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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mardi 24 août 1976 - Vol. 17 N° 129

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du programme d'investissement à la baie James


Journal des débats

 

Commission permanente

des richesses naturelles

et des terres et forêts

Etude du programme d'investissement à la baie James

Séance du mardi 24 août 1976

(Dix heures douze minutes)

M. Séguin (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

La commission des richesses naturelles et des terres et forêts en est à sa première séance pour l'étude des projets de la baie James. Si je me réfère à la convocation, on nous donne: La commission se réunira le mardi 24 août 1976 à la salle 81-A, aux fins d'étudier le programme d'investissement à la baie James.

Les membres de la commission pour la séance de ce matin, la première séance, sont: M. Massicotte (Lotbinière); M. Bédard (Chicoutimi); M. Bellemare (Johnson); M. Bérard (Saint-Maurice); M. Carpentier (Laviolette); M. Lachance (Mille-Iles); M. Cournoyer (Robert Baldwin); M. Faucher (Nicolet-Yamaska); M. Morin (Sauvé); M. Houde (Abitibi-Est); M. Boudreault (Bourget); M. Perreault (L'Assomption); M. Picotte (Maskinongé); M. Samson (Rouyn-Noranda).

Nous pourrions, si la commission y consent, garder le même rapporteur qu'à l'occasion de la séance d'il y a quelques jours, soit M. Carpentier (Laviolette). Est-ce qu'il y a objection?

Le rapporteur sera M. Carpentier (Laviolette).

Je demanderais aux photographes ou aux personnes qui ont des photographies à prendre de le faire dès le commencement de la séance pour quelques minutes seulement, pour ensuite s'abstenir de le faire durant la séance, et surtout durant les interventions des personnes, soit des représentants de la baie James, soit des membres de la commission. Qu'on le fasse dès le début de la séance ou, pour une raison spéciale, si on devait obtenir l'autorisation pour certaines prises pendant la séance, il faudrait obtenir la permission auparavant. La raison de cette mise au point, c'est que nous avons été un peu larges depuis quelque emps, à l'occasion des séances des commissions, de permettre de la photographie à peu près à tout instant. On sait fort bien que ce n'est pas autorisé en Chambre.

Cela prendrait une résolution, un désir, une motion de la Chambre, de l'Assemblée nationale pour le faire, c'est-à-dire avoir ces photographies, pour les prendre pendant les séances. On ne le permet pas en Chambre. La commission est une extension de la Chambre, tout simplement. Alors, les mêmes règles de procédure s'appliquent.

Tout de même, puisqu'il n'y a pas de hall d'entrée, puisqu'il n'y a pas d'autres manières de le faire que de le faire ici présentement, dès le début, si vous le voulez, messieurs les photographes, prenez les prises de vue ou les photographies que vous jugez nécessaires et, par la suite, avec votre coopération, on s'abstiendra de le faire.

La même chose s'appliquerait au début de chaque séance en ce qui concerne la commission des richesses naturelles et des terres et forêts.

M. le ministre, avez-vous des commentaires?

Remarques préliminaires

M. Cournoyer: Un seul commentaire avant de commencer, M. le Président. Il y a deux semaines, nous avions convenu de faire une division dans l'étude des investissements généraux de l'Hydro-Québec et de s'arrêter aujourd'hui aux investissements de la baie James.

Nous avons eu des difficultés de compréhension avec le chef de l'Opposition. J'espère que maintenant ces difficultés sont aplanies et qu'on peut aller franchement et délibérément dans les coûts de la baie James. J'espère que cela n'était que des difficultés techniques que nous avons eues il y a deux semaines et non pas des difficultés d'approche philosophique.

Je pense bien qu'on peut y aller maintenant, soit en laissant la parole à M. Boyd, soit en laissant la parole au chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, avant de commenter l'augmentation de quelque 36% du coût des travaux de la baie James, j'aurais quelques commentaires à faire, destinés à faire le point, avant que nous n'abordions l'exposé de M. Boyd.

Je ne voudrais pas reprendre systématiquement tous les points que j'ai soulevés lors de la séance d'ouverture du 10 août et je vais simplement tenter de replacer les entretiens que nous avons eus à ce moment sur la demande dans un contexte plus général de façon que nous puissions, ensuite, parler des coûts en toute connaissance de cause.

En ce qui concerne les prévisions de la demande, le taux de croissance de 7,75%, dont il a été fait état la dernière fois, nous paraît toujours très élevé. Je tiens à le dire avant que nous n'abordions la question des coûts. Il nous paraît même excessif, dans la mesure où on laisse à l'Hydro-Québec seule le mandat de répondre à toute la demande.

J'ai eu l'occasion de le dire déjà, selon la loi actuelle, dans l'état de la législation, on s'en remet entièrement à l'Hydro pour répondre à la demande. Celle-ci n'a guère le choix d'agir autrement puisque c'est la loi qui lui en fait une obligation.

Mais, peut-être, demandons-nous à l'Hydro, de la sorte, de se comporter comme le gouvernement, c'est-à-dire de nous donner une sorte de politique de l'énergie. Il serait peut-être temps que le gouvernement prenne en main cette tâche essentielle de définir, par rapport aux autres, à l'ensemble des choix sociaux, le rôle de l'électricité parmi les autres formes d'énergie.

Ce genre de décision qui s'échelonne sur une période de plusieurs années, qui a des conséquences sur de très longues années, en particulier sur les dépenses d'équipement, peut entraîner une différence de quelque $10 milliards, selon qu'on choisit, par exemple, un taux de croissance de 6,75% plutôt que 7,75%.

En second lieu, si nous admettons que, pour des raisons historiques, la demande "naturelle" prévisible devrait croître au taux discutable de 7,75%, ce qui nous semble particulièrement élevé à la lumière du taux de 6% observé dans l'Ontario et du taux de 5,7% observé au Québec au cours des dernières cinq années, il est loin d'être certain qu'il soit souhaitable de procéder à un programme d'équipement qui réponde à une demande qui évoluerait sans aucune contrainte à un taux aussi élevé. Il n'est pas mauvais en soi, bien sûr, de substituer rapidement l'électricité au pétrole, pour en arriver à une situation, qu'on a décrite d'ailleurs, où l'électricité occuperait, vers l'an 2000, quelque 45% des besoins énergétiques du Québec. Mais, on ne peut certainement pas le faire sans savoir que cela entraînera de très lourdes conséquences sur l'utilisation de l'épargne et des capitaux disponibles au Québec.

En troisième lieu, l'équation électricité égale richesse ne nous paraît pas nécessairement exacte.

En tout cas, elle ne nous paraît pas absolue. A la limite, on pourrait investir toutes nos ressources financières dans l'électricité et il ne resterait plus rien à investir dans l'industrie secondaire, dans les mines, dans les pâtes et papiers, etc. A la limite, il est donc préférable de continuer à consommer certaines quantités de pétrole à déterminer qui s'inscriraient à l'intérieur d'une politique générale de l'énergie — cette source d'énergie, vous le savez, n'exige pas d'investissement québécois — de façon à conserver au gouvernement un pouvoir d'emprunt qui lui permette d'investir, par exemple, $500 millions dans SIDBEC, etc.

En conclusion, sur cette question de la demande, qui bien sûr sert de toile de fond à tout ce que nous allons dire au cours des heures qui viennent, nous estimons, du côté de l'Opposition, qu'il y a une limite. Disons qu'il y a un point optimum à fixer. Augmenter notre capacité de production de 7,75% par an d'ici l'an 2000, c'est peut-être une possibilité, mais la preuve n'a pas été faite devant cette commission que ce soit le meilleur choix possible en termes d'affectation optimum des ressources de développement de la collectivité.

A notre avis, cela doit être élaboré dans le cadre d'une politique générale émanant du gouvernement. Or, malheureusement, nous n'avons pas de telle politique générale. Je me demande parfois si nous avons un gouvernement.

Je passe maintenant à la question des coûts.

M. Perreault: II est très sérieux.

M. Morin: Nous entrons, avec les coûts, dans le vif du sujet. En 1975, M. Boyd nous avait dit — je le lui rappelais il y a deux semaines — pour autant qu'il était concerné, que les chiffres de 1974 étaient toujours valables. On nous avait donné l'impression, à ce moment — j'ai observé qu'on avait pris soin d'inclure dans la documentation de l'Hydro les extraits du journal des Débats de l'an dernier qui nous le rappellent — que cette estima- tion de 1974 demeurait fiable. Elle était à ce moment de $1,9 milliard.

Or, nous ne pouvons pas nous empêcher d'observer que, dans la formule de gérance, à la page A-5, on nous dit que les engagements financiers sont comparés chaque mois avec le budget global. Il y a donc — du moins c'est ce que nous dit la formule de gérance — une sorte d'autocontrôlé permanent des coûts. Cet exercice n'avait-il pas révélé, déjà en 1975, le caractère aléatoire des chiffres de 1974? C'est la première question que je ne pouvais m'empêcher de me poser déjà en 1975, lors des séances de cette même commission.

Et, depuis lors, je vous rappellerai, M. le Président, qu'on nous annonçait de nouvelles prévisions pour la fin de 1975. Cela est dit à plusieurs reprises et en toutes lettres dans l'exposé de M. Boyd et dans l'échange que nous avons eu l'an dernier.

On ajoutait que, dès que les chiffres seraient prêts, on serait à la disposition de la commission et on serait prêt à répondre à nos questions. Or, j'ai dû écrire, l'automne dernier, à M. Boyd, avec copie au ministre des Richesses naturelles, pour lui demander s'il était exact qu'on avait mis un terme à ces études, qu'on les avait suspendues à tout le moins.

Depuis lors, je ne cesse d'interroger le gouvernement et le ministre pour savoir quand nous aurons ces nouvelles estimations, ces nouvelles prévisions de coûts. Je ne puis m'empêcher d'observer que ça fait deux ans que nous n'avons pas eu le loisir de nous pencher sur cette question cruciale. Cela fait plus de deux ans aujourd'hui que nous avons eu les dernières prévisions. Au milieu de cette période de deux ans, l'an dernier, on nous affirmait que, pour autant qu'on était concerné, les chiffres étaient toujours valables.

M. le Président, à première vue, cette hausse de 36% par rapport à des chiffres qu'on nous disait valables nous paraît excessive, fortement excessive. Elle ne peut s'expliquer par une augmentation significative de la capacité installée du complexe, qui passe de 10 070 mégawatts à 10 090 mégawatts, ce qui ne représente même pas une augmentation de 1%.

La dernière fois, on avait pu justifier une partie de l'augmentation de 1972 à 1974 en nous apprenant que la capacité installée augmentait de 24% ce qui justifiait une augmentation des coûts de l'ordre de 22%. Mais cette fois-ci il n'y a même pas un pour cent d'augmentation de capacité. Cette hausse ne peut s'expliquer non plus par le taux d'inflation, en tout cas, pas entièrement.

Selon Statistique Canada, le taux d'inflation observé depuis 1971 dans les coûts de construction de centrales hydroélectriques est de 55% et ceci pour toute la période de quatre ans. Le taux d'augmentation observé pour l'année 1975 est de 15% par rapport à 1974. S'il est vrai, comme nous l'apprenait la Presse du début du 9 août, que le premier ministre aurait affirmé qu'il ne fallait pas s'étonner de l'augmentation des coûts à la baie James parce que les coûts de construction avaient augmenté partout au Canada de 300% ou de

400%, je dois dire, M. le Président, qu'une telle affirmation est ridicule, qu'elle n'est pas fondée dans les faits, qu'elle est destinée à tromper la population.

J'espère que nous allons pouvoir étudier cela en détail ce matin. Depuis quatre ans, c'est donc 55% et ceci s'applique spécifiquement aux travaux de construction, à ce genre de travaux. Je pense que ceci en dit long sur le genre d'administrateurs et d'économistes qui dirigent les destinées du Québec depuis quelques années. Au lieu de chercher à améliorer la gestion du projet et à minimiser les coûts, on s'efforce de trouver des justifications a posteriori, mais ces justifications ne tiennent pas devant les chiffres qui nous sont fournis par les bureaux de la statistique.

Si les coûts avaient augmenté de 500%, par exemple, on nous aurait dit: Au Canada, partout, il y a eu une augmentation de l'ordre de 500% ou de 700%. M. le Président, je crois qu'il est grand temps de revenir au sérieux. Cette question de l'augmentation des coûts est une des questions qui préoccupent le plus les Québécois à l'heure actuelle. Les données que nous avons eues devant nous et celles qu'on nous a fournies depuis quelques jours ne nous donnent pas d'explications sur cette escalade effrénée des coûts.

J'avais, à la fin de la dernière séance, M. le Président — je tiens à le rappeler — demandé à la SEBJ qu'on nous fournisse des documents de travail. Tout ce que nous avons eu, c'est le rapport annuel, un document qui nous rappelle notre échange de l'an dernier et un tableau au bas duquel il y a une ligne et demie exactement pour nous expliquer que les coûts sont maintenant à $16,2 milliards. Aucune explication autre que des colonnes de chiffres qui, malheureusement, ne nous disent rien sur les causes de l'augmentation des coûts.

M. le Président, il me semble que, récemment, le président de la SEBJ a fait allusion au fait qu'il aimerait beaucoup voir ce projet devenir une sorte de projet des Québécois. Eh bien! il y a à cela des conditions. Je ne dis pas que cela ne pourrait pas le devenir, mais il y a des conditions et la première, c'est une certaine transparence des coûts, une certaine transparence des dirigeants de cette entreprise devant l'opinion publique québécoise. Comment voulez-vous que cela devienne le projet des Québécois dans un contexte où sans explication, où sans qu'on puisse voir clair là-dedans, pendant deux ans le coût d'un projet augmente de 36%, alors qu'on nous avait présenté les choses, il y a un an encore devant cette commission, comme si les chiffres étaient toujours valables?

Tout ce qu'on nous donne pour nous préparer à cette commission, c'est une ligne et demie dans les documents. J'avais cru être explicite, il y a deux semaines, en demandant qu'on nous communique les renseignements quelques jours d'avance pour que nous puissions nous préparer à cette commission. J'avais cru que M. Boyd m'avait compris et qu'il nous donnerait des documents qui nous permettent d'analyser l'augmentation de coûts. Ce n'est pas le cas, de sorte que, ce matin, nous allons nous trouver devant une situation que nous connaissons bien où, de vive voix, on va consentir à nous donner des chiffres. Mais le temps d'y penser, le temps de les regarder, non, cela, il va falloir que ce soit fait à la sauvette.

Une fois de plus, on se trouvera devant une situation où on se plaindra de la tension qui existe entre cette commission et ces messieurs de la SEBJ.

J'avais demandé qu'on nous donne les documents. Je ne voulais pas dire une ligne et demie au bas d'un tableau; je voulais dire des explications qui nous permettent, tout en sauvegardant le caractère confidentiel des documents, de nous préparer à cette commission.

Nous abordons les choses ce matin, sans avoir la moindre idée de ce qui peut justifier cette augmentation des coûts de la baie James. Nous allons donner la parole au président de la SEBJ, mais je tiens à lui dire que ce n'est pas en procédant de la sorte qu'il va faire que ce projet devienne celui des Québécois. Merci!

Le Président (M. Séguin): Merci, M. le chef de l'Opposition! Le ministre des Richesses naturelles m'a demandé la parole pour ajouter quelques mots.

M. Cournoyer: M. le Président, je ne croyais pas que le chef de l'Opposition partirait comme cela. Je pensais qu'il voulait poser des questions et, après cela, faire des commentaires sur les réponses aux questions.

M. Morin: J'en poserai des questions.

M. Cournoyer: Je le sais, mais vous êtes parti avec le jugement déjà fait, comme la semaine passée. Etant donné que votre jugement est déjà porté, je vais vous dire ce que je pense de cette histoire.

On se retrouve en 1970. Les perspectives économiques à long terme permettent d'envisager, selon les différents indicateurs économiques, un taux réel de croissance pour le Québec.

Dans le secteur de l'électricité, les spécialistes s'affairent à déterminer en fonction du taux de croissance historique les besoins en énergie électrique des années 1980 à 1990. Cette électricité, bien que relativement chère, concurrence le pétrole à $3.20 le baril et le gaz naturel à $0.12 les mille pieds cubes. Le développement et la mise en service de Churchill Falls, projet gigantesque pour l'époque, c'est déjà du passé. Le complexe Manic-Outardes est en voie de réalisation. La crise pétrolière et la hausse effrénée et continue des taux d'inflation, c'est de l'avenir, à l'époque, tout à fait imprévisible.

En 1970, à l'Hydro-Québec, on étudie avec grand soin les possibilités d'équipement électrique qui s'offrent à elle. L'Hydro, il va sans dire, cherche un programme d'équipement qui puisse répondre à la demande des Québécois pendant la période allant de 1980 à 1990 au moindre coût possible. Cela implique, si l'on utilise le taux de croissance annuel de 7,5% environ, qu'elle puisse produire 20 000 mégawatts de plus que sa capa-

cité installée en 1970, qui était de 10 000 mégawatts. A cette époque, on ne parle pas encore de l'énergie solaire, ni de l'énergie éolienne. Le nucléaire est encore au stade expérimental. Les ressources hydrauliques attrayantes deviennent de plus en plus rares et éloignées des centres de consommation. Seuls deux bassins hydrographiques semblent offrir un certain attrait. L'un se situe au nord-est, accolé au Labrador, et est composé de plusieurs rivières ayant un potentiel de forte capacité. L'autre, à l'opposé, au nord-ouest, bien que dans un territoire plus vierge encore, semble offrir un potentiel élevé. Ces deux bassins, bien qu'inconnus du grand public, font l'objet depuis déjà plusieurs années de recherches, d'inventaires, de mesures de la part de l'Hydro-Québec afin de déterminer le plus exactement possible tant le potentiel hydroélectrique que les coûts d'aménagement de la totalité ou d'une partie de ces bassins. A cette époque, les ingénieurs de l'Hydro, en une deuxième étape, évaluent plus en détail les caractéristiques des régions des rivières Nottaway, Broadback et Rupert, de même que du secteur de la rivière La Grande, qui semblent toutes les deux offrir des avantages, tant économiques que techniques, supérieurs à ceux de la région de la Côte-Nord.

Des alternatives au développement hydroélectrique sont envisagées, bien sûr, soit l'électricité, l'énergie électrique d'origine thermique par les centrales nucléaires ou les centrales pétrolières conventionnelles. La filière nucléaire offre à cette époque largement les mêmes caractéristiques qu'aujourd'hui. L'énergie nucléaire pose, de façon générale, un problème de pollution. Elles ont un rendement relativement faible comparé à celui des centrales hydroélectriques. Le coût de construction de ces centrales augmente considérablement, de même que le prix du combustible.

Enfin et surtout, la technologie n'est pas à point, surtout au Québec. Quant aux centrales pétrolières conventionnelles, elles posent des problèmes bien connus, problème de pollution, problème de coût d'exploitation qui aura été considérablement accru à la suite de la crise pétrolière que nous ne vivons pas encore en 1970. Donc, de façon générale, l'hydroélectricité semble jouir au départ de trois avantages marqués par rapport à l'électricité thermique: la stabilité des prix, un rendement exceptionnel, la nécessité de réserves plus faibles.

La filière hydroélectrique ayant été préférée, l'Hydro-Québec arrive à la conclusion que l'aménagement des rivières de la baie James constitue un programme d'équipement optimal, compte tenu des alternatives qui s'offraient à l'époque.

Durant ce temps, le gouvernement avait conçu le projet d'ouvrir au développement économique et social cette vaste région jusqu'alors appelée le Nouveau-Québec où ni routes, ni voies d'accès ne permettaient de pénétrer.

Le gouvernement de l'époque projetait d'aménager, de façon planifiée, cette région afin d'y développer de façon optimale les ressources naturelles qu'elle contenait et permettre un nouvel essor économique en ouvrant à la société québécoise de nouvelles frontières.

Puisque l'Hydro-Québec considère le projet d'aménagement de la rivière La Grande comme supérieur à celui du complexe NBR, ce projet désormais appelé populairement le projet de la baie James devient à la fois le fer de lance et l'épine dorsale de l'aménagement intégré du Grand-Nord au profit des Québécois du Sud de même que des autochtones et des pionniers du Nord.

Cette volonté politique d'élargir les activités économiques du Québec, alliée aux besoins techniques des Québécois industrialisés, trouve son existence juridique par le sanctionnement de la loi créant la Société de développement de la baie James le 14 juillet 1971.

L'importance que prend le développement électrique dans ce domaine ou dans ce développement global incite, d'autre part, l'Hydro-Québec à demander, par souci d'efficacité et de coordination du secteur électrique, que la nouvelle Société d'énergie de la baie James tombe sous sa responsabilité.

L'ampleur de ce projet apparaît à tous. Il s'agit d'aménager, de façon planifiée et intégrée, 100000 milles carrés de territoire d'où des lignes de transport partiront vers Montréal à une distance de 900 milles à 1200 milles, si l'on situe leur origine au bassin de la Caniapiscau.

Ces lignes achemineront l'énergie aménagée sur une rivière d'une longueur de plus de 400 milles. L'importance des travaux nécessaires à la satisfaction des besoins en énergie électrique des Québécois doit toujours être gardée à l'esprit car elle entraîne des coûts d'une ampleur équivalente.

Je crois maintenant opportun d'aborder spécifiquement la question des coûts de ce projet. Toutefois, au départ, j'aimerais bien situer la discussion sur le financement et les coûts émanant de l'aménagement et de l'infrastructure nécessaire à la baie James pour transporter l'électricité jusqu'aux centres de consommation.

Il m'apparaît donc nécessaire d'établir deux paramètres essentiels à l'analyse des coûts du projet de la baie James. Tout d'abord, il a été clairement établi, et les discussions que nous avons eues avec l'Hydro-Québec la semaine dernière ou la semaine d'avant sur le programme de développement de la baie James sont venues le confirmer, que le rythme d'accroissement des besoins des Québécois au cours des années nécessitait une capacité additionnelle de 20 000 mégawatts en 1985.

Il fallait donc satisfaire cette demande d'une façon ou d'une autre pour répondre à l'esprit de la loi de l'Hydro-Québec.

Deuxième paramètre important. Il était clair à l'époque, et il l'est fort possiblement encore plus aujourd'hui, que les coûts de l'énergie électrique d'origine hydraulique livrée au marché étaient plus bas que ceux de l'électricité d'origine thermique, que celle-ci soit nucléaire ou de source pétrolière conventionnelle.

La discussion devrait donc se situer en gardant à l'esprit ces deux facteurs essentiels. Ceci étant dit, il nous est maintenant possible de discuter des aspects du financement des coûts de la baie James.

Tout d'abord, l'évolution des coûts depuis 1972 jusqu'à aujourd'hui et, deuxièmement, l'analyse détaillée des coûts du projet en 1976.

En ce qui concerne l'évaluation en 1972, je tiens d'abord à rappeler à la commission que cette évaluation portait sur un projet précis, soit l'aménagement de la rivière La Grande, selon un scénario qui offrait un potentiel de 8300 mégawatts, projet qui avait été préféré, après plusieurs étapes successives d'optimisation, à l'aménagement de la NBR.

Le coût de ce projet, de même que l'acheminement de l'électricité jusqu'au marché, était alors estimé à $5,8 milliards. Les composantes de ce coût global se divisent comme suit: coût de base, $3,5 milliards; escalade, $1,1 milliard; intérêt, $0,7 milliard, pour un total de $5,8 milliards.

Les hypothèses principales ayant servi à évaluer ce coût consistaient en des hypothèses d'intérêt et d'inflation. L'intérêt sur la durée du projet était évalué à 8% alors que l'inflation globale était, elle, évaluée à 48%. Deux ans plus tard, c'est un nouveau projet que nous examinons. Si les coûts du projet sont passés de $5,8 milliards à $11,9 milliards, c'est dû, en partie, nous l'admettons, au fait que l'optimisation finale entraîne le choix définitif par l'Hydro-Québec du scénario d'aménagement de 10 300 mégawatts, ce qui signifie une augmentation de puissance de 24% amenant une augmentation des coûts de 22%.

Les coûts du projet sont maintenant prévus comme ceci: coût de base, $5,9 milliards; escalade, $2,5 milliards; intérêt, $3,4 milliards, un sous-total de $11,9 milliards. Cette nouvelle prévision a été calculée à partir d'un taux d'inflation moyen de 7% et un taux d'intérêt moyen de 10%.

Selon l'Hydro-Québec, l'avancement des études et les modifications techniques qui ont été apportées, les mesures de protection de l'environnement qui ont été ajoutées, les révisions d'estimation qui ont été faites augmentèrent les coûts de 17%. A cela s'ajoutent, bien sûr, les coûts dus à l'augmentation de puissance que je viens de vous mentionner. Enfin, les coûts de construction connaissent, toujours selon l'Hydro, une hausse générale sans précédent de 10% de 1972 à 1974. Or, comme les prévisions d'inflation n'étaient que de 4% dans l'estimation préliminaire, il a fallu appliquer un facteur de majoration de 20% au coût.

La somme de ces augmentations nous donne donc le coût de base du complexe La Grande en dollars de 1974. La troisième estimation des coûts du projet de la baie James est maintenant connue. Elle s'élève à $16,1 milliards. Le coût de base est maintenant de $9 milliards; l'escalade est réévaluée à $3 milliards et l'intérêt à $4 milliards, ce qui nous donne un montant global de $16,153 milliards.

L'Hydro-Québec, aujourd'hui, et la Société d'énergie nous fourniront, j'en suis convaincu, les explications nécessaires à cette nouvelle évaluation.

Il m'apparaît, cependant, important, au préalable, de situer l'évolution des coûts de ce projet dans le contexte économique général des dernières années, non afin de justifier ou de défendre l'évolution des coûts du projet de la baie James, mais de les analyser dans une perspective plus large en comparant l'évolution de ces coûts à celle d'autres projets, qui, bien que différents dans l'ensemble, ont été soumis à la même conjoncture économique que le projet de la baie James.

Tout d'abord, le projet de pipe-line de la vallée du Mackenzie, plus communément connu sous le nom de Canadian Arctic Gas Pipe-Line, a connu, lui aussi, plusieurs réévaluations successives de ses coûts depuis 1974, soit en deux ans.

En 1974, les coûts de construction du pipeline de la vallée du Mackenzie étaient évalués à $5,5 milliards. Moins de deux ans plus tard, soit la semaine dernière, les promoteurs du projet confiaient à l'Office national de l'énergie qu'il fallait maintenant évaluer ces coûts à $8,4 milliards, soit une augmentation de 53% en deux ans.

Un autre pipe-line, qui fait concurrence au pipe-line de la vallée du Mackenzie, le projet Maple Leaf, évalue que le coût de son projet a augmenté récemment de $500 millions jusqu'à $2,9 milliards, depuis sa dernière évaluation en 1975. Toujours dans le secteur des pipe-lines, le pipe-line américain transportant le pétrole de l'Alaska vers la côte du Pacifique avait été évalué, il y a quelques années, à moins de $1 milliard. Lorsqu'il sera terminé, il aura coûté environ $10 milliards. Plus près de nous, le projet Gull Island, dont on parle beaucoup ces derniers temps, était évalué par les organismes financiers chargés de conseiller le gouvernement terre-neuvien à $1,1 milliard en 1974. Au printemps de 1976, son coût s'élevait à $2,3 milliards, soit une augmentation de 200%, ce qui explique probablement, beaucoup plus que la décision du ministre des Richesses naturelles, la décision du gouvernement de Terre-Neuve de ne pas faire Gull Island.

La semaine dernière, M. Giroux nous a fait état de l'évolution des coûts de la centrale de Gentilly 2 qui sera prochainement parachevée au coût de $700 millions. Ces chiffres ne justifient ni le coût, ni révolution des coûts du projet de la baie James. Ce n'est pas l'intention. Ils permettent, cependant, une meilleure compréhension de la situation économique que nous avons connue depuis 1972, tant au Canada qu'en Amérique du Nord et dans le monde entier. Ils permettent aussi de comprendre, dans une certaine mesure seulement, j'en conviens, l'ordre des difficultés auxquelles font face les responsables de projets d'une telle ampleur. Je ne parle pas seulement de la baie James, mais de tous les projets d'une telle ampleur.

L'ampleur des investissements auxquels nous faisons face entraîne la réévaluation du rôle des organismes ou hommes publics chargés de s'assurer que les fonds publics sont investis et dépensés de façon optimale. Face à l'ampleur et à la complexité des investissements d'un projet tel que celui de la baie James, est-il encore, aujourd'hui, opportun de maintenir les mécanismes traditionnels de contrôle entre gouvernement et société d'Etat? A ce premier ordre de préoccupation s'en ajoute un autre. Les mécanismes de contrôle internes à la SEBJ et à l'Hydro-Québec ont-ils été établis de façon satisfaisante en 1972? Se

montrent-ils toujours satisfaisants en 1976? Dans quelle mesure la formule de gérance adoptée a-t-elle contribué à restreindre la montée des coûts? Il est possible qu'on ait restreint la montée des coûts juste avec une formule de gérance telle que nous l'avons. Cela aurait pu être pire aussi, M. le Président.

M. Lessard: Peut-être qu'on l'a augmentée aussi.

M. Cournoyer: Oui, mais c'est à ces questions qu'on devra répondre. Je pense qu'il est important que ces questions soient posées. Je ne les poserai pas personnellement, mais je dis: Le genre de préoccupation que nous avons devrait s'attacher, dans une commission parlementaire comme la nôtre, à ce genre de choses. Ce n'est pas de dire que le gouvernement est épais, est cave et sans dessein. Admettons que, personnellement, je suis prêt à admettre cela.

M. Lessard: On n'a plus besoin de le dire, on le sait.

M. Cournoyer: J'admets cela. Moi je suis épais, je suis cave et sans dessein. Je ne suis pas aussi intelligent que le député de Saguenay, on le sait.

D'un autre côté, quand cela vient du chef sérieux de l'Opposition de Sa Majesté, j'aime moins cela.

M. Lessard: Vous vous connaissez.

M. Cournoyer: J'aimerais cela que le chef puisse se situer au niveau que je lui ai connu il y a longtemps.

M. Morin: Ne commençons pas le spectacle traditionnel.

M. Cournoyer: Non, ce n'est pas un spectacle traditionnel. J'aimerais qu'on situe le débat à ce niveau. Vous savez que vous avez commencé tantôt et que vous avez, comme d'habitude, terminé sur une note aussi ennuyeuse qui me force à faire ces choses-là.

M. Lessard: Vous auriez dû commencer comme cela en 1971.

M. Cournoyer: Je me pose encore des questions sur un nombre de décisions qui ont été prises par le chef du Parti québécois. Très souvent, je dis: Je le remets en doute. Je suis en 1976, je ne suis pas en 1971. C'est en 1976 que je discute.

M. Lessard: C'est cela.

M. Cournoyer: Toutes les raisons qui ont été motivées, à la source des décisions gouvernementales, ont été, quoi qu'en dise l'Opposition, au grand avantage des Québécois. Ce n'est pas ma faute si vous avez vécu la crise du pétrole après nous autres.

M. Morin: Ce n'est tout de même pas M. Lé-vesque qui a annoncé la baie James. Il ne faudrait pas soutenir que c'est M. Lévesque qui a annoncé la baie James.

M. Cournoyer: Non, c'est pour vous dire, resituez ça dans le contexte que je viens de décrire.

M. Morin: Vous parlez de la Manie, c'est autre chose.

M. Cournoyer: Ce n'est certainement pas René Lévesque qui a décidé de la Manic.

M. Morin: Bien, c'est lui qui...

M. Cournoyer: II faudrait que vous arrêtiez et que vous démystifiez vos petites bebelles, vous autres aussi.

M. Lessard: Vous étiez au cabinet à ce moment-là?

M. Cournoyer: Je n'étais pas au cabinet, mais je savais...

M. Lessard: Vous étiez bleu dans ce temps-là.

M. Cournoyer: ...qu'il y avait un nommé Johnson qui était là et ça n'était pas au deuxième temps qu'il était au pouvoir.

M. Lessard: Vous étiez bleu dans ce temps-là.

M. Cournoyer: Non, non, non. C'était pas mal dans le temps d'un nommé Duplessis ce dont on parle, où la Manic a été décidée. Arrêtez donc de mettre ça sur le dos de Lévesque, voyons donc! On pourrait peut-être aussi faire des petites enquêtes à la Manic pour voir ce qui a coûté si cher. Cela n'a rien coûté à la Manic par rapport au coût estimé au début?

M. Lessard: Par rapport à la baie James.

M. Cournoyer: Bah!

M. Lessard: L'Hydro-Québec nous avait dit à une première commission parlementaire qu'ils n'avaient pas beaucoup d'expérience dans ce temps-là mais, avec la Manic, ils ont pris de l'expérience. Maintenant, avec leurs coûts, ils savaient où ils allaient quand ils ont...

M. Cournoyer: Vous allez voir ça tantôt, ils vont vous expliquer tout ça.

M. Lessard: C'est ça.

M. Cournoyer: Moi je vous dis dans quel contexte on devrait situer ça. Réduire le débat aux petites folies, c'est votre affaire, vous autres.

M. Lachance: C'était l'an I.

M. Cournoyer: Les contrats accordés à l'entreprise privée par soumissions publiques ont-ils

permis de minimiser les coûts? C'est important de poser cette question. L'Hydro-Québec aurait-elle pu ou aurait-elle dû entreprendre, en régie, une plus large part de la construction? Dans quelle mesure un calendrier plus long de réalisation des travaux aurait-il permis de réduire l'importance des investissements annuels? L'effet sur la disponibilité de l'électricité pour les consommateurs québécois aurait-il été aussi sévère qu'on le laisse entendre? Pourquoi les taux d'inflation dans le secteur de la construction générale et au niveau des produits de base...

M. Morin: Pourquoi attendez-vous 1976 pour poser ces bonnes questions?

M. Cournoyer: C'est parce que je viens d'arriver comme ministre des Richesses naturelles.

M. Morin: Ah, c'est ça!

M. Lessard: Ah, ah! Vous ne vous étiez pas douté...

M. Morin: On vous attendait.

M. Cournoyer: Est-ce que ça vous choque? Est-ce que ça vous choque, M. le Président?

M. Lessard: Mais vous n'étiez pas dans le Conseil des ministres?

M. Cournoyer: Est-ce que ça vous choque, M. le Président, que je pose des questions et que je lui coupe l'herbe sous le pied?

M. Lessard: Puis quand...

M. Morin: Elles sont excellentes vos questions, elles sont excellentes, mais elles arrivent trop tard.

M. Cournoyer: ...ils sont ici pour y répondre.

M. Morin: Elles arrivent trop tard, elles arrivent quatre ans trop tard.

M. Cournoyer: Donc, il est trop tard. Arrêtez les projets de la baie James, les gars de la construction sont en train de vous aider.

M. Lessard: Quand vous étiez au Conseil des ministres, vous n'avez pas posé ces questions, même lorsque vous étiez au Conseil des ministres, alors que M. Gilles Massé était ministre des Richesses naturelles?

M. Cournoyer: L'effet sur la disponibilité, pourquoi les taux d'inflation dans le secteur... C'est sûr...

M. Morin: Cela fait un an que vous êtes ministre, cela fait un an que vous posez des questions. Ce sont les réponses qu'on veut.

M. Cournoyer: Cela vous choque; parce que je pose de bonnes questions, vous dites: Est-ce que ça se peut qu'un gouvernement pose de bonnes questions?

M. Morin: Ce qui nous choque, c'est qu'on attendait de vous des prises de position. Tout ce qu'on a, ce sont des questions.

M. Cournoyer: Moi, je ne suis pas comme vous autres, je ne porte pas des jugements avant de savoir la grosseur et la possibilité de la question. Vous autres, vous donnez vos réponses et après cela vous posez les questions.

M. Lessard: Cela fait quatre ans qu'on pose ces questions-là.

M. Morin: Cela fait quatre ans qu'on les pose, voyons donc!

M. Lessard: Cela fait quatre ans qu'on pose ces questions-là. On n'a pas de réponse, parce que, de l'autre côté, vous ne voulez pas avoir de réponse.

M. Cournoyer: Quatre ans qu'ils posent des questions.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, à l'ordre!

M. Cournoyer: Ils sont ici pour répondre aux questions.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre!

M. Cournoyer: Ils vont répondre aux questions.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre!

M. Cournoyer: II n'y a personne qui va empêcher M. Boyd...

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cournoyer: Oui, M. le Président, j'étais bien parti pourtant.

Le Président (M. Séguin): Puisque les membres de la commission semblent être tous d'accord, je pense qu'on devrait passer immédiatement à M. Boyd.

Non, non, un instant, s'il vous plaît. Vous n'êtes pas membre de la commission, M. le député.

M. Lessard: Comment, je ne suis pas membre de la commission!

Le Président (M. Séguin): Vous avez été remplacé par le député de Sauvé.

M. Cournoyer: Bien oui!

M. Lessard: Comment? On a deux membres de la commission parlementaire.

M. Cournoyer: Rien qu'un, il y en a d'autres qui s'occupent de la RIO.

Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous plaît! Ne commencez pas à charroyer, je ne nomme pas les membres.

M. Morin: M. le Président, est-ce que... M. Lessard: Deux membres...

M. Morin: Nous avons deux membres de la commission. Je crois qu'il devrait tout simplement être substitué...

Le Président (M. Séguin): J'ai nommé M. Bé-dard.

M. Morin: ... à celui de M. Bédard.

Le Président (M. Séguin): J'ai nommé M. Bédard. Que voulez-vous?

M. Morin: Substituer le nom du député de Saguenay.

Le Président (M. Séguin): Là, cela prend une décision parce qu'on était d'accord que les membres étaient nommés au début.

M. Lessard: M. le Président, il y a toujours eu une coutume...

Le Président (M. Séguin): Oui, mais il a beaucoup de coutumes qu'on semble... D'habitude aussi la coutume veut qu'on écoute à ce moment-ci les représentants de la baie James.

M. Lessard: J'ai toujours été membre de la commission parlementaire des richesses naturelles.

M. Morin: C'est juste.

M. Lessard: Cela a toujours été le député de Sauvé et moi-même.

M. Morin: Depuis le début.

M. Lessard: Alors, on vous soumet tout simplement que ce soit moi qui remplace M. Bédard. Je pense que c'est tout à fait normal.

M. Morin: Cela a toujours été comme cela. Il serait inélégant, je pense, de faire le contraire cette fois-ci.

Le Président (M. Séguin): Je n'ai pas I intention de manquer d'élégance, mais vous m'avez dit, la dernière fois que cette commission s'est réunie ici, que vous remplaciez le député de Saguenay. Et puis, ce matin, personne ne s'est opposé, j'ai fait la liste...

M. Morin: Non, vous m'avez tout simplement nommé.

Le Président (M. Séguin): Je vous ai nommé à la place de M. Lessard, comme on avait fait la dernière fois.

M. Morin: Vous n'avez pas dit à la place de M. Lessard parce que je l'aurais signalé.

Le Président (M. Séguin): Peut-être que cela prendrait cette précision.

M. Massicotte: Trop tard.

Le Président (M. Séguin): J'ai quand même nommé M. Bédard.

M. Lessard: M. le Président, je vous soumets tout simplement...

Le Président (M. Séguin): Les membres consentent-ils que le député de Saguenay remplace M. Bédard?

M. Lessard: Ce sera élégant. Le Président (M. Séguin): Bon.

M. Lessard: Ne soyez pas ridicules. Ne soyez tout simplement pas ridicules.

M. Perreault: Nous sommes élégants.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Boudreault: Nous sommes élégants.

M. Lessard: Nous ne t'entendons pas souvent toi.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lessard: Silencieux continuel. Reste sur ton banc et sur ta chaise, c'est la seule place où tu peux faire quelque chose.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre! M. Perreault: On n'est plus élégant.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre! S'il vous plaît! M. Cournoyer, voulez-vous continuer, s'il vous plaît!

M. Cournoyer: M. le Président, il y aurait d autres questions à poser à l'Hydro-Québec et particulièrement à sa filiale, la SEBJ. Alors, je pense bien que je vais m'arrêter sur les questions très générales. Je ne les pose pas, mais je voulais situer le débat dans ses sphères d'activité et non pas sur des niaiseries. Je suis sûr que l'Opposition veut faire la même chose. Il n'est pas question de recommencer les débats comme nous venons de le faire, à savoir qui a décidé de la baie James et qui n'aurait pas dû. Ils devaient le faire et c'est fait. On y travaille et il s'agit maintenant de savoir ce qu'on

fait. Avec les explications de la Société d'énergie, je pense bien qu'on va avoir tout l'éclairage qui va nous permettre de poser d'autres questions intelligentes à la Société d'énergie.

Or, M. le Président, je pense qu'il serait temps, étant donné qu'on connaît les grands coûts, que la Société d'énergie, explique le pourquoi de l'augmentation de 11,9% à 16,1% ou 16,2% qui auraient été annoncés en 1974.

M. Morin: M. le Président, je suis d'accord. J'aurais une simple observation. Je ne voudrais pas laisser passer un commentaire du ministre au sujet de l'augmentation générale des coûts, par exemple pour le projet du pipe-line du MacKenzie ou Gull Island. Il est évident que dans ces cas il s'agissait de projets tout à fait préliminaires qu'on a dû réévaluer à la hausse, qui ne peuvent en aucune façon se comparer avec les projets de la baie James.

Si on pouvait peut-être les comparer aux coûts de 1970 par rapport à 1972, j'abonderais dans le sens du ministre, mais présentement nous comparons les coûts de 1974 avec ceux de 1976. Or, en 1974, déjà ce n'était pas un projet préliminaire. C'étaient des chiffres qu'on nous donnait comme fiables. Donc, attention, ne comparons pas des projets qui ne sont pas au même stade de développement.

M. Cournoyer: Ils sont en état... Je pense que c'est à...

M. Morin: Avec cette réserve, je suis prêt à entendre M. Boyd.

M. Perreault: On pourrait vous donner pareilles comparaisons avec le nucléaire.

Le Président (M. Séguin): M. Boyd.

M. Morin: Pourrions-nous avoir le texte, M. le Président?

M. Boyd: Oui. Nous allons le distribuer à l'instant.

M. Morin: Le texte que j'aurais aimé avoir il y a quelques jours.

M. Boyd: A la fin, M. le Président, je répondrai à un certain nombre de remarques qu'a faites M. Morin.

Le Président (M. Séguin): On semble avoir reçu le message. M. Boyd, si vous voulez continuer s'il vous plaît.

Exposé du président Robert A. Boyd

M. Boyd: M. le Président, voici maintenant trois ans que les travaux de construction du complexe La Grande ont commencé. Durant cette période relativement courte, la vie de ce vaste chantier a été plus d'une fois perturbée par des événements et des difficultés que vous connaissez et qui ont été largement rapportés et commentés par la presse. En passant, on en subirait un événement aujourd'hui même. On pourra en parler plus tard, mais, dans le moment, on évacue les 4000 âmes qu'il y a à LG 2 et à Duncan. En outre, l'évolution réelle des travaux n'a pas toujours été bien comprise par l'ensemble de la population, principalement à cause de l'éloignement des chantiers.

En fait, il pourrait être facile pour l'opinion publique de dresser un bilan plutôt négatif de cette courte histoire. Ceux qui ont récemment visité nos chantiers — il y en a eu quelques milliers cet été — particulièrement celui de la centrale LG 2, pourront cependant témoigner de l'ampleur des travaux accomplis à ce jour, envers et malgré les contretemps et les obstacles de parcours survenus. Le complexe La Grande n'est plus un projet. Nous n'en sommes plus qu'à trois ans et demi de la mise en service des premiers groupes générateurs de LG 2, cette centrale qui fournira la moitié de la production annuelle d'énergie du complexe.

Cette année, nous avons mis en chantier la centrale LG 3, à 148 milles de l'ebouchure de La Grande Rivière. En définitive, plus de la moitié de la puissance installée du complexe est présentement en construction.

Le complexe La Grande n'est certes plus un projet. Plus de $1,5 milliard ont déjà été dépensés tant pour les travaux d'infrastructure que pour les ouvrages hydroélectriques. Par ailleurs, nos engagements dans les contrats adjugés pour les travaux en cours atteignent environ 24% du coût global du complexe.

Grâce à une planification rigoureuse des travaux, à une équipe de gérance expérimentée sur les chantiers et au siège social, grâce aussi à la collaboration de nos entrepreneurs et à la vaillance de tous les travailleurs du complexe (lorsqu'on les laisse tranquilles) il a été possible de récupérer certains retards subis et de réaliser la plupart des objectifs que nous nous étions fixés au départ. Les résultats sont là pour le prouver.

Mais, pendant que progressaient les travaux et que le climat de travail dans les chantiers était à son meilleur depuis longtemps, d'autres problèmes sont apparus. Le complexe La Grande n'a pas été à l'abri de l'évolution défavorable de la conjoncture économique. A travers le monde, la cherté des capitaux et les poussées inflationnistes extraordinaires des deux dernières années ont durement frappé l'industrie de la construction et particulièrement le secteur énergétique. Ces nouvelles contraintes, sur lesquelles nous n'avons aucun contrôle a priori, nous ont obligés à prendre des mesures correctives qui, dans certains cas, affectent l'évolution des travaux eux-mêmes.

En dernière analyse, cependant, malgré les effets dévastateurs de ces pressions économiques, nous demeurons plus que jamais convaincus de la nécessité et de la rentabilité du complexe La Grande pour le Québec, car l'état actuel des autres sources d'énergie renforce les arguments que nous avons fait valoir, il y a cinq ans, en faveur du développement des ressources hydroélectriques de la baie James.

L'activité de 1975 et du premier semestre de 1976. Nous avons publié, comme par les années passées, un rapport d'activité qui décrit en détail l'avancement des travaux au complexe La Grande 1975. L'activité de la Société d'énergie a été intense pour tous les fronts et j'aimerais ici mettre en valeur les faits saillants des 18 derniers mois.

Infrastructures. Au chapitre de l'infrastructure principale, les travaux ont surtout porté sur l'agrandissement du village familial de Radisson, le parachèvement du campement à LG 2, la mise en place du chantier LG 3, le prolongement des voies d'accès et l'amélioration de notre système de transport aérien.

Radisson abrite maintenant 400 familles. La deuxième phase de son aménagement comportait l'installation de 125 unités d'habitation préfabriquées et la construction du centre commercial qu'on appelle aussi centre-ville. Au plus fort des travaux, 600 familles habiteront ce village.

Le campement LG 2 et son satellite Duncan ont été parachevés au cours de 1975. La capacité de logement de ces deux agglomérations est respectivement de 4300 et de 1000 personnes.

La cantine de LG 2, une des plus considérables du genre au monde, a été officiellement ouverte le 7 juillet 1975, et le centre hospitalier fut inauguré le 12 septembre.

Cette année, nous entreprenons la construction des ouvrages permanents de LG 3. L'aménagement du campement des travailleurs, analogue à celui de LG 2, permet de recevoir cet été près de 1000 personnes. Quant au village familial Sakami, il pourra éventuellement loger 275 familles. Déjà, le bras sud de la rivière est fermé par un batardeau et la construction du barrage sud est commencée. Les travaux de dérivation débuteront cet automne pour permettre la construction du barrage nord dès le printemps prochain.

Commencée en 1974, la route d'accès au site LG 3 a été ouverte à la circulation à la fin de 1975 et son prolongement vers LG 4 se poursuit présentement. Au total, plus de 175 milles de routes ont été construits. Le réseau routier du complexe La Grande a maintenant près de 700 milles depuis Matagami. Le transport du personnel des entrepreneurs et de la Société d'énergie entre le complexe et les principales villes du Québec, d'une part, et entre les différents chantiers, d'autre part, pose des défis sans précédent.

Ainsi, avec un effectif de pointe d'environ 6000 personnes sur nos chantiers en 1975, nous avons enregistré près de 60 000 entrées et sorties aux cinq centres de vérification du territoire de la baie James.

Comme la majeure partie de cet effectif était concentrée à LG 2, le transport des personnes fut une opération relativement facile. Cependant, l'ouverture du chantier LG 3 cette année et des chantiers LG 1, LG 4, Caniapiscau et Eastmain, au cours des deux prochaines années, fera passer l'effectif du complexe à 14 000 personnes dispersées d'un bout à l'autre d'un territoire de 68 000 milles carrés.

Imaginez, par exemple, que chaque travailleur a droit à un voyage aller-retour vers son domicile tous les deux mois. Très peu songent à emprunter la route. L'avion est donc le seul moyen de transport efficace du personnel. Une étude des besoins auxquels il faudra répondre au cours des prochaines années a convaincu la Société d'énergie de la baie James d'acheter cinq avions de type Convair 580 qui permettront d'assurer une liaison efficace constante entre les chantiers du complexe et avec les principaux aéroports du Québec. L'exploitation de ces appareils a été confiée à la société Qué-bécair par appel d'offres.

Les ouvrages hydroélectriques. Comme vous le savez, la construction des ouvrages hydroélectriques à LG 2 est commencée depuis 1973. En 1975, l'effectif de pointe du chantier a atteint 3500 personnes, le plus important chantier du Québec à cet égard, et tous les ouvrages de cet aménagement étaient en voie de réalisation, à l'exception de l'évacuateur de crues. L'installation des groupes générateurs commence à la fin de l'an prochain.

Aux autres sites du complexe, nous avons poursuivi intensément les programmes d'exploration, les études d'ingénierie d'avant-projet et certains travaux d'infrastructure.

La mobilisation de l'effectif de construction à LG 3 a eu lieu au début de 1976, tandis qu'aux sites LG 1, LG 4, Caniapiscau et Eastmain, elle aura lieu au cours des deux prochaines années.

Achats et contrats. En 1975, le montant de nos achats de biens et services s'est élevé à $112 millions, le double de l'année précédente. Les unités mobiles d'habitation, le matériel de construction et les produits pétroliers représentent environ la moitié de cette somme. Au total, le contenu québécois de nos achats a été de 74%. Pour le premier semestre de 1976, nos achats se chiffrent déjà à environ $91 millions.

Les contrats de construction adjugés en 1975 atteignent une valeur de $460 millions comparativement à $300 millions en 1974. Pour le premier semestre de 1976, les contrats adjugés s'élèvent à $290 millions.

L'éloignement des chantiers, l'envergure des travaux, l'incertitude des relations de travail à la suite des événements de mars 1974 et la surchauffe de l'économie ont engendré un climat d'insécurité chez la majorité des entrepreneurs intéressés à nous offrir leurs services.

Cette insécurité, associée à un volume élevé de construction au Québec, s'est traduite, en 1975, par un nombre restreint de soumissionnaires et des prix qui nous sont apparus trop élevés. Somme toute, les soumissionnaires surévaluaient leurs risques pour parer à toute éventualité au cours de 1975.

Nous ne pouvions nous payer un tel luxe et nous avons réagi avec une nouvelle formule de contrat dit "contrat de gérance". En vertu de cette formule, la société d'énergie assume la majeure partie des coûts directs de l'entrepreneur tels que transport, carburant, gîte et couvert, matériel de construction.

En outre, les objectifs à atteindre sont établis par voie de soumissions et le contrat prévoit un régime d'incitation financière pour assurer la réa-

lisation de ces objectifs. Cette formule nous a permis de contrôler les risques inflationnistes des entrepreneurs et d'obtenir les biens et services fournis à l'entrepreneur à des prix plus avantageux, grâce à notre pouvoir d'achat ainsi accru.

Nous avons appliqué cette formule à trois contrats majeurs à LG 2, soit les digues du bief d'amont, la centrale est et la centrale ouest, et les résultats à ce jour nous permettent d'être optimistes. Cette fièvre inflationniste constatée chez les entrepreneurs privés en 1975 est une des raisons pour lesquelles nous avons confié à l'Hydro-Québec le mandat de construire le barrage principal et certaines digues de l'aménagement LG 3. Comme on le sait, l'équipe de construction de l'Hydro-Québec vient de terminer l'aménagement de Manie 3 et cette expérience sera pour nous un atout majeur à LG 3.

J'aimerais, toutefois, souligner que, depuis le début de 1976, le phénomène d'insécurité des entrepreneurs privés s'est sensiblement résorbé. Une meilleure connaissance de la région, des travaux et des conditions de vie sur les chantiers, ainsi que la diminution du volume de construction au Québec ont certainement contribué à faire baisser la pression. On note, en effet, depuis le début de cette année, une augmentation du nombre de soumissionnaires et une tendance à la baisse des prix. Cependant, cette tendance risque d'être annulée en raison du conflit qui sévit en ce moment dans l'industrie de la construction et dont les chantiers de la baie James ne sont pas exempts.

Entente avec les autochtones. L'entente signée avec les autochtones le 11 novembre 1975 comporte plusieurs engagements que doit assumer la Société d'énergie. L'effet de cette entente sur les coûts du complexe La Grande est évalué à environ $158 millions en 1975. Cette somme ne représente, toutefois, que les coûts de construction et n'inclut pas les compensations monétaires de $75 millions prévues par l'entente durant l'exploitation des centrales, ni les coûts des avantages d'une autre nature consentis aux autochtones et qui s'élèvent à plus de $30 millions.

Optimisation du complexe. Nous avons poursuivi nos études d'optimisation du complexe et vous constaterez que la puissance installée prévue des quatre centrales s'établit maintenant à 10 190 mégawatts. L'estimation budgétaire de mai 1974 fixait la puissance du complexe à 10 340 mégawatts. En avril 1975, nous la rabaissions à 10 020 mégawatts pour tenir compte du déficit de 270 mégawatts résultant du déplacement de LG 1 et du rajustement des cotes et réserves de LG 3 et de LG 4. Depuis lors, nos analyses ont permis de rehausser la cote de LG 3 et récupérer une partie du déficit. Les puissances de LG 2 et de LG 4 demeurent inchangées, soit respectivement 5328 et 2032 mégawatts. Quant à l'énergie annuelle garantie du complexe, elle demeure telle qu'établie lors de la révision d'avril 1975, soit 67,8 milliards de kWh, mais inférieure à celle de l'estimation budgétaire de mai 1974 qui la fixait à 69 milliards de kWh.

Nos études préliminaires permettent d'entrevoir la possibilité d'ajouter trois centrales additionnelles à l'envergure actuelle du complexe La

Grande. Ces aménagements permettraient une utilisation maximale du potentiel hydroélectrique de la région. Les trois sites envisagés sont ceux de Laforge 1, avec une puissance installée de 660 mégawatts, Brisay, avec 405 mégawatts, et East-main 1 avec 430 mégawatts. L'énergie annuelle garantie de ces trois usines serait d'environ 9 milliards de kWh.

Les conditions de vie sur les chantiers. Les critiques à propos des conditions de vie des travailleurs du complexe La Grande ont été nombreuses. Certaines étaient fondées et nous y avons remédié. La plupart, cependant, trahissaient un manque évident d'information et souvent un profond irréalisme. Les chantiers de la baie James sont à 900 milles de routes au nord de Montréal, au coeur d'une région difficile et jusque-là inhabitée. Il est absolument impossible d'y recréer les conditions de vie des travailleurs d'un chantier montréalais. C'est un rêve en couleur.

On ne pourra jamais anéantir complètement les inconvénients d'un chantier aussi éloigné des centres urbains. D'ailleurs, le mandat de la Société d'énergie ne comporte pas celui de créer des villes permanentes dans le Grand-Nord. Tous les campements du complexe doivent être démantelés à mesure que les travaux seront achevés.

Cela dit, nous pouvons, aujourd'hui, affirmer en toute objectivité que les campements du complexe La Grande sont des modèles du genre en Amérique du Nord, voire dans le monde. Les ressources humaines, techniques et financières affectées à l'aménagement de nos campements sont très importantes.

Tout n'est pas parfait, comme je viens de le laisser entendre plus haut. Mais considérons seulement le campement LG 2 qui servira de modèle à tous les autres campements de construction du complexe. Il n'y a pas loin à penser qu'il ferait l'envie de bien des municipalités du Québec à plusieurs égards. Je ne veux pas ici vous décrire tous les services, installations communautaires et aménagements récréatifs que vous retrouvons maintenant au complexe ou qui s'ajouteront au cours des deux prochaines années. Nous croyons que, compte tenu des contraintes physiques et financières, les travailleurs de la baie James peuvent vivre et travailler dans des conditions très humaines et très confortables.

Le complexe La Grande est une entreprise sans précédent au Canada et il nous était difficile, au début des travaux, de prévoir l'évolution des besoins relatifs à l'aménagement des campements et à l'organisation de la vie de 14 000 travailleurs sur un territoire aussi vaste. Les devis considérés en 1973 et 1974 s'inspiraient de l'expérience de projets antérieurs. Depuis lors, cependant, nous avons constaté que les exigences ont augmenté davantage que prévu, surtout dans le contexte d'un volume exceptionnel de la construction au Québec. Pour assurer un meilleur climat de travail et aussi pour favoriser le recrutement d'une main-d'oeuvre compétente, il nous a fallu, en 1974 et 1975, modifier considérablement certaines normes de campements. Par exemple, tous les dortoirs des travailleurs achetés à compter de

1975 comportent un espace beaucoup plus grand par personne. La superficie utilisable passe de 80 pieds carrés à 120 pieds carrés par personne.

Les installations communautaires et récréatives prévues ont été considérablement améliorées en nombre, en surface et en qualité. Les normes d'aménagement extérieur des campements ont été modifiées pour créer une atmosphère plus agréable.

Par ailleurs, la difficulté de recruter un personnel-cadre compétent sans lui assurer un logement familial à proximité des travaux nous a obligés de multiplier le nombre de villages familiaux du complexe. Un village a donc été ajouté à LG 3, à Caniapiscau et à Eastmain. Nous n'en avions pas envisagé à ces sites en 1974. Le nombre d'unités familiales de logement pour le complexe est passé de 390 à 846.

Finalement, à la suite des événements de mars 1974à LG 2, nous avons accru les mesures de sécurité et de vérification d'accès aux chantiers. Ces mesures ont entraîné des coûts additionnels au chapitre de la construction et de l'équipement de plusieurs postes de vérification, ainsi qu'à celui des salaires du personnel affecté à ces tâches.

L'addition de ces normes nouvelles relatives aux campements et des mesures de sécurité supplémentaires s'élève à $230 millions en dollars 1975dans notre nouvelle estimation budgétaire. Restrictions budgétaires. La cherté des capitaux et le volume important d'emprunts que devait contracter l'ensemble des institutions publiques et parapubliques du Québec nous ont obligés de réduire d'environ $225 millions notre programme de construction cette année. Cette coupure a pour conséquence de retarder certains ouvrages majeurs du complexe, mais n'affecte pas l'échéancier ultime de 1985 pour la mise en service des 44 groupes générateurs. Ainsi, la mise en service de LG 1 est repoussée en 1983. D'autre part, la construction de la route LG 4— Caniapiscau est suspendue pour un temps indéterminé. Enfin, les détournements Eastmain et Caniapiscau ont été retardés d'une année, soit en 1980 et 1983, ce qui entraînera une diminution temporaire de la productivité des centrales alors en service.

L'évolution des conjonctures économiques et énergétiques. Nous avons, ici même et devant des dizaines d'auditoires à travers le Québec et à l'étranger, déjà expliqué les motifs du choix qui a été fait, en 1970, de développer le potentiel hydroélectrique des rivières de la baie James.

En deux mots, c'était et c'est toujours la meilleure façon de répondre à l'accroissement de nos besoins en électricité pour les années 1980 à 1985.

Ce programme de production hydroélectrique était non seulement plus économique qu'un projet nucléaire équivalent, mais aussi celui qui était le mieux susceptible d'assurer la sécurité et la qualité de la fourniture d'électricité aux consommateurs du Québec.

L'évolution pénible des autres modes de production d'électricité au cours des cinq dernières années a donné encore plus de poids à nos arguments. En fait, le développement des rivières de la baie James place désormais le Québec dans une position de force dans le secteur énergétique.

La crise du pétrole et les problèmes posés par l'énergie nucléaire ont bouleversé les règles du jeu et forcé la remise en question des programmes de production d'électricité dans de nombreux pays.

Aux Etats-Unis, par exemple, l'industrie du charbon, qu'on croyait irrécupérable, dans notre société de haute technologie, renaît vigoureusement de ses cendres pour concurrencer celles du pétrole et de l'uranium dans les centrales électriques.

L'énergie nucléaire n'a pas tenu toutes ses promesses, sans doute parce que les ambitions que certains ont entretenues étaient sans commune mesure avec les possibilités actuelles de cette nouvelle source d'énergie. La technologie nucléaire n'a pas encore atteint le degré de maturité et de perfectionnement qui lui permettrait de remplacer, du jour au lendemain, les sources connues et éprouvées d'énergie électrique.

L'énergie nucléaire ne se laisse pas facilement conquérir. Elle est certes la principale sinon la seule voie de solution à l'accroissement de la demande mondiale d'électricité pour les générations futures. Mais il reste encore beaucoup à faire.

Le fait, pour le Québec, de disposer encore de ressources hydrauliques relativement abondantes permet d'atteindre un double objectif: d'abord, bien sûr, assurer notre approvisionnement d'électricité; ensuite, acquérir les connaissances et l'expérience du nucléaire sans bouleversement et sans précipitation. Notre potentiel hydroélectrique nous assure une transition harmonieuse vers le nucléaire.

Nos prévisions d'accroissement des besoins en électricité se heurtent encore, malheureusement, au scepticisme de nombreux Québécois. Ceux-ci seraient toutefois les premiers à nous accuser d'imprévoyance et d'incompétence si nous étions incapables de répondre à la demande durant les grands froids de l'hiver.

Le Québec n'est pas le seul endroit au monde où le taux annuel d'augmentation de la demande d'électricité entraîne un doublement décennal des équipements de production. A cause de la progression géométrique des besoins, les programmes d'équipement des prochaines décennies seront de plus en plus considérables.

L'évolution défavorable de la conjoncture économique des récentes années, cependant, frappe durement les projets énergétiques d'envergure qui ont été entrepris pour faire face à l'accroissement des besoins des générations futures.

Permettez-moi ici de vous donner quelques exemples qui démontrent que la hausse des coûts n'est pas un phénomène particulier à la baie James.

Le projet de pipe-line Aleyska, en Alaska, a subi une hausse de 42% entre son estimation de 1974 et celle de 1975, passant de $4,5 milliards à près de $6,4 milliards.

Vous avez, en arrière, si vous voulez, attaché à ce texte, un tableau qui illustre les comparaisons que je vais vous donner, et vous avez en arrière de

vous, M. le Président, un tableau qui répète avec plus de détails ce que je vais vous lire.

Je reprends donc.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples qui démontrent que la hausse des coûts n'est pas un phénomène particulier à la baie James. Le projet de pipe-line Alyeska, en Alaska, a subi une hausse de 42% entre son estimation de 1974 et celle de 1975, passant de $4,5 milliards à près de $6,4 milliards; cela fait une augmentation de 42% si vous regardez votre tableau. Le projet Irving de raffinerie au Nouveau-Brunswick a connu une hausse de 100% depuis l'estimation de 1974, passant de $100 millions à $200 millions en 1975. Le projet hydroélectrique Gull Island, toujours à l'étude, a été estimé à $1,1 milliard au début de 1974 et l'estimation de 1975 porte maintenant le coût à $2,3 milliards, soit une augmentation de 111%.

Le projet de pétrole Syncrude, en Alberta, a pour sa part connu une hausse de coûts de 67% entre l'estimation de 1974 et celle de 1975, passant de $1,2 milliard à $2 milliards.

Je vous signale, par ailleurs, trois projets de centrales nucléaires de la filière américaine. Le projet Limerick, à Philadelphie, comporte deux groupes nucléaires de 1,055 mégawatts et la mise en service est prévue pour 1981. L'estimation du coût de ce projet a connu une hausse de 38% entre celle établie en 1973 et celle de 1975.

Le projet San Onofre, en Californie, de dimension semblable au précédent, a connu pour sa part une hausse de 56% au cours de la même période.

Le projet Grand Gulf, au Mississipi, montre quant à lui une augmentation de 48% entre les estimations de 1973 et de 1975.

Enfin, je cite deux projets de centrales nucléaires de la filière canadienne. Gentilly 2 comporte un groupe générateur de 637 mégawatts et sa mise en service est prévue pour 1979. L'estimation du coût de cette centrale a connu une augmentation de 59%, passant de $386 millions en 1972 à $612 millions en 1975. D'après les rentrées de soumissions, actuellement, on ne serait pas surpris que cela dépasse $700 millions.

Le projet nucléaire Pointe Lepreau, au Nouveau-Brunswick, est de dimension semblable à celui de Gentilly 2. Là aussi l'estimation du coût a subi une hausse appréciable, passant de $466 millions en 1974 à $684 millions en 1975, soit une augmentation de 47% dans une année seulement. Là également, je veux faire le même commentaire que pour Gentilly, les $684 millions doivent être révisés.

Nouvelle estimation du coût final. En juillet 1974, nous avons présenté aux membres de cette commission l'estimation du coût du complexe La Grande. Depuis cette date, comme vous le savez, l'évolution de l'économie canadienne a pris une allure qu'il était impossible de prévoir, même avec les vues les plus pessimistes.

En effet, les statistiques indiquent aujourd'hui que, du premier trimestre 1974 au troisième trimestre 1975, le taux réel d'inflation pour la construction d'ouvrages hydroélectriques a été de 31%. Il va sans dire que les travaux du complexe La

Grande n'ont pas été à l'abri de cette hausse formidable.

Cette tournure tout à fait imprévue du contexte économique, de même que l'évolution de certains facteurs d'ordre écologique, technique et social qui étaient également imprévisibles au début de 1974 sont venues bouleverser nos hypothèses initiales de coûts de construction. En juillet 1975, devant cette commission je signalais déjà l'apparition de certaines tendances au chapitre de l'inflation. Il n'était pas encore possible d'en évaluer avec certitude l'effet mais, comme je l'annonçais alors, nous avions commencé à ce moment une révision complète des estimations du coût du complexe La Grande.

Cette nouvelle estimation s'est faite en très grand détail et a nécessité près d'une année de travaux et d'analyses. Elle a tenu compte des données techniques disponibles les plus récentes relativement à chacun des projets, de l'expérience acquise avec les contrats déjà adjugés aux entrepreneurs et des travaux présentement en cours sur les chantiers.

La nouvelle estimation porte les coûts du complexe La Grande à $16,15 milliards, soit une augmentation de 35% par rapport à l'estimation de $11,94 milliards du début de 1974. Ce pourcentage d'augmentation se compare tout à fait favorablement au pourcentage constaté pour les autres grands projets énergétiques cités précédemment.

Cette nouvelle estimation de $16,15 milliards se répartit comme suit: $10,956 milliards pour le complexe hydroélectrique; $1,61 milliard pour l'infrastructure principale, et $4,136 milliards pour le réseau de transport d'énergie qui relève entièrement de l'Hydro-Québec, en passant.

Au total, les nouveaux coûts de base du complexe La Grande, exprimés en dollars de 1975, sont maintenant de $9,4 milliards. Si on ajoute à ces coûts de base des prévisions d'escalade de $3,53 milliards, ainsi que $4,96 milliards d'intérêts pendant la construction, nous obtenons la nouvelle prévision de $16,153 milliards. Si vous voulez vous référer au tableau no 2, à l'arrière du texte, vous avez ces chiffres exprimés autrement ou en colonnes. Ils sont également exposés au tableau à l'arrière du président. On pourra revenir en détail sur chacun d'entre eux.

L'inflation est le principal facteur de l'augmentation de $4,2 milliards. Au cours de la période d'une année et demie séparant notre estimation de $11,94 milliards et la nouvelle prévision de $16,51 milliards, l'inflation subie par l'industrie de la construction lourde au Québec dans le domaine hydroélectrique a été de 31%. Il s'agit là d'un taux annuel de près de 20% que l'on jugeait encore incroyable l'an dernier. Je répète: II s'agit là d'un taux annuel de près de 20% que l'on jugeait encore incroyable l'an dernier. Pourtant, si on applique les taux d'inflation historiques aux éléments qui composent les coûts du complexe La Grande, celle-ci, en effet, a été de 19% en 1974 et de 20,7% en 1975.

Notre prévision initiale du taux d'inflation se situait à 9% pour les années 1974 et 1975. Le taux

moyen équivalent applicable à toute la période de construction, soit de 1974 à 1985, était alors de 7%. Compte tenu de l'inflation exceptionnelle des deux dernières années et des prévisions d'inflation révisées à la hausse pour les années futures, le nouveau taux moyen équivalent pour la période 1974à 1985 passe donc à 12%.

Ce phénomène tout à fait exceptionnel et imprévisible de l'inflation représente $2,388 milliards de l'écart total de $4,2 milliards entre l'estimation de 1974 et la nouvelle prévision des coûts.

Cette escalade de $2,388 milliards se compose de deux éléments: Premièrement, une escalade additionnelle de $997 millions uniquement pour la période 1974/75, escalade qui est incorporée aux nouveaux coûts de base exprimés en dollars de 1975; deuxièmement, une escalade de $1,391 milliard qui représente l'augmentation que nous devons incorporer à nos prévisions d'inflation pour la période 1976 à 1985.

Ces hypothèses d'inflation formulées par la direction en recherche économique de l'Hydro-Québec supposent un taux moyen équivalent à 8% par année pour la période 1976 à 1985. Si on y incorpore l'inflation exceptionnelle des deux dernières années, le taux moyen équivalent pour la période 1974 à 1985 passe à 12%, comme je l'ai mentionné précédemment.

De plus, les intérêts durant la construction ont augmenté de $569 millions, même si nous utilisons toujours le même taux d'intérêt de 10%, parce que les coûts de base et l'escalade ont augmenté.

Enfin, l'augmentation du coût de base lui-même constitue le solde de cet écart total de $4,2 milliards et s'élève à $1 milliard 251 millions.

Les composantes de cette augmentation du coût de base sont d'ordre écologique, technique, social et économique. a) Des mesures remédiatrices relatives à la protection de l'environnement, qui étaient imprévisibles en 1974, ont été ajoutées aux ouvrages du complexe La Grande. Ces travaux supplémentaires sont évalués à $87 millions.

L'entente signée avec les autochtones le 11 novembre 1975 a un double effet: la modification de certains ouvrages et la définition de normes de protection de l'environnement spécifiques au territoire. Ce double effet entraîne pour la Société d'énergie un coût additionnel de $158 millions. b)Lorsque l'estimation budgétaire de base a été préparée, la conception de la plupart des ouvrages du complexe n'avait pas atteint le stade de conception final. Les estimateurs durent donc travailler avec des hypothèses qui, par la suite, se sont parfois révélées insuffisantes. L'avancement des études d'ingénierie, la détermination détaillée de conditions de construction ainsi que la collecte de renseignements topographiques et géologiques lors des campagnes d'exploration de 1974 et 1975ont entraîné dans plusieurs cas des modifications techniques aux divers ouvrages ou des méthodes différentes de construction. Ces modifications représentent $470 millions. c)Ensuite, comme je l'ai déjà dit, l'application de nouvelles normes relatives à l'amélioration des conditions de vie dans les campements et l'instauration de mesures de sécurité additionnelles requièrent une somme de $230 millions. d)D'autre part, un montant de $162 millions est attribuable à des facteurs d'estimation pour le complexe hydroélectrique. Parmi ces facteurs, il faut surtout noter une hausse considérable des coûts indirects des entrepreneurs. e)Enfin, une augmentation de $140 millions est affectée en grande partie à des modifications applicables aux travaux d'infrastructures et de transport d'énergie.

Voilà, en résumé, les principales composantes de l'augmentation des coûts du complexe La Grande.

La plupart des éléments de l'écart entre notre estimation de 1974 et celle d'aujourd'hui échappe à notre contrôle direct. Nous avons subi l'inflation comme tout le monde; même les gouvernements éprouvent beaucoup de difficultés à l'enrayer. Pour notre part, nous avons réagi dans la mesure de nos moyens pour la contrer. Ainsi, la mise au point de nouvelles formules de contrats, l'octroi d'un mandat à l'Hydro-Québec pour l'aménagement de LG 3 et l'adoption de mesures d'austérité interne conformément aux lois anti-inflationnistes, ont permis de réaliser des économies substantielles.

Quant aux coûts additionnels attribuables aux mesures de protection de l'environnement, dans le cadre de l'entente avec les autochtones ou autrement, j'ai déjà dit, devant cette commission, que la protection de l'environnement est un objectif très souhaitable, voire primordial, mais il faut en payer la note.

Les modifications techniques que nous devons apporter aux ouvrages, d'autre part, sont normales dans le cadre d'une entreprise qui a l'envergure du complexe La Grande.

Par ailleurs, l'amélioration des conditions de vie sur les chantiers du complexe aura un effet bénéfique sur la productivité de l'effectif et contribuera à atténuer une certaine insécurité dans les relations de travail que les entrepreneurs ont eu tendance à compenser par des hausses de coûts.

Enfin, l'entente avec les autochtones a mis fin à un conflit qui, comme on le sait, avait déjà entraîné la fermeture du chantier.

En dernière analyse, nous devons remarquer que, si l'inflation a durement affecté les coûts du complexe La Grande, la hausse de 35% entre notre estimation de 1974 et celle que nous venons de vous exposer se compare avantageusement à celle d'autres projets du secteur énergétique au cours de la même période.

Eu égard aux difficultés aussi bien techniques que financières qu'éprouvent les utilisateurs de combustibles fossiles en Amérique du Nord, la mise en valeur des ressources hydrauliques de la baie James constitue le meilleur investissement qu'ait pu faire le Québec pour assurer la réalisation de ses objectifs de développement.

M. le Président, si vous me permettez, j'aimerais aller à l'arrière de la salle et vous expliquer en détail les tableaux qui sont là et, par la suite, j'aurais d'autres commentaires à ajouter.

Pour entrer un peu plus dans le détail, pour le complexe hydroélectrique, l'estimation dont on parle ici est de $16,1 milliards. Donc, du côté de la SEBJ, le coût de base incluant les imprévus est maintenant de $6,91 milliards; l'escalade: $1,848 milliards; les intérêts: $3,17 milliards, pour un total de $10 956 milliards.

Du côté de la société de développement, les infrastructures, le coût de base: $539 millions, et l'escalade, $41 millions. Ici, il n'y a presque plus d'escalade puisque, en ce qui nous concerne, les travaux sont presque finis. Il y a cependant un intérêt important sur la construction qui est presque égal au coût de base parce que, de la façon dont les choses sont comptabilisées, il faut porter cet intérêt tant que les premières unités n'auront pas commencé à fonctionner à LG 2. Cela nous fait un total de $1,61 milliard. Evidemment, c'est un fardeau assez lourd, mais il est là.

Du côté de l'Hydro-Québec, les lignes de transport d'énergie ainsi que tous les postes représentent maintenant des coûts de base de $2,374 milliards; l'escalade, de $1,164 milliard; l'intérêt, de $598 millions, pour un total de $4,136 milliards. Si on revient au grand total, vous avez des chiffres qui nous donnent $16,153 milliards.

J'aimerais passer au tableau suivant avant d'entrer dans le détail ou les questions sur ces points parce qu'ici, on a les mêmes chiffres, un total de $16,153 milliards où on vous explique l'analyse des écarts entre cette prévision et l'estimation de 1974.

Le coût de base, en dollars de 1974, était de $5,971 milliards. L'inflation prévue entre l'estimation 1974 et la nouvelle était de $785 millions. Maintenant, c'est passé. On additionne le coût de base plus l'inflation qui avait été prévue et on a maintenant le coût de base, suivant ces calculs, en dollars de 1975.

M. Morin: M. Boyd, pour l'inflation prévue en 1974/75, combien avez-vous prévu dans vos dernières prévisions? Là, vous avez $785 millions; quel était le chiffre la dernière fois.

M. Boyd: Si vous permettez, une des raisons pour laquelle ce tableau et d'autres n'ont pas été envoyés d'avance, c'est qu'ils sont extrêmement compliqués. Si vous me permettez, je vais le terminer et ensuite je vais répondre à toutes les questions. Cela prend une explication; je l'aurais envoyé d'avance et il aurait fallu quand même passer par la période des questions. Quant à moi, les questions pourront être aussi nombreuses et aussi longues que vous voudrez, mais...

M. Morin: Vous êtes en train de nous dire que nous ne sommes pas capables de comprendre un tableau?

M. Lessard: On est trop enfant?

M. Boyd: Tout le monde est capable de comprendre un tableau lorsqu'on l'explique. Mais j'aimerais revenir sur ces commentaires...

M. Lessard: ... on aurait pu l'avoir. Le Président (M. Séguin): A l'ordre!

M. Lessard: On aurait pu avoir le tableau et le regarder...

Le Président (M. Séguin): A l'ordre!

M. Lessard: ... et on aurait pu comprendre les explications après.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre!

M. Lessard: Qu'on ne nous prenne pas pour des enfants, quand même; quand on demande des documents, on veut les avoir.

M. Perreault: Va donc prendre un café.

M. Lessard: Cela te ferait du bien, cela ne dérangerait rien.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Boyd: L'estimation de 1974, en coût de base en dollars de 1974, dans cette estimation globale, il y avait une inflation prévue en 1974/75 de $785 millions qu'on additionne. Cela nous donne l'estimation de base s'il n'y avait pas eu de changement en dollars 1975.

Si on reste toujours dans les coûts de base, le coût de base en dollars 1975 est maintenant de $9,4 milliards. Si on fait la différence entre ce tableau et celui-ci, cela nous donne $2,248 milliards d'écart. Je voudrais d'abord expliquer celui-là. Dans ces $2,248 milliards, il y a l'escalade additionnelle, imprévue en 1973/74, lorsqu'on faisait les estimations, qui couvre la période 1974/75 de nos études, soit 18 mois. Cela représente $997 millions. En 1973/74, on avait prévu que pour cette période cela aurait été ce montant. C'est ce montant, plus ce montant qui font les 31%.

M. Perreault: C'est cela.

M. Boyd: Cela fait partie des $2,248 milliards. En restant toujours dans les coûts de base, il y a d'autres écarts qui peuvent aller jusqu'à $1,250 milliard.

M. Morin: Un instant, je vous prie. Je comprends qu'il faut que cela soit expliqué, mais j'ai une petite question précise à vous poser. Pour l'escalade additionnelle de 1974/75, est-ce à la fin de 1975 et est-ce qu'en ajoutant les six ou sept mois qui sont maintenant écoulés vos $997 millions sont déjà dépassés? Avez-vous des chiffres plus récents que la fin de 1975? Je sais bien qu'on aurait dû avoir cela en fin de 1975.

M. Perreault: ... escalade.

M. Morin: Là, on est à plus que la moitié de 1976.

M. Boyd: Ces chiffres sont une partie de nos études qu'on a terminées en mars 1976. De 1976 à 1985, on a $3,053 milliards d'escalade. Cela répond à votre question.

Il y a cela d'escalade passée et il y a cela d'escalade future. Dans le $1,250 milliard, qui sont des modifications dont je vais vous parler, il y a plus de $300 millions qui sont encore de l'escalade.

M. Cournoyer: C'est de l'escalade normale et non additionnelle.

M. Boyd: C'est de l'escalade normale avec les taux d'escalade qu'on utilise maintenant. Ces travaux, on les a calculés en tenant compte du coût des travaux additionnels, de l'escalade et de l'imprévu.

De l'écart sur le coût de base, il y en a $997 millions qui sont dus à de l'escalade additionnelle. Pour les 18 mois du premier trimestre 1974 au dernier trimestre 1975, nous avions, dans nos estimations 1974, prévu que l'inflation serait de 13,5%. Le contexte historique pour les projets hydroélectriques, incluant les postes, les lignes, les centrales, a été de 31%. Nous faisons la correction et, pour cette période, cela donne cela et, pour le reste, on revient ici.

Je sais que là-dessus on a parlé l'autre fois des chiffres de Statistique Canada, qui étaient de 24% ou de 25% pour cette période. Là, on vous parle de 31%. On pourra vous expliquer en détail pourquoi cette différence entre Statistique Canada et les 31% au Québec. C'est assez facile de l'expliquer. On pourra vous donner cela plus tard.

Il y a donc $997 millions ici. Les autres, je crois que je les ai tous identifiés dans mon texte, mais j'y reviens. Il y a des mesures remédiatrices de $87 millions. Il y a l'entente avec les autochtones et les normes d'environnement, $158 millions; les modifications techniques, $470 millions; les normes de campement, $230 millions; les facteurs d'estimation, $162 millions; les infrastructures et le transport d'énergie, $144 millions, ce qui nous fait $1,251 milliard.

Vous avez maintenant ici, l'explication de cet écart. Si on parle des autres écarts, vous en avez trois: $1,251 milliard, $2,388 milliards et $569 millions, ce qui vous donne le grand total de $4,208 milliards.

La majorité importante de ces $4,208 milliards est due à de l'inflation exceptionnelle additionnelle imprévue au moment de l'estimation de 1974. Je vais travailler là-dessus un peu. Vous avez ici la réserve d'escalade pour le projet de 1974 à 1985, que nous avions dans notre estimation, était de $2447 milliards. La portion prévue pour 1974/75 — ce qui veut dire une soustraction — est de $785 millions. On l'a enlevée de la partie escalade et on l'a mise dans le coût de base, parce que c'est passé maintenant.

Donc, l'escalade au total était cela, moins $785 millions qu'on a transférés aux coûts de base, ce qui donne $1,662 milliard qui seraient restés si le projet n'avait pas changé pour les raisons que je vous ai données: l'escalade et les trois facteurs ici.

La réserve d'escalade pour 1976 à 1985. Notre nouvelle prévision indique $3,053 milliards. $1,662 milliard qui, sur la même base, seraient restés, nous donnent une différence de $1,391 milliard dans l'escalade à ce moment-là.

Du côté des intérêts, vous avez $4,096 milliards. On avait avant, en 1974, $3,527 milliards pour un écart de $569 millions et vous avez une autre façon de retrouver les écarts. Alors, vous avez donc cet écart de $1,391 milliard pour la période 1976-1985 qui est ici plus l'écart additionnel qu'on vous a expliqué tout à l'heure pour cette période; ça vous donne le chiffre de $2,388 milliards. Les intérêts et le total.

Ce sont des explications sur lesquelles on pourra revenir. Est-ce qu'il est nécessaire d'y revenir? Je pense que c'est celui-ci qu'on a donné en premier et il s'explique de lui-même. Peut-être, M. le Président, que j'aimerais retourner à ma place et remettre sur le chevalet le dernier tableau que je vais expliquer.

M. Morin: Pouvons-nous dès maintenant commencer les questions à M. Boyd, M. le Président?

Le Président (M. Séguin): Voici, M. le chef de l'Opposition, c'est que M. Boyd a dit qu'il voulait faire son exposé et ensuite répondre aux questions. Je ne sais pas encore s'il a terminé. Avez-vous terminé votre exposé, M. Boyd? Est-ce qu'il s'agirait de répondre aux questions ou si vous avez autre chose à ajouter?

M. Boyd: J'ai quatre autres tableaux que j'aimerais distribuer.

Le Président (M. Séguin): Voulez-vous répondre aux questions immédiatement?

M. Boyd: C'est une continuation. J'aimerais les remettre...

Le Président (M. Séguin): Alors, vous voulez terminer.

M. Boyd: ... les expliquer et on pourrait me questionner cet après-midi sur ça.

Le Président (M. Séguin): Alors, continuez votre exposé.

M. Boyd: Evidemment, je ne pense pas avoir noté toutes les questions qu'a posées M. Morin au début, mais, dans la pochette qui a été distribuée jeudi dernier, il y en avait une qui relevait les différents propos qui avaient rapport à la question que le chef de l'Opposition avait posée. En fait, j'avais dit que j'aimerais discuter de ça dans le contexte et non pas hors du contexte. Je pense, en toute

honnêteté, que, l'année passée, au mois de juillet, si vous lisez tous ces textes, j'ai indiqué à plusieurs endroits qu'au moment où nous étions, le chiffre était celui-là. En fait, la phrase que vous avez citée, je ne la nie pas. Elle est là. Je l'ai dite, mais il faut lire tout l'ensemble du portrait et, entre autres, à la page B-5376, je dis qu'en 1974 nous avons constaté une escalade de 15%; donc, nous commencions à le constater et on était en voie de réviser à ce moment-là.

Il y a plusieurs faits que je pourrais relever.

En autres, à la page B-5380, à la fin de la page, M. Roy avait dit ceci: "Cela veut dire que ces 12% pourraient influencer et faire dépasser le montant prévu, en 1974, de $11,9 milliards; c'est ce que vous venez de nous dire." Je réponds: "Je ne suis pas allé si loin que cela, M. Roy. Je dis que $11,9 milliards étaient l'estimation budgétaire de 1974. Je vous donne le portrait actuel. Cela correspond à ce que vous avez cité, mais sur les $12 milliards, il y en a un qui a été engagé — c'étaient les 12% auxquels il se référait — dans les $11 milliards qui restent, je voudrais bien être aussi perspicace que les devins et vous dire de façon sûre que l'estimation sera telle parce que l'escalade sera telle et que l'intérêt sera tel. Malheureusement, il n'y a personne ici qui pourrait me donner cela. Nous disons, à ce moment-ci: II ny a rien qui nous justifie de changer à ce moment-ci. D'ici la fin de l'année — c'est dans la même phrase — nous allons faire tous nos efforts pour étudier et la partie technique et la partie ingénierie et la partie construction et l'intérêt et l'inflation. En somme, j'ai cité tout ce que je pouvais citer. Nous vous dirons à la fin de l'année si cela est changé ou non dans notre estimation.

Il y a plusieurs autres citations, M. le Président. Ceci était dans la même séance. Vous avez voulu, à ce moment, compléter. J'ai répondu à différents députés sur différents points. D'ailleurs, vous l'avez entre vos mains. Il n'a jamais été question de rien cacher. On était en train de commencer une nouvelle estimation. On savait qu'en 1974 cela avait été 15%; on savait qu'en 1975 cela aurait été plus que 39%, mais je n'étais pas en mesure et ce n'est pas mon habitude de dire des chiffres avant de les faire.

Alors, quant à moi, je pense que c'est assez clair. On n'a jamais voulu cacher quoi que ce soit, mais on vous a dit qu'on refaisait une estimation. J'ai mentionné qu'on allait tout revoir. C'est ce qu'on a fait et on arrive avec les chiffres qu'on a maintenant.

Il y a plusieurs points qui ont été soulevés. Si la demande était moindre, peut-être pourrait-on retarder la baie James, mais retarder la baie James va tout simplement en augmenter le coût. On pourrait parler de cela. Je pense que cela peut suffire pour le moment, M. le Président. Si on veut poser des questions, j'aurai peut-être d'autre chose à ajouter plus tard.

Le Président (M. Séguin): Merci, M. Boyd.

M. Morin: M. le Président, avant d'entrer dans les détails de la valse des milliards, je voudrais po- ser quelques préliminaires à M. Boyd. Effectivement, l'an dernier, au cours de notre entretien en commission parlementaire, vous nous aviez annoncé de nouvelles prévisions pour la fin de l'année 1975, tout en donnant bien l'impression que ce chiffre de $11,9, milliards avait quelque chose de fiable, présentait un caractère fiable. Je tiens à souligner cela parce qu'on pourrait mentionner de nombreux passages où ce montant est présenté de façon à avoir un caractère de fiabilité, mais je reconnais que vous nous aviez annoncé de nouvelles prévisions pour la fin de l'année 1975.

Plus tard, au cours de l'année, il est venu à nos oreilles que vous aviez fait suspendre cette analyse de coûts, ces nouvelles prévisions; je me suis permis à ce moment-là de vous écrire pour vous dire à quel point nous estimions essentiel d'obtenir ces nouveaux coûts pour la fin de l'année 1975 tel que prévu et j'oserais dire tel que promis durant la commission parlementaire.

J'aimerais que vous nous disiez tout d'abord si effectivement ces études, ces nouvelles analyses avaient été suspendues, pour quelle raison. Deuxièmement, quand les chiffres que vous nous présentez aujourd'hui étaient-ils prêts exactement? C'est ma première question.

M. Boyd: M. le Président, je pense que le mot "suspendues" qui a été rapporté par un journaliste était très fort. Ce que j'avais indiqué, lors d'une conférence de presse, c'est qu'on aurait regardé l'influence — parce que c'est à peu près, je pense, la question qu'on m'avait posée — des mesures anti-inflationnistes qui venaient d'être annoncées. C'est cela qu'on a fait. On a recommencé; on a regardé l'étude de nos prévisions d'inflation, parce que, après le coût de base, le facteur le plus important dans les $16 milliards, c'est l'inflation qu'on ne contrôle pas.

Cependant, ces mesures ayant été annoncées, on a voulu considérer cet effet et on a changé, d'une certaine façon, nos prévisions d'escalade ou d'inflation à la suite de cela. Les chiffres qu'on vous présente, on les a étudiés et préparés. Je peux vous dire qu'officiellement les estimations ont été approuvées par le conseil de la Société d'énergie, par l'Hydro-Québec, au milieu d'avril 1976.

M. Morin: Au milieu d'avril 1976. A quel moment les avez-vous communiqués au gouvernement?

M. Boyd: M. Giroux communique avec le gouvernement. J'aimerais mieux qu'il réponde à cela.

M. Morin: M. Giroux peut répondre s'il le veut.

M. Giroux (Roland): On ne me les a jamais demandés.

M. Morin: Comment on ne vous les a jamais demandés?

M. Giroux (Roland): On ne m'a jamais demandé les chiffres. La seule chose à laquelle on a

répondu, je crois, dans le temps, c'est qu'on ferait les exposés à la minute où la commission parlementaire serait convoquée. On est ici aujourd'hui. On expose les chiffres.

M. Morin: M. le président de l'Hydro, voulez-vous dire que le ministre ne vous a jamais demandé ces chiffres, à venir jusqu'à récemment?

M. Giroux: Non, on a toujours répondu au ministre qu'on lui répondrait, qu'on lui donnerait les chiffres en commission parlementaire.

M. Morin: Et vous pouvez donc m'affirmer que ces chiffres n'ont pas été communiqués au gouvernement alors que vous les aviez sous la main dès avril 1976?

M. Giroux: On avait ces chiffres dès avril 1976, mais ils étaient encore sujets à révision, ce qui a été fait. Vous savez, il ne faut pas se faire un scandale de certains chiffres.

M. Morin: Je n'ai rien dit encore, c'est vous qui mentionnez le mot "scandale", M. Giroux.

M. Giroux: Non, je ne dis pas cette chose, je ne dis pas que vous avez dit cela.

M. Morin: J'essaie de comprendre ce qui s'est passé.

M. Giroux: Le point, c'est que, quand on fait ces analyses, il faut se tenir à la disposition, et cela prend énormément de travail. Comme vous voyez, toutes ces études comparatives, cela ne se fait pas dans une journée. Donc, on peut avoir un chiffre, mais on peut avoir tous les autres chiffres qui doivent faire l'objet d'études et les mettre à la disposition.

Soyez assuré d'une chose. Le chiffre qui est donné aujourd'hui, je ne l'ai pas donné à M. Cour-noyer officiellement. Tout le monde me disait: Cela va de tel montant à tel montant. Oui, cela peut aller. C'est la même chose, n'est-ce pas, pour M. René Lévesque. Je n'ai jamais donné le chiffre à M. René Lévesque, malgré qu'il soit tombé dessus et qu'il ait eu le chiffre exact. On a dit que je lui avais donné le montant.

M. Burns: M. Giroux, entendons-nous bien...

M. Giroux: Je m'excuse, mais les chiffres, je ne les ai jamais donnés à personne.

M. Morin: Mais, M. Giroux, je veux que vous compreniez que nous on posait des questions en Chambre pour avoir des coûts, parce que cela intéressait un peu tout le monde. Par hasard, il y a des gens qui s'intéressent à ces questions en dehors de l'Hydro-Québec et de la SÈBJ.

Chaque fois que nous avons eu à poser ces questions, nous nous sommes trouvés devant un mur, soit de la part du premier ministre, soit de la part du ministre. Voici ce que je veux savoir. Vous avez dit que vous n'aviez pas communiqué ces chiffres officiellement; les aviez-vous communiqués de quelque autre façon?

M. Giroux: On a communiqué comme ceci: Qu'il y avait des pourcentages d'augmentation. Cela se comparait à... On discute. Seulement, le chiffre exact, je ne l'ai jamais communiqué.

M. Cournoyer: M. Giroux, quand le chiffre exact a-t-il été approuvé par la Commission hydroélectrique?

M. Giroux: Le chiffre a été approuvé en avril.

M. Cournoyer: Le chiffre a été approuvé par la Commission hydroélectrique en avril ou par la Société d'énergie...

M. Giroux: Approuvé en avril.

M. Cournoyer: ... ou par les deux en même temps?

M. Giroux: A ce moment, on a demandé tout de suite une révision sur les effets et les taux de comparaison. En ayant un chiffre, il faut être capable de l'expliquer; sinon c'est mal renseigner les gens. Actuellement, on est ici. Vous avez les chiffres.

D'ailleurs, au point de vue du coût, il y a un point très logique dans cette chose. Le coût est à $16,2 milliards. Si ce chiffre même avait été discuté au mois d'avril, on n'aurait peut-être pas eu tous ces exemples qui prouvent que l'augmentation dans la baie James se situe en bas de la moyenne au Canada. Je ne m'oppose pas à ce qu'on fasse usage des statistiques fédérales, parce que j'ai toujours eu beaucoup de respect...

M. Morin: Je m'excuse, mais là, nous partons sur une autre question.

M. Giroux: Non, écoutez, cela fait exactement deux heures...

M. Boudreault: Vous êtes bien nerveux.

M. Giroux: ...que je suis ici et je n'ai pas dit un mot. Il me semble que je peux prendre 5 minutes.

M. Morin: Je voudrais terminer sur un point, M. Giroux. Je suis très intéressé, on va y venir. Je m'excuse. Ma question précise est celle-ci: Quand avez-vous communiqué ces chiffres officiellement au gouvernement? Je n'arrive pas à m'expliquer que le ministre ne vous les ait pas demandés. Cela me paraît invraisemblable.

M. Cournoyer: On va régler cela tout de suite. Pardon!

M. Lessard: C'est cela qu'on veut savoir. M. Cournoyer: Je ne veux pas avoir l'air... M. Morin: D'un dindon.

M. Cournoyer: ...plus épais que je ne le suis. Il ne faut pas le faire exprès.

M. Morin: Oui. A l'heure actuelle, c'est de cela que vous avez l'air.

M. Cournoyer: Pourquoi n'êtes-vous pas gentil avec moi? J'ai été élégant avec vous tantôt. Ne me faites pas monter sur mes grands chevaux! Encore une fois, vous allez l'avoir dans le front; ce n'est pas votre faute, vous avez couru après. Le 11 février 1976, j'ai posé une question, non pas sur les prix.

Voici ce que j'écrivais à M. Giroux qui est président de l'Hydro-Québec. "La semaine dernière, les media d'information publiaient la nouvelle à l'effet que M. Boyd, président de la Société d'énergie de la baie James, aurait en main les résultats de la révision des coûts du projet de la baie James, que les spécialistes de la société ont effectuée ces derniers mois. Ce sujet a fait et fera sans doute l'objet de questions à l'Assemblée nationale..."

M. Morin: Qu'en termes élégants ces choses-là sont dites!

M. Cournoyer: C'est parce qu'on a appris cela tous les deux à la même place, écrire, "...et, en tant que ministre responsable de ce projet, je désire que vous m'informiez dans les plus brefs délais des résultats de cette révision des coûts".

M. Morin: 11 février 1976.

M. Cournoyer: C'était le 11 février 1976. Maintenant, on va continuer, parce que la chose ne s'est point arrêtée là. Je compte sur votre bonne collaboration, oomme d'habitude. Peu de temps après, je répète à M. Giroux: "Lors de notre conversation..." C'était le 24 février. M. Giroux était, à ce moment, à un endroit que nous n'avons pas besoin de décrire. En tout cas, il avait payé ses comptes tout seul, c'est-à-dire qu'il était en vacances, c'étaient ses affaires à lui. "Lors de notre conversation téléphonique..." Je l'ai appelé, parce que je n'avais pas encore reçu ma réponse et que vous me posiez des questions, tel que prévu.

M. Morin: C'est cela.

M. Cournoyer: J'ai donc téléphoné à M. Giroux. M. Giroux m'a donc expliqué au téléphone et j'ai confirmé la conversation téléphonique, "Lors de notre conversation téléphonique de ce matin, vous m'avez avisé que, le 17 février dernier, le président de la SEBJ vous avait informé qu'il n'avait pas à ce moment les prix révisés du projet de la baie James. Je répète la demande que je vous ai faite alors de m'indiquer à quel moment la SEBJ et votre commission — parce que les deux, dans les deux cas, doivent approuver ces chiffres — auront établi et accepté les nouvelles projections..." Parce qu'à tout moment le président Giroux me disait: Ce ne sont pas les coûts; ce sont des projections de coûts.

M. Lessard: Encore des projections de coûts.

M. Cournoyer: Oui, cela reste des projections de coûts.

M. Lessard: Ce sont toujours des projections de coûts.

M. Cournoyer: Vous allez savoir le coût de la baie James quand vous allez calculer combien cela a coûté, pas avant.

M. Lessard: Quand vous ne serez plus là.

M. Cournoyer: Pardon?

M. Morin: C'est bien ce que nous pensons.

M. Cournoyer: Tu va avoir de la barbe quand tu vas trouver cela.

M. Lessard: Oui, je sais bien.

M. Cournoyer: Tu va avoir rejoint les barbus, toi aussi.

M. Morin: Allez!

M. Cournoyer: Tu va aller à l'université. Il faut que tu ailles te recycler.

M. Lessard: Oui. Cela vous ferait du bien d'aller vous recycler.

M. Cournoyer: Je suis assez bien là où je suis, mon très cher. Pas de problème, là.

M. Lessard: Vous n'avez pas besoin de recyclage?

M. Cournoyer: Non, je n'ai pas besoin de recyclage. Si j'avais un recyclage, je ne sais pas ce qui se passerait. Je vous écraserais. "Je répète la demande que je vous ai faite alors de m'indiquer à quel moment la SEBJ et votre commission auront établi et accepté les nouvelles projections, de façon à ce que je puisse communiquer cette information au cabinet des ministres et au Parlement". C'est loin de ne pas s'occuper de ses affaires. Je l'ai fait.

La réponse du président de l'Hydro-Québec me vient le 25 février 1976. En fait, elle n'est pas signée par le président. C'est une réponse téléphonée par le président à sa secrétaire. Elle est signée par Mlle Adèle Leblanc. Elle est exactement, cependant, ce que le président m'avait dit au téléphone. "Suite à la conversation téléphonique que vous avez eue hier avec M. Giroux et en réponse à votre lettre du 24 février 1976, demandant de vous indiquer à quel moment les nouvelles projections de coûts du projet de la baie James auront été établies, voici le message que M. Giroux m'a prié de vous transmettre. Je demande au président de la Société d'énergie de la baie James de prendre les mesures nécessaires afin que, le 16 avril prochain, les nouveaux coûts d'estimation du

projet soient approuvés par le bureau de direction et que ces chiffres soient déposés au bureau de direction et à l'actionnaire principal pour étude.

Dès que l'analyse des chiffres aura été faite, ce qui devrait être fait avant le 1er mai prochain, je pourrai communiquer de nouveau avec vous à ce sujet au début de mai. "Espérant que vous trouverez le tout à votre satisfaction, je vous prie de croire, M. le ministre, à l'expression de mes salutations respectueuses."

Le 5 mai 1976, je reçois une lettre de M. De-mers qui est secrétaire, effectivement, de la commission. "La commission me prie de vous informer qu'elle a déposé à son secrétariat la nouvelle prévision des coûts du complexe La Grande et l'estimation budgétaire de base révisée du réseau de transport d'énergie de la baie James. Tel qu'il avait été convenu avec vous, ces estimations budgétaires peuvent être consultées par les analystes de votre ministère, si vous le jugez opportun, afin de leur permettre de connaître la méthode utilisée dans l'établissement de ces données. "Veuillez agréer, M. le ministre...", etc. et, là-dessus, j'ai téléphoné à M. Perlstein qui s'en est occupé. "Au nom de la Commission..." — et ceci est une lettre adressée par M. Demers au premier ministre, M. Bourassa — "...hydroélectrique de Québec, je vous fais parvenir sous ce pli une copie de la lettre adressée ce jour à M. Cournoyer, ministre des Richesses naturelles, lui faisant part du dépôt au secrétariat de l'Hydro-Québec de la nouvelle prévision des coûts du complexe La Grande et de l'estimation budgétaire de base révisée du réseau de transport d'énergie de la baie James. "Nous invitons votre délégué à se joindre aux analystes du ministère des Richesses naturelles, si vous le jugez à propos, afin qu'ils puissent prendre connaissance de ces documents." Cela a été fait ainsi.

Et le 25 mai, j'écrivais à M. Giroux une autre lettre. "J'ai bien reçu votre lettre du 5 mai 1976 relative aux prévisions des coûts du complexe La Grande et du réseau de transport d'énergie de la baie James. Les analystes de mon ministère, à savoir M. Jacques Ruelland, responsable du secteur de l'énergie, Mlle Claire Monette, directeur de la programmation budgétaire, M. Denis Giroux, analyste de la direction générale de l'énergie, communiqueront donc avec votre secrétaire, M. Demers, afin de pouvoir consulter ces dossiers. "Dans ce cadre, je leur ai confié le mandat d'examiner ces estimations dans l'optique tant de la méthode utilisée que de l'utilisation optimale des ressources financières dans le contexte général d'austérité décrété par le gouvernement du Québec. "Je leur ai demandé également de faire rapport sur ces deux aspects au comité intergouvernemental chargé d'étudier le budget d'immobilisation 1976 de l'Hydro-Québec, de manière que ce budget soit placé sous un éclairage approprié et que le ministre des Richesses naturelles puisse se préparer, convenablement, à celle des séances de la commission parlementaire des richesses natu- relles qui porteront sur les coûts de la baie James. "Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments." C'était le 25 mai et c'est à peu près vers la même époque que j'ai annoncé que la commission parlementaire siégerait au mois d'août.

M. Morin: Si je comprends bien, M. le président de l'Hydro-Québec, on vous avait demandé les chiffres, à tout le moins en février.

M. Giroux: Oui.

M. Morin: Mais vous venez de me dire, il y a un instant, qu'on ne vous les avait pas demandés.

M. Giroux: Je ne les ai pas donnés.

M. Lessard: Vous avez dit qu'on ne vous les avait pas demandés.

M. Giroux: Ecoutez. Ne mélangez pas la question. D'abord, c'est M. Morin. Je vais vous répondre un par un.

Au mois de février, on m'a demandé si on avait les chiffres. J'étais en vacances. J'ai communiqué. On m'a dit qu'on ne les avait pas. Suivez les lettres qui sont là. Elles sont très claires. Quand les chiffres ont été prêts pour examen. Des chiffres prêts pour examen et des chiffres prêts pour publication, ce sont deux choses. Alors, quand les chiffres ont été prêts pour examen, pour savoir si les formules étaient acceptables ou ces choses, on a informé les analystes du ministère... qui doit faire partie de notre budget. Cela a été fait et, à ce moment, il a été décidé qu'il y avait une commission parlementaire qui serait annoncée pour le 24 août pour discuter des coûts de la baie James.

Alors, comme c'est la politique à l'Hydro-Québec de discuter de ces choses en commission parlementaire, je ne vois pas pourquoi je les annoncerais à l'avance parce que, si je donne une conférence de presse et que j'annonce ces choses à l'avance et que j'explique tout cela à l'avance, quelle est l'utilité d'avoir une commission parlementaire?

M. Morin: Oui, M. Giroux, je constate néanmoins que ces chiffres vous avaient été demandés en février et que, le 5 mai, vous les tenez, obligeamment disponibles pour le ministre, au secrétariat.

M. Giroux: Pour examen.

M. Morin: Pour examen. Pendant ce temps, depuis des mois, nous réclamions ces chiffres et M. Boyd nous avait laissé entendre, il y a un an maintenant, en juillet 1975, qu'ils seraient disponibles au mois de décembre 1975.

Alors, il ne faudrait pas s'étonner trop que le projet ne soit pas populaire chez les Québécois si on continue de procéder ainsi.

M. Perreault: ...à la commission parlementaire.

M. Giroux: De deux choses l'une. Ou bien nous allons dévoiler ces choses par conférence de presse — à ce moment-là, nous allons être accusés de faire de la politique — ou bien on va les dévoiler à la commission parlementaire. Comme je n'ai pas l'intention de faire de politique, je les dévoilerai toujours à la commission parlementaire. Je ne pense pas qu'on puisse m'accuser d'avoir fait des abus de conférences de presse.

M. Morin: Je conviens que la véritable responsabilité, celle du ministre, en l'occurrence, est de n'avoir pas poussé davantage pour avoir les chiffres, et quand il les a eus, à partir du 5 mai, de ne pas avoir informé l'opinion publique de la chose et d'avoir retardé cette commission pendant plusieurs mois, de sorte que nous nous trouvons maintenant à plus de deux ans des dernières prévisions.

M. Cournoyer: Je n'aime pas cela, quand il parle de cette façon. D'abord, je ne les ai pas eus, M. Giroux ne me les a pas donnés. Il a dit qu'il les donnerait pour consommation publique à la commission parlementaire, à un endroit où il pourrait expliquer ce que cela veut dire. Je comprends qu'il a de la misère à vous expliquer cela, vous ne voulez pas comprendre ni des pieds, ni de la tête.

M. Morin: Oui, c'est parce que nous comprenons trop bien.

M. Lessard: Quand vos spécialistes sont allés les consulter... A quelle période les spécialistes du ministère des Richesses naturelles sont-ils allés consulter ces chiffres, après le 25 mai?

M. Cournoyer: Au milieu de juillet.

M. Lessard: Au milieu de juillet. M. Morin: Au milieu de juillet?

M. Lessard: Vous n'étiez pas pressés.

M. Cournoyer: Nous sommes pressés, mais ce sont des choses sérieuses, cela ne se regarde pas d'un simple coup d'oeil...

M. Lessard: Mai, juin.

M. Cournoyer: ...en disant cela va coûter $16,2 milliards. Ce serait une belle affaire.

M. Lessard: C'est ce que vous nous avez lancé à l'Assemblée nationale, un peu, en levant les bras, comme cela $12 milliards...

M. Cournoyer: ... que cela coûterait $50 milliards?

M. Lessard: ... $14 milliards, $16 milliards, $18 milliards, pourtant, c'est l'argent des Québécois.

M. Cournoyer: Regardez donc cela!

M. Lessard: Vous comptez cela comme cela.

M. Cournoyer: II n'a pas encore écouté ce qu'on a expliqué tout à l'heure. Cela ne sert à rien, ton jugement est fait avant.

M. Lessard: A la mi-juillet... M. Cournoyer: C'est effrayant.

M. Lessard: Vos spécialistes sont allés à la mi-juillet seulement.

M. Cournoyer: On n'est pas en procès, ici, ils pourraient vous donner une bonne raison pour laquelle ils n'y sont allés qu'à la mi-juillet.

M. Lessard: C'est au ministre de répondre et non au fonctionnaire.

M. Cournoyer: Ce n'est pas des...

M. Morin: Je pense que vous avez fait preuve de pas mal de légèreté, en l'occurence.

M. Cournoyer: Je vous ai donné la trame. Vous êtes choqué, encore une fois. Vous pensiez que je ne m'étais pas occupé de mon affaire. J'ai commencé...

M. Lessard: Arrêtez donc de faire le clown, on discute de milliards...

M. Cournoyer: ... avant que vous posiez une question à l'Assemblée nationale.

M. Lessard: Arrêtez de faire le clown, on discute de milliards.

M. Cournoyer: Arrêtez donc de faire le clown, vous. Vous ne parlez que de cela, des clowneries. Vous êtes un clown, monsieur.

M. Morin: M. le Président...

M. Cournoyer: Posez donc les vraies questions sur ce sujet, au lieu de savoir qui vous pouvez poigner. Vous ne pensez qu'à cela, poigner quelqu'un, vous allez passer pour des cochons.

M. Morin: M. le Président...

M. Lessard: Je vais vous poigner tout seul.

Le Président (M. Séguin): La commission suspend ses travaux jusqu'à 3 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

Reprise de la séance à 15 h 6

M. Séguin (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

Avant de commencer nos travaux de cet après-midi, je voudrais faire part au public et aux représentants de la Société d'énergie de la baie James que la commission n'a pas l'intention de siéger plus tard que 6 heures, ce soir, mais que nous reviendrions demain matin à 10 heures, toujours si c'est nécessaire. C'est-à-dire que nous ne siégerons pas passé 6 heures ce soir.

M. Boyd, au moment où nous avons suspendu nos travaux, je pense que vous étiez en train de faire un commentaire ou de répondre à une question déjà posée.

M. Boyd: II y aurait aussi quelques tableaux qui ont été distribués et qu'il faudrait peut-être commenter avant de passer à d'autres questions.

Le Président (M. Séguin): Le chef de l'Opposition.

Augmentation des coûts

M. Morin: M. le Président, je comprends mieux, depuis ce matin, que ces coûts aient pu grimper de la sorte depuis quelques années, surtout quand j'ai constaté, à la suite de notre échange de ce matin, qu'à toutes fins pratiques le gouvernement a été en dehors du dossier pendant les six premiers mois de l'année 1976.

Si j'ai bien compris la réponse qu'a donnée le ministre ce matin, ce n'est que vers la mi-juillet que le ministre a pu prendre connaissance des nouvelles prévisions de la SEBJ et de l'Hydro-Québec.

M. le Président, je voudrais aborder maintenant, de façon plus précise, ce qui semble, à ce qu'on nous dit, être la principale raison de l'augmentation des prévisions des coûts, c'est-à-dire l'inflation. J'ai l'impression que sous ce mot "inflation" se cachent beaucoup d'éléments divers et que, d'une certaine façon, c'est un mot passepartout qui peut permettre de justifier à peu près n'importe quelle augmentation. Qu'il y ait eu de l'inflation, nous n'en disconvenons pas. D'ailleurs, c'est moi-même qui, à la dernière séance de la commission l'an dernier, attirais l'attention de M. Boyd sur le fait que les 7% de taux moyen n'étaient peut-être pas très réalistes. Je me permets de citer un passage et une réponse de M. Boyd qui montre que nous étions sans doute plus sensibles qu'il ne l'était, à ce moment, à ce facteur important dont je ne veux certainement pas diminuer l'importance. Je disais ce qui suit, à la page B-5354: "De façon générale, on peut sans aucun doute prévoir que l'hypothèse d'un taux moyen de 7% d'inflation au cours de la période de construction, hypothèse sur laquelle se fonde l'estimation de $11,9 milliards, sera très probablement largement dépassée". Je pense que nous l'avions pressenti. D'ailleurs, beaucoup l'avaient pressenti avec nous. Je ne pense pas que nous ayons fait preuve d'une très grande originalité. La plupart des économistes nous prédisaient que cela pouvait être plus que 7%.

Je me reporte à quelques pages plus loin, à la page B-5373 où je posais à M. Boyd la question directe suivante: "Maintenez-vous toujours l'hypothèse moyenne de 7%, compte tenu de l'expérience de 1974 et de celle qui s'amorce en 1975?" Tout le monde était, évidemment, devant des taux d'inflation qui paraissaient supérieurs à ceux qu'on avait prévus.

Réponse de M. Boyd: "Dans le moment, il n'y a rien qui puisse nous indiquer, nous justifier de la changer". Il s'agit de l'hypothèse des 7%. Un an plus tard, nous sommes devant une augmentation du taux moyen, pour 1974 à 1985, de 12% et, de 1976 à 1985, de 8%.

J'aimerais que vous commenciez par nous donner quelques détails sur ce qu'on pourrait appeler l'inflation passée. Dans votre exposé, ce matin, M. Boyd, vous nous avez expliqué avec beaucoup de patience, avec des méthodes pédagogiques certainement très éprouvées au sein de la commission, que l'inflation prévue, c'est-à-dire passée, pour 1974-1975 était d'abord estimée en 1974 à $785 millions et que nous nous trouvions désormais devant une escalade additionnelle de $997 millions pour les années 1974 et 1975.

Si je ne m'abuse, cela fait une inflation totale, pour ces deux années, 1974 et 1975, de $1,782 milliard. On a beau tenir compte de l'augmentation de l'inflation que nous avions prévue, je n'en disconviens pas, c'est beaucoup au chapitre de l'inflation et j'aimerais savoir ce qui, là-dedans, constitue de la véritable inflation. Est-ce qu'il n'y a pas, là-dedans, des erreurs d'évaluation sur le coût des contrats, par exemple? Je sais qu'avant que vous accordiez un contrat, l'Hydro-Québec, à tout le moins, fait une estimation du coût normal de ce contrat.

Est-ce qu'il n'y a pas, dans ce que vous appelez l'inflation, des erreurs qui auraient pu être commises dans l'estimation des coûts véritables des travaux?

Evidemment, c'est facile, par la suite, de dire: Tout ça, c'est de l'inflation, parce que cela a coûté plus cher que prévu. Mais j'aimerais que vous entriez dans les détails et j'aimerais même que vous nous donniez des exemples de contrats, disons, qui expliqueraient ces chiffres. C'est ma première question.

M. Boyd: Evidemment, lorsqu'on accorde des contrats et qu'ils sont plus élevés que l'estimation, chose qui peut arriver, c'est que ceux qui ont préparé les soumissions ont prévu des coûts, des estimations et même de l'inflation peut-être plus élevée que la nôtre. Mais en 1975, à la commission parlementaire, on vous a dit qu'en 1974 on reconnaissait que c'était 15% qui avaient été l'expérience à ce moment. Selon la phrase que vous avez citée, on a dit: Dans le moment. Cela veut dire qu'on n'était pas prêt à donner les véritables chiffres. Aujourd'hui, on vous les donne. J'ai ici les taux d'inflation de la construction de centrales hy-

droélectriques et composantes, indices de l'Hydro-Québec.

En 1970, l'indice a été de 5,7%; en 1971, 4,9%; en 1972, 4,5%; en 1973, 6,9%. Alors, nous avons préparé les estimations de 1974, à partir de l'automne 1973 et on a terminé en 1974. On travaillait sur un passé de 5,7%, 4,9%, 4,5%, 6,9% et, malgré tout, on a mis 9% en 1974 et 9% en 1975. C'étaient nos hypothèses et on avait prévu que, pour la durée du projet, la moyenne serait de 7%. Mais en 1975, on vous a dit: On révise tout cela parce que les indications en 1974 étaient de 15% au lieu de 9%.

Alors, aujourd'hui on vous donne la réalité. En 1974 c'était 19% et en 1975 c'était 20,7%.

M. Morin: Vous groupez tout ce qui est augmentations là-dedans?

M. Boyd: Ingénierie, administration, main-d'oeuvre de construction, matériaux, équipements de construction, équipements permanents. Ce sont les mêmes facteurs qu'emploie la statistique fédérale.

M. Morin: Bon.

M. Boyd: Je vous ai dit que pour 18 mois on avait 31%, alors que le fédéral parle de 25%.

On peut vous expliquer pourquoi c'est plus haut ici. Notre expert en inflation, fait toutes ces études, compare, avec toutes les statistiques québécoises et fédérales, les statistiques de l'Hydro-Québec. Tout à l'heure, il pourra vous l'expliquer et répondre à vos questions avec plus de détails. C'est une spécialité.

C'est devenu tellement important que cela a plus de poids sur les estimations que tous les autres facteurs.

M. Morin: C'est convenable que nous ayons un chiffre moyen pour l'ensemble du Canada pour ce genre de travaux et que, vous, à la baie James, pour un certain nombre de raisons spécifiques, ce soit supérieur à la moyenne?

M. Boyd: II y a l'équipement de construction.

M. Morin: C'est pour cela que ce serait intéressant de savoir exactement pourquoi.

M. Boyd: II y a l'équipement de construction qui a augmenté de beaucoup plus que la moyenne dans la construction. Au Québec, il y a eu $0.85 qui n'étaient pas prévus au moment où on faisait nos estimations. Ce sont des facteurs qui représentent beaucoup d'argent. Les $0.85 n'étaient pas prévus lorsqu'on a fait notre estimation.

M. Morin: Mais cela a augmenté ailleurs aussi. M. Boyd: Oui.

M. Morin: La machinerie n'a pas augmenté... M. Boyd: Pardon!

M. Morin: La machinerie n'a pas augmenté que pour le Québec.

M. Boyd: Non, mais elle a beaucoup augmenté au Québec. C'est un contrat où on emploie beaucoup de machinerie. C'est un genre de contrat où il y a énormément de machinerie. Donc, c'est un facteur qui a beaucoup plus de poids. Je vous fais un portrait des dernières années. L'équipement de construction en 1970, 3,8% d'inflation; en 1971, 3,8%; en 1972, 3,1%; en 1973, 5,9%; en 1974, 20,1%, en 1975, 24,2%. Ce n'était quand même pas prévisible, à la fin de 1973 et de 1974. C'est l'acier, ce sont toutes ces conditions qui ont fait cela.

Si on prend l'équipement permanent, cela non plus n'était pas prévisible. Cela fait longtemps que l'Hydro-Québec a de l'équipement permanent. Cela fait depuis 30 ans que je suis là et qu'on installe de l'équipement permanent. En 1970, c'était 5,9%; en 1971, c'était 6%, en 1972, 2,9%; en 1973, 4,1%. Tout à coup, en 1974, c'était 35%; en 1975, 20%. Ma boule de cristal et celle de nos gens n'étaient ps là pour nous donner les chiffres de ce que cela pouvait être.

Si on parle des matériaux de construction, 2,9%; 3,2%; 5,2%; 8%; en 1974, 17,3% et, en 1975, 19,3%.

La main-d'oeuvre de construction; en 1970, 9,1%; en 1971, 6,5%; en 1972, 4,8%; en 1973, 8,4%; en 1974, 12%; en 1975, 22,5%. L'ingénierie et l'administration; en 1970, 8,4%; en 1971, 5,8%; en 1972, 7%; en 1973, 6,5%; en 1974, 14%; en 1975, 14%. C'est ce qui vous donne les moyennes de 19% et de 20%, quand c'est pondéré selon l'importance. Les entrepreneurs ont soumissionné, les soumissions sont entrées. Les entrepreneurs, tenant compte des facteurs, devaient être renseignés eux aussi au moment de leurs soumissions. Ils ont soumissionné, dans certains cas, plus haut que nos estimations. C'est un fait. D'ailleurs, dans le texte de ce matin, je vous ai dit qu'en 1975, lorsqu'on s'est rendu compte que les soumissions entrées étaient plus hautes qu'on ne le pensait, on a décidé dans certains cas d'introduire des contrats en gérance où on assume les incertitudes, comme le coût du carburant, le coût de l'équipement. On a pris sur nous d'acheter l'équipement, d'acheter le carburant, de payer la main-d'oeuvre pour éviter qu'il n'y ait trop d'imprévus dans les soumissions.

M. Morin: M. Boyd, diriez-vous que les entrepreneurs savent mieux calculer que vous ou moins bien calculer que vous?

M. Boyd: C'est relatif.

M. Lessard: Eux, ils ont prévu les coûts d'inflation.

M. Boyd: M. le Président...

M. Morin: Je pense qu'on se comprend très bien.

M. Boyd: La question...

M. Perreault: Vous ne comprenez absolument rien. C'est justement cela.

M. Lessard: Comment se fait-il que les entrepreneurs aient prévu, eux, les coûts d'inflation et que l'Hydro-Québec ne les aient même pas fait estimer?

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lessard: C'est inquiétant.

M. Perreault: Vous n'avez jamais fait d'estimation. C'est cela qui est le pire.

Le Président (M. Séguin): A l'ordrel

M. Boyd: Evidemment, la question est qu'un entrepreneur fait une soumission pour un contrat qui est peut-être de $1 million, de $3 millions, de $5 millions, de $10 millions, de $50 millions ou de $100 millions. C'est très limité. Tous les documents lui sont fournis. Le contexte est très limité dans le temps. Dans certains cas, les soumissions qu'on reçoit sont trop basses ou trop hautes. Elles sont exactes, en certaines occasions.

Je vous ai parlé du contexte de 1975. Je vous ai également parlé, ce matin, du contexte de 1976.

En 1976, les soumissions que nous avons reçues sont à 2% du budget. C'est donc que tout le monde sait compter. Il y a plus d'intérêt — je l'ai dit ce matin — on reçoit plus de soumissions; donc, il y a plus de chances d'avoir de bonnes soumissions et les entrepreneurs ont plus d'intérêt à travailler; c'est plus stable. Du moins, cela l'était jusqu'à ce matin à la baie James! Donc, c'est pour cela que nous avons plus de soumissions et ces dernières sont plus conformes.

Au sujet de l'inflation, je pense que le tableau que je viens de vous lire vous indique que, jusqu'à la fin de 1973, c'était relativement calme du côté de l'inflation. N'importe quelle ménagère vous confirmera cela. Vous savez que, dans tous les domaines, cela a été ainsi et, en 1974 et 1975... On vous a dit, ici, en juillet, que 1974 avait été 15.

On aurait pu vous donner des estimations basées sur 15 en 1974, mais on ne connaissait pas le chiffre de 1975. Lorsqu'on vous a donné notre estimation actuelle, c'était basé sur des escalades historiques qui sont maintenant connues.

M. Morin: J'aimerais me reporter au rapport d'activités 1975, à la page 33, où vous énumérez les principaux contrats qui ont été adjugés en 1975 et qui se sont élevés à $459 612 521.

L'an dernier, je vous avais demandé s'il vous serait possible de nous communiquer les contrats, du moins ceux qui dépassaient, par exemple, un certain montant, un certain nombre de millions de dollars, et vous aviez acquiescé à cette demande. Nous n'avons pas reçu depuis les contrats en question.

J'aimerais vous demander, à nouveau, si vous pourriez déposer ces contrats et, également, si vous pourriez déposer l'estimation faite par l'Hydro-Québec de chaque contrat avant qu'il ne soit adjugé, de sorte qu'on pourrait voir, pour chaque contrat, le coût tel que vous l'avez estimé et le coût tel qu'il a été soumis par l'entrepreneur qui a obtenu le contrat.

M. Boyd: Si on relit les déclarations, les engagements que nous avions pris lors de la commission parlementaire, nous étions allés plus loin que quelques millions, nous nous étions engagés pour les contrats de $100 000 et plus. Nous sommes maintenant prêts, nous avons amené cela jusqu'au 30 juin 1976 et nous aurons une copie que nous pourrons déposer du côté des achats et du côté des contrats. Nous avons deux documents pour des montants dépassant $100 000, de 1972 à 1975 inclusivement, pour toute l'année. Ce tableau donne la description du nombre d'entreprises qui ont obtenu des soumissions, le nombre de celles qui ont soumissionné, l'adjudicateur, le montant et le coût final. C'est l'engagement que nous avions pris.

Nous avons longuement discuté de notre estimation et nous vous avons indiqué que le fait de donner notre estimation était une indication pour les entrepreneurs et nous ne pensions pas qu'il était d'intérêt de donner nos estimations aux entrepreneurs. Cela a été longuement discuté l'an dernier. C'est encore notre point de vue. Si les entrepreneurs savent — même si c'est après l'ouverture — comment on soumissionne à l'intérieur, ce sont des indications pour les prochaines soumissions. Nous croyons qu'il n'est pas d'intérêt public de les donner, à ce moment-ci.

M. Morin: De sorte que nous sommes réduits à accepter en vrac vos chiffres, sans pouvoir scruter les montants estimés par l'Hydro, les comparer avec ceux de l'adjudicataire, de sorte que...

M. Boyd: On vous donne...

M. Morin: ...tout ce que nous pouvons faire, c'est d'accepter le montant en vrac.

M. Boyd: S'il y a, dans un cas, six soumissionnaires, on donne les six soumissions, l'adjudicataire et le montant de l'octroi et on vous donne le coût final du projet. Je pense que, comme méthode de contrôle, c'est quand même plus que l'Hydro n'a jamais fait.

Si vous avez six entrepreneurs qui ont soumissionné dans des marges connues et qu'ensuite on vous dit comment le contrat fut terminé, c'est quand même une bonne indication. On s'était engagé à cela l'an passé avec l'assentiment de la commission.

M. Lessard: Pourriez-vous me dire si c'est encore exact cette année que les entrepreneurs qui soumissionnent sur des contrats soient exclus lors de l'ouverture des soumissions?

M. Boyd: On a demandé à l'association qui représente les entrepreneurs s'ils voulaient être

représentés et on n'a pas encore, à mon avis, reçu leur réponse. On ne sait s'ils étaient intéressés à y être ou non.

M. Lessard: Vous avez la même réponse que l'an dernier. Il semble qu'il n'y aurait pas d'intérêt de la part des entrepreneurs.

M. Boyd: Le public est représenté par différents journaux de construction qui publient les soumissions. Ils sont là à l'ouverture et ils publient les soumissions dès qu'elles sont ouvertes.

M. Morin: Si je comprends bien...

M. Boyd: C'est rendu public par les journaux spécialisés dans ce domaine.

M. Morin: Si je comprends bien, M. Boyd, il nous est donc impossible de comparer les montants adjudicatoires avec l'estimation faite par l'Hydro. Vous estimez que ce n'est pas d'intérêt public. Vous craignez que cela ne permette aux soumissionnaires de connaître un peu mieux vos méthodes de calcul. Remarquez que ce serait peut-être de nature à ramener les montants à des proportions plus raisonnables. Je pense que ce serait plutôt dans l'intérêt public que ce soit connu et qu'on puisse voir qui exagère et qu'on puisse voir, dans certains cas, à quoi mène un système de deux ou de trois soumissionnaires.

Je n'admets pas que vous refusiez ces chiffres. Je crois qu'au contraire ils sont d'intérêt éminemment public. Je n'admets pas que vous ayez ce comportement de dissimuler ces chiffres. Il n'y a aucune raison. Le public qui paie pour cela a le droit, je pense, au contraire, de savoir à combien vous aviez évalué ces contrats et quels ont été les montants de l'adjudication. J'estime que c'est fondamental et, en ne donnant pas ces montants, vous nous empêchez de faire notre travail. On ne peut pas savoir exactement les raisons profondes de ces augmentations que vous nous donnez en vrac. Je me demande bien, M. le Président, au fond, ce que nous faisons si on est obligés d'accepter les chiffres. Dès qu'on pose une question un peu sérieuse qui commence à aller au nerf de l'affaire, cela ce n'est pas de l'intérêt public. Ce n'est pas admissible. Je vous le dis en toute sympathie, ce n'est pas admissible.

Pouvez-vous, du moins, nous donner un ordre de grandeur? Prenons les principaux contrats, seulement les principaux; je ne vous demande pas les contrats de $100 000 et plus. Prenons ceux que vous énumérez à la page 33 de votre rapport. Je vais vous dire combien il y en a. Il y en a exactement 14. Si on faisait le total des montants de l'adjudication et qu'on le comparait ensuite avec le total des montants des évaluations de l'Hydro-Québec, cela nous donnerait peut-être un ordre de grandeur sans que cela ne permette à qui que ce soit de déceler vos méthodes de calcul et de vous faire un procès, ou de déjouer vos calculs. Serait-il possible que vous nous donniez un chiffre?

M. Boyd: Vous avez ceux qui sont à la page 33. Vous voulez le total pour l'ensemble ou pour chacun?

M. Morin: Vous m'avez dit que vous ne pouviez pas me donner le montant de l'estimation de l'Hydro-Québec pour chacun. Le montant du contrat, je l'ai; il est indiqué dans votre rapport. Je vous avais demandé l'estimation de l'Hydro-Québec pour chacun. Vous me dites que ce n'est pas d'intérêt public, ce sur quoi je ne suis pas d'accord. Mais, comme je ne suis pas doté d'instruments de torture et que la commission ne peut pas vous forcer à dire ce que vous ne voulez pas dire, eh bien! Parfois, je pense que le ministre souhaiterait avoir à sa disposition de tels instruments; ça lui permettrait au moins, à lui, d'être renseigné.

M. Cournoyer: Qu'est-ce qui se passe au Jour?

M. Morin: Est-ce que vous pourriez, si vous ne pouvez pas nous donner les chiffres de chaque contrat, nous donner un montant global pour ces 14 contrats?

M. Cournoyer: C'est un de vos journaux qui m'a renseigné, le Jour.

M. Boudreault: Le Jour, c'est terminé.

M. Boyd: M. le Président, en réponse à la question, oui, on peut vous le donner si vous nous permettez de préparer la réponse.

M. Lessard: Si l'Hydro-Québec était une entreprise privée, ses jours seraient comptés aussi.

M. Boudreault: II faut laisser cela aux administrateurs.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît! On essaie d'entendre M. Boyd, s'il vous plaît.

M. Boyd: D'accord, M. le Président. A le demande de M. Morin, nous allons préparer la réponse. Evidemment, ça va être difficile pour cet après-midi, mais demain on pourra vous donner la réponse.

M. Morin: Bon. Alors, quitte à ce que nous puissions revenir sur la question demain matin, c'est d'accord, si vous voulez nous fournir le chiffre; on se contentera de ça pour l'instant.

Encore une fois, M. Boyd, je le répète, je ne suis pas d'accord avec votre façon d'interpréter l'intérêt public en l'occurrence.

M. Boyd: M. Morin, aussi longtemps que le contrat n'est pas terminé, le fait de connaître notre soumission permet toutes sortes de choses. Je peux vous dire qu'il n'est pas d'intérêt public que ce soit connu.

M. Morin: Pourriez-vous les déposer pour les contrats qui sont venus à expiration, les contrats entièrement exécutés?

M. Boyd: Si vous me le permettez, ce qu'on vous avait promis l'année passée, on va le déposer à la commission. Il s'agissait de tous les contrats de $100 000 et plus pour les achats, les contrats de services, tous les contrats, les résultats, tous les soumissionnaires, ceux qui ont soumissionné et leurs soumissions. Vous allez constater les écarts; vous en avez qui soumissionnent de $2,3 millions jusqu'à $5 millions. Vous allez voir à qui on l'a accordé et vous allez voir le résultat.

M. Morin: Ce n'est pas ça qui m'intéresse, M. Boyd; c'est de savoir quelle était l'estimation que vous aviez faite de ces même contrats.

M. Boyd: Je ne l'ai pas.

M. Morin: Parce que c'est là, j'imagine, que se cache une partie de l'explication. C'est pour ça que j'aimerais entrer dans ces détails.

M. Boyd: M. le Président, je regrette; M. Morin n'est pas d'accord avec moi sur une chose, soit l'intérêt public de dévoiler ou non ces chiffres. Moi, je dois vous dire que je ne suis pas d'accord avec son interprétation de cachotterie. Ce n'est pas une cachotterie. Quand on vous dit que les coûts ont augmenté de 31% en 18 mois, ce n'est pas une cachotterie; on vous dit la vérité.

M. Lessard: On veut vérifier, nous autres, M. Boyd. On veut voir si c'est... M. le Président, j'ai une question à poser au ministre.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Boudreault: Ecoutez.

Le Président (M. Séguin): M. le député, j'avais...

M. Boudreauit: Est-ce au sujet de...

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît! Je dois croire qu'il y a consentement unanime de la commission pour entendre le député de Saguenay. C'est son droit comme député à condition qu'on veuille l'entendre.

M. Lessard: Qu'est-ce que c'est cela, qu'on veuille l'entendre? Vous m'avez accepté ce matin.

Le Président (M. Séguin): C'est parce que vous avez remplacé...

M. Lessard: Je regrette, M. le Président, cela a été unanime ce matin.

Le Président (M. Séguin): Excusez. A l'ordre, s'il vous plaît. A l'ordre!

M. Lessard: M. le Président, sur l'article 143, je suis d'accord, mais, ce matin, vous avez accepté que je remplace M. Bédard, le député de Chicoutimi, et cela a été unanime à partir du ministre jusqu'aux autres députés. Si vous ne l'avez pas vu, moi, je l'ai vu et on l'a vu de ce côté-ci de la table.

M. Cournoyer: Laissez-le finir.

M. Lessard: On va régler le problème tout de suite.

Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous plaît; ne vous emportez pas. Je demanderais tout simplement aux membres de la commission de reconnaître le droit de parole du député de Saguenay. C'est tout ce que je demande, aussi simple que ça. Je ne veux brimer personne.

M. Lessard: M. le Président, ce n'est pas là le problème. Est-ce que je suis membre de la commission ou est-ce que je ne suis pas membre de la commission?

Le Président (M. Séguin): Vous étiez membre de la commission jusqu'au moment où le député de Sauvé vous a remplacé sur la liste.

M. Lessard: M. le Président, vous nous avez induit en erreur ce matin.

Cet après-midi, dans les circonstances, j'aurais demandé de remplacer M. Bédard comme c'est mon droit, en vertu de la coutume parlementaire. Or, ce matin, cela a été clair ici en commission parlementaire que vous acceptiez, que les membres de la commission acceptaient que je remplace M. Bédard, comme cela a toujours été le cas à la commission parlementaire des richesses naturelles.

Le Président (M. Séguin): Si tel est le cas, qu'on me le confirme. Y a-t-iI objection?

M. Cournoyer: On n'a pas d'objection à ce que ce monsieur parle; c'est un excellent député et j'aime l'entendre poser des questions.

Le Président (M. Séguin): Maintenant, je ferai remarquer au député de Saguenay... Il n'y a aucun doute, la commission l'accepte.

M. Lessard: Elle accepte que je sois membre de la commission.

Le Président (M. Séguin): C'est cela. M. Cournoyer: Oui, oui. M. Lessard: D'accord.

M. Morin: C'est vous qui, sans me prévenir, avez mis mon nom à la place du sien. Ce n'est pas la même chose.

M. Lessard: Alors, c'est clair.

Le Président (M. Séguin): Je ne suis pas le whip de votre parti, je n'ai rien à faire dans la sélection des membres de ces commissions. Du côté ministériel, on m'a soumis une liste. Il est entendu que l'incident est clos. Le député a recouvré son droit de parole.

M. Cournoyer: C'est réglé.

Le Président (M. Séguin): Je l'ai tout simplement inscrit ici à la place de M. Bédard.

M. Lessard: C'est cela. C'est ce qu'on vous a demandé.

M. Cournoyer: C'est réglé.

Le Président (M. Séguin): L'argumentation, vous l'avez commencée.

M. Cournoyer: C'est réglé. L'affaire est correcte.

M. Lessard: Bon. J'ai une question à poser au ministre, M. le Président.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît! Juste avant cela, je voudrais porter à l'attention des membres de la commission et des représentants de la Société de la baie James qu'il y a dans notre règlement un article touchant justement cette question de dépôt de documents. C'est l'article 176 dans la Loi révisée de la Législature. Le gouvernement n'est pas obligé de produire des documents s'il les juge contraires à l'intérêt public.

M. Lessard: Le gouvernement.

Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous plaît! Je ne prends pas une décision, je voudrais alerter les membres de la commission sur ce point de règlement, au cas où on ne serait pas au courant. Alors, il est question... Si c'était possible de les obtenir autrement, on pourrait les obtenir.

M. Lessard: M. le Président...

Le Président (M. Séguin): Alors, je me pose cette question, messieurs. La position de la Société de la baie James, responsable à l'Hydro-Québec, responsable au gouvernement, s'applique-t-elle dans le cas de l'article 176 puisqu'ici il est question du gouvernement?

Je me demande alors si, indirectement, nous ne sommes pas en face d'une représentation qui, de fait, est gouvernementale. Deuxièmement, je ne voudrais pas que les représentants, les officiers, le président de la Société de la baie James soient soumis à une pression de dépôts de documents par un membre ou des membres de la commission. Je voudrais qu'ils connaissent ce point de règlement qui semble recouvrir des circonstances semblables.

M. Boyd a déjà déclaré ici cet après-midi qu'il pensait ou qu'il croyait ou qu'à son opinion, ré- pondre à la question posée ou aux questions posées pour le dépôt de certains chiffres, certaines informations et questions demandées par le chef de l'Opposition, pouvait ne pas être dans l'intérêt public. Je voudrais tout simplement dire qu'il est dans son droit de choisir et de déterminer si, oui ou non, il doit le faire.

Il n'y a pas de débat sur sa décision. Alors, M. Boyd est-ce que...

M. Lessard: Sur la question du règlement, par exemple...

Le Président (M. Séguin): Un instant. Sur le point de règlement, on reviendra immédiatement; permettez-moi de finir. M. Boyd, vous aviez déjà déclaré qu'il serait difficile, vous avez révisé votre position en disant que vous pourriez préparer certains textes pour demain ou après-demain, je ne sais pas, mais en restez-vous à cette dernière décision?

M. Boyd: C'est à la demande M. Morin qui me signalait, à la page 33 de notre rapport d'activité, 14 contrats. Il demandait si on pouvait faire le total de notre estimation par rapport à ce qui a été octroyé; j'ai répondu oui. Nous allons faire cela pour demain.

Le Président (M. Séguin): Bon. Très bien.

M. Boyd: Dans le sens général de la grande question, j'ai quelques renseignements additionnels qui sont...

M. Lessard: Avant d'aller là, M. le Président, je soulève une question de règlement.

Le Président (M. Séguin): Sur un point de règlement, le député de Saguenay.

M. Lessard: Vous nous avez fait part de l'article 176.

Le Président (M. Séguin): L'article 176.

M. Lessard: Vous avez d'ailleurs précisé que c'est bien le gouvernement qui peut refuser de répondre à une question au nom de l'intérêt public. A ce que je sache, l'Hydro-Québec n'est pas le gouvernement, pas encore en tout cas.

Le Président (M. Séguin): Non, je n'ai jamais dit cela.

M. Lessard: C'est un organisme paragouvernemental. C'est pour cela...

M. Morin: Des fois on se le demande mais...

Le Président (M. Séguin): On n'a pas prétendu cela.

M. Lessard: C'est pour cela, à un moment donné, que je me retourne vers le ministre, parce que c'est le ministre qui est responsable de l'administration de l'Hydro-Québec.

M. Cournoyer: Je suis content de vous l'entendre dire.

M. Lessard: II n'appartient pas à l'Hydro-Québec comme telle de nous dire que tel document ou tel autre document n'est pas d'intérêt public. Si la commission parlementaire ici, en vertu d'une motion, demande à l'Hydro-Québec de déposer un certain nombre de documents, je pense que la commission parlementaire a le droit de faire une telle motion, pour autant justement que cette motion soit adoptée par l'ensemble des députés membres de la commission parlementaire.

Il est certain qu'à l'Assemblée nationale, non pas ici en commission parlementaire, mais à l'Assemblée nationale, le ministre peut très bien nous répondre, suite à une question, que ce n'est pas d'intérêt public.

M. Perreault: Pardon, à la commission parlementaire.

M. Lessard: Un ministre, un membre du gouvernement...

M. Perreault: Oui.

M. Lessard: ...peut nous répondre en commission parlementaire comme à l'Assemblée nationale parce que le député sait très bien que les règlements qui s'appliquent à l'Assemblée nationale s'appliquent aussi en commission parlementaire.

M. Perreault: Ce n'est pas ce que vous disiez tout à l'heure.

M. Lessard: Mais je pose la question suivante au ministre: Etant donné que nous sommes ici pour essayer d'analyser l'augmentation considérable des coûts de la baie James, étant donné que nous sommes ici, tel qu'on nous l'a dit, pour poser toutes les questions et recevoir toutes les réponses pertinentes, en vue justement d'éclaircir, d'éclairer, si vous voulez, la situation en ce qui concerne le projet de la baie James, la question, à ce moment, je la retourne au ministre et je lui demande: Est-ce que le ministre est convaincu, tel que le précise M. Boyd, qu'il s'agit de documents qui ne sont pas d'intérêt public? C'est à vous de répondre, parce que c'est vous, comme ministre, qui, êtes responsable de l'Hydro-Québec.

M. Cournoyer: Une réponse comme celle-là, M. le Président, est d'abord une réponse à multiples tranchants. Il va de soi que tout ce qui regarde l'Hydro-Québec ou la Société de développement de la baie James ou la Société d'énergie de la baie James, qui sont toutes propriété du public, que tous les documents qu'elles ont en leur possession sont d'intérêt public. Je pense bien que M. Boyd ne dit pas que ce n'est pas d'intérêt public. Mais ce que j'entends comme argumentation — c'est là que cela devient extrêmement délicat — c est qu'il serait peut-être contre l'intérêt public de les publier; c'est-à-dire qu'on veut tous que l'intérêt public prime, mais si on publie les documents et que cela vient à l'encontre de l'intérêt public, ce n'est pas ce que le député de Saguenay ni ce qu'aucun député recherche.

Je préférerais que, sans aller dans le document, nous entendions une autre fois M. Boyd nous dire pourquoi il serait contre l'intérêt public que de publier ce qu'il refuse ou ce qu'il refusait de publier. Autrement, je suis convaincu qu'il ne s'agit que d'une décision de la commission pour obliger la Société d'énergie de la baie James de publier ce que nous considérons comme d'intérêt public, puisque nous sommes... Je sais que je ne suis pas le patron de l'Hydro-Québec ni de la Société d'énergie, mais tout le monde...

M. Morin: Vous en êtes responsable.

M. Cournoyer: ...dit qu'on en répond devant la commission parlementaire. La politique de l'Hydro-Québec, c'est de répondre devant la commission parlementaire. Je lui ai offert de répondre devant moi, mais elle aime mieux répondre devant vous. A ce moment, c'est sûr que, quand vous posez une question, vous pouvez obtenir la réponse que vous voulez. Cependant, il faut faire bien attention.

M. Morin: Je connais un ministre des Richesses naturelles qui n'aurait pas enduré cela longtemps.

M. Cournoyer: II y en a un autre qui n'endure pas tellement cela longtemps.

M. Morin: Mais vous l'avez enduré depuis un sacré bout de temps, depuis que vous êtes là.

M. Cournoyer: Ecoutez, je suis peut-être plus patient que l'autre ministre des Richesses naturelles. Parlez-vous de Johnson ou de M. Massé?

M. Morin: Je vous le dirai tout à l'heure.

M. Boudreault: Avez-vous honte de le nommer?

M. Morin: M. le Président, je veux bien laisser l'occasion à M. Boyd...

M. Cournoyer: S'il vous plaît.

M. Morin: ...de répondre à la question du...

M. Boyd: A la commission parlementaire, l'année passée, c'était après une longue discussion comme celle-ci, il avait été convenu — c'est dans les procès-verbaux — que ce seraient ces documents-ci qu'on déposerait. C'est ce qu'on dépose.

Il y a une seule différence entre ce qu'on dépose et ce que M. Morin demande, ce sont les estimations internes que nos gens préparent au moment de la soumission.

M. Morin: Cela est important, M. Boyd.

M. Boyd: C'est important pour tout le monde. Pour les entrepreneurs aussi, c'est important. La façon de procéder, on a un budget; les $16,1 milliards, c'est le budget vers lequel on s'oriente. En plus, pour chaque soumission qu'on émet, il y a des plans et devis qui sont émis. Les gens viennent les chercher. On a un groupe spécialisé qui les prend aussi et qui fait une estimation en se mettant autant que possible dans la peau des entrepreneurs.

M. Morin: De la soumission fictive.

M. Boyd: C'est cela. Ce chiffre, nous le connaissons. Les gens qui soumissionnent ne le connaissent pas, ni avant, ni pendant, ni après, jamais. Vous demandez qu'on le rende public. Il y a un danger que je n'aime pas signaler. Si on est plus haut, l'entrepreneur le sachant, il y a des tentations d'aller chercher cet argent. Ce n'est pas de l'intérêt public que cela se fasse. Lorsque les contrats seront finis, si vous voulez, ce sera une autre chose. J'ai accepté pour les 14. Je vais vous donner d'autres statistiques, si vous voulez, qui vont éclairer un peu là-dessus.

M. Lessard: Puis-je vous indiquer qu'au ministère des Transports on a l'estimation du ministère? Aux engagements financiers, jeudi, on va avoir à étudier certains engagements financiers. Jeudi, il va y avoir des contrats qui ont été donnés. On a à chaque fois l'estimation du ministère des Transports. Après, ils l'ont. Je me demande lequel n'est pas du bon côté.

M. Cournoyer: Pardon, le député de Saguenay, est-ce qu'il s'agit du contrat proprement dit?

M. Lessard: Oui, il s'agit...

M. Cournoyer: Au moment de l'octroi ou de...

M. Lessard: Oui, nous avons l'estimation du...

M. Cournoyer: L'estimation, est-ce que vous l'avez avant que le gouvernement n'octroie le contrat? Je ne sais pas, je pose la question.

M. Lessard: Nous l'avons lorsque nous étudions l'engagement financier. Les contrats sont donnés actuellement.

M. Cournoyer: II y a plus que cela. Il y a bien des contrats qui sont de même nature qui ne sont pas encore donnés à l'Hydro...

M. Boyd: Ce ne sont pas les mêmes.

M. Lessard: On demande les contrats qui sont donnés.

M. Boyd: Oui, mais la différence...

M. Cournoyer: Ils sont de même nature, mais ils sont à côté de ceux-là.

M. Lessard: Dans le transport, aussi.

M. Boyd: La différence, c'est qu'il y a beaucoup de contrats de même nature, comme dit M. Cournoyer, au même endroit qui sont répétitifs. Les gens connaissant la façon dont on estime, c'est une indication sur la façon dont ils devraient soumissionner la prochaine fois, surtout sur des contrats qui sont semblables. Sur cinq contrats de route, on a vu des soumissions qui pouvaient avoir un effet l'un sur l'autre. Si vous le permettez, puisque vous avez demandé des statistiques globales, en 1974, nos soumissions internes étaient de 5,76% inférieures aux plus basses soumissions. En 1975, nos soumissions étaient de 6,1% inférieures à la plus basse soumission publique. En 1976, nos soumission internes sont de 18% au-delà de la soumission, de la valeur des contrats octroyés.

M. Morin: Est-ce que vous pourriez maintenant comparer avec le coût final?

M. Boyd: Le coût final?

M. Perreault: Est-ce supérieur?

M. Boyd: II y en a très peu qui sont terminés.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Il y avait une question.

M. Boudreault: Est-ce que vous calculez une marge de profits dans vos estimations comparativement à l'entrepreneur?

M. Boyd: La soumission que l'on fait n'est pas faite par les gens du budget. Elle est faite par des spécialistes en construction, des estimateurs qui font une soumission exactement comme ils pensent que les différents entrepreneurs vont la faire, en mettant tous les mêmes facteurs, les coûts directs, les coûts indirects, l'éloignement la possibilité de grève, l'effet sur le décret, les profits, etc., comme un entrepreneur le fait.

M. Perreault: En 1976, avez-vous dit que vos soumissions internes étaient supérieures ou inférieures?

M. Boyd: Elles sont supérieures de 18%. M. Perreault: Supérieures.

M. Boyd: C'était au mois d'avril. Maintenant, j'ai des statistiques plus récentes, au 31 juillet.

M. Lessard: Comment expliquer qu'en 1974/75 les soumissions aient été inférieures au montant prévu par les entrepreneurs, alors qu'en 1976 les soumissions sont supérieures? Est-ce simplement parce que vous avez décidé de vous rajuster ou est-ce dû à la concurrence?

M. Boyd: II y a plusieurs facteurs dont j'ai parlé ce matin dans mon texte. Premièrement, il y a plus de concurrence actuellement qu'il n'y en

avait et je vais vous donner des chiffres tout à l'heure. Depuis 1976, on a beaucoup plus de soumissionnaires, donc beaucoup plus de concurrence.

Il y a aussi le fait que le chantier est mieux connu, les entrepreneurs sont moins inquiets. Il y a plus de stabilité. Les gens aiment aller travailler à la baie James et, en passant, ils resteraient là s'ils n'étaient pas forcés de sortir dans le moment, mais ils sortent.

Donc, jusqu'à ce matin, les entrepreneurs étaient satisfaits, cette année, des conditions. A part cela, devant la réalité de 31%, on vous a expliqué, ce matin, que nous avons révisé nos escalades.

M. Lessard: C'est ce que je voulais savoir.

M. Boyd: Je ne l'ai pas caché. Je l'ai expliqué pendant deux heures, ce matin. Mais l'escalade, au cours de 1975 jusqu'à maintenant, en 18 mois, a augmenté de 31%. Cela est entré dans nos prix. Vous me dites: Pourquoi la différence? C'est parce que nous avons réalisé que l'escalade était plus forte que nous ne l'avions estimée en 1974.

Tout à l'heure, je vous ai expliqué pourquoi, en 1974, c'était ce qu'on avait mis. Dans les grands sujets que je vous ai énumérés, main-d'oeuvre, matériaux permanents, équipement de construction, équipement permanent, ingénierie, surveillance, je vous ai dit ce qu'on avait jusqu'en 1970-1973. C'était moins de 6%. On a prévu 9% pour 1974 et 9% en 1975. Cela a été 19% et 20%. Donc, on corrige.

Evidemment, cela a un effet et cela fait augmenter les coûts de $2,4 milliards. Mais, quand nos estimateurs, maintenant, refont les calculs, ils utilisent les nouveaux taux d'escalade.

Les $0.85 l'heure, cela fait beaucoup quand on multiplie cela par les heures; quand on calcule cela à temps et demi et à temps double les samedis et dimanches, cela fait beaucoup d'argent.

En 1973-1974, on ne savait pas cela. Maintenant, on le sait et maintenant on a une idée de ce que sera le décret. On a la certitude de ce qui a été donné en octobre, d'après le décret; on a la certitude de ce qui a été donné au printemps, en attendant le décret, et on a une petite idée de ce que sera le décret. Donc, on considère tout cela.

L'équipement de construction, qui était très rare en 1974-1975, est moins rare en 1976. C'est un autre facteur.

Pour revenir au portrait plus complet de 1976... Pardon?

M. Perreault: Vous avez un dernier chiffre à donner pour 1976?

M. Boyd: Pardon?

M. Perreault: Vous aviez un dernier chiffre à nous donner?

M. Boyd: J'avais le portrait du 1er janvier 1976 au 31 juillet 1976 sur les soumissions et le portrait global.

Alors, je vais vous donner le nombre de soumissions par appel d'offres, l'écart entre la plus haute et la plus basse soumission et l'écart entre le budget et la plus basse soumission.

Le budget — je vous l'ai expliqué, c'est une chose — est de $16 milliards. C'est notre cible. L'estimation est une autre chose. L'estimation, ce sont nos gars qui s'assoient et qui disent: Nous sommes entrepreneurs. Le budget, c'est autre chose.

Quand je compare ici, c'est entre le montant qu'on a prévu à notre budget et la plus basse soumission. Alors, les soumissions sont subdivisées en deux catégories dans mon étude: les contrats mineurs dont la valeur se situe entre $1 million et $10 millions et les contrats majeurs dont la valeur se situe entre $10 millions et $150 millions.

Maintenant, le nombre de soumissionnaires par appel d'offres. Les contrats majeurs. Sur neuf appels d'offres majeurs — je parle de $10 millions à $150 millions — on a eu huit soumissionnaires par appel d'offres.

En 1975, on était chanceux lorsqu'on en avait trois. La moyenne des contrats majeurs sur trois appels d'offres, trois soumissionnaires par appel d'offres. La moyenne générale des contrats mineurs et majeurs est de 7,2 soumissionnaires par appel d'offres. L'écart entre la soumission la plus élevée et la soumission la plus basse est de 64% pour les contrats mineurs. L'écart entre le budget, excluant les imprévus, et la soumission la plus basse dans notre budget est de 38% plus élevé que la soumission la plus basse dans les contrats mineurs. Pour les contrats majeurs de $10 millions à $150 millions, l'écart entre la soumission la plus élevée et la soumission la plus basse est de 32%. L'écart entre le budget — comme dans l'autre cas, en excluant les imprévus — et la soumission la plus basse dans notre budget est de 2% au-dessous de la soumission la plus basse, 2% au-dessous pour les contrats majeurs, mais on a 8% d'imprévu.

M. Lessard: 2% en bas...

M. Morin: Pour ce qui est des années 1974 et 1975, vous nous avez donné l'écart entre les soumissions internes et les soumissions les plus basses. Avez-vous, pour les contrats qui sont maintenant exécutés entièrement, la possibilité de nous donner l'écart entre les soumissions internes et le coût final, compte tenu de tous les imprévus qui s'ajoutent?

M. Boyd: Je vais examiner cela. Si on peut vous donner ces chiffres, on vous les donnera demain.

M. Morin: Bien.

M. Boyd: Je ne sais pas si on est en mesure de les donner.

M. Morin: Si vous êtes en mesure de me donner l'écart entre la soumission interne et la sou-

mission la plus basse, j'imagine qu'il ne devrait pas être trop difficile de mesurer l'écart entre la soumission interne et le coût final, lorsque le contrat a été...

M. Boyd: II faut faire certaines réserves, parce que le contrat final, dans bien des cas, comprend, premièrement, si le contrat dure assez longtemps, des réclamations à cause de l'arrêt pour l'injonction des Affaires indiennes, des réclamations pour l'arrêt des feux de forêt, des arrêts d'une soixantaine de jours, dans le coût final. En plus de cela, il y a des quantités additionnelles qui sont tout à fait normales dans n'importe quel contrat. Il arrive que c'est en moins, mais, la plupart du temps, ce sont des quantités additionnelles, des travaux qui n'étaient pas prévus.

M. Morin: C'est pour cela que je vous pose la question, si c'était possible d'avoir ces chiffres demain matin.

M. Boyd: Je ne peux vous le garantir pour demain, sur les contrats terminés, mais on va le faire le plus rapidement possible.

Vous voyez malgré tout que l'affaire est suivie de proche. On avait certains écarts en 1974-1975; en 1976, on les a corrigés en se basant sur nos prévisions, nos estimations et les facteurs qu'on a connus en 1974/75; peut-être qu'on les a corrigés un peu fort. C'était le premier rapport au mois d'avril, cette année. C'était le résultat de seulement quelques mois de 1976. Les derniers chiffres que je viens de vous donner où on colle de beaucoup plus près à la réalité et je n'avais pas terminé, c'est que, si on prend la moyenne pour l'ensemble des contrats majeurs et mineurs entre le budget excluant les imprévus et la soumission la plus basse, le budget est de 2% plus élevé que la soumission la plus basse. Donc, on a 2% de marge entre le budget et l'ensemble des soumissions les plus basses, sans compter les imprévus.

M. Morin: M. Boyd...

M. Boyd: Donc, vous voyez qu'en 1976, la situation est beaucoup plus favorable de ce côté et je vous ai donné quatre ou cinq facteurs qui justifiaient cela.

M. Morin: M. Boyd, nous avons parlé jusqu'ici de l'écart entre la soumission fictive et le plus bas soumissionnaire. N'y a-t-il pas également, au moment où avant que l'appel d'offres ne soit fait, ce qu'on pourrait appeler une estimation originale du contrat qui est faite par vos services avant même la soumission fictive, ce qu'on peut appeler le budget prévu pour ce contrat? N'y aurait-il pas moyen que nous connaissions ce chiffre-là, à défaut de connaître la soumission fictive de l'Hydro? Est-il possible de connaître l'estimation originale?

M. Boyd: II n'y a pas beaucoup d'objections à fournir ce chiffre parce qu'il n'a à peu près pas de valeur. C'est un chiffre — excusez, c'est sérieux, je ne veux pas rire — ...

M. Morin: Non, non.

M. Lessard: On ne rit pas nous autres non plus, vous le savez.

M. Boyd: D'accord. Vous ne riez pas et moi non plus. C'est un ordre de grandeur qui est fait par les gens des approvisionnements, basé sur le budget. Le seul but est de fixer un ordre de grandeur pour être capable de dire quelle sorte de cautionnement cela va prendre aux soumissionnaires ou quelle sorte de bons de soumissions ou de chèques visés cela va prendre.

On ne veut pas que ce chiffre soit significatif. C'est évident qu'il est connu. A la longue, les entrepreneurs savent que, lorsqu'on dit que cela va prendre un chèque visé de $500 000, c'est parce que c'est une soumission de $5 millions. Pour éviter cela, c'est pour cela que je vous l'ai dit sérieusement — vous croyiez que c'était une farce — que ce n'est pas significatif. C'est un ordre de grandeur pour permettre aux gens des approvisionnements de fixer les cautionnements, les basses soumissions ou les chèques visés ou des choses comme celles-là. Ce n'est pas basé sur le budget, sauf pour l'ordre de grandeur, et encore moins sur la soumission interne.

M. Morin: C'est possible d'avoir ces chiffres, tout de même.

M. Boyd: Mais avec toutes les réserves que je vous donne, cela n'a pas de valeur pour comparer les soumissions ni le résultat, ni l'efficacité interne, ni l'efficacité de l'entrepreneur, ni nos chantiers.

M. Morin: Je concède...

M. Boyd: Cela n'a pas de relation avec le budget, ni avec l'estimation.

M. Morin: Je concède que la soumission fictive serait plus utile. C'est pour cela que je vous la demandais. Est-ce que vous auriez objection à nous faire connaître le cas de la soumission fictive dans les cas de contrats entièrement exécutés, c'est-à-dire où l'entrepreneur ne peut pas se retourner contre vous, son contrat est exécuté, il est payé? Cela nous permettrait de mesurer, grâce à quelques exemples, l'ampleur des écarts qui peuvent s'amonceler.

M. Giroux: M. le Président, je pense qu'il n'y a pas de différence entre les écarts individuels et les écarts totaux. Si, par exemple, au moment d'une soumission, on s'est trompé, admettons, de $50 millions dans le total d'une année, si on était trop bas, on était trop bas. L'embêtement qu'on a strictement de dévoiler ces choses, c'est qu'on a beaucoup de contrats qui sont exactement comme ceux qui ont été donnés. Il y a un clacul de base qui peut se faire avec les chiffres tels qu'établis.

L'embêtement est le suivant: c'est une tentation pour un entrepreneur. Si nous avons évalué,

par erreur, disons à $50 millions, et qu'il en soumissionne $30 millions. On lui accorde le contrat.

M. Morin: Les tentations ne doivent pas être nombreuses.

M. Giroux: Non, mais je vous le donne comme exemple. Il y a une tentation pour aller chercher $3 millions ou $4 millions.

M. Morin: Une tentation qui n'ira pas bien loin, ni devant les tribunaux, ni devant qui que ce soit.

M. Giroux: Si on allait en cour avec le contrat et si on faisait foi à nos estimations le juge serait absolument très sympathique.

M. Morin: A l'encontre du contrat? M. Giroux: A l'encontre du contrat.

M. Lessard: II y a rien que l'ombudsman qui fait cela.

M. Giroux: Pardon!

M. Lessard: II y a seulement l'ombudsman qui fait cela. Il fait cela vis-à-vis les patroneux libéraux, mais devant la cour, c'est bien différent.

M. Perreault: Bon, il faut qu'il sorte une finesse du Saguenay.

Une Voix: Vous n'êtes pas au courant.

M. Lessard: Non, mais devant la cour, cela peut être différent.

M. Perreault: Une finesse du Saguenay.

M. Lessard: II me semble que le contrat doit être respecté s'il y a eu une soumission qui a été présentée, pour autant que le soumissionnaire a obtenu toutes les informations nécessaires de l'Hydro-Québec, les plans et devis, et qu'il ait soumissionné en fonction de ces plans et devis, qu'il n'y ait pas d'unité linéaire, si vous voulez, qui soit modifiée, à ce moment-là, il est obligé de respecter son contrat.

M. Giroux: Sur un contrat qui s'exécute... M. Lessard: Faites-le donc pour une fois.

M. Giroux: ... dans 30 jours, c'est différent. Si un contrat s'exécute sur une période de trois ans, il y a un tas de facteurs qui viennent et qui changent beaucoup.

M. Morin: Oui, mais on vous parlait de contrats exécutés. Je ne vous parlais pas des contrats qui sont en cours.

M. Giroux: Peut-être deux ans après qu ils sont exécutés. Mais je crois que si on donne l'ordre général de l'affaire...

M. Morin: Cela nous donne une indication, mais ce serait plus précieux, plus utile si on pouvait avoir le décompte.

M. Giroux: Ce serait surtout plus utile pour les entrepreneurs, à mon avis.

M. Morin: Je crois que l'opinion publique y gagnerait également.

M. Giroux: A moins que vous ne vouliez vous lancer dans la construction, je n'ai pas d'objection.

M. Morin: D'ailleurs, ce n'est pas nous qui nous plaignons constamment du petit nombre de soumissionnaires. Vous le savez, vous-mêmes, vous avez évoqué cette difficulté.

M. Giroux: Ce n'est pas...

M. Boudreault: M. le Président, est-ce que je pourrais...

M. Boyd: Ce n'est pas en rendant les soumissions internes publiques qu'on va augmenter le nombre de soumissionnaires. Ce que je voulais, M. le Président, c'est vous répéter que dans les contrats mineurs, entre la plus basse et la plus haute, sur une même soumission, avec les mêmes plans et devis, l'écart est de 64%. C'est pour $10 millions. Dans les contrats majeurs, de $10 millions à $150 millions, l'écart est de 32%. Alors, si des entrepreneurs qui se donnent la peine de prendre un cautionnement et de faire des études qui leur coûtent cher trouvent le moyen d avoir un écart de 64% dans un cas de $10 millions et de 32% dans des contrats de $10 millions à $150 millions, il est certain que nos gars qui préparent ça à l'intérieur, c'est la même sorte de gars qui préparent ça pour l'entrepreneur. Ils sont eux aussi sujets à faire des erreurs.

Il arrive des cas où l'entrepreneur a soumissionné trop bas; il est au-dessous de nos estimations et en bas de celles de tout le monde. On peut lui donner le contrat, mais il ne le terminera pas: cela arrive rarement, mais cela arrive. Des erreurs, il s'en fait dans les estimations.

Est-ce qu'il est d'intérêt public qu'à chaque fois on dise: Entre le plus bas et le plus haut, il y a un écart de 64%. La Société d'énergie est en plein milieu, on est bon? Ou alors on est plus haut de 64%, on est en bas de celui qui est le plus bas? C'est ça que vous nous demandez? Je pense qu'il n'est pas d'intérêt public de faire connaître ça. Ce qui est important pour l'administrateur, pour celui qui doit nous questionner, c'est de savoir qu'à la fin de l'année, sur l'ensemble, comment on a fait dans nos estimations internes. Quel a été le résultat global? Est-ce que, dans I ensemble, on a été bon ou pas bon ou pourri?

Moi. je vous dis qu'en 1976 on a été en plein dessus. On a un peu de marge, on a corrigé notre tir et on arrive avec peu de marge. Mais, avec ce

qui nous arrive, on va peut-être perdre la marge, cela va aller de l'autre côté.

C'est la raison de notre réticence.

M. Boudreault: M. le Président...

Le Président (M. Séguin): Le député de Bourget.

M. Boudreault: M. le Président, si vous voulez me donner une minute, M. Boyd. Je voudrais relever les paroles du député de Saguenay, qui accusait l'ombudsman de faire des concessions à certains. J'aimerais qu'il précise sa pensée et qu'il donne des noms s'il en a.

M. Lessard: M. le Président, c'est un autre problème, je pense q'il y a eu une commission parlementaire qui a siégé sur ce problème.

M. Boudreault: Oui, mais vous avez porté une accusation contre l'ombudsman tout à l'heure.

M. Lessard: C'est-à-dire que le Protecteur du citoyen, à un moment donné, a pris une décision concernant des immeubles...

M. Boudreault: Est-ce que vous la contestez cette décision?

M. Lessard: ... dans le comté de Saint-Jean. M. Boudreault: Est-ce que vous la contestez?

M. Lessard: Oui, nous la contestons cette décision.

M. Boudreault: Ah, vous la contestez!

M. Lessard: De toute façon, M. le Président, cela a été discuté en commission parlementaire.

M. Boudreault: Faites-le publiquement et donnez donc des précisions au lieu de lancer des accusations en l'air.

M. Lessard: Cela a été discuté en commission; le député aurait dû venir en commission parlementaire.

M. Boudreault: J'aime mieux prendre la parole du Protecteur du citoyen que la vôtre.

M. Lessard: En tout cas. De toute façon, votre parole, on ne peut pas la prendre parce qu'on ne l'entend jamais.

Le Président (M. Séguin): On peut revenir au débat.

M. Massicotte: Est-ce qu'on va prendre la vôtre pour le voyage de Bruxelles?

Le Président (M. Séguin): On revient au débat, s'il vous plaît, messieurs.

M. Boyd, excusez, vous étiez en train d'expliquer ou vous deviez expliquer quelque chose.

M. Boyd: M. le Président, tout à l'heure, j'ai dit que je vous donnerais du mieux que je pouvais ce que je pensais de l'escalade et qu'on avait des spécialistes.

J'aimerais, avec votre permission, demander à M. André Larochelle, qui est en recherche économique à l'Hydro-Québec, de vous expliquer les 31% de notre escalade historique, pourquoi c'est ainsi. Devant ce fait, on a employé ce chiffre, ce qui explique près de 60% de la différence qu'on vous a donnée ce matin.

M. Morin: M. le Président, j'espère donc que vous pourrez nous donner la comparaison entre les soumissions internes et le coût final pour les contrats entièrement exécutés. Je voudrais maintenant me tourner, étant donné que je me rends compte qu'on n'ira pas beaucoup plus loin sur ce chapitre, vers les sous-hypothèses d'inflation pour l'année courante et les années qui viennent. Vous nous avez donné un chiffre global; si ma mémoire est bonne, pour 1976 à 1985, cela doit être 8%.

M. Boyd: C'est ça. La moyenne va être de 8%.

M. Morin: Le taux moyen est de 8%. J'aimerais que nous fassions un peu le même exercice que l'année dernière et que nous regardions les sous-hypothèses année par année.

M. Cournoyer: J'aimerais bien qu'on ne corrige pas, mais qu'on précise bien la dernière pensée que le chef de l'Opposition a exprimée... "J'espère donc, " a-t-il dit.

M. Boyd: Pardon?

M. Cournoyer: Le chef de l'Opposition a dit: J'espère donc obtenir de la Société d'énergie les comparaisons de soumissions avec les estimations dans les cas de contrats totalement terminés, si j'ai bien compris.

M. Morin: Oui, la comparaison entre les soumissions et le coût final.

M. Cournoyer: II n'y a pas eu d'engagement de la part de M. Boyd de le faire.

M. Boyd: J'avais dit précédemment que nous allions regarder, voir les chiffres et qu'on vous donnerait une réponse demain. Je ne sais pas si on peut vous donner les chiffres ou non, mais on vous donnera une réponse demain.

M. Lessard: M. le Président, je me retourne encore une fois vers le ministre. M. Boyd nous dit que peut-être il va nous les fournir, que peut-être il ne nous les fournira pas. Je pose la question au ministre. L'objectif fondamental de cette commission parlementaire est d'essayer de scruter — sans cela, on n'a pas de raison d'être ici — l'augmenta-

tion des coûts de la baie James, d'essayer de savoir à un moment donné, ce qui s'est passé là-dedans et ce qui explique cette situation aujourd'hui. Comme ministre responsable de l'Hydro-Québec, je pense que vous avez intérêt à savoir vous-même, comme ministre des Richesses naturelles, ces raisons, à connaître ces chiffres qui expliquent l'augmentation des coûts. Il me semble, M. le Président, que, comme ministre des Richesses naturelles, membre de cette commission parlementaire, vous devez, vous aussi, avoir des exigences. La question que je vous pose...

M. Morin: Au lieu de cela, il essaie de diminuer les engagements que prend M. Boyd.

M. Lessard: ...est: Croyez-vous, pour l'information...

M. Cournoyer: Non, non. C'est parce que je ne veux pas avoir des choses imprécises dans six mois d'ici et qu'on dise en plein Parlement, en lisant mal les minutes: M. Boyd a promis qu'on les aurait.

Je suis pris avec cela au Parlement parce que M. Boyd est chez lui.

M. Lessard: Mais, M. le Président, M. Boyd est, je pense, responsable devant une commission parlementaire au ministre des Richesses naturelles.

M. Cournoyer: Est-il responsable à la commission parlementaire ou au ministre des Richesses naturelles?

M. Lessard: Ou bien nous sommes ici pour la frime, un peu comme pour les Jeux olympiques, ou bien nous sommes ici pour scruter quelque chose. On demande des renseignements et ce n'est pas la première fois, car l'an dernier, en 1975, les 4 et 5 juillet, nous avons tenté d'obtenir des informations, nous avons tenté d'obtenir des documents, les contrats. On nous avait dit qu'on pouvait nous les fournir et on n'a absolument rien reçu. Actuellement, on n'a à peu près rien et le chef de l'Opposition tente d'interroger le président de la Société d'énergie de la baie James. On nous répond: Ce n'est pas d'intérêt public. Les chiffres et l'augmentation des prix des coûts de la baie James, est-ce d'intérêt public, cela?

Je pose la question. Je pense que c'est le ministre qui est là qui doit présenter une motion, s'il le faut...

M. Cournoyer: Oui.

M. Lessard: ...pour qu'un certain nombre de documents, dont les documents demandés par le chef de l'Opposition, soient déposés ici en commission parlementaire. L'Hydro-Québec, ce n'est pas l'Etat; la Société d'énergie de la baie James, ce n'est pas l'Etat. C'est le ministre qui est responsable devant l'opinion publique. Alors, le ministre, devant l'opinion publique, est-il prêt à présenter une motion pour demander les docu- ments que nous considérons comme essentiels pour l'analyse de ce dossier extrêmement important pour l'ensemble des Québécois? En effet, cela veut dire $2600 par personne actuellement, $16,200 milliards. Etes-vous assez responsable pour demander que l'Hydro-Québec arrête d'administrer en cachette et donne des explications sur ce budget non seulement à la commission parlementaire mais aussi à l'opinion publique? C'est votre responsabilité, actuellement.

M. Cournoyer: M. le Président, j'ai une responsabilité...

M. Lessard: Ou bien c'est de la frime.

M. Cournoyer: ... qui est très bien inscrite d'ailleurs dans la loi, et l'Hydro-Québec me le rappelle régulièrement. Je suis responsable de l'Hydro-Québec devant le Parlement. Je réponds pour l'Hydro-Québec, je ne réponds pas de l'Hydro-Québec. Quand elle vient ici, l'Hydro-Québec se défend bien toute seule. Elle est capable de se défendre toute seule, elle n'a pas besoin de moi, pas une miette. Pardon?

M. Lessard: Passablement mieux que vous-. M. Morin: Vous répondez de l'Hydro aussi.

M. Cournoyer: Pourquoi fais-tu cela? Moi, je te parle doucement. J'essaie de répondre le plus intelligemment possible à l'imbécile question que tu as posée.

M. Lessard: C'est une question de type...

M. Cournoyer: Oui, parce que tu n'as pas compris encore de quoi il s'agit ici.

M. Morin: Voyons donc!

M. Cournoyer: Je suis prêt à imposer à l'Hydro-Québec, avec une motion de cette commission, non pas comme ministre, mais comme membre de la commission au même titre que vous, M. le Président, à demander par motion à l'Hydro-Québec de déposer tel ou tel document, à condition que ce soit non seulement d'intérêt public — parce que c'est d'intérêt public, je l'ai dit tantôt — mais que le dépôt et la publication spécifique ne soit pas contre l'intérêt public. C'est la question du débat que j'ai.

Je suis pour le fait qu'on cherche tout ce qu'on a à trouver, comme représentant de l'opinion publique et de l'intérêt public. Nous disons — je le dis avec vous — l'intérêt public, ce n'est pas à l'Hydro-Québec de décider de cela.

M. Lessard: Parfait.

M. Cournoyer: D'accord. Mais quand l'Hydro-Québec dit que, selon elle, c'est contre l'intérêt...

M. Lessard: Selon vous...

M. Cournoyer: Laissez-moi finir.

Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre!

M. Cournoyer: L'argument ou la difficulté que nous avons actuellement, c'est que l'Hydro-Québec prétend qu'il y va contre l'intérêt public de publier tel contrat spécifique.

M. Morin: Vous, qu'est-ce que vous en pensez? Ce n'est pas elle l'Etat, c'est vous.

M. Cournoyer: Je vais vous dire... M. Morin: C'est censé être vous.

M. Cournoyer: C'est correct cela. Tant et aussi longtemps que vous n'aurez pas établi qu'il y va de l'intérêt public de publier tel document et non pas votre petit intérêt mesquin et non pas en situant le débat dans de petites niaiseries, l'Hydro-Québec a encore raison devant moi. Elle dit: II est contre l'intérêt public...

M. Morin: C'est de l'intérêt mesquin.

M. Cournoyer: Non, laissez-moi finir. Elle dit: II est contre l'intérêt public de publier spécifiquement cette chose. On est capable de les publier globalement. On peut vous dire: Dans l'année, voici comment on s'est trompé dans nos estimations. Ce sera correct pour l'intérêt public. On va le faire.

M. Morin: Votre opinion c'est quoi, comme ministre responsable?

M. Cournoyer: Mon opinion, au moment où on se parle, elle est identique à celle de l'Hydro-Québec.

M. Morin: C'est ce que je pensais.

M. Boudreault: C'est normal.

M. Lessard: C'est de dire...

M. Cournoyer: Qu'y a-t-il de grave à cela?

M. Lessard: C'est cela.

M. Cournoyer: Je ne sais pas ce qu'il y a de grave à cela.

M. Lessard: Votre position...

M. Cournoyer: La semaine passée, sur le nucléaire, vous étiez avec l'Hydro et, aujourd'hui, c'est avec l'Hydro dans des folies comme cela. Ecoutez, ce n'est pas important. Il s'agit d'une affaire de $16,2 milliards. Il s'agit bien plus de regarder les méthodes comptables et comment cela arrive que d'essayer de poigner quelqu'un.

M. Morin: C'est le bon temps de le faire.

M. Cournoyer: Vous cherchez seulement à poigner quelqu'un, comme d'habitude.

Une Voix: Voyons donc!

M. Lessard: II me semble que le ministre devrait comprendre, à un moment donné, comme ministre des Richesses naturelles, qu'il est redevable à la population de l'administration de l'Hydro-Québec.

M. Cournoyer: C'est la population, ce n'est pas toi cela.

M. Lessard: On ne lui demande pas de dire ce que l'Hydro-Québec va dire.

M. Cournoyer: II y a déjà une différence entre la population et vous.

M. Lessard: On lui demande de dire, comme ministre responsable des Richesses naturelles et du dossier de l'Hydro-Québec et de la baie James, ce qu'il pense, comme ministre responsable, de ces dossiers. Si vous étiez allé un peu, avant le 15 juillet, analyser les chiffres de l'Hydro-Québec, peut-être que vous auriez quelque chose à dire aujourd'hui.

M. Cournoyer: Mon cher Président, nous avons des choses à dire.

M. Lessard: C'est ridicule.

M. Cournoyer: Nous sommes responsables et nous examinons dans tous ses détails les soumissions de l'Hydro-Québec. Nous les comparons, avec l'aide de tout ce que nous pouvons avoir d'experts à l'intérieur de mon ministère.

Bien sûr, l'Hydro-Québec, on n'a pas de points de comparaison. C'est l'Hydro-Québec. Elle est toute seule ici et elle construit des barages. Elle a appris cela à Manicouagan. Qui lui a montré cela, déjà, à Manicouagan? C'est quelqu'un d'autre que moi. Finalement, elle le sait.

M. Morin: Effectivement...

M. Cournoyer: Ce que j'ai, chez nous, c'est l'examen, par des techniciens et non par de petits politiciens, d'une situation financière et d'une situation comptable de l'Hydro-Québec. Les raisonnements que vous suivez quand vous dites: Je veux avoir tel document, je pense qu'il y a lieu d'examiner le pourquoi du refus de l'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la baie James. Jusqu'à preuve du contraire, je suis d'accord avec elles qu'on ne doit pas publier immédiatement, ou même après, les estimations de l'Hydro-Québec.

Je sais que ce serait intéressant pour vous autres de savoir où l'Hydro-Québec s'est fait fourrer, parce qu'une semaine elle s'est fait fourrer et une autre semaine elle est au-dessus des estimations.

M. Morin: Les avez-vous ces soumissions, effectivement?

M. Cournoyer: Non, je ne les ai pas, parce que I'administration...

M. Morin: Je commence à comprendre que vous suiviez si peu le dossier.

M. Cournoyer: M. le Président, l'administration journalière de l'Hydro-Québec n'est pas l'affaire du ministre.

M. Morin: Non, mais il faut vérifier. C'est à vous de vérifier sans cesse.

M. Cournoyer: Vous avez décidé, comme Parlement, il y a déjà longtemps, qui faisait ces lois dans ce temps.

M. Morin: Je comprends que vous ne compreniez pas pourquoi cela monte.

M. Cournoyer: Qui a nationalisé l'Hydro-Québec? Se souvient-on de quelqu'un, qui a nationalisé l'Hydro-Québec et lui a donné un degré d'indépendance extrêmement élevé...

M. Morin: Ce n'est pas dans ce gouvernement-là.

M. Cournoyer: ... dans son administration journalière?

Est-ce qu il y a quelqu'un qui répète assez régulièrement: Les politiciens, tenez-vous en dehors de l'Hydro-Québec? Qui est-ce que je suis?

M. Morin: Vous êtes le ministre responsable.

M. Cournoyer: Est-ce que je suis un politicien ou un technicien? Un politicien. Je ne me mêle pas de l'administration journalière de l'Hydro-Québec. Quand M. Boyd se met à dire des choses politiques, je dis à M. Boyd: Mêlez-vous donc de vos maudites affaires. Je me mêle des miennes, parce qu'il me le dit assez souvent de me mêler des miennes.

M. Morin: C est seulement que vous êtes responsable devant l'Assemblée.

M. Cournoyer: Je suis responsable dans les limites de la loi.

M. Morin: II est responsable, mais il ne veut rien savoir.

M. Cournoyer: Non, je veux savoir et je vous ai prouvé ce matin que je voulais savoir, que je posais des questions dans ma capacité de ministre, mais que l'Hydro-Québec, pas plus que la Société d'énergie de la baie James, n'était dans une situation, dans les deux cas, de dire au ministre: Voici la loi que nous avons. Cette loi a été votée par le Parlement, M. le ministre. Nous avons, en vertu de cette loi, M. le ministre, l'obligation de faire en sorte que les citoyens québécois aient de l'électricité selon nos prévisions. Cette chose, on a décidé de la faire de telle façon. La Société d'énergie de la baie James administre d'une façon journalière un contrat de $16,2 milliards quand même. Le ministre n'est pas dedans. Vous pouvez essayer de me poigner dedans et de dire: Ecoute, dans le cas de tel contrat, est-ce que c'était un "chum" à Cournoyer qui a fait cela? Est-ce que c était un chum" à Bourassa? S'il y avait un Québécois qui avait fait une piastre là-dedans, que cela serait épouvantable! Si c'est cela que vous cherchez, vous ne le trouverez pas, je ne suis pas là-dedans. Cela ne fait qu'un an que je suis là. Si vous en avez d'autres à poigner en arrière... Cela fait un an et je sais comment vous êtes.

M. Morin: M. le Président...

M. Cournoyer: M. le Président, il est clair que je n'ai pas fini encore. Quand vous allez lire la loi de I'Hydro-Québec, la loi constituante de la Société de développement et de la Société d'énergie de la baie James, vous allez découvrir que le rôle du ministre, je dis bien du ministre, n'est pas le rôle du ministère. Le ministre est, face au président de l'Hydro-Québec, un sous-ministre avec une très grosse structure en dessous de lui, comme mon sous-ministre a une très qrosse structure pour s'occuper de tel ou tel secteur d'activité. Or, la Société d'énergie de la baie James ne relève même pas du ministre. C'est une société qui est contrôlée à part entière par l'Hydro-Québec. Pardon?

M. Lessard: Qui l'a faite?

M. Cournoyer: Pourquoi est-il haïssable comme cela? On parle sérieusement.

M. Perreault: Qui l'a faite, l'Hydro?

M. Cournoyer: Du côté de la Société de développement de la baie James, c'est la même chose. Je ne me plains pas de cela. C'est le Parlement qui est supérieur au ministre qui a décidé que c'était comme cela. Il a dit: Quand tu auras une question à poser en Chambre, on posera cela à celui-là, il s appelle le ministre des Richesses naturelles. Je parle au président Giroux. Je parle au président de la Société de développement de la baie James qui, dans les circonstances, relève de moi. Je dis: Je suis en fait, un messager. C'est clair que je le dis comme cela. Je n'en ai pas honte, parce que c'est cela que la loi dit que je suis, un messager entre l'autorité constituée par la loi et effectivement...

M. Morin: Non, pas un messager.

M. Cournoyer: M. le Président, nous prenons maintenant à cause... Laissez-moi finir...

M. Morin: Vous en prenez large avec la loi.

M. Cournoyer: Bien oui, on en prend plus large qu'on en prenait. Je commence à être mieux

"gearé" que je ne l'étais. Il ne s'agit plus du ministre, il s'agit du ministère. Dans la section de l'énergie, nous disons: Nous allons jouer notre rôle. Le rôle qu'on a à jouer, c'est non pas de diriger l'Hydro-Québec dans son activité journalière, c'est d'établir des paramètres différents pour l'Hydro-Québec de ceux qu'elle a actuellement dans la loi. La seule façon de le faire, c'est de changer la loi.

M. Morin: Oui.

M. Cournoyer: Je ne peux pas faire cela comme ministre.

M. Perreault: Le Parlement. M. Cournoyer: Le Parlement.

M. Morin: II n'en reste pas moins que le ministre est responsable. Cette responsabilité entraîne de sa part une obligation de surveillance. Il ne peut pas le nier. L'une des façons dont il peut surveiller, c'est de demander les chiffres et c'est de les scruter. C'est à lui, non pas à l'Hydro ou à la SEBJ, de décider ce qui doit être rendu public ou pas dans l'intérêt public. C'est à lui de décider. Or, je me rends compte que ces chiffres, il ne les a même pas demandés à l'Hydro-Québec.

M. Cournoyer: ...pas demander à l'Hydro-Québec.

M. Morin: Non, vous ne les avez pas demandés. C'est bien visible.

M. Cournoyer: Les chiffres dont il est question, voici les principaux contrats pour les suivants: Transport de ciment en vrac de Matagami aux chantiers de la baie James, pour 1976, c'est $6 millions. On en a des chiffres. Des chiffres publiés.

M. Morin: ...de la liste, ce que vous auriez dû savoir, c'est...

M. Cournoyer: Je ne lis pas la liste. Elle est là, elle est publiée.

M. Morin: A propos de chaque contrat, vous auriez dû poser des questions. Je vous pose une question, M. Giroux. Si le ministre vous avait demandé l'écart entre la soumission fictive et la plus basse soumission, la lui auriez-vous donnée?

M. Giroux: Je la lui aurais donnée sur une base confidentielle.

M. Morin: Bon. C'est ce que je pensais aussi. Cela aurait été votre obligation de la lui donner, puisque c'est le ministre responsable. Il ne vous l'a même pas demandée.

M. Cournoyer: M. le Président, il ne faut pas dire cela.

M. Giroux: ...seulement...

M. Cournoyer: Je n'ai jamais vu...

M. Morin: Qu'est-ce qu'il faut dire? Je me le demande.

M. Cournoyer: Mon professeur! Voulez-vous savoir la table des matières de notre travail, le travail de mon ministère? Pas de moi, mon ministère est là. Formulation du problème, nature générale du problème, mandat, importance de l'étude, objectifs de l'étude. Il y en a 24 pages de mandat de mes gens sur la manière d'aborder particulièrement l'étude des coûts de la baie James, en particulier.

Il y a 24 pages de mandats que j'ai signés.

M. Morin: Vous n'avez pas commencé à ce que je vois.

M. Cournoyer: On en sait bien plus que vous en savez. On est sûr que ce sont tous des gens honnêtes qu'il y en a en face de nous, ceux qui sont là en particulier. Vous n'essayez que de les poigner; nous sommes trop honnêtes, même si on les trouve parfois...

M. Morin: Je me rends compte qu'on ne pourra pas aller plus loin que cela, sauf peut-être sur un point. Serait-il possible, comme nous l'avons demandé l'année dernière — il semblait que cela correspondait à certaines sympathies du côté de l'Hydro-Québec — d'obtenir le dépôt des principaux contrats, ceux qui dépassent $10 millions? Autrement dit, dans la liste que nous avons ici, cela voudrait dire qu'il y en aurait onze sur les quatorze.

M. Boyd: J'aimerais peut-être que vous précisiez davantage votre question. Habituellement, lorsqu'on fait un appel d'offres, les documents qui sont pris par l'entrepreneur, les plans et devis, les différentes clauses particulières, les clauses générales, les devis, les plans, tout cela fait l'objet de la soumission et, en fait, c'est cela, le contrat.

A un certain moment, on fait un appel d'offres. Tout le monde a le droit de venir le chercher pour $25 et, lorsque les soumissions sont entrées, on les analyse et le conseil reçoit des recommandations et ce dernier décide que c'est tel monsieur ou telle entreprise qui a le contrat.

A ce moment-là, tout ce qu'on a à faire, c'est de retourner une formule d'adjudication en disant: Monsieur, on vous a octroyé le contrat suivant votre soumission. Si c'est cela que vous voulez, il n'y a pas de problème. C'est public. On en vend à la centaine.

M. Morin: C'est exactement ce à quoi je pensais. C'est comme cela d'ailleurs que ça se passe pour certains contrats de voirie, si ma mémoire est bonne. Pendant quatre ans, j'ai été là-dedans et c'est ainsi que cela se passait. Il y avait le devis, la

soumission et c'était considéré comme un contrat. C'est ce que je vous demande.

M. Boyd: Oui, la soumission devient le contrat. Il y a une lettre d'adjudication qui précise certains points, une lettre très courte...

M. Morin: La lettre fait partie du contrat.

M. Boyd: ... et on demande au responsable de la compagnie de signer et de nous envoyer une résolution indiquant qu'il est autorisé à signer les formalités légales. Cela devient le contrat.

Si c'est ce que voulez, on peut vous en donner.

M. Morin: Est-ce possible pour les contrats supérieurs à $25 millions?

M. Boyd: $25 millions?

M. Morin: Oui. Je m'excuse. A $10 millions. C'est le chiffre que nous avions...

M. Boyd: Mais vous en voulez... M. Perreault: Avec plans et devis?

M. Boyd: Vous voulez une soumission typique?

M. Morin: Je voudrais, dans chacun des contrats...

M. Perreault: ... tous les plans et devis.

M. Morin: ... de la liste, je voudrais le contrat pour chacun de ceux qui excèdent $10 millions.

M. Perreault: Avec plan et devis?

M. Boyd: C'est énorme.

M. Perreault: Plans et devis.

M. Boyd: C'est énorme, M. Morin. Je ne veux pas dire non tout simplement pour le plaisir de dire non, mais une seule soumission peut être autant de volumes que cela et des plans comme cela. On en a un très grand nombre. Si vous en voulez... Peut-être qu'on pourrait vous donner un cas typique, $10 millions, $50 millions, $100 millions. C'est du pareil au même, en général.

M. Morin: Le contrat pour la galerie de fuite de LG 2 est maintenant terminé, je pense. Pas tout à fait?

M. Boyd: Non. Il n'est pas terminé.

M. Morin: Pas tout à fait. Cela ne serait même pas la peine de prendre des contrats qui sont en cours, mais qui ont déjà été exécutés et, bien sûr, si cela commence à prendre un camion pour transporter tous les plans et devis, c'est une autre affaire, mais n'y a-t-il pas des récapitulations?

M. Boyd: Non. Le contrat, c'est un contrat. Si vous voulez réellement... Vous parlez de contrat. Le contrat est tout ce qui fait partie de la soumission et la formule d'octroi.

On peut vous donner des contrats types, si vous le voulez, un de $5 millions, un de $10 millions, un de $25 millions.

M. Morin: Procédons comme cela, parce que j'aimerais qu'on puisse regarder un contrat type de très près.

M. Boyd: D'accord, on les déposera.

M. Morin: Bien, merci. J'aimerais aborder la question des sous-hypothèses.

Le Président (M. Séguin): II y a juste un petit point, afin que nous n'ayons pas trop de difficultés ou de malentendus. Le contrat type dont il s'agit à ce moment-ci, qui est mentionné par le chef de l'Opposition, ce n'est pas un contrat, ce sont des plans et devis, une soumission telle que l'entrepreneur... C'est le tout en blanc.

M. Boyd: C'est cela.

Le Président (M. Séguin): Non consenti par qui que soit.

M. Morin: Non, ce n'est pas cela du tout que j'avais dans l'esprit.

Le Président (M. Séguin): C'est le point. Je voudrais savoir ce qu'on va déposer.

M. Morin: Dans le passé, ce que nous avons demandé, c'est un contrat qui a fait l'objet d'une négociation. Est-ce qu'on se comprenait bien, M. Boyd?

M. Perreault: II n'y a pas de négociation.

M. Boyd: On ne se comprenait pas bien. D'ailleurs, je vous ai dit: II faudrait peut-être que vous précisiez et on n'a peut-être pas assez précisé. Premièrement, ces contrats ne font pas l'objet de négociations; ce sont des soumissions à prix unitaire ferme. Je pense qu'on peut regarder et vous donner une réponse demain. On pourrait probablement trouver certains contrats types qui ont été octroyés après soumission.

M. Morin: Je ne vous demande pas tous les plans.

M. Boyd: Non? D'accord.

M. Morin: Parce que cela ne nous avancerait peut-être pas énormément d'avoir les plans.

M. Boyd: Permettez-vous, M. le Président, qu'on donne une réponse définitive, là-dessus, demain matin?

M. Morin: Très bien.

Le Président (M. Séguin): Je pense que j'Jrais plutôt de ce côté, M. Boyd. Je n'aime pasles décisions qui sont prises à la hâte ici sur des points du genre, à l'intérieur d'un mini-débat de 20 minutes ou une demi-heure.

J'aimerais aussi que le ministre et que le chef de l'Opposition voient M. Boyd, d'ici à demain matin, pour essayer de convenir de ce dont il s'agirait comme dépôt de documents, afin qu'on se comprenne exactement sur ce dont il s'agit. Je ne voudrais pas qu'on recommence le même débat demain.

M. Morin: Je pense qu'on s'est compris assez bien.

M. Cournoyer: Donc, c'est bien compris pour le moment.

Le Président (M. Séguin): Parce qu'il y a toujours le danger de certains précédents qui peuvent être établis et cela peut être très dangereux. C'est pour cela que je voudrais qu'on procède avec certaines précautions.

M. Perreault: D'ailleurs, le Parti québécois pourrait agir comme soumissionnaire et avoir tous les plans et devis pour chaque contrat. Il n'y a pas de difficulté.

M. Morin: Bon.

Le Président (M. Séguin): Demain matin, M. Boyd, à la séance de dix heures, vous vous serez peut-être entendu avec le chef de l'Opposition et le ministre sur les documents dont il s'agirait. Cela peut éliminer des discussions, des débats, de part et d'autre.

M. Boyd: C'est à vous, messieurs, de décider.

Le Président (M. Séguin): Pour dix heures demain matin, la décision est prise.

M. Morin: On peut peut-être passer à l'analyse des sous-hypothèses. La dernière fois, pour justifier les 7% de taux moyen de 1974 à 1985, vous nous avez donné les hypothèses année par année. J'aimerais que l'on procède de la même façon pour justifier le nouveau taux d'inflation moyen de 8% et qu'on nous donne pour chaque année, d'ici à 1985, le taux annuel prévu. Si c'était possible, je demanderais de le comparer avec le taux annuel prévu en 1974.

M. Boyd: On peut très bien répondre à cela. En fait, on pourra vous donner une courbe qui représente cette comparaison. Tout à l'heure, j'avais demandé au président la possibilité de faire entendre notre spécialiste en inflation, M. Larochelle. J'aimerais, si vous me le permettez, en plus de répondre à la question que vous posez maintenant, qu'il puisse également répondre à une question posée antérieurement, que j'avais proposé qu'on explique davantage.

C'est la différence entre les 24% et les 25% de la statistique fédérale — M. Morin l'avait d'ailleurs posée il y a deux semaines — et nos 31%.

M. Larochelle pourra également vous expliquer cela.

Le Président (M. Séguin): Je pense qu'on peut procéder avec le consentement de la commission et du chef de l'Opposition.

M. Boyd: Oui.

M. Morin: Peut-on nous remettre le document, s'il y en a un?

M. Boyd: Je crois que oui.

Le Président (M. Séguin): M. Larochelle, la parole est à vous.

M. Larochelle (André): Merci.

M. Boyd: On en fait des copies, ce ne sera pas long. On va vous donner les courbes dans quelques minutes.

M. Morin: M. Boyd, y aurait-il moyen que vous fassiez faire les copies avant tous les documents que vous prévoyez déposer, de sorte qu'on les aurait au moment où celui qui comparaît prend la parole?

M. Boyd: D'accord.

M. Larochelle: M. Morin, vous avez mentionné à juste titre, il y a deux semaines, que, selon Statistique Canada, le coût des centrales hydroélectriques au Canada avait augmenté de 55%. En fait, si on se réfère aux sources...

M.Morin: Depuis 1971.

M. Larochelle: Depuis 1971, c'est cela. Si on se réfère aux sources, il s'agit effectivement d'une augmentation de 55,4%.

Je dois mentionner ici ce que fait Statistique Canada là-dessus. C'est en considérant l'évolution du coût de composantes, comme la main-d'oeuvre, les matériaux et l'équipement à travers l'ensemble du Canada, y compris dans les provinces qui n'ont même pas de projet hydroélectrique. Ceci ne rend pas invalide l'indice comme tel pour refléter ce que pourraient coûter des centrales hypothétiques qui seraient construites à un endroit ou à un autre à travers le pays. Donc, on admet, comme référence, tout comme l'indice des prix à la consommation d'ailleurs, l'indice qui donne 55,4%. Toutefois, si on considère que le chantier de la baie James est construit au Québec, à ce moment, en nous servant également de certaines statistiques provenant de l'organisme officiel fédéral, on s'aperçoit que l'évolution depuis 1971 a été quelque peu plus élevée, c'est-à-dire de 60,4% au lieu de 55,4%. La différence s'explique essentiellement par l'année 1975 où les augmentations, dans l'ensemble du Québec — je ne parle pas du chantier en particulier — sont, comme l'a cité M.

Boyd, si on les applique aux composantes de projets hydroélectriques, de 20,7% alors que, selon l'indice fédéral, ce serait de 15,4%.

Les raisons de cet écart sont assez bien connues. On sait, par exemple, que le pourcentage d'augmentation de volume de la construction non résidentielle au Québec en 1975, par rapport à celui de l'année précédente, a été de 27%. Dans le reste du Canada, cela a été de 7% seulement. Le chantier olympique, le prolongement du métro de Montréal, les multiples autres chantiers dans la province, y compris celui de la baie James, ont contribué à cette très forte activité dans le domaine de la construction non domiciliaire.

Si on se reporte à une période plus récente, soit celle de l'année et demie séparant les deux prévisions de coût, celle de 11,9 milliards et celle de 16,2 milliards, on obtient une évolution de 31,2% si on utilise une statistique québécoise et de 24,6% si on utilise une statistique fédérale. Evidemment, l'écart s'explique pour les mêmes raisons que j'ai données. La différence provient surtout de l'année 1975.

On peut se dire: Cela, c'est bien beau, c est un indice que vous devez construire vous-même pour le Québec, vu que Statistique Canada ne le fait pas. Dans les cas où Statistique Canada donne des indices québécois et des indices canadiens, et aussi des indices provinciaux pour les autres provinces, pour des composantes entrant dans des projets de construction, on retrouve à peu près le même écart. Par exemple, Statistique Canada ne donne, dans la même publication que vos recher-chistes connaissent bien, c'est-à-dire le catalogue 62-008 de Statistique Canada, que la main-d'oeuvre de construction résidentielle.

Evidemment, ce n'est peut-être pas la même pondération par métier, mais ce sont quand même des employés de la construction qui sont sujets aux mêmes conditions sa'ariales dans la province. Si on se reporte, pour simplifier, à la période de 1971 à 1975, au Canada, on trouve que l'indice a augmenté de 51,6%. Au Québec, toujours selon l'organisme... Pardon?

M. Morin: Au Canada, c'était..

M. Larochelle: 51,6%.

M. Morin: 51,6%.

M. Larochelle: Oui, c'est ça. Au Québec, toujours selon l'organisme officiel du gouvernement fédéral, c'est 154,4%.

M. Cournoyer: II y avait un excellent ministre du Travail dans ce temps-là, comme tout le monde se souvient.

M. Larochelle: Et encore une fois, la différence est surtout attribuable à l'année 1975. Vous savez très bien ce qui s'est passé, cette année-là. avec l'ouverture du décret dans l'industrie de la construction.

Si on regarde les matériaux également. Statistique Canada donne des statistiques pour les ma- tériaux de construction résidentielle. Evidemment, dans la construction non résidentielle, ça prend aussi du ciment, du cuivre, de l'aluminium, du fer et de l'acier, ainsi de suite. Mais c'est la statistique qui est disponible. Sur la période de quatre ans. de 1971 à 1975, cela a augmenté de 39,8% au Canada et de 43.3% au Québec.

A titre d'exemple, le béton préparé, qui comprend évidemment le ciment et les autres matériaux pour la fabrication, la main-d'oeuvre et I'équipement, selon Statistique Canada, toujours à la même période, de 1971 à 1975, l'augmentation a été de 55.6%, étrangement proche d'ailleurs de celle de 55,4% pour les centrales hydroélectriques.

Le même indice pour le Québec est de 177,3%. c est-à-dire une augmentation sur quatre ans de 77,3%. Je peux donner un autre exemple que j'ai sous les yeux. Le bois résineux, I epinette rabotée. Pour le Canada, l'augmentation sur quatre ans a été de 38%, et pour la région centrale, c est-à-dire le Québec et l'Ontario, ce sont les seules statistiques officielles qu'on a, c'est de 42.8%.

Si j'ai cité tous ces chiffres, M. le Président, c est pour montrer que, si Statistique Canada construisait un indice, comme nous-même sommes obligés d'en faire un pour l'appliquer à nos projets à l'Hydro-Québec et à la SEBJ. étant donné évidemment qu'il devrait se servir de ses propres indices provinciaux — et on voit que les indices québécois sont plus élevés que ceux du Canada — il obtiendrait vraisemblablement un écart du même ordre que celui que l'on obtient ici.

Donc, en conclusion de ceci, les 55.4% sur quatre ans sont bons pour le Canada dans son ensemble, et encore une fois, ce sont des centrales hydroélectriques théoriques qui seraient construites n'importe où, en moyenne, au Canada. Si on se reporte au Québec, non pas le chantier de la baie James en particulier, mais dans la province, l'évolution de l'indice de prix est de 60,4%. Je pense que ces explications devraient contribuer à nous réconcilier au moins sur la question de l'évolution des prix comme telle pour ce qui est dépensé dans une année en particulier, c'est-à-dire l'augmentation sur les quatre ans de 55% à 60%.

Permettez-moi ici une précision concernant les prévisions qui avaient été faites pour I'estimation de 1974, celle de $11,9 milliards. Durant l'année et demie du premier trimestre de 1974 au troisième trimestre 1975, on prévoyait une augmentation à un taux annuel de 9%, ce qui veut dire environ 13.5%. grosso modo, sur la période d une année et demie.

La réalité, comme je viens de I expliquer, employant des statistiques applicables au Québec et non au Canada dans son ensemble, c est une augmentation de l'ordre de 31.2%. Donc, grosso modo, I'écart entre la réalisation et la prévision est de 18%. comme M. Boyd l'a dit plus tôt dans la journée.

Juste pour fixer les idées, sans entrer dans de longs calculs, on peut tout de suite faire un raisonnement à l'aide d'une petite règle de trois. Effectivement, I erreur de prévisions de 18% en un an et demi affecte tous les prix, non seulement au début du projet, mais tous les prix de 18% au

moins pour toute la durée du projet. On peut dire que la baie James était évaluée, en estimations budgétaires à $12 milliards et que c'était au tout début du projet, mais qu'il y avait quand même certains travaux qui étaient déjà commencés, qu'il y avait des déboursés de faits. Considérons qu'il y a eu des augmentations des coûts de base et gardons le chiffre, si vous voulez, de $12 milliards et appliquons à cela 18% d'erreurs de prévisions dans les prix qui se répercutent, somme toute, sur toute la durée de construction. Vous allez trouver un ordre de grandeur de $2,2 milliards par un calcul aussi simple que celui-là qui, à mon avis, devrait fournir suffisamment d'intuition pour dire: L'erreur de prévisions d'inflation, c'est peut-être dommage, mais c'est cela que ça occasionne sur une période aussi longue que de 1974 à 1985, mais malheureusement l'erreur a eu lieu au tout début. Si elle avait eu lieu plus tard, cela aurait eu moins d'impact.

L'erreur est, en fait, au début; à ce moment, vous avez un écart qui dépasse $2,2 milliards. Pour ce qui est du reste, M. Boyd a donné les explications détaillées ce matin.

M. Morin: Je vous remercie, M. Larochelle. Je trouve vos explications très claires. Effectivement, donc, l'écart entre le Canada et le Québec est de l'ordre de 5% puisqu'on a 55,4% de moyenne dans l'ensemble du pays pour 60,4%. Donc, c'est exactement 5%.

Si j'avais posé cette question et si je suis heureux d'avoir la réponse, c'est parce que vous vous souviendrez que le premier ministre a mentionné des augmentations de l'ordre de 300% à 500%. C'est le chiffre qu'il a lâché dans le public. C'était évidemment aberrant et je suis heureux que les chiffres que vous nous donnez aujourd'hui confirment que ce genre de déclaration n'avait rien à voir avec la réalité.

M. Cournoyer: M. le Président, je pense que le chef de l'Opposition parle d'une chose totalement différente. Mon premier ministre n'a pas parlé de l'indice des prix à la consommation. Il sait que ce n'est pas 300%, il n'est pas imbécile.

M. Morin: II parlait de l'inflation dans la construction.

M. Cournoyer: On peut penser...

M. Morin: Voulez-vous que je vous cite...

M. Cournoyer: On peut parler de certains projets de construction qui ont été augmentés de 300%. Cela n'a rien à voir avec l'indice en question.

M. Morin: Cela n'avait surtout rien à voir avec la baie James.

M. Cournoyer: Arrêtez d'attaquer des gens qui ne sont pas ici pour se défendre. Mon doux!

M. Morin: Voyons donc!

M. Cournoyer: Mon patron n'est pas ici et vous lui faites dire des choses comme vous m'en faisiez dire mais ce matin j'étais prêt à me défendre.

M. Morin: J'aimerais bien qu'il soit là.

Le Président (M. Séguin): Bon. Pour revenir...

M. Morin: C'est-à-dire, M. le Président, il vaudrait mieux qu'il ne vienne pas parce que chaque fois qu'il vient cela fait une salade à n'en plus sortir.

Le Président (M. Séguin): Je pense que M. Larochelle...

M. Cournoyer: II est moins patient que moi.

M. Larochelle: Si vous me le permettez, M. le Président, étant donné qu'on fait allusion à ces pourcentages élevés qu'on attribue au premier ministre. Je ne connais évidemment pas les sources du premier ministre là-dessus. Toutefois, il y a une source qui est le magazine Fortune de novembre 1975 où — et on parle ici d'une période de treize ans, soit à peu près la période de construction de la baie James — on fait référence aux coûts du thermique. On dit que ce qui coûtait environ $100/kw en 1967 passerait vers 1980 à $450 ou $550.

Comme je le disais, je ne connais pas l'autre source, mais je veux ajouter les pourcentages sont d'autant plus grands que la période est longue. Des chiffres de ce genre qu'on voit rapidement peuvent être cités et conduire à des interprétations délicates.

M. Morin: Je vous en propose une. Dans votre tableau sur l'évolution des estimations budgétaires de différents projets énergétiques d'envergure, on fait état du fait que Gentilly II, qui est un projet nucléaire, bien sûr, soit passé de $386 millions en 1972 à $612 millions en 1975, ce qui représente une hausse de 59%. Durant la même période de 1972 à 1974, le projet de la baie James a augmenté de 175% à 180%. Vous voyez que les chiffres peuvent être éloquents.

De 1972 à 1976. C'est cela.

M. Cournoyer: Oui. Combien? M. Morin: De 175%. N'est-ce pas?

M. Boyd: C'est un beau chiffre. M. Morin: On nous propose...

M. Boyd: On ne parle pas de la même chose, évidemment.

M. Morin: Non.

M. Cournoyer: On ne parle pas du même projet.

M. Lessard: Quelque 20% de plus de production.

M. Cournoyer: C'est épouvantable de jouer comme cela.

M. Morin: M. Boyd, c'était bien $5,8 milliards et c'est passé à $16,2 milliards, faites le calcul.

M. Cournoyer: C'est effrayant.

M. Boyd: Les hypothèses sont différentes.

M. Morin: Oui.

M. Boyd: Je vous ai fait distribuer, avant la suspension, ce midi, quatre tableaux. L'un d'entre eux, en particulier, s'il y a moyen, j'aimerais qu'on le discute en détail avant six heures, c'est celui de la comparaison entre les NBR, La Grande, première fois, La Grande, deuxième fois et La Grande, troisième fois. Cela va prendre environ une demi-heure pour en discuter. J'aimerais qu'on en discute quand vous le voudrez, ce n'est pas à moi de fixer les limites, mais on ne doit certainement pas se quitter sans le discuter.

M. Morin: On pourrait venir à ce tableau. Mais c'est un fait, quand on prend les chiffres, qu'en 1972, le projet était évalué à $5,8 milliards et il est passé à $16,2 milliards. Faites le calcul, cela fait 175% d'augmentation.

M. Boyd: M. Morin, là, vous...

M. Morin: J'admets qu'il y a eu 24% d'augmentation de puissance. Enlevons ces 24%, cela reste encore important.

M. Boyd: Ce n'est pas seulement cela, M. Morin. Les hypothèses de calcul étaient différentes. On n'employait pas le même taux d'escalade, ni le même taux d'intérêt...

M. Morin: Non, non.

M. Boyd: ... puis ce n'était pas les mêmes années.

M. Morin: Dans Gentilly...

M. Boyd: Dans le cas de Gentilly, c'est la même puissance qu'on considère dans les deux cas, ce sont les mêmes conditions, etc.

Ce matin, je vous ai dit que les $612 millions sont une estimation de 1975 qu'on a mise là, parce que c'est le dernier chiffre officiel qu'on a. On est sur le point de le réviser. Cela va avoir une forte hausse aussi. On a déjà, dans le passé, parlé du projet de la baie James comparativement à un complexe nucléaire de même capacité. On avait dit, à ce moment-là, que la différence au coût unitaire en mills par kilowatt-heure au client en faveur de la baie James était de tant. Aujourd'hui, on pourrait vous dire qu'elle est supérieure, de combien et avec des chiffres.

M. Morin: J'espère qu'on pourra le faire.

M. Lessard: A partir de vos hypothèses.

M. Boyd: L'hypothèse de tout le monde.

M. Morin: Parce que, si je m'en réfère à ce tableau, je constate, par exemple que, pour le coût d'investissement original et normalisé par kilowatt installé à La Grande, c'est de $1585. Ce sont vos propres chiffres. Si je regarde au tableau, Gentilly II coûtera $612 000 000 pour 635 mégawatts, c'est-à-dire un peu moins de $1000 du kilowatt.

Même si on monte à $700 000 000 au lieu de $612 000 000, cela fait encore une différence dans ce cas en faveur du nucléaire. Mais je veux bien qu'on revienne par la suite... point par point.

M. Perreault: Ne parlez pas seulement du kilowatt, parlez du kilowatt-heure.

M. Boyd: M. le Président, M. Morin sait fort bien que les spécialistes, les techniciens qui travaillent pour vous ont passé de longues heures à l'Hydro-Québec et se sont fait expliquer tout cela. Je pense qu'ils ont endossé notre façon de calculer. Tout à l'heure, M. Lessard a dit: Suivant nos hypothèses! Nos hypothèses ont été discutées longuement par vos techniciens, vos spécialistes qui les ont acceptées.

Il ne faudrait pas toujours recommencer sur cela.

M. Morin: Non, non, sauf que je ne sais pas si les hypothèses ont été établies à la satisfaction complète de ceux qui y sont allés, je ne le pense pas.

M. Boyd: J'ai compris que oui. M. Morin: Je ne le pense pas.

M. Cournoyer: Vous ne dirigez pas votre parti, vous?

M. Morin: C'étaient les techniciens...

M. Cournoyer: Vous n'avez pas de belles petites lettres comme moi sur les questions que vous avez posées à vos techniciens à la suite des visites qu'ils ont faites à l'Hydro?

M. Morin: Nous avons posé beaucoup de questions, mais je dois dire que, dans le nucléaire, M. Boyd...

M. Cournoyer: ... poser des questions à vos techniciens.

M. Morin: Je ne voudrais pas que vous parliez pour nous. On ne nous a pas entièrement satisfaits sur la validité des hypothèses. Je prenais cela

comme exemple parmi d'autres, parce que ce sont vos propres tableaux qui nous conduisent à ces conclusions.

M. Boyd: Si vous employez mes tableaux, il faudrait me donner le temps et l'occasion de répondre complètement à la question.

M. Morin: Oui, je pense qu'on le devrait.

M. Boyd: On discutait d'inflation. Vous pouvez revenir là-dessus n'importe quand. Dans le cas de Gentilly II, c'est un chiffre qui est à réviser très bientôt. Toutes les soumissions qu'on reçoit dans le moment sur Gentilly II sont à la hausse considérablement. Mais, à part cela, le facteur le plus important, c'est qu'on ne compare pas des choses qui sont de même durée.

Une centrale nucléaire, au bout de trente ans, c'est fini. Une centrale hydraulique, au bout de cinquante ans, à compter du moment où on établit la comparaison, c'est encore bon et bon pour cinquante ans de plus. On arrête à cinquante ans.

M. Morin: C'est juste. Enfin, nous pourrons revenir là-dessus pour le détail. Est-ce qu'on pourrait maintenant venir à la question que je soulevais tout à l'heure, qui est celle des sous-hypothèses? M. Larochelle pourrait peut-être nous expliquer où en est cet aspect du dossier.

M. Larochelle: Je pense que vous m'aviez demandé de comparer année par année les taux qui avaient été utilisés lors de l'estimation de 1974 avec les taux utilisés dans l'estimation récente. Pour reprendre à partir de 1974, dans l'estimation précédente, on avait 9% en 1974, en 1975 et en 1976. Maintenant, c'est sûr que, dans la nouvelle estimation, on utilise la réalité: 19% en 1974; 20,7% en 1975; en 1976, c'est 9,9% qui a été utilisé. Donc, dès 1976, vous avez une augmentation qui va de 9% à 9,9% entre les deux prévisions du taux d'inflation. Maintenant, si je procède année par année, en 1977, l'estimation précédente était de 7%, la nouvelle 8,7%. En 1978, l'ancienne, 6%, la nouvelle, 7,6%. En 1979, l'ancienne, 6%, la nouvelle, 9,6%.

Seulement un commentaire. Vous allez peut-être me dire: Pourquoi est-ce que cela augmente entre 1978 et 1979? C'est à cause de certaines hypothèses qu'on a faites, étant donné qu'en 1979, théoriquement, ce serait la fin des contrôles antiinflation et qu'il y aurait peut-être un certain rattrapage qui se ferait. En 1980, 6% selon l'ancienne estimation et 7,1% selon la nouvelle. De 1981 à 1985, un taux uniforme chaque année. Selon l'ancienne prévision, un taux d'inflation de 5%; selon la nouvelle, 6,1%. Ceci nous conduit immédiatement aux deux taux moyens, aux deux taux équivalents sur toute la période du chantier, qui ont été cités ce matin. Dans l'ancienne prévision, de 1974 à 1985, on appliquait ces taux d'inflation annuels à tout le projet, selon l'échelonnement des déboursés, pour obtenir $11,9 milliards, c'est-à-dire 9% en descendant jusqu'à 5%. A partir de cela, on se demandait effectivement quel était le taux équivalent. A ce moment, il y avait différents essais de faits, de 5%, à 6%, à 7%, à 8%, etc., jusqu'à ce qu'on atteigne par essais successifs le taux qui donnait le même résultat à la fin, soit $11,9 milliards.

C'est de cette façon qu'il y a environ deux ans, par une méthode en partie graphique, les 7% avaient été obtenus. Cette année, on a fait le même exercice, mais on l'a fait de façon plus détaillée, c'est-à-dire par calcul. Les petites machines électroniques sont plus répandues. Cette fois, si on fait le calcul à partir de 1974 pour avoir la comparaison sur la même période, on obtient un chiffre de l'ordre de 12%, qui a été mentionné ce matin. Effectivement, c'est un petit peu moins de 12% si on l'applique à l'ancien flux monétaire, avant la révision des coûts de base. C'est de l'ordre de 12% si on l'applique au nouveau. Donc, on peut dire 12% pratiquement dans les deux cas.

Maintenant, pour donner une idée de l'inflation restante — après tout on est en août 1976 — de 1976 à 1985, si, par la même approche, on essaie de trouver quel serait le taux annuel unique qui nous amènerait à $16,2 milliards à la fin, par essais successifs, on trouve que ce taux unique serait d'environ 8%. Il nous amènerait au même résultat.

Evidemment, il est plus facile de donner un seul chiffre plutôt que des chiffres annuels pour montrer les répercussions. Cela permet de fixer les idées, mais les calculs, ce qui compte, ce qui est fait, avec les chiffres détaillés de chaque année.

M. Morin: Evidemment, on est un peu dans le royaume de la conjecture et c'est bien difficile pour vous comme pour nous de savoir si ces 8% se vérifieront ou ne se vérifieront pas. Dans le passé, nous pensions que 7% étaient inférieurs à la réalité et nous penchions pour 8% ou 9% et vous en êtes à 8%.

Cependant, j'observe que, pour l'année 1976, vos prévisions sont de 9,9%. Les mois écoulés vous permettent-ils de soutenir ce chiffre? Quand on le compare avec celui de l'an dernier de 20,7%, on peut se poser des questions.

M. Larochelle: II me fait plaisir que vous me posiez cette question.

M. Morin: Je suis heureux de vous la poser aussi, M. Larochelle.

M. Larochelle: D'abord, je ne sais pas si nous sommes dans le royaume ou dans la république de la conjecture, mais je dois dire que je m'attendais à cette question et que nous avons préparé certaines analyses à partir des plus récents chiffres.

M. Morin: Y en a-t-il d'autres auxquelles vous vous attendez? On peut peut-être...

M. Larochelle: Quand vous les poserez, je vous mentionnerai si on les attendait ou non.

M. Lessard: Des fois que cela nous donnerait des indications.

M. Morin: Non, mais si cela avait pour objet de renseigner la population, vous savez, il ne faut peut-être pas attendre qu'on vous pose des questions.

M. Larochelle: Très bien. Alors, s'il y a des réponses qui me viennent à l'esprit, je vous les donnerai avant que les questions ne soient soulevées.

On a fait ceci. On a regardé l'évolution avec les statistiques fédérales, qui semblent bien appréciées comme point de référence, jusqu'en juin, juillet, c'est-à-dire les statistiques disponibles. Ce qui se passe jusqu'ici est qu'il y a une possibilité — mais je ne veux pas lancer de rumeur — que nos prévisions, pour une fois — et je tiens mes doigts croisés, évidemment — pourraient être, du moins — ne nous aventurons pas trop loin — pour 1976, assez bonnes.

M. Lessard: Avec une telle réponse, on peut tout dire!

M. Larochelle: Laissez-moi compléter ma réponse.

M. Lessard: Cela veut dire entre quelle marge? De combien sera la fourchette?

M. Cournoyer: ... le ministre des Richesses naturelles.

M. Larochelle: A la lumière de l'évolution des prix au cours des six premiers mois de l'année, il se révèle que, du côté de certains matériaux, l'évolution pour l'année pourrait être légèrement plus basse.

Par contre, pour un matériau comme le ciment, par suite de la révision de la statistique fédérale de janvier 1976, on s'attend à une sous-estimation. Donc, dans l'ensemble, un dans l'autre, je dirais qu'étant donné le point où on en est en 1976 le chiffre de l'ordre de 10% a assez peu de chances de varier beaucoup, dans un sens ou dans l'autre d'ailleurs.

Maintenant, en ce qui concerne 1977, 1978 et les autres années, comme vous le savez, nous avons actuellement, depuis le 14 octobre 1975, I'application des mesures anti-inflationnistes. Ces mesures concernant, bien sûr, l'évolution des rémunérations et les mesures les plus spectaculaires, mais aussi, elles sont accompagnées de tout un train de mesures concernant le logement, l'alimentation, la réduction du rythme de croisière des dépenses publiques et, ce qui est plus important encore, une croissance plus lente de la masse monétaire"; comme les "monétaristes" disent: Plus la masse "monétaire" évolue rapidement, plus il y a d'inflation; dans les récentes années, elle a eu tendance à augmenter de 15% à 20% par année. Il semble maintenant qu'on veuille ramener son rythme à 10%.

Nous ne faisons pas les politiques, mais nous les analysons.

Nous regardons ce que les spécialistes des maisons de courtage, des banques, d'autres institutions, des gouvernements et ainsi de suite peu- vent avoir à dire là-dessus et on forme notre propre opinion. Au moment où on sort nos prévisions, on pense toujours que ce sont les meilleures possible. Mais franchement, à ce stade-ci, il y a une volonté bien arrêtée des gouvernements de freiner l'inflation et semble-t-il — est-ce un hasard ou est-ce le résultat de cela, on ne serait pas en mesure de l'affirmer avant la fin de l'année — une évolution favorable, en particulier, des prix à la consommation. Il semble que l'augmentation des prix à la consommation au Québec pour l'année 1976 sera peut-être de l'ordre de 7%, alors que la balise fédérale est de 8%.

Etant donné tout cela, je peux affirmer aujourd'hui sans grande crainte d'erreur, au mois d'août, que le taux de l'ordre de 10% pour l'inflation est sûrement un très bon ordre de grandeur pour les centrales hydroélectriques au Québec en 1976.

M. Morin: Les 9,9% comprennent, j'imagine, les 50 cents d'augmentation accordés en mai.

M. Larochelle: Oui, les 9,9% tiennent compte d'une moyenne. C'est sûr qu'ils comprennent, si on se reporte à l'année 1975 comme base, le forfaitaire de 85 cents qui était composé de 59 cents en janvier 1975 et de 26 cents en mai. Cela tenait compte aussi pour 1975, comme base, des augmentations de 35 cents en mai et de 20 cents en octobre. Ce qui est arrivé, c'est que pour 1976, il y a eu une augmentation de $1.40 en mai et dont nous tenons compte.

Nos calculs englobent non seulement le salaire lui-même, mais de diverses hypothèses sur les avantages sociaux tels que congés payés, Régime de rentes du Québec, Régime d'assurance-maladie du Québec, Commission des accidents du travail, assurance-chômage et ainsi de suite.

M. Morin: II est exact que le décret va faire I'objet d'une renégociation, ces temps-ci. Avez-vous intégré des prévisions à ce sujet? Je ne demande pas un montant. Je comprends très bien les raisons qui feraient que vous ne pouvez répondre, mais avez-vous pris cela en considération, la possibilité d'une renégociation du décret?

M. Larochelle: Je ne pense pas que ce soit difficile de répondre à cela sans aucunement nuire aux négociations, on a utilisé les prescriptions de la Loi des mesures anti-inflationnistes. Ce qu'on a comme augmentation pour 1976, c'est le taux permissible étant donné les augmentations antérieures; c'est de l'ordre de 8%. Si ce qui sera effectivement négocié est supérieur, c'est sûr que cela affecterait notre prévision.

M. Morin: C'est pour cela que je parlais du royaume de la conjecture: même pour l'année courante, cela peut l'être au moins un peu.

M. Larochelle: Evidemment, il est plus facile de discuter des statistiques passées que des prévisions concernant l'avenir, mais on n a pas le choix.

M. Morin: D'accord. Une dernière question. Il y a dans vos prévisions pour l'année 1979 une hausse assez spectaculaire à 9,6%, alors que pour l'année précédente ce serait retombé à 7,6%.

NI. Larochelle: Vous avez raison.

M. Morin: Oui. Je ne suis pas sûr que vous ayez expliqué cette hausse.

M. Larochelle: J'ai mentionné... M. Morin: C'est la fin des contrôles.

M. Larochelle: C'est cela. J'ai mentionné, sans entrer dans le détail, ici, qu'étant donné le frein, le serrage de ceinture, si vous voulez, mis par les contrôles jusqu'en 1978, on a utilisé une hypothèse d'ajustement en 1979.

Il est sûrqu'au fur et à mesure que le temps va passer, il est possible que le gouvernement fédéral s'arrange pour que cela se fasse plus en douceur que cela. Nous, on a fait un ajustement tout d'un coup en 1979, mais il se pourrait que ce soit étalé dans le temps, soit en 1979 ou après ou même avant 1979. C'est essentiellement dû aux hypothèses et à nos interprétations concernant l'application des mesures antiinflationnistes. Il fallait refléter peut-être un certain relâchement à la fin des contrôles.

M. Morin: Une toute dernière question que j'avais posée l'année dernière et que je voudrais reposer cette année dans le contexte nouveau dans lequel on se situe. En chiffres absolus, quel montant représente une variation à la baisse ou à la hausse de 1% dans le taux moyen? Vous vous souvenez de cette question l'an dernier. Je pense qu'on avait estimé que cela représentait $500 millions, si ma mémoire est bonne. Cette année, est-ce que le montant demeure le même? Il devrait, lui aussi, j'imagine, être un peu à la hausse.

M. Larochelle: Je ne l'ai pas calculé moi-même, mais je pense que ce serait du même ordre de grandeur. Je ne sais pas si quelqu'un d'autre l'a calculé?

M. Boyd: Je ne l'ai pas calculé. On peut regarder,

M. Morin: Non, c'est l'ordre de grandeur qui m'intéresse. Cela peut-être un petit peu plus.

M. Boyd: Ce serait l'ordre de grandeur.

M. Morin: Vous êtes le spécialiste de l'inflation. Vous n'êtes pas celui du taux d'intérêt, mais vous aviez peut-être d'autres documents à déposer. J'en profite, M. le Président, pour faire un aparté sur cette question. Il arrive souvent que l'Hydro se présente avec des boîtes fort intrigantes à l'arrière et des piles de documents. Mais j'ai cru observer que la pratique est de ne déposer que ceux qui sont réclamés par l'Opposition, parce qu'en général c'est l'Opposition qui pose des questions.

M. Perreault: Vous ne nous laissez pas le temps. Vous parlez tout le temps.

M. Morin: Je me demande s'il ne serait pas opportun qu'on adopte une autre façon de procéder. Il y a certainement des questions qui nous viendraient à l'esprit ou encore des réponses qui seraient données d'avance à nos questions si la SEBJ et l'Hydro déposaient les documents qu'elles ont apportés avec elles. N'attendez pas qu'on les réclame. En général, cela arrive tard. Au moment où on les réclame, nous n'en connaissons pas le contenu. Le temps qu'on en prenne connaissance, on n'a pas le même temps pour se préparer. J'en fais une suggestion et je pense que ce serait une façon peut-être plus ouverte de procéder. Ce serait susceptible de contribuer à ce que le projet du siècle devienne peut-être un petit peu plus le projet des Québécois. Pour montrer que nous sommes devant une transparence complète des dirigeants de ces organismes, il faudrait que vous déposiez devant la commission un exemplaire de tout de que vous avez apporté. Nous allons en faire notre profit, nous allons lire tout cela et peut-être y trouverons-nous toutes les réponses à toutes nos questions. Je vous en fais une suggestion, M. le Président.

M. Boyd: M. le Président, on essaie d'informer le plus possible. Je pense que vous remarquerez que, dans la présentation que j'ai faite ce matin et dans celle que M. Giroux a faite la semaine dernière, notre texte est précisément fait de manière à ouvrir toutes sortes de portes et à suggérer toutes sortes de choses, toutes sortes de questions. M. Cournoyer en a aussi suggéré ce matin. On pense que c'est la meilleure façon d'agir de faire une présentation qui peut paraître longue, mais le but, c'est d'ouvrir différentes avenues pour poser des questions. Evidemment, ce qu'on apporte, c'est ce qu'on pense... Il y a des statistiques. Ce que M. Larochelle vient de vous résumer, c'est le résultat de sa connaissance. Il aurait fallu qu'il s'assoie pendant des heures pour écrire ce qu'il vient de vous donner. On lui demande de synthétiser sa connaissance et d'en faire une capsule pour une présentation. Il est maintenant ouvert à toutes les questions sur l'inflation. Dans tous les domaines, c'est la même chose. On essaie de plus en plus de vous donner des documents d'avance.

M. Morin: D'accord.

M. Boyd: Notre rapport d'activité, je pense que vous l'avez eu. Cela aussi ouvre toutes sortes de portes à des questions.

M. Morin: Oui. M. Boyd, acceptez-vous ma suggestion? Dans la mesure où vous avez pris la peine d'apporter des documents ici, pour le cas où on vous poserait la question, ne serait-il pas opportun que vous les déposiez de toute façon, même si nous ne posons pas la question?

M. Boyd: En principe, je n'ai pas d'objection à votre demande, mais il y a des tas de choses qui ne seraient pas nécessaires.

M. Cournoyer: M. le Président, là-dessus, je suis d'accord avec le chef de l'Opposition dans le sens suivant.

M. Morin: Pourquoi les avez-vous apportés?

M. Cournoyer: Pour nous autres, il y a un paquet de boîtes en arrière. Là-dessus, on les voit, les boîtes. La minute où vous décidez que quelque chose est d'intérêt public, vous le sortez. Donc, on sait que tout ce qu'il y a dans les boîtes, normalement, est d'intérêt public, à condition qu'on pose la question d'intérêt public. On se demande quelle question poser pour avoir le document qu'il y a dans la boîte qui est là, mais on ne sait pas ce qu'il y a dedans.

Supposons que là, je suis d'accord avec le chef, si vous ne voulez pas les sortir...

M. Boyd: Voulez-vous qu'on les classe?

M. Cournoyer: ... ne les amenez pas là, c'est une affaire, c'est quelque chose d'impressionnant. »

M. Lessard: A moins qu'on puisse aller voir ce qu'il y a...

M. Cournoyer: Je ne sais pas...

M. Morin: C'est parce que vous ne devriez pas concevoir ça comme un jeu du chat et de la souris.

M. Boyd: II y a des boîtes qui comprennent des histoires comme celles-là.

M. Lessard: On les a eus, ça.

M. Boyd: Des documents qui prennent de l'espace.

M. Cournoyer: On ne veut pas savoir ce qu'il y a dedans, M. Boyd, mais si vous pensez nous impressionner avec ça, on va être impressionné quand on va avoir vu ce qu'il y a dedans.

M. Morin: Davantage en tout cas.

M. Boyd: Vous savez bien, M. le Président, que ce n'est pas notre fonction ni notre intention d'impressionner...

M. Lessard: Quand cela a été le temps...

M. Cournoyer: Le colloque...

M. Lessard: ... de nous convaincre de quelque chose comme la Jacques-Cartier, vous êtes arrivé avec toute une série de documents et vous n'avez pas eu peur de nous en donner; ç'a été positif.

M. Cournoyer: ... comme celui-là, à cette heure-là...

M. Lessard: ... mais là, est-ce que c'est pour nous en cacher? C'est ça qu'on se demande.

M. Perreault: ... vos documents, cela n'a pas réussi.

M. Morin: Je ne mets pas en doute la bonne foi de qui que ce soit, mais je vous demande si vous auriez l'amabilité de déposer ce que vous avez jugé bon d'apporter. Je suis sûr que ce serait utile à tout le monde.

M. Cournoyer: On va vous donner une chance, M. Boyd, jusqu'à demain matin, de déposer ce que vous aurez jugé bon de rapporter.

M. Boyd: M. le Président, j'ai fait...

M. Lessard: Ce n'est pas drôle de rapporter ça, dans le fond. Si c'est à la pesanteur, ça va coûter encore plus cher.

M. Boyd: M. le Président, premièrement, ce qu'il y a là-dedans, ce n'est pas en 50 copies. Ce sont des renseignements de base qui sont là pour nous aider à vous répondre. Vous voulez qu'on vous réponde, ce sont des renseignements de base qui nous permettent de vous répondre. Vous n'aimez pas ça quand on vous dit: On va vous envoyer ça dans un mois ou dans six mois ou quand on va y penser. On essaie de vous répondre le plus rapidement possible et, quand on peut le faire tout de suite... C'est parce qu'on a en arrière des boîtes dans lesquelles les gens fouillent, ils viennent m'apporter un papier, ou portent un papier à M. Giroux. Quand c'est l'Hydro-Québec, c'est l'inverse.

M. Lessard: Ah! ce sont vos classeurs. M. Boyd: Ce sont les classeurs...

M. Lessard: Bon, ce sont des classeurs comme documentation interne pour répondre aux questions des parlementaires.

M. Boyd: C'est exactement ça. Ce sont des classeurs. On n'est pas à Montréal sur la rue Dorchester. On est ici. Vous nous posez des questions, on essaie honnêtement de vous répondre au coton. Pour ça, il faut avoir nos classeurs.

M. Lessard: Au coton, ça: ça dépend de l'interprétation que vous donnez.

On a les réponses que vous voulez bien nous donner.

M. Cournoyer: II y en a qui ont des petits cotons et il y a des gros cotons.

M. Boyd: Evidemment, ce n'est pas à moi d'interpréter mon opinion. Je disais, M. le Président, qu'on a distribué 4 tableaux ce matin, avant de déjeuner. Vu que les membres les ont, j'aimerais pouvoir utiliser les cartons qui correspondent à ça et les expliquer. Après ça, s'il y a des questions... Sinon, on pourra les oublier.

Taux d'intérêt

M. Morin: M. le Président, on peut y revenir également demain. Je voudrais qu'on consacre tout le temps à chaque tableau, mais au moment où, dans le développement de nos questions, ce

sera le plus opportun. Si vous n'y voyez pas d'objection, j'aurais préféré maintenant parler du taux d'intérêt et j'imagine que vous avez aussi un spécialiste du taux d'intérêt. Si vous aviez des documents, j'imagine que le président aura...

M. Giroux: M. le Président, je crois qu'un spécialiste en taux d'intérêt, ça n'existe pas. Il y a des gens qui rêvent de taux d'intérêt futurs. On doit payer l'intérêt dont le prêteur veut bien nous faire les avances.

Les taux d'intérêt sont souvent contrôlés par la Banque du Canada. Actuellement, vous avez, depuis une quinzaine de jours, des marchés d'obligation qui sont assez intéressants. Personnellement, je crois que le marché va se maintenir autour des taux actuels.

L'an prochain, le marché sera peut-être un peu plus facile au début et un peu plus difficile par après. Mais tous les taux qui nous affectent ici en particulier, découlent surtout de la politique économique américaine. C'est donc pas mal la conjecture de l'économie américaine qui a un effet sur le taux d'intérêt. Je suis bien prêt à m'asseoir. J'ai souvent écouté de nombreuses théories sur les intérêts futurs et j'attends encore pour voir que cela arrive après six mois.

M. Morin: Avez-vous des sous-hypothèses pour les années qui viennent puisqu'en 1976 votre emprunt d'un milliard était à 10,25%, je crois, ce qui ne représente pas une variation considérable par rapport à la moyenne que vous avez retenue? Mais comme dans le cas de l'inflation, avez-vous un tableau qui nous fait part de vos projections?

M. Giroux: Non. Parce qu'au point de vue de taux d'intérêt, il y a deux facteurs. Vous savez que, depuis je ne sais quelle année, ce qu'on appelait l'intérêt libre a disparu avec l'installation des banques centrales. Alors, tout dépend des gouvernements: du gouvernement fédéral, du gouvernement fédéral américain et des banques centrales des pays européens.

C'est pourquoi vous avez des variations. Entre autres, par exemple, actuellement, on a peut-être un taux d'intérêt autour de 10,25% et 10,30% au Canada. Nos mêmes titres, vendus sur les marchés européens, sont autour de 8,75% et 9%. Ce sont des caprices.

M. Morin: D'accord.

M. Boyd: Mais, dans l'ensemble des gens qui font actuellement ce qu'on appelle les hypothèses maintiennent que le taux d'intérêt va rester autour de 10% plutôt que de descendre de façon draconienne.

M. Morin: Bon! Autrement dit, votre taux moyen est plutôt déterminé au pifomètre, si je comprends bien.

M. Giroux: Exactement. C'est pourquoi nous sommes très près de la vérité.

M. Morin: Plût au ciel que vous ayez le même pifomètre pour l'inflation!

M. Giroux: Cela n'est pas mon pif.

M. Morin: M. le Président, je ne suis pas sûr d'avoir eu une réponse de M. Boyd à ma question antérieure, à savoir s'il lui était possible de déposer devant la commission les documents que son équipe a apportés et juge nécessaires à la compréhension de la commission. Vous ai-je persuadé de déposer ces documents ou allez-vous continuer de nous les donner sur questions?

M. Boyd: Là-dessus, M. le Président, on a expliqué que les boîtes ici semblent intrigantes et impressionnantes. Je suis d'accord, la salle est malheureusement trop petite pour pouvoir les cacher. Ce sont des dossiers, en somme, que nous avons sortis de nos classeurs, que nous avons amenés ici, comme je vous l'ai expliqué.

Ce sont des dossiers qui sont là pour répondre aux questions. On avance dans un sujet, on nous demande des précisions, des détails, on nous demande d'aller plus loin, on le fait, mais, pour cela, il faut avoir des dossiers à l'arrière-scène. On parlait de la population l'autre jour, on avait des tableaux, on a voulu aller voir plus loin. Vous avez posé d'autres questions là-dessus, on vous a dit qu'on était pour vous préparer une réponse. On a donc une douzaine de réponses à vous remettre. Sur les questions de l'autre semaine, il y a douze réponses qui sont préparées qu'on peut vous remettre et qui vont compléter l'information qu'on vous a donnée.

M. Morin: Pourrons-nous avoir ces documents, M. Boyd?

M. Boyd: Vous pouvez les avoir immédiatement, j'en suis assez certain. Je voulais, en effet, vous les donner aujourd'hui.

M. Morin: Ce serait apprécié.

M. Lessard: Normalement, cela aurait pu être donné au début d'une commission.

M. Boyd: II y a des réponses sur douze questions, la dernière, porte sur Blanc-Sablon. Ces réponses ont été préparées depuis deux semaines et nous sommes en mesure de vous les déposer. Ce qu'on aurait préféré, c'est d'avoir toutes les boîtes ici pour pouvoir vous répondre immédiatement, mais on ne les avait pas toutes...

M. Morin: M. Boyd...

M. Boyd: Ce qu'il y a là-dedans, c'est cela.

M. Morin: M. Boyd, comprenons-nous bien, quand je pose des questions qui exigent des recherches ou une enquête de votre part, je ne m'attends pas à avoir la réponse immédiatement. Mais je sais, parce que je l'ai observé au cours des

années précédentes, que certains documents que vous avez préparés ne nous sont donnés que si nous posons la question. Je l'ai observé bien des fois. Je me disais que, puisque vous vous êtes donné le mal de préparer des documents, pour le cas où nous poserions des questions sur tel ou tel sujet, pourquoi ne déposeriez-vous pas la masse devant la commission? Je suis sûr que cela servirait les fins de l'opinion publique. Je suis sûr que cela aiderait à renseigner...

M. Boyd: Monsieur...

M. Morin: Parce que la politique inverse nous donne l'impression que vous ne nous donnez que ce qu'on va chercher. Il me semble que cela aiderait la...

M. Boyd: Je voudrais essayer de dissiper ce doute qui a été exprimé ici. Les documents qu'on a préparés pour la distribution, on les donne. Ce qui est là, ce sont des renseignements de fichiers pour substancier". Dans mon texte de 25 pages de ce matin, je vous ai dit tout à l'heure qu'il y a un tas de portes ouvertes là-dedans.

Je n'ai pas préparé un texte sur chacune des portes ouvertes, mais on espère avoir dans nos boîtes des réponses qui, si vous me posez telle question, contiendront un document qui va me permettre de sortir des chiffres ici et là. Tout à l'heure, on a parlé des différences entre des estimations internes, des soumissions reçues et cette question des budgets. Je n'avais pas préparé un document là-dessus pour distribution, mais on m'a donné un document que je connaissais. Un document interne que j'avais demandé pour mon information afin de savoir comment évoluent les soumissions internes. Comme gestionnaire, j'ai demandé cela.

On en parle. J'ai fait sortir le document. Ce n'est pas une cachette, c'est un dossier qui est là-dedans. C'est cela, M. Morin.

M. Morin: Bien.

M. Boyd: Les documents qu'on a préparés, en pensant les distribuer, on les distribue.

M. Morin: Oui.

M. Boyd: Celui-ci, c'est la réponse à vos questions de l'autre jour.

M. Morin: Vous allez nous donner le temps de le lire.

M. Boyd: Si j'avais eu l'occasion de les déposer plus tôt aujourd'hui, je l'aurais fait. C'était mon intention de les déposer avant la fin de la journée.

M. Morin: Bien. Je vous remercie. Je vais en prendre connaissance et, s'il y a quelques problèmes, je vous en parlerai demain. Je vous pose une question spécifique pour terminer sur ce sujet. Y a-t-il d'autres documents que vous ayez apportés à l'intention de la commission? Si tel était le cas. voudriez-vous les déposer tout de suite de façon qu'on puisse en prendre connaissance?

M. Boyd: Je vais consulter et vous donner une réponse.

M. Morin: C'est cela.

M. Boyd: Après vérification, il reste le document dont on vous a parlé tout à l'heure. Ce sont les contrats d'achat, les contrats de services, etc... de $100 000 et plus, dans la forme de notre engagement de l'année passée. C'est volumineux. C'est une copie, cela. Si vous permettez, on en déposera une pour la commission, une au chef de l'Opposition et une au ministre.

M. Morin: Volontiers.

M. Boyd: On pourra répondre à vos questions plus tard.

M. Morin: Bien. Je passe à un autre aspect, toujours du problème des coûts, M. le Président. Dans une conférence de presse récente...

M. Boyd: Excusez-moi. M. Morin: Je vous en prie.

M. Boyd: Je voulais être sûr que j'en avais une pour vous répondre. Excusez-moi.

Modifications techniques

M. Morin: Dans une conférence récente, le ministre des Richesses naturelles a déclaré qu'une partie de la hausse de $4,3 milliards serait attri-buable au fait que les ingénieurs avaient dû faire de multiples modifications au plan en cours de route en raison de l'absence d'études adéquates. C'est, du moins, ce que rapportent les journaux. Je ne sais pas s'ils ont mal interprété le ministre.

M. Cournoyer: Avec toute l'honnêteté intellectuelle que je vous connais, vous avez lu la déclaration exacte.

M. Morin: J'ai lu la déclaration dans les journaux.

M. Cournoyer: La déclaration exacte, vous ne I'aviez pas...

M. Morin: Je me suis fié aux journaux. S'il y a une déclaration exacte, vous pourrez peut-être nous dire laquelle. En tout cas. j'ai cru comprendre qu'il faisait entrer dans cette hausse de $4.3 milliards le fait que les ingénieurs avaient dû faire des modifications au plan en cours de route, que cela expliquait à tout le moins une partie de I augmentation. J'aimerais vous demander si c'est exact. Quelle est l'ampleur des dépassements at-tribuables à cette cause spécifique?

M. Cournoyer: Je ne sais pas si vous avez entendu ce matin M. Boyd nous expliquer qu'il y avait $470 millions de travaux qui avaient été faits, qui n'étaient pas prévisibles en 1974, et que cela expliquait au moins pour $470 millions les travaux techniques. Ce n était pas à cause des erreurs des ingénieurs, mais parce qu'effectivement des travaux techniques plus approfondis nous amenaient à conclure d'une façon différente de la façon dont on concluait en 1974. S'il y a une explication différente...

M. Morin: Effectivement, il y a des modifications techniques pour un montant de $470 millions. Il se peut qu'il y ait d'autres... Je ne sais pas si c'est seulement à cela que le ministre faisait allusion.

M. Cournoyer: Je donnais cela comme exemple d'une possibilité. Il y a quelque chose qui est nouveau depuis 1974, qui explique une partie de l'augmentation. Si on ne peut pas expliquer toute l'augmentation par la seule inflation, il y a des choses qui avaient été changées.

M. Morin: C'est bien ce que je pensais aussi.

M. Cournoyer: J'explique ce que j'ai dit. M. Boyd peut répondre à votre question maintenant, mais ne peut pas savoir ce que j'ai dit...

M. Morin: Parce que nous avons toujours pensé qu'il y a un rapport que M. Boyd n'aime pas beaucoup, mais un rapport qui a été fait pour le conseil des sciences, dont je sais que M. Boyd va nous dire tout de suite qu'il n'avait pas été accepté ou entériné par le conseil des sciences, qui, justement, soulignait ce manque de planification à l'origine, ce manque de préparation. Le ministre semblait faire une allusion à cela, c'est du moins ce que j'ai cru comprendre, quand il parlait du fait que les ingénieurs avaient dû refaire un certain nombre de modifications au plan. Alors, je vous demande des détails.

M. Cournoyer: Vous devriez être journaliste au Jour, vous.

M. Morin: J'aimerais que vous expliquiez ce que le ministre a pu vouloir dire.

M. Cournoyer: II ne sait pas ce que j'ai pu vouloir dire, c'est moi qui l'ai dit. Ce n'est pas lui.

M. Lessard: Non, mais vous vous êtes basé sur quelque chose pour le dire.

M. Cournoyer: Je me suis basé sur le fait qu'il y a une affirmation de $470 millions...

M. Lessard: Ce serait probablement 10%...

M. Cournoyer: Effectivement, ce sont des travaux différents de ceux qui étaient prévus en 1974 qui causent une augmentation des coûts de $470 millions. Est-ce que ce sont des erreurs des ingé- nieurs? Pas du tout. Effectivement, en allant plus loin dans la recherche, en creusant plus profondément, on trouve d'autre chose qu'on n'avait pas vu avant. Il fallait les faire les travaux pour pouvoir arriver à une conclusion.

M. Morin: Oui, mais j'aimerais mieux...

M. Cournoyer: Ils vont peut-être en trouver une autre l'année prochaine. C'est l'explication qu'on m'a donnée lorsque je me préoccupais de cela, pendant que vous pensez que je ne m'en préoccupais pas.

M. Morin: Si cela ne vous fait rien, j'aimerais maintenant avoir la réponse de M. Boyd.

M. Cournoyer: Ce n'est pas lui qui va dire ce que j'ai dit. C'est moi qui vais vous dire ce que j'ai dit. Ce n'est pas M. Boyd qui va expliquer ce que j'ai dit.

M. Morin: M. Boyd peut très bien expliquer ce que vous avez dit, à supposer que vous ayez pris ce chiffre dans son rapport.

M. Cournoyer: Pas du tout. Non. M. Boyd n'expliquera pas ce que j'ai dit. Ce ne sont pas ses affaires. C'est moi qui suis responsable ici devant vous quand je suis ici.

M. Lessard: Vous avez dit...

M. Cournoyer: M. Boyd est responsable pour M. Boyd, n'est-ce pas, et pour la Société d'énergie. C'est encore suffisant pour vous, M. Boyd; ne vous occupez pas de moi.

M. Morin: M. Boyd?

M. Lessard: Cela démontre que vous n'êtes pas responsable de grand chose.

M. Morin: M. Boyd, j'ai des excuses à vous faire. Je pensais que vous aviez donné des explications au ministre. Je vois que, même cela, n'a pas été nécessaire, puisqu'il avait tout compris, sans que vous ne lui expliquiez. Je vous demande, néanmoins, quelle est l'ampleur des dépassements qui seraient dûs à ces changements de plan en cours de route.

M. Cournoyer: Des changements de plan, il n'y a pas de changement de plan en cours de route. Je n'ai jamais annoncé des changements de plan en cours de route.

M. Lessard: II y a eu des modifications majeures.

M. Cournoyer: Des modifications dans les coûts, parce qu'il y a des dépenses additionnelles. Il y a une différence entre des changements de plan et des dépenses additionnelles. On fait encore les barrages à la même place, excepté que dans le sous-sol on découvre différemment.

M. Morin: M. Boyd, Dieu sait que je n'aime pas toujours vos réponses mais, en l'occurrence, je préférerais que ce soit vous qui répondiez.

M. Boyd: M. le Président, je peux répondre?

M. Cournoyer: M. le Président, s'il répond et s'il me blâme, ça y est!

M. Lessard: Vous démissionnez?

M. Cournoyer: Lui, il démissionne. On va arrêter cela tout de suite.

M. Morin: Ah! Il retrouve de l'autorité tout à coup.

M. Cournoyer: Avec toute l'autorité que vous me prêtez, il est temps que j'en prenne un petit "boutte".

M. Morin: II serait temps, en effet.

M. Cournoyer: Celle que vous me prêtez seulement!

M. Boyd: Loin de moi cette idée de vouloir interpréter les autres et surtout le ministre. Alors, je vais vous répondre sur ce qu'on sait. Les $470 millions, ce sont des modifications techniques. Par des modifications techniques, on ne veut pas nécessairement dire des modifications d'ingénierie exclusivement, ni des modifications de plans exclusivement. C'est un ensemble de modifications techniques. C'est beaucoup d'argent, j'en conviens. Il y a bien des gens qui ne voudraient que $1 million sur les $470 millions. Mais, relativement, ce n'est pas tellement, mais c'est encore trop.

Les modifications techniques en cause, je vais en énumérer un certain nombre. A LG 2, on a eu des problèmes de fondations et d'étanchéité aux digues Duncan, qui étaient imprévus. On a fait l'installation de pompes aux digues Duncan justement pour deux raisons importantes: une pour éviter de déranger le lac Desaulniers au point de vue de l'environnement et l'autre, c'est qu'en pompant cette eau en arrière de la digue, on l'envoie dans le réservoir et on l'utilise à bon escient.

Au départ, lorsque les plans ont été faits, on avait fait beaucoup d'investigations, mais, dans un pays lointain comme cela où la seule façon d'entrer, à l'époque, était en hélicoptère, où vous avez des milles et des milles de digues à parcourir, vous en faites des forages et vous entrez des "pé-pines" comme ils disent, des petites pelles, et vous faites toutes sortes d'expériences, d'analyses de sol, etc., et puis vous pensez tout avoir. Vous avez cela dans votre cour parfois. Vous creusez un trou ici et vous pensez que c'est correct et un autre gars vous dit: Creuse ici, tu va avoir de l'eau et il n'y en a pas.

Le sous-sol, c'est une chose qu'on recherche, qu'on étudie. On emploie les meilleurs spécialistes et il nous arrive des imprévus.

Donc, il y a l'imprévu des fondations. Deuxièmement, l'installation de pompes au point de vue écologiques du lac Desaulniers. On aurait très bien pu l'ignorer. En faisant ce pompage, cela rendait aussi la chose plus rentable.

Des critères d'excavation en surface plus sévères. Au point de vue de la construction, on a décidé d'établir des critères plus sévères.

Je pense que là-dessus personne ne nous blâmera. Quand on voit ailleurs qu'il y a des barrages qui partent, nous ne voulons pas courir de risque et en tenant compte des expériences ailleurs. On impose des critères plus sévères et cela coûte plus d'argent.

M. Lessard: Etant donné les critères plus sévères, j'espère qu'il n'y a pas de problème pour Manic 5.

M. Boyd: II n'y a pas de problème à Manic 5, à ce qu'on sache.

M. Morin: Parce que le député habite Haute-rive.

M. Dozois: II sait nager.

M. Cournoyer: ...qu'on sache.

M. Lessard: Cela vous inquiète.

M. Cournoyer: Non. Il peut changer de comté, comme moi.

M. Lessard: A cause des barrages, mais pas à cause de la population.

M. Morin: II faudrait qu'il change de couleur aussi.

M. Cournoyer: Ce n'est pas nécessaire. M. Lé-vesque n'a pas changé de couleur pour changer de comté. Il s'est essayé deux fois dans le même et une autre fois dans un autre.

M. Lessard: Ces critères plus sévères — la question est assez importante— ne veulent-ils pas dire que, suite à vos études de barrages antérieurs, vos critères n'étaient pas assez exigeants.

M. Boyd: Nos critères étaient assez exigeants, selon la nature des terrains et des sols qu'on avait. Dans le cas des digues à LG 2, par exemple, on avait une qualité de roc qui était connue, on avait descendu des puits, on avait fait des galeries d'exploration, on avait sondé le roc, etc. — je vous parlerai des critères souterrains après — donc on avait fait tout cela. On connaissait bien le roc, on avait une bonne qualité de roc. Dans les digues qui s'étendent sur des vingtaines de milles, on pensait avoir la même qualité de roc. A certaines digues, lorsqu'on enlève des tonnes et des tonnes de terre, on a fait des forages. Les résultats nous donnaient qu'on avait du bon roc, mais lorsqu'on creuse, on se rend compte qu'à des places il y a

des galettes. On a donc fait venir nos experts de l'Hydro et de la société et nos consultants mondiaux — une demi-douzaine — et on a dit: Qu'est-ce qu'on va faire avec cela? Parce qu'on ne veut pas que cela parte. On a établi des critères et on ne veut pas que cela parte, mais cela coûte quelques millions de dollars.

M. Lessard: Vous voulez dire des critères plus exigeants que ceux qui avaient été exigés lors du début de ce barrage de la baie James?

M. Boyd: D'accord. La même chose nous est arrivée à Manic 5, la même chose nous est arrivée à Manic 3.

M. Lessard: C'est cela, mais pour que ce soit clair...

M. Boyd: On avait estimé Manic 3 à tant de millions et cela a fini pas mal plus élevé. Je ne veux pas citer les chiffres pour me faire blâmer, je ne les sais pas par coeur. Mais il y a une grosse différence. Quand on avait parlé de Manie 3, on a décidé: On fait Manic 3. On a dit: On le fait là. Et quand on est arrivé là, on a dit: le rocher, des deux bords, n'est pas bon et on s'est déplacé. On a dit: Là, le rocher est bon. On a commencé à regarder et il y avait un immense banc de sable. On a dit: C'est quand même la meilleure place. Que va-t-on faire avec ce sable? Va-t-on l'enlever? Cela va prendre deux ans. Ce n'est pas possible. On a consulté les meilleurs experts qu'on avait et les meilleurs au monde et on a dit: On va faire un mur, il est unique au monde. Il y a eu un tremblement de terre l'autre fois et il n'a pas bougé.

M. Lessard: Autrement dit, les critères plus exigeants dont vous parlez ne sont pas des critères plus exigeants par rapport à Manic 3 ou Manic 5, mais par rapport aux devis...

M. Boyd: Je vais être bien clair là-dessus. M. Lessard: C'est pour cela.

M. Boyd: Vous me reprochez de ne pas être clair.

M. Lessard: Même si tout à l'heure je vous ai posé une question, elle est sérieuse cette question.

M. Boyd: Moi aussi. Quand on a parlé...

M. Lessard: J'ai compris et je voulais que ce soit clair.

M. Boyd: ...de Manic 3, par exemple, qui est un cas que vous connaissez bien, on avait au départ, quand on avait fait les premières estimations, certains critères basés sur la connaissance qu'on avait du sol — et on l'avait cherché le sol — et on a changé le barrage de place.

Donc, à la fin on a dû avoir des critères plus exigeants. Je vous parle des digues à LG 2, c'est similaire. On ne se pose pas de questions. Va-t-on oublier cela en espérant que cela ne parte pas ou si on va faire l'ouvrage? On fait l'ouvrage. Malheureusement, il faut venir vous dire: Cela coûte tant de millions de plus. On ne peut pas être blâmés pour cela.

M. Morin: Néanmoins...

M. Boyd: Je n'ai pas fini. A LG 2 il y a plusieurs autres points.

M. Lessard: Vous dites que cela coûte cher. Pouvez-vous nous donner le montant d'argent que cette modification a comporté. Vous dites: Je vais être obligé de modifier cela...

M. Boyd: Je vais vous le donner globalement. A LG 2, c'est environ $80 millions et je n'ai pas fini d'énumérer les choses.

M. Morin: D'accord. Pour l'ensemble des travaux de la baie James, si on additionne les $74 millions d'aujourd'hui, cela fait plus d'un milliard.

M. Boyd: Pardon.

M. Morin: Oui, changements techniques en 1974, $700 millions. 17% d'augmentation sur ce chef-là seulement.

M. Boyd: Oui, mais ceux-là étaient d'une autre nature. On les a expliqués dans le temps. Si vous voulez que je revienne sur ceux-là, je pourrai revenir sur ceux-là.

M. Morin: Tout à l'heure. Continuez, je ne veux pas vous interrompre.

M. Boyd: Je pourrai revenir sur les changements techniques de ce temps. C'est pour cela que j'ai des boîtes en arrière. Ma boîte ici ne contient pas tout cela.

Donc, les critères d'excavation en surface sont plus sévères. Il y a des critères d'excavation souterraine beaucoup plus sévères pour une sécurité industrielle accrue. Maintenant, on doit prendre des précautions plus grandes. On a de l'excellent rocher. Les défauts de ses qualités dans le souterrain de LG 2, c'est que, dans les 24 ou 48 heures après avoir dynamité, avoir tout fait l'éla-gage, il y a des éclatements en surface de ce rocher. C'est à cause de sa consistance qu'il y a une galette qui part. A cause de cela, c'était imprévisible. Tous les forages révélaient que c'était du rocher numéro 1. On se rend compte qu'au point de vue industriel, il faut faire des changements. On prend donc les mesures pour le faire. Il y a, par exemple, du treillis continu qui se pose. Ils n'ont pas fini de forer que le treillis est rendu là. Le treillis métallique et les boutonnages, etc. sont des choses qu'il n'était pas prévu de faire de cette façon d'après nos expériences antécédentes.

Surtout avec la qualité de roc qu'on avait là.

M. Lessard: Vous aviez, de toute façon, prévu

une protection; vous l'aviez à Manic 5, vous laviez à Manic 3 quand... La différence, c'est que...

M. Boyd: On avait eu de la protection...

M. Lessard: ... au lieu de prendre des filets, vous avez pris du treillis métallique.

M. Boyd: Cela coûte plus cher.

M. Lessard: Normalement, il reste que c'était plus cher, mais ce ne sont pas des changements considérables qui peuvent, d'une telle ampleur qu'ils peuvent...

M. Boyd: M. Lessard, quand je parle de $80 millions, dans ça, il y a l'escalade incluse. Enlevez l'escalade et vous allez avoir le coût direct. Je parle de $80 millions pour un certain nombre de choses. Ce n'est pas $80 millions pour les treillis métalliques.

M. Lessard: C'est ça, mais c est combien? M. Boyd: Je n'ai pas le chiffre.

M. Lessard: Vous n'avez pas le chiffre; en tout cas, c'est secondaire par rapport aux $4 milliards.

M. Boyd: On ne parle pas de $4 milliards. On parle de $470 millions.

M. Perreault: $470 millions, vous êtes tout mélangé.

M. Boyd: On parle de $470 millions. M. Perreault: Vous êtes tout mélangé.

M. Lessard: Ce n'est pas dune ampleur énorme.

M. Boyd: Ce n'est pas d'une ampleur, M. Lessard... J'ai dit moi-même, au début, que $470 millions, c'était beaucoup trop, quant à moi et quant à notre gérance; on trouve que c'est trop, $470 millions. Il faut quand même se rendre à l'évidence qu'il faut le faire. Bon, M. Morin m'a demandé de lui expliquer; j'essaie de l'expliquer. Je vous ai dit que c était relativement peu.

M. Morin: Vous ne réalisez pas que nous, on trouve que c'est beaucoup aussi puisque vous, vous trouvez que c'est trop.

M. Boyd: Oui, je trouve que c'est trop; $1 million, c'est trop d'après moi. C'est comme ça qu'on gère des projets. Mais je vous donne des explications. Il y a des critères d'excavation souterraine dont je vous ai parlé. L excavation est incluse au poste de transformation en surface. Il faut, à cause de la nature du sol, mettre des fondations beaucoup plus élaborées, faire du remplissage et mettre du gravier concassé; il faut le voir pour croire à ce qu'il a fallu faire. Tout ça ensemble, c'est environ $80 millions.

A LG 3, on a eu des problèmes de fondation, de topographie modifiée pour les digues, même raison qu'on vous a expliquée pour LG 2.

Le déplacement de la centrale. Quand on a eu Manic 3, on a été obligé de le faire à LG 3. C'est quand on commence à fouiller de proche; ce fouil-lage de proche, ce n'est pas en 1971 qu'on pouvait le faire; ce n'est pas possible.

Sans compter le rehaussement de la cote du réservoir; ça, c'est dans autre chose.

On attribue cela aux changements qui ont été nécessaires pour l'entente avec les Indiens. Cela représente environ $100 millions. A la LG 4, les modifications des critères d'excavation comme à LG 2, représentent environ $40 millions. A Cania-piscau, les modifications topographiques, les problèmes de fondations nombreux, $100 millions. Les routes dont les normes de qualité sont très supérieures aux hypothèses de 1974, $60 millions.

Ce sont les principales explications. Ce sont des changements qui sont dus à des critères de construction, à des critères de sécurité, à des changements de design ou de plans et de spécifications qui sont dues à une meilleure connaissance du sol. C'est l'ensemble de ces facteurs qui fait $470 millions.

C'est relativement peu, mais je vous répète que, pour moi, c'est trop, parce qu on essaie toujours d'arriver avec le moins possible.

M. Morin: Je vois que I'Hydro veut nous plonger dans l'obscurité, M. le Président. Néanmoins, j'aimerais poser des questions additionnelles à M. Boyd sur ces modifications techniques, les modifications d environnement comme on les appelle quelquefois.

En 1974, vous vous souviendrez qu'il y en avait déjà pour 17%. c'est-à-dire $700 millions d augmentation. On nous disait, dans le document intitulé Modifications aux coûts prévus du complexe La Grande de 1972 à 1974", que cela était dû aux contraintes de respect de I'environnement, à la modification de certains éléments des ouvrages hydroélectriques tels que types de barrages, emplacements de déversoirs, etc. Il y en avait déjà pour $700 millions. Si on ajoute les $470 millions de cette année, nous sommes rendus au-delà du milliard seulement pour les modifications techniques. Cela évoque ce que nous avons dit à plusieurs reprises dans le passé que peut-être ce projet n'avait pas fait l'objet de toutes les recherches possibles. Il aurait pu vous permettre de nous donner un coût plus réaliste au départ, mais je voudrais vous demander...

M. Cournoyer: M. le Président...

M. Morin: Je m'excuse, j'ai la parole, un instant!

M. Cournoyer: Disons que cela va mal. Je vais vous I'enlever.

M. Morin: Est-ce que ce $1.14 milliard d'augmentation au titre des modifications techniques se compare à...

M. Boyd: Ce sont des techniques d'environnement, M. Morin.

M. Morin: Et d'environnement.

M. Boyd: J'ai le même document. Vous allez trouver cela dans vos documents.

M. Morin: Comment cela se compare-t-il avec des augmentations dues aux mêmes causes pour les autres ouvrages hydroélectriques entrepris au Québec disons depuis cinq ou dix ans?

Pourriez-vous nous en donner une idée, parce que c'est la seule...

M. Boyd: A peu près...

M. Morin: ...façon dont on puisse mesurer l'importance de ce montant de plus de $1 milliard, depuis 1972, rien que pour les modifications techniques ou d'environnement.

M. Boyd: Le milliard dont vous parlez, c'est escaladé. Il faudrait d'abord enlever l'escalade pour savoir le coût de base.

M. Morin: Je veux bien.

M. Boyd: Là-dessus, je pense qu'il n'y aurait pas d'inquiétude à le comparer, sur les changements qui ont été faits, à Manic-Outardes. Cela prendrait une étude assez détaillée. On ne l'a pas ici.

M. Morin: Non.

M. Boyd: Mais cela ne m'inquiéterait pas de comparer avec les changements techniques qui sont faits sur les projets de cette amplitude. Les techniciens, les ingénieurs, les spécialistes en construction doivent vivre avec le sol, avec la nature, avec les conditions qu'ils rencontrent. Je pense qu'il est préférable de s'assurer au point de vue technique — au point de vue de l'environnement c'est aussi un facteur — de satisfaire aux meilleures normes exigées par la technique et qu'on ne joue pas avec cela.

M. Morin: Je n'en doute pas.

M. Boyd: Je vous réponds. Votre question ce sont des choses, des modifications qui sont d'ordre courant dans ce grands projets hydroélectriques comme cela.

M. Morin: Me permettriez-vous de m'en assurer davantage? Puis-je vous demander de faire la moyenne d'augmentation due aux modifications techniques ou d'environnement, dans vos autres ouvrages, dans tout le Québec, depuis Manic, y compris Manic 5...

M. Cournoyer: Ce sont des dépenses d'argent...

M. Morin: ...pour que nous puissions comparer si les dépenses additionnelles dues aux modifications techniques se situent dans la norme pour la baie James, dans la norme par rapport à vos autres ouvrages? J'aimerais pouvoir le vérifier, chiffres en main si c'était possible, parce que je n'en suis pas aussi sûr que vous semblez l'être.

M. Perreault: De la même année, par exemple. M. Morin: Naturellement, voyons!

M. Cournoyer: Je vais vous demander une soumission avant de faire le travail, parce que cela doit être une "job" de faire cela. Combien pensez-vous que cela peut coûter faire cela, cette belle "job"?

M. Morin: Je ne demande pas l'impossible, mais j'imagine que vous devez savoir, dans chaque contrat...

M. Cournoyer: Non, je veux savoir combien cela coûte, avant de transporter tout ce monde dans ces histoires.

M. Morin: C'est peut-être à l'Hydro qu'il faudrait poser la question, plus qu'à vous.

M. Cournoyer: Bien, moi, je peux poser la question à M. Boyd, pendant qu'il est là, sur le même sujet. M. Boyd, vous avez dit tantôt...

M. Morin: Chaque fois qu'on veut obtenir des détails, vous voudriez qu'on enterre tout cela.

M. Cournoyer: II n'est pas question que vous fassiez dépenser de l'argent pour rien, pour des désespoirs de niaiseries! Posez donc la question comme il faut. Vous voulez nous poigner. Je sais tout cela. M. Boyd, je vais vous poser la question qu'il aurait dû vous poser: Est-ce que les travaux additionnels de $470 millions étaient prévisibles en 1972? Est-ce qu'ils étaient prévisibles en 1974? Comment cela se fait-il que vous ayez découvert qu'il fallait cela en 1976? Dites-lui donc comment. Il n'a pas compris qu'effectivement vous avez fait des travaux et qu'en faisant les travaux vous avez découvert une nature du sous-sol qui était différente de celle que vous connaissiez avec toute la technique ordinaire. Il n'a pas compris cela et il ne veut pas comprendre cela. Il veut que le gouvernement se soit trompé en décidant d'aller à la baie James. Le gouvernement ne s'est pas trompé en décidant avec l'Hydro-Québec d'aller à la baie James.

M. Morin: M. le Président, le ministre n'a pas à lire mes intentions. Ce que je veux, ce sont des renseignements.

M. Cournoyer: Vous lisez assez les miennes que je vais lire les vôtres une fois de temps en temps.

M. Morin: M. le Président, il y a eu des augmentations à ce titre de $1 milliard depuis 1974, effectivement. J'estime que nous avons le droit de comparer ces augmentations avec celles qui interviennent pour l'ensemble des ouvrages hydroélectriques. Si cela prouve par hasard que le gouvernement a été incompétent, cela le prouvera. Je ne peux pas le savoir avant d'avoir la réponse.

M. Cournoyer: Je n'irai pas demander à I Hydro-Québec, ni à la Société d'énergie de la baie James de dépenser inutilement des fonds publics.

M. Morin: Je demanderai ce qu'il m'intéresse d'obtenir, parce que c'est ma tâche.

M. Cournoyer: C'est votre tâche de le demander et c'est ma tâche de dire ce que je vais demander à l'Hydro-Québec.

M. Morin: C'est votre tâche de l'empêcher, peut-être?

M. Cournoyer: Oui, monsieur. A part cela, "watchez-vous" bien après ce que vous avez dit ce matin. Vous avez dit ce matin que je n'avais pas de pouvoirs sur l'Hydro-Québec, que je les laissais aller, que je faisais n'importe quoi et que ces gens étaient libres de faire ce qu'ils voulaient. Je vais en avoir, monsieur.

M. Morin: Le ministre...

M. Cournoyer: A votre suggestion, mon cher monsieur.

M. Morin: Le ministre se décide.

M. Cournoyer: Quand le débat en Chambre va arriver, vous allez vous apercevoir de ce que cela veut dire. C'est vous qui avez fait le débat pour moi et je suis bien content, à part cela. Je vous ai "poigné correct."

M. Morin: Le ministre commence à assumer ses responsabilités. C'est heureux. Vous voyez que poser des questions, parfois, cela a un bon effet.

M. Lessard: Une question complémentaire, M. le Président.

Le Président (M. Séguin): Comme...

M. Lessard: Etant donné qu'il y avait des normes...

M. Cournoyer: II est 18 heures...

Le Président (M. Séguin): On ne peut pas s'attendre d'avoir toutes les réponses ce soir à ces questions, pour la fin de notre débat sur le sujet, veuillez revenir à 10 heures demain matin. On ajourne donc les travaux à demain 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 4)

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