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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le jeudi 5 mai 1977 - Vol. 19 N° 54

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Terres et Forêts


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère des Terres et Forêts

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

La commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts est réunie ce matin pour continuer l'étude des crédits budgétaires du ministère des Terres et Forêts. Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont M. Baril (Arthabaska), M. Bérubé (Matane), M. Boucher (Rivière-du-Loup), en remplacement de M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu (Richmond), M. Desbiens (Dubuc), M. Garneau (Jean-Talon), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Goulet (Bellechasse), M. Grégoire (Frontenac), M. Joron (Mille-Iles), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Gravel (Limoilou), en remplacement de M. Marcoux (Rimouski), M. Marquis (Matapédia), M. Mercier (Berthier), M. O'Gallagher (Robert Baldwin), M. Perron (Duplessis).

Nous avions procédé à l'adoption des programmes 1, 2, 3 ainsi qu'à l'adoption des programmes 5 et 6. Nous avions laissé en suspens l'étude du programme 4 qui avait été commencée. Nous en étions à l'élément 1 du programme 4. J'avais dressé, au moment où nous avions suspendu l'étude du programme 4, élément 1, une liste des députés qui avaient demandé la parole. Il y avait, en premier lieu, le député de Montmagny-L'Islet, le député de Robert Baldwin, le député de Rimouski, le député d'Abitibi-Est et le député de Mercier. Je donne immédiatement la parole au député de Montmagny-L'Islet.

Utilisation de la forêt Révocation des concessions forestières

M. Giasson: M. le Président, comme vous l'avez dit, nous avons arrêté notre discussion sur la situation de révocation des concessions forestières au Québec pour profiter de la présence de ceux qui ont oeuvré du côté du crédit forestier depuis son institution afin de libérer cet élément de programme puisque ces gens ne pouvaient pas être avec nous cette semaine.

Nous pourrions reprendre là où nous avions laissé, je pense, la discussion sur la révocation des concessions forestières. Il y a un élément qui m'a frappé beaucoup lorsque le ministre nous a déclaré que l'état de réflexion dans lequel il s'est plongé vis-à-vis de cette partie du programme forestier au Québec n'avait pas atteint son cheminement final; c'est que le ministre voulait se donner encore une période de réflexion pour choisir entre les options possibles. Je ne cache pas que cela m'a beaucoup surpris, cette longue période de réflexion que le ministre doit se donner, puis- que son parti, depuis quelques années déjà, avait classé toute la question des concessions forestières.

On n'a qu'à se rappeler les prises de position et les déclarations de certains de ses collègues, entre autres de M. Jacques Parizeau, qui est ministre des Finances présentement, et de l'actuel premier ministre de la province de Québec qui, à ce moment, faisait encore du journalisme combiné avec sa fonction de chef de parti en dehors de la Chambre. Nous avions là des déclarations qui nous prouvaient qu'il n'y avait plus de doute possible dans l'esprit du Parti québécois qui forme l'actuel gouvernement.

Je pourrais citer, M. le Président, des déclarations qui ont paru dans les journaux du Québec, ici, à l'époque, et qui discutaient de la vision que le Parti québécois avait vis-à-vis de ce programme de révocation. Je pourrais citer, par exemple, entre autres, une prise de position très précise du premier ministre qui déclarait, dans le Journal de Québec du 6 octobre 1971, dans l'une de ses chroniques: "Le fait est — je cite le premier ministre alors chef du Parti québécois — que la forêt étant déjà propriété collective, ce rachat des seuls investissements utilisables ne devrait coûter qu'environ $200 millions — c'est bien $200 millions, les chiffres n'ont pas été tronqués — en tout et pour tout étalés sur dix ans, selon un précédent créé pour la reprise de Hammer Mill près de Matane. L'opération grèverait le budget québécois d'une vingtaine de millions par année". C'étaient des peanuts, c'était peu de chose. Dix ans, $200 millions, $20 millions par année, pas de problème là. Si vous permettez, je vais aller au bout de ma citation. "Ce n'est vraiment pas cher pour reprendre le contrôle de la première de nos richesses". Ce sont de grandes déclarations de principes. C'est l'actuel premier ministre qui parle et il sait ce qu'il dit. "Ce n'est vraiment pas cher pour reprendre le contrôle de la première de nos richesses, surtout pour la remettre en bon état en lui donnant enfin une gestion rationnelle". Là, il n'a pas déclaré de chiffres, il n'a pas dit quel serait le coût de la remise en état, de la formation d'unités de gestion, parce que c'est un autre chiffre qui vient s'ajouter aux $200 millions qu'on applique uniquement au coût des révocations.

Il arrive que dans la vie le hasard fait bien les choses. L'actuel ministre des Finances, qui s'y connaissait lui aussi en matière de réforme forestière, déclarait, et je cite le journal Québec-Presse du 26 septembre 1971: "En termes d'emplois et d'impôts à percevoir, le déboursé du gouvernement deviendrait un de ses meilleurs placements". $200 millions, en termes de déboursés et de création d'emplois, cela devient l'un des meilleurs placements. "Quelques dizaines de millions par an — pour le citer textuellement — serviraient ainsi à moderniser et à rendre plus concurrentielle sur les marchés mondiaux l'industrie des pâtes et papiers".

C'est heureux que cet homme, qui avait analysé la situation, qui avait réfléchi sur le dossier, qui était fixé dans les objectifs à réaliser, soit devenu, aujourd'hui, ministre des Finances. Il va être justement celui qui va permettre à l'actuel ministre des Terres et Forêts de réserver, à même les budgets du gouvernement, lui qui siège au Conseil du trésor, les dizaines de millions de dollars annuels qui sont nécessaires pour passer à travers le programme de révocation des concessions forestières et permettre à l'Etat québécois, donc à la population du Québec, d'être véritablement propriétaire de cette richesse naturelle.

C'est pourquoi je vous disais, M. le Président, que je ne comprends plus les hésitations du ministre, ces réflexions profondes qu'il doit faire, puisque c'est facile. En effet, nous avons là deux hommes importants dans l'actuel gouvernement, le premier ministre et le ministre des Finances qui détient les cordons de la bourse, donc qui peut mettre à la disposition du ministre les sommes requises. Je ne comprends plus cette période d'hésitation, d'attente et de longue réflexion que le ministre doit se donner pour savoir si les $70 millions, qui étaient les prévisions de l'ancien ministre des Terres et Forêts, sont une bonne chose. Devant le fait de consacrer $70 millions, qui serait le coût total des révocations selon les critères déjà établis par l'expérience qui est acquise en matière de révocation, je ne comprends plus son hésitation. Il me semble que le ministre des Terres et Forêts n'aurait qu'à aller voir le premier ministre et le ministre des Finances et, bingo, le tour est joué. Ce n'est plus $200 millions, coût estimé par son premier ministre à l'époque; c'est seulement $70 millions.

Je n'accepterai pas qu'on me trouve une multitude de raisons pour nous dire, aujourd'hui, que ce n'est plus possible, qu'il faut réfléchir, qu'il faut peut-être trouver d'autres formules. C'est clair, c'est net, c'est précis. Son équipe nous a dit comment on devait travailler. Le ministre se cache derrière quoi pour dire que c'est difficile, compliqué et qu'il faut réfléchir encore?

M. le Président, j'aimerais que le ministre nous donne plus de précisions, compte tenu de ce qui était facile à l'époque. On disait qu'on ferait cela en un tour de main; il s'agissait d'avoir la volonté de consacrer les crédits et on réglait le problème.

Le Président (M. Clair): Le ministre des Terres et Forêts.

M. Bérubé: II me fait plaisir de répondre à votre interrogation. D'une part, il est important de retenir que la programmation de révocation nous a été léguée directement par l'ancienne administration. En d'autres termes, nous n'avons pas modifié la programmation qui avait été adoptée par l'ancien gouvernement; nous avons considéré que nous n'étions pas en mesure de la remettre en question et que, par conséquent, les crédits que vous voyez au poste en question, c'est pour un programme de trois ans. C'est donc la suite logi- que de la programmation de l'ancienne administration. Il est donc assez intéressant de constater que le critique officiel de l'Opposition est aujourd'hui en train de critiquer les chiffres de son gouvernement, l'année dernière.

Je suppose que l'an dernier il devait défendre la position de son gouvernement face à l'Opposition du Parti québécois. Par conséquent, ce que je vous ai expliqué dans ma déclaration préliminaire était à l'effet que, dans la présentation du présent budget, il y a forcément un bon bagage historique que nous avons accepté et que nous n'avons pas remis en cause. Donc, nous n'avons pas jugé bon, dans le budget que je vous présente, de remettre en question, en particulier, la programmation de révocation prévue par l'ancien gouvernement.

Par conséquent, j'ai l'impression que le député de Montmagny, présentement, critique son propre gouvernement et ses propres décisions passées auxquelles il a participé, j'espère.

Deuxième remarque: II nous cite, en 1971, certaines déclarations de notre chef, M. Lévesque. Je pense qu'il a raison de les citer. En 1971, effectivement, les finances de l'Etat pouvaient paraître relativement saines. Cependant, l'an dernier, le gouvernement libéral nous a entraîné dans des emprunts de l'ordre de $2500 millions. En d'autres termes, le gouvernement s'est lancé dans des dépenses tellement insignifiantes, tellement irrationnelles, tellement irréalistes que, forcément, au moment de l'élection — d'ailleurs, une des principales raisons pour lesquelles nous avons été élus, c'est que la population a jugé que les enfantillages du gouvernement précédent avaient suffisamment duré— prenant le pouvoir dans la suite logique de l'ancien gouvernement, nous avons été aux prises avec une condition budgétaire du gouvernement qui n'était pas à la hauteur de ce qu'elle aurait pu être en 1970 si nous avions effectivement pris le pouvoir.

Donc, il y a un legs du passé à nouveau; c'est non seulement le legs de vos propres planifications budgétaires, mais c'est également le legs d'un état budgétaire catastrophique au niveau du gouvernement du Québec. Deuxième réflexion.

La troisième réflexion est que je me suis engagé à terminer les révocations en 1982. Je rappellerai également au député de Montmagny que l'une des principales attaques du critique de l'Opposition à l'époque, donc, dans les années 1973/74/75, M. Lessard, à l'encontre du programme de révocation, était son coût qu'il jugeait excessif. Il était donc normal qu'en prenant le pouvoir, la première réflexion que nous effectuions soit: Est-ce que nous ne payons pas trop cher? La conclusion que nous en avons tirée c'est qu'effectivement, pour les ressources du Québec, nous payons trop cher. Il y a deux possibilités: soit que nous nous organisions pour percevoir, de l'industrie, les revenus comparables au coût que justifie la révocation ou soit que nous procédions à un mode moins coûteux de révocation.

Donc ce que j'ai pris la peine d'affirmer, c'est que nous allons maintenir cette programmation, mais de deux choses l'une; ou nous paierons

moins cher, ce qui à ce moment-là répondrait aux critiques du Parti québécois quand il était dans l'Opposition, ou nous chargerons plus cher à l'industrie forestière, de manière à justifier cette révocation et cette gestion.

Il m'apparaît à moi totalement anormal que le gouvernement subventionne l'industrie des pâtes et papiers. Ne vous semblerait-il pas injuste, si l'industrie papetière présentement doit, à titre d'exemple, payer peut-être l'équivalent de $8, $9, $10 le cunit pour l'entretien de sa voirie forestière, qu'au lendemain de la révocation payée par les deniers des Québécois nous ne chargions à cette industrie que $1 le cunit? En d'autres termes, non seulement nous aurions racheté les concessions, mais en plus nous subventionnerions cette industrie, puisque dans le cas où elle aurait conservé sa concession elle aurait dû encourir des frais de quatre, cinq, six fois plus élevés.

Par conséquent, on peut aborder ce problème sous deux angles et c'est ce que je vous ai dit au début. Par conséquent, je vous dirai que je ne remets pas en question le programme de révocation, je m'assure simplement qu'il se fasse à l'avantage de l'ensemble des Québécois.

M. Giasson: L'argumentation que le ministre vient de nous donner, M. le Président, ne me convainc pas. Ses collègues, après avoir examiné le dossier de révocation, avaient jugé que $200 millions étaient un prix normal à payer; on pouvait payer cela dans le programme de révocation. Ces chiffres n'étaient pas sortis en fonction de la situation financière du Québec, c'était sorti en fonction de la valeur qu'on jugeait de voir attribuée au coût de la révocation. C'était là la position du premier ministre et c'était également l'attitude ou les déclarations faites par le ministre actuel des Finances, quelque $10 millions par année.

Moi, je demeure convaincu que, si cette volonté ou ce désir, qui était très formel de la part du ministre des Finances à l'époque, il avait voulu le maintenir, il aurait été possible de couper des budgets à d'autres ministères pour aller chercher les $10 millions ou les $20 millions qui étaient requis. Le ministre sait bien qu'il ne convainc personne en disant cela. Lorsqu'on a un budget au ministère des Transports de $1 milliard par année, on ne me fera pas croire qu'il était impossible de retrancher un petit montant de $20 millions sur le milliard des Transports, pour procéder à ce qui était une urgence déjà en 1971.

Il aura beau invoquer la situation financière actuelle du Québec, il ne convainc encore personne, pour celui qui connaît le moindrement l'administration. Tout cela se fait à l'intérieur d'une assiette globale, et c'est une question de choix. J'en déduis, et c'est cela la réalité, que cette importance qu'on avait donnée à l'époque à la révocation des concessions n'est plus la même maintenant que ce parti a le pouvoir.

C'est aussi simple que cela. Cela n'a plus la même importance que celle qu'on lui donnait à l'époque en 1971. C'est cela le fond de la réalité.

M. Bérubé: Dois-je répondre au député de Montmagny que le budget qu'il critique en ce moment est la continuité du budget de l'année précédente? Nous n'avons pas modifié la planification que l'ancien gouvernement avait imposée dans ce secteur.

Par conséquent, ce que vous nous reprochez, c'est d'aller moins vite que l'ancienne administration.

M. Giasson: C'est de ne pas aller dans le sens de ce qui était la politique et la philosophie du Parti québécois tout récemment. C'est ce qu'on vous dit ce matin.

M. Bérubé: Je peux vous assurer...

M. Giasson: Ce qu'on vous reproche, c'est que d'un côté le premier ministre faisait une déclaration, l'actuel ministre des Finances en faisait une autre, et pendant qu'eux prenaient ces positions le critique officiel du Parti québécois, qui à cette époque, était l'Opposition, reprochait au ministre des Terres et Forêts de ne pas consacrer $10 millions ou $20 millions par année pour passer à travers le programme de révocation des concessions sur une période de dix ans. C'est ce qu'il faisait à l'époque.

Ce parti, qui avait des données très précises, prenant le pouvoir, il était facile d'imaginer que le programme de révocation se ferait dans le temps prévu, même à l'intérieur du temps prévu parce qu'au lieu de $200 millions comme coût probable, nous passions à $70 millions, tel que déterminé par l'ancien ministre des Terres et Forêts.

M. Bérubé: Premièrement, lorsque je parle de $70 millions, je parle de la voirie forestière en gros. D'ailleurs, je tiens à souligner que ces coûts sont très mal connus. Autant ils étaient mal connus à l'époque, en 1971, par l'Opposition, autant aujourd'hui encore on constate qu'ils ne sont pas finalement connus de façon extrêmement précise.

Les coûts de voirie forestière augmentent de façon substantielle depuis les dernières années, de plus de 30% par année. Par conséquent, je pense que justement un point important à souligner c'est peut-être le fait que nous connaissons mal le coût réel que nous allons encourir par la révocation des concessions. Mais je pense que ce qui est important, c'est justement de s'engager à terminer la programmation pour 1982 et, donc, se donner les moyens pour le terminer.

Même si le député de l'Opposition nous disait: Vous devriez mettre $50 millions cette année pour programmer la révocation, alors que vous n'en mettez que $1,6 million, à cela je répondrais que si nous mettions $50 millions il faudrait le prendre ailleurs. Nous avions une marge de manoeuvre de l'ordre de $175 millions qu'il a fallu partager entre les différents ministères.

Relativement peu de ministres auraient accepté que l'on investisse $20 millions comme tels

dans le programme de révocation en sacrifiant des programmes extrêmement urgents dans le secteur de la santé, dans le secteur du développement minier, dans le secteur de l'aide à la forêt privée, je pense que cette coupe aurait été beaucoup trop importante pour qu'elle soit justifiée. D'autant plus que, compte tenu de la réflexion que nous avions faite, on se rendait compte que révoquant les concessions forestières tout ce que nous faisions c'était subventionner l'industrie des pâtes et papiers.

Or, je pense qu'il était normal de la part du gouvernement de revenir sur l'ensemble du programme pour savoir dans quelle mesure le gouvernement est justifié de faire payer moins à l'industrie des pâtes et papiers, une fois la révocation faite, que ce que cette même industrie aurait à défrayer si elle gardait ses concessions. C'est là le raisonnement que nous faisons.

Or, je peux vous assurer que, pour 1982, ce sera terminé. Maintenant, ce dont je peux également vous assurer, c'est qu'il est possible que cela ne se fasse pas de la même façon que ce qui avait été prévu, comme cela pourrait également se faire de la même façon si nous arrivons à la conclusion — et c'est ce que nous sommes en train de faire — que l'industrie forestière est en mesure de payer des droits pour la voirie forestière, qui seraient substantiellement plus élevés que ceux que le gouvernement a exigés dans le passé.

M. Giasson: M. le Président, puisque le ministre dans sa réplique a indiqué qu'il n'était pas question de vouloir subventionner les pâtes et papiers sur l'application d'un programme donné, j'aimerais savoir de l'actuel ministre — lorsqu'il a indiqué son intention de procéder dans les meilleurs délais à une réorganisation totale et intégrée de toute l'industrie des pâtes et papiers, il a même utilisé des chiffres; dans des prévisions initiales, il a parlé d'un montant de $6 milliards pour vraiment moderniser l'industrie des pâtes et papiers — face à cette projection à laquelle le ministre a fait allusion récemment, comment il entend procéder dans cette rénovation de l'industrie des pâtes et papiers afin de la moderniser et de la rendre compétitive avec les industries similaires dans d'autres pays. Est-ce que dans l'évaluation d'un coût de $6 milliards il prévoit des subventions qui pourraient venir, soit du gouvernement provincial du Québec ou encore du gouvernement fédéral? Il serait intéressant que le ministre nous donne beaucoup plus d'informations sur ce vaste programme de réorganisation et de modernisation de cette industrie.

M. Bérubé: Ce que vous demandez ici, c'est d'élaborer quelque chose qui sera l'objectif du ministère dans les années à venir. Par conséquent, nous allons parler beaucoup plus d'hypothèses de travail, d'orientations à donner que de résultats concrets, tangibles concernant en particulier les chiffres mentionnés.

D'ailleurs, comme vous le soulignerez, c'est rapporté par un journaliste, je pense que ce journaliste a fait un excellent travail en ce qui a trait à la synthèse de ma pensée dans la majeure partie des sujets.

Quant à la valeur précise du chiffre de $6 milliards, je peux vous dire comment on peut évaluer, grosso modo, le montant. On sait qu'une usine à Saint-Félicien a coûté autour de $300 ou $350 millions. On sait à peu près l'ordre de grandeur du coût d'une usine moderne, premièrement. On sait grosso modo le volume de notre industrie qui représente à peu près une vingtaine de ces grosses usines, si on tient compte de l'état de certaines d'entre elles. Par conséquent, on sait, en théorie, combien coûterait une reconstruction complète de l'industrie des pâtes et papiers, en gros, c'est donc très approximatif.

M. Giasson: C'est en gros.

M. Bérubé: Oui, c'est en gros. C'est simplement une idée générale. D'ailleurs, on peut penser que cela coûterait beaucoup moins cher.

Deuxième réflexion. Pour savoir si un gouvernement peut s'engager dans une telle démarche, on peut se dire que sur un rapport d'équité-dette, un rapport de un semble normal. Par conséquent, les entreprises bancaires pourraient certainement couvrir jusqu'à concurrence de $3 milliards. Dans un secteur comme l'industrie des pâtes et papiers, depuis un certain nombre d'années, on constate que le gouvernement fédéral a subventionné, je pense, à Cabano plus précisément. Il y a des indications à l'effet que le gouvernement fédéral accepterait d'investir dans le secteur de la réforme de l'industrie des pâtes et papiers au Québec. Evidemment, il n'y a eu aucune négociation. Ils ont simplement déjà créé un précédent en intervenant. On peut donc se dire que, si on appliquait les règles normales de subventions, Ottawa pourrait en prendre une partie.

Si vous prenez le reste, en général, je pense que c'est autour de 20% dans le cas de Cabano, on peut toujours extrapoler voyant grosso modo le montant. Vous vous retrouvez avec l'équivalent peut-être de $2 milliards à couvrir par l'industrie. Des programmes de travaux publics comme ceux, par exemple, de la construction du réseau d'égout dans la région de Montréal sont prévus pour un montant d'environ $3,2 milliards. En d'autres termes, pour régler un problème de pollution dans la région de Montréal, et par régler je ne veux pas dire qu'on élimine la pollution, mais on fait simplement la diriger en aval de l'île, le coût serait de l'ordre de $3 milliards. Ce montant est donc tout à fait comparable à ce que cela pourrait coûter pour rénover l'industrie. Je dois vous signaler qu'à mon point de vue les $6 milliards sont probablement un chiffre assez gros puisque la société Kruger a fait une réforme quand même assez importante dans son usine qui lui coûte évidemment nettement moins cher que $300 millions pour rénover son usine. Ils ont encore une programmation en vue.

Par conséquent, on se rend compte que l'ordre de grandeur est un ordre de grandeur qu'on peut envisager. Ce n'est pas un chiffre complètement exagéré. Cela indique que, probablement, le gouvernement doit s'orienter de ce côté. Mainte-

nant, sous quelle forme le gouvernement doit-il participer? Vous savez qu'il existe déjà des sociétés d'Etat, comme la Donohue, REXFOR, donc on peut imaginer que le gouvernement pourrait participer par le biais de ces sociétés.

On peut maintenant se demander si le gouvernement devrait participer sous forme de subventions. C'est une de nos questions. Personnellement, je pense que non. Je pense qu'il n'appartient pas au gouvernement du Québec de subventionner notre industrie des pâtes et papiers, que, c'est donc à l'industrie elle-même de le faire, et si elle ne peut le faire, le gouvernement aura des responsabilités à prendre. Je pense qu'on ne peut pas s'asseoir et regarder fermer des usines, comme celle du Cap-de-la-Madeleine, les unes après les autres, parce que vous êtes conscients du vieillissement de notre industrie.

On ne peut pas s'asseoir et regarder, à chaque année, une usine de plus qui ferme ses portes. Avec, évidemment, les critiques de l'Opposition, qui prendra un malin plaisir à demander ce que le gouvernement fait. Il est donc normal que nous choisissions d'aborder carrément le problème, et c'est ce que nous allons faire dans les mois à venir. Par conséquent, ce qui est souligné, c'est ma vision des problèmes de l'industrie forestière au Québec. Je pense qu'il ne sert à rien d'aménager la forêt privée, il ne sert à rien de parler d'allocation de la matière ligneuse, il ne sert à rien de parler de révocation des concessions forestières et de plans de gestion, si nous n'avons pas l'industrie forestière pour faire la transformation du bois. Il semble normal que le gouvernement actuel estime que ce soit peut-être là le domaine sur lequel il faudra insister. Non pas que l'on mette en veilleuse le programme de révocation, comme vous l'avez laissé entendre, mais que l'on reporte le programme de révocation dans un cadre plus global de celui d'une étude et d'une révision complète de notre industrie des pâtes et papiers au Québec.

Il faudra donc intégrer le programme de révocation, en intégrant les règlements de protection de l'environnement concernant l'industrie des pâtes et papiers qui sont sur les tablettes déjà depuis un très bon bout de temps, vous le savez, et qui n'ont pas été appliqués, justement parce que cette industrie prétend, et probablement à juste titre, que si on appliquait de tels règlements elle devrait fermer ses portes.

Je pense qu'il faudra de toute façon appliquer ces règlements. Nous n'avons pas le choix. Par conséquent, nous devons appliquer ces règlements en sachant pertinemment que certaines industries accepteront de se moderniser ou de fermer leurs portes. Si ces industries ferment leurs portes, il faut que le gouvernement ait automatiquement une solution de rechange. Lorsque vous me souligniez cet article du Devoir, c'est le sens de l'interview que j'ai voulu donner aux journalistes.

M. Giasson: J'aimerais savoir tout de même si cette réforme de toute l'industrie comme telle, la modernisation des usines est une priorité à laquelle le ministre va s'attacher à brève échéance. Pour en arriver là, il va falloir que l'industrie collabore. C'est un fait certain. Pour collaborer, l'industrie va demander certainement au gouvernement du Québec, comme du gouvernement fédéral, de l'aider de ce côté. Est-ce qu'il est possible de croire que cette aide pourrait être semblable à celle de Cabano, usine à laquelle le ministre a fait allusion? Il y a eu d'abord une participation des citoyens à la base, une aide qui est venue du gouvernement du Québec, une aide qui est venue du gouvernement fédéral. Est-ce qu'on peut prévoir que cette usine de Cabano pourrait servir de modèle dans un plan de réorganisation des usines de pâtes et papiers ici au Québec?

M. Bérubé: J'ai cité en exemple le cas de Cabano aux journalistes qui m'interviewaient, comme étant un exemple du type d'intervention du gouvernement; c'est pour cela que vous avez, dans cet article, mention que REXFOR pourrait participer. Donc, c'était un exemple. Je pense que deux solutions vont se présenter, soit que l'industrie jugera préférable de conserver son autonomie, et que, par conséquent, elle n'estime pas nécessaire de voir le gouvernement investir dans la modernisation de ses usines. Dans ce cas, je pense que le gouvernement ne voit aucune objection et l'industrie pourra avoir son propre programme de développement à nous présenter, et nous n'avons pas l'intention d'interférer.

Dans le cas où l'industrie devrait nous dire, avec chiffres à l'appui, qu'elle est incapable de faire face à une modernisation de ses installations et qu'elle demande au gouvernement de participer, le gouvernement devra décider, d'une part, quant à la modernisation de cette usine, si cette modernisation est justifiée.

On sait que nous avons un certain nombre de nos usines qui sont très loin des approvisionnements en bois. Il y aura un choix économique à faire, à savoir si telle usine mérite la peine d'être reconstruite à partir de zéro. Ces choix seront faits au gouvernement par un groupe de travail et on fera une évaluation cas par cas. A ce moment, je pense qu'il y aura une négociation avec l'industrie, à savoir sous quelle forme le gouvernement doit s'engager, et j'aurai à défendre face au gouvernement une solution qui sera sans doute propre à chaque cas. Je ne peux pas vous dire que ce sera REXFOR qui embarquera ou encore que ce sera la Société générale de financement ou encore la SDBJ, si ce doit être un cas dans le Nord-Ouest. Je pense que la formule d'intervention est à définir et qu'elle va varier énormément avec les cas.

M. Giasson: Dans l'esprit du ministre cela pourrait s'étaler sur quelle période de temps, cette transformation de toute la production des pâtes et papiers?

M. Bérubé: Vous dites bien dans l'esprit et non le résultat... Moi, j'aime bien la notion de plan quinquennal. Compte tenu du fait que nous vou-

Ions terminer les révocations en 1982, nous n'avons pas l'intention d'attendre à 1982 pour appliquer les règlements sur la protection de l'environnement. Or, comme la notion de plan quinquennal me semblerait valable a priori, si vous demandez l'idée du ministre, je vous dirais que c'est un programme de cinq ans où on s'asseoit avec les entreprises, où on met sur la table carrément les objectifs du gouvernement dans le secteur et où on demande à l'industrie quelle est la forme de participation qu'elle a maintenant l'intention d'apporter.

M. Giasson: Cela pourrait débuter vers quelle année?

M. Bérubé: II me paraît possible de commencer cette année, probablement vers l'automne, les rencontres avec l'industrie papetière.

M. Giasson: Dès cette année, on pourrait rencontrer l'industrie, comme vous dites, et commencer à examiner le dossier puis voir les formules de transformation, le financement de ces projets.

M. Bérubé: Oui, il faut dire qu'il existe présentement, grâce aux bons soins de l'ancienne administration, un comité interministériel — oui, certainement, cher collègue de Montmagny-L'Islet — regroupant des fonctionnaires du ministère de l'environnement, du ministère des Terres et Forêts et du ministère de l'Industrie et du Commerce qui sont, présentement, à évaluer, cas par cas, les problèmes que représenterait la modernisation de l'industrie pour faire face aux nouvelles normes de la protection de l'environnement. Un des concepts de base auxquels ce comité se réfère, c'est: Vaut-il la peine d'investir dans des équipements de traitement des eaux plutôt que dans une modernisation directe de l'usine, de manière que celle-ci génère une charge polluante moindre? Pour arriver à faire ce calcul, il faut, dans chaque cas, évaluer tous les coûts de la transformation de l'usine par rapport au coût purement et simplement de l'usine de traitement des eaux. Nous devrions avoir pour le mois de juin, normalement — et il y a déjà un bon nombre d'usines pour lesquelles ces travaux sont déjà terminés — ce rapport global de l'état de l'industrie des pâtes et papiers au Québec, qui sera, je pense, un outil extrêmement utile pour ces discussions. D'autre part, nous voulons, au ministère — et c'est ce que nous nous employons à faire présentement — constituer une petite équipe de travail d'économistes qui nous permettront justement de réfléchir, maintenant, à une projection dans l'avenir des marchés, de la place qu'occupe le Québec, et donc de l'importance de notre industrie papetière face, justement, à la révocation et à l'approvisionnement en matière ligneuse, donc d'avoir une vision beaucoup plus claire de ce que l'on peut espérer comme industrie pour peut-être les cinq prochaines années. Comme ce groupe de travail, normalement, sera formé d'ici à l'été, on peut donc imaginer une commission parlementaire pour permettre aux membres de l'Assemblée nationale de rencontrer les dirigeants de l'industrie des pâtes et papiers, nos syndiqués, et que l'on puisse justement évaluer l'ensemble des problèmes de cette industrie.

Cette commission parlementaire serait sans doute à la base d'une nouvelle politique.

Etat de l'industrie des pâtes et papiers

M. Giasson: Dans des problèmes plus immédiats qui touchent, entre autres, les travailleurs, j'ai à l'esprit, par exemple, la fermeture, au Cap-de-la-Madeleine, de l'usine de la Consolidated-Bathurst. Comment le ministère des Terres et Forêts entend-il disposer de cette main-d'oeuvre qui, tout de même, est qualifiée et a pris de l'expérience à l'intérieur de l'industrie? Y a-t-il déjà des projets qui sont examinés, qui sont sur la table de travail afin de prévoir de quelle façon on va réintégrer ces gens dans l'industrie ou s'il faudra les diriger vers d'autres secteurs de la production chez nous?

M. Bérubé: Non. Malheureusement, je dois dire non, pour plusieurs raisons. Je pense que la véritable raison est que la vocation du ministère des Terres et Forêts n'a jamais été de travailler dans ce secteur du développement industriel, du développement économique. Le ministère de l'Industrie et du Commerce a servi souvent d'étincelle pour le lancement de nouveaux projets, mais, sauf dans les cas récents de Donohue à Saint-Félicien et de Cabano, il n'était pas dans la tradition du gouvernement d'intervenir dans ce secteur de l'industrie des pâtes et papiers. Par conséquent, nous manquons d'outils pour faire face à des situations. Je pense que, dans le cas de la relocalisation des travailleurs, de leur emploi dans l'industrie, il faut, à ce moment-là, tabler sur les mécanismes existants, c'est-à-dire ceux du ministère du Travail, pour retrouver de l'emploi à ces travailleurs. Je ne pense pas que présentement nous soyons en mesure de proposer une solution de rechange au problème de l'usine du Cap-de-la-Madeleine, aussi malheureux que ce soit.

M. Giasson: II est possible, d'ailleurs, que, dans la région de Trois-Rivières-Cap-de-la-Madeleine, il y ait d'autres mises à pied en plus de celle des travailleurs de l'usine de la Wayagamack, comme on l'appelle aussi. Le ministre est-il au courant de cela?

M. Bérubé: Vous voulez dire dans d'autres secteurs que l'industrie des pâtes et papiers?

M. Giasson: Non, dans les pâtes et papiers, région de Trois-Rivières-Cap-de-la-Madeleine.

M. Bérubé: Vous voulez parler du moulin de l'île dont la vétusté serait encore plus grave que celle du Cap-de-la-Madeleine, mais qui serait peut-être protégé par le fait qu'il traite quand même un volume plus important de matière ligneuse et que, par conséquent, il serait peut-être

plus rentable que l'autre. Je ne suis pas en mesure, ici en tout cas, de vous donner la réponse.

La seule solution que le gouvernement peut apporter, c'est la possibilité d'investir dans le projet de Magnésium-Québec dont on parle ces jours-ci. Je pense que, présentement, c'est plutôt dans la recherche de nouveaux projets pour la région qu'il faut chercher une solution, pour l'instant.

M. Giasson: On se rappelle tous qu'en 1975 une grève assez longue, dans l'industrie des pâtes et papiers, a perturbé, a causé des problèmes assez aigus à l'industrie québécoise qui, ne pouvant alimenter les marchés traditionnels qu'elle avait, à cause de cet état de grève qui a duré plusieurs mois, a connu une reprise plus difficile et a vu ses acheteurs s'alimenter chez des concurrents, chez d'autres marchés possibles. Cela a également eu comme conséquence de poser des problèmes très aigus de vente de bois venant des forêts privées, des petits producteurs qui, par suite d'un arrêt de la plupart des usines durant une période de quatre et de cinq mois, ont vu s'accumuler des quantités de bois très importantes qui ont traîné sur les routes, qui ont vieilli. Etant donné que les usines n'avaient pas produit pendant une aussi longue période, cela a eu nécessairement des répercussions.

Face à cette situation, il est possible qu'on vive encore des problèmes de grève, des problèmes de relations de travail. J'aimerais que le ministre nous livre davantage sa pensée, la philosophie qui lui serait propre, puisqu'à un moment donné, à l'Assemblée nationale, il a fait allusion à la nécessité absolue d'un nouveau contrat social dans tout le secteur de l'industrie du bois, j'inclus le sciage, les pâtes et papiers et les autres utilisations du bois.

Ce nouveau contrat social, dans l'esprit du ministre, comment faut-il le percevoir et de quelle façon pourrait-il résoudre les problèmes que nous avons vécus traditionnellement à diverses périodes dans toute l'industrie du bois au Québec? Autrement dit, traduit dans une réalité bien définie, quel est ce nouveau type de contrat social qui pourrait être un élément de stabilité et qui pourrait constituer à donner beaucoup plus de sécurité dans l'avenir à tout ce qui est l'utilisation de la richesse bois ici au Québec?

M. Bérubé: Je soulignerai, d'une part, que vous avez généralisé une réponse qui, en fait, était partielle. Cette idée du contrat social, elle ne vient pas du ministre des Terres et Forêts, elle vient du CRD de l'Est du Québec et elle résulte d'un certain nombre de rencontres que j'ai eues avec les syndicats, en particulier de la Consol, à New Richmond, et de rencontres que j'ai eues avec les gens de l'industrie comme telle.

Ce qui se produit, dans le domaine du sciage, dans l'Est du Québec, est le problème dont je parlais quand je parlais d'un contrat social. Dans l'Est du Québec, vous savez que l'industrie du sciage est peut-être plus vieille et possiblement moins rentable qu'ailleurs au Québec. Par conséquent, les difficultés sont plus importantes, surtout dans ce domaine par exemple de l'approvisionnement en bois, dans la qualité du bois alimentant les usines de sciage.

Or, à la suite d'une rencontre avec les syndiqués de la Consolidated, à New Richmond, ceux-ci avaient fait la remarque à l'effet que, s'ils avaient su que l'entreprise n'était pas rentable, que l'entreprise prévoyait devoir fermer, lors de la négociation de la convention collective, ils auraient été prêts à planifier un certain nombre de règlements qui auraient permis justement à certains travailleurs de prendre des retraites prématurées, donc permettre également à certains travailleurs de se retrouver un emploi par exemple dans l'exploitation d'une usine de pâtes et papiers. Donc, ils auraient tout probablement modifié le texte même de la convention collective qu'ils négociaient avec l'entreprise, de manière à faciliter la transition.

Or, n'ayant pas été au courant, ils n'ont pas été en mesure, à ce moment-là, de se doter d'une convention collective davantage à la mesure de la situation qu'ils envisageaient. Alors ce sont donc les syndicats eux-mêmes qui ont fait la première avance, en disant: Ecoutez, si nous étions au courant de ce qui se passe dans cette industrie, nous serions certainement prêts, en discutant avec les industriels, à définir des conventions collectives qui pourraient être différentes. Ils ont dit: Nous serions même prêts à accepter, par exemple, des salaires inférieurs à ceux que nous négocions présentement.

A la suite de cette rencontre et à la suite sans doute d'une rencontre entre le CRD et le syndicat, et entre les industriels et le CRD, le CRD devait proposer au gouvernement la tenue d'un comité de travail qui réfléchirait à la situation de l'industrie du sciage dans l'Est du Québec, et qu'il nous proposerait à ce moment-là, peut-être justement ce contrat social, c'est-à-dire un modus vivendi des industriels du sciage dans l'Est du Québec, des syndicats, des travailleurs de la population, de manière qu'on puisse peut-être avoir un plan d'exploitation pour une industrie qui est peut-être en moins bonne posture dans l'Est du Québec qu'elle ne l'est dans le reste du Québec.

C'est donc en ce sens qu'on parlait d'un contrat social. C'est d'ailleurs pour cela que présentement il y a un groupe de travail, animé par le directeur général du ministère des Terres et Forêts à Rimouski, et qui regroupe des représentants des syndicats, de l'industrie, des populations, du CRD, et qui va chercher à faire le point. Ce contrat social résultera sans doute de leur propre effort.

Je pense qu'un contrat social vient d'abord des gens, de la population et non pas de l'idée d'un ministre. C'est en ce sens que j'ai parlé d'un contrat social en réponse, en fait, à une demande que me faisait, je pense, le chef de l'Opposition relativement à cette demande du CRD puisqu'elle venait de son comté.

M. Giasson: Donc, je dois comprendre que le

contrat social auquel le ministre faisait allusion s'appliquait uniquement à une région du Québec et n'était pas fonction de solution de problèmes que vit l'industrie un peu partout à travers le territoire. Le ministre sait fort bien que l'Est du Québec a des problèmes pour continuer certaines industries qui sont alimentées par le bois. Nous avons le même phénomène dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, peut-être sur la Côte-Nord. Nous avons le cas de Samoco là-bas, à Sacré-Coeur. Il y a également d'autres usines qui sont aux prises avec des difficultés à peu près identiques à celles qu'on peut retrouver dans l'industrie du sciage dans l'Est du Québec.

Dans ce contrat social j'avais cru déceler la place assez importante que pourrait prendre l'Etat du Québec, le gouvernement, ou encore des sociétés d'Etat. Ce n'est pas ce que le ministre avait à l'esprit?

M. Bérubé: II s'agit là...

M. Giasson: Je me posais la question, et voici pourquoi. C'est que dans le reportage du Devoir du 5 avril, une déclaration que vous faites indique une volonté ou une présence très grande de l'Etat comme nécessité pour solutionner les problèmes, surtout lorsqu'on lit: A moins d'une intervention énergique du gouvernement, l'industrie québécoise des pâtes et papiers, estime le ministre, disparaîtra, au dire de M. Bérubé. Quand on lit cela, on se demande si l'avenir des pâtes et papiers et même des autres utilisations du bois, repose entre les mains de l'Etat, dont la participation sera beaucoup plus grande, qui devra oublier la présence traditionnelle de l'industrie privée. Est-ce que nous devons croire que l'Etat deviendra le moteur principal, par une participation directe ou une action directe, dans la réforme ou la réorganisation de toute cette industrie?

M. Bérubé: Je ne vous cacherai pas que la pensée évolue même à l'intérieur de l'industrie privée dans ce domaine. Au tout début de mon mandat j'ai tenu à rencontrer des représentants de l'industrie des pâtes et papiers canadienne et québécoise, et je pense qu'un leitmotiv de nos rencontres en est ressorti. Je me souviens, en particulier, de certaines réflexions à l'effet que probablement une des exploitations les plus rentables dans ce secteur des pâtes et papiers serait probablement Donohue-Saint-Félicien. Les industriels eux-mêmes avouaient que probablement ils n'auraient jamais les reins suffisamment solides pour relancer l'industrie des pâtes et papiers.

Par conséquent, j'ai dû me faire une philosophie dans ce domaine de l'industrie à partir des rencontres que j'ai eues avec les industries et les syndicats et, évidemment, avec les fonctionnaires du ministère. Je pense qu'il ressort de ces nombreuses discussions que, d'une part, peut-être l'industrie, présentement, n'aurait pas les reins assez solides pour moderniser. C'est là un cercle vicieux parce que, ne générant pas les profits suffisants pour réinvestir, ils n'ont pas les moyens d'investir. Leurs industries vieillissent, leur productivité décroît, elles sont de moins en moins rentables, et le cercle vicieux est engagé.

Par conséquent, c'est donc à partir de cette constatation que les industriels eux-mêmes s'interrogeaient sur la possibilité de relacer leur propre industrie et sur le fait que le problème semblait véritablement grave, au dire de tous les fonctionnaires qui oeuvrent dans ce secteur au Québec. A ce moment-là je pense que c'était normal qu'on parle d'une relance.

Maintenant, quand vous parlez d'un contrat social, un véritable contrat social ne peut s'établir qu'à la suite de relations entre le patronat, le gouvernement et les syndicats. Je pense que c'est l'esprit du sommet économique qui se tiendra au printemps. Il faut retenir qu'une des principales raisons pour lesquelles l'économie allemande s'est peut-être assez bien comportée au cours des dernières années c'est qu'à tous les trois mois présentement il existe en Allemagne un regroupement des syndicats, patronats, gouvernements pour étudier la situation de l'économie, voir les projections.

Ce type d'information a permis jusqu'à maintenant au gouvernement, aux syndicats, à l'entreprise privée un développement de l'économie allemande qui semble avoir assez bien réussi. Or, le sommet économique auquel nous allons assister, au printemps, c'est tout nouveau dans l'histoire du Québec et je pense que s'il n'y avait qu'un seul sommet sans suite, on n'aurait peut-être pas ce contrat social. Au contraire, si on parle de rencontres, peut-être à tous les trois mois ou tous les six mois, des principaux intervenants dans l'économie du Québec, je pense qu'à la longue ce contrat social dont j'ai parlé pourrait s'instaurer à l'échelle du Québec, non pas simplement dans l'industrie des pâtes et papiers.

M. Giasson: Ce que je retiens des propos que le ministre vient d'énoncer, c'est que s'il fallait avoir une collaboration pour appliquer ici au Québec le modèle qu'il a cité, celui de l'Allemagne, soit une participation voulue et acceptée de la part des trois grands agents, le gouvernement, le patronat et les syndicats, cela supposerait dès le départ qu'ici au Québec le monde syndical, les centrales syndicales changent d'attitude sur ce qui a été leur cheminement des dernières années. C'est qu'on recherchait, du moins chez certaines centrales syndicales, délibérément et de façon manifeste, un changement de système total au Québec.

M. Bérubé: Vous avez raison. Il faut également que le gouvernement change totalement son attitude face au développement économique. Il faut également que l'entreprise privée change totalement son attitude face à son rôle de développeur économique; non seulement cela, mais également son rôle social. Et c'est là un changement radical de mentalité qui va être très dur, et pour les syndicats et pour les industriels et pour le Conseil du patronat du Québec et pour le gouvernement. Ce n'est pas qu'un problème syndical. Je pense que c'est un problème social.

M. Giasson: Vous croyez donc à la capacité du patronat, que ce soit par le conseil ou tout ce qui regroupe le patronat au Québec, vous croyez à la capacité de ces hommes que l'on retrouve là de changer leur mentalité, leur attitude, leur philosophie. Vous croyez également que le monde syndical, que les centrales syndicales sont capables d'évoluer à un rythme aussi rapide.

M. Bérubé: Je crois en la bonne volonté des Québécois et je crois...

M. Giasson: Je n'ai pas de doute moi non plus. Mais ceux qui mènent les Québécois, c'est autre chose. Ceux qui conduisent les Québécois par groupes organisés, c'est une autre chose. On ne parle pas du même monde, on ne parle pas de gens qui pensent de la même manière que l'ensemble des Québécois.

M. Bérubé: Je pense que vous prêtez de noirs desseins à...

M. Giasson: Ce ne sont pas de noirs desseins. Je vous dis tout simplement qu'ils ne pensent pas de la même manière que l'ensemble des Québécois, sans porter un jugement sur la pensée collective des Québécois ni sur celle de ceux qui prétendent diriger les grands secteurs économiques au Québec.

M. Jolivet: L'ancien gouvernement aussi.

M. Giasson: II a été jugé. Ne vous faites pas de peine. Le jugement a été porté par les Québécois sur l'ancien gouvernement comme il sera porté sur le présent gouvernement un jour ou l'autre. Vous n'y échapperez pas, quel que soit le verdict de la population.

M. Jolivet: C'est la volonté différente d'un gouvernement qui parle.

M. Giasson: C'est l'ensemble des Québécois.

Le Président (M. Clair): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Ce matin, le ministre a parlé du mode de financement, par exemple, de Cabano. Il a dit que c'était un mode de financement satisfaisant. La semaine dernière...

M. Bérubé: ...

M. Goulet: Bien oui, vous ne critiquez pas. La semaine dernière, également, vous avez parlé de la société REXFOR et vous avez dit — je ne sais pas si ce sont vos mots mais je vais essayer de les rapporter le plus fidèlement possible — qu'elle avait réussi là où d'autres compagnies avaient échoué et qu'en général vous étiez satisfait de son travail.

J'aimerais demander au ministre ce qu'il pense du prêt de $19 millions, tout près de $20 millions, consenti par le gouvernement à REXFOR, et ce sans intérêt. A l'époque, l'économiste du Parti québécois, actuellement ministre des Finances, M. Parizeau, avait dénoncé cette entente très fortement. Il était contre cela. J'aimerais savoir tout simplement ce que le ministre en pense aujourd'hui de cette méthode de financement.

M. Bérubé: Vous parlez du prêt à REXFOR qui a été reprêté à ITT-Rayonier?

M. Goulet: C'est cela.

M. Bérubé: Donc, nous ne parlons pas directement de REXFOR, REXFOR n'ayant été qu'un instrument du gouvernement pour prêter à m.

M. Goulet: Si vous voulez, oui.

M. Bérubé: D'accord. D'abord un petit mot en passant sur le mode de financement de Cabano, dont vous me dites qu'il est satisfaisant. Je vous dirai tout de suite qu'il n'est peut-être pas entièrement satisfaisant.

Je pense qu'il manque, à l'intérieur de la structure financière de Cabano, la participation d'un industriel qui aurait utilisé, par exemple, la production de l'usine. Un des problèmes auxquels doit faire face présentement Cabano, c'est qu'ils ont une excellente structure de production, mais ils n'ont pas une structure de mise en marché. A moins d'être une très grosse entreprise, comme la Donohue, par exemple, qui est déjà plus importante, la mise en marché pose des problèmes lorsque vous n'êtes pas associé avec un financier qui lui-même est intéressé par votre production.

Je pense que déjà la structure de financement de Cabano est discutable, sous cet angle. Quant au prêt à ITT, je ne vous cacherai pas que — d'ailleurs, c'est ce que j'ai dit tantôt — je suis assez peu favorable à des subventions à l'entreprise privée. Il m'aparaît difficilement acceptable que le gouvernement investisse de concert avec des industriels de l'entreprise privée et que les industriels aient droit au profit et que le gouvernement n'y ait pas droit, en d'autres termes qu'il s'agisse de subventions. Qu'il y ait participation au capital-actions, là c'est entièrement différent, mais qu'il y ait purement et simplement subvention, je pense que, d'une façon générale, on peut dire que je suis assez peu favorable au système de subvention.

Je reconnais, cependant, que le principe des subventions peut parfois se défendre, en particulier quand il s'agit de développement régional. Lorsqu'une industrie encourt des coûts plus élevés en allant s'établir dans des régions désignées, je pense qu'à ce moment un mécanisme de subvention compensateur pourrait permettre de rétablir la rentabilité de cette entreprise pour la ramener sur un plan comparable. A ce moment, un but social pourrait justifier des subventions. Mais je pense, malheureusement, que ces décisions de subventionner l'entreprise ne sont pas prises sur une base rationnelle. Il existe une excellente étude

qui a été effectuée à Laval en recherche opérationnelle où, justement, on évalue à quel niveau le gouvernement doit embarquer sous la forme de subventions, de participation au capital-actions, en faisant entrer en ligne de compte des notions de rentabilité pour l'Etat, de profits sociaux. C'est un modèle mathématique qui nous permet de calculer jusqu'à quel niveau le gouvernement doit aller dans ses subventions. Dans le passé, les subventions se sont faites à la suite de négociations et ont eu un caractère beaucoup plus politique qu'objectif.

Si on devait instaurer un programme de subventions à l'industrie, d'une façon générale, il faudrait que ce soit un programme de nature purement et simplement à compenser les frais supplémentaires qu'on fait encourir à l'industrie lorsque celle-ci obéit à des pressions gouvernementales pour s'établir à un endroit ou à un autre.

M. Goulet: M. le Président, si vous me le permettez, le ministre a dit qu'il est peu favorable aux subventions à l'entreprise privée. Il a bien mentionné privées. Est-ce qu'il serait favorable à d'autres modes de subventions à d'autres organismes? Vous avez mentionné privées et vous avez donné comme raison... En tout cas, je vous laisse répondre.

M. Bérubé: Je pense que l'attitude du gouvernement face aux coopératives est connue et, dans la mesure où une subvention s'avère nécessaire pour rentabiliser une entreprise à caractère plus social, qui appartient, donc, à un grand nombre de Québécois, à ce moment, ma position serait beaucoup plus flexible.

M. Goulet: M. le Président, je demanderais au ministre de m'expliquer cela. Ce que je ne comprends pas, c'est cette philosophie qui fait une différence entre l'entreprise privée et une coopérative. Si l'entreprise privée fait du bon travail, si elle en fait profiter l'Etat par des emplois créés, des salaires, des impôts et même s'occupe d'écouler son produit soit sur le marché local ou international, lorsqu'il s'agit du bien des Québécois, que l'initiative vienne d'une entreprise privée ou d'une coopérative, je ne vois pas la différence. Je ne comprends pas la philosophie du ministre et même du Parti québécois. Je ne peux pas m'entrer cela dans la tête.

Quand c'est pour le bien de la population, si l'entreprise privée ou une personne crée 500 emplois et fait bénéficier toute une région de ses connaissances ou de son travail, je ne vois pas la différence entre cela et une coopérative. Je n'ai rien contre les coopératives. Je ne vois pas pourquoi, dans la philosophie du ministère, du ministre et du Parti québécois même, on ferait une grosse différence entre les deux. Il me semble qu'on doit regarder ce que cela donne à l'autre bout et non pas partir avec des oeillères et dire: Si c'est l'entreprise privée, si c'est un particulier c'est non, et, si c'est une coopérative, c'est oui.

Si on crée 500 emplois et si on fait du bien à la population avec une coopérative, et si on fait le même bien avec l'entreprise privée, je ne vois pas la différence. Je ne vois pas de différence. Je regarde à l'autre bout, ce qui résulte à l'autre bout, c'est cela qui compte, M. le Président. C'est cela qui compte. On étudie, ce matin, les crédits. C'est comme cela dans d'autres ministères. Quand c'est une coopérative, je n'ai rien contre cela quand c'est pour le bien de la population, si la coopérative réussit là où l'entreprise privée n'a pas réussi, bravo. Si la coopérative vient en concurrence avec l'entreprise privée et si c'est pour le bien du marché, bravo. Mais pourquoi, au départ, on exclut des gens? On exclut des gens. En tout cas moi, c'est difficile de m'entrer cela dans la tête. Moi, ce que je regarde à l'autre bout, c'est ce que cela donne. 500 emplois, c'est pour le bien d'une population que le promoteur soit l'entreprise privée ou la coopérative, je ne vois pas pourquoi le gouvernement pourrait aider l'un plus que l'autre.

M. Bérubé: Ma réponse à votre question est relativement simple. Lorsque deux hommes d'affaires s'associent et mettent chacun la moitié du capital, vous trouvez normal qu'ils se partagent la moitié des profits.

M. Goulet: Certainement!

M. Bérubé: Lorsque le gouvernement s'associe avec un industriel à 50/50, vous trouvez anormal que le gouvernement récupère 50% des profits.

M. Goulet: Je n'ai jamais dit cela, M. le ministre.

M. Bérubé: Donc, nous reconnaissons au premier chef, que si la collectivité investit dans les moyens de production, la collectivité devrait normalement bénéficier du même pourcentage de profits que s'il s'agissait d'une entreprise privée.

M. Goulet: Et des coopératives.

M. Bérubé: Donc, d'une façon générale, nous nous opposons au principe des subventions. C'est là ma position et c'est la vôtre aussi. Je pense que nous nous retrouvons. Là où nous acceptons le principe de la subvention, c'est pour des raisons de caractère social. C'est-à-dire que si un industriel de l'entreprise privée va s'installer dans une région défavorisée et qu'il encourt des frais de transports, parce que l'infrastructure n'y est pas, des frais supérieurs, là nous acceptons le principe de la subvention parce que nous introduisons un caractère social au financement. De la même façon, lorsque nous acceptons au gouvernement, dans la philosophie du Parti québécois, de privilégier les coopératives, voici ce que nous disons: Présentement, il y a très peu de Québécois qui ont les reins suffisamment solides pour se lancer en affaires. Faire démarrer une coopérative demande énormément de bonne volonté, demande beaucoup de courage parce que très souvent les coo-pérateurs n'ont pas les moyens financiers, n'ont pas les connaissances techniques pour se déve-

lopper, ils ont donc besoin d'une assistance. C'est en ce sens, c'est au sens social que le gouvernement, à ce moment, accepte d'investir dans une coopérative. Mais si vous me présentiez une coopérative... Je ne pense pas, par exemple, que le gouvernement jugerait bon, en ce moment, de venir en aide aux Caisses populaires Desjardins, qui font suffisamment d'argent, Dieu merci.

Par conséquent, je pense que dans le cas d'une coopérative prospère, il n'est pas question, pour le gouvernement, d'intervenir. Mais lorsqu'une coopérative n'a pas les reins suffisamment solides pour se développer, lorsqu'elle a besoin d'une aide gouvernementale, le gouvernement fait entrer en ligne de compte le concept social de la subvention. Et là, nous faisons la réflexion suivante, c'est qu'il s'agit d'un regroupement collectif, donc, d'une participation populaire des gens, et en c.e sens, la philosophie du gouvernement estime que chaque fois qu'il y a un effort populaire, avec une participation des travailleurs, le gouvernement estime que son engagement social est plus grand que quand il s'agit simplement d'un industriel qui le fait. Sauf, évidemment, si cet industriel, pour développer son industrie, se soumet à des conditions sociales qu'un autre n'aurait pas à rencontrer. En d'autres termes, chaque fois qu'un industriel privé a un rôle social dans son action, le gouvernement estime qu'on peut subventionner, je pense. C'est normal. Mais, on dit que, d'une façon générale, il faut qu'ils soient dans des conditions particulières.

Par contre, pour une coopérative, que ce soit une coopérative d'alimentation, que ce soit dans l'industrie du sciage, qui fait face à une situation financière difficile, le gouvernement estime que, pour des raisons purement sociales, cela vaut la peine de protéger, de défendre ces coopérateurs. C'est, je pense, une question de philosophie politique.

M. Goulet: Vous me permettez, M. le Président.

Si l'entreprise privée garantissait le même bien social au bout qu'une coopérative, seriez-vous prêt à l'aider au même titre?

M. Bérubé: Une entreprise privée, par exemple, qui nous parlerait de cogestion.

M. Goulet: Une entreprise privée qui se soumet aux mêmes conditions sociales et promet, garantit les mêmes résultats qu'une coopérative pourrait garantir. Je parle pour le bien d'une région, par exemple. Le ministère serait-il prêt à aider, dans sa philosophie de base, l'entreprise privée autant que la coopérative? Si on parle des mêmes conditions.

M. Bérubé: J'ai un problème semblable, présentement, dans mon comté, à Cap-Chat, où vous avez une opération qui n'est...

M. Goulet: En partageant — si vous permettez — toujours les bénéfices au prorata de l'aide, mais, si on donne à quelqu'un il faut consentir à donner à l'autre. Si on partage avec l'un, on partage avec l'autre, dans les mêmes conditions. Il y a juste les promoteurs qui font la différence.

M. Bérubé: Prenons l'exemple d'un cas où apparemment l'exploitation est non rentable, donc vous ne trouverez aucun promoteur, aucun industriel intéressé à le développer. Mais le promoteur, souvent, va vous dire: Si vous me donniez une subvention de X millions, à ce moment, je pourrais, compte tenu de l'argent que je mets, faire un profit de 10%. J'estimerais cela satisfaisant; par conséquent j'accepterais d'investir. En d'autres termes, ce que le promoteur demande c'est que le gouvernement le subventionne de manière qu'il puisse faire un profit, donc que le gouvernement lui fasse faire des profits et que le seul objectif du gouvernement c'est de lui faire faire des profits. Moi, j'hésiterais énormément à accepter. Mais si cet industriel disait: Moi, je serais prêt à m'asso-cier, avec les travailleurs, à implanter un système de cogestion avec mes travailleurs. Je serais prêt à investir un certain montant dans cette entreprise et, pour la rentabiliser, il faudrait peut-être un investissement du gouvernement. A ce moment, je vous dis que, personnellement, je regarderais très favorablement cette association, entreprise privée, gouvernement, coopérative. Là j'y verrais justement cette possibilité de réfléchir à ce contrat social, mais, pour des raisons purement sociales, je dirais oui. Mais si cet industriel dit: Vous me subventionnez simplement pour que moi je puisse faire 10% de profit sur mon capital, à ce moment, je dis: Quant à subventionner, je préfère subventionner une coopérative carrément.

M. Goulet: Vous me permettez, M. le Président.

Si l'entreprise privée ou le promoteur consentait, par exemple, à diviser ses profits au prorata de l'aide qu'il a reçue, je ne vois pas la différence. C'est cela la question. Je ne vois pas de différence.

La philosophie actuelle semble que, pour les mêmes résultats, on est prêt à dépenser beaucoup plus d'argent ou beaucoup plus d'énergie, du côté physique, pour aider les associations plutôt qu'un promoteur. On va prendre le cas de Tricofil; on dit que c'est un cas type, je suis bien d'accord. Mais je ne comprends pas ceci. Si un promoteur arrive et dit: Ecoutez, moi, j'aimerais avoir telle aide pour produire tels résultats qui sont à peu près les mêmes qu'une coopérative pourrait produire, pourquoi ne l'aiderait-on pas au prorata, quitte à ce qu'il divise ses profits? Est-ce que la coopérative divise ses profits avec l'Etat? S'il les divisait au prorata de ce que la coopérative les divise, mais la philosophie de base du ministre et du ministère, et même de votre parti, ne semble pas celle-là.

M. Bérubé: Chaque fois que la propriété d'un bien de production est collective, il ne fait aucun doute que le gouvernement envisage plus favorablement la possibilité de donner des subventions. Je pense que c'est cela qui est important, c'est de retenir que la propriété des biens de production

est collective. C'est que l'Etat représente une collectivité, l'ensemble des Québécois. Ce que nous disons, c'est que lorsque c'est un transfert d'une collectivité à une autre collectivité, à ce moment, peut-être que le parti au pouvoir présentement est davantage intéressé à ce genre de subvention tandis que la subvention d'une collectivité à un individu, cela cadre beaucoup moins avec la philosophie du Parti québécois.

M. Goulet: M. le Président, est-ce que vous permettez une dernière question?

Le Président (M. Clair): Allez-y, M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci. Je ne voudrais pas être mal interprété, puis je ne suis pas contre du tout les coopératives, je suis pour même. Je pose la question, mais c'est qu'on semble voir, un moment donné, qu'on est porté à favoriser la coopération de façon à créer de la concurrence à l'entreprise privée, avec l'argent de l'Etat, avec l'argent de tout le monde.

C'est là que je me pose de sérieuses questions à savoir si c'est bon. Si on se sert de cet argent et qu'on favorise la coopération pour créer de la compétition à l'entreprise privée pour la faire tomber, bien... Pourquoi ne pourrait-on pas l'aider? Si cela donne les mêmes résultats, j'aimerais qu'on l'aide au prorata.

M. Bérubé: C'est la première fois que j'entends dire que le mouvement coopératif au Québec met en danger l'entreprise privée.

M. Goulet: Pas mettre en danger, mais créer de la compétition.

M. Bérubé: Mais la compétition, dans le système de l'entreprise privée, est saine.

M. Goulet: Pour autant qu'elle soit...

M. Giasson: A chances égales.

M. Goulet: ...à chances égales.

Le Président (M. Clair): Le député de Berthier.

M. Mercier: Les questions que j'aurais à poser concernant plutôt les éléments 2 et 4. Je ne sais pas si...

M. Giasson: Oui, allez-y.

Contrôle de l'utilisation de la forêt.

M. Mercier: Cela va? Au sujet de l'élément 2, Contrôle de l'utilisation, dans ma région, j'ai beaucoup de plaintes de gens quant à la façon dont la forêt est exploitée par les "timberjacks". On dit que cela crée des dommages extrêmement sérieux à la forêt. Est-ce que le ministère est préoccupé par cette donnée?

M. Giasson: Les méthodes modernes.

M. Mercier: Oui, par ces méthodes modernes d'exploitation de la forêt?

Deuxièmement, il y a un élément directement relié à cela. La compagnie Consolidated-Bathurst de ma région a vendu aux exploitants ces fameux "timberjacks" qui sont rentables sur une base d'utilisation de plusieurs mois. Les gens se sont retrouvés avec des contrats simplement pour une période de deux ou trois mois parce qu'il n'y avait pas suffisamment de demande. Ils sont pris avec des paiements considérables sur cette machinerie extrêmement coûteuse et, d'autre part, ils ne sont pas admissibles à l'assurance-chômage. Donc, ils se trouvent dans une situation extrêmement difficile.

M. Bérubé: A votre première question, il faudrait répondre que les "timberjacks", effectivement, brisent le paysage d'une façon momentanée dans le sens que cela amène énormément de bouleversement du terrain où les opérations ont lieu. Effectivement, ce bouleversement, selon les conditions du sol et surtout les conditions de drainage, a souvent pour effet de favoriser la venue d'une régénération plus hâtive.

Quand à la deuxième question sur le mode de propriété des machines, le ministère, à ma connaissance, n'est jamais intervenu dans ce domaine. Je ne suis pas sûr que ce soit de notre ressort d'intervenir dans ce domaine.

M. Mercier: Cela crée quand même un problème social assez considérable. Bien sûr, si ce n'est pas directement dans le cadre de vos préoccupations, sauf que pour ceux qui sont pris avec ce problème, c'est...

M. Bérubé: Effectivement, c'est une pratique courante dans l'industrie, je pense. On pourrait ajouter qu'effectivement la façon dont les forêts publiques sont exploitées est une préoccupation constante du ministère. On en tient compte continuellement lorsque nous examinons et évaluons les plans d'aménagement et les plans d'exploitation faits par les concessionnaires, les permissionnaires ou les industriels.

Le débat sur les effets des différentes pratiques d'exploitation sont d'ordre économique, écologique et, évidemment, technique. Il y a plusieurs versions qui circulent actuellement à savoir que la venue de la grosse machinerie en forêt met en danger le système écologique et fait des dommages au sol, etc. Il ne faut pas oublier, d'autre part, qu'un des traitements sylvicoles ou qu'une des actions que nous retrouvons facilement en forêt, à la suite ou non d'exploitations forestières, ce sont les opérations de reforestation qui, très souvent, sont précédées de méthodes de scarification alors qu'on amène de la machinerie justement pour préparer le sol à recevoir des plantations. Il y a certaines personnes qui se demandent si les "timberjacks", par exemple, ne font pas une double opération: l'exploitation, d'une part, et la scarification, d'autre part.

Alors, le débat est ouvert et des spécialistes de différents milieux, particulièrement ceux de notre ministère se penchent, depuis quelques années, sur cette question. Nous avons une préoccupation constante de ce côté.

M. Mercier: Oui, autre question également. Pourriez-vous m'expliquer en fonction de quels principes vous établissez vos programmes d'allocation des feuillus dans les régions, c'est-à-dire cette question des feuillus qu'utilisent plus facilement les petites scieries et des résineux que...

M. Bérubé: Disons que le plan d'allocation des feuillus — c'est une expression consacrée chez nous — c'est une institution qui remonte aux années 1967, alors qu'on a constaté que la quantité de bois feuillu disponible et susceptible d'être ouvré au Québec diminuait d'année en année et qu'il fallait prévoir même, à toutes fins pratiques, une extinction. Les gouvernements, depuis ce temps, ont cru bon de réglementer la quantité de bois feuillu qui pouvait être utilisé sur une base annuelle et ont procédé à une distribution aux différents utilisateurs.

La distribution se fait, règle générale, à partir de la capacité de production des usines installées, également à partir du degré de transformation plus ou moins poussée de chacune de ces usines. Compte tenu de ces deux facteurs, règle générale, les bois sont attribués après négociation avec les utilisateurs.

M. Mercier: Enfin, vous êtes conscient que, dans une usine où il y a une surcapacité de sciage — c'est le cas pour les petites usines — par rapport au montant de feuillus disponible, cette allocation peut faire en sorte que l'entreprise disparaisse et qu'une autre ait de l'expansion. L'allocation est quand même quelque chose de délicat.

M. Bérubé: On pourrait ajouter, à la suite des remarques précédentes, comme on vient de le mentionner, que malheureusement nous en sommes à une phase de liquidation, jusqu'à un certain point, des feuillus. Il y a une capacité installée au Québec de quelque 52 millions de p.m.p. Alors, les usines qui oeuvrent dans le domaine des feuillus ont une capacité installée de quelque 50 millions ou 52 millions de p.m.p. Le volume disponible est de 28 millions de p.m.p. Alors, vous voyez immédiatement le dilemme de la distribution de ce volume qui est la moitié moindre à peu près que ce que les usines voudraient avoir pour continuer à vivre.

Alors, premièrement, nous sommes sur une base de liquidation. Donc, il y a un problème sérieux. Il y a des industriels ou des industries qui sont appelés à disparaître, évidemment. Les différents critères mentionnés tout à l'heure sont évalués sérieusement au ministère, dans cette distribution du volume à traiter annuellement.

M. Mercier: D'accord.

Le Président (M. Clair): Le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: M. le Président, j'aurais une question. Cette hésitation de la part de l'industrie privée à réinvestir dans notre plus grande industrie n'est-elle pas causée par le climat politique instable, la menace de séparation, un nouveau régime politique et même un nouveau système monétaire qui est étranger vraiment à l'Amérique du Nord?

M. Bérubé: Je répondrai à cela que, sous l'administration antérieure, à titre d'exemple, jamais auparavant une entreprise privée n'avait accepté de s'associer au gouvernement dans un programme de développement économique. Je soulignerai au député de Robert Baldwin que c'est à titre de ministre des Richesses naturelles que j'ai négocié avec la Société Noranda. Justement, la participation de Noranda à un programme gouvernemental d'exploration. En d'autres termes, je vous dirai que l'attitude de l'entreprise privée dépend beaucoup plus du dynamisme dont fait montre son interlocuteur gouvernemental que des problèmes dont vous parlez, d'incertitude ou autres.

Je sais que, de ce temps-ci, il y a énormément de sièges sociaux qui quittent le Québec. Paraît-il qu'il en est sorti 91 dans quatre mois et que c'est une catastrophe pour le Québec, évidemment catastrophe qui n'a pu être observée par la société Bell Canada puisque, semble-t-il, très peu avaient le téléphone. Vous savez, ce climat d'incertitude sur lequel vous revenez continuellement, sur lequel vous insistez...

M. O'Gallagher: C'était dans le cas de CPR.

M. Bérubé: Laissez-moi vous répondre. Ce climat d'incertitude, c'est vous qui le créez. C'est par vos interventions continuelles, par les interventions de l'Opposition qui parle d'un climat d'incertitude que, finalement, tout le monde se dit: Puisque tout le monde parle d'un climat d'incertitude, il doit y en avoir un. Ce que je trouve bizarre, c'est que, ayant rencontré le président de la société Noranda, qui investit présentement au Chili, qui investit partout, l'ayant rencontré, lui ayant expliqué la situation dans le secteur de l'exploration et estimant que sa compagnie devrait s'engager, j'ai dit qu'il serait normal qu'il s'associe avec nous. Il a fallu moins de dix jours pour que cette société nous dise: On pense que cela a du bon sens, on est prêt à s'associer. On pense qu'avec le jeu que vous définissez, même si c'est différent de ce qu'on a connu antérieurement, nous sommes susceptibles de justifier nos investissements, par conséquent nous nous engageons.

Donc, je vous dirai que ce climat d'incertitude était beaucoup plus grand sous l'ancien régime puisque, évidemment, l'ancien régime manquant peut-être un peu d'épine dorsale, on ne savait jamais trop de quel côté il allait se tourner, tandis qu'avec le nouveau gouvernement, on sait où nous allons et le climat d'incertitude disparaît.

M. O'Gallagher: Justement, le CPR hésite en ce moment à investir $120 millions à Montréal

pour reconstruire son siège social. Vous trouvez votre climat très calme. Je pense que c'est surtout le gouvernement qui influence les investisseurs et non pas l'Opposition.

Le Président (M. Clair): Le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur une question que j'avais posée au ministre en Chambre, et à laquelle il a donné une réponse par écrit hier, concernant le problème qui prévaut actuellement dans la région de Senne-terre. Je pense que le ministre me fait signe de la tête qu'il est au courant de la situation. J'avais soulevé la question, le 13 avril dernier, pour la première fois à l'Assemblée nationale, en demandant au ministre s'il était au courant du problème, d'abord, s'il était au courant aussi que l'Association des travailleurs de la région de Senneterre était à mettre au point une étude de rentabilité de l'exploitation sur place, une usine de pin blanc. Le ministre m'avait répondu ceci: "Non, je n'ai pas eu d'arrêté en conseil — parce que je lui avais demandé s'il y avait eu un arrêté en conseil de passé à ce sujet—concernant l'approvisionnement en bois pour l'usine de Senneterre, d'une part. Quand à l'ATSEN, je connais vaguement le dossier, mais il ne m'a pas encore été soumis". Le ministre m'avait dit qu'il me répondrait le lendemain et le lendemain était hier.

J'aimerais que le ministre puisse faire le point maintenant. Je sais qu'il a révisé le dossier depuis ce temps-là. Je comprends qu'il a fallu un certain temps pour le faire aussi, d'ailleurs je ne lui en tiens pas rigueur, mais j'aimerais que le ministre nous fasse le point sur la situation, la décision prise aussi, et peut-être nous donner quelques informations sur les dates des arrêtés en conseil en question accordant, comme il a été dit dans le communiqué qu'il nous a remis, une garantie en faveur des Produits forestiers Dufresne Inc. Est-ce que le ministre pourrait nous donner ces quelques indications? J'aurai peut-être d'autres questions par la suite.

M. Bérubé: Oui, il appert que certaines questions peuvent recevoir des réponses assez rapidement et d'autres fois c'est plus difficile quand la situation est en évolution. Je ne vous cacherai pas qu'en rentrant à mon bureau le soir, j'ai découvert que justement l'ATSEN était en discussion à mon bureau, et que, par conséquent, la situation était en évolution à ce moment-là.

C'est toujours plus difficile de répondre de façon définitive quand la situation est mouvante. Il semble que l'arrêté en conseil dont on parle, donnant une garantie d'approvisionnement dans la forêt Decelles à la société, je crois que c'est...

M. Brochu: Le groupe Cossette.

M. Bérubé: Le groupe Cossette, je crois. C'est cela, les Produits forestiers Dufresne, c'est le groupe Cossette. Ceci date du mois de décembre, c'est-à-dire qu'il s'agissait de négociations qui avaient eu cours sous l'ancienne administration, et l'arrêté en conseil nous attendait quand nous sommes arrivés au gouvernement. Cela explique la raison pour laquelle je ne m'en souvenais que vaguement. En fait, nous n'avons pas remis en question toutes les négociations antérieures et nous avons tout simplement, au Conseil des ministres, tenu pour acquis que le travail avait été bien fait et nous avons donc entériné d'une façon générale les décisions antérieures.

Par conséquent, donc, c'est le 22 novembre ou le 22 décembre, donc immédiatement après que nous ayons pris le pouvoir, d'une part.

M. Brochu: Pour aller plus loin, je pense que le premier arrêté en conseil a été signé le 29 novembre 1976, ce qui confirme un peu ce que le ministre dit, dans le sens que cela a peut-être été commencé sous l'ancienne administration et ratifié ensuite pas votre gouvernement.

M. Bérubé: Lorsque vous m'avez posé la question en Chambre, effectivement le lendemain matin, suite à l'arrêté en conseil et aux négociations et à la préparation des contrats, en date du 22 décembre.

M. Brochu: En date du 22 décembre. M. Bérubé: En date du 22 décembre.

M. Brochu: Est-ce l'arrêté en conseil qui porte le numéro 4381?

M. Bérubé: Oui, c'est bien cela.

M. Brochu: Y a-t-il eu un autre arrêté en conseil en date du 29 novembre 1976 accordant en principe la faveur au groupe Cossette en ce qui concerne l'exploitation? Est-ce qu'on pourrait vérifier s'il y a eu un autre arrêté en conseil datant du 29 novembre 1976 concernant le même problème de la région de Senneterre, la question de l'approvisionnement?

M. Bérubé: Nous allons vérifier. M. Brochu: D'accord.

M. Bérubé: Mais nous n'avons pas les éléments en main pour répondre.

M. Brochu: Le ministre pourrait-il nous répondre plus tard à ce sujet?

M. Bérubé: Oui, nous allons vérifier.

M. Brochu: J'aimerais demander au ministre quelque chose. Dans le dossier en question, le ministre a mentionné tout à l'heure que son gouvernement avait ratifié ce qui avait été commencé par l'ancienne administration. Avant de ratifier, le ministre s'est-il impliqué dans le dossier et, si oui, de quelle façon et jusqu'à quel point est-il inter-

venu pour réévaluer cette situation et les groupes en cause également?

M. Bérubé: Donc, si je reprends essentiellement ce que j'allais vous dire, c'est qu'en arrivant nous n'avons pas remis en question des décisions administratives. Nous avons donc accepté de ratifier un nombre de décisions en les estimant sans doute justifiées. Nous nous contentions d'examiner si quelque chose semblait carrément anormal. Or, au moment, donc au mois de décembre, ATSEN n'était pas encore entré dans le décor. Ce qui était en discussion à l'époque était un problème tout autre, c'était la décision à prendre sur une garantie d'approvisionnement aux usines qui allaient remplacer Paradis et Fils dans la région de Senneterre. C'était donc, à ce moment-là, de savoir si nous allions donner une garantie d'approvisionnement au groupe de Normick-Perron et au groupe de Barrette et Saucier plutôt qu'à un regroupement populaire à former. C'était donc le problème que nous avions à affronter et j'ai eu une décision à prendre sur le sujet.

Quant au projet de Cossette, il n'y avait à ce moment-là aucune remise en question de quelque regroupement que ce soit. Ce n'est qu'après coup que le groupe de l'ATSEN, ayant réfléchi au problème, a décidé de se tourner du côté d'un approvisionnement en pin. Ayant appris qu'il y avait justement en négociation un plan d'approvisionnement en pin gris pour le groupe de Cossette, ils sont intervenus la journée même où vous m'avez posé cette question en Chambre. Nous avons donc regardé, en particulier en prévision du contrat à signer le lendemain, dans quelle mesure nous pouvions intervenir. Il s'est avéré effectivement d'ailleurs — c'est ce qui confirme la raison que je vous ai donnée — que dans la région de Senneterre il n'existe pas d'approvisionnement en pin gris pour justifier une exploitation. Il y en aurait au contraire dans l'autre unité d'aménagement et il y aurait eu à ce moment-là possibilité d'approvisionnement en pin blanc, ce pin blanc étant dirigé vers l'usine de Cossette. Je me mélange encore dans les espèces, excusez-moi.

M. Brochu: II y en a beaucoup aussi.

M. Bérubé: Par conséquent, ce que nous avons pris garde de garantir, c'est que, compte tenu du très faible approvisionnement en pin, nous avons insisté pour que le pin de la région de Val-d'Or, dans leur unité d'aménagement, aille à une usine existante et non à une nouvelle usine. Nous estimons illogique de permettre la construction d'une nouvelle usine pour scier du pin pour un approvisionnement que nous prévoyons ne pas devoir perdurer. Donc, dans le contrat avec Cossette nous avons une clause qui exige que le pin coupé dans cette unité d'aménagement approvisionne une usine existante et non une nouvelle usine. Nous avons dû pour la même raison signifier au groupe de l'ATSEN que, même si d'une part nous sommes très favorables aux coopératives, d'autre part nous devions tenir compte de l'appro- visionnement en pin pour ne pas justifier la création d'une nouvelle usine.

M. Brochu: M. le Président, je voudrais revenir un peu sur la question qui était en discussion par rapport aux coopératives et à la participation gouvernementale tantôt. En ce qui concerne l'usine des entreprises Cossette, de Val-d'Or, il semble, du moins d'après les informations qui sont disponibles actuellement, que la transformation de ce pin blanc se ferait à Val-d'Or et que l'installation se ferait probablement dans le parc industriel de Val-d'Or, d'une part. Maintenant, ce qui existe actuellement comme bâtisse ou comme usine pour la transformation du pin blanc, c'est, à toutes fins pratiques, une vieille scierie qui ne sert actuellement aucunement pour l'usinage du pin blanc mais simplement pour le planage du bois.

Quant à la question de l'argumentation à savoir si on doit utiliser une usine déjà existante qui peut continuer de fonctionner, je pense qu'à ce moment il faudrait peut-être réviser la situation et revoir ce qu'il en est exactement, parce que si c'est bien ce que je vous dis actuellement, à savoir qu'il s'agit d'une vieille bâtisse, il faudra, de toute façon, reconstruire également, moderniser l'équipement pour faire cette transformation, ce qui, comme argument de poids, n'aurait plus la même valeur pour les travailleurs de l'association de Senneterre.

M. Bérubé: Oui, je suis au courant. Cela ne fait aucun doute. D'ailleurs, je soulignerai que c'est largement à la suite de votre intervention en Chambre que nous avons insisté pour qu'au moins ce pin aille dans une usine existante et non pour la construction d'une nouvelle usine. Il ne fait aucun doute qu'effectivement, dans l'usine en question, il devra y avoir des transformations pour lui permettre d'effectuer le sciage en question. Il reste tout de même qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle usine rebâtie à partir de zéro; il s'agit simplement de continuer à faire vivre une usine.

M. Brochu: Je comprends, mais lorsqu'on parle de la structure de la bâtisse, apparemment, c'est à reconstruire complètement parce que c'était tout simplement une vieille usine de planage, l'usine en question. C'est-à-dire qu'il y a là une usine existante qui a déjà fonctionné en ce qui concerne la transformation du pin blanc. Par contre, depuis quelques années, il ne se fait aucune transformation de pin blanc à cette usine. Ce que je veux dire, c'est que l'argument, à toutes fins pratiques, ne vaut pratiquement pas parce que rééquiper une vieille usine qui tombe peut-être en désuétude, ou qui, n'est pas affectée au but auquel on la destine, ou reconstruire une autre usine à quelques milles de distance, c'est la même chose au fond. Ce que je voulais dire par là, c'est que le fait d'utiliser une installation existante a très peu de poids parce que si l'usine tombe en désuétude, n'est pas utilisée à ces fins et n'est plus équipée pour cela, à ce moment, on ne peut pas prendre la décision de donner la concession

d'approvisionnement en pin blanc à une organisation sous prétexte qu'elle a déjà l'équipement nécessaire alors que ce n'est pas tout à fait le cas.

M. Bérubé: II s'agit en fait d'une remise en état de fonctionnement d'une usine pour le moins vieillotte. Au cours des négociations, l'industriel a manifesté le désir ferme de remettre cette usine en fonctionnement et, au ministère, il a semblé que cette remise en état de fonctionnement s'avérait la solution la moins coûteuse pour usiner le pin blanc qui restait à être usiné parce que, effectivement, dès l'octroi d'un contrat d'approvisionnement en faveur des Produits forestiers Dufresne, on était déjà conscient que la quantité de pin blanc disponible ne pouvait pas supporter des investissements très élevés. Effectivement, je pense que la remise en état va en être une très sommaire et avec le moins d'investissements possibles parce que la quantité de pin blanc ne pourra pas justifier un investissement très élevé.

M. Brochu: Mais il semblait, du moins dans la proposition qui avait été faite par l'association en question, qu'il aurait pu y avoir une exploitation conjointe des différentes essences dans le projet qui avait été soumis. Pour peut-être clarifier la situation, je me réfère ici à un document qui avait été présenté au gouvernement décrivant un petit peu la situation là-bas et la nature du projet de l'Association des travailleurs de Senneterre. Je cite: "Depuis trois ans, nous travaillons sur l'étude de l'implantation d'une usine de transformation de bois de pin blanc dans notre région de Senneterre. Après la destruction par le feu de l'usine de Victoria Pine, filiale de Paradis et Fils, située à quelque 35 milles de Senneterre, quelques anciens actionnaires et des citoyens de Senneterre sont venus très près de réaliser la reconstruction de ladite usine à Senneterre.

Le projet fut suspendu, c'est-à-dire sa réalisation, parce que l'actionnaire majoritaire a décidé d'investir à la construction d'une usine à Cha-pais." Cet élément est intervenu dans le dossier. "Si le fiasco administratif de Paradis et Fils n'était pas survenu, nous croyons que la compagnie Victoria se serait reconstruite à Senneterre. Il est très malheureux que l'étude faite par ladite compagnie sur la rentabilité de la réimplantation de Victoria Pine à Senneterre ait demeuré parmi les dossiers de cette compagnie." Donc, il y avait une amorce faite, par la compagnie concernant la rentabilité de la construction éventuelle d'une usine sur place.

Je continue le texte maintenant: "M. le ministre, nous faisons une demande d'aide officielle à votre gouvernement afin d'obtenir l'aide nécessaire pour compléter une étude de rentabilité sur l'implantation d'une telle usine à Senneterre et, en même temps, retenir l'approvisionnement nécessaire à l'alimentation de ladite usine. Nous connaissons la forêt qui pourrait donner un tel approvisionnement. Nous connaissons la topographie de ces lieux, nous en connaissons la qualité et le rendement. Nous estimons que cette partie de la forêt contient 220 millions à 250 millions de p.m.p. facilement récupérables, donnant un approvisionnement d'environ 20 années." Ici, j'ouvre une parenthèse simplement pour mentionner que le document qui nous a été remis par le ministre disait environ dix années hier, je pense. Il y a peut-être une petite différence. Je continue: "De plus, à Senneterre, nous avons les administrateurs compétents, etc." On donne les qualités qui sont invoquées pour la réalisation du projet. "Réaliser ce projet redonnera une stabilité à notre économie et aura un effet bienfaisant sur notre situation sociale très affectée présentement. Nous croyons sincèrement, M. le ministre, que ce projet est plus réaliste que celui que nous proposions." Il y avait une autre étude qui avait été faite. "Les études préliminaires nous proposent de réaliser ce projet, c'est-à-dire la construction d'une usine, l'installation et l'achat d'équipement et des dépendances pour un montant d'environ $360 000, créant annuellement 115 emplois."

Je rappelle seulement que l'Association des travailleurs de Senneterre avait demandé, à ce moment, une collaboration de l'Etat non pas d'abord pour investir dans le projet comme tel, mais pour compléter la fameuse étude en question. Apparemment, le relevé des valeurs récupérables en matière ligneuse dans la région ne serait peut-être pas exhaustif ou fait de façon souhaitable ou comme on pourrait l'espérer.

Cette étude, il semble qu'elle ait été complètement mise de côté ou la participation à l'étude demandée, qui serait d'un montant d'environ $25 000. Est-ce que le ministre en a été informé suite aux questions que j'ai posées en Chambre? Deuxièmement, est-ce que le ministre serait prêt à reconsidérer, non pas sa participation financière au projet comme tel, mais peut-être une étude de rentabilité de l'implantation d'une telle usine sur place, à Senneterre?

M. Bérubé: Une petite remarque en passant. Une des raisons invoquées par la population fut d'exiger que les garanties d'approvisionnement aux usines de Paradis et Fils, Nottaway et autres soient soumises à des conditions d'usinage dans la ville. Donc, cette condition, le ministère a insisté pour qu'elle soit respectée. Cela veut dire que, quand nous avons émis notre garantie d'approvisionnement, nous avons exigé que le bois — je pense qu'il vient de la forêt de Mégiscane, c'est-à-dire celle de Senneterre — soit usiné à Senneterre. Ce que nous demandait l'ATSEN présentement, c'était, en fait, de prendre du bois de l'unité d'aménagement Decelles donc relevant de Val-d'Or, et de l'expédier à Senneterre justement pour traitement.

En d'autres termes, ils nous demandaient de faire exactement l'inverse de ce qu'ils avaient exigé dans le cas de notre intervention à Senneterre. Souvent, cela pose un réel problème, soit celui de prendre du bois relevant d'une unité d'aménagement, donc, d'une municipalité, et de l'expédier dans une autre municipalité. Je pense que c'est peut-être un argument pour hésiter à favoriser l'expédition du pin blanc de la région de Val-d'Or du côté de Senneterre pour traitement.

Quant au projet, effectivement, il nous a été

soumis, au moment où la question nous a été posée. Je pense que, présentement, ce doit être l'administrateur régional qui a le problème en main. Il nous a été soumis à notre cabinet et nous avons demandé une opinion justement sur la possibilité, préliminaire au moins, d'une telle étude de rentabilité. Je pense qu'il y a toujours un problème d'approvisionnement en bois; comme vous le constatez, c'est souvent un problème. Si nos administrateurs régionaux nous disent qu'il n'y a pas d'approvisionnement en bois, par exemple, en pin blanc, dans la forêt Mégiscane, à ce moment, je pense que ce n'est pas tellement la peine de poursuivre plus avant l'étude de rentabilité de l'usine comme telle, puisque je pense que cela parle de soi.

M. Brochu: Mais ce qui arrive, c'est que Victoria Pine a quand même toujours exploité dans De-celles.

Mais l'argument que le ministre nous donne ici, si je comprends bien, c'est que c'est surtout un problème de territoires, entre municipalités. Vous n'avez pas pris votre décision surtout sur la rentabilité ou la non-rentabilité du projet, mais sur le fait que cela semblait causer, du moins selon ce que vous dites, un conflit de juridictions entre les municipalités, dans le sens que, le territoire relevant de Val-d'Or, à ce moment, il était, d'après le raisonnement que vous faites, logique de continuer dans ce sens de régionalisation.

M. Bérubé: Voici les deux paramètres dont on a tenu compte; d'une part, on a tenu compte de la quantité totale de pin disponible et, d'autre part, du fait que ce pin était situé dans l'unité d'aménagement de Decelles, donc dans la région de Val-d'Or, et non pas dans l'unité d'aménagement de Mégiscane, dans le région de Senneterre. Ce sont les deux facteurs dont on a tenu compte.

M. Brochu: Est-ce que le ministre, dans ce qu'il a dit, est prêt, du moins, à envisager la possibilité de cette étude, à vérifier l'étude de rentabilité dont il a été question?

M. Bérubé: On me souligne que dans la région de la forêt de Decelles trois usines peuvent couper de 20 millions à 25 millions p.m.p., pour une forêt potentiellement capable de fournir 200 millions de p.m.p., c'est-à-dire qu'il y en a pour une durée d'au plus dix ans dans la forêt de Decelles. Donc, il y a un problème d'approvisionnement en bois. Du côté de Mégiscane, je n'ai pas les chiffres.

M. Brochu: C'est que le pin blanc est absent de la région de Mégiscane.

M. Bérubé: Ils n'ont sûrement pas de pin blanc.

M. Brochu: Est-ce que le ministre serait prêt, quand même, à faire cette étude pour le vérifier? Ce serait peut-être dans le sens...

M. Bérubé: Ce que nous sommes en train de faire, c'est de regarder l'approvisionnement en bois avant de toucher, comme tel, à l'étude de rentabilité.

M. Brochu: On parle toujours de la même chose, de l'étude de rentabilité qu'ATSEN avait proposé de faire?

M. Bérubé: Oui.

M. Brochu: D'accord. Le gouvernement pourrait participer éventuellement financièrement à cette étude?

M. Bérubé: Oui, s'il y avait du bois.

M. Brochu: Cela ferait peut-être un peu le contrepoids à ce qui est arrivé historiquement dans ce dossier, parce qu'il semble que, depuis 1972, l'étude est faite dans un certain sens; cela a été, évidemment, dans le sens de remettre aux entreprises Cossette l'exloitation de ces richesses.

Je pense que c'est en 1972 que Dumont, Blais & McNeil ont fait l'étude, apparemment, mais, selon les gens du coin, cela n'aurait pas "marché", comme on le dit dans le langage du métier. C'est un peu dans ce sens aussi que cela ferait peut-être le contrepoids à la démarche qui a été suivie, depuis 1972, par l'ancienne administration et qui semble être continuée par la nouvelle administration. Si ma mémoire est bonne, je pense, d'ailleurs, que c'est M. Houde, l'ancien député de la région, qui avait piloté le projet. Il est devenu, à un moment donné, chef de cabinet du ministre des Terres et Forêts, M. Drummond, et il est actuellement à l'emploi de la firme Cossette. Disons que l'étude s'est faite dans ce sens, depuis 1972, et il semblerait que la décision était en bonne voie de réalisation depuis cette époque glorieuse.

Maintenant, ce qui me fait dire qu'il y a eu une continuité, c'est que le ministre a simplement entériné ce qui avait déjà été fait. Il y a quand même tout un historique à la situation. C'est dans ce sens que je posais la question: Est-ce que le ministre serait prêt à faire cette étude, peut-être, pour faire le contrepoids à une situation sur laquelle on peut peut-être se poser certaines questions? Cela apporterait peut-être en même temps certaines lumières.

M. Bérubé: Est-ce qu'on pourrait mentionner, puisqu'on mentionne Cossette, que ce qui intéresse cet industriel, compte tenu des investissements qui ont été faits et des différentes usines où il a des participations — on pense aux usines de contre-plaqué, Bel, ainsi de suite — c'est un volume de bois. Le pin blanc comme tel ne l'intéresse pas du tout. Il préférerait que le volume de bois qui lui a été garanti par le ministère en vue des investissements qu'il a faits là-bas, se traduise par des volumes d'épinette, de pin gris, particulièrement. Cela irait plus dans sa ligne d'orientation.

Le volume global, cependant, comme on l'a mentionné tout à l'heure, est limité. Le bois n'est

pas disponible autant que tout le monde voudrait en avoir. Ce qui est arrivé dans les négociations, c'est que nous avons l'impression, actuellement, que le pin blanc n'est pas en volume suffisant pour motiver un investissement spécifique pour une usine qui traiterait cette essence, car nous sommes sur une base de liquidation, comme cela a été mentionné tout à l'heure. Nous sommes en train de réévaluer cela, pour être bien certain que c'est le cas. S'il s'avérait qu'il y a suffisamment de pin blanc pour que cela devienne rentable au point de vue de la transformation comme telle, il est évident que cela pourrait être remodifié, réévalué.

Cependant, compte tenu du volume limité qui est disponible, et que pour l'instant nous croyons qu'il n'y a pas suffisamment de volume en pin blanc pour motiver un investissement propre, c'est le ministère même qui a imposé à l'industriel que dans son volume il y ait une partie de pin blanc pour éviter que le pin blanc soit laissé sur place et soit perdu. L'industriel n'aurait aucune objection, au contraire; nous avons déjà pris cette précaution auprès de lui. Si jamais il y avait assez de volume en pin blanc pour sa transformation et en d'autres essences pour remplacer cette partie du volume, il n'y aurait aucune objection à réviser l'entente avec nous. C'est une imposition du ministère des Terres et Forêts pour éviter une perte d'une essence particulière.

M. Brochu: C'est dans ce sens-là que dans l'arrêté en conseil il est prévu que si l'industriel ne peut pas s'approvisionner des 15 000 cunits en pin blanc, à ce moment-là, il peut suppléer par de l'épinette pour remplir le quota, si on peut dire.

M. Bérubé: Exactement. Une étude de rentabilité sur une usine, le ministère, comme cela a été mentionné précédemment, serait favorable à y participer, mais la première opération est de voir s'il y a assez de bois pour que cela vaille la peine de penser même à une usine. C'est ce que nous sommes en train de réévaluer, compte tenu des objections et des suggestions qui ont été faites au ministre récemment.

Chaque fois qu'il y a un problème de pénurie d'approvisionnement dans une région, je pense qu'il est assez normal que le ministère soit réticent à fovoriser l'implantation de nouvelles industries. Je pense qu'il ne faut pas que notre grand désir de contrer le chômage se traduise par la fermeture rapide de toutes les industries de sciage que nous avons au Québec. Déjà, présentement au Québec, nous avons des capacités de sciage qui excèdent, dans le facteur 2, les possibilités de la forêt. Par conséquent, c'est un problème réel à l'échelle du Québec. D'une façon générale, il faut s'attendre que le ministère soit réticent face à l'ouverture de nouvelles usines, sauf, évidemment, dans les régions précises où il y aurait l'approvisionnement nécessaire.

M. Brochu: C'est sûr qu'il faut tenir compte de différents facteurs et il faut nuancer une décision de cette importance. Par contre, je voulais attirer l'attention du ministre sur ces données et peut-être lui demander de pousser la vérification plus loin en ce qui concerne cette étude. Si, après vérification, cela ne s'avère vraiment pas possible, à ce moment-là, la décision pourrait être entérinée. Mais, si l'étude qui a été demandée par cette association révélait qu'il y a vraiment des possibilités, le ministre peut, à ce moment-là, l'évaluer.

Le Président (M. Clair): Le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):

Merci, M. le Président. Je voudrais savoir l'orientation du ministre et de son ministère sur le fait qu'on accorde des permis de coupe de bois. Serait-il possible, dans un comté comme le mien, par exemple, ou dans une région donnée, de savoir qu'il y a tant de scieries et qu'on donne tant de permis de coupe de bois annuellement? Surtout quand on sait qu'au Témiscouata l'industrie première est la forêt. Vous avez l'usine de Gué-rette, à Dégelis; présentement, on fait une étude pour voir comment cela pourrait coûter de déplacer leur scierie au Nouveau-Brunswick. Son permis de coupe est sur le point de se terminer, il ne reste qu'un an ou deux, je crois, à 18 millions de p.m.p. par année.

J'aimerais savoir s'il est possible de nous dire combien on peut scier dans un comté ou si ce sont, d'une façon globale, les capacités de coupe de bois qu'on peut attribuer dans un comté comme le mien.

Ou encore, comme vous le disiez tout à l'heure, ne pas laisser implanter, d'autres usines comme c'est arrivé à Pohénégamook, où on implante une autre usine quand il y en a de fermées et qu'on voit des scieries comme Guérette qui emploient 350 personnes à l'année dont on peut dire que si elles disparaissent d'ici un an ou deux, pour la ville de Dégelis, cela va être une catastrophe parce que l'industrie première c'est la scierie.

M. Bérubé: Dans le but d'aider justement les députés dans les comtés où la forêt représente une ressource importante, j'ai demandé que l'on fasse imprimer des cartes qui sont préparées présentement par le groupe consultants COGEF. Ce sont des cartes en couleur qui nous montrent l'utilisation de la forêt, la surutilisation ou la sous-utilisation de la forêt, et l'original est prêt. On travaille présentement au processus d'impression pour être capable de rendre toutes ces différentes teintes et je pense qu'on pourra mettre ces cartes à la disposition des députés des comtés où la forêt joue un rôle, et là ils auront une idée du potentiel qu'offre la forêt. D'après ce que je comprends maintenant du problème, il semble d'opinion assez généralisée dans tous les villages où je suis passé que du bois, il y en a. Cependant, chaque fois que je rencontre les fonctionnaires de mon ministère, on me dit: Ecoutez, il y en a, mais il est donné en garantie. En d'autres termes, il faut quand même calculer qu'une usine doit fonction-

ner sur un certain nombre d'années. Effectivement, il y a du bois, mais s'il est coupé dans cinq ans, ce bois n'est pas disponible présentement.

Donc, il semble, je pense, assez répandue au Québec que du bois, il y en a et que par conséquent on peut construire à l'infini des usines. Or, l'opinion unanime au ministère, c'est que dans un grand nombre de régions au Québec, présentement, nous avons des problèmes d'approvisionnement, mais il y a des régions où, au contraire, on pourrait quand même justifier l'implantation de nouvelles usines. C'est donc pour permettre aux députés de répondre aux interrogations qui leur viennent sans doute de gens de leur municipalité, pour leur permettre de répondre aux questions que je compte mettre à leur disposition ces cartes qui vont leur permettre de juger d'un coup d'oeil si, d'une façon générale, les demandes qui leur viennent sant doute d'à peu près toutes les municipalités de leur comté, sont justifiées ou non.

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):

Est-ce sur le point de sortir?

M. Bérubé: Oui, dans quelques semaines.

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):

Dans quelques semaines on va les avoir. Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Clair): Le député de Berthier.

M. Bérubé: M. le Président, je voudrais apporter une correction à un chiffre qui a été donné tout à l'heure quant au volume de bois feuillu mis en disponibilité via le plan d'allocation. On a dit tout à l'heure que c'était 28 millions de p.m.p. qui étaient mis sur le marché pour une possibilité d'usinage de 52 millions. Il s'agit là du chiffre pour les bois de déroulage seulement. Le volume total des bois-feuillus mis sur le marché est de 140 millions de p.m.p.

Le Président (M. Clair): M. le député de Berthier.

M. Mercier: A l'élément 4 on constate que le budget du gouvernement du Québec pour 1976 est de $4 000 095...

M. Bérubé: II s'agit de 4.4. Je me demande si l'ensemble des députés serait d'accord pour adopter certains éléments avant de se rendre au 4.4?

Le Président (M. Clair): On pourrait peut-être appeler le...

M. Giasson: Nous n'avons pas analysé encore en profondeur la situation de toute l'industrie du sciage au Québec. Si on adopte tous les éléments précédant le 4.4, après on nous dira... Bien, il fallait en discuter à ce moment-là.

M. Bérubé: A ce moment-là il faudrait peut-être...

M. Giasson: Je n'ai pas d'objection à ce qu'on passe sur les éléments 1, 2, 3, si le député de Berthier a des propos à tenir sur l'élément 4.

M. Bérubé: II me semble qu'il est préférable de s'en tenir peut-être à chaque élément de programme. Ce qui se produit, c'est que nous avons de très longues discussions puis nous avons peut-être l'impression de ne pas progresser. On pourrait continuer 4.1, qui est le problème de la planification de l'utilisation et quand on arrivera à 4.4 on pourra peut-être aborder cette question.

M. Mercier: Très bien.

Le Président (M. Clair): Je pense que ce serait raisonnable, parce qu'il faudrait à un moment ou l'autre adopter quelques-uns de ces éléments du programme 4.

Est-ce que vous avez encore d'autres questions sur l'élément 1 du programme 4?

M. Giasson: La planification de l'utilisation. Le Président (M. Clair): Oui. M. Giasson: Assurément.

Le Président (M. Clair): Alors allez-y, M. le député de Montmagny.

M. Giasson: M. le Président, nous savons qu'au cours des dernières années, l'industrie du sciage s'est développée au Québec. D'abord, les capacités d'usinage se sont accrues, la plupart des petites scieries que nous avions au Québec ont eu des difficultés mais, par contre, l'industrie du sciage a développé des complexes beaucoup plus importants, plus vastes, et nous avons ainsi accru de façon assez importante, compte tenu de la demande qui s'amplifiait, et le phénomène de la construction a demandé de plus en plus de ressources.

Cette industrie du sciage a contribué surtout à soutenir des économies de petites municipalités ou localités qui, souvent, constituaient, à l'intérieur de ces zones, la principale activité économique. Par contre, en dépit de cette situation, nous déplorons, depuis environ un an, ce n'est pas la première fois que l'industrie du sciage a connu des problèmes, loin de là, mais nous déplorons le fait qu'il y ait des difficultés de plus en plus grandes du côté de l'industrie du sciage, que ce soit au niveau du marché de consommation du bois de sciage, du bois scié comme on l'appelle communément, que ce soit vis-à-vis de la disposition de certains résidus du sciage, tels les copeaux.

Le phénomène le plus inquiétant face à des collectivités au Québec qui comptaient sur de petites unités de transformation du bois, c'est de voir les monstres s'amplifier — ce qu'on appelle les monstres sont les usines d'importance — peut-être au détriment de l'économie de beaucoup de nos paroisses. Cela ne manque pas d'être inquiétant. Je crois d'ailleurs que le Parti québécois qui forme

le gouvernement est sensibilisé à cela puisqu'il s'est fait le parrain du développement de la petite entreprise et de la moyenne entreprise chez nous. On sait que dans bien des régions, et le ministre a fait allusion à la région de l'Est du Québec tout à l'heure, s'il faut que le mouvement de disparition des petites usines se maintienne, nous aurons des problèmes nouveaux au Québec.

J'aimerais savoir quelle est la position du ministre vis-à-vis de cette volonté de soutenir de petites industries de sciage que nous avons dans certaines régions, devant le phénomène qui s'est développé récemment, soit l'amplification sans cesse croissante d'usines de sciage beaucoup plus importantes que celles que nous trouvons dans les régions qui vivent surtout de l'économie forestière axée sur le sciage. Quel est l'essor que le gouvernement entend donner à la petite et moyenne entreprise qu'il veut soutenir, surtout dans le secteur des usines de sciage.

M. Bérubé: II semble, dans le cas de la petite et moyenne entreprise dans le domaine du sciage, que celle-ci puisse s'avérer encore rentable, à une condition évidemment, c'est que le propriétaire de l'usine soit à la fois le comptable, le gérant, le mécanicien en chef, le responsable de la mise en marché, en d'autres termes, que le propriétaire de l'usine minimise au grand maximum ses frais d'administration. Dans de telles conditions nous avons de petites scieries au Québec qui fonctionnent avec profit.

Cependant, il faut se dire une chose, et à cela nous ne pouvons à peu près rien, c'est que le gros de notre industrie du sciage au Québec est quand même exporté. Sur les marchés d'exportation, nous devons faire face à une forte concurrence. En conséquence, nous sommes soumis à des prix qui ne sont peut-être pas au niveau où nous aimerions les voir.

Je pense que le problème que vous soulevez, dans le cas d'une industrie d'exportation, c'est un problème de compétitivité avec les étrangers. On pourrait imaginer peut-être que les petites scieries pourraient alimenter le marché local, mais même là, d'une façon générale, ils produisent trop pour le marché local. Elles doivent donc exporter vers Montréal et même vers l'extérieur.

Je pense qu'en un sens c'est presque irréversible, compte tenu du fait que nous devons entrer en concurrence avec l'industrie de sciage américaine et celle de la Colombie-Britannique, c'est presque irréversible qu'avec les années seules les plus grandes entreprises arrivent à être rentables et que les plus petites aient des difficultés.

C'est une des lois du marché économique, et seule, finalement, la fermeture du Québec, en instaurant des barrières tarifaires sévères, pourrait permettre de rentabiliser la petite industrie. Je pense que, sur le strict point de vue économique, cela ne me semblerait pas acceptable.

Par conséquent, je pense qu'il va forcément y avoir de petites entreprises de sciage qui devront disparaître. Je pense que c'est irréversible, sauf quand elles sont favorisées par le fait qu'elles sont à proximité d'un approvisionnement en bois et qu'elles sont très bien administrées par le propriétaire.

M. Giasson: Le ministre a fait allusion, tout à l'heure, au cours des débats, que le climat incertain en matière économique était le fait de l'Opposition, qu'effectivement cela allait bien au Québec comme dans le meilleur des mondes, et que seule l'Opposition créait un climat d'incertitude.

Comment peut-il concilier certaines prises de position et de déclarations de spécialistes, spécialement dans l'industrie du sciage, qui nous disent, malgré tout, que cela ne va pas si bien que cela? Sont-ce là d'autres prophètes de malheur que nous avons au Québec?

Je regarde, par exemple, une déclaration du directeur général de l'Association des manufacturiers de bois de sciage, M. Létourneau, qui, à la toute fin de décembre, déclarait que le marché du bois de sciage était mauvais et que s'il n'y avait pas amélioration de ce marché au cours des prochains mois, plusieurs entreprises fermeraient leurs portes et que d'autres seraient à vendre. Est-ce encore dans l'imagination du directeur de l'association que cela n'aille pas bien dans l'industrie du sciage ou est-ce un phénomène réel, selon l'avis du ministre?

M. Bérubé: Non, je ne pense pas. Je pense que là il s'agit d'une déclaration que j'estimerais plus objective que celle du député de Robert-Baldwin, en soulignant que ce n'est pas un problème politique, ce problème d'insécurité dans l'industrie du sciage, mais un problème de coût, un problème d'approvisionnement, un problème de prix de vente et peut-être un problème de volume de vente.

Il demeure néanmoins que, présentement, le prix de vente du bois n'est pas mauvais. Il n'est pas ce qu'il a été en 1974, mais lorsque l'on sait que l'industrie du sciage est une industrie très fortement cyclique, que le prix passe continuellement à des hausses presque exagérées pour passer par des baisses qui sont aussi dramatiques, je pense que, compte tenu qu'il s'agit d'une industrie cyclique, il serait nécessaire que les industriels du sciage profitent des bonnes années pour se constituer un fonds de roulement susceptible de leur permettre de passer à travers les années difficiles. Or, je pense que, malheureusement, au cours des années 1974, beaucoup d'industriels en ont profité pour investir massivement dans leurs usines, pour se lancer dans différentes entreprises, appauvrissant ainsi leur fonds de roulement, ce qui rend en ce moment leur viabilité difficile.

Mais il reste néanmoins qu'une consultation des chiffres, que j'ai pu voir d'ailleurs cette semaine, sur la fluctuation des prix dans l'industrie du sciage me montrerait présentement que peut-être les prix, en ce moment, sont légèrement supérieurs à ce qu'ils devraient être en moyenne si on extrapolait une montée normale au cours des années. En d'autres termes, le prix de vente du bois de sciage n'est pas mauvais pour nos industriels,

et les volumes ne sont pas non plus trop bas puisque, finalement, les stocks ne sont pas exagérés dans l'industrie du sciage, compte tenu de la situation.

Donc, je ne pense pas que l'industrie du sciage soit en si mauvaise posture à l'échelle du Québec, mais les problèmes locaux sont différents. Je pense que dans l'Est du Québec, le vieillissement, l'approvisionnement causent un problème. Je pense que dans dix ans, par exemple, dans l'unité d'aménagement de la forêt de cèdres, il ne fait aucun doute que s'il nous reste dix années d'approvisionnement, dans neuf ans on nous posera sans doute la question: Qu'allez-vous faire pour ces industriels du sciage qui n'ont plus de bois à scier? Evidemment, je pense qu'à ce moment-là nous n'aurons sans doute pas de réponse, sauf si nous avons investi une somme substantielle dans l'aménagement de la forêt domaniale afin qu'on puisse regénérer la forêt.

Donc, quand vous me dites que l'industrie du sciage est en très mauvaise posture, l'impression que j'en ai, au contraire, en rencontrant les industriels, c'est qu'elle n'est peut-être pas en si mauvaise posture que l'industrie des pâtes et papiers.

M. O'Gallagher: J'ai l'impression que le ministre...

M. Giasson: Ecoutez, je n'ai pas fait d'études personnelles approfondies sur l'état de l'industrie du sciage. Je m'en remets à des visions, à des perceptions des problèmes vécus par ceux qui sont a l'intérieur de ce secteur. Sont-ce des oiseaux de malheur? J'avais quelques industriels du sciage dans mon comté, chez moi, et j'ai des contacts de temps à autre avec ces gens, et on m'a informé de la façon dont va l'industrie. Ou ces gens s'abusent ou cela ne va pas dans un sens aussi optimiste que vient d'exprimer le ministre.

En 1966, on avait 2000 usines de sciage au Québec, si je ne fais pas erreur. En 1976, c'est tombé à 500 mais j'aimerais savoir, sur les 500 usines qui existent encore au Québec, combien il y en a qui fonctionnent.

M. Bérubé: Nous avons encore une capacité de sciage qui double la capacité forestière. La réponse, vous l'avez. Nous avons encore trop d'usines par rapport à ce que notre forêt est capable de produire en bois de sciage. C'est là le problème particulier. Je pense que le problème d'approvisionnement est un problème réel.

M. Giasson: Combien d'usines fonctionnent présentement au Québec en 1977? Est-ce que vous avez des chiffres là-dessus?

M. Bérubé: M. le Président, actuellement, il y a 1000 usines de sciage qui sont inscrites comme fonctionnant mais, de ces usines, il y en a à peu près 500 qu'on peut considérer comme commerciales. Alors, cela veut dire que les 500 autres vont fonctionner pendant un mois ou deux et fermer.

Les usines qu'on classe comme non commerciales sont bien souvent des usines qui échangent le bois avec les cultivateurs. Sur ce plan, ces usines n'ont pas trop de difficultés d'approvisionnement. Ce sont de petites usines. C'est plutôt pour les 500 autres que c'est plus dramatique concernant l'approvisionnement et le marché. La capacité installée, comme le ministre le mentionnait, est du double des marchés. Nécessairement, le prix de revient est beaucoup plus élevé et il y a des difficultés de vente et de coût.

M. Giasson: Quelles sont les prévisions pour l'année 1977, l'année en cours, du pourcentage de bois de sciage produit au Québec qui sera vendu à l'extérieur du Québec?

M. Bérubé: Bon an, mal an, ce qui sort du Québec est d'environ 40% à 45%. Alors, de ces 45% une partie va aux Etats-Unis, la plus grosse partie, le reste va dans l'Ontario et un peu dans les Maritimes.

M. Giasson: Cela serait donc reconnaître que le marché québécois absorbe facilement au moins 55% de tout le bois usiné au Québec.

M. Bérubé: Mais c'est sur une base annuelle. Suivant les permis de construction, c'est relié étroitement à la construction.

M. Giasson: Dans l'état du prix au marché présentement, est-ce que le prix sur le marché québécois se compare bien avec le marché extérieur du Québec, soit l'Ontario et les Etats-Unis, et même le marché d'exportation, parce qu'on commence à vendre du bois au Moyen-Orient, on commence à développer un certain marché d'exportation en dehors du continent?

M. Bérubé: II y a peu de développement sur les marchés européens. Peu d'usines du Québec approvisionnent les marchés européens. Il y a un problème de dimensions. Je pense que ce problème va se stabiliser quand on aura le système métrique. C'est très difficile pour une entreprise, par exemple, de faire une partie de sa production à une journée donnée pour le marché européen, et après quelques heures de modifier ses équipements pour produire pour le marché américain. Je pense que cette possibilité d'exportation éventuelle sur le marché européen sera beaucoup plus intéressante quand le système métrique sera en vigueur.

M. Giasson: Vous soutenez que, présentement, il y aurait 500 usines dites commerciales qui sont en activité au Québec en 1977. Est-ce que ce sont 500 usines ou 500 permis?

M. Bérubé: II y a plus de permis que cela. Il y a...

M. Giasson: Je parle d'usines commerciales. Oublions les usines qui sont alimentées principa-

lement par de petits propriétaires, des cultivateurs...

M. Bérubé: Les 1000 usines doivent avoir un permis.

M. Giasson: Elles ont toutes un permis mais est-ce qu'elles fonctionnent toutes...

M. Bérubé: Non, pas toutes les 1000. Comme je vous le disais tout à l'heure, au moment où je vous parle, je n'ai pas le décompte, il y en a peut-être 450 ou 400. La semaine prochaine, il va peut-être y en avoir 500 ou 600.

M. Giasson: Quelle orientation le ministère entend-il prendre vis-à-vis du renouvellement de ces permis? Je pose la question à la suite des commentaires que le ministre a faits, soutenu par le fonctionnaire, que présentement la capacité d'usinage double le potentiel d'approvisionnement aux usines. Est-ce que le ministère entend retirer graduellement, avec le temps, les permis aux petites usines qui n'auraient pas cette vocation commerciale ou si on maintient une stabilité dans l'attribution des permis ou le renouvellement des permis sur une base annuelle?

M. Bérubé: Actuellement, les vues du ministère sont qu'on favoriserait un regroupement des petites usines, ce qui aurait pour effet de diminuer le nombre d'usines, et ce n'est pas sûr que cela aurait un effet aussi comparable du côté de la capacité installée.

Il faut quand même dire que la capacité installée, dans ce cas, compte tenu du fait que bon nombre d'usines fonctionnent sur une base plutôt temporaire, risque de nous conduire, un petit peu, vers des conclusions qui pourraient être prématurées à moins d'avoir été étudiées d'une façon très approfondie.

M. Giasson: Je pose également la question parce que j'ai vécu ce phénomène, l'an dernier, dans ma région, où un industriel qui achetait le bois des cultivateurs s'est vu refuser l'attribution d'un permis. Il a continué quand même à scier le bois. A un -moment donné, il a fait face à des amendes, donc il était en infraction. Il exploitait une industrie de sciage qui utilisait dix employés. Il a fait face à des avis, les premiers avis, qui ont débouché sur des ordres formels d'arrêter, sinon cela lui coûtait, je pense, $100 par jour. Comme cet industriel s'alimentait uniquement de bois venant de petits propriétaires, j'ai mal compris qu'on ait refusé. Il ne demandait aucune garantie d'approvisionnement venant des terres publiques. Aucune. Il voulait travailler tout simplement à partir de bois venant de propriétés privées. On lui a refusé totalement la possibilité d'obtenir un permis pour sa petite usine. Ce n'était pas gros, je le concède, mais c'étaient dix emplois qui sont tombés le jour où, pour ne pas payer des amendes trop onéreuses, il a décidé de cesser les opérations.

M. Bérubé: Vous faites état d'une situation très malheureuse, mais l'expérience nous a enseigné au ministère que dans la plupart des cas, ces petites usines sont possédées par des propriétaires ayant une certaine compétence et une certaine audace et il y a une tendance naturelle à grossir si bien qu'éventuellement, les gens — c'est la procédure normale — demandent un permis d'usinage en pensant s'approvisionner dans les forêts privées, puis, avec leurs caractéristiques d'agressivité et d'efficacité, ils réalisent qu'ils pourraient faire un profit s'il y avait plus de bois à usiner et, à ce moment, le surplus de bois qui pourrait leur amener un surplus de profit, c'est du bois qui proviendrait de forêts publiques où, actuellement, il y a un surplus. C'est l'expérience qu'on a connue.

M. Giasson: Je regrette, ce n'est pas le cas qui est en cause, d'aucune façon.

M. Bérubé: Je ne parle pas du cas précis.

M. Giasson: II s'agit d'un petit entrepreneur qui ne veut absolument pas, ni immédiatement ni dans l'avenir, obtenir des garanties d'approvisionnement. Il alimente son usine uniquement à partir de petites quantités de billots: 20 000 pieds chez un producteur, 20 p.m.p., 25 000 pieds là, 10 000 pieds là. L'objection qu'on m'apporte ne tient pas. Je connais trop bien cette situation.

M. Bérubé: Sans plus d'information que ce que vous nous donnez, il me semble difficile de porter un jugement. Je vous dirai que je suis en entier accord avec la position que vous défendez, pour la raison très simple que, si on nous le présente comme le petit industriel qui fait vivre dix personnes, qui n'a jamais fait de mal à personne, qui n'empêche personne de respirer à côté, c'est inhumain de la part du gouvernement de lui refuser son permis alors qu'il ne nuit pas. A ce moment, je dis que vous avez raison. Si vous nous disiez le nom de cet industriel et que l'on puisse examiner le dossier, peut-être qu'on vous dira qu'il y a d'autres facteurs.

M. Giasson: Quel facteur, par exemple? Donnez-moi des exemples. Autour de l'usine qu'il exploitait, vous avez, dans un rayon d'à peu près 15 milles, d'autres industries de sciage qui, elles, sont entièrement alimentées par du bois qui vient de l'Etat du Maine. Lui, il n'ira pas en acheter du bois venant du Maine. Il alimente son usine à partir de petits propriétaires.

M. Bérubé: Pourriez-vous nous donner le nom de cet industriel pour qu'on fasse examiner le cas?

M. Giasson: II s'agit de M. Léopold Lemieux, de Lemieux et Proulx et de l'usine qu'il exploitait à Sainte-Perpétue, comté de L'Islet. Oui.

M. Bérubé: Parce qu'il sera beaucoup plus facile de vérifier ce qui s'est produit, et s'il y a injustice, on corrigera.

M. Giasson: Dans tout le secteur, il y a une usine qui est alimentée par la forêt publique du Québec, il s'agit de Lafontaine Lumber qui va chercher la très forte majorité de ses approvisionnements dans le comté du député de Kamouraska, dans la forêt domaniale du Grand Portage. On sait que la forêt domaniale des Appalaches est sous mandat d'exploitation uniquement par REXFOR. Personne ne peut y aller faire des opérations, sauf s'il obtient un mandat de REXFOR, ce qui est le cas de la coopérative de Sainte-Apolline, et REXFOR a sa politique de vendre du bois, qui lui est propre, à des usines qui existent dans le territoire. La demande à laquelle je fais allusion, qui a été refusée et qui a débouché sur des amendes parce que le bonhomme a continué d'exploiter son usine, au moins pour scier les billots qu'il avait déjà en sa possession, cela ne vient pas changer quoi que ce soit aux approvisionnements des autres usines dans le secteur de L'Islet-Sud.

Lafontaine Lumber s'alimente dans la forêt domaniale du Grand Portage, Medex s'alimente entièrement dans l'Etat du Maine, Matériaux Blanchet, même phénomène, entièrement dans l'Etat du Maine. Je n'ai vraiment pas compris qu'il y ait des raisons logiques qui se tiennent pour refuser le permis à cette petite usine de sciage qui sera alimentée dans l'avenir uniquement par l'achat ou la livraison de bois venant de cultivateurs ou de petits propriétaires.

M. Bérubé: Je voudrais savoir si le député de Montmagny-L'Islet suggère que le ministère devrait émettre des permis à tout le monde, sans aucune considération de quelque nature que ce soit, ou s'il pense que nous devons utiliser un certain nombre de critères pour l'émission de permis.

M. Giasson: Je suis d'accord sur l'utilisation d'un certain nombre de critères, mais en allant voir ce qui existe effectivement sur place; pas décider à partir de Québec sans avoir une étude approfondie de la situation qui prévaut dans la région.

M. Bérubé: Nous n'avons, évidemment, pas fait l'étude exhaustive, mais il paraît que, dans le cas du M. Lemieux en question, celui-ci a d'abord décidé de construire son usine sans permis, d'une part, qu'il y a eu des protestations d'autres industriels du sciage dans la même région, sur la même route, le voisin.

M. Giasson: Lafontaine Lumber?

M. Bérubé: Non, Napoléon Gagnon. On pourra vérifier les noms. Il y a donc eu des protestations...

M. Giasson: Napoléon Gagnon n'existe plus. Il était alimenté entièrement par du bois venant de Robinson Lumber, aujourd'hui M. Marquis, qui est du bois coupé entièrement dans l'Etat du Maine.

M. Bérubé: On me souligne, là...

M. Giasson: II y avait peut-être l'objection de la scierie du Gallion qui est située tout à côté, mais elle est en faillite depuis trois ans. Je ne vois pas le problème; elle est disparue de la carte, puis le permis doit être retiré.

M. Bérubé: Ce qu'on va faire, c'est qu'on va le vérifier. Mais ce que je vous dis, c'est qu'on me dit présentement qu'il y aurait eu des protestations justement à propos de l'émission d'un nouveau permis, étant donné que la forêt privée arrivait difficilement à fournir l'approvisionnement en bois d'une usine au moins voisine existante, et que, par conséquent...

M. Giasson: C'est ce que j'aimerais savoir. Puisqu'on est sur le cas, vous avez demandé le nom du propriétaire à qui on refuse un permis. On est dans le dossier, qu'on me donne les usines voisines.

M. Bérubé: Comme vous admettez avec moi qu'il y a au-delà de 500 usines, au-delà de 1000 en fait, je pense qu'on n'a pas tous les éléments du dossier avec nous présentement. Je vous dis tout simplement que, dans un cas comme celui-là, c'était l'évaluation que le ministère a faite que la forêt privée ne justifiait pas de nouvelles installations dans la région. Cet industriel, en dépit de l'avis qu'il avait reçu du ministère, a délibérément choisi de construire sans permis. Par conséquent, il s'exposait donc à une décision.

Maintenant, si effectivement il y a aujourd'hui, par suite de la faillite d'un ou deux ou trois industriels dans la région, de nouvelles données qui permettent, au contraire, maintenant de justifier l'émission d'un nouveau permis, je n'ai absolument aucune objection à ce que nous réétudions le cas. La seule chose sur laquelle j'insisterai, c'est qu'il est absolument nécessaire de veiller à ne pas émettre de permis quand la forêt privée ne peut pas approvisionner cette usine.

M. Giasson: Au moins, est-ce que vous connaissez les raisons pour lesquelles il s'est porté acquéreur d'une petite usine?

M. Bérubé: C'est parce qu'il avait du bois du Gallion...

M. Giasson: C'est cela.

M. Bérubé: ...qu'il a voulu scier, mais c'était une usine transportable.

M. Giasson: Du Gallion a failli. Les billots étant dans la cour du Gallion, il était pris avec ce bois et il fallait qu'il l'usine. Pour régler son problème au départ, il a dit: Je vais m'acheter une usine. Comme il avait les capacités d'acheter encore des petits propriétaires environnants, il a dit: II y a une possibilité d'exploiter mon usine. C'est une petite usine, il y a dix emplois à l'intérieur de cela.

M. Bérubé: C'est une usine transportable.

M. Giasson: Oui.

M. Bérubé: A l'époque, il n'avait pas eu de permis, mais il avait eu une espèce de tolérance pour scier le bois du Gallion; c'était convenu qu'il sciait le bois du Gallion, puis c'était tout. Après, il a continué à acheter des propriétaires et des cultivateurs. Par contre, il y a beaucoup d'usines dans la région qui, elles, ne fonctionnent pas à l'année parce qu'elles n'ont pas suffisamment de bois.

M. Giasson: II n'y a pas d'autres usines, que je sache, dans tout le secteur.

M. Bérubé: Pas dans la paroisse même, mais dans toutes les paroisses de l'endroit.

M. Giasson: On va prendre tout le secteur de L'Islet sud. Il y avait la scierie de la côte du sud qui n'exploite plus, qui est disparue.

M. Bérubé: Qui a fait faillite.

M. Giasson: II y avait Napoléon Gagnon, Tourville, disparu.

M. Bérubé: Cela ne fait pas longtemps.

M. Giasson: Vous aviez du Gallion, disparu. Il y a la petite usine de M. Lemieux.

M. Bérubé: En d'autres termes, vous avouez qu'elles disparaissent toutes, faute de bois.

M. Giasson: A part cela, vous avez Lafontaine Lumber.

M. Bérubé: Elles ferment toutes parce qu'elles manquent de bois.

Vous avez un grand nombre d'usines qui disparaissent, faute de bois, puis vous nous reprochez de ne pas avoir émis un permis pour une nouvelle usine.

M. Giasson: Non. Les usines disparues étaient des usines alimentées par le bois des petits propriétaires. Vous reconnaissez cela? Elles ne sont plus là. Lafontaine Lumber était alimenté par la forêt publique pour une partie, l'autre partie vient du Maine. Medex, alimenté par le Maine; Matériaux Blanchet, alimenté par le Maine.

M. Bérubé: II y a beaucoup d'usines qui achètent des deux, qui achètent ce que le cultivateur offre, s'il en a.

M. Giasson: II y a une usine qui est alimentée par le Maine et qui va faire des achats chez les petits propriétaires, c'est la scierie Aurèle Lord.

M. Bérubé: Aurèle Lord aussi, oui.

M. Giasson: A Sainte-Perpétue. Là, on a fait le tour de toutes les usines de ce qu'on appelle L'Islet Sud.

M. Bérubé: II n'y a pas un autre Lord, un peu plus loin?

M. Giasson: Ce n'est pas dans la même région. C'est sur la route 285 qui va de l'Islet-sur-mer à Saint-Adalbert. Ce n'est pas la même zone. Vous avez la zone 285 et la zone 204.

M. Bérubé: Ce sont des zones que je ne connais pas. Vous voulez dire la route?

M. Giasson: Oui, la route. L'une est sur un côté du comté et l'autre sur l'autre côté.

M. Bérubé: De fait, la loi est spécifique, elle dit tout simplement que "tout utilisateur doit avoir un permis d'usine pour opérer". Le ministre des Terres et Forêts donne un permis s'il juge l'approvisionnement suffisant. C'est en vertu de cela que l'approvisionnement n'a pas été jugé suffisant et le permis n'a pas été accordé aux agences Lemieux. A l'époque, d'ailleurs, Napoléon Gagnon était là. La scierie du Gallion venait juste de fermer, mais il y a beaucoup de scieries qui ont fermé parce que... Ce qu'ils nous disaient à l'époque, c'était la région de Québec.

M. Giasson: La dernière année de fonctionnement du Gallion a été 1974. La dernière année de fonctionnement de Gagnon était 1975.

M. Bérubé: La raison fondamentale est le manque d'approvisionnement.

M. Giasson: Les usines disparues, ce n'est pas une question de manque d'approvisionnement. Il y en avait, du bois.

M. Bérubé: Le manque d'approvisionnement du bois de sciage.

M. Giasson: II y avait du bois de sciage. Du Gallion n'a jamais manqué de bois, Gagnon, de Tourville, n'a jamais manqué de bois. Quand ils en manquaient, de la forêt privée de la région, ils allaient s'alimenter chez M. Marquis, bois coupé dans le Maine, approvisionnement du Maine.

M. Bérubé: Doit-on comprendre que, présentement, les cultivateurs de la région de votre comté n'arrivent pas à vendre leur bois de sciage?

M. Giasson: Ils finissent par le vendre, leur bois de sciage, personne ne garde ses billots. Le cultivateur qui, aujourd'hui, a besoin de ses billots pour ses propres besoins n'a pas le choix: il est obligé de vendre ses billots et retourner acheter le bois scié dont il a besoin dans le commerce.

M. Bérubé: Les recommandations que nous fait l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, présentement, c'est de ne plus émettre de permis au Québec, étant donné que l'approvisionnement des usines est déjà largement insuffisant, ce dont nous avons fait état déjà à plu-

sieurs reprises au cours de nos discussions. Par conséquent, en ce moment, au ministère, je pense qu'il est normal qu'on examine avec énormément de réserves toute nouvelle demande d'approvisionnement. Or, si vous nous dites que les cultivateurs de votre comté sont présentement capables de vendre leur bois et de le faire scier ailleurs...

M. Giasson: Non, ils ne peuvent pas le faire scier ailleurs. Il faut qu'ils vendent les billots, mesure ronde, et quand ils ont besoin de bois, ils rachètent du bois scié au prix du marché; c'est l'exploitation dans la zone en cause. Si vous allez dans la partie nord du comté, c'est un autre phénomène parce qu'il reste encore deux petites usines de sciage, à peu près du volume de celles dont on parle, qui scient le bois des cultivateurs. Le cultivateur qui en a besoin pour se bâtir une remise ou agrandir ses bâtiments, il peut apporter ses billots. Il n'a pas besoin de les vendre, il les transporte à la scierie, il les fait scier et il rapporte son bois scié.

M. Bérubé: Je ne vous cache pas qu'une erreur administrative peut toujours se produire. Au moment où cette évaluation a été faite, il y a deux ans maintenant, il y avait déjà d'autres industriels qui effectuaient du sciage, qui ont fait faillite depuis, et que, par conséquent, la situation ayant évolué, aujourd'hui, il manque d'usines de services pour scier le bois des cultivateurs dans votre région. C'est tout à fait possible. Auquel cas, si, effectivement, un industriel s'avérait intéressé à partir une telle usine, je pense que le ministère, en soi, n'aurait pas d'objection.

D'une façon générale, on me signale que le ministère s'efforce d'émettre les permis nécessaires pour qu'il y ait, dans chaque région, des usines de services, mais non en excès. En d'autres termes, si, présentement, il n'est pas possible pour les cultivateurs de faire scier leur bois et qu'il existe un volume suffisant dans la région pour justifier une usine, à ce moment-là, il pourrait y avoir une émission de permis. Mais si le volume de bois de sciage, dans la région, n'est pas suffisant pour justifier l'émission d'un permis, je pense que la décision resterait la même. Mais il faudrait s'assurer qu'il y a le volume.

S'il y avait le volume de bois, je pense que cela il n'y a personne qui le remet en question.

M. Giasson: Pas d'une grosse usine, elle fonctionne environ cinq mois par année, elle peut scier au cours de cette saison 1,5 million de p.m.p.

M. Bérubé: Nous allons reprendre le dossier et le regarder à nouveau, parce qu'effectivement, avec les autres faillites, peut-être que là maintenant la situation est différente.

M. Giasson: Elles n'ont pas toutes failli, du Gallion a failli, Gagnon n'a pas failli, puis...

M. Bérubé: Gagnon a été vendu.

M. Giasson: Cela a été vendu. Cela a été vendu pour la machinerie et non pas pour le fonctionnement de l'usine à Tourville.

M. Bérubé: Côte-du-Sud a failli.

M. Giasson: Côte-du-Sud a failli. Mais Côte-du-Sud on n'est plus dans le même secteur...

M. Bérubé: Puis elle a été six mois en fonctionnement. C'est sur la même route.

M. Giasson: ...Côte-du-Sud, vous êtes dans L'Islet nord. Saint-Omer.

M. Bérubé: C'est à peu près 20 milles, je crois.

M. Giasson: Oui, mais vous ne demanderez pas à des producteurs, des cultivateurs de Saint-Omer et de Saint-Adalbert de descendre des billots à Saint-Aubert, de chercher cela et de remonter cela. Il y a des dimensions locales qu'il faut voir aussi. Du Gallion pouvait scier le bois des petits propriétaires habitant la partie nord du comté, des paroisses comme Saint-Damase, Saint-Aubert, Saint-Eugène, L'Islet, Saint-Cyrille.

M. Bérubé: Mais les industries Lemieux ne font pas que scier pour les cultivateurs, ils achètent, ils commercent aussi.

M. Giasson: C'est cela, le cultivateur qui veut vendre des billots à Lemieux, vend des billots, celui qui veut faire scier du bois pour ses propres besoins, il fait scier du bois chez la scierie Lemieux.

M. Bérubé: Puis le ministère calculait la possibilité sur les inventaires forestiers et non sur les offres des cultivateurs de billots. Ce que le ministre a dit tantôt...

M. Giasson: Ils ne vous demandent aucun approvisionnement venant d'un autre endroit que le bois des petits propriétaires.

M. Bérubé: ...il n'y a pas d'usine de sciage. Oui la loi couvre les forêts privées et les forêts publiques, la loi d'utilisation.

M. Giasson: Oui mais je comprends que la loi le couvre mais, quand on le voit dans la situation qui est propre à Lemieux, de ne pas compter sur d'autres fournitures que le bois qu'il peut acheter des petits propriétaires ou le bois qu'il peut scier pour les besoins de petits propriétaires, il me semble que ce n'est pas... Pour prendre un terme qui est souvent utilisé par le premier ministre, ce n'est pas sorcier cela.

M. Bérubé: Pour les besoins, c'est cela.

En tout cas, ce que je m'engage à faire c'est de reprendre l'étude de ce cas particulier, compte tenu de l'approvisionnement et compte tenu de la disparition d'un certain nombre d'usines qui pour-

raient effectivement aujourd'hui justifier l'implantation d'une usine de service.

M. Giasson: M. le Président, vous avez fait état de la faiblesse de l'industrie du sciage dans l'Est du Québec; on pourrait croire que le phénomène de difficultés peut s'appliquer également dans d'autres régions telles que le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mais, si nous demeurons du côté de l'Est du Québec, où en est la situation d'usines de sciage que vous connaissez assez bien? Il y en a même dans le comté que vous représentez. . Qu'est-ce qu'il advient de l'économie des municipalités ou des petites villes touchées par la situation d'usines de sciage qui ont eu des difficultés? Est-ce que le gouvernement entend intervenir directement vis-à-vis de ces problèmes qui touchent des régions données comme cela a pu être fait dans le passé? On avait demandé à REXFOR de venir sauver l'économie de certaines régions qui n'étaient pas nécessairement dans l'Est mais on est même allé en Abitibi; qu'est-ce qui en est de la scierie Lepage par exemple à Saint-Anne-des-Monts? Je pense qu'il s'agit d'une municipalité de votre comté.

M. Bérubé: A la scierie de Louis Lepage? M. Giasson: Oui.

M. Bérubé: Je pense qu'il n'est pas question pour l'instant de fournir une garantie d'approvisionnement pour la scierie Louis Lepage, comme telle, ni de donner des subventions non.

M. Giasson: C'est une scierie fermée définitivement, il n'y a pas de retour possible de ce côté?

M. Bérubé: Je ne crois pas.

M. Giasson: Pour quel motif? Il n'y a pas assez d'approvisionnement dans le secteur? Ou les approvisionnements sont situés trop loin de l'usine, c'est quoi le phénomène?

M. Bérubé: II y a des problèmes d'approvisionnement dans les régions qui sont assez évidents, je pense, c'est ce qui nous a fait hésiter à réinvestir. D'abord, précisons la pensée du ministère ou du moins du ministre en ce qui a trait à l'aide financière à apporter à certaines usines de sciage au Québec. Si, dans une région donnée, il n'y a pas d'approvisionnement ou l'approvisionnement est difficile, je pense que vous comprendrez maintenant, à la lumière des discussions, que le ministère n'encouragera pas la construction de nouvelles usines. D'autre part, il est possible que, pour des raisons uniquement de création d'emplois temporaires, le gouvernement décide de soutenir une scierie, dans l'attente d'un projet comme on peut l'envisager. Par exemple, dans un village où l'approvisionnement serait très difficile, où la qualité du bois serait mauvaise, où les installations seraient vétustés, et où on ne pourrait pas prévoir de rentabiliser une industrie du sciage et que où non plus nous n'avons pas de façon prévisible de plan de développement économique pour ce village en particulier, n'ayant pas de proposition sous les yeux, dans ce cas je ne pense pas que le gouvernement interviendrait pour soutenir artificiellement une scierie.

De ce côté, ma position est assez ferme. Pour que le gouvernement décide de soutenir une scierie, comme dans le cas Samoco, de Béarn et de Taschereau, il faut qu'il y ait possibilité d'approvisionnement en bois, il faut que la qualité du bois soit suffisante, il faut que l'on puisse estimer et rentabiliser cette exploitation. Le critère de rentabilité économique est important.

Dans une région où la rentabilité n'est pas établie, à ce moment, je pense que le gouvernement accepterait d'intervenir uniquement s'il existe des projets de développement économique dans cette région qui, temporairement, ne peuvent pas naître du jour au lendemain. Il faut leur donner un certain nombre d'années pour naître. A ce moment, le gouvernement pourrait intervenir. C'est le cas de la Richardson, en particulier, à Cap-Chat.

M. Giasson: Dans le cas de Lepage, quels sont les problèmes qui empêchent véritablement de faire produire cette usine, étant donné qu'il s'agissait d'une usine qui était rentable? Est-ce une absence d'approvisionnement? Quel est le phénomène?

M. Bérubé: Dans le cas de la scierie de M. Lepage, il est venu me voir pour demander une subvention du gouvernement pour l'aider à relancer son industrie. Comme M. Lepage a l'habitude de bouffer des subventions gouvernementales — c'est ce qu'on m'avait dit, en tout cas — je me suis dit que ce n'était peut-être pas, disons, raisonnable pour le gouvernement d'aller subventionner un industriel du sciage localement.

M. Giasson: Qu'est-ce que M. Lepage a pu bouffer vis-à-vis de la caisse du gouvernement du Québec dans le passé?

M. Bérubé: Je n'ai pas vérifié. On m'a dit qu'il avait bénéficié de subventions dans le passé.

M. Giasson: Vous affirmez cela. Qu'est-ce qu'il a touché du gouvernement provincial?

M. Bérubé: Je n'ai pas d'idée. Je vous dis simplement que c'est ce qu'on m'avait dit à ce moment-là.

M. Giasson: Le problème quand même...

M. Bérubé: Je vois que c'est de toute façon un ami personnel de votre conseiller qui est assis derrière vous.

M. Giasson: Cela a une importance absolument secondaire dans le cas de l'usine en cause.

M. Bérubé: Cela a une importance assez grande sur la sympathie que je pouvais manifester au moment où il est venu me voir.

M. Giasson: II n'y a rien de changé en ce monde.

M. Bérubé: Pour les subventions, oui.

M. Giasson: C'était une incapacité d'approvisionnement dans le secteur. Quelle en était la cause?

M. Bérubé: II y avait une demande de subvention qui m'était faite d'un industriel et je lui ai dit que le gouvernement n'envisageait pas de subvention à des individus pour le financement de leur entreprise.

M. Giasson: Mais supposons — faisons une hypothèse — que le propriétaire est prêt à exploiter son usine pour autant qu'on lui fournisse des approvisionnements, est-ce que le ministère est prêt à lui accorder des approvisionnements?

M. Bérubé: Pour autant qu'il y en a, oui.

M. Giasson: Dans le présent cas, y a-t-il absence d'approvisionnement dans le secteur environnant cette usine?

M. Bérubé: Dans ce secteur le volume de bois susceptible d'approvisionner les usines est là, mais il s'agit la plupart du temps de volume de bois beaucoup plus propice à un autre usage qu'au sciage à cause, surtout, de la dimension des billes, pour une part, mais le plus gros facteur est le taux de défilement des billes qui sont relativement courtes. Une bille diminue de dimension en diamètre très vite si bien que... disons pointue...

M. Giasson: Si l'arbre est court, la bille à sa base est assez large et quand vous arrivez au petit bout, comme on l'appelle en termes de métier, c'est diminué considérablement.

M. Bérubé: C'est pour cela d'ailleurs, je pense, autant que je m'en souvienne, qu'une des dernières années où M. Lepage a fonctionné on avait dû, au ministère, lui accorder une réduction de droit de coupe pour tenir compte des difficultés d'exploitation qu'il avait connues, du fait que son bois s'usinait plus ou moins bien.

M. Giasson: Comme cela, il y aurait des approvisionnements dans le secteur? C'est l'état de l'essence elle-même.

M. Bérubé: S'il était intéressé à ouvrir une usine de pâtes, il y aurait peut-être plus d'approvisionnement, je pense.

M. Giasson: Oui, mais il est équipé pour le sciage.

M. Bérubé: Oui, il n'y a pas de bois de sciage. Je tiens à souligner que, n'étant pas un spécialiste des approvisionnements forestiers, je pourrais difficilement porter un jugement sur l'approvisionnement en forêt. Néanmoins, ayant eu a discuter en long et en large du problème de la relance d'une industrie de sciage dans la région de Cap-Chat, il est très vite apparu que l'approvisionnement en bois ne justifiait pas une nouvelle usine, donc la reconstruction de l'usine de Cap-Chat, d'une part, et que même l'approvisionnement des usines existantes posait de réels problèmes, compte tenu de la présence du parc à l'arrière, donc compte tenu de la situation générale de la forêt.

Il faut prévoir des exploitations en forêt à près de 2000 pieds en altitude. Par conséquent, de l'avis de REXFOR, les approvisionnements sont extrêmement limités et c'est confirmé par l'opinion des fonctionnaires du ministère ici et même, semble-t-il, par l'opinion assez généralisée de la population locale.

Par conséquent, je pense que les problèmes d'approvisionnement sont réels, mais la demande de M. Lepage n'était pas une demande d'approvisionnement; c'était une demande de subvention que j'ai reçue avec le sourire.

M. Giasson: Du côté de Cap-Chat, il n'y a pas de possibilité d'approvisionnement, non plus?

M. Bérubé: On a fait des études d'approvisionnement pour l'usine de la Richardson et, présentement, nous ramassons dans la région absolument tout le bois que l'on peut imaginer.

M. Giasson: II est ramassé pour les pâtes et papiers, quand vous dites que vous ramassez tout le bois?

M. Bérubé: Non, pour la reprise des activités de Grande Vallée, de celles de la Richardson à Sainte-Anne-des-Monts et de l'usine de rabotage de Cap-Chat.

M. Giasson: Autrement dit, dans tout le secteur, il y en a assez présentement pour la capacité d'usinage, pour le potentiel du milieu.

M. Bérubé: C'est cela. Compte tenu de notre philosophie politique, si nous avons à subventionner, nous subventionnerons plutôt les coopératives qu'un industriel proprement dit.

M. Giasson: Faut-il croire que les solutions, qui étaient possibles et existantes lors de la dernière campagne électorale, pour Cap-Chat, sont disparues?

M. Bérubé: Dans le cas d'une construction d'une usine de sciage nouvelle, il ne fait aucun doute qu'il était inadmissible pour un gouvernement d'accepter, même dans le comté du ministre des Terres et Forêts, de financer une nouvelle

usine en appliquant les critères que nous venons de discuter en long et en large ce matin.

M. Giasson: Vous vous êtes aperçu de cela après le 15 novembre.

M. Bérubé: Non, au contraire. L'un des charmants auguments de la dernière campagne électorale, c'était que l'arrêté en conseil, adopté à la vapeur le 25 octobre, sans que personne ne soit trop au courant à l'intérieur du ministère des Terres et Forêts, était un geste plus électoral qu'économique.

M. Giasson: Quelle était la teneur dudit arrêté en conseil?

M. Bérubé: II avait été présenté comme étant l'engagement du gouvernement à construire une nouvelle usine de sciage. Lu soigneusement cependant, cela revenait, en fait, à dire que le gouvernement acceptait de faire une étude.

M. Giasson: L'arrêté en conseil exprimait une volonté d'étude sur la situation dans ce milieu.

M. Bérubé: Oui, il pouvait être interprété comme cela. Il n'était pas présenté comme cela par l'ex-député, je dois dire.

M. Giasson: II y a des politiciens dans le bout.

M. Bérubé: Celui-là même qui vous conseille, mon cher collègue, de Montmagny.

M. Giasson: La situation à Roberval, c'est la scierie Gagnon et Frères qui est fermée. Le nombre d'emplois, pour toutes les activités de cette entreprise, était de 600. Qu'est-ce qu'il va advenir de cela?

M. Bérubé: D'après ce que je vois, nous faisons face de nouveau à la même difficulté. Nous avons offert à la scierie Gagnon et Frères de leur fournir, à partir de concessions révoquées, de la Console, je crois, un emplacement où le bois est de meilleure qualité, ce qui pourrait augmenter la rentabilité de l'usine. Malheureusement, cet emplacement est situé à une distance presque aussi grande que là où ils prélèvent présentement leur bois. Par conséquent, le problème du transport du bois demeure réel, d'une part.

M. Giasson: C'est une distance de combien de milles?

M. Bérubé: 160 milles.

M. Giasson: Le chantier est à 160 milles de l'usine?

M. Bérubé: C'est cela. Donc, d'une part, le ministère était prêt à faire ce geste. D'autre part, également, le ministère était prêt, dans le cadre de son programme de voirie, donc en mettant un peu plus d'accent que nécessaire sur la région, à investir pour un montant de l'ordre de $1,5 millions en voirie forestière, de manière, justement, à faciliter les opérations de la compagnie. Egalement, à la suite d'une rencontre avec M. Rodrigue Tremblay, M. Dinsmore, sous-ministre à l'Industrie et au Commerce, et M. Jean-Noël Poulin, nous avons discuté des possibilités d'intervention gouvernementale autre que subventionnaire.

Parmi les hypothèses retenues, il y a eu celle de la participation au capital-actions de l'entreprise. A la suite de contacts téléphoniques et de plusieurs rencontres, d'ailleurs, au ministère, entre les autorités de la compagnie et les autorités du ministère, réunion à laquelle je n'assistais cependant pas, cette proposition a été faite. La société a souligné qu'elle ne cherchait pas tellement de subventions comme telles, qu'elle recherchait plutôt une subvention ou un prêt sans intérêt qu'une participation au capital-actions, étant donné la structure de la compagnie qui ne se prêtait pas à l'émission d'actions au gouvernement.

Dans ces conditions, le gouvernement n'a pas jugé bon d'intervenir davantage sauf sous les formes que je vous ai présentées.

M. Giasson: Quelles sont les solutions de rechange que vous avez mises de l'avant comme gouvernement pour ramener au travail les 600 travailleurs de l'industrie Gagnon?

M. Bérubé: Une des solutions de rechange, évidemment, c'est avec le démarrage de l'usine de Saint-Félicien. Il y aura quand même la création d'un bon nombre d'emplois directs et indirects dans la région, ce qui est déjà un point important.

Il faut quand même souligner que, dans le cas de la scierie Gagnon et Frères, les hauts fonctionnaires du ministère m'ont rappelé qu'au moment où Gagnon et Frères a choisi d'agrandir son usine, de la moderniser, on lui a souligné le fait que l'approvisionnement n'existe pas dans la région, que tout était donné en garantie d'approvisionnement et que, par conséquent, il courait d'énormes risques financiers. Cet industriel, c'était sans doute au cours de l'année 1974, je crois...

Une Voix: Avant cela.

M. Bérubé: ... un peu avant, le prix du bois étant relativement bon, a jugé qu'il pouvait opérer dans la région de Chibougamau et expédier son bois par voie ferrée. Il a donc choisi de courir le risque économique.

Malheureusement, le prix du bois ayant repris un niveau un peu plus normal, il s'est trouvé en difficulté. De là, évidemment, à dire que le gouvernement devrait maintenant intervenir et le subventionner, alors qu'au contraire le gouvernement lui avait déjà souligné les dangers des gestes qu'il prenait! Si vous me demandez si le gouvernement doit assumer le déficit, c'est que le gouvernement, s'il assume le déficit, devra devenir propriétaire de l'usine.

M. Giasson: Dans la proposition que le ministère a faite à la compagnie Gagnon, là-bas, vous avez proposé, je présume qu'il s'agit d'une offre ferme, par écrit, de consacrer un montant de $1,5 million en coût de voirie forestière pour accéder aux nouvelles ressources?

M. Bérubé: Ceci a été fait par écrit. De même que la nouvelle aire de coupe qui lui a été offerte, ceci a été fait par écrit. Quant à la négociation sur la formule d'aide financière, c'est suite, évidemment, à des négociations qui ont montré que la société n'était pas du tout intéressée à ce type d'intervention gouvernementale.

M. Giasson: II n'a pas été question de l'apport de cet industriel de rapprocher son usine du territoire d'opérations forestières?

M. Bérubé: C'est ce qui lui avait été fait comme suggestion, il y a un certain nombre d'années.

Le Président (M. Clair): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: M. le Président, on parle de l'industrie du sciage. REXFOR a un permis d'exporter du bois non ouvré à l'extérieur du Québec. Est-ce que REXFOR en a exporté? Elle n'a pas besoin de permis, elle peut en exporter. Est-ce que REXFOR a exporté du bois qui aurait pu être ouvré, qui aurait pu être scié au Québec et qui a été scié à l'extérieur du Québec. Afin de — je ne sais pas — ne créer aucun préjudice à l'industrie locale, si vous voulez?

M. Bérubé: Les exportations de bois effectuées par REXFOR remontent déjà à quelques années alors qu'il y avait des surplus sérieux qui venaient principalement du bois récupéré sur la Côte-Nord, sur la Manicouagan. Actuellement, et depuis quelques années, REXFOR n'expédie pas de matière ligneuse à l'extérieur. Il y a eu des négociations, l'an dernier, pour évaluer la possibilité d'expédier la matière ligneuse sous forme de co-paux, compte tenu des excédents et de la difficulté de placer les copaux de plusieurs industriels du sciage.

Il n'y a pas eu de suite à ces projets, parce que, d'une part, les personnes qui auraient été acheteurs, ou les organismes des pays étrangers qui auraient acheté avaient des exigences inacceptables, particulièrement dans deux secteurs: d'abord au niveau des prix où on exigeait des engagements qui auraient compromis la rentabilité; deuxièmement, parce qu'on exigeait également des engagements à long terme. Comme vous le savez, au Québec, nous hésitons toujours à prendre des engagements d'expédition d'une matière première à l'extérieur, afin de ne pas compromettre des projets ou des possibilités de transformation sur place ou au Québec même.

Pour l'instant, c'est ce qui a fait qu'on peut dire que REXFOR n'expédie pas, depuis quelques années, de matière ligneuse à l'extérieur.

M. Goulet: Vous voulez dire quoi, quand vous parlez de billes de sciage? Ce sont les billots, comme on les appelle communément? Ici, dans le rapport, je vois qu'on en a expédié 600 000 pieds cubes. C'est inscrit à la page 154 du rapport 1975/76. Vous dites qu'on n'en a pas expédié, ce n'est pas la même chose.

C'est cela que je demande, est-ce que c'est...

M. Bérubé: Hors du Québec, dans les autres provinces, il y a d'autres gens que REXFOR...

M. Goulet: Je m'excuse, c'est expédié dans d'autres pays, un peu au Canada, soit 225 000, et 2588 fois 100 pieds cubes, soit 2 588 000 pieds cubes dans d'autres pays. C'est bien mentionné. Il y a à peu près 10% qui sont expédiés au Canada et le reste, c'est en dehors du pays, pas en dehors du Québec. A moins que vous ne commenciez à appeler le Québec un pays, mais pour moi le pays c'est le Canada, jusqu'à ce jour. C'est marqué là. Ou il y a une erreur dans le rapport, je ne sais pas. Quand on dit que le nombre d'industries de sciage qui ferment leurs portes, on aurait pu... Je ne dis pas REXFOR.

M. Bérubé: Non, pas REXFOR.

M. Goulet: Je n'ai pas parlé de REXFOR. Tantôt, j'ai demandé si REXFOR avait le droit d'en exporter. Mais avant de permettre d'exporter du bois — j'ai commencé avec REXFOR — vous m'avez dit: Elle n'en a pas exporté. Mais il y en a eu d'exporté en dehors du Québec. Or, avant de permettre de l'exporter on ne pourrait pas enlever ces permis. Parce que dans le rapport, on dit: Seule la société REXFOR peut être autorisée à exporter du bois non ouvré hors du pays. Alors si ce n'est pas REXFOR qui l'a exporté, c'est qui? Pourquoi l'a-t-on permis?

M. Bérubé: Cela peut être du bois partiellement ouvré ou cela peut aussi être des billes de sciage non ouvrées, mais provenant de forêts privées. Les expéditeurs, tout en n'étant pas assujettis à se procurer un permis d'expédition ou d'exportation, quand le bois provient de forêts privées, font quand même une demande au ministère de façon à se protéger vis-à-vis du receveur éventuel.

Il paraît que le gouvernement n'aurait pas, l'an dernier, en tout cas, émis de permis pour l'expédition de billes de sciage provenant de la forêt publique comme telle.

M. Goulet: Je m'excuse, on ne parle pas de forêt publique ou privée dans le rapport. Si vous le permettez, M. le Président, je vais juste lire un paragraphe. Vous allez dire que je suis peut-être rendu loin, mais c'est toujours en regard du préjudice qu'on peut causer à l'industrie du sciage. "Les bois qui sortent du Québec, qu'ils soient ouvrés ou non, font l'objet d'un contrôle de la part du ministère des Terres et Forêts. Il s'agit, ici encore, d'une mesure visant à promouvoir une transformation plus complète de cette matière première". On ne parle pas de forêt privée ou publi-

que. "Ainsi, seule la société REXFOR peut être autorisée à exporter des bois non ouvrés hors du pays". Alors, il en est sorti.

M. Bérubé: La phrase n'est peut-être pas complète.

M. Goulet: II en est sorti 5 626 000 pieds cubes. Pourquoi le permet-on? C'est pour 1975/76. Cela m'a fait sursauter quand le sous-ministre a dit qu'il n'en est pas sorti. Seule REXFOR est autorisée à en sortir et puis...

M. Bérubé: En provenance de la forêt publique.

M. Goulet: Vous auriez dû mettre cela dans le rapport. Même là, pour la forêt privée, il me semble qu'on devrait arrêter cela si nos industries de sciage sont en train de fermer. On devrait le faire tout de suite.

M. Bérubé: M. le Président, je tiendrais à souligner que mon collègue aura l'occasion, lors du référendum, de voter "oui", ce qui permettra au gouvernement du Québec de reprendre le contrôle de son marché extérieur. Je tiens à souligner que la constitution ne permet pas à l'Etat du Québec de contrôler les produits qui sont propriété privée.

Le commerce extérieur est régi par un organisme fédéral, par des lois fédérales.

M. Goulet: II y aurait un mot extrêmement important à ajouter dans le rapport.

M. Bérubé: Le gouvernement peut interférer sur le commerce des bois provenant de la forêt publique, parce que le gouvernement est propriétaire de ses forêts, de la même façon , le gouvernement peut légiférer dans le secteur du commerce extérieur concernant les minerais parce que le gouvernement est propriétaire, dans la plupart des cas, de son sous-sol. Mais, lorsque le gouvernement n'est pas propriétaire de la ressource, comme les bois provenant des boisés privés, le commerce de ces produits est régi par des lois fédérales régissant le commerce extérieur. Là-dessus, le gouvernement du Québec ne peut pas intervenir, suivant la constitution que nous connaissons. Mais le député de l'Union Nationale pourra, en tout temps, voter "oui", lors du référendum, et, à ce moment-là, il nous fera plaisir de modifier de telles lois.

Le Président (M. Clair): II est 13 heures et la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 13 h 1)

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