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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le mercredi 23 juin 1971 - Vol. 11 N° 63

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de loi no 23 - Loi des transports


Journal des débats

 

Commission permanente des Transports

Projet de loi no 23 — Loi des transports

Séance du mercredi 23 juin 1971

(Dix heures sept minutes)

M. KENNEDY (président de la commission permanente des Transports): A l'ordre, messieurs!

M. le ministre, messieurs les membres de la commission, messieurs, bienvenue à la commission parlementaire des Transports.

Nous vous demandons de présenter vos mémoires et nous vous demandons de les résumer autant que possible, de faire ressortir les points que vous avez à faire ressortir, de sorte que nous puissions passer à travers cet ordre du jour dans un temps aussi restreint que possible, tout en donnant la chance à tout le monde de s'exprimer et de faire valoir son point de vue.

Nous avons une liste assez chargée de gens qui veulent se faire entendre et je crois que nous allons suivre l'ordre tel qu'il a été imprimé ici, selon la réception des mémoires. Nous pourrions peut-être faire une exception. Il y a M. Claude Boutin-DuParc qui a demandé de se faire entendre, il en aurait pour cinq minutes, ses services étant requis à Montréal cet après-midi. Du consentement de tout le monde, nous pourrions faire entendre M. DuParc qui représente la Fédération des associations de parents de l'enseignement privé.

M. ROY (Beauce): Selon l'ordre du jour que nous avons eu tout à l'heure, n'apparaît pas l'Association des camionneurs-artisans du Québec qui présente un mémoire. Est-ce qu'on pourrait l'ajouter tout de suite à l'ordre du jour pour qu'elle puisse être entendue? Je pense qu'elle a des représentants dans la salle.

M. LE PRESIDENT: Je présume qu'elle en a.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il y en a d'autres.

M. LE PRESIDENT: Il y en a d'autres dont le nom vient de m'être remis, des gens qui ont téléphoné ce matin demandant de se faire entendre. Nous les ajoutons à la liste, à mesure qu'ils nous parviennent.

M. DuParc.

M. le ministre va dire quelques mots

Avant-propos

M. TREMBLAY (Bourassa): Je dirais à messieurs les membres de cette commission et à mes chers amis du transport que le bill 23 est non seulement nécessaire mais inévitable si le ministère des Transports veut remplir son rôle en vue du développement socio-économique du Québec. Pour remplir mon rôle il me faut des moyens et ces moyens je ne les ai pas. Quand on regarde le transport au Québec et qu'on voit ce qui passe, une loi des transports avec neuf articles ne donne pas grands pouvoirs sur les transports. Une régie à juridiction très limitée est loin de couvrir tous les aspects du transport qui s'insèrent à la politique globale des transports.

Troisièmement, un système de transport de plus de 600,000 écoliers qui relève uniquement des commissions scolaires donne le résultat que 10,000 autobus scolaires sont utilisés pour quelques voyages par jour, alors que des milliers de citoyens sont privés de transport en commun.

Des milliers de camionneurs artisans font le transport de marchandises en vrac et ils ne sont même pas couverts par la régie. D'ailleurs, qui n'a pas à l'esprit les graves conflits dans ce domaine?

Cinquièmement, une bonne partie des transporteurs laitiers dont le chiffre d'affaires était de $15 millions par année ne sont même pas assujettis à la Régie des transports. Le transport par eau est sous la juridiction du ministère des Transports mais cette juridiction est si limitée que c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a dû acheter les traversiers de Québec-Lévis. Enfin, il y a la formation presque annuelle de comités et de commissions qui font des rapports qui n'aboutissent jamais à rien parce que le ministre n'a pas les pouvoirs de mettre leurs recommandations en application. Vous savez comme moi qu'il y a eu beaucoup de rapports faits au Québec dans les derniers dix ans et on n'a jamais amené une loi ici pour en faire quelque chose. Je ne blâme personne mais c'est pour ça aujourd'hui que je veux faire cette énumération en vous donnant quelques notes.

Comme vous pouvez le voir par ce court tableau la situation du transport au Québec était vraiment sombre avant le bill 23. Tout ce que nous voulons par cette présente loi, c'est de centraliser sous le ministère des Transports tous les aspects de l'industrie du transport. La condition d'une politique globale de transport c'est ça: la juridiction du ministère sur tous les transports.

Les règlements ne sont que des aspects de cette politique globale et ces aspects ne peuvent pas être déterminés avant que les intéressés aient pu se faire entendre. Pour terminer, la politique globale des transports exige le rapatriement sous le ministère des Transports de toutes les lois se rapportant au transport et le pouvoir de faire des règlements pour réaliser tous les objectifs qui découlent d'une politique de transport. Cela aurait été beaucoup plus facile pour moi, mes chers amis, de faire comme beaucoup de mes prédécesseurs, de continuer sur la même route, de déposer tous les ans mon budget d'une vingtaine de millions de dollars et

de demeurer dans la même situation. En ce qui me concerne, étant celui qui dirige le ministère des Transports, je crois que c'est un défi à relever, de donner au Québec les outils qu'il faut au transport pour bien déterminer où on s'en va avec le transport car vous savez comme moi que le domaine du transport constitue un des cinq plus importants investissements au Québec. Je crois qu'il a été négligé et je veux faire tout mon possible pour que le transport soit amélioré dans la province de Québec et dans tous les domaines.

M. LE PRESIDENT: M. Bertrand.

M. BERTRAND: M. le Président, je souhaite la bienvenue à ceux qui sont ici ce matin comme représentants des différents groupements qui s'intéressent directement ou indirectement au transport, dans le Québec. Notre parti a pris position, lors de la présentation du projet de loi. Vous pourrez en trouver la substance dans le journal des Débats du 15 juin. J'ai cru alors de mon devoir de demander au ministre, qui a acquiescé à ma demande, que le projet de loi 23 soit renvoyé à la commission des Transports afin de permettre à tous et chacun de faire entendre leurs opinions, leurs idées, en vue de bonifier le projet de loi, de le corriger et de le modifier s'il y a lieu. Quiconque a lu le projet de loi se rendra vite à l'évidence que, si le gouvernement annonce une politique globale dans le domaine des transports, les notes explicatives vous indiqueront rapidement que cette politique globale dépend d'une réglementation qui, malheureusement, n'est pas annexée au projet de loi. C'est pourquoi il est très important que tous et chacun de vous, représentants de groupements et d'associations, vous fassiez connaître vos points de vue sur cette réglementation possible. Il en est une qui existe à l'heure actuelle à la Régie des transports. Si vous lisez les articles du projet vous vous rendrez compte qu'il y a au moins dix articles où l'on parle d'une réglementation qui n'est pas encore connue.

Messieurs, nous sommes ici pour vous écouter. Nous avons eu l'occasion, mon collègue le député de Chicoutimi et moi, de rencontrer des groupements, des représentants des taxis, des artisans, des propriétaires de camions, ceux que l'on appelle les camionneurs-artisans. Il y en a d'autres également qui nous ont transmis leur mémoire. Nous sommes très ouverts à cette discussion, à ce dialogue qui s'engage avec vous. Prenez votre temps, nous avons tous à coeur, au Parlement, d'avoir une loi des transports qui soit une amélioration sur ce qui existe, mais une amélioration conforme aux besoins et aux aspirations des représentants du monde du transport au Québec.

M. LE PRESIDENT: M. Audet.

M. AUDET: A la suite des paroles du leader de l'Opposition, nous sommes heureux de notre côté de constater que le ministre des Transports a bien voulu permettre cette commission parlementaire. Cela permettra aux organismes ici présents auxquels nous souhaitons la bienvenue, de pouvoir s'exprimer et d'influencer dans la bonne voie la prochaine réglementation qui s'établira vis-à-vis de la nouvelle Commission des Transports. Cette réglementation, pour être démocratique et refléter exactement le désir de la population, se doit d'entendre la voix des organismes ici présents. Je vous souhaite la plus cordiale bienvenue.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, le groupe que je représente et moi, nous avons voté en deuxième lecture pour le principe de la loi; nous avions cependant critiqué la loi dans son ensemble d'accord avec le chef de l'Opposition officielle, parce que le projet de loi qui change un peu le ministère des Transports, qui crée la Commission des Transports, le Tribunal des Transports, en somme toute la politique des Transports est prévue par des règlements. Je pense qu'en deuxième lecture j'avais fait cette remarque au ministre. Je lui avais dit qu'en commission nous espérions avoir un aperçu des règlements qui vont régir tous les transports dans le Québec. Après avoir entendu les représentants de tous les groupes concernés, après avoir entendu leurs objections à certains articles, je pense qu'il y aura moyen de s'entendre en discutant objectivement, et d'améliorer cette loi, surtout de savoir quelle va être la politique des transports que le ministre va appliquer par règlements. C'est le conseil des ministre qui va décider, par des règlements, des permis, des normes de sécurité, enfin tout. Nous aimerions savoir quels vont être ces règlements, autant que possible. J'espère que de la discussion de la commission va jaillir la lumière et que nous allons savoir à quoi nous en tenir. Merci.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour répondre à la question du député de Sainte-Marie, si on a convoqué la commission à la demande de l'honorable M. Bertrand, chef de l'Opposition du temps, remplaçant le chef de l'Opposition aujourd'hui, et si j'ai accepté d'être ici aujourd'hui et de rencontrer toutes les associations, c'est pour faire quelques changements s'il y en a à faire. Il n'est pas seulement question de faire des règlements, il faut avoir une loi, il faut avoir un cadre comme disait le député de Chicoutimi.

Naturellement il faudra remplir le cadre, mais il faut certainement commencer par avoir un cadre.

Tout d'abord, il nous faut une loi. Nous sommes ici ce matin pour rencontrer les corps intermédiaires et les associations. Et après nous pourrons nous asseoir, les législateurs, et en venir à une entente sur certains changements s'il y a des changements à apporter.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne voudrais pas reprendre ce qu'a dit le chef de l'Opposition, M. Bertrand, mais j'ai indiqué au ministre lors de l'étude de ce projet de loi qu'il s'agissait — je reprends les propres termes, ça l'a fait rire à ce moment-là — d'un squelette, que ce projet de loi était un squelette et qu'il fallait y mettre de la viande. J'insistais en particulier sur une réglementation à venir et j'avais demandé au ministre de nous indiquer quels seraient les principes directeurs de cette réglementation sans laquelle il nous est impossible de saisir la portée de ce projet de loi.

J'ai insisté aussi sur le fait que ce projet de loi était d'une importance telle qu'il n'était pas possible de procéder rapidement. Du reste nous avons devant nous ce matin un nombre très important d'associations, de groupes de toutes natures. Il y a en particulier les représentants des camionneurs artisans. J'imagine que le gouvernement nous donnera toute latitude pour examiner aussi longtemps qu'il sera nécessaire le projet de loi afin qu'il atteigne véritablement l'objectif que s'est fixé le ministre. Je sais que le ministre est très sincère lorsqu'il présente ce projet de loi, qu'il veut en faire l'instrument le plus utile qui soit pour réglementer tout le domaine des transports mais cela à condition que nous ayons tout le temps nécessaire pour entendre les représentations et, s'il y a lieu, enfin, le cas échéant, de refondre complètement une loi qui, comme le dit le ministre, est un contenant dont nous ne connaissons pas encore le contenu.

M. LE PRESIDENT: Oui, monsieur?

M. SAINT-LAURENT: M. le Président, c'est à titre de président du conseil d'une compagnie visée par l'article 47 dans le mémoire de l'Association du camionnage du Québec. Je suis membre actif de l'association, ancien président du comité de législation de cette association et je vois, en parcourant le mémoire de l'Association du camionnage qu'il y a un article qui vous recommande, messieurs les législateurs, d'intercaler dans la loi une prohibition pour les compagnies de chemins de fer, des propriétaires de compagnies de camionnage, à l'encontre de tout ce qui se passe depuis des années ici au Canada, dans tout le pays. Je voudrais me faire entendre pour justifier la demande d'opposition de mon association à cet article 47.

M. LE PRESIDENT: On y reviendra. Monsieur Boutin-DuParc, est-ce qu'il est ici? Il a demandé à se faire entendre tantôt parce qu'il devait retourner à Montréal. Voulez-vous venir au micro, s'il vous plaît?

Fédération des associations de parents de l'enseignement privé

M. BOUTIN-DUPARC: M. le Président, M. le ministre, M. le chef de l'Opposition, messieurs les députés, mon nom est Claude Boutin-DuParc. Je suis avec le président de la Fédération des associations de parents de l'enseignement privé, le Dr François Thelmos. Nous avons pris connaissance du projet de loi 23 un peu à la dernière minute, sur l'information de nombreuses associations qui sont membres de notre fédération un peu partout dans la province.

Nous avions été prévenus par le ministre de l'Education, l'automne dernier, qu'il y aurait fusion du transport scolaire avec le transport normal et qu'il y avait un projet de loi en préparation. Evidemment, c'est un peu une carence des organisations bénévoles de ne pas être continuellement au courant du travail des législateurs. Tout de même, nous avons pris connaissance du projet de loi 23. Nous avons été un peu désappointés, pour ne pas dire désagréablement surpris, de voir la modification à l'article 475, 2b), qui nécessite en même temps une explication de l'article 2a) concernant les ententes de transport prévues pour les institutions associées et les institutions privées déclarées d'intérêt public et les collèges d'enseignement général et professionnel.

Je ne m'attarderai pas à parler des collèges d'enseignement général et professionnel. Je pense qu'ils ont leur propre transport à régler. Nous allons tout simplement demander aux membres du gouvernement de transposer un peu la formulation du paragraphe b) pour deux raisons: la première, nous comprenons, aux explications que semblent nous avoir données certains fonctionnaires du ministère de l'Education, qu'au paragraphe a), on aurait l'intention de comprendre que les institutions associées sont des écoles sous la juridiction des commissions scolaires. Nous sommes bien conscients de la bonne foi de ces explications, toutefois, l'expérience d'interprétation du bill 56, Loi de l'enseignement privé, étant encore amère à notre mémoire, nous aimerions avoir des choses précises dans les textes de loi parce que nous comprenons que l'interprétation, une fois qu'elle est sortie de l'Assemblée nationale, peut varier énormément selon les officiers qui en font l'administration. Il semble de plus en plus qu'on insiste pour avoir des textes de loi qui sont clairs et positifs et qui nous indiquent, à la population, exactement où on s'en va et ce qu'on doit attendre.

Nous aimerions que le paragraphe b) puisse permettre l'organisation du transport scolaire pour les institutions déclarées d'intérêt public et que les coûts soient admissibles aux subventions des commissions scolaires au même titre que les autres transports. C'était un peu l'opinion du ministre de l'Education l'automne dernier à l'effet qu'il y aurait une recomman-

dation faite au ministère des Transports lors de la fusion des transports scolaires et publics, à l'effet que ce serait possible pour les institutions d'intérêt public de demander aux commissions scolaires la négociation de contrats de transport et que les coûts soient assujettis aux normes des subventions au même titre que les autres transports scolaires.

Or, nous voyons au paragraphe b) qu'il y a possibilité de conclure des contrats de transport, mais que la charge en est imputée aux parents. Bien sûr, selon les explications que l'on nous a données, c'est peut-être difficile parfois d'organiser un transport cohérent en même temps pour le secteur public et le secteur privé. Tout de même, nous croyons que la possibilité de cerner ces difficultés reposerait dans la signature des contrats. J'imagine bien que, lorsque cela est absolument impossible de conclure un contrat pour des circonstances locales, la commission scolaire aurait quand même la possibilité de refuser un contrat de transport qui serait peut-être à un coût prohibitif ou impossible à organiser. Nous croyons qu'il y a suffisamment de protection pour le ministre des Transports pour permettre la conclusion de contrats de transport pour les institutions déclarées d'intérêt public, les institutions privées déclarées d'intérêt public et que la précaution de coûts prohibitifs pourrait être corrigée par la négociation ou non de contrats, tandis qu'à l'heure actuelle on impute carrément la charge aux parents. Nous avons déjà affirmé — et je pense que la législation approuvée par les deux partis à ce moment-là, ou plutôt par les trois partis, par les trois représentants des partis qui à cette époque existaient en Chambre l'avait reconnu — que les institutions privées déclarées d'intérêt public faisaient partie de l'équipement scolaire du Québec et qu'à ce titre, évidemment elles avaient droit aux mêmes ajustements de lois que les institutions publiques.

C'est la représentation de notre fédération. Nous voudrions que le paragraphe b) soit modifié et qu'au lieu d'imputer la charge des transports aux parents des institutions privées, on prévoie plutôt que, par le mécanisme des contrats, ce soit admissible aux subventions des commissions scolaires, que la gratuité du transport soit assurée au même titre que dans les institutions publiques et que si il apparaissait dans le contexte de certaines institutions privées, qu'il y a un coût prohibitif ou une impossibilité d'organiser le transport, la non-négociation d'un contrat serait une réponse qui probablement serait acceptée par les parties.

Nous avons essayé de voir dans le paragraphe d) une certaine modification, soit de payer directement aux parents des personnes transportées une somme égale au tarif autorisé pour le transport des élèves. Nous semblons comprendre que ceci pourrait s'appliquer lorsque l'organisation d'un transport cohérent, d'un transport un peu plus organisé se révélerait impossible, et qu'on pourrait verser aux parents des élèves la somme équivalant au transport régulier, pour les élèves qui ont un transport, ce qui ne semblerait pas s'appliquer dans le cas d'un transport organisé pour les institutions privées.

Or, nous soumettons respectueusement, M. le Président, ces observations, en espérant que les députés en prendront bonne note et nous souhaitons tout simplement que la réforme du transport ne soit pas pénalisante pour la clientèle des institutions privées. Nous sommes conscients des efforts qui sont faits à l'heure actuelle pour ajuster la fréquentation du secteur privé et, comme le bill 56 — la Loi de l'enseignement privé — en crée un réseau inhérent au système d'éducation du Québec, nous nous croyons justifiés de demander la modification de cet article pour que le coût soit inclus définitivement parmi les subventions.

Merci.

M. BERTRAND: M. Boutin-DuParc, je vous conseillerais, étant donné que la commission des Transports étudie ici le problème du transport scolaire, de continuer vos démarches, même à la suite de vos propos, auprès du ministre et du ministère de l'Education. Je crois bien que, dans ce domaine-là, mon collègue, le ministre des Transports, se basera sur l'opinion définitive du ministère de l'Education et du ministre en particulier.

M. BOUTIN-DUPARC: M. Bertrand, je ne voudrais mettre personne dans l'eau bouillante, mais il semble, selon nos informations non seulement orales mais écrites, que la directive a été donnée par le ministre et le ministère de l'Education à l'effet d'inclure le transport scolaire pour les institutions privées éligibles aux subventions. Mais le ministère des Transports n'en a pas tenu compte. Je ne voudrais pas... Je veux bien taper sur l'autre ministre...

M. BERTRAND: C'est pourquoi je vous invite à continuer vos démarches de manière que vous n'alliez pas de Pilate à Caïphe.

M. BOUTIN-DUPARC: Mais nous pensons bien qu'aux Transports nous nous dirigeons vers la bonne voie.

M. BERTRAND: C'est fondamentalement un problème d'éducation et de philosophie de l'éducation entre autres dans le domaine des institutions privées. Mon expérience m'indique que le ministre des Transports se basera sur l'opinion définitive du ministre de l'Education.

M. BOUTIN-DUPARC: Nous allons demander au ministre de l'Education d'être clair et public, de sorte que le ministre des Transports entende à la face de la province ce que le ministre de l'Education nous dira.

M. BERTRAND: C'est ça.

M. BOUTIN-DUPARC: Merci.

M. ROY (Beauce): Je voudrais demander au ministre des Transports s'il a quelque chose à ajouter à la suite de la demande de M. Claude Boutin-DuParc relativement à la demande de modification de la clause.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois que les remarques du député de Missisquoi sont très bonnes. Le transport scolaire relève de la juridiction du ministère des Transports, mais par contre cela n'empêchera pas d'avoir des rencontres avec le ministère de l'Education et d'éclaircir certains points que nous ne connaissons pas aujourd'hui et qui vont survenir l'an prochain. Nous serons alors obligés de travailler conjointement. Comme M. Bertrand vient de dire, je ne vois pas pourquoi M. Boutin-DuParc ne continuerait pas de faire ses interventions au ministère de l'Education. Après ça, sur le plan du transport, s'il y a des montants à voter, les députés sont ici pour les voter et décider si on doit faire le transport ou non.

M. ROY (Beauce): Si j'ai bien compris M. Boutin-DuParc, il a fait son intervention ce matin devant la commission parlementaire, parce que la question, qui concerne son groupement et les institutions privées, fait justement l'objet d'une clause dans le présent projet de loi présenté par le ministre des Transports. C'est la raison pour laquelle M. Boutin-DuParc a fait sa représentation ce matin. S'il doit continuer à travailler sur un deuxième front et travailler auprès du ministre de l'Education par la suite, pour qu'il y ait une rencontre entre ce dernier et le ministre des Transports relativement à la rédaction ou à la modification possible de cet article, je pense qu'elle devrait avoir lieu.

M. TREMBLAY (Bourassa): De toute façon, on en prend bonne note. J'ai à mes côtés M. Lewis, le secrétaire, à qui j'ai demandé de prendre des notes et au moment où on en arrivera à cet article-là, on pourra en discuter et lui donner toute l'importance qu'on doit lui donner.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, j'imagine qu'avant de présenter ce projet de loi, vous avez eu des consultations avec le ministre de l'Education.

M. TREMBLAY (Bourassa): Bien sûr, nous nous sommes rencontrés à quelques reprises.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous auriez des commentaires à faire immédiatement sur la proposition qu'a faite M. Boutin-DuParc?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'ai pas de commentaire à faire actuellement. Ici, ce matin, je veux entendre les intéressés expliquer leurs points de vue, et on verra, à chaque article, à prendre note des recommandations, et après ça on verra ce qu'on en fera.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez refondre le bill comme je l'ai demandé.

M. TREMBLAY (Bourassa): S'il y a quelques changements à faire on les fera. Une refonte du bill? Non. S'il y a des changements à faire on pourra les faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne comprends pas l'attitude du ministre. Voilà qu'il a accepté de convoquer la commission parlementaire pour entendre les parties intéressées, et il se refuse, au départ, à apporter les modifications qui vont être substantielles.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous voulez une refonte du bill. Il y a une différence entre une refonte du bill et l'amener...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Nous sommes ici pour entendre les parties. On doit, je crois, entendre les parties. On continuera après.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'aimerais souligner ceci: lorsque le ministre des Institutions financières a présenté le projet de loi dit de protection du consommateur, nous avons entendu les parties intéressées, et les représentations ont été d'une telle importance qu'il nous a fallu refondre véritablement le projet de loi, qui n'est pas encore déposé, d'ailleurs, en Chambre. Je demande au ministre, et je connais ses bonnes intentions, le même esprit de collaboration et de compréhension.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai pris bonne note des suggestions du député de Chicoutimi.

Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal

M. LE PRESIDENT: M. Robert Jodoin, le représentant de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal.

M. RAYMOND: Au lieu que ce soit Me Robert Jodoin, c'est moi, Gaétan Raymond, qui prendrai la parole comme procureur de la Commission de transport de Montréal.

Les articles qui concernent la Commission de transport de Montréal sont les articles 130, 131 et 132 du projet de loi que vous avez devant vous. Avec votre permission, je commencerai par des observations sur l'article 131 avant de toucher aux articles 130 et 132.

En ce qui concerne l'article 131, il s'agit d'ajouter un nouveau paragraphe à l'article 312 de la Loi de la Communauté urbaine de

Montréal au chapitre concernant la commission de transport. Or, je voudrais vous suggérer une concordance de date entre le premier et le deuxième paragraphes pour une raison de convenance, à la Commission de transport. Le premier paragraphe se rapporte à l'article 267 de la loi qui s'applique mutatis mutandis, et dans ce premier paragraphe, on prescrit que la Commission de transport doit déposer ses états financiers auprès des municipalités de la communauté et auprès de la Commission municipale de Québec avant le 1er mai, ce qui équivaut au 30 avril, alors que dans l'amendement proposé où on veut insérer le deuxième paragraphe, on prescrit que la commission devra, au plus tard le 30 mars de chaque année, transmettre son rapport au ministre et à la Commission de transport du Québec. Il nous semble qu'il serait beaucoup plus logique et raisonnable qu'on ait une concordance de dates et que la commission soit obligée de déposer ses rapports vis-à-vis de tous les organismes qui y sont concernés à peu près à la même période. Nous vous suggérons donc de remplacer la date du 30 mars par celle du 30 avril afin qu'il y ait concordance entre les deux paragraphes.

En ce qui concerne maintenant l'objet de l'article 130, qui est d'assujettir la Commission de transport de Montréal au règlement adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de l'article 8, nous avons certaines observations à vous faire. En effet, il ne faut pas oublier que la Commission de transport de Montréal est déjà assujettie à certains paliers d'autorité. Ainsi, pour certains sujets, elle doit passer par le conseil de la communauté, ensuite le comité exécutif de la communauté, la Régie des transports et même la Commission municipale de Québec. Alors, on se demande pourquoi on devrait multiplier les paliers d'autorité, les niveaux d'autorité pour y en ajouter un cinquième ou un sixième qui serait celui du lieutenant-gouverneur en conseil. Il nous semble que les paliers d'autorité précédents auront déjà suffisamment vidé le débat d'une façon démocratique pour ne pas avoir à être assujettis à une intervention ultérieure qui passerait par-dessus tous les paliers inférieurs. Toutefois, à ce sujet, il nous a semblé qu'une partie de l'article 8, les pouvoirs de réglementation donnés au lieutenant-gouverneur en conseil, ne nous touchent pas et les deux seuls paragraphes ou sous-paragraphes au sujet desquels nous aurions des observations à faire sont le paragraphe d) et le paragraphe f). En effet, le paragraphe d) réfère au pouvoir du lieutenant-gouverneur en conseil de décréter des normes de tarifs, de taux ou de coûts de transport. Au paragraphe h), les pouvoirs sont beaucoup plus généraux.

Encore avec votre permission, je reviendrai au paragraphe d). Je voudrais passer immédiatement au sous-paragraphe h). J'ai des raisons de croire que ce sous-paragraphe h) a été rédigé dans le but de régir le transport des écoliers. Or, à la lecture du sous-paragraphe h), on s'aperçoit que les pouvoirs donnés au lieutenant-gouverneur à ce moment-là, dépassent le cadre du transport des écoliers et pourraient aller, par exemple, jusqu'à l'intervention dans la gestion — en anglais, le "management", si vous voulez — des systèmes de transport, ce qui nous parait aller très loin étant donné déjà les mécanismes actuels de fonctionnement de la Commission de transport.

Si nous avons raison de croire que cet article a été rédigé dans le but unique de régir le transport des écoliers, il nous semble qu'il faudrait remanier un peu le texte de cet article de façon qu'immédiatement au début du sous-paragraphe h) nous disions: "Concernant le transport des élèves:" et ensuite, laisser porter l'article tel qu'il est. Autrement, si on laisse l'article tel que libellé, nous assujettirons la Commision des Transports, comme je l'ai dit tantôt, à un cinquième ou sixième palier d'autorité après que toutes les municipalités auront pu se prononcer sur les question concernant l'administration ou la gestion de la Commission de transport.

En ce qui concerne le sous-paragraphe d), décréter des normes de tarifs, de taux ou de coûts de transport, je voudrais vous dire que cet article vient en conflit avec deux articles de la Loi de la communauté urbaine de Montréal, l'article 294, qui régit les circuits, et l'article 296, qui régit les tarifs. Une fois que la Commission de transport a établi ces circuits ou ces tarifs, si les communautés, enfin les villes, les municipalités composant la Communauté urbaine de Montréal ne sont pas satisfaites, elles ont droit d'appel devant la Régie des transports.

De la Régie des transports, il y aura appel au tribunal des transports. Donc, encore une fois, on se demande, en ce qui concerne toujours la Commission de Transport de Montréal, ce que viendrait faire le lieutenant-gouverneur en conseil par-dessus toutes les instances que je viens d'énumérer.

C'est pourquoi, en conclusion à l'article 130, lorsque l'on veut appliquer l'article 8, je suggérerais qu'à la troisième ligne du bill, quand on dit: "Les règlements adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de l'article 8 de la Loi des transports, on ajoute les mots suivants: Sauf les alinéas d) et f), s'appliquent à la commission ainsi qu'à ses moyens ou systèmes de transport". De telle façon qu'à ce moment-là, on aurait sauvegardé l'autonomie qu'on a donnée à la Commission de transport sous la surveillance d'organismes intermédiaires déjà suffisamment démocratiques. Ce sont les alinéas d) et h) plutôt.

M. LEGER: M. le Président, pourrais-je poser une question à M. Raymond? M. Raymond, quand vous analysez ça et que vous dites que ça mettrait un quatrième ou un cinquième palier d'autorité dont la Commission de transport devrait tenir compte dans l'opération régulière

de ses activités, est-ce que vous calculez que ça pourrait retarder ou même paralyser un peu l'opération normale de la Commission de transport d'avoir un autre palier?

M. RAYMOND : Inévitablement. Si déjà il faut traverser un premier, un deuxième ou un troisième palier, ce qui comporte des délais inévitables à chaque étape, il faut encore arriver à une étape ultime, et comme je l'ai dit déjà, la Communauté urbaine de Montréal a tout de même été établie sur des bases suffisamment démocratiques qui donnent le droit aux municipalités de faire valoir leur point de vue. Une fois qu'on a traversé toutes ces étapes et que dans certains cas on a été assujetti à l'appel à la Régie des transports, que va faire le lieutenant-gouverneur en plus par-dessus tout ça? Il y a non seulement une question de délais, mais il y a une question de procédure administrative qui nous paraît extrêmement fastidieuse et nuisible au bon fonctionnement des opérations de la commission, qui représente tout de même la métropole du Canada où il y a un système de transport unique au Canada, et les décisions doivent être prises localement et le plus rapidement possible.

M. BERTRAND: M. Raymond, vous allez d'ailleurs être déjà astreints à la réglementation de la Commission des transports. Vous allez l'être.

M. RAYMOND: Il faudrait s'entendre, nous n'allons être assujettis à certaines décisions de la Commission des transports que dans des domaines très limités, puisque le premier paragraphe de l'article 298 de la Loi de la communauté urbaine de Montréal est maintenu à l'effet que la Commission de transport n'est pas assujettie à la juridiction de la Régie des transports ou de la nouvelle Commission des transports si vous voulez, sauf dans les domaines spécifiés dans la loi.

M. BERTRAND: Pour les tarifs?

M. RAYMOND : En ce qui concerne les tarifs actuellement, le pouvoir de la commission est d'établir ces tarifs sans être subordonnée à aucun autre pouvoir, si ce n'est que les membres de la Communauté urbaine de Montréal peuvent à ce moment-là en appeler de la décision de la commission à la Régie des transports.

M. BERTRAND : Il y a un appel.

M. RAYMOND: Il y a un appel. Je demande, à ce moment-là vu que nous avons le niveau d'appel, si le lieutenant-gouverneur va agir comme l'équivalent d'une cour Supérieure?

M. BERTRAND: Vous êtes assujettis, mais par voie d'appel.

M. RAYMOND: Par voie d'appel. C'est ce que je dis, à ce moment-là. Si nous sommes assujettis par voie d'appel, c'est donc le tribunal d'appel qui pourra apporter la protection désirable à ceux qui ont des intérêts à protéger sur les décisions de la Commission des transports.

Maintenant, avec votre permission, je vais passer à l'article 132, qui représente pour nous une question très importante. L'article 132 a pour objet de modifier le paragraphe 1 de l'article 313 de la Loi de la communauté urbaine de Montréal.

Cet article nous prend un peu par surprise parce que, malheureusement, je pourrais dire que le domaine est sub judice. Le premier alinéa de l'article 313, tel qu'il existe présentement avant l'amendement, fait l'objet d'un litige actuellement pendant en cour Supérieure entre la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal et Murray Hill Limousine Service. Il nous semble que l'amendement rendra absolument illusoire l'instance judiciaire et qu'il s'agit d'une intervention du législatif dans le pouvoir judiciaire à ce stade-ci...

M. BERTRAND: Depuis quand la cause est-elle devant le tribunal?

M. RAYMOND: Elle a été plaidée au mois de décembre et est actuellement en délibéré, les procureurs s'étant échangé des notes à venir jusqu'à récemment. Il s'agit d'une requête en injonction permanente prise par la Commission de transport.

M. BERTRAND: Quand le jugement devrait-il être normalement rendu?

M. RAYMOND : Etant donné la difficulté de la cause et — comment pourrais-je dire? — la précaution légendaire du juge qui rend ces jugements, je doute que nous ayons jugement avant 1972.

M. BERTRAND: Avant 1972.

M. RAYMOND: Parce que nous sommes déjà rendus au mois de juin, il faut tenir compte des vacances du juge comme celles des avocats. Les avocats ont échangé toutes leurs notes, le dossier est censé être terminé. Mais si on se base sur la façon dont le juge rend habituellement ses autres jugements, je douterais, personnellement, qu'il rende jugement avant 1972. Remarquez bien qu'il pourrait le rendre à l'automne mais, à ce moment-là, je tiens compte de mon expérience, devant le juge qui est saisi de la cause, pour dire que je serais surpris qu'il rende jugement avant 1972.

M. BERTRAND: Seriez-vous assez aimable de nous transmettre copie de la requête et copie également des notes? Quant à moi, sur cet article, nous avons eu une décision hier au comité. S'il s'agit d'une affaire qui est devant la

cour, nous ne pouvons pas pour le moment discuter si, substantiellement, c'est le même problème qui est soulevé dans l'article. Et ça invitera le ministre à y penser lorsqu'il reviendra devant la Chambre avec ce projet de loi.

M. RAYMOND: Evidemment, je dois, M. Bertrand, abonder un peu dans vos vues et vous apporter les précisions suivantes. Ce n'est qu'avec votre permission que je pourrais entrer dans le mérite de l'amendement et, pour entrer dans le mérite de l'amendement, je serais obligé de toucher à la substance du litige actuellement pendant entre les deux parties. Si, par exemple, l'amendement était adopté, ce serait rendre absolument illusoire le jugement du tribunal au point que le juge serait obligé, devant le texte de loi intervenu entre l'audition et son délibéré, de juger autrement qu'il pourrait le faire à l'heure actuelle, étant saisi de la cause.

M. BERTRAND: Dans les circonstances, M. le Président, quant à moi je soumets que nous devons nous-mêmes garder en délibéré nos opinions et que le ministre doit en tenir compte au sujet de l'article 132. Je prends note de vos recommandations officielles au nom de la Communauté urbaine à l'effet qu'il y a un litige qui porte substantiellement sur l'article 132 qui réfère à l'article 313 de la Loi de la Communauté urbaine de Montréal. Pour le moment, face à ce qu'on peut faire, une action parlementaire d'après moi serait prématurée.

M. RAYMOND: C'est exactement mon avis, autrement j'aurais des représentations assez élaborées à vous faire. Et si vous prenez la décision que la cause, étant sub judice, il est prématuré d'adopter cet article, je vous suggérerais évidemment de suspendre l'adoption de cet article d'une façon indéfinie.

J'ai été témoin hier du précédent qui s'est passé ici. Il y a eu un précédent par l'intervention officielle du Barreau du Québec. Je dois dire évidemment que, dans notre cas, il était un peu tard pour prévenir le Barreau du Québec afin qu'il ait toutes les données pour lui permettre une intervention officielle ce matin.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que je pourrais demander à M. Raymond si, selon sa conception, l'article 132 était adopté ce matin, cela pourrait amener un élément nouveau dans la cause qui pourrait influencer la décision du tribunal.

M. RAYMOND: Manifestement, le juge serait obligé de dire: Tenant compte d'une loi adoptée dans l'intervalle, voici que ma décision va devenir purement théorique. Et ça peut influencer nécessairement son jugement parce que son jugement deviendrait purement académique, à ce moment-là.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre si, étant donné que le témoin ce matin aurait toute une documentation à présenter sur ce sujet mais qu'il ne veut pas le faire étant donné que ça pourrait être dans un domaine sub judice, il a l'intention de suspendre l'article 132 ou s'il n'a pas l'intention, pour qu'on puisse continuer à discuter le mérite de l'affaire si le ministre décide de l'adopter.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je suis prêt à suspendre l'étude ici en commission parlementaire ce matin.

M. BERTRAND: Je crois que l'attitude du ministre nous permettra d'abord d'obtenir une documentation d'ici là. C'est pourquoi j'invite le représentant de la Communauté urbaine à nous la transmettre.

Cela nous permettra de nous former une meilleure idée sur la portée exacte de l'article relativement au litige qui est devant le tribunal. Quant à moi, je trouve que l'attitude du ministre de suspendre l'examen de l'article ici à la commission est bonne.

M. LEGER: M. le Président, la réponse du ministre ne me satisfait pas en ce sens que, même si on suspend ce matin la discussion de l'article 132, cela ne veut pas dire que l'article ne pourrait pas être adopté quand même en Chambre alors que les représentants ne seront pas présents pour exprimer leur point de vue sur le sens même et les raisons qui motivent leur intervention. Est-ce que le ministre veut dire qu'il n'adoptera pas l'article en Chambre non plus?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois que le député me connaît assez pour savoir mon opinion. L'article 132, c'est l'article 313 de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal. J'ai décidé, ce matin, de le suspendre. Je n'ai pas décidé de le suspendre en Chambre ou à d'autres commissions qui viendront.

M. LEGER: Je ne sais pas si le ministre a compris...

M. TREMBLAY (Bourassa): Cela va à l'encontre de toute entreprise privée de Montréal, de toutes les compagnies d'autobus de Montréal.

M. LEGER: Voilà, la question, M. le Président, que je voulais que le ministre discute parce que je sais que...

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai décidé de la suspendre ce matin.

M. LEGER: M. le Président, je veux faire remarquer au ministre sachant l'intérêt qu'il porte à cet article, ce matin, le fait de suspendre

la discussion là-dessus ne règle pas le problème parce qu'en réalité les arguments qui auraient pu ce matin être apportés à la commission pour éclairer le ministre sur cet article, on est obligé de s'en passer.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois que le ministre pourrait éclairer le député parce que le ministre était ici quand la Communauté urbaine de Montréal a discuté cela. On pourra en discuter à une autre séance.

M. RAYMOND: A ce moment-là, M. le ministre, si on ne fait qu'ajourner la décision ce matin, cela nous couperait le droit de parole et de représentation verbale ultérieure sur les conséquences de l'adoption, par exemple, en Chambre, à la troisième lecture, de l'article 132, le premier alinéa de l'article 313. Je dois vous dire qu'à ce moment-là cela aurait des conséquences très importantes et très sérieuses pour la Commission de transport, non seulement au niveau de l'administration, mais même au point de vue financier qui va retomber sur les municipalités de la Communauté urbaine de Montréal.

M. BERTRAND: M. Raymond, ce matin nous avons énormément de personnes qui veulent être entendues. Quant à moi, j'accepterais que nous suspendions l'étude de cet article 132 relatif à l'article 313 pour la raison bien simple que vous nous indiquez qu'il y a une cause devant le tribunal. Afin de connaître un peu plus l'ampleur de ce problème, je vous ai demandé des documents. Quant à moi, — on est à une première séance de la commission — si on pouvait avoir au moins l'occasion de se former davantage une opinion quant à sa portée exacte, j'en serais satisfait pour le moment. Je ne m'engage pas pour l'avenir.

M. RAYMOND: D'accord!

M. BERTRAND: Mais que nous suspendions l'examen de cet article immédiatement quitte à y revenir.

M. RAYMOND: S'il doit y avoir une autre audition...

M. BERTRAND: Quitte à y revenir parce qu'il y aura d'autres auditions. Vous pouvez être sûrs qu'avec tous les mémoires que nous avons à entendre, nous sommes ici au moins pour quelques séances. Si mes collègues voulaient accepter cela, M. le Président, cela ne paralyserait pas les travaux, cela nous permettra de nous former une meilleure opinion. Quant à moi, je n'accepterai pas que cet article soit adopté s'il est de la nature que nous indique le procureur. Par ailleurs, j'aimerais me rendre compte de sa portée exacte, en ce qui a trait au litige.

M. RAYMOND: J'abonde dans vos vues, M. le chef de l'Opposition, à la condition qu'il y ait une deuxième audition publique parce que je dois vous dire que cet article que...

M. BERTRAND: Absolument.

M. RAYMOND: ...cet article ne concerne pas uniquement la commission comme telle, mais aussi le syndicat des employés de la Commission de transport...

M. BERTRAND: Parfait.

M. RAYMOND:...et dont le représentant est ici et qui aimerait à se faire entendre. Si on ajourne à une autre audition, il n'en souffrira pas, la commission non plus.

M. BERTRAND: M.Raymond, nous verrons quant à nous et nous demandons au président, immédiatement après que l'examen en aura été fait par les conseillers juridiques du gouvernement et par nous les membres de l'Opposition, que vous soyez invités à une séance subséquente. Ce problème-là, s'il peut être examiné ici par la commission, il faut que vous soyez présents vous et les représentants du syndicat.

M. ROY (Beauce): M. le Président, en ce qui nous concerne, nous sommes prêts ce matin à suspendre cet article étant donné que c'est devant les tribunaux, que la cause est sub judice. En ce qui nous concerne nous tenons à ce que M. Raymond...

M. RAYMOND: C'est bien cela, monsieur.

M. ROY (Beauce): ... puisse revenir devant la commission parlementaire et que nous puissions l'entendre à nouveau, de façon que cette question soit étudiée à fond. C'est notre position, M. le Président.

M. LEGER: M. le Président, en ce qui nous concerne, je n'ai pas d'objection à ce que l'on remette cette question à une autre séance, mais est-ce que le ministre peut m'assurer qu'il y aura une autre commission parlementaire?

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que vous croyez, par l'expérience que vous avez dans cette Chambre depuis un an et demi, que l'on peut régler cette question dans une journée? Il y aura d'autres séances et, à la prochaine séance, la Communauté urbaine de Montréal sera avisée de revenir ici pour faire toutes les interventions qu'elle veut faire. On pourra lui répondre.

M. LEGER: M. le Président, M. le ministre peut répondre avec son expérience de plusieurs années à l'Assemblée nationale que la cause sera probablement encore sub judice la prochaine fois que l'on se rencontrera.

M. TREMBLAY (Bourassa): On verra, à la

suite des paroles que l'honorable député de Missisquoi vient de prononcer et après avoir consulté nos conseillers, ce qu'il faudra prendre comme décision.

M. LEGER: S'il y a moyen de se rencontrer à nouveau, je suis d'accord sur cette condition.

M. LE PRESIDENT: M. Raymond, avez-vous terminé?

M. RAYMOND: J'ai terminé, M. le Président, si la proposition est adoptée, évidemment j'en suis satisfait.

M. LE PRESIDENT: La commission suspend l'étude de l'article 132 de la loi. M. Paul Noreau... Si vous voulez prendre le micro. Veuillez vous identifier.

Comité des transporteurs scolaires de la division de Montréal

M. PERREAULT: Je suis François Perreault du bureau d'Adrien Paquet à Montréal. Nous représentons actuellement le Comité des transporteurs scolaires de la division de Montréal qui conteste l'article 313. La majeure partie de ses revendications repose justement sur cet article de sorte que, si l'on suspend ce matin l'étude de cet article et qu'on avise ensuite Me Raymond d'une prochaine réunion, nous aimerions en être avisés également afin que nous puissions faire valoir nos revendications.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y en a d'autres qui ont des représentations à faire sur l'article 132 de sorte qu'on ait les noms et qu'on puisse vous aviser...

Fédération des services publics

M. LEPAGE : Mon nom est Léon Lepage. Je suis représentant de la Fédération des services publics, organisme affilié à la CSN. Justement l'article, dont l'étude est suspendue ce matin, pose un problème très sérieux pour les syndiqués employés des organismes de transport locaux. Alors il est absolument indispensable que l'on puisse se faire entendre sur la portée sociale de l'article 313 sur des choses qui sont déjà acquises de façon contractuelle pour les employés de ces différents organismes. Je voudrais être entendu sur le cas pour qu'on puisse discuter au mérite de ce paragraphe de la loi.

M. LE PRESIDENT: C'est très bien, M. Lepage, on vous avisera.

Communauté urbaine de Montréal

M. TRUDEAU: M. le Président, mon nom est Marcel Trudeau. Je représente la Communauté urbaine et Me Raymond représente la Commission de Transport. Ce sont deux orga- nismes différents et je demanderais également d'être avisé.

M. LE PRESIDENT: Très bien. Est-ce qu'il y en a d'autres?

Murray Hill

M. GAGNON: Je suis Me Guy Gagnon. Je représente la compagnie Murray Hill. Je représente également certaines compagnies qui font du "sight seeing". Nous aimerions aussi être avisés.

M. LE PRESIDENT: Bon d'accord. Est-ce qu'il y en a d'autres?

M. STEIN: M. le Président, j'aimerais attirer votre attention sur le fait qu'il y a d'autres articles dans le bill dont l'étude est suspendue. Dans mon cas, je représente la Commission de Transport de la Communauté urbaine de Québec. Je présume la même chose pour la communauté de l'Outaouais, même si ce n'est pas mon affaire. Vous voudrez probablement prendre la même décision, en même temps, pour les autres articles qui sont au même effet.

M. LE PRESIDENT: Oui, d'accord. On continue. M. Paul Noreau, secrétaire de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec.

Association des propriétaires d'autobus du Québec

M. BHERER: M. le Président, mon nom est Wilbrod Bhérer, je suis l'avocat de l'Association des propriétaires d'autobus de Québec et je représente l'association, ce matin, aux lieu et place de M. Noreau.

Nous avons distribué un mémoire — je ne sais pas si vous en avez des copies —.

Nous en avons remis copie hier ou avant-hier au secrétariat de la commission. Je vais le commenter assez sommairement en y référant, si vous l'avez devant vous. D'abord, je tiens à vous signaler que, dans la province de Québec, l'autobus est le plus important mode de transport de passagers qui relie à peu près toutes les municipalités de la province aux centres régionaux et urbains pour des fins administratives, scolaires ou autres. Il y a au-delà de 800 municipalités dans la province qui n'ont pas d'autres moyens de transport que l'autobus, qui les relie ensemble par ces divers circuits et constitue un réseau de transport qui donne satisfaction à la population.

Je ne sache pas qu'il y ait de griefs contre ce moyen de transport tel qu'actuellement contrôlé par la Régie des transports. Cette industrie est extrêmement importante et nous vous soumettons dans notre mémoire que seule une législation qui assure le contrôle de cette entreprise dans l'intérêt public par une commission indépendante composée d'hommes compé-

tents en la matière offrira, à ceux qui ont investi et devront continuer d'investir des sommes considérables pour le maintien et le progrès continu de cette industrie au service du public, les garanties nécessaires à la rentabilité de tels établissements.

Ceci étant dit, nous craignons que le projet de loi tel que soumis, qui laisse au lieutenant-gouverneur en conseil — et sans que nous sachions quelle sera cette législation, et ce contrôle et sa nature — le contrôle déterminant de cette industrie, nous craignons, dis-je que cela ouvre la porte à l'instabilité de la réglementation, la carence de principes généraux sanctionnés par une jurisprudence motivée par les circonstances et les faits, et crée une situation d'incertitude qui pourra influer largement sur l'avenir de ce mode de transport en le privant des capitaux nécessaires à son expansion.

Vous comprenez facilement que, si les capitaux actuellement investis dans cette entreprise ne sont pas établis sur des bases solides et fermes qui assurent leur rentabilité, on ne pourra plus trouver de capitaux pour continuer de faire progresser cette entreprise. Nous estimons qu'il y a actuellement entre $75 millions et $100 millions investis dans l'industrie du transport de voyageurs par autobus et nous craignons cette forme de réglementation par règlements au lieu de celle de la régie par ordonnance motivée.

Je réfère dans le mémoire, à la page 2, aux différents articles — il y en a 24 — où l'on dit que le règlement sera le contrôle déterminant de la politique de la régie. Dans notre esprit, ça signifierait que les règlements, tels qu'on les soumet, c'est ce que nous constatons, pourraient vouloir dire à un moment donné: Sur une route, on va charger tel taux pour transporter des voyageurs entre tels endroits. Sur une autre, on chargera un autre taux. Entre tel endroit et tel autre, il y aura deux transporteurs au lieu d'un. Et si les règlements disent ça, ça veut dire que la régie sera obligée d'émettre deux permis, sans tenir compte de la rentabilité. Ou bien nous aurons un tribunal qui va être le tribunal qui va juger l'entreprise, qui va juger dans l'intérêt public après avoir entendu les parties, ou bien ce seront les règlements qui yont contrôler l'industrie. Nous craignons le contrôle par les règlements, nous sommes satisfaits et nous ne craignons pas le contrôle par une régie autonome qui rend des jugements motivés et qui rend des jugements qui sont basés sur l'intérêt public.

C'est la teneur de toute notre intervention en ce qui a trait au contrôle par règlements, parce que si on lit l'article 8, par exemple, on constate que le ministre ou le lieutenant-gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre, aura le droit d'établir des normes, plus précisément à l'article 5: "Déterminer la nature des moyens de transport, leur nombre, leur qualité, évaluer leur efficacité en fonction du développement économique, prendre des mesu- res destinées à améliorer les moyens des systèmes de transport, dresser un plan des système, faire la nomenclature des taux, prendre les mesures destinées à améliorer les coûts et les services de transport notamment en coordonnant et en intégrant de tels services.

C'est presque de l'expropriation sans indemnité. C'est presque de l'expropriation! Coordonner et intégrer des services qui appartiennent à l'industrie privée si on ne parle pas de l'exproprier, enfin, c'est l'exproprier sans l'indemniser. Si on se réfère ensuite à l'article 8 au paragraphe a): "Etablir des normes d'utilisation, de garde, d'entretien, de propriété ou de possession de tout moyen ou système de transport, fixer les droits annuels ou autres payables, déterminer la nature," ça va, mais décréter des normes de tarifs, de taux ou de coûts de transport! Les taux, cela se détermine en fonction du coût d'exploitation. Le coût d'exploitation doit être déterminé par un tribunal qui prend connaissance de tous les faits, entend les parties intéressées, les passagers comme l'exploitant et qui, après ça, rend un jugement et qui donne des motifs de ce jugement afin qu'on ne soit pas pris devant une décision. On n'est obligé de consulter personne quand on passe un arrêté en conseil. Nous craignons cette forme de réglementation qui deviendrait le motif déterminant des actions de la régie et qui remplacerait dans une certaine mesure la régie.

En d'autres termes, si on devait avoir des règlements et une politique de transport, nous soumettons qu'elle devrait être dans la loi, qu'on soit en mesure de l'apprécier, que la Législature soit celle qui la détermine. Elle doit être d'ordre général et non pas d'ordre particulier.

Maintenant, d'autres commentaires. A l'article 30, nous approuvons l'idée que la commission motive ses décisions, ce qui était déjà fait d'ailleurs. Nous ajoutons cependant qu'il serait peut-être opportun de demander à chaque régisseur de rendre un jugement distinct. Il nous semble que cela assurerait un plus large éventail d'opinions et une plus grande liberté d'expression de chacun des commissaires. Les décisions seraient alors rendues en majorité. Rendre ça public permettrait de mieux apprécier les idées qui sont émises et de mieux canaliser les opinions si chaque commissaire siégeant dans une cause était obligé et tenu de rendre un jugement distinct. Que ce soit la majorité des décisions! C'est ce qui se passe dans tous les tribunaux où il y a plusieurs personnes qui siègent. Il semble que cela serait une amélioration à la loi actuelle.

A l'article 43, on dit que le permis sera valide pour un an expirant le 31 mars de chaque année. M. le Président, c'est extrêmement dangereux! Voici quelqu'un qui va investir des millions dans une entreprise et il a un permis pour un an. Pensez-vous qu'on va pouvoir continuer de se financer et à quoi serons-nous

soumis à chaque année pour obtenir un nouveau permis? C'est extrêmement important. Il faut qu'il y ait continuité là-dedans. Toutes les autres entreprises sont tenues à avoir une continuité d'opération parce qu'il n'y a pas d'investissement qui se fait si cela ne se fait pas à long terme.

Encore une fois, je dis dans mon mémoire, à la fin, qu'aujourd'hui les autobus qui circulent sur les routes coûtent chacun $80,000 et il y en a qui ont plusieurs dizaines de ces véhicules. On ne peut pas investir des sommes d'argent aussi considérables. Il y en a 1,200 dans la province de ces véhicules-là. Il y en a environ 10 p.c. qui se renouvellent chaque année. Imaginez 120 fois $80,000 qu'il faut réinvestir chaque année dans l'industrie. Si on investissait seulement pour un permis qui dure un an et qu'on ne sait pas trop à la fin de l'année comment cela va fonctionner: les règlements du lieutenant-gouverneur en conseil, la régie, un jour de fête, enfin, qu'est-ce qui va arriver? Il serait plus réaliste et plus conséquent de dire que le permis ou l'autorisation émise est valide jusqu'à ce qu'elle ait été révoquée ou annulée par la commission et pour cause — pas pour n'importe quoi — d'intérêt public. Là, vraiment, on peut faire de l'investissement, c'est ce qui existe actuellement.

A l'article 44, on dit que le permis...

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que vous avez à l'heure actuelle un permis de plus qu'un an?

M. BHERER: La régie n'émet pas actuellement un permis chaque année. C'est la licence qui est émise chaque année.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que c'est pour un an ou pour dix ans?

M. BHERER: Il n'y a pas de renouvellement annuel actuellement. Il n'y a aucun permis qui est renouvelé annuellement. Les plaques d'immatriculation sont émises à chaque année, mais les permis ne le sont pas annuellement.

M. BERTRAND: M. Bhérer, quand vous obtenez un permis de la régie, c'est-à-dire une autorisation, c'est un jugement de la régie, et à ce moment-là si vous respectez les conditions d'année en année il n'y a pas de problème. Vous avez une licence.

M. BHERER: C'est ça! M. le Président, voici le processus actuel. La régie rend une ordonnance autorisant l'émission d'un permis. Elle émet un permis et, à chaque année, il faut aller à la régie pour voir si notre dossier est complet avant de se faire émettre des plaques par l'émetteur de plaques d'immatriculation. C'est le processus actuel. Mais le permis n'est pas renouvelé annuellement. Et surtout la loi ne dit pas qu'il expire le 31 mars de chaque année. C'est ça qui est extrêmement dangereux. Cela voudrait dire que, si on n'a pas en main notre permis le 31 mars, le 1er avril on exploite illégalement. Pensez-vous qu'on va pouvoir exploiter une entreprise qui vaut des millions sur cette base? C'est impossible.

A l'article 45, on dit que le permis sera détenu par une personne physique. Nous soumettons, M. le Président, que ce n'est pas réaliste non plus. On ne doit pas dissocier le possesseur des biens d'exploitation du détenteur du permis, car les biens sont sans valeur pour l'exploitant s'il ne détient pas un permis. D'autre part, le permis est sans valeur pour le détenteur s'il ne possède pas les biens nécessaires à l'exploitation de son entreprise. Il faut que les deux soient reliés l'un à l'autre. Vous avez, par exemple, dans le domaine du transport des écoliers — pour vous montrer jusqu'où ça peut aller — des vendeurs d'autobus d'écoliers qui sont vraiment les exploitants du transport, mais ce n'est pas eux qui ont le contrat. Par exemple, ils vendent un autobus avec contrat à réméré, avec contrat à clauses résolutoires; le détenteur du contrat paie une espèce de loyer pour se servir du véhicule, et quand il a terminé son contrat, le véhicule retombe entre les mains du vrai propriétaire.

On constituerait une industrie sur cette base, qui à sa base, serait insolvable, qui pourrait être insolvable. Si le détenteur physique n'a pas de biens et qu'il a un permis et que c'est une compagnie à fonds social qui exploite ce permis-là, comme la loi le permet actuellement, lui, il pourrait être une personne insolvable qui exploiterait une entreprise solvable, peut-être. Mais lui, il serait une personne insolvable. On ne pourrait pas le poursuivre en justice personnellement. Et c'est lui qui serait le détenteur du permis. C'est lui qui aurait la responsabilité du transport. Ce n'est pas l'exploitant. Ce n'est pas l'exploitant propriétaire des véhicules et des biens.

Alors, je soumets que ce n'est pas réaliste, M. le Président. Il faut absolument que le détenteur du permis soit le propriétaire des biens et que le propriétaire des biens soit le détenteur du permis. Il faut que les deux soient reliés parce qu'il y a des obligations envers le public. On transporte des passagers. On est responsable envers eux de les mener à bon port. Il y a un tas de responsabilités qui incombent au transporteur lorsqu'il accepte de transporter quelqu'un. Nous soumettons donc, que cela n'est pas réaliste.

A l'article 44, nous nous opposons à ce que le ministre puisse décider, par sa recommandation au lieutenant- gouverneur en conseil, s'il y a lieu d'émettre des permis temporaires. La commission doit être le seul juge de l'urgence de l'émission de tels permis en tenant compte des droits des intéressés et de l'intérêt public. Cet article-là permettrait à quelqu'un d'aller voir le ministre des Transports, d'obtenir un arrêté ministériel puis de se faire émettre un permis temporaire. Enfin, ou bien on est sous le

contrôle de la régie ou de la Commission des transports, ou bien on est sous le contrôle du ministre du Transport. Et si, d'une part, celui qui transporte régulièrement des gens, qui a toutes les obligations de transporter le public, peut voir arriver un concurrent avec un permis temporaire sans avoir consulté la Régie des Transports dont il dépend, sans avoir eu l'occasion de faire des représentations, alors, il me semble qu'il y a une injustice là. Ou bien c'est la commission qui émet les permis ou bien c'est le ministre.

M. BERTRAND: Je vais vous citer le cas, M. Bhérer, du transport des fruits à certaines périodes de l'année. Je me souviens d'un cas où un homme était obligé de transporter des fruits à telle période de l'année. Il n'y avait pas d'autres moyens que le transport le dimanche sur les routes. Mais je ne crois pas, d'une manière générale, qu'il y ait une urgence telle que la personne, qui demande un permis temporaire, ne puisse aller devant la commission et faire la preuve qu'il y a d'abord intérêt public et, ensuite, urgence. Je crois, comme vous, que c'est un pouvoir qui ne devrait pas être laissé au lieutenant-gouverneur en conseil. Cela peut prêter à des abus, suivant des coutumes que je ne qualifierai pas mais qui sont connues, c'est de notoriété publique. Je crois juste votre recommandation à savoir que la Commission des transports, la régie, soit seule juge en pareille circonstance, indépendamment des quelques cas exceptionnels qui peuvent se produire. On n'adopte pas une loi pour des exceptions, on l'adopte pour des cas généraux.

M. BHERER: Je vous assure, M. le Président, que dans le domaine du transport des passagers actuellement — j'en parle parce que je le connais bien, ça fait 35 ans que je suis avocat des propriétaires d'autobus, je sais ce qui se passe devant la régie — je peux vous dire en toute sincérité qu'il n'y a pas de cas où les gens n'ont pu être transportés parce que la régie n'avait pas pu émettre un permis temporaire. Il n'y a pas de personnes qui ont souffert du fait qu'il y avait une urgence à laquelle il fallait répondre, et qu'on n'a pas pu y donner suite à temps. C'est impossible, il y a toujours des véhicules disponibles tout autour des gens, et il n'y a pas d'urgence à laquelle on n'a pas répondu. Maintenant, je me demande aussi si le ministre va être plus rapide que la régie. Si c'est une question de rapidité dans l'urgence, je me demande lequel va être le plus rapide des deux.

M. BERTRAND: Il est habitué de voyager en avion.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... frère volant.

M. BOSSE : Cela pourrait être l'exception qui confirme la règle.

M. BHERER: Quand je fais ces remarques,

M. le ministre, je n'attaque pas M. Tremblay, le ministre actuel, j'attaque le principe...

M. BERTRAND: Le système.

M. BHERER: ... des choses. Je vous prie de m'excuser si je semble parler du ministre.

M. TREMBLAY (Bourassa): Surveillez-vous!

M. BOSSE: Quand vous vous attaquez aux Tremblay, vous vous attaquez à tous les partis.

M. BHERER: Je tremble devant vous, messieurs! A l'article 57, on suggère que les avis de requêtes et les décisions de la régie soient publiés dans la Gazette officielle. Nous croyons que cela alourdira considérablement la procédure. Ensuite ça va obliger tous les propriétaires d'industrie de transport et tous ceux qui s'intéressent au transport à s'abonner à la Gazette officielle. Enfin, si c'est pour augmenter le volume de publication de la Gazette officielle, c'est sûrement un bon moyen parce qu'il y a un grand nombre de détenteurs de permis.

Mais actuellement, la régie publie un bulletin bimensuel dans lequel elle donne les avis de toutes les requêtes reçues et de toutes les ordonnances rendues. Dans ce bulletin — je ne sais pas si elle donne les ordonnances rendues, je m'excuse — je suis certain qu'elle publie les avis de toutes les requêtes reçues. Ce bulletin est distribué à tous les détenteurs de permis et à tous les corps publics intéressés qui donnent leur nom à la régie et qui veulent recevoir ce bulletin-là.

Cela ne coûte rien à personne, et c'est un mode de distribution des informations qui est très correct et suffisant. Je pense que la publication dans la Gazette officielle serait de trop, M. le Président. Je soumets respectueusement...

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous avez dit que ça faisait plusieurs années que vous étiez avocat des compagnies d'autobus. Est-ce que ce n'est jamais arrivé que la régie ait oublié d'avertir une telle compagnie?

M. BHERER: Pas depuis...

M. TREMBLAY (Bourassa): Cela ne fait qu'un an et quelques mois que je suis ministre, et j'ai déjà eu beaucoup de plaintes à l'effet que certaines compagnies ont eu des permis temporaires ou d'autres permis donnés sans qu'elles soient au courant.

M. BHERER : Pas dans le domaine des autobus, M. le ministre.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois que la Gazette officielle est une maison d'affaires sérieuse. Comme le transport au Québec est sérieux, comme je peux le voir ce matin, je crois

que la Gazette officielle est réellement la Gazette du Parlement et des lois.

M. BHERER: Combien cela coûte-t-il pour s'abonner à la Gazette officielle? Vous obligez tout le monde à s'abonner à la Gazette officielle, qui contient toutes sortes d'autres informations qui ne nous intéressent pas.

Je pense qu'on devrait avoir un document qui ne s'intéresse qu'au transport et la régie en publie déjà un. Je ne vois pas pourquoi on remplacerait celui-là par la Gazette officielle. Enfin, si on le veut, moi, je vous suggère que c'est inutile. Nous avons tous l'information dont nous avons besoin. Je parle pour le domaine de l'autobus, je ne parle pas pour le camionnage, je ne connais pas du tout les conditions du camionnage. Mais dans le domaine de l'autobus, nous n'avons jamais eu à nous plaindre que des gens n'avaient pas été avisés. Nous n'avons pas été avisés dans le cas, M. le ministre, de permis temporaires. Nous ne le serions pas plus si c'était le lieutenant-gouverneur en conseil qui les émettait. Nous nous plaignons parfois de ne pas avoir été avisés pour l'émission d'un permis temporaire mais nous avons toujours été avisés lors de l'émission de permis à la suite d'une requête. Nous avons toujours eu l'occasion de nous faire entendre, même actuellement, nous avons quinze jours de délai pour produire une requête après la réception du bulletin, nous avons quinze jours pour répondre, nous opposer ou faire des représentations.

Alors, il n'y a pas de raison pour que quelqu'un puisse prétendre ne pas avoir été informé.

A l'article 75, le ministre demande de pouvoir en appeler d'une décision dans une cause où il n'était pas partie. Enfin, ce n'est pas à moi à juger si c'est nécessaire ou non. Il me semble que c'est inutile. S'il n'est pas partie au litige, pourquoi est-ce qu'il pourrait en appeler?

M. BERTRAND: Voici, M. Bhérer, le principe qui peut être en jeu. Nous avons déjà eu, quant à nous, l'occasion d'examiner ce problème.

Dans le projet de loi, je conviens avec vous que le gouvernement n'indique pas les critères ou les objectifs de sa politique globale. Mais un gouvernement doit avoir une politique globale des transport. Cette politique, c'est l'entreprise privée qui, dans la mesure du possible, la réalise et par le truchement des commissions de transport municipal comme on les a à Québec, dans l'Outaouais, etc.

Par contre, il est survenu des cas où la régie a pu rendre un jugement dérangeant une politique qui n'était peut-être pas établie en bonne et due forme dans un document, mais une politique véritablement québécoise, d'intérêt public pour le Québec, dans la protection — et c'est le rôle du gouvernement — des intérêts du Québec et de ceux qui y vivent. La régie rend donc une ordonnance; les parties n'en appellent pas parce qu'elles se sont entendues — j'ai des cas en mémoire que je ne citerai pas —. A ce moment-là, aucun moyen de faire réexaminer ce problème.

Sur tout cela, je vous le dis, à l'heure actuelle, tel que la loi l'est, j'abonderais dans votre sens, à moins de connaître quels sont les principes de la politique globale et vous en avez indiqué un tantôt. Ce qui me surprend dans le projet de loi — je suis content de cette intervention que vous faites dans ce domaine — c'est qu'il n'y ait pas des principes. Il y a eu une loi nationale des transports qui a été adoptée à Ottawa et cette loi comporte des principes. On peut aimer les principes qui y sont indiqués, on peut différer d'opinion mais qu'importe, il y en a. Vous avez un critère que vous avez indiqué tantôt: l'intérêt public des usagers dans certains domaines. Il y a à part ça l'intérêt économique du Québec qui en est un autre. Et il y a des critères que l'on pourrait tirer d'ailleurs de décisions déjà rendues et en faire des principes fondamentaux d'une loi. On n'a pas besoin d'écrire trois chapitres là-dessus mais de les indiquer dans la loi. Et là, les règlements pourront se raccrocher aux principes que l'on y trouvera. C'est là, quant à moi, le grand vice du projet de loi actuel. C'est que l'on s'inspire de certaines lois d'ailleurs, non pas pour reprendre, reproduire les mêmes principes, mais qu'on ait des critères qui permettent à l'industrie en général de savoir que la commission ou que le gouvernement sera guidé dans ses actes par de tels principes.

M. BHERER: C'est ce que nous recherchons.

M. BERTRAND: C'est cela. Je crois que de ce côté-là la loi pèche grandement.

M. BHERER: On ne dit même pas dans la loi que les décisions de la régie devraient être basées sur l'intérêt public. On ne dit même pas cela, alors que les régisseurs pourraient décider n'importe quoi actuellement. Il faut tout de même qu'ils se raccrochent à quelque chose.

M. BERTRAND: Disons d'une manière générale-vous avez rendu hommage tantôt à la régie — que la régie a appliqué ce principe-là, mais pourquoi ne pas le mettre dans la loi? C'est un point. Il y a autre chose, le développement d'un système de transport adéquat au Québec. Je me souviens des propos de mon collègue feu Daniel Johnson qui s'était penché sur ce problème et avec qui nous avons discuté à plusieurs reprises d'une politique québécoise dans le domaine du transport vu, entre autres, la pénurie des chemins de fer. Dans certains domaines c'est l'industrie du camionnage, M. Archambault le sait, cela a souvent été discuté. Il serait à propos que la loi indique dès le départ quels sont les principes qui guident le gouvernement et qui devront guider la Commission des transports.

M. BHERER: M. le Président, c'est là le but de toute notre intervention quant aux règlements. Aussi longtemps que l'on ne connaîtra pas quelle est cette politique, je pense qu'on ne peut pas faire de règlement adéquat. Il faut d'abord décider de la politique qu'on veut mettre en pratique.

M. BERTRAND: C'est cela.

M. BHERER : Cette politique-là, je dois vous dire qu'elle doit être basée, il n'y a pas de doute, sur l'intérêt public des usagers, l'intérêt public aussi de l'exploitant parce qu'il faut que l'industrie du transport soit rentable...

M. BERTRAND: Exactement.

M. BHERER: ...si on veut qu'elle reste entre nos mains. Il ne faut pas avoir peur de dire qu'on doit exploiter une entreprise publique avec un profit raisonnable aussi. C'est ce que la régie s'efforce de fixer à chaque fois qu'on demande une augmentation de taux, la fixation de taux, elle s'assure que cela rendra de façon raisonnable au propriétaire pour les capitaux qu'il a investis, et ainsi de suite. Il y a les services à la population des centres éloignés. Ces gens ont droit à des moyens de transport en commun aussi. Il n'y a rien qui parle de cela dans la loi. Si on disait ce qu'on veut atteindre par la politique, ce que le ministre des Transports est chargé de mettre en application, ce que la régie aussi est chargée de mettre en application, c'est une ordonnance des moyens de transport en fonction de tels objectifs. Il n'y a plus de problème à ce moment-là parce qu'on sait à quoi on s'expose en investissant des capitaux dans cette entreprise. Actuellement, nous dépendons des ordonnances rendues dans le domaine du transport de voyageurs. Il y a une continuité de principes qui sont énoncés dans les ordonnances qui sont rendues jusqu'à maintenant qui nous assurent une continuité des principes régulateurs de l'industrie parce que d'une décision à l'autre la régie modifie ou non ses attitudes mais on sait vers quoi elle se dirige. On sait à quoi on s'expose en exploitant cette entreprise. Mais si on fait fi de tout cela, on recommence à neuf et on n'a pas de politique, alors, où allons-nous? C'est cela notre préoccupation actuellement.

Maintenant à l'article 76, il y a quelque chose qui est intéressant, je crois. On fixe le délai d'appel à huit jours de la décision et on donne le délai de présentation de la requête de trois jours. Pour les personnes qui demeurent dans les centres éloignés, M. le Président, ce délai est insuffisant. Je soumets que cela devrait être quinze jours. Quelqu'un qui demeure très loin des centres administratifs — le siège social de la commission est à Québec, il y a un bureau à Montréal — celui qui demeure très loin de ce centre-là, avant qu'il ait reçu la communication de son jugement, vu son avocat, préparé une requête en appel, je crois que huit jours sont insuffisants. Vraiment! Il faudrait mettre quinze jours et aussi prolonger à cinq jours le délai de présentation de la requête en appel pour les mêmes raisons.

Un autre article qui nous préoccupe beaucoup c'est l'article 85 qui a trait aux peines et amendes prévues qui va même jusqu'au retrait des plaques. M. le Président, l'industrie du transport s'applique aussi aux camionneurs, mais je parle seulement pour les autobus. Un autobus, dans une même journée, peut être conduit par trois chauffeurs différents. Ils ont des heures de travail qui sont déterminées, pas plus que huit heures par jour. Il y a des véhicules qui voyagent toute la journée, 24 heures par jour. Ils peuvent être conduits par trois chauffeurs différents. Ces chauffeurs vont commettre trois infractions avec le même véhicule. Le lendemain matin, la loi dit qu'on lui enlève ses plaques. Ce n'est pas la faute du propriétaire, cela. Le propriétaire n'a rien eu à voir là-dedans, lui.

C'est bien malheureux mais c'est le chauffeur qui a commis une infraction et non le propriétaire de l'entreprise. On ne peut pas enlever des plaques mais qu'on enlève la licence du chauffeur ou qu'on punisse ce chauffeur, mais pas le propriétaire de l'entreprise. Comment voulez-vous qu'un propriétaire d'entreprise, qui a 10, 15, 20, 50 véhicules qui circulent sur la route continuellement, puisse empêcher ses chauffeurs d'aller trop vite ou bien de ne pas arrêter aux traverses à niveau ou de faire des erreurs en conduisant leur véhicule. Si encore une fois le même véhicule commet dans les mêmes vingt-quatre heures un délit ou trois infractions et qu'on lui enlève ses plaques, c'est absolument illogique.

M. BERTRAND: Dans le cas des autobus, il faut que l'horaire établi par la compagnie de transport suivant les distances ne soit pas trop serré. Il peut arriver que des employés, chauffeurs d'autobus, soient placés dans la position — je prends un fait hypothétique — d'un horaire tellement étroit qu'il doit franchir telle distance en tant d'heures. J'ai déjà eu certains cas qui ont été portés à mon attention où la compagnie avait coincé ses chauffeurs dans un horaire tellement chargé, tellement étroit qu'il fallait qu'ils fassent de la vitesse!

M. BHERER: En admettant...

M. BERTRAND: C'est un cas hypothétique.

M. BHERER: Admettons qu'il y a peut-être des industries ou des propriétaires d'entreprises qui auraient fait ça. Actuellement ça ne se fait plus. C'est strictement contrôlé, ça. Ce qui arrive, M. le Président, c'est qu'un chauffeur d'autobus qui n'est pas censé arrêter sur une route par exemple arrête et, quand il reprend son temps après ça, il va plus vite que permis. Il

y a toutes sortes de circonstances. Admettons qu'il y a un accident, ou autre chose, il arrête sur la route pour aider quelqu'un. Il y a toutes sortes de circonstances qui peuvent forcer quelqu'un à commettre une infraction. Ce que nous ne voulons pas, c'est que le propriétaire de l'entreprise, qui n'a rien eu à voir avec l'infraction, soit pénalisé. Au fond, c'est un peu comme dans le domaine civil où celui qui n'a pas été capable de contrôler les dommages causés par son employé, ne peut pas en être tenu responsable. Celui qui n'a pas commis d'acte participant à l'infraction et qui n'a rien pu faire pour l'empêcher d'être commise ne doit pas être pénalisé. Il y a des offenses qui peuvent aller jusqu'à $1,000, $5,000. Enlever les plaques et priver l'usage du véhicule pendant quelques jours est extrêmement pénalisant pour une personne qui n'a rien eu à faire dans la commission de l'offense. Alors, je soumets que de ce côté là...

M. BERTRAND: C'est la commission qui devrait, d'après vous, autoriser le retrait des plaques.

M. BHERER: C'est ça. Et après avoir appelé l'individu..

M. BERTRAND: Ou la révocation du permis...

M. BHERER: Après avoir appelé le propriétaire de l'entreprise, lui avoir fait remarquer les infractions, on lui dit: Corrigez-vous. Si ça ne marche pas, après ça on enlèvera le permis. On n'enlèvera pas seulement les plaques à ce moment là, on enlèvera le permis. Mais je crois qu'aussi longtemps qu'on n'aura pas pris ces mesures préventives contre le propriétaire d'entreprise, il ne faut pas le pénaliser lui-même parce qu'en fait on pénalise le public à ce moment-là pour la faute que l'on n'a pu empêcher.

Maintenant, une autre question. J'aborde le 2e paragraphe de l'article 4 de mon mémoire concernant les infractions pour lesquelles on pourrait enlever même un permis de conduire à un chauffeur. Je trouve qu'on devrait mettre aussi comme peine, dans la loi des Transports, la possibilité de pénaliser le chauffeur qui conduit mal ou qui conduit trop vite, qui conduit de façon dangeureuse... Il n'y a rien contre lui là-dedans. Il devrait être pénalisé aussi. C'est lui qui est maître du véhicule pendant qu'il est à bord. Le pilote à bord d'un bateau, c'est lui qui est pénalisé, ce n'est pas le propriétaire du bateau. On lui enlève son permis de pilote. On ne prive pas le propriétaire du bateau de son bateau. Enfin, il faut mettre la responsabilité là où elle repose et pénaliser celui qui ne s'est pas bien conduit.

D'autre part, il faudrait que les offenses qui peuvent être prises en considération pour l'accumulation d'offenses et l'augmentation de la peine à la deuxième ou à la troisième offense, devraient être des offenses de même nature, non pas n'importe quelle offense. Celui qui conduit trop vite une fois, le lendemain s'il n'a pas arrêté à une traverse à niveau, il a fait une autre infraction. Ce ne sont pas trois offenses contre lui, il faudrait que ce soient des offenses de même nature, sans entraîner des peines cumulatives.

Nous soumettons que nous sommes très heureux de voir que le transport des écoliers tombera sous l'empire de la Loi des transports et sous le contrôle de la Commission des transports. C'est une amélioration notable sur ce qui existait présentement, car le transport d'écoliers dans une communauté urbaine, dans un centre urbain et sur les routes de la province, c'est un apport considérable au maintien et à la stabilité de l'entreprise au service du public dans bien des cas. Et je pourrais vous citer des noms, c'est inutile de le faire. Nous connaissons des endroits où le transport dans une ville a dû être abandonné pour le service des adultes parce que le service des écoliers a été donné d'une façon distincte à un autre transporteur. Si on avait continué de faire les deux ensemble, il y aurait un autre transporteur, bien souvent à un prix plus élevé que celui du propriétaire de l'entreprise privée qui aurait pu le faire. Mais comme lui ne se soumettait pas à la possibilité du contrat annuel, qu'il voulait faire ça d'après ses tarifs réguliers, on a dû subir la législation et la réglementation du ministère de l'Education.

Je crois que c'est une amélioration notable que de forcer la réunion de ces deux modes de transport en un seul pour assurer la permanence des services publics de transport, dont on ne doit pas tendre à dissocier les éléments constitutifs. On ne peut pas faire un service de transport pour les écoliers, un autre pour les adultes, un autre pour les malades, un autre pour les enfants, un autre pour les travailleurs de telle usine, pour tel groupe, il faut absolument que ce soit un service collectif, les écoliers comme tout le monde. C'est ce que la loi semble vouloir obtenir. Nous sommes très heureux de cette tendance-là.

Cependant, nous soumettons que, là encore, il faudrait que cette coordination des services soit sous le contrôle de la Commission des transports. C'est elle qui doit avoir la responsabilité de la mise en application d'une politique générale définie par la loi.

Pour terminer, je vous signale que l'industrie du transport de voyageurs par autobus est une industrie considérable. J'ajouterais, pour ceux qui ne le savent pas, qu'elle est née, qu'elle a vécu, qu'elle a grandi dans le cadre de l'entreprise familiale. On peut nommer des noms qui ont été liés à l'industrie du transport de voyageurs par autobus dans la province: les Carrier, Fournier, Drolet, Laramée, Lemelin, Bourgeois, ce sont tous des personnes qui ont fait naître l'industrie, ce sont leurs capitaux qui sont investis là-dedans et c'est la plus belle

industrie, je crois — pour être sincère — qui est possédée en totalité par des Canadiens français. Je crois qu'on doit s'efforcer de protéger cette industrie. On essaie d'en faire naître d'autres au bénéfice des Canadiens français, je trouve qu'on doit s'efforcer de faire en sorte que celle-là reste entre les mains des Canadiens français, qu'on la garde rentable et qu'on assure un contrôle qui va permettre qu'elle continue de progresser dans une ambiance de sécurité et dans une ambiance de confiance du public en général et de la législation elle-même. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Bhérer. M. Roméo Blouin, qui représente l'Association du camionnage du Québec Inc.

Association du camionnage du Québec

M. ARCHAMBAULT: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, mon nom est Camille Archambault, de l'Association du camionnage du Québec Inc., M. Blouin est notre secrétaire général. Si vous me permettez, je vais vous faire un résumé du préambule de notre mémoire, faisant suite à votre demande d'être bref, et par la suite, lorsque nous arriverons aux divers articles et à notre conception de ce que devrait être la loi, Me André Bilodeau interviendra.

Je vous ferai remarquer d'abord que, dans la province de Québec, il y a 232,000 camions qui circulent sur son vaste territoire, et que cette évolution est due à la carence des chemins de fer qui, avec 30 p.c. de la population canadienne, n'ont que 11 p.c. des voies ferrées dans la province de Québec.

Nous soulignons en plus dans notre mémoire que le transport par camion est un puissant multiplicateur d'énergie humaine. Dans le Québec, il y a plus de 50,000 personnes travaillant directement pour l'industrie du transport routier sous permis de la Régie des transports et en plus de ça, vous avez tous les gens qui y sont intéressés et qui y vivent indirectement.

Nous soulignons que quoi que les camions de services publics — environ 26,000 — ne représentent que 8.7 p.c. du total des camions de la province de Québec, nous transportons, suivant le Bureau fédéral de la statistique, 70.8 p.c. de toutes les tonnes-milles, parce que la majeure partie des camions sont la propriété de manufactures ou d'entreprises dont le camionnage n'est pas leur fonction principale alors que nous, nous sommes des professionnels de la route, transportant dans bien des cas jour et nuit et dans tous les sens.

Notre association, qui est formée en vertu de la Loi des syndicats professionnels, a tout près de 1,000 membres en règle et nos membres représentent la majorité des véhicules sous permis de la Régie des transports. Nous prétendons donc, que notre groupe a conséquemment l'autorité voulue et nécessaire pour parler au nom des transporteurs routiers de marchandises sous permis de la régie.

A la page 4, nous soulignons immédiatement que le transport routier sous permis de la régie actuellement n'est pas dans des difficultés ou dans un marasme comme certains ont tenté de le faire croire. Nous admettons que dans le cas des camionneurs-artisans, qui font le transport public mais exempté par la loi, ils peuvent avoir des problèmes et ils ont effectivement des problèmes. Nous sympathisons avec eux et nous serions heureux de les voir tomber sous le coup d'une législation, mais qui serait à l'intérieur de l'administration de la Commission des transports et dans une section différente de façon à ne pas mêler les problèmes.

Nous félicitons le ministre d'avoir présenté ce bill 23. Nous retrouvons dans ce bill plusieurs modalités que notre association réclamait depuis longtemps mais il parait important de faire quelques remarques en vue d'assurer une meilleure protection aux consommateurs de services de transport comme aux droits des exploitants. Ceci étant dit, je demanderais à Me André Bilodeau de faire les suggestions et d'exprimer les conceptions que nous avons sur ce projet de loi.

M. BILODEAU: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, vous remarquerez que plusieurs de nos recommandations rejoignent en grande partie celles que vient de vous faire Me Bhérer au nom des propriétaires d'autobus.

Cependant, il en est qui sont différentes puisque notre industrie a ses caractéristiques. A l'article 1 d) qui définit l'exploitant, nous souhaitons que soient définis plus clairement, pour éviter des difficultés d'interprétation, les courtiers en transport et les locateurs de véhicules de transport qui sont actuellement déjà sous le contrôle de la régie et ça depuis plusieurs années. C'est pourquoi nous suggérons que le texte de l'article 1, paragraphe d), se lise: "Exploitant: une personne qui exploite directement un moyen ou un système de transport y compris les courtiers en transport et les locateurs de véhicules de transport."

Le texte actuel nous paraît un peu ambigu et laisse ouverture à des interprétations en vertu desquelles ces gens-là pourraient peut-être prétendre ne pas être soumis à la loi.

A l'article 8, nous faisons nôtres les remarques faites tout à l'heure par Me Bhérer quant à l'indépendance de la Commission des transports. Nous estimons que cet article confère au lieutenant-gouverneur en conseil des pouvoirs qui ne doivent appartenir qu'à la Commission des transports qui, selon l'esprit de la présente loi, est l'organisme créé pour contrôler de façon générale et détaillée le transport dans la province.

Il nous parait dangereux de permettre au lieutenant-gouverneur de décréter par exemple les normes, les tarifs, les taux de transport puisqu'alors la juridiction de la commission deviendrait illusoire et viendrait en conflit constant avec une réglementation parallèle du lieutenant-gouverneur en conseil.

Nous demandons donc que tous les pouvoirs qui sont accordés au lieutenant-gouverneur en conseil par cet article 8 le soient à la Commission des transports. Il y aurait peut-être certaines exceptions qu'a énumérées Me Bhérer tantôt. En somme, ce que nous voulons c'est que sauf ce qui concerne l'administration proprement dite du ministère qui doit relever du ministre, tout ce qui touche le contrôle du transport, les normes, les tarifs, l'émission des permis, soit de juridiction exclusive de la commission. A l'article 17 notre association se réjouit de la création du conseil consultatif composé de spécialistes — que nous demandions depuis longtemps — et remercie M. le ministre Tremblay d'avoir accédé à sa demande en ce sens.

A l'article 24 où il est question de la formation de la commission, c'est l'opinion de nos membres qu'étant donné que le tribunal des transports est déjà formé de trois juges nous comprenons difficilement la raison qui justifierait la nomination de trois autres juges siégeant à la Commission des transports. Nous croyons qu'il devrait y avoir des personnes nommées pour leur compétence dans le domaine qui nous intéresse, soit le camionnage et le transport en général sans que ces personnes soient nécessairement de la magistrature.

A l'article 26, les divisions administratives proposées par cet article sont souhaitables.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que je pourrais vous poser une question sur l'article 24? Est-ce que vous ne croyez pas que c'est une garantie pour tous les transporteurs d'avoir sept membres, d'avoir trois juges, dont deux vice-présidents, et quatre commissaires qui sont des juristes? Vous avez quatre personnes qui connaissent le transport à fond. Ne trouvez-vous pas que c'est une garantie qu'on n'a jamais eue pour le transport au Québec?

M. BILODEAU: M. le ministre, personnellement, j'estime...

M. TREMBLAY (Bourassa): Non, je vous le demande. Vous ne croyez-pas? Je vous demande votre opinion.

M. BILODEAU: Mon opinion personnelle, c'est qu'il me parait souhaitable que des juges en nombre suffisant soient nommés pour que nous ayons constamment, à la Commission des transports, un juriste qui siège en permanence. C'est-à-dire que, lorsque nous, procureurs, nous avons à formuler certaines objections de nature juridique...

M. TREMBLAY (Bourassa): Oui et les procureurs sont les premiers à formuler des blâmes s'il n'y en n'a qu'un. S'il y en a trois ils sont plus serrés un peu.

M. BILODEAU: Absolument! Le sens de cette demande à laquelle nous tenons évidemment...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous êtes toujours prêt à lancer la pierre mais là, quand on donne la sécurité, vous n'êtes pas prêt à l'accepter.

M. BILODEAU: M. le ministre, ce n'est pas notre recommandation principale et si nous avons la certitude que les juges qui vont être nommés auront une compétence certaine dans le domaine du transport...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous pouvez être sûr que ce n'est pas moi qui vais les nommer parce que je ne suis pas juge. Je ne suis pas avocat non plus. Je ne fais pas partie du Barreau.

M. BILODEAU: De toute façon ce n'est pas le point important...

UNE VOIX: Le Barreau le regrette amèrement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Seulement, je trouve que c'est une garantie pour le transport. J'émets mon opinion, mais vous ne m'avez donné la vôtre très clairement.

M. BILODEAU: Personnellement j'ai peut-être une opinion qui diffère un peu de celle de nos membres. Mais j'ai le mandat de vous rapporter l'opinion de nos membres.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excusez-moi, continuez !

M. BILODEAU: Sur cette question-là, remarquez bien! Sur les autres j'endosse entièrement l'opinion de nos membres.

Alors, quant aux divisions de l'article 26, voici les recommandations que nous vous faisons, nos prétentions. Nous estimons que la section du transport général devrait inclure le transport du bois et de ses rebuts qui nous parait erronément classifié comme du transport de matériel en vrac et que devrait également être inclus dans le transport général le transport par camions-citernes. Cependant, il nous semble logique que le transport du bois brut en billots devrait tomber sous la juridiction du transport de matériaux en vrac. De plus, la section du transport spécialisé devrait comprendre l'exploitation de véhicules de location pour être logique avec ce que nous disions tantôt. Quant au transport en vrac, il nous parait essentiel pour éviter des conflits d'interprétation et faciliter la surveillance de le définir de façon plus élaborée, en mentionnant qu'il consiste à transporter des matériaux pour la construction ou la réputation de chemins publics.

Il s'agit du sable, de la terre, du gravier, de la pierre des champs ou des pierres concassées, à

l'exclusion du ciment qui, selon nous, ne fait pas partie de cette catégorie, de pierre à chaux broyée ou de marbre devant servir à l'amélioration des sols.

Etant donné que plusieurs milliers de camionneurs publics deviendront assujettis à cette nouvelle classification de transport de matières en vrac, nous demandons respectueusement que ceux-ci appliquent sur leurs véhicules une licence d'immatriculation distincte, soit par exemple une plaque B au lieu d'une plaque L, la plaque employée présentement, de façon à éviter la confusion et faciliter l'application de la loi.

Nous croyons avoir détecté une ambiguité au paragraphe 4d) de cet article, en ce qui concerne les véhicules de livraison. Nous suggérons les modifications suivantes: que le paragraphe 4e), concernant le transport des ordures ménagères et des déchets industriels devienne le paragraphe 4d) et que le nouveau paragraphe 4e) se lise comme suit: "Tout autre transport, au moyen de véhicules de livraison, au sens du code de la route et non indiqué dans la définition précédente, pour éviter qu'il y ait double emploi dans les divisions telles qu'elles sont formulées".

A l'article 43 qui concerne la durée du permis, notre position est identique à celle adoptée par les propriétaires d'autobus et nous souhaitons que les permis soient émis de façon permanente, quitte à ce qu'ils soient abrogés ou annulés par la commission pour cause ou raison valable. Ceci pour les mêmes raisons, c'est que vis-à-vis des institutions financières, que nos membres ont l'obligation de consulter et de solliciter pour financer leur entreprise, évidemment la précarité d'un permis annuel peut causer de graves problèmes.

A l'article 44 où il est question de l'émission de permis spéciaux, nous devons vous dire que, par le passé, l'émission de permis spéciaux a causé de profonds remous chez les camionneurs. C'est le secteur où il y avait le plus d'insatisfaction. Notre suggestion est que la commission ne puisse émettre de permis spéciaux qu'après avoir avisé les intéressés par le mode que nous recommanderons tout à l'heure, et que ces intéressés aient pu, lors d'une audition sommaire et très rapide, se faire entendre devant la commission. Nous vous soumettons que, lorsqu'un détenteur de permis apprend soudainement alors qu'il pouvait effectuer un transport, qu'un permis spécial est accordé pour faire le transport que lui-même était déjà autorisé à faire, ça crée de jolis remous et nous voulons éviter ça.

A l'article 45, nos remarques sont également identiques à celles des propriétaires d'autobus. Nous demandons que cet article accorde le permis, non seulement une personne physique mais à une personne, ou une société, ou une corporation, quitte cependant à exiger — et c'est notre suggestion positive — que cette personne morale que constitue la corporation désigne, lors d'une demande de permis devant la commission ou la régie, son agent qui ait feu et lieu ou résidence dans la province de Québec. Si le nom de cet agent doit être modifié, soit qu'il décède ou autrement, qu'elle en avise immédiatement la commission de façon qu'elle puisse toujours savoir à qui s'adresser lorsqu'elle doit faire des recommandations ou s'adresser à un détenteur de permis.

D'ailleurs, c'est ce que nous avions cru déceler dans la rédaction de l'article 50 du projet de loi 23 qui laisse sous-entendre dans sa cinquième ligne qu'une corporation ou société détient un permis.

Il nous a semblé voir une contradiction entre le texte de l'article 45 et l'article 50 puisque l'article 45 n'accorde le permis qu'à une personne physique alors que l'article 50 parle d'une corporation ou d'une société qui détient un permis. C'est ce que nous souhaitons; qu'une corporation puisse détenir un permis.

Quant à l'article 47, depuis de nombreuses années, messieurs les membres de la commission, notre association a lutté pour que les entreprises de transport sous contrôle des compagnies de chemins de fer ne puissent s'immiscer dans les services de transport par camion. Nous demandons à nouveau que soit incluse dans cet article 47 la restriction suivante: "Aucun moyen de transport terrestre concurrentiel ne peut obtenir un permis de transport par camion, soit directement de la Commission des transports ou par voie d'achat d'un permis, de la totalité ou partie des intérêts d'une compagnie ou société exploitant un service de transport par camion."

Nous croyons que le public expéditeur doit bénéficier de deux modes de transport distincts qui se font une réelle concurrence, soit le rail et la route. On peut imaginer entre autres ce qui arriverait, en cas de grève, si tous les moyens de transport terrestre étaient contrôlés par les mêmes intérêts. D'ailleurs cette pratique est interdite par la législation américaine et dans la plupart des pays qui refusent l'absorption du transport routier par le rail.

Je dois vous dire que c'est une lutte que notre association mène depuis fort longtemps pour la protection des droits de ses membres. A plusieurs reprises, notre association a fait des représentations tant ici au gouvernement du Québec qu'à Ottawa et, plus particulièrement, en 1960, le gouvernement de la province a présenté un mémoire à la commission MacPherson sur les transports au Canada. A l'article 303, le gouvernement recommandait ce qui suit: "Nous rappelons aux chemins de fer que leur principale responsabilité à l'endroit du peuple canadien, aux points de vue historique, économique et social, est d'organiser un système de transport ferroviaire efficace et économique, et non pas de se lancer dans l'industrie du camionnage. "Par conséquent — et ça c'est le mémoire du gouvernement qui parle — qu'ils ne touchent pas à l'industrie du camionnage dans la provin-

ce, sauf dans certains cas exceptionnels, quand cela leur est nécessaire pour remplacer efficacement leur rôle comme chemins de fer."

Depuis ce temps, la politique des autorités gouvernementales du Québec est devenue contradictoire. Nous souhaitons et nous espérons que la nouvelle législation précisera que les chemins de fer subventionnés par le gouvernement fédéral ne devront pas concurrencer l'industrie du camionnage qui est actuellement sous l'égide de l'entreprise privée au Québec, ceci parce que les chemins de fer obtiennent des subsides que nous ne leur reprochons pas évidemment, tant mieux pour eux, mais nous, comme camionneurs, nous n'avons pas ces subsides, ce qui fait une disparité et une concurrence qui nous paraît déloyale. Et c'est une demande que nous vous formulons.

Maintenant, quant aux articles concernant la Gazette officielle du Québec, encore là, les remarques de Me Bhérer tout à l'heure sont en substance les nôtres. La Gazette officielle, selon nous, n'est pas le véhicule de publication adéquat pour rejoindre les camionneurs, parce que — comme disait Me Bhérer — ils n'y sont pas abonnés, il faudra que ça passe par le truchement de leur procureur, qui n'a pas toujours le temps de lire en entier la Gazette officielle, et à cause de certains délais de publication que nous avons connus dans le passé. Ce n'est pas un reproche qu'on fait à la Gazette officielle mais quand même, il y a des délais entre la demande de publication et la publication. Toutes ces raisons nous font opter pour ce bulletin mi-mensuel de la Régie des transports ou de la commission à être créée qui est reçu par tous nos membres et qui constitue, selon nous, le véhicule le plus approprié, le plus efficace pour la publication des avis officiels.

D'ailleurs, je fais remarquer à ce sujet que les permis actuels dont nos membres défraient le coût comportent une charge imposée par la Régie des transports pour la publication de ce bulletin bimensuel.

Nos membres sont prêts à continuer à le défrayer pour avoir un organe de publication efficace.

Les articles 63 et suivants traitent de la formation du tribunal des transports. Notre association se réjouit de la formation de ce tribunal à qui elle souhaite voir attribuer — on se réjouit parfois, M. le ministre, comme vous le voyez — une juridiction exclusive en matière de transport. Notamment notre association estime qu'il est justifié de donner à ce tribunal le pouvoir d'entendre et de décider de toute plainte portée en vertu de la présente loi et demande que la Loi des tribunaux judiciaires soit modifiée pour accorder à ce tribunal juridiction exclusive en matière de transport. Il est arrivé que certains juges d'autres juridiction, d'autres tribunaux, ne soient pas familiers, et c'était tout à fait normal, avec le jargon du droit du transport. Il faut bien dire qu'il y a tout un jargon qu'un juge de discipline différen- te ne peut normalement connaître sur le bout de ses doigts. Nous croyons qu'il serait préférable que des juges spécialement formés, ou spécialement versés dans les matières de transport, entendent toutes les causes qui traitent de transport.

Quant à la juridiction d'appel créée par l'article 68, notre association estime qu'il y a lieu de l'étendre sur les questions de fait également et cet appel sur des questions de fait ne devant cependant comporter aucune réouverture d'enquête et devant s'exercer sur la preuve telle que faite en première instance, c'est-à-dire devant la Commission des transports.

L'article 75 accorde au ministre un droit d'appel d'une décision de la commission. Et comme l'a dit tantôt Me Bhérer, nous ne pouvons souscrire à ce principe d'un appel d'une partie quelle qu'elle soit qui n'a pas été partie en première instance. Cela nous parait un principe faux en droit. Nous préférerions lorsque dans une instance — ce que M. Bertrand, le chef de l'Opposition, soulevait tantôt — où le ministère a réellement un intérêt à intervenir dans un débat en matière de transport, que le ministère intervienne dès la première instance devant la commission et que, si par la suite, la décision rendue va à l'encontre de la politique globale du ministère en matière de transport, qu'il aille en appel. C'est pourquoi, nous demandons que toute partie en cause en première instance puisse en appeler d'une décision de la commission ou demander qu'elle soit procédée par voie d'évocation. Cela couvre tout le monde, toute partie insatisfaite, ou autrement le ministère a un droit d'appel.

A l'article 76, notre demande est identique à celle des propriétaires d'autobus quant aux délais. Nous soumettons que huit jours pour en appeler, pour décider si on va en appeler lorsque des camionneurs habitent des centres un peu éloignés, c'est insuffisant, il faut qu'ils consultent, il faut qu'ils décident après ces consultations s'ils ont d'abord un droit d'appel, ce que cela coûtera, il faut qu'ils évaluent cela et quinze jours nous paraissent plus adéquats pour le droit d'appel et quant à la demande de permission d'appeler, nous demandons que son délai de présentation soit porté à cinq jours juridiques au lieu de trois jours.

A l'article 85 qui traite des amendes et des peines, notre association est heureuse de constater que des amendes substantielles sont imposées par cet article, mais elle ne croit pas justifié de faire une distinction entre un individu et une corporation quant à la gradation des peines.

Il existe, à notre connaissance, des corporations qui ne sont pas mieux nanties, financièrement, que des particuliers, et nous ne comprenons pas pourquoi on impose une amende plus sévère à une corporation, par rapport à un particulier. Alors nous sollicitons qu'une seule catégorie de délinquants soit créée. Il nous

paraît donc équitable que, pour la première condamnation, l'amende soit au plus de $500; et que, pour une deuxième condamnation, pour une infraction de même nature — je dis bien condamnation et pour une fraction de même nature, parce qu'il faut qu'il y ait condamnation au préalable; il est bien évident que si un délinquant commet 15 infractions dans une même journée, s'il est accusé de 15 et acquitté de 14, ce sont seulement les condamnations qui doivent compter — de $200 à $1,000; et pour une troisième condamnation, de $500 à $2,000, à la condition toutefois que les condamnations comportant récidive soient prononcées dans les douze mois qui suivent une infraction donnée.

Quant à relèvement des plaques, nous soumettons que, comme la commission détient déjà, par l'article 46, le pouvoir de suspendre et de révoquer le permis d'un exploitant, il ne nous paraît plus justifié d'obliger le tribunal à ordonner un retrait de plaque après une troisième infraction ou condamnation, selon que la loi définitive sera rédigée, puisqu'alors on risque de priver le public d'un service essentiel pour lequel la commission des transports a reconnu la nécessité. Il est bien évident que, si on enlève une plaque à un détenteur qui n'a qu'un camion, c'est toute une région qu'on prive d'un service de transport que la régie ou la commission avait jugé nécessaire pour une région donnée. En fait, la peine excède de beaucoup l'infraction elle-même. On prive ces gens-là de leur seul moyen de transport. Nous signalons également qu'une telle sanction, l'enlèvement des plaques, créerait des disparités dans la peine, puisque si vous enlevez, comme je viens de le dire, les plaques à un détenteur d'un seul camion, vous lui enlevez son gagne pain et vous privez tout le monde, mais si vous enlevez les plaques à une compagnie qui a 500 camions, franchement ce n'est pas la même peine. C'est pourquoi nous demandons que ce soit uniquement la commission qui ait juridiction pour apprécier s'il doit y avoir non pas enlèvement des plaques d'enregistrement, mais suspension ou révocation du permis.

Maintenant, nous voulons également que cet article 85 qui touche les délinquants qui ne sont pas détenteurs d'un permis de transport, vise aussi les expéditeurs qui, parfois, incitent les gens, les camionneurs à commettre des infractions; nous voulons qu'ils soient également "dans le bain", comme cela existait autrefois. Autrefois, l'ancien article 40 de la loi de la Régie des transports prévoyait que celui qui incitait à commettre une infraction devenait lui-même partie à une infraction. Nous demandons aussi que l'article 85 comporte l'addition de l'ancien paragraphe 3 de l'article 40 qui dit que: "Toute personne, partie à la présente loi, à une ordonnance ou à un règlement de la commission, est passible des peines prévues par le paragraphe précédent, premièrement, si elle fait ou s'abstient de faire quelque chose dans le but d'aider ou d'inciter quelqu'un à commettre cette infraction; deuxièmement, si elle provoque, induit ou cherche à induire quelqu'un d'une manière quelconque, à commettre cette infraction.

A l'article 89, il est dit que les poursuites sont intentées par le procureur général. Quant à nous, nous aimerions qu'elles soient intentées par le ministre des Transports, qui est chargé de l'administration de la présente loi.

Peut-être y a-t-il complication dans les structures administratives, peut-être est-il nécessaire que ce soit le procureur général qui porte les plaintes. De toute façon, nous signalons que pour être logique il appartiendrait au ministre des Transports d'intenter ces plaintes.

A l'article 146, il est question de l'interruption des opérations d'un service d'un système de transport et de la nomination d'un administrateur. Nous n'avons rien contre la nomination d'un administrateur évidemment, mais nous soumettons qu'au lieu que cet administrateur soit désigné et nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil, il soit désigné par la Commission des transports, puisque c'est la commission qui jugera si les conditions voulues pour la nomination d'un administrateur se présentent, sont réalisées. Si l'on veut respecter ce grand principe, qui selon nous devrait prévaloir dans cette loi, selon lequel c'est la commission qui est l'autorité première et indépendante, c'est à elle qu'il devrait appartenir de nommer cet administrateur.

A l'article 155 — qui fait partie du groupe des articles de concordance — nous croyons devoir signaler qu'un article de concordance devrait prévoir que toutes les procédures qui seront mues lors de l'adoption de la présente loi devant la Régie des transports, soient continuées devant la Commission des transports pour éviter qu'il y ait complication au point de vue procédural.

En guise de conclusion, nous disons que les mesures législatives suggérées sont dans notre esprit essentielles au bon fonctionnement des transporteurs routiers du Québec. Nous estimons que, même s'il y a des lacunes dans la loi actuelle, les représentations qui ont été faites dans le passé sont particulièrement dues au manque de personnel au sein de la Régie des transports.

Le souci premier de notre association est de préserver l'autonomie de la Commission des transports, qui constitue, selon nous, l'organisme indépendant et adéquat pour assurer aussi bien l'efficacité des services de la rentabilité des entreprises de transport. Si cette autonomie n'est pas respectée, et que seul le ministre ou le lieutenant-gouverneur en conseil exerce la véritable autorité et le contrôle effectif en matière de transport, notre association ne peut endosser globalement les dispositions de la présente loi, avant d'avoir pu examiner toute la réglementation qui servira de cadre juridique à la juridiction confiée à la commission.

Dans l'ignorance de cette réglementation,

notre association se voit dépourvue de la possibilité de connaître les normes qui serviraient désormais de base au contrôle de toute exploitation de service de transport. C'est pourquoi nous insistons fortement pour que la Commission des transports soit investie avec le tribunal des transports de tous les pouvoirs requis pour exercer en exclusivité le contrôle des normes, des taux et généralement de tous les facteurs inhérents à l'exploitation d'un service de transport.

C'est à cette condition que notre association applaudira aux mesures progressistes, nous l'admettons, qu'elle se plait à retrouver dans ce projet de loi.

Les principes énoncés dans ce mémoire font partie de la politique d'action de l'association et ils ont été approuvés par ses membres et ratifiés par une assemblée générale spéciale du conseil provincial de l'association tenue à Québec en date du 18 juin 1971.

M. TREMBLAY (Bourassa): Revenons à quelques articles. Pourriez-vous me citer une loi au Québec qui autorise l'émission de permis pour plus d'un an à la fois? Pouvez-vous m'en citer soit de la Régie des alcools ou d'une autre qui donne des permis pour plus d'un an à la fois? Comme avocat depuis plusieurs années — vous pourriez peut-être être nommé juge maintenant — pourriez-vous me dire s'il y a des lois qui donnent des permis pour plus d'un an?

M. BILODEAU: Je n'en connais pas.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous n'en connaissez pas.

M. BILODEAU: Autrefois, il était mentionné, non dans la loi mais dans l'ordonnance générale du camionnage, que les permis étaient annuels et renouvelables. Ce qui paraissait mieux lorsque nos gars allaient à la banque. Actuellement, les permis peuvent être renouvelés pour une année. Le gérant de banque, un peu sceptique, va dire: Ecoute mon vieux, ce n'est pas bien long ton affaire, seulement un an. Ce qu'on aimerait, c'est qu'on en reste à l'ancienne rédaction annuelle renouvelable. Ce serait mieux que...

M. TREMBLAY (Bourassa): Une soupe à l'ancienne servie à la moderne.

M. BILODEAU: C'est le caractère de continuité.

M. TREMBLAY (Bourassa): Mais ici, ce n'est pas de la soupe. Il ne faudrait pas l'oublier. A l'heure actuelle, le bill 23 vous donne le renouvellement au 30 mars soit la même chose que l'autre loi aux pages précédentes. C'est la même chose. Les pouvoirs, on les a expliqués, on pourra y revenir. Vous parlez des pouvoirs des ministres. Combien de fois enten- dons-nous dire au Québec que ce sont les régies qui conduisent et que nos députés et nos ministres n'ont rien à faire! On l'apprend par les journaux. S'il y a des augmentations de taux, on va voir les députés, on va voir les ministres. Eux n'ont rien à faire, ce sont les régies qui décident. Pour une fois, vous pourrez aller voir les députés et ces derniers pourront faire pression à la Chambre ici, en haut — c'est là la démocratie — et intervenir auprès du ministre et dire que, dans telle et telle région, il y a tel et tel problème et le' ministre pourra intervenir. Mais si on ne laisse aucun pouvoir au ministre, de quelle façon le ministre pourra-t-il intervenir auprès des transporteurs?

Mon opinion est que le ministre doit avoir certains pouvoirs pour que les membres de cette Chambre qui représentent toutes les régions du Québec puissent intervenir pour donner une plus grande satisfaction de transport dans toutes les régions du Québec. Mais si on laisse seulement la régie à Montréal et à Québec, le ministre et les députés apprennent par les journaux qu'il y a augmentation de tarifs dans telle ou telle région et le député n'en est même pas saisi.

C'est là, je crois, qu'il n'est pas question de politique, il n'est pas question de bâillon, il n'est pas question de dents, c'est une question d'honnêteté envers chaque région de la province de Québec. Cela fait partie d'une politique globale des transports.

Maintenant, on parle de la Gazette officielle...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que M. le ministre pourrait me permettre une observation à propos de ce qu'il vient de dire? Il dit, pour une fois qu'on donne le pouvoir au ministre de réglementer et de surveiller.

M. TREMBLAY (Bourassa): On lui donne des pouvoirs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On lui donne des pouvoirs, d'accord. Il dit: Les députés en haut pourront protester.

Enfin, ce n'est pas exactement le ministre, c'est le lieutenant-gouverneur en conseil, cela veut dire le cabinet. Donc les députés n'auront rien à dire lorsque vous aurez pris une décision. Ils pourront la critiquer, mais ils n'auront pas le pouvoir de faire changer vos décisions si majoritairement le gouvernement n'est pas d'accord!

M. PICARD: ...de la bonne couleur!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est justement ce que nous voulons éviter. C'est que tous les pouvoirs soient remis entre les mains du gouvernement via ce qu'on appelle le lieutenant-gouverneur en conseil — ce qui est un drôle d'anachronisme en passant — sans que nous puissions, nous, exprimer l'avis des gens

que nous représentons. Par conséquent, l'argument qu'invoque le ministre est un argument en porte-à-faux puisqu'à toutes fins utiles c'est le gouvernement qui déterminera par arrêté en conseil ou par décret ministériel quelles seront les provisions, les prescriptions des règlements.

M. PICARD: Le député de Chicoutimi sait très bien — il a été ministre lui-même — que lorsque le ministre arrivera à une réunion du conseil des ministres ses collègues vont certainement l'appuyer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'accord! Mais le député de Chicoutimi qui vous parle a été ministre et il sait très bien comment cela se passe lorsqu'une réglementation est présentée par des fonctionnaires. Il arrive que nous votions en Chambre des lois extrêmement bénéfiques mais que, par la réglementation afférente à cette loi, les effets bénéfiques de cette loi soient absolument annulés par une réglementation qui souvent est d'un caractère tellement technique et complexe que le cabinet n'a pas toujours le temps d'examiner en détail tous les aspects techniques et les implications éventuelles de cette réglementation. C'est la raison pour laquelle nous avons déclaré, lors de l'examen en seconde lecture de ce projet de loi, qu'il nous apparaissait que trop de pouvoirs étaient laissés au ministre et qu'il y avait un caractère discrétionnaire que nous ne pouvions pas appuyer dans l'ensemble des pouvoirs qui sont dévolus au ministre dans l'application et la surveillance de cette loi.

M. TREMBLAY (Bourassa): Le député de Chicoutimi, avec toute l'expérience qu'il a, n'a pas besoin d'accepter mes paroles ce matin et de dire oui ou non ou de se faire aller les lèvres, mais il est tellement au courant et même moi, je peux lui rendre hommage que je lui ai déjà demandé une subvention alors que j'étais député de l'Opposition et je l'ai obtenue. Je crois donc qu'un député peut aller auprès d'un ministre s'il a un problème dans son comté et lui dire: J'ai tel et tel problème. Et un ministre, je crois, a le respect des députés. Cela est une chose.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord, M. le Président, oui...

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est un endroit où le député peut intervenir, qu'il soit de n'importe quel parti, et faire valoir ses idées avant même que cela soit passé par le lieutenant-gouverneur en conseil.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, faire valoir ses idées avant que ce soit soumis au cabinet...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois que le député de Chicoutimi est bien d'accord avec moi qu'il les fait valoir ses idées et on lui donne tout le temps qu'il lui faut.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord! Un instant, M. le Président, c'est déplacer le problème. Il s'agit d'un organisme qui va être très complexe et très technique. Vous voulez réglementer l'ensemble du transport au Québec, ce dont nous vous félicitons. D'accord, mais une fois que le machine sera mise en marche, le gouvernement sera sans cesse obligé de revoir la réglementation, d'en surveiller l'application et, indépendamment de la volonté des députés, du désir des députés et de la bonne volonté du ministre, le ministre ne pourra pas, chaque fois, nous donner un coup de fil pour savoir ce que nous en pensons, d'autant plus que le ministre qui est devant nous, avec toute la bonne volonté qu'il a, ne sera pas éternel. Il y aura d'autres ministres des Transports et si la machine n'est pas bonne...

M. TREMBLAY (Bourassa): Si les règlements ne sont pas bons, il pourra les changer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais si la machine...

M. TREMBLAY (Bourassa): Si le gouvernement change, il pourra changer les règlements lui aussi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord, M. le Président, mais avant que ces règlements soient changés...

M. TREMBLAY (Bourassa): Il n'y aura pas de carcan.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avant que ces règlements ne soient changés, il se peut qu'ils aient déjà produit des effets extrêmement désastreux sur l'industrie du transport en général. C'est la raison pour laquelle je dis que le ministre a peut-être trop de pouvoirs et qu'il n'a pas raison de dire que les députés auront tout le loisir de faire des représentations, parce que c'est le lieutenant-gouverneur en conseil qui décidera sans que nous soyons consultés. Le ministre doit savoir la différence entre une loi et un décret ministériel quand même.

M. TREMBLAY (Bourassa): Sûrement, si un ministre amène un projet de règlement à ses collègues au conseil des ministres, il y a certainement des règlements qui seront acceptés par la majorité de la Chambre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les règlements ne sont pas signés à la Chambre.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... pour le transport du Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Prési-

dent, un instant, c'est très important. Le problème est que le ministre ne comprend pas vraiment le problème. Il dit que les règlements pourront être acceptés par la majorité de la Chambre, mais à condition que ces règlements nous soient soumis. Or, lorsque nous avons examiné le projet de loi en deuxième lecture, nous avons demandé au ministre de nous donner, sinon l'ensemble de la réglementation afférente à cette loi mais un format et de nous indiquer quels étaient les principes qui inspiraient cette réglementation. Or le ministre ne l'a pas fait et nous sommes en commission parlementaire précisément pour connaître les orientations de la politique, dans quel sens ça va s'infléchir parce qu'une fois que la loi sera votée, nous n'aurons même plus le droit de regarder les règlements puisque ça se fera par décret ministériel.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous avez 173 articles qui vous indiquent pas mal où la politique s'en va.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous ai dit que 173 articles, c'est un squelette parce que nous avons un contenant mais nous n'avons pas le contenu, et d'ailleurs les mémoires que nous venons d'entendre nous indiquent très bien que tout le monde est inquiet au sujet des principes qui inspirent ce projet de loi.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'avais une autre remarque à faire. La différence entre la Gazette officielle et ce qui est publié à l'heure actuelle à la régie, c'est que vous payez $0.50 par unité, je crois, pour être averti de ce qui va se passer, si le tribunal va siéger dans telle et telle cause. A l'avenir, ça va être dans la Gazette officielle du Québec, et l'abonnement va vous coûter $15 par année approximativement. Vous allez être tenu au courant directement du gouvernement, par la Gazette officielle. Je crois que c'est une amélioration à mon sens, pour tous les transporteurs du Québec, d'être au courant de tout permis, etc, de tout ce qui va se passer dans toutes les régions.

Sans ça, vous savez qu'il se donne un permis dans une telle région, et une telle compagnie voudrait planifier, peut-être aller dans une telle région pour une telle sorte de transport, et le permis se donne cette année, mais cette compagnie prévoyait, dans six mois, d'aller dans telle région qui n'est pas desservie. Avec la Gazette officielle, elle va savoir immédiatement où elle s'en va, tout le monde va l'avoir.

Je crois que c'est une chose très claire, c'est nettement un amélioration par rapport à ce qu'on avait auparavant. Disons que je demeure de votre opinion. Vous savez comme moi, vous avez parlé de l'article 85, c'est seulement pour les chauffeurs. Le propriétaire est toujours responsable de ses hommes. Je crois qu'à ce moment-là c'est encore donner de la sécurité au propriétaire et aussi à l'artisan qui se fait écraser souvent par le gros. Mais la compagnie va être obligée, à l'heure actuelle, avec l'article 85, sûrement d'avoir une meilleure surveillance. Mais elle est responsable quand même de ses hommes. Là, à ce moment-ci, avec le bill 85, on donne à la compagnie des armes pour qu'elle puisse dire à ses employés: Vous êtes obligés à telle et telle réglementation s'il arrive telle ou telle chose, soit dans le transport par autobus ou le transport général, soit dans le transport en vrac, n'importe lequel... Je trouve qu'on donne aux compagnies et même au propriétaire, à l'artisan, une garantie. On peut appeler artisan quelqu'un qui a trois camions. On dit qu'un artisan a seulement un camion, il peut en avoir trois. C'est une question d'idée. Je trouve que c'est une garantie qu'on donne aux compagnies qui doivent dire à leurs hommes et même aux syndicats ouvriers: Ecoutez on paie tel taux, etc. mais ça nous prend des hommes compétents. Je crois que la compagnie peut exiger cela parce qu'il y a le projet de loi 85 qui peut nous enlever des plaques.

M. BILODEAU: Mais ne croyez-vous pas, M. le ministre, que...

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous en avez parlé tout à l'heure, je vous donne une idée avant qu'il ne soit 12 h 30. Ce n'est pas une réplique, c'est plutôt pour vous donner, je crois, le but qui est plutôt d'aider les compagnies...

M. BILODEAU: Oui, mais...

M. TREMBLAY (Bourassa): ...pour exiger de leurs chauffeurs une efficacité meilleure.

M. BILODEAU: ...Dans ce but louable, M. le ministre, notre crainte à nous est qu'on pénalise plus fortement l'artisan justement parce qu'il a moins de camions. Et si on lui enlève une ou deux plaques s'il a commis plusieurs infractions, on le paralyse, alors que la grosse compagnie, elle, on la pénalise très peu parce qu'elle a beaucoup d'unités en réserve. C'est le sens de notre intervention.

M. TREMBLAY (Bourassa): L'artisan dans ce cas peut suivre l'article 85. Où j'ai le plus peur, c'est lorsque les compagnies qui ont 100 ou 200 camions et que, il arrive une urgence à un moment donné. Je crois que je peux vous répondre là-dessus. J'ai déjà été, avec mon frère, propriétaire de 155 camions et un chauffeur n'avait pas fait onze voyages que l'autre en avait fait douze. Vous savez ce que je veux dire.

A ce moment-là, il y avait peut-être de la vitesse et des accidents, mais nous sommes en 1971, avec un mode différent, un mode d'efficacité, moins d'accidents, alors un meilleur service, nos employés sont plus spécialisés. On ne dit plus à un chauffeur: Prends le volant, conduis le camion et va travailler. C'est fini, ces années-là. Je crois qu'on donne aux compa-

gnies, avec les unions ouvrières, la chance de demander des chauffeurs, des bons chauffeurs. Je crois qu'on ne va pas à l'encontre des compagnies, on aide les compagnies.

M. BILODEAU: L'article, M. le ministre, dit que le tribunal doit ordonner. Le juge n'a aucune latitude, il est obligé d'ordonner le retrait et, même s'il y a des considérations de services publics ou toutes sortes de considérations, si l'opérateur a une bonne raison pour que la plaque lui soit laissée, le juge ne le peut pas, il n'a pas de latitude. Si au moins, l'article disait: "Le tribunal peut ordonner le retrait," à ce moment-là, il y a des considérations dont le tribunal, qui connaît toute la cause, pourrait peut-être tenir compte.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il peut toujours ravoir ses plaques, il y a l'amende. S'il y a trois infractions, il y a une amende. Il peut toujours ravoir ses plaques en payant son amende. Il y a infraction, mais en payant l'infraction, il reçoit sa plaque.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, nous avions convenu d'ajourner à midi trente...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je crois qu'il serait bon de vider la question avec Me Bilodeau, si tout le monde est d'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... il y a beaucoup de problèmes qui se posent en lisant le mémoire de l'Association du camionnage. Il serait important d'interroger peut-être un peu plus longuement Me Bilodeau et M. Archambault, particulièrement à la page 5 du mémoire, lorsqu'il est question de courtiers en transport et de locateurs de véhicules de transport. Ce paragraphe rejoint les observations que Me Bilodeau a faites au sujet de l'article 45. J'aimerais que Me Bilodeau nous explique, le plus brièvement possible, ce qu'il entend, ce que l'association qu'il représente entend par les courtiers en transport et les locateurs de véhicules de transport et comment il concilie cette nouvelle définition qu'il veut voir inclure dans la loi avec les prescriptions de l'article 45.

M. BILODEAU: Celui qui est courtier en transports et celui qui, à proprement parler, n'a pas de camion, mais fait une consolidation si on veut, ou du courtage, il sollicite auprès des clients les services de transport qu'il fait exercer par des détenteurs de permis. C'est ce qui se fait présentement. Il existe des compagnies qui ne font que cela. Elles sollicitent du transport et le font faire par des détenteurs de permis. Il suffit d'avoir un bureau et un téléphone pour tenir un organisme de ce genre. Alors ces gens-là sont présentement sous le contrôle de la régie. Il faut, pour faire du courtage en transports, obtenir un permis et à certaines conditions. Il faut respecter les taux, des choses comme celles-là. Le locataire de véhicules de transport ne détient pas nécessairement le permis, il peut en détenir un, je crois, mais n'en détient pas nécessairement un pour faire du transport. Il fait de la location de véhicules qui servent à l'exploitation d'un permis de transport. Encore-là, ces gens-là sont soumis à une réglementation très sévère de la Régie des Transports qui établit des normes sur la qualité des véhicules, sur toutes les facettes du transport. Nous voulons que ces gens-là continuent d'être sous la juridiction de la loi et qu'ils ne puissent pas invoquer le texte de l'article 1 d) pour dire: Désormais, nous ne sommes plus soumis à la loi, nous pouvons faire ce que nous voulons et les restrictions et conditions qui nous ont été inposées, dans le passé, par la régie ne s'appliquent plus à nous. Nous voulons que cette éventualité ne se produise pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Par rapport à l'article 45, que viennent faire les courtiers en transports, c'est-à-dire les locataires de véhicules de transport?

M. BILODEAU: L'article 45 évidemment s'appliquera à ces gens-là puisque ces compagnies ou ces personnes devront détenir un permis. Un permis sera émis selon notre demande, au nom soit d'une personne ou d'une société ou corporation qui fait du courtage ou de la location — du "leasing" comme on dit en langage de transports — au même titre qu'un autre détenteur de permis, qui fait directement lui, du transport.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne voyez-vous pas un danger là-dedans?

Vous dites: Nous suggérons que tout permis soit émis au nom d'une personne, corporation ou société et si cette personne, corporation ou société n'a pas de domicile ou place d'affaires au Québec, elle soit dans l'obligation de désigner légalement, dans la demande de permis, le nom et l'adresse de son représentant domicilié au Québec.

M. BILODEAU: C'est la même chose. Si une compagnie faisant du courtage a son siège social en Ontario — ça existe, je pense, dans le cas des déménageurs — je ne voudrais pas apporter d'exemples trop... je pense que dans le cas des "Van Lines", il existe des compagnies qui font du courtage, dont le siège social est situé en dehors des limites du Québec, nous voulons que ces gens-là soient dans l'obligation de désigner un agent avec domicile dans la province, à qui la commission s'adressera pour toute matière concernant leur permis.

En somme, ces gens devront être traités de la même façon qu'un détenteur de permis. C'est notre demande.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y aurait des observations à faire sur le problème de la concurrence avec les entreprises de transport par rail. Il y a quelques années déjà, alors que j'étais député à Ottawa, j'ai eu l'occasion avec M. Archambault d'aller devant la régie et de défendre les camionneurs au sujet de cette concurrence, que j'avais qualifiée alors de déloyale, faite par les entreprises de transport par chemin de fer. J'imagine que le ministre tiendra compte sérieusement des représentations qui sont faites par l'association qui s'est exprimée tout à l'heure en ce qui concerne le transport par rail.

Je ne veux pas accaparer le temps de la commission, j'aurais d'autres problèmes qu'il faudrait évoquer. Nous les évoquerons avec le ministre à partir du mémoire que nous a présenté l'Association du camionnage du Québec. Mais j'estime que cette association a mis le doigt sur les faiblesses du projet de loi que nous avons devant nous et je suis obligé de dire encore une fois au ministre que c'est à une refonte complète du projet de loi qu'il va devoir s'atteler, s'il veut satisfaire les demandes.

Dans le mémoire de l'Association du camionnage du Québec, on a fait référence aux camionneurs artisans. Ceux-ci ont un mémoire que nous allons étudier lorsqu'ils le présenteront et il va nous falloir évidemment examiner très attentivement le cas de cette entreprise des camionneurs artisans et concilier leurs intérêts avec ceux des autres entreprises de transport.

M. TREMBLAY (Bourassa): Le député de Chicoutimi va bien comprendre avec moi qu'il n'est pas question de bâillonner qui que ce soit vu que nous sommes ici. Nous allons ajourner...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas parlé de bâillon, M. le ministre.

M. TREMBLAY (Bourassa): Là, vous nous parlez du mémoire qui a mis le doigt sur le problème de la refonte. Je voudrais vous dire immédiatement qu'il n'y aura pas de refonte de la loi. Je ne vous dis pas qu'on ne peut pas amener des changements à certains paragraphes de la loi. Mais il n'est pas question d'une refonte de la loi. La loi par elle-même est très bonne. Il y a sûrement certains changements qu'on peut introduire dans cette loi. Je vois, par exemple, l'Association de transport du Québec qui demande, dans des mémoires, des amendes sévères. Depuis au moins quinze ans, selon mes fonctionnaires, on se plaint qu'on impose des amendes trop élevées. Je ne sais pas si on met le doigt partout. Mais je crois qu'on met le doigt où c'est un peu mou. Il faudrait aussi voir à mettre le doigt où c'est dur. Dans le mou ce n'est pas tellement bon. Je crois que l'association a mis le doigt sur quelques affaires qui sont dures mais il y a certains endroits où il y a plus de mou.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis.

M. ROY (Lévis): M. le Président, M. le député de Chicoutimi a amené une chose tout à l'heure qui est absolument logique lorsqu'il a dit qu'on avait une compétition déloyale de la part des chemins de fer. Je dis "déloyale" parce que moi aussi, j'ai déjà fait du transport — je n'en fais plus aujourd'hui parce que j'ai fait trop d'argent et j'ai été obligé de le laisser — je trouve que ce n'est pas normal qu'un chemin de fer vienne faire compétition à nos compagnies de transport du Québec. Si vous avez tellement d'infractions à des compagnies de transport, c'est parce que ces gars-là sont obligés parfois de forcer la note et de faire des choses qu'ils ne devraient pas faire afin de contrôler et d'administrer leur transport.

Les compagnies de chemin de fer ont une chance que les compagnies de camionnage n'ont pas. Celles-ci sont obligées de faire du transport, de charger tant et le rendre à destination. Les compagnies de chemin de fer font la même chose mais, quand il leur manque d'argent, qu'est-ce qu'elles font? Elles font payer le déficit par le gouvernement fédéral au détriment de nos compagnies de transport du Québec. C'est justement de cela que je voudrais que vous preniez note et que vous demandiez au fédéral d'arrêter de concurrencer nos compagnies de camionnage du Québec avec le chemin de fer payé par la population quand il y a des déficits. C'est ce que je voulais dire. Un point, c'est tout.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Le ministre n'a aucun pouvoir de régler ça.

M. ROY (Lévis): Je ne parle pas comme séparatiste, je parle comme administrateur.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je voudrais seulement répondre... au député de Lévis qui a posé une très bonne question. Je crois qu'en ce qui concerne l'association du transport — si le député de Lévis veut prendre quelques minutes et les consulter — on a eu beaucoup de difficultés sur la question des poids. On a passé des arrêtés ministériels pour en venir à s'entendre avec l'Association du transport du Québec de façon qu'elle soit sur le même pied que les autres provinces. Alors, loin de nous l'idée d'essayer de lui causer plus de problèmes et de lui imposer des amendes. Quand nous parlons d'amendes, c'est quand le gars va à l'encontre de la loi. L'an dernier nous sommes allés chercher au-delà de $1 million de tous les contrevenants qui traversaient à Blackpool en Ontario et venaient faire du transport au Québec. Alors, c'est loin d'aller à l'encontre des transporteurs du Québec. Le problème des chemins de fer, bien, je vais vous le laisser parce qu'on va l'étudier ensemble mais je crois que ce n'est pas dans le projet de loi 23. On pourra en discuter dans un autre projet de loi.

M. ROY (Lévis): Je voudrais que le ministre comprenne que ce n'est pas pour le blâmer. J'ai

demandé que le ministre demande au fédéral de ne pas venir concurrencer les compagnies de Québec. Parce que, quand on fait du transport, si on est arrêté pour surcharge — j'ai déjà chargé assez, moi, pour faire glisser la route dans le fossé — c'est que l'on charge suffisamment pour faire un voyage payant, parce que je suis en concurrence avec des compagnies de transport qui sont payées comptant.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ne me dites pas que vous avez violé les lois.

M. ROY (Lévis): Oui, j'ai eu de la chance, je n'ai pas été pris.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre doit se rendre compte de l'importance du problème qu'évoque le député de Lévis, et moi, je représente une région où nous avons un vieux chemin de fer poussif qui est anachronique, désuet et je le dis devant ceux qui peuvent représenter les chemins de fer, on a fait un million de demandes pour qu'on le change et on ne l'a jamais changé. Or, ce sont les gens de chez nous qui ont organisé un système de transport sous toute forme, un système adéquat qui est concurrencé de façon déloyale par les compagnies de transport par chemin de fer. Alors, il faut que le ministre en tienne compte.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'en tiens compte. Je prends bonne note, mais ça me surprend qu'avec toutes ses capacités, l'honorable député de Chicoutimi, qui a été député du gouvernement fédéral, n'ait pu réussir à enlever cette poussière de ce chemin de fer alors qu'il a été quatre ans avec M. Diefenbaker.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais ici faire observer au ministre que le gouvernement central à l'époque...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Bourassa): Bien, je ne sais pas, je n'étais pas à Ottawa.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... avait exactement l'attitude qu'il a aujourd'hui lorsqu'il a acculé le premier ministre Bourassa à dire non à la formule présentée la semaine dernière à Victoria.

M. TREMBLAY (Bourassa): Nous parlons de votre chemin de fer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il en est dans ce domaine-là comme dans tous les autres.

M. TREMBLAY (Bourassa): Nous parlons de votre chemin de fer du temps où vous étiez député de Chicoutimi.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre, avec tout le respect que je vous dois...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... vous allez faire trembler le CNR, c'est certain. Ne faites pas pression contre les chemins de fer, vous allez faire trembler le CNR.

M. LE PRESIDENT: La question des chemins de fer n'est pas impliquée dans le bill 23. Alors on en discutera à un autre moment. Maintenant il y a le député d'Abitibi-Ouest qui avait une autre question.

M. AUDET: J'aurais seulement une question.

Je demanderais à Me Raymond, qui représente la Communauté urbaine de Montréal, de bien faire parvenir tous les documents relatifs à la poursuite dont il a...

M. RAYMOND: Quand voulez-vous ces documents?

M. AUDET: ... a parlé ce matin...

M. RAYMOND: Quand voulez-vous ces documents?

M. LE PRESIDENT: Pour mercredi prochain.

M. RAYMOND: Mercredi prochain, c'est bien M. le ministre, vous les aurez.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce qu'on peut les avoir avant, ces documents?

M. RAYMOND: Oui, vous les aurez avant, enfin disons... La déclaration de M. le ministre tout à l'heure, m'a fait plaisir parce qu'il disait justement à M. Bilodeau, qu'il s'opposait à donner une trop grande latitude à la prochaine Commission des transports. On demande justement ici l'autonomie complète de la Commission des transports. Je crois réellement que nous, de notre groupe, nous nous sommes opposés à cette trop grande latitude qu'on semblait vouloir accorder à cette commission. Je crois que le ministre est dans l'ordre, lorsqu'il ne veut pas accorder autant d'autonomie à cet organisme qui pourrait facilement, comme le député de Chicoutimi le disait tout à l'heure, venir annuler pratiquement les dispositions contenues dans le bill 23.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je pense que le député a très mal compris...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais nous aurons l'occasion d'y revenir.

M. LE PRESIDENT: On y reviendra, il est déjà 12 h 45.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je m'inscris en faux contre l'interprétation du député.

M. LE PRESIDENT: On avait convenu d'ajourner à 12 h 30. S'il n'y a pas d'autres questions dirigées vers Me Bilodeau, je vais ajourner cette commission à mercredi prochain, 10 heures.

(Fin de la séance: 12 h 45)

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