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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(29 novembre 2022 au 10 septembre 2025)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mardi 3 juin 2025 - Vol. 47 N° 97

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 103, Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté


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Journal des débats

10 h (version non révisée)

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Provençal) :Alors, bon matin à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi no 103, Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté.

Mme la secrétaire, y a-t-il des emplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Abou-Khalil (Fabre) est remplacée par Mme Boivin-Roy (Anjou-Louis-Riel); Mme Caron (La Pinière) par Prass (D'arcy-McGee); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par Mme Gentilcore (Terrebonne).

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Nous débuterons ce matin par les remarques préliminaires puis nous entendrons les témoins suivants : l'Association des intervenants en dépendance du Québec et la Ville de Québec.

J'invite maintenant le ministre responsable des Services sociaux à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes. Je vous donne la parole.

M. Carmant : Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux d'être de retour ici aujourd'hui pour ce projet de loi qui témoigne de notre volonté de mieux préparer l'implantation des sites de consommation supervisée au Québec, notamment à l'égard de leur emplacement.

Tout d'abord, j'aimerais vous saluer, M. le Président, ainsi que les équipes ici, mes collègues de la banquette gouvernementale, les collègues des oppositions qui sont également avec nous aujourd'hui, ainsi que les représentants et représentantes des différents groupes aujourd'hui et demain.

Alors, ce projet de loi modifie diverses lois, notamment en matière de services de garde éducatifs, d'enseignement privé, d'instruction publique et de santé et services sociaux, afin de favoriser une cohabitation harmonieuse entre les sites de consommation supervisée et les communautés dans lesquelles ils se trouvent. On cherche ainsi à établir un équilibre juste et durable entre la nécessité des services de consommation supervisée sécuritaires, encadrés par les bonnes pratiques professionnelles, et les préoccupations bien réelles exprimées par des citoyens, notamment en ce qui concerne l'exposition des mineurs fréquentant les écoles et les garderies à proximité, à des événements et des situations pouvant affecter leur santé et leur sécurité. De cette manière, on pourra renforcer le sentiment de sécurité des citoyens et une meilleure compréhension du rôle des services de consommation supervisés comme étant un lieu pour rejoindre les personnes là où elles se trouvent et leur offrir des soins, et ce, tout en favorisant une cohabitation harmonieuse dans la communauté.

Les modifications apportées par ce projet de loi, comme je le soulignais tantôt, permettront de renforcer le rôle stratégique des sites de consommation supervisée. Il faut le dire très clairement : Les sites de consommation supervisée sauvent des vies. Ils permettent d'éviter des surdoses mortelles, ils créent un lien précieux entre des personnes marginalisées et notre réseau de la santé et des services sociaux, et mon objectif est qu'ils offrent une porte d'entrée vers le traitement des dépendances et des maladies chroniques.

Je rappelle qu'au cours des dernières années le nombre de sites de consommation supervisée a considérablement augmenté au Québec, passant de quatre, en 2020, à 14 en 2024. Et j'insiste, il va falloir en implanter d'autres, surtout au niveau de l'inhalation supervisée, dans les prochaines années pour continuer de répondre à cette urgence...

M. Carmant : …de santé publique. Notre gouvernement reconnaît leur pleine importance et c'est justement pour cela qu'il faut tenir compte des préoccupations légitimes des communautés locales pour préserver leur développement.

Ces dernières années, plusieurs de nos compatriotes… et je pense aux parents, commerçants, élus municipaux qui nous ont interpelés, particulièrement en raison de la proximité de certains sites de consommation supervisés avec des écoles, des garderies et d'autres lieux fréquentés par des enfants. Ce qu'on note, c'est que… c'est ce besoin pour la population de préserver la confiance et la sécurité de leur quartier. On est capable de tenir compte de cet enjeu, tout en poursuivant les efforts… les efforts d'implantation des sites de consommation supervisés.

Ce projet de loi est donc un… représente une solution équilibrée. Il instaure un régime d'autorisation claire, sous la supervision du ministre, pour encadrer l'installation des sites de consommation supervisés. Cette autorisation reposera sur une analyse rigoureuse de Santé Québec, mais aussi précédée par une consultation auprès du ministre de l'Éducation, de la Famille ainsi que les municipalités concernées.

Le régime prévoit l'interdiction d'autoriser un site qui se situerait à moins de 150 mètres d'une école, d'un centre de la petite enfance ou d'une garderie. Ces autorisations seront valables pour une période de quatre ans, avec des modalités claires de suivi, de renouvellement ou de révocation. En plus, il est possible d'adjoindre aux autorisations d'autres conditions qui pourraient mettre l'accent sur des éléments de sécurité, propreté et tranquillité dans les environs immédiats.

Pour qu'il ne puisse pas y avoir de rupture de services, il est également prévu des dispositions transitoires afin que tous les organismes offrant actuellement des services de consommation supervisés soient réputés titulaires d'une autorisation pour quatre ans au moment de la sanction de la loi. Cela permettra d'intégrer progressivement ces organismes dans le nouveau cadre réglementaire, sans interruption des services pour les bénéficiaires. Ce projet de loi témoigne aussi d'une volonté forte de mettre en place une trajectoire de soins plus coordonnée qui ne laisse personne de côté. En plus de donner accès à des lieux sécuritaires pour l'usage de substances, on veut qu'ils deviennent des portes d'entrée vers un traitement rapide et adapté pour celles et ceux qui le souhaitent, une occasion d'encourager l'adhésion volontaire aux soins et services chez les personnes réfractaires à recevoir de l'aide, une occasion d'offrir des soins et des services spécialisés sur place et une démarche visant la rétention dans les soins lorsque cela est nécessaire.

Et ce n'est qu'avec la mobilisation de tous les partenaires qu'on va pouvoir réussir. C'est d'ailleurs pour cela que je salue l'intégration à ce projet de loi de l'élaboration d'un plan de cohabitation, lequel témoignera de la collaboration intersectorielle requise avec tous les partenaires avant le dépôt du projet. La crise de surdoses est une réelle… une réalité douloureuse et elle affecte autant les personnes qui en sont victimes que celles qui les entourent. Elle bouleverse des vies, crée de la peur, du rejet, de la stigmatisation et parfois de l'incompréhension. On parle de plus de 50 personnes décédées par mois pour le compte de l'année 2024, selon les données de l'INSPQ. Derrière ces chiffres, ce sont des vies, des familles et des drames qui sont tout à fait évitables. Les actions que nous posons maintenant permettront de maintenir ces services, de s'assurer que le déploiement des sites de consommation supervisés se fasse dans un cadre respectueux, sécuritaire et socialement acceptable. Évidemment, je suis plus qu'ouvert à entendre les commentaires et suggestions afin d'améliorer le projet de loi que je vous propose et je remercie les représentantes et représentants des groupes invités d'être parmi nous aujourd'hui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, je vais maintenant inviter la porte-parole de l'opposition officielle et députée de D'Arcy-McGee à faire ses remarques préliminaires pour une durée de trois minutes 36 secondes. Je vous cède la parole.

• (10 h 10) •

Mme Prass : Merci, M. le Président. Également, je voudrais d'entrée de jeu remercier toutes les équipes, tous les collègues, tous les organismes qui ont déposé des mémoires, qui vont faire partie des consultations. Votre expertise, vos connaissances vont alimenter justement nos travaux par la suite.

Donc, on se trouve aujourd'hui dans le cadre du projet de loi intitulé Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisés afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté. On se comprend que dans les dernières années, l'enjeu de l'itinérance a explosé au Québec. La crise des opioïdes a explosé au Québec. Et là, on essaie... Le gouvernement essaie de faire un petit peu de rattrapage.

On se comprend qu'il y a des éléments, par exemple une absence de logements adéquats destinés aux personnes en situation d'itinérance ou en situation de toxicomanie qui sont disponibles et que, s'il y avait une meilleure disponibilité de ces services, on n'aurait peut-être pas à devoir adresser l'enjeu avec ce projet de loi de la façon dont on le fait.

C'est notre responsabilité d'étudier ce projet de loi, d'essayer de le bonifier compte tenu de ce que nous allons entendre et ce qui va nous être exposé. Toute la question de cohabitation en est une qui se discute davantage dans les dernières années. Et on voit l'absence de la présence du gouvernement par des programmes, par des… par du financement pour aider les organismes…

Mme Prass : ...organismes et des communautés, justement, à avoir un dialogue qui ferait en sorte qu'ils pourraient arriver à une situation de cohabitation harmonieuse, justement. Donc, remettre la responsabilité uniquement sur les organismes communautaires, je pense, est un élément très problématique avec ce projet de loi, que nous pourrons discuter lors de l'étude détaillée.

En fin de compte, on est là pour la sécurité de tous ceux qui sont concernés, autant nos tout-petits, autant nos familles, autant les personnes avec des enjeux de dépendances, qui, eux aussi, sont les enfants d'individus. Donc, ce n'est pas pour défendre une réalité plus qu'une autre, c'est vraiment pour faire le portrait de la situation et voir comment on peut tous... parce qu'on a tous un rôle à jouer dans cette réalité-là, comment on peut tous venir ensemble et collaborer pour justement s'assurer que nous sommes dans une société où nous avons tous un sentiment de sécurité et que chacun, indépendamment de... néanmoins de ses vulnérabilités soit pris en considération et se sente dans une société où ils sont soutenus, et que les moyens sont là pour, justement, voir cette réalité.

Donc on a hâte d'entendre ce que les groupes ont à dire. On a hâte de commencer les travaux, parce qu'il y a beaucoup d'éléments qui devront être bonifiés dans le projet de loi, et nous espérons, et nous attendons que le ministre soit ouvert, justement, à ces discussions-là pour que, comme j'ai dit, on puisse bonifier le projet de loi au bénéfice de tout le monde. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, je vais maintenant céder la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Saint-Henri-Sainte-Anne pour ses remarques préliminaires. 1 min 12 s

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, bonjour au ministre, bonjour aux collègues députés, bonjour aussi au groupe qui commence, l'AIDQ et la coalition aujourd'hui, là, qui vient nous parler, projet de loi important, M. le Président. On va l'étudier avec grande ouverture, mais qui arrive dans un contexte particulièrement difficile. Un contexte où les surdoses, malheureusement, explosent au Québec. Les chiffres de 2023, 459 décès par surdose et de janvier à septembre 2024, 485 surdoses mortelles malheureusement, donc en hausse de 33 %. Ce qui nous démontre que, oui, il y a des questions à évaluer, il y a des questions à étudier, mais il ne faut certainement pas limiter et complexifier l'accès aux services.

Les organismes en surdose, dépendance et ceux qui opèrent des SCS sont des gens qui sauvent des vies au quotidien. Je les ai visités la plupart. Ils me disent pour certains qu'ils renversent des surdoses à tous les jours, donc à tous les jours. On est très, très reconnaissants du travail qu'ils et elles font sur le terrain. Il va évidemment y avoir des enjeux de financement, des enjeux de responsabilisation sur à qui revient les objectifs de cohabitation. On va en parler. C'est tout le temps que j'avais, M. le Président, mais évidemment, on va travailler très fort dans l'étude du projet de loi. Merci.

Le Président (M. Provençal) : Je vous remercie beaucoup, M. le député. J'invite maintenant la députée de Terrebonne à… Ça va?

Mme Gentilcore : …ça va.

Le Président (M. Provençal) : Ça va?

Mme Gentilcore : Oui, merci.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, étant donné qu'on a terminé le volet des remarques préliminaires, je vais débuter les auditions, ce qui me permet maintenant de saluer et de souhaiter la bienvenue à l'Association des intervenants en dépendance du Québec, qui sont représentés par la directrice générale et trois partenaires présents pour les échanges. Alors, vous avez 10 minutes pour votre présentation et par la suite, on procédera aux échanges. Je vous cède immédiatement la parole.

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Alors, M. le Président, membres de la commission, à titre de directrice de l'AIDQ je vous remercie de nous donner la parole aujourd'hui. Je suis en compagnie de trois collègues, Rémi Pelletier, représentant des personnes qui font usage de drogues, Simon-Xavier Perreault, qui représente les services de consommation supervisés que nous nommerons SCS et Pénélope Boudreault, représentante des services de santé.

Ainsi, notre groupe, avec l'AIDQ, porte la voix de 30 organismes et acteurs engagés en santé publique. On le sait, le Québec traverse une crise de surdoses et le manque de ressources et de logements. Dans cette lutte, les SCS sont reconnus comme essentiels pour sauver des vies et améliorer les environnements. La jurisprudence et un tout récent rapport du coroner Julie Kim Godin sont sans équivoque là-dessus.

Le projet de loi n° 103 met les SCS en péril, notamment en imposant un régime d'autorisation très complexe. Et Simon-Xavier nous en parlera davantage. Le projet de loi transfère la responsabilité de la cohabitation sociale sur les épaules des organismes, alors qu'elle devrait être…

Mme Vadlamudy (Sandhia) : …partagé. Il y a d'ailleurs plusieurs exemples probants, dont celui de PACT de rue, à Montréal, en ce moment même. Nous estimons que les dispositions prévues par le projet de loi sont contre-productives, stigmatisantes envers les personnes qui consomment des substances ou vivent en situation d'itinérance, Rémi pourra nous en parler, inefficaces quant aux causes profondes de la crise et inéquitables entre les SCS communautaires et des SCS sous l'égide de Santé Québec.

Ainsi, nous recommandons d'emblée au gouvernement de retirer le projet de loi n° 103 et de mener avec les parties prenantes une réelle consultation. Et, bien que l'approche législative ne nous convienne pas, nous estimons tout de même essentiel de porter à l'attention du gouvernement les angles morts et les risques de ce projet de loi.

Et là-dessus je cède la parole à Rémi.

M. Pelletier (Rémi) : Merci, bonjour. Je m'appelle Rémi Pelletier. Je travaille à l'AQPSUD. Par le passé, j'ai été à la fois militant, consommateur et même conseiller municipal, dans l'ordre et dans le désordre. Aujourd'hui, il est probable qu'au sein même de cette salle des jeunes ici, vos parents, vos frères, vos sœurs ou vos enfants utilisent les SCS. Certains ont probablement été sauvés. Si on leur retire cet accès, il va sans dire que c'est délibérément que toutes ces personnes se voient placées en situation de risque plus élevé. Imaginez l'impact que ça aura sur les gens que vous aimez.

Premièrement, le p.l. n° 103 imposera plusieurs changements irréalistes dans la vie des consommateurs. Eux, qui sont généralement déjà mal vus dans la société, devront s'adapter à de nouvelles conditions d'accès aux soins. Imaginons un instant qu'un SCS se retrouve aux abords d'un parc industriel plutôt que dans Hochelaga-Maisonneuve, pas d'école, pas de garderie. En fait, pour y accéder, il y a deux arrêts de bus aller-retour. Les jours passent, madame X fait deux heures de bus tous les jours pour aller consommer. Elle est vue dans ce parc par tous les employés qui y travaillent. Vous pensez qu'elle ne serait pas stigmatisée, vous? Le fait que les SCS soient situés dans des endroits passants lui donne un anonymat nécessaire dont elle a… qu'elle a perdu dans ce parc. Au final, madame X retourne consommer dans la rue, à 150 mètres d'une garderie, là où se trouvait précédemment un SCS. Pire encore, elle n'a plus accès à du matériel stérile. Elle risque donc de contracter une STS et même de mourir d'une surdose. Alentour, plus personne n'est formé pour l'aider.

C'est à ça que nous expose le p.l. n° 103. Pourquoi la prémisse du p.l. n° 103 est une fausse réalité, une «fake news», à savoir que les SCS nuisent au développement des enfants? Aucune donnée probante ne va dans ce sens. En adoptant le p.l. n° 103, le gouvernement légitimise ces idéologies infondées et contribue à la stigmatisation et à l'isolement des personnes qui consomment. Au lieu de projets de loi qui marginalise les personnes qui consomment, les stigmatisent et les isolent, on devrait plutôt prendre leur avis. La manière de faire est évidente. Il faut traiter avec les OBNL qui leur dispensent les services qu'ils choisissent d'utiliser, dont ceux des organismes parés pour.

En conclusion, le gouvernement a l'obligation de veiller à ce que toutes les lois relevant de sa compétence respectent et défendent les droits de tous les membres de la communauté. Ils sont protégés par les chartes québécoise et canadienne des droits et libertés. Les valeurs personnelles, les intérêts économiques et les sentiments de confort personnel ne peuvent jamais l'emporter sur cette obligation légale, éthique et humaine. C'est chaque Québécois qui a un ou des proches qui consomment qui est concerné. Je vous rappelle que l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, selon laquelle chaque personne a droit à la vie et à la santé… et cela inclut les personnes utilisatrices de drogues. Merci. Je vais céder la…

• (10 h 20) •

M. Perreault (Simon-Xavier) : Salutations à tous, à toutes. Je me présente, Simon-Xavier Perreault, coordonnateur de L'Interzone et sortant à la maîtrise en psychoéducation.

Aujourd'hui, nous faisons face à une crise de santé publique sans précédent. Partout au Québec, les surdoses sont en hausse, 645 morts en 2024, plus de 30 % d'augmentation, et pourtant, dans les sites de consommation supervisée, on ne recense aucune surdose mortelle. C'est, selon moi, la meilleure statistique, la plus belle. C'est une donnée fondamentale, chaque intervention permet non seulement de sauver des vies, mais aussi de désengorger nos urgences, de réduire les coûts d'hospitalisation. Ce sont des économies pour notre système de santé, mais surtout ce sont des personnes qui restent en vie.

Comme il est mentionné dans le mémoire de la coalition, les SCS sont déjà soumis à un processus long et coûteux afin d'obtenir une exemption à la loi fédérale. Les organismes qui offrent ce type de service sont désormais… devront désormais fournir un deuxième ensemble de documents, avec les exigences équivalentes au gouvernement du Québec. Selon… 2022, le milieu et l'approche communautaire sont des piliers, des fondements dans l'opération des sites de consommation supervisée. Encore une fois, le public sous-estime la charge qu'il lui demande à travers cette masse bureaucratique…

M. Perreault (Simon-Xavier) : ...ne sont pas seulement des lieux de prévention, ce sont aussi des portes d'entrée vers la réaffiliation sociale et les soins, notamment pour les personnes les plus vulnérables souvent en rupture avec les institutions. En offrant des espaces sécuritaires autant physiquement, socialement et même judiciairement, ces lieux permettent de retisser des liens, de reconstruire la confiance et de redonner accès aux services publics. Ils jouent également un rôle clé dans la réduction de la criminalité et la judiciarisation.

Là où on implante un SCS, la gestion collaborative de l'espace public contribue à une cohabitation plus harmonieuse avec le voisinage. On observe moins de consommation visible, moins de seringues dans les rues et une meilleure qualité de vie pour tous. Et surtout, l'efficacité des SCS est documentée. On pense à... et al. dans une revue de 22 études, qui concluent que les sites de consommation supervisés réduisent les risques de surdoses et de décès, augmentent l'accès aux soins et limitent la criminalité dans le voisinage. On pense à Marshall et al. 2011, qui démontrent que l'ouverture d'Insite à Vancouver entraîne une baisse significative des décès par surdoses. On pense à Potier et al. 2014, qui soulignent également leur rôle dans la réduction des ITSS et l'amélioration de l'accès aux services sociaux.

Alors, oui, les SCS sont efficaces. C'est même la prémisse de mon essai qui porte sur les interventions en sites de consommation supervisée. Au-delà des chiffres, il est essentiel de documenter davantage les interventions concrètes qui s'y déroulent, de valoriser l'expertise développée sur le terrain et de soutenir le déploiement à l'échelle provinciale. Merci.

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Donc, pour conclure, le projet de loi n° 103 suscite, vous l'avez entendu, de vives préoccupations. Plutôt que d'améliorer la situation, son application va l'aggraver en contraignant les personnes en situation de vulnérabilité à consommer dans des environnements non sécuritaires, au détriment de leur santé, de leur sécurité et surtout de la cohabitation sociale, en imposant un fardeau supplémentaire et inégal aux organismes communautaires, de surcroît.

Nous constatons que plusieurs dispositions du projet de loi semblent en contradiction avec les orientations gouvernementales, notamment avec la Stratégie nationale de prévention des surdoses, qui, elle, privilégie des approches basées sur la réduction des risques et des méfaits et la concertation avec le milieu communautaire.

Les SCS sont des services de santé à part entière reconnus dans les orientations nationales et protégés dans la jurisprudence canadienne. Ils ne peuvent être traités comme des exceptions à réglementer, par suspicion ou par crainte. Le gouvernement a le devoir de les reconnaître explicitement comme des services de santé essentiels en leur assurant un cadre réglementaire stable fondé sur les données probantes en santé publique et les principes de réduction des risques et des méfaits. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) : Alors, M. le ministre, nous allons initier immédiatement la période d'échange. Alors, vous avez la parole pour 16 min 30 s.

M. Carmant : Bien, merci beaucoup pour cet échange. Je pense que, sur le fond, on dit la même chose, c'est-à-dire que les centres de consommation supervisés sont importants, il nous en faut d'autres à travers le Québec. L'enjeu, maintenant, c'est pour... Avec le projet de loi actuel, on impacte deux des centres existants, puis maintenant l'enjeu, ça va être surtout, pour les prochains qu'on veut ouvrir, où est-ce qu'on va les situer.

Le seul commentaire avec lequel je n'étais pas d'accord, c'est qu'on dit que ça n'a pas d'impact sur les enfants. Mais y a beaucoup de données probantes qui montrent que le stress parental influe sur le développement des enfants. Donc, un parent stressé, quelle que soit la raison, ça impacte le développement de ses enfants. Ça, c'est... je suis neuropédiatre, là, de carrière, donc, ça, je pense qu'il n'y a aucun doute là dessus. Maintenant, la question c'est vraiment comment faire pour s'assurer que ça se fasse de façon harmonieuse.

Moi, ce que j'ai constaté... Moi, j'ai été impliqué dans l'ouverture d'un seul de ces sites-là, là, puis ce que j'ai remarqué, c'est que la cohabitation n'était pas préparée en amont. Et ce qu'on veut s'assurer, avec ce projet de loi, c'est que cette cohabitation se fasse lors du dépôt du projet. Donc, c'est pour ça que, contrairement à dire qu'on on met le fardeau à l'organisme, nous, on veut que ça se fasse en collaboration avec...

M. Carmant : ...qui va être Santé Québec, avec l'organisme communautaire, et que les ressources vous soient données pour faire... pour s'assurer que les choses se passent bien.

Maintenant, ce que j'aimerais savoir, c'est comment vous... comment... comment vous exprimeriez ça dans vos mots pour s'assurer que ça se passe le mieux possible?

Mme Boudreault (Pénélope) : Bien, je pense que, comme on disait tout à l'heure, il faut s'asseoir avec les organismes puis avec les personnes qui consomment. Puis on est aussi sensibles à la réalité des parents qui sont inquiets. Ça fait que c'est tous ensemble qu'on doit réfléchir à ça. Parce qu'il y a déjà un système qui est extrêmement complexe, puis je comprends, vous parlez de cohabitation qui va être une affaire de tous, mais c'est quand même les organismes qui, dans leur mission, vont développer un site de consommation supervisée, par exemple. Et là ils vont devoir aller vers... chercher des ressources, chercher des personnes qui vont les aider à développer un plan de cohabitation ou développer des corridors de services, parce qu'on parle aussi d'avoir accès dans le système de santé. Ça fait que, quand on parle de fardeau qui est remis sur le dos des organisations communautaires, c'est ça qu'on veut dire, parce que, dans la réalité, l'organisme communautaire se développe. Il doit se chercher un secteur parce que c'est difficile aussi de trouver un endroit où se localiser. Que tu aies un site de consommation supervisée ou pas, c'est déjà extrêmement complexe d'offrir des services à cette population-là qui vit dans les rues puis dans nos secteurs où il y a des écoles, des garderies et des CPE. Donc, c'est juste de rajouter un fardeau sur une réalité...

Puis les parents sont inquiets. Moi, je suis infirmière, j'ai travaillé à Sainte-Justine, j'ai deux enfants, je suis dans le milieu de la rue à Médecins du Monde depuis 20 ans. On comprend cette inquiétude-là. Les parents sont inquiets tout le temps, à propos de tout. Ce n'est pas nécessairement à cause des projets de consommation supervisée. La drogue est présente dans les écoles, est présente dans d'autres milieux. Est-ce que c'est vraiment la solution de réglementer sur un service qui sauve des vies, qui est un milieu d'accès à un milieu de la santé puis à un «step-up» pour les personnes qui consomment parce qu'elles sont entourées de personnes qui sont spécialisées, avec plusieurs spécialités, des intervenants, des pairs, des personnes qui consomment elles-mêmes, des infirmières, des intervenants, des travailleurs de rue. Il y a des personnes qui se déplacent, du système de la santé, des infirmières de proximité. Il y a des médecins, il y a des IPS qui viennent dans ces milieux-là. C'est un milieu de santé dans le communautaire.

M. Carmant : Mais on va rester sur la cohabitation, c'est... Ce qui est arrivé, cependant, c'est que, quand j'ai demandé à certains... à des organismes de rehausser la cohabitation, on m'a dit : Ce n'est pas de mon ressort. Ça fait que je peux comprendre, mais c'est du ressort de qui, dans ce contexte-là? J'ai fait la même remarque à la Santé publique. Ils m'ont dit également : Ce n'est pas de mon ressort.

Donc, ce qu'on vient, ici, je pense, faire, c'est, en passant par le mécanisme qui est établi ici, s'assurer que toutes les parties prenantes jouent un rôle dans ce phénomène de cohabitation.

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Je pense que ça fait partie de notre message essentiel, de dire que cette cohabitation concerne l'ensemble des parties prenantes, pas seulement les groupes communautaires, qui en font déjà beaucoup à travers leurs missions et qui vont tous les jours au-delà de leurs missions.

Maintenant, pourquoi il y a... Parfois, vous entendez certainement des réponses, de dire : Ce n'est pas de notre ressort? C'est parce qu'il y a un grand manque de moyens. Il manque de ressources, il manque de moyens, il manque de plans rassembleurs de tous ces acteurs dans la communauté. Et le projet de loi qui a été déposé n'annonce pas de moyen non plus qui vient du gouvernement pour soutenir ces démarches en amont et après, en continu, parce que c'est la clé.

• (10 h 30) •

M. Carmant : Bien, on s'entend là-dessus, mais une règle que vous ne connaissez pas, c'est que, dans un projet de loi, on ne peut pas mettre de règle financière, mais le passage par Santé Québec pour le déploiement passe... doit s'assurer implicitement que le financement soit inclus pour cette mission-là, vous comprenez?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Je l'entends bien. Pour l'instant, nous ne sommes pas rassurés parce que, par exemple, en ce moment, on est dans une situation où la Stratégie nationale de prévention des surdoses n'est pas confirmée auprès des groupes communautaires. On attend encore les sommes et on est obligé de mettre des projets qui sont structurants pour lutter contre les surdoses dans chacune des régions du Québec, et on doit mettre ces projets-là en attente de confirmation de financement, qui devrait arriver au milieu de l'automne. Ça, c'est un non-sens et ça fait partie des inquiétudes, quand on ne voit pas ce soutien-là...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

Mme Vadlamudy (Sandhia) : …transparaître à travers une initiative qui est déposée par le gouvernement. On a aussi des groupes communautaires qui sont porteurs déjà de la SCS et qui attendent la confirmation de leur financement… d'un financement qui avait été confirmé il y a deux ans et qui n'est toujours pas reçu pour cette année, un financement qui devrait être structurant pour les SCS à Montréal.

M. Carmant : Il y a eu une transition. Il y a eu une transition peut-être un peu difficile l'an dernier, là, j'en conviens, puis on a eu plusieurs échanges là-dessus, mais on me souffle à l'oreille justement que les lettres vont être rendues d'ici la fin de l'été et que, comme je vous l'ai dit lors de nos échanges précédents, les sommes vont s'y rendre. Donc, je pense que… Il faut que vous compreniez que l'intention du passage via Santé Québec, c'est un… c'est plus dans l'intention de s'assurer que toutes ces mesures de cohabitation soient couvertes.

Une autre chose dont je ne sais pas si vous êtes au courant, là, mais j'ai tenu quelques rencontres avant… avant le projet de loi, là, sur une base personnelle de ministre, là, où on a discuté de développer une trajectoire de soins pour la toxicomanie parce que mon observation sur le terrain, c'est qu'il y a beaucoup de silos. Il y a ceux qui travaillent très fort dans la réduction des méfaits, il y a ceux qui travaillent dans le traitement des surdoses avec de la toxicomanie, mais la relation entre les deux n'est pas très fluide… entre ces deux groupes-là n'est pas très fluide. Et je me suis assis avec quelques-uns d'entre vous qui sont dans la salle ici pour amorcer les discussions, et j'avais demandé au ministère de continuer ces discussions-là. On me dit que les lettres devraient arriver sous peu, mais on va créer un comité pour développer les trajectoires de toxicomanie, et le premier projet pilote va être à Montréal, et on veut continuer à vous impliquer là-dedans.

Donc, je comprends que les discussions n'ont pas été faites de façon soutenue en amont du dépôt du projet de loi, mais on compte bien les continuer, là, puis ça, ça va être important aussi. Et je pense… et je pense que j'aimerais que vous me parliez peut-être de votre rôle dans ces discussions-là puis comment vous voyez votre apport à ces comités-là… à ce comité-là.

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Bien, notre rôle, on le voit comme étant très proactif, et je pense que c'est un rôle qu'on a mis de l'avant auprès de vous, auprès du gouvernement, dans les… certainement de façon intensive, au cours de la dernière année, dernière année et demie. Les discussions sur cette trajectoire, oui, on a entendu parler de ces discussions. Certains en ont été partie prenante, mais les discussions se sont arrêtées en janvier dernier, et depuis on n'a pas eu de nouvelles, bien qu'on a tenté de recevoir des nouvelles à plusieurs reprises.

On a également communiqué avec vous, comme coalition, en janvier pour vous offrir de travailler en collaboration pour cerner le rôle qu'on peut jouer à l'intérieur de de cet… de tous ces enjeux liés aux crises et de ce mouvement au niveau gouvernemental qui affecte les groupes, parce que non seulement il y a la stratégie de prévention des surdoses qui inquiète, mais il y a également des coupures, au niveau de Montréal, de 24 % de l'enveloppe de prévention ITSS qui affecte actuellement les groupes. Donc, il y a énormément de préoccupations sur les moyens à disposition pour pouvoir contribuer à la hauteur de ce que voudraient faire les groupes.

M. Carmant : D'accord. Et donc ça, ça va être un processus, là… Comme je vous dis, les lettres devraient arriver sous peu puis le comité devrait être actif également dans les prochaines semaines, au plus tard au début de l'automne. Donc, ça, ça va être quelque chose d'important aussi.

Bon, une chose sur laquelle aussi je suis très sensible, là, c'est… Vous mentionnez la complexité de l'autorisation. Pouvez-vous m'en dire un peu plus, là, actuellement, comment ça se fait et puis… parce que le but n'est pas nécessairement de complexifier… le but est d'avoir un filtre.

M. Perreault (Simon-Xavier) : En fait, on a fait déjà une demande fédérale avec toutes les autorisations qui vont être similaires, probablement, à celles demandées par Santé Québec. Donc, on vient tout simplement doubler la charge de travail des organismes qui tiennent un site de consommation supervisée, déjà qu'ils sont débordés. Et je me permettrais aussi de revenir quelques minutes plus tôt…

M. Perreault (Simon-Xavier) : ...vous avez dit qu'un site de... les sites de consommation supervisée en place vont être peu impactés par le projet de loi, mais je tiens à dire qu'à Québec nous sommes le seul site de consommation supervisée d'interzones. On déborde. Et on espère avoir un deuxième site de consommation supervisée. Cependant, un projet de loi comme celui-là vient nuire à la mise en place d'un deuxième site et vient mettre un clou, peut-être, dans le cercueil de notre espoir d'avoir un... de cesser de déborder.

Et, en fait, je reviendrais aussi quelques minutes plus tôt : Est-ce que... est-ce que vous vous engagez, en fait, à... qu'il y ait un financement octroyé pour la cohabitation? Est-ce que Santé Québec s'engage à ça?

M. Carmant : C'est un peu atypique, là, d'habitude, on ne me pose pas des questions. Mais j'ai clairement mentionné que le but de passer par Santé Québec est de s'assurer que le financement octroyé soit adéquat. L'intention est claire, là, l'intention est vraiment claire, ça ne peut pas être plus clair que ça. Puis l'autre chose qui est importante aussi de mentionner... bien, d'ailleurs, pour Maison Benoît Labre, pour ne pas la nommer, on a sorti du financement additionnel, un, pour l'organisme, et, deux, pour un autre organisme qui effectue les patrouilles quand l'organisme lui-même ne voulait pas le faire. Tu sais, c'est... Donc, on est rendus là puis on pense que c'est nécessaire de soutenir ces initiatives-là. Puis pour la Capitale-Nationale, oui, on travaille sur un autre site, et ne perdez pas espoir, s'il vous plaît. C'est très important de continuer à développer ces sites-là, puis je l'ai dit d'entrée de jeu aussi.

Mme Boudreault (Pénélope) : Je... Est-ce que je peux me permettre...

M. Perreault (Simon-Xavier) : Oui, allez-y.

Mme Boudreault (Pénélope) : ...de rajouter sur le comment... bien, le fardeau, mais aussi, comment on peut travailler avec vous. Je pense que la question est extrêmement bonne, puis c'est ce qu'on est en train de faire ici. Les groupes se sont tous mobilisés, et tout le monde va venir, de Montréal, ou de Québec, ou d'autres régions, pour vous rencontrer, pour parler avec vous. Ce qu'on vous demande, c'est : En quoi le projet de loi va faciliter ces discussions-là? On a une expertise, on peut répondre à plusieurs questions sur ce qu'on vit sur le terrain, ce que... les personnes elles-mêmes qui consomment, qui ont cette expérience-là. Est-ce qu'il y a eu ces moments-là, pour que nous, on puisse s'asseoir avec vous puis partager notre expertise?

Il y a plusieurs problématiques dans le projet de loi actuel. Le fait que les... Vous dites que ça affecte peut-être seulement deux sites. En fait, nous, à Médecins du Monde, on s'est fait demander : Pourriez-vous le faire, parce qu'il manque beaucoup de sites, vous pourriez, dans votre... dans votre motorisé, le faire? Mais nous, on se remet en question, parce qu'avec un... ce qui plane au-dessus de nos têtes est-ce que, dans quatre ans, ça pourrait... est-ce que, s'il y a des plaintes de certains citoyens... Qu'est-ce qui va faire que, dans quatre ans, on pourrait se le faire enlever? Ça fait que tout le fait, autour, que ça peut être révocable, ça concerne tous les organismes, pas seulement les deux qui sont à moins de 150 mètres. Ça fait que ça, c'est vraiment inquiétant pour les groupes.

• (10 h 40) •

M. Carmant : L'autre versant de la médaille, parce qu'il y a toujours un autre versant, c'est qu'actuellement, à cause de l'inquiétude générale dans la population on n'est même pas capables d'ouvrir de l'hébergement pour personnes en... tu sais, qui sont prêtes à sortir de l'itinérance, puis... Donc, il faut venir sécuriser la population que les choses vont être faites de façon ordonnée, pour s'assurer que, quand on... quand quelque chose ouvre, bien, il n'y a pas... il n'y a plus d'enjeu, et les règles sont claires pour tout le monde.

Puis je vous ai entendus, là, je vous entends bien que vous trouvez que c'est trop strict. C'est pour ça qu'on passe par le processus de la commission parlementaire. Et moi, je suis quelqu'un de très à l'écoute. On va s'assurer de... que tout ce qui est fardeau excessif, là, soit allégé le plus possible. Mais je pense qu'on a... ça répond également à un besoin de la population, pour s'assurer qu'on puisse développer des sites de consommation supervisée, mais également de l'hébergement. Parce qu'actuellement, le... mon besoin principal, c'est de développer du logement de transition et du logement supervisé, et c'est moi qui me dois... qui doit me déplacer, avec les organismes communautaires, dans les communautés, pour les rassurer, là. Tu sais, je suis allé à Rosemont, je suis allé à Ahuntsic, je suis allé à Montréal, partout, là, il faut que le ministre soit là. Ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'il y ait des règles claires qui vont rassurer la population et qui vont être tenues dans tous les projets. Comme ça, les choses vont se faire beaucoup plus facilement, selon moi. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Je vais maintenant céder la parole à la députée de D'Arcy-McGee, pour 9 min 54 s.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Je sais que toute la question...

Mme Prass : ...la cohabitation vous rejoint également. Ce n'est pas une question des parents qui sont concernés et vous qui n'êtes pas concernés. Le ministre dit que dans le passé, par exemple, la maison Benoît Labre, qui est l'organisme, n'a pas voulu faire les mesures de... rehausser les mesures de cohabitation, mais tel que mentionné, il n'y avait pas de budget additionnel pour qu'ils le font. Déjà, c'est beaucoup du financement par projet pour laisser les CSES et tout l'argent que vous avez doit évidemment aller à la mission de ce que vous faites qui est d'aider les gens. Donc, une de vos recommandations, puis on vient de l'évoquer à un certain point, c'est qu'il y ait un financement justement pas seulement pour les mesures de cohabitation, mais également, ça tombe dans la même catégorie, les mesures d'atténuation, parce que ça se peut que vous ayez fait du travail en amont. Une fois que vous ouvrez, vous voyez que ça ne répond pas nécessairement à la réalité. Et il faut rajouter les mesures qui vont... les mesures qui vont être en place, mais vous avez besoin des moyens pour le faire. Avez-vous une idée, à une moyenne, ça demanderait combien d'argent, sans qu'il y ait de fonds additionnels qui vous soient octroyés? Est-ce que c'est un 10 % de votre financement, un 5 %, un 15 % que vous... que les organismes, les CSES auraient à dédier pour les mesures de cohabitation et d'atténuation?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Moi, je ne parlerais pas de budget en ce moment parce que je pense que ce n'est pas réaliste de commencer à émettre un chiffre en ce moment et surtout pas de l'accorder complètement au groupe communautaire qui est responsable du SCS. Donc c'est une démarche que l'on pense importante d'être faite de manière concertée, à l'intérieur d'un plan qui implique une multitude d'acteurs et qui est porté par l'ensemble de ces acteurs également. Donc je... De mon côté, je pense que mettre un chiffre n'est pas une bonne idée en ce moment. Est-ce que tu veux ajouter quelque chose?

Mme Boudreault (Pénélope) : ...à ajouter que je suis d'accord complètement avec Sandhia. Ce n'est pas une question de chiffre, c'est une question aussi de volonté. C'est l'affaire de tous de travailler en cohabitation. Ça inclut les citoyens, ça inclut le gouvernement. Tout à l'heure on parlait de sentiment de sécurité dans la population. C'est un peu un «statement», excusez l'anglais, fort du gouvernement, et de la population, et de la société de dire : On veut prendre soin de ces personnes-là qui consomme, ça fait que travaillons ensemble. Ce n'est pas nécessairement en... Parce qu'il n'y aura jamais assez d'argent pour convaincre des gens de travailler ensemble puis de réfléchir ensemble.

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Oui. Et ce travail doit être fait de manière, de manière unique, dans chaque milieu également. Un élément important aussi à retenir pour effectuer une démarche qui soit cohérente avec le milieu, c'est de ne pas faire une approche qui convient à tous, parce qu'il n'y a pas un milieu qui est pareil. Dans un certain milieu, 150 mètres à côté d'une garderie, il est possible que ça ne cause pas d'enjeux, mais il faut prendre le temps d'en prendre la mesure, d'en discuter et de voir avec l'ensemble des parties prenantes qu'est-ce qui fait sens pour ces personnes-là en fonction de la configuration et de l'existence des services dans le milieu où s'implante ou existe le SCS. Et ça, le milieu communautaire le fait depuis longtemps, mais en partenariat avec les autres organisations de sa communauté.

Mme Prass : ...que tout le monde a un rôle à jouer. Il faut que tout le monde soit impliqué. Par exemple, l'idée d'avoir, dans le cadre des mesures de cohabitation, l'idée d'avoir par exemple un comité de bon voisinage, mais qui est permanent, qui rejoint la police, l'organisme, les gens dans la communauté, est-ce que c'est quelque chose que vous pensez?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : C'est une avenue fort pertinente, mais il faut faire attention à ce que ce comité-là ne soit pas l'unique et seule responsabilité du groupe communautaire à avoir à coordonner et mobiliser parce qu'il est une partie prenante importante. Donc, d'avoir un comité qui se rencontre. Mais qui a aussi une coordination qui soit un... qui ait une certaine neutralité dans cette coordination-là, c'est un facteur important dans le succès de ce type de démarche.

Mme Prass : Et, entre autres, vous recommandez de jumeler la demande avec la demande qui est faite auprès du fédéral pour ne pas faire du dédoublement. Quels sont les éléments qui sont demandés au niveau fédéral? Et est ce qu'il y a des éléments de cohabitation également qui vous sont...

Mme Prass : ...dans le cas de ces demandes.

Des voix : ...

Mme Vadlamudy (Sandhia) : O.K. Non, il n'y a pas d'éléments de cohabitation sociale demandés dans la demande fédérale. Par contre, cette demande au fédéral comporte tous les éléments budgétaires, les éléments de concertation avec le milieu, avec les instances de santé, tous les règlements qui sont imposés pour les opérations de la salle de consommation supervisée. Donc, c'est une démarche qui est assez colossale à mener et la démarche qui serait en ajout au niveau provincial pour obtenir le permis ne semble pas être collée avec cette démarche-là. Et c'est-à-dire que de mener une démarche, c'est suffisant. Donc, on a tous les éléments à travers l'obtention de cette exemption pour que... pour qu'on soit rassuré sur la qualité du service qui va être offert. Et dans la... le... dans les éléments de permis qui sont nommés dans le projet de loi, on va aussi en consultation de plusieurs ministères. Ça, ça ouvre la porte aussi à toute une durée, hein, et à se dire : Bon, mais, O.K., mais tout ça, toute cette démarche-là, combien de temps elle va durer dans le temps et de quelle manière le groupe va être capable, en fait, de soutenir les travaux pendant toutes ces consultations?

Mme Prass : Et justement vous, vous parlez, entre autres, de la création d'un fonds d'appui provincial et un soutien financier pour cibler des organismes. Pouvons-nous nous donner une idée, justement, des besoins qui ne sont pas... auxquels... bien, les besoins qui combleraient... ce que ce fonds comblerait? Parce qu'on comprend, c'est souvent par là un projet, on comprend que l'argent à la mission n'est jamais à la hauteur des besoins. Donc, quels sont les éléments, justement, que ce fonds pourrait couvrir qui présentement ne vous sont pas accordés?

M. Perreault (Simon-Xavier) : En fait, dans un VCS, en fait, il y a plusieurs facteurs. Le facteur principal, en fait, c'est la sécurité d'un site de consommation supervisée. C'est probablement le schème et la valeur qu'on doit préconiser et mettre de l'avant. Donc, mise en place de locaux sécuritaires accessibles pour les gens qui utilisent les services, de la façon qu'ils les utilisent, et pour les personnes qui y travaillent. Donc, premier élément, je crois que ce serait vraiment au niveau de la sécurité. Je passerais la parole. Je n'ai rien d'autre à ajouter à ce niveau-là.

Mme Boudreault (Pénélope) : Bien, je sais qu'il faut s'adapter, ça fait qu'il faut déjà que l'espace soit adapté, là, parce qu'on ne peut pas juste dire : ah, il y a une salle ici, puis on va consommer dans cette salle-là. Il y a des systèmes de ventilation, il y a des autorisations, il y a des assurances. Je sais qu'avec Benoît Labre ça avait été extrêmement difficile de juste faire assurer la bâtisse à cause de ce site-là. Ça fait que c'est beaucoup, là... Même pas au niveau gouvernemental, au niveau des demandes, il y a plusieurs autres documentations, administration à faire.

• (10 h 50) •

Puis, comme on le mentionne dans la mémoire, bien, un site de consommation supervisée, c'est un espace de soins, il y a des intervenants, ça fait que là, il faut payer les intervenants, il peut y avoir des travailleurs de rue parce qu'il y a de l'espace à l'extérieur, ce n'est pas seulement le site, toute la proximité, aller vers les gens, aller les rejoindre. On travaille avec des pairs, des personnes qui ont un savoir expérientiel, ce n'est pas des bénévoles, c'est des personnes qu'on embauche pour leur savoir, pour leur expertise, pour leurs compétences. Ça fait que soutenir tout le réseau des personnes qui travaillent autour, parce que ce n'est pas... elles n'ont pas un titre d'infirmière ou de médecin, mais c'est des gens qui font de la santé à tous les jours en étant là, assis à prendre un café avec quelqu'un qui vient consommer, en étant une oreille attentive pour quand ils viennent s'asseoir puis ils ont passé une journée difficile. Ça fait que toutes ces personnes là, ça fait que, pour moi, le font, c'est de payer pour tout ça. Puis on a une équipe aussi.

Et rédiger ces demandes-là, ça prend beaucoup de temps, ça prend des gens qui ont des compétences en finances, ça prend... On n'a pas tout ça dans les organismes. Souvent, vous allez rentrer dans un organisme, puis le directeur, c'est lui qui fait les communications, il fait la reddition de comptes, il fait le... puis l'intervenant, il nettoie les toilettes, il va servir le café, il va... C'est ça, les organismes communautaires au Québec, là. Ils sont sous financés puis c'est des gens qui en font beaucoup plus que ce qu'on peut réaliser dans le système de santé, pour avoir travaillé, moi-même comme infirmière dans le système de santé. Ça fait que ce fonds-là servirait à soutenir une mission qui est extrêmement large...

Le Président (M. Provençal) :...Alors, je vais maintenant céder la parole au député de Saint-Henri Sainte-Anne pour trois minutes 18 secondes.

M. Cliche-Rivard : Merci, M. le Président. D'abord, je vous remercie pour votre mémoire, votre présentation, puis merci au quotidien aussi du travail que vous faites. Vous sauvez des vies, tous et toutes, puis on est extrêmement reconnaissants. Je pense que c'est le plus de ressources... en fait, le fait qu'il y ait plus de ressources qui va améliorer la cohabitation sociale puis pas le contraire. Donc, pour nous, vous êtes la solution, la clé et non pas le contraire. Donc, je voulais le préciser.

À l'article 15, le ministre parle depuis tout à l'heure, là, que ça impacte deux organismes, mais, finalement, ça impacte tous les organismes, incluant les organismes en situation d'itinérance. C'est vrai, le 150 mètres, mais l'ensemble du régime d'autorisation, puis on le verra par règlement plus tard dans l'étude du projet de loi, pourra aussi concentrer l'ensemble des ressources en itinérance. Donc, ce n'est pas seulement l'affaire que de deux organismes à 150 mètres, là, c'est l'ensemble du tissu social de cohabitation, en fait, d'itinérance et de consommation supervisée qui est visé par ledit projet de loi. Je voulais quand même le réitérer puis le placer. C'est assez important.

La cohabitation, je pense que c'est le nœud de l'affaire, puis la cohabitation, c'est l'affaire de tous. Et là il y a un rôle disproportionné du communautaire dans la version actuelle du projet de loi, c'est ce que je vois. 667.4, la cohabitation, il faut le relire, vous devez déposer... vous devrez déposer un plan de cohabitation détaillant les mesures qu'ils entendent prendre pour mitiger les inconvénients. Donc là, il n'y a pas de mention de la police, il n'y a pas de mention de la santé publique, il n'y a pas de mention de ceux et celles qui ramassent les déchets, des pouvoirs municipaux, il n'y a pas de mention de la ville, là. Il y a une mention de votre obligation.

Et vous, un peu plus tard, 667... je n'ai pas les... 14, ou 15, ou 16, vous, vous pouvez perdre votre autorisation si votre plan de mitigation, qui par ailleurs concerne des éléments pour lesquels vous n'avez pas de pouvoir directement corrélé, pour lesquels vous ne pouvez pas agir... si vous appelez les services pour du nettoyage puis qui ne viennent pas, si vous appelez la police puis elle ne vient pas, je veux dire, vous allez être responsable et l'unique responsable d'une perte d'autorisation.

Donc, elles sont où, les obligations, selon vous, dans le projet de loi, des autres partenaires? Parce que le ministre dit : On fait ça en partenariat, on fait ça en... collectivement. Mais moi, je vois seulement des obligations fondées envers les organismes communautaires. Est-ce que je me trompe? Est-ce que vous avez la même lecture que moi?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Nous, on a eu la même lecture, et je pense que le mémoire qui a été déposé traduit bien cette lecture-là. On a besoin de ressentir que cette responsabilité-là, elle est partagée et qu'il y a une reconnaissance du travail qui est fait à tous les jours par les groupes, une reconnaissance qui n'est pas associée aussi avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête de ces organisations-là, qui peuvent perdre leur permis pour ne pas avoir répondu à une responsabilité qui est impossible à porter pour une seule organisation, que même la société entière, avec toutes les parties prenantes, n'arrive pas à porter en ce moment. Donc, c'est irréaliste de faire porter tout ça à un groupe communautaire pour pouvoir opérer un service de santé.

M. Cliche-Rivard : Bien, on va y veiller. Puis j'entends le ministre vouloir collaborer là-dessus. Je pense que le ministre en est conscient aussi, que les obligations de collectivisation, puis d'harmonisation, puis de cohabitation sociale... Vous, vous donnez un service. Vous, vous nous permettez d'y arriver, mais vous ne pouvez pas y arriver seul. Ce serait impossible. Et on doit vraiment voir, ici, une responsabilisation, une coresponsabilisation de cet enjeu-là dans l'article 667.4.

Le Président (M. Provençal) :...M. le député. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Terrebonne pour conclure de premier échange. Alors, je vous cède la parole, Mme.

Mme Gentilcore : Merci, merci beaucoup d'être ici. Toujours agréable d'échanger avec vous. Deux petits points. Puis le premier, évidemment, la paperasse, tout ce qui administratif, ça me préoccupe énormément parce qu'on l'entend tellement sur le terrain. Là, de devoir remettre à chaque quatre ans ces documents-là, qu'est-ce que ça représente pour vous? Quatre ans, est-ce que vous avez été consultés pour cette durée-là? Comment vous voyez ça? Est-ce que vous, vous jugiez nécessaire, dans quelque mesure que ce soit, justement, de périodiquement revenir là-dessus? Puis comment vous entrevoyez ça?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : On juge que ce n'est pas du tout nécessaire en ce sens où il y a déjà toute une démarche d'exemption pour repérer un SCS, et cette démarche-là s'opère avec Santé Canada et réunit l'ensemble des éléments qui sont importants pour pouvoir opérer un SCS de manière à la fois sécuritaire et cohérente.

Le faire aux quatre ans, c'est doubler encore la charge parce qu'avec Santé Canada, je le répète, toute cette démarche-là a déjà lieu. Et là non seulement on vient doubler cette charge-là, mais en plus on la colle avec un renouvellement potentiel de permis, donc... et ce permis-là peut être révoqué après, suite à une plainte qui peut venir de n'importe quelle instance, là...

Mme Vadlamudy (Sandhia) : ...ce qu'on lit dans le... dans le projet de loi, c'est que la plainte peut venir d'une personne. Et, si elle n'est pas réglée en 10 jours, le permis peut être révoqué.

Mme Gentilcore : ...

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Une très grande incertitude. Et c'est de... c'est à partir notamment de cette incertitude que l'ensemble des groupes qui portent des SCS sont affectés par ce projet de loi. Parce qu'ils sont inquiets de se dire : Comment on va... on va renouveler le permis, avec quelles ressources et de quelle manière on va être exposés à des plaintes qui pourraient faire en sorte que le permis soit révoqué?

Mme Gentilcore : Avez-vous pensé à des outils qui vous permettraient d'assurer un certain suivi auprès du ministère, c'est-à-dire de rendre des comptes, d'une certaine façon, mais de manière peut-être plus étendue, sans devoir remettre en jeu votre permis à chaque quatre ans? Est-ce que c'est déjà en place même?

Mme Vadlamudy (Sandhia) : Les outils sont bien en place. Il y a des redditions de comptes qui sont très détaillées, en continu, entre les groupes et le ministère. Et je pense que tout est là déjà pour pouvoir avoir un bon suivi. L'important, c'est de le faire en collaboration.

Mme Gentilcore : Puis, est-ce que vous trouvez qu'en ce moment, dans le projet de loi, c'est bien encadré, ce que vous auriez à remettre aux quatre ans? Est-ce que vous trouvez que c'est clair? Est-ce que vous avez des craintes par rapport à l'ouverture, là, qu'il y a dans cet article-là?

Mme Boudreault (Pénélope) : Bien, on est extrêmement inquiets, parce que, non, ce n'est pas clair, qu'est-ce qui va être demandé, qu'est-ce qui peut faire qu'un permis peut être révoqué. Puis j'ai juste envie de rappeler que ça impacte les organismes qui sont... en ce moment, qui le font déjà, mais ça a un impact majeur sur les organismes qui pourraient penser. Ça fait que, d'un côté, on dit : Il faut en ouvrir davantage, on est conscients, c'est la crise des surdoses, c'est des milieux importants, ça sauve des vies, il faut en ouvrir davantage, mais clairement, les organismes ne se lanceront pas dans des démarches comme ça, qui sont fastidieuses. Pour se faire dire ou risquer de se faire dire aux quatre ans : Bien, finalement, vous ne pouvez plus opérer.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée, c'est... le temps est écoulé. Alors, je remercie l'Association des intervenants en dépendance du Québec pour leur participation à nos travaux et surtout la contribution que vous y apportez.

Sur ce, je suspends les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup de vous être déplacés.

(Suspension de la séance à 10 h 58)


 
 

11 h (version non révisée)

(Reprise à 11 h 03)

Le Président (M. Provençal) :Alors nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la ville de Québec et le maire de Québec, M. Bruno Marchand ainsi que des membres qui vont l'accompagner. Alors, M. Marchand, vous avez 10 minutes pour votre présentation, et par la suite nous poursuivons les échanges. À vous la parole.

M. Marchand (Bruno) : Merci beaucoup, M. le Président. Content de vous revoir, M. le ministre également. Merci de nous accueillir. Députés et membres du Parlement, on est contents d'être ici avec vous et de prendre ce temps-là. Merci à vous de prendre le temps.

Alors, d'entrée de jeu, pour nous, ce qu'il est important de dire, c'est qu'on comprend l'intention qui guide le projet de loi. On comprend également tout ce qui explique la réflexion menant à sa rédaction, on y souscrit, à ces préoccupations-là, et effectivement il y a matière à, certainement, y réfléchir.

Puis vous n'êtes pas sans savoir, à Québec comme ailleurs au Québec, c'est, nous dirons, deux grandes problématiques qui nous concernent : entre 2020 et 2023, c'est 116 décès par surdose, qu'on a vécus; et comme L'Interzone vous l'a dit, c'est en augmentation, à la fois les services, mais aussi cette malheureuse réalité-là est en augmentation. Et on est conscients des défis que représentent à la fois traiter, soutenir, guérir et en même temps cohabiter. Je n'ai pas besoin de vous parler d'itinérance davantage. Vous savez l'explosion de l'itinérance, c'est le cas à Québec également. On attendra le prochain décompte pour statuer, mais tous les intervenants terrain nous disent qu'il y a augmentation.

Toutefois, ce qui nous surprend et ce à quoi nous sommes assez convaincus, c'est que le moyen choisi, pour nous, n'est pas le bon, le moyen choisi dans le projet de loi. Et je fais référence à quelques éléments, puis on pourra en discuter avec vous, notamment sur la question du 150 mètres. Alors, je comprends le contexte politique dans lequel s'inscrit le 150 mètres, un projet de loi qui est venu d'un autre parti, toute la situation à Montréal. En même temps, à mes yeux... et si ma compréhension est infidèle, vous me direz, M. le ministre, mais elle soustrait le ministre à tout pouvoir d'agilité, à tout pouvoir d'agilité et à toute capacité de discernement.

Et je vous donne des exemples qui sont théoriques, mais qui pourraient arriver à Québec et pour lesquels le 150 mètres devient assez fictif. On pourrait avoir, d'un côté et l'autre de la rivière Saint-Charles, deux entités, deux institutions qui s'excluraient mutuellement parce qu'elles seraient à 150 mètres de distance, mais au final, à des kilomètres pour se rejoindre l'une et l'autre. On pourrait avoir, à travers... Et encore là, c'est théorique, mais ce n'est pas théorique... arbitraire ou utopique, on pourrait avoir, avec la falaise qui garnit Québec de sa Haute-Ville et de sa Basse-Ville... avoir des éléments très proches l'un de l'autre, mais être à très grande distance parce que séparés par une barrière naturelle...

M. Marchand (Bruno) : ...je vous parle des barrières naturelles, mais on pourrait parler des autres obstacles, on pourrait parler de boulevards et d'autoroutes qui font que parfois ces quartiers-là sont divisés et, de manière proximale, peuvent être sous le 150 mètres, mais finissent par avoir des distances qui peuvent être énormément plus grandes parce que séparées par des barrières qui font en sorte que des quartiers ont des difficultés à communiquer entre eux par ces barrières-là. Je... Et je ne vous parle pas... et la mairesse de Gatineau, lorsque je serai de retour avec elle, pourra en parler cet après-midi, mais d'endroits où le 150 mètres n'est pas respecté présentement au Québec, il y a un exemple probant à Gatineau, qui ne créent pas de problème.

Alors, le 150 mètres, je comprends la volonté, M. le ministre, de dire : Il faut statuer quelque part, mais je pense qu'on a besoin d'avoir, dans les mains d'un ministre, un discernement et un pouvoir de tenir compte à la fois de topographie de barrières naturelles, de barrières qui ont été érigées par l'humain et aussi de contextes et de circonstances qui font qu'à travers cette intention qui guide le projet de loi on ne se met pas des barrières qui vont faire en sorte que, dans les villes et dans leur densité, on arrive à des impossibles, ou on arrive à corriger des situations qui ne méritent pas d'être corrigées, ou on arrive à avoir un remède qui est beaucoup plus grand que le problème. Ça, pour nous, c'est un enjeu à la lecture du projet de loi.

On ne comprend pas pourquoi, dans ce projet de loi là, on amène la question de l'itinérance et de ce qui pourrait, et je vais dire «pourrait» au conditionnel, nous amener dans une situation similaire. C'est un projet de loi qui vise la question des sites de consommation supervisée. Cette question de l'itinérance, qui vient dans des articles un peu après, nous semble amener de façon concomitante deux problématiques qui ont des enjeux de cohabitation mais qui sont totalement, plus souvent qu'autrement, divisées, séparées ou qui tiennent compte de d'autres réalités, et pas les mêmes.

Alors, je comprends, sans mauvaise intention... je ne le présume nullement qu'il y ait de mauvaises intentions, mais on a voulu inclure la question de l'itinérance là-dedans, mais on se retrouve avec faire un amalgame pour lequel il y a des enjeux de cohabitation, c'est vrai, mais pour lequel ils sont totalement différents. Alors, oui, l'enjeu de cohabitation est réel dans les deux cas, mais pour lequel on a des enjeux, des problématiques, des défis qui sont complètement différents. Et je ne pense pas qu'on envoie un bon message politique en les jumelant, les deux. Je ne pense pas qu'on envoie un bon message politique sur tous les efforts qui sont faits en itinérance pour expliquer que c'est une problématique complexe qui ne vient pas seulement de quelques enjeux faciles à identifier mais qui est beaucoup plus complexe. Et je pense que... je pense qu'on fait erreur là aussi.

Dans mes deux derniers éléments, M. le Président, après ça, je... on pourra conclure... La question de la réciproque par rapport à l'implantation de services scolaires, d'écoles, garderies versus la réglementation qui est présupposée dans le projet de loi qui est à l'étude présentement fait en sorte que... et, encore là, je vais être théorique, mais on connaît, par historique, comment... comment se font les choses, qu'est-ce qui va arriver quand on va avoir besoin d'écoles dans un quartier, devant les grands besoins d'une population, et qu'on va dire : Non, vous ne pouvez pas vous installer, si c'était le cas, parce qu'à 150 mètres du lieu d'installation choisi il y a empêchement? Bien, nécessairement, ce qui va arriver, c'est qu'on va dire à un centre de consommation supervisée : Bien, tu dois te déplacer, parce que c'est beaucoup plus facile déplacer un centre que de déplacer une école pour laquelle on a déjà de la misère à trouver des lieux dans certains quartiers. On va toujours avoir le réflexe facile de dire : Quel est le moindre mal? Et ça va être le centre qu'on va déplacer, et on va recréer des problèmes parce qu'on veut répondre à des normes. Alors, est-ce que l'inverse, dans le projet de loi, fera pour ainsi dire créer ce que j'amène ici? Nous, on pense qu'il y a un risque. Après ça, vous pourrez clarifier et me dire que j'ai... on a peut-être la mauvaise lecture.

• (11 h 10) •

Sur la question du plan de cohabitation, les intervenants précédents en ont parlé, mais je pense qu'ils sont justes. Un milieu... Un groupe communautaire va difficilement pouvoir coordonner avec les services policiers, avec le CIUSSS, avec la ville de dire : Bien, voici, j'arrive à établir un plan de communication... un plan de cohabitation. Et on comprend son importance. Moi, je souscris à son importance, et que vous ameniez cette idée-là, je pense, c'est nécessaire, mais je pense que c'est très difficile pour un groupe communautaire, pour y avoir oeuvré, de dire : Bien, maintenant, je vais... Ce n'est pas ce que le projet de loi dit, mais, si on veut déposer un plan qui a du sens, il faut avoir des alliés partenaires qui vont y collaborer. Ça se pourrait qu'un service policier dise : On n'a pas le temps de le faire, on n'a pas le temps de contribuer avec vous, on y... on le verra en temps et lieu, et ça va placer le milieu communautaire dans une réciprocité de trouver les façons d'écrire un plan de cohabitation... au-delà des ressources manquantes, et vous en avez parlé tantôt, j'étais content de vous entendre, ça place le milieu communautaire face à des obligations pour lesquelles il n'a pas les moyens. Je ne parle pas juste de moyens financiers, mais moyens de dire à des partenaires : Bien, il faut travailler ensemble et il faut que vous m'aidiez dans mon plan de cohabitation pour que je puisse convaincre le ministre qu'il y a un bon plan de cohabitation.

Alors, on souscrit à l'idée, on souscrit à l'idée que ça prend un plan de cohabitation. Et je suis d'accord avec vous...

M. Marchand (Bruno) : …M. le ministre, ce que vous disiez tantôt, c'est que si on ne se soucie pas de la cohabitation, on va avoir d'autres problèmes et d'autres problèmes qui vont traiter avec inhumanité des gens pour lesquels on a besoin d'amener de l'humanité. Vous avez tout à fait raison.

Maintenant, je pense qu'il y a des choses à revoir dans le plan de cohabitation si on veut arriver à l'objectif. Et je termine en disant sur… et c'est la première recommandation de notre rapport, de notre mémoire, vous nous soustrayez, en matière de zonage municipal, des pouvoirs du projet de loi. Pour nous, ce n'est pas de bon augure, au sens de cette capacité qu'on a de collaborer, on a besoin que le zonage municipal ne soit pas mis en… mis en deuxième zone ou en quelque chose qui est… qui est beaucoup moins important et auquel le projet de loi peut dire : Bien, on peut faire fi du zonage municipal. Le zonage municipal est construit justement pour faire… créer des villes en fonction des différents besoins. Présentement, le projet de loi, ce qu'il dit, c'est : Bien, le zonage municipal, on ne s'en soucie pas. Nous, et vous l'avez vu dans notre première recommandation, on a besoin que le zonage municipal reste un outil que le projet loi considère et qui n'est pas… j'ai envie de dire, mis de côté par le projet de loi, ça nous semblerait assez problématique, à la fois pour les villes, à la fois pour l'autonomie municipale, mais à la fois pour la capacité de construire les villes dans une prévision à long terme et avec des zonages municipaux qui doivent tenir compte de ces enjeux-là.

Et là, vous me direz : Oui, mais est-ce qu'on ne développera pas une espèce de pas dans ma cour où on ne pourra le faire nulle part, si le zonage municipal ne le permet pas, et que les villes veulent le transformer. Bien, nous, ce qu'on vous propose, c'est dans le cas… et la ville de Québec a ça, mais dans le cas où on irait vers ces types de modalités là, bien, c'est de le soustraire à des processus référendaires, parce qu'on sait qu'en processus référendaire, c'est très difficile de faire passer ce type d'organisation là, mais au moins ne pas soustraire au zonage municipal. Je m'arrête là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup, M. le maire. Alors, M. le ministre, vous débutez cet échange avec les représentants de la ville de Québec.

M. Carmant : Bien, beaucoup, M. le Maire, pour vos commentaires, à votre équipe également qui vous accompagne. Bien, restons justement sur cette notion de zonage. Une des raisons pourquoi c'est introduit dans le projet de loi, c'est que, pour donner comme exemple la maison Benoît Labre, moi, j'ai été avisé de son ouverture quand tout était déjà créé. Et on m'a dit que le zonage le permettait. Donc, nous, ce qu'on essaie de mettre en place, c'est un moyen de s'assurer que les instances soient avisées de la création d'un centre de consommation supervisée et que… et que… et les instances municipales et les instances du Québec soient... en soient avisées et que ça ne puisse pas se faire comme… sans que personne ne le sache.

M. Marchand (Bruno) : C'est ce qu'on comprend. Puis, si vous me permettez, M. le Président, j'aurais dû faire ça bien avant. Je suis accompagné de ma précieuse collègue Marie-Pierre Boucher, qui est membre de l'exécutif, qui travaille sur les dossiers, notamment de l'itinérance. Je suis accompagné du directeur des affaires juridiques, monsieur… Me Serge Giasson, sa collègue madame… est derrière ici, et Sylvie Roy, directrice section de l'intervention communautaire. J'aurais dû faire ça, bien avant, je m'en excuse.

Pour répondre à votre question, je pense que vous pourriez dire… le projet de loi pourrait prévoir, puis c'est la dernière ligne de notre page quatre, « comme condition de délivrance d'une autorisation par le ministre, l'attestation par la municipalité sur le territoire de laquelle elle se situe dans un local visé par la demande de conformité du projet à sa réglementation ». Vous avez des moyens de dire à un groupe qui fait la demande : En avez-vous fait la demande à la ville? Est-ce que vous respectez l'ensemble des règlements nécessaires? Faites-m'en la démonstration ou obtenez par la ville un appui sous quelque forme que ce soit qui vous permet dans votre analyse de dire : Ah! Je vois que ça respecte le zonage, mais ça respecte aussi cette ville dans laquelle on veut s'implanter ou dans laquelle on veut ajouter des services. Il y a des moyens autrement que de rendre le zonage municipal caduc. De un, vous, êtes informés et, deux, de le tenir en considération quand vous émettez votre autorisation.

M. Carmant : D'accord. L'autre point… bien, je… le point du 150 mètres et des barrières physiques. C'est bien… C'est bien compris. Puis ce qui est important pour nous, c'est vraiment la proximité physique, là, dans… entre les... entre les deux… entre les sites. Maintenant, pour ce qui est des ressources en itinérance, comme vous le savez, je pense, déjà, on est en train de développer des ressources qui sont spécialisées en santé mentale et en toxicomanie. Je pense que ça va être important de le spécifier pour expliquer pourquoi on inclut ces ressources-là dans le projet de loi. Mais je pense que c'est important aussi de dire que les citoyens nous mentionnent leur inquiétude...

M. Carmant : ...quiétude. Puis je pense que L'Interzone, par exemple, c'est une ressource qui est fondamentale à Québec, qui est 30 fois plus utilisée que les autres ressources au Québec, là, c'est des 10 000 personnes par trimestre, là, versus 1 000 dans... pour plusieurs autres régions, mais, quand même, ça a un impact sur les gens du quartier. Moi, je les ai rencontrés. Je pense qu'il faut s'assurer que cette cohabitation soit harmonieuse.

M. Marchand (Bruno) : Nous sommes tout à fait d'accord. Mais si on attend... Je vais vous donner un exemple tiré de l'itinérance sur la question des maisons modulaires qu'on installe dans le secteur est de la ville. Alors, les gens, ils ont déjà l'itinérance présente dans leur quartier, et on est un peu excentrés, et on l'installe là, pas pour amener des itinérants, des personnes itinérantes du centre-ville, mais on l'installe là parce qu'il y a des réels besoins de gens qui maintenant vivent l'itinérance dans ces secteurs là de l'est de la ville. L'itinérance a beau être présente, si on n'avait pas accéléré les choses, on se serait fait dire non, parce que les inquiétudes sont légitimes, vous avez tout à fait raison de le dire. Et si on... on ne peut pas dire aux inquiétudes : Mais vous n'avez pas raison d'être inquiets puis c'est une... vous êtes juste des citoyens qui ne considérer pas les autres. Faire ça, c'est très grave. C'est très, très grave. Ça fait que votre préoccupation qui est sincère parce que je vous connais, elle est nécessaire. Si on ne travaille pas la cohabitation, si on ne travaille pas avec les gens, c'est vrai qu'on va avoir plus de problèmes que moins.

Maintenant, ce qui est difficile à placer, puis c'est ce qu'on vit au quotidien, puis Marie-Pierre tu pourrais ajouter, ce qui est difficile à placer, c'est le curseur entre avoir l'unanimité, puis je ne dis pas que c'est ce que vous souhaitez, là, pas du tout, je fais juste dire entre des citoyens qui veulent s'objecter, et peu importe ce qui arrivera, ils vont vouloir s'objecter, on a eu à Québec des gens, il y avait un lieu pour diabétiques, pour aider les personnes diabétiques à s'implanter, une petite maison, puis les gens se plaignaient qu'ils avaient trouvé des aiguilles partout, on est loin d'un centre de consommation supervisée, là. Imaginez comment les gens... parfois la peur peut gagner et faire en sorte qu'à travers des arguments qui sont partagés dans la population, on finit par dire : Non, on ne veut pas ça. Bien, il y a des choses comme ça, qu'on est obligé d'écouter les peurs, d'entendre, de discuter, de dialoguer, d'expliquer, d'être pédagogue, mais, au final, on n'aura pas l'unanimité.

C'est la même chose. Alors, vous me dites L'Interzone, avec... puis ces défis et avec ces grands résultats, vous avez raison. Mais on ne peut pas s'en aller dans le champ où il n'y a personne autour, parce que si on est loin des clientèles et des personnes qu'on veut servir, bien, ils n'y iront pas, ils n'y iront tout simplement pas. Les axes de désir en matière de transport, que ce soit collectif, vélo, auto, et autres, sont des indicateurs pour nous dire qu'est-ce que les citoyens veulent. Puis on le sait que quand on force un chemin alors que les axes de désir sont ailleurs, mais les gens n'y vont même pas, même si le chemin est à 50 ou 100 mètres à côté. C'est la même chose dans le cas des grandes problématiques humaines. On aurait beau trouver le lieu idéal loin de tout, si on n'est pas proche d'où les problématiques se vivent, il sera inutilisé. Alors, oui, L'Interzone, il est dans un secteur où les personnes qui en ont besoin le fréquentent. Oui, ça crée... et ce n'est pas parfait, ça crée parfois des conditions de cohabitation qui méritent d'être toujours réfléchies, discutées et débattues pour améliorer les choses. Si on attend le moment parfait, puis ce n'est parce que vous dites, mais si on attendait de convaincre tout le monde, on n'en aurait jamais. Puis L'Interzone n'aurait jamais vu le jour.

Si vous permettez. Veux-tu rajouter?

M. Carmant : Oui. Vas-y, vas-y, vas-y.

Mme Boucher (Marie-Pierre) : En fait, si L'Interzone n'existait pas, probablement que les gens continueraient à s'injecter probablement dans le parc de l'école des Berges, probablement dans un secteur un petit peu... où il y a des enfants quand même, mais ils ne seraient pas accompagnés. Le parc n'est pas un lieu de soins, la cour d'école non plus, mais les besoins sont présents. Donc, quand on vit les enjeux de cohabitation, c'est souvent aussi parce que les besoins sont grandissants, et pas répondus à la hauteur des besoins, et non à cause que ce n'est pas à la bonne place. Donc, je pense qu'il est plus là, l'enjeu, là.

• (11 h 20) •

M. Carmant : Puis je vous entends à propos de la hauteur des besoins, parce que le... ce qui entraîne les situations, encore une fois, c'est les gens à l'extérieur de L'Interzone. Mais, encore une fois, ça a pris une visite de ma part pour dire aux... à l'établissement, le CIUSSS, mais il faudrait peut-être développer des services pour ces gens qui font la file dehors.

M. Marchand (Bruno) : C'est vrai.

M. Carmant : Alors, ce que le projet de... tu sais, l'intention derrière le projet de loi, c'est de s'assurer que tout ça soit pensé en amont et que les citoyens savent que, quand quelque chose s'implante dans leur quartier, ça a été bien réfléchi et bien fait. Donc...

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Mais la responsabilité, elle est partagée sur la cohabitation, il y a les organismes communautaires qu'ils le travaillent, mais nous, de la façon qu'on le travaille, c'est autant avec le CIUSSS, avec les services de police, avec l'équipe de la...

Mme Boucher (Marie-Pierre) : ...donc c'est ce volet-là qui est très, très, très important au niveau de la cohabitation, plutôt que le laisser reposer sur les seules épaules d'un organisme communautaire.

Et ce n'est pas à tous les quatre ans non plus qu'il faut le réviser. C'est une cohabitation qui doit être vue en continu avec les acteurs sur place. Donc, vous avez tout à fait raison de l'importance de travailler cette cohabitation-là, et elle est au centre, en fait, de nos préoccupations quand on travaille avec les... avec notre milieu, mais ça doit être une responsabilité qui est partagée.

M. Carmant : Oui, puis je suis d'accord. Puis, en fait, moi, à ma lecture du projet de loi, je ne sentais pas que toute la pression était sur les organismes communautaires, là, mais je l'ai bien entendu, puis on va venir corriger ça, là. Il n'y a pas de... J'en suis bien conscient. Puis le rôle de la Santé publique là-dedans est fondamental parce que la Santé publique a tous les pouvoirs pour organiser les services aux alentours. Donc, ça, c'est clair pour moi.

Dernier petit point, peut-être, c'était la collaboration, justement, que vous aviez avec la Santé publique, et puis dans la gestion de l'interzone, puis comment on pourrait améliorer ces partenariats-là.

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Bien, on a de très bonnes relations, en fait, avec... avec la Santé publique pour... pour s'assurer, justement, d'identifier les enjeux puis de venir... venir le travailler. C'est certain qu'on a, tu sais, on a davantage de besoins, les besoins sont grandissants. Je pense qu'on a plus davantage besoin de multiplier les sites pour pouvoir venir répondre aux besoins que de grandir un site en soi. Donc... Mais les besoins sont toujours grandissants, et il faut y répondre, parce qu'effectivement, après ça, c'est les enjeux de cohabitation qu'on vit tous, là.

M. Carmant : O.K. Puis, en tout cas, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais on travaille sur un projet, là, pour un autre site, parce que le groupe précédent n'était pas certain, mais je tiens à vous le dire. Puis une des choses qu'on essaie aussi, qui est intrinsèque au projet de loi puis que les gens semblent... ne mentionnent pas, c'est qu'on privilégie aussi certains modèles où il y a une collaboration intrinsèque, là, entre le réseau de la santé puis les organismes communautaires. Nous, on a un bel exemple et un bel exemple à Montréal, où... avec Dopamine, où c'est dans un CLSC que les locaux sont partagés. Vous, comment voyez ça, cette collaboration-là entre le réseau de la santé et les organismes communautaires?

Mme Boucher (Marie-Pierre) : En fait, c'est majeur. C'est important. Puis on a la chance, à Québec, d'avoir d'excellentes relations, réseau de la santé, organismes communautaires, ville. En fait, tous les acteurs travaillent conjointement pour arriver à répondre aux besoins. C'est vraiment une des forces de l'écosystème de Québec. Puis il faut continuer à le tisser, il faut continuer à le préserver, à le travailler, mais c'est majeur, en fait, pour pouvoir autant implanter que de s'assurer de la survie et du bon fonctionnement de ces... de ces services-là, et, en même temps, bien, pour... pour entendre les besoins des citoyens qui peuvent vivre les impacts, des fois, là, de ce qui se passe aussi, là.

M. Carmant : Parfait. Une des choses qui est importante aussi pour nous, c'est de développer les trajectoires de soins. Puis j'ai lu, dans votre mémoire, que vous aviez hâte que les services en toxicomanie se développent. Mais je pense que, déjà, avec ce qu'on a fait au niveau de l'ouverture de Lauberivière, là, des lits PRISM, on a déjà un plus... une plus-value. Vous, est-ce que vous avez vu un impact ou... Comment vous voyez ça, cette ouverture-là, là, de lits pour les personnes en situation d'itinérance avec problèmes de toxicomanie puis santé mentale?

M. Marchand (Bruno) : Je vais laisser Marie-Pierre répondre spécifiquement, je vais y aller globalement, ce avec quoi on était tout à fait d'accord. L'enjeu qu'on a globalement présentement, puis vous le savez, c'est qu'on... il y a beaucoup d'efforts qui est mis, plus qu'avant, plus de ressources, puis je l'ai toujours dit puis je ne me gêne pas pour le dire, mais, puis ce n'est pas de votre faute, mais jamais à la hauteur de la problématique qui, elle, augmente. Ça fait que, là, Marie-Pierre va pouvoir répondre sur le volet spécifique de votre question, mais, sur le volet global, le citoyen ne voit pas d'amélioration. Et ça, c'est problématique parce que ça veut dire qu'il y a... la fatalité par rapport à l'itinérance et aux autres problématiques, qu'elle soit concomitante ou non, la fatalité augmente. Les gens nous disent : Il n'y a rien à faire, c'est comme ça, puis on est pris avec quelque chose. Et vous savez à quel point j'en suis profondément... je suis profondément opposé à cette idée de fatalité. Puis, si j'ai... si j'ai un commentaire par rapport à ce projet de loi qui est arrivé quand même assez rapidement, puis je m'adresse à tous les partis, c'est que le citoyen a besoin de savoir que le gouvernement a décidé — et le gouvernement et les futurs gouvernements ou pas futurs gouvernements, ce n'est pas important, je ne fais pas de...

M. Marchand (Bruno) : ...sur la prochaine élection. Je fais juste, d'une seule voix, de dire : Nous allons, au Québec, atteindre l'itinérance zéro et se donner tous les moyens pour le faire et d'arriver à mettre les ressources suffisantes, même dans un contexte difficile. Présentement, vous avez fait énormément plus qu'avant. Mais la problématique, contre votre gré, malgré vous, elle augmente, et on ne voit pas globalement les gains. Et on a besoin d'atteindre ce point de bascule qui va faire en sorte de donner des ailes à ceux qui y travaillent, de montrer les effets, de montrer que la cohabitation s'améliore encore plus. Et, pour ça, on a besoin d'un engagement multiparti pour dire : il est temps qu'on soit ambitieux, puis qu'on s'engage, et qu'on engage le Québec. Ça prendra 15 ans, ça prendra 20 ans, peut-être, plus personne d'entre nous ne fera de la politique, mais on aura été ceux qui auront dit : Ce n'est pas vrai qu'on va attendre, ce n'est pas vrai qu'on va se dire : Bien, on fait des choses, puis c'est vrai qu'on en fait, puis on en fait plus, M. le ministre, vous êtes aux premières loges et vous en faites plus, mais il est temps qu'on aille beaucoup plus loin que ça. Je me permets ce commentaire global mais on va revenir à votre question.

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Merci. Concernant le projet PRISM, plus spécifiquement, il y a un impact positif. Ce qu'on entend des organismes, particulièrement de l'Auberivière, là, qui est le porteur finalement dans le milieu, c'est que ça a vraiment un impact spécifique pour les personnes qui l'utilisent. Mais, comme... comme le maire le mentionne, les besoins sont tellement grandissants qu'on le voit peu dans la rue, cet impact-là. Pour l'organisme, comme tel, c'est important. C'est important parce que les gens qui sont dans ces lits-là, c'est des gens de moins qui sont en crise dans la rue. Donc, ça a un impact sur l'humain qui a ces services-là... qui avaient besoin de ces services-là. Donc, chaque personne qui est sauvée, chaque personne qui reçoit cette main tendue là, qui offre... qui reçoit le service dont il a besoin, c'est une personne de moins qui est dans la rue. C'est une personne... puis je vais revenir sur les sites d'injection supervisée, donc c'est une personne de moins qui se retrouve à aller s'injecter dans la rue dans des conditions qui sont... qui sont inadmissibles. Donc, chaque personne, elle est importante parce que ça a un impact global. Pour le citoyen qui le voit, qui regarde l'ensemble, il ne le voit pas encore.

M. Carmant : Puis comment on peut accentuer en... justement en créant un site pour la toxicomanie? Est-ce que... Est-ce que ce sera plus visible ou...

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Bien, chaque pièce de casse-tête est importante, je pense. Quand on arrive avec un service, que ce soit PRISM ou que ce soit le projet dont vous parlez, c'est une pièce de casse-tête qui vient contribuer à l'image globale du soutien social qu'on veut... qu'on veut faire à notre communauté. L'enjeu qu'on vit, c'est que notre casse-tête de 500 morceaux est rendu un casse-tête de 1 000 morceaux. Puis actuellement, il monte à 1 500 puis à 2 000 morceaux. Donc...

M. Marchand (Bruno) : Peut-être 10 000!

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Oui. C'est ça. Donc, chaque pièce, elle est importante parce qu'elle contribue à venir créer ce tout-là. Mais il faut qu'on en mette assez pour diminuer le nombre de pièces plutôt que de juste venir rajouter une à la fois.

M. Carmant : O.K. Juste pour conclure, je dirais qu'on commence des mesures de prévention, là, qui, nous, on pense, vont vraiment changer la donne, là, au niveau de la jeunesse, les sorties carcérales et d'autres mesures qui vont vraiment diminuer le robinet, là, que vous décrivez, là, qui sont la... qui tombent vers l'itinérance.

Mme Boucher (Marie-Pierre) : C'est des... C'est des... C'est majeur comme...

M. Carmant : Merci à vous!

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons procéder maintenant avec la députée de D'Arcy-McGee.

• (11 h 30) •

Mme Prass : Merci, M. le Président. Premièrement, je voudrais saluer votre implication, M. le maire, et votre vision. Vous êtes à la tête du comité de l'UMQ pour l'itinérance et vous avez été très vocal au cours des dernières années pour dire que nous avons tous un rôle à jouer, justement.

Et, comme vous dites, oui, il y a de l'augmentation au financement pour tout ce qui est question itinérance, mais on ne voit pas les résultats. On ne voit pas qu'il y a une vision à long terme. Et ce que ce que vous suggérez, entre autres, c'est que la ville puisse, avec les terrains que vous aurez donnés, puisse faire la suggestion au ministre, au gouvernement pour les emplacements. Quels sont les critères que la ville se donne? Parce qu'évidemment vous êtes préoccupés par toutes les questions de cohabitation également. Ça concerne tous vos citoyens. Et vous voulez justement qu'il y a une vie harmonieuse dans la communauté. Donc, quels sont les critères que la ville se donne justement pour octroyer ces zonages-là que vous... ensuite vous suggérez au gouvernement, en prenant en compte toute la question de la cohabitation?

M. Marchand (Bruno) : Marie-Pierre va compléter ma réponse pour être plus spécifique. Mais la nature inhérente de la politicienne ou du politicien municipal, c'est d'être à distance du pied du citoyen. C'est le seul politicien ou politicienne qui est à distance de pied du citoyen. Non pas que vous ne recevez pas vos volées de bois vert périodiques, là. Ce que je veux dire, c'est que je... pour bien connaître la politique municipale, cette réalité-là, elle incombe aux politiciens municipaux parce qu'ils en entendre parler.

Alors, on va revenir sur la question des critères, mais c'est impossible d'être un...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Marchand (Bruno) : ...politicien municipal ou une politicienne municipale et de ne pas se soucier de ça, parce qu'ils en entendent parler dans leurs conseils de quartier, ils en entendent parler quand ils font l'épicerie, ils en entendent parler au bureau d'arrondissement, ils en entendent parler au conseil de ville parce que les citoyens se présentent. Et sur ces dossiers-là, ils se présentent fort.

Alors, à la ville, on va vous présenter qu'est ce qu'on a mis en place. On travaille ça avec Santé publique et CIUSSS, mais ça reste imparfait parce que ça suppose de l'agilité, parce qu'il n'y a pas un territoire, il n'y a pas un quartier, il n'y a pas une rue pareille. Parce que chaque fois, chaque fois, il y a une levée de boucliers, même avec des critères, les citoyens ont une levée de boucliers.

Écoutez, il y a des endroits où, à Québec, il y a des citoyens qui refusent qu'il y a une garderie à côté de chez eux parce que ça fait du bruit. C'est arrivé, là, c'est un exemple réel, là, ce n'est pas théorique, là. Il y a des citoyens qui ont refusé qu'il y ait une garderie, là. On part de loin, dans certains cas.

Ça fait qu'on s'est mis des critères qu'on garde en état d'agilité. Et la nature inhérente du politicien de proximité, bien, c'est de faire en sorte d'être toujours à l'écoute et de nous ramener ces éléments-là. Ça demeure imparfait, mais on a quand même une bonne base. Marie-Pierre.

Mme Boucher (Marie-Pierre) : C'est certain qu'on regarde le lieu-environnement... lieu-environnement. Dernièrement, on a... bien, justement, M. le Maire parlait des modulaires... D'ailleurs, les modulaires, on est à l'intérieur du... on a une garderie en dedans de 150 mètres, mais on a fait le pari que la façon qu'on faisait l'implantation, le travail qu'on a fait et la relation qu'on est allé établir avec les organismes du secteur... on est allé rencontrer aussi le CPE pour voir comment on pouvait travailler cette cohabitation-là. C'est une façon qui nous permet de... un, d'être en amont, de planifier comme il faut le projet, même au niveau de l'implantation. Des fois, juste l'implantation, la façon qu'on pose les infrastructures fait en sorte que la zone tampon où les gens se retrouvent, ils ne sont pas nécessairement dans un secteur où ils sont dans une cohabitation qui est plus difficile.

Donc, on regarde le lieu-environnement, on regarde la sécurité des locaux aussi parce qu'on utilise souvent des locaux qui sont déjà existants. Donc, on veut s'assurer d'avoir un local qui répond aux besoins. Des fois, ne serait-ce que comment la toilette, elle est installée, là, pour pouvoir s'assurer que les gens y sont en sécurité, mais aussi que l'environnement est en sécurité.

Tout à l'heure, je vous disais la zone tampon, là, comment ce milieu de vie là permet d'accueillir des gens qui, parfois, sont à l'extérieur aussi, c'est un des éléments qui est important. C'est très, très simple, là, pour l'instant, les éléments que je vous nomme, mais on y va vraiment du cas par cas parce qu'on veut s'adapter aussi au milieu.

Mme Prass : Et je suis curieuse. Le travail que vous avez fait en amont, justement... Parce qu'on a... j'ai parlé avec d'autres organismes, puis on dirait que c'est vraiment un élément qui fait la différence, le travail qui se fait en amont. Est-ce que vous l'avez fait tout seuls? L'avez-vous fait en concert avec la police? L'avez-vous fait en concert avec les organismes communautaires? Quelle était l'équipe, disons, que vous avez mise sur pied, justement, pour faire cette sensibilisation auprès de la communauté?

Mme Boucher (Marie-Pierre) : On l'a fait avec les organismes, on l'a fait avec les équipes de la ville, les équipes avec... du réseau, avec le réseau de la santé. On a vraiment fait un partenariat, jusqu'à faire la consultation publique où la ville était avec aussi le réseau de la santé. Donc, on était ensemble pour venir répondre aux questions des citoyens. On était ensemble, tu sais, puis je pense que c'est vraiment le central de cette capacité de réponse aux besoins là, le travailler ensemble.

Donc, quand on a une personne qui vient questionner plus spécifiquement sur le type de service puis comment ça répond, bien, le réseau de la santé est en mesure de venir répondre spécifiquement à ces éléments-là qui sont plus spécifiques, qui sont plus du réseau de la santé. Le milieu communautaire est capable de répondre sur sa capacité de gérer ce lieu-là aussi. Puis, après, la ville, bien, pourquoi nous, on vient identifier que c'est un lieu qui est correct pour venir implanter un type de service. Donc, c'est cette collaboration-là qui nous permet vraiment de venir s'implanter.

Puis c'est aussi ce qui s'était passé dans le travail pour le site à Québec, pour le site de consommation supervisée, il y avait eu un gros travail en amont pour arriver avec l'implantation de ce site-là. Ça a pris un certain temps avant qu'on vive les enjeux de cohabitation, parce qu'au départ il n'y avait pas... il n'y avait pas d'enjeu, il n'y avait pas d'enjeu de cohabitation. Quand le problème est devenu plus grand, quand il y a eu davantage de personnes qui, finalement, n'avaient pas de place à l'intérieur des services, c'est plus ça, l'enjeu qu'on a vécu, c'est le manque de place à l'intérieur des services, et non le lieu et la façon que c'est travaillé, parce qu'il y a eu un travail de concert, important avec le réseau de la santé, avec la ville, puis avec les organismes communautaires.

Mme Prass : Et, dans cette perspective-là, on a parlé avec le groupe tout à l'heure, la possibilité qu'il y ait un financement pour les organismes communautaires, pour les mesures de cohabitation, atténuation. Pensez-vous que les municipalités...

Mme Prass : …parce que le travail que vous faites, des fois, c'est d'avoir une présence policière accrue dans ces endroits-là. Pensez-vous qu'il serait utile qu'il y ait aussi un programme de financement pour les municipalités dans cet esprit de cohabitation là?

M. Marchand (Bruno) : Oui, mais oui, oui, oui, tout à fait, mais il n'y a pas de… Ce que je veux dire, c'est… Il y a une partie de ce qu'on fait pour laquelle on n'a pas besoin de financement de plus. Il y a une partie qui nous incombe, il y a une partie qui est dans notre champ de responsabilité, et c'est à nous de faire notre travail, mais on a besoin de le faire de façon concertée. Mais il y a une autre partie qui n'est pas dans notre champ de compétence, pour laquelle, là, on a besoin d'être soutenus.

Alors, ma réponse n'est pas celle traditionnelle de dire : Oui, on veut plus d'argent en tout temps pour tout. Ça ne se peut pas, ça n'arrivera pas puis, selon moi, c'est une mauvaise demande de faire ainsi. Donc, on va s'occuper… on va continuer de s'occuper de sécurité publique. C'est notre responsabilité. Ça fait partie de notre devoir. On va s'occuper de l'entretien, de la voirie. On va s'occuper, avec des partenaires… Vous voyez, on a mis des programmes en place présentement pour soutenir les commerçants dans des contextes difficiles. Ça fait partie de notre travail, puis certains… Dans certains cas, on le fait avec le gouvernement du Québec parce qu'on obtient des sommes, mais le gouvernement du Québec doit se concentrer sur la portion qui est vraiment la sienne dans son champ de compétence santé et services sociaux, puis ce n'est pas à moi de faire quelque apprentissage que ce soit en cette matière pour venir là puis faire en sorte qu'on ait les moyens nécessaires, «on» n'étant pas la ville, «on» étant le collectif, pour qu'on ait les moyens nécessaires pour que ça se passe.

Le ministre a raison, puis je pense que tout le monde l'est, d'être préoccupé de cohabitation. Si on ne se préoccupait pas de cohabitation, on va mal desservir d'en dedans les personnes souffrant de différentes problématiques. Pourquoi? Parce qu'il va se créer de la haine, il va se créer de la division puis il va y avoir des attentes qu'on rentre avec des tags puis qu'on amène le monde dans des champs, loin de tout, loin de tout, et ça ne sera jamais la bonne réponse. Attendre à un problème, ça ne sera jamais la bonne réponse, mais, pour le faire, il y a des rôles que le gouvernement et les services de la santé doivent jouer pour être cohérents avec le milieu communautaire et le milieu municipal pour qu'on joue tous notre rôle.

Mme Prass : Et vous avez… Excusez-moi. On a parlé tantôt de… que les mesures de cohabitation, plans de cohabitation, ça ne peut pas être quelque chose qui est présenté au début, on travaille, puis ensuite ça se perd de… Évidemment, les municipalités sont des partenaires premières dans cette réalité-là. Et est-ce que vous serez ouverts à l'idée que, justement, il y ait un rôle du municipal pour qu'il y ait une conversation ou un dialogue continu avec les différents partenaires dans l'esprit de, justement, maintenir cette cohabitation qui… Comme vous l'avez mentionné, d'un jour à l'autre, il y a une augmentation du nombre de personnes desservies. Donc là, ça pourrait créer des enjeux. Donc, justement, d'avoir ce comité ou ce groupe en continu pour pouvoir répondre aux différentes réalités qui pourraient apparaître…

M. Marchand (Bruno) : Absolument, c'est ce qu'on fait déjà, et, absolument, la relation de confiance ne doit pas attendre que le champ soit rempli de mauvaises herbes pour qu'on décide de se demander qu'est-ce qu'on fait pour enlever les mauvaises herbes. Il est trop… Il est souvent trop tard, parce que la relation de confiance s'effrite. Donc, cette relation continue dont vous parlez, elle est absolument nécessaire et elle évite d'amplifier les problèmes qui prennent, plus tard, beaucoup plus de temps à régler, et pour lesquels on a perdu des relations de confiance importantes, et qui sont difficiles à regagner, donc, cette nécessité-là de le faire en continu…

Il y a des choses qui ne sont pas prévisibles quand on implante ce type de service là. On travaille avec des humains puis on suppose des mouvements humains qui nous semblent, à travers nos expériences, possibles, puis on s'aperçoit qu'exactement ce que le ministre a dit, c'est que, maintenant, on se retrouve avec des gens devant le centre, puis là il y a des choses qui se passent. Il faut être capable de réagir en continu, et ça suppose cette relation de confiance, mais cette communication et ce respect pas des responsabilités des autres, mais cette imputabilité de ces responsabilités. Dans ces groupes-là, souvent, ce qui arrive, c'est que c'est la faute de l'autre, tout type de table de concertation, et, à partir du moment où c'est la faute de l'autre, on n'arrive à rien.

Mme Prass : Merci beaucoup.

• (11 h 40) •

Le Président (M. Provençal) : Je vais maintenant céder la parole au député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre mémoire, pour votre présentation. Je vais aller rapidement.

On est dans une dualité, là, puis vous en parliez tantôt, entre les responsabilités de la ville, aussi ceux du communautaire, aussi ceux de la santé publique, du ministre. Le communautaire, tout à l'heure, nous disait : Oui, mais on ne peut pas supporter à nous seuls le plan de cohabitation. Puis il nous disait : Moi, j'ai parlé avec des organismes sur le terrain, moi, quand j'appelle la police, bien, pour gérer une situation, ce n'est pas toujours qu'elle vient. Ils n'ont pas un contrôle sur la force policière. Quand il y a eu des déchets, du débordement, puis que j'appelle, bien, les travaux publics pour venir ramasser, des fois, ils ne viennent pas.

Donc, il y a un enjeu de responsabilisation de la ville. Là, le projet de loi tel quel, quand même, met la seule responsabilité, de la manière que je le lis puis que les organismes communautaires le lisaient, sur le communautaire d'assurer le respect du plan de cohabitation. Là, on ne veut pas nécessairement non plus ne responsabiliser que les villes. Sur le plan de cohab aussi, il y a le rôle de Québec…

M. Cliche-Rivard : ...bref, dans la disposition législative ou dans votre vision, vous disiez chacun avoir son carré de sable. Là, le carré de sable semble limité aux organismes. Est-ce qu'il y a un meilleur balancement? Et à quel point est-ce que la ville pourrait ou voudrait être impliquée dans le plan de cohabitation de manière aussi... paraître contraignante, là, mais à quel point il y aurait un rôle législatif puis d'application de la coresponsabilité de la médication sociale?

M. Marchand (Bruno) : Moi, j'ai la même perception, même si le ministre nous dit que ce n'était pas l'intention, et je le crois... j'ai la même perception que présentement on fait reposer sur le milieu communautaire une responsabilité qu'il n'est pas capable, pas par ses compétences, mais par son incapacité et ses rôles, il est incapable d'assumer. Et donc ça veut dire que ça pourrait bien aller, dans certains cas, s'il y a déjà des collaborations au préalable, mais, dans d'autres cas où il n'y a pas ces collaborations-là, on ne sera pas capables de présenter un plan de cohabitation qui va être crédible et sérieux parce que les vrais partenaires autour ne seront pas... ou seront un peu en porte à faux. Ça, c'est la première chose. Et ça pourrait être une façon pour certaines... certains endroits sur cette terre, au Québec, de dire : Bien, pour ne pas en vouloir, on a juste à ne pas collaborer au plan de cohabitation, ils n'auront jamais un plan de cohabitation crédible. Donc, ça peut être une façon de «not in my backyard», là, «pas dans ma cour», pour dire : Regarde, on a juste à ne pas collaborer, le ministre va bien voir que le plan de cohabitation ne tient pas la route et ne pourra pas donner son aval.

Donc, comment on force les gens — dans certains cas, il faut les forcer — à travailler ensemble? Nous, comme ville, on assume parfaitement de jouer nos rôles. Alors, on a un rôle, et nos responsabilités sont claires, et on doit le jouer, mais on a besoin de... Et comme ville, je pense qu'on assume un bon rôle de leadership, et ça fait une différence. On a besoin d'avoir cette capacité à dire : O.K., comment on rallie les acteurs? Alors, si je m'extirpe de Québec... Parce que présentement, Québec n'aurait pas besoin d'arbitre, on est capables de s'arbitrer. Peut-être qu'il y a des municipalités qui auraient besoin qu'un ministre puisse dire : Bien, vous allez devoir travailler ensemble parce que vous, là, vous êtes... c'est complètement le bordel, c'est un foutoir et vous n'êtes pas capables de travailler ensemble. Mais, si je parle juste pour Québec aujourd'hui, puisque j'en suis le représentant, on n'a pas besoin d'avoir un arbitre ou une pression, on a déjà cette réalité-là qui va bien et pour laquelle on trouve des solutions. Mais ça ne peut pas juste être le communautaire, ça ne peut pas juste être la ville, mais la ville doit jouer son rôle.

M. Cliche-Rivard : ...d'un deuxième site? Vous êtes...

M. Marchand (Bruno) : Oui, oui, tout à fait, tout à fait.

M. Cliche-Rivard : Puis est-ce que ce projet de loi le facilite ou non?

M. Marchand (Bruno) : C'est une très bonne question. Je ne le sais pas. As-tu une réponse?

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Oui. En fait, c'est qu'il y a un volet qui ne nous appartient plus dans l'identification du lieu où, on pense, ce serait la meilleure place. La ville est probablement... en fait, pas probablement, la ville, on est les mieux placés pour connaître notre territoire et savoir où sont les besoins, avec le milieu communautaire, avec le réseau de la santé, ils sont où, les besoins. Parce que l'idée, c'est de venir implanter un service où les besoins sont. Donc, ils sont où, les besoins? Où on pense est le mieux?

Et on l'a prouvé à travers les expériences qu'on a mises en place ici, à Québec, pour être capables de montrer, puis d'identifier, et de créer le meilleur lieu, et assurer cette cohabitation-là qui n'est pas toujours facile, là, on en convient. Puis on le sait que les citoyens nous le nomment, que ce n'est pas toujours facile. Mais on a cette sensibilité-là aussi de maintenir cette relation et ce dialogue-là avec le citoyen, sachant très bien que ce n'est pas toujours facile. Donc, on pense, actuellement, que ça pourrait même ralentir, si on n'a pas le pouvoir de le travailler entre nous, parce que ça va se travailler sur un autre palier.

Puis je pense aussi qu'il y a un volet dans ce qu'on a fait comme proposition. Quand M. le Maire dit «pas dans ma cour», bien, pas dans ma cour, ça peut être pas dans ma ville aussi, hein? Donc, mettons, à la grandeur Capitale-Nationale, ce type de besoins là peuvent être aussi dans d'autres villes de la Capitale-Nationale puis venir... s'il y a une obligation d'intégrer aux grilles de zonage, pour d'autres municipalités. Parce que ça fait partie des propositions qu'on a faites, aussi, dans le mémoire, que ce soit même une obligation pour les municipalités d'identifier des lieux où ce type de service là pourrait être offert. Puis je dis «à hauteur de municipalités», mais ça peut être à hauteur de MRC aussi, là, donc, que chacun vienne de répondre aux besoins de sa communauté aussi.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) : Mme la députée de Terrebonne, vous allez compléter cet échange.

Mme Gentilcore : Oui. Merci beaucoup. J'aimerais continuer là-dessus parce que c'est un sujet qui m'intéresse. Donc, vous étiez au courant qu'il y avait ce projet-là qui était en développement du côté du... Est-ce qu'on vous a consultés déjà, justement, par rapport aux emplacements potentiels, et tout ça, ou, en vue de la loi qui va être mise en application, déjà, vous êtes écartés de ce processus-là? Comment ça se passe, à date, dans ce projet-là?

Mme Boucher (Marie-Pierre) : Bien, on n'est pas écartés, il n'y a pas... pour l'instant, on ne sent pas qu'on est mis de côté.

Mme Gentilcore : Non, non, très bien. Donc, vous avez été consultés par rapport à ce projet-là, vous avez déjà des endroits qui ont été prédéterminés, peut-être potentiels, pour installer...

M. Marchand (Bruno) : C'est un travail qui se fait le CIUSSS, c'est un travail qui se fait avec les autorités de santé publique.

Mme Gentilcore : O.K. Donc, ça avance. Donc, ça avance. Donc, la seule crainte, de votre côté, c'est que peut-être que ce projet de loi là pourrait retarder un peu le développement des travaux, alors que c'est une urgence, quand même, pour la ville Québec?

M. Marchand (Bruno) : À voir.

Mme Gentilcore : À voir, à voir.

M. Marchand (Bruno) : Oui.

Mme Gentilcore : Est-ce qu'il y a des éléments dans ce projet...

Mme Gentilcore : ...ce projet de loi là que vous conserveriez ou vous, vous... Comme, le groupe précédent a demandé de retirer le projet de loi. C'est quoi, votre vision par rapport à ça? Est-ce qu'il y a des trucs dans le projet de loi que vous, vous conserveriez?

M. Marchand (Bruno) : Bien, il y a beaucoup de trucs. Notre mémoire... Notre mémoire ne dit pas : Il ne faut prendre le projet de loi puis le mettre à la poubelle. Notre mémoire dit : Bien, on doit faire attention à la question du zonage municipal. On pense qu'il y a quelque chose qui est pernicieux là-dedans, qui est... puis qui... pour laquelle, je pense, qu'il y a une tendance qui est plutôt inverse à ne pas subordonner le municipale à une façon de le voir comme étant un petit enfant d'école à qui on dit quoi faire, comment le faire. Donc, notre première recommandation, c'est ça. Il y a du zonage, il peut y avoir des modifications, comme vient de le préciser ma collègue, mais ça, c'est important. La question du 150 mètres, pour moi, c'est... Je comprends, je comprends l'étiquette politique qu'on a besoin d'avoir quand on veut agir fortement, quand on veut...

Mme Gentilcore : L'image mentale pour les gens.

M. Marchand (Bruno) : Oui, c'est important, ça, parce que les gens ne sont pas dans le fin détail. Je le comprends, pourquoi le ministre amène ça. Il reste que... Moi, je pense qu'il soustrait son pouvoir d'agilité à quelque chose qui est, sans mauvaise foi, à l'étiquette politique qui va nous compliquer la vie dans les centres urbains, qui va compliquer la vie, énormément, à plusieurs égards. Ça fait qu'est-ce que... Est-ce qu'il faut que ce soit un 150 mètres? Est-ce qu'il faut que ça reste en 150 mètres, mais que ça ne soit plus une suggestion, et, sous d'autres aspects, le ministre peut décider autrement? Il faut se garder un pouvoir, un pouvoir de dire : Sur ce terrain-là, compte tenu de ces conditions-là, on a la capacité de le faire, même si c'est à 75 mètres.

Mme Gentilcore : Donc, pour vous, un mur-à-mur dans le cadre des sites d'injection supervisée, ce n'est pas une bonne façon de voir les choses.

M. Marchand (Bruno) : Je ne le pense pas. Maintenant, qu'on ait un projet de loi qui vienne préciser des choses, qui vienne donner des orientations, pourquoi pas. Mais je pense qu'il faut éviter de se cadenasser avec une étiquette politique qui viendrait nuire à la capacité d'implanter dans des secteurs où, même si c'est 50 mètres, ça peut être possible, alors qu'ailleurs ça devrait être 250.

Mme Gentilcore : ...à exercer un jugement puis discernement par rapport à ça. Parfait. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je remercie les représentants de la ville de Québec pour leur contribution à nos travaux.

Sur ce, je vais suspendre les travaux jusqu'après les avis touchant les travaux des commissions. Alors, merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 11 h 48)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 15)

Le Président (M. Provençal) :Alors, bonjour à tous. Nous reprenons nos travaux. La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 103, Loi visant principalement à réglementer des sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté. Puis, cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants : la ville de Montréal, la ville de Gatineau conjointement avec l'Union des municipalités du Québec et le Réseau Solidarité Itinérance du Québec. Alors, nous allons... Dès maintenant, je souhaite la bienvenue à la ville de Montréal et à ses représentants, c'est-à-dire Mme Blanco, M. Therrien et M. Lemaire. Et vous avez 10 minutes pour votre présentation et nous procéderons aux échanges. Alors, je vous cède immédiatement la parole. Vous pouvez y aller, madame...

Mme Blanco (Josefina) : ...Merci beaucoup. Bonjour, M. le président de la commission, M. le ministre responsable des services sociaux, Mmes, MM. les députés. La ville de Montréal remercie la commission pour l'occasion qui lui est donnée de présenter ses commentaires au sujet du présent projet de loi. Je me présente, je suis Josefina Blanco, je suis conseillère de la ville de Montréal, Responsable de la diversité, de l'inclusion sociale, de l'accessibilité universelle, de la condition féminine, de la jeunesse et des personnes aînées au sein du comité exécutif de la ville, donc l'action de la ville en matière de réduction des méfaits révèle... relève, en partie, de ma responsabilité. Aujourd'hui, je suis accompagnée de M. Jean Therrien, directeur du Bureau des relations gouvernementales et municipales de la ville de Montréal, ainsi que de M. Pier Alexandre Lemaire, conseiller de planification au sein du Service de la diversité et l'inclusion sociale.

Permettez-moi d'abord de citer le contexte dans lequel s'inscrit notre intervention. La ville de Montréal est la plus grande ville du Québec, avec une population de plus de 1,8 million d'habitants sur l'île. Sa densité urbaine est la plus élevée au Québec, avec plus de 4 800 habitants au kilomètre carré, soit trois fois plus que la moyenne des 10 plus grandes villes de la province. Cette densité exceptionnelle, combinée à la rareté des terrains disponibles, rend chaque décision d'aménagement particulièrement stratégique et unique, mais surtout, dans le contexte actuel, Montréal concentre une partie importante des enjeux sociaux du Québec : pauvreté, itinérance, dépendance, inégalités.

C'est dans ce contexte que je vous présente aujourd'hui la position de la ville de Montréal concernant le projet de loi n° 103, visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté, dont l'étude est faite aujourd'hui. Vous allez retrouver notre position et des propositions que nous vous soumettons dans le mémoire déposé par la ville.

D'entrée de jeu, le projet de loi n° 103... avec le projet de loi n° 103, la ville de Montréal veut saluer la volonté du gouvernement du Québec de favoriser une cohabitation harmonieuse entre les personnes visées par les sites de consommation supervisée ainsi que par les services en itinérance, en général, et les communautés avoisinantes. La ville de Montréal reconnaît aussi l'importance de favoriser une cohabitation harmonieuse sur son territoire, dans le respect des droits et des besoins de toutes les personnes qui y vivent. Elle comprend les préoccupations exprimées par de nombreux citoyens et citoyennes face aux impacts de la crise des surdoses et de l'itinérance sur leur quotidien. Ces enjeux sont réels, complexes et, parfois, difficiles. Nous nous engageons d'ailleurs à poursuivre nos efforts et à continuer d'assumer pleinement notre rôle en ce domaine avec l'ensemble des partenaires concernés.

Nous tenons tout de même à rappeler que les sites de consommation supervisée sont des lieux de santé publique essentiels, qui sauvent des vies et préviennent les infections dans un contexte urbain qui concentre une grande partie des problématiques liées à la crise des surdoses. Cette crise est bien réelle. Selon l'Institut national de santé publique du Québec, les intoxications suspectées aux opioïdes sont en hausse constante. Le nombre de décès liés à ces substances a triplé entre 2000 et 2020. En moyenne, cinq personnes meurent chaque semaine, au Québec, d'une surdose, et 81 % de ces décès surviennent lorsque les gens consomment seuls. Les sites de consommation supervisée permettent de prévenir ces drames. Ils offrent un environnement qui est sécuritaire, encadré par des professionnels, où les personnes peuvent consommer tout en ayant accès à des soins, à de l'écoute, à de la prévention. À Montréal, cinq sites de consommation supervisée fixes et un site mobile ont desservi plus de 28 000 personnes uniques entre 2020 et 2025. Il est aussi important de mentionner qu'entre janvier 2017 et février 2025 aucune surdose mortelle n'a eu lieu dans un site de consommation supervisée au Canada.

• (15 h 20) •

Nous sommes à l'écoute des préoccupations exprimées par les citoyens et au besoin d'assurer une cohabitation harmonieuse, mais il faut rappeler que l'enjeu de cette crise est, avant tout, un besoin important, non comblé, de services en santé et services sociaux, notamment en matière de dépendance et de toxicomanie. Nous estimons aussi qu'il est fondamental de ne pas confondre deux réalités qui sont bien distinctes, la crise des surdoses et la crise de l'itinérance. La crise des surdoses est une grande urgence de santé publique. Elle est liée à la toxicité croissante du marché des drogues, à la présence de substances imprévues, comme le fentanyl ou les nitazènes, dans les drogues consommées par les individus. Elle touche des personnes de tous les horizons, dont une partie seulement sont en situation d'itinérance. Les sites de consommation supervisée sont une réponse médicale, sociale et sécuritaire à cette crise. Ils ne sont pas des refuges, mais des lieux de soins, qui sont encadrés...

Mme Blanco (Josefina) : …des professionnels de la santé. La crise de l'itinérance, quant à elle, est une crise sociale et structurelle. Elle est exacerbée par la pénurie de logements, l'inflation, les évictions, les inégalités socio-économiques. Elle se manifeste par une hausse du nombre de personnes en situation d'itinérance, visibles ou non, et par des tensions dans l'espace public. Les services en itinérance, que ce soient des haltes chaleur, hébergements d'urgence, centres de jour, répondent à des besoins de base. Confondre ces deux types de services peut mener à la mise en place de politiques inadaptées. Restreindre l'accès aux sites de consommation supervisée pour répondre à des enjeux liés à l'itinérance, c'est risquer d'aggraver la crise des surdoses, sans résoudre les causes profondes de l'itinérance.

Nous sommes d'avis qu'une réponse efficace à ces deux crises doit reposer sur une approche qui est différenciée, complémentaire et coordonnée. Considérant donc les éléments mentionnés précédemment, la ville de Montréal propose 14 recommandations pour le projet de loi n° 103. Notamment, devant l'ampleur de la crise des surdoses et celle de l'itinérance, nous estimons que le gouvernement du Québec doit investir de manière encore plus importante, prévisible et soutenue en habitation, en santé physique et mentale et en services sociaux. La véritable solution à long terme passe par un réengagement fort du gouvernement du Québec, en partenariat avec les villes et les organismes communautaires, dans ces secteurs clés. Autrement, les enjeux de cohabitation, de sécurité publique et de qualité de vie ne feront que s'aggraver.

Ensuite, nous sommes d'avis qu'il faut retirer les articles du projet de loi qui confèrent au ministre le pouvoir de soumettre à autorisation tout local destiné à accueillir principalement des personnes en situation d'itinérance. Une telle centralisation des pouvoirs soulève plusieurs enjeux comme de ralentir les interventions et l'ouverture des nouvelles ressources dans un contexte d'urgence sociale et de compromettre l'accessibilité des services essentiels de première ligne. De plus, l'application uniforme d'une distance minimale de 150 mètres entre 11 sites de consommation supervisée et un établissement scolaire ou un service de garde éducatif à l'enfance ne tient pas compte des contraintes propres aux milieux urbains denses. Cette exigence uniforme rendrait très difficile l'implantation de nouveaux sites de consommation à Montréal, alors que les besoins sur notre territoire sont plus que pressants.

Nous soutenons donc qu'il est essentiel de permettre de déroger, sous réserve d'un avis conforme de la Direction régionale de la santé publique, aux réductions de la distance minimale dans les zones à forte densité urbaine ou de manière à tenir compte les différentes réalités locales. Les sites de consommation supervisée déjà en activité doivent aussi, quant à eux, être protégés pour éviter des fermetures injustifiées dès 2028. Une telle mesure, appliquée sans analyse de risques, pourrait avoir des effets nuisibles sur la santé publique. Une hausse des surdoses, pertes des liens avec le service, entre autres, et aussi sur la cohabitation dans l'espace public, comme par exemple voir une augmentation de la consommation et de la présence de matériel de consommation dans l'espace public.

Il faut donc garantir que tous ces sites de consommation supervisée en activité à la date de la sanction de la loi puissent poursuivre ses activités pour une période de quatre ans renouvelable de plein droit, sauf incident majeur, justifié par un avis conforme de la DRSP.

La Ville de Montréal soutient aussi qu'il est essentiel d'ajouter une mention explicite à l'effet que le projet de loi s'applique uniquement aux sites de consommation fixes et non mobiles pour ne pas freiner une solution qui est souple, efficace et complémentaire aux sites de consommation fixes. Le projet de loi impose aux organismes l'obligation de produire un plan de cohabitation sans toutefois en définir les attentes, la structure ou les critères d'évaluation. Cette absence de balises crée une insécurité juridique pour les organismes, risque de ralentir le processus d'autorisation ou de renouvellement et de nuire à l'équité dans une évaluation des projets. Nous recommandons de produire un guide précisant la structure des indicateurs et des meilleures pratiques pour l'élaboration du plan de cohabitation. Cela permettra de standardiser les pratiques, de soutenir les organismes et de faciliter l'analyse des dossiers. Finalement, il faut impliquer les municipalités dès le début du processus d'implantation d'un site de consommation supervisée. Elles connaissent leur territoire, les enjeux et les communautés.

En conclusion, soyez assurés que nous partageons vos objectifs. Une cohabitation harmonieuse, des quartiers sécuritaires, des services accessibles et efficaces, une quantité adéquate pour répondre à la crise de vulnérabilité exacerbée dans la métropole, même si nous saluons la volonté de légiférer dans ce sens, le projet de loi n° 103, dans sa forme actuelle, comporte des risques pour la santé publique, pour l'autonomie des milieux et surtout pour la sécurité et la santé des personnes les plus vulnérables. En créant un amalgame entre les enjeux liés à la consommation supervisée et à l'itinérance et en imposant des contraintes uniformes et centralisées, le projet de loi pourrait aggraver les problèmes qu'il cherche à résoudre. La ville de Montréal…

Mme Blanco (Josefina) : ...de Montréal appelle donc à des ajustements législatifs qui tiennent compte des réalités urbaines, respectent les compétences municipales et soutiennent les approches communautaires fondées sur la réduction des méfaits, la proximité et la dignité. Merci.

Le Président (M. Provençal) :...alors, M. le ministre, je vous invite à débuter cette période d'échange.

M. Carmant : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour votre exposé, Mme Blanco, et bonjour à vos collègues.

Une chose que j'aimerais clarifier. Puis, depuis les commentaires que j'entends ce matin, c'est... je ne suis pas... je ne suis pas certain que c'est clair. Quand on parle des sites accueillant les gens en situation d'itinérance, la distance ne s'applique pas du tout, là. On s'entend là-dessus. Ce qu'on parle, c'est peut-être ajouter des règles de cohabitation, surtout quand on développe des sites - et vous le savez à Montréal - qui vont toucher spécifiquement les personnes avec des problèmes de santé mentale et avec des problèmes de toxicomanie. Et, même là, vous croyez qu'il faudrait enlever cet alinéa-là?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Je veux bien clarifier. Vous faites mention du 150 mètres pour les sites de consommation supervisée.

M. Carmant : C'est ça. Il ne s'applique pas pour les autres.

Mme Blanco (Josefina) : Non. Ça, je comprends. Nous, nous croyons que, pour les sites de consommation supervisée, appliquer une mesure mur à mur, ce n'est pas la bonne... la bonne réponse. Que, des fois, je pense que, comme on demande, les municipalités, puis je pense que Montréal n'est pas la seule municipalité à demander la même chose, du moment où on est impliqués du début du processus, bien, l'analyse peut, des fois, montrer qu'un site qui ne respecte pas le 150 mètres peut aussi répondre et être tout à fait adéquat, peut-être, qu'un site qui se trouve à 180 mètres. Donc, je pense que la... c'est... nous, on fait mention précisément, les 150 mètres appliqués pour l'ouverture, l'installation des sites de consommation supervisée.

M. Carmant : O.K. Mais on ne fait pas d'amalgame avec les sites accueillant des personnes en situation d'itinérance. La distance ne s'applique pas. Je veux juste être clair là-dessus.

Mme Blanco (Josefina) : O.K.

M. Carmant : Si je comprends votre commentaire, si c'était à refaire, vous donneriez le feu vert à l'ouverture de la Maison Benoît Labre?

Mme Blanco (Josefina) : Je pense que ce qui prouve cet exemple, c'est qu'on a la place à l'amélioration quant au processus de collaboration et concertation avec les parties prenantes. Et, en disant ça, je fais mention autant du moment où on demande... l'exemption est demandée au fédéral, la province est impliquée, de notre compréhension, aussi dans ce processus. Mais vient la municipalité ainsi que l'arrondissement concerné doivent être impliqués et informés très rapidement. Et c'est pour ça qu'on parlait de la proximité et la connaissance fine. Et viennent évidemment les organismes qui vont porter les proches. Et je pense qu'il y a une grande place à l'amélioration, à un meilleur arrimage de concertation et de partage d'information... un service comme... de telle sorte peuvent... peuvent ouvrir pour qu'on s'assure qu'on est dans la meilleure piste de solution.

M. Carmant : Parce que vous savez qu'avant d'accorder le financement, j'ai eu une lettre d'appui du maire d'arrondissement, j'ai une... d'appui du député de Saint-Henri-Sainte-Anne m'assurant que la cohabitation était adéquate. Et, pourtant, c'est moi qui ai dû aller rencontrer le comité citoyen en bout de ligne.

Mme Blanco (Josefina) : Je pense que...

M. Carmant : Donc, qu'est-ce... qu'est-ce... quelle a été la difficulté, selon vous, quand... Comment vous lisez ça?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Je pense qu'un élément intéressant du projet qui est présenté aujourd'hui, du projet de loi, c'est justement cette volonté de travailler en amont les plans de cohabitation sociale pour une cohabitation plus harmonieuse. Et c'est un élément intéressant. Toutefois, on croit qu'il faudrait mieux peut-être le définir et l'encadrer pour que ce soit plus clair aussi pour les organismes. Lorsqu'ils sont dans un processus... c'est lourd, c'est difficile, il y a beaucoup d'allers-retours. Donc, le plus clair et le plus de prévisibilité qu'on peut donner aux organismes, je pense que c'est le mieux. Donc, avoir un gabarit, je dirais, un gabarit de départ on sait à quoi l'organisme doit s'attendre, comment on va mesurer, quels sont les indicateurs.

• (15 h 30) •

Toutefois, je vais faire aussi référence à nouveau au fait qu'un plan de cohabitation ne peut pas être un copié-collé au Sud-Ouest, Plateau-Mont-Royal, Villeray, Saint-Michel, Parc-Extension. Il doit y avoir quand même une flexibilité pour s'adapter à la réalité locale. Et, même à ça, on voit qu'un plan de cohabitation est mis en place, mais il faut le suivre, il faut s'ajuster, et il faut... Et, ça, ça se fait en concertation, en partenariat.

M. Carmant : D'accord. Et actuellement quelles sont les mesures mises en place par la ville pour améliorer la cohabitation sociale?

Mme Blanco (Josefina) : Je vais faire motion plutôt, peut-être, à ce qui concerne le volet plus lié à l'itinérance. C'est un constat on l'a vu surtout depuis la pandémie et dans différents arrondissements, de plus en plus, on a mis en place... on...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Blanco (Josefina) : ...les organismes communautaires à mettre en place des plans de cohabitation sociale. D'ailleurs, ce qui... Dans les dernières années, c'est quand on s'est rendu compte que la collaboration entre les arrondissements était très présente, parce qu'on le sait, on allait s'inspirer des autres. Mais chaque plante demeure unique à la ressource, au contexte local. Et ça, ça a été un apprentissage fort intéressant. J'irais plus loin. Ce constat est tellement présent que c'est pour ça qu'on a mandaté l'OCPM, l'Office de consultation publique de Montréal, justement, pour aller plus loin. Et son rapport sera rendu très bientôt, je pense que c'est le mois de juin, sur la cohabitation sociale. Mais là je vais faire vraiment la distinction qu'ici on parle de ressources pour des personnes en situation d'itinérance et non des sites de consommation supervisés.

Je voudrais aussi être très sensible à la réalité des organismes communautaires à qui on demande déjà beaucoup. Donc, c'est important aussi de prendre en considération qu'en ayant... en leur donnant de la prévisibilité, il faut aussi prendre en considération que ça doit venir avec un soutien financier pour que cet organisme puisse mettre en place et répondre aussi à cette attente. Je peux bien évidemment garantir ou continuer à dire que la ville va continuer à être présente. La ville, c'est clair. Et les arrondissements vont prendre vraiment en charge tout ce qui touche l'espace public en général. Mais ces plans de cohabitation, en général, sont travaillés en concertation. Je pense que vous en connaissez plusieurs de ces plans-là.

M. Carmant : D'accord. Puis un des buts du projet de loi, c'est vraiment de s'assurer que ça se... que ça se fasse en amont, et c'était le but de donner cette responsabilité-là quand le... quand le projet est déposé à Santé Québec. Et c'est sûr qu'il faut impliquer la santé publique beaucoup plus, là. Je suis tout à fait d'accord. Et il faut que, dans cette planification-là, il y ait des planifications budgétaires. Ça, je pense que c'est intrinsèque à la demande du projet de loi.

Vous voyez, par exemple, quand on parle de... de cette situation là, une de mes premières demandes pour alléger la situation a été de déplacer le centre de consommation supervisée au CLSC, qui n'est pas très loin de la maison Benoît Labre. Puis l'avantage d'avoir cette cohabitation là, même si le centre de consommation supervisée peut toujours être géré par l'organisme, c'est de mieux pouvoir contrôler l'extérieur du site. Parce que j'ai fait plusieurs demandes. Et évidemment que l'organisme est autonome, donc peut accepter ou pas de répondre aux demandes du ministre. Donc, comment vous voyez ça, vous, cette cohabitation, là, des organismes communautaires dans les... dans des sites du réseau de la santé, un peu comme Dopamine qui est un modèle que j'aime beaucoup, là?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Je crois que de toute façon, vous allez entendre l'organisme en question demain. Donc, je laisserai le soin à l'organisme proprement parlant de pouvoir s'étendre plus sur cette question. Et je pense que ça prend plusieurs... Ça prendre autant de ressources dans le réseau et la santé, mais ça prend aussi également des ressources qui sont directement menées par les organismes communautaires. On le sait, qu'en répondant à des besoins de personnes qui, des fois, sont très, très éloignées du système déjà de la santé, donc, les organismes communautaires ont la confiance. C'est sur eux. Ils sont la porte d'entrée et ils sont des gens qui peut-être n'iront pas... Ce n'est pas tout le monde qui va aller vers le réseau de la santé. Donc, je pense que ça prend entre les deux. Ça prend également, puis je le mentionne lors de mon allocution, les sites de consommation mobile. C'est une autre réponse qui est flexible. Et à notre compréhension, les sites ne sont pas concernés, mais peut-être ça vaudrait la peine de le clarifier parce qu'à Montréal, on a quelques cas puis c'est important que cette, aussi, cette option demeure disponible sur notre territoire.

M. Carmant : O.K. Et quel serait votre souhait pour favoriser cette concertation-là? Comme qui devrait l'animer, cette concertation? Puis je pense que c'est... Tout le monde dit un peu la même chose, là, c'est qu'il manque cette concertation-là. Qui devrait l'animer selon vous?

Mme Blanco (Josefina) : Je vous dirais que pour ce qui concerne l'itinérance, la ville a commencé dans les dernières années, a pris un rôle assez important, comme pour concerter tout le monde et s'assurer que chaque partie est à la table. En ce qui concerne les sites de consommation supervisée, je voudrais quand même...

Mme Blanco (Josefina) : ...prend plus de précautions qu'on parle vraiment d'une question de santé publique comme compétence exclusive du gouvernement du Québec. Donc, je pense que ça demeure. On veut que la concertation se fasse, que ça se fasse rapidement, les municipalités ainsi que les arrondissements, on doit être à la table. Est-ce que c'est à la ville de l'amener? Je pense que la responsabilité devrait être peut-être plus définie entre la santé, l'organisme qui porte. Mais c'est sûr et certain que la ville va être là pour continuer à répondre comme on le fait en itinérance, pour tout ce qui concerne plutôt la gestion de l'espace public.

M. Carmant : Je pense qu'effectivement que la santé publique régionale a un rôle clé à jouer, là, là-dedans, puis quelque chose qu'il faudrait peut-être clarifier.

M. le Président, je passerais la parole à la députée.

Le Président (M. Provençal) : La députée de Louis-Riel.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) : Allez-y.

Mme Boivin Roy : ...Donc, vous nous avez dit qu'effectivement il y a sept sites de consommation supervisés à Montréal, incluant L'Anonyme avec le site mobile et puis que Montréal est l'épicentre pour ce qui est de la situation des opioïdes. Le rapport de l'OCPM qu'on attend au mois de juin, donc il est très attendu, vous le savez ça fait presque un an, qu'est ce que vous vous attendez de retrouver dans ce rapport là avec la discussion d'aujourd'hui?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Je vais revenir sur une... pour clarifier encore que le rapport de l'OCPM, c'est vraiment pour la cohabitation liée aux ressources, pour les ressources, pour les personnes en situation d'itinérance et non spécifiquement pour les centres de consommation supervisée. Je pense qu'on va voir... En l'attendant, il y a eu beaucoup des consultations auprès des personnes concernées, des organismes, la ville, des arrondissements. Donc, je pense que ça va être un rapport qui va consolider et peut-être, je l'espère, plusieurs apprentissages qu'on a eus dans les dernières années, puis comme je le disais tout à l'heure, surtout après la pandémie. On l'a vu, on l'a vu, là, dans les derniers recensements des personnes en situation d'itinérance, la situation a explosé non seulement à Montréal, dans d'autres villes du Québec, dans des petites villes. Donc, on est très sensibles à cette question, de qu'on s'assure que quand nos ressources arrivent, mais ce soit travaillé le mieux possible en amont et l'aspect de la cohabitation sociale est essentiel. On est conscient que ça bouleverse, ça change des habitudes, ça peut créer des perceptions d'insécurité. Donc, il ne faut pas... on ne néglige pas cette sensation qu'ils peuvent avoir peut-être les personnes aînées, les familles, on veut être sensible, on est sensibles à cette réalité, mais c'est possible de travailler en amont. Donc, on espère que le rapport va faire peut-être vraiment constant puis va sortir des pistes de solutions plus claires un peu comme on demande pour le plan de cohabitation pour les sites de consommation supervisée. Est-ce que ça va nous permettre à nous, à la ville, d'établir une sorte de gabarits qui après ça va pouvoir être adapté à chaque contexte? Sûrement, je l'espère, mais je me garde une réserve à l'attente de la sortie de rapport.

Mme Boivin Roy : Parfait. Merci. M. le Président, j'ai le temps pour une autre question?

Le Président (M. Provençal) :Oui.

Mme Boivin Roy : Merci beaucoup. Quand vous dites que la ville, vous êtes sensible à la réalité sur le terrain, comment la ville évalue les impacts de la cohabitation urbaine justement dans des quartiers spécifiques comme, entre autres, Saint-Henri ou le Village?

Mme Blanco (Josefina) : Mais de plus en plus on est capables de voir même les investissements que la ville peut... même au niveau financier, que la ville peut faire quand il y a des ressources ou des... liées à l'installation de ressources pour personnes en situation d'itinérance. Je ne sais pas si on a quelqu'un... Si tu veux compléter, peut-être quelques chiffres pour donner un ordre d'idée. Ce n'est pas mal lié à des questions de propreté, des fois, d'éclairage, de ramassage de matériel qui peut traîner. On va donner différents contrats avec... même avec les organismes communautaires qui sont dans le secteur, on va faire des activités de sensibilisation. On pourrait... Oui.

• (15 h 40) •

M. Lemaire (Pier Alexandre) : 2026 à 2028, on a le programme Milieux inclusif et itinérance, où est-ce qu'on va... en appel d'offres, 22... plus de 22 millions de dollars, 7 millions par année, pour les trois prochaines années qui s'en viennent. Simplement pour un site, mettons, de consommation supervisée, puis on ne finance pas la cohabitation sociale pour chacun des sites de consommation supervisée en tant que tels, mais ça peut être entre 350 000 $ et 550 000 $ juste pour la cohabitation. Donc, quand on dit de mettre... Pardon? Je peux... je n'ai pas compris, mais je peux essayer de vous répondre. On parle ici de... à la fois du travail de milieu qui peut être de 100 000 $ à 150 000 $ pour avoir une à deux ressources temps plein seulement, donc pour offrir une présence en tout temps. Des activités d'inclusion pour favoriser l'intégration sociale et réduire l'isolement, ici, 100 000 $ à 150 000 $. Une brigade de propreté pour entretenir les lieux environnants, que ce soit pour les seringues, les déchets...

M. Lemaire (Pier Alexandre) : ...quoi que ce soit, déjà, c'est 150 000 à 250 000 $. Ça, c'est des coûts que la ville engage dans ses appels de projets, que... les organismes peuvent faire la demande à l'intérieur de ces appels de projets là. Il y a aussi toute la partie de travail de rue qui n'est pas prise en compte, par contre, dans ces appels de projets là, parce que c'est une compétence de santé, que ça peut aller jusqu'à 250 000 $, deux à trois travailleurs. Ça, la ville ne peut pas financer ça parce qu'on parle ici de suivi psychosocial, évidemment. Donc, ça rentre dans... Il y a beaucoup de financement qui est donné. Ce n'est pas tous les sites de consommation qui sont... auxquels on octroie de l'argent. Pour Benoit Labre aussi, justement, je pense que vous faisiez référence à l'appui de... la construction des logements aussi, là, le SCS, en fait. On ne l'a pas appris au même moment nécessairement que l'arrivée des logements.

Donc, ça, c'est des choses à prendre en compte, mais moi, je vous parle juste point de vue fonctionnaire, là, je ne suis pas en train de vous remettre en question, inquiétez-vous pas, mais dans ce plan de cohabitation là, en fait, qu'est-ce qui pourrait être intéressant, justement, c'est vraiment avoir cette communication-là. Dès qu'il y a une demande en cours pour l'ouverture, que tant la ville puis l'arrondissement, on soit avisé, avec les partenaires, pour qu'on puisse déjà entamer le plan de cohabitation. On soutient des plans de cohabitation, déjà, mais il y a beaucoup d'organismes qui ont déjà l'expertise, là, pour en faire, là, qui en font régulièrement quand il ouvre des nouveaux services, là, puis parfois on fait juste les accompagner pour les plans de cohabitation.

Puis, justement, dans l'idée de faire... dans nos recommandations, il y avait l'idée aussi d'émettre un guide, justement, un guide ministériel en lien... cohabitation. C'est intéressant, justement, pour avoir des meilleurs indicateurs de qu'est-ce qui est attendu quand on... je parle ici juste des sites de supervision... de consommation supervisée, là, qu'est-ce qui est attendu en termes de consommation, pour pouvoir mieux jauger, pour que les organismes aient l'heure juste sur les demandes réelles, là, qui seraient... qui passeraient au travers de ce projet de loi là.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, nous sommes maintenant rendus avec la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Merci de votre présentation, du travail pour le mémoire. Vous demandez que la ville soit incluse dans l'implantation depuis le début du processus pour les futurs CES. C'est... excusez-moi... SCES. Donc, j'ai deux questions pour vous. D'après vous, quel devrait être le rôle que la ville devrait jouer dans cette démarche? Et, justement, quand il y a eu l'implantation de la maison Benoît Labre, n'étiez-vous pas justement là pour les aider depuis le début, puis il y a eu un manquement, vraiment, d'analyse puis également de travail en amont, en matière de consultation et d'information auprès de la population? Donc, si... Vous voulez être là depuis le début, mais, dans ce cas-là, vous avez été là depuis le début, puis ça a été un petit peu mal mené, disons.

Mme Blanco (Josefina) : Peut-être, je vais préciser quelques éléments puis je laisserai éventuellement mon collègue compléter. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le projet de Benoît Labre, c'est un projet qu'il y a différentes... Dans un seul projet, il y a autant de logements, comme au centre de jour, comme un centre... un site de consommation supervisée, deux cubicules, par injection et inhalation. Donc, la ville, et je pense... Pierre-Alexandre, je pense que c'est ça que tu faisais mention, on a été impliqué du début pour le volet plutôt logement, et les étapes suivantes sont arrivées plus tard.

Et donc c'est là où, certes, il y a la place à l'amélioration et il y a la place à qu'on puisse mieux partager les infos et se concerter pour qu'on s'assure que l'arrivée d'un site, d'un service, d'une ressource, qui est nécessaire... parce que ça, il faut se le rappeler, la ressource est nécessaire, mais qu'elle arrive mieux accompagnée dans le milieu où elle souhaite s'installer.

Mme Prass : Alors, hypothèse, le projet Benoit Labre ne comportait pas de logement. C'était le CES... excusez-moi, SCES. Est-ce que vous auriez eu le même... est-ce que vous auriez fait les mêmes démarches? Est-ce que vous seriez arrivés aux mêmes conclusions, par exemple, pour l'implantation, ou est-ce que vous dites, parce que c'était... vous avez approché ça comme du logement, tout est arrivé par la suite, puis là vous avez réalisé qu'il pourrait y avoir des enjeux de cohabitation?

Mme Blanco (Josefina) : Je pense qu'on ne fait pas, peut-être, exactement la même lecture. Je pense que, si les services étaient au centre de jour ainsi qu'au site de consommations supervisée... Il faut comprendre que les organismes vont faire la demande d'exemption au gouvernement fédéral. Ma compréhension, c'est aussi que le gouvernement provincial est consulté ou impliqué, et, peut-être, et il y a encore de la place à l'amélioration, à comment on s'arrime avec la ville et les arrondissements pour qu'on s'assure que tout le monde a ces informations puis qu'on travaille tous en concertation et en collaboration, en amont.

L'autre question que peut-être il faut aussi se rappeler par rapport à Benoît Labre, c'est qu'un des enjeux qu'il y a eus, c'est plus en lien avec...

Mme Blanco (Josefina) : ...le centre de jour qui peut-être n'était pas ouvert autant d'heures qu'on l'aurait souhaité, et donc... parce qu'en fait, ce qui concerne le site de consommation supervisée, il faut se rappeler qu'on parle des deux cubicules. Donc, il y a une capacité d'accueil qui est quand même limitée. Par contre, peut-être qu'il y a l'intérêt à... qu'on s'assure que, quand il y a un centre de jour aussi... bien, que les organismes ont les ressources nécessaires, financières, humaines, pour que ces services-là puissent être coordonnés, coordonnés autant des temps d'ouverture et capacité d'accueil.

Ce qui... aussi, c'est le dernier élément que je viendrais ajouter, est-ce que peut-être il y a eu des attroupements de beaucoup de gens? Mais parce que c'est la réalité à la métropole. On voit qu'il y a une crise d'opioïdes, de... Donc, il faut qu'on ait, en fait, plus de services où les gens se trouvent. Et peut-être la réponse aussi, ça passe pour décentraliser puis s'assurer qu'on a plus de services disponibles pour plus de population qui en a besoin ailleurs.

Mme Prass : Bien, je pense qu'on est tous d'accord...

M. Lemaire (Pier Alexandre) : Est-ce que je peux ajouter?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Je laisserais peut-être...

Mme Prass : Ah! je vous en prie. Allez-y.

M. Lemaire (Pier Alexandre) :  ...un petit point aussi. C'est difficile de faire une corrélation directe entre les services de consommation supervisés et les enjeux de cohabitation en tant que tels. En fait, c'est presque impossible de la faire étant donné le panier de services qui est offert à Benoît Labre : centre de jour, logement et SCS. C'est loin d'être le seul... le seul lieu à Montréal où est-ce qu'on a des enjeux de cohabitation importants depuis la pandémie, ça a explosé dans les dernières années. Le nombre de personnes en situation d'itinérance visible a aussi considérablement augmenté à Montréal. Et le déplacement, évidemment, de services d'une zone à l'autre entraîne l'affluence de personnes en situation d'itinérance, et ce n'est pas la seule source qui a entraîné un déplacement de population. Il y a d'autres zones qui sont occupées par des personnes en situation d'itinérance à Montréal où est-ce que le niveau de sécurité n'est plus le même puis qu'il y en a qui vont se déplacer aussi, par la force des choses, vers d'autres lieux, notamment proches des métros.

Donc, la question des CLSC est superintéressante aussi, là, parce que là c'est de voir... Lui, il est à cinq minutes, MBL. Le CLSC est à 10 minutes. Ça a l'air un peu basique de dire ça de même, là, mais il n'y a... tu sais, quand on va au centre de consommation supervisée, on le fait à pied, à proximité d'un métro, ça fait que le rayon a une très grande importance, là, pour ne pas perdre ces gens-là.

Puis l'autre chose, c'est que tu as deux cubicules et ce n'est pas ouvert à chaque jour, étant donné des enjeux de ressources humaines, et... Oui, c'est ça. C'est là j'allais. Donc, deux cubicules, ce n'est pas ouvert à chaque jour, donc c'est un nombre assez faible comparativement au reste de la population qui occupe le territoire dans le secteur. Merci.

Mme Prass : Et vous avez mentionné qu'il y avait eu d'autres enjeux de cohabitation dans le cadre de sites supervisés d'injection. Moi, ça me dit... Bien, je veux dire, à l'extérieur des centres de jour?

M. Lemaire (Pier Alexandre) : ...en général, avec les personnes en situation d'itinérance, là, dans d'autres secteurs, pas nécessairement en lien avec le SCS, où est-ce qu'une part importante aussi a un logement. La majorité des cas de surdose ont lieu en logement, aussi rarement dans l'espace public. Donc, c'est à prendre en compte ici. Ça ne veut pas dire qu'ils ont des logements permanents, évidemment, là, il y en a que c'est des logements en instabilité résidentielle, mais il n'y a pas de corrélation directe entre les surdoses et l'itinérance, automatique, au niveau des... de qu'est-ce qu'on voit dans les SCS. Mais, au niveau de la cohabitation, comme je vous dis, ce n'est pas nécessairement en lien avec les SCS, ce que je vous dis, c'est en lien avec où est-ce qu'on a des concentrations importantes de personnes en situation d'itinérance.

Mme Prass : D'accord.

Mme Blanco (Josefina) : ...pardon, que, lors de mon allocution, je faisais aussi référence que, dans les dernières... je reviendrai sur la période de temps, mais il n'y a pas eu dernièrement de décès lié à une surdose quand les gens consomment à l'intérieur d'un site de consommation supervisée, ce qui est une bonne nouvelle. Les gens le font en toute sécurité.

• (15 h 50) •

Mme Prass : Et je pense qu'on est tous d'accord, surtout étant la ville municipale, pour dire que la question est... de cohabitation est importante. C'est question de sécurité de tous nos citoyens. La vulnérabilité, c'est l'âge, c'est la situation, c'est l'état physique, etc. Je pense que vous serez d'accord avec les groupes qu'on a entendus ce matin également pour dire qu'il doit y avoir... il doit y avoir une implication financière de la part du gouvernement justement pour accompagner ces organismes-là, pas seulement dans l'élaboration du plan, mais avec toutes les mesures d'atténuation qu'on peut leur demander par la suite. Et le ministre a mentionné ce matin qu'il n'y avait pas d'engagement financier qui pouvait se faire dans un projet de loi du gouvernement, mais ce n'est pas le cas. C'est nous qui... c'est les membres... c'est les partis d'opposition qui ne peuvent pas soumettre un élément financier dans un projet de loi, mais le gouvernement peut le faire, et on s'en parlera durant l'étude détaillée.

Mais tout ça pour dire, par exemple, l'implication de la ville dans toutes les mesures de cohabitation, l'idée d'avoir des comités de bon voisinage en continu et qu'il y ait justement une présence pour s'assurer qu'il y ait toujours quelqu'un pour répondre aussi aux...

Mme Prass : ...sur le terrain. Parce que je pense que ce qu'on a vécu dans la dernière année, c'était beaucoup de citoyens qui trouvaient, bien, la ville rejette la balle au gouvernement, le gouvernement nous dit que c'est la ville, puis les gens sentaient qu'ils n'avaient plus où se tourner. Il n'y avait plus personne qui les écoutait.

Donc, qu'est-ce que la ville est prête à faire davantage pour s'assurer, justement, que la population ne se sente pas délaissée dans ce sens-là?

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Merci pour votre question, parce que c'est un excellent point, puis ça me permet aussi de l'aborder un petit peu plus. En fait, un des constats qu'on a faits depuis les dernières années, surtout lié, si je parle plus au... au centre pour les personnes en situation d'itinérance, c'est une bonne pratique qu'on a commencé à développer de plus en plus, mettre en place des comités de bon voisinage, parce que, je le tiens... je tiens à réitérer, les Montréalais, les Montréalaises sont solidaires, et je pense qu'ils comprendront les besoins et l'importance de soutenir les personnes qui peuvent vivre différentes situations de vulnérabilité. Donc, cette volonté est là.

Toutefois, on reconnaît que, des fois, la situation peut devenir plus difficile, et donc il faut qu'on puisse les entendre. Donc, par exemple, on a parlé du rapport qui va s'en venir de l'OCPM. J'ai vraiment hâte de voir quelle va être la recommandation à cet égard. Mais on voit de plus en plus dans les dernières années, ce sont des pratiques qu'on a mises en place pour les ressources des personnes en situation d'itinérance. Ça pourrait être aussi quelque chose d'intéressant à regarder pour ce qui concerne spécifiquement aussi le site de consommation supervisée. C'est clair que ce dialogue est nécessaire.

Mme Prass : Et, je pense, dans le...

Le Président (M. Provençal) :Merci, Mme la députée...

Mme Prass : Ah! c'est terminé. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons... je vais demander maintenant au député de Saint-Henri—Sainte-Anne de poursuivre cet échange-là.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, bonjour, Mme Blanco. Content de vous voir ici, à l'Assemblée nationale. On se voit habituellement à Montréal, donc c'est bien de se voir ici. Je voudrais juste quand même rétablir quelques éléments, là. M. le ministre nous parlait du CLSC Saint-Henri tout à l'heure. Bon, ça, c'est à proximité d'un CPE, là. Donc, on ne va quand même pas déménager un site de consommation supervisée sur la problématique liée à l'école primaire pour le déménager proche d'un CPE, là.  Je pense que, là, on ferait fausse route. Donc, je veux quand même clarifier ça en amont, pour avoir une connaissance du terrain comme vous l'avez vous aussi.

Je veux quand même aussi dire : le ministre a raison de dire que l'interdiction à 150 mètres ne s'appliquera pas pour la question des locaux qui accueillent des personnes en situation d'itinérance. Ceci dit, ces gens-là sont soumis à l'article qui dit que le ministre peut, par règlement, prévoir des interdictions. Puis, ça, il y a rien qui empêche que le ministre n'émette pas 150 mètres dans le règlement. Donc, c'est vrai et ce n'est pas tout à fait exact en même temps. Le ministre aurait le pouvoir, là c'est la différence entre les deux, là. À 150 mètres, il n'y a pas ce pouvoir discrétionnaire là dans l'application du projet de loi pour les sites de consommation supervisée, il aurait tout à fait le pouvoir d'émettre ou non l'autorisation à 150 mètres pour un site de... des personnes en situation d'itinérance. C'est quand même des éléments qui sont importants dans la nuance.

Est-ce que, vous, Mme Blanco, ou votre gouvernement... en fait, votre arrondissement et la ville centre ont été consultés dans l'élaboration du projet de loi qu'on étudie aujourd'hui?

Mme Blanco (Josefina) :  Je ne peux pas dire que moi, j'ai été consultée directement. Il faut comprendre aussi que, moi, c'est une responsabilité que je partage avec mon collègue Robert Beaudry, qui est responsable de l'itinérance. Mais, pour nous, c'est important aussi de faire la distinction dans le projet de loi aujourd'hui, qui est à l'étude entre les sites de consommation supervisée, une question vraiment liée à la santé publique, et les services pour les personnes en situation d'itinérance, qui fait... ça répond... c'est une autre réalité : une crise sociale, économique et structurelle.

M. Cliche-Rivard : Donc, à votre connaissance, Montréal, qui accueille l'ensemble... la grande majorité de ces sites-là n'a pas été consultée, à votre connaissance.

Mme Blanco (Josefina) : Non. À ma connaissance, non.

M. Cliche-Rivard : Merci. Il y a un enjeu de concentration aussi des ressources à l'ouest, à Saint-Henri. Nous, après ça, ça s'arrête, hein, en situation d'itinérance ou en situation de sites de consommation supervisée. Il n'y a rien Verdun, il n'y a rien à NDG, il n'y a rien à Dorval, il n'y a rien... si on suit, là, à Beaconsfield, Pointe-Claire, etc., ce qui fait en sorte qu'il y a un... les gens descendent, hein? Il y a une concentration des ressources puis des services. C'est la même chose en matière d'itinérance. Il faut aller jusqu'à AJOI, là, pas mal plus loin dans l'ouest de l'île, pour retrouver une seule situation... une seule ressource en situation d'itinérance.

Est-ce qu'il n'y a pas un enjeu aussi de déconcentration puis de responsabilisation de chaque quartier, chaque arrondissement de la ville, pour être sûr qu'au final, effectivement, il n'y ait pas une centralisation des ressources qui fasse en sorte que la cohabitation devienne effectivement plus difficile? Je pense à Hochelaga-Maisonneuve, je pense à Saint-Henri, je pense à d'autres quartiers.

Mme Blanco (Josefina) : Oui. Oui, c'est un excellent point, celui que vous soulevez. C'est pour ça que, souvent, on parle puis on peut utiliser d'autres termes d'équité territoriale. Puis, en fait, c'est une réalité, un constat, les personnes en situation d'itinérance, la situation s'est exacerbée partout. Historiquement, à Montréal, on les voyait dans les quartiers centraux. C'est de là où il y a une concertation et une diversité de ressources qui vont répondre à différentes réalités, mais, aujourd'hui, ce n'est plus le cas...

Mme Blanco (Josefina) : ...et c'est pour ça que, dans les dernières années, on a vu comment la situation a évolué au Plateau—Mont-Royal, Mercier, Hochelaga-Maisonneuve, Villeray et d'autres quartiers. Mais l'intérêt d'avoir des ressources plus petites dans les secteurs où les gens se trouvent, ça, ça va éviter ces attroupements. C'est normal que les gens aillent où il y a des ressources, donc c'est important de pouvoir répondre aux besoins où les gens se trouvent. Et oui, on croit qu'avoir des ressources dans d'autres arrondissements plus petits, ça va... c'est... Ça peut paraître anodin, mais non, on croit fermement que d'avoir.... parce que les organismes vont pouvoir répondre de façon plus adéquate, de façon plus humaine aux besoins de ces personnes-là, et ça va... la cohabitation sociale va être naturellement plus harmonieuse. Donc, c'est... Pardon?

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal) : ...on va compléter cet échange avec les représentants de la ville de Montréal. Et c'est Mme la députée de Terrebonne.

Mme Gentilcore : Merci, M. le Président. Bonjour. Bienvenue. Ce qui revient quand même fréquemment dans votre rapport, c'est les zones de flou, et vous trouvez qu'il manque de clarté par rapport à la définition de plusieurs termes. Premièrement, j'aimerais parler... bon, les pouvoirs discrétionnaires que le ministre s'accorde dans ce projet de loi là. Et là vous dites qu'il manque de clarté par rapport à cohabitation harmonieuse, ce qui est très clair, et inconvénients normaux du voisinage. À votre avis, est-ce que c'est possible d'arriver à des définitions suffisamment claires de ces termes-là pour faire du mur-à-mur et l'appliquer à l'ensemble des ressources? Première question. Puis, complément de question par rapport à ça, si oui, comment on y arrive, de quelle façon on arrive à cette définition-là?

Mme Blanco (Josefina) : Merci pour votre question. Concernant le pouvoir discrétionnaire, pour la question de la localisation pour les sites pour les personnes en situation d'itinérance, on pense que ce n'est pas une bonne idée de garder ce pouvoir discrétionnaire. Toutefois, il faut qu'on puisse mieux se concerter, mieux travailler, collaborer entre les arrondissements, la ville, et le réseau, et la Santé pour retrouver... Il faut prendre en considération que, puis vous le savez, un milieu qui est un milieu densément peuplé, très, très... ce n'est pas une tâche mineure, trouver un site qui réponde aux besoins de ces personnes, aux besoins de l'organisme. Mais il y a des efforts, il y a la place, certes, à l'amélioration à cet égard.

Par rapport à la cohabitation harmonieuse, il faut tenter de mieux la définir collectivement, oui. Et, quand j'ai fait ma mention d'avoir un gabarit, c'est plus pour donner une meilleure prévisibilité aux organises quand ils sont dans le processus de demande. Par contre, on ne croit pas qu'il y a une solution mur à mur qui va répondre à chaque... à chaque réalité.

Mme Gentilcore : ...s'applique à chaque cas de figure, et on peut juste appliquer la recette, là?

Mme Blanco (Josefina) : Savoir à quoi on s'attend, quand on demande un plan de cohabitation harmonieuse, qu'est-ce qu'on va dire, à quoi s'attendre, lesquels paramètres, les objectifs, avec quels indicateurs on va travailler. Parce qu'en plus, en suivant l'évolution, pour l'organisme, c'est prévisible de comment mesurer, ça va bien, ça ne va pas bien, comment on s'ajuste. Mais je réitère aussi que c'est important, par la suite, c'est un gabarit de départ qu'il va falloir pouvoir l'ajuster selon la réalité où le centre est implanté, selon l'organisme. Mais c'est évolutif aussi, une fois qu'on adopte... Puis je ferais la référence au plan de cohabitation en itinérance qu'on adopte à la ville, dans les quartiers. Mais ce n'est pas qu'on le sort, puis ça reste comme ça. Ça évolue, ça change, et on le travaille.

Mme Gentilcore : Mais qui devrait définir? Qui devrait arriver à cette définition-là?

Mme Blanco (Josefina) : Nous, on croit que c'est à... ça doit venir du ministère, mais évidemment les parties concernées doivent être consultées.

Mme Gentilcore : Voilà. Merci.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup. Alors, je tiens à vous remercier de vous être déplacés puis de venir bonifier et échanger avec nous pour le projet de loi n° 103.

Sur ce, je vais suspendre les travaux temporairement pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 01)


 
 

16 h (version non révisée)

(Reprise à 16 h 07)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous poursuivons nos travaux. Nous recevons maintenant la ville de Gatineau, qui est représentée par Mme Maude Marquis-Bissonnette, mairesse de Gatineau et membre du comité sur l'itinérance de l'UMQ, M. Bruno Marchand, président du comité sur l'itinérance, UMQ, et maire de Québec, Mme Annabelle Martini, conseillère aux politiques, et M. Christian Tanguay. Alors, vous avez 10 minutes pour votre présentation, et par la suite, on procédera aux échanges. Alors, je vous cède immédiatement la parole.

M. Marchand (Bruno) : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Provençal, merci, M. Carmant, merci, mesdames, messieurs de la commission, les députés. Je vais prendre un bref temps de parole et je vais céder à Maude Marquis-Bissonnette le reste du plancher. Vous m'avez déjà entendu, je ne voudrais pas vous endormir, déjà que vous avez une journée quand même assez exigeante. Mais merci de donner l'opportunité à l'Union des municipalités du Québec de vous présenter les différentes recommandations que nous avons... nous avons soumises pour le projet de loi n° 103. Je veux juste vous rappeler qu'on représente 85 % de la population du Québec, quand même, l'UMQ, c'est une grosse organisation, pas juste de grandes villes, comme, des fois, l'impression donne, là, mais des villes de tout le territoire de l'ensemble du Québec, et ça représente une vaste partie des Québécois.

Aujourd'hui, plus que jamais, pour nous, la situation exige une réponse urgente et ciblée face à deux crises bien distinctes. L'UMQ juge essentiel de distinguer la crise de l'itinérance de la crise des surdoses. Chacune présente des dynamiques propres, nécessite des réponses adaptées, je vous en ai parlé ce matin. Mais ces deux crises, à nos yeux, évoluent aussi de manière parallèle et sont... et se sont considérablement aggravées au cours des dernières années. Alors, nous réitérons l'importance de faire de la prévention de l'itinérance, vous le savez, une priorité nationale, et on compte sur chaque parti politique pour en faire un débat apolitique, et pour qu'on mette le Québec sur une... dans une direction qui ressemble à celle de la Finlande, où on est arrivés à de grands résultats avec un plan d'action structuré, structurant, financé adéquatement, évidemment, et coordonné à l'échelle gouvernementale, avec des données probantes, des objectifs précis, des cibles et des financements adéquats. Ce leadership gouvernemental est indispensable et devrait prendre la forme d'un engagement clair du premier ministre — nous l'avons déjà dit publiquement — et du Conseil des ministres à inscrire la rédaction de l'itinérance à l'agenda politique.

Les municipalités... puis vous le savez, puisque vous êtes... vous représentez presque... de nombreuses régions du Québec, et vos collègues vous en parlent... les municipalités de toute nature, de toutes grandeurs sont confrontées à ces crises, notamment la crise de l'itinérance, des endroits où il n'y en avait pas il y a même encore cinq ans, et agissent en première ligne en regard de cette problématique, malgré des ressources limitées. Toutefois, cette mobilisation ne peut pas remplacer l'engagement du gouvernement du Québec. Il est impératif, à nos yeux, que ce dernier soutienne activement les efforts municipaux et communautaires, tant sur le plan financier que réglementaire, afin de garantir une réponse cohérente, efficace et humaine à la crise de l'itinérance.

Le projet de loi... le projet de loi prévoit de permettre au ministre de conditionner par règlement l'utilisation de locaux destinés à accueillir des personnes en situation d'itinérance. Or, dans un contexte d'urgence sociale, il est essentiel de privilégier des interventions souples et rapides. L'ajout de contraintes réglementaires supplémentaires risque de nuire à l'accessibilité des lieux d'accueil et à la coordination des actions sur le terrain. Le choix de recourir à un règlement pour définir les modalités d'application de ces articles entraîne des enjeux, à notre... à nos yeux, de transparence. De plus, les solutions terrain apparaissent plus efficaces pour atteindre les objectifs visés. C'est pourquoi nous vous demandons le retrait des articles 667.25, 667.26 contenus dans ce projet de loi.

Je cède maintenant la parole à Mme Marquis-Bissonnette, mairesse de Gatineau.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Merci. Bonjour, M. le Président. M. le ministre, députés, les équipes, membres de la commission, merci de nous accueillir aujourd'hui. Évidemment, l'implantation des sites de consommation supervisée dans nos quartiers peut susciter des préoccupations, des inquiétudes, qui sont tout à fait légitimes, en lien avec la sécurité des personnes, la tranquillité, aussi, des espaces publics, puis en particulier, aujourd'hui, ce qui nous occupe, c'est la proximité des garderies, des CPE et des écoles. Évidemment, c'est nécessaire de répondre à ces préoccupations-là, mais aussi de continuer d'offrir des services aux personnes les plus vulnérables dans nos communautés. L'approche de réduction des méfaits, qui est celle qui est sous-jacente aux sites de consommation supervisée, c'est une approche auquel on croit, comme le gouvernement, d'ailleurs, et on doit continuer de renforcer, et non de restreindre, la capacité d'intervention des services de première ligne.

• (16 h 10) •

Je vous parlerai aujourd'hui un petit peu du cas de Gatineau, pour mettre quelques images, peut-être, sur quelques principes qui sont introduits, là, dans le mémoire de l'Union des municipalités du Québec. Puis je pense que le cas de Gatineau est intéressant pour plusieurs raisons, notamment parce que Gatineau est la ville qui connaît la plus forte augmentation de l'itinérance, selon le plus... et de loin, là, selon le plus récent recensement du réseau de la santé...

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : ...la préoccupation de Gatineau concernant l'itinérance est grande. On est en action, comme le gouvernement du Québec l'est aussi. Gatineau est une des six villes au Québec à avoir un site d'injection supervisée, un site de consommation supervisée permanent, et notre site de consommation supervisée, qui est géré par un organisme qui s'appelle le BRAS, que vous allez rencontrer demain en commission parlementaire, serait fermé avec l'adoption du projet de loi tel qu'il est présenté aujourd'hui, donc, s'il n'y a aucun changement au projet de loi no 103. On croit au bien-fondé du projet de loi, on est donc ici en mode ajustements. On veut vous proposer des solutions pour que ça fonctionne dans nos communautés puis pour vous aussi.

Donc, vous me permettrez d'aborder quelques points. D'abord, la notion du 150 mètres. Donc, la proposition est simple, puis l'idée, ce n'est pas d'arriver avec des problèmes, mais vraiment des solutions, c'est qu'au lieu que ce soit un critère d'exclusion, que ça devienne un critère d'évaluation du projet du site de consommation supervisée, donc à tenir compte dans le plan de cohabitation, qui est une excellente idée qui est introduite dans le projet de loi. Pour vous dire, l'effet de ce critère-là de 150 mètres d'exclusion à Gatineau aurait comme effet de fermer notre site de consommation supervisée. Il y a deux garderies qui se trouvent à moins de 150 mètres de notre site de consommation, et, sur l'île de Hull, donc dans le centre-ville, il y aurait très peu de possibilités, voire pas de possibilité d'en ouvrir d'autres si jamais on fermait celui-là. Donc, avec l'effet d'enlever un service qui est essentiel à des personnes vulnérables, il y a 40 % des gens qui fréquentent notre site de consommation supervisée qui sont des personnes en situation d'itinérance, 60 %... c'est donc dire que 60 % sont des travailleurs. Pourtant, avec le projet du BRAS, il n'y a aucun appel au 3-1-1 et aucune requête aux services policiers. Notre corps policier ne gère pas cet endroit-là. Là où ils interviennent... évidemment, il y a une augmentation des interventions policières liées aux personnes en situation d'itinérance, c'est dans notre campement, évidemment, puis dans nos centres de jour, donc notamment la soupe populaire, qui est quelques coins de rue plus loin.

Donc, le risque de fermer le site de consommation supervisée, c'est évidemment de rendre plus vulnérables des gens qui sont déjà vulnérables, de créer aussi des enjeux de sécurité dans le quartier. Ça, c'est le paradoxe, parce que le projet de loi vise à créer de la sécurité, mais la réalité, c'est qu'en enlevant ces sites-là, c'est là que ça crée des risques, à notre avis. Puis je vais vous donner un exemple concret. Il y avait, dans une école primaire de l'île de Hull, donc du centre-ville, une personne qui s'injectait sur le terrain de l'école. Les intervenants communautaires du BRAS sont allés le rencontrer en lui disant : Vous savez, il y a un site de consommation supervisée, vous pouvez y aller. Il les a accompagnés. Depuis ce temps-là, cette personne fréquente le centre, obtient des services dans ce centre-là. Donc, on a retiré une situation... en fait, on a mis fin à une situation qui présentait effectivement des risques, parce qu'il y avait une opportunité pour cette personne-là d'aller ailleurs puis de le faire en toute sécurité, pour elle et pour les autres.

Donc, l'exemple de Gatineau, ce qu'il démontre, c'est que la cohabitation est possible. Évidemment, il y a un enjeu de perception au site, autour des sites de consommation supervisée, mais les enjeux démontrent qu'ils sont davantage autour des centres de jour et des campements.

Il y a aussi une question... deuxième aspect, l'enjeu d'application. Que faire lorsqu'il y a une nouvelle école, un CPE ou une garderie qui veulent élire domicile à l'intérieur du 150 mètres du SCS? Le problème, c'est que ça va être difficile de dire non à une école, à une garderie, donc on va se retrouver à délocaliser le site de consommation supervisée, donc, encore une fois, à faire en sorte qu'on risque de perdre ce service-là puis vulnérabiliser des gens qui peuvent être déjà vulnérables. Ça crée aussi, évidemment, un manque de prévisibilité pour des organismes, des entreprises, souvent d'économie sociale, mais qui ont aussi, eux, besoin de planifier.

On demande donc le retrait des articles, et M. Marchand l'a mentionné d'entrée de jeu, le retrait des articles 667.25 et 667.26, qui portent sur le fait que l'autorisation du ministre pourrait être requise pour destiner des locaux à des personnes en situation d'itinérance. La crise actuelle appelle pour plus d'agilité, plus de ressources. Évidemment, ça ajoute des contraintes, ça risque de rendre plus difficiles nos actions face à la crise de l'itinérance, et je pense qu'il faut plutôt les rendre simples pour être capable de mieux travailler ensemble, de continuer de mieux travailler ensemble.

Je souligne aussi qu'il y a un empiétement dans les champs de compétence municipale à l'article 667.23, qui indique qu'une municipalité ne peut refuser l'émission de permis ou certificat municipal pour un SCS lorsque celui-ci est autorisé par le ministre. Donc, notre demande est double, c'est de clarifier comment ce pouvoir s'insère dans le respect des principes de la LAU et garantir le respect des pouvoirs municipaux.

Je veux souligner, en terminant, le plan de cohabitation. Je veux saluer l'article 667.4, l'alinéa 2°. À mon avis, c'est la bonne approche...

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : …évidemment, il faut que les organismes fassent un plan de cohabitation. Je pense que ça a été un succès dans le cas de l'organisme du BRAS à Gatineau. Ils pourront vous en parler demain. Ils ont fait du porte-à-porte dans le quartier avant de s'implanter. Ils ont pris contact avec les garderies, avec les parties prenantes sur le terrain. Ils ont pris part et ils prennent toujours part à un comité de cohabitation où est-ce qu'ils se rencontrent régulièrement.

Et donc, quand il y a un enjeu qui survient, il y a un lieu pour en discuter puis, ensemble, trouver des solutions. Pour nous, c'est la bonne approche, c'est l'approche gagnante. Évidemment, il faut être capable d'outiller les organismes d'un point de vue technique et financier pour qu'ils arrivent à développer un plan de cohabitation, évidemment soutenu par le réseau de la santé.

Donc, à notre avis, le site de… un site ou les sites de consommation supervisée font partie d'un continuum de services pour répondre à la crise de l'itinérance, mais aussi celle des surdoses, et que la cohabitation est possible. Elle est importante. Il faut s'y intéresser puis il faut se donner les moyens, mais ça nous prend évidemment les bonnes ressources pour le faire. Merci de nous avoir écoutés.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. M. le ministre, vous débutez cet échange, s'il vous plaît.

M. Carmant : D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme la mairesse, M. le maire et vos équipes, pour cet exposé. Je l'ai mentionné tantôt et je veux juste qu'on soit… qu'on… clarifier une situation, pour les sites d'itinérance, les distances ne s'appliqueraient pas, là, on a bien conscience de ça, c'est vraiment l'enjeu de cohabitation, surtout si on développe des sites où il y a des… où… pour prendre en charge principalement des gens qui ont des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie. Est-ce que vous… Est-ce qu'il y a une inquiétude par rapport à ça ou par rapport à la cohabitation dans ces contextes-là de votre côté?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Je veux juste reprendre les articles de la loi, là, qui nous intéresse. Dans ce cas-ci, c'est le 167.23, c'est une nouvelle clause qui, à notre… Notre interprétation, c'est effectivement que ça ne concerne pas directement les sites de consommation supervisée, mais ça vous donnerait, à vous, le… à vous, M. le ministre, le pouvoir de dire quel lieu va être utilisé ou ne peut pas être utilisé pour des personnes en situation d'itinérance, puis évidemment ça nous inquiète parce que ça nous enlèverait de la flexibilité pour agir. Par exemple, si on décide, puis on le fait dans le cas de Gatineau, d'utiliser un aréna municipal ou un centre communautaire pour être capable d'offrir des services, que ce soit l'accès à de la nourriture, de l'accompagnement, halte de fraîcheur, halte de chaleur, on souhaite avoir cette flexibilité-là parce qu'évidemment on s'en rend bien compte sur le terrain, quand on essaie de continuer à développer une offre de service, là, les lieux pour le faire ne sont pas si nombreux que ça.

M. Carmant : O.K. Alors, vraiment, je pense qu'il y a besoin de clarification parce que plusieurs personnes nous disent ça aujourd'hui, et le but, vraiment, c'est de s'assurer que le choix… Au contraire, on demande aux municipalités de nous aider à trouver les sites, c'est juste vraiment voir s'il y a besoin d'avoir des mesures de cohabitation dans les… certains sites pour des personnes en situation d'itinérance. Si je comprends bien, avec l'organisme Le BRAS, aucun appel à la municipalité, aux services de police, depuis le début. L'organisme a été proactif, et ça s'est toujours bien passé.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Ils sauront vous le dire davantage que moi. Ça doit faire à peu près deux ans qu'ils ont été ouverts. Puis d'ailleurs je tiens à préciser qu'il y a un projet qui vient d'être financé par votre gouvernement, c'est aussi un projet du BRAS, qui est le voisin, c'est une clinique médicale financée, si je me trompe pas, par le PHAQ, ou sinon c'est des fonds fiscalisés… puis des logements aussi. Donc, c'est géré par le même organisme. Puis, en fait, au départ, la clinique d'injection supervisée, elle devait être dans cet édifice-là qui devait être financé par le gouvernement du Québec, puis, finalement, comme il y a eu des enjeux avec le site d'injection mobile, l'organisme a fait l'achat de la bâtisse voisine, là, c'est vraiment collé, et donc opère depuis ce temps-là. Ce site-là, il va en profiter pour mettre d'autres services, là, dans la bâtisse, mais il y a un certain paradoxe là-dedans parce qu'évidemment, tu sais, on vient tous d'investir, la ville… l'organisme… dans un site pour pour mieux répondre à ces besoins-là de manière permanente.

• (16 h 20) •

Donc, effectivement, il n'y a pas d'enjeu sur le terrain. Puis, en fait, moi, quand le projet de loi est sorti, je suis allée voir le site. Je ne savais même pas qu'il existait. Je savais qu'il y en avait un, mais je ne savais pas il était où, puis il est vraiment… tu sais, ce n'est pas quelque chose qui est visible. On se promène autour, puis vous ne pouvez pas savoir que c'est là qu'il y a un site d'injection supervisée, mais les usagers, les utilisateurs, les organismes communautaires, eux, savent qu'il est là, puis c'est vraiment bien fait. Donc, moi, j'ai visité l'intérieur. Il y a vraiment un fumoir qui est à l'intérieur, tu sais, il n'y a pas de fumée qui émane de là, puis c'est vraiment sécuritaire. Tu sais, au niveau des vitres, là, ils sont vraiment dans les meilleures pratiques, se sont…

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : ...inspiré des meilleures pratiques pour développer puis les équipes municipales. M. Tanguay pourrait certainement en témoigner, mais les équipes municipales m'indiquent qu'il n'y a effectivement aucune requête au 3-1-1, ça veut dire aucun voisin qui a appelé pour dire, là, je présume, mais il y a une seringue à terre, il y a du bruit. Tu sais, il n'y a pas de nuisance du tout qui est associée à ce site-là. Et même chose pour notre chef de police qui a participé, là, depuis le début, à la mise en place de ce projet-là. Parce qu'évidemment on fait partie de cette cohabitation-là, là, les services municipaux, et qui lui présume que c'est davantage un enjeu de perception. Quand je nous compare à Benoît Labre à Montréal, puis je n'ai pas... je n'ai pas une connaissance infinie de Benoît Labre, l'enjeu, c'est, à mon avis, qu'il y a le centre de jour, de l'hébergement et le site d'injection supervisée au même endroit. Je vous laisserai faire vos analyses, je n'ai aucun doute que vous allez le faire avec énormément de rigueur, mais je pense que ça démontre que l'enjeu, il est peut-être au niveau de... Il est peut-être au niveau de l'agglomération de plusieurs services au même endroit ou bien davantage liés au service de centre de jour. Chez nous, notre centre de jour, il y a des enjeux là. Les policiers sont là et de plus en plus présents, puis il y a des enjeux de sécurité au centre de jour. Mais il n'est pas où le centre d'injection supervisée, là.

M. Carmant : Quel est le rôle de la municipalité dans la cohabitation dans ce... autour de ce site-là?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Bien, je vous dirais qu'on est des partenaires et qu'on est des alliés, là. C'est-à-dire que l'organisme est vraiment bien pris en charge. Au besoin, ils savent qu'on peut nous appeler. Notre corps policier a été interpelé dès le départ dans la mise en œuvre de ce site-là, là, mais donc un peu un rôle de conseil de partie prenante, je dirais. Et nous, on les voit comme une partie de la solution à apaiser. Tu sais, l'itinérance, moi, j'ai fait une campagne électorale l'année passée à ce lancement de l'année à la mairie de Gatineau. L'enjeu dont on m'a plus parlé d'est en ouest, et pas juste au centre-ville, c'est l'itinérance. Chez nous, c'est une réalité qui est vraiment prenante. Donc, évidemment, on est conscients que ça nous prend un continuum de services qui n'a pas crû au même rythme où l'itinérance a cru à Gatineau. Donc, ça nous prend... Là, on a... On connaît sans doute un... Puis M. Martin est venu visiter d'ailleurs la semaine passée, mais un projet d'hébergement transitoire dans des conteneurs qui vont nous permettre de sortir des gens de la rue. On mise beaucoup en logement parce qu'évidemment l'itinérance, ce n'est pas juste une question de logement, mais c'est toujours une question de logement. Et d'ailleurs, le gouvernement du Québec investit beaucoup pour nous aider à faire face à ce défi-là. Puis, dans ce continuum là, il y a aussi le site de consommation supervisée, l'intervention communautaire, qui nous permette d'apaiser la situation sur le terrain, de répondre aux enjeux puis, ultimement, bien, de sortir les gens de la rue aussi. Ça y participe.

M. Carmant : D'accord. Et juste aussi, un autre point à clarifier parce qu'une des raisons pourquoi on inclut la... la consultation des autres ministres qui sont dans la liste, là, l'Éducation, Famille, etc., c'est justement pour s'assurer qu'il n'y a pas de projet éventuel dans les cartons à cause de la situation que vous avez décrite. Qu'est-ce qu'on fait quand une nouvelle école se produit? Oui.

M. Marchand (Bruno) : Là dessus, c'est une expérience qui est complètement différente de la question des sites de consommation, où le lien qui est différent. Ce n'est pas simple, travailler avec plusieurs centres de services scolaires au Québec pour savoir quels seront les besoins dans le futur. Et en général, l'approche qu'ils ont, c'est une approche très, très, très protectrice de dire : Oui, on risque d'avoir des besoins. On ne sait pas exactement quand. Et donc ils sont très protecteurs de certains espaces, très protecteurs de besoins à venir. Là-dessus, on déborde. Mais la consultation des autres ministères risque de faire comme on le fait sur les terrains municipaux pour lesquels il y a des besoins scolaires, on nous demande des choses sans avoir tout le temps une vision très claire du futur. Mais par prophylaxie, on nous en demande plus que moi. Si ça arrivait lors de consultations, par exemple, avec le ministre de l'Éducation ou le ministère de l'Éducation, vous seriez avec des réponses ou, oui, on aura besoin d'une école dans le centre-ville de Hull bientôt, on ne sait pas quand. Et par protection vous allez... vous allez enchâsser des lieux qui seront inaccessibles pour des services dont les besoins sont maintenant, pour des peut-être possibles besoins futurs, mais pour lesquels on n'a pas de réponse. Si ça faisait... Si ça avait le même effet, ça vous contraindrait beaucoup.

M. Carmant : D'accord. Oui.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : L'enjeu du 150 mètres, il est celui de la densité. C'est dans des milieux denses comme Québec, comme Montréal, comme Gatineau ou comme d'autres villes au Québec. Puis la réalité, c'est que si, par exemple, il faudrait qu'il y ait une nouvelle école, puis nous, on croit, là, on crée de la densité au centre-ville du Hull. Donc, il est possible que, dans les prochaines années, on dise : Ah bien, on a besoin d'une nouvelle école. D'habitude, comment ça se passe? C'est le centre de services scolaire qui fait une évaluation de ses besoins, qui définit à peu près le bassin dont il a besoin. Après ça, il se retourne vers Québec pour avoir... J'imagine que vous validez quand même, mais vous donnez le financement. Puis nous, bien, on est aussi responsables, maintenant, de donner des terrains, tu sais. Et ça, il y a des grandes contraintes qui sont associées à...

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : ...notamment la disponibilité des terrains dans des milieux denses qui ne sont pas toujours... qui ne sont pas toujours disponibles puis les coûts aussi, là. Donc, les contraintes sont déjà assez grandes. Alors, on peut très bien s'imaginer que si on avait un terrain pour une école, mais qui se situait à l'intérieur du périmètre de 150 mètres, on dirait... tu sais, moi, je ne me verrais pas dire non à une école d'enfants, là, je vais vous le dire bien franchement. Puis, je pense, M. le ministre, vous feriez la même chose dans notre situation. Puis même chose pour les garderies, tu sais, les garderies en milieu familial, tu sais, on vient répondre à des besoins, puis évidemment c'est des services qu'on souhaite également dans nos villes, dans nos centres-villes, mais avec l'effet de chambouler le reste d'écosystèmes qui favorise la cohabitation de tout ce beau monde-là dans nos milieux urbains qui sont définis par une certaine densité.

M. Carmant : Parfait. On me parle d'un service d'accompagnement à la consommation, qu'est ce que c'est exactement?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : En fait, j'avoue que j'ai mélangé. On parle dans le projet de loi de services de consommation supervisée, l'organisme communautaire parle de services d'accompagnement à la consommation, mais on parle bel et bien du même service. Oui, c'est ça, c'est des... Vous pourrez leur poser la question demain. Je vous invite à le faire pour qu'ils vous expliquent la raison pour laquelle ils utilisent ces termes, mais on parle vraiment.

M. Carmant : D'accord. Et par rapport à la situation de l'itinérance, nous, on envisage, là, de... on travaille avec votre CIUSSS pour un projet PRISM, là, également dans la région de Gatineau. Et là encore on va avoir besoin de refuges où il va y avoir des... avec des... spécifiques pour des problèmes de santé mentale. Dans ce contexte-là, est-ce qu'il y a des inquiétudes de votre côté, ou comment vous accueillez ce projet-là?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Le projet PRISM, ce serait une excellente nouvelle, M. Carmant, chez nous, puis ça aiderait certainement à sortir des gens de la rue, ce serait vraiment un bel investissement. Puis on a déjà eu l'occasion de s'en reparler. Les organismes qui seraient concernés, là, selon les discussions actuelles qu'on a avec le CISSS O ne sont pas les organismes dont il est question ici, c'est deux autres organismes. Je pense qu'on est toujours à l'étape des discussions, mais donc il n'y a pas d'enjeux, ces services-là participeraient, comme le service de consommation supervisée, à mon avis, à sortir des gens de la rue puis préserver un climat de sécurité puis d'une plus grande équité, égalité sociale aussi, je dirais.

M. Carmant : O.K. Et au niveau... puis c'est un des enjeux qu'on entend beaucoup depuis ce matin, c'est les enjeux budgétaires. Est-ce que l'organisme... ou est-ce qu'il y a du financement qui vient de la ville pour la cohabitation autour de l'organisme BRAS?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Non, il n'y a pas de financement direct. Par contre, il y a une collaboration, je dirais, des... du service de police, tu sais, dans la cohabitation, etc., qui doit se faire autour du site. Ce sont des partenaires, en fait.

M. Carmant : 4 minutes. Mais je pense que... Est-ce qu'il y a d'autres questions? Moi, je pense qu'on a fait le...

Le Président (M. Provençal) : Ça va?

M. Carmant : Oui, ça va pour moi.

Le Président (M. Provençal) : Merci. Alors, Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président... Désolée. D'entrée de jeu, je voudrais saluer votre innovation, le fait que la ville ait mis 5 millions $ de son propre argent, le programme de containers, on s'en était déjà parlé, je trouve que c'est des beaux exemples d'une municipalité, les villes qui doivent gérer avec un enjeu. C'est vous qui êtes sur le terrain, c'est qui vous qui êtes à proximité de ces réalités-là. Et de prendre la responsabilité à un certain point, bien, de vous en responsabilité, parce que vous voyez que les ressources ne sont pas nécessairement là. Je vous salue à cet égard.

Donc, je comprends pour BRAS qu'il n'y a pas eu de... depuis 2022, il n'y a jamais eu de situation où il y a eu des plaintes, des signalements. Par curiosité, si ça avait été le cas, disons qu'il y a deux signalements dans l'année, est ce que la ville, j'imagine, serait là? Parce que je comprends que vous avez des comités de cohabitation, mais c'est plus pour la question des différences. Puis, on se comprend, pas tout le monde qui est itinérant a des enjeux de toxicomanie et vice versa. Donc, est-ce que la ville serait prête à s'impliquer dans un comité ou un effort de cohabitation pour ce qui est de BRAS et éventuellement d'autres sites d'injection ou d'inhalation supervisée?

• (16 h 30) •

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Merci de votre question. Mais, d'entrée de jeu, vous soulignez nos innovations. Je tiens quand même à souligner que le projet Transition Québec a été rendu possible grâce à l'aide financière du gouvernement du Québec, là, il y a 100 PSL qui ont... tu sais, qui est quand même énorme, là, qui ont été donnés, là, pour nous permettre de faire vivre ce projet-là. Puis notre souhait, c'est évidemment qu'on rende ça possible dans d'autres villes du Québec ou ailleurs qui font face à ça. Donc, merci...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : ...je tiens à dire que c'est toujours du travail d'équipe quand on réussit à faire des bons coups. Donc, votre question sur la cohabitation, c'est : Est-ce que, nous, on serait prêts à s'impliquer dans le cadre d'un comité de cohabitation? La réponse est : Bien sûr que c'est oui, là, dans la mesure où on est des partenaires dans la lutte à l'itinérance, dans la sécurité publique. Chez nous, on a une équipe unique, entre autres, qu'on appelle, là, qui est une équipe de policiers qui sont assistés par un travailleur social, un intervenant communautaire. Donc, c'est eux qui interviennent auprès des personnes en situation d'itinérance sur le campement, à moins qu'il y a... il y a des situations où... qui requièrent, je dirais, un petit peu plus de force de bras, là, dans lesquelles, évidemment, on peut s'ajuster. Mais, oui, donc, moi, je considère qu'on est... qu'on est des partenaires, qu'on a... c'est important qu'on soit là puis qu'on soit capables de faire vivre ça aussi.

Ceci dit, nous, on n'a pas l'expertise en matière de cohabitation. Je trouverais ça important qu'il y ait du soutien qui soit donné auprès des organismes communautaires qui doivent développer un plan de cohabitation, un plan de voisinage, une expertise, par exemple, qui proviendrait du réseau de la santé, là, qui peut avoir une expertise puis qui est aussi bien placée pour la diffuser entre les différentes régions ou entre les différentes villes du Québec, où on doit mettre en place des plans de cohabitation. Mais, nous, on pourrait certainement s'engager à le faciliter, là, puis à favoriser, en fait, cette cohabitation-là puis ce bon voisinage là. Comme on le fait foncièrement sur le terrain, on le fait à cet endroit-là, mais on le fait aussi sur le site du campement, où, bien, évidemment, il y a d'autres joueurs proches, puis notamment une école, une école secondaire pour lesquels je voudrais que la cohabitation se passe bien, justement, parce qu'on s'y intéresse. Tu sais, moi, je pense que le risque, c'est de ne pas... de ne pas s'y intéresser, tu sais. C'est de faire comme si ce n'était pas un enjeu. Mais, à partir du moment où on ouvre le dialogue, où on identifie les enjeux, tu sais, s'il y a une situation xyz, là, qui survient, puis qu'on est capables de la gérer rapidement, de mettre en place des mesures d'atténuation, de mettre en place des mesures pour que tout le monde se sente à l'aise là-dedans, bien, ça permet de... tu sais, de réduire le niveau de risque mais aussi d'apaiser les... de répondre au sentiment de sécurité, là, qui est aussi, à mon avis, quelque chose d'important, là. Tu sais, des fois, ce n'est pas tant la réalité que la perception, puis c'est aussi important d'être capables d'y répondre. Donc, oui, nous, on est partenaires là-dedans, du moins, c'est comme ça que je le vois.

Mme Prass : Parce que je pense que c'est aussi...

M. Marchand (Bruno) : ...

Mme Prass : Oui. Je vous en prie.

M. Marchand (Bruno) : Exemple de transition à Gatineau en corrélation avec le projet de loi actuel. C'est un exemple, où, si on disait : Gatineau n'aurait pas dû le faire, on aurait tort. Il y a une réalité au site Robert Guertin que je n'ai vue nulle part ailleurs au Québec. Je ne connais pas tout, il manque peut-être quelques échos à mes informations, là, mais il y a une réalité particulière qui vient d'un historique et qui vient d'une croissance, malheureusement, de la population itinérante, comme l'a dit la mairesse. On prendrait ça puis on dirait : Jusqu'à date, il y a un certain succès, puis ça va continuer d'être mesuré, puis on dirait : Toutes les villes devraient en avoir un, ce serait une autre erreur. Parce que, je ne suis pas sûr, même si on en avait besoin, qu'on a... on a la place, nous, pour faire ça, parce qu'on n'a pas le même historique, parce qu'il y a une place qui est assez dédiée, qui était déjà identifiée, qui est particulière.

Est-ce qu'il faut le faire ou pas le faire, je ne le sais pas. Mais pour revenir à l'élément lié au projet de loi, c'est cette souplesse-là que le gouvernement du Québec doit aussi garder. Puis que, notamment le 150 mètres, et autres, et c'est pour ça qu'on y réagit beaucoup, qui doit appartenir à la capacité de juger, à la capacité d'être agile, et la capacité d'être habile plutôt que d'envoyer un message à la population, dire : Bien, 150 mètres, ce sera toujours non. On ne le sait pas. On ne le sait pas. Et il y a des places, ce sera 250 mètres, puis il y a des places, ce sera peut-être 50. Et il y a des places, il y aura des sites comme Transition Québec qui devront être reproduits parce qu'il y a des choses intéressantes, puis il y a d'autres places où on dira : Ce n'est pas possible. On peut... Je pense qu'on ne doit pas se substituer au jugement, à l'important jugement de nos élus et de nos fonctionnaires, qui sont capables de déterminer et de discriminer.

Mme Prass : Donc, il n'y a pas de modèle unique. Chacun sa réalité. Il faut s'ajuster en conséquence.

M. Marchand (Bruno) : C'est... À l'UMQ, c'est notre compréhension. Et surtout se fier sur les autorités locales. Je ne le sais pas, moi, ce qui est bon à Gatineau. J'ai beau y avoir été, j'ai beau avoir vécu là deux jours dans ma vie pendant trois ans, ou je ne sais pas trop quoi, si on ne se fie pas aux élus locaux, qui, eux, prennent la chaleur, qui, eux, doivent rendre des comptes, si on ne respecte pas l'autorité municipale, le pouvoir municipal mais surtout sa connaissance, on risque encore plus de se tirer dans le pied.

Mme Prass : Et, si jamais le projet de loi maintenait la question du 150 mètres et le BRAS aurait à déménager, j'imagine que ce serait la moindre des choses qu'on s'attende que le gouvernement les accompagne de façon administrative et également de façon financière pour trouver un lieu pour se déplacer. Parce que, quand même, le gouvernement a trouvé bon d'investir en premier lieu, de les soutenir. Comme vous avez mentionné, là il y a un projet, un autre projet qui vient d'être accepté par le gouvernement du Québec, donc il faudrait... s'ils doivent déménager en raison du projet de loi du gouvernement, qu'il doit y avoir un accompagnement, puis un accompagnement financier, également.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Bien, espérons. Honnêtement, je vais... je vais espérer qu'on ne se rende pas...

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : …dans la mesure où si on fermait ce site de consommation supervisée là, le risque, c'est que… je ne sais pas si à Gatineau, on pourrait ravoir un autre site de consommation supervisée, parce que sur l'île de Hull, ça ne nous apparaît pas évident. Pourtant, on sait que, pour avoir un site de consommation supervisée qui fonctionne, il faut que les gens soient à 15 ou 20 minutes de marche, autrement ils n'iront pas. Donc, nous autres, on aurait de la place, là, dans le parc industriel de l'aéroport, mais ça serait sans intérêt pour les usagers de se rendre là.

Donc, si le gouvernement souhaitait maintenir le 150 mètres comme critère d'exclusion plutôt qu'un critère d'évaluation dans le plan de cohabitation... Puis tu sais, ceci dit, si le plan de cohabitation, il ne marche pas au bout de quatre ans, bien, c'est là où vous pouvez tirer la plug, là, vous pouvez dire : Là, ça ne marche pas, il y a des enjeux de cohabitation, puis tu sais, le pouvoir, il vous reviendrait, là, comme ministre, mais ça permet d'avoir un regard puis pas de tirer systématiquement la plug, parce qu'il y a effectivement des cas qui fonctionnent. Mais dans le cas où vous alliez avec un 150 mètres d'exclusion, moi, je demanderais qu'il y a un droit acquis qui soit donné à l'organisme Le bras, étant donné que c'est un modèle qui fonctionne. C'est un modèle qui répond à des besoins puis c'est un modèle sur lequel on souhaite continuer à miser.

M. Marchand (Bruno) : …politique, puis j'utilise le mot à dessein, imaginez le fait de relocaliser un centre qui est existant et pour lequel ça va bien, de trouver un autre lieu, de refaire des consultations, imaginer le parcours du combattant politique qui soulève des boucliers. Même si… la mairesse a sûrement raison quand elle dit : On ne trouve pas d'espace, mais imaginez qu'ils en trouvaient, on repasse par un paquet de processus de… consultatif pour lequel il peut y avoir des milliers de levées de boucliers et pour lequel on n'en sort pas gagnant. Donc, on crée à quelque chose qui va bien, qui répond à un besoin un paquet d'enjeux pour lequel on ne sait même pas si on va être capable d'y répondre.

Mme Prass : Et vous, dans votre mémoire, vous demandez une clarification de l'article 667.23 du projet de loi sur l'interaction entre l'autorisation ministérielle et les règlements municipaux. On en a discuté un petit peu plus tôt ce matin avec le maire Marchand, mais je voudrais vous entendre là-dessus également.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : En fait, l'article 667.23, vous avez dit? Oui, alors « un permis ou un certificat municipal ne peut être refusé et une poursuite en vertu d'un règlement ne peut être intentée pour le seul motif qu'un local est destiné à l'offre de services de consommation supervisée lorsque ce local est autorisé par le ministre en vertu… » Ce qui veut donc dire… c'est qu'à partir du moment où M. Carmant ou la personne du ministre responsable des… santé et services sociaux autorise un lieu, nous, comme ville, on n'a pas de capacité de s'y opposer. Pourtant, tu sais, on a des règlements de zonage. On a aussi une fine connaissance du terrain, tu sais, puis c'est la raison pour laquelle l'aménagement du territoire, l'urbanisme, ce sont des compétences exclusives des municipalités. C'est parce qu'on connaît notre terrain, on connaît notre monde, on connaît les ressources, on connaît les défis, mais on connaît aussi les opportunités. Moi, je pense que ce travail-là, il doit se faire ensemble.

Tu sais, nous autres, on est capable d'accompagner un organisme qui a besoin, par exemple, d'ouvrir un site de consommation supervisée ou autres… autres services, que ce soit par exemple du logement communautaire, du logement social, que ce soit un centre de jour, on est capable de l'aiguiller vers notre fine connaissance du terrain, les données policières, les données au 3-1-1, voire les données des voisins, là. Tu sais, nous autres, on connaît notre monde. Donc, c'est un travail qui doit se faire de manière conjointe puis je pense qu'on doit le faire dans le respect de nos compétences. Et nous, notre compétence propre, c'est l'urbanisme, l'aménagement du territoire. Mais encore une fois, l'exemple de Gatineau démontre que nous, on a accompagné cet organisme-là, ça fonctionne, et donc on est capable d'avoir de grands succès quand on travaille ensemble.

Mme Prass : D'accord. Merci beaucoup.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Merci.

Le Président (M. Provençal) : Merci, Mme la députée. Alors, le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, prenez la relève.

M. Cliche-Rivard : Bien sûr, M. le Président. Merci d'ailleurs pour votre mémoire, vos deux mémoires. Très intéressant, l'UMQ et Gatineau, merci. J'ai posé la question de tout à l'heure à Montréal, puis je voudrais vous la poser à vous aussi, indépendamment. Est-ce que vous avez été consultés dans la préparation et la rédaction du projet de loi no 103?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Non.

M. Cliche-Rivard : M. le maire Marchand?

M. Marchand (Bruno) : Non.

M. Cliche-Rivard : Non. Parfait. Très clair. Est-ce que, selon vous, le projet de loi va favoriser ou faciliter l'accès à de nouveaux services de consommation supervisée au Québec?

• (16 h 40) •

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Bien, je ne pense pas que c'est l'esprit du projet de loi.

M. Cliche-Rivard : Est-ce que c'est un constat partagé par M. le maire Marchand?

M. Marchand (Bruno) : J'ajouterais la nuance suivante, et où je rejoins le ministre, c'est : La population a besoin d'entendre qu'on est préoccupés par la cohabitation et qu'on prend les mesures et les moyens nécessaires pour faire en sorte de dire que ce n'est pas un « free for all ». Ce n'est pas ça, mais la perception est malheureusement parfois maître et ça crée chez certaines parties de la population cette impression qu'on peut faire n'importe quoi, n'importe où. Alors, comment faire pour rétablir cette perception chez certains et leur dire qu'il y a des critères, qu'il y a des mesures, qu'il y a une prise en charge nécessaire qui fait que les choses sont bien faites…

M. Marchand (Bruno) : ...je pense qu'il faut avoir cette préoccupation-là. Je pense que ce qu'il y a dans le projet de loi vise ça, mais je pense qu'on ne l'atteint pas sur certaines dispositions.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Puis j'ajouterais que je comprends la volonté du gouvernement d'encadrer les sites de consommation supervisée, puis je pense qu'il y a un cas à Montréal qui a fait la une, qui est effectivement préoccupant. Puis, si j'étais à votre place, là, je serais aussi préoccupée. Puis là où on est capable, je pense, de vous alimenter, c'est en faisant, en quelque sorte, un peu la part des choses en vous amenant la fine connaissance qu'on a de notre territoire, comme élus municipaux, pour vous dire qu'effectivement il y a un cas particulier, mais, si on le défait puis qu'on enlève un petit peu de perception, on est capable de voir qu'il y a des cas où ça fonctionne, tu sais,  puis peut-être qu'on est capable de tirer certaines leçons de ces cas-là pour mieux encadrer l'implantation des sites de consommation supervisée pour être capables d'être meilleurs collectivement, tu sais.

Donc, moi, je rejoins tout à fait M. Marchand, effectivement, il y a des questions de sécurité publique qui sont tout à fait légitimes, puis je pense qu'on est là vraiment dans l'esprit de vous aider, de nous aider à être meilleurs pour répondre aux besoins de l'ensemble des gens. Puis ça comprend les personnes les plus vulnérables, mais ça comprend aussi les enfants qui vont à l'école, les parents qui ont envie de savoir que leurs enfants sont en sécurité. On est des parents, on comprend très, très bien ça aussi, là.

M. Cliche-Rivard : Dernière question. Le BRAS nous dit : Si on doit être relocalisé, là, suivant l'article, dans quatre ans, c'est à peu près 5 millions, tel qu'évalué aujourd'hui. Maison Benoît Labre nous dit, dans son mémoire, c'est à peu près 7 millions. Eux, ils ont fait les étapes suivant les réglementations puis les dispositions législatives conformes, au moment où ils ont ouvert, là. Qui devrait assumer la facture des 5 et des 7 millions, selon vous? Est-ce que c'est les villes? Est-ce que c'est les organismes? Est-ce que c'est Québec? Qui devrait payer ça?

M. Marchand (Bruno) : À partir du moment où c'est une disposition qui vient changer une mise en place déjà établie, le gouvernement du Québec doit en assumer une très, très, très large part. On ne peut pas demander à ces organismes communautaires qui ont, d'arrache-pied, composé des financements, pas à eux seuls, mais avec, notamment, des contributions, parfois municipales, mais principalement gouvernementales ou autres, parfois dans de l'autofinancement... Il y a quelque chose où... On doit assumer nos responsabilités. Si on change les dispositions, bien... on en assumera les responsabilités comme gouvernement.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :On va compléter cet échange avec Mme la députée de Terrebonne, s'il vous plaît.

Mme Gentilcore : Merci, M. le Président. Merci d'être là. Plusieurs de mes questions ont été répondues, ça fait que je vais en profiter pour approfondir un peu, parce que c'est intéressant, ce que vous avez dit par rapport au fait que, chez vous, le site d'injection supervisée, il n'y a pas de problème, il n'y a pas d'appel au service de police, mais votre centre de jour, par contre, oui. Ça fait que je suis curieuse de creuser ça un petit peu plus pour ma compréhension à moi.

Est-ce que vous avez des garderies, des CPE ou des écoles dans le 150 mètres autour de votre centre de jour?

Une voix : ...

Mme Gentilcore : O.K. Puis, en ce moment, c'est quoi, le genre de problème que vous voyez puis comment vous évaluez, en fait, la différence entre le succès de votre site d'injection, le fait qu'il n'y ait aucune plainte à ce niveau-là, mais le fait qu'il y en ait, par contre, pour votre centre de jour? Quelle est la différence au niveau de la ville?

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : C'est vraiment... Merci. C'est vraiment une excellente question, puis je ne sais pas si j'ai tous les détails à vos réponses, mais... à vos questions, mais ce qui m'apparaît être évident, c'est que, dans le cas du centre... du service de consommation supervisée, on a les ressources en place pour en faire un succès, tu sais. On a fait du porte-à-porte, on a mis la table. Il y a des ressources, aussi, adéquates, pour permettre l'encadrement de ça. Donc, on est capable de bien gérer, puis il n'y a pas de débordement.

Dans le cas du centre de jour, là, le grand défi, c'est que c'est un service qui a quelques années, voire quelques dizaines d'années, puis qui a été, à mon avis, conçu... puis, tu sais, il y a des gens qui travaillent fort, entendez-moi, des gens dévoués, puis ce n'est pas du tout ça qu'on remet en causé, mais il a été pensé à une époque où l'itinérance n'avait pas la même ampleur à Gatineau. Et donc le défi, c'est d'être capable de répondre aux besoins qui, eux, sont grandissants.

Donc, par exemple, là, l'organisme a dû, temporairement, dans les dernières années, là, fermer parce qu'il y avait un enjeu de sécurité, puis ils n'étaient pas capables d'assurer la sécurité de leurs travailleurs. Donc, ils ont donné des boîtes à lunch, là, pour emporter plutôt qu'accueillir les gens sur eux... chez eux puis être capable de les accompagner adéquatement. Donc, je pense qu'il y a un enjeu d'adéquation entre les besoins et les ressources qui, dans le cas de notre centre de jour, malgré toute la bonne volonté, malgré, tu sais, leur dévouement entier que je salue du fond du cœur, je pense qu'il... je pense qu'il y a des défis de répondre à l'ampleur des besoins.

Et je dirais que, quand il y a des débordements, c'est souvent ça, tu sais, les gens ont faim parce que... parce qu'ils n'ont pas de nourriture, là, tu sais, ils ont un repas par jour, donc, à un moment donné, ils ont faim,  puis c'est là où ça déborde, tu sais, ça fait que c'est...

Mme Gentilcore : Donc là, je comprends qu'on ne veut pas faire d'amalgame, donc on veut retirer l'itinérance de ce projet de loi là, mais ce serait donc intéressant de s'y pencher aussi, si je comprends bien...

Mme Gentilcore : ...peut-être dans un autre projet de loi, mais sur les enjeux de l'itinérance et des ressources en itinérance, pour peut-être aussi mettre plus de règles, c'est ce que j'entends de votre côté, qu'ils aient un devoir aussi par rapport à la cohabitation, qu'ils aient un devoir aussi. Est-ce que...

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Oui. Bien, il y a l'enjeu des ressources, tu sais, il y a la... puis l'enjeu des ressources financières. Puis on porte, je pense, M. Marchand et moi, la demande, je dirais, constante depuis quelques années de dire : Ça nous prend plus de ressources pour faire face à la crise de l'itinérance parce que, ça, c'est sûr que c'est une partie de la clé. Tu sais, la solution, c'est d'avoir du logement, c'est d'avoir plus de ressources, que les organismes communautaires, qui font un travail merveilleux, soient plus outillés, soient... pour être capables de répondre à l'ampleur de la demande. Même chose du côté de, tu sais, bon. Donc, vous comprenez l'adéquation entre les besoins puis les ressources qui doit être travaillée. Je voulais dire autre chose, mais ça m'a échappé.

Mme Gentilcore : Donc, pas nécessairement plus d'encadrement. C'est vraiment des ressources financières, pour vous.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : Bien, la question de l'encadrement, je dirais, ça dépend comment est-ce que vous le voyez, tu sais. Nous, on est en train de travailler dans notre camping à un... ce qu'on pourrait appeler, là, des règles de campement. Donc, dorénavant, il va falloir, tu sais, s'installer dans tel carré puis répondre à un code de vie. C'est du bas seuil, là, on s'entend, là, mais pour être capable de garder un certain contrôle, un plus grand contrôle, je dirais, pour mieux m'exprimer sur la situation.

Donc, oui, il y a... il y a des règles qui doivent être appliquées. Puis, tu sais, on est tous dans l'innovation, les villes, tu sais, les organismes innovent. Parce qu'on a toujours connu l'itinérance à Guertin. Il y a toujours eu des personnes en situation d'itinérance, 10, 15, 20. Mais là il y en a des centaines, donc, évidemment que la solution, elle ne peut pas être la même pour y faire face, là.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup.

Mme Marquis-Bissonnette (Maude) : J'espère que je réponds bien. Mais c'est évidemment un grand débat, une grande discussion.

Le Président (M. Provençal) : Alors, je remercie les représentants de la ville de Gatineau et de l'Union des municipalités du Québec de s'être déplacée en présentiel pour faire ces échanges. C'est très structurant pour les notes qui sont prises pour le projet de loi. Alors, merci beaucoup.

Sur ce, je vais suspendre les travaux pour laisser place au prochain groupe. Encore merci pour votre...

Une voix : Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

(Reprise à 16 h 54)

Le Président (M. Provençal) :Nous reprenons nos travaux. Je veux juste signaler que, normalement, les photos ne sont pas permises dans la salle.

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal) : Non, c'est... il n'y a pas de problème. Merci. Alors, nous allons poursuivre nos travaux avec le Réseau Solidarité Itinérance du Québec et leurs représentants. Alors, je vous rappelle que vous allez avoir... je vais vous inviter à vous présenter, et par la suite, là... mais vous avez 10 minutes pour votre présentation, et les échanges, par la suite. Alors, je vous invite à vous présenter, s'il vous plaît.

M. Vallée Dore (Boromir) : Donc, tout d'abord, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, nous vous remercions de nous donner l'opportunité de nous exprimer aujourd'hui. Nous prenons le temps aussi de remercier Karine d'avoir eu le courage de venir faire part de son précieux témoignage devant la commission. Je me présente, Boromir Vallée Dore, directeur général au Réseau Solidarité Itinérance du Québec.

Mme Babeux (Karine) : Et Karine Babeux, paire aidante à L'Interzone.

Mme Guilhem (Marie-Edwige) : Marie Guilhem, je suis organisatrice communautaire au Réseau Solidarité Itinérance du Québec.

M. Vallée Dore (Boromir) : Donc, sans plus attendre, j'inviterais Karine à prendre la parole.

Mme Babeux (Karine) : Bonjour, M. le ministre, et vous aussi. Je commencerais en vous parlant des bénéfices des SIS. En ce qui concerne L'Interzone, il est possible d'accompagner les usagers dans l'enseignement sur les techniques de consommation sécuritaires et sur les drogues en général. Ça leur donne un endroit pour éviter de consommer seul dans la rue et un endroit pour se poser pour un bref moment, donc moins de tickets pour les usagers, et aussi, le plus important, moins de surdoses mortelles. C'est un service inclusif, anonyme et sans jugement. Les usagers ont le choix de parler soit avec un intervenant, un pair aidant, ou encore, un infirmier. Il est important de souligner le travail des infirmiers. Ils peuvent faire des dépistages d'ITSS, de la vaccination, des soins de plaies et ils prennent le lead lors de surdoses. Aussi, les intervenants sont nécessaires en termes de soutien psychosocial et de soutien lors de surdoses...

Mme Babeux (Karine) : ...et ils gèrent beaucoup d'émotions et de détresse au quotidien. Ils font un travail exceptionnel. Il faut... Et il faut aussi mentionner que comme l'Interzone n'est pas un milieu de vie, il serait nécessaire d'avoir d'autres sites de consommation supervisés à Québec avec des modèles différents afin de diversifier l'offre en fonction des besoins des usagers. Niveau professionnel, on ne se le cachera pas, l'Interzone m'a permis d'avoir une job. Je voulais travailler avec les jeunes en délinquance, mais j'avais peur du cégep. Ça m'a donné la stabilité. J'ai eu accès à des formations. Ça m'a donné le courage de suivre une formation de pair aidant à l'AQRP avec l'Université Laval. La fierté que, malgré ma consommation, j'étais capable de garder un emploi et surtout de montrer aux usagers que, pour eux aussi, il était possible d'y arriver. Étant paire aidante, je ne fais pas le même... les mêmes interventions que les intervenants. Je connais les usagers personnellement. Donc, le lien de confiance est déjà là. Je peux me permettre de leur dire leurs quatre vérités lors de mes interventions. Les usagers savent que je suis transparente... transparente, honnête et que je respecte la confidentialité. Vu que je connais le milieu de la drogue, ils ne seront pas gênés de me parler de leur réalité et sans se faire juger.

En étant consommatrice de drogue par injection, je peux donner des trucs aux usagers, à savoir quelle quantité est plus sécuritaire, quels sont les effets des différents mélanges de substances, et les risques, et comment s'injecter à moindre risque. Je peux faire de la sensibilisation sur le partage du matériel entre individus et leur fournir du matériel neuf.

Ayant déjà été prostituée, s'il y a une jeune qui commence dans un milieu, elle aura plus de facilité à me parler de ce qu'elle vit. Je puis lui donner des conseils, de l'écoute et du soutien. J'essaie de creuser si elle est en sécurité et, si besoin, je peux la référer à des organismes compétents en lien avec ses besoins comme le projet Lune ou même le CIPQ.

L'Interzone a impacté ma vie positivement. J'ai réussi à avoir une subvention pour mon logement grâce aux intervenants, à me sortir de l'aide sociale, d'être indépendante financièrement, d'avoir été capable d'avoir assez de recul sur mon vécu pour m'en servir pour connecter avec les usagers et être capable de faire des interventions pertinentes, surtout aussi d'être heureuse dans ce que je fais. Et je travaille fort à maintenir ce petit bonheur là...

M. Vallée Dore (Boromir) : Merci Karine. J'inviterais Marie.

Mme Guilhem (Marie-Edwige) : Oui. Merci beaucoup, Karine. D'entrée de jeu, nous tenons à être clairs, nous sommes pour une bonne cohabitation sociale et c'est pour cette raison que nous sommes contre le projet de loi n° 103. Nous défendons une cohabitation sociale fondée sur l'inclusion, le vivre-ensemble et non sur la stigmatisation et l'insinuation que certaines personnes de notre société sont indésirables. Le gouvernement fédéral définit la stigmatisation structurelle comme l'adoption de politiques publiques qui renforcent les préjugés au lieu de les combattre. En associant la présence de certaines personnes dans certains lieux à des nuisances, le projet de loi renforce l'idée que les personnes en situation d'itinérance ou consommatrices sont indésirables. Vous le savez, le Québec fait face à une crise de l'itinérance, une crise de logement et une crise des surdoses liées aux opioïdes. Chaque semaine, nous recevons des rapports d'enquête portant sur les décès de personnes en situation d'itinérance disparues, trop jeunes, dans des conditions inhumaines. Du printemps 2022 jusqu'à l'automne 2024, le Bureau du coroner a recensé 459 décès par surdose accidentelle. C'est 459 décès de trop. Derrière ces statistiques se cachent des citoyens, des citoyennes comme Mario, Jérémy, Christine.

• (17 heures) •

Les rapports sont clairs. Si ces personnes avaient eu accès à un logement temporaire ou permanent, à du soutien psychosocial, à un site de consommation supervisée, elles auraient eu de bien meilleures chances de survie. Et finalement, la cohabitation sociale, de quoi s'agit-il réellement? Au-delà de coexistence sans aucune friction, la cohabitation sociale suppose le partage de l'espace entre les individus selon des modes d'entente qui comprennent autant le conflit que la tolérance et la collaboration. Elle fait l'objet d'oppositions fondées sur des préjugés, des enjeux de consultation ou des enjeux d'aménagement. Le p.l. n°        103 nous entraîne dans une tout autre logique, car loin de prévoir des moyens de sensibilisation pour favoriser la cohabitation, il ouvre la porte à des oppositions...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Guilhelm (Marie-Edwige) : ...citoyenne et politique basée sur des préjugés visant les personnes marginalisées qui seront encore confrontées au phénomène du pas dans ma cour institutionnalisée.

Par ailleurs, ce projet de loi encadre sévèrement les centres de consommation supervisée et il ouvre la porte à imposer ces mêmes contraintes contre-productives aux locaux accueillant des personnes en situation d'itinérance. Par le fait même, il crée des barrières là où il faudrait construire des ponts. Il accentue la stigmatisation des personnes en situation de grande précarité. Il détourne la mission première des organismes qui n'est pas de gérer des irritants sociaux ou des... des perceptions négatives. Pourquoi nuire à ces organismes qui assurent chaque jour un soutien, une cohésion, de l'humanité dans nos communautés et, qui plus est, pallient les carences du réseau public?

Le RSIQ déplore que le court délai imposé par la commission limite la qualité des consultations, nuise à ses mécanismes internes démocratiques et à la participation des personnes concernées. Malgré ces contraintes, le RSIQ a tenté d'être le plus représentatif possible. Toutefois, nous nous interrogeons sur la valeur accordée à la démocratie par l'Assemblée nationale, la plus haute instance démocratique au Québec. Si des organisations comme la nôtre peinent à trouver leur place dans le cadre établi avec hâte.

Ce va-vite, les organismes communautaires en itinérance le connaissent que trop bien. Vous devez savoir qu'au Québec la lutte à l'itinérance repose sur des financements précaires d'un à trois ans, des fonds d'urgence reçus en retard, des lettres de confirmation qui arrivent avec des années de retard elles aussi, un plan d'action qui se termine en 2026, sans aucun début de travail pour le suivant et sans garantie de financement postavril 2026.

Le p.l. n° 103 représente une preuve supplémentaire du désengagement de l'État face à ses responsabilités fondamentales, que ce soit en matière de santé publique, d'itinérance et de solidarité sociale. Pour preuve, celui-ci entre en contradiction avec plus d'une dizaine de politiques et de plans d'action déjà adoptés par le gouvernement. Nous souhaitons donc vous adresser cette question : Comment le projet de loi reflète-t-il la responsabilité collective que le gouvernement s'est engagé à assumer dans la politique nationale de lutte à l'itinérance?

Aujourd'hui, nous vous demandons de ne pas adopter ce projet de loi. Pour honorer le droit à la vie et pour faire face à vos obligations gouvernementales, nous appelons à un véritable dialogue démocratique, à une discussion franche, inclusive et concertée sur la cohabitation sociale. Nous sommes disposés à collaborer et croyons qu'ensemble, nous pouvons trouver des solutions basées sur les meilleures pratiques. Nous avons aussi une vision à offrir, celle d'une société qui prend soin de tous ses citoyens. Merci pour votre attention.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre présentation. Alors, M. le ministre, on débute cet échange.

M. Carmant : Oui, d'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Une petite phrase pour mettre mon... Mais merci beaucoup pour votre présentation. Et Mme Babeux, merci beaucoup pour votre témoignage, là, c'est très touchant.

Écoutez, on n'est pas d'accord, on n'est pas situé à la même place, là, mais je vous entends. Tu sais, puis moi, j'ai... c'est important pour moi. Puis moi, j'ai vraiment la... Je saisis toute l'importance des sites de consommation supervisée et toute l'importance de ce que vous faites pour lutter contre l'itinérance.

La raison du projet de loi, puis j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est que maintenant on est rendu à un endroit où tout est confondu. On essaie d'ouvrir justement de l'hébergement de transition, de l'hébergement supervisé. Et la population hésite toujours en pensant que, dès qu'on parle d'une ressource pour aider les gens à sortir de l'itinérance, il s'agit d'un refuge à bas seuil d'accessibilité. Donc, c'est un peu pour ça, la pensée derrière le projet de loi, pour venir dire : Bien, écoutez, les sites de consommation supervisée seront mieux encadrés et il n'y aura pas dans... Et faites-nous confiance dans le processus d'implantation des différentes ressources dans chacune des régions. Est-ce que vous êtes en accord un peu avec cette observation que moi j'ai en tout cas? Parce que, sincèrement, je dois vous même le dire, j'ai dû m'impliquer personnellement pour aller rencontrer des comités citoyens parce que la réponse était non pour du logement supervisé. Tu sais, c'est quand même inquiétant.

M. Vallée Dore (Boromir) : ...

M. Vallée Dore (Boromir) : ...à ce propos là, une... bien, en fait, de l'analyse qu'on a pu faire, la force du projet de loi, c'est de proposer des plans de cohabitation préventifs. En ce moment, les plans de cohabitation arrivent souvent après qu'on ait eu des enjeux de cohabitation. Donc, en fonction des bonnes pratiques, c'est effectivement quelque chose qui est identifié comme positif, donc, de poser la question est-ce qu'il y a un plan de cohabitation puis à quelle hauteur du quartier on veut répondre aux enjeux de cohabitation. Toutefois, le projet de loi fait reposer ce fardeau-là sur les organismes communautaires, qui, bien... puis ça a été dit à plusieurs reprises aujourd'hui, qui n'ont déjà pas les moyens de mener leur mission première, qui est de supporter et accompagner les gens.

Donc, il y a quelque chose d'inéquitable, un peu, dans le fardeau qu'on transmet. Surtout dans un contexte où est-ce que le gouvernement du Québec vient juste de travailler sur les rôles et responsabilités des différents ministères et des municipalités sur la question de l'itinérance. Quand on parlait que le projet de loi était en inadéquation avec des politiques gouvernementales, les derniers travaux, rôles et responsabilités n'en font pas fi.

En fait, ce qu'on en... ce qu'on demande aux municipalités, c'est de mettre en œuvre des mesures favorisant la cohabitation harmonieuse et l'inclusion sociale dans l'espace public, la mobilisation des équipes municipales selon les besoins ainsi que la communication avec la population. On demande aussi de collaborer à l'implantation des différents services auprès des personnes en situation d'itinérance, selon les compétences municipales, et d'aménager l'espace urbain. Donc, on vient juste de faire un travail sur les rôles et responsabilités, qu'on a identifié, avec les municipalités, certaines responsabilités. Et là, le projet de loi ramène ces responsabilités-là sur les organismes communautaires. Donc, il y a une incohérence avec des travaux frais. Puis, ce napperon-là, il date de cette année, là. Je n'ai pas la date exacte.

Une voix : ...

M. Vallée Dore (Boromir) : Novembre 2024. Donc, il y a.... C'est ce qu'on veut mettre en lumière notamment. Ça fait partie d'une des incohérences. Actuellement, effectivement, il y a un mélange entre l'ensemble des services. On l'a vu à TVA Nouvelles. Au réseau, on est sortis publiquement sur notre Facebook pour délier des amalgames qui avaient été faits, si jamais vous voulez aller voir. Oui, on l'observe aussi, mais on n'a pas le sentiment que, ce projet de loi là, il défait ces amalgames-là. En fait, on pense qu'il les tisse. Pourquoi? Parce que le thème du projet de loi, donc, c'est la cohabitation harmonieuse pour réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser la cohabitation harmonieuse, et on voit apparaître, dans le projet de loi, des articles sur les locaux qui habitent... qui accueillent principalement des personnes en situation d'itinérance et sans-abri. D'ailleurs, le terme «sans-abri» n'est pas utilisé dans les politiques québécoises. On était surpris de le voir apparaître. Donc là, on sent qu'il y a un amalgame qui se crée à l'intérieur de ce projet de loi là. Dans le mémoire, là, on a pu l'aborder davantage.

M. Carmant : O.K. Donc, ça... puis, ça, je l'ai mentionné auparavant, le moyen de faire cette cohabitation, cette discussion de cohabitation, en amont, c'est vraiment en instaurant ce dépôt de projet via Santé Québec. Donc, c'est là qu'on veut impliquer la Direction régionale de santé publique, les organismes communautaires et les municipalités, dans un forum où on peut établir la cohabitation. Mais on va... on va éclaircir ça.

Puis, l'autre... l'autre point qui est important aussi, parce que c'est plusieurs qui me le ramènent aujourd'hui, c'est... c'est ce sentiment que, dans le projet de loi, tout revient sur les organismes communautaires. Ce n'était pas l'intention du législateur, là. Puis, si vous pouvez nous identifier ce qui... les points qui vous... qui vous indiquent ça, là, que tout revient... on va s'organiser pour clarifier ça.

M. Vallée Dore (Boromir) : Oui. C'est les articles 667.10 puis 667.12 qui ont été identifiés, là, comme étant... qui donnaient la responsabilité de la cohabitation harmonieuse et l'acceptabilité sociale aux organismes communautaires.

• (17 h 10) •

Et puis il y a... il y a toute l'idée des inconvénients normaux aussi, là, qui sont décrits dans le projet de loi. Puis c'est... c'est aussi faux de penser que, dans un quartier où il y a un organisme communautaire qui va s'implanter pour donner des services, que le... il va y avoir le même... comment je pourrais dire, la même situation que dans un quartier où il n'y en a pas. C'est sûr que s'il y a une soupe populaire puis qu'il y a des gens qui font la file, bien, versus un quartier où il n'y en a pas, bien, il va y avoir peut-être des inconvénients autour de ça qu'on ne retrouvera pas dans un autre quartier. Et le projet de loi, avec la question des inconvénients normaux, fait aussi reposer une espèce de fardeau sur le quartier de dire : Bien, il n'y aura pas de situation dérangeante. Toutefois, la cohabitation, comme décrite par Marie, un peu plus tôt, suggère que, des fois, il va y avoir des tensions, des fois, il n'y en...

M. Vallée Dore (Boromir) : ...pas, des fois, il va y avoir des alliances. Ça va dépendre du... du tissu social, de c'est quoi, les intérêts, je pourrais dire, présents dans le quartier. Donc, ça va être évolutif dans le temps. Puis il y a des moments où est-ce que ça pourrait faire très mal à certaines ressources. S'il y a des intérêts qui vont à l'encontre de ça puis qui peuvent parler plus fort, là aussi, notamment des immeubles qui veulent faire du Airbnb, qui veulent une quiétude, etc., qui s'instaurent et qui s'installent après que les groupes soient arrivés, là.

M. Carmant : D'accord. L'autre point qui est important pour moi, c'est l'enjeu de collectivité. Et ce qui a été difficile parfois, c'est la raison aussi qui entraîne un peu le projet de loi, c'est que quand on n'encadre pas cette cohabitation, un organisme peut dire : Bien, nous, ce qui est aux alentours de de leurs services, tu sais, ne les... ce n'est pas leur rôle de gérer l'extérieur, par exemple, du bâtiment. Et c'est ça qui est un peu... qui me pousse à dire : Bien, il faut prévoir ça avant l'ouverture du site. Puis, même à l'interzone, je pense que c'est un endroit qui est extrêmement bien géré. Mais, des fois, vous le savez, il y a des... il y a des files d'attente, il y a beaucoup de circulation autour. Puis c'est quand moi, je suis allé faire la visite que, là, je me suis rendu compte du besoin et, là, j'ai commencé à travailler avec le CIUSSS pour un projet pour alléger la circulation autour du site de consommation supervisée, tandis qu'idéalement ça aurait été réfléchi avant.

Mme Babeux (Karine) : Mais, quand on a ouvert l'Interzone, la dame, justement, qui avait ouvert le Airbnb, elle, elle n'était pas ouverte. Maintenant, on essaie de condenser les personnes dehors à ce qu'ils restent tranquilles, qu'ils flânent un peu moins dehors, qu'ils restent en dedans. Mais moi, je me dis : J'aime mieux les voir flâner alentour de l'Interzone. S'il y arrive quelque chose, on peut réagir, que de les voir flâner au Parvis, ou au parc des six, ou peu importe quel, qu'il arrive une surdose puis qu'on ne peut pas réagir. Donc, on essaie d'avoir quand même le bon voisinage avec les gens, les gens qui nous côtoient, mais, tu sais, des fois, tu sais, vous savez, il y a tout le temps... tu sais, les personnes sont marginales, donc ils ont chacun leur caractère. Tu sais, nous, on essaie de faire pour le mieux, mais, en même temps, tu sais, s'ils ne nous laissent pas la chance aussi, tu sais, si... tu sais, à nous... si les gens nous donnent à tous les jours des... des plaintes, à un moment donné, c'est comme : Laissez-nous un peu faire notre sécurité. Puis là, mais, tranquillement, pas vite, on essaie, on a même... on a même engagé des gardiens, justement, pour... pour que le bon voisinage... que se fasse, là.

M. Vallée Dore (Boromir) : Puis après... Puis ça, c'était... Puis aussi, l'Interzone, on a vu les chiffres ce matin, là, tu sais. Puis l'Interzone est d'accord pour dire qu'il faut ouvrir un autre local, mais c'est extrêmement compliqué, ouvrir d'autres locaux. Et là on semble vouloir complexifier la chose. Et puis la question de la cohabitation, puis ce que Karine, elle nomme, c'est que les groupes communautaires en itinérance sont à pied d'œuvre sur les questions de cohabitation. On a fait un sondage chez nos membres, là, dans la foulée du projet de loi, puis c'est plus de 90 % des répondants qui ont dit qu'ils ont des actions déjà en place en lien avec la cohabitation dans leur milieu. Donc, ces choses-là existent déjà. Il y a des bonnes pratiques, il y a eu des essais-erreurs par le passé. Donc, on devrait plutôt s'inspirer des choses qui fonctionnent.

On a le cas de BRAS Outaouais, qui est un site implanté, qui ne génère pas de problématiques. Donc, on se questionne sur c'est quoi, le méfait qu'on essaie de réduire avec le projet de loi actuel. Et puis, oui, pour les bonnes pratiques et la cohabitation.

M. Carmant : D'accord. M. le Président, je passerais la parole à ma collègue.

Le Président (M. Provençal) : Alors, Mme la députée de Louis-Riel, allez-y.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président. Alors, merci à vous trois, du réseau, pour votre présence aujourd'hui. Je comprends que vous représentez 16 concertations régionales, plus 225 organismes, donc vous êtes quand même relativement occupés. Vous vous êtes présenté aussi aujourd'hui pour votre présentation. Merci beaucoup. Mme Babeux également. Alors, on sait que ça prend beaucoup de courage de venir à une commission parlementaire et puis d'être impliqué personnellement dans un dossier, alors...

Mme Boivin Roy : ...Bravo à vous pour votre témoignage et merci. Vous nous avez parlé du vivre ensemble dans une société qui prend soin de tous ses citoyens. Vous nous parlez d'une discussion qui est franche, qui est inclusive, qui est concertée. Alors, comment vous voyez les conditions de succès pour une meilleure intégration des ressources en itinérance dans un quartier donné?

Mme Guilhem (Marie-Edwige) : Bien, je reviens un petit peu, du coup, à la question de la responsabilité. Pour les questions de succès, je pense qu'il faut travailler en concertation avec tous les acteurs qui sont impliqués dans la cohabitation, cohabitation harmonieuse. C'est essentiel que les organismes puissent se centrer sur cet aspect-là, mais puissent le faire aussi avec les municipalités, avec les ministères qui sont concernés par cet aspect-là, qu'on puisse, là aussi, ne pas travailler en silo, mais pouvoir partager cette tâche-là et que ça ne devienne pas le fardeau d'une seule partie. Parce que dans le projet de loi, on ne voit pas à quel moment, quelles sont les autres parties qui sont impliquées dans la cohabitation harmonieuse. Ce n'est pas clair, en tout cas, cet aspect-là.

Mme Boivin Roy : Est-ce que vous...

M. Vallée Dore (Boromir) : Je me permets de rebondir aussi sur ce qui devrait être mis en place. Il y a un travail qui a été fait, là, des pratiques d'aménagement novatrices pour une ville solidaire en 2023. Puis en fait, ils ont identifié plus de 200 pratiques qui fonctionnent sur les questions de la cohabitation, puis ils les catégorisent, là, en cinq grandes catégories. Donc, reconnaître le droit à l'espace public des personnes plus marginalisées, faciliter la cohabitation sociale, évidemment, concevoir des espaces inclusifs en mobilisant une approche par et pour les personnes concernées, et aménager des lieux sûrs, et soutenir l'autodétermination des personnes concernées. Puis on ne sent pas dans le projet de loi tout ce qui est de l'autodétermination, de par et pour, de soutenir les personnes. On ne le sent pas transparaître. Puis, pour nous, c'est une erreur majeure parce que c'est les principales concernées, en fait.

Mme Boivin Roy : Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples de succès? Puis je vous dirais, en deuxième question, il y a des mécanismes de dialogue ou de médiation qui ont été mis en place, dont vous êtes au courant, que ce soit lignes téléphoniques, médiateurs, rencontres, etc.

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, je pense qu'on a un exemple de succès. Le Bras en Outaouais, là, il a été nommé à plusieurs reprises par Maude, Mme la mairesse, là, juste avant. Donc, je pense que ça, c'est un exemple qu'on pourrait aller s'inspirer. Pour ce qui est de la médiation, oui, des équipes de médiation sociale à travers la province, on en a vu qui ont été déployées. Il y a des fois des plans de cohabitation qui sont plus ou moins élargis selon la communauté dans laquelle va être implanté... Sinon, ce qu'on voit, c'est des organisations qui ont fait du porte-à-porte. Il y a des consultations citoyennes, ils sont allés rencontrer les voisins. Il y a... Nos membres aussi ont répondu, là, à un ensemble d'actions qui sont présentement en place. Donc, il y a des choses qui se font présentement sur le terrain. Puis on trouve ça navrant que le projet de loi ne semble pas vouloir promouvoir ces choses-là.

Mme Boivin Roy : D'un côté, on a... On peut avoir les résidents, on peut avoir les commerçants. On a entendu aujourd'hui le témoignage de Mme Babeux. Comment vous impliquez les personnes en situation d'itinérance dans l'identification des besoins?

M. Vallée Dore (Boromir) : Ça, c'est... Ça, c'est une grande question. Ça demande beaucoup de doigté, de temps. Ça demande une confiance aussi. Et évidemment, on l'a mentionné d'entrée de jeu, cinq jours pour se préparer à discuter de ces questions là, ça ne nous donne pas le temps nécessaire pour consulter ces personnes-là. On a été très chanceux que Karine accepte de venir témoigner sur un délai court terme. Donc, je pense qu'il faut qu'on se donne du temps puis qu'on soit en mesure d'aller chercher la confiance de ces personnes-là. Puis pour le faire, bien, il faut travailler en collaboration avec les organismes avec qui ils ont un lien puis qui les accompagnent. Donc, en réponse, moi, je pense que c'est du temps, puis ça fait partie de nos recommandations que de se donner le temps de bien discuter des questions de cohabitation, là, parce qu'il y a des organismes communautaires qui se sentent concernés aussi par cette question.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup, Mme la députée. Oui, allez-y, madame.

• (17 h 20) •

Mme Babeux (Karine) : Je veux juste dire que, tu sais, ça fait quatre ans qu'on est ouverts. On est les seuls à Québec puis on a plus de 34 000 visites par année. Ça fait que, tu sais, c'est sûr qu'à un moment donné, tu sais, s'il arrive des conflits, on ne peut pas... Mais, tu sais, on essaie vraiment de... de faire, tu sais, d'être pour... comme sur le côté bon voisinage, là. Mais on s'entend qu'avec 34 000 visites, on ne peut pas non plus, tu sais, faire des miracles, là.

Le Président (M. Provençal) : Merci. Mme la députée de...

Le Président (M. Provençal) :...D'Arcy-McGee, je vous cède la parole maintenant.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Premièrement, je vous remercie pour le travail que vous avez fait en cinq jours. C'est quand même un mémoire, une présentation qui est assez complet, qui fait... qui fait le tour. Je vous remercie, Mme Babeux, d'avoir partagé votre histoire. Comme on a dit, ça prend du courage, mais aussi vous êtes là en tant qu'exemple pour les autres de ce qu'on peut réussir quand on croit en nous-mêmes, donc félicitation.

Vous avez... Vous venez de mentionner que, Interzone, vous avez dû engager un gardien de sécurité dernièrement. Est-ce qu'il a été fait à vos frais ou est-ce qu'il y a eu un financement qui vous a été accordé?

Mme Babeux (Karine) : Non. C'est à nos frais.

Mme Prass : Et qu'est-ce que vous avez dû mettre de côté comme services ou comme effectifs pour pouvoir engager ce gardien de sécurité?

Mme Babeux (Karine) : Marc-André va répondre à cette question.

M. Lamy (Marc-André) : Ah oui? Bien, bonjour, tout le monde! Si je peux juste corriger, par contre, l'embauche des gardiens de sécuritaire à L'Interzone n'est pas aux frais de L'Interzone en tant que tel. C'est le CIUSSS, en fait, qui a débloqué un budget pour ça. Donc, on n'a pas eu à sacrifier de service pour ça.

Mme Prass : O.K. Excellent. Parce...

M. Vallée Dore (Boromir) : ...des questions spécifiques à L'Interzone, Karine, elle a son parcours, son vécu, mais c'est sûr qu'elle possède moins le côté administratif, là.

Mme Prass : Bien, c'était juste pour démontrer. Parce qu'évidemment un élément qui est demandé des différents organismes, dans le cadre du projet de loi, c'est toute la question de la cohabitation. Je pense qu'on est tous d'accord pour dire : C'est le but... C'est le but auquel on voudrait arriver, qui est un sentiment de vie harmonieux dans nos coins. Mais il n'y a pas... pour l'instant, il n'y a pas d'engagement financier dans le projet de loi de la part du gouvernement pour que les organismes communautaires puissent développer ce plan de cohabitation ou mettre... mettre en œuvre des mesures d'atténuation. On sait que, déjà, les organismes communautaires, là, vous êtes sous-financés à votre mission. C'est souvent des appels de projets auxquels vous répondez pour avoir un certain financement pour mettre des projets de l'avant. Donc, j'imagine... et puis ça fait partie de vos recommandations également, que le gouvernement doit faire sa part justement, d'être présent, côté financier, pour tout ce qui est des mesures de cohabitation et d'atténuation. Je vous demande ça, puis évidemment, ça va varier selon l'organisme, mais selon vous, c'est des coûts qui peuvent représenter 5 %, 10 % du budget total qui ferait en sorte que... si le gouvernement n'est pas là pour accompagner de façon financière, que c'est de l'argent à la mission qui doit être amputé pour payer les services et plans qui sont... vous sont demandés par le gouvernement?

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, financement. C'est important de dire qu'actuellement, on l'a mentionné, la lutte à l'itinérance est financée par projets, par ententes trois ans, deux principales sources de financement, Vers un chez-soi, Plan d'action interministériel en itinérance. Dans ces deux enveloppes là, il n'y a pas possibilité de financer des actions qui touchent à la question de la cohabitation. Donc, ce n'est pas quelque chose qui est actuellement finançable et qui ne l'était pas par le passé.

Il faut faire attention pour dire combien ça coûterait, cette question-là de la cohabitation, pour les organismes. Parce que, ce qu'on vous dit, c'est que ce n'est pas la responsabilité des organismes. C'est une responsabilité collective. Donc, ce fardeau-là, on pense qu'il ne doit pas être imposé aux organismes. Toutefois, c'est important d'avoir des actions de cohabitation. Puis il doit y avoir aussi des moyens qui y sont arrimés, donc. Puis, c'est ça, il faut être capable de le financer. À quelle hauteur? Je ne le sais pas. Ça dépend aussi des besoins et des réalités. Donc, nous, évidemment, on met de l'avant un financement à la mission et du financement de ces actions collectives là, non portées seulement par les organismes communautaires.

Mme Prass : Puis, à la recherche d'emplacements pour SCES, est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir de l'accompagnement qui vous est offert de la part du CIUSSS, ou du CIUSSS local, ou de la part de la ville justement pour vous assurer que vous éviterez qu'une fois que l'emplacement est choisi, vous le soumettez à Santé Québec, que là, il y ait des préoccupations? Parce que, si le... depuis le début, vous êtes accompagnés dans ce processus-là, ça ferait en sorte que justement vous pourrez éviter des situations qui engendreraient des questions de la part de Santé Québec.

Mme Babeux (Karine) : Bien, nous, je crois que si vraiment le CIUSSS qui... tu sais, à la base, on est chapeautés par la SABSA. Mais, la SABSA, c'est le CIUSSS qui paie L'Interzone. C'est ce que je peux dire comme ça.

Une voix : ...

Mme Babeux (Karine) : C'est ça. C'est une enveloppe budgétaire, là, selon le CIUSSS, qui nous donne une subvention à la SABSA. Et, après, la SABSA détermine le choix pour L'Interzone.

M. Vallée Dore (Boromir) : Pour le lieu. Mais cette...

M. Vallée Dore (Boromir) : ...travail-là, on vient juste de le faire, là, dans Rôles et responsabilités des ministères et des municipalités. Ce qui est inscrit, c'est que les municipalités doivent participer à la recherche des sites pour de nouveaux projets, services ou déplacement de services existants. Donc, c'est déjà identifié, là, que c'est dans la... ça fait partie des responsabilités des municipalités.

Mme Guilhem (Marie-Edwige) : Et ça fait également partie de la responsabilité du ministère de la Santé et des Services sociaux, dédier des places aux personnes les plus désaffiliées, sous-entendu, quand même, qu'il faut apporter une aide et assurer à la population des soins de santé et des services sociaux de proximité également. Donc, s'il y a cette responsabilité là, sous-entendu que, là aussi, il faudrait du soutien par rapport à ça, oui.

Mme Prass : Également. Et j'imagine... Comme j'ai dit, on est tous préoccupés par la question de la cohabitation. Êtes-vous d'accord, par exemple, qu'il y ait des comités de bon... bon voisinage, excusez-moi, qui sont là de façon continue pour s'assurer... puis, justement, avec ce que le projet de loi propose... qu'à chaque quatre ans la demande se refasse pour la suite des choses? Est-ce que vous pensez que c'est une bonne idée? Évidemment, avec la collectivité, pas juste aux organismes communautaires, mais avec la police, les différents acteurs, que ce soient des comités qui soient là en continu, justement, pour s'assurer, tu sais, si jamais il y a une évaluation de... évolution de la situation, que vous êtes bien équipés pour répondre aux préoccupations qui pourraient... qui pourraient avoir lieu dans la population.

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, je réitère qu'on s'oppose à l'ensemble du projet de loi là, donc. Mais, par contre, pour ce qui est du... de la question de la cohabitation, il faudrait faire attention pour ne pas définir une recette qu'on veut qu'elle soit appliquée uniformément partout au Québec, donc le «one size fits all», parce qu'il y a dans des communautés, que des voisins, ils ne sentiront pas le besoin d'être sur un comité, d'autres, oui, des services de police qui ne seront pas disponibles à certains moments, d'autres, oui, tout dépendant des réalités. Donc, je pense qu'on peut proposer, soumettre des bonnes pratiques, mais de lier ça à une autorisation qu'on redonne aux quatre ans ce serait une erreur, là. Je pense que, dans le contexte de crise actuel, on s'enlèverait la capacité, là, de répondre aux besoins des personnes, là.

Mme Prass : Et vous mentionnez, dans votre mémoire, que les organismes pourraient être contraints de choisir entre offrir certains services ou ne pas exister du tout. Pouvez-vous expliquer en quoi les exigences du projet de loi viennent mettre en péril la liberté d'action des organismes communautaires?

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, en fait, ce qu'on nomme, c'est que le fardeau de preuve imposé à l'égard de l'acceptabilité sociale, dans le projet de loi, c'est basé sur une norme floue, arbitraire, imprévisible, qui, à toutes fins pratiques, annule la possibilité d'établir ou de maintenir un service de consommation supervisée sur les quatre ans. C'est une exigence d'accréditation. Bien, cette exigence d'accréditation, c'est disproportionné par rapport aux règles habituelles du droit administratif, dans le sens où on demande à des organisations de gérer les... l'acceptabilité sociale autour d'eux. On serait curieux de savoir quels autres... à quelles autres organisations qu'on demande l'équivalent de... pour avoir un permis pour opérer, là.

Mme Prass : Également, dans la... le projet de loi, on permettrait aux municipalités de restreindre des services selon les usagers et leur clientèle. Et je ne sais pas quelles ont été vos expériences avec les différentes villes avec lesquelles vous avez des projets qui ont cheminé, mais, jusqu'à présent, avez-vous trouvé que ça a été... ça a été un accompagnement ou une aide qui était utile, ou est-ce que vous avez trouvé qu'ils vous mettaient certaines entraves justement, pour la liberté de développer vos projets, à votre vision?

M. Vallée Dore (Boromir) : Est-ce qu'on parle des sites de consommation supervisée ou locaux accueillant des personnes...

Mme Prass : Les sites de consommation, oui.

M. Vallée Dore (Boromir) : Plus spécifiquement. Je n'aurais pas la réponse spécifique à cette question là pour les différentes expériences qui ont été faites, là, dans l'ensemble de la province. Toutefois, on est persuadés que les municipalités font partie de la réponse, dans le sens où ils ont des responsabilités, en lien avec l'itinérance, qui sont centrales, qui sont importantes, elles doivent être dans le dossier. Mais de dire qu'elles... si elles ont créé des freins, je ne pourrais pas répondre à cette question-là.

Mme Prass : O.K. C'est bon, merci.

Le Président (M. Provençal) : M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

• (17 h 30) •

M. Cliche-Rivard : Merci, M. le Président. D'abord, merci pour votre mémoire, merci aussi pour le travail que vous faites au quotidien pour les personnes en situation de grande vulnérabilité. Merci de ce que vous faites. J'aurais une première question, que j'ai posée à plusieurs autres groupes : Est-ce que vous, vous avez été consultés dans l'élaboration du projet de loi n° 103?

M. Vallée Dore (Boromir) : Non.

M. Cliche-Rivard : Non? Bon, question et réponse claire. J'ai en main...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Cliche-Rivard : ...puis c'est sorti il n'y a pas si longtemps, un rapport de la coroner Me Julie-Kim Godin sur le décès de M. Wilson à Montréal. Et une des recommandations... malheureusement, M. Godin... M. Wilson, pardon, est décédé d'une surdose. Dans les recommandations, c'est clair, hein, elle recommande à Santé Québec plusieurs choses, mais notamment la mise en place de davantage de centres de prévention de surdose à Montréal offrant des salles d'injection et d'inhalation supervisées 24/7 et la mise en place d'actions nouvelles pour faciliter l'implantation de centres de consommation supervisée et de lieux d'hébergement dotés d'espaces de consommation supervisée. Est-ce que vous pensez que le projet de loi n° 103 respecte les recommandations de la coroner?

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, en fait, nous, dans notre mémoire, on a mis de l'avant les recommandations de la coroner Stéphanie Gamache, qui vont dans le même sens pour à propos du décès de M. Raphaël André. Puis on a une section, là, complète, sur l'effritement des lieux disponibles pour ces personnes là, pour être habité, occuper l'espace. Donc, et on fait la conclusion, en fait, que le projet de loi s'éloigne, là, des recommandations de la coroner qui sont dans le même sens, là, que ce qui est proposé là, qui disait notamment de rendre plus pérennes les organismes communautaires, les lieux d'accueil, les refuges, donc là, on sent que ça vient les fragiliser, puis de multiplier ces lieux-là, en fait, là.

M. Cliche-Rivard : On parle de ça, puis je suis content que Mme Babeux soit avec nous, parce qu'on parle beaucoup de... des communautés visées, mais on les voit peu, on ne les voit pas, on les voit peu autour de cette table puis dans nos forums. Nous, ce qu'on constate, puis ce qu'on voit, puis c'est ce que vous voyez au RSIQ certain, c'est que ces organismes-là sauvent des vies au quotidien, là. Il y a véritablement des gens... Je voulais vous laisser peut-être la dernière minute, Mem Babeux. Est-ce que vous, vous avez des exemples ou des impacts directs de vies qui ont été sauvées grâce au travail des sites de consommation supervisée?

Mme Babeux (Karine) : Vous parlez de surdose?

M. Cliche-Rivard : Oui.

Mme Babeux (Karine) : Oui, on a sauvé... on les a tous sauvés. On a eu combien de surdoses, donc, depuis le début?

Une voix : ...

Mme Babeux (Karine) : Je n'ai pas de chiffres exacts, mais on les a vraiment tous sauvés. Je sais qu'il y a même des gens... juste le fait de venir puis... c'est con, là, mais de venir voir travailler, qui ont été sur le chemin du travail, parce que, tu sais, ils voyaient que même s'ils consommaient, tu n'es pas plus un minable parce que tu consommes, là, tu es capable d'aller travailler, là. Juste le fait de travailler, tu sais, il y a des gens en cravate qui consomment puis ils vont travailler eux autres aussi, là. Mais, tu sais, ils sont tellement brimés, ils n'ont pas d'endroit où rester, ils sont barrés partout, ils ont juste L'Interzone, mettons, pour venir dire un petit bonjour ou peu importe, ça aussi ça sauve des vies, là, je veux dire... Mais oui, on en a sauvé beaucoup.

M. Cliche-Rivard : Puis évidemment, là, merci.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Terrebonne, vous complétez cet échange, s'il vous plaît.

Mme Gentilcore : Merci. Merci pour votre présence, merci pour le témoignage. C'est vraiment très éclairant, très pertinent. Question simple : Est-ce que vous l'aviez vu venir, ce projet de loi là?

Mme Babeux (Karine) : Mais moi, non, parce que je ne suis pas au courant des lois.

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, pour notre part, c'est quelque chose qui se discutait depuis un moment, là, à l'Assemblée nationale, donc là, qui a... tombé en projet de loi...

Mme Gentilcore : Mais avant ce moment-là, avant que l'Assemblée nationale en parle, est-ce que vous, vous l'aviez vu venir? En fait, le sens de ma question, c'est quel était l'état des relations entre les organismes et le ministère qui se dit pourtant, tu sais, vouloir être dans la collaboration, puis être dans l'ouverture, puis être dans la médiation? Comment ce le projet de loi, là, peut arriver comme ça, sans que vous soyez vraiment au courant? Est-ce que ça vient justement de l'état de la relation entre les organismes et le ministère? Puis... Parce que vous n'avez pas été consulté de ce qu'on a appris, là?

M. Vallée Dore (Boromir) : Non.

Mme Gentilcore : Donc, c'est ça, le sens de ma question.

M. Vallée Dore (Boromir) : Bien, en fait, bien, nous, ça va faire deux fois qu'on vient en commission parlementaire en un an. La première, c'était à la réforme de l'aide sociale. Il faut savoir que l'itinérance prend racine dans la pauvreté. Donc, on a fait des recommandations pour que l'aide sociale réduise la courbe de l'itinérance, donc donne plus de moyens aux gens. Ce qui n'a pas été le cas au final. Donc là, tu sais, c'était la première fois qu'on est allé à la commission parlementaire en un an.

Cette fois-ci, on revient, mais cette fois-ci dans une visée de réduire la capacité des sites d'injection supervisée de faire leur travail. Donc, nous, ça nous ébranle un peu en contexte de crise que le gouvernement légifère deux fois en allant à l'encontre de nous donner des capacités de renverser la tendance en itinérance.

Mme Gentilcore : Oui. Puis donc, vos membres, est-ce qu'ils ont été étonnés de voir que l'Assemblée nationale parle de ce projet de loi là? Et qu'est-ce qu'il aurait aimé, en fait, dans... Parce...

Mme Gentilcore : ...je pense qu'on s'entend sur le fait qu'il faut encadrer, qu'il faut être dans la cohabitation. Qu'est-ce que votre organisme aurait aimé?

M. Vallée Dore (Boromir) : Je ne sais pas si on s'entend sur le fait qu'il faut encadrer, mais je pense qu'on s'entend sur le fait qu'il faut qu'on se donne des capacités collectives pour dire : Oui, on a des enjeux de cohabitation à certains égards. Qu'est-ce qu'on fait ensemble pour se sortir de ce noeud-là? Qui peut prendre des responsabilités? Qui peut faire quoi? C'est quoi, les bonnes pratiques? Qu'est-ce qui fonctionne? Donc, c'est le type de discussion qu'on aurait voulu avoir, là, entourant les pratiques de cohabitation. Puis d'ailleurs on est très disponibles, là, pour ce type d'échange là. M. Carmant, il le sait aussi. Donc, je pense qu'on a un travail collectif à faire à ce niveau-là. Puis les membres sont d'accord, par l'entremise de sondages, là, qu'on a pu aller chercher.

Mme Guilhelm (Marie-Edwige) : ...quand ils ont entendu parler du projet de loi la première fois, les réactions qu'ils ont eues, c'était une insécurité par rapport à l'incertitude qu'amène le projet de loi, par rapport au délai de quatre ans. Ils ont aussi nommé une incompréhension par rapport à la lourdeur administrative en disant qu'ils ont déjà énormément de dossiers à remplir, que ça leur en rajoute un, qu'ils n'ont pas de soutien par rapport à ça, pas de financement non plus. C'était vraiment une colère. La cohabitation, oui, ils le nomment tous. Ils y travaillent déjà pour, mais pas de cette manière-là, pas en encadrant, pas de manière aussi stricte non plus. C'était de là que venait l'incompréhension.

Mme Gentilcore : Une dernière petite question. 34 000 visites par année, ce que vous disiez. Vous êtes combien dans l'équipe d'Interzone?

Mme Babeux (Karine) : On n'est pas beaucoup.

Mme Gentilcore : À peu près, là.

Mme Babeux (Karine) : On est une douzaine, environ.

Mme Gentilcore : Vous êtes ouverts sept jours sur sept, j'imagine.

Mme Babeux (Karine) : Oui, de 9 heures à 1 heure du matin.

Mme Gentilcore : O.K. Puis les gardes de sécurité qui sont là, est-ce que c'est de manière permanente?

Mme Babeux (Karine) : Oui, ils sont permanents eux autres aussi.

Mme Gentilcore : Puis qu'est-ce qu'ils permettent de dénouer comme problèmes?

Mme Babeux (Karine) : Plus, tu sais... Bien, on s'entend que, des fois, avec la consommation, des fois, nous, tu sais, on est plus des femmes aussi. Tu sais, les tensions viennent, survoltées. Donc, ils sont là pour assurer notre sécurité et même la sécurité aussi des consommateurs, là.

Mme Gentilcore : Parfait. Merci.

Mme Guilhelm (Marie-Edwige) : Juste rappeler aussi, quand même, là, ce matin, j'ai visité un projet... un projet, bien, un résultat, pardon, de recherche de l'INSPQ qui a rappelé qu'il n'y a jamais eu de décès par surdose dans un service de consommation supervisée. Juste le rappeler.

Le Président (M. Provençal) : Merci de cette précision.

Alors, je remercie les représentants du Réseau Solidarité Itinérance du Québec pour leur participation à nos travaux.

Sur ce, je suspends les travaux jusqu'à 18 h 40, où nous terminerons nos consultations d'aujourd'hui. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 39)


 
 

18 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 18 h 43)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons poursuivre nos travaux ce soir. La Commission de la santé et services sociaux reprend ses travaux.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 103, Loi visant principalement à réglementer des sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté.

Ce soir, nous entendrons les témoins suivants : le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal et M. Michael MacKenzie.

Comme... Je demande le consentement pour aller au-delà de l'heure prévue, quelques minutes seulement, considérant qu'on n'a pas commencé directement à l'heure. Ça va?

Alors, ça me permet de saluer maintenant les représentants du Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes, c'est-à-dire Mme Annie-Andrée Savage, directrice, et M. Martin Pagé, membre, RAPSIM, et directeur de l'organisme Dopamine. Alors, je vous donne 10 minutes pour votre présentation. Et on poursuit par la suite avec les échanges. Je vous cède la parole immédiatement.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Bonsoir, M. le Président, membres de la commission. Je m'appelle Annie Savage. À titre de directrice du RAPSIM, merci de me donner la parole.

M. Pagé (Martin) : Bonsoir. Mon nom est Martin Pagé. Je suis également reconnaissant de pouvoir participer aux travaux sur le p.l. 103. J'interviens aujourd'hui auprès de vous à titre de directeur général de l'organisme communautaire Dopamine, qui est un fier membre du RAPSIM. Notre organisme oeuvre auprès des personnes qui consomment des drogues depuis les 30 dernières années dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, à Montréal, où il est solidement implanté. L'organisme travaille avec une approche de réduction des méfaits, appuyée par les meilleures données probantes qui ont largement démontré dans plusieurs études les nombreux impacts positifs de ces services sur la santé des personnes et de la communauté en général.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Les organismes communautaires en itinérance, vous le savez, apportent au quotidien un soutien à celles et ceux qui vivent des situations de grande vulnérabilité. Ces groupes veillent à tisser autour et avec elles un filet social souvent très effrité et, dans certains cas, absent.

De notre contribution, ce soir, on voudrait que vous reteniez quatre messages.

M. Pagé (Martin) : Notre premier message : les sites de consommation supervisée sauvent des vies. Ce sont maintenant des services essentiels. Ils ont accueilli plus de 143 000 visiteurs et renversé plus de 3 500 surdoses depuis l'ouverture des sites à Montréal en 2017. Ce ne sont pas des chiffres abstraits. Ce sont des vies sauvées, des visages, des histoires et des familles. Je pense que ça vaut la peine aussi de souligner qu'à ce jour aucun décès n'a été constaté dans un SIS, non seulement à Montréal, mais également au Québec et partout ailleurs au Canada.

Je veux porter à votre attention l'histoire de M. Otabie Wilson, qui avait 40 ans au moment où sa vie s'est éteinte. C'était en septembre dernier, dans l'anonymat d'une rue du quartier Saint-Henri, hors des heures d'ouverture de Benoit Larbre. Le rapport de la coroner informe qu'il est mort seul d'une sorte accidentelle causée par des substances...

M. Pagé (Martin) : ...contaminé. Il n'était pas suivi, pas hébergé, pas soutenu. Pourtant, il était tout près d'une pharmacie. Malheureusement, c'est une situation beaucoup trop fréquente. La plupart des décès par surdose, comme celui de M. Wilson, sont évitables.

Les recommandations du rapport de la coroner sont claires : consolider et rehausser les services de consommation supervisée, consolider et rehausser le continuum d'hébergement, déstigmatiser les personnes utilisatrices de drogues, sensibiliser la population générale pour prévenir les surdoses. Le projet de loi n° 103 complique l'implication et le maintien des SCS, aurait pour effet direct de réduire leur accessibilité dans les quartiers où les besoins sont les plus criants. Il risque d'accroître les surdoses mortelles, en forçant les gens à consommer dans l'ombre. Les personnes qui meurent de cette crise sociale et sanitaire sans précédent en ce moment doivent être vues et reconnues comme des personnes, des familles, des adolescents, des aînés, bref, comme des citoyens, et non comme de simples statistiques annuelles.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Notre deuxième message, c'est que la cohabitation harmonieuse ne peut pas être assurée au détriment de la vie des personnes les plus vulnérables. Le projet de loi impose présentement une distance minimale de 150 mètres entre un SCS et une école ou un CPE. À Montréal, avec la densité urbaine, c'est tout simplement irréaliste. Les déplacements des personnes, les déplacements des ressources ne favorisent pas la cohabitation, ils l'aggravent. Loin d'encadrer la consommation, on la repousse vers des lieux non supervisés, des ruelles, des parcs, des cours d'école. On met donc à risque les personnes qui consomment, on augmente le stress des parents, le sentiment d'insécurité dans le quartier. Donc, la cohabitation harmonieuse ne se fait pas en cachant la pauvreté et la détresse, qui ne cessent de s'accroître. On doit, par contre, la reconnaître, cette détresse, et y répondre avec pragmatisme, avec diligence.

Le projet de loi met la responsabilité d'une cohabitation harmonieuse sur les épaules des groupes communautaires. Pourtant, ceux-ci déploient déjà des efforts constants. À CACTUS Montréal, par exemple, il y a un comité mensuel qui rassemble des citoyens, la ville, la police, la santé publique pour assurer le dialogue. À Spectre de rue, à la Maison Benoît Labre, des intervenants assurent une présence aux abords des écoles pour prévenir les tensions. Ces mesures-là fonctionnent. Ce qui crée les tensions, ce n'est pas la présence d'un site, c'est le manque de sites. C'est quand 40 personnes font la file dehors, par manque de places. C'est quand une personne qui aurait besoin de soins de santé adaptés n'a que l'organisme communautaire comme point d'ancrage. Augmenter les ressources, ce serait donc améliorer à la fois la cohabitation et assurer le droit à la vie et à la dignité des personnes. Les diminuer va faire l'effet inverse.

M. Pagé (Martin) : Troisième message, le projet de loi alourdit inutilement le processus et fragilise nos organisations. Avec les dispositions présentées du p.l. n° 103, les organismes devront renouveler leur autorisation tous les quatre ans, répondre à des normes floues et variables, et faire face à l'incertitude réglementaire et financière. Ce fardeau administratif détourne des ressources humaines et financières qui devraient pourtant être investies dans l'accompagnement, dans les soins adaptés et de proximité, dans la création de liens et dans la protection de la vie humaine. Ce pouvoir discrétionnaire du ministre crée un climat d'instabilité pour l'ensemble des organisations oeuvrant auprès des personnes en situation d'itinérance, en plus de décourager le développement de nouvelles réponses par le milieu communautaire, ce qui est pourtant, plus que jamais, nécessaire, vous l'avez vous-même dit ce matin.

• (18 h 50) •

Cette menace de nous faire retirer nos autorisations peut conduire à une rupture de services, et donc, de nos liens avec les personnes, liens qui mettent parfois plusieurs mois, voire des années à se créer. Nos organismes sont déjà assujettis aux critères d'exemption rigoureux élaborés par Santé Canada. Pour exploiter un SCS, il est nécessaire d'obtenir une exemption en vertu de l'article 56.1 sur les lois sur les drogues. Les demandes comprennent des consultations menées auprès d'un large éventail d'intervenants au sein de la collectivité. Chaque site est examiné au cas par cas, d'après son bien-fondé et ses impacts dans la communauté, bref, il regarde les demandes en matière de sécurité publique et de santé publique. Avec le p.l. n° 103, Santé Québec dédoublera le travail bureaucratique déjà effectué par Santé Canada.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Et, quatrième message, le projet de loi empiète sur l'autonomie de l'action communautaire. En imposant des conditions opérationnelles qui sont discrétionnaires, administrées par voie réglementaire, le p.l. n° 103...

Mme Savage (Annie-Andrée) : ...réduit les organismes à de simples exécutants des politiques gouvernementales. C'est contraire à la politique de reconnaissance de l'action communautaire du gouvernement lui-même, qui affirme que les organismes doivent pouvoir déterminer librement leurs orientations et leurs approches. En étendant ces contraintes à tous locaux accueillant principalement des personnes en situation d'itinérance, ce projet touche des centaines d'organismes à Montréal seulement. Cafétérias, des centres de jour, des maisons d'hébergement, du logement communautaire avec du soutien pourraient tous être assujettis à ces exigences.

On est bien au fait des tensions sociales actuelles, des inquiétudes des citoyens logés. On comprend ces inquiétudes, on est des parents nous-mêmes. On comprend aussi la volonté du gouvernement d'agir sur ces inquiétudes. Mais ce projet de loi aura des effets contraires à ceux souhaités, en plus de nuire aux personnes les plus marginalisées. On vous invite donc à faire un choix courageux, qui comprend que les solutions efficaces passent par le soutien, la réduction des méfaits, l'éducation, pas par la réglementation.

On demande donc le retrait du p.l. n° 103. On demande une reconnaissance formelle des SCS comme des services de santé essentiels, qui sauvent des vies, tel que la Cour suprême du Canada l'a fait, en 2011, dans un jugement unanime, qui fait toujours jurisprudence. On demande un financement stable, et sans conditions restrictives, pour les organismes. On demande une réaffirmation que la cohabitation sociale est une responsabilité partagée, tel que le reconnaît la politique nationale en itinérance. On demande un respect de la politique de reconnaissance de l'action communautaire. Et, finalement, on demande une réelle concertation avec les personnes concernées, les milieux communautaires, la ville de Montréal, la santé publique pour co-construire, ensemble, les solutions.

Les SCS ne doivent pas être vus comme un problème à encadrer. Au contraire, ils sont une réponse humaine et efficace à une crise de santé publique majeure. Il nous manque les outils pour agir à la hauteur de l'urgence. Nous avons les connaissances, il faut maintenant la volonté politique. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour cette présentation. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole pour débuter cet échange.

M. Carmant : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup à vous deux pour la présentation. On est à un moment où c'est vraiment difficile pour nous d'ajouter des ressources pour la population itinérante toxicomane. Comment envoyer un message à la population que les ressources qui vont être développées vont être... vont le faire... vont être... vont être... vont se développer dans une... de façon sécuritaire? C'est ça qu'on essaie d'envoyer comme message à la population. Puis moi, je vous dirais que le plus bel exemple, c'est qu'on essaie d'ouvrir des... même, de l'hébergement supervisé, et il y a une fin de non-recevoir, pour laquelle, moi-même, je dois aller intervenir auprès des comités citoyens. C'est ça, l'enjeu profond, là, que l'on a actuellement. Comment y répondre, ce n'est pas en se disant qu'il y a des règles claires, qui vont être suivies par tout le monde, et que tout va bien aller.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Je pense qu'on en a parlé un peu hein, l'éducation, je pense que c'est la clé. La sensibilisation fait partie du travail que les organismes communautaires font aussi à travers leur mission. Maintenant, c'est un travail qui se fait tous ensemble aussi, ça... L'éducation, la sensibilisation, je pense que ça pourrait être fait, de la part de votre gouvernement, de manière beaucoup plus forte.

Je pense qu'on va rentrer dans des années qui ne seront pas faciles, qui vont être confrontantes au quotidien. On va tous avoir nos quotidiens impactés par la présence des personnes en détresse dans l'espace public. Ça va être une réalité à laquelle, malheureusement, on va tous être confrontés, et ça va se faire de longue haleine. Souvent, en itinérance, on cherche des solutions rapides. C'est un travail à long terme que les groupes font depuis des années, des décennies. Il y a une expertise qui s'est développée en matière de sensibilisation, mais on ne peut pas faire ça tout seul, ça, c'est certain.

M. Pagé (Martin) : Et on comprend les préoccupations et les inquiétudes. On fait face à des crises sans précédent. Il faut, je pense, d'abord, reconnaître la situation, les crises. On fait face à des décennies de désinvestissements en santé mentale, en...

M. Pagé (Martin) : ...et ces décennies de désinvestissement là nous rattrapent en ce moment tous, je pense. Et je suis convaincu de la bonne volonté de tout le monde, sauf qu'il va falloir mettre les bouchées doubles si on veut réussir à atteindre les objectifs de tout le monde, y compris les gens qui sont les plus vulnérables en ce moment, et ce sont les gens qui perdent la vie, les gens qui meurent à chaque jour, à chaque semaine. La crise des surdoses au Canada a fait plus de 60 000 morts. C'est beaucoup plus que la COVID n'a fait, et donc il faut mesurer et mettre des efforts à la hauteur de cette crise-là, selon moi.

M. Carmant : Puis paradoxalement, là, bien qu'aucun des groupes n'a dit ça aujourd'hui, là, puis je m'en rends bien compte, là, un des efforts que l'on fait dans ce sens-là, c'est en passant par Santé Québec. Loin de... diminuer l'autonomie puisque, de toute façon, il y a des demandes qui se font à ce... au fédéral, à Santé Canada, mais ce que ça vient s'assurer, c'est que tous les besoins des organismes et des municipalités dans la gestion de cette cohabitation-là vont être répondus. Puis on s'entend tous que la Direction régionale de la santé publique a tous les pouvoirs pour mobiliser tous les acteurs, pour s'assurer que cette cohabitation soit bien faite. Jusqu'à présent, cependant, plusieurs de mes demandes ont été, tu sais, répondues par des non. Et, encore une fois, on a dû initier nous-mêmes des initiatives avec les établissements locaux.

Donc, moi, je pense que... je suis tout à fait d'accord avec vous qu'il ne faut pas que le poids soit sur les organismes communautaires, puis on va s'assurer, avec les juristes, là, de clarifier le texte, mais êtes-vous ouverts à ce, tu sais, les...  tout ce travail-là se fasse en amont et de façon structurée? C'est ça que... c'est ça, notre demande, en fait.

Mme Savage (Annie-Andrée) : En fait, les groupes sont plus couverts, puis même, si on prenait l'exemple de Benoit Labre, pour avoir suivi chacune des étapes de développement de ce projet-là, bien en amont de l'ouverture, il y a eu énormément de travail de fait. Ouvrir un projet comme Benoit Labre, c'est cinq, sept ans de travail avant l'ouverture.

Donc, les groupes en général sont tous conscients de ce travail qu'il y a à faire. Ils exercent leur mission dans leur communauté, ils connaissent les besoins. La plupart du temps, ils sont très en lien avec les partenaires sur différentes tables de concertation, les écoles, les CPE, mais c'est sûr que cette cohabitation harmonieuse là, non seulement elle ne peut pas reposer juste sur les épaules du groupe communautaire, mais elle peut aller super bien, cette cohabitation-là et, pour un contexte x, y, z, tout d'un coup, ça se met à mal aller. Des fois, il y a un développement immobilier, il y a des déplacements de population, il y a des nouvelles dynamiques qui prend racine dans la communauté et là, tout d'un coup, ça se met à mal aller. Ça ne peut pas être le groupe communautaire qui en paie les frais, parce que, là, médiatiquement, on s'empare de certaines situations.

Tu sais, nous, on n'est pas là pour se dire qu'il n'y a pas de problème, on les constate au quotidien, les enjeux de cohabitation sociale. Parfois, par contre, ça prend une grande ampleur, et on sent que ça vient jouer un peu sur ce projet de loi là, en fait, qui est très rattaché à tout le bruit que ça peut faire dans un contexte où l'itinérance fait face à beaucoup de soulèvements, du « pas dans ma cour ». Mais il y a d'autres éléments aussi qui font... qui amènent un sentiment d'insécurité dans l'espace public. Les groupes communautaires ne peuvent pas tout porter.

• (19 heures) •

M. Pagé (Martin) : Nos groupes font déjà beaucoup avec peu. Nous avons fait... bien avant même le terme de « cohabitation », nous avons toujours communiqué ou tenté de communiquer avec nos voisins, avec nos commerçants. Nous faisons nos efforts, nous faisons des portes ouvertes annuellement, nous faisons des collectes de seringues dans l'environnement depuis des décennies. Maintenant, on ne peut pas tout prendre le fardeau. Je suis content de vous entendre là-dessus aussi. On est des acteurs de notre communauté, on n'est pas responsable de tout, comme je vous dis, le désarroi et les décennies de désinvestissement. On ne peut pas porter ça seuls, aussi, et nous avons besoin d'aide pour participer dans cette cohabitation...


 
 

19 h (version non révisée)

M. Pagé (Martin) : ...parce qu'en ce moment le financement qu'il nous est octroyé est... on en est reconnaissant, de ce qu'on a présentement, mais sert à donner des services aux... donner des services à notre communauté qui en ont besoin. Nous sommes là 365 jours par année. On ne ferme jamais. Alors, les efforts de notre financement vont, à la majeure partie, à ça. On nous demande en plus d'aller frapper aux portes, de faire des consultations citoyennes et tout ça. À un moment donné, iI ne faut pas nous demander l'impossible. Nous avons besoin d'aide, nous avons besoin des réponses diversifiées, et les groupes communautaires ne peuvent pas tout porter.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Surtout si le financement ne peut pas être garanti à plus moyen long terme. C'est sûr qu'avec une enveloppe par projet qui te permet d'embaucher un intervenant à temps plein et que tu n'es pas capable de garantir ce poste-là dans le temps, ça reste difficile de développer des réponses aussi importantes, essentielles, qui répondent souvent à des besoins de base, alors qu'on n'est pas capables de garantir la capacité de l'organisme à financer ce poste-là. C'est beaucoup d'énergie mettre en place ce type de mesures. Les groupes sont prêts à le faire, mais dans des conditions qui permettent de le faire adéquatement et de faire... de maintenir dans le temps ces réponses-là qu'on met en place.

M. Carmant : Il faut comprendre que ça fait partie d'un plan d'action qu'on a beaucoup bonifié, là. Tu sais, moi, je n'aime pas tellement les chiffres, mais on est passés de 5 millions de dollars récurrents, pour l'itinérance au Québec, à 100 millions de dollars par année, là. Tu sais, on a fait un effort massif pour répondre. Puis je sais qu'il y a encore des besoins, j'en suis bien conscient. Puis je pense que cette partie-là, bien, il va falloir qu'on la regarde. Puis je pense que c'est la... De passer par les centres de consommation supervisée, c'est... je pense, c'est un premier pas qui pourrait nous aider. Moi, j'adore le modèle de dopamine, là. M. Pagé, comment ça se passe pour vous puis, tu sais, comme...

M. Pagé (Martin) : Comme vous l'avez nommé aujourd'hui, je vous ai écouté, là, j'ai écouté la commission toute la journée, et, oui, c'est un modèle qui peut fonctionner, ça fonctionne pour nous dans Hochelaga. J'invite cependant la commission et vous à ne pas toujours donner une réponse pour toute la diversité des réalités dans différentes communautés du Québec. Je ne pense pas que le modèle peut complètement s'étendre à 100 %. On parlait de centres d'inhalation, d'ajouter des centres d'inhalation. Imaginez-vous, avec la réglementation dans les établissements de Santé Québec, de pouvoir fumer du fentanyl et du crystal meth. Donc, il y a une complexité dans certains projets qui méritent d'être regardés. Et je suis très content d'être, depuis 1999... Dopamine, aidant le CLSC de Maisonneuve, donc, bien avant les services de consommation supervisée, c'est une union qui a été très bénéfique pour notre communauté. Mais j'invite également à ne pas... à s'en aller dans une prescription comme si c'était un modèle. C'est un des modèles qui peut fonctionner. Et je nous invite à réfléchir à d'autres modèles afin de pouvoir être agiles dans nos communautés, et répondre, et sauver des vies.

M. Carmant : O.K. Une chose qu'on n'a pas parlé beaucoup aujourd'hui, là, c'est aussi... je pense, je l'ai mentionné dans mon discours d'ouverture, c'est... des fois, j'ai l'impression qu'il y a une équipe qui fait la réduction des méfaits puis une autre équipe qui fait le traitement de l'aspect thérapeutique. Puis un début aussi du projet de loi, c'est de travailler plus intense tout le monde ensemble. Et d'ailleurs on veut faire un comité trajectoire. On va avoir un premier projet pilote qui va s'établir à Montréal, qui va inclure du logement supervisé pour les... avec Spectre de rue. On va inclure également les refuges. Comment vous voyez ça de votre côté, les collaborations, là, dans le réseau de la santé entre les différents groupes?

M. Pagé (Martin) : On attend que ça depuis des années. Et ça se fait, ça se fait à différentes échelles. Nous, avec notre CIUSSS, on est en constante communication. On essaie de créer des choses. Dopamine a sa propre clinique médicale, mais qu'on tient à bout de bras, qu'on n'a pas d'aide pour soutenir cette clinique-là. On a trois médecins, une infirmière, une paire aidante, et on tient ça à bout de bras les mardis. On doit regarder, encore une fois, des modèles et non pas tomber dans un modèle unique, mais plutôt regarder les différentes façons...

M. Pagé (Martin) : ...d'intervenir et offrir une trajectoire de soins, de traitement adéquat, qui répond aussi aux besoins des personnes qui consomment des drogues aussi. Donc, c'est plus que souhaité. Le monde demande ça depuis très longtemps. Sauf que les... force est d'admettre que les ressources actuelles en dépendances ne sont pas toutes adaptés aux réalités des personnes. On doit regarder et être... offrir des alternatives, et plusieurs alternatives, pas seulement une, pas seulement un modèle, selon moi.

Mme Savage (Annie-Andrée) : Oui, puis je vous ai entendu parler d'investissements, vous avez tout à fait raison. On fait partie de ceux qui reconnaissent qu'il n'y a jamais eu autant d'argent investi en matière d'itinérance. Il n'y a jamais eu, par contre, une réalité aussi frontale, aussi intense, et on aurait tout l'argent du monde, le milieu communautaire avec les meilleures pratiques, la meilleure collaboration possible, ce n'est pas le milieu communautaire qui va régler la question de l'itinérance. Je pense qu'il faut penser en profondeur. Et nous, on est là, le milieu communautaire, on va rester là, on travaille idéalement en prévention, hein, puis on souhaiterait voir des investissements en amont, qui va venir agir sur les causes profondes, systémiques de l'itinérance. On aurait beau avoir toutes les places du monde en hébergement, en logement transitoire, parce que parfois ça répond aux besoins, si on n'a pas de logement permanent, social et communautaire avec un soutien à plus ou moins intensité... si on n'a pas ce logement-là à offrir aux personnes, on ne peut pas améliorer la situation. Si les personnes n'ont pas accès à un revenu décent pour pouvoir subvenir à leurs besoins de base, on travaille dans le vide, si les personnes n'ont pas accès à des soins de santé de proximité, adaptés, exempts de stigmatisation, on travaille dans le vide. Donc, on a besoin aussi de réponses fortes, profondes, systémiques. Et ça, malheureusement, ce n'est pas le milieu communautaire qui peut sortir ça de sa poche.

M. Carmant : M. le Président, je passerais la parole.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Louis-Riel, il vous reste 1min 30s.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président. M. Pagé, Mme Savage je vais me permettre de vous appeler Martin et Annie, puisqu'on se connaît bien. La balle au bond sur ce que notre ministre a dit, sur les investissements qui sont hors du commun depuis tout gouvernement, justement pour répondre à l'amalgame de toutes les crises.

Puis, en même temps, vous aussi, votre travail, tout ce que vous faites depuis des années... je salue tout ce que vous faites depuis des années. L'expertise, effectivement, a été développée et vous êtes là sans relâche, Martin, comme tu l'as dit, sept jours sur sept. Évidemment, vous avez... vous nous dites aujourd'hui qu'on ne peut pas prendre un seul modèle, qu'il faut, finalement, regarder chaque dossier dans ses particularités, dans sa complexité, mais est-ce qu'il y a quand même des conditions, qu'on pourrait dire, qui sont réunies d'un dossier à l'autre pour qu'on puisse dire : Bien, voici les conditions de succès pour une meilleure intégration dans un quartier donné?

Mme Savage (Annie-Andrée) : Les conditions de succès pour l'implantation d'une ressource, un SCS en particulier? Je n'aime pas, moi, qu'on trace une ligne bien fine entre les SCS et le milieu de l'itinérance. J'ai entendu des interventions qui disaient que c'étaient des amalgames. Je ne suis pas certaine qu'on se questionne au bon endroit. D'ailleurs, les SCS à Montréal... les personnes qui fréquentent les SCS, il y a autour de 80 % je pense, des personnes qui sont en situation d'itinérance. On peut même se demander qu'est-ce qui dérange vraiment. Est-ce que c'est le fait de voir des personnes en détresse dans l'espace public, en état de consommation, est-ce que c'est la question de la consommation? Bref, pour l'implantation d'une ressource qui... d'abord, il faut que cette ressource-là réponde aux besoins de la communauté. Et c'est là où, parfois, nous on craint, quand on dit : Il faut vraiment préserver l'autonomie des groupes. Les groupes communautaires sont les mieux placés pour connaître les besoins des communautés avec lesquelles ils travaillent, pour faire remonter ces besoins-là.

• (19 h 10) •

Et habituellement, quand un groupe se lance dans un projet, ce qui est difficile et parmi les conditions du succès, ce serait d'avoir accès à un programme de financement qui est à la mission et qui permet de financer l'intégralité des programmes à l'intérieur de cette réponse-là. Ce qui est difficile pour un groupe, c'est de se dire... de se projeter dans cinq ans, de penser à la cohabitation sociale quand tu n'es même pas sûr d'avoir tes permis pour pouvoir... quand tu n'es même pas sûr d'avoir la portion du FAC qui va te permettre de développer la brique, quand tu développes la brique, mais que tu n'es même pas sûr de pouvoir faire financer ton soutien nécessaire...

Mme Savage (Annie-Andrée) : …dans ton projet de logement ou d'hébergement. C'est vraiment des… Tu sais, quand on dit : On travaille en silo, bien, les financements sont morcelés aussi et c'est impossible de demander à un groupe communautaire de déjà parler de plan de cohabitation harmonieuse quand on… il ne le sait même pas si dans cinq ans son projet va voir le jour. Donc, une des conditions importantes, c'est d'asseoir toutes ces personnes responsables de chacune de ces enveloppes-là et de voir un projet dans son… de e manière holistique dans son ensemble et de pouvoir programmer un financement à la hauteur des besoins.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup. Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Vous avez mentionné tantôt que chez Cactus… puis j'avais parlé à des membres de Cactus il y a quelques mois qui disaient qu'avant qu'ils soient implantés, eux, ils ont fait un travail dans la communauté justement en amont pour aller les faire… bien, pour faire de… pour se faire connaître, pour rassurer les gens de la communauté. Et là, vous avez mentionné qu'ils font un comité mensuel justement avec tous les différents partenaires.

Donc, deux questions. Premièrement, je comprends que même avant que vous dites que l'expression « cohabitation sociale » soit un terme, vous étiez bien conscient des réalités, qu'il fallait justement rassurer, disons, les gens du quartier pour avoir une bonne relation. Donc, qu'est-ce qui diffère entre le travail que vous faisiez déjà de votre propre volonté pour s'assurer justement qu'il y ait une cohabitation… Qu'est-ce qui diffère avec ce que vous avez fait ou l'approche que vous avez prise et ce qui vous est demandé dans le cadre de ce projet de loi, qui est de présenter un plan de cohabitation, par exemple?

M. Pagé (Martin) : Bien, en fait, c'est… la différence est plutôt… tu sais, premièrement, on a une réalité sociale et sanitaire beaucoup différente qu'à l'époque en 2017. Nos équipes sont débordées au quotidien et la différence, c'est dans les exigences d'un plan de cohabitation, alors que quand on a fait les tournées en 2017, entre autres dans l'ouverture des SCS, c'était d'aller discuter avec les personnes de l'arrivée et non pas de demander si c'était correct ou pas. C'était d'aller vers nos voisins, voisines et de discuter de l'arrivée des… des programmes d'injection supervisée. C'était dans le cadre beaucoup plus de cohésion, je disais, de communauté et que de demandes ou d'exigences de plans de cohabitation en tant que tels, et etc. Donc, la différence, elle se situe un peu là, là, dans la façon dont on est tenu… on serait tenu, du moins, par le projet de loi, de faire ce fameux plan de cohabitation là, là.

Mme Prass : Donc, vous… (Interruption) Excusez-moi, vous voyez une distinction avec ce qui vous est demandé, qui remet la responsabilité sur vous d'aller chercher cette acceptabilité sociale plutôt que de démontrer que… (Interruption) excusez-moi, des efforts ont été déployés dans la communauté avec les différents partenaires pour avoir ces conversations-là, pour rassurer les citoyens, Etc. Donc, pour vous, c'est vraiment… vous avez une mission dans le plan de cohabitation qui vous est demandé de la part du gouvernement, et c'est d'aller chercher cette acceptabilité sociale selon votre compréhension.

Mme Savage (Annie-Andrée) : J'aime… j'aime que vous souligniez la question de l'acceptabilité sociale. J'ai l'impression que là, on est à mi-chemin entre on souhaite instaurer une cohabitation harmonieuse, mais dans un contexte où il y a un manque d'acceptabilité sociale. Et c'est là où c'est énormément de pression à mettre sur les épaules des groupes. Le jour où il y aura une forme d'acceptabilité sociale, un consensus fort, qu'il faut des réponses, la cohabitation sociale, moi, j'ai confiance aux communautés, à l'expertise des différents partenaires, les comités, la cohabitation sociale, ça va bien aller. Mais là, on a besoin de vous aussi pour traverser ce moment-là où l'acceptabilité sociale n'est pas au rendez-vous. Et si on politise en quelque sorte la question de l'itinérance dans un contexte où il y a un manque d'acceptabilité sociale, c'est là où ça fait beaucoup de pression sur les groupes communautaires.

Mme Prass : Et quand vous dites… vous avez dit tantôt qu'il y aurait des effets contraires à ce que ce qui est souhaité avec ce projet de loi. Pouvez-vous élaborer dans ce sens-là? Comment est-ce que vous voyez, bien, c'est ça, qu'il y aurait l'effet contraire…

Mme Savage (Annie-Andrée) : ...en fait, quand on vous disait... Souvent, ce qui fait qu'il y a des enjeux de partage d'espaces publics puis il y a une crainte des voisins, un sentiment d'insécurité impacté, c'est souvent parce que le groupe communautaire qui exploite une ressource, qui opère une ressource est l'unique ressource sur le territoire, et donc il y a une grosse affluence autour de la ressource, la ressource n'est pas en mesure de répondre à l'ensemble des besoins.

Donc, nous, ce qu'on vous dit, c'est : Plus il va y avoir de ressources bien réparties sur le territoire en fonction des besoins des communautés, plus ça va être gagnant en termes de cohabitation harmonieuse et plus on va repousser les gens, les déplacer, plus ça va créer de la pression dans les lieux où ils se déplacent. Donc, on n'a pas le choix, comme société, de reconnaître qu'il y a un besoin. Puis on l'a entendu, M. Carmant. C'est bien, on le... Il faut aller plus loin. Il faut mettre les actions, il faut qu'il y ait des changements majeurs et profonds et... oui.

Mme Prass : Un petit peu dans la même lignée, vous mentionnez dans votre mémoire, vous dites : Il est clair qu'un cadre de contrôle et de conformité administratif supplémentaire qui... entraînant encore une surcharge de travail aux équipes de travail ne va pas améliorer la cohabitation sociale. Pourquoi est-ce que vous... Pourquoi est-ce que c'est votre point de vue?

M. Pagé (Martin) : Bien, premièrement, on est dans l'administratif, donc dans une lourdeur bureaucratique à laquelle... comme j'ai mentionné, que les organismes qui détiennent une exemption par Santé Canada ont déjà fait. Donc, on vient mettre beaucoup d'énergie dans une bureaucratie, alors qu'en ce moment les efforts doivent être déployés sur le terrain et nos énergies devraient être déployés à sauver des vies et à développer des programmes adaptés plutôt que de s'enfarger dans la bureaucratie et dans des... encore une fois, dans un plan.

Donc, je pense qu'on détourne un petit peu le focus. Et je le comprends très bien aussi, qu'on veut habiter dans des communautés... tu sais, on veut tous cohabiter, mais la situation actuelle n'est pas ça. La réalité actuelle, c'est que les gens ont besoin d'espaces pour consommer, les gens ont besoin de logements, les gens ont besoin de chambres, les gens ont besoin de place pour obtenir des soins autant physique que mental, et ces choses-là sont absentes en ce moment. Donc, si on met nos énergies que sur la cohabitation... Donc, j'en conçois qu'il faut en mettre, de l'énergie, mais il ne faudrait pas oublier le travail qu'on doit faire pour se sortir de cette crise-là, parce qu'il y en a plus qu'une crise en ce moment.

Mme Prass : Et ça, on en reparlera avec le ministre, mais je pense que nous sommes du même avis. Vous semblez avoir une crainte dans votre mémoire que le terme «un local destiné à accueillir principalement les personnes en situation d'itinérance ou sans-abri» pourrait s'extensionner à d'autres entités comme les cafétérias communautaires, les logements avec soutien communautaire. Je ne pense pas que c'est l'intention du ministre, puis on va s'assurer de le préciser. Mais je voulais qu'on l'adresse devant vous puis que le ministre soit bien d'accord pour vous rassurer, je pense... bien, je comprends que ça n'a jamais été l'intention.

• (19 h 20) •

Mme Savage (Annie-Andrée) : Bien, le chapitre II mentionne clairement, là, que ce règlement pourrait... cette réglementation pourrait être appliquée à tout organisme qui accueille en... c'est écrit, en majorité des personnes en situation d'itinérance ou sans-abri. Puis là après je comprends que la question de la distance de 150 mètres ne sera pas... n'en fera pas partie. Mais une mauvaise cohabitation, une cohabitation qui n'est pas du tout harmonieuse peut tout à fait se faire dans un milieu de vie où il y a plus de 200 mètres d'une ressource en itinérance ou d'un SCS. Puis le contraire aussi, là, ça peut très, très très bien aller à moins de 150 mètres aussi. Donc, la question de la distance, ce n'est peut-être pas nécessairement non plus l'unique élément qui va garantir une cohabitation harmonieuse.

Donc, nous, pour nous, le chapitre II ouvre la porte à... effectivement, si la cohabitation harmonieuse n'est pas au rendez-vous, que l'autorisation qui est revue aux quatre ans... en tout cas, comme le projet de loi est écrit présentement, on a tous compris que ça pouvait être appliqué, là, à tout l'ensemble des ressources qui offrent des services aux personnes en situation d'itinérance...

M. Pagé (Martin) : ...et j'ajouterais que ça peut aussi ouvrir la porte à avoir d'autres projets de loi pour contrôler ou encadrer d'autres types de ressources aussi. Donc, c'est une préoccupation que plusieurs groupes ont aussi.

Mme Prass : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Saint-Henri–Sainte-Anne, vous prenez le relais.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup. M. le Président. D'abord, je veux vous remercier tous les deux d'être là ce soir, puis dans... la coalition que vous représentez aussi, puis à tous ceux et celles qui font la différence au quotidien dans cet enjeu qui n'est pas facile. Je veux vous remercie.r.

Par ailleurs, je voulais souligner, quand même, aujourd'hui, l'Assemblée nationale du Québec a adopté une motion unanime dans laquelle on réaffirme la nécessité de maintenir et de soutenir adéquatement vos services, les services de consommation supervisée, partout au Québec, dans une perspective de santé publique, de dignité humaine et de réduction des méfaits. Donc, je voulais quand même vous le rappeler et vous remercier.

J'ai posé cette question-là à plusieurs autres groupes et partenaires. Est-ce que vous, de près ou de loin, vous avez été consultés dans l'élaboration du projet de loi no 103?

Mme Savage (Annie-Andrée) : Non.

M. Pagé (Martin) : Non plus.

M. Cliche-Rivard : Et est-ce qu'à votre connaissance... M. Pagé, par exemple, vous avez d'autres directions générales, là, que vous connaissez bien, l'Anonyme et les autres, pour ne pas les nommer, à votre connaissance, est-ce que des gens dans cet entourage-là, qui opèrent des sites de consommation supervisés, ont été consultés dans l'élaboration du projet de loi?

M. Pagé (Martin) : Non. Nous avions... Ça a été mentionné ce matin, là, dans la première... les premiers qui ont passé à l'audition ce matin, ça a été mentionné qu'on avait écrit au mois de janvier au ministre pour dire que nous serions ouverts à discuter et à échanger sur le sujet, mais on n'a pas eu de suite à cette demande-là.

M. Cliche-Rivard : ...pense à l'AIDQ, je pense.

M. Pagé (Martin) : Oui, exactement.

M. Cliche-Rivard : Exactement. Parfait. À votre connaissance, parce que vous avez une connaissance terrain assez approfondie, est-ce qu'il y a des projets en cours de développement à Montréal actuellement, puis quel impact aurait ce projet de loi là sur les projets en cours?

M. Pagé (Martin) : Il y a assurément plusieurs projets en développement. Dopamine essaie de développer un service d'inhalation aussi et d'injection à son centre de jour, donc, qui est situé dans un autre secteur du quartier Hochelaga-Maisonneuve. Et ce projet de loi là, effectivement, nous préoccupe aussi pour voir si on va être capable de répondre. Il faut savoir qu'en ce moment, pour notre communauté, on a une réponse de soir qui va bien, oui, mais les personnes...

M. Cliche-Rivard : ...

M. Pagé (Martin) : Sur Ontario, exactement, à l'intérieur du CLSC, mais les personnes doivent... et nécessitent d'autres services de jour parce qu'on sait que la consommation n'est pas circonscrite juste dans des horaires de soins. Et l'inhalation est aussi un élément qui manque à Montréal, donc, ce service-là, d'inhalation.

Donc, on a des projets en cours, je sais qu'il y a d'autres projets aussi, de Mobile et autres, qui tentent de voir le jour aussi. Donc, c'est sûr que les groupes sont préoccupés de voir une réglementation appliquée là.

M. Cliche-Rivard : Tout à l'heure, on a parlé du rapport de la coroner sur le décès de M. Wilson, recommandation... vous l'avez notée : «Mettre en place des actions nouvelles pour faciliter l'implantation de centres de consommation supervisée.» Est-ce que vous sentez que ce projet de loi là est en accord ou pas avec le projet de loi... en fait, le rapport du coroner et le projet de loi, ça va-tu dans le même sens ou pas vraiment?

Mme Savage (Annie-Andrée) : Bien non, pour nous, ça ne va pas dans le même sens du tout. On comprend qu'il y a une volonté de développer davantage de ressources de SCS, de SIS, mais c'est sûr que ce projet de loi là, pour nous, est, en quelque sorte, contreproductif dans cette vision-là.

M. Cliche-Rivard : En vous remerciant beaucoup pour votre temps ce soir. Très apprécié. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je remercie les représentants du Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal pour votre participation ce soir à nos travaux et votre contribution à notre réflexion.

Alors, sur ce, je suspends les travaux pour laisser place à la prochaine personne qui va venir nous présenter son mémoire. Merci.

(Suspension de la séance à 19 h 25)

(Reprise à 19 h 31)

Le Président (M. Provençal) : Nous reprenons nos travaux. Alors, nous terminons notre journée de travail avec la présence du docteur Michael J. MacKenzie, titulaire de la Chaire de recherche du Canada…


 
 

19 h 30 (version non révisée)

Le Président (M. Provençal) :...sur le bien-être des enfants et professeur titulaire de travail social, de psychiatrie et de pédiatrie de l'Université McGill. Vous disposez de dix minutes et, par la suite, il y aura des échanges. Je vous cède la parole, Dr MacKenzie.

MacKenzie (Michael J.) : Good evening, Mr. President, Mr. Carmant and assembled deputies of the committee. I want to thank you for the opportunity to come before you at the end of what is a long day for all of you, and I'm humbled by the invitation to be here.

I want to apologize at the outset for my lack of facility in French. I'm taking classes, but I'm only at «niveau 4», and I'm not keeping pace with my children who are soaking it up like sponges, thankfully. Perhaps, one day I'll have cause to come back to your committee and without the need of translation. So, I thank you for indulging me.

As a chair... this is an area of work that I've been in for 25 years as an academic researcher and, ten years before that, working in residential and care models. I suspect my academic credentials were at the root of my invitation to be here before you today, but I'm also here as a husband, a father, a neighbor, a youth hockey coach and mentor and a member of the Saint-Henri community. I live within two blocks of one of the supervised injection sites that this bill addresses, just steps from a local elementary school.

What I'm about to share is not academic, it's not theoretical, it's a live reality for my family, my neighbors, and the children of our community. And even given the esteemed nature of these halls, I want to be able to ask you to be able to speak frankly about some of those experiences.

In many ways, I feel ill-equipped to represent my community here today. My roots in Saint-Henri certainly do not run as deep as many, my many neighbors, largely Francophone, who have worked tirelessly over the last year to share what is happening in our community and to advocate for our children, doing so with great grace and compassion that does true justice to themselves and to our community, despite accusations that they face regularity of being uncaring and not in my backyard people. I know many are watching, and I want to thank them on behalf of my family for all they've done.

So, I feel I have a sense of duty and responsibility to represent the best I can the voices of my neighbors, but I really urge you all to come visit Saint-Henri Ouest and meet with our community, so you can hear from them directly. You'll find folks from all walks of life with diverse social and economic backgrounds and the extent to which they've been afforded opportunity in our society. But what unites us is a deep sense of community and looking out for each other. Most aren't so far removed from challenging circumstances themselves that they don't share a wide sense of compassion for those who may be struggling. «Malgré tout», it's a community that flourishes. We're very proud to be part of this community and to be raising our children in it, and I'm proud of my neighbors, who, despite many being victims directly of serious incidents and of having their sense of safety compromised, have maintained their empathy and compassion for those in need.

I would like to begin with... by being unequivocal that people have a fundamental right to be housed, a fundamental right to adequate mental health and health care and a fundamental right to safe substance use treatment, including harm reduction models, and that a vast majority of unhoused people present zero risk to the children of our community. We're in a crisis and we do not begrudge folks at all levels of government trying things. And not everything we try will work or strike the right balance with public health and safety, but good policy needs to be able to pivot in the face of data, and we must be able to learn from problems and implementation. And we also can't let idealism leave us naive about the scope of this reality that our community has been living. I can also unequivocally and unapologetically say that communities and children also have a fundamental right to safety and well-being.

A community can be compassionate and still set clear boundaries about public behavior that harms other people. These ought not be mutually exclusive pursuits. That we've been thrust into this false choice, whereby those two interests are seen as somehow incompatible is a direct result of a culture of scarcity and the failure of our society's duty of care to those in need from all levels of government. But that failure of our society to address these issues cannot be borne on the backs of our children and it's a particular injustice that the children who are asked to bear that weight all too often come from lower resourced neighborhoods, neighborhoods like Saint-Henri and Little Burgundy.

You've likely heard and will likely hear across these hearings the phrase «evidence base» used to describe supervised consumption sites. While there is certainly an evidence base, I want to begin by addressing the soundness of that claim towards a more nuanced view of the reality of that literature. The most...

MacKenzie (Michael J.) : ...a rigorous systematic review, which is a study of the studies that I refer to in my written brief, summarized just 22 studies on supervised consumption sites that actually included outcome data of any kind, rather than simple descriptive studies that describe programs and services, of which there are many more. 22 outcome studies is not reflective of a deep empirical literature base, particularly when you realize that most of those 22 studies focus on just a few sites. In fact, 16 of those 22 studies were about just one model program implementation site in Vancouver. Three others are about just one site in Australia. So, when people talk about an evidence base, the study of the studies with outcome data shows that 19 of the 22 studies reviewed, 86% of that reviewed literature was about just two sites. And critically, those model sites were not located near schools or daycares. They were staffed with professionally trained and credentialed providers, they are placed in areas with overwhelming preexisting need and minimal prior services, and they are largely assessed based on client self-report, not on independent community data.

This stands in contrast to what the SPVM data has shown in the area of Saint-Henri West, where Maison Benoit Labre was placed, attracting large numbers of new people to the community and concentrating them in public spaces. That's why it's so informative to look at what's actually happening in our community. SPVM's data show that crime impacts extended well beyond the 150 meters in the bill, so I think it's also important to look at what the data tells us about what does distance mean. Is there some sort of marked qualitative drop-off at 150 meters? Why not 140? Why not 200? What does the data show? Well, the data shows out to 250 meters from the center, mischief calls increased by 800%. A 93% increase or near doubling in crimes against people and even overdose incidents were up 300%. And even this is a very conservative undercount because many crimes are not geotagged properly at the time of call logging.

I'm happy to, in the question period, say more about that, we've done some spot checking on the data that was released where we had known police report numbers and it's indicative that it's an undercount, and that's compounded by the fact that many long-term residents in our community simply don't feel comfortable calling the police. And as bad as that data is, the reality on the ground is likely several fold worse. Children are exposed routinely to unconscious individuals, open drug use, sex acts including clearly coercive sex acts, masturbation, nudity, fighting, people in severe psychological distress behaving in ways scary for children and adults alike, and a marked increase in stabbings. I've seen neighbors violently assaulted and others threatened. We've watched the same dealers selling openly at the school crosswalk on Notre-Dame every morning for over a year. Every morning, families are afraid. Many have changed their walking routes to school, others have taken their children out of school entirely or moved. Well, that option doesn't exist for most families. Teachers are worn down; parents are angry, and children are suffering the consequences of this.

The middle childhood to adolescent transition is a critical period for child development, a proving ground of burgeoning independence. Children need time not to be under the hovering eyes of adults. They need space and time to explore, to test rules, to navigate life and conflict with peers without adults meddling and hovering, time to grow. Sadly, we see evidence of children in our community taking a regressive step backward in that regard. And I'd welcome the chance to unpack that with you further in the question period while respecting the privacy of families.

• (19 h 40) •

We were promised last summer that the day site would be relocated before the school year began, and that promise was not kept, and the organization operating the site continues to receive nearly all of its funding from public money. This bill is a critical, but insufficient step. It needs to be stronger. I urge the committee to consider five changes. I think the buffer needs to be increased to 250 meters. We have a SQDC limit of 250 meters for a legal substance that people buy and take home. 150 meters is not sufficient, not in keeping with what we see in the crime data. The bill goes a long way to measuring from property lines and not from doors and using Google Street maps, which many of the media has unfortunately continued to do, to follow…

MacKenzie (Michael J.) : …all the way around Atwater and Notre Dame to… make this distance seem a lot further than the five yards, that it is, five meters between the center and the playground. And we asked you not to grandparent an existing violations. Four more years is almost an entire childhood. It's unacceptable.

Honestly, what I'm hearing from families, it feels almost worse that this four year grandparenting was allowed for the two existing sites that motivated this bill than if you had done nothing. At least before, our community could cling to the belief that maybe you just didn't realize what we were living. And if we could just get you to come visit and see it, you'd help us. But by bringing forward this bill, what you're saying explicitly is that, you know, these organizations can do harm if not implemented properly. But you're going to allow that to continue for our community. Kids who were in maternelle last year when this opened are in grade one now, and in four years will be finishing fifth grade, nearly their entire elementary school experience will have been facing these kinds of stressors. Deputy Prass, perhaps in the question period, we can discuss the incidents that happened even during your brief visit to the playground.

Moving forward, the ministry and the minister should be empowered to withhold public funding from organizations that harm communities or break public promises. We have many capable ethical organizations in… and in Little Burgundy, including Welcome Mission, amongst many others, doing excellent work the right way with broad community support, and we need a shift towards a more distributed model. Large scale, high concentration sites are incompatible with balancing community safety and well-being. We need many smaller, specialized services across all neighborhoods, including affluent ones, not just Saint-Henri, Little Burgundy… or Villeray. Everyone should share that responsibility. Thank you.

Le Président (M. Provençal) : Merci. Alors, M. le ministre.

M. Carmant : Oui, merci beaucoup, M. MacKenzie. Moi, j'ai… je suis allé plusieurs fois sur le site, là, je vous dirais presque une dizaine de fois. Avez-vous vu une différence après le mois de septembre où on a introduit des équipes additionnelles pour patrouiller matin, midi, soir autour du site Benoit Labre. Parce que, justement, c'est ce qu'on veut instaurer avec le projet de loi, c'est cette obligation de gérer la cohabitation.

MacKenzie (Michael J.) : Thank you, Minister. We noticed some slowdown over the winter months, which is to be expected, when there's less outside activity. This spring has been really rough. September and October last year actually saw a sharp uptick in stabbings that occurred after SPVM released their report. And with all respect, it almost became sort of a little laugh within our community. If there was a day where we noticed a real change on the grounds of… where it was really looking great, the question was whether the Minister or Mr. Cliche-Rivard were coming that day. Because things were put into place. And by 3 o'clock in the afternoon after your visit, things were back to… back to the way they were. I would hope that the police data, I would hope that the stories from those in our community… and again, we invite you to come and meet with parents in our community and at the school, not the good neighborhood committee, it's controlled by the center. Should be clear that not all organizations are going to be honest brokers of the impacts of their services on the community. And I suspect you're seeing a big disconnect from what you hear from community members and what you're being told. And we're certainly living that disconnect. It's been very frustrating, and we've certainly not seen improvements. This spring has been rough.

M. Carmant : Okay. But but I did take the time… Excusez-moi, j'ai pris le temps d'aller rencontrer la direction de l'école, et les parents de l'école aussi, mais vous… selon vous, d'où viennent tous ces incidents puis quelle est la cause de tous ces incidents?

MacKenzie (Michael J.) : The incidents are largely… I want to be very clear that the residents of the transitional supportive Housing program have presented no challenge to the community. There's broad support within the community for that program. And to be honest, I think… own data would reveal that the injection sites… consumption sites only been using… used by, the last I heard, 6 to 8 people per day…

MacKenzie (Michael J.) : ...I was struck by the last speaker talking about sort of these kinds of closure efforts could drive people into the ruelles and doorsteps. Well, that's where they're using now. Most of the folks who are concentrating outside the center, the largest issue is the location of the day site. They're not using in the cubicles. They're using in our alleys, they're using in our doorsteps. This is where we're being encouraged by the boroughs to plant our tree squares. I got a stark reminder this weekend to double-check my tree square before I go to plant a new plant, because I just want to throw my hands in needles. So, I mean, we can't even count the number of needles. We're accumulating.

So, the largest issue is what's happening outside the center. And the sort of distancing that the centers do to what's happening outside their doorstep, I think that's one of the largest issues. You know, the security that happened last spring before the school year ended certainly helped for walk home and arrival to school. But that's school yard. For those who aren't familiar, it's also the playground, it's also our local park. Park... across Atwater, it's a little hard for the younger kids to be able to go there on their own. This was the playground where the kids in Saint-Henri West went to. That doesn't happen anymore. The summer camps aren't using it. It's emptied a lot of the time. Or, when there's kids there, they're there with an adult. And this, you know, we... Deputy Prass visits us for about 15 or 20 minutes, I remember, it seems like we were inside that playground during that time, witness an arrest, a fight, and a man with no shirt and his pants undone comes screaming and running at the fence. This was startling behavior for adults. And that part of the playground is the part of the playground for the maternelle to Grade 2. That's one 15-20 minutes. That's one recess worth, right? So, we're talking about four more years of that.

M. Carmant : Et quel est le... par exemple, le rôle du Service de police de la ville de Montréal? Vous dites que ça consomme en avant. Quand on parle des vendeurs, vous parlez sûrement de ceux qui sont sur les triporteurs rouges, là, qui ont été identifiés par plusieurs groupes. Est-ce que la police vient soutenir les activités de l'organisme?

MacKenzie (Michael J.) : I was disappointed to see the updated schedule that the 15 Precinct wouldn't be here. I think that's a great question for Commander Chase and his team. I know the officers are very frustrated about how much of their day and resources they're spending at the center. The sounds of children playing outside has been replaced with the soundtrack of sirens in our neighborhood. Well, Mister... come down a little closer and you'll see. The police are there 6-day times a day at least, that we hear consistently. This is... The dealers are there... People are also nervous about speaking of this directly for good reason. This is... We're not seeing change in this.

M. Carmant : O.K. Et est-ce que vous pensez qu'un plan de cohabitation... Pensez-vous qu'un plan de cohabitation plus important pourrait aider? Parce que, oui, on donne quatre ans pour relocaliser, mais peut-être qu'on pourrait agir plus rapidement sur la cohabitation.

MacKenzie (Michael J.) : Yes, I think there's two real questions before you... in your work, one is questions about the model itself and one is about the particular implementation of that model, in one instance. And I think, when those get blurred together, we really run the risk of making bad policy. There are good examples of implementation of these programs. I think we need more evidence. As I said, the evidence base is not deep, but there's a good example of how it can be done well. I've been in this business for a long time, and this is the worst implementation of a social service I have ever seen, and it's the most acrimonious towards the community that I've ever witnessed.

• (19 h 50) •

M. Carmant : Pourquoi?

MacKenzie (Michael J.) : I think the discounting of people's experiences, I think the painting that the only vulnerable people in the community are those being served by the organization. There are many vulnerable people in our community. We've had children with severe neurodevelopmental disabilities who have had to be protected by adults, adults who probably put themselves at risk, in fact, in doing that. We've had senior members of our community who've lived in our ruelle for 30-40 years, be threatened, asked if they live alone...

MacKenzie (Michael J.) : ...these are, you know... The year before this open, we've got ... just even on our little alley, we've got kids who are 11, 12, the age when they want to go to the dép for a Freezy in the summer and walk to the park or Dollarama alone. Important milestones for kids in middle childhood going into adolescence. They're not asking to do that. They're not asking to do it. It's not: I want to go... can we go? It's can you take us? Because the work I do, I have a lot of parents will reach out to me about these kinds of questions. And one thing I'm hearing consistently is a really increased hypervigilance of children towards what's going on around them, acutely vigilant to that knock, you know, at the door: Mom, is that you? These are symptoms of exposure to fear and trauma that are not healthy for kids.

M. Carmant : Et les municipalités nous ont demandé de retirer le 150 mètres. Vous, vous nous demandez de l'augmenter, si je comprends bien?

MacKenzie (Michael J.) : Yes.

M. Carmant : Est-ce que 250 mètres, ça va être suffisant? Pourquoi vous donnez ce chiffre-là?

MacKenzie (Michael J.) : So, I would ask that question that when you're picking a distance, the data would be important. We've only seen data to 250m. So, it may not be a drop off after 250m. I don't know that. Certainly, it's lower at 250m than it was at 50, but it's still markedly high at 250m.

M. Carmant : est-ce qu'il y a d'autres questions du groupe? Oui. M. le Président, je passerais la parole.

Le Président (M. Provençal) :Oui. Mme la députée de Louis-Riel, à vous.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président. Dr MacKenzie, bonsoir à vous. Merci pour vos commentaires, ce soir.Vous vous êtes exprimé publiquement sur les enjeux de cohabitation sociale, et ce que vous me dites ce soir, vous parlez, là, du sentiment d'incompréhension, du sentiment d'insécurité à l'intérieur de votre communauté. Vous avez aussi insisté sur le fait, dans vos sorties publiques, sur le fait qu'on peut à la fois défendre les droits des personnes en situation d'itinérance, en même temps avec la nécessité de trouver des solutions qui sont viables. C'est un exercice.... «balancing act», entre les deux, là. Selon vous, selon ce que vous nous dites aujourd'hui, bon, vous nous dites qu'il n'y a pas beaucoup de données, les données ne sont pas substantielles. «You're talking about evidence space, which is not deep.» Alors, selon vous, quelles seront les conditions gagnantes pour pouvoir avoir la meilleure possible... une meilleure intégration d'une ressource dans un quartier donné?

MacKenzie (Michael J.) : I think part of the challenge with trying to address a problem that's as stark as it is currently across the province, and certainly in Montreal, is that any time you move first with something, there's going to be a real concentration of people needing that service. We need smaller resources. Smaller resources come at a cost also, right? You lose the economies of scale that come with a larger facility that can have an array of services in one organization. So, each of these steps have trade-offs. We've painted ourselves in a corner, I think. This is part of the reality. But smaller services increase the possibility that we are offering an array of services that can meet people where they are in their current level of need. Not all people who are unhoused need serious mental health services. Not all people unhoused need significant substance use support, right? Some people just need a roof. Other people on that spectrum of services require more intensive supports. Some of that may be mandated services. We have to acknowledge that span and we have to have a service array that can meet that broader array. Even at MBL, most of the folks that are going there are not suspected to... and this is where the 15th precinct could be helpful, because it's a... it's likely a small cadre certainly that we see of folks who are causing the majority of the significant challenges. They may be gone for a day or two of treatment and after incident, and then they'll be back. So, I think that's the answer, but it's more expensive. We have to decide that we want to invest in that as a society. I think to my mind that measure of our humanity as a society is the size of that gap between what we'll accept is good enough for our own children, and what we'll accept is good enough for someone else's. And I would put to you that there's not many around this table who would accept as good enough for their...

MacKenzie (Michael J.) : ...children with the children of Saint-Henri West are experiencing right now. And, if your answer is no, that it's not acceptable, then the time to act on that is now.

Mme Boivin Roy : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Oui.

M. Carmant : On regarde pour une autre ressource potentielle, avec Résilience, à une... quand même pas très... à une distance intermédiaire, je vous dirais, mais qui offrirait une autre ressource pour la région. Est-ce que vous voyez ça positivement de votre côté?

MacKenzie (Michael J.) : So, I don't know enough about... I sat in on one of Resilience's community calls. I don't know... about their... enough about their services. Currently they're up the hill, for those who aren't familiar with the neighborhood, they're sort of kitty corner to the Old Montréal Forum, on the Westmount side of the hill. They're being moved down the hill to Saint-Henri. In the similar way the... was in Griffintown for over five decades, Griffintown, an area that's seen the highest level of investment in condo tower development in the province over the last five years. And... was moved from there. So, I also think we have to have some frank conversations about these decisions about placement. And I think that's not being discussed.

M. Carmant : And what would you... Qu'est-ce que vous aimeriez dire sur le... là-dessus?

MacKenzie (Michael J.) : I think each neighborhood needs to have resources. It was interesting. As part of the city's consultation, a number of neighbors, we went to a consultation process where there was a... we were in small tables doing a workshop activity with members of the community. And we were given a map of hypothetical neighborhood that showed a daycare, a school, a metro, a CLSC, different things around the neighborhood. And you had to, as part of this discussion, pick where would you put this resource. It was very interesting that lots of members of the community who are... who are more removed from these kinds of services said : Well, right across from the CLSC, you're close to the services, close to the metro, which also happen to be right next to the school. We had two people at our table who have been unhoused and have been involved in services for the homeless, who both picked a site that was further away. So, I would also urge people to talk to the community. I think those of you who have seen the site know that buildings nearby had some banners on the building. Some of that also doesn't feel good, right, for those receiving services, being made to feel unwelcome. I think that's part of the tension we're seeing and in the placement around the school.

M. Carmant : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. C'est terminé, M. le ministre. Alors, Mme la députée de D'Arcy-McGee, je vous donne le relais.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Thank you for being here, Doctor MacKenzie, and for your presentation. I'm going to address my questions to you first in terms of your professional and academic knowledge, and then as a parent, then as a resident.

Benoît... One of the unique elements about Maison Benoît Labre is you have transitional housing, you have an inhalation site and you have a day center for unhoused people. Personally, I had never seen a combination of those services in one building before. I'm curious if you had, in the research that you've done, and if you think that that is part of what contributed to some of the problematic issues. Because, as you said, everyone in the community seems to be supportive of the transitional housing aspect. It's the combination of the three that seems to have been problematic. Do you... Do you share that view and why do you think that is?

• (20 heures) •

MacKenzie (Michael J.) : So, there's certainly models like that that exist, that co-mingle these services. Again, as part of the reality of... we have often large community-based organizations offering these services, they try to take advantage of economy of scale. They offer lots of services in... sort of... kind of a whole wraparound array of services. So, that's happening. What I don't see is good evidence, even in those 22 studies with data, on examples of that, of that co-mingling. So, certainly, as someone who's worked in the area of residential and community-based services, that presents questions that we should be looking at more closely. I think if you put yourself in the position of someone who is in perhaps various stages of recovery, who's... who's finally found supportive housing, transitional or permanent supportive housing option, you've got a safe place to keep your stuff, you've got a shower, you've got a pillow, you've got a bed, and, every time you come downstairs in your residence, you're surrounded by people using. Certainly, it raises questions about how challenging that would be in maintaining a path towards recovery, which we know is marked, particularly with opiates, marked by many... as many step back as forward...


 
 

20 h (version non révisée)

MacKenzie (Michael J.) :  ...time, I think that compounds that challenge in serious ways.

Mme Prass : So, do you think if it had been, considering the urban setting, considering the proximity to school and to other public… to the public space, if you will, do you think that that is the wrong formula, having those… all those services combined when you take into consideration the negative effects that then… again, combined, may have on the surrounding public?

MacKenzie (Michael J.) : Yes. I would not recommend linking those particular services. I think it depends on the kind of housing model you're offering as well. People within the transitional support of housing, even in the permanent support of housing may certainly require safe and supervised... But I think the… which has presented a lot of challenges, not just the community, but to staff of the centre, who dealt with injury to residents of the centre who have their own challenges with this.

So, it's… you know, I don't think it's the model we should be pursuing, the… on those services, and the other piece of that is that there is no apparent pathway from the day site to the other services, and I think it's important, remember, that… particularly safe… was not a treatment model. This was not built as a treatment model. It was built as a stop gap in the face of the lack of treatment models, that, if we're not going to help people, then we need to at least make sure that we keep people safe, that we reduce needle born illnesses, that we reduce needle born infections, that we can attend overdoses, and perhaps, with that additional points of contact with people, we may be able to make a connection to services down the road.

In… itself, it's not a treatment model, and so I'd also urge you to push organizations to be clear about, within… what is that process to transition people to recovery?

Mme Prass : And, when you talk about smaller services, for instance, with mobile services be something that you think would be useful and would achieve its goal as well?

MacKenzie (Michael J.) : So, I think Mission Old Brewery has had some success with their mobile band. I think there're other examples across the province, not just in the city, and elsewhere, that have done that to be able to… particularly if… where the need exists, there's not suitable infrastructure to be able to build brick and… or to have brick and… offerings. So, certainly, that needs to be in the mix. The presence of those vans made some difference, particularly in the heat of last summer. We saw more people getting support, and I want to be very clear, I know… the role of pure navigators of those who lived experience in addiction and in homelessness in the service mix or paraprofessional staff, but even the evidence based around the role of pure navigators and paraprofessionals, they're not an insolation, they are in combination with professional staff. And so, I'd also ask you to push organizations to be more clear about what their staffery is going to look like. We saw it with a lunch of… this is just an example, within the first three weeks, they had to close because of significant staff… We were promised a community meeting in October 2023 by the organization that they would have many social workers and many nurses. I had city officials telling me… I toured. I saw the nurses' office. I said we want nurses at the… Do you think they're really going to have one other than coming to check the injections logs and consumption logs and… on a periodic basis? And ask the organizations themselves, when they come before you, how many registered members of the order of social work do they have. The reality is we need thousands of more social workers in this province. I would urge the ministry and the committee to work close with the Minister of Higher Education, to support growing those capacities across the province. We're not growing our social work programs fast enough, and the reality is it's creating a situation that even if they want to hire social workers, they can't, or they might have one or two on staff trying to oversee all the… services.

Mme Prass : Do you think, if, as you mentioning social workers hiring nurses, etc., we know that certain safety measures were asked or implemented after the fact, cameras, guards outside, do you think that there would have… there's a parallel world in which, if this was done the proper way, with the proper means, that a lot of the negative effects on the community and on the school children could have been avoided?

MacKenzie (Michael J.) : This is the critical question, and this is where it's getting out with this… unfortune conflation that's happened between… the model itself and… one particular implementation. I think the community impacts could have been mitigated significantly by better implementation. But I think it also still highlights…

MacKenzie (Michael J.) :   ...and when organizations are doing the best they're able, there's going to be spillover effects and cascading effects into the surrounding community, and I think it's important that that community is not five meters away from a kindergarten playground.

Mme Prass : I will now ask you to wear both hats because as you... no, no, as a parent and as a professor. As you mentioned, we met last summer, and I was at the schoolyard with you, and as you said, for the short time that we were there, as an adult surrounded by other adult men in daytime, it was very disconcerting. What... And maybe you can go to some of the things that your neighbors' children's have been witness to and the effects that it's had on the children, but what are the consequences of exposing children to such behavior in the long term?

MacKenzie (Michael J.) : This is one of the sad realities of all of this, that many of the folks who are involved in some of these incidents from around the center have themselves experienced long histories of trauma around these areas. And if you look in the literature... sort of some common elements might exist across folks who are having some of these experiences in mental health and substance use crises. Outside of their own family, it's often exposure to community discord and violence, early sexualization and early substance use exposure. And those are the three things we're exposing children to in the community. Now, that's coming into families, some of whom have a contemporaneously supportive environment in place. My own children have experienced things that I really wish they had not, but we have supports in place, we're in a position where we're able to support them through that processing and understanding it. Not every family in our community has that ability, and I think it's important to keep that in mind, that the tentacles of this can be far reaching for children, particularly the things that feel uncertain and unsafe. And those are the pieces that that we're experiencing.

My day started at 3 : 03 this morning because I looked at my phone on my table as my kids were woken up by a man in distress on the street in front of our house last night. So, this is, you know... I had to go back down and get them settled back down to bed. This is sort of just in the air we're breathing right now. It's, you know... It's... This isn't about people trying to hide their kids from seeing poverty or seeing mental health crisis, this is not what this is. It's very easy to dismiss this as... and people who just don't want their kids to recognize that there's ills in the world. That's not what this is.

Mme Prass : And you mentioned earlier, in terms of the effects on children, regressive steps. Can you talk to us a little bit more about that?

MacKenzie (Michael J.) : Yes. So, I used the example, a few minutes ago, about just something as simple as 11-12 year olds not wanting to walk to the park by themselves, not wanting to go to the dep, grab a freezie, a treat or something. Even when they're a year younger, some of those kids in our alley, were doing that already much more independently than they are now. And the big piece of this is that hypervigilance, and I think this gets to this sort of... where does that exposure to stress... how does that get under the skin of a kid, right, how does our experience of stress around us in childhood become written into our bodies through our stress hormones, through our ability to respond to stressful situations? We become organized... we become reorganized in a way that makes us less able to deal with stress. It's one of the most pernicious things about early stress, it's that those who face the most of it become least equipped to deal with it. Some degree of stress is a good thing, right? We learn resilience, we learn that we can get back up, but this sort of chronic level of stress is a problem for kids. And it can be lifelong consequences, particularly the exposure to violence, sexuality and... the violence in particular.

• (20 h 10) •

Mme Prass : And my final question, because of time, you mentioned... you mentioned in your briefing, you mentioned orally that... a promise by the minister and city officials to relocate the site before the start of the 2024 school year, a promise that has been ignored by the organization operating the site, despite receiving the vast majority of its funding from public sources. So, I just want to understand, is the commitment that you received at that time from the minister and city officials or was it from the organization itself? Because earlier, you seemed to allude that it was the organization that had made it?

MacKenzie (Michael J.) : No, the organization, I think, was... we just got this in the press from the ministry and the borough council. The organization and the... organization...

MacKenzie (Michael J.) : ...that there connected to are very quick to sort of say: We're a private organization, you're not going to tell us how to operate it. And I think, a piece of this bill to empower you to make decisions about implementation is going to be really important. And not to throw the baby out with bath water; it doesn't have to be the whole model, it can be one implementation of it. I love Italian food, not every Italian restaurant I've been to is good, right? That's at the crocks, it's a simple example, it's at the crocks of implementation science. We have to deliver services in a way that actually replicates the evidence bases that we're drawing from. You can't look to a literature that requires professional staff and deliver it in a different way and say you're doing the same thing. You can't look to a literature that does this not besides of school and do it besides a school and say you're doing the same.

Mme Prass : And do you think…

Le Président (M. Provençal) : Merci.

Mme Prass : Oh, désolée. Thank you very much. 

Le Président (M. Provençal) :M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M, le Président. Bonjour, M. Mackenzie. D'abord, je veux vous remercier pour votre témoignage, votre témoignage très important. La voix de tous les citoyens, de toutes les citoyennes de Saint-Henri—Sainte-Anne sont... ces voix-là sont importantes pour moi, et j'ai écouté tous les citoyens qui m'ont contacté puis je vais continuer de le faire à chaque rencontre; chaque demande de rencontre qui m'a été fournie, j'ai accepté l'invitation. Et je l'ai dit et je le redis, tous les témoignages, tous les sentiments sont légitimes, et je l'ai reconnu, puis je vais continuer de le reconnaître.

Je veux vous remercie pour votre grand sens de la compassion, votre partage. Aujourd'hui, je pense qu'on a un objectif commun. L'objectif commun, c'est de faire mieux. On doit tous faire mieux, ça, je le reconnais. Et je pense que c'est un objectif qu'on partage tous et toutes ici sur le terrain.

J'habite Saint-Henri depuis une dizaine d'années moi-même, ce sont mes voisins de qui vous parlez aussi. J'habite à quelques minutes de la Maison Benoît Labre, je suis allé plusieurs... quelques centaines de fois à la Maison Benoît Labre, donc il n'y a pas de question de quand est-ce qu'ils m'invitent ou pas m'invite, je... ou qu'ils ne m'invitent pas, j'habite à côté.

Je parle aux groupes locaux qui s'occupent de nos enfants, au Gym d'à côté, les Scientifines, le Marché, la SDC, Desjardins, la Maison des jeunes, les parents, Amitié Soleil, plus encore. Je suis même allé rencontrer... en fait, j'ai assermenté le conseil étudiant de l'école primaire il n'y a pas si longtemps. Donc, je suis assez impliqué dans ma communauté. Et le parc Victor-Rousselot, je le fréquente moi-même avec mon enfant de trois ans et demi. Mon bureau de circonscription est à 400 mètres, donc je sais exactement de quoi vous parlez.

J'ai dit à plusieurs reprises et je ne suis pas gênée de le dire avec vous aussi aujourd'hui, ce n'était pas la meilleure idée du monde d'ouvrir la Maison Benoît Labre puis le centre de consommation supervisée à 150 mètres de l'école primaire secondaire, ça, je l'ai dit, mais je rappelle que c'était le Parti libéral qui était là en 2023, ce n'était pas moi avant 2023. Donc, moi, je... c'était Mme Anglade qui était là comme députée. Je les prends, mes responsabilités, mais ce que je demanderais, c'est que tout le monde soit capable de prendre ses responsabilités dans cette affaire-là. Moi-même, j'ai soumis une lettre de soutien. Le maire Doré a soumis une date de soutien, le conseiller Sauvé a soumis une lettre de soutien. Les groupes de quartier ont soumis des lettres de soutien. Des citoyens, le SPVM, le CIUSSS, un nombre considérable de partenaires ont soumis des lettres de soutien.

Maintenant, on arrive avec là où on en est aujourd'hui. Vous l'avez mentionné, on ne peut pas vivre ça encore quatre ans. C'est ce que vous avez mentionné. Vous connaissez bien votre quartier. Alors, moi, je vais vous poser une question très ouverte, là : On le déplace où, le centre Benoît Labre? Vous connaissez bien la rue Notre-Dame, vous connaissez Saint-Henri, la Bourgogne, vous connaissez les quartiers : Où est-ce qu'on se déplace. Parce qu'on a besoin de services pour protéger nos populations. Où est ce qu'on déplace?

MacKenzie (Michael J.) : Sure. And I don't want to paint a… and nice picture that there are no challenges in our community before the launch of MBL, certainly around Lionel-Groulx we had challenges. But I would also point out that some of the unhoused folks who presently on Groulx, themselves have pushed on, because of how unsafe they felt from what's happening now. It's not easy. And I'll to your side of the table the question of who, where, when. It's easier… it's not easier to be here as a father, but it's easier to be on this side of the dais when it comes to what to do next, because I don't envy the position you're in. These are not easy. I think we've painted ourselves into corners as I said that doesn't present easy solutions at this point. We have a lot of available commercial real estate in Montréal right now unfortunately and globally, that's likely to remain the case for a while giving the changing in the nature of work, there are certainly sites that are available that are not within that distance to a school. It's going to be easier in Thetford Mines…   

MacKenzie (Michael J.) : …going to be in Ville-Marie, right? But even taking that into account, I think we can… we can do this in a way that's keeping that distance in mind. And I think just being thoughtful, having organizations have a plan of thoughtfulness about where people will be. So, just MVL, just as an example. Again, it's not just where the site is, where the movement corridors are going to be? Well, the metro, right. So, people are moving back and forth between and beyond, MVL and… Those are foreseeable things, right? Those are foreseeable.

Before the organization moved from their temporary site, for example, there wasn't pre site visits for residents in a meaningful way, right? And it might not seem far. It was only a few hundred… half a kilometer maybe down Notre-Dame. That's a long distance for someone who knows where they can safely consume, where they can use the restroom, where they can find some food, where they can find some safety. It might not seem like a big distance, but it's a big distance. So, people were thrust late in the month, mid-month, when they didn't have resources without a lot of foresight. I think those are all little small symbols of implementation that could have been handled better, that are foreseeable by professionals in this space. Other organizations do that. And that could have happened here.

So, I don't have street addresses for you of particular sites that are open and available right now. The city owns a lot of real estate. There's a lot of empty real estate, even within a dense area like this… People need to be close to resources. There's a lot of considerations, but I think we can find common ground that one of those considerations needs to be about the places where children congregate, right? Even our sentencing guidelines for substance use and sales built into it, special protections for places where children congregate, right? Sentencing mandates increased significantly in those spaces. That's already built into our laws and into our policy.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Dr MacKenzie d'avoir accepté de venir ce soir à notre commission. Merci beaucoup pour votre présentation.

Et, sur ce, j'ajourne les travaux au mercredi 4 juin 2025, après les avis touchant des travaux des commissions, où elle poursuivra son mandat. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 20 h 19)


 
 

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