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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mercredi 27 avril 1977 - Vol. 19 N° 41

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Terres et Forêts


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère des Terres et Forêts

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts est réunie aujourd'hui pour étudier les crédits budgétaires du ministère des Terres et Forêts. Les membres de la commission pour aujourd'hui sont M. Baril (Arthabaska), M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi), M. Russell (Brome-Missisquoi) en remplacement de M. Brochu (Richmond), M. Desbiens (Dubuc), M. Garneau (Jean-Talon), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Goulet (Bellechasse), M. Grégoire (Frontenac), M. Joron (Mille-Iles), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski), M. Marquis (Matapédia), M. Mercier (Berthier), M. O'Gallagher (Robert-Baldwin), M. Perron (Duplessis).

Est-ce qu'il y a des changements ou des remplacements d'un côté ou de l'autre?

M. Giasson: M. Lamontagne (Roberval)?

Le Président (M. Clair): A la place de M. Garneau, M. Lamontagne (Roberval).

M. Roy: Avec votre permission, M. le Président, même si je ne suis pas membre de la commission comme tel, j'aimerais participer aux travaux de cette commission parlementaire.

Le Président (M. Clair): Je demanderai une information à l'assemblée. En règle générale, dans pareil cas, est-ce qu'il est de coutume de demander plutôt l'assentiment de la commission ou plutôt de remplacer l'un des membres absents d'un côté ou de l'autre?

M. Roy: Je ne peux remplacer personne. Si la commission donne son consentement unanime...

Le Président (M. Clair): La commission est maîtresse de ses travaux, est-ce qu'il y a unanimité pour accepter?

M. Giasson: M. le Président, pour ce qui est de l'Opposition officielle, nous n'avons aucune objection à ce que le député de Beauce-Sud participe aux travaux de notre commission.

Le Président (M. Clair): Du côté de l'Union Nationale?

M. Russell: M. le Président, je pense que notre règlement dit que tout député peut venir poser des questions à la commission. Le seul moment où il ne peut pas participer, c'est s'il y avait un vote sur un sujet particulier; il ne peut pas voter. La coutume est établie depuis longtemps. Je pense que cette coutume a toujours été respectée.

M. Roy: Mais, comme il y a très peu de votes lors de l'étude des crédits, je doute que le problème se pose. Mais le député de Brome-Missisquoi a raison, M. le Président. S'il y a un vote, évidemment, n'étant pas membre de la commission, je ne peux pas participer.

Le Président (M. Clair): Cela va. Effectivement, en vertu de l'article 148 paragraphe 3 de notre règlement, "lorsqu'une commission étudie les crédits d'un ministère, tout député peut se faire entendre, qu'il soit membre ou non de ladite commission". Je vois qu'il y avait également consentement unanime de la commission dans ce sens. Bien entendu, dans pareil cas, même si la question n'est pas soulevée, je pense qu'un député n'a pas le droit de vote, même s'il a le droit de se faire entendre là-dessus.

Il y aurait maintenant lieu de désigner un rapporteur. Est-ce que quelqu'un a une suggestion à faire? M. Marquis de Matapédia accepterait-il d'agir comme rapporteur?

M. Marquis: D'accord. J'accepte si les autres partis...

M. Giasson: Accepté.

Le Président (M. Clair): M. Marquis de Matapédia agira comme rapporteur.

Avant d'appeler l'élément 1 du programme 1, M. le ministre des Terres et Forêts, si vous avez des remarques préliminaires ou générales à faire.

Exposé général du ministre M. Yves Bérubé

M. Bérubé: M. le Président, suivant la tradition, je pense qu'il convient peut-être de ma part d'exposer brièvement les politiques générales du ministère et leurs implications budgétaires.

Comme les membres de cette commission pourront le constater au fur et à mesure de la progression de l'étude que nous entreprenons aujourd'hui, la programmation financière du ministère des Terres et Forêts pour l'exercice 1977/78 tient compte, dans son ensemble, du contexte d'austérité dans lequel s'est effectuée l'allocation des ressources financières disponibles entre les divers programmes gouvernementaux.

C'est ainsi que le taux d'accroissement des dépenses ministérielles a été maintenu le plus bas possible, sauf pour ce qui est de certaines activités dont l'intensification permettra à la ressource forêt de jouer un rôle plus dynamique dans la stabilisation de l'économie québécoise. Je pense, ici, à la consolidation du potentiel forestier du Québec; je pense à l'utilisation plus rationnelle des ressources forestières, aux sources additionnelles d'emplois que générera une recrudescence des activités dans ces secteurs particuliers.

Je pourrais, pour rendre la chose plus explicite, vous fournir le détail d'un tableau qui montre,

par programme et par élément de programme, les variations par rapport au cycle financier précédent. Mais j'ai l'impression qu'un tel exercice ne contribuerait pas tellement à la discussion, à ce stade du moins, puisque nous aurons l'occasion de revenir là-dessus lors de l'examen plus détaillé des crédits budgétaires du ministère.

J'estime, par contre, beaucoup plus utile et plus constructif de vous présenter des considérations d'ordre plus général qui vous permettront d'obtenir une vue d'ensemble de ce qui se passe au ministère et, partant, de constater que les activités sur lesquelles celui-ci met l'accent respectent bien les grandes orientations qu'il s'est données ces dernières années dans la recherche d'une gestion beaucoup plus dynamique et plus moderne de ses ressources forestières et territoriales.

Les demandes financières du ministère des Terres et Forêts, pour la période de 1977/78, totalisent la somme de $94 861 000 soit, par rapport au cycle budgétaire précédent, un accroissement de quelque $13 millions que l'on retrace plus particulièrement au programme 2, l'Amélioration de la forêt, et au programme 4, l'Utilisation de la forêt. Ce sont deux secteurs dans lesquels le ministère juge prioritaire d'intensifier son action vu le rôle de plus en plus important que la forêt sera appelée à jouer dans notre économie.

De sérieuses études démontrent en effet qu'au cours des prochaines décennies les besoins en produits ayant comme base le bois seront de plus en plus considérables et les pays qui posséderont des réserves forestières importantes pourront prendre une place de choix sur les marchés mondiaux. Plus concrètement, la recherche de l'objectif principal visé, soit l'accroissement maximal du potentiel forestier du Québec, se traduira par des efforts plus marqués au niveau de certaines activités précises telles, entre autres, le reboisement des superficies non régénérées et des terrains à vocation forestière, l'exécution des travaux sylvicoles, aptes à augmenter la productivité de la forêt, et la construction de voies d'accès à la ressource permettant une allocation plus rationnelle et plus économique de la matière première entre les divers utilisateurs.

Ce qu'il importe aussi de souligner, c'est que ces activités privilégiées ne se limiteront pas nécessairement à la forêt publique, mais elles pourront également, sous réserve de modalités prédéterminées, s'étendre aux terrains privés comme c'est le cas présentement pour le reboisement des terrains des petits propriétaires et pour les travaux de l'amélioration de la forêt effectués dans le cadre d'ententes avec des organismes groupant des propriétaires de terrains privés.

Pour ce qui est des autres activités, qu'on retrouve dans les programmes du ministère, elles se poursuivront à peu près au même rythme que par le passé, sauf en ce qui a trait principalement au programme 3, élément 2, où il y a eu diminution des crédits budgétaires destinés aux travaux d'arrosage aérien contre les insectes et au programme 8, élément 1, où des sommes d'argent additionnelles ont été prévues pour les travaux d'arpentage dans le Grand Nord. C'est le cas de l'entente avec les Cris et les Inuit et pour la cartographie des plaines d'inondation dans le cadre d'une entente avec Ottawa pour la protection contre les inondations.

En ce qui a trait aux politiques du ministère des Terres et Forêts, je puis vous dire que depuis mon entrée en fonction j'ai eu l'occasion de discuter, passablement en profondeur avec mes collaborateurs immédiats, les grandes orientations que s'est données le ministre ces dernières années dans les domaines relevant de sa juridiction.

Il va sans dire que je suis entièrement d'accord avec les objectifs recherchés à court, à moyen et à long termes et cela plus particulièrement en ce qui a trait à la réalisation de la réforme forestière entreprise par le ministère. J'estime en effet que la ressource forêt représente pour le Québec un levier indispensable à l'amélioration de la situation économique dans certaines régions où elle constitue, cette forêt, par son caractère de durée et de permanence, souvent la seule source d'emploi et de revenu apte à atténuer un chômage devenu chronique. C'est pourquoi je vois d'un oeil favorable l'intensification des efforts visant à augmenter le stock forestier et à en faciliter la mise en valeur dans le meilleur intérêt de la population québécoise.

J'ai la ferme conviction que le ministère s'est engagé dans la bonne voie et que les sommes d'argent qu'il investit dans l'amélioration des forêts publiques et privées constituent un excellent placement qui devrait lui rapporter des dividendes intéressants dans le futur. Quant aux orientations du ministère dans le secteur des terres ou du territoire, je me suis rendu compte, à l'examen des documents en chantier, que le ministère, en collaboration avec des représentants des ministères dont les activités concernent de près ou de loin la gestion du domaine public, travaille depuis plusieurs mois déjà à l'élaboration d'une politique gouvernementale de gestion foncière dont la mise en application favorisera certainement une action centrale beaucoup plus rationnelle et certainement plus dynamique dans un secteur que je sais très controversé de nos jours.

Les problèmes les plus sérieux ont été mis en évidence et je pense que les éléments de solution proposés devraient concourir à faire disparaître le climat d'incertitude qui s'est installé à la longue dans l'esprit de la population par suite d'un manque des gouvernements d'affirmer clairement leur position sur des questions aussi épineuses que celles de l'aliénation ou la non-aliénation des terres publiques sur la réserve des trois chaînes, et j'en passe. Ce projet de politique de gestion du domaine public a été soumis à l'étude du comité permanent de l'aménagement, lequel, une fois terminées les consultations amorcées avec les ministères et les organismes que la question concerne plus particulièrement, devrait être en mesure de formuler ses recommandations aux autorités gouvernementales.

C'est dire que, dès 1977, le ministère des Terres et Forêts devrait être en mesure de modifier

ses règles et de réaliser ses transactions en fonction de la nouvelle philosophie de gestion qui découle de cette politique. Or cet examen un peu à vol d'oiseau des prévisions budgétaires du ministère des Terres et Forêts, pour la période 1977/78, devrait tout de même être suffisamment indicatif pour que l'on puisse se rendre compte que le ministère, malgré les contraintes dont il a dû s'accommoder, n'a pas dévié de sa course et qu'il respecte toujours la ligne de conduite qu'il s'est tracée dans les recherches d'une meilleure gestion de ses ressources forestières.

D'aucuns pourront remarquer que les choses ne progressent par aussi rapidement qu'on le prévoyait.

Je répondrai à cela que le ministère s'est engagé dans une réforme qui nécessite l'apport des ressources humaines, des ressources financières, du matériel additionnel, dont la disponibilité ou la non-disponibilité affecte nécessairement l'échéancier établi au départ pour la réalisation des objectifs. J'ai l'impression, cependant, que nous traversons peut-être des moments les plus durs et que la conjoncture économique défavorable, qui ralentit présentement notre progression, devrait s'améliorer avec le temps. Ceci devrait nous permettre de rattraper le temps perdu.

Je m'excuse, messieurs, d'avoir retenu aussi longtemps votre attention. Je l'ai fait en croyant qu'il serait profitable pour la bonne marche des discussions qui vont suivre, de faire état du contexte dans lequel s'est effectuée l'allocation des crédits budgétaires entre nos différents programmes. Il fallait faire ressortir que le ministère, en l'absence de moyens financiers pour maintenir un niveau d'opération stable, n'avait pas d'autre choix que de ralentir certaines activités qui, tout en ayant leur raison d'être, pouvaient, pour un temps donné, être poursuivies à un régime réduit, sans pour autant nuire à l'efficacité générale du ministère.

Je termine là-dessus en vous remerciant de votre bonne attention et en vous indiquant que je serai extrêmement heureux, avec l'aide, si vous le permettez, de tous mes collaborateurs autour, de répondre aux questions que vous jugerez opportun de me poser dans le cours de l'étude plus détaillée des demandes financières du ministère, pour l'exercice 1977/78. Merci.

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, avant de procéder à certains commentaires, au tout début de l'étude des crédits du ministère des Terres et Forêts, j'apprécierais vivement que le ministre nous présente les fonctionnaires qui l'accompagnent, ce matin, afin que ces personnes qui l'appuient soient connues de tous les membres de la commission.

M. Bérubé: M. Poulin, sous-ministre aux Terres et Forêts; M. Gagnon, sous-ministre adjoint, également aux Terres et Forêts, responsable de l'administration et de la gestion financière; M. Lé-garé, sous-ministre; M. Boissinot, qui s'occupe plus particulièrement de la conservation et M. Jean-Louis Caron, qui travaille à la gestion régionale du ministère.

Commentaires de l'Opposition M. Julien Giasson

M. Giasson: M. le Président, on ne peut, à ce moment-ci, entreprendre l'étude des crédits du ministère des Terres et Forêts sans se rappeler les changements profonds qui ont été effectués au cours des récentes années au Québec, à partir du moment où la volonté du ministère, comme la volonté du gouvernement de l'époque voulait apporter une transformation assez importante vis-à-vis de la ressource forestière chez nous. On sait qu'il s'agit d'une ressource renouvelable, une ressource qui, au Québec, parmi les différentes richesses naturelles que nous avons, a une importance énorme.

Etant donné que c'est là une ressource renouvelable, il va sans dire qu'on doit y apporter peut-être une attention encore plus particulière puisque, dans le temps, on saura les conséquences et les impacts que ceci aura toujours sur l'économie de notre province.

Cette réforme forestière, il y a longtemps qu'on l'attendait au Québec. J'ai eu l'occasion, il y a quelques années, il y a environ quatre ou cinq ans, d'assister à des séances de travail au tout début de la réforme et j'étais parfaitement d'accord avec tous les projets de réforme proposés ou la quasi-totalité de ces projets. On avait dit depuis longtemps que les Québécois n'étaient pas vraiment propriétaires de la ressource, surtout par la tenure de droits qu'avaient certaines entreprises et certaines compagnies sur la forêt du Québec. On avait dit que l'existence des concessions forestières chez nous ne donnait pas aux Québécois les marges de manoeuvre qu'on devrait avoir comme groupe sur cette ressource. Je pense que la réforme forestière au Québec a inauguré véritablement un temps nouveau. Il est évident qu'elle fut reçue avec une appréciation assez diverse dans les milieux du Québec, selon les centres d'intérêt qu'avaient les personnes qui l'évaluaient, qui la jugeaient, mais cette réforme avait été acceptée.

En principe, elle a débouché sur des législations qui ont commencé la mise en application de la réforme. Il y a également d'autres législations qui devront suivre pour compléter l'ensemble de la programmation de changements qu'on voulait apporter.

On a trouvé à l'époque, surtout du côté de l'Opposition, que le gouvernement mettait trop de lenteur à procéder dans certains secteurs de la réforme. On a reproché au gouvernement de ne pas faire les efforts suffisants au plan du personnel, surtout au plan financier, pour réaliser un programme de rétrocession ou de rachat de ces concessions forestières. Je me souviens très bien, pour avoir participé à différentes commissions

parlementaires touchant les terres et forêts, avoir entendu le représentant de l'Opposition officielle d'alors reprocher assez sévèrement ou amèrement au gouvernement de ne pas vraiment traduire rapidement dans des faits concrets cette volonté de réforme. Nous aurons, au cours des prochaines heures, l'occasion d'entendre le ministre pour voir de quelle façon il entend fonctionner vis-à-vis de cet élément de la réforme forestière chez nous.

On ne peut également discuter de la programmation du ministère des Terres et Forêts du Québec, avec tout ce que cela comporte, sans avoir à l'esprit les problèmes qui sont vécus présentement par les utilisateurs de la forêt.

Quand on pense à la situation que vit l'industrie des pâtes et papiers, quand on connaît les impacts que cela peut avoir lorsque viennent des ralentissements de ce côté, les impacts sur les conditions sociales et sur les conditions économiques des Québécois de certaines régions où sont installées ces usines des pâtes et papiers, on se dit qu'il faudra absolument prendre tous les moyens pour donner une meilleure position à l'industrie des pâtes et papiers chez nous.

Il y a également la situation vécue par l'industrie du sciage. Le ministre a eu l'occasion d'entendre les questions venues de l'Assemblée nationale et posées par l'Opposition. Lui-même, dans ses réponses, nous a indiqué qu'il était conscient des difficultés vécues présentement par l'industrie du sciage et également des problèmes majeurs que cela pouvait occasionner dans certains territoires du Québec surtout là où l'économie était basée, dans une forte proportion, sur l'exploitation d'usines de sciage.

Il faudra naturellement que le ministre réponde aux questions que nous aurons à lui poser également pour voir ce que le ministère comme tel ou la société qui relève de ce ministère est en mesure de faire pour pallier, dans l'immédiat et à plus long terme, ces difficultés que nous vivons au Québec.

Il y a également d'autres questions sur lesquelles nous aurons un débat afin de savoir véritablement si nous sommes en mesure d'apporter des changements ou des solutions aux problèmes vécus par des Québécois. A ce moment-ci, je fais allusion à la situation qu'on vit vis-à-vis de l'application assez stricte de la loi touchant la réserve des trois chaînes qui a affecté beaucoup de Québécois propriétaires de boisés ou de terrains privés. Je pense qu'il serait temps qu'on débouche de ce côté sur une orientation qui ferait que les gens sauraient enfin de quelle façon on peut être vraiment propriétaire de terrains qu'on croit avoir toujours possédés. C'est la réalité que beaucoup de Québécois n'ont jamais su, avant 1973 ou 1974, qu'ils possédaient des terrains sur lesquels ils n'étaient pas effectivement propriétaires de toute la superficie. On leur a même indiqué, au moment des travaux que ces propriétaires avaient faits, qu'ils n'avaient pas le droit de procéder à ces coupes. On a pénalisé ces gens et on a exigé des droits de coupe multipliés par deux, trois, quatre ou cinq fois, selon les cas. Il m'apparaît que nous devons aujourd'hui savoir vers quoi se dirige le ministère pour trouver la solution logique à cet état de choses.

Il y a également des situations qu'on aimerait voir détaillées vis-à-vis du rôle qu'on a confié à REXFOR ici, au Québec.

On sait qu'on a demandé, au cours des dernières années encore, à REXFOR de faire des opérations de salut public ou de dépannage vis-à-vis de certaines régions. Par contre, dans d'autres champs d'activité, on a également demandé à REXFOR de jouer un rôle différent. On lui a permis, dans certains secteurs, de rivaliser, dans des programmes d'aménagement forestiers, avec les compagnies privées, que ce soit du côté du sciage, du côté du déroulage, ou même des pâtes et papiers. On lui a permis de faire des opérations sur une base à peu près équivalente, c'est-à-dire que ce n'était pas un mandat qu'on donnait à REXFOR d'aller dépanner une région ou de faire des opérations ou des programmes là où c'était moins avantageux pour les autres exploitants de la province.

Il y a également le développement des unités de gestion qui prennent une importance capitale dans l'application de la réforme. Il va falloir connaître de notre ministre de quelle façon il entend appliquer, et à quel moment dans le temps, un véritable programme d'allocation de la matière en ce qui a trait aux terres et forêts. Dans ces belles régions, non seulement du côté de la forêt publique, mais surtout du côté de la forêt privée, nous vivons des problèmes qui font que beaucoup de petits propriétaires de boisés privés sont parfois dans l'incapacité, pour une période d'un ou deux ans, de disposer de la ressource qui a été exploitée sur leur forêt privée. Je crois que, pour être en mesure de régler passablement bien dans le temps cette situation, seul un véritable programme d'allocation des bois, des pâtes, de la matière ligneuse pourra déboucher sur les solutions acceptables pour les propriétaires de forêts privées.

M. le Président, il est entendu que je me réserve, tout au long de l'étude des crédits, des programmes des éléments et sous-éléments, le droit d'avoir plus de précision sur le cheminement que le ministère va connaître immédiatement. Je suis désireux d'entendre les réponses que le ministre voudra bien nous donner, surtout vis-à-vis des problèmes qui sont d'une actualité cuisante pour certaines régions du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: M. le Président, d'une façon sommaire, je ne voudrais pas retenir indûment le ministre dans son désir de discuter de ses crédits mais, comme membres de l'Opposition, nous avons un rôle bien particulier, c'est de voir que le ministre justifie chacun des dollars qu'il réclame

pour le fonctionnement de son ministère. Je voudrais, avant de commencer l'étude des crédits, tâcher de les situer un peu et dire la façon dont on aimerait que le ministère des Terres et Forêts fonctionne pour le grand bien de l'industrie forestière du Québec, et aussi pour ses citoyens.

Actuellement, nous savons que des changements ont été amorcés, il y a déjà plusieurs années, sur la recommandation des fonctionnaires du ministère. Ces changements s'amorcent graduellement, d'année en année, mais ceci semble marcher un peu à pas de tortue. Bientôt il sera peut-être trop tard. Quand on examine un petit peu le potentiel forestier que nous avons, l'étendue de terrain que nous pouvons utiliser et l'effort retenu qu'on fait, je pense qu'on va arriver en retard lorsqu'il sera le temps d'appliquer réellement les politiques qui sont à l'avantage de la population québécoise. Pour résumer, si on regarde l'inventaire forestier dans les bois durs, le Québec avait dans le passé cette réputation d'être le foyer de l'industrie du meuble. Cette réputation baisse actuellement.

On va se ramasser, tout à l'heure, avec notre industrie du meuble qui va boiter un peu, à moins qu'on continue de changer la façon de produire le meuble, en achetant des produits qui viennent des Etats-Unis ou d'autres provinces canadiennes, parce que nous, ici, négligeons d'imposer l'utilisation maximale de tous les déchets qui pourraient être ramassés dans les forêts. On les laisse traîner, on les laisse pourrir. On laisse certaines compagnies continuer à exploiter de la façon qu'elles l'entendent.

En somme, je pourrais peut-être préciser certains points sur lesquels je ne suis pas d'accord. Lorsqu'on laisse faire la coupe de billes pour la scierie, on permet la coupe du billot à quatre pouces et demi plutôt qu'à trois pouces et demi, lorsqu'on fait du bois de papier. Parce que certaines usines disent: On ne veut pas acheter le bois de papier qui viendrait de ces concessions, parce qu'il est fait pour une scierie. Je ne vois pas la différence; on devrait, à mon sens, imposer à celui qui fait la coupe de la forêt, de nettoyer au maximum et de mettre seulement ce qui fait des billes pour la scierie en billes et que le reste soit ramassé pour le bois de papier, et non pas laisser les usines à papier payer le prix qu'elles veulent, parce qu'on en coupe du bois de papier et qu'on le fait à perte. On ramasse des billots qui ne sont pas bons pour la scierie, on exige qu'on en apporte à la scierie et, par le fait même on entraîne une perte à la scierie en imposant ces conditions. Je pense que c'est prêcher le ridicule. On a certaines essences dont on impose l'exploitation aux scieries parce que cela fait partie d'une coupe, sachant d'avance que les scieries ne peuvent pas en faire la mise en marché parce qu'elles ne sont pas populaires sur le marché, surtout lorsqu'il y a un surplus de bois de sciage.

Je pense qu'il y a d'autres utilisations qu'on pourrait faire de ces essences. Ceci pourrait être fait avec des politiques plus rigides, plus compréhensibles, plus flexibles dans l'attribution des droits. Peut-être que le ministère sera obligé d'uti- liser cet organisme qui a été créé, qu'on appelle REXFOR, qui doit avoir un certain rôle à l'intérieur de l'économie québécoise. Je n'accepte pas le fait qu'on laisse des provinces comme les Maritimes, qui ont deux ou trois usines de planche-particules expédier au Québec, alors qu'on n'en a qu'une qui fonctionne à peine. Même les autres provinces comme l'Ontario, le Manitoba, les provinces de l'Ouest expédient ici de la planche-particules.

En plus de cela, si mes informations sont bonnes, dans l'industrie du meuble, plus de 50% de la planche-particules qui est faite de déchets de forêts, de déchets de scierie viennent des Etats-Unis. Cela se produit quotidiennement. Nous, nous avons des programmes de dépenses d'assistance sociale dans toutes les régions du Québec. Il me semble qu'on pourrait utiliser ces montants pour bâtir des usines qui pourraient faire la planche-particules à peu près dans toutes les régions du Québec et faire l'inverse de ce qui se produit actuellement, faire ce que font les Etats-Unis, c'est-à-dire l'exporter presque au prix coûtant. On utiliserait ainsi une matière première qui est gaspillée, actuellement. On donnerait du travail à ceux qui désirent travailler.

Je disais tout à l'heure que le ministère procède à pas de tortue — je n'accuse personne — peut-être que les politiciens sont les plus à blâmer. J'ai assisté, depuis quelques années, à l'étude des crédits ici et je pense que ma réclame a toujours été à peu près la même. On a eu d'autres gouvernements qui ont succédé aux uns et aux autres, avec le ferme propos de procéder dans cette voie. J'ai moi-même parlé avec un des anciens ministres des Terres et Forêts du gouvernement précédent qui était désireux d'appliquer ces politiques.

Je me rappelle aussi avoir discuté avec certains officiers du ministère et aussi avec le ministre actuel. Je sais qu'il est désireux d'appliquer ce que son parti a annoncé durant la campagne électorale, la récupération de toutes les forêts, qui seront la propriété du gouvernement, afin d'en faire la distribution d'une façon rationnelle. On se retourne aujourd'hui et on dit: C'est un manque de personnel, parce qu'il y a des chômeurs; deuxièmement, on dit: On manque de crédits.

Si on peut exploiter des terrains en province et les payer au bout de quatre, cinq ou six ans, pour des travaux de voirie, on devrait être capable de prendre ces terrains, qui sont actuellement contrôlés par des compagnies, à qui on n'a que des garanties d'approvisionnement à donner. Je comprends que plusieurs de ces compagnies ont obtenu des territoires au moyen d'une loi. Elles ont fait des dépenses peut-être pas aussi énormes qu'elles le prétendent, mais il y a certainement un dû qui leur revient. Ceci pourrait être discuté après avoir pris possession du territoire, tout en leur garantissant une alimentation rationnelle.

On sait que l'an dernier, une année bien particulière, il y a eu des milliers de tonnes de copeaux gaspillées, ce qui a occasionné des pertes considérables a des scieries. On a toléré cela; le gouvernement a toléré cela. Je pense que la même chose va se continuer. On freine certaines ventes,

on laisse les usines à papier s'approvisionner de ces copeaux à leur guise, à leur prix, à leur avantage, au détriment des scieries qui, actuellement, connaissent des conditions très difficiles. Il faut connaître la condition du marché. Je suis conscient que les officiers du ministère sont parfaitement au courant de la situation actuelle. On sait ce qui se passe dans bien des milieux, au point de vue des scieries. Il y en a plusieurs qui vont être obligées de se retirer d'affaires et de laisser le contrôle à quelques-unes des grosses scieries. Plusieurs ont été vendues à des usines à papier. Plusieurs sont devenues la propriété de REXFOR.

Ce qui m'intéresse — on pourra poser des questions au ministre tout à l'heure — c'est de savoir quelle sera la nouvelle politique qui va faire en sorte qu'on pourra rétablir ou garantir la survie de ces petites scieries; ce sont de petites entreprises qui sont nécessaires au développement et à l'utilisation rationnelle de nos forêts. Il faudrait garantir à certaines régions le maintien d'une main-d'oeuvre nécessaire pour nos forêts. On ne doit pas penser à aller chercher des gens dans la ville de Montréal pour aller faire de la coupe en forêt; c'est illusoire. Si on laisse se vider certaines régions où des jeunes sont élevés à faire de l'exploitation forestière leur boulot, si on laisse ces jeunes se diriger vers les villes, demain, on fera comme dans certaines régions agricoles, on pleurera, mais il sera trop tard.

Je pense qu'il est temps plus que jamais que le ministère examine d'une façon très objective cette situation — je sais que le ministre veut le faire d'une façon non partisane — et qu'il voie à ce que des correctifs soient apportés le plus rapidement possible. Je veux l'assurer de l'appui du parti que je représente. Je suis convaincu qu'il pourra aussi compter sur l'appui de l'Opposition officielle pour apporter des politiques qui feront en sorte que les Québécois pourront compter sur leurs richesses naturelles renouvelables. Il faut maintenir ceci en mémoire: les forêts sont renouvelables. Ce n'est pas comme les mines de cuivre, d'argent, d'or ou d'autres métaux qui, elles, ne sont pas renouvelables. La forêt peut se renouveler; c'est à nous de faire en sorte qu'on puisse la maintenir de façon favorable et d'augmenter sa production, plutôt que de la laisser décliner comme cela se fait actuellement.

Je ne veux pas plus longtemps retarder le début des travaux. Je sais que les officiers du ministère ont une réponse à toutes les questions qu'on va leur poser. On les interrogera avec toute l'objectivité possible afin que cette commission soit consciente, en détail, des politiques qui seront appliquées pour l'année qui s'en vient.

Le Président (M. Clair): Le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président, au tout début, j'aimerais faire quelques remarques évidemment, à la suite des propos que vient de tenir le ministre. Egalement je voudrais revenir à nouveau sur certaines remarques que j'avais faites l'an dernier, lors du début de l'étude des crédits de cette commission parlementaire. Effectivement, l'an dernier, c'est précisément le 27 avril, il y a exactement un an aujourd'hui, que nous entreprenions l'étude des crédits de ce ministère important.

Le ministre a fait des remarques, tout à l'heure, pour déplorer un peu la contingence budgétaire dans laquelle il se trouvait pris, en quelque sorte, pour aller plus avant et beaucoup plus loin dans la réforme forestière et vers une plus grande utilisation de ces ressources, en ayant évidemment les moyens pour le faire. Quand je compare le budget du ministère des Terres et Forêts avec le budget global de la province et que je me rends compte qu'on n'accorde même pas 1%, soit 0,8% du budget de la province, dans un ministère qui touche une ressource, je dirais la ressource no 1, la plus grande ressource que nous avons au Québec, il est permis d'être inquiet.

Je me rends compte qu'on a suivi encore cette année, même s'il y a une augmentation de 15% dans le budget par rapport au budget de l'an dernier, cette coutume, cette habitude qu'on a de ne pas consacrer — et ce n'est pas un reproche que je fais au ministre des Terres et Forêts, cela c'est peut-être la politique d'ensemble, la politique budgétaire de l'ensemble du gouvernement — de ne pas considérer comme on le devrait les ministères à vocation économique. Le ministère des Terres et Forêts est évidemment un ministère clé, un ministère de développement économique, compte tenu de cette immense ressource que nous trouvons dans toutes les régions du Québec et qui contribue à une utilisation de main-d'oeuvre, une création d'emplois considérable dans tous les milieux.

Mes prédécesseurs ont parlé des régions rurales, des producteurs de boisés privés, on a parlé des compagnies forestières, des compagnies papetières, toute l'industrie des pâtes et du papier. Mon collègue de Brome-Missisquoi vient de parler de l'industrie du sciage, de l'industrie du meuble. Ce sont des propos sur lesquels je suis entièrement d'accord. Mais il va falloir, au niveau du gouvernement et au ministère des Terres et Forêts, une volonté beaucoup plus grande que celle qui a été manifestée jusqu'ici, de façon à sensibiliser l'exécutif de la province afin d'avoir suffisamment de budgets, pour être en mesure d'accorder les crédits nécessaires et se donner les outils pour tirer le maximum de cette ressource.

L'année dernière, j'ai fait une remarque d'un autre ordre. Si, d'un côté, on examine les dépenses que le ministère doit y consacrer, il faut également regarder les revenus que le ministère doit obtenir par la mise en valeur de ses ressources par les droits de coupe et autres. Et je dois faire à peu près les mêmes remarques que l'an dernier, à savoir que l'augmentation des revenus dans le trésor public ne correspond aucunement à l'augmentation et le taux de développement de l'économie québécoise. Encore cette année, on prévoit, dans

le discours du budget qui nous a été présenté par M. Parizeau, quelque $32 millions de revenu pour ce qui a trait aux ressources forestières, alors que les revenus de 1975/76 ont été de $38 millions. Alors, loin de connaître une augmentation, nous connaissons une diminution assez appréciable. Il y a sûrement des causes à cela et évidemment il y aura bien des questions que nous pourrons poser à l'occasion de l'étude, programme par programme, des crédits du ministère.

Il y a également cette société que le Québec s'est donnée, la société REXFOR pour la mise en valeur et l'utilisation de certains territoires, l'exploitation de certains territoires forestiers. Le but de la société était de procéder à la récupération de certains territoires forestiers qui étaient en perdition à cause de la construction des grands barrages hydroélectriques. Et évidemment la mission, si vous voulez, le rôle de cette société a été étendu par le fait qu'aujourd'hui cette société fait des exploitations sur les terres de la couronne, et elle conclut des accords avec des compagnies de pâtes et papiers en vue de leur fournir du bois.

Il a été assez renversant de constater que cette fameuse société de la couronne — on appelle toujours cela une société de la couronne, une société d'Etat — ne paie pas de droits de coupe, au moment où elle exploite les terres de la couronne, contrairement à l'obligation qui est faite aux compagnies papetières.

C'est une question que je pose depuis deux ans à l'Assemblée nationale et à laquelle je n'ai pas eu de réponse. Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre de la part du ministre des propos qui auraient pu nous rassurer; cette compagnie, lorsqu'elle exploite, en compétition avec des compagnies forestières, les terres de la couronne, devrait être soumise aux mêmes règles.

Je trouve, actuellement, que c'est avantageux, non pas pour les Québécois, non pas pour le gouvernement du Québec, mais pour les compagnies de faire faire des chantiers, de faire faire de l'exploitation forestière par cette entreprise, parce que le faible profit que réussit à faire cette société ne correspond même pas à l'exemption des droits de coupe dont elle est l'objet. C'est un facteur qui contribue à faire que la province, le gouvernement n'a pas les revenus qu'il devrait avoir de tout ce secteur, de cette grande richesse naturelle que nous avons.

J'aimerais aussi aborder un peu la question des boisés privés. Il y a eu l'an dernier, on se le rappellera, une manifestation devant le parlement, qui a été organisée par l'Association des propriétaires de boisés privés du Québec. Evidemment, cette association regroupe énormément de gens de mon comté, de ma région. Une solution devait leur être apportée au cours des prochains jours. Je ne fais pas de reproche au ministre, ce n'est pas lui qui était là à ce moment. La solution se fait toujours attendre. Il n'y a eu absolument rien de décidé pour ce qui a trait à tout ce secteur d'exploitation forestière dans nos régions. J'aimerais dire au ministre que ces gens, actuellement, sont mal pris. La Régie des marchés agricoles a les pouvoirs de statuer sur les organisations de mise en marché de produits agricoles. Or, on est obligé de considérer la forêt comme un produit agricole, alors qu'en définitive elle n'a jamais été un produit agricole, et je ne sache pas que cela puisse le devenir.

On en a parlé à ce moment. Je rappellerai au ministre les propos qui ont été tenus par son collègue critique de l'Opposition officielle du temps, le député de Saguenay. Il disait qu'il était urgent qu'on dote le Québec d'une régie des produits forestiers. Je n'en ai pas entendu parler, à ma grande surprise, ce matin. Je ne sais pas si le nouveau titulaire du ministère a mis ce projet de côté. J'aimerais, au cours de la réplique qu'il nous donnera tout à l'heure, qu'il puisse nous apporter des précisions de ce côté.

J'aimerais souligner à son attention que ces propriétaires de boisés privés ne sont pas des agriculteurs comme tels. Ce sont des gens qui ont toujours vécu de la forêt. Ce sont des gens qui se sont occupés de transport du bois. Ce sont des gens qui ont acheté du bois des agriculteurs, qui se sont occupés de le livrer, de faire affaires avec les compagnies, mais ce sont des personnes qui sont effectivement propriétaires d'étendues de terres forestières assez grandes, assez vastes. C'est leur revenu. Avec l'exclusivité qui a été accordée aux offices de producteurs de bois, ces gens ont été mis de côté.

D'ailleurs, je n'apprends rien ce matin au ministre, ni aux membres de la commission, parce que cela a fait l'objet d'énormément de discussions et de représentations, de part et d'autre. Il n'en demeure pas moins qu'il y a eu des centaines, pour ne pas dire quelque milliers de cordes de bois qui ont été littéralement gaspillées. Il s'agit de se promener dans ces régions pour voir, le long des routes, le gaspillage dont ces personnes ont été victimes et les difficultés que cela leur a apportées. D'un autre côté, je pense que nous ne sommes pas rendus à un stade, dans le Québec, où on doit se permettre de gaspiller des efforts, de l'énergie, ni de gaspiller cette ressource qui est extrêmement importante.

Le député de Montmagny-L'Islet a également parlé de la fameuse loi de la réserve des trois chaînes, qui, on se le rappellera, a été suspendue il y a trois ans, avec cette promesse que les personnes qui faisaient l'objet de poursuites ou de réclamations les verraient suspendues.

Les gens qui avaient effectivement déboursé les sommes réclamées par le ministère des Terres et Forêts seraient remboursés selon les règles du jeu, autrement dit si la loi était changée. Alors, il n'y a pas eu de développement depuis cette époque relativement à cette loi. C'est toujours l'épée de Damoclès au-dessus d'un certain nombre de propriétaires fonciers du Québec, agriculteurs et propriétaires de terrains boisés. Or, j'aimerais bien savoir du ministre quelles sont les intentions du gouvernement, à savoir si une loi est actuellement en préparation. Si oui, cette loi sera-t-elle présentée devant l'Assemblée nationale pour être étudiée et adoptée au cours de l'année?

La dernière remarque, je l'ai soulignée un peu tout à l'heure, j'aimerais savoir du ministre ce que le nouveau titulaire du ministère entend faire relativement au projet de la régie des produits forestiers qui a été réclamée par l'Opposition depuis plusieurs années. Le ministère semblait avoir retenu l'idée de créer une régie des produits forestiers, mais il y avait quand même une question de temps dont les officiers du ministère avaient besoin pour préparer cette législation et définir le rôle que pouvait jouer cette régie.

Le Président (M. Clair): Le ministre des Terres et Forêts.

Réplique du ministre

M. Bérubé: Je crois que de très nombreux problèmes ont été soulevés qui, en général, impliqueraient souvent une discussion assez longue. Je me demande s'il serait opportun immédiatement d'entamer une telle discussion. Je noterai quand même certains points qui ont été soulevés pour tenter d'apporter des réponses qui seraient susceptibles de vous satisfaire, je l'espère.

Il faut reconnaître qu'il s'agit ici d'un nouveau gouvernement, qu'un ministre dans un ministère forcément, à son arrivée, doit tenir compte de ses orientations propres, des orientations de son parti politique, il doit également tenir compte d'une certaine continuité avec le gouvernement antérieur et, finalement, il doit tenir compte de la pensée, de la réflexion originale et personnelle des officiers de son ministère. Par conséquent, c'est un délicat équilibre dans une période de transition entre un passé qui nous est légué et que l'on ne peut radicalement modifier du jour au lendemain. C'est, je pense, le cas d'un problème budgétaire. Vous êtes parfaitement conscient qu'un budget se prépare quand même plusieurs mois d'avance et que, par conséquent, avant d'avoir fait une réflexion complètement originale sur un nouveau rôle que pourrait jouer un tel et tel organisme, il faut tout de même un certain nombre de mois et c'est un peu serré pour qu'une telle réflexion influence directement le budget. Cela veut donc dire que certaines des préoccupations du ministère présentement qui sont le fruit d'un mixage à la fois de la tradition antérieure et des nouvelles orientations, donc certaines nouvelles politiques sont davantage présentement en voie de préparation que prêtes à être "opérationnalisées" sous forme d'une présentation budgétaire.

C'est probablement pour cela que vous ne retrouverez pas dans le budget comme tel toute l'expression de cette préoccupation que j'ai pu faire mienne au cours des dernières semaines et des derniers mois.

Je tenterai de répondre à un certain nombre de questions. D'une part, le problème de la régie des produits forestiers, le problème des dissidents et le problème de l'allocation de la matière ligneuse me semblent faire partie d'un tout. Ce tout, c'est finalement de s'assurer qu'une proportion plus importante du bois provenant de la forêt pri- vée serve à alimenter notre industrie, l'industrie du sciage et l'industrie des pâtes et papiers.

Cela pose également le problème de la mise en marché et de l'utilisation rationnelle. Nous avons donc accepté de poursuivre une idée qui avait été conçue par l'ancien gouvernement, celle d'une loi d'allocation de la matière ligneuse. Nous avons peut-être modifié légèrement l'approche, en ce sens qu'avant de soumettre une loi et de rendre peut-être sa modification malaisée devant l'Assemblée nationale, puisqu'il y a toujours des difficultés à voir une loi taillée en pièces qui n'a pas été suffisamment mûrie, nous avons choisi de l'aborder franchement avec l'industrie papetière, l'industrie du bois de sciage et, également, les syndicats des producteurs de bois de manière que cette réflexion générale qui a cours présentement au Québec nous amène justement à présenter un projet de loi qui soit objectivement le plus valable possible.

Donc, l'approche, c'est plutôt présentement de faire une discussion un peu ouverte à l'intérieur des principaux partenaires de l'exploitation de la forêt pour tenter de présenter un projet de loi sur l'allocation de la matière ligneuse qui soit acceptable à la majorité.

Pour ce qui est de la régie des produits forestiers, à ce moment, à mon point de vue, je pense qu'il est trop tôt. La régie des produits forestiers sera peut-être l'évolution naturelle qui résultera de l'application de la loi de l'allocation de la matière ligneuse et non pas quelque chose qu'il faudrait viser immédiatement. Je pense que je préférerais voir la loi en application pendant quelques années pour voir dans quelle mesure justement elle est efficace. Ceci m'amène peut-être à parler présentement des surplus de bois. Vous savez qu'il semble que l'écoulement de la matière ligneuse se fasse plus facilement cette année que dans le passé. Ce n'est pas, il va sans dire, parce que l'industrie des pâtes et papiers est en meilleure posture que l'année dernière ou que l'industrie du bois de sciage est en meilleure posture. C'est peut-être justement que l'industrie est parfaitement consciente présentement que le gouvernement a l'intention d'intervenir si elle ne veille pas à mettre un peu d'ordre dans l'administration de ses affaires, ce qui, à ce moment, rend les négociations peut-être un peu plus faciles.

Dans le cas des surplus de copeaux dont on a mentionné l'existence tout à l'heure, je sais que, dans certaines régions, on élabore des plans qui seraient assez astucieux et qui pourraient peut-être permettre de régler ce problème.

Le problème des dissidents, comme vous l'avez si bien souligné, relève, pour l'instant, de la Régie des marchés agricoles. Le seul et unique problème que je vois en tant que ministre des Terres et Forêts en ce qui a trait aux dissidents, c'est que, dans la mesure où nous allons vouloir que l'industrie forestière s'alimente à partir des boisés privés, il faudra s'assurer que nous puissions leur garantir un approvisionnement stable. Ceci n'est évidemment pas possible lorsqu'un exploitant forestier a tendance, par exemple, à exploiter à

blanc un lot, ce qui est parfois nécessaire quand évidemment la forêt est mûre, mais qui peut parfois vouloir dire que, par suite de l'exploitation abusive d'une forêt, on ne pourra pas soutenir la demande en produits forestiers.

Il faut donc s'assurer que ce qu'on appelle les dissidents ou les propriétaires de boisés privés puissent fournir, dans tous les cas, au ministère des Terres et Forêts une certaine garantie que leur approvisionnement en matière ligneuse soit stable.

Présentement, les rencontres que j'ai eues ne me permettent pas de conclure qu'ils sont en mesure de le faire et eux-mêmes reconnaissent présentement que, même s'ils estiment que c'est effectivement un objectif qu'ils ont en vue, ils ne peuvent pas, pour l'instant, présenter, dans tous les cas, de moyens à leur disposition pour justement garantir que l'exploitation puisse se faire d'une façon rationnelle et puisse surtout garantir à l'industrie forestière un approvisionnement stable. Par conséquent, je pense que, si le ministère des Terres et Forêts doit intervenir, ce sera uniquement pour nous assurer que l'exploitation de nos boisés privés, par quelque intervenant que ce soit, soit faite d'une façon rationnelle qui nous permette de garantir les approvisionnements, parce qu'on ne peut, de toute évidence, pas obliger l'industrie forestière à s'approvisionner à partir des boisés privés, si les boisés privés ne peuvent pas, d'autre part, garantir un approvisionnement à long terme.

On voit bien que l'exploitation forestière représente de la mécanisation et de la main-d'oeuvre spécialisée. On ne peut pas demander à une industrie de ne pas s'équiper pour le travail en forêt publique si, d'autre part, elle n'est pas assurée d'un approvisionnement stable de la forêt privée. Vous voyez donc que le type de réflexion que nous faisons, c'est plutôt au niveau de la stabilité des approvisionnements. De là vient l'importance que nous avons attachée dans le budget actuel aux programmes de revalorisation de la forêt privée, de manière à répondre à cet objectif d'un approvisionnement stable. Evidemment, ceci implique des contraintes pour tous les exploitants privés et je ne sais pas si, présentement, la réflexion est assez poussée de ce côté dans le secteur de la forêt privée.

Quant au rôle de REXFOR, le gouvernement, vous le savez, a donné comme mandat une réflexion à être effectuée par le comité de développement économique sur le rôle des sociétés d'Etat et sur leur interaction avec le gouvernement. C'est une réflexion nécessaire parce qu'on a été à même de constater que les sociétés d'Etat, n'ayant jamais été soumises dans le passé à de véritables orientations politiques par les gouvernements, ont pris les orientations qui leur étaient propres. A l'intérieur même des deux sociétés dont je suis titulaire, soit SOQUEM et REXFOR, on peut constater des objectifs qui sont complètement antithétiques. Je pense qu'il est nécessaire d'abord que cette réflexion, du côté du gouvernement, soit entreprise. En ce qui a trait au ministre même des Terres et

Forêts et à son impression sur le rôle qu'a joué REXFOR, je reconnais que REXFOR a joué un rôle éminemment utile dans le soutien d'entreprises locales qui auraient dû disparaître à la suite de conditions de marché difficiles.

Ceci a des implications, cependant, parce qu'il ne fait aucun doute que lorsque le gouvernement intervient pour soutenir une industrie, il peut, à ce moment, mettre en danger d'autres concurrents qui font affaires avec le même marché. Par conséquent, c'est un rôle qui est délicat à jouer; ce rôle social de REXFOR est un rôle qui pourrait justement causer d'autres problèmes ailleurs.

Deuxièmement, dans la mesure où on ne demande à REXFOR qu'à intervenir dans les cas difficiles, dans les cas où l'entreprise privée a déjà fait la preuve que c'était non rentable, comme on a tendance en général à dire que l'entreprise privée est plus efficace, semble-t-il, que l'entreprise d'Etat pour démontrer la rentabilité, on voit bien que, lorsqu'on demande à REXFOR continuellement de reprendre des dossiers qui n'ont pu être rentabilisés par l'entreprise privée, on demande à REXFOR un rôle presque inhumain. Il est même étonnant de voir le succès avec lequel REXFOR a réussi des opérations de sauvetage, comme dans le cas de Béarn et Taschereau et Tembec, et je pense que c'est tout à son honneur. Cela démontre bien que les sociétés d'Etat sont capables de performances souvent supérieures à celles de l'entreprise privée.

Le problème, cependant, c'est qu'il faut reconnaître que, pour des dirigeants d'une entreprise comme REXFOR, qui seraient continuellement amenés à régler des cas problèmes, cela peut être très difficile sur le plan psychologique. Pour cette raison, je pense, il convient que REXFOR fasse elle-même une évaluation du rôle qu'elle entend jouer. Et si REXFOR nous dit que c'est le rôle qu'elle entend jouer, donc ce rôle de sauvetage, elle le jouera. Il faudra alors développer des critères d'évaluation de cette société d'Etat qui seront, évidemment, différents des critères de rentabilité économique qu'on pourrait appliquer peut-être à la Société générale de financement, par exemple, ou à SOQUEM.

C'est donc l'orientation de ma réflexion. Ce n'est pas une contestation du rôle de REXFOR, mais plutôt une remise à neuf de notre approche vis-à-vis des sociétés d'Etat, entreprise par le gouvernement actuel, et en même temps ma propre réflexion personnelle sur les problèmes que rencontre REXFOR.

Le député de Beauce-Sud a parlé de l'augmentation des revenus de la forêt qui sont insuffisants. Je ne vous cacherai pas que, dans mon esprit, je relie ce problème en grande partie, également, au problème de la révocation des concessions forestières. Si l'Opposition antérieure a trouvé que le gouvernement ne procédait pas suffisamment rapidement dans la révocation des concessions forestières, je continue à partager cette opinion. Je pense que le gouvernement actuel, dans le budget qui est présenté ici, ne pro-

cède pas suffisamment rapidement à la révocation des concessions.

Associées, cependant, à ce problème de la révocation, je pense qu'il y a deux approches. On peut d'abord, remettre en question la méthode de rachat des concessions forestières prévue par la loi. C'est donc une approche qui pourrait consister à dire: Peut-être que l'on paie trop cher. Par conséquent, on pourrait diminuer le paiement et, dans ce cas, on pourrait donc accélérer la révocation. Compte tenu des finances gouvernementales, étant donné les choix qu'il y a à faire, il est douteux qu'on puisse mettre des sommes très considérables au rachat de concessions forestières qui, en soi, représente un investissement non productif comme tel. C'est donc un simple rachat.

Une autre approche qui pourrait être envisagée — et ici je rejoins le député de Beauce-Sud — c'est celle d'augmenter substantiellement les revenus provenant de la forêt. En d'autre termes, si nos droits de coupe et les droits que nous demandons pour la voirie forestière ne sont pas adéquats, on peut donc imaginer qu'on augmente ces droits et que l'augmentation des revenus nous permet de justifier une accélération du processus de révocation des concessions forestières.

Une telle remise en cause, parce que vous avez une alternative, suppose une réflexion. C'est cette réflexion que nous faisons présentement. Nous avons évalué, par exemple, quel serait l'impact de l'augmentation des revenus en provenance de la forêt; quel serait l'impact sur cette industrie forestière. Il ne s'agit pas non plus de la rendre encore moins rentable qu'elle ne l'est présentement. Je pense que c'est à la suite de cette réflexion que nous serons plus en mesure d'accélérer ce processus de révocation. Une chose est certaine, c'est que vous en verrez l'effet dans le budget de l'année prochaine.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: II y a seulement un petit point que j'aimerais reprendre, parce que le ministre a employé le terme "dissident" en ce qui a trait à l'Association des producteurs de boisés privés. Je pense qu'il faudrait quand même être juste à l'endroit de ces personnes. J'aimerais bien dire à l'honorable ministre que chez les producteurs de boisés privés, il y a deux catégories bien distinctes. Vous avez le cultivateur qui, par la force des choses, est propriétaire d'une petite étendue de boisé, qui le met en valeur de façon rationnelle, en mettant sur le marché, à chaque année, une quantité limitée de bois.

Vous avez d'autres personnes qui n'ont rien à voir avec l'agriculture, qui sont exclusivement des exploitants forestiers, qui mettent des quantités de bois beaucoup plus considérables sur le marché, à cause de leur étendue de terrain et de leur spécialisation. Avec l'exclusivité qui a été remise à l'office des producteurs et à cause des difficultés à obtenir des contrats capables d'absorber la mise en marché de la totalité du bois produit dans une région donnée, il est évident qu'on répartit le nombre de passes en tenant compte du nombre de producteurs, plutôt que de la quantité du bois qui peut être mise sur le marché par ces gens. Cela a forcé, en quelque sorte, un groupe de propriétaires de boisés privés à se regrouper en une association pour demander d'avoir un statut pour être en mesure de négocier et d'organiser la mise en marché de leur bois.

Je ne veux pas qu'on défasse en quelque sorte le plan conjoint des producteurs de bois qui est la propriété des agriculteurs et qui est affilié à l'UPA. Ce serait retourner 20 ans en arrière et retrouver des situations chaotiques, puis faire en sorte que ces petits producteurs de boisés soient encore exploités comme ils l'ont été dans le passé. Je pense qu'il ne faudrait pas non plus, en corrigeant un abus, en créer un autre. C'est la raison pour laquelle, ces gens, à ce jour, ne peuvent pas se retrouver dans nos lois actuelles, à cause de la Régie des marchés agricoles. Je tiens encore à le dire au ministre, c'est un problème crucial, important, cela touche des centaines et des centaines de gens chez nous. Ces gens ne peuvent pas se faire régir par la Régie des marchés agricoles, la forêt n'est pas un produit agricole. C'est tout le problème qu'il y a, c'est la raison pour laquelle ces gens vont sûrement revenir à la charge. Il y a trop de capitaux impliqués. Il y a des gens pour qui c'est leur gagne-pain leur vie et la vie de leur famille. Cela a des conséquences économiques dans plusieurs paroisses auxquelles on ne peut pas être indifférents. Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas une formule qui permettra à ces gens d'avoir droit aussi de négocier la vente collective de leurs produits, le problème va demeurer et c'est un impact économique qui nous fait perdre des dizaines et des dizaines de milliers de dollars.

J'aimerais que le ministre soit bien conscient de cela. C'est pour cela que je m'oppose, quand j'entends parler de dissidents. Ce ne sont pas des dissidents, c'est un groupe de producteurs différents des autres. Lorsqu'on les appelle des dissidents, on pourrait leur porter préjudice en laissant présupposer que ce sont des hors-la-loi ou presque. Ce n'est pas cela. Je tiens bien à insister auprès du ministre, aujourd'hui; il va falloir que le ministère des Terres et Forêts intervienne, parce que cela dépasserait, selon les informations et les rencontres que nous avons eues avec les conseillers juridiques, les cadres et les possibilités du ministère de l'Agriculture. Le problème est là.

Le Président (M. Clair): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: M. le Président, je veux seulement vous dire de bien vouloir prendre acte que j'appuie à 100% les propos que le député de Beauce-Sud vient de tenir concernant les propriétaires de boisés privés.

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, on vient d'aborder un problème qui touche également quelque

peu la région que je représente. Pour ma part, après avoir rencontré et discuté avec les gens qui forment l'Association des propriétaires de boisés privés, j'en conclus que c'est l'évidence même que nous devrions avoir, au Québec, une régie des produits forestiers. C'était là un des éléments de la réforme forestière au Québec. Pour moi, ce n'est pas le moindre. Lorsque le ministre nous dit qu'il faudra d'abord procéder à une loi en vue d'allouer les bois, au Québec, à toutes les industries qui les utilisent et qu'on pourra, dans un deuxième temps, procéder à la mise sur place d'une régie de produits forestiers, je ne partage pas son avis.

Les problèmes auxquels viennent de faire allusion les deux députés qui m'ont précédé existent par l'absence de cette régie des produits forestiers. Somme toute, je n'ai jamais compris qu'on ait confié cela à la Régie des marchés agricoles du Québec, avec tous les pouvoirs que cela comporte. On ne peut ainsi, véritablement trouver une solution aux propriétaires de boisés privés qui vivent uniquement de l'exploitation de la forêt, qui sont de véritables forestiers. On ne peut, par la loi de la régie des marchés agricoles, trouver la solution et la capacité pour ces gens de s'adapter, de s'intégrer à la remise en marché du bois.

Heureusement qu'à certains endroits les offices de producteurs de bois ou les syndicats de producteurs de bois ont eu cette compréhension et ont eu une largeur de vue qui a fait en sorte que ceux qu'on appelle les propriétaires de boisés privés ont pu assez bien s'intégrer et s'adapter au plan de mise en marché tel que conçu soit par les offices de producteurs ou les syndicats de producteurs.

A Sainte-Anne-de-la-Pocatière, entre autres, l'Office des producteurs de bois a réservé une place dans la mise en marché, dans la commercialisation du bois à ces gens qui possèdent d'assez grandes étendues de boisé en leur confiant un mandat, celui d'être les agents représentants de l'Office des producteurs. Ce sont, pour la plupart, ces gens qui s'occupent de l'achat du bois des propriétaires, des petits cultivateurs comme des autres propriétaires de boisés privés. Ce sont ces gens-là également qui s'occupent du transport, qui ont la responsabilité de l'achat, du respect des règles du jeu telles que déterminées par l'Office des producteurs et de rendre le bois à l'usine. Cela, on le retrouve à très peu d'endroits au Québec, cette capacité de compréhension et d'intégration d'un groupe de producteurs qui n'ont rien à voir avec l'agriculture, qui ne feront jamais d'agriculture, qui sont de vrais forestiers. Je pense que l'office de la Pocatière est le seul endroit où on a fait une place véritable à ces gens, ce qui a résulté qu'il ne s'est pas perdu de bois par le vieillissement dans cette région à cause de cette compréhension de l'Office des producteurs qui a fait appel à la collaboration des gens qui étaient de véritables producteurs de boisés privés.

Si on avait pu, dans les autres régions du Québec, chez les autres syndicats de producteurs, avoir autant d'ouverture d'esprit, autant de tolérance et de compréhension, le problème vécu par ces gens serait beaucoup moins aigu. Je le sais, parce que j'ai eu à rencontrer les représentants de l'association de ce groupe l'an dernier; je les ai rencontrés deux fois. Il y avait des problèmes qui touchaient le ministère des Transports à cause de l'obligation de passer sur une balance installée à Charny; je suis allé les rencontrer là-bas avec un officier du ministère des Transports. Je les ai rencontrés lorsqu'ils sont venus devant le parlement, en juin 1976, j'ai discuté avec eux, et ces gens ont reconnu que dans la région de la Pocatière les problèmes étaient moins grands parce que l'Office des producteurs là-bas avait laissé une place à l'intérieur de son plan de commercialisation.

Comme on sent qu'il n'y aura pas de revirement suite aux audiences qu'a tenues la Régie des marchés agricoles sur ce problème l'automne dernier, il me paraît, de toute urgence, qu'on devrait avoir au Québec notre régie des produits forestiers qui va tenir compte de la commercialisation et de la mise en marché du bois des véritables cultivateurs et qui va laisser une place également à tout ce groupe de forestiers du Québec qui vivent exclusivement d'exploitation forestière. C'est leur gagne-pain, comme le disait le député de Beauce-Sud. Si on n'a pas de formule rapide permettant à ces gens d'être à l'intérieur du système — une fois qu'ils vont connaître les règles du jeu, je suis sûr qu'ils seront en mesure de les respecter — on aura des gens qui ne seront plus en mesure de faire face à leurs obligations. Il y a des gens, dans ces groupes, qui ont des sommes de $100 000 d'investies en machinerie, en acquisition de terrains, etc. Le problème est sérieux et je ne crois pas qu'on doive retarder trop longtemps cet élément de la réforme forestière qui est la création d'une régie des produits forestiers au Québec.

J'aimerais que le ministre me précise les raisons pour lesquelles on doit retarder la création de cette régie et le plan d'allocation. Je pense que les deux vont de pair. Dans un plan d'allocation, il faudra qu'il y ait un organisme avec des pouvoirs assez grands afin d'effectuer l'allocation des bois, c'est-à-dire faire les contingentements requis, prévoir les volumes de coupe que les différents propriétaires de boisés privés feront; l'organisme qui pourrait être mandaté à l'application du plan d'allocation des bois, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas une régie des produits forestiers bien constituée. Le ministre pourrait-il me donner les raisons pour lesquelles il juge valable de retarder ce principe d'une régie des produits forestiers?

Le Président (M. Clair): Sur le même sujet, le député de Bellechasse. Peut-être que le ministre pourra répondre aux deux intervenants à la fois.

M. Goulet: Suite aux propos du député de Montmagny-L'Islet, et toujours dans les remarques générales, il existe certainement des solutions.

Dans trois comtés voisins, nous connaissons trois plans conjoints différents. Ces plans conjoints ont eu un bon pourcentage de succès dans les comtés de L'Islet et de Kamouraska et n'ont pas eu de succès, par exemple, dans les

comtés de Beauce, de Bellechasse et de Dorchester. Ce que les propriétaires de boisés privés ont demandé aux ministères de l'Agriculture et des Terres et Forêts, ministère que nous touchons aujourd'hui, c'est une enquête impartiale. Ils veulent qu'il y ait enquête; il n'y a jamais eu d'enquête impartiale. Cela a toujours été fait par la Régie des marchés agricoles. Cela ne veut pas dire que cela n'a pas été bien fait, mais on ne peut pas dire que l'enquête a été impartiale.

Ces gens sont soumis à la Régie des marchés agricoles et, d'après la loi — j'ignore l'article, mais je l'ai lu — ils n'ont pas le droit d'être reconnus. Ils ne sont pas reconnus comme producteurs agricoles, et ils sont régis par cette régie. C'est là qu'est le problème: ils sont régis par la Régie des marchés agricoles et, dans la loi, ils ne sont pas reconnus; ils sont exclus de cela.

Alors, lorsque le député de Montmagny-L'Islet parle de régie, je pense qu'il faudrait que le ministère s'y penche. Ce serait une priorité d'après moi, parce que le problème dure depuis quatre ans. Avec les gens qui viennent nous voir au bureau chaque lundi, cela m'étonnerait qu'on passe le mois de juin sans avoir encore des bûchers sur la colline parlementaire. Vraiment, il va falloir, tout le monde, apporter une solution à ce problème, parce qu'il existe. Il est plus grave qu'on ne le pense, parce qu'il y a trop d'argent d'investi par ces gens pour qu'ils laissent tomber l'affaire.

Le Président (M. Clair): Le député de Brome-Missisquoi sur le même sujet.

M. Russell: M. le Président, d'une façon très brève, je crois bien que les remarques qui ont été faites du côté de l'Opposition ne sont pas en vue d'embêter le ministre, c'est simplement pour tenter d'éclaircir cette situation qui semble être un peu ambiguë actuellement.

Un cultivateur qui fait de la coupe comme revenu supplémentaire, je peux comprendre qu'il peut être reconnu par cette Régie des marchés agricoles, tandis que celui qui vit totalement de la coupe de bois de ses terrains ne peut être traité par cette même régie, c'est évident. C'est un peu comme les camionneurs artisans; celui qui a un camion et l'autre qui en a dix, ce n'est pas tout à fait la même chose. C'est ce qu'on voudrait que le ministre prenne en main pour y apporter des correctifs. Je sais que le problème est très complexe. Ce n'est pas facile d'arriver et de trancher la question, parce qu'il y a aussi des cultivateurs qui font des coupes aussi considérables, si non plus, que d'autres qui ont des boisés privés, c'est vrai. Mais il faudrait peut-être tirer la ligne quelque part. On voudrait, d'un côté, que les gens, la population du Québec, ceux qui sont intéressés à cela augmentent l'utilisation de territoires privés en vue de faire une récolte de bois. D'un autre côté, on tente de les pénaliser en apportant des mesures restrictives pour faire en sorte de les mettre en péril. C'est aussi grave que cela.

Je pense que le ministre possède un personnel assez compétent, assez bien renseigné sur le sujet pour pouvoir faire une analyse de la situation et prendre les mesures qui s'imposent en vue de protéger celui qui veut réellement faire son boulot de la coupe en territoires privés.

Le Président (M. Clair): Le député de Rimouski sur le même sujet.

M. Marcoux: Mes propos iraient dans le même sens que ceux du député de Montmagny-L'Islet. Il a souligné que, dans sa région, on semblait s'être entendu concrètement. Je pense que, dans la région du Bas-Saint-Laurent, le problème des dissidents, en tout cas, est un problème très marginal, parce que le syndicat des producteurs de bois semble... C'est une région où il y a les deux types: d'abord, des agriculteurs pour qui, le boisé, c'est marginal, mais qui tirent une partie de leurs revenus du boisé; il y a aussi des exploitants forestiers dont la majorité ou presque la totalité des revenus vient du boisé. La coordination ou la façon dont sont répartis les contingentements ou la distribution qui est faite par le syndicat des producteurs semble répondre aux besoins de la population de cette région.

On a souligné que c'est un problème très délicat. Je pense que des mesures rapides dans ce secteur pourraient peut-être jeter plus d'huile sur le feu qu'autre chose. On a fait la comparaison avec la question des artisans. C'est bien sûr que le problème central, si on prend le camionnage, entre le vrac et les artisans, c'est d'avoir un poste de distribution qui soit neutre, un organisme qui soit neutre entre les deux pour l'affectation des camions aux différents emplois ou aux différents travaux qu'il y a à faire.

Je voulais donner un exemple d'une autre région, en plus de celle du député de Montmagny, où les problèmes semblent avoir été résolus par les gens qui étaient concernés, à l'avantage des deux types d'exploitants forestiers: ceux pour lesquels c'est marginal, et ceux pour lesquels c'est presque l'essentiel de leur revenu.

Le Président (M. Clair): Le ministre des Terres et Forêts.

M. Bérubé: Je pense que l'on soulève ici, comme vient de le rappeler le député de Brome-Missisquoi, un problème qui est passablement complexe, ce qui m'a amené à les rencontrer à plusieurs reprises, justement, pour tenter moi-même de comprendre le sens du problème, puisqu'il s'agit d'un problème éminemment politique.

Je ne sais pas si l'Opposition serait d'accord, à l'élément 4, au programme 4, en fait, nous aurons à discuter de tout le programme de l'aide à la forêt privée. On pourrait peut-être reprendre, à ce moment, cette discussion en profondeur et, justement, peut-être réfléchir ensemble, d'un commun accord, sur tous les problèmes que cela soulève. Je pense que vous avez raison de soulever cette question. Il m'est, à moi, en tout cas, difficile, pour l'instant, d'avoir une idée claire là-

dessus. Je vois des avantages. Je vois des inconvénients et je pense qu'une discussion à ce sujet pourrait nous être passablement utile à tous et pourrait nous aider, justement, à trouver une solution plus immédiate.

On m'a demandé de répondre uniquement pourquoi je n'envoyais pas la régie. Evidemment, dans mon esprit — c'est peut-être là où il y aurait lieu d'avoir, justement, une discussion plus en profondeur — le problème de l'Association des propriétaires de boisés privés — je m'excuse de les avoir appelés dissidents — réside dans le fait que les cultivateurs sont également des propriétaires de boisés privés, ce qui fait qu'on ne sait plus trop lequel représente quoi. Finalement, le problème relié à ce qu'on appelle les dissidents est peut-être un problème lié au problème de vente de bois, dans la mesure où si tout le monde pouvait vendre le bois qu'il est en droit d'attendre d'écouler, il n'y aurait peut-être pas le problème, justement, de l'Association de propriétaires de boisés privés. Ce qui fait que, si on peut mettre sur pied une technique, une loi qui nous permette de garantir l'écoulement des bois, peut-être qu'on réglerait ce problème, qui nous apparaît présentement extrêmement important dans trois régions du Québec finalement. Partout ailleurs, au Québec, ce problème est tout de même extrêmement restreint. Je connaissais la région de Québec-Sud, mais on se souvient qu'il y a Montmagny et Bellechasse où ces problèmes se retrouvent également. Par conséquent, c'est un problème qui est assez localisé. Peut-être que, si on arrivait à régler le problème d'écoulement des bois en provenance de ces régions, arriverait-on en même temps au moins à diminuer l'impact qu'il a présentement.

C'est pour cela que, lorsque vous me demandez pourquoi attendre l'organisation de la régie, je vous dirai simplement qu'en fait, au moment où le livre blanc a proposé la création d'une régie des produits forestiers, tous les intervenants se sont opposés à une telle régie, à l'exception de la CSN. En d'autres termes, tous ont fait l'unanimité pour ne pas avoir la Régie des produits forestiers, ce qui fait qu'il est un peu normal que la pensée n'ait pas évolué, à l'origine, en faveur d'une telle régie. Qu'aujourd'hui la situation ait changé, cela est possible, mais si on se remet dans le contexte historique, évidemment, cela nous oblige à faire un rajustement. On peut se demander, justement, si ce n'est pas plus un problème de vente de bois, présentement, qu'un problème fondamental de mise en marché par la régie. C'est une question que je pose, plus qu'une réponse.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, pour faire suite à ce que vient de dire le ministre, je voudrais rappeler tout simplement que, lors de l'étude des crédits de l'année dernière, il y a exactement un an aujourd'hui, le représentant de l'Opposition officielle — et je cite ses paroles, extraites de la page B-843 du journal des Débats — le député de Sa- guenay disait ceci: "C'est extrêmement important d'en arriver — et l'ex-ministre des Terres et Forêts nous l'affirmait un peu lors de l'étude des crédits, l'an dernier — à une régie des produits forestiers qui aura la responsabilité de redistribuer la production entre les différents marchés". Voici ce que disait M. Lessard: "Actuellement, ce sont les grandes compagnies forestières qui ont le gros "bargaining power". Il ne faut pas exclusivement laisser, malgré — je dis malgré — les offices de commercialisation et malgré les offices de mise en marché de l'Union des producteurs agricoles, malgré les plans conjoints, je pense que le gros bâton, ce sont encore les compagnies forestières". Il dit ceci: "On l'a vu l'an dernier, je l'ai vu dans ma région, on l'a vu dans la Beauce, dans la Gaspésie, quand les grandes compagnies décident de ne pas acheter les produits forestiers qui sont produits par des producteurs privés, tout cela reste simplement sur les terres et ces produits ne se vendent pas..."

C'est la raison pour laquelle j'étais à peu près convaincu — je le dirai bien franchement, je suis aussi un peu déçu — de constater que la Régie des produits forestiers qui a tant été prônée par les représentants de l'Opposition officielle, avec qui nous étions d'accord sur ce plan, est laissée en plan cette année, et on veut reprendre la discussion de ce côté.

J'aimerais bien que l'honorable ministre, et je le dis sans malice, sans lui tendre des pièges, examine un peu l'attitude et les propos qui ont été tenus à cette commission parlementaire au cours des années précédentes qui exigeaient qu'une action soit prise, que le gouvernement ait au moins un outil pour voir à la redistribution de la mise en marché du bois.

Il y a tout un problème que je n'ai pas soulevé. Il y a le problème des feuillus de la région des Bois-Francs, de la région de la Beauce. Il y a un gaspillage énorme d'essences forestières. S'il y avait une étude faite de ce côté, pour examiner quelles seraient les possibilités d'approvisionnement d'une usine, on pourrait considérer peut-être un projet de construction d'une usine pour l'utilisation de ces essences forestières de façon à éviter le transport qui est toujours dispendieux vers des grands centres et vers des marchés qui ne sont pas toujours accessibles.

On pourrait même aller encore plus loin. Mais de toute façon, sur ce point en particulier, je pourrais revenir lors de l'étude du programme no 4. J'aimerais bien rappeler au ministre les propos que son prédécesseur à la commission parlementaire avait tenus au moment où il était dans l'Opposition parce que je ne voudrais pas que, de ce côté de la table, on reprenne les anciens propos et que nous soyons toujours obligés de tenir les propos que les autres tenaient avant nous.

Autrement dit, les hommes changent de côté de la table mais il ne faudrait pas que les mêmes discours demeurent aux mêmes places.

Le Président (M. Clair): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Ce qui m'a surpris, c'est lorsque le ministre dit que les autres associations, je ne sais pas comment il les a appelées, ne sont pas en faveur, sauf la CSN. Ecoutez, c'est compréhensible. Posez la question à la CSN: Etes-vous pour la FTQ? Posez la question au Parti québécois: Etes-vous pour le Parti libéral? On n'a pas besoin de poser la question, on connaît la réponse. Je vous donne un exemple. Dans le plan conjoint Québec-Sud, qui est régi par l'UPA, je ne sais pas si le ministre est au courant actuellement. Afin de démontrer qu'ils ne sont pas en faveur qu'on reconnaisse d'autres régies, on exige des gens qui font partie de l'Association des propriétaires de boisés privés de renoncer à cette association moyennant une vente de bois. On leur dit: Signe-moi cela ici. Si tu renonces à faire partie de l'Association des propriétaires de boisés privés, on va te prendre 200, 300, 400 ou 500 cordes de bois. Je l'ai vu cette semaine, pas plus tard que lundi, M. le Président. Demandez à ces gens: Etes-vous pour la régie? Il n'est pas nécessaire de le leur demander, je sais que c'est non et tout le monde sait que c'est non. Ce n'est pas à eux qu'il faut le demander. C'est pourquoi je disais tout à l'heure que cela prendrait une enquête impartiale. Si je fais faire l'enquête par un syndicat pour connaître l'utilité d'un autre syndicat, si on veut appeler cela ainsi, il n'est pas nécessaire de faire faire l'enquête. Je pense qu'on a la réponse, et c'est là que c'est dangereux. C'est ce qui se produit actuellement. On fait faire des enquêtes par des groupes qui sont intéressés. C'est physiquement impossible pour eux d'être impartiaux. C'est là que réside le problème et il dure depuis quatre ans. Cela ne veut pas dire que les deux n'ont pas raison. Il faudrait sortir ces gens à un moment donné du contexte.

Le Président (M. Clair): M. le député de Bellechasse, je pense que nous avions convenu tout à l'heure d'un commun accord de discuter de ce sujet au programme 4. On pourrait peut-être appeler immédiatement l'élément 1 du programme 1.

M. Goulet: M. le Président, j'avais même fait signe que oui moi aussi.

Le Président (M. Clair): Elément 1 du programme 1.

M. le ministre des Terres et Forêts.

Connaissance de la forêt

M. Bérubé: Je vous présente M. Pierre Dorion, directeur du service de la recherche, qui m'assistera dans ce dossier.

En termes d'activité de la recherche, la priorité aux recherches est accordée à l'amélioration de la recherche, à la connaissance de la forêt, à la planification et à l'utilisation de la forêt et à l'origine également des recherches sur l'utilisation des effectifs pour la lutte contre la tordeuse des bourgeons.

En fait, je serai prêt à répondre à l'ensemble des questions que vous aimeriez poser quand je me serai trouvé dans la quantité invraisemblable de papier... voilà.

Le Président (M. Clair): Cela fait fonctionner l'industrie, exactement.

M. Giasson: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Pour la bonne marche des travaux, j'aimerais connaître l'orientation qu'on pourrait leur donner. Par exemple, j'aurais aimé poser des questions au ministre sur le vaste programme qu'il a à l'esprit en vue de la rénovation totale et complète de l'industrie des pâtes et papiers. Est-ce qu'on peut l'aborder immédiatement ou le ministre préfère-t-il qu'on attende un autre programme?

M. Bérubé: Vous pouvez le faire. C'est plutôt au niveau de la recherche sur l'écosystème, ou sur l'écologie forestière. Nous sommes donc peut-être un peu en dehors...

M. Giasson: ...le programme 4... M. Bérubé: D'accord! Oui.

M. Giasson: M. le Président, on pourra aborder cette question au programme 4, comme on l'indique. Au cours des dernières années, j'ai eu des contacts assez fréquents avec les fonctionnaires du ministère des Terres et Forêts et j'y ai rencontré un esprit de collaboration et un désir de servir assez exceptionnels. Toutes les relations avec les fonctionnaires que j'ai eues dans le passé se sont traduites par des rencontres très productives et j'ai été favorablement surpris du désir de servir qu'avaient ces gens et de leurs connaissances approfondies des dossiers que nous abordions. Or, quelle ne fut pas ma surprise, récemment, de lire dans un journal, à la suite d'une entrevue que le ministre avait donnée, soit le Devoir, une remarque du ministre qui déplorait ne pas avoir trouvé la compétence et la rigueur intellectuelle chez ses fonctionnaires face à l'orientation qu'il voulait donner à son ministère.

J'aimerais que le ministre précise davantage, parce que cela n'a aucune relation avec les constatations que j'ai faites personnellement dans les contacts que j'ai eus avec toute l'équipe du ministère des Terres et Forêts.

M. Bérubé: Le député serait-il surpris que cela n'a pas non plus aucune relation avec l'expérience que j'ai acquise au ministère des Terres et Forêts? Je sympathise avec le travail souvent difficile d'un journaliste qui doit, en quatre heures, essayer de retenir l'essentiel d'un grand nombre de sujets couverts. Dans le cas qui vous inquiète, malheureusement, le journaliste a fait un raccourci entre

deux idées différentes qui a conduit à une présentation pour le moins douteuse. Je ne vous cacherai pas qu'effectivement l'expérience que j'ai du ministère des Terres et Forêts est une expérience éminemment agréable si on réfère à nos nombreuses discussions qui sont toujours dans un esprit très ouvert, et, je crois qu'elles sont extrêmement passionnantes. Donc, d'une part, je pense que je n'ai pas l'intention de commenter votre remarque. Si vous me demandez dans quel secteur je trouve que le ministère doit évoluer, parce que cela répond davantage à votre question, je vous dirai que dans le domaine du développement économique dans le secteur de l'industrie forestière, ce n'est certainement pas la vocation passée du ministère.

Le loi permet justement que le ministère s'engage dans cette activité. Cependant, il faut reconnaître que le développement de l'industrie forestière, que ce soit celle du sciage ou celle des pâtes et papiers, a d'abord relevé de l'industrie privée. Le ministère a eu comme vocation l'aménagement de la ressource, de l'approvisionnement en bois, et beaucoup moins le problème, justement, du développement économique de ce secteur de l'industrie primaire. Par conséquent, cela peut expliquer pourquoi, devant l'abondance de dossiers à caractère économique qui afflue maintenant vers le ministère, nous sommes amenés à constater, particulièrement depuis janvier, je dois dire, que s'il devait y avoir une nouvelle consolidation de l'orientation actuelle du ministère, cela devrait être justement dans le secteur de l'économie forestière, donc, de la capacité du ministère d'évaluer des dossiers de rentabilité, d'investissement. Par conséquent, c'est l'orientation qu'on devrait prendre.

Je pense que nous sommes unanimes, au ministère à reconnaître que c'est cette orientation qui a été mise de côté dans le passé, pour peut-être d'excellentes raisons; je pense que je ne suis pas en mesure de les juger aujourd'hui. Mais je pense que c'est dans ce secteur que nous devons faire des efforts et que ces efforts deviendront apparents, je pense, dans les années qui vont venir. Pour cette année, elle n'affecte pas le budget, sauf peut-être, parfois dans la réallocation de postes de certains domaines du ministère vers, justement, ce domaine de l'économie forestière, du développement forestier qui n'apparaissent évidemment pas au budget ici.

M. Giasson: Dans un premier temps, si j'ai bien saisi les propos du ministre, le ministre aurait été mal cité par le journaliste et, effectivement, il n'accepte pas les commentaires ou les propos que le journal a rapportés.

M. Bérubé: Je refuse complètement ce paragraphe.

M. Giasson: Vous reconnaissez la qualité de l'équipe qui vous entoure.

M. Bérubé: 95% de l'article étant valables, les derniers 5%, je pense qu'il ne faut pas trop en tenir rigueur au journaliste.

M. Russell: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: ... à l'élément 1, il y a une baisse de crédits pour la recherche de $2 174 000 à $1 900 000. Est-ce que le ministre veut minimiser la recherche? Est-ce qu'il y a un changement de politique, une diminution de fonctionnaires? Quelle est l'économie que le ministre fait?

M. Bérubé: L'économie, en fait, porte sur une coupure de $400 000 sur un programme de recherche portant sur la tordeuse des bourgeons de l'épinette. On peut se demander: Pourquoi couper ce programme de recherche? Je pense que vous êtes peut-être au courant que l'épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette est en régression. D'ailleurs, vous verrez que, dans les programmes d'arrosage que nous discuterons ultérieurement — je ne saurais dire à quel numéro — il y a également des coupures cette année. C'est que l'épidémie progresse en direction de l'est et quitte présentement le Québec. Elle est encore extrêmement sévère en Gaspésie, mais elle est, quand même, en voie de régression un peu partout au Québec. Dans ces conditions, il était normal que le gouvernement, étant amené à faire des coupures, on ait choisi de faire des coupures dans des secteurs où justement c'était peut-être moins urgent. Une des premières coupures que nous avons pratiquées, c'est cette coupure de $400 000 au niveau du programme de recherche sur la lutte contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette.

M. Russell: Est-ce qu'il s'agit d'une diminution de personnel à cet article?

M. Bérubé: Est-ce que vous me permettez peut-être, dans les questions techniques, de laisser la parole à un fonctionnaire? De coutume, on permet à un fonctionnaire de répondre, mais il le fait toujours au nom du ministre et c'est toujours comme si c'était le ministre qui parlait. Alors je les ai bien mis en garde de ne pas me citer de façon tendancieuse. Il ne s'agit pas d'une coupure de personnel.

M. Giasson: A quel endroit est localisé le personnel qui travaille au service de recherche du ministère? Est-ce qu'on le retrouve uniquement à Québec ou si c'est réparti en province dans des stations forestières de recherche?

M. Bérubé: Au complexe scientifique, sauf un ouvrier qui travaille à la station forestière de Duchesnay.

M. Giasson: On les retrouve tous au complexe scientifique. Il y a combien de personnes affectées à ce service?

M. Bérubé: II y a 67 personnes.

M. Russell: Au complexe scientifique.

M. Bérubé: Moins un ouvrier qui travaille à la station forestière de Duchesnay où nous avons des recherches puisque c'est la vocation de la station forestière de servir à la recherche et à l'éducation en conservation.

M. Giasson: Mais Duchesnay est la seule station forestière au Québec où il se fait un programme de recherche comme tel ou si d'autres stations peuvent poursuivre également des programmes de recherche?

M. Bérubé: C'est la seule station organisée avec un personnel et des bâtisses aussi bien.

Le Président (M. Clair): L'élément 1 du programme 1 sera-t-il adopté?

M. Russell: M. le Président, une simple question ici. Je crois qu'il y a 67 fonctionnaires permanents, dont 66 travaillent au centre de recherche, mais il y en a aussi 29 à temps partiel. Est-ce que ces employés vont retrouver encore leur emploi cette année? A quelle place les utilise-t-on ces employés à temps partiel?

M. Bérubé: En fait, c'est le total des étudiants durant l'été, des ouvriers qu'on engage en forêt pour les reboisements expérimentaux, les traitements sylvicoles expérimentaux, et aussi, des professionnels affectés à des projets spécifiques, de même que quelques fonctionnaires occasionnels aussi.

M. Russell: Une autre question, M. le Président. A la catégorie 6, loyers, on voit qu'il y a une augmentation assez substantielle. Est-ce que les $30 000 qui sont demandés pour les loyers représentent le montant qui était au programme l'an dernier?

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Oui, M. le Président, merci.

Au service de recherche, on poursuit des travaux de classification écologique des forêts du Québec. Lorsqu'on fait ce travail, quels sont les buts précis ou les faits qu'on veut atteindre? Dans le programme de classification écologique des forêts au Québec.

M. Bérubé: Les buts sont de décrire des types des régions écologiques homogènes. Cela dépend de l'échelle à laquelle on veut travailler. A grande échelle, ce sont des régions et puis ensuite, quand on passe à des unités plus petites, il y a des systèmes écologiques et enfin on tombe aux types écologiques. Mais le but de cela c'est de connaître, selon l'échelle à laquelle on travaille, des forêts homogènes qui vont réagir de façon sembla- ble quand on veut les traiter, quand on veut les aménager. Comme c'est basé sur la description du terrain, la forme de terrain, les sortes de matériel, comme le gravier ou l'argile, etc., cela peut servir aussi pour des fins de tracés de chemins. Cela peut servir pour des fins de difficulté d'exploitation, puisque cela tient compte de la pente, etc.

C'est en fait la définition de la forêt, c'est-à-dire de l'objet des travaux forestiers.

M. O'Gallagher: Est-ce que toute cette information est montrée sur des cartes forestières?

M. Bérubé: Certainement, oui.

M. O'Gallagher: Maintenant, y a-t-il d'autres cartes forestières, concernant le Québec, disponibles, autres que Mont-Laurier, Iles-de-la-Madeleine, Ottawa et Cap-Chat? Si oui, lesquelles sont disponibles?

M. Bérubé: Je ne sais pas exactement de quoi vous voulez parler. Au point de vue des cartes que la recherche peut fournir, il y a eu les cartes d'inventaire des terres du Canada qui sont publiées à deux échelles, l'échelle 250 millièmes qui est publiée, en fait, par le fédéral, puisque c'est une entente fédérale-provinciale. L'échelle à 50 millièmes n'est pas publiée, mais on peut la fournir, à Québec même, sur demande.

M. Giasson: Vous les avez pour tous les territoires, toutes les régions du Québec. C'est cela?

M. Bérubé: Pour le Québec mérédional, c'est-à-dire qu'il y a eu une limite nord qui allait à peu près avec la limite des terrains colonisés. Ensuite de cela, il y a eu quelques études écologiques dans certains territoires qui ont été faites, en partie, pour fins de recherche, pour déterminer les méthodes de classification écologique. Il y a une carte publiée, actuellement, c'est la carte du comté de Rivière-du-Loup.

M. Giasson: On peut conclure que toutes ces cartes sont disponibles pour quelqu'un qui voudrait les consulter, et on peut se les procurer au ministère des Terres et Forêts.

M. Bérubé: Celle-là.

M. Russell: Est-ce que je dois comprendre que, sur ces cartes, on a l'indication des essences de bois dans chaque territoire?

M. Bérubé: Cela dépend de la série de cartes. Les cartes d'inventaire des terres du Canada étaient basées sur la capacité productive de la forêt et non pas sur la production actuelle. C'est-à-dire qu'il s'agissait de déterminer quelle essence croîtrait là naturellement ou quelle combinaison d'essences.

Ce sont ces essences qui sont indiquées sur la carte. Vous pouvez avoir un endroit donné où c'est indiqué "sapin et bouleau jaune", c'est-à-dire le

merisier, et peut-être que cet endroit est actuellement en culture ou encore c'est un bûché ou un brûlé ou encore, après un brûlé, il est redevenu en trembles et on a du tremble de 30 ans. Mais cela indique les essences qui croîtraient là, naturellement. Cela, c'est pour les cartes d'inventaire des terres du Canada.

Pour les cartes écologiques, là encore, cela va dépendre. Si c'est la série évolutive qui est indiquée, c'est le stade final de l'évolution naturelle. Si, par contre, c'est une carte qui vous indique chaque stade de la série évolutive comme, par exemple, la carte du comté de Rivière-du-Loup, à ce moment-là, vous avez les essences qui étaient là au moment où la carte a été faite.

M. Russell: Si je veux obtenir une carte avec les essences qu'il y a sur un territoire, actuellement, puis-je l'obtenir de votre service?

M. Bérubé: Pas à la recherche, c'est l'inventaire forestier, à ce moment-là. En fait, c'est le prochain élément que vous allez étudier.

M. Giasson: Le service de recherche a entrepris des travaux dans la forêt domaniale des Appalaches en vue d'un projet pilote pour les unités de gestion. On prévoyait que les travaux pourraient être terminés en 1977. Effectivement, est-ce que les travaux sont sur le point de se terminer et quels sont les résultats? Que peut-il découler de ces travaux de recherche visant ce plan pilote qu'on a bâti et qui servirait de portrait ou d'image en vue de développer d'autres unités de gestion au Québec?

M. Bérubé: En fait, ce qui est actuellement en cours dans la forêt des Appalaches, c'est l'essai de la méthode de classification écologique qui a été préconisée par un groupe multidisciplinaire et interorganismes. C'est ce qui est en cours depuis deux ans et on doit continuer l'été prochain. Maintenant, il est question, au cours de la prochaine année, d'essayer de travailler à l'élaboration d'un programme d'informatique qui permettra, en utilisant les programmes déjà en cours, d'étudier l'effet de révolution de la tordeuse des bourgeons de l'épinette sur la forêt. Autrement dit, il y aurait une partie du programme qui étudie l'évolution naturelle de la forêt et une autre partie qui étudie l'évolution naturelle d'une épidémie de tordeuses. C'est l'interaction entre les deux qui serait traitée par le programme d'ordinateurs auxquels on pourrait poser des questions concernant l'aménagement forestier.

M. Giasson: Mais ce projet pilote...

M. Bérubé: II n'y a pas de projet pilote d'aménagement en ce qui concerne la recherche dans la forêt domaniale des Appalaches.

M. Giasson: Je vois ici, dans le rapport du ministère, qu'on fait bien allusion à un projet pilote en vue d'aménager des unités de gestion.

M. Bérubé: C'est cela, c'est l'établissement du programme d'ordinateurs. Quand le programme sera au point, à ce moment-là, on pourra l'essayer dans la forêt domaniale des Appalaches, dans l'unité de gestion des Appalaches.

M. Giasson: Le plan de recherches ne serait pas encore terminé?

M. Bérubé: II n'est pas terminé encore. C'est le but qu'on vise.

M. Giasson: Justement, dans cette recherche qui a été faite, dans la forêt domaniale des Appalaches, visant également une étude des phénomènes découlant de l'épidémie de la tordeuse, est-ce que cela va déboucher sur des décisions?

Va-t-on procéder à des programmes de coupe de façon à récupérer les secteurs ou les parcelles qui sont vraiment endommagées? On sait que du côté du sapin les dommages sont beaucoup plus lourds que du côté de l'épinette.

Est-ce que cela va déboucher nécessairement sur une décision d'entreprendre des programmes de coupe qui n'étaient pas prévus, avant la venue de l'épidémie de tordeuses?

M. Bérubé: Evidemment, quand le résultat de la recherche est terminé, ce résultat est passé aux gestionnaires, ceux qui doivent prendre des décisions concernant l'aménagement. Puis, ce sont eux qui prendront les décisions en conséquence.

M. Giasson: Des décisions qui vont suivre les résultantes de la recherche effectuée sur le territoire, sur les parcelles. C'est une affaire importante; on a décidé, à un moment donné, dans une région qui a subi le passage de la tordeuse... Qu'est-ce qu'on fait avec l'essence qui est sur place et qui va disparaître à brève échéance? Est-ce qu'on la laisse se gaspiller sur place ou si on bâtit des programmes de récupération dans ces secteurs-là, ou si on modifie le programme d'ensemble? Va-t-on vers les secteurs endommagés pour laisser d'autres secteurs qui devaient subir des traitements ou de l'aménagement, mais n'étant pas endommagés par l'épidémie, on les garde en réserve pour récupérer le plus de forêt possible qui va se perdre de toute façon? Cela prend une importance assez grande à mon sens.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, c'est un aspect très important qui est soulevé actuellement au niveau de la récupération. Je dois dire que déjà, au ministère, ce n'est pas exclusivement de la recherche, mais la connaissance actuelle des dégâts causés à la forêt par la tordeuse, on en tient compte dans les permis de coupe, dans les plans d'exploitation de la forêt. L'objectif serait évidemment de récupérer en totalité tous les bois qui sont affectés et en perdition. L'effort maximum est fait déjà au niveau des plans d'exploitation que nous acceptons des compagnies, des concession-

naires, des permissionnaires. Il est peu probable, cependant, que nous réussissions a récupérer le bois qui est en perdition, il y en a trop.

M. Giasson: On peut déduire que c'est une préoccupation au ministère de voir à modifier les programmes de coupe, d'exploitation et d'aménagement en tenant compte de ravages qui peuvent se produire de façon plus intense dans des secteurs par rapport à d'autres secteurs.

M. Bérubé: Mais ce n'est pas le rôle du service de la recherche comme tel de préparer des plans de gestion. Alors, il s'agit donc davantage de faire des études fondamentales sur le comportement de la forêt, lorsqu'elle est soumise à des contraintes naturelles comme la tordeuse, par exemple, et de voir son comportement en milieu naturel et non pas de faire des plans de gestion.

M. Giasson: L'information que la recherche peut apporter, à un autre palier de décision opérationnelle, permet au ministère de récupérer des essences qui vont se perdre, si ce n'est pas fait dans une période de deux ou trois ans.

M. Bérubé: Exactement.

Le Président (M. Clair): Le député de Robert-Baldwin.

M. O'Gallagher: Toujours sur la recherche, où en est rendu votre projet de recherche sur la sélection et l'amélioration du peuplier dans la vallée du Saint-Laurent, plus précisément à Matane et à Villeroy?

M. Bérubé: Cela progresse normalement. On a planté, vers 1969, les premières plantations et on a déjà une bonne idée des lignées de peupliers qui donnent les meilleurs rendements, compte tenu du climat régional, compte tenu de certaines maladies aussi qui peuvent exister dans ce coin, compte tenu aussi de la croissance naturelle de chacun des hybrides de peupliers ou de chacune des espèces qu'on a plantées là.

Evidemment, tout cela doit se poursuivre, parce que, même si le peuplier est une essence à croissance rapide, il reste qu'il y a encore une foule de choses à chercher et à préciser. On a tout de même déjà des résultats préliminaires qui nous permettent de recommander une dizaine d'hybrides ou de variétés de peupliers à planter ailleurs.

M. Giasson: Après, quoi — vous avez commencé en 1969 — sept ou huit ans de croissance, vous avez déjà des indications qui permettent de faire des choix entre les différents types de peupliers que vous avez.

M. Bérubé: Oui.

M. Giasson: L'expérience que la recherche a poursuivie du côté du mélèze à Bonaventure et à Duchesnay est-elle concluante jusqu'à présent?

Est-ce que ces plantations sont aussi récentes que celles des forêts de Villeroy et de Matane?

M. Bérubé: Elles ont été commencées après. On est moins avancé. On en est à l'installation. En fait, ce qu'on fait, dans une première étape, on sélectionne dans la nature différents individus qui semblent avoir une belle forme, une excellente croissance et on reproduit cela à Duchesnay, à la pépinière expérimentale, en plus de ce qu'on obtient par des échanges avec d'autres provinces ou d'autres pays, qui proviennent de régions où le climat est semblable au nôtre. On essaie cela à Duchesnay et, déjà, dans la pépinière, on peut voir que certains plants ne résistent pas au gel, par exemple. Ils ne semblent pas donner de bons rendements. On peut éliminer ceux-là.

Ensuite, on va planter des jeunes arbres dans un réseau d'arboretums (une vingtaine) établi à travers le Québec. C'est là encore, après quelques années, qu'on peut comparer les arbres qui sont placés dans des conditions climatiques un peu différentes de celles de Duchesnay et, avec l'âge, on peut voir si leur bon rendement se maintient.

Alors, là on en est à la phase des jeunes plantations dans les arboretums. Déjà, évidemment, celles qui ne semblent pas vouloir donner un bon rendement, on peut les éliminer.

Le Président (M. Clair): M. le député de Montmagny-L'islet.

M. Giasson: Quel est le type d'industries, au Québec, qui requiert surtout le mélèze? C'est une essence qu'on ne peut pas tout de même utiliser à des fins multiples, je crois.

M. Bérubé: Actuellement, c'est surtout les pâtes et papiers, comme à New Richmond, où on utilise le mélèze. Le mélèze peut être aussi utilisé pour le sciage.

M. Giasson: II y a un marché de sciage pour le mélèze?

M. Bérubé: J'ai dit qu'il pourrait être utilisé pour le sciage. Il est utilisé ailleurs dans d'autres pays.

Le Président (M. Clair): Le député de Pontiac-Témiscamingue.

M. Larivière: Le ministère a-t-il d'autres projets expérimentaux pour l'année qui vient? Si oui, quelles plantes et à quel endroit?

M. Bérubé: Si on veut parler selon les essences, celles sur lesquelles on travaille le plus sont le peuplier, le mélèze et aussi le pin gris. Le pin gris est une essence à croissance rapide, comme tout le monde sait, qui peut donner un bon rendement en plantation. Il y a aussi un autre problème, c'est que le pin gris qu'on trouve naturellement dans le Québec, lorsqu'il est coupé à plusieurs endroits se régénère mal. Alors, on peut avoir de grandes su-

perfides de forêts qui ne se régénèrent pas. On a établi, en collaboration avec d'autres organismes, un programme de recherche concernant le peuplier, qui traite en bonne partie des méthodes pour régénérer les bûcheries et les différentes méthodes de plantation aussi. Malgré qu'on ait aussi quelques recherches concernant la sylviculture, les peuplements de pins gris naturels et la fertilisation aussi des pins gris naturels.

Ensuite de cela, on a passablement de recherches qui sont plus anciennes concernant la sylviculture du sapin. Certaines datent de 1959. Pas seulement de sapins, mais aussi des épinettes, celles-là concernant plutôt la sylviculture de peuplement naturel et la fertilisation.

Le Président (M. Clair): Le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: M. le Président, simplement quelques remarques. On parlait de mélèzes et de peupliers tout à l'heure.

Je pense que cela prend deux marchés possibles dans cela, l'industrie des pâtes et papiers et l'industrie de la planche-particules où cela peut être rentable. On se rappellera quand même, quand on parle des pâtes et papiers, que les usines paient les prix qu'elles veulent parce qu'il y a des surplus. En ce qui concerne la planche-particules, il n'y a pas d'utilisateur actuellement. Vous avez une industrie à Cabano — je crois qu'elle est installée — les Papiers Cascades, qui est une cartonnerie et qui pourra l'utiliser avec avantage.

M. Giasson: Le problème de recherche...

M. Bérubé: Dans le domaine de la recherche, où nous faisons des recherches sur une essence qui est plus ou moins utilisée actuellement, on a un certain nombre d'années pour convaincre l'industrie des bons résultats qu'on pourra obtenir avec ces essences. Nous avons une vingtaine d'années dans le cas des plantations de mélèzes; d'ici là les conditions économiques peuvent changer beaucoup. Connaissant les qualités technologiques de ces essences, comme le mélèze, il s'agit donc de convaincre l'industrie.

Le Président (M. Clair): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Bérubé: II y a aussi une chose, si on les plante sur de grandes superficies, cela devient plus intéressant pour l'industrie d'accepter ces essences que si quelqu'un se présente avec un chargement de mélèzes à l'usine.

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, je dois vous signaler qu'en vertu d'un ordre que l'Assemblée nationale nous a donné hier nous devons ajourner nos travaux à midi, mercredi. Je propose donc l'ajournement des travaux.

Le Président (M. Clair): La commission parlementaire...

M. Giasson: On pourrait remettre cela sine die en attendant...

Le Président (M. Clair): La commission parlementaire...

M. Giasson: ...le prochain ordre de la Chambre.

Le Président (M. Clair): ...ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 4)

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