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Commission parlementaire spéciale sur le
problème
de la liberté de la presse
Séance du mercredi 11 juin 1969
(Dix heures trente-sept minutes)
M. CLOUTIER (président de la commission de la liberté de
la presse): A l'ordre, messieurs! Au début de cette séance des
travaux de notre commission, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous
nos visiteurs. Aujourd'hui, comme mercredi dernier, nous avons un ordre du jour
assez chargé. Alors, nous allons commencer immédiatement. Nous
avons, au premier article de l'ordre du jour, les Entreprises Gelco et j'ai,
sur ma liste ici, les noms de M. Parisien, vice-président
exécutif, de M. Marcel Caron, c.a. et de Me Jules Deschênes,
conseiller juridique.
Alors, je demanderais à un des membres...
M. LESAGE: II y a aussi M. Desmarais, le patron, qui est ici ce
matin.
M. LE PRESIDENT (M. Cloutier): M. Desmarais qui...
M. DESCHENES: M. le Président, messieurs, depuis quelques mois,
s'agite dans l'opinion publique la question qui a entraîné la
formation de la commission. Il s'est dit et il s'est écrit tellement de
choses plus ou moins exactes et plus ou moins fantaisistes autour des
Entreprises Gelco Limitée que cette compagnie est très heureuse
et je suis mandaté pour le dire à la commission de
pouvoir enfin participer aux travaux de la commission afin de rétablir
les faits dans leur véritable lumière, lorsque la chose pourra
paraître nécessaire.
C'est donc avec plaisir que je puis dire, même si on l'a
déjà annoncé, que sont présents devant la
commission, ce matin, le président des Entreprises Gelco, M. Paul
Desmarals, ainsi que son associé de toujours, M. Jean Parisien,
vice-président.
Avant, cependant, de céder la parole à M. Parisien au cas
où la commission aimerait poser certaines questions, je voudrais, M. le
Président, avec votre permission, tenter de fournir une réponse
ce matin à une question que M. Mlchaud avait posée vers la fin de
la dernière séance. M. Mlchaud s'était interrogé
sur le motif pour lequel une transaction impliquant les actions de la Compagnie
de publication La Presse n'avaient pas été soumise à
l'autorisation ou à l'examen de l'Assemblée nationale,
l'année dernière.
Au moment où cette question avait été posée
à M. André Bureau, celui-ci avait répondu que les
Entreprises Gelco fourniraient les éclaircissements nécessaires.
Je crois qu'il est utile que ces éclaircissements soient fournis afin
que la question ne reste pas sans réponse et qu'on ne continue pas de
s'interroger sur ce problème.
Cette question exige évidemment que l'on fasse deux remarques,
l'une portant sur le texte de la loi lui-même de 1967, et l'autre portant
sur les faits relatifs à cette transaction de 1968, de façon que
nous puissions voir comment la transaction vient s'imbriquer dans le texte de
loi de l'année précédente.
Je ne prétends évidemment rien apprendre aux membres de la
commission sur ce texte de loi puisque, messieurs, vous étiez tous
membres de la Législature qui a voté cette loi en 1967. Je
souligne cependant qu'il y a deux articles de la loi du 12 août 1967 qui
sont pertinents à l'examen de la question, les articles 2 et 3,
auxquels, d'ailleurs, M. Michaud s'était référé la
semaine dernière.
L'article 2 est celui qui portait sur la transaction même qui
avait amené les parties devant la Législature, la cession des
intérêts Berthiaume à la Corporation de valeurs
Trans-Canada. Et ne citant que la partie de l'article 2 qui est pertinente
à notre discussion, je crois qu'il est essentiel que l'on remarque ce
que la Législature a dit dans la loi et ce sur quoi elle s'interrogeait.
Parce que, vis-à-vis de cette transaction, la loi dit ceci: « Les
fiduciaires du testament Berthiaume sont autorisés à vendre
à la Corporation de valeurs Trans-Canada toutes les actions ordinaires
et privilégiées de la compagnie et ce, pourvu que le
contrôle effectif de la Corporation de valeurs Trans-Canada n'ait pas
changé entre le 1er mai 1967 et la date où ladite vente sera
complétée. »
Donc, en 1967, ce à quoi la Législature s'est
arrêtée, ce n'est pas uniquement la façade corporative, la
Corporation des valeurs Trans-Ca-nada, mais la Législature s'est
demandé qui, de fait, contrôlait, pour employer l'expression de la
loi, exerçait le contrôle effectif de la Corporation de valeurs
Trans-Canada. Et c'est à cette idée-là qu'on s'est
attaché. On a su évidemment, à l'époque, que le
contrôle reposait entre les mains des intérêts de M. Paul
Desmarais. Et c'est après avoir reçu cette assurance que ces
mêmes intérêts continuaient de contrôler la
Corporation de valeurs Trans-Canada et continueraient de la contrôler au
moment de la passation de l'acte de transfert, que la loi a été
passée dans le texte que nous avons.
Seulement, on s'est interrogé ensuite et c'est là que la
chose a de l'intérêt pour la discussion aujourd'hui sur des
cessions de droits futures. On arrive alors à l'article 3 de la loi,
dont la
partie pertinente encore c'est la seule à laquelle je
voudrais m'arrêter, et c'est la partie que M. Michaud, sauf erreur,
citait la semaine dernière dit: « Aucune vente, cession ou
transport d'un nombre d'actions de toute compagnie qui aurait pour objet ou
comme résultat de déplacer le contrôle de la Compagnie de
publication de La Presse limitée ne peut être validement fait ou
consenti sauf avec l'autorisation de la Législature. »
Je pense donc qu'il est essentiel que l'on s'arrête au texte, ce
que le texte de loi soumet à l'autorisation nécessaire de la
Législature, appelons-la une vente, pour simplifier la chose, d'un
nombre d'actions qui aurait pour objet ou comme résultat de
déplacer le contrôle de la Compagnie de publication de La Presse.
Ici, il faut lire ce texte, je vous le soumets, en fonction du même texte
qu'on lisait dans l'article 2 qui s'interrogeait, lui aussi, sur le
contrôle de la Corporation de valeurs Trans-Canada.
Or, qu'est-ce qui est arrivé en 1968? Il est arrivé ceci,
qui apparaît déjà d'ailleurs dans le mémoire soumis
par la compagnie Gelco. Il y a eu une transaction qui, à toutes fins
pratiques, se présente dans un aspect extrêmement simple. Il y
avait deux catégories d'actions dans l'entreprise de la Presse: Il y
avait des actions privilégiées et des actions ordinaires qui,
toutes deux, étaient des actions jouissant du droit de vote. Elles
étaient détenues par la Corporation de valeurs Trans-Canada,
contrôlée par M. Desmarais. Alors, sont intervenues deux ventes:
La vente des actions privilégiées par la Corporation de valeurs
Trans-Canada à la compagnie Gelco et la vente des actions ordinaires par
la Corporation de valeurs Trans-Canada toujours, à la compagnie Gesca
Limitée. Alors, nous sommes en présence de deux transactions. Or,
ces deux transactions sont faites en faveur de deux compagnies, Gelco et Gesca
qui, toutes deux également, étaient àl'époque et
sont encore contrôlées par les intérêts
Desmarais.
Le diagramme ou l'organigramme qui a été produit dans le
mémoire des entreprises Gelco fait voir que cette compagnie est
contrôlée à plus de 80% par M. Paul Desmarais et que cette
entreprise contrôle une filiale à part entière, qui est la
compagnie Gesca Limitée. De telle sorte que si l'on va derrière
la façade corporative et si l'on interroge sur ce que la loi de 1967
appelait le contrôle effectif de l'entreprise on constate qu'en 1968, les
transactions qui sont intervenues ont eu pour effet de déplacer les
actions, les faisant passer de la Corporation de valeurs Trans-Canada,
contrôlée par M. Desmarais, aux entreprises Gelco,
contrôlées par M. Desmarais, et à la compagnie Gesca,
contrô- lée par Gelco, donc également par M. Desmarais.
En d'autres termes et c'est cela qui est l'élément
essentiel et c'est là-dessus que je voudrais terminer la
démonstration, pour ne pas allonger indûment les travaux de cette
commission, l'élément essentiel, c'est que la transaction faisait
agir, les unes avec les autres, des entreprises qui étaient ensemble et
en même temps contrôlées par les mêmes
intérêts que ceux qui s'étaient présentés
devant la Législature en 1967, les intérêts Desmarais.
Alors, quand on prend cette situation de fait et qu'on l'examine à la
lumière de l'article 3 de la Loi de 1967, qu'est-ce qu'on lit? Je
reprends le texte, il est très court: « Aucune vente d'un nombre
d'actions de toute compagnie qui aurait comme résultat de
déplacer le contrôle de la Compagnie de publication de La Presse
ne peut être valablement fait ou consenti, sauf avec l'autorisation de la
Législature.
Ici, nous sommes en présence d'une cession d'actions qui n'a pas
eu pour effet de déplacer le contrôle de la Compagnie de
publication La Presse. Ce contrôle était entre les mains des
intérêts Desmarais en 1967, au moment où la loi a
été adoptée. En 1968, au moment de la transaction, il
était demeuré entre les mains des intérêts Desmarais
et il l'est encore. Ce qui explique qu'à l'époque, lorsque
recours a été fait à une opinion juridique pour savoir si
cette transaction, en 1968, devait être soumise à l'examen de la
Législature, une opinion négative a été fournie
parce que cette transaction ne tombait pas sous la lettre et sous l'esprit de
l'article 3 de la loi de 1967.
C'est ce qui explique pourquoi cette transaction n'a pas
été soumise à la Législature. La
démonstration me semble irréfutable à la lumière de
la loi et c'est la réponse que Gelco désirait donner, ce matin,
à la question que M. Michaud avait posée la semaine
dernière.
M. MICHAUD: Est-ce que les intérêts de M. Desmarais
comportent la pleine totalité du contrôle de Gesca et de Gelco? On
dit 83%.
M. DESCHENES: Gesca est une filiale à part entière de
Gelco.
M. MICHAUD: A part entière de Gelco. M. DESCHENES: A 100%.
M. MICHAUD: Oui, M. Desmarais détient 80.3% de Gelco.
M. DESCHENES: De Gelco.
M. MICHAUD: Les 20% qui restent sont détenus par qui?
M. DESCHENES: Il y a une proportion relativement minime qui est
détenue par M. Jean Parisien qui est vice-président de
l'entreprise et le reste, qui est également une petite proportion, est
détenu par des intérêts familiaux de M. Desmarais. Ce qui
veut dire que M. Desmarais personnellement a 80% et, avec ses
intérêts familiaux, il a un pourcentage encore plus
considérable qui est complété par une toute petite
proportion qui reste entre les mains de M. Parisien, en particulier.
M. LESAGE: Dans les 83%, n'y a-t-il pas une partie qui est la
propriété des enfants de M. Desmarais ou de son
épouse?
M. DESCHENES: Sur ces questions de fait, M. le chef de l'Opposition, je
me réservais de vous suggérer, dans un moment, que toute question
devrait être dirigée aux représentants de la compagnie
Gelco. Je préférerais de beaucoup que, sur ces
matières-là, ce soient eux-mêmes qui vous répondent
plutôt que moi.
M. LESAGE: C'est un peu immatériel, parce que je sais
pertinemment que M. Desmarais contrôle, de toute façon, 83% des
actions. Même s'il y en a qui éventuellement iront à sa
femme ou à ses enfants, il les détient en fiducie et il en a le
contrôle parfait, je suis au courant de cela. L'explication que vous
venez de nous donner nous prouve, comme vous l'avez dit, que la lettre et
l'esprit de l'article 3 ont été respectées. J'avais
participé à la discussion lors de l'étude de ce projet de
loi qui permettait la vente de la Presse aux intérêts de M.
Desmarais. L'intention, c'était que M. Desmarais ne puisse abandonner le
contrôle, particulièrement du journal La Presse, sans revenir
devant la Législature. Il est clair qu'il a se contrôle. Qu'il
l'ait d'une façon ou d'une autre, l'intention du législateur,
c'était qu'il ne puisse abandonner le contrôle. Il l'a
conservé, il l'a encore.
M. DESCHENES: C'est exactement ce que nous exposons devant la
commission.
M. MICHAUD: Dans la transaction ultérieure, qui est survenue
à propos de la fusion de Power Corporation avec Gelco, est-ce que le
journal La Presse ou la filiale Gesca sont impliqués d'une
manière ou d'une autre?
M. DESCHENES: A l'époque, ilyaeu échan- ge d'actions et
acquisition d'intérêts par Gelco dans Power Corporation. C 'est
une transaction à laquelle Gesca était étrangère,
de même, d'ailleurs, que la Compagnie de publication La Presse. Je crois
pouvoir dire aujourd'hui, en toute vérité, que Power Corporation
ne détient pas d'intérêt dans les entreprises de
publication de journaux.
M. MICHAUD: Mais si Power Corporation détient 50% du portefeuille
de Gelco, est-ce que Power Corporation n'est pas, par ce biais, un peu
propriétaire? Est-ce que c'est exclu?
M. DESCHENES: Vous avez justement là formulé une
hypothèse qui, Je dois vous le dire en toute déférence,
n'est pas conforme aux faits. Power Corporation ne détient pas de
pourcentage d'actions, quel qu'il soit, dans la compagnie Gelco. Il n'y a
aucune participation de Power Corporation dans Gelco. Au contraire, Gelco
participe à quelque 30% dans Power Corporation. La situation est tout
à fait à l'inverse que celle que vous venez de citer.
M. LESAGE: Dans Gelco, comme vous l'avez dit, il y a 83% des actions
à M. Desmarais, il y en a un peu à M. Parisien et le reste
à la famille de M. Desmarais, mais Gelco, par exemple, détient
des actions de Power Corporation.
M. DESCHENES: Gelco détient le bloc le plus important de Power
Corporation.
M. LESAGE: Mais l'inverse n'est pas exact. Le « holding »
Gelco détient les actions du « holding » Power
Corporation.
M. DESCHENES: C'est un jeu de mots auquel peut-être pourrais-je
acquiescer pour autant qu'on ne verrait pas là une admission qui serait
susceptible de qualifier une situation de fait.
M. LESAGE: Power Corporation est un « holding » et Gelco est
également un « holding », mais la mère des deux n'est
pas Power, c'est Gelco.
M. DESCHENES: D'accord.
M. LESAGE : C'est comme ça que M. Desmarais est à la fois
père et mère.
M. DESCHENES: Je me demandais s'il y avait là un
phénomène de parthénogenèse, mais je suis content
que vous ayez corrigé l'impression qui tentait de se faufiler dans le
dialogue.
M. MICHAUD: Mais d'un strict point de vue légal, il est admis que
si M. Desmarais devait se déposséder de ses intérêts
dans Gesca ou dans Gelco, il lui serait nécessaire d'avoir l'approbation
de la Législature à cet effet.
M. LESAGE: C'est ça.
M. DESCHENES: II n'y a pas de doute parce que ça tomberait sous
l'expression « toute compagnie » dans l'article 3 de la loi.
M. MICHAUD: Mais la Corporation des valeurs Trans-Canada et la nouvelle
société Gelco ou sa filiale Gesca, c'est quand même un
changement de personnalité juridique. Est-ce que vous admettez qu'au
moins dans des transactions de cette nature, une information soit
donnée?
M. DESCHENES: II y a eu ce que j'appelais tout à l'heure une
transformation de façade corporative. Vous dites de personnalité
juridique. Vous avez raison pour autant que ce sont deux compagnies
différentes, mais ce à quoi il a fallu s'arrêter, c'est ce
à quoi la Législature s'était, elle, arrêtée.
Or, de toute évidence elle ne s'était pas arrêtée
à la façade corporative ou à la personnalité
Juridique. Elle s'était intéressée aux faits réels,
à savoir qui contrôlait effectivement la corporation, la
façade corporative. A ce moment-là, dès que nous nous
sommes rendu compte qu'il n'y avait aucun changement dans ce contrôle
réel, Je crois que nous étions justifiés de dire qu'il n'y
avait aucune obligation de revenir devant la Législature. J'ajouterais
là-dessus que le législateur, s'il avait voulu, à
l'époque, par ses lois, demander qu'une semblable Information soit
transmise, il lui aurait été facile de le dire dans le texte de
loi et il aurait été facile aux parties de se conformer au texte
de loi.
M. MICHAUD: Je crois que vous avez raison sur le fond, mais en fait sur
la forme le principe que nous essayons de défendre ici c'est que l'Etat,
qui est quand même responsable du bien commun, doit non pas avoir un
droit de contrôle sur les transactions en matière d'entreprises de
presse, mais au moins un droit de surveillance. Or, quels que soient les
apparentements Juridiques et quelle que soit la forme juridique que prennent
les transactions il serait, ce me semble, nécessaire que l'Etat comme
tel, qui est gardien du bien commun, soit avisé de ces transactions.
C'est ça l'esprit de la loi.
M. DESCHENES: Justement, l'Etat a voulu être avisé de ces
changements de contrôle et de ces changements d'intérêts. Il
l'a dit dans sa loi. Nous le savons. Si jamais, comme on le mentionnait il y a
un instant, M. Desmarais décidait pour une raison x de se
départir de ses intérêts, il faudrait que l'on revienne,
à ce moment-là, devant la Législature. Seulement, tant et
aussi longtemps que le contrôle n'est pas modifié
réellement et dans les faits, l'Etat doit être satisfait que le
contrôle demeure entre les mains des mêmes personnes, même si
un désir se manifeste à un moment donné que le nom soit
changé pour ne plus être Corporation de valeurs Trans-Canada, mais
devenir Gesca ou devenir Gelco ou devenir Desmarais et compagnie, peu importe.
Ce qui compte, c'est l'intérêt...
M. MICHAUD: Mais il y a quand même eu une sorte de changement de
propriétaire et non pas majoritaire puisqu'il y avait M. Jean-Louis
Lévesque qui avait des intérêts dans la Corporation des
valeurs Trans-Canada. M. Desmarais a acquis la majorité des actions de
ce groupe,
M. LESAGE: Il l'avait.
M. MICHAUD: Il l'avait, oui. A l'époque où la Presse a
été vendue, il y avait M. Desmarais et il y avait M.
Lévesque.
M. LESAGE: C'est M. Desmarais qui avait le contrôle. Il avait plus
de la moitié des actions. Alors, l'intention du législateur
c'était que M. Desmarais c'était de lui qu'il était
question autour de la table ne puisse se départir du
contrôle efficace qu'il avait dans les faits sans revenir devant la
Législature.
Autrement dit, mon cher Yves, si M. Desmarais,
généreusement, vous offrait gracieusement le contrôle de la
Presse, il ne pourrait le faire sans notre consentement.
M. MICHAUD: Uniquement sur la Presse.
M. DESCHENES: Maintenant que j'espère avoir satisfait les membres
de la commission avec les explications que je viens de fournir, je voudrais
vous demander la permission de ne formuler que deux brèves observations
additionnelles sur deux documents qui ont été
déposés devant cette commission de travail au cours des
séances antérieures. Il y a deux affirmations qui y apparaissent
et que je ne voudrais pas laisser passer inaperçues.
Lors d'une séance où la direction de la revue Maintenant a
comparu devant la commission, elle a produit, a-t-elle dit, comme partie
intégrante de ses représentations, le dernier numé-
ro de la revue Socialisme 1969. Dans ce numéro, on s'interroge en
particulier sur l'avenir du Québec et sur la liberté au
Québec. Il y a cinq lignes de ce texte auxquelles je voudrais accorder
une certaine attention ce matin. Cette question de la liberté,faisant
partie du problème qui nous intéresse, ne devrait pas laisser
indifférents les membres de la commission ce matin.
Or, voici ce qu'on lit dans cette communication déposée
comme partie intégrante des représentations qui ont
été faites devant la commission. J'extrais ce passage de la page
133. On s'interroge là sur l'avenir du Québec: « Ce sera
une nouvelle manifestation des chauffeurs de taxi, ce sera une nouvelle
démarche des comités de citoyens, ce seront de nouvelles
occupations d'écoles ou d'usines ou d'édifices de
l'administration municipale ou provinciale, ce sera la constitution de
réserves d'armes pour la résistance. Il faut y songer maintenant.
Ce sera l'organisation, peut-être clandestine, d'un véritable
mouvement révolutionnaire, etc. »
En présence d'un texte aussi séditieux que celui-ci qui a
été déposé devant la commission, il est opportun
qu'avant d'arriver à des recommandations à l'Assemblée
nationale celle-ci s'interroge pour savoir si nous chérissons
suffisamment aujourd'hui les libertés que l'on critique et que l'on
attaque aussi facilement, mais que néanmoins nous possédons et
que l'on se demande si nous devons nous déclarer prêts aujourd'hui
à troquer ces libertés que nous avons et que nous
défendons contre celles que l'on prétend nous imposer par le fer,
par le feu et par le sang.
M. MICHAUD: « Ce sera » se réfère à
quoi?
M. DESCHENES: Oh! il faudrait, à ce moment-là, que je
revienne. Je disais que l'on s'interrogeait, à ce moment-là, sur
l'avenir du Québec.
M. MICHAUD: Oui.
M. DESCHENES: On dit alors: Ce seront les démonstrations que je
viens de vous mentionner, allant jusqu'à la révolution
armée. Si vous voulez que je vous cite les trois lignes
précédentes, je puis le faire. Je ne voulais pas allonger la
citation. Les trois lignes précédentes se lisent comme suit... Il
faut que je remonte encore plus haut, parce que cela commence par: « II
faudra répondre à ces questions. » Ces questions,
c'était: « Comment, par exemple, ferons-nous pour que notre lutte
pour le Québec soit ici une lutte avec les Latino-Américains, les
Afro-Américains, les
Asiatiques, les Africains, une lutte contre les impérialistes?
» On dit: « II faudra répondre à ces questions. Le
plus tôt sera le mieux. J'ai tâché, pour ma part, de le
faire partiellement, dans un essai intitulé « Feu sur
l'Amérique ». D'autres réponses seront
éventuellement et très certainement données à ces
questions. Ce sera une nouvelle manifestation, etc. » On va
jusqu'à la révolution armée.
M. MICHAUD: C'étaient les étapes de leur accession
à une hypothèse de liberté.
M. DESCHENES: Justement. C'est pour cela et c'est ma
deuxième et dernière observation que je trouve beaucoup
plus saine l'attitude que l'on retrouve dans la revue Maintenant, dont le
dernier numéro avait également été
déposé devant cette commission. On y trouve un passage que les
Entreprises Gelco peuvent et désirent faire leur, ce matin devant la
commission.
Je n'en lis encore que quelques lignes qui sont à la page 155 et
où la revue Maintenant, sous la plume de l'un de ses collaborateurs,
nous dit ceci et cela fait partie de ses représentations devant
la commission: « La concentration des journaux, qui amènera
inévitablement une meilleure administration des entreprises et les
rendra ainsi plus rentables, peut susciter un renouveau sans
précédent dans les qualités de l'information, si les
nouveaux propriétaires sont conscients de leur intérêt,
même le plus égoïste. Car, ils sont aujourd'hui capables de
faire d'une pierre deux coups: améliorer la qualité
journalistique des journaux et assurer, je dirais même accroître en
même temps la longivité et la rentabilité de ceux-ci.
»
Ce passage, M. le Président, qui se trouve dans les
représentations faites à cette commission par la direction de la
revue Maintenant, nous pouvons le faire nôtre parce que ceci fait partie
de la philosophie des entreprises Gelco, telle d'ailleurs qu'elle vous a
été exposée dans le mémoire qui a été
déposé devant cette commission la semaine dernière.
Afin comme je le disais, il y a un moment et c'est par là
que je termine de hâter les travaux de cette commission, il ne
nous a pas paru opportun de relire ce matin ou même de tenter de
résumer le mémoire qui vous a été soumis la semaine
dernière.
Qu'il me suffise de dire que, dans une première partie, vous
aurez pu constater que ce mémoire relate l'historique des entreprises
Gelco au cours des vingt dernières années et montre comment
on me pardonnera l'exprès-
sion deux petits Canadiens français, avec rien ou à
peu près, ont réussi à force de poignet, de
ténacité, de persévérance, d'initiative, à
se hausser dans le domaine de l'entreprise et à arriver à exercer
aujourd'hui une Influence considérable dans l'entreprise privée
comme dans l'entreprise publique. Gelco souhaite justement, dans son
mémoire, que son exemple soit suivi et que d'autres Canadiens
français, faisant montre des mêmes efforts, des mêmes
qualités, surtout du même esprit de travail, arrivent
également à pouvoir exercer les mêmes influences
aujourd'hui.
Dans la deuxième partie du mémoire de Gelco, celui-ci
explique sa philosophie vls-à-vis, en particulier, des entreprises de
presse et démontre que Gelco n'intervient pas, n'est jamais intervenu et
n'entend pas intervenir dans l'avenir dans ce qu'on appelle les tentatives de
contrôle de l'information. Au contraire ici j'emploie les termes
mêmes du mémoire de Gelco à la page 8: « C'est la
philosophie de Gelco de bâtir des entreprises bien administrées et
stables, de rationaliser de façon à assurer chez les journalistes
une sécurité d'emploi et une liberté d'expression qu'ils
ne sauraient peut-être pas trouver dans des entreprises qui menaceraient
tôt ou tard de disparaître faute de ressources financières,
faute de saine administration ou faute de n'être pas en mesure de
concurrencer les produits des différentes entreprises de presse qui
arrivent sur nos marchés venant de tous les coins du monde et qui
trouvent chez les Canadiens un public pour les lire ».
C'est là la politique suivie par Gelco, et je puis dire sans
crainte d'être contredit par les intérêts qui, actuellement,
administrent et contrôlent les entreprises Gelco et, par leur truchement,
certaines entreprises de presse, qu'il n'y a aucun désir dans ce
domaine-là eux-mêmes d'ailleurs vous le diront
personnellement de pratiquer tel genre d'intervention qui a pu
apparemment amener certaines craintes dans le public et en particulier chez les
membres de l'Assemblée nationale.
C'est pour cela et c'est ma dernière observation
que Gelco ajoute à la fin de son mémoire que depuis que Gelco a
fait des acquisitions dans ce domaine, sa première préoccupation
a été de donner une base financière et une administration
saine à chacune de ses entreprises afin que, graduellement, les
journalistes aient l'occasion de se perfectionner, d'étudier, de voyager
et finalement de se sentir fiers d'appartenir à des entreprises qui ont
comme désir le rayonnement de l'homme de presse dans une entreprise qui
se discipline à atteindre un marché de plus en plus exigeant.
Ceci dit, il est concevable et tout à fait possible que les
membres de cette commission aient cependant des éclaircissements
additionnels à demander sur les entreprises Gelco et sur les faits qui
sont relatés dans le mémoire qui est Ici déposé. Je
vous suggère, M. le Président, qu'il serait opportun que vous
entendiez deux voix représentant les entreprises Gelco. D'une part, si
les membres de la commission ont des questions à poser, pertinentes
à ce qui nous intéresse ici, M. Jean Parisien, le
vice-président des entreprises Gelco, qui a eu l'occasion et l'avantage
de participer aux travaux antérieurs de cette commission, et qui s'est
plus particulièrement familiarisé avec ce qui fait l'objet de vos
préoccupations, est ici présent et disposé à
répondre à vos questions.
Lorsque vous aurez obtenu les éclaircissements que vous
désirez, je vous demanderai de donner ensuite quelques minutes à
M. Marcel Caron, ex-président de l'Institut des comptables
agréés, qui a préparé des données factuelles
sur le problème de l'évolution des entreprises dans le monde
contemporain, plus particulièrement en Amérique et plus
particulièrement au Canada, problème au sujet duquel cette
commission, sauf erreur, n'a reçu jusqu'à maintenant que des
informations théoriques et sur lequel il nous apparaît opportun
d'apporter maintenant des précisions d'ordre concret pour servir
d'instruments de travail à cette commission parlementaire.
Alors, M. le Président, s'il y a des questions, je
suggérerais qu'elles soient adressées à M. Parisien qui
sera en mesure d'y répondre de la part de Gelco.
M. BOUSQUET: Monsieur, puisque vous avez fait allusion à la revue
Socialisme, je serais tenté de vous poser une question.
M. DESCHENES: Il faut d'abord vous demander, M. Bousquet, si vous devez
succomber à la tentation.
M. BOUSQUET: Voici, est-ce que... M. LESAGE: Il aime ça.
M. BOUSQUET: M. Lesage est souvent un tentateur.
M. DESCHENES: Je me réserve le privilège de
l'absolution.
M. BOUSQUET: Si la revue Socialisme demandait de s'annoncer dans La
Presse, accepteriez-vous une annonce de la revue Socialisme?
M. DESCHENES: M. Bousquet, je représente ici la compagnie Gelco
et, je puis vous dire que celle-ci justement n'aurait absolution rien à
voir avec la demande de publicité qui pourrait être faite, et je
suis bien certain que ce ne sont pas les administrateurs de Gelco qui
pourraient exercer une influence là-dessus.
Mais ici, justement, vous faites la meilleure démonstation de ce
que je viens de vous dire, à savoir qu'il serait de beaucoup
préférable que ce soient eux-mêmes qui répondent
à cette question-là plutôt que de le faire par le
truchement d'un avocat qui, sur ces questions-là, n'est pas celui qui
peut vous fournir la meilleure réponse. Je préfère le
reconnaître en toute humilité, et en même temps en toute
franchise, et également pour le meilleur avantage de la commission. Je
crois que, là-dessus, il serait justement opportun que je demande
à M. Parisien de vous donner la réponse des entreprises
Gelco.
M. LE PRESIDENT (M. Cloutler): M. Parisien.
M. PARISIEN: M, Bousquet, je pense que ce devrait être une
réponse qui vous serait fournie par M. Bureau, qui est l'administrateur
effectif de La Presse. Il était ici ce matin, nous le cherchons dans le
moment. Aussitôt qu'il sera arrivé, il vous fournira la
réponse.
M. DESCHENES: Je puis dire, M. le Président, que M. Bureau, de La
Presse, est ici ce matin. Il n'est apparemment sorti que pour quelques
instants. Nous le faisons rechercher et nous lui demanderons de vous fournir
les éclaircissements nécessaires, dès qu'il sera
revenu.
M. BOUSQUET: Ma question serait quand même pertinente justement
à une session de la commission sur la liberté de la presse. Alors
j'attends la réponse avec beaucoup d'intérêt.
M. MICHAUD: Pour clarifier cette situation, une fois pour toutes, au
moment de la transaction Power Corporation et Gelco, le Montreal Star, si j'ai
bonne mémoire, sauf erreur, présentait cette transaction comme
une association 50/50 de Gelco et de Power Corporation. Donc, on a pu
raisonnablement croire à cette époque, sur la foi de ces
informations qui m'apparaissent irrecevables, en tout cas pour l'instant, que
Power Corporation était liée à Gelco dans les
intérêts de la presse écrite. Or, Je comprends bien,
d'après votre organigramme, que Gelco détient 30% du
capital-actions de
Power Corporation, Power Corporation n'étant
intéressée, dans le Québec, que dans les stations de radio
et de télévision...
M. DESCHENES: C'est ça.
M. MICHAUD: Donc, il n'y a pas d'Intérêts de Power
Corporation dans la presse écrite que les intérêts que vous
représentez contrôlent.
M. DESCHENES: C'est la réponse que je vous ai donnée tout
à l'heure. Maintenant, si vous me permettez peut-être une
explication à ce que vous dites avoir lu à l'époque dans
le Montreal Star, je ne m'en souviens pas, mais il est tout à fait
possible que cette explication soit venue du fait que ce que l'on
présentait dans le public, c'était qu'il s'agissait d'une
association entre M. Desmarais et M. Peter Thomson, ces deux
messieurs-là, s'associant ensemble pour conjointement exercer le
contrôle sur l'entreprise Power Corporation et que, dans cette
optique-là, on ait dit c'est 50/50, Desmarais-Thomson, et qu'on ait
confondu, à ce moment-là, Gelco et les entreprises
contrôlées par M. Thomson à ce temps-là. Je verrais
là l'explication de la conception qu'on avait pu se faire de cette
combinaison d'Intérêts. Il n'y a certainement pas de 50/50 dans la
division du capital-actions de la Power Corporation.
M. MICHAUD: Cette Information a-t-elle pu être
véhiculée par la presse, en fonction de cette transaction qui a
eu lieu au sommet de la pyramide entre Warnock Hersey International et
Gelco.
M. DESCHENES: Comment voulez-vous que je vous réponde, M.
Mlchaud? Je ne le sais pas et je plaide ignorance.
M. MICHAUD: Quels sont les liens d'association entre Warnock Hersey
International et Gelco, si tant est qu'il y en ait?
M. PARISIEN: Les entreprises Gelco détiennent quelque 30% des
actions votantes de Power Corporation, Warnock Hersey détient quelque
25%. C'est la seule association qu'il y ait entre Warnock Hersey et Gelco,
c'est qu'ensemble, nous détenons le contrôle de la majorité
des actions de Power Corporation.
M. LESAGE: Le reste des actions est sur le marché.
M. PARISIEN: Il est répandu parmi 18,000 actionnaires.
M. LESAGE: C'est ça.
M. PARISIEN: Il n'y a aucun autre...
M. LESAGE: Alors il y a 30% à Gelco et à peu près
25% à Warnock Hersey qui est contrôlée par M.
Thomson...
M. PARISIEN: C'est ça.
M. LESAGE: ...personnellement ou pard'autres, cela n'a pas d'importance.
Mais il ya 55% à peu près des actions de Power qui sont
détenues ou contrôlées par M. Desmarais et M. Thomson et
c'est là qu'est l'association.
M. PARISIEN: C'est exact, c'est la seule.
M. LESAGE: C'est ce que j'avais compris après avoir lu les pages
financières des journaux.
M. MICHAUD: Cest une association, donc d'à peu près 50/50,
M. Thomson et M. Desmarais, dans les 50% des actions qui restent.
M. LESAGE: Non, dans 55%des actions qu'ils détiennent
individuellement et respectivement dans Power, le reste étant sur le
marché, coté en bourse et détenu par 18,000
actionnaires.
M. PARISIEN: C'est ça. M. MICHAUD: D'accord.
M. BOUSQUET: Maintenant, pourrait-on nous dire quels peuvent être
les liens entre Power Corporation et les différentes corporations
américaines? J'ai lu moi aussi les pages financières des
journaux, j'ai lu le Financial Times et j'ai vu que Power Corporation
était liée très étroitement à beaucoup de
grandes compagnies nord-américaines. Alors, en quelques mots,
pourrait-on nous dire quelles peuvent être les associations entre Power
Corporation et les principales compagnies nord-américaines?
M. LESAGE: Warnock Hersey n'a pas beaucoup de capital américain,
je pense.
M. PARISIEN: Non.
M. LESAGE: II n'en a pas du tout.
M. PARISIEN: J'ai ici et je crois que vous avez en main vous-mêmes
le rapport annuel de Power Corporation. A la page 5, vous allez trou- ver une
liste des placements principaux de Power Corporation. Voici ce que ça
représente. Les seuls intérêts américains qui sont
représentés c'est American District Telegraph Company dans
laquelle nous avons un placement d'à peu près 2% des actions de
la compagnie.
M. LESAGE: Oui, mais ça, ce sont les placements de Power
Corporation. Ce que M. Bousquet voulait savoir, c'est si Warnock Hersey
était, de quelque façon, contrôlée par du capital
américain. C'est-à-dire la compagnie-mère.
M. PARISIEN: A ma connaissance, Warnock Hersey est
contrôlée par M. Thomson.
M. BOUSQUET: Et M. Thomson lui-même? M. PARISIEN: Lui-même,
personnellement.
M. BOUSQUET: Oui, je comprends cela, mais ce qui m'intéresse
quand même c'est de savoir quelles peuvent être les associations ou
les liens entre Peter Thomson ou les intérêts Peter Thomson et
divers intérêts américains, Y en a-t-il? Je crois qu'il y
en a, à la lumière de ce que j'ai déjà lu. Je crois
qu'il y en a beaucoup. Pourriez-vous nous donner une idée des liens qui
peuvent exister entre les intérêts Peter Thomson et les
intérêts américains?
M. PARISIEN: A ma connaissance, il n'y en a aucun.
M. LESAGE: Warnock Hersey...
M. PARISIEN: C'est une compagnie canadienne listée en bourse.
M. LESAGE: ... c'est une compagnie canadienne, je le sais bien, mais M.
Thomson...
M. BOUSQUET: J'apporterai cet article que j'ai
découpé.
M. LESAGE: ... personnellement, a-t-il le contrôle de plus de 50%
des actions?
M. PARISIEN: Oui, de Warnock Hersey.
M. LESAGE: Y a-t-il des actions cotées sur le marché?
M. PARISIEN: Absolument.
M. LESAGE: Warnock Hersey en a.
M. PARISIEN: C'est une compagnie canadienne, siège social
à Montréal.
M. LESAGE: Y a-t-il un autre actionnaire que M. Thomson qui
possède un bloc d'actions et qui vaut la peine d'être
mentionné?
M. PARISIEN: Non.
M. LESAGE: Alors c'est M. Thomson qui possède plus de 50%,
mathématiquement, des actions, le reste étant coté en
bourse. A la bourse de Montréal, je crois.
M. PARISIEN: A la bourse de Montréal. M. LESAGE: Et à la
bourse de Toronto. M. PARISIEN: Et à la bourse de Toronto.
M. LESAGE: Alors, que vouliez-vous savoir, M. Bousquet?
M. BOUSQUET: Ce que je veux savoir, c'est ceci.
M. LAPORTE: Vous voulez savoir s'il lit les journaux?
M. BOUSQUET: Non, ce n'est pas ça du tout.
M. LAPORTE: M. Thomson est-il un grand lecteur de journaux?
M. BOUSQUET: Ce n'est pas ça du tout. M. Laporte, n'essayez pas
de faire des farces déplacées.
M. LAPORTE: Ah! monsieur, depuis qu'il est assis à la
première chaise, il se prend pour un autre.
M. BOUSQUET: Je ne suis pas assis à la première chaise,
c'est M. le Président qui est assis là.
M. LAPORTE: Remarquez bien que si vous êtes assis là, c'est
parce qu'il y avait tellement d'absents. Alors ne vous énervez pas!
M. BOUSQUET: Oui, je sais ça. Et d'ailleurs je n'ai jamais eu la
prétention du député de Chambly.
M. LAPORTE: Vous avez toutes les raisons du monde d'être
humble.
M. BOUSQUET: Oui, je sais, et vous avez toutes les raisons de vous taire
et de me laisser parler puisque j'ai la parole.
M. LAPORTE: A merveille!
M. BOUSQUET: Bon, très bien.
M. LESAGE: Que voulez-vous savoir au juste?
M. BOUSQUET: Ce que je trouve intéressant et important de savoir,
c'est si des gens qui contrôlent une partie importante de l'information
au Québec ont des liens étroits avec des compagnies
américaines. Je trouve qu'il est important de connaître ça,
dans le domaine de l'information ou dans d'autres domaines.
M. LESAGE: Oui,maisonvientd'expliquer...
M. LAPORTE: Cela fait trois fois qu'ils lui disent non.
M. BOUSQUET: Ce n'est pas ça.
M. LESAGE: ... que Power Corporation est détenue à 30% par
M. Desmarais, à 25% par Warnock Hersey, M. Desmarais par Gelco et M.
Thomson par Warnock Hersey. Dans le cas de M. Des marais et dans le cas de
Gelco, il possède 83% des actions; dans le cas de Warnock Hersey, M.
Thomson, personnellement, possède au-delà de 50% des actions et
dans les deux cas le reste, ou presque, est en bourse.
M. PARISIEN: En bourse canadienne.
M. LESAGE: En bourse canadienne, oui, oui.
M. PARISIEN: Il n'y a aucun intérêt américain.
M. LESAGE: Evidemment, un Américain peut bien acheter des actions
en bourse de Montréal ou de Toronto.
M. PARISIEN: S'il veut payer la taxe additionnelle.
M, LESAGE: Que voulez-vous? Il n'y a pas de contrôle. Alors, ce
sont des liens qui n'ont pas d'effet. De quels Intérêts
américains avez-vous peur?
M. PARISIEN: Il n'y a aucun lien américain.
M, BOUSQUET: Disons qu'à la prochaine séance j'apporterai
cet article qui est paru dans le Financial Time au sujet des
intérêts de Power Corporation. Pour le moment, je laisse la
question de côté.
M. LESAGE: Parce que Power Corporation
a des Intérêts dans l'Imperial Life, qui est une compagnie
canadienne; dans la Canada Steamship Lines, qu'elle contrôle...
M. MICHAUD: Blue Bonnets, Transport Provincial.
M. LESAGE: ... Dominion Glass, 56%; Canadian Interurban Properties, 68%;
Consolidated Bathurst Limited, 16%; Laurentide Finance, 48%; Northern and
Central Gas, 16%. Dans cette dernière, y a-t-il des
intérêts américains, M. Parisien?
M. PARISIEN: C'est canadien.
M. LESAGE: Canadien. Est-ce qu'une autre personne ou une autre
corporation détient un bloc d'actions plus important que les 16%
détenus par Power Corporation?
M. PARISIEN: Non.
M. LESAGE: Bon. Alors 16% suffisent pour avoir le contrôle
effectif?
M. PARISIEN: Oui.
M. LESAGE: Parce que c'est en bourse, cela aussi.
M. PARISIEN: Pour répondre à M, Bousquet, Je puis
l'assurer que Warnock Hersey n'a aucun intérêt américain et
que M. Thomson n'a aucun lien avec les Américains. Maintenant, si des
articles ont paru, c'est une autre affaire. Ici, nous essayons de vous donner
les faits véritables, et je ne peux pas faire autrement que de vous
assurer que cela n'existe pas.
M. MICHAUD: M. le Président, en ce qui concerne ce danger que
semble prévoir le député de Saint-Hyacinthe, Je pense bien
que si, à l'occasion, M. Thomson, M. Desmarais, Warnock Hersey ou Gelco
détenait un ou deux pour cent d'actions dans des compagnies
américaines, à ce moment-là il n'y aurait pas de danger.
C'est leur propre initiative et leur propre liberté. Je pense bien que
le problème du contrôle américain...
M. LESAGE: EL n'existe pas.
M. MICHAUD: ... en tout cas, ne se pose strictement pas quant au
problème des entreprises de presse au Québec. A tout le moins, ce
ne serait pas significatif.
M. LESAGE: Mais il n'y en a pas.
M. PARISIEN: Il n'y en a pas.
M. LESAGE: Personnellement, Je n'ai pas de témoignage à
donner, mais de toutes ces compagnies-là, la plupart sont en bourse
à Toronto et à Montréal ou à Montréal ou
à Toronto. Je ne vols pas le danger.
M. MICHAUD: Est-ce qu'effectivement...
M. LESAGE: Lisez-vous les pages financières?
M. BOUSQUET: J'apporterai cet article et Je vous le montrerai.
M. LESAGE: Très bien.
M. BOUSQUET: Jusqu'à ce moment-là, j'ai dit que je
laissais la question en suspens.
M. LESAGE: L'avez-vous ici à votre bureau?
M. BOUSQUET: J'ai dit que je vous l'apporterai.
M. LESAGE: C'est parce que nous pourrions le lire ce matin, pendant que
ces messieurs sont ici.
M. BOUSQUET: Très bien.
M. LESAGE: Cela constitue une insinuation...
M. BOUSQUET: Je ne fais pas d'insinuation.
M. LESAGE: C'est ce que vous avez fait. Il me semble qu'il y aurait lieu
de clarifier l'atmosphère ce matin. Si vous aviez l'article en main, je
pense qu'en toute justice vous devriez nous le produire.
M. BOUSQUET: J'ai répondu à cette question.
M. MICHAUD: M. Parisien, ne serait-il pas juste de dire que Gelco, par
les actions qu'elle détient dans Power Corporation, exerce un
contrôle ou une espèce de semi-contrôle sur la Consolidated
Bathurst, par exemple, qui fait du papier?
M. PARISIEN: Gelco étant le plus gros actionnaire de Power
Corporation, M. Desmarals, qui en est le président du conseil
d'administration et le directeur général, exerce sûrement
le contrôle des politiques de Power Corporation.
M. MICHAUD: De Power Corporation. M. PARISIEN: Et puis...
M. MICHAUD: Les intérêts de Power Corporation dans
Consolidated Bathurst sont de 16.3%; est-ce que ce sont des
intérêts qui assurent, à toutes fins utiles, le
contrôle de Consolidated Bathurst?
M. PARISIEN: C'est un contrôle effectif. M. MICHAUD: C'est un
contrôle effectif? M. PARISIEN: Oui.
M. MICHAUD: On peut dire que Gelco et Warnock Hersey détiennent
le contrôle effectif de Consolidated Bathurst.
M. PARISIEN: Oui.
M. MICHAUD: Est-ce qu'a ce moment-là il n'y aurait pas un danger
éventuel d'une certaine pression sur les prix du papier? Je pense aux
autres Journaux 13..
M. LESAGE: C'est le contraire.
M. PARISIEN: Non, parce que le prix du papier, c'est un prix unique et
nous-mêmes, nous n'avons aucun intérêt à ce
que...
M. MICHAUD: Il n'y aurait aucun danger éventuellement, vu que
tous vos groupes de journaux s'alimentent Je ne sais pas si vous le
faites tous à la Consolidated Bathurst, que des pressions soient
exercées sur les prix du papier, de telle sorte que ça pourrait
mettre en danger, par le mécanisme du prix du papier, d'autres Journaux
dans le Québec.
M. LESAGE: Consolidated Bathurst n'est pas une assez grosse compagnie
pour ça, M. Michaud. Si vous parliez de CIP ou bien d'autres grandes
compagnies de papier, je ne dis pas, mais Consolidated Bathurst, dans l'ordre
de grandeur des compagnies de papier, n'est évidemment ni la
première, ni la deuxième, peut-être...
M. MICHAUD: Oui, mais sur le marché domestique
québécois, Consolidated Bathurst se situe-t-elle comme une des
premières sociétés de fabricants de papier?
M. PARISIEN: Non, c'est une des petites compagnies. En plus de
ça, j'aimerais ajouter que le prix, du papier est fixé par un
marché international; ce n'est pas le marché domestique qui
détermine le prix du papier. Le prix du papier, en Amérique du
Nord, se détermine à New York actuellement. Il est le même
pour tout le monde.
M. LESAGE: Là, ce sont les Américains beaucoup plus que
nous qui déterminent le prix du papier.
M. PARISIEN: A la Consolidated Bathurst, la majorité des actions,
je pense, sont détenues par des Canadiens.
M. MICHAUD: Bien oui, c'est détenu par Gelco.
M. LESAGE: Consolidated Bathurst, bien oui, le contrôle effectif
est entre les mains de Power Corporation et les autres fonctionnaires, bien, ce
sont ceux qui en détiennent,
M. LEDUC (Laviolette): Les autres actionnaires aussi.
M. LESAGE: ...Il y en apeut-être qui s'achètent ou qui se
vendent ce matin sur le marché de Toronto.
M. LEDUC (Laviolette): En majorité canadienne.
M. LESAGE: Cela dépend de la cote de la bourse. Les gens qui
Jouent à la baisse jouent aujourd'hui.
M. LEDUC (Laviolette): C'est le temps d'en acheter.
M. MICHAUD: M. le Président, j'ai posé ce
problème...
M. LESAGE: Les gens qui jouent à la baisse.
M. MICHAUD: ... du prix du papier en pensant à l'exemple
français. En effet, les journaux français paient moins cher le
papier, alors qu'ils n'ont pas un pays producteur de pâte à papier
et de papier journal. Ils paient moins cher pour la tonne de papier journal que
les journaux québécois, alors que nous, nous sommes quand
même le pays numéro 1 qui produit du papier journal. Il y a
là-bas une société nationale des entreprises de presse, la
SNEP, et je crois savoir qu'il y a des subventions de l'Etat. Ces subventions
ne sont pas arbitraires,
mais elles s'appliquent à tous les journaux. Il y a une
réglementation du prix du papier par l'Etat. Cette réglementation
est sous forme de subventions qui aident précisément les petites
voix et les petits journaux à publier. C'est la forme que prend l'aide
de l'Etat à la liberté de la presse là-bas, en
contrôlant le papier à la baisse et en donnant un traitement
préférentiel à tous les journaux quels qu'ils soient.
M. LESAGE: Ces subventions ont toujours été un point de
discussion entre le gouvernement français, le gouvernement canadien et
même entre le gouvernement français et le gouvernement du
Québec. Entre 1960 et 1966, nous avons toujours tenté d'obtenir
du gouvernement français que, premièrement, le marché
commun diminue les barrières tarifaires sur le papier. Je ne me souviens
plus du nom de celui qui est en tête des pâtes et papiers en
France, c'est un Français et c'est clair que c'est un chaud partisan du
protectionnisme. J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de discuter
avec lui, puis je n'ai jamais rien gagné.
M. DESCHENES: M. le Président, Je vous suggérerais
d'entendre, sur ce point-là particulier, M. Jacques Francoeur qui a en
main des renseignements très pertinents pour répondre à la
question de M. Michaud.
M. FRANCOEUR: M. le Président, si vous me le permettez, pour
éclaircir la question du papier, justement, la semaine dernière,
j'ai étudié la situation française en détail.
En France, comme vous le savez, les villes sont plus dispersées
et le territoire français au point de vue juridique comprend même
la Guadeloupe, la Martinique et anciennement l'Algérie, etc. Pour donner
une chance aux Journaux publiés dans les villes un peu
éloignées ça comprenait même Alger, par
exemple, au moment de l'Algérie française il y a une
péréquation qui se fait. Le gouvernement français a
créé une régie qui achète le papier pour toute la
France. Ensuite, la régie revend le papier au même prix à
tout le monde. En d'autres mots, même le journal qui est au Havre, paie
le même prix que le Journal qui est à Lyon, malgré que l'un
reçoive son papier directement au bateau, tandis que l'autre le
reçoit par l'entremise du chemin de fer.
Ici, nous avons en pratique la même chose. Le marché
nord-américain étant mondial ou à peu près, les
prix sont cotés sur New York.
Qu'un journal de Québec prenne son papier à la compagnie
Price, ou la Tribune à Sher- brooke, ou à Val-d'Or, les prix sont
toujours calculés sur New York et là, on déduit les frais
de transport pour tenir compte des distances. Le système
français, c'est ça. C'est que le gouvernement achète et
revend à tout le monde au même prix. En d'autres mots, les frais
de transport pour les journaux éloignés sont absorbés en
partie par les journaux plus près. Cela, c'est le système
français dans le détail.
M. LESAGE: En Amérique du Nord, cette péréquation
se fait, mais sans régie.
M. FRANCOEUR: C'est-à-dire que là, non. Le transport est
compté un peu. En d'autres mots, toutes les compagnies de papier vendent
à tous les journaux au prix de New York, tant la tonne, mais, dans le
cas des journaux de Québec, on alloue la distance qu'il y a entre notre
ville et New York, au point de vue transport.
M. LESAGE: Est-ce qu'on la charge? M. FRANCOEUR: Non, on la
déduit. M. LESAGE: On la déduit.
M. FRANCOEUR: Le prix est fait en fonction de New York, moins le
transport allant à New York.
M. LESAGE: Pour que ça revienne à un prix uniforme.
M. FRANCOEUR: C'est un prix uniforme. Toutes les compagnies de papier en
Amérique du Nord, en fait, fonctionnent sur les mêmes
barèmes et les mêmes prix.
M. MICHAUD: M. Francoeur, vous venez précisément de dire
que le prix du papier dans le Québec, c'est le prix aligné sur le
marché américain du prix du papier, en fait, qui est un
marché mondial.
M. FRANCOEUR: Moins le transport et moins d'autres concessions de base,
mais il faut comprendre que je ne connais pas le marché du papier
dans le détail, mais je connais assez les gens dans ce commerce
80% du commerce des papeteries québécoises se fait aux
Etats-Unis. Que voulez-vous? Le prix dont on discute est évidemment le
prix le plus élevé que ces compagnies peuvent aller chercher,
c'est le prix américain.
M. MICHAUD: Bien sûr, mais ma proposition, je pense que je suis
conscient qu'elle dé-
borde peut-être un peu les cadres du mandat de cette commission.
Mais, étant donné que le Québec est un des plus puissants
producteurs de papier journal au monde, ne serait-il pas pensable que, sur une
base tout à fait égalitaire pour ce qui concerne les journaux
québécois, nous bénéficiions, comme groupe
collectif, de prix de papier qui soient moindres que ceux qui sont actuellement
en vigueur sur le marché américain? Est-ce que ça ne
serait pas là une façon de privilégier la liberté
de la presse sans toucher à des intérêts, mais de faire en
sorte que nous soyons les premiers bénéficiaires de
l'exploitation d'une richesse naturelle collective que sont nos forêts et
qui produisent le papier journal? Je pense qu'il faudrait presque envisager un
traitement préférentiel aux journaux.
M. FRANCOEUR: La loi existe déjà depuis le temps de M.
Duplessis. La loi avait été votée, mais elle n'a jamais
été sanctionnée, pour la bonne raison que les journaux ont
refusé de s'en prévaloir. Parce que, si ma mémoire est
bonne je remonte à vingt ans en arrière les
journaux devaient demander la protection du gouvernement. Et justement, les
journaux ont préféré, à ce moment-là, payer
leur papier un peu plus cher plutôt que de donner une première
entrée au gouvernement dans le domaine de la liberté de presse.
M. Laporte, vous êtes au courant?
M. LAPORTE: Je suis plus inquiet de la protection que du coût du
papier.
M. FRANCOEUR: J'aime mieux payer le papier plus cher la tonne que de
donner à l'Etat une première entrée où, ultimement,
il peut...
M. LESAGE: Que de lui entrebâiller la porte.
M. MICHAUD: Oui, mais ça, c'était quand même il y a
vingt ans. Il y a vingt ans, il y avait de ces obsessions, mais aujourd'hui, on
admet de plus en plus l'intervention étatique dans certains domaines. Je
ne crois pas qu'une réduction du prix du papier ou un contrôle du
prix du papier à la baisse pour tous les journaux
québécois, sous forme de loi ou autrement, puisse mettre en
danger la liberté de la presse. Je crois, au contraire, que cela la
favoriserait. Je vous comprends, vous, de réagir comme ça, mais,
pour le Clairon de Saint-Hyacinthe ou l'Echo des Laurentides ou pour les petits
journaux régionaux, le papier représentant un tiers du coût
de production d'un journal, ça serait peut-être là une
façon de légiférer sans toucher au principe sacro-saint et
tabou de la liberté du capitalisme de privilégier la
liberté de la presse et son expression par un meilleur prix du papier
préférentiel, à un taux préférentiel, pour
les entreprises de presse québécoises et là, je ne
dis pas francophones, que ce soit francophone ou anglophone, ce serait normal
puisque, collectivement, nous sommes les plus grands producteurs au
monde de papier journal, que nos journaux bénéficient de tarifs
préférentiels.
M. FRANCOEUR: Je vous ferai remarquer que même les petits
hebdomadaires dans le temps n'ont pas demandé la protection de cette
loi. Ils auraient pu, et j'ai encore l'impression, M. Michaud je ne
voudrais pas être en désaccord avec vous mais j'ai
l'impression, que demain matin, si vous faisiez une enquête auprès
des éditeurs, même de journaux hebdomadaires ruraux, pour leur
expliquer ce que vous venez d'expliquer, je crois qu'ils
préféreraient encore payer quelques dollars de plus, parce qu'il
ne faut quand même pas rêver en couleur. La plupart des petits
hebdomadaires passent une ou deux tonnes par semaine.
Ce ne sont pas les $5 que la loi prévoit qui feraient une grosse
différence dans leur bilan à la fin de l'année. Cela
ferait bien plus de différence, par exemple, dans le bilan de la Presse
ou du Star ou du Soleil ou du Devoir.
M. MICHAUD: C'est juste, je suis conscient de cela, mais ce principe de
l'intervention étatique sous forme d'aide aux entreprises de presse a
déjà été accepté. Il est déjà
actuellement en vigueur. Les prix du télégraphe, par exemple,
sont moins chers pour la copie-presse que pour les souhaits de bonne fête
à des amis ou à des parents. Il y a déjà une forme
d'aide de l'Etat au niveau du gouvernement central qui fait que l'acheminement
de la copie coûte moins cher.
M. LESAGE: Non, non. Tout de même, on ne peut pas dire que les
services télégraphiques sont des services du gouvernement
central.
M. MICHAUD: Le CN.
M. LESAGE: Bien il y a le CP aussi qui est à 50% dans une
nouvelle compagnie de télécommunications. Qu'il y ait des tarifs
donnés par une compagnie qui, à toutes fins pratiques, est
indépendante du gouvernement, des tarifs particuliers dans le cas de
transmission de nouvelles pour les journaux, je crois que c'est normal.
M. FRANCOEUR: C'est même international.
M. LESAGE: Cela a toujours existé.
M. FRANCOEUR: Le taux de presse est International. Ce n'est pas un pays
ou un gouvernement qui donne un privilège, c'est International,
même avec l'URSS dans le moment, par exemple.
M. MICHAUD: Mais comprenez, M. Fran-coeur, nous essayons de trouver des
avenues dans lesquelles l'Etat ou le gouvernement québécois
pourrait s'engager pour favoriser la liberté de la presse. Or, il y a
des interventions étatiques d'une part qui freinent ou qui posent des
entraves au libre exercice de la diffusion des informations. Je pense à
la loi fédérale de l'augmentation des postes, mais qui vraiment
là, pose un problème extrêmement sérieux et
inquiétant pour les petites entreprises de presse. Or, cela c'est une
intervention étatique à un autre niveau de gouvernement.
Comment pouvons-nous, nous, au niveau du gouvernement
québécois, essayer d'établir un certain équilibre
pour freiner ces tentatives qui, 3 mon sens, pour les petits journaux et les
petites voix de la presse écrite, sont des interventions
étatiques nuisibles? Je pense que la loi fédérale qui a
été votée, l'augmentation des tarifs postaux je ne
veux pas exagérer mais est une loi qui pénalise les
petites entreprises de presse. En vertu du mandat que nous avons, et pour le
bien commun dans le Québec, nous devons, nous, trouver des
possibilités de contrebalancer ces lois qui m'apparalssent nocives. Or,
une loi qui verrait à établir ou à contrôler ou
à régir un prix de papier... Je comprends qu'il y a quelques
années, c'était horrible simplement à la pensée de
croire que l'Etat pourrait intervenir dans ce domaine, mais peut-être,
aujourd'hui, pouvons-nous envisager ce problème- là avec beaucoup
plus de sérénité.
M. DESCHENES: Je ne sais pas s'il y a d'autres questions que l'on
désire poser à M. Parisien ou au représentant de Gelco. Je
vous avais mentionné tout à l'heure que nous désirions
également vous soumettre des données « factuelles »
par l'intermédiaire de M. Marcel Caron qui est ici ce matin.
M. LEVESQUE (Laurier): J'aurais une question...
M. DESCHENES: Certainement, monsieur.
M. LEVESQUE (Laurier): Power Corporation a comme actionnaire principal
Gelco à 30%...
M. PARISIEN: C'est exact.
M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce qu'on a parlé des autres?
M. LESAGE: Est-ce que nous allons tout recommencer? Nous avons
étudié toutes les structures avant que vous arriviez, M.
Lévesque.
M. LEVESQUE (Laurier): D'accord. Vu que Gelco tient Gesca à
100%... Si le chef de l'Opposition en a déjà parlé, je
vais arrêter tout de suite, mais seulement j'aimerais pouvoir finir ma
question pour qu'il sache s'il en a parlé. Ensemble, Gelco et Gesca,
finalement, cela revient à la même chose, détiennent la
Presse et, jusqu'à concurrence des deux tiers, les journaux
Trans-Canada, n'est-ce pas?
M. PARISIEN: C'est exact.
M. LEVESQUE (Laurier): A la page 11 du rapport des états
financiers consolidés de Power Corporation, il y a une note à
propos des placements. La note 2, page 11, mentionne à a) un billet de
Warnock Hersey, et à b) $17,300,000 d'obligations à
intérêt conditionnel de Gesca Ltée, filiale d'un
actionnaire, évidemment Gelco. Vous pourriez peut-être expliquer
ce que sont ces $17 millions d'obligations à intérêt
conditionnel. Je ne sais pas si cela a déjà été
touché.
M. PARISIEN: Je puis vous donner les explications, M. Lévesque.
Quand il a été question que Power Corporation fasse une offre
pour les actions des valeurs Trans-Canada, nous avons voulu
nécessairement garder les entreprises de presse, comme possession de
Gelco. Pour ce faire, nous nous sommes servis, comme méthode de
financement, d'une obligation qui échoit dans cinquante ans, qui ne
comporte aucune clause de défaut et dont l'intérêt est
rattaché au bénéfice net des entreprises de presse.
M. LEVESQUE (Laurier): Alors l'intérêt flotte selon les
bénéfices?
M. PARISIEN: C'est ça.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est bon, ça.
M. PARISIEN: C'est un « income »...
M. LEVESQUE (Laurier): A toutes fins pratiques, cela revient à
dire que Power Corporation avait les liquidités ou pouvait trouver les
liquidités plus facilement. A toutes fins pratiques, c'est elle qui a
financé l'achat de la presse par Gesca ou Gelco, de même qu'une
partie de l'achat des journaux Trans-Canada.
M. PARISIEN: Non, la finance était déjà faite dans
Trans-Canada...
M. LEVESQUE (Laurier): Elle était déjà faite mais
était-ce relié...
M. PARISIEN: ... pour que Gelco rachète les journaux. Le moyen de
finance a été l'obligation.
M. LEVESQUE (Laurier): D'accord.
M. PARISIEN: ... en faveur de la Corporation des valeurs
Trans-Canada.
M. LEVESQUE (Laurier): A part les $17 millions placés là,
qu'est-ce que cela a coûté? Le savez-vous?
M. PARISIEN: Cela représente le coût total des
journaux.
M. LEVESQUE (Laurier): Alors, c'est le coût total qui a
été financé par ces obligations de 50 ans...
M. PARISIEN: Oui, c'est ça.
M. LEVESQUE (Laurier): ... à intérêt flottant selon
les bénéfices des entreprises de presse.
M. PARISIEN: C'est exact.
M. LEVESQUE (Laurier): Merci.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions avant que nous ne passions
à M. Caron?
M. MICHAUD: Est-ce que Consolidated Bathurst vend du papier à
d'autres journaux qu'à ceux du groupe? Est-ce que Consolidated Bathurst,
dont le contrôle effectif est détenu par Gelco, vend à
d'autres journaux québécois qu'à ceux du groupe?
M. PARISIEN: Franchement, M. Michaud, je l'ignore.
M. MICHAUD: Ou si c'est un marché captif, si vous voulez? Est-ce
que Consolidated Bathurst a des liens économiques avec d'autres groupes
de journaux?
M. PARISIEN: C'est une chose que j'ignore complètement. Les
ventes de Consolidated Bathurst ne sont pas de notre ressort. Il y a une
compagnie qui s'appelle Consolidated Bathurst Paper Sales qui fait affaires
à travers le monde. Quels sont leurs clients, je l'ignore. Maintenant,
nos entreprises de presse ont plus d'un fournisseur. Nous avons trois
fournisseurs.
M. LESAGE: Bien oui.
M. MICHAUD: Vos entreprises de presse ont plus d'un fournisseur?
M. PARISIEN: Absolument.
M. MICHAUD: Vous n'achetez pas tout votre papier de Consolidated?
M. PARISIEN: Absolument pas.
M. LEVESQUE (Laurier): Quels sont vos fournisseurs?
M. PARISIEN: Nos fournisseurs sont Abi-tibi, Domtar et Consolidated
Bathurst.
M. LEVESQUE (Laurier): Y a-t-il eu des changements dans la proportion
ces derniers temps?
M. PARISIEN: Au début, en 1967, lors de l'achat des journaux,
nous avons réduit le nombre de nos fournisseurs principaux à deux
pour ne pas être à la merci d'un seul fournisseur et à ce
moment-là il n'était aucunement question d'une offre de la Power
Corporation. Consolidated fournit en général 50% des besoins des
journaux, Domtar fournit certains papiers spéciaux et Abitibi fournit
les autres 50%.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est comme ça depuis le début?
M. PARISIEN: C'est comme ça depuis que nous avons acheté
les journaux.
M. LEVESQUE (Laurier): II n'y a pas eu de changement récemment?
On avait dit ce sont peut-être des rumeurs qu'il y avait eu
un changement très important dans les proportions?
M. PARISIEN: En ce moment, vous vous référez probablement
à 1967 lorsque nous avons commencé à acheter pour la
Tribune, par exemple, ou Dimanche-Matin qui avait comme fournisseurs
Consolidated et Kruger Paper. C'est devenu Abitibi au lieu de Kruger, mais cela
s'est fait en 1967.
M. MICHAUD: Pour en finir avec ce problème du papier, juste une
autre observation. Je suggérerais, afin que ce soit consigné dans
le journal des Débats, qu'au cours des éventuelles
négociations concernant les droits de coupe, les « royalties
» les redevances payables par les compagnies de papier qui exploitent les
richesses forestières du Québec, ce problème du prix du
papier soit abordé, que l'on tienne compte des impératifs de la
liberté de la presse au Québec, et qu'à la suite de ces
négociations, on prenne en considération le problème des
petites entreprises de presse, qu'on s'attarde un peu sur le prix du papier et
que l'on voie s'il n'y a pas une possibilité d'obtenir dans ces
éventuels marchés des conditions privilégiées pour
la presse québécoise.
M. BOUSQUET: M. Parisien, pour revenir un peu à ce dont je
parlais tout à l'heure, étant donné l'Importance de Peter
Thomson dans la possession de Power Corporation, j'aimerais savoir, si vous
pouvez me le dire, quels sont les principaux intérêts de Peter
Thomson en dehors des questions strictement de communications.
Quels sont les principaux intérêts de Peter Thomson et ses
principaux champs d'activité? J'aimerais connaître ça, si
vous voulez bien me le donner. Je crois qu'il est important de connaître
les principaux propriétaires d'un empire comme celui-là. Je crois
que c'est à propos de connaître quel est le principal champ
d'activité de Peter Thomson et quels sont ses principaux liens avec
d'autres compagnies canadiennes ou nord-américaines, dans d'autres
domaines que le domaine strict de la presse.
M. DESCHENES: M. le Président, si vous me permettez une
intervention ici. Il n'est pas de notre ressort de décider quelle peut
être l'étendue de l'enquête que cette commission
désire faire. Si, toutefois, vous jugez que la question de M. Bousquet
est pertinente et recevable, je ne crois pas que ce soit à M. Parisien
de fournir la réponse.
M. LAPORTE: Ce qui m'a empêché d'intervenir, c'est qu'il
s'agit de M. Peter Thomson et que nous allons immédiatement nous faire
dire par les gens d'en face que c'est un de nos amis. C'est absolument hors
d'ordre. Nous avons ici une enquête qui porte sur la liberté de la
presse. Que M. Thomson ou M. X ou M. Y ou M. Desmarais aient d'autres
intérêts dans d'autres choses ne nous regarde pas.
M. BOUSQUET: M. le Président, j'ai bien évité de
signaler les liens qui peuvent exister entre M. Thomson et le parti
libéral.
M. LAPORTE: Je n'ai pas dit que vous les aviez signalés; j'ai dit
que, n'eût été la personnalité de M. Thomson, je
serais immédiatement intervenu pour dire que ce genre de question que
vous voulez poser, qui ne manque certainement pas d'intérêt, ne
relève pas de l'étude que nous entreprenons ici.
M. BOUSQUET: Voici, j'admets que, strictement parlant, ça ne
relève pas de l'étude que nous entreprenons ici. Mais, à
mon point de vue, c'est une question d'intérêt, comme le
député de Chambly vient de l'admettre.
M. LAPORTE: Si le député de Saint-Hyacinthe voulait me
permettre. Comme je ne voudrais pas vu que nous avons tous un peu de
travail à faire encore sur cette commission-là que nous
passions l'été ici, nous allons nous en tenir strictement au
mandat qui nous a été confié.
M. BOUSQUET: C'est une question connexe d'importance, à mon point
de vue.
M. MICHAUD: La réponse est extrêmement facile: M. Thomson
détenant le contrôle effectif de Warnock Hersey International, que
le député de Saint-Hyacinthe aille voir le rapport financier de
Warnock Hersey International dont les actions sont inscrites en Bourse et il
aura la réponse au portefeuille que détient M. Peter Thomson.
M. LE PRESIDENT (M. Cloutier): Alors, messieurs...
M. LEVESQUE (Laurier): Je suis d'accord pour ce qui est du fait que la
question déborde le mandat de la commission, tel qu'il a
été interprété jusqu'ici, mais je crois que
ça souligne jusqu'à quel point nous sommes en train de faire
semblant... C'est intéressant, cependant; nous nous renseignons sur des
choses. Je crois que le fond de la question du député de
Saint-Hyacinthe rejoint, au moins, une partie de l'essentiel du problème
qui est devant nous, soit les ramifications, par les hommes, comme par les
entreprises, de ces groupes qui sont tous reliés à des groupes de
contrôle de plus en plus complet de toute l'économie du
Québec ou de l'économie du Canada à ce compte-là,
parce qu'ils rejoignent Investors Group maintenant et Investors Group rejoint
Great West, etc. Nous sommes vraiment dans
la mosaïque verticale la plus authentique dans ce
cas-là.
Evidemment, c'est déborder le mandat strict de la commission,
mais ilI reste que, tant que nous n'aurons pas touché à ces
choses-là si ce n'est pas ici que ça se fait, il faudra
que ça se fasse ailleurs le Parlement du Québec,
jusqu'à un certain point, s'amuse autour et alentour de la question et
ne va pas au fond.
M. BOUSQUET: Je crois que c'est justement important de connaître
ces ramifications. Je comprends que le député de Chambly ou le
député de Louis-Hébert veuillent que nous nous en tenions
rigoureusement au mandat de cette commission. Mais, à mon point de vue,
c'est un détail important que de connaître quelles sont les
ramifications de l'empire Peter Thomson.
M. LAPORTE: M. le Président, nous avons été
convoqués pour étudier un problème qui n'a pas
été, d'ailleurs, soumis par le député de
Saint-Hyacinthe, mais par un député libéral, M. Yves
Michaud. Le problème qui nous a été soumis était
fort bien circonscrit; Est-ce que le fait, pour des intérêts
communs, de détenir plusieurs journaux, de détenir des postes de
radio ou de télévision, de détenir des compagnies de
distribution, peut et est, en fait, une entrave à la liberté de
la presse? C'est le problème que nous avons à étudier.
Nous avons, à ce point de vue, entendu des journalistes, des
représentants d'associations de journalistes, nous avons entendu des
représentants de certaines revues, nous avons entendu les
propriétaires des intérêts dont il est question. Ceci
va-t-il ajouter à notre étude de savoir que M. Peter Thomson ou
n'importe quel autre citoyen détient des intérêts au
Royaume-Uni, aux Bahamas, aux Etats-Unis et en Afrique?
M. Lévesque dit qu'on tourne autour du pot. Si nous voulons
entreprendre cette étude, là, évidemment, ça va
nous conduire aux quatre coins du monde, ça va nous conduire dans les
bilans d'une infinité de compagnies. La question que je pose au
président, la question que je pose au député de
Saint-Hyacinthe: Lorsque nous saurons tout ça, que M. Peter Thomson,
M.Sigouln ou M. Ce-qu'on-voudra détient des intérêts dans
32 ou dans 60 autres compagnies, ça va ajouter quoi à la
dimension de ce que nous étudions? Au Québec, la liberté
de la presse est-elle ou n'est-elle pas entravée?
M. BOUSQUET: D'accord.
M. LAPORTE: C'est tout ce que je veux sa- voir. Je pense là,
contrairement à ce que dit M. Lévesque, qu'on commence à
s'amuser, qu'on commence à perdre du temps pour savoir que,
peut-être aux Bahamas, il y a deux hôtels qui appartiennent
à M. X et qu'il a peut-être des intérêts en Afrique
du Sud. Cela va ajouter quoi à notre étude, sinon de nous faire
perdre du temps?
M. BOUSQUET: D'accord. Pour ce qui est de la première partie de
l'Intervention du député de Chambly, je lui donne raison. Il
s'agit de déterminer si, actuellement, la liberté de la presse
est menacée au Québec. D'accord. Mais je crois qu'il est aussi
important de savoir quels peuvent être les moyens de pression sur les
principaux propriétaires des moyens de communication au Québec,
étant donné que nous n'avons pas encore la réponse,
à savoir si la liberté de la presse est menacée ou non au
Québec.
M. MICHAUD: M. le Président-là-dessus, je réponds
au député de Saint-Hyacinthe le portefeuille de Warnock
Hersey International est une chose qui est du domaine public. Au cours de mon
intervention, le 5 décembre, j'en ai parlé, j'ai donné
à peu près la liste, à même des renseignements que
J'avais pu obtenir, il y a de l'argent qui est investi dans le domaine des
loisirs et le reste, c'est public. S'il veut retourner à mon
intervention, il verra.
Maintenant, si le député de Saint-Hyacinthe a des
informations à l'effet que ces intérêts qui sont
détenus par Warnock Hersey International ou M. Peter Thomson posent un
problème sur la liberté de la presse au Québec, bien,
qu'il le dise. Bien sûr, on essaie d'étudier toutes les
ramifications, mais c'est du domaine public, ce n'est pas caché.
M. BOUSQUET: Oui.
M. MICHAUD: Moi-même, avec mes faibles moyens, j'ai donné
le portefeuille de Warnock Hersey International le 5 décembre.
M. LAPORTE: Si on voulait être sérieux et éviter de
perdre inutilement du temps, j'ai l'impression que l'on est quasi prêt
à conclure qu'il faut créer dans la province de Québec
cela a été suggéré par plusieurs un
organisme, pas nécessairement gouvernemental, pour s'assurer que la
liberté de la presse ne sera pas menacée dans la province de
Québec. Quand même on ferait encore vingt ans d'études, on
va arriver aux mêmes conclusions. Me Bureau nous l'a dit clairement, les
journalistes nous l'ont dit claire-
ment, ils s'inquiètent que ce soit le gouvernement qui
intervienne.
Je partage l'avis de M. Michaud à l'effet que ça a
évolué, que nous sommes probablement plus ouverts à ces
choses-là, mais les propres consommateurs de la liberté de la
presse sont inquiets. Alors, puisque la concentration est peut-être un
danger de contrôle, il faut créer un organisme chez nous. Quand
même on étudierait encore 40 portefeuilles, on va conclure la
même chose. C'est pour ça que je n'aime pas à perdre du
temps inutilement.
M. BOUSQUET: Il n'est pas question...
M. LE PRESIDENT (M. Cloutier): Alors, messieurs, si vous me permettez
quelques remarques à ce moment-ci, sans être fataliste, je
m'attendais à ce qu'une discussion comme celle-là ait lieu au
cours de nos travaux. Nous devions fatalement y arriver.
Je ne crois pas qu'à ce moment-ci, nous ayons exploré
toutes les possibilités, en dehors des travaux de la commission,
d'obtenir ces informations. Peut-être serait-il possible en dehors, pour
ne pas prolonger inutilement les travaux de cette commission, de tenter
d'obtenir ces renseignements par un autre moyen, par d'autres publications.
Au début des travaux de cette commission je dis au
début, malgré que nous soyons rendus à la cinquième
ou à la sixième séance je ne voudrais pas tout de
suite élargir indéfiniment le mandat de cette commission, parce
que si nous le faisons à ce moment-ci, il est indéniable, il est
prévisible que nous ne verrons pas le terme de ces travaux. Je voudrais
que nous nous en tenions le plus strictement possible au mandat de la
commission, sans empêcher cependant et je l'ai fait depuis le
début sans empêcher les membres de la commission d'explorer
autour du mandat initial de la commission.
Ce matin, nous avons passablement de groupes qui sont venus devant la
commission. Je crois que, pour l'instant, nous devrions entendre ceux qui sont
ici, M. Caron, entre autres. Peut-être que le témoignage des
autres membres ou des autres experts qui sont ici, des visiteurs, pourrait
ajouter à la discussion, de sorte que des questions qui auraient pu
être posées pourront éviter d'être posées.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, juste un mot, si vous
permettez, qui s'enchaîne à ce que vous venez dire et à ce
que disait aussi le député de Chambly. Le député de
Chambly est presque prêt à conclure, ce qui est son droit, mais
vous avez dit, M. le Président, que nous étions presque au
début. Il y a évidemment quelque chose de rassurant dans la marge
qui existe entre vous deux. Je reviendrais tout simplement sur ce point-ci pour
clarifier ce que je disais tout à l'heure. On joue assez souvent sur
deux mots. J'ai entendu le député de Chambly ou peut-être
le député de Gouin dire qu'il s'agit de savoir si la
liberté de la presse est entravée et, à d'autres moments,
on l'a dit menacée. Enfin, sans entrer dans ces nuances chinoises,
entraver, effectivement, voudrait dire qu'elle est bloquée, autrement
dit qu'il y a vraiment un blocage de l'information ou de la liberté
d'opinion. Menacer, cela rejoint ce que nous avons déjà
discuté, c'est-à-dire de savoir s'il y a une présomption
sérieuse, ce qui, je crois, rejoint le document des juristes qui ont
déjà étudié la question pour le gouvernement.
Il faudrait des lois ou des mesures efficaces à ce point de
vue-là, et il ne faudrait pas attendre que tout soit entravé. On
n'attend pas que tout s'en aille chez le diable. On se demande s'il y a une
présomption sérieuse. A ce moment-là, cela vaut la peine
d'aller au fond. Je maintiens de nouveau, en prenant simplement l'esprit de la
question du député de Saint-Hyacinthe, que si on devait
découvrir si ce n'est pas fait ici, j'espère que ce sera
fait ailleurs que, via M. X ou M. Y, les groupes qu'ils
représentent là, je ne m'en vais pas dans les Bahamas, en
Amérique latine, etc. ont une très grande partie du
contrôle économique et stratégique dans Québec et
dans l'ensemble du Canada. Ce contrôle est entre les mains de groupes
tous interreliés qui, également, sont en train de mettre la main
sur une très grande partie des publications et des moyens de diffusion
par les ondes du Québec; je dis qu'à ce moment-là il y a
une présomption extrêmement grave.
Je dis que cet ensemble économique qui représente
l'« establishment » le plus puissant et le mieux coordonné
de tout le pays et du Québec pas besoin de vous le dire
par voie de conséquence, peut faire peser une menace à court
terme sur la liberté d'opinion et d'information du Québec. C'est
tout.
M. LAPORTE: Vous voyez que vous êtes prêt à conclure.
Vous avez conclu.
M. LEVESQUE (Laurier): Non, je dis simplement...
M. LAPORTE: En partant de là, qu'est-ce qu'on fait?
M. LEVESQUE (Laurier): Je voudrais que l'on vole clairement l'ampleur de
ces ramifications et on peut les voir autrement qu'ici, c'est tout.
M. LAPORTE: Qu'on siège encore vingt fois?
M. LE VESQUE (Laurier): Non.
M. LAPORTE: Mais est-il nécessaire, pour que nous soyons, comme
je le dis, disposés à conclure, que nous voyons encore les
ramifications? Vous venez de dire, vous-même, qu'il y a un danger. Si
l'on posait la question: Quel est le meilleur moyen d'éviter que ce
danger ne devienne réalité? Est-ce que c'est un conseil de
presse, un contrôle gouvernemental? Nous pourrions peut-être
engager la discussion sur cela plutôt que de continuer à voir
quelles sont les ramifications. Cela ne vous fera pas changer d'idée,
cela ne me fera pas changer d'idée. Le danger existe, alors, que fait-on
à partir de là?
M. LE VESQUE (Laurier): Je crois que si le député de
Chambly a tout compris et tout saisi cela, je n'ai pas encore vu et je
crois quand même à une sorte de démocratie qu'on ait
suffisamment clarifié, certainement pas par cette commission, cette
interrelation des grands Intérêts qui affectent de plus en plus
les moyens d'information et de diffusion dans le Québec, de façon
que l'opinion publique en soit saisie d'une manière convenable.
M. LAPORTE: C'est-à-dire que, Jusqu'ici, la preuve est à
l'effet que cela n'a pas réussi à contrôler la presse.
Continuons l'enquête pour savoir si nous allons infirmer ce
jugement-là.
M. LE PRESIDENT (M. Cloutier): Alors, messieurs...
M. LESAGE: M. le Président, si vous me permettez, M.
Lévesque vient de laisser entendre que le contrôle de
l'économie québécoise serait entre les mains d'un groupe
qui, par toutes sortes d'associations ou d'affiliations, aurait la main sur
l'économie du Québec et, en même temps, sur les moyens de
communications, sur les moyens de diffusion de la nouvelle. Il faut bien
comprendre, je crois, que le secteur de Gelco, de Power Corporation, les
secteurs contrôlés par M. Desmarais et par M. Thomson sont
limités. Je ne crois pas que M. Thomson ou M. Desmarais aient des
affiliations, ils en ont peut-être avec la Banque Royale, je crois, mais
ils n'en ont certainement pas avec la Banque de Montréal.
Or, ce sont deux grandes banques concurrentes. Ils n'en ont pas, non
plus, avec la CIP. Ce sont des concurrents. IL y a des groupes qui
contrôlent...
M. LEVESQUE (Laurier): Steinberg.
M. LESAGE: ... c'est vrai, des parcelles, des parties plus ou moins
importantes de l'économie au Québec, au Canada, mais les groupes
entre eux se font concurrence. S'il y a tendance à former des groupes,
c'est que, pour soutenir la concurrence, il faut être plus fort.
Il n'y a pas de monopole. Il y a des groupes de plus en plus forts face
à une concurrence de plus en plus forte et de plus en plus difficile
à soutenir.
M. MICHAUD: M. le Président, j'aimerais simplement ajouter ceci:
Depuis les cinq séances que nous avons tenues pour étudier ce
problème,il est clair que le phénomène de concentration
des entreprises de presse existe et peut en soi mettre en danger l'exercice de
la liberté de la presse. On cherche des avenues et des solutions pour
équilibrer le phénomène concentrationnaire par d'autres
mesures. Il y a, quand même, des choses qui se décident. On ne
tourne pas nécessairement en rond et j'imagine qu'on arrivera à
établir des solutions pratiques. Il y en a eu de formulées
à la commission. Il y en a déjà quatre fondamentales.
La première, on a parlé de la possibilité de
créer des messageries étatiques ou paraétati-ques qui
feraient en sorte que l'ensemble des titres québécois seraient
rapidement disponibles à l'échelle du territoire. La
deuxième, on vient de faire une suggestion à l'effet que le prix
du papier serait peut-être, sous forme d'intervention étatique,
une façon de privilégier la liberté de la presse. La
troisième, le conseil de presse. La quatrième il faudrait
en venir là serait une sorte de régie de surveillance du
mouvement des capitaux en matière d'entreprise de presse.
Ce sont là quatre hypothèses de réflexion qui nous
permettront peut-être de légiférer en ce sens dans un
avenir rapproché. Je ne voudrais pas, d'une part, avoir trop
d'enthousiasme, mais, d'autre part, je ne voudrais pas verser dans un
pessimisme facile, à l'effet que les travaux de la commission tournent
en rond et n'aboutiront à rien.
Je crois qu'il y a là des possibilités pour l'Etat
d'équilibrer et de contrer cette présomption sérieuse, qui
existera toujours, face au phénomène de la concentration, que la
liberté de la presse pourrait être menacée. Je pense que
notre mandat à nous, c'est de voir comment
nous pouvons, par une intervention étatique ou autrement,
équilibrer le phénomène de la concentration par des
mesures législatives propres à favoriser une plus grande
liberté de presse au Québec.
M. LAPORTE: Je partage pleinement votre point de vue. Je serais
prêt à ce qu'on aborde la deuxième partie de notre
étude.
M. BOUSQUET: Quant à moi, je suis d'accord avec le
député de Gouin à ce sujet. Je ne voudrais surtout pas que
l'on comprenne que je m'oppose aux concentrations de capitaux. Je sais que
c'est une nécessité, une question de vie ou de mort en
Amérique du Nord. Je prends comme exemple un type comme M. Desmarais. Je
pense que les Canadiens français ont raison d'être fiers de son
succès, parce qu'il a compris qu'en Amérique du Nord il faut de
grandes entreprises pour pouvoir survivre économiquement.
M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, après cette expression
d'opinions de part et d'autre, je pense que maintenant nous devrions entendre
M. Caron.
M. CARON: M. le Président, on vous remettra une communication que
j'ai préparée pour exposer devant votre commission les grands
problèmes qu'affrontent les entreprises québécoises et
leur structure financière.
Ce témoignage s'appuie sur des statistiques tirées des
Etats-Unis, de France, du Canada et expose en particulier la position relative
et les progrès des divers média d'information. Considérant
que le temps dont dispose votre commission est très précieux et
qu'une élaboration complète de la thèse que j'ai
préparée prendrait près de deux heures, je me permets de
vous faire un résumé succinct vous laissant l'initiative de lire
ce document, si vous jugez à propos de le faire.
Le témoignage que j'ai préparé pour vous est
réparti en sept chapitres, 13 notes de référence et 13
annexes, dont certaines ont été reproduites pour illustrer ma
présentation.
Le premier chapitre de mon témoignage expose la théorie
des grands ensembles, qui découle du besoin de diversification, lequel
s'impose au monde des affaires si l'on veut éviter les fluctuations
économiques de certains pays ou de certains types d'activité.
Les grands ensembles sont des groupements de compagnies ou d'entreprises
économiquement liées.
Ces concentrations s'organisent pour faire face au problème, au
phénomène de la mutation des dimensions de l'économie
aussi bien pour ce qui est des outils de production, de l'organisation, des
débouchés, de la recherche que pour les hommes et les capitaux.
L'adaptation à l'ère technologique de demain exige des moyens qui
dépassent le niveau de la moyenne entreprise. Donc, on se réunit,
on se groupe, on s'associe. Le regroupement des entreprises s'effectue par
l'acquisition, la fusion ou l'association d'entreprises. De là naissent
deux types de concentration, la compagnie de gestion et ses filiales ou
divisions intégrées verticalement ou horizontalement dans une
même activité ou le conglomérat et ses filiales ou
divisions aux activités diversifiées. Les grands ensembles
permettent une meilleure utilisation du personnel de cadre, l'unification et
l'intensification de la recherche, l'adaptation constante aux meilleures
méthodes de gestion découvertes et mises en oeuvre dans le monde
entier. Ainsi, ce n'est que par les grands ensembles que certains pays
évoluent rapidement vers la société postindustrielle, vers
l'application de l'électronique au contrôle, aux communications et
à la manutention.
La faiblesse du grand consortium ou du conglomérat réside
dans l'unification des pouvoirs en un corps de gestion unique et suprême
pour toutes les activités. De même que pour un pays ou un
gouvernement, la direction générale des grands ensembles ne peut
suffire à la tâche et ne peut prendre les décisions rapides
qui s'imposent par suite de la complexité et de la diversité des
problèmes. Pour obvier à ce désavantage de structures,
certains grands ensembles délèguent à la direction
nommée pour chaque pays une autonomie de décision
complète. D'autres le font par type d'activité. On pallie ainsi
les carences de la centralisation du pouvoir. En fait, les grands ensembles
peuvent fonctionner comme des entreprises séparées tout en
maintenant les services communs pour autant qu'il y ait une juste
répartition des fonctions et des pouvoirs à l'intérieur de
l'entreprise.
Alors, si vous voulez, je vais passer directement aux tableaux qui sont
devant vous pour illustrer un peu le témoignage que j'ai
préparé.
Le premier tableau donne des renseignements statistiques sur la
croissance des fusions ou acquisitions aux Etats-Unis de 1947 à 1963.
C'est le tableau 1-A, En 1965, vous avez 2,215 fusions. Vous en avez 5,400 en
1969. Cela représente 21% d'augmentation, et $11 milliards d'actifs sont
concernés dans ces fusions. En parallèle, si on regarde ce qui se
fait en France, on a en 1962, 999 fusions sur un total
parce qu'il y a des fusions partielles de 1,320. Les
tableaux ont été tronqués de manière à les
simplifier, mais remarquez tout de même qu'il y en avait 1,959 en 1966 et
1,752 en 1967.
Il faut dire qu'en France, il y a 200,000 sociétés de
capitaux et qu'il y a une tendance vers la fusion. Le gouvernement
français a même adopté une législation
spéciale en 1965 pour favoriser les fusions. On dit que ce régime
n'est pas encore suffisamment libéral.
Si vous voulez passer ensuite au tableau suivant. Je passe du texte,
considérant que vous l'avez devant vous. Le prochain tableau montre
l'influence des corporations dans l'économie américaine. Ce que
les grosses compagnies contribuent, le pourcentage de la valeur ajoutée,
c'est-à-dire ce qu'elles ajoutent au produit de l'ensemble de la
production des Etats-Unis. En 1947, les cinquante plus grosses compagnies
contribuaient à 17% de la valeur ajoutée de toute la production
américaine. En 1963. vous êtes rendus à 25%. Si vous prenez
les 200 plus grosses compagnies, la contribution était de 30% en 1947.
Elle est rendue à 41%. On peut presque dire que la moitié de la
production américaine est entre les mains de 200 compagnies
américaines. C'est ce que l'annexe 1 nous dit. L'annexe 1-A vous montre
le pourcentage des expéditions par type d'entreprise, ce que les vingt
plus grosses compagnies contribuent, encore une fois. C'est assez amusant parce
que vous remarquez que pour l'automobile, par exemple, qui est un secteur que
nous connaissons bien, 90% se trouvent dans les vingt plus grosses
compagnies.
Ce que je voulais illustrer ici, c'était surtout la partie des
journaux, ce que les grosses compagnies aux Etats-Unis contribuent.
Elles détenaient 36% des actions en 1947, et vous voyez qu'en
1963, elles en ont encore 36%. Si on prend les cinquante plus grosses
compagnies qui en possèdent 51%, elles en ont maintenant 52%, je veux
dire qu'il n'y a pas eu de concentration tellement forte.
Une des raisons, je crois, qui expliquerait cela, c'est peut-être
la venue de petits quotidiens de banlieue des quotidiens de quartier qui
rétablissent l'équilibre. On penserait qu'il pourrait y avoir une
plus grande concentration. Par contre, vous ne le voyez pas sur le tableau ici,
mais si vous regardez les périodiques, vous allez voir que la
concentration est de l'ordre de 78%.
M. LEVESQUE (Laurier): Puisque vous êtes là-dessus, il y a
une chose qui me frappe dans votre rapport. Quand vous donnez des exemples de
précédents ou des exemples qu'on peut don- ner, vous donnez
Southam Press et puis dans votre note 9 qui correspond à votre annexe 9,
Southam Press et Maclean-Hunter. Dans les deux cas et ce sont les deux
cas canadiens que vous citez, il s'agit de combinaisons très
familières de journaux ou d'entreprises de presse avec des entreprises
de diffusion, radio, télévision.
M. CARON: Exactement.
M. LEVESQUE (Laurier): Vous n'avez pas de conglomérats qui
peuvent rayonner sur toute l'économie. Dans le cas américain,
n'est-ce pas un peu la même chose? Vous êtes sûrement au
courant du fait, si j'ai bonne mémoire, je peux me tromper, que ATT, qui
est devenu de plus en plus un congromérat immense, a voulu acheter le
réseau ABC. Cela a été bloqué par les services
antitrusts, ou enfin je ne sais pas comment on les appelle maintenant, du
gouvernement américain. Etes-vous au courant de ces cas-là?
M. CARON: Malheureusement.
M. LEVESQUE (Laurier): On a justement dit qu'un conglomérat qui
achèterait des instruments de diffusion trop puissants se placerait
automatiquement en position de conflit d'intérêt un jour ou
l'autre. On n'attendait pas que cela soit fait. On disait: Il y a un danger.
Cela a été bloqué. Est-ce que vous êtes au courant
de cela? Est-ce que vous avez réfléchi là-dessus?
M. CARON: Malheureusement, je n'ai pas pu trouver de statistiques
là-dessus. Ce que j'ai ici c'est parce que c'est dans l'Annuaire du
Canada, cela va assez bien. Ces statistiques, sur la valeur ajoutée, ont
été préparées à cause du fait qu'on se
préoccupe, aux Etats-Unis, de la concentration des entreprises. On n'a
pas attaqué le problème sous l'angle où nous
l'étudions ici.
M. LEVESQUE (Laurier): M. Caron, j'ai lu votre document. Il est
extrêmement clair sur cette tendance aux grandes entreprises et à
cette espèce d'amalgame d'entreprises économiques de tout genre
qui finissent par être tenues par des mêmes groupes
d'intérêts et qu'on appelle de plus en plus les
conglomérats.
Dans ces conglomérats, n'y a-t-il pas aux Etats-Unis, justement,
puisque vous nous les donnez comme exemples, le cas de ABC? Si vous ne l'avez
pas étudié, je comprendrais mal, parce que cela touche de
très près nos préoc-
cupations. J'ai suivi un peu ce qui a été le dossier de
cette histoire qui, je crois, traîne depuis un an, si ce n'est pas deux
ans. La nette préoccupation, aux Etats-Unis, malgré cette
tendance aux grands ensembles, est que, Justement, de grandes entreprises de
communications ne puissent pas être embringuées trop facilement.
Et dans ce cas-là, ils les ont bloquées, dans des
conglomérats, dans toute une série d'entreprises
économiques. S'ils n'ont également des entreprises d'information
que par définition, ou presque, on craint une emprise qui finirait par
devenir tout simplement l'asservissement de l'information.
M. CARON: J'ai essayé de m'attacher uniquement à des
statistiques de source connue dans ce que je vous présente. Je ne nie
pas ou Je n'affirme pas que cela existe. C'est fort possible que cela existe,
puisque cela existe ici. Vous allez le voir d'ailleurs dans le texte quand je
parle de Southam et de Maclean-Hunter...
M. LEVESQUE (Laurier): Oui, mais strictement dans des domaines de presse
ou de communications, il n'y en a pas ailleurs, même dans vos notes.
M. CARON: Oui. Il n'y a pas de statistique comme telle que j'ai pu me
procurer. A cause de cela, je n'ai pas pu continuer. Ce n'est pas
disponible.
M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que je pourrais vous poser, puisque vous
êtes là, une autre question, puisque les autres parlent d'autre
chose? Power Corporation est l'ensemble dont on parle ici, sans aller plus
loin.
M. CARON: Oui.
M. LEVESQUE (Laurier); Le contrôle de cela, de façon
purement théorique je vous pose une question théorique
pourrait-il passer entre les mains des intérêts
étrangers, non canadiens tel que c'est structuré, oui ou non? Je
ne vous demande pas en pratique.
M. CARON: Je pense que si, en théorie, M. Thomson et M. Desmarais
comme M. Untel décidaient de vendre ces actions, le propriétaire
d'Imperial Oil peut changer le contrôle, n'importe quelle entreprise peut
changer de contrôle.
M. LEVESQUE (Laurier): Autrement dit, ça peut très
nettement passer entre des mains étrangères, enfin non
canadiennes et non qué- bécoises jusqu'à un certain
point, on peut se poser des questions d'une façon normale, par
voie de vente, etc. Vous êtes au courant du fait que Famous Players, qui
avait essayé de trouver une formule Juridique, juridico-corporative,
pour diluer sa propriété américaine, n'a pas réussi
à le faire d'une façon suffisamment convaincante
récemment, pour que l'organisme de contrôle de la diffusion
accepte sa formule. Elle a été bloquée. Vous connaissez le
cas?
M. CARON: Oui.
M. LEVESQUE (Laurier): Donc la même chose peut très
nettement se produire en théorie enfin ces messieurs ne sont pas
immortels, ni M. Thomson, ni M. Desmarais en tout cas dans le cas de
l'ensemble qu'ils représentent.
M. CARON: C'est aussi possible pour la bière que ça l'est
pour les cigarettes.
M. LEVESQUE (Laurier): Le domaine des communications est plus important
pour mol que la bière.
M. CARON: Ah oui! ça ne communique pas de la même
manière.
M. LEVESQUE (Laurier): Non.
M. MICHAUD: M. Caron, vous venez de dire: Si c'est possible pour la
bière...
M. CARON: On me fait remarquer que Power n'a pas de Journaux comme
telle, par exemple.
M. LEVESQUE (Laurier): A-t-elle de la bière?
M. MICHAUD: Tout le problème qui se pose vous venez de
parler de la bière et des cigarettes évidemment, vous
retracez dans votre document toute la mécanique d'un mouvement moderne
de concentration des entreprises qui affecte également les entreprises
de presse... Je suis également convaincu que les entreprises de presse
qui ne se fusionnent pas, qui ne mettent pas en capitaux certaines de leurs
ressources, seront condamnées tôt ou tard à
disparaître, à péricliter et à mourir.
Or, il est clair que, dans une petite société comme la
nôtre, chaque journal qui meurt, c'est un échec de la
liberté, parce que c'est une voix qui n'est pas entendue. Mais ces
grandes lois des mouvements de capitaux et des fusions il y a
même des gouvernements qui favorisent, il y a des lois, comme vous venez
de le dire, qui, en France, favorisent les fusions Justement pour
prévenir l'extinction des petites entreprises à caractère
artisanal qui sont vouées à la disparition: Mais une entreprise
de presse, c'est ça qui nous concerne. Et j'aimerais avoir votre opinion
là-dessus en matière de diffusion des faits
même que vous citez ici dans votre document un éditeur torontols,
M. Fulford. Il dit, en parlant des journaux et de cette nouvelle orientation
des propriétaires de Journaux au chapitre « politique
éditorlale des chaînes de journaux », en parlant des
éditeurs modernes de journaux: « Ce sont des éditeurs
appartenant à la génération de sang-froid. Pour eux, un
journal est un Journal et non pas un porte-voix. S'il est responsable des
sources de bénéfices, il doit être accepté tel
quel.»
Or, c'est ce que nous, nous ne pouvons accepter parce qu'un Journal est
davantage qu'une source de bénéfices qui doit suivre d'autres
lois que celles qui sont communément acceptées dans le domaine du
mouvement des capitaux. Pour nous, il s'agit de déterminer... Face au
phénomène de la concentration, surtout en matière
d'entreprises de presse, le phénomène n'est pas immoral, mais,
parce qu'il s'applique aux entreprises de presse, il implique la surveillance
et l'Intervention de l'Etat responsable du bien commun.
M. CARON: Je pense que la thèse que j'essaie de faire ici, c'est
que la survie est impossible, S. moins de maintenir une certaine
rentabilité.
M. MICHAUD: Oui, c'est vrai.
M. CARON: La rentabilité est impossible, à moins de subir
une certaine modernisation. La modernisation est impossible, sans avoir un
groupement de capital, parce que c'est ce qui en découle. Là, il
y a des compromis à faire, des équilibres à faire.
Jusqu'à quel point doit-on être rentable, jusqu'à quel
point doit-on se grouper? Il y a des limites, mais le principe est que, par
lui-même, je suis fortement convaincu que le journal ne peut survivre,
parce qu'il ne peut se permettre de s'adapter aux changements qui sont requis
à l'ère technologique.
Donc, nous devons accepter le groupement comme une
nécessité, dans le journal comme dans toutes les entreprises en
général. Je ne fais pas de distinction; car, sur le plan indus-
triel et sur la plan financier, vous êtes obligés de créer
de grandes entreprises si vous voulez qu'elles survivent.
Là-dessus, je rejoins M. Primeau, de la Banque Provinciale; je
rejoins le premier ministre qui en a parlé dans l'industrie du bois; je
rejoins M. Dupuis de la Bourse de Montréal; je rejoins, en fait, tous
les gens qui examinent le problème attentivement et qui réalisent
qu'il faut une concentration aujourd'hui pour assurer la survie.
M. MICHAUD: Cela, c'est acquis, M. Caron, mais ce que je reprocherais
à votre document, si vous me le permettez, extrêmement Intelligent
et bien fait c'est un plaidoyer fort éloquent pour la
concentration c'est cette dimension information et presse. J'imagine que
vous auriez pu dépasser ce plaidoyer en faveur de la concentration et
nous dire comment l'Etat, qui est responsable du bien commun en matière
d'entreprise de presse, pourrait l'assortir de certains contrôles et nous
dégager, peut-être, les perspectives sur lesquelles nous pourrions
travailler au cours des prochains mois.
M. CARON: Je pense que si vous lisez mon texte attentivement, vous allez
trouver des phrases, que vous avez peut-être négligées, sur
la répartition des responsabilités au sein des entreprises, sur
la répartition des décisions au point de vue de la gestion et de
l'administration. J'établis aussi que les entreprises, même
groupées, restent, en fait, des entreprises autonomes. J'établis
aussi que, même dans le conglomérat, nous sommes obligés
d'avoir de la gérance diversifiée, séparée, parce
que nous entrons dans des techniques différentes. Je dis que, même
dans la grande entreprise, on ne sacrifie pas la partie des
responsabilités et la partie de l'exécution à
l'intérieur de l'entreprise même.
M. MICHAUD: Mais, admettez-vous clairement qu'en matière
d'entreprise de presse il doit y avoir davantage de contrôles que dans
les autres secteurs de l'activité économique?
M. CARON: Je pense que la démonstration qui nous a
été faite le montre. Celle de M. Bureau, m'a permis de comprendre
qu'il y en avait nécessairement plus dans ce domaine-là, parce
que c'est un domaine qui est plus complexe que le domaine de la simple
fabrication, par exemple.
M. BOUSQUET: M. Caron, trouveriez-vous déplorable qu'un empire de
cette importance
tombe dans des mains étrangères? Si oui, se-riez-vous
d'accord pour accepter que le transfert ou que la vente d'une entreprise comme
celle-là à des mains étrangères ne se fasse pas
sans le consentement du gouvernement?
M. CARON: Comme Québécois, mol, je suis toujours triste
quand des entreprises sont vendues à des mains étrangères,
parce que nécessairement je suis intéressé à ce que
la croissance économique se fasse ici et je réalise que les gens
d'ici ont un intérêt plus grand que ceux de l'extérier
à assurer notre propre bien-être; c'est inévitable.
A présent, nous sommes dans le domaine hypothétique, dans
le moment. Nous pourrions en faire plusieurs hypothèses. Si vous me
disiez: Aimez-vous mieux avoir des concentrations que d'avoir uniquement des
entreprises individuelles, je vous dirais qu'aujourd'hui nous sommes presque
obligés d'opter pour la concentration.
M. BOUSQUET: Oui, tout le monde est d'accord là-dessus; tout le
monde reconnaît la nécessité de la concentration.
M. CARON: Autrement, nous allons nous réveiller vingt ans en
arrière.
M. BOUSQUET: Etant donné que le domaine de l'information est un
domaine absolument névralgique, ne croyez-vous pas qu'il devrait y avoir
un certain contrôle des placements de capitaux dans ce domaine-là,
quelque chose de semblable, par exemple, à ce qui s'est produit dans le
cas du journal La Presse?
M. CARON: Oui, excepté qu'il ne faut pas tuer les entreprises
aussi.
M. BOUSQUET: Ah, non!
M. CARON: Et je pense que le contrôle des capitaux peut être
exactement ça. Il peut créer une structure tellement rigide que
vous n'êtes plus capable de trouver la structure d'accommodement dont
vous avez besoin. Vous voyez comment c'est complexe, ce qu'on nous a
expliqué, mais ce n'est pas venu spontanément.
M. LEVESQUE (Laurier): Essentiellementil y a là un cercle
vicieux. Ecoutez, on va l'admettre, mais si je suis tout ce qui s'est
passé, y compris dans votre propre témoignage, c'est que, d'une
part votre argument, au nom de Gelco, est essentiellement que la concentration,
les grands ensembles et vous incorporez là- dedans les moyens de
presse et de communication c'est nécessaire, et que, sans
ça, on ne peut pas y arriver.
D'autre part, on peut, je crois, voir se profiler certains dangers
à l'horizon. Il s'agirait donc évidemment de voir si cette
quadrature du cercle peut être résolue. Seulement, ce n'est pas
à vous d'aller plus loin.
M. CARON: Non.
M. LEVESQUE (Laurier): A propos de votre texte, vous dites certaines
phrases très rapidement, c'est la seule question additionnelle
que j'aurais, moi dans votre chapitre 6, quand vous parlez des grands
ensembles et de Power Corporation, spécifiquement, vous dites: «
Les grands ensembles centralisent les décisions de politique et
décentralisent la gestion et l'exécution. Ainsi les grandes
politiques de Power Corporation of Canada Limited ont été
établies comme suit: donc, je présume que,
psychologiquement, il y a d'autres points de vue, c'est en première
place, et si on lit, je pense que c'est assez visible, c'est un objectif
fondamental 1. Faire des placements de participation à long terme
dans des industries ayant un potentiel élevé de croissance et de
rentabilité. » Je pense bien que ce soit un objectif
primordial.
Trois pages plus loin, vous avez un autre passage dans lequel vous
dites, à la page 22: « En fait, la propriété
combinée des journaux et d'autres organes a peut-être
été la seule possibilité de survie des journaux, car
l'industrie de la presse a une croissance très lente ». Donc ce
n'est pas une industrie de croissance en soi, cela ne répond pas au
premier objectif. Y a-t-il d'autres objectifs un peu moins purement
économiques, puisque c'est un fait reconnu que les journaux, ce n'est
pas exactement ce qu'on pourrait appeler une industrie de pointe?
M. CARON: C'est peut-être pour ça que Power Corporation n'a
pas de journaux.
M. LEVESQUE (Laurier): Non, je comprends, mais enfin...
M. CARON: C'est parce que là...
M. LEVESQUE (Laurier): ... comme vous parlez pour Gelco aussi, si j'ai
bien compris, et Gelco, via Gesca et Trans-Canada, a quand même un
certain nombre de journaux...
M. CARON: Non, je pense que...
M. LEVESQUE (Laurier): ... il ne faut pas jouer sur les mots.
M. CARON: Non, disons, c'est bien clair, les statistiques vont nous le
montrer tout à l'heure, que la croissance dans le domaine des journaux
est plus lente que dans d'autres domaines.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est vous-même qui le dites, alors, je le
crois.
M. CARON: Oui, je vous remercie beaucoup, mais ce que je voulais dire,
c'est qu'il y a tout de même une certaine stabilité, et je
pense...
M. LEVESQUE (Laurier): II y a beaucoup de stabilité maintenant
que...
M. CARON: ... qu'avec le groupement, on peut, par l'efficacité,
augmenter la rentabilité.
M. LEVESQUE (Laurier): Mais enfin, il reste que ça ne
répond pas à ce critère de haute rentabilité. Donc,
il y a d'autres critères qui peuvent avoir présidé
à l'achat des journaux industrie à croissance lente
d'autres critères que la rentabilité.
M. CARON: Je pense bien qu'il a dû y en avoir,
inévitablement. Et puis, par contre, ça peut aussi se
réfléter dans le prix d'achat. Cela dépend tout de
même à quel prix vous l'achetez, et c'est là qu'est votre
facteur de rentabilité.
Alors, si vous me permettez, je vais aller vite avec mes tableaux, parce
que je sais que vous avez un programme tellement chargé. Si vous voulez
passer à l'annexe 2, vous avez un parallèle entre le nombre
d'établissements dans le domaine de l'impression et de l'édition.
C'est assez amusant de voir que, sur une base statistique, il y en a moins en
1966 qu'il y en avait en 1961. Vous regardez la croissance du nombre des
industries qui, elle aussi, s'est à peu près maintenue.
Le tableau 2-A, par contre, vous montre justement le facteur de la
rentabilité des entreprises d'impression et d'édition dont nous
discutions tout à l'heure. Vous avez le montant de production et
d'expédition par Homer, dans le domaine de l'impression. Il était
de $12 et est passé à $14.47, soit une croissance de 20%. Pour
l'industrie en général, vous avez $11.91 qui passent à $14
et qui montrent aussi une croissance de 19%. On peut conclure, de ce
tableau-là, que tout de même l'industrie de l'impression ou de
l'édition a suivi la moyenne de modernisation ou de productivité
de l'industrie en général.
M. LEVESQUE (Laurier): Le rapport entre l'impression et l'édition
est le même, parce qu'il y a beaucoup d'impression commerciale qui se
fait. Parlez-vous de l'édition des journaux eux-mêmes?
M. CARON: Oui, c'est un facteur pas mal important. J'ai un autre tableau
qui l'explique en détail. Vous allez voir la contribution. Voulez-vous
aller à l'annexe trois? Je vais les passer très rapidement car je
sais que je suis en retard. C'est le nombre de quotidiens dans les centres
urbains où il y a une population supérieure à 30,000
habitants en 1966, dans le Canada de langue anglaise et de langue
française, qui nous intéresse plus particulièrement. La
comparaison entre les deux dates, entre 1966 et 1961. Le suivant, s'il vous
plaft.
Ici, on parle des chaînes de journaux. Dans le texte, vous
trouverez des détails quant à la participation des autres, dont
F.P. Publication qui a grossi considérablement récemment. Je
pense qu'il y a deux acquisitions qui n'apparaissent pas au tableau et qui sont
assez récentes: celle du Toronto Globe and Mail parle F.P. Publications
et celle du Montreal Gazette qui a été faite en 1968 par Southam.
Alors, vous voyez un peu les consortiums ou les groupements d'entreprises qui
existent au Canada et la concurrence à laquelle nous devons faire face.
Au suivant, s'il vous plaît.
Ici, vous avez des statistiques sur les groupements qui existaient aux
Etats-Unis en 1910. Un chiffre clef, il y avait une moyenne de 4.7 journaux par
groupe en 1910 et, en 1968, il y en avait 5.2. Remarquez que le nombre de
groupes a augmenté de 13 à 159, de même que le nombre de
journaux. Le suivant, s'il vous plaît.
L'annexe 7 établit des parallèles entre Sherbrooke,
Trois-Rivières et Granby, avec leur population et leur tirage.
Qu'est-ce qui se passe dans d'autres villes avec le nom du
propriétaire des chaînes, comme F.P. Publications à
Victoria, entre autres, et à Lethbridge? Tableaux 7D et 7C s'il vous
plaft.
Au Nouveau-Brunswick, on dit que l'information est
contrôlée par un seul homme parce que c'est M. Irving qui
contrôle les journauxde Saint-Jean et de Moncton. Le tableau 7C vous
donne le détail de la chaîne de Thomson dans les petites villes,
Sudbury, Peterborough. Tableau suivant, s'il vous plaft. Vous avez maintenant
une liste de journaux qui appartiennent à des propriétaires
indépendants. Vous avez l'indication de la ville, le tirage, la
population. Ce qu'on essaie de démontrer ici, c'est la tendance vers les
villes à un seul journal, comme disait l'Annuaire duCana-
da dès 1959. Aujourd'hui, c'est une règle
générale de n'avoir qu'un journal par ville, et les villes qui
ont plusieurs journaux font exception.
Si vous voulez continuer avec les tableaux...
Voici la fréquence de la lecture, le nombre d'exemplaires par
jour. Vous avez en bas la fréquence de la lecture au Canada, qui
était de 4.41 et qui est maintenant de 0.71 en 1967. Donc diminution de
lecture par adulte en parallèle avec les Etats-Unis, bien qu'on lise
encore plus aux Etats-Unis qu'ici, si vous remarquez 0.53, 9 et 0.51, 2 en
1967.
M. LEVESQUE (Laurier): On n'a rien d'équivalent pour le
Québec? Je veux dire que nous sommes noyés dans la statistique
canadienne.
M. CARON: C'est ça, c'est l'Annuaire du Canada qui nous fournit
ces statistiques avec lesquelles nous avons travaillé.
M. LESAGE: Sans doute un effet, de la télévision, n'est-ce
pas?
M. CARON: Ah, oui, assurément!
M. LESAGE: La télévision doit être un des
facteurs...
M. CARON: Oui.
M. LESAGE: ... qui est peut-être le plus puissant.
M. CARON: Le tableau suivant, d'ailleurs, va vous montrer justement les
revenus qui vont dans ces secteurs-là. Vous avez les revenus
publicitaires sur une base globale, annexe 11, le revenu des journaux qui passe
de 98 à 291, soit une augmentation de 297 au point de vue de l'indice.
C'est une plus belle croissance que celle des Etats-Unis qui est passée
de $2.2 millions avec un indice de 217, comparativement au Canada. Par contre,
si vous regardez le tableau 11-A qui donne la position de la croissance des
journaux au Canada en parallèle avec les Etats-Unis, vous voyez la
croissance de la télévision et de la radio. Vous voyez que la
position du journal devient bien différente à mesure que les
années passent et que les nouveaux média s'implantent, par
exemple la télévision...
M. LEVESQUE (Laurier): II y a une chose visible aussi, c'est que les
revues s'en vont chez le diable, hein?
M. CARON: Oui, les revues s'en vont chez le diable, puis elles se
groupent de plus en plus aussi. Aux Etats-Unis, 79% des revues sont
groupées. Hier, je lisais un article sur M. Maclean qui rapportait avoir
groupé 87 périodiques. Avez-vous demandé ce qu'il
reste?
On a vu des revues cela est assez dramatique, qui passent de 21%
à 13%, et le phénomène est moins prononcé aux
Etats-Unis qu'ici au Canada. Au Canada, c'est une situation qui est
extrêmement difficile.
Le tableau suivant indique les revenus totaux, au point de vue de la
publicité et le revenu de tirage. Vous y voyez la croissance du revenu
de publicité qui est à 6.2%, le revenu du tirage qui est à
6%, ce qui donne une moyenne de 6.2%. Quand on sait que l'augmentation du
produit national brut est autour de 9%, vous voyez que la croissance du revenu
des quotidiens est inférieure à la croissance normale du produit
national brut. En bas, vous avez des pourcentages développés pour
les postes de radio, de télévision et les revenus totaux. Vous
voyez que la radio croît à 10.6% par rapport à 6.2%, et la
télévision à 14.9% par rapport à 6.2%.
L'annexe 13 sépare justement ce qu'on demandait tout à
l'heure entre l'impression et l'édition, entre le journal, et vous avez
les statistiques qui établissent la croissance à 5.3% et à
8.8% dans l'édition. C'est mieux dans l'édition. Si vous regardez
le produit national brut, vous voyez où on se place quant à
l'industrie du journal.
J'aurais voulu vous faire une grande dissertation sur les
conglomérats, mais comme on en a parlé, que le texte est à
votre disposition, et que je pourrai toujours répondre à vos
questions, je me retire parce que je sais que votre temps est très
précieux. Merci.
S'il y a des questions, j'y répondrai avec plaisir.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Caron. Il est midi et demi. Je
suggère, d'accord avec les membres de la commission, que nous reprenions
nos travaux cet après-midi vers trois heures trente, et je crois que
nous pourrons passer à travers l'ordre du jour.
Reprise de la séance à 16 h 52
M. CLOUTIER (président de la commission sur la liberté de
la presse): A l'ordre, messieurs!
Après cet ajournement plus long que prévu, nous entendrons
maintenant M. de Gaspé Beau-bien qui va nous parler au nom de
Québec Télémédia Inc. Les membres de la commission
sont actuellement à terminer, en Chambre, les préparatifs pour le
reste des travaux. Dans quelques instants, les autres membres seront ici,
à la commission. M. de Gaspé Beaubien, nous vous
écoutons.
M. BEAUBIEN: Je vous remercie, M. le Président. Il me fait
plaisir de vous parler d'un médium d'information qui n'est pas
voué à l'extinction, lui, médium vivant parmi les
média d'information vivants. J'aimerais vous référer
à un mémoire que nous avons déposé auprès de
vous et de votre commission. Ce mémoire explique en détail les
différents éléments que je ne répéterai pas,
mais, si vous me le permettez, je brosserai un tableau général de
ce qu'est la compagnie Québec Télémédia. Je serai
disponible à la fin de ce court exposé pour répondre
à vos questions.
Durant les cinq prochaines années, il va se passer des choses
assez extraordinaires du côté des média de communications
électroniques. Nous aurons bientôt les modes de
télévision UHF qui vous donneront des réseaux inconnus
jusqu'à présent dans vos résidences. Peut-être douze
ou quinze postes de télévision additionnels seront disponibles
dans chacune de vos résidences. Vous aurez bientôt la
possibilité d'obtenir des machines à* rubans
magnétoscopiques qui pourront s'adapter à vos appareils de
télévision de façon à pouvoir y jouer à une
période donnée, dans une chambre donnée et à une
heure donnée un programme que vous aurez acheté d'avance. Ce sera
une révolution, dans le domaine de la musique par exemple, qui
égalera celle de l'industrie du disque. Vous pourrez avoir, d'ici
quelque temps, les villes dites électroniques qui vous permettront
d'avoir par câble des disponibilités de télévision,
de communications qui ne sont normalement pas captables ou disponibles dans des
régions dans lesquelles elles sont présentement.
Vous aurez, grâce au moyen de ce câble, accès
à des banques d'informations qui vous permettront d'obtenir de
l'information sur quelques sujets donnés soit d'une bibliothèque
donnée ou d'un service donné. Ceci permettra a une personne
d'écrire une thèse en ayant toute l'information qui pourra lui
venir par l'entremise de son poste de télévision. Vous aurez
finalement la possibilité de faire des achats directement à un
magasin à rayons, sans pour cela vous déplacer.
Cela vous permettra, ainsi qu'à vos épouses, de faire des
emplettes directement sans avoir à vous rendre au magasin à
rayons. Les emplettes seront chargées automatiquement à un compte
de banque.
M. le Président, si j'ai cru bon esquisser brièvement de
qui peut nous arriver dans le domaine des communications électroniques,
c'est qu'elles sont importantes pour nous, et d'ici peu nous aurons un
satellite, un satellite au-dessus du Canada et peut-être d'autres
satellites accessibles à nous, non loin du Canada. Ceci permettra la
communication des éléments qui sont maintenant reliés
à un niveau québécois, ou provincial, accès
à tout le Canada dans la programmation française, et avec
l'accès de satellites, nous pourrons avoir directement dans nos
résidences de la programmation qui nous viendra en direct des pays
d'Europe.
M. MICHAUD: Quand vous parlez de satellites, faites-vous allusion
à Telesat?
M. BEAUBIEN: Je fais allusion aux différents satellites autres
que les satellites qui seront au-dessus du Canada, disons, les satellites
internationaux. Vous pourrez avoir accès à une programmation
directe qui viendra de la Tchécoslovaquie, de l'Union soviétique,
de la France, de l'Angleterre.
M. le Président, ces développements sont extrêmement
importants pour nous, parce que ces choses se passeront chez nous dans un
avenir rapproché. Il nous faut prendre notre place dans les média
de communications électroniques, tant sur le plan régional que
sur le plan national, que sur un plan international, il faut être
prêt à remplir ces exigences. Ces développements que nous
verrons prochainement chez nous ont des exigences importantes; exigences
d'équipement, par exemple. Un appareil à ruban
magnétoscopique dans un poste de télévision il en
faut parfois jusqu'à huit et neuf dans un poste de
télévision coûte au-delà de $100,000.
Ces petits appareils électroniques, de caméras
électroniques, dont nous nous servirons bientôt pour rendre la
nouvelle plus vivante puisque nous pourrons nous rendre directement dans un
champ donné, se vend par appareil au-delà de $100,000. Il en
faudra plusieurs pour un poste indépendant. Les éléments
de chaînes de téléciné se vendent au-delà de
$100,000 l'unité. C'est ce qui explique que de-
puis cinq ans, dans l'industrie privée seulement, les mises de
fonds qui ont été requises dans notre pays, pas les autres pays,
ont passé de $60 millions qu'elles étalent il y a cinq ans, non
pas à $80 ou à $100 millions, mais à plus de $207
millions, dans l'Intervalle de cinq ans.
C'est donc dire que simplement au point de vue de l'équipement
dans le domaine électronique, il y a eu une augmentation de mises de
fonds de l'ordre de 250% depuis les cinq dernières années. Et
nous sommes loin de ce que nous devrions être.
Les exigences sont non seulement nécessaires en équipement
ou en technique mais le sont également du côté de la
programmation.
Vous vous imaginez, M. le Président, avec la venue de 14 autres
postes de télévision dans votre résidence que ces postes
de télévision, que ces canaux de télévision
deviendront beaucoup plus spécialisés, concentreront sur un sujet
donné. Par exemple, il est fort possible qu'un de ces canaux soit
réservé uniquement à la nouvelle. Un autre canal sera mis
à la disposition uniquement de programmes éducationnels.C'est
donc qu'il se fera une spécialisation dans la programmation.
Le temps qui existait jusqu'à maintenant où la famille
fera face à une programmation donnée pendant une heure
donnée est révolu. Vous aurez de la programmation
spécialisée de telle façon que, dans votre maison, il y
aura différentes personnes qui regarderont des programmes bien
spécifiques avec des intérêts bien
déterminés. Ceci exigera une mise de fonds exceptionnellement
importante du côté de la programmation qui se voudra beaucoup plus
spécialisée.
Cette mise de fonds sera d'autant plus nécessaire qu'il faudra
que cette programmation soit non seulement plus quantitative mais plus
qualitative. S'il faut entrer en compétition, M. le Président,
avec les programmes qui nous viendront directement des pays d'Europe, il faudra
réellement que notre programmation soit compétente pour entrer en
compétition avec ces éléments.
Vous savez, le temps est révolu où les gens nous
regarderont simplement parce que nous avons un poste de
télévision canadien-français.
Il faudra que la qualité de notre programmation soit égale
sinon supérieure, de façon que les gars aient la chance de
synthoniser notre poste plutôt qu'un poste qu'ils peuvent prendre en
direct des pays d'Europe.
Je vous donne comme exemple une expérience que nous avons
vécue ensemble en 1967, celle du pavillon de la Tchécoslovaquie
à l'ex- position universelle pour vous exprimer le développement
assez extraordinaire qui se passe dans ces pays au point de vue visuel, au
point de vue Imaginatif et créateur.
Les nôtres ne nous regarderont pas uniquement parce que nous
sommes Canadiens français. Et c'est un fait qui se manifeste dès
à présent. Dans la région d'un de nos postes, la
région des Cantons de l'Est, il est regrettable à noter que
près de 25% de notre auditoire ait synthonisé à des postes
qui ne sont pas des postes canadiens. Cela se passe présentement chez
nous. Un poste anglais de la région de Montréal relié au
réseau CTV se prévaut du fait que 50% de son auditoire
présentement soit bilingue et donc non pas de langue française
uniquement. C'est donc que ces exigences se manifesteront d'une façon
importante du côté de la programmation. Ces exigences seront
également évidentes du côté du personnel. Il faut
développer chez nous du personnel compétent pour administrer ces
nouveaux outils, ce nouvel équipement. Il s'agira d'utiliser ce qui
existe, de diriger nos banques d'information. Il sera nécessaire de
créer des banques d'idées, des banques d'imagination, de
façon à créer des concepts d'imagination, des concepts de
programmation qui pourront rivaliser avec la programmation qui peut nous venir
d'autres pays du monde.
Ces exigences se voudront, en plus d'être des exigences
techniques, des exigences de programmation, des exigences de personnel, elles
se voudront des exigences financières.
Il nous faut former chez nous des groupes canadiens-français
capables de faire face à cette mise de fonds requise. Il est
nécessaire de trouver des compagnies qui seront prêtes à
trouver le capital, à investir le capital, à risquer le capital
et des centaines de millions de dollars. Chez nous, au Canada français,
il s'agit que de répéter l'augmentation de la mise de fonds qui a
été requise au point de vue capital seulement depuis cinq ans
pour voir qu'une augmentation de 250% est une augmentation importante et
s'avérera encore plus importante dans les années à" venir.
Si les Canadiens français ne jouent pas ce rôle, ce rôle
sera joué par d'autres mieux préparés sur le plan
provincial alors que la programmation risquera de ne pas répondre aux
éléments de notre culture. Sur le plan national nous manquerons
une occasion merveilleuse d'interpréter notre milieu à d'autres
milieux qui ne sont pas francophones à travers le pays, et nous
manquerons certainement l'occasion de réfléter le visage du
Canada, le visage du Canada français en particulier, dans
l'élément international alors
qu'il se fera une compétition sur l'échelle internationale
de façon à montrer que notre visage n'est pas uniquement un
visage américain.
Les développements nouveaux, les exigences nouvelles, nous
croyons que Québec Télémédia peut y faire face.
Québec Télémédia offre une réponse à
ces exigences. Elle offre une idée, un concept d'union
d'éléments différents pour rendre les
éléments plus forts. Elle propose un réseau de
communications d'abord au Canada français, tant dans le domaine de la
télévision privée que dans celui de la radio
privée. Nous avons déjà commencé à oeuvrer
dans ce domaine. Nous avons et nous parlons aujourd'hui pour deux postes de
télévision. Evidemment c'est encore un humble début. On se
propose beaucoup plus encore. Nous parlons pour les postes de Sherbrooke et de
Rimouski. Nous avons dans le domaine de la radio un plan d'ensemble important.
Nous avons présentement des postes dans la région de
Montréal, de Trois-Rivières, Sherbrooke et Rimouski.
Il est à noter que tous ces postes doivent être
approuvés par la Commission de la radio et de la
télévision canadienne qui siège également
aujourd'hui à Montréal et dont nous nous sommes absentés
pour venir prendre part à vos assises puisque vous vouliez être
renseignés sur notre industrie. Nous sommes heureux de le faire.
Nous croyons que Québec Télémédia, en plus
d'offrir une réponse à ce concept d'union et de réseaux,
l'union des éléments différents pour les rendre plus
forts, offre également une solution de personnel. Nous avons
quoique humble encore un personnel d'au-delà de 250
employés que nous croyons compétents. Je vous donne un exemple de
l'attitude que nous avons adoptée; Un de nos postes de la région
de Sherbrooke, dont nous avons pris possession dernièrement, comptait 92
employés. Nous l'avons développé, nous l'avons logé
dans de nouveaux locaux. Normalement, il aurait du y avoir un
décroissement de personnel puisque nous avons des ordinatrices
électroniques. Au contraire, nous avons augmenté ce personnel de
92 à 124 employés. C'est ce qui existe maintenant
Nous voulons travailler en collaboration avec l'Université de
Sherbrooke et les CEGEP de notre région. Nous commencerons bientôt
à collaborer à des cours qui seront donnés aux gens de
notre région pour former un personnel encore plus compétent.
Nous croyons que Québec Télémédia a
également une solution aux exigences de l'équipement. Nous avons
une mise de fonds présentement même si nos postes ne sont
pas trop nombreux d'au-delà de $7,500,000 du côté de
la capitalisation. Dans un seul poste, depuis que nous l'avons, nous avons fait
une mise de fonds de $2,500,000 pour le déménager dans un nouvel
édifice.
Nous croyons également que nous avons une réponse aux
exigences nouvelles d'organisation et d'administration. Qu'il me suffise de
vous mentionner, M. le Président, que l'année dernière,
les treize postes privés de langue française au Canada
français ont vu leur cote d'écoute diminuer, sauf deux. Notre
poste est le premier avec une augmentation de cote d'écoute de 5%.
Finalement, nous croyons pouvoir avoir une attitude compréhensive
à l'endroit des exigences de la programmation que nous avons
énumérées plus tôt. Notre budget de programmation,
dans un de ces postes, a passé depuis 1967, alors que nous en prenions
possession de $300,000 à au-delà de $1 million et ce avec des
pertes assez substantielles depuis deux ans. Je le mentionne puisque c'est une
indication que le profit n'est pas l'unique élément qui nous
anime. Nous sommes prêts à mettre les ressources
nécessaires pour faire la programmation qui s'Impose pour rivaliser tant
sur le plan national que sur le plan international.
Québec Télémédla a pu accomplir ces choses
parce qu'il y a des principes qui guident ses activités. Permettez-moi
de les énumérer très brièvement. Chaque poste de
notre groupe de Québec Télémédia est
intégré à son milieu. Il est intégré parce
que l'administration est locale, parce que le personnel est essentiellement
local, parce que le talent est local, parce que le conseil d'administration,
nous le voulons local. Chaque poste est intégré à son
milieu et nous voulons que les émissions soient le reflet et l'Image de
la région dans laquelle le poste est situé. C'est un fait
présentement dans les postes que nous administrons, même si
souvent les émissions politiques et les émissions
éducatives ne représentent pas nécessairement les opinions
du poste. Nous ne partageons pas toujours ces opinions, mais nous croyons que
le poste doit être le moyen d'exprimer ces vues, même si nous ne
les partageons pas.
Un second principe nous anime, M. le Président, c'est que l'union
des postes est nécessaire pour mieux entrer en concurrence. Cette
concurrence veut refaire sur le plan International et nous voulons faire
rayonner notre poste en dehors même des cadres des régions dans
lesquelles ils existent. Nous collaborons présentement et vendons des
émissions françaises d'un de nos postes à Sherbrooke
à d'autres postes indépendants de la province de
Québec.
Il nous fait plaisir de mentionner que nous
avons également des émissions françaises faites
dans un de nos postes dans la région de Sherbrooke. Elles passent en
direct toutes les semaines dans les régions de Toronto et de Hamilton
avec, en passant, des commentaires très élogleux. Et ces
émissions passent en français, annonces et tout,
régulièrement toutes les semaines.
M. le Président, nous croyons pouvoir attester que nous sommes
prêts à contribuer à cette mise de fonds avec les
contributions que notre compagnie a faites dans le cadre d'une compagnie qui
s'appelle NTV, une compagnie veut être le troisième réseau
national, et nous l'espérons, le deuxième réseau
français au pays. NTV à ce jour a fait une mise de fonds et nous
n'en sommes pas les seuls propriétaires, nous le sommes à 50%.
Depuis trois ans, nous avons fait des mises de fonds d'au-delà de
$700,000 afin de développer cette idée de rayonnement de
programmation à travers le Canada, parce que nous voulons un rayonnement
du français en dehors des cadres de notre province.
Nous avons également un principe d'entraf-nement pour notre
personnel, qui sera facilement explicable si vous le désirez. Nous avons
quelques explications à donner à ce sujet.
Messieurs, quelles sont nos préoccupations dans Québec
Télémédia autres que le rendement financier, la
compétence de notre personnel et les exigences nombreuses de notre
commission de radio et de télévision auxquelles nous faisons face
régulièrement tous les mois? Notre crainte est la crainte de
notre milieu. Notre milieu se veut inquiet à trois domaines pour ce qui
est de la télévision et de la radio, si on vous comprend bien. Il
se veut inquiet au sujet du monopole d'information, il se veut inquiet dans la
concentration de pouvoirs financiers, il se veut inquiet de l'Ingérence
dans le domaine de l'information.
Je prends le monopole de l'information et, si vous permettez, j'aimerais
prendre comme exemple la région de Sherbrooke où nous avons le
poste de radio et le poste de télévision. J'aimerais donner une
précision.
Ces deux postes sont des postes affiliés à la
Société Radio-Canada, c'est donc dire, messieurs, que 70% des
heures de diffusion en temps de pointe de ce poste de télévision,
sont des heures obligatoires sur lesquelles nous n'avons absolument aucune
autorité. Nous sommes obligés de le supporter.
Dans la région de Sherbrooke, nous sommes un poste de
télévision. Nous sommes un poste de télévision sur
plusieurs. Il y a plus de postes de télévision qui ont
accès au marché de Sherbrooke qu'il y en a dans la région
de Montréal. Nous sommes un poste sur onze qui ont une
pénétration dans la région des Cantons de l'Est.
A la radio, nous sommes second dans le marché. Dans ce
marché, nous sommes un des 18 postes qui diffusent et qui ont
accès à ce marché, 18 postes de radio. Il a
été mentionné que nous avons des contacts avec le journal.
Qu'il me soit permis de dire en passant que nous n'avons aucun contact avec le
journal de la ville de Sherbrooke, soit pour nous servir des nouvellistes ou
pour utiliser leur système de nouvelles. Au contraire même nous
avons un peu de difficultés à obtenir de la collaboration au
sujet des contrats, collaboration que nous pouvons avoir avec beaucoup d'autres
journaux au Canada français.
Pour ce qui est des autres régions que nous desservons notre
poste de radio de la région de Montréal, CKAC, est un poste parmi
22 qui ont accès à cette région. Et CHLN, à
Trois-Rivières, est un poste parmi 16 de cette région. C'est donc
dire que le monopole de l'information, M. le Président, est impossible
pour nous, dans les régions que nous desservons.
La seconde crainte de notre milieu est celle de la concentration des
pouvoirs. Nous avons vu ce matin que la concentration des pouvoirs existe
presque partout en Amérique. Elle est nécessaire chez nous, si
nous voulons garder chez nous les éléments qui sont de chez nous,
les éléments qui se veulent très dispendieux et
coûteux, comme je vous l'ai expliqué plus tôt. Nous voulons
trouver des partenaires canadiens-français que nous voulons nous
adjoindre dans notre société. Il est de notre intention, M. le
Président, dès que nous aurons rendu ces postes rentables, parce
que tous, sauf deux, n'étaient pas rentables l'année
dernière. Dès que nous aurons su les rendre rentables, nous
rendrons ces compagnies publiques. Nous voulons donner une chance à
d'autres éléments de chez nous d'y investir de l'argent afin
d'ypren-dre un intérêt. Ce, nous nous proposons de le faire afin
de jouer notre rôle dans le domaine des communications comme entreprise
canadienne-française, comme tant d'autres compagnies publiques ont pu le
faire dans le Canada anglais, des compagnies comme Standard Broadcast Sales,
Southern Press, Selkirk, Chatham, Mclean-Hunter, Western Broadcasting, Bushnell
Television. Il n'y en a pas au Canada français et nous espérons.
que nous en serons une bientôt.
Nous croyons qu'il doit y en avoir une. Finalement, M. le
Président, l'ingérence dans le domaine de l'information est une
crainte dans notre milieu. Nous rappelons que nous avons une politique de
décentralisation complète pour cha-
cun de nos postes. J'ai ici les présidents de ces postes qui
pourront attester, si vous le voulez, cet élément. Ils sont
complètement libres de fonctionner comme ils le veulent et comme ils
l'entendent dans cette région.
Nos postes de télévision et de radio sont affiliés
à Radio-Canada. Donc, une bonne partie des nouvelles que nous passons
dans le courant de la journée sont des nouvelles de Radio-Canada.
Où nous avons deux média d'information, comme à
Sherbrooke, nous séparons le domaine de la télévision du
domaine de la radio. Messieurs, cela n'existait pas avant que nous entrions
dans ces postes. Dans la région de Rimouski, dans la région de
Sherbrooke, depuis que nous y sommes, nous avons réellement
séparé la programmation, et la vente, pour qu'il se fasse une
concurrence entre elles, les nouvelles et la programmation totale de ces
postes.
C'était l'élément important que nous croyions
apporter dans ces deux régions.
Nous avons beaucoup de choses sous ce rapport, et je vous en ferai
grâce. Permettez-moi d'en lire simplement un paragraphe. « Notre
compagnie ne s'est jamais ingérée et ne s'ingérera jamais
dans le domaine de l'information. Nous n'avons jamais eu aucune plainte dans ce
domaine de la part de nos nouvellistes, de la part de nos annonceurs et Dieu
sait que nous en aurions rapidement.
Disons en passant que tous nos employés sont
syndiqués.
M. le Président, nous avons essayé de brosser
brièvement un tableau des progrès extraordinaires qui seront
requis dans le domaine des télécommunications dans un avenir
rapproché. Nous avons rappelé les exigences de ces
progrès. Nous avons rappelé que Québec
Télémédia est consciente et veut fournir une solution
à ces différents éléments. Elle se sent capable de
régler ces problèmes chez nous.
Nous avons rappelé les principes qui l'animent qui sont
orientés vers l'identification dans son milieu, vers le rayonnement au
niveau provincial et même international. Nous avons rappelé que
Québec Télémédia ne partage pas les craintes de son
milieu. Elle ne craint pas. Elle ne croit pas avoir le monopole de
l'information.
Elle n'offre pas une concentration outrée de pouvoirs. Elle ne
s'ingère pas et elle ne s'ingérera jamais dans le domaine de
l'information. Québec Télémédia se propose de jouer
un rôle que peu d'entreprises canadiennes françaises de chez nous
peuvent jouer actuellement. Elle ne demande aucun subside de la part de ses
gouvernements. Elle espère toutefois obtenir l'encouragement et l'appui
des siens pour une présence compétente du Québec dans le
domai- ne des communications de demain. Je suis à votre disposition, M.
le Président.
M. MICHAUD: M. de Gaspé Beaubien, vous comprendrez que le
mémoire que vous déposez devant la commission parlementaire du
gouvernement du Québec sur la liberté de la presse est
difficilement contestable parce que le mandat de la commission ne peut pas se
porter sur les problèmes de la radio et de la télévision
parce qu'il s'agit d'une juridiction du gouvernement fédéral.
M. BEAUBIEN: C'est exact.
M. MICHAUD: Bien sûr, les écoles de pensée varient
en ce qui concerne les groupes politiques au Québec. Cela va des
revendications les plus fermes et les plus dures visant à l'exercice de
la juridiction constitutionnelle du Québec en matière de radio et
de télévision parce que et là je rejoins une de vos
hypothèses il s'agit de la culture canadienne française et
de la culture d'une ethnie qui est en somme le prolongement de
l'éducation ici. Il y a d'autres écoles qui veulent une
juridiction partagée, c'est-à-dire concurrentielle à la
fois du gouvernement fédéral et du gouvernement
québécois. Vous comprendrez comme nous qu'à l'heure
actuelle le gouvernement du Québec n'est même pas consulté
par le gouvernement fédéral en ce qui concerne l'attribution des
permis de station privée de radio et de télévision. Je
pense que cette question-là devrait être négociée au
niveau des négociations constitutionnelles avec le gouvernement
fédéral afin que le gouvernement du Québec enfin
c'est mon opinion personnelle puisse immédiatement avoir au moins
une voix consultative en matière de politique de
radio-télédiffusion.
Il est impensable que nous soyons consti-tutionnellement absents du
phénomène que vous venez de décrire qui prévoit
que, d'ici quatre ou cinq ans, le conditionnement même psychologique de
la société québécoise sera largement
influencé par les nouvelles méthodes de communications
audio-visuelles. Pour l'instant, nous ne pouvons faire autrement que de prendre
acte de votre mémoire et nous n'avons pas de juridiction
constitutionnelle. Il est difficile pour nous de le commenter. Mais je voudrais
tout simplement dire que par-delà les rivalités politiques,
par-delà les affrontements partisans, il semble se dessiner un consensus
dans le Québec pour tous les partis, à l'effet que le minimum que
nous pourrions exiger du gouvernement central en nos négociations
constitutionnelles, c'est que nous soyons au moins présents non
seulement
à la table des négociations, mais présents, au
moins consultés en ce qui concerne l'attribution des fréquences
des ondes à des propriétaires, à des stations
privées de radio ou de télévision en fonction du principe
qui veut que ces nouveaux moyens de communications ont une influence
prépondérante sur la culture de la société
québécoise.
M. BOUSQUET: Disons, d'abord que je suis d'accord avec le
député de Gouin concernant l'affirmation qu'il vient de faire.
Maintenant, je tiens aussi à féliciter
Télémédia de s'être lancé dans un domaine
comme celui-là. Pour une fois certains d'entre nous ont
décidé d'être à l'avant-garde dans un domaine qui
est appelé à se développer énormément. Je
crois que Québec Télémédia doit avoir l'appui moral
des Canadiens français, des Québécois en particulier,
quitte à prendre les mesures nécessaires pour que soit
respectée cette liberté d'information, dont M. de Gaspé
Beaubien nous assure qu'elle existe actuellement.
M. MICHAUD: Une simple question de renseignement, M. de Gaspé
Beaubien...
M. LEVESQUE (Laurier): Puisque nous avons parlé de consensus,
j'aurais voulu éviter d'en parler. Mais seulement un consensus n'existe
pas vraiment sur ce qu'a dit le député de Gouin. Une voix
purement consultative dans le domaine des ondes, cela me paraît
être plus ou moins un recul même dans l'attitude des vieux partis.
Je crois, je suis forcément obligé de donner mon opinion...
M. MICHAUD: Dans l'état actuel des choses.
M. LEVESQUE (Laurier): Si nous parlons de consensus, nous ne sommes plus
d'accord. Je crois que si l'on parle de choses aussi fondamentales que les
instruments de culture populaire et d'information, il est invraisemblable
qu'une société complète qui s'appelle le Québec
français, n'ait pas le plein contrôle juridique et administratif,
je parle au sens des permis, etc. le plein contrôle sur l'ensemble de ce
qui constitue les ondes en particulier. Parce qu'autrement les voix vaguement
consultatives, cela me paraît nettement être un recul par rapport
à des besoins qui se dessinent de plus en plus clairement.
Ceci étant dit, je n'ai pas d'autre intervention parce qu'il y a
un autre mémoire.
M. MICHAUD: Moi, j'en ai une. Seulement 30 secondes...
M. BOUSQUET: Je crois que cela a été la position
traditionnelle du gouvernement du Québec, que la radio et la
télévision, le contrôle des ondes devait appartenir aux
provinces.
Alors, disons que la cour en a décidé autrement. Mais le
strict minimum serait sûrement d'avoir une voix consultative et, pour ma
part, je pense qu'on doit tendre à avoir beaucoup plus qu'une voix
consultative.
M. MICHAUD: M. le Président, je ne voudrais pas que mes paroles
soient mal interprétées là. Je dirai brièvement ce
que je pense, toutefois.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est simplement le mot consensus, s'il n'y avait
pas eu ce mot-là, je ne serais pas intervenu.
M. MICHAUD: Non, mais j'ai parlé des écoles. Mon opinion
personnelle là dessus, je l'ai donnée il y a déjà
trois mois. Je crois qu'en vertu du mandat et de ce que le Québec peut
représenter le gouvernement du Québec devrait tendre à
exiger la juridiction exclusive en matière de radio et de
télévision. Je l'ai déjà dit il y a trois mois.
M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que le député de Gouin parle
pour le parti libéral?
M. MICHAUD: Je parle en mon nom personnel.
M. LEVESQUE (Laurier): Ah bon! D'accord.
M. MICHAUD: Il ya également du point de vue du parti
libéral le rapport Paul Gérin-La-joie qui a défini notre
plate-forme constitutionnelle et qui prévoit des négociations
avec le gouvernement fédéral de récupération de
certains pouvoirs dont les pouvoirs en matière de radio et de
télévision.
M. CLOUTIER: Alors, messieurs, vu qu'il n'y a pas d'autres questions,
nous allons remercier M. de Gaspé Beaubien.
M. MICHAUD: Une question d'information. Vous parliez des satellites, il
semble y avoir trois projets de satellites à l'heure actuelle, il y a un
projet de Symphonie, un projet de Memini et le projet Telesat. Il semble que le
Québec et le Canada soient vaguement engagés dans ces trois
projets. Est-ce que votre société privée a des
négociations avec les animateurs de ces trois projets?
M. BEAUBIEN: Notre société est intéressée
à se servir de tous les modes de communications qui seront à la
disposition dans le domaine des communications dans l'avenir. C'est donc dire
que nous serons intéressés s'il y a des disponibilités de
faire rayonner notre programmation dans le plus d'endroits possibles où
elle se veut viable.
Présentement, elle n'a fait qu'une présentation,sur le
satellite canadien il y a déjà bon nombre d'années et nous
attendons toujours une décision à ce sujet.
M. MICHAUD: Et si le projet Symphonie, qui est un projet
franco-allemand-québécois, devait se réaliser et qu'il
prévoyait une possibilité d'exploitation par le secteur
privé, on peut logiquement conclure par votre intervention que vous
seriez intéressés.
M. BEAUBIEN: Nous serions certainement intéressés à
nous en servir pour diffuser la programmation de notre milieu. Parce que nous
trouvons qu'il doit y avoir une présence française,
canadienne-française, dans le monde international de l'avenir. Nous
espérons pouvoir construire les cadres pour nous en servir comme moyen
de diffusion.
M. MICHAUD: Donc, votre intérêt est de diffuser des
émissions...
M. BEAUBIEN: C'est exact.
M. MICHAUD: ... dans le monde à partir du territoire
québécois. Et non, simplement pour capter des émissions de
l'extérieur.
M. BEAUBIEN: Ah! cela pourrait être les deux, dans un cadre
d'échanges, mais nous voulons essentiellement un rayonnement,
plutôt que simplement prendre la programmation d'autres pays et l'adapter
au nôtre. Il faut créer chez nous.
M. LEVESQUE (Laurier): Ce qui implique que vous n'avez pas
abandonné, Je suppose, le projet d'un réseau de toute
façon, quels qu'en soient les modes de transport.
M. BEAUBIEN: J'expliquais plutôt, M. Lé-vesque, que nous
avons l'intention de participer à l'échelle nationale à un
réseau qui se voudrait bilingue. Je vous remercie, M. le
Président, Je vous remercie, messieurs.
M. CLOUTIER: Je vous remercie, M. Beau-bien. Nous avons maintenant deux
groupes qui voudraient présenter conjointement un mémoire la CEQ
et la FTQ. Je ne sais pas qui est le porte-parole dans le moment, cet
après-midi.
Est-ce que vous auriez l'obligeance, pour le bénéfice de
tous les membres de la commission, de vous identifier et d'identifier ceux qui
vous accompagnent.
M. VIGNEAULT: Régis Vigneault, président du comité
d'action politique de la Corporation des enseignants du Québec, mes
collègues, Mme Nicole Blouin-Cap, de la Corporation des enseignants du
Québec, M. Richard Pérusse, de la Fédération des
travailleurs du Québec et M. Pierre Desaulniers, de la Corporation des
enseignants du Québec.
Mes collègues et moi, nous avons été
mandatés par nos deux centrales syndicales pour vous présenter un
mémoire sur le problème de la liberté et de la
concentration de la presse au Québec.
Comme vous avez pu vous en rendre compte vous-mêmes à la
lecture du document que vous avez, nous n'avons pas cherché à
nous appuyer sur un appareillage statistique très complexe et qui,
compte tenu, des limites de temps qui nous étaient imparties, aurait
certainement été incomplet. Nous avons
préféré une démarche peut-être un peu plus
théorique, et nous en sommes arrivés à certaines
conclusions.
Point n'est besoin de vous dire que le problème de la presse, le
problème de l'information est un problème éminemment
complexe et qui touche de près tous les consommateurs. Nous avons
abordé ce problème justement du point de vue des consommateurs
qu'en une certaine partie nous représentons. Et le problème du
consommateur face à la presse, face à l'information, quel
est-il?
Nous savons tous que l'information est depuis longtemps, mais
peut-être plus particulièrement depuis un certain nombre
d'années en tout cas au XXe siècle certainement un
des biens primodiaux de l'homme du XXe siècle. Pourquoi? Parce que
l'information est facteur de liberté. Il nous apparaissait que
c'était là le premier facteur de l'information. Facteur de
liberté, en ce sens que sans information complète, sans
information objective, la liberté perd son principe justificateur. Pour
être capable de poser un acte libre, il nous faut une connaissance des
faits, et cette connaissance des faits tant au point de vue économique
qu'au point de vue politique, elle nous est donnée par
l'information.
L'information nous apparaissait également comme un des facteurs
primordiaux de la démocratie. Que penser d'une démocratie qui
ne
reposerait pas sur l'information la plus objective et la plus
complète possible? Il n'est qu'à songer aux différents
totalitarlstes pour nous rendre compte qu'un contrôle ou bâillon
des différents média d'Information, des différentes
sources d'Information, entraîne nécessairement une disparition de
la démocratie.
Nous nous sommes également rendu compte que l'Information, dans
notre économie moderne, était un facteur d'expansion
économique, selon que l'économie moderne est basée en tris
grande partie sur la satisfaction de besoins et même sur la
création de besoins qui se font en grande partie, non seulement par la
publicité, mais qui se font également par l'information.
Et nous nous sommes trouvés devant un fait concret, celui d'une
concentration de plus en plus poussée. Nous n'avons pas l'Intention,
même représentant les intérêts d'une certaine part
des consommateurs, de nous opposer farouchement à la concentration, et
nous avons encore moins l'intention de demander à l'Etat de s'opposer
à la concentration; car la concentration nous apparaît être
un phénomène nécessaire, compte tenu des impératifs
de gestion, des impératifs financiers, et de toute façon, la
concentration nous apparaît comme un phénomène
inévitable.
Nous croyons que les consommateurs peuvent tirer profit de la
concentration, pour autant que celle-ci permet une qualité plus grande
de l'information. Mais, Je pense qu'il faudrait être bien naïf et
bien inconscient pour ne pas voir le danger que représente la
concentration, c'est-à-dire qu'elle finisse par aboutir à un
monopole, soit national, soit régional. Mais, il y a tout de même
danger de monopole.
Nous avons, comme bien d'autres groupements qui se sont
présentés ici avant nous, fouillé certains documents,
fouillé certaines statistiques; nous avons éprouvé
et je m'aperçois à la suite de la réunion de ce matin, que
différents membres de votre commission ont éprouvé les
mêmes craintes à la suite des questions qui ont été
posées ce matin, 3 la question du groupe GELCO, de celui de GESCA, du
groupe Power Corporation, etc. nous avons trouvé qu'il
était extrêmement difficile pour nous, compte tenu des limites qui
nous étaient imparties, de nous présenter devant la commission,
et de la limite de nos moyens financiers de faire une étude très
approfondie de toutes ces questions.
Mais, l'information, compte tenu du rôle capital qu'elle Joue dans
notre société actuelle, et compte tenu des dangers qui la
guettent face au phénomène de la concentration et du monopole de
la presse, nous croyons que cette question d'information mérite
d'être traitée très attentivement. Et sans vouloir, en
aucun cas, faire injure ou faire insulte, M. le Président, à
cette commission, nous nous demandons si tout ce problème relatif
à la liberté de la presse, à la concentration de la
presse, peut être réglé par une commission comme celle qui
siège présentement.
Les membres de la commission les recommandations ont
été acceptées par la Corporation des enseignants du
Québec et la Fédération des travailleurs du Québec
croient que face à un phénomène comme celui auquel
nous assistons présentement, il n'est,non pas qu'une solution, mais
qu'un mode d'approche vers une solution, soit la création d'une
commission royale d'enquête sur tout le phénomène de la
concentration. Nous croyons que seule une commission royale d'enquête, eu
égard aux pouvoirs qui sont conférés aux commissaires
enquêteurs, pourrait tirer au clair certaines données. Les
questions qui ont été posées ce matin soit par le
député de Saint-Hyacinthe, soit par le député de
Gouin, soit par le député de Laurier ont amené certaines
réponses qui n'ont peut-être pas toujours été aussi
claires qu'on l'eut voulu.Nous croyons que seule une commission royale
d'enquête serait en mesure de jeter une lumière très
franche sur tout ce phénomène.
M. MICHAUD: Quels sont les points qui vous paraissent obscurs? Quelles
sont les données que vous voudriez voir éclaircies?
M. VTGNEAULT: Les données que nous aimerions voir
éclaircies, on les retrouvera dans le mandat, mais je vous
réponds tout de suite. Disons que pour le mandat comme tel, je
demanderai à M. Pérusse de la FTQ de bien vouloir l'expliciter.
Exemple, toute cette question de gestion financière. M. Lévesque
a soulevé ce matin le point 2 de la page 11 du rapport financier de
Power Corporation à savoir les $17.3 millions qui avaient
été prêtés avec intérêt flottant, par
exemple. Ce point, nos deux centrales syndicales se sentent tout S. fait
incapables de le tirer au clair, s'il y a à tirer au clair... Remarquez
nous n'avons pas de présomption et nous ne disons pas: Nous sommes face
à une situation où il y a entente pour brimer la liberté.
Pas du tout. Nous ne présumons pas de la situation. Mais tout
simplement, nous nous disons: A l'heure actuelle, les réponses qui ont
été données ne nous satisfont pas. Nous aimerions voir
tirer au clair toute cette question de la concentration qui nous apparaît
de plus en plus poussée à différentes couches, si vous
voulez, à différents niveaux.
Les représentants de la compagnie GELCO nous ont expliqué
ce matin comment fonction-
nait leur société. Mais nous aimerions voir cette
étude poussée un peu plus à fond pour qu'une fois pour
toutes et d'une façon très claire on sache exactement ce qu'il en
est.
M. MICHAUD: Alors vos inquiétudes se situent au niveau du
financement de ces entreprises. Est-ce que c'est le seul point
névralgique? Voici pourquoi je dis cela. C'est la deuxième fois
qu'on entend cette recommandation à l'effet que tout ce problème
devrait être référé à une commission royale
d'enquête. Bien sûr, il y a des avantages. Il y a également
des désavantages.
La commission parlementaire qui est devant vous est quand même le
prolongement de la souveraineté nationale. C'est-à-dire que la
commission, en vertu des règlements de la Chambre, a les pouvoirs
d'assigner, a les pouvoirs de contraindre, a des pouvoirs supérieurs 3.
ceux qui pourraient être éventuellement donnés à une
commission royale d'enquête dont le mandat devrait être
extrêmement large.
Souvent, on dit aux hommes politiques qu'ils ne sont pas responsables et
qu'ils abdiquent leurs responsabilités en référant
constamment tous les problèmes devant des commissions roayales
d'enquête. Alors, c'est la deuxième fois. La revue Maintenant a
soumis cette recommandation et vous aussi. La commission ici n'a pas de limite
quant à son budget. Elle peut commander des travaux, sauf erreur.Elle a
le budget de l'Assemblée nationale qui peut être facilement
augmenté si tant est que nous ayons besoin de crédits, que nous
ayons besoin d'argent pour commander des travaux.
Je vous pose la question je vous demande de
réfléchir tout à l'heure: Quels sont les travaux qui
manquent? J'imagine que nous pourrions très bien les commander, tout
à l'heure je vais en commander quelques-uns aux officiers du
ministère.
En fait, il y a aussi le fait que ce problème de la
liberté de la presse est débattu devant les représentants
des groupes politiques donc il y a une contestation possible
devant les représentants de tous les groupes politiques. Ce qui fait que
c'est en pleine lumière.
Je me demande si vous n'avez pas une meilleure garantie que la
commission va un peuplus au fond des choses parce qu'il y a contestation
sur le champ de certaines prises de position que si tout était
référé et éventuellement délayé
à une commission royale d'enquête. Bien sûr, il y a des
avantages et des désavantages. Je voulais simplement vous signaler que
cette suggestion est recevable, elle doit être étudiée
à son mérite, mais le fait de vouloir réfé- rer
tout le problème de la liberté de la presse à une
commission d'enquête entraînerait des délais qui seraient,
pensons en termes d'années d'abord, et je me demande si nous pourrions
oeuvrer efficacement enfin sur des problèmes précis.
M. VIGNEAULT: Permettez-moi. La première réponse que je
vous ai donnée est une des raisons pour lesquelles nous recommandons la
création d'une commission royale d'enquête. Bien
évidemment, ce n'est pas la seule. Je dirais même que ce n'est
peut-être pas la plus importante.
Le premier mandat que nous aimerions peut-être voir confier
à une commission royale d'enquête plus que le problème de
la concentration de la presse, c'est le problème de l'information en
général. Je pense que ce problème est beaucoup plus vaste
que le simple problème de la concentration de la presse.
Je vais, si vous voulez, raisonner par analogie.
M. MICHAUD: Mais, le mandat de la commission n'est pas uniquement le
phénomène de la concentration, c'est la situation de la
liberté de la presse au Québec. Donc le mandat de la commission
serait le même que le mandat que vous voudriez voir confier à une
commission royale d'enquête.
M. VIGNEAULT: Oui. Je vais donc raisonner par analogie. Une commission
royale d'enquête a touché de très près au moins une
des deux centrales, la CEQ. C'est la commission d'enquête sur
l'enseignement qui a donné lieu au rapport Parent.
Nous croyons que l'information est, à l'heure actuelle et
je pense qu'elle le sera de plus en plus un des moyens les plus
efficaces dans le bon sens ou dans le mauvais sens, mais un des moyens les plus
efficaces d'éducation et de culture populaire. Je pense que la
véritable culture populaire, beaucoup plus que donnée par cours
du soir, les gens l'apprennent par les différents média
d'information. Je pense que personne ne songe à nier l'importance des
différents média d'information.
Justement, compte tenu de ce rôle capital de l'information, nous
croyons... C'est vrai quela création d'une commission royale
d'enquête retarderait une solution, évidemment une commission
royale d'enquête qui se pencherait sur tout ce problème
d'information ne pourrait pas fournir de rapport après six mois. C'est
évident. Il faudrait songer en termes d'années, je le pense bien.
Mais, de la même façon que l'on
a cru que pour l'éducation II valait la peine de confier la
tâche d'examiner tout le problème de l'éducation à
une commission royale d'enquête, je pense qu'il faudrait faire la
même chose pour l'information. En recommandant cela, ce n'est pas que
nous ne voulions pas faire confiance aux membres d'une commission, membres
élus par la population, mais nous désirons simplement que soient
nommées des personnes qui auront le temps nécessaire pour faire
cette étude-là. La commission royale d'enquête sur
l'éducation ne brimait en rien les droits et les privilèges des
gens élus par le peuple, mais ça a permis à des gens
extrêmement compétents de se pencher sur un problème
capital pour une société moderne et de produire un rapport qui a
tout de même été à l'origine du renouveau dans le
système éducatif. De la même façon nous voudrions
voir une commission royale d'enquête prendre tout le temps
nécessaire. Je le répète, il faudrait
nécessairement parler en termes d'années plutôt qu'en
termes de mois à ce moment-lâ. Mais envisager le problème
de l'information sur toutes ses facettes plutôt que de pensera une
solution qui... Remarquez que, dans le mémoire, nous semblons nous
opposer à la création éventuelle d'un conseil de presse.
Ce n'est pas qu'en soit nous trouvions que le conseil de presse est une chose
mauvaise, mais c'est dans la démarche pour arriver au conseil de presse.
Nous croyons que peut-être le conseil de presse s'avérera
après examen la meilleure solution. Nous croyons que la création
d'un conseil de presse ou d'une régie d'Etat ou de n'importe quel autre
organisme ne devrait arriver qu'après une étude faite par une
commission royale d'enquête qui prendrait le temps nécessaire pour
étudier le problème dans toute son étendue.
M. MICHAUD: Qui seraient les commissaires?
M. BOUSQUET: Que voulez-vous savoir exactement? En lisant votre
mémoire je l'ai lu avant le début de la séance
j'ai l'impression que le premier but de votre commission royale
d'enquête serait de garder l'opinion publique éveillée.
Vous semblez dire qu'en dernière analyse la seule garantie du
véritable droit à l'information semble être une opinion
publique éveillée.
D'après vous un moyen idéal pour éveiller l'opinion
publique, ce serait d'avoir une commission royale d'enquête. Est-ce qu'il
est nécessaire pour avoir une opinion publique éveillée de
mettre sur place une commission royale d'enquête avec tout ce que cela
peut coûter à l'Etat?
M. VIGNEAULT: Alors, nous mentionnons effectivement que peut-être
la meilleure garantie, plus qu'une loi, plus qu'une régie d'Etat, ou
plus qu'un conseil de presse ou ce qu'on voudra, pour nous d'avoir une presse
véritablement libre, c'est d'avoir une opinion publique
éclairée. Cela, nous croyons fermement que c'est l'opinion
publique plus qu'une loi qui permettra d'avoir une presse véritablement
libre. Mais ce n'est tout de même pas la seule chose que nous disions
dans notre mémoire, quoique Je trouve cela tout de même
fondamental de chercher à avoir une opinion publique
éclairée qui sera le véritable chien de garde de la
liberté de la presse. Je pense que c'est extrêmement important
d'avoir cette opinion publique éclairée, mais la commission
royale d'enquête, nous ne l'appuyons pas seulement comme étant un
moyen de former cette opinion publique éclairée. Elle repose tout
de même surd'autres considérations qui peuvent être, si vous
voulez, marquées par certains mémoires qui ont été
présentés ici. Ce matin on a relevé certains arguments qui
semblaient séditieux ou enfin plus ou moins conformes à la
réalité.
Alors, je pense que remarquez, ce n'est pas un jugement de valeur
que Je porte sur les mémoires qui ont été
présentés Ici compte tenu des limites de temps, les
organismes qui se sont présentés devant vous n'ont
peut-être pas tous eu le temps de faire une étude très
approfondie.
M. MICHAUD: Je ferais simplement remarquer que c'est l'Intervention que
j'ai faite à l'origine, elle remonte au 5 décembre 1968. Vous
parlez de limite de temps, cela fait quand même un certain temps, mais
cela est simplement un aparté. Est-ce que vous avez poussé votre
réflexion un peu plus loin sur la commission royale d'enquête? Qui
seraient les commissaires enquêteurs dans votre esprit? Le gouvernement
les nommerait comment? En consultation avec les groupes
intéressés? Avez-vous poussé plus loin votre
réflexion sur la composition de cette commission-là?
M. VIGNEAULT: Effectivement, nous avons essayé de voir un peu ce
que pourrait être cette commission royale d'enquête. Il y a le
mandat, mais il n'y a pas de recommandation quant au choix des personnes
pouvant, non pas en termes de noms, mais en termes d'organisme ou de couche
sociale, il n'y a pas recommandation justement parce que nous ne sommes pas
allés très loin. Mais il nous paraît assez
inévitable que ceux qui sont directement concernés par
cette question fassent partie d'une telle commission.
Maintenant, quels sont ceux qui sont directement concernés par
cette question?
M. MICHAUD: La principale objection que je vois, c'est que ce
comité parlementaire pour étudier le problème de la
liberté de la presse relève de l'Assemblée nationale,
c'est-à-dire du Parlement en ses élus, exprimant leur
souveraineté par l'Assemblée nationale. Votre suggestion d'une
commission royale d'enquête transfère à l'exécutif
et au gouvernement actuel le soin d'établir une commission royale
d'enquête. Donc, il y a là quand même un certain pouvoir de
partagé. De l'Assemblée nationale, vous transportez le
problème et le bébé au niveau du gouvernement.
M. VIGNEAULT: C'est un fait, mais les exemples ne manquent pas qui ont,
dans bien des cas, donné d'excellents résultats.
Je ne crois pas que ce soit une argumentation qui, à elle seule,
permette de rejeter une suggestion telle que la nôtre. Effectivement, le
raisonnement que vous venez de faire est juste, mais je ne vois pas en quoi il
peut amener à conclure qu'on ne peut pas créer une commission
royale d'enquête.
M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que M. le Président me permettrait
une couple de questions? Normalement, on va finir vers six heures.
M. LE PRESIDENT: C'est exact.
M. LEVESQUE (Laurier): Deuxièmement, la prochaine séance
serait plus ou moins sine die, je veux dire, ce serait...
M. LE PRESIDENT: Quant à la prochaine séance, il faudra
prendre une entente entre le chef de l'Opposition et le premier ministre. Il
est question d'une séance, peut-être, à la fin de juin.
M. LEVESQUE (Laurier): D'accord.
M. LE PRESIDENT: C'est ce que je peux vous donner de plus précis
maintenant.
M. LEVESQUE (Laurier): J'aurais, et d'autres collègues aussi,
quelques remarques à faire avant la fin de la séance. Nous avons
deux groupes devant nous. Il y a M. Vigneault qui parle au nom de la CEQ et qui
nous a annoncé enfin, je ne voudrais pas enlever la parole au
député de Gouin, s'il a d'autres questions mais on nous a
dit que M. Pérusse aurait aussi certaines élucidations
additionnelles à présenter. Comme il est le seul
représentant des quatre de la FTQ, est-ce que nous ne devrions pas aussi
passer...
M. LE PRESIDENT: Si...
M. LEVESQUE (Laurier): S'il y a des choses... de façon qu'on voie
s'il y a des compléments.
M. PERUSSE: Dans l'enchaînement des questions et réponses,
je pense que notre scénario a été un peu jeté
par-dessus bord. Si vous me permettez de dire quelques mots, sans vouloir faire
injure à personne de la commission, nous avons assisté ce matin
à une séance de votre commission où il nous a
semblé que les préoccupations politiques n'étaient pas
tout à fait absentes. Nous ne nous méfions pas tellement d'une
commission royale d'enquête nommée par un gouvernement, même
dans le secteur très délicat de l'information, parce que
l'expérience nous prouve que ces commissions royales d'enquête,
nommées par quelque gouvernement que ce soit, composées de
quelques membres que ce soient pourvu qu'ils soient compétents, donnent
à peu près inévitablement des résultats fort
intéressants.
Vous avez la commission royale d'enquête sur la santé qui
était présidée par un juge conservateur qui, au
départ, était opposé à l'assurance-maladie et qui a
conclu à la nécessité de l'assurance-maladie. Vous avez la
commission royale d'enquête sur l'éducation dont personne à
l'époque, je pense, n'espérait qu'elle conclurait à une
réforme de l'éducation telle que celle qui a été
recommandée. C'est le cas de la commission Carter sur la
fiscalité, c'est le cas de la commission Prévost sur la
justice.
D'après notre expérience parce que le mouvement
syndical a presque constamment collaboré avec ces organismes-là
on obtient des résultats à peu près
régulièrement inespérés. C'est pour cela, je pense,
que la CEQ et la FTQ, devant l'ampleur du problème... Si vous nous dites
que le problème n'est pas si complexe que ça, que vous pouvez
vous en tirer, très bien! Mais nous, devant l'ampleur du problème
nous devons reconnaître humblement qu'il y a un tas de données qui
nous manquent.
La concentration...
M. BOUSQUET: D'après vous, monsieur, quelle est l'ampleur du
problème? Quelles sont les deux questions précises?
M. PERUSSE: La concentration, qu'est-ce que ça veut dire? On ne
le sait pas. La concentration, c'est mauvais si cela crée un monopole.
Alors, est-ce que l'on sait si, dans chaque coin du Québec ou dans
certains coins du Québec, la concentration crée un monopole ou
pas? Il y a des postes privés de télévision, par exemple,
qui prennent la majeure partie de leurs informations à Radio-Canada.
Radio-Canada est un organisme qui, partout où il pénètre,
empêche un monopole complet de l'information dans quelque région
que ce soit.
Le problème, par exemple, de l'équipement des journaux. Je
ne sais pas si c'est un problème qui vous intéresse; nous sommes
très sensibles à cela dans le mouvement syndical,
l'équipement des journaux en ressources humaines et physiques.
Nous avons conscience et je pense que d'autres groupes de la
société devraient avoir conscience de la possibilité,
s'ils ne s'imposent pas une autocensure eux-mêmes, les organismes sont
conscients de la possibilité qu'ils ont jusqu'à un certain point
de manipuler la presse, les organes d'information.
Les gens qui ont des services de presse savent que les journaux peuvent
être victimes de leur propagande ou de leur manipulation. Et cela,
à notre avis, c'est un problème plus grave, le fait que les
journaux ne puissent pas se défendre contre des fournisseurs
d'information. C'est un problème plus grave que de savoir s'il faut dix
sources ou vingt sources d'information pour la population. Peut-être
qu'il faut cinq sources différentes d'information et que cela est
suffisant pour garantir la liberté d'information. Mais, il nous
apparaît tout au moins aussi important que ces sources diverses
d'information, qu'elles soient trois, qu'elles soient cinq, qu'elles soient
dix, soient équipées convenablement pour n'être pas
simplement des courroies de transmission pour la propagande soit
gouvernementale, soit patronale, soit syndicale, quelque propagande que ce
soit. C'est un problème infiniment complexe et, pour l'étudier,
il faut faire comparaître des gens, il faut savoir quel personnel est
nécessaire pour obtenir telle information selon tel médium
d'information. Et nous avons l'impression que nous ne sommes pas capables de
nous prononcer là-dessus et nous ignorons si vous l'êtes.
M. BOUSQUET: Auriez-vous l'impression qu'un conseil de presse pourrait
avoir quelque utilité pour aider à résoudre les
problèmes qui existent.
M. PERUSSE: Le conseil de presse, à notre avis, est un organisme
de défense du droit d'information, du droit du citoyen à
l'information. Mais encore faut-il que le conseil de presse ou bien ait la
connaissance de la situation telle qu'elle existe, ou bien ait les moyens ou
les ressources de faire enquête sur la situation de façon à
la connaître.
Comme je vous l'ai dit l'équipement des journaux, ce n'est pas un
conseil de presse avec un budget de $10,000 fourni par les journalistes, par
les entreprises de presse et peut-être $5,000 ou $10,000 de l'Etat, ce
n'est pas avec cela qu'il va connaître la situation. Le
sous-équipement des organes de presse au Québec est un
problème aussi grave que le problème de la concentration et cela
prend des ressources pour savoir quelle est la situation exacte.
M. MICHAUD: Notez bien, M. Pérusse, qu'au début
j'étais passablement réfractaire à l'idée d'une
commission royale d'enquête, mais il se peut qu'à la fin...
M. PERUSSE: Tout bon journaliste l'est
M. MICHAUD: II se peut qu'à la fin de nos travaux, nous en
arrivions à cette conclusion. Je note par exemple, dans vos
recommandations, une chose extrêmement intéressante qui n'a pas
encore été étudiée à l'effet que
l'éventuelle commission royale d'enquête pourrait avoir comme
mandat d'étudier à l'Office d'information de publicité du
Québec, à Radio Québec et de façon plus
générale l'accès aux informations gouvernementales et
paragouvernementales d'intérêt public. Cest un problème
dont nous n'avons pas encore discuté, il va falloir discuter quelque
part de tout le secteur public de l'information. Bien sûr, on discute
depuis cinq ou six séances du secteur privé, mais c'était
dans le calendrier des travaux de la commission. Enfin, je le voyais comme
cela, que nous en arrivions à étudier le problème de
l'information gouvernementale.
C'est possible que la commission devra récuser de
compétence parce que les problèmes seront insolubles, mais je
voulais quand même sur cette recommandation-là, tester votre
position.
M. PERUSSE: Et puis, il y a tous les modes de gestion possibles, les
organes d'information aussi sont à étudier. Je veux dire: Est-ce
que votre commission va voyager? Est-ce que votre commission va se
déplacer, va étudier les formules de gestion des entreprises de
presse à travers le monde?
M. MICHAUD: Elle pourrait créer des sous-comités qui
pourraient...
M. PERUSSE: Si vous voulez vous transformer en commission classique
d'enquête.
M. MICHAUD: C'est peut-être une possibilité d'une nouvelle
orientation et d'une nouvelle approche des travaux de députés et
de membres de l'Assemblée nationale.
M. PERUSSE: Etes-vous sûrs de pouvoir le faire avec la même
sérénité et le même
désintéressement?
M. MICHAUD: Nous pourrions demander à des contractuels, à
des gens de l'extérieur, d'effectuer des travaux qui pourraient nous
être suggérés par les groupes intéressés.
M. PERUSSE: Des recherches.
M. MICHAUD: Cela pourrait s'envisager.
M. LEVESQUE (Laurier): A ce moment-là, un comité
d'enquête parlementaire se transformerait, à toutes fins
pratiques, en commission d'enquête. Je ne sais pas si c'est sous-entendu
dans les réponses de M. Pérusse, mais, mol, Je craindrais
très nettement que ce soit une commission d'enquête qui risque de
se gauchir par des ingérences politiques. J'aimerais mieux, plutôt
que de Jouer à la commission d'enquête, avoir une commission
d'enquête.
M. PERUSSE: Ce n'est pas pour vous critiquer, mais, ce matin, il y avait
certains échanges de vues qui réflétaient des orientations
politiques; c'est votre rôle.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est le moins qu'on puisse dire!
M. BOUSQUET: Démontrez donc celai
M. MICHAUD: Ne vous scandalisez pas de cela. La politique est le
lieu...
M. BOUSQUET: Pouvez-vous démontrer l'affirmation que vous venez
de faire?
M. PERUSSE: Par exemple, il semblait qu'il y avait des défenseurs
et des accusateurs acharnés de Peter Thomson.
M. LEVESQUE (Laurier): Du moins des soupçonneux!
M. PERUSSE: Moi, je ne connais pas Peter
Thomson mais, à un moment donné, cela resemblait à
un tribunal d'inquisition sur la pesse.
M. BOUSQUET: Vous me surprenez énormément.
M. MICHAUD: Toute commission d'enquête prendra
nécessairement l'allure, dans certains cas, de tribunal
d'inquisition.
M. PERUSSE: La commission royale d'enquête a plutôt des
allures d'organisme de recherche que de tribunal.
M. CLOUTIER: Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le
député de Laurier?
M. LEVESQUE (Laurier): Vu qu'on va ajourner à une date qui peut,
quand même, être la fin de juin ou plus tard et que, jusqu'ici,
nous avons tous enfin, dans mon cas, j'en suis conscient, je n'ai pas
donné d'opinion véritable, même si cela transparaît
parfois dans mes questions essayé de poser le plus de questions
possible, si on me le permet, je voudrais faire des remarques de deux ou trois
minutes, pas plus, qui seraient comme une sorte de conclusion provisoire parce
que nous ne reviendrons pas avant quelque temps.
M. LE PRESIDENT: M. le député de Laurier, je voudrais
faire remarquer à la commission qu'il y a des groupes importants de
journalistes qui ne sont pas encore venus, devant nous.
M. LEVESQUE (Laurier): D'accord! C'est pour ça que Je dis que ce
sont des remarques qui peuvent servir, quant à mol, de conclusion
très provisoire. On a étudié très longuement, avec
beaucoup de détails, je pense, surtout depuis deux séances, et
avec des gens qui le vivent le phénomène de concentration qui est
au coeur du mandat de la commission. Nous l'avons étudié
M. Caron, ce matin, en particulier, a fait un exposé sur ce sujet
à partir de critères nord-américains et quelque peu
européens. Là, déjà, il me semble qu'il y a une
certaine fragilité dans notre information. Quand nous pensons aux grands
ensembles, c'est une de nos tendances naturelles, à nous les
Québécois, étant nord-américains, de toujours
référer à des images nord-américaines et
d'être portés à oublier pour autant que cela puisse
être dangereux de l'oublier que nous sommes six millions dans le
Québec.
Nous parlons en réalité de 200 millions à
côté de nous, aux Etats-Unis, et même auCana-da anglais, qui
pour des raisons culturelles,
n'ont pas les mêmes sentiments au point de vue de certaines
valeurs. Qu'on juge ces valeurs comme on le voudra!
J'ai posé à M. Caron certaines questions. J'ai
trouvé que son information comme témoin expert n'allait pas aussi
loin que je l'aurais voulu. J'aurais bien aimé que nous ayons une chance
d'examiner certaines petites entités. Je prends comme exemple les pays
Scandinaves ou d'autres, dans le monde. J'aurais aimé savoir comment ils
ont affronté le problème parce qu'il doit se
présenter chez eux aussi ce ne sont pas des pays inefficaces,
comment ils ont affronté ce problème de la concentration, surtout
dans le domaine qui nous préoccupe, celui de l'information et des moyens
de communications.
Tout le monde admettra je pense que la démonstration en
-a été faite si nous parlons seulement au point
de vue de l'efficacité, et techniquement, de gestion, de «
management », que la concentration présente visiblement des
avantages au point de vue administratif, au point de vue de la
rentabilité, et même au point de vue d'une certaine liberté
professionnelle dont les journalistes eux-mêmes pourraient avoir
l'illusion, peut-être top longtemps. Parce qu'à priori il est vrai
que cela donne un « respir » je m'excuse de l'expression
à la profession des journalistes, que certains vieux
propriétaires privés à l'ancienne mode ne leur ont jamais
permis de connaître.
D'un autre côté, il s'agit d'une concentration qui, pour
l'essentiel, se produit chez nous sous la forme du conglomérat,
c'est-à-dire sous la forme du grand « merger » d'entreprises
extra-ordinairement diversifiées qu'elles sont de plus en plus; c'est
extraordinairement complexe, et de plus en plus nous voyons le texte de
M. Caron était clair là-dessus que cela peut avoir des
ramifications dans la plupart des secteurs de l'économie.
Je me pose des questions moi aussi. Est-ce que cela ne peut pas finir
par amener, exactement comme le dernier mémoire vient de nous le dire,
une sorte de mainmise éventuelle sur le citoyen consommateur par des
producteurs et distributeurs d'une foule de produits, par des
intérêts, même dans le domaine financier, dont les
ramifications vont très loin, qui forcément se serviraient des
moyens d'information et de diffusion comme du véhicule de leur
production et, évidemment aussi, comme d'un étouffement possible
de la concurrence? Il me semble que c'est une question extrêmement grave,
et nous n'avons pas de réponse. Est-ce que ce genre de concentration ne
peut pas continuer à s'étendre et à se ramifier jusqu'5
risquer dangereusement d'éteindre tout choix?
Je sais bien qu'on dit dans les Cantons de l'Est et ailleurs: Il reste
des possibilités de se renseigner, etc., mais il ne faudrait tout de
même pas être trop superficiel.
Nous ne sommes pas si naïfs que cela. Il reste des choix de plus en
plus ténus et de plus en plus restreints. Est-ce que cela ne peut pas
risquer de finir par étouffer dangereusement tout choix de sources
d'information et de véhicules d'opinions? Non seulement dans telle et
telle région importante et c'est déjà tris grave
mais jusqu'à un certain point dans l'ensemble du
Québec.
D'autant plus que d'autres journaux et d'autres stations de radio et de
télévision ne sont pas à l'abri de cette ampleur
grandissante de la concentration actuelle. On le sait, il n'y a pas de garantie
là-dessus. Quelles limites devrait-on poser? J'espère qu'on
admettra que tous les moyens principaux d'information actuellement
privés ne devraient pas finir par aboutir entre les mêmes mains.
Or on sait qu'en anglais on dit: Nothing succeeds like success. Une fois qu'une
grosse machine comme celle-là est en marche, où
s'arrêtera-t-elle? Qui est équipé pour l'arrêter et
est-ce qu'on doit l'arrêter?
Cela pourrait même, éventuellement et peut-être assez
vite, sans prêter d'Intentions du tout à ceux qui
représentent le groupe actuel je suis sincère ils
ne seront pas toujours là ces hommes. Et on sait à quel point,
quand les entreprises deviennent très vastes, certaines choses
s'introduisent qu'on n'a pas prévues. Par l'autocensure, par exemple,
par un certain climat de prudence automatique. Parce qu'il vient un moment, si
cela se répand beaucoup, les gens qui font l'Information n'ont plus
grand choix au point de vue patronal. Ils peuvent rester toujours plus ou moins
dans le même circuit, celui qui pale le mieux, etc.. Je note en
particulier la fragilité des directions locales que, pour l'instant, on
nous a expliqué l'autre jour, dans certains cas de journaux, comme une
certaine direction qui durait durant un bon plaisir, à toutes fins
pratiques sans contrat.
Alors à cause de tout cela, est-ce qu'il ne pourrait pas,
éventuellement, y avoir un danger que la liberté professionnelle
dont on parle aujourd'hui puisse être une liberté relativement
provisoire au moment où une concentration plus grande aurait
été effectuée?
Et finalement, de tels groupes privés comme ceux qu'on
étudie en ce moment, structurellement M. Caron l'a
confirmé ce matin sont exposés à changer de
propriété. Ils font partie du secteur privé, c'est normal.
Tant qu'ils sont dans le secteur privé tel quel, sans aucune ba-
lise quelle qu'elle soit. Au point de vue collectif, le contrôle
peut donc passer entre n'importe quelles mains, y compris des mains
complètement étrangères au Québec. D'autant plus
qu'on bâtit sur des postes de télé vision de telles
entre autres, je connais ce cas un peu mieux concentrations de capitaux
à partir d'un permis de diffuser que quand vient le moment, comme M.
DesRuisseaux vendant ses propriétés, de faire le transfert de ses
propriétés, une fois qu'il y a plusieurs millions
d'impliqués, il n'y a pas beaucoup de groupes qui peuvent se payer le
luxe de récupérer ces propriétés-là quand
elles sont à vendre. Ce qui fait que les acheteurs éventuels
deviennent de moins en moins nombreux, peuvent de plus en plus on vit en
Amérique du Nord, nous ne sommes pas naïf être des
intérêts américains entre autres, quand vient le moment
où la propriété doit changer.
Je conclus là-dessus ou presque: Pour une petite
société culturelle et politique comme le Québec qui a
autant de fragilité que la nôtre, n'est-il pas absolument vital
d'aller beaucoup plus loin que ce qu'on a obtenu jusqu'ici?
Je me souviens d'un article de Galbraith c'est assez ironique
qui avait été commandé pour le centenaire de la
Confédération. Vous savez que Galbraith, le célèbre
économiste américain, qui est d'origine ontarienne, avait
répondu à cette demande d'articles par un petit article qu'il
avait fait rapidement, mais de son mieux, où il oubliait
complètement autre chose que le Canada anglais ce qui est normal
pour lui, il est Américain maintenant. Il disait en réponse
à une question la question était celle-ci: Quelles sont,
d'après vous, les conditions essentielles pour que le Canada
confêdératif dure encore cent ans dans le monde d'aujourd'hui?
Oubliant complètement qu'il y avait une société
française, dans le Québec en particulier, il répondait de
façon générale: La première condition sans laquelle
il n'y a absolument rien qui puisse être garanti, c'est que les
instruments de communication, de presse et d'information, on trouve des moyens
absolument sûrs d'en garder la propriété et le
contrôle effectif à l'intérieur d'une société
qui prétendrait s'appeler le Canada pendant encore cent ans. Est-ce qu'a
fortiori ce genre de certitude ne devrait pas aussi être une chose dont
le Québec se préoccuperait, et le plus vite possible,
vis-à-vis du phénomène qu'on prétend
étudier? Parce qu'il y a un processus d'ensemble dans ces concentrations
qui, une fois mis en marche et bien déclenché, peut vite devenir
fatal.
Je ne sais pas si on a passé ce qu'ils appellent en anglais le
« point of no return » ; une chose certaine, c'est qu'on n'est pas
très bien.
Moi, je crois que nous ne sommes pas capa- bles, à cette
commission, nous n'avons pas convenablement les faits complets, bien
détaillés... J'ai étudié des cas
économiques, et fondamentalement il s'agit de cas économiques. Je
n'ai jamais travaillé en amateur comme on le fait à cette
commission-ci, sans recherche, prenant et j'ai beaucoup de respect pour
ce qu'on nous dit sans vérification des choses
incomplètes. Par exemple, dans les cas de GELCO et GESCA, le fait qu'il
s'agisse de compagnies privées qui n'ont pas l'obligation de
déposer le même genre de rapport que des compagnies publiques...
Tout ça est entremêlé. Pour unproblème aussi vaste,
devant une commission aussi peu équipée et qui siège par
intermittence elle ne peut pas faire autrement, car il s'agit d'une
commission parlementaire cela me paraît extraordinairement fragile
sans service de recherche, sans expert financier, sans contre-interrogatoire
comme il devrait y en avoir, sans véritable continuité non plus.
Cela risquerait de devenir une opération « endormitolre » ou
une opération-improvisation. C'est là qu'il y a un danger que
peut-être ces messieurs n'ont pas vu.
Toutes sortes de projets genre conseil de presse, régie, etc.,
qu'on a l'air d'accepter très facilement, en principe au moins,
pourraient mener à l'improvisation et à l'ingérence
politique.
Je termine. Je crains justement l'ingérence politique du
gouvernement ou du Parlement avec ses partis dans un domaine comme
celui-là, mais il ne faudrait pas non plus oublier l'autre aspect de la
question et c'est cela qui le rend complexe. Je crois aussi profondément
que peut être frauduleuse, dans ce domaine surtout, une notion de la
liberté qui pourrait être confisquée au profit de groupes
privés trop puissants et finalement pouvoir exercer un poids excessif
sur toute la société y compris l'Etat lui-même que nous
sommes censés représenter ici de notre mieux. Tout compris donc
et en tenant compte du fait qu'il faut sensibiliser l'opinion publique, ce qui
n'a jamais été fait et que le comité ne peut pas faire par
ses moyens, je crois. Je serais d'accord provisoirement pour que nous visions
à étudier beaucoup plus assidûment l'idée d'une
commission d'enquête.
M. LE PRESIDENT: Alors une remarque maintenant par le
député de Gouin avant d'ajourner les travaux.
M. MICHAUD: Ce n'est pas une remarque. J'imagine qu'il s'agit d'une
décision essentiellement gouvernementale à moins que la
procédure parlementaire puisse prévoir par voie de
motion ou autrement qu'une commission royale d'enquête soit
instituée, f imagine que la décision ne soit ressortir que du
niveau gouvernemental. Mais avant cela, il y aurait deux travaux que je
voudrais demander aux experts de la commission puisqu'ils sont à notre
disposition. Le premier c'est de faire une étude comparative du prix du
papier journal à la fois aux Etats-Unis, au Canada et également
en Europe pour voir exactement où on se situe ici et
éventuellement entrer dans la loi d'il y a une vingtaine
d'années, la loi que M. Duplessis avait présentée,
prévoyant un éventuel contrôle du prix du papier et
pourquoi cela avait été bloqué à ce moment-la. La
deuxième chose, je voudrais que le comité puisse étudier
sur le plan légal les arguments qui pourraient justifier ou qui justi-
fient l'exercice, par le gouvernement du Québec, de sa juridiction
exclusive ou concurrente sur les ondes de la radio et de la
télévision.
M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, je remercie ceux qui sont venus se
faire entendre en comité. Nous avons noté, M. Frenette, que vous
avez déposé à tous les membres du comité, des
états financiers de Power Corporation et votre lettre également
qui a été distribuée à tous les membres du
comité.
La prochaine séance nous ne pouvons pas préciser
aujourd'hui sera annoncée publiquement dès que la date en
aura été fixée. Merci, messieurs.
(Fin de la séance: 18 h 7)