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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mardi 14 mars 1972 - Vol. 12 N° 5

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 250 - Code des professions et autres projets de loi connexes


Journal des débats

 

Commission spéciale des corporations Professionnelles

Projet de loi no 250 — Code des professions et autres proiets de loi connexes

Séance du mardi 14 mars 1972

(Dix heures vingt-trois minutes)

M. FORTIER (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Il y a plusieurs membres de la commission qui croyaient que les travaux commençaient à 10 h 30 alors que la convocation indiquait bien dix heures.

Je vais inviter maintenant les doyens des facultés de médecine à présenter leur mémoire.

Comité des doyens des facultés de médecine du Québec

M. BOIS (Pierre): M. le Président, MM. les ministres, MM. les membres de la commission, les doyens des quatre facultés de médecine vous remercient de cette occasion qui leur est donnée de présenter leurs commentaires au sujet des projets de loi 250 et 252.

Le bref mémoire qui vous a été remis se limite aux implications de ces deux projets traités conjointement sur l'enseignement de la médecine. Disons tout de suite que les doyens appuient la proposition de confier à la corporation professionnelle le mandat du contrôle de la qualité de l'exercice de la médecine et que ce contrôle suppose celui de la compétence de ceux qui l'exercent.

Il nous paraît donc que l'ordre des médecins puisse établir des normes de formation et approuver des programmes d'études, établir des critères d'agrément pour les institutions qui participent à la formation des médecins, connaf-tre la liste des étudiants en médecine et des candidats qui font un stage dans les institutions. Toutefois, il doit être précisé clairement que l'ordre des médecins est un organisme de normes et d'agrément, que la préparation et l'exécution des programmes d'enseignement à tous les niveaux relèvent de la compétence des universités, de même que l'admission des candidats aux études médicales et leur évaluation.

Au sujet des programmes de médecine conduisant au diplôme de m.d., nous avons un premier commentaire. Selon l'article 169, paragraphes d) et e) du code des professions et l'article 22 de la Loi médicale, le lieutenant-gouverneur en conseil pourra, après consultation de l'Office des professions et de l'ordre des médecins déterminer les diplômes décernés par les universités ayant une faculté de médecine qui donnent ouverture à un permis d'exercice de la médecine ou à un certificat de spécialiste et fixer les modalités de la participation de la corporation à l'élaboration des programmes conduisant à ces diplômes.

Les doyens reconnaissent la raison d'être de ces articles mais, puisque les études professionnelles doivent donner ouverture au permis, il serait normal que l'organisme qui décerne ce permis puisse avoir le droit d'approuver ces programmes d'études. En conséquence, les doyens seraient disposés à soumettre comme par le passé leur programme d'études conduisant au grade m.d. à l'approbation de l'ordre des médecins du Québec.

Un deuxième point concerne la formation professionnelle post-m.d. Les doyens désirent rappeler qu'en 1969 le Collège des médecins avait demandé aux universités d'assumer la responsabilité pédagogique de la formation professionnelle post-m.d. Les facultés ont donc préparé et soumis au comité des programmes du Conseil des universités et au Collège des médecins des programmes universitaires de formation pour les internes et les résidents.

Ainsi, les internes et les résidents, faisant un stage d'entrafnement professionnel, doivent être inscrits à l'université.

Les doyens des facultés de médecine acceptent de soumettre à l'approbation de l'ordre les programmes d'internat et de résidence comme ceux des études médicales pré-m.d. Toutefois, ils croient avantageux que les universités participent, comme les étudiants d'ailleurs, à la détermination du contenu de ces stages d'entrafnement professionnel et à l'élaboration des normes de l'ordre pour l'approbation des programmes et l'agrément des milieux de formation.

L'immatriculation par l'ordre dont il est question à l'article 23 doit naturellement concerner aussi les internes et résidents faisant un stage d'entrafnement professionnel, puisqu'ils sont également, comme nous l'avons dit tout à l'heure, considérés comme des étudiants. Alors, à ce sujet, nous croyons que l'article 24 pourrait comporter également un paragraphe disant: A également droit à un certificat d'immatriculation celui qui a fait un stage d'entrafnement professionnel requis par l'ordre, en vue d'un permis ou d'un certificat de spécialiste.

Un dernier point à ce sujet, puisque les programmes de formation professionnelle doivent être adaptés aux diverses modalités d'exercice de la profession, selon les besoins de la population, les doyens croient utile que l'ordre puisse identifier ces modalités d'exercice et n'être pas limité à la seule définition des classes de spécialités qu'elle comporte.

L'autre point concerne l'éducation médicale continue. Un point assez bref. Les doyens croient que le terme "organiser", tel qu'employé à l'article 83 j) du code des professions est ambigu et suggèrent qu'il soit remplacé par les termes "coordonne et agrée" des cours ou des stages de formation continue mis à la disposition des membres de la corporation.

Enfin, les doyens aimeraient faire quelques commentaires au sujet du permis temporaire octroyé aux professeurs de médecine engagés par une université. L'article 29 de la Loi

médicale autoriserait l'ordre à donner un permis temporaire au professeur qui n'est pas citoyen canadien, valable pour une durée maximale d'une année, à moins d'une autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil, lorsque l'intérêt public le requiert.

Les doyens considèrent cette trop courte durée de la validité du permis comme une sérieuse entrave au recrutement des professeurs, qu'il faut parfois faire en dehors du Canada. Ils croient que l'ordre devrait pouvoir, aux conditions qu'il détermine, décerner à ces professeurs cliniciens un permis temporaire annuel et renouvelable, mais dont la durée ne doit pas excéder celle de leur engagement comme professeur de médecine dans une université du Québec. De plus, nous croyons que cette possibilité devrait pouvoir s'appliquer à celui qui est ou qui est devenu citoyen canadien.

L'article 29 est donc modifié dans ce sens, disant que "le bureau peut délivrer, aux conditions qu'il détermine, et lorsque l'intérêt de l'enseignement de la médecine le requiert, un permis annuel et renouvelable à toute personne qui ne remplit pas les conditions fixées à l'article 28, mais qui est engagée comme professeur pour enseigner la médecine dans une université du Québec. Ce permis ne peut dépasser la durée de l'engagement de cette personne comme professeur".

Si cette suggestion semblait inacceptable, une autre pourrait être une possibilité qui consisterait à augmenter à cinq ans la durée de la validité du permis temporaire.

Le dernier point concerne la composition du bureau. Le projet de loi prévoit que le bureau sera formé de vingt membres élus par les médecins de leur district et de quatre membres désignés par le lieutenant-gouverneur en conseil. Or, l'actuelle Loi médicale stipule que chaque faculté de médecine désigne un membre du bureau provincial de médecine. Les doyens des facultés de médecine ont toujours pensé que cette participation des facultés, étaient à l'avantage réciproque des deux parties et ils auraient souhaité qu'elle soit maintenue dans la nouvelle Loi médicale. En somme, de nouveau ici, le doyen propose un ajout qui voudrait qu'un autre administrateur soit désigné par chaque université ayant un programme d'études médicales conduisant au diplôme de m.d.

En conclusion, les doyens des facultés de médecine espèrent que le code des professions et la nouvelle Loi médicale établiront le partage des responsabilités entre les universités et la corporation, les premières ayant un mandat d'enseignement, de recherche et de participation aux services; la seconde ayant un mandat de contrôle de la qualité des soins, de la compétence des personnes autorisées à exercer la médecine.

Ils espèrent aussi que les modalités d'octroi du permis d'exercice ne compromettront pas le recrutement de professeurs étrangers et ils souhaitent que la nouvelle Loi médicale leur permettra de continuer à participer aux travaux du bureau de l'ordre des médecins.

Les comités des doyens désirent, en terminant, remercier tous les membres de la commission et le ministre des Affaires sociales de leur bienveillante attention.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous pourriez présenter les membres de votre commission, s'il vous plaît?

M. BOIS (Pierre): A ma droite, le vice-doyen Cronin, de l'université McGill; à ma gauche, le Dr Gilles Pigeon, doyen de la faculté de médecine de Sherbrooke; le Dr Jean-Marie Lemieux, vice-doyen à l'université Laval.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay.

M. CASTONGUAY: M. le Président, d'abord, je voudrais remercier les doyens de ce mémoire qu'ils nous présentent. La première question m'apparaît extrêmement importante et je pense que je dois l'adresser, en fait, ou obtenir une réponse de chacun des membres du comité.

Nous savons qu'à l'intérieur des universités, les diverses facultés, surtout celles qui conduisent à des activités de nature professionnelle telles que celles que nous discutons ce matin sont généralement un peu tiraillées entre les exigences du fonctionnement de l'université, l'établissement des programmes par l'université, l'équilibre entre l'allocation des ressources, etc., et aussi d'autres exigences externes qui proviennent du caractère professionnel des activités en cause. La question qui m'apparaît extrêmement importante c'est de savoir si ce mémoire a été approuvé par le conseil de chacune des quatre universités ou si c'est un mémoire qui provient plutôt du comité des doyens. Je pense qu'il me faut obtenir une réponse de chacun de vous parce que, si c'est un mémoire qui ne provient que du comité des doyens, je crois qu'il prend une signification très différente.

M. BOIS (Pierre): Ce mémoire a été préparé par le comité des doyens et chaque doyen en a discuté dans sa faculté, au niveau du conseil de sa faculté. Pour ce qui a trait à l'Université de Montréal, copie de ce mémoire a été transmise au secrétaire général. Je ne crois pas qu'il ait été approuvé de façon formelle par le conseil de l'université. D'autre part, il n'y a pas eu de contrainte émanant du secrétariat général à cet égard. Peut-être que, dans le cas des autres facultés, cela a été approuvé.

M. PIGEON: M. le Président, à Sherbrooke également, après avoir discuté de ce mémoire auprès du cabinet du doyen, du conseil de la faculté, je ne crois pas que ce mémoire ait été présenté au conseil d'administration de l'Université de Sherbrooke.

M. LEMIEUX: A l'université Laval le mé-

moire a été présenté vendredi dernier au conseil de la faculté de médecine par le doyen.

M. CRONIN: A l'université McGill, M. le Président, le rapport a été approuvé au sein du conseil de la faculté et cela a été envoyé au principal de l'université qui l'a approuvé lui-même.

Cela a été discuté au conseil des doyens des universités, mais cela n'a pas été discuté formellement devant le sénat de l'université.

M. CASTONGUAY: La raison pour laquelle je pose cette question, ce n'est pas dans le but de créer des difficultés mais c'est en plus de ce que j'ai mentionné précédemment. C'est que j'ai reçu copie d'un avis du Conseil des universités adressé au ministre de l'Education et qu'il prend des positions quelque peu différentes.

C'est un mémoire que je ferai circuler parmi les membres de la commission ici lorsque viendra le Conseil des universités. En fait, nous pourrons communiquer avec lui et je ne crois pas qu'il ait d'objection. C'est un organisme officiel, normalement, ces avis deviennent publics et je crois que l'avis du Conseil des universités devrait être communiqué aux membres de cette commission.

La raison pour laquelle je souligne aujourd'hui ce fait, c'est qu'il y a une différence d'approche assez considérable entre les deux. Peut-être y aurait-il avantage à ce qu'une fois le mémoire du Conseil des universités connu, une fois connu le mémoire du Comité des doyens, je sollicite une opinion des conseils des universités également, de chacune des universités respectives. Tout ceci dans le but d'éliminer toute équivoque possible sur cette question. Vous comprendrez qu'il est assez difficile pour nous d'essayer d'analyser quel peut être... Il nous faut, il me semble, avoir plutôt une opinion qui ne peut être sujette dans notre esprit à des doutes quant à la position précise du conseil de chacune des universités parce qu'il y a là un problème assez important.

C'était donc la raison de cette question.

D y aurait un petit point que je voudrais mentionner avec la permission des membres, même si le but de la commission est ici de poser des questions, mais il s'agit de la question de l'agrément des établissements d'enseignement; je le répète, parce qu'il semble que le même malentendu existait lorsque le Collège des médecins nous a présenté son mémoire.

Dans la loi 65, la procédure pour l'agrément des établissements dits d'enseignement est précisée. Il s'agit d'une procédure qui prévoit un contrat d'affiliation entre une institution d'enseignement et un établissement qui donne des services, un hôpital pour le cas en cause ici, et ce contrat ou cette affiliation doit être approuvée par la suite par le ministre des Affaires sociales et le ministre de l'Education, étant donné — c'est la raison fondamentale — que la reconnaissance du fait qu'un établissement est un établissement d'enseignement implique évidemment des immobilisations, des dépenses de fonctionnement à un niveau très différent que s'il s'agit d'un établissement régulier. Alors, c'est la raison pour laquelle ces dispositions ont été proposées dans le bill 65 et sont maintenant dans la loi 65.

L'autre question que j'aimerais adresser, je crois bien que c'est la dernière, M. le Président, a trait au permis temporaire. Parce que nous avons ici des dispositions qui sont tout simplement transposées de la loi 64 qui a été approuvée l'an dernier et le bill 40 qui est venu préciser certains points qui ont trait à l'octroi de permis temporaires à des professeurs qui ne sont pas citoyens canadiens, comme il s'agit d'une loi qui a été approuvée en décembre 1970, si ma mémoire est bonne, qu'il y a possiblité de prolonger, par voie d'arrêté en conseil, la durée de l'engagement d'un professeur qui ne remplit pas les conditions fixées à l'article 28, j'aimerais savoir dans les faits, très concrètement, quel type de difficultés ceci pose. Parce qu'il ne faut pas oublier, d'autre part, que l'esprit général du bill 64, également le fait que dans les autres universités canadiennes il n'y a pas si longtemps, un cri d'alarme général a été lancé il y a deux ou trois ans indiquant que nos universités comptaient un nombre toujours plus élevé de professeurs étrangers, de professeurs américains, entre autres, et qu'il y avait là une situation qui ne pouvait être ignorée, et cela a fait l'objet de débats beaucoup plus aigus, par exemple, en Ontario qu'ici au Québec, il n'en demeure pas moins qu'il y a là une situation qui ne peut être ignorée.

Alors, dans cette recommandation que vous faites, j'aimerais voir concrètement quels problèmes précis les dispositions du bill 64 et, particulièrement compte tenu du fait que la durée de l'engagement peut être prolongée lorsque l'intérêt public le requiert, dans les faits, quelles difficultés ces dispositions ont donné lieu.

M. BOIS (Pierre): La disposition par l'arrêté en conseil nous semblait un moyen assez lourd...

M. LE PRESIDENT: Un peu plus fort s'il vous plaît, les membres de la commission sont...

M. BOIS (Pierre): H nous semblait que ce permis pour une année lui donnait un délai relativement court dans le cas du recrutement d'un professeur étranger si, par la suite, on dit à ce professeur venant de l'extérieur: II faut maintenant un arrêté en conseil pour que vous puissiez demeurer à l'université. On trouvait que c'était une condition assez difficile. Premier point.

Deuxième point. Nous avons un certain nombre de professeurs étrangers dans nos facultés — je ne me souviens pas du nombre exact — mais approximativement je pense qu'il doit être

de l'ordre de 75 à 80 pour les quatre écoles de médecine. Dans l'immédiat, il y a, pour les fins du recrutement dans certaines spécialités, des difficultés sérieuses. Je ne pense pas que ce soit dans l'esprit de la recommandation du comité des doyens de voir un recrutement massif important ou considérable, mais plutôt de pouvoir attirer, le cas échéant, quelques professeurs lorsque nous en avons absolument besoin. C'est pour cette raison que le proviso du début de l'article était aux fins des besoins de l'enseignement qui le requiert.

M. CRONIN: M. le Président, est-ce que je pourrais ajouter quelques mots? Ce recrutement dont M. Bois parlait tantôt, il s'agit toujours de recrutement dans les spécialités où il existe à l'heure actuelle une pénurie d'enseignants à l'intérieur de la province. Souvent il s'agit des spécialités de laboratoire et pour nous spécialement à l'université McGill, il est difficile de convaincre des candidats venant de l'extérieur de la nécessité au sein d'une université anglophone d'apprendre le français dans la courte période d'une année, spécialement en ce qui concerne les enseignants dans la spécialité de pathologie, par exemple, où la clientèle, évidemment, ne parle ni l'anglais ni le français.

Elle parle peut-être une langue morte.

C'est pour cette raison que nous appuyons fortement cet amendement au projet de loi et nous avons l'impression que ça ne posera pas une concurrence envers les candidats à l'intérieur de la province.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous des commentaires? Non. Alors, M. Cloutier.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez suggéré des précisions et des modifications à certains articles de la loi et vous disiez même, pour justifier cette demande de précisions: "II doit être précisé clairement que l'ordre des médecins — vous voulez faire un "départage" — est un organisme de normes et d'agrément et que la préparation et l'exécution des programmes d'enseignement à tous les niveaux relèvent de la compétence des universités, de même que l'admission des candidats aux études médicales et leur évaluation."

Actuellement, avant l'adoption du code des professions, est-ce aussi précis que ça? Est-ce que le "départage" se fait très bien entre l'ordre des médecins et les facultés de médecine dont vous êtes les doyens?

M. BOIS (Pierre): Bien, c'est assez précis en effet, à savoir que les programmes au niveau pré-m.d., par exemple, sont préparés, déterminés par la faculté de l'université et ils sont approuvés au niveau du collège. Nous croyons que, pour certaines autres étapes de la situation des études médicales, par exemple celle qui concerne les internes et les résidents, de la même manière que les universités et le collège sont conjoints dans l'approbation des milieux de formation... Il y a ici un article qui est un peu nouveau, c'est pour ça que nous sommes venus. C'est que la responsabilité au plan de la formation des internes et résidents date de deux ans à peine au niveau de l'université. En somme, il a fallu retrouver des moyens de travail lorsque le collège a donné aux facultés l'entière responsabilité de l'aspect académique de la formation des résidents.

Mais le collège conserve les mêmes responsabilités au plan des normes de compétence. Alors, il n'y a pas beaucoup de différence entre la situation actuelle et celle qui est proposée ici, ce n'est que sa confirmation somme toute.

M. LE PRESIDENT: M. Guay, une autre question à poser? M. Burns? Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui ont des questions à poser aux doyens? Alors, MM. les doyens, je vous remercie.

J'invite la Fédération des médecins omnipra-ticiens du Québec.

Fédération des médecins omnipraticiens du Québec

M. HAMEL: M. le Président, permettez-moi de vous présenter les autres représentants de notre fédération: à ma droite, le vice-président, le Dr Paul Bertrand, le Dr Gilles Desrosiers, Me Chapados, conseiller juridique, le Dr Czytrom et le Dr Dollard Larouche.

M. le Président, messieurs les ministres, messieurs les membres de la commission, nous n'avons pas l'intention de lire...

M. LE PRESIDENT: Vous êtes le Dr Gérard Hamel.

M. HAMEL: Oui.

M. LE PRESIDENT: C'est pour le journal des Débats.

M. HAMEL; La prochaine fois, je m'en souviendrai.

Nous n'avons pas l'intention, M. le Président, de lire notre résumé ni les extraits de notre mémoire. S'il vous agrée, nous préférerions en premier lieu exposer sur le code des professions et la Loi médicale certaines considérations d'ordre général qui sont de nature à mieux situer et à mieux faire comprendre les suggestions et la recommandation que nous avons faites.

En second lieu, nous aimerions compléter les informations ou donner des arguments supplémentaires sur le sujet de la substitution des médicaments. Finalement, toujours à l'occasion de l'étude sur la Loi de pharmacie, nous aimerions exposer un des problèmes que pose la dispensation des médicaments par les médecins.

En ce qui concerne le bill 250 et le bill 252, c'est-à-dire le code des professions et la Loi

médicale, à la table des matières de notre mémoire, dans la section A, nous avions deux parties: une partie touchait la constitution des comités de discipline et d'inspection professionnelle, la nomination des syndics. Ces questions sont évidemment du ressort des corporations; nous avons appris qu'elles avaient été traitées avec beaucoup de compétence par l'ordre des médecins et nous avons l'intention de passer outre.

Les autres sujets, depuis l'instruction de la plainte, décisions et sanctions du comité de discipline, droit d'appel, dossier du professionnel, cotisation, états incompatibles avec l'exercice d'une profession, radiation possible du professionnel peuvent apparaître aux membres de cette commission comme bien secondaires relativement à l'importance d'autres problèmes.

Cependant, l'ensemble de ces questions constitue un élément très important des droits fondamentaux des professionnels en tant qu'individus et citoyens. C'est pour ça que nous avons traité chacun de ces cas très consciencieusement dans le but d'obtenir, de réaliser un équilibre entre les pouvoirs de l'Etat, les responsabilités des ordres professionnels et évidemment les droits des individus.

Dans la section B nous avons traité des juridictions respectives des ordres et des associations professionnelles. Nos remarques n'ont pas été le fruit de théories sociologiques ou politiques. Elles ont été le résultat de l'expérience pratique bien particulière acquise par notre fédération depuis dix ans dans ses rapports avec d'autres associations professionnelles et les corporations correspondantes. Nous avons été fortunés, en effet, d'assister ou de participer à la naissance des syndicats de plusieurs professions ou catégories professionnelles, notamment les ingénieurs, les médecins spécialistes, les médecins résidents, les pharmaciens, les dentistes, les optométristes, les opticiens d'ordonnance, les médecins vétérinaires et j'en oublie sûrement. Dans la plupart de ces cas nous avons été à même d'assister à des malentendus, des accrochages entre les syndicats naissants et les ordres professionnels en place.

H serait bien difficile d'évaluer combien de temps et d'énergie ont été gaspillés, combien de luttes stériles ont été livrées faute d'une délimitation claire et nette des juridictions respectives des ordres professionnels et des associations représentatives. C'est pourquoi nous avons fait des représentations et des recommandations dans ce mémoire à l'effet d'éliminer d'une façon définitive les ambiguïtés qui peuvent persister dans les champs d'activité respectifs des ordres professionnels et des corporations.

Le gouvernement a reconnu aux syndicats le droit de représenter les professionnels et de négocier pour eux. Pourtant, le projet de loi 250 confie des pouvoirs aux ordres dans des domaines tels que la fixation des tarifs d'honoraires et la même remarque s'applique pour la Loi médicale où le projet de loi accorde juridiction aux ordres en ce qui concerne les caisses de retraite et d'assurance-groupe. Ces domaines sont le prolongement de la négociation des tarifs d'honoraires et relèvent directement de la juridiction des associations représentatives.

Ceci constitue en fait un peu le résumé de notre motivation à présenter les différentes suggestions et recommandations contenues à ce sujet-là. En ce qui concerne la Loi de pharmacie, la question de la substitution des médicaments, nous avons écrit dans notre mémoire qu'aucune substitution ne doit être effectuée sans l'autorisation des médecins et ce, dans l'intérêt premier du malade.

A l'appui de cette affirmation, nous aimerions signaler, dans une liste, bien que sommaire, très significative, les contre-indications à la substitution. Nous sommes près des malades; nous sommes près des familles et certains aspects de l'exercice médical nous ont fait percevoir plus facilement les contre-indications, par exemple, psychologiques. Dans certains cas, la maladie ou l'entité pathologique dont souffre un malade ne doit pas être connue de ce malade. Il faut éviter que ce dernier puisse diagnostiquer sa maladie par l'identification du médicament à l'aide de caractéristiques physiques, telles que la couleur ou la forme.

Nous avons aussi les contre-indications familiales. Pour deux membres d'une même famille, il peut s'avérer important de fournir le même médicament sous des formes différentes si l'on veut éviter de dévoiler la situation dans des cas de troubles psychiques en particulier.

Il y a aussi des contre-indications pratiques ou cliniques. Une certaine expérience pratique dans l'utilisation de certains médicaments peut ajouter à l'efficacité thérapeuthique. Un médecin plus familier avec un médicament peut déceler plus facilement les effets secondaires, les troubles d'absorbtion. Il y a intérêt alors à prescrire toujours le même médicament. Le principe s'applique, par exemple, à des anticoagulants, à des stéroides.

Il y a même des contre-indications financières. Plus un médecin est familier, par exemple , avec un anticoagulant donné, moins il aura besoin de recourir à des épreuves de laboratoire de façon fréquente, de façon à évaluer la concentration sanguine de son médicament. Alors, avec tel médicament, il pourra diminuer les coûts de laboratoire. Il y a des économies qui sont apparentes, qui sont fictives. Si, pour traiter une maladie X, j'utilise un médicament A, une posologie de quatre comprimés par jour, et si le pharmacien y substitue un médicament B pour obtenir la même efficacité thérapeuthique, malgré l'équivalence, nous devons doubler la dose à huit par jour; à ce moment-là, le coût est plus grand et nous doublons aussi les risques des effets secondaires. Ceci a été apprécié très souvent par les médecins spécialistes, les médecins omnipraticiens, lorsqu'ils ont traité leurs patients avec des stéroïdes, en particulier.

Finalement, il faut tenir compte du coût social du médicament, qu'on oublie trop souvent. Il est quelquefois plus rentable de prescrire un médicament cher. Nous le disions, il y a quatre ans, au congrès des affaires québécoises et nous le répétons aujourd'hui, si un malade retourne au travail plus rapidement, après l'utilisation d'un tel médicament, un profit social net s'ajoute à l'avantage individuel constitué par la réduction, la perte de salaire. Il faut distinguer souvent entre la théorie et la pratique. Nous avons connu des professeurs d'université — ce ne sont pas nécessairement ceux qui m'ont précédé ici — qui prescrivaient l'utilisation de certaines combinaisons de médicaments, mais ils étaient les premiers à s'en servir dans l'espérance de guérir plus rapidement un malade important, comme, par exemple, un député ou un ministre.

Je suis convaincu que chacun des membres de cette commission, un jour, sera bien aise de s'adresser aux pharmaciens avec l'assurance d'obtenir le médicament prescrit par le médecin en toute connaissance de cause. Ceci n'est évidemment qu'un résumé des contre-indications à la substitution et c'est simplement à l'appui de notre succincte recommandation à l'effet qu'aucune substitution ne doit être effectuée sans l'autorisation du médecin.

Sur le troisième point, il s'agit de la dispensation des médicaments par les médecins. Je voudrais au départ faire une mise au point. La très grande majorité des médecins omniprati-ciens du Québec de même que la fédération ne sont intéressés d'aucune façon à ce que les médecins développent cette fonction secondaire de distribuer des médicaments. Il y a déjà une pénurie d'omnipraticiens. Ceux-ci ont de la difficulté à satisfaire les besoins de la population en fournissant des soins généraux au cabinet, à domicile, à l'hôpital. Il va de soi que nous n'avons pas l'intention de concurrencer les pharmaciens. Cependant, il n'en reste pas moins qu'en milieu rural, par exemple, où il n'y a pas de pharmacien, les médecins dont obligés de distribuer ou d'administrer des médicaments, de distribuer les médicaments de main à main. Tous les médecins omnipraticiens, la grande majorité des médecins spécialistes administrent des médicaments d'urgence par voie injectable, par voie orale et ceci demeure quand même une fonction secondaire mais importante assumée par les médecins.

Or, nonobstant l'article 33 du projet de loi médicale et l'article 16 du projet de loi sur la pharmacie; en vertu des articles 18 et 39 b) de cette même loi, et surtout en vertu du bill 69, les médecins qui administrent des médicaments, s'ils veulent être remboursés, en particulier en ce qui concerne le bill 69, par la régie, dans le prochain régime d'assistance-médicaments, devront s'inscrire à l'ordre des pharmaciens. Comme tous les médecins auront un jour ou l'autre à dispenser des médicaments, à administrer des médicaments, soit d'une façon d'urgence, soit d'une autre façon, ceci veut dire que tous les médecins sont soumis à l'obligation de s'inscrire à l'ordre des pharmaciens pour administrer des médicaments.

L'an passé, à pareille date, le Dr Desrosiers qui représentait la Fédération des médecins omnipraticiens avait argué, en utilisant évidemment le rapport Castonguay, comme bien d'autres le font souvent, qu'aucune profession ne saurait en maintenir une autre en tutelle sous peine de conflit d'intérêts. La commission McRuer avait déjà souligné qu'il était injuste de déléguer à des organismes d'une province le droit de réglementer ou de contrôler les affaires d'une autre profession dont les membres ne peuvent pas participer à l'élaboration des règles qui les gouvernent ni à l'administration de leurs propres affaires.

D'autre part, nous avions recommandé que le contrôle des médecins qui distribuent des médicaments s'effectue en vertu de la nouvelle Loi médicale ou par des dispositions particulières prévues dans les conventions. Nous avons eu dernièrement un mémoire du Collège des médecins et l'ordre des médecins réclame dans son mémoire le pouvoir de participer à la préparation de la liste des médicaments. Sans doute, par conséquent, sans contrôler l'utilisation par les médecins.

L'an passé, à pareille date, nous nous demandions même par quelle logique on pouvait soutenir que la distribution de médicaments administrés par une voie, par un médecin par exemple, par voie d'injection, doit être soumise au contrôle d'une corporation alors que la distribution du même médicament par une autre voie, par le même médecin, doit être soumise au contrôle d'une corporation différente.

Si un médecin, actuellement administre par voie d'injection un antibiotique, il n'est pas soumis à l'ordre des pharmaciens et il peut le devenir s'il administre le même médicament par voie orale.

De toute façon il y a plusieurs problèmes que nous avons touchés, mais il y en a un qui est aigu, c'est celui qui impose, par le bill 69 et qui est confirmé par les articles 18 et 39 b) du projet de loi sur la pharmacie, l'obligation au médecin de s'inscrire au collège des pharmaciens s'il veut dispenser des médicaments et être remboursé par la régie lors du prochain régime d'assistance médicale. Alors voici succinctement, M. le Président, les remarques que nous voulions faire.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier d'abord la Fédération des médecins omnipraticiens pour le mémoire qu'elle nous a présenté. Comme le Dr Hamel l'a mentionné, il s'agit d'un mémoire qui est précis et qui soulève des questions extrêmement im-

portantes et intéressantes. J'aurais, en fait, deux ou trois questions à poser.

En ce qui a trait à la fixation des tarifs d'honoraires pricipalement — je n'entrerai pas dans les autres questions, je crois qu'elles y sont reliées, l'arbitrage des comptes, fonds d'indemnisation, etc. — par certaines corporations professionnelles, je crois qu'il y a une distinction assez importante qui doit être faite. Lorsqu'il y a négociation d'une convention collective ou d'une entente déterminant quelles seront les conditions de rémunération pour les services rendus, soit par un groupe de médecins ou une autre catégorie de professionnels, il y a un certain équilibre qui s'établit, c'est-à-dire équilibre entre le syndicat et le gouvernement; les processus normaux de négociation s'établissent. Lorsqu'il n'y a pas une telle entente, que nous discutons de services professionnels soit dans le domaine de la santé ou un autre secteur — parce qu'il ne faut pas oublier qu'il y a d'autres groupements intéressés à tout cet ensemble de lois — lorsqu'il n'y a pas d'entente, à ce moment-là l'équilibre entre un syndicat... la contrepartie du syndicat n'existe pas. Les services sont rendus sur une base individuelle à des clients qui s'adressent aux membres de la corporation. C'est la raison pour laquelle nous proposons dans cette législation que, lorsqu'il n'y a pas une telle entente, les tarifs soient établis par la corporation professionnelle et que ces tarifs soient soumis à l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil, de telle sorte que ces tarifs s'établissent à un niveau raisonnable. Dans ce sens nous croyons qu'il y a là un certain équilibre qui s'établit, qui est plus logique, qui est plus sain que si cette fonction était donnée à un ou des syndicats, parce qu'il ne faut pas oublier aussi que dans certains secteurs professionnels plus d'un syndicat existe.

Alors je saisis mal, en fait je ne comprends pas tout à fait les remarques qu'a faites le Dr Hamel à ce sujet-là et je crois bien que, malgré le fait qu'on cite des choses que j'ai déjà dites, ces choses n'entrent pas en contradiction avec ce qui est proposé dans le projet de loi, étant donné les distinctions que je fais.

J'aimerais savoir en quoi cette pratique qui a été suivie dans bien des cas dans le passé, dans bien des corporations professionnelles, ne s'est pas avérée un mécanisme raisonnable.

D'autant plus que maintenant, en plus du lieutenant-gouverneur en conseil, l'Office des professions va agir à titre de conseiller auprès du gouvernement et va exercer un certain rôle de surveillance générale, ce qui n'est pas le cas présentement.

M. HAMEL: Evidemment, le problème se pose peut-être moins pour la profession médicale que pour d'autres professions, nous le reconnaissons. Cependant, pour les raisons que nous avons exprimées tout à l'heure, nous sommes sensibles à l'harmonie qui doit régner aussi entre les associations et les corporations de toutes les professions. C'est une loi qui va s'appliquer à un grand nombre de professions.

Il est entendu qu'en ce qui nous concerne, le secteur conventionné est tellement important que la médecine libérale demeure marginale actuellement en ce qui concerne la profession médicale. Il existe d'une part des médecins non participants qui sont obligés par la loi et par l'entente de déclarer à leurs malades qu'ils sont non participants; donc les malades sont bien avertis et ils peuvent négocier directement avec le médecin en toute connaissance de cause. D'autre part, il reste très peu d'actes qui ne sont pas couverts par le régime d'assurance-maladie parce que le régime vise à couvrir tous les soins qui sont médicalement nécessaires. Nous sommes d'accord, mais pour la profession médicale, nous verrions d'un mauvais oeil qu'on cherche à limiter l'exercice des droits de négociation au secteur conventionné, en ce sens que, lorsqu'il n'y a pas de convention, lorsqu'il n'y a pas de négociation pour des services rendus, nous tombons dans l'exercice libéral de la médecine où à ce moment-là il y a entente directe individuelle entre le client ou le patient et le professionnel concerné.

D'autre part, si pour d'autres professions le secteur conventionné n'était pas tellement important ou n'existait pas et que le gouvernement décidait ou avait l'intention, de façon directe ou indirecte, de déterminer des tarifs d'honoraires plutôt que de déterminer des tarifs d'autorité, je pense qu'il devrait les négocier avec les organismes représentatifs. La tendance actuelle démontre que les membres de toutes les corporations sont ou auront tôt fait de se regrouper en associations représentatives. Rien n'empêche le gouvernement de négocier directement, lorsque les besoins sont nécessaires, avec les associations représentatives plutôt que de demander aux corporations de suggérer des barèmes, des tarifs d'honoraires. Nous avons établi et la commission Castonguay a établi — tout le monde est d'accord — qu'il y a conflit d'intérêts pour les corporations lorsqu'en même temps elles prétendent défendre le public et les intérêts des médecins.

Ce projet de loi place les corporations dans une situation conflictuelle. Ceci est tellement vrai d'ailleurs que l'ordre des médecins, notre corporation, avec l'expérience de ses dix dernières années a manifesté dernièrement ou à plusieurs reprises la volonté de s'éloigner complètement de toute responsabilité touchant la détermination des tarifs d'honoraires, aussi bien que l'arbitrage des comptes.

Nous croyons, nous, que c'est limiter l'exercice des droits au secteur conventionné, les droits fondamentaux des individus, des groupes et des associations d'individus, et que s'il faut déterminer des tarifs, on ne doit pas le faire par voie d'autorité, c'est-à-dire par le lieutenant-gouverneur en conseil; on ne doit pas le faire non plus par la même voie en fait mais indirecte

en demandant à la corporation de nous suggérer des tarifs. On doit s'adresser directement aux associations représentatives parce que, finalement, on en viendra à négocier avec ces associations représentatives. Merci.

M. CASTONGUAY: La deuxième question a trait à la substitution des médicaments. Il y a bien des problèmes dans la question de prescription des médicaments, la consommation des médicaments, et la base de votre argumentation telle qu'on la voit dans votre mémoire repose sur la liberté de prescriptions du médecin.

Justement, au nom de cette liberté de prescription, on trouve une situation présentement où il n'existe en dehors des hôpitaux et dans bien des hôpitaux, aucun formulaire. Il existe aussi — et ç'a été discuté au moment de la présentation du mémoire du Collège des médecins — des pratiques qui contribuent, à mon avis, à accentuer le problème de la surconsommation des médicaments par la population, situation que vous-mêmes aviez d'ailleurs déjà soulevée dans un mémoire antérieur à la commission.

Vous touchez ici uniquement le problème de la substitution, vous ne touchez pas l'autre. Vu qu'il a été discuté avec le collège, je n'y toucherai pas, mais je voulais souligner qu'il n'y a pas seulement ce problème. Vos remarques, à mon sens, sont très pertinentes dans un contexte où il n'existe pas de liste des médicaments bien construite. C'est présentement ce qu'est en voie de faire le Conseil de pharmacologie par rapport à la recommandation du Collège des médecins, celle que vous reprenez, qu'il y ait au sein de ce conseil un représentant de la profession médicale.

J'ai mentionné l'autre jour que le conseil s'est assuré le concours de plus de 100 médecins pour le conseiller dans la fabrication de cette liste, ce qui, à mon sens, est beaucoup plus valable que la présence d'un seul et unique médecin. Ceci souligne en même temps le fait que la connaissance de ce qu'est un médicament, de ses effets, est un problème qui, je l'avoue, est complexe, mais ceci souligne aussi le fait que, de plus en plus, le pharmacien doit devenir le spécialiste de ce qu'est le médicament. Enfin, on doit tendre beaucoup plus vers son rôle de pharmacologue. C'est dans ce sens que l'on se dirige vers une liste de médicaments et, dans ce contexte, je me demande si tous les commentaires que vous avez formulés s'appliquent bien.

La question, en fait, ne peut être évitée, à mon avis. C'est que, dans un tel contexte où une liste est dressée scientifiquement à partir des travaux des divers organismes comme la division des aliments et drogues, et autres analyses qui peuvent être effectuées, jusqu'à quel point les représentations que vous faites demeurent-elles valables? D'autant plus qu'on peut aussi se demander si le médecin est vraiment celui qui connaît le mieux la composition des médica- ments ou s'il connaît plutôt la façon d'utiliser des médicaments spécifiques suite à ses études d'une part, suite aussi, à cause de l'évolution très rapide, aux représentations qui sont faites par les représentants de fabricants de produits pharmaceutiques.

Alors, il me semble que, dans un tel contexte, où une liste est faite de façon très scientifique, où on a consulté un très grand nombre de médecins quant aux effets, vous le soulignez ici, et si cette liste fait les nuances nécessaires, si cette liste donne aussi une certaine gamme de choix, parce qu'il n'est pas dit du tout qu'il doit être nécessairement le médicament au plus bas prix, si cette liste est aussi à la disposition du médecin, de la sorte, une certaine marge de manoeuvre demeure, si vos commentaires s'appliquent toujours.

M. HAMEL: En premier lieu, M. le ministre, permettez-moi de vous dire que nous n'avons pas l'intention de nous substituer aux pharmaciens. Nous reconnaissons la compétence du pharmacien. Nous n'avons pas non plus la prétention d'être des savants dans le domaine de la pharmacologie. Il y a d'autres catégories de professionnels, de médecins, qui en connaissent plus que nous sur le plan scientifique, en ce qui concerne les médicaments. Cependant, les contre-indications que j'ai apportées tout à l'heure étaient fondées sur l'utilisation pratique des médicaments, sur l'appréciation des effets cliniques des médicaments, autant des médecins omnipraticiens que des médecins spécialistes.

Et en ce qui concerne la validité de nos remarques dans le contexte que vous posez, à notre point de vue, elles tiennent toujours. Prenons par exemple les contre-indications pratiques.

Justement, lorsqu'un médecin est familier avec tel médicament — et j'ai donné l'exemple d'un anticoagulant — nous avons certains cardiologues qui sont plus familiers, qui utilisent presque exclusivement tel anticoagulant plutôt que tel autre, à ce moment-là, s'ils sont obligés de changer fréquemment, évidemment ça complique leur thérapeutique, ça complique l'appréciation clinique des effets de ce médicament et ils sont obligés de recourir à plus d'analyses de laboratoire. Pour nous, ce sont là des choses réelles, quelle que soit la qualité de la liste des médicaments.

De la même façon, nous ne contestons pas la compétence du pharmacien mais il peut arriver — en particulier, je l'ai signalé, avec les sté-roides — qu'un groupe de médecins omnipraticiens spécialistes travaillant ensemble dans l'allergie aient remarqué que, pour deux médicaments équivalents sur le plan de la composition chimique, lorsqu'on donnait un tel médicament pour obtenir les effets désirés et qu'on obtenait avec l'autre, il fallait doubler la dose. Donc, même s'il est légèrement moins dispendieux, ça revient plus cher, c'est une économie fictive.

Ces remarques sont valides, quelle que soit la

valeur des médicaments. IL faut ajouter aussi que nous avons — j'aurais peut-être dû le dire au début — toujours eu les meilleures relations possibles avec l'association représentant les pharmaciens. Cette association a d'ailleurs vécu dans les mêmes murs que nous pendant plusieurs années et nous continuons à partager de façon générale les objectifs de cette association. D'autre part, il faudrait aussi vous dire que nous ne sommes pas contre la substitution. Nous sommes en faveur de la substitution mais, nous l'avons dit, sous l'autorisation du médecin, de telle façon qu'un médecin puisse, quand il le juge à propos, pour des raisons telles que celles que j'ai invoquées antérieurement, être sûr que le malade va pouvoir bénéficier du médicament qu'il prescrit, pour des raisons qu'il serait trop long d'expliquer aux pharmaciens par écrit.

Nous sommes en faveur de la substitution, mais sous réserve de la condition que nous avons exposée. D'ailleurs, M. le ministre, vous savez fort bien que vous avez autorisé le conseil consultatif de la liste, je pense, à nous rencontrer. Nous avons rencontré ce conseil consultatif; nous avons accepté de collaborer avec ce conseil. Ce conseil doit nous envoyer un projet de liste que nous allons distribuer à au moins 50 représentants régionaux des omnipraticiens du Québec pour l'étudier pendant un mois avant de rencontrer les membres de ce conseil pour discuter de l'application de cette liste. Donc, nous avons manifesté jusqu'ici la volonté de coopérer encore à une mesure sociale qui est absolument indiquée, qui est nécessaire.

Mais je pense que la conditions que nous apportons n'est d'ailleurs pas éloignée de celle, — j'ai remarqué — du Collège des médecins; c'est peut-être blanc bonnet, bonnet blanc. Le collège demande évidemment que le médecin puisse, à un moment donné, empêcher cette substitution. Nous demandons que ce soit avec l'autorisation du médecin; à toutes fins pratiques, c'est la même chose.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. Castonguay.

M. CASTONGUAY: La dernière question a trait aux activités du médecin dans la distribution de médicaments. Nous proposons que, lorsque le médecin, pour diverses raisons, soit absence d'autres pharmaciens, densité faible de population, etc., agit comme pharmacien, qu'il maintient à toutes fins pratiques une pharmacie d'officine, les règles de contrôle contenues dans la Loi de la pharmacie s'appliquent. D ne s'agit pas de soumettre ou de mettre en tutelle une corporation par rapport à l'autre dans ses activités propres. Il s'agit de distinguer les types d'activité et je crois que c'est un point extrêmement important qu'il faut faire. C'est d'ailleurs ce que nous proposons.

Il y a l'autre partie, le médecin qui, dans la pratique courante de l'exercice de sa médecine, fournit des médicaments. Là se pose une question et nous ne demandons pas ou ne proposons pas que, dans ce type d'activité qui est la continuation de son travail professionnel en tant que médecin, il devienne membre du Collège des pharmaciens.

Mais, la question qui se pose à mon avis, entre les deux, est de savoir si — je l'adresse d'autant plus à mon aise que, justement, comme vous l'avez mentionné, une association a comme mission de représenter les intérêts des médecins, intérêts socio-économiques— dans un tel type d'activité, l'on doit simplement couvrir les frais du médicament fourni et non pas en plus rémunérer pour ce que les pharmaciens appellent l'acte pharmaceutique. A mon sens, il y aurait là une rémunération exagéré et superflue.

M. HAMEL: M. le ministre, en ce qui concerne la distribution des médicaments par ce qu'on est convenu d'appeler les médecins pharmaciens, c'est-à-dire les médecins qui ont une pharmacie, nous convenons qu'ils doivent se soumettre à la juridiction de l'ordre des pharmaciens et obéir aux mêmes règles et aux mêmes contraintes que les autres pharmaciens. Ce ne sont pas d'eux qu'il s'agissait. Il y a encore environ 75 médecins au Québec qui détiennent des pharmacies, en particulier dans des régions reculées. Il ne s'agit pas de ces cas. Il s'agit plutôt de l'ensemble des médecins qui distribuent, par une voie ou par une autre, qui administrent des médicaments qui éventuellement seront remboursés dans un régime d'assistance-médicaments. Il y a deux points à soulever. Le premier point, que nous avons soulevé tout à l'heure, c'est qu'en vertu du bill 69 tel qu'il est libellé actuellement et en vertu des articles 18 et 39 b) du projet de loi sur la pharmacie, les médecins seront obligés de s'inscrire, de payer une cotisation à l'ordre des pharmaciens. Ceci est un point.

L'autre point, que vous soulevez, concerne le prix même des médicaments qui doit être remboursé, ou le coût des médicaments qui doit être remboursé. Nous convenons, avec vous, qu'ils peuvent et même doivent faire l'objet de négociations. C'est entendu que nous convenons que le coût des médicaments qui seront distribués et qui sera remboursé aux médecins par le régime, pourra ou devra faire l'objet de négociations. Nous convenons que ce ne sera pas nécessairement aux mêmes conditions que celles qui auront fait l'objet d'une entente entre les pharmaciens eux-mêmes et le ministère.

M. CASTONGUAY: II y a peut-être une distinction à faire. En ce qui a trait à l'assistan-ce-médicaments nous ne négocions pas avec les pharmaciens le prix des médicaments. Nous négocions le prix d'un acte pharmaceutique. Il n'y aura pas de négociations avec les pharmaciens sur le prix des médicaments. Cela se fait avec les fabricants de produits pharmaceutiques et c'est une opération distincte. Si l'honoraire versé au pharmacien couvre ses frais d'adminis-

tration, son travail professionnel, les frais qu'il peut avoir dans le maintien d'un inventaire, etc., à ce moment-là le prix du médicament ne doit pas contenir d'autres marges. Je ne vois pas en quoi nous devrions négocier avec les pharmaciens dans un tel contexte le prix des médicaments. De la même manière, si ces prix s'appliquent et sont des prix raisonnables et des prix applicables aux médecins dans leurs achats — d'autant plus qu'on sait que les médecins reçoivent des fabricants une certaine quantité additionnelle de médicaments sous diverses formes — je ne vois pas en quoi nous devrions négocier ces prix avec les médecins.

M. HAMEL: D'une part, nous avons convenu, il y a quelques secondes, que la méthode de rembourser les médecins pour le coût des médicaments fournis à un malade par le médecin pouvait être différente de la méthode que vous utilisez pour rembourser les médicaments à la fois aux compagnies pharmaceutiques et aux pharmaciens sous forme d'honoraires. Nous avons très bien compris que vous payez les médicaments aux compagnies pharmaceutiques et que vous pouvez payer les honoraires aux pharmaciens. C'est pour ça, d'ailleurs, que nous avons dit il y a quelques secondes que nous convenions qu'il pourrait y avoir une méthode différente en ce qui concerne le remboursement du coût des médicaments distribués par les médecins.

Nous n'avons pas anticipé, M. le ministre, le résultat de la négociation qui pourrait avoir lieu. Vous nous dites que vous ne voyez pas pourquoi on rembourserait plus que le prix coûtant du médicament. Nous n'avons formulé aucune opinion à cette table-ci en ce moment. Nous n'avons pas voulu anticiper le résultat des négociations.

M. CASTONGUAY: Mais vous supposez qu'il doit y avoir négociation. Je ne vois pas trop pourquoi. Si c'est dans l'activité normale professionnelle du médecin et que le médecin est rémunéré pour son activité, si cela se termine par la remise d'un médicament et que le coût de ce médicament était ce qu'il y avait à négocier.

M. HAMEL: Je ne suis pas prêt à négocier cette question à cette table-ci d'une part et si monsieur le ministre ne croit pas qu'il faille la négocier d'autre part, on se demande de quelle façon les médecins pourront être remboursés du coût des médicaments qu'ils fourniront à leurs malades. Il pourra arriver à ce moment-là, si les médecins ne sont pas remboursés, qu'ils disent tout simplement à leurs malades de se procurer les médicaments où il y en a, c'est-à-dire dans les pharmacies; et dans certains cas, cela pourra être à 10, 15, 20 ou 30 milles. Nous ne le demandons pas actuellement; c'est un service supplémentaire. Il faut bien comprendre et bien se rappeler dans quelle optique je l'ai présenté au début. J'ai dit que la fonction des médecins omnipraticiens était de distribuer des soins généraux au cabinet du médecin, à domicile, dans les hôpitaux, dans les cliniques externes, que cette fonction de distribution des médicaments était une fonction accessoire, secondaire et qu'elle n'était pas concurrentielle, qu'elle était complémentaire en ce moment faute d'effectifs suffisants du côté des pharmaciens. Mais si l'Etat décidait de ne pas rembourser les médecins pour le coût des médicaments, les médecins ne les donneraient plus, c'est tout. Par contre, les malades auraient des problèmes à certains endroits pour se les procurer. C'est tout ce que nous avons voulu dire.

M. CASTONGUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: M. Cloutier.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dr Hamel, je voudrais vous poser quelques questions sur les trois principaux points que vous avez voulu soulever devant la commission ce matin. Je tiens compte aussi des observations que vous avez échangées avec le ministre des Affaires sociales. Sur le premier point, vous avez traité des aires de compétence ou de responsabilité qui relèveraient plutôt des associations que de l'ordre des médecins. Vous avez mentionné particulièrement les tarifs, les caisses de retraite, l'assurance-groupe, les fonds d'indemnisation aussi, je crois.

M. HAMEL: Celui-ci, c'est un peu différent.

M. CLOUTIER (Montmagny): Un peu différent. Vous avez également fait allusion aux difficultés antérieures, difficultés qui ont confronté à un certain moment les associations de médecins. Vous ne faisiez peut-être pas autant référence à la vôtre qu'à l'autre fédération quand vous avez parlé d'énergie dépensée inutilement dans des luttes pour faire reconnaître certaines aires de responsabilité. Je ne sais pas si vous vouliez...

M. HAMEL: Au contraire, M. Cloutier. Je sais que le président de la FMSQ est ici présent. Je pense que notre fédération a eu plus de problèmes avec la corporation que l'autre fédération.

M. CLOUTIER (Montmagny): Plus de problèmes.

M. HAMEL: Parce que chronologiquement, nous avons dû pendant deux ans... Il nous a même fallu deux ans avant d'obtenir la reconnaissance de la Fédération des médecins omnipratriciens en septembre 1963, après deux ans de représentations, justement parce qu'à cette époque le Collège des médecins avait des réticences à recommander au gouvernement la reconnaissance d'une pareille fédération. A cause de la chronologie, nous avons eu plus de

difficultés que l'autre fédération. Je pense aux dentistes, aux ingénieurs pour qui cela dure encore actuellement et qui, après dix ans, ont les mêmes problèmes...

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous faites état de difficultés qui sont survenues et vous ne voudriez pas que ces difficultés se répètent, autant que possible.

M. HAMEL: C'est cela.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous craignez la façon dont cela est stipulé dans la loi.

Quant à ces points que nous venons de soulever, la fixation des tarifs — je tiens compte de la réponse du ministre cependant au sujet de la fixation des tarifs — vous craignez que cette imprécision ou plutôt la façon dont c'est stipulé dans la loi entraîne des difficultés.

Mais est-ce que vous ne reconnaissez pas tout de même que, par le code des professions, étant donné qu'on touche aux corporations professionnelles, on doit leur indiquer une certaine responsabilité, peut-être pas quant aux modalités d'installation d'une caisse de retraite, aux modalités de gestion d'un fonds d'indemnisation, mais tout de même que l'Office des professions et les ordres et corporations professionnelles s'assurent, se rendent compte et vérifient si en pratique ces mécanismes-là sont bien en place et protègent le public. Parce que, les corporations professionnelles, ce que les pouvoirs que l'Etat leur délèguent surtout, c'est de protéger le public. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que, dans les modalités, cela pourrait relever davantage des associations professionnelles mais que la responsabilité de voir à ce que ces mécanismes soient mis en place, fonctionnent bien, ça devrait relever de l'Office des professions?

M. HAMEL: M. le Président, en premier lieu, vous avez sans doute remarqué que nous acceptons d'emblée la presque totalité des suggestions du code des professions. Il est vrai que nous avons laissé à la corporation du Collège des médecins le soin de discuter des questions qui la concernent spécifiquement. Dans l'ensemble nous avons accepté le code des professions. Nos remarques sont en nombre minime et pour une grande partie avaient pour but de défendre les intérêts des professionnels en tant que citoyens. Mais les remarques que nous avons faites en ce qui concerne les juridictions respectives des ordres professionnels et des syndicats, nous les avons faites avec la certitude qu'elles étaient fondamentales à cause de l'expérience que nous avons vécue. Je pourrais facilement prédire aujourd'hui les problèmes — je n'ai pas le mandat de parler d'autres professions — qui vont survenir dans d'autres professions entre la corporation et les associations syndicales si la corporation conserve le droit de déterminer des tarifs ou de suggérer des tarifs au lieutenant-gouverneur en conseil ou même d'arbitrer des comptes parce qu'en arbitrant des comptes, la corporation se trouve à fixer des tarifs d'une façon ou d'une autre, et qui peuvent être utilisés par la partie patronale, par le gouvernement à un moment donné lors des négociations avec les associations représentatives. Ou bien la corporation en fixant les tarifs va prendre partie consciemment ou non pour le gouvernement ou bien pour l'association représentative. L'un ou l'autre. Elle sera dans une situation conflictuelle. Prenons par exemple les caisses de retraite, les assurances-groupe, vous conviendrez avec nous que ceci actuellement fait partie, dans toutes les négociations qui ont lieu entre l'employeur et toutes les catégories de travailleurs, de bénéfices marginaux, c'est-à-dire qui sont le prolongement naturel de la négociation des tarifs d'honoraires. S'ils sont le prolongement naturel de la négociation des tarifs, pourquoi allons-nous les laisser sous la juridiction des corporations? Pourquoi ne pas de façon définitive placer cela avec les honoraires, avec les intérêts économiques, avec les intérêts sociaux, professionnels, économiques et particuliers des différents professionnels ou des membres des différentes professions?

M. CLOUTIER (Montmagny): Là, Dr Hamel, vous prévoyez évidemment la naissance d'autres associations professionnelles, ainsi que vous l'avez dit tantôt, là où il n'en existe pas. Vous avez assisté, vous, à la naissance de plusieurs associations et même peut-être y avez-vous participé d'une façon ou d'une autre, soit comme conseiller ou autrement.

En attendant que ces associations soient créées pour certaines professions et qu'elles fassent le pendant à certaines professions pour justement discuter des intérêts économiques des membres, d'ici ce temps-là quel sera le mécanisme habilité si ce n'est pas le code des professions? Est-ce qu'à l'intérieur de tout cet appareil qu'on est en train d'étudier il devrait y avoir une période, un mécanisme de transition qui pourrait s'assurer que ces intérêts soient discutés dans le cadre où ils doivent être discutés?

M. HAMEL: Dans notre mémoire, en ce qui concerne, par exemple, l'arbitrage des comptes, nous convenons que, dans certaines professions actuellement, c'est encore nécessaire. C'est pourquoi nos recommandations disent que c'est s'assurer que chacune des professions, sauf celles exemptées par la loi... C'est-à-dire qu'aussitôt qu'une profession pourrait être exemptée de cette fonction, on devrait faire une ouverture, prévoir dans la loi une disposition pour permettre aux corporations de se débarrasser de cette responsabilité qui doit être supportée ou assumée par les associations représentatives. Il n'y a ici aucune disposition dans la loi qui permette à une corporation de se débarrasser de

cette responsabilité-là aussitôt qu'une association représentative peut la supporter.

Notre recommandation en ce qui concerne l'arbitrage des comptes est donc positive en ce sens que nous disons: S'assurer que chacune des professions, sauf celles exemptées par la loi... Donc, à mesure que le transfert pourra se faire aux associations représentatives, il se fera automatiquement dans le code des professions.

M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai une autre question. Docteur, on parle des responsabilités qui sont dévolues particulièrement, soit à l'ordre des médecins, soit à votre fédération. On sait que la surveillance, la discipline, la déontologie, cela relève de l'ordre des médecins. Vous, comme fédération, à l'intérieur de l'application des conventions collectives, ces problèmes peuvent aussi vous être soumis par le biais. Disons que vous les voyez passer. Est-ce que vous êtes satisfait des dispositions du code des professions? Je sais que vous n'êtes pas entièrement satisfait. Vous avez dit tantôt que l'Etat devait davantage s'assurer que la discipline soit une responsabilité de la corporation professionnelle et non pas que l'Etat lui-même s'arroge ce pouvoir par des nominations ou par une surveillance trop tatillonne et trop étroite. De toute manière, est-ce que vous êtes satisfait de la façon dont l'ordre des médecins peut actuellement s'acquitter de cette obligation de surveillance, peut faire fonctionner son comité de discipline à l'endroit des omnipraticiens? Je ne dis pas "veut", voudrait l'exercer, mais "peut" l'exercer.

M. HAMEL: Vous vous rendez sûrement compte, M. le Président, que vous voudriez me faire porter un jugement de valeur sur l'ordre des médecins. Je ne peux sûrement pas le faire. Je voudrais quand même faire écho à des représentations qu'ils ont faites souvent, c'est qu'ils manquaient des pouvoirs pour assumer parfaitement, comme ils auraient voulu le faire, leurs responsabilités. Je pense donc que l'appréciation de l'ordre des médecins revient à tous les médecins, ce n'est pas à moi de le faire actuellement.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est justement la réponse que j'attendais, docteur, parce que l'ordre des médecins nous a dit, lors de sa comparution devant la commission, qu'il était désireux d'exercer complètement cette responsabilité; il a exprimé le désir qu'on lui fournisse les mécanismes et qu'on lui laisse la marge d'autonomie nécessaire pour exercer cette responsabilité qu'il veut assumer.

M. HAMEL: Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je pense bien que les autres corporations professionnelles, les autres ordres de professionnels qui vont venir devant la commission, — je ne veux pas le présumer mais je l'imagine — nous feront aussi la même affirmation. C'est pour cela qu'il est important que le code des professions stipule clairement qu'il donne ce pouvoir aux corporations professionnelles, qu'il le leur donne ou qu'il ne le leur donne pas. L'ordre des médecins nous a même mentionné qu'il préférait peut-être abandonner le tout et ne pas assumer de responsabilité à l'intérieur du code des professions s'il n'a pas les mécanismes et les outils voulus. J'espère que j'interprète bien le sens des déclarations qu'ils ont faites devant la commission.

M. HAMEL: La meilleure façon de répondre à cette question, ce serait pour moi de dire que, de façon générale, nous sommes d'accord sur les demandes de la corporation, de l'ordre des médecins, sous réserve de toutes les recommandations que nous avons faites aux sections A et B de notre mémoire, en particulier l'introduction de la plainte, l'instruction de la plainte; le droit d'appel, le dossier du professionnel, la radiation.

Toutes ces questions-là sont des questions techniques. Là-dessus, nous pouvons avoir, sur des questions de détail, certaines différences d'opinions avec l'ordre des médecins. C'est d'ailleurs pourquoi nous les avons soulignées.

IL faut bien comprendre que, de la même façon que l'Etat veut participer davantage au développement social et aux structures d'organisation et veut maintenir sa présence — comme on l'a senti dans le code des professions — de la même façon aussi les ordres professionnels désirent obtenir plus de pouvoirs pour assumer plus facilement leurs responsabilités. Mais nous, qui représentons les membres, nous essayons de tracer des limites dans l'exercice de ces pouvoirs, de façon à mieux protéger ces professionnels, je le répète, en tant qu'individus et en tant que citoyens. Qu'ils aient les mêmes droits lorsqu'ils seront, par exemple, traduits devant un tribunal de discipline, qu'un autre citoyen possède lorsqu'il est traduit devant un autre tribunal. Il ne faudrait pas que les professionnels soient moins bien traités que les autres. Sous réserve de ces remarques, dans l'ensemble, nous sommes d'accord sur les recommandations du Collège des médecins.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez parlé de certaines divergences d'opinions avec l'ordre des médecins sur certains points. Cela m'amène à vous poser la question suivante: Est-ce que vous considérez que la représentation de votre groupe, la représentation des omnipraticiens au sein de l'exécutif, si vous voulez, des gouverneurs, du "board" — si vous me permettez l'expression — du collège, de l'ordre des médecins, est suffisante ou s'il faudrait faire une répartition peut-être un peu différente?

M. HAMEL: Je pense, j'aillais dire, M. le

ministre, à l'époque où vous l'étiez, vous voulez faire écho à certaines critiques que nous avions faites à ce moment-là. Il est vrai que nous avons pendant longtemps été très peu représentés au bureau des gouverneurs et pas du tout à l'exécutif, mais actuellement, nous le sommes.

M. CLOUTIER (Montmagny): Au sujet de la substitution des médicaments, c'est un problème extrêmement important. Depuis que cette commission siège, à quelques reprises nous en avons traité. L'ordre des médecins, dans son mémoire, reconnaissait aux pharmaciens, on allait même jusqu'à dire sans aucune restriction, la compétence dans l'évaluation de la qualité des médicaments. Tenant compte des observations qui ont été faites, il y a un instant, par vous-même, et pat le Dr Hamel, et des réponses du ministre des Affaires sociales, est-ce que vous soutenez que, d'un côté, l'ordre des médecins aurait peut-être dû nuancer davantage cette affirmation, si l'on tient compte de vos remarques, à la page 43 de votre mémoire, à l'article 4.4 et à l'article 4.5 particulièrement?

A l'article 4.4, vous dites: "Le médecin peut avoir des raisons spécifiques de prescrire tel médicament plutôt que tel autre réputé équivalent — entre parenthèses, le type d'enrobage ou le véhicule de médicament, etc. — Le médecin qui prescrit agit en fonction des besoins de son malade".

Et à l'article 4.5, vous dites: "Soulignons également que l'ordonnance est signée par le médecin qui, de ce fait, est responsable vis-à-vis de son malade des effets du médicament prescrit. La responsabilité du médecin étant ainsi directement engagée, nous considérons qu'aucune substitution ne doit être effectuée sans l'autorisation du médecin et ce, dans l'intérêt premier du malade".

Alors, il semble y avoir, à première vue, d'un côté, du côté de l'ordre des médecins, une reconnaissance inconditionnelle et sans restriction de la compétence du pharmacien en matière de l'évaluation de la qualité du médicament. D'autre part, vous semblez — la Fédération des médecins omnipraticiens — nuancer davantage cette affirmation et elle irait même à l'extrémité opposée.

Voulez-vous faire des commentaires, docteur?

M. HAMEL: J'aurais deux commentaires. D'autre part, le collège recommande que la liste soit établie conjointement par le Collège des pharmaciens et le Collège des médecins. Donc, évidemment, le respect qu'elle a pour le Collège des pharmaciens est limité, quand même, par l'obligation, pour elle, d'être présente lorsqu'il faut confectionner la liste.

D'autre part, il est bien dit dans le mémoire du collège: "Cependant, le collège considère que les réactions chez l'être humain sont au moins aussi importantes que celles qui sont réalisables et étudiées en laboratoire". C'est faire écho aux paroles que je prononçais tout à l'heure.

C'est que les médecins, dans la pratique, sont sûrement compétents pour apprécier les effets cliniques des médicaments. C'est leur responsabilité, quand même, le diagnostic et le traitement de la maladie.

Donc, je ne vois pas beaucoup de différence entre la position du collège et la nôtre. J'y vois plutôt une question de détail, à la page 5 de leur mémoire, où on dit que le professionnel qui s'oppose ainsi à une substitution prévue par l'article 7 peut avoir à fournir à sa corporation les raisons de toute décision, si celle-ci le lui demande. Evidemment, à ce moment-là, la corporation veut éclaircir un contrôle et s'offre à exercer un contrôle à l'égard des médecins qui refuseraient de façon régulière probablement de substituer des médicaments. C'est la seule petite distinction que je vois.

M. CLOUTIER (Montmagny): Mais le point que je voulais surtout faire ressortir, docteur, c'est que vous dites dans votre mémoire qu'aucune substitution ne doit être effectuée sans l'autorité du médecin. Est-ce qu'à ce moment-là ça ne contredirait pas un peu l'affirmation de l'ordre des médecins, à savoir que, sans aucune restriction, il reconnaît la compétence, l'incontestable qualité du professionnel qu'est le pharmacien? Je pose la question parce que cela touche au troisième point. Il y a aussi la distribution des médicaments. Vous avez parlé tantôt de l'enregistrement du médecin au Collège des pharmaciens, vous avez parlé des régions où il n'y a pas de pharmacien, disant que le médecin est peut-être celui qui est le mieux placé pour donner des services à la population du point de vue des médicaments. Vous avez parlé d'une négociation possible. Là-dessus, je pense bien que la négociation n'est pas encore entamée, si j'en juge par la réponse qu'a faite le ministre tantôt sur cet aspect particulier. Ce sont donc des points extrêmement importants, c'est pour ça que je voudrais autant que possible que vous précisiez.

M. HAMEL: Vous avez raison d'exiger cette précision, M. Cloutier, bien sûr, le mot "aucune" est un mot un peu fort. Nous croyons que, dans la pratique, il peut y avoir des modalités qui peuvent permettre la substitution automatique, à moins que le médecin ne l'indique autrement, ce qui reviendrait au même. C'est dans ce sens-là que je parlais tout à l'heure de blanc bonnet et bonnet blanc.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, docteur — vous me pardonnerez ma question, elle est peut-être inopportune — mais ce n'est peut-être pas aussi important sur l'enrobage du médicament ou le véhicule du médicament sur les effets secondaires. Il y a peut-être une différence d'appréciation. Si je comprends bien l'expression "l'enrobage" ou le "véhicule" du

médicament, c'est la façon dont il est apporté aux clients.

M. HAMEL: Vous avez tellement raison que c'est pour ça que nous avons voulu donner des arguments supplémentaires aujourd'hui en apportant des contre-indications supplémentaires à la substitution. Dans tout ceci, je le répète, nous acceptons la substitution sous réserve que les médecins puissent quand même, à un moment donné, pouvoir exiger que ce soit tel médicament plutôt que tel autre qui soit donné à un malade.

M. CLOUTIER (Montmagny): J'imagine que le pharmacien, après avoir fait sa substitution, assume davantage de responsabilité que le médecin qui, à ce moment-là, est dégagé. Il a prescrit un médicament, le pharmacien en fait une substitution sans consulter le médecin; j'imagine donc que la responsabilité du pharmacien est davantage engagée que celle du médecin qui se trouve dégagé. Est-ce que c'est comme ça qu'on doit faire le raisonnement?

M. HAMEL: Je comprends que le pharmacien a des responsabilités, mais le médecin a aussi des responsabilités en ce qui concerne le traitement des malades. Si on lui change ses médicaments, surtout sans qu'il le sache, il est bien sûr qu'il sera surpris à un moment donné du résultat. C'est absolument impensable que la substitution puisse s'appliquer de cette façon-là.

Nous sommes en faveur d'une possibilité de substitution mais limitée au moins dans les cas où le médecin juge, pour la santé du malade, qu'il est nécessaire que tel médicament bien précis soit donné, à l'exclusion de tout autre.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans les régions, docteur, où il y a les services des pharmaciens, dans les régions dont la population est suffisamment dense, où ç'a incité des pharmaciens à s'installer et à rendre des services à la population, est-ce que, vous diriez que le médecin omnipatricien devrait abandonner la distribution des médicaments?

M. HAMEL: M. Cloutier, c'est intéressant, parce qu'à cette table-ci, aujourd'hui, est assis un monsieur qui vient d'une région de la Gaspésie, qui n'est pas loin de celle du président de cette commission, où les médecins, lorsque le pharmacien s'est implanté, ont automatiquement cessé de fournir des médicaments à leurs malades. Mais, parce que, le pharmacien ne pouvait pas fournir les médicaments la nuit, les samedis et les dimanches, ils ont dû recommencer plus tard à s'approvisionner de médicaments pour les distribuer au moins durant la nuit et au cours des fins de semaine. D'une part, je démontre la bonne volonté des médecins omni-praticiens de ne pas faire concurrence aux pharmaciens et je démontre en même temps que, face à une insuffisance de moyens, le médecin se trouve dans l'obligation de les fournir durant la nuit ou au cours de la fin de semaine.

Si le système était satisfaisant, les médecins sont tellement occupés actuellement qu'ils n'auraient pas à assumer, dans certains cas, cette responsabilité secondaire.

M.CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, est-ce que, dans ce domaine, le dialogue entre les pharmaciens et les médecins se continue? Est-ce qu'on explore toutes les possibilités d'entente?

M. HAMEL: Disons que nous avons discuté avec l'association des pharmaciens pendant des années, de 1966, en particulier, à 1969, toutes ces questions et qu'il n'y avait pas d'opposition irréductible de part ou d'autre. Nous nous entendions très bien, nous partagions à peu près les mêmes points de vue. Mais nous avons toujours eu, évidemment, une opposition irréductible de la part de la corporation des pharmaciens à ce que celle-ci se désiste de ses pouvoirs de contrôler les médecins lorsqu'ils dispensent des médicaments, même de main à main, sans posséder de pharmacie.

On a eu un problème avec la corporation des pharmaciens mais nous n'en avons jamais eu avec l'association représentative des pharmaciens.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci. M. LE PRESIDENT: M. Guay.

M. GUAY: M. le Président, on a touché un point quand même très important, surtout concernant le milieu rural. Et c'est sur ce point que j'aimerais revenir. Dans la distribution des médicaments, quand on parle de substitution, il s'agit pour le médecin qui prescrit, qui est responsable de la prescription ou de la signature de l'ordonnance, je pense que c'est normal, qu'il y ait un certain contrôle pour que le bon médicament soit prescrit.

Maintenant, en milieu rural, on éprouve des difficultés et ces difficultés s'accentuent. On vient de les soulever et le député de Montmagny les a très bien touchées. Ce problème s'accentue, parce que plus on avance dans le temps, plus c'est difficile pendant les fins de semaine, d'obtenir un médicament. Et on obtient parfois des médicaments plusieurs jours après que la prescription ou l'ordonnance a été commandée ou signée par le médecin. Est-ce qu'il y a quelque chose de prévu, soit dans la Loi médicale ou ailleurs, comme solution à ce problème? En pratique, en milieu rural, le milieu que je connais, le médecin est en même temps le pharmacien. Et c'est de plus en plus difficile de se procurer des médicaments dont la population a besoin. Est-ce qu'il y a quelque chose de prévu pour corriger cette lacune? Je me rends compte que, de plus en plus, il y a, dans différentes régions, sous-consommation de

médicaments à cause des difficultés d'approvisionnement.

M. HAMEL: Evidemment, vous pourriez peut-être poser la question au ministre des Affaires sociales. En ce qui nous concerne...

M. CASTONGUAY: J'aimerais connaître les sources qui vous permettent de confirmer qu'il y a sous-consommation.

M. GUAY: Si j'ai posé la question, c'est parce que j'étais bien conscient que le ministre assistait à cette séance de la commission. Je pense que le ministère a pris connaissance de certaines revendications de plusieurs municipalités qui réclamaient, en quelque sorte, un centre où il y aurait des services jour et nuit de distribution. Je pense que c'est normal: mais je suis peut-être hors d'ordre aussi.

M. LE PRESIDENT: M. Burns.

M. BURNS: J'ai une seule question, Dr Hamel. Vous n'en avez pas parlé dans votre exposé, mais dans votre mémoire vous laissez entendre que le fonds d'indemnisation ne serait, à toutes fins pratiques, pas applicable à des professions comme la médecine, etc., mais que ça viserait surtout les professions où les membres gardent des sommes d'argent pour leurs clients, notamment les avocats, les notaires, les comptables, etc.

D'ailleurs, je pense que le Collège des médecins a fait une remarque dans ce sens.

Ne croyez-vous pas que ce fonds d'indemnisation, dans le cas des professions où les membres ne détiennent pas de l'argent de leurs clients, pourrait quand même servir pour dédommager, dans certains cas, d'incurie quitte à ce que ce soit, après décision par les tribunaux réguliers, un peu comme la Loi d'indemnisation des victimes d'accidents le fait?

M. HAMEL: Ce n'est pas notre avis. Je pense qu'il y a obligation, d'une façon générale, pour les médecins qui exercent dans les hôpitaux, à posséder une pareille protection. Je pense que ce fonds d'indemnisation serait très élevé, devrait être très élevé, à un moment donné. Disons que dans les consultations que nous avons eues, soit avec des experts dans la matière, soit avec des experts dans le domaine de l'assurance ou des conseillers juridiques, ces gens n'étaient pas d'accord sur cette hypothèse que le Collège des médecins puisse posséder un pareil fonds d'indemnisation. C'est ni plus ni moins que devenir une compagnie d'assurance.

M. BURNS: Sauf que, dans ces cas-là, ne pensez-vous pas, docteur, que c'est un fonds supplétif? Je pense, par exemple, que ça pourrait ne s'appliquer, en pratique, que dans les cas où un médecin n'a pas d'assurance, que dans un cas où le médecin n'a pas l'actif nécessaire pour répondre à une condamnation en dommages devant les tribunaux. C'est dans ce sens que je le dis. Ces fonds sont des fonds supplétifs. Evidemment, si, dans le cas de l'avocat ou du notaire qui a détourné des fonds, son client est en mesure de les payer de sa poche, le fonds, comme je le comprends, n'a aucune espèce d'utilité. Alors, ce n'est que dans des cas de supplément requis. C'est dans ce sens que je vous posais la question.

M. HAMEL: Si vous avez remarqué, en lisant le mémoire, c'est peut-être un des seuls endroits où nous n'avons pas été catégoriques, où nous avons posé des questions aux législateurs.

M. BURNS: Vous demandez au ministère de préciser son intention.

M. HAMEL: De préciser sa position. On dit: Si ce rôle doit déborder les attributions que nous connaissons présentement, nous croyons que celles-ci devraient être énoncées et explicitées dans le projet de loi. Si, d'autre part, ce rôle est conforme à l'interprétation que vous venez d'en faire, que les présentes dispositions du projet de loi nous ont permis d'exprimer précédemment, il y a lieu de se demander quel serait le rôle d'un tel fonds d'indemnisation à l'intérieur de l'ordre des médecins. Nous, nous n'en voyons pas l'utilisation, actuellement, à l'intérieur de l'ordre des médecins. Nous pensons qu'il serait préférable que les médecins détiennent de façon obligatoire une assurance, mais que le fardeau en soit supporté par une compagnie d'assurance, parce que c'est une véritable assurance.

M. CASTONGUAY: Je peux peut-être souligner ici une application de ce fonds. Vous avez vu quelques causes récentes intentées par la régie ou par le gouvernement, à la suite du fait que certains médecins, alors que la Loi de l'assurance-maladie ne leur permettait pas de charger quoi que ce soit, chargeaient un supplément. Si ces médecins, par hypothèse, sont insolvables ou encore ne sont pas en mesure de rembourser rapidement, le fonds d'indemnisation devrait immédiatement rembourser la personne: après ça, lui se ferait rembourser par la suite par le médecin de telle sorte que la personne qui a été obligée de débourser contrairement à ce que la loi dit, le médecin, en cour, ayant été condamné, le fonds d'indemnisation pourrait être utilisé pour réparer le plus rapidement possible la situation. C'est un exemple.

M. BURNS: II n'exclut pas l'autre que j'ai suggéré tantôt.

M. HAMEL: M. le Président, il est évident, d'autre part, que si on fait supporter par l'ensemble des membres d'une profession de pareils fonds, normalement, on pourrait se demander si ces fonds d'indemnisation ne de-

vraient pas être supportés par la société entière et non pas par les membres d'une profession.

M. BURNS: Ces professions ont des privilèges, remarquez. C'est en vertu de ces privilèges que ça crée des obligations. Ce sont des professions...

M. HAMEL: Mais de là à se transformer en compagnie d'assurance, cela mérite d'être étudié, il n'y a peut-être qu'un pas pour vous.

UNE VOIX: Seulement un pas.

M. HAMEL: Je veux dire que cela mérite certainement, de notre côté, certaines considérations.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. HAMEL: Sur le plan pratique, d'autre part, ce serait très difficile d'application.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, dans le chapitre III, du mémoire de la fédération, il est question de caisse de retraite. La fédération établit bien ses positions à l'effet que des caisses de retraite ou des assurances-groupe sont au profit des participants et non pas de la population en général. Ce serait donc à la fédération d'être responsable de cette question plutôt qu'au Collège des médecins. La question que je pose est une question d'information. Est-ce qu'à votre connaissance il y a des négociations quelconques qui ont été engagées, soit avec le gouvernement, soit avec des compagnies soit avec vos membres, soit par vous ou par le collège, concernant l'établissement d'une caisse de retraite? Ou si c'est là tout simplement parce qu'il en était question dans le projet de loi et qu'hypothétiquement il y aura un jour une caisse de retraite ou si, au contraire, effectivement, il y a des négociations qui sont engagées à quelque niveau que ce soit.

M. HAMEL: Actuellement, l'ordre des médecins et les associations représentatives des médecins possèdent des régimes d'assurance-groupe et certains même des caisses de retraite. Certaines associations aussi ont négocié avec le gouvernement, certains membres de la profession médicale, des bénéfices d'assurance-groupe et de caisse de retraite, certains médecins salariés ou payés autrement qu'à l'acte. Donc, c'est une réalité actuellement. Il y a des démarches qui ont été faites entre l'ordre des médecins et les fédérations pour que le Collège des médecins abandonne définitivement ce champ d'activité aux fédérations.

M. MASSE (Montcalm): A votre connaissance, le Collège des médecins serait d'accord pour que la loi amendée pour remettre à la fédération plutôt qu'au collège cette possibilité de négociation.

M. HAMEL: Oui. Lors des dernières consultations à ce sujet avec l'ordre des médecins, les représentants de l'ordre étaient d'accord à la condition que tous les médecins puissent bénéficier d'un régime de retraite et d'assurance-groupe et non pas seulement les membres en règle des fédérations.

M. MASSE (Montcalm): Je vous remercie. M. LE PRESIDENT: Je remercie les...

M. CASTONGUAY: M. le Président, est-ce que, sur ce point, je pourrais faire une petite clarification pour bien indiquer quelle était l'intention en inscrivant ces dispositions dans ce projet de loi. Nous, en donnant ces pouvoirs à l'ordre ou au collège, nous n'excluons pas d'autres types d'activité de la part des syndicats de même nature. Toutefois, l'adhésion au syndicat étant volontaire, on peut imaginer qu'à un certain moment la Fédération des médecins omnipratriciens n'existera plus, les médecins voulant aller dans un autre syndicat. C'est une hypothèse qui est peut-être peu possible mais qui existe malgré tout. Alors comme les dispositions relatives à la retraite, par exemple, revêtent un caractère de permanence et permettent au collège d'instituer une caisse sans enlever ce pouvoir au syndicat de le faire ou même de négocier dans un autre contexte, cela peut donner un certain choix à des membres, à des corporations qui verraient une plus grande stabilité dans le... C'est dans ce but-là que cela a été fait. Cela n'a pas été fait dans le but d'enlever aux fédérations un champ d'action possible.

M. MASSE (Montcalm): Dans ce sens-là, est-ce qu'il ne serait pas possible que la loi prévoie que de toute façon la caisse est administrée par un organisme public, comme le régime de rentes, ce qui enlèverait cette objection de disparition de la fédération.

M. CASTONGUAY: C'est une des choses que nous pouvons discuter.

M. MASSE (Montcalm): D'accord.

M. LE PRESIDENT: Dernière question, M. Louis Vézina, député de Montmorency.

M. VEZINA: Je voudrais vous demander si vous avez pris connaissance du mémoire présenté à la commission par les... Est-ce que votre organisme a étudié le mémoire?

M. HAMEL: Non, monsieur,

M. VEZINA: Au sujet de l'office des professions, relativement à la nomination et au paiement des syndics, etc., est-ce que la distinction des pouvoirs est exercée par le lieutenant-gouverneur en conseil ou par l'office? Est-ce que votre fédération a des remarques particuliè-

res à faire sur le système tel que proposé par le projet de loi 250?

M. HAMEL: Oui. Nous croyons que le président et le secrétaire du comité de discipline, le secrétaire du comité d'institution professionnelle, les syndics, s'il y en a, ne devraient pas être nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil mais nommés par les corporations. De la même façon, à l'article 169, paragraphe a), qui permet au lieutenant-gouverneur en conseil de déterminer les procédures de fonctionnement du comité d'inspection professionnelle, on pense que ces pouvoirs-là devraient être réservés aux corporations et non pas au lieutenant-gouverneur en conseil. On devrait faire confiance davantage aux corporations, et nous l'avons exprimé, je pense, de façon générale dans notre mémoire. Nous sommes d'accord probablement avec le conseil interprofessionnel sans avoir lu le mémoire.

M. VEZINA: Sur la question de la substitution des médicaments, je réfléchissais à ce que vous disiez tantôt, sur ce que vous souhaitez être l'accord préalable du médecin traitant avant qu'il y ait substitution de médicaments. Au point de vue pratique maintenant, pensez-vous que cela ne créera pas des problèmes assez sérieux? J'imagine mal quelqu'un du public, un quidam se rendre à la pharmacie avec son ordonnance, et que le pharmacien l'informe qu'il doit proposer une substitution pour telle raison et que là, il tente de rejoindre le médecin. Dans quelle situation met-on la personne qui est appelée à recevoir le médicament?

M. HAMEL: J'ai laissé entendre tout à l'heure, peut-être pas d'une façon suffisamment claire, que ça pourrait dans la pratique se passer tout à fait autrement. Si le médecin n'indique d'aucune façon qu'il est opposé à la substitution, le pharmacien serait libre de substituer un médicament. Nous tenons, lorsque le médecin a des raisons précises d'éviter une substitution dans l'intérêt de son malade, qu'il le signale sur son ordonnance de telle sorte que le pharmacien ne puisse pas passer outre. Alors, c'est simple. Il n'y a pas de complications. Si le médecin ne signale pas sur l'ordonnance son opposition à une substitution, c'est automatique, cela peut être fait par le pharmacien. S'il le signale, on pense que le pharmacien doit se soumettre à la volonté du médecin, qu'il y a des raisons d'ordre médical pour ne pas tolérer une substitution. Est-ce clair?

M. VEZINA: Mais est-ce que je dois comprendre de vos propos que, s'il y a un problème à ce jour, c'est beaucoup plus sur la façon de prescrire un médicament que sur la façon dont il a été préparé et vendu au malade.

M. HAMEL: II n'y a pas de problème à ce jour parce qu'il n'y a pas de liste applicable excepté dans certains hôpitaux où c'est très large. Il n'y a pas de problème. Nous prévoyons les problèmes, nous sommes là, nous, pour les prévoir et les éliminer si possible en faisant des recommandations appropriées aux législateurs.

M. VEZINA: Vous nous avez dit tantôt que les contradictions étaient d'ordre social, économique, financier, pathologique, etc. Vous avez dit que c'était à partir d'expériences acquises et vécues par les membres de votre fédération. Vous avez donc eu des problèmes jusqu'à maintenant?

M. HAMEL: C'est-à-dire pas avec la liste elle-même, nous avons des problèmes... c'est-à-dire que l'expérience pratique de la prescription des médicaments par le médecin nous a démontré clairement qu'il pourrait y avoir une catastrophe à un certain moment si le pharmacien pouvait changer de médicaments sans que le médecin soit mis au courant, ou même sans la volonté du médecin, par l'expérience quotidienne. On dit: Dans tel ou tel cas, s'il fallait que le médicament soit changé... lorsqu'il y a des erreurs, par exemple, de médicaments, on s'en aperçoit, car les équivalances sont d'ordre chimique souvent, mais les effets thérapeutiques ne sont pas toujours les mêmes.

M. LE PRESIDENT: Je remercie le Dr Hamel et ses collaborateurs de l'exposé de leur mémoire.

Je vais inviter l'Association des hôpitaux de la province de Québec.

Association des hôpitaux de la province de Québec

M. DUFOUR: M. le Président de la commission, M. le ministre, messieurs, nous remercions d'abord les membres de la commission d'accepter d'entendre l'Association des hôpitaux qui représente les 215 hôpitaux dits publics de la province de Québec. C'est aux doubles titres de porte-parole des hôpitaux de la province et de partenaire de l'Etat dans les négociations collectives que l'Association des hôpitaux se présente devant cette commission. Notre mémoire se limitera tout simplement...

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous donner vos noms, s'il vous plaît, pour le journal des Débats.

M. DUFOUR: Oui, je suis M. Paul Dufour, de l'Association des hôpitaux. Voici Me Albert Gobeil, notre conseiller juridique et Guy Saint -Onge, de l'Association des hôpitaux.

Notre mémoire se limitera à saisir la commission parlementaire de certains effets de l'application de l'article 7 du projet de loi no 272 et, afin de vous présenter notre mémoire, Me Albert Gobeil agira à titre porte-parole.

M. GOBEIL (Albert): M. le Président, M. le ministre, messieurs, dès le départ, je pense qu'on pourrait peut-être laisser tomber la lecture, si vous le permettez, du mémoire. Il est court, j'aimerais plutôt vous le verbaliser pour tenter de circonscrire le problème. Disons au départ, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, que nous n'entendons pas discuter le contenu; nous n'avons aucune objection au contenu de la loi comme tel. Ce que nous voulons porter devant vous, c'est une conséquence que l'on croit fâcheuse à l'organisation du travail du milieu hospitalier, plus particulièrement du milieu des départements de médecine physique.

La loi 272, comme n'importe laquelle des lois qui voient à créer une corporation professionnelle, je pense que c'est la réalisation de l'article 22 du projet de loi 250 qui nous dit que, lorsqu'il y a un acte d'une nature très particulière qui touche le public, le public doit être protégé et on doit en fait s'assurer que l'acte sera posé par des personnes compétentes.

Alors on a régi; pour enlever toute ambiguïté sur la physiothérapie, la loi définit ce que c'est à l'article 7: "Constitue l'exercice de la physiothérapie tout acte qui a pour objet de redonner à une personne la maîtrise de ses mouvements corporels en utilisant des exercices physiques, l'hydrothérapie, l'électrothérapie ou l'ergothérapie. Nous n'avons pas la compétence pour savoir si c'est vraiment ça sur le plan médical, nous la prenons telle quelle. Enfin, on a une définition de la physiothérapie maintenant.

On dit à l'article 8: "Sous réserve des droits et privilèges expressément accordés par la loi à d'autres professionnels, les actes décrits à l'article 7 — que nous venons de lire — sont réservés aux physiothérapeutes". Donc, avec cette loi on sait ce qu'est la physiothérapie et on dit qui va l'exercer. Cela enlève les vendeurs de pilules, les charlatans, les studios de massages bons, moins bons et très mauvais; on veut que le public soit protégé. Cela va bien, le but est louable. Mais il arrive que chez nous, dans le milieu hospitalier, si on dit que seuls les physiothérapeutes peuvent faire ces actes-là, on fait disparaître à toutes fins pratiques deux classifications d'emploi. Une première qui s'appelle les préposés en physiothérapie qui exercent déjà dans les services de médecine physique et qui, de fait, participent aux traitements de physiothérapie suivant une définition que l'on retrouve dans nos conventions collectives et qui est la suivante: "Personne qui reçoit ou a reçu dans un service de médecine physique une formation pratique lui permettant d'assister les physiothérapeutes dans l'exécution de certaines tâches à caractère technique de complexité restreinte". De fait, ils participent aux traitements, ils participent à l'utilisation des exercices physiques etc.

Alors, si on dit que seulement les physiothérapeutes peuvent faire ce genre de choses-là, vous nous faites disparaître carrément 177 personnes du milieu hospitalier québécois à l'heure actuelle. IL y a un corollaire assez fâcheux également, c'est que, de ces 177 personnes, il y en a 159 qui ont plus de deux ans d'emploi, donc qui sont à toutes fins pratiques absolument sécurisées, que l'on ne peut plus mettre à pied, puisque nos conventions collectives, dans le milieu hospitalier, ont consacré ce droit-là aux salariés: après deux ans, leur emploi est assuré. On ne devrait pas dire l'emploi, on devrait dire la sécurité de revenu. Vous voyez immédiatement qu'au point de vue de l'administration du personnel — c'est ce qui nous concerne à l'heure actuelle, les administrateurs — nous avons un problème considérable qui est celui de la disparition d'une classe de travailleurs que l'on devra mettre sur les tablettes et payer en attendant que l'on trouve quelque chose pour eux.

C'est un problème, mais on verra plus loin que le problème principal est qu'on ne peut pas s'en passer en médecine physique.

Il y a un autre groupe maintenant qui, lui, n'est pas encore dans le milieu hospitalier, mais auquel nous, les administrateurs d'hôpitaux, pensons, c'est celui des techniciens en physiothérapie. Il y a trois ou quatre ans, le ministère de l'Education a sanctionné au niveau du CEGEP un cours qui s'appelle "techniques en physiothérapie". Je vous ferai grâce de l'énumération ou du contenu du cours; on voit dans les publications officielles du ministère que ce cours-là est absolument sérieux.

Il y en a un à Sherbrooke, il y en a un autre à Chicoutimi. Il y en aura vingt qui vont "graduer ", pour prendre un mauvais terme, cette année, et à Sherbrooke ce sera l'an prochain.

Nous serons aux prises avec à peu près une centaine de personnes d'ici quelques années, vingt dès cette année, qui ont choisi une option sanctionnée par le ministère de l'Education, qui l'a sanctionnée parce qu'elle correspondait à un besoin du milieu. On manquait de techniciens et on leur dit, trois ans après: Excusez-nous, nous nous sommes trompés. Je pense que nous devons penser à ça; pour nous, en tout cas, c'est un problème, cela en est un d'autant plus considérable que nous les attendons dans les hôpitaux. Nous n'aurons pas de difficulté à placer ces gens. La prévision du départ, il y a trois ans, était bonne quand le ministère a dit: "Nous allons faire un cours, il y a de la place pour vous". Il y en a, selon ce que l'on nous dit dans les hôpitaux.

C'est le problème, pour faire une référence au "stunt" publicitaire que nous entendons ces temps-ci: C'est quoi ton problème? C'est celui-là.

M. BURNS: C'est quoi l'important?

M. GOBEIL: C'est quoi l'important? Si on se limite aux seuls physiothérapeutes, il y a deux classes de personnes qui disparaissent et qui nous semblent nécessaires. Notre préoccu-

pation n'est pas seulement une préoccupation en termes d'administration de personnel. Si vous permettez, vous pouvez prendre le mémoire à la page... Je m'excuse, je voudrais vous rappeler, qu'il y a, dans le système hospitalier, une certaine complémentarité entre des fonctions. Prenons la fonction de "nursing" par exemple dans un département.

Vous avez pour l'acte global du "nursing" — prenons ce département — des gardes-malades, des gardes-malades auxiliaires, des puéricultrices suivant le département, des auxiliaires en "nursing", on peut avoir une bachelière en "nursing". Tout ces gens-là, dans un département donné, dans une unité de soins donnée, participent à l'acte "nursing". C'est complémentaire; comme dans n'importe quelle organisation ou institution, il est arrivé qu'il existe de fait des structures d'occupation. C'est fait comme ça, un hôpital. Je ne dis pas que ça ne peut pas s'améliorer, mais enfin, on a reconnu ça. Et l'Etat a reconnu cette complémentarité dans les hôpitaux, dans les soins hospitaliers, lorsque, dans le bill qui traite des infirmières et infirmiers, il dit à l'article 31: "Sous réserve de l'article 26, nul ne peut poser des actes décrits à l'article 25 s'il n'est pas infirmière ou infirmier. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas..."

Et là, on énumère à qui elles ne s'appliquent pas; il y a des gens qui peuvent faire ces actes-là en milieu hospitalier. Nous disons que l'on ajoute à la loi que "l'article 8" qui crée une sanction si on exerce la fonction et qu'on n'est pas physiothérapeute — ne s'applique pas aux préposés ou aux techniciens en physiothérapie en milieu hospitalier".

Je pense que vous avez là l'essentiel de notre préoccupation. Notre motivation est d'un autre ordre et en lisant le rapport à partir de la page 8, vous voyez que nous croyons que ces gens sont nécessaires pour donner la gamme de soins qu'on souhaite dans un milieu hospitalier.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les représentants de l'Association des hôpitaux d'avoir soulevé dans leur mémoire cette question qui est évidemment importante. La difficulté à laquelle nous nous butons — vous l'avez exposée de fait — c'est que bien des gens s'improvisent dans ce secteur à l'extérieur, évidemment, des hôpitaux, et il y a un besoin ou un danger pour la population si on n'est pas capable de reconnaître ceux qui sont aptes à poser des actes d'une façon compétente et ceux qui ne le sont pas.

A l'intérieur des institutions, le problème se pose différemment et vous soulevez une des difficultés que crée la définition d'un champ de pratique très strict et réservé à un groupe.

Voici la seule question que j'ai à vous adresser, parce que le problème que vous soulevez est réel: Est-ce que des dispositions analogues à celles que vous avez citées dans la Loi des infirmières et infirmiers vous apparaî- traient comme étant une solution satisfaisante ou encore pouvez-vous nous décrire comment on établit, compte tenu de votre recommandation à la page 14, quels sont les limites de la compétence respective des différents types de personnel dans les hôpitaux présentement et si ces mécanismes assurent les garanties nécessaires? Vous nous faites une recommandation et vous affirmez un principe.

Mais comment s'est effectuée la détermination des limites des compétences respectives des différents groupes à l'intérieur des hôpitaux? En fait, il semble y avoir deux approches possibles.

M. GOBEIL: Cela nous est apparu, on doit l'avouer, comme une recommandation qui, après étude plus poussée, était peut-être trop floue. La compétence respective, finalement — on l'a marquée là, c'est un peu dommage — cela n'a pas de limite, cela ne commence pas et ne finit pas. Nous préférerions à cela une conclusion comme celle-ci: Que l'article 13, tel que présenté dans le projet de loi, soit remplacé par le suivant: Sous réserve de l'article 8, nul ne peut poser des actes décrits à l'article 7, s'il n'est physiothérapeute. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux actes posés par les techniciens en réadaptation, ou techniciens en physiothérapie, et les préposés en physiothérapie dans les départements de médecine physique des institutions.

Je pense qu'on cerne le problème davantage. Cela représente la situation actuelle.

M. CASTONGUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. GOBEIL: Est-ce que vous voudriez, M. le Président, qu'on vous remette copie de ce que je viens de lire?

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. GOBEIL: De la recommandation, telle quelle?

M. LE PRESIDENT: Oui. Alors, messieurs, je vous remercie. Maintenant, la commission suspend ses travaux jusqu'à entre 4 heures, 4 heures 30, après la période des questions, mais, à la salle 81-A.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

Reprise de la séance à 16 h 15

M. FORTIER (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs! La Fédération des médecins spécialistes du Québec.

Fédération des médecins spécialistes du Québec

M. ROBILLARD: M. le Président, je vous demanderais la faveur de parler assis, si c'est possible, parce que j'ai la grippe. M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, dans le mémoire que nous avons soumis à cette commission parlementaire, nous avons tenté de dégager ce qui nous paraissait constituer les objectifs généraux de la réforme du droit des professions pour examiner... Vous voulez que je présente les gens qui sont avec moi? Il y a moi-même, président de la Fédération des médecins spécialistes, Dr Raymond Robillard, accompagné de notre conseiller juridique, Me Roger David et, à ma droite, le Dr Pierre Archambault, président de l'association des radiologistes.

Je disais donc, M. le Président, que nous avons tenté dans une première partie du mémoire d'examiner sommairement les objectifs du régime, les objectifs généraux en voulant en dégager ensuite quelques aspects qui nous paraissaient ne pas traduire fidèlement les objectifs tels que nous pouvions les déduire de la lecture du projet de loi et particulièrement de l'article 21 qui définit, en somme, les critères qui doivent pour le législateur traduire ce qu'est une corporation et ce qui doit en découler sur le plan législatif.

Je passerai sous cet aspect des objectifs généraux qui ont été discutés par d'autres et en particulier par le Collège des médecins et qui sont, je pense, d'ordre général, que la commission pourra lire, pour en venir aux aspects plus détaillés des positions que nous voulons prendre sur certains points particuliers.

Nous constatons d'abord par la lecture du bill 250 que, sur tous les paliers où se prennent les décisions de la corporation, c'est-à-dire au bureau, au conseil d'administration, à l'inspection professionnelle, au comité de discipline, que l'Etat nomme les délégués directement, rémunère ces individus et nomme également les secrétaires de ces comités. Nous croyons que l'intérêt public veut la présence de l'Etat ou des mandataires de l'Etat directement dans la corporation professionnelle. C'est un des piliers de la loi, de la réforme, du bill 250; nous ne discutons aucunement cette perspective. Nous ne croyons pas cependant que l'Etat desserve nécessairement le bien public en étant présent directement à tous les paliers que nous avons décrits. Nous croyons qu'il devrait exister entre l'Etat et la corporation professionnelle un tampon, si l'on peut s'exprimer ainsi, qui serait l'office des professions et qu, au nom de l'Etat, déléguerait, lui, ses représentants au conseil d'administration de façon que l'Etat, par cet intermédiaire, puisse s'assurer en tout temps du fonctionnement adéquat de la corporation et voir que la corporation respecte les obligations qui lui sont conférées par la loi.

Nous pensons que ce mode, ce procédé moins direct que l'intervention de l'Etat pourrait être atténué ou pourrait respecter l'intérêt public en prévoyant ce que le bill 250 ne prévoit pas tout à fait, c'est-à-dire un mécanisme de mise en tutelle des corporations qui ne se déchargeraient pas d'une façon satisfaisante de leurs obligations.

Le bill 250 prévoit un processus de mise en tutelle des corporations en ce moment, mais seulement pour les corporations qui n'honorent pas leurs obligations financières.

Nous croyons que l'institution de l'Office des professions est fort juste et pourrait être améliorée dans le sens que nous avons recommandé. Nous ne croyons pas cependant que le bill 250 confère à cet organisme un droit de regard suffisant sur les activités des corporations et en particulier que le projet de loi ne fournit pas à l'office des moyens d'intervention suffisants. L'office, à notre avis, devrait représenter l'Etat au bureau des corporations et mener auprès de ces corporations toute enquête qu'il juge nécessaire sur l'ensemble de leur fonctionnement et, comme nous l'avons dit antérieurement, mettre en tutelle au besoin celles qui n'assument pas leurs responsabilités.

Dans cette nouvelle optique d'un élargissement du rôle de l'office, nous croyons que cet organisme devrait être davantage représentatif, que sa composition devrait être, non pas de trois membres comme le prévoit la loi, mais de sept. Si nous voyons assez bien le rôle de l'office des professions, par contre nous voyons moins clairement celui du conseil interprofessionnel. Cet organisme, à notre avis, devrait demeurer un organisme volontaire auquel les corporations peuvent adhérer mais ne devrait pas être sanctionné en vertu de la loi et détenir un mandat officiel qui se situe en somme d'une façon assez obscure entre l'office et les corporations elles-mêmes.

Les corporations, et particulièrement l'ordre des médecins — c'est un point qui a été souligné par l'ordre lui même — à notre avis, puisqu'elles sont responsables en fin de compte de la qualité des services qui sont rendus à la population par leurs membres, doivent intervenir dans l'élaboration des programmes de formation et être en mesure de vérifier au besoin par des examens les qualifications de ceux à qui les corporations décernent des permis d'exercice. Cette question, nous l'avons vu, a été abordée ce matin dans le même sens par le comité des doyens des quatre facultés de médecine du Québec.

Pour ce qui est du comité d'inspection professionnelle, nous constatons qu'il est autonome, qu'il fonctionne indépendamment de l'autorité de la corporation, qu'il est, en som-

me, une délégation de pouvoir interne à la corporation. Les membres son nommés par le gouvernement, un directement. Ce comité fonctionne de lui-même, spontanément, fait enquête sur l'activité professionnelle des membres de la corporation et peut traduire directement le membre en discipline. Nous pensons que cette façon de procéder est incompatible avec l'autonomie normale d'une corporation si dans un secteur aussi important que celui-là... En somme, il y a deux secteurs capitaux d'une corporation, l'inspection professionnelle et la discipline; nous voyons assez mal comment on pourrait concevoir que ces deux aspects majeurs de l'activité de la corporation seraient entre les mains de gens qui sont nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil et qui échappent, à toutes fins pratiques, à l'autorité du bureau. Donc, nous croyons que les membres de ce comité devraient être nommés par le bureau, que le comité devrait détenir son mandat du bureau et que le bureau devrait en déterminer la procédure. Nous croyons également que cette composition du comité de trois membres est par trop rigide et qu'elle ne s'applique pas à l'ensemble des professions et sûrement pas, de toute façon, à celle que nous connaissons le mieux, celle de la profession médicale qui est composée de 8,000 personnes, dont 4,000 spécialistes en 31 disciplines.

Pour ce qui est des syndics, la question a été posée ce matin, nous voyons une ambiguïté dans ce concept. Les syndics ont une instance disciplinaire, une fonction disciplinaire et nous croyons qu'ils devraient être rattachés à cette fonction de façon plus spécifique et la loi leur donne une fonction de contrôle de l'activité professionnelle par voie d'enquêtes. Nous pensons que ce rôle des syndics devrait être éclairci et que les individus devraient être clairement rattachés aux instances disciplinaires et ne devraient pas fonctionner de façon autonome, mais être rattachés à l'autorité du bureau.

Pour ce qui est de l'ensemble du processus disciplinaire, nous voulons en retenir un aspect particulier. Nous avons été impressionnés par le fait que le comité de discipline peut être saisi directement d'une plainte en provenance du public, ou en provenance des syndics, ou en provenance du comité d'inspection professionnelle sans aucune intervention de la corporation. Nous voyons encore ici, de même que nous l'avons vu dans le comité d'inspection professionnelle, que le comité de discipline fonctionne à l'intérieur de la corporation de façon autonome. Nous soutenons que, si la corporation doit demeurer un organisme responsable et autonome, il lui revient de porter toute plainte devant le comité de discipline. Cette façon de procéder respecterait l'autonomie de la corporation et préviendrait le fait que le professionnel soit possiblement traduit en discipline pour des raisons futiles, faute d'avoir pu passer au préalable par un certain tamisage.

Nous croyons par contre que les plaintes du public doivent être reçues et doivent être traitées avec diligence et que les gens qui se plaignent à une corporation doivent avoir un rapport de ce qui est survenu à leurs plaintes. Nous croyons donc qu'il devrait exister dans chaque corporation un comité spécifique d'examen des plaintes qui ferait enquête auprès des professionnels et ferait rapport au comité administratif. Le rejet de toute plainte devrait être motivé par écrit et le plaignant pourrait en appeler de cette décision à l'Office des professions.

Passons rapidement et sans expliquer certains points que nous avons soulevés. Nous croyons que la radiation provisoire immédiate que prévoit la loi sur décision du bureau devrait être atténuée et que le bureau d'une corporation ne pourrait pas prescrire à cette forme ultime de sanction, sans avoir reçu, à cet effet, une recommandation spécifique du comité administratif.

Pour ce qui est des fonds d'indemnisation, j'ai été fort intéressé par la discussion qui s'est déroulée ce matin, nous pensons que le fonds d'indemnisation ne doit pas s'appliquer à la profession médicale, que le fonds d'indemnisation doit être restreint aux corporations dont les membres détiennent de l'argent du public. Pour ce qui est de la profession médicale, si on veut faire du fonds d'indemnisation un organisme qui veut remplacer les compagnies d'assurance ou qui veut dépanner la régie tout simplement pour faciliter le paiement des honoraires, nous allons devoir monter des organismes qui vont recruter des fonds assez spectaculaires et je prévois que la cotisation au Collège des médecins va se situer à un niveau beaucoup plus élevé qu'actuellement. Peut-être M. le ministre pourra-t-il nous expliquer quelles sont les vues du gouvernement sur ce fonds d'indemnisation et de quelle façon il peut s'appliquer à la profession médicale. Nous ne l'avons pas vu pour nous-mêmes mais je pense que nous serions bien prêts à nous faire expliquer quelles sont les vues du gouvernement sur ce point.

Pour ce qui est des tarifs d'honoraires et des procédures d'arbitrage, pour notre part, nous pensons que l'établissement d'un tarif d'honoraires ne relève pas de la corporation. Nous avons vécu des expériences assez difficiles dans le passé sur ce plan-là. Pour ce qui est des procédures d'arbitrage, nous croyons qu'elles devraient exister, mais qu'elles ne devraient s'appliquer que dans les cas où il n'existe pas d'entente collective, où il n'existe pas une loi telle que l'assurance-maladie qui prévoit un mode de règlement des conflits d'honoraires.

J'aimerais qu'on soulève très rapidement toute cette question de la santé physique et psychique des membres. Il y a là un certain nombre de dispositions qui nous paraissent assez étonnantes et, si on peut être d'accord sur le principe général qui est de surveiller et de protéger l'intérêt du public, je pense que les

modalités qui ont été choisies par le législateur nous paraissent un peu sévères.

Nous notons en particulier que le bureau peut ordonner l'examen de tout membre sans qu'il ne soit spécifié de quelle façon il prend sa décision, que le bureau doit définir par règlement ce qui constitue un état physique ou psychique incompatible avec l'exercice d'une profession, que les professionnels sont tenus à la délation obligatoire, sont tenus à dénoncer les autres professionnels qu'ils jugent inaptes à pratiquer la profession, enfin que l'admission dans un hôpital psychiatrique amène la radiation automatique d'un professionnel.

Nous croyons que l'obligation de dénonciation n'est pas compatible avec nos moeurs politiques et que personne ne devrait être dans l'obligation, surtout s'il est médecin ou praticien traitant d'une autre personne, de dénoncer cette personne pour des troubles physiques ou mentaux. Nous croyons qu'il est impossible d'établir des règlements pour définir précisément ce qui constitue un état physique ou psychique compatible avec l'exercice d'une profession ou d'une autre, que ce soit la podiatrie ou la comptabilité, etc., que le bureau, avant d'ordonner l'examen médical, mental ou physique d'un de ses membres, doit avoir eu la recommandation spécifique à cet effet du comité d'examen des plaintes ou du comité d'inspection professionnelle. Et, enfin, nous croyons que l'admission dans un hôpital psychiatrique, au sens des lois des institutions mentales, ne doit pas être une cause de radiation.

Pour ce qui est des permis de radiologie que prévoit la loi disant que l'Office des professions établira des normes selon lesquelles le bureau des corporations pourra émettre des permis de radiologie à ceux qui ne sont pas médecins ou dentistes, notre position est très claire: nous disons que seuls les médecins, les dentistes et les médecins vétérinaires devraient être autorisés à pratiquer la radiologie.

Pour ce qui est de la Loi médicale, nous avons trois ou quatre recommandations parce que toutes celles qui étaient pertinentes à la révision de la loi médicale tant attendue ont déjà été faites dans la révision du code des professions. Il est dit que le bureau de la Corporation des médecins peut donner son avis au ministre sur les normes à suivre pour relever le niveau de la qualité des soins dans les hôpitaux. Nous pensons que ce mot "normes" est ambigu, laisse entendre que le ministre des Affaires sociales pourrait mettre en place des normes professionnelles de contrôle de l'activité professionnelle, normes qui relèvent clairement, à notre avis, de la Corporation des médecins.

Nous avons proposé une définition qui nous parait plus exacte de la pratique médicale; faisant place à la notion de médecine préventive, nous avons demandé que les auxiliaires techniques des médecins — nous entendons par là des individus qui ne détiennent pas un certificat ou un permis d'exercice dans une des disciplines qui sont maintenant incorporées, mais qui rendent des services, tels les assistants en physiatrie qui ont été décrits ce matin — puissent continuer à exercer, de façon à ne pas affaiblir la solidité de l'équipe médicale.

Pour ce qui est de la caisse d'épargne et de retraite, qui a été longuement discutée ce matin, nous avons des syndicats médicaux, des caisses d'épargne et des caisses de retraite et nous pensons que cette activité n'est pas une activité qui dessert l'intérêt du public mais une activité collective des syndicats médicaux et qu'elle devrait leur être laissée.

Nous avons enfin abordé quelques lois particulières que nous appelons satellites au bill 250 et qui intéressent certaines corporations. Nous avons fait des représentations sous les chapitres suivants: en ce qui regarde la Loi sur la pharmacie, nous sommes opposés à la substitution des médicaments par le pharmacien. Toute cette question a été débattue ce matin, je m'en rends compte. Je voudrais que notre position soit très claire: nous ne sommes pas opposés au principe de la substitution comme d'autres professions médicales l'ont été au Canada et le sont encore; nous ne sommes pas opposés au principe même de la substitution, nous aimerions que le médecin soit informé des prix des médicaments, qu'on lui donne certaines garanties sur l'équivalence réelle chimique des médicaments, on ne peut pas lui en donner sur l'équivalence thérapeutique, cela est impossible — le Par-Cost ontarien et l'administration fédérale l'ont admis d'ailleurs — et nous pensons que dans certains cas, si le médecin veut prescrire une drogue spécifique pour des raisons qui lui sont particulières, il peut le faire sur demande positive de sa part, c'est-à-dire que, tant et aussi longtemps que le médecin n'aura pas demandé spécifiquement sur une ordonnance qu'on respecte sa prescription et le nom du manufacturier, le pharmacien pourra substituer une drogue.

Nous croyons que certaines définitions qui nous sont apportées de l'exercice professionnel en ce qui regarde l'exercice des techniciens en radiologie et l'exercice des physiothérapeutes sont tout simplement inexactes sur le plan scientifique et nous avons proposé une correction.

Dans trois professions, soit les dentistes, les optométristes et les podiatres, nous avons suggéré des modifications qui nous semblent préciser d'une façon plus conforme à la réalité le champ d'exercice de ces professions de façon qu'elles ne débordent pas sur ce qui en relève, non pas sur le plan économique parce que nous n'y avons nul intérêt, mais sur ce qui relève sur le plan scientifique de l'activité médicale proprement dite.

Nous avons pensé, à l'égard des physiothérapeutes, des orthophonistes et des audiologistes, que pour ces gens... qu'on est convenu d'appeler paramédicaux et qui travaillent sur prescrip-

tions médicales, ces ordonnances médicales soient conservées dans la loi actuelle parce qu'elle ne l'est pas dans les lois révisées.

Voici les points, M. le Président, MM. les députés, que nous avons cru devoir soulever. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay.

M.CASTONGUAY: ...M. le Président, je voudrais remercier les représentants de la Fédération des médecins spécialistes pour ce mémoire qui, également, m'apparaît comme étant très fouillé et qui va certes nous être utile dans notre travail d'étude des projets de loi en cause.

Avant d'adresser certaines questions au Dr Robillard, j'aimerais apporter une couple de clarifications. Lorsqu'il a été question de fonds d'indemnisation, ce matin, lorsqu'on a parlé de la possibilité que ce fonds d'indemnisation soit utilisé à des fins de responsabilité professionnelle, ce ne sont pas des membres du gouvernement qui ont soulevé cette possibilité. De la même façon, au cours de la discussion ce matin il a été question ou on a donné l'impression que ça pouvait servir certaines caisses de dépannage pour la Régie de l'assurance-maladie, je crois que c'est une impression qui est fausse. J'ai fait allusion à un type bien précis, à un cas bien précis à titre d'exemple, celui du médecin qui, en vertu de la Loi de l'assurance-maladie n'a pas le privilège ou le droit de demander des honoraires et qui le ferait. A ce moment-là, si, par exemple, il est établi clairement, soit dans une cour de justice qu'il doit y avoir restitution au patient pour éviter que celui-ci ne subisse des délais, j'ai mentionné que cela pouvait être une utilisation d'un tel fonds d'indemnisation, quitte à ce que le fonds, par la suite, se fasse rembourser. J'ai soulevé ça à titre de possibilité. C'est la seule.

En ce qui a trait à la question de l'état de santé d'un membre d'une corporation professionnelle qui pourrait devenir une cause ne lui permettant pas d'exercer sa profession, le point a été mentionné à quelques reprises et je reconnais que le texte peut peut-être laisser une certaine ambiguïté. De toute façon, dans les délais assez brefs, nous allons déposer un projet de loi sur la santé mentale. Je crois que cela peut contribuer à dissiper certaines équivoques. Il y a également d'autres aspects à la question, tel que cela a été mentionné. Est-ce que, pour d'autres types de corporation, les mêmes critères doivent s'appliquer? De toute façon c'est une question qu'il nous faut analyser de plus près.

Dans les remarques qu'a faites le Dr Robillard ou à la lecture du mémoire, comme un bon nombre de questions ont déjà été soulevées, comme le mémoire lui-même m'apparait être rédigé de façon très claire, je n'ai que peu de questions. La seule, c'est que j'aimerais demander au Dr Robillard de détailler un peu plus la question des auxiliaires médicaux, le point qu'il a soulevé dans ses commentaires.

Comment voit-il cette question par rapport d'abord à l'existence des corporations professionnelles qui réservent un champ exclusif de pratique aux médecins? Aussi bien sur ce plan-là qu'au plan très concret, dans les faits, de ce qui se passe, de ce qui est susceptible de se produire. Comment peut-on concilier ceci, selon lui, avec tout le principe de réserver des champs exclusifs de pratique par la voie de législation comme celle que nous étudions?

M. ROBILLARD: Nous avons des principes, une situation de fait et une situation d'avenir. Sur les principes, je pense que la commission Castonguay-Nepveu s'est prononcée elle-même dans le passé sur cette notion de la profession-nalisation des occupations. Est-ce qu'on doit pousser plus loin ce concept de la professionna-lisation des occupations? Est-ce qu'on doit former de nouvelles corporations? On pourrait se poser là-dessus bien des questions. On pourrait même se demander si toutes celles qui sont formées dans le bill présent répondent vraiment à la définition, au critère que le législateur énonce à l'article 21 du code.

Pour ce qui est de la situation présente, dans plusieurs disciplines — j'en mentionnerais quelques-unes: la radiothérapie, l'isotopie, l'ophtalmologie sûrement, l'oto-rhinolaryngologie, la physiatrie — il existe des individus qui travaillent étroitement avec le médecin, qui assument une partie des trois étapes de ce qu'on appelle l'acte médical, c'est-à-dire l'examen du malade, le diagnostic et le traitement, qui peuvent en assumer généralement une partie dans le secteur diagnostique, dans certaines techniques bien spécifiques selon lesquelles le médecin délègue une partie de son autorité de façon immédiate. Ces gens-là n'ont pas l'entraînement aussi complexe qu'ont reçu les gens cités dans les lois actuellement, mais sont exposés dans l'immédiat à entrer en conflit avec les dispositions de ces lois, parce qu'on dit que le droit exclusif de pratiquer tel acte, tel geste, est réservé aux gens qui détiennent un permis d'exercice décerné par telle corporation.

Je pense que cela peut poser d'ores et déjà un sérieux problème. Pour l'avenir, si nous pensons en termes d'aides médicaux, d'assistants médicaux et que nous voulons élargir ce concept et nous libérer un peu des formules traditionalistes, je pense que toutes ces lois vont nous inscrire dans un carcan assez serré et que, probablement, nous serons gênés demain quand nous voudrons développer les aides médecins. Parce que, entre nous, je pense que c'est une obligation de notre part. Nous devrons arriver à former des gens qui vont prendre une partie du travail des omnipraticiens et des spécialistes dans plusieurs secteurs, surtout celui de l'examen des malades et du diagnostic. J'aurais peur qu'on se mette une cangue dont il serait difficile de sortir. Je pense qu'on peut sur le plan législatif...

M. CASTONGUAY: Docteur, vous craignez

qu'on se place un carcan. En fait, sur ce plan-là, du principe de restreindre un champ de pratique très clairement identifié, c'est la situation actuelle.

Avec la loi médicale actuelle et les autres lois du même secteur, est-ce que les possibilités qui ont été soulevées ce matin au sujet des physio-thérapeutes, au sujet des infirmières par exemple, principalement dans le cadre de la pratique à l'intérieur d'un établissement, vous apparaissent comme une voie qui mériterait d'être explorée de telle sorte que, justement, on ne se place pas dans un tel carcan?

M. ROBILLARD: C'est celle que nous avons suggérée en demandant que soit ajouté quelque chose à l'article 38 de la Loi médicale lorsque cet article élimine de l'ensemble du groupe médical un certain nombre de gens qui peuvent poser des gestes médicaux sans être médecins, par exemple les résidents, nous avons pensé qu'on pourrait inscrire à cet endroit-là les auxiliaires techniques médicaux de même que la proposition a été faite ce matin de procéder un peu de la même façon dans une autre loi. Je pense que ce serait la solution.

Nous n'y verrions aucune objection de notre part au contraire.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay.

M. CASTONGUAY: Merci. Pas pour le moment, je vais écouter.

M. LE PRESIDENT: M. Fournier.

M. FOURNIER: Juste une question relativement au comité d'inspection professionnelle. La loi telle que proposée prévoit un comité qui est autonome et indépendant du bureau de la corporation. Maintenant, ne croyez-vous pas que de cette façon, on garantit davantage la surveillance de l'exercice de la profession s'il y a un comité d'inspection qui est indépendant du bureau?

M. ROBILLARD: Je pense qu'il faut prendre une décision: ou on garde une corporation ou on ne garde pas une corporation. Je pense que, dès l'instant où on garde une corporation et qu'on dit que l'Etat va déléguer ses pouvoirs à une corporation, il faut établir à ce moment-là un minimum d'autonomie et de fierté à l'intérieur de la corporation. Si le gouvernement délègue au conseil d'administration des gens qui sont capables de surveiller l'activité de tous les comités, de recevoir tous les rapports, si l'office est en mesure — c'est ce que nous avons proposé — de surveiller le fonctionnement au jour le jour d'une corporation, de faire enquête au besoin dans n'importe quel secteur d'activité de cette corporation et de le mettre en tutelle, je pense que nous sommes allés aussi loin qu'on le peut dans le chemin d'une participation plus grande de l'Etat aux travaux des corporations, sans franchir le Rubicon, c'est-à-dire sans abolir la corporation. Mon avis est que, si on entre au coeur même des corporations et que l'activité professionnelle, l'inspection du travail journalier des médecins est faite par des gens qui ne sont pas envoyés dans leur bureau par la corporation, qui ne détiennent pas leur pouvoir de la corporation et qu'en plus l'aspect disciplinaire est laissé au représentant direct du ministre des Affaires sociales, à ce moment-là je ne vois sincèrement pas pourquoi on garderait une corporation. Je pense que c'est l'idée qui a été exprimée par le Collège des médecins et nous y souscrivons entièrement. Si ce doit être ça, à ce moment-là, je pense qu'il vaut mieux abolir le Collège des médecins tout simplement, qu'on procède par voie de négociations collectives et qu'on procède par les tribunaux ordinaires, soit au civil ou au criminel. Autrement, il n'y a aucun avantage particulier à motiver les médicins à garder un code de déontologie, une certaine éthique particulière; je pense qu'à ce moment-là on aura tout simplement nié ce concept qu'est la corporation et qui est peut-être dépassé. Si le législateur pense qu'il est dépassé, nous voulons bien, on s'en accommodera. Il faut le dire clairement, je le pense.

M. FOURNIER: Si les membres de ce comité sont nommés par le bureau, l'ensemble des trois membres, est-ce que cela ne répond pas partiellement à votre requête?

M. ROBILLARD: D'accord. C'est entièrement différent. Si le bureau peut nommer ses membres, leur donner un mandat, ce qui n'est pas le fait dans la loi, leur donner un mode de procéder, si le bureau peut former non pas un comité de trois membres, mais un comité de six membres s'il en a besoin, et faire un sous-comité, s'il y a lieu, et en médecine, c'est une nécessité, je pense que nous avons à ce moment-là un comité d'exercice professionnel. Nous comptons l'exercice professionnel parfaitement acceptable.

Je ne crois pas qu'il soit plus tendre pour les médecins ou qu'on vise à avoir une situation plus confortable; je pense que le Collège des médecins, même s'il n'a pas en ce moment — et il l'a répété à plusieurs reprises — tous les pouvoirs dont il aurait besoin pour exercer son rôle, il le joue tout de même assez bien, et quand on commence à recevoir des plaintes des médecins qui se disent pressés par le Collège des médecins, c'est bon signe.

M. FOURNIER: Relativement au mandat, le mandat est de deux sortes, il y a un mandat général d'inspection qui ressort de l'article 105 et il y a un mandat qui est donné par le bureau d'aller inspecter tel et tel endroit. Est-ce que vous croyez que le pouvoir de réglementation établi par l'article 169 relativement à la surveillance générale dépasse les pouvoirs que le gouvernement devrait imposer relativement au

système d'inspection? Ou bien est-ce que vous voulez réglementer la façon dont l'inspection doit se faire par le bureau lui-même?

M. ROBILLARD: Non, c'est sur la procédure tout simplement, sur le fonctionnement interne du comité. Je ne pense pas qu'on soit intéressé spécifiquement à limiter le mandat du comité; je pense que la loi l'exprime de façon assez claire et qu'il doit être assez homogène pour l'ensemble des professions. Non, je pense que c'est tout simplement sur le plan administratif. Un comité qui est nommé par quelqu'un répond à quelqu'un et je pense qu'il doit tout de même y avoir un certain "management" à l'intérieur de corporations aussi considérables que celles des médecins ou des dentistes ou autres qui permet à la corporation de contrôler un de ces comités importants qui engendrent des coûts, des dépenses et qu'elle doit être en mesure de contrôler.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je veux d'abord noter la qualité du mémoire de la Fédération des médecins spécialistes et dire au Dr Robillard notre satisfaction de le voir devant la commission.

UNE VOIX: II ne manque jamais.

M. CLOUTIER (Montmagny): II serait probablement l'un des opinants qui seraient venus devant la commission le plus de fois s'il n'en avait pas manqué une.

M. ROBILLARD: On se reprend.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, nous apprécions d'autant plus sa présence aujourd'hui que sa santé l'aurait peut-être retenu ailleurs.

Alors, M. le Président, je voudrais, comme première question au Dr Robillard, lui demander, à travers son mémoire, celui de la fédération qui est très bien fait, je le répète, une opinion peut-être un peu plus personnelle sur la qualité de la législation qui nous est proposée. Peut-être y aura-t-il des modifications importantes qui se traduiront probablement dans la réalité une fois que la version nouvelle du projet de loi sera apportée? Le ministre n'est pas scandalisé, c'est sa façon de procéder, d'apporter d'abord une première version humainement un peu plus faible et permettant, évidemment, à tous les organismes qui viennent devant la commission et aux membres de la commission de faire véritablement un travail positif et constructif. Et la deuxième version est supérieure.

M. CASTONGUAY: Avant longtemps vous allez avoir la réputation d'être mon porte-parole officieux si vous continuez.

M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai déjà dit que le ministre Castonguay était peut-être l'élève de l'ancien ministre des Affaires sociales, parce qu'il lui avait donné la chance d'entreprendre une période de formation qui l'a conduit à occuper le poste qu'il occupe dans le moment.

Je demanderais au Dr Robillard son opinion personnelle sur la qualité de cette législation si le gouvernement donnait suite à de nombreuses et très bonnes suggestions qui sont faites, comme la plupart des suggestions qui sont contenues dans le mémoire, afin de minimiser l'intervention de l'Etat et du gouvernement dans les mécanismes: qu'elle soit là, mais qu'elle soit moins omniprésente, omnipotente ou qu'elle empêche les corporations professionnelles, du moins celles qui ont plus d'années d'expérience et qui ont une jurisprudence beaucoup plus longue à leur actif, et aussi évidemment en tenant compte que des corporations professionnelles sont plus nouvelles et qu'elles ont, elles aussi, à acquérir une certaine expérience. Elles ont besoin peut-être au début de mécanismes un peu plus précis, d'un peu plus de précision dans la loi. De toute façon, le bill 250, c'est peut-être une moyenne aussi pour toutes les corporations. Mais d'après vous, est-ce que cette nouvelle version que l'on fera du bill 250 continuera d'être un bon outil pour une corporation professionnelle aussi âgée et aussi efficace que celle de l'ordre des médecins?

M. ROBILLARD: Eh bien! nous ne dirons pas comme le Barreau que le bill 250 ne nous concerne pas ou ne nous regarde pas. Si vous me demandez une opinion personnelle, bien sûr, je vais vous la donner. Je crois que c'est une bonne loi. Je ne pense pas qu'elle plaise d'emblée, parce que c'est une loi qui intègre beaucoup de disciplines qui ont encore du chemin à faire pour se rapprocher sur le plan pratique. Je pense que vous avez été en mesure d'apprécier ces problèmes il y a quelques années. Vous savez que ce n'est pas facile, à l'intérieur d'équipes médicales, de rapprocher les gens les uns des autres et ils doivent se rapprocher. Ils vont le faire davantage par la force des choses dans les années à venir. Je pense que, comme parapluie, la loi qui est faite est bonne et va faciliter l'intégration des travailleurs de la santé, comme on a coutume de les appeler maintenant.

Je pense, par contre, que ce que cette loi soulève fondamentalement, c'est de savoir si vraiment on doit accepter le point de vue d'une certaine fraction de la société qui dit que les corporations professionnelles doivent disparaf-tre, ou si on doit réellement croire que les corporations doivent avoir un rôle à jouer dans la société.

Je pense qu'il n'y a pas moyen d'alambiquer le problème ou de jouer avec le problème, de le tourner ou de le farder. Je pense qu'il y aura ou il n'y aura pas une corporation, mais de penser qu'on va maintenir le vestige ou la prétention

d'une corporation en la vidant de son sens, en prenant un oeuf en le vidant par deux petits trous de son blanc et de son jaune et montrer la coquille, je pense que ça ne tromperait personne. Ou il va y avoir une corporation, ou il n'y aura pas de corporation, c'est le sens de ce que le collège a dit, et je pense que c'est le sens de ce que nous essayons de dire nous aussi, d'une façon plus succincte parce qu'en fait ce n'est pas une loi qui nous concerne directement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous partagez l'opinion de la Fédération des médecins omnipraticiens, savoir que certains aspects proposés dans le projet de loi tels que les tarifs, les caisses de retraite, l'assurance-groupe, les fonds d'indemnisation peuvent entraîner encore des aires de compétence imprécises et floues qui peuvent entraîner des luttes, des pertes d'énergie? Est-ce que vous essayez de départager les champs de responsabilité entre les corporations professionnelles et les associations professionnelles?

M. ROBILLARD: Je pense que ce sont des questions mineures, marginales et assez secondaires. On n'a pas de gros problèmes avec la corporation de médecins, on n'en a jamais eu de considérables. On en a eu entre nos membres. Il y a eu bien plus de questions qui se sont posées chez les médecins à savoir si la corporation devait nous représenter ou si ce devraient être les syndicats médicaux. Il ne faut jamais perdre une chose de vue, c'est que le Collège des médecins et les syndicats médicaux, c'est la même chose. Ce sont les mêmes membres. Alors, c'est difficile de penser que les membres vont avoir deux pensées, une dans le thalamus droit et l'autre dans le thalamus gauche. Ils pensent la même chose à peu près, ces gens-là. Ils se posent des questions, ils deviennent confus par moments, puis ils ne savent pas dans quel sens exactement aller pour faire un choix. Mais de dire qu'ils sont en conflit avec eux-mêmes, je pense que ce serait exagérer la question.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ce sont les mêmes personnes mais elles doivent prendre des chapeaux différents. Vous, Dr Robillard, quand vous siégez à la Régie de l'assurance-maladie...

M. ROBILLARD: J'en ai trois, quatre.

M. CLOUTIER (Montmagny): ... vous n'avez pas le même chapeau que quand vous êtes président de la Fédération des médecins spécialistes?

M. ROBILLARD: Bien sûr que non. A certains moments, à certaines époques, on représente les opinions de gens dans certaines parties de leurs opinions qui ont à voir avec certains faits particuliers et on essaie de le faire comme vous le faites, de la façon la plus représentative possible.

M. CLOUTIER (Montmagny): L'allusion au chapeau n'a aucune relation avec votre rhume d'aujourd'hui, Dr Robillard.

Dr Robillard, vous n'avez pas — sauf si j'ai été distrait, vous m'excuserez — traité de la question de la substitution des médicaments dans le mémoire, tantôt.

M. ROBILLARD: J'en ai parlé rapidement. Notre position là-dessus, je pense, la mienne et celle de l'exécutif, puis celle de tout le monde, est assez bien arrêtée, parce que nous y avons pensé et nous avons surveillé ce qui s'est passé ailleurs. Tout d'abord, les médicaments coûtent trop cher, nous sommes convaincus de ça. Deuxièmement, il se prescrit trop de pilules, nous sommes convaincus de ça. Il y a trop de sortes de pilules, puis il y a trop de mélanges de pilules et trop d'annonces pour les pilules, nous sommes convaincus de ça. Nous passons notre temps à enseigner aux étudiants en médecine que l'on peut se comporter avec une vingtaine de pilules, c'est déjà pas mal, quand on connaît ces pilules-là.

Maintenant, ceci étant dit, il demeure que, ou il va nous rester un médecin, ou il ne restera pas de médecin. C'est comme la corporation, on peut démembrer ce bonhomme-là en petits morceaux aussi. On peut faire un diagnosti-queur au début du système, un trieur semi-électronique, on peut faire un diagnosticien, un technicien, puis, ensuite, on peut faire un thérapeute, puis on peut, comme il convient de dire de temps en temps, revaloriser tout ce monde-là puis redéfinir son organigramme. On peut faire ça. A ce moment-là, j'ai encore le concept de ce qu'on appelle l'acte médical. Dans mon livre, l'acte médical se fait en trois temps, il y a un examen, un diagnostic et un traitement. Puis quand on pose mal l'un, généralement on pose mal l'autre, ou tous les trois. Tout ça se tient. De dire qu'on va revaloriser le pharmacien en le faisant devenir thérapeute, qu'il y a quelqu'un qui va faire le diagnostic, après que quelqu'un d'autre aura fait l'examen et qu'on va aller porter cela sur la table de l'officine du pharmacien pour lui dire quoi prescrire pour traiter le malade, je pense que c'est complètement de la foutaise.

Cela ne marchera pas.

J'ai bien du respect pour le pharmacien comme pharmacologue, je suppose, comme thérapeuthe, non. Je ne pense pas que le pharmacien — je l'ai été dans le temps de mes études médicales, brièvement — soit en mesure de poser un diagnostic médical au comptoir, même si on le faisait à l'occasion, ou de donner de sages conseils thérapeutiques. Il peut donner des médicaments, il peut juger dans une certaine mesure de l'équivalence chimique de deux médicaments, mais moi, je ne me ferais pas traiter une méningite ou même une bronchite ou une autre infection par le pharmacien, parce qu'il n'a pas l'entrafnement de thérapeute pour voir les effets secondaires, ajuster le médicament, etc.

Je distingue entre deux choses: le pharmacien est peut-être un bon pharmacologue, mais il n'est pas un thérapeute et il appartient au médecin de prescrire. Maintenant, je suis conscient du coût des médicaments, drogues, pilules, etc. et nous voulons bien l'aider. Vous avez remarqué que, quand le bill sur le conseil de pharmacologie est sorti, notre fédération n'a fait aucune représentation, contrairement aux professions, à tous les corps organisés du Canada, on n'a fait aucune protestation il y a deux ans, trois ans ou quatre ans contre un formulaire.

Tout le monde a fait des représentations contre le formulaire. On y voyait des manoeuvres obscures, dangereuses. Nous n'en avons fait aucune. Nous avons donné notre collaboration à la rédaction d'une liste de produits pharmaceutiques. Nous sommes prêts à nous limiter dans le nombre de produits que nous voulons prescrire, bien que je pense que la liste soit trop restrictive, mais on fera les représentations voulues auprès du ministère.

Nous sommes prêts à nous faire donner une liste et à prescrire le moins cher. Nous sommes prêts à dire à nos membres de le faire, et s'ils ne le font pas comme dans le Par-cost, en Ontario, où il s'est avéré qu'on ne le faisait pas, à ce moment-là, on leur dira: Messieurs, on fait une médiane et le gouvernement paiera seulement les trois ou quatre premiers. Je pense, avant de faire ça, qu'il faut franchir une étape, aller plus loin que ça et dire: Moi, je prescris un médicament, mais je ne sais pas ce qui entre dans le ventre du malade à l'autre bout, ni ce qui en sort, ça peut poser un problème, parce que tout ce qui entre dans le corps d'un malade, souvent en sort intact. Cela dépend de l'enrobage, de la préparation. J'ai vu ça souvent, ç'a fait du bruit.

A ce moment-là, ce qu'on prescrit n'est pas pratique et c'est une chose absolument banale, une question courante de tous les jours. C'est beau de prescrire un médicament mais, quand le malade n'en a aucun bénéfice, le médecin non plus, et nous ne sommes pas rendus bien loin. Je pense que c'est une façon violente, explicite, amusante ou autrement, je ne peux pas insister trop pour dire que si je veux que le malade reçoive tel médicament, je voudrais bien avoir le droit de marquer sur l'ordonnance: Ne pas substituer, s'il vous plaît.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. MASSE (Montcalm): M. le Président, le Dr Robillard, tout à l'heure, a tourné autour d'un problème de fond qui est le suivant: Doit-il ou ne doit-il pas y avoir de corporation? Mais il n'a pas donné sa réponse. Dans l'état actuel de l'évolution de la société québécoise, le rôle accru de l'Etat dans l'exercice des professions, l'apparition de syndicats professionnels qui négocient avec l'Etat patron dans le domaine de l'exercice de leur profession, est-ce qu'il croit qu'il est encore nécessaire pour le bien-être et de la population et des individus qui pratiquent dans un domaine limité, est-ce qu'il doit être encore d'avant-garde d'assurer l'existence de corporations comme principe?

M. ROBILLARD: J'aimerais vous répondre à titre personnel...

M. MASSE (Montcalm): C'est à titre personnel que je pose la question.

M. ROBILLARD: ... de crainte d'être mal interprété, de crainte aussi de laisser passer qu'on ne supporte pas certaines vues qui ont été prises par le Collège des médecins. Je vous dirais bien sincèrement que l'existence, la survie ou la non-survie des corporations professionnelles, cela me laisse assez froid. Je ne vois pas la nécessité particulière des corporations professionnelles dans le contexte. On pourrait vivre sans les corporations professionnelles.

Mais le débat a déjà été fait, c'est une guerre de Troie qui a déjà eu lieu. Quand le gouvernement gaulliste a aboli, après la guerre, la corporation des médecins ou a voulu le faire — je ne sais pas si vous vous souvenez de cette petite histoire — il n'existait pas de corporation ers France, il existait des syndicats médicaux depuis 1891. Vous savez que le régime nazi était antisyndical. Alors, en 1943, l'occupation nazie en France a aboli les syndicats médicaux et a institué les ordres. Et, après la guerre, évidemment, la première chose qu'on a faite après avoir descendu quelques bonshommes, ç'a été de vouloir descendre la corporation aussi. On a fait des comités et il y a eu en Chambre des envolées de toute beauté de la part du ministre des Affaires sociales à l'époque. On a longuement débattu la question: Est-ce qu'il faut des ordres médicaux? Est-ce qu'il ne faut pas des ordres médicaux? Et, assez curieusement, ceux qui sont venus à la rescousse des ordres médicaux ont été des syndicats médicaux, en France, malgré qu'ils n'ont jamais cessé de se chicaner depuis.

On a décidé qu'il y avait deux fonctions très différentes et que c'était commode d'avoir les deux, à condition que les deux juridictions soient bien différentes. Depuis ce temps-là, même si les syndicats — je le répète — ont eu des accrochages sérieux avec la corporation qui prétend représenter de temps en temps les milieux, tant médicaux, syndicaux que gouvernementaux, on considère, que l'ordre des médecins est une bonne chose.

Dans le temps du bill 8, d'auguste mémoire, 39, 40 et 41, à l'époque, quand on parlait du contrôle de l'activité professionnelle et que la Régie de l'assurance-maladie revendiquait un gros morceau de ce contrôle et que, ici, la commission parlementaire, d'un geste élégant, a renvoyé cette attribution au Collège des méde-

cins — en notre absence d'ailleurs — je ne sais pas si vous vous souvenez, à cette époque, nous avions déclaré dans un mémoire qui était un peu plus fougeux que celui-ci que "peu nous importait qui faisait l'inspection professionnelle, à condition que ceux qui la fassent soient compétents et neutres".

Dans la conjoncture actuelle, je pense que si nous, les syndicats, négocions avec les tribunaux civils, ça pourrait se faire, avec le gouvernement, un bureau d'experts; on pourrait toujours dire: Ce sont des membres de la fédération, même si c'étaient les gens les plus compétents du monde. Mais ce ne serait pas impensable. Je pense que l'organisme, surtout avec la nouvelle loi et surtout avec l'avènement des syndicats médicaux, qui représente la compétence ou qui peut la représenter dans la mesure où il sort un peu des carcans étroits des trois membres dont on parlait tantôt et qui peut-être neutre — il est neutre, de toute évidence — c'est le Collège des médecins, la corporation.

C'est une simple question d'opportunisme, de fonctionnarisme. C'est commode, un collège; c'est commode, un ordre de médecins. Et je pense que ça peut respecter l'intérêt du public mieux que n'importe quel autre organisme que je connaisse. C'est dans ce seul sens que je pense qu'il faut faire survivre la corporation. Autrement, il faudrait trouver quelque chose pour mettre à sa place et ce serait une grosse commande pour le ministère des Affaires sociales parce qu'il faudrait recruter pas mal de monde. C'est difficile.

M. LE PRESIDENT: M. Masse.

M. MASSE (Montcalm): Un deuxième point dans votre mémoire auquel vous semblez attacher de l'importance, c'est toute la question du comité de discipline. Vous consacrez plusieurs pages et plusieurs critiques à cette question. Est-ce que vous pourriez détailler ça un peu ou si c'est tout simplement comme vous disiez tout à l'heure, mécanique, ou si c'est un point essentiel dans votre position?

M. ROBILLARD: C'est long parce que c'est long à expliquer. C'est tout simplement qu'on a voulu, en épluchant la loi, voir un peu comment le médecin vivrait avec ça et l'on s'aperçoit qu'il va être surveillé par vingt paires de petits yeux noirs à tout moment, ça peut devenir oppressif. Il y a des inspecteurs de la régie et il y a les inspecteurs du syndicat — parce qu'on en a nous aussi — ensuite, il y a l'inspecteur du collège et, ensuite, il va y avoir le syndic et ensuite il peut y avoir l'inspection professionnelle et ensuite l'accréditation des hôpitaux et ensuite le comité de létalité. En fait, si vous alignez tout le monde qui regarde un médecin agir n'importe quand, et qui peut entrer dans son bureau n'importe quand, ça devient un peu oppressif, cette affaire-là. Je pense qu'il faut tout de même une certaine latitude de pouvoir travailler et d'être jugé a posteriori, pas toujours peut-être a priori.

Dans ce sens-là, nous avons pensé que l'acheminement des plaintes devait se faire dans une certain ordre, qu'il devrait y avoir un certain tamisage, de façon que le médecin ne soit pas accusé à gauche et à droite, comme on l'a vu dans les journaux de Montréal la semaine dernière, de faits extravagants et que ceci, automatiquement, l'amène en discipline. Est-ce qu'il va passer son temps en discipline? Si c'est long, c'est parce que c'est un peu complexe à exprimer, mais au fond, ce n'est pas une chose majeure pour nous.

M. MASSE (Montcalm): D'accord. Merci. M. LE PRESIDENT: M. Guay.

M. GUAY: M. le Président, j'aurais une question à poser. Dans vos commentaires sur la Loi des techniciens en radiologie, je remarque à la page 53 de votre mémoire que vous recommandez à propos du code des professions que soient supprimés les articles concernant l'émission de permis de radiologie ou radiothérapie à des professionnels autres que les médecins, les dentistes ou les médecins vétérinaires. Est-ce que vous pourriez formuler quelques commentaires? Pourquoi?

M. ROBILLARD: Je pense que la tendance partout au monde est de réserver l'utilisation des radiations ionisantes entre les mains de gens compétents, parce que cela comporte de réels dangers. Alors, l'office faisant des normes qui permettent de décerner des permis à des individus qui feront de la radiothérapie ou de la radiologie diagnostique nous pensons que ces permis doivent être, dans les lois organiques qui les concernent, restreints aux médecins, aux dentistes et aux médecins vétérinaires. Et dans les faits, ce sont les gens qui s'en servent en ce moment. Si d'autres étaient appelés à se servir des radiations pour fins thérapeutiques ou diagnostiques, je pense qu'à ce moment-là ils devraient faire appel à ceux qui sont entraînés pour faire ces radiations.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: Dr Théberge, député de Témiscamingue.

M. THEBERGE: Dr Robillard, malheureusement j'étais absent ce matin parce que je demeure un peu loin. Je n'ai pu suivre votre mémoire. Maintenant, si vous me permettez, à la page 43 de votre mémoire vous semblez ne l'article 23 qui, en somme, est la définition de la Fédération dentaire internationale. Je vais vous poser deux questions. Est-ce que vous avez consulté le collège des chirurgiens avant de donner votre nouvelle définition?

Deuxièmement, ne trouvez-vous pas que c'est un peu restrictif... Surtout à la dernière partie de votre premier paragraphe quand vous dites "le diagnostic et le traitement en milieu hospitalier des affections de la cavité buccale", cela voudrait dire qu'un dentiste, qu'il soit spécialisé ou non, ne pourrait pas diagnostiquer une affection buccale s'il est à son bureau?

M. ROBILLARD: Pour ce qui est de la première partie de votre question, la loi propose: "Que constitue l'exercice de l'art dentaire tout acte qui a pour objet de diagnostiquer ou de traiter les maladies des dents — votre problème — de la bouche ou des maxillaires chez l'être humain". Nous avons pensé, non pas en questionnant l'association dentaire, mais en questionnant les chirurgiens plasticiens, les chirurgiens qui font à l'ORL le traitement de ces affections, que cette définition incluait le traitement de toutes les tumeurs bénignes et malignes et de toutes les infections de la bouche. C'est pour cela que nous avons suggéré qu'on parle de prévention et de diagnostic des états pathologiques du système dentaire et leurs complications locales, ainsi que le diagnostic et le traitement en milieu hospitalier des affections de la cavité buccale et des maxillaires. Pourquoi avons-nous dit en milieu hospitalier? C'est que l'association dentaire, l'association des chirurgiens buccaux a signé une entente avec le gouvernement, avec le ministère des Affaires sociales, qui est présentement en vigueur avec une liste d'interventions chirurgicales qui peuvent être faites en milieu hospitalier. Premièrement, parce que c'est un fait; deuxièmement, parce que nos médecins qui travaillent en milieu hospitalier avec les chirurgiens buccaux font équipe avec eux. J'ai fait venir les deux groupes, nous avons parlé avec les deux groupes. Il se développe très nettement en milieu hospitalier une équipe qui englobe les chirurgiens en oto-rhino-laryngologie, les plasticiens, et qui font bon ménage et nous pensons que cette équipe doit continuer de se développer et qu'elle ne peut pas se développer ailleurs qu'en milieu hospitalier. Il y a une extension graduelle du champ d'intervention des médecins-dentistes, n'est-ce pas? Surtout de ceux qui sont spécialisés. C'est le même phénomène qu'on a vu en médecine et, évidemment, il y a des zones grises parce que le chirurgien-dentiste commence à faire des interventions. Seulement, il faut bien se rendre compte qu'il ne peut guère procéder très loin dans ce champ-là s'il n'a pas l'entier support de l'équipe médicale.

J'ai demandé des dossiers, je me suis informé de la procédure qui est suivie et, dans nombre de cas, Vous avez des opérations en intervention urgente, trachéotomie, etc., qui sont faites chez des médecins, par des médecins, sur des malades qui ont été traités par des chirurgiens buccaux dans des cas de traumatisme de la figure, par exemple. C'est dans ce sens-là que nous avons fait nos recommandations.

M. THEBERGE: Je comprends que les spécialistes en chirurgie buccale sont payés seulement en milieu hospitalier, mais ce n'est pas parce qu'ils n'auraient pas pu être payés au bureau, c'est parce que la loi fédérale le demandait. Votre argument ne me semble pas tellement fort.

M. ROBILLARD: J'ai dit que c'était un fait que la loi reconnaissait et que les conventions reconnaissaient dans les faits et j'ai dit aussi que de par l'expérience acquise de ce qui se passe dans ce genre de chirurgie, nous pensons qu'elle doit être faite, comme d'ailleurs la chirurgie plastique, la chirurgie de l'oto-rhinolaryngologie, en milieu hospitalier. Je pense que cela assure la protection du malade.

M. THEBERGE: II est évident qu'en grande chirurgie, il n'y a pas d'objection à ce que nos spécialistes aillent travailler en milieu hospitalier, c'est normal. Mais je trouve que votre définition est trop restrictive en ce sens que, si un dentiste qui n'est pas spécialiste, voit une maladie dans la cavité buccale — il ne peut la traiter s'il n'est pas spécialisé — au moins il peut la diagnostiquer à son bureau. Mais, d'après votre définition, il ne pourra le faire.

M. ROBILLARD: D'après la définition, il peut la traiter aussi.

M. THEBERGE: En milieu hospitalier.

M. ROBILLARD: Si on regarde la définition que comporte la loi en ce moment, elle est très claire. Le dentiste peut traiter toute infection de la bouche, sans exception. Ceci veut dire les cancers de la bouche, les tumeurs bénignes de la bouche, toutes les infections de la bouche, sans exception. C'est là-dessus qu'on s'est posé des questions. Si tel est le désir des chirurgiens dentistes, ils sont libres de l'exprimer devant le législateur. Nous avons cru, nous, que nous devions faire la contrepartie, non pas parce que nous ne faisons pas bon ménage, je vous répète que nous nous entendons très bien avec les chirurgiens dentistes, il n'y a aucune sorte de friction. Quand la convention est arrivée et qu'il a été question d'établir des listes, etc., nous avons mis, à la même table, chez nous, les chirurgiens dentistes, les plasticiens, les ORL. C'est une soirée qui a été sans difficulté. Il n'y a eu aucun problème. On voudrait seulement que les choses soient bien faites.

M. THEBERGE: Deux belles professions. M. ROBILLARD: Qui ne plaisent pas.

M. LAVOIE (Wolfe): Est-ce que l'extraction de dents est considérée comme chirurgie buccale?

M. ROBILLARD: L'extraction de dents n'est pas de la chirurgie pour nous.

M. LAVOIE (Wolfe): Et pour la Régie de l'assurance-maladie, est-ce que cela est considéré comme de la chirurgie buccale?

M. CASTONGUAY: Je pense que vous faites référence à certaines pratiques que nous constatons — j'espère qu'elles ont tendance à diminuer au lieu d'augmenter — d'hospitaliser des personnes pour que l'extraction de dents soit couverte, étant donné que cela est fait en milieu hospitalier. Ce n'est évidemment pas le sens et le but de l'entente qui est intervenue avec les spécialistes en chirurgie buccale et l'association des chirurgiens dentistes, mais dans les faits, c'est malheureusement ce qui semble se produire à certains endroits. J'ai demandé à la Régie de l'assurance-maladie d'examiner l'affaire d'aussi près que possible; aussi, nous avons communiqué avec le Collège des chirurgiens dentistes à ce sujet-là.

M. BOIVIN: L'état général du malade peut nécessiter une hospitalisation pour une extraction dentaire?

M. CASTONGUAY: D'accord, mais pas d'une façon généralisée.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Vous avez mentionné durant votre allocution qu'il devrait y avoir à la fin des études et avant d'avoir un droit de pratique pour les membres de différentes corporations, un examen, que les étudiants ou les postulants à une profession auraient à subir devant le collège, devant la corporation; ceci serait avant d'avoir un droit de pratique et après avoir terminé les études universitaires, si je vous ai bien compris.

M.ROBILLARD: Oui, la corporation —et c'est prévu dans la loi — a le droit de faire passer tout examen à tout médecin étranger pour s'assurer de sa compétence. Je pense que la corporation, si elle est responsable — et c'est la responsabilité que la loi lui donne — de la qualité des soins qui vont être donnés par des gens à qui elle donne un diplôme, elle est aussi en droit de s'assurer que ces gens ont reçu une formation convenable.

Maintenant on peut dire: On va faire confiance aux universités. On peut dire: Le diplôme québécois doit être bon, même si on met en doute le diplôme qui est donné en Colombie-Britannique, qui est donné en Angleterre ou qui est donné aux Etats-Unis. Je pense que la corporation, si vraiment on lui donne l'obligation de maintenir la qualité des soins — je parle de celle des médecins — on doit avoir le privilège d'examiner, si elle le juge à propos, les candidats qui terminent. On pourrait dire peut-être — certains le diront sans doute, on l'a déjà entendu — que ce serait là un moyen pour la corporation de diminuer le nombre de gens qui ont accès à l'exercice d'une profession ou potentiellement de diminuer le nombre de gens. Je pense que ceci peut être facilement contourné. La corporation — et c'est une discussion qui a eu lieu récemment — peut fort bien utiliser des procédures d'examen qui sont reconnues dans toute l'Amérique du Nord ou qui sont reconnues partout ailleurs au Canada. On peut fort bien appliquer ces examens ici, dans la province, et cela nous donnerait une bonne opinion de la valeur du cours, des cours qu'on donne dans nos facultés. C'est le procédé qui est suivi partout en Amérique du Nord; les examens sont standardisés partout au Canada et je pense qu'on ne s'en porterait pas plus mal au Québec si la corporation doit avoir la responsabilité de garantir la qualité des services qui sont donnés par ses membres.

M. SAINT-GERMAIN: Maintenant si cette collaboration commençait au tout début des études de l'étudiant, c'est-à-dire s'il y avait collaboration entre les diverses facultés et la corporation afin d'établir un cours adéquat et qui serait satisfaisant et pour la corporation et pour l'université, vous ne croyez pas qu'on pourrait dispenser les jeunes de ces examens?

M. ROBILLARD: Je pense que si on développait un des deux mécanismes suffisamment, on pourrait se dispenser d'un des deux.

Ici, on a parlé des deux: la collaboration de la corporation et des facultés tout au long, plus un examen. Je serais d'accord avec vous: si cette collaboration était bien faite, qu'il y avait une participation au programme, qu'il y avait une possibilité pour la corporation d'exercer vraiment un certain droit de regard sur les programmes et qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter de la qualité des cours qui sont donnés, nous pourrions supprimer l'examen. Je vous dis cela parce qu'il faut faire attention à l'évolution de l'enseignement de certaines disciplines. Le diplôme d'Etat, ce n'est pas une mauvaise chose comme le promulgue la loi, mais le gouvernement est soumis à des pressions terribles au point de vue de la présélection, de la postsélection des candidats. Vous savez sans doute, pour prendre l'exemple de la médecine, qu'en France le nombre d'étudiants en médecine est fantastiquement élevé et ce qui se fait, ceci pour des raisons politiques, parce qu'on ne peut pas empêcher l'étudiant de rentrer. La population en France, avec l'accession à la gratuité d'éducation, a refusé la présélection en parlant de chances égales. On laisse le poulain partir, on lui laisse faire un ou deux ans de droit ou de médecine et après, on le sacrifie; et après, on le laisse terminer son externat, et là on le sacrifie encore, d'une façon beaucoup plus draconienne avec les concours des hôpitaux. Alors le gouvernement va traverser, je pense, ici au Québec exactement la même situation. On va avoir de la part du public une résistance

grandissante à exercer une présélection en médecine et dans d'autres domaines. Les gens vont demander chances égales. Le nombre d'étudiants en médecine qui, idéalement on pense est de 120, 130, avec les professeurs qu'on a... C'est déjà énorme au Québec qu'on produise tant de médecins, c'est très difficile. On s'en va à 250 dans l'immédiat et je vois des promotions d'ici cinq ans, dix ans, de 300 à 400 étudiants. A ce moment-là, je pense qu'on va avoir très sérieusement un problème de qualité d'enseignement de médecine au Québec et qu'il se peut fort bien, parce que je ne vois pas d'où vont venir les professeurs qui nous manquent en ce moment... Je pense qu'il devrait, à ce moment-là, y avoir un organisme qui serait capable de dire: Est-ce qu'on maintient les standards au Québec? Est-ce que vraiment notre cours de médecine au Québec est bon?

Je pense que vous avez eu cette discussion avec les intéressés, M. le ministre, mais le LMCC est un examen, qui, même s'il est d'inspiration canadienne, est un bon examen et il s'inspire des examens américains et vous permet de dire si le cours qu'a reçu les individus est bon ou non. On peut discuter la valeur des examens, un certain tamisage de ce genre-là. Je pense que le "fellowship" du Collège royal vous permet de dire si quelqu'un connaît la spécialisation ou non.

L'examen du collège de même, à l'heure actuelle. Ils sont aussi difficiles l'un que l'autre, je le sais pour les avoir passés tous les deux. Je pense que le RLCC est un bon examen de terminaison de cours de médecine et que, si on n'arrivait pas à passer cet examen-là, je poserais des doutes sérieux sur la qualité des cours qui sont donnés et je me demanderais ce que vaut le diplôme d'Etat au Québec.

M. SAINT-GERMAIN: Dans ces conditions, est-ce qu'il n'y a pas...

M. CASTONGUAY: Me permettez-vous ici seulement un petit commentaire? Je viens de rencontrer, il y a quelques jours, des représentants de la faculté de médecine de l'université Laval et ils me disaient qu'ils venaient d'avoir la visite de — là j'oublie le nom — l'American Board...

M. ROBILLARD: L'American Accreditation Board.

M. CASTONGUAY: ... alors, il y a aussi ce mécanisme-là qui joue un rôle assez important et il vient justement de faire la visite...

M. ROBILLARD: Faut-il souligner que les bureaux d'accréditation américains sont venus constamment au Québec et que le dernier rapport sur la faculté de médecine de Montréal a parlé du miracle de la médecine canadienne-française, en se demandant comment il se faisait qu'on avait réussi à faire ce qu'on avait fait et qu'on ne pensait pas que cela pouvait durer sans une réforme considérable. Il y a eu des prodiges de faits et je vous dis tout simplement que ces prodiges ont été faits avec 120 étudiants, dans des circonstances difficiles.

Je suis inquiet, moi, de l'avenir de l'enseignement de la médecine au Québec. Pas plus inquiet qu'il le faut, vous savez, mais je voudrais simplement dire qu'il me semble qu'on devrait garder un corps quelconque, deux, ce serait encore mieux: le gouvernement qui surveille par le ministère de l'Education et le Collège des médecins qui surveille en dehors, cela en ferait deux à surveiller. S'ils ne sont pas d'accord, la population le verra et tirera ses conclusions. Je pense qu'on devrait laisser cette prérogative au Collège des médecins de pouvoir aller faire des sondages et savoir ce qui sort de ce cours-là.

M. SAINT-GERMAIN: Vous élaborez ici, assez longuement, en ce qui regarde la loi sur l'optométrie, cette question de pathologie et vous ne voulez pas, du moins vous attachez de l'importance au fait que les optométristes pourraient empiéter sur la profession médicale. Est-ce que le fait d'avoir senti cette nécessité "d'élaborer" au point de vue pathologique a comme source, ou comme cause le changement de définition de la profession à l'article 14 du projet de loi sur l'optométrie, ou s'il y a d'autres raisons qui sont à la source de vos craintes?

M. ROBILLARD: Si M. le Président le permettait, le Dr Michel Mathieu, à ma droite, qui est président de l'Association des ophtalmologistes du Québec pourrait donner une vue plus détaillée de l'aspect technique de ce problème-là.

Pour ma part, en ce qui regarde la fédération, nous avons été intrigués par le fait que dans cette définition qui est donnée de l'optométrie, on élargit assez considérablement le champ de l'examen, le champ du diagnostic sans déboucher sur le champ de la thérapie. Après avoir questionné nos amis, les optométristes, qui sont venus et que l'on voit souvent — parce qu'on voulait développer une autre idée tantôt, indépendamment, séparément, les ophtalmologistes qui sont associés à notre fédération— l'Association professionnelle des optométristes, pour essayer de comprendre les deux côtés, nous ne voyons pas quelle est, dans l'immédiat, l'utilité de développer tout cet aspect d'examen et de diagnostic pour lequel nous ne pensons pas que l'optométriste, dans l'état actuel des choses, soit préparé.

Maintenant, je pense que je vais laisser le détail au Dr Mathieu. Par contre, j'avais écrit beaucoup plus long là-dessus parce qu'à la suite des rencontres, c'est un problème qui nous avait préoccupés. Je pense qu'il doit y avoir un moyen de faire — et cela fait longtemps qu'on s'en préoccupe — le joint entre les optométristes et les ophtalmologistes. Je pense que

séparer les deux juridictions et se retrancher comme cela, on s'en va en s'écartant, et je pense qu'on va tout simplement laisser évoluer deux professions en parallèle au lieu d'en faire deux professions complémentaires. Moi, je ne vois pas d'autres solutions que d'en faire deux professions complémentaires. Il me semble que les optométristes n'en savent pas tout à fait assez long pour être des docteurs en ophtalmologie, mais en savent certainement plus long que pour être simplement des auxiliaires médicaux. Je suis convaincu de cela. A mon avis il y a deux paliers, pas hiérarchiques, pas un qui domine l'autre, pas un qui est l'employé de l'autre, mais il doit y avoir entre gens intelligents un moyen de faire travailler ces deux individus-là en équipe.

Je pense qu'on va dans l'immédiat, assez rapidement, faire l'expérience, parce qu'on n'a pas de préjugé.

M. SAINT-GERMAIN: Lorsque vous parlez de professions complémentaires, est-ce que vous voulez dire que vous n'admettriez qu'une profession à avoir le champ exclusif de la pathologie et l'autre profession à avoir le champ exclusif de la vision et des problèmes optométriques?

M. ROBILLARD: Tel que je comprends le champ de l'optométrie, comme on me l'a expliqué, j'ai regardé le "background" de la formation, etc., je crois, à moins que ma lanterne soit mal éclairée, que l'optométriste est qualifié pour faire le diagnostic et prescrire un traitement des affections de l'acuité visuelle, pas de l'appareil visuel. L'appareil visuel, pour moi, ça commence dans le cortex calcarin et ça se termine dans la rétine avec tous les corps transparents et corps optiques; ça, c'est la vision telle que moi je la conçois, telle qu'on la conçoit médicalement. Je pense que, pour être capable de saisir le processus pathologique, physiologique de la vision à partir du cortex calcarin dans les zones cérébrales qui enregistrent les ondes optiques jusqu'à l'acheminement du nerf optique, la réception de l'image et tout ce que ça comporte, et pour connaître les affections qui peuvent influencer l'acuité visuelle, la vision, il faut savoir qu'en France — je n'ai pas de chiffres ici mais je ne dois pas être loin — à peu près 50 p.c. des cas de cécité sont dus au diabète et aux rétinites qui en dérivent. Je pense donc à ce moment-là que l'optométriste n'est pas qualifié dans le champ du diagnostic des maladies de la vision. Par contre, je suis persuadé qu'il est qualifié dans le champ de l'examen et du diagnostic des affections qui vont donner des troubles d'acuité visuelle. Mais, au plan technique, je vous donnerais l'expert en la matière, le Dr Mathieu, parce que c'est le plus loin que moi je suis allé dans mon cours pour essayer de comprendre comment on peut rattacher les optométristes aux ophtalmologistes.

M. SAINT-GERMAIN: Sans être spécialiste, j'aimerais bien vous entendre dire si vous admettez qu'il y a des troubles au point de vue de la vision qui sont des troubles exclusivement optométriques et qu'il y a d'autres troubles qui sont exclusivement pathologiques et que les deux nécessairement ne se marient pas?

M. ROBILLARD: Je pense qu'on tourne toujours autour du même problème dans n'importe quelle de ces disciplines que les Français appellent des disciplines médicales partielles, parce qu'elles prennent un champ de la médecine. Est-ce qu'on en est capable ou n'est-ce pas une échappatoire à un de ces artifices que la profession médicale, à l'occasion, sait prendre? Il y a de mythes comme ça, je pense. Démystifiant cette idée du diagnostic, je suis convaincu que, sans un cours de médecine, on n'est pas capable de faire un diagnostic différentiel. Que ce soit en chiropraxie, comme le disait le juge Lacroix, ou dans n'importe quelle discipline — et je n'ai pas aucun préjugé — si on n'est pas capable de faire un diagnostic différentiel, on ne peut pas faire un diagnostic précis, et si on ne peut pas faire un diagnostic précis, on ne peut pas faire un traitement. Pas parce que les médecins font toujours des diagnostics précis, ce n'est pas cela que je veux dire. Il faut qu'on se comprenne bien. Je suis persuadé que, quand le médecin fait un mauvais diagnostic — et je suis persuadé que ça arrive — son traitement, à moins d'une chance bien extraordinaire, ne sera pas bon. Mais tout tourne autour de cette notion de diagnostic.

Maintenant, si on veut pousser l'idée plus loin — enfin le plus loin que je peux aller — est-ce que d'autres gens que le médecin peuvent participer au diagnostic? Est-ce que le malade peut garder une certaine sécurité avec une équipe qui, elle, se charge du diagnostic? Là, je pense que oui. Quelle est la relation à ce moment-là entre les gens qui, dans une équipe, travaillent à établir un diagnostic et le médecin qui en est responsable ou qui peut diriger, lui ou un autre? Je n'en ai pas vu d'autres encore dans la démarche au point de vue des dirigeants d'équipes médicales. Si on regarde les optométristes, si on regarde l'ensemble de tous les autres, ce n'est pas différent à mon sens. Regardez le pléthore de gens que le médecin emploie maintenant pour poser un diagnostic. Avant ça, il avait sa petite valise noire, son stétoscope, un peu de mémoire puis ses dix doigts et il posait des diagnostics, bons ou mauvais; la plupart du temps à mon avis, ils étaient mauvais, peu importe. Il était peut-être plus sympathique qu'il ne l'est maintenant, mais enfin, c'est une autre question. De toute façon, si, pour poser un diagnostic aujourd'hui, vous n'avez pas les techniciens en radiologie, si vous n'avez pas les audiomètres, si vous n'avez pas les analyses de laboratoire, les dix sortes de laboratoires, vous êtes perdu. Quand vous en-

trez à l'hôpital, puis quand vous relevez un dossier le matin, si vous regardiez pendant deux secondes le nombre de gens qui ont participé à établir le diagnostic biologique, etc., vous aurez recruté sans effort au moins une vingtaine de personnes immédiatement.

Je pense que la solution philosophique au problème, c'est d'intégrer l'optométriste dans cette équipe.

Maintenant, à quel titre, et quelle fonction exactement va-t-il occuper? Quelle va être sa relation avec le médecin qui, lui, est supposé être capable de poser un diagnostic, au moins de diriger l'équipe? C'est sur ça que j'aimerais qu'on puisse discuter, négocier et s'entendre, et je pense que ça se fera seulement quand les gens se connaîtront, travailleront ensemble dans le même lieu. Je pense que c'est ça qu'il faut essayer. Il faut faire travailler ces gens-là ensemble, dans le même lieu, les faire se rencontrer une couple de fois par semaine. A ce moment-là, ils vont être capables de trouver des techniques pour se comprendre.

Il n'y a pas un monde qui sépare les optométristes des médecins. Les techniques scientifiques qu'ils emploient sont les mêmes que nous connaissons. Nous parlons le même langage, ce n'est pas de la chiropraxie. En chiropraxie, on ne parle pas le même langage. Nous pourrions difficilement nous entendre, nous ne parlons pas le même langage. Mais c'est sûr, quand on parle de lentilles, de réfraction et de structures organiques avec un optométriste, on parle le même langage. Nous devrions pouvoir nous entendre.

M. SAINT-GERMAIN: Mais si on parle de myopie, est-ce que vous considérez la myopie et l'astigmatisme comme étant une pathologie des yeux?

M. ROBILLARD: Le Dr Michel Mathieu, M. le Président, qui est l'expert en la matière — il est président de l'Association des ophtamolo-gistes — est à mon avis, plus compétent que moi sur cette question.

M. MATHIEU: M. le Président, M. le ministre, vous savez que nous avons à titre d'Association des ophtamologistes, présenté des mémoires, très courts d'ailleurs, et je ne suis venu ici aujourd'hui qu'au cas où il y aurait des questions d'ordre technique. Si nous avons fait des mémoires, si je suis ici aujourd'hui, ce n'est pas pour venir défendre l'ophtamologie, pour essayer d'attraper quelque chose du gâteau ou garder quelque chose pour nous.

Nous sommes des médecins et, par les lois qui nous régissent, nous avons tous les privilèges. Si nous venons ici, c'est pour essayer de vous donner l'opinion que notre expérience nous permet d'émettre, à savoir ce qui est bon pour la population. S'il est question d'optomé-triste, de ce que l'optométriste doit faire ou peut faire, et de savoir qui va être utile à la population, c'est là le problème, je pense, et c'est à ça que nous devons répondre.

L'ophtamologiste, lui, a une formation qui lui permet de tout faire, y compris l'optométrie, parce que l'ophtamologiste existe depuis des années et les optométristes n'existent que depuis le commencement du siècle. Ce qui a fait naître l'optométrie, c'est le besoin que les gens ont eu d'avoir une vision claire quand les lunettes ont commencé à arriver. Il y a encore quelques années et encore même dans certains Etats aux Etats-Unis, vous allez dans un magasin, il y a une série de lunettes étalées sur un comptoir, vous les choisissez et vous les ajustez, et vous achetez une paire de lunettes comme un chapeau.

Seulement, il y a des gens, à un moment donné, qui se sont demandé, comme il n'y avait pas suffisamment d'ophtamologistes pour faire les examens nécessaires, s'il n'était pas bon que des gens puissent apprendre à bien examiner les yeux pour que les gens aient des lunettes qui soient bonnes. C'est comme ça que l'optométrie est née. Actuellement, l'optométriste rend service parce qu'il y a une proportion très grande de la population qui souffre de troubles de la rétraction et nous ne pouvons pas, nous, comme ophtamologistes, répondre à cette demande.

Par conséquent, les optométristes rendent service à la population. Maintenant, si on veut leur faire faire plus que ça, si on veut tranquillement leur donner des privilèges pour lesquels ils ne sont pas préparés, c'est là qu'on risque de ne plus rendre service à la population. Si on permet à l'optométriste de faire des actes, des gestes, des examens, il y a une foule d'actes que l'on peut faire. On peut acheter une foule d'instruments, mais si on n'a pas les connaissances de base nécessaires pour faire ces gestes, pour poser ces actes, à ce moment-là, on n'est pas utile à la société. La nouvelle définition — je reviens à votre question — à notre avis, en substituant le mot "vision" au terme "d'acuité visuelle", pour la personne qui n'est pas initiée, ça semble anodin pour quelqu'un qui s'y connaît.

Il y a un monde de différence entre faire des examens dont le but est d'évaluer l'acuité visuelle et des examens dont le but est d'analyser la vision. Parce que la vision, comme l'a dit le Dr Robillard, c'est fonction du cerveau. Une tumeur cérébrale peut modifier la vision. Il y a une question de... Alors, nous croyons que l'optométriste est parfaitement compétent pour s'occuper de tous les problèmes qui ont trait à l'acuité visuelle. Mais si vous le définissez comme étant un spécialiste de la vision, vous ouvrez un éventail d'examens que sa formation, n'étant pas médicale, ne lui permettra pas de faire adéquatement.

Voilà, en résumé, un peu la position. Et nous développons cette idée dans notre mémoire. Nous croyons qu'il n'est pas dans l'intérêt de la population de permettre à des gens de faire des examens pour lesquels ils n'ont pas la formation

nécessaire, pour les choisir, d'abord, parce qu'il y a certains examens... Prenons un exemple, le champ visuel peut être pertubé par une foule de pathologies qui peuvent être oculaires et qui peuvent être systémiques. Est-ce qu'on va se mettre à faire des champs visuels à tout le monde? Dans ma pratique personnelle, je fais en moyenne un, deux ou trois champs visuels par semaine. Si je ne connais pas les indications précises que m'a apprises mon cours de médecine, que m'ont apprises les connaissances que j'ai en neurologie, je vais faire des champs visuels à tout le monde. Cela va coûter ce que ça coûtera mais ça ne rendra pas service.

Nous croyons que l'optométriste a une valeur et nous sommes d'accord, avec le Dr Robillard, qu'il faut trouver une façon de se suppléer les uns aux autres. N'essayons pas de faire de l'optométriste une espèce de miniophtalmologiste. Parce qu'il n'y a pas un ophtalmologiste à Saint-Tite, on va faire une espèce d'ophtalmologiste qui va donner l'impression à la population de la région qu'elle a quelque chose qui n'est pas tout à fait ce qu'on trouve dans les grands centres mais qui n'est pas trop mal. On va créer un faux sens de la sécurité chez les gens si on essaie de créer une espèce de personnage qui n'est pas tout à fait un ophtalmologiste mais qui est un peu mieux que ce que pourrait être l'optométriste qui est effectivement un spécialiste de l'acuité visuelle.

M. SAINT-GERMAIN: Je laisse bien aux gens le soin de faire la différence; ils sont bien capables de faire ça, croyez-moi. Mais j'avais posé une question bien précise: Est-ce que vous considérez, par exemple, la myopie, l'astigmatisme puisque vous voulez parler d'acuité visuelle, comme étant des causes pathologiques, comme étant en elles-mêmes, une pathologie des yeux?

M. MATHIEU: La distinction est très philosophique. Disons que nous considérons la myopie comme une déficience ou une anomalie. Le mot "maladie" est peut-être trop fort et le mot "normal" est certainement trop faible. Alors, c'est une déficience, c'est une anomalie, c'est quelque chose qui n'est pas normal.

M. SAINT-GERMAIN: N'être pas normal n'est pas nécessairement une maladie. Quelque chose qui n'est pas normal, ce n'est pas nécessairement quelque chose...

M. MATHIEU: Ce n'est pas nécessairement une maladie, non.

M. SAINT-GERMAIN: Vous voulez astreindre la pratique de l'optométrie à une question d'acuité visuelle, exclusivement.

M. MATHIEU: Surtout, oui.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous ne croyez pas, par exemple, que la vitesse de perception c'est comme l'acuité visuelle? On peut avoir une perte de vitesse de perception sans qu'il n'y ait aucun cas de pathologie, c'est un autre problème réellement...

M. MATHIEU: Vous vous référez à ce qu'on appelle la vitesse de lecture ou...

M. SAINT-GERMAIN: La vitesse de lecture, c'est encore une facette.

M. MATHIEU: Je n'ai aucune objection à ce que les optométristes fassent des cours de lecture rapide. Cela d'ailleurs n'a rien à voir avec les yeux, c'est quelque chose qui a été inventé par des psychologues et la plupart de ceux qui donnent des cours de vitesse sont un peu des psychologues. On rend le cerveau beaucoup plus attentif, c'est un cours d'attention, ce n'est pas un cours de vision.

M. SAINT-GERMAIN: Vous ne faites pas de relation entre la vision, les yeux...

M. MATHIEU: Et la vitesse de lecture? Pas du tout. Il n'y a aucune relation entre les yeux mêmes et la vitesse de lecture. Vous allez avoir des myopes, vous allez avoir des gens qui ont des gros défauts visuels qui vont être des liseurs rapides.

Vous allez avoir des gens qui ont des yeux parfaitement normaux à tout point de vue et qui vont être lents de lecture.

M. SAINT-GERMAIN: Cela, je l'avoue, je l'ai même constaté dans ma pratique. C'est la raison pour laquelle je vous pose spécifiquement la question. Vous parlez d'acuité visuelle, je suppose que vous voulez la laisser â l'optométrie parce qu'elle ne regarde pas, si vous voulez, ni indirectement ni directement, la question pathologique. Mais, est-ce la vitesse de lecture ou la vitesse de perception? A la guerre, on enseignait à des aviateurs à percevoir les choses vite et bien en quelques secondes.

M. MATHIEU: Certainement.

M. SAINT-GERMAIN: Alors, on a développé chez ces aviateurs des habiletés visuelles qu'ils n'avaient pas, on les a développées.

M. MATHIEU: Certainement.

M. SAINT-GERMAIN: Ceux qui, antécédemment aux exercices, percevaient plus tranquillement, ne percevaient pas plus lentement â cause de pathologie.

M. MATHIEU: Ce que je veux dire, c'est qu'on n'a pas développé leurs yeux. On a développé leur rapidité de perception cérébrale. Ce ne sont pas des exercices visuels qu'on a fait faire.

M. SAINT-GERMAIN: On n'a pas développé leurs yeux ! Ils ne voyaient pas avec leurs pieds, dans ce temps-là, lorsqu'ils voyaient plus vite. Ils voient encore avec l'appareil visuel. Il y a certainement une transformation qui s'est faite et au niveau du cerveau et au niveau de l'appareil visuel.

M. MATHIEU: Justement, l'appareil visuel...

M. SAINT-GERMAIN: Si vous me permettez, je crois que c'est là la distinction.

M. MATHIEU: La distinction...

M. SAINT-GERMAIN: C'est là la distinction entre un ophtalmologiste et un optométriste.

M. MATHIEU: A savoir?

M. SAINT-GERMAIN: A savoir que les habiletés visuelles n'ont rien à voir avec la pathologie des yeux. Lorsque vous dites que le pathologiste, au point de vue médical, devrait avoir un champ exclusif d'action, je le crois. A titre d'optométriste, je serais le dernier, si vous voulez, à permettre aux optométristes de pratiquer la médecine. Je crois d'ailleurs qu'on a un code de déontologie assez sévère. Mais, lorsque vous parlez d'optométrie, je crois que la formation de l'ophtalmologiste ne se compare pas à la formation de l'optométriste. Je crois qu'il faudrait que ce soit su.

M. MATHIEU: Dans quel sens?

M. SAINT-GERMAIN: Dans le sens scientifique et clinique du mot.

M. MATHIEU: Ne se compare pas... vous voulez dire...?

M. SAINT-GERMAIN: A la connaissance que l'ophtalmologiste a eue lors de sa formation universitaire.

M. MATHIEU: Oui, je crois que nous sommes d'accord.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous êtes d'accord qu'il y a une différence de niveau de connaissances?

M. MATHIEU: Tout à fait d'accord, oui.

M. SAINT-GERMAIN: Pour ce qui regarde les problèmes optométriques, êtes-vous d'accord que cette différence est à l'avantage des optométristes?

M. MATHIEU; Non. Là, je ne serais pas d'accord.

M. SAINT-GERMAIN: Bon!

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Dr Mathieu, pourriez-vous nous dire combien d'années d'études cela prend pour la formation d'un ophtalmologiste?

M. MATHIEU: Cela prend d'abord un cours de médecine et ensuite quatre années supplémentaires de formation en ophtalmologie, ce qui fait actuellement neuf années.

M. BOIVIN: Et un cours d'optométrie? Si l'Ecole d'optométrie était ici, on pourrait lui demander combien d'années d'études sont nécessaires pour la formation d'un optométriste.

M. MATHIEU: Actuellement, c'est trois ans.

M. LE PRESIDENT: M. Lavoie, député de Wolfe.

M. LAVOIE (Wolfe): M. Mathieu, en 1963, vous avez comparu à la commission ici, si je me rappelle bien. Il avait alors été question que les opticiens d'ordonnances marchaient avec des ristournes avec les ophtalmologistes. Est-ce que cela continue encore, ce procédé?

M. MATHIEU: Je me souviens de ce petit incident qui, d'ailleurs, a été fait par un monsieur qui n'est plus libéral, je crois.

M. LAVOIE (Wolfe): M. René Levesque.

M. MATHIEU: ... alors, la question des ristournes, si vous en connaissez, M. le ministre ou M. le député, je serais très intéressé à connaître les noms parce que nous avons des mesures disciplinaires très graves qui peuvent aller jusqu'à l'exclusion du Collège des médecins si un ophtalmologiste était trouvé coupable de recevoir des ristournes. Si vous en connaissez, vous pouvez les citer ici; si vous aimez mieux ne pas les citer, donnez-nous les noms et nous nous en chargerons.

M. LAVOIE (Wolfe): Je n'en connais pas mais, à l'occasion, vous aviez admis que cela existait dans le temps et que c'était en voie de régression. Je voulais savoir où cela en était rendu.

M. MATHIEU: Disons que la régression est complète.

M. LE PRESIDENT: Je permets une dernière question au député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: On a parlé d'heures d'études.

M. MASSE (Montcalm): Pas d'heures, d'années d'études.

M. SAINT-GERMAIN: Parlons d'heures, cela sera plus précis. Lorsque vous faites votre cours, vous avez dit que cela prenait huit ou neuf ans d'études. Mais combien d'années ou d'heures

étudiez-vous l'optométrie relativement à l'optométriste? Cela prend quatre ans de toute façon. Les optométristes étudient exclusivement les questions de l'optométrie. En pathologie, on aurait bien aimé, même si cela avait été seulement pour diriger les gens, mais le Collège des médecins n'a pas voulu que les ophtalmologistes donnent des cours à l'Ecole d'optométrie pour le bien-être du public et pour la sécurité du public. Il faut tout de même avouer que cela n'a aidé personne.

M. MATHIEU: Vous me demandez des statistiques. Je vais vous donner les nôtres et je vais vous donner celles que je crois être, quitte à me faire contredire si c'est faux. On nous a dit que, dans un cours d'optométrie de trois ans, un optométriste réussissait en moyenne à faire environ 150 réfractions. Il ne semble pas y avoir trop de bruit. Donc, cela ne doit pas être trop mal. Nos résidents que nous entraînons font en moyenne de 800 à 900 réfractions par année pendant trois ans. Alors, cela ne nous qualifie pas trop mal comme optométristes.

M. SAINT-GERMAIN: Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. On ne fait pas un optométriste ou un ophtalmologiste par le nombre de réfractions. Il faut apprendre à faire les réfractions. Il y a toute une série de sciences théoriques. Il faut se baser sur quelque chose.

M. MATHIEU: II y a un vieux principe qui dit: "C'est en forgeant qu'on devient forgeron" mais, lorsqu'on commence à mal forger et qu'on n'a pas d'étude, on forge mal toute sa vie.

M. SAINT-GERMAIN: II y a des cours d'optique théorique qui sont donnés à vos résidents.

M. CASTONGUAY: M. le Président, est-ce que je pourrais tout simplement rappeler que les séances de la commission sont censées être faites selon certaines règles et que le but de ces séances est de questionner ceux qui nous soumettent des mémoires et non pas de s'engager dans des débats.

M. SAINT-GERMAIN: Oui, mais lorsque les faits ne sont pas bien établis, M. le Président,...

M. CASTONGUAY: On pose d'autres questions.

M. LE PRESIDENT: Disons que devant la bonne humeur de tout le monde, j'ai été assez libéral pour permettre aux membres de cette commission de s'engager dans certaines questions plus étendues.

Je remercie les médecins spécialistes de la présentation de leur mémoire. J'ai remarqué que la santé du Dr Robillard s'améliorait au fur et à mesure qu'il exposait son mémoire et j'en suis très heureux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à jeudi matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 48)

Séance du jeudi 16 mars 1972

(dix heures cinq minutes)

M. BLANK (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Nonobstant l'absence de quelques membres de la commission, avec le consentement de tous ceux qui sont ici, nous commençons. J'ai lu la liste des mémoires qui seront présentés aujourd'hui et je veux savoir si les représentants sont ici.

L'Association des comptables généraux licenciés?

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: L'Institut des comptables publics accrédités?

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: Guilde des comptables industriels, commerciaux et institutionnels?

Le Guilde n'est pas ici.

Corporation des administrateurs agréés du Québec?

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: Institut des comptables agréés du Québec.

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: Société des comptables en administration industrielle du Québec?

UNE VOIX: Présent.

M. LE PRESIDENT: Nous allons suivre la liste que je viens de lire et commencer avec l'Association des comptables généraux licenciés.

Selon notre système, nous vous donnons un maximum de 20 minutes pour présenter le résumé de votre mémoire, puis les membres de la commission disposent de 40 minutes pour vous questionner. Nous essayons en principe de suivre ces règles. Si c'est nécessaire de prolonger dans certaines circonstances, nous pouvons le faire.

Je donne la parole à Me Lachaapelle qui est le procureur de l'Association des comptables généraux licenciés.

Association des comptables généraux licenciés

M. LACHAPELLE: Alors le président commencera, M. le Président.

M. LACROIX: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Quel est votre nom, s'il vous plaît?

M. LACROIX: Claude Lacroix, président de l'Association des comptables généraux licenciés du Québec.

M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, en vous présentant les membres de notre délégation, vous me permettrez de vous souligner non seulement leurs titres et qualités comme membres exécutifs des CGA, mais également leur statut professionnel dans notre société québécoise. Ceci afin d'illustrer l'éventail du champ d'activité de nos membres.

Dès que le projet de loi 250 fut déposé, notre corporation professionnelle s'est empressée de former un comité spécial pour en étudier toutes les implications. Notre mémoire reflète l'opinion générale de nos membres du Québec qui ont été consultés à maintes reprises. De plus, notre point de vue est endossé inconditionnellement par notre association nationale.

Les personnes regroupées à cette table sont, tout d'abord, les membres de l'exécutif provincial. Ce sont MM. André Saint-Jacques, de Montréal, chef de division, bureau de vérification au ministère du Revenu du Québec, premier vice-président provincial et un de nos délégués auprès de l'association nationale; Pierre Poliquin, de Charlesbourg, associé senior d'un bureau de comptables généraux licenciés, deuxième vice-président provincial; Gérard Saint-Pierre, de Sainte-Foy, directeur général adjoint de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, ex-président provincial et secrétaire de l'association nationale.

Egalement les membres du comité ad hoc d'étude du code des professions: le président Ernest Maheux, Fellow CGA, de Sainte-Foy, directeur général de J.-B. Laliberté Ltée, président national pour l'année 1970-1971 et, en tant que tel, membre de l'exécutif national; Robert Motard, de Sainte-Foy, chef de la division du contrôle, direction générale des impôts au ministère du Revenu du Québec, ex-président provincial et membre du conseil national; Claude Breton, de Sainte-Foy, au service du budget et de l'analyse financière, Régie de l'assurance-maladie du Québec, membre du conseil provincial, président de la section de Québec et délégué national du comité de l'éducation; Victor MacDonald, Fellow CGA, de Montréal, administrateur délégué des CGA du Québec, et notre procureur, Me Séverin Lachapelle, de Québec.

A cause de l'intérêt soutenu de notre association nationale pour toute législation affectant la profession comptable et particulièrement à cause des répercutions attendues de ce projet de loi avant-gardiste, notre exécutif national a délégué son premier vice-président, John Conwell, Fellow CGA, de Toronto, contrôleur de la division est du Canada pour Imperial Oil Ltd, premier vice-président de l'Association professionnelle des CGA; Gordon Finlay, Fellow CGA, de Don Mills, Ontario, vice-président et trésorier de A.C. Nilson Co of Canada Ltd, directeur natio- nal et vice-président de l'association de l'Ontario.

L'association des CGA est d'origine canadienne. En effet, c'est à Montréal en 1908 qu'elle fut fondée. Elle fut par la suite reconnue par une charte fédérale en 1913. En 1946, le gouvernement du Québec scella le statut des comptables généraux licenciés par la Loi 10 George VI, chapitre 89.

L'effectif québécois des CGA compte présentement près de 1,200 membres certifiés et au-delà de 2,200 membres étudiants dûment enregistrés. Au Canada, les CGA comptent près de 3,500 membres certifiés et plus de 8,200 membres étudiants répartis sur tout le territoire canadien, incluant les Territoires du Nord-Ouest. Notre taux de croissance actuel est pour nous un sujet d'orgueil car il dépasse et dé loin nos prévisions, ce qui est attribuable à la demande toujours croissante de nos services professionnels de la part du public. Les fonctions occupées par nos membres sont importantes et variées, et pour vous en donner une idée, je me permettrai de vous en énumérer quelques-unes.

A leur compte, plusieurs pratiquent comme comptables généraux licenciés, conseillers en administration, syndics autorisés en matière de faillite, vérificateurs des corporations municipales et scolaires, vérificateurs à l'emploi de firmes comptables. Dans l'industrie et le commerce, ils sont présidents et directeurs généraux, vérificateurs internes, contrôleurs, chefs comptables, analystes et conseillers en information. Au sein de la fonction publique et parapublique, autant au niveau fédéral que provincial, nous retrouvons des sous-ministres, des présidents de régie, directeurs et directeurs adjoints, chefs de services financiers et budgétaires.

Enfin, plusieurs de nos membres participent au travail de vérification pour le vérificateur général. D'autres sont chefs vérificateurs dans divers ministères. Nous les retrouvons également au Service des corporations municipales, scolaires et institutionnelles comme gérants, secrétaires-trésoriers, contrôleurs ou vérificateurs. Certains de nos membres agissent également comme professeurs dans les universités et autres institutions d'enseignement qui dispensent la science comptable. L'étude du code des professions est l'occasion unique de rectifier une situation confuse et préjudiciable à la profession comptable.

M. le Président, le comité et les membres de l'association souhaitent que votre commission accueille favorablement nos recommandations et traduise ainsi ces dernières dans une loi appropriée. Une telle loi aurait pour avantage de clarifier de façon définitive la situation confuse actuelle, tant pour le public dont on veut protéger les droits que pour la discipline comptable.

Enfin, pour terminer, pour les fins de la discussion, M. Ernest Maheux, président du comité ad hoc présentera les vues de notre association professionnelle et sera à la disposi-

tion des membres de votre commission pour répondre aux questions.

M. MAHEUX: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, le mémoire soumis à votre commission par notre association reflète la pensée générale de nos membres sur la portée particulière ou combinée des projets de loi 250 et 264. Depuis le dépôt de ces projets de loi, nous avons eu l'avantage de prendre connaissance du mémoire soumis par l'Institut des comptables agréés de Québec relativement à ces deux projets de loi. De façon générale, le contenu de leur mémoire ne fait que confirmer le bien-fondé des avancés de notre exposé original. Nous n'entendons pas changer quoi que ce soit à notre mémoire. Il conviendrait cependant de relever les points litigieux du mémoire de l'institut et, là où il y a lieu, réfuter leur argumentation et loger notre opposition à leurs recommandations. Notre argumentation portera sur trois points principaux.

Premièrement, la situation actuelle de la profession comptable au Québec, ses déficiences et leurs effets, suite à la législation de 1946.

Deuxièmement, le rôle joué depuis par l'Institut des comptables agréés au sein de la profession et les conséquences de leurs recommandations.

Et enfin la réorganisation de la profession suivant notre optique.

Nous réitérons notre assentiment au principe du code des professions qui a trait à la protection du public avant l'intérêt personnel des membres des corporations, ainsi qu'au principe de la délégation des pouvoirs de l'Etat aux corporations. La situation intolérable et discriminatoire réservée à notre association par le code nous porte à ignorer certaines considérations secondaires dans les circonstances, pour ne nous attarder qu'aux questions essentielles.

Pour ce qui est de notre profession, le bill 250, à notre avis, tend à consacrer et à perpétuer une situation fausse et contraire au bien public, que la commission Castonguay-Nepveu s'était donné comme mission principale de corriger. Cette situation consiste à assujettir juridiquement l'exercice d'une profession, celle de la comptabilité générale, au contrôle d'une autre profession, celle de la vérification publique.

Nous soumettons de plus que le monopole presque total accordé à l'institut en 1946 devrait être révisé à l'occasion de la législation proposée, puisqu'il ne s'agit pas, comme le recommandait la commission Castonguay-Nepveu, d'un cas "où il est évident que la sécurité ou le bien-être de la population seraient menacés par le libre accès à la profession, et qu'on en détermine l'étendue et l'objet en fonction des impératifs de la protection du public."

Certaines dispositions du code appuyées par des stipulations draconiennes du bill 264 et les recommandations du mémoire de l'institut ne visent qu'à consolider le quasi-monopole que les CA détiennent depuis 1946, et elles nous apparaissent nettement contraires au bien public. Il semble exister dans notre système démocratique un principe essentiel qui veut que la privation par le législateur des droits acquis est une chose grave, surtout lorsque ce droit a réellement été accordé en fonction de l'intérêt public, ou pour corriger une législation antérieure inadéquate.

La législation actuellement à l'étude, en ce qui a trait à la pratique de la comptabilité et de la vérification, expose les CGA à la perte de tous leurs droits acquis et même de leur raison d'être. Il pourrait s'ensuivre une situation d'injustice pour plusieurs milliers de citoyens, en compromettant leurs moyens d'existence, ce qui, à notre avis, nuirait à l'économie de l'Etat en privant les employeurs des services d'experts comptables que sont les CGA, et enfin sanctionnerait la situation fausse et incohérente créée par la loi de 1946.

Nous comprenons mal pourquoi le législateur a jugé à propos dans le projet de code de diviser la corporation et mentionner en deux catégories, celle d'exercice exclusif et celle à titre réservé, sans d'abord se soucier du bien-fondé, des exclusivités accordées à celle du premier groupe. Nous comprenons mal également qu'un commencement de redressement de situation soit proposé pour les corporations de la santé, mais non pour la profession comptable.

Nous croyons que nulle part ailleurs, les vices soulignés par la commission Castonguay-Nepveu ne sont aussi évidents que dans le domaine de la comptabilité. Nous voudrions voir dans l'honneur qui nous est fait de paraître si tôt devant votre commission un indice de la volonté du législateur de corriger cette situation qui, malheureusement, dure depuis plus d'un quart de siècle.

Devons-nous comprendre qu'en reléguant tous les CGA dans la deuxième catégorie, c'est-à-dire à titre réservé seulement, le projet de code aurait pour effet de nous priver de tous nos droits acquis, notamment ceux dont nous partageons l'exclusivité conjointement avec des corporations du premier groupe, les comptables agréés, les avocats, les notaires.

En 1966, les CGA avaient demandé aux législateurs une révision de leur propre loi. Ce projet fut bloqué à la demande de l'institut. En février 1970, les CGA se sont de nouveau adressés au législateur pour lui demander cette fois de consolider dans une seule loi tous leurs droits éparpillés dans divers statuts. Les comptables avaient finalement, et par écrit, accepté le principe de ce projet de loi.

L'étude de notre projet de loi a été constamment retardé par le législateur depuis février 1970 sans doute à cause et en prévision du code des professions. Nous considérons, à la lecture du code, que cette incidence nous a très mal

servis. Ces droits des CGA, mentionnés dans notre projet de bill privé de 1970, comprennent tous ceux qui nous ont été laissés par la loi de 1946 sur la comptabilité publique, soit le droit d'agir comme vérificateur de corporation municipale, des associations coopératives, des caisses d'épargne et de crédit ainsi que cette partie de l'expertise comptable décrétée dans les lois du Barreau et du notariat. Ces deux dernières lois mentionnent expressément les droits des CGA à ce sujet.

L'article 242 du code nous paraît vouloir effacer ou éliminer ces droits. De toute façon, le mémoire de l'Institut des comptables agréés déposé devant votre commission ne laisse aucun doute sur leurs intentions à ce sujet. Il y a lieu de se demander si leurs recommandations ne visent que l'intérêt public.

Nous demandons donc pour les CGA de paraître dans le premier groupe des professions, celles d'exercice exclusif. Notre proposition principale d'une loi-cadre sur la comptabilité professionnelle conduit nécessairement à ce résultat. Notre acceptation en principe du code des professions est sujet à cette correction importante.

Nous avons tenté, dans les articles 96 à 112 de notre mémoire, d'énumérer quelques-unes des anomalies découlait de la loi de 1946 sur la comptabilité. Premièrement, elle ne définit pas la comptabilité ni la vérification. Deuxièmement, elle ignore l'existence de la comptabilité ou expertise comptable en dehors de la comptabilité et de la vérification et laisse entendre que le comptable public est le seul expert comptable. Malheureusement, le contenu de cette loi ne correspondait pas au titre si prometteur de "Loi pour réglementer la pratique de la comptabilité et de la vérification". On aurait dû l'intituler: Tentative pour fermer la pratique de la comptabilité publique et de la vérification en faveur des comptables agréés seulement. D'ailleurs improprement dénommés dans cette loi, "comptables publics".

Lors de la refonte de la législation en 1964, cette loi changera d'ailleurs son titre pour celui plus indicatif de Loi des comptables agréés. Si l'on réfère au code d'éthique de l'institut, on lit que l'expression "expert-comptable" désigne toute personne qui seule ou en société exerce l'expertise comptable en cabinet privé. Devons-nous comprendre que les CA qui ne pratiquent pas en cabinet privé ne sont plus des experts-comptables et ont de ce fait perdu leur compétence en expertise comptable.

A notre avis, les CA comme les CGA sont tous des experts-comptables même si l'institut s'acharne à réserver une exclusivité de pratique publique que 54 p.c. de ses membres ont effectivement délaissée. Dans leur mémoire, les comptables agréés empruntent au Petit Robert la définition de l'expert-comptable.

Ils auraient tout aussi bien trouvé cette définition dans les textes législatifs de France, mais cette fois accolée à celle des comptables agréés français, très différents de leurs homony- mes canadiens. En effet, la charte de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés définit et répartit nettement en France la dualité des fonctions, soit celle du vérificateur et celle du comptable général. Ce texte législatif français illustre bien la possibilité d'une loi-cadre de l'expertise comptable comme celle que nous proposons.

Effectivement, les CA demandent maintenant au législateur de leur réserver l'exclusivité de la pratique générale comptable entraînant l'élimination des CGA, avec le titre d'expert-comptable en plus de celui de CA et, également, la confirmation officielle du droit d'agir comme conseiller en administration et d'en prendre le nom.

Dans son mémoire, l'institut affirme que personne d'autre que ses membres ne possède à un degré suffisant l'intégrité, l'indépendance et l'impartialité requises pour exercer la moindre parcelle de la fonction de l'expertise comptable. S'il fallait que le législateur accorde crédit à ces prétentions, nos membres qui occupent, dans la fonction publique par exemple, les postes aussi bien reconnus que ceux de sous-ministres, présidents de régie et directeurs de service, n'auraient plus l'illusion de se considérer experts-comptables. Il en serait de même pour 54 p.c. des comptables agréés qui ne pratiquent pas en cabinet privé.

Permettez-nous de signaler ici que cette prétention de l'institut exprimée de façon générale et catégorique n'est pas la seule affirmation de son mémoire que nous considérons absolument inexacte. Il est absolument faux, par exemple, de prétendre que le législateur de 1946 avait réservé à l'institut l'exclusivité de l'expertise comptable. Tout au plus ce dernier lui réservait, sujet à exception, une portion de cette expertise, soit celle qui se pratique en cabinet privé et moyennant rémunération.

Pour le moins tendancieuse et surtout opportuniste, cette autre affirmation de l'institut que l'on trouve au troisième paragraphe de l'introduction de son mémoire et qui se lit comme suit: "Ainsi l'expert-comptable qui se porte garant de la sincérité du bilan de son client engage sa responsabilité à l'endroit de tout investisseur et bailleur de fonds éventuels, de même qu'à l'égard du fisc et de maints services administratifs et financiers de l'Etat." Comment concilier cette prétention avec l'affirmation contradictoire faite en juin 1967 par le président national de l'institut, dans son discours prononcé lors de l'assemblée annuelle des CA de Québec, de l'Ontario et du Manitoba?

Je cite: "Certains désastres financiers dont on a beaucoup parlé au cours des deux ou trois dernières années ont attiré l'attention sur le besoin de vérificateurs indépendants. En même temps, ils ont soulevé la question de commentateurs et de rédacteurs d'un gouvernement quant à notre indépendance, à notre compétence et à notre responsabilité. Il est facile de démontrer que, dans la plupart des cas, les critiques de notre profession espéraient l'impos-

sible, affirme le président de l'institut. Après tout, les vérificateurs ne sont pas des répondants. Dans les états financiers, l'objection subjective joue un grand rôle et un être humain ne pourra jamais être sûr de découvrir toute fraude minutieusement préparée, délibérée et intelligente. Mais si nous pensons que nous avons là une réponse satisfaisante aux critiques qui nous sont adressées, le public est plus exigeant.

A l'heure actuelle il existe un danger que l'on pousse le gouvernement à nous imposer des exigences quasi impossibles à remplir, ou qui exposeraient une responsabilité exagérée, conclut M. Wilson.

Est-ce bien seulement en fonction de l'intérêt public que l'institut demande au législateur de rayer de tous les textes de loi actuels toute mention des droits des CGA ou est-ce plutôt pour atteindre une exclusivité totale de tout le champ d'activité? Ce souci d'accaparement se traduit dans leurs recommandations par l'interdiction qu'ils veulent imposer de l'usage des désignations: Certified public accountant, certified accountant, comptable public licencié et comptable licencié. Ces désignations s'apparentent étrangement aux variations des titres français et anglais de nos membres et leur interdiction aurait pour effet de réduire le prestige et l'importance de notre titre. Nous nous permettons de signaler ici que pratiquement toutes les recommandations de l'institut relatives à leur loi et à la profession comptable nous paraissent viser uniquement la protection du titre et de l'intérêt personnel de ses membres. Nous avons peine à déceler dans ces recommandations un souci sincère et désintéressé de l'intérêt public recherché par le code des professions.

Pour résumer notre mémoire et justifier l'essence de notre intervention devant votre commission aujourd'hui, nous vous soumettons notre conception d'organisation comptable au Québec. Nous recommandons, à la base la réorganisation de la profession comptable, que les membres qualifiés de toutes les associations comptables reconnues au Québec soient gratifiées du nouveau titre d'experts-comptables. Chaque association conservera son identité et son affiliation à son organisme national. La législation québécoise de 1946, et celles qui ont suivi par la suite dans certaines provinces ont créé des mécanismes, des structures, des objectifs, des programmes et des affiliations disparates, et il serait difficile, croyons-nous, de régler le problème global par une simple fusion des associations comptable au Québec.

C'est pourquoi nous recommandons une loi-cadre chapeautant toutes les associations québécoises reconnues par la loi et qui porterait le nom de la Loi de la corporation professionnelle des experts-comptables. A l'intérieur de cette loi, la spécialité de vérification serait nettement établie et ne pourrait s'exercer qu'en vertu d'un système de permis. Le titre de vérificateur et le permis pourront être accordés à tout expert-comptable qui voudra s'engager dans cette spécialité et qui satisfera par ailleurs aux exigences spéciales qui seront imposées aux candidats à cette spécialité. Il est entendu qu'au départ tous les vérificateurs actuels dans la pratique seraient automatiquement éligibles à la licence, mais à l'avenir des exigences d'admission seraient imposées à tout nouveau candidat y compris ceux qui auraient délaissé la pratique publique depuis un certain nombre d'années. Ce projet global de réorganisation que nous proposons découle de l'historique et de la philosophie de la profession que nous avons exprimés de façon élaborée au chapitre V de notre mémoire.

Maintenant que la comptabilité de gestion dans laquelle nos membres se sont particulièrement signalés a pris une telle ampleur avec les années, surtout à cause de l'évolution de la technique et du développement de l'économie, l'institut entend également évincer tout autre professionnel du domaine de la comptabilité de gestion en prétextant faussement, comme on l'a dit, que la loi de 1946 lui réservait également ce champ de façon exclusive. Le législateur de 1946, immédiatement après la Loi des CA, sanctionnait la loi incorporant les CGA et donnait à ces derniers comme objectif, à l'article de notre loi, "de maintenir, améliorer et augmenter les connaissances professionnelles, l'habileté et la compétence de ses membres de manière à pouvoir établir des barèmes de compétence en tout ce qui concerne les sciences sociales; économiques, commerciales et industrielles en général, et en particulier la comptabilité industrielle et commerciale."

Selon nous, notre loi d'incorporation octroyait à notre association le droit à l'expertise comptable de façon générale tandis que la Loi des CA réservait à ces derniers la pratique publique de cette expertise comptable en cabinet privé de même que la vérification. Par charité chrétienne, nous n'osons pas prêter des intentions égoïstes et centralisatrices à nos confrères de l'institut. Nous croyons tout au plus qu'ils ont pris au pied de la lettre ou interprété dans un sens unique cette parole évangélique du grand saint Mathieu, comptable de son métier, qui disait, au chapitre XIII: "On donnera à celui qui a déjà et il sera dans l'abondance mais à celui qui n'a pas, on enlèvera même ce qu'il a."

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous en avez pour longtemps encore? Vous avez dépassé la limite prévue de 20 minutes.

M. MAHEUX: Ce ne sera pas très long. M. LE PRESIDENT: Très bien.

M. MAHEUX: Nous avons terminé les paroles évangéliques. Par sa contribution à l'économie et à la cause de l'enseignement et au bien public en général, qui englobe aussi bien le client et les employeurs que les étudiants qui ambitionnent la carrière d'expert-comptable,

notre association a prouvé son utilité, sa raison d'être et son droit à une reconnaissance professionnelle sans équivoque. Il nous apparaît maintenant que le seul moyen de régler définitivement, dans l'intérêt du public et également de toutes les parties en cause, les problèmes de la profession comptable, ce serait l'adoption d'une seule et unique loi pour régir la pratique de la comptabilité sous toutes ses formes. Cette loi, tel que suggéré au dernier paragraphe de notre mémoire, pourrait s'intituler "Loi des experts-comptables" et dans l'optique des professions remplacerait le présent projet de loi des comptables agréés, bill 264. C'est pour écourter la discussion.

Le principe fondamental de notre plan de réorganisation repose sur la dualité des fonctions dans l'exercice de la pratique comptable, la comptabilité générale ou expertise comptable et la vérification. Notre mémoire a clairement démontré que la comptabilité de gestion précède la vérification. Ce sont deux fonctions distinctes et, sans la première, la deuxième ne peut exister. D'ailleurs, le comité spécial de l'Institut canadien des comptables agréés, dans son étude sur l'orientation future de la profession, "Horizon 2,000", reconnaît cette dualité dans sa recommandation à l'effet que la fonction de vérificateur soit reconnue comme une activité distincte dans la profession comptable. Aux Etats-Unis et en Angleterre, l'organisation de la profession comptable s'oriente comme en France vers la reconnaissance officielle de cette dualité. Cette dernière recommandation rejoint une disposition principale de la présente loi provinciale de l'administration financière qui corrigeait la situation de l'ancienne fonction d'auditeur de la province, qui agissait à la fois comme le comptable de la gestion financière et comme vérificateur général de la province.

Avant de terminer, nous voulons souligner particulièrement notre recommandation finale de permettre, sous le contrôle de l'Office des professions, des bureaux multiprofessionnels où le public pourrait trouver, dans une formule intégrée et plus économique, une solution rapide à un problème requérant les services compétents de diverses disciplines. Au sein de la profession comptable, la reconnaissance de la compétence professionnelle et de la responsabilité sociale est aussi importante pour l'expert-comptable, qu'il soit dans la fonction publique, dans la gestion financière ou à son compte, que pour le vérificateur.

Il importe que tous soient soumis à un code de déontologie où les critères uniformes d'intégrité, d'indépendance seraient complétés par des normes spécifiques en fonction des domaines d'activité respectifs.

La compréhension du rôle de chacun et la reconnaissance de sa compétence dans sa sphère d'activité ne feraient que contribuer à l'efficacité mutuelle de tous les membres de la profession comptable et serviraient nécessairement et sans équivoque l'intérêt réel du public recherché par le code des professions. Nous visons surtout dans nos recommandations la protection de l'intérêt du public et nous osons croire que nos confrères des autres corporations comptables de même que les législateurs reconnaîtront le bien-fondé des principes qui nous ont guidés et l'honnêteté de nos intentions.

L'acceptation de nos recommandations ne nécessiterait que quelques retouches au code des professions mais imposerait une refonte totale du projet de loi 264 qui deviendrait la loi des experts-comptables.

M. le Président, nous voulons nous excuser d'avoir dépassé la limite du temps réglementaire mais nous croyons qu'une législation aussi progressive que celle qui vise à corriger le passé en fonction de l'avenir doit en même temps corriger justement la situation anormale de la profession comptable.

Je veux aussi peut-être excuser le ton de certaines parties de notre exposé mais, particulièrement, je voudrais que nos nombreux amis de l'institut ne voient dans cela tout simplement qu'un souci sincère de mettre de l'ordre, car nous comptons non seulement des amis dans l'institut mais nous comptons aussi des membres de notre propre association.

Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Merci, maintenant pour la période de questions, nous commencerons avec le Solliciteur général.

M. FOURNIER: Je tiens à remercier l'association du mémoire qu'elle a présenté, qui est certainement élaboré et qui nous donne une bonne vue de l'historique de la profession comptable.

Maintenant, j'aurais quelques précisions à demander sur le mémoire, à savoir en quoi le bill 250 et le bill 264 diminuent les pouvoirs que vous avez présentement? Je ne parle pas de la précision des pouvoirs mais je demande en quoi vous trouvez que ces bills-là diminuent les pouvoirs. C'est parce que je ne le vois pas dans les textes de loi.

M. MAHEUX: Je pense que nous touchons là une question d'interprétation. Nous avions l'impression évidemment que les stipulations particulières du code des professions nous enlevaient ce privilège-là. Nous avons reçu là-dessus l'avis de notre conseiller juridique et je pense qu'il pourrait peut-être précisé ce qui nous a mené à prendre une position aussi catégorique.

M. LACHAPELLE: M. le Président, M. le ministre, si on se réfère à l'article 242 du projet de loi 250, tout renvoi, je fais abstraction évidemment, est un renvoi à la disposition équivalente du présent code si une telle disposition existe.

Or, notre interprétation est la suivante. Nous croyons à ce moment-là que les lois particulières qui nous donnent des pouvoirs si, dans les textes mêmes, elles ne sont pas répétées dans le bill 250, nous prétendons par voie d'interprétation que ces pouvoirs-là disparaîtraient.

Nous trouvons évidemment qu'il peut y avoir des interprétations différentes mais, comme je l'expliquais aux membres de l'association, nous ne prendrons pas le risque de laisser les tribunaux interpréter un article aussi important pour nous.

M. FOURNIER: L'article 35 a dit la fin: "En outre de celles qui lui sont autrement permises par la loi". Ne croyez-vous pas que ce texte-là couvre la loi de la commission municipale et les autres lois dont vous prétendez que les pouvoirs de comptabilité découlent? C'est la raison pour laquelle nous avons ajouté cette phrase au texte de l'article 35.

M. LACHAPELLE: Encore là, nous tombons sur une question d'interprétation par la loi. Nous avons voulu présenter en 1970 un bill privé qui justement ramasserait, si vous voulez, toutes les lois ou tous les pouvoirs éparpillés dans différentes lois.

Par la loi, on pouvait se permettre de se demander s'il n'y aurait pas interprétation à ces paroles. D'autant plus que, dans le passé, à cause de certaines mesquineries d'autres associations professionnelles, nous avons eu affaire aux tribunaux et nous voulons éviter cela; on voudrait que la loi soit beaucoup plus précise. Dans notre bill privé qui n'a pas été présenté justement à cause de ce projet de loi 250, nous avons demandé que ce soit spécifique à nous, dans une loi bien propre à nous. C'est pour cela que nous voudrions beaucoup plus de précision dans cette loi-ci.

M. FOURNIER: Relativement au même domaine, au même sujet, l'ancienne loi prévoyait à l'article 25, chapitre 89, une prohibition pour vous de faire certains actes. Dans la loi actuelle, en plus de vous conférer le titre, il y a une précision qui semble encore plus grande sur les pouvoirs de comptabilité que vous obtenez selon l'article 35 b). Est-ce que ce texte-là ne donne pas plus d'étendue encore, ou ne confirme pas un état de choses actuel qui s'est développé depuis 1946? Est-ce qu'il n'y a pas des pouvoirs additionnels qui apparaissent dans cet article-là?

M. MAHEUX: Notre position là-dessus, c'est que, se basant sur le danger de l'interprétation des stipulations, nous croyons que, même si le texte semblait vouloir nous donner plus, nous préférions faire des représentations pour demander que ces stipulations soient changées. Particulièrement sur ce point, je vois que dans les pouvoirs que vous prétendez additionnels qui nous étaient donnés, nous interprétons que vous voulez vous référez à la mention de pouvoir offrir nos services au public mais particulièrement vous y attachez la mention "service au public de teneurs de livres". Alors, nous croyons que dans notre loi d'incorporation il n'y a aucune mention indiquant que le CGA doive être amené et restreint à un service de teneurs de livres. Je pense que la preuve est faite, si on consulte le bottin de l'association, que nos membres ne sont pas des gens qui font strictement de la tenue de livre. Cette mention-là, même si elle semblait vouloir nous donner plus, nous croyons que ce n'est absolument pas à notre avantage.

M. FOURNIER: Mais est-ce que cette mention-là ne corrige pas la situation qui a existé pendant un certain nombre d'années à l'effet que seul un groupement pouvait s'annoncer au public et, en vertu de cet article-là, cela met fin à cette situation équivoque dans le passé?

M. MAHEUX: Je pense que c'est une demi-solution, parce que si nous voulions considérer strictement l'intérêt de nos membres, nous pourrions évidemment nous satisfaire de dire: Eh bien! il y a des modifications à l'intérieur du code qui rectifient justement cette situation-là. Mais nous pensons que, dans l'intérêt public, la loi devrait profiter de l'occasion pour remettre de l'ordre totalement dans la profession comptable dans le sens de nos recommandations qui sont appuyées par des opinions, même celles de l'institut dans son projet d'avenir.

M. LACHAPELLE: M. le Président, si vous me permettez, seulement un mot additionnel, c'est que le fait d'être dans la deuxième section, association, corporation à titre réservé, nous donne l'impression justement que déjà là, par voie d'interprétation, tous les droits acquis — parce qu'il y a tout de même des droits exclusifs que nous avons ou que nous partageons avec d'autres et qui sont tout de même des droits qui sont plus que réservés — si nous étions dans la première section, à ce moment-là, disons que l'interprétation nous effraierait moins, mais quand nous sommes dans la partie des noms réservés, à ce moment-là, je vous avoue honnêtement que nous sommes craintifs.

M. FOURNIER: Relativement au domaine comptable — et c'est la base de votre mémoire — vous voudriez que nous établissions une catégorie de personnes qui s'appelleraient des experts-comptables. Ils seraient les seuls à avoir droit au nom de corporation professionnelle des experts-comptables et, à l'intérieur de cette loi-là, vous voudriez que nous divisions la comptabilité en deux groupements, à savoir la section qui serait une vérification, ou l'expression d'opinions sur le bilan, et l'autre, qui serait l'enregistrement et la préparation d'états. Est-ce bien cela?

M. MAHEUX: C'est exactement cela, nous croyons que cette distinction-là existe dans la philosophie de...

M. FOURNIER: Et actuellement, quant à votre association et à vos membres, est-ce que vous faites de la vérification publique là où c'est permis?

M. MAHEUX: Partout où c'est permis, on peut dire qu'il y a environ 10 p.c. de nos membres qui pratiquent effectivement la vérification ou des services de comptabilité publique, dans les domaines qui nous sont permis. Si on considère ceux qui sont au service de bureaux de comptables, ceux qui sont dans leur propre bureau, ceux qui sont au service du vérificateur général ou de l'auditeur général du Canada, on peut estimer que nous sommes déjà dans ce domaine-là.

M. FOURNIER: La grande partie de vos membres, à 90 p.c., font la première partie qui est la comptabilité d'enregistrement et d'établissement de bilans financiers?

M. MAHEUX: Oui, c'est cela. Nous sommes d'avis que dans la philosophie le comptable de gestion peut jouer un rôle tellement utile qu'il faudrait qu'il ait une reconnaissance d'expert-comptable, parce qu'au sein de l'entreprise même, il est en mesure de jouer le rôle qui va permettre au vérificateur de faire un travail encore plus complet s'il peut reposer sur la compétence d'un expert-comptable.

M. FOURNIER: Si je comprends bien, tous les comptables seraient des experts-comptables et il y aurait des spécialistes qui s'appelleraient vérificateurs?

M. MAHEUX: Les vérificateurs seraient au même niveau d'experts-comptables mais, avec une licence ou un permis, ils pourraient se présenter pour faire les vérifications.

M. FOURNIER: Vous auriez deux catégories d'experts-comptables?

M. MAHEUX: Tous seraient experts-comptables, les CA, les CGA, les RIA seraient des experts-comptables, mais parmi les membres de chaque association, ceux qui voudraient pratiquer la vérification publique devraient obtenir un permis.

M. FOURNIER: Vous voulez enlever la confusion dans l'esprit du public, mais si le seul titre est celui d'expert-comptable et que vous avez une série de particules nommant les groupements, est-ce que la confusion ne continuera pas d'exister?

M. MAHEUX: Je pense que la confusion serait éliminée si, de façon officielle, par législa- tion et dans les faits, tous les membres des associations comptables étaient considérés comme des experts, au lieu de donner l'impression qu'il y a simplement ceux qui sont dans la vérification publique qui le sont.

M. FOURNIER: Pourriez-vous nous donner des explications relativement â la formation ou aux études entre les différentes professions comptables? Est-ce que vous pourriez donner un exposé de cela?

M. MAHEUX: Je pense que nous avons au mémoire fait un tableau comparatif des études et nous nous en remettons aux programmes d'études qui sont exigés dans les diverses universités de la province de Québec. Si vous allez à la page 33 de notre mémoire, à l'annexe E, vous allez voir une comparaison où toutes les matières exigées pour le CA comme pour le CGA sont, à une exception près, je crois, les mêmes. Cette exception, ce sont les cours de relations humaines.

M. FOURNIER: En plus de cette situation qui est exposée dans le mémoire, est-ce que vous n'avez pas des cours de l'institut, des cours par correspondance ou autres?

M. MAHEUX: Nous avons évidemment, pour accéder au titre de CGA, la possibilité pour les candidats de suivre des cours à l'université, mais, dans certaines régions, ceux qui n'ont pas accès aux cours universitaires peuvent suivre des cours personnels qui sont des cours par correspondance préparés en coopération avec l'Université de la Colombie-Britannique. Ces cours permettent aux candidats de passer des examens intermédiaires d'année en année — c'est un cours de cinq ans — et de finir par passer l'examen final de l'association.

M. FOURNIER: En vertu de ce que vous exposez, est-ce que les experts-comptables seraient les seuls qui pourraient préparer des états comptables? Est-ce que ce serait limité aux experts-comptables?

M. MAHEUX: Je crois qu'il est assez difficile de penser qu'on peut priver quelqu'un de préparer des états, mais je pense que, pour avoir une sanction reconnue officiellement, les experts-comptables seraient ceux qui donneraient un titre valable aux états financiers préparés.

M. FOURNIER: Quelle est la situation qui existe relativement à votre groupe et aux membres d'autres provinces au Canada?

M. MAHEUX: Comme vous le savez, on a dit dans le mémoire que l'Association des CGA a été fondée au Québec mais elle s'est propagée dans tout le Canada. La situation des droits exclusifs et des droits de pratique n'est pas la même d'une province à l'autre. Jusqu'en 1946,

la situation était que tous les CGA avaient les mêmes droits que les CA. A partir de 1946, la législation l'a limitée au Québec, mais dans d'autres provinces, comme en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Nou-veau-Brunswick, à Terreneuve, les CGA ont droit à la pratique publique autant que les CA.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais d'abord souligner le travail qu'ont dû faire les organismes qui viennent devant nous aujourd'hui; ils nous présentent des mémoires très élaborés, et cela permet, je pense, pour la première fois aux associations, aux professionnels d'une discipline, de se rencontrer au même endroit, devant les parlementaires, pour exposer à fond le problème de leur secteur d'activités.

Nous l'avons fait, depuis les séances de la commission, dans le domaine de la santé avec les médecins surtout, et nous entreprenons ce matin le même travail avec les comptables. Nous devons souligner, M. le Président, que l'intérêt des professionnels est amplement démontré par l'assistance nombreuse qui est ici ce matin et qui est probablement la plus nombreuse depuis le début de ces séances de la commission.

Vous exposez dans votre mémoire des points extrêmement importants et le Solliciteur général a, par ses questions et vos réponses il y a un instant, commencé à jeter un éclairage plus précis sur le débat qui est engagé. Il arrivera certainement que nous répéterons les mêmes questions à l'endroit de tous les organismes qui viendront devant nous aujourd'hui, particulièrement aux CA et aux RIA.

Ma première question est celle-ci, étant donné que nous sommes devant une situation de fait. Le passé, vous l'avez décrit tantôt, c'est avant 1946, la loi de 1946 pour les comptables agréés, et depuis ce temps-là, les tentatives que vous avez faites à deux reprises de faire adopter une loi spéciale, particulièrement en 1970 alors que l'institut des CA, vous l'avez dit tantôt, était favorable en principe — et il l'a même écrit — à ce que vous ayez une loi qui englobe tout ce qui vous concerne.

A partir de cette situation de fait que nous avons vécue et que nous vivons maintenant, les séances de la commission et cette législation sont un point tournant pour la profession des CA, pour les CGA et pour tous les groupes de comptables comme pour toutes les autres professions. On peut discuter cette législation en ne prenant que la situation de fait et en collant une législation à la situation de fait. Mais on peut aussi adapter la législation à l'évolution que l'on entrevoit pour les professions.

Je pense que c'est un des aspects les plus intéressants et peut-être les plus difficiles de la législation. M. le Président, je m'en viens avec ma question, c'était un préambule un peu plus élaboré. Est-ce qu'il y a actuellement des mécanismes de communication et de discussion entre les différentes sections des comptables, comme il peut y en avoir entre les différentes spécialités de la médecine? Disons qu'ils pratiquent à l'intérieur d'un cadre, c'est chapeauté par l'ordre des médecins. Vos associations sont chapeautées chacune par les groupes professionnels. Mais est-ce que vous avez des moyens, des véhicules de communication, tels que proposés par les travaux qui ont été entrepris?

Je fais allusion à Horizon 2,000, travaux spéciaux qui avaient été entrepris à la demande de l'institut des CA et qui ont conduit à certaines conclusions. Je vous demanderais d'expliquer en même temps ces travaux d'Horizon 2,000 qui recommandaient certaines mises en commun de vos ressources, certains travaux en commun et même une fusion des trois groupes. Est-ce que vous pourriez donner des explications là-dessus, M. Maheux?

M. MAHEUX: Je vous remercie, M. le député, et je dois dire d'abord que je suis très heureux du préambule de votre question. Je pense que c'est exactement le point de vue que nous voulions faire ressortir. Les relations entre les associations, au Québec évidemment, ne sont peut-être pas aussi poussées que nous le voudrions, mais tout de même, il existe entre les associations, même au Québec, des réunions conjointes, des causeries, des choses de ce genre-là.

Je pense que ce qui est plus significatif, c'est ce qui se passe au national. Nos relations au niveau national entre les différents groupements, RIA, CGA et CA, sont de plus en plus intimes et poussées et, particulièrement à l'occasion de Task Force 2,000, l'Horizon 2,000, nous avons eu l'occasion de recevoir de l'institut une quantité assez imposante de ses rapports et particulièrement à notre convention nationale de Québec l'an passé. Le thème de notre convention était justement de faire l'étude en profondeur de ce document et nous nous rendons compte qu'à l'intérieur de ce document-là, par ses conclusions, l'Institut canadien des comptables agréés reconnaît absolument l'importance, au sein de l'organisation de la profession comptable, du comptable de gestion par opposition à la vérification et va jusqu'à définir et spécifier que ce doit être une occupation distincte.

Alors, au plan national, nous avons beaucoup plus de contacts qu'au plan provincial où, évidemment, peut-être que la loi de 1946 a fait une espèce de mur qui rend les contacts plus difficiles. Au point de vue de la philosophie, nous sentons que nous nous orientons tous vers le même but. Des intentions de fusion ont été souvent mentionnées au sein des trois associations et toujours en tenant compte que la fusion est peut-être l'idéal à atteindre le plus vite possible mais que, dans les circonstances, il

faut tenir compte de certaines particularités. Nous sommes tous d'avis que nous devons viser à ça.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que les stipulations du projet de loi tel que proposé actuellement vous permettent d'entrevoir que cette communication pourra être faite assez facilement dans l'avenir ou tel que le projet de loi est proposé, s'il était adopté dans sa forme actuelle, sans aucune modification ou sans aucune précision? Tantôt, le Solliciteur général a précisé certaines choses quant au champ de pratique et aux droits acquis. Admettant que cela est précisé, est-ce que l'orientation qui va être donnée aux différents groupes de comptables par le code des professions et les lois spécifiques va éloigner davantage chacune des professions des différents secteurs comptables les uns des autres ou si le rapprochement sera possible?

M. MAHEUX: Si nous nous en remettons à l'interprétation que nous avons faite des stipulations de la loi actuelle, nous avons l'impression que notre association s'expose à disparaître, peut-être pas dans le sens d'éliminer complètement notre organisme du jour au lendemain mais au fur et à mesure de la limitation de nos droits. Si, effectivement, se vérifiait l'interprétation que nous faisons que nos droits acquis seraient effacés, et si on donnait suite aux recommandations de l'institut des CA, au point de vue de la reconnaissance professionnelle du comptable, nous y perdrions énormément. Je pense que la conséquence, c'est qu'il y aurait beaucoup plus risque d'éloignement entre les groupements que chance de rapprochement.

M. CLOUTIER (Montmagny): On pourrait peut-être comparer ce rapprochement avec d'autres secteurs professionnels tels que la médecine, où vous avez l'ordre des médecins et à l'intérieur de l'ordre des médecins, vous avez 23 spécialités, plus les médecins omnipraticiens. C'est peut-être ce genre de chapeautage, ce genre de regroupement que vous voudriez faire par la profession d'expert-comptable et, à l'intérieur de cet ordre, de cet organisme professionnel d'experts-comptables, vous auriez différentes disciplines, soit de comptabilité, de vérification, de gestion. Est-ce que c'est le sens de votre interprétation?

M. MAHEUX: Je pense bien que l'on s'orienterait à aller plus loin dans le sens de la comptabilité générale, à en venir à des spécialités plus particulières. Pour éviter ce qu'on reproche, pour éviter la confusion, nous ne voulons pas dès le début nous mettre à dire qu'il y aura des spécialités bien précises. Eventuellement, je pense que l'évolution de l'économie nous amène à des spécialités bien précises. Je pense que nous nous en allons à ça. Pour le début, nous croyons que la spécialité bien particulière qu'il faut distinguer est celle de la vérification. Ce que l'on souhaite et ce que l'on croit recommandable, c'est que les membres qualifiés des trois associations soient éligibles à cette fonction bien particulière. Ils possèdent les mêmes connaissances. Il s'agit tout simplement de voir à ce qu'ils se conforment à des exigences spéciales pour jouer leur rôle dans l'intérêt du public de la meilleure façon, dans la vérification publique.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je sais que la profession a beaucoup évolué au cours des vingt-cinq ou trente dernières années, surtout à l'occasion du développement et du raffinement de la fiscalité. La profession a pris un essor. Est-ce que le code d'éthique, le code de déontologie — si je peux employer l'expression — a évolué de la même façon pour toutes les corporations professionnelles dans le secteur comptable?

M. MAHEUX: Je dirais que oui. Je pense qu'il faudrait que le code d'éthique se conforme aux exigences modernes. On vise de plus en plus à assurer la protection du public et voir à ce qu'on se conforme à l'éthique professionnelle et au respect des principes. Mais pour la distinction que l'on pourrait faire dans le domaine de la comptabilité, je pense que le code d'éthique ne doit pas s'adresser uniquement aux vérificateurs. Je pense que le comptable de gestion doit lui aussi avoir un code d'éghique. Je pense qu'à l'intérieur de l'administration, le comptable est en mesure de faire preuve d'indépendance et d'impartialité tout autant que le vérificateur. Je pense, par exemple, à l'indépendance et que le comptable professionnel dans une entreprise doit avoir envers son employeur pour pouvoir respecter les principes comptables, respecter les lois fiscales de façon qu'il fasse le partage, exactement, de ce qui revient à l'employeur et à l'Etat. Je pense que ce sont toutes des particularités qui doivent justifier un code d'éthique bien spécifique pour le comptable de gestion.

M. CLOUTIER (Montmagny): Votre organisation professionnelle travaille aussi au niveau national. Nous avons deux représentants, ce matin, de l'Ontario, ça nous fait plaisir de les voir assister aux travaux de la commission parlementaire. Est-ce que vous diriez que l'examen que doivent subir les CGA ou l'admission dans la corporation est davantage national que québécois? Est-ce que les normes sont plus nationales ou s'il y a des points spécifiques qui ne s'appliquent qu'au Québec.

M. MAHEUX: Je pense que, si on peut se servir de la connotation du national dans les normes que nous exigeons, c'est justement d'avoir cet avantage d'uniformité à travers tout le Canada. L'importance de nos normes est justement de poser des examens, d'organiser des

cours et d'exiger de passer des examens qui sont au niveau de la compétence comptable. Je pense que la preuve de ça est faite et l'avantage d'avoir l'aspect national dans notre organisation est justement cette uniformité de programmes d'études et cette uniformité d'examens, de sorte que le candidat qui réussit les examens garde une mobilité de son titre d'une province à l'autre.

Je pense qu'une législation qui amoindrirait l'importance du titre au Québec aurait pour conséquence que les provinces — la Colombie-Britannique, par exemple — où la vérification est permise auraient peut-être réticence à considérer les CGA du Québec au même niveau.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmorency.

M. VEZINA: M. le Président, au début je voudrais d'abord souscrire aux propos du député de Montmagny à l'effet que le nombre des membres de l'association qui sont ici dénote nettement l'importance que les membres et non pas seulement l'exécutif, comme malheureusement dans bien des cas, attachent aux travaux de la commission.

Il est évident qu'à la lecture de votre mémoire, que je pourrais diviser en deux parties, un côté peut-être positif et l'autre un petit peu moins positif, ça pose — à vos yeux tout au moins — un grave problème. Cependant, il y aurait peut-être des questions de base sur lesquelles il faudrait s'entendre. Est-ce qu'il y a possibilité de faire vivre le monde comptable au Québec à l'intérieur d'une seule association, mais quel que soit son nom, ou d'une seule corporation?

M. MAHEUX: Je pense que la réponse à cela est oui. Eventuellement, je ne vois pas pourquoi il n'y aurait pas une seule association, pour autant qu'on aura pris soin de corriger les mécanismes et les structures pour tenir compte, justement, des implications nationales. Je mentionnais tout à l'heure la mobilité de notre titre d'une province à l'autre, je pense que ce qu'il faut viser c'est que cette acceptation devienne une acceptation de toute la profession au Canada. C'est le voeu d'ailleurs de Task Force 2000 qui dit qu'on doit plutôt avoir un "national scope" et non pas s'en tenir tout simplement à un point de vue provincial. La complication évidemment est que les droits de pratique exclusive sont du domaine provincial. Alors, tant qu'il n'y aura pas une uniformité dans ce sens, je pense que la possibilité d'une fusion est plus difficile.

M. VEZINA: Mais, en fait, vous allez nous dire cela bien honnêtement.

Est-ce que les CA et les CGA, vous vous parlez, vous vous regardez, vous collaborez, ou si vous êtes comme chien et loup?

M. MAHEUX: Non, je pense bien que nous sommes tous exposés... D'ailleurs, dans l'industrie et dans l'entreprise, nous sommes obligés d'avoir affaire à un vérificateur, nous nous parlons convenablement et socialement à l'occasion aussi.

M. VEZINA: Alors, est-ce que je me trompe? C'est donc dire que, dans le sens de l'intervention du député de Montmagny, on peut espérer qu'éventuellement la profession comptable prise au sens générique sera intégrée à l'intérieur d'une seule corporation comme on voit chez les médecins, même s'il y a plusieurs spécialités, ou comme on voit dans d'autres secteurs professionnels? Est-ce que l'on peut espérer cela éventuellement?

M. MAHEUX: Pour autant que nous sommes concernés, c'est le voeu que nous chérissons.

M. VEZINA: II y a une question que je me pose. Si on examine votre mémoire, notamment à la page 23 et aux pages 33 et suivantes, il semble que vous fassiez des cours identiques, il semble que les exigences de scolarité, les exigences universitaires soient les mêmes. Est-ce que vous pouvez me dire si les CA ou les CGA peuvent faire des actes professionnels que l'un ou l'autre des troupes ne peut pas faire? Est-ce que les CA ont priorité sur certains actes professionnels?

M. MAHEUX: En fonction de...

M. VEZINA: En fonction de l'exercice de la comptabilité. Est-ce que les CA peuvent faire des choses ou des actes que les CGA ne peuvent pas faire? Ou le contraire?

M. MAHEUX: Je pense que la loi de 1946, justement, précise que, dans le domaine de la vérification des compagnies, les CGA ne peuvent pas faire la vérification.

M. VEZINA: D'accord, alors sous réserve de la vérification des compagnies, est-ce que c'est la même chose au point de vue de l'exercice de la profession?

M. MAHEUX: Je crois que les CGA — je ne parle pas pour les RIA, je pense que...

M. VEZINA: Je parle seulement des CA et des CGA.

M. MAHEUX: Les CGA ont assurément les droits acquis d'offrir leurs services dans le domaine de la comptabilité publique, de la vérification, des exceptions qui sont mention-

nées dans la loi de 1946 et des exceptions qui sont mentionnées dans la loi du notariat et du Barreau.

M. VEZINA: Maintenant, cela veut dire qu'à toutes fins pratiques un CGA pourrait par exemple, faire la vérification de la Corporation de la ville de Montréal et il ne pourrait pas faire la vérification d'une bicoque qui a $200 d'investissements?

M. MAHEUX: Si vous voulez corriger votre exemple, parce que l'acception élimine la ville de Montréal.

M. VEZINA: Québec, si vous voulez.

M. MAHEUX: A Québec, je pense que c'est exactement cela.

M. VEZINA: Trois-Rivières. Vous ne trouvez pas cela un peu loufoque comme situation?

M. MAHEUX: Entre autres, c'est la situation que nous trouvons anormale et incohérente. Pourquoi un CGA au Québec n'est-il pas capable de faire la vérification d'une grande entreprise et en Colombie-Britannique, s'il déménageait, il pourrait le faire?

M. VEZINA: Maintenant, vous êtes en vertu de la législation proposée là, je dirais définis ou classés comme titres réservés. Il semblerait que vous vouliez glisser vers la catégorie de l'exercice exclusif. Vous allez m'expliquer en quoi cela va régler ou améliorer votre situation.

M. MAHEUX: Si vous parlez de nous classer dans la catégorie de l'exercice exclusif, strictement avec nos droits annuellement, je pense que c'est tout simplement confirmer ce que nous voulions dans notre bill privé. Mais ce n'est pas la solution que nous recherchons; nous visons justement à ce qu'il y ait de.l'ordre dans la profession comptable de façon que, une fois pour toutes, on parte de là. La proposition que nous faisons, évidemment, c'est de créer par le truchement de la législation actuelle la possibilité de réunir les trois associations et de fixer de façon définitive les particularités de la profession.

M. VEZINA: Vous suggérez à la page 19, article 30 que comptable agréé soit remplacé par expert-comptable et vous prenez la peine de nous dire que c'est l'une des recommandations principales du présent mémoire — et je rejoins les propos du Solliciteur général — à ce moment-là, tout le monde serait expert-comptable, mais à l'intérieur, il y aurait des subdivisions ou des divisions. Mais comment allez-vous vous présenter au public comme expert-comptable pour préparer les impôts? Comment allez-vous annoncer cela?

M. MAHEUX: Je pense que l'appellation, la désignation CA, CGA et RIA que nous suggérons, c'est tout simplement pour garder notre appartenance à une association nationale et c'est aussi peut-être pour voir ou viser à organiser les membres des associations en fonction peut-être de la Loi des syndicats professionnels. Mais l'ordre des experts-comptables serait l'ordre qui verrait à la protection du public.

M. VEZINA: Pour tout le monde de la comptabilité?

M. MAHEUX: C'est cela.

M. VEZINA: II y a un point sur lequel j'aimerais connaître l'opinion de tout le monde. Vous avez sans doute pris connaissance des structures proposées pour l'office, pour les bureaux, les comités de discipline, les syndics, leur nomination, leur paiement, etc. Quelle est la position de votre groupement sur cette partie du projet de loi 250?

M. MAHEUX: Comme nous l'avons dit dans notre mémoire, il était tellement important pour nous de régler la situation de la profession comptable que nous nous sommes surtout attardés à cela. Le comité a évidemment regardé les implications que pouvaient avoir certaines stipulations du code. En principe, nous sommes favorables à cela. Vous exprimez actuellement une opinion sur ces particularités que vous mentionnez, nomination à l'office, etc.; je pense que cela ne serait pas une position officielle. A prime abord, je pourrais me risquer à dire que nous y sommes favorables; dans l'application, il faudrait revenir avec une recommandation plus officielle.

M. VEZINA: Sur ces points-là? M. MAHEUX: C'est cela.

M. VEZINA: Un dernier point, M. le Président. Je sais que vous êtes très patient, vous avez d'ailleurs le sourire pour cela. Vous avez parlé des bureaux multiprofessionnels. Dans votre esprit, vous voyez le mariage de quelle profession avec quelle autre?

M. MAHEUX: On ne voit pas pourquoi, comment, dans le problème d'une succession, par exemple, l'avocat, le notaire, le comptable...

M. VEZINA: L'avocat, le notaire, le comptable, ensuite?

M. MAHEUX: L'évaluateur...

M. VEZINA: Vous voyez tout cela marié ensemble?

M. MAHEUX: C'est cela.

M. VEZINA: Vous me permettrez de vous citer une petite anecdote. J'ai consulté un vieil avocat, un vieux routier de la profession, à qui j'ai demandé son opinion, il m'a dit tout bonnement de ne jamais voter en faveur de cela comme avocat, parce que le travail qui se fait chez les notaires, chez les comptables, c'est souvent une source de travail pour les avocats.

C'est tout, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Au nom des avocats, merci. Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Si j'ai bien compris tout à l'heure, il y a des CA que vous acceptez et à qui vous donnez des équivalences au sein de votre association. Est-ce qu'il y a des CA que vous acceptez dans votre association?

M. MAHEUX: Sûrement. Ceux qui ont satisfait aux exigences, qui ont passé des examens. Vous voyez actuellement, dans le botin des CGA, plusieurs membres qui, en 1946, étaient des CGA et qui, par la suite, sont devenus CA. Ils ont gardé leur dualité d'appartenance et leur loyauté envers notre association.

M. BOIVIN: Il y a des CA qui font partie de l'association des CGA...

M. MAHEUX: C'est cela. M. BOIVIN: ... et vice versa? M. MAHEUX: C'est cela.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y a des rencontres aux écoles de formation? H me semble que ce serait là que pourrait se faire le joint, si les programmes sont les mêmes.

M. MAHEUX: Nous sommes parfaitement d'accord, parce que les cours sont à peu près les mêmes. Il n'y a pas de raison pour que ce ne le soit pas.

M. BOIVIN: Est-ce que les CA ont la même affiliation au point de vue national? Est-ce qu'il y a une association nationale des CA?

M. MAHEUX: Oui, il y a une association qui s'appelle l'Institut canadien des comptables agréés.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y a entente sur le plan national?

M. MAHEUX: Je ne suis pas en mesure de savoir s'ils ont avec leur organisme national des contacts aussi intimes que nous en avons avec les nôtres. Mais je sais qu'ici, chez les CGA, nous avons une participation constante à toutes les affaires au plan national. CA-CGA au plan national, est-ce que c'est la question?

M. BOIVIN: Est-ce que les CA au plan national ont des ententes avec ceux de la province de Québec?

M. MAHEUX: C'est cela que je ne suis pas en mesure de vous dire, mais je sais que nous, nous avons un contact très intime avec notre organisme national.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chauveau.

M. HARVEY (Chauveau): M. le Président, lors de la première audition des mémoires, je me suis permis un commentaire et le président s'est chargé de me rappeler à l'ordre. Alors je m'en tiendrai aux questions, cependant avec un court préambule pour affirmer moi aussi mon assentiment concernant les commentaires ou le préambule qu'ont voulu livrer le député de Montmagny et mon collègue, le député de Montmorency.

J'ai lu avec intérêt votre mémoire, M. le président. Franchement, lorsque vous parlez d'une loi-cadre qui chapeauterait les associations professionnelles, pourquoi ne suggérez-vous pas plutôt, vous n'orientez pas plutôt vos démarches pour en arriver à une fusion pure et simple de vos services puisqu'au point de vue de ce qui vous est donné comme profession au niveau de l'enseignement, il y a absolument une identité de connaissances.

Alors je me demande pourquoi, si vous visez effectivement les mêmes buts que nous visons en instaurant cette loi 250, soit la protection du public, ne pas en arriver à une fusion pure et simple de la profession RIA. En fait peut-être que le RIA pourrait venir plus tard, mais si vous chapeautez tout cela par un code d'éthique professionnelle à l'intérieur de vos professions qui convergent quand même vers un même but, soit la protection du public, alors pourquoi ne pas y arriver par une fusion pure et simple?

M. MAHEUX: Je pense que c'est assez difficile, quand on pense fusion, on parle de participants unilatéralement, mais on ne peut pas dire que ce ne serait pas la solution. Je pense que ce qui est important pour le travail de la commission, c'est de permettre justement, par les stipulations de la loi, la possibilité que les autres associations puissent venir à une table et discuter toujours sous le contrôle et dans l'esprit du code des professions.

M. HARVEY (Chauveau): J'ai remarqué dans votre mémoire, M. le Président, que vous revenez assez souvent sur les mots comme "importance d'intégrité". C'est donc que vous voulez faire ressortir une dualité des fonctions comptables qu'on retrouve dans ces professions. Vous insistez souvent sur les mots "intégrité", "qualité d'indépendance ou d'impartialité" de ces mêmes corps qui font profession dans le même sens. Est-ce que vous pourriez m'indiquer pourquoi vous revenez aussi souvent sur cela?

M. MAHEUX: C'est toujours en fonction du même principe que l'expert-comptable, qu'il soit dans la gestion ou qu'il soit dans la vérification, doit avoir une impartialité, une indépendance pour donner plus de poids à son rôle et à sa compétence professionnelle. S'il avait l'occasion de participer à la déclaration à l'effet que les états, par exemple, sont conformes aux principes comptables, qu'ils sont en respect des lois fiscales, etc., je pense que cette impartialité-là pourrait être encore plus officielle. Il n'y a pas de raison pour qu'on puisse laisser entendre que l'indépendance et l'intégrité sont du domaine particulier du vérificateur seulement.

M. HARVEY (Chauveau): Une dernière question, M. le Président. Lorsque nous regardons votre mémoire et que nous comparons les chiffres, à la page 23, quand au nombre d'étudiants, cette question-là me frappe particulièrement. Dans l'option CGA, nous voyons ici, au Québec, 2,200 étudiants, comparativement à 3,850 en Ontario. C'est certainement cette province, qui dans le passé, en tout cas, nous a fait la barbe assez souvent. Ce nombre prouve vraiment qu'il y a un accent marqué vers cette profession et on y croit davantage. Comparativement aux autres provinces, on sait que vous avez exactement les mêmes connaissances, mais en Ontario est-ce que les CA et CGA sont chapeautés par une seule et même association professionnelle ou est-ce qu'ils sont reconnus par la loi provinciale ontarienne comme ayant les mêmes droits professionnels?

M. MAHEUX: Non, en Ontario la situation est exactement la même qu'au Québec. Le droit de pratique, de vérification publique est réservé par une loi aux CA et puis il y a un bureau de permis de licences en Ontario qui est composé de cinq membres de l'institut, je crois, et deux autres membres. Vous touchez un point très important quand vous parlez de l'intérêt pour la profession comptable. On pourrait peut-être soumettre, comme renseignement additionnel, les statistiques que nous avons sur la progression de notre association dans la province de Québec en disant, par exemple, qu'en 1965 nous étions 469 CGA et 576 étudiants. En 1970, nous étions 844 licenciés et 1,363 étudiants. En 1971 nous sommes dans l'ordre que nous mentionnons dans notre mémoire,soit quelque 1,130 licenciés et 2,200 étudiants. Vous voyez donc là une progression qui fait qu'aujourd'hui le nombre de nos membres licenciés rattrape assez rapidement celui des CGA de l'Ontario.

M. HARVEY (Chauveau): Même en tenant pour acquis que le Québec aurait peut-être avantage à avoir un pas en avant sur l'Ontario dans sa législation, croyez-vous qu'une solution pourrait être trouvée au niveau des associations professionnelles comptables?

M. MAHEUX: Voulez-vous dire au sein de la province de Québec?

M. HARVEY (Chauveau): Au sein du Québec.

M. MAHEUX: Je pense que si les mécanismes de législation nous permettent d'être tous dans une corporation d'experts-comptables, il y a certainement possibilité de rallier les opinions, sinon des dirigeants des groupements, du moins des membres. Je pense que les membres de chaque association seraient favorables à cela en général.

M. HARVEY (Chauveau): Me référant toujours à la première journée des auditions, nous avons écouté attentivement l'association interprofessionnelle, mais une question est demeurée sans réponse, et c'est là que le président s'est chargé de m'éviter de faire des commentaires, mais je voudrais peut-être vous demander pourquoi le comité des CGA, lors de la présentation de l'association interprofessionnelle, n'était pas représenté. Est-ce que vous avez fait un effort vous aussi pour être inclus dans cela?

M. MAHEUX: J'apprécie de pouvoir corriger cette affirmation qui a été faite. Effectivement, les CGA ont demandé leur admission au sein du conseil interprofessionnel. Notre demande est restée sans réponse pendant plusieurs années et on nous a finalement laissé entendre à un moment donné qu'on nous avait fait parvenir le refus de nous accepter. Nous avons recherché par quel moyen on nous avait transmis ce renseignement et nous n'avons pu trouver aucune trace de la lettre en question. Il s'agissait à ce moment-là de la période où la législation actuelle était en cours et on nous a rapporté à ce moment-là qu'on reconsidérerait peut-être notre demande. Effectivement, on nous a refusé l'admission au sein du conseil interprofessionnel quand on en voyait accepter d'autres qui n'étaient pas aussi importants quant aux effectifs, qui n'étaient peut-être pas plus importants quant aux buts qu'ils poursuivaient et nous comprenions mal que le conseil nous refuse l'accès.

M. VEZINA: Encore des naturopathes.

M. MAHEUX: Non, je n'en aurais peut-être pas contre les naturopathes dont j'aurais besoin des services.

M. HARVEY (Chauveau): M. le Président, votre représentation est impressionnante, je vous félicite et je voudrais souhaiter la bienvenue aux gens de l'Ontario en particulier.

M. KENNEDY: M. Maheux, je vais être très bref. D'abord, si on fait un peu d'historique, en 1946, quand a été votée la loi, je me demande

pourquoi à ce moment-là tous les CGA ne se sont pas joints à l'institut pour ne former qu'une seule association comptable. Il est assez évident que votre progression a été plutôt lente au début puisqu'en 1965 vous n'étiez que 576 membres. C'est une première question. Deuxième question, d'après vos données, il n'y a environ que 10 p.c. de vos membres qui se dirigent vers la pratique publique. Est-ce par accident ou simplement qu'il n'y aurait pas de place dans l'industrie, puisque leur nombre est quand même assez restreint par rapport au total, je veux dire 10 p.c. dans la pratique publique? Troisième question, quelles sont les normes ou comment comparez-vous les normes d'admission à votre corporation aux normes d'admission à l'Institut des comptables agrées, je veux dire les examens? Je n'ai jamais passé les vôtres, mais j'ai passé ceux de l'institut, je sais comment ils sont. Je voudrais avoir vos commentaires sur ces trois points.

M. MAHEUX: Votre première question est pourquoi les CGA n'ont pas joint les rangs des CA en 1946. J'imagine que vous voulez insinuer par là que le problème aurait été réglé, que cela aurait été une fusion finale et définitive. Je pense que la réponse repose beaucoup plus sur l'attitude de l'institut des CA du temps que celle des CGA. Je pense qu'on a fait des distinctions à ce moment-là à l'effet que les membres CGA, certifiés et en règle, en 1946, étaient automatiquement admis dans les rangs de l'institut pour autant qu'ils étaient dans la pratique publique ou qu'ils étaient au service de la fonction publique. Tous les autres, c'est mon cas, ont gardé le privilège de pouvoir joindre les rangs de l'institut pour autant que, par la suite, ils pourraient prouver qu'ils ont coopéré à la vérification publique pendant un an à raison de 80 p.c. de leur revenu. Je pense que c'était la stipulation. Je pense qu'il y a dans l'assistance des gens plus compétents que moi pour dire pourquoi les CGA n'ont pas alors été tous admis mais l'historique veut que ce soit plutôt en raison de l'attitude de l'institut et non pas des CGA.

Votre deuxième question est de savoir pourquoi, en 1965, si peu de gens étaient membres des CGA. Je pense que c'est le contre-effet de la législation de 1946.

Evidemment, nous avons perdu à ce moment-là plusieurs de nos membres qui se sont joints aux rangs de l'institut et il a fallu remonter la côte, mais je pense que nous la remontons assez rapidement.

Votre troisième question discute du nombre restreint de nos membres qui font de la vérification publique; je pense que là encore c'est un effet de la loi de 1946. On a tellement restreint à ce moment-là nos pouvoirs que les gens voyaient beaucoup plus de possibilités du côté de la pratique de la comptabilité générale que de la pratique publique, parce que nous étions limités à faire de la vérification simple- ment dans un domaine restreint. Si tout le champ nous avait été ouvert, je pense qu'il y aurait une plus forte proportion de nos membres qui en feraient aujourd'hui partie.

M. KENNEDY: II y a une dernière question à laquelle vous ne m'avez pas répondu. Est-ce que vous êtes en mesure de nous faire la comparaison entre les exigences d'admission à votre corporation et les exigences d'admission à l'institut? Je parle des examens d'admission, je ne parle pas des cours. Je vois que les cours universitaires sont à peu près identiques mais je parle des examens d'admission.

M. MAHEUX: C'est assez difficile de comparer la valeur des examens d'une association par rapport à l'autre. On peut donner des exemples, je vous félicite de donner le vôtre, vous avez passé avec succès celui des CA, mais on pourrait invoquer le cas de certains CA qui n'ont pas réussi les examens des CGA.

M. KENNEDY: II y a beaucoup plus de CGA qui n'ont pas réussi l'examen de CA.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je voudrais avertir les gens qui assistent à cette réunion qu'on n'a pas le droit de manifester ici. Nous ne voulons pas tenir ces séances à huis clos, mais si ça continue, on va voir des gens organiser des groupes et venir applaudir un groupe ou un autre et ça ne finira jamais. Nous ne voulons pas d'une telle situation. S'il vous plaît, souriez, si vous voulez, mais...

Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Vous dites que les cours sont donnés habituellement par correspondance par cette université de la Colombie-Britannique; quelles exigences a cette université au point de vue de la formation de base d'un étudiant?

M. MAHEUX: Le cours par correspondance est un cours organisé avec la coopération de l'Université de la Colombie-Britannique, mais c'est un cours entièrement contrôlé par l'association. L'association s'est entendue avec un comité permanent d'éducation qui se réunit régulièrement, qui reçoit la coopération des universitaires de toutes les provinces du Canada. L'organisation du cours se fait en coopération avec la Colombie-Britannique mais toutes les matières sont préparées en coopération avec d'autres membres d'universités et sous le contrôle d'un comité permanent de l'éducation de notre association.

M. SAINT-GERMAIN: Quelle formation de base exigez-vous d'un étudiant?

M. MAHEUX: Nous exigeons actuellement pour l'admission aux examens des CGA l'équivalent des admissions au cours secondaire, au cours universitaire.

M. SAINT-GERMAIN: Vous voulez dire l'équivalent pour les CA ou pour vos membres, j'entends au point de vue de la scolarité pour les étudiants?

M. MAHEUX: C'est cela.

M. SAINT-GERMAIN: II y a des cours du soir qui se donnent, je pense, aux Hautes études commerciales?

M. MAHEUX: Oui, dans les universités du Québec. Le cas du Québec est un cas un peu différent de celui des autres provinces, parce que beaucoup de nos étudiants, la majorité de nos étudiants, suivent des cours universitaires, cours du jour ou cours du soir. Ces cours sont donnés à Québec, à Sherbrooke, à Montréal, à Trois-Rivières, à Chicoutimi; ce sont des cours du soir pour ceux qui font leur pratique tout en se donnant à leur formation de comptables.

M. SAINT-GERMAIN: Pour ceux de vos membres qui font de la pratique publique, quel genre de services cette minorité de gens rend-elle à la population au point de vue comptable?

M. MAHEUX: Toujours dans le domaine restreint que la loi nous permet, la vérification des municipalités, la vérification des caisses populaires, les services de comptabilité publique qui leur sont permis.

M. SAINT-GERMAIN: Vous n'avez pas le droit, par exemple, de faire l'impôt des... Vous avez le droit de faire l'impôt des particuliers, mais...

M. MAHEUX: Absolument. La Loi du barreau et la Loi du notariat le spécifient d'ailleurs, particulièrement en mentionnant le nom des CGA, nous avons le droit de faire ces choses.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, j'ai quelques questions qui seront très brèves. Le monde de la comptabilité semble un monde bien occupé, démonstration faite, un monde bien intéressé. Est-ce qu'il existe actuellement dans la province de Québec suffisamment de spécialistes comptables pour répondre à tous les besoins?

M. MAHEUX: Je pense que les besoins sont tellement grandissants que nous voyons que la majorité de nos CGA trouvent facilement de l'emploi. Je me demande du côté de la vérification s'il n'y a pas encore un besoin aussi grandissant. Si l'on considère les renseignements que nous ne pouvons pas étayer de statistiques, on sait pas exemple que plusieurs des rapports qui sont soumis au ministère du Revenu ne sont pas toujours accompagnés d'un certificat du vérificateur. Alors, je pense qu'il y aurait certainement de la place dans ce domaine-là.

Notre opinion, nous, d'après les renseignements et le bureau de placement que nous avons, nos étudiants, une fois qualifiés, trouvent facilement de l'emploi très rémunérateur.

M. GUAY: Maintenant, si on regarde le code des professions ou encore le projet de loi 264, est-ce que ces projets de loi laissent quand même assez d'autonomie aux spécialistes comptables pour rendre à la population tous les services qu'on est en droit d'attendre?

M. MAHEUX: Vous parlez des stipulations mêmes du code?

M. GUAY: En général.

M. MAHEUX: Je crois que oui, pour autant qu'ils en laisseront aux autres professions, je ne crois pas qu'il y ait des raisons pour que la profession comptable se sente plus particulièrement restreinte par les stipulations du code.

M. GUAY: Vous avez, d'autre part, souligné que vous avez déjà présenté un bill privé. Est-ce que le code des professions et le projet de loi 264 s'apparentent de façon très proche au projet de loi que vous aviez présenté à ce moment-là?

M. MAHEUX: Encore toujours sujet a l'interprétation qu'on fait des restrictions, des stipulations qui sembleraient nous enlever nos droits acquis, notre bill privé voulait tout simplement consigner dans un document officiel tous les droits que nous avons mais éparpillés dans divers statuts. Le code des professions et les lois actuelles, suivant qu'on interprète qu'ils nous laissent nos droits acquis, ne nous donnaient pas plus, mais suivant notre interprétation, nous les perdions tous.

M. GUAY: C'est donc dire qu'il n'y a pratiquement pas de chômeurs à l'intérieur de votre profession, c'est-à- dire dans l'ensemble des professions comptables?

UNE VOIX: II en manque encore à Radio-Canada...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. FOURNIER: Voici une dernière question. En prenant la définition que vous mettez dans votre mémoire à la page 13, la comptabilité, est-ce qu'il serait juste de dire que votre association préconiserait la théorie suivante voulant que la tenue de livres et l'enregistrement des données puissent se faire par tout le monde: qu'en second lieu, l'expertise comptable, soit la présentation des opérations ou la préparation des états comptables, se fasse par les experts-comptables, et qu'en troisième lieu, la vérification se fasse par des licenciés ou des détenteurs de licence particulière?

M. MAHEUX: C'est exactement ça. Je pense que la tenue de livres fait partie intégrale d'un système comptable. C'est la base même de la théorie de la philosophie de la comptabilité. Mais je pense qu'au niveau de la tenue de livres, on ne peut pas exiger que ce soient des experts-comptables. Mais en partant de là, je pense qu'il est nécessaire d'incorporer la notion de professionnel.

M. LE PRESIDENT: Merci, messieurs. Au nom de la commission, je veux remercier la délégation et l'assistance imposante de CGA... Pas de manifestations.

M. MAHEUX: Je me permettrais de vous remercier de l'attention et du temps que vous nous avez confiés et j'espère bien que nos représentations auront un bon effet.

M. LE PRESIDENT: L'Institut des comptables publics accrédités. Me Armand Poupart Jr.

Messieurs, s'il vous plaît, pas de discussion dans la salle. Voulez-vous prendre siège? Nous allons continuer. Je donne la parole à Me Armand Poupart.

Institut des comptables publics accrédités

M. POUPART: M. le Président, messieurs, je représente l'Institut des comptables publics accrédités; le terme anglais est The Institute of Accredited Public Accountants. Le mémoire que nous vous soumettons a été préparé par l'exécutif qui est ici présent avec moi. M. Lefebvre, qui est le président, est assis à ma droite et il y a M. Bell, qui est secrétaire de l'institut. Il s'agit d'un court mémoire. Mes clients ont pris connaissance du bill 250 qui s'intitule code des professions. Ils l'ont étudié. Ensuite ils se sont aperçus qu'en vertu de l'article 1 on indique quelles sont les corporations professionnelles et on réfère à une annexe au projet de loi. A ladite annexe, l'Institut des comptables publics accrédités n'est pas mentionné. Nous vous soumettons que nous sommes une corporation reconnue par le code civil, que nous existons en vertu de lettres patentes. Nous avons notre charte. Notre profession existe dans des cadres législatifs, avec des règlements, depuis 1946. C'est la raison pour laquelle, dans les quelques lignes de nos conclusions, nous vous demandons d'inclure dans l'annexe I du code des professions, le bill 250, les mots "The Institute of Accredited Public Accountants" en anglais et en français "L'Institut des comptables publics accrédités". Ce sont les simples raisons de notre demande ici ce matin.

M. LE PRESIDENT: M. le Solliciteur général.

M. FOURNIER: Les lois comptables ont été approuvées ici le 17 avril 1946. Je constate que votre incorporation date du 7 mai 1946 et que vous avez obtenu une charte de compagnie à ce moment-là. Il y a référence dans la loi présente des comptables au APA. Est-ce qu'il s'agit de votre organisme? A l'article 45 du bill 264, vous avez une réserve qui est faite: certaines personnes conservent le titre APA. Est-ce qu'il s'agit réellement de votre organisme?

M. LEFEBVRE: Exactement, M. le Président.

M. FOURNIER: Le nom dont vous vous servez, "Institut des comptables publics accrédités", ce n'est pas ce que l'on revoyait dans les autres lois.

M. LEFEBVRE: Il s'agit de la traduction de "The Institute of Accredited Public Accountants". La traduction a été faite comme elle se lit, l'Institut des comptables publics accrédités. Dans les lettres patentes, elle est inscrite dans la langue anglaise parce que c'est une charte fédérale. Nous l'avons traduit par Institut des comptables publics accrédités pour la pureté de la langue française et pour respecter la traduction de chaque mot.

M. FOURNIER: N'avez-vous pas changé de nom? L'autre association était International Society of Commerce Limited et, au mois de mai, c'est devenu, d'après ce que vous mentionnez, The Institute of Accredited Public Accountants. Il semble que ce soient totalement des organismes différents.

M. LEFEBVRE: The Institute of Accredited Public Accountants a été établi en 1936. The International Society of Commerce Limited a été incorporée après, étant la propriété l'un de l'autre.

En 1946, lorsque le bill 201 a été voté par la Chambre, l'International Society of Commerce a servi d'intermédiaire, vu que notre demande d'enregistrement à Ottawa sous le nom de "Institute" n'était pas encore acceptée, mais elle avait été soumise au Parlement, à Ottawa, par bien des lettres patentes. A ce moment-là, nos avocats se sont servis de International Accountant Society, qui était une chose légale, incorporée, au Manitoba, et ça a servi d'instrument pour nous donner notre pouvoir. Et c'est à ce moment-là qu'on a dit: APA, auditeur public accrédité, accredited public accountant. Mais le mot "international", par nos avocats, était l'intermédiaire qui nous a donné ce droit. C'est pour ça que dans le bill 201, on écrit, auditeur public accrédité, ce qui nous accordre les initiales APA qui étaient nos initiales.

M. FOURNIER: Comme ça, votre demande a pour effet de demander de nouveaux pouvoirs et une nouvelle accréditation à une nouvelle association qui n'avait pas d'accréditation, qui n'a pas présentement d'accréditation, sauf par l'intermédiaire du nom d'une compagnie.

M. POUPART: Voici, pour que ce soit bien clair, nous ne demandons rien de cela. Nous nous en tenons à notre mémoire. Nous sommes une association existant depuis 1946, reconnue par le 10, George VI, chapitre 47. Ensuite, il y a eu des bills additionnels qui ont été adoptés; nous avons toujours été reconnus; dans la Loi des comptables agréés, nous sommes reconnus comme tels. Nous avons une association, nous avons des cadres, nous avons un code d'éthique, nous avons des règles de discipline; nous formons, ni plus ni moins, une profession, pour être clair et précis, parallèle à la profession de comptable. Et ça s'appelle l'Institut des comptables publics accrédités. Nous rendons les mêmes services généraux et spéciaux au public en général.

M. FOURNIER: Je tente de retracer légalement en vertu de quoi vous existez, si ce n'est par l'intermédiaire d'une compagnie incorporée en 1946.

M. POUPART: Notre association existait avant ça, elle a été reconnue dans la Loi de 1946 et...

M. FOURNIER: De quelle façon? M. POUPART: Allez voir à l'article...

M. FOURNIER: C'est parce qu'à ce moment-là ce qui est reconnu, c'est International Accountant and Executive Corporation of Canada.

M. LEFEBVRE: C'était l'instrument, M. le ministre, que nos avocats nous ont dit, à ce moment-là, vu que la charte était soumise à Ottawa mais n'avait pas encore été acceptée. Elle a été acceptée, comme vous faites mention, un mois — je crois — après. C'est exactement, à ce moment-là, qu'on a dit: C'est l'instrument qui va nous servir. Et c'est pour ça que dans le bill 201, c'est marqué? APA, auditeur public accrédité, accredited public accountant. On a extrait du nom de notre charte Institute of Accredited, on a mis auditeur public accrédité, dans ce but parce que l'autre avait été l'instrument.

M. FOURNIER: Voulez-vous prétendre que, même si vous n'êtes pas membres de International Society of Commerce, vous avez droit à la protection des lettres APA en vertu de la loi de 1946?

M. LEFEBVRE: Non, 1946, ne nous a pas donné le droit — ici, dans la province de Québec, oui — mais seulement l'International était la propriété de l'institut qui avait été fondé en 1936, Accredited Public Accountant, au Manitoba et, aujourd'hui, c'est encore la même propriété. Ce sont deux compagnies différentes, mais ce sont les mêmes propriétai- res, les mêmes membres, c'est la même association de professionnels et nous pratiquons dans toutes les provinces du Canada. Nous sommes reconnus comme comptables publics.

M. FOURNIER: Etant donné que vous n'êtes pas inclus dans l'ancienne loi, étant donné que c'est un autre organisme, je trouve difficile, avec le mémoire qui est présenté, pour la commission parlementaire, la tâche de donner un jugement de valeur sur votre organisme.

M. POUPART: M. le Président, en vertu de la loi de 1946, 10, George VI, chapitre 47, à l'article 11, nous sommes reconnus et nous existions et nous existions comme tels à ce moment-là. Pensez-vous que depuis 1946 nous aurions pratiqué comme ça, sans que les CA ou les autres associations nous causent des problèmes? Nous avons toujours eu une existence légale, nous avons incorporé par la suite une corporation à la deuxième partie de notre charte, ce sont nos lettres patentes qui ont été accordées par le gouvernement fédéral et nous avons des filiales dans toutes les provinces. En vertu de cette charte fédérale, nous sommes conformes aux exigences de l'article 25 du bill 250, puisque nous sommes une corporation reconnue par le code civil et, dans le bill 250, nous nous conformons aux exigences de l'article 25, mais nous ne sommes pas mentionnés à l'annexe. C'est la raison de notre présence ici.

M. FOURNIER: En vérifiant la loi, on ne retrouve pas ce dont vous faites mention.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. POUPART: Je vous réfère à l'article 11, M. le Président, qui dit qu'à partir du premier jour de janvier 1947, personne n'aurait le droit de pratiquer comme comptable public ou occuper les fonctions, en aucune façon se présenter ou représenter toute société dont il fait partie comme comptable public ou comme une société de comptables publics ou agir de manière à laisser entendre qu'il est un comptable public.

Ou que ladite société est une société de comptables publics à moins qu'il ne soit: a) un membre de l'institut ou un détenteur d'un permis en vigueur émis par l'institut ou — et j'attire votre attention sur le paragraphe e) — un membre d'un institut ou association de comptables publics constitué avant l'entrée en vigueur de la présente loi ou sous l'autorité de la Législature de toute autre province du Canada dans laquelle il est permis aux personnes mentionnées aux aliénas a) et b), par le présent paragraphe, de pratiquer comme comptable public."

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: J'aimerais poser une question différente: Advenant une loi-cadre de la profession de comptable, j'aimerais me faire éclairer un peu sur le rôle dévolu aux comptables publics versus les CGA, les CA?

M. LEFEBVRE: Monsieur, les CGA ne sont pas des comptables publics, ce sont des comptables spécialistes en administration.

M. PERREAULT: Pouvez-vous me définir le terme "comptable public" d'abord?

M. LEFEBVRE: Les comptables publics sont tous ceux qui offrent leurs services, tel que l'article vous le dit dans la loi, avec rémunération pour faire de la comptabilité publique aux compagnies, aux individus, ou n'importe quoi. C'est exactement notre rôle et celui des CA présentement, avec les comptables publics enregistrés. Nous sommes trois. C'est exactement le rôle, dans la province de Québec, reconnu par les CA, reconnu par nous et les comptables publics qui sont une filiale des CA.

M. POUPART: Pour répondre exactement à votre question, je me réfère à l'article 13 de la Loi des comptables agréés qui dit que: "Pour les fins de la présente loi le mot "comptable public" signifie une personne qui, moyennant rémunération, s'engage dans l'art ou la science de la comptabilité ou dans la vérification des livres ou comptes et offre ses services au public, mais ne comprend pas celui qui agit exclusivement comme teneur de livres, même s'il offre ses services comme tels au public."

M. LEFEBVRE: Alors notre rôle, c'est exactement ce que l'on fait présentement.

M. PERREAULT: Si je comprends bien, votre rôle est équivalent à celui d'un CA.

M. LEFEBVRE: Exactement, monsieur.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montcalm.

M. MASSE: Justement, c'est le problème; vous me permettrez de poser des questions qui sont peut-être toutes naïves. Je n'ai pas l'expérience du monde de la comptabilité, mais je découvre ce matin que c'est très confus au point de vue des professions.

M. POUPART: C'est exact.

M. MASSE: ... et que la tendance actuellement au Parlement, au gouvernement du Québec, c'est de faire certains cadres à l'intérieur desquels la population, comme les individus, se retrouve plus facilement. Partant de là, le député de l'Assomption vous posait une question tout à l'heure: Quelle différence y a-t-il entre votre organisme et les autres organismes?

Vous répondez que, en soi, il n'y en a pas tellement. Mais s'il n'y a pas tellement de différence, pour quelles raisons tout le monde ne se retrouve-t-il pas ensemble dans un plan beaucoup plus clair, plus conforme à la raison?

M. LEFEBVRE: Est-ce que je peux, M. le Président, répondre à M. Masse? M. Masse, depuis 1969, on a rencontré les CA dans le but de faire une fusion et la chose se discute depuis 1969; les APA et les CA, ici au Québec, travaillent la main dans la main, on veut arriver à cette fusion. En 1969, on a eu une session avec eux; dans le moment, c'est en discussion. Le bill 250 est peut-être une entrave à la marche de l'affaire, mais c'est ce que l'on veut viser, c'est ce que l'on a entrepris depuis 1969 avec les CA.

M. MASSE: Si je comprends bien, tout le monde est d'accord, mais le gouvernement ne le sait pas encore.

M. LEFEBVRE: Ecoutez, avant d'arriver devant le gouvernement, que ce soient les CA fusionnés avec nous ou avec un autre groupe, je crois qu'il faudrait d'abord présenter un bill au gouvernement. A ce moment-là, il le saura; mais antérieurement à cela, je ne le crois pas.

M. MASSE: Est-ce que, dans un autre ordre d'idées, la plupart, ou beaucoup de professions qui viennent à cette commission sont des professions auxquelles le public est obligé de s'adresser lorsqu'il retient certains services dans un domaine particulier? Exemple: N'importe qui ne peut pas pratiquer la médecine; si on a besoin d'un médecin, il faut aller voir un médecin; pour un avocat, etc.. Quand on arrive dans le domaine de la comptabilité, nul n'est obligé de retenir les services spécifiques d'un comptable — appelez-le comme vous le voulez, mais quelqu'un dans ce domaine-là — pour des choses qui touchent la comptabilité. Est-ce que vous croyez qu'il serait nécessaire qu'au même titre que la médecine ou autre vous ayez un service exclusif et, pour le public, obligatoire, lorsque l'on touche au domaine de la comptabilité ou si, au contraire, c'est une profession qui offre des services dans le domaine de la comptabilité à la population en général, à elle de décider d'en retenir les services ou non, si elle le désire.

M. LEFEBVRE: Tout d'abord, M. Masse, les compagnies sont obligées d'avoir un comptable public. Alors, automatiquement, nous sommes là pour...

M. MASSE (Montcalm): Pour ce qu'on appelle la vérification...

M. LEFEBVRE: L'individu n'est pas obligé. Maintenant, il sera obligé. C'est encore votre gouvernement qui l'a demandé et avec raison.

Pour les courtiers en immeuble, il exige que les états financiers soient signés par un comptable public, CA et APA, actuellement, et comptable public enregistré. Vous avez, dans d'autres secteurs, les comités paritaires qui exigent que les rapports soient signés par un comptable public, c'est un CA ou un APA ou un comptable public enregistré. Ce sont vos lois de Québec mais, pour le commun des mortels, c'est là, réellement, où existe une confusion extrême. Nous ne pouvons pas, ni les CA, ni le gouvernement, à moins de passer une loi radicale, empêcher n'importe qui de faire de la comptabilité, ce qu'on appelle de la tenue de livres. C'est regrettable parce qu'à un certain moment il est déjà arrivé des affaires. Mais nous sommes obligés de nous conformer. Pour les compagnies, les comités, toutes les affaires du gouvernement, vous exigez des rapports signés par un comptable public qui est un CA, un APA ou un comptable public enregistré présentement dans la province de Québec.

M. MASSE (Montcalm): On peut dire que tout ce qui s'appelle rapport officiel doit être vérifié et signé par quelqu'un de vos professions...

M. LEFEBVRE: Nous avons fait des mises au point dans certains secteurs du gouvernement parce qu'ils exigeaient un comptable agréé. Alors, nous avons dit: Messieurs, non. Nous avons le droit de pratiquer comme comptables publics. Si vous regardez, c'est bien écrit, quand on dit vérification faite par un comptable public, le mot "comptable agréé" n'existe plus. Ce sont les comptables publics qui sont les APA, les CA, les comptables publics enregistrés présentement.

M. POUPART: M. le Président, je voudrais seulement ajouter une clarification à ma réponse au Solliciteur général. L'association que je représente ici existait avant 1946 et je vous réfère à l'article 11.

M. FOURNIER: Pas en vertu de votre document qui dit que c'est arrivé au mois de mai.

M. POUPART: Je vous réfère à l'article 11 de la Loi des comptables agréés qui la reconnaît — il ne faudrait pas qu'il y ait de confusion— qui reconnaît cette association-là parce que nous existions avant 1946. Donc, tous ceux qui existaient comme corps public avant 1946 ont été reconnus à ce moment-là.

M. FOURNIER: Je saisis très bien vos remarques. Mais depuis le mois d'avril 1946, vous avez substitué à cet organisme qui existait un nouvel organisme. Est-ce que les droits de l'ancien organisme doivent être transmis automatiquement alors que la loi ne les a pas transmis?

M. LEFEBVRE: II n'y a pas eu substitution, M. le Procureur.

M. LE PRESIDENT: Solliciteur général, procureur de son...

M. LEFEBVRE: H n'y a pas eu substitution parce que les deux existent actuellement. Institute of Accreditated Public Accountants est le propriétaire. Ce sont les mêmes directeurs qu'International. Mais au moment où est arrivé le bill 201 en 1946, nos avocats se sont servis du statut légal que nous avions à ce moment-là à International comme instrument. C'est exactement le mot qu'ils nous ont dit, pour que nous puissions être inclus dans le bill 201 parce qu'Ottawa n'avait pas encore accepté notre charte. Elle venait d'être présentée, elle a été acceptée un mois plus tard. C'est pour cette raison qu'ils ont demandé au gouvernement de mettre dans la loi les initiales APA, et auditeur public accrédité —Accredited Public Accountants — qui était une partie de notre nom que nous demandions à Ottawa.

M. FOURNIER: Seulement une dernière question. Je pense que nous sommes suffisamment éclairés. Qu'est-ce qui est arrivé et qu'est-ce qui existe aujourd'hui relativement à The International Society of Commerce Limited?

M. LEFEBVRE: Elle existe toujours.

M. FOURNIER: Pourquoi ne vous êtes-vous pas présentés sous ce nom aujourd'hui?

M. LEFEBVRE: Parce que nous sommes appelés maintenant partout au Canada sous le nom Institute of Accredited Public Accountants au point de vue national. Nous avons toujours notre charte internationale qui est toujours là, un point, c'est tout. Mais nous agissons suivant notre charte fédérale vu que nous sommes une affaire nationale et que, dans chaque province, nous sommes reconnus comme comptables publics. Même en Ontario, si vous me le permettez — tout à l'heure la question a été posée aux CGA — c'est une licence qui est requise pour avoir le droit de pratiquer dans la province et c'est un comité gouvernemental qui a été formé et qui est composé de CA et de APA. Alors, nous coopérons ensemble dans tout le pays.

M. POUPART: M. le Président, pour terminer ma réponse et compléter mon éclaircissement, l'article 17 de la Loi des comptables agréés dit que rien dans la présente loi n'empêche un membre de The International Society of Commerce Limited qui a résidé depuis le 1er janvier 1942 dans la province de Québec et qui a pratiqué comme comptable de continuer à le faire et ce membre pourra employer le titre APA, soit Accredited Public Accountant en

anglais. Moi, je représente The Institute of Accredited Public Accountants, c'est ça qui est la personne morale, la personne légale qui est devant vous ce matin, pour fins de comptabilité publique. Il pourra conserver les droits et se servir des mêmes titres et des mêmes initiales dans l'exécution de ses fonctions. Tous mes clients utilisent les initiales APA depuis que cette loi-là existe et elle n'a jamais été changée. C'est ça que je veux clarifier, étant donné la confusion qui semble exister.

M. LE PRESIDENT: Merci. Le député de Châteauguay.

M. KENNEDY: Seulement deux questions, M. le Président.

Je présume que vous étiez en pratique en 1946 quand la loi des CA a été adoptée. Pourquoi, à ce moment-là, ne vous êtes-vous pas prévalus du privilège de vous unir dans une seule institution? Deuxième question, combien de membres avez-vous dans la province?

M. LEFEBVRE: Pour répondre à votre première question, monsieur, c'est regrettable que, dans la province de Québec, on ne puisse pas toujours s'accorder. En 1945, le travail a été fait par un groupe qui a eu le malheur de faire une telle chose. En 1946, ce à quoi vous faites allusion, nous étions cinq associations reconnues dans la province de Québec, les CA, les CPA, les CGA, les LIC et les APA. A ce moment-là, j'était jeune étudiant, ce sont mes patrons qui étaient dans plusieurs universités de la province qui se sont occupés de cette affaire-là. On avait suggéré de faire une table ronde, — c'est exactement ce à quoi vous voulez faire allusion — représentée par chacun des comités des associations reconnues et fermer une fois pour toutes cette profession. Mais en vertu du fameux mot d'autonomie qu'on prononce si souvent et qui devrait être seulement dans le Larousse pour moi, à certains moments, chacun a voulu présenter son propre bill. Le résultat est la cacophonie qu'on a eue. Tous les bills ont été mis au panier et quinze jours plus tard, on avait le bill 201 qui nous a reconnus, nous, les APA, les CA, tandis que les CGA qui, à ce moment-là étaient en pratique publique ont été acceptés comme CA. Cela répond-il à votre question? C'est la raison pour laquelle ce n'est pas fait. On travaille actuellement depuis 1969 avec les CA pour faire une fusion entre les APA et les CA. Cela va probablement se faire, il faut que cela arrive â la fin. Le bill 250 peut aider tout le monde. Quant au nombre de membres, nous sommes ici au Canada environ 700 membres tous pratiquants.

M. KENNEDY: Dans la province.?

M. LEFEBVRE: Dans le Québec, nous étions 200. Cela répond à votre question?

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Poupart, si je comprends bien la réserve qui est faite, qui apparaît actuellement à l'article 45 du bill 264 qui répète, je pense, quelque chose qui se trouve dans la Loi de l'institut des comptables actuel, c'est au fond une espèce de modus vivendi qui a été établi pour sauvegarder les droits acquis. Est-ce que je me trompe en affirmant cela?

M. POUPART: Vous allez presque jusqu'à l'interprétation que je lui donne. Je dirais que c'était une reconnaissance de ce qui existait et qui légalisait ou qui donnait à cette association parallèle le droit de continuer de l'exercer. C'est dans le texte législatif. Alors, se prévalant de ce droit, ils ont continué à professer et depuis cette période, depuis 25 ans qu'ils existent, il n'y a jamais eu de plainte, les CA n'ont jamais demandé aux APA s'ils avaient le droit de pratiquer parce que leur droit est reconnu dans la loi même des CA. Comprenez-vous?

M. BURNS: En somme, votre demande n'est pas à l'effet de reconnaître un droit de pratique, puisqu'il est déjà reconnu.

M. POUPART: Non, nous l'avons.

M. BURNS: Est-ce que je comprends bien votre demande en disant que votre institut, vous le voulez en annexe pour être justement soumis aux mêmes règles que les autres corporations?

M. POUPART: Exactement. Regardez, M. le député, ce qu'on dit en deux mots. On dit que vous avez préparé un bill et cela s'appelle le code des professions. Nous ne voulons pas que cela s'appelle le code de certaines professions, parce qu'il y en a qui manquent. Nous nous disons que nous sommes des professionnels, nous sommes reconnus par d'autres professionnels dans d'autres textes législatifs. Allons â l'article 1 où on dit: "Seules les corporations qui sont mentionnés à l'annexe 1 sont des professions, des corporations professionnelles. Nous disons; Messieurs, vous avez oublié d'y mettre notre nom. Nous ne vous demandons pas autre chose, nous ne vous demandons pas de nous donner ce que nous n'avons pas, de changer ce que nous avons ou de nous donner autre chose. Nous vous disons: Reconnaissez-nous et mettez notre nom. Parce que vous mettez les avocats là-dedans, vous ne mettez pas seulement les avocats en droit commercial. Vous mettez les avocats.

Vous mettez les médecins, vous ne mettez pas seulement les médecins spécialistes en certaines maladies de la peau, vous mettez les médecins. Quand vous arrivez â mettre les comptables, vous arrivez et vous dites: La

Corporation professionnelle des comptables agréés du Québec. Alors, là je pense que vous restreignez, vous mettez une partie de la profession, une partie du monde des comptables seulement. Vous négligez une autre partie du monde des comptables qui est ici et dont je me fais l'interprète, étant la société reconnue par la loi des APA. Alors, je me retourne vers vous et je vous dis: Ne nous oubliez pas, mettez-nous dans l'annexe comme tous les autres professionnels si vous voulez que votre code des professions demeure en titre le code des professions et non pas le code de certaines professions. C'est ma demande. Je pense que c'est clair et simple.

M. LEFEBVRE: M. le Président, est-ce que je pourrais faire une mise au point? Pour vous montrer, messieurs, que réellement notre institut a toujours été reconnu depuis 1946 sous le nom, depuis notre charte, d'Institute of Accredited Public Accountants, nous avons, et c'est vice versa, nos membres APA en société avec des CA. Alors, si nous sommes reconnus par les CA, s'ils acceptent... Nous avons un code d'éthique qui est exactement le même: nous exigeons pour nos membres qu'ils soient bacheliers en commerce d'une université reconnue et qu'ils aient cinq ans de pratique: on accepte qu'un APA se mette en société avec un CA ou vice versa. Je ne vois pas pour quelle raison, messieurs, on met les instituts des auditeurs publics accrédités en dehors du bill. Je crois que c'est une erreur involontaire qui a été faite. Normalement, cela devrait être inclus dedans au même titre puisque nous allons de pair. C'est notre opinion, je crois que c'est un oubli involontaire qui a été fait.

UNE VOIX: Avez-vous actuellement des écoles...

M. LEFEBVRE: Monsieur, voici, si vous me permettez, pour être membre ici dans la province, voici ce qui en est: a)Tout résidant de la province de Québec qui est un membre en règle accrédité d'une association connue comme l'Institut des auditeurs publics accrédités incorporé aux chartes du gouvernement du Canada; b)Tout résidant de la province de Québec qui est un membre en règle de toute association comptable et de vérificateurs incorporée par ou sous l'autorité d'un acte du Parlement du Canada ou par la Législature de toute province, pourvu que les qualifications comme membre desdites associations soient dans l'opinion du bureau d'administration locale équivalentes aux qualifications requises pour être membre de l'institut: c) Ceci va répondre à votre question, M. le député. Toute personne de plus de 21 ans qui détient un "degré" conféré par l'université, un collège ou une école, tel "degré" étant l'équivalent d'un "degré" de licencié en science commerciale, qui de plus a complété cinq ans de stage dans un bureau approuvé par le conseil d'administration locale, tel stage devant être dans le bureau d'un membre de l'institut si possible ou dans un bureau de travail qui sera de même nature, tel que prescrit par les directives de la section.

Cela veut dire que nos membres, il faut qu'ils passent à l'université au moins de la province de Québec ou une université d'ailleurs, mais il faut qu'elle soit reconnue. Ce sont nos exigences. Est-ce que cela répond à votre question?

M. BOIVIN: Ce n'est pas un diplôme qui est décerné par une école...

M. LEFEBVRE: Une université. On a pas d'école à nous.

M. BOIVIN: Vous acceptez pour la clérica-ture, par exemple, des membres mais vous n'avez pas d'école en particulier.

M. LEFEBVRE: Non, monsieur. On accepte l'université.

M. LAVOIE (Wolfe): Avez-vous une profession qui se renouvelle ou qui reste stagnante?

M.LEFEBVRE: A chaque année, monsieur, on accepte de nouveaux membres.

M. LAVOIE (Wolfe): Parce que 200...

M. LEFEBVRE: On a deux examens par année...

M. LAVOIE (Wolfe): 200, cela n'est pas un grand nombre; vous ne devez pas en accepter beaucoup chaque année. Dans quelques années que va devenir votre association?

M. POUPART: Nous avons au-delà de 700 membres dans tout le Canada, il y en a 200...

M. LAVOIE (Wolfe): Je parle au Québec, ici.

M. POUPART: II y en a au-delà de 200 dans le Québec, il y a des jeunes qui sont acceptés, cela se renouvelle d'année en année.

M. LAVOIE (Wolfe): Quelle est la moyenne d'âge des membres de l'association?

M. POUPART: La moyenne d'âge, c'est une question à laquelle je ne peux répondre.

M. BURNS: Une question sur ce même point-là.

M. POUPART: Oui, M. le député.

M. BURNS: On a parlé tantôt de modus vivendi, du moins c'est moi qui en ai parlé comme cela et pour sauvegarder les droits acquis. Est-ce que je me trompe, encore une fois, en disant que la corporation ou l'institut des comptables publics est appelé éventuelle-

ment à disparaître avec la disparition de son dernier membre? Est-ce cela que je comprends? Du moins le droit de pratiquer qui est réservé aux gens qui ont résidé au Québec depuis 1942 et qui étaient membres le 17 avril 1946, c'est cela qui est bien confus.

M. LEFEBVRE: Je vais vous répondre, M. le député. Voici, vous avez raison jusqu'à un certain point. Les membres qui en 1946 ont accepté ont un droit de pratiquer. Depuis on prend des membres quand même, rien ne nous empêche dans la loi d'en prendre, seulement on fait signer un engagement à ces membres-là. On exige le même standard de qualification mais on leur fait signer une formule disant qu'ils s'engagent suivant la loi à ne pas pratiquer comme comptable public dans la province de Québec. Il faut être honnête mais cela ne nous empêche pas de prendre des membres.

Si vous vous en tenez strictement aux membres qui ont le droit de pratiquer comme comptables publics, automatiquement, tant qu'il n'y aura pas de fusion avec les CA ou une entente générale pour fusionner notre profession, on s'élimine graduellement. Cela est logique, mais notre institut existe toujours; tous les ans, il y a des nouveaux membres qui sont qualifiés, qui passent des examens et qui sont acceptés. Seulement, ils ne peuvent pas pratiquer comme comptables publics. Ils vont faire de la vérification municipale, parce qu'on a un permis pour le faire.

M. BURNS: Parmi vos membres actuels, les 200 que vous nous avez mentionnés au Québec, combien y en a-t-il qui pratiquent et qui ont droit au titre de comptable public?

M. LEFEBVRE: Quarante-deux pour cent, monsieur, aux statistiques de 1971.

M. BURNS: Quarante-deux pour cent, c'est-à-dire à peu près 84.

M. LEFEBVRE: Les autres ont des postes clés dans les gouvernements, même de Québec, il y en a qui ont des postes intéressants, vous en avez un au bout de la table ici, M. Parent, et dans d'autres services. Presque tous ceux de la ville de Québec sont employés du gouvernement.

M. BURNS: II y en aurait à peu près 84 qui pratiquent avec le titre? Est-ce cela?

M. LEFEBVRE: Il y en a d'autres qui en ont le droit et sont à l'emploi du gouvernement. Ils ont le droit de pratiquer la journée qu'ils voudront.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, plusieurs ques- tions ont été posées, ça va éliminer celle-là. Pourriez-vous exercer votre profession comme ça, tout court?

M. LEFEBVRE: Exactement, on le fait actuellement sous le nom de APA.

M. GUAY: Pourquoi semblerait-il que vous seriez refusés à l'intérieur de l'association des CA?

M. LEFEBVRE: Je n'ai pas dit que nous avions été refusés, M. le député. J'ai dit qu'en 1969 nous avons rencontré les CA et discuté avec eux en mettant sur la table la question d'une fusion à venir, c'est toujours en discussion. Seulement, le bill 250 paralyse l'affaire et ça va peut-être avancer davantage. Cela va nous pousser à faire la fusion, soit par le bill 250 ou de l'association à l'association. C'est en marche depuis 1969.

M. GUAY: Si je comprends bien l'ensemble de votre mémoire, la seule demande que vous faites, c'est d'insérer à l'annexe du projet de loi 250 l'Institut des comptables publics?

M. LEFEBVRE: Notre nom. C'est tout ce que nous demandons. Uniquement cela. Nous ne sommes pas contre le bill 250. Nous sommes reconnus publiquement comme comptables publics par la loi, par le code civil, au point de vue de la compagnie et ainsi de suite, c'est une omission involontaire qui a été faite. Tout ce que nous demandons, c'est cela, c'est pourquoi notre mémoire est si bref.

M. GUAY. Si, à l'intérieur du projet de loi 250 — on le suppose — votre demande est refusée, est-ce que vous avez le droit de pratiquer demain matin?

M. LEFEBVRE: La même chose, ça ne nous enlève aucun droit. Le bill 250 n'a pas encore été accepté, si j'ai bonne mémoire.

M. GUAY: Non, mais on suppose que la loi 250 va être votée.

M. LEFEBVRE: A ce moment-là, on verra ce qu'il y aura à faire, mais nous allons y voir avant. Ce serait une injustice, un point c'est tout, parce qu'on ne peut pas reconnaître un droit à un individu et le lui enlever le lendemain matin sans raison. Du moins, je crois que c'est ça la loi, il faut donner justice à tout le monde. C'est à vous de décider, ce n'est pas à nous.

M. GUAY: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans la fonction publique du Québec, quand il s'agit de

recrutement ou de classification, est-ce qu'on tient compte de votre titre, de votre certificat, de votre compétence?

M. LEFEBVRE: Dans le Québec, M. Cloutier, c'est drôle à certains moments, vous savez. La fonction publique de Québec a des règlements. Elle va dire que les bacheliers en commerce sont reconnus au service civil. Elle ne parle pas de APA ni de CA ni de CGA, les membres sont des bacheliers en commerce. Pour les associations de comptables reconnues, c'est le mot. Ce sont les règlements que vous avez à la fonction publique. Automatiquement, on ne spécifie pas CA ou APA ou quoi que ce soit, on demande d'être bachelier en commerce ou membre d'une association professionnelle. Je vous disais tout à l'heure que la majorité de nos membres à Québec, qu'ils aient le droit de pratiquer ou non, sont des employés du gouvernement et ont de bons postes parce qu'ils sont qualifiés. Est-ce que je réponds à votre question?

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Vous avez des membres à deux paliers. Vous avez des membres reconnus comme comptables publics et d'autres qui ne le sont pas?

M. LEFEBVRE: Par la loi, oui. Pour nous, non. Il n'y a qu'un groupe de membres, mais par la loi, oui.

M. SAINT-GERMAIN: Mais enfin, c'est ce qui arrive. Si on inclut votre association dans le code des professions, est-ce que vous admettriez qu'il devrait tout de même y avoir...

M. LEFEBVRE: Nous, comme membres, si nous voulons avoir notre nom inscrit dans cela, c'est pour nos membres à 100 p.c. Quant aux lois qui existent actuellement, je ne suis pas avocat, vous pourrez me corriger.

Les lois qui existent actuellement, qui nous séparent à notre regret, il faudrait les maintenir jusqu'à ce que le bill 250 soit changé et qu'on ait fait une fusion pour tout le monde. Mais on ne peut pas revenir. Notre nom dans l'annexe 1 ne nous empêche pas de continuer à faire ce qu'on fait actuellement, ceux qui ont le droit de le faire et les autres qui n'ont pas le droit ne le feront pas.

M. POUPART: C'est exact. On ne demande pas de changer quoi que ce soit dans le bill 250. On demande que notre nom soit dans l'annexe 1, on s'en tient à ça. Si vous reconnaissez ça, vous ne créez rien. Vous ne faites que constater ce qui existe en fait. C'est tout.

M. SAINT-GERMAIN: En fait, puisque la loi dans le passé a reconnu 20 p.c. — vous avez quoi, 84 ou 85 membres qui sont considérés comme comptables publics— c'est pour eux, dans l'esprit de la loi, qu'on a voulu garder à ces gens-là, qui professaient dans le domaine de la comptabilité, les droits acquis. Les membres nouveaux n'ont certainement pas ces droits acquis, ils n'existent pas pour vos nouveaux membres. Est-ce que, d'après la loi, ces nouveaux membres doivent être considérés comme étant des professionnels ou non?

M. POUPART: Vous distinguez le problème et je vais vous répondre dans le même ordre. Quant aux membres anciens, comme vous les qualifiez, par opposition aux membres nouveaux, il n'y a pas de problème. Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus. Maintenant, ce que vous appelez membres nouveaux et ce que nous appelons nos membres, parce que nous ne faisons pas de distinction, en vertu de l'article 25 du bill 250, du code des professions qui est devant vous, c'est écrit que "chaque corporation est formée des professionnels qui en sont membres et constituent une corporation au sens du code civil." Nous vous disons: Notre corporation, obtenue par lettres patentes du gouvernement fédéral, est une corporation au sens du code civil, en vertu de l'article 353 du code civil.

L'article 25 englobe tout le monde, c'est ma prétention juridique et c'est ce que je vous soumets. Nous le sommes tous en vertu de l'article 25. Si nous le sommes dans l'article 25, nous demandons, selon les mêmes termes, de l'être dans l'annexe 1.

M. FOURNIER: Ici, il faudrait bien préciser qu'une corporation au sens du code civil, vous pouvez l'obtenir et d'autres groupements peuvent l'obtenir. A ce moment-là, vous êtes membres de la compagnie X, Y ou Z. Mais le code des professions, le bill 250, a pour but de mettre de l'ordre et de permettre à certains groupes de s'appeler professions, la corporation professionnelle de... Et c'est en vertu de ce bill 250, que le terme "corporation professionnelle" sera limité à ceux qui tombent sous l'empire de cette loi. Si vous vous incorporez, ou si des groupements s'incorporent en vertu de la loi des compagnies fédérales ou provinciales et deviennent membres d'une corporation, partie III, ils pourront toujours dire qu'ils sont membres de telle compagnie. Mais ils ne seront pas membres d'une corporation professionnelle au sens du bill 250 et c'est peut-être là où la. confusion se présente.

Maintenant, dans le bill 250, de façon à le mettre aussi clair que possible, nous avons tenté de conserver les droits qui existaient dans les différentes lois aux groupements comptables, comme les APA qui étaient reconnus dans la loi de 1946. C'est pourquoi nous avons mis une disposition protégeant les membres de cette même corporation qui existait avant la loi de 1946. Et nous leur reconnaissons dans la loi le nom de APA.

Vous avez en plus l'article 27 qui reconnaît aussi, pour tout autre organisme existant avant 1946, les personnes qui avaient des droits acquis; le bill 250 ne leur enlève pas ces droits-là. Il leur permet de les continuer en vertu de l'article 27, mais il les limite aux personnes qui étaient membres avant 1946 et non pas aux personnes qui sont devenues membres en 1970 ou 1971.

M. BURNS: M. le ministre, j'aimerais peut-être, sur ce point-là, poser une question. C'est contre le règlement mais...

M. LE PRESIDENT: Je vous donne une permission spéciale.

M. BURNS: Vous êtes bien aimable, M. le Président, comme toujours. Si je comprends bien, le fait que cette corporation ou que cet institut-là ne soit pas régi, les quelque 84 membres, ne faisant pas partie d'une corporation professionnelle au sens du bill 250, à toutes fins pratiques ne seront pas régis par les codes d'éthique ou quoi que ce soit.

H me semble que c'est un peu de la générosité de leur part. Ils pourraient dire: Nous, nous n'avons pas de normes d'éthique à suivre, ni quoi que ce soit, mais le fait qu'on veuille que notre institut soit inclus du moins pour les membres qui sont là actuellement et ceux qui ont des droits acquis jusqu'à ce que la corporation s'éteigne vis-à-vis de cette loi, si vous n'incluez pas ces gens-là, ils n'auront pas de normes à suivre et ils pourront faire du travail qui est l'équivalent — à ce que je comprends — d'un travail de CA. Je me demande si c'est souhaitable que des gens puissent faire du travail qui est déjà régi, un travail de CA. Les CA vont être obligés de se plier à certaines normes, à certains codes d'éthique alors que ces gens-là, si vous n'incluez pas leur institut, vont faire le même travail sans se faire régir par les mêmes normes. C'est ce qui me frappe à moins que je ne comprenne mal la situation.

M. FOURNIER: Ces gens-là ne seront pas membres d'une corporation professionnelle. Ils seront limités par les lois à la tenue de livres, si l'on retient les éléments qui ont été donnés sauf...

M. BURNS: Pas d'après l'article 45. L'article 45 de la Loi de l'Institut des comptables agréés...

M. FOURNIER: La difficulté, c'est que l'article 45 est rédigé pour une corporation qui ne se présente pas aujourd'hui, c'est une autre corporation qui se présente aujourd'hui.

M. BURNS: Sauf que ces gens-là nous disent que les APA qui sont visés à l'article 45 sont membres de l'institut des APA. Cela me pose un problème en ce sens que je vois que c'est au désavantage des CA de ne pas les inclure. Vous allez avoir deux types de gens qui vont faire la même profession — du moins pendant tout le temps que les APA vont exister, reconnus par la loi — et qui peuvent théoriquement être régis, tous deux, par des normes différentes.

M. FOURNIER: Les seuls APA qui sont reconnus par la loi sont les APA de l'article 45 et ne sont pas ceux qui appartiennent à l'association qui se présente aujourd'hui. Ce n'est pas l'association d'aujourd'hui. C'est une autre association.

M. BURNS: Ils en ont 84 apparemment. Il y en a 42 p.c...

M. POUPART: Ce sont les mêmes.

M. LEFEBVRE: Ce sont tous des membres de la corporation. Je suis peut-être dur de "comprenure", si on peut employer ce mot-là. Vous parlez des corporations professionnelles reconnues qui sont énumérées ici. Je vais poser une question. Si elle n'est pas bien, vous me le direz. Toutes les corporations qui sont ici sont-elles inscrites par bill privé à Québec ou par une charte émise par le gouvernement du Québec, à la troisième partie?

M. FOURNIER: Voici ma réponse. Il y a plusieurs incorporations, en fait, le groupement suivant qui se présentera, s'il a des représentants, "la Guilde," est une nouvelle charte qui vient d'être donnée en 1970, je crois.

M. LEFEBVRE: Alors, cette corporation est comprise à l'article 352 du code civil.

M. FOURNIER: C'est ça.

M. LEFEBVRE: Alors, nous aussi. Nous avons une charte fédérale qui tombe à l'article 352 et qui est conforme à l'exigence du bill 250. Je ne vois pas qu'il y ait quelque chose qui empêche...

M. FOURNIER: Vos prétentions seraient justes. Vous avez deux prétentions. Premièrement, vous prétendez avoir succédé à l'ancienne corporation et, deuxièmement, vous prétendez que votre nom devrait être indiqué dans l'annexe. Si l'article 45 était rédigé de façon à changer le nom de International Society of Commerce pour le remplacer par le nom de votre association, est-ce que cela règle une partie de votre problème?

M. LEFEBVRE: Cela réglerait le problème mais, au point de vue légal, nous n'aurions pas notre nom.

M. POUPART: Le nom que nous avons, qui existe.

M. LEFEBVRE: Notre nom est légal, on ne peut pas en prendre un autre dans le moment. Il est accepté dans le Canada tout entier.

M. POUPART: Cela ne réglerait pas le problème soulevé par M. le député de Burns.

M. BURNS: Ce n'est pas régi.

M. LE PRESIDENT: Le député de Wolfe a une question.

M. LAVOIE (Wolfe): Qu'est-ce qui arriverait d'un comptable public licencié en Ontario qui voudrait pratiquer au Québec? Je veux savoir la différence qui peut exister.

M. LEFEBVRE: II n'y a pas de loi de réciprocité, monsieur, entre l'Ontario et le Québec, par rapport à ça. Ce sont justement nos discussions avec les CA. Toutefois, dans la loi de l'Ontario, celle que le gouvernement, le conseil de comptabilité ont faite pour l'Ontario, il est dit qu'un type qui a le droit de pratiquer dans sa province a le droit de pratiquer dans n'importe quelle province où c'est reconnu. A part la province de Québec. Nos membres ne peuvent pas venir professer ici. Nous pouvons aller en Ontario d'une manière, en demandant une licence spéciale et on va nous le permettre. C'est ça, monsieur?

M. FOURNIER: II y a des lois de l'Ontario...

M. LEFEBVRE: M. X. est un membre qui a des clients en Ontario; il demande une permission spéciale; on lui donne une licence temporaire et il va travailler en Ontario. Vous avez d'autres CA, dont un des principaux associés est un APA; ils ont un permis eux aussi pour aller pratiquer en Ontario. Mais nous ne pouvons pas ouvrir un bureau en Ontario. Vous avez le même cas — ce n'est peut-être pas la profession — pour les ingénieurs. Un ingénieur ne peut pas venir travailler ici s'il vient de l'Ontario, sans avoir un pied-à-terre dans un bureau, sans avoir un permis. L'Ontario exige de nous la même chose. Nous demandons un permis, nous avons une vérification à faire à Ottawa; on va nous donner un permis, mais pas de bureau.

M. LAVOIE (Wolfe): Un comptable public de l'Ontario ne peut pas venir s'installer au Québec.

M. LEFEBVRE: Non.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: M. Fournier a une question.

M. FOURNIER: C'est une question relative aux questions posées par M. Burns. Est-ce que vous croyez qu'il serait raisonnable pour votre association, composée d'environ 89 membres, d'avoir toutes les exigences du bill 250, à savoir: comité de discipline, comité d'inspection professionnelle, etc? Je comprends que vous avez certaines normes de déontologie et peut-être certains comités, mais est-ce que votre association accepterait de se soumettre à toutes les formalités de la loi générale sur les professions?

M. LEFEBVRE: Certainement, M. le ministre. Si nous vous demandons d'inscrire notre nom, c'est parce que, automatiquement, nous acceptons en principe le bill 250.

M. POUPART: Nous n'aurions pas demandé ça si nous n'acceptions pas le bill.

M. FOURNIER: Je comprends que pour 89 membres, former un comité d'inspection professionnelle de trois membres, former un bureau en vertu de certaines normes, former un comité de discipline, avoir un syndic...

M. LEFEBVRE: Nous avons tout. M. le ministre, actuellement, vous parlez de 84 membres, nous n'avons pas le droit de parler de 84 membres. Nous avons un code d'éthique, nous avons toutes ces choses-là et si c'est changé par le bill 250, nous allons nous y conformer.

M. FOURNIER: C'était une question et j'ai eu la réponse.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Vous n'avez pas le droit de parler de 84 membres mais nous avons bien le droit d'en parler, parce que, au point de vue de la loi, pour le législateur, ces gens ont des droits acquis que vos nouveaux membres n'ont pas. N'est-ce pas là tout le problème — pour faire suite aux arguments du député de Maisonneuve, et qui sont, à mon avis, absolument fondés — pour le législateur de bien sortir de cette situation ambiguë. Vous ne voulez pas faire de discrimination entre vos membres mais la loi en fait une. Le législateur est obligé de continuer dans le même sens. Quelle serait pour vous, dans ce sens, la meilleure solution possible pour le législateur...

M. POUPART: Mais voici.

M. ST-GERMAIN: ... qui lui est obligé de par la loi de faire une discrimination entre vos membres?

M. POUPART: Voici, là, vous voulez nous diviser, c'est cela qui est le problème.

M. ST-GERMAIN: Je n'ai absolument pas d'arrièrerpensée, croyez-moi, je parle d'une

question de fait. Vous êtes divisés, c'est une question de fait, de par la loi. Alors, en partant des faits et non pas des théories ou de votre bonne volonté, ou de la considération que vous portez à vos nouveaux membres.

M. POUPART: Je vais vous répondre en deux mots, brièvement. L'historique des professions au Québec, comme l'historique des métiers, c'est la même chose. Autrefois le notaire qui voulait devenir notaire suivait un vieux notaire et devenait clerc de notaire et, à un moment donné, il devenait notaire. Le médecin devenait médecin petit à petit. A un moment donné, les universités, les corps enseignants sont arrivés et ont exigé des certificats. Les cours préparatoires, ça ne comptait pas; c'était la pratique qui était le cours préparatoire et l'université ou le collège ou l'institut reconnaissait. C'est comme cela que c'est devenu petit à petit...

M. LAVOIE (Wolfe): Les optométristes ont remplacé les vendeurs de lunettes...

M. POUPART: C'est cela, mais il a fallu avoir un commencement, le Québec a eu un commencement. Maintenant on est rendu à un niveau où on a des corps universitaires qui vont légiférer et qui vont nous donner des droits, qui vont nous donner des permissions de pratiquer et de s'inscrire à telle ou telle science. Cela, c'est l'historique. Parallèlement à cela, dans le même ordre d'idées, notre association a fait la même chose: elle est venue au monde, elle a progressé, et puis elle a été reconnue par la loi. La même façon d'entraîner les jeunes à ces professions a été suivie par l'institut des APA. Alors là, pour arriver spécifiquement à votre question, après le préambule que je viens de vous faire, on est des gens "seniors", appelons-les "seniors", parce qu'ils sont là, depuis 1946. Ce sont des gens qui sont très compétents, qui veulent se renouveler et ont des jeunes qui les suivent et qui marchent dans leurs sentiers battus. Ils veulent continuer. Il ne faudrait pas, disons, nous couper et désintégrer quelque chose qui va bien, qui marche en vertu de certaines règles de pratique, qui est reconnu, et qui a été reconnu par une charte fédérale, c'est cela qui est le problème. On veut continuer dans le même sens et on veut être reconnu globalement dans le même sens, c'est cela qui est notre prétention. C'est cela que l'on vous soumet.

M. LE PRESIDENT: Une dernière question par le député de Dorchester.

M. GUAY: Vous avez sans doute pris connaissance des différents mémoires qui ont été soumis à la commission, dans le monde de la comptabilité, est-ce que vous acceptez ou si vous êtes d'accord sur les recommandations, disons en général, qui ont été faites par différentes associations du monde comptable?

M. POUPART: Chacun a son problème, chacun a ses problèmes à régler. Nous nous sommes satisfaits du principe du bill 250 et nous demandons d'être inscrits sous l'égide de ce bill-là, pour la protection du public, du gouvernement et de nos membres. C'est tout ce que l'on peut dire. On ne peut pas parler pour les autres.

M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je veux remercier la délégation des APA, et j'espère que le gouvernement comprendra vos représentations. Maintenant, on passera à la Guilde des comptables industriels, si ses représentants sont arrivés. La guilde est arrivée? Alors, s'ils ne sont pas ici. Suivant nos règlements, ils ont perdu le droit de présentation. On me dit que la Corporation des administrateurs agréés de Québec peut prendre un peu de temps; on suspend la commission jusqu'à 4 heures, après la période des questions en Chambre. Ici dans la même salle à 4 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 22)

Reprise de la séance à 16 h 21

M. BLANK (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Messieurs, mesdames, mesdemoiselles, je constate que nous avons une délégation imposante de la Corporation des administrateurs agréés du Québec. Nous sommes prêts à entendre votre mémoire.

Corporation des administrateurs agréés du Québec

M. TANGUAY: André Tanguay, administrateur général. C'est un principe administratif que de déléguer. C'est pour cette raison que je suis seul aujourd'hui quoique nous étions plus nombreux ce matin.

Je désirerais faire remarquer, en commençant, que la corporation fait partie du conseil interprofessionnel et qu'au sein du conseil nous avons étudié le bill 250. Nous acceptons en principe la majorité des articles du bill et je ne voudrais pas y revenir. Je voudrais seulement attirer votre attention sur un point un peu spécial, soit l'article 35 a) du bill 250.

L'article 35 a) essaie de donner une définition de la Corporation professionnelle des comptables en administration industrielle du Québec. Cette définition est la suivante: "Etablir des prix de revient et faire de la comptabilité industrielle, de l'organisation et de la gestion des affaires". Il nous a semblé, à la lecture de cet article, qu'il y avait trois activités professionnelles relativement étanches, soit établir le prix de revient, faire de la comptabilité industrielle et de l'organisation et de la gestion des entreprises, distinctement.

Notre corporation s'oppose à ce terme "gestion des affaires" et cela pour quelques raisons. Gestion, à notre avis et selon le petit Larousse, est synonyme d'administration, et ce terme très vague — parce que dans la loi, c'est très général — devrait être réservé à la Corporation des administrateurs agréés du Québec. A remarquer également que la majorité de nos membres détiennent un diplôme universitaire en gestion des affaires, car auparavant il y avait, dans les universités, deux sections terminales, soit la comptabilité ou la gestion des affaires.

Je regarde également la définition que les comptables en administration industrielle ont essayé de faire d'eux-mêmes. Et comme par hasard, la définition qu'ils ont faite de leur tâche à ce moment-là nous convient parfaitement. Et elle se lit comme suit: Premièrement, faire de la comptabilité, de la gestion, en fournissant et utilisant l'information comptable et financière et toute autre information pour la prise de décisions relatives à la planification, au contrôle et à la gestion des entreprises.

Deuxièmement, offrir au public des services de conseillers en matière d'élaboration, d'administration, de système comptable, de planifica- tion et de contrôle financier des entreprises. Cette définition qu'ils ont tenté de faire nous semble être assez bonne et couvrir effectivement le champ d'action qu'ils ont toujours occupé les années passées.

J'aimerais de plus noter dans notre propre définition, si vous me permettez de la lire, celle de la Corporation professionnelle des administrateurs agréés du Québec: "Participer à l'établissement, à la direction, à la gestion d'organismes publics ou d'entreprises, en déterminer ou en refaire les structures ainsi que coordonner et contrôler leur mode de production ou de distribution et leur politique économique ou financière."

Nous avons, surtout dans une partie ici, "refaire les structures", supposé que cela incluait évidemment nos conseillers en administration. C'est une question à laquelle j'aimerais avoir une réponse, à un moment donné. Nous avons supposé que ça voulait dire cela.

J'aimerais souligner également, si vous permettez, deux suggestions pour ce qui est des conseilleurs eh administration qui, en grand nombre, font partie de notre corporation. Nous souhaiterions personnellement, comme corporation, que ces conseillers en administration soient surveillés par l'Etat tout comme notre corporation et qu'au moins un administrateur agréé par bureau de conseillers en administration soit nécessaire. Cet administrateur agréé pourrait détenir une licence pour le bureau, car aujourd'hui n'importe qui peut se dire conseiller en administration et donner un conseil à une entreprise ou à un individu.

Nous aurions une autre suggestion aussi à vous faire, celle d'autoriser les administrateurs agréés ou une partie de ceux-ci à décerner un certificat attestant la bonne administration de l'entreprise. Par exemple, lorsqu'une entreprise entre sur le marché ou émet des actions sur le marché, vous avez dans son prospectus cinq, six pages ou plus qui traitent de l'aspect financier de la compagnie, le tout contresigné par un comptable agréé et vous avez toute l'autre partie qui explique les structures et l'organisation administrative de la compagnie; ce qui est peut-être aussi important pour eux pour vendre des actions, c'est le public.

Dans cette partie-là, ils peuvent évidemment dire ce qu'ils veulent; il n'y a aucun contrôle qui agit.

Personnellement, j'ai terminé.

M. LE PRESIDENT: Pas de question ici? Le Solliciteur général.

M. FOURNIER: Je vous remercie des remarques appropriées qui ont été faites. J'aimerais particulièrement attirer votre attention sur l'article 36 du bill 250 qui prévoit que, lorsqu'une certaine définition de tâche est inscrite à l'article 35 pour les différentes corporations, ceci n'accorde pas un privilège exclusif et n'empêche pas, comme dans votre cas, d'agir,

peut-être, dans un domaine qui est déjà précisé pour un autre groupement. Est-ce que cet article ne répond pas quelque peu à vos appréhensions?

M. TANGUAY: Oui. Cela nous satisfait très peu, parce que nous nous demandons pourquoi deux corporations qui auraient à peu près le même but ou les mêmes prérogatives.

M. FOURNIER: Relativement aux corporations du genre, vous nous avez mentionné les conseillers en administration qui eux-mêmes présentent un mémoire la semaine prochaine, et vous dites que ces membres-là sont déjà membres de votre organisme, qui a un titre réservé. Nous tentons, autant que possible, de grouper des personnes qui agissent dans le même domaine de la comptabilité et je crois qu'en conséquence votre domaine est celui qui devrait regrouper les conseillers en administration.

M. TANGUAY: Je suis tout à fait d'accord avec vous.

M. FOURNIER: Quant aux remarques relativement aux définitions, ceci va faire l'objet d'études plus approfondies par la commission.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. Tanguay, votre corporation professionnelle, la Corporation professionnelle des administrateurs agréés, est une des plus jeunes corporations professionnelles qui existent. Combien compte-t-elle de membres actuellement?

M. TANGUAY: Tout près de 1,000 membres répartis dans la province.

M. CLOUTIER (Montmagny): Depuis le début, est-ce que les objectifs poursuivis par la corporation ont pu être assumés, ont pu être atteints?

M. TANGUAY: Ils sont tout au moins en voie d'être atteints. Je pourrais peut-être vous faire un très court résumé de ce qu'on fait, vous dire quel genre de programme d'activités on a. Par exemple, on a un programme majeur qui est de perfectionner l'administrateur comme tel, par le perfectionnement des membres. Nous avons sept régionales qui oeuvrent tous les ans et qui, chaque année, ont cinq, six, sept ou huit activités pour l'information et le perfectionnement des membres.

Nous avons au niveau provincial également un congrès et différentes autres activités. Nous avons également des services au public vis-à-vis des institutions d'enseignement. Nous sommes à effectuer une banque d'administrateurs compétents, qu'ils soient agréés ou pas.

Je pense que l'orientation que nous avions prise depuis cinq ans est en voie d'être réalisée. On ne peut pas dire que tout est fait. Au contraire, nous avons beaucoup plus de programmes à faire que nous en avons de faits. Les buts que nous nous étions fixés il y a cinq ans, nous les avons atteints aujourd'hui et même dépassés.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce qu'il serait possible pour un professionnel qui appartiendrait aux CGA ou aux APA ou à l'un des groupes qui sont devant la commission aujourd'hui, qui ne fait pas de comptabilité mais qui s'occupe davantage de gestion, de faire partie de la corporation des administrateurs agréés?

M. TANGUAY: Actuellement, nos normes d'admission sont seize ans de scolarité dont trois ans en sciences de l'administration, avec une exception qui s'applique aux autres professionnels quels qu'ils soient. Le médecin, par exemple, qui travaille dans un hôpital. L'ingénieur ou autre qui, lui, aurait fait deux ans en sciences de l'administration et oeuvre aujourd'hui dans l'administration, ce qui rend éligible la grosse majorité des CA, des RIA et des CGA.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous étiez ici ce matin, M. Tanguay?

M. TANGUAY: Oui.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez entendu la discussion entre les CGA, les APA et les membres de la commission. Tout à l'heure nous entendrons les comptables agréés et les RIA. Est-ce qu'il sera possible — on posera la question tantôt aux CA, ils nous donneront la réponse — mais, advenant le cas où il y aurait une fusion de certaines sections, je prends les APA en particulier, j'ai l'intention de demander — et je pose la question tout de suite, les CA nous répondront tantôt — si les CA absorbaient les effectifs, admettaient au sein de leur corporation les effectifs APA — il y a 80 membres environ qui s'occupent des comptabilité publique, il en reste 120 — j'imagine que les autres font plutôt de l'administration et occupent des postes administratifs. C'est exactement le même cas pour des CA aussi et pour des CGA qui occupent des postes administratifs. Est-ce que pour ceux-là ça réglerait le problème qu'une partie des effectifs aille vers les CA et que l'autre partie des effectifs aille vers les administrateurs agréés?

M. TANGUAY: II n'y a aucun problème, si nous pouvons considérer ces gens comme des professionnels selon les normes généralement établies, c'est-à-dire un cours universitaire ou seize ans de scolarité dont trois ans en sciences de l'administration.

Nous avons une exception, quinze ans de scolarité, deux ans en sciences de l'administration plus un examen. Ce sont des règles

internes, du moment que ces gens-là pourront être considérés comme des administrateurs professionnels, ils seront admissibles chez nous.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, la corporation n'aurait pas d'objection à étudier ce problème, conjointement avec les autres corporations professionnelles, si c'était le désir de l'ensemble de ces corporations.

M. TANGUAY: Certainement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Evidemment, vous n'avez pas élaboré tellement le projet de loi 250, parce que vous nous avez dit tantôt que vous avez participé aux travaux avec le conseil interprofessionnel qui est venu devant la commission comme premier opinant. Cela suppose que le conseil interprofessionnel était le porte-parole de la Corporation des administrateurs agréés en ce qui touche particulièrement le code des professions. D'autre part, est-ce que vous seriez d'avis que la loi devrait reconnaître officiellement le conseil interprofessionnel ou si on devrait, comme plusieurs corporations l'ont mentionné, le laisser sur une base de volontariat et que la loi ne le consacrerait pas officiellement?

M. TANGUAY: Nous avons exprimé au conseil interprofessionnel qu'il serait préférable que ce conseil demeure libre. A notre avis, il ne semble pas pouvoir être certain, tout au moins, d'exister lui-même longtemps. Il s'agit que les corporations qui en font partie décident de laisser tomber le conseil interprofessionnel et il disparaîtrait, tel que connu. Il n'est pas très heureux de le voir institutionnalisé; peut-être que, dans dix ou douze ans, il nous sera inutile. D serait préférable qu'il soit volontaire, quoique ça ne nous apparaît pas être un inconvénient majeur qu'il soit institutionnalisé à l'intérieur du conseil interprofessionnel. Mais il serait peut-être plus utile s'il était libre.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: Dans le programme 2, vous mentionnez que la majorité de vos membres détiennent un diplôme universitaire en gestion des affaires. Vous avez mentionné tout à l'heure qu'il fallait un diplôme de trois ans en sciences d'administration ou qu'on pouvait admettre des ingénieurs et médecins avec deux ans d'études. Ce sont des études universitaires ou des études pratiques?

M. TANGUAY: Des études universitaires.

M. PERREAULT: Deux ans d'études universitaires en administration.

M. TANGUAY: Dans la majorité des cas, ça mène au MBA.

M. PERREAULT: Est-ce que tous vos membres ont au moins un diplôme universitaire de quelque façon?

M. TANGUAY: Tous nos membres ont un diplôme universitaire minimum, celui de bachelier en commerce. Je ne dirai pas qu'il n'y a pas quelques exceptions, mais disons que lorsqu'il n'existait pas de diplôme universitaire dans notre secteur —je remonte à l'année 1946 ou avant 1946 si ma mémoire est bonne, alors qu'il n'y avait pas de diplôme universitaire — il y a eu de la part de l'université Laval une reconnaissance des gens qui avaient terminé avant, par exemple à l'Académie.

C'est au moins un bachelier. On a admis ces gens-là. Ils sont en très petite partie, peut-être 5 p.c. ou 8 p.c. de nos membres.

M. PERREAULT: Ce sont des diplômes par équivalence?

M. TANGUAY: Oui.

M. PERREAULT: II faut un diplôme pour y entrer maintenant.

M. TANGUAY: Oui.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions de la part des membres de la commission? Merci, M. Tanguay.

M. TANGUAY: C'est moi qui vous remercie.

M. LE PRESIDENT: L'Institut des comptables agréés du Québec.

Institut des comptables agréés du Québec

M. REEKIE: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission parlementaire spéciale sur les professions, la délégation de l'Institut des comptables agréés du Québec, qui a l'honneur de se présenter devant vous cet après-midi, est composée, à ma gauche, de MM. Frank Denis, ancien président de notre institut; Pierre Barry secrétaire de notre institut; André Desrochers, notre directeur adjoint; Yvon Normandin, notre vice-président et président de notre comité sur les bills 250 et 264; à ma droite, de Me Gaston Pouliot, notre conseiller juridique et de MM. Marcel Caron, ancien président de notre institut; CD. Mellor, directeur administratif de notre institut; Boris Levi-ne, membre de notre comité d'enquête et je me présente, Alastair Reekie, président de l'institut.

L'Institut des comptables agréés a déjà soumis un mémoire sur le bill 250, le code des professions et sur le bill 264, Loi des compta-

bles agréés. Nous pensons qu'il serait inutile aujourd'hui de répéter simplement devant vous nos recommandations sur ces projets de loi.

Nous voudrions mentionner les points que nous croyons être les plus importants, après avoir brossé un tableau sommaire de notre corporation.

M. le président, l'Institut des comptables agréés de Québec a été fondé en 1880. Nous avons donc 92 ans et je crois que, dans le monde, il n'y a que deux associations de comptables qui soient plus anciennes que la nôtre. Durant nos 92 ans d'existence, notre seul but a été de former des experts-comptables et des vérificateurs compétents capables de servir les besoins du public. Notre effectif n'a pas toujours été aussi important qu'à l'heure actuelle. Quarante ans après sa formation, notre institut n'avait encore formé que 130 comptables agréés. L'un d'eux s'installa à Québec en 1922 et il fonda le troisième bureau d'experts-comptables de cette ville. D y a seulement 25 ans, nous comptions environ 1,000 membres, mais lorsqu'à cette époque le gouvernement décida de confier l'exclusivité de l'expertise comptable à une seule association professionnelle, comme dans le cas des médecins, des avocats, des notaires, etc., c'est notre institut qui a eu l'honneur d'être choisi.

Notons en passant que les quelques autres experts-comptables en exercice à l'époque furent traités généreusement, certains devenant membres de l'Institut des comptables agréés sans avoir passé d'examen, les autres recevant un permis d'exercice. Cette réorganisation de la profession s'est avérée bénéfique pour la province, car l'expansion de l'industrie dans les années d'après-guerre s'est accompagnée de l'accroissement du nombre de comptables agréés qui est passé de 1,000 en 1946 à 5,300 aujourd'hui. Les experts-comptables ne sont plus maintenant concentrés uniquement dans les grandes villes. Ils oeuvrent en effet dans plus de 800 cabinets d'experts-comptables répartis dans 120 villes de notre province. Nous estimons qu'à l'heure actuelle il existe des cabinets d'experts-comptables partout où le besoin s'en fait sentir.

Afin d'assurer aux experts-comptables une formation adéquate et de veiller à ce qu'ils se conforment dans leur pratique à des normes professionnelles élevées, les 5,300 membres de l'Institut des comptables agréés de Québec se sont donné un personnel permanent de 25 personnes et un budget annuel de plus de $500,000.

En s'appuyant sur le manuel des normes professionnelles minimales, rédigé avec grand soin et constamment mis à jour, l'institut poursuit vigoureusement les délinquants par le truchement de son comité d'enquête et de son comité de discipline. Cette attitude est bien différente de celle des autres associations de comptables de la province qui, elles, ne groupent pas des experts-comptables et qui ne cachent pas qu'elles prennent rarement des mesures disciplinaires à l'endroit de leurs membres.

M. le Président, nous sommes fermement convaincus que l'unique moyen de former les futurs experts-comptables est de leur faire suivre un stage d'un, deux ou trois ans dans un cabinet d'experts-comptables après qu'ils ont terminé leurs études théoriques. Les médecins, les avocats et les notaires utilisent le même système de formation pratique. Ce système est éprouvé et il s'est révélé bénéfique tant pour le public que pour les professions en question. De toutes les associations de comptables, seul notre institut est en mesure d'assurer ce type de formation. Depuis 92 ans, nous sommes conscients de nos responsabilités envers le public et nous n'avons jamais ménagé nos efforts pour faire face à ces responsabilités. Bien que les pouvoirs publics n'aient jamais exercé de contrôle sur nos activités dans le passé, nous ne nous opposons pas, en principe, à l'instauration d'un certain contrôle. Ce que nous redoutons, cependant, c'est que ce contrôle soit excessif. Je demanderais maintenant à notre conseiller juridique, Me Gaston Pouliot, de commenter les recommandations les plus importantes de notre mémoire.

M. POULIOT: M. le Président, conformément aux directives du président des comptables, je ne toucherai, dans cet exposé, que les points les plus essentiels parmi les recommandations majeures que l'institut a faites. Je dois vous dire que j'ai fait les efforts les plus louables pour tâcher de me restreindre à l'intérieur des 20 minutes réglementaires. Si, par hasard, nous les dépassions un peu, j'espère que nous aurons votre indulgence.

Un premier commentaire s'impose. L'institut fait décidément sien l'objectif fondamental visé par le législateur à l'occasion de cette législation, soit la protection du public. Ainsi qu'il apparaft au mémoire et ainsi qu'a eu l'occasion d'y faire allusion brièvement le président de l'institut, c'est justement cet objectif qui a inspiré l'action de l'institut depuis fort longtemps et plus particulièrement depuis la loi de 1946. Je pense qu'il n'est pas inutile de rappeler qu'en ce qui concerne le rôle des membres de l'institut, la notion de public ou d'intérêt public prend une extension assez exceptionnelle. Alois que pour les praticiens de plusieurs professions, c'est le client qui incarne à lui seul la notion de public et qui suffit à en définir l'extension, pour le comptable agréé, au contraire, l'acte professionnel rejoint, par-delà le client, une multitude d'utilisateurs éventuels et inconnus au moment où l'acte est posé.

Ainsi l'expert-comptable, qui se porte garant de la sincérité du bilan de son client ou encore qui contresigne un prospectus, engage sa responsabilité à l'endroit de tout investisseur et bailleur de fonds éventuel, de même qu'à l'égard du fisc et de maints services administratifs et financiers de l'Etat.

Ceci dit, M. le Président, je voudrais d'abord aborder le problème que suscitent certaines dispositions des deux lois relativement au champ d'exercice des CA et, compte tenu de ce que j'ai entendu ce matin, je me rends compte que cela n'est pas un sujet nouveau depuis le début de la journée.

M. le Président, en 1946 le législateur a voulu démarquer et définir ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la comptabilité publique et il a voulu en réserver l'exclusivité à une corporation professionnelle, les CA. Selon l'article 13 de la loi de 1946, — et je pense que la définition est extrêmement importante, elle est à la base, à tout le moins, de l'exposé que nous voulons vous faire — "un comptable public est une personne qui, moyennant rénumération, s'engage dans l'art ou la science de la comptabilité ou dans la vérification des livres ou comptes". Je signale tout de suite qu'il y a immédiatement deux sphères qui sont très nettement précisées, c'est-à-dire l'art et la science de la comptabilité et, secondement dans la vérification des livres ou des comptes. La définition se poursuit avec les mots suivants "offre ses services au public".

L'élément capital de la définition, et ce qui différencie justement le rôle et la corporation, est contenu dans les mots "et offre ses services au public", lesquels mots, M. le Président, caractérisent spécifiquement la comptabilité publique et distinguent nettement la pratique comptable à l'égard du public en général de la pratique comptable à l'égard d'employeurs particuliers.

Si je peux faire ici une parenthèse, M. le Président, il me paraît bien que le souci primordial du législateur à l'occasion de la présente législation générale sur les professions, c'est de protéger le public en général. Il ne s'agit pas de protéger une grande entreprise qui retient les services d'un avocat ou d'un médecin ou d'un expert-comptable, je pense. Il ne s'agit pas de protéger — il me vient tant de noms de grandes entreprises à l'esprit — une grande entreprise contre un de ses employés, il s'agit de protéger le public multiple qui fait affaires avec un professionnel qui exerce de façon indépendante.

Il me semble en tout cas que c'est bien l'optique du législateur.

Le législateur en 1946 n'a pas voulu par là, je pense, accorder un monopole à un groupe donné d'individus. D'ailleurs, je pense que la loi de 1946, si on la lit bien, est très éloquente à ce sujet. Le législateur en 1946 a voulu définir une vocation ou si l'on veut un rôle particulier comportant une optique et des exigences particulières axées sur le service du public.

Je rappelle les mots "offrir au public", le service du public en général par opposition, encore une fois, aux services d'un employeur particulier. Ce rôle, M. le Président, il a voulu le réserver, non pas, encore une fois, à un groupe donné d'individus mais à quiconque choisirait cette orientation.

Dans les faits, cette loi a eu pour effet d'intégrer à l'Institut des comptables agréés du Québec la plupart de ceux qui exerçaient alors la comptabilité publique d'une part, et d'autre part de consacrer les droits acquis des autres praticiens de la comptabilité publique.

M. le Président, plus particulièrement, il faut signaler qu'avant les lois de 1946 — car il y en a eu deux — existaient, à ce moment-là, parallèlement deux sociétés: la Société des comptables agréés de la province de Québec, devenue l'Institut des comptables agréés de Québec et, d'autre part, une autre société de comptables connue alors sous le nom de la Société générale des comptables. Pour se référer aux initiales et pour faciliter l'appellation de l'une et de l'autre, disons qu'avant la législation de 1946, les CA d'une part et les CGA d'autre part se parta-gaient effectivement, d'ailleurs avec d'autres groupes, le champ de la comptabilité publique. C'est un fait qu'avant 1946 et les CA et les CGA faisaient de la comptabilité publique.

La législation de 1946 relative aux comptables, soit les chapitres 47 et 89, sanctionnée le même jour, le 17 avril 1946, et c'est un détail important — sanctionnée le même jour, les deux lois se complètent et doivent se lire ensemble — illustrent on ne peut plus clairement la vocation particulière et différente que le législateur a voulu assigner à chacune des deux corporations. D'une part, le chapitre 47, soit la loi pour réglementer la pratique de la comptabilité et de la vérification, d'abord définissait la comptabilité publique — j'ai lu la définition — ensuite en réservait l'exclusivité aux CA mais surtout permettait à tout CGA, résidant dans la province et en règle avec son association au 17 avril 1946, date de la sanction de la loi, d'obtenir en tout temps, sans conditions, un permis d'exercice de la comptabilité publique. Au surplus, tout LCGA, après un an de pratique de la comptabilité publique, pouvait devenir automatiquement, encore une fois sans conditions, membre de l'institut, c'est-à-dire CA.

D'autre part, M. le Président, le chapitre 89, encore une fois sanctionné le même jour que l'autre, regroupait dans une nouvelle corporation, soit l'Association des comptables généraux licenciés de la province de Québec, tous les CGA qui ne choisiraient pas, ni alors, ni plus tard, de se joindre aux CA. Et le législateur, dans ce second panneau des deux lois de 1946, prévoyait spécifiquement, à l'article 25 de la deuxième loi, que nul membre de la corporation. C'est-à-dire que nul membre de la corporation des CGA ne pouvait pratiquer dans la province comme comptable public, tel que défini dans la loi pour réglementer la pratique de la comptabilité et de la vérification.

Bref, M. le Président, c'est un réaménagement complet des deux corporations auquel procédait le législateur, assignant en exclusivité à l'une d'elles, les CA, le domaine de la comptabilité publique, excluant expressément l'autre corporation de ce même domaine, mais octroyant à tout membre des CGA — tout

membre à la date de la sanction de la loi — le droit d'opter en tout temps, à son gré, sans condition, pour la comptabilité publique. Cette option existe toujours et elle est de nouveau consacrée aux articles 37 et 44 du bill 264.

En somme, un rôle différent était assigné à chacune des deux corporations. Comme chacun des deux groupes exerçaient antérieurement la comptabilité publique, il était juste que soit conservé aux CGA en règle à la date de la sanction de la loi le droit en tout temps d'opter pour la comptabilité publique. Par ailleurs, M. le Président, quant à ceux qui ont choisi de joindre les CGA plutôt que les CA, après le 17 avril 1946, c'est-à-dire après que l'orientation respective de chacune des deux corporations eut été définie, c'est-à-dire après qu'il eut été expressément prévu — orientations, je tiens à le dire, l'une et l'autre également valables, il n'est pas question de faire de comparaison — que le champ de la comptabilité publique était fermé aux CGA. Quant à ceux qui ont après tout ceci choisi d'aller chez les CGA plutôt que chez les CA — encore une fois je dis que ce sont deux orientations différentes mais extrêmement valables, l'une et l'autre — nous soumettons que ceux-là ne peuvent plus désormais légitimement réclamer le droit de faire de la comptabilité publique. C'est en toute connaissance de cause que librement ils ont choisi une orientation.

Nous soumettons surtout que le fait pour le législateur de leur concéder désormais ce droit constituerait un retour à la confusion à laquelle il a justement voulu mettre fin il y a déjà 25 ans et ce, à l'occasion d'une trentaine de lois destinées à mettre de l'ordre dans les professions et à démêler les champs respectifs de juridiction.

L'ensemble des lois relatives aux professions que propose le législateur témoigne de son souci d'éviter les chevauchements, d'éviter en d'autres mots que deux corporations se disputent l'exercice de la même profession.

Ainsi, M. le Président, nous voulons croire que c'est par inadvertance que s'est glissé dans le code des professions le paragraphe b) de l'article 35. Il aurait pour effet, dans sa rédaction actuelle, de créer ici la confusion que le législateur s'est donné tant de mal à corriger ailleurs, à l'occasion de la présente législation sur les professions. Cet alinéa aurait pour effet de permettre aux CGA d'offrir au public — et j'insiste encore une fois sur ces mots capitaux: d'offrir au public et de rendre des services de comptabilité industrielle et commerciale — et ce sont les mots qui nous préoccupent du paragraphe b) do l'article 35. Je souligne les mots "offrir au public" qui, précisément, caractérisent et spécifient la comptabilité publique.

Je tiens ici à rappeler encore une fois la définition de la comptabilité publique telle que faite dans la loi de 1946 et à rappeler les deux sphères qui y sont clairement définies: l'art ou la science de la comptabilité et, secondement, la vérification des livres ou comptes. Tenant ces deux sphères à l'esprit, il apparaît que ce pouvoir constituerait un chevauchement très considérable du champ d'exercice exclusif des CA, chevauchement qui ne leur laisserait en exclusivité que la vérification — le domaine de la vérification ne serait pas touché — mais quant aux domaines de l'art et de la science de la comptabilité, si on y regarde de près, tout ce que ça leur laisserait en exclusivité, ce serait la comptabilité des individus et celle des associations sans but lucratif. Je suis bien convaincu que cela n'a pas été l'intention du législateur.

Il n'est pas question de nier le calibre et la qualité de l'Association des comptables généraux licenciés, non plus que de ses membres, non plus de méconnaître l'excellence des services rendus et l'importance du rôle joué par eux dans l'industrie, dans les entreprises commerciales et dans les services gouvernementaux en particulier.

Le tout, d'ailleurs, en conformité avec l'orientation donnée par le législateur en 1946 et en conformité, M. le Président, avec le choix librement fait par chacun des membres de cette corporation.

Il est seulement question de distinguer deux orientations, deux rôles, deux corporations et nous soumettons que c'est à ceux qui choisissent d'être membres de l'institut des CA que le législateur a assigné le devoir du service au public, que c'est dans cette optique qu'ils sont formés, que c'est dans cette optique qu'il leur est imposé un stage obligatoire en comptabilité publique, enfin que c'est dans cette optique que sont conçus autant l'examen d'admission, les normes d'exercice, le code de déontologie.

Nous voyons mal en quoi, M. le Président, l'intérêt public serait servi, après que de l'ordre eut été mis il y a 25 ans, par un dédoublement de responsabilités et par un chevauchement de juridictions, en somme, par le rétablissement d'un certain désordre qui existait avant 1946. Et nous demandons en conséquence que l'article 35 b) soit modifié.

M. le Président, toujours à l'égard du champ d'exercice, c'est dans le même esprit et substantiellement pour les mêmes raisons que l'institut demande aussi que les paragraphes a) et i) du même article 35 soient modifiés de façon à interdire expressément aux membres des corporations qui y sont mentionnées d'offrir leurs services au public.

Telle parait d'ailleurs être l'intention du législateur, comme dans ces deux cas les mots "offrir au public" n'y apparaissent pas. Incidemment, il s'agit de la Corporation professionnelle des comptables en administration industrielle et de la Corporation professionnelle des administrateurs agréés. Encore une fois, il semble bien que ce n'est pas l'intention du législateurs d'accorder un domaine public, mais pour éviter toute ambiguïté, l'institut demande que l'interdiction soit expresse.

Relativement à cette même question du champ d'exercice de la comptabilité publique, il y a également lieu de rappeler ici la recommandation 55 du mémoire. Elle a trait à l'article 78

de la Loi de la Commission municipale de Québec selon laquelle, en particulier, la Commission municipale peut accorder un permis de vérificateur municipal à toute personne qui en fait la demande, soustrayant ainsi cette sphère d'activité du champ de la comptabilité publique.

Cette disposition, M. le Président, qui remonte à l'avant-guerre — j'espère qu'on ne me demandera pas laquelle — mais qui remonte à l'avant-guerre se justifiait d'une part par la simplicité relative de la comptabilité municipale d'alors dans la plupart des cas et, d'autre part, par l'indisponibilité de comptables publics en dehors des grands centres. La situation a radicalement changé dans les deux cas.

Nous soumettons qu'en 1972 cette exception, en plus de constituer un anachronisme, présente de graves dangers pour la saine gestion des affaires municipales et, en définitive, pour la protection du public. L'institut demande qu'elle cesse d'être en application.

M. le Président, dans un autre ordre d'idées — et nous abordons ici plus particulièrement le code des professions — le projet de loi confie au lieutenant-gouverneur en conseil la nomination de quatre membres du bureau dans le cas de l'institut, la nomination d'un membre du comité administratif, la nomination du secrétaire du comité d'inspection professionnelle, la nomination du président et du secrétaire du comité de discipline, enfin la nomination d'un syndic.

L'institut s'oppose à ces dispositions. Il estime que les pouvoirs accordés à l'Office des professions en particulier au paragraphe j) de l'article 10 aussi bien que ceux accordés au lieutenant-gouverneur en conseil, qui sont nombreux, mais en particulier au paragraphe g) de l'article 169 sont amplement suffisants pour assurer la protection du public, ce qui est l'objectif du législateur: assurer la protection du public. L'institut soutient en effet que le lieutenant-gouverneur en conseil devrait exercer ses pouvoirs de surveillance et d'intervention par le truchement de l'Office des professions dont le personnel se composera, il faut le présumer, de personnes que leur formation et leur expérience auront rompues aux usages et aux techniques des diverses professions.

Au chapitre de la discipline, l'institut a fait un certain nombre de recommandations. Il attache de l'importance à chacune d'elles mais il y en a deux qu'il voudrait spécialement souligner ici: l'institut s'oppose décidément au double système d'inspection professionnelle, double et parallèle que constituent le comité d'inspection et le syndic. L'institut souligne qu'il ne peut en résulter que de la confusion, chose que, nous comprenons encore une fois, le législateur veut supprimer.

L'institut demande que disparaisse le poste de syndic. Deuxièmement, il paraît essentiel à l'institut, étant donné le caractère éminemment technique des causes entendues en discipline et qui sont susceptibles d'être portées en appel, que le tribunal d'appel, en plus des trois juges, comporte deux membres de la corporation désignés par le bureau. Au chapitre des honoraires et relativement à l'obligation imposée par l'article 83 de suggérer un tarif au lieutenant-gouverneur en conseil, l'institut soumet que, dans le cas de l'exercice de la comptabilité publique, il est en pratique impossible de procéder à une classification des actes professionnels, de leur modalité, de leur importance relative et des honoraires qui pourraient y être respectivement attachés.

L'institut s'explique d'ailleurs plus en détail à ce sujet dans son mémoire. Ce sont sans doute des considérations analogues qui ont amené le législateur à proposer pour le Barreau l'article 56 du bill 251 qui dit ceci en parlant du Barreau: "Le bureau peut, par résolution, suggérer pour approbation au lieutenant-gouverneur en conseil des tarifs d'honoraires extrajudiciaires." L'institut soumet qu'il y aurait lieu d'introduire semblables dispositions à la Loi des comptables agréés.

Relativement à l'obligation d'établir un fonds d'indemnisation, l'institut soumet qu'elle devrait être limitée dans la loi à l'indemnisation des victimes de fraude ou de malversation d'argent confié en fidéicommis quitte à ce que la responsabilité non délictuelle soit obligatoirement couverte par une assurance-responsabilité.

M. REEKIE: Ceci termine notre déposition. Nous sommes maintenant prêts à répondre aux questions que les membres de la commission voudront bien nous poser.

M. LE PRESIDENT: M. le solliciteur général.

M. FOURNIER: Je tiens à remercier l'Institut des comptables agréés du Québec de leur présentation et du mémoire dont ils nous ont fait part aujourd'hui. J'aurais quelques questions à poser. Dans l'exposé fait par M. Pouliot, l'on semble attacher une importance capitale aux dispositions de l'article 13 qui existaient, à savoir l'offre des services au public.

Si on examine cet article 13, est-ce que l'institut considère que la partie essentielle n'est pas nécessairement l'offre au public mais surtout l'art de la comptabilité, de la vérification?

M. POULIOT: M. le Président, M. le ministre, il est bien sûr que l'art et la science de la comptabilité sont extrêmement importants. La vérification des livres et comptes est extrêmement importante. Cela, c'est la matière propre, le champ propre d'exercice. La caractéristique qu'apporte le fait de les offrir au public, c'est la distinction entre les personnes à qui ce sera offert. En somme, les mêmes services peuvent être offerts à un employeur particulier ou ils peuvent être offerts au public. C'est en somme la distinction fondamentale. Le champ peut

s'exercer de la même façon pour un employeur à temps plein mais la distinction fondamentale que nous faisons et que nous croyons capitale, — et nous croyons que c'est celle qui justifie le souci du législateur de voir à protéger le public — c'est que, dans le cas des comptables agréés, ce sont ceux qui peuvent s'adresser au public en général.

M. FOURNIER: Est-ce que cette notion qui existait ou qui a été imposée en 1946 n'est pas aujourd'hui dépassée par certains actes qui ont été posés et, de plus, est-ce que ce n'est pas là en fait une source de la confusion qui existe? Vous dites qu'on a mis de l'ordre, qu'il y a eu de l'ordre de mis en 1946, mais un autre groupement est venu nous dire ce matin qu'il y a une confusion considérable dans l'esprit du public relativement aux services comptables.

J'arrive à la question: Est-ce qu'il ne faut pas s'en rapporter aux principes ou aux fonctions de base dans la comptabilité pour ensuite en arriver à déterminer le champ d'activité d'un groupe ou de l'autre groupe? Ce matin, nous semblions avoir trouvé une définition à peu près générale des services comptables qui provenait de l'exposé et ça contenait trois parties: en premier lieu, la tenue des livres; en deuxième lieu, la préparation des états comptables et, en troisième lieu, la vérification. Est-ce que cette série de faits ou d'actes ne comporte pas l'ensemble de la comptabilité sur lequel nous pourrions commencer à travailler et tenter de dissiper la confusion qui semble exister?

M. REEKIE: Je demanderais à M. Normandin de répondre.

M. NORMANDIN: M. le ministre, certaines associations qui se sont prononcées ce matin voient de la confusion dans le domaine de la comptabilité. En réalité, l'Institut des comptables agréés n'en voit pas du tout et nous croyons que le public n'en voit pas non plus. C'est avant tout une question de vocation. Depuis 1880, notre institut a toujours poursuivi des buts constants, ceux de grouper les comptables publics ou experts-comptables. Comme conséquence, toute notre formation théorique a été, aussi bien que notre formation pratique, axée sur cette vocation, en fonction du code des professions et du bill 264, et il ressort que !e champ d'exercice exclusif aux CA leur échoit à cause de la notion d'indépendance qui découle du concept de la profession libérale ou, si l'on veut, de l'aspect objectif du mot "professionnel".

En effet, le but premier du code des professions étant la protection du public, tel qu'illustré par les diverses recommandations sur le fonds d'indemnisation, le comité d'inspection, le comité de discipline, les tarifs d'honoraires, etc., tous les contrôles suggérés ne peuvent s'appliquer aux professionnels qui offrent leurs services au public d'une façon autonome, en vue de protéger celui-ci.

Il faut dire que le secteur de la vie économique qui représente la comptabilité est beaucoup plus vaste que le champ d'activité du comptable public. C'est là qu'il ne faut pas confondre, du point de vue strictement professionnel, et il faut quand même délimiter la question en fonction de la protection du public.

Dire que les secteurs de l'industrie et du commerce et de la fonction publique devraient être compris dans la définition professionnelle ne peut pas être sérieusement soutenu. Cela ne nie en rien la compétence des RIA ni des CGA dans ces secteurs où ils oeuvrent.

Au contraire, il est très important que les CA y trouvent leurs interlocuteurs valables dans ces milieux. Il ne faudrait pas croire non plus que le fait qu'au moins 50 p.c. de nos membres ne soient pas en pratique publique affaiblit notre position en ce domaine. Au contraire, si certains de nos membres sont plutôt à l'emploi de l'entreprise ou de la fonction publique c'est à cause de leur compétence reconnue et du fait qu'ils ont fait la preuve de leur expérience. Cela ne détruit pas l'argument que notre institut est le seul dont la vocation propre est d'offrir ses services au public dans le domaine de la comptabilité et de la vérification.

L'exclusivité de notre acte professionnel est la meilleure garantie de la protection du public, à notre avis. Il faudrait dire aussi que notre institut est l'institut reconnu d'une façon internationale comme celui qui représente le secteur de la comptabilité publique, si on fait un parallèle avec, en Angleterre par exemple, les chartered accountants; aux Etats-Unis, les certified public accountants et dans divers autres pays, aujourd'hui en Fiance, les experts-comptables; au Canada, ce sont les comptables agréés qui occupent ce secteur-là d'une façon exclusive.

M. FOURNIER: Relativement à la réponse que vous venez de me donner, vous vous reportez à ce qui est un peu mentionné à la page 18 de votre rapport lorsque vous mentionnez que les qualités d'intégrité, d'indépendance et d'impartialité sont la marque de l'expert-comptable. Ces qualités d'intégrité, d'indépendance et d'impartialité sont la marque que nous voulons, nous, pour l'ensemble de toutes les professions. Mais là nous sommes dans le domaine de savoir exactement ce qu'est la profession comptable. Est-ce que sa définition comprend différents éléments et est-ce que plusieurs personnes peuvent agir comme comptables, soit sous telle appellation ou sous telle autre?

Je crois que, pour bien définir le problème, il faut savoir exactement ce que contient la comptabilité et non pas simplement la question des normes générales ou critères généraux d'une profession. J'aimerais bien que vous nous éclairiez sur le domaine de la comptabilité. Je pose des questions un peu faciles, un peu sommaires, au sujet de la tenue de livres. Est-ce qu'il est absolument nécessaire pour faire l'enregistre-

ment des chiffres d'être un comptable sur base professionnelle tenu au code des professions? Première question.

M. NORMANDIN: Non, ce n'est pas nécessaire et c'est même dit d'une façon expresse dans notre loi actuelle.

M. FOURNIER: Très bien. En second lieu, la question de la préparation des états, c'est-à-dire la compilation des données qui ont été enregistrées, est-ce qu'il s'agit là d'un domaine qui nécessite absolument une corporation professionnelle?

M. NORMANDIN: Cela demande subjectivement une attitude professionnelle, des qualités de compétence professionnelle, mais ce travail-là est parfois exécuté par des personnes qui n'ont aucun titre et n'appartiennent pas à une association professionnelle.

M. FOURNIER: Mais ce domaine de la préparation des états, d'après vous, pourrait être réservé à des comptables, sans définir immédiatement si ce sont...

M. NORMANDIN: Mais je vois mal comment ça pourrait être réservé d'une façon exclusive?

M. FOURNIER: Non. En troisième lieu, est-ce que le domaine comptable ne comprend pas le domaine de la vérification qui est l'expression d'opinions sur des données comptables? Est-ce cela?

M. NORMANDIN: Oui, cela fait partie du même champ et cette section a toujours été réservée historiquement aux comptables agréés.

M. FOURNIER : De sorte que, dans votre mémoire, vous demandez d'être classifiés maintenant comme experts-comptables. Ce matin nous avons eu un autre groupement qui a dit: Nous aussi, nous aimerions que le terme soit "expert-comptable", et quant au domaine de tenue de livres et de préparation d'états financiers, nous pourrions, tous les deux groupements ou d'autres groupements qui viendront peut-être après, faire ou se partager ce même domaine. Est-ce qu'il y a possibilité?

M. NORMANDIN: Je voudrais vous en référer à notre mémoire sur le bill 264 où est débattue toute la question de l'appellation "expert-comptable". Le fait est que la traduction correcte du mot "public accountant" est expert-comptable. Qu'il me soit permis de nier l'interprétation de l'Association des comptables généraux licenciés, parce que sa définition n'est pas la bonne. Elle a cité à cet effet la loi française des experts-comptables. Or, justement la loi française des experts-comptables est exac- tement la définition qu'on lit dans notre mémoire à un point qu'un expert-comptable en France qui délaisserait la pratique publique ne peut plus s'appeler expert-comptable mais devient comptable agréé dans la corporation à cause de la notion d'indépendance.

M. CARON: M. le ministre, si vous me permettez, on a fait beaucoup état de la confusion, ce matin, mais je pense que nous n'avons peut-être pas eu la bonne perspective des choses. En 1946, il y a eu, effectivement, 84 APA qui ont obtenu ou retenu un droit de pratique. Il n'est pas dit qu'il en reste aujourd'hui 84. Il en reste beaucoup moins. Je ne le sais pas. Deuxièmement, le président des CGA a dit que 10 p.c. de leurs membres sont engagés en comptabilité publique. Or, d'après leur mémoire, il y aurait 1,100 membres au Québec, 10 p.c, cela pourrait être 110. Mais nous savons qu'il y a beaucoup de gens qui sont aussi comptables agréés et CGA et ils sont compris dans les 10 p.c. Si vous prenez le nombre des gens engagés dans la comptabilité publique présentement et le nombre de comptables agréés engagés dans la comptabilité publique, vous vous apercevrez qu'il n'y a aucune confusion dans le public, parce que cela représente une infime partie de la pratique publique. Vous avez peut-être eu l'impression que cela représentait une forte proportion mais ce n'est absolument pas le cas. Je pense donc que le comité devra contrôler cela, devra faire des recherches pour établir exactement la situation telle qu'elle existe dans le moment parce que, dans le public, à mon point de vue, il n'y a aucune confusion.

M. FOURNIER: Si nous continuons dans le même ordre d'idées, le troisième domaine serait la vérification et cette dernière est présentement exclusive à l'Institut des comptables à l'exception de certaines lois qui permettent une vérification, comme la Commission municipale, etc. C'est pour cela, évidemment, qu'il n'y a que 10 p.c. de ces gens qui sont là. Est-ce qu'il serait possible que les groupements comptables se rencontrent de façon à décider que la vérification pourrait être sujette à des licences particulières alors que le reste pourrait être sujet au domaine général de l'expert-comptable?

M. NORMANDIN: Si vous permettez, M. le ministre, il y a deux questions là-dedans. En ce qui concerne la vérification, vous parlez de licences à être octroyées?

M. FOURNIER: Ce serait une qualification particulière qui spécialiserait certaines gens comme je considère que vous, les CA, ne faites pas tous de la vérification.

M. NORMANDIN: Non, mais ils ont tout de

même tous été entraînés pour le faire. Nous avons pour ceux qui sont en pratique des systèmes de contrôle auxquels ils seraient soumis s'ils revenaient à la pratique. Vous semblez suggérer une tentative de dialogue avec les autres associations. Je dois dire que nous sommes fiers de vous faire part que nous avons pris l'initiative de ces rapprochements. Par exemple, le comité Horizon 2000, dont il a été fait mention ce matin par les CGA, était une initiative de l'Institut canadien des comptables agréés qui est lui-même une création des provinces. Une des recommandations de ce comité était l'intégration éventuelle de toutes les associations professionnelles de comptables. J'ai fait partie du comité qui a pondéré les recommandations du comité Horizon 2000 et cette question n'a pas été rejetée; elle a tout simplement été différée, parce qu'il y a une multitude de problèmes pratiques qui se présentent immédiatement. Il y a, par exemple, le fait que certaines de ces associations ont d'abord été fondées à un niveau fédéral qui a ensuite créé des succursales dans les provinces.

C'est tout â fait différent de l'Institut des comptables agréés qui est un ensemble de dix instituts provinciaux qui ont créé un institut national. Il y a déjà un problème à ce niveau-là.

Il y a aussi des problèmes très réels d'équilibre dans les normes d'éducation, les normes d'accès à la profession qui sont des problèmes où il y a une possibilité de règlement à long terme ou à moyen terme, mais pas immédiatement. Je voudrais aussi citer une initiative d'un ancien président de notre institut provincial qui a pris sur lui de tenter une démarche auprès du président des comptables généraux licenciés en vue de créer un terrain d'entente et on a même parlé, à un moment donné, d'une passerelle à établir entre ces deux associations. Malheureusement cette démarche-là est jusqu'à ce jour demeurée lettre morte.

La deuxième partie de votre question traite du secteur de la comptabilité. Il faut bien distinguer la section de la comptabilité qui nous est exclusive, c'est l'exercice public de la comptabilité. C'est tout à fait différent de la comptabilité qui est faite à l'intérieur des entreprises pour un seul patron ou pour un patron comme le gouvernement ou la grande entreprise par exemple. La différence essentielle, à mon avis, c'est l'indépendance, l'autonomie du praticien. Aujourd'hui la vérification est loin d'être la majorité de nos travaux, je veux dire pour ceux qui sont dans la pratique.

La première page de notre code d'éthique décrit l'éventail des travaux que nous sommes appelés à offrir au public. Vous pouvez y lire par exemple qu'on entend par expertise comptable, l'examen et la vérification de registres et documents comptables effectués en vue de dresser des états financiers ou d'exprimer une opinion â leur sujet et la prestation de services connexes. On considère que cette définition couvre notamment les activités suivantes: a), la comptabilité, c'est-à-dire les travaux d'analyse et d'interprétation faits en qualité d'expert, les conseils donnés à ce titre, ainsi que l'étude et l'implantation de systèmes et de procédés, à l'exclusion de la tenue de livres; b), la vérification; c), les services en matière de fiscalité. L'expertise comptable comprend également la consultation en administration, les fonctions de syndic de faillites et de séquestres, le traitement de l'information, y compris la tenue de livres manuelle, la mécanographie, le traitement par ordinateur, le courtage en affaires qui consiste à négocier et à conseiller l'achat, la vente et la fusion d'entreprises, la gestion et la liquidation de successions, la planification successorale, la consultation en matière de finances, la consultation en matière d'assurances, l'évaluation.

Vous voyez que cela ne se restreint pas à la notion de vérification.

M. FOURNIER: Relativement à la vérification elle-même, je comprends que votre code de déontologie l'établit vous précisez que la vérification elle-même doit être faite par une personne indépendante de celle qui a préparé, qui a fait la tenue de livres, qui a fait l'enregistrement des données. Est-ce que c'est bien ça?

M. NORMANDIN: Je pense que ce n'est pas précisé. Ce qui est précisé, c'est qu'on ne peut pas donner une opinion sur un état financier quand on a un lien de parenté, par exemple. Les liens de parenté sont définis; enfin je pense que l'unité familiale se borne à une famille qui demeure ensemble, comme le père, l'épouse, les fils, les filles, etc.

M. FOURNIER: Si je comprends bien, cela s'étend aussi aux associés.

M. NORMANDIN: Oui, ça s'étend aux associés. On donne comme exemple une firme d'envergure nationale qui serait vérificateur de la compagnie Bell Canada: si l'épouse d'un employé de ce bureau-là à Vancouver détient une action, les associés de Montréal ne peuvent pas donner une opinion sur le bilan du Bell Canada.

M. FOURNIER: Est-ce qu'à ce moment-là, même â l'intérieur du groupement de l'institut des comptables, à cause de l'indépendance que doit avoir celui qui fait la vérification, si vous empêchez les associés de le faire, vous ne mettez pas en danger la survie de bureaux comptables qui ne sont pas de gros bureaux?

M. NORMANDIN: Eh bien! ce ne sont pas des règles qui proviennent de nous, vraiment, elles viennent de la Commission des valeurs mobilières de différentes provinces. Ces contraintes-là viennent directement de la Security Exchange Commission des Etats-Unis.

M. FOURNIER: Si votre code de déontologie est sévère au point qu'il fait la distinction et exige la distinction entre la personne qui prend les données et celle qui émet une opinion ou qui fait la vérification, qui empêche cela, à ce moment-là? Est-ce qu'en définitive vous n'empêchez pas la survie de petites entreprises parce qu'elles groupent quatre ou cinq comptables, et entre eux, ils ne pourraient faire la tenue de livres et la vérification? Est-ce que ce n'est pas la conséquence?

M. NORMANDIN: Ce n'est pas ce que j'ai expliqué au point de vue de notion d'indépendance et je ne crois pas que notre code d'éthique présente ce que vous dites. On n'a pas le droit de dresser les états financiers et de plus donner une opinion. Je ne me rappelle pas...

M. FOURNIER: J'ai l'article 23 qui semble dire: Dans lesquels, lui-même, ses associés, ses proches parents ont directement ou indirectement les intérêts financiers, etc.

Vous avez mentionné qu'il y a actuellement 800 cabinets de comptables dans la province. Combien avez-vous d'étudiants? Combien y en a-t-il qui étudient?

M. REEKIE: Environ 1,500.

M. FOURNIER: Environ 1,500...

M. NORMANDIN: Si vous le permettez, M. le ministre, je voudrais apporter une clarification sur ce qui a été dit ce matin. Dans l'association des CGA on voit une augmentation assez extraordinaire d'étudiants, c'est un fait historique. C'est que, depuis le 1er janvier 1970, notre institut a établi comme normes, pour entrer dans la profession comme minimum, un diplôme universitaire au premier cycle, c'est-à-dire les étudiants du cours du jour, avec des cours d'appoint. Autrefois nous avions un système qui ressemblait à celui de l'association des CGA, c'est-à-dire des étudiants de cinq ans qui étudiaient le soir et qui n'obtenaient pas un diplôme universitaire mais un brevet seulement, une attestation d'études de cinq ans. Ce qui est arrivé, ceux qui ont voulu poursuivre leurs études le soir se sont inscrits au CGA, puisque cet accès leur était dorénavant fermé chez nous. Cette politique-là a été prise à l'échelle du Canada pour relever les normes de la profession, d'exiger comme minimum un diplôme universitaire de premier cycle qui se dispense le jour dans les universités.

M. FOURNIER: Mais vous exigez des étudiants un stage avant de les admettre.

M. NORMANDIN: Oui. Dans le cas des bacheliers en commerce, c'est deux ans et, dans le cas des licenciés, c'est une année.

M. FOURNIER: C'est le but de ma question, comment vos 800 bureaux vont-ils faire face à 1,500 étudiants qui veulent faire un stage et qui veulent devenir membres de la corporation? De quelle façon solutionnez-vous ce problème de ceux qui veulent y parvenir et devenir membres de l'institut?

M. CARON: Dans le moment il y a même une rareté d'étudiants, ce n'est pas un surplus, c'est le contraire qui existe. Il y a de l'emploi offert pour tous les étudiants qui voudraient faire un stage dans les bureaux de comptables, mais en pratique un comptable peut avoir plusieurs stagiaires. Alors, comme il y en a 2,500 en pratique, vous pourriez avoir 7,500 étudiants. Je ne pense pas qu'il y ait de danger de ce côté-là.

M. FOURNIER: A votre avis quel rôle don-neriez-vous aux autres groupements comptables dont la reconnaissance existe dans un titre? Quels sont les rôles, la différence des rôles entre le CGA et le vôtre?

M. NORMANDIN: Je crois que ce qui arrive dans le cas des CGA, c'est qu'ils oeuvrent dans un champ qui forcément ne peut pas être exclusif, ils le partagent avec nos membres qui ne sont pas dans la pratique publique, ils le partagent avec des gens qui n'ont aucun titre professionnel, mais des formations universitaires qui mènent à un diplôme mais n'entrent pas dans une profession. Je ne vois pas vraiment qu'on puisse jamais délimiter une profession fermée avec le secteur privé de notre secteur de comptabilité.

M. FOURNIER: Je ne sais pas si vous l'avez consulté, mais dans le document qui nous a été soumis ce matin, on avait des tableaux qui exposaient le cours d'étude de chacune des professions comptables.

Est-ce que vous avez certains commentaires particuliers à faire relativement à ce cours d'étude qui semble être identique à peu d'exceptions près au cours d'étude suivi par les membres de votre institut?

M. CARON: Voici le mécanisme qui existe chez nous. Premièrement, pour se présenter à l'institut, il faut détenir un diplôme universitaire. Ce diplôme universitaire existe depuis deux ans. Ceci a été fait pour hausser les standards de la profession comptable, mais ça va aussi plus loin; c'est aussi parce qu'on bénéficie de droits de réciprocité avec d'autres provinces au Canada et des Etats aux Etats-Unis. Pour pratiquer dans l'Etat de New York, vous ne pouvez pas être un comptable public sans avoir un diplôme universitaire. Or, nous avons jugé que ce serait bon pour nos membres de hausser nos standards pour rejoindre les standards les plus élevés.

Notre processus est que nous avons des examens. Nous avons un examen établi par un comité interprovincial et cet examen émane de suggestions venant de comités provinciaux, sur lesquels siègent tous les représentants universi-

taires. Vous avez un examen conçu et qu'on appelle un examen uniforme et assez difficile mais tout de même qui nous permet de faire graduer un nombre suffisant chaque année. Il y a un procédé d'élimination qui est assez sévère. Je pense que, si vous voulez faire la grande différence entre un comptable agréé et un autre membre d'une association, vous avez la qualification universitaire, un régime d'examens et un stage; un stage, dans un bureau de professionnels qui peut être d'une, deux ou de trois années, suivant les qualifications du candidat. Je pense que c'est cela qui vous donne le produit fini qui est différent. Autrement vous retourneriez aux normes universitaires de l'enseignement des cours.

M. FOURNIER: Merci, monsieur.

M. LAVOIE (Wolfe): Je voudrais savoir pourquoi il dit "un nombre suffisant". Est-ce que ça va au nombre que vous limitez chaque année des gens qui sont diplômés?

M. CARON: Vous avez bien raison. Parce que le besoin est grandissant et il n'y a pas de doute qu'avec l'évolution des affaires, vous avez de plus en plus besoin de comptables et de gens qui ont une formation de comptable ou une formation d'administrateur. Cela ne tient pas à d'autres norme que celle de la compétence; c'est un examen anonyme, ce sont des numéros, les gens écrivent, soit en français, soit en anglais, il y a une compilation qui est faite et les résultats sortent. J'ai connu le régime parce que je l'ai présidé même pour le Canada. J'ai connu le régime dans toutes ses façons et je pense qu'il est équitable et qu'il est à l'abri de tout reproche.

M. LAVOIE (Wolfe): C'est parce que souvent on blâme certaines professions de vouloir limiter leur nombre, on prend certaines façons, soit par les examens ou d'autres manières pour en avoir le moins possible. Je pensais que cela pouvait arriver chez vous.

M. CARON: Je ne pense pas qu'on soit là et ce, avant longtemps.

M. FOURNIER: J'aurais une dernière question sur le bill 250, sur le code des professions. Dans votre mémoire, vous prétendez que les pouvoirs de l'office et du lieutenant-gouverneur sont déjà suffisants et que l'Etat ne devrait pas nommer en plus certains représentants au bureau ou aux comités. Je ne vois pas votre mémoire mais il ne semble pas aller aussi loin que cela. Est-ce que vous admettriez que les membres du public aux comités de discipline, d'inspection ou aux bureaux, soient nommés par l'office des professions?

M. REEKIE: On demanderait à M. Desrochers de répondre.

M. DESROCHERS: On pourrait peut-être répondre à votre question en deux parties. Les recommandations que nous faisons sur le fait que le public ou que le gouvernement soit représenté au bureau des corporations, elles sont d'une part qualitatives et d'autre part quantitatives. Nous ne discutons pas le principe qu'il y ait une représentation de l'Etat au sein du bureau des corporations. Nous nous demandons simplement si le fait d'avoir quatre délégués ou trois délégués dans le cas des corporations un peu moins nombreuses est vraiment essentiel. Le principe de la représentation de l'Etat ou du public — je ne ferai pas la disctinction — nous l'acceptons d'emblée. Nous estimons que, si le lieutenant-gouverneur ou l'Office des professions — et j'y reviens tantôt — ne désigne qu'une seule personne, un seul délégué, l'objectif est atteint quand même. Nous craignons aussi que, du moins pour les premiers temps, lors de la mise en place du régime, si le lieutenant-gouverneur se met en frais de désigner trois ou quatre représentants au bureau des 34 corporations, il a toute une tâche sur les bras.

La deuxième partie que j'aimerais commenter est la suivante. Vous vous demandez si nous verrions des objections à ce que ce soit l'Office des professions — si j'ai bien compris votre question — qui nous désigne ses membres au bureau et au comité de discipline et au comité d'inspection. Non seulement nous ne nous y opposons pas mais nous en faisons une recommandation expresse.

M. FOURNIER: Voici, quant aux mots "représentant de l'Etat", je mentionnais représentant du public au sein du bureau des corporations.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, vous représentez un groupe extrêmement important, votre mémoire l'est aussi et les réponses que vous apportez aux travaux de la commission sont également très importantes, vous l'avez constaté depuis le matin. J'aurais beaucoup de questions à vous poser, M. le Président, j'en poserai quelques-unes et laisserai la chance aux collègues d'en poser, quitte à revenir à l'autre partie de la séance.

Il se dégage des réponses que vous avez données tantôt, M. Normandin, M. Caron surtout, que le problème n'est pas constitué par le nombre de professionnels qu'il y aura à l'intérieur de chacune des professions. Tantôt, on a circonscrit pas mal le problème des APA, on a dit qu'ils étaient 84 au début et ce nombre est réduit. Quant aux CGA, il y en a 10 p.c. dans le domaine public et il y a aussi des CA qui sont CGA, alors, ça pourrait aussi être réduit.

D'autre part, on peut accentuer le problème en disant qu'il y a beaucoup de CA qui ne

pratiquent pas non plus. On vient aussi de recevoir il y a un instant la visite de la Corporation des administrateurs agréés. Il semble bien qu'il y ait un problème d'orientation de tous ces professionnels pour l'avenir. On a dit ce matin qu'on a vécu avec une situation et la ligne de démarcation a été située en 1946 au moment de la législation. Mais le code des professions doit aussi être l'occasion de faire une réflexion là-dessus quant à l'avenir. Vous l'avez fait à l'institut des CA avec vos travaux de recherche pour Horizon 2000. Qu'est-ce que vous pensez de cette possibilité qu'on a évoquée depuis ce matin de cette rencontre, de ce dialogue entre les différentes associations professionnelles dans le domaine de la comptabilité, pour tenter de dégager des orientations pour l'avenir? Parce que si vous vivez le problème et le présentez devant la commission parlementaire, en définitive, c'est le public qui va le vivre, même si on dit parfois qu'il n'y a pas de confusion. Est-ce que vous prévoyez qu'il y aurait possibilité de mettre en place un mécanisme qui éviterait que la profession comptable soit la seule profession qui apparaisse à deux annexes? Une qui a un caractère exclusif, de pratique, et l'autre dont le titre est réservé. C'est la seule profession. Si c'est la seule profession — ça n'existe pas dans le domaine de la santé, ça n'existe pas pour les médecins, ça n'existe pas pour le droit — il doit y avoir un problème quelque part.

Si on ne le règle pas à l'occasion des travaux de la commission, il va falloir qu'il se règle dans les mois, les années à venir, le plus tôt possible, de façon que les corporations et la profession puissent s'épanouir normalement et qu'on ne passe pas son temps à se demander jusqu'où va la compétence, jusqu'où va la responsabilité. Je voudrais vous entendre là-dessus, je ne sais pas lequel, si c'est M. Caron ou M. Normandin qui le fera.

M. NORMANDIN: Je voudrais réitérer notre intention ferme d'être très positif sur cette question. Nous sommes disposés à discuter ce problème. Nous serions inquiets d'une solution trop rapide parce que, à cause de notre étude préalable, qui date de deux ans, nous avons entrevu une quantité de problèmes dont nous n'entrevoyons pas une solution rapide. Cela ne veut pas dire qu'ils sont insolubles. Je pense que si nous donnions des chiffres, vouloir régler ça d'ici trois mois, cela serait vraiment précipiter les choses et je craindrais de faire des erreurs irréversibles. Toute la profession comptable en Angleterre et aux Etats-Unis a discuté ce problème de l'intégration des corporations professionnelles de comptables et cela bouge assez lentement, je dois vous dire. On a voté sur cette question en Angleterre et cela a été rejeté temporairement. On en arrive forcément à une profession à plusieurs paliers et c'est la difficulté.

M. CLOUTIER (Montmagny): En pratique, cela pose certainement des problèmes. Prenons l'expérience gouvernementale, soit au niveau fédéral ou au niveau provincial. Prenons le bureau du vérificateur général des comptes. Vous avez là des CGA — sauf erreur — et vous avez des CA. Vous avez des CGA qui vont vérifier des rapports et des travaux faits par des CA à l'intérieur de la fonction publique. Ils vont vérifier également dans les régies gouvernementales des rapports qui ont été préparés par des CA. Vous avez d'autre part à l'intérieur des ministères des CA qui vont travailler pour des CGA et vous avez l'inverse. C'est une situation de fait qui existe en pratique. Je comprends que la loi de 1946 a dit que les CGA qui étaient au niveau des gouvernements pouvaient obtenir tout de suite le permis de pratique des CA. Nous voyons qu'il n'y a pas tellement de distance entre toutes ces professions parce qu'elles se rencontrent à un moment donné, une a le champ de la pratique publique et l'autre a le champ de la pratique privée. Je pense que, si l'on réduit le problème comme on l'a réduit tantôt à une question de nombre de personnes, il est moins considérable que si on prend le problème à l'échelle des corporations. Je pose une autre question.

M. Caron a parlé il y a un instant de la formation universitaire qui est exigée depuis le 1er janvier 1970. Là, encore — je vais vous poser une question — nous avons la situation d'une formation universitaire mais il y a des CA qui n'ont pas de formation universitaire. Dans l'avenir, les CA vont avoir une formation universitaire. Il y a des CGA qui ont eux aussi une formation universitaire et il y a des CA qui ne l'ont pas. C'est difficile de juger au mérite. Ce n'est pas le rôle du législateur de juger ici le mérite des corporations professionnelles. Selon la loi de 1946, la licence comptable était décernée par l'Ecole des hautes études commerciales, l'université McGill et l'université Laval. Ces institutions pouvaient décerner la licence en sciences comptables. Vous n'en avez pas fait mention dans votre mémoire. Est-ce parce que vous êtes d'accord sur la suppression de la licence qui serait décernée par ces universités?

Nous aurons l'occasion de le demander à M. Charbonneau, le directeur de l'Ecole des hautes études, qui viendra devant la commission bientôt. Mais je voudrais savoir de l'institut des CA si vous êtes d'accord sur cette disparition de cette responsabilité qui était décernée aux universités. Est-ce parce qu'elles ne s'en sont pas servi?

M. CARON: En 1946, je présume que le législateur a voulu une période de transition et notre loi, la Loi des comptables agréés, aux articles 48 et 50, prévoit que l'Ecole des hautes études, l'Ecole de commerce de Laval et McGill peuvent tenir un examen et accorder une licence en sciences comptables. Et d'après cette législation, le détenteur devenait membre auto-

matiquement de la profession des comptables agréés. Or la loi leur donnait le droit de tenir un examen propre à eux, excepté qu'en pratique — comme vous l'avez dit tout à l'heure, M. Cloutier — au lieu d'établir leur propre examen, Laval et McGill d'abord, autour de 1954, ont abandonné — je dis autour à peu près de 1954 — leur droit d'établir un examen et on pris un examen uniforme.

En 1958, l'Ecole des hautes études a abandonné son examen séparé pour prendre l'examen uniforme. Depuis ce temps, depuis 1958, c'est l'examen uniforme du Québec qui sert de critère pour décerner la licence en sciences comptables. Or, aujourd'hui, nous sommes en face d'un autre problème parce que non seulement vous avez Laval, McGill et Montréal, mais vous avez aussi des écoles de commerce à Sherbrooke, à Rimouski, à Trois-Rivières, vous avez le Loyola, et, s'il fallait que le législateur accorde un droit à chacune des universités de faire son examen, vous pourriez avoir dix types de standards, dix types d'examens qui mèneraient au même titre. On tombe dans une situation qui est théoriquement absurde.

Nécessairement, nous sommes bien heureux que le nouveau code élimine cette question d'examen, parce qu'on pense que cela a été aussi bénéfique pour les écoles de commerce en établissant des standards, des exigences passablement élevées pour tout le monde. Et au Québec on s'y est très bien maintenu. Je peux d'ailleurs vous dire que, sur quinze ans, neuf fois ce furent des candidats du Québec qui ont été premiers au Canada et, six fois, ce furent des Canadiens français, des types de langue française.

La transition, au point de vue du régime d'examens, n'a certainement pas été au désavantage des Québécois. Nous nous réjouissons de ce que votre code, votre proposition élimine ces droits acquis en vertu des articles 48 et 50 et je peux vous dire d'ailleurs que, comme administrateur de l'Ecole des hautes études, je partage le même point de vue. Je le partage comme comptable agréé, mais je le partage aussi comme administrateur de l'école.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est donc un examen national. Vous avez parlé tantôt d'un examen québécois uniforme, mais c'est un examen national.

M. CARON: Qui est le même partout et qui est préparé suivant les suggestions des conseils provinciaux auxquels siègent les universités. Et chaque province reçoit une proposition d'examen, l'examine, fait ses commentaires, établit les changements qu'elle juge à propos; c'est soumis à un comité interprovincial qui, lui, accepte et détermine l'examen final et c'est retourné aux instituts provinciaux pour acceptation.

C'est tout un processus qui est passablement long; ça prend neuf mois pour pondre un examen.

M. CLOUTIER (Montmangy): Vous avez une charte provinciale?

M. CARON: Nous avons une charte provinciale; alors l'institut provincial accepte l'examen et, jusqu'à maintenant, le comité d'examen est formé de représentants de l'institut et de représentants de toutes les universités du Québec.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que l'institut a l'intention de pousser plus loin?

De toutes vos recommandations, il y en avait plusieurs qui découlent du "task force" que vous avez fait et qui est, dans le domaine de la comptabilité, un des travaux les plus importants à ce jour. Est-ce que vous avez l'intention de continuer à explorer non seulement cette possibilité de fusion, mais aussi la recherche sur la comptabilité et le développement de la profession comptable?

M. NORMANDIN: Oui, justement, M. Cloutier, dans le domaine de recherche, il y avait des recommandations expresses, spéciales, à l'effet d'inviter les autres associations de comptables à collaborer à la recherche pour faire l'unité dans les efforts, parce que, en termes d'argent, c'est un effort gigantesque. Les budgets de l'institut canadien sont grevés de façon très importante par la recherche. Etant donné qu'il s'agit là d'un secteur d'économie canadienne, un secteur important, l'institut canadien pensait qu'il était plus à propos de s'assurer la collaboration de toutes les associations qui poursuivent les mêmes buts que nous en fait de perfectionnement des normes comptables.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je reviendrai plus tard avec d'autres questions.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmorency a une question?

M. VEZINA: M. le Président, à quelle heure désirez-vous suspendre les travaux?

M. LE PRESIDENT: On les suspendra à 6 heures, et on reviendra à 8 h 15.

M. VEZINA: Je me demande s'il n'y a pas lieu en bon comptable, de constater qu'il est 6 heures tout de suite parce que l'on pourrait tout au plus aborder la série de questions que j'ai à poser.

M. LE PRESIDENT: Mais nous allons avoir d'autres questions à 8 h 15, peut-être y a-t-il quelqu'un qui a une courte question? Le député de Châteauguay.

M. KENNEDY: Vous semblez être en faveur de l'intégration complète de la profession, c'est-à-dire la fusion de toutes les associations de comptables. Pour faire suite à une question

du ministre, M. Normandin, je vais m'adresser à vous. Croyez-vous qu'il soit possible en pratique de séparer l'aspect de la comptabilité, de la tenue de livres, ce que l'on appelle en bon langage de comptable la mitaine, quoique vous, vous avez un bureau spécialisé, la préparation des états et la vérification? Ce matin, on a parlé de séparer peut-être ces étapes en divers secteurs sous un même chapeau. Croyez-vous qu'en pratique on puisse dire qu'on va limiter des individus, qu'un va faire la tenue de livres, que l'autre va préparer les états, que ça va être sa spécialité de préparer les états, et que l'autre qui aura une licence différente aussi, va faire la vérification? Je parle de la pratique.

M. CARON: Ce n'est pas pratique. Moi, si j'avais à répondre, il y a deux choses qui se séparent, il y a la comptabilité privée, il y a la comptabilité publique. La comptabilité publique, à l'occasion, vous en faites des états, à l'occasion vous étudiez des rapports, à l'occasion, vous donnez des opinions au point de vue d'une fusion. A d'autres moments, vous faites de la planification successorale, vous faites des conseils sur la fiscalité, vous faites de la consolidation ou du prospectus.

Alors, où commence la comptabilité et où commence la vérification? E n'y a pas de démarcation, en pratique, ce sont tous ces travaux que vous faites. Alors, vous êtes obligés d'avoir un bloc qui englobe les comptabilités publiques et la vérification; les comptabilités publiques, nous les avons nommées tout à l'heure, ce sont tous les services qui apparaissent dans la loi.

M. KENNEDY: Je suis d'accord parce que, en pratique, nous ne sommes pas tous Clarkson Gordon...

M. CARON: Non, mais ils ont commencé petits eux aussi. Il y a longtemps cependant.

M. KENNEDY: Je vous posais la question pour savoir si on pouvait séparer la tenue de livres, la présentation des états et de la vérification. Je pense bien que cela n'empêche pas une personne d'avoir une opinion indépendante, intègre sur les états...

M. CARON: II reste qu'on doit travailler tout de même pour établir différents paliers à l'intérieur d'un même groupe. On pourrait peut-être trouver, avec de la recherche, de la bonne volonté et de la bonne foi — je pense qu'il y en a de toutes parts— des moyens d'accomodement où on pourra vivre à l'intérieur d'un même groupe, dans une même structure, avec des genres de spécialités, des qualifications. Mais nous n'avons pas trouvé la formule. Nous ne sommes pas plus fins qu'ailleurs. On ne l'a pas trouvée ailleurs et on a le même problème. Le problème existe autant en Ontario qu'il existe en Angleterre ou aux

Etats-Unis. Nous sommes aux prises avec ce problème. Je pense que tout le monde veut y travailler. La preuve, c'est qu'Horizon 2000 l'indique et puis les CGA le veulent puis, nous aussi, nous le voulons. Je pense que l'on travaillera ensemble pour trouver une formule. Nous n'avons pas la formule.

M. LE PRESIDENT: Je donne la chance à un autre comptable, le député de Jeanne-Mance.

M. BRISSON: En pratique, quelle différence faites-vous entre un CA et un CGA?

M. CARON: Je ne veux pas être brutal, mais je n'ai jamais rencontré un CGA en pratique, encore.

M. BRISSON: Est-ce que dans les compagnies privées ou compagnies familiales, il n'y a pas de CGA, à votre connaissance, qui signeraient des bilans?

M. CARON: S'ils le font, c'est contraire à la loi. Ils n'ont pas le droit de signer...

M. BRISSON: Croyez-vous que cela existe de fait?

M. CARON: Cela existe certainement parce qu'il y a des cas de discipline. Je n'ai pas siégé depuis quatre ou cinq ans mais j'en ai connu de ces cas-là. Ce ne sont pas des cas nombreux et ce sont des cas d'abus, mais je ne voudrais pas exagérer la chose.

M. BRISSON: Mais est-ce que vous ne pensez pas qu'à ce moment-là la propre association CGA n'est pas sévère à l'endroit de quelqu'un qui signe des documents et qui n'aurait pas d'autorité? Il n'est pas banni à ce moment-là de la propre association qui, à mon sens, est aussi professionnelle que d'autres associations, qui a des droits acquis?

M. DUROCHER: Je pense qu'il ne nous appartient pas de promulguer ni d'appliquer le code d'éthique de l'Association des comptables généraux licenciés. A l'article 25 de la loi qui les crée, il est dit qu'ils ne peuvent pas exercer la comptabilité publique. Si certains de leurs membres exercent la comptabilité publique, à mon sens, cela devrait être l'article premier de leur code de déontologie que de les soumettre à la discipline dans ce cas-là.

M. BRISSON : Mais cela fait partie également du code d'éthique des CA de voir à ce que ça ne se fasse pas.

M. DESROCHERS: Je ne pense pas. L'éthique ne vise que nos membres.

M. BRISSON: Parce qu'à ce moment-là, si on veut une protection et une compétence presque parfaite...

M. DESROCHERS: Cela relève des tribunaux à ce moment-là..

M. HARVEY (Chauveau): Ce n'est pas plus sage d'accuser que cela se produit...

M. CARON: C'est la loi qui intervient et il y a des procédures légales qui sont prises contre la personne pour pratique illégale, à ce moment-là. C'est une question d'institut, c'est une question de loi, de législation.

M. BOIVIN: M. Caron, si vous pensez que les CGA et les CA puissent être si loin les uns des autres, pourquoi leur accordez-vous des équivalences?

Parce qu'il y a des CGA qui sont CA.

M. CARON: Non, j'ai peut-être été mal interprété quand j'ai dit qu'ils étaient loin les uns des autres. Je n'ai jamais dit cela. J'ai dit qu'il y avait, certainement qu'il peut y avoir des équivalences parce que ces gens-là font des études en comptabilité et en vérification. Ils peuvent obtenir les crédits qui vont être valables parce que les études qu'ils poursuivent, on ne conteste pas leur qualité. On dit qu'ils en font moins dans certains secteurs. Dans les secteurs où ils étudient les mêmes matières que nous, ils ont droit à des crédits et c'est juste qu'ils y aient droit aussi parce qu'ils le méritent.

M. BRISSON: Qu'exigez-vous d'un CGA qui veut devenir CA?

M.KENNEDY: En pratique, avant 1946, qu'exigez-vous d'un CA qui veut devenir CGA?

M. DESROCHERS: Ce que nous exigeons d'un CA qui veut devenir CGA? Nous exigeons qu'il se plie aux conditions générales. Et les conditions générales sont, d'abord, qu'il possède un diplôme universitaire; deuxièmement, qu'il possède une certaine formation technique, et la formation technique sur une très large mesure, il la possède; troisièmement, qu'il fasse le stage dans un bureau de CGA, que tous nos futurs membres doivent faire et, quatrièmement, qu'il subisse notre examen. Les CA sont traités exactement comme tout le monde, sauf que, sur le plan technique, ils sont excellemment bien préparés et on ne leur fait pas reprendre des cours depuis les principes élémentaires de comptabilité qu'ils connaissent aussi bien que nous. Mais on les assujettit à l'examen et au stage.

M. HARVEY (Chauveau): II est six heures, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La séance reprendra à 8 h 15.

M. BRISSON: J'aurais juste une autre question qui sera courte, afin d'éclairer l'assemblée. Pour quelle raison un CA ne peut s'annoncer comme expert en impôts ou expert en prix de revient ou quelque chose comme ça?

M. NORMANDIN: Je crois que c'est parce que c'est une règle d'éthique qui est générale à la profession à travers le pays. On ne doit pas s'annoncer dans quelque sphère particulière que ce soit. Nous sommes sensés être des généralistes.

(Fin de la séance à 18 h 01)

Reprise de la séance à 20 h 15

M. BLANK (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Y a-t-il des petites questions du député de Montmorency? Est-ce qu'on peut fermer les portes en arrière s'il vous plaît?

M. VEZINA: M. le Président, comme vous l'avez dit, j'ai une série de petites questions. Ma première question est la suivante. Ce matin nous avons entendu, vous étiez probablement présent, les CGA; cet après-midi nous avons entendu les CA et chacuun y va un peu de sa façon d'approcher le problème. Nous qui représentons le public, nous ne voyons pas cela tout à fait de la même façon. Le monde de la comptabilité prend une importance accrue chaque jour pour toutes sortes de raisons que vous connaissez mieux que moi. Et quand vous dites qu'il n'y a pas de confusion, je suis prêt à concéder que, de votre côté, du côté de votre barrière, il n'y ait pas de confusion. Dans le public il y a incontestablement beaucoup de confusion.

Ma première question est la suivante. Est-ce que vous nous demandez de constater et d'adopter le concept législatif de 1946 pour régler un problème qui se pose en 1972? C'est la première question. Je ne sais pas qui peut... Me Pouliot peut-être?

M. NORMANDIN: Est-ce que vous nous demandez de perpétuer une législation de 1946 pour régler un problème de 1972? Je pense que ce n'est pas un problème de 1972, c'est une situation de fait qui a toujours existé. Je pense qu'il serait utile de décrire — cela n'a pas été fait que je sache à ce jour — nos deux corps professionnels respectifs. Il est très important, je pense, de revenir à la source et de regarder la vocation propre de chacun des organismes.

Du côté de l'institut des CA, notre vocation a toujours été la comptabilité publique avec tout ce que cela comporte de structures pour la protection du public en termes de contrôle sur la pratique, enfin de code d'éthique et tout ce qui en suit. Mais cela, c'est notre vocation première; c'est par accident qu'il y a des membres qui ne sont pas engagés dans la pratique publique. C'est parce que, comme je disais cet après-midi, leur compétence a été reconnue par d'autres sphères d'activité qui l'ont mise à leur profit.

Essentiellement, la vocation des comptables généraux licenciés, de par leur choix propre, délibéré, a été d'oeuvrer dans le secteur privé de l'entreprise, qu'elle soit une entreprise commerciale ou industrielle ou l'entreprise gouvernementale de la fonction publique. Je pense que c'est une différence essentielle, ce que je disais cet après-midi, la distinction entre l'aspect objectif et l'aspect subjectif du mot "professionnel". On peut très bien être un professionnel dans ses attitudes, dans sa compétence et enfin dans son travail sans pour cela poser des actes professionnels. Je pense que c'est le fond du problème. Quand certains CGA demandent le droit de pratique professionnelle, nous disons à ceux qui existaient en 1946: Vous conservez toujours ce droit. C'est-à-dire qu'il leur faut passer une année de pratique, après ça ils sont reçus d'emblée dans notre institut qui est celui qui a l'exclusivité de la pratique publique. Pour les autres qui sont entrés après, ils avaient tout de même un choix. Ils pouvaient, s'ils désiraient, s'orienter du côté de la pratique publique; ils n'avaient qu'à s'inscrire à l'Institut des comptables agréés. Ceux qui ont opté du côté des comptables généraux licenciés, c'est qu'ils ont tourné le dos, à ce moment-là, à la pratique publique. Je pense que c'est tout le fond du problème. Ce sont essentiellement les différences.

M. VEZINA: Quand vous dites "la pratique publique", vous voulez dire les services professionnels offerts au public.

M. NORMANDIN: Dans le sens de la profession libérale, par opposition avec la profession salariale.

M. VEZINA: Est-ce qu'on va baser les distinctions sur le fait qu'un comptable, au sens générique du terme, est à honoraires et un autre est à salaire? Est-ce qu'on va distinguer les professions à partir des moyens de rémunération ou bien si on va les distinguer à partir de la nature des actes professionnels posés?

M. NORMANDIN: Je pense que ça va plus loin que la rémunération. Je pense que c'est dans la nature des choses que quelqu'un, qui est à son compte, qui pose un acte professionnel, est entraîné dans une responsabilité envers le public en général, tandis que celui qui travaille à salaire pour un patron a une responsabilité envers son patron.

M. VEZINA: Prenez au Barreau, il y a des avocats qui oeuvrent pour des employeurs, disons la fonction publique, ou des entreprises et il y en a d'autres qui oeuvrent à leur compte dans des cabinets privés. Il demeure que, globalement, ils sont tous membres du Barreau, ils ont tous le même code d'éthique, ils ont tous les mêmes obligations et les mêmes droits.

Enfin, il y a un équilibre qui se fait entre celui qui a un employeur donné et celui qui a son cabinet privé. Ce n'est pas par le fait d'être à salaire ou à honoraires qu'on fait deux classes d'avocats ou des particularités qui me semblent un peu paternalistes.

M. NORMANDIN: Voilà, où la comparaison ne peut plus se poursuivre avec les comptables agréés et tous les autres, c'est que je pense que le domaine privé de la comptabilité n'est pas fermé. Ce n'est pas un domaine exclusif, parce que nous trouvons à ces postes des personnes

qui n'ont aucun titre professionnel, qui ne sont membres d'aucune association mais qui ont tout de même la compétence. Ce n'est pas un champ réservé aux comptables agréés ou autres. C'est de là que vient la difficulté, tandis que, dans le cas d'un avocat, il faut être avocat par exemple, pour être dans le service juridique de la ville de Montréal ou — je ne sais pas — de Bell Canada,

M. VEZINA: Oui, mais par contre, est-ce qu'on ne peut pas dire que pour avoir le titre de CA ou de CGA ou les autres, — il y en a sept ou huit sur la liste — il faut qu'ils soient tous membres d'associations, il faut qu'ils répondent tous, je présume, à certaines normes. Si on trouve des associations qui, à toutes fins pratiques, ont la même formation, ont les mêmes capacités intellectuelles dans leur domaine, du point de vue du public, pourquoi y aurait-il des distinctions? Le gars de la rue, confond un CA, un CGA. Moi le premier, je ne vous le cache pas, j'ai toujours mis ça un peu ensemble. Parce qu'on a des comptables et on voit les titres, untel, CA, CGA, l'autre est seulement CGA, l'autre seulement CA, ils sont tous ensemble.

M. NORMANDIN: Permettez-moi de relever ce que vous avez dit, ils n'ont pas la même formation.

M. CARON: Autrement, pourquoi un avocat ne pratiquerait-il pas comme comptable agréé?

M. NORMANDIN: S'il a la compétence pour le faire.

M. CARON: Mais justement, si, pour avoir la compétence pour cela, il faut qu'il aille faire un stage dans un bureau et acquérir l'expérience pratique, c'est là-dessus qu'on insiste. Pour pratiquer publiquement, il est obligé d'aller assumer des responsabilités, on est sujet à amende pour ça. Quand on pose un geste professionnel, on ne travaille pas seulement pour un patron qui nous donne un salaire, on travaille pour des honoraires. Nous sommes sujets à être ruinés complètement, nous sommes illimités dans notre responsabilité.

Nous avons un rôle très différent de celui qui travaille pour un patron, qui reçoit un salaire toutes les semaines. A cause de ça, nous sommes obligés de nous protéger au point de vue professionnel avec des codes, avec un indépendance professionnelle complète pour que notre jugement ne soit pas mis en doute.

C'est pour ça qu'un avocat ne peut pas pratiquer la comptabilité comme nous ne pouvons pas pratiquer le droit. Nous ne sommes pas préparés pour ça. Ce n'est pas une question de "IQ". Ce n'est pas une question d'années d'études, c'est une question de préparation. Je pense que c'est la même distinction qui peut se faire entre quelqu'un qui fait de la comptabilité privée et quelqu'un qui fait de la comptabilité publique. C'est la même analogie. Ce n'est pas une question d'intelligence et de "IQ". C'est tout simplement une question de préparation.

M. VEZINA: Si j'ai bien saisi vos propros, je ne sais pas si c'est vous ou un de vos collègues, vous nous avez dit qu'une partie très importante de vos effectifs était à l'emploi d'un employeur donné, soit la fonction publique ou une entreprise. Vous avez un autre pourcentage qui a des cabinets privés. Ils sont tous des CA. Ils sont tous sujets au même code d'éthique, aux mêmes règlements, aux mêmes préparations scolaires. A l'intérieur de votre organisme, vous ne faites pas de distinction entre celui qui a un employeur donné et celui qui offre ses services au public. Du point de vue du public, placez-vous de l'autre côté de la clôture; supposons que l'individu, quelles que soient les lettres au bout de son nom, puisse donner un service équivalent dans le monde de la comptabilité: pourquoi la législation, dans le but de protéger le public et non pas de défendre des privilèges, ne mettrait pas ces gens-là exactement dans la même texture légale, si vous me permettez l'expression? Pourquoi?

M. CARON: Vous avez la réponse. Si les gens veulent rendre les mêmes services, avoir les mêmes droits que vous croyez être des droits acquis, on dit qu'il y a un chemin à suivre et pour le chemin que vous allez suivre vous allez obtenir un diplôme universitaire, vous allez faire un stage dans un bureau de comptables publics où vous allez apprendre les règles du métier, où vous allez apprendre comment procéder et vous allez assumer pleine responsabilité pour les actes que vous poserez. Si vous pouvez faire tout ça, nous allons vous permettre de pratiquer la comptabilité publique, il n'y a pas de doute. Nous avons établi des barèmes parce que nous savons par expérience que cela est requis, que nous sommes sujets à des poursuites et que nous sommes sujets à contestation. D faut que nous soyons dégagés de tout doute quant à notre indépendance et quant à notre compétence. Nous sommes obligés de suivre un entraînement spécial. C'est comme si je voulais devenir dentiste demain, je ne pourrais pas le faire parce que je n'ai pas été préparé à ça. Je pense bien que ce n'est pas une question d'intelligence. C'est tout simplement parce que je n'ai pas suivi le chemin pour le devenir. Le chemin est ouvert à tout le monde parce que les gens peuvent toujours entrer chez nous. Tout ce qu'ils ont à faire c'est de respecter les conditions d'admission. Ces conditions-là ont été édictées depuis 1946. Les gens qui ont voulu le faire l'ont fait; la preuve c'est qu'il y en a beaucoup qui le font.

M. VEZINA: Je regrette. Ce n'est pas ce qu'ils ont fait en 1946. Ils ont dit, pour régler un problème: Tout ceux qui sont CGA, vous aurez le droit de vous incorporer à l'Institut des

comptables agréés. Ils n'ont pas dit: Vous passerez un examen, vous ferez un stage, vous ferez ci, vous ferez ça. C'était pour régler un problème qui existait en 1946.

M. CARON: C'est ça.

M. VEZINA: Je ne vous cache pas que...

M. CARON: Mais il y avait les droits acquis, personne n'avait été averti, on ne savait jamais qu'on fermerait la profession. Mais on l'a fermée à ce moment-là. Le gouvernement ne pouvait pas départir les gens de leur droit de gagner leur vie. Ces gens-là avaient oeuvré dans la comptabilité et avaient gagné leur vie comme tels. Le gouvernement ne peut pas les déposséder. Mais aujourd'hui, c'est différent; en 1946, vous avez dit: Messieurs, c'est fini, ça; acceptez ces gens-là, donnez-leur le droit de pratique; vous n'avez pas le droit de les déposséder. Mais, 26 ans après, vous rouvrez le débat et vous dites: Faites donc encore la même chose. Allez-vous refaire encore la même chose en 1995?

M. VEZINA: Vingt-six ans après, on veut adopter, à un problème donné, une solution style 1972. En 1946, j'avais sept ans, je ne suis pas intéressé à savoir ce que le législateur faisait, pour vous dire honnêtement. Mais je vis en 1972, et je voudrais que le problème des corporations professionnelles, que ce soit comptabilité ou autres, se règle dans le style et le mode de vie de 1972. Enfin, c'est mon humble opinion.

Ma question est la suivante: Si on arrivait à la conclusion — je dis bien si, remarquez — que pour le public, des services rendus, que ce soit par un CGA, un CA ou tous les autres, sont égaux au niveau de la compétence, au niveau de la sécurisation du public, pourquoi, à l'intérieur d'un texte légal, ne retrouverait-on pas des normes générales qui incorporeraient tout ce monde-là?

M. CARON: Si ce que vous dites est vrai, la réponse serait oui. Moi, je prétends que vous ne pouvez pas dire que c'est vrai. Cela ne peut pas être si, parce que le si n'existe pas, ce sont deux éléments complètement différents, deux types qui ont été préparés de manière différente. N'oubliez pas que les gens qui font des stages dans nos bureaux ont fait de nombreux sacrifices pour cela; ils ne les font pas sans savoir qu'il va y avoir une récompense éventuelle qui est de pratiquer une profession. Ils sont des stagiaires et savez-vous ce que ça veut dire, un stagiaire? C'est gagner un très petit salaire pendant que d'autres personnes, peut-être, gagnent de plus gros salaires et font des études le soir. Ce n'est pas la même chose. Le gars est un universitaire et il se présente dans un bureau et accepte de descendre et de servir et d'apprendre pendant un an, deux ans ou trois ans et après ça, de se présenter à un examen et, peut-être, d'être admis. On ne peut pas demander à celui qui n'a pas fait les mêmes sacrifices, les mêmes efforts d'arriver aux mêmes fins.

M. VEZINA: Ce n'est pas une question de chercher un privilège. C'est une question d'assurer des services...

M. CARON: Que le public reçoive des services de qualité égale, correspondante, d'un niveau suffisant et qu'il soit satisfait complètement pour les services qu'il reçoit. Et c'est pour ça qu'on établit nos minimums. Ce ne sont pas des objectifs.

M. VEZINA: Je vais vous dire quelque chose. Dans ma profession d'avocat, on en rencontre des CA qui jouent à l'avocat. Vous savez, il ne faut pas se scandaliser de tout ça. C'est un peu normal, ce sont des professions un peu collatérales.

Je ne vois pas pourquoi, je le dis bien honnêtement, pourquoi il y a une division, il y a un mur de Berlin autour d'une profession qui, dans le fond, fait partie de tout le monde de la comptabilité, dont le public a besoin. C'est ça qu'il ne faut pas oublier. Ce n'est pas "dont l'institut a besoin", c'est "dont le public a besoin".

M. CARON: Mais le mur de Berlin, je ne vois pas où il existe. Il n'existe pas, selon moi.

M. VEZINA: Ecoutez, je vais vous dire. Quand je lis, par exemple, que l'intégrité etc., ce sont les CA, je regrette, des denturologues l'ont, les avocats l'ont, etc. Il faut une espèce de collégialité, parce qu'il ne faut pas avancer que, pour la protection du public, il faut assurer des privilèges à un groupe. Il faut exactement le contraire. Si on accorde des privilèges, c'est pour la protection du public.

M. CARON: Il ne faut pas nous reprocher de demander à nos membres d'être intègres.

M. VEZINA: Non, mais je peux vous reprocher de l'affirmer carrément.

M, CARON: Bien écoutez, on le dit assez à nos membres pour les inciter à agir honnêtement et intègrement. On croit qu'on sert mieux le public en prêchant cela. Ce n'est peut-être pas nécessaire dans le mémoire, mais comme entraînement, on dit à notre personnel: Vous serez jugés par vos actes. On ne sait jamais qui va nous juger. Alors agissez suivant les normes, agissez intègrement. Nécessairement on ne réussit pas à 100 p.c, parce qu'il ne faut pas s'en faire, il n'y a pas de profession sacrée. Il y a des problèmes partout et je pense bien qu'il y en a dans le droit et du côté de la comptabilité aussi.

M. VEZINA: Mais il y a une autre question; ce matin j'ai posé une question aux CGA.

D'après ce que j'ai compris de leur mémoire, de leur exposé, d'après ce que j'ai compris de votre mémoire et de vos exposés, c'est qu'un CGA pourrait disons, faire la vérification de la ville de Québec et que, par contre, la plus petite "binerie" incorporée en vertu de la première partie du rôle des compagnies, ne pourrait pas signer sa vérification. Est-ce que je me trompe lorsque j'affirme cela?

M. CARON: Non, non, c'est un droit acquis et c'est un droit qui a été donné.

M. VEZINA: Vous ne trouvez pas cela un peu loufoque comme situation, vous ne trouvez pas ça un peu style 1946 justement?

M. CARON: Je vais vous dire une chose, c'est que la comptabilité municipale, c'est une spécialité et la vérification commerciale ou industrielle, c'en est une autre. Les gens ne sont pas universels; eux ont eu le droit de le faire et ont continué de le faire et je ne porte pas de jugement sur la qualité du travail qu'ils font. Mais vous ne pouvez pas conclure aussi rapidement que vous le faites que vous allez passer d'un domaine à l'autre et que vous allez être aussi compétent. C'est impossible, parce que normalement on se groupe pour être capables d'obtenir cette compétence-là. Ce sont des spécialités.

UNE VOIX: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose, M. le député?

M. DESROCHERS: Je pense que la question que vous soulevez, M. le député, est fort à propos et je pense que c'est un élément qui peut engendrer de la confusion dans le public. Et quitte à passer pour un renégat — parce qu'il semblerait qu'à cette table on ait établi de façon péremptoire qu'il n'y a pas de confusion dans le public — moi je vais vous dire qu'il y a de la confusion et je vais vous dire pourquoi il y a de la confusion.

Il y a de la confusion parce que, dans la Loi des comptables agréés, le chapitre 266 des statuts de 1964 et dans la loi constitutive de l'association des CGA, on pose comme principe — je vous réfère à l'article 11 et à l'article 25 de la loi des CA — que la pratique de la comptabilité publique est réservée aux comptables agréés. C'est un principe et j'espère que vous allez en convenir. Si le principe s'appliquait sans exception, il n'y aurait pas de confusion. La confusion vient du fait qu'il y a des exceptions et, l'une des exceptions, c'est précisément que les personnes qui ne sont pas comptables agréés, qui n'ont pas l'exclusivité de la pratique de la comptabilité publique, peuvent néammoins faire de la vérification municipale, peuvent néammoins vérifier des entreprises coopératives, des caisses populaires et tout cela, peuvent exercer au sein de la fonction publique. Cela sera certainement un élément de confusion dans le public.

Un deuxième élément de confusion dans le public, c'est qu'il y a des personnes à l'heure actuelle, comme nos APA de ce matin, que nous aimons beaucoup — ils nous l'ont dit et c'est vrai que nous les aimons beaucoup ces gens-là — qui peuvent exercer de la comptabilité publique mais ce ne sont pas des comptables agréés. Le public ne s'y retrouve pas dans la façon de clarifier la situation. L'un des éléments, la vérification municipale et la vérification des associations coopératives, comme nous le disons dans notre mémoire, nous estimons que c'est un anachronisme. Cette exception-là était peut-être fondée en 1946 mais nous sommes en 1972, aujourd'hui. Comme vous l'avez dit vous-même, ce n'est plus fondé. Mettons fin à cette exception.

Le deuxième régime d'exception, c'est celui des APA et celui des comptables publics enregistrés qui oeuvrent en vertu d'un permis. Cela est en vertu de préservation de droits acquis et, des droits acquis, on ne touche pas à cela. C'est un élément de confusion que, malheureusement, nous devons conserver jusqu'à ce que ces gens s'éteignent d'eux-mêmes. Alors, la solution que nous proposons, c'est que les exceptions auxquelles on peut apporter un remède, qu'on les enlève, qu'on apporte le remède. Et celles qui s'éteindront d'elles-mêmes, on les laissera s'éteindre d'elles-mêmes. C'est la solution que nous proposons et je pense que c'est une solution de 1972 à un problème de 1972 qui n'était pas prévu en 1946.

M. VEZINA: Mais quand vous dites que vous ne touchez pas aux droits acquis, n'avez-vous pas l'impression, à la lecture de votre mémoire ou de son résumé — parce que c'est le résumé que j'ai lu — que vous touchez aux droits acquis des CGA?

M. CARON: En aucune façon. M. VEZINA: En aucune façon? M. REEKIE: Pas du tout.

M. DESROCHERS: Nous ne leur retirons rien de ce qu'ils ont le droit de faire en ce moment.

M. POULIOT: Ce qui est demandé par eux, c'est d'envahir la charte qui était réservée jusqu'ici aux comptables agréés sans se soumettre aux exigences auxquelles les comptables agréés se sont soumis. C'est aussi simple que cela. Est-ce que je peux vous demander, M. le député, si vous seriez favorable à ce que le Barreau ouvre ses portes, sans restriction, à tous les notaires demain matin?

M. VEZINA: Non.

M. POULIOT: Est-ce que vous ne répondez pas à vos propres questions?

M. VEZINA : Je pense, à tort ou à raison, M. Pouliot...

M. POULIOT: Nous suivons le même cours de droit mais, à un certain moment, nous faisons une option, ou pour la pratique du droit ou pour la pratique du notariat et c'est exactement le même cours. C'est la formation subséquente qui est différente parce que l'un se dirige vers une vocation et l'autre vers une autre vocation. Et je pense que les notaires auraient bien mauvaise grâce de dire: Nous voulons, du jour au lendemain, être avocats sans nous soumettre au cours du Barreau, aux exigences de stage du Barreau dans un bureau d'avocats aussi bien qu'aux examens du Barreau.

M. VEZINA: M. Pouliot, je vous dirai ceci: Ne préjugez pas des conclusions auxquelles je peux arriver. Si je me fais un peu l'avocat du diable, c'est pour faire ressortir la lumière, c'est tout. Parce qu'en vertu de nos règles de pratique, on ne peut que poser des questions.

M. LE PRESIDENT: Jusqu'à ce que l'on ait eu le règlement.

M. VEZINA: Je vous avouerai honnêtement que ce que je recherche, si vous voulez avoir le fond de ma pensée, c'est un moyen pour le bien du public de voir l'intégration rationnelle normale de toutes les personnes au Québec dont le moyen de gagner leur vie est d'offrir des services comptables au public. Je me fous comme l'an 40 des conditions de chacun. Ce que je me dis, c'est que, si on mettait plus d'intégration dans tout cela, ce serait beaucoup plus facile, je pense d'assurer la protection du public parce que vous n'êtes pas sans savoir que c'est un domaine qui prend une importance vitale tous les jours. On ne peut pas emprunter $200 à une caisse populaire sans qu'on ne nous demande des bilans. Alors on sait fort bien que, enfin je ne veux pas m'étendre là-dessus, je serais peut-être méchant, mais bilan pour l'impôt, bilan pour l'emprunt, bilan pour ceci et bilan pour cela, il va falloir arriver à un bilan à un moment donné. C'est le seul but que je recherche. L'amitié que j'ai pour vos clients vous savez, n'a d'égal que celle que je porte pour les autres corporations. Mais je pense, personnellement qu'il y a une défense de privilège qui sied mal avec l'esprit général du code des professions, je ne vous le cache pas. Je me demande pourquoi finalement. Est-ce parce qu'on veut fermer la profession à un point tel que ce sera un petit monopole? Cela me fatigue ces questions-là. Je ne vous dis pas que j'ai les réponses.

M. POULIOT: Tout ce qui est dit, c'est qu'une option différente est faite à un moment donné par un étudiant qui suit ensuite un cours de formation pratique différent et qui subit des examens différents en vue d'un rôle différent comme, encore une fois, au Barreau, à l'univer- sité, à la faculté de droit, les étudiants se séparent en deux orientations différentes. C'est ce qui se passe et la profession des CA est ouverte à tous ceux qui veulent choisir cette orientation.

M. LAVOIE (Wolfe): Mais c'est au Québec ça aussi. M. Pouliot. En Ontario les avocats et les notaires n'existent pas ce sont seulement des avocats. Cela fait pareil.

M. POULIOT: C'est exact, mais je ne suis pas en mesure, M. le député, de vous dire comment en Ontario se fait la formation des avocats et des notaires. Ce que je sais c'est qu'ici...

M. LAVOIE (Wolfe): Un avocat n'a pas le droit.

M. POULIOT: ... elle comporte deux options et deux formations différentes à partir de l'université.

M. LE PRESIDENT: Pour contredire le député de Wolfe, c'est facile pour un avocat d'être notaire, mais c'est difficile pour un notaire d'être avocat.

M. VEZINA: Me Pouliot, pour la recommandation que vous faites concernant l'article 35, sous-paragraphe b), c'est possible que je comprenne mal la portée de l'amendement que vous suggérez, soit d'enlever les mots "offrir au public et", dans le sous-paragraphe b); est-ce que je dois comprendre que, pour être comptable général licencié, on devrait se limiter à rendre des services de tenue de livres et de comptabilité industrielle ou commerciale?

M. POULIOT: La tenue de livres a toujours été spécifiquement excluse de la comptabilité publique, alors il n'en est pas question, il n'y a pas de problèmes à ce sujet-là. C'est dire que, quant à la comptabilité industrielle et commerciale, nous nous opposerons à ce que les mots "offrir au public" y soient pour les raisons expliquées depuis le début, à savoir que ce genre de comptabilité, s'il est exercé à l'intérieur d'une entreprise, il s'adresse à un employeur au lieu de s'adresser de façon autonome au public et c'est le fond de toute l'attitude des comptables. Leur formation est dirigée vers le service du public et quiconque étudie la comptabilité peut choisir cette orientation. S'il a choisi l'autre, nous nous demandons pourquoi il vient demander à la Législature du jour au lendemain de s'introduire dans la première, comme on pourrait se demander pourquoi un notaire qui a choisi d'être notaire viendrait demander ici que toute la profession du jour au lendemain soit introduite chez les avocats, puisqu'il avait le choix d'être avocat.

Il a choisi d'être notaire. Encore une fois, il avait le choix d'être notaire, il a choisi d'être

avocat. Cela ne parait pas raisonnable ayant fait un choix en toute connaissance de cause, de venir demander à la Législature d'envahir le champ d'action de l'autre corporation.

M. VEZINA: Mais si le public était aussi bien protégé, indépendamment des privilèges de chacun?

M. POULIOT: C'est un "si", comme M. Caron l'indiquait tout à l'heure, qui parait ne pas exister.

M. VEZINA: C'est parce qu'en pratique, je vais vous dire, il ne faut pas rêver en couleur. On voit un paquet de bilans, de ci et ça, signés par des CGA. Que ce soit légal ou non, admettons que je ne me préoccupe pas de ce problème-là. Je me dis ceci: Si vous protégez le public, mieux vaut procéder à une intégration, quitte, quitte remarquez, à faire des distinctions à l'intérieur de l'intégration. Je me demande pourquoi on refuserait à la population en général ce privilège d'avoir une législation qui clarifie une situation. Autrement, vous arrivez dans un cul-de-sac. Cela va être une bataille entre des corporations sur le dos du public.

M. POULIOT: Ce n'est pas ce qui s'est passé, que je sache.

M. VEZINA: Je ne veux pas référer à une cause en particulier mais je viens de regarder un jugement de l'Institut des comptables versus Untel, dont je tairai évidemment le nom.

M. LE PRESIDENT: Je voudrais soumettre à l'attention du député de Montmorency que cette question a pas mal été vidée et je voudrais donner une chance au dernier groupe d'avoir son mot à dire, car je ne veux pas le forcer à revenir un autre jour.

M. VEZINA: Vous avez attiré mon attention.

M. LE PRESIDENT: Si vous avez une question...

M. VEZINA: Alors, j'ai une dernière question. Je reviens sur l'office, le code des professions. Est-ce que l'institut a pris connaissance du mémoire du Comité interprofessionnel du Québec?

M. NORMANDIN: Oui.

M. VEZINA: Est-ce que je me trompe en affirmant que, concernant l'office, le bureau, la nomination de syndics, la rémunération des syndics, etc., vous épousez, grosso modo, peut-être pas dans les menus détails, la position prise par le comité interprofessionnel?

M. NORMANDIN: Oui.

M. DESROCHERS: Le mot, c'est grosso modo.

M. VEZINA: Oui, il y avait de menus détails mais...

M. DESROCHERS: Tout à fait.

M. VEZINA: ... la division des pouvoirs entre l'office et le lieutenant-gouverneur en conseil, la nomination des syndics, le paiement, la rémunération?

M. DESROCHERS: Non, pas le syndic.

M. VEZINA: Vous autres, vous voulez enlever les syndics?

M. NORMANDIN: Parce qu'on croit qu'il y a double emploi.

M. VEZINA: Le comité de discipline, les syndics, cela vous paraît double emploi.

M. NORMANDIN: Non, le comité d'inspection et les syndics.

M. VEZINA: Le comité d'inspection vous parait faire double emploi. Alors, vous n'épousez pas la position du comité interprofessionnel sur ce point.

M. NORMANDIN: II y a une autre exception aussi, il s'agit de l'intervention du conseil interprofessionnel dans toutes les questions qui pourraient intéresser une profession donnée.

M. VEZINA: Vous dites ici dans votre lettre du 10 février que vous n'épousez pas le droit pour le conseil interprofessionnel d'intervenir dans tout débat judiciaire intéressant l'exercice des professions. Est-ce que je peux savoir pourquoi? Parce qu'eux ont défendu le premier côté de la médaille, l'avantage qu'il y aurait là, ce serait peut-être un autre côté de la médaille si on savait pourquoi.

M. NORMANDIN: C'est parce qu'une corporation donnée pourrait se trouver dans la situation où elle serait en opposition directe avec le conseil interprofessionnel; or, c'est le conseil interprofessionnel qui serait le porte-parole dans ce cas-là.

M. VEZINA: Alors, vous avez peur qu'il y ait un conflit d'intérêts. Par contre, si vous regardez le comité, vous verrez que c'est non seulement pour protéger les droits du public mais aussi pour protéger le droit des membres de la corporation ou de la profession donnée.

M. NORMANDIN: Oui, mais on pense qu'une corporation donnée peut très bien défendre ses droits parce qu'elle est en meilleure connaissance de cause.

M. VEZINA: Considérez-vous votre corporation comme étant appelée à défendre l'intérêt de ses membres ou l'intérêt du public?

M. NORMANDIN: C'est toujours en fonction de l'intérêt du public que je m'exprime.

M. VEZINA: Est-ce qu'il y a une association professionnelle de CA en vertu de la Loi des syndicats professionnels?

M. NORMANDIN: Pas dans le moment.

M. VEZINA: Pas dans le moment. Vous savez que, chez les médecins, il y a le Collège des médecins; il y a les associations qui, elles parlent strictement en vertu de l'intérêt de leurs membres. Parce que le Collège des médecins a comme but de défendre, lui, l'intérêt du public en matière médicale.

M. NORMANDIN: Historiquement, cela n'a jamais existé chez nous.

M. VEZINA: Est-ce que vous songez à délaisser l'intérêt de vos membres pour prendre l'intérêt du public?

M. NORMANDIN: Ce problème a été exposé très clairement dans le rapport de la commission Castonguay-Nepveu sur les professions de la société et je pense que le principe est reconnu comme très valable chez nous, sauf que, historiquement, il n'y a rien eu de fait encore. C'est tout ce que je peux dire.

M. VEZINA: M. le Président, je vous remercie beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Le député de L'Assomption.

M. PERREAULT: M. le Président, il a été établi que l'institut groupe des CA qui oeuvrent dans le domaine public et dans le domaine privé. Maintenant, on a parlé de droits acquis; j'aimerais savoir si les droits acquis dont vous parlez, que vous voulez conserver, c'est autant pour les membres, les CA, que pour l'institut.

M. NORMANDIN: S'il s'agit des droits acquis d'autres personnes.

M. PERREAULT: Vos droits acquis à vous. Quand vous parlez de droits acquis, est-ce que ce sont vos membres ou l'institut?

M. NORMANDIN: Nous n'avons jamais parlé de nos droits acquis et nous avons toujours mentionné les droits acquis d'autres personnes qui n'étaient pas comptables agréés comme les APA et les comptables publics enregistrés qui avaient le droit de pratique avant 1946, dont les droits acquis ont été préservés en 1946 et qui vont l'être de nouveau, je présume, avec cette nouvelle législation.

M. PERREAULT: J'écoute cela depuis le matin et, un peu comme mon confrère de Montmorency, je ne vois pas comment l'institut qui a été fondé en 1880 —j'aimerais vous poser la question — ne pourrait pas se pencher pour étudier ou regrouper une loi-cadre de tous les services de la comptabilité, tout en couvrant le domaine public et le domaine privé, comme la corporation des ingénieurs, les ingénieurs-conseils, les ingénieurs salariés. Vous l'avez là-dedans.

M. NORMANDIN: Je pense que j'ai dit au moins à trois reprises cet après-midi que l'institut des comptables agréés était très ouvert à cette question, était prêt à étudier la question. Je mets cependant les membres de la commission en garde, afin qu'ils ne soient pas séduits par la facilité apparente de cette solution d'intégration, parce qu'elle comporte des problèmes graves qui ne peuvent pas se résoudre aussi rapidement qu'on pourrait le croire.

M. PERREAULT: Je veux bien le croire, mais si on ne s'attarde pas un moment donné... Vous avez parlé de passerelle dans votre discussion, dans votre présentation, le président ou vous.

M. NORMANDIN: C'est moi qui en ai parlé.

M. PERREAULT: ... mais les passerelles, il faut qu'elles s'établissent. Si elles ne s'établissent pas...

M. NORMANDIN: La tentative a été faite par nous et n'a pas été continuée par l'autre partie.

M. PERREAULT: Une dernière question. Ce matin les membres de l'APA nous ont dit que depuis 1969 ils étaient en négociation avec vous, l'institut, et que ça n'aboutissait pas. Est-ce qu'on pourrait savoir pourquoi ça n'aboutit pas?

Les APA, ce matin, nous ont dit qu'ils étaient en négociation avec vous autres depuis 1969.

M. NORMANDIN: Dans le cas des APA, il s'agit de personnes dont les droits acquis ont été protégés. Comme telle, ce n'est pas une association professionnelle. C'est pour ça qu'il y a eu beaucoup de confusion ce matin sur leur cas. Il s'agit d'un groupe qui n'a pas eu le droit de recrutement après la loi de 1946. Ce groupe-là va s'éteindre forcément avec ses membres.

M. CARON: Si vous voulez protéger le public, parce que ça semble être le désir de la commission, je pense que les gens qui ont droit de pratique de la comptabilité publique dans la province de Québec devraient tomber sous le code de discipline de l'Institut des comptables agréés. Peut-être qu'à ce moment-là on ferait

quelque chose pour aider le public, parce que, somme toute, il y a déjà 2,500 personnes qui sont soumises à un code de discipline. Pourquoi y en aurait-il 70 ou 72 qui se policent seuls?

M. PERREAULT: Pourquoi les comptables dans le domaine privé ne tomberaient-ils pas sous un code d'éthique aussi?

M. CARON: Certainement.

M. LE PRESIDENT: Je donne la parole au député de Duplessis qui a passé ce fameux bill de 1946.

M. COITEUX: Une correction immédiate: pas le député de Duplessis, mais le député du comté de Duplessis. Il y a une maudite différence!

J'ai une question très simple. J'ai écouté depuis ce matin les différentes représentations et il y a une remarque faite par Me Pouliot qui m'a plu énormément, lorsqu'il a fait une comparaison en demandant au député de Montmorency s'il accepterait que les notaires, d'emblée, deviennent avocats et vice versa. Cette comparaison m'a plu.

Maintenant, ma question est de savoir à quel endroit, lorsqu'on dit notaire et avocat. On sait qu'à un certain moment du cours universitaire, on prend une option, comme on le fait d'ailleurs au génie forestier, nous. Après un an d'études — les études préliminaires sont les mêmes — quelqu'un peut opter pour l'arpentage ou opter pour le génie forestier, ou prendre les deux. Mais quand il prend les deux, il est reçu ingénieur forestier mais il lui faut, comme vous le mentionniez tantôt, subir un autre examen de la corporation. Car son diplôme universitaire ne lui donne pas automatiquement droit à la pratique. A quel moment, dans les études que suivent les CGA et les CA, y a-t-il bifurcation dans les programmes d'études?

M. CARON: Vous avez raison parce que plus on avance, plus s'éloigne ce point de jonction-là, parce que la plus grande majorité de leurs membres passent par des cours du soir qui sont donnés à Laval, à l'Ecole des hautes études; alors que nous, nos gens doivent être détenteurs d'un diplôme universitaire et de plus en plus, ou presque exclusivement, aujourd'hui, à 100 p.c. ils viennent des universités par les cours du jour.

Vous voyez, où se fait le problème de lien entre les deux, c'est peut-être par le truchement de crédits, comme on a mentionné, mais ce n'est pas autrement parce que ce n'est plus exactement le même cours, ce sont des cours qui sont assez différents. Cela, c'est depuis le 1er janvier 1970.

M. COITEUX: Alors le cours...

M. CARON: L'équivalence que vous avez dans le mémoire, c'est l'équivalence qui existait avant le 1er janvier 1970. Ce n'est plus l'équiva- lence qui existe aujourd'hui. Aujourd'hui, ce sont deux approches complètement différentes sur les mêmes matières. Vous êtes obligés de tâcher de faire des équivalences entre des gens qui suivent des cours du soir et des gens qui suivent des cours du jour.

M. LAVOIE (Wolfe): Les gens derrière vous nous font signe de la tête que c'est non; alors, je ne sais pas...

M. CARON: Ecoutez, chacun son opinion. Nous sommes libres. Je viens ici pour exprimer la mienne et puis, si je me trompe, je le fais involontairement.

M. COITEUX: Pour me former une opinion finale là-dessus, vous êtes en mesure de dire, ce que vous venez d'affirmer d'ailleurs, que les matières enseignées aux cours du soir ne préparent pas aussi adéquatement l'étudiant vers une profession de comptable que les matières enseignées aux cours du jour à l'université.

M. CARON: Cela a été le jugement de l'ensemble de la profession comptable au Canada, d'établir depuis juin 1970 que l'exigence était un diplôme universitaire de cours complets et puis c'a été la décision qui a été prise après six ans d'études. Alors, elle a été prise et elle est en vigueur depuis le 1er janvier 1970.

M. COITEUX: Mais ce que je veux vous entendre dire est ceci: Est-ce que le gars qui suit des études du soir, dans votre optique, suit un cours de comptabilité adéquat, comparativement au gars qui en suit de jour?

M. CARON: Plus maintenant, d'après nos standards à nous parce que nous avons opté pour autre chose.

M. COITEUX: Cela me satisfait. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Lorsque les étudiants ont suivi tout le cheminement que vous avez expliqué au point de vue des études, soit les études universitaires, stages, examens et les stages au niveau des bureaux de comptables, vous calculez évidemment que cet étudiant a droit à un diplôme et a un droit de pratique comme CA. Est-ce que vous calculez que ce diplôme est une récompense ou un droit? Il me semble que je vous ai entendu parler de récompense tout à l'heure.

M. CARON: J'ai parlé des sacrifices qu'un stagiaire s'imposait.

M. SAINT-GERMAIN: Lorsque le cheminement est complet et que le stagiaire a passé son examen final, est-ce que vous calculez que le diplôme que vous lui remettez est une récompense ou un droit?

M. DESROCHERS: Cela me semble une question assez ambiguë. Il me semble que ce n'est sûrement pas une récompense, c'est peut-être un droit. Essentiellement, c'est un brevet de compétence et c'est surtout un engagement envers la société.

M. NORMANDIN: Je pense que c'est un droit de pratique et, d'une façon familière, je pense que, par comparaison on le dit, avec les efforts fournis, c'est une récompense, c'est un à-côté. Je ne pense pas qu'essentiellement ce soit une récompense; c'est une récompense pour des efforts fournis. Mais essentiellement, fondamentalement, c'est un droit de pratique.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous pensez maintenant que le cheminement que vous faites subir dans les études du futur CA, en fait, c'est le seul cheminement qui peut permettre à jeune homme d'atteindre une compétence comptable?

M. NORMANDIN: Comme comptable de la pratique publique.

M. SAINT-GERMAIN: Oui.

M. NORMANDIN: Oui, l'exercice public de la profession.

M. SAINT-GERMAIN: N'est-il pas possible qu'un jeune homme suive des cours du soir et devienne membre du CGA et qu'en travaillant et par son travail et par ses études personnelles se développe, parce qu'enfin, à être comptable, on apprend aussi bien par des études qu'à travailler. D'ailleurs, vous l'admettez vous-mêmes, puisque vous obligez les jeunes à faire des stages au niveau des bureaux des différents CA. Si ce jeune homme est ambitieux, il apprend d'une façon continue et par son travail et par ses études. Est-ce que vous admettez qu'il puisse atteindre les mêmes qualifications que celui qui a passé par le cheminement que vous avez expliqué et qui est le cheminement régulier pour en arriver à être CA?

M. NORMANDIN: Vous l'avez dit vous-même, ce n'est pas un cheminement régulier, donc, il n'y a aucune garantie que les normes y soient. Il se peut qu'une personne les atteigne. Il n'y a aucune garantie que le produit moyen contienne toutes les normes qu'on veuille bien y mettre.

M. SAINT-GERMAIN : Est-ce une question de garantie ou si, en fait, le type peut être aussi compétent?

M. NORMANDIN: C'est purement une hypothèse. Je ne peux pas répondre à ça.

M. SAINT-GERMAIN: II faut tout de même se poser des questions. Vous avez des gens qui sont CGA ou tout simplement comptables, ce sont peut-être des APA, et qui ont sous leurs ordres et font travailler des CA. Il y a des employeurs qui, par le fait même, jugent qu'un membre d'une autre corporation que la vôtre a des talents et des capacités supérieurs puisqu'on lui donne des responsabilités qu'on ne donne pas à un CA et qu'on fait travailler le CA sous sa juridiction.

M. CARON: J'aimerais bien reprendre ce point-là parce que nous parlons de travailler sous direction, c'est bien différent d'exercer une profession publique. Ce n'est pas seulement quelqu'un qui travaille pour un employeur dont un est salarié ou que les deux sont salariés et que l'un est au-dessus de l'autre. C'est très différent de dire qu'on offre des services au public ou qu'on encourt des responsabilités personnelles. A ce moment-là, nécessairement, l'expérience que vous obtenez en travaillant varie; il y en a qui progressent plus que d'autres et il y en a nécessairement qui deviennent excellents et d'autres qui restent moyens.

M. SAINT-GERMAIN: Ce que je veux faire ressortir surtout, c'est que si vous faites les comparaisons avec le droit ou certainement avec la médecine, je crois que les comparaisons sont fausses. Si vous voulez devenir médecin, il est impensable que vous puissiez l'être par stage. Vous ne pouvez pas avoir un jeune qui va dire: Je ne suis pas trop compétent, je vais me limiter à soigner les rhumes ou je vais me limiter à soigner les maux de tête. C'est impossible. En comptabilité, vous pouvez le faire. Vous pouvez dire: Je vais commencer par tenir les livres, je vais prendre un cours du soir et après avoir fait une tenue de livres, peut-être que je pourrai m'aventurer dans les états financiers. En fait, c'est ce qui arrive. Petit à petit, comme les universités n'ont pas l'exclusivité du savoir et qu'elles n'ont pas l'exclusivité de l'enseignement de tout ce que les êtres humains apprennent. Il y a en effet énormément de choses qui s'apprennent au niveau de l'industrie ou qui s'apprennent à tous les niveaux dans la vie d'un homme. Il est possible qu'un type qui n'a pas suivi le cheminement que vous avez déterminé dans vos règlements puisse atteindre une compétence égale et même supérieure à la moyenne des compétences de vos CA. On pourrait invoquer la même argumentation pour les ingénieurs parce qu'il y a des techniciens qui sont plus efficaces que des ingénieurs. Est-ce qu'on ne pourrait pas dire que c'est là la cause profonde des discussions que nous avons eues aujourd'hui? Si vous arrivez à admettre que, par d'autres cheminements, un homme puisse atteindre la même compétence, — même si on voulait soutenir le contraire, cela arrive et cela se fait — si votre diplôme est un droit et non pas une récompense — et c'est là que ma question avait du sens — ne serait-il pas logique que cet homme qui a atteint la compétence ait

aussi le droit attaché â cette compétence, quel que soit le cheminement de ses études? Je crois que c'est là le fond du problème.

M. CARON: II en est de même de toutes les autres professions. Je pense bien que, si quelqu'un voulait étudier le droit par lui-même et y donner le temps et les efforts nécessaires, il pourrait devenir aussi compétent que la plupart des avocats.

M. SAINT-GERMAIN: Ne croyez-vous pas que, en comparant la médecine au droit, ou la médecine à la comptabilité, je vous ai donné une comparaison qui, par le champ d'activité même des deux professions, est absolument fausse?

Lorsque vous parlez de liberté de choix, entre le notaire et l'avocat, pour le jeune qui atteint une compétence, soit en devenant CA ou par un autre cheminement, ne croyez-vous pas que cette liberté de choix est presque, peut-être, inexistante dans les faits pour ce jeune homme? Il est bien possible qu'il ne puisse pas, par exemple, étudier le jour, qu'il ne puisse pas se payer le luxe d'un cours universitaire. Alors, cette liberté de choix, ne croyez-vous pas qu'elle n'est pas la même que la liberté de choix du type qui est en droit et qui dit: Je m'en vais comme notaire ou je m'en vais comme avocat?

M. CARON: Mais comme celui qui aimerait devenir avocat et qui n'aurait pas les moyens de suivre les cours en droit à l'université, ou la médecine, ou la chirurgie dentaire, ou l'optométrie.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: On parle de droits acquis par des chartes obtenues, soit du gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial, sur lesquelles évidemment chaque association a bâti un programme d'études pour donner la qualification nécessaire pour pratiquer la profession. Est-ce que vous n'avez pas, dans le monde comptable, un organisme d'accréditation nord-américain, par exemple, qui donnerait des jalons à chacune des associations un chemin qu'elles pourraient suivre selon leur compétence? Est-ce qu'il y a un organisme nord-américain d'accréditation? Cela existe en médecine, il y a un organisme d'accréditation nord-américain qui donne des directives, soit du côté des universités, soit du côté des corporations professionnelles pour qu'elles puissent s'acheminer vers une compétence et déterminer les champs d'action des corporations professionnelles. Est-ce que ça existe dans le monde comptable?

M. CARON: Je ne pense pas que ça existe dans le moment mais je pense qu'on a exprimé le voeu, par Horizon 2000, de tendre vers une évolution où on pourrait tabler sur les connaissances et la compétence de tous ceux qui ont un intérêt dans la science comptable, en créant, en commun, des centres de recherche pour faire avancer les techniques comptables et la science comptable. Ce n'était pas exclusif au groupe des comptables agréés, c'étaient tous ceux qui font de la comptabilité, qu'ils soient dans les universités ou dans d'autres associations. Ce dont vous parlez, l'accréditation, ça n'existe pas chez nous, à ma connaissance.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, vous avez parlé de la définition du mot "expert-comptable". Ne pensez-vous pas que si votre loi spécifique, au lieu de s'appeler la loi des comptables agréés, s'appelait la Loi des experts-comptables, cela faciliterait les étapes subséquentes de dialogue entre les différentes corporations?

M. NORMANDIN: M. le député, le terme "expert-comptable" décrit le travail que nous faisons. Le terme "comptable agréé" décrit le titre que nous possédons. C'est la distinction. L'expert-comptable est très bien décrit dans notre mémoire...

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est ce qui permettrait...

M. NORMANDIN: C'est la traduction, en fait, de l'anglicisme "comptable public". Vous regarderez dans le dictionnaire: un comptable public est quelqu'un qui s'occupe de comptabilité publique dans le sens du gouvernement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous comprenez pourquoi je pose la question, c'est qu'une loi spécifique pour les experts-comptables est beaucoup plus large...

M. NORMANDIN: Je pense qu'elle serait plus restreinte.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'accord, elle est beaucoup plus large que celle des comptables agréés, mais ce serait le cadre justement qui permettrait, à l'intérieur de cette loi, de définir ce qu'est un comptable agréé. C'est le sens que je voulais donner à ma question.

D'autre part, est-ce qu'il n'y a pas une évolution qui se fait chez les comptables agréés dans le sens suivant: j'ai déjà lu et des représentations ont été faites par des membres éminents de la profession, à savoir que le comptable agréé devait peut-être dans l'avenir donner moins d'importance à la préparation des états financiers et se diriger danvantage, en plus de faire de la préparation d'états financiers, vers l'interprétation et vers un mandat ou une responsabilité plus large.

Est-il possible que votre profession évolue vers ce champ-là, que ce soit à partir des

conclusions d'Horizon 2000 ou autrement, d'autres études qui ont été faites?

M. NORMANDIN: Non seulement c'est possible, mais c'est un fait de tous les jours. J'ai donné lecture cet après-midi de la description des travaux que nous sommes appelés à accomplir pour les clients et il y en a beaucoup... A part l'acte d'attestation — c'est évident — c'est une évolution qui se poursuit depuis plusieurs années et s'accentue, si je peux dire, mais ça ne contredit pas le fait que ces actes-là sont posés dans le contexte de l'expert-comptable indépendant, à son compte, qui rend des services au public et qui engage ainsi sa responsabilité.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous pouvez me dire, dans l'effectif actuel des comptables agréés, combien il y en a sur 5,000 qui ont une formation universitaire?

UNE VOIX: On va vous répondre: 55 p.c.

M. CLOUTIER (Montmagny): 55 p.c. actuellement. Est-ce qu'actuellement, depuis que le cours universitaire est commencé, depuis que vous avez cette exigence... Le premier janvier 1970, il y avait, j'imagine, des étudiants qui étaient engagés dans des cours du soir. Est-ce que ceux-là continuent leur cours pour devenir CA en prenant le cours du soir?

M. NORMANDIN: Ils sont maintenant rendus en troisième année.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ils ont continué. Mais maintenant vous n'en admettez plus de nouveau au cours du soir; ils doivent suivre le cours du jour, et prendre une formation universitaire.

M. NORMANDIN: Cela fait partie de l'évolution historique de notre profession. Il faut songer qu'au début les stagiaires prenaient leur enseignement de leur martre de stage qui était aussi leur employeur. Il ne dispensait aucun enseignement dans les universités. Petit à petit, les instituts provinciaux ont organisé des cours; ils occupaient les salles des universités, mais c'étaient des cours parauniversitaires. Ici il faut rappeler que la province de Québec est à l'avant-garde; ça fait plus de 20 ans que l'Institut des comptables agréés a eu des pourparlers et a conclu des arrangements avec les universités pour céder cette partie-là de la formation c'est-à-dire la formation scolaire aux universités qu'il croyait mieux qualifiées que lui-même pour dispenser des cours aux étudiants. C'est une évolution normale. On en est arrivé à un point où l'on exige maintenant le diplôme universitaire. Cela s'est fait par étapes.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, en 1975, normalement cinq ans de délai, tous les étudiants qui voudront devenir CA devront suivre un cours universitaire.

M. NORMANDIN: D'accord.

M. CLOUTIER (Montmagny): A ce moment-là — je pose la question, mais j'imagine que la réponse sera négative — il n'y a pas de danger que ceux qui, parmi vos membres, n'ont pas une formation universitaire deviennent des professionnels de seconde zone?

M. NORMANDIN: Non, non. D n'y a aucun danger. C'est une évolution normale, il ne s'agit pas d'enlever à quelqu'un ce qu'il a acquis et c'est pour se mettre au niveau. Ce problème-là est à l'échelle du continent américain.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je suis content, ma question suivante allait au niveau national ou au niveau nord-américain. Est-ce que vous diriez que la profession comptable est justement une de ces professions dont l'équivalence est extrêmement importante, justement à cause de la responsabilité précise que vous avez? Vous êtes vérificateurs pour des entreprises, des entreprises qui oeuvrent au niveau national; elles ont ici au Québec peut-être une maison mère et des filiales dans d'autres provinces ou dans d'autres pays et l'inverse aussi est possible, qu'ils aient leur maison mère ailleurs et des filiales ici. Alors je voudrais savoir si, à ce moment-là, le critère d'équivalence de formation entre les différentes provinces prend d'autant plus d'importance.

M. NORMANDIN: Non seulement c'est important, c'est fondamental. Comme vous le savez, aujourd'hui le commerce est national et international. Nous sommes au siècle des communications. Si, par exemple, il arrivait que dans la province de Québec, notre formation soit jugée inférieure à celle des instituts d'autres provinces ou d'autres Etats américains, nous perdrions ce privilège de réciprocité et, en conséquence, des comptables agréés de la province de Québec ne pourraient pas travailler à vérifier les livres, par exemple, faire des travaux comptables chez des maisons qui exploitent leur commerce dans la province de Québec. A ce moment-là, ces maisons internationales auraient recours à des gens d'autres provinces qu'ils feraient accréditer ici.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je vous poserai une question peut-être un peu délicate. Comment est considéré, à l'extérieur, le CA qui est formé dans le Québec? Quel est le jugement que l'on porte sur la formation du CA aux Etats-Unis ou dans les pays d'Europe? Parce que vous aurez aussi nécessairement, à un certain moment, à signer des documents qui pourront être interprétés jusque dans les pays européens.

M. NORMANDIN: A l'échelle du Canada, il faut dire qu'il n'y a pas de problème parce que nous avons un examen uniforme qui comporte en contrepartie, la réciprocité, c'est-à-dire que si

vous êtes membre, par exemple, de l'institut de la province de Québec vous devenez membre par affiliation de l'institut d'un autre province sur simple demande puisque vous avez subi le même examen. Donc, au niveau canadien, il n'y a pas ce genre de problème. En ce qui concerne les relations avec d'autres pays, j'ai dit cet après-midi que la profession canadienne de comptabilité qui était reconnue à l'échelle internationale, c'est l'Institut des comptables agréés. Ceci s'est propagé par les ententes qui existent entre les firmes nationales et internationales associées, par exemple, à des firmes canadiennes qui ont des associés aux Etats-Unis, qui ont des associés en Europe. Nous sommes certains que les normes canadiennes sont parmi les plus élevées au monde à la suite de congrès internationaux auxquels nous avons pu assister. Le point de vue canadien est toujours très apprécié.

M. CLOUTIER (Montmagny): Une autre question. Depuis que...

M. CARON: Tout à l'heure, j'ai voulu ajouter quelque chose parce que je crois que c'est important pour la commission. Quand on parle, nous, du public, nous avons deux publics. Nous avons le public québécois, le public individuel, le résidant du Québec, et nous avons aussi un public que nous servons, qui est un public qui se compose d'entreprises qui sont situées en dehors ou dans la procince de Québec, et même aux Etats-Unis. Alors, à l'occasion, notre client peut être une entreprise de Californie. A ce moment-là, c'est lui le public que nous servons. Je comprends que nos états peuvent servir auprès des banques, mais nos services ne sont pas toujours rendus à des individus. Ce sont très souvent des corporations. Quant à l'autre partie de votre question concernant la reconnaissance, je peux vous dire que sur le marché de New York ou auprès de la Security and Exchange Commission ou auprès des banquiers d'Allemagne ou auprès d'autres financiers, la réputation que nos membres ont acquise au Québec nous apporte une reconnaissance et un respect qui aident les Québécois. Je pense que l'on doit se rappeler cela contineullement parce que c'est une réputation longue à bâtir. Elle est très bien établie et elle sert les Québécois.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que depuis que vous exiger la formation universitaire, il n'y a pas danger que vous soyiez en face d'une pénurie d'effectifs? Si je me base sur les chiffres que vous avez cités cet après-midi, le nombre de cabinets, le nombre de stagiaires dont vous avez besoin, le développement de l'industrie, le développement du commerce, l'expansion que prend le secteur de la comptabilité, de la gestion en générale, est-ce qu'il y a un danger d'une pénurie d'effectifs à la suite de ce changement radical dans la formation, dans les exigences?

M. NORMANDIN: Je ne crois pas que cela provienne du changement au niveau de l'enseignement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous en avez combien au cours du soir? Vous en avez combien au niveau de la formation universitaire?

M. NORMANDIN: C'est un nombre que nous ne savons pas parce que ceux qui sont étudiants durant le jour ne sont pas inscrits à l'institut. Vous pouvez avoir 150 étudiants à l'université Laval, par exemple, qui vont terminer leur cours mais il n'y a aucun signe qui pourrait vous faire connaître d'avance s'ils vont se destiner à devenir des comptables agréés. Vous le savez quand ils viennent chez vous pour subir l'examen. C'est cela qui a changé un peu. Il y a un nombre de recrues éventuelles que nous ne connaissons pas à cause de cela. Mais je voulais dire tout à l'heure que, s'il y a une pénurie, c'est peut-être parce que, dans la jeunesse, il semble y avoir des orientations moins traditionnelles que par le passé. On voit l'explosion du nombre de facultés dans les universités. Je me rappelle, il y a 25 ans, qu'il y avait quatre ou cinq facultés à l'université. Vous y retournez aujourd'hui et il y a une prolifération de facultés. Il y a l'embarras du choix pour les étudiants. Je pense que c'est un problème qui se pose pour toutes les facultés excepté certaines professions où il y a des pénuries reconnues qui attirent traditionnellement beaucoup de monde.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'ai une dernière question.

Est-ce qu'aussi du côté des CA, du côté de la profession comptable en général, on se dirige vers la pratique collégiale avec d'autres professionnels? Avec d'autres disciplines?

M. NORMANDIN: C'est une question très intéressante. Nous pensons que, pour mieux servir le public, c'est une chose inévitable. Il y a des secteurs où cela se fait d'une façon non officielle, si vous voulez, sur certains cas, dans les affaires où vous travaillez en collaboration très étroite, par exemple, avec des ingénieurs, même des architectes ou des avocats pour un projet donné. Je pense que c'est une idée très positive et je regrette même que cela n'ait pas été mentionné dans le code des professions.

M. LE PRESIDENT: Je pense que la dernière question revient au député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, il y a eu tellement de questions de posées, mais il en reste encore quelques-unes. J'ai quand même l'impression que l'acte comptable, que ce soit du domaine privé ou du domaine public, c'est quand même un acte comptable. Je ne sais pas si on a bien défini ou si on a défini clairement

ce que c'était que l'acte comptable, mais j'ai l'impression, que ce soit pour le compte d'une municipalité ou d'une entreprise quelconque, que ce sont les mêmes chiffres, c'est en quelque sorte une même comptabilité, cela finit par se ressembler. Quand vous dites dans votre mémoire que l'institut s'oppose énergiquement au nom de l'intérêt public à ce que le domaine de l'expertise comptable soit partagé entre plusieurs corporations, je me dis qu'il va falloir à un moment donné qu'on se décide de fusionner les groupes de comptables ou encore qu'on délimite leur champ, qu'on délimite un territoire bien défini, parce qu'on se pose encore la question: Qui va faire quoi? Si ce sont les comptables agréés en fait qui couvrent tout le champ et que c'est impossible d'incorporer d'autres groupes en comptabilité, à ce moment-là, ils se retrouveront sans travail. Je me demande un peu depuis un bon bout de temps qu'on en discute si c'est uniquement une question de reconnaissance légale, puisqu'on a semblé dire auparavant que d'autres groupes que les CA avaient quand même une certaine compétence. Je me pose une question: Ai-je besoin d'une carte en menuiserie pour aiguiser un crayon parce que celui-ci est en bois? Disons que c'est plus un commentaire qu'une question, mais étant donné que je n'ai pas posé de question, je me permettais, M. le Président, d'exposer quand même ma façon de voir les choses.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Vous nous avez dit tout à l'heure qu'on reconnaissait la compétence des comptables par exemple sur un travail, un rapport que vous avez à faire pour certaines compagnies des Etats-Unis, mais est-ce que cette équivalence est reconnue au point qu'on permettrait à nos comptables d'aller pratiquer aux Etats-Unis?

M. CARON: Oui, pour autant que vous avez un diplôme universitaire, maintenant, vous pouvez aller pratiquer dans l'Etat de New York, par exemple — je le nomme en passant parce que je sais que c'est un cas de réciprocité, un cas d'équivalence — et dans beaucoup d'Etats aux Etats-Unis. Je ne pourrais pas les nommer, mais il y en a probablement une dizaine ou une quinzaine où, par le fait que vous avez des standards équivalents d'admission, on vous donnerait le droit de pratique à la condition tout simplement de le postuler.

M. BOIVIN: Est-ce que c'est la même chose, l'équivalence est-elle sur les deux côtés? Est-ce qu'un comptable des Etats-Unis, de l'Etat de New York, pourrait venir pratiquer par exemple dans la province de Québec?

M. CARON: J'aimerais laisser cette question-là en plan pour y répondre ultérieurement, parce qu'il y a des conditions à cela.

M. DESROCHERS: C'est-à-dire que certaines contraintes nous sont imposées par des lois du Québec, à savoir celles qui découlent du bill 64, je pense, qui a été adopté et qui a trait à la citoyenneté canadienne ou à la connaissance d'usage de la langue française. C'est une contrainte, mais si on met cette contrainte de côté, je pense qu'il y a un accord de principe entre les instituts provinciaux au sujet des membres de certaines corporations d'experts-comptables. Je ne sais pas si nous en avons dressé une liste mais certaines corporations d'experts-comptables sont couvertes et je pense que les CPA des Etats-Unis devraient tomber dans cette catégorie et pourraient être admis à exercer leur profession moyennant qu'ils subissent un examen en fiscalité et moyennant un an de résidence au Canada.

M. BOIVIN: Ce serait donc assez facile d'établir ce dont je parlais tout à l'heure, la norme, un organisme d'accréditation, si vous avez autant de relations que cela avec l'extérieur et si vous avez des équivalences. Il serait alors très facile d'avoir un organisme d'accréditation qui réglerait beaucoup de cas, il me semble dans le monde comptable.

M. NORMANDIN: Permettez-moi. A l'institut canadien il existe un comité qui s'appelle le Comité international de qualification et qui fait justement ce travail-là pour tout le reste des provinces. Il s'agit d'évaluer les titres professionnels d'un pays étranger.

M. LE PRESIDENT: Une dernière question, le député de Bourget.

M. LAURIN: Je crois qu'il est assez compréhensible et normal que vous cherchiez à rationaliser, à uniformiser par le haut votre profession et que vous cherchiez à établir les plus hauts standards possible. Mais est-ce qu'il serait possible aussi de tenir compte — et je vous pose la question — d'une part, des droits acquis depuis de longues années par les membres de votre profession qui n'ont pas atteint votre degré d'excellence, et d'autre part, est-ce que la proposition que vous faites, cette intégration rapide et forcée de ceux qui n'ont pas atteint cette norme d'excellence, correspond vraiment aux conditions concrètes auxquelles devraient se plier les membres éventuels de votre corporation? A ce moment-là, pourriez-vous nous dire quelles sont les étapes que vous avez envisagées pour que cette intégration se fasse d'une façon qui corresponde aux conditions d'exercice de la profession dans ses autres branches qui n'ont pas atteint le même niveau?

M. LE PRESIDENT: M. le député de Bourget, on a peut-être répondu dix fois à cette question aujourd'hui.

M. LAURIN: J'ai entendu monsieur qui y a répondu tout à l'heure mais cela ne m'a pas satisfait.

M. LE PRESIDENT: Vous n'étiez pas ici, comment pouvez-vous...

M. LAURIN: Non, j'étais là quand monsieur a répondu à cette question.

M. LE PRESIDENT: On y a répondu cet après-midi.

M. LAURIN: J'étais là quand on a répondu à cette question.

M. LE PRESIDENT: Une dernière chance pour y répondre et après on ferme cette partie de la commission pour donner une chance à...

UNE VOIX: L'avocat...

M. NORMANDIN: Je ne sais pas de quels droits acquis vous voulez parler parce que les droits acquis ont été respectés en 1946 jusqu'à nos jours. En ce qui concerne l'intégration rapide, nous avons justement dit qu'un écueil à éviter était de se précipiter dans une solution qui semble facile et qui ne l'est pas. Nous sommes très au courant que ce n'est pas une solution facile; néanmoins nous sommes prêts à oeuvrer de toutes nos forces à réaliser cet objectif. Je dois vous dire, en toute sincérité, que nous n'avons pas de plan défini envers l'intégration, mais je pense que le premier pas n'a pas encore été fait avec les autres associations puisque nous l'avons tenté l'an dernier et qu'il n'a pas été accepté si je peux dire. Il faudrait se reprendre.

M. LAURIN: C'est simplement, M. le Président, je m'excuse, pour soumettre, à part la formule qui nous est suggérée, qu'il y a peut-être d'autres formules alternatives auxquelles on pourrait penser et je me demandais si l'institut avait pensé à d'autres formules.

M. NORMANDIN: Nous sommes prêts à nous pencher sur le problème.

M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je remercie la délégation des comptables agréés.

M. REEKIE: Pour conclure, je voudrais dire que c'est un plaisir pour nous d'avoir eu la permission de nous présenter devant vous cet après-midi. Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, la Société des comptables en administration industrielle du Québec.

Voulez-vous continuer vos discussions dehors s'il vous plaît? Je donne la parole à Me L'Heureux-Dubé qui remplace Me Jacques Phi-lippon.

Société des comptables en administration industrielle du Québec

MME L'HEUREUX-DUBE: J'ai senti, M. le Président, que vous n'aviez pas le courage d'empêcher une femme de parler. Je vous en remercie.

M. LE PRESIDENT: J'ai été marié assez longtemps pour savoir cela. Même une couple de fois.

MME L'HEUREUX-DUBE: M. le Président, MM. les députés, je remplace Me Jacques Philippon, mon associé, qui est absent du pays et qui aurait été sûrement heureux d'être ici ce soir.

On se réfère souvent, en parlant du comptable en administration industrielle, à l'homme au centre. Ils ont même une brochure comme ça. Pour ce soir, ils m'ont permis d'être la femme au centre.

Les RIA sont des gens réalistes., Le mémoire que nous vous présentons aujourd'hui, au nom de la Société des comptables en administration industrielle du Québec, est empreint d'un souci évident d'apporter une contribution réaliste à l'étude d'un projet de loi sur lequel la société que je représente est fondamentalement d'accord.

Nous avons suivi le débat toute la journée, nous avons été impressionnés par la qualité des questions et peut-être, dans le moment, sommes-nous un peu moins confus ou peut-être un peu plus confus, quant à moi personnellement.

Pour être réaliste après cette journée bien remplie, je limiterai mon exposé à quelques minutes seulement et je comprends que vous êtes intéressés plutôt à entreprendre un dialogue avec les membres de la corporation qui est ici représentée par plusieurs des membres de ce conseil provincial que je vous présente.

M. Doug Simpson, comptable en chef de la Steel Company of Canada de Montréal, président provincial de la société des comptables en administration industrielle.

M. Vic Bolduc, gérant général de T.J. Moore, Québec, vice-président provincial et président du comité de formation de l'enseignement. C'est aussi le trésorier provincial.

M. Don Birk de Montréal, secrétaire permanent de la société provinciale.

M. Léopold Girard et M. Gaston Brown, directeurs de la société financière pour le commerce et l'industrie, tous deux ex-présidents.

M. Réginald Dugré, directeur du département des sciences comptables, directeur de la section des sciences de l'administration de l'extension de l'enseignement de l'université Laval, Québec, administrateur provincial et membre du comité provincial de l'enseignement.

M. Nelson Allen, vice-président exécutif national de la Société des comptables industriels du Canada qu'on désigne comme SIA Canada. Il a à son actif 27 ans d'expérience et de permanence sur le plan national et sa réputation, particulièrement dans le domaine de l'éducation, s'étend même au niveau international. Ayant noté votre intérêt sur le plan national, je pense que sa contribution pourra peut-être être utile pour vous éclairer.

M. Michel Philippon, trésorier des industries MAIBEC, administrateur provincial, ex-président de la section de Québec, membre du comité provincial de l'enseignement.

M. Denis Delongchamps, responsable de la gestion des documents à l'Hydro-Québec, membre du comité de l'éducation et administrateur de la section de Montréal.

Voilà pour les présentations.

A titre d'information seulement, cette société compte actuellement dans la province 872 membres et 2,411 de ses étudiants sont enregistrés au Québec. Au Canada, il y a plus de 5,000 comptables en administration industrielle et au-delà de 15,000 étudiants inscrits dans cette discipline.

C'est en 1941 que l'Institut de gestion industrielle et commerciale a été créé par la Loi 5 George VI, chapitre 95, et en 1948, et par la suite, en 1968, par des amendements à la loi de 1941, le nom a été modifié en celui que la société porte aujourd'hui.

La Société des comptables en administration industrielle du Québec est mieux connue sous le nom de RIA, le nom réfère à son titre anglais, Registered Industrial Accountants.

Ce mémoire a d'abord été préparé par un comité ad hoc, à la suite de plusieurs réunions du conseil provincial et entériné à l'unanimité des membres du conseil.

Malgré que la société n'ait pu procéder à une consultation élaborée de ses membres, vu le temps restreint, un exemplaire du mémoire a été transmis à chacun des membres et je crois qu'il représente un consensus de l'opinion de ses membres.

Il existe actuellement, comme vous le savez, trois groupes principaux de comptables, les RIA, les CA, les CGA. Il en existe d'autres aussi. Rejoignant l'idée maîtresse du code des professions, comme l'a rappelé l'honorable Cas-tonguay au début de la première séance des travaux de la commission, qui est la protection du public, les RIA considèrent que cette protection, justement, serait mieux assurée par l'unification de toutes les professions comptables.

Si nous analysons la situation telle qu'elle se présente réllement sur le plan pratique, les CA, les CGA, les RIA entre autres, sont des spécialisations de la grande profession comptable, et telles spécialisations ont été rendues nécessaires par les exigences du monde des affaires moderne.

Remontant à l'origine de la société que je représente, c'est en 1920 que les membres de l'Institut des comptables agréés ont eux-mêmes décidé d'incorporer la Société des comptables en administration industrielle. Beaucoup d'arguments militent en faveur de l'unification de la profession comptable, que la société a exposés dans son mémoire. Mais entre autres et rejoignant, encore là, l'idée fondamentale à la base du code des professions, c'est la protection du public que cette unification assurerait d'abord et avant tout.

Je pense qu'on a beaucoup parlé de confusion, nous croyons qu'il y a confusion, et, en particulier, on n'a qu'à consulter les offres d'emplois dans les journaux pour s'en rendre compte. On demande un comptable RIA, CGA ou autre. C'est comme ça qu'on met les annonces dans les journaux. Nous sommes à l'ère des fusions, des regroupements sur le plan international, sur le plan national, sur le plan québécois et il semblerait illogique de laisser continuer à exister une situation de fait qui est de moins en moins conforme à la réalité quotidienne.

Paraphrasant le ministre des Affaires sociales lors de la présentation du mémoire du Collège des médecins, il serait mauvais d'avoir autant de corporations qu'il y a de spécialités comptables. Le ministre, lui, parlait de spécialités médicales. Des contacts ont été faits par les RIA, par les CA, et il semble à la société que rien ne s'opposerait vraiment à ce que l'unification se réalise.

L'idée est vraiment dans l'air. Devant une telle situation, il semble appartenir au législateur de prendre l'initiative dans ce domaine et la société que je représente offre son entière collaboration au gouvernement en ce sens. Sans même s'être consultés parce que nous n'avions pas lu le mémoire des CGA quand nous avons fait le nôtre, nous reprenons cette idée-là. C'est qu'elle est vraiment dans l'air.

Comme il ne serait pas réaliste, croyons-nous, d'espérer que cette unification se fasse du jour au lendemain, la société que je représente, tout en souhaitant que le législateur manifeste clairement son appui à cette suggestion et y donne suite dans un avenir rapproché, nous pensons que trois ans serait un délai réaliste, soumet plusieurs recommandations quant à la législation proposée.

Nous croyons aussi que si le législateur ne fait pas ce pas, probablement qu'elle aura beaucoup moins de chances de se réaliser. Ces recommandations s'inscrivent dans le cadre de la protection du public, objectif sur lequel la société se déclare pleinement d'accord.

Pour assurer cette protection, la société considère que le rôle de l'Etat en est un de surveillance et de contrôle dans le but d'assurer la compétence, l'intégrité, l'efficacité des corps professionnels et non pas un rôle de subordination, de l'exercice de la fonction à l'autorité de l'Etat. Si l'Etat doit agir, c'est seulement à défaut par les corporations de le faire.

La création de l'Office des professions, avec des pouvoirs étendus que le projet de loi 250 lui confère, semble répondre entièrement à cet objectif. Aussi, la société ne peut être d'accord sur les pouvoirs conférés par l'article 169 au lieutenant-gouverneur en conseil. Celui-ci assumerait alors, non pas des pouvoirs de surveillance et de contrôle, mais des pouvoirs de décisions entiers.

En ceci, nous rejoignons les recommandations de plusieurs autres corporations qui ont déjà soumis leurs représentations à cette commission, tout en faisant des recommandations distinctes à cet égard. Par exemple nous différons des recommandations du conseil interprofessionnel qui voudrait confier certains de ses pouvoirs à l'office. Nous croyons qu'il appartient à chaque corporation, même pas à l'office seul, d'exercer la surveillance.

Qui mieux que la corporation est en mesure de juger et de déterminer les programmes d'études, les diplômes. Dans le cas particulier des RIA, depuis plus de vingt ans, ses programmes d'études sont établis, améliorés, étendus régulièrement, et ces programmes d'études répondent aux besoins et à la définition du comptable de gestion dans la société moderne.

Cinquante universités du Canada dispensent nos cours. C'est une situation unique.

Cela prouve que les cours avaient été élaborés dans un processus d'entente avec les universités et que nous avons fait là tout ce que nous pouvions faire pour avoir des standards très élevés. A cause justement de ces standards élevés, la société que je représente a acquis le niveau d'une corporation professionnelle de premier plan. La détermination des programmes d'études a été son souci constant et elle a travaillé en collaboration avec la société nationale à inviter des professeurs d'université spécialisés et, en consultation avec eux, a tenu compte du besoin du monde des affaires, de l'opinion des praticiens et de tous les aspects de la question dans la détermination de ces programmes et des diplômes décernés.

Le programme et les examens que doivent subir et suivre les étudiants pour obtenir le titre de RIA sont uniformes dans tout le Canada et sont établis par des comités formés de représentants de chacune des provinces. Les examens sont d'un standard national et sont la base de la reconnaissance du standard professionnel des RIA à l'échelle du pays.

Le système de l'examen uniforme tel qu'il fonctionne actuellement est nécessaire à cause des ententes de réciprocité interprovinciale qui permettent le mouvement des professionnels entre les provinces. Effectivement, ces transferts se font. Nous avons, dans notre mémoire, un tableau qui le démontre et elles existent. La corporation professionnelle est la première intéressée à assurer et à augmenter la compétence de tous ses membres.

D'ailleurs, ses programmes doivent être approuvés par les universités et toutes les maisons d'enseignement qui les dispensent, ce qui est déjà une mesure de contrôle sur leur qualité. La province de Québec, qui importe des capitaux étrangers, doit pouvoir compter sur la compétence reconnue nationalement de ses comptables de gestion. Il doit aussi — autre argument — y avoir équation entre permis et compétence dont la corporation est responsable. Si elle ne peut pas faire l'équivalence entre les deux, je crois qu'il lui sera difficile d'assumer ces responsabilités, d'assurer la compétence de ses membres.

Ce rôle de la corporation nous apparaît comme fondamental. Il nous semble donc que ce pouvoir ne doit pas être exercé par le lieutenant-gouverneur en conseil mais bien par la corporation elle-même, par l'intermédiaire de son bureau, soumis si l'Etat le croit nécessaire, au contrôle de l'Office des professions à défaut de la corporation d'agir.

C'est pourquoi les sous-paragraphes a), d) et e) de l'article 169 devraient, à notre sens, être incorporés à l'article 83 et les sous-paragraphes b) et c) à l'article 87. Autrement, cela serait ouvrir la porte à l'arbitraire et mettre de côté des années d'efforts et de recherches fournis par la société.

La société soumet plusieurs autres recommandations sur le projet de loi 250 qui, pour la plupart, ont pour but d'assurer une défense pleine et entière des membres de la corporation. D'autres recommandations concernent les aspects pratiques, tels que les réunions toutes les six semaines qui, prétendons-nous, devraient avoir lieu quatre fois par année seulement, le quorum, etc. Je n'insiste pas pour le moment sur ces différentes modifications suggérées mais je désire plutôt souligner la recommandation particulière concernant l'article 35 a) du projet qui définit le rôle du comptable de gestion. Ce problème épineux des définitions a d'ailleurs semblé être une préoccupation majeure du ministre des Affaires sociales. Si ma mémoire est bonne, c'est le député de Montmagny qui a indiqué que chaque corporation aurait l'occasion de donner son point de vue sur la définition contenue dans le projet de loi, particulièrement lors de la présentation du mémoire du Collège des médecins.

La définition du comptable de gestion à l'article 35 a) ne semble pas réaliste, en ce qu'elle ne tient pas compte de l'évolution de cette profession depuis plusieurs années. M. Vézina parlait tout à l'heure de 1972, nous sommes à l'ère de 1972 dans la définition que nous donnons et non pas à l'ère de 1946.

L'honorable ministre Castonguay, dans son intervention lors de l'étude du mémoire du Conseil interprofessionnel du Québec, a lui-même souligné que, dans certains cas, c'est une difficulté majeure qui se présente, celle de délimiter le champ de pratique. Les RIA se sont rendu compte de cette difficulté et ont soigneusement rédigé une définition de leur champ d'activité qui est à leur avis une transposition de

la réalité. Je vous la lis, je pense que c'est important: "Faire de la comptabilité de gestion en fournissant et utilisant l'information comptable et financière et toutes autres informations pour la prise des décisions relatives à la planification, au contrôle et à la gestion des entreprises. Offrir au public des services de conseillers en matière d'élaboration et d'administration des systèmes comptables, de planification et de contrôle financier de ses entreprises". C'est notre définition.

Offrir au public — nous avons vu beaucoup de discussions aujourd'hui là-dessus — nous le faisons. Vous avez par exemple la firme de P.A. Ross à Montréal. Ce sont des "management consultants" comme on les appelle en anglais, je ne connais pas la traduction en français, ce sont probablement des consultants en administration. Nous faisons cela. Nous ne le faisons pas de façon extensive mais nous le faisons.

C'est l'essentiel des fonctions des RIA actuellement et, comme vous le constatez, cette définition ne revendique pas pour les RIA l'exclusivité de la vérification publique externe. Nous ne revendiquons rien au point de vue exclusif. La majorité des RIA agissent à l'intérieur des entreprises privées, pour le gouvernement ou les corps publics. Mais rien ne s'oppose à ce qu'ils agissent comme conseillers et fournissent des services comptables au public.

En fait, une personne qui aurait beaucoup d'expérience dans ce domaine, il semble que ce serait même à l'avantage du public qu'elle puisse offrir ses services. Dans le moment, on ne lui reconnaît pas ce droit-là et le projet de loi ne le reconnaît pas.

La société croit donc que la définition du législateur doit correspondre à la pratique existante, au moment où cette définition est adoptée, et au besoin du public. Je désire souligner enfin que la société a fait des commentaires et recommandations relativement au projet de loi 264 des comptables agréés. Ce projet de loi ne contient pas l'équivalent de l'article 16 de la loi actuelle des comptables et accorde en plus tous les pouvoirs résiduaires aux comptables agréés en vertu de son article 18.

La société considère que ceci peut être une source de difficultés et de conflits quand on réalise combien sont connexes et imbriqués les champs d'activité des diverses catégories de comptables. La société aimerait retrouver, dans ce projet 264, l'article 16 de l'actuelle loi des comptables.

Ces brefs commentaires, évidemment, ne rendent pas justice au mémoire qui vous est soumis présentement et qui contient de nombreuses autres recommandations. Nous espérons que la commission parlementaire tiendra compte de toutes et chacune et les membres de la corporation sont maintenant à votre disposition pour répondre à vos interrogations, si vous le jugez utile.

M. FOURNIER: Je comprends que votre mémoire contient plusieurs recommandations qui seront analysées par la commission. Cependant, il y a quelques questions que j'aimerais vous poser. Je constate, à la page 7 de votre mémoire, que la recommandation principale du mémoire est de voir à l'unification des professionnels de la comptabilité. Vous avez dû remarquer qu'au cours de la journée c'est un peu l'orientation qu'avaient les membres de la commission, de ce côté-ci, dans les questions qu'ils posaient.

Relativement à cette unification, vous nous donnez à la page 8, une série d'articles touchant le champ de la comptabilité. J'aimerais savoir ce que vous pensez du premier article: définir le comptable et son rôle et déterminer son champ d'activité. Je vous pose la question suivante. Aujourd'hui un certain groupe a voulu définir la comptabilité elle-même par les actes qui étaient posés, tandis qu'un second groupe a voulu la définir par le client qu'il représentait. Quelle est votre attitude relativement à ça? Est-ce qu'on ne devrait pas la définir par le champ d'activité plutôt que par les clients que le groupement comptable a?

MME L'HEURUEX-DUBE: M. Dugré va répondre à votre question.

M. DUGRE: M. le Président, il nous semble que la comptabilité devrait être définie. Elle est d'ailleurs définie en soi, c'est un champ d'activité que de nombreuses associations de comptables ont déjà défini, sur lequel de nombreux professeurs ont écrit longuement et je pense qu'il est quand même assez connu.

Vous me permettrez de reprendre un peu ce que vous avez souligné au cours de la journée, lorsque vous disiez: Dans la comptabilité, il y a la tenue de livres. La tenue de livres, ça peut être très bien fait par des étudiants de secondaire V qui quittent le secteur commercial; ça peut être très bien fait par les gens du CEGEP, du secteur des techniques administratives; ça peut être fait aussi par beaucoup d'autres qui l'ont appris, évidemment.

Il y a aussi, on le disait, premièrement à reviser les transactions et, vous le disiez, après ça, à préparer des états financiers. D'autres que les comptables, si vous voulez, peuvent en préparer et d'excellents aussi. Il y a aussi une autre partie dont on n'a pas beaucoup parlé mais que la définition de la comptabilité classique nous rappelle, et celle-là est extrêmement importante et extrêmement vaste, c'est l'analyse. La définition ordinaire que l'on soumet dans certains livres, c'est l'analyse à la fin de tout, et c'est ça évidemment la fonction de comptable, surtout du comptable professionnel, c'est dans l'expertise qu'il montre, après qu'il a tous les documents comptables en main, qu'il va pouvoir maintenant tirer certaines conclusions, donner certains conseils à ceux qui vont avoir à les utiliser. C'est à ce moment-là,

évidemment, qu'il joue son rôle de conseiller, son rôle de professionnel.

Lorsque nous nous parlons de comptabilité administrative, nous sortons en bonne partie du champ de ce que tantôt on a appelé la comptabilité publique pour dire: Nous, nous sommes spécialisés, nous avons étudié particulièrement un champ donné de la comptabilité générale qui s'appelle la comptabilité de gestion, c'est-à-dire l'utilisation de tous les documents comptables, de toutes les données comptables et autres provenant de différentes sources, pour mieux guider l'administration et l'aider à prendre des décisions plus judicieuses. Voilà, le champ, si vous voulez, dans lequel nous nous cantonnons davantage, ce qui ne nous empêche pas d'étudier d'autres branches qui sont connexes aux autres professions. Nous nous en sommes tenus à cet aspect très particulier où, je pense, les comptables, soit les comptables en prix de revient ou les RIA sont particulièrement qualifiés.

M. FOURNIER: Est-ce que vous êtes en faveur d'une loi générale qui serait la Loi des experts-comptables et qui contiendrait un certain nombre de personnes qui seraient des licenciés, pour faire de la vérification ou autre chose?

M. DUGRE: Sûrement, c'est la première recommandation de notre mémoire. Nous y voyons évidemment beaucoup d'avantages pour le public, peut-être plus que pour nous-mêmes, parce que nous sommes vraiment bien organisés, nous croyons être capables de survivre, mais nous croyons que le public serait mieux servi et la profession de comptable serait peut-être mieux servie si elle était unifiée.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais d'abord féliciter votre organisme de la qualité du mémoire et aussi votre éloquent porte-parole, cela nous repose de toutes ces voix graves que l'on entend depuis ce matin, voix graves et sévères. Vous avez assisté depuis le matin, aux séances de la commission, vous avez entendu les nombreuses questions qu'on a dirigées à l'intention des groupes, principalement les CGA et les CA. Il n'est pas l'intention de répéter toutes les questions, mais il y a certainement des choses qui vous ont frappés, d'ailleurs, tout correspond au sens des questions qui ont été posées, le Solliciteur général vient de le dire, pour déceler s'il y avait possibilité d'univier la profession, toujours dans l'intérêt du public, sans brimer pour autant les droits acquis, la compétence, la préparation, la spécialisation. Mais le comité s'interroge et à bon droit sur l'opportunité de faciliter cette unification. Vous avez dit tantôt que vous suggériez cependant des étapes, mais que vous ne croyiez pas qu'à ce moment-ci ce soit possible de faire l'unification. Vous avez également mentionné que le législateur devrait pro- bablement intervenir, parce que si les parties étaient laissées à leur propre initiative, probablement que ça prendrait beaucoup plus de temps et peut-être que ça serait difficile. Mais quel serait le mécanisme que vous suggéreriez? Est-ce que ce mécanisme qui faciliterait le dialogue entre les principaux groupes devrait être en dehors du projet de loi 250?

Est-ce que cette responsabilité pourrait être confiée à l'Office des professions? Remarquez bien que ce genre de problème d'unification, ce genre de problème d'analyse de description de fonctions, de compétence, ne se pose pas seulement pour les comptables. Nous l'avons vu dans des discussions antérieures, nous l'avons vécu à d'autres moments de la commission, chez les optométristes, les ophtalmologistes, les opticiens d'ordonnance, cela arrivera aussi dans le champ de la pharmacie, cela arrivera ailleurs aussi.

Mais est-ce que ce sera à l'intérieur de l'office des professions, ou si la loi devrait créer un autre mécanisme, dans la loi cependant, mais un autre mécanisme dont la fonction aurait pour but de faciliter les fusions, des unifications là où se serait préférable que cela se fasse; de faciliter la délimitation du champ de compétence là aussi où cela devrait être fait. Enfin, vous voyez le genre de responsabilité qui pourrait être confiée à un tel mécanisme.

MME L'HEUREUX-DUBE: Je dois vous dire ceci, d'abord, comme préliminaire. C'est que chacun qui est venu ici a revendiqué, a été le premier à avoir pris l'initiative. Nous le revendiquons aussi. Nous avons été les premiers, la société a été la première sur le plan national à faire une étude complète sur le "Future of the Accounting Profession". C'était fait par le national. L'avenir de la profession comptable. Nous avions suggéré plusieurs options, trois ou quatre soit que les gens le fassent d'eux-mêmes. Nous réalisons que c'est difficile. Nous réalisons que sans que le législateur y mette réellement un impératif, que ce soit dans la loi — je le verrais peut-être difficilement dans la loi, peut-être que l'Office des professions serait le mécanisme qui serait approprié — mais je pense que le législateur devrait clairement indiquer que d'ici tant de temps, nous croyons que cela devrait se faire et mettez-vous à la tâche. A ce moment-là, les mécanismes peuvent se travailler. Nous n'avons pas encore les solutions. Nous ne proposons pas de mécanisme particulier. Peut-être que M. Dugré pourrait ajouter un mot là-dessus.

M. DUGRE: Durant les communications que vous avez entendues et dans les réponses que vous avez eues à vos questions, les CGA, les CA et maintenant les RIA ont exprimé tous les trois le souhait, avec un accent plus ou moins fort peut-être, qu'il y ait unification. C'est sûrement un bon départ. Nous avons peu pensé au mécanisme à utiliser pour faire cette unifica-

tion et en arriver à une solution. C'est évident qu'il y aura des difficultés. Nous parlons de trois ans. C'est parce que si nous étions sûrs que, dans une semaine, cela serait réglé, on dirait: Revenez dans une semaine, nous allons vous rencontrer de nouveau et là nous allons vous présenter quelque chose qui serait comme... Nous sommes persuadés que cela sera pénible mais nous sommes prêts à faire ces efforts et à y mettre le temps et l'énergie qu'il faut afin de faire une profession comptable suivant diverses modalités sur lesquelles nous ne sommes pas prêts à faire des déclarations aujourd'hui.

MME L'HEUREUX-DUBE: Je peux ajouter quelque chose, M. Cloutier? En y pensant, si le projet de loi mentionnait que les professions comptables devraient former un comité de tant de membres de chacune des professions afin d'élaborer des structures de réorganisation ou d'unification, peut-être que cela serait là un pas. Si le projet mentionnait seulement qu'il devrait, de façon nécessaire, faire rapport dans un temps donné...

M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai voulu, Me Dubé, élargir un peu le mandat qui pourrait être confié parce qu'il n'y a pas seulement des problèmes d'unification. J'ai mentionné tantôt qu'il y avait aussi des problèmes de partager des champs de compétence dans d'autres secteurs. Le secteur de la santé notamment où pour des professionnels c'est difficile de trancher une ligne bien étanche de pratique de profession. Vous allez prendre, par exemple, l'infirmière qui pose un geste qui ne relève pas particulièrement de l'acte infirmier, mais tout de même elle peut le poser parce qu'elle est sous la surveillance d'un professionnel, d'un médecin. Vous avez un médecin qui distribue le médicament dans certaines circonstances. Vous avez le pharmacien et le médecin qui discutent de la substitution du médicament.

Ce sont tous des problèmes qui ont trait au champ de compétence ou d'exercice de la profession, pratique exclusive ou... Ce serait ce genre de problèmes qui pourraient être confiés à un organisme y compris l'unification de certaines professions. On va continuer la réflexion là-dessus mais, s'il y avait au cours des travaux de la commission d'autres suggestions qui pourraient être faites par des organismes qui viendraient devant la commission, je pense que ce serait une excellente suggestion.

MME L'HEUREUX-DUBE: Nous serions absolument d'accord sur quelque mécanisme que ce soit qui soit embryonnaire au début et votre suggestion est sûrement retenue par nous. Nous ne pouvons pas seuls et unilatéralement évidemment faire cela.

M. LE PRESIDENT: Le député de Châteauguay.

M. KENNEDY: Mme Dubé, seulement une question pour éclairer ma lanterne. Dans votre suggestion pour le nouvel article 35 a), vous dites "faire de la comptabilité de gestion en fournissant et utilisant l'information comptable et financière" etc., pourquoi inclure "fournissant"?

MME L'HEUREUX-DUBE: Je vais vous passer M. Dugré qui va être plus en mesure de régler cela.

M. KENNEDY: Qu'est-ce que vous voulez dire exactement par "fournissant"? Cela peut vouloir dire n'importe quoi.

M. DUGRE: En la préparant. Evidemment en la préparant et en fournissant à celui qui en a besoin pour prendre une décision. C'est dans ce sens-là qu'on a voulu, si vous voulez, écrire ce paragraphe-là.

M. KENNEDY: Mais on pourrait aussi bien retrancher le mot "fournissant" et cela ne vous enlèverait pas du tout aucun champ d'action. Si on disait tout simplement: Faire de la comptabilité de gestion en utilisant de l'information comptable et financière et toute autre formation pour la prise de décision, etc.

M. DUGRE: Oui, je pense que cela pourrait ne pas avoir une très grande conséquence...

M. KENNEDY: Cela rendrait la chose plus précise, en fait. Ce serait moins ambigu.

M. PHILIPPON: Je peux ajouter quelque chose, si vous me permettez. Lorsqu'on dit fournir l'information, d'abord, la première information, il faut tout de même récupérer cette information. D faut être en mesure de transmettre cette même information, c'est ce qu'on veut dire ici, en la fournissant.

M. KENNEDY: Par après vous arrivez avec "utiliser l'information".

M. PHILIPPON: Oui, l'utiliser dans la prise de décision.

MME L'HEUREUX-DUBE: C'est peut-être un souci de précision, ce sont des gens précis.

M. KENNEDY: Oui, je connais les RIA très bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gatineau.

M. FOURNIER: Je constate que vous mentionnez tout le temps les lettres RIA et que vous n'avez pas mentionné les lettres FIA. Est-ce que les lettres FIA sont d'usage courant?

MME L'HEUREUX-DUBE: FIA.

M. FOURNIER: C'est Fellow of Institute Accountant. Est-ce qu'elles sont de pratique courante? C'est parce que j'ai reçu une communication de la part d'un membre qui est Fellow of the Institue of Actuaries. Or, ces gens-là se servent des lettres FIA à la suite de leur nom et ils ont demandé de faire une réserve quant à eux pour qu'elles ne soient pas exclues, car ils se servent de ces lettres depuis au moins 70 ans. Je me demandais si...

MME L'HEUREUX-DUBE: Ce ne sont pas des lettres qui sont utilisées dans le Québec.

M. FOURNIER: Elles ne sont pas utilisées au Québec.

M. DUGRE: J'ai l'impression que ce sont des lettres qui ont été réservées auprès du fédéral pour un certain but à un moment donné. Nous ne les utilisons jamais.

M. FOURNIER: De sorte qu'une réserve pour les actuaires n'affecterait aucunement...

M. LAVOIE (Wolfe): M. Castonguay a ce titre-là.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Une question seulement à poser, pas de commentaires.

M. GUAY: Pas de commentaires? Alors j'irai pour une question. Est-ce que la formation d'un comptable en administration est bien différente de la formation d'un comptable agréé?

MME L'HEUREUX DUBE: M. Dugré.

M. DUGRE: M. le Président, je suis très heureux que cette question me soit posée, parce que mon métier est de faire de l'enseignement et je suis assez bien placé pour y répondre parce que je suis directeur des cours du soir dont il a été beaucoup question tantôt. Je suis en même temps directeur du département des sciences comptables pour les cours du jour, par conséquent la licence, la maîtrise et le doctorat. Je pense qu'il faut commencer au tout début. Dans la société des RIA on admet des gens qui ont une onzième année,n'importe quelle onzième année. Le principe qui est à la base et depuis très longtemps est le suivant: Prouve-nous que tu est capable d'étudier et d'avancer. Si tu n'es pas capable, nous allons nous en apercevoir et tu vas t'en apercevoir et tu vas te retirer toi-même. C'est la base.

Deuxièmement, nous acceptons les gens des CEGEP en technique administrative. Ceux parmi eux qui viennent étudier aux cours du soir à

Laval, nous les exemptons d'un certain nombre de cours, même si foncièrement il n'y a peut-être pas tout à fait une équivalence. Mais encole là nous leur disons: Si tu est rendu à ta limite nous allons nous en apercevoir et tu vas te retirer de toi même ou les examens, ou enfin des travaux qu'on va te demander et le rythme d'apprentissage qu'on va t'imposer vont faire que tu vas te retirer toi-même.

Nous acceptons également dans la société des gens qui suivent des cours par correspondance parce qu'ils travaillent à Sept-Iles où il n'y a évidemment pas d'institution ou encore plus loin que ça, ou ce sont des employés du gouvernement qui voyagent d'une place à l'autre et qui ne peuvent pas fréquenter les institutions. A ce moment-là, ils suivent les cours par correspondance. Ces gens sont extrêmement méritants, s'ils font tout leur cours de cette façon. Il faut enlever notre chapeau, devant eux, parce que c'est extrêmement dur. Mais certains le font.

Il y a aussi dans la profession des gens qui viennent de l'université, qui ont un diplôme universitaire. Il faudrait dire aussi que les programmes, que ce soit pour les CA, CGA et RIA, dans la spécialité de la comptabilité, sont assez proches l'un de l'autre. Entre autres, les cours suivis par les CA et les cours suivis par les CGA sont exactement les mêmes. Dans le processus de l'apprentissage, on arrive à un certain moment où les RIA s'éloignent un peu de l'enseignement des CA et des CGA pour se spécialiser davantage dans la comptabilité de gestion dont il était question tantôt.

Evidemment il y a aussi des cours d'impôt, mais moins forts, il y a aussi des cours de vérification, mais moins forts, parce qu'ils vont plutôt s'attacher à la vérification interne, c'est-à-dire la vérification à l'intérieur de l'entreprise. Quant au diplômé de l'université qui a sa licence — chez nous, on appelle ça une licence — ça s'appellera bientôt un baccalauréat, à partir de septembre, comme dans toutes les universités de la province, c'est évident qu'il a une meilleure formation générale, en économie, en méthode quantitative. Mais lorsqu'on en revient à la comptabilité, à la vérification, à ce moment-là, vous retrouvez le même programme ou la même teneur de cours que vous retrouvez aux cours du soir ou ailleurs. Mais il a une formation plus large. Les CA vous disaient: Nous allons admettre des gens avec un diplôme universitaire. Un avocat peut devenir à ce moment-là CA, on va lui imposer quoi? Evidemment, cette spécialité des sciences comptables, un ingénieur peut l'acquérir, on va lui imposer quoi? Ce plan de connaissances qui s'appelle sciences comptables et qui est connexe. Il retrouve à divers degrés, avec une préparation diverse, des niveaux d'enseignement, des niveaux de connaissances qui sont sensiblement égaux, dans cette particularité qui s'appelle les sciences comptables. Il faut dire qu'on n'a peut-être pas bien démontré cela ce matin.

Aux HEC à Sherbrooke, à Trois-Rivières et ailleurs, on a aussi ces programmes qui sont relativement en commun. On peut évidemment trouver des différences dans le genre d'examens et là, ça fait déjà une différence. Un RIA, par exemple, peut passer un examen, un à la fois, s'il le veut.

Les CGA, depuis un an ou deux, demandent de passer deux examens à la fois. Autrefois, c'était quatre. Il y avait quatre examens que les étudiants devaient passer et ces quatre-là, ils devaient les passer à la fois. Les RIA, encore une fois, passent un examen à la fois le plus souvent deux, évidemment; pour s'avancer, il faut que ça finisse un jour, tandis que les CA exigent des examens pour l'ensemble, ce qu'on appelle l'examen des CA qui, autrefois, était quatre examens de quatre heures, six plutôt, excusez-moi, et maintenant c'est quatre examens. Cela, on appelle ça l'examen. Les RIA et les CGA, à mon point de vue comme éducateur, avaient une série d'examens qui étaient mieux adaptés à des étudiants du soir qui sont obligés de prendre une matière ou deux par année et, évidemment, quand l'année est finie, ils sont examinés sur cette partie-là.

Les CA ont une philosophie différente qui est évidemment très acceptable mais qui est peut-être moins adaptée à des étudiants qui travaillent toute la journée et qui, le soir, suivent des cours et, après, à la fin de l'année, après avoir travaillé très péniblement, passent un examen. Mais enfin, c'est une question de dosage.

IL peut peut-être y avoir d'autres différences dans les examens, mais les examens sont de très grande qualité dans les trois cas.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y a le même programme d'études dans chacune des associations?

M. DUGRE: Dans chacune des associations.

M. BOIVIN: Est-ce que ça vous est commandé par les corporations professionnelles?

M. DUGRE: Ordinairement, c'est le processus inverse. C'est l'association elle-même qui réunit des praticiens, des professeurs d'université et, ensemble, nous traçons un programme, nous préparons des séries de cours que, dans les universités, à cause de leur qualité encore une fois, nous dispensons aux étudiants qui veulent aller vers une association ou vers une autre, ou encore à un étudiant qui veut tout simplement s'instruire dans les sciences comptables sans aller à aucune association. Mais au départ, c'est surtout l'association qui trace les programmes.

M. BOIVIN: Mais est-ce que les universités ou les écoles ne pourraient pas collaborer ou être le centre de l'unification des sciences comptables? Ce sont elles qui donnent l'ensei- gnement. Est-ce que les universités ne devraient pas faire un effort, réunir les corporations?

M. DUGRE: C'est bien possible. Cela peut très bien se faire. Il y a un élément qui nous manque.

M. BOIVIN: Est-ce que les universités ont déjà tenté de réunir toutes les corporations professionnelles pour établir un programme qui serait beaucoup plus facile pour les universités?

M. DUGRE: Cela n'a jamais été fait comme tel sauf que... Non, cela n'a jamais été fait à ma connaissance en tout cas. Nous n'avons jamais pensé réunir les universités pour tracer un programme. L'université est représentée officiellement ou légalement pour tracer des programmes, mais cela se fait assez peu.

M. BOIVIN: Les universités prennent les commandes des corporations professionnelles...

M. DUGRE: J'aimerais dire ceci. Comme universitaires, nous sommes quelquefois, malheureusement peut-être, toujours un peu loin de la réalité. Qu'il y ait aussi des gens qui connaissent vraiment leurs besoins, qu'ils connaissent le besoin du public pour nous ramener dans les limites plus raisonnables ou plus concrètes, je pense que ce n'est pas mauvais. Non seulement ce n'est pas mauvais, mais je pense que c'est indispensable. Nous sommes portés, peut-être, à philosopher trop vite alors qu'il y. a des gens qui vivent des situations plus concrètes et c'est bon qu'ils nous le rappellent. C'est bon aussi qu'ils soient là pour nous le rappeler.

M. BOIVIN: Mais ce serait bon aussi que les universités leur disent: Bien, vous doublez tel programme, cela pourrait être réuni, tel cours.

M. DUGRE: Nous l'avons fait dans le cas des CGA et des CA; le soir, ils suivent le même cours, voyez-vous. Un étudiant du jour, qui va vouloir devenir CA ou CGA, est préparé par le même programme pour aller, soit dans une, soit dans une autre association, s'il le veut. Il fait son choix à ce moment-là. Ce sont des programmes qui sont communs à tout le monde.

M. BOIVIN: Mais quand fait-il son choix? Cela a été demandé et nous n'avons pas obtenu de réponse.

M. DUGRE: II fait son choix et, quand il le fait, il est entièrement libre.

M. BOIVIN: Mais quand fait-il son choix après des programmes, comme vous l'enseignez, quand fait-il son choix vers le CA ou le CGA?

M. DUGRE: Aux cours du soir, il le fait dès le début parce que les CA exigent qu'en même

temps qu'il étudie le soir, il travaille dans un bureau de comptable. Les CGA exigent qu'en même temps qu'il étudie, il soit exposé à la comptabilité dans l'emploi qu'il occupe. Les RIA ont une exigence à peu près semblable. Tandis que les RIA et les CGA peuvent faire leur choix plus tard, le CA doit, à cause de cette exigence qui veut qu'il travaille dans un bureau de comptable tout en étudiant, eh bien, faire son choix immédiatement. Voilà pour les cours du soir.

Pour les cours du jour, c'est ordinairement, à la fin de son cours, en troisième année.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Dorchester a une autre question?

M. GUAY: On a parlé souvent de cours par correspondance. Est-ce que c'est encore possible de devenir comptable par correspondance?

M. DUGRE: Dans le cas des RIA, dans le cas des CGA, oui. Je ne saurais dire dans le cas des CA. Je ne crois pas, non, peut-être bien, mais il y en a sûrement assez peu qui le deviendraient par ce moyen-là.

M. GUAY: Une dernière question: Quel est, dans ce monde adulte de la comptabilité, le plus haut sommet de la compétence?

MME L'HEUREUX-DUBE: II n'y a pas de limite.

M. DUGRE: Probablement lorsque quelqu'un a travaillé très dur et qu'il meurt, si vous voulez, à 90 ans.

M. GUAY: Je veux dire en titres?

M. DUGRE: En titres, je ne suis pas prêt à faire une comparaison. Comme éducateur, en tout cas, je trouve qu'ils ont une très grande valeur et il est extrêmement difficile pour moi de dire qu'un titre est meilleur que l'autre. Ce sont trois excellents titres comptables.

M. GUAY: J'accepte votre réponse.

M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je veux remercier Mme L'Heureux-Dubé et toute la délégation. Nous ajournons la commission jusqu'à 10 heures, mardi prochain.

MME L'HEUREUX-DUBE: Je vous remercie.

(Fin de la séance à 22 h 8)

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