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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le jeudi 21 septembre 1972 - Vol. 12 N° 93

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 250 - Code des professions et autres projets de loi connexes


Journal des débats

 

Commission spéciale des corporations professionnelles

Projet de loi no 250

Code des professions

et autres projets de loi connexes

Séance du jeudi 21 septembre 1972

(Dix heures quinze minutes)

M. GIASSON (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre messieurs!

Bonjour mesdames; la plus cordiale bienvenue à la commission parlementaire des corporations professionnelles. Pour commencer les activités de la journée, nous entendrons l'Association des infirmières et infirmiers de la province de Québec. Je pense que ces gens-là sont déjà représentés à la table devant nous. J'inviterais le porte-parole officiel à déposer son mémoire.

Association des infirmières et infirmiers de la province de Québec

MLLE BUREAU: M. le Président, M. le ministre Castonguay, messieurs les membres de la commission parlementaire, je vais d'abord me présenter. Je suis Rachel Bureau, présidente de l'Association des infirmières et infirmiers de la province de Québec. Je suis accompagnée, à mon extrême gauche, par Mlle Claire Bélanger, présidente du comité de législation de l'association. Mlle Bélanger, en plus de son cours d'infirmière, a à son crédit un cours de technicienne en radiologie médicale, un diplôme d'infirmière hygiéniste et un certificat de nursing psychiatrique. Elle a oeuvré dans ces différents champs d'activité.

Ensuite, M. Jules Duchesneau, conseiller juridique de l'association. A mon extrême droite, Mlle Denise Lalancette, qui est présentement infirmière clinicienne au centre hospitalier de l'Université de Sherbrooke. Après avoir enseigné à l'Ecole des sciences infirmières de l'université Laval et dans une école traditionnelle, elle a, entre autres, travaillé à Port-au-Prince, à Haïti. Mlle Lalancette a une maîtrise en nursing de l'Université de Boston.

Mlle Claire Martin a une expérience au chevet du malade dans les hôpitaux de la province de Québec et au Vietnam. Elle a, de plus, de l'expérience en éducation infirmière à l'école traditionnelle et au CEGEP. Mlle Martin, qui détient un diplôme en hygiène, est présentement étudiante au niveau de la maîtrise à l'Université de Montréal. Finalement, je suis accompagnée de Mlle Nicole DuMouchel, directrice générale et secrétaire-registraire de notre association. Malgré son jeune âge, Mlle DuMouchel a une expérience très diversifiée. Elle a oeuvré dans le domaine de l'éducation, elle a acquis de l'expérience dans les différentes spécialités cliniques, dans un service de soins à domicile, dans les services infirmiers de l'armée.

A l'emploi du Conseil canadien d'accréditation des hôpitaux, elle a préparé des normes pour les soins à long terme. En plus de visiter plusieurs hôpitaux du Canada pour faire l'évaluation du service des soins infirmiers, Mlle DuMouchel possède une maîtrise en nursing (administration) de l'Université de Montréal.

M. le Président, nous avons l'honneur de présenter aux membres de la commission parlementaire le mémoire préparé par les membres de notre corporation sur les bills 250 et 273. Pour faciliter la manipulation des nombreux documents remis aux membres de la commission, nous avons pensé réunir nos deux mémoires dans une même brochure.

M. le Président, la présence de nombreuses infirmières et infirmiers ici ce matin prouve éloquemment l'intérêt que notre profession démontre à l'endroit de ces lois. En premier lieu, nous voulons féliciter et remercier le ministre des Affaires sociales d'avoir proposé une loi-cadre pour les professionnels de la santé et les autres professions. Nous sommes d'accord sur le principe de cette loi. De plus, nous voulons dire notre appréciation pour les modifications que le ministre a proposées la semaine dernière, lesquelles rendront plus autonomes les corporations.

Nous comprenons, M. le Président, que le code des professions a été préparé pour l'ensemble des corporations, qui totalisent environ 90,000 membres. Mais la nôtre, qui groupe à elle seule 40,000 membres, aurait de sérieuses difficultés à fonctionner sans l'obtention de quelques modifications. Tenant compte de notre nombre et également de notre représentation géographique, nous aimerions porter à l'attention des membres de la commission parlementaire quelques points ressortant de notre mémoire sur le bill 250 et ensuite traiter du bill 273.

L'article 18 du bill 250 impose aux corporations l'obligation de financer le conseil interprofessionnel au prorata de leurs membres. Nous soumettons aux membres de la commission qu'étant 40,000 nous financerons près de 50 p.c. des dépenses du conseil dont le travail par ailleurs n'a aucune relation avec le nombre de membres d'une corporation.

De plus, si nous comparons les salaires des membres de notre profession avec le revenu, par exemple, des avocats et des médecins, on peut dire que nous sommes des économiquement faibles. Nous demandons donc qu'une formule plus équitable soit établie et nous faisons entièrement confiance aux actuaires pour la trouver.

En ce qui concerne le fonds d'indemnisation, nous vous référons à notre mémoire, aux pages 5 et 6 qui font état de la non-utilité de cette mesure pour les membres de notre profession à qui on confie sa vie mais non son porte-monnaie. Dans le chapitre des assemblées générales, l'article 98 du bill no 250 établit à cent le quorum pour une corporation de 1,500 membres et plus. En outre, le droit de vote à

l'assemblée générale de la corporation est donné à tout membre présent à l'assemblée.

Etant donné toujours le grand nombre de membres, il n'y a, dans la province, que deux villes où nous pouvons tenir une assemblée générale, soit Montréal et Québec. En conséquence, les membres des autres régions de la province seraient lésés dans leurs droits. Nous demandons de conserver le statu quo, soit la formule que nous accorde notre loi actuelle: un délégué votant par 100 membres, dont les dépenses sont entièrement payées par l'association, que ce soit une déléguée des Iles-de-la-Madeleine ou de Chibougamau.

Cette façon de procéder consacre le principe de représentation régionale et assure plus de démocratie en permettant aux membres de toutes les régions de participer aux décisions. Sans cette façon de procéder, la corporation tomberait sous le contrôle, en fait, sinon de droit, des membres des régions de Montréal et de Québec.

M. CASTONGUAY: A Montréal, ce serait mauvais.

MLLE BUREAU: Je suis Québécoise. En ce qui concerne l'inspection professionnelle et le comité de discipline, Mlle DuMouchel traitera de ces sujets lors de la présentation de notre mémoire sur le bill no 273.

M. le Président, ces considérations sur le bill 250 n'ont qu'un seul objet, à savoir l'intérêt du public et assurer la participation égale de tous les membres de notre corporation à la bonne marche de ses affaires.

M. le Président, de notre mémoire sur le bill 273,...

M. CASTONGUAY: Est-ce que...

MLLE BUREAU: ... Loi des infirmières et infirmiers...

M. CASTONGUAY: Un instant, s'il vous plait.

MLLE BUREAU: Aimez-vous que nous procédions l'un après l'autre?

M. CASTONGUAY: Est-ce que les membres de la commission aimeraient que nous discutions ces trois points qui portent sur le code pour ne pas confondre deux ordres de questions différents?

M. LAURIN: Elle pourrait terminer ce qu'elle a à dire.

M. CASTONGUAY: Est-ce qu'elle a des remarques sur le bill 250?

MLLE BUREAU: C'est-à-dire que c'était sur l'inspection professionnelle...

M. CASTONGUAY: Ah bon!

MLLE BUREAU: ... et la discipline, que nous pensions passer avec le projet de loi 273. C'est que, dans notre projet de loi 273, nous demandons certaines particularités pour ne pas embêter les autres corporations dans le projet de loi 250. Nous sortons quelque chose du projet de loi 273 et nous y demandons des articles.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, c'est peut-être préférable qu'elle fasse l'exposé au complet et qu'on pose des questions en dernier parce que vous allez reparler, plus tard, du projet de loi 250.

MLLE BUREAU: Nous allons en parler tant que vous allez vouloir !

M. CASTONGUAY: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Continuez, mademoiselle.

MLLE BUREAU: Merci. Alors, de notre mémoire sur le bill 273, Loi des infirmières et des infirmiers, nous relèverons, au cours de cette présentation, quelques points seulement quitte à revenir aux autres au cours de la période des questions si les membres de la commission parlementaire le jugent à propos.

Etant donné le grand nombre de nos membres, indispensable d'ailleurs pour répondre aux besoins de la population, nous devons demander certaines particularités pour assurer le bon fonctionnement de notre association. Au lieu d'obliger les autres corporations à en tenir compte dans le bill 250, nous avons préféré les recommander dans notre projet de loi 273. Ces particularités ont trait, par exemple, aux vacances à combler au bureau, selon l'article 77 du bill 250. Il serait difficile pour les membres du bureau de choisir, en connaissance de cause parmi les membres de la section, la personne la mieux apte à remplir ce poste. C'est pourquoi nous demandons que les membres du conseil de la section concernée choisissent le remplaçant.

Nous proposons qu'un paragraphe soit ajouté à l'article 7 du projet de loi no 273.

Il en est de même pour l'élection du président, prévue à l'article 62 du bill 250. Il nous apparaît difficile, sinon impossible, de réaliser une élection au suffrage universel. D'une part, cette façon de procéder serait très onéreuse, représentant plusieurs milliers de dollars. D'autre part, les infirmières et les infirmiers susceptibles d'accepter ce poste étant des salariés, à peu près à 90 p.c, de l'Etat et ne possédant pas de caisse électorale, ne peuvent se permettre de parcourir la province pour se faire connaître.

A toute fins pratiques, les 40,000 membres choisiraient au hasard un nom apparaissant sur la liste des candidats. Nous croyons que les administrateurs du bureau élus, eux, au suffrage universel, dans leur section, sont mieux placés pour choisir, parmi eux, la personne la plus qualifiée pour remplir ce poste. Nous demandons donc de maintenir le statu quo.

Nos districts actuels s'appelleront désormais, selon la décision du législateur, des sections. Nous n'avons aucune objection à changer notre terminologie. Nous n'avons, non plus, aucune objection à changer le territoire des sections, bien au contraire. Toutefois, nous demandons au législateur le droit de diminuer ou d'augmenter le nombre de sections selon les besoins des membres, tout en conservant le minimum de onze que nous avons actuellement.

De même, en ce qui concerne la cotisation des sections, nous croyons que l'assemblée générale de l'association doit fixer les cotisations à être versées aux sections. C'est ce qui se fait présentement et l'expérience a démontré que le système fonctionne équitablement, à la satisfaction de tous nos membres.

Nous demandons également, en raison de la nature du travail et des heures de travail de nos membres, que chaque section fixe par règlement le nombre de ses conseillers.

D en est ainsi de l'exercice du droit de vote. Certaines sections, en raison de l'étendue de leur territoire, ne peuvent se permettre de demander à leurs membres de voter à un endroit désigné, car il y a des infirmières partout dans la province de Québec. Dans les endroits les plus éloignés, là où aucun autre professionnel de la santé ne veut ou ne peut aller, il y a une infirmière pour soigner la population.

Nous suggérons donc, afin de ne priver aucun membre de son droit de vote, de laisser à chaque section le soin de décider du mode d'élection, et cela par règlement.

En ce qui concerne le secret professionnel, nous avons la même position que les autres corporations.

Le poste de secrétaire-registraire est prévu dans notre loi actuelle. A notre avis, cette position est primordiale pour la bonne administration de la corporation. Le bill 273 ne le mentionnant pas, nous demandons d'ajouter un nouvel article.

Ceci étant dit, je demande à notre secrétaire-registraire, Mlle Nicole DuMouchel, de poursuivre cette présentation.

MLLE DUMOUCHEL: Merci, M. le Président. Tout d'abord, l'acte infirmier.

Nous félicitons le législateur pour son effort louable lorsqu'il tente de donner une définition de l'exercice de la profession infirmière. Au cours des séances de la commission parlementaire, nous avons constaté que plusieurs groupes ont déjà apporté leur interprétation de ce qu'ils croient être l'exercice infirmier. De plus, nous avons attentivement étudié toutes les éditions du journal des Débats.

Aujourd'hui, nous soumettons officiellement au législateur que les professionnels des soins infirmiers sont en mesure de présenter une définition plus précise et plus adéquate de l'acte infirmier. Cette définition énonce la nature intrinsèque de notre profession impliquée dans l'évolution de la société dont elle tente de satisfaire une certaine catégorie de besoins.

La définition, à la page 16 de notre mémoire sur le bill 273, proposée par nos experts en soins infirmiers émane d'une étude approfondie entreprise par divers groupes de notre profession, à savoir : spécialistes cliniques, administrateurs des soins infirmiers, éducateurs de niveau collégial et universitaire.

Cette définition est basée sur un contenu scientifique duquel découle tout ce qu'implique l'exercice complexe de notre profession.

La profession infirmière est constituée d'actes dépendants et indépendants. Les auteurs et l'expérience nous démontrent qu'un septième des actes accomplis par les infirmières et les infirmiers sont dépendants et que les six septièmes sont indépendants de la profession médicale.

Même dans l'accomplissement des actes dépendants, il demeure que l'infirmière et l'infirmier doivent constamment poser un jugement professionnel basé sur leurs connaissances scientifiques et leur expérience clinique. A titre d'exemple, le médecin prescrit un médicament au besoin. L'infirmière ou l'infirmier doit faire appel à son jugement, à son sens d'observation, à ses connaissances scientifiques et techniques concernant le médicament et l'état du malade pour décider de l'opportunité de l'administration dudit médicament.

Au cours de l'été, l'association a fait parvenir 8,000 questionnaires à ses membres dans le but d'identifier les activités des infirmières et infirmiers et circonscrire celles accomplies au-delà des frontières de la légalité. Soixante-treize pour cent des questionnaires envoyés ont été complétés et retournés. Les données obtenues illustrent la gravité du problème de la reconnaissance et de la protection légale du rôle de l'infirmière et de l'infirmier.

La documentation remise aux membres de la commission parlementaire contient les résultats partiels de cette étude qui démontrent entre autres que 83 p.c. des répondants du comté de Saint-Louis effectuent illégalement des accouchements en l'absence du médecin. C'est un acte médical. Quatre-ving-cinq pour cent des répondants des Iles-de-la-Madeleine installent des transfusions sanguines, pratique illégale de la médecine. Soixante-quatre pour cent des répondants du comté de Montmagny rupturent les membranes lors du travail de la parturiente sur prescription médicale. Quatre-vingt-cinq pour cent des répondants du comté de Dorchester administrent un médicament intraveineux. Soixante-quatre pour cent des répondants du comté de Bourget agissent comme premier assistant lors d'intervention chirurgicale. Qu'adviendrait-il si le chirurgien devait être remplacé immédiatement?

L'infirmière et l'infirmier auraient-ils la compétence pour continuer l'intervention? Soixante-cinq pour cent des répondants du comté de Louis-Hébert donnent illégalement des immunisations.

Ce ne sont là que quelques exemples sélec-

tionnés non pas au hasard pour illustrer une situation courante dans la province, puisque notre enquête a révélé que 55 p.c. des infirmières et infirmiers, soit approximativement 20,000 de nos membres, posent ces actes frontières illégaux.

Tout en reconnaissant que l'infirmière et l'infirmier assument tant de responsabilités et distribuent tant de soins dans l'illégalité, nous soutenons que, dans la plupart des situations, l'infirmière et l'infirmier possèdent les connaissances et l'habileté nécessaires à l'accomplissement de ces activités.

Devant ces faits, nous sommes convaincus que le législateur se rendra aux demandes de l'association et régularisera la situation dans l'intérêt de la population. Nous tenons également à rappeler que le rôle de l'infirmière et de l'infirmier est suffisamment constitué d'actes indépendants des autres professionnels de la santé pour que l'association recommande une définition axée sur l'essence même de la profession infirmière, à savoir l'identification de l'état et des besoins de santé, la promotion de la santé, la prévention de la maladie, le traitement, la réadaptation et l'enseignement de la clientèle. Nous n'avons pas d'objection à ce que le législateur donne aux autres professionnels de la santé les termes promotion de la santé et prévention de la maladie dans leur définition.

Ce serait même souhaitable que les professionnels de la santé soient orientés vers la santé plutôt que vers le curatif. Ces termes dans notre définition font partie de l'essence même de notre profession et doivent se retrouver dans tous les actes de notre exercice.

L'inspection professionnelle. A partir de cette définition de l'acte infirmier, l'association aura un bon instrument pour mettre en marche des mécanismes d'appréciation de l'exercice de la profession partout où elle s'exerce. Le bill 250 donne cette responsabilité aux corporations professionnelles. L'association accepte cette responsabilité et s'engage à maintenir des standards élevés de soins aux bénéfices de la population. Encore faut-il, pour s'acquitter de cette responsabilité, que l'association soit nantie de l'autorité lui permettant d'appliquer les mécanismes d'évaluation nécessaires.

C'est ce que l'association réclame dans son mémoire. Nous reconnaissons le rôle de la direction générale de l'accréditation dans l'évaluation des divers secteurs pour assurer la qualité des services rendus à la population. Le rôle de l'Etat à ce plan est important, si l'on veut rehausser la qualité des services. Voilà pourquoi l'association s'est toujours fait un devoir de communiquer avec le ministère des Affaires sociales, autrefois le ministère de la Santé, dès qu'un problème majeur de qualité des services infirmiers était porté à son attention. Au cours des deux dernières années, l'association a transmis à la division de l'accréditation au moins une dizaine de cas problèmes qui relevaient de sa compétence, afin qu'une évaluation appropriée soit effectuée par une infirmière ou un infirmier compétent.

Cette situation est due largement à l'absence de normes de qualité. Il est impérieux de remédier à cette situation déplorable.

Conséquemment, dans son mémoire, l'association demande respectueusement de participer activement à l'élaboration desdites normes et ce pour la sécurité de la population. Nous retrouvons, parmi nos 40,000 membres, des experts en soins infirmiers préparés au niveau du doctorat, de la maîtrise, du baccalauréat ainsi que des infirmières possédant une vaste et riche expérience clinique.

Ces personnes sont aptes à travailler efficacement à l'élaboration de normes de qualité quant aux soins. D'ailleurs, plusieurs pays étrangers et le Canada entier reconnaissent la compétence des infirmières du Québec puisque plusieurs d'entre elles participent activement à des comités internationaux, nationaux et provinciaux. En ce qui a trait à l'exercice infirmier, nous soumettons au législateur que l'association est l'organisme le plus en mesure de définir les critères d'évaluation et de développer l'instrument approprié pour évaluer toutes les dimensions de l'exercice infirmier.

Nous acceptons que l'Etat et le public soient en mesure d'exiger que l'association s'acquitte adéquatement de ce rôle; néanmoins, il s'avère impérieux que les autorités des établissements de santé permettent à l'association d'accomplir son rôle sans entrave. Voilà pourquoi l'association demande au législateur de lui accorder ces mécanismes dans son projet de loi 273.

Conseil de discipline. L'inspection professionnelle systématique proposée par le code des professions à l'article 102 du bill 250 sera de nature à augmenter la responsabilité de la profession en matière de discipline. Nous faisons remarquer aux membres de cette commission qu'en vertu de notre loi actuelle, Statuts refondus du Québec 1964, chapitre 252, le travail disciplinaire s'effectue par notre corporation jusqu'à la limite des pouvoirs en vigueur. Trois membres de la permanence de notre association se sont occupés, jusqu'à présent, de remplir le rôle similaire à celui qui est prévu pour les syndics dans le code des professions.

De plus, le conseil de discipline se réunit aussi souvent que nécessaire pour régler les problèmes disciplinaires qui lui sont soumis. La corporation demande au législateur, en se référant à l'article 110 du bill 250, relativement à l'administration de la discipline des membres de l'association, d'ajouter par règlement quatre membres substituts au comité de discipline — pas parce que les infirmières sont moins disciplinées que les avocats ou les médecins — en raison 1) du grand nombre des membres de notre association qui, sans doute, générera beaucoup plus de cas de discipline qu'une corporation de 100 ou 1,000 ou 5,000 membres; 2) de la nature du travail des infirmières et des infirmiers. Leurs horaires variés de travail

rendent difficile la disponibilité des membres appelés à siéger au conseil de discipline.

Nous faisons remarquer aux membres de la commission qu'en vertu de notre loi actuelle, trois membres du bureau de l'association s'occupent activement de faire observer la loi par des enquêtes de première instance et le travail disciplinaire se poursuit activement par le conseil de discipline.

L'éducation. L'enseignement infirmier au Québec remonte à 1892. Nos premières infirmières canadiennes ont été formées par des élèves de Florence Nightingale. L'ABPQ a été parmi les premières corporations d'infirmières à obtenir une reconnaissance légale au Canada et l'éducation a été l'une de ses principales préoccupations. A preuve, notre loi actuelle touche les aspects suivants: l'admission à l'étude, l'admission à l'exercice de la profession, le contrôle des conditions nécessaires à l'ouverture d'une école, la certification régulière des écoles par le moyen de visiteuses affectées à plein temps au contrôle des programmes offerts dans les centres d'éducation.

Le présent projet de loi semble vouloir enlever à notre corporation une responsabilité dont elle s'est toujours acquittée avec honneur et nous prive de droits acquis sans motif apparent.

L'étude des projets de loi chapeautés par le code des professions nous permet de constater que neuf professions ont conservé les droits acquis sur le contrôle de l'éducation; quatre professions n'avaient pas droit de regard sur l'éducation de leurs professionnels et l'ont acquis; quatre autres n'ont rien gagné et trois ont perdu leurs droits acquis, à savoir: les médecins vétérinaires, les ingénieurs forestiers et les infirmières et infirmiers.

Par ailleurs, le législateur augmente les pouvoirs et les obligations de notre corporation vis-à-vis du contrôle des actes professionnels. La corporation, à notre avis, pour s'acquitter adéquatement de cette dernière responsabilité, doit continuer à exercer, en collaboration avec le ministère de l'Education ou les universités, selon le cas, le droit de regard sur les conditions d'admission à l'étude et à l'exercice de la profession, les programmes, leur coordination et leur adaptation aux besoins.

Ce que l'association réclame, c'est une participation à part entière à la formation de la catégorie des professionnels de la santé dont elle assume la responsabilité légale. Elle réclame que ce droit lui soit conservé, tout d'abord, parce qu'elle ne croit pas avoir failli à la tâche dans le passé. Elle croit que, dans le système présent où l'éducation infirmière est étatisée, l'efficacité de l'action d'un organisme apolitique est nécessaire pour assurer la réforme en profondeur de notre système pédagogique. Elle croit aussi que c'est au sein de ses membres que se trouvent les vrais spécialistes de l'éducation infirmière. Elle réclame encore ce droit parce qu'au cours des cinq dernières années où les infirmières et infirmiers ont été formés dans les collèges elle a été à même de constater les faiblesses du système actuel, concernant surtout la mise en application des normes préconisées par la commission royale d'enquête sur l'éducation, dite commission Parent, le mode de contrôle et de coordination des programmes, les nombreux problèmes qui existent au sein des options "techniques infirmières", problèmes qui jusqu'à ce jour n'ont eu ni l'attention, ni l'étude, ni les solutions appropriées de la part du ministère de l'Education.

La compétence du personnel enseignant dans les quarante options "techniques infirmières" dans les CEGEP préoccupe beaucoup l'association et elle a tenté, par tous les moyens possibles, d'augmenter cette qualité chez les professeurs au niveau de la formation infirmière. Le rapport Parent avait préconisé un système d'évaluation et d'agrément ou, si vous le préférez, d'accréditation des collèges et même des options à l'intérieur de ces derniers. Jusqu'à ce jour, aucun mécanisme n'a encore été ébauché pour l'établissement de ces normes d'évaluation et d'agrément. Cette recommandation du rapport Parent est, à notre avis, un élément essentiel à la réforme en profondeur de l'éducation.

L'AIPQ est fortement intéressée à s'engager activement dans un tel projet, puisqu'elle veut continuer d'assurer au public la qualité des soins infirmiers dont il a besoin.

Un dernier point reste à traiter, la situation des infirmières et infirmiers auxiliaires ou auxiliaires en nursing. L'association, à la demande du ministère de la Santé, a, depuis 1943, volontairement assumé des responsabilités similaires à celles qu'elle remplit dans le domaine de l'éducation infirmière et de l'exercice infirmier. L'auxiliaire en nursing joue un rôle important dans les soins infirmiers. Le public et ce groupe ont droit d'être protégés. A cet effet, l'association recommande au législateur que ce groupe soit protégé par un organisme légalement reconnu; que l'association puisse établir des normes en collaboration avec l'organisme qui les régira; que ces personnes prodiguent des soins infirmiers sous la responsabilité directe d'une infirmière ou d'un infirmier.

Je demande à la présidente de vous transmettre le mot de la fin.

MLLE BUREAU: M. le Président, j'aimerais souligner que l'ensemble de nos membres appuient les positions et les recommandations que nous présentons ce matin. Nous avons sur la table des dossiers qui contiennent 7,000 signatures de nos membres, recueillies pendant la période des vacances, venant de tous les comtés de la province, appuyant en particulier la définition de l'acte infirmier et le droit de regard de la corporation sur la formation des membres.

En terminant cette présentation, nous désirons rappeler aux législateurs que, s'ils accor-

dent à notre profession la définition de l'acte infirmier que nous soumettons, ils seront les premiers dans le monde à reconnaître légalement le rôle de l'infirmière et de l'infirmier. Les infirmières de la Californie obtiendront probablement cette reconnaissance sous peu. Permettez-moi de vous faire part d'un télégramme reçu ce matin: "La présidente et le conseil d'administration de l'Association des infirmières canadiennes vous assurent de leur appui dans vos démarches auprès de la commission parlementaire, tout en espérant que vos demandes seront prises en considération". On nous souhaite bon succès.

Je puis vous dire, M. le Président, que toutes les infirmières et les infirmiers des provinces canadiennes ont les yeux tournés vers la province de Québec, cette semaine.

Nous sommes à votre disposition pour la période des questions.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. le ministre.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais faire un bref rappel de la situation qui existe dans le domaine de la législation touchant les corporations professionnelles depuis un certain nombre d'années. On se souvient, par exemple, qu'en 1965 ou 1966, on avait atteint un certain degré de confusion. Je me souviens de l'époque où le premier ministre avait jugé nécessaire de former un comité. Il avait confié, à l'époque, un mandat à Me Yves Pratte et au Dr Laurent Lizotte, je crois, qui portait notamment sur les problèmes qui font l'objet de nos discussions aujourd'hui. Les orientations à prendre étaient extrêmement embrouillées, difficiles. Depuis, un travail énorme a été fait, aussi bien de la part des infirmières et infirmiers — particulièrement le travail de consultation que vous avez effectué — que de la part du gouvernement — j'inclus le gouvernement précédent qui avait formé la commission d'enquête — de telle sorte que nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation où il me semble que les problèmes sont clairement posés. Des solutions sont proposées également. Il est possible, comme vous le souhaitez, de faire vraiment des pas vers l'avant dans la bonne voie.

En même temps, je crois que les faits que vous nous exposez dans vos mémoires démontrent une fois de plus jusqu'à quel point la loi que nous étudions — même si comme je le comprends fort bien — a pu susciter des inquiétudes. Il convient de dissiper ces inquiétudes le plus rapidement possible. Il n'en demeure pas moins que ces faits, ces recommandations, ces propositions que vous formulez indiquent jusqu'à quel point cette nouvelle loi est nécessaire.

Cela étant dit, j'aurais un bon nombre de commentaires et de questions à poser. Je vais les reprendre dans le même ordre que les représentantes de l'association ont fait leur exposé.

On a mentionné d'abord, à l'article 19, la question du financement au prorata du conseil interprofessionnel qui pourrait faire porter un fardeau trop lourd sur l'Association des infirmières et des infirmiers. Lorsque j'ai annoncé, la semaine dernière, un certain nombre de changements au bill no 250, j'ai indiqué que cette formule serait éliminée dans la nouvelle version de ce bill, de telle sorte que les membres participants du conseil interprofessionnel déterminent eux-mêmes le mode de financement qu'ils jugeront le plus approprié. Compte tenu de votre nombre, de votre éloquence, j'ai l'impression que la part que vous assumerez du financement de cet organisme sera équitable. Je ne doute pas que vous serez en mesure de faire un aussi bon travail qu'un actuaire pourrait le faire.

Quant au fonds d'indemnisation dont il est question dans le bill 250, les fins d'un tel fonds d'indemnisation n'étaient pas tellement précises. On a craint que ce fonds puisse être appelé à dédommager des personnes qui auraient pu subir des préjudices ou des dommages sur le plan professionnel. Ceci n'est pas le but de ce fonds. Alors, nous en avons discuté à la suite des représentations qui ont été faites, aussi bien par les organismes que par les membres de la commission des affaires sociales. Je l'ai mentionné, lorsque j'ai annoncé les changements, que nous croyons, à ce moment-ci, nécessaire d'apporter au bill 250. J'ai mentionné que ce serait seulement utilisé si une personne, dans sa relation avec un professionnel, lui confiait, en fiducie, en quelque sorte, des sommes et que ce professionnel se les appropriait d'une manière frauduleuse. Ceci signifie donc que, pour un très grand nombre de corporations, l'établissement d'un fonds d'indemnisation sera presque nominal s'il n'y a pas de transaction. Je ne sais pas si dans votre cas — ce serait une question à discuter aussi bien avec l'Office des professions que le Conseil interprofessionnel — il n'y a pas certaines infirmières, qui sont dans la pratique privée, qui peuvent être placées dans cette situation. Si, de toute façon, cela ne se produit pas, à ce moment le fonds d'indemnisation pourra être constitué de façon purement nominale, advenant que, théoriquement, cela puisse se produire. Alors, on ne veut pas imposer une nouvelle charge.

Quant à la question du quorum aux assemblées générales, vous proposez que la formule d'un délégué par 100 membres soit retenue. J'avoue qu'ici notre seul et unique souci, c'est d'assurer une représentation équitable à l'occasion d'assemblées générales où des décisions importantes sont prises. Ce n'est pas notre intention d'imposer un fardeau financier additionnel ou une procédure qui pourrait paraître trop lourde ou impraticable. Cette suggestion de retenir les dispositions de la loi actuelle me parait extrêmement valable. Je ne vois pas ce qui pourrait faire en sorte que nous ne la retenions pas.

Vous êtes passée, par la suite, au bill 273.

Là, vous avez traité de certaines questions, au début, qui sont reliées au bill 250. Vous nous avez dit que, dans l'article 77, lorsqu'il y a une vacance au bureau, au lieu que la procédure générale soit utilisée, qu'il vous paraîtrait préférable que la vacance soit comblée par le conseil régional qui avait élu le membre qu'il faut remplacer. Encore là, étant donné le nombre de vos membres, encore une fois le souci d'une représentation équitable de tous les groupements, particulièrement sur le plan géographique, il me paraît que vous faites là une recommandation qui semble tout à fait juste. Encore une fois, je ne vois pas pourquoi nous devrions la refuser, étant donné qu'elle s'inscrit dans le même objectif que celui que nous recherchons.

Quant à l'élection du président du bureau, vous nous dites que le suffrage universel pourrait entraîner des frais élevés. Vous demandez que les dispositions actuelles soient maintenues. Ici, je voudrais simplement mentionner que, dans certains cas, certains groupements professionnels ont démontré une préférence marquée pour le suffrage universel pour diverses raisons qui sont valables, je crois. Alors, c'est la raison pour laquelle nous allons, dans les dispositions du bill 250, à moins de changement d'ici la présentation définitive du bill, présenter une option. La corporation qui voudra procéder par l'élection du président au sein des membres du bureau pourra le faire. La corporation qui voudra procéder par voie de suffrage universel pourra le faire. H y a des avantages et des inconvénients à chaque formule.

Nous proposerons donc dans la version définitive du bill 250, à moins de changement, que les membres décident quelle procédure leur paraît la plus appropriée.

Egalement, en ce qui a trait au niveau des cotisations, je crois qu'on revient au même problème que pour le Conseil interprofessionnel. Vous demandez que chaque section puisse jouer un rôle bien précis au moment de l'établissement des cotisations. Ce qui nous parait le plus important, c'est que le niveau des cotisations soit établi au moment d'une assemblée générale. Je pense que c'est un principe sain. Que cela soit fait au moment d'assemblées générales qui couvrent l'ensemble du territoire ou d'assemblées générales régionales, surtout lorsqu'une corporation compte un grand nombre de membres, il n'y a rien qui s'y oppose en principe. A mon sens, encore là, il s'agit d'une recommandation qui nécessite d'être examinée très attentivement. Je ne vois pas encore au premier abord, pourquoi nous nous y opposerions. A mon sens, je crois que c'est une autre recommandation qui doit être retenue.

Quant au poste de secrétaire-registraire, qui est prévu dans la loi, on demande un nouvel article. Nous allons l'étudier attentivement. Pour le moment, je ne suis pas en mesure de dire ce qu'il contient. J'ai plutôt voulu suivre attentivement votre exposé qu'aller regarder bien spécifiquement ce que dit cet article. Alors, nous pourrons y revenir au besoin.

Nous passons, à mon sens, à la question — j'aurais ici des questions à vous adresser — qui est probablement la plus importante. Je pense bien que cela a été le message, aussi, que vous avez voulu nous transmettre, celui de la définition de l'exercice de votre profession. Vous avez posé ce que vous avez appelé le problème des actes frontières illégaux.

Il est clair qu'au cours des années le rôle de l'infirmière, aussi bien dans la pratique que par sa formation, a évolué grandement. Ce que l'infirmière d'aujourd'hui fait, dans bien des cas, peut correspondre à ce que le médecin, il y a trente ans, faisait. Bien des fois, les gestes qu'elle pose ont un contenu scientifique et imposent une responsabilité qui est énormément différente de celle que l'infirmière d'il y a vingt ans, d'il y a trente ans avait. La législation doit tenir compte de cette situation. C'est clair, pour diverses raisons. Premièrement, la législation doit être, autant que possible, en conformité avec la réalité. C'est ainsi que les programmes de formation pourront suivre, c'est ainsi que les problèmes de responsabilité professionnelle qui existent présentement pourront être réglés. Nous en sommes bien conscients. Vous nous avez soumis, à plusieurs reprises, des situations extrêmement difficiles. Nous étions placés, comme gouvernement ou comme ministère, dans une situation tout aussi difficile que celle dans laquelle se trouvent vos membres et vous, comme association, puisque nous avons présentement un cadre législatif et que, malgré notre désir de vouloir apporter des réponses aux problèmes que vous nous avez soumis, il n'en demeure pas moins que nous, également, sommes tenus par ces lois. C'est une des choses qu'il nous faut modifier.

Nous sommes d'accord sur la nécessité d'une nouvelle définition de ce qui constitue l'exercice de la profession. Nous devons, toutefois, faire extrêmement attention, de telle sorte que cette définition soit suffisamment précise pour tenir compte de la réalité et qu'elle ne nous place pas dans une situation difficile, même si elle est beaucoup plus adéquate, au plan strictement professionnel —cela aussi, c'est important, parce que cela peut faire l'objet de litiges, comme vous le savez — mais règle aussi le problème.

A ce sujet, j'aurais une suggestion à faire. Je la fais dans un esprit extrêmement positif, d'autant plus que je vous dis que nous sommes d'accord sur la nécessité d'avoir une nouvelle définition.

Nous avons fait un effort dans le projet de loi, et cet effort n'est pas définitif. Tout comme vous proposez pour les auxiliaires de pouvoir déléguer des actes dans certaines conditions, nous nous demandons, étant donné que la plupart des actes qui créent des problèmes sont des actes qui sont de la nature d'actes médicaux, s'ils n'en sont pas ou s'ils en sont. Je

pense bien que ça ne donne rien de tourner autour des termes. Je me souviens qu'on m'avait dit, à l'occasion de la commission d'enquête, quand j'avais rencontré un groupe d'infirmières: Nous posons plus que des actes infirmiers, mais un petit peu moins que des actes médicaux. J'avais demandé de quoi il s'agissait exactement, et on m'avait donné une description qui m'avait donné l'impression qu'elles faisaient de la médecine. C'étaient des infirmières de colonie.

Je mentionne uniquement ça parce que ça ne donne rien de tourner autour des mots, de maintenir une équivoque. A mon sens, un grand nombre d'actes que vous posez sont des actes de même nature que des actes médicaux. A cette fin-là et de la même façon que vous le proposez pour les auxiliaires, en plus de parfaire, de préciser la définition du champ d'exercice, nous nous demandons s'il n'y aurait pas lieu d'établir un mécanisme beaucoup plus formel et légal, cette fois-ci. Il viserait un peu les buts poursuivis lorsque la classification des fonctions du personnel infirmier a été faite en 1967. Cette fois-ci, dans la loi médicale, dans votre loi, nous retrouverions des dispositions de telle sorte qu'une certaine série d'actes pourraient être établis, définis, précisés. Ces actes, lorsqu'ils seraient posés dans les conditions prescrites — c'est un peu le même esprit que vous avez en ce qui a trait aux auxiliaires— seraient légalement posés par les infirmières.

Peu importe la définition, on va toujours garder une certaine marge d'incertitude. On ne pourra pas dire dans votre définition que vous faites de la médecine. On ne pourra pas dire que vous posez des actes médicaux et que votre profession fait en sorte que votre exercice est celui de la médecine. On ne peut pas dire ça. On ne peut pas avoir la même définition que nous avons pour l'exercice de la médecine.

Il faut avoir une définition beaucoup plus à jour, beaucoup plus précise, mais on ne sera pas capable, malgré tout, à mon sens, de régler ces cas frontières dont vous parlez. Je me demande, après avoir examiné bien des possibilités, après avoir lu votre mémoire et surtout après avoir vu la proposition que vous faites vous-mêmes, si un tel mécanisme pourrait être approprié à votre avis. Je pense à un mécanisme en vertu duquel — et dans la loi médicale et fort probablement dans votre loi — une liste d'actes serait établie après consultation entre les deux organismes. Lorsque posés dans les conditions prescrites ils ne seraient pas posés de façon illégale.

C'est la première question que j'ai, je vous la propose, je ne vous demande pas une réponse définitive — je sais qu'elle a des implications — mais j'aimerais, si possible, connaître vos commentaires. C'est probablement le problème le plus épineux auquel vous avez à faire face, auquel nous avons à faire face et auquel les médecins ont à faire face également.

MLLE BUREAU: C'est certainement, M. le ministre, la question. Les infirmières et les infirmiers de la province de Québec sont devant un dilemme plusieurs fois par jour: poser un acte médical illégal et peut-être encourir une pénalisation, ou bien laisser souffrir ou mourir un patient. C'est un dilemme que nous connaissons, que nous essayons de résoudre pour le bien-être de la population. Je remercie le ministre Castonguay de vouloir trouver une solution légale et nous tirer d'embarras.

Je vais donner la parole à des gens plus compétents que moi dans le domaine. Pour ma part, à première vue, je peux vous dire qu'une liste, c'est toujours limitatif. Et c'est un carcan. Nous savons comment cela n'est pas facile d'obtenir des amendements à une loi.

M. CASTONGUAY: Me permettez-vous une explication pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté?

MLLE BUREAU: Oui.

M. CASTONGUAY: Je ne vois pas cette liste comme étant inscrite dans une loi...

MLLE BUREAU: Ah bon!

M. CASTONGUAY: ... mais plutôt dans un règlement qui pourrait être mis à jour en consultation périodique entre le Collège des médecins et l'Association des infirmières.

MLLE BUREAU: C'est une autre question. Je crois que c'est une suggestion à retenir et je vais demander à Mlle DuMouchel d'apporter des précisions là-dessus.

MLLE DUMOUCHEL: M. le ministre, nous avons entrepris d'analyser le 1/7 de nos actes infirmiers, par notre questionnaire cet été, mais vous remarquez, sur le document que nous vous avons remis, que c'est écrit "Etude partielle". Nous avons l'intention, par une recherche approfondie et scientifique, d'élaborer justement ce que vous proposez pour, ensuite — nous avons eu des rencontres avec le Collège des médecins au cours de cette année entre nos voyages à Québec — discuter ce point-là: Comment on pourrait élaborer des normes. Je crois que le principe d'élaborer des normes conjointement serait acceptable et bon, mais il ne faut pas, non plus, entrer, comme le disait Mlle Bureau, dans une liste qui va nous imposer le même carcan et nous causer le même problème que nous avons actuellement avec un certain fascicule.

Je crois que le principe est bon, mais qu'il doit se baser sur une recherche scientifique indépendante pour les deux corporations, soit le Collège des médecins et l'Association des infirmières. Lorsque les deux auront des données scientifiques, il faudra se réunir et ceci devra se faire dans un temps assez court. Nous en sommes très conscientes. Je crois que le principe de nous obliger, par un article de la loi,

à travailler est très sain. Lorsque nous avons eu à définir le nursing en quinze jours — parce que nous avions 30 jours pour donner nos commentaires à la commission parlementaire — nous avons pensé que nous étions un peu...

M. CASTONGUAY: Mais vous étiez au travail depuis des années.

MLLE DUMOUCHEL: ... cinglées de faire cela en quinze jours. Mais, parce que nous étions obligées, nous l'avons fait. Nous croyons que notre définition répond à l'exercice actuel et à l'exercice futur tant dans la santé communautaire, l'industrie, le milieu scolaire et l'intégration des services de santé que dans le milieu hospitalier ultra-spécialisé et l'hôpital régional. Nous croyons que la définition est malléable. Il reste tout le travail de recherche à faire. Nous sommes prêtes à le faire et je crois que nous forcer à travailler par un article de loi qui demande aux deux corporations d'établir des normes serait très sain. C'est mon opinion.

M. CASTONGUAY: Pour être bien précis, à mon sens, dans ce que je propose, il faudrait aller plus loin que des normes. Il faut aller aussi à des actes très précis.

MLLE DUMOUCHEL: Oui.

M. CASTONGUAY: Parce que ce sont des actes que vous posez.

MLLE DUMOUCHEL: Oui, d'accord.

M. CASTONGUAY: Je comprends le commentaire de votre présidente qui dit qu'il ne faut pas, non plus, être enfermé dans un carcan. Je sais — et je l'ai mentionné au début — que nous sommes dans un champ en pleine évolution. C'est pourquoi cette liste et ces normes — je sais aussi qu'il doit y avoir des normes parce que cela doit se faire à l'intérieur d'un certain cadre — devraient être conçues dans un mécanisme qui permette sa mise à jour périodique, de telle sorte que, lorsque de nouveaux moyens, de nouvelles possibilités apparaissent, de l'avis des deux organismes professionnels mandatés spécifiquement pour contrôler ces actes, ils puissent être inscrits au fur et à mesure.

Nous sommes bien conscients du fait que cette classification n'a aucune valeur légale et qu'elle s'est figée dans le temps. Alors, même si c'était un travail valable qui a été fait, il peut nous inspirer pour trouver un mécanisme, à ce moment-ci, encore plus adéquat. C'est le sens de la proposition.

MLLE DUMOUCHEL: Nous sommes d'accord sur vos commentaires. Je crois que c'est l'esprit qui était à la base de notre décision lorsque nous avons pensé à élaborer une classification de fonctions, si vous voulez l'appeler ainsi. C'est même dans cet esprit que l'association a entrepris le travail de recherche pour déterminer les fonctions que peut accomplir l'étudiant comme travailleur de la santé.

Alors c'est un travail que l'association a entrepris et a mené à bonne fin au cours de l'année, pour justement essayer de régulariser la situation du milieu étudiant mais il s'est basé sur ce principe de classification de fonctions.

MLLE BUREAU: M. le Président, est-ce que vous me permettez d'ajouter quelque chose?

M. LE PRESIDENT: Oui.

MLLE BUREAU: Au niveau national, un comité mixte a été formé, l'Association des médecins du Canada et l'Association des infirmières canadiennes, pour étudier les actes qui peuvent être transmis du médecin à l'infirmière. Seize actes ont été acceptés de part et d'autre. Cette nouvelle fera peut-être plaisir au ministre car ces seize actes, qui ne seront pas faits par le médecin mais par l'infirmière, économiseront $54 millions aux contribuables.

M. CASTONGUAY: Est-ce qu'on pourrait avoir une copie de cette liste? Je suis sérieux.

MLLE DUMOUCHEL: Ces seize actes. Nous vous en enverrons la copie, M. le ministre, et nous sommes à votre disposition pour ajouter d'autres actes. Il n'y en a que seize.

M. CASTONGUAY: Très bien. Alors j'apprécierais énormément avoir copie de cette liste.

Quant à la question des normes de qualité, il y a deux aspects à cette question, je crois. Il y a celles qui sont établies par la direction de l'agrément ou de l'accréditation du ministère. Ce sont des normes qui, à notre avis, revêtent un caractère minimal sur le plan de la sécurité, etc. Et, jusqu'ici, dans les diverses normes qui ont été préparées, nous avons pris un soin particulier de consulter tous les organismes intéressés.

Le travail d'élaboration a été beaucoup plus lent que nous ne le croyions au départ et je sais que dans certains cas nous n'avons pas encore atteint la phase d'élaboration de certains types de normes. Nous avons voulu aller vers ce qui nous paraissait le plus pressé — par exemple, les normes de sécurité sur le plan des incendies — d'autant plus que nous savions que, dans d'autres secteurs, les circonstances, par l'existence de personnel qualifié, etc., accordaient une beaucoup plus grande protection de façon générale.

Alors, on s'est fait un ordre de priorités et, dans chaque cas où nous avons élaboré des normes, — c'est un travail qui est long et difficile — nous avons élaboré un processus de consultation. Par exemple, cet été nous avons publié les normes sur les colonies de vacances, il y a eu de multiples consultations; ainsi quant

aux normes de sécurité sur le plan des incendies, etc. Alors, nous procédons graduellement, mais c'est notre intention, dans chaque cas, de toujours consulter.

Il y a aussi d'autres normes qui se situent à un niveau différent des normes visant à l'excellence, et à la préparation de ces normes, vous nous demandez de pouvoir participer de façon officielle par la voie de votre association, de votre corporation. Encore, nous croyons important justement que les associations jouent un rôle dynamique sur ce plan-là.

Certaines corporations se sont acquittées de cette fonction de plus en plus. Je pense à divers documents que le Collège des médecins a publiés au cours des deux ou trois années sur certains types bien précis d'activités et nous croyons que ce mouvement doit s'accélérer et que les associations ou les corporations professionnelles doivent y participer de façon active.

Vous nous avez également parlé du comité d'inspection professionnelle et nous sommes conscients, par les mémoires qui ont été étudiés déjà à la commission, qu'il y avait une certaine ambiguïté entre le rôle de ce comité d'inspection professionnelle et le comité de discipline. Lorsque j'ai mentionné les changements qu'à ce moment-ci nous croyons nécessaire d'apporter, nous avons voulu enlever cette ambiguïté. Pour nous, le comité d'inspection professionnelle n'est pas de la même nature que le comité de discipline.

Il doit justement jouer un rôle dans le même sens, c'est-à-dire un rôle d'évaluation positive de telle sorte que les besoins en recyclage, les besoins de formation continue ou permanente soient identifiés. Tout ce qui, dans le bill 250, pouvait donner l'impression que le comité d'inspection professionnelle revêtait un caractère disciplinaire nous allons l'enlever et, au besoin, nous allons mettre l'accent sur le caractère positif du travail d'un tel comité. Dans notre esprit, ce sont deux choses tout à fait différentes.

En même temps, en faisant cette clarification nous ne porterons pas un jugement sur le travail fait par les comités de discipline dans une corporation donnée. Quant au comité de discipline lui-même, nous savons également — cette représentation nous a été faite par d'autres organismes — que la rédaction pouvait donner l'impression que ce comité était composé d'un nombre de membres indiqué et que ce devait être toujours les mêmes membres, de telle sorte que, dans un organisme où les membres sont très nombreux, on en viendrait à avoir pratiquement des personnes à temps plein à ces comités. Encore une fois, sur ce point-là le texte va être clarifié.

Ce qui nous paraît important, c'est que le président soit un avocat, qu'il ait un certain nombre d'année d'expérience, qu'il soit nommé après consultation du Barreau, pour ne pas qu'il soit nommé pour d'autres motifs que ceux qui vont l'intéresser dans sa fonction, et les mem- bres qui l'assisteront pourront être choisis parmi une liste dressée par le bureau. Selon le volume de travail, il sera possible de répartir ce travail parmi un certain nombre de membres.

Quant à la question de l'éducation, je voudrais vous référer à l'article 169 e), la question de la formation, de l'évaluation. Nous allons préciser cet article parce que nous croyons d'abord, comme vous l'avez mentionné, qu'il est dans l'esprit du rapport Parent. Nous croyons également qu'il est nécessaire de revoir les mécanismes pour éviter les conflits comme ceux que nous avons vécus. Je n'ai qu'à donner à titre d'exemple celui entre le Collège des dentistes et les facultés d'art dentaire où l'université décerne son diplôme et le collège dit: Nous devons reprendre tout notre procédé d'évaluation pour voir si nous devons admettre ces étudiants.

Nous avons proposé dans cet article, et cela s'applique à l'Association des infirmières, ce qui nous parait être des dispositions dans l'esprit du rapport de la commission d'enquête sur l'éducation, c'est-à-dire que les corporations professionnelles, de par la loi, participent au mécanisme d'élaboration des programmes de formation dans les établissements d'enseignement, les universités, les CEGEP, etc., de même que dans les mécanismes d'évaluation des étudiants. Là, je sais que l'article 169 e), dans son texte actuel, ne parle pas d'évaluation. C'est une addition que nous devrons faire. Nous croyons qu'ainsi il sera possible, au lieu de toujours vivre dans une situation de conflit possible, d'associer ceux qui voient à la fonne formation scolaire et dont c'est la responsabilité, les institutions d'enseignement, et les corporations professionnelles qui doivent se préoccuper de la bonne formation professionnelle, de telle sorte que les membres qu'ils admettent soient aptes à pratiquer.

Ceci étant dit, ces dispositions de l'article 169 e) ne doivent pas et ne peuvent pas être interprétées comme réduisant ou amoindrissant le droit d'une corporation professionnelle de déterminer qui elle admet dans ses rangs. Ce droit, cette responsabilité doit demeurer celle de la corporation professionnelle. J'espère que ces commentaires, que ces modifications que nous allons apporter répondent aux représentations que vous avez faites.

Enfin, quant aux représentations ou aux recommandations que vous formulez en ce qui a trait aux infirmières auxiliaires, à mon sens ce sont des recommandations qui me paraissent très pertinentes et qui s'apparentent à la suggestion que j'ai formulée pour vous-mêmes par rapport aux médecins.

M. le Président, avant que nous passions la parole à d'autres membres de la commission, étant donné que j'ai soulevé un bon nombre de points, on devrait demander aux porte-parole de l'association s'ils ont des commentaires à faire. Est-ce que les membres de la commission seraient d'accord?

M. LE PRESIDENT: Allez!

MLLE BUREAU: Juste un petit commentaire, je vais passer la parole à Mlle DuMouchel après. M. le Président, j'aimerais bien que le ministère de l'Education interprète l'article 169 e) dans le même sens que le ministère des Affaires sociales.

MLLE DUMOUCHEL: Pour faire suite à ce que Mlle Bureau dit, on nous a officiellement, dans des rencontres conjointes, ministère de l'Education, Association des infirmières, bien informés qu'avec le nouveau projet de loi nous n'aurions plus rien à faire dans l'éducation et que, même si nous voulions maintenant faire respecter notre loi, ce n'était pas important. Cela a été dit officiellement, écrit dans des procès-verbaux.

On voudrait bien que l'interprétation soit très claire.

M. CASTONGUAY: Mlle DuMouchel, est-ce que — vous nous dites c'est de l'information officielle — je pourrais avoir, pas nécessairement le...

MLLE DUMOUCHEL: Le procès-verbal, je vous l'enverrai, M. le ministre.

M. CASTONGUAY: S'il vous plaît, parce que ce n'est pas conforme aux dispositions du projet de loi. Je suis conscient, nous sommes bien conscients, du fait que les corporations professionnelles doivent jouer un rôle, elles ont une responsabilité lorsqu'elles admettent des membres. Tout comme les universités, les CEGEP ont une responsabilité, les corporations professionnelles en ont une.

Il ne s'agit pas, à mon avis, de garder cette situation de conflit mais d'essayer d'associer les corporations et les établissements d'enseignement. Ainsi chacun pourra assumer pleinement ses responsabilités sans que ce soient les étudiants qui en souffrent.

MLLE DUMOUCHEL: Nous nous questionnons sur la force de frappe d'une disposition qui dit que par règlement on peut laisser à la corporation le choix de participer. Avec une loi, actuellement, qui nous oblige à participer et nous oblige à assurer un contrôle, nous n'arrivons pas. Est-ce que par règlement nous aurions autant de force de frappe? Je ne crois pas que les problèmes que nous avons actuellement seront réglés totalement par les bonnes interprétations du ministre des Affaires sociales. Si, avec la loi actuelle, nous ne pouvons pas faire respecter notre responsabilité et que nous nous acharnons à remplir cette responsabilité envers et contre tous, nous ne pourrons pas, par un simple règlement, avoir la force de frappe nécessaire.

En ce qui regarde l'inspection professionnelle, nous ne la voyons pas comme entrant en conflit avec la discipline. Au contraire. Nous ne l'avons pas fait de façon systématique parce que notre loi ne nous permet pas d'entrer dans les centres de santé pour l'évaluation de l'exercice infirmier. Mais nous avons eu une expérience pilote, au cours de l'année, où nous avons fait une inspection professionnelle d'actes infirmiers, d'exercice de la profession dans un centre où il avait été dit publiquement que les infirmières étaient incompétentes. Nous sommes allés faire l'évaluation et nous avons, à la demande de l'administrateur de ce centre, envoyé le rapport au ministre des Affaires sociales. Les infirmières exerçaient avec compétence. Les problèmes qui pouvaient se manifester dans ce centre ne dépendaient pas de la compétence de l'infirmière mais plutôt d'autres variables qu'il n'étaient pas de notre ressort d'évaluer. Cela était plutôt, à la division de l'accréditation de le faire.

Nous voyons la division de l'accréditation faire l'évaluation de la qualité de la dispensation de services et nous, d'actes professionnels. Et nous n'en voyons pas le conflit. Quant au conseil de discipline, nous sommes très heureux de voir que nous pourrons avoir plusieurs conseils de discipline pour avoir une bonne représentation des divers secteurs d'infirmières. Ils pourront évaluer les membres, par exemple une infirmière spécialisée en psychiatrie, une infirmière en éducation, une infirmière praticienne, si la compétence est mise en question.

Actuellement, nous ne pouvons pas, avec notre loi, évaluer la compétence et en discuter. Nous le faisons par extension parce que nous ne voulons pas laisser auprès du public des gens qui ne seraient pas aptes à exercer. Nous le faisons en disant "manquement au devoir professionnel." C'est une extension d'une interprétation, selon nos conseillers juridiques.

En ce qui a trait à la discipline et à l'inspection professionnelle, nous ne voyons pas de contre-indication, mais nous devons avoir les instruments pour pouvoir entrer dans les centres de santé, de sorte qu'il n'y ait pas d'entrave et qu'on ne nous dise pas: Ce n'est pas pour vous autres; c'est seulement pour les médecins ou qu'on ne dise pas: Ce n'est pas écrit dans telle loi, ce n'est pas dit que vous pouvez le faire. On ne peut pas vous donner les dossiers, on ne le dit pas. Il faut penser que les interprétations du ministre sont très larges; elles englobent tout le secteur de la santé. L'interprétation d'un administrateur, à quelque niveau qu'il soit.soit infirmier, soit hospitalier, soit industriel ne serait peut-être pas aussi globale et il n'aurait peut-être pas la même perception que le ministre des Affaires sociales.

MLLE BUREAU: M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais mettre l'emphase sur la formation de nos membres, parce que c'est très important. Nous serions désireuses d'avoir un article à ce sujet dans notre loi no 273. Je crois qu'on a donné aux chiros, dans leur projet de

loi, un droit de regard sur la formation. Nous voudrions que ce soit dans la loi afin que les gens n'interprètent pas différemment les règlements.

M. CASTONGUAY: On ne peut pas interpréter cela comme signifiant que vous êtes en communion d'idées avec les chiros.

MLLE BUREAU: Non, ce n'est pas ici que nous communions.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que je tiens pour acquis que cela met fin à vos commentaires à la suite des différentes questions du ministre?

Avant de céder la parole au député de Montmagny, je signale aux membres de la commission que le député de Chicoutimi m'a donné préavis de son intention de poser quelques questions très brèves. Après, nous reviendrons au député de Montmagny.

M.CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je m'oppose à cette procédure, parce que je devais présenter le député de Chicoutimi avec toute la préparation que cela exige et dire que c'est son état de célibataire qui le force à se pencher davantage sur le problème des infirmières. Personne ne m'en voudra de faire cette remarque, avant que le député de Chicoutimi ne pose ses questions.

M. LE PRESIDENT: Votre objection est valable.

M.CLOUTIER (Montmagny): J'aurais un bref commentaire à faire à la suite de l'échange qu'on vient d'entendre entre le ministre des Affaires sociales et les porte-parole de l'Association des infirmières. Evidemment, la commission est bien consciente des problèmes non seulement ce matin, mais également par des travaux connexes que nous poursuivons. Une autre commission siège pour le bill no 65 et les règlements du bill no 65. Des problèmes qui rejoignent ceux qui ont été mentionnés, ce matin, sont discutés également à cette commission.

Nous étions conscients et nous avions prévu l'importance des problèmes qui sont exposés devant la commission. Le ministre a dit, dans son exposé, que les commissions d'enquête et les travaux qui ont été faits depuis quelques années, travaux auxquels vous avez été associés de très près dans certains cas, d'un peu plus loin dans d'autres cas, ont permis de mettre le doigt sur les problèmes et de faire l'exposé de ces problèmes. Tout le monde est d'accord là-dessus. Les problèmes sont maintenant posés. Mais cela ne veut pas dire que c'est le législateur qui va apporter toutes les réponses. Ce n'est pas le bill no 250 et ce ne sont pas les lois spécifiques, quelle que soit la qualité du bill no 273, qui vont régler tous ces problèmes, même avec les modifications que le ministre a laissé entrevoir.

Il a été assez généreux avec les infirmières. Le ministre prenait note jusqu'à présent et, devant les infirmières, il n'a pu résister à la pression et a annoncé des modifications. Il laisse entendre qu'il y en aura. D'ailleurs, cela aurait été de 1'héroisme aussi de garder cela jusqu'au mois de novembre.

Les problèmes sont posés, mais je voudrais faire une remarque ici. Cela ne veut pas dire que c'est le législateur qui va apporter toutes les réponses. Les corporations professionnelles qui sont venues devant la commission ont une large part de responsabilités.

On l'a vu encore ce matin dans la suggestion qui a été faite et qui a été reçue favorablement, je crois. C'est que les médecins, d'une part, et les infirmières, d'autre part, discutent des problèmes qui les confrontent et ils s'entendent sur une liste d'actes médicaux. A chaque séance de la commission, ce problème a été posé, celui des zones frontières, la définition du champ d'exercice des professions, surtout dans le domaine de la santé. Cela a été posé ailleurs aussi. Mais dans le domaine de la santé, c'est tellement évident, c'est tellement patent que c'est là où la réponse va être apportée davantage par les corporations professionnelles elles-mêmes, à partir du moment où elles auront l'outil, qui va être chacune des lois spécifiques, et le bill 250.

Je remarque également que les médecins sont toujours au centre. Evidemment, c'est normal. Dans toutes les équipes de santé, dans toutes les corporations professionnelles de la santé, le médecin a toujours été au centre des préoccupations. Je le dis parce que le médecin va avoir une large part de responsabilités du fonctionnement harmonieux et de l'évolution future de toutes les sciences, de toutes les professions de la santé. Le médecin va avoir une responsabilité vis-à-vis des infirmières, il va avoir une responsabilité vis-à-vis des optométristes, il va avoir une responsabilité vis-à-vis des chiropra-ticiens, il va avoir une responsabilité vis-à-vis de toutes les corporations professionnelles et toutes les associations qui sont venues devant la commission. C'est un commentaire que je voulais faire ce matin tellement le fait est évident. Cela ressort à partir des suggestions qui ont été faites tantôt. Et, pour ma part, je considère que c'est une excellente suggestion que cette liste sur laquelle vous allez discuter et probablement vous entendre.

Je retiens deux problèmes majeurs sur lesquels je voudrais poser des questions et avoir des commentaires. D'autres de mes collègues — on l'a dit tantôt — voudront, également sur ces questions particulières, avoir davantage de renseignements.

Vous vous doutez bien que le premier des problèmes, c'est la définition de l'acte infirmier. J'ai, aujourd'hui ainsi qu'hier, pris connaissance de ce document d'analyse, que vous avez fait, d'échantillonnage des actes infirmiers posés dans certains comtés. J'ai été fort impressionné par les actes illégaux posés dans le comté de Louis-Hébert surtout!

M. CASTONGUAY: Elles sentaient la surveillance du ministre de façon plus immédiate. C'est pour cela qu'elles en posaient plus!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'elles en ont posé en vue de vous faire rire?

M. CLOUTIER (Montmagny): Je me suis demandé même si je n'avais pas manqué à mes responsabilités, durant quatre ans, pour que dans le comté de Louis-Hébert, en 1971 ou 1972, on pose des actes illégaux en médecine! M. le Président, c'est un échantillonnage. Je félicite l'association d'avoir fait ce travail de recherche qui n'est qu'un résultat partiel mais qui démontre éloquemment là où est le problème. Mais cela ne résout pas le problème.

Sur l'acte infirmier, j'ai lu votre définition, celle que vous proposez dans votre mémoire. Ma première question serait la suivante: Vous commencez comme suit: "Constitue l'exercice de la profession infirmière tout acte qui a pour objet d'identifier l'état et le besoin de santé". Je me suis arrêté là et je me suis demandé: Est-ce qu'il s'agirait d'un diagnostic? Quelle est la signification exacte à partir du moment où on dit "pour objet d'identifier l'état et les besoins de santé"? Parce que le médecin aussi identifie l'état et les besoins de santé quand un patient se présente à lui. Alors, quel est véritablement le sens que vous voulez donner à cette proposition?

MLLE BUREAU: Est-ce que nous devons répondre tout de suite, M. le Président?

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui.

MLLE BUREAU: Avant de vous donner la réponse, M. le député de Montmagny, j'aimerais apporter un petit commentaire. Vous dites, par exemple, que le médecin est au centre de toutes les décisions. Nous en sommes conscientes et nous trouvons que c'est justifié. Vous dites que nous avons été associées à quelques... Nous avons été aussi absentes. Nous avons déploré cette absence. Peut-être que cela aurait réglé des problèmes un peu plus tôt.

Par exemple, nous avons été absentes parmi les 26 membres de la commission Castonguay et nous sommes toujours absentes, malgré nos nombreuses représentations, au Conseil des affaires sociales et de la famille. Nous croyons que nous pourrions aider le ministre. Nous constatons aussi que, si nous sommes dans tous les postes éloignés de la province et nous y somme seules, il y a encore un endroit où nous sommes absentes, c'est dans les cadres supérieurs du ministère des Affaires sociales.

Lorsqu'il y a eu un précédent de créé, on a nommé un comptable ministre de la Santé, un deuxième, un actuaire, ministre des Affaires sociales, nous nous sommes réjouies.

M. CLOUTIER (Montmagny): II y avait eu

M. Kierans, auparavant, un économiste, qui s'occupait du ministère des Postes, aussi.

MLLE BUREAU: Cela a été pour nous un objet de réjouissance car nous nous sommes dit: Nous allons avoir un autre précédent: une infirmière nommée sous-ministre.

Nous avons plusieurs membres qui sont préparées à aider le ministre, à travailler avec lui au bien-être de la population. Nous savons fort bien que, tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Donc, nous attendons et nous espérons.

Mlle Claire Martin, qui a travaillé avec beaucoup d'autres à notre étude scientifique, va répondre à votre question, M. Cloutier.

M. CASTONGUAY: Je voudrais simplement faire un commentaire sur cette intervention. Ce qui me parait extrêmement important, comme ministre, c'est que lorsque nous avons besoin d'une expertise et que nous avons besoin de conseils éclairés sur une question, nous puissions nous adresser à des organismes comme votre corporation, à des gens qui sont dans la pratique. Une infirmière qui prendrait un poste de sous-ministre adjoint, chez nous, rapidement, à mon sens, deviendrait détachée ou isolée de la pratique; elle prendrait, assez souvent, beaucoup plus des caractéristiques d'un administrateur. On pourrait, bien souvent, être tenté d'écouter son opinion, pensant qu'elle est bien au fait de la situation, alors qu'elle est dissociée, dans une certaine mesure, de la pratique.

C'est pourquoi, tout comme dans le Conseil de pharmacologie, nous avons demandé à une centaine de professionnels de donner leurs avis sur l'établissement de la liste. Ainsi, dans l'établissement des normes, par exemple, nous consultons dans toute la mesure du possible. Je ne veux pas jeter une douche d'eau froide, mais je voulais aussi donner mon opinion sur cette question, expliquer mes gestes; parce que ce n'est pas un reflet sur la compétence professionnelle des infirmières, en aucune façon.

MLLE BUREAU: M. le Président, puis-je demander au ministre des Affaires sociales si cela s'applique aussi aux médecins qui sont sous-ministres?

M. CASTONGUAY: N'oubliez pas qu'anciennement ils étaient ministres et qu'aujourd'hui ils ne le sont plus!

MLLE BUREAU: On aura probablement une infirmière ministre !

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Une seule remarque, à l'endroit de la présidente. Elle suggère qu'il y ait une infirmière sous-ministre.

II y a déjà sept sous-ministres. Ira-t-elle là comme huitième, comme péché ou comme vertu?

MLLE BUREAU: Ce sera certainement une vertu. Nous n'en sommes pas à un huitième près. Ce sera peut-être la huitième merveille!

MLLE MARTIN: Pour répondre à votre question, c'est exact. Identifier l'état et les besoins de santé, c'est un diagnostic, mais un diagnostic nursing au lieu d'être un diagnostic médical, comme les médecins le posent.

Les médecins posent un diagnostic dans le cadre maladie. L'infirmière va le poser dans le cadre santé. C'est-à-dire que, lorsqu'elle se présente devant le malade, elle doit déceler les besoins, sur le plan biologique, sur le plan psychologique et sur le plan social et familial de la personne qui est hospitalisée. Cela s'étend jusque-là. Le médecin a moins de chances de le faire. Il est beaucoup moins présent auprès du malade. Mais l'infirmière a à considérer tous les besoins fondamentaux de l'être humain.

A partir de ce moment-là, elle doit identifier l'état et le besoin du malade qui lui fait face pour lui donner un soin complet, un soin total.

M. CLOUTIER (Montmagny): Cette proposition de définition avez-vous eu l'occasion d'en discuter avec le Collège des médecins? Hier, dans les déclarations que vous avez faites, il semble que — du moins d'après ce qu'en rapportent les journaux — vous aviez dit que le Collège des médecins et le ministre des Affaires sociales étaient d'accord pour la reconnaissance de l'acte infirmier.

MLLE MARTIN: Nous espérions que le ministre des Affaires sociales eût été d'accord. Quant au Collège des médecins, nous discutons toujours avec lui. Je crois que le Collège des médecins acceptait le principe qu'on pouvait se définir, qu'on pouvait illustrer dans une définition légale les champs d'exercice. Je crois que c'était le principe.

Nous avons certainement discuté de certains aspects. C'est surtout dans la partie médicale qu'ils ont été impliqués. Dans la partie nursing, je ne crois pas que nous avions à leur demander ce qu'était le nursing. Nous voulions leur dire ce que c'était le nursing et nous avons collaboré avec eux pour qu'ils nous disent quels étaient les actes délégués médicaux.

MLLE BUREAU: Vous vous souvenez que, lorsque le Collège des médecins s'est présenté ici, à la période des questions, ils avaient demandé d'enlever de notre définition la promotion de la santé ou de la donner à tous les professionnels de la santé. C'est le seul point.

Nous disons que nous devons la garder. Nous en avons besoin. Et nous demandons de l'ajouter aux autres. Si tous les professionnels de la santé font la promotion, la population du Québec ne s'en portera que mieux.

M. CLOUTIER (Montmagny): Effectivement, ils avaient mentionné ce point-là.

MLLE DUMOUCHEL: Si je peux me permettre une illustration, lorsque l'infirmière fait un traitement curatif, un pansement par exemple, si elle ne considère pas l'aspect de la promotion de la santé, la prévention des complications, l'éducation à la santé de son client ou de son malade, suivant que vous êtes en santé publique ou en cure, elle n'exerce pas sa profession complètement. Dans l'évaluation de l'exercice professionnel, ceci doit se retrouver dans tous les actes, même en cure. C'est pour cela que l'on dit que c'est l'essence même de notre profession, même au-delà des techniques.

M. CLOUTIER (Montmagny): Le député de Chicoutimi voulait enchafner sur ce sujet de l'acte infirmier. J'en ai discuté hier avec le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie mon collègue de me laisser, pour un moment, la parole. Je voudrais d'abord vous dire que je suis très ému de parler devant une assemblée de femmes aussi nombreuse, mais comme, par ailleurs, je suis habitué, à Chicoutimi, d'être entouré de femmes, mon émotion en est moins grande.

Le ministre a parlé tout à l'heure, à la suite des observations de Mlle Bureau, de ce danger qu'il y a, lorsqu'on fait des nominations, qu'un professionnel à quelque métier qu'il appartienne s'éloigne de sa profession. Je ne suis pas d'accord avec lui, parce que tous les députés qui exercent des professions, du fait qu'ils sont députés, ne sont pas pour autant privés de relations avec leur profession et des connaissances qu'ils avaient auparavant. Le ministre est peut-être dans cette situation, ce qui expliquerait qu'il n'y a pas de loi spéciale sur les actuaires.

Ceci étant dit, je voudrais poser une question à Mlle Bureau ou à Mlle Dumouchel sur ce que vous appelez précisément le diagnostic infirmier dont m'entretenaient aujourd'hui les représentants de l'Association des infirmières et infirmiers de ma région, qu'en passant je salue tout spécialement. Qu'est-ce exactement que le diagnostic infirmier?

MLLE BUREAU: Mlle DuMouchel va répondre.

MLLE DUMOUCHEL: Le diagnostic infirmier peut se retrouver de diverses façons. Je prends un exemple pour illustrer ce point. L'infirmière qui est en santé scolaire va poser des diagnostics infirmiers. Après avoir évalué, dans ses limites, si l'enfant ne fonctionne pas bien en milieu scolaire, elle va voir s'il y a un problème d'acuité, ce qui sera probablement le cas.

Le diagnostic médical sera posé et, s'il y a un problème d'acuité visuelle, le traitement sera

effectué. Mais l'infirmière va déceler qu'il y a un problème de santé qui empêche cet enfant de fonctionner.

Si le malade arrive en phase aiguë, par exemple, à la salle d'urgence, elle posera le diagnostic. Elle dira que le malade a besoin de radiographies, d'analyses, qu'il a besoin de voir un médecin immédiatement ou qu'il peut attendre quelques minutes. On peut lui donner des soins de base, comme faire baisser la température, etc. C'est un diagnostic de nursing.

La diète dont le malade a besoin, même si le médecin ne la prescrit pas, peut être un diagnostic de nursing. La diète d'un enfant qui est augmentée ou diminuée, c'est un diagnostic de nursing. La position du malade, pour qu'il n'y ait pas de complication et pas de plaies de lit, comme dirait Mlle Bureau, c'est un des grands actes de diagnostic de nursing parce que nous n'avons pas besoin du médecin pour nous dire qu'il faut tourner le malade, qu'il faut lui donner une bonne position. S'il y a une défaillance osseuse, le diagnostic médical dira: II faut tel traitement. Cela devient un traitement. C'est la prévention qui fait partie de tout l'acte infirmier. L'exercice respiratoire, c'est la même chose. Il faut préparer un malade qui est inquiet face à la chirurgie, il faut qu'il soit préparé pour bien respirer après. Ce sont des diagnostics de nursing.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il vous arrive, par exemple, lorsqu'il y a eu ordonnance par un médecin aux fins d'administrer un remède, de devoir, étant donné la connaissance que vous avez de l'état du patient à un moment précis, discontinuer l'administration d'un médicament?

MLLE DUMOUCHEL: C'est un problème que nous vivons quotidiennement dans les hôpitaux. C'est un problème que nous vivons beaucoup dans les régions éloignées. Mlle Martin pourra peut-être vous donner des chiffres.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la nature, vous savez. Ce ne sont pas tellement les chiffres.

MLLE DUMOUCHEL: Ceci se produit nécessairement. Par exemple, tout médicament qui est prescrit pour prendre au besoin, l'infirmière le donne ou ne le donne pas. C'est le jugement de l'infirmière. Il faut qu'elle le fasse selon des connaissances techniques. La surveillante du malade va nous donner les faits d'observation qui nous sont nécessaires pour prendre cette décision et elle communique avec le médecin immédiatement. Le médecin peut être à une autre activité médicale ou il peut être absent de l'hôpital et il faut prendre une décision. Nous ne pouvons pas laisser le malade en plan. Dans la salle d'urgence, par exemple, lorsqu'on attend qu'un médecin arrive pendant une heure, deux heures ou trois heures, il faut prendre une décision. Nous continuons ou nous discontinuons. Alors, nous pouvons dire: II a besoin de respirer, il a besoin d'oxygène. Nous essayons de diriger le malade pour qu'il ait les analyses nécessaires. Il y a certaines analyses de routine qui requièrent le jugement de l'infirmière.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Mlle DuMouchel, je comprends ce que vous entendez par le diagnostic infirmier. Est-ce que la situation dans laquelle vous vous trouvez très souvent dans des hôpitaux ou en dehors des hôpitaux fait que vous êtes empêchés de prendre contact rapidement avec le médecin et que cela vous oblige à poser des gestes que vous appelez de diagnostic infirmier qui ont des conséquences qui pourraient être éventuellement des conséquences légales?

MLLE DUMOUCHEL: Oui, régulièrement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous le devez faire régulièrement.

MLLE DUMOUCHEL: Surtout dans les régions éloignées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Surtout dans les régions éloignées.

MLLE DUMOUCHEL: En hémodialyse par exemple. Lorsque les traitements d'hémodialyse ont commencé, le médecin était toujours à côté de l'infirmier ou de l'infirmière qui travaillait dans ce secteur. C'est lui qui branchait les fils nécessaires, qui voyait à faire le traitement et qui dirigeait l'infirmière. Maintenant, le médecin n'est plus là aussi constamment et l'infirmière et l'infirmier prennent les actions nécessaires et vont même à domicile. Le médecin n'a qu'à donner un ordre médical et voir les effets du traitement de nursing qui est élaboré pendant son absence et qui est exécuté. Mlle Martin pourra certainement vous donner des chiffres très précis sur ce point.

MLLE MARTIN: A l'occasion du questionnaire, nous avons demandé des commentaires. Les infirmières nous ont répondu avec beaucoup de collaboration et j'ai un commentaire ici, M. le député, qui peut vous intéresser beaucoup. C'est bien écrit par l'infirmière en question, qui travaille dans une unité d'obstétrique. "La plupart des médecins ne viennent pas voir le patient durant le travail."

C'est donc l'infirmière qui a la responsabilité du travail de la pateinte au point de vue de l'évolution, de la modification, de la surveillance des signes vitaux, de la prévoyance des complications, dose des médicaments nécessaires à la patiente. Certains médecins ont des ordres permanents, mais l'infirmière doit juger quand il faut le donner et quelle dose donner. Alors, je ne sais pas si ça répond vraiment à votre question, c'est bien spécifique à une spécialité, mais je pense que le commentaire est très valable.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. C'est parfait, ce que vous me dites là, mademoiselle, et je suis très heureux d'entendre cela. Je ne suis pas un spécialiste de la médecine et c'est à ce titre précisément de non-spécialiste de la médecine que je tenais ce matin à être ici pour vous interroger.

Il me parait évidemment que la proposition de définition de l'acte infirmier que vous soumettez est nécessaire; en ce qui concerne évidemment le détail technique, scientifique, etc., je laisse au spécialiste le soin de le déterminer, afin que cela corresponde à des réalités médicales et corresponde aussi à l'idée que vous vous en faites. Mais cette proposition de reconnaissance d'un acte infirmier, veuillez croire que je l'endosse absolument, parce que je crois que c'est essentiel à votre profession, à sa valorisation, à sa survie et aussi à son expansion, puisque votre rôle — le ministre le soulignait et vous l'aviez vous-même souligné — a pris une dimension qu'il n'avait pas autrefois.

Par conséquent, à ce chapitre de l'acte infirmier, je suis d'accord avec vous, quitte, comme je le disais tantôt, à laisser aux spécialistes le soin de voir par quel mécanisme cela peut être intégré dans le cadre d'une loi. Maintenant, Mlle Bureau, vous avez parlé, on a parlé de ce problème, ce sont deux aspects majeurs de votre mémoire. Il y a l'acte infirmier comme tel, mais il y a un autre aspect majeur qui retient mon attention, c'est celui de la formation de l'infirmière et des exigences que vous avez formulées, afin d'exercer un contrôle sur la formation, l'accréditation, l'agrément des infirmiers ou infirmières.

Je vous pose une question précise ici. D'abord, est-ce que vous pouvez porter — ici il ne s'agit pas de dévaloriser qui que ce soit ou quoi que ce soit — un jugement de valeur sur la formation actuellement donnée dans les CEGEP? Au point de vue pratique, au point de vue théorique, est-ce que les étudiants qui sortent de ces maisons d'enseignement sont préparés à exercer la profession? Est-ce que vous jugez absolument essentiel, comme moi je le pense, que ces étudiants au sortir de l'école, du CEGEP, soient soumis à des examens, enfin des examens préparés par votre association et qui répondraient aux normes de préparation technique et aux qualités que vous exigez d'une infirmière et d'un infirmier?

MLLE BUREAU: Je vais répondre en partie et je vais demander à Mlle DuMouchel de compléter. Si vous voulez, au point de départ, nous allons dire que l'association a préconisé que la formation de nos membres s'intègre dans le système d'éducation. Nous croyons que, nous, les infirmières formées à l'école traditionnelle, avons été pénalisées en faveur de la société.

Pendant notre période de formation, tout le monde sait que nous étions auprès des malades à assurer du travail économique. Cela a aidé à ce moment-là à garder les services hospitaliers à un coût très bas. Lorsque nous étions en service de nuit, nous travaillions douze heures d'affilée, six nuits par semaine. Le ministre des Affaires sociales n'a pas connu ce temps-là. L'association avait préparé le programme et avait demandé qu'on procède par projet pilote. Ainsi, nous avions demandé que seulement trois CEGEP donnent l'option technique infirmière, qu'on attende que ces cégepiennes-là aient fini leur cours, qu'on fasse l'évaluation avant d'en commencer d'autres. Nous le regrettons. Nous ne regrettons pas la formation en CEGEP, remarquez bien, nous regrettons qu'autant d'options en techniques infirmières se soient ouvertes en même temps.

Nous aurions voulu pouvoir évaluer et ne pas nous défaire tout de suite de notre personnel de professeurs qui étaient dans des écoles traditionnelles, qui avaient une expérience, qui donnaient de très bons cours. Ces personnes ont été employées dans d'autres services et il y a eu à un moment donné pénurie de professeurs dans certains CEGEP, c'est une constatation. Nous avons préparé, à l'association, un programme d'orientation pour les cégépiennes qui arrivent sur le marché du travail.

Il ne faut pas oublier que ces infirmières arrivent en pleine période de vacances. Je ne suis pas une directrice de soins infirmiers dans un hôpital mais je les connais et elles me parlent de leur problèmes, entre autres, de leur budget global et de la norme. Je ne veux pas m'embar-quer dans des choses mais j'essaie de transmettre leurs inquiétudes. L'été, elles n'ont pas de personnel suffisant pour remplacer le personnel en vacances. En plus, elles doivent assumer la responsabilité du programme d'orientation de ces étudiantes. Il y a certainement des mécanismes à développer; M. le ministre doit nous rencontrer le 16 octobre et nous voulons en discuter avec lui.

C'est notre grande préoccupation pour l'année qui vient. L'année dernière, le ministre nous a tenues fort occupées. Nous allons certainement en discuter d'abord avec les directrices des soins infirmiers qui, elles, les reçoivent dans leurs hôpitaux et qui sont les plus aptes à faire l'évaluation. Il y a place pour l'amélioration, il serait dommage qu'il n'y ait plus de place pour l'évolution car cela voudrait dire que notre société a arrêté de progresser. Je demande à Mlle DuMouchel de compléter.

MLLE DUMOUCHEL: Nous croyons, à l'association, que la formation dans les collèges est valable; nous reconnaissons qu'il y a des problèmes, nous reconnaissons que les méthodes d'évaluation en cours de formation doivent être améliorées et que la formation des professeurs doit être augmentée. Nous reconnaissons aussi que les expériences dirigées des étudiantes et étudiants des collèges devraient s'intensifier tant quelquefois qualitativement que quantitativement. Nous essayons de travailler avec le

ministère de l'Education pour amener un programme amélioré continuellement.

Les directrices des soins infirmiers réalisent que maintenant nous avons à peu près 3,000 à 4,000 étudiantes et étudiants qui ont été admis à l'exercice de la profession sur le marché du travail; nous avons un très bon échantillonnage pour faire une évaluation plus systématique faite par l'employeur qui les reçoit. Quant à l'examen d'exercice, un centre d'éducation donne un examen pour évaluer les objectifs qu'il a proposés pour l'éducation. Il n'évalue pas nécessairement la compétence et l'application des connaissances à un milieu pratique, c'est le but de l'examen de l'admission à l'exercice. C'est un mécanisme humain et nous devons toujours continuer à chercher des mécanismes plus raffinés, plus spécialisés. L'examen d'admission à la pratique, pour ce qui concerne les soins infirmiers, se basent sur cinq spécialités cliniques et fait faire à l'étudiant l'adaptation de ses connaissances théoriques prises séparément, pas nécessairement toujours intégrées, malheureusement, à une situation pratique. C'est un examen objectif qui place l'étudiant dans une situation pratique.

De plus, cet examen réussi donne la parité avec les autres provinces, est reconnu par les autres provinces et est reconnu aussi pour celles qui passent au niveau national pour le secteur des examens de langue anglaise, un examen anglais, il est de parité nationale et permet au candidat qui a réussi de se présenter dans d'autres provinces, d'autres pays. Il n'y a pas de limite tellement rigide imposée aux autres pays; nécessairement, chaque pays est libre et peut poser certaines conditions. La parité est vraiment reconnue et c'est un moyen d'évaluation de normes à partir de normes minimums de sécurité et on est relativement certain que cet étudiant, qui a été évalué pendant sa formation, qui a rempli les conditions d'admission à l'étude et qui a subi avec succès ses examens pédagogiques du centre d'éducation, peut appliquer tout ceci à une situation pratique devant laquelle il est mis.

Il ne faut pas oublier non plus que les CEGEP se retrouvent à travers toute la province, les étudiants sont mis dans des variables différentes; par exemple, dans la région de Chicoutimi, les étudiants ont un certain champ clinique; dans la région de Montréal, il y en a un autre. Pour évaluer de façon systématique, on place les étudiants devant une variable identique qui est la sécurité et l'application pratique face à des situations de nursing.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): En résumé, Mlle DuMouchel, vous tenez à cette certification — si je peux employer ce terme — par votre association pour l'ensemble de ces étudiants qui proviennent des maisons d'enseignement CEGEP?

MLLE DUMOUCHEL: Jusqu'à ce qu'on nous présente une formule de sécurité totale dans d'autres niveaux. Ce n'est pas immuable, je crois qu'on désire l'examen d'admission à la pratique actuellement. Si nous avons l'assurance que nous avons des étudiants idéaux, avec des professeurs idéaux, travaillant dans des hôpitaux parfaits, des champs cliniques parfaits et des collèges magnifiques, nous considérerons peut-être de changer nos méthodes d'évaluation d'admission à la pratique.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mlle Bureau, vous avez fait référence tout à l'heure à l'article 169 où il est dit que le lieutenant-gouverneur en conseil peut par règlements déterminer les diplômes délivrés et fixer les modalités de participation de la corporation', etc. Est-ce que vous croyez suffisant que le gouvernement procède ici par règlements compte tenu de ce que le ministre a dit tout à l'heure, des explications qu'il a données? Est-ce que vous croyez nécessaire que cela soit inscrit dans le texte de loi comme tel ou si vous jugez suffisant que le gouvernement procède par voie de réglementation?

MLLE BUREAU: Je sais qu'on n'a pas le droit de poser des questions mais je peux m'en poser une à moi. Est-ce que ce serait suffisant, par exemple, pour le Collège des médecins, pour le Barreau, la Chambre des notaires? Nous avons la même obligation que ces professions de protéger le public.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je crois que vous posez là le problème d'une façon originale mais vous m'avez donné une réponse. En réalité, vous souhaiteriez que soit inscrite dans la loi une prescription exigeant que votre corporation en somme exerce le contrôle pour l'admission à la profession.

MLLE BUREAU: Je constate que notre compréhension réciproque est parfaite.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Nous sommes, mademoiselle, en communion d'idées. Tout ce que je déplore c'est de ne pas être indisposé aujourd'hui afin de pouvoir me faire traiter par chacune d'entre vous. Cela viendra peut-être avec mon âge. A tout événement... pardon?

M. LACROIX: On peut dire que vous avez l'air malade un peu.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Il sied en pareille circonstance d'avoir un air un peu particulier pour inciter à la sympathie, à la compassion. D'ailleurs, le ministre a toujours cet air là, c'est pour ça que les infirmières le traitent si bien aujourd'hui.

MLLE BUREAU: M. le député, vous m'ouvrez une porte pour vous dire que c'est impor-

tant dans la définition de l'acte infirmier d'avoir la promotion de la santé et la prévention.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est excellent, mademoiselle! Je vais vous consulter tout à l'heure, pour un diagnostic infirmier.

Mesdames, vous avez parlé de cette question de formation, d'évaluation et d'examens. Cela me parait absolument essentiel, absolument nécessaire et j'endosse les recommandations de votre mémoire, sous toutes réserves, bien entendu, des dispositions et de la formulation que le ministre voudra bien nous soumettre et soumettre ensuite par voie de réglementation.

Il y a évidemment dans votre mémoire un ensemble d'aspects: cotisation, fonds d'indemnisation, quorum, etc., tout ce que le ministre a discuté tout à l'heure, a évoqué au sujet duquel il entend apporter des solutions, enfin des amendements, je ne sais trop. Cet aspect plus particulièrement administratif ne retient pas mon attention, et ce, non pas que je ne le juge pas important.

Ce qui m'intéresse tout spécialement, ce matin, c'est que vous puissiez obtenir par voie juridique la reconnaissance que vous demandez de l'acte infirmier, premièrement — je suis entièrement d'accord avec vous — quitte, encore une fois, à le définir de façon précise ou selon ce que le ministre indiquait, même si cela ne correspond pas exactement à votre idée. Mais c'est à vous qu'il appartiendra de dire au ministre, au gouvernement et aux membres de la commission comment procéder.

En ce qui concerne l'éducation, la formation, je suis absolument d'accord avec vous parce que j'estime que votre profession, comme toutes les autres professions, doit quand même être contrôlée par ceux qui en sont membres, qui en sont responsables et cela, en vue de promouvoir l'intérêt public qui, en l'espèce, est la santé. Maintenant, tout ce que je voudrais ajouter, c'est que je souhaiterais que les membres de la commission, le ministre et le gouvernement accordent une attention bien particulière aux demandes qui ont été présentées par votre association.

Avant de terminer, j'aimerais vous poser une question. Il y a, dans votre association, beaucoup de femmes. Je crois qu'en 1967 on a apporté des amendements à la loi qui permettent aux hommes aussi d'y entrer, ce qui n'est pas mauvais, me dit-on. Est-ce qu'il y a beaucoup d'infirmiers masculins dans votre association, à l'heure actuelle?

MLLE BUREAU: Environ 800.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Environ 800. Cela veut dire qu'il y a eu une augmentation graduelle depuis 1967?

MLLE BUREAU: Je dois vous dire que les infirmiers ne font partie de notre association que depuis deux ans. Nous avons demandé l'amendement pendant sept ans.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et vous l'avez obtenu en 1967, nous étions là.

MLLE BUREAU: Nous étions désireuses d'avoir les hommes avec nous.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ça et nous vous les avons donnés. Moi, je serais désireux, comme vous en avez exprimé le désir, que le ministre requière vos services à titre de sous-ministre ou à d'autres postes aussi importants, même ministre éventuellement. Nous ferons appel à vous, mesdames.

Je ne veux pas insister davantage. Mesdames les infirmières ont répondu aux questions que je voulais poser. Je termine en assurant les infirmiers et infirmières de l'AIPQ que je suis entièrement d'accord sur les revendications majeures qui sont contenues dans le mémoire. Je vous remercie et je vous félicite, mesdames, du travail que vous avez accompli qui nous permet d'avoir une connaissance très précise, même très scientifique de ce qu'est votre profession et de l'importance du rôle que vous jouez dans les services de santé. J'espère que l'on pourra, enfin par voie législative ou autrement, éliminer tout ce qui constitue des points d'accrochage qui pourraient vous empêcher d'atteindre ce niveau de promotion que vous vous êtes acquis par votre dévouement auprès de la société.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, comme le député de Chicoutimi, dans sa dernière question, a posé ma première question, en évitant cependant, après avoir entendu ce qui a été dit, de parler de sexe fort ou de sexe faible. J'ai obtenu ma réponse. J'aimerais savoir une chose. On a parlé de nombre d'actes illégaux. Quelle est la part de l'infirmière dans les soins de santé, globalement?

MLLE BUREAU: Mlle DuMouchel.

MLLE DUMOUCHEL: Question très globale. Je vais essayer de répondre globalement sur la part de l'infirmière dans les soins de santé. Les infirmières, dans le milieu scolaire, font le dépistage, orientent vers les spécialistes de la médecine ce qui est décelé comme problèmes de santé; elles font de l'immunisation, elles font de l'éducation au point de vue des soins de la mère et de l'enfant. Nous avons une spécialiste, ici, en soins de la mère et de l'enfant, qui travaille dans un centre hospitalier à Sherbrooke à titre d'infirmière clinicienne pour donner aux parents tout ce dont ils ont besoin pour bien recevoir l'enfant et donner les soins de santé que cet enfant requiert. Il y a des infirmières dans les industries, dans les colonies. Leur apport est immense au point de vue des premiers soins, au point de vue de l'éducation sanitaire, au point de vue du dépistage et de l'orientation vers les centres médicaux. Il y a

l'infirmière qui travaille dans tous les secteurs des services cliniques de l'hôpital, nécessairement soins ultra-spécialisés, soins intensifs, services généraux des spécialités cliniques. Il y a des infirmières qui assistent les équipes multidisciplinaires en recherche de santé, en recherche médicale, en recherche clinique. Nous avons des infirmières qui travaillent aussi dans les unités sanitaires auprès des familles, dans les services de soins à domicile, parce que nos infirmières vont encore à domicile pour donner des soins. Elles travaillent soit dans un centre hospitalier de soins à domicile organisé ou dans un service infirmier à domicile. Ceci est réparti dans toute la province. Je ne sais pas si ça répond globalement à votre question, mais j'ai essayé d'illustrer les secteurs. Nécessairement, nous avons nos chercheurs, nos éducateurs, nos administrateurs pour diriger les équipes de nursing, pour donner le service total de soins infirmiers à la population.

M. GUAY: Ma deuxième question porte sur un sujet grandement discuté. Je vais quand même tenter de vous faire apporter certaines précisions, peut-être en termes de chiffres, si c'est possible. On a beaucoup parlé de l'acte illégal. Cela m'intéresse au plus haut point puisqu'on a dit, à plusieurs reprises, — et même je pense que le ministre l'a souligné— qu'on avait une pénurie de professionnels de la santé, actuellement. Si, demain matin, les infirmiers et infirmières se limitaient à poser ce qu'on a appelé, pour les besoins de la cause, l'acte légal, est-ce que les médecins pourraient suffire? Sinon, combien de médecins devraient être ajoutés à ceux qui sont déjà en place?

MLLE BUREAU: Quarante mille. M. GUAY: Quarante mille!

MLLE BUREAU: II n'y a pas un actuaire qui va pouvoir résister à un budget semblable !

M. GUAY: Si l'acte infirmier est décrit dans une liste, il est bien sûr que les membres de votre association devront respecter cette liste. Je me posais la question suivante tantôt, qui aurait été une question supplémentaire à celle qui a déjà été posée: Comment est-ce possible, pour vos membres, de respecter une telle liste, si vous n'avez pas le contrôle, premièrement, de la compétence, de la formation et de l'évaluation de l'acte infirmier? En fait, il y aurait peut-être des changements à apporter, ajuster les membres d'après la liste ou ajuster la liste d'après les membres.

MLLE DUMOUCHEL: Espérons que la liste sera basée sur les besoins.

M. GUAY: D'accord.

MLLE BUREAU: M. Guay, me permettez- vous de dire que c'est un problème épineux que vous touchez là? Des listes, ce sont des listes. Souvent, nous allons peut-être faire une liste qui va répondre à l'ensemble de la population, mais là où il n'y a pas de médecin, là où il y a un médecin pour 8,000 de population, par exemple, la liste ne sera peut-être pas la même que la liste pour Montréal. Il est très difficile de dresser une liste qui réponde aux besoins de la population de la province de Québec. Nous croyons, nous, à l'équipe multidisciplinaire.

Si vous permettez, j'aimerais que le conseiller juridique réponde là-dessus.

M. GUAY: D'accord.

M. DUCHESNEAU: M. le Président, nous avons fait distribuer, ce matin, des copies d'une décision rendue dans l'affaire Fillion versus Sainte-Justine et Magnan. Les principes énoncés dans cette décision, qui est une décision clé, se limitent un peu à ceci. C'est qu'en posant l'acte illégal, l'infirmier ou l'infirmière, automatiquement, engage sa responsabilité, même si l'acte est posé selon les normes établies, selon la qualité. D'ailleurs, le Dr Goldbloom avait agi comme expert dans cette cause, si je me rappelle bien. Alors automatiquement, en posant l'acte, même selon les qualités établies, selon les normes établies, l'infirmier ou l'infirmière engage sa responsabilité, s'il y a complication, alors que les autres professionnels n'ont pas d'obligation de résultats mais de moyens. S'ils agissent comme une personne raisonnable, selon la définition légale, ils sont dégagés de toute responsabilité s'il n'y a pas négligence grossière.

Ceci étant dit, la définition que nous proposons, surtout la deuxième partie de la définition, dit ceci: "Ainsi que le fait de prodiguer des soins selon prescription médicale ou selon les conditions du milieu ou du client et de contribuer aux méthodes de diagnostic, le tout compte tenu des connaissances scientifiques". C'est là que se pose la névralgie du problème. Pour remédier à cette névralgie, le ministre a suggéré, tout à l'heure, qu'il soit établi une liste, conjointement avec le Collège des médecins, pour établir, déterminer, légaliser les actes illégaux présentement posés.

Je soumets, M. le Président, que cette suggestion est excellente en soi mais ne résout pas le problème. Ce n'est pas une solution au problème. Je crois, cependant, que la philosophie de la proposition du ministre est acceptable, en ce que si la définition telle quelle est acceptée par le législateur, on devrait ajouter, à la définition, par les règlements du bill 65, que les méthodes de diagnostic et les connaissances scientifiques requises pour poser ces actes médicaux, dans certaines circonstances, dans certaines conditions, selon les conditions du milieu ou du client.

A ce moment-là, les normes devraient être établies conjointement entre le Collège des

médecins et la Corporation des infirmiers et infirmières. C'est la seule solution.

La proposition du ministre — je me répète — est bonne philosophiquement, dans sa pensée, mais pratiquement ne résout pas la difficulté. Comme proposition concrète, à la suggestion formulée par le ministre, je crois qu'on devrait ajouter dans la définition ou autrement: Que les méthodes de diagnostic et les connaissances scientifiques requises pour protéger la personne qui pose l'acte frontière soient déterminées conjointement par les médecins et les infirmiers et infirmières. C'est une proposition pratique, une proposition qui saura dégager la responsabilité. Croyez-moi, malgré que je sois avocat, j'ai maintenant subi un lessivage de cerveau complet et on pourrait presque m'accorder, peut-être... Non? On me dit non.

Je crois que, comme solution pratique, il faudrait se pencher sur notre proposition de plus près.

M. GOLDBLOOM: M. le Président, est-ce que je pourrais faire un bref commentaire en réponse à ce que vient de dire Me Duchesneau?

Premièrement, pour rétablir les faits, je n'ai pas été appelé comme expert dans la cause en question; j'ai été désigné par entente entre les parties arbitre résiduaire dans les problèmes entre l'hôpital Sainte-Justine et ses infirmières. Ce que je voudrais dire, c'est simplement que la formule proposée par mon collègue, M. Caston-guay, me sourit pour une raison très fondamentale. On sait qu'il y a, quant à la définition des champs d'action des diverses professions, chevauchement. Ce chevauchement existe nécessairement parce qu'il y a dans l'exercice des professions un certain chevauchement.

Il existe aussi parce qu'il n'y a pas moyen de donner une définition assez serrée pour éviter tout chevauchement. Ce qui compte dans tout ceci, ce n'est pas le fait qu'il y ait chevauchement et que ce chevauchement embête les professions concernées. Ce qui compte, c'est l'intérêt du malade, la protection — vous l'avez souligné — de la personne qui exerce une profession pour rendre service au malade et qui doit pouvoir rendre ces services sans crainte de poser un geste illégal à cause de mots inscrits sur papier.

Dans ce sens, je pense que la formule de retenir les définitions plutôt générales mais par règlements, selon des ententes, de régler les questions de relations entre les professions et celles de chevauchement de champ d'action, c'est une formule qui me sourit beaucoup. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci.

M. GUAY: J'ai encore quelques questions. On parle d'acte légal ou illégal. Il est bien sûr — et M. Duchesneau vient de le souligner — qu'il y aura toujours des conditions bien spéciales. Et une des conditions dans le domaine de la santé qui est plus souvent qu'à son tour spéciale, c'est l'urgence. L'infirmière ou l'infirmier devra juger. Nous avons discuté de la question de l'urgence et je ne voudrais pas y revenir parce qu'elle a été clarifiée en disant que c'est toujours le professionnel qui décide. Mais étant donné que l'infirmier ou l'infirmière doit à certains moments, pour la survie d'un patient ou pour tout autre raison majeure, décider si oui ou non on pose cet acte, comment l'infirmier ou l'infirmière pourra-t-il faire pour décider, étant donné que c'est le professionnel qui décide, si oui ou non c'est un cas d'urgence? A partir de là, je me pose la question suivante: Etant donné que le professionnel, en l'occuren-ce l'infirmier ou l'infirmière, ne peut pas décider à la place du médecin, du professionnel de la santé, en l'absence du médecin qui décidera en fait si l'acte est considéré comme illégal?

M. DUCHESNEAU: C'est le problème.

M. GUAY: C'est le grand problème qui se pose bien sûr. Je ne voudrais pas non plus que la profession d'infirmier devienne la profession tampon des professions médicales. On dit qu'on ne veut pas de chevauchement. Mais l'autre question se pose: Est-ce possible qu'il n'existe aucun chevauchement entre ces deux professions?

M. DUCHESNEAU: Non.

M. GUAY: D'après les discussions, cela semble absolument impossible. Nous avons parlé beaucoup de formation. Est-ce qu'il y a des tableaux comparatifs qui peuvent exister entre les différentes provinces canadiennes ou encore d'autres pays concernant le niveau de formation des infirmiers et des infirmières de la province de Québec? Où se situe-t-il?

MLLE BUREAU: Je suis très heureuse de votre question, M. Guay. Et sans nous vanter, nous sommes tous des Québécois ensemble, je puis dire que le nursing de la province de Québec est parmi les meilleurs du monde. Les infirmières de la province de Québec se trouvent de l'emploi très facilement aux Etats-Unis et elles sont reconnues pour leur compétence. Mais il ne faut pas oublier que nous avons accès dans la province de Québec — il y a des choses qu'il faut dire parfois — à toutes les techniques américaines.

Il nous reste encore ce qu'il y a de bon dans certaines traditions — par les infirmières de langue française, les traditions de saint Vincent de Paul; par les infirmières de langue anglaise, les traditions Florence Nightingale — qui rendent humaines les techniques américaines.

M. LAURIN: II ne faudrait pas que ça se perde, cependant.

MLLE BUREAU: Non, on vient vous voir ce matin parce qu'on veut le conserver.

UNE VOIX: Pour l'améliorer aussi.

MLLE BUREAU: On veut l'améliorer aussi.

M. GUAY: On a également dit qu'il devrait y avoir plus de collaboration entre le ministère de l'Education, le ministère des Affaires sociales et également dans la formation de vos membres. Actuellement, quelle est la collaboration du ministère de l'Education? Est-ce qu'il y a eu des rencontres, par exemple, entre les dirigeants de l'association et les fonctionnaires du ministère de l'Education pour savoir si éventuellement cette collaboration plus étroite pourrait devenir possible?

MLLE BUREAU: M. le Président, je dois vous dire qu'il a été possible de rencontrer les membres de la commission parlementaire. Il a été possible de rencontrer le ministre des Affaires sociales qui nous a accordé un rendez-vous de près de deux heures. Il a été possible de rencontrer le premier ministre quarante minutes, mais il n'a pas été possible, dans l'année, de rencontrer le ministre de l'Education.

Après avoir demandé plusieurs rendez-vous, nous avons rencontré un sous-ministre et, avec des personnes responsables du cours de formation au CEGEP, nous avions établi un mécanisme de collaboration. Nous y croyons, à la collaboration et nous la voulons. Nous pouvons dire que, jusqu'à aujourd'hui, la collaboration a peut-être été beaucoup dans un sens: AIPQ via le ministère de l'Education. Je comprends que les employés du ministère de l'Education sont peut-être débordés de travail. Nous le sommes aussi. Nous constatons que plusieurs ne se sont pas rendus à des rendez-vous qui étaient établis plusieurs semaines à l'avance.

M. GUAY: J'aurais une dernière question; ce serait également pour une clarification. On a soulevé des exemples de formation inadéquate dans certains cas, mais on a dit également que ce n'était pas le cas de vos membres. Moi, je serais intéressé à savoir si d'autres professionnels de la santé, par exemple les médecins, même les médecins spécialistes, ont porté à votre attention je ne sais pas, des griefs, à savoir qu'il y aurait lieu de changer actuellement l'orientation qui est donnée dans la formation de vos membres. Si on dit, par exemple, que des groupes sont incompétents, est-ce qu'on fait des représentations afin de corriger cette incompétence qui deviendra éventuellement de la compétence?

MLLE DUMOUCHEL: Nous avons rencontré des groupes de la médecine, par exemple, un groupe d'omnipraticiens, qui sont venus nous demander de l'information sur les inquiétudes qu'ils avaient face à la nouvelle formation infirmière. Lorsque des lacunes sont décelées, elles nous ont soulignées et nous essayons de les améliorer par notre consultante en éducation qui siège aux comités au ministère de l'Education, comités provinciaux des représentants des collèges, des options de nursing dans les collèges.

Nous discutons nécessairement avec le Collège des médecins de la définition de l'acte infirmier. De cette définition, il y aura certainement des orientations différentes sur certains points de vue dans la formation infirmière. Dans la formation infirmière aussi, avec les nouveaux objectifs du ministre des Affaires sociales sur l'intégration et la concentration sur l'aspect de la santé, nous avons fait beaucoup de travail auprès des professeurs à la base de la formation pour qu'Us donnent plus en profondeur le concept de la santé et qu'ils insistent beaucoup sur la promotion de la santé et que, dans tout acte infirmier, apparaisse toujours le concept de la santé.

Nous avons fait un gros travail auprès des professeurs, nous avons fait de l'évaluation dans les collèges; dans plusieurs endroits, cette évaluation est bienvenue, elle est demandée et, de plus, les collèges nous consultent régulièrement. Elle se fait à la base, mais elle n'est pas très acceptée des dirigeants au niveau du ministère de l'Education, sur le plan des directions générales. Nous travaillons aux comités, lorsque nous sommes invitées, mais parfois la participation n'est pas régulière.

Nous avons aussi demandé à la représentante infirmière qui s'occupe de 24 programmes différents au niveau collégial, tant de santé que de non-santé, de siéger à notre comité des écoles d'enseignement infirmier. Nous l'avons vue à quelques reprises à ce comité, mais la collaboration semble, comme le disait Mlle Bureau, à sens unique.

M. CASTONGUAY: C'est peut-être à l'Education que vous devriez avoir un sous-ministre adjoint.

MLLE BUREAU: Nous sommes d'accord pour en avoir aux deux ministères.

M. LE PRESIDENT: Avant de suspendre les travaux, je permettrai une question au député de D'Arcy-McGee, le Dr Goldbloom, et, à la suite, il y aura un commentaire du ministre des Affaires sociales.

M. GOLDBLOOM: Une petite question dont je m'excuse à l'avance. Mlle Bureau, n'avez-vous pas omis un ministre que vous avez rencontré un grand nombre de fois?

MLLE BUREAU: Je ne l'ai pas omis, je le gardais pour la fin.

M. LE PRESIDENT: La commission suspend ses travaux jusqu'à deux heures quinze cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

Reprise de la séance à 14 h 26

M. GIASSON (président de la commission spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!

Messieurs, la commission poursuit ses travaux et, au moment d'ajourner le débat, la parole était au député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, je vais commencer par une réflexion qui a été faite ce midi au café du parlement: Aujourd'hui au parlement, c'est un peu comme Loto-Québec, des infirmières il y en a partout !

J'aurais deux questions complémentaires à poser. Etant donné que la formation est différente en ce qui concerne les infirmiers et infirmières et les auxiliaires, est-ce qu'en pratique les actes des auxiliaires sont sensiblement les mêmes que ceux des infirmiers?

MLLE DUMOUCHEL: Ils doivent se faire selon la classification des fonctions sous la surveillance de l'infirmière. Certains actes de base techniques sont similaires. Mais l'infirmière le fait — nous l'espérons — différemment. Elle a une préparation plus scientifique et l'autre une préparation plus technique. Les deux vont faire le même acte mais nous espérons que l'infirmière va faire une évaluation plus approfondie de l'état du malade et de la mise en application des principes scientifiques pour répondre aux besoins du malade, tout en faisant un traitement de base qui pourrait être technique comme l'auxiliaire.

La description dans la brochure que nous vous avons remise montre qu'il y a des fonctions similaires mais vous voyez que pour l'infirmière il y a beaucoup plus de fonctions. C'est surtout au niveau de l'aspect technique que l'auxiliaire fonctionne, ou est habilitée à fonctionner, et seconde grandement l'infirmière.

M. GUAY: De quelle façon un patient en milieu hospitalier peut-il déterminer que c'est une infirmière ou une auxiliaire?

MLLE DUMOUCHEL: Les politiques internes de l'hôpital, dans certains milieux, demandent que les identifications apparaissent. Il y a le nom infirmière ou infirmière auxiliaire, à côté du nom. Il est très difficile, nous le constatons, pour le malade dans l'hôpital de différencier l'infirmier du médecin, le médecin du technicien de laboratoire. Pour tout le monde, tout ce qui est masculin est médecin et tout ce qui est féminin est infirmière.

C'est assez difficile pour le malade de faire une identification. Mlle Bureau pourrait peut-être clarifier.

MLLE BUREAU: Si vous me permettez, M. Guay, plusieurs de nos infirmiers se font appe- ler docteur mais nous espérons que le comportement et l'approche de l'infirmière vis-à-vis de son malade va la différencier de l'infirmière auxiliaire.

M. GUAY: D'accord. Probablement, comme dernière question — à moins qu'il y ait autre chose qui soit soulevé et cela m'intéresse — je me posais la question suivante, ce matin, un peu comme Mlle Bureau se posait des questions à elle-même. Si, par exemple, on décide dans une loi de limiter l'acte infirmier à ce qui est légalement permis, est-ce que, avec la formation ' que reçoivent vos membres actuellement, ils ne sont pas préparés à faire des actes qui sont dans l'illégalité? Est-ce que cette formation, si vous êtes limités par exemple à la légalité, ne dépasse pas les normes obligatoires pour répondre aux besoins des actes commis légalement?

MLLE DUMOUCHEL: La formation de base prépare à certains actes. Quant aux techniques, c'est toujours assez facile, par la formation en cours d'emploi, de les développer. Certains actes demandent une formation beaucoup plus poussée et c'est par la formation en cours d'emploi, par l'expérience ou par la formation formelle au niveau supérieur que l'infirmière va développer ses connaissances.

M. GUAY: Est-ce qu'on prévoit —je veux dire par là que si l'infirmière n'est pas limitée à ce qui existe actuellement — que vous avez la formation pour accomplir les actes qui sont commis... D'un autre côté, si la loi vous limite, à ce que j'appelle, des actes de moindre importance peut-être, ou ce qu'on appellera l'acte infirmier, mais actuellement, pour les actes commis de façon illégale, est-ce que vos membres ont la formation de poser ces actes?

MLLE BUREAU: M. Guay, si vous me permettez, je vais vous répondre. D'abord l'infirmière a la compétence voulue pour remplir les actes infirmiers qu'elle pose tous les jours. De plus, elle a les connaissances nécessaires pour poser les actes qu'on dit illégaux, médicaux, qu'elle fait actuellement. De sorte que pour répondre à votre question, si le législateur ne nous donnait pas une définition de l'acte infirmier ou de l'exercice de notre profession qui nous permette de poser légalement un septième de notre travail de tous les jours qui comporte des actes illégaux, nous avons les connaissances voulues pour les poser, puisque nous les posons actuellement dans toute la province et vous voyez le résultat, vous êtes tous en vie, mesdames et messieurs.

C'est donc que nous avons les connaissances voulues pour les poser. Si on ne nous permet pas, par la définition de notre exercice, de les poser à l'avenir, nous ne pourrons pas employer ces connaissances que nous avons acquises et cela coûtera des millions de dollars de plus aux contribuables de la province de Québec.

De toute façon, la population ne sera pas soignée parce qu'on n'a pas suffisamment de médecins pour répondre à ces besoins. Les médecins, présentement, sont débordés de travail.

M. GUAY: Une dernière question qui est connexe à celle-là: Est-ce qu'il y a, actuellement, des infirmiers ou des infirmières qui ont une formation dans un domaine spécialisé, ce qu'on appelle des infirmières spécialisées?

MLLE BUREAU: Si vous le voulez, je vais demander à Mlle Lalancette, qui a vraiment une spécialisation en soins de la mère et de l'enfant, de vous répondre?

M. GUAY: D'accord.

MLLE LALANCETTE: M. le Président, je pense bien, étant donné qu'on m'a présentée comme une infirmière spécialisée, qu'il en existe. Nous avons des infirmières qui, au-delà de leurs cours, soit de CEGEP ou d'hôpital, ont acquis une spécialisation dans un domaine clinique. Par exemple, nous en avons qui ont une préparation en psychiatrie. C'est un cours qui dure de neuf à douze mois. Nous en avons qui ont également une spécialisation en salle d'opération, en médecine-chirurgie, en soins de la mère ou soins de l'enfant. Egalement, nous avons des infirmières qui, au-delà du cours de CEGEP ou d'hôpital, ont complété un baccalauréat en sciences infirmières. De façon générale, il s'agit d'un baccalauréat général et non pas spécialisé. Nous en avons également d'autres qui ont fait les études postcollégiales ou préuniversitaires et qui, ensuite, ont fait leurs cours d'infirmière et baccalauréat d'un seul trait à l'université. Donc, nous avons des bacheliers ou des bachelières en sciences infirmières.

Nous avons, également, des infirmiers et des infirmières qui, au-delà du baccalauréat, ont complété des études spécialisées à un niveau de maîtrise, dont un certain nombre des maîtrises cliniques, soit en psychiatrie, soit en soins de la mère et de l'enfant ou en médecine-chirurgie. Peut-être qu'une question se pose dans vos esprits: Qu'est-ce qui fait la différence entre la personne qui est spécialisée immédiatement après le cours d'infirmière et celle qui l'est au niveau de la maîtrise? Est-ce que ce ne sont pas simplement des années gaspillées pour rien? Le cours de spécialisation fait immédiatement après un cours d'infirmière répond à des besoins des clients que nous soignons. Je crois qu'également nous avons besoin de personnes préparées à un niveau de maîtrise, qui, elles, sont habilitées, par un bagage de connaissances plus considérable, à développer la qualité des soins, à envisager davantage les besoins du client dans leur ensemble.

Ici, je voudrais vraiment faire la distinction entre le fait d'avoir le droit de poser tel, tel ou tel geste, que l'on peut parfois déléguer, et la possibilité d'envisager le client dans son ensemble, de diagnostiquer, comme on le disait, ce matin, son profil de santé, d'également diagnostiquer des problèmes de santé qui ne sautent pas aux yeux immédiatement, de façon à pouvoir planifier des soins dans un ensemble et à long terme, pour que, par exemple, on ne se contente pas de laisser partir un diabétique chez lui avec sa bouteille d'insuline et sa diète sur une feuille de papier, mais qu'on soit bien assuré que non seulement il sait administrer son traitement, mais qu'il sait suivre son état de santé lui-même. A ce jour, je ne pourrais pas vous citer des études qui ont documenté mon affirmation mais on pressent que certaines interventions faites font que le malade s'est davantage adapté à son problème de santé et, donc, est davantage en mesure de se maintenir en santé.

Je suis de plus en plus persuadée — j'ai certaines expériences cliniques pour le confirmer — que parfois, souvent même, on évite de nouvelles hospitalisations, parce que le client, qui s'est bien adapté à sa situation, parce qu'on l'a aidé, prend mieux soin de lui et demeure en meilleur état de santé. C'est peut-être à ces niveaux qu'on retrouvera l'action des personnes préparées à divers niveaux.

M. GUAY: Tout ce que vous avez énuméré, est-ce compris à l'intérieur du nursing?

MLLE LALANCETTE: Tout cela est du nursing. J'ai omis de signaler qu'on a également des personnes qui sont préparées au niveau du doctorat au nursing. Ces personnes ne sont pas très nombreuses mais il y en a aussi.

M. GUAY: M. le Président, il me reste à remercier l'association d'avoir, premièrement, présenté un mémoire qui est clair. Au moins, on peut dire sans se tromper qu'elle sait ce qu'elle veut. J'ajoute que ce que femme veut, le ministre doit le vouloir.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, mes premières remarques seront à l'effet d'excuser de son absence le chef parlementaire du parti et le responsable à cette commission, habituellement, le Dr Laurin, qui a dû partir pour d'autres engagements qu'il n'a pas été capable d'éliminer. Je dois quand même dire que la position que j'aurai à présenter, maintenant, sur le mémoire de l'association, est celle du parti. Même si je n'ai pas eu l'occasion, ce matin, d'écouter la défense assez brillante, m'a-t-on dit, de ce mémoire par les infirmières, je dois vous dire que j'ai été soumis aux soins intensifs du Dr Laurin pendant l'heure du dîner et que, comme cela, c'est un peu comme si j'y avais assisté, tout en parcourant le mémoire...

M. CASTONGUAY: En tant que psychiatre ou en tant que spécialiste de la commission?

M. CHARRON: En tant que membre de la commission parlementaire. En tant que psychiatre c'est comme député simplement. La remarque portait sur trois points en particulier que vous avez mis de l'avant ce matin dans la présentation du mémoire. La première porte sur l'exercice professionnel et que vous défendez à la page 15 de votre mémoire. Et après avoir écouté attentivement la défense de votre demande de diagnostic et la querelle autour du mot "diagnostic" entre vous et d'autres corporations professionnelles, et aussi la définition très large et très difficile en même temps à préciser qu'on peut donner à la médecine préventive, ou la prévention, après avoir écouté aussi la réponse que le ministre vous a formulée ce matin, nous en sommes venus à la conclusion que nous croyons que le projet de loi, le code des professions, ne devrait pas contenir à cet effet une définition trop précise, trop stricte du diagnostic et de la prévention.

Car une fois que cette définition précise aura été faite, elle pourrait, à notre avis, d'une part, arrêter ou ralentir l'évolution qui est normale et qui est très vive à l'intérieur de vos professions, et arrêter aussi toute chance d'en arriver à un accord entre les corporations, une fois que le législateur aurait voulu, lui, se prononcer de façon très ferme.

Je veux dire par là qu'une fois que nous aurions entendu une définition la plus stricte possible de diagnostic ou de prévention, d'éducation, de formation, le problème ne serait pas pour autant tranché. Il faudrait maintenant trouver lequel des diagnostics, venant de quelle corporation, est le plus important. Il faudrait ensuite aller à une échelle, une qualification des diagnostics et on en tramerait probablement une querelle de mots au moment de la définition, mais qui serait plus grave au moment où on le mettrait en application dans la vie des hôpitaux et surtout pour les clients ou les patients que vous avez.

Il semble donc qu'une définition trop précise pourrait arrêter une évolution qui a été assez grande dans votre milieu, que les CLSC, par exemple, du bill 65 reconnaissent cette espèce de volonté d'inclure les différentes corporations autour d'une même table pour, dans la pratique, dans le quotidien s'entendre sur une façon de pratiquer, plutôt que de s'en remettre à une définition trop stricte.

Deuxièmement, je pense que les témoignages des membres de la commission parlementaire, ce matin comme ceux d'autres députés qui pourraient se joindre à nous, démontrent qu'il n'est peut-être pas dans notre capacité de législateur d'entrer dans cette définition fortement professionnelle et sur laquelle même entre vous, les professionnels de la santé, il y a difficulté à s'entendre. Vous me direz que nous ne nous gênons pas pour intervenir habituellement dans un paquet d'affaires que nous ne comprenons pas; c'est vrai. Mais je pense que le domaine de la santé est trop important pour que nous agissions de manière tatillonne et non professionnelle pour empêcher par la suite une évolution dans ce domaine.

Troisièmement, j'ai signalé brièvement tantôt, et je crois que cela vaut la peine de le reprendre, l'esprit du bill 65, l'esprit du CLSC. Nous l'avons appuyé, nous le défendons. Il avançait peut-être pour la première fois d'une façon institutionalisée l'obligation qu'ont certaines corporations professionnelles, tous ceux qui travaillent dans ce domaine, de s'entendre, de parler alentour d'une table. Dans le même esprit, nous espérons et nous suggérons que les médecins, les infirmières et tous ceux qui pourraient être intéressés à la définition de ces mots qui sont chez vous votre vie quotidienne puissent, préalablement et à l'extérieur de cette assemblée, s'entendre sur une répartition des tâches qui pourrait être soumise au ministre pour son acceptation. Ce serait un projet de règlements qui faciliterait largement les responsabilités politiques qu'ont les membres de la commission quant à la manière finale de façonner la loi.

Je pense qu'il est beaucoup mieux de vous le remettre et de nous fier à votre évolution des dernières années pour espérer que, sur ces points de diagnostic, d'exercice de la profession, l'entente se fasse entre les professionnels sans intervention ou avec intervention ultime du législateur.

Un deuxième point de votre mémoire —je dois le dire pour être plus à l'aise — m'est plus familier et c'est celui qui concerne votre droit de regard sur la formation professionnelle. Vous avez fait un procès — sans mot méchant — vous avez fait une analyse de la qualité de la formation professionnelle que vous croyez que les collèges d'enseignement général et professionnel, qui existent au Québec maintenant depuis cinq ou six ans, donnent à la science infirmière.

Je suis presque d'avis d'endosser complètement votre position là-dessus. Mon parti m'a familiarisé plus avec les questions d'éducation qu'avec les questions de santé et j'ai été appelé au cours des deux dernières années à scruter, à la demande de plusieurs groupes...

M. SAINT-GERMAIN: Je m'excuse, j'invoque le règlement. Je crois que tout ceci est hors d'ordre. Nous sommes ici, cet après-midi, pour écouter les gens qui sont venus nous expliquer leurs mémoires et pour les étudier. Je crois qu'autant que possible on doit s'en tenir à poser des questions. Je ne crois pas qu'il soit permis par nos règlements de nous servir de cette commission pour expliquer nos politiques ou les politiques des divers partis. Je crois que c'est le but de la commission et, pour que nos travaux avancent d'une façon adéquate, je crois qu'il y aurait lieu que les règlements soient observés.

M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer au

député de Jacques-Cartier que j'ai été extrêmement tolérant lors du préambule du député de Chicoutimi, ce matin, qui avait été présenté par son collègue de Montmagny. Pour la première fois, nous avons l'occasion d'entendre le représentant du Parti québécois et, délibérément, j'ai l'intention de lui donner les mêmes privilèges que j'avais accordés au député de Chicoutimi, mais tout en l'invitant, peut-être, à diminuer la longueur de son préambule et à passer à des questions.

M. PAUL: M. le Président, vos remarques sont à point, surtout qu'il ne nous arrive pas souvent ici, pour nous qui siégeons régulièrement à cette commission, d'entendre la voix du représentant du Parti québécois. Cet après-midi, ça nous fait chaud au coeur de voir une participation de ce parti politique à nos travaux parlementaires.

M. GUAY: Sur le point de règlement, M. le Président, en quelques mots, normalement, il n'est pas permis aux différents membres de la commission de formuler des commentaires, mais uniquement de poser des questions. Bien sûr, le président, depuis ce matin, a permis aux membres de la commission de faire de brefs commentaires. Pour ma part, je me suis abstenu, si vous l'avez remarqué, de faire des commentaires afin de respecter l'autorité de la présidence. Soyez assuré qu'à l'avenir je collaborerai de la même façon, mais, advenant que je désire faire un commentaire, j'aimerais avoir la même latitude, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Bien, lorsque je serai président d'une commission, je vous donnerai les mêmes privilèges, mais je ne m'engage pas pour les autres présidents aux commissions parlementaires. Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, j'étais à dire que, sur la question de la formation professionnelle des infirmières, le droit de regard que vous demandez me semble parfaitement normal. Or, la qualité de l'enseignement professionnel, depuis qu'il appartient au secteur public, a souvent été critiquée.

Cela est peut-être d'autant plus grave dans votre secteur.

Le ministre a parlé, en réponse à cette remarque bien fondée, qu'il était possible d'avoir un contrôle a posteriori, après que les programmes sont appliqués. Je crois que c'est au ministère de l'Education qu'il faudrait le demander plutôt qu'ici. Une participation à l'élaboration des programmes, avant même qu'ils sortent du ministère de l'Education...

M. CASTONGUAY: M. le Président, je m'excuse mais on me prête ici des paroles...

M. CHARRON: ... c'est normal.

M. CASTONGUAY: ... qui ne sont pas tout à fait exactes. J'ai rappelé l'existence de l'article 169 e) qui propose d'associer au mécanisme d'élaboration des programmes, dans les établissements d'enseignement, donc non pas a posteriori mais au moment où les programmes sont élaborés, les mécanismes d'évaluation au sein des établissements d'enseignement, des corporations professionnelles. Non pas a posteriori.

J'ai ajouté qu'en plus de cette participation, il me parait essentiel que la corporation professionnelle puisse, si elle le juge à propos, exiger des stages additionnels ou d'autres conditions avant d'admettre un membre dans ses rangs, ceci aussi bien pour le Collège des médecins que pour les infirmières ou un autre groupe. Il y a là deux niveaux, et ce matin, j'ai fait bien attention; je ne voudrais pas laisser les membres de l'association dans l'incertitude à ce sujet-là.

M. CHARRON: Est-ce que je peux signaler au ministre qu'en laissant la participation des associations professionnelles au niveau des collèges, le contrôle est quand même, d'une certaine façon, a posteriori. La liberté laissée au Collège d'enseignement général et professionnel dans le choix des programmes est de choisir les programmes dans les grandes lignes fixées par le ministère. Certains CEGEP peuvent décider d'appliquer telle science, de laisser tomber tel cours, d'offrir tel cours, mais toujours dans les lignes définies par le ministère.

Lorsque vous permettez la latitude d'action des corporations professionnelles au niveau des CEGEP, c'est dans le choix des programmes. Ils pourront, au niveau du CEGEP, choisir pour telle et telle région, tel et tel programme. Mais l'élaboration du programme, le contenu pédagogique du programme comme le contenu professionnel, se fait toujours au niveau du ministère de l'Education, à la direction générale de l'enseignement collégial. La liberté des institutions est de choisir parmi...

M. CASTONGUAY: M. le Président, je ne veux pas me lancer dans une discussion; nous aurons l'occasion de reprendre ce point-là. J'ai voulu mentionner un fait bien précis, j'ai simplement rappelé ce que j'avais dit ce matin. Sur l'autre point dont parle le député, je ne voudrais pas m'engager dans un débat avec lui, mais lorsque j'ai annoncé les changements au bill 250, j'ai apporté des précisions sur ce point-là. Je ne voudrais pas, pour ne pas nous priver de la discussion avec les membres de l'association, m'engager dans un débat sur cette question.

M. CHARRON: Je voulais simplement signaler, en conclusion, que la participation de l'association professionnelle au niveau de l'élaboration des programmes et non pas simplement dans leur choix, comme le permet l'article 169, pourrait être une chose qui nous paraît fort valable.

Une troisième et dernière remarque très rapide avant de terminer par une question, pour

satisfaire le député de Jacques-Cartier. Je veux vous demander votre commentaire sur les différentes appréciations que nous avons faites et en particulier sur celle-ci: votre décision non pas de rompre mais de vous séparer un peu plus que vous ne l'êtes actuellement des infirmières auxiliaires. Nous aimerions entendre, d'une façon beaucoup plus précise, vos arguments sur ce point.

Il nous semble peut-être d'une grande responsabilité à votre égard de demander une telle chose et nous imaginons que vous avez très bien fait le parallèle entre les infirmières auxiliaires et vous, comme entre vous et les médecins, et que vous avez placé la comparaison sur un terrain qui vous a amenées à prendre cette décision. Donc, sur ce point, le mémoire ne nous a pas paru peut-être assez clair; il serait peut-être bon que vous le défendiez un peu plus pour notre entendement, surtout cette question.

MLLE BUREAU: M. le Président, en ce qui concerne les infirmières auxiliaires, nous avons respecté le désir de la commission Castonguay à savoir qu'aucune profession n'ait la mainmise sur une autre. Les infirmières auxiliaires oeuvrent dans le même champ d'action que nous. Jusqu'à présent, nous avons aidé à la préparation des programmes d'un certain nombre d'infirmières auxiliaires et nous leur donnions un certificat d'attestation. Les hôpitaux en tenaient compte comme une preuve de compétence.

Mais nous laissons aux infirmières auxiliaires et au législateur le soin de décider de la législation la meilleure pour elles. Nous croyons que ce n'est pas à nous de décider. Si le législateur veut que les infirmières et les infirmiers auxiliaires fassent partie de notre corporation, nous nous occuperons de leurs intérêts comme des nôtres. Si le législateur veut leur donner une législation qui leur est propre, ce n'est pas à nous de décider. Je crois que c'est à ce groupe et au législateur de décider de la chose.

M. CHARRON: Pour le bien-être des infirmières auxiliaires, pour la qualité de leur formation et éventuellement la qualité des soins qu'elles vont dispenser, croyez-vous qu'elles seraient mieux de continuer l'état actuel, c'est-à-dire être membres de votre corporation ou si vous croyez que le législateur ferait mieux de les séparer d'avec votre corporation?

MLLE BUREAU: Je vais dire quelque chose et Mlle DuMouchel pourra peut-être compléter. Je peux vous dire qu'actuellement ce sont des infirmières qui enseignent aux infirmières auxiliaires dans les polyvalentes. Je ne sais pas si Mlle DuMouchel aimerait compléter.

MLLE DUMOUCHEL: Nous faisions le contrôle et donnions le service aux auxiliaires, à la demande du ministère de la Santé, depuis 1943. Nous avons élaboré le programme, nous avons fait un certain contrôle dans l'éducation, dans les écoles, de la même façon qu'on le faisait pour les infirmières, nous les soumettions à un examen d'admission et nous leur donnions une certification. Nous faisions ça volontairement et pour aider le groupe. Le groupe a mûri, il y a eu regroupement des deux associations. Pour ne pas nuire au regroupement, l'association a continué d'offrir la certification à celles qu'elle reconnaissait déjà, aux personnes intéressées, pour aider à faire le pont. Je crois que ce qui est important, c'est de faire respecter deux principes. Le premier, c'est qu'il y ait contrôle de ce groupe, et le deuxième, qu'il y ait des mécanismes pour que l'infirmière soit responsable de l'acte infirmier et, enfin, des mécanismes pour que les deux groupes puissent élaborer des normes.

Je crois que ce sont les principes qu'il faut faire respecter. Les modalités peuvent-elles s'intégrer à notre corporation? Nous avions déjà proposé ce système, nous sommes prêts à les faire participer si le législateur le juge à propos, avec représentation adéquate et participation de ce groupe et, si le législateur préfère les voir s'autodiscipliner elles-mêmes, s'autocontreler et avoir tous les mécanismes de contrôle de l'éducation, de la formation, de l'évaluation des candidats des autres pays, nous nous y soumettons.

Mais nous aimerions qu'il y ait un mécanisme pour les normes, tel que nous avons discuté ce matin, et qui semblait être accepté par la commission parlementaire.

Je crois que le principe est le contrôle du groupe pour que des gens non acceptables par le pays, non acceptables parce qu'ils ne satisfont pas aux normes, non acceptables chez les infirmières qu'ils s'en aillent travailler comme auxiliaires pour leur protection et celle du public. Mais c'est le contrôle qui est le principe de base.

M. CHARRON: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela clôt les questions du député de Saint-Jacques? Le député de Trois-Rivières. Est-ce que vous aviez quelque chose à ajouter, Mlle Bureau?

MLLE BUREAU: M. le député a souligné quelque chose de très important pour nous dans notre définition d'acte infirmier. Je ne voudrais pas être hors d'ordre.

M. LE PRESIDENT: Je vous le permets.

MLLE BUREAU: Merci. M. le député a parlé de diagnostic. C'est un mot qui semble chatouiller beaucoup de gens. Nous avons fait des recherches dans les différents dictionnaires et nulle part n'était-ce marqué que c'était réservé uniquement à une profession. D'ailleurs, vous

savez qu'il y a des gens qui se disent spécialistes ou docteurs en moteurs et qui posent un diagnostic sur les moteurs. On a parlé de définition trop précise qui empêcherait l'évolution et on a parlé de primauté du diagnostic médical ou diagnostic infirmier.

L'infirmière quant à elle, a un seul diagnostic qu'elle peut poser, c'est le diagnostic infirmier. Le diagnostic médical, ce n'est pas son boulot. Pour le médecin, le diagnostic médical, cela va de soi que c'est son domaine, mais le diagnostic infirmier, c'est notre domaine. Mais comme nous savons bien que c'est un mot chatouilleux, nous n'avons pas mis les mots "diagnostic infirmier" dans notre définition. Nous avons mis: "De contribuer aux méthodes de diagnostic." Ce n'est pas poser un diagnostic. En fait, à chaque fois qu'une infirmière prend la température de son patient, ou prend sa pression, fait des examens pour envoyer du sang au laboratoire, ou fait différents examens de cette nature, elle aide le médecin à poser le diagnostic. Elle contribue aux méthodes de diagnostic, mais c'est le médecin qui pose le diagnostic médical. Ce n'est pas notre boulot et on n'en veut absolument pas.

Notre boulot est le diagnostic infirmier. D s'agit de savoir quand il faut tourner un patient pour qu'il ne fasse pas de plaie de lit, pour qu'il n'ankylose pas. Voilà un diagnostic infirmier. C'est cette précision que je voulais faire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: Ce matin, au cours de la présentation du mémoire, on a parlé de la formation. C'est le point sur lequel je voudrais revenir. Vous avez dit que vous aviez, à un moment donné, proposé qu'il y ait seulement trois CEGEP qui enseignent les techniques infirmières. Pourriez-vous préciser un peu la proposition que vous aviez faite alors? En fait, que devenait ce que vous appelez l'enseignement traditionnel? Est-ce qu'il restait statu quo ou si vous aviez proposé une précision?

MLLE DUMOUCHEL: Lors de l'implantation du système collégial, il devait avoir trois collèges qui serviraient d'étude pilote. Ces trois collèges, après expérience et après avoir mis un produit sur le marché, le candidat à la profession, devaient évaluer le résultat de l'expérience Les pressions, les besoins ont fait que le transfert s'est fait rapidement, les options nursing ont été ouvertes. On nous informe que l'option s'ouvre. Nous avons encore, selon notre loi, si je lis notre loi actuelle, notre mot à dire sur l'ouverture des options nursing. Mais notre mot devient presque théorique parce que l'option s'ouvre quand même. Même si on ne croit pas que l'option devrait être ouverte dans telle région faute de champ clinique, faute de professeurs qualifiés, faute de personnes capables de prendre la direction de l'option. La loi n'est pas respectée.

M. BACON: Ce n'est pas tout à fait le sens de ma question. Je m'excuse de ne pas avoir été assez clair. Vous avez fait une proposition en disant que vous vouliez trois CEGEP. Vous étiez d'accord pour trois CEGEP...

MLLE DUMOUCHEL: ... les deux parties...

M. BACON: J'aimerais que vous disiez ce que devenait l'enseignement traditionnel. Parce qu'alors vous admettiez, j'imagine, que dans les hôpitaux continue l'enseignement traditionnel.

Mais est-ce que vous proposiez, à ce moment-là, que ce qui se passait dans les hôpitaux soit modifié? Avez-vous proposé un mode d'intégration?

MLLE DUMOUCHEL: Le projet demandait que les trois collèges fonctionnent et que, graduellement, les options, dans le cours traditionnel des hôpitaux, diminuent à mesure que les collèges s'ouvraient. Mais on ne pensait pas que 40 collèges s'ouvriraient en dedans de cinq ans, et il y a des options à travers la province. Alors, quand l'option fonctionnait, l'école traditionnelle arrêtait d'admettre des étudiants. C'était le but. Cela devait se faire. L'entente des trois options avait été faite avec le ministère de l'Education de ce temps et la corporation. Nous étions tous d'accord sur les mêmes principes.

M. BACON: Est-ce qu'on vous avait consultés, à ce moment-là, sur le contenu du cours?

MLLE DUMOUCHEL: Oui, nous avons collaboré très étroitement avec la commission Parent sur le contenu du cours. Avec l'expérience, nous avons fait d'autres recommandations sur le contenu et le programme. Nous en faisons encore lorsqu'on nous soumet des programmes, par exemple, de recyclage, des programmes de formation. Nous faisons des recommandations. Nous acceptons, nous refusons ou nous demandons d'améliorer.

M. BACON: Ma question, M. le Président, s'adressait à Mlle Bureau, la présidente, qui disait ce matin —je suis d'accord avec elle — que la qualité du nursing était excellente au Québec. Par extrapolation, quelles sont vos opinions sur ce que va devenir la qualité du nursing face à la formation qui est donnée actuellement dans les CEGEP? Est-ce que vous êtes optimiste?

MLLE BUREAU: Moi, je suis de tempérament optimiste, au point de départ. Ensuite, les étudiantes qui sont formées actuellement dans les CEGEP reçoivent, à mon sens, une très bonne formation d'approche du malade. Je vous ai parlé d'humanisme, ce matin. On m'a dit qu'on devait mettre l'accent là-dessus. Je crois que dans les CEGEP on le fait. On leur donne une très bonne formation au sujet du concept de santé. Je crois que c'est absolument le ton pour l'année 1972 et pour les prochaines années.

Elles manquent peut-être de dextérité. Mais qui acquiert de l'expérience pendant sa formation professionnelle? La société était habituée d'avoir des infirmières qui obtenaient leur expérience pendant leur période de formation. Cette expérience que nous recevions, c'était à notre détriment, je dois vous le dire. Nous arrivions, au bout de trois ans, avec trois ans d'expérience auprès des malades. Aucun médecin, aucun avocat, aucun notaire ne prend son expérience pendant sa formation. L'expérience vient en cours d'emploi.

Nous ne sommes pas assez statiques pour penser qu'il n'y a pas lieu d'améliorer les programmes dans les CEGEP. D'ailleurs, les professeurs, les responsables des techniques infirmières travaillent continuellement à améliorer ce programme avec la DIGEC et l'association des infirmières. Il est possible que les stages des étudiantes dans les hôpitaux ne soient pas suffisamment longs en nombre d'heures ou en jours continus. Il y a des expériences et des recherches à faire là-dessus. L'association entend, dans l'année qui vient, faire une priorité de la formation de nos étudiantes dans les CEGEP avec les directrices des soins infirmiers et les responsables des options de techniques infirmières. Il doit s'établir une collaboration entre tous ces gens. Je crois que c'est à l'association d'être le trait d'union dans ce domaine. Il y a place pour l'amélioration, j'en conviens avec vous. Mais je suis sûr que nous allons former de très bonnes infirmières et de très bons infirmiers qui vont donner des soins aussi excellents que ceux que nous avons donnés, nous, de l'école traditionnelle. Mais c'est à la condition que nous gardions notre droit de formation et que nous ayons les mécanismes qu'il faut pour nous faire entendre par qui de droit.

M. LE PRESIDENT: Si le député de Trois-Rivières le permet, sur le même sujet, je donnerai la parole au député de Montmagny. Il sera suivi des députés de Dorchester et d'Argenteuil.

M. BACON: Avant de donner la parole au député de Montmagny, est-ce que je pourrais féliciter l'association de l'excellent mémoire qu'elle a présenté, ce matin? C'est à regret que nous allons vous voir quitter le salon rouge.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je m'excuse auprès de mes collègues qui n'ont pas encore adressé la parole. Mais il y a un sujet qui revient constamment depuis le matin et je pense que je dois intervenir, à ce moment-ci, pour inviter le ministre des Affaires sociales à être vigilant auprès du ministère de l'Education, parce que nous avons vécu, le Dr Boivin et moi, le même problème.

On a raconté — on vient de la raconter encore — l'expérience du transfert des étudiantes infirmières de l'école traditionnelle au

CEGEP. Il est exact qu'on avait prévu un calendrier. A un moment donné, le ministère des Affaires sociales — le ministère de la Santé, dans le temps — a été mis en face d'un fait accompli, pour le transfert.

En plus des arguments que vous avez invoqués, nous avions invoqué d'autres arguments auprès du conseil des ministres. Je pense qu'on peut dire cela. Je ne vous dirai pas de quelle façon nous avons invoqué ces arguments au conseil des ministres mais je vous dirai quels arguments nous avons employés.

Tout d'abord, le transfert trop rapide pouvait perturber tout le système, le réseau, les services rendus en réseau hospitalier parce que, du jour au lendemain, on prenait tout un groupe d'étudiantes, un groupe très nombreux, on les enlevait du réseau hospitalier et on les envoyait dans une autre école. Alors du point de vue du budget de l'assurance-hospitalisation, cela créait un gros problème. A un moment donné, aussi, cela a été un des facteurs d'augmentation du coût des services hospitaliers.

Deuxièmement, il y avait des locaux qu'il fallait réaffecter. Je me souviens d'avoir assisté à l'inauguration d'écoles d'infirmières et de les avoir visitées. C'étaient des investissements assez considérables, tenant compte des besoins de la formation des infirmières, selon l'école traditionnelle. Il y avait donc des écoles qu'il fallait réaffecter à d'autres fins. Il y a encore des écoles, actuellement, dont on voit la réaffectation. Je lisais cette semaine qu'à l'école de Saint-Luc, à Montréal, on vient d'autoriser un projet de transformation. Il y avait donc aussi cet aspect de récupération des locaux, qui était véritablement important.

Justement, le ministère de l'Education — je ne veux pas faire de charges contre le ministère de l'Education — doit être très conscient que d'autres ministères sont drôlement impliqués dans les différentes étapes de formation. Le ministre des Affaires sociales en est conscient, je le sais. Il faudra que, du côté du ministère de l'Education, on en soit conscient. Ce n'est pas toujours au même ministère à fournir tout l'effort de bonne volonté, cela joue aller et retour.

M.CASTONGUAY: Sur cela, M. le Président, si vous me permettez, très brièvement, nous sommes engagés, avec le ministère de l'Education, dans une opération des sciences de la santé. J'en ai déjà parlé à quelques reprises. Le ministère est associé étroitement au ministère de l'Education dans la révision d'un bon nombre des questions dont nous avons discuté. Le ministre de l'Education, incessamment, va donner tous les détails sur ce programme ou cette opération.

En plus, compte tenu d'un certain nombre de problèmes qui ont été soulevés ici, à la commission parlementaire, j'ai rédigé, à l'intention de mon collègue de l'Education, une assez longue note. Je dois le voir dès mercredi

prochain, avec son sous-ministre, pour discuter ces questions.

Enfin, nous avons une rencontre prévue avec l'Association des infirmières, où on pourra reprendre certains de ces points.

Alors, je suis conscient du problème et, justement, le but de la rencontre de mercredi prochain est d'insister sur certains aspects qui ont été soulevés ici.

M. CLOUTIER (Montmagny): Le nom qu'il porte va bien le disposer à dialoguer avec le ministre.

M. LE PRESIDENT: C'est un nom prédestiné!

M. GUAY: M. le Président, il y a quand même un problème qui reste entier: l'aspect légal de l'acte posé par l'infirmière. Ma dernière question, je l'adresserai donc au ministre. Le ministre, à partir d'aujourd'hui, a-t-il l'intention de faire en sorte que les infirmiers et les infirmières respectent la loi, ou s'il va leur permettre, temporairement, de continuer le genre de travail qu'ils font? Disons que, pour moi, le problème reste entier.

Demain matin, les infirmiers et les infirmières vont continuer de pratiquer dans l'illégalité. Maintenant que tous les membres de la commission et que le ministère en sont conscients — probablement qu'ils le savaient avant, mais cela a été confirmé — qu'est-ce qui va se passer demain matin?

M. CASTONGUAY: Je ne crois pas que ce soit le but d'une commission comme celle-là de questionner le ministre; il s'agit de questionner les organismes. D'un autre côté, la question étant posée, je ferais remarquer que le contrôle des actes professionnels posés par divers groupements professionnels relève des corporations professionnelles et non du ministre. Ce contrôle-là a été délégué aux divers collèges et c'est à eux de s'acquitter de cette responsabilité.

Nous sommes tous conscients, de même que les collèges — je pense que cela a paru — qu'une mise à jour s'impose. Je ne crois pas que, demain matin, si le Collège des médecins disait : Nous pourchassons toutes les infirmières qui nous aident quotidiennement, qui apportent toute leur collaboration, qui posent les actes dont nous avons parlé, on gagnerait quelque chose. Je ne crois pas que les infirmières, d'autre part, comme association, si elles prenaient la position de dire: Nous nous retranchons dans une légalité stricte, gagneraient quelque chose.

Le problème existe. Nous en avons discuté; nous arrivons à l'étape où nous serons enfin en mesure de faire la mise à jour de cette législation. Nous avons également, dans les règlements de la loi 65, retenu la suggestion à l'effet que les établissements hospitaliers doivent obligatoirement avoir une assurance de responsabilité professionnelle. Je crois que cette situation est en voie de se régulariser. Aujourd'hui, je ne peux poser un autre geste que celui de poursuivre, dans le climat dans lequel nous le faisons, le travail amorcé, en espérant pouvoir le terminer au cours de la session d'automne.

M. GUAY: Si j'ai posé cette question au ministre, c'est que j'avais à l'esprit la protection de la personne qui pose un acte illégal. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Argenteuil.

M. SAINDON: C'est une question que j'aurais à poser à Mlle DuMouchel au sujet du diagnostic infirmier. J'avoue ne pas comprendre le diagnostic infirmier versus le diagnostic médical. N'y aurait-il pas danger de poser des diagnostics entrafnant des gestes superposés qui souvent pourraient ne pas concorder? De ce fait, il pourrait s'ensuivre des incidents fâcheux au niveau des traitements peut-être, mais sûrement au niveau des relations patients-médecins.

Deuxième question, est-il illégal pour une infirmière de poser des gestes commandés par un médecin?

MLLE DUMOUCHEL: Tout d'abord, pour ce que vous dites du diagnostic infirmier, identifier les besoins de santé, c'est le diagnostic infirmier. J'identifie que tel malade fait une réaction à une transfusion. J'arrête la transfusion, je communique avec le médecin. J'ai identifié un problème dans l'état de santé.

Le médecin dans son diagnostic médical va aller plus loin. D va en sortir la cause, il va étudier les raisons; il va voir si la cause est due à la transfusion ou au malade. Cela peut être une analogie.

On n'a pas mentionné le mot "diagnostic". On a dit qu'on identifiait l'état ou les besoins de santé, qu'on planifiait, qu'on prodiguait des soins, qu'on contrôlait les soins infirmiers et qu'on enseignait à la clientèle. Alors, cela n'entre pas en conflit avec la profession médicale; nous le faisons jusqu'à nos limites.

Voici un exemple que l'on retrouve dans les centre communautaires où les infirmières ont un rôle plus poussé, où elles font un examen physique pour assister le médecin. Ceci s'expérimente de plus en plus à travers le pays. Elles vont identifier que quelque chose ne fonctionne pas.

Si elles sentent une masse en faisant un examen physique, elles ne pourront pas dire la cause de cette masse, mais elles pourront dire: H y a un problème de santé et je dirige cette personne vers le médecin pour avoir le diagnostic médical. C'est dans le sens d'un rôle plus étendu que nous avons illustré dans la définition. Je crois que Me Duchesneau aimerait apporter une précision sur l'aspect de la légalité.

M. DUCHESNEAU: Sur votre deuxième

question, le fait pour un médecin d'ordonner un acte illégal ne le rend pas légal. Il n'y a que le législateur qui peut légaliser l'illégalité.

M. SAINDON: II faut s'entendre. Le médecin n'ordonne pas un acte illégal; il ordonne qu'un acte légal soit posé par un aide. C'est lui qui en est responsable.

M. DUCHESNEAU: Non. C'est là le problème.

M. SAINDON: Ce n'est pas illégal. Le fait qu'il ne le fait pas lui-même ne rend pas l'acte illégal. Il l'est ou il ne l'est pas.

M. DUCHESNEAU: On va vous remplacer sur les différents bancs de la magistrature québécoise et nationale pour redéfinir la position légale de l'infirmière ou de l'infirmier dans des cas semblables. Le fait que l'acte illégal soit ordonné ne le légalise pas.

M. SAINDON: Non, mais il y a de la jurisprudence à ce sujet, dans le passé, qui en fait foi.

M. DUCHESNEAU: Je ne voudrais pas m'en-gager dans un débat jurisprudentiel.

M. SAINDON: Je ne comprends quand même pas le sens du diagnostic infirmier et médical. Ce que vous entendez par diagnostic médical, c'est tout simplement la constatation de faits. Si vous constatez un fait, ce n'est pas un diagnostic. D peut, à ce moment-là, y avoir certainement conflit dans l'interprétation.

MLLE BUREAU: Si c'est le mot "diagnostic" qui chatouille tout le monde, nous ne l'avons pas mis dans notre définition, parce que nous savions que c'était un mot qui chatouillait tout le monde.

M. SAINDON: Vous en avez parlé toute la matinée.

MLLE BUREAU: Non. Ce n'est pas nous qui en avons parlé. Nous n'avons jamais parlé du diagnostic infirmier. Ce sont des personnes qui nous ont posé des questions là-dessus. Si vous regardez notre définition, nous avons bien écrit : "... identifier l'état et les besoins de santé." Cela sous-entend que nous posons un diagnostic infirmier. Mais nous gardons les mots pour nous. Nous en posons à longueur d'année depuis 50 ans. Nous n'en avons jamais parlé à la population et elle s'est toujours bien portée. Là, parce que quelqu'un a sorti le mot diagnostic infirmier, cela semble épouvantable. Qu'est-ce que vous voulez? Ce sont des mots et les gens...

M. SAINDON: II faut quand même clarifier son esprit et préciser les mots.

MLLE BUREAU: Nous n'avons pas parlé de diagnostic infirmier dans notre définition.

M. SAINDON: Cela revient au même. N'en parlez pas, cela sera moins pire.

MLLE BUREAU: Nous parlons "d'identifier l'état et les besoins de santé." Est-ce que vous voulez nous empêcher, lorsque quelqu'un fait une réaction à un soluté, d'identifier son état de santé et de dire qu'il fait une réaction au soluté? C'est notre rôle de le faire. Nous sommes à l'hôpital 24 heures par jour pour cela, pour surveiller les besoins des malades, les satisfaire, quand cela nous concerne, ou les transmettre aux autres professionnels de la santé. C'est notre rôle. Si nous avons un malade qui fait une réaction à un soulté, c'est notre rôle d'évaluer son état de santé. A ce moment-là, c'est notre domaine. Nous appelons le médecin qui, lui, viendra poser un diagnostic médical. Mais, en attendant, est-ce que nous allons laisser mourir le malade?

M. SAINDON: Je pense que, si le malade est dans un état aussi urgent, aussi grave, que vous posiez un diagnostic ou ne le posiez pas, cela ne change absolument rien, parce que les chances sont que la garde-malade qui est là ne soit pas capable de le sauver, en général.

MLLE BUREAU: Pour répondre à votre question, je suppose qu'un patient reçoit une transfusion sanguine et qu'il fait une réaction à sa transfusion sanguine. Si l'infirmière n'intervient pas immédiatement pour cesser la transfusion sanguine, le malade va mourir...

M. SAINDON: D'accord.

MLLE BUREAU: ... en attendant que le médecin arrive.

M. SAINDON: D'accord.

MLLE BUREAU: L'infirmière est intervenue au point de vue du nursing. C'est un acte de nursing qu'elle a posé. Je n'emploierai pas le mot "diagnostic." Elle a identifié l'état du malade, qui, si elle n'était pas intervenue, serait mort.

M. SAINDON: Là je suis d'accord avec vous, mais ce n'est pas un diagnostic.

M. PAUL: M. le Président, le député d'Argenteuil semble quelque peu traumatisé par le mot "diagnostic". Est-ce que le député convient, avec toute l'expérience médicale qu'il a, que l'auxiliaire ou surtout l'infirmière émet une opinion qui sert de guide au médecin quant à l'état du malade auprès duquel elle se tient, où elle oeuvre? Il arrive fréquemment que le médecin demande un rapport à tout les quinze

ou vingt minutes sur l'état du malade à la suite d'une médication qu'on lui a fait prendre.

Alors, est-ce que l'honorable collègue d'Argenteuil s'oppose à ce que les auxiliaires émettent une opinion? Ceci n'entrafne pas nécessairement un diagnostic.

M.SAINDON: M. le Président, je ne m'y oppose absolument pas, au contraire. On demande toujours l'opinion d'une infirmière. Les infirmières peuvent le dire. Ce à quoi je voulais en venir c'est qu'on semble vouloir préciser les termes. On joue un peu sur les termes; si on veut les préciser qu'on les précise. Qu'on n'emploie pas un terme à deux ou trois sauces.

M. PAUL: Est-ce que les infirmières émettent une opinion sur l'état du malade?

M. SAINDON: Je viens de vous le dire que c'est tout à fait dans l'ordre. C'est toujours ça qui a existé.

M. PAUL: Vous semblez reprocher aux infirmières de donner un tel rapport.

M. SAINDON: Non, du tout. Je ne reproche pas ça aux infirmières, au contraire. Tout ce que je dis — c'est ce qu'on a retenu ce matin — c'est qu'il y aurait deux sortes de diagnostics. A ce moment-là ça ne tient pas debout. Alors changeons les termes, précisons-les, c'est ça qu'on veut faire. Ce que les infirmières font, ce n'est pas poser un diagnostic, c'est tout simplement noter, relever des faits qui vont servir par la suite à poser un diagnostic.

Alors, si on veut s'en tenir à la définition juste, exacte des termes qu'on le fasse. Il ne peut pas y avoir deux sortes de diagnostics, mais seulement une.

M. PAUL: Cela dépend de la portée.

M. SAINDON: Bien, ça dépend ce que l'on entend.

M. PAUL: Justement, le médecin va émettre un diagnostic médical et l'infirmière va émettre un diagnostic...

M. SAINDON: Cela ne se peut pas. Changez la dénomination, changez le terme.

M. PAUL: Vous en avez contre le terme.

M. SAINDON: Bien ça ne serait pas juste. Cela ne serait pas exact, cette histoire-là; vous voulez jouer sur les termes, tenez-vous-en à la signification des termes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Roberval.

M. LAMONTAGNE: Merci beaucoup, M. le Président. Lorsqu'on parle après plusieurs autres collègues, la majorité des questions ont été posées. Cependant, je crois de mon devoir personnellement de féliciter l'Association des infirmières et infirmiers de la manière dont elle a présenté son travail à la présente commission et également souhaiter qu'une fois pour toutes une définition puisse être donnée à l'acte médical ou l'acte qu'ils posent dans l'exercice de leur profession.

Il est évident qu'il ne faudra pas laisser uniquement au médecin le soin de désigner l'acte posé par une infirmière. Mon collègue qui m'a précédé est un médecin et moi, je suis notaire. Je regarde depuis le matin devant moi la définition de l'acte et je trouve, comme plusieurs l'ont mentionné auparavant, que la définition doit représenter, en 1972, l'acte qui a été confié à l'infirmière ou à l'infirmier, par ses antécédents, par sa compétence et par la charge qui lui est confiée dans nos centres hospitaliers ou autres.

J'ai l'impression que la définition représente très bien l'acte posé, sauf peut-être, par exemple, le mot "identifier". Moi, je n'en veux pas du tout au mot "diagnostic". J'ai l'impression qu'il est très bien situé dans la définition lorsqu'on parle de contribution aux méthodes de diagnostic. Il y a plutôt, à la deuxième ligne de la définition, le mot "identifier", qui pourrait en certains cas être même synonyme de diagnostic. Egalement le dernier paragraphe: "Le tout compte tenu des connaissances scientifiques de l'infirmière et de l'infirmier".

Quant à moi, je souhaite ardemment que ceux qui, dans les semaines à venir, auront à se pencher sur cette définition aient à coeur de représenter l'acte posé par l'infirmière et d'essayer de prévoir également son avenir.

Ce matin, on s'est demandé ce qui arriverait demain s'il n'y avait plus d'infirmières; ça prendrait 40,000 médecins de plus. J'espère que les médecins également tiendront compte du besoin fondamental qu'ils ont d'avoir comme associée et partenaire à toute heure du jour l'infirmière dans l'hôpital ou dans leur propre bureau.

Un autre point soulevé par le député de Saint-Jacques, sur lequel je voudrais revenir, c'est qu'à la suite des commentaires de ce matin on se rend compte que votre ministère est sensibilisé aux demandes de l'Association des infirmières. Cependant, je crois de mon devoir de dire que j'aurais souhaité qu'un autre ministre participe également au présent débat. Cela nous aurait permis de lui poser des questions afin de savoir un peu ce qu'est la formation des infirmières. J'ai été surpris de voir qu'il semblait manquer de communications entre une association d'aussi forte représentation et un ministère de notre gouvernement.

J'espère que ces communications pourront se faire le plus rapidement possible, malgré que, déjà, vous avez prévu une assemblée pour la semaine prochaine. Pour nous, de la commission des corporations professionnelles, nous devons essayer d'analyser la profession elle-

même, mais aussi les implications quant à la formation de ses membres et à son avenir. Comme M. Cloutier l'a mentionné, si, à un moment donné, on a mis son ministère devant un fait accompli, je ne voudrais pas que tout le travail que nous voulons faire ensemble aujourd'hui nous apporte le même résultat.

J'invite donc M. Castonguay, à titre de membre de la commission, à faire part des commentaires de plusieurs autres collègues également qui auraient fortement souhaité qu'il leur soit permis, cet après-midi, de dialoguer sur la formation des infirmières. J'ai eu l'occasion de discuter avec plusieurs représentants de l'enseignement collégial et il semble y avoir un problème fondamental qui a été souligné par Mlle DuMouchel, ce matin et cet après-midi. Le ministre des Affaires sociales, comme l'a mentionné M. Cloutier, est très généreux depuis ce matin. Sans aucun doute, vos sourires l'influencent et aussi les membres de la commission. J'espère que le ministre de l'Education voudra, dans les plus brefs délais possible, répondre au voeu de votre association. Si le ministre des Affaires sociales est en mesure de régler vos problèmes de profession, il est à souhaiter que le ministre de l'Education voudra également participer à la formation de vos membres. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. le Président, presque toutes les questions ont été posées. Ce n'est pas toujours comique d'être député du côté ministériel parce qu'on passe bon cinquième. Cela donne peut-être l'impression que notre contribution n'est que résiduelle. Par contre, notre principal porte-parole est le ministre. On peut vous aider en essayant de convaincre le ministre que vous avez raison en totalité ou en partie.

J'ai un bref commentaire à faire. Je pense qu'il est difficile de définir de façon très précise le nursing; toutefois, je pense qu'une définition plus large compensera peu à peu grâce à la suggestion du ministre concernant la classification des fonctions. En fait, on ne peut pas facilement fixer, d'après moi, dans une loi une définition finale et qui ne pourrait pas changer. Une telle définition est toujours en évolution dans la réalité. Elle est sans cesse à venir, à moins qu'elle ne soit très circonstancielle. La preuve nous en a, d'ailleurs, été fournie ce matin par l'association. Ce sont les circonstances qui ont fait que les infirmières posent des gestes médicaux petit à petit et il va s'en ajouter sans cesse. Comme on l'a mentionné, on n'est pas pour laisser mourir le malade.

Je souhaite tout simplement au ministre, en consultation avec la corporation des médecins et des infirmières, d'essayer de trouver la solution par laquelle le malade sera le mieux servi et de peut-être ainsi réussir la quadrature du cercle.

M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette.

M. CARPENTIER: Dans un autre ordre d'idées, une question: Est-ce que les membres des autres associations, comme les Cadres infirmiers unis, la Fédération des infirmières et infirmiers unis, la Société des techniciens en radiologie médicale du Québec, l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires de la province de Québec, font partie de votre association?

MLLE BUREAU: Dans notre association, en font partie toutes les infirmières unies et les infirmières cadres. Toute infirmière et tout infirmier qui pratiquent dans la province de Québec font obligatoirement partie de notre association, comme les médecins font partie du Collège des médecins pour pratiquer.

En ce qui concerne les techniciennes en radiologie, non, ce ne sont pas des infirmières. Mais en ce qui concerne les infirmières auxiliaires, nous avons dit tout à l'heure qu'il y en avait quelques-unes encore qui recevaient un certificat d'attestation de nous, mais elles ont elles-mêmes une association qui n'est pas d'appartenance obligatoire. Nous avons demandé aux législateurs de leur donner des mécanismes voulus pour le contrôle.

Mais les infirmières unies et les infirmières cadres, qui doivent présenter des mémoires, font partie de notre association. Nous avons consulté tous les groupements d'infirmières, entre autres les infirmières syndiquées, nous les avons toutes invitées pour leur soumettre notre mémoire, les infirmières des CEGEP, les infirmières des universités, les directrices des soins infirmiers, nous avons réuni toutes les infirmières par groupe d'activité pour leur soumettre notre position.

On peut vous dire que nous n'avons pas eu de dissidence en ce qui concerne la définition d'actes infirmiers et notre droit de regard sur la formation. Bien plus que ça, je puis vous dire — on parle beaucoup de formation des cégé-piennes — que nous avons réuni, le 1er juin, des étudiantes des trois années de tous les CEGEP de la province et elles nous ont, tout au long de la journée, demandé d'être encore beaucoup plus présentes dans les CEGEP que nous le sommes. C'est le voeu des étudiantes que je vous transmets.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CARPENTIER: Un instant, s'il vous plaît, mon cher collègue.

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse auprès du député de Laviolette, vous n'aviez pas terminé? Allez!

M. CARPENTIER : Je remercie la présidente et je formule un voeu à votre intention ici, c'est

celui de voir se réaliser vos objectifs au cours des présents travaux et je vous souhaite bon succès.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, après avoir entendu les infirmières, tantôt on va entendre les gardes-malades et infirmiers et infirmières auxiliaires. On va leur poser des questions et vous n'aurez pas la chance de répondre. Je voudrais vous donner la chance tout de suite de répondre à certaines objections qu'elles ont pu formuler, vous n'avez peut-être pas lu le mémoire.

Les gardes-malades auxiliaires disent, en conclusion...

M. CASTONGUAY: M. le Président, je m'excuse, mais est-ce qu'on ne risque pas de s'engager dans un débat entre groupements?

M. CLOUTIER (Montmagny): Non.

M. CASTONGUAY: Si vous me permettez, nous avons posé toutes les questions à l'Association des infirmières sur leur mémoire et nous avons toujours été très prudents dans nos séances afin de ne pas engager de débat entre groupes. Il me semble que le mémoire des infirmières auxiliaires devrait être l'objet d'une présentation par leur association et de questions des membres de la commission si l'on veut que nous partions sur un bon pied dans l'analyse de leur mémoire.

Je ne veux pas être désagréable vis-à-vis d'un groupe ou d'un autre, mais il me semble qu'il y a peut-être un danger ici.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne fais pas référence du tout à un mémoire; j'ai deux petites questions à vous poser. J'ai oublié tout ce que j'ai lu. Est-ce que vous avez l'impression de constituer un monopole et que ce que vous demandez va brimer dans leur épanouissement, dans leur fonctionnement d'autres professionnels qui sont appelés forcément à travailler près de vous?

MLLE BUREAU: Si c'était ce qui est perçu, M. le député de Montmagny, nous en serions très malheureuses car, pour le bien-être de la population du Québec, aucun groupement qui lui rend service ne doit être brimé par un autre.

Nous voulons que les infirmières auxiliaires qui travaillent avec nous — nous travaillons côte à côte, pas l'une contre l'autre — pour le bien-être du malade, obtiennent du législateur le moyen de contrôler les membres de leur groupement. Je crois que nous devons faire confiance au législateur — c'est ce que nous faisons — pour trouver la meilleure méthode de contrôle. Je ne crois pas que ce soit à nous de proposer des méthodes de contrôle pour d'autres groupements.

La seule chose que nous demandons en ce qui concerne les infirmières et les infirmiers auxiliaires, c'est qu'ils aient le droit de pratique mais sous la surveillance d'une infirmière ou d'un infirmier de notre corporation.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je dirai au ministre que la réponse qu'on vient d'entendre est de nature à faciliter les relations et non pas à les envenimer.

Une autre petite question. On forme dans nos institutions, au niveau du CEGEP les infirmières et au secondaire IV et V, on forme des auxiliaires. Les auxiliaires sont au nombre de 16,000. Ce nombre augmente rapidement. La progression est presque géométrique. Ces gardes-malades auxiliaires accomplissent des tâches. Est-ce que l'augmentation rapide que l'on connaît dans les effectifs des auxiliaires est causée par la demande de plus en plus de soins, par une clientèle qui a besoin de soins, ou si elles vont assumer des tâches et des actes que vous posez actuellement et qui leur seront transférés?

MLLE BUREAU: M. Cloutier, vous posez une question extrêmement importante. Il faudrait connaître d'avance beaucoup de choses pour répondre à votre question. D'abord, quelle est la politique du gouvernement face à la santé de la population? Jusqu'où le gouvernement peut-il aller avec ses ressources financières disponibles pour donner de la santé ou des soins à la population? On peut donner différents niveaux de soins selon nos dispositions humaines et financières. Ce n'est pas nous qui pouvons le déterminer. Il y aura certainement des études très sérieuses à faire concernant la question que vous nous posez. Il faudrait aussi connaître les objectifs des différents ministères qui nous semblent parfois divergents. Nous avons quelquefois l'impression que le ministère des Affaires sociales a le souci de bien-être de la population. Nous avons cette impression et d'ailleurs les lois qu'il nous présente le prouvent. Par ailleurs, le ministère du Travail semble vouloir, on ne peut pas le blâmer, avoir le moins de chômeurs possible. Il fait recycler toutes sortes de groupes. Parfois, les conditions ne sont pas toujours respectées. Le rôle du ministère de l'Education est de faire obtenir à la population le plus de scolarisation possible et de lui donner des diplômes.

Il y aurait peut-être lieu de faire une étude très sérieuse entre ces trois ministères et les groupements intéressés pour évaluer vraiment les besoins du personnel dans la province et non pas former des gens au hasard des régions, peut-être des disponibilités régionales, je parle de personnel enseignant ou de rentabilité d'une option dans un CEGEP quelconque ou dans une école secondaire. C'est certainement un point très important. Je me demande si Mlle DuMouchel n'aurait pas quelque chose à ajouter.

MLLE DUMOUCHEL : Je communiquais avec la présidente. Il y a des études nationales

qui se font sur la prolifération des travailleurs de la santé tant sur le nombre de catégories que sur le nombre de chaque groupe. Nous collaborons aux études nationales, nécessairement. Il y a aussi le fait que les budgets parfois font qu'on préférerait peut-être une infirmière pour prendre des responsabilités, mais il y a des limites â un certain moment.

M. LE PRESIDENT: Merci. Le ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les membres de l'association. Elles nous avaient dit qu'elles nous présenteraient un mémoire clair, précis et c'est ce qu'elles ont fait.

Elles ont répondu aussi, je pense, de façon extrêmement objective à toutes les questions qui ont été posées, ce qui nous a permis d'avoir un portrait énormément plus clair de toute la situation. Je crois que l'intérêt démontré par tous les membres de la commission vis-à-vis de ce problème devrait être de nature à les encourager à poursuivre leur travail, garder leur motivation. Le long processus de mise à jour de la législation qui a été amorcé, aussi bien sur le plan professionnel que dans l'organisation des services de santé, qui est en voie de se parachever constituera une base valable pour l'avenir prévisible. Je voudrais les remercier, donc, de s'être associées à notre travail et les assurer que non seulement nous les avons écoutées attentivement mais que nous analyserons encore de façon très attentive les points qui restent à clarifier. Merci.

MLLE BUREAU: M. le Président, au nom des 40,000 membres, j'aimerais d'abord remercier le ministre de nous avoir si bien accueillies ainsi que tous les membres de la commission parlementaire, qui ont vraiment montré beaucoup d'accueil vis-à-vis de nous. Il y en a plusieurs, ici, que nous avons rencontrés de nombreuses fois. Nous avons toujours été très bien reçues. Nous voulons vous remercier, M. le Président, de la façon que vous nous avez accueillies, avec un peu de tolérance. Vraiment cela a été une très bonne journée pour nous et nous voyons que personne n'a regardé l'heure. Nous vous remercions.

Association des gardes-malades

et infirmiers auxiliaires

de la province de Québec

M. LE PRESIDENT: J'invite maintenant les représentants de l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires de la province de Québec à s'approcher de la table. Avant de nous donner lecture de leur mémoire, est-ce qu'ils pourraient identifier les personnes qui représentent le groupe?

MLLE O'ROURKE: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, je vais m'identifier: Carmelle O'Rourke, présidente de l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires de la province de Québec. A mes côtés, comme porte-parole de l'association, à mon extrême droite, Me Jean-Paul Dansereau et Me Marc-André Isabel. A ma gauche, M. Denis Larocque, directeur des relations extérieures de l'AGMIA. Me Isabel fera donc l'exposé, en ce qui concerne notre représentation.

M. ISABEL: M. le Président, notre exposé sera d'autant plus court que le problème du personnel auxiliaire a déjà été énoncé, il y a quelques instants, par l'Association des infirmières et infirmiers de la province, que nous remercions de se soucier de nous encore jusqu'à la dernière seconde. Le fait que la position qu'elle a affichée il y a quelques instants vous ait été clairement donnée vous exprime qu'il n'y a pas d'opposition entre ces groupes mais que, toujours, il y a eu collaboration et qu'il continue à y en avoir.

Au surplus, si on regarde le problème de la façon dont le député de Montmagny l'a exposé tantôt, l'on constate que l'Association des infirmières a laissé, depuis un bon nombre d'années, de plus en plus d'autonomie aux auxiliaires. De fait, depuis plus de cinq ans, l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires a eu l'occasion de se présenter devant un certain nombre de commissions et a eu l'occasion de rencontrer des ministres. Je pense que le député de Montmagny se souviendra des rencontres que nous avons eues en 1967, de même que le ministre des Affaires sociales, des rencontres que nous avons eues en janvier 1970, entre autres, et à l'occasion de l'étude de la commission Castonguay-Nepveu.

A ce moment-là, nous avions exposé la situation du personnel auxiliaire, des auxiliaires en général. Aujourd'hui nous revenons devant la commission; nous avons été invités par le ministre des Affaires sociales, au mois de janvier dernier, à venir exposer nos prétentions et à soulever de nouveau le problème des auxiliaires.

Le gouvernement, d'une façon générale, depuis 1967, a suggéré une réunification du personnel auxiliaire. Il y avait un certain nombre de groupes, de catégories d'auxiliaires, qui se sont depuis regroupés, de sorte que l'association qui est présentement devant vous compte 14,000 membres, qui sont tous des auxiliaires.

On sait, si l'on regarde ce qui se faisait antérieurement, que les formations données à ces auxiliaires n'étaient pas de commune portée mais qu'il y avait des différences qui existaient. Aujourd'hui, cette situation se corrige quelque peu, puisque l'enseignement est maintenant confié au niveau secondaire, encore que nous ayons le même problème que celui qui a été soulevé par les infirmières, il y a quelques instants, celui de la formation. Dans la mesure où il nous est difficile, à l'heure actuelle,

d'établir qu'une formation adéquate et égale est donnée à toutes les auxiliaires qui oeuvrent dans le secteur hospitalier, il nous faut nous poser la question du groupe qui doit s'immiscer dans toutes les formules nécessaires pour établi; une formation adéquate au départ et, en second lieu, prévoir un mécanisme qui verra à l'application de normes qui assureront, dans la pratique, la compétence qui est recherchée par tous, dans le secteur de la santé.

C'est en fait poser là l'essentiel du problème. On a toujours parlé, lors des rencontres antérieures avec les ministres ou au cours d'exposés devant les commissions, du système corporatif professionnel comme étant un élément de solution au problème du contrôle de l'exercice de la profession auxiliaire. Chaque fois que nous avons eu l'occasion de discuter de ce système de contrôle de la pratique de la profession d'auxiliaire, certains mécanismes ont été mis en branle. On pensait, en 1967, à une commission qui devrait être créée, la commission des professions paramédicales. Si, aujourd'hui, on se replace dans le nouveau contexte, le ministre des Affaires sociales signalait lui-même, ce matin, et, à son instar, le député de Montmagny, que les problèmes sont maintenant posés et qu'en seconde étape, le législateur a établi le mode par lequel s'exercera un contrôle sur les professions dans le domaine de la santé.

Aussi, est-ce avec étonnement — si on regarde nos apparitions devant les commissions antérieurement et si on regarde le projet de loi 250 — qu'on ne retrouve aucune disposition qui semble toucher tout l'aspect du personnel auxiliaire. Ni à l'article 30 du bill 250, ni aux deux annexes du même bill, nous ne retrouvons le nom des auxiliaires.

S'il nous faut, pour une part, admettre qu'il faille, d'une façon très précise, définir l'acte infirmier, il faut aussi admettre que cette définition toucherait l'ensemble des gens qui doivent travailler dans ce secteur. Et ça comprend les auxiliaires.

Dans la mesure aussi où on donne des mécanismes à une corporation pour contrôler l'exercice de la profession définie par l'acte infirmier, nous nous demandons si on ne doit pas aussi faire l'autre pas et donner à un groupe qui travaille dans un domaine connexe les mêmes outils pour exercer un contrôle sur l'ensemble des gens qui exercent cette profession.

C'est là poser tout le problème, tant en termes de définition de l'acte infirmier qu'en termes de contrôle de l'exercice de la profession. Nous sommes demeurés dans l'incertitude face à cette situation depuis plus de dix ans maintenant. Il nous semble que le temps est venu, avec les mécanismes que le gouvernement met de l'avant, de trouver une solution à cette absence de contrôle de la pratique de la profession auxiliaire qui, il faut l'avouer, peut mettre en péril la santé, si la compétence n'est pas contrôlée et si l'exercice de la profession n'est pas contrôlé.

Le gouvernement met de l'avant comme mécanisme la corporation professionnelle. Nous soumettons qu'à ce titre le seul mécanisme qui puisse convenir au contrôle de l'exercice de la profession auxiliaire, c'est encore la corporation professionnelle puisque les autres organismes de régies d'Etat ou de "licensing" que nous avions déjà étudiés antérieurement ne s'avéraient pas efficaces pour exercer un tel contrôle.

Il s'agit donc, aujourd'hui, de refaire la demande que nous faisons depuis six ans, mais avec un nouvel éclairage qui est celui de la nouvelle législation, avec le nouvel éclairage des problèmes qui sont maintenant plus clairement posés à la connaissance de tous et avec l'éclairage que la profession d'auxiliaire prend de plus en plus d'importance dans la mesure où elle répond à une pénurie de personnel spécialisé et permet quand même d'assurer rentablement des services adéquats et compétents.

Nous nous demandons comment le gouvernement entend régir l'ensemble de cette profession qui, dans le domaine de la santé, surtout par rapport à l'acte infirmier, demeurerait complètement intouchée, ce qui l'empêcherait d'assurer complètement et totalement la sécurité du public. Dans la définition qu'on retrouve au bill 250, parmi les critères d'admission à une corporation professionnelle, et surtout à l'article 22, on retrouve cette première notion de la protection du public.

Il nous paraît dans l'ensemble que le seul moyen, c'est celui que nous vous soumettons, soit celui de la création de la corporation professionnelle pour permettre le contrôle de l'admission, d'abord, à l'exercice de la profession; ensuite, de surveiller la pratique de la profession et aussi de voir à la formation uniforme et adéquate des gens qui vont entrer sur le marché du travail dans le secteur auxiliaire aux services de santé.

Voilà l'ensemble des considérations que nous voulions soumettre. Quant aux problèmes qui peuvent se soulever dans la mise en pratique, la mise sur pied d'une corporation professionnelle pour les auxiliaires, il nous semble que ces problèmes ont été traités il y a quelques instants, puisqu'avec les infirmières vous avez eu l'occasion de parler de l'acte infirmier.

De la même façon que le problème d'un chevauchement se pose entre les infirmières et les médecins, de la même façon ce même chevauchement se pose au niveau des auxiliaires et des infirmières. Malgré les normes qui ont pu être édictées antérieurement, particulièrement celles de 1967, pour déterminer les tâches de chacune des parties, il faut quand même admettre qu'en pratique les auxiliaires, à l'occasion, exercent des fonctions qui sont propres à l'infirmière, comme l'infirmière le fait par rapport aux actes médicaux.

Il faut donc établir clairement la définition

de l'acte infirmier. Nous soumettons que, dans la mesure où cet acte serait défini beaucoup trop restrictivement, cela mènerait à une sclérose d'une partie des travailleurs de la santé que sont les auxiliaires.

C'est l'ensemble des considérations que nous voulions vous soumettre pour l'instant.

M. CAST9NGUAY: M. le Président, je voudrais remercier l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires pour ce mémoire. J'aurais quelques commentaires à formuler avant de poser une ou deux questions. On a fait état des besoins de main-d'oeuvre à quelques reprises au cours de la journée et également lors de la présentation qui vient de nous être faite.

Je voudrais rappeler qu'un groupe de travail a été présidé par M. Thomas Boudreault, et je crois que, par la suite, M. Béland ou quelqu'un d'autre en a pris la direction, justement sur les prévisions de main-d'oeuvre dans le domaine hospitalier. Comme celui-ci couvre une bonne partie de la demande de main-d'oeuvre dans le secteur de la santé, ce travail, qui est en voie d'être terminé, nous fournira des données extrêmement intéressantes.

J'ai également fait état de l'administration des sciences de la santé, qui est en voie de prendre son élan, sous la gouverne du ministère de l'Education avec la participation du ministère des Affaires sociales. Evidemment, la collaboration des organismes intéressés sera requise. Cette administration vise à établir des prévisions de main-d'oeuvre pour l'avenir, les types de main-d'oeuvre, les niveaux de formation, le contenu des programmes de formation. Cette administration, qui se voudra, je crois bien, de plus en plus permanente, pourra associer par une nouvelle voie bien des groupements et permettre d'avoir d'une façon beaucoup plus continue un éclairage des problèmes qui se posent dans tout le domaine de la formation, des besoins par rapport à la main-d'oeuvre, etc.

Je note aussi qu'à une couple de reprises on a parlé de la pénurie de personnel spécialisé. Ici, je voudrais faire une petite mise en garde. Il y a un certain danger, à mon sens, à répéter cette affirmation sans la nuancer.

J'ai mentionné, à l'occasion d'une séance de la commission parlementaire qui étudie les règlements de la loi 65, que présentement au Québec, si l'on examine le système hospitalier, nous constatons que nous avons les coûts, per capita, les plus élevés au Canada, encore, et ceci pour 1972.

L'on sait, lorsqu'on examine de façon un peu plus attentive tous ces chiffres ou ces coûts, que la partie la plus importante provient du paiement du personnel. Ceci confirme d'autres études antérieures sur le même sujet. Tout ceci pour dire qu'au Québec, présentement, d'après toutes les données disponibles, l'analyse de ces données, nous consacrons plus par citoyen du Québec, per capita que toute autre province au Canada, pour le personnel hospitalier. J'exclus de ceci les médecins. Alors, on parle donc du groupe le plus important en nombre, les infirmiers, les infirmières, les infirmières auxiliaires et tous les autres qui oeuvrent dans ces secteurs. Il y a donc un effort considérable qui est fait et qui semble être plus élevé qu'ailleurs.

Je voulais faire cette petite mise en garde étant donné le danger qu'à un moment donné on retienne cette affirmation comme signifiant que nous sommes vraiment dans une situation non privilégiée, ou encore dans une situation vraiment déficiente si l'on en juge par ce qui se passe dans les autres provinces.

Quant à l'objet bien précis de votre mémoire, je crois qu'il est exact de dire que le regroupement qui s'est effectué au cours des dernières années — plus particulièrement depuis 1967 — en un groupe d'auxiliaires, est un regroupement qui présente de multiples aspects positifs. J'ai ici un rapport sur divers gestes qui ont été posés pour permettre justement à des groupes, qui dans le passé avaient une formation différente, de pouvoir se recycler, de pouvoir obtenir des compléments de formation, pour atteindre le niveau requis pour être considérés comme personnel auxiliaire. Et, à mon sens, ces efforts doivent se poursuivre.

Un deuxième aspect a été mentionné. Afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, à mon sens, il serait indésirable de subordonner comme groupement professionnel — ici je dis comme groupement professionnel — les infirmières auxiliaires à l'Association des infirmières. Et ce n'est pas un reflet ni sur un groupe ni sur l'autre. Cela n'est pas un jugement quant à la valeur des relations qui existent entre les deux groupes. Il me semble que ce sont deux groupes distincts. Ils ne doivent pas, en tant que travailleurs de la santé, et en tant que groupement, être dans une position d'autorité d'un par rapport à l'autre, ou de subordination l'un par rapport à l'autre.

Ici je dis bien, en tant que groupement, parce que évidemment, lorsqu'on reprend la question sur le plan individuel, nous avons toute la réalité des hôpitaux par exemple et nous avons une multitude de situations possibles. Et je ne veux pas ici en faire l'inventaire. D'ailleurs, ce n'est pas l'objet de la discussion, à mon sens, d'essayer de faire cet inventaire. S'il n'y a pas d'insubordination en tant que groupement, se pose donc, comme vous le dites, la question de savoir comment sur le plan de l'organisation professionnelle, nous pouvons voir la situation en ce qui a trait au personnel auxiliaire.

Et vous avez noté qu'il n'y a pas de projet de loi spécifique dans la série qui a été déposée en relation avec le code des professions. C'est exact. Nous croyons, premièrement, qu'il était important de recevoir les mémoires, de discuter la question, parce que diverses possibilités se posent. Tout d'abord, il y a la corporation dont un champ d'exercice exclusif est réservé. Et comme on cite assez souvent le rapport de la

commission, je voudrais le citer moi-même pour dire — en tant que ministre et comme gouvernement, cette même attitude est retenue de façon générale — qu'il nous paraît qu'il doit y avoir des motifs extrêmement sérieux avant de constituer en une corporation, ayant un champ d'exercics exclusif, un groupe professionnel.

Il y a également l'autre possibilité qui apparaît dans le code des professions, c'estcelle du titre réservé. C'est une possibilité qui impose des obligations en ce sens qu'il doit y avoir un code d'éthique, il doit y avoir des mécanismes sur le plan de la discipline. Il doit y avoir aussi des niveaux de formation bien établis de telle sorte que chacun puisse savoir que lorsqu'il s'adresse à un membre d'une corporation à titre réservé, il s'adresse à quelqu'un qui est soumis à un cadre bien précis.

D y a également le mécanisme qui provient de l'attestation de compétence, suite à une formation obtenue en milieu d'enseignement. De nombreux groupes oeuvrent présentement à l'aide de ce mécanisme, ce qui permet une évolution plus facile et des stabilisations de situations. Il y a aussi l'autre mécanisme qui, sur le plan de l'activité quotidienne, l'activité concrète, est proposé dans le mémoire de l'Association des infirmières et infirmiers de la province de Québec, soit l'établissement, par voie de consultation, d'un certain champ qui puisse être délégué en plus d'un champ généralement reconnu comme étant celui du personnel auxiliaire.

Un choix doit être fait et ces diverses possibilités doivent être considérées. C'est la raison pour laquelle, à ce moment-ci, l'ensemble législatif que nous avons ne présuppose pas des décisions finales qui doivent être prises. La question que je pourrais poser est: Devant ces diverses possibilités, quelle est celle qui parait la plus valable à l'association? J'en profite, dans un dernier commentaire, pour rappeler que de nombreux groupements professionnels, qui sont extrêmement valables, ne sont pas formés en corporation et ne demandent pas à l'être. On a fait allusion ce matin aux actuaires, je ne reprendrai pas cet exemple; je pourrais parler des économistes, des sociologues, d'autres groupes qui ne demandent pas à être reconnus parce que le type de pratique, l'exercice de leur profession ne l'exige pas.

On peut vouloir garder plus de mobilité, plus de possibilités d'évolution. Il y a aussi certains dangers à fixer les choses dans des textes législatifs. Les corporations professionnelles qui ont des champs exclusifs qui leur sont réservés sont, dans presque tous les cas, des corporations professionnelles qui ont une longue existence. Je pose la question, elle me parait importante. J'aimerais qu'on explique si possible, pourquoi on préfère telle solution par rapport à telle autre et de façon aussi motivée que possible.

M. ISABEL: M. le ministre, nous partons, pour répondre à votre question, de la situation actuelle dans laquelle se trouve notre association. On considère le fait que l'association, qui est formée actuellement en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies, exerce, sans en avoir les pouvoirs spécifiques, des pouvoirs de même nature que ceux d'une corporation professionnelle. Aussi étrange que cela puisse paraf-tre, je pense que vous en conviendrez, M. le ministre, au niveau de la formation des gens il y a une étroite collaboration entre l'Association des gardes-malades et infirmiers auxiliaires et le ministère de l'Education.

Heureusement, nous n'éprouvons pas, pour notre part, les difficultés qu'ont eues les infirmières avec leur système de formation, quant à leur rapport avec le ministère de l'Education. Bien au contraire, les rapports avec les ministères et l'association ont été, chez nous, très cordiaux et énormément de travail a été effectué de ce côté-là pour fixer, avec l'aide des infirmières, on l'admet, des normes de formation adéquates.

Dans la mesure où on assume ce premier rôle, il nous paraît déjà que c'est un élan vers le système corporatif professionnel. En second lieu, nous avons été, à de multiples occasions, consultés par des directrices de nursing, des directrices de soins infirmiers pour des actes que des auxiliaires auraient posés. On s'en remettait à l'association parce qu'il paraissait que ce devait être par voie disciplinaire qu'on devait régler ces situations malheureuses. En fait, on assumait encore une fois, même sans en avoir les pouvoirs, le rôle d'un comité de discipline. C'est ce qui nous fait dire que pour une bonne part, tout au moins, on s'achemine dans les faits, avec la situation actuelle, vers un phénomène qui ressemble étrangement à la corporation professionnelle.

Par ailleurs, il faut admettre aussi, si on regarde le bill 273 particulièrement, qu'un champ d'activité a été défini par le gouvernement dans son projet de loi. Les infirmières ont soumis une définition plus serrée, peut-être plus adéquate aujourd'hui, de l'acte infirmier, mais on constate aussi qu'à l'article 31 il y a une exception quant à l'exercice illégal de la profession. On dit: Pour toute auxiliaire qui poserait ces gestes, qui exercerait la même profession, dans la mesure où elle est rémunérée pour ce faire.

C'est quasiment admettre, au départ, qu'on est dans un même champ d'activité. C'est un peu la réaction que vous aviez vous-même, M. le ministre, tantôt, en disant: II ne faudrait pas créer de conflit entre les deux organismes en posant des questions qui laisseraient croire éventuellement à des difficultés entre les deux organismes. On a toujours collaboré, on s'est toujours entendu. Il reste que, dans le fond, de la même façon que les infirmières le disaient ce matin, on est encore en pourparlers avec le Collège des médecins. Il faut quand même dire, nous aussi, au sujet de la définition qu'elles pourraient apporter de l'acte infirmier et de

l'exercice qu'on peut en faire, qu'on est encore en pourparlers avec eux, c'est évident. Il restera toujours à définir ce champ d'activité.

Puisqu'on est appelé — il faut le reconnaître dans la mesure où on fait une exception — à exercer dans un champ qui est très connexe, c'est déjà un autre pas vers le système corporatif professionnel. On est tellement près des infirmières sur le plan de la technique qu'il faut nécessairement s'orienter vers le même système. En effet, l'acte infirmier étant défini, on en assure, par une loi qui est le bill 273, éventuellement l'exercice et le contrôle.

Et, d'un même souffle, on ne trouverait pas le même mécanisme pour contrôler un acte qui est très connexe à celui posé par l'infirmière. Cela, c'est quotidien, c'est constant. Malgré toute la théorie qu'on a pu vouloir implanter à ce système de définition de l'acte infirmier et des gestes qui devaient être posés, on n'en est jamais arrivé en pratique à le réaliser complètement. On sait que les auxiliaires posent des actes qui reviennent aux infirmières, comme elles le font par rapport aux actes médicaux. Le problème qui était soulevé ce matin, inutile de le reprendre cet après-midi, mais il demeure le même, à un palier inférieur, entre les auxiliaires et les infirmières.

On se dit: Pourquoi ne pas prendre, pour contrôler l'admission d'abord, l'exercice et la formation, le moyen qui est donné aux infirmières puisqu'on est dans un champ qui ne peut pas être plus connexe? L'ensemble de ces raisons fait que, quant à nous, nous ne pouvons que vous soumettre la seule formule qui soit viable, surtout avec les antécédents que nous connaissons depuis cinq ans et la reconnaissance même que le ministère de l'Education et le ministère des Affaires sociales en ont faite jusqu'à ce jour dans leurs interventions au niveau de l'association et leurs consultations. Nécessairement — encore une fois, c'est ce qu'on vous soumet — la seule formule, c'est la formule corporative.

M. CASTONGUAY: M. le Président, il y a deux options dans la formule corporative. Vous savez que, dans le code des professions, nous retrouvons un certain nombre de corporations dont l'existence est maintenue ou encore dont la formation est proposée qui seront des corporations à titre réservé, alors que, dans d'autres cas, nous avons des corporations avec champ exclusif d'exercice, accompagné de modalités comme celles dont nous discutons depuis ce matin.

Je mets de côté, pour le moment, la question, comme vous l'avez dit vous-même, d'un "licensing board" ou d'un organisme octroyant des permis qui n'est pas composé des membres du groupement.

M. ISABEL: Sur le plan de la distinction que vous établissez entre les deux types de formule corporative, on doit dire très franchement qu'on les a étudiés tous les deux. Ce qu'on vous soumet, c'est évidemment celui qui nous parait être le meilleur, ce qui n'implique pas pour autant que l'autre ne serait pas valable. C'est moins bien, mais c'est acceptable. Nous continuons à dire que la meilleure formule demeure la formule de la corporation fermée. Je comprends que ça impose un certain nombre de conditions et d'obligations par la suite, de la même façon que la seconde formule qui est celle du titre réservé en impose aussi.

M. CHARRON: Pourriez-vous expliquer davantage ce qui vous a fait choisir entre les deux? Puisque vous dites que les deux formules vous semblent valables mais que vous avez choisi la meilleure. Pourquoi l'autre vous semblait-elle moins bonne?

M. ISABEL: Sur le plan corporatif, il parait évident que l'ensemble des prérogatives qui sont données à une corporation professionnelle fermée sont de beaucoup plus étendues qu'en ce qui concerne la formule du titre réservé. Dans cette mesure, il n'y a pas de commune mesure à dire qu'on ne peut que s'acheminer vers la formule qui est la plus complète en soi. Il est évident que le second pas qu'on doit faire, c'est de dire que si le législateur juge, lui, que cette formule ne convient pas parfaitement, il reste toujours l'autre formule qui est le titre réservé.

M. CHARRON: Donc, dans l'exercice de votre profession, pour la plus grande qualité possible, vous avez besoin du titre corporatif fermé.

M. ISABEL: Absolument.

M. CHARRON: De toutes les prérogatives et des modalités qu'il y a, et que l'autre affecterait la qualité de votre profession, si vous deviez prendre la deuxième formule.

M. ISABEL: Ecoutez, on doit admettre très franchement que, si on avait la seconde formule, on ne toucherait pas nécessairement à la qualité et à la compétence des gens quant aux normes qu'on pourrait fixer éventuellement en termes de contrôle d'exercice, par exemple, par un code de déontologie. Quant à la seconde formule, ce n'est qu'après coup qu'on exerce le contrôle. Jamais on n'exerce le contrôle auparavant. De sorte qu'on voudrait, à toutes les étapes, pouvoir exercer un contrôle et ce, dans le seul et unique but d'être sûr qu'on puisse offrir des services compétents de la part de nos gens, et ainsi protéger le public.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: Je comprends que, dans votre groupement, il y a eu des regroupements de certaines écoles, par exemple, de gardes-bébés qui sont peut-être spécialisées avant d'avoir une

formation de base. Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de songer d'entrer dans une corporation déjà formée, parce qu'il y a eu des recyclages pour en venir à former le personnel auxiliaire, infirmiers et infirmières auxiliaires? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'étudier, avec les infirmières, vos écoles pour faire des auxiliaires des infirmières et des infirmiers?

M. ISABEL: Là-dessus, je répondrai au député de Dubuc...

M. BOIVIN: D'abord, la différence réside entre les périodes de formation des infirmières et celle des gens de votre association.

M. ISABEL: Je laisserai ce type de réponse à mes collègues de gauche. Ce que je voudrais signaler avant de leur laisser la parole, c'est que tout le système de recyclage en soi a permis, pour une part, le regroupement. On pense, par exemple, au recyclage et ce, à l'instigation même du ministère des Affaires sociales; d'abord le ministère de la Santé en 1967, puis le ministère des Affaires sociales a continué le même système. Les gardes-bébés et les puéricultrices ont eu tendance à disparaître. Des cours de recyclage ont été instaurés qui ont permis à ces gens de devenir auxiliaires. Il y a un autre système qui vient par la suite. Il permet à des auxiliaires de se recycler pour devenir infirmières.

Quand on parle de recyclage et de formation, on l'a toujours fait, du moins en ce qui nous concerne — pour prendre l'exemple que vous donniez vous-même — les gardes-bébés qui deviennent auxiliaires, on a exercé des pressions pour que les formules employées, le contenu des cours soit satisfaisant et que ce contenu tienne compte de ce que ces gens avaient fait auparavant par rapport à ce que les auxiliaires avaient aussi fait.

Quand on passe à l'autre partie, des gens qui sont chez nous et qui veulent devenir infirmières, on en a parlé aussi avec les infirmières. Mais il reste que c'est plutôt elles qui doivent dire: La personne qui vient chez nous devra avoir telle compétence. Là-dessus, je pense que Mlle Bureau s'est exprimée assez clairement tantôt quand elle a parlé de la formation. Elle a employé un exemple qui recoupait un peu la situation qu'on est en train de discuter. A ce niveau, quand on parle de formation non seulement au niveau des CEGEP, mais aussi en termes de recyclage des auxiliaires qui devien-ment infirmières, ce sont les infirmières qui ont un mot à dire là-dessus. De sorte que nous ne nous confinons qu'à notre propre domaine des gens qui partent de plus bas, pour employer cette expression, et qui s'en viennent chez nous. On joue au niveau de cette formation.

M. BOIVIN: Quelles sont les exigences pour devenir...

M. ISABEL: Je vais laisser cela à M. Laroc-que qui est plus compétent que moi dans ce domaine.

M. BOIVIN: Qu'est-ce que vous exigez des membres qui vont à votre école pour devenir auxiliaires?

M. LAROCQUE: Actuellement, c'est au niveau du ministère de l'Education, c'est au niveau secondaire IV et V. Je pense que vous aviez un programme, ce matin, qui était celui du ministère de l'Education. Le cours est de deux ans avec des stages dans les hôpitaux, avec et la partie théorique et la partie de l'apprentissage à l'hôpital. Alors, si c'est une garde-bébé, supposons, qui est diplômée d'un hôpital et qui veut devenir garde-malade auxiliaire ou infirmière auxiliaire, elle doit compléter ce qui lui manque chez les adultes, conformément au programme du ministère de l'Education.

M. BOIVIN: Est-ce qu'il y a beaucoup de membres de votre association qui se dirigent vers la Corporation des infirmières, c'est-à-dire qui complètent leurs études pour devenir des infirmières ou des infirmiers?

M. LAROCQUE: D'après le nombre d'admissions dans les CEGEP, c'est le désir d'un grand nombre de nos membres parce qu'actuellement ils sont insatisfaits de la situation qui existe de la profession. C'est surtout le gros point.

M. BOIVIN: Merci.

M. CHARRON: Vous dites qu'ils sont insatisfaits. Voulez-vous dire que c'est au niveau de la formation?

M. LAROCQUE: Au niveau de l'exécution de la tâche à l'hôpital.

M. CHARRON: Ah bon!

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, on nous a remis, dernièrement, une espèce de tableau comparatif en ce qui concerne la formation. Pour les infirmières, cela se situe au niveau collégial. Pour les auxiliaires, cela se situe au niveau secondaire. Une bonne partie de la formation, en fait, semble pratiquement la même, sauf que les auxiliaires ont moins d'heures d'étude — maintenant je ne vous demande pas si vous êtes d'accord sur ce que j'ai ici, c'est le seul tableau que j'ai et c'est pour ça que je m'en sers — et que les infirmières ont beaucoup plus d'heures. Mais, en pratique, dans le champ de travail, est-ce qu'il existe une grande ou une énorme différence entre les actes posés par des auxiliaires et les actes posés par des infirmiè-

res? Pour Monsieur Tout-le-Monde, l'auxiliaire ou l'infirmière, c'est la même chose. Ce sont toutes des gardes-malades. Quand on va à l'hôpital, c'est une garde-malade, qu'elle soit auxiliaire ou infirmière. Alors, à partir de là, j'aimerais savoir si, en pratique — parce que la pratique démontre qu'il peut se présenter bien souvent autre chose que ce qu'il y a en théorie ou encore sur papier dans une loi — dans un même centre hospitalier, c'est sensiblement la même chose, les actes qui sont posés.

M. ISABEL: En termes d'actes, si on veut poser le problème de cette façon, on doit admettre que les techniques, à la base, sont les mêmes. C'est évident que les connaissances scientifiques, ce qui est une tout autre question, sont différentes pour l'infirmière et l'auxiliaire. Déjà en posant ces deux principes côte à côte, on voit la différence qui peut exister, même dans le champ d'activité pratique. On peut revenir, encore une fois, à toute l'explication que l'on avait de l'acte infirmier tantôt et qui était donné par Mlle Bureau. Il y avait des démarcations qui se posaient. Elle les posait des deux côtés aussi, aussi bien par rapport à l'auxiliaire, par en bas, en délimitant la tâche, et par en haut aussi. C'est le même problème qui se situe au niveau des auxiliaires. Il peut fort bien se produire qu'en pratique des gestes soient posés par des auxiliaires, gestes qui appartiennent carrément au domaine des infirmières. Il ne faut quand même pas dire que c'est d'une fréquence quotidienne très élevée.

M. GUAY: D'accord.

M.ISABEL: Parce qu'alors, on serait une infirmière tout court. On ne prétend pas être des infirmières.

M. GUAY: Maintenant, il semble bien, depuis le temps qu'on en discute, que le problème no 1 se situe à ce niveau. Alors, à la suite de questions posées, on m'a répondu qu'il était quasi impossible d'établir des cloisons étanches entre les infirmiers et infirmières et les médecins. Il ne semble pas plus facile d'établir d'autres cloisons étanches entre les auxiliaires et les infirmières. A partir de là, si la loi dit qu'aucun chevauchement ne doit exister, je suis obligé de donner ma langue au chat et dire que c'est impossible selon les explications. C'est peut-être beau sur papier, mais en pratique, cela devient autre chose. C'est peut-être, en même temps, un commentaire qui donne suite à une question. J'attends la réponse: Seriez-vous disposé à vous intégrer au corps des infirmières, actuellement?

M. ISABEL: II y a une double question dans ce que vous venez d'énoncer. Il y en a une première qui touche la définition de l'acte infirmier comme tel. En fait, c'est nous demander très indirectement quelle sera notre position par rapport à cela, étant donné les difficultés de définir carrément ce que peut être l'acte infirmier et d'en poser les limites.

Le ministre des Affaires sociales, ce matin, faisait une suggestion à l'Association des infirmières et infirmiers, en disant: On peut toujours créer un comité, par voie législative, qui pourrait étudier toute cette question. Il posait alors la question comme devant se débattre entre deux corporations uniquement. C'est évident qu'on a une réaction à cela. Je pense bien que le ministre des Affaires sociales devait s'attendre qu'on réagisse à cela en disant qu'on est bien d'accord que cela se fasse. Cela doit se faire, à un moment donné. La philosophie qui anime cette proposition est fort heureuse, en soi. Encore faudrait-il que nous soyons un peu dans le portrait, pour une raison bien simple: malgré toute la confiance que nous avons envers les infirmières, là-dessus, il faut quand même admettre que la difficulté existe depuis des années. Personnellement, je ne me permettrais pas de laisser cela uniquement entre les mains des infirmières. Cela se comprend. Ce n'est pas un vote de non-confiance. Il s'agit d'établir des champs d'activité. Dans cette mesure, chaque partie qui participerait à l'élaboration d'un système voulant déterminer des normes de pratique voudrait tirer la couverture de son côté, c'est évident. Dans tout ce système, ce sont les auxiliaires qui risquent de voir leur profession se scléroser.

Le système de délégation proposé par l'AEPQ, cela fait que ce sont les infirmières elles-mêmes qui disent: Le champ d'activité étant délimité à peu près de la façon suivante, ce qu'on peut laisser aux gens d'en bas, c'est à peu près cela. Il faudrait participer à ce système.

Le deuxième aspect de votre question, c'est que vous allez plus loin que cela. Le Dr Boivin y faisait allusion tantôt lui-même, en disant: Seriez-vous prêts à vous laisser imbriquer, d'une certaine façon, dans les cadres de la Corporation professionnelle des infirmières? D'abord, il y a une première question que je me pose. Dans la mesure où, depuis un certain nombre d'années, les infirmières nous laissent notre autonomie, je me demande si elles sont tellement intéressées à nous voir revenir. La deuxième question, c'est une chose certaine, nous ne sommes pas intéressés à y retourner, pour une raison bien simple, qui est celle exprimée par le ministre des Affaires sociales: Ce sont des champs distincts, bien que connexes. Dans cette mesure, cela doit être divisé. Chacun doit avoir son propre domaine d'activité.

Alors, à cette question sous-entendue, notre position est claire. Nous voulons être autonomes. Nous nous demandons — c'est l'ensemble de nos prétentions — quelle méthode employer pour le contrôle de l'exercice.

M. GUAY: Si je me reporte à un autre document — vous m'excuserez encore d'avoir

seulement celui qui nous a été fourni par les infirmières — quand on regarde un sommaire des fonctions comparées, un plus grand nombre d'actes, apparemment, devraient être posés par l'infirmier ou l'infirmière. Un certain nombre, quand même assez restreint, d'après l'énumération que j'ai devant les yeux, le serait par les auxiliaires. C'est de 11 à 37. Mais on nous a démontré en pratique, ce matin, qu'à défaut de médecin l'infirmière ou l'infirmier pose un acte médical. Alors je repose la question: Est-ce qu'à défaut d'infirmière, l'auxiliaire va poser des actes infirmiers?

M. ISABEL: Je ne pense pas qu'on puisse poser la question dans les mêmes termes mais on arrive quasiment à la même réponse. Il y a les actes, tel qu'ils sont définis et catégorisés, à l'heure actuelle; on pense au petit livre vert de 1967, entre autres. On sait que malgré le tollé de protestation qu'il y a eu, en pratique et quotidiennement, ce n'est pas tellement respecté. C'est que les exigences du milieu et les besoins font en sorte que, bien souvent, les auxiliaires vont poser des gestes que les infirmières devraient poser. Cela, on le fait sans crier à l'illégalité. Ce sont plusieurs groupes, les médecins, les infirmières et les auxiliaires qui travaillent constamment ensemble.

On ne peut pas dire que l'auxiliaire remplace carrément l'infirmière quand elle n'est pas là. Cela peut être vrai, dans certaines circonstances, bien sûr. Les actes posés, on ne peut pas les considérer selon leur nombre. Que les auxiliaires posent moins d'actes n'amène pas de conclusions. On ne peut pas poser le problème de cette façon. Là où cela devient important, c'est que les actes qui sont posés par les auxiliaires sont faits comme étant ceux des auxiliaires, des infirmières et des médecins.

Si on prend l'exemple de la tension artérielle, c'est l'auxiliaire qui la prend. Le résultat s'en va au dossier et l'infirmière connaît le résultat. S'il faut absolument que l'infirmière exerce la surveillance que la loi lui donne sur l'auxiliaire, elle va aller reprendre la tension artérielle pour voir si c'est bien ça. A ce moment-là, on n'a plus besoin d'auxiliaire.

Ce n'est donc pas "en remplacement de", mais à titre "d'auxiliaire de". On voit aussitôt l'importance de contrôler les gestes posés par une catégorie de travailleurs qui s'appellent les auxiliaires. C'est une information que ces gens donnent à l'infirmière et que l'infirmière va transmettre au médecin. Si on n'a aucun contrôle sur l'exercice de cette profession, on voit les dangers pour le public. C'est de cette façon que nous répondons à la question que vous soumettiez.

M. GUAY: Si les trois groupes de personnes sont habilités à dispenser des soins, à donner des services sur un même étage d'un centre hospitalier, ce doit être assez difficile de ne pas entrer en conflit. On doit faire certains compromis.

M. ISABEL: II faut en faire.

M. GUAY: Est-ce possible d'établir des champs de pratique distincts sans chevauchement? Moi, je pense que non. S'il n'y a pas une collaboration bien étroite en ce qui concerne l'élaboration des cours, la formation et l'accréditation, j'aimerais bien que vous tentiez de préciser qui, premièrement, va élaborer les cours. Si on veut éviter les chevauchements, il va falloir que chacun demeure dans sa sphère bien particulière.

Il y a un danger pour l'autonomie des professions, c'est que, tôt ou tard, la formation va couvrir le même champ. A partir de là, est-ce possible de fonctionner normalement s'il n'y a pas une communication constante entre les groupes concernés, médecins, infirmiers-infirmières, et auxiliaires?

M.ISABEL: Je me demande, M. Guay, si vous ne proposez pas dans des termes différents la suggestion que le ministre des Affaires sociales faisait ce matin.

M. GUAY: Le problème est là.

M.ISABEL: Etant donné la complexité du problème, le ministre faisait une suggestion, en disant: Ce n'est pas par voie de législation que le problème va se régler. Donc, quand vous vous demandez s'il ne doit pas y avoir une collaboration très immédiate entre chacun de ces groupes, cela me paraît absolument nécessaire. Il paraît d'autant plus nécessaire qu'un de ces groupes ne soit pas ignoré dans le processus de détermination de l'acte infirmier et des actes, si jamais on en faisait une liste.

M. GUAY: Je pense que c'est plus que nécessaire. Je vais aller un peu plus loin que le ministre en disant que ça va devenir obligatoire si on veut éviter le chevauchement.

M. ISABEL: Si on veut régler le problème, il va falloir procéder de cette façon et qu'il y ait une collaboration. Même si on trouve un mécanisme qui nous permettrait de tenter de le régler, le problème n'est pas plus facile pour autant, mais c'est une façon de l'aborder.

M. GUAY: La dernière question que je me pose — j'espère que vous pourrez y répondre, parce que moi, je ne trouve pas la réponse — est la suivante: Qui va accepter de se soumettre? Quand même, il va y avoir une part de la formation qui va déborder dans un autre champ, soit que les auxiliaires soient obligés de se restreindre à une certaine formation, ou encore que les infirmiers et infirmières doivent se tasser un peu de côté pour faire place aux auxiliaires.

On revient toujours au même problème, mais, puisque nous sommes ici pour en discuter, je veux essayer de tirer le maximum de lumière possible.

M. ISABEL: Vous me paraissez poser la question que le député de Montmagny a tenté de poser tantôt. A toutes fins utiles, c'est prendre l'approche conflictuelle en la posant dans ces termes. On dit: Lequel des trois groupes va lâcher?

M. GUAY: C'est ça.

M. ISABEL: Je ne pense pas que ça puisse se poser de cette façon. Il y a des champs d'activité qui sont connexes, très près l'un de l'autre, mais qui sont quand même distincts. Il y a la petite barrière entre les deux où se situent les problèmes. C'est là que cesse le champ d'activité d'un et que le champ d'activité de l'autre commence et se continue. Ce n'est pas globalement que le problème se situe de définir l'exercice de la profession par rapport à une autre profession; il s'agit d'établir la limite ultime.

M. GUAY: Je pense qu'on ne peut pas se permettre de tirer au sort qui va lâcher, comme on le fait pour des candidats dans une campagne électorale. C'est bien différent.

M. ISABEL: Là-dessus, il faut admettre qu'il y a eu énormément de tractations qui ont déjà été faites. Tout le monde déplore cette situation où l'acte infirmier est mal défini et où l'acte médical est défini de façon telle qu'on constate que les infirmières posent des gestes médicaux à longueur de journée.

Il y a eu des tractations mais jamais il n'y a eu de mécanismes qui obligeaient les parties à s'asseoir et tenter de régler le problème. A ma connaissance, tout au moins, il n'y a jamais eu de tractation telle qu'on ne soit proche d'une solution là-dessus.

M. GUAY: Mais, au départ, vous êtes prêt, comme représentant de votre groupe, à collaborer de façon maximale?

M. ISABEL: Non seulement, sommes-nous prêts à collaborer mais nous demandons d'y être.

M. GUAY: Je pense que, si tout le monde est prêt à collaborer, cela fonctionnera. C'est ce que nous souhaitons.

M. CHARRON: Pour continuer dans la même veine que les questions du député de Dorchester, vous semblez poser comme condition, peut-être pas comme condition, je ne parle pas d'ultimatum, mais comme argument qui faciliterait les choses, que si vous aviez le statut de corporation, l'espèce de dialogue à trois parties, le "trilogue" auquel vous invitez le ministre des Affaires sociales quant à la définition des champs d'activité, serait plus clair pour vous. Vous imaginez que, si vous allez à une table de négociation, de champ d'activité où vous faites face à deux corporations professionnelles pendant que vous, vous n'avez pas ce statut, vous partez avec un désavantage dans la distribution des champs de travail.

Je voudrais que vous expliquiez plus clairement comment le statut de corporation ou non qui vous serait accordé affectera la distribution du travail particulièrement entre les auxiliaires et les infirmières licenciées.

M. ISABEL: Ce système peut jouer en deux étapes dans la mesure où l'on pose l'hypothèse au départ que nous sommes un système corporatif professionnel fermé. Vous le dites vous-même, nous sommes sur un pied d'égalité avec deux autre professions.

M. CHARRON: D'accord.

M. ISABEL: Or, je pense que chacune de ces professions, à l'heure actuelle, admet que les champs d'activité sont différents. Et je reprends ce que je disais tantôt. Il reste la petite barrière. C'est là que le problème se crée. Ce pourquoi il nous apparaît que, si nous ne sommes pas une corporation professionnelle, nous sommes complètement submergés pour ne pas dire noyés, c'est qu'à ce moment-là, nous, ne pouvons absolument pas discuter sur un même pied bien que les deux autres parties puissent fort bien admettre que le champ d'activité qui est le nôtre est distinct du leur. Bien que connexes, ils n'ont certainement pas la même oreille pour tenter de régler la situation en tenant compte d'un groupe, qui, par rapport à eux, sur le plan corporatif, deviendrait marginal. Dans ce sens, ne serait-ce que pour ce seul but de régler le problème de l'acte infirmier et de l'exercice quotidien de la profession, il nous apparaît que nous devons avoir une corporation professionnelle.

M. CHARRON: Mais je ne suis pas certain, si la corporation professionnelle des infirmières a à négocier avec vous le champ d'activité de chacun des deux groupes, que votre statut de corporation ou non fasse que la corporation professionnelle des infirmières — ceux au-dessus, comme vous les avez appelés vous-même tout à l'heure — aura une position différente à votre égard. Encore une fois, j'hésiterais lorsqu'il s'agit du travail quotidien dans le centre hospitalier. Je me demande pourquoi, dans la répartition du travail, on prendrait une attitude différente si la garde auxiliaire était membre d'une corporation ou ne l'était pas. Sur le plan concret du travail du centre hospitalier, je ne parle pas des négociations pour les salaires, etc., plus tard je parle simplement du travail concret, quel changement qualitatif dans la relation cela pourrait-il entraf-ner?

M. ISABEL: De la façon que vous exprimez votre question, c'est l'approche conflictuelle entre trois parties.

M. CHARRON: Ecoutez, depuis le matin...

M. ISABEL : II ne me parait pas qu'il doive y avoir une approche conflictuelle. A toutes fins utiles, à l'heure actuelle, il n'y en a pas eu d'approche de ce genre, et on n'a jamais vu cela comme étant un conflit. Tout le monde sait qu'il y a un problème, mais tout le monde sait qu'on peut le régler.

M. CHARRON: Appelons cela une approche problématique.

M. ISABEL: Nous ne nous sommes pas battus. Cela ne veut pas dire —il faut quand même être honnête et l'admettre — que le fait que nous n'aurions pas une corporation professionnelle ferait que cela pourrait changer le champ d'activité comme tel. Mais il est aussi vrai — on le dit du même souffle — que si nous sommes une corporation professionnelle, là, nous pouvons faire valoir un champ d'activités d'une façon plus forte. C'est une question de stratégie, si vous voulez. Si on veut employer le terme, on a utilisé celui de négociation entre guillemets, nous allons employer celui de stratégie entre guillemets. C'est au même niveau.

M. CHARRON: J'ai appris que la deuxième formule de corporation que vous a présentée le ministre des Affaires sociales tout à l'heure et que vous avez dit quand même valable, comporte la détermination d'un champ exclusif.

Donc, si vous adoptiez cette deuxième formule, qui semble ouverte en tout cas à votre association actuellement, dans ce domaine précis vous auriez les mêmes droits que la corporation des infirmières, quoiqu'elle vous donne droit à un champ exclusif de travail.

M. ISABEL: C'est bien certain, la réponse est affirmative.

M. CHARRON: J'ai une dernière question aussi à vous poser. Qu'est-ce qui arrive si vous n'avez pas le statut de corporation? Vous avez parlé tantôt de vos relations avec les infirmières. Vous avez souligné l'autonomie qu'on vous a accordée. C'est ce que j'ai senti aussi à la réponse qu'elles m'ont fournie tout à l'heure. Deuxièmement, vous dites vous que vous êtes certain d'une chose, c'est que vous ne voulez pas y retourner.

Si, le bill 273 une fois adopté, vous n'avez de statut de corporation professionnelle, qu'est-ce qu'il advient?

M. ISABEL: C'est justement la question que nous nous posons et essayons de poser au gouvernement. En fait, nous resterions au minimum dans la situation actuelle. Sur le plan juridique, le statut que nous avons est extrêmement limité, restreint. Nous sommes incorporés en vertu de la troisième partie de la loi des compagnies. Nous pouvons nous donner par règlements certains pouvoirs, mais la loi les limite.

Nous n'avons donc sur le plan juridique aucune possibilité de contrôler, que ce soit l'exercice de la profession elle-même ou l'admission à cette profession. Encore qu'à l'heure actuelle nous donnons des permis de pratique. Les hôpitaux, d'une façon générale, ont accepté, au niveau des directions du personnel et du nursing, que les gens n'entrent pas sur le marché du travail sans que soit présenté ce permis.

Il y a encore des hôpitaux qui procèdent autrement. Dans la mesure où cet appui moral, qui provient autant des infirmières que des hôpitaux, ne continue pas à se maintenir, que nous n'avons pas de certitude qu'il se maintiendra, c'est pratiquement nier l'existence d'un groupe de plus de 20,000 personnes. Nous n'aurions plus aucun contrôle et les personnes, individuellement, n'auraient plus de droits. C'est là que se situe tout le drame dans la mesure où les personnes, sur le plan individuel, n'auront plus aucune garantie. Et, comme groupe, elles en auront encore moins.

Il faut absolument que des pouvoirs soient donnés à un groupement comme celui-là pour exercer un contrôle de quelque façon que ce soit. Qu'il y ait des dispositions de prévues pour permettre de participer à la formation, contrôler l'admission, et ensuite l'exercice. C'est dans le seul but que le public soit assuré que la personne qui est auprès de lui soit compétente, qu'elle puisse fournir des services efficaces, ce qui n'existe pas à l'heure actuelle.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Très brièvement, je voudrais poser quelques questions. Qui négocie actuellement pour vous des conditions de travail?

M. ISABEL: Le député de Montmagny demande s'il y a un lien entre l'aspect corporatif et l'aspect syndical. C'est très évident dans le cas des auxiliaires à l'heure actuelle, j'allais dire contrairement aux infirmières, mais non. Les auxiliaires appartiennent à une unité dite générale qui est régie par une des deux grandes centrales qui est dans le secteur hospitalier.

Cela ne veut pas dire que le fait que la syndicalisation soit totalement distincte de l'aspect corporatif place dans l'ensemble l'association et les membres dans une situation difficile. Il n'y a rien qui dit que ça ne pourrait pas changer. Non pas que la corporation prenne à sa charge un aspect syndical, loin de là, mais il reste que le regroupement des auxiliaires entre eux ou entre elles devient de plus en plus imminent. Cela ne voudrait pas dire nécessairement que ça continuerait d'exister à l'intérieur d'une centrale.

M. CLOUTIER (Montmagny): Advenant que

le législateur — ça ne sera pas 273, mais ça pourrait être 273 a) ou 273 b) — vous reconnaisse comme corporation professionnelle, quelle serait la tâche prioritaire que vous entreprendriez? Est-ce qu'il y a des mécanismes comme l'éthique professionnelle, comme la révision de la qualité des membres que vous avez actuellement? Est-ce qu'il y a des tâches que vous devriez entreprendre immédiatement après ça?

M. ISABEL: En fait toutes les tâches qu'il ne nous est pas permis d'entreprendre parce que nous n'en avons pas les pouvoirs à l'heure actuelle. Si l'on pense en termes de mise en place de mécanismes, nous avons déjà un comité de discipline. Mais il a des pouvoirs tellement restreints que les gens peuvent ne pas s'y soumettre même s'ils le veulent. C'est ce qui se produit assez souvent.

A ce moment-là, on reste dans l'imprécision. Déjà, à ce niveau-là il y a un code à adopter; il faut l'adopter et préciser des normes, ce qu'est l'exercice et la pratique, et ce, dans le seul but de protéger le public. A l'heure actuelle, étant donné qu'il n'y a rien de cela, on applique des normes que nous nous sommes faites à l'usage, ou nous disons: La personne qui pose tel geste, c'est contraire à la profession.

Cela paraît d'une façon très évidente et il faut donc mettre en place ces mécanismes, établir, puisqu'on en aurait les pouvoirs à ce moment-là, tout le code de déontologie et, par la suite — cela nous parait comme une conséquence — cela nous permettra d'améliorer les standards de qualité, non pas qu'ils soient très inférieurs à l'heure actuelle, mais cela nous permettra effectivement d'exercer le contrôle qu'on ne peut pas exercer à l'heure actuelle.

Une personne, par exemple, termine son cours, qu'elle soit recyclée ou pas. Si elle se présente dans un hôpital et qu'on lui demande son permis de pratique accordé par l'association, cette personne, si elle a certaines connaissances juridiques, peut fort bien répondre à l'hôpital que ce n'est pas nécessaire parce que, légalement, elle n'est pas obligée d'avoir ce permis pour travailler. En second lieu, si cette personne, dans une deuxième hypothèse, pose un geste contraire aux intérêts de la profession, nous n'avons plus aucun contrôle, pas plus que l'hôpital. C'est assez étonnant —- je le soulignais tantôt — de voir les hôpitaux revenir vers la corporation quand il s'agit de cas extrêmement patents, de gestes contraires à la profession. Cela vient de directeurs de personnel qui oublient tout le système de relations de travail où, dans ce milieu, peuvent être prises des mesures disciplinaires contre une personne qui a posé des gestes qui, professionnellement ne doivent pas exister.

Les directeurs de personnel, les directrices de nursing ne procèdent pas de cette façon. Ils se tournent plutôt vers l'association en disant: C'est un de vos membres, faites quelque chose. On n'a rien, on ne peut pas citer ces gens-là, on n'a aucun pouvoir de ce côté-là.

M. CLOUTIER (Montmagny): A quel rythme s'accroît votre association annuellement?

M. ISABEL: II faut quand même tenir compte d'un phénomène assez récent, qui prévaut depuis deux ans, c'est le regroupement des gardes-bébés, etc., un certain nombre de groupements d'auxiliaires qui viennent chez nous. En fait, quand on parlait de gardes-malades et d'infirmiers auxiliaires, nous étions 8,800 et nous sommes 14,000. On estime, d'après les relevés qu'on a, que sur le marché à l'heure actuelle, il y en a entre 18,000 et 20,000.

Donc, la progression depuis deux ans a été assez importante et on estime que cela se continue.

M. CLOUTIER (Montmagny): Vous disiez 16,000 dans le mémoire. Je ne vous chicanerai pas pour 2,000.

M. ISABEL: On n'est pas à 2,000 près.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous croyez, à courte échéance, que d'autres professions, d'autres sections — il y a les puéricultrices, les gardes-bébés qui ont été recyclées et qui sont arrivées chez vous — pourraient venir chez vous?

M. ISABEL: II y a des infirmières auxiliaires tout court — c'est ce dont parlait Mlle Bureau tantôt, si je m'exprime correctement — qui passent maintenant chez nous et ce, avec la collaboration de l'AIPQ qui est prête à nous laisser ces gens-là, c'est notre champ d'activité. Il y a les "nursing assistants" qui se dirigent vers nous. Il y en a quelques-unes qui sont déjà devenues membres de l'association; les autres ont soumis des dossiers qu'on regarde et qui vont devenir éventuellement membres chez nous.

M. CLOUTIER (Montmagny): Avez-vous pris connaissance de l'annexe du bill 250? Y a-t-il d'autres corporations professionnelles qui sont reconnues par la loi ou qui sont nouvellement créées qui ont à peu près le même degré de formation que les auxiliaires?

M. ISABEL: Là-dessus, remarquez que je n'ai pas fait d'étude particulière.

M. CLOUTIER (Montmagny): A première vue, je l'ai regardé mais je n'ai pas fouillé, je pense que la majorité est au niveau collégial. Mais il y a d'autres associations qui ont demandé d'être des corporations, peut-être qu'elles sont au niveau secondaire, c'est pour cela que je vous pose la question. A ce moment-là, ce n'est pas l'argument de la formation surtout qu'il faudrait invoquer...

M. ISABEL: Non, c'est une question...

M. CLOUTIER (Montmagny): ... c'est l'argument de la protection du public, l'argument des mécanismes à mettre en place, dont vous avez parlé tantôt, le code de déontologie, le code d'éthique, le contrôle sur la profession.

Il y a aussi la question que je vous ai posée: l'accroissement normal des effectifs que vous prévoyez. C'est peut-être préférable de donner le feu vert tout de suite à votre demande de création d'une corporation que d'attendre qu'il y ait chez vous double demande, que vous ayez 32,000 membres. A ce moment-là, peut-être qu'avec les 16,000 autres qui seront entrés, vous n'aurez pas eu les contrôles que vous auriez voulu avoir et sur la formation et sur la préparation. C'est la question qu'il faut se poser.

M. ISABEL: C'est ce qui est très important.

M. CLOUTIER (Montmagny): Même si le code des professions permet, plus tard, d'ajouter des corporations professionnelles pour autant qu'elles répondront aux quatre critères de l'article 21, si c'est préférable que ça se fasse tout de suite, il faudra que le législateur prenne la décision d'accorder tout de suite la corporation professionnelle. C'est la réflexion que je voulais faire, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté des parlementaires? A titre de président, il m'est agréable de remercier les représentants de l'association de s'être soumis si aimablement aux questions venant de chaque côté de la table. Avant de passer au prochain organisme, sur une suggestion d'un des membres de la commission, on pourrait suspendre les travaux pendant cinq minutes afin de permettre à tout le monde de se délasser quelque peu.

Nous reprendrons dans cinq minutes.

Cadres infirmiers unis inc.

M. LE PRESIDENT: Nous reprenons nos travaux en invitant les Cadres infirmiers unis inc. à se présenter devant nous pour commenter leur mémoire et répondre aux questions des parlementaires. Je prierais les porte-parole de s'identifier. Nous vous écoutons.

MLLE PHIPPS: J'aimerais, tout d'abord, présenter Mme Joan Porcheron, présidente des Cadres infirmiers unis, à ma droite. Moi-même, je suis Jocelyne Girard-Phipps, directrice générale des Cadres infirmiers unis.

M. le Président, messieurs les députés de la commission parlementaire, nous venons d'entendre la présentation du mémoire de l'AIPQ. En ce qui concerne les prises de position relatives à l'éducation, à la formation, à la discipline, à l'acte infirmier et au contrôle de cet acte, nous sommes en parfait accord sur les énoncés faits aujourd'hui. Aussi, considérant combien le temps de chacun est précieux, nous voulons éviter, en vous présentant notre mémoire, de répéter les mêmes points.

Cependant, en tant que syndicat, nous avons, vis-â-vis de nos membres, certaines préoccupations que ne doivent avoir d'autres corporations dont le but primordial est la protection du public. Nous voulons vous faire connaître les sujets de nos désaccords quant au projet de loi no 250 spécifiquement.

Nous sommes en désaccord sur l'article 83 et l'article 169 du bill no 250 qui permettraient au bureau ou au lieutenant-gouverneur en conseil d'approuver des tarifs d'honoraires professionnels pour les services rendus. Ces deux articles donneraient des pouvoirs au bureau de la corporation des infirmières ou au lieutenant-gouverneur en conseil et, de plus, rendraient impossible la négociation de conventions individuelles de travail pour les membres de syndicat de cadres. Ce genre d'article avait aussi été inclus dans le projet de loi no 65, mais cette clause, on l'a enlevée dans la version finale de cette loi, tel que proposé dans le mémoire présenté à la commission parlementaire par les Cadres infirmiers unis.

De plus, nous trouvons qu'il est illogique et incompatible pour le même corps légal, c'est-à-dire la corporation professionnelle, d'avoir à la fois la responsabilité de défendre les droits du public et celle de faire des recommandations au sujet des salaires de ses membres. Les Cadres infirmiers unis demandent donc de nouveau que ces deux articles soient enlevés du projet de loi no 250.

L'article 51 du bill no 250, qui traite de l'interdiction prononcée par un tribunal ou de l'admission dans un centre hospitalier au sens de la Loi des institutions pour malades mentaux, entraîne la radiation automatique du professionnel qui en fait l'objet. Etant donné que cet article démontre des préjugés précis contre les troubles mentaux, ignore complètement l'admission de cas sérieux aux sections psychiatriques des hôpitaux généraux, requiert que le directeur des services professionnels fasse rapport de telles interdictions ou admissions, ce qui pourrait devenir une charge de travail considérable pour un directeur de services professionnels dans les hôpitaux psychiatriques importants, les Cadres infirmiers unis recommandent que l'article 51 soit changé pour se lire comme suit... Vous avez, d'ailleurs, notre recommandation entre les mains. Je pense qu'il serait plus facile de donner une suspension au professionnel de la santé. Le médecin, lorsque la personne en question aura eu les traitements nécessaires, pourra évaluer le cas et lui permettre de nouveau d'être admis à la profession.

Nos représentations se résument à cela.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre.

M. CASTONGUAY: Merci, M. le Président.

Je voudrais aussi remercier les Cadres infirmiers unis pour ce mémoire. Je comprends les raisons pour lesquelles vous limitez vos observations à ces quelques points, compte tenu de la longue discussion que nous avons eue. Vous pouvez être assurés que, malgré tout, le mémoire que vous avez soumis nous est fort utile dans notre travail.

J'aurais une couple de précisions à apporter. Lorsque vous parlez de la question des honoraires, notre intention n'est, en aucune façon — d'ailleurs, je l'ai dit la semaine dernière, lorsque j'ai parlé des précisions que nous nous proposions d'apporter aux dispositions du code des professions — de demander aux organismes, tels que les corporations professionnelles, de jouer un rôle dans la détermination d'honoraires lorsqu'il existe un groupement qui est apte à négocier.

H y a aussi, par contre, certaines situations, et c'est un article de portée générale, lorsqu'il n'y a pas d'autre mécanisme. Dans le nouveau libellé, lorsque nous disons "après consultation", d'abord ce ne sera plus le lieutenant-gouverneur en conseil qui aura cette fonction mais plutôt l'office. La consultation pourra s'effectuer et devra normalement s'effectuer avec des organismes autres que les corporations. Simplement, pour certains groupements professionnels, il n'existe pas d'association ou de syndicat. Alors, c'est un article à portée générale qui doit être interprété comme tel, et les précisions dans le texte, je crois et je l'espère, enlèveront toute ambiguïté.

La question, également, des personnes traitées dans des hôpitaux psychiatriques a été soulevée par plusieurs autres organismes. Nous allons soit supprimer certains articles ou, dans les autres cas, nous laisserons plutôt à la corporation professionnelle, non pas par voie de règlement, mais par ces organismes appropriés, de juger si un membre est apte à pratiquer ou si, pour des raisons de santé, il n'y aurait pas lieu qu'il y ait une suspension, comme vous le dites, pour une période. Ces articles, je crois, ont été précisés et aussi on voulait enlever toute distinction entre le malade mental et le malade physique.

Alors, j'espère que ces modifications sauront vous rassurer. Ici, je note, dans votre mémoire, et ce serait la seule question que je voudrais vous poser, que vous traitez de la question de l'avortement. Je comprends que les dispositions touchant l'avortement apparaissent dans le code criminel.

MLLE PHIPPS: Vous me permettrez de vous arrêter un instant. Nous n'avons rien mentionné, dans notre mémoire, en ce qui concerne l'avortement. Peut-être que vous...

M. CASTONGUAY: Oh! Je m'excuse. C'est la Fédération des infirmières unies. Je m'excuse. Je fais erreur, en effet. Il y a là dans le mémoire...

M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre a avorté une question!

M. CASTONGUAY: Dans le mémoire des infirmières unies, je veux juste l'indiquer pour l'information, on nous montre des annonces publiées dans certains journaux. Cela me paraît assez fantastique qu'on en soit rendu à faire ce genre de publicité. Evidemment, les infirmières unies dénoncent ceci. C'était une des choses sur lesquelles je voulais discuter.

Alors, M. le Président, ceci, je crois, complète les quelques commentaires que je voulais faire à la suite des observations que les Cadres infirmiers unis nous ont formulées.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que l'on pourrait savoir le nombre de membres qu'il y a dans votre organisme?

MLLE PHIPPS: Disons qu'actuellement on compte 600 infirmières cadres qui sont au niveau d'hospitalières, surveillantes, assistantes-directrices et directrices des soins infirmiers. Dans la province de Québec, il y a, actuellement, environ 2,000 cadres.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, vous avez 600 membres sur une possibilité de 2,000.

MLLE PHIPPS: C'est ça.

M. CLOUTIER (Montmagny): A quel niveau situeriez-vous votre organisme? Il y a l'ordre professionnel; évidemment, ce n'est pas là. Il y a l'association professionnelle et il y a le syndicat professionnelle. A quel niveau le situez-vous?

MLLE PHIPPS : C'est évident que c'est au niveau du syndicat professionnel.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, vous êtes appelés à négocier?

MLLE PHIPPS: Absolument. Nous sommes, actuellement, d'ailleurs en négociation.

M. CLOUTIER (Montmagny): Avec vos patrons. Quels sont les établissements?

MLLE PHIPPS: Disons que nous négocions au niveau provincial...

M. CLOUTIER (Montmagny): Au niveau provincial.

MLLE PHIPPS: ... des contrats individuels d'emploi.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: Juste de petites questions, M. le Président. Est-ce que vos membres sont également membres de l'Association des infirmières?

MLLE PHIPPS: Absolument. Pour avoir le droit de pratiquer dans la province, il faut être membre de l'AIPQ et, secondairement, les gens peuvent être membres d'autres associations, comme un syndicat, par exemple, qui peut être les Cadres infirmiers unis ou d'autres groupes.

M. GUAY: Avec la même compétence décrite par ces dernières, ce matin.

MLLE PHIPPS: Absolument. M. GUAY: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Mesdames, nous vous remercions cordialement de votre présence parmi nous. J'invite immédiatement les représentants de la Société des techniciens en radiologie médicale du Québec.

Société des techniciens en radiologie médicale du Québec

M. PELLETIER (Gérard): Permettez-moi de vous présenter M. Roch Boucher, à ma gauche, qui était le président du comité d'étude sur les bills 250 et 265. M. Roch Boucher est diplômé en radiologie médicale, depuis 1962, dans les options de radiodiagnostic et radio-isotope, soit la médecine nucléaire. Il est de plus chef technicien à l'hôpital Hôtel-Dieu de Lévis. Il étudie actuellement en relations industrielles, pour l'obtention d'une licence.

Quant à moi, mon nom est Gérard Pelletier. Je suis diplômé en radiologie médicale de l'Institut du radium de l'Université de Montréal, en 1958, dans les options radiodiagnostic et radiothérapie. J'ai cumulé les fonctions de technicien à l'hôpital Maisonneuve, à l'hôpital Notre-Dame et, présentement, à la faculté de chirurgie dentaire de l'Université de Montréal. J'occupe la fonction de président de la société et je suis également le porte-parole de cette corporation, pour vous expliquer le petit document bleu. On l'a voulu très simple, pour la bonne raison que nous avions peu de chose à demander ou à faire changer, considérant que nous fonctionnons à peu près dans l'optique du bill 250, qui nous a été présenté, à quelques nuances près. Les quelques nuances qu'on devrait apporter dans les changements ne sont pas pour nous une opération douloureuse et difficile. Nous désirions depuis un certain temps la plupart de ces changements.

Le but de la présentation de ce mémoire est d'établir le rôle du technicien, son champ de juridiction, son champ de travail, ainsi que sa formation. Nous croyons que le technicien a une formation pour avoir pleine et entière responsabilité sur le champ technique de l'utilisation des radioéléments et des rayons X — je parle uniquement du secteur technique. Nous entendons le faire et considérons qu'il n'y a personne d'autre que nous de compétents dans ce domaine pour le faire. Si nous devions disparaître, l'Etat devrait trouver des remplaçants, en commençant par les former et leur donner le travail que nous, actuellement, devons faire.

Nous n'avons pas l'intention de chevaucher ou de nous ingérer dans d'autres professions, soit celle du médecin-radiologiste. Nous sommes appelés à travailler avec lui en étroite collaboration et évidemment, par la loi, sous sa tutelle, actuellement. Selon l'ancienne loi, nous sommes incorporés en corporation fermée depuis 1960. Nous comptons actuellement à peu près 2,000 membres dans la province de Québec. Ils oeuvrent dans les fonctions de radiolo-giediagnostic, pour le plus grand nombre; il y en a un nombre moins important en radiothérapie et dans une nouvelle discipline qui est née de l'industrie, pour des fins de recherche et des fins d'application de traitement médical. Elle nous est venue en 1965 environ.

Si vous voulez, je vais lire les quelques articles auxquels on a voulu des changements. Par la suite, je serai très heureux de répondre à vos questions.

D'abord, constitue l'exercice de la profession de technicien en radiologie tout acte qui a pour objet d'exécuter un travail technique comportant l'utilisation d'isotopes en vue de traitements radiothérapeutiques ou production de radiographies.

Nous croyons que cet article est incomplet et insuffisant pour définir de façon adéquate le travail du technicien en radiologie.

Après consultation auprès des personnes compétentes sur ce sujet, nous considérons que le travail de technicien en radiologie ne comporte pas seulement l'utilisation de radioéléments mais, en plus grande partie, l'utilisation des rayons X, la plupart des radiographies étant produites par l'utilisation des rayons X et non par des isotopes.

Aussi, nous proposons que l'article 7 soit lu de la façon suivante: "Constitue l'exercice de la profession de technicien en radiologie tout acte qui a pour objet d'exécuter un travail technique comportant l'utilisation de rayons X et de radioéléments pour des fins thérapeutiques et diagnostiques.

A l'article 8 du projet de loi 265 on dit: "Sous réserve des droits et privilèges expressément accordés par la loi à d'autres professionnels, les actes décrits à l'article 7 sont réservés aux techniciens en radiologie." Considérant que l'office fixe les normes de délivrance et de détention des permis habilitant ou pouvant habiliter certaines personnes ou groupes de

personnes à faire de la radiographie ou de la radiothérapie, la Société des techniciens en radiologie médicale du Québec exige, en vertu de l'article 172 du bill 250, que le comité d'experts soit obligatoirement consulté et qu'un membre représente la corporation des techniciens en radiologie.

A l'article 172 du bill 250 on dit: "L'office fixe des normes de délivrance et de détention de permis habilitant à faire de la radiologie ou de la radiothérapie. A ces fins, l'office peut s'adjoindre le concours d'un comité d'experts." Nous proposons que l'article 172 du bill 250 soit amendé par le texte suivant: "L'office fixe des normes de délivrance et de détention de permis habilitant à faire de la radiologie ou de la radiothérapie. A ces fins l'office doit s'adjoindre le concours d'un comité d'experts formé de une ou plusieurs personnes représentant les corporations professionnelles concernées par la radiologie et la radiothérapie."

A l'article 11 du projet de loi 265, on dit: "Nul technicien en radiologie médicale ne peut exercer sa profession, si ce n'est sous la surveillance d'un médecin ou d'un dentiste, d'un détenteur d'un permis de radiologie ou de radiothérapie délivré conformément à l'article 173 du code des professions ou d'une personne désignée par règlement du lieutenant-gouvernenr en conseil." De façon pratique, le technicien en radiologie exécute actuellement un travail technique sous la tutelle d'un médecin radiologiste et à la demande d'un médecin ou d'un dentiste, Statuts refondus, 1964, chapitre 251. Nous croyons que le mot "surveillance", en plus de limiter les activités du technicien en radiologie, ne rend pas justice à sa formation. Dans la présente loi l'exercice de la profession est définie comme étant tout acte qui a pour objet un travail technique.

Ainsi, nous proposons que l'article 11 de la loi des techniciens en radiologie soit lu de la façon suivante: "Nul technicien en radiologie ne peut exercer sa profession, si ce n'est à la demande écrite d'un médecin, d'un dentiste ou d'un détenteur d'un permis de radiologie ou de radiothérapie délivré conformément à l'article 173 du code des professions ou d'une personne désignée par règlement du lieutenant-gouverneur en conseil. Tout règlement adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu du présent article entre en vigueur le jour de sa publication dans la Gazette officielle du Québec ou à toute autre date ultérieure qui y est fixée."

J'aimerais vous dire également que le cours de technicien en radiologie était le premier cours paramédical donné dans les CEGEP. Nos examens à la corporation sont préparés en collaboration avec l'Association des radiologistes du Québec, la Société médicale du Canada, de même que la Société canadienne des techniciens en radiologie médicale du Canada. Nos diplômes sont reconnus par réciprocité dans les dix provinces du Canada, les 50 Etats américains, tout le Commonwealth britannique. Re- marquez que je n'ai pas de dévotion particulière pour ça, mais c'est un fait, c'est appréciable quand même. Il y a aussi la Suisse, qui reconnaît par réciprocité nos diplômes. Nous leur rendons le réciproque, nous au Québec, lorsque les gens de ces pays se présentent, qu'ils ont une carte de membre en règle de leur corporation. Ils ont les mêmes droits que nous au Québec.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre.

M. CASTONGUAY: Je voulais vous remercier pour ce mémoire. Je note votre désir de participer dans les organismes, comités d'experts. Je note votre accord général sur le projet de loi. Je vais étudier les propositions que vous formulez quant à cette participation. Est-ce qu'il y a lieu d'inscrire tout ceci dans un texte de loi, oui ou non? Assez souvent — et je pense que vous retrouvez pas mal la même chose dans tous les textes de loi — on préfère, de façon générale, ne pas trop entrer dans les détails, spécifier qui doit faire partie de tel comité d'experts.

Cela se comprend, étant donné l'évolution des sciences, parfois la nécessité de faire appel à des personnes dont la compétence peut être extrêmement importante, personnes dont on n'avait pas pu prévoir, soit l'existence ou le besoin, au moment de la rédaction d'un texte de loi. De toute façon, il me parait que ce sont des propositions qui doivent être examinées.

La seule question a trait à l'article 11; lorsque vous demandez d'une part que pour exercer votre profession que cela soit fait à la demande écrite d'un médecin, d'un dentiste, je voudrais que vous expliquiez pourquoi vous croyez qu'il est nécessaire d'avoir une demande écrite. Et je note également que vous dites: A ce moment-là, cela ne serait plus sous la surveillance d'un médecin ou d'un dentiste.

Alors, il y a là un changement: d'une part, demande écrite et d'autre part, l'élimination de la surveillance. Et si l'on considère que la radiothérapie, particulièrement, qui constitue il me semble un traitement médical même s'il fait appel à l'instrumentation hautement spécialisée et qui demande un personnel formé pour l'utiliser et présente des dangers, etc., j'aimerais savoir pourquoi on peut demander l'exclusion de cette surveillance.

M. PELLETIER (Gérard): M. le ministre, je suis très heureux que vous me posiez la question. D'abord, l'idée d'avoir une ordonnance écrite est pour se protéger. Actuellement, la loi exige que nous ayons des tuteurs. C'est-à-dire que normalement, si on devait respecter la loi comme telle, nous serions obligés d'avoir un radiologiste sur nos épaules lorsque nous faisons un examen. Remarquez que c'est du verbiage. Dans les faits, ce n'est pas cela. De toute façon, c'est une protection pour s'assurer que, si nous avons accompli un acte radiologique, cela a été

à la demande d'un médecin pour ne pas se faire dire par l'association des radiologistes qui est un syndicat et qui sont nos tuteurs actuellement: Mon vieux, tu t'installes et tu fais de la radiologie illégalement; montre-moi l'ordonnance du médecin qui t'a fait cette demande. Et en même temps, pour éviter que l'on fasse des demandes un peu farfelues au téléphone ou de toute autre manière, qui comportent l'utilisation d'éléments dangereux et, après cela, tout le monde se lancerait la balle à savoir qu'il n'y a personne de responsable, d'une part.

Quand on dit surveillance, si surveillance comporte comme définition: avoir le praticien général sur nos épaules, encore une fois, pour dire: M. Pelletier, vous faites un examen du crâne, vous utiliserez 75 kilowatts, vous vous servirez de 300 milliampères et d'un tiers d'exposition, c'est de la surveillance, à mon point de vue. Ici, surveillance a la définition d'examen demandé, soit par écrit ou qui peut s'inscrire au moins dans un dossier quelconque quelque part pour attester que l'examen a vraiment été demandé par un médecin ou par une personne autorisée à le faire.

Pour ce qui est de la radiothérapie, le Collège des médecins autorise l'utilisation de prescrire la radiothérapie uniquement par des radiothéra-peutes ou des radiologistes qui ont fait des stages et qui ont une compétence en radiothérapie. Le médecin sans spécialité dans le domaine n'a pas le pouvoir d'utiliser des rayons X ou des substances radioactives pour faire de la radiothérapie ou prescrire de la radiothérapie.

M. CASTONGUAY: Je n'en suis pas sur l'aspect de l'ordonnance mais bien du traitement à ce moment-là. Et si on lit votre texte, si je comprends bien, une fois l'ordonnance reçue par écrit, le traitement par voie de radiothérapie serait fait par vous sans qu'il y ait surveillance ou responsabilité de la part du médecin. C'est ce point qui m'apparaît extrêmement important.

M. PELLETIER (Gérard): Sur la radiothérapie, il est entendu que le technicien n'exécute jamais un traitement en radiothérapie sans la présence d'un médecin radiothérapeute. Et ce n'est pas pour ce groupe que nous demandons... Nous n'excluons pas la surveillance. Dans le domaine de la radiologie, nous n'excluons pas non plus en radiodiagnostic certains examens qui se font toujours avec l'assistance du médecin radiologiste.

Par exemple, prenons les examens de radio ou de fluoroscopie ou en cinéradiologie ou en cardio-vasculaire ou en neuro-radiologie. Ce sont des examens qui nécessitent la présence d'un radiologiste. Alors, la même chose dans le diagnostic; il y a certains examens qui, par habitude et par nécessité de compétence et de responsabilité, nous en sommes conscients, se font en collaboration et avec la surveillance immédiate ou la présence du médecin radiolo- giste et ceci devra demeurer. Il est entendu que, dans les faits, et peut-être sur papier éventuellement, il s'agira d'établir spécifiquement quel examen peut être fait par un technicien, seul ou avec la présence du médecin radiologiste comme on fait d'habitude.

M. CASTONGUAY: Alors, une dernière question, si je comprends bien, ce serait plus juste de parler, au lieu de surveillance — étant donné que, dans certains cas, il doit y avoir surveillance, et que dans d'autres cas la présence physique n'est pas nécessaire — on devrait parler plutôt de la responsabilité du médecin.

M. PELLETIER (Gérard): Si vous m'avez bien compris, j'ai spécifié au départ que nous avons l'intention de faire porter nos revendications uniquement sur le plan technique. Lorsqu'il s'agit de diagnostic ou de traitement, ce n'est plus technique. C'est la responsabilité du médecin, du médecin qui prescrit ou du médecin radiologiste. Nous, c'est l'aspect technique et, dès qu'un examen dépasse l'aspect technique, le côté médical comme tel est toujours de la responsabilité du médecin dans sa spécialité.

Alors, nous allons demeurer dans le secteur technique, et dès que ça dépasse le secteur technique et que ça devient technique et médical, ça va de soi que l'assistance du radiologiste est nécessaire. Et ceci est la même chose pour les techniciens en médecine nucléaire ou radio-isotope. Si c'est plus que technique, si c'est médical à un moment donné, lorsque le secteur technique est franchi, ce n'est plus notre responsabilité. Et je cite un exemple ici. Je pense que tout le monde doit connaître ce que c'est qu'une urographie qu'on doit normalement faire avec une substance de contraste qui doit être injectée par voie veineuse. Alors, que le médecin ou l'infirmière ou une personne autorisée à le faire donne la substance de contraste au patient, moi mon devoir technique est de produire des clichés qui permettront de déceler l'arbre urinaire et de voir si les images que je vais produire peuvent aider le médecin à établir un diagnostic.

Moi, mon rôle est de faire un film qui est lisible ou sur lequel on peut détecter une anomalie ou non, où on peut faire un diagnostic par un bon film, si vous voulez, comme on fera une bonne photographie d'une starlette ou de quelqu'un d'autre. Alors c'est le côté technique. Le côté médical de l'injection ou des conséquences de la substance de contraste qui a été donnée par un médecin ou toute personne compétente ne me regarde en rien.

M. CASTONGUAY: Non, ça je comprends ça, votre rôle, vous le placez clairement sur le plan technique. Je ne voudrais pas laisser cela dans l'ambiguïté. Est-ce que vous acceptez, par contre — compte tenu de cette responsabilité sur le plan technique, puisque nous sommes dans le domaine de la santé, qu'il s'agit d'êtres

humains, non pas là d'objets — que votre travail doit être fait sous la responsabilité du médecin, du radiologiste, ou du radiothérapeute, qui conservent toujours la responsabilité sur le plan médical totalement, et que vous effectuez dans ce cadre-là des actes techniques dont vous êtes vous-mêmes à ce moment-là responsable? Est-ce que c'est ça? Est-ce qu'on peut faire la distinction comme ça?

M. PELLETIER (Gérard): M. Castonguay, moi je considère, enfin l'organisme que je représente et les membres que nous avons, considèrent que l'ordonnance du médecin à l'effet de demander un examen radiologique est toujours la responsabilité du médecin qui la demande.

Disons qu'on me demande une radiographie d'un pied. La façon de le faire, d'établir la qualité de rayons, la quantité que je devrais utiliser pour produire cet examen, avec la formation que je prétends avoir reçue durant mes trois années d'étude, je suis responsable de ce que je devrais utiliser ou faire pour produire l'examen. Mais 1st responsabilité de l'examen en dehors du côté technique demeure la responsabilité de celui qui l'a prescrit, du début à la fin. Et s'il veut s'adjoindre, pour compléter son diagnostic, un médecin radiologiste, ça demeure sa responsabilité, ça demeure sa prérogative. Uniquement sur le côté technique, une façon de localiser...

M. CASTONGUAY: J'aurais une dernière question; je ne veux pas insister, mais c'est très important. Je suis au courant d'un cas où une personne qui subissait des examens, a été exposée, par inadvertance, pendant une période assez prolongée, à des rayons X. Les rayons X ont laissé des traces sur la poitrine et elle est morte dans des délais assez brefs par la suite.

Lorsque vous dites que vous voulez votre responsabilité au plan technique, j'en suis. Au sujet de cet examen, s'il avait été prescrit et que le médecin n'était pas là, qui est responsable, dans votre conception?

M. PELLETIER (Gérard): Premièrement, si j'ai à exécuter un examen qui m'est demandé et qui est en dehors de ma compétence ou de ma responsabilité, je ne le ferai tout simplement pas ou je le référerai au requérant, en disant: Référé au Dr Untel ou à M. Untel dont c'est la compétence. Si je considérais que je n'ai pas la formation pour appliquer tel traitement ou pour faire tel examen qui comporte un certain danger, je retournerais l'ordonnance au requérant.

M. CASTONGUAY: C'était quelque chose d'assez banal.

M. PELLETIER (Gérard): Vous voulez parler d'un cas de radiothérapie.

M. CASTONGUAY: Non, apparemment c'était une question d'examen et —je ne sais pas si c'est possible, je vous en parle de mémoire; supposons que ce serait de la radiothérapie— alors que l'idée était d'exposer la personne le plus brièvement possible à des rayons X, elle a été exposée pendant quelques minutes — je ne sais pas combien — ce qui constituait une exposition trop prolongée. Je connais le nom de la personne et toute l'histoire. Je sais qu'elle a eu des douleurs épouvantables et qu'elle en est morte quelques mois plus tard.

Je n'ai pas tous les détails, mais je prends ce cas par suite de ce que vous nous dites et j'essaie de voir si je comprends clairement ce que vous nous dites. Les termes ont de l'importance. Je comprends très bien votre demande, lorsque vous dites que vous voulez avoir une demande écrite. Je le comprends et cela me paraît extrêmement important. Sur cette question de surveillance et de responsabilité, je voudrais comprendre très clairement ce que vous dites.

M. PELLETIER (Gérard): Le cas que vous soumettez, s'il existe, était sûrement de la radiothérapie. Vous savez que les brûlures aux rayons X n'apparaissent qu'après deux ans environ. S'il est mort à brève échéance, probablement que ce n'est pas parce qu'il a reçu trop de rayons.

M. CASTONGUAY: Je vous donnerai le nom après et nous pourrons en reparler. Je vous le donnerai en dehors.

M. PELLETIER (Gérard): Je sais qu'on utilise le cobalt, qui est un métal radioactif très puissant qui peut amener la mort rapidement, mais ce n'est pas si patent que cela. Cela prend quand même quelques jours, voire même quelques semaines.

M. CASTONGUAY: On sait que l'exposition trop prolongée à des rayons X est mauvaise. Je vous ai donné un exemple. Supposons que je n'ai pas tous les faits précis, car je vous en ai parlé de mémoire, mais ce qui importe, c'est de savoir où se situe, dans ce que vous nous dites, la question de responsabilité. Vous demandez uniquement de procéder sur demande écrite et vous enlevez la notion de surveillance et de responsabilité de votre texte.

M. PELLETIER (Gérard): Disons qu'on parle toujours du secteur technique. Le cas que vous nous avez amené antérieurement, c'est un secteur technique et médical; il s'agit de l'application de traitements. A ce moment-là, le technicien qui le fait déroge à ses responsabilités et à ses droits. Ce n'est pas la fonction d'un technicien d'exécuter un traitement seul, surtout s'il est aussi important et comporte cer-

tains dangers. Je parle du secteur technique uniquement.

Maintenant, les personnes habilitées à prescrire des examens de rayons X dans les trois disciplines possibles. Je considère que, quand on demande un examen, on doit savoir ce qu'il comporte comme responsabilités. Si on n'a pas cette compétence, on ne devrait peut-être pas prescrire d'examen. Je pars du principe que les gens qui vont me demander un examen savent ce que c'est, un peu comment ça se fait et quelles conséquences cela peut avoir.

S'il arrive que chez certaines de ces personnes, il y avait déjà incompétence, — ce qui ne s'est pas souvent vu mais ça peut arriver— je pense que les techniciens sont suffisamment formés et suffisamment avertis pour ne pas s'embarquer dans une galère semblable; ils vont se référer au médecin radiologiste soit par téléphone, soit à son bureau, s'il est là. Il reste quand même qu'ici, ce qu'on demande, je vous le rappelle, ce n'est pas de jouer au médecin, on n'a pas du tout ce goût —franchement ça ne m'a vraiment jamais attiré — c'est tout simplement, sur le plan technique, la possibilité de travailler avec des orthopédistes, avec des dentistes, des médecins vétérinaires sans toujours que M. Untel, qui est à 500 milles de distance, vienne voir ou pas du tout, disons une fois par mois, et vraiment que ce soit mon tuteur ou mon surveillant.

Je trouve que, dans les faits, ce n'est pas tellement possible, alors pourquoi s'embarquer dans ça? Je pense qu'on a suffisamment de formation sur le plan technique pour pouvoir procéder à des examens qui ne sont quand même pas si dangereux sur le plan technique, avec nos responsabilités, considérant la formation reçue.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dubuc.

M. BOIVIN: De qui viennent les ordonnances pour vos radiographies? Est-ce qu'elles vous viennent toujours d'un radiologiste ou si elles peuvent venir d'un médecin de médecine générale ou autre?

M. PELLETIER (Gérard): Actuellement, selon la loi, le médecin fait une demande; la paperasse signée par un médecin, c'est une demande. Lorsqu'elle arrive au service de radiologie, même sans que le médecin radiologiste la voie, c'est devenu une réquisition, une ordonnance du radiologiste, parce qu'il est responsable de tout ce qui se fait dans son service, selon la loi. La réquisition part du Dr de Grandpré, rue Berri, et elle arrive chez nous, à Notre-Dame, et c'est devenu une ordonnance en entrant à Notre-Dame, même si le radiologiste n'est pas là. C'est la loi qui dit ça. Normalement, ce sont des médecins qui demandent les examens et du fait d'avoir un radiologiste responsable du service, ça devient une ordonnance, et la même chose si ça vient d'un dentiste ou d'un médecin vétérinaire, quoique, dans les hôpitaux, ça s'est vu quelquefois d'avoir des animaux mais disons que c'est plus rare que ce l'était.

M. BOIVIN: A l'usage, le radiologiste détermine les ordonnances que vous devez suivre et celles que vous pourrez...

M. PELLETIER (Gérard): C'est-à-dire que par routine, pour les examens qui sont exécutés à la demande de médecins dans les hôpitaux, on établit des techniques avec le service de radiologie. Le radiologiste fait l'interprétation, fait la radioscopie, mais les techniques comme telles relèvent des techniciens ou presque à 100 p.c. parce que les radiologistes n'ont pas le temps de faire de la technique; d'abord, ils ne sont pas assez nombreux. Si les radiologistes devaient jouer au technicien, il faudrait qu'ils soient 2,000 alors qu'ils sont 200. C'est donc le technicien qui détermine la quantité de rayons, l'utilisation pour produire l'examen demandé, soit les incidences, les manipulations et la quantité d'énergie utilisée pour produire tel examen. Mais c'est toujours le radiologiste qui, de près ou de loin, a la responsabilité de l'acte que je pose.

Par exemple, quant au droit de travailler et de remplir des ordonnances des dentistes ou des médecins, soit dans les cliniques ou dans des hôpitaux éloignés, vous savez qu'il existe des hôpitaux où le radiologiste passe une fois par mois ou même ne va pas du tout, où il y a des techniciens qui, leurs examens faits, envoient par messager les valises ou les boites de films qui sont lus à Montréal ou ailleurs par des radiologistes.

Ceci devient légal vu que c'est interprété par un radiologiste, mais le technicien est seul dans son hôpital à faire l'examen qui lui a été demandé par les médecins de la région.

Je prends un cas plus près, par exemple. Je suis à la faculté de chirurgie dentaire. Je fais de l'enseignement clinique au service de radiologie et on a un médecin radiologiste qui est notre tuteur. On ne le voit pas. Il sait à peu près ce qu'on fait parce qu'il connaît la radiologie. Il nous connaît. Depuis cinq ans, on ne l'a jamais vu mais il est notre tuteur et tout ce qui se fait est sous sa responsabilité. Cela me donne le droit de travailler. S'il n'y avait personne d'autorisé en vertu de la loi, à avoir son nom ou avoir des titres accrochés quelque part dans le service, je n'aurais absolument pas le droit de faire quoi que ce soit.

Vous vous souvenez très bien, pour un certain nombre d'entre vous, lors de la grève des médecins radiologistes en 1966, les techniciens sont devenus d'éternels chômeurs, non pas chômeurs parce qu'ils ont été payés, mais ils se sont assis dans les services de radiologie et ils ont bu du café, parce que les radiologistes étant en session d'étude, on n'avait plus le droit de travailler. Antérieurement, on faisait à peu près

90 p.c. de nos examens sans leur présence. C'était légal. Je n'ai rien contre le légalisme. Je suis même favorable à cela, mais j'ai des choses contre ce qui est un peu, pour moi — je le dis sans méchanceté ici, parce que je me sens à l'aise avec vous — ridicule. Je pense qu'il est peut-être temps qu'on sorte de cela.

M. BOIVIN: Vous travaillez dans un champ déterminé par le radiologiste sous la responsabilité du radiologiste.

M. PELLETIER (Gérard): Tutelle et responsabilité, si vous voulez. La loi nous dit tutelle.

M. BOIVIN: Mais dans un champ déterminé, de routine par exemple, où ils disent: Faites cela tous les jours.

M. PELLETIER (Gérard): C'est ça. C'est en quantité.

M. BOIVIN : II y a toujours un champ, parce que vous ne faites pas de fluoroscopie?

M. PELLETIER (Gérard): Non.

M. BOIVIN: Vous ne faites pas d'examen qui nécessite, comme vous l'avez dit tout à l'heure, examen du système nerveux...

M. PELLETIER (Gérard): C'est moins sûr, mais normalement on ne doit pas en faire.

M. BOIVIN: Quand le champ est déterminé par le radiologiste, il peut vous pousser plus loin avec les connaissances qu'il sait que vous avez. Seulement, vous travaillez toujours dans un champ déterminé par le radiologiste, sous la responsabilité du médecin.

M. PELLETIER (Gérard): Du médecin radiologiste. On ne pourrait pas travailler pour des médecins s'il n'y avait pas un radiologiste qui soit notre tuteur. Je ne pourrais pas travailler dans un hôpital où il n'y aurait pas de radiologiste. Cela s'est vu. Des hôpitaux avaient des médecins qui, par habitude, interprétaient des films d'une façon convenable et des techniciens travaillaient dans ces services. L'Association des radiologistes nous a demandé de retirer nos techniciens parce qu'il n'y avait pas de radiologiste attaché à l'hôpital. On nous a dit que les techniciens travaillaient dans l'illégalité. On a, nécessairement, intéressé des radiologistes à interpréter les films faits par ces techniciens pour légaliser le côté de la pratique de la radiologie.

M. BOIVIN : Mais je ne comprends pas ce que vous nous demandez actuellement. Vous dites: Nous agissons dans un champ déterminé par le radiologiste, sous la responsabilité du radiologiste. Qu'est-ce que vous voulez? Vous voulez être capables d'ouvrir une clinique de radiologie et agir sans radiologiste?

M. PELLETIER (Gérard): Non. Ce n'est pas notre intention d'ouvrir une clinique de radiologie. Nous considérons, d'abord, que les médecins radiologistes ont un rôle à remplir. Personnellement — mais pas en tant que président de la corporation — je suis à me demander si le radiologiste devrait être propriétaire d'une clinique. Je suis à me demander ça fortement. Alors, ce n'est pas l'intention des techniciens d'ouvrir des cliniques de radiologie, d'entrer en concurrence ou de faire de la radiologie pour qui que ce soit. Nous sommes des salariés. Nous désirons travailler en étroite collaboration avec les radiologistes. Nous avons une formation technique pour ce qui est du secteur technique. Nous demandons que la responsabilité des actes posés, afin de produire techniquement des examens, soit nôtre entièrement. Cela se limite à ça. Dès que cela déborde l'aspect technique de la production d'examens ou de clichés radiolo-giques, dès que cela touche le côté médical ou diagnostique, ce n'est plus notre domaine. Ce n'est pas notre intention d'ouvrir des services de radiologie. Personne n'a manifesté cette intention. Nous avons fait des réunions, deux à Montréal et une à Québec. Nous avons rencontré des membres de différentes régions. Hors de tout doute possible, ce n'est l'intention d'aucun technicien d'ouvrir une clinique de radiologie. Nous sommes satisfaits du travail fait actuellement et nous voudrions tout simplement un peu plus de liberté. Nous voudrions être responsables des examens que nous faisons dans la mesure de notre compétence et de nos connaissances.

M. PAUL: Mais, assez souvent, hors la présence du médecin radiologiste?

M. PELLETIER (Gérard): Vous n'êtes pas sans savoir — je ne ferai le procès de personne, je vous indique des faits— qu'il y a deux ou trois hôpitaux en province où il y a présence d'un radiologiste les fins de semaine, le soir et la nuit, sur 300 ou 400 hôpitaux possibles. Le radiologiste a ses heures de travail, normalement entre 8 h 30 et 16 h 30. En dehors de ça, ce sont des techniciens seuls. Le radiologiste peut être appelé, si nécessaire, par le technicien ou le médecin de garde, au besoin. Mais 90 p.c. des examens sont faits sans la présence du radiologiste.

M. PAUL: Vous dites: Par le médecin de garde. Est-ce que le médecin, l'omnipraticien par exemple, ne doit pas renvoyer la demande d'une radiographie au radiologiste?

M. PELLETIER (Gérard): Elle est envoyée directement au service de radiologie, où seulement un ou deux techniciens sont présents. Mais, le soir ou la nuit, les techniciens sont présents dans les services de radiologie et ils remplissent les ordonnances des médecins, soit de la salle d'urgence ou des départements.

Sur demande écrite d'un médecin, on remplit le côté technique de l'examen. Le côté technique de l'examen est fait par les techniciens. La demande du radiologiste est faite, si ce n'est que pour établir un diagnostic ou un traitement. Lorsque cela touche le côté médical, on demande la consultation. •M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, vous semblez exercer, en fait, une profession qui a été un peu méconnue ou inconnue jusqu'à maintenant. Ma première question est la suivante: Est-ce qu'un radiologiste peut exercer sa profession de radiologiste sans techniciens en radiologie?

M. PELLETIER (Gérard): Oui, certainement. Maintenant, il faudrait qu'il apprenne à faire de la technique, chose que la plupart n'ont jamais apprise, parce que, d'abord, c'est mécanique. Pour un médecin, disons que ce serait peut-être perdre un talent ou des aptitudes beaucoup plus utiles, pour des domaines plus compliqués. C'est pourquoi on a formé les techniciens qui, eux, demandent moins de préparation. On n'a pas besoin d'être médecin. Après une douzième année scientifique, on peut entrer au CEGEP et faire trois années de radiologie et on devient technicien. On développe suffisamment d'habilité manuelle pour produire beaucoup d'examens en une journée, ce que le médecin, du jour au lendemain, devrait apprendre en faisant un peu ce que nous avons fait, pour avoir autant de vitesse et autant de dextérité, même s'il a des compétences scientifiques plus élevées.

Disons donc que le médecin pourrait le faire, mais il ne s'en donnera pas la peine parce qu'il a des choses plus importantes à faire, pour lesquelles il a été formé.

M. GUAY: Votre rôle, en fait, est surtout centré sur la quantité, par exemple, d'énergie requise pour tel ou tel genre d'examen. Vous êtes le technicien de la machine spécialisée dans la radiologie. Est-ce que la formation est quand même comparable, comme spécialité, à celle du radiologiste? J'aimerais bien que vous nous exposiez, si c'est possible, peut-être comparativement, la formation du technicien en radiologie et la formation du radiologiste, en quelques mots.

M. PELLETIER (Gérard): Disons que la formation est aussi différente, si je prends un plan de comparaison, qu'entre un architecte qui établit le plan d'une salle ou d'un édifice et le simple ouvrier qui va l'exécuter. L'architecte dit ce qu'il faudrait utiliser. C'est peut-être plus compliqué pour l'architecte, parce qu'il va donner le type de matériaux à utiliser tandis que le radiologiste ne le dira pas au technicien. Mais la formation est très différente. D'abord, pour être radiologiste, il faut être médecin d'abord et ce sont trois ou quatre années de spécialisation par la suite, alors que le cours de technicien porte sur le côté technique, évidemment. On a de l'anatomie, de la physiologie, de la radiobiologie-protection et tout cela mais il reste que c'est beaucoup plus simplifié.

Il n'est pas nécessaire d'avoir la compétence ou les qualités scientifiques d'un médecin pour être un bon technicien. C'est un champ différent.

M. BOIVIN: Vous n'interprétez pas, d'ailleurs, la radiographie.

M. PELLETIER (Gérard): Ce n'est pas le rôle du technicien.

M. BOIVIN: Vous prenez la radiographie.

M. PELLETIER (Gérard): II s'agit d'utiliser la quantité d'énergie nécessaire pour produire une image qui permettra au médecin radiologiste, au médecin spécialiste ou autre de vérifier un diagnostic, de déterminer une anomalie ou de dire: C'est normal, il n'y a pas de fracture, de tumeur ou d'infection pulmonaire, etc. C'est la production de l'image, le radiogramme, si vous voulez, le cliché radiologique.

M. GUAY: Quelle est la durée de la formation pour devenir technicien en radiologie?

M. PELLETIER (Gérard): C'est deux années théoriques dans les CEGEP pour l'obtention du DEC, le diplôme d'enseignement collégial. Cela se termine par une année d'internat avec des techniciens moniteurs dans les services de radiologie des hôpitaux accrédités qui ont à peu près toutes les options possibles en radiologie. Après avoir terminé les deux années théoriques, l'étudiant est dirigé vers un centre accrédité qui a été inspecté conformément aux exigences de l'Association médicale du Canada, qui groupe différents organismes de la santé. Ils sont suivis par des professeurs, des moniteurs. Ils font des examens avec les radiologistes déjà en place et, douze mois après, ils ont un examen théorique obligatoire qui est exigé par la corporation. Cet examen réussi, le technicien a son droit de pratique. C'est trois années, comprenant le DEC, le diplôme d'enseignement collégial, plus le diplôme de la corporation qui est obligatoire pour avoir le droit de pratiquer au Québec.

M. GUAY: Par la force des choses, est-ce qu'un technicien en radiologie ne fait pas le même travail, par condition exceptionnelle, que le radiologiste? Est-ce que vous auriez des connaissances et une compétence identiques?

M. PELLETIER (Gérard): II existe aux Etats-Unis — on a parlé d'instituer ça au Québec — des supertechniciens à qui on donnerait une formation pour faire une radioscopie.

Normalement, ça n'existe pas. Si ça devait exister au Québec, c'est en dehors de notre contrôle ou de notre connaissance, mais, normalement, ça ne devrait pas exister, ce n'est pas légal. Personne ne m'a signalé un tel état de choses. Je sais que certains radiologistes, dans certains grands hôpitaux, veulent former des techniciens avec un cours plus avancé ou un complément en éducation pour pouvoir faire de la radioscopie afin de se décharger d'une partie du travail qu'eux font normalement.

Evidemment, étant restreints quant au nombre et la quantité de radiographies augmentent de plus en plus — depuis que c'est gratuit, on ne se gêne pas — ils ont beaucoup de travail. Donc, de plus en plus, le radiologiste déléguera certains pouvoirs à des techniciens qu'on jugera formés. On ne saurait dire jusqu'à quel point cela se fera, mais il est en question déjà. Nous avons à la corporation institué des examens de spécialité, non pas dans le but de remplacer les radiologistes mais pour donner des connaissances accrues dans certains domaines spécialisés de la radiologie, ceci pour être à la page, pour mieux suivre le milieu médical qui évolue de jour en jour. Et nous espérons que cela continuera d'être.

M. GUAY: Par qui sont préparés les examens que vous devez subir pour l'admission à la pratique comme techniciens?

M. PELLETIER (Gérard): Ils sont préparés par l'Association médicale du Canada et la Société des techniciens en radiologie du Canada, en collaboration avec la Société des techniciens en radiologie du Québec et l'Association des radiologistes du Québec.

M. GUAY: Merci.

M. LE PRESIDENT: MM. les membres de la commission, est-ce que cela termine les questions? MM. les représentants de la Société des techniciens en radiologie, nous vous remercions d'avoir déposé devant nous votre mémoire et d'avoir répondu aussi aimablement aux questions qui venaient de ce côté-ci de la table.

M. PELLETIER (Gérard): Nous vous remercions de nous avoir reçus; nous demeurons à votre disposition, si vous sentez le besoin de nous rencontrer pour clarifier certaines choses. Nous sommes toujours très heureux de le faire. Il fut très agréable pour nous d'être ici aujourd'hui. Nous avons appris beaucoup de choses et nous apprécions davantage nos parlementaires.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux au mardi 26 septembre. Demain matin, la commission parlementaire siège sur la réglementation du bill 65 à 9 hres 30 au Salon rouge.

(Fin de la séance à 18 heures)

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