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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le mardi 31 août 1971 - Vol. 11 N° 79

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Projet de loi no 23 - Loi des transports


Journal des débats

 

Commission permanente des Transports

Projet de loi no 23 — Loi des transports

Séance du mardi 31 août 1971

(Dix heures huit minutes)

M. George Kennedy

M. KENNEDY (président de la commission parlementaire des Transports): A l'ordre, messieurs! Encore une fois, bienvenue à la commission parlementaire des Transports. Nous allons commencer, ce matin, par entendre l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants Inc.

Je veux répéter les remarques que j'ai faites à chacune des autres séances de la commission. Je demanderais à ceux qui présentent des mémoires d'être aussi brefs que possible dans leur préambule. Je pense que nous allons vous donner toute la latitude possible pour discuter des points spécifiques de la loi, mais dans la présentation de votre préambule, je vous demanderais d'être le plus bref possible pour que nous puissions entendre le plus de gens possible aujourd'hui. Alors, Me Béliveau.

Association nationale des camionneurs artisans indépendants Inc.

Me Jean-Marc Béliveau

M. BELIVEAU: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de l'Assemblée nationale, je représente avec fierté, à titre de conseiller juridique, 5,000 petits camionneurs qui, pour la première fois dans leur histoire, ont cru bon de faire l'unité et ce, autour de l'Association nationale des camionneurs artisans. M. Alphonse Dufour, le président de cet organisme est ici et se déclare prêt à répondre à chacune des questions que vous jugerez bon de lui poser.

M. le Président, de façon à bien vous faire comprendre nos problèmes et la dimension exacte de nos difficultés, je devrai vous brosser un bref tableau de ce qu'est véritablement le camionneur artisan et vous aurez tôt fait d'en venir à la conclusion qu'il est le citoyen le plus mal foutu que l'on puisse trouver sur le territoire québécois.

M. le Président, le camionneur artisan, c'est lui qui, depuis 35 ou 40 ans, avec ses collègues a investi quelques milliards de dollars dans l'industrie du petit camionnage au Québec et ce, dans des conditions extrêmement difficiles et pénibles. L'achat des camions, de la gazoline, des pneus, l'entretien des camions, voilà sa contribution à la roue économique du Québec. C'est lui qui a hypothéqué son passé, son présent, son avenir dans un instrument de travail qui s'appelle un camion, se dépréciant à vue d'oeil et cela malgré le fait qu'en 1971, au moment où je vous parle, il ne possède encore aucune garantie légale de quelque nature qu'elle soit. A l'heure actuelle, alors que la plupart des membres de notre société québécoise sont organisés, c'est lui qui a encore peur des élections, peur des hommes politiques, peur des divisionnaires, des cantonniers, peur des entrepreneurs, bref, peur de toute force ou de toute puissance quelconque parce que, chaque fois qu'il s'y est frotté, cela a toujours été à son détriment. Bref, M. le Président, le camionneur artisan — et M. le ministre le sait très bien, j'en suis convaincu — c'est le citoyen le plus mal foutu au Québec.

Nulle part, encore une fois, dans quelque loi que ce soit, on ne trouve à son égard une protection qui puisse lui permettre de respirer un peu comme respirent des gens qui sont organisés dans d'autres secteurs de la société.

Alors, quelle est son attitude à ce camionneur artisan, M. le Président, devant cette nouvelle Commission des transports que le gouvernement du Québec a l'intention de former?

Il est à la fois très heureux et très inquiet; heureux parce qu'enfin on semble considérer qu'il existe puisqu'on nous avertit que désormais nous serons coiffés par cet organisme qu'on appelle la Commission des transports, mais il est aussi très inquiet parce que, comme homme juridique, je dois lui dire, à mon camionneur artisan, que pas un seul article dans cette loi, ou dans ce bill 23, n'est de nature à le calmer ou à lui permettre d'avoir quelque espoir que ce soit.

J'ai beau éplucher la loi de A à Z et de tous ses articles, dans tous ses contours, que je ne trouve rien qui puisse lui permettre, au camionneur artisan, justement de regarder l'avenir avec un peu plus d'optimisme. Evidemment, M. le Président, nos partenaires dans cette future commission n'ont pas cet inconvénient parce qu'ils ont au moins la conviction que les droits qu'ils possèdent dans la présente régie seront transférés dans la future commission. Nous n'étions pas dans la future commission. Nous devons faire confiance au gouvernement qui nous dit: des règlements s'en viennent qui vous donneront un certain nombre de garanties, mais dans la loi elle-même, je ne trouve rien et je dois le dire purement et simplement.

Maintenant, M. le Président, il faudrait très peu de chose pour que nos camionneurs artisans soient calmés et pour qu'ils puissent avoir un certain espoir dans l'avenir. D'abord, nous remarquons que la Commission des transports va fonctionner et qu'elle va créer un certain nombre de postes très importants dont celui des commissaires et celui qu'on retrouve à ce fameux conseil consultatif. Il y aura également, qui se greffera à cela, un comité d'enquête qui verra au bon fonctionnement de la Commission des transports. Si nous avions la certitude à ce moment-ci de retrouver à chacun de ces paliers des gens qui comprennent bien le problème du camionneur artisan, qui savent que chaque fois que nous avons des doléances à présenter, nous avons aussi un problème humain immédiat à soumettre, bien, nous serions, sur ce plan, très calmés; mais notre expérience

devant les divers ministères ou devant les diverses commissions parlementaires, c'est qu'on a devant nous une foule de gens de bonne foi, mais à qui nous devons toujours faire l'historique de nos problèmes, à qui nous devons toujours décrire parfaitement bien ce que nous sommes avant qu'on puisse finir par comprendre notre problème.

Parfois il se passe des mois et nos gars attendent toujours, ils attendent dans tous les points du Québec.

Il y a également une autre chose qui nous tient à coeur, M. le Président, et c'est la plus importante, c'est que dans la loi ou dans les règlements, on nous dise que les règlements vont consacrer le principe de la limitation des permis d'après les besoins du Québec. Nous remarquons dans la loi que le ministre a l'intention de faire un inventaire des véhicules qui se trouvent actuellement dans le Québec; c'est sûrement parce que la Commission des transports a l'intention d'émettre des permis dans la mesure des besoins du Québec.

Quand je parle des besoins du Québec, M. le Président, je ne parle pas de ses besoins temporaires, je parle de besoins véritables qui sont à longue durée. Or, nous sommes convaincus qu'il y a actuellement au Québec peut-être 30 p.c. ou 40 p.c. de petits camions de trop. Nous voyons que dans les comtés, les gens s'achètent des camions. Nous voyons que des événements ont favorisé l'achat de certains camions, et c'est normal. Nous ne nous scandalisons pas de cela.

Mais nous préconisons que dans une société bien organisée, où des gens, pendant 35 ans, ont enduré une situation extrêmement pénible, soit celle qui a été le sort des camionneurs artisans, nous nous disons que si, enfin, le gouvernement a l'intention de donner des taux et des conditions de travail qui sont assez intéressants, on doit limiter ça à ceux qui ont fait profession d'être camionneurs artisans et qui peuvent très bien, d'après leur équipement actuel, répondre à tous les besoins actuels du Québec. Nous préconisons le principe de la limitation des permis d'abord, le principe de la limitation dans le secteur parce qu'il nous apparaît certain qu'un secteur devrait nous être donné exclusivement, où, désormais, personne ne pourrait nous faire chanter, où personne ne pourrait nous dire: Ecoutez les gars, ne vous énervez pas parce que si vous vous énervez, vous allez perdre ce que vous avez, mais un secteur qui nous est assigné.

Je remarque dans l'article 26 paragraphe 3 qu'on parle d'un secteur particulier pour ceux qui ont des bennes basculantes, c'est-à-dire qu'on nous confine à l'article 26 paragraphe 3 mais on ne nous dit pas, évidemment, que ce secteur-là va nous être réservé exclusivement. C'est pourquoi nos gars qui transportent du bois, du gravier, des marchandises en vrac se disent: On serait bien heureux si le gouvernement du Québec nous disait, vous êtes dans le paragraphe 3 de l'article 26, mais on vous donne ça exclusivement. Et â partir du moment où on dira: On vous donne ça exclusivement, nous aurions le pouvoir, une assiette légale qui nous permettrait de repousser les injonctions quand, dans un comté, par exemple, on voit venir des gens qui viennent d'un peu partout faire les jobs de nos gars et qu'on veut justement défendre nos droits. Actuellement, des droits on n'en a pas.

Limitation quant à la personne également.

Nous souhaiterions, M. le Président, que ceux qui ont fait leurs preuves dans un domaine, encore une fois, pénible pendant 35 ou 40 ans, qui ont justement enduré une situation, une atmosphère irrespirable dans l'espoir qu'un jour on aurait à leur donner des conditions de vie et de travail plus intéressantes, on voudrait que ce secteur dans lequel ils ont travaillé, qui n'était pas intéressant et qui peut le devenir évidemment, leur soit réservé à eux. En d'autres termes, nous voudrions que le petit camionnage au Québec soit réservé aux camionneurs artisans, c'est-à-dire aux gens qui font profession de gagner leur vie avec un camion et qui à ce jour ont, je pense, très bien fait et donné un excellent service au Québec.

Je remarque dans la loi — juste quelques remarques bien courtes que je ferai — que quand on a formé cette Commission des transports on a pensé, on a planifié grand et j'en félicite le ministre des Transports. Seulement, quand on arrive au chapitre des procédures, par exemple, pour les griefs ou les doléances et en fait les délais et tout cela, s'il est vrai qu'une grosse compagnie de transport peut très bien s'accommoder de telles procédures, comment voulez-vous que le camionneur artisan, qui dépend de son camion directement — c'est-à-dire que si le camion reste arrêté deux jours il est directement et immédiatement compromis avec sa famille — se sente à l'aise, devant un tribunal de la commission ainsi constitué, à côté de très gros intérêts où l'humain a peut-être moins d'importance que chez nous?

Deuxièmement, on s'aperçoit que la loi réserve des appels sur les questions de droit seulement. Ma courte expérience devant les tribunaux démontre que lorsqu'un juge est habile il peut toujours s'organiser, sur des questions de droit — j'ai bien dit lorsqu'un juge est habile — pour qu'il n'y ait pas d'appel.

Nous souhaiterions évidemment que dans l'optique qui nous concerne nous puissions en appeler également sur des questions de fait et je rejoins là le voeu exprimé par l'Association du camionnage du Québec.

On s'aperçoit également qu'il y a des tribunaux où des frais seront prévus pour être entendu. Comment pouvoir évaluer cette échelle de frais quand nous ne l'avons pas devant nous et comment ne pas souhaiter finalement, tenant compte de nos moyens, quand on sait que nos gars n'ont pas d'argent, que le tribunal des transports soit un tribunal sans frais? L'optique actuelle du ministère de la Justice, par exemple, à un niveau supérieur, est qu'on dote le Québec d'un certain nombre de tribu-

naux d'équité où le justiciable peut se présenter devant le tribunal sans frais et faire entendre sa cause. Alors, je voudrais qu'on tienne compte, dans la Commission des transports, que nos membres, étant pauvres par définition, on leur permette de se faire entendre sans qu'il y ait de frais.

Les frais, si petits qu'on puisse les imaginer, seraient je le sais, dans bien des cas, toujours prohibitifs pour certains de nos membres qui n'en ont pas les moyens.

En outre, on parle de tarif uniforme dans tout le Québec. M. le ministre, je vous félicite pour cette disposition. Je dois vous dire, cependant, que je souhaite que la commission tienne compte du fait que le coût de revient de nos camions n'est pas le même nulle part dans le Québec. Je vous donne un exemple en passant : à Shawinigan, le prix d'un gallon d'essence est actuellement de $0.39, tandis qu'à Rouyn-Noranda c'est $0.60. Il y a une différence appréciable. Je suis sûr que la commission pense à cela.

M. le Président et messieurs les membres de la commission, quelle que soit votre couleur politique, je vous présente aujourd'hui non pas les doléances de gens qui n'ont pas pensé à leur affaire, mais un problème très humain, très impérieux. Je représente, encore une fois, avec fierté, 5,000 petits camionneurs qui, je vous le dis, sont en colère actuellement parce qu'ils n'ont aucune espèce de protection légale. Je dois dire une autre fois que, dans le projet de loi no 23, je ne vois rien qui puisse les calmer.

Je souhaite de tout mon coeur que dans les règlements, au moins, on prévoie justement quelque chose pour les camionneurs artisans. Je souhaite surtout que, chaque fois que l'on vote un règlement, on s'interroge sur les incidences de ce règlement sur les infiniment petits que nous serons, parce que nous serons les plus petits en termes de piastres et de cents de toute cette immense Commission des transports. Nous avons demandé au ministère du Travail qu'il nous reconnaisse juridiquement comme unité de négociation. Evidemment, nous voudrions arriver dans la commission avec une dimension juridique, ce que nous n'avons pas actuellement. Nous ne voudrions pas qu'un de nos membres se présente devant la commission comme Jean-Baptiste Mathieu, par exemple, qui vient de Saint-Tite et qui est tout seul à défendre ses droits, mais nous souhaiterions être là pour défendre ses intérêts au nom d'une association qui comporte, tout de même, à ce jour, 5,000 membres.

Four peu, M. le Président, que le gouvernement du Québec nous donne l'assurance qu'il n'y aura pas de permis accordés à n'importe qui; pour peu qu'on soit convaincu que ça ne peut pas bien marcher si on n'a pas une limitation des permis et une limitation quant à la qualité, parce que nous avons au moins gagné le droit, à l'heure actuelle, en ayant supporté pendant 36 ans une situation irrespirable, de nous faire entendre et de partager le gâteau, enfin, si gâteau il y a à partager, que ce ne soit pas quelqu'un d'autre qui vienne le chercher, alors que des conditions de vie plus normales seront accordées au petit camionnage.

Pour peu que tout cela soit accordé — et c'est bien à mon point de vue, M. le Président — je vous assure que l'Association nationale des camionneurs artisans se fera un plaisir de collaborer à 100 p.c. avec le gouvernement, avec la commission. J'exprime évidemment le souhait que ce que je vous ai dit ce matin sera bien entendu et qu'on apportera immédiatement les correctifs voulus pour les 5,000 membres que je représente. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, je vous remercie de la présentation que vous avez faite du problème des camionneurs artisans. Ce problème est en effet crucial, il est extrêmement dramatique dans certains cas. J'aurais un certain nombres de questions à vous poser sur la situation générale des camionneurs artisans de même que sur les modifications que vous voudriez voir apportées à la loi.

D'abord, M. Béliveau, pourriez-vous préciser la situation juridique de l'association dont vous êtes le procureur, sa situation juridique comme association?

M. BELIVEAU: L'Association des camionneurs artisans du Québec a une charte provinciale en vertu de la Loi des syndicats professionnels. Vous et moi savons très bien que cela ne veut absolument rien dire, cela ne nous confère aucun droit. Les droits que nous avons actuellement sont ceux que nous avons pu obtenir dans divers ministères, miette par miette, humiliation par-dessus humiliation.

Je dois vous dire qu'en outre de cela, nous avions obtenu, par exemple, du ministère de la Voirie une certaine reconnaissance de fait qui vient d'être désavouée purement et simplement parce qu'on a dit: Ecoutez, vous n'avez pas de loi. Nous constatons que le problème fondamental est que nous n'avons aucune dimension juridique actuelle qui soit valable devant qui que ce soit, qui nous permette d'exiger de qui que ce soit des conditions de travail normales. Je dois dire, entre parenthèses, qu'un très grand nombre de députés ont accepté notre association, la voit d'un bon oeil et collabore à 100 p.c. et ce dans tous les partis politiques.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, vous faisiez état, tout à l'heure, de certains griefs en disant que vous êtes un groupe assez mal traité et que vous êtes encore ce groupe qui craint les répercussions que peuvent entramer des élections générales. Est-ce que, à votre connaissance, il y a des faits qui vous indiquent

que l'Association des camionneurs artisans n'est pas agréée dans certaines circonscriptions?

M. BELIVEAU: Il est évident, M. le député de Chicoutimi, que nous ne sommes pas agréés dans certaines circonscriptions, et je dois vous dire que même dans les comtés où cela va bien, en fait, ça va mal. Comment voulez-vous que j'assure mes membres qu'ils ont cette garantie pour laquelle ils travaillent depuis si longtemps, quand je sais que, demain matin, il peut se produire des événements qui peuvent leur faire perdre ces droits? Et on ne manque pas de leur dire à un moment donné: Ne vous énervez pas les gars, parce que le peu que vous avez on peut vous l'enlever.

Je vous cite un cas en particulier. Nous sommes allés au ministère de la Voirie pour tenter de régler un problème dans un comté de la rive sud. Nous avons là une association légalement constituée, bien organisée et, évidemment, le député du comté ne veut pas l'accepter. Il nous a dit qu'il ne voulait pas l'accepter tout simplement parce qu'il était normal que des gens qui avaient jeûné pendant quatre ans fassent jeûner les autres pendant quatre ans. C'est aussi simple que cela. C'est ça le problème que nous vivons. Nous le vivons dans plusieurs comtés, et je regrette d'avoir à le dire. J'ai passé, cette semaine, à cause de cela, pour un contestataire, un gars dangereux, parce que, enfin après un an je le dis, il arrive, M. le député de Chicoutimi, que depuis un an je déploie tous les efforts voulus pour calmer les gars et non pas pour susciter quoi que ce soit. Le député de Charlevoix, qui assistait à notre congrès, l'autre jour, a été témoin du fait qu'alors que des gars voulaient absolument faire des manifestations, partir en guerre j'ai dû intervenir à maintes reprises pour les calmer. Les gars réalisent qu'ils n'ont rien actuellement et ils demandent au ministre des Transports, justement, qu'on nous donne au moins des principes, dès aujourd'hui, de ces règlements qui n'apparaissent pas dans la loi et qui vont nous donner, au moins à celui qui vous parle, la possibilité de calmer nos gars.

Moi, je fais le tour du Québec actuellement et je ne peux plus faire les mêmes discours en disant: Les gars, on va l'avoir. Ça va bien aller. On va discuter, on va dialoguer. On va nous comprendre. Je ne peux plus faire cela. Parce que les gars vont me mettre à la porte. Remarquez que cela, ce n'est pas grave, mais il reste que l'autre qui arrivera par la suite ne pourra non plus donner ce genre de discours. Ce n'est plus possible maintenant.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, Me Béliveau, vous faites état de situations de fait. Vous avez mentionné notamment certaines circonscriptions de la rive sud où l'on vous aurait dit que des gens qui ont jeûné pendant quatre ans ont le droit de se reprendre. Qu'est-ce que cela signifie dans les faits? Cela signi- fie-t-il que l'on a écarté les camionneurs artisans au profit d'autres camionneurs qui ne font pas partie de votre association?

M. BELIVEAU: Cela signifie, M. le député de Chicoutimi, par exemple, que dans un comté comme Arthabaska, depuis au-delà d'un an, il y a eu 40 camionneurs qui n'ont pas eu droit, qui n'ont pas eu accès à un sou des travaux de voirie parce qu'ils n'avaient pas voté du bon côté. C'est aussi brutal que ça; je n'accuse personne, mais c'est ça.

Dans le comté de Drummondville actuellement, c'est un comté où le problème est loin d'être réglé, ça se fait encore que des camionneurs soient mis de côté, à qui on a fait gagner quelque $100, mais justement pour pouvoir dire qu'ils ont gagné, eux aussi. Mais si par comparaison on fait des chiffres avec ceux qui participent au gâteau, c'est extraordinaire. Et dans Drummondville en particulier, je dois vous dire que le président de notre organisme est le président politique du parti au pouvoir dans une section de Drummondville. Lui, il aurait pu participer au gâteau, lui, il aurait pu dire: Je suis bon pour quatre ans. Mais lui-même a compris que le problème de quatre ans, ça ne règle rien. Ce qu'il faut, en 1971, c'est que, de même qu'on a trouvé une solution à la Régie des alcools ou à la Ponction publique, il faut en trouver une où les gars, avec un investissement de $25,000, $30,000 ou $35,000 qui est l'investissement du camionneur artisan, puissent dormir sur leurs oreilles, quel que soit le gouvernement au pouvoir, quel que soit le parti politique qui puisse prendre le pouvoir. C'est une protection syndicale qu'il nous faut et c'est une protection syndicale spéciale parce que nous ne sommes ni employeur ni employé et que nous ne pouvons pas épouser les troubles de celui-ci ou celui-là.

On a demandé au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre qu'il nous reconnaisse juridiquement pour pouvoir justement négocier. Je sais bien que le ministre des Transports, même s'il voulait éviter toutes ces choses qui peuvent arriver au Québec actuellement, il ne le peut pas parce que c'est la situation qui est bâtarde, qui n'a aucun bon sens pour des gens qui, pendant 35 ou 40 ans, ont enduré une situation irrespirable et puis qui, en 1971, ne peuvent pas dire à qui que ce soit, ni à l'entrepreneur ni au divisionnaire. Ecoute, on a des droits. Ils n'ont pas de droits. En toute sincérité, je dois le leur dire, et dans le bill 23, il n'y a rien non plus. Je dois le leur dire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Béliveau, revenant à la question de fait, est-ce que l'affirmation que vous avez faite tout à l'heure, savoir que l'on aurait déclaré qu'il y a des gens qui ont jeûné et qu'il est temps qu'ils aient leur part du gâteau, cette affirmation a été faite par des personnes qui ne sont pas investies

d'autorité ou si cette affirmation a été faite par des personnes en place?

M. BELIVEAU: Cette affirmation a été faite par M. Bernard Pinard...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Par le ministre Bernard Pinard.

M. BELIVEAU: ...que j'estime beaucoup à plus d'un égard. Mais cette fois-là, franchement, le président de l'association, M. Alphonse Dufour, M. Bernard Gagnon, M. Oscar Tellier, nous sommes sortis de là complètement découragés parce que son ministère, qui avait donné une reconnaissance de fait, désavouait cette reconnaissance de fait. En tout cas, il y a une reconnaissance de fait qui a été donnée par le sous-ministre de la Voirie, M. Blais, par une lettre dans laquelle il dit, dans le dernier paragraphe: "A l'avenir, en autant que nous sommes concernés, le seul...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, s'agit-il d'une lettre du 28 mai...

M. BOSSE: J'aimerais entendre le contenu de la lettre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président, j'ai la parole et je pose une question à Me Béliveau.

M. BOSSE: Il est en train de nous donner le contenu de la lettre, j'aimerais l'entendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais justement, c'est là-dessus que je l'interroge. Il s'agit d'une lettre, semble-t-il, que vous auriez reçue vers le 28 mai...

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...une lettre de M. Blais...

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... dans laquelle on vous indiquait que les camionneurs artisans seraient reconnus...

M. BELIVEAU: Exclusivement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et pourraient exécuter exclusivement des travaux. Cette reconnaissance de fait a été, par la suite, démentie ou récusée par Me Pinard lui-même.

M. BELIVEAU: C'est cela, puisque dans le comté de Drummondville, qui est le comté de M. Pinard, on ne respecte pas cette lettre et on dit: Ecoutez, il est normal que des gens qui ont jeûné pendant quatre ans fassent jeûner les autres pendant quatre ans. Ce sont les paroles exactes; j'étais là. Il n'y a pas plus exact que cela. Je comprends les difficultés — je ne suis pas un enfant, tout de même — de M. Pinard qui a affaire à des gens qui veulent avoir le camionnage chez eux, c'est clair. Mais, j'imagine, que ce genre d'argument a été donné à tous les députés dans tout le Québec et tous les députés ont dû avoir la tentation de dire: D'accord, on va agir comme ça. Par ailleurs, je dois dire qu'au gouvernement actuel, comme chez les députés de l'Opposition, on a reçu l'assentiment de plusieurs députés, dont celui de M. le Président de la commission, M. Kennedy où cela fonctionne très bien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, les personnes dont on requiert les services pour faire du camionnage dans le comté de Drummondville, notamment, et qui ne passent pas, comme vous venez de l'indiquer, par votre association, ont-elles une organisation? Font-elles partie d'une association parallèle ou d'une association de comté et qui en est le porte-parole?

M. BELIVEAU: C'est un M. Joyal qui est le président de l'Association nationale des camionneurs artisans dans le comté de Drummondville et qui a suivi toutes les procédures voulues pour qu'il y ait là une association affiliée à la nôtre, ici à Québec. M. Joyal jeûne justement avec ses membres; ils sont 40 et ils ont leur voyage!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'avez pas tout à fait faisi le sens de ma question.

M. BELIVEAU: J'ai peut-être mal saisi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je parle des autres.

M. BELIVEAU: Pardon?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous me dites que ces gens qui font partie de l'Association des camionneurs artisans ont été écartés. Il y a donc d'autres camionneurs qui ne font pas partie de votre association et qui, eux, peuvent travailler.

M. BELIVEAU: Oui, c'est cela, monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): En vertu de quoi? Sont-ils intégrés dans une autre association et qui peut-être le porte-parole de ces gens qui ne font pas partie de votre association?

M. BELIVEAU: Je dois vous dire qu'il y a, évidemment, une association autre dans Drummondville. Si je tiens compte du principe émis par M. Pinard, c'est une association qui est coiffée juridiquement par le principe qu'ils ont jeûné pendant quatre ans et donc que les autres doivent jeûner.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que

cette association, qui se situe en dehors de la vôtre, a un porte-parole?

M. BELIVEAU: Elle a un porte-parole justement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que c'est M. Mercure?

M. BELIVEAU: M. Mercure et M. Sigouin.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les organisateurs de M. Pinard.

M. BELIVEAU: Et M. Côté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Béliveau, dans d'autres circonscriptions, est-ce que le même problème se pose?

M. BELIVEAU: Evidemment, cela existe, M. le député de Chicoutimi, dans plusieurs autres circonscriptions, mais pas à ce point chronique. On n'a jamais eu, jusqu'à maintenant, l'honnêteté de nous dire aussi clairement que le principe qui prévalait, c'est celui que j'ai énoncé, mais cela existe, évidemment. Matane, par exemple, est un comté qui a des difficultés énormes justement à cause de ce principe qui n'a pas été énoncé, mais qui existe.

M. HARVEY (Chauveau): Voulez-vous nous dire ce qui se passe dans Wolfe et dans Gaspé-Nord?

M. BELIVEAU : Dans Wolfe et dans Gaspé-Nord? Dans Wolfe, nous avons un embryon, nous avons une association qui va très bien...

M. LACROIX: Est-ce qu'il y a un libéral qui est capable d'entrer un camion présentement?

M. LE PRESIDENT: Messieurs, chacun son tour.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai la parole.

M. LE PRESIDENT: C'est cela, c'est vous qui avez la parole.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, pour revenir aux questions de principe puisque les faits que vous venez d'évoquer sont d'un ordre un peu particulier, je ne voudrais pas insister trop longuement là-dessus, nous avons tous pris note des observations que vous avez faites. Le ministre, pour sa part, les a enregistrées et nous nous attendons bien à ce qu'il consulte son collègue pour mettre fin à cette situation.

Dans l'ordre des principes, lorsque vous parlez d'une limitation du nombre des camionneurs artisans, voulez-vous expliciter exactement ce que vous entendez parce que, Me

Béliveau, j'ai longuement étudié votre mémoire — d'ailleurs j'étudie cette situation depuis déjà plusieurs mois — et je suis tout à fait d'accord avec vous pour reconnaître d'abord l'existence légale de l'Association des camionneurs artisans et que, d'autre part, par le projet de loi no 23 on ne lui donne pas seulement une assurance d'intention, mais on lui donne légalement l'assurance que ses membres seront reconnus au même titre que n'importe quel transporteur, ou n'importe quelle entreprise qui effectue des travaux identiques, similaires ou analogues à ceux qu'effectuent les membres de votre association.

Lorsque vous parlez de la limitation, vous y pensez naturellement en termes de sécurité d'emploi pour vos gens, vous y pensez aussi dans l'optique des investissements qu'ils ont consentis et dans l'optique, évidemment, de la poursuite d'une entreprise normale qui se situe dans le cadre de l'entreprise privée et qui doit être protégée par une disposition législative.

M. BELIVEAU: C'est cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cette limitation, quelle est-elle exactement dans votre esprit? Vous avez 5,000 membres, vous avez dit par ailleurs qu'il y avait de 30 p. c. à 40 p. c. de camions de trop. Pourriez-vous m'expliquer cette situation?

M. BELIVEAU: Le principe lui-même a été repris par M. Bossé lorsqu'il a fait une enquête sur le taxi dans l'île de Montréal. Il m'apparaît évident, sans même que nous ayons à faire un plaidoyer très long, que si on veut permettre à des gens qui font un investissement de $25,000 à $30,000, dans le domaine du petit camionnage, que le nombre de camions doit être proportionnel au besoin que l'on trouve dans un certain territoire. Si on multiplie les camions, si c'est un "free for all", il est évident que des gens vont travailler à 50 p. c, à 25 p. c. et qui vont se retrouver dans le statut dans lequel nous sommes actuellement puisque la moyenne de travail de nos gens — j'ai oublié de vous dire cela tout à l'heure — est d'à peu près quatre mois et demi ou cinq mois par année. Nous remarquons dans le projet de loi no 23 que le ministre veut faire un inventaire des véhicules. Cet inventaire est sûrement fait dans un but précis. Nous aimons à penser que c'est justement pour tenir compte des besoins actuels et lorsque viendra le temps d'émettre des permis, on tiendra compte de ces besoins.

M. le député de Chicoutimi, nous souhaitons justement, si nous avons une dimension légale de quelque nature qu'elle soit, nous pourrons à ce moment-là, avec l'autorité concernée, apporter nos doléances. Nous pourrons dire, par exemple, qu'à notre point de vue il y a suffisamment de camions et nous pourrons tâcher, par tous les moyens légaux voulus, de bloquer l'émission de nouveaux permis.

Si le principe de la limitation n'était pas reconnu dans le domaine du petit camionnage comme dans le domaine du taxi sur l'île de Montréal, il est évident que tout ce qu'on pourra faire dans la Commission des transports n'aura aucun effet bénéfique pour les petits camionneurs, c'est clair. Parce que nous sentons bien que le ministre a l'intention de forcer la main à celui-ci et celui-là pour donner des taux convenables.

Un secteur de la société québécoise qui était pourri jusqu'ici va devenir intéressant, et immédiatement on va voir des groupes de gens, des groupes de notaires, d'avocats, de médecins, d'hommes d'affaires qui vont s'acheter, devant un projet comme la baie James, peut-être 1,500 camions et qui vont prendre le plus beau du gâteau alors qu'il y a des gars qui veulent travailler et dont les camions restent dans la cour.

Je vous cite une autre anomalie. Les usines de pâtes et papier, actuellement, ont des subventions gouvernementales, vous le savez. Or, il arrive que nos camionneurs qui sont prêts, par exemple dans l'Abitibi, à transporter le bois d'un point A à un point B, voient leur camions dans la cour pendant qu'on se sert des subventions gouvernementales pour s'acheter une série de camions. Est-ce que c'est normal? C'est ça qu'on veut éviter. On veut qu'il y ait une limitation et que ce petit camionnage — on a souffert pendant 35 ans et c'est sur le point de devenir intéressant — soit fermé à ceux qui ne sont pas de la profession et qu'enfin on puisse vivre comme tout le monde.

Nos gars, vous le savez, M. le député de Chicoutimi, ont renoncé depuis bien longtemps — et je parle de l'ensemble des camionneurs du Québec — à envoyer leurs fils à l'université, faire instruire leurs filles, se donner un certain luxe qu'on retrouve chez tous les travailleurs aujourd'hui. Ils ont renoncé à cela parce que leur condition est épouvantable, et c'est celle que j'essaie de vous décrire aussi bien que possible aujourd'hui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, la Commission des transports qui sera créée va évidemment établir des normes et tout cela. Quelles sont, selon vous, les normes qui décriraient le mieux la situation du camionneur artisan pour que vous soyez protégé de la façon dont vous l'indiquez?

M. BELIVEAU: Il faudrait que la première norme soit que la Commission des transports accepte le principe de la limitation, qui est d'ailleurs reconnu à un niveau plus élevé. Dans le transport important, là où on trouve un grand nombre de camions, il y a des permis pour certains secteurs et n'entre pas là-dedans qui veut. M. le député de Chicoutimi, si on ne reconnaît pas ce principe à la base, avant même que la loi ne soit votée, nous sommes convaincus que l'effet à court terme de la Commission des transports sera de faire disparaître les petits camionneurs. Si le ministre pouvait nous dire dès aujourd'hui qu'il croit à ce principe et qu'il mettra à sa disposition son talent pour qu'il soit appliqué, nous serions déjà bien satisfaits.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'article 26, dans les recommandations précises que vous faites relatives aux dispositions du projet de loi, vous parlez de votre association en disant: "L'association nationale des camionneurs artisans sait qu'elle se situe au numéro 3, transport de matières en vrac."

M. BELIVEAU: C'est ça, monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): "Elle sait aussi que le transport général réclame l'exclusivité dans le domaine du bois et de ses rebuts ainsi que dans celui du ciment, de pierre à chaux broyée ou de marne pouvant servir à l'amélioration des sols. "L'association est prête à céder le transport du bois fini et celui du ciment de pierre à chaux broyée ou de marne devant servir à l'amélioration des sols, pourvu que tout ce qui reste au numéro trois lui soit accordé sans réserve."

Ne pensez-vous pas, dans l'optique de la protection et de l'expansion de votre association, que vos exigences ici sont limitatives?

M. BELIVEAU: Je le pense davantage depuis que j'ai entendu le mémoire très bien préparé de l'Association du camionnage du Québec. M. Archambault a déclaré — j'en suis très fier — que ses camionneurs se portent très bien et que, financièrement, ils vont bien. Alors, je me reporte en arrière et je dis que, si nous pouvions avoir tout ce qui est prévu exclusivement, au paragraphe 3 de l'article 26, à ce moment-là, tout notre problème serait réglé et je vous assure que vous seriez bien longtemps sans entendre parler de nous. Evidemment, nous souhaiterions avoir tout ce qui est dans le paragraphe 3, mais nous partions avec le principe que c'était trop beau pour être vrai. Maintenant, nous avons peut-être commis la faute d'avoir fait une concession, ce qui est mauvais en matière de négociations, apparemment.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je reviens là-dessus justement; c'est qu'à l'article 26 je trouve que vos exigences sont limitées. Que restera-t-il vraiment aux camionneurs artisans à faire si vous excluez ce que vous indiquez dans l'article 26? Vous êtes prêts à céder le transport du bois fini, de ciment de pierre à chaux, de marne et vous demanderiez simplement qu'on retienne ce qui se trouve indiqué au paragraphe 3 de l'article 26.

M. BELIVEAU: M. le Président, que la commission retienne que les camionneurs artisans souhaitent pouvoir transporter toute matière en vrac, évidemment, surtout en tenant

compte de ce que nous avons entendu ici, et, nous serions très satisfaits. Si nous avions cela exclusivement, avec le transport des billots et tout ce que l'on voit dans le bois, ça voudrait dire qu'avez une planification aussi humaine que possible, un jour ou l'autre, nos camionneurs transporteraient tout ce qu'il y a de bois au Québec, tout ce qu'il y a de "chips"(les chips ce sont des petites pièces de bois que l'on fait sur place) dans des secteurs où ils n'ont jamais été admis ou à peu près.

On voit très bien le phénomène suivant lorsqu'ils sont admis; ils sont l'objet de chantage de la part de ceux qui les admettent : Si tu ne veux pas transporter à tel prix, va-t'en chez toi et on prendra quelqu'un d'autre. On se fait dire ça tous les jours. Si tu ne veux pas faire telle chose à telle condition, fous-nous la paix. N'ayant aucune dimension juridique, nous sommes obligés de nous en aller. Quand les gars font un blocage à un moment donné, il leur rebondit dans la figure une injonction contre laquelle nous ne pouvons pas nous battre parce que nous n'avons pas de droits. C'est toujours le même cercle vicieux qui revient et notre position aujourd'hui, c'est que nous sommes complètement démunis. Nous sommes les nouveau-nés de cette future commission et, dans la loi, nous cherchons quelque chose pour nous habiller car nous sommes tout nus. C'est ça le problème.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Selon vous, Me Béliveau, il n'y a pas, dans la loi, de disposition qui couvrirait le cas des camionneurs artisans.

M. BELIVEAU: Non, dans la loi, nous sommes confinés au paragraphe 3 de l'article 26. Cela ne veut pas dire que ça nous appartient en propre. Si on nous disait ça nous appartient en propre, si la formulation ou si l'intention du ministère des Transports était celle-là, je voudrais bien le savoir, mais je dois, comme avocat, voir que nous sommes confinés là. Qui sera avec nous dans ce transport en vrac? Est-ce que n'importe qui qui achète un permis lorsque la commission décide qu'un permis doit être émis pourra entrer? N'importe qui peut l'acheter. A ce moment-là, nous côtoyons des gens qui n'ont pas d'intérêt commun avec nous, évidemment, qui arriveront avec des grosses sommes et qui prendront un secteur que nous avons supporté pendant si longtemps.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Béliveau, à l'heure actuelle, vos 5,000 camionneurs travaillent dans quel secteur particulier, à part le transport qu'exigent les chantiers de voirie?

M. BELIVEAU: Les camionneurs transportent un peu de bois, lorsqu'ils sont admis, après des négociations pénibles où ils coupent les prix, et c'est un secteur limité; il n'y a pas autre chose. La semaine passée, je dois vous dire, cependant, qu'on a annoncé une bonne nouvelle. A titre d'expérience, nous allons transporter cette année le sel qui arrive par bateaux, ici au quai, et qui est transporté à certains points du Québec.

Mais on dit: vous transportez le sel cette année mais qu'est-ce qui arrivera l'an prochain? Qu'est-ce qui arrivera dans six mois? C'est toujours quelque chose où je ne peux pas dire à nos membres qu'ils ont le droit, maintenant, de transporter le sel. Ils n'ont pas de droit. Et nous exigeons des droits.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour l'instant, M. Béliveau, je laisse la parole à un autre collègue, mais je reviendrai sur certaines de vos propositions.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Béliveau, dans votre mémoire, il ressort quatre problèmes qui préoccupent les camionneurs artisans qui sont quand même quatre revendications, à savoir: la reconnaissance légale de votre association; l'abolition du patronage dans l'octroi des permis — ça, nous savons qu'il y en a, il y en avait avant l'administration actuelle et il y en a encore...

M. BELIVEAU: Je n'ai pas dit dans l'octroi des permis, M. le député.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans l'octroi des contrats, excusez-moi. Vous demandez aussi le gel des permis, c'est-à-dire un contrôle sur les permis — ce qui est normal — et puis, que le transport du bois soit confié aux petits camionneurs, c'est-à-dire aux camionneurs artisans.

Lorsque vous parlez de la reconnaissance syndicale, cela veut dire que votre association deviendrait un syndicat en vertu du code du travail...

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... et vous permettrait de négocier avec qui?

M. BELIVEAU: Avec la Commission des transports, avec celui qui peut être notre employeur éventuel. Si la Commission des transports, après négociation, vient à la conclusion qu'on doit payer tel taux pour le transport de telle et telle chose, ce taux sera uniforme dans tout le Québec, j'imagine, et, à ce moment-là, on aura eu le droit de négocier des taux, on n'aura pas à les subir. Lorsque, dans un comté aussi reculé qu'on puisse l'imaginer, un entrepreneur ne voudra pas payer les taux que nous aurons négociés légalement, évidemment il aura à subir les foudres de la Commission des transports ou de l'autorité compétente.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): En somme, votre association deviendrait un syndicat, une unité de négociation et vous donnerait une force de revendication.

M. BELIVEAU: Exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Remarquez bien, en passant, que je vous approuve là-dessus parce que je suis pour le syndicalisme quand c'est normal. Et, étant donné que les petits camionneurs artisans, individuellement, n'ont pas tellement de force économique pour revendiquer des droits ou quoi que ce soit, c'est entendu que ça deviendrait un syndicat assez fort, assez puissant, cela vous permettrait de négocier avec la Commission des transports, et ainsi de suite.

M. BELIVEAU: Cela permettrait surtout, M. le député, d'arriver devant la Commission des transports toujours avec une dimension de 5,000 membres, ou 6,000, ou 7,000, si on se rend là, plutôt que d'amener un pauvre diable, qui vient de Saint-Tite ou d'ailleurs, tout seul avec son camion, qui arrive tout perdu dans cette immense commission. C'est aussi un problème.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous parlez du gel des permis. Actuellement, il y a environ 5,000 permis de camionneurs artisans?

M. BELIVEAU: Il y en a plus que ça. Nous ne touchons pas du tout à l'île de Montréal actuellement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous ne touchez pas à l'île de Montréal.

M. BELIVEAU: Il faut dire que les gens de Montréal, à cause de la présence de grandes centrales syndicales, sont beaucoup mieux organisés que bien des gens reculés dans le Québec. Nous avons commencé par organiser tout ce qu'il y avait en dehors du Québec et puis, pour être réalistes, disons que notre syndicat pourrait contenir, en dehors de Montréal, peut-être 6,000 membres. Si Montréal était inclus un jour ou l'autre, ça pourrait monter à 10,000 membres.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est donc dire qu'actuellement les camionneurs artisans de l'île de Montréal ne font pas partie de votre association?

M. BELIVEAU: Pas encore, mais je peux vous dire à l'heure actuelle qu'ils souhaitent ardemment en faire partie, surtout si nous obtenons des conditions de vie normales et une dimension juridique qui est à la base de tout.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans le bill 23, tel qu'il est rédigé —vous l'avez étudié naturellement — aucun article ne limite le nombre de permis; rien dans la loi ne dit que les permis seraient contrôlés?

M. BELIVEAU: On dit dans la loi que les permis vont être contrôlés, je dois vous l'avouer. Mais on ne dit pas, par exemple, que les camionneurs artisans sont les seuls dans leur secteur. Je me souviens de paroles dites par des gens en place, disant: Au nom de la liberté, on ne peut pas bloquer l'arrivée dans votre domaine de gens, par exemple, de notaires, d'avocats, d'hommes d'affaires qui décideraient de s'acheter 25 camions et qui décideraient à un moment donné de marcher.

Nous sommes convaincus, actuellement, que nous avons suffisamment d'effectifs pour répondre à tous les besoins du Québec et ce pour quelques années. Nous sommes certains de cela. Nous voulons que si un besoin est créé dans le comté de Wolfe, pour donner un exemple, on passe par notre association parce que nous savons que des gens de Québec, de Lotbinière ou d'ailleurs seraient intéressés d'aller travailler dans Wolfe au même prix qu'accorderait la Commission des transports. Cela ne sert à rien, dans ce cas-là, d'émettre de nouveaux permis qui vont empoisonner l'existence, dans quelques mois, d'un secteur qui est déjà empoisonné par un trop grand nombre de véhicules.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans une déclaration antérieure, vous avez dit que des compagnies de papier, subventionnées par le gouvernement, profiteraient de ces subventions pour monter leur propre service de camions pendant que le camionneur artisan est réduit au chômage.

M. BELIVEAU: Je ne dis pas que la subvention du gouvernement est donnée pour monter des services de camions. Je dis que des manufactures de pâtes et de papier, ayant des subventions du gouvernement, à un moment donné, subitement, décident de s'acheter un groupe de camions alors que les camions de la place sont dans la cour. Cela est véritable. Il y a une anomalie là. Nos gars sont là, tous prêts à travailler avec des véhicules très bien organisés. Il est évident que c'est anormal, à notre point de vue.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous voudriez que ce transport du bois soit confié aux camionneurs artisans?

M. BELIVEAU: Eventuellement. Nous savons que cela ne peut se faire du jour au lendemain, mais nous savons que si les compagnies de pâtes et de papier savaient, par exemple, que dans un délai d'un, deux ou trois ans, elles doivent se débarrasser de leurs camions, ce secteur-là nous appartiendrait et nous en serions très heureux. Nous pourrions monter la moyenne de travail de nos camions qui est de

quatre mois et demi ou cinq mois par année actuellement.

Ce qu'il y a de pire, à l'heure actuelle, c'est que vous avez des camions loués, par d'immenses compagnies de location, qui viennent empoisonner l'existence de ce secteur des petits camionneurs artisans.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous avez dit des camions loués?

M. BELIVEAU: Oui, il y a des camions loués.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ils prennent la place, en somme...

M. BELIVEAU: C'est cela.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... de ceux qui sont propriétaires. Me Béliveau, vous avez parlé, à plusieurs reprises tantôt, de la déclaration du ministre de la Voirie qui disait que lorsqu'on a jeûné pendant quatre ans, il est normal que l'autre "gang" jeûne également.

Vous aviez mentionné aussi une déclaration du ministre des Transports.

M. BELIVEAU: Le journal a rapporté que j'avais accusé le ministre des Transports de patronage; c'est faux. Je corrige immédiatement. Un journal a rapporté cela.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je veux tout simplement préciser que j'ai lu cela dans un journal.

M. BELIVEAU: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne dis pas que vous avez répété cela, je ne dis pas que le ministre l'a dit. Dans un journal...

M. BELIVEAU: Moi, je dis qu'il ne l'a pas fait.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... le ministre des Transports aurait dit à des camionneurs attablés dans le Café du parlement: "Prenez-vous pas pour d'autres, on va vous mater." Est-ce vrai que le ministre aurait dit cela, lui qui est un ancien camionneur artisan? Je ne le sais pas.

M. BELIVEAU: Il s'est passé, dans le Café du Parlement, un incident que l'on considère isolé...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ecoutez, s'il y a des affaires strictement personnelles vous n'êtes pas obligé...

M. BELIVEAU: ... qui ne représente sûrement pas l'opinion du ministre des Transports, j'en suis convaincu et je le souhaite, alors que le ministre des Transports, avec sa fougue habituelle — c'est un homme très chaud et évidemment, tous les hommes chauds explosent facilement — aurait dit, à des camionneurs artisans, alors que je n'étais pas là — je dois vous dire que c'est du oui'-dire: "Prenez-vous pas pour d'autres. Si vous vous énervez, on va vous mater." Les gens qui étaient là sont présents aujourd'hui.

Je ne pense pas que ce soit l'opinion du ministre des Transports. On a rapporté que je l'avais accusé de patronage, c'est faux. Le ministre des Transports n'a pas fait de patronage. Je sais bien qu'il ne pourrait pas en faire non plus.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui...

M. LE PRESIDENT: Je voudrais que l'on revienne au bill 23.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... je comprends.

M. LE PRESIDENT: On prend des tangentes qui vont nous mener loin.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, vous admettrez que si le ministre des Transports avait dit cela, cela aurait des conséquences néfastes pour les camionneurs artisans.

M. LE PRESIDENT: Cela ne change rien au bill 23.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Bon!

M. LE PRESIDENT: Cela n'ajoute et ne retranche quoi que ce soit au bill.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais tout simplement poser une question au ministre des Transports. J'ai déjà causé avec lui, et je sais que c'est un ancien camionneur artisan, n'est-ce pas?

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est vrai.

M. BELIVEAU: Il est possible que le ministre des Transports n'ait pas eu cette idée au moment où il a dit ces choses.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, je prends la parole...

M. BELIVEAU: Nos camionneurs prennent peur facilement; ils ont été exploités pendant tellement longtemps qu'évidemment la moindre parole... Vous connaissez le phénomène.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous dites que cela a été mal rapporté, et je prends votre parole. Le ministre dit qu'il n'a pas dit cela et je prends sa parole.

M. BELIVEAU: Je dis que cela a été dit.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela a été dit?

M. BELIVEAU: Oui. Je dis que le ministre l'a dit, mais je ne pense pas que cela représente l'opinion du ministre.

Je dis plutôt...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ...qu'il a dépassé sa pensée.

M. BELIVEAU: ...que ses paroles ont dépassé sa pensée.

M. TREMBLAY (Bourassa): Mes paroles étaient de vous donner, dans le bill 23, ce que vous n'avez jamais eu auparavant. C'était cela mes paroles, je crois. Jusqu'à 1954, les transporteurs de camions à bascule possédaient des permis pour le transport de la pierre, etc. En 1954, cela a été annulé. A ce moment-là, c'était la bagarre dans tous les comtés. Je l'ai vécue moi-même. Je crois que mes paroles ont été pour vous dire que, maintenant vous aurez un statut, disons, vous aurez des taux, des pesanteurs. D'ailleurs, on a adopté les arrêtés en conseil pour les pesanteurs. Je crois que personne n'est contre cela qu'on ait des pesanteurs pour ne pas détruire les routes. Maintenant, on va vous donner des taux et des permis. Alors, c'était plutôt de cette façon-là que je vous ai répondu, de ne pas vous en faire de ce côté-là, parce que je connais votre problème. S'il y a un problème que je connais, c'est bien celui-là.

M. BELIVEAU: Oui.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'était plutôt de cette façon-là que je vous ai répondu, de ne pas avoir peur. Seulement, il y en a qui ont peut-être eu peur de ma façon de répondre. J'ai peut-être répondu un peu vite, mais, naturellement, on n'a pas toujours le temps de prendre trois heures pour donner une explication.

M. BELIVEAU: C'est évident.

M. TREMBLAY (Bourassa): Mais, ce matin, nous sommes en commission. J'ai accepté d'y venir. J'ai accepté de répondre, de vous rencontrer et d'écouter ce que vous avez à dire.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, une autre question...

M. TREMBLAY (Bourassa): Excusez-moi, je ne veux pas vous enlever la parole.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, non, je prends la parole du ministre. Cela m'aurait surpris que le ministre dise cela, qu'il pense cela. Il l'a peut-être dit, mais il ne l'a peut-être pas pensé. En tout cas. Je reviens un peu à la reconnaissance syndicale. Je ne sais pas, je vous demande plutôt votre opinion. Vous êtes conseiller juridique. La reconnaissance légale de l'Association des camionneurs ne peut pas être incluse dans le bill 23?

M. BELIVEAU: Non, ce n'est pas possible.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que cela a déjà été demandé auparavant?

M. BELIVEAU: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce qu'il y a déjà eu des demandes?

M. BELIVEAU: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela a abouti à quoi?

M. BELIVEAU: La reconnaissance syndicale ne peut pas être incluse dans le bill 23, c'est clair. Seulement, la Commission des transports pourrait nous dire tout de suite qu'en autant qu'elle est concernée elle considérera l'Association des camionneurs artisans comme interlocutrice valable pour les 5,000 membres. Déjà, ce serait une reconnaissance dans les faits.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans les faits, mais ce ne serait pas une reconnaissance syndicale légale.

M. BELIVEAU: Oui, mais ce serait une reconnaissance dans les faits qui nous permettrait au moins d'avoir un simulacre d'outil pour travailler.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Alors, j'ai terminé. Maintenant, j'aurais juste une question à poser au ministre des Transports. Quatre problèmes ont été mentionnés dans le mémoire, à savoir la reconnaissance syndicale, l'abolition du patronage dans les contrats, le gel des permis et que le transport du bois soit confié aux camionneurs artisans. M. le ministre, est-ce que vous voyez un moyen de remédier à ces quatre problèmes par des amendements au bill 23? Est-ce que vous prenez cela en considération?

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai déjà eu une entrevue avec le président de l'association, M. Dufour, sur le transport du bois. A ce moment-là, mon idée était de ne pas inclure le transport du bois dans le bill 23. Mais, après étude et après des rencontres avec des personnes qui font du transport dans les forêts, c'est qu'il y a plusieurs compagnies qui prenaient le meilleur transport, disons, du haut des montagnes ou des côtes qu'on peut appeler et le mauvais transport, bien on le donnait au camionneur artisan. Alors, à ce moment-là, j'ai dit: La Voirie, c'est 75 p.c. du transport qu'elle donne à l'artisan et 25 p.c. aux compagnies. Supposons que vous

êtes entrepreneur, vous faites 25 p.c. du transport, si vous voulez, mais, par contre, vous êtes obligé de donner 75 p.c. à l'artisan. Alors, je me suis dit: Je vais l'inclure dans la nouvelle loi.

Quant à la reconnaissance syndicale, cela ne relève pas du ministère des Transports, cela relève du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Je ne peux pas dicter de ligne de conduite au ministre du Travail. C'est à l'association de se faire reconnaître. J'ai déjà siégé à une commission du ministère du Travail en remplacement du député de Charlevoix, en 1968, si ma mémoire est fidèle, et il y a eu une négociation. Il y avait les entrepreneurs, les artisans, M. Dufour était présent. Il y a eu discussion à ce moment-là. Le député de Charlevoix pourrait donner plus de détails, c'est lui qui a siégé à cette commission.

Mais sur la question de la reconnaissance syndicale, cela relève uniquement du ministère du Travail.

Je ne peux pas répondre à cette question.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excusez-moi, je suis d'accord, mais j'ai posé la question à Me Béliveau.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui prendra la décision.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne peut pas être inclus dans la loi.

M. TREMBLAY (Bourassa): Alors, dans les autres domaines, transport en vrac, etc., je donne aux camionneurs artisans des permis de transport, chose qu'ils n'ont jamais eue. Maintenant, évaluer dans chaque comté ou chaque région — on ne devrait pas prendre chaque comté; j'aimerais mieux prendre les régions — comme Me Béliveau le disait, il y a quelques instants, pour voir si, dans Lotbinière, on manque de camions et s'il y en a dans Bellechasse à ne rien faire, eh bien, cela devrait être fait pour qu'à chaque élection, s'il y a changement de gouvernement, il n'y ait pas l'achat de 25, 30 ou 40 camions dans chaque comté.

Je crois que le bill est très clair; on veut limiter les permis de transport pour camions à bascule afin qu'il n'y en ait pas trop dans la province. Mais si dans telle et telle région il y a tellement de travail qu'il y a une demande, à ce moment, il faudra que la demande soit faite à la Commission des transports, qu'il y ait enquête, étude et, ensuite, on pourra se permettre de donner de nouveaux permis.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais juste ajouter quelque chose. Tous les membres de la commission sont au courant qu'actuellement il y a des camionneurs artisans qui sont en chômage pour toutes sortes de raisons de surplus de permis ou de patronage, qu'importe, passons là-dessus.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il n'y a pas de patronage là-dedans.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Bien, écoutez...

M. TREMBLAY (Bourassa): Pourquoi amener le mot "patronage" là-dedans? Je ne vois pas le mot "patronage" dans le bill 23.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, mais les camionneurs artisans demandent l'abolition du patronage dans l'octroi des contrats. Bon, on sait qu'il y en a.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si le ministère de la Voirie donne des contrats sans soumission...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne dis pas que, vous, vous en faites. On sait qu'il y en a, et cela depuis 25 ans.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ah ça, c'est une vieille histoire. Je pense que vous avez ça dans la tête depuis le début.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, mais j'ai dit que je passais par-dessus.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, revenons au bill 23.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le député de Sainte-Marie se souvient très bien du temps où René Lévesque exigeait que ce soit les camionneurs...

M. LEGER: M. le Président, qui a la parole?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... de son choix qui soient engagés à l'Hydro-Québec

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai dit, à la dernière séance de la commission et je le répète ce matin, que je ne parlerais pas du patronage du nouveau chef de l'Union nationale. Je vais être délicat, il est absent. S'il était ici, j'en parlerais, mais, étant donné qu'il est absent, je vais le ménager là-dessus et je ne me permettrai pas de faire allusion au patronage du chef actuel de l'Union nationale.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, parce qu'à ce moment-là...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vous prie de revenir au bill 23.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement puisqu'on a mis en cause le chef de l'Union nationale.

M. LE PRESIDENT: Les règlements, on va laisser ça aux avocats, puis on va essayer de s'en tenir au bill 23.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux dire au député de Sainte-Marie que, le jour où il voudra faire un inventaire du patronage, je lui parlerai des tractations de M. René Lévesque auprès de l'Hydro-Québec pour l'engagement de camionneurs à l'Hydro, au détriment des camionneurs artisans. C'est clair!

M. LE PRESIDENT: Bon! Le député de Chicoutimi a fait son point, je le remercie.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je n'ai pas fait mon point, c'est un anglicisme. J'ai fait valoir mon argument.

M. LE PRESIDENT: Vous avez fait valoir votre argument.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Passons là-dessus, mais je tiens à faire remarquer aux membres de la commission et à l'assistance que chaque fois que je parle de patronage, c'est le député de Chicoutimi qui prend le feu. Alors, il y a quelque chose de louche là-dedans. Il se sent attaqué. Passons. Maintenant, je veux tout simplement...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le député de Sainte-Marie pourrait donner des faits?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne me permettrai pas d'en donner ici; je n'ai pas le temps.

M. LE PRESIDENT: Revenons au bill 23, parce que je vais susprendre la commission.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je connais très bien la région de Chicoutimi et j'ai oui dire toutes sortes de choses en ce qui regarde le patronage du député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'avez pas entendu parler de la mine Campbell quand René Lévesque intervenait?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre, je sais que les camionneurs artisans ont des droits acquis et je pense que vous allez prendre en considération qu'il faut que ces droits acquis soient sauvegardés dans le bill 23. Pour notre part, quand le projet de loi reviendra à l'Assemblée nationale en comité plénier, attendez-vous à avoir des amendements sur bien des articles parce que j'aime bien la sauvegarde des droits acquis, que ce soit pour n'importe quel groupe de la société, même pour le député de Chicoutimi. Quand il a des droits acquis, j'aime bien qu'on les lui laisse.

Alors, j'ai terminé, M. le ministre.

M. BELIVEAU: Me permettez-vous juste une observation, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. BELIVEAU: C'est qu'à l'article 26, paragraphe 3, nous sommes confinés, encore une fois, à un secteur. Nous voudrions nous voir assigner un secteur. Nous sommes confinés à un secteur et il n'est nulle part dit que nous aurons ce secteur à nous seuls. Il est dit que nous allons nous retrouver là-dedans. Alors, le point fondamental que j'ai voulu souligner ce matin, c'est que nous souhaitons que la Commission des transports nous assigne un secteur.

M. LE PRESIDENT: Le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. MAILLOUX: M. le Président, après les observations qui ont été faites par M. Béliveau ce matin et les questions qui ont été posées par le député de Chicoutimi, comme le ministère de la Voirie a été passablement mis en cause, vous me permettrez d'apporter quelques éclaircissements et, si nécessaire, de poser quelques questions à M. Béliveau également.

On a fait référence tantôt d'abord au dernier congrès de l'Association des camionneurs artisans où il avait été largement question de reconnaissance de fait s'il n'y avait pas de reconnaissance syndicale. Je me rappelle qu'à ce moment-là il y avait eu un "gentleman's agreement", une convention verbale, à l'effet que l'Association des camionneurs artisans, qui était à ce moment organisée — si ma mémoire m'est fidèle — dans environ 53 comtés du Québec, serait reconnue par des hauts fonctionnaires du ministère de la Voirie. La demande était faite au même moment aux camionneurs artisans de ne pas faire d'action syndicale dans les autres comtés où il y avait de multiples associations, où il y avait divergence de vues, tant et aussi longtemps que le gouvernement, que les ministères concernés, soit les ministères du Travail, des Transports, des Terres et Forêts, de la Voirie n'auraient pas discuté entre eux et apporté une législation qui permette, d'abord, de définir le terme de camionneur artisan, de savoir si les clauses de protection qui étaient à ce moment accordées seraient logiques, et d'apporter toute autre législation nécessaire afin que l'action syndicale puisse se terminer.

Je pense que tous les membres de cette commission conviendront qu'il n'appartient pas au ministère de la Voirie de faire lui-même de l'action syndicale. Comme l'ANCAI était à ce moment bien organisée dans 53 comtés, dans les jours qui ont suivi ce congrès, après avoir fait rapport au ministre de la Voirie, celui-ci a demandé à M. René Blais, sous-ministre suppléant, d'envoyer un télégramme demandant à chaque divisionnaire de reconnaître comme seules unités de négociation, pour la partie des contrats qui concernait la clause de protection des camionneurs artisans, où il y a la clause 7525, et pour tous les autres travaux en régie, les associations reconnues dans ces 53 comtés. Le télégramme a été envoyé par M. René Blais.

Malheureusement, une erreur a été faite à ce moment par ce fonctionnaire, sans qu'il le veuille, et le télégramme a été envoyé dans tous les comtés du Québec, même dans la région de Montréal où les routiers (teamsters) sont organisés.

Je me rappelle qu'à ce moment-là, même M. Dufour, le président des camionneurs artisans, avait demandé que ce télégramme ne soit pas envoyé ailleurs. Je mentionne un cas en particulier: le comté de Saguenay où, depuis la construction du barrage Manic 5, il y a là-bas une association qui s'appelle la Coopérative des camionneurs artisans et qui détient un privilège exclusif des travaux de Manic 3 actuellement, jusqu'au 1er mars 1972. C'est ce télégramme qui a un peu amené la confusion dans certains comtés. Je dois dire devant M. Béliveau que la convention verbale que nous avions concernant des comtés, comme Drummond ou d'autres comtés où il n'y avait pas d'associations reconnues, où il y avait litige, l'action syndicale s'est continuée et cela nous a amené des problèmes particuliers.

Je pense que M. Béliveau admettra que dans les 53 comtés où il y avait unité d'action il n'y a pas eu tellement de problèmes. Je dois affirmer également que jamais, sous aucun régime politique, tant et autant n'a été fait pour les camionneurs artisans. Je ne mentionnerai qu'un cas en particulier sur la rive sud, dans les comtés de Rivière-du-Loup, Kamouraska, Témiscouata. Je pense que les gens savent que sur les contrats de la Transcanadienne il n'y a jamais eu de clause 7525; le gouvernement fédéral ne l'a jamais permis. Afin de permettre que les camionneurs qui étaient en congé — qui n'avaient pas de travail — puissent avoir accès aux travaux, le ministère de la Voirie a accordé une subvention de $500,000 en ouvrant quatre contrats permettant à tous les camionneurs artisans de ces comtés, qui étaient sans travail, de pouvoir participer à quelques-uns de ces contrats où il n'y avait pas de clause 7525.

M. Béliveau a mentionné également ce matin que sur les routes de la province, pour la première fois, une tentative est faite où 100,000 tonnes de sel sont transportées par les camionneurs artisans dans certains districts en aval de Québec, sur la rive sud ou sur la rive nord. C'est également la première fois qu'un gouvernement donne $400,000 de transport pour permettre à des artisans qui sont sans travail d'avoir accès aux travaux.

Cette mesure, je dois l'avouer, est faite contre d'autres camionneurs qui ne sont pas artisans, mais qui, possiblement, ont également le droit de gagner leur vie.

Dans la discussion, M. Béliveau a mentionné souvent tantôt le chiffre de 5,000 camionneurs artisans. Je pense qu'on doit quand même rétablir ici les faits. Si on faisait le dénombrement de ces 5,000 camionneurs artisans, — on a souvent accusé les députés d'être propriétaires de camions — on trouverait des gens qui possèdent des postes d'essence, d'autres qui possè- dent des garages, d'autres qui possèdent sept camions, d'autres qui possèdent des camions et des machines, d'autres qui possèdent des terres. Il y en a de toutes sortes là-dedans, à telle fin que l'on est assuré que si l'on fait le dénombrement de ces 5,000 camionneurs artisans, si, comme je le suppose, le terme artisan signifie le propriétaire qui conduit son propre camion et qui vit principalement du camionnage, ce chiffre sera réduit de moitié.

Je voudrais que les gens de la commission comprennent que, malgré toute la hâte qu'apporte l'actuel gouvernement à tenter de régler ce problème du camionneur artisan, que nous savons explosif, jamais il n'a été fait autant dans le but d'apporter une aide appréciable à ces artisans. Je n'ai pas à revenir sur tout le travail que je fais depuis 1964 dans le but de les faire reconnaître par les différents ministères concernés.

On a mentionné tantôt que le ministère de la Voirie était le principal concerné; je dois malheureusement affirmer que moins de 30 p.c. du travail qui est fait par les artisans vient du ministère de la Voirie. C'est principalement la forêt qui fait vivre les camionneurs artisans. Je me rappelle des discussions précédentes; quand nous en venons à pouvoir fixer des taux protégeant les camionneurs artisans, soit dans les chantiers actuels, 20.6 p.c. ou 20.5 p.c, nous savons fort bien que lorsque nous passons une mesure comme la Loi des pesanteurs, qui sera d'ailleurs mise complètement en vigueur à compter du mois de mars 1972, nous devons réduire les charges de 90,000 à 64,000 livres. Nous devrons, à ce moment-là, réduire les charges qui seront conduites vers les moulins de papier de onze à sept cordes, entraînant du fait une augmentation considérable du prix de la tonne de papier. Quand on sait qu'actuellement, en raison de la concurrence avec les marchés étrangers des. provinces voisines, les compagnies de papier ont des difficultés extraordinaires, les ministères concernés sont donc soucieux de ne pas apporter de législations qui mettent en danger également des compagnies qui font vivre d'autres Canadiens.

Il a été discuté avec le ministère des Forêts à savoir s'il serait nécessaire d'apporter des politiques de soutien, étant donné que nous devrons faire respecter les pesanteurs sur les routes. Je pense que la commission comme les camionneurs artisans doivent prendre conscience du fait que le ministère du Travail devra d'abord définir quel est le véritable artisan dans le camionneur. Nous devrons connaître l'inventaire complet des artisans qu'il y a dans la province. Il sera nécessaire que tous ceux-là soient effectivement reconnus. Les ministères, tel celui de la Voirie, qui accordent des clauses de protection, devront redéfinir les clauses qui actuellement accordent souvent 75/25. Les ministères doivent également considérer que dans tout le camionnage, s'il y a 3,000, 4,000 ou 5,000 camionneurs artisans, il y a également 7,000, 8,000 ou 10,000 autres camionneurs qui

ont deux, trois, quatre ou cinq camions et qui désirent vivre également. Devant tous ces problèmes, les ministères concernés sont actuellement à tenter de préparer des lois qui viendront à donner justice à peu près à tous. Mais si les camionneurs artisans, dans une hâte effrénée, veulent faire en sorte que le gouvernement apporte des lois qui ne sont pas le reflet des besoins, je crois que ce serait une erreur grave du gouvernement. Tous savent évidemment quelle sympathie j'ai accordée aux camionneurs artisans.

Je dis donc actuellement que les ministères concernés — et j'ai assisté à la dernière réunion avec le ministre du Travail vendredi matin à Montréal — font un effort colossal dans le but d'arriver à quelque chose de valable pour tous les intéressés, mais le gouvernement donnera, je crois, les réponses qu'attendent les artisans et d'autres camionneurs quand tous les à-côtés du problème et des problèmes auront été étudiés. M. le Président, je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, je veux demander à Me Béliveau, combien il y a selon ses statistiques, de camionneurs artisans dans le Québec et combien, parmi ceux-là, sont membres de cette association.

M. BELIVEAU: A mon point de vue, il y a à peu près 10,000 camionneurs artisans au Québec. Il y en a 5,000 qui sont chez nous et les 5,000 autres sont dans l'île de Montréal et dans les quelques comtés qui ne sont pas encore organisés.

Concernant les camionneurs artisans répondant à la définition de celui qui a un camion, qui gagne sa vie avec, qui le conduit lui-même, 90 p.c. de nos effectifs actuellement sont vraiment des artisans. Les autres 10 p.c., ce sont des gens qui ont un, deux ou trois camions, qui nous disent: nous voulons être dans l'association, mais faites-nous la preuve que nous pourrons avoir des garanties de gagner notre vie avec un camion nous nous ferons un plaisir de nous débarrasser du deuxième et du troisième.

Donc, à mon point de vue, il y a deux définitions du camionneur artisan, il y a celle de maintenant qui doit comporter et accepter des distinctions ou des exceptions, il y a celle qu'on vise évidemment, à court terme, pour dans deux ou trois ans où on retrouvera dans le secteur seulement des gens qui gagnent leur vie avec un camion parce qu'ils auront eu la preuve qu'ils peuvent gagner leur vie avec un camion. Et ceci ne peut pas se faire sans reconnaissance légale.

M. MAILLOUX: Me Béliveau, est-ce que vous pensez que le gouvernement, à même les taxes des contribuables, est en mesure d'accorder à d'autres qui ne sont pas artisans, qui sont actuellement dans des associations, une mesure d'assistance que le gouvernement refuse, pour en nommer une catégorie, à tous les navigateurs du Saint-Laurent qui, comme les camionneurs, se sont acheté ou fait construire un bateau dans le but de vivre et qui n'ont aucune mesure d'assistance? Est-ce que vous croyez qu'à tous ceux qui ne sont pas de véritables artisans, le gouvernement doit apporter des mesures d'assistance pour faire vivre deux, trois, quatre et cinq camions et faire respecter la cédule des justes salaires?

M. BELIVEAU: Non, nous sommes convaincus que s'il y avait reconnaissance syndicale, et si, pour un temps, on accepterait comme notion de camionneur artisan celui qui peut ne pas l'être parfaitement, pour le moment, nous sommes convaincus que, d'après les besoins du Québec et le nombre de camions qu'il y a, tout le monde pourrait y trouver son profit. Il est évident qu'à l'heure actuelle, il y a des gens qui ne sont pas artisans et c'est un problème que vous avez soulevé et qui existe, mais ce sont des gens qui, après consultation, nous ont démontré qu'ils souhaitaient devenir artisans mais pour peu qu'ils puissent gagner leur vie et qu'on cesse justement de jouer avec eux. J'ouvre une parenthèse, M. le député, pour vous dire que vous avez souligné tout à l'heure les efforts déployés pour le camionneur artisan, je dois dire devant la commission que c'est bien vrai. Il est bien évident que si on avait eu davantage de gens comme vous, qui ont compris le problème si vite, le problème serait réglé à l'heure actuelle.

Mais il y en a qui ne sont pas artisans et qui souhaitent le devenir et qui souhaitent gagner leur vie là-dedans, cela prend une reconnaissance syndicale. J'ai remarqué que vous avez dit: le jour où les artisans nous auront donné l'inventaire de ci, ou l'inventaire de ça. Mais avez-vous songé que ça va prendre encore des mois? Avez-vous songé qu'il y a 5,000 gars en colère qui nous poussent dans le dos? Et vous en avez été témoin. Ils nous poussent dans le dos, je ne peux plus les contenir, ils disent: Cela nous prend au moins une reconnaissance syndicale. Qu'on cesse d'être l'objet de chantage de la part d'un entrepreneur, d'un cantonnier, de celui-ci ou de celui-là.

Si tous les comtés fonctionnaient comme le vôtre, M. le député de Charlevoix, il n'y en aurait pas de problème. Mais ce que je souligne actuellement, c'est que je représente 5,000 camionneurs qui, malheureusement, ne demeurent pas tous dans Charlevoix.

M. LEGER: M. le Président...

M. MAILLOUX: M. le Président, je pense que...

M. LEGER: M. le Président, je m'excuse, mais je pense que j'ai la parole...

M. MAILLOUX: ... M. Béliveau, il n'y a pas

seulement le comté de Charlevoix, il y a près de 50 comtés et ça ne s'est jamais vu dans le Québec.

M. BELIVEAU: Cela ne s'est jamais vu dans le Québec.

M. MAILLOUX: Cela ne s'est jamais vu. Vous avez fait un tableau plutôt noir au début, ce n'est pas le tableau qu'on constate dans le Québec actuellement, il n'y a jamais eu autant de gain pour les camionneurs artisans que depuis que ce gouvernement est en place. Jamais, en aucun temps.

M. BELIVEAU: Je peux vous dire, M. le député de Charlevoix, que le camionneur artisan en 1971, au moment où je vous parle, n'a aucune espèce de protection légale de quelque nature qu'elle soit, et c'est justement ça qu'il réclame. Qu'il gagne plus qu'en 1921, c'est clair. Qu'il gagne plus qu'en 1945, c'est également clair. Mais il gagne encore bien moins que bien des gens qui n'ont pas à faire cet investissement de $25,000 ou $30,000, et c'est ça qui n'est pas normal.

Que nos camionneurs artisans ne peuvent pas planifier pour envoyer leurs gars à l'université ou à l'école, qu'ils ne peuvent pas voir un avenir plus prometteur pour leurs fils que pour eux-mêmes, c'est un problème existant en 1971 et je suis obligé de le souligner. C'est clair qu'il s'est fait des efforts, mais à l'heure actuelle, nos gars exigent qu'on les reconnaisse légalement. Ce n'est pas compliqué. Les cultivateurs et les gens de tous les secteurs de la société réclament ça.

C'est ça qu'on demande justement, qu'au moins la Commission des transports qui n'a pas le pouvoir de nous faire une reconnaissance légale, nous considère entre-temps comme un porte-parole valable qui représente 5,000 camionneurs. En attendant, on ira frapper à la porte qu'il faut et, justement, en attendant, on ne voudrait pas non plus que des politiciens en place ou des gens en place nous disent: Votre sécurité syndicale, vous ne l'aurez jamais; on a parlé avec celui-ci, avec celui-là, vous êtes un problème pour tout le monde, vous allez crever, etc.

Ce qu'on veut actuellement, ce sont des faits précis et immédiats.

J'ai le regret de vous le dire immédiatement parce que moi, par nature, je n'ai pas l'habitude d'exiger des gens. Je crois encore à la négociation, mais je dois bien en venir à l'évidence qu'à l'heure actuelle la négociation est rompue et il n'y a pas possibilité d'aller plus avant. Il faut des gestes concrets, et ces gestes-là nous ne pouvons pas les avoir autrement que par l'autorité en place; nous le demandons bien respectueusement.

M. LEGER: M. le Président, Me Béliveau, je pense que vous avez parfaitement raison de demander une reconnaissance légale, un gel des permis pour corriger une situation qui dure depuis de nombreuses années. Ce matin, vous avez mentionné les problèmes dans les comtés où il y a de la discrimination concernant l'octroi de contrats pour les camionneurs artisans. Ce matin même à la table, devant les accusations que vous apportiez pour certains comtés, la première riposte que vous avez eue fut : Avez-vous regardé dans le comté de Wolfe? Avez-vous regardé dans le comté de Gaspé-Nord? Alors, on se renvoie la balle en disant: Si c'est mal là, n'oubliez pas que c'est encore mal là-bas. S'il n'y a pas de loi qui règle tout ça, on sera encore en train de se chicaner...

M. BELIVEAU: C'est clair.

M. LEGER: ... mettre en évidence les situations anachroniques qui existent dans différents comtés. Ne pas procéder par une loi, je pense que c'est illogique, c'est une perte de temps.

M. BELIVEAU: On a parlé, M. le Président, de la clause 75 p.c. — 25 p.c. effective dans la plupart des contrats de la Voirie mais cette clause c'est 75 p.c. — 25 p.c. de ce qui n'est pas l'infrastructure. Alors, dans les comtés actuellement, les entrepreneurs parlent de la notion d'infrastructure. Ils disent aux camionneurs artisans: Vous avez droit à 75 p.c. — 25 p.c. de ce qui n'est pas l'infrastructure. Alors, le gros problème se discute sur une question de pouces, qu'est-ce que l'infrastructure? Ce que nous voudrions avoir c'est 75 p.c. — 25 p.c, pour le moment, de tout ce qui se transporte pour faire un chemin. Qu'on ne vienne pas nous bombarder de notions de mots où nos gars sont complètement perdus et où l'entrepreneur a beau jeu pour finasser avec les petits camionneurs.

M. LEGER: De plus, M. le Président, je pourrais quand même affirmer, en voyant la situation, qu'on peut corriger par certaines lois des anomalies; mais tant qu'une population au Québec n'a pas un contrôle de sa politique nationale pour régler les vrais problèmes, pour avoir une solution collective, pour avoir une politique et ne pas être absente de cette politique nécessaire, soit dans le domaine forestier, dans le domaine de l'industrie et du commerce, on se retrouve dans des petites politiques locales, partisanes, où les intérêts privés...

M. LE PRESIDENT: Je rapelle l'honorable député de Lafontaine à l'ordre; ça n'a pas de rapport au bill présentement en discussion.

M. LEGER: M. le Président, j'ai la parole et je tiens à parler sur le bill 23...

M. LE PRESIDENT: Vous avez la parole parce que je vous l'ai accordée.

M. LEGER: Ce n'est qu'une solution temporaire et ça ne règle pas le problème en entier. Je pense que c'est mon droit de le dire. Si ça fait mal à quelqu'un, tant pis, mais la solution est là.

Alors, M. le Président, Me Béliveau disait tantôt que certaines compagnies recevaient des subventions gouvernementales, qu'avec ces sommes d'argent on s'achetait des camions et qu'on entrait directement en conflit avec les camionneurs locaux. Etes-vous au courant si ces subventions avaient été données à ces compagnies dans un but bien précis pour telle ou telle partie de leurs activités ou si c'était seulement une subvention générale qui leur laissait le loisir de faire ce qu'elles voulaient?

M. BELIVEAU: Je pense que c'étaient des subventions générales. Je ne dis pas qu'on s'est servi de ces sommes d'argent, je dis qu'on retrouve le phénomène suivant: Une compagnie de pâtes et papier reçoit des subventions du gouvernement et en même temps s'achète des camions pour transporter le bois alors qu'à Macamic, par exemple, pour ne citer qu'un cas, vous avez peut-être 35 ou 40 camions très bien équipés qui sont dans les cours et qui ne transportent rien justement à cause de cela et c'est anormal.

M. LEGER: Vous avez parlé, si vous permettez, après, j'ai deux questions seulement.

M. MAILLOUX: Ce ne sera pas long. M. LEGER: Allez-y.

M. MAILLOUX: C'est sur l'observation que le député de Sainte-Marie a faite. M. Béliveau, ne voulez-vous pas dire par là que les compagnies forestières qui oeuvrent sur les territoires de la couronne, qui exploitent nos richesses naturelles ne reçoivent pas de subvention? Vous voulez dire évidemment que les compagnies forestières qui exploitent les richesses naturelles emploient leurs propres camions? Vous n'avez pas parlé de subventions.

M. BELIVEAU: Je parle du cas suivant, M. le Président; c'est que plusieurs usines de pâtes et papier, reçoivent des subventions du gouvernement et en même temps font le transport de leur bois.

M. MAILLOUX: Quel type de subvention?

M. BELIVEAU: Je vais vous donner comme exemple un cas précis: les Perron en Abitibi. A un moment donné, ils ont demandé aux camionneurs de la place de faire le transport du bois; à un autre moment, ils ont reçu des subventions du gouvernement et maintenant ils font le transport du bois.

M. MAILLOUX: Des subventions du gouver- nement pour des constructions de chemins de pénétration?

M. BELIVEAU: Non, pour des usines de pâtes et papier, du moins, d'après les renseignements que nous avons.

M. LEGER: M. Béliveau, actuellement, est-ce que vous êtes protégés contre le fait que des personnes peuvent louer des camions et faire un travail en concurrence avec vos camionneurs? Du fait, justement, que ces compagnies peuvent louer des camions et se permettre de déduire de leur impôt la totalité de la location de ces camions, après trois années ou deux de location, elles peuvent acheter ces camions pour une valeur de — je ne sais pas — 10 p.c. A ce moment-là, c'est exactement une concurrence déloyale pour un camionneur qui n'a pas les possibilités de le faire.

M. BELIVEAU: C'est un cas qui existe. Il y a un autre cas qui existe que nous étudions présentement, c'est que des compagnies, par exemple, de pâtes et papier peuvent fort bien avoir une entreprise de camionnage qui, en soi, est déficitaire, mais, à cause des lois de dégrèvement d'impôt et des privilèges qu'elles ont à certains chapitres pour l'impôt, cette entreprise, en soi déficitaire, devient rentable. Vous comprenez ce que je veux dire? Alors, notre étude là-dessus n'est pas encore terminée, mais nous arrivons déjà à cette conclusion.

M. LEGER: M. Béliveau, si vous aviez une loi qui vous donnait une reconnaissance légale et un gel des permis, en pratique, cela voudrait dire quoi concernant le fait qu'il n'y aurait pas de discrimination par la suite? Des faits précis? Comment se donne un contrat précisément? Même si vous avez un gel des permis, cela ne veut pas nécessairement dire que la distribution des contrats sera faite d'une façon égale. Est-ce que vous avez des méthodes à proposer?

M. BELIVEAU: La méthode à proposer est la suivante: la Commission des transports qui sera créée sera dotée, tout de même, de mécanismes qui auront, je pense, les bras assez longs pour vérifier sur place des anomalies à certains principes qui auront été reconnus à la suite de négociations.

Disons qu'un taux est octroyé pour tel genre de transport; disons qu'un secteur est accordé à tel genre de camionneur, disons à un camionneur artisan. Si, à Macamic, dans le Lac-Saint-Jean ou ailleurs, il y a des entrepreneurs ou des divisionnaires qui ne suivent pas la politique, immédiatement, on aurait le droit de porter une plainte. Actuellement, on n'a pas le droit de porter une plainte.

Une cause a été plaidée récemment où, à un moment donné, on a tenté d'organiser des camionneurs d'un comté qui voulaient s'organiser. On a fait une plainte parce que des

entrepreneurs ont fouté à la porte les camionneurs en question et ont dit: Il n'y aura pas de syndicat de camionneurs ici. On est allé devant le tribunal pour se faire dire ceci: Ecoutez, vous avez raison, mais cette disposition qu'on retrouve dans le code du travail qui empêche un patron de mettre à la porte celui qui veut s'organiser syndicalement, étant donné que vous n'êtes nulle part, vous, les camionneurs artisans, vous n'êtes pas dans le code du travail, vous n'êtes nulle part, on ne peut pas vous l'appliquer, on ne peut pas vous en faire bénéficier.

C'est tout de même tragique de se faire dire ça. C'est un point que je souligne même si, à ce jour, je dois reconnaître qu'il s'est fait des améliorations dans notre domaine. C'est le point le plus tragique. On n'a pas de droits. Nous n'avons absolument rien qui puisse nous permettre de dire: L'année prochaine, c'est sûr, parce qu'on a un droit acquis. On a tout simplement de la bonne volonté, on a du coeur au ventre, on a une foule de gars qui refusent d'aller à l'assistance sociale où ils seraient beaucoup mieux parce qu'en répondant à certaines normes ils auraient au moins un chèque.

Mais nous n'avons pas de loi et nos gars veulent travailler quand même. M. le Président, je me suis posé la question pendant six mois: Comment se fait-il que, le secteur étant aussi pourri, il y ait des gars qui veulent encore y demeurer et y travailler? J'ai fini par comprendre que le gars de "truck", comme on l'appelle, c'est un gars qui a la vocation de conduire son camion. Il lui faut un volant dans les mains. Même dans les périodes où il travaille très fort, disons sept jours par semaine, le dimanche, il va trouver le moyen d'astiquer, de frotter son camion pour qu'il soit beau et propre le lundi matin. Disons que son premier amour est probablement sa femme, mais le second, qui vient tout près, c'est son camion. C'est un plaisir presque sexuel qu'il a à conduire son camion.

M. LEGER: Me Béliveau, prenons un cas pratique. On disait tantôt qu'on faisait jeûner un groupe quatre ans et, les autres quatre ans, c'est un autre groupe. Prenons un cas hypothétique: si vous avez dans une région, disons 25 camionneurs de telle couleur et 25 camionneurs d'une autre couleur politique, qu'est-ce que la loi pourrait faire étant donné qu'il y aurait un taux fixe pour dire que tout le monde aurait une chance égale?

M. BELIVEAU: D'abord, le problème que vous soulevez, celui du patronage, n'est pas généralisé. C'est dans quelques comtés localisés parce que, grâce aux efforts déployés par certains membres, on a pu installer quelque chose qui fonctionne très bien.

Comment pourrait fonctionner cette loi-là par rapport à du patronage éventuel dans dix ou quinze ans? Si celui qui est camionneur artisan doit répondre à certaines qualités pour le devenir, évidemment, il a un permis émis par la commission et, à ce moment-là, il est protégé, parce qu'il est coiffé par une loi. A quiconque voudrait lui enlever quelque droit, il pourrait tout de même, devant un tribunal compétent, dire: Ecoutez, j'ai des droits, voici la loi. On plaide ce matin.

Actuellement, quand j'ai une cause à plaider devant quelque tribunal que ce soit, je ne peux jamais répondre, quand le juge me demande où est la loi qui me permet de prétendre à tel droit, car je n'en ai pas de loi, je n'ai absolument rien.

M. LEGER: Dans vos études, vous parlez de gel de permis. Avez-vous fait des études pour déterminer du moment que la loi serait effective, combien de permis devraient exister? Y a-t-il eu une étude de faite là-dessus?

M. BELIVEAU: L'étude provient de l'expérience. Tenant compte de ce que nous disent nos camionneurs dans chaque comté, tenant compte du fait que la moyenne de travail est d'environ quatre mois ou quatre mois et demi, on vient vite à la conclusion qu'il y a trop de camions par rapport au secteur qui nous est accordé ou par rapport aux besoins du Québec. C'est en partant de ces faits concrets que nous venons tout de suite à la conclusion qu'il y a trop de camions.

A un moment donné, devant des travaux importants ou intéressants qui se situent n'importe où au Québec, on voit arriver une suite de camions qui vient de Montréal ou d'ailleurs et qui prend les emplois de nos gars pendant que les camions sont dans la cour. Cela, c'est tragique. Les gars réussissent quand même à faire leurs paiements à la finance en faisant des contorsions spirituelles et physiques épouvantables. Moi, je me pose encore des questions.

Ce sont tous de braves garçons qui veulent gagner leur vie au Québec et qui sont un apport important pour le Québec.

M. LEGER: Vous dites qu'il y a environ 10,000 camionneurs artisans, dont 5,000 sont membres de votre association. Vous n'avez pas de chiffres approximatifs pour dire qu'il en faudrait 6,000 ou 7,000?

M. BELIVEAU: Non, mais je peux vous dire que nos camionneurs travaillent quatre mois par année. Cela, c'est un fait brutal; de là, je pense que l'on peut tirer les conclusions que j'affirme.

M. LEGER: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Béliveau, votre mémoire contient certaines demandes auxquelles vous aimeriez avoir des réponses positives dans la réglementation qui s'en vient, probablement.

De toute façon, une de ces demandes disait, entre autres, par exemple, que vous aimeriez voir la participation des camionneurs artisans à 75-25 dans le transport des compagnies privées, par exemple, qui transportent du bois et des compagnies surtout forestières.

Dans mon comté, en Abitibi ce sont des compagnies forestières. De quelle façon prétendez-vous établir une certaine justice pour les compagnies forestières existantes qui sont déjà organisées et qui maintiennent probablement, elles, 75 p.c. de leur camionnage actuellement? Si la loi était adoptée demain matin, de quelle façon pourrait-on être juste envers ces compagnies qui détiennent ce moyen de transport?

M. BELIVEAU: C'est un problème qui se retrouve dans chaque secteur où il y a des gens de trop. Les solutions doivent venir de l'autorité en place. Je sais bien qu'il y a des gens dont cela ne ferait pas l'affaire de se faire dire, demain matin, que le transport du bois va se faire par les artisans. C'est pourquoi nous sommes tellement sensibles à cet argument-là que nous disons qu'il pourrait y avoir un délai d'un certain nombre de mois ou d'années pour permettre à chacune des parties de s'enligner là-dessus.

J'ai oublié, M. le Président, de vous citer tout à l'heure le chapitre des pénalités, pour vous montrer que le bill 23 ne pense pas tellement à nous. Au chapitre des pénalités, quand on regarde les montants pour les première et deuxième pénalités, je pourrais vous citer plus d'un cas où ce serait la faillite complète pour des camionneurs que de payer disons $500 ou $1,000 d'amende. Il faudrait que l'on prévoie, pour le camionneur artisan qui possède un camion et qui vit avec, des pénalités beaucoup moins grandes, qui pourraient être de $50 pour la première amende, de $100 pour la seconde et de $150 pour la troisième. Là encore, on voit que pour le camionneur artisan il n'y a rien de spécial, parce que ce serait la faillite dans bien des cas.

M. AUDET: M. Béliveau, au sujet du surplus de camions que nous avons au Québec, comme vous dites, peut-être viendra-t-il un jour où nous aurons besoin d'une augmentation de l'effectif du camionnage. Ceci est peut-être pour un avenir assez lointain, mais, de toute façon, dans l'obtention de nouveaux permis, si vous aviez, par exemple, votre reconnaissance syndicale, de quelle façon verriez-vous l'obtention nouvelle de permis? Est-ce que vous faciliteriez l'obtention de permis aux camionneurs artisans existants, pour un deuxième ou un troisième camion, ou de nouveaux membres dans votre syndicat?

M. BELIVEAU: De nombreux membres, parce que le point de vue que nous avons, c'est qu'un jour ou l'autre la définition du camionneur artisan réponde parfaitement au caractère suivant: un type possédant un camion. H le conduit et vit avec lui. Comment prévoir le mécanisme de l'émission de nouveaux permis? C'est bien simple. Moi je fais confiance à l'autorité en place, la Commission des transports, qui, devant l'évidence qu'il faut d'autres permis pour répondre à des besoins accrus au Québec, ou l'évidence qu'il ne faut pas d'autres permis, va sûrement rendre une décision qui a du bon sens. Mais comment pourrions-nous nous faire entendre si nous n'avons pas de dimension juridique? Là, c'est une absence complète, de notre point de vue. Tandis que je crois encore à la négociation qui pourra se faire au niveau de la Commission des transports.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Me permettriez-vous une question dans le même ordre d'idée. Me Béliveau, pour votre reconnaissance syndicale, est-ce qu'en vertu du code du travail actuel on pourrait le faire ou pensez-vous que ça prendrait une loi spéciale comme le syndicalisme agricole, par exemple?

M. BELIVEAU: Cela prendrait une loi spéciale parce qu'en vertu du code du travail actuel, je ne vois aucune possibilité.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela prendrait une loi spéciale. Bon. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le ministre des Transports.

M. TREMBLAY (Bourassa): M. Béliveau, premièrement, je voudrais vous remercier de votre plaidoyer. Maintenant, vous parlez des camionneurs en colère. Je peux vous dire que les camionneurs artisans sont en colère, à ma connaissance, depuis 1946. J'ai vécu dans ce domaine jusqu'en 1962. Je crois qu'à l'heure actuelle, c'est une étape, un pas en avant que le bill 23; prenez l'article 26, paragraphes 3, 3 a) et b), je crois que cela indique déjà, à l'heure actuelle, que l'artisan camionneur fait un pas en avant.

Vous avez parlé d'inventaire. C'est sûr que c'est assez coûteux et je verrais difficilement une association faire l'inventaire des camions à bascule de la province de Québec quand le ministère des Transports peut le faire par le Bureau des véhicules automobiles, enfin, faire une recherche rapidement et à un coût très minime. Alors, je comprends très bien que c'est assez difficile, dans votre cas, de faire cet inventaire. Mais nous, nous pouvons le faire et assez rapidement. Malgré que, quelquefois, il y a des personnes qui vont enregistrer leur camion, si vous voulez, avec des "bunks" qu'on peut appeler, de transport pour le bois et, deux mois après, ils ont une boîte pour transporter du gravier. Je crois qu'il peut y avoir une petite différence de 5 p.c. à 10 p.c, mais par les enquêteurs, on peut retrouver cela assez facilement.

Maintenant, la différence entre l'artisan et celui qui a deux, trois, quatre, cinq ou dix camions, c'est cette définition qui est assez difficile, parce que celui qui a cinq camions, il fait vivre quatre familles. Dans ces quatre familles, vous avez des pères de famille qui n'ont peut-être pas les moyens de s'acheter un camion. Ils n'ont pas les moyens de la banque ou ils ne sont peut-être pas acceptés par les compagnies de finance. Alors, ces gens-là, disons, dans la région de Montréal ou dans la région de Québec, gagnent $4 l'heure ou $3.85 l'heure, et gagnent $200 par semaine. Alors ces gens-là n'ont pas les moyens de s'acheter de camion. Est-ce qu'on va pénaliser ceux qui ont cinq camions ou dix camions ou quinze camions? Il faudrait se comprendre. Il ne faudrait pas non plus détruire l'artisan qui a dix, douze, quinze ou même vingt camions, si vous voulez, mais qu'il fasse seulement du transport par camion à bascule.

Vous allez prendre des compagnies ou des villes qui, à un moment donné, à cause de la neige ou s'il y a une grosse construction, vont appeler les artisans, mais elles vont appeler aussi celui qui a dix camions. Elles ont un appel à faire au lieu d'en faire dix. Ce sont des choses, je crois, sans diminuer ce que vous avez dit, qu'il faut aussi comprendre dans nos règlements. Parmi ces gens-là, il y a des pères de famille qui travaillent pour ces gars. Alors ces pères de famille n'ont pas les moyens de s'acheter un camion, à ce moment-là, ils gagnent leur vie comme ça. Ce sont des artisans quand même. Alors c'est cette façon qu'il faudrait comprendre dans nos règlements.

Maintenant, la reconnaissance syndicale, vous savez comme moi que cela relève du ministère du Travail. Comme disait mon collègue de Charlevoix, il y a quelques instants, je crois que tous les ministères ensemble et tous les députés vont faire en sorte qu'on en vienne, disons, à une moyenne — je ne dis pas 100 p.c., parce que 100 p.c, ça n'existe pas — pour que le camionneur artisan — appelez-le comme vous voulez, celui qui détient les camions à bascule — puisse gagner sa vie et travailler plus que quatre mois par année.

Alors, en émettant des permis, des règlements, à ce moment-là, avec la progression — la province de Québec s'agrandit d'année en année — je crois que d'ici un an ou deux, ceux qui possèdent des camions pourront gagner très bien leur vie. Je comprends le problème. Je sais que tous les ans, les caisses populaires perdent de l'argent, et c'est le beau-père ou un endosseur qui est obligé de payer la caisse populaire; je suis au courant de tous ces problèmes. Je sais que réellement on met des gens dans la misère, je comprends le problème.

Mais le problème n'est pas de rayer ceux, entre l'artisan, celui qui a un camion et celui qui en a cinq ou dix. Je crois qu'il faut bien s'entendre, ce gars fait vivre neuf ou dix familles. Ce n'est pas de l'entrepreneur que je parle, je parle toujours du gars qui fait du transport avec un camion à bascule. Bon!

Maintenant, dans le bill 23, vous avez des taux qui vont être mis en vigueur dans les régions. Vous savez comme moi que depuis 1945 il n'y a pas eu de changement de taux. Je crois que tout le monde est au courant de ça, les taux sont demeurés les mêmes dans le transport. Il y a des régions où c'est $0.20 le premier mille, 19 milles à $0.05 et après 20 milles, ça tombe à $0.04 le mille par tonne. A ce moment, je suis bien d'accord avec vous que personne ne peut vivre à ces taux-là. Même il y a des compagnies de sable à Joliette qui font encore du transport à Montréal pour $0.03 1/2 le mille par tonne. Alors, au bout de deux ou trois ans, l'artisan n'est plus capable, il est venu à bout de payer son camion, il n'est plus bon, mais il ne peut pas le changer. Il n'est pas en faillite, mais il ne peut plus fonctionner.

Alors, ce sont des choses qu'on prévoit ici, quand on dit à l'article 26, paragraphe 3: "Transport de matières en vrac". Je crois qu'à ce moment-là le camionneur artisan a réellement une ouverture qu'il n'a jamaie eue dans sa vie. Alors, on lui ouvre la porte. S'il arrive un bateau dans un port et le camionneur transporte des marchandises de Montréal à Valleyfield. Il y a eu un temps où le taux était de $1.75 la tonne. Aujourd'hui, par suite de la concurrence, il est rendu à $1.35 la tonne. Cela n'a aucun sens. C'est même de mettre les compagnies en faillite, même les compagnies de transport par camion à bascule.

Alors, le gouvernement doit intervenir par une loi. Maintenant, la reconnaissance syndicale, j'y reviens tout le temps, cela appartient au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Je n'ai siégé qu'une fois à la commission du Travail et de la Main-d'Oeuvre, mais M. Mailloux y a siégé plus souvent et il pourra vous donner plus de détails.

Maintenant, quant à l'investissement des camionneurs artisans, il faut conserver dans le Québec les camionneurs artisans, il faut qu'ils demeurent parce que le camionneur artisan comparé au gros entrepreneur, il y a une grosse différence. Le camionneur artisan fait vivre la quincaillerie, la station d'essence, il fait vivre beaucoup de gens dans son entourage, tandis que le gros entrepreneur, lui, achète directement. A ce moment-là, ce qui arrive, c'est que le petit transporteur n'est plus dans la compétition, mais par contre les gens de la place ne peuvent pas vivre. Le petit garagiste qui emploie huit employés, bien, à ce moment-là il n'en emploie seulement trois. Alors je comprends très bien la situation du camionneur artisan et c'est pour cette raison que le bill 23, par les règlements qui vont être apportés à l'article 26, je crois qu'il va être éclairci. Les règlements, nous sommes en 1971, en 1972 ça peut être différent et je ne voudrais pas non plus qu'on en fasse un cartel, qu'on dise, à un moment donné... Prenons le cas d'un homme que je

connais très bien, M. Dufour. Son fils veut s'acheter un camion dans le comté de Charlevoix, il y a un manque de camions dans cette région-là et on dit: Bien, c'est gelé, les camions. Il y a un manque de camions dans toute cette région de la Côte-Nord. Est-ce que son fils, un gars de 22 ans, n'aurait pas une chance de partir en affaire et de pouvoir grossir ou est-ce qu'un autre camionneur n'aurait pas une chance? Pourquoi empêcher l'investisseur de pouvoir s'éDanouir?

Il faut faire attention également à un certain cartel qui peut s'introduire là-dedans.

M. BELIVEAU: Notre but, M. le ministre, est justement celui que vous soulignez; s'il y a un besoin de camions, il va de soi qu'il y a émission de nouveaux permis. Mais si, par fantaisie, un homme veut devenir camionneur alors que déjà, dans une région, il y a beaucoup trop de camions, on crée là un problème; on force les autres et tout le mode à vivoter. Le problème que vous soulevez, c'est un des points pour lequel nous nous battons. S'il y a un besoin, cela va de soi qu'il y ait un permis d'émis.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je suis bien d'accord qu'il faut émettre des permis, mais qu'il faut faire l'inventaire avant d'en émettre de nouveaux.

M. BELIVEAU: Dois-je comprendre, M. le ministre, qu'en attendant que cet inventaire soit fait, il y aurait un certain contrôle d'ici ce temps pour que des gens, par exemple, qui voient la baie James ou d'autres projets importants ne puissent acheter 100, 150, 200 camions?

M. TREMBLAY (Bourassa): Ils ne pourront pas le faire, parce qu'ils devront avoir un permis de la Commission des transports. Si la région de l'Abitibi, qui a une route en contruction, peut fournir les camions à la baie James, à ce moment, la commission n'émettra pas de permis.

M. BELIVEAU: Mais aujourd'hui, en 1971...

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est un non-sens; s'il n'y a pas de travail dans la région de l'Abitibi, alors que la baie James est à 90, 120 ou 140 milles, ces camions peuvent aller travailler là. Je comprends bien votre point de vue, mais ce serait un non-sens d'émettre de nouveaux permis ou d'envoyer des gens de Montréal travailler là.

M. BELIVEAU: Oui, mais aujourd'hui, par exemple, on sait qu'on n'a pas besoin de permis pour avoir un camion. Qu'est-ce qui empêche un groupe d'hommes d'affaires de Montréal de s'acheter aujourd'hui même 50 camions pour dire, à un moment donné, quand le bill sera adopté: On était sur la carte, nous autres, il nous faut une part du gâteau. Etant convaincus qu'il y a déjà trop de camions, est-ce qu'il n'y aurait pas un mécanisme quelconque pour bloquer dès aujourd'hui l'achat de nouveaux camions ou avertir très sérieusement que si on achète ce camion c'est à son risque, de façon à ne pas empoisonner l'existence de camionneurs qui sont déjà peut-être trop nombreux pour les besoins du Québec, y compris ceux qui se préparent là-bas?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je ne crois pas qu'il y ait de compagnies ou de personnes qui soient tentées d'acheter 40 ou 50 camions. Je ne vous dis pas qu'il n'est pas temps que cette loi soit adoptée le plus tôt possible, mais je ne crois pas que personne — compagnie ou individus — achète 40 ou 50 camions au cas où le projet de la baie James fonctionnerait d'ici 2, 3 ou 6 mois. A ce moment-là, c'est assez difficile pour moi de dire aux compagnies de camions: Vous ne vendrez plus de camions. Vous allez comprendre avec moi qu'après que le bill sera adopté et en vigueur, là, on pourra contrôler les permis; mais d'ici ce temps, je ne pense pas que je puisse dire à la compagnie Mack: Vous ne vendrez pas de camions à M. Cloutier ou vous ne vendrez pas de camions à M. Tremblay. C'est une chose que je ne peux pas faire.

M. BELIVEAU: Mais la compagnie Mack sait fort bien que le bill s'en vient et qu'il y aura...

M. TREMBLAY (Bourassa): Il faut comprendre un peu la situation. C'est assez difficile, tant que la loi n'est pas adoptée, de dire: Vous ne vendrez pas de camions à M. Tremblay, de Chicoutimi, s'il veut en acheter deux, trois ou quatre. Je pense qu'il faut adopter cette loi d'abord. En tout cas, disons que je vais répondre à votre question...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre me permettrait-il d'ajouter quelque chose? Je comprends que la société Mack ne me vendra pas de camion à moi mais...

M. TREMBLAY (Bourassa): Elle peut vous en vendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, elle ne le fera pas maintenant, parce que plusieurs entreprises se constituent actuellement à Montréal et qui ont requis des soumissions de certaines sociétés qui vendent de gros transporteurs en vue des travaux qui seront effectués à la baie James. Le ministre devrait être au courant de cela. S'il appelait M. Paul Desrochers, il saurait tout cela.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si le député de Chicoutimi est au courant de ces choses-là, moi, je ne le suis pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est dommage.

M. MAILLOUX: M. Béliveau.

M. TREMBLAY (Bourassa): On a parlé du bois; j'en ai dit quelques mots il y a un moment. Je trouve pénible de voir que les compagnies prennent les meilleurs secteurs du transport du bois alors que les mauvais secteurs sont donnés à l'artisan. Je crois qu'à ce moment, de concert avec le ministère des Terres et Forêts, on peut en venir à une entente à 75 — 25, etc., mais que ce ne soit pas seulement la grosse entreprise qui en bénéficie. Il faut tenir compte aussi des paroles de M. Mailloux, que malgré qu'il y ait compétition, il pourrait se faire un travail de concert, de façon que l'on soit en compétition avec les autres pays ou les autres provinces dans le domaine de nos richesses forestières. Le bois est une de nos ressources naturelles.

On peut toujours demander à ces compagnies, même plus, invoquer, comme le fait le ministère de la Voirie, 75 p.c-25 p.c. je crois qu'on peut en venir à une entente avec ces Compagnies, mais avant de m'engager plus loin j'aimerais avoir d'autres ententes...

M. BELIVEAU: D'accord.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... avec le ministre titulaire des Terres et Forêts. M. Béliveau, vous avez parlé des amendes.. A l'article 85, vous avez parlé du taux des amendes pour les particuliers et les compagnies. Le maximum pour les particuliers est de $500 et, pour les compagnies, il est de $1,000.

M. BELIVEAU: Si on regarde la deuxième amende, M. le ministre, cela veut dire la faillite.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si vous parlez des amendes pour ceux qui vont...

M. BELIVEAU: Pour les particuliers.

M.TREMBLAY (Bourassa): ... à l'encontre de la loi, elle est de $500 au maximum pour les particuliers et de $1,000 pour les compagnies. Je crois que là nous n'avons pas oublié le camionneur artisan. Il y a une différence de 50 p.c.

M. BELIVEAU: J'ai peut-être mal compris, mais, quand il s'agit d'une deuxième offense, l'amende du particulier peut aller jusqu'à $1,000, si j'ai bien lu l'article. Pour un grand nombre de nos membres ce serait évidemment le drame le plus épouvantable que d'avoir à payer $1,000 d'amende.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je ne peux pas encourager les transporteurs à aller à l'encontre de la loi. Si on a mis $500, c'est que je crois que le transporteur va s'y conformer autant que la compagnie va se conformer à $1,000. Si on n'impose pas d'amende ou si on n'impose que

$50, on se fera dire, même par des membres de votre association: Vous n'avez pas mis une amende assez élevée, les gars transportent et ils n'ont pas de permis pour faire du transport à telle place. On a $50 ou $100 ou $150, un maximum de $500, pour la compagnie un maximum de $1,000. Les compagnies ne sont pas tellement heureuses de payer $1,000. Même, à l'heure actuelle, je me fais dire, concernant les nouveaux poids établis à Montréal, par des camionneurs artisans: Telle compagnie n'a pas eu de billet et nous, nous avons des billets de pesanteur. J'ai vérifié moi-même et les mêmes compagnies ont jusqu'à 100 ou 120 billets d'infraction parce que la charge était trop pesante et pas permise par la loi, par exemple, sur le boulevard Métropolitain à Montréal. Ce sont des renseignements que j'ai pris hier afin de savoir si cela était vrai ou non. Les compagnies sont autant pénalisées que les artisans afin qu'elles se conforment à la loi. Je ne peux pas dire de baisser l'amende car, vous le savez autant que moi, s'il n'y a aucune amende les gars vont s'en fouter et la loi ne sera pas, respectée. Vous êtes le premier, je crois, à être contre cela. Vous voulez que la loi soit respectée.

M. BELIVEAU: Je suis le premier, M. le ministre, à souhaiter qu'il y ait des amendes. Cependant, ce que je voudrais c'est que dans le bill 23 on tienne compte des proportions. Il est évident que la compagnie Smith Transport — pour ne citer qu'un exemple — qui paierait $1,000 d'amende dans un cas peut quand même y trouver son profit; je vous dis que pour le camionneur artisan qui par malheur serait obligé de payer $1,000 d'amende c'est la faillite complète parce que déjà il est endetté pardessus la tête et pour des années. C'est seulement le point que je voulais soulever, c'est la très grande différence qui existe entre le moyen des uns et le moyen des autres à l'intérieur de la même commission.

M. LEGER: Est-ce que le ministre ne trouve pas qu'il y a une disproportion entre l'amende imposée aux compagnies et celle imposée aux individus? C'est là la question. Est-ce que le ministre peut y répondre? Ne trouve-t-il pas disproportionnée l'amende à une compagnie comparativement à celle imposée à un individu, de $500 à $1,000?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je trouve qu'elle est pas mal proportionnée. Ce ne sont pas toutes les compagnies qui sont grosses et surtout Smith Transport n'est pas dans le domaine dont on parle.

M. BELIVEAU: Ce n'est qu'un exemple. La compagnie, à la fin de l'année, peut lout de même présenter un rapport financier; elle peut même payer moins d'impôt si elle paie beau-

coup d'amendes, M. le ministre. Tandis que chez nous ce serait un drame — je vous le dis encore une fois — que de payer $1,000 d'amende. Une grande compagnie de transport qui paierait $10,000 d'amende aurait $10,000 de profit de moins à présenter dans son rapport financier à la fin de l'année. Elle paierait moins d'impôt. Chez nous, $1,000 d'amende pour un individu, un camionneur artisan, qui vient de plusieurs coins que je pourrais vous citer, ce serait un drame à la fois individuel, familial et tout ce que vous voulez. Le gars ne peut pas s'en sortir. Il n'y a pas de proportion, à mon point de vue, entre les amendes imposées à ceux qui sont très puissants et qui feront partie de la commission et le camionneur artisan, qui, par définition, à l'heure actuelle, est pauvre.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est pour cette raison que dans la loi — si vous la lisez bien — c'est au plus $500 à l'artisan.

M. BELIVEAU: Non. Le deuxième délit, $1,000, M. le ministre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est pour le second. Il y a quand même, M. le Président, une disproportion entre l'amende imposée à un individu et celle imposée à une société puisque, si on reprend l'article 85, on voit très bien: $200 et d'au plus $1,000 lorsqu'il s'agit d'un individu, d'au moins $800 et d'au plus $5,000 lorsqu'il s'agit d'une corporation ou d'une société à fonds social, pour chaque infraction subséquente dans les douze mois qui suivent une infraction. Ceci est le deuxième délit. Il y a déjà une disproportion dans le cas de la première infraction; il y a une disproportion beaucoup plus marquée dans le cas de la seconde. Je pense que le ministre devrait...

M. TREMBLAY (Bourassa): Le ministre prend bonne note de cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... reconnaître que c'est une considération importante.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'enregistre de très bonnes notes sur cette suggestion.

M. LE PRESIDENT: M. le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais revenir sur certains points soulevés par M. Mailloux.

M. Mailloux — je le remercie des renseignements qu'il nous a donnés — nous a dit qu'il y avait des associations des camionneurs artisans dans environ 53 circonscriptions et qu'on avait demandé, lors de cette réunion qui s'est tenue, qu'on suspende l'agitation, si je puis appeler cela ainsi, et qu'on ne poursuive pas d'action syndicale dans les endroits où les associations ne sont pas encore constituées.

C'est compréhensible, étant donné les difficultés d'aménagement de tout ce complexe de l'organisation des camionneurs artisans. Maintenant, le député de Charlevoix, a dit qu'après l'inventaire, après avoir dénombré les camions, il resterait environ la moitié des camionneurs artisans dont Me Béliveau nous a dit qu'ils étaient actuellement 5,000. Me Béliveau, est-ce que, selon vous, après inventaire, le nombre des camionneurs artisans pourrait être réduit de moitié?

M. BELIVEAU: Après inventaire, le nombre des camionneurs artisans pourrait être réduit de 10 p.c, mais ces 10 p.c. désirent se qualifier pour devenir des camionneurs artisans pour peu que nous ayons des conditions de vie qui nous permettent de vivre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon.

M. BELIVEAU: Ce sont des gens qui sont mentalement des camionneurs artisans. Si nous avons accepté dans les rangs de nos membres des gens qui ont un, deux ou trois camions, c'est parce que les autorités concernées nous ont demandé de les accepter également, et pour une question strictement humaine: il est facile à comprendre qu'on ne peut pas dire à un type qui a deux ou trois camions: Mets en deux sur le tas de ferraille et fous-nous la paix, tu n'a pas le droit de vivre. S'il y avait un délai de prévu et si on avait des conditions de vie normales, il est évident que ces gens-là se qualifieraient — et très vite et avec plaisir — avec un seul camion.

M. MAILLOUX: Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait une observation?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Certainement.

M. MAILLOUX: Entre les chiffres de 10 p.c. que M. Béliveau avance, qui ne seraient pas de véritables artisans, et ma prétention à l'effet que pas tellement plus de 50 p.c. seraient de véritables artisans, dans mon esprit, je considère qu'au moment où le ministère du travail aura défini le terme artisan, ce sera un propriétaire de camion qui le conduira lui-même et qui, forcément, devra nous dire que c'est son principal revenu. Les définitions du terme artisan, selon les nomenclatures que j'ai entendues tantôt, semblent assez variables à chacun des participants. Mais j'imagine mal que le gouvernement veuille accorder un taux de protection, le taux de la cédule des justes salaires, soit 20.6 p.c. ou 20.5 p.c, à des gens qui ne seraient pas effectivement de véritables artisans, des gens qui sont désavantagés et qu'il faut aider par une mesure d'assistance. Dans mon esprit, c'est clair et net, et au moment où le terme artisan sera défini, il y aura, je le pense, beaucoup moins d'artisans qu'on en avance actuellement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie le député de Charlevoix de ces précisions et je reviens à Me Béliveau. Il est bien entendu que tout le monde, et je l'ai dit dès le départ quand j'ai fait ma première intervention, nous étions évidemment pour cette reconnaissance syndicale de votre association. Cela relève évidemment d'un autre ministère et ne peut pas faire ici l'objet de l'étude du projet de loi 23.

Lorsque l'on procédera à l'examen de ce problème en vue de la reconnaissance syndicale, on devra définir l'artisan de la même façon qu'actuellement, dans la Loi du syndicalisme agricole, on devra définir ce que c'est qu'un producteur agricole, un agriculteur ou un cultivateur. Mais, M. Béliveau, selon vous, un camionneur artisan est celui qui possède un véhicule et qui en tire son principal revenu, qui le conduit lui-même et qui en tire son principal revenu.

M. BELIVEAU: C'est la définition que nous souhaitons voir appliquer, pas immédiatement, parce que ça créerait tellement d'injustice, mais dans quelques mois, alors que les types qui ne sont pas tout à fait artisans pourraient se qualifier pour le devenir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans ces conditions-là, si on acceptait par hypothèse cette définition, est-ce que vous croyez qu'après inventaire, une fois reconnue votre association, il resterait encore 5,000 camionneurs artisans, étant donné que d'autres viendraient se joindre à l'association.

M. BELIVEAU: J'en suis tout à fait convaincu.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, évidemment, ce que vous demandez, outre la reconnaissance syndicale qui est un problème spécifique comme je viens de le mentionner, c'est que l'on reconnaisse dans la loi, d'une façon explicite, votre association et qu'on délimite le champ de son activité...

M. BELIVEAU: Absolument.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...ce qui, à votre avis, n'est pas actuellement indiqué à l'article 26.

M. BELIVEAU: Si je lis l'article 26, je suis forcé d'en venir à la conclusion que nous sommes confinés à cet article, mais qu'on ne nous assigne pas un secteur. C'est là tout le problème.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, il est bien évident — c'est une observation que j'avais faite au ministre et il me pardonnera de la refaire encore une fois — que nous avons la loi actuellement; nous n'avons pas la réglementation. Or, la délimitation de ce secteur, de ce champ d'activité, serait faite, à ce moment-là, par voie de réglementation. Me Béliveau, croyez-vous que la réglementation, dans ce cas-là, serait suffisante pour vous donner cette garantie que vous exigez ou si vous préféreriez qu'il y ait une disposition dans la loi qui détermine le champ d'activité que vous revendiquez?

M. BELIVEAU: Vous me demandez, M. le député, si j'aime mieux que ce soit maintenant que peut-être plus tard. J'aimerais mieux voir dans la loi une disposition, évidemment, qui consacre ce principe; c'est clair.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, vous préféreriez que la loi consacre le principe.

M. BELIVEAU: Evidemment.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez, comme moi, l'expérience de la réglementation; une loi peut être fort bonne, mais on peut l'altérer, en changer même les principes lorsqu'on rédige la réglementation afférente à la loi. Alors, pour ma part, sous réserve évidemment d'un examen plus approfondi des difficultés que cela pourrait entraîner, je serais, avec vous, d'avis que le ministère doive inscrire dans la loi une disposition déterminant le champ d'activité qui doit être celui des camionneurs artisans.

Maintenant, Me Béliveau, vous vous inquiétez à raison de la question de l'inventaire des véhicules dont nous a parlé le ministre à plusieurs reprises. Je crois que cet inventaire est nécessaire, mais vous vous posez la question suivante: Entre-temps, qu'est-ce qui peut se produire? Selon vous, qu'est-ce qui se produit actuellement qui pourrait laisser croire que cet inventaire, étant assez long, vous soyez, à cause de cela, privés des droits que vous réclamez ce matin?

M. BELIVEAU: C'est que nous avons des informations précises à l'effet que des gens se préparent à acheter des camions pour les envoyer dans des endroits où vraiment il y a un dollar à faire et très vite, alors que, disons dans le secteur de la baie James, il y a des gens qui chôment actuellement. Il s'agit de camionneurs artisans qui ne demandent pas mieux qu'à travailler et qui sont prêts à travailler. Alors, le danger est imminent, il existe. Il y a des gens qui planifient à long terme; ils font bien, je ne les méprise pas pour tout cela, mais il reste que, si on ne prévoit pas une sorte de mécanisme qui les prévient d'avance qu'ils achètent à leurs risques, évidemment, les compagnies qui fabriquent les camions ont avantage à vendre et à vendre le plus possible, et je pense qu'il y a des gens qui vont s'organiser pour s'acheter des camions.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Béliveau, dans votre mémoire, à la page trois, sous l'article 5 f), vous dites ceci: "La Commission des transports devrait étendre sa juridiction aux véhicules du ministère de l'Equipement de façon à ce que les unités soient marginales et jamais compétitives avec les inté-

rêts des sujets de la commission." Que voulez-vous dire exactement ici?

M. BELIVEAU: Le ministère de l'Equipement qui possédera les véhicules — c'est bien normal — ne devrait pas, en fin de compte, être en position de prendre les emplois de ceux qui attendent actuellement. Il ne devrait jamais être dans une position concurrentielle. Dieu sait que, si on étendait la politique de lui permettre d'acheter des véhicules pour faire des travaux, il serait drôlement concurrentiel parce qu'il dispose, en fin de compte, de pouvoirs que nous n'avons pas.

Le ministère de l'Equipement, à notre point de vue, doit avoir des véhicules dans la mesure où ces véhicules font des travaux tout à fait marginaux, exceptionnels, accidentels, mais jamais des véhicules qui s'installeront à la place de ceux qui ont espoir de gagner leur vie dans le secteur un jour ou l'autre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A la page 5, Me Béliveau... Oui, sur le même sujet?

M. MAILLOUX: Vous parlez de ce qui sera probablement le futur ministère de l'Equipement. Le ministère de la Voirie possède ses propres véhicules qui sont affectés spécialement à l'entretien des routes et il ne concurrence en aucune façon les camionneurs artisans.

M. BELIVEAU: Pas à l'heure actuelle, mais si on regarde la loi telle qu'elle est, disons que nous pourrions nous retrouver dans une situation anormale où le ministère de l'Equipement pourrait avoir des véhicules qui prendraient nos places.

M. MAILLOUX: Ce que j'ai pensé en lisant votre mémoire, c'est que vous suggériez que le ministère de la Voirie retire ses véhicules qui sont à l'entretien actuellement. Cela aurait entraîné un problème particulier.

M. BELIVEAU: Non, ce n'est pas cela, M. le député.

M. MAILLOUX: D'accord, merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A la page 5 de votre mémoire, M. Béliveau, à l'article 51 du projet de loi, vous dites: "L'association se réjouit du contenu de cet article pour peu que la commission prenne les dispositions pour que le coût de revient soit le même partout. Elle devra faire légiférer les ministères concernés pour que la gazoline — ou l'essence — se vende le même prix dans tout le territoire québécois. Comment le coût de revient serait-il le même quand on vend la gazoline $0.60 le gallon à Rouyn alors qu'on l'obtient à $0.36 à Shawini-gan? "

Vous demandez que la commission tienne compte de ces facteurs dans la fixation des taux? Comment, mécaniquement, cela pourrait-il se faire, à votre avis?

M. BELIVEAU: Mécaniquement, on sait que les cultivateurs du Québec, par exemple, pour la plupart, ont des réserves de gazoline pour leur usage personnel et que, pour autant qu'ils sont cultivateurs et qu'ils répondent à certaines normes, ils ont un taux qui est uniforme partout au Québec. Ou bien on prévoirait un mécanisme comme celui-là ou bien, quand viendrait le temps de fixer les taux dans l'Abitibi, par exemple, on tiendrait compte du fait que la gazoline là-bas est beaucoup plus chère qu'à Shawinigan.

Je vous dirais, M. le député, qu'il y a des camionneurs qui dépensent 100 gallons de gazoline par jour, quand ils travaillent. Alors, s'ils sont payés le même taux à Shawinigan qu'à Rouyn-Noranda, toute la différence du monde se retrouve dans le profit net, évidemment.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, l'alternative c'est: ou des mesures analogues à celles dont jouissent les cultivateurs...

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... ou, dans la fixation des taux, enfin, un examen des conditions particulières dans chaque région étant donné que, dans diverses régions, le prix de l'essence n'est pas le même.

Me Béliveau, en ce qui me concerne, je n'ai pas d'autres questions, pour le moment, à vous poser. Nous en poserons au ministre le cas échéant.

Mais, soyez assuré — vous savez d'expérience, en ce qui concerne Chicoutimi — que nous avons non seulement pris bonne note de vos demandes, de la requête générale que vous avez soumise, mais nous sommes d'accord avec vous sur le principe de la reconnaissance syndicale, sur l'inventaire, la limitation dont vous avez parlé — je ne veux pas vous réinterroger là-dessus parce que ce serait peut-être un peu long — et surtout sur la reconnaissance de l'artisan et sur la délimitation de son champ d'activité.

Je vous ferai observer — nous allons entendre d'autres mémoires, d'autres organismes qui peuvent, à un moment donné, se trouver dans une situation de concurrence avec le vôtre — qu'à l'article 26, les recommandations que vous faites me paraissent toujours limitatives.

M. BELIVEAU: C'est cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous essaierons d'exiger du ministre qu'il vous reconnaisse un champ d'activité peut-être plus grand, compte tenu toutefois des représentations qui nous seront faites par d'autres entreprises qui effectuent des travaux qui sont de même nature que ceux qu'effectuent vos camionneurs artisans.

Je sais que mon collègue, M. Cloutier, a des questions à vous poser. Je ne veux pas prendre le temps de la commission. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Me Béliveau, j'ai rencontré, dimanche, comme plusieurs de mes collègues, l'association de comté. Cela s'est déroulé dans l'ordre et je les en félicite. J'ai remarqué que sur la cinquantaine de transporteurs qui sont venus à la rencontre, la plupart — et c'est normal, je crois — étaient équipés pour transporter des matériaux de construction de chemins.

Il y en avait quelques-uns qui étaient équipés pour le transport du bois. Je voudrais toucher le point particulier de l'exclusivité que vous demandez, c'est-à-dire qu'un champ spécifique vous soit assigné en ce qui concerne le transport du bois. Etant donné que cela ne prend pas exactement le même équipement et pour transporter les matériaux de construction de chemins et du bois, que ce soit des billots ou du bois à pâte, est-ce que les transporteurs actuellement, ceux qui font partie des camionneurs artisans, sont en majorité équipés pour ces deux sortes de transport important? Et ceux qui ne le sont pas, est-ce que, dans l'éventualité d'une reconnaissance ou de l'assignation d'un secteur en particulier, ils sont intéressés à faire les dépenses d'équipement nécessaire? Et qu'est-ce que cela pourrait représenter en investissement?

M. BELIVEAU: Actuellement, il y a beaucoup de camionneurs artisans qui sont prêts, au point de vue matériel, à transporter le bois.

Pour répondre à la deuxième tranche de votre question, si les camionneurs artisans se voyaient attribuer le secteur du transport du bois, pour une fois ils investiraient avec grand plaisir dans ce secteur-là parce que la preuve est faite qu'ils ont investi jusqu'à présent sans avoir aucune protection. Là, ils auraient justement la certitude qu'avec leur investissement, cela va leur rapporter quelque chose. Disons que si, demain matin, ce secteur nous était accordé, je puis vous certifier qu'en l'espace d'une semaine nos camionneurs artisans pourraient faire tout le transport du bois qu'il y a au Québec.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je parle d'un secteur que je connais bien: le transport du bois dans la partie sud de Montmagny où il entre du côté canadien, à partir du côté américain, des forêts du Maine, environ 100 millions de pieds de bois par saison d'hiver. Cela prend un équipement assez dispendieux. Actuellement, il n'y a pas de problème, étant donné qu'il vient des transporteurs de bois de plusieurs régions, à partir des Cantons de l'Est jusqu'aussi loin que Témiscouata ou la Gaspésie même. Ils viennent dans la section sud de Montmagny et de L'Islet pour assurer le transport du bois.

Mais il reste que c'est un investissement assez dispendieux puisque, dans ce secteur de transport, il y a une évolution aussi, il y a un changement d'équipement qui entraîne un investissement assez considérable. Vous nous dites que les camionneurs artisans, moyennant une certaine assurance, une certaine sécurité, pourraient faire l'investissement, mais vous n'avez pas d'idée actuellement sur ce que cela pourrait représenter pour les camionneurs artisans.

M. BELIVEAU: Avec l'équipement qu'ils ont actuellement pour transporter le gravier, disons qu'en ajoutant $6,000 ou $7,000 ils seraient vraiment bien équipés pour transporter le bois. Ils seraient très heureux de le faire pour transporter le bois. Mais je dois mentionner que, déjà, il y en a beaucoup qui sont équipés matériellement pour le transporter, mais qui sont dans les cours et qui attendent d'avoir à faire le transport.

M. CLOUTIER (Montmagny): Pour les entrepreneurs forestiers importants de ce territoire, que ce soit en Abitibi ou dans le secteur que je viens de décrire, il y a un point extrêmement important, c'est qu'il y a un temps limité pour ce transport du bois.

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. CLOUTIER (Montmagny): Il y a une saison, un nombre de semaines limité, conditionné par la température. Alors, l'entrepreneur forestier ne peut pas prendre le risque que son bois reste en forêt. Il faudrait nécessairement qu'il y ait des ressources suffisantes en équipement pour assurer le transport.

M. BELIVEAU: C'est clair.

M. CLOUTIER (Montmagny): Advenant la possibilité que la réglementation prévoie que le camionneur artisan puisse avoir accès exclusif ou accès en majorité à ce transport du bois, quelle serait la période de transition que vous verriez afin d'assurer aussi un équilibre entre les équipements actuels et les équipements à venir?

M. BELIVEAU: Il se vend des équipements convertibles, si je peux m'exprimer ainsi. En l'espace d'une matinée, il est possible de faire d'un camion qui transporte du gravier un camion qui peut transporter du bois et inversement. C'est un problème que nous réalisons, mais que nous sommes prêts à assumer n'importe quand.

M. CLOUTIER (Montmagny): Très bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Béliveau,

dans votre mémoire, vous parlez de l'article 44. Vous dites que l'association a peur de cet article, car la commission pourrait contourner le principe de la limitation. Est-ce que vous voulez dire par là que, même si le nombre des permis était limité, en vertu de l'article 44, on pourrait toujours contourner la limitation des permis? Cela irait-il jusqu'à dire que vous seriez en faveur que cet article soit amendé, quoi? De quelle manière?

M. BELIVEAU: Nous souhaiterions que ce pouvoir ne soit pas accordé au lieutenant-gouverneur en conseil.

Evidemment, si le principe de la limitation est accepté, si, d'une part, on a la dimension juridique pour négocier et si, d'autre part, ce pouvoir n'est pas accordé au lieutenant-gouverneur en conseil, nous sommes prêts à assumer tout ce que ça représente de danger.

Il est évident qu'il faut prévoir dans la loi des mécanismes pour équilibrer le nombre de permis par rapport au besoin et nous ne nous scandalisons pas de voir que certains articles le prévoient et l'article 44 en est un.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous voulez dire par là que ce pouvoir devrait être accordé à la Commission des transports?

M. BELIVEAU: C'est ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, une autre question, l'article 72, l'association s'oppose à la requête pour permission d'appeler. Elle veut que cet appel existe de plein droit et également sur les questions de fait. Voudriez-vous expliciter un peu votre pensée là-dessus?

M. BELIVEAU: C'est parce que la permission d'appeler... Evidemment si le principe de la permission d'appeler est consacré dans une loi, on consacre en même temps le principe qu'on peut nous refuser la permission d'appeler. On est d'accord là-dessus, je pense bien.

Nous voudrions pouvoir aller en appel de toute décision qui nous serait défavorable sans avoir à prendre tous les corridors que la loi prévoit pour demander à Pierre, à Jean ou à Jacques la permission d'appeler. Le problème fondamental est le suivant, c'est qu'être sûr qu'il y aura dans tous les paliers de cette commission des gens qui comprennent le problème du camionneur artisan, nous n'aurions même pas besoin de faire de remarque sur cet article. Mais notre expérience nous démontre qu'à chaque fois qu'on parle de notre problème à quelqu'un, il faut recommencer à faire tout l'historique et j'imagine que la commission va avoir autre chose à faire que d'entendre des historiques.

Alors, évidemment, on souhaiterait que la permission d'appeler soit automatique. Si un citoyen qui est devant la commission désire en appeler d'une décision, qu'il puisse le faire.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.

M. BELIVEAU: J'insiste surtout pour que le tribunal de la Commission des transports soit un tribunal sans frais parce qu'on a parlé tout à l'heure de pénalités, d'amendes qui, pour nous, peuvent être nettement prohibitives eu égard à nos moyens. Imaginez-vous combien pourraient être prohibitifs les frais qu'on pourrait retrouver à différents paliers du tribunal de la Commission des transports pour le camionneur artisan.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous étiez reconnus légalement comme un syndicat, ce sont des choses que vous pourriez négocier avec la commission.

M. BELIVEAU: C'est ça, quoique le principe des dépens pour le tribunal de la Commission des transports, c'est tout de même un problème qui regarde la Commission des transports. Cela pourrait être un tribunal sans frais comme celui qu'on retrouve à la Régie des alcools et qui donne l'exemple sur ce plan-là.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sur le même sujet, Me Béliveau, concernant l'article 44, dont a parlé le député de Sainte-Marie, vous dites que l'association a peur de cet article car la commission pourrait contourner le principe de la limitation. Vous suggéreriez que ce soit la commission qui décide et non pas le lieutenant-gouverneur en conseil.

M. BELIVEAU: C'est cela. Partout où on trouve dans la loi, M. le député, des pouvoirs qui sont accordés au lieutenant-gouverneur en conseil, nous souhaiterions que ces pouvoirs soient donnés à la commission. Nous rejoignons là le voeu émis par l'Association du camionnage Inc., par mon confrère qui a...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, c'est une observation que nous avons faite au ministre en lui indiquant que le ministre, en vertu de cette loi, avait beaucoup trop de pouvoirs, mais nous y reviendrons lors de l'examen en seconde lecture.

A l'article 72, dont a parlé le député de Sainte-Marie, vous voulez que l'appel existe de plein droit et également sur les questions de fait. Vous voulez qu'on reconnaisse l'appel juris et de jure.

M. BELIVEAU: C'est cela. Evidemment on nous dira que n'importe qui peut aller en appel et n'importe quand. C'est un danger qui existe, bien sûr. Le danger est moins grave, à mon point de vue, que la personne qui pourrait être privée d'un droit d'appel si, par fantaisie ou pour d'autres motifs ou parce qu'on n'a pas bien compris son problème, on refusait de lui

permettre ce droit d'appel. Il y a toujours des inconvénients de part et d'autre, évidemment. Mais le droit d'appel, il faudrait qu'il soit consacré de plein droit.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, Me Béliveau.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Béliveau, je vous remercie d'avoir fait la lumière sur la concurrence déloyale que certaines compagnies privées font par le ricochet de subventions gouvernementales accordées à des entreprises supposément créatrices d'emplois, pour s'équiper d'un ensemble de camions pour effectuer pratiquement tout leur camionnage et souvent pour laisser la part non rentable au petit camionneur dans des conditions impossibles. Je crois qu'à la lumière de vos arguments et de vos remarques, la réglementation sur le transport comprendra les changements souhaitables.

M. BELIVEAU: Le principe que nous voulons, en fait, c'est que si une usine veut être une usine de pâte et papier, qu'elle ne soit pas en même temps un transporteur. Qu'on mette de l'ordre là-dedans, tout simplement.

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: J'aurais une question à poser au ministre. Par ses déclarations tout à l'heure, j'ai cru comprendre qu'il avait un penchant favorable. Toutefois, la position prise par son ministère me semble encore quelque peu ambiguë.

J'aimerais savoir si son ministère entend appuyer les revendications, de se donner une dimension juridique pour les camionneurs artisans, d'appuyer le syndicalisme pour les camionneurs artisans, s'il entend également faire les pressions voulues auprès du ministère du Travail et s'il espère des développements prochains dans ce domaine? Est-ce que son ministère serait même prêt à établir un échéancier justement en vue d'amener une politique du transport favorable de plus en plus à l'artisan dans la province de Québec? C'est un cas de principe.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour répondre à l'honorable député, il est question de dialoguer avec lui et de le tenir au courant des problèmes de transport du camionneur artisan, mais de là à lui dicter ce qu'il doit faire, je crois que M. Béliveau peut faire les représentations au ministère du Travail pour obtenir sa reconnaissance. Il n'appartient pas au ministre des Transports d'intervenir auprès de l'autre ministère et de lui dire: "... Tu vas faire ceci ou cela." Je vais en discuter avec le ministre concerné, mais je crois que Me Béliveau va faire ses représentations. Après cela, le ministre du Travail pourra prendre ses décisions au point de vue de la reconnaissance du camionneur artisan afin de savoir s'il va le reconnaître, de quelle façon il va le reconnaître, etc., les normes... Cela relève uniquement du ministère du Travail.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Béliveau, est-ce que — excusez-moi, M. le ministre — vous avez bien dit tout à l'heure — je crois avoir bien compris — que, pour que vous soyez reconnus, pour que vous obteniez cette reconnaissance syndicale, les dispositions actuelles du code ne permettent pas qu'on vous reconnaisse et qu'il faudrait un projet de loi?

M. BELIVEAU: C'est cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.

M. LATULIPPE: Est-ce que, M. le ministre et vos officiers vous êtes favorables à ce principe de reconnaissance syndicale pour les camionneurs artisans ou si c'est encore à l'étude?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je suis favorable à donner une loi, des pesanteurs et des taux aux camionneurs, mais quant à la reconnaissance syndicale, cela relève uniquement — je l'ai dit il y a quelques instants — du ministère du Travail.

M. BELIVEAU: Est-ce que j'ai bien compris, M. le ministre, quand j'ai décelé chez vous, ce matin, un penchant naturel d'appui pour cette reconnaissance syndicale?

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai répondu que cela relevait du ministère du Travail.

M. BELIVEAU: J'avais donc mal compris.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, comme le ministre est membre du cabinet et qu'il peut rencontrer à loisir son collègue, le ministre du Travail...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je l'ai dit il y a quelques instants.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... nous imaginons bien que, très bientôt, le cabinet se réunira et étudiera cette question afin de faire droit à la requête des camionneurs artisans...

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai répondu à cette question il y a quelques instants.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et que l'on présentera dans les délais les plus brefs un projet de loi à cet effet, si le code du travail ne permet pas à l'heure actuelle aux camionneurs artisans d'être reconnus.

C'est une suggestion que nous faisons, M. le ministre.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai dit tantôt que j'allais rencontrer le ministre du Travail mais que Me Béliveau était capable de faire valoir ses droits...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... auprès du ministre du Travail. Je vais discuter avec le ministre du Travail, mais ce n'est pas à moi à dicter une ligne de conduite au ministre du Travail.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne demande pas au ministre des Transports de dicter au ministre du Travail ce qu'il doit faire, mais, étant donné les incidences de ce projet de loi sur le domaine du ministre du Travail, j'imagine que le ministre ne voudra pas faire adopter une loi qui ne permettrait pas aux camionneurs artisans de s'en prévaloir si entre-temps on ne prépare pas une loi qui leur donnera le droit d'être reconnus comme association syndicale.

Il y a une question de collaboration et d'efficacité. Il faut que la loi que vous présentez soit fonctionnelle et qu'on puisse l'interpréter en regard des autres lois. Donc, il me paraît que, dans votre esprit, ce doit être une priorité que celle de faire auprès du ministre du Travail toute représentation utile, et cela dans les plus brefs délais.

M.TREMBLAY (Bourassa): J'enregistre les commentaires de l'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous ne nous voulons pas nous contenter de cela, nous demandons instamment au ministre de faire des pressions auprès du ministre du Travail pour que soit facilitée aux camionneurs artisans la possibilité d'obtenir cette reconnaissance syndicale.

M. TREMBLAY (Bourassa): Nous autres, ce n'est pas comme dans le temps de l'Union Nationale, il n'y a pas de pressions, on discute. J'ai dit que j'étais pour rencontrer le ministre du Travail, discuter avec lui et parler du sujet. Il n'est pas question de pressions parce qu'on n'est plus sous le régime de l'Union Nationale, c'est le régime libéral.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je veux bien, M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement pour faire observer au ministre que, sous le régime libéral, il n'y a effectivement pas de pressions puisqu'on est passé de 150,000 chômeurs à 250,000 et 60,000 bientôt à l'automne.

M. TREMBLAY (Bourassa): On dialogue et on travaille.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Cela fera 325,000.

M. LE PRESIDENT: Le député de Charlevoix.

M. MAILLOUX: M. le Président, le ministre du Travail est bien sensibilisé au problème que le comité discute ce matin. M. Béliveau, au nom de l'Association des camionneurs artisans, a fait lui-même ses propres représentations à M. Cour-noyer. Je sais que le gouvernement prendra ses responsabilités découlant du problème qu'on étudie présentement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous prenons note, M. le Président, de l'affirmation...

M. MAILLOUX: Que le ministre du Travail est bien sensibilisé au problème.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... de l'adjoint parlementaire.

M. MAILLOUX: Bien sensibilisé.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Nous tenons pour acquis que le député de Charlevoix parle au nom du gouvernement en l'absence des ministres.

M. MAILLOUX: Le député de Charlevoix, M. le Président, parle en son propre nom. Il a assisté, en compagnie du ministre du Travail, à une réunion vendredi et...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, sa déclaration est nulle et non avenue.

M. MAILLOUX: Je dis simplement que le ministre du Travail est bien sensibilisé au problème que l'on discute ce matin et qu'en temps et lieu le gouvernement prendra ses responsabilités, j'en suis assuré.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, nous en prenons acte, mais la déclaration du député de Charlevoix est nulle et non avenue parce qu'elle n'est pas faite au nom du gouvernement.

M. MAILLOUX: En aucune façon, parce que je ne suis pas membre de l'Exécutif, et le député de Chicoutimi le sait très bien.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce que je voulais savoir.

M. TREMBLAY (Bourassa): Une dernière

remarque au sujet des régions. Je voudrais rassurer Me Béliveau en lui disant que, dans le cadre de la réglementation, pour chaque région — vous savez comme moi qu'il y a des régions montagneuses et que les taux ne sont pas les mêmes; dans la région de Shawinigan, le coût est moindre que dans d'autres régions — nous verrons à ce que les taux soient équilibrés pour qu'il y ait justice envers tous les camionneurs.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'espère que le ministre du Travail comprendra que la reconnaissance syndicale des camionneurs artisans lui rendrait la tâche beaucoup plus facile. J'écoutais le ministre tantôt lorsque l'on se demandait: Qui est un camionneur artisan, quel nombre de camions et combien de permis faut-il dans telle ou telle région? La reconnaissance syndicale permettrait à la Commission des transports et aux représentants des camionneurs artisans, qui connaissent leurs problèmes, de s'asseoir à une table de négociations et de définir tout ça, ce qui rendrait la tâche du ministre beaucoup plus facile. Alors, je souhaite que le ministre argumente un peu dans ce sens-là lorsqu'il rencontrera le ministre du Travail, parce qu'il a tout intérêt à ce que les camionneurs artisans soient membres d'un syndicat qui est reconnu.

M. LE PRESIDENT: Alors, il n'y a pas d'autres questions sur le mémoire de Me Béliveau?

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour répondre au député de Sainte-Marie, je voudrais lui dire qu'il y a un comité consultatif de vingt personnes qui va être formé en attendant les amendements que le ministère du Travail pourra apporter dans l'avenir. Il y aura une consultation et vingt personnes seront choisies dans toute la province de Québec, dans toutes les régions, pour nous exposer les problèmes de chaque région...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce qu'il va y avoir des camionneurs artisans à ce comité-là?

M. TREMBLAY (Bourassa): ... et pour éclaircir certains points que nous ne connaissons pas. Nous sommes ici à la commission, ce matin, pour entendre les gens, mais un comité consultatif de vingt personnes sera appelé à siéger assez souvent pour connaître les problèmes de telle ou telle région, problèmes que nous ne connaissons pas. Peut-être que nous ne connaissons pas les problèmes dans le fond de la Gaspésie, ceux qui existent dans le comté de Montmagny, près du Maine.

Il y a peut-être des problèmes, il y a certaines gens... A ce moment-là, il y a toujours une garantie qu'il y a vingt personnes qui seront prises dans toutes les régions du Québec, qui seront présentes à la Commission des transports c'est-à-dire au ministère des Transports. A ce moment-là, je crois que ça va rendre la tâche plus facile au ministre parce qu'on va pouvoir être sensibilisés aux problèmes de chaque région. Il ne faudrait pas que vous oubliez que c'est dans la loi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si votre conseil...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il y aura des camionneurs artisans membres de ce comité consultatif?

M. TREMBLAY (Bourassa): Certainement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il y en a de nommés actuellement?

M. TREMBLAY (Bourassa): Non, il n'y en a pas de nommés mais il va y en avoir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quand vous allez...

M. BERTHIAUME : La loi n'est pas votée encore.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il va y en avoir, la loi n'est pas votée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voulais savoir une chose du ministre. Il parle d'un groupe de travail qui va faire de la consultation. S'agit-il, à l'heure actuelle, au moment où nous siégeons, d'un comité interministériel ou s'il parle de ce comité consultatif qui sera créé en vertu de la loi?

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est en vertu de la loi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans ce comité consultatif, est-ce qu'il y aura un représentant des camionneurs artisans?

M. TREMBLAY (Bourassa): Certainement. M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est une parole de ministre!

M. LE PRESIDENT: Me Béliveau, nous vous remercions de votre représentation. Maintenant, nous allons suspendre la commission jusqu'à 2 h 30 et nous reprendrons avec M. Pierre Thomas parce que c'est Thomas Transport... à moins que vous ayez autre chose à ajouter.

M. BELIVEAU: Non, mais M. Alphonse Dufour, le président de l'organisme, est ici. Il aurait un mot à dire à 2 heures, si vous suspendez jusqu'à 2 heures...

M. LE PRESIDENT: A 2 h 30.

M. BELIVEAU: Je tiens à vous remercier infiniment pour m'avoir écouté. Merci.

M. LE PRESIDENT: D'accord.

Reprise de la séance à 14 h 36

M. KENNEDY (président de la commission parlementaire des Transports): A l'ordre messieurs! La parole est à M. Dufour, de l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants Inc.

M. Alphonse Dufour

M. DUFOUR: Mon nom est Alphonse Dufour. Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, MM. les membres de la commission, il me fait plaisir, aujourd'hui, de vous remercier d'avoir bien voulu écouter l'Association nationale des camionneurs artisans, par l'entremise de notre conseiller juridique, Me Béliveau.

Après l'exposé de M. Béliveau, je vous assure que nous n'avons pas grand-chose à ajouter. On pourrait en ajouter beaucoup, mais par contre, cela se résume dans son exposé.

J'aurais un seul point à souligner à titre de représentant des artisans. Ce que nous réclamons dans l'ensemble est un droit acquis. Les matériaux que nous réclamons, étant exclus de l'article 33 de la Régie des transports il y a une quinzaine d'années, ne l'étaient pas, dû à la mécanisation. On l'a fait à la main, comme le transport du bois, par exemple ; le bois transporté avec le petit crochet et le gravier transporté à la petite pelle. Aujourd'hui, si beaucoup de gros organismes de transport sont intéressés à récupérer ces matériaux, c'est que la mécanisation a amélioré la situation.

Nous, les camionneurs artisans, voudrions que ces transports-là nous appartiennent parce que l'on considère que c'est un droit acquis. Si on l'a acquis à la main-d'oeuvre jusqu'à présent, c'est qu'on voudrait continuer à y vivre en suivant la mécanisation et en donnant le meilleur service possible. Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a des questions adressées à M. Dufour?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais reprendre brièvement ce qu'a dit M. Dufour. L'argumentation de M. Dufour est basée sur le fait que, si j'ai bien compris, ils ont des droits acquis du fait qu'au moment où ils sont entrés dans ce domaine du transport par camion, il n'y avait pas de mécanisation. Ils ont donc bâti, au prix de leur sueur et de leurs sacrifices, une entreprise qu'ils veulent garder.

Ils s'inquiètent aujourd'hui du fait que, de la mécanisation, d'autres entreprises beaucoup plus fortes voudraient s'emparer d'un domaine que les camionneurs artisans considèrent comme étant le leur et cela en vertu de droits acquis. C'est là votre plaidoyer, M. Dufour?

M. DUFOUR: Oui. D'ailleurs, M. Roy — si vous me permettez, M. Tremblay — qui était président d'un comité devant lequel nous avons eu l'honneur de venir faire des exposés, a toujours été un des premiers à citer le droit acquis. C'est une chose qui ne devrait pas s'enlever. Nous l'avons acquis en commençant par des miettes et en réussissant à passer au travers.

Je pourrais vous citer, par exemple, un cas de 32 jours de travail pour des compagnies forestières comme à 1'Anglo, avec un homme et deux jeunes hommes de 17 à 20 ans, qui transportaient 2200 cordes de bois. Cela se faisait au crochet dans le temps. Je n'ai pas besoin de vous dire tout ce qui a coulé de sueur. Aujourd'hui, maintenant que cela se fait de façon mécanisée, on serait très intéressé à venir chercher de l'or qui s'apporte avec plus de facilité.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends très bien votre argumentation, M. Dufour. Elle m'est très sympathique, d'autant plus que, quand je vivais sur la ferme de mon père et que j'étais étudiant, je travaillais et je charroyais de la pitoune qu'on manoeuvrait au crochet à ce moment-là. Alors, je comprends très bien et j'imagine que le ministre qui a travaillé de la même façon en a pris bonne note.

M. OSTIGUY: Cela ne l'a pas développé.

M. LEGER: Vous êtes passé de l'agriculture à la culture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon?

M. LEGER: Vous êtes passé de l'agriculture à la culture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ça, parce que nous, nous sommes polyvalents.

M. BERTHIAUME: Et c'est moins pesant que la pitoune.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais c'est souvent plus embarrassant.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Alors, M. Dufour, nous vous remercions de votre exposé. Je dois aussi remercier l'association qui, par l'entremise de votre procureur, ce matin, nous a exposé les doléances des camionneurs artisans. Je vous en remercie.

M. DUFOUR: Je profite de l'occasion pour remercier M. Béliveau, parce qu'il nous a fait un très bel exposé. J'avais toujours prétendu que les conseillers juridiques ne connaissaient pas le métier...

M. LE PRESIDENT: Ah! Mais son compte peut varier d'un moment à l'autre.

M. DUFOUR: Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Alors, M. Pierre Thomas, qui représente Thomas Transport Inc. Est-ce que M. Thomas est présent?

Thomas Transport Inc. M. Pierre Thomas

M. THOMAS : Mon nom est Pierre Thomas. M. le Président, à titre de propriétaire d'une entreprise de transport visée par le bill 23, Loi des transports, je vous remercie de me fournir l'occasion de faire entendre la voix d'une entreprise indépendante spécialisée dans le transport de matières en vrac par camion à bascule.

Thomas Transport Inc. est une entreprise familiale qui opère dans la région de Montréal depuis 35 ans. Cette entreprise emploie 50 personnes et possède aujourd'hui plus de 40 camions agencés pour le transport de matières en vrac. Il s'agit d'un investissement de l'ordre de $1 million.

M. le Président, je veux m'associer à tous les camionneurs artisans pour féliciter le ministre des Transports, l'honorable Georges Tremblay, d'avoir présenté un projet de loi qui va conférer le statut du camionnage public à tout un secteur important du transport qui est ignoré par l'actuelle Régie des transports.

Le ministre des Transports connaît bien tous les problèmes et les graves difficultés qui sont notre lot, et j'ai confiance que le ministère et la nouvelle Commission des transports verront à contrôler et à réglementer cette division de l'industrie du transport de façon à assurer aux quelque 10,000 camionneurs concernés un minimum décent de sécurité et de stabilité.

Avec l'Association des camionneurs artisans, je souhaite que le transport des matières en vrac soit réservé exclusivement à ceux qui se sont spécialisés dans ce genre de transport et qui en tirent leur principale, sinon leur seule source de revenu. Je veux cependant me dissocier de la position de l'Association des camionneurs artisans qui veut que cette division du transport en vrac lui soit réservée en exclusivité.

Je reconnais que le camionneur artisan, celui qui possède un seul camion qu'il conduit lui-même, remplit un rôle non seulement utile, mais nécessaire. Je suis d'accord pour qu'il soit protégé contre l'exploitation et les abus dont il est trop souvent victime par suite de l'absence totale de protection légale. Mais il ne faudrait pas protéger le camionneur artisan aux dépens de l'intérêt public.

La principale raison de ma présence ici est précisément d'attirer l'attention des membres de la commission parlementaire des Transports sur le rôle utile et nécessaire que remplit l'entrepreneur en transport au service de l'industrie et en particulier des entrepreneurs.

L'entrepreneur qui a besoin de 30 ou 40 camions de façon régulière et permanente aura toujours intérêt à confier la responsabilité de son transport à un entrepreneur expérimenté et responsable qui peut lui fournir les garanties et assurances nécessaires contre les pertes dues aux délais de livraison, aux accidents ainsi qu'aux dommages causés aux matériaux transportés.

La disponibilité en tout temps d'un équipe- ment approprié aux besoins est une autre garantie indispensable à l'entrepreneur qui doit exécuter ses contrats dans le contexte de la concurrence. L'entrepreneur en transport peut lui assurer cette disponibilité d'équipement beaucoup plus efficacement que le camionneur artisan dont le camion fait défaut par suite de bris ou d'accident.

L'entrepreneur en transport répond à un besoin réel des entrepreneurs, et je crois qu'il est urgent et d'intérêt public que le gouvernement contrôle et réglemente tout le secteur du transport des matières en vrac en fonction des besoins et du développement économique. A titre de mesure d'urgence et avant que le nombre sans cesse croissant de camions à bascule rende le problème quasi insoluble, je crois qu'il est essentiel et urgent de geler le nombre de permis en fonction du nombre de camions à bascule actuellement enregistrés, et je soumets respectueusement que la loi devrait contenir une prescription dans ce sens.

Je vous remercie, M. le Président, de m'avoir fourni l'occasion de me faire entendre devant les membres de cette commission.

Je souhaite que le projet de loi no 23 soit adopté sans délai afin de redresser la situation lamentable dans laquelle notre industrie se débat depuis trop longtemps. Je crains que ceux qui insistent tellement pour que la loi soit parfaite et rencontre les vues de chacun sont précisément ceux qui souhaitent que la situation actuelle ne change pas. Pour ma part, M. le Président, je crois que le bill 23 est urgent et nécessaire et j'ai confiance que le ministre actuel des Transports va apporter à l'industrie du transport la stabilité dont elle a besoin pour contribuer efficacement au développement économique de notre province. Merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a des questions à adresser à M. Thomas? Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser une question à M. Thomas, simplement pour qu'il me renseigne sur l'activité qui est la sienne. Lorsque vous parlez de transport en vrac, M. Thomas, d'abord, quel genre de matière transportez-vous et dans quel territoire?

M. THOMAS: Je suis dans le territoire de Montréal. Je transporte surtout des matériaux provenant de carrières. J'aimerais pouvoir transporter le sel, par exemple, et tout ce qui peut se transporter par camion à bascule.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais poser une question au ministre qui connaît ce problème dans la région de Montréal. Quelle est l'opinion du ministre concernant ce problème du transport en vrac par des entreprises de la nature de celle de M. Thomas?

M. TREMBLAY (Bourassa): La situation — c'est une des raisons d'être du bill — pour celui qui possède des camions à bascule à Montréal, que ce soit M. Thomas ou un autre, c'est qu'il y a beaucoup de chargement ou plutôt de déchargement de bateaux qui se fait à Montréal. Actuellement, il existe un cartel qui fait que le camionneur qui a un, deux, dix ou vingt camions ne peut pas aller au port de Montréal pour transporter le sel. Il y a beaucoup de matériaux qui peuvent être transportés par camions à bascule, mais les camionneurs sont limités à transporter seulement de la pierre ou du sable. A Montréal, cela crée un préjudice aux personnes qui emploient des chauffeurs. Combien payez-vous les chauffeurs actuellement sur l'île de Montréal?

M. THOMAS : Mes employés sont rémunérés au taux de $3.47 l'heure, actuellement.

M. TREMBLAY (Bourassa): Alors, vous voyez ce qui arrive pour ces gens-là. Le sel arrive l'automne et ce sont toujours les mêmes compagnies qui ont le transport. Je ne dis pas qu'ils ne peuvent pas concurrencer...

Cela ne dit pas qu'on peut concurrencer parce qu'il va y avoir des taux, mais ils peuvent concurrencer dans le service. Comme cela existe présentement, ils ne peuvent même pas concurrencer dans le service. C'est ce qui arrive à Montréal à l'heure actuelle.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Thomas, est-ce qu'il existe beaucoup, à votre connaissance, d'entreprises de l'importance de la vôtre dans la région de Montréal?

M. THOMAS: A ma connaissance, il y en a quatre.

M. TREMBLAY Chicoutimi): Cela regroupe 200 camionneurs...

M. THOMAS: A peu près 200 camionneurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que ces camionneurs font partie d'associations syndicales?

M. THOMAS: Non. Nous n'appartenons à aucune association.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des entreprises...

M. THOMAS: ... privées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... dites familiales ou...

M. THOMAS: Privées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... privées. Il n'y a pas de syndicats qui régissent les employés qui sont à votre service?

M. THOMAS: Les employés sont sous le régime de comités paritaires.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Régime de comités paritaires. Les salaires que vous payez sont établis à partir des normes des comités paritaires?

M. THOMAS: C'est cela.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Votre mémoire est très bien présenté. Vous défendez très bien votre cause. Je vous félicite. Il y a, cependant, un paragraphe dans votre mémoire qui m'intrigue et j'aimerais vous demander des précisions. Je pense que le but du gouvernement — en l'occurrence le ministre des Transports, quand il a présenté le projet de loi numéro 23 — est de rendre cette loi la plus parfaite possible et aussi que cette loi rencontre les vues de chacun. Vous dites — je me demande pourquoi — à la page 3, deuxième article: "Je crains que ceux qui insistent tellement pour que la loi soit parfaite et rencontre les vues de chacun sont précisément ceux qui souhaitent que la situation actuelle ne change pas." Il est possible que je comprenne mal votre texte, mais je ne suis pas du tout d'accord quand vous déclarez que le fait de rendre une loi parfaite, de faire en sorte qu'une loi rencontre les vues donne satisfaction à tout le monde, que ceux qui préconisent cela souhaitent que la situation actuelle ne change pas. Je ne suis pas d'accord avec cela. Je ne sais pas si vous voulez expliquer ce passage, mais c'est très contradictoire et paradoxal, ce que vous dites là.

M. THOMAS: Jusqu'à aujourd'hui, cela fait déjà quatre fois que je viens de Montréal pour assister à la commission. J'ai hâte que cela se règle parce que je ne peux pas toujours perdre mon temps à venir ici.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous voulez dire qu'il ne faut pas naturellement éterniser les débats...

M. THOMAS: C'est surtout mon idée, oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il y a quand même des fois où c'est nécessaire qu'une loi ne frustre personne et qu'elle rende justice à tous les groupes concernés.

M. THOMAS: D'accord, mais en plus je trouve que c'est pressant pour nous, surtout qu'une autre augmentation s'en vient.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si c'est dans ce sens-là que vous l'avez dit, il ne faut pas trop étirer le temps, c'est parfait. Il n'y a pas autre chose.

M. TREMBLAY (Bourassa): Cela fait combien d'années que les taux de transport de la pierre n'ont pas changé? Sur l'île de Montréal, vous n'êtes pas régis par le ministère de la Voirie, vous n'avez pas les taux de voirie. Est-ce qu'à votre mémoire...

M. THOMAS: Je crois que c'est depuis 1939. M. LE PRESIDENT: Le député de Rouville.

M. OSTIGUY: M. Thomas, actuellement vous faites du transport en vrac pour des carrières. Est-ce que vous allez à l'extérieur de Montréal ou si vous êtes actuellement limité à la ville de Montréal?

M. THOMAS: La région métropolitaine. Aux alentours de Montréal seulement.

M. OSTIGUY: Et lorsque vous mentionnez que vous aimeriez faire le transport du sel, évidemment ce serait d'aller dans nos comtés ruraux?

M. THOMAS: Justement.

M. OSTIGUY: Vous seriez en concurrence directe avec les camionneurs artisans à ce moment-là.

M. THOMAS: Ils prennent le matériel à Montréal.

M. OSTIGUY: Oui, mais quand même.

M. THOMAS: Montréal est la place où j'ai mon commerce. J'ai autant le droit que l'artisan, je crois.

M. OSTIGUY: Oui d'accord, mais vous iriez quand même livrer ou délivrer le matériel dans les campagnes.

M. THOMAS: Oui.

M. OSTIGUY: Alors, vous ne voulez pas faire partie de l'Association des camionneurs artisans?

M. THOMAS: Non.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Thomas, je crois qu'il serait assez difficile de vous demander de limiter vos intérêts à autre chose que le camionnage à cause de vos revendications. Mais est-ce que les carrières dont vous transportez le matériel ne sont pas votre propriété?

M. THOMAS: Elles ne sont pas ma propriété.

M. AUDET: C'est seulement le camionnage.

M. THOMAS: Je leur donne du service en leur louant mes camions.

M. AUDET: Je crois que vos demandes sont très légitimes, mais c'est là que je posais une question cet avant-midi à un monsieur des artisans sur la façon dont on parviendrait à donner justice à ceux qu'on veut mettre à 7 5 p.c. aux compagnies de transports, 75 p.c-25 p.c. On demandait justement de transporter 75 p.c. des intérêts du camionnage aux artisans et 25 p.c. aux compagnies. Vous êtes une compagnie de transport à 100 p.c, nécessairement, il va falloir vous conserver à vous aussi des droits acquis.

M. THOMAS: Mais le nombre de camions que j'ai ne suffit pas aux compagnies, aux carrières. Beaucoup d'artisans travaillent avec nous.

M. AUDET: Vous louez des camions des artisans aussi?

M. THOMAS: Je loue des camions des artisans aussi.

M. AUDET: Merci.

M. OSTIGUY: Les artisans qui viennent des comtés ruraux?

M. THOMAS: N'importe où.

M. OSTIGUY: Il n'y en a pas dans Montréal.

M. THOMAS: Il n'y a pas d'artisans dans Montréal? Il y en a beaucoup.

M. OSTIGUY: C'est ce que monsieur...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ils ne sont pas membres de l'association.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans sa question, le député d'Abitibi-Ouest, a confondu et, je crois, n'a pas compris que M. Thomas exploite une entreprise et a pour cela des rapports avec des entreprises privées, soit ceux qui exploitent des carrières. Lorsqu'on parle de 75-25, il s'agit des entreprises d'Etat, soit de la Voirie, soit des Terres et Forêts. Cela n'a donc aucun rapport avec ce que vous faites actuellement.

M. THOMAS: Non, aucun.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: J'aurais juste une question à poser à la suite de certaines interventions que j'ai mal saisies. En somme, ce que vous exigez, c'est que pour ce qui est transporté à partir de Montréal vers l'extérieur, vous puissiez avoir quand même une certaine protection, c'est-à-

dire qu'on ne soit pas obligé de faire venir des gens de 50 milles de Montréal pour transporter ce matériel-là. C'est ce que vous demandez?

M. THOMAS: Je demande de transporter ce qui appartient à Montréal...

M. PEARSON: C'est ce que j'ai cru comprendre, mais à la suite de certaines interventions, j'ai cru comprendre qu'il y en a qui auraient exigé ou demandé qu'on fasse appel à des gens d'un certain nombre de milles à l'extérieur de Montréal pour venir chercher les produits de Montréal et les transporter ailleurs.

M. THOMAS: Si nous, de Montréal, ne fournissons pas, pourquoi ne viendraient-ils pas de l'extérieur? Justement, il y a trop de camions. Si nous avons besoin d'aide, nous irons la chercher à l'extérieur, comme si l'extérieur a besoin d'aide, nous irons l'aider.

M. PEARSON: D'accord, mais en premier lieu la protection devrait être accordée, supposons, dans le comté de Charlevoix, aux artisans du comté de Charlevoix s'il y a de la marchandise à transporter dans Charlevoix. Dans Montréal, la protection ou la priorité serait donnée aux gens de Montréal. Dans Québec, ce serait donné aux gens de la région de Québec. C'est ça?

M. THOMAS: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je voudrais apporter un éclaircissement à la question du député de Saint-Laurent. Montréal métropolitain comprend les camions de Laval, les camions de Longueuil, les camions de Pointe-aux-Trembles, les camions de Beaconsfield ou de Sainte-Anne-de-Bellevue qui, dans les carrières, travaillent tous ensemble. A un moment donné, si on veut parler de sel, il se peut qu'un transporteur de Montréal puisse transporter à Boucherville car le Montréal métropolitain est une zone qui comprend tous ces endroits. Cela ne veut pas dire que le transporteur de Montréal va transporter dans le comté de Labelle, mais il faut établir des régions, et la région de Montréal comprend les transporteurs de Longueuil, de Boucherville et d'ailleurs qui viennent transporter à Montréal.

Alors, si les gens de Montréal peuvent obtenir des contrats aux mêmes taux, par le service, qu'ils ne soient pas bloqués. Or, ils n'ont pas de permis à l'heure actuelle.

M. PEARSON : Je suis d'accord avec vous; c'est ce que j'ai voulu dire. C'est pour ça que j'ai mentionné comme exemple des régions de 50,000 à 75,000 habitants.

Je comprends que Montréal est une région; ce n'est pas seulement la ville de Montréal. Cela peut comprendre des villes comme Laval et un certain nombre de milles autour.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excepté le comté de Bourassa.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il n'y a pas de carrières dans le comté de Bourassa; c'est un comté domiciliaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le ministre qui fait la carrière.

M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions, nous vous remercions, M. Thomas, de votre mémoire et des remarques que vous avez faites.

M. BOSSE: Il a fait sa carrière politique. M. THOMAS: Je vous remercie.

Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec

M. LE PRESIDENT: Nous allons maintenant entendre le représentant de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, Me Charles Stein.

M. Charles Stein

M. STEIN: M. le Président, je crois qu'on vous a distribué le mémoire de la Commission de transport. Je ne me propose pas de vous en faire la lecture, mais seulement de vous le résumer et peut-être de vous en lire quelques passages.

Nous rappelons d'abord à votre commission l'opportunité pour les gouvernants et les législateurs de respecter une certaine continuité dans les politiques législatives, surtout les dernières. En d'autres termes, surtout quand les gouvernants ont pris position sur des options fondamentales, comme, par exemple, celle dont il s'agit, la municipalisation du transport en commun, sauf circonstances extraordinaires dont il n'est pas question ici, je crois, nous sommes d'avis que les intéressés ont droit de s'attendre qu'on ne mette pas de côté brusquement ou qu'on ne change pas radicalement un régime qu'on vient d'instituer, dans le cas présent, il y a moins de deux ans.

A ce sujet, je précise — il est à peine nécessaire de le rappeler — que les trois lois de 1969, instituant les communautés urbaines de Montréal, de l'Outaouais et de Québec et créant une commission de transport dans chacune de ces communautés urbaines, datent de moins de deux ans et qu'elles ont été modifiées tout récemment encore. On a même calqué une nouvelle loi au moins sur ces lois de 1969 dans

le cas de la ville de Laval où on a encore créé une commission de transport du même genre. Enfin, on a déposé plus récemment le projet de loi no 84, créant encore une commission de transport pour la rive sud de la région de Montréal.

Nous rappelons, enfin, que la législation de 1969 — si je ne fais erreur — a rallié tous les suffrages à l'Assemblée nationale.

Cette législation qui, dans le cas de Montréal, évidemment, perpétuait seulement un régime qui existait depuis une vingtaine d'années, puisque la Commission de transport de la ville de Montréal existe depuis 1950, confiait à ces organismes municipaux la mise sur pied, l'exploitation du transport en commun dans chacune de ces régions urbaines, dans chacune de ces communautés, dans le cas de la ville de Laval, avec pouvoirs d'acquisition forcée au besoin, c'est-à-dire par expropriation, des entreprises existantes, des entreprises privées de transport en commun.

Voilà pour certaines observations d'ordre général. J'en arrive immédiatement à nos commentaires sur certaines dispositions du projet de loi no 23. D'abord, nous suggérons que les pouvoirs très étendus du ministre et du conseil des ministres, prévus à l'article 5 et à l'article 8 du projet, ne soient pas applicables à ces commissions de transport dont nous parlons, particulièrement, évidemment, à la Commission de transport de Québec. Nous donnons des exemples dans le mémoire, par exemple, à l'article 5, le pouvoir du ministre de prendre l'initiative de mesures destinées à améliorer les moyens et les systèmes de transport en fonction des besoins socio-économiques.

Encore à l'article 5, le projet confère au ministre le pouvoir d'exploiter ou de mettre sur pied un service de transport pour l'ensemble des ministères du gouvernement. Dans ce deuxième cas, nous vous soulignons que cela créerait une concurrence qui pourrait être plus ou moins néfaste à la Commission de transport, plus particulièrement à Québec, où se trouve, évidemment, le gros de l'administration provinciale. Qu'il s'agisse de l'un ou l'autre de ces pouvoirs que j'ai mentionnés, nous invoquons encore les considérations générales du début.

Pour ce qui est des pouvoirs du conseil des ministres, pouvoirs de réglementation très étendus, nous mentionnons la détermination de la nature des catégories et du nombre des permis de transport, l'établissement de normes, de tarifs, de taux ou de coûts de transport, l'imposition d'exigences relatives aux devis, aux appels d'offres, aux contrats, à l'équipement, au financement et à la gestion des moyens ou systèmes de transport ainsi qu'à l'établissement ou à la modification des circuits ou parcours. Enfin, vous avez cette clause finale — que les Anglais appellent "a catch all", on peut y mettre n'importe quoi — toute autre mesure en vue de l'application de la présente loi.

Toujours à la lumière de nos considérations générales et des contrôles qui existent déjà, qui s'appliquent aux commissions de transport municipales, nous disons que ce pouvoir de règlementation ne devrait pas s'appliquer à nous. Nous résumons les contrôles auxquels nous sommes déjà assujettis. Vous en avez de trois ordres: Vous avez d'abord le contrôle de la communauté urbaine et de son conseil ou de son comité exécutif, par délégation.

Vous avez ensuite la commission municipale du Québec dans le secteur financier, le déficit, les emprunts, les ratifications du budget, l'acquisition d'entreprises et, enfin, la Régie des transports qui deviendrait, en vertu du projet de loi, la Commission des transports du Québec, pour ce qui est des circuits, des modifications, des prolongements, de la révision des tarifs, etc., et l'octroi de permis à des concurrents.

Maintenant, si la commission et l'Assemblée nationale, nonobstant nos objections, en venaient à la conclusion qu'il faut quand même assujettir les commissions de transport à ces pouvoirs de réglementation, bien au moins, comme compromis, pourquoi, nous demandons-nous, ne pas tout simplement réserver au gouvernement le droit, le pouvoir d'assujettir la Commission des transports sans qu'elle le soit automatiquement en vertu de la loi? Il suffirait, comme nous le disons à la page 7 de notre mémoire, de dire tout simplement au début de l'article 24 qui se réfère à l'article 8: "S'ils y pourvoient, les règlements adoptés par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de l'article 8... s'appliquent à la Commission des transports, etc..." Mais nous espérons qu'on jugera bon d'exempter complètement les commissions de transport municipales de l'application de ces pouvoirs de réglementation.

Un autre sujet, c'est celui des rapports au ministre et à la Commission des transports du Québec, l'article 125 du projet. Nous demandons simplement de prolonger, comme l'a demandé aussi la Commission de transport de Montréal, le délai d'un mois. D'après le projet, le délai se terminerait le 30 mars, ce qui, incidemment, devrait être, je suppose, le 31 mars. Ce doit être par distraction qu'on a dit le 30, parce qu'il y a 31 jours en mars. Nous demandons que ce soit le 30 avril. Les raisons, c'est que, déjà, pour ce qui est des rapports des vérificateurs... Par exemple, les vérificateurs, eux, ont trois mois pour présenter leur rapport et nous avons déjà, en vertu de notre législation, jusqu'au 30 avril pour présenter certains rapports.

A ce moment-là, si on décide d'étendre le délai au 30 avril, bien, il faudrait faire la même chose. Ce serait plus pratique pour l'obligation de la Commission des transports de transmettre une copie certifiée de son budget de l'année courante. Ce qui veut dire que les rapports et les budgets de l'année courante devraient tous être transmis au plus tard le 30 avril.

J'en arrive à la question de la priorité des commissions de transport au sujet des voyages

spéciaux et du service à charte-partie. C'est l'article 126 du projet. L'article 126 propose un nouveau texte du paragraphe 1 de l'article 251 de la Loi de la Communauté urbaine de Québec. Evidemment, il y a toujours des dispositions identiques pour les deux autres communautés urbaines. Mais je parle des articles qui visent la Communauté urbaine de Québec ou la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec.

Le texte actuel de notre loi empêche la Régie des transports d'accorder un permis à un concurrent pour faire concurrence à la commission à l'intérieur de son territoire au moyen de voyages spéciaux ou à charte-partie. Si la Commission des transports s'y oppose, il y a une réserve, à moins que la régie ne soit d'avis que la Commission des transports ne peut pas donner le service dont il s'agit.

Alors, cette priorité, le projet de loi l'éliminerait. Il est bon de rappeler que cette priorité existe et existerait sans la disposition de la loi actuelle de la Communauté urbaine de Québec, la même chose pour Montréal et l'Outaouais en vertu de l'ordonnance 17 de la régie.

Pour ce qui est de Québec, nous signalons enfin sur ce point que nous avons acheté ou exproprié — ou nous devrons le faire parce que ce n'est pas tout terminé encore — les biens et les actions d'entreprises privées, et ces biens ou actifs comprenaient des droits exclusifs ou prioritaires dans ce domaine des voyages spéciaux et à charte-partie. Alors, si on élimine ce droit prioritaire, on privera les usagers des services de la commission et les contribuables d'un droit, d'un privilège, d'un monopole, si vous voulez, d'une priorité dont le prix se trouverait avoir été payé inutilement.

Il n'est pas hors de propos d'ajouter que l'Assemblée nationale, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, vient d'accorder ce même régime, d'ailleurs, à la Commission de transport de Laval et qu'en modifiant notre loi par le bill 147, elle a maintenu aussi ce régime prioritaire.

Quant au deuxième alinéa proposé de ce paragraphe 1 de l'article 251 de notre loi, l'article 126 toujours du projet, son seul but, semble-t-il, est de préciser que certains articles de la loi actuelle, qui régissent l'acquisition d'entreprises de transport en commun exploitées totalement ou pour la plus grande partie à l'intérieur du territoire de la Commission de transport, s'appliquent à l'acquisition d'entreprises de transport à charte-partie.

Il nous semble que c'est absolument inutile vu la définition des entreprises de transport en commun que contient la loi actuelle. Je cite, au mémoire à la page 10, la définition telle que modifiée par le bill 147 il y a deux mois: "Entreprise ou service de transport en commun: toute entreprise ou service de transport en commun de passagers, utilisant quelque moyen de transport autre que le véhicule taxi, en vertu de quelque modalité contractuelle que ce soit."

Alors il n'y a aucun doute que ça couvre tout, la charte-partie et tout ce que vous voudrez.

Avant de laisser le sujet de l'article 251, je vous signale, M. le Président, une question de simple concordance, que nous ayons gain de cause ou non sur l'article 126 dont je viens de parler et sur le paragraphe 1 de l'article 251 de la Loi de la Communauté urbaine de Québec. Si les articles 94 et 96 du projet de loi 23 sont adoptés, il faudra modifier le paragraphe 3 de l'article 251 de la Loi de la Communauté urbaine de Québec pour remplacer le renvoi à l'article 207 de la Loi de l'instruction publique par un renvoi à l'article 475 de la Loi de l'instruction publique. Et la même correction devrait être apportée pour les articles visant la Communauté urbaine de Montréal et la Communauté régionale de l'Outaouais, ce sont les articles 128 et 140 du projet pour ce qui est de ces deux autres communautés.

Enfin, M. le Président, un mot seulement du transport des écoliers. Nous demandons tout simplement qu'on nous conserve la priorité actuelle, surtout celle que nous accorde le paragraphe 3 de l'article 251 de notre loi dont je viens de parler, et nous rappelons que le transport des écoliers, c'est tout simplement du transport en commun, au moins au sens de la définition législative que j'ai citée tout à l'heure.

Sur la question du transport des écoliers, je me réfère à l'annexe C du mémoire qui est intitulée "Politique globale de transport en commun".

Il y a deux autres annexes — M. le Président, vous l'aurez remarqué — l'une qui donne ce que je pourrais appeler un précis de l'évolution du transport en commun, surtout en Amérique du Nord, et l'autre, l'annexe B, qui traite des priorités et des droits acquis des entreprises de transport en commun. L'annexe C, politique globale de transport en commun.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Vous demandez, en conclusion de votre rapport, qu'on donne priorité à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec pour ce qui touche le domaine public. Vous amenez comme argument de poids que vous avez déjà acheté des droits acquis de quatre compagnies sur sept dont vous avez acheté les trajets, les autobus, etc. C'est donc dire que vous craindriez que les droits acquis que vous avez achetés en plus des trajets vous soient enlevés par l'article 126 du bill 23.

M. STEIN: Oui. Nous avons ces droits et nous ne voulons pas qu'on nous les enlève. C'est ce que l'article 126 fait en remplaçant le paragraphe 1 de l'article 251 de notre loi, si on réfère au texte.

M. LEGER: Contrairement à la Communauté urbaine de Montréal, vous aviez acheté des droits acquis d'autobus qui allaient en dehors de votre territoire et qui pouvaient donner des services à charte-partie ou des services spéciaux en dehors du territoire de la Communauté urbaine de Québec. C'est exact?

M. STEIN: Oui.

M. LEGER: Je vois que vous êtes en train de faire des études. Ne pouvez-vous pas, selon la loi actuelle, donner un service en dehors de la Communauté urbaine de Québec?

M. STEIN: Il y a un seul cas...

M. LEGER: Ma question était simplement pour vérifier si actuellement la loi vous permettait d'user de ce droit que vous avez obtenu en achetant des trajets ainsi que des services d'autobus.

M. STEIN: Voici l'article que je cherchais et qui a été remplacé par le bill 147. C'est l'article 211. Je vous le lis au complet, mais il y a seulement les deux derniers alinéas qui sont pertinents: "La commission de transport a pour objet l'exploitation d'entreprises de transport en commun dans son territoire. Elle peut également tant qu'elle le juge opportun continuer l'exploitation à l'extérieur de son territoire de tout réseau de transport en commun, de toute franchise et de tout permis que comprenait ou possédait une entreprise de transport en commun dont elle a acquis les actifs ou le capital-actions." Le dernier alinéa ajoute: "Pour les fins de l'alinéa précédent, la commission est soumise à la juridiction de la Régie des transports."

M. LEGER: C'est cet alinéa qui fait que vous êtes maintenant à la merci du bill 23 qui peut vous enlever cette priorité que vous désirez pour continuer à fournir cette partie de services que vous donnez.

M. STEIN: Non, cela va plus loin que cela. Dans le moment, l'article 251, paragraphe 1 se lit comme suit: "Aucun permis ne peut être accordé à un transporteur par la Régie des transports pour l'accomplissement de voyages spéciaux à charte-partie — ce devrait être "ou à charte-partie", j'ai oublié de vous signaler cela — par autobus d'un point à un autre à l'intérieur du territoire de la commission de transport, si le requérant ne produit pas, avec sa demande de permis, le consentement du président directeur général de la commission de transport ou d'un autre commissaire ou fonctionnaire de la commission de transport spécialement autorisé à cet effet par le président directeur général, à moins que la régie ne soit d'opinion que la commission de transport n'est pas en mesure de donner le service couvert par la demande de permis." C'est l'article d'ailleurs, que j'ai résumé tout à l'heure. On le remplace par cette disposition ici, à l'article 126, qui se lirait comme suit: "La commission ou tout autre transporteur peut effectuer du transport, etc., s'il détient un permis."

Cela permet à la commission, qui s'appelle la régie dans le moment, d'accorder un permis à n'importe qui sans que la Commission de transport de la communauté urbaine puisse s'y opposer, sans qu'elle ait un droit prioritaire quelconque.

M. LEGER: Ni plus ni moins, vous avez les mêmes revendications que la Communauté urbaine de Montréal. La seule nuance que je voyais, c'est que vous aviez quand même un certain droit en dehors du territoire, chose que la Communauté urbaine de Montréal n'avait pas.

M. STEIN: Oui.

M. LEGER: Vous semblez dire plus loin que vous craignez l'exploitation par l'entreprise privée des routes les plus rentables. A la page 1 de l'annexe C, vous dites: "... il est cependant possible que des entreprises rivales tentent de s'accaparer l'exploitation de certains parcours parmi les plus profitables du transport en commun régulier, ce que la loi devrait de toute façon interdire." Voulez-vous expliquer ce que cela veut dire? De quelle façon un autre organisme pourrait-il prendre les routes les plus rentables?

M. STEIN: Si vous voulez, je vais demander à M. Poisson de répondre à cette question.

M. POISSON: Il s'agit tout simplement d'un service local, par exemple, sous forme d'express ou de semi-express, qui pourrait être donné d'un point à l'autre à l'intérieur de notre territoire pour desservir des groupes précis de population. C'est ce que vise la phrase.

M. BLANK: ... un service...

M. POISSON: Non, pas du tout. Cela peut devenir un service régulier d'année en année.

M. BLANK: Oui, mais à un groupe fixe. M. POISSON: Pas nécessairement.

M. BLANK: Si ce n'est pas à un groupe fixe...

M. POISSON: Je dis que c'est une chose qui est possible.

M. BLANK: ... si on contourne la loi, c'est possible...

M. LEGER: Ma dernière question, c'est qu'à

la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, vous réclamez aussi cette priorité dans le transport à charte-partie et dans les transports spéciaux comme un besoin pour combler les déficits éventuels de la commission et vous donnez comme chiffre que cela touche à un revenu possible d'environ $340,000.

M. POISSON: Pour cette année, oui. Dans nos estimations, justement, à partir de l'expérience acquise des compagnies dont nous avons pris possession, nous arrivons à ce chiffre approximatif de $340,000 pour les deux services: charte-partie, voyages spéciaux et visites touristiques, ce qui représente environ 4 p. c. du budget global.

M. LEGER: Vous avez besoin de ces revenus pour diminuer le déficit possible de l'exploitation de votre service.

M. POISSON: C'est exact. Nous considérons justement que, dans le contexte d'une commission de transport, il est essentiel d'établir une politique globale de transport en commun dans son territoire parce que si nous partons des prémisses que c'est en définitive le contribuable qui a payé les entreprises acquises, y compris les droits — les franchises, en d'autres ternies — que ces compagnies exploitaient, il est juste que les revenus provenant de cette partie du capital public continuent de revenir au public pour augmenter les revenus de la Commission de transport. C'est le point de vue que nous exposons.

M. BLANK: Ces compagnies que vous avez achetées, vous avez payé pour...

M. POISSON: C'est cela.

M. BLANK: ... vous n'avez pris personne à la gorge, vous n'avez fermé les portes à personne pour rien. Vous avez payé pour...

M. POISSON: D'accord.

M. BLANK: ... et maintenant vous avez ces routes-là?

M. POISSON: C'est cela.

M. BLANK: Vous avez le droit, comme tout autre citoyen, d'aller devant la Régie des transports vous opposer à une nouvelle demande d'une autre personne pour les mêmes routes que vous avez.

M. POISSON: C'est sûr.

M. BLANK: Cela veut dire que si vous pouvez montrer à la Régie des transports que vous donnez un service assez bon, elle ne donnera pas un permis...

M. POISSON: Avez notre loi telle qu'elle existe, c'est juste.

M. BLANK: C'est cela, mais pourquoi est-il nécessaire d'avoir la priorité? Pourquoi n'avez-yous pas les mêmes droits que tous les autres citoyens?

M. LEGER: Oui, ils les ont déjà eus.

M. BLANK: Oui, ils ont des droits acquis, mais ils peuvent dire à la Régie des transports: "Nous avons des droits acquis pour tel et tel territoire ou pour telle ou telle chose; nous n'avons pas besoin des autres, ce n'est pas rentable si on donne un autre permis. Cela veut dire qu'ils auront les mêmes droits que n'importe quel citoyen.

M. LEGER: Il y a deux points différents.

M. BLANK: Il n'est pas nécessaire d'avoir de priorité.

M. LEGER: Il y a deux points différents. Il y a le niveau du transport en commun et le niveau des services à charte-partie et spéciaux.

M. BLANK: Je suis d'accord pour le service en commun. C'est un service public et ce doit être une compagnie publique, pas une entreprise privée... Mais quand on arrive aux chartes-parties, s'il y a des compagnies privées qui sont dans ce domaine, comme on l'a suggéré à la Commission de transport de Montréal l'autre jour, on dit: Si vous voulez cette compagnie, payez. On ne peut pas prendre ses droits sans payer.

C'est ça qu'ils ont fait. Maintenant ils sont dans ces affaires-là, s'il y en a d'autres qui veulent entrer dans leur affaire, dans le même service, dans le même district, il peut s'opposer à la régie. C'est certain que la régie n'accordera pas un nouveau permis pour détruire les affaires de la commission.

M. LEGER: Est-ce que M. le président de la Commission de transport de Québec peut me dire quelle est la portion — si vous avez des chiffres là-dessus — du service touristique et des voyages à charte-partie ou spéciaux que la Commission de transport de Québec détient comparativement à l'ensemble de tous les services touristiques de la ville?

M. POISSON: Justement, nous avons commencé l'étude de cette question-là, M. le député, mais, depuis 1967, il y a eu 32 permis accordés par la Régie des transports à de petits transporteurs, propriétaires de minibus. Nous n'avons malheureusement pas encore en main les documents pour établir les proportions exactes. Mais c'est à notre programme de le faire au cours des prochaines semaines ou des

prochains mois. Malheureusement, je ne peux pas répondre à votre question aujourd'hui même.

M. LEGER: Est-ce que vous pourriez affirmer, M. Poisson, que le service de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec est mieux ou aussi bien équipé que l'entreprise privée? Indépendamment des considérations financières qu'on donnait tantôt, soit le besoin de revenus additionnels pour éviter des déficits aux contribuables, est-ce que, d'après vous, vous êtes aussi bien équipés et que ça devrait revenir en priorité à l'institution publique?

M. POISSON: C'est justement ce que nous prétendons. Il faut d'abord prendre pour acquis que nous avons, en acquérant Québec Autobus, pris possession du meilleur équipement de visite touristique qui existe dans la région. Dès le départ, nous sommes dans une situation privilégiée à ce point de vue. Ces droits acquis ont une valeur relative importante dans ce qu'on appelle le système de visite touristique. Nous y tenons d'autant plus que nous sommes...

M. BLANK: Avez-vous des minibus aussi?

M. POISSON: Pas dans le moment, ce qui ne veut pas dire que nous n'en aurons pas.

M. LEGER: Merci, M. Poisson.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. STEIN: M. le Président, je voulais simplement ajouter quelque chose en réponse à M. Blank, par votre entremise, au sujet des droits prioritaires. En pratique, quelle que soit l'interprétation juridique, je me rappelle la discussion que vous avez eue hier avec mon confrère, ça n'est appliqué qu'aux nouveaux permis. On ne dérange aucun droit acquis. Ce n'est pas nécessairement tout de suite, mais je voudrais ajouter deux mots tout à l'heure sur une question de rédaction. Je peux attendre, ça ne presse pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Stein ou M. Poisson, je pense que, dans le cas du mémoire qui est devant nous, il faudrait prendre le problème d'un peu plus haut dans une autre perspective qu'une perspective fragmentaire dans laquelle on a commencé l'étude de votre mémoire. Il ressort de votre mémoire et des annexes qui s'y trouvent que vous mettez en cause d'une certaine façon la philosophie générale de cette loi, en ce sens que vous considérez, et vous le dites au départ, que le législateur a, par la création de communautés urbaines et de commissions de transport desdites communautés urbaines, établi en principe et en fait l'existence d'un système de transport en commun dans les agglomérations urbaines. C'est le point de départ de votre démarche au moment où vous vous présentez devant nous pour critiquer le projet de loi ou nous faire des suggestions d'amendements.

Il y a donc ce fait bien clair, bien net, c'est que le législateur s'est déjà prononcé, que l'Assemblée nationale a voté les projets de loi qui ont créé des communautés urbaines et qui ont constitué des commissions de transport dans les agglomérations urbaines.

Or, par l'article 126 du projet de loi qui fait l'objet de l'étude de cette commission, ces pouvoirs qui vous avaient été impartis sont remis en cause. Ce qui, évidemment, change complètement l'économie générale des lois qui régissent ces communautés et ont des incidences extrêmement importantes sur le présent projet de loi puisqu'on s'apprêterait, par l'article 126, en fait, à fragmenter l'autorité ou des droits que vous possédez déjà en vertu d'un acte législatif.

Donc, la base de votre plaidoyer est la suivante: c'est que vous voudriez que le gouvernement, à tout le moins, respecte les droits que l'on vous a déjà reconnus.

Je ne sais pas si j'ai bien compris le point de départ de votre mémoire, M. Stein.

M. STEIN: C'est bien ça, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est, d'ailleurs, un reproche que j'avais fait au ministre lorsque nous avons commencé l'étude de ce projet de loi. Je le lui rappelle amicalement parce que je sais qu'il s'est penché sur la question et qu'il va la revoir.

Maintenant, à cet égard, je suis d'accord avec vous, le gouvernement a considéré que, dans des régions données à forte densité de population, il était devenu nécessaire de créer des organismes qui s'occupassent du transport en commun.

L'article 126 vise, en fait, à vous priver ou éventuellement pourra vous priver d'un ensemble de droits ou de privilèges qui vous avaient été reconnus par la loi. Ce qui chambarde complètement l'organisation que vous avez mise sur pied et que vous poursuivez d'ailleurs en vue d'établir ces services en commun que l'Etat vous a non seulement donné le pouvoir de créer mais que l'Etat vous a obligés à donner aux citoyens.

Alors, partant de là, c'est le principe même de la loi, l'économie générale du projet de loi 23 que vous remettez en cause. Le législateur s'étant prononcé une fois, il vous apparaît qu'il se dédit maintenant. C'est bien ça, M. Stein?

M. STEIN: Je n'ai qu'une objection, c'est que je crains que la prochaine fois la commission de Transports ne retienne les services de Me Tremblay comme avocat.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci. Je ne chargerai pas cher.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne vaudra pas cher non plus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. Stein, il reste que nous avons entendu l'autre jour des représentants de la Communauté urbaine de Montréal, nous entendrons des représentants d'autres commissions de transport, — lorsque je dis communauté urbaine je confonds, je parle toujours de la Commission de transport de la communauté, urbaine de... — Alors, nous avons entendu l'autre jour Me Raymond nous exposer des problèmes à peu près identiques à ceux que vous venez de nous exposer.

Vous avez parlé tout à l'heure des voyages spéciaux, charte-partie, etc. Nous avons longuement interrogé l'autre jour Me Raymond à ce sujet-là de même que les transporteurs d'écoliers et les gens qui font du transport, enfin, qui organisent des voyages touristiques.

En ce qui concerne le transport écolier, Me Stein ou M. Poisson, le cas échéant, quelle est exactement la situation à Québec, c'est-à-dire dans le territoire qui est soumis à l'activité de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec?

M. POISSON: La question que vous nous posez est assez vaste, mais pour résumer le plus brièvement possible, partons des services que nous donnons déjà. Cette année, nous allons renouveler des laissez-passer à environ 20,000 écoliers qui pourront utiliser, au taux préférentiel des écoliers de $0.12 1/2, nos moyens de transport réguliers. Nous allons également recevoir dans nos autobus un certain nombre d'écoliers à des conditions un peu différentes parce que nous n'avons pu, à cause des circonstances, aller plus loin encore dans le domaine du transport des écoliers.

Dans le domaine du transport des écoliers subventionné, nous n'y sommes pas encore entrés. Le transport de 47,500 écoliers environ dans la région de Québec est actuellement effectué par des entreprises privées différentes et ça représente une somme totale qui dépasse $4 millions. Cela couvre les quatre commissions scolaires régionales qui touchent à notre territoire. Cela comprend une partie seulement sur la rive sud de la régionale de Tilly. Cela ne comprend pas du tout la rive sud du côté est.

Sur le territoire même de la Commission de transport, il doit y avoir environ de 26,000 à 29,000 écoliers transportés aussi par les mêmes moyens, les mêmes transporteurs, à un coût approximatif de $3 millions, et à un taux moyen par écolier par année d'un petit peu plus que $100.

Nous, la Commission de transport, — d'ailleurs ce n'est pas une idée nouvelle, c'est une idée qui remonte même à l'étude des projets de loi, à l'étude que le comité Lacasse avait entreprise en 1968 — nous préconisons une politique globale de transport qui englobe précisément le transport des écoliers, afin d'as- surer à la Commission de transport tous les revenus provenant du transport en commun et, sur le plan financier, l'application d'une telle politique nous permet ensuite de dire aux contribuables que l'entreprise — il faut prendre pour acquise au départ cette chose-là — étant normalement administrée, nous avons bénéficié, avant de vous taxer pour combler nos déficits, de tous les moyens possibles du transport de la région.

Et pour y arriver concrètement, nous préconisons la subdivision en quatre catégories distinctes des écoliers dont le transport est subventionné par l'Etat. La première catégorie serait constituée d'environ un tiers, d'après une étude préliminaire que nous avons faite, des enfants qui pourraient utiliser nos véhicules réguliers sur leur parcours régulier, quitte au besoin, à la commission, à ajouter quelques véhicules additionnels pour répondre à la demande accrue.

Une autre proportion que nous n'avons pas encore pu établir exactement, mais qui est quand même sûrement assez considérable, serait constituée d'écoliers qui utiliseraient nos véhicules réguliers dans des parcours légèrement différents des parcours réguliers. Et on peut combiner à ce moment-là ce que l'on appelle les services additionnels avec ce genre de parcours particulier pour des écoliers.

Et enfin, la troisième catégorie utiliserait des autobus jaunes comme ça se fait actuellement, parce que nos services réguliers ordinaires ne pourraient pas répondre à leurs besoins.

Du point de vue économique, les enfants qui utiliseraient nos services réguliers au taux d'écolier de $0.12 1/2, c'est-à-dire $0.25 par jour aller et retour — je parle uniquement de la partie subventionnée — pourraient donc durant toute l'année se rendre à l'école et en revenir pour une somme de moins de $50.

L'autre proportion, qu'on pourrait, à première vue, estimer sûrement à 15 p. c. ou 20 p. c, utiliserait un service légèrement plus coûteux, et enfin, la troisième partie, les autobus jaunes, à un coût qu'on peut espérer comparable à celui qui est actuellement utilisé.

Avec le résultat que, comme politique globale, le transport d'écoliers, nous sommes convaincus de pouvoir l'offrir à un coût moyen qui ne sera pas supérieur à celui que les transporteurs privés sont obligés d'exiger en ce moment.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Poisson, sur ce sujet des coûts, vous nous dites qu'à l'heure actuelle le coût moyen annuel par élève serait de $100 lorsque le transport est effectué par l'entreprise privée.

M. POISSON: C'est juste.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): S'il advenait que la Commission des transports de Québec exploite ce service, vous pourriez réduire le coût à environ $50 annuellement par élève.

M. POISSON: Il y a une précision là-dessus. Pas le coût moyen, le coût de ceux qui utiliseraient...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ceux qui utiliseraient vos véhicules.

M. POISSON: ...nos véhicules réguliers, c'est-à-dire que nous aurions...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans les catégories que vous avez indiquées.

M. POISSON: C'est cela. Nous aurions un coût moyen constiuté de trois éléments différents, c'est-à-dire un pourcentage, au plus bas coût, qui ne dépasserait pas $50; un autre pourcentage — nous l'établissons approximativement au tiers, ce premier pourcentage — qui peut peut-être varier entre 15 p.c. et 20 p.c, à première vue, — sur celui-là il nous faudrait des précisions additionnelles avant de pouvoir donner un chiffre plus exact; à cause du fait que celui-là sortirait un peu des parcours réguliers, il coûterait légèrement plus cher — et le troisième qui continuerait d'utiliser les véhicules spéciaux, les autobus jaunes comme il y en a maintenant et qui serait évidemment supérieur.

Nous savons que le coût moyen de tous les élèves transportés, en tenant compte des trois catégories, ne dépasserait sûrement pas et serait peut-être même inférieur au coût actuel pour les enfants qui ne voyagent que dans des autobus jaunes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Poisson, pour établir ces services-là, il y a l'utilisation des services réguliers actuels, l'utilisation de véhicules de transport en commun assignés à des services spéciaux ou à des parcours légèrement différents. Est-ce qu'il serait nécessaire, à la Commission de transport de Québec, de se porter acquéreur d'un plus grand nombre de véhicules ou si vous disposez présentement d'un nombre de véhicules suffisant, à quelques unités près, si vous voulez?

M. POISSON: Dans la situation actuelle, je ne suis pas en mesure de vous donner une réponse catégorique parce que, comme vous le savez, nous sommes en voie d'acquérir les entreprises et notre tâche d'acquisition et d'intégration de nos services réguliers n'est pas encore terminée. Il semble que, pour les deux premières catégories d'élèves, il y aurait moyen de répondre à la demande avec un très petit nombre additionnel de véhicules. Par contre, dans le domaine des autobus jaunes, il faudrait évidemment soit acquérir ceux qui sont actuellement la propriété des transporteurs privés ou d'autres pour répondre à cette partie des besoins parce que, dans le moment, nous n'aurions pas l'équipement pour cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il vous est possible de nous dire combien il y a de véhicules, que vous appelez les autobus jaunes, qui sont exploités par l'entreprise privée actuellement dans le territoire de la Commission de transport de Québec?

M. POISSON: Je pourrais vous donner un chiffre approximatif; il doit se situer aux environs de 350 véhicules dans le territoire même. Dans la région avoisinante, il y en a davantage et le chiffre, très probablement, doit dépasser sensiblement 400 véhicules.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans l'hypothèse où vous vous porteriez acquéreur d'un certain nombre de ces véhicules, de ces autobus jaunes, il s'agirait évidemment d'une immobilisation. En fonction des coûts que vous indiquiez tout à l'heure, quelle pourrait être la fluctuation du coût dans le sens d'une hausse plutôt que d'une diminution du coût?

M. POISSON: Voici, il y a le côté de capitalisation. C'est le point que vous soulevez, n'est-ce pas? C'est inclus dans les frais d'exploitation ordinaires de l'entreprise de la Commission de transport comme de n'importe quelle autre entreprise.

Nous avons déjà fait des travaux assez considérables sur ce point-là et, justement, l'immobilisation de l'équipement ne représente pas le facteur majeur dans l'entreprise. C'est plutôt la rémunération des employés qui constitue le facteur majeur. Il se situe, en général, dans les commissions de transport, entre 60 p.c. et 70 p.c. du budget des dépenses. Alors, la partie de capitalisation pour la charte d'autobus jaunes à un prix normal ne constituerait nullement, à notre sens, un empêchement pour nous d'arriver à des conditions acceptables.

M. TREMBLAY ( Chicoutimi ): Maintenant, M. Poisson, dans votre mémoire, au chapitre du transport d'écoliers, vous dites: "Sous cette rubrique, nous ne demandons que le maintien des dispositions actuelles qui nous régissent dans ce secteur du transport en commun, plus particulièrement de la priorité que nous accorde le paragraphe 3 de l'article 251 de la Loi de la CUQ et que, selon nous, le projet laisse intacte. "Un point qu'il nous paraît opportun de souligner au départ, c'est que le transport en question des écoliers, comme celui des touristes, constitue sans aucun doute du transport en commun, au moins au sens de la définition législative que nous venons de citer."

Quelles sont, si je puis m'exprimer ainsi, vos intentions en ce qui concerne le transport d'écoliers sur le territoire de la Commission de transport de Québec? Qu'est-ce que vous pourriez prendre actuellement, au détriment — appelons cela ainsi — des transporteurs privés et qui ferait partie, selon vous, de ce à quoi vous avez droit en vertu de la loi qui vous régit?

M. POISSON: Voici, cette année, par exemple, nous aurions pu, si les circonstances nous avaient été légèrement plus favorables, entreprendre, pour le mois de septembre qui commence, le transport d'un nombre suffisant d'élèves — je m'excuse de ne pas avoir le chiffre en mémoire — pour utiliser l'équivalent d'une centaine d'autobus jaunes. Il s'agissait en l'occurrence des contrats de transport qui devenaient échus à la fin de la dernière année scolaire, c'est-à-dire en juin dernier. Nous avions, d'ailleurs, pris les dispositions nécessaires pour, si les circonstances le permettaient, être prêts à le faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Poisson, est-ce que vous êtes au courant de l'attitude de la Commission des écoles catholiques de Québec au sujet du transport des écoliers?

M. POISSON: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce qui se passe dans ce domaine-là par rapport à votre commission?

M. POISSON: Dans le cas de la Commission des écoles catholiques de Québec, les subventions gouvernementales, pour les élèves qui sont situés à plus d'un mille de l'école, ne s'appliquent pas actuellement. Nous transportons les écoliers de la Commission des écoles catholiques; je crois que nous allons émettre environ 6,000 laissez-passer pour eux. Ce sont les parents qui paient le transport au taux régulier.

Il est question, actuellement, que ce transport puisse être subventionné par le ministère de l'Education, mais la décision, évidemment, ne relève pas de nous. Je ne sais pas ce qu'elle sera. De toute façon, nous avons déjà une proposition qui a été soumise, à la demande de la commission scolaire, d'ailleurs, pour le transport de ces élèves dans nos véhicules réguliers. La réponse n'est pas venue encore.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, je change un peu de sujet, si vous voulez, mais c'est une façon de faire un détour. Vous vous êtes, assez récemment, portés acquéreurs d'entreprises de transport. Qu'en est-il du sort des personnes qui étaient à l'emploi de ces entreprises de transport?

M. POISSON: L'article 228 de notre loi, au dernier paragraphe, je crois, nous impose l'obligation de respecter l'article 36 du code du travail, ce que nous avons fait.

Nous l'aurions fait peut-être différemment, mais nous n'avons jamais eu l'intention de renvoyer les employés des compagnies que nous avons acquises. En résumé, dans le cas de Québec Autobus qui avait une semaine normale de 40 heures de travail, le problème ne s'est pratiquement pas posé. Dans le cas des trois autres entreprises que nous avons acquises, les heures de travail étaient beaucoup plus longues et dans un cas, je crois que ça se chiffrait jusqu'à 48 heures comme semaine de base.

Alors, pour réduire aux normes de la convention collective que nous venons de signer avec tous les employés des compagnies acquises, nous avons dû évidemment non seulement garder les employés déjà à l'emploi de ces entreprises, mais en engager quelques-uns de plus à cause justement de ce décalage d'heures. Alors, il n'y a pas eu de problème d'emploi, au contraire, nous en avons créé.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il en sera de même si vous vous portiez acquéreur d'un certain nombre de véhicules qui font du transport d'écoliers par le truchement de l'entreprise privée.

M. POISSON: La situation est un peu différente dans le domaine du transport des écoliers à cet égard. Il y a très peu d'employés à temps plein dans les entreprises privées de transport des écoliers, du moins dans la région de Québec. Alors nous serions sûrement en mesure de garder à notre emploi les quelques chauffeurs surtout et quelques mécaniciens qui sont là à temps plein. Nous devrions également engager un nombre considérable de chauffeurs à temps partiel. Il est difficile de déterminer le nombre exact, mais justement les chauffeurs à temps partiel qui sont dans les entreprises actuelles ont déjà d'autres emplois principaux pour gagner leur vie. Et même si dans ce secteur il nous arrivait de ne pas être en mesure d'engager tout le monde, les dommages seraient très minimes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Poisson, en ce qui concerne les voyages touristiques, les tours de ville, etc, quels sont les services que votre commission met à la disposition des citoyens?

M. POISSON: En fait, actuellement, nous avons limité notre activité dans ce domaine aux mêmes services que la compagnie Québec Autobus fournissait déjà à sa clientèle. Nous faisons des visites de villes, nous avons la visite de Québec même, la visite de ce que nous appelons la région métropolitaine, une visite de l'île d'Orléans et une visite à Sainte-Anne-de-Beaupré. C'est la base de nos services touristiques actuellement.

Mais justement, comme nous ne faisons que notre première saison dans ce domaine, il ne nous a pas encore été possible, sauf dans le cas de l'île d'Orléans qui est un cas particulier, de modifier ce qui existait déjà antérieurement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous le faites avec des véhicules ordinaires?

M. POISSON: Actuellement, oui, parce que nous n'en avons pas d'autres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, est-ce votre intention d'équiper la Commission des transports de minibus pour les visites touristiques dont les itinéraires seraient plus précis ou plus spécialisés?

M. POISSON: C'est une possibilité que nous envisageons, mais là-dessus nous n'avons pris aucune décision encore. Nous préférerions plutôt nous équiper de véhicules plus considérables, mais plus spécialement aménagés pour les visites touristiques d'abord, quitte à compléter ce service de base éventuellement par des services de minibus. Mais sur la question des minibus, nous ne sommes pas très avancés encore. D'ailleurs quant à l'ensemble du tourisme, nous commençons à peine vraiment à étudier à fond la question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Poisson, vous savez comme moi qu'il existe à Québec et dans la région métropolitaine un ensemble de services de cette nature. Il y a des minibus qui font faire des tours de ville, qui vont même à l'extérieur de Québec. Est-ce qu'en vertu des pouvoirs que vous détenez déjà il est dans l'intention de la Commission des transports de la communauté urbaine de Québec de s'équiper de façon telle que cela mette en péril les entreprises qui existent déjà ne leur laissant, par exemple, que des parcours plus au moins intéressants du point de vue de la rentabilité.

M. POISSON: La question est à l'étude actuellement. Nous avons justement, dernièrement, eu l'occasion, malheureusement, de refuser certaines émissions de nouveaux permis en attendant que nous ayons eu le temps d'étudier notre problème plus à fond. Je crois que, quelque part dans le mémoire, nous mentionnons, incidemment, que nous ne croyons pas pouvoir arriver à des conclusions finales satisfaisantes avant la fin de 1972. Avant cela, je l'espère, nous pourrons établir une politique définie, mais, dans le cas où nous jugerions d'intérêt commun d'augmenter nos services touristiques aux dépens des petites entreprises dont vous parlez, nous n'hésiterions pas à les acquérir à des conditions qui seraient satisfaisantes pour les propriétaires actuels, comme nous le faisons dans le cas du transport en commun.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a eu des négociations à ce sujet? Est-ce que vous avez fait des démarches auprès de ces entreprises? Est-ce que vous leur avez laissé entendre qu'éventuellement elles pourraient être expropriées par votre commission?

M. POISSON: Dans des cas particuliers, oui, mais nous n'avons pas eu de contacts généralisés avec les petits entrepreneurs à ce sujet.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ces transpor- teurs qui font des visites touristiques à l'heure actuelle au moyen de minibus ont-ils des permis temporaires ou des permis permanents?

M. POISSON: Je crois que la plupart ont des permis permanents renouvelables, comme les entrepreneurs d'autres formes de transport, d'ailleurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et vous vous êtes opposés, avez-vous dit, tout à l'heure, à ce que certains permis nouveaux soient accordés cette année?

M. POISSON: Des permis nouveaux et aussi l'extension de permis existants.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Extension, cela veut dire sur des itinéraires plus longs?

M. POISSON: C'est cela. Ou le service à des endroits qui ne sont pas actuellement desservis par eux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah bon! Et vous vous êtes opposés à cela sans, pour autant, donner des services vous-mêmes?

M. POISSON: Oui, nous les donnons, mais, au lieu de les donner avec de petits autobus, nous les donnons avec de gros autobus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous occupez la place en vertu de la loi qui vous autorise à le faire.

M. POISSON: D'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, je reviens au transport d'écoliers, M. Poisson. Il y a quelques jours, la Fédération des commissions scolaires a demandé à la commission parlementaire — et, évidemment, via la commission, au ministre — de déléguer un représentant qui serait partie, je ne dirais pas à la direction, mais tout au moins à la surveillance du transport d'écoliers. Est-ce que vous consentiriez à ce que des représentants des commissions scolaires aient partie liée avec la Commission des transports pour l'organisation du transport d'écoliers?

M. POISSON: Je vous avoue que je n'ai pas très bien compris la portée de cette recommandation. Dans la mesure où il s'agit de discuter autour d'une table avec des représentants des commissions scolaires auxquelles nous avons l'intention d'offrir nos services, il n'y a jamais eu de problème. Nous les avons rencontrés à plusieurs reprises déjà dans le passé. Mais s'il s'agissait de nommer un mandataire qui obligerait automatiquement, de sa propre autorité, l'ensemble des commissions scolaires avec lesquelles nous aurions à traiter, je pense que nous nous y opposerions fermement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si j'ai bien compris, l'autre jour, le représentant de la Fédération des commissions scolaires — et on me corrigera en lisant les procès-verbaux de cette commission — parlait de la consécration du principe de participation à l'organisation dudit transport des écoliers. Est-ce que vous accepteriez ce principe?

M. POISSON: Nous l'avons déjà accepté de fait parce que nous transigeons justement avec les directeurs de transport des commissions scolaires. Sur ce plan, il n'y a pas de difficultés. Là où la difficulté pourrait surgir c'est au moment où un mandataire unique lierait par ses décisions un ensemble de parties dont les besoins peuvent être tout à fait différents les uns des autres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Poisson, toujours au sujet du transport des écoliers, on nous a fait des représentations en nous disant que les écoliers ne doivent pas voyager dans les mêmes véhicules que les adultes, il y a là danger physique, moral, etc. Quelle est votre opinion?

M. POISSON: Nous l'exprimons dans le texte que vous avez devant vous. Je qualifie cette opinion de mythe — le mot n'est pas trop fort — parce que d'abord nous partons du fait suivant: cette année, sans même que nous ayons eu à entrer d'emblée dans le transport scolaire subventionné, nous allons émettre une vingtaine de mille laissez-passer pour des écoliers qui vont voyager dans nos véhicules en compagnie des adultes.

Deuxièmement, parmi les gens qui s'opposent à ce qu'ils appellent la promiscuité entre les adultes et les écoliers, il y a entre autres ceux qui demandent précisément à la Commission de transport, à nous, d'émettre ces laissez-passer pour permettre aux écoliers de voyager dans nos véhicules avec les adultes en dehors de l'heure d'entrée ou de sortie de l'école. Donc, pour eux, c'est dangereux pour un écolier de voyager avec des adultes à l'heure d'entrée et de sortie de la classe, mais c'est à recommander en dehors de ces heures-là. Cela me parait tout à fait exorbitant comme affirmation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La seule chose qu'on pourrait retenir de ces arguments, M. Poisson, ce serait peut-être le fait qu'il faille tenir compte de certaines catégories d'écoliers, par exemple, les tout jeunes enfants...

M. POISSON: D'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qui fréquentent les maternelles, les enfants handicapés, etc.

M. POISSON: Là-dessus, tout le monde est d'accord. Je pense qu'il n'y a pas de problème.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne considérez pas cet argument comme sérieux?

M. POISSON: Pas du tout.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si on vous disait, comme nous l'avons entendu en Chambre, que de faire voyager quatre enfants sur la même banquette ce n'est pas moral, vous trouveriez cela un peu ridicule?

M. POISSON: Cela va de soi. Ah! Ah! Ah!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Poisson, pour l'instant, je vous remercie. J'y reviendrai peut-être.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: Vous avez dit tout à l'heure, M. Poisson, que la Commission de transport était nettement prête à absorber le transport des écoliers et que vous aviez les instruments nécessaires pour effectuer ce service. Quel avantage précis voyez-vous pour la population de faire transporter des écoliers par la Commission de transport plutôt que par les transporteurs actuels?

M. POISSON: Tout le problème vient du fait que ce sont les contribuables qui paient actuellement pour des services parallèles qui se font concurrence. Si une commission publique est en mesure d'assurer un service à un coût comparable, il y a une foule de dépenses et de dédoublements qu'on élimine. Les économies dans ce domaine-là ne peuvent se réaliser que si on fait un transport sur une échelle assez vaste. En définitive, cela va soulager le contribuable d'autant. Si, par exemple, nos services administratifs peuvent absorber des services additionnels sans entraîner des dépenses comparatives, si vous voulez, si on ménageait, par exemple — cela a été le calcul que nous avons fait dans un cas bien précis, le cas que je signalais tout à l'heure — 20 p.c, qui est la partie de nos coûts administratifs, si 20 p.c. de ce coût est économisé parce qu'on intègre les services, tant mieux pour tout le monde.

Dans la mesure où on peut répondre aux besoins des écoles, ce ne peut être, à mon point de vue, qu'une chose favorable à encourager. Je ne sais pas si je réponds à votre question d'une façon satisfaisante.

M. AUDET: A ce que je peux voir, c'est du point de vue de l'économie qui sont les avantages.

M. POISSON: C'est ça.

M. AUDET: Maintenant, vous disiez tout à l'heure que vous aviez trois catégories de

normes, que le premier tiers se transporterait probablement pour $50.

M. POISSON: C'est-à-dire que ceux qui seraient dans les véhicules réguliers voyageraient pour nous au taux régulier.

M. AUDET: Et une autre partie avec vos véhicules réguliers, additionnés peut-être...

M. POISSON: Un coût additionnel, un coût un peu supérieur.

M. AUDET: Mais le troisième, vous n'avez pas mentionné exactement quel coût supérieur. Cela dépasserait peut-être les $100 actuels.

M. POISSON: C'est possible. C'est sur le coût moyen qu'il y a possibilité de réaliser une économie d'échelle. C'est pour ça qu'on ne peut pas travailler sur un tout petit nombre, dans ce domaine.

M. AUDET: Mais dans ce troisième secteur, s'il dépassait passablement les $100 actuels, si ce n'est pas défini, peut-être englobera-t-il l'économie que vous prévoyez.

M. POISSON: Si on part du principe — et nous croyons, d'après les chiffres préliminaires que nous avons faits, que c'est non seulement réalisable mais à peu près sûr déjà — que même si le coût de la main-d'oeuvre était légèrement plus élevé dans la partie du transport spécial d'autobus jaune, il serait largement compensé par les économies qu'on réalise dans l'autre partie. C'est pour ça que nous préconisons l'intégration pour arriver à un coût qui ne nous parait pas devoir être supérieur, bien au contraire, à ce que ça peut être maintenant.

M. AUDET: Merci.

M. POISSON: On pourra fournir des chiffres plus précis dans peu de temps, je ne peux pas vous dire exactement quand, nos études sont en cours. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas été déçus par les résultats de nos travaux.

M. AUDET: Ce serait certainement intéressant d'avoir ces chiffres-là avant de prendre la décision d'abolir le transport par les transporteurs actuels.

M. POISSON: Vous pouvez être certains d'une chose, c'est que nous ne le ferions pas nous-mêmes dans des conditions différentes.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions à l'égard des représentants de la CTUQ?

M. STEIN : M. le Président, je voudrais seulement faire une observation au sujet d'une question de rédaction. Toujours à l'article 126 du projet et à l'article 251 de la Loi de la communauté urbaine de Québec, si, contrairement à nos demandes et représentations, le premier alinéa proposé de l'article 251 proposé à l'article 126 du projet était adopté, il faudrait au moins insérer le mot "ou" après le mot "spéciaux". Le premier alinéa en question se lit: "La Commission ou tout autre transporteur peut effectuer du transport pour l'accomplissement de voyages spéciaux à charte-partie..." Il faudrait dire: "ou à charte-partie." Il s'agit de deux modes différents, deux espèces différentes de transport en commun. Justement, à notre suggestion, l'Assemblée nationale a apporté cet amendement au texte actuel du paragraphe 1 de l'article 251 dans le bill 147 qui a été sanctionné le 29 juin dernier, à l'article 44 du bill 147.

A l'article 102 du bill 124, charte modifiant la charte de la ville de Laval, sanctionné le 30 juin, on trouve également: voyages spéciaux ou à charte-partie. L'autre point est au sujet du même alinéa. Dans la troisième ligne, on a: "... peut effectuer du transport pour l'accomplissement de voyages spéciaux à charte-partie." Je crois qu'on devrait dire effectuer du transport en commun par voyages spéciaux ou à charte-partie, et non pas: effectuer du transport pour l'accomplissement. On devrait effectuer du transport en commun par voyages spéciaux ou l'effectuer à charte-partie.

Je reprends tout ce que je viens de dire en suggérant tout simplement qu'on remplace les mots "pour l'accomplissement de voyages spéciaux à charte partie" par les mots "en commun par voyages spéciaux ou à charte partie". Pour le deuxième alinéa du paragraphe 1 en question, toujours à l'article 126 du projet, si on l'adoptait il faudrait, là encore, insérer le mot "ou" et dire dans le cas d'une entreprise de transport "par voyages spéciaux ou à charte partie".

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Stein, pour résumer vos propositions, en fait, l'objectif de votre mémoire, dans l'idéal, serait le suivant: que le projet de loi no 23 ne touche pas à l'article qui vous permet d'occuper le champ du transport en commun. L'idéal, si le ministre acceptait, ce serait qu'on supprime cet article 126 du projet de loi en ce qui concerne les commissions de transport, celle de Québec et les autres parce que toujours — et j'y reviens parce que c'est très important — cet article vient à toutes fins utiles abolir ce qui est fondamentalement la base des droits qui vous ont été reconnus lors de la création des communautés urbaines et des commissions de transport qui ont suivi la création desdites communautés.

Dans l'idéal, il ne faudrait pas que cet article 126 touche à quelque privilège ou à quelque droit que ce soit des commissions de transport.

M. STEIN: C'est bien ça, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, qu'est-ce que le ministre pourrait nous dire là-dessus?

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce que le ministre pourrait vous répondre, c'est que je ne vois pas comment nous pourrions avoir une Loi du transport du Québec sans avoir ces paragraphes, sans avoir l'article 251 et l'article 132, l'article de la ville de Montréal ou l'article de Hull qui deviennent ici un autre article dans le bill. J'ai cependant pris bonne note des représentations de ces deux messieurs, comme j'ai pris bonne note des représentations des gens de Montréal.

Maintenant, j'aurais une question à poser: Gombien le transport à charte-partie peut-il rapporter à la Commission de transport de Québec en revenu brut?

M. POISSON: Dans le moment, je pense que c'est une somme de $190,000. Les chiffres sont quelque part dans le mémoire ici. Pouvoirs spéciaux et charte-partie, $190,000; visites touristiques, $150,000; les deux ensemble, $340,000, actuellement, pour l'année en cours.

M. TREMBLAY (Bourassa): Une somme de $340,000.

M. POISSON: Les deux ensemble.

Tourisme et voyages spéciaux à charte-partie. Ce qui représente à peu près 4 p.c. du budget de la commission actuellement.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que ce montant est net ou brut?

M. POISSON: C'est brut.

M. TREMBLAY (Bourassa): Combien cela peut-il rapporter comme revenu net à la commission?

M. POISSON: Il faudrait que je fasse le calcul. Vous savez très bien, pour avoir été vous-même dans le transport...

M. TREMBLAY (Bourassa): Brièvement, là. Approximativement.

M. POISSON: J'aime mieux ne pas vous donner de chiffres. Ce qui arrive, c'est que lorsque, l'été, nous faisons des voyages touristiques, particulièrement, et à charte-partie, nous utilisons des véhicules qui ne seraient pas utilisés parce que la demande dans le transport en commun l'été est moins forte que durant les autres saisons, comme vous le savez. Le complément de $190,000 ou $340,000 qui est là représente donc, toutes proportions gardées, beaucoup plus qu'un revenu régulier du transport en commun parce que cela nous permet une optimisation de l'utilisation de nos véhicules.

J'aimerais mieux vous faire un calcul et vous transmettre les chiffres personnellement, si vous le permettez.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que par le transport à charte-partie et le transport touristique, ça vous porte l'hiver à avoir des autobus qui sont stationnés parce qu'ils n'ont pas de travail l'hiver ou si ces mêmes autobus ont du travail douze mois par année?

M. POISSON: Justement, ça nous permet parce qu'il s'en fait plus en été...

M. TREMBLAY (Bourassa): Le surplus de travail ne vous incommode pas, vous pouvez le remplir avec le même nombre d'autobus?

M. POISSON: En principe oui. Il est très rare que nous soyons obligés de recourir à l'extérieur pour remplir des contrats de ce genre-là, parce que l'été il s'en fait plus que durant les autres saisons, et c'est précisément l'été que nos véhicules de transport en commun sont le moins utilisés. C'est à ce moment-là qu'il nous reste souvent dans le garage, malgré les voyages à charte-partie et les visites touristiques, encore un petit nombre de véhicules qui ne sont pas utilisés, parce que la demande est moins forte.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si j'ai bien compris c'était Québec Transport?

M. POISSON: Québec Autobus.

M. TREMBLAY (Bourassa): Et vous en avez fait l'achat?

M. POISSON: C'est ça.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous ne vous en êtes pas emparé, vous en avez fait l'achat.

M. POISSON: Nous avons fait l'expropriation, effectivement.

Nous avons payé pour l'ensemble.

M. TREMBLAY (Bourassa): Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'aimerais poser une autre question au ministre là-dessus. Compte tenu des représentations qui nous ont été faites par la Communauté urbaine de Montréal, enfin la Commission de transport de Montréal et celle de Québec, quelles sont les raisons qui expliquent la présence de cet article 126 dans la loi? Le ministre ne se rend-il pas compte qu'il y a une sorte de contradiction ici dans la volonté d'un législateur qui a accordé des droits à des communautés urbaines pour créer des commissions de transport et que maintenant le législateur vient changer l'économie de ces lois en essayant de chapeauter tout cela et en se donnant des pouvoirs qui mettent en cause ceux que le législateur avait déjà reconnus à ces institutions crées par le gouvernement?

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour répondre à l'honorable député de Chicoutimi, je crois qu'il se rappelle au moment de l'adoption à la vapeur de ces trois bills, c'était la veille de Noël ou l'avant-veille de Noël, nous avons siégé une journée en commission. Nous avons eu le temps d'entendre les compagnies, les villes ou les communautés urbaines, tous les gens intéressés.

A ce moment-là, le bill 75 pour une politique globale de transport n'était pas complet. Si nous avons l'article 251, l'article 132, c'est pour que le ministère des Transports — ce n'est pas pour dicter des lignes de conduite — ait une politique globale de transport. On me dit ici: le 30 mars. Que ce soit le 30 avril au lieu du 30 mars, je ne dis pas que ce ne sont pas des choses auxquelles on ne peut pas remédier, mais pour avoir une politique globale de transport, si le député de Chicoutimi veut savoir dans telle région ce qui se passe, comment voulez-vous que le législateur réponde si ce n'est pas dans la loi?

C'est la même chose pour la Régie des transports à l'heure actuelle. Vous me poserez une question sur la Régie des transports, je ne peux pas vous répondre. C'est une régie. Je n'y sais rien. Ces gens-là sont plus au courant de ce qui se passe à la Régie des transports que moi qui suis le ministre qui en répond à la Chambre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est dommage.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce n'est pas dommage, c'est une loi qui est comme ça, c'est une loi qui...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est dommage et c'est surprenant.

M. TREMBLAY (Bourassa): Le ministre des Transports n'a aucune juridiction sur la Régie des transports.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre peut quand même se renseigner et s'informer. C'est le moins qu'on puisse lui demander.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si le ministre s'informe trop, on dit qu'il s'ingère dans les affaires des autres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non! le ministre a droit de regard en vertu de la loi. Il a droit de savoir ce qui se passe.

M. TREMBLAY (Bourassa): La Régie des transports donne ses permis, des permis temporaires, de n'importe quelle sorte, sans demander au ministre son avis. Le ministre n'est même pas au courant. Il apprend les augmentations de tarif par les journaux, comme tous les citoyens. C'est pour avoir une politique globale de transport, ce n'est pas pour arriver et dicter à telle communauté: Vous allez passer dans telle rue. C'est d'avoir des rapports et de savoir où on s'en va avec le transport, d'avoir une politique globale de transport.

Et je ne comprends pas le député de Chicoutimi, parce que le premier ministre de 1966 à 1968 préconisait cette politique du transport. Je sais bien que ç'a été accepté après, mais disons que celui du temps préconisait une politique globale de transport.

Je ne comprends pas le député de Chicoutimi. Que ce soit la ville de Montréal ou la ville de Saint-Hyacinthe, la question est de savoir de quelle façon le transport est fait.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre du temps — comme dirait le ministre actuel des Transports — le gouvernement du temps préparait aussi une politique globale, mais, dans cette politique globale, il eût certainement tenu compte de l'existence d'organismes qu'il avait lui-même créés. Or...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'ai jamais vu...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... le ministre actuel ne semble pas tenir compte de l'existence de ces organismes-là.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... de préparation à part les paroles du premier ministre du temps. Je n'ai jamais vu de préparation au ministère des Transports et je puis vous dire qu'on a fouillé dans tous les papiers.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'en suis d'autant plus sûr, M. le Président, que le ministre n'a probablement pas vu le texte de la loi ni celui qui fait les communautés urbaines parce qu'il y avait à l'époque...

M. TREMBLAY (Bourassa): Les communautés urbaines, je les ai suivies.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... au moment où ces lois ont été adoptées en Chambre...

M. TREMBLAY (Bourassa): Oui, je les ai suivies.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...l'absentéisme généralisé des députés libéraux que nous avons constaté lors de l'étude du projet de la baie James. Ce que vous ignorez, vous l'ignorez d'ignorance crasse.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je les ai suivies et je n'ai pas voté, à part cela. Est-ce assez pour vous? Je n'ai pas voté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'avez pas voté...

M. TREMBLAY (Bourassa): Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... parce que vous n'avez pas eu le courage d'être en Chambre pour dire non.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je trouvais que le gouvernement se cachait derrière des paravents.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M.TREMBLAY (Bourassa): C'était au gouvernement de prendre ses responsabilités.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous avez eu peur de prendre vos responsabilités, vous les avez données à d'autres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre sait très bien comment ont été conçus les projets des communautés urbaines, comment les gens ont eu le loisir de se faire entendre et comment l'Opposition avait le loisir de se faire entendre.

M. TREMBLAY (Bourassa): Une journée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous aviez le droit de convoquer la commission parlementaire des Transports si vous n'aviez pas été satisfait, mais il y avait un absentéisme généralisé à ce moment-là. C'est tout ce que je veux dire sur la question. Nous y reviendrons lors...

M.TREMBLAY (Bourassa): Vous avez adopté cela à onze heures et demie du soir, à part cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A onze heures et demie du soir...

M. TREMBLAY (Bourassa): A onze heures et demie du soir, à la vapeur.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... comme vous nous avez fait voter le projet de la baie James...

M. TREMBLAY (Bourassa): A la vapeur.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour enrichir vos amis politiques à cinq heures de la matinée.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pendant trois semaines.

M. BERTHIAUME: Pendant trois semaines.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pendant trois semaines.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Trois semaines de temps à cinq heures de la matinée.

M. BERTHIAUME: A partir de dix heures de la matinée jusqu'à cinq heures de la matinée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sous la dictée de M. Paul Desrochers.

M.TREMBLAY (Bourassa): Trois semaines de temps.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Revenons aux travaux de la commission.

M. LEGER: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: ...à la suite de l'intervention du ministre, qui posait des questions à M. Poisson, je voudrais demander à celui-ci de faire une comparaison avec les demandes de la Communauté urbaine de Montréal, qui disait que, si elle n'avait pas une priorité pour les services à charte-partie et spéciaux, elle avait des dépenses inhérentes quand même.

Autrement dit, si elle n'avait pas une possibilité de revenu par des services à charte-partie, il y avait des autobus qui étaient là quand même, du personnel payé quand même et elle avait des dépenses qu'elle n'a pas à charger au service de la charte-partie. Est-ce la même chose à la Communauté urbaine de Québec?

M. POISSON: En principe, c'est dans la même situation que nous allons nous trouver. Il y a une différence entre la commission de Montréal et la nôtre, c'est que la nôtre est en pleine voie d'organisation. Nous traversons une période qui ne sera sûrement pas stabilisée avant au moins la fin de 1972. La situation normale que la Commission de transport de Montréal décrivait dans ce domaine, si nous ne la vivons pas exactement maintenant, nous savons très bien que, les données du problème étant les mêmes, nous allons la vivre l'an prochain au plus tard.

Si nous avions un recul de trois, quatre ou cinq ans d'administration, nous serions déjà dans cette situation depuis un certain temps, mais parce que nous pouvons en été, comme je le disais tout à l'heure, utiliser des véhicules qui seraient autrement inutilisés, le revenu est d'autant plus important, relativement. Je ne sais pas si cela répond suffisamment bien à votre question.

M. LEGER: Oui. Vous allez vivre bientôt le même problème que la Communauté urbaine de Montréal vit actuellement.

M. POISSON: C'est cela.

M. LEGER: M. le ministre, tantôt vous disiez que dans le bill 75, qui était un amendement à la Loi de la Communauté urbaine de Montréal, dans le projet de la Commission de transport de la ville de Laval, pour la rive sud, de même que dans le projet de loi de la Communauté urbaine de Québec, dans ces quatre projets de commission de transport vous avez le même problème.

Vous avez affirmé, M. le ministre — je veux voir si vous êtes encore d'accord là-dessus — que les privilèges que vous donniez, à la fin de la dernière session qui a été ajournée, à ces commissions de transport sont annulés par le bill 23.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour avoir une politique globale des transports, il ne s'agit pas de faire des tracés à la ville de Montréal ou à la ville de Québec et de leur enlever ce qu'elles possèdent à l'heure actuelle. La Commission de transport de Québec a acheté quatre compagnies d'autobus. Elle fait le transport. Il y aurait peut-être lieu de se poser la question suivante si elle décidait de s'amener dans le transport scolaire: Est-ce qu'elle va acheter les compagnies de transport scolaire ou bien si elle va s'en emparer? Il y a là une différence. La différence, c'est mettre l'entreprise privée dans le chemin, disons, sans contrat, sans rien, sans qu'elle soit dédommagée et que les commissions achètent des autobus. J'ai même demandé à M. Poisson si, durant la saison touristique ou pour faire du transport à charte-partie, il était obligé d'avoir plus d'autobus et si ces autobus servaient l'hiver ou bien s'ils étaient stationnés tout l'hiver.

M. LEGER: Mais le ministre ne répond pas à ma question.

M. TREMBLAY (Bourassa): Alors, j'ai éclairci la question pas mal.

M. LEGER: Mais vous n'avez pas saisi ma question, M. le ministre. Je m'excuse, mais la question que je vous posais, c'est ceci: Vous donnez des droits ou des privilèges à des commissions de transport. Je vais en nommer quatre: Communauté urbaine de Montréal, Communauté urbaine de Québec, ville de Laval et la Commission de transport de la rive sud. Elles doivent planifier les services. Elles doivent savoir combien d'autobus elles doivent acquérir. Si vous leur enlevez, par l'article 126, cette priorité dans le transport à charte-partie ou à services spéciaux, cela dérange toute leur planification. Elles doivent tenir compte du fait qu'elles auront la priorité et doivent donner le service en conséquence, quitte, si elles ne peuvent pas le donner, à le laisser à l'entreprise privée.

Je pense bien qu'il n'a pas été question de ne pas dédommager les entreprises privées qui donnent un service et qui n'auraient peut-être pas le même nombre de contrats du fait que la Commission de transport se réserve le droit de le faire parce qu'elle a la priorité. Alors, ma question est la suivante: Vous avez donné des priorités à une commission de transport par le bill 75 et par les autres bills que vous avez adoptés et, maintenant, la Loi des transports, le bill 23, leur enlève ces droits-là. C'est là que je dis qu'il y a de l'incohérence: vous leur demandez de planifier leur administration en leur donnant des droits et, par la suite, le bill 23 leur enlève cette priorité.

M. TREMBLAY (Bourassa): On ne la leur enlève pas au complet. On demande, pour le transport à charte-partie, qu'elles obtiennent des permis de la Commission des transports. C'est la seule façon de planifier le transport au Québec.

M. LEGER: Un instant! Ce n'était pas comme ça avant.

M. TREMBLAY (Bourassa): Si le bill 75 ou le bill de l'Outaouais ou le bill de Québec ont été adoptés à la vapeur du temps de l'autre gouvernement, eh bien, les lois sont là pour être changées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. TREMBLAY (Bourassa): Les lois sont là pour être changées quand elles sont mal faites.

M. LEGER: Mais la ville de Laval, cela n'a pas été à l'autre session; c'était dernièrement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Revenons au bill 23, s'il vous plaît.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président. Je vais, comme vous le disiez ce matin, faire le point.

M. BLANK: Quel article?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tous les articles du règlement.

M. LEGER: Le ministre a déjà fait tout ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): En particulier, celui qui dit que personne ne doit imputer de motif à qui que ce soit et faire des affirmations fausses. Le ministre vient de déclarer que lesdites lois créant les communautés urbaines ont été adoptées à la vapeur. Où était le ministre à ce moment-là? En voyage!

M. TREMBLAY (Bourassa): Pas vrai! M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est faux!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous n'étiez même pas là !

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est faux! M. TREMBLAY (Chicoutimi): Absent!

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est faux! J'étais ici. J'étais à la commission. Vous parlez à travers votre chapeau. Si vous n'avez pas de chapeau, vous n'avez pas de tête, vous parlez à travers rien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous disiez quoi à la commission?

M. TREMBLAY (Bourassa): J'ai parlé à la commission et même...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans quelle langue?

M. TREMBLAY (Bourassa): ... avant la troisième lecture, j'ai fait un discours, à part ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans quelle langue?

M. TREMBLAY (Bourassa): J'étais le seul à faire un discours.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Revenons au bill 23.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce n'était pas la langue du député de Chicoutimi parce que personne ne le comprend.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non! C'est justement parce que le projet de loi est rédigé dans une excellente langue que le ministre ne le comprend pas.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est ça; vous ne comprenez rien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne voit pas qu'il détruit les pouvoirs donnés aux commissions des transports.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il y a seulement le député de Chicoutimi qui ne comprend pas.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Poisson, nous nous demandons un peu pourquoi vous exigeriez de la Commission des transports une forme de statut particulier pour la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec parce que vous pourriez de toute façon, autant que n'importe quel détenteur de permis de voyages à charte-partie, aller devant la Commission des transports et revendiquer vos droits ou expliquer de quelle façon vous pouvez donner le service, et la Commission des transports vous entendrait comme n'importe qui.

M. POISSON: Pourquoi remettrait-on en cause des droits que nous possédons déjà et pour lesquels nous avons payé? C'est ça notre point de vue. C'est ça le point de vue. Nous demandons une seule chose, c'est de garder les droits que nous possédons déjà et que nous avons acquis lorsque nous avons payé les entreprises acquises.

M. AUDET: Le fait que vous ayez payé ces entreprises ne veut pas nécessairement dire que d'autres les reprendront. Ce sera toujours laissé à la discrétion de la Commission des transports. Si, par exemple, votre service laissait à désirer, probablement que la Commission des transports pourrait émettre d'autres permis. Ne serait-ce pas justement un facteur qui serait de nature à apporter une saine concurrence vis-à-vis du service des transports?

M. POISSON: Jusqu'à maintenant, l'ordonnance 17 de la Régie des transports a accordé aux entreprises privées que nous avons acquises une protection dont nous jouissons encore nous-mêmes après les avoir acquises, et nous voudrions pouvoir compter sur cette même protection qui existait au moment où nous avons acquis ces droits. Cela résume la question.

M. BLANK: Je pense que vous avez la protection. La loi vous donne le privilège de continuer votre exploitation, et s'il y en a d'autres qui veulent vous empêcher, vous avez le droit d'aller à la Régie des transports pour vous opposer. Si vous avez raison, elle n'accordera pas d'autres permis.

M. STEIN: M. le Président, il semble y avoir un malentendu sur l'interprétation de l'article, je pensais l'avoir bien expliqué. L'article actuel me paraît clair, l'article 251, paragraphe 1 de notre loi donne clairement un droit prioritaire à la Commission de transport. La Régie des transports n'a pas le droit d'accorder des permis si la Commission de transport de la communauté urbaine s'y oppose, à moins qu'elle ne soit pas en mesure de donner le service. C'est la seule condition. C'est ça qu'on veut supprimer, ce droit prioritaire, ce droit de veto de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec. Cela, c'est clair, on l'enlève. On vient de le donner il y a moins de deux ans et on l'enlève.

M. BLANK: Pourquoi avez-vous besoin de cette priorité? Pourquoi avez-vous besoin de ce droit de veto? Pourquoi?

M. LEGER: Pour planifier tous leurs services, voyons!

M. BLANK: Pour quelle raison? Parce que si vous avez un très bon argument aujourd'hui pour demander cette priorité, vous avez le droit de plaider la même chose devant chaque cas à la Régie des transports quand une personne fait une demande de permis.

M. STEIN: Non, parce que là, c'est la régie qui décidera dans chaque cas. Là, le législateur a dit: Il importe de donner à cette entreprise municipalisée une priorité, un monopole, si vous voulez, mais restreint.

M. BLANK: Mais, M. Stein, ne pensez-vous pas que la Régie des transports est plus au courant des faits que le législateur dans les cas particuliers?

M. STEIN: Cela, je pourrais vous renvoyer la balle. La Législature vient de décider cela, c'est tout ce que j'ai dit.

M. BLANK: On a pris la copie et on a mis... C'est ça qui est arrivé.

M. LEGER: M. le Président, pour répondre au député de Saint-Louis, il y a deux raisons pour lesquelles le député de Saint-Louis...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une loi du gouvernement.

M. BLANK: Pas du gouvernement. Cela a été préparé par les avocats de la ville de Laval. C'est un bill privé, celui de Laval.

M. LEGER: Pour répondre au député de Saint-Louis, deux raisons pour lesquelles nous-mêmes nous appuyons le retrait de l'article 126 du projet de loi, premièrement, c'est pour permettre à un organisme public de planifier entièrement le service qu'il doit donner avec la quantité d'autobus et l'immobilisation qu'il doit mettre en ligne de compte. Deuxièmement, c'est aussi bien de le dire clairement, c'est pour éviter un patronage possible, parce qu'actuellement...

M, BLANK: Patronage possible par un tribunal qui n'est pas formé encore!

M. LEGER: ... la compagnie Murray Hill n'a jamais accepté cette priorité. Et présentement, du fait qu'on consacre, par l'article 126, la charte de la Communauté urbaine de Montréal, en permettant à tout autre transporteur de le faire, et comme la compagnie Murray Hill est en appel pour ne pas admettre cette priorité que la Commission de transport de Montréal avait, c'est pour lui donner à elle un privilège qu'il pourrait avoir. Et c'est pour arrêter ce patronage-là que nous votons contre cet article.

M. BLANK: Une minute. Ce qui est devant le tribunal n'a rien à faire avec ce bill. Quand le bill sera adopté, la nouvelle loi commencera à être en vigueur.

Selon l'ancienne loi, Murray Hill peut gagner ou peut perdre, c'est la cour qui va décider. Ce n'est pas rétroactif, cette chose-là. Cela vient quand le bill est sanctionné, si c'est sanctionné dans les termes suggérés aujourd'hui. On ne sait pas ce que la Législature va décider en haut.

M. LEGER: M. le Président, si la compagnie Murray Hill gagne son point, elle doit admettre qu'elle a une priorité que Montréal n'a pas.

M. BLANK: Non, elle est sur un pied d'égalité avec tout le monde.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Nous ne sommes pas ici pour défendre la cause de Murray Hill.

M. LEGER: Non, mais le bill 23 défend actuellement, tel quel, la cause de Murray Hill.

M. BLANK: Que pensez-vous de toutes les autres entreprises privées dans la province? Peut-être y en a-t-il deux cents. Pourquoi ne parle-t-on pas de celles-là? Pourquoi seulement de Murray Hill? Parce que Murray Hill est allé en cour?

M. LEGER: Parce que Murray Hill n'a jamais accepté le principe de...

M. BLANK: Elle a le droit d'aller en cour pour avoir une interprétation, comme n'importe quel autre citoyen!

M. LEGER: D'accord.

M. BLANK: C'est ce qu'elle a fait.

M. LEGER: D'accord, mais la conséquence de cela, par exemple...

M. BLANK: Si elle gagne sa cause...

M. LEGER: ...que Murray Hill gagne sa cause, c'est la Commission de transport de Montréal qui n'a pas la priorité.

M. BLANK: Alors ce serait du patronage au tribunal aussi — c'est ce qu'on dirait — si elle gagne sa cause?

M. LEGER: Le patronage viendra par la suite quand on octroiera des contrats à Murray Hill plutôt qu'à la Commission de transport de Montréal parce qu'elle à le choix entre les deux, à ce moment-là.

M. BLANK: Je pense que la Régie des transports, qui est un tribunal autonome, peut juger s'il peut donner un permis à telle ou telle personne, que ce soit Murray Hill, la compagnie Métropolitaine, la compagnie de transport provincial ou d'autres compagnies de la ville de Montréal ou de Québec. Ce sont eux les juges de l'affaire.

M. LEGER: Le député sait fort bien tous les efforts et les coûts que cela occasionnera à la Commission de transport de Montréal pour prouver chaque fois qu'elle doit avoir priorité, alors que si c'est inscrit dans la loi, il n'y a pas de problème, la Régie des transports, qui deviendra la Commission de transport...

M. BLANK: Si...

M. LEGER: ... doit directement donner le service à la Commission de transport de Montréal, si la Commission de transport de Montréal peut donner le service.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Les études en comité doivent se faire en Chambre. On est ici pour interroger des témoins qui viennent faire entendre leur mémoire.

M. BLANK: M. Léger, si on va jusqu'au bout de votre pensée, cela veut dire que les gens n'ont pas le droit d'aller devant un tribunal pour faire interpréter la loi.

M. LEGER: Non.

M. BLANK: C'est ce que vous avez dit.

M. LEGER: Vous faites des conclusions que je n'ai pas faites.

M. LE PRESIDENT: Je crois qu'il n'y a plus de questions qui s'adressent aux membres de la Communauté urbaine de Québec. J'appelle M. Gustave Lafontaine, secrétaire général de la Commission scolaire régionale de l'Estrie.

Commission scolaire régionale de l'Estrie

M. TOUSIGNANT: M. le Président, il faudrait apporter une correction au nom du porte-parole. Je suis Gérard Tousignant, directeur général de la Commission scolaire régionale de l'Estrie. Pour répondre à votre voeu de ce matin, je vais essayer d'être bref.

M. le Président, M. le ministre, messieurs de l'Assemblée nationale, je voudrais apporter le point de vue du client, soit la Commission scolaire régionale de l'Estrie. La Commission scolaire régionale de l'Estrie considère le projet de loi no 23 comme un effort louable pour améliorer les transports dans le Québec. Cependant, comme ce projet de loi contient des articles qui peuvent amener l'intégration du transport scolaire aux différents services du transport public, elle tient à exprimer son opposition à une intégration totale et complète, tout en reconnaissant que, dans certains cas spécifiques, il puisse y avoir avantage à intégrer ces deux genres de transport, mais à certaines conditions.

Raisons contre l'intégration complète: Nous nous opposons à l'intégration totale parce que nous jugeons que les services publics ne sont pas en état de desservir adéquatement à la fois le public en général et les élèves des différentes écoles. Et voici ce que nous entendons par service adéquat pour les élèves: un transport qui effectue des départs de la résidence des élèves le matin et qui effectue les retours le soir à des heures convenables; un transport où les élèves sont tous assis pour permettre au chauffeur de surveiller et de faire respecter le règlement par les élèves transportés; un transport qui réduit au minimum la longueur et la durée du trajet entre le domicile de l'élève et l'école fréquentée, un transport non subordonné à l'impondérable des services publics; un transport effectué avec des véhicules dûment identifiés avec feux clignotants, peints en jaune pour protéger la sécurité et la santé des élèves transportés; un transport dont les raccordements et les transferts sont effectués dans des zones particulières qui sont souvent dans les cours d'école; un transport dont les chauffeurs sont préparés à cette fin; un transport dont la qualité et les coûts sont contrôlés par la commission scolaire régionale; un transport qui peut être vérifié par la commission scolaire régionale en tout temps à des points stratégiques localisés aux abords des cours d'écoles.

Nous sommes d'avis qu'un service qui transporte le public en général ne peut fournir ce service adéquat et continuer à bien servir ce public. Ou il sert bien le public et mal les élèves, ou il sert bien les élèves et mal le public.

Actuellement, nous avons dans le Québec un grand nombre d'entrepreneurs privés de transport d'écoliers qui ne font que ce genre de transport et qui donnent satisfaction aux commissions scolaires tout en réalisant de bons revenus. Les commissions scolaires possèdent même leurs propres autobus et ont su se donner un service adéquat à un coût peu élevé. Il serait tout aussi maladroit d'intégrer le public en général à ce genre de transport que d'intégrer le transport scolaire au transport public.

Conditions de l'intégration dans certains cas. La preuve devrait être faite qu'il y aurait avantage à réaliser cette intégration, la qualité du service devrait être maintenue, les coûts ne devraient pas être augmentés.

Recommandations. Compte tenu du fait que le transport scolaire constitue une partie très importante du système de transport du Québec, nous recommandons qu'il y ait un représentant du domaine scolaire au conseil consultatif prévu à l'article 17 du bill 23 et à la Commission des transports prévue à l'article 22.

Nous recommandons le maintien du système de soumissions publiques parce qu'il nous apparaît un élément stabilisateur des coûts et une incitation au développement de la qualité des services.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais quelques questions à poser à M. Tousignant.

M. Tousignant, dans votre mémoire, vous faites un certain nombre d'affirmations. Evidemment, vous parlez au départ de service adéquat pour les élèves. Je pense que sur l'ensemble des propositions qu'il y a là, il n'y a pas grand-chose de contentieux et on s'entend tous pour dire que le transport doit s'effectuer à des heures convenables, que les étudiants soient autant que possible assis, que les chauffeurs les surveillent, qu'on réduise au minimum la longueur et la durée du trajet — cela ne se discute pas, cela va de soi — "un transport non subordonné à l'impondérable des services publics."

Est-ce que vous pourriez expliquer cette quatrième condition?

M. TOUSIGNANT: Par exemple, il peut arriver à des journées données dû à une affluence des adultes qu'à ce moment-là il y ait... ou encore de la circulation comme telle, que le circuit soit plus lent. A ce moment-là, il pourrait même arriver aussi, compte tenu de la clientèle, qu'un certain nombre d'élèves ne pourraient pas avoir accès à l'autobus. La question se poserait à ce moment-là à savoir qui va rester sur le trottoir, l'adulte ou l'élève?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Tousignant, justement à ce propos-là, on nous a déjà fait ce genre d'observation. A supposer que l'on utilise les transports publics, — je ne connais pas exactement l'organisation du transport dans la région de l'Estrie — mais est-ce que, à votre connaissance, les transporteurs publics disposent d'un nombre suffisant de véhicules pour parer à ces inconvénients, pour pallier ces inconvénients d'une clientèle tout à coup accrue à certaines heures, aux heures de pointe, par exemple?

M. TOUSIGNANT: Il faudrait se référer un peu à l'organisation actuelle du système de transport d'une commission scolaire où vous avez des circuits qui sont planifiés... Rapidement, disons que tout d'abord nous faisons remplir une fiche de renseignements scolaires par tous les élèves. A partir de cela, nous établissons sur des cartes la position où se situent les élèves, ensuite nous établissons les circuits et nous déterminons, par exemple, qu'il y a une vingtaine d'élèves... disons qu'il y a trente élèves à tel endroit, nous envoyons un autobus pour trente élèves. En termes de temps, à ce moment-là, le problème ne se pose pas, puisque nous savons pertinemment que pour tel circuit cela va prendre tant de temps. Notre interrogation — il ne s'agit pas pour nous de s'opposer carrément au principe global — est la suivante: Comment sera-t-il possible matériellement de prévoir dans le temps ces impondérables? Nous pouvons dire qu'on va mettre cinq minutes de délai, mais si au lieu d'avoir cinq arrêts pour adultes, il y en a une vingtaine, pour le début des classes, cela peut changer bien des choses. Quant au nombre de véhicules, je ne pense pas que le problème se situe là. Je pense bien que les transporteurs vont se doter des équipements requis, mais on se demande comment cela va être planifié.

C'est pour cette raison que nous souhaitons, du moins dans nos milieux, une organisation de transport spécifique pour les étudiants. Nous avons fait des expériences qui nous démontrent que ça représente quand même des avantages de procéder ainsi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Tousignant, est-ce que je me trompe en disant que, dans la région de l'Estrie, les transports publics ne vous paraissent pas suffisamment organisés, à telle enseigne qu'on puisse faire face à ces situations que vous décrivez? Prenons la ville de Sherbrooke par exemple.

M. TOUSIGNANT: Dans la ville de Sherbrooke, nous ne voyons pas qu'avec le système de transport, — le service en commun si on veut — les élèves soient intégrés à ce système. D'ailleurs, nous l'avons déjà expérimenté sans aller de façon aussi intégrée et ça posait un certain nombre de problèmes. L'année dernière, nous avons opté pour un transport spécialisé pour les étudiants et les problèmes ont été moindres; sur le plan des horaires et sur le plan du fonctionnement, ç'a été plus efficace. Je pourrais vous parler de l'aspect des coûts aussi à cette dimension-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, reprenant les conditions dont vous parlez, cinquièmement, sixièmement, septièmement, huitièmement: ce sont là toutes des conditions que l'on peut accepter, qui sont non seulement désirables mais qui devraient être obligatoires. Est-ce que vous ne croyez pas qu'un transport public bien organisé, sous toute réserve que, dans la région de l'Estrie, un tel transport existe, est-ce vous ne croyez pas, dis-je, qu'un service de transport public ne pourrait pas répondre à ces exigences que vous formulez, de cinq à neuf?

M. TOUSIGNANT: Théoriquement, bien sûr.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Théoriquement, sûr. Dans les faits, évidemment, il faudrait tenir compte de la situation actuelle du transport public dans la région de l'Estrie.

M. TOUSIGNANT: Mais...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. TOUSIGNANT: Si vous me permettez, personnellement, je ne fais pas de restrictions,

sur le principe, à notre territoire. La question que l'on se pose est celle-ci: Même si c'est un transport public qui transporte les élèves, pourquoi ne peut-il pas y avoir un transport spécialisé? Je ne parle pas de Montréal et Québec, je parle de l'ensemble de la province. Il nous semble qu'en termes de coûts, il n'est pas prouvé que ce serait plus dispendieux. Nous avons quand même de l'expérience là-dessus et nous ne sommes pas non plus sûrs que cette formule va répondre aux besoins de la population en général, du moins dans toutes les villes en dehors de Montréal et de Québec que je connais ou pas, au point de vue de l'organisation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): En principe, M. Tousignant, est-ce que vous vous opposez catégoriquement à ce que le transport des écoliers soit effectué par le transport public? En principe, mettons de côté les cas de Québec et de Montréal, est-ce que vous vous opposez à ce qu'on utilise les transporteurs publics pour transporter les écoliers?

M. TOUSIGNANT: Présentement, avec les garanties ou avec ce que l'on voit, vous comprendrez qu'on ait une certaine réticence, puisqu'à notre sens, nous n'avons pas les garanties. C'est une question qui appellerait une réponse. Dans le fond si vous pouviez me fournir la réponse en même temps que la question, je pourrais vous dire oui ou non, puisqu'on nous dit: quelle est la garantie, — et nous avons des réserves, compte tenu des expériences passées — quelles sont les garanties que ce système-là nous assurera les neuf points que nous préconisons? Présentement, nous prétendons que cette garantie n'est nullement prouvée, alors qu'il est clairement démontré que le système actuel est valable et efficace. Disons qu'en résumé, nous ne voudrions pas que le transport écolier, dans toute la réorganisation et la planification du transport au Québec, nous fasse perdre dans l'échange.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, maintenant, — c'est une preuve par l'absurde que vous nous fournissez là — vous nous dites: Nous avons des réticences et nous voudrions que le transport réponde aux conditions que nous formulons ici.

Vous ne nous dites pas, par ailleurs, si dans les faits, compte tenu de la situation particulière de l'Estrie, par exemple, que vous avez les garanties suffisantes qui vous permettraient de croire que les transporteurs publics pourraient vous donner des services qui répondent exactement aux exigences que vous avez formulées dans votre mémoire.

M. TOUSIGNANT: En 1969, le transport des élèves dans la ville de Sherbrooke était fait par la compagnie qui détient le permis de transport pour Sherbrooke. Comme situation, à ce moment-là, nous avions de multiples retards aux écoles, nous avions beaucoup d'élèves qui étaient debout et nous avions continuellement des représentations puisqu'il se passait toutes sortes de choses dans les autobus. Pas sur le plan moral au sens qu'on peut souvent l'entendre, mais sur le plan d'un élève qui va prendre un couteau, briser des sièges, provoquer des disputes, et ainsi de suite, parce qu'il n'y avait aucun contrôle.

En cours d'année la compagnie a demandé à la Régie des transports une majoration des taux, ce qu'elle a obtenu. Nous avons fait des représentations qui n'ont pas eu de suite. Comme résultat, nous avons eu une majoration de $45,000 pour 4,000 étudiants. La régie a accordé une somme de $45,000 pour 4,000 étudiants.

Nous nous trouvions devant le problème de faire accepter ce montant par le ministère de l'Education. Voici ce que nous avons fait. En 1970, nous avons intégré les circuits de l'extérieur de Sherbrooke avec ceux de Sherbrooke et nous avons demandé des soumissions publiques. Nous avons obtenu un coût global moindre de $80,000 avec, sur le plan des services, des retards moindres puisqu'on savait exactement que les élèves partaient à telle heure et étaient rendus à telle heure à l'école, et tous les élèves étaient assis. Sur le plan de la sécurité, c'était maximal. Alors, vous comprendrez que face à cela nous avons des réserves. Nous disons que nous avons un système qui a fait ses preuves et nous ne voyons pas pourquoi nous ne pourrions pas le conserver sur la base de soumissions publiques avec la possibilité aussi que d'autres entrepreneurs, qui actuellement nous desservent bien, puissent continuer. C'est exactement le fond de la situation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Tousignant, au sujet justement, des conditions de l'intégration dans certains cas vous dites: "Nous accepterions l'intégration dans certains cas exceptionnels mais selon les conditions suivantes: La preuve devrait être faite qu'il y aurait avantage à réaliser cette intégration; la qualité du service devrait être maintenue et les coûts ne devraient pas être augmentés." Pourriez-vous nous fournir — peut-être pas verbalement aujourd'hui, à moins que vous n'ayez les documents — des tableaux qui pourraient nous donner une idée des coûts comparatifs du transport effectué par des transporteurs privés et du transport effectué par des transporteurs publics?

M. TOUSIGNANT: Vous avez le jeu des soumissions et vous avez, au ministère de l'Education actuellement, ce que nous appelons le tableau des coûts normalisés. La situation ne peut donc pas se produire comme vous la décrivez puisque le jeu des appels d'offres étant ce qu'il est, ayant aussi un maximum par le tableau des coûts normalisés qui sont les nor-

mes du ministère de l'Education, nous n'avons pas le moyen de comparer puisqu'à toutes fins utiles la compagnie qui détient le permis pour la ville de Sherbrooke soumissionne au même titre que les entrepreneurs privés. C'est le jeu de la concurrence qui intervient alors et c'est là que nous prétendons que voilà un élément qui peut stabiliser les coûts.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, dans votre mémoire, vous recommandez le maintien du système des soumissions. S'agit-il de soumissions annuelles ou des soumissions qui sont prévues par le projet de loi no 23?

M. TOUSIGNANT: Des soumissions annuelles, nous considérons que c'est trop court. Sur une période de trois ans, nous sommes d'accord, mais renouvelable. Sur ce principe, évidemment, trouver le seuil de la rentabilité et dire, par exemple, combien de temps il faut permettre le contrat... Il faut quand même que ce soit rentable pour celui qui fait l'offre et que cela l'incite aussi à augmenter la qualité de ses services parce qu'il est clair que si nous demandons des périodes très courtes, il n'aura pas intérêt à améliorer les services ou encore à investir beaucoup. Nous n'avons donc pas relevé ce point parce qu'il nous apparaissait qu'il relevait de l'aspect bien technique d'évaluer en terme de temps. Mais, en terme de principe, par contre, nous y tenons, à savoir qu'il doit y avoir, après un certain temps, une soumission. Quoique cela pose tout le problème à savoir si au bout de six ans la concurrence deviendra possible parce que ceux qui n'auront pas eu de contrat seront-ils en dehors du marché à ce moment-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voyez-vous, M. Tousignant, c'est justement là où je voulais vous amener; vous parlez de coût, de rentabilité, de qualité, de service et d'une rationalisation d'une politique générale des transports, soit les écoliers ou d'autres types de transport.

De toute façon, que ce soient les transports publics ou les transports privés, ce sont les contribuables qui vont payer. Moi, personnellement, je suis d'avis — et je l'ai dit l'autre jour à la commission — qu'il faut protéger les transporteurs privés qui ont consenti des investissements importants et qui se retrouveraient dans la rue si tout à coup on décidait de changer de système ou de les écarter lors des appels d'offres, etc.

Seulement, en collaboration avec le ministère de l'Education, le ministère des Transports semble décidé à rationaliser la politique du transport, de l'organisation du transport dans le Québec. Il est donc important qu'une régionale comme celle que vous représentez fasse un examen des coûts à partir des soumissions qui vous ont été présentées l'année passée, l'année d'avant, etc. et en fonction des services que vous exigez.

Pour obtenir un service de qualité, le meilleur qui soit, à un coût normal, ne pensez-vous pas que le système d'appel d'offres, de soumissions que l'on a actuellement ne permet pas, ni aux transporteurs d'écoliers, entreprise privée ou publique, ni même à la commission scolaire, de rationaliser ou de normaliser ces dépenses dans ce domaine-là?

M. TOUSIGNANT: Sur une courte période, je suis parfaitement d'accord que ça peut avoir une influence négative. Par exemple, avec une soumission annuelle, à mon point de vue, il est clair que, même si on apportait le jeu de la concurrence, la qualité des services interviendrait.

Il faut que ce soit plus qu'annuel. De là à dire que ça serait pour tout le temps, je pense qu'il y a probablement une commune mesure qui va permettre d'atteindre à la fois l'efficacité des services et une politique de moindre coût. Qu'ils ne se chicanent pas sur les 3, 4, 5 ou 6. Je pense qu'il faut maintenir le principe.

Par la force des choses, dans nos milieux, je pense bien que l'entrepreneur privé va continuer à vivre, parce que dans tous les petits milieux il n'est absolument pas question d'un transport offert par une communauté urbaine. Il n'en reste pas moins que, dans la loi, dans le mécanisme, il faut que ce soit prévu tout ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Tousignant, dans le cas de la Commission scolaire régionale de l'Estrie, est-ce que celle-ci ou les commissions scolaires constituantes ont des services de transport qui leur appartiennent, qu'elles ont organisés?

M. TOUSIGNANT: Lorsque vous parlez de services de transport, vous voulez dire posséder des autobus?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'écoliers. Est-ce que certaines commissions scolaires possèdent des autobus scolaires?

M. TOUSIGNANT: Disons que la Commission scolaire régionale de l'Estrie possède six autobus. La commission scolaire protestante en possède au-delà d'une centaine.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Au-delà d'une centaine d'autobus, la commission scolaire protestante?

M. TOUSIGNANT: Du côté francophone, il y en a six pour l'ensemble du territoire. Du côté anglophone, il y en a plus de cent.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il s'agit donc d'un transport public déjà, pas pour le grand public en général mais d'un transport public au sens de la loi, puisque c'est une institution publique qui exploite cette entreprise de transport. Cent autobus dans le cas de la population anglophone?

Vous avez déjà, en somme, la base d'une organisation de transport scolaire public qui est entre les mains d'une entreprise que l'on peut déclarer publique. A côté de cela, vous avez six autobus de la régionale de l'Estrie qui transportent des étudiants francophones. D'où vient cette distinction, cette séparation? Pourquoi y a-t-il des transporteurs pour les anglophones et des transporteurs pour les francophones?

M. TOUSIGNANT: Ecoutez, je peux vous répondre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que ces véhicules sont catholiques ou protestants, français ou anglais?

M. TOUSIGNANT: Ils sont neutres, ils sont jaunes. Je peux vous répondre en ce qui nous concerne. Je ne peux évidemment pas vous expliquer pourquoi telle commission scolaire s'est dotée de tant d'autobus. Je peux vous dire que nous nous sommes dotés de six autobus et pas plus puisqu'il nous apparaissait rentable de se doter de six autobus. Pour l'ensemble de l'organisation, nous devions, à ce moment-là, recourir au transport existant dans Sherbrooke même ou aux transporteurs privés pour l'extérieur de Sherbrooke.

Pour ce qui est du côté anglophone, il est sûr que l'on doit accommoder des élèves éparpillés sur un grand territoire. Je ne peux pas m'avancer là-dedans, je ne connais pas du tout le pourquoi fondamental. Pour nous, il nous apparaissait rentable d'utiliser six autobus qui sont surtout utilisés pour l'interécole et pour quelques circuits plus difficiles. Il peut arriver aussi — et c'était notre idée — que des circuits soient trop dispendieux et qu'on doive demander des soumissions publiques à cause des conditions particulières, mais il devenait plus rentable pour nous d'utiliser un autobus qui nous appartenait pour faire ce trajet. C'est uniquement dans cet aspect-là parce que notre principe est que c'est plus rentable d'aller en entreprise privée que d'administrer nous-mêmes tout un ensemble comme tel, en autant que nous ayons un contrôle sur les autobus qui transportent nos élèves, par un règlement d'élèves, par des circuits planifiés qui disent aux transporteurs: Vous devez partir à telle heure et vous devez arriver à telle heure. C'est la situation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que votre commission scolaire, la régionale de l'Estrie, a l'intention d'accroître son propre service de transport d'écoliers?

M. TOUSIGNANT: Pas nécessairement. Les conditions que nous posons étant respectées, avec le système actuel, je ne vois pas pourquoi on devrait se porter acquéreur de plus d'autobus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Depuis X années, une période de cinq ans au moins, est-ce que les transporteurs de l'entreprise privée ont toujours été les mêmes ou si, par le jeu des appels d'offres, vous avez changé de transporteurs?

M. TOUSIGNANT: Pour ce qui est des transporteurs que nous appelons "plus importants", à toutes fins pratiques, cela n'a pas varié. La variation va se retrouver parmi les petits transporteurs qui vont surtout desservir les rangs, par exemple, qui font le ramassage dans les rangs pour conduire ces élèves à des centres plus importants. Là, évidemment, la variation est plus considérable, mais en général, on ne peut pas dire que cela ait tellement varié.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que dans le cas de la régionale de l'Estrie — vous avez des autobus qui transportent des francophones et des autobus qui transportent des anglophones — il arrive que ces transporteurs suivent le même itinéraire, fassent le même périple pour cueillir à un endroit un anglophone et qu'un autre autobus vienne cueillir au même endroit un francophone?

M. TOUSIGNANT: Selon les règles budgétaires du ministère de l'Education, on se doit d'éviter de multiplier les circuits. Depuis l'année dernière, nous avons des ententes pour éviter justement la situation que vous décrivez.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cette situation existait-elle ou existe-t-elle encore?

M. TOUSIGNANT: Actuellement, dans la province, je pense qu'on peut dire qu'une situation comme celle-là existe certainement. Cependant, avec le principe de la régionalisation du transport, la multiplication des circuits sera automatiquement éliminée. Je peux vous dire aussi qu'à cause, justement, des normes administratives des commissions scolaires sont incitées à collaborer pour ne pas multiplier les circuits.

Maintenant, à votre question bien précise: Est-ce que cela existe? Moi, je prétends que cela doit exister.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que cela existe dans le cas de la régionale de l'Estrie?

M. TOUSIGNANT: A cause des horaires, il peut exister encore quelques multiplications de circuits. Actuellement, la participation ou la collaboration sont, quand même, sur une base de volontariat. Alors, pour toutes sortes de raisons, il pourrait arriver qu'à un moment donné il soit moins possible d'assurer complètement, disons, cette collaboration, mais je peux dire qu'à 95 p.c. nous avons éliminé la multiplication des circuits. Je peux vous répon-

dre pour la régionale de l'Estrie et pour les commissions scolaires locales de notre territoire. Je ne peux pas m'engager pour l'ensemble de la province.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, votre intention à la régionale de l'Estrie, c'est de faire disparaître ces doubles circuits.

M. TOUSIGNANT: Exactement. C'est parce qu'à cause des horaires et tout il faut aussi planifier l'aspect pédagogique. De plus en plus, actuellement, c'est accepté. Lorsque je vous parle de 95 p.c. des circuits où, à notre sens, il n'y a aucune multiplication, je ne fais pas entrer là-dedans les éléments, par exemple, d'horaires différents qu'il faut modifier, d'organisations différentes du côté anglophone et francophone, quoique, l'année dernière, certains autobus appartenant à la commission scolaire anglophone transportaient de nos élèves et, ensuite, leurs propres élèves pour les diriger vers leur école polyvalente qui est à 5 milles de Sherbrooke.

De ce côté-là, à notre sens, il n'y a pas de problème crucial. La régionalisation du transport a pour effet d'éliminer cela complètement. C'est pour ça qu'au début on reconnaît comme un effort louable cette tentative de régionaliser le transport.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a quelques jours, on nous a parlé de ce problème de la présence des commissions scolaires dans les entreprises de transport, certains s'élevant contre ça; d'autres nous disant: D'accord, nous sommes bien prêts à faire disparaître les transports d'écoliers par les commissions scolaires, mais il y a le problème des normes, enfin, des conditions posées par le ministère de l'Education. Dans le cas où le ministère de l'Education accepterait de couvrir ce qu'on appelle les dépenses inadmissibles, est-ce que vous considérez que les commissions scolaires devraient se retirer du transport scolaire, puisqu'il s'agit là d'une question qui n'est ni pédagogique ni quoi que ce soit du genre?

M. TOUSIGNANT: Si se retirer du transport scolaire implique, par exemple, que ce n'est plus maintenant de nos préoccupations, je pense qu'on aurait un réveil brutal, puisque, sur le plan de l'organisation, cela poserait des problèmes. Maintenant, est-ce que les commissions scolaires doivent être propriétaires d'autobus scolaires?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ça que je veux dire, M. Tousignant. Comprenez-moi bien. Je ne dis pas que les commissions scolaires doivent se désintéresser du transport scolaire. Cela va de soi. Je veux dire: Est-ce qu'à votre avis les commissions scolaires ne devraient pas se retirer du transport scolaire, en ce sens qu'elles devraient cesser d'acheter des autobus et d'organiser matériellement le transport des écoliers, quitte à surveiller, évidemment, ce transport lorsqu'elles accordent des contrats à ceux qui présentent des soumissions.

M. TOUSIGNANT: Notre point de vue est que le fait d'avoir des autobus qui sont notre propriété présente des avantages de souplesse, entre autres ce que nous appelons les déplacements interécoles; à un moment donné, les élèves vont se déplacer et tout cela. Le fait d'avoir nos propres autobus est beaucoup plus souple. Actuellement, il semble aussi que ce soit moins dispendieux pour la commission scolaire.

Ce que je soulignais tout à l'heure, c'est que là où est le seuil de la rentabilité entre... Nous, nous avons 20,000 étudiants, nous avons six autobus. Nous avons une commission scolaire qui a 4,000 ou 5,000 étudiants et qui a 100 autobus. Alors, sur le principe, moi, je considère qu'il serait rentable que les commissions scolaires puissent être propriétaires d'un nombre limité d'autobus scolaires pour ces fins qui sont spécifiques et qui demandent une souplesse de fonctionnement et tout ça.

Cela peut être nécessaire aussi pour l'organisation de certains transports pour lesquels il serait peut-être assez difficile d'obtenir des soumissions, ou, si on en obtient, ce serait possiblement plus dispendieux. Alors, sur le principe, je soutiens qu'on devrait être propriétaire de quelques autobus; à mon sens, ce serait pour des fins marginales et il faudrait bien spécifier ces fins.

Evidemment, lorsqu'on répond globalement, je sais que la situation d'un grand centre urbain ne se présente pas de la même façon, mais enfin, en ce qui nous concerne, puisque vous posez la question en regard de l'Estrie, notre prétention est qu'on devrait pouvoir rester propriétaire d'un certain nombre d'autobus scolaires.

M. LACROIX: Y a-t-il des désavantages à ce qu'une commission scolaire soit propriétaire de tous ses autobus scolaires? Si vous croyez que c'est avantageux d'avoir un certain nombre d'autobus pour la planification, pour un meilleur service à tout point de vue, quels désavantages voyez-vous à ce que la commission scolaire soit elle-même propriétaire des autobus?

M. TOUSIGNANT: Bien, écoutez, je pense que ça peut être bien aléatoire où on va tirer la ligne dans le fond, mais nous avons expérimenté la situation et la situation que nous vivons actuellement répond â nos besoins. La commission scolaire voisine a une centaine d'autobus et elle prétend que c'est son meilleur système, que c'est le meilleur système qu'il y ait pour ses fins propres.

Sur le plan des commissions scolaires, il est possible en s'organisant, en se dotant de ces équipements, que ça pourrait ne représenter que des avantages. Cependant, nous ne voulons pas

demeurer en vase clos, on veut bien regarder à côté de nous et on constate qu'il y a des équipements disponibles. On pense qu'il faut les utiliser, mais pour autant que ça réponde à nos impératifs. Je pense que s'il fallait demain matin doter tout le système scolaire, je ne sais pas, d'une centaine d'autobus, d'accord, ça ferait vendre des autobus, mais, par contre, cela aurait des répercussions sur tout le réseau du transport.

M. LACROIX: Si les commissions scolaires achetaient les autobus qui sont actuellement en service — il ne s'agit pas d'acheter des autobus neufs et de laisser de côté les autobus qui sont actuellement la propriété d'individus, de particuliers ou de compagnies — est-ce que les propriétaires d'autobus auraient des objections à les vendre à la commission, parce qu'ils ne sont pas là sans but lucratif? Les administrateurs se prennent des salaires, en fait, il y a bien des revenus qui pourraient aller aux commissions scolaires plutôt que d'aller à des individus. Il ne s'agit pas de laisser de côté des actifs qui seraient inopérants, mais, par la commission scolaire, les exproprier de façon raisonnable.

M. TOUSIGNANT: Il se poserait certainement un problème. Actuellement, nous avons 200 autobus qui, par soumissions publiques, sont impliqués dans des contrats de transport. Il apparaît évident que si on voulait acheter ces 200 autobus — les autobus transportent les élèves le matin et les transportent le soir — alors, considérant le laps de temps qui s'écoule entre le matin et le soir, vous auriez là un investissement qui dormirait sur place.

M. LACROIX: Qu'est-ce qu'on en fait à l'heure actuelle?

M. TOUSIGNANT: Pour un certain nombre, ils demeurent sur place, mais pour d'autres, ils sont utilisés dans la journée, je présume.

Si je réfère à Sherbrooke, par exemple, ces autobus sont certainement utilisés dans la journée pour le transport public. C'est une supposition que je fais. Je ne suis pas allé voir comment ils organisaient leur affaire. La question que je me pose est celle-ci: A partir de normes avec les systèmes qu'on a, on entre dedans et on est satisfait des services. On n'a pas analysé si une commission scolaire pourrait devenir propriétaire de tout un réseau. En partant j'aurais certainement des réserves sur la rentabilité.

M. LACROIX: Je voudrais bien savoir où les autobus scolaires peuvent nuire, ou faire concurrence aux transporteurs publics qui ont déjà des permis pour le transport public. On a déjà des difficultés même pour le transport des élèves pour les fins sportives d'un point à l'autre, alors que les transporteurs publics désirent qu'on utilise leurs autobus plutôt que d'utiliser les autobus scolaires. S'ils apparte- naient ,à la commission scolaire, est-ce qu'on ne pourrait pas obvier jusqu'à un certain point à une difficulté que l'on connaît un peu partout dans la province de Québec actuellement?

M. TOUSIGNANT: Possiblement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais revenir sur ceci: Combien d'autobus avez-vous? La Commission scolaire régionale de l'Estrie a six autobus. Est-ce que les chauffeurs y sont à temps partiel? Il y en a trois, je crois, à temps plein et trois à temps partiel. Combien utilisez-vous d'autobus pour le reste du transport des écoliers?

M. TOUSIGNANT: Deux cents.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a deux cents autobus qui appartiennent à l'entreprise privée et six autobus qui appartiennent à la commission scolaire, plus les cent autobus de la partie anglophone?

M. TOUSIGNANT: Oui, pour la commission scolaire régionale anglophone.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela fait trois cent six. Je pose une dernière question, M. Tousignant. Je n'ai pas fini. Vous maintenez le principe des soumissions...

M. TOUSIGNANT: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour la qualité de service, le coût et tout cela. Et pour la sécurité des entreprises de transport, est-ce que vous ne croyez pas que la recommandation qui a été faite de supprimer les soumissions de quelque forme que ce soit, les appels d'offres, serait préférable, si vous tenez à la sécurité de cette entreprise privée que sont les transporteurs d'écoliers?

M. TOUSIGNANT: Tout d'abord, je dois vous dire que notre objectif n'est pas de garantir toute sécurité possible aux transporteurs d'écoliers; ce n'est pas tout à fait notre problème. Qui, dans toute organisation d'affaire a la sécurité maximale? Je pense que les députés ne l'ont pas; les ministres non plus; les administrateurs de commissions scolaires non plus n'ont pas cette garantie pour le restant de leurs jours. A un moment donné, ils seront assurés d'avoir des contrats pour organiser des transports. Je pense qu'il y a un jeu qui se joue. Nous maintenons le principe de la soumission publique, justement parce que nous considérons que si le transporteur sait que son permis pourrait être révoqué, s'il sait qu'au bout de X années il pourrait faire face à une concurrence, cela va être certainement incitatif à améliorer ses services ou, du moins, à garder la qualité de ses services. Pour ce qui est de la sécurité, il y a une question de seuil à un moment donné. C'est

comme la sécurité d'emploi. C'est valable jusqu'à un certain point, mais il arrive que si ça va trop loin — en termes de motivation — cela peut jouer à l'inverse.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Tousignant, je comprends mal votre raisonnement. Vous dites que si les transporteurs qui obtiennent les contrats par voie de soumissions avaient une certaine sécurité, peut-être que cela les inciterait à se négliger et que le transport s'en trouverait diminué en qualité.

Mais, lorsque vous engagez des transporteurs, vous leur imposez toutes les conditions qui sont là dans votre mémoire. Vous demandez, d'autre part, que les commissions scolaires soient associées à la surveillance dans le domaine du transport d'écoliers. Je crois que, toutes ces conditions étant remplies, il n'y a aucun danger que ces gens-là se négligent et donnent un service de moindre qualité.

M. TOUSIGNANT: Présentement, nous sommes juges. Nous contrôlons, si on veut, la qualité du service. Avec le bill 23, ce qui ferait, en fin de compte, que le contrat pourrait être prolongé, ce serait une décision de la Commission des transports. Nous référant — peut-être à tort — à notre expérience vécue avec la Régie des transports, nous devenons plus ou moins perplexes et nous nous disons qu'il faudra certainement qu'il y ait des incitations. Sur le principe aussi, je pense que c'est assez embêtant de décréter que jamais personne ne pourra se lancer dans le transport pour vingt-cinq ou cinquante ans à venir. Encore là, nous référant à notre expérience personnelle, il nous a semblé que le fait d'accorder une certaine sécurité que l'on peut fixer dans le temps aux transporteurs leur permet de planifier leurs investissements. Devant l'éventualité d'une nouvelle soumission, nous n'avons pas l'impression que c'est le jeu de la concurrence qui va intervenir. C'est là qu'on parle d'élément stabilisateur des coûts et d'incitation aux services.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Croyez-vous que six ans, dans la planification générale d'entreprises de transport, c'est suffisant pour prévoir les amortissements d'une immobilisation très importante, d'une capitalisation énorme, en fait?

M. TOUSIGNANT: Je crois qu'actuellement c'est une base de cinq ans pour amortir le coût d'un autobus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Huit ans.

M. TOUSIGNANT: Comme je l'ai dit au début, sur la question du nombre d'années, à savoir si ce serait six ou sept ans, j'imagine que les transporteurs eux-mêmes pourraient avec force arguments faire valoir qu'il faut sept ans plutôt que six.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. Tousignant.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Dans le mémoire de la commission scolaire régionale de l'Estrie, on demande qu'un représentant du domaine scolaire soit nommé au conseil consultatif en vertu de l'article 17 et aussi qu'un représentant soit nommé à la Commission des transports. Est-ce que le ministre a l'intention de faire suite à ces demandes?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je me suis déjà prononcé là-dessus en disant qu'il y aurait des représentants des transporteurs et qu'il y aurait collaboration entre les commissions scolaires et le ministère des Transports. Je me suis déjà prononcé là-dessus.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce matin, vous vous êtes prononcé pour les camionneurs artisans...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je m'excuse ce n'est pas la commission, mais le conseil consultatif.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce qu'il y en aura un aussi qui sera nommé à la Commission des transports, formée de sept membres? On demande ici qu'il y en ait un à chacun des deux organismes.

M. TREMBLAY (Bourassa): Dans la Commission des transports même, il y a quatre sections. Il est certain que, dans ces quatre sections, ce seront des gens qui vont connaître le transport. Vous avez encore le ministère de l'Education, vous avez M. Lachapelle, qui, avec ses proches collaborateurs, sera muté au ministère des Transports pour continuer à coordonner le transport d'écoliers et le transport public.

Là-dessus, j'avais une question à poser à M. Tousignant: Verrait-il d'un mauvais oeil, disons, que dans un circuit où il y a vingt écoliers, s'il y a cinq ou six pères de famille ou des filles ou des mères qui vont travailler à tel village ou à telle ville et s'il y a de la place dans l'autobus, que ces gens puissent y monter? A ce moment-là, on peut éviter un double transport public. Je crois que c'est cela un peu. Je me demande si vous voyez une objection dans ce sens-là.

M. TOUSIGNANT: Si la situation générale était aussi nette que vous la posez comme hypothèse, il est sûr que nous n'aurions aucune objection.

Si l'on dit par exemple, sur le circuit cinq, il y a une vingtaine d'étudiants et cinq adultes et qu'en termes de départ et de retour ça ne pose aucun problème, à ce moment-là, dans une

situation bien identifiée comme celle-là, il n'y a aucun problème, ça irait bien.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ma question est de ne pas allonger le temps des enfants dans l'autobus, etc. mais je pose la question, s'il y a 20 écoliers et dix adultes. Cela peut peut-être être une question de cinq minutes, mais, par contre, on sauve un circuit de transport public. Alors, je vous demande si vous seriez contre une formule semblable dans des circuits. Cela ne veut pas dire tous les circuits parce qu'il y a des circuits écoliers pour lesquels ça prend deux autobus chargés à plein. A ce moment-là, il n'en est pas question mais vous savez comme moi que, dans certaines régions, les autobus sont à moitié ou aux trois quart remplis. A ce moment-là, on peut épargner un minimum d'argent sur ce circuit-là. Est-ce que vous seriez contre une chose semblable?

M. TOUSIGNANT: Telle que vous la décrivez, pas du tout. Au contraire, je ne serais pas contre, je serais en faveur.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Seulement une ou deux petites questions. D'abord, je félicite M. Tousignant pour avoir présenté les neuf conditions pour un service adéquat; ça veut réellement dire que, si un service remplit les neuf conditions, l'élève est réellement bien protégé. Il y a quand même sept ou huit de ces conditions-là qui pourraient — et je pose la question à M. Tousignant — être remplies par un service public aussi. Mais je ferais peut-être abstraction de l'article 1 ou de l'article 4. Est-ce que vous êtes d'accord que la plupart de ces conditions-là pourraient être aussi remplies par un service public, sauf peut-être les articles 1 et 4?

M. TOUSIGNANT: En tant qu'hypothèse, je peux dire oui; en tant que fait pratique, notre expérience nous amène à être beaucoup plus prudents avant de dire oui. Nous avons vécu une situation mitoyenne et ça ne répondait pas à cela. Nous avons un système spécialisé qui répond à nos critères.

M. LEGER: Vous parlez à l'article 1 de ce qui serait pour vous une des conditions essentielles — vous l'avez mise en premier — c'est que le départ se fait à partir de la résidence de l'élève jusqu'à l'école et vice versa. Est-ce que vous pensez qu'un service public pourrait, le matin et le soir, avoir des autobus en plus grand nombre et spécialisés pour le faire? Est-ce que vous pensez qu'un service public peut aussi avoir des autobus supplémentaires ou si vous pensez que ces deux conditions-là ne peuvent pas s'y intégrer?

M. TOUSIGNANT: Si j'ai bien compris votre question, vous me demandez s'il serait possible qu'un service public...

M. LEGER: Aux heures de pointe.

M. TOUSIGNANT: ... aux heures de pointe, ait des autobus spécifiquement pour les écoliers. C'est ça?

M. LEGER: Oui.

M. TOUSIGNANT: Je pense que, s'il y a des autobus spécifiquement pour les écoliers, ils vont être en mesure de respecter les neuf points que nous avons énoncés. Le principe qui a été mis de l'avant, lorsqu'il a été question de l'intégration, ce n'est pas clairement indiqué. On parle d'intégration en termes d'organisation mais, dans les faits il n'est indiqué à nulle part que les étudiants auront de façon spécifique un transport spécialisé.

M. LEGER: Avec ces conditions-là.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Tousignant, vous disiez tout à l'heure que vous étiez en faveur de la soumission publique pour conserver certaines qualités de service. En quoi le maintien d'un bon service pourrait-il garantir à un transporteur de conserver son transport en face de l'appel d'offres? Croyez-vous qu'en maintenant un meilleur service, en améliorant ce service ceci pourrait garantir au transporteur de garder son transport devant la soumission publique?

M. TOUSIGNANT: Il y a d'abord un premier point, c'est que pour pouvoir soumissionner, il devra répondre à des conditions. Evidemment, ces conditions, il voudra les remplir; il voudra aussi, en cours de contrat, donner un service pour demeurer accrédité comme étant un soumissionnaire valable.

M. AUDET: Mais n'aurait-il pas les mêmes obligations si, par exemple, un taux était fixé par la Commission des transports? La Commission des transports pourrait facilement fixer des taux. Le transporteur serait quand même obligé de donner une qualité de service suivant les normes que vous demandez.

M. TOUSIGNANT: Je pense que si nous l'abordons dans le sens que vous soulignez, si on en fait un système global, à savoir que le ministère des Transports lui-même assure un contrôle de tout l'ensemble des détails et qu'il fixe non seulement les conditions, mais qu'il établit aussi les critères qui devront être respectés pendant tout le temps du parcours et que lui-même décrète les variations des montants à être payés, c'est une façon de concevoir l'orga-

nisation sur une base plus centralisée. Ce que nous soulevons, nous, c'est qu'à toutes fins utiles, avec la disparition des soumissions, il deviendrait à peu près impossible à d'autres, au bout d'un certain temps, d'entrer à leur tour dans la concurrence, si c'était sur cette base.

M. AUDET: Peut-être, dans ces nouveaux transporteurs éventuels voit-on souvent des transporteurs non expérimentés qui veulent tenter une aventure, qui soumissionnent trop bas et qui ne sont justement pas capables de donner le service que celui d'avant donnait.

Maintenant, nous considérons la commission scolaire comme un intermédiaire valable et impartial pour le choix du meilleur mode de transport entre le transport par les transporteurs privés et le transport par les commissions de transport. Je crois que votre exposé est très clair là-dessus. Votre choix est passablement clair et je crois, — le croyez-vous vous-même? — que vous avez une certaine impartialité dans le choix du transport.

M. TOUSIGNANT: Ecoutez, je pourrais vous répondre à travers ma subjectivité, ma partialité. C'est que présentement nous considérons... Vous savez, nous, il faut répondre face aux étudiants, aux parents, et nous devons leur présenter un système de transport qui est valable. Actuellement, nous disons: Dans tout cela, demain, avec le bill 23, est-ce qu'à toutes fins utiles la commission scolaire va continuer à jouer ce rôle face aux besoins, à savoir est-ce qu'elle pourra doter le système scolaire d'une bonne organisation de transport sans se trouver dans des complications? Une chose est certaine, lorsqu'il y aura des problèmes de transport cela va encore revenir à la commission scolaire. Alors, nous nous disons que c'est d'accord, que nous allons en assumer la responsabilité, mais il nous faut aussi un droit de parole quelque part. Il faudrait quand même que, dans le système, on tienne compte de nos besoins. C'est dans ce sens-là parce que lorsqu'il y aura des problèmes dans les autobus, si jamais les élèves n'arrivent pas, on va toujours communiquer avec la commission scolaire pour voir ce qui ne va pas.

M. AUDET: C'est là que nous voyons votre impartialité et votre justesse de jugement lorsque vous commandez un certain service.

Maintenant, lorsque vous avez choisi de vous approprier six autobus, poursuiviez-vous une meilleure rentabilité ou si vous poursuiviez une meilleure planification des services?

M. TOUSIGNANT: Ce que j'ai énoncé tout à l'heure, c'est que pour un certain nombre de services que nous devions nous donner, il nous apparaissait qu'il nous fallait nous doter de véhicules nous appartenant puisque cela représentait plus de souplesse. Je pense, par exemple, aux déplacements interécoles pour les activités sportives. Dans le réseau, aujourd'hui, avec le système à options, il peut arriver qu'un élève doive se déplacer d'une école à l'autre pour aller chercher des options professionnelles. Nos autobus nous permettent cette souplesse et nous permettent aussi... Il serait assez difficile de pouvoir planifier au début d'une année avec un transporteur l'ensemble des déplacements qui devront se faire entre les écoles, sur le plan des activités, etc.

Nous ne cachons pas non plus que nous nous sommes dotés d'autobus parce que nous considérions que ça pouvait être un tableau indicateur pour les transporteurs, en disant: Nous, nous sommes capables de donner tel service, nous vous demandons tel autre. Nous produisons chaque année des rapports financiers sur l'utilisation, sur le nombre de voyages que nous faisons. Et si les transporteurs publics peuvent nous dire que ce n'est pas rentable, nous pourrions le réétudier, mais actuellement, avec les chiffres que nous avons à l'appui, ils ne peuvent pas nous le démontrer, pour ce nombre-là.

C'est un souhait que j'émets, je ne voudrais pas qu'à partir de ce fait, on en déduise un principe ou autre chose, je traduis tout simplement une situation.

M. LACROIX: L'honorable député de Chicoutimi a posé une question, et je crois que vous avez manqué d'y répondre, parce qu'il y avait deux ou trois questions de greffées à la sienne. Il parlait des six autobus qui étaient la propriété de la commission scolaire et il vous a demandé si les six conducteurs étaient à l'emploi partiel ou en permanence de la commission scolaire de l'Estrie.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. le Président, je désire indiquer au député des Iles-de-la-Madeleine que je n'ai pas insisté, parce que ça apparaît ici.

M. LACROIX: Je n'ai pas ce...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a un tableau qui indique qu'il y en a trois à temps plein et trois à temps partiel.

M. TOUSIGNANT: C'est ça.

M. LACROIX: C'est parce que nous ne sommes pas comme le député de Sainte-Marie, nous. Des fois, nous avons des obligations à nos bureaux, nous n'avons pas que ça à faire.

M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions...

M. LACROIX: Si vous permettez, vos six autobus servent-ils aussi pour des cas spéciaux, par exemple pour les handicapés, etc?

M. TOUSIGNANT: Oui.

M. LE PRESIDENT: Alors, il n'y a pas d'autres questions?

M. OSTIGUY: Est-ce que vous vous servez de vos autobus pour faire du transport en dehors des heures des classes, par exemple lorsqu'il y a des joutes de hockey à l'extérieur, etc?

M. TOUSIGNANT: Dans le document, vous avez une indication, 213 voyages.

M. OSTIGUY: En dehors des heures d'école?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour des fins?

M. TOUSIGNANT: Pour des fins sportives, pastorales.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des écoliers qui utilisent les autobus, ce qui apparaît dans votre tableau?

M. TOUSIGNANT: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voyages de septembre à juin: 95. Ce sont ces voyages-là?

M. TOUSIGNANT: Oui, ce sont des activités qui prolongent l'enseignement. Il y a par exemple la pastorale, ou bien les étudiants vont aller en fin de semaine dans un camp pour les compétitions sportives. C'est le genre de déplacements.

M. OSTIGUY: Vous détenez un permis spécial pour ce genre de transport?

M. TOUSIGNANT: Non, ce n'est pas nécessaire, c'est pour les activités d'enseignement comme telles.

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que vous avez déjà fait l'estimation des coûts de ces voyages-là disons pour des tournées sportives? Quel taux vous chargerait l'entreprise privée? Quel est le coût, pour l'autobus, le chauffeur, le temps, etc.? Avez-vous déjà fait la comparaison des coûts? Cela devient du transport à charte-partie — ce n'est plus du transport d'écoliers.

M. TOUSIGNANT: Pas dans notre sens...

M. TREMBLAY (Bourassa): Si vous les prenez pour aller jouer au hockey dans mon beau comté de Bourassa, à l'aréna de Montréal-Nord, à partir de Sherbrooke, ce n'est plus du transport d'écoliers. C'est pour des fins sportives. A ce moment-là, avez-vous évalué les coûts — je ne parle pas de permis de la Régie des transports, elle n'a rien à faire là, je vous parle des coûts — si ça vous coûterait moins cher de le faire vous-mêmes? Vous dites que vous avez trois chauffeurs. Ont-ils de l'ouvrage à longueur de journée? Quand ils n'ont rien à faire, que font-ils? Ils lavent les autobus? Ils ne sont pas professeurs en même temps?

M. TOUSIGNANT: Non. Si vous voyiez le nombre de voyages qui ont été faits, — je m'en souvenais tantôt. — Il y a évidemment aussi l'entretien des autobus, il y a du transport pour l'enfance inadaptée.

Pourquoi trois? Parce que nous pouvons, selon notre évaluation, en employer trois à temps plein. Nous pouvons les utiliser. J'aimerais, si vous me le permettez, expliquer un peu ce que j'ai dit tout à l'heure: lorsqu'on parle de voyages pour les étudiants c'est dans le cadre des activités parascolaires. A toutes fins pratiques, c'est pour des fins d'enseignement. Il ne s'agit pas d'un club en dehors de l'école que nous allons transporter. Il s'agit d'activités qui prolongent tout simplement l'enseignement. Les jeunes, au lieu de faire l'activité à telle école, vont aller dans tel camp, ils vont aller à tel endroit pour une compétition, mais c'est pour des activités sportives.

C'est pour des fins d'enseignement, ce n'est pas un pèlerinage, ce n'est pas une tournée touristique.

M. TREMBLAY (Bourassa): Quand vous venez jouer au hockey à l'aréna de Montréal-Nord, dans le comté de Bourassa, ce sont des activités sportives, ce n'est pas de l'éducation.

M. TOUSIGNANT: Oui, mais selon le règlement no 7, lorsqu'on parle maintenant d'enseignement, on parle de cours et d'activités. C'est la nouvelle loi, le règlement no 7. Cela fait partie du cadre de l'enseignement.

M. LACROIX: C'est refusé par la Communauté urbaine de Montréal, de Québec et de l'Outaouais. Il y a eu des représentations de faites ici à l'effet que ces choses-là sont refusées. Comment cela se fait-il que, dans votre commission scolaire régionale, cela peut se faire sans permis spécial?

M. TOUSIGNANT: J'ai l'impression qu'on ne parle pas du même type d'activités.

M. LACROIX: Pour le transport, par exemple, de vos élèves de Sherbrooke à Montréal-Nord pour aller jouer une partie de hockey, vous ne nous ferez pas croire que c'est parascolaire, cela.

M. TOUSIGNANT: Je vais illustrer. Vous avez, par exemple, une quizaine d'étudiants — je vais prendre un domaine qui illustre bien, prenez la question de la pastorale — qui s'organisent avec l'animateur de la pastorale pour aller en fin de semaine à un endroit donné pour des sessions d'animation en pastorale. A ce moment-là, nous — évidemment, nous pouvons

faire erreur — nous interprétons cela comme étant tout simplement un prolongement de l'enseignement.

Ils ne vont pas concurrencer, ils vont continuer, tout simplement, dans un autre lieu, l'enseignement. Vous avez la même chose avec les classes vertes alors que des jeunes s'en vont dans un lieu pour des activités d'enseignement, c'est la même chose.

M. TREMBLAY (Bourassa): Mais si vous allez jouer contre un autre club...

M. TOUSIGNANT: Cela, c'est une autre chose.

M. TREMBLAY (Bourassa) ... il y a toujours une compétition quand même.

M. TOUSIGNANT: Cela, c'est une autre chose.

M. TREMBLAY (Bourassa): Faites attention, parce que la Communauté urbaine de Montréal...

M. TOUSIGNANT: Va nous surveiller.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... va vous envoyer des frais, va vous faire des arrêts. Vous avez le droit de les amener, mais pas de les reprendre.

M. TOUSIGNANT: Ce que vous traduisez comme une concurrence, cela ne réfère pas à nos activités. Il est sûr qu'en dehors, lorsqu'il y a concurrence, il faut demander au transport public de nous fournir un autobus et il nous produit le compte, c'est la situation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans ces activités dites sportives, supposons que vous preniez un groupe d'étudiants de votre régionale et que vous les ameniez voir jouer les Remparts à Québec, est-ce que ce genre de choses se fait?

M. TOUSIGNANT: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce qui explique le nombre d'autobus que l'on voit au Colisée le soir, à la sortie des parties de hockey, et qui viennent de partout au Québec? C'est la popularité de Guy Lafleur qui fait cela?

M. LACROIX: C'est pour la pastorale.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La pastorale...

M. TOUSIGNANT: Vous donnez beaucoup d'extension à la pastorale. Nous ne lui donnons pas tout à fait...

M. LACROIX: Mens sana in corpore sano.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Nous allons revenir au bill 23 et laisser faire la pastorale, si vous voulez bien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais nous en profitons, nous, de la pastorale.

M. TREMBLAY (Bourassa): On pourrait se demander si ces autobus peuvent servir pour les synagogues aussi.

UNE VOIX: Pourquoi?

M. TREMBLAY (Bourassa): ... pour les synagogues. Bon, on ne posera pas la question.

M. TOUSIGNANT: Pour répondre à M. Tremblay, disons qu'il est possible que les autobus demandent un permis. Je dis bien, il est possible, mais vous savez ce qui se passe à Québec. Il faudrait peut-être demander à ceux qui sont de Québec d'apporter plus de précision. Je ne m'aventurerai pas là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans votre cas, on demandera un permis. Si vous aviez à faire ce genre de voyage avec un autobus scolaire, vous devriez requérir un permis.

M. TOUSIGNANT: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: Alors, s'il n'y a pas d'autres questions à l'endroit de M. Tousignant, je le remercie infiniment de la représentation qu'il nous a faite. Je crois qu'il a fait valoir son point d'une façon très brillante. Je l'en remercie.

M. TOUSIGNANT: C'est moi qui vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, j'appellerais la Fédération des employés de services publics, M. Léon Lepage. Maintenant, je voudrais vous aviser immédiatement que si vous préférez présenter votre mémoire demain, nous allons ajourner à demain matin, 10 heures. Alors si c'est assez long et que vous pensez avoir besoin de plus temps que ce qu'il nous reste avant l'ajournement...

M. LEPAGE: Nous aimerions ne procéder que demain, si c'était possible.

M. LE PRESIDENT: Certainement, je vous donne le choix, l'option. Alors, la commission ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

M. LEGER: M. le Président, une question. M. LE PRESIDENT: Oui.

M. LEGER: Est-ce qu'il y aurait possibilité, pour permettre à toutes les personnes qui viennent présenter des mémoires, que le prési-

dent de la commission établisse, au début d'une séance de la commission, l'ordre dans lequel les mémoires seront présentés? Il y a des gens qui viennent ici et qui se demandent: Est-ce qu'on passe ou non? S'ils savaient qu'ils sont les troisièmes ou les quatrièmes sur la liste, ils pourraient dire, c'est d'accord, on sera là. Mais il y a des gens qu'on fait venir ici d'une façon régulière et ils ne savent même pas s'ils doivent passer ou non. Je pense qu'un peu plus de compréhension pour les gens qui n'ont peut-être pas les fonds voulus à dépenser...

M. PRENOVEAU: M. le Président, peut-être que je pourrais ajouter qu'une fois que nous avons été convoqués par télégramme, il serait de mise de nous aviser si oui ou non nous allons passer. J'ai fait des appels téléphoniques ici à Québec. J'ai demandé: A quelle heure allons-nous passer? Nous ne savons pas. On fait un ordre du jour et on ne le suit pas, selon toute apparence.

M. LE PRESIDENT: Ecoutez, je comprends vos problèmes. Je suis sensible à vos problèmes, mais je ne peux pas faire autrement. Il faut quand même tenter de grouper les gens qui présentent le même point de vue.

Ce matin, on a passé deux heures et demie avec les camionneurs artisans; cet après-midi, la commission scolaire et l'Estrie a pris au-delà d'une heure et la Communauté urbaine a pris au-delà d'une heure aussi, presque deux heures.

M. PRENOVEAU: M. le Président, ce serait votre responsabilité de voir à écourter les débats qui se répètent. C'est une vraie farce d'assister à ces commissions parlementaires. C'est une répétition continuelle. Nous avons écouté la Communauté urbaine de Montréal et ainsi de suite.

M. LE PRESIDENT: Je ne peux pas empêcher personne de parler tant qu'on reste dans le sujet. Alors, malheureusement...

M. PRENOVOST: C'est la quatrième fois qu'on nous convoque.

M. LE PRESIDENT: ... il y en a qui répètent les mêmes questions; je le sais, je m'en rends compte.

M. LEGER : Ce serait une bonne chose au départ que les gens sachent à quelle heure ils vont être entendus.

M. LE PRESIDENT: Demain, on sait qu'on commence avec la Fédération des employés de services publics.

M. LEGER : Est-ce que vous pourriez nommer les autres qui vont suivre?

M. LE PRESIDENT: Bien, après, il y aura l'Association métropolitaine des propriétaires de taxi, l'Association des propriétaires de taxi, Me Boucher, et puis l'Association des chauffeurs de taxi de Québec, le Syndicat professionnel des propriétaires de taxi unis du Québec métropolitain qui vient de remettre son mémoire; ensuite, il y a le Syndicat des chauffeurs de taxi de la province de Québec.

M. LEGER: Cela, c'est dans l'ordre.

M. LE PRESIDENT: Demain, on va entendre tous les gens de taxi.

M. LEGER: Dans cet ordre-là? M. LE PRESIDENT: Oui.

M. LEGER: Alors, on est sûr d'entendre parler de taxi demain.

M. LE PRESIDENT: Demain, vous allez entendre parler de taxi. On pensait bien les passer aujourd'hui et même à la dernière séance.

(Fin de la séance: 17 h 49)

Séance du mercredi 1er septembre 1971

(Dix heures six minutes)

M. KENNEDY (président de la commission parlementaire des Transports): A l'ordre, messieurs! Nous reprenons où nous avons suspendu hier avec la Fédération des employés de services publics Inc. M. Léon Lepage, conseiller technique.

Fédération des employés des services publics Inc. M. Léon Lepage

M. LEPAGE: M. le Président, M. le Ministre, messieurs les députés. D'abord, je tiens à remercier les membres de la commission parlementaire qui nous permettent par la voie de cette commission de nous faire entendre.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous parler plus près du micro? On a de la difficulté à vous entendre.

M. LEPAGE: J'ai des difficultés avec la table; je m'excuse. Disons tout d'abord que la fédération que nous représentons compte 8,000 travailleurs syndiqués qui, plus particulièrement dans le domaine du transport public, oeuvrent à l'intérieur de leurs fonctions, c'est-à-dire à l'intérieur des commissions de transport local et chez certains transporteurs privés. Notre intervention, nous croyons la justifier par le fait que, par suite de la syndicalisation de ces groupes, les conditions de travail dans le transport public ont subi des transformations assez radicales ces dernières années et que ces transformations ont amélioré de façon très marquée les conditions dans lesquelles travaillent les chauffeurs d'autobus et ceux qui sont affectés au service d'entretien, au travail de bureau et autres fonctions similaires.

Nous tenons à faire remarquer aussi que notre intervention se veut très sérieuse. Il s'agit de se référer à l'historique des négociations dans le secteur du transport public. On peut tenir compte des conflits à Montréal, Québec, Shawinigan, Laval qui ont amené les conditions de travail existantes pour ces travailleurs. Ces conditions de travail que nous considérons comme des droits acquis nous semblent être mises en cause et en danger par certaines introductions et modifications à des législations existantes ou par l'introduction de nouveaux éléments dans le projet de loi no 23.

Il y a deux parties à notre intervention, si vous permettez. La première traite d'éléments ou d'articles du projet de loi no 23 qui pourraient être modifiés à notre sens et qui permettraient des solutions aux problèmes que l'on va vous présenter. Il y a aussi la deuxième partie, les articles 126, 132 et 140 du projet de loi no 23 qui à notre sens affectent les droits acquis des travailleurs que nous représentons.

L'article 41 traite de la juridiction de la nouvelle Commission des transports. Cet article lui donne le pouvoir — à la suite d'une information — de retirer les plaques et les certificats d'immatriculation de véhicules qui mettent en danger la santé et la sécurité publiques.

Il est évident que les informateurs, à la lecture de l'article, ne peuvent être entendus au moment où l'on discute et où on décide au mérite de la plainte qui a été portée par un informateur quelconque, un organisme ou un individu. Or, nous croyons que cela devrait être possible pour permettre une meilleure participation des individus et des groupes concernés et plus particulièrement des organismes oeuvrant dans ce milieu qui désirent que le public soit protégé et que l'application des normes de sécurité se fasse de façon uniforme et équitable pour tout le monde.

Notre fédération compte parmi ses membres, les 8,000 que j'ai cités tout à l'heure, ce que nous considérons, nous, comme des professionnels dans le domaine du transport public, spécialement les chauffeurs d'autobus et ceux qui sont affectés au service de l'entretien. Nous préconisons une sécurité maximale. Il est bien évident que les normes de sécurité, quand elles rendent le service pour lequel elles ont été introduites, ne peuvent recevoir de notre fédération et des syndicats qui y sont affiliés qu'un appui total. Seulement, ces normes de sécurité, nous croyons qu'elles devraient être appliquées de façon plus uniforme. Nous croyons que les différents transporteurs ne sont sûrement pas, actuellement, à la hauteur de la situation dans l'application des normes de sécurité, surtout dans le domaine du transport des écoliers.

Un autre des aspects du projet de loi no 23 que nous aimerions discuter est la mise en place d'un tribunal des transports et sa juridiction. Le tribunal des transports peut en appel, selon le texte du projet de loi no 23, annuler et disposer de toute décision prise par le directeur du Bureau des véhicules automobiles dans le cas d'émission, de suspension, d'annulation ou de refus d'accorder un permis ou certificat d'immatriculation. Un aspect important du contrôle est accompli par l'introduction de ce texte, mais il y a une autre partie qui n'est pas couverte. Il faudrait qu'on se penche sur le problème des permis de chauffeurs d'autobus.

En effet, l'article 26 du code de la route refuse l'émission d'un permis de conduire ou en réduit les effets. Pour des raisons connues ou inconnues, l'article 26 du code de la route stipule que le directeur peut refuser l'émission d'un permis ou en restreindre les effets. Il peut annuler un permis ou en suspendre les effets et exiger la remise au bureau des certificats. Evidemment, les raisons ne sont pas spécifiées dans cet article. Dans les cas où un chauffeur d'autobus perd son permis ou qu'on en réduit les effets, nous tenons à souligner que ces personnes se voient privées de leur gagne-pain et souvent, par la même occasion, une foule de droits acquis en vertu des conventions collectives disparaissent.

Les pertes en résultant sont considérables et l'on doit prévoir un canal rapide, efficace et équitable pour entendre ces cas. La procédure actuelle en vertu du code de la route est inexistante, inopérante et dilatoire.

On pourrait vous donner des cas où, par exemple, quand un chauffeur d'autobus s'est vu refuser ou enlever son permis, après toutes sortes d'interventions de la part des syndicats et des individus, et après des interventions individuelles parlementaires, c'est-à-dire des députés et autres, on a réussi à établir que les raisons de la suspension des permis étaient inexistantes ou inconnues.

Et on a des cas très spécifiques où des gens ont perdu leur permis de chauffeur d'autobus pour une durée de 18 mois pour se rendre compte qu'il n'y avait pas de raison à la suspension de permis, et effectivement, cet individu-là a été affecté pendant 18 mois par la perte des salaires. Certains ont dû vivre de l'aide du bien-être social pour des raisons inconnues et tout à fait fausses en vertu de la décision du directeur du Bureau des véhicules automobiles.

Nous croyons qu'une modification à l'article 66 du projet de loi no 23 pourrait permettre aux individus ou aux organismes concernés de procéder avec diligence en appel dans les cas où des individus se croiraient lésés. L'autre aspect du projet no 23 que nous contestons fortement concerne les articles 126, 132 et 140 qui traitent des voyages spéciaux à charte-partie et qui affectent les commissions de transport locales, c'est-à-dire les commissions de transport de Montréal, de la région de l'Outaouais et de Québec.

Les articles 126, 132 et 140, sans les lire, ont tous la même portée. Ils modifient les projets de loi créant les communautés urbaines et introduisent par le projet de loi no 23 la possibilité, pour d'autres transporteurs que les commissions de transport locales, d'oeuvrer dans le domaine du transport. Par ce biais, ils affectent les conditions de travail de nos membres dans ces régions particulières, étant donné, et après explication — ce que je veux faire plus tard — des luttes acharnées qui ont dû être faites et entreprises par ces différents syndiqués pour arriver à la conclusion de conventions collectives qui prévoient des salaires plus élevés que la concurrence que nous considérons déloyale dans le domaine du transport public, et qui a amené des conditions, des clauses de sécurité d'emploi ou qui a déterminé des conditions de travail, plus particulièrement dans certaines conventions pour le voyage touristique ou pour le transport en charte-partie.

Si nous utilisons l'exemple de l'article 132, modifiant la juridiction de la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal, on se rend compte que l'article 313 de la loi 75, créant la Communauté urbaine de Montréal, a été modifié pour permettre, selon l'expression du ministre des Transports, à tout le monde de vivre. Elle permettrait à des transporteurs privés la possibilité d'oeuvrer dans le domaine de la charte-partie.

Nous avons, chez nous, dans notre syndicat, le Syndicat du transport de Montréal, une quantité approximative de 1,100 à 1,200 chauffeurs d'autobus qui possèdent, de façon contractuelle, des clauses de sécurité d'emploi et des conditions de travail y incluant les bénéfices marginaux extrêmement supérieurs à ce qui est versé par les exploitants actuels à Montréal, le transport public, ou tout autre exploitant existant mais qui, actuellement, n'oeuvre pas dans le domaine de la charte-partie, étant donné le droit de veto de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal.

Ces conditions de travail selon nous, pourraient être et sont effectivement en danger s'il y a compression des postes disponibles à la Commission de transport, ce qui pourrait priver effectivement d'emploi les employés de la Communauté urbaine de Montréal, membres du Syndicat du transport, ou pourrait, dans le cadre de la négociation collective d'une prochaine convention, créer des difficultés importantes au niveau de la négociation, dû à la concurrence de transporteurs ou au fait que les conditions de travail ne sont pas déterminées. Et ceux qu'on connaît actuellement, les conditions de travail permettent certainement à peine aux chauffeurs d'autobus de vivre. J'entends, par exemple, les transporteurs d'écoliers où le travail est temporaire et où les normes de sécurité ne sont pas toujours suivies. Par exemple, à la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal, nos membres doivent, pour se qualifier comme chauffeurs d'autobus, satisfaire à des normes de sécurité et des normes professionnelles très élevées. Et plusieurs postulants pour des emplois à la Commission de transport de Montréal se dirigent vers les transporteurs que nous mentionnons et se trouvent très facilement des emplois. Nous avons d'autres exemples où, souvent, des chauffeurs d'autobus de transport d'écoliers sont embauchés dans des tavernes.

Et, avant d'introduire une législation comme celle-là, on aurait dû faire une enquête dans le domaine et peut-être que la loi aurait une autre saveur que celle qu'elle a actuellement.

Le projet de loi no 23 enlève à nos syndiqués organisés, selon nous, et met en danger certaines clauses contractuelles. Pourtant, par l'introduction du bill no 84, qui crée la Commission de transport de la rive sud, l'article 313 de la loi no 75 est répété dans sa totalité. Il permet ou permettra à la Commission de transport de la rive sud d'exercer les mêmes droits qu'exerce actuellement la Commission de transport de Montréal.

Par la création de la Commission de transport de la cité urbaine de Laval aussi, on permet ces mêmes privilèges qu'on enlève actuellement à la Commission de transport urbaine de Montréal, et par ricochet on affecte les conditions de travail de nos membres. Et pour cette raison,

nous croyons que ces articles 126, 132 et 140 doivent être biffés du projet de loi no 23.

Nous considérons que le projet de loi no 23 affecte directement uniquement les travailleurs syndiqués et qu'à moins de la preuve du contraire, nous pourrions considérer que les travailleurs organisés pourraient être visés par l'adoption d'un projet de loi de cette nature.

Nous sommes évidemment d'accord pour que le législateur mette de l'ordre dans le domaine du transport en général et dans le domaine du transport public en particulier. Si le législateur pouvait tenir compte des objections ou des remarques de notre intervention, surtout au niveau de l'incidence très directe qu'a sur les droits acquis des travailleurs organisés une législation de cette nature, si elle ne permettait pas l'élargissement du secteur privé dans le domaine du transport public — car selon nous elle crée une concurrence tout à fait déloyale — elle aurait une répercussion sur les possibilités de correctifs à apporter aux conditions existantes que nous considérons qui doivent être modifiées.

Si le projet de loi no 23 ne crée pas des déficits aux commissions de transport avec lesquelles nous sommes habilités légalement à négocier, si ces montants qui sont enlevés dans le cadre des juridictions des commissions de transport ne servent pas à subventionner les transporteurs privés d'une façon ou d'une autre, nous considérons que c'est de la subvention indirecte à l'entreprise privée, qui devrait être conservée dans les cadres actuels pour éviter évidemment des déficits accrus qui finalement seront payés par les deniers publics, soit à l'un ou l'autre palier des gouvernements.

Nous croyons que, par l'introduction des articles 132, 136 et 140, nous aurons effectivement — étant dans le domaine syndical depuis un certain nombre d'années, je puis vous en avertir dès maintenant — au niveau des prochaines négociations le potentiel et tous les éléments de ce qu'on appelle une recette à problèmes. Nous croyons que les parlementaires devront voir, parce qu'on en a l'occasion, à ce que ces situations n'arrivent pas pour qu'on ne soit pas pris avec des mises à pied massives où tout le monde s'arrache les cheveux parce qu'effectivement on a voulu permettre à l'entreprise privée de vivre dans le domaine du transport public.

Nous croyons que l'article qui accorde la juridiction à la commission de suspendre des permis devrait permettre à l'informateur d'être entendu. Nous croyons que le tribunal des transports devrait permettre à un chauffeur d'autobus qui a été privé de son gagne-pain l'utilisation du processus pour aller en appel. Nous croyons que, par l'abolition des articles 132, 136 et 140, le projet de loi no 23, tel que présenté, pourrait régler un certain nombre de problèmes dans le transport en général et dans le transport public en particulier.

M. le Président, je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Lepage. Maintenant, si vous me permettez d'ouvrir une parenthèse, Me Stein m'a demandé la parole pour une minute. Il veut simplement corriger une suggestion qu'il a faite hier. Je voulais que ce soit inscrit dans les registres et c'est pourquoi je lui ai demandé de le faire publiquement.

M. Charles Stein

M. STEIN: Merci, M. le Président. Il s'agit de l'article 126 du projet et du paragraphe 1 de l'article 251 de la Loi de la Communauté urbaine de Québec. L'une des propositions conditionnelles d'amendement de rédaction que j'ai faites hier était celle-ci: Insérer le mot "ou" après le mot "spéciaux" pour que cela se lise "voyage spéciaux ou à charte-partie".

Au cas où on adopterait ce nouveau texte, en dépit de notre opposition — j'espère que l'hypothèse ne se réalisera pas — à tout événement, je retire cette proposition conditionnelle d'amendement de pure rédaction. Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M. Lepage de la présentation de son mémoire. Je crois qu'il a très nettement mis l'accent sur certains aspects fondamentaux du projet de loi. M. Lepage a assisté, hier, aux auditions de la commission.

Il a dû se rendre compte, non seulement de l'intérêt, mais de l'insistance que nous avons manifestée en ce qui concerne cette distinction qu'il faut faire entre le transport en commun dans les transports publics tel qu'il existe et tel qu'il est organisé par les Communautés urbaines de Montréal, de Hull ou de Québec, etc. M. Lepage a dû aussi voir jusqu'à quel point nous avons insisté pour que soient reconnus et protégés tous les droits acquis: sécurité d'emploi, normes de sécurité maximale, conditions de travail. Alors, je ne crois pas nécessaire, pour ma part, d'insister longuement sur ce que nous avons déjà dit. Le mémoire que vous avez présenté, M. Lepage, est excellent et précise certains points qui sont pour vous et votre association sujets d'inquiétude.

Nous avons, hier, en interrogeant la Commission des transports de la Communauté urbaine de Québec, mis l'accent sur les droits et pouvoirs qui ont été reconnus à cette communauté urbaine et à sa commission de transport, comme dans le cas des autres que je mentionnais tout à l'heure. Il existe toutefois un problème, soit dans le domaine du transport d'écoliers, dans le domaine du transport à charte-partie, voyages touristiques, etc., c'est qu'il y a des entreprises privées qui exploitent des services et si dans l'idéal et conformément aux dispositions qui régissent les lois des communautés urbaines et de leurs commissions des

transports, on pouvait souhaiter que ces commissions de transport occupent tout le champ, on doit quand même, sur une certaine période de temps, tenir compte de l'existence de l'entreprise privée. Nous vivons en régime d'entreprises privées, là où l'Etat a reconnu à l'entreprise publique une priorité, nous avons demandé au ministre de maintenir cette priorité.

Mais on ne peut quand même pas disposer du revers de la main des entreprises privées qui ont consenti des investissements importants et qui assurent des services dont, dans bien des cas, on nous dit qu'ils sont adéquats. Nous avons, nous, de cette commission parlementaire, en notre qualité de législateurs, à tenir compte aussi des particularités régionales. Il y a des cas bien déterminés et beaucoup plus clairs, là où existent des communautés urbaines et des commissions de transport. Mais il y a tout le reste du Québec, toutes ces régions où n'existent pas de tels services publics.

Par conséquent, il nous faut concilier les exigences de l'entreprise publique créée par l'Etat et les exigences de l'entreprise privée puisque, à moins que je ne m'abuse, nous ne vivons pas encore en régime socialiste, mais nous vivons en régime d'entreprise libre. Par conséquent, M. Lepage, je ne puis qu'abonder dans votre sens lorsque vous demandez, par des suggestions très nettes, que soient protégés les droits des travailleurs que vous représentez, que ces droits soient élargis et que disparaisse de la loi ce qui pourrait mettre en cause ces droits et constituer un danger.

Quant au reste, l'entreprise privée — nous avons déjà fait connaître notre avis à ce sujet — nous n'avons pas l'intention de demander au gouvernement de prendre des dispositions qui mettraient en péril des entreprises privées rentables qui donnent aux citoyens des services qui sont adéquats et qui permettent aussi à un grand nombre de citoyens du Québec de vivre avec des conditions de salaire, des conditions de travail, sécurité d'emploi, etc., convenables là où cela existe.

Il faut donc que le ministre et le gouvernement fassent un sérieux examen de la situation afin que le projet de loi no 23 couvre tous ces secteurs et tienne compte des représentations que vous faites en même temps que de celles qui nous ont été faites par les transporteurs privés.

M. le Président, je ne veux pas pour l'instant aller plus avant, mais je tiens à rassurer M. Lepage sur les propositions qu'il nous a faites. J'en admets le principe sous toutes réserves, évidemment, des conditions particulières dont nous devons tenir compte dans diverses régions du territoire du Québec.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEPAGE: Est-ce que vous me permettriez de faire une remarque au député de

Chicoutimi? Notre mémoire n'est pas une contestation globale de l'entreprise privée; nous le faisons par d'autres canaux normaux. C'est à l'intérieur du transport public. Nous considérons que l'entreprise privée, sous sa forme actuelle, qui exploite des services, exploite aussi les travailleurs, qu'à cause du réservoir de chômeurs on puise là-dedans, tant et aussi longtemps qu'on en a besoin, à des salaires ridicules et à des conditions de travail inacceptables. Cela crée pour les syndiqués, les travailleurs organisés, une concurrence déloyale.

Nous ne tenons pas à condamner les chauffeurs d'autobus d'écoliers et les autres. Ils n'ont pas le choix. Le législateur a à prendre une décision. Il doit, selon nous, créer des législations pour ne pas élargir ce secteur, mais plutôt qui auraient tendance à le faire disparaître. Si on veut normaliser par le haut plutôt que par le bas, on a l'occasion de le faire.

Deuxièmement, notre mémoire ne conteste pas les transporteurs privés là où n'existe pas de commission de transport local. Il est évident que le transport doit se faire quand même et l'organisation sociale ne le permettant pas, peut-être, on n'est pas arrivé à créer de ces commissions. Notre propos, à l'intérieur de notre intervention, se situe uniquement où existe cette situation. Pour ce qui est de la contestation globale de l'entreprise privée, c'est bien sûr que ce n'est pas ici qu'on va la faire. Seulement, je tiens à souligner que le projet de loi no 23, en comparaison avec la loi no 75, le projet de loi no 84 et les règlements créant la ville de Laval, il y a un paradoxe et peut-être que les politiques de partis devraient être plus continues pour avoir une politique économico-sociale plus rationelle. C'est notre propos dans le mémoire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lepage, je vous remercie de ces précisions. Ce que vous venez de dire n'ajoute rien à ce qui a déjà été dit, à ce que nous avons dit nous-mêmes. Nous avons tenu compte de cela; nous l'avons notamment longuement discuté, hier, lors de l'interrogatoire que nous avons fait subir aux représentants de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec. Vous parlez de cas spécifiques où des transporteurs privés exploiteraient une main-d'oeuvre qui est disponible. Il appartient au gouvernement et il appartient ensuite aux législateurs lorsqu'ils ont à examiner les propositions de loi du gouvernement de voir que ces situations soient corrigées à partir d'un examen des faits, d'un examen qui nous donne un tableau précis de la situation. Nous aurons, j'imagine, l'occasion d'entendre à nouveau votre organisme en d'autres circonstances et nous aurons l'occasion de vous interroger sur des situations de fait qui pourraient exister et qui correspondraient à la description que vous faites. Et si telle chose existe — je sais que cela existe en certains cas — il nous appartient, il appartient au gouvernement d'abord de pren-

dre toute disposition pour corriger cette situation d'injustice sociale.

M. LEPAGE: Si vous me permettez, je sais que ce que j'ai dit à la fin n'ajoute rien, mais je ne voulais pas que la commission ajoute quelque chose.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Je voudrais féliciter M. Lepage pour son mémoire qui ajoute une dimension supplémentaire à l'argumentation qui voudrait, depuis les débuts de ces audiences publiques, donner la priorité aux services publics dans le domaine des transports en commun. Je ne pense pas que M. Lepage dans son mémoire veuille présenter quelque chose qui pourrait nuire à l'entreprise privée.

Je ne pense pas que ce soit son but principal. Je vois tout simplement que le gouvernement a un choix à faire. Est-ce que, par cette loi, il doit protéger d'abord les intérêts de l'entreprise privée et, ensuite, le travailleur et la population, ou s'il doit d'abord protéger le travailleur et la population en général, qui paie des taxes, et par la suite protéger aussi l'entreprise privée? L'une ne va pas sans l'autre, il y a une question de priorité entre les deux. Je ne pense pas qu'on puisse dire que le fait qu'on veut protéger d'abord les intérêts des travailleurs signifie qu'on va enlever une certaine liberté à l'entreprise. Sur ce, M. le Président, je vais poser quelques questions à M. Lepage.

A la page 2, vous dites que l'informateur devrait être entendu pour exposer les raisons et la preuve justifiant ses interventions. Pourriez-vous nous donner quelques explications là-dessus? Est-ce que vous voulez dire par là qu'un de vos employés en fonction aurait pu commettre quelques erreurs? Il y a une certaine déficience et il y a eu une dénonciation quelconque et il est appelé à comparaître devant un comité de discipline, mais vous voudriez que l'informateur aussi vienne dire pourquoi... est-ce que c'est dans ce sens-là?

M. LEPAGE: Cela dépend des conditions de travail intérieures qui régissent les individus qui, eux, travaillent sous les directives des commissions de transport et des exploitants privés. Quand, par exemple, un concurrent au niveau de l'exploitation ou un organisme qui est habilité à vérifier certains faits dans ce domaine, quand ces gens considèrent que les normes sécuritaires ou pédagogiques dans le domaine du transport des écoliers ne sont pas suivies, quand une plainte est faite par un organisme ou un individu la commission, avant de prendre des décisions, quand elle décide au mérite, doit entendre cet informateur, que ce soit un groupe, un individu ou un concurrent, établir le fondement de sa plainte. C'est dans ce sens-là que l'on considère que l'article 41 pourrait être modifié.

M. LEGER: Vous avez mentionné que vous représentez environ 8,000 employés. Est-ce exact?

M. LEPAGE: C'est exact.

M. LEGER: Vous dites que le bill 23 tel que présenté, s'il n'y a pas d'amendement, peut enlever une certaine sécurité d'emploi. Est-ce que vous pourriez expliquer ce que vous...

M. LEPAGE: On sait, pour l'avoir vérifié dans la mesure où c'est possible — on n'est pas dans l'administration des différentes commissions scolaires ou des transporteurs privés — qu'un certain nombre de nos chauffeurs et les gens du service de l'entretien sont affectés à la réparation et à la conduite de ce matériel roulant que sont les autobus. Effectivement, on arrive à la conclusion que, dans certains cas, il pourrait y avoir une compression suffisante des postes disponibles pour qu'on procède à des mises à pied massives. Ce sont ces choses que l'on veut éviter. Evidemment, si en comprimant ces postes, on crée des ouvertures chez les concurrents, vous comprendrez notre position.

M. LEGER: Vous avez dit, un peu plus loin, que vous aviez du personnel qui avait été entrafné et qualifié, je n'ai pas tellement saisi quand vous avez dit: " ... ils sont engagés dans une taverne."

M. LEPAGE: Chez les chauffeurs d'autobus affectés au transport des écoliers, nous avons, après vérification, constaté que l'embauchage de ces chauffeurs se fait de façon tout à fait irrationnelle par opposition ou en parallèle si vous voulez avec ce qui se fait dans les cas que je connais dans les commissions de transport locales. Les critères d'embauchage dans les commissions de transport sont très rigides au niveau sécuritaire. Au niveau pédagogique, c'est assez difficile, cela n'apparaît pas dans le genre d'examen qu'ils ont fait subir aux chauffeurs d'autobus. Pour ce qui est des normes sécuritaires, il est évident que ce qui est imposé aux travailleurs syndiqués, ou pour ceux qui s'introduisent dans ces groupes, on devrait utiliser également les mêmes critères partout où un individu a à conduire un véhicule public, que ce soit pour les écoliers, pour une clientèle privée — je parle de charte-partie — ou pour le transport public connu de façon générale, c'est-à-dire les lignes courantes et le transport du public en général.

M. LEGER: Est-ce que vous avez des chiffres concernant le nombre d'employés qui seraient engagés par les entreprises privées comparativement au nombre que vous avez dans l'entreprise publique?

M. LEPAGE: La rotation du personnel chez les transporteurs qui exploitent des services de cette nature est tellement élevée qu'il est

presque impossible de déterminer un nombre fixe d'employés qui exerceraient plus de 40 p.c. de leur temps à transporter des écoliers. C'est presque impossible. En tout cas, nous n'avons pas les moyens à la fédération et dans nos syndicats de faire ces vérifications.

Je pense que l'embauchage se faisant rapidement et les mises à pied aussi, il serait difficile pour n'importe qui, à moins d'établir un canal de vérification, d'examens et d'embauchage universel, de corriger la situation dans ce domaine.

M. LEGER: Est-ce que vous êtes au courant si la plupart des employés des entreprises privées sont syndiqués ou pas?

M. LEPAGE: Ils ne sont pas syndiqués généralement parlant, sauf que les transporteurs privés à long cours, certaines grosses unités, sont syndiqués. Les commissions de transport locales sont toutes syndiquées.

M. LEGER: Est-ce que vous auriez des noms de certaines entreprises qui sont syndiquées, dans les grosses?

M. LEPAGE: Des noms... Des entreprises comme "Voyageur" et tout ça. Evidemment, au niveau de la Commission urbaine de Montréal, le problème ne se pose pas, sauf pour les voyages à charte-partie, en particulier, dans une entreprise antisyndicale qui s'appelle Murray Hill.

M. LEGER: La Murray Hill n'est pas syndiquée. Maintenant, vous avez dit tantôt que le bill 23, tel qu'adopté, amènerait une concurrence déloyale pour le service public. Pourriez-vous expliciter comment ça peut être une concurrence déloyale?

M. LEPAGE: Après avoir entendu les différents rapports des commissions de transport locales qui font état de la rentabilité du service commercial qui est à charte-partie, je ne crois pas que personne d'autre soit arrivé à la conclusion que, si on enlevait ces sommes d'argent des budgets des commissions de transport locales pour les verser à l'entreprise privée, on créerait un déficit et, indirectement, on subventionnerait les entrepreneurs privés dans le même domaine.

Il y a aussi la concurrence déloyale au niveau de notre préoccupation qui est celle d'être obligés de négocier dans un contexte où on paye à peine le salaire minimum, alors que nos gens ont déjà $4.00 l'heure. Il est bien évident que, si on est obligé de négocier dans ces conditions-là, on va nous traiter d'irrationnels parce qu'on va faire des comparaisons avec des entreprises où il n'existe pas de syndicat et où, parce que l'on peut soumissionner à toutes sortes de prix, on ne peut pas payer et aussi où on empêche la syndicalisation des gens.

M. LEGER: Je voudrais tout simplement terminer en faisant remarquer au ministre qu'on accumule depuis quelques jours des arguments. J'espère que le ministre est conscient de toutes ces demandes et des conséquences qu'entraînerait le fait que les articles 126, 251 et 313 ne seraient pas corrigés. Je voudrais simplement de nouveau noter ici les différents arguments, au cas où le ministre les aurait oubliés. D'abord des droits ont été reconnus aux communautés urbaines de Montréal, de Québec, de l'Outaouais, de la ville de Laval, de la rive sud, que le bill 23 leur enlèverait. Il y a aussi le cas, comme à la Communauté urbaine de Québec, des achats de droits acquis d'entreprises privées qui sont maintenant utilisés par les entreprises publiques. Les commissions de transport des communautés urbaines ont besoin de ces revenus-là pour combler leur déficit. Il y a une question de planification générale pour les communautés urbaines si elles ont une priorité ou non dans le domaine des services spéciaux, de charte-partie et de commissions de transport.

Eviter aussi, comme je le disais hier, le jeu de coulisses, le patronage possible, si ce n'est pas clairement mis dans la loi que ce sont les commissions de transport public qui ont la priorité dans ce domaine-là. Le problème aussi que soulevait la Communauté urbaine de Québec hier que des meilleures routes soient données aux entreprises privées et qu'on laisse le reste aux entreprises publiques. Il y a aussi les conditions de travail des employés, comme M. Lepage vient de le mentionner ce matin; il y a un problème de sécurité d'emploi, un problème de négociation pour les syndiqués des commissions de transport du domaine public face à la concurrence d'organismes privés qui n'ont pas d'employés syndiqués. Il y a aussi le fait que les dépenses sont déjà prévues au budget pour ces services à charte-partie dans les commissions de transport et que ce n'est pas tellement ajouter une dépense de rendre le service; c'est plutôt comprimer les dépenses qu'elles ont déjà. J'espère que le ministre en prend non seulement bonne note, parce qu'il nous le dit régulièrement qu'il en prend bonne note, mais qu'il repense ces amendements aux articles que j'ai mentionnés tantôt.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je prends très bonne note, comme le député de Lafontaine vient de le mentionner, et même j'enregistre, comme dirait le député de Chicoutimi. Ces questions que vous me posez ce matin ont reçu réponse à plusieurs reprises. J'aurais une question à poser à M. Lepage, mais, avant, j'aimerais vous remercier pour votre mémoire. Dans les catégories de chauffeur, je ne sais pas si vous avez été mis au courant mais mon prédécesseur, le Dr Lizotte, qui était ministre sous le règne de l'Union Nationale, c'est que, maintenant, les catégories de chauffeurs sont différentes. Si vous regardez sur votre permis de conduire, un chauffeur d'autobus est dans la catégorie A; un

chauffeur comme moi, j'ai un permis de chauffeur, c'est dans la catégorie B; et un conducteur est dans la catégorie E maintenant. Alors, il y a des catégories différentes.

Le ministère des Transports fait passer des examens à ces gens de la catégorie A, pour savoir s'ils peuvent conduire un autobus scolaire ou tout autre autobus. Vous étiez au courant que ça se faisait?

M. LEPAGE: Je suis tout à fait au courant, c'est justement ces éléments qui ont amené notre intervention. Si un gars qui a détenu un permis de catégorie A est disqualifié pour toutes sortes de raisons, il devient de catégorie B, son gagne-pain prend le bord. Et il y a un problème à ce moment-là.

On a vérifié, on a eu des cas patents, on peut vous donner les noms et les adresses des individus en cause qui ont été suspendus ou à qui on a donné un B plutôt qu'un A, ce qui les empêchait de conduire un autobus. Après 18 mois d'interventions ardues, on a fait la preuve que les raisons n'existaient pas ou étaient inconnues et on a remis les permis de chauffeurs aux individus concernés sans qu'il y ait dédommagement. Pendant 18 mois, les travailleurs concernés ont dû vivre d'expédients et du bien-être social.

M. TREMBLAY (Bourassa): Il y a peut-être — je prends bien votre parole sur...

M. LEPAGE: On peut vous fournir les noms et les adresses des gens intervenus. D'ailleurs, votre adjoint parlementaire, le député de Na-pierville, a eu à participer et il nous a aussi suggéré de faire des recommandations de cette nature.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce sont peut-être des choses qui sont arrivées mais, par contre, je trouve que c'est une sécurité pour le public aussi de voir que ces gens, les chauffeurs d'autobus, sont dans une catégorie A, alors qu'ils sont responsables du transport d'écoliers ou du transport public. Je crois que, déjà, c'est un pas en avant.

Peut-être il y a eu des droits qui ont été violés, ou peut-être des gens n'ont pas pu se faire entendre assez vite. Cela a pris un certain temps. Par contre, il y a la question de la sécurité aussi. Je crois que, sur ce côté, il y a peut-être une modification à apporter pour que ça passe plus vite. Par contre, je crois que c'est une sécurité pour le public.

M. LEPAGE: Nous voulons souligner ici que des gens viennent chez nous avec un permis émis par le directeur du Bureau des véhicules automobiles et ne réussissent pas à obtenir un emploi à l'intérieur des groupes que je représente. C'est dans ce sens que je désire soulever le problème. Et aussi quand on leur enlève le permis, c'est la question de l'appel pour faire la preuve que les raisons invoquées étaient justifiées et si elles étaient justifiées. On ne conteste pas les normes de sécurité qui sont établies, on dit tout simplement que si, par exemple, pour des raisons basées sur les normes qui sont établies par le ministère, on suspend un permis l'individu ait droit d'appel devant le tribunal du transport.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je m'excuse, depuis mon accession comme ministre du Transport, j'ai demandé que les commissaires siègent toutes les semaines pour entendre toutes ces causes sur les changements de catégorie. C'est une chose qui se fait. Je ne conteste pas que ça peut arriver que, peut-être, quelqu'un ait été lésé dans ses droits. Cela peut prendre plus de temps. Mais, de toute façon, je crois que c'est une sécurité pour le transport public d'avoir des catégories différentes pour le chauffeur d'autobus. On ne peut pas nier cela, un chauffeur d'autobus a une responsabilité plus grande que celui qui conduit une automobile dans laquelle il y a deux personnes.

Sur le retrait des permis de conduite, vous en avez parlé, vous savez comme moi que, depuis le mois de mai 1970, le ministère des Transports n'enlève pas de permis si un chauffeur est arrêté et jugé par un juge et qu'il doit garder son permis de conduire; le ministère n'enlève pas le permis. S'il y a eu accident, on demande un V-2-C d'une compagnie d'assurances. Mais on n'enlève pas le permis si le juge a décidé de laisser le permis au chauffeur.

Par contre, s'il y a eu accident, si c'était un cas d'ivresse au volant le soir après son travail — ça peut toucher un de vos chauffeurs — à ce moment-là, s'il a besoin de son permis pour travailler, le juge en décide, non pas le ministère.

Nous croyons que si un juge a rendu un jugement ce n'est pas au ministère d'aller chercher le permis dans la poche du chauffeur. Au mois de mai 1970 la décision a été prise qu'après qu'un juge a rendu un jugement, la seule chose que nous demandons en cas d'accident ou en cas d'ivresse — c'est un V-2-C d'une compagnie d'assurance.

C'était la remarque que je voulais faire au sujet des changements qui ont été apportés.

M. LEPAGE: Nous sommes au courant. Nous savons qu'il y a de la jurisprudence et qu'il y a des décisions rendues en vertu du code criminel, violation aux règlements...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je voulais être très honnête, je ne veux pas m'attribuer toutes ces bonnes choses. Il y en a qui avaient été préparées. Quand je suis arrivé au ministère, elles sont arrivées sur mon bureau, la décision avait été prise. Je ne veux pas me lancer des fleurs. Ce sont des choses qui avaient été faites avant. Par contre, j'ai trouvé qu'elles avaient du bon sens, qu'après qu'un juge avait décidé que

quelqu'un garde son permis de conduire, ce n'était pas au ministère à l'enlever.

M. LEPAGE: Nous savons qu'une certaine jurisprudence a fait que le ministère des Transports a modifié son attitude. C'est qu'il y a eu contestation en appel d'une décision du bureau et qu'effectivement le bureau a été obligé de remettre le permis à un individu, parce que le juge avait décidé dans sa sentence que le permis pouvait être maintenu. C'est à partir de cela qu'on a établi un règlement différent, selon les informations que j'ai du service de la Régie des transports.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: Lorsque vous parlez des chauffeurs de l'entreprise privée qui peuvent être de seconde classe, à l'effet que ce seraient des gens engagés dans des tavernes, etc., est-ce que vous voulez dire par le fait même que ces chauffeurs ont échappé à l'examen de la Commission des transports qui les aurait classés dans la catégorie A, par exemple?

M. LEPAGE: Cela n'a aucune relation avec le permis qu'ils détiennent. J'ai expliqué au ministre tout à l'heure que chez nous les gens passent les examens. Ils sont habilités à faire le travail ou pas, et les gens qui ne réussissent pas travaillent ailleurs. C'était une référence à la qualité professionnelle des gens qui travaillent à l'intérieur de nos cadres, c'est-à- dire des commissions de transport locales ou des transporteurs privés qui exploitent actuellement certains trajets à long cours, par opposition à du transport urbain ou local.

M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions, nous vous remercions, M. Lepage, de la façon dont vous avez présenté votre mémoire. Je crois que vous avez bien fait valoir vos arguments et je vous remercie.

M. LEPAGE: Je remercie la commission parlementaire de nous avoir entendu.

Association métropolitaine des propriétaires de taxis

M. LE PRESIDENT: M. Henri Paquette, représentant de l'Association métropolitaine des propriétaires de taxis.

M. Paul Prénoveau

M. PRENOVEAU: J'aimerais apporter une légère correction. Mon nom est Paul Prénoveau, président de l'Association métropolitaine des propriétaires de taxi.

M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire, l'Association métropolitaine des propriétaires de taxi est un corps légalement constitué en vertu de la Loi des syndicats professionnels, chapitre 146, et 13-14, Elizabeth Il, chapitre 51.

Il serait de première importance d'avancer que l'industrie du taxi injecte dans l'économie montréalaise une somme d'environ $110 millions par an, tant en investissements, entretien, consommation et les salaires de ceux qui en retirent leur subsistance puisque l'industrie du taxi procure de l'emploi à plus de 16,000 personnes.

Nous désirons rappeler à la commission que le rôle joué par l'industrie du taxi comme moyen de transport de passagers ne se limite pas à un service de luxe, mais bien à un service d'utilité publique qui comble les déficiences des autres transports en commun.

L'industrie du taxi, comme roulier public, a toujours été ignorée dans l'orientation de son commerce et des règlements qui la régissent; voilà une des raisons pour laquelle elle est, plus souvent qu'à son tour, plongée dans une multiplicité de problèmes. Qu'il nous suffise de mentionner, comme preuve récente, la législation apportée par le comité des bills privés en confiant pleine juridiction à la ville de Dorval sur toute l'industrie de l'île de Montréal pour le service de l'aérogare de Dorval. Nous croyons qu'il aurait été plus sage de confier ce pouvoir à la Commission urbaine de Montréal.

Au sujet du présent projet de loi, nous partageons l'opinion de certains organismes sur les doutes qui peuvent se dégager de certains articles du bill 23. L'industrie du taxi ne voudrait pas se retrouver dans une situation qui menacerait davantage son existence par un manque de précision, ou encore par une trop grande autorité du ministère des Transports en certains domaines, plus précisément en pouvoir de réglementation et pour en déterminer le nombre.

Dans le texte de la présente loi, nous croyons que le paragraphe a) de l'article 5, qui laisse au ministre le soin de déterminer le nombre, la nature et la qualité des systèmes de transport et au paragraphe b), d'intégrer et de coordonner tels services en matière de transport de passagers, laisse l'industrie du taxi inquiète par la possibilité de fusion d'autres transports connexes dont nous avons à déplorer l'existence. Puisqu'avec l'adoption de la présente loi, par l'article 154, la Loi de la Régie des transports, chapitre 228, sera abrogée, ce qui fait disparaître automatiquement l'article 29 a) de la Loi de la régie qui limite le nombre de permis et que cette limitation du nombre se retrouve entre les mains du ministre des Transports tel que défini au paragraphe a) de l'article 5.

Article 8: Au paragraphe a), nous sommes d'avis que divers moyens de transport peuvent nécessiter des normes de construction, mais nous croyons que dans l'industrie du taxi, celle-ci rencontre toutes les exigences de sécurité et que des normes de construction spécifiques entraîneraient la formation d'un cartel.

Nous sommes d'avis que le paragraphe d), qui donne au lieutenant-gouverneur en conseil le droit de décréter des tarifs, taux ou coûts de transport, devrait être de la juridiction de la Commission des transports du Québec qui pourrait étudier les demandes en séance publique.

Article 17: Notre association accepte l'idée d'un comité consultatif lorsqu'il est dit, au paragraphe b) "de personnes spécialisées dans le domaine des transports"; notre industrie a toujours été ignorée dans les réformes ou règlements. Nous voulons participer à l'élaboration de notre avenir.

Article 26: A la lecture du paragraphe 1: "Transport public", il est mentionné "ainsi que le transport de personnes, moyennant rémunération, par des véhicules automobiles au sens du code de la route". L'industrie du taxi aimerait bien obtenir du ministère plus de précisions sur le texte de ce paragraphe.

En nous référant au code de la route, chapitre 231, section 1, dans les déclarations déclaratoires et interprétatoires, à l'article 1, paragraphe 7, il est dit: "Taxi: Le taxi est agencé pour le transport de personnes, au plus sept à la fois, et fait ce transport moyennant considération pécuniaire. Il inclut entre autres le taxicab, l'ambulance et le corbillard." L'industrie du taxi a toujours considéré que le transport de personnes, moyennant considération, était du taxi. Nous aimerions que le ministre des Transports précise sa pensée sur le texte du présent paragraphe.

Article 43: Nous sommes d'avis que le permis de taxi devrait être émis en permanence et devrait faire partie intégrante du commerce, ce que nous croyons plus juste que ce qui existe présentement à savoir qu'à l'heure actuelle une personne peut vendre son permis sans vendre son commerce, chose illogique.

Nous convenons qu'il peut être sujet à révocation pour cause par le tribunal des transports.

Article 44: Nous sommes d'avis que des permis spéciaux ne devraient être émis qu'après avoir avisé les organismes de transport qui font l'objet du permis spécial et de plus, établir la preuve de la nécessité d'un tel permis. Cette audition devrait se faire publiquement devant la Commission des transports du Québec.

Articles 57, 58, 59, 70 et 76: A la lecture de ces articles, l'industrie du taxi ne peut que se réjouir, car, dans le passé, elle n'a jamais été avisée, sauf en de rares cas, des choses qui la concernaient, en matière de transport des passagers. Nous sommes d'avis que les publications de la Gazette officielle du Québec font suite à un besoin trop longtemps attendu.

Article 63: L'industrie du taxi se doit d'acclamer avec joie la création d'un tribunal du transport où enfin elle pourra se faire entendre et obtenir justice, ce qu'elle n'a jamais eu auparavant.

Article 76: Nous partageons l'idée émise par d'autres organismes concernant les délais entre la publication et la déposition des dossiers, ce qui, à notre sens, n'est pas suffisant, puisque la Gazette officielle, étant publiée le samedi, ne nous parvient que le lundi ou le mardi. Alors, nous croyons juste et raisonnable de porter le délai à quinze jours de la publication.

Article 85: Nous partageons l'idée lorsqu'il est dit: "Quiconque enfreint l'une des dispositions de la présente loi ou des règlements ou refuse de se conformer à un ordre donné en vertu de cette loi ou des règlements ou fait sciemment une fausse déclaration relativement à une affaire devant la commission ou le tribunal, commet une infraction."

Mais il faudrait tenir compte du contrevenant. Si celui-ci est le conducteur, nous ne voyons pas comment le propriétaire, en l'occurrence le patron, verrait son permis révoqué pour une infraction qu'il n'a pas commise, et se verrait privé de son droit ou permis.

Le présent article devrait préciser de pénaliser le contrevenant, plutôt que le détenteur du permis, ce qui, à notre sens, serait plus juste, hormis que le détenteur du permis fasse partie de l'accusation comme complice.

Article 89: Nous serions d'avis que les poursuites puissent être intentées par une personne intéressée, avec l'autorisation du ministère des Transports, ou encore le procureur général ou, à défaut, par la personne autorisée à cette fin.

Article 154 : A la lecture de cet article, nous admettons la disparition de la Loi de la Régie des transports, chapitre 228. Alors, nous demandons que la limitation du nombre des permis de taxi, tel que stipulé au paragraphe 29 a) de la Loi de la régie, soit maintenue et incluse dans la présente loi, afin de sauvegarder les droits acquis en conformité avec les lois existantes.

Article 155: Nous partageons le point de vue du texte du présent article, à l'effet que les permis délivrés en vertu de la Loi de la Régie des transports demeurent en vigueur jusqu'à la date à laquelle il aurait expiré en vertu de ladite loi, mais en autant que le présent article ne vient pas en conflit avec l'article 26, paragraphe 1 de la présente loi.

Nous savons que, dans le passé, des ordonnances ont été émises par la Régie des transports concernant le transport de personnes et décrits comme taxis alors que la Régie des transports n'a jamais avisé l'industrie du taxi d'un nouveau genre de transport pour passagers. Par ce geste, la Régie des transports faisait indirectement ce que la ville de Montréal ne pouvait faire directement: augmenter le nombre de permis. Nombre limité par une loi sanctionnée le 11 juillet 1963, chapitre 16, Loi concernant les permis de taxi dans l'île de Montréal.

Nous tenons à faire remarquer qu'une documentation complète traitant de ce sujet fut remise au premier ministre ainsi qu'à M. Alfred

Bossé. Donc, il vous sera facile d'en prendre connaissance.

L'article 156: A la lecture du présent article, l'industrie du taxi n'est assurée que d'une faible garantie de protection en ce qui concerne la rivalité de commerce qui existe entre le service de taxi et l'automobile de promenade. Nous sommes d'avis que le permis accordé par ordonnance de la Régie des transports pour le transport de passagers par véhicules de promenade non enregistrés comme taxis soit abrogé. S'il y à lieu de coordonner ou d'intégrer de tels services, le tout devrait faire le sujet d'une audience devant la Commission des transports du Québec.

Ce qui nous étonne le plus dans le présent projet de loi, c'est que rien n'apparaît au sujet des courtiers en transport communément appelés "associations de services". De plus, de telles associations de services actuelles échappent à tout contrôle de la part d'un corps public, ce qui nous semble une sérieuse anomalie.

Il apparaîtrait de bonne politique que de telles associations de services fussent obligées d'obtenir un permis d'une autorité provinciale et d'être assujetties à une surveillance de la part de la Commission des transports du Québec. Il est à propos d'observer que ces associations jouent un rôle important dans l'industrie du taxi en ce qu'elles constituent la liaison directe entre le détenteur de permis et le public. Leur rôle devrait se limiter à recevoir les appels téléphoniques et les répartir entre leurs membres.

Leur ingérence dans les relations patronales-ouvrières devrait être éliminée, de même que l'obligation de leurs membres de souscrire à une assurance de leur choix. Si les détenteurs de permis de taxi doivent être soumis à des lois et des règlements, nous sommes d'avis que les associations dites de services, qui retirent tout leur revenu de détenteurs de permis, soient soumises à des lois et à des règlements et qu'un contrôle de surveillance se doit d'exister.

Comme il est à prévoir, dès l'adoption de la présente loi, que des règlements doivent régir l'industrie du taxi, nous croyons qu'il serait sage de consulter les organismes légalement constitués tels que déterminés à l'article 17 de la présente loi.

Nous croyons avoir accompli notre devoir vis-à-vis l'industrie du taxi en vous faisant part de notre attitude sur le bill 23 et nous espérons que les remarques concernant certains articles ne feront qu'éclairer cette commission parlementaire sur le transport qui a pour fonction de préserver notre industrie et d'en assurer la permanence d'une manière équitable.

Après avoir étudié à fond nos mémoires et les documents qui y sont joints, il vous sera possible de nous donner justice. Nous admettons qu'il doit exister un contrôle sur le transport de passagers par véhicules automobiles, mais il faut aussi tenir compte de nos besoins, et ils sont nombreux. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorion.

M. BOSSE: Tout d'abord, je voudrais féliciter M. Prénoveau, représentant de l'Association métropolitaine des propriétaires de taxi. Comme bien d'autres, il a dû venir ici à la commission au moins quatre fois avant de se faire entendre, ce qui est déjà un indice de l'intérêt qu'il porte à la question du taxi.

On sait que cette question est beaucoup plus difficile dans la région de Montréal.

Certains problèmes qui se rencontrent à Montréal ne se retrouvent pas dans d'autres villes. Je voudrais donc le féliciter de son beau travail et je peux l'assurer, pour ma part, que les représentations qu'il avait faites lors de l'enquête que j'ai menée ont été prises en bonne considération et qu'elles devraient normalement se transformer, à la suite de l'adoption de la loi, en règlements qui devraient corriger un bon nombre, en tout cas, des difficultés qui sont soulevées ici.

Cependant, je voudrais revenir à quelques points particuliers, comme la remarque que l'on retrouve à la page 2 en ce qui a trait à la juridiction accordée à la ville de Dorval sur l'aéroport de Dorval. Il est important, d'abord, de préciser que cette juridiction n'a été accordée, dans l'esprit du législateur, que pour une période temporaire, c'est-à-dire jusqu'à ce que la loi ait été adoptée et que les règlements s'appliquent. Là, normalement, la communauté urbaine, dans un délai raisonnable, devrait avoir l'autorité. Je veux souhaiter, en tout cas, que, dans les plus brefs délais, on ait dans la région de Montréal, comme dans les autres communautés urbaines, un permis de taxi qui couvre l'ensemble du territoire, de telle sorte qu'il y ait pour les uns et pour les autres moins de gaspillage de temps et d'argent. Si la juridiction a dû être accordée à la ville de Dorval, c'était qu'il y avait à Dorval une situation assez difficile où les chauffeurs de taxis eux-mêmes avaient pris en main une espèce d'autorité non existante ou qui ne s'appliquait pas. Comme ces voitures venaient d'un peu partout dans l'île de Montréal et que personne n'était là pour assurer l'ordre ou la réglementation, il fallait bien nommer une autorité. Oui, allez-y.

M. PRENOVEAU: Me permettriez-vous de vous interrompre un instant...

M. BOSSE: Certainement.

M. PRENOVEAU: ...pour prouver notre point? A plusieurs rencontres, nous vous avons consulté. Malheureusement, le règlement de Dorval est une des raisons pour lesquelles on dit que l'industrie du taxi n'a jamais été consultée.

C'est malheureux, mais si, à ce moment-là, vous nous aviez consultés probablement que la règlementation ou ce qui s'est produit à Dorval ne serait pas arrivé.

M. BOSSE: Je pense que vous soulevez un point extrêmement important: la question de la représentativité ou de la non-représentativité, phénomène plus particulièrement difficile dans la région de Montréal. Alors que, dans d'autres villes, telles Sherbrooke, Québec, par exemple, les chauffeurs ou les propriétaires de taxis ont su s'organiser pour constituer des associations extrêmement représentatives, dans la région de Montréal, on retrouve, encore une fois, ce phénomène de la grande difficulté qu'ont les diverses associations, soit de chauffeurs ou de propriétaires de taxis de se regrouper dans une seule association ou dans deux associations représentatives. Evidemment, c'est là, d'ailleurs, une des difficultés que l'on rencontrera lors de la formation des comités consultatifs au niveau des communautés urbaines de déceler quel est l'élément représentatif.

J'ai souhaité souvent que les gens qui oeuvrent dans l'industrie du taxi dans la région de Montréal, une fois pour toutes, essaient de trouver un mécanisme pour se former en groupes représentatifs. Que ce soit la formule syndicale ou une autre de type professionnel, pour moi, c'est secondaire. Il importe que les gens qui oeuvrent dans l'industrie du taxi se regroupent et cela, c'est assez particulier à la ville de Montréal ou à la région de Montréal.

Pour terminer, en ce qui a trait à la ville de Dorval, il fallait donner cette autorité à quelqu'un et la plus appropriée, en l'occurrence, c'était l'autorité municipale de Dorval. Dans mon esprit et, je pense, dans l'esprit des législateurs, ce n'était que pour une période temporaire, jusqu'à ce que l'intégration des permis de toutes les villes de la Communauté urbaine se fasse à la suite de l'adoption de cette loi.

En ce qui a trait à vos remarques de la page 2 concernant les paragraphes a) et b) de l'article 5, je crois que ces articles, comme l'article 8, sont des mécanismes qu'on retrouve d'ailleurs tout au long de la loi et qui vont permettre, pour ma part, d'appliquer les recommandations que j'avais faites dans le rapport que j'ai présenté au premier ministre et qui a semblé satisfaire un bon nombre de gens oeuvrant dans l'industrie du taxi dans la province, mais plus particulièrement dans la région de Montréal. Evidemment, là comme ailleurs, il y a toujours des imperfections. Il est évident qu'on n'arrivera peut-être pas à satisfaire tout le monde du premier coup, mais il est possible, avec les mécanismes existants dans le présent projet de loi, en y apportant évidemment les corrections nécessaires à la suite des remarques faites devant cette commission par divers organismes, d'y apporter des améliorations afin que lorsqu'on reviendra en Chambre le député de

Chicoutimi soit satisfait ainsi que les corps représentatifs qui ont fait ici des représentations fort pertinentes. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie d'abord M. Bossé, mon collègue de Dorion, des explications qu'il nous a fournies. Je voudrais remercier du même coup M. Prénoveau de son mémoire. Je dois vous dire tout de suite, M. Prénoveau, que le problème du taxi à Montréal est pour le représentant de Chicoutimi, un problème assez complexe. J'en connais passablement sur ce problème. Il y a le rapport de la commission Bossé. Je m'incline devant le président qui nous en a fait connaître les principaux éléments, mais, évidemment, dans notre esprit, nous qui ne vivons pas à Montréal tous les jours le quotidien du chauffeur de taxi, du propriétaire de taxi, nous ne pouvons pas prendre toute la dimension de cet immense problème. C'est pourquoi je ne voudrais pas vous interroger trop longuement avant d'avoir entendu les autres représentants de cette profession du taxi.

Il y a quand même un document de base sur lequel nous sommes en principe d'accord, c'est le rapport de la commission Bossé. Ce document a été longuement étudié. Il a été discuté et je sais que des organismes en font état, qu'ils apporteront des modifications, des suggestions additionnelles, etc. C'est à la lumière de ce document que nous voulons examiner votre problème. Votre mémoire est assez spécifique puisqu'il formule des propositions relatives à certains articles du projet de loi qui est devant nous. C'est sur ces sujets que je voudrais vous interroger brièvement, M. Prénoveau, en m'excusant au nom de tous mes collègues de n'avoir pu hier vous donner la possibilité de vous faire entendre. Je sais que vous êtes venu à plusieurs reprises et il est malheureux que l'on ne vous ait pas entendu tout de suite. Comme il y a un grand nombre de gens qui se présentent devant nous, nous devons examiner chacun des mémoires avec attention. C'est ce qui explique le délai que l'on a apporté à vous entendre.

A la page 3 de votre mémoire, au premier paragraphe, au sujet de l'article 8, vous faites une observation. J'aimerais que vous me précisiez cela pour ma gouverne personnelle. C'est une question assez naive que je vous pose, j'en suis conscient. Vous dites: " ... nous sommes d'avis que divers moyens de transport peuvent nécessiter des normes de construction mais nous croyons que dans l'industrie du taxi celles-ci rencontrent toutes les exigences de sécurité et que des normes de construction spécifiques entraîneraient la formation d'un cartel." Est-ce que vous voulez dire par là que le véhicule dont se sert le chauffeur de taxi, le propriétaire de taxi, est de soi un véhicule apte au transport des gens que vous devez transporter? Que c'est une voiture automobile et qu'on

n'a pas besoin d'ajouter ceci et cela — sauf vos radios pour la communication avec vos postes — qu'on n'a pas besoin d'y ajouter quoi que ce soit, dis-je, pour que cela soit un véhicule qui convienne aux chauffeurs de taxi, à la différence, par exemple, d'un autobus qui transporte des écoliers où il faut faire des modifications? Lorsque vous parlez de cartel, vous suggérez peut-être que si on exigeait que la voiture-taxi soit munie de tel ou tel dispositif, il pourrait se former...

M. PRENOVEAU: Si vous me permettez, M. le député...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie, M. Prénoveau.

M. PRENOVEAU: Ce n'est pas dans ce sens-là, ce n'est pas tel et tel équipement, mais si on allait nous suggérer une marque de voiture spécifique...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce que j'entendais dire.

M. PRENOVEAU: Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quand je parlais de tel ou tel dispositif, je voulais dire tel type de voiture comportant tel équipement.

M. PRENOVEAU: Exactement, c'est dans ce sens-là que nous faisons cette observation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai très bien compris, je n'insiste pas, ce que...

M. BOSSE: M. le Président, à moins de faire erreur, je ne crois pas que ce soit là le sens du paragraphe a).

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Moi non plus.

M. BOSSE: Je pense que c'est peut-être fendre les cheveux en quatre, je vois l'intention de l'opinant mais je n'ai pas l'impression que ce soit là ce que la loi ait eu l'intention d'exprimer. Il appartient maintenant au ministre de l'exprimer. Je ne crois pas que ce soit là, cependant, le sens de cet article. Ces craintes m'apparaissent plutôt injustifiées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, à l'article 26, M. Prénoveau, toujours à la page 3 de votre mémoire, vous demandez au ministre des précisions sur une partie de ce paragraphe qui se lit comme suit: Ainsi que le transport de personnes moyennant rémunération par des véhicules automobiles au sens du code de la route. Quelles sont vos craintes à ce sujet-là?

M. PRENOVEAU: Voici, ça concerne l'automobile de louage, M. le député de Chicoutimi, et nous avons deux sortes de permis de taxi à la ville de Montréal: un émis par la ville de Montréal, qui est limité, et un permis émis par la Régie des transports, qui est sans limitation. Pour ce qui s'appelle l'automobile de louage, en l'occurrence le permis donné à Murray Hill, le permis émis par la ville de Montréal est limité par une loi sanctionnée le 11 juillet 1963, tandis que le permis émis par la Régie des transports ne date que du 3 février 1967, et ce transport se fait par véhicules non enregistrés comme taxis. Mais il faut admettre que c'est tout de même du taxi que Murray Hill fait. Il ne faut pas se leurrer, elle ne loue pas d'automobiles. La loi stipule que le détenteur est autorisé à exploiter le service de taxi ci-dessous décrit : Transport de passagers par véhicules de promenade non-enregistrés comme taxis.

Ce permis fait suite à une ordonnance rendue sur le banc en date du 23 décembre 1966. Ce que l'industrie du taxi ne peut admettre, c'est que la Régie des transports, qui a un droit de regard sur le maintien du nombre de permis de taxi, n'excède pas le nombre fixé par la loi. C'est cette même régie qui émet un permis de taxi, ce qui est, à notre point de vue, illégal puisque, par l'émission de ce permis, elle favorise des gens qui avaient fait le transport de passagers illégalement depuis au-delà de trente ans.

Vous savez, la rengaine de Murray Hill, de prendre toutes sortes de procédures judiciaires, d'aller en appel et de perpétuer son commerce et de s'enrichir au détriment des chauffeurs et des petits propriétaires de taxi. Tout est permis à Murray Hill et non aux chauffeurs de taxi. Murray Hill peut solliciter à l'intérieur des hôtels, ce que nous ne pouvons pas faire. La police de Montréal va donner des billets de circulation aux chauffeurs et aux petits propriétaires artisans de taxis, par contre laisse les autobus de Murray Hill en poste.

On a même vu, et M. Bossé se rappellera l'intervention d'un artisan du taxi qui lui avait montré une photographie lors d'une séance publique, que le policier ouvrait la porte de la voiture de Murray Hill pour y faire entrer le client. On trouve ça un petit peu fort comme on dit dans notre langage de taxi. C'est vrai, M. Bossé?

M. BOSSE: Si vous me permettez, là-dessus, M. Prénoveau, comme je l'ai fréquemment communiqué aux chauffeurs de taxi ou aux gens de l'industrie du taxi, lors de l'enquête, je n'ai pas voulu pousser plus loin ni fouiller en profondeur ce problème. Cependant, je suis bien d'accord avec vous que des constatations comme celles dont vous venez de nous faire image sont typiques à Montréal. J'ajouterai même que, pendant qu'il ouvre la portière de la voiture, il donne un billet au chauffeur de taxi qui est à côté.

C'est donc donner ici la dimension du problème et cette espèce d'injustice qui règne. Evidemment, je n'ai pas voulu pousser en

profondeur, laissant le soin au ministère des Transports d'examiner très sérieusement le problème. C'est évident qu'à Montréal, par exemple, le président du comité exécutif, à l'occasion de la discussion de ces problèmes, renvoyait la balle au ministère et, de part et d'autre, on s'est renvoyé la balle.

Je pense, comme vous, qu'on le fait depuis assez longtemps maintenant pour qu'on puisse étudier à fond cette question et s'assurer que les personnes qui détiennent un permis de taxi puissent jouir du plus grand nombre de possibilités de donner des services au public.

M. LEGER: Est-ce que le député de Dorion me permettrait une courte question?

M. BOSSE: C'est évident.

M. LEGER: Est-ce que vous pourriez me dire pourquoi, dans votre enquête, vous avez décidé de ne pas pousser plus loin le problème de Murray Hill?

M. BOSSE: Oui. Non seulement je n'ai pas poussé le problème de Murray Hill, quant à moi je l'ai réglé,...

M. LEGER: C'est le problème...

M. BOSSE: ...le vrai problème de Murray Hill, celui pourquoi bon nombre de gens à Montréal avaient procédé à des actes de violence ou des actes de représentation pacifique; c'était le problème de l'accès des chauffeurs de taxi à l'aéroport de Dorval. Celui-là a été réglé. Il en reste un autre évidemment, celui du transport des passagers à l'intérieur des divers terrtoires de la communauté urbaine. C'est un problème, évidemment, que je n'ai pas voulu aborder volontairement, non pas parce que je suis mêlé de près ou de loin à des intérêts, mais parce que je n'en serais pas sorti. Autant que le problème que vous avez soulevé, celui des associations de services, autant que celui de l'assurance-automobile. Je n'en serais certainement jamais sorti. Je veux bien qu'on m'appelle M. Taxi, cependant je ne veux pas être M. Taxi toute ma vie.

Ceci étant dit, je crois que le problème principal de Murray Hill a été réglé, celui de l'accès, comme celui d'ailleurs de Sept-Iles, dont on n'a pas tellement fait mention dans les journaux. C'est aussi un problème qu'il y avait à Sept-Iles: l'accès des taxis à l'aéroport de Sepd-Iles. Ces deux problèmes ont été réglés: un, c'était Murray Hill qui était concerné et l'autre, c'était Autobus Sept-Iles. Il me semblerait qu'ici, à Québec, il se soit réglé à l'amiable.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Préno-veau, je passe à la page 6 de votre mémoire, à l'article 154. Ce n'est pas que je néglige les autres considérations que vous avez faites, mais on aura l'occasion d'y revenir.

Vous dites: A la lecture de cet article, nous admettons la disparition de la Loi de la Régie des transports. Alors, nous demandons que la limitation du nombre de permis de taxi, tel que stipulé au paragraphe 29 a) de la loi de la régie, soit maintenue et incluse dans la présente loi afin de sauvegarder les droits acquis en conformité avec les lois existantes.

Evidemment, tout le monde sait ce qu'est un droit acquis. Mais est-ce que vous pourriez nous expliquer exactement quelle est, à cet égard, la situation du taxi à Montréal, dans la région que vous représentez, le nombre de taxis et pourquoi vous voulez que soit maintenue cette disposition qui existait dans la Loi de la Régie des transports?

M. PRENOVEAU: C'était la limitation du nombre de permis. Il y a eu le gel des permis — vous êtes au courant, M. le député de Chicoutimi — et nous voulons que ce gel soit respecté. Egalement, avec l'article 29 a), nous ne voulons pas une prolifération de permis d'automobiles de louage concernant Murray Hill.

Quand le député de Dorion avance qu'il a réglé le problème de Dorval, il a réglé le miniproblème de Dorval. Le problème fondamental, c'est Murray Hill dans les hôtels.

Vous voyez des lignes aux postes d'attente. Nous n'avons même pas la chance de solliciter le client; il est sollicité à l'intérieur par Murray Hill. Il est de connivence... Il a établi des postes à l'intérieur de chaque hôtel.

M. LEGER: Vous aviez le bon mot "connivence".

M. PRENOVEAU: Oui, de connivence avec les hôtels. Il ne faut pas se leurrer sur les mots; nous sommes ici pour dire la vérité et c'est ce qui va sortir.

Le député de Dorion dit dans son enquête qu'il y a beaucoup trop de taxis à Montréal. Nous voyons là une occasion heureuse de dire à Murray Hill: Vous avez beaucoup trop de permis, premièrement, et vous allez vous conformer à la loi, parce que Murray Hill, contrairement à tout le monde, veut être au-dessus des lois.

Nous disons — comme le député de Dorion l'avance dans son rapport — que Murray Hill peut racheter l'excédent de permis de taxis qu'il y a à Montréal. Si l'on fait l'historique de Murray Hill, on peut reculer très loin et voir que Murray Hill, un jour, avait 40 voitures, dont 21 sans permis et 19 avec un permis de la ville de Montréal. Vous connaissez toutes ces histoires qui se sont enchaînées, tous ces débats juridiques que je n'ai pas la compétence de contester, mais qui nous font très mal, parce que, comme le disait hier l'avocat Béliveau des camionneurs artisans, — nous sommes à peu près dans la même condition — nous sommes les gens les plus mal foutus de la société montréa-

laise, exploités de A à Z. Qu'on nous donne ce qui nous revient; c'est tout ce que nous demandons.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous le permettez, je vais vous poser une question. Lorsque vous parlez de limitation, est-ce que vous avez un ordre de grandeur en ce qui concerne le nombre de permis qui pourraient être accordés?

M. PRENOVEAU: A la suite du rapport Bossé, nous sommes en partie d'accord avec M. Bossé, mais il faudrait réduire considérablement le nombre de permis, tout en respectant les droits acquis. M. Bossé a suggéré de réduire le nombre de permis avec compensation. Nous nous y opposons si c'est le propriétaire artisan qui doit payer la compensation. Si nous sommes ici aujourd'hui, si le problème de Murray Hill n'est pas réglé et si le problème du taxi montréalais n'est pas réglé, à la base, c'est à cause de Murray Hill. Ces gens-là devraient racheter nos permis.

Il y a eu un manque de responsabilités de la part des gouvernements tant au niveau provincial que municipal. J'espère que le député de Chicoutimi sera d'accord avec moi, parce qu'avant moi d'autres ont fait des représentations.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, je suis heureux de ce que vous nous dites là, parce que les législateurs ne peuvent pas tout connaître. Il faut que des gens comme vous, qui êtes dans le métier, nous expliquent clairement les choses.

Le cas de Murray Hill est une chose publique. Je pense qu'il y a peu de gens qui savent exactement comment ça fonctionne tout ça dans la pratique. Vous parliez tout à l'heure des voitures de louage qui font concurrence aux voitures-taxis.

Combien de voitures de louage — prenons le cas de Murray Hill, — sont en service et se trouvent ainsi à concurrencer vos entreprises? A quels postes stratégiques se trouvent-elles situées? Je veux que vous nous répétiez des faits qui sont connus de la plupart des gens qui sont ici. Je voudrais que vous nous les répétiez afin que ça soit inscrit et qu'on sache, une fois pour toutes, de quoi il retourne.

M. PRENOVEAU: D'accord, M. le député de Chicoutimi. J'avancerais le nombre d'au moins 400 véhicules et ces gens oeuvrent dans les hôtels du centre-ville de Montréal et, également, dans les maisons d'appartements distinguées du centre-ville; il y en a plusieurs à Montréal, comme vous le savez. Ces gens reçoivent des appels d'un peu partout, comme je viens de le mentionner, des maisons d'appartements et des maisons privées.

Il y a des gens qui se servent strictement de Murray Hill à des taux qu'ils sont capables de payer. Il y aurait une information ici que j'aimerais vous donner. Le 16 juillet 1955, une cause a été entendue devant le juge E. Simard et a été rejetée sans frais. La compagnie Murray Hill a avoué sa culpabilité sur quantité de choses pour lesquelles la ville de Montréal la poursuivait, mais avec notre système juridique, elle s'est toujours prévalue de toutes sortes d'appels, etc.

La Murray Hill a aussi profité de la vente des permis de taxi qu'elle détenait de la ville de Montréal ainsi que des taxis sans permis pour se procurer des automobiles de louage. La Régie des transports a fait le jeu de la Murray Hill en ce sens que la ville de Montréal ne voulait pas émettre d'autres permis, le nombre de permis étant gelé, et on a, par le biais de la Régie des transports, laissé proliférer le nombre d'automobiles de louage qui, en somme, sont des taxis.

Nous voudrions aussi que la Murray Hill respecte les ordonnances de la Régie des transports. La Régie des transports disait à la Murray Hill, selon l'ordonnance 602-ATL, qu'elle devrait avoir un terminus sous la bâtisse de l'OACI (aviation internationale) à l'angle des rues University et Dorchester pour entrer vers la Gare centrale ou le Reine Elizabeth. Or, la Murray Hill ne respecte rien, aucune loi. Nous voudrions que le législateur mette la Murray Hill à sa place afin qu'elle respecte les lois tout comme nous.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, cette explication est importante. Je ne suis pas un citoyen résidant dans la ville de Montréal, mais quand je vais à Montréal, je descends évidemment dans des hôtels, dont le Reine Elizabeth, etc. Il arrive assez souvent que, alors que j'ai besoin d'une voiture pour sortir, un garçon de l'hôtel me dise: Monsieur, vous cherchez un taxi? Je dis: Oui, j'ai besoin d'une voiture. On me fait monter dans une voiture et je ne sais pas si c'est un taxi de Montréal.

M. PRENOVEAU: Justement, M. le député de Chicoutimi...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne le sais absolument pas.

M. BOSSE: Un instant, s'il vous plaît. C'est assez facile à identifier parce que la voiture de louage n'a pas de taximètre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'accord. Mais une fois que je suis monté, je me rends compte qu'il n'y a pas de taximètre. Je ne m'en rends compte que quand je suis dedans. Comme je suis toujours un peu pressé — à Montréal il faut toujours courir — je n'ai pas...

M. LEGER: Vous n'osez pas sortir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... le loisir d'en attendre un autre. C'est ce genre de chose

qui se produit. Pour revenir à la question de l'accès des voitures-taxi à l'aérogare de Dorval, M. Bossé indiquait tout à l'heure qu'on avait apporté une solution partielle et temporaire à ce problème.

A votre avis, comment ce problème pourrait-il être réglé à la satisfaction des propriétaires de taxi de Montréal?

M. PRENOVEAU: Il devrait être clairement indiqué que seuls les taxis de l'île de Montréal — je dis bien de l'île de Montréal — aient accès à l'aérogare internationale de Dorval avec permis de la ville de Montréal ou de la communauté urbaine, si vous désirez. Nous respecterons les permis de Westmount, de Côte-Saint-Luc, etc. Dans toutes les villes qui font partie de la communauté urbaine, que chaque individu ait son numéro de poche, communément appelé un "pocket number."

Que chaque association, ou chaque indépendant soit clairement identifié. C'est une partie du problème. Qu'on affiche des tarifs qui soient pour tout le monde dans les postes d'arrivée, pour les clients éventuels, à l'aérogare internationale, aux arrivées domestiques et aux arrivées internationales.

Il y a eu un problème sur la question du compteur. Nous voulons un taux fixe. Il est illogique, à mon sens, de partir de Montréal à un taux fixe et de revenir de Dorval avec un compteur. Ne le croyez-vous pas? A notre avis, il devrait y avoir un tarif fixe de Montréal à l'aérogare et de l'aérogare à n'importe quelle destination où le client éventuel voudrait se rendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, toujours à la page 6 de votre mémoire, vous dites: Nous savons que dans le passé des ordonnances ont été émises par la Régie des transports concernant le transport de personnes et décrits comme taxis, alors que la Régie des transports n'a jamais avisé l'industrie du taxi d'une nouveau genre de permis pour le transport de passagers.

Par ce geste, la Régie des transports faisait indirectement ce que la ville de Montréal ne pouvait faire directement. C'est ce que vous avez mentionné tout à l'heure?

M. PRONOVEAU: Exactement, M. le ministre. Excusez-moi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne perdez pas les bonnes habitudes.

M. LEGER: Vous rappelez des souvenirs douloureux.

M. PRENOVEAU: Vous vous souvenez, M. le député de Chicoutimi, du gel des permis qui a été sanctionné par une loi en 1963. A ce moment-là ou précédemment à cela, en 1958, Murray Hill a liquidé ses voitures-taxis et a fait une demande pour avoir un permis d'automobiles de louage de la Régie des transports. Or, il n'y a pas de limitation en ce qui concerne le nombre de permis d'automobiles de louage distribués dans la région de Montréal. Alors, ce sont eux qui nous font une concurrence déloyale. On parle du cas de Murray Hill; il y a aussi les entrepreneurs de pompes funèbres qui agissent de la même façon, Silverdale Parking, Outremont Limousines et quelques autres. Alors, ces gens-là prennent la crème du taxi et nous laissent le petit lait.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans le cas des entrepreneurs de pompes funèbres, comment cela fonctionne-t-il? Ils louent cela aux familles...

UNE VOIX: Aux morts.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour transporter...

M. PRENOVEAU: D'après les informations que nous avons, si, par malheur, quelqu'un meurt dans votre famille, c'est inclus dans le prix du service funèbre, selon la catégorie de cercueil, que vous devez payer, disons, $800, $1,000. Bien, vous riez, mais, comme on dit en bon français, c'est un "package deal".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je le sais très bien.

M. PRENOVEAU: Les voitures sont incluses selon la qualité du cercueil que vous allez prendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, je suis bien au courant de cela. Ayant eu, d'ailleurs, à ramener une de mes soeurs qui était décédée dans un hôpital de Montréal, j'ai su ce que cela pouvait coûter.

Alors, à la page 7 de votre mémoire, au sujet de l'article 156, vous dites: "Nous sommes d'avis que le permis accordé par ordonnance de la Régie des transports pour le transport de passagers par véhicules de promenade non enregistrés comme taxis soit abrogé". Alors, quel est ce problème exactement?

M. PRENOVEAU: C'est encore le fameux problème d'automobiles de louage de Murray Hill, de Phoenix, de Silverdale Parking, etc., qui se répète. C'est notre pire concurrent; il va chercher la crème du taxi. Alors, nous voulons que ces gens-là disparaissent de la carte ou à peu près, parce que M. Bossé nous dit qu'il y avait beaucoup trop de taxis à Montréal. Pour atteindre un seuil de rentabilité, il nous faudrait avoir un permis de taxi par au moins 800 personnes. Alors, il est grandement temps que les législateurs se penchent sur ce problème qui date de 30 ans, qui se renouvelle enquête après enquête. Si ma mémoire est fidèle, Murray Hill a fait le

sujet de sept enquêtes sur le taxi. Alors, en 1971, il est grandement temps qu'on prenne ses responsabilités et qu'on dise: On règle le problème du taxi une fois pour toutes.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Dans le cas de ces véhicules de promenade non enregistrés comme taxis, ils n'ont pas ce qu'on appelle un permis de taxi comme ceux que vous avez.

M. PRENOVEAU: Non, monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Leurs véhicules sont identifiés toutefois.

M. PRENOVEAU: Juste par le numéro de série de permis 028. On le sait par coeur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est tout?

M. PRENOVEAU: Cette année, mais il change continuellement, chaque année.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et, extérieurement, il n'y a pas d'identification?

M. PRENOVEAU: Aucune. Une autre chose: Si on est pour en conserver un certain nombre, très restreint d'ailleurs, parce qu'il existe une clientèle pour ce genre de commerce, on devrait clairement identifier cette automobile de louage. Alors, si quelqu'on contrevient à la loi, il sera facilement repérable. On a déjà eu, je me souviens, il y a quelques années, une petite plaque qui étaient à l'avant et à l'arrière de la voiture et qui identifiait "automobile de louage". Nous sommes encore plus exigeants que cela.

Nous voudrions voir Murray Hill, si elle se sert de limousines pour le service entre les hôtels, entre un point donné, disons, nous allons prendre l'hôtel Mont-Royal, son fief, et le Reine-Elisabeth, et tous les hôtels du centre-ville de Montréal,nous voulons qu'ils soient clairement identifiés. C'est facile ça, probablement que ça viendra au moment de la réglementation, mais nous voulons que ces gens soient clairement identifiés pour enlever tous les doutes que peuvent avoir les petits propriétaires et les chauffeurs de taxi. Ils subissent la concurrence déloyale de ces gens et ils veulent voir si c'est un Murray Hill, si c'est lui, bon, on va le suivre et on va voir ce qu'il fait. C'est de cette façon que nous chassons Murray Hill, Silverdale Parking, Phoenix, Outremont, tous ces gens qui détiennent des permis.

M. BOSSE: M. le Président, j'imagine que M. Prénoveau ne verrait pas d'inconvénient à ce que Murray Hill ait son propre drapeau sur ses voitures.

M. PRENOVEAU: Peut-être pas un drapeau, M. Bossé, mais j'aimerais que Murray Hill soit clairement identifiée avec une lumière de toit comme nous en avons, par exemple.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Prénoveau, à la page 7 de votre mémoire, un peu plus bas, j'aimerais avoir une explication. Vous dites ceci: Ce qui nous étonne le plus, c'est que, dans le présent projet de loi, rien n'apparaît au sujet de courtiers en transport communément appelés associations de services.

Voudriez-vous m'expliquer, en ce qui concerne Montréal et votre association, ce qu'est l'association de services et de quelle façon cela fait concurrence à l'entreprise de transport par taxi?

M. PRENOVEAU: Ce n'est pas une concurrence comme une dictature. Ce qui nous étonne le plus, c'est qu'on n'a pas touché aux associations dites de services. Ces gens sont strictement l'intermédiaire entre le détenteur de permis et l'opérateur du taxi. Il y a eu une enquête en 1962, si vous vous rappelez bien, de la Régie des transports, qui trouvait que c'était une grande anomalie que de ne pas régir ces associations dites de services.

Si vous êtes pour régir le détenteur d'un permis de taxi et les opérateurs de taxi, il serait logique que chaque association de services soit elle aussi réglementée et régie par une autorité provinciale. Il y a là-dedans la dictature des assurances et un peu plus bas, je dis, leur ingérence dans les relations patronales-ouvrières. Nous ne pouvons pas, dans notre commerce, engager qui nous voulons. Les associations de services peuvent dire: M. Prénoveau, en l'occurrence — et ça m'est arrivé — vous ne pouvez pas engager ce monsieur, il est "barré", comme on dit communément, par les assurances, malgré que le type n'ait eu que deux accidents mineurs.

De plus, ces gens nous imposent par la dictature une compagnie d'assurance de leur choix. Nous voudrions qu'à l'avenir, dans la réglementation, nous ayons le libre choix de nous assurer où nous voulons. On nous leurre et on nous dore la pilule en nous disant qu'une fois en association de telle sorte, on bénéficie d'un taux réduit, ce qui est absolument faux parce que, depuis 1965, nous avons subi des augmentations continuelles et, dans certains cas, le double de la prime de 1965-1966.

Alors, il est grandement temps de voir à réglementer et à superviser les associations de services. On nous impose ce que l'on veut et on nous exploite de A à Z.

M. BOSSE: Pour ajouter aux explications de M. Prénoveau et pour la satisfaction du député de Chicoutimi, il faudrait peut-être dire que ce problème des associations de services, — les plus connues sont évidemment Diamond et LaSalle — n'existe pas dans le reste de la province, dans les autres villes, soit à Québec ou ailleurs. Il semble s'être formée une association du type coopératif ou d'un autre genre, mais elle n'est pas contrôlée par quelques individus comme cela semble être le cas à Montréal.

Il est évident qu'il y a eu de nombreuses plaintes quant aux conditions ou à cette forme de dictature. En fait, on semblait imposer des conditions plus particulièrement au niveau des assurances. La régie interne semble assez rigide. Il semble à première vue qu'il y aurait un contrôle limité par un certain nombre d'individus à Montréal, alors que dans les autres villes du reste de la province, c'est la formule coopérative qui semble dominer, qui apporte en tout cas de nombreuses satisfactions à ses membres et qui les fait bénéficier.

On peut déplorer le fait. Cependant cela demeure des associations de services et, par des moyens très démocratiques, les membres de ces associations pourraient après brève échéance résoudre leurs propres problèmes. C'est là peut-être une des raisons pour laquelle je n'ai pas voulu m'immiscer dans ce problème, tout en connaissant et en prenant connaissance des diverses plaintes qui ont été faites. C'est évident, cependant, qu'il y a une satisfaction extrêmement grande et qu'il y a aussi une forme de dictature ou du moins d'imposition de conditions sinon directement, indirectement. Il y a là de nombreux abus. Cependant, je croyais qu'à Montréal ou dans la région de Montréal, les personnes oeuvrant dans l'industrie du taxi trouveraient, comme ailleurs dans la province ou se modelant sur le reste de la province pour une fois, un moyen de prendre en main leurs propres difficultés et de les résoudre, parce que les moyens démocratiques existent. Je pense qu'en principe l'Etat doit autant que possible essayer de ne pas s'immiscer dans les affaires que les individus peuvent régler entre eux. Je ne pense pas que le fardeau de l'organisation des associations de services incombe à un ministère quelconque si la preuve est faite qu'il est possible que ces situations soient réglées par les personnes impliquées elles-mêmes.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Bossé, je voudrais savoir de M. Prénoveau si ce que vous dites, ce que vous proposez est possible, parce que j'aimerais bien savoir comment fonctionne cette histoire d'association de services. Cela n'existe pas, du moins sous cette forme, dans la région que je représente. Quant à celle de Québec, nous entendrons les représentants des taxis et ils nous diront ce qui en est. Comment cela fonctionne? Est-ce que ce sont des gens qui ont des intérêts dans la propriété de l'entreprise? Comment vous sont imposés ces services qu'on vous propose? Je voudrais avoir un tableau complet de cela.

M. PRENOVEAU: Si on regarde les concessions, le tarif, pour appartenir à une association, dépend des concessions que cette même association détient pour ne nommer que la Gare centrale, Jean-Talon, les hôpitaux et certains hôtels. Le prix, les loyers, que l'Association de services paie à ces gens-là nous sont chargés au prorata du nombre de personnes dans l'association.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me permettez-vous de vous interrompre un moment? Qui détermine les lieux?

M. PRENOVEAU: Chaque association, M. le député de Chicoutimi, possède ses agents qui vont solliciter à gauche et à droite des clients éventuels. Prenez comme la compagnie Bell Téléphone, IBM, les hôpitaux. On est obligé de payer. A ce que je sache, les hôpitaux sont des propriétés publiques maintenant.

M. BOSSE: Mon collègue de Chicoutimi voudrait-il me permettre d'ouvrir une parenthèse pour dire que dans la réglementation nous entendons mettre un terme à toutes les formes de concessions.

M. PRENOVEAU: M. Bossé, dans votre rapport il y a une recommandation à laquelle nous nous opposons et je pense vous en avoir fait part lors d'une rencontre.

Il s'agit, si ma mémoire est fidèle, de ce que vous dites à la page 43 de votre rapport, qu'une concession sera accordée avec l'autorisation de la Régie des transports. N'ouvrez-vous pas là, M. Bossé, la porte à du beau chantage et à peut-être du patronage?

M. BOSSE: C'est là une interprétation que je réprime avec beaucoup de vigueur. Je dois dire que la formulation qui est exprimée ici n'enlève absolument rien au principe et à l'expression de l'intention que nous entendons appliquer en ce qui a trait aux concessions. La seule petite ouverture qui demeure, sous réserve d'approbation de la Commission des transports, c'est évidemment pour empêcher qu'il y ait de fausses interprétations sur le plan juridique. J'entends par là, par exemple, que s'il y avait un terrain qui appartenait à une association de services, on pourrait, au pis-aller, le considérer comme une concession. Pour empêcher cette équivoque, précisément, nous avons voulu réserver à la Commission des transports le soin de déterminer ce qu'était une concession. Dans notre esprit, une concession c'est exactement ce qui existe, par exemple, à la gare de chemin de fer, c'est-à-dire le CNR où il y a une exclusivité de services de passagers à un édifice public appartenant à un gouvernement ou à une entreprise privée.

M. PRENOVEAU: Ils sont obligés de payer une location d'à peu près $45,000 par année.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie mon collègue de Dorion des explications qu'il nous donne et de l'expression d'intention du gouvernement.

M. PRENOVEAU: Dans les faits, c'est dangereux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, si vous le permettez, M. Prénoveau. Le député de Dorion, ou M. le ministre, aura l'occasion d'exprimer les intentions du gouvernement et l'interprétation de certains textes qui sont contestés par les gens qui sont devant nous. Ce que je suis à expliquer à M. Prénoveau c'est la façon dont fonctionne ces associations de services et je voudrais savoir le court et le long de cette histoire...

M. PRENOVEAU: Très bien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour me prononcer lorsque le gouvernement formulera des propositions pratiques qui se traduiront en termes législatifs.

M. PRENOVEAU: Certaines associations, M. le député de Chicoutimi, ont des terrains privés qu'elles exploitent comme postes de taxi. D'autres également — toutes les associaitons devrais-je dire — font aussi de la location ce qu'on appelle, sauf dans le cas de certains hôtels, les hôpitaux, les cliniques médicales, etc., avec lesquels elles ont des lignes directes.

Les associations profitent de leurs terrains et souventefois les revendent avec un profit, mais ce profit ne fait jamais baisser le taux de la cotisation de l'abonné. C'est toujours, en somme, le petit propriétaire artisan, qui appartient à une association, qui paie un montant x, disons d'environ $31.50 par mois, pour enrichir ces gens-là, dans un sens, parce que leurs services doivent se limiter à la répartition d'appels, point. Certaines associations nous donnent également le privilège d'acheter de l'essence à bon marché avec escompte — comme on dit communément. Elles détiennent diverses stations d'essence à travers la ville. Diamond en possède 7 et LaSalle en a 5.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Des stations de service?

M. PRENOVEAU: Des stations de service. Nous n'entrerons pas dans ce détail, mais si vous voulez connaître leurs opérations, c'est ce qu'elles font. Il y a aussi les "charges" — les charge accounts — qui forcent certains clients... dont les clients ont été sollicités par les associations et dont nous acceptons les charges. Nous nous servons de ces billets de charge pour payer notre essence.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau,...

M. PRENOVEAU: Un instant, si vous permettez, je vais ajouter...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, je vous en prie.

M. PRENOVEAU: Ce sont les contrats de service, je pense, que vous cherchez à me faire dévoiler.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. PRENOVEAU: Voici, nous en avons une copie entre l'Association des taxis Vétérans et aujourd'hui c'est aussi l'Association Diamond. Ces gens-là ne permettent pas aux membres, — disons comme nous,... si je fais partie, moi, du Diamond ou du LaSalle, strictement dans le cas du Diamond — de relations patronales-ouvrières.

Ils interviennent là-dedans.

Comme je vous disais tout à l'heure, lorsqu'on veut empêcher quelqu'un de travailler pour moi, on fait du chantage et on dit: Ce monsieur est condamné et rayé par les assurances et vous ne pouvez pas l'engager. Alors, moi je détiens un permis, et le type qui s'en vient travailler pour moi ne travaille pas pour l'association en fait. Il travaille pour moi, c'est moi le détenteur du permis, tandis que l'association de services est strictement le lien entre le détenteur du permis et le public.

C'est pour ça qu'on mentionnait tout à l'heure à M. Bossé que l'on régisse ces gens-là, qu'ils détientent un permis d'une autorité provinciale, pour que, si nous avons des revendications à faire, nous sachions où nous adresser. C'est grave, ces choses-là et c'est écrit. Droits de l'association, obligations des membres: Le membre sera soumis aux obligations suivantes: De payer à l'association, lors de la signature de ce contrat, un droit d'entrée non remboursable, tel que déterminé par le règlement de l'association et de payer les dus mensuellement, tel qu'aussi déterminé par les règlements de l'association entre le premier et le cinquième jour de chaque mois.

Le défaut de se conformer à cette obligation résultera en la résiliation ou l'annulation immédiate de ce contrat sans avis, et le membre renonce par les présentes à tout recours de ce fait. Vous qui êtes avocat, si je ne me trompe, vous connaissez la portée de ces choses-là?

M. BOSSE: M. Prénoveau, me permettriez-vous une petite question? Est-ce que vous avez l'obligation d'appartenir à l'une quelconque de ces associations de services ou avez-vous le loisir d'appartenir à l'une quelconque de ces nombreuses associations de services? Est-ce que vous êtes dans l'obligation d'appartenir...

M. PRENOVEAU: M. Bossé, nous ne sommes pas dans l'obligation mais forcément, par la force des choses, si nous voulons avoir des employés, des chauffeurs, c'est là que nous allons puiser, c'est le réservoir. Les associations ont un fichier de chauffeurs et c'est là qu'on va fouiller pour avoir des chauffeurs.

M. BOSSE: Oui, c'est après avoir pris la décision d'appartenir à l'une quelconque d'entre elles que vous vous plaignez de certaines conditions que vous font certaines associations de services. Cependant, vous avez le loisir d'appartenir à Beaubien Service Taxis ou à une autre association.

M. PRENOVEAU: Ce qui est malheureux, M. Bossé, et je pense que c'est la nature humaine qui veut ça, c'est que chaque personne qui dit: Moi, je choisis le Lasalle parce qu'au Lasalle, en majorité, les voitures sont plus propres, nous, on fait la même chose. Et 90 p.c. des gens qui s'engagent dans une association ne lisent pas ces contrats et n'ont aucune connaissance juridique pour évaluer ces contrats. Que voulez-vous faire à ce moment-là?

M. BOSSE: S'il y a des choses irrégulières dans ces contrats, je crois comprendre que ça pourrait relever du ministère des Institutions financières. Cependant, je vois mal que vous nous demandiez à nous d'aller lire les contrats pour les chauffeurs de taxi avant de les signer. Je comprends qu'il y a quelque chose d'abusif là-dedans.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voici M. Bossé, le problème n'est pas d'examiner tout l'aspect juridique de cette question-là. Ce qui m'intéresse de savoir, c'est comment ça se passe, comment vous requérez les services d'une telle association, quelles sont les conditions qu'elle vous impose. Cela me paraît mettre en péril vos entreprises et vous imposer des charges très onéreuses, même si vous avez le choix de vous adresser à l'une ou l'autre de ces associations de services.

M. LEGER: M. le Président, je crois que M. Prénoveau pourra répondre à la question du député de Chicoutimi. Dans le contrat, je pense qu'il y a une clause qui vous oblige à prendre telle compagnie d'assurance, et c'est là le problème, je pense...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est là que j'allais en venir pour la question des assurances.

M. PRENOVEAU: Exactement. C'est là que nous disons qu'il y a dictature de la part des associations de services en nous suggérant telle et telle compagnie d'assurance, par contrat.

Et nous ne voyons jamais la police originale. On nous dit: Vous pouvez être assurés pour $100,000 ou $500,000, mais nous ne voyons jamais ces chiffres sur une police écrite.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous êtes, à ce moment-là, assuré personnellement et vous n'êtes pas détenteur, par ailleurs, de la police?

M. PRENOVEAU: Non, c'est une assurance-groupe, monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une assurance-groupe.

M. PRENOVEAU: Il y a une police-maîtresse et on nous remet une copie comme quoi nous sommes assurés, mais sans aucun détail spécifique quant à la couverture que nous pouvons obtenir de cette assurance.

Maintenant, si vous voulez...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie.

M. PRENOVEAU: ...des éclaircissements concernant le contrat de services de la Diamond Taxi-cab Association, à l'article 9 on dit: "Le membre devra souscrire à un tel nombre d'actions de $100 chacune de la classe A, "membership", du capital-actions de l'association, qui pourront être déterminées de fois à autre par le bureau d'administration et devra payer le montant de cette souscription au pair par tel versement mensuel, conjointement avec les cotisations mensuelles et les primes d'assurance qui pourront être déterminées de fois à autre par le bureau d'administration de l'association. Les certificats d'actions représentant le nombre d'actions entièrement payées seront émis sur paiement d'icelles, seront déposés à l'association et seront attachés au duplicata du contrat de services détenu par l'association. Les numéros de tels certificats pour actions entièrement payées seront inscrits sur ledit duplicata du contrat. Si le membre omet de payer à l'association les cotisations mensuelles mentionnées au paragraphe 6, ou les primes d'assurance mentionnées aux paragraphes 7 et 8, ou ledit versement partiel périodique mentionné au paragraphe 9 des présentes, à la fin de chaque mois que ces montants deviennent payables respectivement, son contrat sera résilié ipso facto sans préavis, pourvu, cependant, que ledit membre dispose d'un laps de temps de dix jours pendant lesquels il pourra céder ou transférer le présent contrat subordonnément et conformément aux conditions et à la tenure générale 14 des présentes." La part, il ne l'a jamais.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, comme c'est une association de services, on fait de vous, quand vous requérez les services de ces organismes, des associés.

M. PRENOVEAU: Non, pas des associés parce qu'ils exploitent un commerce...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez seulement des obligations, mais vous n'avez pas de droits là-dedans.

M. PRENOVEAU: Absolument pas, nous n'avons pas de droits...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas de participation aux profits.

M. PRENOVEAU: Nulle part. Eux, font des profits.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce que cela peut représenter annuellement, en moyenne, dans le cas d'une association que vous avez mentionnée, comme charge?

M. PRENOVEAU: Pour nous, cela représente une charge mensuelle de $31.50. Si on multiplie par douze, cela fait à peu près $336.

M. LEGER: Ce n'est pas pour la part, cela.

M. PRENOVEAU: Non, c'est juste pour le service d'appel. En plus, nous payons notre prime d'assurance. Si on revient sur le fameux problème des assurances, ils combinent les deux: l'association de services et le service de l'assurance. Il y a des propriétaires de taxis qui, cette année, selon leurs opérations, ont subi des augmentations de primes d'assurance variant de $3 à $55 par mois, et ce par voiture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous parliez tout à l'heure des relations patronales-ouvrières. J'aimerais que vous explicitiez davantage ce point de vue en regard des associations de services. Elles s'opposent à ce qu'il y ait des relations patronales-ouvrières?

M. PRENOVEAU: Presque, parce que la majorité de ces associations n'ont pas de syndicat d'employés et ne voient pas souvent d'un bon oeil les petits propriétaires s'organiser en syndicat professionnel, ou les chauffeurs, peu importe, l'un ou l'autre. A chaque fois qu'il a été question de syndicalisme dans le taxi, ça a été une guerre et souventefois les associations ont tué le syndicalisme qui voulait s'intégrer.

On a voulu expulser quantité de membres. A la Diamond Taxicab Association entre autres, vous n'avez pas le droit de faire partie d'une association. C'est dangereux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais vous poser une dernière question, parce qu'il y a d'autres membres qui veulent vous interroger. Il faut vider la question, c'est important. Ce que vous nous dites va nous servir lorsque nous entendrons d'autres témoins.

Vous parliez tout à l'heure des endroits où se trouvent situés les principaux postes d'appel. Est-ce que ces associations s'occupent de la distribution des voitures à des stands?

M. PRENOVEAU: Non, chaque individu est libre de travailler au poste qu'il veut. Nécessairement, si vous connaissez le fonctionnement de la répartition des appels, on appelle un poste et, s'il n'y a personne, on envoie l'appel au vol ou on va combiner certains postes qui sont rapprochés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je laisse la parole à un collègue, en vous remerciant, M. Prénoveau ; vous m'avez instruit.

M. LE PRESIDENT: Le ministre des Transports.

M. TREMBLAY (Bourassa): A la compagnie à laquelle vous participez, vous payez $31.50 par mois; est-ce que c'est un système coopératif, avez-vous des dividendes quelconques qui vous reviennent à la fin de l'année?

M. PRENOVEAU: Non, si je ne fais pas erreur, je crois que seule Diamond est censée verser un dividende, mais pas sur les dus que nous payons mensuellement.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous recevez des dividendes?

M. PRENOVEAU: Non, nous ne recevons pas... Seule, je crois, Diamond Taxicab Association, qui vend une action à ses membres, paie un dividende annuel, 1 p.c; il est ridicule et le membre ne le reçoit jamais. Nous ne participons pas non plus aux profits que peut faire la compagnie par notre versement de cotisation mensuelle.

Probablement, le problème que vous voulez soulever s'applique aux assurances mensuelles que nous payons. Je vais finir ma pensée...

M. TREMBLAY (Bourassa): Nous allons revenir sur les assurances, mais je voudrais vider cette question. Cela veut dire que cet argent-là ne va pas aux travailleurs du taxi, il va à d'autres personnes inconnues?

M. PRENOVEAU: L'argent va aux propriétaires de l'association de services.

M. TREMBLAY (Bourassa): Qui ne font pas le taxi?

M. PRENOVEAU: Non.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ils louent les terrains, ils les achètent, ils vous donnent les appels, etc., mais par contre vous n'avez pas de dividende, ce n'est pas un système coopératif.

M. PRENOVEAU: Non.

M. TREMBLAY (Bourassa): Deuxièmement sur les assurances — je n'avais que ça à ajouter — ce n'est pas de faire des pressions comme j'ai dit hier, mais de rencontrer mon collègue. Je ne sais pas si vous vous rappelez, mais l'hiver dernier j'ai même fait certaines déclarations au sujet des assurances, que les bons payaient pour les mauvais, c'est-à-dire que celui qui n'avait pas d'accident pendant X années payait le même prix que celui qui avait cinq ou six accidents. J'en ai déjà parlé avec le ministre des Institu-

tions financières, duquel les assurances relèvent, et je lui ai donné beaucoup de normes que nous avons au ministère des Transports.

C'est une chose qui me préoccupe, pas seulement dans le domaine du taxi, mais dans le domaine aussi des personnes en bas de 25 ans qui sont obligées de payer $600 et $700 par année.

L'autre, qui a une auto sport, qui a des accidents, paie le même taux. Là-dessus, je suis bien d'accord non pas pour faire des pressions, mais pour rencontrer mon collègue pour lui faire part du fait que si un chauffeur n'a pas d'accident, il ne doit pas payer pour celui qui en a.

Je voudrais ajouter autre chose. Si vous faites partie d'une association et que vous n'avez pas le duplicata du certificat d'assurance, que vous ne savez pas si c'est pour $100,000, $200,000 ou $300,000 que vous êtes assuré, à ce moment-là, vous allez vers quoi, si vous ne savez même pas pour combien vous êtes assuré?

M. PRENOVEAU: Au point de vue juridique...

M. TREMBLAY (Bourassa): Sur ce point-là...

M. PRENOVEAU: ... c'est inquiétant.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous n'avez aucune police d'assurance qui vous renseigne?

M. PRENOVEAU: Concernant la responsabilité des assurances...

M. TREMBLAY (Bourassa): Est-ce que cela voudrait dire que la compagnie même dont vous faites partie pourrait faire un profit avec la compagnie d'assurance?

M. PRENOVEAU: Définitivement. Il m'a même été proposé, M. le ministre des Transports, que si je pouvais réunir 450 personnes, je pourrais faire un beau petit bénéfice de $25,000 par année strictement sur les primes d'assurance. C'est grave! Si on continue dans le domaine des assurances, je crois que l'avocat Bhérer, je ne me souviens pas qui il représentait... Il y a une chose qui, probablement, s'adresserait au ministère du Transport.

Actuellement, c'est le propriétaire du véhicule qui est responsable en tout temps de sa voiture et même de son opérateur. Nous aimerions savoir s'il y aurait possibilité, à l'avenir, que le contrevenant soit pénalisé et non le détenteur de permis; autrement, c'est illogique. Nos voitures changent de mains. Si quelqu'un possède, disons, cinq voitures; il ne peut pas les opérer toutes lui-même, alors, il doit avoir des employés. On ne peut pas donner une ligne de conduite aux employés. Nous ne pouvons dire: Ne faites pas de virage à gauche, ne brûlez pas de feu rouge. Il devrait être spécifié, dans une loi quelconque, probablement que cela s'adresse au ministère des Transports — de ne pas révoquer le permis de taxi, si c'est l'employé... C'est toujours le propriétaire qui est pénalisé, c'est une guerre devant les tribunaux pour des voitures sales que nous louons.

On va expliquer la location d'une voiture à la semaine. La voiture est enregistrée à notre nom. A ce moment-là, la police donne une contravention au type qui opère la voiture. Nous ne sommes pas l'opérateur, souvent, de la voiture, mais nous sommes pénalisés et nous devons payer des fois, pour un lavage qui aurait peut-être coûté $1.50 au maximum ou $2, des contraventions qui vont parfois jusqu'à $20 à la cour Municipale.

M. TREMBLAY (Bourassa): A la cour Municipale de Montréal?

M. PRENOVEAU: Le stationnement aussi entre quatre heures et six heures trente, $10.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.

M. LEGER: M. Prénoveau, vous connaissez très bien le problème du taxi, on le voit par votre rapport et la facilité des réponses que vous donnez aux questions qui vous sont posées. Est-ce que, d'après vous, l'industrie du taxi a déjà participé à la rédaction des règlements qui la régissent?

M. PRENOVEAU: Non, jamais à ce que je sache, M. le député de Lafontaine. Après avoir assisté à quantité de séances en cette salle, je commence à connaître les députés qui y siègent.

Malheureusement, jamais l'industrie du taxi n'a été invitée à prendre part à sa réglementation, parce qu'on nous a toujours ignorés. On a reconnu les associations dites de services parce que ces gens-là étaient gros. Il y a des gens, à Montréal, qui se font les porte-parole de tout le monde. Mais une association de services n'a pas de mandat pour représenter les petits propriétaires ou les chauffeurs qui travaillent à l'intérieur de cette association. Ils n'ont aucun mandat pour ce faire.

M. BOSSE: Pour ajouter un mot, si le député de Lafontaine me le permet, dans la recommandation no 14, que je fais au premier ministre dans mon rapport, est-ce qu'il n'est pas tenu compte, précisément dans cette recommandation, de la formation d'un comité consultatif? Est-ce qu'il n'est pas tenu compte précisément du fait que les associations ne sont pas des représentants de l'industrie du taxi? Parce que, précisément, les associations me font le reproche de ne pas les avoir incluses dans le comité consultatif et les éléments qu'on retrouve dans ce comité consultatif qu'on veut former au niveau de chaque communauté urbaine ou

municipalité, comprennent les autorités de la communauté ou de la ville, les représentants de chauffeurs, les représentants de propriétaires artisans et les représentants de groupes. Mais il n'est nullement fait mention à nulle part de représentants de l'association de services, précisément parce que nous ne croyons pas qu'ils sont les éléments les plus représentatifs.

M. PRENOVEAU: Nous espérons, M. le député, que vous allez tenir parole sous ce rapport.

M. BOSSE: Sous tous les rapports y compris le rapport Bossé.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais poser une question au ministre à ce sujet-là. Si le ministre des Transports peut m'écouter... Est-ce que le ministre des Transports pourrait être attentif? J'ai une question à lui poser. Est-ce que le député de Bourassa pourrait écouter la question que j'ai à lui poser? J'ai une question à poser au ministre des Transports. Vous êtes toujours avec nous autres, M. le ministre?

UNE VOIX: Arrivez en ville!

M. LEGER : Voici la question que je voulais poser au ministre des Transports. Dernièrement, le premier ministre, M. Bourassa, dans un article d'un journal, disait qu'il voulait innover dans la façon de présenter des lois, en permettant que les règlements, avant qu'ils soient promulgués, soient présentés à des commissions parlementaires pour étude. Alors, je vais demander au ministre des Transports s'il accepterait, avant que les règlements qui vont régir le bill 23 soient appliqués de le présenter à une commission parlementaire, tel que le souhaite le premier ministre, pour que nous puissions participer à l'élaboration de ces règlements et aussi, peut-être, avoir comme témoins, les personnes qui sont concernées dans le domaine, comme pour le bill 45 dont l'étude aura lieu la semaine prochaine.

M. TREMBLAY (Bourassa): Disons que cette question, si le premier ministre... Je n'ai pas lu cet article-là. Si le député de Lafontaine l'a lu, j'aimerais mieux qu'il pose sa question à l'honorable premier ministre au lieu de la poser au ministre des Transports, car je ne suis pas au courant de cette déclaration.

M. LEGER: Bon, alors, oublions la déclaration du premier ministre. Est-ce que le ministre ne pourrait pas, aujourd'hui, nous assurer que les règlements qui vont être présentés, étant donné leur importance et leurs implications, seront présentés à la commission parlementaire?

Est-ce que ce ne serait pas une bonne chose, M. le ministre?

M. TREMBLAY (Bourassa): En ce qui regarde les taxis, le premier ministre...

M. LEGER: Pas seulement les taxis.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... a donné un mandat au député de Dorion, M. Bossé, pour faire enquête dans la province. Alors, si le premier ministre a fait une déclaration sur la réglementation qui doit les régir...

M. LEGER: M. le ministre, vous n'avez pas saisi ma question.

M. TREMBLAY (Bourassa): Sur les règlements du bill 23, je n'ai pas l'intention de convoquer la commission parlementaire.

M. BOSSE: Si vous me permettez, sur la question très spécifique du taxi, je voudrais ajouter ici que nous allons un peu plus loin, c'est-à-dire que non seulement il est question de commission parlementaire, mais nous dépassons ça pour rejoindre vraiment les représentants de l'industrie du taxi en mettant sur pied des comités consultatifs permanents. Evidemment, comment fonctionnent ces comités consultatifs? Bien, ça dépend un peu des participants, de ceux qui sont à l'intérieur. Leur dynamisme fera peut-être en sorte que des améliorations pourront être apportées, surtout si on tient compte des articles 5 et 8 ici qui donnent énormément de pouvoirs au ministre, en tout cas suffisamment pour améliorer les règlements au fur et à mesure que les comités consultatifs auront produit des résolutions ou des recommandations.

M. LEGER: Alors le ministre n'a aucunement l'intention de présenter ces règlements à la commission parlementaire comme l'a fait le ministre Tetley pour les institutions financières? Vous n'avez aucunement l'intention de le faire?

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est le premier ministre qui a fait la déclaration, posez-lui la question, à lui.

M. LEGER: Non, je parle au ministre des Transports...

M. TREMBLAY (Bourassa): Mais tous les règlements, c'est le premier ministre qui en décide, alors vous poserez la question au premier ministre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le député de Lafontaine me permettrait de poser une question très importante? Il a parlé de consultation en ce qui concerne la réglementation des taxis.

M. LEGER: Je ne parle pas de la réglementation du taxi. Le projet de loi 23, comme

plusieurs projets, a comme conséquence une série de règlements, et c'est à ces règlements-là que je me réfère, pas uniquement aux taxis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Auparavant, quand vous avez interrogé M. Prénoveau, vous lui avez demandé si les gens du taxi avaient été consultés lorsqu'il s'agissait de réglementation. Moi, je voudrais greffer une question, si vous le permettez, à la vôtre, parce que M. Prénoveau nous a dit qu'on avait fait des tentatives d'organisation syndicale du taxi dans Montréal, que ce n'était pas encore organisé parfaitement. Est-ce que, justement, le fait de l'inexistence d'organismes du taxi très représentatifs n'a pas été une des raisons pour lesquelles on n'a pas pu consulter ceux qui étaient vraiment intéressés à l'industrie du taxi?

M. PRENOVEAU: Dans un sens, c'est exact ce que vous affirmez, mais il ne faut pas oublier que les associations de services, à chaque fois qu'elles savent qu'il y a en formation soit un syndicat comme le nôtre ou soit un syndicat de chauffeurs, s'organisent pour infiltrer quelqu'un à l'intérieur et pour acheter tous les gars.

Nous représentons peut-être seulement 550 permis de taxi à Montréal; c'est très minime. Nous n'avons d'attache avec aucune association. Nous faisons face à un lion et nous n'avons pas peur même si nous devons y perdre nos permis de taxi ou être expulsés d'une association quelconque. Nous n'avons pas peur de ça. Nous sommes décidés à régler le problème du taxi. M. Bossé a jeté les jalons; il a commencé. Le premier ministre lui-même, quand il était dans l'Opposition, faisait une priorité de Murray Hill. Qu'il tienne à cette priorité; nous sommes derrière lui pour l'appuyer de A jusqu'à Z. Nous voulons avoir satisfaction.

M. LEGER: M. le Président, seulement une seconde. Sur ce problème, je pense qu'il y a quelque chose d'anormal actuellement. Nous écoutons des mémoires depuis l'ouverture de la commission parlementaire. Jusqu'à maintenant, peut-être 15 ou 20 groupes sont venus présenter des mémoires. Pratiquement, chaque fois que nous avons entendu quelqu'un, il y avait un problème avec Murray Hill. Nous l'avons vu avec les commissions de transport de la Communauté urbaine de Montréal, de la Communauté urbaine de Québec, avec les taxis, avec des représentants des transports provinciaux. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu l'occasion d'entendre la compagnie Murray Hill. Je me demande comment il se fait qu'on ne peut pas les entendre. Je pose une question bien directe au ministre — j'ai entendu dire cela et je voudrais qu'il l'infirme ou le confirme —. Est-il vrai ou faux que Murray Hill a demandé d'être entendue privément?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'ai jamais entendu parler de cela.

M. LE PRESIDENT: Un instant, M. Prénoveau. M. le député de Lafontaine, pour votre information, le représentant de Murray Hill sera ici cet après-midi pour présenter son mémoire. Il m'a fait savoir que, ce matin, il ne pourrait pas être présent parce que sa présence était requise en cour. Il sera ici cet après-midi.

M. LEGER: Un autre procès?

M. BOSSE: Si vous le permettez, M. le Président, à la suite des remarques de M. Prénoveau, je voudrais quand même ajouter que les difficultés qu'il rencontre à l'occasion de la formation d'un syndicat ou d'une association ne sont pas propres à son secteur. Les méthodes d'intimidation font généralement leur apparition à l'occasion d'une campagne d'organisation syndicale. Cela n'est pas propre au secteur du taxi. Violence pour violence, cela n'est pas différent dans un secteur plus que dans l'autre.

Evidemment, ça ne justifie pas ceux qui prennent des mesures d'intimidation vis-à-vis les gens qui essaient de se syndiquer. Cependant il reste que c'est un fait qui est une tradition dans l'ensemble du secteur dans la province de Québec.

M. LEGER: M. le Président, quand on voit les problèmes qui pourrissent, qu'il y a des personnes qui subissent des préjudices depuis de nombreuses années, quand on voit que, depuis tellement longtemps, le système a permis qu'il y ait des privilèges qui soient donnés à certaines associations très puissantes qui contrôlent le domaine du transport, le domaine du taxi, M. le Président, je veux vous dire qu'on dit souvent que le bras de la justice est long, mais je tiens à dire que si on ne règle pas le problème, le bras de la justice peut être plus long, et à ce moment-là on paie des pots cassés qu'on aurait pu régler avant. Alors, M. le Président, je pense que cette loi devrait prévenir ces abus et corriger les privilèges qui ont été donnés à des associations qui, pas parce qu'elles sont représentatives, mais parce qu'elles sont puissantes et qu'elles ont des échos chez ceux qui font des lois, permettent des situations qui peuvent être explosives.

Alors, M. le Président, je pense qu'il faut de plus en plus que le ministre tienne compte des gens qui sont exploités et qui ne peuvent plus attendre. Je pense qu'il faut régler au plus tôt non seulement le problème du taxi, mais le problème du transport en général. Je ne comprends pas pourquoi le ministre, qui est bien disposé, ne voudrait pas, quand les règlements vont être édictés, entendre au moins les sons de cloches des partis d'opposition. S'il ne veut pas que la population vienne se présenter ici, au moins que les représentants de l'opposition puissent faire entendre les autres sons de cloches.

M. TREMBLAY (Bourassa): Pour répondre à la question du député de Lafontaine, M. le

Président, je crois que le ministère des Transports, pour une fois, pour la première fois, donne la chance aux artisans propriétaires de taxi ou aux artisans camionneurs ou à d'autres organismes de se faire entendre et d'amener un projet de loi. Si on a accepté de venir en commission, c'est pour les entendre et essayer d'améliorer, s'il y a lieu, certains paragraphes de la loi...

M. LEGER: Evidemment...

M. TREMBLAY (Bourassa): ... d'accord, seulement il faut être aussi logique dans nos pensées. On parle toujours de droits acquis. J'admets que ces gens-là sont peut-être exploités. J'ai demandé, il y a quelques instants, s'il pouvait se faire un profit sur les assurances entre les compagnies, les compagnies pour lesquelles ils travaillent et les compagnies d'assurance, alors j'ai pris bonne note de ces choses-là. Maintenant, après qu'on les aura entendus, c'est de les étudier et de faire les règlements en conséquence. Alors je crois que je réponds à votre question. Quant à revenir en commission sur ces choses-là, c'est le premier ministre qui en décidera.

Moi, je suis ici depuis cinq ans; je prends ma sixième année bientôt. Or, on a siégé en commission et, après, le gouvernement a fait les règlements pour la loi.

A ce moment-ci, je crois que ces gens-là s'expriment très bien, clairement. Tout est enregistré; c'est à nous, après de faire les règlements en conséquence. Vous parlez toujours de droits acquis, mais il faut aussi donner justice à ces gens-là et faire attention aux droits acquis. Il faut être honnête aussi. Il ne faut pas les bercer d'un côté à l'autre. Je veux être honnête pour tout le monde. Si ces gens-là n'ont pas de police d'assurance, de duplicata dans leurs poches et qu'ils payent $800, $900 ou $1,200 par année, je trouve que c'est un non-sens. Je ne dis pas que je vais faire des pressions, mais je dis que je vais dialoguer avec le ministre des Institutions financières. C'est assez difficile d'être plus ouvert que ça.

M. LEGER: Dans votre dialogue avec le ministre des Institutions financières, est-ce que vous ne trouvez pas qu'une des solutions au problème de l'assurance des taxis, comme aussi de l'assurance automobile en général serait d'obtenir un résultat concernant une politique d'assurance-Etat pour les automobiles?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'ai jamais parlé de police d'Etat, pas du tout. L'hiver dernier, j'ai fait une déclaration — je peux le dire ici ce matin — au sujet des compagnies d'assurance; j'ai dit que les gens ne doivent pas payer pour les pots cassés des autres. C'est ça que j'ai dit; je n'ai pas parlé d'assurance d'Etat pour les automobiles.

M. LEGER: Mais vous n'avez aucunement l'intention...

M. LE PRESIDENT: Je rappelle le député de Lafontaine au bill 23.

M. LEGER: M. le Président, je pense que ça a une incidence directe sur le bill 23 puisqu'il y a un problème d'assurance dans le domaine du taxi qui est relié au bill 23. Je demande au ministre s'il a l'intention de se pencher sur le problème d'une assurance automobile d'Etat.

M. TREMBLAY (Bourassa): M. Prénoveau n'a pas demandé une assurance d'Etat. Il a demandé d'avoir le privilège d'aller s'assurer où il le veut à des taux raisonnables.

M. PRENOVEAU: Nous avons fait parvenir des représentations à M. Tetley, le ministre des Institutions financières, en ce sens-là. Nous aimerions avoir une enquête publique sur toutes les assurances-automobiles au Québec.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si vous permettez ici...

M. LEGER: M. le Président, je n'ai pas terminé. Est-ce que ça a rapport à cette question-là?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est en rapport avec l'observation de M. Prénoveau, justement, à la suite des représentations que vous avez faites. J'ai demandé moi-même à M. Tetley, le ministre des Institutions financières plus précisément, quelles étaient ses intentions en ce qui concerne l'assurance-automobile, parce que je suis d'accord avec vous, M. Prénoveau, qu'il doit y avoir une enquête là-dessus, étant donné les problèmes très graves que ça pose. Mais ici, à la commission parlementaire, ce matin, nous étudions le projet de loi 23.

Je comprends qu'il y a une incidence de l'assurance dans le domaine du taxi mais ce problème de l'assurance, en ce qui vous concerne, pour l'instant peut être réglé par voie de négociations avec vos associations, mais, dans le projet de loi 23, nous voulons régler le problème du taxi comme tous les problèmes du transport.

M. PRENOVEAU: En ce qui concerne les assurances, vous dites que ça peut être négocié. J'ai essayé de négocier, je vais vous relater juste un fait. A la suite d'une augmentation d'assurance que je devais subir personnellement, parce que j'exploite cinq voitures, j'ai sollicité quelqu'un d'autre, une association rivale — pour ne pas la nommer, la Beaubien que M. Bossé mentionnait tout à l'heure — j'ai pris tous les renseignements à savoir: changement de fréquence pour les radios et les lumières de toit. Parfait jusque là, très bien, vous êtes le bienvenu, M. Prénoveau.

Maintenant, j'ai dit: En ce qui concerne les assurances. On me dit: Monsieur, allez voir M. Legault à la Canadian Universal Insurance. Je vous relate brièvement ce qui m'arrive. J'entre là, je me présente, le monsieur ne veut même pas m'entendre parler vu que je suis du taxi. Je dis: M. Legault, je posséderai, dans quelques jours, une voiture privée, de promenade. Vous serez le bienvenu, monsieur.

Il y a dictature et connivence, à n'en pas douter. C'est pour ça que nous avons fait des représentations auprès du ministère des Institutions financières pour obtenir une enquête publique sur les assurances.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Prénoveau, je suis tout à fait d'accord avec vous là-dessus. Mais tout simplement, ce que je veux vous faire observer ainsi qu'aux membres de la commission, c'est que ce matin nous étudions le projet de loi 23...

M. PRENOVEAU: D'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour régler le problème général du transport y compris celui du taxi. Le problème des assurances, en général, relève d'un autre ministère, celui des Institutions financières. Ce qui ne nous empêche pas toutefois de vous entendre lorsque vous évoquez des faits...

M. PRENOVEAU: Parce que ça fait partie intégrante de notre commerce.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... aussi dramatiques que ceux que vous venez de mentionner dans le cadre de votre entreprise de transport.

M. BOSSE: M. le Président, pour répondre au député de Lafontaine, précisément, et peut-être ajouter aux remarques du député de Chicoutimi, dans mon rapport, à la page 49, les considérations générales, il y a un petit paragraphe concernant les assurances. Vous permettez, M. le Président, pour l'information des membres de cette commission, que je le lise: Un grand nombre de gens rencontrés ont réclamé la prise en charge, par l'Etat, de tout le champ de l'assurance-automobile.

Les arguments à l'appui de cette suggestion sont des plus valables et justifient une étude de cette question par des compétences gouvernementales. Je comprends que je n'étais pas dans l'ordre, c'était uniquement pour répondre...

M. LEGER: Pour rester dans le désert.

M. BOSSE: ... aux inquiétudes de l'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: Je vais poser une autre question au ministre. Comment se fait-il qu'une situation comme celle-ci existe, que la ville de Montréal ne donne pas de permis de taxi et que la régie puisse donner des permis pour un commerce analogue? Comment se fait-il que quelqu'un puisse dire: Je n'ai pas de permis de la ville, je peux en avoir de la régie?

Qui en définitive a le mot final ou la juridiction finale pour l'émission des permis? Est-ce la régie ou la ville de Montréal?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je vais vous faire parvenir l'adresse de la Régie des transports sur la rue Dorchester. Vous pourrez demander ça au président de la Régie des transports. Elle est une régie indépendante et elle pourra vous donner les raisons pour lesquelles elle a attribué des permis de transport...

M. LEGER: A quoi sert un ministre des Transports s'il n'est pas au courant de ce qui se passe dans son ministère? La Régie des transports relève quand même de votre ministère, M. le ministre.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous poserez la question...

M. LEGER: S'il faut que je fasse le tour de la province pour avoir des renseignements alors qu'on a un ministre, ne mettons pas de ministre là.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... au président de la Régie des transports. Elle est une régie autonome.

M. LEGER: Imaginez-vous quand un député ne peut même pas avoir de renseignements à une commission parlementaire, comment des gens du taxi peuvent-ils régler leurs problèmes, alors qu'ils ne sont même pas outillés pour régler les problèmes?

M. TREMBLAY (Bourassa): La Régie des transports est autonome et elle a donné ces permis-là en 1965.

M. LEGER: Quand est-ce que la Régie des transports comparait devant une commission parlementaire pour donner des renseignements?

M. BOSSE: Mais ça tramait depuis 1958.

M. LEGER: M. le ministre, quand est-ce que la Régie des transports comparaît devant une commission parlementaire pour qu'on puisse en obtenir des renseignements? Jamais.

M. TREMBLAY (Bourassa): On peut la convoquer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On peut la convoquer.

Je crois toutefois que la question du député de Lafontaine est sérieuse. Il s'agit de savoir

— et c'est très confus aussi dans mon esprit — qui en fait a autorité pour donner les permis. Est-ce que c'est la ville de Montréal ou si c'est la Régie des transports?

Le ministre tout à l'heure a donné une réponse mais, à mon sens, elle n'est pas non plus satisfaisante, parce que là on se dit: La ville de Montréal donne des permis, la Régie des transports en donne, qui a l'autorité finalement?

M. LEGER: C'est ça.

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est pour ça qu'on amène le bill 23, c'est parce que...

M. LEGER: Comment voulez-vous faire un bill 23 qui sera clair si vous n'êtes pas au courant de qui a la juridiction?

M. TREMBLAY (Bourassa): C'est pour cette raison-là que nous amenons le bill 23, parce que nous reconnaissons que le législateur n'est pas au courant de certaines choses dont il devrait être au courant. C'est pour ça qu'avec le bill 23 le législateur, vous comme moi, sera au courant de ce qui se passera.

M. BOSSE: La Loi des transports va clarifier nettement les juridictions. Il semblerait que le ministre des Transports aura juridiction sur l'émission des permis, en tout cas en ce qui a trait à la commission.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce qui justifie la question qui a été posée.

M. LEGER: Je demande au ministre, qui aura beaucoup de pouvoirs après l'adoption de cette loi, de voir à ce que l'on définisse qui a juridiction finale pour l'émission des permis.

M. LAURIN: Une remarque additionnelle. Est-ce qu'on peut penser, M. le ministre, que c'est l'une des raisons pour lesquelles certains organismes, mieux instruits des subtilités et des échappatoires de la loi, jouaient entre les deux paliers de juridiction? Quand ils n'étaient pas satisfaits de la réponse de la juridiction municipale, ils allaient à la juridiction de la Régie des transports.

Ceux qui n'étaient pas au courant de la loi, eux, étaient obligés de subir les inconvénients de leur ignorance ou de leur manque d'approche, leur manque de pouvoirs auprès de la régie ou auprès de l'autorité municipale. Il est permis de s'instruire des leçons du passé quand on examine une nouvelle loi.

M. TREMBLAY (Bourassa): La Régie des transports est autonome et peut donner des permis. Le juge en chef peut autoriser, après audition et avec ses régisseurs, les permis qu'il croit devoir autoriser pour donner le service du transport dans le Québec et ce sans aucune autorisation de la part du gouvernement, quel qu'il soit. C'est de cette façon qu'agit la Régie des transports.

On m'a posé la question hier. Si j'interviens, on va me dire qu'il y a ingérence politique. La Régie des transports a émis des permis en 1967 et je suis convaincu que l'honorable ministre des Affaires culturelles du temps n'était même pas au courant de ce qui s'est passé à la Régie des transports et même pas le ministre du temps.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président. Je pourrais corriger...

M. TREMBLAY (Bourassa): Ils n'étaient même pas au courant.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... le ministre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Sinon, nous allons ajourner immédiatement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a une présomption. Je suis tout à fait d'accord avec le ministre lorsqu'il dit qu'il n'a pas à dicter, à une régie autonome, ce qu'elle doit faire, mais le gouvernement, quel qu'il soit, a l'obligation stricte de surveiller les actes des sociétés qu'il constitue, des régies qu'il crée et de voir à ce qu'elles rendent les services pour lesquels elles ont été constituées.

M. TREMBLAY (Bourassa): On va la convoquer, la régie.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Toutes les commissions, toutes les régies indépendantes qui relevaient du ministère que j'administrais — et c'était le cas des autres ministres avec lesquels je travaillais étaient surveillées.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce n'était pas difficile, dans votre cas, parce que vous...

UNE VOIX: Vous êtes pas écoeurés, bandes de caves?

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce n'était pas difficile, dans votre cas.

M. LEGER : M. le Président, avant d'ajourner et étant donné que, malheureusement, je ne pourrai pas être ici après-midi, j'avais plusieurs questions à poser mais j'aimerais n'en poser que deux dernières, si vous voulez me permettre.

M. Prénoveau, tantôt, vous avez parlé d'un cas précis. Il y a une personne que vous ne pouvez pas engager parce qu'il y a le problème de l'assurance. D'une façon pratique, comment se fait-il que, vous qui avez une assurance dans l'association où vous travaillez, cette assurance puisse être une occasion de bloquer l'engagement d'une personne? Est-ce que l'assurance est pour vous ou pour la personne que vous engagez?

M. PRENOVEAU: C'est pour moi, nécessairement, parce qu'on assure mon véhicule. Mais il faut comprendre que c'est simplement du chantage. Nous avons pris nos informations auprès du service des permis de la ville de Montréal à savoir que moi — on appelle cela du "booking" chez nous — si j'engage quelqu'un, il doit être enregistré à la ville de Montréal. La ville de Montréal reconnaît légalement que Paul Prénoveau détient un permis et il peut engager qui il veut. Par contre, les associations de services se servent de cela pour jouer avec nous. Alors, c'est du chantage et c'est une dictature. Parce que légalement, à l'encontre des idées de l'association de services, nous pourrions même engager la personne en question, et s'il survenait un accident, nous ne serions pas responsables parce qu'il y aurait eu ingérence quelque part.

Si vous me permettez, M. le ministre, pour ajouter à ce que demandait tantôt le député, le 25 avril 1966, M. Henri Paquette, qui est mon adjoint et le directeur des relations extérieures de notre organisme, faisait parvenir une lettre à M. Maurice Lacroix, chef du contentieux de la Régie des transports. Voici le texte de la réponse de M. Lacroix: "Je regrette de n'avoir pu répondre plus tôt à votre lettre, reçue le mois dernier, me demandant quelques renseignements. "D'après les informations reçues, les véhicules de la compagnie Murray Hill portent maintenant une série spéciale pour les différencier d'avec les taxis. Ces véhicules nécessitent un permis de la régie et, comme les "drive-yourself", ils ne peuvent pas avoir de compteur. "C'est donc dire qu'en plus de payer le coût d'immatriculation qui est de $1 par 100 livres, comme les taxis, leurs propriétaires doivent payer des droits de régie. "Quant à la définition de l'automobile de louage, je ne puis que vous référer à l'article 27 du code de la route où il est mentionné que celui qui conduit un véhicule possédé en vue de le louer doit être soit un chauffeur, soit un locataire de véhicule. "Nous sommes d'avis que le prochain code de la route révisé devrait contenir une définition de l'automobile de louage, mais il est encore trop tôt pour vous dire quels en seraient les termes exacts."

J'ajouterai si je le peux, qu'en 1962, la Régie des transports faisait une enquête sur le taxi à Montréal. On déplorait le fait qu'il y avait trop de taxis encore à Montréal, la même constatation que M. Bossé a faite et publiée.

Mais par contre, quelques années plus tard, six ans plus tard — ce rapport d'ailleurs n'a jamais été rendu public — il a été déposé à l'Assemblée nationale le 11 mai 1964, si ma mémoire est fidèle. De toute façon, un an et trois mois plus tard, on a donné la réponse et, par la suite, on a continué à laisser augmenter le nombre d'automobiles de louage. C'est là que nous venons en accord avec vous, parce que je crois que la ville de Montréal doit s'adresser à la

Régie des transports en vue de l'augmentation du nombre de permis. Mais depuis que les permis ont été gelés, on ne permet pas l'émission additionnelle de permis de taxi.

Donc, de quelle façon pouvez-vous voir à régler le problème, sinon en vous infiltrant, M. le ministre, dans la Régie des transports?

M. BOSSE: Il n'aura pas besoin de s'infiltrer, parce que la nouvelle loi donne juridiction. C'est là un des aspects bénéfiques de cette loi.

M. LEGER: Vous avez dit tantôt, M. Prénoveau, que le problème de Dorval n'est pas tout à fait réglé. Comment ça fonctionne actuellement à Dorval pour les taxis en général?

M. PRENOVEAU: Est-ce que le député de Dorion veut répondre à ma place?

M. BOSSE: Non, allez, la question vous est posée.

M. PRENOVEAU: Disons qu'il y a une ligne d'attente pour Murray Hill et une ligne d'attente pour tous les taxis. Vous avez deux lumières... Non, pas 50-50.

M. LEGER: Vous avez dit une ligne pour Murray Hill seulement et une ligne pour les autres taxis de Montréal?

M. PRENOVEAU: Oui, c'est ça. M. LEGER: Un cheval, un lapin.

M. PRENOVEAU: C'est ça. Nous avons un maximum, je crois...

M. BOSSE: Je regrette, un cheval, un lapin, il y a des choses, il faut quand même avoir un minimum d'honnêteté quand on interprète les situations. Alors, à Dorval, présentement, je crois qu'il y a toujours une filée de taxis, je ne sais pas exactement le nombre de voyages qu'ils prennent, mais proportionnellement, les chauffeurs de taxi bénéficient largement de l'utilisation des passagers comme source de revenu.

M. LEGER: Le député de Dorion va quand même admettre que Murray Hill a environ 10 p. c. des taxis et la balance des taxis, c'est 90 p. c. Alors il y a une ligne spéciale pour 10 p. c. et une ligne spéciale pour 90 p. c.

M. BOSSE: Je regrette, ce n'est pas exact, selon les chiffres que m'ont donnés les autorités de l'aéroport de Dorval. S'il y a deux lignes — en fait il y a même trois postes — il y en a un spécialement pour les taxis des environs immédiats de l'aéroport. Beaucoup de chauffeurs de taxi se plaignaient qu'ils devaient faire de longs voyages de Montréal pour se rendre là et par la suite prendre un petit voyage à $0.50 ou $0.75.

On a obvié à cette difficulté en accordant un poste particulier aux chauffeurs de taxis des environs immédiats de Dorval, ce qui permet aux chauffeurs de taxis de la ville de Montréal ou d'ailleurs de faire exclusivement de longs voyages, c'est-à-dire au moins, en tout cas, à l'extérieur des limites de la ville de Dorval.

Il y a, d'autre part, à côté, une autre rangée de voitures et celles-là, ce sont les limousines de Murray Hill. Le passager qui arrive a un triple choix, à savoir l'autobus, la limousine ou le taxi. La disposition physique des voitures — cela, je l'ai vu personnellement — est nettement favorable aux voitures-taxis avec taximètre. La preuve qu'il doit y avoir là des sources de revenus additionnels intéressantes, c'est que les taxis s'y rendent en grand nombre. On fait toujours la queue à ce poste en commun. D'après les chiffres que j'ai, les chauffeurs de taxis avec taximètre font autant de voyages, sinon plus que les voitures de Murray Hill Limousines.

Cependant, je voudrais apporter une autre petite correction. On a beau vouloir utiliser Murray Hill à toutes les sauces — d'autres partis ont fait des représentations — mais il faut aussi avoir l'honnêteté de dire que, lorsque Murray Hill détenait un permis exclusif avec ses limousines à l'aéroport de Dorval, elle ne commettait pas d'infraction à la loi. Elle n'avait rien de particulier comme privilège. C'était comparable au privilège que pourrait avoir Provincial Transport de faire le transport des passagers de Montréal à Québec ou D'Anjou Transport de transporter en vrac ou non de Montréal à Rimouski. Il n'y avait rien de particulier; ce n'était pas un privilège. Peut-être qu'à cause du contexte social, c'est moins acceptable. Ce n'était pas plus particulier ou différent du droit exclusif qu'ont d'autres compagnies dans d'autres secteurs.

M. LEGER: Il avait été question qu'il n'y avait qu'une sonnette pour aviser les taxis d'avancer. Est-ce que cette situation a été corrigée?

M. PRENOVEAU: Oui, il y a maintenant deux lumières. Si vous le permettez, M. le Président, pour ne pas m'éterniser — j'ai reproché hier qu'on s'était éternisé — le vice-président de notre association, M. Brouillard, serait beaucoup mieux qualifié que moi pour répondre à ces questions. Il le fera immédiatement, si vous voulez.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va l'entendre cet après-midi.

M. LE PRESIDENT: Je vais vous donner cinq minutes, pas plus.

M. BROUILLARD: M. le député, pour répondre à votre question, il se produit ceci à l'aéroport de Dorval. Il y a une voie bien définie pour les taxis de Montréal qui sont présents et une voie qui est sans limite pour la Murray Hill Limousine. Puis West Island Taxi et Dorval Taxi ont leur voie propre à eux avec un nombre de voitures défini, restreint. Alors lorsque nous arrivons dans la voie, il faut que les taxis passent par une barrière et déposent $0.25 pour avoir accès à la porte avant. Rendus à la porte avant, nous avons accès aux voyages qui arrivent, à ce moment-là; au début, nous n'avions pas de solliciteurs, maintenant nous avons des solliciteurs et il faut leur donner un autre $0.25 pour avoir droit aux voyages. Ce qui nous fait $0.50 à chaque voyage qu'on prend à Dorval.

Maintenant, ce qui se produit, faisant partie d'une association de service, je paie déjà un service, un droit pour avoir le privilège de prendre des voyages, et en plus on exige encore là $0.50 à chaque voyage, ce que d'autres n'ont pas besoin de faire. Je crois que si on veut discuter, dans un district, là on s'en va maintenant vers un règlement métropolitain, d'ensemble métropolitain, je ne voudrais pas discuter sur le passé mais sur l'avenir, que ces choses-là soient réglées pour l'avenir. Dans le présent, je n'ai pas d'objection qu'on continue comme ça, mais pour l'avenir, que ces choses-là soient corrigées et qu'on ne continue pas, nous...

M. LEGER: Murray Hill ne paie pas les $0.25?

M. BROUILLARD: Non.

M. BOSSE: M. Brouillard, pourriez-vous me dire qui est à l'origine de ces ententes à l'effet, par exemple, de placer un solliciteur et de demander $0.25 additionnel? Est-ce que ç'a été imposé par quelqu'un, soit au niveau municipal ou au niveau provincial?

M. BROUILLARD: Je pourrais vous dire que beaucoup de chauffeurs de taxi étaient d'accord pour payer $0.25 pour prendre un voyage, mais de là à payer une autre fois $0.25, il y a beaucoup de chauffeurs qui ne sont pas arrêtés...

M. BOSSE: Ma question est: Qui a décidé d'ajouter un autre $0.25? Remarquez que ce n'est pas un reproche que je vous fais, seulement, je ne voudrais pas non plus qu'on laisse entendre que c'est quelqu'un d'autre que les chauffeurs de taxi qui ont décidé ça. Ce sont les chauffeurs de taxi.

M. BROUILLARD: Je ne le crois pas, M. Bossé.

M. BOSSE: Bien, qui a décidé?

M. BROUILLARD: Je n'étais pas présent, mais...

M. BOSSE: Bien, moi non plus je n'étais pas présent.

M. BROUILLARD: ... je puis vous dire que beaucoup de chauffeurs, avant l'obtention du stand, ont proposé $0.25 du voyage. J'en suis un, je l'ai proposé moi-même à la commission, je ne m'en cache pas, j'ai proposé $0.25. Mais de là, j'ai bien dit à la commission que les $0.25 pouvaient rapporter assez pour nous payer des commissionnaires là qui pourraient nous aider. Mais ce n'est pas ce qu'on a fait. D'autres chauffeurs ont demandé à payer $0.25 de surplus pour avoir un solliciteur parce que l'autre compagnie avait des solliciteurs.

M. BOSSE: C'est une décision provenant des chauffeurs de taxi intéressés à avoir un meilleur service.

M. BROUILLARD: Oui, mais ces mêmes gens n'ont pas pensé à l'avance à ce qui leur arriverait.

M. BOSSE: Bien, écoutez là...

M. BROUILLARD: Ils ont été jetés dans l'eau bouillante et puis les propriétaires de taxi ont été jetés dans l'eau bouillante par la police de Dorval. Cela devient très dispendieux pour moi d'aller chercher un voyage à Dorval et c'est là la rancune.

Je l'ai dit, M. Bossé, lorsque je vous ai rencontré, que les gens ne voient pas assez loin dans le taxi, c'est malheureux. Mes chauffeurs ont des billets de stationnement et la loi dit: Vous stationnez votre auto, le chauffeur n'est pas dedans lorsque l'auto est stationnée, si le chauffeur est dedans, l'auto n'est pas stationnaire.

On prend le numéro de plaque, on envoie le billet au propriétaire cinq ou six mois après la date de l'infraction.

M. BOSSE : Mais quand je me stationne ici à Québec, quand je vais au restaurant, on m'envoie le billet chez moi, aussi...

M. BROUILLARD: Mais vous n'êtes pas dans l'auto à ce moment-là, vous êtes dans le restaurant.

M. BOSSE: ... et je ne suis pas chauffeur de taxi.

M. BROUILLARD: Un instant, M. le député. Vous n'êtes pas dans votre auto, vous êtes dans le restaurant. Mais la chose est différente autrement, le chauffeur est dans l'auto.

M. BOSSE : Sur les 30 places accessibles aux voitures, quand vous êtes là, que vous soyez à l'intérieur ou à l'extérieur, on ne vous donne pas de billet.

M. BROUILLARD : C'est la même chose pour les cas du restaurant. Quand vous allez manger au restaurant, si vous êtes sur le terrain de stationnement, vous payez votre cotisation, vous n'aurez pas de billet non plus. C'est le même problème pour moi.

M. BOSSE: Vous parlez de location lorsque vous êtes à l'extérieur du poste en commun.

M. BROUILLARD : A l'extérieur, c'est le danger qu'il y a. Il faut qu'il y ait correction. Un chauffeur peut abuser d'un propriétaire. Un chauffeur qui en veut à un propriétaire, c'est facile d'aller à Dorval...

M. BOSSE: L'inverse est vrai aussi.

M. BROUILLARD: ... vous parliez tout à l'heure de location par jour, remarquez bien, il paye $10 de location par jour pour une auto, il a deux billets dans la journée. Six mois après, le propriétaire reçoit deux billets, deux contraventions de $5. Que lui reste-t-il sur...?

M. BOSSE: Vous touchez un autre point, vous n'êtes pas du tout...

M. BROUILLARD : Moi, je veux que la commission soit prévenue de la chose, et qu'on voit à régler ça au même moment et non pas attendre dans cinq ans.

M. BOSSE: ... prendre des notes, j'étais bien conscient des difficultés que vous rencontriez. Maintenant, le grand pas à faire à Dorval — allez-vous l'admettre? — c'était d'abord de faire en sorte que les chauffeurs de taxi aient accès à l'aéroport et non pas exclusivement la compagnie Murray Hill avec ses limousines et ses autobus.

M. BROUILLARD: Je suis d'accord, M. le député, mais je n'aurais jamais pensé qu'on nous aurait lancé comme ça, à Dorval: Arrangez-vous avec vos problèmes.

M. BOSSE: C'est justement pourquoi nous avons une loi qui va donner autorité et juridiction sur l'ensemble du territoire et éventuellement, je l'espère, la communauté urbaine.

M. BROUILLARD : Je le souhaite aussi et dans le plus bref délai possible.

M. LEGER: Vous dites, M. Brouillard, que les taxis ont trente places accessibles et la Murray Hill a une ligne sans limite.

M. BROUILLARD: Exactement.

M. LEGER: Alors, ils peuvent se placer n'importe où et...

M. BROUILLARD: N'importe où, même on les voit stationnés en double et la RCMP passe et ne donne pas de billet. Si le taxi de la ville de Montréal ou des banlieues est stationné en

dehors d'une ligne qui est marquée "fin du stand" ou "fin du stationnement", si il y a une de ces voitures qui est stationnée ou cinq ou dix, on arrive deux voitures en trombe, on bloque la première et la dernière voiture de façon à ce qu'aucun chauffeur ne puisse partir, on prend les numéros de plaque et on envoie ça par la poste au propriétaire de taxi. J'ai trois causes qui passent actuellement à la ville de Dorval, et j'en aurai quinze que j'ai reçues — je reçois les billets de stationnement quatre à la fois.

M. BOSSE: Vous touchez un autre problème, celui de la responsabilité du chauffeur vis-à-vis du propriétaire de la voiture. C'est un problème dont on a été saisi évidemment...

M. BROUILLARD: Personne n'avait prévu cela au début.

M. LE PRESIDENT: Je crois bien que les représentants de l'Association métropolitaine des taxis ne peuvent pas me faire le reproche de les avoir empêchés de s'exprimer sur des sujets même qui ont été assez vastes. On a couvert pas mal tous les problèmes du taxi.

Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 3 heures cet après-midi.

M. BROUILLARD: Je vous remercie et je laisse le dernier mot à mon directeur.

M. PRENOVEAU: Je vous remercie, M. le Président, et je remercie tout le monde d'avoir été aussi indulgent à nous écouter. Espérons que l'on va passer à l'action maintenant.

Reprise de la séance à 15 h 11

Le Service de sécurité et protection sur la route

M. KENNEDY (président de la commission parlementaire des Transports): A l'ordre, messieurs! Nous allons entendre M. Léandre Proteau, qui représente le Service de sécurité et protection sur la route. Je vais répéter ce que j'ai dit antérieurement, je demanderais à ceux qui présentent des mémoires d'être aussi brefs que possible dans leur préambule, quitte à discuter plus longuement sur des points spécifiques du projet de loi no 23.

Nous avons encore plusieurs associations qui ont demandé à se faire entendre et nous aimerions bien donner une chance égale à tout le monde. M. Proteau.

M. Léandre Proteau

M. PROTEAU: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, messieurs, je suis Léandre Proteau, de Longueuil. Je suis président du SSPR Ltée, le plus jeune mouvement en Amérique du Nord, de sécurité et de protection sur la route et le seul du genre en Amérique du Nord.

Le SSPR soumet les quelques considérations qui suivent, conscient de la nécessité d'une sensibilisation plus poussée de l'automobiliste face à son comportement sur la route et, partant, de toute la population routière devant les conséquences sociales de son comportement. Bien que n'étant pas directement concerné par le bill 23, Loi des transports, le présent mémoire se veut bien sûr un encouragement et un appui à une refonte complète de la Loi du ministère des Transports et de la Loi de la Régie des transports de la province de Québec.

Il se veut avant tout, en ce qui le concerne, la voie d'une réflexion plus intense, d'une prise de conscience personnelle, puis d'un exemple et, collectivement, d'une éducation progressive.

Il est relativement facile, pour un automobiliste, d'imputer, en dernier ressort, la totale responsabilité au gouvernement en matière de sécurité et de protection sur la route. Les lois existent, elles changent, elles évoluent. Malheureusement, trop souvent l'automobiliste ne suit pas le mouvement. Le moment serait mal choisi de vouloir porter atteinte à la liberté individuelle. Devant son comportement, n'est-il pas plus sage d'en connaître à fond les causes? N'est-il pas plus impérieux de chercher comment diriger le développement anarchique des tendances que de lutter directement contre ce qui semble une faute?

Le Service de sécurité et protection sur la route a été conçu et créé dans cette optique. Connaissant les fautes des automobilistes, comme le disait Hubert Renard dans son livre intitulé "L'automobiliste et la morale chrétienne", il s'agit de remonter à leur origine pour qu'il soit possible de déterminer comment et à quel moment purifier la volonté du conducteur.

Tout en adressant des voeux de succès et des félicitations au ministre des Transports, M. Georges Tremblay, à son ministère de même qu'aux membres de l'Assemblée nationale qui siègent à cette commission, nous désirons également remercier messieurs les journalistes, les dirigeants d'associations qui contribuent activement à semer et à faire grandir l'éducation positive des automobilistes sur la route.

Au nom du SSPR, qu'il nous soit permis d'exposer de façon plus détaillée, dans les pages qui suivent, la philosophie comme telle de l'entreprise, son orientation et ses structures, de même que les modalités avec lesquelles nous entendons contribuer à l'élaboration d'un service de sécurité et de protection sur la route.

Nous sommes tous d'accord que l'automobiliste est un des types caractéristiques évoquant un monde en pleine expansion et en plein désarroi. Nous vivons dans un siècle qui devient résolument celui du mouvement. La modalité est en train de devenir une valeur clé dont nos décisions devront permettre un meilleur développement.

Mais pour en arriver là, va-t-il falloir sacrifier les valeurs de base qui font les grandes civilisations: le respect de la personne, de la vie, la coopération, le civisme? "Par imprudence, fatigue, par vanité, par hâte excessive, par maladresse, nous sommes des assassins, et chaque lundi nous apporte le bilan de l'hécatombe. Mais la journée même nous apporte son lot de préoccupations et nous oublions, pour reprendre la route bientôt au risque d'être à notre tour, des victimes. Personne ne peut accepter qu'il en soit durablement ainsi car, à ne rien faire, on laisse le danger s'accroître alors qu'il est déjà intolérable."

Ce cri d'alarme a été lancé par M. Edgard Pisani, ministre de l'Equipement en France. Il dit de façon nette et précise qu'il est temps que chaque automobiliste prenne ses responsabilités dans le but de faire de la route non plus un tombeau mais un moyen de structurer pour l'avenir une société plus humaine, plus fraternelle.

En effet, les problèmes de la route, de l'automobile, prennent une ampleur qui ne doit plus nous laisser indifférents. L'automobile n'est plus seulement qu'un moyen de transport mais un facteur essentiel dans les transformations sociales de l'économie mondiale. Nous sommes les citoyens, les membres vivants de cette société. Il nous appartient, à ce titre, de jouer notre rôle social partout où notre action personnelle peut venir en aide à la communauté.

L'automobile est un facteur essentiel dans les transformations sociales, avons-nous dit. Doit-elle être un facteur de transformation négative ou positive? Si on en juge par l'irresponsabilité de certains conducteurs, par l'accroissement des morts violentes, des accidents graves, on est porté à croire que la route est devenue un facteur de destruction.

Il est vrai que notre civilisation automobile a moins de 50 ans... Or, ce qui fait une civilisation, ce sont les rapports qu'ont, entre eux, les membres d'une société, des rapports basés sur le respect de l'homme, sa liberté, sa responsabilité.

Peut-on dire actuellement que l'automobile redonne à la personne sa grandeur, sa noblesse et son épanouissement? Il est permis d'en douter. Pourtant, l'homme du 20e siècle retrouve sur la route une compensation aux frustrations que la société actuelle lui apporte: dépersonnalisation, irresponsabilité, manque de civisme, de courtoisie.

Ce qui nous fait croire que l'automobile doit être un facteur de transformation positive, c'est justement ce besoin inné qu'a l'homme d'établir des rapports avec les autres. C'est ce besoin profond qu'a l'homme de rechercher chez les autres leur acceptation, leur approbation. C'est ce besoin naturel qu'ont les hommes de fraterniser, de vivre en société.

Le SSPR s'inscrit dans cette perspective d'avenir car l'automobile n'est définitivement pas antisociale comme on est porté à le croire.

En effet, ce n'est pas simplement en marchant que l'on fait attention à son voisin, mais c'est surtout au volant que l'on ne doit jamais cesser d'y penser.

Comment donc faire en sorte que le comportement des conducteurs s'améliore, comment faire en sorte que cette crise de croissance aboutisse vers une société meilleure?

Si vous me permettez, M. le Président, je vais vous donner les trois points principaux et je termine.

Constitué en vertu de la partie 1 de la Loi sur les corporations canadiennes, le SSPR est un organisme privé ayant comme but de grouper dans un même mouvement tous les automobilistes de choix en Amérique du Nord qui, volontairement, veulent prôner de façon active les objectifs qu'il poursuit:

Premièrement, devenir participant d'un groupe distinctif d'automobilistes où l'on pratique la fraternité, la collaboration, la coopération, le civisme, la courtoisie et la conduite préventive;

Deuxièmement, devenir membre d'un immense mouvement où les participants volontaires désirent s'identifier comme des automobilistes de choix et semer par leur attitude, leur conduite et le symbole visible de leur groupement — signal d'identification et de détresse en forme de triangle — l'éducation positive et continuelle à la sécurité routière.

De la même façon, ils veulent protéger leur vie et celle des autres. Par ce même signal ils désirent se venir en aide en cas de panne sur la route, à titre d'automobilistes honnêtes, serviables et courtois;

Troisièmement, devenir participant d'un immense mouvement où les membres sortant de la majorité silencieuse veulent, à titre de consommateurs, se protéger de façon active auprès de tous les services publics identifiés à ce mouvement: garages, hôtels, motels, restaurants, terrains de camping.

Je vous remercie de votre bonne attention. Etant le mouvement le plus jeune, notre service n'étant qu'à l'état d'embryon, nous aurons certainement l'occasion de vous rencontrer, ayant permis d'améliorer, par notre travail qui se fera parallèlement à celui des gouvernements, la sécurité et la protection de l'automobiliste sur les routes. Je vous remercie.

M. BOSSE: M. Proteau, dans votre cas, étant le mouvement le plus jeune, je pense que vous n'aurez pas à faire de demande de maintien de droits acquis.

M. PROTEAU: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Proteau, je vous remercie de ce mémoire qui est l'esquisse d'un code d'éthique de l'automobiliste et je suis assuré que votre mouvement pourra s'épanouir. Je souhaite que le plus grand nombre d'adhérents possible joignent vos rangs.

M. PROTEAU: Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Proteau, est-ce que, dans votre mouvement qui est à ses débuts, vous avez déjà fait des études sur le nombre d'accidents mortels sur les autoroutes comparativement aux routes secondaires? Avez-vous des données quelconques?

M. PROTEAU: Je dois vous dire, bien franchement, que nous ne nous sommes pas arrêtés à faire tellement d'études. Nous avons pris les statistiques du ministère des Transports, de l'Office des autoroutes, en considérant, par exemple, le nombre de pannes et les circonstances de détresse qu'il y a sur la route. Nous sommes partis de cette idée, considérant qu'il était grand temps que nous reconnaissions sur nos routes quelqu'un qui était dans le besoin. Aujourd'hui, vous voyagez sur les routes et pratiquement personne n'ose venir en aide à son voisin, ayant des doutes sur la personne qui est en détresse. Je ne voudrais pas m'attarder.

En passant, si M. le Président me le permet, il y a déjà un certain temps que nous avons présenté ce mémoire. Des personnes qui étaient présentes à ce moment-là l'ont eu; d'autres qui sont présentes aujourd'hui ne l'ont pas. S'il y a des personnes ici qui désireraient recevoir ce mémoire, il nous fera plaisir de leur faire parvenir. Vous n'avez qu'à vous adresser à case postale 158, Longueuil, Québec, Canada, et nous vous ferons parvenir le mémoire en question.

M. LE PRESIDENT: Merci. Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Proteau, une simple question. Votre mémoire est très intéressant, c'est un appel à la prudence. On n'en fait jamais trop; il y a tellement d'accidents. Nous sommes ici pour étudier le bill 23. Est-ce qu'on pourrait avoir votre avis sur le bill 23? Vous n'en parlez pas dans votre mémoire.

M. PROTEAU: M. le député, il y en a suffisamment qui en ont parlé. Je laisse à toutes ces personnes la discrétion de l'améliorer. J'ai confiance aux membres de la commission, de même qu'au ministre, que ce bill sera le plus perfectionné au point de vue des lois ou des droits acquis des personnes dans la province de Québec.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je suis obligé de vous donner raison.

M. PROTEAU: Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Proteau. Si vous me le permettez, je vais faire une remar- que. Je crois que votre mémoire aurait été plutôt de mise lors d'une étude qui sera peut-être faite sur la refonte du code de la route.

M. PROTEAU: Possiblement. On l'avait présenté au ministère et quelques fonctionnaires du ministère m'avaient dit que j'aurais avantage à le présenter de façon très brève lors de l'étude du bill 23. Nous nous en sommes tenus à cette idée et nous sommes venus le présenter.

M. LE PRESIDENT: Très bien. Merci beaucoup, M. Proteau.

Association professionnelle des chauffeurs de taxis

M. LE PRESIDENT: Maintenant, j'appellerai Me Mathieu, qui représente l'Association professionnelle des chauffeurs de taxis. Mémoire M-9.

M. MATHIEU: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, nous avons un court mémoire qui est déjà, je crois, déposé ou qui sera distribué par les préposés au service, mémoire signé par notre président, M. Raymond Roberge, ici présent. Dans notre mémoire nous notons que, suite à la parution du rapport Bossé concernant le taxi, notre association n'est pas demeurée indifférente aux recommandations de cette commission, consciente que tous nos problèmes ne sont pas solutionnés même si on appliquait toutes les suggestions contenues dans ce rapport. Il demeure que ce document est grandement valable et doit servir de base à une législation dans le domaine de l'industrie du taxi. Lors d'une assemblée générale, ce document fut soumis aux membres de notre association. L'unanimité des membres présents s'est faite pour approuver les conclusions et l'esprit de ce rapport et pour féliciter M. Alfred Bossé du travail qu'il avait accompli. Au mois d'avril dernier, peut-être pour la première fois au Québec, nos membres se sont rendus devant le Parlement provincial pour dire merci aux autorités gouvernementales. Je dois vous noter que nous avions profité de l'occasion pour discuter du problème des assurances dans le domaine du taxi, problème qui demeure toujours une grande préoccupation pour nos membres car ce problème est aussi lié à la rentabilité du taxi et, de là, à la rémunération de nos membres.

Cependant, la présentation du bill 23, Loi des transports, nous intéresse et vous le comprenez sûrement. L'article 122 de ce projet de loi retient particulièrement notre attention. Cette façon de procéder, soit une réglementation adoptée par le lieutenant-gouverneur en conseil, nous semble acceptable. Dans le passé, il a été facile pour nous de faire nos représentations aux autorités gouvernementales, lesquelles ne sont pas demeurées insensibles à nos revendications.

Pour l'avenir, nous leur faisons confiance, espérant qu'elles tiendront compte des quelques suggestions que nous désirons retrouver dans la réglementation qui ne saurait tarder, suivant notre opinion. Parmi les recommandations que nous aimerions discuter avec vous, vous avez la recommandation no 1, à la page 52 du rapport Bossé. Elle dit ceci: Que pour toute municipalité de 25,000 habitants et plus, la limite pour l'émission des permis de voitures de taxi soit fixée à un permis par 800 personnes. Nous croyons que la limitation devrait être d'un taxi pour 800 personnes pour la ville de Québec, et un permis pour 1,300 personnes pour les villes de banlieue.

Nous croyons que ce rapport avait été particulièrement rédigé pour un problème qui se situait dans la ville de Montréal, et nous notons qu'ici, dans la région de Québec, un permis par 800 personnes, par exemple dans des régions comme Sainte-Foy ou Charlesbourg, serait exagéré. Nous en arriverions à un nombre trop élevé.

Surtout du fait que depuis quelques jours, un événement nouveau s'est produit, c'est-à-dire que, lors de l'arrivée d'un bateau ici au quai, nous avons remarqué que la clientèle qui, normalement, était desservie par les taxis, a été à cette occasion desservie par un autobus de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec.

A ce moment-là, ils ont quand même perdu une clientèle assez sérieuse et lorsque vous arriverez à déterminer le nombre de taxis dans la ville de Québec, il faudra savoir si cette partie de clientèle continuera d'appartenir au taxi ou si ces gens-là vont être servis par la Commission de transport.

Il est évident qu'un taxi pour 800 personnes, c'est raisonnable, si nous avons la clientèle que nous avions l'an dernier et cette année pour la ville de Québec. Cependant, si la Commission de transport empiète et accapare notre clientèle, ça devient trop élevé comme nombre de taxis possible.

Aux recommandations nos 3, 4, 5 et 8, on note: l'annulation immédiate de tous les permis pour lesquels aucune voiture n'est en circulation et ceci sans compensation aux détenteurs; le décret immédiat de la non-transférabilité des permis et la mise au point de mécanismes de contrôle de cette non-transférabilité; le retrait automatique et définitif de tout permis dont le détenteur fait l'objet d'une condamnation en vertu du code criminel, n'a pas comme occupation principale l'industrie du taxi, abandonne le commerce ou décède; l'interdiction du doublage dans l'utilisation des voitures de taxi.

Il nous apparaît évident et nécessaire de prendre des mesures immédiates pour couvrir ces recommandations. Plus nous attendons, plus il est dangereux que des émissions massives — même si des recommandations étaient faites aux autorités municipales des différentes municipalités dans tout le Québec — de permis soient faites et à ce moment-là il en coûtera d'autant plus au gouvernement ou aux autorités pour aller chercher de nouveau ces permis.

Nous notons cependant, nous de l'Association des chauffeurs de taxi, la recommandation no 5: on parle de retrait automatique pour une personne faisant l'objet d'une condamnation en vertu du code criminel. C'est un point qui serait peut-être discutable si nous pensons, au plan social, à la réhabilitation qui est favorisée par les différents gouvernements. On se demande si un chauffeur de taxi n'est pas réhabilitable, lui aussi. Nous notons bien que cette recommandation devait s'inscrire pour éviter que ce soit l'endroit où tous les criminels se ramassent. Dans le passé, je crois que les chauffeurs de taxi ont été dignes du travail qu'ils ont dû faire et nous notons qu'il serait possible de corriger cette recommandation en apportant la suggestion suivante: c'est-à-dire que celui qui aurait eu une condamnation en vertu du code criminel pourrait se faire enlever son permis sans, pour cela, qu'il lui soit enlevé d'une façon automatique.

La recommandation no 6 invite, avec insistance, les propriétaires de plus de vingt voitures à se départir volontairement du plus grand nombre possible de leurs permis excédentaires. Dans la ville de Québec, il y a une compagnie qui possède 61 taxis. Nous favorisons une diminution immédiate de ce nombre afin d'atteindre le nombre indiqué de vingt permis au maximum. Nous croyons que la nouvelle réglementation devrait s'inspirer d'un règlement que l'on retrouve à la ville de Québec et qui veut qu'un propriétaire n'ait droit qu'à un permis et qu'à un taxi.

La recommandation no 14, à la page 55, demande que soit mis sur pied un comité consultatif du taxi, composé de deux représentants des autorités de la communauté urbaine, de deux représentants des chauffeurs de taxi, choisis et délégués par ces derniers, de deux représentants des propriétaires artisans et de deux représentants des propriétaires de systèmes de taxis. Nous croyons que ce comité consultatif devrait être ainsi formé. Nous aimerions voir siéger un représentant de la Commission des transports du Québec et des représentants de la Communauté urbaine, vu qu'elle aura à voir à l'application des règlements du taxi. Nous aimerions aussi voir représentés les chauffeurs de taxi, ainsi que les artisans. Cependant, nous nous opposons à ce que les propriétaires de systèmes soient doublement représentés, du fait qu'ils le sont déjà par le biais de leur association. Faisant déjà partie de l'Association des propriétaires, ils le seraient de par ces représentants et de part leurs propres représentants. Nous croyons que cette recommandation se dirige surtout vers le secteur de Montréal et nous notons que, pour la ville de Québec, cela ne devrait pas s'appliquer.

Dans cette réglementation éventuelle, il serait nécessaire de prévoir un processus à suivre

pour obtenir l'émission d'un permis d'exploitation. Parmi les critères à fixer, nous pensons que vous ne pouvez ignorer ceux-ci, c'est-à-dire donner préférence à un ancien chauffeur de taxi ayant pratiqué sa profession durant deux ans depuis les cinq dernières années et exiger que le candidat passe, avec succès, un examen portant sur la réglementation du taxi dans le territoire à desservir afin d'avoir une certaine uniformité dans les services offerts au public.

Dans le but de protéger les chauffeurs de taxi contre la faillite, il serait nécessaire d'obliger le propriétaire du véhicule à maintenir en vigueur une police d'assurance couvrant la responsabilité du chauffeur pour une somme jamais inférieure à $100,000. Il se pose un problème dans la région de Québec — j'imagine que cela se pose ailleurs — c'est que, dans les conditions de travail du chauffeur de taxi, il doit travailler souvent pour un artisan, lequel prend une assurance de responsabilité qui ne couvre pas son propre véhicule.

Lorsque surviennent des accidents et que cela est imputable au conducteur, à cause d'une erreur de sa part, le propriétaire se retourne vers son propre conducteur pour se dédommager des pertes encourues lors de cet accident. Durant une année, il est assez rare qu'un conducteur ne fasse pas un ou deux accidents, parce qu'il est toujours sur la route.

Alors, chaque année, généralement, arrive la période des vacances et on échange les vacances pour cette partie de responsabilités ou de montants encourus pour un accident pour lequel le propriétaire n'était pas assuré.

Donc, le conducteur est constamment en dette envers son propriétaire. Nous croyons qu'il serait important d'exiger que le propriétaire couvre la responsabilité du conducteur.

Nous espérons, messieurs, que ces quelques suggestions pourront être retenues et serviront à l'élaboration de la réglementation pour l'industrie du taxi dans la région de Québec.

Voilà notre mémoire. Nous demeurons à votre disposition si vous avez quelques questions à poser.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorion.

M. BOSSE: Félicitations, Me Mathieu, pour le travail que vous avez accompli ainsi que votre association. Je voudrais d'abord apporter quelques explications en ce qui a trait aux remarques que vous faites dans votre représentation. Dans la recommandation no 1, qui a trait au nombre de permis dans les villes de 25,000 habitants et plus, il est exact que c'est un permis par 800 habitants. Par la suite, après diverses rencontres dans de multiples villes de la province, il nous est apparu assez évident que nous devions aussi considérer les villes de moins de 25,000 habitants et nous en étions venus à l'intention, en ce qui a trait aux règlements, de permettre l'émission d'un permis par 1,200 de population dans les villes de moins de 25,000 habitants et de demeurer ailleurs à un permis par 800. C'est là, évidemment un objectif. Il faut considérer un peu les difficultés qu'on peut avoir à l'atteindre dans la région de Montréal quand vous avez dans la ville de Montréal, présentement, un permis par 326 de population.

A Québec, ici, c'est déjà beaucoup moins grave. Cependant, il faut tenir compte dans les exemples que vous nous avez donnés, qu'il est possible que les villes de banlieue, ici, soient intégrées à l'intérieur de la communauté urbaine. En conséquence, évidemment, avec la règlementation à venir, ces villes de banlieue seraient considérées comme partie intégrante de la communauté urbaine et, conséquemment, tomberaient sous le coup de la réglementation des villes de 25,000 et plus.

En ce qui a trait à la petite remarque concernant les services publics, à savoir les services d'autobus dans des endroits habituellement desservis par les chauffeurs de taxi, vous comprendrez qu'il est assez difficile de s'opposer à l'établissement d'un service d'autobus, si on prend aussi en ligne de compte l'intérêt du client qui est, lui, le citoyen.

En principe, même si je n'ai pas à me prononcer là-dessus, il m'apparaît bien clair que c'est un argument difficilement défendable dans le but de favoriser spécifiquement des chauffeurs de taxi. Même si la cause nous apparaît extrêmement sympathique, on ne peut quand même pas empêcher le citoyen qui peut bénéficier d'un service public à meilleur marché d'avoir ce choix, cette possibilité.

M. MATHIEU: Si vous me permettez... M. BOSSE: Je vous en prie.

M. MATHIEU: ... à cet article, nous croyons que vu que la Commission de transport de Québec est un organisme qui est, jusqu'à un certain point, parallèle à la Communauté urbaine de Québec, c'est-à-dire qu'ils sont reliés, mais aussi indépendants sur le plan opérationnel, il semblerait que lorsqu'un comité sera formé à la Communauté urbaine de Québec pour régir les taxis, si vous avez, d'une part, la Commission de transport qui est jusqu'à un certain point indépendante relativement à la Communauté urbaine et si vous avez le service de taxis qui est sous la juridiction de la Communauté urbaine, eh bien, dans les zones grises, c'est-à-dire dans les cas limites, il y aura toujours des conflits, à savoir à qui appartient cette clientèle.

Dans le passé, avec les compagnies privées, il ne s'était pas posé de question. Il y avait eu, il semblerait, une entente assez facile. Il se peut que la Commission de transport de Québec n'ait pas eu à vivre ces problèmes et qu'à l'avenir une politique soit établie à cet effet.

Mais ce que nous croyons, c'est qu'on devrait centraliser les pouvoirs entre les mains de la Communauté urbaine de Québec pour

qu'elle devienne le maître de la situation et qu'elle puisse faire l'arbitrage, à savoir qui dessert telle ou telle clientèle.

M. BOSSE: Il m'apparaît que c'est une question d'intérêt pour le public. Ce n'est pas une question d'intérêt soit pour la Commission de transport, soit pour les taxis. C'est une question d'intérêt pour la population qui a le droit d'être desservie aux taux les plus bas, il me semble.

M. MATHIEU: Oui, mais c'est sur ce point qu'on note... si on devait se diriger vers une exploitation de cette clientèle, c'est-à-dire en desservant cette clientèle par un système d'autobus, un transport en commun, au lieu d'émettre un permis par 800, il faudrait en émettre un par 1,000 ou 1,200 suivant la clientèle qu'on va enlever.

M. BOSSE: Je suis d'accord. Si ça devait avoir une répercussion aussi importante, il devrait y avoir évidemment reconsidération du nombre. Comme on le sait cependant, même dans Québec, ici, on n'a pas atteint encore cet objectif d'un par 800. Je crois que c'est un par 500 ou 600 ici.

Alors, c'est déjà une situation nettement supérieure à la région de Montréal, cependant ce n'est pas égal à la région de Sherbrooke, par exemple, où il y en a un par 1,200, je crois, de population. Alors, là, c'est idéal et on sent que le climat est meilleur, beaucoup plus sain.

Je suis d'accord avec vous qu'à ce moment-là il pourrait y avoir reconsidération, il n'y a rien qui empêche de modifier ultérieurement ce nombre. Cependant, je pense que jusqu'à ce que l'on ait atteint le nombre d'un par 800, il y a lieu... De toute façon, vous avez les mécanismes pour vous permettre la discussion par les comités consultatifs.

Je voudrais passer à la recommandation no 2 où, à un moment donné, il est question de retrait automatique et définitif de tout permis où le détenteur a fait l'objet d'une condamnation en vertu du code criminel. Je suis d'accord avec vous. Suite aux diverses rencontres, encore une fois, dans la province, il a été convenu de spécifier en fait le type de condamnation et aussi de le relier avec le travail.

Il est évident qu'ici, il ne s'agit pas de pénaliser, d'enlever un permis de taxi au détenteur qui a été condamné parce qu'il agissait comme bootlegger, ce qui est un acte criminel. Il ne s'agit pas de ça. Il s'agit de spécifier, je pense, et cela a déjà été convenu. Vos remarques sont donc extrêmement pertinentes dans le cas.

En ce qui a trait maintenant au décret immédiat de la non-transférabilité des permis, de la mise au point des mécanismes de contrôle de cette non-transférabilité, on peut affirmer que le premier ministre a fait parvenir, peu de temps après avoir rendu le rapport public, une lettre à chacune des municipalités de la provin- ce de Québec. Nous sommes très fiers de dire que nous avons eu l'entière collaboration des diverses autorités municipales sur ce point et qu'on a cessé d'émettre de nouveaux permis. En ce qui a trait à la non-transférabilité, on a aussi respecté cette mesure de contrôle et elle a sûrement permis, jusqu'à ce qu'on puisse recommencer de nouveau, s'il y a lieu, de mettre un peu d'ordre dans l'industrie.

M. MATHIEU: M. le député, est-ce que nous pourrions savoir si cette demande de gel des permis a été envoyée à toutes les municipalités ou seulement à certaines?

M. BOSSE: Cela a été envoyé à toutes les municipalités de 25,000 habitants et plus. Par la suite, on l'a envoyée à un certain nombre de municipalités qui, se prévalant peut-être de cet élément d'ignorance, voulaient jouer le jeu de la spéculation ou de l'exploitation dont vous avez parlé tout à l'heure, c'est-à-dire émettre un certain nombre de permis. Je peux vous affirmer de ce côté-là qu'il y a eu même des retraits de permis après émission ou il y a eu cessation d'émission. Maintenant, la situation m'apparaît sous contrôle dans l'ensemble de la province, y compris dans les petits villages en banlieue immédiate de villes de 25,000 de population. C'était là qu'on trouvait les émissions de permis en vue de les exploiter dans la grande cité.

En ce qui a trait à votre recommandation no 3, qui traite du retrait volontaire d'un certain nombre de voitures pour les flottes, c'est évident que la ville de Québec présente un problème nettement différent de celui de Montréal. C'est aussi vrai que Montréal présente un problème très particulier en ce qui a trait à la province de Québec. Il y a des flottes — bien qu'elles ne soient pas tellement nombreuses si on pense aux grandes villes comme New York, Paris, Londres, où il y a des systèmes de 200, 300 et 400 voitures — à Montréal où le maximum atteint, à l'heure actuelle, semblerait à peu près de 75 ou 80 voitures. C'est assez récent; c'est à la suite de nouvelles acquisitions que des personnes ont faites, mais le nombre de 60 nous apparaissait, au moment de l'enquête, en tout cas, le maximum, alors que partout ailleurs on retrouve des systèmes...

Les systèmes, quoiqu'on en dise, apparaissent être un service nécessaire aussi. Les jours où il y a mauvaise température, nos artisans, pour ne pas être victimes d'accidents et être pénalisés par les compagnies d'assurance, prennent moins de risques, tandis qu'un système, c'est une entreprise d'affaires et elle prend tous les risques pour faire de l'argent, évidemment. C'est là d'ailleurs l'objet de ses investissements. Je suis d'accord que la ville de Québec — et on a pris cela en considération — pourrait ajuster sa réglementation pour qu'il y ait peut-être des particularités concernant la Communauté urbaine de Montréal.

En ce qui a trait au comité consultatif, nous savons et nous tenons à féliciter d'ailleurs la région de Québec qui avait déjà pris cette initiative. On peut même dire que l'idée de l'inclure dans le rapport provient précisément de la rencontre de votre comité consultatif que vous avez à Québec et qui fonctionne très bien, à ce qu'on sait évidemment des négociations habituelles entre les diverses parties. Il y a ici une collaboration et nous l'avons constatée par votre présence à ces comités. Cela fonctionne très bien et c'est là d'ailleurs qu'est née l'idée d'y apporter des modifications pour satisfaire aux besoins réels d'ici, de Québec, ou d'autres villes. Je pense que ce serait opportun.

Le principe de la représentativité étant respecté, les divers éléments composant l'industrie du taxi, je ne crois pas qu'il soit tellement important que ce soit un groupe plutôt que l'autre, dans la mesure où ce ne sont pas les associations comme telles mais les individus comme tels qui soient les représentants, pour bien assurer la représentation des groupes et non, comme on le disait ce matin, comme à Montréal où certaines associations l'ont réclamé, d'être les représentants de l'industrie du taxi. Cela nous apparaît plutôt faux. Conséquemment, en respectant les critères de base, on n'a aucun inconvénient à les modifier pour les adapter à l'ensemble de la province et faire s'il le faut pour Montréal, une particularité.

En ce qui a trait aux critères à prévoir, il est évident que, pour la réglementation future, on s'est inspiré un peu de la réglementation qu'on a retrouvée ailleurs, et cela ressemble fort à votre première proposition a), donner préférence à un ancien chauffeur de taxi, ce qui existe présentement à Toronto et à Paris. A Toronto, on exige que la préférence soit donnée au chauffeur de taxi qui a oeuvré au moins trois ans dans l'industrie à titre de chauffeur de taxi depuis les cinq dernières années, alors qu'à Paris on exige plus déjà, on exige d'avoir été chauffeur pendant cinq années. Il y a une préférence et on a tenu compte de cela pour la préparation de la réglementation et, évidemment, il faut exiger que le candidat passe avec succès un examen; cela va de soi, cela m'apparaît même de toute évidence une nécessité. Or, ici, en ce qui a trait aux assurances, je ne sais pas de quelle façon on peut inclure cela, mais je suis d'accord sur le principe; d'ailleurs, dans le rapport, j'en fais mention. Il n'y a pas tellement une grosse différence non plus dans le prix des assurances même si, à Montréal, présentement, la réglementation exige, je pense, $35,000. D'accord, parce que la différence de prix n'est pas tellement élevée et c'est une plus grande protection. C'étaient des remarques peut-être de nature à apporter des clarifications à votre mémoire, qui, en passant, est bien fait. La collaboration de votre groupe jusqu'à présent a été des plus réconfortantes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le député de Chicoutimi, est-ce que vous me permettriez juste une question dans le même ordre d'idée?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Certainement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est une question au député de Dorion, étant donné qu'il était président de la commission qui porte son nom. Vous recommandez un taxi par 800 personnes, c'est bien cela?

M. BOSSE: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Quelle est la proportion actuellement dans la ville de Montréal?

M. BOSSE: A Montréal présentement, dans la ville, c'est un par 326 de population et, si on prend l'ensemble de la communauté urbaine, c'est un par 386.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela veut dire que, si on applique cette recommandation, à peu près la moitié des permis disparaît?

M. BOSSE: Oui, mais, par exemple, à la ville de Saint-Pierre, vous avez un taxi par 225 de population. Il y a beaucoup de villes, cependant, qui ont déjà un taxi par 800 ou par 750. Il y a Lachine, entre autres. Il y a quelques villes de banlieue qui ont déjà le quota. Cependant, le pire, c'est vraiment la ville de Montréal, soit un par 325, et, présentement, on sait que le nombre de permis est gelé. Or, ici à Québec par comparaison, je l'ai dit tout à l'heure, c'est un par 600 habitants; à Sherbrooke, c'est une situation déjà stabilisée, un par 1,200, je crois.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie et félicite Me Mathieu. Je pense que, sur l'ensemble des propositions qu'il a faites, la commission est d'accord et disposée à recommander au ministre l'application des dispositions que vous exigez. Maintenant, il y a quelques problèmes qui ont éveillé mon attention. Je voudrais vous poser une première question, Me Mathieu. Vous avez parlé de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec et des relations que vous serez obligés d'avoir ou que vous avez déjà eues avec cette commission. Est-ce que vous avez poursuivi des consultations ou engagé des pourparlers avec la CTCUQ au sujet des taxis et de cette clientèle dont vous parliez tout à l'heure?

M. MATHIEU: M. le député, le problème que j'ai soulevé est apparu il y a trois jours pour

un navire qui avait abordé à Québec. Depuis ce temps, j'ai pu consulter M. Poisson même ce midi, je lui en ai parlé, mais le problème n'a pas été discuté au niveau de l'association et de la commission. Il se peut qu'il soit possible d'en arriver à un règlement à ce niveau-là, je l'imagine, mais cependant il demeurera toujours que peut-être il y aura d'autres problèmes qui vont se poser parce que ce sera en fait deux pouvoirs parallèles jusqu'à un certain point et il y aura peut-être une concurrence entre les deux. Si une seule autorité avait à décider de cette limite où l'un doit agir et où l'autre doit agir, ce serait peut-être plus facile.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Mathieu, dans la ville de Québec, comment s'effectue le transport des passagers qui doivent se rendre à l'aéroport de l'Ancienne-Lorette? Est-ce que ces voitures, dites aéroporteurs, sont la propriété de gens qui font déjà du taxi?

M. MATHIEU: Si vous me le permettez, je vais consulter mon président, qui est plus informé que moi.

M. BOSSE: Ici, à l'aéroport, il y a une exclusivité pour la cueillette des passagers, c'est une Mme Breton.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux avoir la réponse du représentant.

M. MATHIEU: Je vais demander au président de vous répondre directement.

M. ROBERGE: Ici, à Québec, c'est une compagnie qui est détenue par une dame Breton. Elle a un service de limousines, mais on se sert plus des taxis que des limousines. Il y a Airlines Taxis, qui appartient à Mme Breton. A ce moment-là, au lieu de charger les limousines les premières, ils chargent les voitures-taxis qui viennent en concurrence avec nous, toujours. Dernièrement, ils ont donné la préférence aux taxis de Sainte-Foy et nous chargeons seulement à la dernière rangée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, ça pose un problème de concurrence dans votre cas...

M. ROBERGE: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... dont se plaignent les gens que vous représentez.

M. BOSSE: J'ai déjà prévenu le ministère fédéral des Transports que, tôt ou tard, le dernier des cas importants au Québec en ce qui a trait à l'accès à l'aérogare reviendrait sur le tapis. Il y a déjà une présomption qui vous est favorable. Je croyais de bonne foi que ce problème avait été réglé entre les parties. Cependant, si les taxis de Québec désirent avoir les mêmes avantages que Dorval et Sept-Iles, je pense qu'il ne dépend que d'eux de faire des représentations.

M. ROBERGE: Nous ne sommes pas contre le fait qu'il y ait un service de limousines parce qu'à ce moment-là ça revient meilleur marché au client. Mais il y a une chose certaine, c'est qu'au lieu de charger les limousines les premières, on utilise le service de taxis à $2 par tête.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, voyez-vous, je comprends les interventions de mon collègue, M. Bossé, qui veut courir au devant des coups, mais je connaissais l'existence de ce problème et c'est la raison pour laquelle j'ai posé la question à Me Mathieu. M. Roberge nous a donné la réponse. Il y a un problème qui pourrait peut-être s'aggraver. Par conséquent, le gouvernement aurait à en tenir compte et à se pencher sur cette question.

M. BOSSE: M. le Président, le gouvernement n'a pas hésité à prendre ses responsabilités, même si ce n'était pas de son ressort.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais bien que M. Bossé, mon ami et collègue, ne m'interrompe pas constamment pour venir à la rescousse du gouvernement dont il devrait être ministre, à mon avis.

M. BERTHIAUME: Ne t'en fais pas, il dit ça à tout le monde.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je dis ça à tout le monde, mais je choisis les circonstances. Me Mathieu, dans votre mémoire, à la recommandation no 6, vous parlez de ces propriétaires de systèmes qui devraient se départir volontairement des permis excédentaires. Vous mentionnez le cas d'une société qui posséderait 61 voitures. Qu'est-ce qui justifierait que cette société en particulier, qui a 61 voitures-taxis, diminue le nombre de ses voitures?

M. MATHIEU: On prétend qu'il y a trop de permis en circulation à Québec. Cette compagnie qui possède 61 permis n'utilise en pratique qu'environ 27 permis. Dans le but de régulariser la situation dans l'esprit du rapport Bossé, nous suggérons que les permis soient retirés avant que la réglementation intervienne et qu'on soit obligé d'indemniser ces corporations pour ce faire.

Comme ils ne sont pas utilisés, on demande qu'ils soient tout simplement retirés.

M. BOSSE: D'ailleurs, si on remarque la recommandation no 3, elle se lit comme suit: L'annulation immédiate de tous les permis pour lesquels aucune voiture n'est en circulation, et ceci sans compensation au détenteur. Cela fait l'objet, évidemment, d'une de nos résolutions. Il est évident que si ces permis ne sont pas

rattachés à une voiture, ils doivent disparaître. J'avais pensé, d'autre part, subsidiairement si l'on veut, que c'était pour faire diminuer au prorata le nombre de permis des systèmes, de telle sorte que les artisans conservent toujours le même pourcentage par rapport aux systèmes. J'ai bien dit subsidiairement.

M. MATHIEU: Peut-être. Les 61 permis sont peut-être utilisés dans l'ensemble mais il demeure qu'en réalité on n'utilise qu'environ 27 voitures par jour. C'est-à-dire qu'en rotation il se peut qu'on passe les 61 voitures dans la semaine.

M. BOSSE: Ces permis sont rattachés à des voitures présentement?

M. MATHIEU: C'est ça, en rotation. Les besoins sont justifiés pour 27 permis.

M. BOSSE: Je m'excuse, mais je voudrais ajouter encore que dans l'esprit du retrait d'un certain nombre de permis afin d'atteindre le 1 par 800, nous songions toujours à maintenir les mêmes pourcentages — c'est pourquoi j'ajoutais tout à l'heure cette explication additionnelle — à réduire proportionnellement entre les deux groupes pour ne pas créer plus d'injustice pour l'un ou l'autre des groupes.

M. MATHIEU: Tenant compte de la proportion des deux groupes.

M. BOSSE: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que ce retrait volontaire des permis peut se faire vraiment volontairement par entente?

M. BOSSE: Si Me Mathieu ne le sait pas...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je m'excuse, je vais poser la question à M. Mathieu et M. Bossé pourra ensuite parler au nom du gouvernement.

M. Mathieu, est-ce que vous pensez que cela puisse se faire volontairement, sur la base d'un "gentlemen's agreement", avec les gens qui possèdent plus de voitures que vous voudriez les voir posséder?

M. MATHIEU: Sur le plan juridique, à part une expropriation de permis, il semblerait impossible d'effectuer ces retraits. Cependant, il apparaît dans les recommandations qu'il faudra procéder de façon progressive: par les décès d'abord, en ne permettant pas le transfert de certains permis. Le retrait directement, à notre avis, à moins d'une expropriation, il est impossible de le faire.

M. BOSSE: Si vous me permettez, sur la même question, je voudrais ajouter...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, je vais poser mes questions à M. Mathieu et le gouvernement s'exprimera après.

M. BOSSE: J'ai une réponse satisfaisante, je crois.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'interroge le témoin et le ministre me répondra lui-même tout à l'heure.

M. Mathieu, vous parliez d'une société qui a 61 taxis. Mécaniquement, comment peut se faire ce retrait volontaire? Est-ce que vous avez l'impression que ce groupe qui a 61 voitures accepterait de se départir de ses permis ou s'il faudrait procéder par voie législative ou par voie de réglementation pour que cela se fasse?

M. MATHIEU: Je crois qu'il faudrait peut-être commencer par inviter les gens, c'est-à-dire négocier avec ces groupes autant que possible pour retirer les permis dont ils ne se servent pas. Par la suite, si c'est inefficace comme moyen, il serait peut-être nécessaire de légiférer dans un sens semblable. Il n'y aurait pas d'autre moyen à notre avis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Mathieu, à la toute fin de votre mémoire, lorsque vous parlez de la protection des chauffeurs contre la faillite, vous dites: Il serait nécessaire d'obliger le propriétaire...

M. BOSSE: Sur ce point même, je voudrais ajouter ici une information...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez revenir... M. le Président, je regrette infiniment...

M. LE PRESIDENT: Je donne la parole au député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais le député de Dorion...

M. BOSSE: ... éclairer les questions une par une, au fur et à mesure qu'elles nous arrivent.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le député de Dorion, ayant été président de la commission dite Bossé, a une vue de synthèse des problèmes.

Même si on pose des questions qui portent sur des sujets différents, il est capable, à la fin, de ramasser tout cela, de nous faire une synthèse et d'exposer le point de vue du gouvernement.

M. BOSSE: Il m'apparaît, M. le Président...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pose une dernière question à M. Mathieu.

M. BOSSE: ... que, dans la procédure habituelle, lorsqu'il était question d'un point bien particulier, chaque membre de la commission pouvait intervenir. En saine démocratie, il m'apparaît que c'est là un bon procédé qu'habituellement les membres de la commission n'hésitent pas à utiliser...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis tout à fait d'accord, M. le Président.

M. BOSSE: ... pour être bien informés, évidemment, alors que la question est encore claire à l'esprit de chacun. Conséquemment, ce que je voulais dire sur cette question...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président; je n'ai pas donné la permission à mon collègue de parler. Je la lui accorde.

M. BOSSE: Je vous remercie, cher confrère. Cela étant dit, sur la question de la réduction du nombre de permis, l'expérience a déjà été faite. Je peux vous affirmer que, dans la ville de Chicago, des compagnies ont convenu de retirer volontairement des groupes de 500 à 600 permis.

Evidemment, il faut immédiatement conclure qu'il y avait un intérêt. Par voie de négociations, les approches ayant déjà...

M. DEMERS: La population était de combien?

M. BOSSE: Si vous me permettez d'aller jusqu'au bout.

M. DEMERS: Vous voulez répondre à notre question.

M. BOSSE: ... été faites, il apparaît que, lorsqu'il y a un intérêt, les gens sont prêts à s'en départir. Des chauffeurs de taxi ou des personnes dans l'industrie du taxi admettront qu'avec la diminution d'un certain nombre de permis vous augmentez la valeur commerciale des permis demeurant sur le marché. Vous augmentez, de plus, le revenu, tout en diminuant le nombre d'heures de travail parce que vous mettez à la disposition d'un groupe de voitures plus limité une plus grande quantité de clients. Conséquemment, vous augmentez le revenu et la valeur commerciale du permis.

C'est un raisonnement que tout bon capitaliste qui a fait de l'investissement dans n'importe quel secteur sait comprendre. C'est pourquoi je dis que c'est possible par voie de négociations et par voie de volontariat de retirer un certain nombre de permis, plus particulièrement pour les systèmes de taxis qui auront moins de dépenses et moins d'investissements à faire pour retirer les mêmes revenus ou peut-être plus de revenus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je...

M. BOSSE: Je remercie le député de Chicoutimi de m'avoir permis de parler.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... remercie le député de Dorion de nous avoir donné cet exemple de la ville de Chicago, mais nous sommes ici à Québec. C'est pour cela que je demandais à Me Mathieu si...

M. BOSSE: Les hommes, à Chicago comme à Québec, se ressemblent.

M. DEMERS: Quelle était la proportion à Chicago? Vous avec l'air ferré sur Chicago.

M. BOSSE: C'était à peu près 10 p. c. du nombre de voitures qu'il y avait. Il y avait eu, là aussi, l'émission d'un excédent de permis. Je ne sais pas dans quel contexte.

M. DEMERS: Un taxi par 300 ou 500?

M. BOSSE: Je ne me rappelle pas les chiffres, très honnêtement.

M. DEMERS: Vous croyez que, par bonne volonté et en négociant...

M. BOSSE: Par le volontariat.

M. DEMERS: ... les gens de Québec vont embarquer là-dedans?

M. BOSSE: Je demeure convaincu, par le volontariat, que n'importe quel bonhomme qui a investi de l'argent dans un secteur donné et à qui on donne l'occasion de faire autant d'argent en investissant moins de capital, va accepter à n'importe quel moment, logiquement, de retirer un certain nombre de permis.

M. DEMERS: Il n'y a aucun problème dans ce cas-là.

M. BOSSE: A première vue, il ne paraît pas y avoir de problème.

M. DEMERS: Il n'y a aucun problème, c'est fait.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Mathieu, évidemment, c'est parce que nous sommes à Québec...

M. BOSSE: Nous n'en serions pas au règlement d'un premier problème.

M. DEMERS: Non, il n'y en a pas; c'est payant. Il n'y a personne ici qui ne sauterait pas là-dessus.

M. BOSSE: Voilà.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voulais demander à Me Mathieu — n'embrouillons pas les

questions en utilisant des exemples que l'on pourrait aller puiser à Chicago ou à Tokyo; le problème est à Québec — si, compte tenu de l'expérience qu'il a et de l'expérience qu'ont les personnes qu'il représente, ce volontariat semble possible.

M. MATHIEU: C'est une opinion très personnelle. Je crois que c'est peut-être possible, mais il y aura certainement des réticences. Les gens de Québec ont souvent compté sur leur permis comme rente viagère. Quant aux compagnies, je ne pourrais pas parler en leur nom.

Je pense que Me Boucher va me succéder au micro et il pourra sûrement le faire mieux que moi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Mathieu, une dernière question sur le problème de la protection des chauffeurs. Je devais en parler tout à l'heure. Vous dites: "Dans le but de protéger les chauffeurs de taxi contre les faillites, il sera nécessaire d'obliger le propriétaire de véhicule à maintenir en vigueur une police d'assurance couvrant la responsabilité du chauffeur pour une somme jamais inférieure à $100,000."

Supposons qu'il y ait un propriétaire qui a dix véhicules. Qu'est-ce que cela peut représenter comme coût d'assurance pour les dix personnes qui conduiraient ces véhicules?

M. MATHIEU: Cela peut représenter peut-être, je ne sais pas, $75 par personne.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Environ $75. Je voulais le savoir, enfin, pour les implications financières.

Alors, M. Mathieu, quant à moi, je suis heureux de vous avoir entendu et je suis d'accord avec l'ensemble de vos recommandations. J'imagine que mon collègue, le député de Dorion, voudra bien les actualiser dans des textes législatifs ou dans une réglementation formelle.

M. MATHIEU: M. le député de Chicoutimi, pour votre information, il est arrivé dans le passé que des individus aient un accident. Il y a une coopérative, une espèce de compagnie de services, comme on disait ce matin, à Québec, la Co-Op, comme on l'appelle, qui a des règlements, et malheureusement, ces règlements, qui sont envoyés aux institutions coopératives ou dans les ministères, semblent passer sans trop avoir été examinés. Il y avait un règlement, entre autres, qui empêchait un autre employeur d'engager un conducteur s'il était en dette avec un autre propriétaire. Or, au moment où il y avait un accident, le propriétaire jugeait que son conducteur était en faute, il le notait à la direction, et à ce moment-là, si le conducteur voulait s'engager ailleurs que chez lui, eh bien, on lui disait: C'est impossible, tu es en dette avec un autre, alors qu'il n'avait pas encore été jugé par les tribunaux du Québec. C'est un règlement qui était passé inaperçu, j'imagine, aux autorités. Cela date, d'ailleurs, de peut-être quatre, cinq, dix ans, je ne sais pas. C'est un règlement qui, définitivement, est excessif dans sa teneur.

M. BOSSE: Municipal?

M. MATHIEU: Non, c'est un règlement de la Co-Op.

M. BOSSE: De régie interne.

M. MATHIEU: De régie interne. Mais quand même, ces règlements sont soumis aux institutions financières pour approbation. Alors, à ce moment-là, notre association, les conducteurs, les chauffeurs sont grandement pénalisés par l'attitude des propriétaires qui contrôlent d'ailleurs cette coopérative, qui en édictent les règlements, c'est-à-dire qui votent les règlements et qui, à ce moment-là, mettent souvent le conducteur entre le choix d'abandonner ses vacances d'été pour payer cette faute ou bien de se retirer de la circulation.

M. BOSSE: Avez-vous encore...

M. MATHIEU: Alors, c'est pour ça qu'on dit, nous, qu'il devrait y avoir une protection. C'est pour ça que nous étions venus en délégation, ce printemps — nous étions environs 200, je pense — pour demander qu'on étudie le problème des assurances dans le domaine du taxi, quitte à ce que les taux soient fixés par une régie des prix sur le plan de l'assurance-automobile. Qu'il y ait une régie, ou que l'on étatise ce secteur en particulier, ce qui pourrait servir de stimulant au reste du domaine de l'assurance. Mais on ne prône pas de politique d'étatisation, cependant. Simplement, on recherche une solution à ce problème qui apparaît être lié au sort des conducteurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A Québec, Me Mathieu, est-ce que vous avez de ces associations de services?

M. MATHIEU: La Co-Op. Le numéro est 525-5191.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la seule qui existe?

M. MATHIEU: Diamond aussi. Il apparaît que c'est une compagnie qui donne le service. C'est une corporation privée.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'à votre avis, à votre connaissance, les conditions d'appartenance à cette association de services ou à ces associations de services sont à peu près semblables à celles que l'on a décrites, ce matin, en écoutant les associations de Montréal?

M. MATHIEU: A mon avis, je ne croirais pas. Elles sont, en général, beaucoup plus humaines. Cependant, il y a quelques règlements qui sont excessifs par leur teneur.

M. BOSSE: Concernant le règlement dont vous avez fait mention tout à l'heure, y a-t-il eu de votre part des représentations qui ont été faites auprès du ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives?

M. MATHIEU: Nous sommes depuis quelques mois à essayer de rejoindre qui décide dans tout ça. Nous avons certaines difficultés dans le sens qu'il y a des administrateurs ou des surveillants qui s'occupent des coopératives entre autres, qui voient à l'administration et eux, ils ne voient que l'aspect pratique. Disons qu'ils donnent des conseils administratifs, ça devrait fonctionner de telle et telle façon, mais cependant, il y a l'aspect légal qui ne les préoccupe pas ou du moins pas tellement.

M. BOSSE: Mais en faisant des représentations au ministre concerné lui-même et non à ses fonctionnaires, n'y aurait-il pas plus de chance pour vous de connaître des résultats, c'est-à-dire, si j'ai bien compris, vous désirez faire rescinder cette résolution?

M. MATHIEU: Celle-là et d'autres résolutions qui sont sûrement inacceptables. Nous avons envoyé des mises en demeure, nous avons discuté et il apparaît que nous serons peut-être obligés d'aller devant les tribunaux pour faire casser certains règlements.

Je note que nous avons fait des démarches pour avoir une entrevue avec le sous-ministre et nous espérons beaucoup de cette entrevue.

Nous avons apporté cet aspect du problème pour noter l'importance des assurances, qui sont grandement liées au sort du propriétaire, j'imagine, mais surtout au sort qui nous préoccupe, le sort des conducteurs, des chauffeurs. Si un chauffeur n'a pas eu la prévoyance d'avoir une assurance pour se couvrir, s'il a un accident, il est dans la rue, on le saisit. Il y a actuellement des actions en cour que je devrai débattre à cet effet, une erreur du conducteur, et il est assez rare qu'il n'en fasse pas une dans l'année. A ce moment-là, soit qu'il vende, c'est-à-dire échange ses vacances ou il doit y laisser sa fortune. Voilà.

M. LE PRESIDENT: Le ministre des Transports.

M. TREMBLAY (Bourassa): M. Mathieu, je veux vous remercier de vos bonnes paroles. Maintenant, quel est le nombre de taxis en trop dans le Québec métropolitain, disons ce que couvre la Commission de transport de Québec? Est-ce que vous avez un inventaire bref qui nous dirait combien il peut y avoir de taxis en trop, 50, 60, 100? Quel est le nombre qui serait convenable?

M. ROBERGE: Dans le moment, il y a un taxi pour 400 de population; il y a 400 taxis dans la ville de Québec et il y a 200,000 de population. Alors vous pouvez juger par vous-même.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je vous pose la question parce que les secteurs ne sont pas tous les mêmes. D'après le travail qu'il y a ici à Québec, vous êtes dans le métier, combien prévoyez-vous de taxis en trop?

M. ROBERGE: Il y en a de 175 à 200 en trop.

M. MATHIEU: Nous avons fait un mémoire il y a environ un an dans lequel j'avais étudié ce problème, avant la parution du rapport Bossé, et nous en étions arrivés à prétendre que la solution était sur le plan métropolitain. Cependant, le problème qui se pose, c'est que souvent il y a concentration des taxis. Si les taxis étaient bien répartis sur le territoire avec des secteurs, il se pourrait que le nombre actuel, moins peut-être 100 ou 75, soit suffisant.

Si on laisse la liberté de travail, il y a une concentration au centre de la ville au détriment de certaines régions comme Charlesbourg ou autres. D'ailleurs, avec les annexions qui ont été faites à Québec, les taxis des Saules et Vanier sont venus travailler à Québec laissant la population là-bas sans service.

Comme je !e notais dès le début, il faut tenir compte de cette politique par secteur. Est-ce que la communauté urbaine va arriver avec des règlements émettant des permis pour un secteur donné ou si elle va laisser une liberté de travail dans tout le territoire? A ce moment-là, il y aura toujours des problèmes.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi un moment. C'est sur le nombre des taxis. Quand M. Roberge dit qu'il y a 400 taxis à Québec actuellement...

M. ROBERGE: Dans la ville de Québec même.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... cela ne comprend pas Sillery et Sainte-Foy? C'est seulement dans la ville de Québec.

M. ROBERGE: Je pense qu'il y a 676 permis dans le Québec métropolitain.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon!

M. TREMBLAY (Bourassa): Il y a deux spécialistes ici: le député de Chicoutimi et le député de Dorion. Comme ministre, j'ai quelques questions à poser, mais je ne veux pas vous poivrer de questions. J'aimerais savoir si, depuis la formation de la nouvelle Commission de transport de Québec, cela vous a enlevé du travail, si cela vous a causé préjudice.

M. ROBERGE: Dans le moment, on ne peut pas dire que cela nous a affectés gravement parce que le système de transport n'est pas encore organisé complètement. D'après ce que je peux voir, il n'y a que quatre compagnies d'autobus d'achetées. Quand il sera organisé au complet, cela va certainement nous nuire c'est officiel.

M. MATHIEU: M. le ministre, nous sommes la seule association au Québec à être, je crois, accréditée et syndiquée; nous avons pris de l'avance. Nous avons des conventions collectives qui vont se terminer au mois de février prochain. Nous avons l'intention de négocier la prochaine convention collective. Si on ne peut pas régler le problème du conflit de juridictions ou d'intérêts entre la Commission de transport et les chauffeurs de taxis, l'Association des chauffeurs n'a pas d'objection à ce que la Commission de transport accapare les permis et qu'elle donne le service, sachant que les conditions de travail seront peut-être supérieures à ce qu'elles sont actuellement et les salaires aussi. On ne met pas en doute, actuellement, la valeur de l'entreprise privée, mais notre désir d'améliorer nos conditions de travail est plus important.

M. BOSSE: Est-ce que vous faites allusion au fait que la Commission de transport de la communauté urbaine pourrait exproprier le service de taxis? Est-ce à cela que vous faites allusion?

M. MATHIEU: Ce que nous disons, c'est que nous n'aurions pas d'objection, nous, l'Association des chauffeurs.

M. BOSSE: Je crois que la communauté urbaine comme telle — au sens du projet de loi, je dis bien — n'aurait pas cette juridiction, d'abord, ni cette autorité. Je ne tiens pas compte des représentations qui ont été faites par les diverses communautés urbaines.

M. MATHIEU: Il se pourrait, M. le député, que cette zone grise donne lieu à un conflit interminable, parce qu'en fait le profit se situe dans cette zone. Si on améliore le service et qu'on fait en sorte, durant le carnaval, de donner des services privés ou des services additionnels, à ce moment-là, cela rend le taxi plus ou moins rentable. L'Association des chauffeurs se dit bien prête à travailler pour la Communauté urbaine de Québec ou la Commission de transport. Remarquez que ce n'est là qu'une suggestion, au cas où on n'arriverait pas à une entente.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'avais une question à poser. Prenez la ville de Vanier ou Québec même. S'il y a beaucoup de travail à Québec même, la population de la ville de Vanier n'a pas de services. Ce qui arrive, c'est que les chauffeurs — je ne les blâme pas — vont où il y a le plus d'ouvrage et ce sont les personnes de la ville de Vanier qui en souffrent. Si c'est une dame qui est malade et qu'il faut qu'elle soit à l'hôpital en dedans d'une heure, alors il n'y a pas de taxi. Alors, c'est assez difficile de fixer une norme. J'ai pris la parole de M. Roberge qui a dit, tout à l'heure, qu'il y avait 200 taxis de trop, mais c'est assez difficile d'avoir le nombre juste, parce qu'il arrive assez souvent qu'ils s'en vont où il y a beaucoup d'ouvrage et il y a des zones où les gens se trouvent à ne pas avoir de services. Il faudrait, à ce moment-là, qu'il y ait un équilibre.

M. MATHIEU: Voilà pourquoi on va suggérer que la communauté urbaine applique des règlements ou donne des permis limitatifs pour certains secteurs afin de desservir des secteurs particuliers.

M. BOSSE: Sur ce point, Me Mathieu, l'expérience vécue de l'intégration des divers services de taxis de plusieurs municipalités dans la communauté urbaine ou ce qui lui ressemble, la Commission métropolitaine de Toronto, il s'avère qu'à l'occasion de l'intégration, il y a eu une concentration des services pour une couple de semaines au centre-ville. Par la suite, chacun semble s'être stabilisé, un certain nombre de voitures s'est stabilisé dans les banlieues et d'autres au centre-ville. De la sorte, après une petite période d'essayage, le service se retrouve assez complet quand même dans les banlieues et dans les autres endroits. Evidemment, la solution ultime pourrait peut-être se trouver dans la proposition que vous faites. Cependant, en toute honnêteté, il serait peut-être opportun préalablement de faire l'expérience et la tentative de la proposition qu'on a faite, c'est-à-dire faire l'intégration à l'intérieur d'un territoire d'une communauté urbaine et, par la suite, si c'était nécessaire, réviser cela, mais les expériences de Toronto, Paris et New York semblent démontrer plutôt le contraire. La plus près de nous évidemment, c'est Toronto.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Mathieu, dans votre mémoire, vous parlez d'une compagnie dans la ville de Québec qui possède 61 taxis et vous recommandez que ce nombre soit réduit à vingt. Plus bas, vous dites: "... nous croyons que la nouvelle réglementation devrait s'inspirer d'un règlement que l'on retrouve à la ville de Québec et qui veut qu'un propriétaire n'ait droit qu'à un permis, qu'à un taxi." Est-ce que cela voudrait dire que c'est une loi qui existe à la ville de Québec et que cette loi n'est pas observée?

M. MATHIEU: D'après nos renseignements...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que cette loi existe réellement?

M. MATHIEU: D'après nos informations, la compagnie avait des droits acquis avant que le règlement soit passé.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Elle avait des droits acquis avant.

M. MATHIEU: C'est-à-dire qu'elle existait avant que ce règlement soit adopté et mis en vigueur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que c'est la seule qui ait plus qu'un permis?

M. MATHEU: Non, il y a un propriétaire...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'étaient des droits acquis avant le règlement?

M. MATHIEU: Exactement.

M. AUDET: M. Mathieu, vous parliez tout à l'heure au sujet de la protection des propriétaires pour assurer les chauffeurs dans l'éventualité d'accidents. Seriez-vous d'accord à reporter sur la responsabilité du chauffeur les infractions possibles faites par lui, soit la perte de son permis plutôt que la perte du permis du propriétaire de l'automobile?

M. MATHIEU: C'est assez global comme jugement, ce que vous me demandez. Je crois que c'est chacun sa faute. Il demeure que si le propriétaire oblige le conducteur à conduire dans des conditions impossibles, il est peut-être difficile de lui demander d'assumer la responsabilité des infractions qu'il commettra, parce qu'il le fait dans des conditions pénibles. Cependant, s'il le fait dans des conditions normales et qu'il devient fautif, ayant une assurance pour couvrir sa responsabilité civile, nous n'avons pas d'objection à ce qu'il assume sa responsabilité. Sur le plan pénal, encore là, c'est sa responsabilité et c'est sa faute, dans des conditions normales.

M. AUDET: Ce matin, je déplorais le fait que souvent l'infraction du chauffeur retombait sur le dos du propriétaire, que celui-ci perdait les permis de son véhicule, que c'est souvent...

M. BOSSE: On a fait allusion, je pense...

M. AUDET: ... trop onéreux pour le propriétaire, et on demandait que la responsabilité retombe sur les épaules du chauffeur.

M. MATHIEU: Globalement, c'est peut-être un jugement trop sévère, mais je pense qu'il faudrait nuancer et faire un partage.

M. BOSSE: Ce à quoi on faisait allusion, je crois, pour allumer la lanterne de mon confrère, c'était surtout le cas d'infractions à la circulation, la question des billets de stationnement, par exemple, ou de vitesse. Cela n'est pas de même nature. Ce à quoi vous faisiez allusion dans votre question avait plutôt trait aux assurances, si j'ai bien compris, à la responsabilité à l'occasion d'un accident. Cela n'est pas de même nature. Je pense que dans la question, par exemple, des infractions, il est assez pertinent d'analyser très sérieusement la responsabilité du conducteur, du chauffeur, parce que le propriétaire, dans certains endroits à Montréal où fréquemment on va changer de propriétaire, reçoit cinq ou six semaines, quelquefois deux mois après, des billets de stationnement dont il doit faire les frais. Cela diminue de beaucoup le revenu ou le bénéfice ou augmente le coût de l'exploitation. Sur ce point, je pense qu'il est important d'analyser la possibilité de pénaliser le chauffeur. Mais sur les questions d'accident, je pense que Me Mathieu nous a bien répondu qu'il ne faut pas non plus rendre les conditions de vie difficiles pour le chauffeur. Chacun ses responsabilités. Si le propriétaire réalise des bénéfices, il lui incombe d'autre part d'accepter un certain nombre d'obligations, entre autres l'assurance-automobile.

M. MATHIEU: C'est cela. Même sur le plan pénal, si on oblige le conducteur à aller travailleur sur la Place d'Armes ou ailleurs alors qu'on sait qu'il y a beaucoup de clientèle mais qu'il y a un risque d'avoir des billets, ou durant une période d'hiver où il y a un danger parce qu'il fait mauvais et qu'il doit stationner dans la rue et peut écoper d'une contravention, on imagine qu'à ce moment-là il devrait y avoir un partage de coût parce qu'il y a un partage de profits aussi. Il travaille alors sous les ordres du propriétaire.

M. LE PRESIDENT: Il n'y a pas d'autres questions? On vous remercie, Me Mathieu, de la façon dont vous avez présenté votre mémoire. Je crois que vous avez fait valoir vos points et je vous remercie au nom des membres de la commission.

M. MATHIEU: C'est nous qui vous remercions.

M. LE PRESIDENT: Maintenant...

M. PRENOVEAU: M. le Président, est-ce que je pourrais...

M. LE PRESIDENT: M. Prénoveau, je ne veux pas vous enlever votre droit de parole, mais je vais vous donner la permission d'être très bref, une où deux minutes.

M. PRENOVEAU: M. Bossé vient de déposer entre les mains des députés un éditorial de M. Pierre Pascau. Je trouve un peu étrange qu'on ait attendu après notre témoignage pour produire ce document. Est-ce que M. Bossé...

M. BOSSE: M. le Président, c'est justement sur ce point que je demandais la parole. Si j'ai fait distribuer cette copie d'un éditorial de Pierre Pascau, datant du mois d'avril, ce n'est sûrement pas pour discréditer les chauffeurs de taxis comme tels dans la région de Montréal. Au contraire, c'est pour mettre en évidence les difficultés devant lesquelles se trouvaient les autorités à quelque niveau qu'elles soient à l'occasion, par exemple, de l'ouverture de l'aérogare à l'aéroport de Dorval.

Il est bien connu que M. Pierre Pascau, commentateur, avait pris fait et cause pour les chauffeurs de taxis et s'était engagé assez à fond dans cette sorte de bataille verbale. Il n'avait pas hésité à démontrer sa sympathie pour les chauffeurs de taxis vis-à-vis de qui on avait exercé un grand nombre d'injustices, etc. Je voulais mettre en lumière ici le bien-fondé de la remise entre les mains des autorités de Dorval de l'application de certaines mesures de nature à assurer un minimum de surveillance vis-à-vis des chauffeurs de taxi qui, indéniablement, tel que l'affirmait le journal Montréal Star et tel que le répète ici le commentateur Pierre Pascau, avaient nettement exagéré et abusé à tous les points de vue vis-à-vis de la clientèle.

Il ne s'agit pas, évidemment, de discréditer l'ensemble des chauffeurs de taxi pour des gestes répréhensibles posés par certains d'entre eux. Cependant, il faut faire la lumière sur tous les événements et tous les aspects d'un problème et avoir l'honnêteté, à mon avis, d'exposer les choses telles qu'elles sont et non de favoriser seulement une partie à l'occasion.

C'est uniquement ce que j'ai voulu faire, mettre en lumière les difficultés devant lesquelles ont peut se trouver et ne pas voir seulement un côté de la médaille. M. Pascau dit justement cela. Ce n'était que pour justifier notre prise de position à l'égard de la ville de Dorval.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, permettez-moi là-dessus de dire un mot très bref pour déplorer cette procédure. Voici que, après l'audition du témoignage de M. Prénoveau, l'on nous fait distribuer un texte qui est simplement un éditorial d'un journaliste au sujet duquel je n'ai pas à porter jugement. Je ne veux ni commenter ni porter jugement sur le texte que l'on nous a remis.

Je trouve cette procédure indélicate, surtout qu'il s'agit simplement d'un éditorial qui fait état de certaines choses qui existeraient peut-être mais qui ne sont pas prouvées. Par conséquent, M. le Président, pour être très bref, je déclare que le geste que l'on a posé est inusité dans les circonstances, que l'on ne devrait pas répéter pareil geste et que cet éditorial, même si les faits qui sont évoqués étaient vrais, dans les circonstances, étant donné que les gens que nous avons entendus ce matin ne sont pas en mesure immédiatement de réfuter tout cela, est de nature à abuser les membres de cette commission et pourrait laisser entendre que les personnes que nous avons entendues ce matin, par la voix de M. Prénoveau, nous auraient trompés.

Alors, jusqu'à preuve du contraire, je prends la version qui nous a été donnée ce matin jusqu'à ce que l'éditorialiste en question et le journal le Star nous donnent des preuves très nettes que la situation que commente l'éditorialiste est bien celle qu'il essaie de décrire sans pour autant apporter les éléments de preuve qui nous permettraient de lui accorder une certaine crédibilité.

M. BOSSE: M. le Président, si vous me permettez, il est peut-être déplorable que cela ait été déposé après-midi. Malheureusement, je ne l'avais pas en main, je n'ai mis la main dessus que cet après-midi, premièrement, et, deuxièmement, les faits qui sont relatés dans cet éditorial se rapportent à des événements passés, jugés et décidés.

Conséquemment, il n'ont aucunement comme effet d'affecter de quelque façon que ce soit le ou les groupes concernés qui sont ici, les porte-parole. Cet éditorial fait tout simplement l'image d'une situation difficile et répond à un argument dans le rapport, à la page 2, qui déplore le fait qu'on ait confié à la ville de Dorval la surveillance et la juridiction. Ce n'est tout simplement que pour mettre en lumière les difficultés et la nécessité qu'avait le gouvernement en place de faire voter une législation qui soit de nature à corriger de telles situations.

Les faits relatés, évidemment, portent sur des articles parus dans le Star; je ne suis pas non plus personnellement en mesure de les prouver mais, d'autre part, ils ne semblent pas avoir été contestés. Quoi qu'il en soit, ces faits et ces événements sont dépassés. J'ai d'abord pris comme mesure d'aviser que ce n'était pas dans un but de discréditer qui que ce soit.

D'autre part, le groupe concerné qui s'adresse à nous est un groupe de propriétaires, alors que cet éditorial s'adresse à des chauffeurs de taxi. C'était strictement pour mettre en lumière la situation et, évidemment, si le fait est inusité en soi, il faut aussi se rappeler que le fait de Murray Hill à Dorval est inusité en soi. Il faudrait se rappeler que ça ne se produit pas tous les jours dans la province de Québec.

Il y a, de par les temps qui courent, des choses assez inusitées qui se produisent dans cette province. Conséquemment, pour ma part, je ne me scandalise pas de déposer des documents de telle nature, qui permettent précisément à cette commission de voir un peu plus clair dans le problème difficile et les difficultés qui existent dans l'industrie du taxi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Psychologiquement, M. le Président, ne pensez-vous pas que ce document est de nature à créer une impression défavorable et qu'étant donné qu'il s'agit de faits passés on n'avait pas raison de

déposer pareil document? Je comprends, avec le député de Dorion, qu'il se passe bien des choses dans le Québec. Il y a le problème de Murray Hill. Nous aurons, d'ailleurs, l'occasion d'interroger les représentants de Murray Hill tout à l'heure, mais il reste que ce document est déposé sans explication.

Je remercie le député de Dorion de nous les avoir maintenant fournis.

M. BOSSE: J'ai justement demandé la parole au président dans le but de donner des explications.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais nous ne les avions pas tantôt.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Je ne permettrai pas qu'on éternise le débat. D'ailleurs, cela ne touche nullement le bill 23.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si vous le permettez, il s'agit d'une question de procédure en commission parlementaire. Je répète que cela est inusité. Je ne prête aucune mauvaise intention à mon collègue. Il s'est expliqué, mais, s'il ne nous avait pas fourni les explications qu'il vient de nous fournir, je serais obligé de demander qu'on le condamne pour avoir posé un tel geste.

M. BOSSE: J'espère qu'on ne me condamnera pas.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas en prison.

M. BOSSE: Juste une dernière remarque. Encore une fois, l'intention n'est sûrement pas — venant de quelqu'un qui désire, du moins, améliorer les conditions de travail et qui n'a pas hésité à prendre tous les risques afin que les conditions qu'il recommande soient appliquées — de discréditer l'industrie du taxi dans Montréal, au contraire.

M. PRENOVEAU: M. le Président, juste deux minutes très courtes. Nous avons déploré ce fait parce que les propriétaires artisans et les chauffeurs étaient impliqués là-dedans. Nous sommes allés plus vite que le gouvernement. Nous avons pris l'initiative d'employer quelqu'un, à raison de $0.25 par voyage, qu'il nous remettait, pour faire concurrence à Murray Hill. Le répartiteur que nous avons engagé dit le prix au client et au chauffeur; c'est entendu comme cela. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'apporter un éclaircissement.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je voudrais juste rassurer ces messieurs. Même si cela nous a été remis après le lunch, ce n'est pas cet éditorial qui va changer le projet de loi ou ce qui a été dit ici ce matin en commission.

M. PRENOVEAU: Non, mais nous le prenions comme une giffle à notre égard.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je veux vous rassurer à l'avance...

M. PRENOVEAU: Très bien, merci.

M. TREMBLAY (Bourassa): ... et vous dire que ce qui compte, c'est ce que vous avez dit ce matin et qui a été enregistré. Nous en avons pris bonne note, comme le dirait le député de Chicoutimi, et cela a été très bien enregistré.

M. BOSSE: M. le Président, pour rectifier certaines choses, je ne vois pas d'inconvénient à ce que des citoyens, de quelque secteur qu'ils soient, prennent des initiatives de nature à corriger des situations. Cependant, ce qui est inadmissible, c'est qu'un groupe, quel qu'il soit et quelle que soit sa bonne foi, prenne en main la réglementation dans quelque secteur que ce soit. Ce serait nier tout la nécessité d'une autorité à quelque niveau que ce soit, au municipal, au provincial ou au fédéral.

M. PRENOVEAU: Je suis d'accord avec vous, M. Bossé, mais, vu la lenteur de votre rapport à devenir loi — vous savez comme moi que le problème était très grave — nous ne voulions pas perdre ce sur quoi vous aviez travaillé. C'est pour cette raison que le groupe de chauffeurs a pris l'initiative d'engager un répartiteur pour avoir un peu plus de travail.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie beaucoup, M. Prénoveau. J'appelle l'Association des propriétaires de taxi. Me Côme Boucher.

Association des propriétaires de taxis

Me Côme Boucher

M. BOUCHER: M. le Président, M. le ministre, Messieurs les députés, l'association que je représente a été formée en 1944, ici à Québec. C'est une association formée en vertu de la Loi des syndicats professionnels et elle a toujours fonctionné depuis. Jusqu'à l'hiver 1970, elle comptait presque tous les propriétaires de taxi de la ville de Québec, sauf la compagnie dont on a fait mention jusqu'à présent, à savoir la compagnie qui a 61 véhicules. Au cours de l'hiver 1971, une autre association de propriétaires s'est formée, après l'assemblée annuelle au cours de laquelle une élection avait eu lieu. Alors, aujourd'hui, il y a deux associations de propriétaires, à savoir celle que je représente et une autre. Enfin, il y a l'Association des chauffeurs que Me Mathieu a représentée et qui est maintenant accréditée auprès de la Commission des relations du travail.

On pourrait ajouter également que l'association que je représente compte environ, dans le moment, 250 propriétaires artisans.

En ce qui concerne le bill 23 comme tel, nous n'avons à peu près rien à redire. Nous constatons dans ce bill que la juridiction est transférée à la communauté urbaine au lieu d'être, comme elle l'a été jusqu'à présent, à la ville de Québec.

Ce que nous ne savons pas, naturellement, c'est la réglementation qui interviendra à la suite de cette loi. Il y a des principes fondamentaux qui entrent en ligne de compte dans la réglementation qui interviendra.

Tout cela, naturellement, part du principe qu'il y aurait trop de taxis dans la ville de Québec et dans la plupart des villes. Alors, acceptons, pour fins de l'argumentation, qu'il y a trop de propriétaires de taxis, trop de véhicules. Il faut se demander comment faire pour les réduire. C'est à ce point-là que les recommandations du rapport Bossé sont justes, et nous sommes d'accord avec la majorité de ces recommandations. Seulement il y en a une que nous ne croyons pas très juste, à savoir celle qui prévoit que les propriétaires de taxis ne devraient avoir qu'une seule occupation. On procéderait à réduire le nombre de propriétaires de taxis, premièrement, en enlevant ceux qui ont été condamnés par les cours, une condamnation criminelle. Alors, nous sommes d'accord sur cette première recommandation, sauf qu'il y ait des modifications, qu'il y ait des restrictions, comme il y en a toujours eu, d'ailleurs, dans le règlement de la ville de Québec. On n'enlève pas un permis de taxi dans la ville de Québec parce que quelqu'un a été trouvé coupable d'un vol à l'étalage. C'est bien évident. Alors, cela a toujours existé et, dans le règlement de la ville de Québec, il y a une bonne division des crimes pour lesquels un chauffeur ou un propriétaire doit perdre son permis. Je vous donne celui qui saute le plus aux yeux, celui qui est condamné pour facultés affaiblies à deux ou trois reprises. C'est bien évident et logique qu'à un moment donné on dise qu'il ne peut plus faire de taxi.

La deuxième recommandation est celle à l'effet qu'il n'y ait pas de transférabilité de permis. A venir jusqu'à aujourd'hui, les propriétaires de taxis ont toujours pu vendre leur permis, pas officiellement, mais les propriétaires ont toujours vendu leur automobile, le taximètre et l'équipement, et, toujours, le permis de taxi avait une valeur marchande beaucoup plus élevée que celle qui représentait la valeur de l'automobile et de l'équipement.

Je suis heureux de constater que le rapport Bossé met cela ouvertement sur la table, qu'il y a une valeur marchande au permis de propriétaires de taxis. Nous sommes d'accord sur le fait qu'il n'y ait plus de transfert de permis pour éviter le marchandage. J'ajoute cependant que, dans la ville de Québec , il y a toujours eu une restriction à ces transfers de permis, vu qu'une personne, une fois qu'elle avait vendu, ne pouvait en acheter un nouveau avant cinq ans. Nous sommes d'accord sur ce point-là.

Nous ne sommes pas d'accord sur la troisième recommandation, à savoir que les permis devraient être retranchés à ceux qui ont une double occupation ou dont l'occupation principale n'est pas celle du taxi. Voici pourquoi. Naturellement, nous ne savons pas exactement de quelle façon cela va se présenter ou de quelle façon cela va se produire. Aujourd'hui, dans la ville de Québec, il y a environ 100 à 125 personnes qui sont propriétaires d'un permis de taxis pour lequel elles ont payé une somme de $5,000 à $6,000. Si, du jour au lendemain, on le leur enlève parce qu'elles ont une occupation secondaire ou une autre occupation, je crois qu'il y a là une injustice inacceptable. Si on nous garantissait, dans la loi ou dans les règlements, que ces règlements n'auront aucun effet rétroactif, je suis absolument satisfait. Si c'était dit, pour l'avenir: "Les propriétaires de taxis n'auront plus le droit d'avoir une double occupation," quoique ce soit un peu exorbitant. Je ne connais pas beaucoup de domaines dans lesquels les gens ne peuvent pas ou bien où la loi défend à une personne d'avoir différentes activités.

Je crois que ça va un peu à l'encontre des droits de l'homme. Quoi qu'il en soit, nous serions d'accord pour que ça se fasse, parce qu'il faut que ce soit réduit.

Alors, on en vient là à l'indemnité. A venir jusqu'à présent, personne ne nous a dit: D'accord, il faut réduire les permis, on va vous enlever vos permis, messieurs, mais qui va payer? M. Bossé nous a dit, j'espère respecter l'idée, on nous a dit, lors d'une assemblée d'information aux chauffeurs, à laquelle nous avons assisté, parce que nous l'avons su d'une autre manière, que les permis seraient payés par ceux qui resteraient en place.

Alors, ceux qui resteraient en place, naturellement ce seront encore les propriétaires de taxis qui paieront. D'abord, nous ne voyons pas trop comment cela pourrait se faire. Est-ce qu'on va exiger une cotisation des propriétaires qui resteront en place pour payer les anciens propriétaires qui sont partis? On ne le sait pas trop. On aimerait avoir des éclaircissements sur ça.

Je dois ajouter cependant que, lors d'une entrevue avec M. Frigon, qui m'a semblé très au courant de la question et qui travaille en étroite collaboration avec M. Bossé, on nous a dit qu'il y a possibilité qu'une partie soit payée par la communauté urbaine, une partie par le gouvernement provincial, une partie par les propriétaires. C'est une suggestion qui a été faite. Bon.

Alors, nous aimerions savoir qui va payer ces permis qu'on va enlever aux propriétaires, s'il faut en enlever 100, 150 ou 200. C'est un point très important. Il me semble qu'il y a là une question très importante de droit, et pour les gens qui font du taxi depuis de très nombreuses années, qui ont une occupation secondaire, je ne crois pas qu'on puisse le leur enlever du jour au lendemain.

Nous disons que si on nous propose un mode de rachat de ces permis, il y a lieu de discuter, parce qu'il y a plusieurs personnes qui seraient disposées à s'en départir si on leur offrait quelque chose pour leur permis. Mais je ne peux pas me mettre dans la tête que les gens vont se départir volontairement de leur permis.

J'en viens maintenant au cas de la compagnie dont on a parlé tout à l'heure, qui a 61 permis. Cette compagnie a 61 permis de taxi, 61 véhicules automobiles. Alors si cette compagnie garde 61 véhicules automobiles dans le moment, si elle trouve que c'est rentable dans le moment de les garder, je vois assez mal qu'elle va s'en départir volontairement. Et je vois plus mal qu'elle va s'en départir, parce qu'elle réalise que la réduction se fera chez les propriétaires artisans au prorata du nombre qu'elle a. Alors, de toute façon, elle sait que si, dans une année, il y a dix propriétaires artisans qui disparaissent, il y en aura au prorata chez elle. Elle sait, de toute façon, que son nombre va être réduit à un moment donné à 20, 30 ou 50, alors, elle n'a pas intérêt à s'en départir volontairement.

Nous sommes également d'accord avec M. Bossé sur la question du seuil de rentabilité. C'est un objectif qu'il y ait un taxi par 800 personnes, quoique, encore là, nous croyions que 800 personnes dans la ville de Québec n'exigent pas nécessairement le même nombre de taxis que 800 personnes dans la ville de Sherbrooke ou de Trois-Rivières ou de Rimouski, parce que la ville de Québec a certainement un caractère que d'autres villes n'ont pas, à savoir: le gouvernement provincial est ici, beaucoup de touristes durant l'été, il y a le carnaval durant l'hiver. Alors, je ne conçois pas qu'une norme aussi rigide puisse être appliquée de façon générale. C'est assez difficile à déterminer si c'est un par 800 ou un par 900 ou un par 700. Un par 800 est probablement pas mal juste.

Je voudrais également parler un peu de la question des relations patronales-ouvrières dans la ville de Québec. Sans faire de reproche, bien évidemment, à M. Bossé, je crois que le rapport est plutôt axé sur la question des relations entre patrons et ouvriers, et essaie de donner de bonnes conditions de travail aux ouvriers. Je suis entièrement d'accord sur ça.

Mais si on parle de l'industrie du taxi, je représente les propriétaires et non pas les ouvriers. Alors, pour ce qui est de la ville de Québec, mon confrère qui m'a précédé représentait l'association des chauffeurs, qui est accréditée, il y a eu une convention collective de signée entre les deux parties.

C'est une chose unique. Comme mon confrère a dit, c'est exact, c'est une chose unique qui existe dans la province de Québec.

Quand on parlait du paiement des accidents par les chauffeurs, tout à l'heure, et qu'on semblait en faire une grosse affaire, il y a une clause dans la convention collective qui prévoit cette chose. C'est une chose qui doit se négo- cier, je crois, au plan de la convention collective.

Au sujet des assurances, je crois également que c'est sujet à négociations entre le patron et l'ouvrier, à savoir si l'ouvrier va payer une partie de la prime supplémentaire, prime qui serait de $480 pour une protection de $35,000 et de $580 pour $100,000. C'est une différence de $100, pour quelqu'un qui n'a pas d'accident.

Nous croyons que ce n'est pas un sujet qui doit faire partie de la Loi des transports. C'est une chose qui peut être couverte par la Loi des relations ouvrières et par la convention collective.

J'ajoute également que nous avons toujours pu faire nos représentations à la ville de Québec pour la réglementation du taxi. Nous avons toujours surveillé et on nous a toujours écoutés de façon raisonnable. C'est ainsi que nous avons toujours vu également à ce qu'il n'y ait pas augmentation excessive des permis. Il y a un article dans la charte de la cité de Québec, 249a), qui prévoit qu'il ne pourra y avoir plus de 375 permis, sauf à mesure qu'il arrive des annexions, évidemment. Le nombre de taxis qui existe entre dans cela. C'est l'association que je représente qui avait fait les représentations nécessaires pour que cette chose soit dans la loi de la ville de Québec. C'est la raison pour laquelle ce n'est pas la faute des propriétaires de taxis s'il y a aujourd'hui trop de permis. C'est qu'à un moment donné les villes émettaient des permis sans aucune considération. L'association que je représente s'est occupée de cela dans les années cinquante. Après la guerre, il y avait une multitude de permis qui étaient émis. L'association que je représente s'est occupée de faire insérer cette clause dans la loi de la ville de Québec. Nous sommes entièrement d'accord, il est bien évident que les permis ne doivent pas se multiplier.

Je termine avec la question de diminuer les permis. Je suis presque assuré à l'avance qu'on verra à protéger les droits acquis des propriétaires artisans, mes clients, afin que, si on décide de réduire le nombre, on le fasse de façon à ne pas les brimer dans leur droits et qu'on nous dise de quelle façon et par qui on sera payé. Je ne crois pas que cela devrait être payé par ceux qui resteront puisqu'on veut améliorer leur sort. Dans le mémoire que j'ai présenté, vous verrez l'impact financier que cette question peut avoir, tant sur les compagnies que sur les propriétaires. On peut prendre la compagnie Co-op, dans laquelle il y a 260 membres qui paient une cotisation actuellement d'environ $25 par mois et qui devront payer ces permis qui ont une valeur marchande. Si vous l'avez en main, vous pourrez constater. Ce ne sont pas des chiffres qui sont au cent près, mais c'est environ ce qui se produirait. C'est une chose très importante. Je vous remercie de nous avoir écoutés, M. le Président, M. le ministre, M. le député Bossé et MM. les députés.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorion.

M. BOSSE: Je remercie Me Côme Boucher ainsi que ses commettants d'avoir fait des représentations. Evidemment, je suis d'accord avec eux, lorsqu'ils sont d'accord avec moi, sur la majorité des recommandations. Là où il y a quelques difficultés, où l'on commence à être moins d'accord — on note que Me Boucher représente des propriétaires — c'est au moment où il est question de retrait de permis. Je comprends très bien sa situation. C'est assez pénible de se voir retirer un permis, surtout dans un régime comme celui dans lequel on vit.

Cela va un peu à l'encontre des principes habituels. Il est reconnu que tout individu a le droit d'investir son argent dans le secteur qu'il choisit. Qu'à un moment donné on lui force la main et le force à investir en dehors d'un secteur donné, cela apparaît assez contradictoire et paradoxal par rapport au système dans lequel on vit. D'autre part, il y a des intérêts publics supérieurs dont il faut tenir compte. Evidemment, ici, il s'agit d'un cas extrêmement temporaire, c'est-à-dire qu'après avoir convenu, comme vous l'avez fait aussi, de la nécessité d'atteindre un seuil de rentabilité et, pour ce faire, de réduire un certain nombre de permis, vous avez admis au départ qu'il fallait prendre des moyens pour les retirer. Or, nous nous trouvions devant la solution suivante: ou attendre l'augmentation naturelle de la population ou procéder rapidement à une réduction des permis. Dans les divers moyens qui nous étaient offerts pour réduire les permis, là encore il fallait procéder de façon peut-être un peu draconienne pour une autorité supérieure, c'est-à-dire forcer quelqu'un à remettre son permis, mais par contre tenir compte du système et le rembourser. Et là vous devenez plus inquiet. Vous vous posez la question: "Mais qui va rembourser et comment cela va se faire? " C'est une question de modalité, c'est une question de mécanisme à établir. Le principe à la base, le principe énoncé, il est évident que ce serait une forme de taxation additionnelle sur le nombre de permis restants.

Ce qu'il faut se rappeler aussi, c'est que, dans le rapport, à la page 41, il est question des délais qui seront apportés pour réduire le nombre de permis. Cela nous donne une idée quand on dit, par exemple, "... dans les cas où les réformes proposées n'engendreraient pas dans un temps suffisamment rapide (un an) une diminution significative du nombre de permis, au moins 1 par 6,000. On voit que c'est graduel. Ce n'est pas du jour au lendemain qu'il faut faire cela parce qu'on se donne comme objectif d'atteindre 1 par 600 dans un an. Je recommande que nous ayons recours à une mesure plus radicale et l'on parle de l'interdiction du doublage.

Conséquemment, l'esprit du rapport est assez clair. Il s'agit de procéder assez rapidement, mais par contre, aussi, de ne pas tout casser parce que 1 par 600 à l'intérieur de douze mois, pour Québec, c'est déjà moins grave que pour Montréal, c'est-à-dire que vous y avez déjà 1 par 475, selon votre rapport. Je ne connais pas assez l'évolution démographique pour savoir s'il y a une augmentation de population. Il y a le fait de l'intégration des diverses villes centrales et de banlieue à l'intérieur d'une communauté urbaine. Il y a l'autre facteur de l'augmentation naturelle de la population. Est-ce que ces facteurs suffiront à l'intérieur de douze mois pour permettre de se retrouver avec 1 permis par 575 ou 600 de population, ce qui serait un quota déjà atteint et, évidemment, d'être moins radical par la suite pour permettre de ne pas émettre de permis, du moins jusqu'à ce qu'on ait atteint l'objectif recherché, soit 1 par 800, qui nous apparaît, comme vous l'avez dit, une situation plutôt idéale?

Je ne sais pas si ces quelques réflexion," sont de nature à amoindrir un peu ou diminuer vos inquiétudes. Cependant, c'est là l'esprit du rapport. Il se peut que quelques propriétaires qui ont un double emploi, c'est-à-dire des gens qui oeuvrent dans un autre secteur mais qui ont un investissement dans le taxi, se voient à un moment donné priés de remettre leur permis, ce qui est une forme d'expropriation. C'est un principe accepté, qui nous a été relaté ici devant cette commission, qui a été utilisé par la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec. Il y a eu des expropriations aussi à Montréal, évidemment. Ces cas sont exceptionnels. Ce n'est pas un système, ce n'est pas un principe, c'est une exception à un principe général et c'est toujours dans l'intérêt d'un bien supérieur. Dans ce cas-ci, c'est pour mettre de l'ordre dans l'industrie du taxi. De deux choses l'une; ou on veut mettre de l'ordre et on prend les moyens ou on ne veut pas mettre d'ordre et on prend les rapport pour les mettre sur les tablettes.

A ce moment-là, on n'a pas de difficultés avec les propriétaires de taxi, mais on n'a aussi rien réglé. Il s'agit de savoir si on est prêt à faire l'effort et à accepter que certaines choses doivent être faites, même si, temporairement, ça lèse quelqu'un, pour atteindre un bien supérieur. Ce sont là les quelques remarques que j'avais à faire, Me Boucher.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que Me Boucher a fait valoir les principaux points de vue de son association. Il a insisté sur le problème du retrait volontaire des permis. D'ailleurs, j'éprouvais le même inquiétude au sujet de ce retrait volontaire quand j'ai interrogé tout à l'heure Me Mathieu. Je me rends compte que ce n'est pas aussi facile qu'on pourrait le penser.

Maintenant, Me Boucher, vous demandez, à un moment donné, au gouvernement s'il acceptera d'indemniser lui-même ceux qui encourraient des pertes par suite de ces retraits. C'est évidemment une question qui s'adresse plus précisément au ministre.

M. BOSSE: J'aimerais, quand même, répéter, avant que le ministre en parlât, des affirmations qui ont été faites devant les diverses assemblées, soit à Québec, à Montréal ou en province. Il n'a jamais été avancé par qui que ce soit de responsable que le gouvernement donnerait sous quelque forme que ce soit des indemnisations. Ce qui a été avancé, c'est qu'un mécanisme serait mis en place, qui ferait en sorte que le fardeau de ces expropriations serait porté par ceux qui demeurent dans l'industrie. C'est le principe qui a été avancé jusqu'à présent et rien d'autre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce la réponse que pourrait donner également le ministre? Dans le mémoire que nous a soumis Me Boucher, il est fait état — c'est une annexe au mémoire ou un autre mémoire — des charges qui résulteraient de ce genre de transactions. Le député de Dorion, qui ne parle évidemment pas au nom du cabinet, nous dit qu'il n'a jamais été question pour le gouvernement d'indemniser lui-même dans ces cas-là.

M. BOSSE: Evidemment, le député de Dorion parle pour la représentation qu'il a faite lorsqu'on lui a confié le mandat de faire une enquête.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous sommes à étudier le projet de loi 23. Ce problème-là vient d'être évoqué par Me Boucher. Quelle est l'opinion du gouvernement à l'heure actuelle?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je vais répondre à cette question-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sur l'indication de Me Bossé qui vous demande d'être prudent et de faire attention à cela.

M. TREMBLAY (Bourassa): Non, Me Bossé a mené son enquête à bonne fin. Je crois qu'on en a eu la preuve ici, aujourd'hui. Quand on fait un travail, il y a quelques paragraphes parfois qui ne conviennent pas à certaines personnes, mais je crois que, s'il y a achat pour enlever des permis de taxi, il faudra qu'il y ait négociation entre les communautés urbaines ou les villes et le gouvernement pour voir de quelle façon nous devons procéder.

Je ne vois pas le propriétaire de taxi, qu'il soit artisan ou qu'il ait dix ou quinze taxis, être obligé de payer, si on lui en enlève 25. Je verrais mal qu'il soit pénalisé et qu'il paye pour ces taxis-là, parce qu'en fin de compte ce n'est pas lui qui les achète. Si on arrive dans d'autres domaines de l'industrie, peut-être qu'elle est subventionnée. Je ne dis pas que celle-ci peut être subventionnée, mais je dis que cela peut être discuté avec les communautés urbaines et les villes en question qui émettent des permis.

Il y a des villes qui ont émis trop de permis. Je crois qu'il faudra faire des rencontres avec les villes et les Affaires municipales pour voir de quelle façon on pourra procéder.

Mais disons que, personnellement, je vois mal le petit propriétaire ou celui qui en a cinq ou dix payer pour ces automobiles, payer pour les taxis, s'il y a ici, dans le Québec, 60 ou 50 taxis en trop. Il faudra faire un grand inventaire, comme on l'a dit ici. Je prends la parole de tout le monde, seulement, il faut faire un inventaire aussi pour voir si tel service est donné aussi dans toutes les régions du Québec. Il faut faire l'inventaire de ça aussi à Montréal, il faut le faire à Drummondville, à Saint-Hyacinthe, il faut le faire partout. C'est une question, je crois, à laquelle il est assez difficile de répondre directement. C'est une entente qui peut se faire entre les villes. Premièrement, peut-être, que les villes gèlent tous les permis. Je ne parle pas seulement de Montréal, où c'est gelé, mais il y a d'autres villes où ce n'est pas gelé. Dans la ville où je demeure, une dizaine de permis de taxi ont été émis encore l'automne dernier.

A ce moment-là, après l'adoption du bill 23, que les villes soient averties de ne pas émettre de nouveaux permis. Après, on pourra négocier quelques ententes avec les villes et avec les communautés urbaines. Seulement, personnellement, je ne crois pas qu'on puisse prendre aujourd'hui une décision immédiate sans consultation avec les villes et les communautés urbaines.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis d'accord avec le ministre lorsqu'il dit que le problème est difficile. Il ne faut quand même pas qu'il noie le poisson. La question est formellement posée: savoir, dans le cas de retrait de permis, qui dédommagera qui? Ce sera, ou bien le propriétaire à qui on aura retiré le permis qui casquera, ou le gouvernement, ou la communauté urbaine, ou la ville; de toute façon, ce seront les contribuables ou le propriétaire personnellement.

C'est pour ça que je demande au ministre de nous donner quelques indications à ce sujet afin de rassurer...

M. TREMBLAY (Bourassa): Je viens de donner les indications.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est-à-dire que vous ne nous avez pas donné d'indication. Vous avez dit...

M. TREMBLAY (Bourassa): ... indication que le seul...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président...

M. TREMBLAY (Bourassa): ... moyen c'est avec les villes, les communautés urbaines, à discuter de quelle façon...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que ça ne revient pas exactement...

M. TREMBLAY (Bourassa): La seule chose, c'est de les geler.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre voudrait me laisser poursuivre 1'argumentation que je suis en train de faire? C'est bien clair, bon!

Il arrive ceci, le ministre me dit: D'accord, il va falloir s'entendre avec les villes, avec les communautés urbaines, avec tous ceux qui sont intéressés. Mais, à la fin de tout, il y aura une note à solder. Est-ce que c'est le propriétaire qui va la solder, ou si ça va être le gouvernement directement ou le gouvernement par le truchement des communautés urbaines? De toute façon, à ce moment-là, c'est le propriétaire qui paiera. Alors, il va falloir que le gouvernement se branche et nous dise exactement quelle est son intention.

Et même si le ministre n'est pas, à l'heure actuelle, prêt à se prononcer, je lui souligne que le problème est important et que ce que nous a dit tout à l'heure M. Boucher, et qui fait l'objet de son inquiétude, mérite considération.

M. TREMBLAY (Bourassa): Certainement. C'est un cas que nous prenons en considération et même, j'ai consulté des gens du taxi dans ce cas. J'ai M. Bossé, ici, qui a son rapport et même, personnellement, j'ai consulté des gens du taxi. Il y a certains moyens qu'il faut prendre et je crois que le premier moyen c'est de négocier avec les villes et avec les communautés urbaines pour — celles qui ne sont pas gelées — les geler immédiatement, pour faire un inventaire et voir ce qu'on a et de quelle façon on peut procéder.

Je crois, immédiatement, que dire de quelle façon on peut procéder ce serait d'avancer des faits qu'on ne pourrait poursuivre. Alors, il faut étudier avant la question, de voir si on enlève des permis à Québec et à quel taux. Est-ce que la ville doit absorber un montant? Est-ce que la communauté urbaine doit absorber un montant? Est-ce que le gouvernement doit absorber un montant? Est-ce que le propriétaire de taxi doit voir son taux augmenter, s'il paie $80 devra-t-il payer $100 par année et, à longue échéance, il paierait une certaine partie? C'est une discussion qu'il faut prendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends tout cela, M. le Président, mais il reste que, même après inventaire, lorsque l'on aura passé par toutes les procédures que vient de décrire le ministre, il va falloir présenter la note à quelqu'un. Est-ce le contribuable qui va la payer, cette note, par le gouvernement directement ou par les communautés urbaines ou les commissions de transport, ou si ce sera le propriétaire ou si on partagera les frais entre le propriétaire et les organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux? C'est simplement la question que j'ai posée au ministre et je n'ai pas demandé de me donner immédiatement une réponse extrêmement précise.

Je lui dis que l'inquiétude de M. Boucher c'est de savoir qui va payer la note à la fin. Nous sommes obligés, nous, législateurs, de nous occuper aussi de savoir si les contribuables auront à payer dans ces circonstances-là.

M. BOSSE: Dans les représentations que j'ai faites devant divers groupes, c'était évident que j'ai mis en valeur, à ce moment-là, le fait, encore une fois, que celui qui se verrait départir de son permis serait remboursé au taux du marché. Actuellement, à Montréal c'est d'environ $4,500, et à Québec, la valeur marchande d'un permis c'est quoi, approximativement?

M. BOUCHER: $4,000.

M. BOSSE: Ils ont monté. $4,000...

M. BOUCHER: M. Bossé, si je puis ajouter quelque chose sur cela. Vous avez pris la valeur marchande d'après les chauffeurs. Vous avez demandé aux chauffeurs combien les permis valaient; je crois que ç'aurait été mieux de le demander aux propriétaires.

M. BOSSE : Le ministre était bien fondé tout à l'heure lorsqu'il disait qu'il fallait faire l'inventaire, parce que cela a légèrement monté depuis l'enquête. Conséquemment...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Même après l'inventaire, cela va être encore plus sérieux pour régler la note.

M. BOSSE: C'est bien possible. Par la suite, la communication était à l'effet que les demeurants dans le commerce augmenteraient leurs revenus et auraient à investir évidemment moins d'argent, qu'ils se trouveraient à bénéficier des avantages de la réduction du nombre de permis sur le marché. En conséquence, il apparaissait très logique qu'ils fassent les frais de ces expropriations. C'est là le sens des communications que j'ai faites à tous les groupes et nul autre.

Même s'il y a eu quelques fois des demandes de la part de certains individus, que le gouvernement participât, sous forme de subventions ou autres, personnellement je n'ai jamais pris de tels engagements. Toujours dans mon esprit, il était bien clair qu'il appartenait aux demeurants, à ceux qui bénéficiaient de ces conditions, de faire les frais. Cela m'apparaissait très logique dans le temps et mon idée n'a pas tellement changé.

M. BOUCHER : M. le Président, je n'ai jamais dit que vous aviez dit que le gouvernement ou les communautés urbaines participeraient. Nous avons eu une entrevue, dont vous devez être au courant, avec M. Frigon. C'est à ce moment-là que cette question a été discutée, pour le moins, sans engagement, évidemment, d'un fonctionnaire. C'est bien évident qu'il n'y a pas eu d'engagement de sa part. Il semblait que c'était la chose la plus logique.

Je considère illogique que l'on fasse payer la note par ceux qui vont rester parce que leurs charges vont augmenter au lieu de diminuer. Elles vont augmenter, et voici pourquoi: dans la compagnie Co-Op, je prends un exemple, la cotisation est de $25 par mois. S'ils doivent payer ces permis, leur cotisation va remonter. On va améliorer leur sort d'une main et on va le reprendre de l'autre main. Je trouve cela illogique.

M. BOSSE: C'est un langage très approprié pour quelqu'un qui défend les propriétaires de taxi, c'est très évident, je ne conteste pas ce droit. Seulement, je continue de croire que ceux qui bénéficient... Il est évident qu'avec des chiffres, on peut faire des démonstrations. D'autre part, j'ai eu l'occasion d'analyser les deux côtés de la médaille. Cela demeure évidemment mon opinion, cela n'engage pas le gouvernement, comme disait si bien tout à l'heure le digne représentant de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais le ministre a ajouté des choses qui nous ont fait voir un autre aspect de la médaille et qui nous ont déjà donné une indication sur ce qu'entend faire le gouvernement.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: Vous disiez tout à l'heure que vous ne verriez pas la Loi des transports inclure les clauses de responsabilité pour le propriétaire et le chauffeur parce qu'elles devaient faire partie des négociations entre patrons et chauffeurs.

Des propriétaires de taxi, ce matin, nous disaient que certaines associations de services de Montréal n'acceptaient pas le syndicalisme chez les propriétaires de taxi ou les chauffeurs de taxi. Dans ce cas-là, je crois que ces représentants d'associations ont demandé que la loi prévoie la couverture de la responsabilité envers les chauffeurs ou les propriétaires.

M. BOUCHER: Sur la couverture de la responsabilité publique, l'assurance-automobile, il faut dire qu'à la ville de Québec il y a toujours eu une exigence. Si quelqu'un n'a pas d'assurance, la ville de Québec lui enlève automatiquement son permis. Alors, je présume qu'il y aura la même chose dans le règlement qui sera adopté par la communauté urbaine qui aura juridiction dans l'avenir.

Maintenant, à savoir s'il doit être inclus dans la loi que le chauffeur doit avoir une responsabilité; d'abord, en vertu du droit commun, il l'a. En vertu du droit commun, si le chauffeur a un accident dont il est responsable, le propriétaire a toujours le droit de lui réclamer les dommages causés à son véhicule automobile par sa faute. J'ai plaidé une couple de causes comme ça. C'est en vertu du droit commun. Quant aux infractions, je suis entièrement d'accord que celui qui commet l'infraction devrait être pénalisé et qu'on ne devrait pas rechercher le chauffeur, d'autant plus qu'il arrive souvent que le chauffeur travaille deux semaines ou trois semaines pour un propriétaire, qu'après cela il va travailler à autre chose et qu'ensuite il revient. Alors, quand le propriétaire reçoit une réclamation au bout de six mois, bien, c'est lui qui la paie, parce qu'il n'est pas capable de retrouver le chauffeur ou qu'il n'est plus là.

Alors, je suis entièrement d'accord que le chauffeur devrait être recherché directement, parce que le propriétaire, en vertu du droit commun, a un recours contre le chauffeur. S'il paie une infraction, il a toujours son recours pour la faire repayer par son chauffeur. C'est certain. Seulement, je serais d'accord pour qu'on modifie le code de la route, parce que c'est le code de la route qui prévoit, actuellement, que le propriétaire peut être recherché directement pour les infractions commises par n'importe qui. Je crois que cela devrait être le chauffeur.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Boucher. Il n'y a pas d'autre question? On vous remercie de votre représentation.

Syndicat professionnel des propriétaires de taxis unis de Québec

M. LE PRESIDENT: Alors, nous passons maintenant au Syndicat professionnel des propriétaires de taxis unis du Québec métropolitain. Me Louis Huot.

Me Louis Huot

M. HUOT: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission parlementaire, le Syndicat professionnel des propriétaires de taxis unis du Québec métropolitain est une nouvelle association de propriétaires de taxis des villes de la Communauté urbaine de Québec.

Notre syndicat a été incorporé en vertu de la Loi des syndicats professionnels. Le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives en a autorisé la constitution le 15 avril 1971 et le syndicat a pu commencer officiellement ses activités lors de la publication de l'avis prévu par la loi dans la Gazette officielle du Québec du 29 mai 1971.

Comme je l'exposais il y a quelques minutes, le syndicat professionnel est formé de proprié-

taires de taxis qui ont voulu se regrouper non plus sur une base urbaine, mais en une structure qui s'étend à toute la Communauté urbaine de Québec. Notre association compte actuellement près de 150 membres, après seulement quelques mois d'existence.

Nous croyons donc particulièrement important de faire valoir devant vous, aujourd'hui, messieurs les membres de la commission parlementaire, certains points de vue sur le bill 23, points de vue que nous avons groupés en deux grands chapitres.

Nous ferons, en premier lieu, une critique rapide de l'ensemble du projet de loi et de certaines de ses dispositions. En commission parlementaire des Transports, il est évident que nous nous devons de nous pencher sur le projet de loi lui-même et de scruter un peu certains de ses articles. En une deuxième partie, nous donnerons notre opinion sur certains des problèmes les plus urgents des propriétaires de taxis, problèmes, évidemment, qui ont été un peu aussi abordés par tous les représentants qui m'ont précédé.

Le but premier de la nouvelle loi des transports, comme le faisait savoir l'honorable Georges Tremblay, ministre des Transports, dans son discours de présentation du 15 juin 1971, est de confier au ministre les pouvoirs nécessaires pour élaborer des politiques coordonnées dans le domaine, plutôt que de voir ces politiques édifiées par un tribunal quasi judiciaire, dont les membres sont nommés et qui n'a pas à répondre de ses actes devant l'Assemblée nationale. Des copies de mon mémoire ont été déposées sur le pupitre du secrétaire; je crois qu'il les a. Il y avait plusieurs copies du mémoire. Je crois qu'il les a mises dans un tiroir hier; il me les a montrées.

UNE VOIX: No 20.

M. BOSSE: Les membres de la commission n'en ont pas; je vous écoutais attentivement, cependant.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le no 20, monsieur.

M. HUOT: Nous souscrivons en général à ce principe que je viens de vous exposer et qu'avait exposé le ministre, même si nous croyons que le projet de loi nous amène à un autre extrême, peut-être, qui est de confier trop de pouvoirs au ministre.

Même si nous sommes d'accord avec le point fondamental du projet de loi, qui est de voir confier à un ministre élu l'initiative des grandes politiques du transport, nous croyons toutefois que la façon que l'on a adoptée pour y parvenir n'atteindra pas les résultats escomptés. Dans le passé, la majorité des pouvoirs de décision concernant les transports étaient confiés à la Régie des transports.

Nous sommes d'avis que le bill 23, plutôt que d'avoir des effets de rationalisation et de simplification des juridictions, créera une structure tripartite, c'est-à-dire le ministre des Transports, la nouvelle Commission des transports et les communautés urbaines, ce qui brouillera les cartes.

Dans cet ordre d'idées et comme exemple, si vous voulez, je vous réfère à l'artice 8 du projet de loi, qui précise les pouvoirs du ministre, et aux articles 39 et 40, qui établissent les fonctions et les pouvoirs de la commission. Ces articles, croyons-nous, amèneront certainement par leur formulation des imbroglios juridiques qui ne feront qu'envenimer les choses.

Je donne plus de précisions. L'article 8 d), par exemple, et l'article 40 b) parlent tous deux des taux et tarifs. Nous croyons que là il va y avoir obscurité entre les juridictions du ministre et les juridictions de la commission. De plus, en ce qui concerne le domaine du taxi, des sphères de compétence sont confiées aux communautés urbaines. Donc, il y a trois maîtres dans l'affaire, si vous voulez, du moins dans certaines juridictions connexes.

Quand aux communautés urbaines, nous supposons que la création de ce niveau de juridiction est basée sur le fait que les communautés urbaines sont plus près des problèmes du taxi et peuvent donc élaborer des politiques plus conformes et plus adaptées aux situations locales.

Nous ne croyons donc pas, en conséquence, qu'on devrait les assujettir alors aux règlements du ministre qui s'appliqueront, eux, à toute la province, comme l'imposent les articles 123, 129 et 136 du projet de loi.

L'article 8, qui nous semble un des articles fondamentaux du projet de loi, nous semble aussi inacceptable pour quelques raisons que je vais vous exprimer rapidement. L'article 8 nous semble, en premier lieu, inacceptable parce qu'il confie trop de pouvoirs au lieutenant-gouverneur en conseil. Le cabinet se voit en effet investi, surtout aux paragraphes a) et b) de l'article en question, de pouvoirs qui lui permettront de créer de toutes pièces et sans contrôle parlementaire tout l'édifice juridique qui règlementera le transport, si bien que, par ce biais, le but principal du projet de loi, qui était d'assurer un contrôle des élus du peuple, se trouvera anéanti.

L'article est aussi inacceptable en ce que, au paragraphe f ), il donne au cabinet le pouvoir de "modifier les divisions administratives de la commission ou attribuer à une division une nouvelle catégorie de transport". Il nous semble pour le moins étrange que l'on puisse, par un arrêté en conseil, modifier les divisions de la commission alors que lesdites divisions sont établies par l'article 26 du projet de loi. Nous ne pouvons concevoir que si le gouvernement considère comme si importante la constitution de la Commission des transports et sa structura-

tion en quatre divisions, il se réserve le pouvoir de tout chambarder par un simple règlement.

Troisièmement, le paragraphe e) de l'article 8, qui stipule que le lieutenant-gouverneur en conseil peut "édicter les règles de pratique et de régie interne de la commission après consultation de celle-ci", nous semble aussi inacceptable. Nous croyons que c'est la commission elle-même, en tant que tribunal quasi judiciaire, qui devrait édicter ses propres règles de pratique — je signale bien les règles de pratiques — quitte à ce qu'elles soient subordonnées à un veto éventuel de la part du ministre ou du cabinet. Nous croyons de plus que la disposition précitée, l'article 8, peut venir facilement en conflit avec l'article 33, qui prévoit des pouvoirs très étendus pour le président de la commission, entre autres en ce qui concerne "toute matière d'administration." Je crois qu'il peut y avoir là un conflit de juridiction. Donc, il peut y avoir situation de conflit.

Remarquez que ce sont évidemment des remarques négatives. Dans l'ensemble nous soulignons les points sur lesquels nous ne sommes pas d'accord. Il est évident que pour tout le reste — et c'est l'immense majorité — nous sommes totalement d'accord.

Je continue. L'article 43 devrait être modifié pour faire en sorte que les permis n'expirent pas le dernier jour de mars de chaque année mais le dernier jour de janvier, si bien que les détenteurs de plaques d'immatriculation qui veulent les renouveler puissent savoir si leur permis sera renouvelé ou non, et ainsi éviter des investissements inutiles si ledit permis ne leur était pas renouvelé.

Nous sommes d'accord aussi sur la formulation de l'article 45, qui stipule que tout permis sera "délivré au nom d'une personne physique". Nous sommes toutefois très surpris de constater que l'article 45 se trouve contredit par l'article 50 qui laisse entendre qu'une corporation ou une société à fonds social pourrait détenir un permis. Il y aurait certainement là matière à clarification.

Enfin, à ce sujet, sans entretenir aucun doute sur la compétence et l'intégrité des juges de la cour Provinciale, nous ne croyons pas qu'il soit de bonne politique — et je pense qu'en droit administratif cela se fait très rarement — d'instituer un tribunal d'appel des décisions de la commission formé de trois juges de la cour Provinciale, lesquels jugeront en appel des décisions d'un tribunal de première instance qui est lui-même présidé par un juge de la cour Provinciale.

Dernier point au sujet du conseil consultatif. Notre syndicat espère que celui-ci ne restera pas lettre morte et que toute la règlementation qui sera adoptée lui sera proposée pour étude auparavant et que les organismes habilités puissent donner leurs recommandations. Ceci est d'autant plus important si l'on considère l'étendue des pouvoirs que la loi confie au cabinet et au ministre.

Je ferai ensuite quelques remarques rapides, dans la deuxième partie, sur certains sujets que nous estimons d'importance. Notre association, par exemple, a été très surprise de constater que le bill 23 lui-même n'a édicté que très peu de dispositions propres à assurer l'application des recommandations du rapport Bossé. Nous croyons qu'il est manifeste qu'il s'est révélé dans toute la province un concensus général en faveur du rapport chez les propriétaires de taxis, aussi bien à Montréal que dans les villes d'importance moyenne comme Québec. Nous voulons d'ailleurs féliciter ici M. Bossé pour l'excellent travail qu'il a fait.

Nous sommes d'opinion que les principales recommandations du rapport Bossé, par exemple, un permis de taxi par 800 personnes, sont des réformes de nature tellement fondamentale qu'elles auraient dû être comprises immédiatement dans le projet de loi lui-même. A ce sujet, je dois ajouter que nous avons quelques chiffres — pour informer la commission, je vais vous dire cela tout de suite — sur la proportion des permis par rapport à la population dans la région de Québec. Ce seraient les chiffres les plus récents, si nos informations sont bonnes. Dans la communauté urbaine de Québec, qui comprend maintenant 23 municipalités, il y aurait 448,000 personnes et 713 permis de taxi, ce qui donne, par un calcul rapide que j'ai fait tout à l'heure, à peu près 628 personnes. On voit qu'il y a déjà une marge avec ce que proposait la commission Bossé. Ce sont les chiffres les plus récents, d'après mes informations.

Deuxièmement, je dois vous dire qu'à Québec, les propriétaires de taxis — surtout dans la région de Québec; cela vaut pour partout ailleurs et peut-être encore plus pour Montréal d'après ce que l'on a dit ce matin — sont actuellement très divisés. Comme ils exercent une activité autonome, une activité d'artisans, il leur est très difficile de s'unir pour exercer un pouvoir de revendication aussi bien dans leurs relations avec les différents corps publics qu'avec leurs employés, les chauffeurs.

Dans l'état actuel des lois, telles que la Loi des syndicats professionnels ou le code du travail, on ne permet pas de véritable syndicalisme chez les propriétaires de taxis. Par exemple, je peux vous dire que s'il a été fait mention d'une convention collective de travail signée, c'était volontaire, évidemment, mais elle ne regroupe actuellement qu'à peu près 125, peut-être au maximum 150 des propriétaires de taxis de la ville de Québec qui ont des chauffeurs, alors qu'il y en a à peu près 250, c'est-à-dire au moins 100 de plus. Là encore, pour cette démarcation, c'est la jungle.

Il nous semble donc très urgent d'ajouter au bill 23 les dispositions législatives propres à assurer un véritable syndicalisme chez les propriétaires de taxis. Nous croyons que leur situation est assez semblable à celle des cultivateurs qui se voient, par le bill 64, — ce n'est pas

loin — reconnaître ce droit. Le bill 23 nous aurait semblé une occasion rêvée pour y inclure des dispositions semblables.

Un dernier problème sur lequel nous voulons insister — il en a été longuement question — c'est celui des assurances-responsabilités. Nous croyons que, dans la région de Québec, les taux, qui sont à peu près maintenant entre $800 et $1,000, sont nettement exagérés et absolument inacceptables. Il est certain à ce sujet que les voitures-taxis roulent beaucoup plus longtemps en moyenne que les voitures ordinaires.

On doit, toutefois, prendre en considération le fait que leurs propriétaires acquièrent quand même une expérience et un savoir-faire dans la conduite d'un véhicule automobile que ne possèdent pas la majorité des propriétaires de véhicules de tourisme. Notre association recommande qu'une enquête soit immédiatement faite par le surintendant des assurances du Québec afin de recueillir toutes les données du problème chez le propriétaire de taxis. Nous croyons de plus que la meilleure solution serait en définitive, c'est sujet à étude, qu'il ne faut pas écarter totalement l'étatisation dans le domaine des assurances.

A ce chapitre, nous voulons ajouter que l'on devrait en profiter pour interdire aux propriétaires de taxis de retenir les services de chauffeurs temporaires et sur demande, lesquels ont presque toujours un autre emploi. Il va de soi qu'un ouvrier qui sort de l'usine et qui est fatigué de sa journée de travail n'aura pas au volant la même concentration qu'un chauffeur de métier. Le même principe nous amène d'ailleurs à réclamer immédiatement l'interdiction de la possibilité qui existe présentement pour une personne d'être propriétaire d'un véhicule-taxi et d'exercer ce métier à temps partiel, soit le soir, les fins de semaine ou lors de vacances, consacrant ses journées à une autre activité. Nous croyons qu'il est possible de faire cela et je pense, par exemple, aux lois constitutives de certains corps professionnels qui interdisent cela. Je ne pense pas que ce soit nécessairement ultra vires des pouvoirs de l'Assemblée nationale, pas du tout.

Nous croyons qu'une régie étatisée de l'assurance-responsabilité pour les propriétaires de taxis travaillant en collaboration avec les comités de taxis des communautés urbaines pourrait poser des jalons très utiles pour résoudre tous ces problèmes.

En terminant, je veux vous remercier de nous avoir écoutés.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Huot. Est-ce qu'il y a des questions?

M. BOSSE: Je veux tout simplement féliciter Me Huot de sa représentation. Je pense que c'est bien fait. Nous avons dans la nouvelle loi les moyens d'appliquer les diverses recommandations que j'ai faites. Nous avons étudié de très près le problème et le projet de loi, tel qu'il est présentement édicté, pourrait permettre l'application de toutes ces recommandations. Je vous remercie des chiffres plus récents, c'est peut-être de nature à soulager Me Boucher. Merci.

M. LE PRESIDENT: M. Poisson, de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec, a une mise au point à faire concernant une affirmation du représentant de l'Association professionnelle des chauffeurs de taxis.

M. STEIN: M. le Président, M. Poisson a dû s'absenter pour aller à une ouverture de soumissions. Il m'a demandé de faire la mise au point dont vous venez de parler. Très brièvement, il s'agit d'une déclaration que Me Mathieu a faite, je crois, au sujet d'un incident qu'il aurait cité en exemple de ce qu'il a appelé la concurrence déloyale de la Commission de transport de la communauté urbaine de Québec. Voici les faits tels que me les a communiqués tout à l'heure M. Poisson, qui, lui-même, s'est renseigné parce qu'il n'avait pas encore entendu parler de la chose. La Commission de transport, dans l'exercice normal des attributions et obligations — j'ai eu l'occasion de le dire — que l'Assemblée nationale vient de lui confier en sa qualité de gérante d'une entreprise de transport en commun de la Communauté urbaine de Québec, mais dans ce cas-ci au nom de la compagnie Québec Autobus, dont elle vient de faire l'acquisition comme la loi l'y obligeait, a accepté le 26 février dernier — cela remonte déjà au 26 février 1971 — la commande de la Swedish American Line de faire le transport d'un nombre assez considérable de personnes. Je ne suis pas certain s'il s'agissait de passagers ou de marins, mais cela ne change rien à l'histoire. Dans l'exécution de ce contrat, elle a fait un certain nombre de voyages, une dizaine — si je comprends bien — le lundi 30 août, cette semaine, et une huitaine de voyages le lendemain, le mardi 31 août, entre le bateau et le Château Frontenac. Je crois que c'était au moyen de deux autobus faisant la navette et les heures — si cela vous intéresse — étaient de sept heures à minuit, lundi, et d'une heure de l'après-midi à cinq heures de l'après-midi, mardi. Ces deux autobus faisaient la navette et on transportait ces gens-là au prix régulier — si je comprends bien — de $20 le voyage; c'était en tout cas le prix régulier convenu entre les deux parties.

Cela s'est fait aux risques et périls de la Commission de transport, plus précisément au risque de dommages à sa propriété et au risque de blessures, sinon de la vie de ses chauffeurs, qui ont été attaqués par des chauffeurs de taxi et qui ont dû faire appel à la police municipale.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Stein. Maintenant, M. Guy Vincent. Il n'est pas ici. Nous entendrons Me Guy Gagnon, représentant de Murray Hill Company.

Voilà le moment si longtemps attendu. UNE VOIX: Oui, c'est le no 12. Murray Hill Company

M. LE PRESIDENT: Entendu, on ajourne après avoir entendu Me Gagnon.

Me Guy Gagnon

M. GAGNON: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, je représente en effet Murray Hill Limousine Service Ltd.

M. BOSSE: Vous gagnez bien votre argent. M. GAGNON: C'est certainement...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): N'interrompez pas le témoin, ne l'intimidez pas.

M. BOSSE: Il n'est surtout pas facile à intimider.

M. GAGNON: Les représentations que j'ai à faire ont trait particulièrement aux dispositions de la loi qui auraient pour objet de modifier l'article 133 du bill 75 qui était relatif à la Communauté urbaine de Montréal. Je tiens à souligner tout de suite que Murray Hill n'a aucune querelle avec la communauté urbaine ou avec les autorités de la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal.

S'il y a querelle, c'est une querelle qui a été créée de toute pièce par certains des employés de la CTCUM et c'est une querelle où Murray Hill a été obligée de se défendre. Mais je pense que si vous analysez les sources de cette querelle, vous allez vous rendre compte que c'est vraiment de la fumée et qu'il n'y avait aucun intérêt de la part de la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal de s'engager dans ce dédale-là.

L'objet de mes représentations sera de faire valoir le point de vue que l'article 313 de cette loi non seulement devrait être modifié mais devrait être en fait biffé. Parce qu'il est clair — et je crois que déjà, les preuves que vous avez devant vous le démontrent, dans son application et dans la position quotidienne que la CTCUM a prise depuis l'adoption de ce texte de loi — que les conséquences pour toute l'industrie du transport sont devenues très graves.

De fait, par les procédures qu'elle avait prises et par l'attitude que je qualifierai de — vous me pardonnerez le mot anglais — "unfair", il s'est créé un malaise social très sérieux dans l'industrie du transport de passagers par autobus à Montréal.

Vous en avez eu des illustrations. Murray Hill n'est qu'une illustration peut-être un peu plus précise et un peu plus marquante du même phénomène. Le phénomène est d'autant plus étonnant qu'à l'analyse, dans à peu près tous les cas, on se rend compte que la Commission de transport de la communauté urbaine n'a absolument rien à gagner des gestes qu'elle pose.

Le premier exemple qui me vient à l'esprit, c'est la déclaration de M. Charbonneau, des Tours maisonneuve, qui vient dire qu'il avait un permis temporaire. Il s'adresse à la régie pour faire transformer ce permis temporaire en permis permanent et la CTCUM s'y oppose. La raison ou le prétexte qui est utilisé pour le refus est une espèce de comité qui aurait été créé pour faire une étude approfondie sur un problème inexistant.

N'importe qui, dans le transport de passagers et qui connaît ça le moindrement — je pense que les gens de la CTCUM connaissent ça — aurait su d'avance que la CTCUM ne fera jamais ce genre de transport là. C'est évident, que la CTCUM n'a pas les véhicules appropriés pour ce genre absolument spécialisé de transport, parce que les Tours Maisonneuve passent d'un motel à l'autre et prennent les passagers dans ces motels. Souvent même, l'autobus qu'ils utilisent porte le nom du motel. C'est évident que c'est un service tellement spécialisé qu'il n'y avait aucun espoir pour la CTCUM de jamais considérer ce genre de transport et de le faire. C'est cousu de fil blanc de dire: Nous avons un comité d'enquête qui étudie la question et nous allons éventuellement régler ce problème. C'est évident que le geste posé avait pour but primordial d'empêcher l'émission d'un permis permanent auquel cette personne avait un droit clair.

J'ai d'autres exemples. Je pense que l'exemple particulier de Murray Hill vous permettra de vous en rendre compte. Il y a une requête en injonction qui est instituée contre Murray Hill, accompagnée d'une action en dommages. L'action en dommages est pour une somme de $4,000. De ces $4,000, il y avait $2,500 au minimum qui étaient pour les frais d'enquête des enquêteurs de la CTCUM. Ce qui veut dire qu'après six mois d'enquête — parce que l'action a été prise au mois de juin et la loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1970 — qui ont coûté $2,500 et où les véhicules de Murray Hill ont été suivis pas à pas d'une façon absolument incroyable, tout ce qu'on a trouvé le moyen de faire, c'est de réclamer $2,000, qu'on a été obligé ensuite, en cour, d'abandonner parce qu'on s'est rendu compte qu'on ne pouvait pas faire la preuve.

Franchement, quand on vient nous dire que la CTCUM a quelque chose à perdre vis-à-vis la Murray Hill, en tout cas, c'est clair que les faits le démentent d'une façon particulière. J'aimerais, si vous me le permettez, décrire un peu quelles sont les activités de Murray Hill en matière de charte-partie, quelles sont ses fonctions à Montréal, quelle est l'importance de cette entreprise et quelle est la nécessité qu'il y a d'avoir une entreprise comme celle-là dans une ville de l'importance de Montréal.

Murray Hill a été fondée par M. Samuels en 1919. Depuis 1919 jusqu'à ce jour, sa fonction particulière a été d'organiser des services spéciaux de transport dans la région métropolitaine. Elle a toujours eu une orientation très particulière, satisfaire à des besoins spéciaux et essentiels à la région métropolitaine. Vous avez, par exemple, l'organisation d'un service de transport à l'aéroport qui est un service absolument spécial et qui requiert un "know-how" spécial pour être exercé d'une façon appropriée. Ces services ont été accompagnés et se sont développés, au cours des années, avec des services dits à charte-partie. Ce mot est peut-être un peu curieux, mais il essaie de désigner un service où un autobus est loué à un groupe de personnes et c'est ce groupe qui en détermine la destination.

Autrement dit, ce véhicule ne voyage plus sur une route régulière, il doit aller d'un point à un autre selon les exigences du groupe qui l'a loué. Murray Hill, pendant 40 ans et plus, 60 ans ou pas loin, a donné ce service sans encombre et sans jamais avoir à débattre ses droits de le donner à Montréal. Elle a évidemment développé, dans ce domaine-là, des services très hautement particularisés et très importants pour la ville. Le service en question est orienté vers le voyageur venant de l'étranger. C'est tout à fait normal, pour une compagnie comme Murray Hill, de concevoir ce genre de service puisqu'elle donne déjà le service de l'aéroport.

Murray Hill a un réseau extraordinaire de rapports avec un nombre incalculable de compagnies, aux Etats-Unis et en Europe, où elle fait ce qu'on appelle — vous me passerez ces mots-là mais je ne pense pas qu'il y ait d'équivalent en français — du "merchandizing" et où l'on vend littéralement la ville de Montréal à ces gens-là pour les attirer vers Montréal. A ce moment-là, le rôle particulier de Murray Hill est de prodiguer un service de transport absolument spécialisé et organisé qui soit de nature à attirer ces gens et à les garder ici une fois qu'ils y sont rendus.

A cause de ce genre de service et de cette orientation, Murray Hill dépense des sommes considérables chaque année non seulement à aller chercher de la clientèle qui vient à Montréal, mais, une fois à Montréal, à lui donner des services absolument de luxe, des services qu'un étranger, normalement, veut avoir. Ce sont des services qu'elle donne grâce à des véhicules qu'elle a elle-même fait développer ici dans la province de Québec.

En effet, vous allez constater — j'invite d'ailleurs tous les membres de la commission, dès qu'ils le voudront et qu'ils le pourront, à venir visiter les garages de Murray Hill et à venir voir eux-mêmes quel genre de travail se fait là et quel genre de véhicules il y a — qu'il y a un nombre très considérable de véhicules qui portent la marque Prévost.

C'est une compagnie qui est installée dans la province de Québec, qui est locale et qui a développé avec Murray Hill, au cours des dix dernières années particulièrement, des véhicules absolument spécialisés qui sont le résultat d'un "design" commun. Il y a eu une collaboration très étroite. Murray Hill n'est pas allée chez GM ou chez Greyhound chercher ses autobus. Elle est venue dans la province de Québec et elle les a achetés là. Chacun de ces autobus — j'ai des photographies, si la commission est intéressée, que je pourrai faire circuler — est un autobus absolument extraordinaire, que vous ne trouverez nulle part ailleurs et qui a pour objet de satisfaire les besoins particuliers de la clientèle que Murray Hill a développée et qui est une clientèle essentielle au bien-être et au développement touristique à Montréal.

Ces véhicules, de plus, Murray Hill, évidemment, s'en sert dans ses services à longue distance, particulièrement aux Etats-Uris. Le résultat de la collaboration qu'il y a eu entre Murray Hill et Prévost fait que Prévost a aujourd'hui, grâce aux véhicules extraordinaires que Murray Hill promène à travers les Etats-Unis, une clientèle très importante aux Etats-Unis, qui provient de cette collaboration.

Je souligne ces faits, qui sont peut-être un peu au-delà du débat particulier qui nous intéresse, pour vous indiquer que le genre de service que donne Murray Hill est un service hautement spécialisé et qui est intégré dans un "merchandizing" que personne d'autre ne fait. Lorsque l'on considère les activités de la CTCUM, évidemment, c'est un autre monde. L'objet premier que vous avez fixé dans la loi de la communauté urbaine à la Commission de transport, c'est que celle-ci organise un service essentiel à la ville, qui est le service de transport en commun en surface et par métro.

Ce genre de transport requiert également un véhicule absolument spécialisé que vous connaissez tous sans doute et qui est l'autobus que l'on prend tous les jours pour aller travailler. C'est un autobus qui n'est pas orienté vers un service de luxe et un service à une clientèle que l'on a attirée. C'est un véhicule qui est orienté vers le plus grand nombre possible de passagers. C'est tellement vrai que, par exemple, les bancs ne sont pas orientés vers l'avant mais placés de côté de manière qu'on puisse mettre le plus grand nombre possible de gens debout. Les bancs ne sont pas conçus de manière qu'on y reste plus que quinze minutes. Ce n'est pas nécessaire. Il est très rare, sauf dans les périodes de pointe, que les gens vont être appelés à être très confortables sur ces bancs. Les fenêtres extérieures ne sont pas organisées pour qu'on puisse voir à l'extérieur, parce que ce n'est pas intéressant. On n'est pas là pour faire de la visite; on s'en va chez soi après avoir travaillé ou on s'en va au travail et on est plus intéressé à lire le journal ou à discuter avec ses copains qu'à regarder le paysage. C'est une conception

complètement différente du problème qui, évidemment, donne lieu à un véhicule complètement différent.

La CTCUM, il y a environ quinze ans, donc à peu près 40 ans après Murray Hill, a décidé de commencer un service de location d'autobus et de faire ce qu'on appelle de la charte-partie. Murray Hill n'a jamais exprimé une objection quelconque à cet état de choses. On pouvait chicaner l'idée, parce qu'à mon point de vue c'est peut-être même contraire aux pouvoirs fondamentaux que possédait la commission à ce moment.

En effet, le service de location d'autobus à un groupe ne peut pas, quelles que soient les définitions qu'on veuille lui donner, être apparenté à du transport en commun. C'est exactement l'inverse du transport en commun. Ce n'est pas destiné à la population en général; c'est destiné à un groupe en particulier.

On pouvait peut-être se demander si la CTCUM, à ce moment-là, avait le pouvoir de faire ça, mais il y avait un besoin pour ce genre de services, pour la simple raison qu'il y a un niveau de la population qui a besoin de se déplacer d'une façon massive d'un endroit à l'autre et qu'il faut que quelqu'un puisse louer des autobus à ces groupes. Or, un service comme Murray Hill, c'est trop riche pour ce genre de "patentes" là. Cela ne peut pas fonctionner; ce n'est pas du tout la même chose.

Si vous avez, par exemple, un groupe de parents qui se réunit dans une école et qui veut, après, se rendre dans une autre école pour une autre réunion, bien, il est tout à fait normal que ces gens-là s'organisent avec la Commission de transport de la communauté urbaine pour faire faire ce transport. D'abord, elle va le faire à un prix modique et, en outre, elle le fait dans des véhicules qui vont être utilisés sur une courte distance.

Le service que Murray Hill donne à un étranger est tout à fait différent. Il vient de l'aéroport, il entre en ville, s'installe dans un hôtel. Il veut faire un tour de ville, il faut ensuite aller dans un endroit particulier avec son groupe, par exemple à la Place des Arts, les femmes peuvent être en robe longue, les hommes en "tuxedo". Comment voulez-vous les placer dans un véhicule de transport en commun? Il va y avoir des objections sérieuses. Il y a également un problème d'air climatisé. Tous les autobus de Murray Hill sont climatisés. Il y a des gens qui exigent ça.

Vous avez les joueurs de baseball qui arrivent à Montréal, par exemple. Bien, ce sont des gens qui vont exiger ce genre de service et qui ne voudraient pas, pour tout l'or du monde, prendre un service inférieur à ça. Alors, il y a des niveaux de services qui sont essentiels, qui doivent être rendus dans une ville de la dimension de Montréal et qui sont donnés par des organismes diffiérents à cause des orientations différentes. Pas plus que la Commission de transport de la communauté urbaine ne peut donner les services que Murray Hill donne, pas plus Murray Hill ne peut songer à donner les services que la Communauté urbaine donne par sa commission de transport.

Cela se vérifie dans les faits d'une façon très simple. On a, enfin, découvert le tarif que demandait la CTCUM. On ne l'avait jamais su; il n'a jamais été publié. On s'est rendu compte que ce tarif était de $13 l'heure. Le tarif de Murray Hill, déposé à la Régie des transports et qu'elle doit requérir de sa clientèle, est le double de ça, c'est au moins $25 l'heure. Il est évident que les gens qui vont utiliser les services de Murray Hill vont le faire parce qu'ils ont un besoin particulier à satisfaire et qu'ils sont prêts à payer pour ce service.

Si le service que donne la CTCUM est équivalent à celui de Murray Hill, il va de soi que jamais les gens ne vont prendre les véhicules de Murray Hill. Il est absolument évident qu'ils vont prendre ceux de la CTCUM.

Tout ceci pour dire quoi? Pour dire que la CTCUM n'aurait absolument aucun intérêt et n'a encore absolument aucun intérêt à venir attaquer Murray Hill pour dire en cour qu'elle veut lui enlever son commerce. C'est ce qu'elle a dit. C'est en toutes lettres dans les notes des autorités que mon confrère a soumises à la cour. L'objectif premier de sa demande était de dire à la cour Supérieure qu'il fallait empêcher Murray Hill à l'avenir de faire toute espèce de transport à charte-partie à Montréal.

Il est curieux que Murray Hill depuis 1919 et jusqu'à 1970 ait rendu un service de qualité à des gens, à des usagers d'autobus sans avoir aucune objection de la part de qui que ce soit, pas plus la Montreal Tramways que la Commission de transport de Montréal qui a suivi et que, le lendemain de l'adoption de l'article 313, Murray Hill se voie acculée à la possibilité d'être ruinée et à la possibilité légale de se voir dépouillée de tous ses investissements, de voir ses employés sans travail et je vous prie de me croire qu'il y en a beaucoup, il y en a quand même 400, de voir ses relations avec des compagnies importantes, comme Prévost, mises à néant. Et pour quelles justifications? On n'est pas capable de les découvrir. On a beau chercher dans le milieu, parmi les gens qui connaissent le transport. Mais qu'est-ce qu'ils font là? Qu'est-ce que c'est que cette histoire? Pourquoi cette attaque? Quels bénéfices et avantages va-t-on en retirer? Il est évident qu'on n'en retirera aucun. Au contraire, le travail que fait Murray Hill actuellement aux Etats-Unis et en Europe pour attirer la clientèle ici, bénéficie à la CTCUM. Lorsque les gens arrivent ici et qu'ils se rendent compte qu'il y a un service qui coûte moins cher et qui fait leur affaire, ils ne prennent pas Murray Hill. Ils prennent ce service-là. Murray Hill n'a jamais eu d'objection à cela.

Nous avons été obligés, une fois attaqués, de dire, évidemment: Ecoutez, vous n'avez même

pas le droit de donner les services que vous prétendez donner. Ne poussez pas! En principe et de fait, Murray Hill n'a absolument jamais eu d'objection à ce que la CTCUM donne les services de transport à charte-partie qu'elle veut donner. Ce à quoi on s'oppose, c'est d'être dépouillé de nos droits. Ce à quoi on s'oppose, c'est de voir mis à néant les investissements considérables faits par Murray Hill pour satisfaire ses besoins. Quand vous pensez qu'un autobus Prévost coûte $80,000 et que Murray Hill en a au moins 74 — de ce nombre ce ne sont pas tous des Prévost, il y en a, je dirais, au moins 60 — il est temps d'y penser. Cela commence à être grave.

Le problème pour Murray Hill n'est pas un problème de guerre avec la CTCUM. Il y a peut-être des niveaux où les deux se rencontrent, comme je vous ai dit. Selon le goût du client, il va prendre la CTCUM ou Murray Hill, et là, il serait peut-être discutable que le client exerce ce goût.

Admettons! Ce niveau-là est tellement petit que c'est ridicule. Quand vous pensez, par exemple, que la CTCUM, qui s'occupe depuis quinze ans — c'est sa propre affirmation — de charte-partie, vient vous dire que son revenu est actuellement de l'ordre de $800,000 en matière de charte-partie et qu'elle a 550 autobus pour donner ce service, un simple calcul nous permet de déterminer que cela veut dire $1,500 par autobus. Ce n'est même pas assez pour payer l'usure des pneus.

Je ne peux pas comprendre qu'il y ait une justification, à ce moment-là, de faire une guerre aussi sérieuse et dont les conséquences sont si terribles pas simplement pour Murray Hill, pour ses employés et pour sa clientèle, mais pour Montréal même, parce que les services que donne Murray Hill à la population en faisant venir ici des quantités considérables de gens sont en danger actuellement.

Vous avez vu vous-mêmes, d'ailleurs, l'attitude prise devant vous. Pourquoi être si agressif et pour justifier quoi? Qu'est-ce qu'on veut cacher? C'est une situation que personne ne comprend. A la lumière de cela, il semble bien que la seule solution à Montréal, ce soit l'abolition totale de l'article 313. Je suggère à la commission, en même temps, de considérer la possibilité de dire spécifiquement si vous croyez vraiment que c'est rentable. Ce n'est pas prouvé. Quant on vient vous dire qu'on a un chiffre d'affaires de $800,000 et qu'on en a retiré $400,000, je demanderais qu'il y ait des vérifications faites, parce que n'importe qui, qui est dans le domaine, se dit qu'on charrie un peu.

Je pense qu'une petite vérification comptable permettrait de juger cette affirmation qui est certainement tirée par les cheveux. Puisque la communauté urbaine, par sa Commission de transport, fait de la charte-partie et qu'il y a un besoin véritable, puisqu'elle en fait jusqu'à concurrence de $800,000 par année, il y aurait sans doute lieu d'avoir dans la loi un texte qui permettrait à la Communauté urbaine de fournir ce genre de service, mais sans exclure les autres. On en a un besoin essentiel.

Je vous soumets respectueusement que la question de priorité n'entre pas en ligne de compte du tout là-dedans. La question de venir dire ici que c'est une guerre entre l'entreprise privée et l'entreprise publique, qu'est-ce que c'est cela quand vous avez vous-même adopté des lois qui disent que le transport, c'est du service public? La seule différence entre Murray Hill et la CTCUM — ce sont deux services publics — c'est que l'une est financée par des fonds publics et l'autre par des fonds privés. Mais, dans les deux cas, ce sont des services publics que vous avez déclarés tels dans vos lois. C'est une affirmation qui encore ne tient pas à l'analyse et qui ne correspond pas vraiment aux réalités du transport dans une métropole comme Montréal.

Je tiens à vous souligner, en terminant, que le genre de services que rend Murray Hill, vous allez les retrouver dans la plupart des grandes métropoles, en tout cas certainement aux Etats-Unis et dans plusieurs métropoles en Europe. Ce n'est pas pour d'autres motifs que celui-ci, c'est que le service public l'exige.

Nous soumettons que l'objectif premier que doit poursuivre Murray Hill, comme la CTCUM et tout autre organisme de transport, est d'assurer d'abord un service public adéquat et conforme. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gagnon. Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie Me Gagnon de son plaidoyer, il l'a fait avec l'éloquence et l'élégance qui le caractérisent. Je ne peux toutefois pas lui dire que je suis parfaitement convaincu. Il s'attend d'ailleurs que nous lui posions des questions et que nous nous opposions à certaines de ses propositions. Il est bien évident qu'il se pose un problème, c'est un problème de philosophie sociale et on ne peut pas l'éviter.

C'est qu'on est en face de propositions de part et d'autre, je parle des témoins que nous avons entendus, qui mettent en cause l'entreprise publique versus l'entreprise privée. La société que vous représentez, soit Murray Hill, appartient à la seconde catégorie, soit l'entreprise privée. Vous avez, depuis 1919, rendu aux citoyens des services de qualité, et j'imagine qu'on ne peut pas contester la qualité de ces services; en tout cas, jusqu'à plus ample informé, je prends votre parole, Me Gagnon.

Il reste toutefois que le législateur, même s'il admet que peuvent exister en même temps des entreprises publiques et des entreprises privées, a créé par la loi 75 une communauté urbaine qui est assortie d'une commission de transport et que cette commission de transport a reçu des pouvoirs dans le domaine du transport en commun ou du transport public. Or, il arrive

que cette commission de transport s'oppose maintenant à ce que certaines entreprises privées occupent un champ qui lui a été dévolu par la loi, voyages à charte-partie par exemple.

Vous nous dites que la CTCUM se propose à toutes fins utiles de faire disparaître la société Murray Hill. Je ne suis pas en mesure de me prononcer là-dessus et surtout d'interpréter les intentions que pourrait avoir la CTCUM en ce qui concerne Murray Hill. Je prends votre parole, votre témoignage qui s'appuie sur certaines déclarations faites en cour.

C'est bien cela, Me Gagnon? Bon!

Disons, Me Gagnon, que, pour ma part, je considère que les législateurs ont accordé à la CTCUM des droits, que cette commission de transport se doit de les exercer en vue du bien commun et qu'elle a l'obligation de les exercer. Cette commission de transport doit-elle pour autant faire disparaître les entreprises privées, viables, de la nature de celle que vous représentez? Je vous avoue que je me pose sérieusement la question. Et je ne me pose pas la question parce que vous avez plaidé pour Murray Hill. Je me la pose pour toutes les entreprises privées qui se trouvent dans une situation analogue. Donc, je mets de côté, dans ce cas particulier, le problème de Murray Hill et je pose au gouvernement la question suivante: Est-ce que le gouvernement entend garder à la CTCUM les droits qui lui ont été accordés en vertu de la loi qui a créé la communauté urbaine et la commission de transport de cette communauté urbaine?

C'est un problème d'option, ici. C'est un problème d'option politique et c'est aussi un problème de philosophie sociale et économique. Il appartient au gouvernement de se prononcer sur ce sujet.

Pour ma part, M. le Président, je suis inquiet: d'un côté, la Communauté urbaine de Montréal existe et la Commission de transport de cette communauté existe. Elle a des droits, nous les lui avons donnés, et nous les lui avons donnés en fonction des besoins et des exigences des citoyens. Par ailleurs, il y a, dans tout le Québec, des entreprises privées que je me dois également de défendre, quel que soit le nom qu'elles portent. C'est le cas de Murray Hill, c'est le cas des transporteurs privés d'écoliers, c'est le cas de toutes les entreprises de transport privées.

Maintenant, Me Gagnon, j'en viens à un point peut-être un peu plus délicat et qui a fait l'objet de certaines interventions ici devant la commission: celui d'une concurrence que la société que vous représentez ferait à l'entreprise du transport par taxi. Il y a, à ce propos, énormément de commentaires. On a fait à ce sujet beaucoup de démonstrations; il y a eu des affrontements, non seulement désagréables mais dramatiques.

Je voudrais, Me Gagnon, vous poser quelques questions très précises en ce qui concerne Murray Hill par rapport aux entreprises de taxi.

M. GAGNON: M. le Président, M. le député, je vais essayer de vous répondre au meilleur de ma connaissance. Je ne peux pas prétendre être ignorant en la matière, mais vous conviendrez que je n'ai pas nécessairement une connaissance quotidienne des opérations de Murray Hill.

Comme je représente la compagnie depuis quinze ans ou plus, j'essaierai, dans la mesure du possible, de vous satisfaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous remercie, Me Gagnon. Je ne doute pas de vos connaissances en la matière. Surtout, je sais que vous connaissez très bien la situation parce que vous n'avez pu, en votre qualité de procureur de Murray Hill, rester indifférent à tous les drames, appelons cela comme cela...

M. GAGNON: C'est sûr.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... qui ont défrayé la chronique depuis des mois et même des années. En ce qui concerne les voitures de louage, qu'en est-il, à Montréal, dans le cas de Murray Hill et quelle est la situation de ces voitures de louage par rapport aux entreprises de transport par taxi?

M. GAGNON: Sur le plan légal — parce que c'est quand même là qu'il faut d'abord situer le problème — en vertu du code de la route, l'article 7, paragraphe 2, sous-paragraphe c) prévoit... Je crois que c'est l'article 7 mais c'est peut être l'article 5; au cours des années, il y a eu des modifications, mais autrefois c'était l'article 7.

D'ailleurs, ce problème de véhicules de louage et de taxi, qui avait pris une certaine ampleur à une époque que l'on connaît, n'avait pas tellement trait aux véhicules de louage comme au service de transport que Murray Hill donnait à l'aéroport, est disparu d'une façon très substantielle. Je n'ai pas entendu parler d'un problème quelconque depuis qu'il y a eu l'arrangement que vous connaissez à l'aéroport de Dorval. Je marche sur de vieux souvenirs et je vous prie de croire que les souvenirs deviennent vite vieux au rythme où vont les choses ces jours-ci. En vertu de cette disposition, le législateur prévoit qu'il y a des véhicules spécialisés qui n'ont pas l'apparence extérieure d'un taxi, qui sont des véhicules de promenade possédés en vue de les louer et qui ne doivent pas porter de plaques T. Par conséquent, ils ne doivent avoir aucune marque commerciale et ne doivent en aucune manière être identifiables.

C'est ce genre de véhicule qu'exploite Murray Hill. C'est un véhicule qui est assujetti à la Régie des transports et pour lequel la Régie des transports a émis un permis qui autorise Murray Hill à donner des services de transport spécialisé de ce genre pour baptêmes, funérailles, mariages et aussi pour du service généralisé.

Si une personne de marque arrive à Montréal, et que vous ayez besoin d'une Cadillac,

vous la louez et vous l'utilisez, elle n'a aucune espèce d'identification. Il s'agit donc, encore là, d'un service spécialisé et de luxe, assujetti à la Régie des transports, qui est donné dans la région métropolitaine. Le permis autorise tout service... En tout cas, la précision n'est peut-être pas essentielle ici, mais il me semble que c'est dans toute l'île de Montréal et une périphérie de quinze milles. Il y a des taux déposés auprès de la régie. Cela a été obtenu après une longue lutte devant la Régie des transports. Je pense qu'il a fallu huit ans avant que le permis définitif ne soit émis. Il y avait eu des permis temporaires, mais il y avait de l'opposition, évidemment, des taxis et d'autres genres de services qui disaient qu'ils n'étaient pas d'accord avec cela. Nous avons été obligés de faire une preuve vraiment considérable pour établir la nécessité absolue de ce genre de services dans une ville comme la ville de Montréal.

Alors, on a obtenu ce permis. Il y a des tarifs qui sont déposés là, qui doivent être soumis à l'examen de la Régie des transports, qui les approuve ou les refuse. Je peux vous parler d'expériences particulières où des tarifs déposés ont été refusés parce que la régie les considérait excessifs ou pas assez considérables.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Gagnon, me permettez-vous de vous interrompre ici?

M. GAGNON: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Au sujet de l'émission de ces permis. Vous dites que les permis sont émis par la Régie des transports.

M. GAGNON : Qui aurait la juridiction en la matière à mon point de vue.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La ville de Montréal où, actuellement, la Communauté urbaine de Montréal n'a pas la compétence en la matière.

M. GAGNON: Elle n'a aucune juridiction en la matière, parce qu'il s'agit d'un véhicule privé par opposition au véhicule public. La loi prévoit que le taxi est un véhicule public agencé pour le transport de sept personnes à la fois, moyennant considération pécuniaire. La loi prévoit que les permis pour taxis sont émis par les municipalités. La loi prévoit également qu'un véhicule de promenade, donc un véhicule privé, qui n'est pas le véhicule public en question, peut être possédé en vue de la louer. Dans la loi de la Régie des transports, lorsqu'on définit un service de transport, on prévoit, d'une façon toute particulière, le service de transport par véhicule de promenade non enregistré comme taxi ou comme véhicule de livraison. Il n'est pas exclu à l'article 33, avec le résultat évident que seule la régie a une juridiction exclusive en la matière, et seule la régie, peut émettre des permis. Alors, c'est la raison. Nous avons été obligés de prouver cette prétention. Nous avons été obligés de faire une démonstration devant la régie qui avait bel et bien juridiction. Cela n'a jamais été en appel. Pourtant, les parties pouvaient, avec la permission du juge, porter cette question en appel. Cela n'a jamais fait l'objet d'un appel et nous avons toujours détenu ces permis de la régie. Nous avons toujours, d'une façon absolue, résisté aux poursuites que nous avons reçues de la ville de Montréal, parce que nous prétendons que la ville de Montréal n'a pas de juridiction. Le jour où la ville de Montréal aura juridiction, ce service va disparaître pour la raison très simple que cela deviendrait économiquement non rentable.

Cela voudrait dire que, du jour au lendemain, Murray Hill serait appelée à payer des permis pour la ville de Montréal, pour la ville de Westmount, pour la ville d'Outremont, pour la ville de Saint-Laurent et pour toutes les municipalités dans un rayon de 15 milles de Montréal, ce qui rend la chose absolument impensable.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Gagnon, vous avez ces permis pour voitures de louage, je reviendrai sur ce sujet-là. Vous détenez d'autres permis, vous détenez les permis de limousine.

M. GAGNON: Non, le seul permis émis par la régie est ce permis relatif aux véhicules de promenade non enregistrés comme taxis, et il comprend tous les véhicules de promenade possédés par Murray Hill.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Y compris les limousines?

M. GAGNON: Bien, c'en sont des limousines.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Bon, alors, tous ces permis que vous détenez, est-ce qu'il vous est déjà arrivé d'en vendre à d'autres?

M. GAGNON: Jamais. D'ailleurs, on ne peut pas, on n'a qu'un permis, c'est une ordonnance de la régie qui autorise le service. Je pense que je peux le trouver là-dedans, c'est dans le dossier conjoint, on l'a produit en cour.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un permis global que vous avez.

M. GAGNON: Bien, voyez-vous, quand on arrive devant la Régie des transports, on fait une demande pour autoriser un service de transport. La demande que nous avons formulée à la régie était pour être autorisés à donner des services de transport par des véhicules de promenade non enregistrés comme taxi. Après une audition publique et après avoir fait une

preuve substantielle, nous avons, à ce moment-là, obtenu de la régie un jugement qui dit: Oui, vous êtes autorisés à donner un service de transport par véhicules de promenade non enregistrés comme taxis pour les fins suivantes, et sujet aux restrictions et aux conditions suivantes. Il y a toute une série de conditions, par exemple de n'avoir aucune identification commerciale, d'avoir des chauffeurs toujours propres et des véhicules toujours propres — et je pense que la plupart d'entre vous connaissez la propreté des véhicules de Murray Hill — de ne pas avoir de poste d'attente à l'extérieur, mais sur des terrains privés. Comme vous le savez, Murray Hill est toujours dans son garage ou sur un terrain privé, et ne sort que sur appel; elle n'est jamais dans les rues publiques, on n'a pas de poste d'attente comme les taxis et puis on ne peut pas. On n'a pas le droit de prendre des gens à la volée, c'est simplement sur appel.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, Me Gagnon, je voudrais avoir une explication au sujet d'un document que j'ai ici en ma possession...

M. LAURIN: Est-ce que le député de Chicoutimi me permettrait d'ajouter une question à celle qu'il vient de poser?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien, je vais, si vous voulez...

M. LAURIN: C'est juste pour savoir...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, je vous en prie, M. Laurin.

M. LAURIN: Ma question: Ce qui veut dire que lorsque la régie vous accorde ce permis, elle vous permet d'exercer les pouvoirs que vous donne ce permis avec une, cent ou mille voitures?

M. GAGNON: On enregistre le nombre de voitures que le besoin du marché nous oblige à enregistrer.

Lorsque l'on parle de services publics il est important de se rappeler cela, par rapport à une entreprise privée. C'est que, lorsque je détiens un permis de la Régie des transports, non seulement je suis autorisé à donner le service, mais je dois le donner et cela veut dire que je dois le donner même si je perds de l'argent. C'est extrêmement important. Je ne peux pas refuser la clientèle, et je dois satisfaire à la demande. Evidemment, il n'y a pas de limitation, il n'y en a jamais eu, ni sur les autobus de quelque détenteur de permis que ce soit, ni sur les détenteurs d'aucun permis de la régie. C'est la même chose dans le cas du "cartage", par exemple. Les gens qui font du transport par vannes ou des choses du genre ne sont pas limités dans le nombre de vannes qu'ils doivent mettre à la disposition du public. C'est leur connaissance du marché et des besoins du public qu'ils doivent desservir qui leur permet de déterminer le nombre de vannes dont ils vont avoir besoin. Ceci implique également de la part de la Régie des transports un contrôle sur le nombre de permis qui sont émis. Lorsque quelqu'un fait une demande de permis, les autres détenteurs de permis font une objection, parce qu'ils disent: Nous pouvons, avec l'équipement dont nous disposons présentement, donner ce service. Ce n'est pas nécessaire d'émettre un nouveau permis qui va ruiner tout le monde. Si le demandeur ne fait pas la preuve du besoin du service et de l'absence d'équipement, il n'aura pas son permis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, je voulais vous interroger au sujet d'un document qui m'intrigue. Je veux avoir de vous des explications. C'est un document de la ville de Montréal, en date du 12 juillet 1962, où il est question des changements survenus dans les permis d'autos-taxis détenus par Murray Hill Limousine Service Ltd. On y donne une série de numéros de permis. J'en prends un au hasard, 2599. Date du changement: 10 avril 1959. Nouveau détenteur: Electra Taxi Service Co. Il y en a toute une série comme ça jusqu'à 1958 et d'autres. Qu'est-ce que cela veut dire exactement? Qu'est-ce qui est arrivé à ce moment-là?

M. GAGNON: Je l'ignore, parce que je n'ai pas eu connaissance de ces événements. Je sais qu'il y a eu des périodes où Murray Hill a détenu, en plus de ses véhicules de promenade non enregistrés comme taxis, des taxis avec des plaques d'immatriculation T. Ils étaient considérés comme véhicules de louage, parce que je pense — je ne sais pas vraiment — qu'ils n'avaient pas de taximètre; à ce moment-là, c'étaient ces véhicules assujettis à la ville de Montréal. Il y avait des permis d'émis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais cela n'existe plus.

M. GAGNON: Cela n'existe plus, à ma connaissance.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A votre connaissance.

M. GAGNON: Je fais cette réserve; je ne crois pas. Je peux m'informer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, j'en serais très heureux.

M. GAGNON: Nous n'en avons aucun. Je sais que jadis il y a eu un moment où Murray Hill a même possédé des taxis avec taximètre qui étaient exploités comme tels. Cela fait des années; je n'ai pas eu connaissance de cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, au sujet de ces voitures dites de louage, il y a des points de chute. Est-il exact que vous avez des concessions des grands hôtels, par exemple, et que la clientèle serait dirigée vers ces voitures de louage plutôt que vers des taxis?

M. GAGNON: A ma connaissance, non. Encore une fois, je ne peux pas témoigner vraiment pour la compagnie dans toutes ses activités. Il faudrait que je sois là. Alors, c'est nécessairement du oui-dire, mais, à ma connaissance, non. Ce qui est exact, c'est que la compagnie a des bureaux dans la plupart des hôtels, parce qu'il lui faut, à cause des permis qu'elle détient de la régie pour donner ses services à l'aéroport, ce qu'on appelle — encore là, il n'y a pas vraiment de terme français — des "dispatchers", des coordonnateurs, qui déterminent le nombre de passagers qui doivent se rendre à l'aéroport et qui appellent les véhicules nécessaires pour assurer ces services. Cela n'a rien à voir avec le genre d'entente que vous suggérez. Les services que Murray Hill est autorisée à donner par son permis de véhicules de louage ont trait à des choses tout à fait différentes.

On a ici une liste de sa clientèle. Par exemple, American Petroleum Institute peut avoir fait un contrat avec Murray Hill, par écrit, disant: Pour la prochaine année, chaque fois que nous aurons besoin d'une limousine ou d'une Cadillac pour aller chercher le président à tel endroit et le transporter à tel autre, vous nous la procurerez au tarif que vous avez déposé à la Régie des transports.

Encore là, vous savez, quand on songe au tarif que Murray Hill a déposé à la Régie des transports et qu'on le compare au tarif des taxis, on n'est plus dans la même ligne, pour utiliser une expression populaire. On ne parle plus du tout de la même chose.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, la raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est que nous avons entendu divers témoins qui nous ont dit que le système de voitures de louage que vous avez à l'heure actuelle se trouve à faire une concurrence très forte à l'entreprise du taxi à Montréal, du fait que, dans les endroits où vous avez des installations — appelons cela ainsi à défaut de dire des concessions — et où vous jouissez de certains privilèges — que vous payez probablement — l'on dirigerait les clients vers ces voitures. Je dois vous dire, Me Gagnon — je l'ai dit ce matin à la commission et je le répète — que, demandant une voiture dans un hôtel, il est arrivé que l'on m'indique une voiture qui ne portait pas d'identification. Ce n'est qu'après coup que je me suis rendu compte que ce n'était pas une voiture-taxi. En fait, ce que je désirais, c'était, tout simplement, un taxi pour me rendre là où je devais aller.

Remarquez que l'on nous a dit cela, on nous a affirmé cela. Je ne porte pas d'accusation contre Murray Hill. Il reste qu'il y a un ensemble de témoignages dans ce sens qui nous obligent, nous, les membres de la commission, à vous poser des questions dans le style du contre-interrogatoire en matière pénale.

M. GAGNON : Je vais vous répondre d'une façon peut-être même naive. S'il y a des événements comme celui que vous venez de relater qui se passent, ce n'est pas à la commission parlementaire qu'on devrait le dire, mais à Murray Hill, parce que c'est une règle d'or à la compagnie que ce genre de choses ne se fait pas.

Si un chauffeur est pris, il est évident qu'il y a une entente entre le chauffeur et quelqu'un à l'hôtel. C'est contraire à notre permis. Nous n'allons quand même pas risquer un permis pour une baliverne, ce serait ridicule.

Il est absolument interdit aux chauffeurs de prendre des passagers sans une entente préalable avec la compagnie elle-même. Il est absolument interdit à un chauffeur de prendre un passager sans qu'il n'ait été "dispatché", ce qui veut dire que déjà la compagnie a une commande, que cette commande est enregistrée par écrit, que le taux de la commande a été déterminé, que le prix a été dit au client et que cette commande a été transmise à celui qui est en charge de ce terminus particulier. Si de tels événements ont lieu, on a qu'à se plaindre à Murray Hill pour que la situation soit corrigée.

Il est évident qu'on ne peut pas empêcher qu'à l'occasion un chauffeur veuille se faire un pécule sans que personne le sache et on ne peut pas savoir quelle entente il peut y avoir entre lui et le préposé à l'hôtel que voulez-vous! Mais là-dessus, — ce n'est pas seulement une question de faits portés à ma connaissance — je suis absolument sûr de ce que j'affirme lorsque je dis que la politique et les règlements très sévères de la compagnie, c'est qu'aucun véhicule ne prend une commande sans y être autorisé par le dispatcher central.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, évidemment, il est assez embarrassant de vous poser des questions sur ce sujet précis de Murray Hill versus les propriétaires de taxis. Nous avons entendu diverses versions, et tous les gens qui comparaissent ici témoignent de bonne foi. Nous devons prendre leur parole, comme je prends la vôtre...

M. GAGNON: Est-ce que vous me permettez...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, Me Gagnon.

M. GAGNON: ... d'ajouter un petit mot? Il est évident dans les circonstances que la soi-disant concurrence que nous leur faisons ne peut qu'être très exceptionnelle. Chaque véhi-

cule est contrôlé; il y a un contrôle constant de toutes les heures de travail, de toutes les heures d'attente. C'est presque impossible. Il faut vraiment qu'il y ait un jeu qui se fasse à un moment donné entre un groupe de chauffeurs et un dispatcher pour que cela arrive. A ce moment-là, qu'on nous avertisse et nous allons régler le problème. Il ne peut pas être question de concurrence quand nos prix sont le double des leurs. Quand quelqu'un prend un taxi dans un hôtel et se rend sur la rue X ou Y, il le fait au taximètre. Le coût de ce voyage et le tarif que nous avons déposé à la Régie des transports ne se comparent pas, ce serait absurbe.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais aborder un autre sujet rapidement avec vous Me Gagnon; la question des visites touristiques, des tours de ville, etc. Vous nous avez dit tout à l'heure que la Commission de transport de Montréal n'était pas équipée et ne pouvait ou ne pourrait pas l'être pour donner ce genre de service que donne Murray Hill ou toute autre entreprise similaire.

Or, nous avons entendu, l'autre jour, des représentants de la Commission de transport nous dire que tel n'était pas le cas, qu'ils étaient capable d'équiper des voitures, de donner ce service. Alors il est question, naturellement, d'itinéraires, de parcours, de points de chute, etc. Est-ce que vous pourriez nous faire un tableau rapide de ce qui se passe dans le cas de Murray Hill?

M. GAGNON: Là encore, Murray Hill donne, comme vous le savez, un service touristique, des tours de ville multiples, à Montréal. Ces services sont donnés depuis 1919. Là encore, il y a une orientation particulière dans la façon de donner ces services. D'abord, l'équipement particulier. Si vous me permettez, j'aimerais faire circuler des photographies qui montrent certains des véhicules, au cas où il y aurait des membres qui n'auraient pas vu ce genre de véhicules utilisés par Murray Hill. Vous allez voir qu'ils sont agencés spécialement pour quelqu'un qui vient visiter, qu'ils sont construits... Ce ne sont pas tous les véhicules, mais quelques-uns; je n'ai ici que quelques exemples d'une multiplicité de véhicules parce que, dans ce genre de services, Murray Hill a développé des conceptions extrêmement dynamiques, de "merchandising". Elle a développé, d'une façon toute particulière, des véhicules appropriés à ce genre de services et qui attirent la clientèle.

Quand nous disons que la Commission de transport de la communauté urbaine n'est pas en mesure de donner ces services, c'est pour une multitude et une foule de raisons. Actuellement, il y a deux compagnies qui ont énormément d'expérience en la matière et qui donnent depuis des années et des années ces services touristiques de tours de ville à Montréal: il y a Murray Hill et Métropolitain provincial qui a l'agence ou la franchise Grey Line. Dans les deux cas, vous pouvez facilement constater que ces gens sont équipés avec des véhicules absolument appropriés et spécialisés dans le domaine. Il est à noter de plus que dans les deux cas, particulièrement dans celui de Murray Hill, le service est donné douze mois par année. Ce n'est pas seulement la question de donner le service du mois de juin au mois de septembre pour écrémer au maximum la population mais il est donné à longueur d'année pour tout visiteur, et c'est essentiel que vous ayez ce genre de service.

Les véhicules de la Commission de transport de la communauté urbaine sont les véhicules dont l'achat avait été autorisé en vertu de sa loi. En effet, l'article 267 est absolument spécifique.

Je peux peut-être vous le citer au texte: Je m'excuse, la mémoire a de ces lapsus; c'est l'article 271. Il dit ceci: "Tous les revenus de la commission servent à acquitter ses obligations et à exploiter, maintenir et améliorer son réseau de transport." Le réseau de transport, je m'excuse, ce n'est pas du transport de "sightseeing"; ce sont les autres transports qui sont prévus aux articles de la loi qui disent que la commission doit publier les routes où elle donne son service de transport en commun. C'est fort discutable que l'on puisse prétendre qu'elle peut acheter des véhicules spécialisés pour le service spécialisé de transport par "sight-seeing".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, si vous le permettez, disons que nous pourrions différer d'opinion avec vous sur le plan juridique...

M. GAGNON: C'est strictement une question d'opinion.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... à savoir si la CTCUM a le droit de faire des voyages touristiques ou non. Mon opinion est qu'elle a droit de le faire. Enfin, ne nous chicanons point sur des questions de droit; venons-en aux questions de fait. Vous avez affirmé que la CTCUM ne pouvait pas s'équiper comme Murray Hill peut l'être.

Pour ma part, disons que je prends cette affirmation-là cum grano salis, avec un grain de sel, parce que, peut-être, la Commission de transport de Montréal n'est pas capable d'équiper des véhicules d'une façon aussi luxueuse que ceux que je connais, d'ailleurs, et dont vous nous avez montré des photos. Mais, ne pensez-vous pas qu'elle peut équiper des voitures qui soient tout aussi fonctionnelles, sans être nécessairement aussi luxueuses ou attrayantes pour le visiteur qui aime le luxe?

M. GAGNON: Il va de soi que oui, dans le sens que, physiquement et pécuniairement, évidemment, il n'y a aucun problème. De fait, la Commission de transport a essayé, à deux

reprises, de donner un service de "sight-seeing" à Montréal. Elle a commencé, en 1966, avec le service de promenade qui était une idée extraordinaire. Tout le monde était d'accord là-dessus, y compris Murray Hill. On n'était peut-être pas d'accord sur les tarifs, mais on était d'accord sur l'idée géniale qui, malheureusement, n'a pas fonctionné. Elle n'a pas fonctionné sans doute à cause de l'équipement utilisé et pour d'autres raisons aussi.

Il y a une question très difficile de personnel en la matière. Je ne veux pas porter atteinte au personnel de la CTCUM qui, dans l'exercice de ses fonctions, fait exactement ce qu'il a à faire et d'une façon convenable. Personne ne s'en plaint et j'espère qu'ils ne se plaignent pas de la façon dont les chauffeurs de Murray Hill font leur service; en tout cas. Il y a une chose certaine, c'est que, pour être capable d'organiser un service de transport adéquat en service touristique de ce genre-là, cela demande un personnel absolument spécialisé et une organisation de convention collective tout à fait particulière.

J'ai négocié les conventions collectives, par exemple, pour le groupe de Métropolitain provincial, avec la CSN qui représentait les salariés. Il a été extrêmement difficile de trouver, à cause de l'orientation de la convention collective, les solutions appropriées qui permettraient à cette compagnie de survivre en matière de transport de "sight-seeing".

En effet, les services qu'elle donnait, qui sont, en fait jusqu'à un certain point, très similaires à ceux de la CTCUM, étaient des services, qu'on appelle des "bookings" — encore là, le mot anglais, mais il est connu dans le métier — et où les chauffeurs travaillaient le matin, attendaient toute la journée et travaillaient le soir. Et essayez de les faire travailler pendant la journée, sans que cela ne vous coûte beaucoup plus cher. C'est très difficile, parce qu'ils ont une espèce de système de rotation, où ils choisissent leur "booking", comme ils l'appellent. Cela leur permet de dire: Moi, j'attends. Je fais autre chose pendant la journée. Je ne dis pas que c'est toujours comme ça, parce qu'il y a toutes sortes de paliers de négociations. C'est très complexe, mais, précisément, ces complexités rendent extrêmement difficile la possibilité de faire du "sightseeing", d'une façon adéquate et d'une façon rentable. Alors, il y a cette considération qui joue et qui n'est pas la moindre.

Ensuite, il y a la considération sur la rentabilité d'un véhicule qu'on va acheter dans un marché qui est déjà saturé. Vous avez Murray Hill qui l'occupe, vous avez Métropolitain Provincial qui l'occupe et vous avez les autres compagnies qui l'occupent également. Alors, à moins d'exproprier tous ces gens-là et de les déplacer, il va falloir les concurrencer. Si vous les concurrencez, il va falloir vous équiper de la même manière qu'eux. Mais il n'est pas garanti que vous allez récupérer assez d'argent pour survivre. Peut-être que tout le monde va disparaître à ce moment-là. Alors, il y a un problème économique extrêmement sérieux pour la CTCUM. C'est de savoir si elle va faire l'investissement de quelle $80,000 pour un autobus pour faire un service comme ça, ou bien si elle va cesser de prendre le risque. Elle a actuellement pris des véhicules qu'elle a améliorés pour donner ce service, mais je ne voudrais pas escompter les résultats pratiques. Ils sont inconnus évidemment. La saison n'est pas finie. Elle va cesser de donner les services le 6 septembre. Elle n'en donne pas l'hiver. Peut-être que, grâce à la période d'été qui a été particulièrement excellente au point de vue du tourisme, cette année, cela va s'avérer suffisant pour elle. Nous le souhaitons pour elle, mais nous serions très étonnés, tout le monde, qu'elle puisse justifier la dépense de véhicules qu'elle utilise pendant l'été. Quand on vient nous dire qu'elle va les utiliser pour de la charte-partie l'hiver et qu'on sait que cela représente ce qu'on a vu tout à l'heure, bien, on est plus ou moins impressionné.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, Me Gagnon, ces dernières réflexions me suggèrent de vous poser une question assez précise. Combien de voitures, au total, avez-vous, et quels sont les salaires payés aux chauffeurs des voitures de diverses catégories, comparativement à ce qui se passe, par exemple, à la CTCUM?

M. GAGNON: Là, je regrette. Je peux peut-être vous donner le nombre de véhicules. Ils sont tous déposés d'ailleurs à la Régie des transports, mais je pense que, actuellement... juste un instant, s'il vous plaît.

Evidemment, je m'étais préparé particulièrement sur la question de la charte-partie et des questions connexes à cela. Je ne prévoyais pas que cela deviendrait une enquête presque royale sur les activités de Murray Hill.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): En bon procureur, je vous égare un peu.

M. GAGNON: Je dois vous dire que sur le nombre de véhicules il y a, d'après les renseignements que j'ai ici, 85 Meteor, 2 Princesse, 29 Cadillac, cinq Lincoln, un Quasar, c'est un type de voiture en verre, neuf ambulances, 10 autobus Travelair, des petits autobus qui sont d'ailleurs un dessin de M. Perry qui m'accompagne, 23 Prévost de 49 passagers, deux Prévost de 45 passagers, quatre Prévost de 51 passagers, cinq Prévost de 49 passagers avec toilette, huit Prévost, avec toilette, de 47 passagers, un Prévost, avec toilette, de 39 passagers et 21 véhicules qui sont des "flexible couriers"; ce sont des véhicules un peu plus âgés. Tous ces véhicules sont enregistrés auprès de la Régie des transports.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous avez des chiffres concernant les salaires moyens?

M. GAGNON: D'abord, je ne sais pas si cette question a été soulevée auparavant, parce que je n'étais pas ici.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voici, Me Gagnon, pourquoi je vous la pose. Lorsque nous avons interrogé la CTCUM, il a été question de la rentabilité en fonction des coûts et naturellement les salaires entrent en ligne de compte. J'aurais aimé connaître les salaires moyens payés à vos chauffeurs, quelles sont leurs conditions de travail, quelle est la sécurité d'emploi qu'ils ont et enfin tout genre de questions connexes.

M. GAGNON: Il faut distinguer entre plusieurs activités. Les chauffeurs eux-mêmes n'ont jamais voulu être organisés en syndicat.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il n'y pas de syndicat.

M. GAGNON: Et je puis vous assurer...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous voulez dire que ce sont les chauffeurs eux-mêmes qui n'ont jamais voulu l'être?

M. GAGNON: Oui. Je peux vous donner l'exemple de la grève des Teamsters qui a eu lieu en 1958 ou 1959 et qui avait commencé de la façon suivante: H était deux heures du matin. Un des chauffeurs quittait le garage de Murray Hill sur la rue Barré pour se rendre chez lui et deux hommes ont sauté sur lui. Ils l'ont projeté par terre et, pendant que l'un de ces hommes lui donnait des coups de pied, l'autre lui déchirait les oreilles avec une paire de pinces. C'était le début d'une organisation syndicale qui se faisait chez Murray Hill.

Le résultat pratique a été que les chauffeurs de bloc ont dit: Jamais! Et, depuis cette période, jamais il n'a été possible pour qui que ce soit de parler d'organisation syndicale chez Murray Hill pour ces faits-là. Il y a eu de la violence absolument inouïe à ce moment-là. Quand vous me parlez de la sécurité d'emploi et que je pense à des chauffeurs qui sont là depuis 30 ans et depuis 20 ans et depuis 15 ans, que je connais personnellement et que j'ai vus passer à travers les violences que vous connaissez, je me demande où est la sécurité d'emploi et ce que ça signifie.

Je pense qu'il faudrait, dans le cas de Murray Hill, ne pas parler de sécurité d'emploi mais de loyauté à l'employeur parce que, vraiment, ces salariés ont manifesté une loyauté qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer et ont manifesté leur attachement à l'emploi qu'ils avaient et qu'ils savaient "secured", comme on dit.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon... M. GAGNON: Quant aux salaires...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant. Là-dessus, je voudrais vous faire une petite réflexion. J'admire cette loyauté mais il reste que...

M. GAGNON: Qui est réelle.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... dans une période d'organisation moderne où on parle de syndicalisme, d'organisation, de sécurité d'emploi, etc., le fait qu'un homme ait passé 20 ans, 30 ans ou 15 ans au service d'une même entreprise ne signifie rien de jure s'il n'y a pas une organisation qui l'assure que, quoi qu'il advienne, il aura cette sécurité d'emploi. Est-ce qu'il existe au sein de l'organisation de Murray Hill des ententes signées qui garantissent à votre personnel cette sécurité d'emploi dont tout le monde parle?

M. GAGNON: Comme je fais beaucoup de relations ouvrières, je suis un peu au courant des conventions collectives, et s'il y a une chose qui n'existe pas en pratique, ce sont bien les clauses de sécurité d'emploi, sauf dans des cas exceptionnels. Pour vous donner un exemple très particulier, j'avais négocié à un moment donné un contrat qui avait commencé avec la demande suivante: On veut avoir une clause de sécurité d'emploi. Nous avons demandé ce que voulait dire leur sécurité d'emploi. Vous ne nous mettez pas à la porte. Alors, nous disons: Très bien. Nous n'avons plus de travail, qu'est-ce que nous faisons? Vous nous gardez. Mais si nous continuons de vous garder, il va falloir payer vos salaires, nous allons les payer avec quoi? Vous ne travaillez pas, vous ne produisez pas, comment pouvons-nous le faire? Il est clair que l'entreprise totale va disparaître. Le genre de sécurité d'emploi que nous pouvons vous donner, c'est la sécurité qu'on retrouve dans toutes les conventions collectives, c'est l'ancienneté, des règles d'ancienneté qui seront raisonnables et qui assureront que si vous avez 20 ans ou 30 ans à l'emploi de la compagnie, on ne vous renverra pas sur un coup de tête. Cela, nous sommes prêts à le faire. Je peux vous affirmer que chez Murray Hill, la politique a toujours été de respecter au moins les règles similaires d'ancienneté et de respecter la productivité des gens. Mais comme il n'y a pas d'union, pas de syndicalisation — pour les raisons que vous voyez, c'est extrêmement difficile à réaliser — bien, il résulte qu'il n'y a pas de convention collective particulière. On ne peut pas négocier avec des gens qui ne sont pas organisés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais est-ce qu'il y a fonds de pension, assurance-groupe, etc.?

M. GAGNON: Comme je n'ai jamais eu à négocier de conditions de travail, vous entrez dans des détails qui me dépassent. M. Perry, que j'ai amené avec moi, était venu pour m'assister dans des questions de marketing ou des choses comme ça, parce que c'est M. Perry qui connaît tout le monde aux Etats-Unis et qui est la source d'un nombre considérable de conventions qui viennent à Montréal. Evidemment, sur les questions de fonctionnement de taux de salaire, de conditions de travail, il aurait fallu que j'aie quelqu'un d'autre.

Tout ce que je sais, pour l'avoir, d'ailleurs, affirmé devant la commission parlementaire fédérale lorsqu'il a été question de l'aéroport, c'est que les revenus des chauffeurs d'autobus varient entre quelque chose comme $125 et $200 par semaine. Il y a tout un système de boni qui sont assurés à ces chauffeurs, selon leur productivité.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, je ne veux pas vous embarrasser avec des questions pour lesquelles vous n'êtes peut-être pas préparé.

M. GAGNON: Je regrette, mais j'ai surtout représenté Murray Hill sur le plan de ses relations avec la Régie des transports, des permis et de ses activités extérieures. Le régime interne ne m'a jamais été soumis.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans ces circonstances, je me contenterais de vous demander ceci: Est-ce qu'il vous serait possible de faire tenir aux membres de la commission parlementaire des chiffres à ce sujet?

M. GAGNON: Sans doute, si vous croyez que c'est pertinent.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, c'est parce que cela nous permettrait d'établir des comparaisons lorsque nous parlons de rentabilité en fonction des coûts, etc.

M. GAGNON: Je ne sais pas jusqu'à quel point mes clients seront d'accord. Si vous l'exigez, sans doute qu'ils devront faire face à cette demande, mais, de fait, ce sont des renseignements qui leur sont strictement privés et qui n'ont pas de conséquences particulières sur l'étude de la loi que vous faites. Personnellement, je n'ai pas d'objection, mais quelle va être la position de mes clients là-dessus? J'aimerais avoir l'occasion de les consulter. Ce n'est pas une question de se cacher derrière une objection. Vous comprenez qu'il peut y avoir intérêt pour une compagnie à garder pour elle les conditions de travail qu'elle donne à ses salariés. Ce n'est pas facile d'avoir la convention collective même de la CTCUM, et pour cause.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour la CTCUM, je pense bien qu'on est dans un domaine très public.

M. GAGNON: Oui, mais ce n'est quand même pas facile.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, vous savez que la plupart des organismes qui passent devant nous établissent des taux et même nous fournissent des tableaux comparatifs de coûts pour nous montrer quelle est l'importance de leur entreprise et quels sont les avantages dont jouissent leurs employés. Je n'insiste pas, encore que la commission a certains pouvoirs que vous connaissez, d'exiger que vous déposiez tel document.

M. GAGNON: J'ai simplement posé la question: Est-ce que c'est vraiment nécessaire? Si vous exigez qu'ils soient déposés, ils le seront avec plaisir. Il n'est pas question de refuser quoi que ce soit à la commission. Je pose la question dans le but, tout simplement, de savoir si vous exigez absolument qu'ils soient produits.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne peux pas l'exiger seul.

M. GAGNON: Vous savez, nous avons été l'objet — je parle de Murray Hill — de tellement d'attaques, de la part de tant de gens, et il est tellement facile de prendre des faits et de leur donner une couleur qui ne correspond pas aux réalités que nous devenons un peu prudents en la matière. Vous n'avez qu'à examiner, par exemple, notre situation à l'aéroport, qui ne dépendait absolument pas de nous, mais du gouvernement fédéral, parce que ce n'est pas nous qui faisions la politique du gouvernement fédéral. M. Bossé, d'ailleurs, pourrait vous en témoigner. Lorsque son enquête a commencé, la première chose que nous lui avons soulignée, c'est que nous n'avions absolument aucune objection, et depuis des années, à ce que les taxis entrent à l'aéroport.

Il en a été de même devant le comité parlementaire fédéral sur cette même question. La première déclaration que nous avons faite, parce que l'occasion nous était donnée de le faire, était de dire: Messieurs, enlevez-nous ce fardeau. On sert de paravent à tout le monde, on sert de cible à tout le monde et ce n'est pas nous.

C'est pour ça que nous sommes extrêmement sensibles actuellement — et pour cause, nous avons la paix depuis un certain temps — à toute déclaration en public qui tomberait entre les mains de quelqu'un qui veut encore déclencher une autre guerre. Vous savez, le nom de Murray Hill, c'est utile.

C'est dans ce sens-là et c'est de là que vient l'hésitation, non pas parce qu'on a quelque chose à cacher, non pas parce que les revenus que font les chauffeurs ne sont pas bien suffisants; autrement, c'est clair que vous n'auriez pas des chauffeurs qui ont 20 et 30 ans de travail chez nous. On aurait un turn-over impossible, il n'y aurait pas moyen d'exploiter une compagnie comme ça, surtout avec les

difficultés à travers lesquelles elle est passée à certaines époques et les violences auxquelles elle a fait face.

Ce n'est pas une question d'avoir une crainte quelconque quant aux conditions de travail qui sont faites aux chauffeurs, mais c'est une crainte quant à l'interprétation qu'on donnera aux chiffres qui, évidemment, sans explication, peuvent paraître, hors du contexte, ne pas être conformes à leur point de vue. C'est dans ce sens-là que je dis que je suis un peu hésitant, et je demande de considérer cet aspect de la question que, moi, je n'ai jamais oublié parce que j'en ai vu des vraies.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, je prends note de ces réserves qui sont normales. Naturellement, pour l'information de la commission, il eût été utile que nous ayons ces chiffres. Toutefois, je comprends que vous devez consulter votre société. Pour le moment, Me Gagnon, je ne veux pas vous poser d'autres questions, je pense que je vous ai tenu sur la sellette assez longtemps. Je ne veux pas enlever de temps aux autres collègues, je vous remercie des renseignements que vous m'avez fournis.

M. GAGNON: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: Vous avez dit tout à l'heure que si le régime était changé, si la Commission de transport de l'île de Montréal avait gain de cause dans ses demandes, vous seriez obligés d'avoir un permis et de la ville de Montréal, et de la ville de Westmount, et de la ville de Saint-Laurent s'il y avait un permis à obtenir. Vous avez dit ça tout à l'heure.

M. GAGNON: Pour les limousines.

M. LAURIN: C'est ça oui. Mais dans le cas où le permis serait métropolitain, est-ce qu'un seul permis ne suffirait pas? Une de vos objections...

M. GAGNON: A ce moment-là, on n'a pas d'objection. Quelle que soit l'autorité, il y a un service à donner qui est essentiel. Qu'on le donne en vertu d'un permis de la Régie des transports ou en vertu d'un permis métropolitain, quelle objection pouvons-nous avoir? Il y a une objection peut-être que tout le monde vous ferait, c'est qu'à la Régie des transports, lorsqu'il y a un permis d'émis, avant qu'un tiers puisse obtenir le même permis il faut qu'il démontre qu'il y a un besoin additionnel qui n'est pas satisfait. Alors que dans les permis métropolitains, ils sont émis par véhicule.

La conception serait tellement différente qu'elle pourrait affecter le service. A première vue, il n'y a peut-être pas une objection majeure à ce que ce soit de cette façon-là. Personnellement, j'ai toujours pensé qu'il valait mieux, dans les trois quarts des cas, avoir une juridiction par une régie qui entend des causes et qui détermine les besoins que par une émission de permis numériques qui ne détermine pas les besoins. Je pense que c'est un principe qui ne devrait pas être négligé.

M. LAURIN: A supposer que M. Perry qui est à côté de vous, obtienne l'assurance que telle ou telle grande association américaine tiendra son congrès dans un hôtel de Montréal et qu'un contrat se passe entre l'exécutif de cette association et Murray Hill en vertu duquel, pendant toute la durée du congrès, Murray Hill se chargera du transport, dans Montréal, de tous les congressistes, est-ce que le permis que vous obtenez de la Régie des transports vous permet une pareille opération?

M. GAGNON: Est-ce que vous voulez dire par limousines, ou par autobus?

M. LAURIN: En fait, les deux.

M. GAGNON: Je peux vous répondre tout de suite. L'autobus, cela va être la charte-partie dans ce cas. Nous prétendons avoir le droit de le faire, car nous le faisons depuis 1919. Quant à la limousine, c'est au tarif déposé à la Régie des transports. Autrement dit, le taux qui va être exigé dans un contrat sera celui prévu et accepté par la Régie des transports.

M. LAURIN: Est-ce que vous ne considérez pas, quand même, que ceci constitue une concurrence pour l'industrie du taxi de la région de Montréal?

M. GAGNON: Non, pour la simple raison que, si vous avez un directeur de compagnie qui vient à Montréal, le président de Steel Company of Canada, par exemple, il va de soi que, s'il veut avoir un véhicule à sa disposition, il va vouloir un véhicule qui n'a aucune identification commerciale, qui a un chauffeur propre et stylé. Ce véhicule sera mis à sa disposition à tant l'heure et à tant le mille. Le tarif qu'il va payer n'a rien à voir avec un taxi, et encore là, avec un taxi avec taximètre. Il ne voudra même pas utiliser ce service. Si vous lui dites qu'il n'y a pas de véhicule comme ça, il va tout simplement aller dans un "drive-yourself" et il va se louer une Cadillac. Après ça, il va se trouver un chauffeur, il va l'engager et lui dire: Conduis l'automobile que j'ai louée. Il va faire la même chose.

Il n'y a aucun moyen d'amener ce personnage à utiliser un taxi avec taximètre.

M. LAURIN: Je comprends bien votre raisonnement en ce qui concerne, par exemple, les "top brass" et les "executive people" qui ont plusieurs rendez-vous importants. La question que je posais concernait plutôt les congrès. On sait qu'il peut y avoir des congressistes qui, au

fond, ne sont pas tellement au courant de l'industrie du taxi d'une région. Ils ne savent pas combien de voyages ils auront à faire dans la ville, quelles courses ils auront à faire pour aller au cinéma, au théâtre, le soir. Est-ce que ça comprend quand même cet avantage?

M. GAGNON: Murray Hill, lorsqu'un congrès arrive à Montréal, va donner un service d'autobus à charte-partie, à tant l'heure, pour aller de tel endroit à tel endroit et en revenir. C'est un autre problème que la CTCUM aurait et à quand les congressistes viennent ici si, par exemple ils veulent faire un tour de ville.

Ils peuvent vouloir aller à la Place des Arts, mais ils peuvent également vouloir aller, par exemple, je ne sais pas, à Sainte-Agathe. A ce moment-là, la CTCUM est limitée dans son territoire, elle ne peut pas le faire. Il y a également ce problème de limitation territoriale qui crée un problème particulier.

M. LAURIN: Je voulais simplement m'assurer...

M. GAGNON: Permettez-moi d'ajouter ceci pour répondre plus directement à votre question. Le transport que fait Murray Hill dans ce cas-là est un contrat qui dit : Vous allez avoir un déplacement... j'en ai un ici comme exemple, malheureusement, est en anglais, mais il vous indique...

M. LAURIN: Je comprends l'anglais, vous pouvez le lire.

M. GAGNON: Vous avez: Friday, August 27th 1971 — c'est tout récent — Approximately 120 people, gone at Wentworth Golf Club. Pick up guests at Le Château Champlain and transfer to the Golf Club. Following activity, return group to the Château Champlain, exact pick-up times to be advised at a later date; type of transfer service to depend upon number of participants.

A ce moment-là, il y a un taux, celui de la Régie des transports, qui est payé pour ce voyage. Vous avez, ensuite de cela, le même jour: A Man And His World. Pick up group at the Château Champlain and transfer to A Man And His World. Following activity, return the group to the Château Champlain, exact pick-up times to be advised at a later date; type of transfer service to depend upon number of participants.

M. LAURIN: Disons que le contrat est limité aux activités de groupe et non pas aux services individuels, aux congressistes.

M. GAGNON: Absolument. A ce moment-là, les limousines ne servent pas si les gens veulent aller visiter leur tante sur la rue... Ils prennent un taxi et c'est leur affaire; cela ne dépend plus du groupe, à ce moment-là. C'est évident que le groupe ne sera pas intéressé à faire des réservations de ce genre. C'est clair qu'on n'entre pas en concurrence, absolument pas, avec le taxi ici. Au contraire, on lui apporte du travail parce que c'est nous qui avons fait les démarches nécessaires pour aller chercher ces gens et les amener ici.

M. LAURIN : Dans un autre domaine, on a entendu à quelques reprises, au cours des audiences de cette commission, des affirmations voulant que Murray Hill et des compagnies du genre exerceraient une concurrence indue à l'industrie du taxi, particulièrement en ce qui concerne les points de chute dont on a parlé, c'est-à-dire les grands hôtels. Vous avez dit tout à l'heure que si cela était effectivement fait, cela serait contrevenir aux règlements de la compagnie. Vous avez dû faire cette affirmation à plusieurs reprises. Pourtant, les affirmations continuent d'être faites.

M. GAGNON: Elles ont une source. C'est encore le service que Murray Hill donne et doit donner à l'aéroport, parce que nous avons un permis de la Régie des transports qui nous oblige à donner un service à l'aéroport. Pour faciliter ce service-là et le rendre efficace, Murray Hill a établi un service, c'est-à-dire qu'un autobus, aux quinze minutes, passe devant un certain nombre d'hôtels, toujours avec l'approbation de la Régie des transports, selon des trajets que la Régie des transports a acceptés. D'accord?

Il arrive que, de plus, Murray Hill, en vertu du même permis, est obligée de donner un service par véhicule de promenade non enregistré comme taxi et elle doit passer à ces hôtels-là et prendre les passagers, avec leurs bagages, pour les transporter à l'aéroport selon le tarif qu'elle a, encore une fois, déposé à la Régie des transports.

Ce service, évidemment, se donne à la vue des taxis. Quand ils voient un véhicule de promenade arriver devant l'hôtel et quelqu'un arriver avec ses bagages et entrer dans le véhicule de Murray Hill, bien, ils protestent. Mais en fait ce n'est pas une concurrence du taxi; c'est l'exercice des obligations de Murray Hill. En vertu de son permis de la Régie des transports, Murray Hill doit rendre ce service et c'est le même service qu'elle rend à l'autre bout, à l'aéroport. Il y a des taxis qui sont là, mais il y a également les véhicules de promenade non enregistrés comme taxis de Murray Hill qui rendent ce service selon le tarif qui est déposé à la Régie des transports... Et aux deux bouts de la chafne, c'est la même concurrence, si vous voulez, mais c'est une concurrence qui est inévitable, parce que dans les deux cas c'est la même destination et ce sont les taxis eux-mêmes qui ont insisté sur cette concurrence.

M. LAURIN: Mais quelles sont les méthodes de concurrence au sein même de ces grands

hôtels? Est-ce que les dispatchers comme vous les avez appelés tout à l'heure, les coordonnateurs, font la chasse aux clients comme les compagnies de taxi peuvent faire la chasse aux mêmes clients de ces hôtels?

M. GAGNON: Les instructions que les dispatchers ont et la politique ferme de Murray Hill, c'est qu'il n'y a aucune chasse. S'il s'en fait, il y a des moyens de corriger la situation. Le problème, c'est qu'on n'en est jamais informé. Cela sert toujours de manchettes dans les journaux; cela ne sert jamais d'information là où cela devrait et où il y aurait moyen de prendre des mesures efficaces. Evidemment, on monte cela en épingle, les gens s'excitent, les chauffeurs de taxi s'imaginent qu'on les dépouille alors qu'en réalité, c'est une goutte d'eau. Cela ne représente rien. S'il y a une chasse qui se fait, il y a toujours moyen de la régler.

Maintenant, j'aimerais souligner que par ailleurs on a parlé, à un moment donné d'un système qui s'était établi à l'aéroport pour les taxis. Ils ont eu leur dispatcher. Si vous avez pris l'avion et si vous avez atterri à l'aéroport de Dorval, vous avez peut-être été en mesure de constater le genre de chasse qu'à l'occasion ces messieurs se permettaient. J'espère que la situation est réglée. Cela fait longtemps que je n'ai pas eu à me mêler de cette question.

Il est bien normal que des gens qui travaillent et qui ont des revenus par pourboires soient intéressés à les augmenter. Evidemment, à ce moment, il se fait toujours certains gestes qui ne sont pas nécessairement conformes à ceux que la compagnie voudrait qu'ils posent. On essaie de remédier à cette chose au meilleur de notre connaissance et avec tous les moyens et tous les règlements possibles. Je pense que c'est tout ce qu'on peut faire.

M. LAURIN: Dans les conversations qu'on peut avoir avec ceux qui émettent de telles affirmations, on parle parfois d'entente entre les représentants de Murray Hill qui sont là, au fond, depuis plusieurs années, et ceux qui ont un rôle important à jouer auprès des clients d'un hôtel comme, par exemple, les portiers ou ceux qui sont à la réception. Vous n'avez jamais entendu parler de choses comme ça?

M. GAGNON: J'ai entendu parler de choses comme ça, il va de soi. Les accusations ont été faites assez souvent pour que j'en entende parler. Est-ce qu'elles se reflètent dans la réalité? C'est une autre paire de manches. C'est moins sûr. Les exigences de la compagnie sont très sévères à ce sujet. De plus, la compagnie a des contrôles qu'elle exerce dans une certaine mesure sur ces activités.

M. LAURIN: Vous avez suggéré tout à l'heure que, si tels cas qui sont contraires aux règlements de la compagnie se produisaient, vous suggéreriez à ceux qui les voient ou qui en sont conscients de faire des plaintes à la compagnie. Avez-vous effectivement reçu de temps à autre des plaintes de la part des propriétaires indépendants ou d'autres associations de taxis, de services?

M. GAGNON: J'en serais fort étonné. C'est beaucoup plus utile dans les journaux que chez nous. Et je ne me souviens pas d'avoir eu des plaintes directement. On en a eu par des commissions parlementaires, par la Régie des transports. A un moment donné, quand on arrivait à une audition, là, ça faisait chic, c'était utile. Mais il faut dire que lorsque le cas arrivait et qu'il y avait moyen de le contrôler, de vérifier les faits et de permettre à l'employé accusé de se défendre — parce qu'il a le droit de se défendre — là, c'est une autre paire de manches. Nous n'avons pas vu de ces choses.

M. LAURIN: On a fait aussi une autre affirmation que, dans certains quartiers plus huppés de la métropole, il pouvait s'être développé un système analogue entre les propriétaires de ces quartiers et les "agents recruteurs" de compagnies telles que la vôtre.

M. GAGNON: Encore là, il faudrait d'abord analyser le soi-disant système et la soi-disant entente pour voir si, premièrement, ils sont véritablement répréhensibles ou si c'est simplement l'exécution normale des obligations de la compagnie, parce que la compagnie se doit d'offrir son service au public. Il faut qu'elle le fasse connaître. Il y a cette réserve que je fais en partant.

Il y a de plus le fait qu'on n'en a jamais entendu parler sauf dans des circonstances comme celle-ci et, à ce moment-là, ce n'est pas contrôlable. Il n'y a aucun fait qui soit mis devant vous, il y a des affirmations; mais les faits qu'à tel jour, à telle date M. Untel a fait telle chose, ce qui nous permettrait à nous de mettre le doigt sur cette situation et, si elle mérite des corrections, de la corriger, on ne les voit jamais.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dr Laurin, me permettriez-vous de poser une question?

M. LAURIN: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon, pour faire suite aux observations du Dr Laurin, on a affirmé que votre société, Murray Hill, jouissait de certains privilèges de la part de la police en ce qui concerne les billets d'infraction. On nous a même dit qu'on avait des documents montrant un policier collant, comme on dit dans le langage populaire, un "ticket" à quelqu'un puis ouvrant la porte d'une limousine de Murray Hill. Qu'est-ce que vous pouvez nous répondre à des choses comme ça?

M. GAGNON: Je dois vous dire, comme vous le savez, qu'il y a eu des périodes où Murray Hill n'a pas gagné des concours de popularité et où, grâce à des affirmations plutôt générales et gratuites comme celles auxquelles on se référait tout à l'heure, on a fait les grandes manchettes dans les journaux, puis on a accusé cette compagnie de tous les péchés. Le résultat pratique, évidemment, c'est que les policiers qui se voyaient toujours accusés de ne pas jouer leur rôle ont exercé un zèle inouï. Un autobus qui arrive au coin de la rue et qui arrête à treize pouces du trottoir reçoit un billet parce que le maximum est douze pouces, dit-on.

Mon bureau pourrait être tapissé de contraventions de ce genre. Il y a un essuie-glace qui fonctionne mal parce que, entre le trajet du garage où l'entretien est soigné d'une façon très particulière et l'endroit où le véhicule se dirigeait, un morceau de glace a frappé le pare-brise, l'essuie-glace est tombé, ou il est arrivé quelque chose comme cela. Une contravention, parce que le véhicule n'est pas conforme! On n'a pas d'idée. Il y a eu des périodes où la persécution a été absolument systématique et absolue. Alors, qu'on ne vienne pas nous raconter que les policiers ont quelque chose à faire en faveur de Murray Hill. C'est de l'aberration. C'est précisément parce qu'on veut que cela continue! Ces affirmations ne sont pas faites...

M. BOSSE: N'est-ce pas l'ex-président du comité exécutif de la ville de Montréal, M. Saulnier, qui disait lui-même qu'après de telles constatations il avait pris des mesures pour changer le plus fréquemment possible les agents qui se trouvaient à proximité de ces hôtels parce qu'il avait, après enquête, constaté lui-même que, de fait, il semblait y avoir de ces espèces d'injustices? Evidemment, vous avez pu être victime à l'occasion, comme vous le faites remarquer si habilement...

M. GAGNON: Est-ce que...

M. BOSSE: La persécution, cependant, n'a pas toujours été le cas. Ici, je ne cherche pas à vous accabler...

M. GAGNON: Non, non, je comprends. D'abord, j'ignore s'il y a eu une enquête ou si c'est simplement à la suite des affirmations qui étaient faites parce que, de notre côté, nous n'avons jamais été avisés qu'il y avait une enquête. En tout cas, moi, je n'en ai pas eu connaissance.

M. BOSSE: Si je me souviens, c'est à l'occasion d'une entrevue radiophonique que donnait le président du comité exécutif du temps. L'enquête ne portait pas évidemment sur les activités de Murray Hill; elle portait surtout sur les activités de certains policiers ayant un zèle très particulier, mais, cette fois-là, pas contre les véhicules de Murray Hill.

M. GAGNON: Oui, mais encore là, quant à nous, quant à Murray Hill...

M. BOSSE: Ah, ce n'est pas la même chose...

M. GAGNON: ... dans la mesure où je le sais, parce que, encore une fois, je ne peux pas connaître tout ce qui se passe chez Murray Hill, dans la mesure où moi, j'ai été informé des circonstances, je ne connais pas de circonstances particulières qui aient été portées à l'attention de la compagnie où il y aurait eu quelque chose de ce genre parce que, là encore, cela se corrige.

M. BOSSE: Je comprends qu'il serait difficile pour vous de vous plaindre de ne pas avoir de contravention, ce n'est pas votre rôle surtout. A ce moment-là, c'étaient des plaintes contre des taxis.

M. GAGNON: Oui, mais l'inconvénient c'est que nous en sommes accusés, que nous sommes accusés d'avoir fait des ententes alors que nous sommes innocents de cela. S'il y a eu une entente entre un chauffeur et un détective, ce n'est pas ma faute, ce n'est pas la faute de la compagnie. Il faudrait quand même rétablir le fait que ce n'est pas la compagnie qui agit alors, mais que cela peut être l'individu qui, lui, ne veut pas être pris avec la contravention et qui prend les moyens parce que, quand il a une contravention, il y a des explications, car la compagnie n'admet pas les contraventions, et pour cause. Alors, s'il y a des ententes au niveau des employés à un moment donné parce qu'ils veulent éviter...

M. BOSSE: Je ne voulais pas vous...

M. GAGNON: ... de se trouver dans une situation déplorable vis-à- vis de leur employeur, il ne faudrait quand même pas coiffer l'employeur ensuite de l'accusation, parce que ça ne marche plus.

M. BOSSE: Ce que je voulais tout simplement mettre en lumière, c'est qu'il y avait des faits là-dessous. Ce n'était pas uniquement de la fumée, il y avait aussi des faits. Mais je n'essaie pas de vous blâmer.

M. GAGNON: Ce que je tiens absolument à souligner, c'est que la fumée et le feu, s'il y en a eu, n'avaient rien à voir avec la compagnie. Que s'il y a eu de la fumée et du feu, cela n'a pas été parce que la compagnie y avait participé.

C'était absolument contraire aux politiques précises de la compagnie qui préfère cent fois plus recevoir une contravention que de se voir accuser, après cela, d'avoir essayé de l'éviter. Vous comprenez pourquoi. La compagnie est tellement consciente des problèmes particuliers auxquels elle a fait face depuis dix ans que ces problèmes, elle tient à les éclaircir. Je tiens absolument à ce que cela ne laisse aucun doute

que, de la part de Murray Hill, il n'y a pas de ces histoires-là, parce que c'est trop facile.

M. LE PRESIDENT: Me Gagnon, me per-metteriez-vous une question: Est-ce que l'activité de votre service d'automobiles de location s'exerce à l'intérieur des limites de la ville de Montréal? Supposons que je demeure dans une belle maison d'appartements qui s'appelle Le Cartier, au coin de Peel et Sherbrooke, et que je désire me rendre pour affaires à Place Crémazie. Plutôt que de prendre un taxi, je préfère avoir un chauffeur costumé dans une automobile non identifiée comme étant un taxi. Est-ce que cela est compris dans le service que vous offrez?

M. GAGNON: Je suis obligé de l'offrir, oui. Parce que le permis exige un service dans l'île de Montréal et dans la périphérie de quinze milles, si je me souviens bien.

M. CARON: A quel taux? M. GAGNON: Le double.

M. BOSSE: C'est là la subtilité qui fait que les taxis vont prétendre qu'il y a effectivement des voitures qui font du taxi. C'est le noeud du problème, au fond.

M. GAGNON: Non, parce que, voyez-vous...

M. BOSSE: Légalement, vous pouvez soutenir...

M. GAGNON: Non, je parle de faits.

M. BOSSE: ...très facilement que vous donnez suite à vos obligations et personne ne vous en fera le reproche. Cependant, si quelqu'un transporte des passagers de la rue Bellechasse à la rue Sherbrooke dans l'ouest, qui est un trajet similaire ou, enfin, qui est dans son territoire, quelles que soient les raisons qui motivent ce transport, effectivement, un chauffeur de taxi peut s'imaginer qu'on transporte des passagers auxquels il a droit en vertu aussi d'un permis qu'il détient dans une communauté quelconque. C'est le noeud. Je ne cherche pas à contester ou à exprimer un simple doute quant à la légalité de vos activités.

Dans mon esprit, c'est très clair. Cela est légal par rapport au permis que vous détenez.

M. GAGNON: J'aimerais placer la question sur un autre plan. La Loi de la Régie des transports, comme la nouvelle loi, a comme objectif fondamental le service public. La Régie des transports, après une audition qui a duré de nombreuses années, a décidé que ce genre de services était essentiel au public. Qu'il y ait des chauffeurs de taxi qui se sentent psychologiquement mal placés ne change rien à la nécessité de fournir le service au public.

Je regrette, mais il me semble que le critère du service public est plus important que la psychologie du chauffeur. Le chauffeur qui est dans le domaine et qui devrait en savoir plus long devrait comprendre qu'il n'y a pas effectivement de concurrence, parce que le véhicule en question ne fait pas de "cruising", pour utiliser un terme du métier; il ne fait pas d'attente dans les postes d'attente; il fait son voyage après un arrangement préalable qui est pris, non pas avec le chauffeur mais avec la compagnie directement, pour un prix qui est au moins le double de celui qu'il peut réclamer en vertu de son tarif de taximètre.

Par conséquent, il ne peut pas être question à ce moment-là de concurrence. Il est évident que c'est parce que l'usager du véhicule a préféré un autre genre de service à celui que le chauffeur de taxi pouvait lui procurer. Vous allez dire que c'est une concurrence entre genres de services, oui, comme il y a une concurrence, entre les trains, les avions et les autobus. Mais ils ont chacun leurs tarifs, ils ont chacun leurs avantages et leurs désavantages et les gens doivent avoir le choix entre ces divers moyens de transport. C'est essentiel.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: Juste une question là-dessus. Quand les règles du jeu sont faussées, — et ça arrive assez souvent — même si ce n'est pas votre responsabilité première, si le fait vient à votre attention, est-ce qu'il n'y a pas quand même un intérêt de la part de votre compagnie à aller au devant des coups et à essayer d'élucider et de clarifier la situation?

M. GAGNON: Certainement. Je ne peux pas vous dire le nombre d'enquêtes qui ont été faites parmi les salariés pour vérifier les affirmations très générales qu'on recevait, et qui, très rarement, étaient... Je vais vous illustrer un peu plus la situation pour que vous voyiez jusqu'à quel point le contrôle est exercé. Chaque véhicule est contrôlé de telle sorte que, si vous perdez quelque chose dans ce véhicule et que si vous appelez ensuite pour l'avoir, il y a au moins 95 p.c. des chances que l'objet soit retrouvé. On va identifier le véhicule dans l'espace d'une heure. C'est quand même fantastique.

Vous pouvez avoir le cas d'un chauffeur qui vous dit: Le tarif est $15, alors que, en réalité, le tarif déposé à la régie et autorisé, est de $10. Si vous êtes capable de donner la destination précise, l'heure précise et l'endroit du départ précis, le chauffeur sera identifié immédiatement parce que le "dispatching" est fait de telle sorte qu'il y a un contrôle absolu sur les allées et venues de chacun des chauffeurs.

Sur ce plan-là, quand on vient nous affirmer qu'il y a eu quelque chose qui s'est passé, on dit que c'est possible, parce que, quand même,

aucun système humain n'est susceptible de ne pas défaillir. Mais ce n'est pas possible assez souvent pour que ça devienne un problème psychologique et encore moins un problème social.

M. LAURIN: Est-ce que l'inverse peut être vrai, qu'un de vos chauffeurs pourrait faire une course sans que votre coordonnateur le sache?

M. GAGNON: C'est ce qu'on dit. Si cela arrive, c'est tellement rare et peu probable que c'est de minimis. Cela ne veut plus rien dire à ce moment-là et ça ne peut pas servir de base au genre d'assauts dont Murray Hill a été la victime dans le passé. C'est clair qu'on a exagéré la chose hors de toute proportion.

M. LE PRESIDENT: Le député de Verdun.

M. CARON: Il faut admettre que si d'une intersection à l'autre — vous parliez de Météor tout à l'heure — il y a des chauffeurs de taxi qui ont de belles autos, à Montréal, il y a des Chrysler, des Buick, même des Cadillac, qui voient une automobile de Murray Hill collée à côté d'eux, prenant un voyageur, qui s'en va, qui paie un permis municipal, c'est pas plaisant. Alors, je pense bien que c'est une grosse partie des plaintes qu'on peut entendre des chauffeurs.

M. GAGNON: Oui, il faut bien reconnaître qu'à ce moment-là c'est un problème psychologique pour ces chauffeurs, mais ce n'est pas comme ça qu'on peut régler un problème relatif au transport. Le problème du transport, c'est l'intérêt public, et l'intérêt public exige ce genre de véhicules. Tant que l'intérêt public va l'exiger, il va falloir l'avoir. Autrement dit, est-ce que le chauffeur de taxi va prendre le pas sur le passager? Est-ce que c'est le chauffeur de taxi qui, à cause de son problème psychologique, va déterminer pour le passager que le seul genre de véhicule qu'il a le droit de prendre c'est le taxi? Il semble que la réponse va de soi.

M. CARON: Non, d'accord, mais il devrait...

M. GAGNON: On comprend ça.

M. CARON: ... y avoir un équivalent du permis qui devrait être payé aux municipalités où circule Murray Hill, pour concurrencer le chauffeur de taxi.

M. GAGNON: Tout à fait d'accord, mais le permis payé par Murray Hill est payé à la Régie des transports. C'est un permis qui coûte cher. Je ne sais pas quel est le prix, mais il y a certainement un prix substantiel.

M. CARON: Est-ce que c'est un prix global?

M. GAGNON: Franchement, c'est un aspect... quand le permis est accordé, je ne m'occupe plus de ça. Il y aurait peut-être moyen de savoir, je l'ignore totalement, pour être bien franc. Je ne me suis jamais enquis de ça, mais je suis certain qu'on paie des droits à la province qui sont assez substantiels quand même.

M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Me Gagnon, vous parliez tantôt de cas très isolés, lorsqu'on parle de clients, par exemple, qui demandent une voiture à l'hôtel pour se faire transporter dans un endroit...

M. GAGNON: Qui n'est pas l'aéroport.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... qui n'est pas l'aéroport. Laissez-moi vous dire que ça se fait très fréquemment. Je ne mets pas en doute vos déclarations, remarquez bien, mais je suis très surpris quand vous parlez de cas isolés, parce que, dans certains hôtels du centre de la ville, il est reconnu que si un client demande une voiture, sans spécifier que ce soit une voiture non identifiée ou une voiture avec un chauffeur en livrée, il est reconnu que c'est toujours une voiture de Murray Hill qui vient chercher le client. Et ce ne sont pas des cas isolés.

M. GAGNON: Comme je l'ai dit plus tôt, si vous avez des cas spécifiques à nous communiquer, vous êtes les bienvenus parce que ce n'est absolument pas dans l'optique de la compagnie, et je ne comprendrais pas d'ailleurs que le passager en question accepte de monter dans le véhicule au prix qu'on lui demande.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Probablement que c'est au même prix.

M. GAGNON: Non, ce n'est pas possible.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela se fait couramment.

M. GAGNON: A ce moment-là, il y aurait... je m'excuse, mais si ça se fait fréquemment, veuillez nous soumettre les faits d'une façon concrète.

Nous allons faire une enquête tout de suite, parce que cela veut dire que la compagnie se fait voler tout rond, parce que cela veut dire que la compagnie ne perçoit pas ces sommes d'argent et il est temps qu'on le sache.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si je demande une voiture, alors que je suis dans un hôtel, pour me rendre à l'aéroport de Dorval, à ce moment-là, c'est une voiture de Murray Hill?

M. GAGNON: Absolument, parce qu'on doit vous donner le service.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): De par votre permis?

M. GAGNON: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Votre permis vous donne l'exlusivité?

M. GAGNON: Pas l'exclusivité, il nous donne l'obligation de donner le service et on le donne.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Alors, si je me rends au bureau de réception et que je demande une voiture pour aller à l'aéroport de Dorval, on ne peut pas faire venir un taxi ordinaire, c'est toujours une voiture de Murray Hill.

M. GAGNON: Dans le concret des choses — j'y vais dans ces hôtels, moi aussi — au Reine-Elisabeth, par exemple, les passagers se dirigent vers une sortie sur le côté de l'hôtel et je pense qu'il y a là quinze taxis. Croyez-vous que le portier va se mettre ces quinze chauffeurs de taxi à dos? Ce n'est pas possible. Il ne survivra pas une semaine, c'est impensable.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si je commande une voiture à la direction de l'hôtel, à ce moment-là, c'est un véhicule de Murray Hill.

M. GAGNON: Ce n'est pas à la direction. Vous allez au bureau. Naturellement, on va vous dire: Murray Hill, parce que c'est le genre de service que Murray Hill donne. Si vous demandez un taxi, on va vous dire: Très bien, voici un taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous avez répondu pas mal à toutes ces questions-là. D'ailleurs, le député de Chicoutimi vous a posé des questions à peu près dans le même sens, mais je voulais ces quelques éclaircissements. Je descends de l'avion, à l'aéroport international de Dorval, et je demande une voiture; est-ce que ce sera une voiture de Murray Hill?

M. GAGNON: Si vous demandez une voiture, vous allez avoir très probablement une voiture...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne dis pas une voiture de Murray Hill, je demande une voiture.

M. GAGNON: Si vous demandez une voiture, c'est très probable que la voiture que vous allez avoir va être de Murray Hill. Si vous demandez un taxi, vous allez certainement avoir un taxi. Vous avez le choix. Murray Hill n'a pas de taxis, si vous demandez une voiture, vous allez l'avoir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que les taxis ont le droit de ramasser les clients à la sortie de l'aéroport de Dorval?

M. GAGNON: Assurément. Il y a d'ailleurs un poste d'attente.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, pas depuis très longtemps.

M. GAGNON: On n'entrera pas là-dedans.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une simple question: Vous avez fait une déclaration tantôt, si vous me permettez, disant que vous choisissez vos clients et cela ne me regarde pas du tout.

Vous avez fait beaucoup de droit ouvrier et surtout pour la partie patronale. Lorsque vous déclariez tantôt que vous donniez l'exemple d'une demande de sécurité d'emploi, laissez-moi vous dire que je n'ai jamais négocié comme conseiller juridique, je ne suis pas avocat, mais j'ai négocié des conventions collectives de travail et je dois vous dire que vous avez exagéré.

Une clause de sécurité d'emploi, ce n'est pas ce que vous avez dit. C'est peut-être un cas que vous avez cité, mais vous avez choisi l'extrême parce qu'une clause de sécurité d'emploi, ce n'est pas cela du tout et j'en ai négocié plusieurs fois.

M. GAGNON: D'accord.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aimais à rétablir les faits. Il ne faut pas faire croire que tous les syndiqués demandent des choses dérisoires ou extravagantes. Je m'excuse, je...

M. GAGNON: Vous avez parfaitement raison. Si vous avez remarqué, après avoir cité ce cas-là qui, il faut le reconnaître, est assez spécial, je vous ai souligné que, dans la grande majorité des conventions collectives, ce genre de clause n'existe pas, que la sécurité d'emploi s'exerce par des moyens indirects de clause d'ancienneté et de choses du genre. J'ai tout simplement illustré que, quand on parle de sécurité d'emploi et que l'on parle de Murray Hill, c'est facile de faire une équation entre une sécurité d'emploi absolue et Murray Hill, parce que c'est Murray Hill.

J'ai tenu à souligner que, dans les conventions collectives, il n'y a pas une sécurité d'emploi si considérable que cela.

C'est une sécurité qui vient de l'ancienneté plutôt que de la garantie qu'on va travailler. En effet, la garantie du travail ne provient pas des cadres de l'entreprise elle provient de son travail. S'il n'y a pas de travail à faire, c'est clair que je n'ai pas de sécurité d'emploi. Si j'ai du travail à faire, c'est clair que j'ai une sécurité.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Me Gagnon, vous venez de donner la définition de la plupart des clauses de sécurité d'emploi qui sont de-

mandées par les syndicats. Là, je suis d'accord. Tantôt, je ne l'étais pas.

M. GAGNON: Tout à fait d'accord. Je peux vous dire que chez Murray Hill, les politiques générales d'emploi — vous pouvez le vérifier par l'ancienneté des chauffeurs — indiquent clairement que cette politique est généralement suivie, comme elle l'est ailleurs. Ce sont les mêmes règles de base, parce que ce sont des règles humaines. Ce sont des règles absolument normales de relations humaines. Il n'y a aucune raison, parce qu'il n'y aurait pas, à un moment donné, une union à un endroit, pour que ces règles ne soient pas suivies.

M. AUDET: M. Gagnon, plusieurs témoins qui formulaient des remarques sur votre entreprise reconnaissaient que vous aviez un permis de limousine. Avec ce permis qui vous donne le droit de louer des automobiles, on prétendait que les automobiles louées, qui sont utilisées, n'étaient pas du tout des limousines. Elles devenaient des voitures très ordinaires.

M. GAGNON: Le permis que nous détenons est un permis pour faire du transport par véhicules de promenade non enregistrés comme taxis. Un véhicule de promenade non enregistré comme taxi est défini dans la loi comme étant un véhicule privé, agencé pour le transport de sept personnes à la fois, y compris le chauffeur.

Alors, ce n'est pas un permis de limousine. Le mot limousine a été utilisé par abus. Il n'y a aucun permis que je connaisse dans la province qui soit un permis de limousine. Cela n'existe pas. Le mot limousine n'a aucune existence juridique où que ce soit.

Je dois dire que Murray Hill, en plus des véhicules Meteor qu'elle utilise pour donner son service à l'aéroport, possède des Cadillac — j'ai énuméré la liste tout à l'heure — pour faire précisément ce qu'on peut appeler communément un service de limousine. C'est un service ultra-chic qui est utilisé dans Montréal à l'occasion.

M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas qu'il y ait d'autres questions de la part des membres de la commission pour M. Gagnon. Je le remercie infiniment de ses représentations. Comme le dirait le député de Chicoutimi, il a fait valoir ses arguments. Je l'en remercie infiniment.

M. Gagnon.

M. GAGNON: Je vous remercie et j'espère que les faits que nous avons essayé de vous présenter étaient clairs. Je vous assure que les représentations étaient sincères.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gagnon. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance: 17 h 48)

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