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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le mercredi 16 septembre 2009 - Vol. 41 N° 2

Consultation générale sur le document intitulé Vers un Régime de rentes du Québec renforcé et plus équitable


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures seize minutes)

Le Président (M. Lehouillier): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé Vers un Régime des rentes du Québec renforcé et plus équitable.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Lapointe (Crémazie) remplace M. Turcotte (Saint-Jean) et M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Caire (La Peltrie).

Le Président (M. Lehouillier): Alors, nous entendrons ce matin deux organismes, donc 14 groupes de femmes, d'abord. Je rappelle, avant de vous céder la parole, le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échange. Donc, il y aura une présentation de 15 minutes. Par la suite, il y aura des échanges d'une durée totale de 45 minutes.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, je vous demanderais de vous identifier et de présenter les personnes qui vous accompagnent.

14 groupes de femmes

Mme Asselin (Michèle): Bonjour. Bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames messieurs. Je suis Michèle Asselin, présidente de la Fédération des femmes du Québec et je prendrai la parole, au nom des 14 organismes, avec Mme Denise Thibeault, présidente de l'AFEAS, qui est accompagnée d'Hélène Cornellier, conseillère, et de Ruth Rose, qui est présidente du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail.

Ça fait 30 ans que le mouvement des femmes étudie, analyse, scrute avec une grande attention toute réforme au projet du Régime des rentes du Québec. C'est majeur et très important pour les femmes. Ça a une influence sur les conditions de vie, particulièrement à la retraite. Nous avons la chance de travailler depuis presque 30 ans avec Mme Rose, qui est une économiste reconnue, et vous allez voir que nous avons fait une analyse très fine du projet de réforme. Nous avons fait une analyse différenciée selon les sexes et nous avons 25 recommandations.

D'ailleurs, d'entrée de jeu, je voudrais mentionner que nous appuyons totalement la recommandation du Conseil du statut de la femme, d'une analyse différenciée selon les sexes pour tout projet de réforme. Et, quand on dit «analyse», c'est très important de penser que, oui, il faut avoir des données ventilées selon les sexes mais d'avoir des mesures qui, suite à cette analyse, ne vont pas accroître les inégalités, puisque, vous le savez, le gouvernement du Québec en convient, il demeure toujours des inégalités, particulièrement économiques, au Québec pour les femmes. Donc, il faut s'assurer que ce nouveau régime, cette réforme ne va pas accroître les inégalités. Et notre analyse fine nous a amené de grandes inquiétudes parce que dans l'ensemble ce qui est proposé va affaiblir le régime et va le rendre plus inéquitable à l'égard des femmes, des jeunes générations, des personnes invalides et de la classe moyenne, en général.

La principale modification qui est proposée est à l'effet de calculer la rente sur les meilleures 40 années au lieu de permettre l'exclusion du 15 % des années à cotisations les plus faibles. Cette proposition va entraîner une réduction de la rente de retraite de la presque totalité des personnes qui font la demande avant 65 ans, et davantage dans le cas des femmes.

n (11 h 20) n

Et on se réfère à l'étude d'impact qui a été produite par la Régie des rentes en juillet 2009, qui confirme qu'en moyenne les rentes de retraite des femmes, si on adopte une telle mesure, vont subir une réduction de 5,9 %, presque 6 %, comparativement à 4,7 % pour les hommes, alors que les femmes reçoivent déjà une rente inférieure de 37 % à celle des hommes. Donc, on n'est pas sur la même ligne de départ. Donc, ça va avoir un impact très important pour les femmes.

De plus, les femmes vont supporter la majeure partie des coupes proposées au chapitre des rentes de conjoint survivant. La proposition de mettre fin au caractère viager de la rente des conjoints survivants de moins de 65 ans nous inquiète. Comme en 2003, nous convenons qu'il est souhaitable de diriger davantage l'argent vers les vrais dépendants, soit les enfants, et nous endossons la proposition de bonifier la rente d'orphelin et en même temps celle de l'enfant d'une personne invalide. Nous demandons en plus que ces rentes continuent d'être versées jusqu'au 25e anniversaire de l'enfant si cet enfant est aux études, comme c'est le cas dans le reste du Canada. Nous demandons également que, dans les cas où la famille est bénéficiaire de l'assistance sociale, cette rente soit considérée comme un revenu de l'enfant au même titre que ses propres gains et donc que la prestation reçue par son parent ne soit pas réduite en conséquence.

On doit constater que les femmes, même les jeunes, continuent d'assumer la majeure partie des responsabilités auprès des enfants et des personnes malades ou en perte d'autonomie. Leur taux de participation au marché du travail, et leurs salaires, et donc le taux de cotisation au Régime des rentes du Québec continuent d'être substantiellement inférieurs à ceux des hommes, c'est pourquoi nous croyons que les rentes du conjoint survivant devraient être versées tant que le ou la bénéficiaire a encore des enfants à charge. Nous demandons également qu'elle soit viagère pour les personnes qui ont éduqué au moins trois enfants et pour les personnes qui ont déjà 65 ans au moment du décès de leur conjoint...

Mme Rose (Ruth): 55 ans.

Mme Asselin (Michèle): ...55, excusez-moi, merci, au moment du décès de leur conjoint, puisque la planification financière s'est faite en fonction d'une unité économique à deux et qu'il est difficile de se réorienter à cet âge. Je passe la parole à Denise, qui va poursuivre.

Mme Thibeault (Denise): Nous appuyons également la proposition de fixer la rente de conjoint survivant pour les personnes âgées de 65 ans et plus à 60 % de la rente de retraite du cotisant décédé et de permettre le cumul avec la rente de retraite jusqu'à concurrence de la rente de retraite maximale.

Par ailleurs, nous sommes d'accord avec la proposition d'inscrire 60 % des crédits d'un conjoint décédé au compte de retraite de la personne survivante dans le cas où la rente de conjoint survivant ne serait pas viagère. Par contre, nous croyons que l'on devrait baser ce transfert sur l'ensemble des crédits accumulés pendant l'union et non pas année par année, comme le propose le document de consultation. S'inspirant de la pratique dans plusieurs pays européens, dont la France, l'Allemagne, la Suède et l'Autriche, nous proposons également d'inscrire un crédit égal à 60 % du maximum des gains assurables au compte des femmes, exceptionnellement des hommes, qui s'occupent d'enfants de moins de sept ans, en guise de reconnaissance de ce travail socialement utile et indispensable. Cela permettrait de s'assurer que toutes les mères à un certain nombre... et un certain nombre de pères acquerront des droits à une rente pendant cette période, même si elles sont moins présentes sur le marché du travail, par la suite. Nous demandons également que l'on inscrive un tel crédit au compte d'une personne qui a quitté son emploi afin de s'occuper d'une personne malade, handicapée ou en perte d'autonomie.

Par ailleurs, le document de consultation affirme que sa proposition de hausser le taux de cotisation de 9,9 % à 10,6 % sera plus équitable pour les jeunes générations parce qu'elle permettrait d'éviter de hausser ce taux à 12,5 % en 2051. Nous ne comprenons pas du tout pourquoi il est plus équitable pour les générations futures de payer plus cher pour recevoir des prestations moindres au moment de leur retraite.

Nous contestons certaines des hypothèses sous-jacentes aux projections actuarielles présentées, autant celles en date du 31 décembre 2006 que celles de la mise à jour au 31 décembre 2008. Plus particulièrement, nous croyons que des projections au sujet des taux d'activité et de la possibilité de récupérer au moins une partie des pertes de la caisse du Régime des rentes du Québec de 2007 à 2009 sont excessivement conservatrices. Nous contestons également la nécessité de maintenir une réserve équitable... équivalente à presque cinq années de prestations, projection de 2006, ou même de 3,5 années, pour la projection de 2008, pendant la majeure partie des prochaines 50 années. Nous soulignons aussi que les dernières projections démographiques laissent croire que la situation démographique n'est pas aussi noire que celle peinte dans le document de consultation.

Sur le volet invalidité du régime, nous endossons la proposition d'améliorer la rente d'invalidité et celle de couvrir le risque d'invalidité des personnes de 60 à 64 ans qui reçoivent une rente de retraite mais qui sont au travail. Toutefois, nous demandons que les bénéficiaires soient aussi admissibles aux prestations sociales... spéciales de l'aide sociale afin de couvrir les coûts de médicaments, d'orthèses ou prothèses, de transport à l'hôpital, au besoin, et le reste. Les rentes d'invalidité ont déjà subi une première coupure en 1998. Le document de consultation propose une nouvelle coupure pour les personnes de 60 à 64 ans qui sont encore capables de travailler mais dans un emploi moins rémunérateur que celui qu'elles occupaient auparavant. Ces gens sont peut-être capables théoriquement d'exercer un emploi, mais cela ne veut pas dire que les employeurs sont prêts à les employer, à les engager.

Je cède la parole à Mme Ruth Rose.

Le Président (M. Lehouillier): Oui, Mme Rose.

Mme Rose (Ruth): Finalement, nous croyons que c'est la classe moyenne qui va écoper le plus des coupes proposées. Déjà, ce sont les gens ayant gagné entre environ 25 000 $ et 60 000 $ qui ont le plus de difficultés à maintenir leur niveau de vie, c'est-à-dire d'obtenir un revenu de retraite, avant impôt, égal à 70 % de leurs revenus d'avant la retraite. En effet, le taux de remplacement fourni par les régimes publics, c'est-à-dire le RRQ, la PSV, le SRG, est très faible comparativement aux régimes européens. Est-il normal que 54,3 % des femmes et 43,9 % des hommes de 65 ans et plus sont suffisamment pauvres pour être admissibles au supplément de revenu garanti du gouvernement fédéral et qu'un grand nombre d'autres personnes se retrouvent tout juste en haut du seuil d'admissibilité?

Le gouvernement du Québec cherche à inciter les gens à rester plus longtemps sur le marché du travail, et nous sommes d'accord avec cet objectif, étant donné le vieillissement de la population. En plus, nous sommes convaincues que la situation économique des femmes à la retraite mais aussi juste avant la retraite serait améliorée si elles poursuivaient leurs carrières plus longtemps. Toutefois, nous proposons des modalités qui fourniraient des incitations réelles, alors que la proposition du gouvernement propose plutôt des pénalités pour les gens qui ne le font pas. La formule proposée actuellement par le gouvernement est en fait moins généreuse que celle proposée en 2003. Celle-ci aurait permis une amélioration de la rente pour tout travail, en sus de 40 années de cotisation. En 2008, le gouvernement a adopté le projet de loi n° 68 qui permet aux personnes qui reçoivent déjà une rente de RRQ de l'améliorer en retournant au travail. Toutefois, la bonification est moindre que celle proposée en 2003 et elle ne s'applique pas aux personnes qui continuent de travailler sans avoir demandé leurs rentes.

Nous proposons une formule 15-42. Je pense que vous en avez déjà entendu parler. Selon cette formule, les gens auront toujours la possibilité de retrancher de leurs profils de carrière le 15 % des années les moins intéressantes. Ces années seront remplacées par la moyenne des autres années, et le tout sera divisé par 42, soit le nombre d'années entre 18 et 59 ans. Avec cette formule, les gens recevront le même montant qu'avec la formule actuelle s'ils prennent leur retraite à 60 ans. Toutefois, pour chaque année qu'ils travaillent après leur 60e anniversaire, leur rente sera améliorée, et cela, qu'ils aient déjà demandé leur rente ou non. Nous proposons donc une formule de calcul de rente qui rendrait attrayant de continuer à travailler après 60 ans sans les coupures radicales et répressives que propose le gouvernement.

Depuis 30 ans, nous réclamons une amélioration du RRQ, qui remplacerait 50 % des revenus d'avant la retraite et dont le maximum des gains admissibles serait à peu près au même niveau que les autres régimes d'assurance sociale du Québec, soit 62 000 $ en 2009. Nous croyons qu'il faudrait mettre l'accent d'abord sur l'augmentation du taux de remplacement. Et une capitalisation de cette amélioration pourrait même aider à résoudre les problèmes financiers de la caisse d'ici 2050.

n (11 h 30) n

Le Président (M. Lehouillier): Il vous reste environ deux minutes.

Mme Rose (Ruth): J'ai terminé.

Le Président (M. Lehouillier): Allez-y, allez-y.

Mme Rose (Ruth): Je voulais juste mentionner, vous pourrez le lire dans notre mémoire, que nous sommes intervenues aussi sur les réformes proposées par le Régime de pensions du Canada. Et ce qui nous inquiète là-dedans, c'est que le gouvernement du Québec pourrait adopter cette réforme-là, qui propose aussi des pertes au niveau des... pour les personnes qui prennent leur retraite avant 60 ans, et qu'il n'y ait pas de consultation réelle sur cette proposition à laquelle nous nous opposons aussi. En terminant, nous aimerions dire que les femmes ont besoin du Régime des rentes du Québec. Avec la crise financière et les fraudes, les pertes dans les épargnes individuelles, les pertes dans les caisses des régimes privés, on peut de moins en moins compter sur les solutions privées et individuelles, et donc nous tenons au Régime des rentes du Québec et nous aimerions le voir amélioré et non pas coupé.

Le Président (M. Lehouillier): Alors, merci beaucoup, Mme Asselin, Mme Thibeault, Mme Rose et Mme Cornellier, pour cette belle présentation accompagnée d'un mémoire riche en contenu. Donc, on vous remercie. La commission vous remercie.

Nous allons maintenant passer à la période d'échange. Donc, cette période durera 45 minutes, dont 22 min 30 s pour le parti ministériel, donc 15 minutes pour l'opposition officielle, 3 min 44 s pour le deuxième groupe d'opposition et 3 min 44 s pour le député indépendant. Donc, nous commençons immédiatement cette période d'échange. Et je cède, sans plus tarder, la parole au ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Alors, je comprends que vous êtes à vos premières armes comme président, à nouveau.

Le Président (M. Lehouillier): Ça va bien.

M. Hamad: Je vais vous féliciter, ça va bien, définitivement. Hier, vous avez bien fait ça, M. le Président.

Le Président (M. Lehouillier): Merci beaucoup.

M. Hamad: Merci. Mme Asselin, Mme Rose, Mme Thibeault, Mme Cornellier, bienvenue à l'Assemblée nationale et merci d'être là ce matin. Et un merci spécial aussi pour le travail effectué par vous, un beau travail minutieux, en détail, et une belle job, comme on dit en bon québécois. Alors, merci d'être là.

Et je veux vous rassurer, je tiens à vous rassurer en partant, c'est important qu'on se comprend. Vous savez, le processus, actuellement c'est un processus de consultation. Et, si vous voulez consulter, la régie, ce qu'elle a fait, elle a mis des hypothèses sur la table. C'est comme en 2004, comme dans les autres années. Et ces hypothèses-là, évidemment c'est dans le but de discuter, c'est la régie qui les propose. Suite à notre consultation, suite à vos présentations, le gouvernement, à un moment donné, va décider, va prendre des positions et va amener la suite de ces consultations-là. Donc, je tiens à souligner que ce n'est pas des positions du gouvernement, c'est plus des consultations. Et une meilleure façon de consulter, c'est mettre le plus possible des hypothèses sur la table et permettre à des groupes comme vous de venir puis dire qu'est-ce qu'ils en pensent et comment ils voient ça. Et je veux vous le dire, que ? bien sûr vous le savez, et Mme Rose, elle le sait très bien ? l'assurance parentale, c'est un programme qui a fait progresser le Québec et surtout les femmes au Québec. Et on le sait très bien, que c'est une... lorsqu'on parle aux mères et aux pères qui utilisent ce programme-là, ce sont des gens heureux, ce sont des gens fiers.

Et, moi, je pense que, dans toutes les données qu'on a, ça a progressé, la cause des femmes. Et, si on ajoute tout ce que le gouvernement a fait depuis quelques années, évidemment la cause des femmes au Québec a progressé. Et il faut que ça continue. Et, je vais vous le dire, au nom du gouvernement du Québec, nous n'avons aucune intention, aucune intention de faire... d'arrêter la progression de la cause des femmes au Québec, au contraire. Quand les femmes progressent, c'est la société qui progresse, c'est les mères, c'est les conjoints, c'est les enfants. Alors, c'est notre être le plus cher. Donc, je vais vous rassurer. Et j'aimerais que vous sortiez d'ici très rassurées. Puis maintenant, évidemment, vous le savez que, les mesures, évidemment on a des discussions, on entend les gens parler de ces éléments-là. Et c'est important pour nous d'écouter, et être attentifs, et surtout d'allumer des choses qu'on veut. Et, nous, en tout cas, on n'a aucune intention envers ça, mais en même temps, en parallèle, je constate que... Et je suis fier de notre société, notre société qui a réussi, qu'on voie la cause des femmes au Québec. Si on revient 40 ans en arrière puis on voit aujourd'hui où nous sommes, mais je pense que... Et ça, c'est grâce à vous, c'est vous, les femmes, qui ont fait avancer la cause.

Nous, on a suivi une bonne cause, on la suit. Et, lorsqu'on regarde, par exemple, le programme de soutien aux familles... Et il n'y a pas longtemps, dans La Presse, je ne sais pas si vous avez vu La Presse le 29 août dernier, où la pauvreté au Québec a diminué de 40 %... et la grande gagnante de cette bonne nouvelle, c'est les femmes au Québec. Il y a un retour des femmes, au Québec, impressionnant sur le marché du travail. Il reste évidemment... Vous savez, une des belles réalisations, c'est l'équité salariale, mais il en reste encore, il en reste encore, des choses à faire, et bien sûr il faut continuer dans cet aller-là, il faut continuer à progresser.

Et, comme j'ai dit, les progrès des femmes, c'est le progrès de la société. Il n'y a pas de progrès des femmes: la société ne progresse pas. Puis, c'est drôle, si vous voulez mesurer un progrès d'un pays ou d'une nation, regardez la situation des femmes dans cette nation-là, ça vous donne exactement le reflet de l'avancement d'une société. Donc, pour nous, c'est très important.

Vous savez, il y a 1 million de travailleurs au Québec qui n'ont pas, malheureusement, des régimes de retraite. Ça, c'est les travailleurs. Il y a plusieurs probablement aussi des femmes, des hommes qui n'ont pas aussi des... qui ne sont pas sur le marché du travail mais n'ont pas des grands régimes, et, je sais, l'AFEAS est très, très sensible à cette question-là. Et on a fait une proposition aussi, c'est dans le but d'ouvrir et d'entendre aussi des opinions. Alors, vous savez, si un jour on a dit aux gens: Qu'est-ce qu'on peut faire, le gouvernement, la Régie des rentes, qu'est-ce qu'on peut faire de plus pour aider les gens à avoir plus de régimes de retraite ou avoir plus d'argent, d'épargne en fait... Et on a dit: Si tout va bien, pourquoi qu'il y a 1 million de personnes, travailleurs et travailleuses, qui n'ont pas rien? Alors, ça veut dire qu'il y a un point actuellement, il y a quelque chose à faire. Et la même chose dans la situation des femmes. Probablement, il y a plusieurs femmes qui n'ont pas d'épargne, et évidemment c'est encore plus difficile lorsqu'elles atteignent le 65 ans et plus, c'est encore... On le sait qu'il peut y avoir une situation de pauvreté accrue, qu'on n'entendait pas, malheureusement, souvent parler, mais ça existe malheureusement, et il faut faire face à ça.

Donc, nos défis, en fait c'est aider les Québécois à avoir plus d'épargne. Nos défis, évidemment c'est continuer à voir la progression de la cause des femmes au Québec et aussi enrichir notre société, enrichir nos femmes et nos hommes, créer la richesse, parce qu'on veut qu'on partage la richesse aussi, et évidemment aider la famille, le noyau de notre société, à progresser, aider nos familles à se consolider, aider nos femmes monoparentales qui sont dans une situation difficile, en plus les enfants, situation de pauvreté, l'emploi, l'éducation. Alors, elles sont dans la situation... Et par contre, je suis très fier, moi, je suis en contact souvent avec des programmes que nous faisons pour les femmes monoparentales et à chaque année je regarde ces programmes-là, je regarde les filles qui graduent de ces programmes-là, et ça me touche au coeur à chaque fois que je vais là. Et j'aime ça aller là parce que ça me pompe, si vous voulez, ça me donne une énergie incroyable. Et, des cas de femmes, plusieurs cas, par exemple, une femme qui avait quatre enfants, elle avait 22 ans, elle était dans la misère, dans une situation de pauvreté, dans la drogue, à la limite à la prostitution et, grâce à sa volonté à elle, cette femme-là ? il y en a plusieurs comme ça, d'ailleurs ? cette femme-là, elle a repris, elle s'est reprise en main, elle a réussi à retourner sur le marché du travail après la formation. Aujourd'hui, elle travaille chez une institution financière, et elle est fière de ce qu'elle fait, et elle avance très bien. Ça, c'est des modèles, je pense, pour les quatre enfants en premier, ses quatre enfants, mais aussi pour moi c'est un modèle. Ça, ça démontre la force et la volonté.

Et bien sûr notre rôle, nous, comme gouvernement, c'est aider ces femmes-là à aller de l'avant, améliorer les conditions autour, les conditions gagnantes, qui permettent à nos femmes d'avancer, et lutter contre la pauvreté, et s'en sortir, de la pauvreté. La pauvreté, ce n'est pas juste être en situation de pauvreté, mais à faibles revenus aussi.

Et, on sait, actuellement, évidemment, dans le programme d'équité salariale, c'est une étape majeure, plusieurs milliers de femmes qui... on reconnaît le travail qu'elles ont fait et on a avancé, bien sûr. On peut dire: On a-tu avancé assez? Ce n'est jamais assez, ce n'est jamais assez. Puis, si quelqu'un qui dit aujourd'hui: Tous les problèmes sont réglés, je pense qu'il a besoin de quelques pilules. Mais, dans le fond, il faut continuer, il faut continuer, et puis nous sommes fiers de ce que nous faisons.

n (11 h 40) n

J'aimerais ça avoir votre opinion sur le régime complémentaire de retraite, qu'on a ouvert une porte, de dire: Le 1 million de travailleurs... En même temps, dans ma pensée à moi, c'est que ces régimes-là... Par exemple, s'il y a un conjoint qui ne travaille pas, pour toutes sortes de raisons valables, ça peut être une femme ou un homme, et en même temps cette personne qui travaille peut contribuer en même temps à un régime pour le conjoint ou la conjointe à la maison, alors ça, ça peut être une ouverture dans ce régime-là, ce que nous n'avons jamais fait dans le passé. Alors ça, ça peut améliorer l'épargne, ça peut améliorer les conditions des gens. Et évidemment l'objectif, c'est d'essayer d'avoir une épargne à long terme pour ces personnes-là.

J'aimerais ça avoir vos opinions, pas juste point du vue économie, mais aussi point du vue représentant les vrais représentants des femmes du Québec.

Mme Asselin (Michèle): Bien, on va laisser notre économiste répondre d'abord, mais...

Une voix: ...

Mme Rose (Ruth): D'abord, nous ne sommes pas opposées à cette proposition, sauf... Même si on le fait, on devrait quasiment le rendre obligatoire. Parce que le problème, c'est que les gens qui ont beaucoup d'argent économisent déjà assez pour leur retraite. Ils avaient pris un avantage des REER. Alors, le problème, c'est les gens qui sont plus dans la classe moyenne et modeste qui ont des problèmes à avoir des épargnes. Et d'ailleurs nous aimerons aussi vous remercier pour l'appui que vous avez donné au régime de retraite communautaire et pour les groupes de femmes, qui va permettre à tout un autre volet...

M. Hamad: ...

Mme Rose (Ruth): ...d'organismes communautaires d'avoir... offrir ces avantages sociaux à leurs personnes. Et donc ça va être une autre gang de femmes ? parce que c'est principalement des femmes ? qui seront moins pauvres à la retraite. Mais vous savez aussi qu'un des problèmes qu'on a au Québec... Et d'ailleurs, je me rappelle, en 1980, où on parlait de... et la possibilité d'améliorer les régimes des rentes du Québec... C'est que, quand on améliore les rentes et des plus pauvres, tout ce que ça fait, c'est couper ce qu'ils reçoivent du fédéral au niveau du supplément de revenu garanti. Alors, nous préférerons, je pense, un nouveau volet au Régime des rentes du Québec qui serait obligatoire pour tout le monde, plutôt que des cotisations volontaires qui ne toucheront pas les gens qui ont plus besoin.

M. Hamad: ...régime-là doit tenir compte des suppléments de revenu, puis, je pense, l'idée, c'est de ne pas pénaliser avec le supplément de revenu. Ça, je vous rassure là-dessus. Pour l'obligation, il faut tenir compte de la capacité du citoyen de payer. Alors, vous savez que, si je gagne 30 000 $, 25 000 $, ce n'est pas évident que j'ai des capacités, si j'ai des enfants, etc. Donc, l'obligation, peut-être elle devient une contrainte pour commencer. Mais de laisser le choix aux gens de le faire, faire envers leurs enfants, faire envers leurs conjoints, alors c'est une étape importante pour commencer et aller chercher évidemment un bénéfice après, mais il ne faut pas qu'il soit pénalisant pour le supplément de...

Une voix: ...

M. Hamad: C'est ça. O.K.

Une voix: Mme Asselin.

Le Président (M. Lehouillier): Oui, Mme Asselin.

Mme Asselin (Michèle): Oui. Vous avez parlé de l'importance de l'épargne, mais là-dessus il y a beaucoup d'inégalités, sur l'épargne. Donc, c'est pourquoi, nous, on insiste sur un régime public. En fait, c'est nos épargnes collectives, qui permettent à un ensemble de femmes et d'hommes d'avoir de meilleurs revenus. Donc, pour nous, la priorité, c'est de bonifier et de viser vraiment un 50 % de remplacement de revenu à la retraite par un régime public. Là, vraiment on ferait avancer la situation économique des femmes et aussi des hommes. Donc, pour nous, la priorité devrait se placer plus en termes de bonifier le régime public des rentes du Québec. C'est pour ça qu'on... je pense, notre proposition 15-42 devrait vous intéresser grandement parce qu'elle permettrait d'avancer dans cette voie-là. Et elle nous semble plus porteuse que de miser sur les épargnes, puisqu'on sait que, vous le dites vous-même, hein, quand les revenus sont modestes, c'est très difficile d'aller vers l'épargne, et là on accroît encore des iniquités importantes.

M. Hamad: Le 15-42, j'ai demandé de l'étudier attentivement, on va le regarder attentivement, puis on va l'étudier, puis on va essayer d'aller de l'avant. Je sais, Mme Asselin, que c'est en fin de semaine, vous terminez, complétez votre mandat.

Mme Asselin (Michèle): Oui, c'est ça. Oui.

M. Hamad: Oui. Alors donc, il y a un héritage derrière vous. Alors, parlez-moi de... Si je regarde ma mère, elle est jeune, mais évidemment elle est retraitée, ma mère, dans le temps où elle travaillait, elle était une femme qui a commencé à travailler très tôt parce que mon père est décédé j'avais quatre ans. Alors donc, il fallait qu'elle travaille. Et, dans ce temps-là, on regarde le taux de nombre de femmes qui travaillaient, c'était autour de 30 %, 40 %. Aujourd'hui, on regarde les jeunes, les jeunes femmes sur le marché... D'abord, les jeunes femmes. Moi, je me rappelle, j'ai étudié en génie, il y avait plus de femmes en génie que des hommes. Et, lorsqu'on faisait notre maîtrise, il y avait autant de femmes que des hommes. Et alors les femmes, de plus en plus, elles ont plus de diplômes, elles ont plus d'études et évidemment elles percent davantage le marché du travail. Aujourd'hui, les chiffres nous donnent... c'est rendu à peu près 80 %, les jeunes femmes sur le marché du travail.

Quelle est votre vision de l'avenir du rôle des femmes maintenant, là, qui rentrent, qui... D'ailleurs, en médecine, la majorité, c'est des femmes. Et alors il y a des métiers intéressants que les femmes prennent la place.

Mme Asselin (Michèle): Je ne vous répondrai pas trop longtemps...

Une voix: Mme Asselin.

Mme Asselin (Michèle): ...parce que ma collègue veut vous répondre.

M. Hamad: Oui.

Mme Asselin (Michèle): Mais vous savez qu'on peut être très fiers du fait qu'il y a une progression importante des femmes sur le marché du travail, et, oui, il y a des mesures qui l'ont permise. D'ailleurs, on voit que les mères d'enfants de moins de six ans sont beaucoup plus sur le marché du travail depuis qu'on a des services de garde, etc.

Donc là, notre défi, c'est qu'on a... on a réalisé certains défis. Comment ça se fait que les écarts salariaux demeurent? Il faut regarder que les femmes, malheureusement, sont les championnes du travail à temps partiel. C'est elles qui se retirent du travail lorsqu'elles ont des enfants. C'est pour ça que, nous, il faut regarder la proposition pour les femmes qui auront eu trois enfants et plus. Il faut reconnaître d'autres formes de contribution sociale. Puis le Régime des rentes du Québec en est une, façon importante de le faire. Et les familles se sont totalement transformées. Donc, oui, la rente de survivante, vous voyez qu'on propose des changements pour tenir compte des transformations des familles, mais il faut supporter les enfants orphelins de façon majeure et en s'assurant aussi que celles qui ont 55 ans et plus, puisque, vous le dites, elles n'ont pas bénéficié de la transformation du monde du travail, d'un meilleur accès...

Mais il y a encore... vous parliez de la Loi sur l'équité salariale. On en est très, très fières. J'ai marché pour cette loi, et marché, et marché, mais les non-syndiqués n'ont pas... les fruits de cette loi ne sont pas encore tous mûrs et ils ne répondront pas au fait que, dans le contexte de la mondialisation, le travail se précarise. Et, malheureusement, les femmes en paient un coût élevé par la précarisation du travail, le fait qu'elles n'ont pas une trajectoire d'emploi linéaire. Donc, le 15 % est fondamental.

Le Président (M. Lehouillier): ...est-ce que vous souhaitez...

Mme Thibeault (Denise): Oui, je voudrais revenir à la question précédente, que vous... du fait que le conjoint pourrait payer une partie. On est en accord avec ça, comme association. Ça a fait partie d'une de nos revendications il y a quelque temps. Maintenant, nous arrivons avec une nouvelle formule qu'on vous... qu'on demande d'étudier la possibilité d'inscrire au compte d'une mère ou d'une aidante 60 % du revenu qui est admissible, parce que plusieurs femmes ne pourraient même pas s'inscrire dans cette catégorie-là. Elles n'ont pas de conjoint. Vous nous avez parlé avec fierté de votre monoparentale qui avait... qui s'était rattrapée, mais, toutes les années où elle a élevé ses quatre enfants-là, il n'y a pas de revenus qui sont inscrits aux rentes du Québec. Elle va arriver à 60 ans avec un très petit revenu parce qu'elle n'aura pas cotisé pendant suffisamment d'années.

Alors, comme nous considérons que d'élever les enfants, de prendre soin des personnes en perte d'autonomie ou malades, c'est un travail social qui est indispensable à notre société, on considère que la société devrait subvenir, combler ce manque à gagner là pour ces années-là. Et on aimerait avoir la promesse du ministre d'étudier cette question avec sérieux pour... parce que ce n'est pas vraiment dans le programme, et qu'on trouve que ce serait indispensable que ce soit considéré.

Une voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Oui? Alors, M. le ministre.

M. Hamad: Moi, je suis correct, là.

Le Président (M. Lehouillier): Ça va?

M. Hamad: Je vais laisser la parole, puis je reviens tantôt.

Le Président (M. Lehouillier): O.K. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel? Ça va? O.K. Ça va. Alors, nous passons donc à une autre période d'échange, et j'invite maintenant la députée de Crémazie à prendre la parole. Alors, à vous, Mme la députée.

n (11 h 50) n

Mme Lapointe: Merci. Merci, M. le Président. Rebonjour, mesdames. Vous avez fait un travail exceptionnel. C'est un volumineux document, et vous l'avez bien résumé.

Et vous avez des recommandations bien précises, plusieurs éléments évidemment, là, dont j'aimerais parler avec vous, mais je... D'abord et avant tout, c'est une assurance collective, c'est un régime qui doit être public et universel, et j'appuie totalement votre quête en quelque sorte, à savoir que, si on pouvait remplacer vraiment juste... plus que 25 %, puisque ce n'est même pas le cas en ce moment, du revenu qu'on avait avant, au moment de la retraite, je pense que ce serait bien, ça ferait une grosse différence au niveau des personnes. On a tellement de personnes au Québec encore qui, après 65 ans, n'ont pour vivre que les prestations.

J'aimerais vous entendre particulièrement sur des incitatifs plus importants, ce que vous souhaitez, des incitatifs plus importants pour que les femmes puissent demeurer plus longtemps sur le marché du travail. On a eu la loi n° 68 l'an dernier, qui a ouvert, en quelque sorte il y a eu une ouverture, mais j'aimerais vous entendre. Concrètement, ce serait quoi, un incitatif vraiment qui fonctionnerait, du côté des femmes, dans votre opinion?

Le Président (M. Lehouillier): Alors, est-ce que c'est Mme Asselin, Mme Rose ou...

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lehouillier): Alors, oui, Mme Rose, la parole est à vous.

Mme Rose (Ruth): Bien, d'abord, on a mis dans le mémoire, en annexe, des chiffres sur le taux de participation des personnes de plus de 60... de plus de 50 ans sur le marché du travail et on voit une progression naturelle, d'une part, parce que les femmes... ce n'est pas seulement que les femmes retournent après leurs enfants, c'est que les femmes continuent de travailler de plus en plus, et nous pensons que ça va continuer à progresser, d'autant plus que le taux de chômage, à part la crise temporaire, actuellement commence à créer des pénuries de main-d'oeuvre, et les employeurs sont intéressés à garder leur main-d'oeuvre expérimentée.

Mais, en termes d'incitatifs, actuellement l'incitatif qu'il y a dans le Régime de rentes du Québec, c'est le fait que plus on retarde la retraite, moins il y a de réduction actuarielle. Et la formule actuelle a aussi le désavantage que, si, après 60 ans, vos années de cotisation sont plus faibles que la moyenne de carrière, ça peut baisser la moyenne. Et donc on voudrait une formule qui permet plutôt de l'augmenter. Le projet de loi n° 68 a fait un pas dans cette direction mais seulement pour les gens qui arrêtent de travailler, demandent leurs rentes puis retournent au marché du travail. Puis j'ai fait les calculs. La moyenne, c'est de l'ordre de 75 $ de plus par année que ça donne, ce qui n'est pas énorme, alors que, dans notre formule, ça augmente de l'ordre de 2,4 % du montant des cotisations à chaque année qu'on resterait sur le marché du travail ou qu'on y retournerait. Donc, nous...

Et d'ailleurs la formule qui était proposée en 2003 aussi avait une incitation à continuer, qui est plus forte que celle du projet de loi n° 68. Donc, on pense qu'il faudrait inscrire davantage d'incitations positives et non pas pénaliser les gens qui prennent leur retraite avant 60 ans... avant 65 ans.

Le Président (M. Lehouillier): Merci. Alors, je cède maintenant la parole donc à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. À vous la parole.

Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, bien, dans un premier temps, moi, je veux prendre un moment pour remercier Mme Asselin pour ses années à la présidence de la Fédération des femmes du Québec, le dévouement qu'elle a démontré durant toutes ces années, et le courage, le courage de prendre la parole et de venir ici et sur toutes les tribunes défendre les femmes du Québec. Alors, moi, je veux la remercier au nom de ma formation politique et des femmes du Québec.

Dans le document que vous nous présentez, il y a le tableau A.8, j'aimerais ça qu'on puisse s'y référer. C'est les pertes résultant de la proposition gouvernementale de 2008 concernant les rentes de conjoint survivant et d'orphelin en termes de valeur actualisée jusqu'à 65 ans, selon l'âge, le sexe et le nombre d'enfants. J'imagine que ça va être Mme Rose qui va nous répondre là-dessus. Est-ce que vous pouvez nous expliquer, là, les impacts? Parce qu'on voit des impacts importants, là, dans ce tableau-là. Pouvez-vous nous expliquer les impacts importants? On n'a pas selon le sexe, dans ce tableau-là, mais, selon vous, les impacts selon le sexe seraient quoi par rapport à ce qu'on voit ici?

Mme Rose (Ruth): Vous référez à notre tableau A.8?

Mme Poirier: Oui, page 80.

Mme Rose (Ruth): Oui. Bon, d'abord, ce sont des données de la régie tirées de l'étude d'impact. C'est essentiellement parce que la rente ne sera pas viagère quand elle commence avant 65 ans.

Et plus la femme est jeune au moment où elle devient... elle perd son conjoint, plus la perte sera importante. Nous avons élaboré des discussions assez nuancées sur d'où viennent les rentes de conjoint survivant. Autrefois, une femme se mariait, elle avait des enfants, elle était pas ou peu sur le marché du travail, était dépendante du salaire de son mari, et donc la rente de conjoint survivant visait à assurer une quantité de revenus pour elle et pour ses enfants. Aujourd'hui, il y a encore une partie de cette réalité, mais les gens peuvent... les femmes peuvent avoir des enfants sans être en couple ou avoir été divorcées et elles ne bénéficient pas de cette rente de conjoint survivant, donc. Et la rente de conjoint survivant est financée à partir de deux choses: une part, c'est la cotisation du mari qui est décédé, donc c'est un peu le patrimoine familial qui est transmis au survivant, mais elle est aussi en partie financée par des transferts à l'interne du régime, c'est-à-dire des autres cotisants et en particulier des célibataires vers les personnes qui ont été en couple.

Et, nous, on dit que cette partie-là de transfert devrait viser non pas les personnes parce qu'elles ont vécu en couple, ça, c'est un choix personnel, mais parce qu'elles ont fait un travail qui est socialement utile, qui est utile pour la société. Et c'est pour ça que nous sommes d'accord que dans certains cas la rente de conjoint survivant devrait être temporaire, qu'il pourrait être coupé un petit peu, mais on veut que ce soit remplacé par cette reconnaissance directe du travail auprès des enfants, et cela, pour toutes les femmes, indépendamment de leur statut marital. Et c'est très important dans votre revendication. Et tantôt Mme Thibeault a demandé au ministre, M. Hamad... tantôt Mme Thibeault vous a demandé si vous accepterez au moins d'étudier sérieusement cette question-là et en particulier d'aller regarder les modèles européens, et j'ai vu que vous avez consulté les gens. Je ne sais pas si vous êtes prêt à nous donner une réponse sur une étude.

Le Président (M. Lehouillier): Alors...

Une voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Oui. Alors, M. le...

Une voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Oui. Bien, M. le ministre, de toute façon vous disposez d'un cinq minutes en réserve, donc c'est possible.

M. Hamad: ...mérite d'être étudiée, là, alors ce ne serait pas sage et responsable de dire non. On va l'étudier. Et il y a une chose en même temps, il faut regarder toujours l'ensemble. Tu sais, on peut regarder un régime comme lorsqu'on parle d'équité intergénérationnelle pour la Régie des rentes, mais il faut regarder dans l'ensemble de la société qu'est-ce qu'on fait. Alors, lorsqu'on dit... Alors donc, c'est la même chose, il faut regarder le régime. En Allemagne, en passant, si vous comparez l'Allemagne, là, l'Allemagne, là, ils veulent augmenter l'âge de retraite à 67 ans, hein? Alors, c'est dans le même package, tout ça, là. Donc là, probablement vous êtes d'accord qu'on ne regarde pas 67 ans, hein?

Mme Asselin (Michèle): ...jusqu'à 67 ans, il ne faut pas être pénalisé par exemple.

M. Hamad: Non, mais on se comprend que, quand on regarde un régime, il faut regarder son ensemble et pas juste tirer des petits morceaux de chaque côté, il faut vraiment être sérieux puis regarder ça.

Mme Rose (Ruth): ...une étude là-dessus.

M. Hamad: Oui, mais on va le regarder avec plaisir. Puis d'ailleurs c'est demandé déjà. Quand vous m'avez dit ça, j'ai demandé de voir c'est quoi. Mais juste parce que des fois, souvent, on arrive, on va chercher juste les beaux fruits sur l'arbre puis on oublie l'arbre, là. Tu sais, derrière un fruit, il y a un arbre qui tient tout ça, là, il faut regarder c'est quoi et comment.

Mme Asselin (Michèle): Je me permettrais quand même que...

Une voix: ...

Mme Asselin (Michèle): Notre proposition, elle est globale aussi, puis elle est allée dans tous les détails, et elle se tient en termes de lutte contre les discriminations à l'égard des femmes mais aussi pour la classe moyenne et dans une perspective d'un programme collectif.

M. Hamad: Je suis très ouvert. Comme je vous l'avais dit, notre responsabilité nous demande d'avoir toujours une vision plus large. Comme, par exemple, le soutien aux familles, de 2 milliards, que nous avons au Québec, ce n'est pas automatiquement pareil en Allemagne. Le régime assurance parentale, vous le savez, Mme Rose, c'est unique. Alors là, donc, il faut tout prendre les morceaux un à côté de l'autre puis les mettre ensemble, voir comment on peut le regarder.

n (12 heures) n

Le Président (M. Lehouillier): Alors, je cède à nouveau la parole à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.

Mme Poirier: Merci, M. le Président. On a eu une discussion, dans les séances précédentes, concernant... entre autres, avec le Conseil du patronat qui nous disait que, si on augmentait les cotisations, ça avait un impact chez les employeurs. Les groupes communautaires sont des employeurs, en tant que tel, donc une augmentation des cotisations aurait un impact direct sur les finances des groupes communautaires. On se comprend bien. En parallèle de ça...

Mme Asselin (Michèle): ...

Mme Poirier: Bien, ça, vous me répondrez à ça. Et la proposition qui est devant nous présentement parle d'un régime volontaire pour lequel les groupes, entre autres, en tout cas les employeurs qui actuellement ne cotisent particulièrement que juste à la Régie des rentes... Il pourrait y avoir un régime parallèle, volontaire, où les employés pourraient cotiser, et l'employeur pourrait aussi cotiser. J'aimerais vous entendre, là, sur les impacts, dans le monde communautaire, de telles mesures.

Mme Asselin (Michèle): Bien, il y a présentement un nouveau régime communautaire de retraite, et on contribue, pour une part, l'employeur, l'employé, et, bon, c'est... L'impact... c'est sûr qu'un organisme en défense de droits comme la Fédération des femmes du Québec, ça veut dire de trouver plus de fonds, plus de dons pour rendre compte de nos obligations d'employeurs. Mais vous savez que maintenant il y a beaucoup de femmes qui vont avoir un profil de travail, tout au long de leur vie, dans le communautaire. Alors, il y a... c'est très important d'avoir accès aussi à un régime qui bonifie les cotisations au Régime des rentes du Québec. C'est dans le même esprit, là, que, oui, on a accueilli très favorablement l'instauration de ce régime-là, puis on espère vraiment qu'il va rejoindre éventuellement l'ensemble des travailleuses communautaires mais aussi de l'économie sociale, etc., toutes celles qui travaillent souvent au bas de l'échelle et qui n'ont certainement pas l'occasion de contribuer à des épargnes sur une base personnelle.

Alors, oui, c'est important, mais ça ne devrait pas faire fi du fait qu'on doit bonifier le Régime des rentes du Québec. Pour nous, ça, c'est une grande priorité. Et aussi en profiter pour avoir un leadership et reconnaître les iniquités pour les femmes et d'y instaurer des mesures qui permettraient de reconnaître l'apport des femmes qui ont éduqué des enfants ou qui prennent soin de proches dépendants. Et ça, il n'y a pas un régime privé qui peut le faire, c'est le Régime des rentes du Québec. C'est pour ça qu'on insiste beaucoup sur ces mesures.

Le Président (M. Lehouillier): Est-ce que ça va, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve?

Mme Poirier: J'aurais une dernière...

Le Président (M. Lehouillier): Autres questions?

Mme Poirier: Oui, une dernière question.

Le Président (M. Lehouillier): Allez-y.

Mme Poirier: Pour revenir sur la rente de conjoint survivant, il y a une notion dans la proposition qui nous est présentée à l'effet que le calcul serait fait, pour le conjoint décédé, sur la vie commune. J'aimerais vous entendre sur cette notion-là, qui fait que, dans le fond, on vient réduire les années de cotisation sur lesquelles on va pouvoir appliquer la rente de conjoint survivant pour le décédé, en tant que tel. Et on vient comme... bon, selon le Conseil du statut de la femme, je vais reprendre ses paroles, on vient introduire une notion de divorce dans le décès du conjoint.

Mme Rose (Ruth): Bon, cette...

Le Président (M. Lehouillier): Mme Rose.

Mme Rose (Ruth): ...proposition, elle a trait au fait que, si la rente n'est pas viagère, la femme va pouvoir se faire créditer 60 % des crédits accumulés par son conjoint, et, nous, on demande que ce soit pour l'ensemble de la vie commune et non pas chaque année, lorsqu'elle prendra sa rente. Moi, personnellement... endossé. Pensons qu'il y a effectivement lieu de mettre la question de patrimoine dans ce régime de... les rentes de retraite, parce qu'effectivement ce sont des actifs de famille et qui... donc la femme va pouvoir en profiter à sa retraite, alors que... Et c'est cette partie-là de la rente de conjoint survivant actuellement qui est financée par les cotisations du décédé.

Mme Poirier: Je veux juste qu'on se comprenne bien, là. Dans le projet de loi, c'est qu'on vient réduire la portion de cotisation, c'est seulement que les années calculables pour ça seront seulement que les années de vie commune et non pas les années pour lesquelles le cotisant a cotisé avant son mariage. Donc, si le cotisant a commencé à travailler à 18 ans, il s'est marié à 25 ans, le 18-25 ans ne sera pas calculable dans la prestation. C'est ce qui est dans le projet de loi, c'est ce que le conseil est venu nous confirmer, et d'autres groupes nous ont confirmé qu'effectivement on venait exclure des années du calcul.

Mme Rose (Ruth): C'est parce que c'est...

Une voix: Dans la proposition.

Mme Rose (Ruth): ...la notion que, si vous avez un premier mariage et que vous vous divorcez, vous partagez vos crédits.

Ensuite, si vous avez un deuxième mariage, est-ce qu'on doit aller chercher encore ces années précédentes? Et, dans plusieurs régimes européens aussi, quand il y a une rente de conjoint survivant, ils partagent entre les conjointes successives. Et donc je pense que c'est approprié, au contraire, d'avoir cette notion de patrimoine dans le transfert vers la rente de retraite, et c'est justement dans le cas où la rente ne sera plus viagère, alors que nous demandons quand même que la plupart des rentes de conjoint survivant soient viagères. C'est seulement les jeunes femmes, parce qu'on pense qu'il y a de moins en moins de différences entre les femmes qui deviennent veuves à un jeune âge et les femmes qui n'ont jamais eu de conjoint ou qui n'ont jamais eu de... qui sont divorcées. Et c'est en ce sens-là que nous visons à rétablir une certaine équité.

Le Président (M. Lehouillier): Merci beaucoup, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Maintenant, est-ce qu'il y a une intervention du côté du deuxième groupe d'opposition?

M. Picard: Bien oui, mon cher Président.

Le Président (M. Lehouillier): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, à vous la parole.

M. Picard: Je vous aime bien, mais, si je suis ici, c'est pour bien comprendre le document, là.

Le Président (M. Lehouillier): Tout à fait. J'en conviens.

M. Picard: Je vous remercie, mesdames, pour la qualité de vos travaux, pour l'éventail des mesures. J'ai une question très précise. La recommandation 7, je veux juste bien saisir, parce qu'elle est libellée... elle peut porter à confusion. Lorsqu'on dit que, lorsqu'une femme a la charge d'un enfant de moins de sept ans, est-ce que c'est... est-ce que par cette mesure vous venez un peu reconnaître le choix qu'un parent peut décider de s'occuper de son enfant à la maison? Ma première lecture, je me disais: Ah, c'est ça. Mais, la deuxième, lorsque je vois que ça s'ajouterait à ses propres cotisations, le cas échéant, est-ce que ça veut dire que quelqu'un, je vais prendre un exemple, une dame ou un homme, qu'on dit, qui a des enfants à charge, qui est au salaire minimum, il cotise à la Régie des rentes, mais là on viendrait lui ajouter un 60 % pour atteindre le maximum, peut-être... Est-ce que... Je veux bien saisir, là, c'est quoi, le... Parce que, quand vous dites que, lorsqu'un homme ou une femme a à la charge... là, tous les parents ont à la charge leurs enfants, là, ça fait que c'est peut-être le libellé, là, qui est...

Mme Thibeault (Denise): J'ai la parole?

Une voix: Oui.

Mme Thibeault (Denise): Alors, si... Oui, on parle d'un 60 % de revenus pour tous parce que, s'ils ne travaillent pas et que... ne travaillent pas pour elles-mêmes, pour un particulier, qu'ils travaillent pour la société, on doit leur reconnaître ce droit-là. S'ils travaillent puis qu'ils sont peut-être... Parce que souvent ils vont prendre un travail à temps partiel ou quelques heures par semaine. On va combler la différence. S'ils travaillent à un gros salaire et ils reprennent le salaire qu'elles ont, cette équité-là, on n'a pas à leur donner. C'est que, pendant les premières années, on sait que leurs conditions de travail vont être affligées par ce rôle de parent, ils vont souvent diminuer leurs heures d'ouvrage, toutes ces conditions-là. On propose que, dans n'importe quelle condition, on leur garantirait d'inscrire à leurs crédits de rente 60 % du maximum admissible.

M. Picard: ...est-ce que les parents dont les enfants fréquentent des CPE seraient admissibles à cette mesure?

Mme Thibeault (Denise): ...du salaire ou de, tu sais, de ce que... Si elles ont... elles travaillent avec un petit salaire, même s'ils vont au CPE, ils ont toujours droit de ne pas être pénalisés au moment de leur retraite parce qu'ils ont eu des enfants.

M. Picard: ...c'est beau. Dernière question.

Le Président (M. Lehouillier): Allez-y.

M. Picard: Vous faites une multitude de suggestions au ministre. Pour aider dans le travail au ministre, là, peut-être, est-ce que vous avez prévu une priorisation des mesures que vous proposez ou vous dites: «C'est tout ça»?

Une voix: ...

M. Picard: C'est bon, hein?

Une voix: ...

M. Picard: Je vous pose la question, là, le ministre ne l'a pas posée.

Mme Thibeault (Denise): La... 7 et 8, c'est les plus importantes pour l'avancée des femmes, présentement.

M. Picard: Dans tout le document, 7 et 8...

n(12 h 10)n

Mme Thibeault (Denise): On veut tout. On veut tout, mais on priorise 7 et 8.

M. Picard: Vous voulez tout, mais... On veut tous aller au ciel, mais on ne veut pas mourir, ça. O.K. Merci, M. le Président.

Mme Asselin (Michèle): Mais c'est très important, on a 25 recommandations, elles se tiennent toutes, l'une, l'autre, et tout ce qui concerne le 15 %, le 15-42 est un axe majeur. Revoir la question des rentes aux survivantes et survivants, c'est très important aussi, et d'avoir une perspective de la recommandation de l'apport des femmes quand elles éduquent leurs enfants ou qu'elles sont des aidantes et aussi qu'il y ait une orientation de maintien d'un régime public, qui ne pénalisera pas mais va bonifier et qui va viser vers une augmentation importante des revenus au moment de la retraite. Alors, c'est ça, nos priorités. Et c'est très difficile de détacher une de nos recommandations, puisque, comme vous, nous avons une vision globale.

Le Président (M. Lehouillier): Sur ces priorités, je cède maintenant la parole au député de Mercier.

M. Khadir: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Asselin, je fais mien l'éloge qui vous a été rendu par ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme Thibeault, Mme Cornellier, Mme Rose, j'ai quand même quelques études universitaires, mais, pour moi, tous ces calculs actuariels qui sous-tendent vos recommandations sont encore un peu opaques, j'ai besoin d'un peu plus de temps pour absorber tout ça, donc mes questions ne seront pas techniques.

C'est sûr que, comme l'a mentionné le député de l'ADQ, on ne peut éventuellement à la fois demander le ciel et ne pas vouloir mourir, mais, quand on sait qu'on va mourir de toute façon, on peut quand même souhaiter de ne pas finir en enfer, et, pour les femmes qui ont travaillé au bas de l'échelle, pour les femmes qui ont sacrifié des carrières pour s'occuper des enfants, bien, finir ses jours dans la pauvreté ou en absence de rentes, c'est l'enfer. Il faut le reconnaître, cet enfer-là est vécu aujourd'hui par des dizaines de milliers de femmes. Donc, moi, j'accueille avec énormément, disons, de satisfaction tout le travail qui a été fait. J'espère que la... Parce que, je sais, venant... On me dit que c'est Mme Rose, qui est en économie, que je connais et j'admire le travail depuis longtemps... a été très au centre en fait de la rédaction de ce rapport. Habituellement, c'est un travail rigoureux. Pour avoir affronté quelquefois ces arguments, je sais que ça peut faire mal. Et c'est très documenté, alors ça devrait peser quelque part dans les choix que fait le ministère, que... c'est ça, que va faire le ministère.

Là où, moi, je me désole, c'est qu'en fait toute cette refonte ou cette réforme du Régime des rentes, si vous le voyez dans la page 9 du document ministériel, parle de l'adaptation du régime aux transformations du marché du travail. Vous savez, dans mon dictionnaire politique à moi, ce n'est pas à la société, ce n'est pas aux familles, ce n'est pas à la population de s'adapter à l'économie. Ce n'est pas à la société de s'adapter à l'économie, c'est à l'économie de s'adapter à la société. Donc, ça devrait être posé différemment. Le gouvernement devrait se questionner: Qu'est-ce que je dois changer dans le marché du travail? Comment, comme instrument, je vais fonctionner, faire fonctionner l'économie différemment pour ne pas pénaliser des travailleurs, des travailleuses ou des gens qui ont eu un travail non rémunéré mais socialement, excessivement, important et utile? Puis c'est là en fait l'équilibre, le jeu d'équilibre.

Ça fait que, moi, malheureusement, je n'ai pas de question technique. J'accueille favorablement. J'implore le ministre, maintenant que tout le monde se pose des questions sur tout ça, sur le travail, sur l'économie, bien d'en profiter pour refaire le travail, d'enlever le troisième point, les enjeux puis de réfléchir comment son gouvernement pourrait agir sur le marché du travail pour qu'on n'ait pas besoin de demander à nos retraités de diminuer leurs attentes.

M. Hamad: Faites-moi une suggestion.

M. Khadir: Oui. Par exemple, le marché du travail, c'est l'économie générale de notre société. On sait que certains pays consacrent, par exemple la Norvège, des redevances et les revenus qu'ils tirent de leurs ressources naturelles pour les générations futures pour justement s'assurer que leurs programmes sociaux et les rentes seront bien fournis, bien protégés. Au Québec, votre gouvernement s'apprête à faire tout un plan Nord avec de vastes exploitations minières. On sait que, dans le régime actuel, ces ressources ne profitent pas au Québec, d'accord? On a célébré ensemble hier Salvador Allende. Salvador Allende, s'il y a quelque chose qui fait qu'il reste dans l'histoire, il a nationalisé les mines.

Le Président (M. Lehouillier): En conclusion, M. le député, parce que le temps est écoulé.

M. Khadir: D'accord. En conclusion, bien, vous pouvez agir. Par exemple, on pourrait demander une redevance aux minières spécifiquement pour ça. Ils ont dépossédé le Québec, depuis 100 ans, de ces ressources. C'était une cent de la tonne, ensuite 15 cents de la tonne dans le temps de Duplessis. Aujourd'hui, rien. C'est même moins que ça.

Le Président (M. Lehouillier): Merci.

M. Khadir: Donc, on pourrait demander des redevances qui soient affectées à nos régimes de retraite. C'est très simple. Là, vous venez d'agir sur le marché du travail, sur l'économie, au service de la société et non l'inverse.

Le Président (M. Lehouillier): Merci beaucoup, M. le député. Alors donc, merci beaucoup pour la présentation de...

M. Khadir: ...

Le Président (M. Lehouillier): Bien, écoutez, malheureusement, le temps est écoulé.

Une voix: Ça vaut la peine d'entendre la réponse.

Le Président (M. Lehouillier): Oui? Alors, écoutez...

Une voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): ...est-ce que les membres de la commission consentent à entendre la réponse?

Des voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Alors, allez-y, allez-y pour cette réponse.

Une voix: ...

Mme Rose (Ruth): Je veux juste dire que fondamentalement la capacité de la société de payer des revenus décents à ses personnes âgées dépend de la prospérité économique, indépendamment de la façon qu'on finance ce régime. Et nous avons un régime par répartition, ce qu'on devrait garder. Et donc nous pensons que l'on a critiqué les hypothèses actuarielles et nous maintenons que la façon d'assurer la viabilité du Régime des rentes du Québec, ce n'est pas de couper les prestations et ce n'est pas d'augmenter les cotisations, c'est d'assurer que l'économie du Québec est prospère, que les gens qui veulent travailler, surtout les personnes qui sont vieillissantes, puissent trouver un emploi, que les jeunes puissent trouver des emplois, que les femmes puissent trouver des emplois. Il faut aussi travailler sur les variables démographiques. C'est pour ça que nous sommes contents du régime d'assurance parentale, des garderies, la politique d'immigration aussi. Nous sommes convaincus qu'on pourrait augmenter le nombre d'immigrants, s'il y a des emplois pour ces personnes-là, et conséquemment les intégrer au marché du travail. Donc, quand on travaille...

Une voix: ...

Mme Rose (Ruth): Si c'est variable... si on travaille sur ces variables-là, nous sommes convaincus que le Régime des rentes du Québec n'aurait pas des problèmes financiers.

Le Président (M. Lehouillier): Alors, merci beaucoup, Mme Rose, Mme Asselin, Mme Thibeault et Mme Cornellier pour cette belle présentation, et j'ajourne quelques instants pour permettre à l'autre groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 18)

 

(Reprise à 12 h 22)

Le Président (M. Lehouillier): La commission reprend ses travaux. J'invite le groupe à prendre place.

Des voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): S'il vous plaît! S'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors donc, j'invite les représentants de la Centrale des syndicats démocratiques de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Alors donc, il est 12 h 22. Est-ce que les membres de la commission consentent à ce qu'on excède de quelque peu sur l'horaire ou si...

Des voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): O.K. Alors donc, est-ce qu'à ce moment-là vous êtes d'accord pour qu'on enlève un peu de temps au niveau des interventions?

Des voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Non, non, mais les interventions au prorata, là. Est-ce que vous êtes d'accord pour réduire...

Mme Poirier: Faites-nous une proposition.

Le Président (M. Lehouillier): Oui. O.K., on va vous le dire.

Une voix: ...

Le Président (M. Lehouillier): Oui. Alors donc, on pourrait y aller immédiatement avec la présentation, et je vous reviens avec une proposition de répartition.

Alors, nous avons aujourd'hui M. François Vaudreuil et M. Normand Pepin, de la Centrale des syndicats démocratiques. Alors, on vous écoute pour votre présentation, et par la suite il y aura la période d'échange. Merci beaucoup.

Centrale des syndicats
démocratiques (CSD)

M. Vaudreuil (François): Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je voudrais vous remercier de l'invitation, qui nous a été faite, de venir échanger sur le document de consultation qui a été produit et qui s'intitule Vers un nouveau Régime de rentes du Québec renforcé et plus équitable.

Alors, les propositions du document de consultation qui ont été produites ne sont pas très différentes de celles du document produit en 2004 alors intitulé Adapter le Régime de rentes aux nouvelles réalités du Québec, propositions auxquelles nous nous étions opposés et que nous avions contribué à stopper à l'époque. Encore une fois, le document de consultation contient des pistes de solution particulièrement inquiétantes pour les travailleuses et travailleurs qui voudraient éventuellement prendre leur retraite avant 65 ans, pour les personnes qui souffriront d'une invalidité entre 60 et 65 ans et pour les femmes qui auront le malheur de perdre leurs conjoints avant l'âge de 65 ans.

Dans le document de consultation de 2004, il n'était pas question d'augmenter le taux de cotisation à la régie mais de simplement réduire les bénéfices des participantes et des participants. En 2008, la régie propose une combinaison des deux approches: une augmentation du taux de cotisation, d'une part, qui passera, en cinq ans, de 9,9 % à 10,4 %, à raison de 1/10 de 1 %, le 1er janvier de chaque année, entre 2011 et 2015, et une réduction des bénéfices, d'autre part, parce que, selon la régie, une hausse du taux de cotisation à elle seule n'est pas suffisante pour assurer aux Québécoises et aux Québécois un régime équitable.

Nous considérons que c'est une drôle de conception de l'équité de celle qui veut que réduire les bénéfices d'un régime soit plus acceptable au nom de l'équité envers les générations à venir, alors que hausser le taux de cotisation pour maintenir les mêmes bénéfices serait à la limite de l'acceptable. Une conception d'autant plus surprenante que le taux de cotisation au régime a augmenté chaque année, de 1987 à 2003, et qu'il est gelé à 9,9 % depuis cette date. Une augmentation de taux après six ans de gel ne nous apparaît donc pas exagérée. Nous réitérons que nous préconisons... ce que nous préconisions, pardon, en 2004, à savoir que toute réforme du Régime de rentes doit respecter le libre choix des travailleuses et des travailleurs de se retirer ou non du marché du travail. Or, plusieurs éléments de la réforme proposée représentent des reculs pour les cotisants et les cotisantes et ils pourraient faire en sorte que les gens se sentent forcés de rester plus longtemps sur le marché du travail.

Selon nous, le gouvernement ne peut se comporter vis-à-vis des régimes publics comme si les régimes complémentaires de retraite allaient prendre le relais, car ce n'est pas la réalité de la majorité des travailleuses et des travailleurs québécois. En effet, selon la régie, environ 42 % des travailleuses et des travailleurs québécois participaient, en 2005, à un régime complémentaire de retraite, une proportion qui augmente d'environ 12 % si on compte les participantes et les participants à un REER ou à un autre instrument collectif. Mais ces données masquent deux types d'inégalités entre les secteurs public, parapublic, d'une part, et le secteur privé, d'autre part. La première est une inégalité dans le taux de couverture. Si la presque totalité de la main-d'oeuvre des secteurs public et parapublic participe à un régime complémentaire de retraite, ce n'est que 25 % de la main-d'oeuvre du secteur privé qui le fait, et, à l'intérieur du même secteur privé, des inégalités se font... font jour. Et, si environ trois grandes entreprises sur quatre offrent un régime complémentaire de retraite, dans les PME ce n'est qu'environ un entreprise sur quatre qui est couverte par un régime collectif de retraite. La seconde tient en la qualité des régimes.

Les salariés des secteurs public et parapublic de même que les salariés des grandes entreprises sont le plus souvent couverts par des régimes à prestations déterminées qui offrent une probabilité élevée d'atteinte d'un niveau de remplacement de revenus adéquat à la retraite, mais il ne couvre que 34 % des travailleuses et des travailleurs. C'est donc dire que les deux tiers des travailleuses et des travailleurs ont au mieux une probabilité moyenne de vivre décemment à la retraite, 16 % ont une probabilité moyenne, 20 % une probabilité peu élevée, et 30 % n'ont tout simplement aucune couverture. Et c'est un portrait qui vaut pour 2005. Déjà, à ce moment, la tendance à la baisse du niveau de probabilités des régimes d'atteindre un niveau adéquat de revenus à la retraite était observé parce qu'il n'y a presque plus de nouveaux régimes à prestations déterminées qui ont été créés ces dernières années et que de nombreuses grandes entreprises ont converti leurs régimes à prestations déterminées en régions... en régimes, pardon, à cotisation déterminée.

C'est donc certainement aujourd'hui, en 2009, moins de 34 % des travailleuses et des travailleurs qui ont accès à des régimes complémentaires de retraite qui offrent une probabilité élevée d'atteindre un niveau de revenus adéquat à la retraite. Comme la majorité des travailleuses et travailleurs ne peuvent compter sur un régime complémentaire adéquat pour assurer de... leur assurer de vivre en dignité à la retraite, il importe pour la CSD que les régimes publics soient préservés, car ils n'assurent déjà que le strict minimum en matière de remplacement de revenus à la retraite.

La réforme proposée, si elle est adoptée, comporte plusieurs reculs, soit celui d'un accès plus facile à la rente de retraite à 60 ans, mais une modification à la baisse du mode de calcul de la rente de retraite; la limitation à 10 ans de la durée du versement de la rente du conjoint survivant; un accès plus difficile pour l'obtention de la rente d'invalidité à compter de 60 ans et un mode nouveau de calcul défavorable.

n(12 h 30)n

Alors, concernant le mode de calcul de la rente de retraite, un des seuls aspects positifs de la réforme proposée serait de permettre aux travailleuses et travailleurs de demander leurs rentes de retraite entre 60 et 65 ans tout en demeurant en emploi. Dans le cadre du régime actuel, pour pouvoir toucher la rente de retraite de la régie avant 65 ans, il faut soit avoir cessé de travailler soit demeurer au travail et avoir conclu une entente de retraite progressive avec son employeur.

Le bât blesse immédiatement après, quand la Régie des rentes propose une modification au mode de calcul de la rente de retraite. Il faut tout de suite préciser que le Régime de rentes vise à remplacer, à 65 ans, 25 % du revenu de carrière. Même si le montant d'une rente est calculé en fonction des revenus de travail, il est important de savoir qu'on n'est pas pénalisés pour toutes les années au cours desquelles nos revenus ont été plus faibles. Dans le calcul d'une rente, une partie des années de faibles revenus est déduite, ce qui a pour effet d'augmenter le montant de la rente. En effet, présentement, dans le calcul de la rente d'un individu, la régie fait abstraction des années au cours desquelles les gains ont été les moins élevés, jusqu'à un maximum de 15 % du nombre d'années. La période de cotisation de toute personne compte entre 42 et 52 ans, selon son âge au moment de toucher sa rente de la Régie des rentes du Québec, mais, grâce au retranchement de 15 % des années de faibles cotisations, la moyenne des gains de carrière est calculée sur un plus petit nombre d'années. Dans le cas d'une personne qui demande sa rente à 60 ans, le régime ne considère que la période de 18 à 60 ans, soit 42 années, de laquelle seront retranchées six années de faibles gains. La rente est alors calculée en fonction des 36 meilleures années.

Le travailleur ou la travailleuse qui demande sa rente à 60 ans peut donc avoir à la rente maximale... peut donc avoir droit à la rente maximale avec 42 années de cotisation, mais les 36 meilleures seulement entreront dans le calcul.

Or, le gouvernement veut pour l'avenir imposer un dénominateur fixe de 40 sans possibilité de soustraire les années de faibles gains, comme si tout le monde passait un minimum de 40 ans à travailler à temps plein toute l'année avec de bons salaires. Ça signifierait aussi que la rente de retraite n'augmenterait, si elle n'est pas déjà au maximum, que pour les personnes qui ont passé plus de 40 ans sur le marché du travail. Avec un dénominateur fixe, ça signifierait aussi que toutes les personnes qui auront travaillé moins de 40 ans seront pénalisées tout simplement parce qu'elles n'auront pas cotisé pendant la totalité des 40 ans. Qui se trouve le plus souvent dans cette situation? Les femmes et les jeunes générations: les premières, parce qu'elles sont plus souvent que les hommes confrontées à la précarité d'emploi et aussi à cause du rôle plus grand que la plupart d'entre elles continuent d'assumer dans leurs familles; les jeunes générations, parce qu'elles sont généralement plus scolarisées que les générations qui les ont précédées, ce qui fait qu'elles entrent plus tardivement sur le marché du travail.

Concernant la rente de conjoint survivant, présentement les personnes veuves ont droit à une rente de conjoint survivant qui leur est offerte... qui leur est versée à vie. Le gouvernement souhaite verser une prestation mensuelle plus importante mais pendant 10 ans seulement. On peut sans doute juger que c'est une amélioration par rapport au projet de 2004 dans lequel cette période était limitée à trois ans, mais nous y voyons tout de même un recul par rapport à la situation actuelle. On aura beau dire que les rentes de conjoint survivant ont vu le jour à une époque où le mari gagnait la croûte de la toute famille, et que l'épouse avait alors besoin d'un soutien financier en cas de veuvage, et surtout que la situation à changé depuis, il n'en demeure pas moins que les femmes accumulent moins de droits que les hommes au Régime des rentes du Québec, comme le démontrent d'ailleurs les statistiques colligées par la Régie des rentes du Québec.

Ainsi, la rente mensuelle moyenne des nouveaux bénéficiaires de la rente de conjoint survivant, en 2007, était de 412,62 $ pour les femmes et de 266,06 $ pour les hommes. Comme la rente de conjoint survivant est basée sur la rémunération du conjoint décédé, c'est donc dire que les hommes continuent de gagner beaucoup plus que les femmes en moyenne, même en 2007. S'il est vrai que les femmes sont beaucoup plus présentes qu'elles ne l'étaient sur le marché du travail, elles continuent de gagner moins que les hommes en moyenne et en conséquence elles cotisent moins qu'eux tout au long de leur vie active.

La perte est donc plus grande pour une femme que pour un homme, en cas de veuvage.

Avec la réforme proposée, comme la durée de versement de la rente de conjoint survivant est limitée à 10 ans, plus le veuvage survient tôt, plus les pertes sont importantes. Pour la personne qui devient veuve à 40 ans, la prestation mensuelle moyenne passe de plus de 700 $ à environ 510 $, et ce, selon les données mêmes de la régie présentées dans leur document. Pour celle qui devient veuve à 50 ans, la prestation mensuelle moyenne passe d'environ 700 $ à 600 $. C'est comme si le gouvernement assumait que toutes les personnes veuves ont refait leur vie avec un autre conjoint au bout de 10 ans et que celui-ci pouvait se substituer au rôle de la Régie des rentes pour subvenir aux besoins de la personne veuve et de ses enfants, quand il y en a.

En contrepartie du fait que les conjoints survivants toucheront moins avec la limitation à 10 ans du versement de la rente, la Régie des rentes propose que la rente mensuelle d'orphelin serait majorée de 66 $ à 209 $ par mois, mais elle cesserait toujours d'être versée à l'âge de 18 ans. Ça peut paraître généreux, mais il faut savoir que chaque année la régie paie environ 18 000 nouvelles rentes de conjoint survivant et seulement 2 500 nouvelles rentes d'orphelin. Cette mesure, si elle était adoptée, serait un recul inacceptable pour les personnes qui, en plus de la perte d'un être cher, devraient continuer à vivre avec un seul revenu pour vivre une vie bâtie pour deux et supporter les obligations qui en découlent.

La rente d'invalidité. Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Lehouillier): Il vous reste environ trois minutes.

M. Vaudreuil (François): Bon, c'est bien. Alors, concernant la rente d'invalidité, présentement les personnes qui deviennent invalides ont droit à une rente d'invalidité jusqu'à l'âge de 65 ans, soit l'âge où commence à leur être versée la rente de retraite, mais, à la régie, contrairement au Régime de pensions du Canada avec lequel le régime québécois est souvent comparé dans le document de consultation, il y a deux définitions d'invalidité: une équivalente au Régime de pensions du Canada pour les gens qui deviennent invalides avant 60 ans et une plus souple pour ceux qui le deviennent entre 60 et 64. Il faut souligner que ce n'est pas un choix de devenir invalide ni de la complaisance de la part des médecins qui prendraient en pitié leur patient, puisque, pour que la Régie des rentes déclare une personne invalide, cette personne doit être atteinte d'une invalidité grave et permanente reconnue par l'équipe d'évaluation médicale de la régie.

Si une personne devient invalide avant 60 ans, elle doit être incapable d'occuper tout emploi rémunérateur pour avoir droit à la rente d'invalidité. Si la personne est capable d'occuper un autre emploi que son emploi habituel, elle n'a pas droit à la rente d'invalidité. Par ailleurs, si une personne devient invalide entre 60 et 64 ans, elle doit prouver qu'elle n'est plus en mesure d'occuper un emploi habituel pour avoir droit à la rente d'invalidité. Le critère d'accès à la rente d'invalidité est donc moins contraignant quand on devient invalide après 60 ans. Ce faisant, la société reconnaît qu'il est beaucoup difficile de trouver un emploi après 60 ans. Le gouvernement souhaite que cette distinction disparaisse, que le critère d'accès à la rente d'invalidité soit le même à tout âge, donc que les personnes de 60 à 64... deviennent invalides et qui peuvent occuper un autre emploi que leur emploi habituel n'aient plus droit à la rente d'invalidité. De plus, la nouvelle méthode de calcul diminue le montant de la rente auquel ces personnes auraient droit.

Il s'agirait encore une fois d'un recul inacceptable, surtout à cause de la vulnérabilité des personnes en cause. Se faire annoncer, après 60 ans, par son médecin que l'invalidité qui nous frappe nous empêche d'occuper notre emploi habituel constitue déjà un choc en soi. Si au surplus on se fait dire qu'il faut trouver un autre emploi ou toucher immédiatement sa rente de retraite de la régie avec une pénalité...

Le Président (M. Lehouillier): Il vous reste juste une minute.

M. Vaudreuil (François): ...O.K., actuarielle importante pour pouvoir survivre jusqu'à 65, moment où la pension de sécurité de vieillesse du fédéral commence à être versée... relève de la cruauté pure et simple.

Or, en conclusion, si ces trois mesures étaient adoptées, les deux dernières particulièrement, ça forcerait des gens à se tourner du côté des assurances privées pour tenter de compenser les pertes de couverture que n'assumerait plus le régime public. Or, avec le secteur public... privé, pardon, une chose est sûre, on assisterait à la fin de l'universalité des mesures actuelles parce que de très nombreuses personnes ne pourraient payer les cotisations nécessaires. Les gagne-petit presque à coup sûr ne pourraient se permettre d'être assurés, alors que les gens pratiquant les métiers jugés à risque par les assureurs se verraient tout simplement refuser l'assurance.

Or, parmi les luttes de... Je terminerais en disant: Parmi les luttes de moyens à la pauvreté et aux inégalités sociales dont dispose le gouvernement, le Régime de rentes du Québec a démontré son efficacité aussi bien par le mode de calcul de retraite que par la rente de conjoint survivant, d'invalidité. Ces mesures doivent donc être maintenues telles qu'elles sont dans le régime actuel des rentes du Québec. Merci.

Le Président (M. Lehouillier): Merci beaucoup, M. Vaudreuil, pour cette belle présentation très bien documentée, d'ailleurs. Merci, M. Pepin. Donc, avec le consentement des membres de la commission, nous entreprenons maintenant des échanges d'une durée de 25 minutes. M. le ministre, à vous la parole.

M. Hamad: Merci, M. le Président. M. Vaudreuil, M. Pepin, bienvenue à l'Assemblée nationale, merci d'être là aujourd'hui, présenter votre mémoire. J'ai quelques questions pour vous. En moyenne, vos membres prennent leur retraite à quel âge à peu près, en moyenne?

n(12 h 40)n

M. Vaudreuil (François): Je ne peux pas vous donner de statistique, on n'a pas de statistique à cet égard. Ce que je vous dirais, c'est qu'environ 95 % de nos membres ? on a un peu plus 70 000 membres ? 95 % proviennent du secteur privé, avec une très forte concentration dans les PME. Et je n'ai pas de taux de salaire moyen, mais il y a une part importante des gens qui doivent gagner entre 15 $ et 20 $ de l'heure. C'est donc dire, si on multiplie par 2 000 heures, entre 30 et 40 000 $ de l'heure... on parle donc de la classe moyenne, là, qu'on retrouve dans les régions au Québec, dans les PME.

M. Hamad: Ma question, c'est: Quelle est la moyenne d'âge de leur retraite?

M. Vaudreuil (François): Je n'ai pas de statistique, à cette époque.

M. Hamad: Ah, Vous n'avez pas... O.K.

M. Vaudreuil (François): Non, non, je n'ai pas de statistique.

M. Hamad: O.K. C'est bon. Vous savez, une des propositions, c'est augmenter le MGA. Là, les revenus actuellement, c'est 46 300 $. L'augmenter un peu plus haut; est-ce que, si on le fait, est-ce qu'il y a un impact sur vos conventions collectives? Pensez-vous que l'industrie va être touchée par ça?

M. Vaudreuil (François): Moi, je pense qu'honnêtement, là, au Québec on est capables d'assumer des augmentations de cotisation, des augmentations patronales, sur la masse salariale, pour être capables de favoriser un meilleur régime public de rentes.

Ça, là-dessus, bon, évidemment les associations patronales vont s'y objecter, mais de tout temps les associations patronales se sont objectées à de telles mesures. Mais, je vous dirais, au niveau de la compétitivité, oui. Ce que je vous dirais: s'il y a des réformes qui s'engagent dans ce sens, je pense que prioritairement qu'on puisse harmoniser, par exemple, avec les montants qui existent à la Commission de la santé et sécurité, au régime d'assurance automobile du Québec, etc., ça, ce serait très bien. Mais il faut faire en sorte... si on pouvait se donner comme objectif qu'il n'y ait pas une Québécoise ou un Québécois qui arrive à la retraite puis qu'il ait besoin du régime de supplément de revenu garanti, ça, ce serait évidemment l'idéal. Parce que, là où j'étais malheureux dans votre document de consultation... j'aurais aimé avoir la statistique, parce que je l'ai déjà eue, mais ça fait déjà plusieurs années, puis, quand on avait vu ça, on avait été estomaqué, du ministère des Finances, de la répartition des revenus des gens qui sont à la retraite actuellement. Et ce qu'on constate, c'est que les revenus sont très bas.

Et j'aimerais que, si c'était possible, que le ministère des Finances nous actualise ces statistiques-là. L'exercice avait déjà été fait dans le cadre de la préparation du Forum des générations en 2004. Et puis on s'apercevrait de la nécessité, à ce moment-là, de consolider notre régime public de rentes pour assurer un meilleur remplacement du revenu.

M. Hamad: Bien, on va le faire, on va le faire. Ça vaut la peine de le sortir et confirmer d'ailleurs ce qu'on pense.

M. Vaudreuil (François): On va être très surpris.

M. Hamad: Moi, ce que j'entends aussi, c'est triste, là, il y en a plusieurs, personnes à la retraite qui n'ont pas beaucoup de revenus, malheureusement. Et, pour ça, ma prochaine question, c'est... Vous savez, il y a 1 million de travailleurs sur le marché du travail qui n'ont pas, malheureusement, beaucoup... rien en fait, ils n'ont rien comme régime, et probablement, dans ce million de travailleurs là, il y a plusieurs de vos membres. On a ouvert une porte de voir un régime complémentaire de retraite volontaire, et qu'est-ce que vous en pensez?

M. Vaudreuil (François): Je ne crois pas à ces régimes volontaires. Moi, je pense que c'est... je crois plutôt à des choix de société qu'on fait et de se rappeler que, comme société, nous avons une responsabilité collective dans la protection de la population contre des risques de la vie, notamment la perte de son emploi au moment de l'âge de la retraite. Et on doit travailler plus sur les efforts de solidarité qu'on doit développer, on doit travailler plus sur une solidarité intergénérationnelle qui doit rentrer dans notre culture que d'y aller sur des trucs volontaires. Je ne crois pas à ce véhicule-là. Moi, je pense qu'il faut améliorer notre régime public, notre Régime de rentes du Québec.

M. Hamad: Mettons, on ne le fera pas, on suivrait votre opinion. Mais qu'est-ce qu'on fait avec le 1 million demain matin? Je comprends la solidarité, mais il y a 1 million, ils n'ont pas d'épargne.

M. Vaudreuil (François): Bien, au nom de la solidarité, ce que je vous dis, c'est qu'il faudrait améliorer le régime public.

M. Hamad: Oui, mais, même si on l'améliore...

M. Vaudreuil (François): Ce que je vous ai dit tantôt, la présentation que je vous ai faite... on a soumis à nos délégués au congrès en juin dernier cette question-là. Et la réponse, parce qu'il y avait, en toile de fond, des résultats de la Caisse de dépôt... puis, nos délégués, et ça a été unanime, ça a été unanime, ça a été de dire: Dans la situation où on est, il y a une nécessité de maintenir ce qu'on a. Alors, tu sais, ça a été leur réaction. Ils ont dit: Regarde, là, avec les déboires de la caisse, on a perdu 25 %, je veux dire, on va commencer par conserver. Mais on a des positions, à la CSD, où effectivement on favorise l'amélioration du régime public. Ça, ça va de soi, là.

M. Hamad: ...vos recommandations.

M. Vaudreuil (François): Alors, les millions... le million, on pourrait... on pourrait aller les rejoindre, là, en améliorant les remplacements de revenus.

M. Hamad: Oui. Parce que j'ai des doutes, là. C'est que, même si on améliore...

M. Vaudreuil (François): ...financé, M. le ministre, par... C'est toujours financé, M. le ministre. Que ce soit un régime volontaire, que ce soit un régime complémentaire, que ce soit un régime public, c'est toujours... ces régimes de protection sociale là sont toujours financés sur la masse salariale. Alors, c'est le fruit du travail qui fait en sorte qu'on peut alimenter. Alors, si collectivement, solidairement, on se dit: Bon, au lieu de mettre 9,9 %, je ne sais pas, on met 12 %, on met 13 %, on met 14 %, mais ça va faire en sorte qu'on va remplacer 70 % du revenu pas de la personne qui gagne 20 000 $, mais de la personne qui gagne, admettons, 40 000 $, bien c'est sûr qu'on n'aura plus le même régime, là, c'est sûr qu'on n'aura plus le même régime. Et ça, ce que je vous dis, c'est qu'à la CSD on loge à cette enseigne. On n'est pas défavorable à ça. Mais la réaction que je vous ai livrée, c'est celle de congressistes, de citoyens qui étaient présents au congrès puis qui ont dit: Arrangeons-nous pour garder ce qu'on a, dans un premier temps.

M. Hamad: Mais on ne se contredit pas, là, mais peut-être ça vaut la peine d'être clair davantage. En fait, je comprends que, lorsqu'on voit un résultat à la caisse, que tout le monde dit: Bien là, là, on ne va peut toucher au régime, parce qu'on ne va pas le perdre, ça, je comprends ça. L'objectif ici, c'est la pérennité du régime. Donc là, là-dessus on est sur la même longueur d'onde. Et là on peut dire: On va ajouter de l'argent dans le régime pour que les gens aient plus. Mais là on augmente un fardeau, là, tu sais, il y a une limite, à un moment donné, là. On est déjà à égalité avec les pensions Canada. Là, si on augmente, on est plus haut, on augmente la charge, il y a une limite. Ça, c'est une histoire d'équilibre, là. Ça, c'est sans... en touchant les désavantages, mais on va voir.

Mais, de l'autre côté, même si on augmente à 12 %, à 13 %, à 14 %, là, puis malgré... c'est une grosse proportion, bien on ne sera pas capable d'améliorer davantage l'épargne. De l'autre côté, c'est là l'ouverture, de l'autre côté, qui répond aux attentes, je suis convaincu, ce qu'on dit: Pourquoi qu'on ne fait pas un régime complémentaire à côté, volontaire, qui permet d'abord... avec toutes les fiscalités, il peut être avantageux? Et en plus ce régime-là permet à quelqu'un... Mettons, moi, je ne le sais pas, j'ai un enfant à 18 ans qui commence sa vie ou est à l'étude, mais, je sais, un jour va contribuer, mais à 18 ans il ne contribue pas, je peux contribuer pour lui. Je suis à la maison. Ma conjointe travaille. Elle, elle peut contribuer pour moi. Alors, ça devient un incitatif d'épargne. Et, en passant, 75 000 PME au Québec qui n'ont aucun régime de retraite pour leurs travailleurs... et là il y a un problème, là. Puis, quand... Moi, je demande juste que quelqu'un qui m'amène une bonne idée pour augmenter l'épargne.

Et je lisais un article dans La Presse il n'y a pas longtemps. En 1980 quelques, au Canada on était 11 % des gens qui ont des régimes, puis là on baisse, on est rendu à 2 % dans l'ensemble du Canada. Alors, il y a un problème, là, d'épargne au Canada. Puis, moi, j'ai demandé aux banques: Avez-vous une solution? Si vous avez une solution, on va vous aider. Mais, s'il n'y a pas de solution, il faut aider. Parce que, le même chiffre que vous a frappé... quand ces gens-là arrivent à la retraite, ils sont pauvres, mais on n'est pas plus avancé. Et...

M. Vaudreuil (François): Nous ne croyons pas, nous ne croyons pas que la solution passe par des stratégies individuelles. C'est juste ça dans le fond que... parce que ces stratégies individuelles là existent actuellement. Chaque personne au Québec a la liberté d'investir dans différents fonds. Tu sais, il y a une multitude, entre guillemets, de produits pour la retraite.

Une voix: ...

M. Vaudreuil (François): Pardon?

Une voix: ...

n(12 h 50)n

M. Vaudreuil (François): Oui, et ça existe. Alors...

M. Hamad: M. Vaudreuil...

M. Vaudreuil (François): Oui?

M. Hamad: ...ce n'est pas vrai, parce que la raison, la preuve, c'est qu'il y a 1 million, ils n'ont rien. Puis en plus...

M. Vaudreuil (François): ...pour mettre à la retraite. C'est ça, le problème.

M. Hamad: Bien, justement, quelqu'un qui gagne 30 000 $...

M. Vaudreuil (François): Ils n'ont pas d'argent.

M. Hamad: ...il n'a pas d'argent.

M. Vaudreuil (François): Il n'a pas d'argent.

M. Hamad: Mais, si on trouve une façon plus souple, plus facile pour que cette personne-là épargne et qu'il soit payant, l'épargne, il va le faire.

M. Vaudreuil (François): Mais en tout cas ce que... Ma trentaine d'années de militant syndical me dit que, si on veut changer cette culture-là, c'est par des approches collectives, ce n'est pas sur une base de volontariat. On n'atteindra pas des objectifs de société qui reposent uniquement sur des stratégies individuelles puis après ça en tentant de culpabiliser des gens pour dire: Bien, regarde, c'était de ta responsabilité de faire ça. Ce que je veux dire, c'est que, comme société, on a une responsabilité collective à cet égard-là et que, bon, si c'est mis sur pied, je pense qu'on ne pourrait pas atteindre les objectifs qu'on recherche, de part et d'autre, à cet égard.

Il y a un petit point que je voudrais parler, là, parce que ça n'a pas été soulevé tantôt avec nos prédécesseurs, c'est tout le volet de la rente d'invalidité. À la CSD, on représente beaucoup de personnes qui ont exercé, pendant leur vie active, du travail manuel très difficile, très difficile, du travail très contraignant. Et aujourd'hui, quand on analyse, par exemple, la rente d'invalidité, j'ai déjà entendu, moi, des jugements qui ont été faits sur des travailleurs à l'effet qu'ils abusaient, puis c'est ci, c'est ça. Mais c'est des gens qui ont oublié ce qu'était le Québec il y a 35, 40 ans dans les milieux de travail, des gens qui ont fait la rotation, tu sais, mettons de semaines de... une semaine de jour, une semaine de nuit, une semaine de... Tu sais, c'est des gens qui ont travaillé difficilement...

Le Président (M. Lehouillier): Alors, il faudrait peut-être...

M. Vaudreuil (François): ...puis des gens qui éprouvent des...

Le Président (M. Lehouillier): ...juste pour conclure.

M. Vaudreuil (François): Oui, mais c'est parce que c'est important. C'est des gens qui éprouvent des problèmes de santé, tu sais, majeurs, difficiles, puis là ils seraient limités au niveau de l'accès à la Régie des rentes. Moi, ça, là-dessus c'est des affaires pour lesquelles j'ai beaucoup de difficultés. Ça fait que ne touchons donc pas à ça pour les gens de 60 à 64.

Le Président (M. Lehouillier): M. Vaudreuil, ça ne veut pas dire la fin des échanges, puisque maintenant je cède la parole à la députée de Crémazie pour un autre bloc de 12 minutes.

Mme Lapointe: Merci beaucoup, messieurs de la CSD, de nous ramener un petit peu à l'ordre. De temps en temps, il faut le faire. Il faut qu'on se rappelle c'est quoi... c'était quoi, le travail il y a quelques années. Disons que les conditions de travail, de santé et sécurité, tout ça, ça s'est amélioré depuis 30 ans, mais il reste quand même que, quand on est col bleu, et il y a toutes sortes de métiers, la question de la Régie des rentes, la question de notre régime collectif d'assurance, c'est fondamental.

Je vais revenir sur différentes choses que vous avez dites, mais je connais un peu votre réponse, mais j'aimerais vous l'entendre dire. C'est qu'il est question aussi de retarder l'âge de la retraite. Dans les propositions, c'est une piste qui est envisagée. Et hier on recevait des personnes, des professeurs d'université, évidemment qui considéraient que plus les gens restent longtemps sur le marché du travail, mieux c'est, mieux c'est pour la suite des choses. Et, moi, j'invoquais qu'on n'est pas tous professeurs d'université dans la vie ou députés ou... et qu'il y a des gens qui même avant 60 ans sont déjà très, très fatigués, c'est très difficile. Souvent, ces personnes-là ont commencé dans le milieu du travail à 16 ans ou 17 ans et non pas après leurs études universitaires. Moi, ça, c'est quelque chose qui m'inquiète parce que je pense que, là, on oublie tous les différents corps de métier.

J'aimerais vous entendre là-dessus et aussi j'aimerais savoir quelle est la proportion de vos membres qui ont un régime complémentaire de retraite.

M. Vaudreuil (François): Bon. Bien, d'une part, je suis d'accord avec l'essentiel, là, de votre intervention.

Je vous dirais que, pour nous, à la CSD, ce qui est fondamental, c'est que le maintien au travail doit être libre et volontaire. Au moment où on se parle, il n'est pas libre et volontaire, parce que, quand les gens retournent sur le marché du travail après 62, 63, 64, 65 ans, souvent c'est pour des besoins d'argent. Ils l'avouent... Ils ne l'avoueront pas de prime abord, mais, quand on creuse ou on gratte un peu, là ils vont vous expliquer que c'est une question de pognon. Parce que l'autre réalité qu'on oublie aussi, c'est que souvent ces gens-là ont eu... ont exercé un travail décent, c'est-à-dire qu'ils avaient des bonnes conditions de travail. Leur entreprise a fermé, ils se sont retrouvé un autre boulot. Là, c'était moins pire. Comme les enfants avaient quitté la maison, c'était moins pire. Alors, ils ont été, pendant des périodes importantes, en situation de survie et ils se sont constamment appauvris. Alors ça, on en retrouve, on en connaît beaucoup.

Pour ce qui est du pourcentage, Normand me dit que, des vérifications qui ont été faites, là, si on exclut évidemment le secteur public, parapublic, dans le privé, dans les PME, ça doit être autour de 30 %, où il y a des régimes complémentaires de retraite.

Mme Lapointe: La Fédération des travailleurs du Québec a proposé l'idée d'avoir un régime universel de retraite, c'est-à-dire qui bonifierait donc, de façon très importante, la rente, le montant de la rente, au moment de la retraite. Est-ce que vous avez, vos membres et vous, est-ce que vous avez réfléchi à cette avenue-là?

M. Vaudreuil (François): ...pas en désaccord avec ça, d'aucune façon, d'aucune façon, comme je vous dis. Puis la raison pour laquelle on a fait, on a choisi cette orientation dans notre présentation, c'est que le congrès... les délégués du congrès chez nous étaient très préoccupés par l'état du financement, puis ce qui se disait, c'est que minimalement il faut assurer la pérennité de ce qu'on a avant de pouvoir penser à obtenir d'autre chose. On reviendra à la prochaine consultation, parce que de mémoire la loi nous dit qu'on doit revenir minimalement à tous les six ans. Alors, ça peut être trois ans. Ça fait que donc ils ont dit: Au prochain horizon, on pourra revenir, mais entre-temps conservons les droits qu'on a.

Mme Lapointe: ...vous nous disiez également que, lors de votre présentation, en 2004, il y avait des propositions qui étaient encore plus draconiennes et que donc...

M. Vaudreuil (François): ...

Mme Lapointe: ...que votre opposition avait porté fruit. Je pense que c'est important toujours que tous les groupes dans notre société soient représentés. C'est important que... C'est important, ce que nous disaient les femmes tout à l'heure et puis ce que vous nous dites en ce moment. J'ai compris que vous étiez d'accord avec l'augmentation du seuil des gains... du maximum des gains admissibles. Est-ce que vous considérez aussi que de garder l'objectif sur un remplacement du revenu de travail à 25 %, on nous dit même que c'est baissé un peu à 23 % en ce moment, là... est-ce que c'est suffisant ou bien est-ce que vous jugeriez qu'il faudrait que notre régime universel puisse remplacer un peu plus que ça, une part plus importante du revenu?

M. Vaudreuil (François): Il faudrait que... Moi, je pense que ce qu'on pourrait, à cet égard-là, se fixer comme objectif... C'est qu'actuellement il représente environ 70 %, puis là, si je me trompe, là, vous me le direz, là, mais 70 %, c'est pour un revenu d'environ 20 000 $ par année. Alors, ce qu'on pourrait faire, c'est qu'on pourrait prendre, je ne sais pas, un truc autour de... là, je n'ai pas les chiffres exacts, mais autour de 40 000 $, par exemple, puis dire: On peut-u s'arranger pour que notre régime, par exemple, couvre 70 %, jusqu'à concurrence de 40 000 $ par année? C'est sur un horizon de x. Ça, je pense qu'on... il faudrait aller dans ce sens-là, c'est sûr, c'est sûr, pour combattre les inégalités.

Mme Lapointe: Oui. Et il y a la... Une association de travailleurs et travailleuses accidentés nous a appris, en tout cas nous a rappelé que, si un travailleur a un accident de travail et qu'il passe une année, par exemple, à l'extérieur de son travail, les cotisations, enfin ce qu'il reçoit de la CSST, bon, ça, ça va, mais cette année-là compte pour zéro, une année qui compte pour zéro. Ça peut aller jusqu'à deux ans. Est-ce que vous aviez vu ça ou bien... Qu'est-ce que vous suggérez?

n(13 heures)n

M. Vaudreuil (François): Pour nous, ces éléments-là ne sont pas prioritaires, dans le sens où on retranche actuellement dans le calcul le 15 % des moins bonnes années. Or donc, ça a moins d'importance. C'est parce que... C'est ça que je vous dis: le choix qu'on a fait en venant ici, c'est de dire... parce qu'on craignait... on craignait qu'il y ait de nombreux reculs. Puis d'ailleurs, quand on a eu notre truc, notre forum... comment? C'était le forum de la solidarité que ça s'appelait, là. Dans mon intervention, ça a été bien clair, c'était de dire: Ne touchons pas à ces acquis-là qui sont aussi un antidote à la pauvreté.

Ça fait que donc, pour nous, ce n'est pas... c'était dans notre réflexion. C'est important, mais ce n'était pas prioritaire. Alors, c'est pour ça qu'on n'a pas voulu intervenir, ouvrir. C'est un choix, dans le fond, stratégique qu'on a fait en venant ici. Et, selon moi, ces situations-là sont atténuées par la règle du 15 %, là.

Une voix: Tout à fait.

Le Président (M. Lehouillier): Alors donc, oui, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Poirier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lehouillier): Allez-y, la parole est à vous.

Mme Poirier: Bien, merci pour vos propositions et puis vos bonnes paroles à... Particulièrement, c'est sur la rente d'invalidité que j'aimerais qu'on revienne. Est-ce que vous avez évalué les impacts, particulièrement pour vos travailleurs dans votre centrale, de la proposition de la mesure 60-64 ans? Est-ce que vous l'avez évalué, en tant que tel? Et quelles sont les conclusions de cette évaluation-là?

M. Vaudreuil (François): Bien, l'évaluation qu'on fait, tu sais, je vais vous donner, là, des... je vais vous donner un exemple bien concret, là, que tout le monde... je pourrais vous en donner plusieurs, mais une, entre autres, que tout le monde connaît très bien.

Prenez l'exemple des gens qui ont travaillé pendant 30, 35 ans à la mine d'amiante d'Asbestos. Or, il fait froid, il fait très chaud, ils travaillent de jour, ils travaillent de nuit, ils travaillent, ils ont fait ça pendant des années, ils travaillent physiquement. Or, si une personne arrive à 60 ans puis elle n'est plus capable, est usée, fatiguée en raison de la lourdeur, de la difficulté du travail, là, tu sais, puis ce que c'était, ce travail-là, dans leurs 20 premières années de vie active, là, tu sais, où il n'y avait pas les technologies qu'il y avait là, puis, aujourd'hui, on arrive avec des personnes, je ne voudrais pas les qualifier, là, mais des personnes qui viennent nous dire qu'il y a une exagération, puis tout ça... Mais, tu sais, ces personnes-là sont sorties de l'université puis ces personnes-là ont eu des emplois de col blanc, puis ils sont tombés à des salaires très élevés, tu sais. Alors, ce que je veux dire, c'est que...

Dans le vêtement, c'est... dans le vêtement, c'est la même chose. Tu sais, moi, j'étais à une assemblée générale où il y a une fille qui s'est levée à la fin, l'usine fermait, tu sais, puis elle dit: Moi, elle dit... puis elle dit: J'ai 60 ans, je ne peux plus travailler ailleurs. Puis là elle expliquait, puis elle dit: Moi, j'ai laissé l'école à 14 ans. J'étais la plus vieille de la famille. Puis elle dit: Mon père était décédé, puis maman m'a dit: Il faut que tu ailles travailler puis...

Ce que je veux dire, c'est qu'il ne faut pas oublier ce qu'était le Québec dans ces années-là. Puis aujourd'hui on se retrouve avec des personnes qui sont en difficulté. Puis non seulement ils sont malades puis ils sont diminués physiquement, mais en plus ils ont à se battre contre un régime puis ils ne sont pas tous syndiqués. Quand ils sont syndiqués, on leur donne un coup de main. Mais, je veux dire, ils se retrouvent seuls à se battre contre un monstre, ils sont découragés puis ils ont des problèmes de santé mentale.

Ça fait que, quand vous me demandez si on a quantifié, on accompagne, nous autres, ces situations-là. On les voit, on les vit à tous les jours puis on essaie de procurer un peu de bonheur puis de l'aide à ces gens-là. Alors, ce que je vous dirais, c'est: Dans le fond, c'est la vision humaniste qu'on doit avoir dans ces situations-là, autre que des chiffres ou des tableaux, tu sais, des indicateurs de performance. Puis ce n'est pas ça, là. Il y a du monde, là, derrière ça, dans la réalité, puis, à tous les jours, nous autres, sur le terrain, on les côtoie, ça fait qu'on peut vous en parler un petit peu.

Le Président (M. Lehouillier): Alors, merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Vaudreuil, merci beaucoup, M. Pepin, pour votre apport précieux aux travaux de cette commission.

La Commission de la santé et des services sociaux ajourne ses travaux au mardi 22 septembre, 10 heures, afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé Vers un Régime des rentes du Québec renforcé et plus équitable.

Merci de votre participation.

(Fin de la séance à 13 h 4)


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