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Version finale

31e législature, 5e session
(24 octobre 1980 au 24 octobre 1980)

Le mardi 26 août 1980 - Vol. 22 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Le transport en vrac au Québec


Journal des débats

 

Camionnage en vrac au Québec

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Jolivet): La commission des transports est réunie pour entendre des mémoires concernant le transport en vrac pendant trois jours, soit les 26, 27 et 28 août 1980, aux heures normales des séances.

Les membres de cette commission sont: MM. Baril (Arthabaska), de Belleval (Charlesbourg), Goulet (Bellechasse), Gratton (Gatineau), Grégoire (Frontenac) remplacé par M. Bertrand (Vanier), MM. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), O'Neill (Chauveau), Proulx (Saint-Jean), Samson (Rouyn-Noranda) et Verreault (Shefford).

Les intervenants à cette commission sont: MM. Beauséjour (Iberville), Bordeleau (Abitibi-Est), Fontaine (Nicolet-Yamaska), Mailloux (Charlevoix), Mathieu (Beauce-Sud), Michaud (Laprairie), Ouellette (Beauce-Nord) et M. Perron (Duplessis).

Est-ce qu'on peut nommer un rapporteur, M. Proulx?

M. Michaud: Je pense que je pourrais vous suggérer le député de Vanier, M. Bertrand.

Le Président (M. Jolivet): Le député de Vanier, M. Bertrand, est nommé rapporteur de cette commission.

M. le ministre avez-vous quelque chose à dire au début de cette séance?

Remarques préliminaires

M. Denis de Belleval M. de Belleval: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval:... il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à tous les participants à cette commission et, en particulier, à ceux qui viendront au cours de ces trois jours nous exposer leurs vues sur l'avenir du transport, du camionnage en vrac au Québec.

Comme vous le savez, le but des travaux de la commission est de faire le point sur la santé de l'industrie du camionnage en vrac au Québec, de même que d'éclairer plus précisément les revendications de l'Association nationale des camionneurs artisans. Ces travaux permettront entre autres au gouvernement d'évaluer sa propre action face à cette industrie et d'ajuster, s'il y a lieu, les politiques et réglementations existantes.

Je dois également rappeler que cette commission ne sera pas nécessairement en position pour résoudre tous les problèmes du camionnage en vrac puisque les actions gouvernementales sont loin d'être les seuls éléments qui façonnent cette activité et déterminent sa santé économique. Il ne faut donc pas aborder les travaux de cette com- mission parlementaire dans l'espoir d'y découvrir la panacée à tous les problèmes qui pourraient se poser à cette industrie.

D'ailleurs, la commission Lippé, qui s'était déjà penchée sur le camionnage en vrac, en 1965, et qui a alors proposé certaines solutions, avait constaté qu'il y avait, à cette époque, un surplus évident d'offres de services ou, si vous voulez, de camions ou de camionneurs, compte tenu des demandes des fournisseurs d'ouvrage.

Par contre, plusieurs des recommandations de cette commission ont été retenues et ont été appliquées en tenant compte de l'évolution de la situation. Il y a cependant une recommandation importante de la commission Lippé qui n'a pas été appliquée. Celle-ci avait pour but de permettre aux entrepreneurs et sous-entrepreneurs d'utiliser leurs propres camions sans restrictions. On sait que ce n'est pas ce qui se produit actuellement, puisque les entrepreneurs et sous-entrepreneurs doivent accorder aux postes d'affectation 75% des besoins de transport pour les travaux effectués au-dessus de la ligne d'infrastructure dans le cas des travaux routiers exécutés sous la responsabilité du ministère des Transports. L'ANCAI revendique maintenant, d'ailleurs, au nom des postes et sous-postes d'affectation, 75% de tout le travail non seulement au-dessus, mais aussi au-dessous de cette ligne d'infrastructure.

De plus, tel que le recommandait la commission Lippé, une réglementation a été élaborée et est appliquée depuis 1973. Elle régit le nombre des permis, qui sont gelés, d'ailleurs, actuellement, les taux applicables et la répartition du travail. Depuis le début de 1980, un commissaire de la Commission des transports du Québec est mandaté en exclusivité à l'application de cette réglementation.

Ayant été souvent amendée depuis 1973, la réglementation n'a pu faire réellement ses preuves, pas plus qu'il n'a été possible de voir les effets de la dernière modification apportée en 1980, quoique les indices permettent un certain optimisme.

Voilà qu'un certain nombre de transporteurs ont revendiqué, entre autres, une plus grande part de travail, une observation plus rigide de la réglementation. Est-ce que ce sont là des indices d'un malaise plutôt circonscrit ou, au contraire, d'un malaise plus fondamental? Il ne faut pas oublier que, face aux revendications des camionneurs en vrac dits artisans, d'autres secteurs de la collectivité ou même de l'industrie désirent protéger leurs intérêts. Ceci nous amène d'ailleurs à cette commission parlementaire puisqu'il faut tenter de déterminer, au cours des prochains jours, la nature réelle des problèmes et la nature réelle des intérêts qui s'opposent.

En effet, si ces problèmes sont surtout conjoncturels, on peut supposer qu'une solution sera relativement facile à trouver. Au contraire, si les problèmes sont plutôt de nature structurelle et s'ils mettent en cause l'organisation même de l'industrie, toute solution sera beaucoup plus ardue.

II faudra également se demander si le secteur possède suffisamment de dynamisme, d'initiative et de ressources pour assurer son propre développement et résoudre à moyen terme ses problèmes par lui-même. Si ce n'est pas le cas, serait-il alors avisé que l'Etat protège de plus en plus les activités de camionnage en vrac et mette celles-ci à l'abri des aléas et des incertitudes de la concurrence et des fluctuations économiques?

La commission parlementaire devra examiner les problèmes actuels du secteur et envisager les solutions nouvelles à apporter. Dans ce but, la commission devra mettre à profit, d'une part, les efforts des camionneurs en vrac eux-mêmes, et d'autre part aussi, ceux du gouvernement, en tant que législateur et autorité réglementaire, et en tant qu'utilisateur important de services de transport en vrac. Dans ce sens, le ministre des Transports porte deux chapeaux, puisqu'il est effectivement responsable de la réglementation et qu'il est aussi en même temps un des principaux utilisateurs des services de l'industrie qu'il est chargé de régulariser.

Il faudra, de plus, examiner le marché du camionnage en vrac et évaluer l'état d'équilibre ou de déséquilibre entre l'offre, c'est-à-dire le nombre de camionneurs en vrac, et la demande, c'est-à-dire l'importance des travaux de transport en vrac disponible.

Ceci est primordial puisque l'équilibre du marché recèle invariablement les solutions les plus profondes et les plus durables à des problèmes d'ordre économique, comme ceux auxquels fait face présentement le camionnage en vrac. De ce point de vue, je n'ai pas à faire état de mes propres préférences, elles sont assez connues. Je suis partisan de laisser autant que possible les forces du marché trouver le juste équilibre entre les différents intervenants. Tant qu'il est possible de réduire au minimum la réglementation, je pense que c'est la voie que nous devons suivre.

Quoiqu'il en soit — je suppose que nous aurons les points de vue des intervenants et des membres de la commission à ce sujet — il n'en reste pas moins que, même s'il assure des conditions optimales de fonctionnement, cet équilibre du marché libre ne s'établit jamais sans peine, car il nécessite, entre autres, une concurrence plus intense et une variation plus libre des taux de transport.

Lorsqu'il faut pallier de manière artificielle le déséquilibre de marché qui existe peut-être — trop grand nombre de permis, pénurie chronique de travaux, etc. — il est loin d'être certain que ce secteur de transport puisse finalement trouver une solution satisfaisante à ses problèmes. Aussi, puisque les camionneurs eux-mêmes ont la principale responsabilité de la bonne santé et du bon fonctionnement de leur secteur d'activité, devront-ils démontrer leur bonne administration, ainsi que le bon usage des permis qui leur ont été accordés.

L'Etat possède également une responsabilité importante, dans la mesure où c'est lui qui réglemente cette activité. A ce titre, il y aura lieu de se demander si la réglementation existante est adéquate et si son application est efficace et équitable. Devrons-nous, suite à l'expérience des sept dernières années, poursuivre dans la voie de la réglementation où des modifications réglementaires doivent constamment être apportées pour solutionner les problèmes que l'ancienne réglementation n'a pas su résoudre ou devrons-nous plutôt accorder, comme je viens de le dire, aux forces du marché un rôle plus important dans la régulation des activités de l'industrie du transport en vrac?

D'autres Etats, dont l'Ontario, ont choisi cette dernière option et ne semblent pas connaître des problèmes aussi aigus que ceux constatés au Québec. La structure en vigueur en Ontario ne comprend aucune fixation de taux par la Commission des transports, et encore moins des secteurs réservés en faveur de certains transporteurs.

Les seules interventions réglementaires touchant le marché sont la fixation d'un taux minimum applicable par le ministère des Transports et à ses propres contrats et le contrôle de l'offre en zone rurale seulement par le biais des plaques d'immatriculation.

L'Etat joue, par ailleurs, un rôle supplémentaire en tant que client du camionnage. Les travaux gouvernementaux ne représentent toutefois qu'une proportion relativement faible du volume d'affaires transigées par les camionneurs en vrac, de sorte que, même s'il est important que l'Etat assure à ces derniers une proportion significative de ses travaux, la seule intervention gouvernementale ne pourra pas assurer la survie de tous les camionneurs, ni résoudre tous les problèmes de l'industrie si les déséquilibres fondamentaux dont j'ai parlé tantôt et dont parlait la commission Lippé en 1965 sont toujours présents.

En effet, les besoins totaux de transport de marchandises en vrac du ministère des Transports représentent moins de 30% et probablement même moins de 25% — je dirais entre 20% et 25% — des besoins de l'ensemble de la capacité de transport offerte par les détenteurs de permis de vrac. Je pense qu'il est important que nous ayons ces chiffres en tête. Quand on regarde l'ensemble de l'offre de transport en vrac faite par les détenteurs actuels de permis, le ministère des Transports lui-même et les ministères qui collaborent avec lui comme le ministère de l'Energie et des Ressources, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, se rendent compte que nous ne pouvons satisfaire qu'environ 20% à 25% de l'offre qui existe actuellement, compte tenu du nombre de permis dans le domaine du camionnage en vrac. Nous sommes donc un client important, sans doute le client le plus important, mais comme on le voit, un client quand même fortement minoritaire.

Ces besoins du ministère sont déjà assumés par les détenteurs de permis VR dans une proportion de 70%. Autrement dit, tous nos besoins de transport de matières en vrac, 70% de tous ces besoins sont actuellement remplis par des camionneurs artisans.

Considérant que seulement 11% du coût des contrats de voirie sont effectivement consacrés au transport en vrac, il faudrait donc augmenter considérablement le budget du MTQ — ministère des Transports — consacré à la voirie pour résoudre le problème du surplus de l'offre de camions, ce qui, d'ailleurs, ne correspond pas aux besoins du Québec et, donc, aux priorités gouvernementales.

Je vais répéter rapidement ces chiffres. Quand nous avons un budget de voirie, pour chaque dollar consacré à ce budget de voirie, environ $0.10 ou $0.12 de ce dollar sont consacrés à du transport de matières en vrac. Et de ces 12%, 70% vont déjà aux camionneurs artisans.

En conclusion, il apparaît que cette commission parlementaire aura à se pencher sur des problèmes extrêmement variés. Je souhaite donc qu'elle apporte un éclairage suffisant sur ceux-ci et qu'elle permette de dégager des solutions adéquates qui pourront subséquemment être appliquées en respectant à la fois les besoins des camionneurs et les intérêts collectifs.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, mes premiers mots sont, bien entendu, pour souhaiter la bienvenue à tous ceux qui voudront bien venir éclairer les membres de cette commission sur les problèmes que nous connaissons dans le domaine du transport des marchandises et plus particulièrement du transport en vrac. (10 h 30)

Quant à nous, de l'Opposition officielle, il serait inutile de rappeler que le Parti libéral du Québec a été le premier à démontrer d'une façon tangible son intérêt à l'industrie du transport et aux camionneurs, en étant le premier à adopter une réglementation qui a subi, au cours des dernières années, plusieurs modifications, et qui est maintenant remise en cause par certains intervenants.

C'est d'ailleurs à mon collègue de Charlevoix, qui nous accompagne ce matin, le député de Charlevoix, M. Mailloux, que l'on doit le premier règlement en matière de transport en vrac. Le ministre rappelait tantôt que, jusqu'à il n'y a pas tellement longtemps, était camionneur celui qui avait ses entrées chez le parti au pouvoir.

Le député de Charlevoix me rappelle que c'est sous le ministère de M. Pinard que la première réglementation a été adoptée, justement avec le concours très précieux du ministre d'Etat et adjoint parlementaire, le député de Charlevoix. Quoi qu'il en soit, quant à moi, je reconnais au député de Charlevoix le mérite d'avoir innové dans le domaine et je suis certain que plusieurs camionneurs partagent mon point de vue.

M. le Président, la réglementation sur le camionnage ne répond certes pas à toutes les attentes. On avait établi, en 1973, que les objectifs de cette réglementation étaient de rentabiliser l'industrie du camionnage en vrac, d'améliorer les conditions de travail des camionneurs artisans et des entrepreneurs, de mettre fin au malaise social qui existait dans le secteur et d'améliorer le service à la clientèle. Je disais tantôt que, plus souvent qu'autrement, les camionneurs qui faisaient le travail dont la plus grande partie relève du gouvernement, surtout du ministère des Transports, étaient susceptibles de connaître la faillite au rythme des changements de gouvernement. C'est à cela qu'a voulu mettre fin la réglementation du transport en vrac au Québec.

Il y a eu, depuis 1973, quelque 17 amendements qui ont été apportés à cette réglementation qui visait trois objectifs principaux: premièrement, limiter l'entrée dans l'industrie par le biais de l'émission de permis; deuxièmement, distribuer le travail par le mécanisme des postes d'affectation et, troisièmement, faire disparaître la guerre des prix par la fixation de tarifs. On doit admettre qu'on a réussi plus ou moins bien à atteindre chacun de ces trois objectifs. Chose certaine, nous demeurons convaincus que nous avons mieux atteint ces objectifs avec la réglementation que nous n'aurions même pu rêver le faire sans aucune réglementation sous l'ancien régime de laisser-faire.

On remet maintenant cette réglementation en cause. Le ministre parle même de la possibilité de déréglementer. Il nous semble, M. le Président, qu'avant d'abandonner une réglementation on devrait tout au moins en faire un essai loyal et valable, ce qui, à notre avis, n'a pas été fait depuis l'accession du Parti québécois au pouvoir en 1976. J'emploierai la comparaison suivante, parce que dans le domaine de la sécurité routière on sait qu'on n'a pas tellement bien réussi non plus au Québec, ni sous l'ancien gouvernement, ni, surtout, sous le présent gouvernement. Pourtant, si, en 1979, le nombre de personnes tuées et le nombre de personnes blessées dans des accidents de la route a atteint des sommets encore inédits dans toute notre histoire, la solution que préconise le ministre actuel des Transports n'est pas de déréglementer et d'abolir la réglementation par rapport à la sécurité routière. Au contraire, il nous parle même d'augmenter les amendes de $10 qu'elles sont pour le non-respect du port obligatoire de la ceinture à $100, comme si cela avait quelque effet que ce soit sur la motivation qu'ont les policiers de faire respecter la loi.

En fait, nous l'avons dit, l'augmentation de cette amende aurait exactement l'effet contraire. Les policiers qui n'arrêtent pas ceux qui contreviennent à cette mesure — je sais que ça vous fatigue, mais on va y revenir — interviendraient encore moins souvent si l'amende était plus élevée.

Ici, dans le camionnage en vrac, on voulait faire croire à la population et, ce qui est encore pire, aux premiers intéressés, c'est-à-dire les camionneurs — que, possiblement, c'est la réglementation qui est mauvaise, alors qu'on n'a aucune volonté et qu'on n'en a eu aucune depuis quatre ans de la faire respecter.

On a même signé en 1977, et je suis surpris de constater que le ministre n'en parle pas du tout, il faut se rappeler qu'en 1977, le ministre des Transports d'alors, Lucien "Stop" Lessard a signé un protocole d'entente avec l'Association nationale des camionneurs artisans. On en a copie de cette entente. Or, on a presque l'impression — parce qu'il faut se replacer dans le contexte où il y avait quelque 2000 camionneurs qui manifestaient devant le parlement — qu'il s'est passé une ou deux choses en juin 1977. On voulait mettre fin à cette manifestation coûte que coûte au ministère des Transports et on a agi soit inconsciemment en signant un protocole d'entente sans savoir ce qu'on signait — on y reviendra souvent, M. le Président, au cours de cette commission parlementaire, à ce protocole d'entente — ou bien on savait trop bien ce qu'on signait, mais on savait déjà qu'on n'aurait aucune volonté de le faire appliquer et, pire, qu'on instituerait des moyens de contourner certaines des clauses de ce protocole d'entente.

Il ne faut donc pas se surprendre si, aujourd'hui, les camionneurs revendiquent et demandent que soit appliquée, que soit respectée l'entente qui est intervenue en 1977. On peut se demander pourquoi des manifestations ont eu lieu en 1980 et pourquoi il n'y en a pas eu en 1974 ou 1975. Je pense que c'est dans la nature du camionneur, surtout celui qui est artisan, qui gagne sa vie de par son métier, qui est probablement le symbole le plus clair de ce qu'est la petite entreprise, l'initiative privée de l'individu, l'initiative individuelle.

Quand les camionneurs ont de l'ouvrage à faire, ils ne perdent pas leur temps à manifester devant le parlement, ni à réclamer ou à revendiquer du gouvernement. Ils travaillent, ils font vivre leur famille honorablement et c'est ce que les camionneurs ont toujours voulu. Mais, forcément, lorsque dans une conjoncture quelconque, il n'y a plus de travail, lorsqu'un gouvernement, dans ses discours parlent du gel des permis, ne trouve pas le moyen de les geler dans les faits, lorsque — en fin de compte, c'est là le fond du problème, M. le Président — le nombre de camionneurs est trop grand pour le travail à faire, c'est bien sûr que ceux parmi les camionneurs qui ne trouvent pas de travail revendiquent du gouvernement des façons d'obtenir au moins un minimum de revenus pour permettre à leur famille de subsister.

Encore là, M. le Président, il faut souligner — ce n'est pas le ministre des Transports qui va le faire — que depuis l'avènement du Parti québécois au pouvoir en 1976, les sommes consacrées à la construction de routes, que ce soient les autoroutes, les routes régionales et même les routes locales — parce que c'est là qu'est le principal volume d'affaires, de travail pour les camionneurs, qu'ils soient artisans ou entrepreneurs — ont diminué et de façon constante, très régulière et très significative. Dans le cas des autoroutes, c'est de 31,7% que les montants consacrés à leur construction ont diminué, depuis quatre ans, et ce n'est sûrement pas parce que les coûts de construction, eux, ont diminué. Au contraire, ils ont continué d'augmenter sous la poussée inflationniste. Mais, malgré l'augmentation des coûts, 31% de moins ont été consacrés à la construction d'autoroutes. Il ne faut pas se surprendre donc qu'il y ait moins de travaux de voirie en cours dans la province de Québec et qu'il y ait donc, par conséquent, moins de travail pour les camionneurs.

Dans le cas de la construction de routes dites régionales, c'est de 25% que les sommes consacrées par le ministère des Transports ont diminué depuis quatre ans. Donc, M. le Président, le problème fondamental que nous devons étudier et sur lequel nous invitons les participants à cette commission parlementaire à se pencher, ce problème fondamental, c'est simplement qu'il y a un trop grand nombre de camionneurs pour effectuer un trop petit volume de travail et en déréglementant tout simplement, est-ce qu'on atteindrait l'objectif de justice sociale pour ceux qui, parmi notre société, ont décidé de gagner leur vie dans le camionnage?

Quant à nous, M. le Président, nous abordons cette commission parlementaire avec l'esprit le plus complètement ouvert. S'il devait s'avérer, à la suite des auditions que nous aurons en commission parlementaire, que nous devions constater l'échec de certaines parties de la réglementation dont nous avons été les auteurs, nous le reconnaîtrons volontiers, M. le Président. Mais il me semble qu'avant de parler de déréglementation, qu'avant de parler et de placer tous les torts sur une association quelconque on doive étudier le problème de la façon la plus ouverte possible.

Je dirai à cet égard que je trouve pour le moins curieux — c'est d'ailleurs absolument inusité, à ma connaissance, en huit ans de parlementarisme, c'est la première fois que je vois cela — que le ministre publie, avant même le début des travaux d'une commission parlementaire destinée à entendre un certain nombre d'intéressés, une réponse aux demandes et revendications d'une association qu'on entendra aujourd'hui. Il me semble que si on veut réellement savoir ce que les intervenants, les intéressés pensent de la situation, proposent comme solution, on devrait au moins avoir, sinon la décence, tout au moins la courtoisie de les entendre avant de réfuter un à un les points de leur argumentation dans un texte que personne n'a encore eu le temps malheureusement d'étudier à fond, où il est relevé certaines anomalies.

C'est d'ailleurs ce qui a fait craindre le pire à l'Association nationale des camionneurs artisans qui demandait au ministre des Transports, dans une lettre récente, de faire en sorte que lors de la présentation des mémoires par les divers intéressés, le choix des intervenants ne soit pas laissé strictement au ministère, l'association craignant qu'on ne fasse comparaître dans cette première journée que les camionneurs artisans et leurs représentants pour ensuite noyer leurs témoignages dans ceux qui suivront au cours des deux derniers jours par d'autres associations, soit d'entrepreneurs ou de transporteurs. (10 h 45)

II me semble que, le ministre ne s'étant pas rendu à cette demande fort légitime de l'association, on pourrait, au tout début de nos travaux ce

matin — j'en fais la suggestion à la commission — assurer l'Association nationale des camionneurs artisans, puisque c'est celle qui représente le plus grand nombre de camionneurs artisans, qui sont les premiers intéressés par les travaux de cette commission, que si cela s'avère utile ou nécessaire, on pourrait à nouveau l'entendre lors de la troisième journée, c'est-à-dire jeudi de cette semaine à cette commission, même si elle aura comparu au troisième rang aujourd'hui.

En terminant, je répète que nous, de l'Opposition officielle, abordons cette commission avec la plus grande ouverture d'esprit possible face aux suggestions qui nous viendront de la part de nos invités. J'avoue, cependant, très franchement que nous aurons un peu plus de méfiance à l'égard des propos du ministre des Transports, compte tenu de sa présentation, à moins qu'il ne fasse amende honorable. Dans sa présentation, nulle référence n'a été faite à ce protocole d'entente signé par son prédécesseur en juin 1977. A ma connaissance et à la connaissance de tous, c'est de cela qu'il s'agit pour les camionneurs, non seulement les camionneurs artisans, mais l'ensemble des camionneurs qui font le transport des marchandises. C'est à cela qu'on devait s'adresser. Quant à nous, nous verrons, par nos questions à nos invités, à faire en sorte que le ministre ne se défile pas indéfiniment devant les questions fondamentales qui intéressent cette commission. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, M. le Président. M. le ministre, mes collègues, en plus de saluer les membres de la commission, bien sûr, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux différents intervenants du monde du transport en vrac. Je peux vous assurer, M. le Président, de mon entière collaboration, au cours de ces travaux que je veux, à tout le moins, constructifs pour tenter d'apporter la lumière et, je l'espère, des éléments de solution au problème du transport en vrac.

Il est inutile de vous rappeler que ce secteur a connu des moments plus que mouvementés depuis quelques années: règlements, ententes, amendements, manifestations, le tout accompagné d'enquêtes et de commissions parlementaires, à commencer par le rapport Lippé, qui reste encore aujourd'hui très au fait des problèmes de ce secteur, même s'il a été complété il y a quinze ans maintenant. C'est donc dire que bien des années ont passé, beaucoup de mesures ont été prises, mais les résultats, en fin de compte, ne sont pas très reluisants.

Il est très facile de s'en prendre aux différents gouvernements qui, tout en apportant des solutions ou en tentant d'en apporter, ont été incapables de faire respecter, par les parties concernées, les ententes et règlements intervenus. On peut avoir certaines réserves à l'endroit d'un gou- vernement lorsqu'il devient, en quelque sorte, juge et partie, lorsqu'il dicte des règlements et signe des ententes d'un côté et de l'autre, lorsqu'il essaie de faire faire des travaux à moindre coût en contournant, parfois, ses propres règlements et les ententes qu'il a lui-même signées. Je pense que c'est là le fond du problème.

Il est facile également ou il serait facile de lancer la pierre à l'adversaire, mais beaucoup plus difficile d'admettre que de chaque côté, chaque partie a probablement ses fautes, d'après ce qu'on nous dit. Chaque partie aurait, semble-t-il, selon les mémoires qui nous seront présentés, abusé de la situation pour en tirer le meilleur parti possible. D'autre part, il est vrai que le secteur du transport en vrac est très complexe et ses problèmes, nombreux. De fait, la commission parlementaire est l'aboutissement d'un malaise profond, mais qu'on pourrait traduire par une volonté de redéfinir les règles du jeu pour que chacun puisse retrouver sa juste part du gâteau.

Tous admettent volontiers qu'il y a un surplus considérable de camions. Je pense que là-dessus, il n'y a pas d'équivoque possible; on s'entend, il y a un surplus de camions. D'ailleurs, le rapport Lippé le mentionnait, il y a déjà quinze ans. Le rapport Lippé mentionnait aussi que "nous faisons face à une situation économique difficile, que nous avons subi un hiver très doux, avec les conséquences que cela a entraînées". Il est assez particulier de noter qu'en lisant ce rapport, aujourd'hui, on se demande si l'auteur ne fait pas allusion à l'hiver dernier. Ce rapport a été, comme je le disais tout à l'heure, rédigé il y a quinze ans.

Par ailleurs, on sait que dans le domaine du transport en vrac, comme dans tous les autres domaines, personne ne veut mourir, chacun emploie des moyens et revendique des solutions qui ont l'avantage de le favoriser, lui, et c'est normal.

Par contre, lorsque je rencontre, à mon bureau, des hommes qui n'ont, comme seul gagne-pain, que leur camion pour faire vivre une famille et faire honneur à leurs obligations, lorsque je rencontre des hommes qui ont du mal à se trouver du travail dans leur région — bien souvent ceux qui se sont présentés chez moi sont des hommes qui font ce métier depuis au-delà d'une vingtaine d'années et qui ne font que ce métier — je ne vous cache pas que je suis tenté de favoriser ce genre de camionneurs et tous ceux qui sont dans une situation similaire. Il ne s'agit pas pour autant de favoriser indûment une catégorie de travailleurs et d'en brimer une autre. Je pense que ce serait déplacer le problème et non le régler. Il faut être capable, je pense, d'apporter des solutions pour obtenir justice et équité pour tous et je suis confiant qu'on pourra y arriver à l'intérieur des travaux de cette commission ou à la suite des travaux de cette commission. Peut-être que certains diront que je rêve en couleur, M. le Président, mais j'espère, en tout cas, pour l'industrie du camionnage en vrac ou du transport en vrac et pour la population en général que ces gens-là se trompent.

Essentiellement, cette deuxième crise que connaît le gouvernement actuel depuis qu'il est au pouvoir ne repose pas seulement sur un problème de stuctures, mais aussi sur un manque de travail, un partage de l'assiette financière disponible et sur l'application plus stricte des règlements édictés par l'Etat, mais non suivis dans bien des cas par l'Etat lui-même. L'Etat ne suit même pas les règlements qu'il a lui-même édictés. Je donne un exemple — et on y reviendra au cours des travaux de cette commission — la fameuse clause 75-25, M. le Président, est interprétée à peu près par tout le monde de façon différente, pour autant que ça fait son affaire. Il faudrait spécifier davantage. Si cette entente peut être interprétée de différentes façons, c'est parce qu'elle n'est pas satisfaisante. Il faudra aller plus à fond au niveau de la définition des règles du jeu et, si les règles sont vraiment définies, que tout le monde respecte l'entente — ça, c'est une parmi les douze — et surtout le gouvernement lui-même devrait respecter les ententes qu'il a lui-même signées.

Dans le rapport que le ministre nous a remis ce matin et dont a fait mention le député de Gatineau, rapport que j'ai parcouru très très rapidement, justement, au niveau de ces ententes qui ont été signées, le ministre semble nous dire que tous les points ont été respectés. Bien, il faudra vraiment y revenir au cours des travaux de cette commission parce que, justement, je pense que la raison première pour laquelle nous sommes ici ce matin, c'est que certaines personnes nous disent que ces fameux règlements, cette fameuse entente n'a pas été respectée. Le ministre, ce matin, dans un beau document qu'il nous remet, nous mentionne les douze points de l'entente et nous dit à chaque paragraphe que l'entente a été respectée. Le ministre nous répond par un oui, M. le Président; il écrit oui, oui, oui et on ne voit pas de non. Je ne sais pas si c'est une déformation professionnelle, il aurait pu écrire "entente respectée", mais, en tout cas, on y reviendra tout à l'heure.

J'espère, M. le Président, qu'au cours des prochains jours nous pourrons identifier les vrais problèmes, même si nous en connaissons déjà plusieurs, et les causes profondes du malaise qui sévit actuellement au sein du camionnage en vrac. Est-ce vraiment un problème de structures, un manque de travail ou encore serait-ce une lutte de pouvoir comme certains le prétendent? Je pense qu'il va falloir en parler aussi durant les travaux de cette commission.

Nous aurons dans ces mémoires, dont nous avons pu prendre connaissance il y a quelques jours, des affirmations aussi contradictoires les unes que les autres. Il y a une chose qui est sûre: les deux peuvent avoir raison, mais certainement pas les deux en même temps. Je souhaite que cette commission nous permette de savoir qui dit vrai. Est-ce vrai que ces ententes ont été respectées, comme nous le dit le ministre dans le document qu'il nous remet ce matin, ou est-ce vrai que ces ententes n'ont pas été respectées? Il y a certainement quelqu'un qui a raison, mais pas les deux en même temps, M. le Président, et j'aimerais, d'ici à la fin des travaux, qu'on puisse savoir qui dit vrai.

On dit souvent, M. le Président, que, pour être objectif, il ne faut pas avoir de préjugés, qu'ils soient favorables ou défavorables. Quant à moi, c'est empreint de cet esprit d'objectivité que je voudrais participer aux travaux de cette commission. Nous avons plusieurs questions à formuler, à la suite des mémoires qui nous seront déposés. J'en profite également, M. le Président, pour appuyer le point qu'a soulevé le député de Gatineau, le premier intervenant de l'Opposition, à savoir que, compte tenu de l'ordre dans lequel nous entendrons ces mémoires, on puisse, au cours de la dernière journée, prendre quelques minutes pour permettre aux premiers intervenants de venir nous dire, s'ils le jugent opportun, ce qu'ils pensent des propos qui ont été tenus à cette commission.

Au cours d'un procès, M. le Président — parce qu'une commission parlementaire comme on fait ce matin, c'est pour faire la lumière, alors je vois cela un peu comme un procès — il y a des accusés parfois, et il faudrait permettre aux accusés de pouvoir se faire entendre, s'ils le désirent. J'aimerais que le ministre, qui fait signe que oui, puisse répondre favorablement à cette demande, que ce soit dix minutes, une demi-heure, ou une demi-journée, quant à moi, je n'ai pas d'objection, mais, compte tenu de l'ordre des mémoires, j'accepterais qu'on permette à ces gens de revenir à la table, si les membres de la commission ou ces personnes le jugent opportun.

M. le Président, quant à moi, je suis prêt à entendre les mémoires et j'aurai des questions à formuler en temps et lieu.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. Denis de Belleval

M. de Belleval: Rapidement, justement pour permettre d'entendre le premier mémoire, j'accepte volontiers les suggestions des députés de Bellechasse et de Gatineau en ce qui concerne à la fin des travaux les représentations éventuelles de l'Association nationale des camionneurs artisans.

J'accepte aussi volontiers le défi du député de Gatineau à savoir qu'il faut que le ministre aussi soit prêt à fournir des réponses claires et franches aux questions qui seront posées. Là-dessus, je pense que c'est un défi que nous devrions tous cependant relever.

Rapidement, avant de donner la parole aux gens de l'Association des camionneurs artisans, je voudrais quand même rectifier ou, en tout cas, éclaircir le plus fortement possible ma position en ce qui concerne un premier point qu'a soulevé le député de Gatineau à savoir que j'aurais déjà pris position en faveur d'une des réglementations de ce secteur de l'activité économique. Il n'en est pas question dans mon esprit du tout. Je pense,

comme je l'ai dit, que j'ai des préjugés favorables en faveur du système de libre entreprise, en général.

Là-dessus, je pensais que, compte tenu du discours actuel du chef de l'Opposition, j'aurais eu des félicitations de la part du député de Gatineau pour cette profession de foi, mais je me rends compte que, effectivement, souvent l'Opposition officielle au Québec tient un langage d'une certaine façon, mais, quand vient le temps de passer aux actes, elle en tient un autre. Ce parti, qui est soi-disant en faveur de l'initiative individuelle et qui nous blâme, nous, d'être en faveur d'une espèce de collectivisme dans la société, quand vient le temps d'étudier des problèmes concrets, se révèle cependant étrangement collectiviste.

On aura le temps, je suppose, durant les prochaines semaines, d'éclaircir ce discours de l'Opposition officielle, mais on en voit un bon exemple dans la déclaration d'ouverture du député de Gatineau.

Pour prendre une autre analogie, puisque vous avez parlé d'un autre secteur d'activité qui me concerne, celui de la sécurité routière, cela me fait penser au discours que vous tenez actuellement sur le zonage agricole: vous dites que vous êtes en principe favorables au zonage agricole, mais, quand vient le temps d'appliquer ce zonage, il faudrait le confier aux municipalités. C'est comme si vous disiez que vous êtes en faveur de la bonne santé des poulets, mais que vous confiiez le poulailler au colonel Sanders. On le voit aussi, ce matin, dans le cas du dossier qui nous intéresse. Vous êtes en faveur de la libre entreprise, mais quand vient le temps de parler d'essayer parce que c'est mon but, de simplifier la réglementation et de respecter le plus possible les lois du marché, on se rend compte que, de toute évidence, la détermination de l'Opposition n'est pas aussi forte. (11 heures)

Donc, je vais être clair là-dessus, il n'est pas question de revenir au statu quo ante; je pense que ce serait impossible. Mais il est quand même important que nous examinions toutes les hypothèses qui sont devant nous et que nous regardions comment la réglementation actuelle pourrait être simplifiée le plus possible, et en ayant toujours comme guide, entre autres, ces forces fondamentales qui réglementent toute l'activité économique dans nos sociétés libérales, démocratiques et industrialisées, libres, à savoir les lois du marché.

Je n'ai pas voulu, dans le document que je rends public ce matin et que je distribue à tous les participants, fournir une réponse d'avance aux revendications, entres autres, de l'Association des camionneurs artisans. Si vous lisez ce document, que vous n'avez pas eu le temps de lire encore — par conséquent, je vous demanderais de ne pas me faire de procès d'intention ou de déjà décrire ce document comme une réponse, puisque vous n'avez pas eu le temps de le lire, je vous l'ai donné il y a à peine quelques minutes — quand vous l'aurez lu, vous verrez qu'il ne s'agit pas d'une réponse comme telle aux revendications qu'on nous fait, mais tout simplement un exposé sur l'état actuel de la réglementation et sur un certain nombre de statistiques vitales qui donnent le portrait économique de cette industrie.

Finalement, en ce qui concerne quelques affirmations, cette fois grossièrement fausses, que le député de Gatineau a faites, je voudrais apporter les correctifs; j'ai les chiffres devant moi, les journalistes pourront les prendre et les vérifier, c'est dans les comptes publics. En ce qui concerne le budget du ministère des Transports, en 1976-1977, le budget du ministère des Transports qui était consacré aux dépenses d'entretien et de construction du réseau routier était de $755 000 000 et il est maintenant de $765 000 000. Donc, cela ne correspond pas aux diminutions dont le député a parlé tout à l'heure.

M. Gratton: Question de règlement.

M. de Belleval: Est-ce que je pourrais terminer?

M. Gratton: Question de règlement!

M. de Belleval: Est-ce qu'il y a des questions de règlement possibles ici?

Le Président (M. Jolivet): Cela dépend de ce que vous voulez dire.

M. Gratton: Imaginez-vous qu'il y a des questions de règlement partout, surtout lorsqu'on fausse la vérité comme le fait le ministre actuellement. Ce que j'ai dit — je peux lui fournir les chiffres — c'est que dans la construction d'autoroutes — je n'ai pas parlé de l'entretien des routes, mais de la construction d'autoroutes — il y a eu une diminution de 31,7% entre 1976-1977 et 1980-1981, et je mets le ministre au défi de me prouver le contraire. Je lui ferai grâce des chiffres, mais de $204 000 000 à $139 000 000, c'est bien 31,7%.

M. de Belleval: Vous avez cité aussi d'autres chiffres et, quoiqu'il en soit, l'impression que vous vouliez laisser était que, effectivement, les marchés que nous donnons en matière de transport en vrac avaient diminué puisque les travaux de construction routière, notamment, comme vous venez de le dire, les autoroutes, avaient diminué. Je veux rectifier cette impression et cette affirmation puisqu'il se peut fort bien que les travaux de construction d'autoroutes aient diminué comme tels; il faut savoir aussi, d'ailleurs, que les constructions d'autoroutes ne sont pas ce qui, en proportion, donne le plus de travail aux transporteurs en vrac, comme vous le savez, puisque dans le cas de la construction d'autoroutes une grande partie du budget va à des structures de béton, donc non pas au transport de matières en vrac.

Je termine en disant que ce qui est important, je pense, c'est le total; comme le dirait Steinberg, c'est le total qui compte; ce n'est pas simplement les travaux d'autoroute ou les travaux régionaux,

comme vous l'avez mentionné, c'est l'ensemble des marchés. Les marchés sont passés de $755 000 000 à $765 000 000. Plus précisément en ce qui concerne le transport en vrac, en 1976-1977, les dépenses que nous avons faites pour le transport des matières en vrac ont été de $42 800 000 et, en 1979-1980, de $58 500 000.

N'oubliez pas, comme je l'ai dit, que, de toute façon, notre part du marché est fort minoritaire, entre 20% et 25%, et qu'il faudrait augmenter le budget du ministère des Transports dans des proportions considérables pour pouvoir changer l'équilibre actuel.

Finalement, en ce qui concerne le protocole d'entente, vous avez dit que c'était signé par le ministre Lessard et le président de l'ANCAl le 23 juin 1977. J'ai effectivement mis dans ce document un tableau explicatif de chacun des points de ce protocole d'entente. Et dans la colonne "remarques", il ne s'agissait pas seulement d'un oui ou d'un non, M. le député de Bellechasse, j'ai indiqué sous quelle forme cette réponse favorable avait été donnée. Mais je suis d'accord avec vous pour dire que nous aurons le loisir de revenir sur chacun de ces points à l'occasion et que nous pourrons examiner le bien-fondé non pas simplement des oui et des non austères que j'aurais pu donner, mais des explications quand même circonstanciées qui sont fournies.

Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Pour l'ensemble des personnes ici présentes, je donne l'ordre des groupes qui doivent venir ici à l'avant.

En premier lieu, l'Association nationale des camionneurs artisans Inc; deuxièmement, le Poste d'affectation région 01 Inc; troisièmement, le Poste d'affectation de la région 02 Inc; quatrièmement, Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec; cinquièmement, Corporation poste d'affectation région 04 Inc; sixièmement, Poste d'affectation région 05 Inc; septièmement, Poste d'affectation région 06 Inc; huitièmement, Poste d'affectation région 09 Inc; neuvièmement, Poste d'affectation région 09 Inc; dixièmement, Poste d'affectation région 09 Inc, sous-poste de Sept-lles Inc; et onzièmement, Scierie des Outardes Enr. C'est l'ensemble des groupes que l'on doit entendre aujourd'hui.

Compte tenu du nombre de groupes, je pense qu'on devrait se fixer au moins un maximum de temps, en sachant que dans certains cas le minimum pourrait être celui des mémoires plus ou moins épais et des discussions sur l'ensemble du sujet si on y revient. Je pense qu'on devrait fixer une heure, comme temps alloué, en étant peut-être un peu souple — on verra en cours de route — par mémoire. Je dois aussi tenir compte qu'on a deux autres journées ou un total d'environ 30 mémoires qui doivent être entendus.

Le président de l'Association nationale des camionneurs artisans Inc, représenté par M. Gérard Dubé. J'aimerais que vous nous présentiez les membres qui vous accompagnent afin que vous puissiez commencer ensuite.

ANCAI

M. Dubé (Gérard): Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier l'honorable ministre des Transports, M. Denis de Belleval, et ses collègues de l'Assemblée nationale qui ont permis une commission parlementaire. Je voudrais remercier également l'Opposition officielle et M. Goulet, de l'Union Nationale. J'espère que cette commission parlementaire pourra faire la lumière sur le transport en vrac au Québec.

Pour présenter le mémoire de l'Association nationale des camionneurs artisans Inc, j'ai avec moi Me Bernard Piuze, Me Pierre Beaudet qui sont également procureurs de l'ANCAl, et M. Michelin Déchênes, technicien en transport au service de l'ANCAl.

Avec votre permission, Me Piuze pourrait procéder à la présentation du mémoire. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Allez!

M. Piuze (Bernard): Merci, M. le Président. M. le ministre, messieurs les membres de la commission. Je dois comprendre, M. le Président, que tout à l'heure vous avez accordé le droit à l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. de revenir la dernière journée. Evidemment, ce droit comporte aussi celui de répondre au document qui semble nous concerner puisqu'il est intitulé: Le marché du transport de marchandises en vrac au Québec et les demandes soumises par l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. Je n'ai pas lu le contenu mais je présume qu'on est concerné, d'après sa face même. On devrait peut-être le lire avant de pouvoir vous répondre.

Si vous me permettez maintenant, je vais faire lecture du mémoire de l'Association nationale des camionneurs artisans.

L'ANCAl est fière de pouvoir s'adresser aujourd'hui à ceux que les citoyens québécois ont élus démocratiquement.

C'est un plaisir pour l'ANCAl et ses membres de pouvoir enfin traiter des problèmes des transporteurs en vrac avec des gens qui peuvent et ont intérêt véritablement à trouver des solutions.

Depuis le 11 juin 1977, l'ANCAl demande une commission d'enquête ou une commission parlementaire afin de pouvoir cerner les problèmes et se mettre à la recherche des véritables solutions.

Ce mémoire remonte au rapport Lippé qui avait constaté, au cours des années 1960, des malaises profonds dans l'industrie du camionnage.

Dans la recherche de solutions sérieuses, nous nous devons d'abord de quantifier le volume de travail et d'identifier le transporteur en vrac.

Selon le rapport CEGIR, 50% du volume de transport des matières en vrac sont manoeuvres à la suite des réquisitions des différents ministères du gouvernement québécois et des entrepreneurs qui ont obtenu les contrats desdits ministères. De 25% à 30% viendraient des gouvernements municipaux qui, selon nous, sont subventionnés dans une grande partie par les gouvernements provincial et fédéral. Les derniers 20%, toujours suivant

le rapport CEGIR, représenteraient le transport en forêt et le marché domestique.

Si nous parlons de 10% pour le marché domestique, le transporteur en vrac est donc, dans 90% des cas, ni plus ni moins qu'un employé tel un menuisier, dont le coffre d'outils est très dispendieux. Il agit à chaque fois comme un employé soit du gouvernement, de ses entrepreneurs ou encore des municipalités. De toute manière, le transporteur en vrac n'est que dans une proportion de 10% de son temps le propriétaire d'une petite entreprise avec laquelle il fait son compte propre.

Pour bien identifier le titulaire de permis de transport en vrac, nous pouvons dire immédiatement que 80% de ces transporteurs possèdent un camion et vivent presque exclusivement de ce transport. 15% des titulaires de permis sont propriétaires ou actionnaires majoritaires d'entreprises d'excavation, d'asphalte ou de construction de routes. Ils possèdent généralement plus d'un camion muni d'un permis de vrac et souvent possèdent des camions sans permis pour faire leur compte propre. 5% des transporteurs sont constitués par des garagistes, cultivateurs et même d'un ' avocat, en somme, de gens pour qui le camionnage en vrac est un à-côté.

Le transporteur en vrac a presque toutes les caractéristiques d'un salarié à l'oeuvre sur un chantier de construction. Il doit changer d'employeur fréquemment, son emploi est, en pratique, saisonnier et il est à la merci des règles économiques de la construction.

L'enquête Lippé a souligné explicitement ces similitudes entre un salarié et le transporteur en vrac faisant partie des 80%.

Cependant, le transporteur en vrac ne bénéficie pas de convention collective, ni de bénéfices maginaux, comme l'assurance-chômage qui est à la disposition du salarié. Le salarié de la construction est protégé contre l'intrusion dans son secteur.

Un comité paritaire et l'Office de la construction protègent jalousement le secteur avec des moyens efficaces que le législateur a mis à sa disposition.

Maintenant que nous avons quantifié le volume de travail et caractérisé le transporteur en vrac, nous nous devons d'identifier immédiatement les problèmes aigus que nous retrouvons pour la plupart depuis 1960.

Au cours de l'année 1965, l'enquête faite par MM. René Lippé, G.-E. Legault et Jacques Pari-zeau décelait clairement les nombreux problèmes du camionnage en vrac.

Quinze ans après cette enquête, les problèmes de cette époque se retrouvent aujourd'hui avec la même intensité.

L'enquête Lippé dénonça principalement les situations suivantes: 1. Le nombre de camions qui sont disponibles pour des travaux de chantier dans la province de Québec est beaucoup trop considérable. 2. En dépit des protections accordées aux camionneurs par le ministère de la Voirie, les entrepreneurs de travaux publics ont tendance à embaucher les camionneurs qui sont disponibles au moindre coût. 4.Lorsque des travaux s'annoncent dans un secteur donné, les gens achètent des camions et, lorsque les travaux se terminent, on retrouve un excédent considérable de camions. 5.Un nombre croissant de camionneurs est amené à travailler à peu près à n'importe quel prix, à la condition que ce prix lui permette au moins de payer la compagnie de finance. 6.La menace continuelle de la substitution qui provient des travaux publics et des compagnies de transport à chaque fois que les taux payés aux artisans sont supérieurs aux coûts d'opération d'un camion. 7.Seules les surenchères à la baisse des petits propriétaires de camions et la restriction quant à l'emploi des camions locaux empêchent que cette menace de substitution puisse s'exercer pleinement. 8.Le revenu du camionneur est trop bas, les taux ne sont pas respectés et le nombre de camions est beaucoup trop considérable dans un grand nombre de comtés. 9.Certains camionneurs, dans le but de suppléer à l'insuffisance des taux de transport, font des pressions sur les préposés aux balances pour faire majorer leurs factures.

Ces extraits du rapport Lippé confirment à peu près tous les malaises que les transporteurs en vrac rencontrent de nos jours. C'est le rapport Lippé qui a suggéré aussi que les clauses de protection soient régionales.

A ces situations dénoncées s'ajoute évidemment le transport sans permis, puisque dans le temps, les camionneurs en vrac n'avaient pas besoin de permis.

Depuis les années soixante-quatorze, un nouveau moyen est apparu pour déjouer les taux des règlements de transport, la pseudo-location, sujet sur lequel nous reviendrons plus tard.

A la suite du rapport Lippé, l'ordonnance 13, émise en vertu de la Loi du salaire minimum, a régi jusqu'au 27 juillet 1973 le camionneur en vrac, que l'on peut qualifier d'artisan. (11 h 15)

A cette époque, le camionneur en vrac artisan était celui qui possédait un camion et le camionnage en vrac était sa principale occupation.

Le 14 avril 1972 devint une date mémorable dans l'organisation du camionnage en vrac au Québec. Le gouvernement québécois et l'Association nationale des camionneurs artisans Incorporée signaient à cette époque une entente qui reconnaissait des secteurs de travail réservés aux camionneurs en vrac que l'on qualifiait d'artisans. De cette entente, on peut dégager les principes suivants: le gouvernement reconnaîtra légalement un groupe de camionneurs québécois comme organisme responsable et représentatif du métier. On accepta aussi le concept de la régionalisation pour la répartition équitable du travail. On protégera le détenteur de permis; cependant, on tentera de réduire le nombre de camions. On accepta

enfin de définir des secteurs de travail réservés, ainsi que l'arbitrage obligatoire des taux par la Commission des transports du Québec. A la suite de cette entente, du 27 juillet 1973 au 11 juin 1977, le camionneur en vrac artisan fut décrit comme le propriétaire d'un camion qu'il conduisait lui-même. Ce dernier pouvait alors faire partie des associations régionales des camionneurs artisans et bénéficier ainsi des secteurs du travail promis le 14 avril 1972 et respectés par le gouvernement à cette date.

L'entente du 14 avril 1972 a été respectée en principe par les parties en cause. Au cours de l'année 1974, sans discussion ou entente entre les parties, le ministre des Transports faisat disparaître le transport du béton bitumineux comme partie de la clause 75-25. Malgré l'entente Lippé et l'entente du 14 avril 1972 qui souhaitaient une limitation des permis, la Commission des transports du Québec, suivant nos propres observations et celles du rapport CEGIR, a émis d'une façon très libérale des attestations de permis et, par la suite, des permis. Tous ceux qui avaient un véhicule immatriculé avant le 14 avril 1972, peu importe qu'ils aient transporté des matières en vrac ou des matières appartenant au transport général, ou encore qui n'avaient qu'un véhicule commercial, se sont tous vu émettre par la Commission des transports des attestations de permis s'ils en avaient fait la demande. En somme, le seul critère retenu par la commission était de savoir si le requérant était propriétaire d'un véhicule au 14 avril 1972.

Les recommandations de l'enquête Lippé et l'esprit de l'entente du 14 avril 1972 venaient d'être sabotés. Sans douter un instant de l'intégrité des membres de la Commission des transports du Québec, nous nous interrogeons tous à savoir s'il y a eu une étude économique sérieuse effectuée par la Commission des transports avant l'émission des permis. Cependant, la Commission des transports du Québec qui avait le mandat de fixer les taux et tarifs a toujours entendu toutes les parties intéressées avant de fixer les taux. Ce genre d'arbitrage obligatoire a été accepté de toutes les parties, mais le respect des ordonnances de la commission a donné lieu à des problèmes majeurs. Cette période de 1973 à 1977 a permis au camionneur en vrac artisan de vivre d'une façon convenable sans cependant cesser de lutter farouchement pour la conservation de son secteur de travail réservé.

Les règlements concernant le camionnage en vrac de juin 1977 à janvier 1980. Constatant la prolifération des permis, le ministère des Transports imposa le gel des demandes de permis. Cependant, il était trop tard et le nombre considérable de camions sur le marché ne pouvait être réduit par cette mesure. Ce règlement avait pour but de permettre à ce trop grand nombre de permis émis de partager les secteurs de travail réservés avec ceux qui gagnaient leur vie dans le camionnage en vrac. Bien entendu, l'affluence des permis VR aux postes d'affectation a fait diminuer les revenus des camionneurs en vrac artisans et ce, d'une façon sensible. Cette nouvelle structure de poste d'affectation aurait pu être un succès si les réquisitions de services avaient toutes été dirigées vers le titulaire du permis de courtage. De plus, la compétition libérale que pouvaient faire les membres des postes d'affectation entre eux, d'une part, et au poste d'affectation, d'autre part, détruit la règle de la répartition équitable du travail. Selon le vice-président de CEGIR, "l'importance des investissements nécessaires pour mettre sur pied une entreprise de service public et l'obtention d'une rentabilité acceptable impliquent généralement l'absence de concurrence ou une diminution non négligeable de celle-ci."

A la suite de ce règlement, une entente est survenue entre l'ANCAl et le ministère des Transports. C'est l'entente de 1977. Au mois de juin 1977, les camionneurs artisans se sont réunis au parlement avec leurs camions. Ils étaient 2800. Trois jours de délibérations et de rencontres ont amené le gouvernement du Québec, par son ministre des Transports, l'honorable Lucien Lessard, et l'ANCAl, par son président, M. Gérard Dubé, à signer un document qui s'intitulait "Entente entre les parties."

A l'article 1 de cette entente, il était clairement dit que "les camionneurs regroupés au sein de postes d'affectation régionaux décidaient eux-mêmes de leur mode de regroupement au sein d'une association professionnelle provinciale". Or, dans le règlement actuellement en vigueur, nous retrouvons des structures locales, des structures régionales, mais aucune structure provinciale.

A l'article 2, 100% du transport en régie des différents ministères devait être confié aux postes d'affectation. Il est très facile pour un ministère d'abolir ses programmes en régie pour les convertir en programmes de subventions qui ne profitent souvent qu'aux multinationales, comme nous le verrons lorsque nous parlerons du programme du ministère de l'Energie et des Ressources.

A l'article 3 de ladite entente, le ministre des Transports a écrit et paraphé de sa main ce qui suit: "Que 75% du transport de matières en vrac sur les contrats donnés par le ministère des Transports soit effectué via le poste d'affectation".

Le texte est clair et parle par lui-même. Il n'est pas nécessaire de faire une recherche élaborée pour comprendre ce que le texte veut dire. L'ANCAl a signé une entente surtout à cause de cette disposition où l'Etat compensait par un volume additionnel de transport donné aux postes d'affectation l'augmentation du nombre de titulaires de permis qui profiteraient désormais des clauses. Ces clauses étaient réservées autrefois exclusivement aux camionneurs artisans qui n'avaient qu'un seul camion et le conduisaient eux-mêmes.

Avec la réglementation de 1977, 1600 titulaires de permis sont venus grossir les rangs des camionneurs en vrac artisans pour effectuer le transport dans la petite clause 75/25 au-dessus de la ligne d'infrastructure. Les 1600 nouveaux titulaires de permis représentaient au minimum 2500 camions additionnels.

A l'article 7, il avait été prévu que "dans le cas

de transport effectué en bas des taux, non seulement le transporteur serait pénalisé, mais aussi le requérant de services".

Lorsqu'un titulaire de permis transporte en bas des taux, c'est celui qui l'emploie qui l'a généralement incité à agir ainsi. Nous avons vu des cas où des transporteurs ont été poursuivis pour avoir effectué du transport en bas des taux. Nous n'avons eu connaissance d'aucun cas où un requérant de services qui a fait transporter quelqu'un en bas des taux a été poursuivi.

Au mois de mai 1978, certains amendements ont été apportés au règlement de juin 1977 pour corriger des lacunes techniques, tel le choix d'une première partie des compagnies et autres détails.

Cependant, les fonctionnaires du ministère des Transports, ayant constaté la force des associations des camionneurs artisans, ont inséré dans le règlement que la représentativité des camionneurs s'établirait par le nombre de camions en limitant cependant ce règlement aux détenteurs de permis de quatre camions et moins.

Encore une fois, les camionneurs en vrac artisans ont trouvé bien étrange cette manière de diminuer leur force.

Par contre, ayant, par cette formule de représentativité, donné un peu de vigueur aux associations de camionneurs entrepreneurs et aux coopératives, ce règlement consacrait en théorie le droit à l'association.

Pour vendre ce règlement, Me Pierre Angers, mandataire du gouvernement dans l'instauration des permis de postes d'affectation, a déclaré à plusieurs reprises aux camionneurs en vrac que l'augmentation des secteurs de travail promis par le gouvernement se transposerait par des augmentations de $120 000 000, et je retiens, c'est hors texte, les déclarations du ministre tout à l'heure où on parlait, en 1977, de $46 millions.

Le lendemain de l'instauration du dernier poste d'affectation prévu, Me Angers, l'homme de $120 millions, disparaissait du décor et était remplacé par M. Jean-Yves Dupéré. Ce dernier a pris comme politique de ne plus dialoguer et d'ignorer totalement les associations qui, pourtant venaient d'être reconnues. En plus de cette ignorance totale des associations, il conseilla au ministère de contrôler l'information et rapporta secrètement, ce qui n'est plus un secret, évidemment, puisqu'on vous le dit, que les autres ministères devant fournir, nous le supposons, les $120 000 000 de Me Angers, fermaient les portes aux titulaires de permis de postes d'affectation en manifestant leur hostilité et leur méfiance vis-à-vis des camionneurs en vrac.

C'était la période où M. Jean-Yves Dupéré offrait à des camionneurs, pour les épater, d'aller les reconduire, avec les camions du ministère, dans leur région. C'était l'époque où des fonctionnaires du ministère des Transports pensaient s'être débarrassés des associations de camionneurs aux revendications syndicales.

Après le départ de M. Dupéré et de son équipe, les négociations reprirent avec le "département" du transport terrestre des marchandises.

Ce règlement de décembre 1979 permettait aux associations sans but lucratif de détenir des permis de sous-postes autonomes avec un code d'éthique distinct. Cependant, malgré ce qui avait été convenu, la reconnaissance d'un permis de poste provincial était retirée et remplacée par une tutelle formelle de la Commission des transports du Québec qui peut même aller jusqu'à fixer des modalités d'élection ou refuser un budget.

Cette tutelle de la commission n'a jamais été demandée par qui que ce soit et cette ingérence dans les règles de régie interne est contraire aux droits des associations et à l'expression de la majorité. En dix ans d'expérience, les associations sans but lucratif des camionneurs artisans n'ont jamais demandé, M. le Président, un seul cent à l'Etat pour s'administrer.

En somme, ces derniers paragraphes représentent nos impressions sur la réglementation passée et présente. Nous passerons maintenant aux questions à débattre.

Il est essentiel que les camionneurs en vrac qui le désirent puissent se regrouper au sein d'associations sans but lucratif, comme ce droit est déjà donné à d'autres classes de la société. D'ailleurs, on retrouve dans le rapport Lippé la recommandation suivante, et je la cite: "Etant donné le très grand nombre de camionneurs indépendants au Québec, le regroupement de ces camionneurs dans diverses formes d'associations est devenu une nécessité absolue. Quelles que soient la valeur et l'efficacité des contrôles que le gouvernement peut mettre en place, ils ne pourront jamais remplacer les mécanismes de défense collective que les camionneurs indépendants peuvent et doivent établir".

Dès 1965, des hommes dont la compétence est plus qu'établie reconnaissent ce rôle essentiel que les associations peuvent et doivent jouer pour les petits transporteurs dans l'actuel règlement sur le camionnage en vrac. Les associations peuvent obtenir un permis de poste ou de sous-poste à certaines conditions. Il y aurait certainement lieu de spécifier clairement dans le règlement que, dès que la majorité des camionneurs qui désirent s'inscrire au poste ou au sous-poste de leur région en fait la preuve par son association, ladite association puisse obtenir le permis de poste ou de sous-poste dans les plus brefs délais.

C'est le principe de la représentation de la majorité qui est un des principe de base d'une saine démocratie et qu'on applique dans le droit du travail. Les groupes minoritaires, dans notre système démocratique, peuvent jouer deux rôles: l'un qui est positif et l'autre qui est négatif. N'est-ce pas, M. le Président, positif que de collaborer avec la majorité pour s'assurer de structures et de services adéquats à l'industrie dans laquelle on "opère"?

D'autre part, n'est-ce pas négatif d'être à l'extérieur des structures de la majorité et de ne trouver que des critiques destructives sans jamais apporter rien de constructif? Il est évidemment beaucoup plus facile de critiquer les actes de ceux qui en posent que d'en poser soi-même. Il y aurait

donc lieu que le règlement sur le camionnage en vrac consacre, une fois pour toutes, le principe que l'association qui regroupe la majorité des titulaires de permis de camionnage en vrac qui veulent se regrouper pourrait être celle qui, non seulement serait titulaire de permis de poste ou de sous-poste, mais aussi serait le porte-parole officiel de la majorité puisqu'elle la regroupe.

Quant aux minorités, qu'elles participent avec la majorité à la construction de leur industrie et qu'on cesse d'accorder plus d'importance à des minorités qui ne veulent jamais construire, mais détruire. C'est ce qui existe déjà dans le domaine syndical depuis longtemps et il est temps, en 1980, que ce principe soit consacré dans le camionnage en vrac.

Dans l'entente de juin 1977, le ministre s'était engagé à consacrer le principe de donner la priorité aux premiers camions. En vertu de ce principe, on devait faire travailler tous les premiers camions avant de faire appel au deuxième camion, etc. Il est vrai que ce principe se retrouve à l'intérieur du règlement. Cependant, il a été faussé dès le début de son application par deux lacunes que l'on apercevait dans la réglementation: premièrement, nous ne retrouvons dans le règlement aucune obligation pour les titulaires de permis d'inscrire tous leurs permis. Ainsi, celui qui a plusieurs camions peut n'en inscrire qu'un seul au poste s'il le désire. Celui-ci est considéré comme un premier camion et, si les travaux augmentent au poste, il peut décider d'en inscrire un deuxième qui, lui aussi, sera utilisé constamment. Pendant ce temps, ses autres camions munis de permis travaillent sur des contrats qui ne sont pas inclus dans la clause de protection.

Deuxièmement, les propriétaires de plusieurs camions utilisent les camions qui leur appartiennent immatriculés avec des "F" pour effectuer le transport sur leurs propres contrats. Le législateur devrait obliger le camionneur à inscrire tous ses permis. D'autre part, il arrive aussi que les titulaires de plusieurs permis transfèrent à de nouvelles corporations, à leur épouse, à leurs fils, à leurs neveux, à leurs nièces, à leurs oncles des permis. Ainsi, tous ces camions sont devenus des premiers camions. Ce sont autant de petits transporteurs qui ont dû perdre une partie de leurs revenus pour les donner à ces nouveaux premiers camions.

Les permis de location n'ont jamais été si populaires dans le camionnage en vrac qu'en 1980. C'est le moyen rêvé pour contourner la réglementation, les postes et les sous-postes. (11 h 30)

A titre d'exemple, Electro Métallurgie SKW Inc. fait effectuer du transport en vrac par une compagnie de location qui, depuis plusieurs années, a mis à la disposition de cette compagnie une escorte de douze semi-remorques. Ces semi-remorques effectuent du transport 24 heures sur 24, et cela depuis au moins cinq ans. Les camionneurs en vrac de Bécancour à Tadoussac n'ont eu d'autre choix, pendant ces cinq ans, que de regarder passer, jour et nuit les camions de location.

Il y aurait lieu, et cela dans les délais les plus rapprochés, que la réglementation prévoie qu'aucun véhicule avec permis de location ne puisse être utilisé pour du transport de camionnage en vrac tant et aussi longtemps qu'il y aura des permis de camionnage en vrac disponibles dans les postes et les sous-postes. La seule exception serait le cas d'un titulaire de permis de camionnage en vrac qui louerait un camion en remplacement du sien brisé, et cela pendant la période de la réparation.

A l'article 10 de l'entente du 23 juin 1977, le ministre s'engageait à ne pas concurrencer les camionneurs en vrac et à ne pas grossir indûment sa flotte de camions. Les camions à six roues du ministère des Transports sont devenus des camions à dix roues. Les pick-up du ministère sont devenu des dix roues et certains responsables de divisions de voirie, pour éviter des coupures de budget, achetaient des camions à profusion pour le ministère. Nous avons même vu, après l'entente signée avec le ministre, l'achat de nouveaux camions, dans une division de voirie de la région 06, pour une somme de $1 250 000. Nous avions d'ailleurs à l'époque signalé au ministre cette anomalie.

Dans plusieurs districts du Québec, les camionneurs en vrac se plaignent que le transport est effectué par les camions jaunes du ministère, pendant que leurs véhicules sont dans les cours. Il est essentiel que le ministère des Transports respecte l'entente de 1977 et que l'Etat laisse aux transporteurs professionnels la possibilité de transporter.

Une des particularités du Règlement sur le camionnage en vrac est la création du permis de courtage exclusif.

L'ANCAI considère comme essentiel que ce permis de courtage soit émis à des corporations sans but lucratif, contrôlées à la base par les camionneurs. Ces corporations, dès l'instant qu'elles regroupent la majorité des titulaires de permis qui désirent un permis de courtage, devraient avoir droit à un permis de courtage, et cela peu importe le nom qu'elles portent.

Le lieutenant-gouverneur en conseil devrait prévoir trois sortes de permis de courtage: le permis de courtage local, le permis de courtage régional et le permis de courtage provincial.

Le permis de courtage local devrait être accordé à une corporation sans but lucratif sur un territoire donné à l'intérieur d'une région lorsque la majorité des titulaires de permis du territoire donné qui désirent s'inscrire à un permis de courtage local en exprime le désir. Ce permis de courtage aurait une vocation plutôt locale et donnerait à son titulaire des pouvoirs particuliers comme nous les retrouvons dans le règlement actuellement en vigueur.

Le permis de courtage régional couvrirait une région au sens du Règlement sur le camionnage en vrac et devrait être, lui aussi, accordé à toute corporation sans but lucratif qui représente la majorité des titulaires de permis qui désirent un permis de courtage régional.

Enfin, pour assurer la coordination du courtage entre les différentes régions du Québec, il y aurait lieu de prévoir la création d'un permis de courtage provincial qui devrait être émis à une corporation sans but lucratif.

D'ailleurs, la formule d'association locale, d'association régionale et d'association provinciale n'est pas un fait nouveau puisque nous la retrouvons un peu partout. Dans le domaine économique, les caisses populaires l'utilisent, les personnes âgées sont regroupées ainsi, les ouvriers syndiqués ont tous des syndicats selon cette structure et, enfin, beaucoup d'autres organisations fonctionnent de cette façon.

La différence fondamentale entre ce que nous proposons et les structures que nous venons de citer est que le camionneur dans chacune des corporations est personnellement membre. Il déciderait donc personnellement dans les assemblées générales, élirait les administrateurs et ratifierait personnellement les budgets.

L'émission de permis de sous-postes. Le Règlement sur le camionnage en vrac prévoit, à l'article 43, la possibilité pour la commission de délivrer des permis de sous-postes, et je cite: "La commission peut délivrer un permis de sous-poste à toute corporation sans but lucratif ou à toute association coopérative".

Au paragraphe a) du même article, on prévoit deux conditions particulières pour que la commission émette un permis de sous-poste: "a) qu'au moins les deux tiers des titulaires de permis de camionnage en vrac de la zone soient abonnés et qu'un permis de poste ait été délivré dans la région".

Pour la première obligation, à savoir que les deux tiers des titulaires de permis de camionnage en vrac de la zone soient abonnés, il y aurait lieu qu'on lise plutôt: la majorité des titulaires de permis de camionnage en vrac qui se sont engagés à s'inscrire au poste dans la zone le désire. Quant à la deuxième condition, à savoir qu'un permis de poste aitété délivré dans la région, il y aurait lieu d'enlever cette obligation puisque, de toute manière, il y a des permis de poste d'affectation qui existent. De plus, le fait pour la commission de refuser un permis de poste à une association n'aurait pas comme conséquence de l'empêcher de statuer sur les requêtes pour l'obtention d'un permis de sous-poste.

Le gouvernement du Québec devrait modifier cet article dans les plus brefs délais afin que la Commission des transports puisse entendre les causes pour les demandes de permis de sous-poste, et cela aussitôt que possible. La commission ne devrait même plus, à notre avis, statuer sur aucun dossier des régions qui sont titulaires de permis de poste d'affectation, mais porter toute son attention et tous ses efforts pour que les sous-postes obtiennent leur permis et deviennent opérationnels dans les plus brefs délais.

C'était le voeu unanime des camionneurs artisans au congrès de l'ANCAl de 1979, que l'accent soit mis, dans le cadre du nouveau règlement, particulièrement sur les sous-postes. Par les dis- positions du règlement actuel, il y a certaines lacunes qui empêchent cette réalisation. Le ministre des Transports pourrait facilement corriger ces lacunes, et la Commission des transports du Québec pourrait dès lors s'attaquer immédiatement au problème des sous-postes.

Il y aurait peut-être lieu que le lieutenant-gouverneur en conseil nomme trois commissaires ad hoc pour s'occuper des permis de courtage. En effet, nous savons que les audiences demanderont beaucoup de travail et qu'avec trois commissaires, l'équité pourrait être mieux assurée. L'un de ces commissaires pourrait venir du secteur du vrac, ce qui aiderait probablement au travail de la commission. Ces commissaires pourraient être nommés pour le temps de mettre en place les permis de poste et de sous-poste.

En vertu du règlement actuellement en vigueur, un sous-poste ou un poste peut accepter comme abonné une personne qui détient quatre permis de camionnage en vrac ou moins.

Un poste ou un sous-poste ne devrait accepter qu'un titulaire qui inscrit tous ses permis. Par cette formule, les titulaires de permis qui s'inscriraient au poste ou au sous-poste seraient incités à agir d'une manière professionnelle et à partager équitablement.

En effet, n'avons-nous pas vu de petits constructeurs de routes ou des titulaires de permis, pour qui le vrac n'était qu'un à-côté très secondaire, inscrire leur camion avec leur permis au poste et se racheter d'autres camions pour faire le transport de compte propre? Il est évident que non seulement on pénalisait un petit transporteur qui devait céder sa place à cet entrepreneur, mais aussi on favorisait l'entrepreneur en lui permettant de jouer sur les deux tableaux.

Le seul moyen de mettre fin à tout ce système, c'est d'obliger l'inscription de tous les camions puisque, par ce moyen et le principe de la priorité du premier camion, celui qui exécuterait ses contrats ne profiterait plus des clauses en pénalisant un petit transporteur professionnel.

En vertu de l'article 32 de la Loi des transports, la commission peut, dans le cadre des règlements, fixer des taux et tarifs, lesquels peuvent comporter soit un minimum, soit un maximum, soit un minimum et un maximum.

En vertu de la section 8, de la section III du règlement sur le camionnage en vrac intitulé "Les normes de taux et tarifs", la commission peut et a effectivement, dans le passé, fixé des taux et tarifs des matières en vrac.

Il est évidemment essentiel que la Commission des transports du Québec ait le pouvoir exclusif de fixer les taux et tarifs du camionnage en vrac.

La commission agit dans un cadre judiciaire et, à ce titre, son importance ne peut être mise en doute. Toute partie intéressée peut faire les représentations qu'elle jugera nécessaire à la Commission des transports du Québec lors des audiences de taux et tarifs.

Le rôle que joue la commission dans ce domaine est d'une importance double. Dans un

premier temps, elle permet au public en général d'être assuré d'une certaine justice quant aux taux et tarifs en évitant que certains transporteurs, par leur situation monopoleuse, fixent arbitrairement des taux exorbitants pour le transport qu'ils effectueraient.

Dans un deuxième temps, la commission permet au transporteur en vrac de faire du transport à des taux qui lui permet de vivre convenablement.

Le règlement sur le camionnage en vrac a été modifié en 1976 pour permettre aux titulaires de permis de camionnage général de faire des options leur donnant le droit de transporter des matières en vrac. La Commission des transports du Québec a été saisie, à l'époque, de plusieurs centaines de demandes de la part des titulaires de permis émis en vertu de l'ordonnance générale no 4995 sur le camionnage.

La Commission des transports du Québec a accordé à la très grande majorité des requérants le droit de faire du camionnage en vrac. Les camionneurs en vrac étaient convaincus que toute cette question était réglée puisque le règlement alors en vigueur indiquait que les titulaires de permis de camionnage général devraient avoir fait leur demande avant le 31 mai 1977.

Voilà que dans la réglementation actuelle, on a redonné encore la possibilité aux titulaires de permis de camionnage général de refaire des demandes. Il est évident que, par cette disposition, on vient à rencontre du gel des permis dans le camionnage en vrac en permettant à des gens qui ont déjà plus que leur part dans le camionnage de venir enlever à ceux qui végètent le peu qui leur reste.

Il est plus qu'urgent d'abroger dans le règlement toutes les dispositions qui permettent aux titulaires de permis de camionnage général d'obtenir des permis de transport des matières en vrac.

Les constructeurs de routes qui obtiennent des contrats du ministère des Transports sont assujettis, en vertu du règlement concernant les contrats de construction du gouvernement, par les articles suivants: "14 b) le soumissionnaire doit fournir avant la signature du contrat une garantie d'exécution du contrat et une garantie des obligations de l'entrepreneur pour gages, matériaux et services: "i) chacune pour 50% du prix du contrat, émises par une compagnie légalement habilitée à se porter caution si ces garanties sont sous forme de cautionnement, auquel cas l'entrepreneur doit utiliser les formules, etc." Je passe à l'autre page. "ii) correspondant à 10% du prix du contrat dans le cas de travaux relatifs aux bâtiments, si ces garanties sont sous forme de chèque visé à l'ordre du ministre des Finances ou de l'organisme selon le cas, ou sous forme d'obligations conventionnelles au porteur, etc." Je m'en vais à la page 35.

Lorsque les camionneurs ne sont pas payés par les constructeurs de routes, ils sont dans l'obligation de prendre des recours judiciaires contre ces derniers. Si les compagnies étaient obligées de fournir une garantie d'exécution de contrat et une garantie des obligations de l'entrepreneur pour gages, matériaux et services, chacune pour 50% du prix du contrat émis par une compagnie habilitée à se porter caution, les camionneurs subiraient beaucoup moins de pertes en cas d'insolvabilité. Il existe des constructeurs de routes avec lesquels nous n'avons jamais eu de problème. Or, il en est d'autres que nous avons dû poursuivre et qui, heureusement, avaient sur leurs contrats une garantie de main-d'oeuvre émise par une compagnie qui s'était portée caution. Lesdites compagnies ont payé intégralement les camionneurs. Lorsque le camionneur a perdu de l'argent, c'est toujours lorsqu'il n'y avait pas de compagnie qui s'était portée caution. En effet, nous retrouvons plutôt des chèques visés pour garantir que les travaux seront exécutés. Ces chèques sont souvent accompagnés d'une cession de créance en faveur d'une banque. Le gouvernement doit s'assurer que les garanties qu'il exige de ses entrepreneurs seront de nature à assurer aux transporteurs en vrac les montants qui leur sont dus.

L'application de la réglementation. Comme nous avons pu le constater dans l'historique, les mêmes malaises dans l'industrie du camionnage se retrouvent quinze ans après l'enquête Lippé, époque où la réglementation était très légère. Nous nous devons de nous interroger sur les causes de l'échec de la réglementation. D'abord, les sanctions prévues par la loi sont dérisoires surtout lorsqu'on parle de $50 pour une première infraction et qu'on n'a jamais donné d'avis de récidive sur une deuxième infraction. Un règlement ou une loi ne peut avoir de vigueur sans la prévision de sanctions sérieuses. De plus, un organisme muni de pouvoirs efficaces devrait voir à l'application des taux.

Dans le domaine de la chasse et de la pêche, le législateur prévoit pour des premières infractions des peines de $300 et même la confiscation d'armes à feu et de véhicules servant à la commission du délit. On a même vu des avions saisis sur la Côte-Nord, dans le comté de l'ex-ministre des Transports. Dans le domaine de la construction, des peines minimums de $200 sont prévues pour ceux qui offrent leurs services sans détenir de permis ou encore pour ceux qui engagent des salariés sans permis.

Contrairement au Code civil, la réglementation et les lois provinciales ont un caractère d'exception et on se doit de les interpréter restric-tivement. Plus souvent qu'autrement, les articles des règlements servent à régler des cas localisés dans une région donnée ou chez un certain nombre de transporteurs donnés.

Souvent, l'article conçu pour régler une situation crée trois autres problèmes à d'autres transporteurs. Il faut absolument que la réglementation en soit une de principe et qu'elle puisse être interprétée suivant les principes de base émis. Il faut absolument que la Commission des trans-

ports du Québec garde son caractère d'indépendance et son caractère judiciaire. Un dossier comme celui-là a un caractère politique et la commission ne devrait pas être l'organisme qui exécute les volontés du ministère. Le ministère des Transports devrait être considéré comme une partie et non le patron.

Il faut absolument que le législateur mette en évidence les principes des années 1965 afin d'assurer les requérants de services et les camionneurs en vrac d'une continuité logique. L'entente du 14 avril 1972 et le règlement 12 concernant le camionnage en vrac faisaient preuve au 27 juillet 1973 de continuité. Cependant, les quinze amendements adoptés entre 1973 et 1977 ont créé plus souvent des problèmes qu'apporté des solutions. En conclusion, une réglementation saine, basée sur des principes et non sur des situations localisées, pourrait améliorer le sort des transporteurs en vrac munis de permis.

Depuis 1973, le ministère des Transports du Québec a pris la responsabilité de protéger le camionneur en vrac artisan. Cependant, le ministère des Transports a un autre rôle à jouer, soit celui d'employeur. C'est le plus important requérant de services en matière de vrac. (11 h 45)

Nous avons entendu, lors de rencontres, le ministre des Transports, qui parle de la loi brutale de l'offre et de la demande qui fait apparemment partie des règles du jeu dans le domaine du camionnage en vrac.

Nous sommes donc devant un ministère des Transports qui contrôle directement ou indirectement 40% des réquisitions de services dans le transport des matières en vrac. A ce titre, a-t-il réellement intérêt à ce que la réglementation et la loi soient appliquées d'une façon rigide?

Depuis deux ou trois ans, le ministre des Transports, par l'entremise de ses hauts fonctionnaires, laisse entrevoir le spectre de la déréglementation.

Au mois d'avril 1979, le sous-ministre Hugues Morissette vantait devant l'Association du camionnage du Québec les grands avantages de la déréglementation. Bien sûr, pour le ministère des Transports, principal employeur dans le secteur vrac, la déréglementation diminuerait les coûts de transport, parce que, dans le moment, l'offre de camions est beaucoup trop considérable par rapport aux réquisitions de services.

D'ailleurs, le ministre des Transports a déjà déclaré sur les ondes d'un réseau radiophonique qu'accorder des secteurs de travail aux camionneurs artisans augmenterait les coûts de la construction.

Bien sûr, déréglementer le secteur pourrait diminuer les coûts du ministère des Transports employeur, mais pour combien de temps? Le temps, évidemment, que les petits crèvent et que les gros transporteurs créent des empires économiques.

Le libéralisme économique et la loi brutale de l'offre et de la demande sont des règles que le gouvernement, à titre de protecteur du citoyen, a modifiées et assouplies afin de donner de la force aux employés vis-à-vis de l'employeur. Si, demain matin, le citoyen québécois avait le droit d'engager le menuisier qu'il désire, d'engager le maçon qu'il désire, d'engager l'électricien qu'il désire ou, encore, n'importe qui à ce titre, le coût de la construction baisserait sensiblement. Ces salariés viendraient de retourner sous le joug de la loi brutale de l'offre et de la demande auquel le ministre faisait allusion.

Meurtris au cours des dernières années par certains fonctionnaires intrigants, nous ne pouvons pas nous empêcher d'ajouter que si le gouvernement avait le choix d'engager le fonctionnaire qu'il désire, en tenant compte du moins dispendieux, et le nombre qu'il désire, il sauverait tellement d'argent que le public en serait émerveillé. Heureusement, en ce qui concerne le salarié, le gouvernement fait abstraction de cette démagogie.

Selon nous, le ministère des Transports employeur n'est pas intéressé à voir une réglementation efficace s'instaurer.

En plus de ces propos de déréglementation que la plupart des fonctionnaires ont à la bouche, le ministère des Transports nous a démontré encore dernièrement que le respect des taux n'était pas tellement intéressant pour lui. Ainsi, la compagnie Arco, de Plessisville, applique les taux de la manière suivante et ça, à la connaissance du ministère des Transports. Elle exige un nombre de voyages défini et applique le tarif horaire. Si le camionneur ne fait pas tant de voyages, on lui enlève des heures.

Après avoir ouvertement contesté cette politique de la compagnie Arco au ministère des Transports, nous apprenons dans la même journée que cette même compagnie obtenait un contrat de $8 400 000, soit $600 000 en dessous des évaluations du ministère des Transports. Pourtant, le contrat lui est accordé, même si le ministère des Transports sait très bien qu'il y a un seul moyen pour faire le contrat avec un profit: engager les camionneurs à forfait et les payer à l'heure. De cette façon, un camionneur perd 25% de ses revenus.

Cette attitude fausse la concurrence entre les entrepreneurs sérieux qui veulent respecter l'esprit de la tarification et ceux qui veulent construire les routes sur le dos des transporteurs.

Au ministère des Transports, les fonctionnaires trouvent génial qu'un titulaire de permis de poste d'affectation ait demandé à la Commission des transports la diminution de taux après que cette même commission eut fixé des taux minimaux. Ce poste d'affectation qui fait le jeu du ministère des Transports employeur bénéficie de l'appui du ministère et de la commission.

Toutes ces attitudes ne peuvent que nous faire découvrir un ministère des Transports employeur qui se sert de sa loi, de ses règlements, de sa commission dans le but de servir ses intérêts pécuniaires et particuliers.

Nous ne pouvons plus croire, à la suite des événements, que le ministère des Transports est

intéressé à ce qu'une réglementation efficace existe.

L'entente du 14 avril 1972, intervenue entre le ministère des Transports et l'Association nationale des camionneurs artisans consacrait un secteur de travail réservé aux camionneurs en vrac artisans. Ce secteur de travail, bien que limité, a permis de régionaliser le transport en vrac, d'ouvrir les premiers postes d'affectation et de faire vivre pendant un certain temps une catégorie de transporteurs dont la principale source de revenus était le camionnage en vrac.

A cette clause se sont ajoutés, entre 1972 et 1977, les travaux en régie de plusieurs ministères et le transport du sel sur les routes entretenues par la voirie provinciale.

En 1977, le règlement concernant le camionnage en vrac faisait disparaître la distinction entre artisan et entrepreneur. Les obligations imposées aux artisans avaient eu pour effet d'augmenter sensiblement, comme nous l'avons vu précédemment, le nombre de détenteurs et le nombre de permis inscrits dans les postes d'affectation.

Cette clause que le gouvernement avait insérée en 1972 devenait évidemment insuffisante pour assurer une vie convenable à tous les détenteurs de permis qui voulaient faire partie des postes. Il ne faut pas oublier que la prolifération des permis et la création de nombreux premiers camions ont réduit sensiblement les revenus des camionneurs en vrac artisans qui faisaient partie de la classe privilégiée des années 1973 à 1977. De plus, la clause 75-25 a été diminuée dans l'année 1974 lorsque le ministère des Transports a décidé d'enlever le transport du béton bitumineux comme secteur de travail réservé.

Cependant, depuis 1979, ce secteur est revenu sous une forme mitigée. L'entrepreneur, après avoir utilisé tous ses camions, munis de permis ou pas, se doit d'employer les camions inscrits au poste d'affectation. 70% des 96% des titulaires de permis de vrac admissibles se sont inscrits au poste de courtage. Les abonnés au poste représentent donc la très grande majorité des transporteurs qui détiennent des permis actifs. Vu cette augmentation du nombre de camionneurs, ainsi que du coût de la vie, il faut absolument que le gouvernement, requérant de services donne directement ou indirectement aux détenteurs de permis de poste un minimum de 75% des réquisitions de services de transport en vrac, que ces travaux soient effectués en régie ou par des entrepreneurs.

Les secteurs de travail réservés favorisent une relation normale entre l'employeur et l'employé. Lorsque le transporteur ne travaille pas dans le cadre des secteurs de travail réservés, l'employeur peut le remercier à toute heure du jour et sans raison. De plus, il peut facilement, lorsque l'offre de camions est trop considérable, le faire travailler en dessous des taux pourtant jugés minimums par un tribunal d'arbitrage obligatoire. Le transporteur est souvent obligé de faire tous les travaux difficiles. Lorsque le travail est facile, il est remercié de ses services sans avis ni raison. Nous pourrions, par la présente, vous donner mille exemples de transporteurs en vrac à la merci des employeurs. Nous ne pouvons comprendre que le gouvernement, qui, pourtant, a décrit en 1977 le poste d'affectation comme la formule de salut pour les petits camionneurs, refuse de confier la majorité de ses propres travaux à ces mêmes postes d'affectation. Les secteurs de travail réservés établiront entre les détenteurs de permis de poste et les requérants de services des relations d'égal à égal dans la négociation des conditions de travail. Le secteur de travail est donc le moyen pour établir des rapports normaux entre le requérant de services et le transporteur. Si le transporteur n'a pas le droit de négociations il disparaîtra. S'il est courageux, il revendiquera avec bruit les avantages fondamentaux auxquels il a droit. Si le ministère de l'Energie et des Ressources a les moyens de subventionner les multinationales forestières et leur donner le contrôle total de la voirie forestière, le gouvernement a sûrement les moyens de donner aux transporteurs le contrôle d'une partie importante du transport.

De plus, dans la région atlantique délimitée à l'ouest par la route Kennedy, couvrant les provinces maritimes à l'est, le gouvernement fédéral donne pour le transport en forêt des subventions aux transporteurs. Ces subventions qui sont de l'ordre de 17,65% au-delà des taux minimums fixés par la Commission des transports du Québec devraient normalement être un atout additionnel au taux minimum fixé par ladite commission.

Aucune compagnie forestière ne respecte cette disposition. Elles enlèvent 17,65% sur les taux minimums fixés par la commission et disent aux transporteurs de réclamer au fédéral la différence. Il est plus que temps que cette situation éhontée cesse, puisque la subvention fédérale pour la région atlantique est une subvention additionnelle au taux du reste du pays et qui vise à aider les transporteurs et non les compagnies forestières. Il s'agit là d'un argument additionnel justifiant l'obligation pour les compagnies forestières de passer obligatoirement par les titulaires de permis de courtage. Il faut absolument que 80% des réquisitions de transport en forêt soient adressées aux postes d'affectation.

Nous ne pouvons croire qu'après de multiples démarches faites au gouvernement par toutes les catégories d'associations de transporteurs en vrac le ministère des Transports ne puisse comprendre que le seul moyen d'établir la paix sociale dans le camionnage, c'est d'accorder des secteurs de travail réservés dans un pourcentage qui permettra à 70% des détenteurs de permis inscrits au poste d'affectation de gagner leur vie convenablement, suivant des conditions normales et minimales de travail. Nous réclamons donc, non pour nous, mais pour les titulaires de permis inscrits dans les postes d'affectation, les titulaires de permis inscrits chez les titulaires de permis de courtage, 75% du transport en vrac confié directement ou indirectement par le ministère des Transports et 80% du transport en forêt.

L'Association nationale des camionneurs artisans Inc. recommande au gouvernement du Québec ce qui suit: Premièrement, une réglementation

saine et efficace basée sur des principes; deuxièmement, une réglementation appuyée par des sanctions sérieuses; troisièmement, la création immédiate d'un comité efficace pour le respect des taux et tarifs décrétés par la Commission des transports du Québec; quatrièmement, la réglementation doit tendre à considérer le camionneur en vrac comme un salarié; cinquièmement, la réglementation se doit de protéger le transporteur et de lui confier le transport public; sixièmement, reconnaissance des associations majoritaires comme titulaires de permis de courtage. Septièmement, la disparition de la tutelle imposée par le règlement et administrée par la Commission des transports du Québec; huitièmement, la limitation des permis de transport de matières en vrac; neuvièmement, maintenir le gel établi des permis par l'entente du 23 juin 1977; dixièmement, la Commission des transports doit garder son caractère judiciaire; onzièmement, les titulaires de permis émis en vertu de l'ordonnance générale no 4995 du camionnage ne doivent plus obtenir, dans leur permis, des matières en vrac; douzièmement, éligibilité de l'association majoritaire pour l'obtention d'un permis de courtage; treizièmement, le gouvernement du Québec réglera le problème s'il admet que le transport public des marchandises en vrac appartient aux transporteurs qui paient le permis prescrit par le gouvernement: -75% du transport des matières en vrac requis ou subventionné par le gouvernement du Québec, directement ou indirectement, devrait être confié aux titulaires de permis de courtage. -Dans le domaine forestier, 80% du secteur devrait être aussi confié aux titulaires de permis de courtage. Quatorzièmement, que la Commission des transports du Québec émette, suite aux modifications du règlement, immédiatement les permis de sous-postes.

L'Association nationale des camionneurs artisans tient à remercier les membres de la commission parlementaire des transports d'avoir accepté d'entendre ses représentations. Nous demeurons à la disposition de la commission pour de plus amples informations et pour répondre à vos questions et nous vous soumettrons un mémoire, s'il y a lieu, là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: M. le Président, rapidement, sur certains points et, en particulier, sur le point fondamental qui est cet équilibre à obtenir entre l'offre et la demande dans ce secteur d'activité économique. J'ai tenté, tout à l'heure, de faire le point sur ces grands équilibres en matière d'offres de services par les différents intervenants. Vous êtes revenu, à quelques reprises, dans votre mémoire, peut-être pas directement mais par la bande, sur certains aspects de ces grands équilibres. C'est là-dessus que je voudrais réitérer certains chiffres.

Tout d'abord, l'activité même du ministère faite pour son propre compte, avec sa propre flotte de camions; pour vous, c'est un point important. Je tiens à dire là-dessus que, depuis 1972, la flotte du ministère des Transports n'a pas varié de 1% et que, deuxièmement, l'importance de cette flotte est extrêmement marginale par rapport à l'offre de camions faite par les détenteurs de permis en vrac. On a vu qu'il y a environ une douzaine de milliers de permis en vrac émis. Le ministère des Transports lui-même possède moins de 200 de ces camions dix roues qui font du transport pour le compte du ministère et qui constituent sa flotte minimale pour effectuer les travaux marginaux qu'il doit effectuer dans le cours normal de ses opérations.

Comme on le voit, ce n'est pas de ce côté que nous pourrions être blâmés et que nous pourrions aussi obtenir des solutions. Je pense que si on s'attaque à des points comme ça, cela peut faire image lorsqu'on fait des affirmations gratuites, mais quand on examine les chiffres très concrètement et qu'on voit les équilibres en présence, les grands équilibres, les 12 000 camions d'une part et les 200 ou 300 camions du ministère, d'autre part, qui, de toute façon, sont absolument nécessaires au ministère, on se rend compte qu'on ne parle pas des mêmes choses.

Deuxièmement, quand on regarde aussi les travaux qui ne sont pas faits en régie, c'est-à-dire les travaux pour le compte du ministère, mais qui sont donnés à contrats, on se rend compte que les camionneurs dits entrepreneurs, c'est-à-dire les camionneurs qui possèdent leurs propres camions et qui, eux aussi, comme le ministère, doivent avoir une flotte minimale pour faire leurs propres travaux comme entrepreneurs, ces camions représentent 23% de tous les camions utilisés sur nos chantiers actuellement, tandis que 77% sont des camionneurs artisans. Les chiffres absolus, c'est 510 camions, plus ou moins, d'entrepreneurs contre 1682 camionneurs artisans. (12 heures)

Comme on le voit, là encore, si on veut aller plus loin et restreindre davantage les camionneurs dits entrepreneurs, on se rend compte qu'on ne peut jouer que sur 23%. J'ai ensuite démontré que, de toute façon, quand on regarde l'ensemble des contrats donnés par le ministère, nous ne pouvons satisfaire qu'environ 20% à 25% de l'offre que ces 12 000 camions dont j'ai parlé tantôt représentent. On le voit dans les chiffres absolus, 1682 camionneurs artisans.

Alors, le déséquilibre entre l'offre et la demande est tellement grand et le rôle que nous pouvons avoir directement sur certains points particuliers constituent tout simplement à ajuster — si je peux dire — la vis du carburateur pour passer de 20 à 20,5 milles au gallon, mais on ne pourra certainement pas passer aux 40 milles au gallon dont vous parlez, en tout cas, au déséquilibre dont il est question actuellement.

J'aurais une question à poser dans cet examen des grands équilibres en cause. J'aimerais vous poser une question que le rapport Lippé aussi posait en 1965, à savoir comment rétablir un plus juste équilibre entre l'offre et la demande.

Là-dessus, vous avez, bien sûr, mentionné les recommandations du rapport Lippé, vous avez loué le rapport Lippé, mais n'oubliez pas qu'il y avait une recommandation du rapport Lippé qui est contraire à toutes vos revendications, à savoir ne pas restreindre, en aucune façon, la possibilité pour un camionneur entrepreneur d'utiliser ses propres camions. Et, comme vous le savez, cette recommandation en particulier n'a pas été observée. Vous avez, au contraire, obtenu un secteur réservé dans une proportion pour des travaux donnés. Mais, on voit que malgré le fait que justement les gouvernements qui se sont succédé n'ont pas respecté la recommandation du rapport Lippé là-dessus, malgré le fait que vous ayez actuellement un secteur réservé, on se rend compte que le déséquilibre fondamental que soulevait le rapport Lippé n'a pas été résolu et que les chiffres en présence nous démontrent bien qu'à première vue, ce n'est pas la voie à suivre, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, puisque le déséquilibre est trop grand.

Alors, je reviens à ma question et à la question, donc, du rapport Lippé: Est-ce que, d'après vous, il y a moyen de rétablir cet équilibre du côté de l'offre de camions et quels seraient les mécanismes, par exemple, qui nous permettraient de retirer des permis de la circulation pour qu'il y ait un meilleur équilibre entre l'offre et la demande?

Vous allez peut-être me répondre: Ce n'est pas en réduisant le nombre de permis, c'est en augmentant plutôt l'ouvrage. C'est ce que j'ai expliqué tout à l'heure; il faudra augmenter nos travaux dans des proportions de $300 000 000, $400 000 000 ou $500 000 000 simplement pour faire varier à même le 10% de ces $400 000 000 ou $500 000 000 les proportions qui sont en cause. Vous avez reçu $58 000 000 de travaux cette année. Pour en obtenir $100 000 000, par exemple, il faudra augmenter le budget du ministère des Transports de $500 000 000 puisque seulement 10% de ces $500 000 000 se retrouveraient finalement dans le transport en vrac. Avez-vous des... Je vois dans votre mémoire que vous n'avez pas de suggestion de ce côté-là. On dirait que personne dans le passé n'a voulu s'attaquer à ce problème fondamental. Comment réduire le nombre de permis, puisqu'on le voit, c'est là certainement que se situe la principale solution compte tenu du déséquilibre si flagrant entre le nombre de camions, le nombre de permis et les possibilités d'ouvrage?

M. Piuze: M. le ministre, Me Beaudet va répondre à votre question étant donné que j'ai parlé pendant une heure. Juste avant, vous nous avez cité un chiffre pour les camions du ministère de 200 véhicules. Or, un de vos sous-ministres qui est encore là — je ne le nommerai pas, je ne crois pas que ce soit nécessaire — nous déclarait, il y a deux ans, qu'il y en avait 850. Alors, je ne sais pas si les camions ont diminué depuis ce temps-là, mais...

M. de Belleval: Ecoutez, vous avez les chiffres dans le document que je vous ai donné. Les chif- fres exacts sont les suivants: pour les camions de dix roues, soit le type qu'on retrouve normalement maintenant parmi les permis émis par la Commission des transports et qui sont au nombre d'environ 10 000 ou 12 000, nous en avons 191. Vous avez d'ailleurs dans ce document la répartition de ces camions par région administrative. Vous pourrez vérifier ces chiffres. Nous avons, en plus de ces 191 camions à dix roues à benne basculante, environ 431 camions à six roues et il y a d'autres pièces d'équipement: "pépines", petits "pick-up" et autres genres d'équipement. Mais si on regarde, là encore, les chiffres dans leur brutale clarté, ce ne sont pas ces 191 camions à dix roues qui viennent faire concurrence actuellement à vos 12 000 camions, d'autant plus que, comme je l'ai expliqué, la politique suivie par mes prédécesseurs — cela inclut, d'ailleurs, le député de Charlevoix — c'est de conserver la flotte du ministère pour les besoins minimaux que nous devrions avoir de toute façon, en particulier pour faire l'entretien l'hiver quand l'équipement des camionneurs privés n'est pas disponible — c'est le cas pour de nombreuses régions, pour certaines routes que les camionneurs privés ne veulent pas desservir — pour les petites commandes à gauche et à droite qu'un district doit remplir tous les jours, qui nécessitent un travail immédiat et, par conséquent, ne nécessitent pas un recours aux postes d'affectation. On voit bien que ce n'est pas là qu'il faut chercher la solution au déséquilibre.

Votre affirmation que nous avons augmenté notre flotte ne se vérifie pas puisque, comme je l'ai dit, depuis 1972, cette flotte n'a pas varié de 1%. Vous m'avez fait des représentations là-dessus. J'ai fait les vérifications, j'ai revu tout le dossier au ministère et les chiffres que je dépose ce matin démontrent que non seulement depuis un peu moins d'un an que je suis au ministère, mais même sous l'administration de M. Lessard et même sous l'administration du ministre Mailloux, ce point en particulier n'est pas le point fondamental. Vous allez me dire: C'est juste un petit point! Ce n'est peut-être pas le point le plus important dans votre mémoire, mais ce que je veux souligner, c'est tout simplement un exemple du fait que l'approche via cette explication du ministère ou cette action du ministère sur l'industrie m'apparaît très limitée et qu'au contraire c'est plutôt du côté de l'offre de camions qu'il faut agir.

M. Piuze: Si vous me le permettez, M. le ministre, nous allons prendre connaissance de votre rapport. On ne veut pas mettre en doute vos chiffres. Dans les rapports que vous allez entendre cet après-midi au niveau des régions, vous allez voir que c'est un problème épineux dans certaines régions et important. Je pense qu'au niveau régional ils seront en meilleure position pour donner des chiffres là-dessus. Si vous me le permettez, M. le Président, je demanderais à Me Beaudet de continuer.

M. Beaudet (Pierre): M. le ministre, sur votre question de savoir ce que propose notre mémoire, il est bien évident que nous pensons que la so-

lution est les secteurs de travail réservés aux postes d'affectation parce que, de 1972 à 1977, malgré certains problèmes qu'on a eus, cette solution des secteurs de travail réservés a permis aux camionneurs artisans de vivre convenablement. Maintenant, votre position de l'offre et de la demande présuppose une élimination naturelle des camionneurs. Si on s'en va sur le marché de l'offre et de la demande, il y en a qui vont survivre et les autres vont crever. En 1978, le ministre Lessard est venu à notre congrès et ce n'est pas dans ce sens qu'il s'est adressé aux camionneurs. Aujourd'hui, on parle des bienfaits de la loi de l'offre et de la demande, mais, dans le temps, il nous disait ceci: "Serais-je devenu en l'espace de quelques années un ennemi des camionneurs? Non, mais j'ai conservé, cependant, les mêmes idées que je prônais en 1965, de même que celles que prônait le premier ministre actuel, qui était ministre des Richesses naturelles du temps, M. René Lévesque, lorsqu'il est venu dire dans notre région aux camionneurs: Arrêtez de vous battre. Regroupez-vous dans des structures régionales efficaces — et là, il disait entre parenthèses dans ses notes, "ce que vous avez fait d'ailleurs — et nous vous donnerons du travail". Aujourd'hui, je ne vous blâme pas, M. le ministre, mais votre message à la commission, lui, dit: Fiez-vous maintenant à votre initiative personnelle; allez-vous-en sur le marché avec la loi de l'offre et de la demande. Vous allez survivre en baissant les coûts automatiquement parce que vous parlez de coûts artificiels qui sont créés.

Quant au nombre de permis, nous prétendons justement que c'est vrai que la Commission des transports a émis d'une façon très libérale des permis entre 1973 et 1977. Cependant, aujourd'hui, le gouvernement a pris une responsabilité et le problème du ministère des Transports, c'est qu'il est à la fois employeur et législateur, comme vous l'avez souligné.

Quand il vient nous dire qu'il protège le petit, il faut qu'il pense au gouvernement et à son programme politique, mais quand il est l'employeur, il est un vrai employeur et il prend même la peine de préparer un contre-mémoire la veille pour démolir nos revendications ou apporter des précisions qu'il juge raisonnables. Cette position du ministère des "Transports comme employeur, nous avons de la misère à la prendre, surtout qu'il y a des liens très étroits entre la Commission des transports, qui est le tribunal judiciaire, et le ministère des Transports qui, selon nous, ne devraient pas exister, parce que si la Commission des transports est là pour appliquer des règlements ou des lois dans lesquels le ministère des Transports est employeur et partie, il faudrait absolument que la Commission des transports conserve son caractère d'indépendance et n'ait pas d'intervention directe dans le jeu des postes d'affectation et ne soit pas, autrement dit, sous la tutelle, parce que, là, on arrive devant la Commission des transports avec des camionneurs en tutelle et un ministre des Transports à la fois employeur et employé.

Il y a deux parties qui jouent au ministère des

Transports. Je ne vous blâme pas, vous êtes mal pris avec cela, mais ce que nous disait M. Lessard quand il vendait les postes d'affectation et ce que vous nous dites cette année dans votre message du congrès, ce sont deux choses complètement différentes. C'est vrai que les camionneurs aiment cela transporter mais ils n'aiment pas se faire transporter comme cela dans l'offre et la demande, dans l'Etat protectionniste et dans trois ans dans d'autres domaines.

Pour répondre à votre argument sur le rapport Lippe, qui disait qu'on prendrait les camions des entrepreneurs et ensuite les camions du poste, aujourd'hui on se doit de... On a signé des ententes en 1972 avec le ministre des Transports du temps, on a signé une entente avec le ministre Lessard qui semble être contestée par votre document, mais il reste une chose, c'est que les parties ont convenu que des secteurs réservés pouvaient aider les camionneurs. De toute façon, M. Lessard, quand il a vendu les postes d'affectation, disait toujours: Je vais m'occuper de vous trouver des travaux en régie et des travaux dans les autres ministères. Est-ce qu'à ce moment-là il reniait les clauses de travail qui sont reniées aujourd'hui lorsque vous nous parlez de la loi et aussi de l'offre et de la demande.

Ma réponse est un peu dans ce sens. Je ne veux pas prendre un ton de guerre même si on a mis les gants de boxe avec l'Association des camionneurs artisans, mais il reste que nous ne pouvons pas dire autre chose à nos membres, que vous êtes à la fois employeur, que vous avez des méthodes d'employeur et que vous dites en outre: On vous protège messieurs, allez-vous en dans les postes d'affectation. C'est cela qu'on n'est pas capable de prendre.

M. de Belleval: Je vous écoutais et me demandais si j'écoutais M. Laberge ou M. Rodrigue...

M. Beaudet: Une chance que vous n'avez pas dit un autre nom.

M. de Belleval:... quand vous parliez de nous comme employeur. Je suis sorti d'un secteur où j'étais directement l'employeur de plusieurs dizaines de milliers de personnes et je me retrouve donc avec des revendications un peu du même ordre. J'essaie de vous suivre. Je vous ai quand même donné des statistiques tantôt qui démontraient que, comme employeur, justement, et comme protecteur des petits camionneurs, des camionneurs artisans, mon dossier n'était pas mauvais puisque, cette année, sur mes chantiers de construction, 77% des camionneurs que j'emploie ou que mes entrepreneurs emploient sont des camionneurs artisans. Je veux bien qu'on trouve des moyens pour augmenter cela à 78%, 79%, 80%, mais il n'en reste pas moins que, de toute évidence, le préjugé favorable dont parlait M. Lessard, on le retrouve dans ces chiffres.

Rappelez-vous ce que j'ai fait à la fin de l'hiver quand j'ai pu dégager une vingtaine de millions de

dollars dont le plus clair est allé dans les poches des camionneurs artisans pour leur permettre de passer un mauvais moment. Cela démontre bien que notre préjugé favorable envers les individus que vous représentez est respecté.

Une fois ceci dit, on se rend compte que, malgré tout, on n'a pas réglé le problème de toute évidence et qu'on se retrouve encore une fois devant un déséquilibre très grand. Il n'est à peu près pas "comblable", compte tenu des chiffres dont je viens de parler, par une extension dans la même voie des politiques passées qui nous ont amenés au problème où on est actuellement. Si les politiques passées avaient été des politiques aussi bonnes que cela, sans doute qu'on ne se retrouverait pas ici aujourd'hui. (12 h 15)

Alors, la question que je pose est la suivante: Continuer dans ce même genre de politique — je ne parle pas d'une mesure ou d'une autre, vous en avez souligné plusieurs qui me paraissent fort valables — est-ce dans la voie de l'amélioration, du "fine tuning", excusez l'expression, de l'ajustage du carburateur de ces mesures qui nous ont mené à la situation actuelle ou s'il ne faut pas reprendre le problème comme, justement, la commission Lippé l'avait proposé et revoir comment rétablir un certain équilibre du côté de l'offre et de la demande? Je ne dis pas d'appliquer brutalement les principes de l'offre et de la demande, la preuve en est que ce n'est pas ce qu'on fait. La preuve en est aussi que les chiffres que je viens de donner démontrent très bien que les effets de ces politiques et de ces attitudes sont de favoriser les camionneurs artisans, mais cela ne résout pas le problème.

Je repose ma question parce que je pense que vous n'y avez pas répondu. Dans votre mémoire, vous ne nous proposez rien en ce qui concerne les moyens que nous pourrions prendre pour diminuer l'offre de camions. Vous dites: On va les laisser mourir à petit feu. Cela, c'est un moyen, on peut laisser mourir des gens à petit feu, mais je suis certain que ce n'est pas la solution que vous proposez. Donc, ce serait quoi, la solution, si ce n'est pas de les laisser mourir à petit feu? Quand, par exemple, des tabaconistes ouvrent des magasins au coin des rues et qu'il s'en ouvre cinq ou six et que le lendemain il y en a un septième et le surlendemain il en vient un huitième, la loi pure de l'offre et de la demande joue; c'est ce qu'on retrouve dans la plupart des secteurs d'activité économique de notre société. A un moment donné, il y a un tabaconiste qui fait faillite parce qu'il y en a un de trop, deux ou trois, ou ils réussissent à vivre mais ils vivotent plutôt parce qu'ils partagent tous le même paquet de cigarettes.

Dans votre cas, ce n'est pas ce que vous proposez sans doute comme solution. Je vous écoute et, de toute évidence, ce n'est pas ce genre de solution que vous proposez, mais est-ce qu'il y en aurait, en auriez-vous à nous proposer qui sont autres que la simple application brutale, que je ne propose pas moi-même, de l'offre et de la demande? Je ne voudrais pas être mal compris, je ne propose pas de laisser les choses aller brutalement, mais je vous dis qu'on ne peut pas non plus faire abstraction de ces mécanismes fondamentaux de notre économie. Comment maîtriser ces mécanismes, mais dans le bon sens? Je repose ma question.

Le Président (M. Jolivet): M. Beaudet.

M. Beaudet: M. le ministre, la réponse nous semble claire. Les secteurs de travail réservés sont la clef du succès. Naturellement, cela ne fera pas augmenter le volume d'ouvrage. Vous parlez de votre statistique de 77%; même si on n'en avait strictement que 70%... On ne demande pas au gouvernement de faire des travaux artificiels, mais le fait que nous ayons un secteur réservé nous permettrait de discuter avec notre employeur d'égal à égal. Si nous n'avons pas de secteur réservé, l'employeur peut nous faire venir à 8 heures le matin et nous dire à 10 heures: Va-t-en chez vous. Il peut aussi nous imposer à travailler en dessous des taux minimums pourtant fixés par un tribunal d'arbitrage obligatoire. Le poste d'affectation est la manière de partager équitablement le travail.

Bien sûr, il y en a qui vont souffrir, mais ceux qui occupent le poste... Tout le monde est à peu près admissible à 96%. Bien sûr, nous serons victimes de la conjoncture économique, mais, comme le poste d'affectation est là suivant vos volontés pour partager équitablement le travail et comme tout le monde peut faire partie, à 96% des cas, du poste, tout le monde partagera équitablement le travail suivant des taux fixés par un tribunal d'arbitrage obligatoire qui est la Commission des transports et nous pourrons négocier avec les patrons d'égal à égal. Dans le moment, c'est: Toi, on ne veut pas te voir ce matin! Toi, tu t'en vas chez vous! On a des problèmes qui remontent à avant l'encyclique Rerum novarum parce qu'on n'a aucun droit, aucun pouvoir de négociation sans le secteur de travail réservé qui nous a été donné. C'est ça, notre problème, l'employeur a le contrôle total. On sait que ça ne va pas bien, la conjoncture économique; ce n'est pas votre faute s'il n'a pas neigé cet hiver, on ne vous demande pas des travaux artificiels, on vous demande de partager équitablement le travail entre tous les détenteurs de permis de vrac et non pas seulement dans l'Association des camionneurs artisans au moyen du poste d'affectation que vous avez mis au service des camionneurs auxquels vous avez dit que vous donneriez le mécanisme pour partager équitablement le travail. Nous sommes entièrement d'accord avec cela. A ce moment-là, on ne fausserait pas la compétition par les jeux de taux. C'est ça qui est un peu notre problème.

Naturellement, nous nous servons de notre entente aujourd'hui pour discuter, avec le ministère, de secteurs de traval. Mais notre solution, secteurs de travail réservés, comme vous, on n'en voit pas d'autre, parce que l'offre et la demande, pour nous, c'est d'envoyer des transporteurs, se faire

concurrence. Avec la surenchère de la baisse des coûts, à la première nouvelle, II y en a la moitié qui vont mourir, les autres vont survivre. Et il va arriver des gros contracteurs qui vont dire au gouvernement, le lendemain matin que ça coûte cher un voyage de terre, ça va changer le prix, comme ça s'est fait dans le domaine du pétrole et dans d'autres domaines. Il est vrai que nous sommes dans un bien petit domaine, mais on a besoin de votre protection et on a besoin de vos postes d'affectation, suivant des règles de partage équitables. Après ça, on pourra parler, M. le ministre, du partage équitable non seulement entre les transporteurs, mais du partage équitable du transport entre les transporteurs et les contracteurs. Depuis 1973, on vend des permis aux camionneurs, permis qui sont dispendieux, on leur a donné un champ d'activité, alors, aujourd'hui, on veut au moins que le champ d'activité leur soit réservé, comme les salariés de la construction ont des champs réservés dans le domaine de la construction.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, Me Beaudet mentionne, en terminant, le secteur de la construction. Je pense que l'ANCAl devrait au moins se réjouir, ce matin, qu'une des solutions proposées par le gouvernement ne soit pas celle qui est appliquée présentement dans le placement dans l'industrie de la construction. La situation, comme vous le savez, est analogue; il y a trop de travailleurs soi-disant de la construction pour le travail à effectuer.

Donc, on a retenu, au gouvernement, par l'entremise de l'OCQ, la solution de dire: A compter du 1er juillet 1978, toute personne qui n'a pas travaillé un certain nombre d'heures dans la construction, l'année précédente, ou un certain nombre d'heures sur cinq années, qu'elle ait 25 ans de compétence comme menuisier, comme électricien ou comme quoi que ce soit, n'a plus le droit de travailler parce qu'elle ne détient pas un certificat classe A.

Je sais que ce n'est pas ça que vous voulez, mais je ne peux pas m'empêcher de faire l'analogie entre les deux. Cependant, le problème est le même, c'est toujours trop de camionneurs, trop de personnes pour un travail qui n'est pas assez volumineux. Vous nous parlez des secteurs de travail réservés. Nul doute que ça fait partie, à mon avis, des éléments de solution.

Justement, dans le document, qu'a déposé le ministre ce matin, on a, à l'annexe 2, copie de l'entente entre les parties; je pense que ça porte sur 16 points au total. C'est une entente qui avait été signée lors de la manifestation des 2800 camionneurs, devant le parlement. C'est évident que la présence des 2800 camionneurs est pour quelque chose au contenu de l'entente. Mais le fait demeure que, quand vous nous parlez des secteurs de travail réservés — vous le reprenez d'ailleurs dans votre mémoire, ce matin — vous récla- mez 75% de tous les travaux effectués par le ministère des Transports et 80% dans le domaine forestier. A vos yeux, aviez-vous acquis ça, en juin 1977, au moment où le ministre des Transports, Lucien Lessard, a signé l'entente qui apparaît en annexe?

M. Beaudet: Dans l'idée de nos clients, à qui nous avons montré l'entente qui était là, il était évident que 75% du transport venant du ministère des Transports, directement ou indirectement, passeraient par le biais des postes d'affectation. Il est évident que nos clients pensaient avoir agrandi le secteur de travail. Le gouvernement nous demandait, à ce moment, d'augmenter le nombre de camionneurs. Comme on en avait à peu près juste assez en tant qu'artisans, pour vivre convenablement, on a pensé qu'en augmentant le nombre de camionneurs dans le poste, d'un autre côté, le gouvernement augmenterait notre secteur. C'est ce à quoi on s'attendait et c'est dans ce sens que nous avons signé le document. C'est dans ce sens que M. Dubé l'a signé. C'est lui qui est le signataire et je pense qu'on va lui laisser donner les explications.

M. Dubé: II est certain que nous ne demandions pas — les 2800 camionneurs dont vous faisiez mention tout à l'heure et nous avons une association de près de 4000 — 75% en haut de la ligne d'infrastructure. Nous n'étions tout de même pas des imbéciles; nous l'avions déjà depuis 1972. Il est clair de voir que nous demandions une augmentation; c'est pour ça qu'on s'était déplacé. Quand on vient nous dire qu'on demandait en haut de la ligne de 75%, c'est malheureux, mais on l'avait déjà depuis le 14 avril 1972. On demandait une augmentation — comme Me Beaudet l'a dit tout à l'heure — parce qu'il y avait une augmentation de permis qui venait accroître les postes d'affectation.

Quand on nous avait parlé d'enlever l'asphalte, on disait qu'il fallait le laisser pour les autres, en 1975, comme j'en ai fait mention. Les autres, c'étaient les 1500, 1600 ou peut-être les 2500 camions qui venaient rejoindre. Dans notre esprit et dans l'esprit de tous les gens, c'étaient les autres. Donc, les autres venaient dans le poste d'affectation et on augmentait l'assiette, comme le disait M. Lessard. C'est là-dessus que j'ai signé l'entente et M. Lessard la signait sûrement dans cet esprit-là; mais après, on a appris que ce n'était pas ainsi dans son esprit, mais c'était ainsi sur le papier. Je pense qu'on en a encore des copies. On a encore l'original et c'est ce qui y est marqué.

M. Gratton: D'ailleurs, c'est quand même significatif que dans l'orginal, justement, cette clause a été ajoutée à la main, de façon manuscrite.

M. Dubé: Mais c'est clair que nous n'aurions pas signé si cela n'avait pas été mis là. Le ministre l'a écrit lui-même de sa main. Il l'a paraphée. D'ailleurs, il y avait ses conseillers et son procu-

reur. Il y avait aussi son chef de cabinet. Cela n'a pas été fait en cachette et en tordant des bras. Cela a été fait bien officiellement devant les caméras en plus.

M. Gratton: Remarquez bien qu'on...

M. de Belleval: Puis-je dire quelque chose là-dessus, M. le Président? Me le permettez-vous, M. le député?

M. Gratton: Oui, oui.

M. de Belleval: Quand même, je voudrais parler au nom de mon collègue, M. Lessard, qui était ministre des Transports à ce moment-là et qui est directement et personnellement impliqué, je pense qu'il pourrait venir à cette commission et fournir lui-même la réponse d'ici les deux ou trois prochains jours; mais cette réponse, il l'a déjà donnée. Elle a déjà été communiquée à l'ANCAl et à l'ensemble de la population du Québec la même journée où cette entente a été signée au mois de juin 1977. Les circonstances sont bien connues. Cette clause a justement été ajoutée à la main et le document est public. Vous l'avez entre les mains. Les journalistes l'ont entre les mains. Ils ont une copie de l'orginal. Actuellement, on ne cherche pas à le cacher. Cette clause a été écrite à la main et on a été obligé de l'ajouter parce que, justement, le ministre ne jugeait pas important d'ajouter cette clause puisque, comme vous venez de le dire, M. Dubé, elle existait déjà; mais vous avez quand même insisté pour que l'ancienne clause soit reconduite, ce qui a été fait. Il ne s'agissait pas d'élargir le secteur et vous l'aviez très bien compris comme tel. Le 26 juillet 1977, à l'Assemblée nationale, d'ailleurs tout de suite quelques minutes après la signature de cette clause, la rectification a été faite et tout le monde s'entendait que c'était effectivement la reconduction de l'ancienne clause et non pas un élargissement de la clause actuelle. Ici même, dans cette Assemblée nationale, au moment où une commission siégeait, le 26 juillet 1977, M. Lessard avait déclaré à ce moment-là devant vous-mêmes, d'ailleurs, des représentants de l'Association des camionneurs artisans: "M. le Président, je dois d'abord dire que l'entente, telle que signée de bonne foi et telle que précisée le 23 juin au soir au président de l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants, en particulier la clause 75-25 en haut de la clause de l'infrastructure, sera respectée. Et elle fut très bien comprise par toutes les personnes qui assistaient à cette négociation, à savoir le conseil d'administration de l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants accompagnés, d'ailleurs, de leurs avocats soit MM. Beaudet et Piuze. Cette entente a été signée de bonne foi et toutes les clauses avec interprétation qui a été donnée à ce moment-là seront respectées, parce que le ministre était de bonne foi." Cette déclaration a été faite à l'Assemblée nationale même, à cette époque. Le débat a été terminé à ce moment-là et vous ne l'avez d'ailleurs pas repris à ce moment-là, parce que vous étiez d'accord avec le fait qu'il ne s'agissait pas d'un élargissement de la clause. Il ne faudrait pas revenir maintenant sur cet aspect d'une question qui a été réglée dès les mois de juin et juillet 1977.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaudet.

M. Beaudet: M. le Président, je voudrais faire remarquer au ministre — je pense bien que c'est une petite erreur technique — que ce qu'il vient de nous lire, c'est un mois et quatre jours après avoir lu la clause à l'Assemblée nationale. Naturellement, lorsque nous avons négocié avec le gouvernement, il y a eu des négociations qui ont suivi. On a esssayé de nous le changer pour les $120 000 000 que nous promettait M. Pierre Angers qui était le mandataire. Il nous a promis, devant 2000 personnes, que ce que le gouvernement augmenterait, cela représenterait $120 000 000. A ce moment-là, on commençait à trouver que cela avait du bon sens et que cela touchait pas mal au 75% qu'on avait demandé, mais les $120 000 000 ne sont pas venus eux non plus. (12 h 30)

Naturellement, le ministre des Transports du temps nous avait écrit dans une lettre que, selon lui, ce n'était pas cela que cela voulait dire. C'est vrai qu'il nous a écrit cela. Le document est là et il est signé, mais nous avons une lettre du 14 juin du ministre Lessard qui nous dit qu'il connaît parfaitement le dossier et profondément et qu'il s'engageait à le signer lui-même. D'ailleurs, quand il l'a lu, si M. Lessard connaissait très bien le dossier, je me demande pourquoi il n'aurait pas écrit "en haut de la ligne d'infrastructure". Il me semble que c'est évident que cela aurait dû être ajouté à ce moment-là parce qu'il nous dit qu'il connaît parfaitement le dossier.

M. de Belleval: Juste un point, M. le Président, pour terminer là-dessus. Justement, cette clause a été rédigée à la main, rapidement, dans un climat tendu, comme on le sait. Tout de suite après le paraphe, la correction a été faite. D'ailleurs, si vous-même aviez considéré, à ce moment-là, que le ministre, quelques minutes après avoir signé de bonne foi cette entente et avec votre accord, de mauvaise foi revenait sur ses engagements, les camions ne seraient pas repartis ou, s'ils étaient repartis, ils seraient revenus.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Beaudet: Cela s'est fait un mois après.

M. Gratton: M. le Président, ce n'est sûrement pas essentiel à la solution du problème qu'on revienne là-dessus, mais je voudrais bien que cela soit clair dans l'esprit de tout le monde qu'en juin 1977 il y avait une manifestation devant le parlement contre un ministre des Transports qui avait fait un certain nombre de promesses, qui avait pris un certain nombre d'engagements auprès des

camionneurs; un ministre des Transports qui se disait bien au courant de la situation, qui connaissait son dossier et qui nous avait même dit, à l'Assemblée nationale ici: Ne vous inquiétez pas; moi, je vais régler cela, cette affaire-là, parce que je connais cela, le transport et nous, du Parti québécois, les petits travailleurs et les camionneurs, on va les protéger.

La façon dont le ministre d'alors a protégé les camionneurs, c'est qu'il est allé écrire de sa propre main les mots suivants: "Que 75% du transport de matières en vrac sur les contrats donnés par le ministère des Transports soient effectués via le poste d'affectation". Et c'est initialé L.L., Lucien Lessard. Comme le ministre lui-même le soulignait, si le ministre qui connaît bien son dossier avait voulu limiter cela à ce qui existait déjà dans la réglementation de toute façon, c'est-à-dire 75% au-dessus de la ligne d'infrastructure, il aurait écrit les trois mots "au-dessus de la ligne d'infrastructure"; c'est cinq mots. Mais non, il a voulu faire croire... Là, je n'étais pas partie aux discussions, mais j'aime autant croire M. Dubé, le président de l'association, qui nous dit aujourd'hui que leur compréhension de cela, c'était qu'on leur accordait 75%. Qu'on ait eu tort ou raison de le faire, cela a peu d'importance pour les besoins de la discussion, mais on l'a fait croire aux dirigeants de l'ANCAl qui, eux, ont rapporté cela à leurs membres, les 2800 qui étaient devant le parlement, et c'est à partir de cela que ces gens-là sont repartis chez eux. Un mois et demi plus tard... Quand le ministre nous dit: Comment se fait-il qu'ils ne sont pas revenus? Je pense qu'il y a plusieurs explications dont certaines nous ont été données par Me Beaudet.

Je reviens là-dessus simplement pour avertir les camionneurs artisans qu'on va être en période électorale très bientôt, qu'une élection s'en vient, qu'il va y avoir des politiciens, des péquistes, des libéraux et des unionistes, qui vont prendre des engagements électoraux...

M. Goulet: Beaucoup.

M. Gratton: Beaucoup d'unionistes, me dit le député de Bellechasse.

Une Voix: Ceux qui ne sont pas passés au Parti libéral.

M. Gratton: Je dis aux camionneurs artisans de se rappeler les engagements qu'on a pris du côté du Parti québécois et de juger les engagements, autant les nôtres que ceux que voudront bien faire les membres du gouvernement actuel, avant d'accorder leur appui à la prochaine élection. Le problème du camionnage en vrac n'a pas été réglé au cours des quatre dernières années; au contraire, il a été empiré. On a fait croire des choses aux camionneurs artisans, à leurs dirigeants. Les $120 000 000 dont vous parlez, ce n'est pas la première fois qu'on en entend parler non plus dans les cercles qui s'occupent de camion- nage. On a fait avaler tout cela et maintenant le grand défenseur de l'entreprise privée, le député de Charlesbourg, c'est la meilleure de toutes, vous dit que le gouvernement péquiste va maintenant devenir le défenseur de l'entreprise privée après qu'il l'a bafouée depuis quatre ans dans tous les textes de loi, dans toutes les réglementations qu'il a adoptées. On ne fera pas trop de politique ce matin, mais je dirai simplement aux camionneurs artisans et à tous les autres camionneurs: Méfiez-vous.

Quant à nous, M. le Président, on pense que les recommandations que l'association fait ce matin méritent beaucoup plus que d'être repoussées du revers de la main comme le fait le ministre en présentant son document et en laissant savoir aux représentants, ici ce matin: On verra. Nous aussi, on verra. On va analyser la situation à la lumière, bien entendu, des représentations de l'association, mais aussi à la lumière de ceux qui viendront nous dire des choses complètement différentes de ce que vous nous dites ce matin. Chose certaine, on ne vous fera pas accroire, si jamais on est placé dans une situation semblable, qu'on vous donne 75% au-dessus de l'infrastructure, quand on n'a aucune intention de vous le donner, simplement pour se débarrasser du problème qu'on peut avoir dans l'immédiat.

Je terminerai, M. le Président, en posant une question au représentant de l'association. Le ministre l'a posée d'une façon différente tantôt. En revenant toujours au fond du problème qui est qu'il y a trop de camionneurs qui détiennent un permis, il y a, nous dit-on, 11 500 détenteurs de permis de camionnage en vrac, dont 4000 font partie de votre association, il y en a donc 7500 qui ne sont pas représentés ce matin et qu'on va probablement entendre au cours des trois prochains jours. Ce n'est pas cela? En tout cas...

Ce que je voudrais savoir, c'est si l'association, votre association à vous serait disposée à un moment donné à discuter et peut-être bien à négocier avec les autorités compétentes des modalités en dehors de toutes les recommandations que vous faites quant aux secteurs de travail réservés, à l'utilisation des postes d'affectation et tout cela, pour en venir à réduire le nombre de permis. Je n'entends pas là seulement le nombre déterminé des autres que les camionneurs artisans, mais en incluant ceux que détiennent présentement les camionneurs artisans. Ce n'est sûrement pas — j'y reviens — une méthode qui serait autre aussi que celle obtenue dans le cas du règlement pour le placement dans l'industrie de la construction. Cela pourrait être un rachat de permis. Je pose simplement une question très générale. Est-ce que votre association serait prête à discuter sur cette base?

M. Beaudet: M. Gratton, il est évident que nous sommes ouverts à tout dialogue avec les autorités compétentes et c'est bien évident que le nombre de détenteurs de permis est de 8692. C'est parce que parfois on est porté, vu le problème, à mêler le nombre de camions et le nombre de

détenteurs. En 1972, le ministre Pinard du temps et les autorités de l'association avaient trouvé une façon moins cruelle, diminuer le nombre de camions au lieu de diminuer le nombre de détenteurs. C'est un petit peu moins douloureux parce qu'avec un camion on a démontré qu'on pouvait vivre convenablement. Ceux qui ont dit à la Commission des transports qu'il y avait des besoins épouvantables, qui sont allés chercher des camions, des attestations et des permis, c'était effrayant comment il y avait du transport à faire; il faudrait qu'ils commencent par réduire le nombre de camions avant de penser à réduire le nombre de détenteurs et c'est dans cet esprit que nous sommes prêts à négocier de n'importe quelle question. Mais, comme vous avez vu, après un certain moment, peut-être qu'avec l'Association nationale des camionneurs artisans, on a commencé à dire qu'elle était hors du contexte réglementaire, les postes d'affectation, qui sont des corporations puis un peu des bureaux de placement, vont négocier avec le gouvernement. Eux autres sont isolés régionalement. Il serait bon que les dirigeants de postes d'affectation et ceux des associations représentant les camionneurs du ministère des Transports se rencontrent franchement et peut-être qu'on peut trouver une solution. Naturellement, nous mettons de l'avant nos demandes. Nous autres, nous sommes là pour protéger les transporteurs et nous demandons pour les transporteurs, mais nous sommes ouverts à tout dialogue. Nous sommes ouverts aussi à toute commission d'enquête sur les administrations de camionneurs artisans au Québec et surtout ce qui a touché le vrac depuis trois ans. Nous sommes ouverts en n'importe quel temps à dialoguer devant une commission d'enquête, devant vous, devant n'importe qui, pourvu qu'on nous donne le droit de parole. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Bien sûr, si nous sommes tous ici ce matin, c'est parce qu'il y a des problèmes; quant à moi, ces problèmes reposent sur trois points plus importants peut-être que d'autres. D'abord, je soutiens encore qu'une partie de ce problème est reliée au manque de travail et je soutiens encore que les budgets consentis au ministère des Transports ont diminué. Même si, en chiffres, de $755 000 000, nous sommes allés à $765 000 000, je soutiens encore qu'en chiffres nets de travaux réalisés, le ministre ne devrait pas s'en vanter, cela a diminué et on a une perte nette de 8%.

On a une augmentation de budget de quelque un pour cent, mais au niveau de l'inflation, du coût des travaux, ainsi de suite, on a une augmentation de 9% à quelque 19%. Il y a une diminution nette de 8%. Là-dessus, je soutiens que cela n'a pas aidé. Quand vous dites que les budgets ont augmenté, ce n'est pas en augmentant le budget de 1% quand l'inflation augmente... En termes de travaux réalisés — on va parler pour se comprendre — dans le champ, cela a diminué.

M. de Belleval: Non, on a augmenté, M. le député.

M. Goulet: En tout cas!

M. de Belleval: Le chiffre — je le rappellerai très brièvement — c'est de $48 000 000 à $58 000 000 de contrats pour le transport en vrac.

M. Goulet: En termes de travaux au niveau de la province, vous avez dit — on ne commencera pas à aller chercher les autoroutes et le transport — en chiffre total, $765 000 000 comparativement à $755 000 000. Il y a donc une augmentation de $10 000 000, ce qui veut dire 1,3% ou 1,4%. Le taux d'inflation, tout le monde s'entend pour dire qu'il a augmenté d'environ 9%. Donc, il y a une diminution nette en termes de travaux réalisés.

M. de Belleval: Pas pour le vrac.

M. Goulet: Pour les travaux réalisés; je reviens exactement sur le point que vous avez touché en réponse au député de Gatineau, un minimum de 8%.

M. de Belleval: Pour cela, d'accord.

M. Goulet: Cela, c'est un premier problème qui est attribuable, non pas à Pierre, Jean, Jacques, mais au gouvernement actuel et je pense que vous devrez assumer votre part de responsabilités là-dessus.

Il y a également le non-respect des ententes — on y reviendra tout à l'heure — sur au moins quatre points. C'est facile de dire qu'on l'a respecté alors qu'on ne l'a pas respecté; à un moment donné, il faudra qu'on tranche la question. Il y a au moins trois ou quatre points sur lesquels j'aimerais revenir.

Troisièmement, après avoir pris connaissance de ces mémoires et après avoir pris connaissance du document qu'a déposé le ministre, quelle est la définition d'un camionneur artisan. Quand on a contingenté dans l'entreprise de la construction — qu'on soit pour ou contre — on a défini ce qu'était un travailleur de la construction. Un travailleur, un permis. Le problème du camionnage en vrac, ce n'est pas cela. On peut avoir, à un moment donné, un camion et deux chauffeurs, l'épouse peut être propriétaire d'un camion, le fils peut être propriétaire du camion. Dans la construction, le menuisier qui va travailler, c'est lui qui tient le marteau et c'est lui qui a les compétences, tandis que le propriétaire du camion, ce n'est pas nécessairement lui qui le conduit, ce n'est pas nécessairement lui qui possède les compétences.

Comme le disait M. Beaudet — vous avez posé la question à trois ou quatre reprises — comment doit-on faire pour diminuer les permis? Je dis qu'il faudrait d'abord définir ce qu'est un camionneur artisan et le définir clairement. On l'a défini, mais un camionneur artisan, cela peut être un camionneur avec trois camions, cela peut être l'épouse qui ne le conduit jamais; c'est son droit, on est dans un pays libre, mais, à un moment donné, il

faut définir cela. Si je prends un permis pour aller travailler sur la construction demain matin, c'est moi qui vais aller travailler sur la construction; je ne prendrai pas un permis au nom de mon fils ou au nom de mon épouse. Il y a vraiment un problème au niveau de la définition d'un camionneur artisan, au niveau du principe à savoir qu'est-ce qu'un travailleur.

M. de Belleval: ... vous avez remarqué, n'est pas favorable à ce qu'on prenne des analogies dans le secteur de la construction.

M. Goulet: J'ai bien dit, M. le Président, qu'il y a un problème, on cherche une solution. Je pense qu'il y a vraiment un problème au niveau de la définition du travailleur et M. Baudet en a touché un volet tout à l'heure. D'un autre côté, est-ce que l'ANCAl nous dit, ce matin, que la seule façon — je voudrais m'assurer de vos propos — de régler le problème serait d'abord l'exclusivité des commandes pour un secteur donné, le principe d'exclusivité? Est-ce que la seule façon de régler le problème serait également le principe de l'obligation d'être membre, comme on le voit dans d'autres syndicats? Par exemple, à l'UPA, pour bénéficier, on doit obligatoirement être membre, tandis que, chez vous, on n'est pas obligé d'être membre pour faire affaires avec un poste. Est-ce que, ce matin, vous soutenez ces deux principes à savoir que la seule façon de régler le problème serait l'exclusivité dans un secteur donné — il y a là un très grand principe — et l'obligation d'être membre, ce qu'on retrouve dans d'autres syndicats?

A la lecture de votre mémoire, j'ai cru déceler que c'est ce que vous demandiez.

M. Beaudet: Evidemment, c'est en partie la solution que vous venez de nous expliquer. C'est vrai que nous réclamons que l'association majoritaire ait au moins le droit de conduire tout en respectant la minorité dans le partage équitable du travail, mais que lorsqu'on fait des demandes à la Commission des transports pour des taux, par exemple, que tout le monde partage également.

Dans les associations majoritaires, on vient bien nous dire que les postes d'affectation peuvent être neutres. Je suis bien d'accord que le poste qui distribue le travail peut être neutre, mais il ne faut pas oublier que le poste est une association sans but lucratif qui détient le permis de poste. Et quel que soit son nom, l'association majoritaire devrait être reconnue. Dans le moment, le poste d'affectation n'est qu'une association majoritaire sans but lucratif. (12 h 45)

C'est un peu dans ce sens-là qu'on veut aller. Après avoir essayé toutes sortes de choses, on a l'impression que la seule solution vitale c'est les secteurs de travail réservés et l'exclusivité. Quand on parle d'exclusivité, c'est surtout sur les deniers publics. Lorsque c'est dépensé par le gouvernement, notre gros employeur, comme les employés de la construction vis-à-vis leur gros employeur, qu'on ait le droit de négocier. C'est vrai qu'on a 78% du transport, mais aux conditions uniques de l'employeur. Ce qu'on veut, ce sont des conditions pour négocier d'égal à égal, et le seul moyen pour l'obtenir, c'est le secteur de travail défini. On nous dit: Vous êtes des gens d'affaires. C'est bien beau, des gens d'affaires, mais on est de la petite entreprise et il y a bien des classes dans les gens d'affaires. Nos gens font partie de la petite entreprise qui ont toutes les caractéristiques beaucoup plus d'un salarié que d'un homme d'affaires qui possède des flottes de camions.

D'ailleurs je lisais, dans la revue de l'Association du camionnage général du Québec, qui présente un mémoire peut-être dans un autre sens, le gros problème dans son industrie c'est la double concurrence créée par le compte propre et par les autres transporteurs.

M. Goulet: La première question que j'avais à formuler était de savoir la définition d'un camionneur artisan. Est-ce que vous en viendriez à recommander au ministre ou aux membres de la commission qu'un camionneur artisan soit celui qui conduit son propre camion? Voulez-vous en revenir à cette définition-là? Est-ce que c'est l'intention de l'ANCAl d'aller jusque là?

M. Beaudet: Ce n'est pas...

M. Goulet: Si vous permettez, M. Beaudet, il y a des problèmes qui émanent de là et je vous donne un exemple. Il y a des entrepreneurs qui ne sont pas contents et qui n'étaient pas contents du service offert par des camionneurs en vrac. Ils ont loué des camions et ils nous donnaient comme réponse — je prends un entrepreneur entre autres — : Lorsqu'on a permis de mettre deux ou trois chauffeurs sur un camion et de le faire fonctionner pendant peut-être 24 heures — je parle ici d'un cas de la baie James — au bout d'une semaine ou quinze jours, le camion a besoin de réparation. Quand il n'y avait qu'un seul conducteur, il faisait ses dix ou onze heures, ensuite il réparait son propre camion et le lendemain, il était intéressé à donner un bon service. Au moment où on a permis de mettre deux ou trois chauffeurs sur le camion, après quinze jours le camion a besoin de réparation. Qu'est-ce qu'on dit? On part cinq ou six camionneurs et on va descendre au bord, comme on dit dans le métier. On va faire réparer le camion, on descend deux ou trois jours et on dit: On ne peut pas monter là pour jeudi, on va attendre à la semaine prochaine.

A l'autre bout, l'entrepreneur commence à crier et à dire: je n'ai pas de service. Que faites-vous? Ou vous envoyez d'autres camions et, à un moment donné, vous êtes trop sur la job. Ou, encore, le contracteur dit: Un instant, je vais avoir du service, je vais aller me louer des camions et je vais être boss.

Quand je parlais d'un homme un permis, je me demande s'il ne faudrait pas en venir là. Je ne vous dis pas que je suis favorable à cela, mais je pose la question: Est-ce qu'on devra en venir là?

M. Beaudet: Cela dépend, M. Goulet, du contexte, dans quelle législation on va évoluer. Cela dépend des autres normes qui vont venir avec. Là, dans le moment, l'ANCAl avait écarté cette possibilité, parce qu'on voyait, nous, tous les transporteurs en vrac aux postes. Il y a des entrepreneurs, comme on a dit tout à l'heure, même des avocats, toutes sortes de gens ont des camions. Alors, on prévoyait que, pour ne pas punir ces gens-là, qui se sont regroupés et à qui on a dit de se regrouper en 1977, qu'ils seraient peut-être mieux d'avoir le secteur de travail réservé, quitte à faire évoluer les premiers camions, la priorité aux premiers camions, que l'on respecte les camionneurs, mais en autant que l'ouvrage passe par là. Si l'ouvrage ne va pas là, ça ne donne rien d'être aux postes d'affectation.

M. Goulet: M. le Président, si vous permettez, je pense que ce mémoire est assez important — les autres aussi — on va prendre les points de l'entente. On va en prendre quelques-uns. On ne prendra pas les seize.

Le Président (M. Jolivet): M. le député... M. Goulet: Oui?

Le Président (M. Jolivet): ... avant de continuer, il faut dire qu'on doit terminer vers 13 heures, pour reprendre vers 15 heures...

M. Goulet: Oui, d'accord.

Le Président (M. Jolivet): ... mais je voudrais savoir d'abord s'il reste beaucoup de questions à poser pour éviter de revenir cet après-midi, parce qu'on s'était donné une heure. On l'a dépassée largement jusqu'à maintenant.

M. Bertrand: M. le Président, de ce côté-ci, s'il fallait prolonger cinq ou dix minutes pour permettre à l'ANCAl de terminer, on est tout à fait d'accord.

M. Goulet: M. le Président, quant à moi, il y a des mémoires qui ont une page ou deux, j'imagine qu'on va s'en tirer en moins d'une heure. Par contre, le premier mémoire est...

Le Président (M. Jolivet): Selon l'habitude de la présidence...

M. Goulet: ... le débat...

Le Président (M. Jolivet):... on indique que ce n'est pas si vrai que ça. En tout cas...

M. Goulet: Non? Si vous permettez, je vais essayer d'abréger, M. le Président.

On va en prendre quelques-uns, prenons le point 2 de l'entente, par exemple. On dit: Toutes les réquisitions venant des différents ministères passent pas le poste d'affectation. Le transport à faire effectuer en regie par les différents ministères sera confié à 100% au poste d'affectation.

L'honorable ministre des Transports nous dépose, ce matin, un document et il marque à côté: Oui, cela a été respecté. Est-ce que cela a été respecté, oui ou non? Vous n'avez pas l'air d'accord avec le point 2.

M. Beaudet: II y a certaines choses et certains moyens de contourner ça. Là, on va être obligé d'attaquer un peu le ministre de l'Energie et des Ressources qui vient de faire son entrée.

M. Goulet: II n'est pas gras...

M. Beaudet: Ce qui est arrivé...

M. Goulet: ... ne lui faites pas trop mal.

M. Beaudet: Vous voyez comment on interprète le point des travaux en régie. Au ministère de l'Energie et des Ressources, l'an dernier, il y avait $15 000 000 de travaux en régie. Nos camionneurs bénéficiaient de ça. Cette année, il y a $8 000 000 ou $7 000 000 qui ont été pris et qui ont été subventionnés avec des ententes fédérales-provinciales aux compagnies forestières en leur donnant le contrôle du transport.

Nous passons de $15 000 000 à $7 000 000. Le ministre nous répond: Vous allez l'avoir, tout le travail. C'est 85% des transporteurs artisans. C'est vrai qu'on va l'avoir, le travail, mais aux conditions strictes de la compagnie qui est là-bas, ou en dessous des taux, parce qu'elles peuvent produire, elles, en dessous des taux. C'est très important. Elles peuvent prendre leurs propres camions, créer un emploi, avoir des subventions là-dessus et, de cette façon, elles ne sont pas intéressées à engager des camionneurs. Si elles les engagent, c'est à leurs seules et uniques conditions. Tandis que quand les travaux étaient faits par le ministère et que ça passait par le poste, il y avait des normes qui étaient respectées. Les taux étaient respectés, l'emploi des camionneurs était respecté, parce que ça passait par le poste d'affectation. Mais quand on envoie $8 000 000 aux compagnies multinationales et on leur dit: Maintenant, vous allez prendre le contrôle du transport et qu'on se présente là, vous allez avoir des exemples de ce qui s'est passé dans les postes d'affectation avec les millions qui ont été envoyés dans les compagnies de transport.

M. Goulet: M. le Président, je voudrais être sûr d'avoir bien compris. Je ne voudrais pas que cela ait l'air d'un contre-interrogatoire. Est-ce que vous avez bien dit, M. Beaudet: C'est vrai qu'on va l'avoir, le 85% ou c'est vrai qu'on peut l'avoir?

M. Beaudet: C'est-à-dire, on l'a, mais non pas par l'intermédiaire du poste. L'employeur peut nous appeler et dire à n'importe quel camionneur: Viens ici, toi, et je t'engage pour la journée. Non, tu ne fais pas l'affaire, j'en engage un autre le

lendemain. Non, pas toi, cela ne marche pas. Il a tous les droits vis-à-vis du camionneur tandis que le camionneur qui s'en va là est à la merci de l'employeur. C'est une règle qui n'est plus valable en 1980. C'est ce qu'on dit au gouvernement. C'est bien beau de nous dire qu'on va avoir 80%, mais à quelle condition. Il se peut que celui qui reçoit les subventions s'achète des camions pour faire les contrats vu que l'entente dure jusqu'en 1984. Cela veut dire que nos travaux en régie au ministère de l'Energie et des Ressources, cette année, passent de $15 000 000 à $7 000 000 ou $8 000 000. Alors, au lieu de parler de travaux de $15 000 000, on tombe à $7 000 000. En 1980, on a augmenté le nombre de nos camionneurs et on diminue les secteurs de travail. On pense que la clé, c'est le secteur de travail, même en régie.

M. Goulet: M. le Président, au niveau de la clause 75-25, je pense qu'on en a assez discuté. Là-dessus, il s'agit de savoir si c'est bien ce que le ministre voulait signer ou si le ministre a signé cela pour se débarrasser des camions qui étaient devant le parlement. On ne le saura peut-être jamais, mais en tout cas... Je ne fais pas...

M. de Belleval: Est-ce que je peux avoir une permission de votre part, M. le député?

M. Goulet: Oui. On ne sait pas les intentions, on n'était pas là. Il y a seulement celui qui l'a signé qui connaît ses intentions.

M. de Belleval: Simplement pour terminer sur ce point — vous avez raison, on ne peut pas s'éterniser là-dessus — j'aimerais quand même déposer la lettre de M. Lessard à M. Gérard Oubé, le 29 juillet 1977, qui faisait le point sur cette question. On laissera, évidemment, aux lecteurs de cette lettre le soin, comme vous venez de le dire, de juger de l'un ou de l'autre. Je voudrais seulement lire un passage clé de cette lettre, à la page 3. On dit: "J'ai toujours affirmé tant à l'Assemblée nationale qu'en conférence de presse, ainsi qu'au cours des négociations que cette clause serait maintenue et extensionnée à d'autres ministères à la suite d'ententes avec mes collègues. Pour le confirmer, je n'ai qu'à relater les faits suivants: Lorsque nos mandataires à la négociation restreinte ont eu fini de rédiger la convention, vos représentants sont retournés devant vous et vos membres participants pour soumettre leur texte. " Le texte auquel on a fait allusion tantôt. "Il avait été entendu que, si vous étiez d'accord avec cette proposition, nous serions appelés, vous et moi, à signer l'entente. Cet accord ayant été donné, je me suis présenté pour signer l'entente. Je l'ai lue, et tous les camionneurs autour de la table étaient d'accord avec son contenu. C'est seulement lorsque vous et moi avons commencé à signer qu'un camionneur a signalé que la fameuse clause 75-25 n'apparaissait pas dans le document." On l'a vu dans le document original, elle n'apparaît pas. "Par courtoisie envers ce camionneur et conscient de l'importance de la reconfirmation de cette clause pour les camionneurs, j'ai signé de ma main sa reconduction." On voit que, justement, cela a été fait à la main. "Mon chef de cabinet, M. Régean Séguin, a alors souligné de nouveau que c'était là la même clause 75-25, telle que connue et appliquée jusqu'alors. Cela a été dit sur place. Cela a été compris par tout le monde, tous les participants y ont acquiescé, de même que vos conseillers juridiques, MM. Beaudet et Piuze. Lors de notre rencontre du 19 juillet, Me Beaudet, votre conseiller juridique, n'a pas nié ces faits..." et ça continue.

Alors, on voit très bien dans quelles circonstances, comme je l'ai expliqué tantôt, cette fameuse clause s'est retrouvée dans le texte original.

M. Goulet: M. le Président, je suis bien d'accord...

M. de Belleval: Et je vous remercie de m'avoir permis de lire cette lettre, M. le député.

M. Goulet: ... je ne mets absolument pas la bonne foi du ministre du temps en doute, mais il faut se rappeler, quand ces gens sont venus ici, la chaleur qu'il faisait, l'activité qu'il y avait autour du parlement: c'est un peu comme quand on négocie un contrat, M. le Président. Le camionneur s'en va chez un marchand de camions et il dit: Qu'est-ce que tu demandes pour ce dix-roues? $40 000, $42 000? Bon! On négocie, on revient; on négocie, on revient. A un moment donné, on lui dit: Si tu me le donnes avec tel équipement, un jacob, des miroirs, des pneus plus gros, je vais te signer ça à $40 000. D'accord? Ecris-moi ça sur le contrat. C'est comme cela que ça c'est passé.

Mais ce n'étaient pas deux enfants d'école de 12 ans ou de 15 ans qui signaient une entente, c'était d'une part un ministre, un membre de l'exécutif. A un moment donné, qu'on prenne la peine, deux mois après, d'expliquer ce qu'on voulait dire dans une lettre... On m'a toujours dit: Avant de signer, penses-y deux fois. On peut toujours revenir sur sa parole, ça paraît mal, on peut toujours le faire, mais, sur sa signature, quand on commence à s'expliquer, ce n'est pas le "fun". C'est là où, je pense, il y a eu vraiment un vice. Que ce soit fait, je comprends le contexte, il y avait bien du monde dans la rue, autour du ministre, etc., mais ce n'était pas un petit contrat de $0.55, c'était un gros contrat que le ministre signait. Il disait à 2500 camionneurs, et à des gens qui en représentaient peut-être 8000: Les boys, allez-vous en à la maison, c'est réglé, l'affaire, je vous l'accorde. On négocie un contrat et, à un moment donné, on veut avoir des pneus plus gros et le vendeur dit: D'accord, je vais te les accorder. C'est ça qui s'est passé.

C'est malheureux, mais, d'après moi, le problème est là. D'accord, il y a plusieurs autres points comme le gel des permis, on peut en discuter. Il y a le transport effectué en bas du taux. Apparemment, même le ministère aurait fait effec-

tuer du transport comme ça, venant même en contradiction avec les taux que la commission a elle-même fixés.

On nous disait à l'article 9, M. le Président, le ministre révisera la notion de permis de location afin qu'elle ne nuise pas aux propriétaires de permis de camionnage en vrac. Le ministre nous dit: La réglementation qui existe dans le secteur de la location a résolu le problème. Dans la réponse que vous nous donnez ce matin dans votre document, ce n'est pas ce qu'on nous dit dans ce document-là. Cela ne semble pas avoir résolu le problème.

Ce sont là, M. le Président, les faits. Il y a des gens en place qui ont signé une entente parce que ça pressait. On dit: Quand ça presse, c'est le temps de prendre son temps, et ce n'est pas ça que le ministre a fait à ce moment-là. Tout simplement, on a signé une entente. Mettez-en des points. Le vendeur qui dit: Envoie, mets-en, mets-en, mets-en et, un moment donné, quand est venu le temps de payer, on n'avait pas ce qu'il fallait. C'est là le problème, M. le Président. Il y a bien d'autres petites choses autour de ça, mais soyons donc conscients. Alors, ou on revient et on écrit un nouveau... Il y a des gens de part et d'autre qui sont de bonne foi et qui nous disent: C'est comme ça que cela s'est passé et ce n'est pas ça qui s'est dit. Justement, quand on interprète un contrat, si les paroles ne font pas, on prend les écrits. Les paroles s'envolent, les écrits restent. Ce matin, c'est ce que ces gens-là font, ils prennent les écrits du ministre du temps. Les écrits disent: 75-25, les "boys" on vous donne tout ça et, ce matin, le gouvernement actuel dit: Non, ce n'est pas tout à fait ça qu'on voulait dire, comme dans l'annonce qu'on voit. C'est là qu'est le problème.

C'est malheureux, le ministre sourit, je comprends qu'il est de bonne foi, mais il faudrait le régler, ce problème-là, un moment donné; ça fait deux ans. Depuis que ça a été signé en 1977, on est revenu sur sa parole, même pas sur sa parole, sur sa signature.

M. le Président, je sais qu'il est une heure. Quant à moi, j'aimerais revenir cet après-midi encore avec l'ANCAI. J'aurais d'autres questions à formuler également au ministre, et je pense que...

M. de Belleval: M. Bérubé voudrait aussi répondre cet après-midi, M. le ministre de l'Energie et des Ressources, pardon.

Le Président (M. Jolivet): Maintenant, juste pour se quitter sur une entente, j'aimerais savoir — toujours en tenant compte que nous devons siéger de 15 à 18 heures et de 20 heures à épuisement de la liste qui est ici, vous avez encore dix autres mémoires à entendre — si vous vous fixez un temps limite cet après-midi pour terminer avec les gens de l'association qui sont devant nous ou si on file jusqu'à ce qu'il y ait épuisement des questions.

M. Gratton: M. le Président, si vous me permettez de suggérer, on pourrait peut-être nous limiter à un intervenant par parti. On a parlé du ministre de l'Energie et des Ressources, de notre côté, il y aurait le député de Charlevoix et, bien entendu, le député de Bellechasse qui a déjà commencé mais qui n'a pas terminé.

Le Président (M. Jolivet): Donc, nous pouvons suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

Suspension de la séance à 13 h 8

Reprise de la séance à 15 h 7

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît.

Nous allons reprendre les travaux de la commission des transports. Au moment où nous nous sommes quittés, à 13 heures, M. le député de Bellechasse m'a indiqué qu'il laisserait le tour normal de parole pour ensuite revenir vers la fin.

Est-ce qu'il a d'autres personnes qui veulent intervenir, à moins que M. le député de Bellechasse pose sa question tout de suite?

M. Goulet: Comment ça, il n'y a plus personne qui...

Le Président (M. Jolivet): II va y en avoir d'autres, semblerait-il.

M. Goulet: S'il venait dans le décor, il y en a plusieurs qui perdraient...

Une Voix: ...

Le Président (M. Jolivet):...

M. Goulet: M. le député de Shefford me parlait de...

Le Président (M. Jolivet) Tenez ça mort.

M. Goulet:... parlait de M. Drapeau. C'est bien mieux qu'il ne vienne pas, parce qu'il y en a plusieurs qui perdraient leur "job" à ce moment-là!

M. le Président, cela va.

Le Président (M. Jolivet): Je vous ai pris au dépourvu là.

M. Goulet: D'être un bon joueur et donner ma place aux autres. On continue, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Goulet: On disait ce matin qu'au niveau des réquisitions je voulais faire dire aux gens présents... Le ministre, dans son document, nous disait que toutes les réquisitions auraient dû passer par les postes d'affectation, et il semblerait que ça n'ait pas toujours été le cas. Au sujet de la clause 75-25, comme je disais avant l'heure du

lunch, on en a beaucoup discuté et je pense que c'est le point extrêmement important, j'aurais une question. Dans votre rapport — je m'adresse aux représentants de l'ANCAl — vous n'avez pas l'air satisfait de ce qui a été fait quant au gel des permis. Lorsque vous aviez rencontré M. Lessard, en 1979, il avait promis qu'il verrait à ce gel de permis. Vous semblez dire dans votre rapport que cela n'a pas été fait. Par contre, M. le ministre nous a dit ce matin que cela a été fait. Qu'est-ce que vous avez à reprocher là-dessus au niveau de ce gel des permis?

M. Piuze: M. le Président, effectivement, lors de la signature avec M. Lessard, il a été question du gel des permis et il est vrai que le principe du gel des permis on le retrouve dans le règlement actuellement en vigueur. Au moment où on le retrouve dans le règlement actuellement en vigueur, il reste qu'à la Commission des transports du Québec, au moment du gel, il y avait beaucoup de requêtes qui étaient déjà pendantes, sur lesquelles évidemment la commission a statué. Il y a aussi le phénomène suivant. Si yous gelez les permis de vrac d'une main aux titulaires, de gens qui n'ont que des permis de vrac, qui n'en ont pas du tout, et qui en demandent, il faudrait peut-être les geler aussi pour ceux qui détiennent des permis émis en vertu de l'ordonnance générale sur le camionnage? Parce que le gel que vous faites pour des gens qui ne détiennent pas de permis, qui ne peuvent plus en obtenir, si vous l'ouvrez à ceux qui détiennent des permis du général, vous avez peut-être 1200 ou 1500 entreprises qui ont utilisé ce droit qui était prévu dans le règlement. Au moment où on pensait que tout était réglé — cela on le dit dans notre mémoire — alors qu'il y a un arrêté en conseil qui est repassé et dans lequel on donne le droit encore à ces titulaires de permis de venir refaire des demandes, cela fausse le principe, bien sûr, du gel des permis. C'est cela qu'on voulait dire.

M. Goulet: II y a également un autre point auquel nous n'avions pas eu de réponse avant l'heure de l'ajournement. Au niveau du fameux problème de la location, dans votre mémoire, vous proposez quelque chose à la page 24, qui a beaucoup de bon sens, mais toujours dans le document présenté par le ministre, on nous dit que la réglementation qui existe actuellement pour le secteur a résolu le problème. D'après le gouvernement, le problème est résolu, d'après vous autres, il ne l'est pas; même vous donnez des cas spécifiques, vous parlez de la SKW, mais on peut parler de...

M. Piuze: C'est cela. Effectivement, avec votre permission, M. le Président, la location est un problème dans le camionnage en vrac, probablement pas seulement là. En demandant à l'Association du camionnage, les gens ont probablement le même problème. Seulement, il est évident que si par la location vous pouvez passer à côté de la réglementation, c'est peut-être injuste pour ceux qui sont dans le milieu qui vivent professionnel- lement du camionnage en vrac. Lorsque le ministre a signé l'entente, il a parlé de la location, il nous a dit que, effectivement, il prendrait des mesures — c'est l'article 9 — "Le ministre révisera la notion de permis de location afin qu'elle ne nuise pas aux propriétaires de permis de camionnage en vrac."

Or, la location actuellement est utilisée probablement comme jamais dans le domaine du vrac et probablement ailleurs aussi dans d'autres secteurs du transport. Ce qu'on voudrait, c'est que la location ne puisse être utilisée que dans la mesure où les titulaires de permis de vrac inscrits auprès des titulaires de permis de courtage que ce soit de postes ou de sous-postes, ne sont plus disponibles, qu'on puisse louer parce qu'autrement vous passez à côté des taux, vous passez à côté des clauses, vous passez à côté d'un paquet de règlements auxquels le type qui a un permis de vrac est soumis.

M. Goulet: M. le Président, j'aurais deux courtes dernières questions. On avait parlé du béton bitumineux lors de la réunion qui avait eu lieu au Hilton et je vous pose la question directement: Est-ce qu'il est vrai que vos membres aiment autant ne pas faire de transport de béton bitumineux et que c'est une des raisons pour lesquelles le gouvernement — je pense que c'était dans le temps du précédent gouvernement — avait enlevé le transport de béton bitumineux, parce que les gars étaient plus ou moins intéressés à en faire? Est-ce que c'est vrai? (15 h 15)

M. Piuze: Concernant le béton bitumineux, nos gars sont prêts à en faire le transport. D'ailleurs, dans le passé — je me reporte en 1974; je vous donne un exemple — on avait eu un problème avec la compagnie Sintra à Drummondville. A l'époque, il n'y avait pas de taux horaire fixé par la Commission des transports du Québec. C'étaient des taux à la tonne/mille. Nos camionneurs transportaient, passaient une journée de dix ou douze heures sur le contrat et gagnaient $52 ou $60 par jour. Cela n'avait définitivement pas d'allure. On avait à ce moment-là pris une entente avec le ministre des Transports et, sur ces contrats-là, on avait convenu que les camionneurs auraient un minimum assuré. Depuis que nous avons les tarifs horaires, c'est évident qu'on peut compenser parce que les problèmes de production sur l'asphalte ne sont pas nécessairement les mêmes que l'on rencontre ailleurs. Avec la tarification horaire et avec les demandes futures que nous allons présenter à la Commission des transports du Québec en particulier sur le béton bitumineux, très probablement que ce problème que nous avons connu dans les années 1972, 1973, 1974 pourra être réglé. Je pense bien que M. Dubé pourrait confirmer que nos camionneurs sont prêts à faire cela, mais, encore là, à des conditions qui ont de l'allure.

M. Dubé: Est-ce que je peux ajouter que, lorsque cela a été enlevé de nos clauses, il y avait

une autre sorte de postes d'affectation qu'on appelait communément "les autres"? On était d'accord d'en laisser pour les autres. Maintenant que ceux qu'on appelle encore les autres sont revenus, sont dans les postes d'affectation ou ont au moins la liberté d'y aller, c'est-à-dire les deux ou trois camions qu'on supprimait de l'Association des camionneurs artisans, évidemment, ce qu'on pensait qui pourrait servir aux autres doit aller dans le poste d'affectation où tout le monde est censé se rencontrer.

M. Goulet: M. le Président, j'aurais une dernière question pour M. le ministre. Ce matin, à deux ou trois reprises, il a posé la question ou formulé le désir de connaître l'opinion des gens, à savoir comment peut-on contingenter ou diminuer le nombre de camions pour régler justement ce problème. J'aimerais lui demander s'il ne croit pas que la permission de location est l'une des causes — je ne dirais pas la cause majeure — importantes du malaise que les camionneurs artisans connaissent actuellement. J'aimerais qu'il nous dise ce qu'il pense de la recommandation qu'on retrouve à la page 24 du rapport qui nous est présenté, à savoir qu'on devrait permettre le recours à l'utilisation de camions loués seulement lorsqu'il n'en reste plus dans la région, comme on fait, par exemple, pour les permis de construction.

Est-ce qu'on est d'accord avec ce principe ou si on ne l'est pas? Je pense que ce serait peut-être une des façons de régler le problème, car on contourne justement le règlement en allant louer des camions et on se réveille avec des gens qui ont payé des permis, qui ont payé leur cotisation, qui ont payé des taux d'enregistrement très coûteux et, à la fin de l'été, ils ont travaillé peut-être dix, douze jours. J'ai vu des types, l'autre jour, qui ont travaillé pas plus de neuf jours, et nous sommes rendus à la fin d'août. Le transport en vrac dans nos régions, surtout dans Bellechasse, cela remonte au mois de mai, parce que nous n'avons pas eu droit, ou à peu près pas, à votre budget de gravier des mois de février et mars; cela veut dire que cela se résume chez nous de mars peut-être jusqu'à la fin de septembre ou le début d'octobre.

Il y a des gens qui, au moment où on se parle, ont travaillé environ neuf jours avec des camions de $40 000 à $50 000 au minimum; il y en a même un entre autres, que je connais, qui a un camion de $125 000. Le ministre ne croit-il pas qu'il y a là un élément de solution à la page 24 de ce rapport quand on nous dit qu'on devrait avoir recours à la location seulement quand il n'y a plus de permis dans la région ou encore quand un camionneur brise son camion? Durant le temps de la réparation, on pourrait louer un camion. Je trouve cet élément de proposition assez valable et j'aimerais savoir ce que le ministre en pense. Il n'est pas obligé de se prononcer, mais...

M. de Belleval: II faudrait savoir de la part de l'ANCAl l'étendue du problème. L'ANÇAI dit qu'il y a un problème avec les camions loués. Si l'ANCAl dit qu'il y a un problème de ce côté, elle doit avoir des chiffres disant combien de camions loués on retrouve un peu partout à travers le Québec, dans chacune des régions, quelle est l'ampleur du phénomène. On a parlé tantôt de 10 000 à 12 000 camions; à son avis, il y a combien de camions? Si elle dit qu'il y a un problème, c'est parce qu'elle a dû faire un recensement pour savoir combien il y a actuellement de camions qui sont loués, à son avis, où et par qui. Là, on pourrait examiner si oui ou non c'est un problème important et comment on peut le régler. J'avoue ne pas avoir ces renseignements pour l'instant.

Le Président (M. Jolivet): Me Beaudet.

M. Beaudet: M. le ministre, naturellement, nous n'avons pas un budget pour faire des études comme celui dont le ministère des Transports dispose. Cependant, le problème de la location vous est souligné, tant par le camionnage général que par les camionneurs artisans, depuis longtemps; non seulement dans ce mémoire, mais nous en avons parlé et je suis convaincu que le ministère des Transports est au courant de ce problème de location. D'ailleurs, il prétend avoir apporté une solution au problème et nous aimerions vous souligner que nous vous donnons des exemples. Nous ne pouvons pas dire le pourcentage de camions loués, mais nous pouvons vous dire que nos membres, dans plusieurs régions du Québec, se plaignent que des camions loués, tels ceux de SKW, transportent. Nous soumettons le problème au ministère des Transports et nous pensons que vous avez déjà commencé à étudier le problème, de même que ce qui regarde le transport général qui a le même problème.

M. de Belleval: Je note qu'effectivement je n'ai pas eu de réponse à ma question, autre qu'un cas particulier qu'on cite dans le cas de SKW et qu'on pourrait d'ailleurs décortiquer. Il y a une très grande différence entre le problème de la location de camions dans le transport général et dans le transport en vrac; c'est un problème qui affecte effectivement le transport général, mais, à ma connaissance, qui n'affecte pas, de façon importante, le transport en vrac.

Il faut bien voir qu'une entreprise a le droit, pour son compte propre, d'avoir ses propres camions. Je suis certain que le Parti libéral, qui est un parti qui, comme on le sait, favorise la libre initiative des individus et le droit inviolable de la personne privée de faire ce qu'elle veut, va être d'accord avec moi pour dire qu'on va respecter le reste de l'Amérique du Nord là-dedans et qu'on va permettre aux gens de transporter leurs propres marchandises. C'est un droit qui existe dans toutes nos lois, comme dans le reste de l'Amérique du Nord ainsi que dans le reste du monde libre, que les entreprises ont le droit de transporter leur propre marchandise. Je suis certain que le député de Bellechasse, qui est un homme d'affaires, en particulier, s'il a des marchandises à faire transporter et s'il désire s'acheter un camion pour transporter sa propre marchandise, ne voudrait

pas qu'une loi vienne lui interdire d'acheter son camion et de transporter sa marchandise.

Certains entrepreneurs ou certains manufacturiers qui ont de la marchandise à faire transporter pour leur propre compte peuvent décider, comme vous le savez — là encore, le député de Bellechasse, qui est un homme d'affaires, connaît bien ce genre de phénomène qui se développe un peu partout, il connaît ces phénomènes de location-bail, d'achat-location ou de location à long terme — plutôt que d'acheter carrément des camions, de les louer à long terme ou de les louer selon les formules modernes d'achat-location. Cela fait partie de la liberté d'entreprise et du corollaire, comme on le disait tantôt, pour une entreprise, de transporter sa propre marchandise. La location, à ce moment-là, devient souvent une forme de financement, comme vous le savez, ou une forme d'amortissement pour fins d'impôt, etc. Il faut faire la distinction entre ce type de location et d'autres types de pseudo-location qu'on retrouve. A ma connaissance, là-dessus, nous n'avons pas, je pense, trouvé, dans le cas du camionnage en vrac, beaucoup de problèmes. Franchement, il faudrait s'attaquer aux vrais problèmes et ne pas arriver avec un cas particulier et en faire un mal général. A ma connaissance, ce problème n'est pas répandu dans le camionnage en vrac.

Je veux bien chercher, mais si je ne trouve rien, je ne vois pas pourquoi je dépenserais de l'argent. Il ne suffit pas à l'ANCAl de répéter qu'un problème existe pour qu'un problème existe si, elle-même, n'est pas capable d'arriver avec quand même autre chose qu'un ou deux cas particuliers et qui sont d'ailleurs loin d'être probants. Je ne veux pas entrer dans le détail du cas de SKW, mais on pourrait, évidemment, en parler longtemps. Je pense bien que ce n'est pas le but de cette commission de s'attarder indéfiniment sur un cas particulier. Si on avait beaucoup de cas particuliers et qu'on puisse en faire une règle générale, je pense qu'on pourrait l'étudier, mais il ne semble pas que ce soit le cas.

Le Président (M. Jolivet): M. Piuze.

M. Piuze: Oui, M. le Président. M. le ministre, M. Lessard a quand même signé un document où, à l'article 9, on dit très bien que le ministre révisera la notion de permis de location, d'une part. D'autre part, on est d'accord avec vous que l'individu qui produit ses produits qui sortent de son usine, de son entreprise a le droit de les transporter avec son équipement ou celui en location. On n'a rien contre ça. Là où on en a, c'est qu'il y a des gens qui utilisent la location pour contourner la réglementation dans le vrac avec de faux connaissements ou des documents qui ne sont pas nécessairement la vérité. Ils prétendent que ce sont leurs produits qu'ils transportent. C'est contre cela qu'on en a. Si le ministre des Transports de l'époque a signé une entente où, à l'article 9, on voit cette notion, on aimerait bien qu'aujourd'hui le gouvernement dise: On va faire au moins un effort pour essayer de l'appli- quer. M. le ministre, lorsque vous aurez les mémoires tout à l'heure des différents postes d'affectation, vous allez assurément avoir des exemples plus concrets et des chiffres plus à jour là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je voudrais une information relativement au problème dont parle le député de Bellechasse quant à l'exemple que vous avez mentionné de SKW. Le ministre s'interroge, évidemment, à savoir si c'est un problème qui est généralisé. Vous mentionnez quand même un phénomène où environ 100 000 tonnes sont transportées entre une région du Québec et une région assez éloignée. Est-ce que je fais erreur en pensant que les artisans, lors du premier contrat, se sont présentés devant la Commission des transports possédant les équipements requis, ont soumissionné, je pense, sur le prix minimum qui était fixé et le contrat ne leur a pas été accordé malgré qu'on l'ait accordé à l'entreprise de location à la même condition.

M. Beaudet: Effectivement.

M. Mailloux: Ce que je voulais vous demander, c'est ceci: Est-il vrai ou non, alors que tous les détenteurs de permis sur place qui possédaient l'équipement requis pour effectuer ce transport-là, que la compagnie de location qui a pris le contrat la première fois ne possédait pas l'équipement requis et l'a acheté ajoutant autant de camions sur le circuit?

M. Piuze: Effectivement, M. Mailloux.

M. Mailloux: Elle ne possédait pas de camions.

M. Piuze: C'est une compagnie qui a été créée pour cela.

M. Mailloux: Forte d'un contrat qu'elle avait eu respectant le prix de la Commission des transports, comme vous le respectiez.

M. Beaudet: Ce qui est le plus important aussi, c'est qu'au début, avant de louer des camions, la compagnie SKW s'était adressée à la Commission des transports pour faire ce transport en bas des taux par des camionneurs en vrac. La commission leur a refusé le droit de faire ce transport en bas des taux. Le lendemain matin, on créait une compagnie de location, on louait les camions et on louait les chauffeurs d'une autre entreprise. Ce qui nous surprend aussi, c'est que dans le contre-mémoire qui nous a été remis ce matin, il est bien marqué: "Le ministre révisera la notion de permis de location afin qu'elle ne nuise pas aux propriétaires de permis de camionnage en vrac", et on marque: "Oui" à cette réponse-là, comme quoi le ministre a rempli son engagement

dans le temps à ce sujet. Aujourd'hui, on dit qu'on n'a pas entendu parler de ce problème.

M. Mailloux: Mais la question vous a été posée... M. de Belleval: Un instant, s'il vous plaît!

M. Gratton: Ils disaient oui à n'importe quoi dans ce temps-là.

M. de Belleval: Quand je dis que je n'ai pas... Je ne dis pas que je n'ai pas entendu parler de ce problème. Je ne me souviens pas m'avoir entendu dire cela il y a quelques minutes. Ce que j'ai dit, c'est qu 'effectivement, si le problème continuait à demeurer à la suite des amendements qui ont été faits, si à votre avis, il reste encore des trous et qu'il y a des exemples nombreux de cela, on regardera le problème. Mais à notre avis, effectivement, comme le document le dit, nous avons réglé ce problème par la nouvelle réglementation. A mon avis, le problème actuellement n'est pas important en ce qui concerne la location. Je ne veux pas, encore une fois, entrer dans le détail du cas de SKW, mais, à mon avis, c'est un très mauvais exemple et vous n'avez pas beaucoup d'exemples de ce genre, de toute façon, à me donner. Je pense que le problème en ce qui concerne la location est réglé actuellement. Il l'a été comme on le met dans notre document et conformément à la promesse de M. Lessard, dans le temps. C'est cela, la réalité.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre de l'Energie et des Ressources.

M. Bérubé: Dans votre mémoire, à la page 47 qui réfère à la page 48, mais celle-ci n'apparaît pas, vous traitez plus spécifiquement du problème du transport du bois. J'ai l'impression que la partie la plus passionnante de votre mémoire a sauté, ce qui fait que c'est difficile pour moi d'essayer de poser des questions plus précises que finalement ce que présente votre mémoire. Ce qui me frappe dans votre intervention, c'est d'abord que vous soulevez — et vous l'avez évoqué tantôt — la question des contrats vous venant du ministère de l'Energie et des Ressources. Vous reconnaissez que tous les contrats, 100% des contrats du ministère de l'Energie et des Ressources sont donnés en passant par les postes d'affectation actuellement.

M. Beaudet: L'an dernier, oui. M. Bérubé: Oui.

M. Beaudet: M. le ministre, cette année, je pense qu'il y a des postes d'affectation qui auraient des remarques à faire à la commission. Là, je ne voudrais pas parler pour eux.

M. Bérubé: On les entendra, mais disons que j'avais bien l'impression que non seulement ce n'était pas un partage de 75-25 que notre ministère pratiquait, mais un partage 100-0.

M. Piuze: En régie.

M. Bérubé: On s'entend pour les travaux en régie. Alors, cela fait déjà au moins un point d'acquis. On est allé plus loin que la promesse de l'ancien ministre des Transports et je tiens à le souligner. (15 h 30)

Le deuxième point que j'aimerais souligner, c'est celui plus général des problèmes de construction des chemins. Ce que nous avons dû constater, de 1974-1975 à 1978-1979, c'est que le coût de construction au mille croissait par un taux à peu près annuel moyen de 40%. Il est passé de $17 000 le mille à au-delà de $100 000 le mille en l'espace de quatre ou cinq ans. Les raisons ne sont pas nécessairement — vous cherchez tout de suite la réponse à cela — dans l'inefficacité gouvernementale puisque très souvent ces contrats sont donnés à sous-contrat par des entrepreneurs à des camionneurs artisans. Ce n'est pas lié à cela. C'est lié davantage à ce que les exigences des normes étaient très grandes un peu partout au Québec et que très souvent on construisait des chemins qui n'étaient pas nécessairement adaptés aux besoins. C'était cet effet combiné des normes et d'une certaine lourdeur administrative qui faisait finalement qu'on observait une croissance des coûts de construction au mille de nos chemins forestiers, qui était très rapide et qui n'avait pas de bon sens. On a constaté que l'entreprise privée, qui, elle, construisait des chemins peut-être plus à la mesure des besoins, avait des coûts de construction qui étaient la moitié inférieurs aux nôtres, premièrement. Je vous soulignerais qu'en donnant une subvention de 50% pour la construction des chemins, cela veut dire que chaque mille nous coûte maintenant le quart de ce que cela nous coûtait antérieurement pour faire des chemins, mais, en même temps, quand vous parlez des subventions aux entreprises forestières, vous ne soulignez pas que nous avons aboli la redevance forestière qui représentait justement le quart des coûts de construction.

En d'autres termes, ce que le gouvernement fait, c'est qu'il redonne tout simplement à l'entreprise privée le soin de construire les chemins et, comme autrefois on leur payait un quart, on dit: Pour cinq années ce que nous allons faire purement et simplement, c'est que nous allons vous donner une subvention. On fait donc quatre fois plus de chemins pour le même montant. La conséquence, c'est que cette année, c'est en plus des $9 000 000 de travaux en régie que nous ferons, contre $16 000 000 que vous mentionnez pour l'année dernière, il y a pour $35 000 000 de voirie forestière faite par l'industrie, ce qui est beaucoup plus que ce que nous avons jamais accordé. Or, comme l'industrie forestière n'a pas les moyens ou ne s'est pas équipée en camions pour effectuer ces travaux, en pratique, et vous le savez, plus de 80% de ces travaux sont donc donnés aux camionneurs artisans. J'en tire la conclusion que cette politique que vous dénoncez a triplé la quantité de travaux donnés aux camionneurs artisans ou à

peu près et je ne vois pas en quoi elle vous aurait affectés. J'aimerais cela que vous développiez ce point.

M. Piuze: M. le Président, avec votre permission, concernant votre premier point, M. le ministre, lorsque vous dites que vous avez rempli plus que ce que M. Lessard avait signé. Je vous ferai remarquer qu'à l'article 2 de l'entente, M. Lessard nous avait signé un document où il disait que toutes les réquisitions en régie passeraient à 100% par les postes et votre ministère a respecté l'entente quant à cet article. Vous n'avez pas fait plus que l'entente, vous avez fait ce que l'entente disait là-dessus.

Deuxièmement, concernant les équipements en forêt, on a déjà signalé à votre bureau que les compagnies, par les subventions que vous avez créées, n'utilisent pas nécessairement nos services. Cela, les postes pourront vous le dire tout à l'heure. Je peux personnellement vous informer que des compagnies que nous avons rencontrées, à qui vous avez accordé des millions en subventions, à qui nous avons offert nos services comme transporteurs par les postes d'affectation, nous ont répondu: On est prêt à vous prendre, mais à 25% en bas des taux. On a dit: A ces conditions, on n'arrivera pas. A ce moment-là, elles nous ont dit: On va s'acheter des camions et on va effectuer notre transport, on a droit à des dégrèvements et à des subventions pour nos chauffeurs, etc., et comme vos plans sont quand même sur une période de quatre ou cinq ans, il est évident que l'absorption du coût, elles vont la chercher là.

Je pense que Me Beaudet avait autre chose à ajouter.

M. Beaudet: M. le ministre, ce que nous voyons comme solution — je pense qu'on a eu le temps d'en discuter, aussi, à un moment donné — c'est qu'il aurait été si simple, étant donné que c'est l'argent du gouvernement, d'inclure une clause stipulant que, lorsque vous accordez une subvention à une compagnie, vous lui dites: Dans une proportion de 50% ou de 75%, vous passerez par les postes d'affectation afin que les taux soient respectés. Vous pensez qu'elles vont construire plus de chemins, mais nous nous sommes aperçus qu'elles font beaucoup de localisation et qu'elles étudient naturellement les chemins à construire. Nous ne sommes pas sûrs que les compagnies que vous avez subventionnées — malgré que ce n'est pas notre problème, elles ont le droit de vivre — soient si en peine pour construire des chemins de voirie. Suivant votre ancienne politique, au moins, vous aviez le contrôle du transport, et nous pouvons vous dire combien c'est important d'avoir le contrôle du transport dans la construction de routes. C'est là-dessus qu'on ne s'entend pas.

Bien sûr, cela a généré des travaux pour $35 000 000, mais, demain matin, nous allons avoir tous les secteurs, 100% du transport, si on y va gratuitement. Suivant votre théorie, on y va à 85%, mais à un taux où on change quatre $0.25 pour $1 parce que l'offre de camions est tellement grande par rapport à la demande qu'on est aux prises avec un marché libre quand ça ne passe pas par les postes d'affectation. C'est cela, notre problème.

M. de Belleval: Juste un moment. Si je comprends bien, vous n'êtes pas capables de concurrencer le marché libre. Autrement dit, les taux fixés par la commission seraient trop élevés par rapport au marché libre parce que, quand vous arrivez sur le marché libre, vous n'êtes plus capables de concurrencer; c'est ce qui fait que les compagnies trouvent plus intéressant de transporter leur propre matériel que d'utiliser vos services. C'est cela, le problème?

M. Beaudet: M. le ministre, c'est exactement cela le problème, parce que les taux — je ne dis pas que c'est la faute du gouvernement — ne sont pas respectés. Les ordonnances de taux de la commission qui ont pourtant été fixés après avoir entendu toutes les parties ne sont pas respectées, à moins de passer par le poste. Si les postes d'affectation veulent respecter la loi, les camionneurs ne travaillent pas et le partage équitable qui se fait entre eux, c'est le partage de zéro, parce que personne ne sera intéressé à passer au poste s'il peut avoir des camions à 25% en bas du prix.

M. de Belleval: Examinons cela de façon très précise pour décortiquer, justement, le mécanisme du marché qui s'établit. C'est la même chose que dans le cas de SKW tout à l'heure. Vous allez offrir vos services à des donneurs d'ouvrage, SKW, par exemple, ou une compagnie forestière. La compagnie forestière dit: On est prêt à te donner le contrat, pour autant que tu nous assures du nombre de camions sur une période, à part ça, souvent non simplement d'une semaine, quinze jours ou trois semaines, mais, dans certains cas, c'est pour des contrats à long terme, ce qui pose aussi un problème supplémentaire, vous le savez. Et, à ce moment-là, elle veut négocier avec vous un taux compétitif compte tenu du marché. On se rend compte alors que les taux que vous leur chargez en vertu des tarifs de la commission seraient trop élevés par rapport à ce que le marché fixerait comme taux. Les taux du marché au fond, les taux véritables, parce que le marché c'est ça, sont moins élevés. A ce moment-là SKW ou une compagnie forestière, dans le cas que vous soulevez, trouve plus intéressant d'utiliser sa propre main-d'oeuvre, d'avoir ses propres camions parce qu'elle se dit: Je suis capable de faire le même travail à meilleur compte.

On se trouve là véritablement devant un problème de type économique et de type... Quoi faire entre une réglementation qui n'est pas réaliste, qui n'est pas en accord avec les lois du marché, et les lois du marché qui reviennent toujours en arrière prendre leur véritable place parce que ces lois-là sont plus fortes que la police, comme on dit, ou que les règlements? C'est ça, fondamentalement, le problème.

Une façon de le régler serait peut-être de permettre aux postes d'affectation de négocier des taux, particulièrement en ce qui concerne les contrats à long terme, qui soient tels que l'entreprise privée va trouver plus intéressant de travailler avec vous que de s'équiper de ses propres camions. Il me semble que c'est une des voies de la solution, n'est-ce pas?

M. Beaudet: M. le ministre je comprends exactement ce que vous... Vous l'avez dit d'ailleurs ce matin, vous êtes un peu un partisan de la loi de l'offre et de la demande, mais...

M. de Belleval: Je m'excuse, ce n'est pas que j'en suis un partisan. On ne peut pas dire qu'on est partisan de la loi de la gravité. Elle est là et c'est comme ça. On n'a pas à en être partisan. Si on essaie de s'envoler ici tous ensemble, on ne réussira pas...

M. Beaudet: Je comprends...

M. de Belleval: C'est la même chose pour les lois du marché. On n'a pas à être pour ou contre. Le problème c'est que toute l'économie vit comme ça. C'est comme l'air qu'on respire, on ne le choisit pas.

M. Beaudet: J'ai parlé des partisans de la loi de l'offre et de la demande, mais je peux vous dire que toutes les lois de la Législature, tous les règlements qui sont faits dans le domaine de la construction pour les salariés ou qui que ce soit, ce sont des modifications et des restrictions à la loi de l'offre et de la demande. Ce que vous nous proposez comme solution, c'est le marché totalement libre et ce n'est pas ce qui nous était offert en 1977.

D'ailleurs vous avez fait faire des rapports et des enquêtes qui ont coûté beaucoup d'argent au gouvernement par CEGIR et même le vice-président de CEGIR dit bien qu'il faut absolument éliminer dans une majeure partie la concurrence pour réussir à faire vivre les compagnies de transport au Québec.

M. de Belleval: Je comprends votre point de vue, M. Beaudet. Je pense qu'au fond on saisit les mêmes choses même si parfois on ne s'exprime pas de la même façon; vous vous rendez compte cependant que la conclusion de ce que vous dites et notre analyse là-dessus concordent, c'est que ça veut dire par exemple dans le cas de SKW qu'elle devrait accepter de payer plus cher, donc d'être moins rentable. Dans le cas d'une compagnie papetière aussi, ou d'une compagnie forestière, de payer plus cher, donc d'être moins rentable.

C'est un choix économique que nous pouvons faire comme société, c'est-à-dire décider que par des lois nous allons pénaliser une autre entreprise, et dans l'ensemble, donc, un secteur économique québécois, pour favoriser un autre secteur économique québécois, à savoir, par exemple, les gens que vous représentez. Mais vous vous rendez compte que c'est un dilemme qui ne peut pas être tranché d'une façon non approfondie.

C'est un problème sérieux que vous posez. Je pense que vous avez raison de le poser. C'est le problème fondamental. De ce point de vue là, je pense effectivement que cette commission est en train de faire du chemin, parce qu'on voit bien où se situe le noeud du problème.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, le ministre vient de dire à deux reprises que le problème de SKW est un problème similaire à celui-là, alors que c'est complètement faux. Tantôt si...

M. de Belleval: Je vais retirer mon exemple, si vous voulez.

M. Mailloux: Non, mais...

M. de Belleval: Si cela affaiblit mon argumentation, de votre point de vue, je vais le retirer.

M. Mailloux: M. le Président, c'est parce que tantôt, j'ai bien dit que la compagnie de location, qui ne semblait pas posséder de camions, et les artisans avaient soumissionné au prix de la commission. Je n'ai pas dit, je pense, que, vu l'offre et la demande, je peux penser que si on l'a donné à une compagnie qui n'avait pas de camions, elle a, sous la table, demandé un prix moindre que celui que la commission fixait.

M. de Belleval: Retirons, si vous voulez, l'exemple de SKW. De toute façon, je prends celui de M. Beaudet. Ce n'est pas le mien; c'est le sien et c'est celui des compagnies forestières dont il parlait tantôt. Mais ne vous en faites pas, je suis prêt à le retirer pour les fins de la discussion. Mais, en pratique, on sait très bien que c'est effectivement ce qui se passe, même dans le cas de SKW.

M. Mailloux: M. le Président, si c'est exact que ça se passe comme ça, qu'on peut se présenter devant la Commission des transports et, tout de suite après, réduire les taux, il est grand temps qu'il y ait une intervention dans le cas des locations.

M. de Belleval: Non, ce que je veux dire, c'est que ce que fait SKW actuellement est tout à fait légal, si elle le fait, c'est parce qu'elle trouve plus avantageux, sur le plan économique, de procéder de cette façon.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Nous en étions toujours au ministre de l'Energie et des Ressources. C'était un aparté.

M. Bérubé: ... excuse, M. le Président, de ce long aparté.

M. Mailloux: ... comprend plus...

M. Bérubé: Dans les bienfaits du secteur de travail réservé, vous mentionnez, par exemple, que le secteur réservé favorise une relation normale entre employeurs et employés et, par exemple, vous parlez d'une réduction du prix de vos services en-deçà des taux. Vous dites aussi que le transporteur est souvent obligé de faire tous les travaux difficiles et, lorsque le travail est facile, il est remercié de ses services sans avis ni raisons. Il m'est parfois arrivé d'entendre le point de vue contraire, c'est-à-dire que l'inconvénient de passer par un poste d'affectation, c'est que les travaux difficiles, le camionneur qui en héritait les refusait et, souvent, l'entreprise qui était aux prises avec cette décision en subissait des pénalités. Alors, on se posait la question justement. Vu de l'autre côté, c'est-à-dire que le poste d'affectation vous permettant d'imposer vos conditions, vous pourriez, à ce moment-là, ne prendre que les travaux intéressants et laisser, par exemple, aux entrepreneurs les travaux les plus difficiles à faire. Est-ce qu'on peut retourner l'accusation?

M. Beaudet: M. Bérubé, je pense que nous sommes obligés, en vertu du règlement, et j'espère que tout règlement nous y obligera, à offrir tous les services et à donner tous les services aux entrepreneurs et pas seulement à faire le beau. Si on décidait de donner des secteurs réservés, il faudrait obliger ces camionneurs à donner le service complet. On veut absolument ça. On ne vient pas chercher des secteurs de travail pour faire seulement ce qui est beau. On ne veut pas faire l'inverse. Soyez assuré de ça. On ne serait pas surpris d'une norme gouvernementale qui nous imposerait de donner le service totalement.

Maintenant, est-ce que vous me permettez une dernière intervention? Je comprends la politique de M. de Belleval, mais, demain matin, moi, si j'ai à me faire construire une maison et que je peux engager le maçon que je veux, le menuisier que je veux, le plombier que je veux, au lieu de me coûter $40 000, ça va me coûter $20 000. J'ai l'impression que c'est ça, la loi de l'offre et de la demande et qu'elle est réellement faussée par la loi ou modifiée par la loi. Les gens sont obligés d'accepter des prix aujourd'hui qui sont peut-être en dehors de la concurrence, mais qui permettent aux individus de vivre.

Alors, c'est dans ce sens-là, nous, qu'on voudrait des modifications à la loi de l'offre et de la demande.

M. de Belleval: Vous savez très bien, dans l'exemple que vous venez de donner, que c'est exactement ce qui se passe, qu'on a créé, en vertu des règlements sur la construction, une classe d'artisans qui peut faire exactement ce que vous venez de dire, c'est-à-dire construire une maison pour $20 000 au lieu de $40 000. C'est tout à fait légal. C'est justement pour obvier à la rigidité d'un système protégé que, finalement, l'Etat est obligé d'intervenir et de créer, entre autres, des catégories d'artisans dans le domaine de la construction pour assouplir le système. D'ailleurs, vous savez que l'Opposition nous a réclamé à grands cris justement ce genre d'assouplissement.

M. Mailloux: Eh, verrat!

M. de Belleval: Alors, si vous pensez qu'avec l'Opposition, vous allez être mieux qu'avec le gouvernement...

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres questions? On avait essayé de se maintenir un peu au même niveau, je ne sais pas si M. le ministre a encore d'autres questions.

M. Bérubé: Oui, c'est pour le transport du bois. Là, nous avons parlé surtout du transport pour la construction de chemins forestiers. J'ai l'impression qu'à la page 48 qui manque, il doit y avoir un développement intéressant sur le transport du bois. Là, nous avons simplement un premier paragraphe qui me met l'eau à la bouche puisqu'on s'attaque au ministre de l'Energie et des Ressources. On tourne la page pour voir l'objet de l'attaque, il n'y a pas de page 48. On arrive à 49 où on conclut qu'effectivement le ministre de l'Energie et des Ressources n'a pas fait son travail. J'aimerais savoir...

M. de Belleval: Vous pouvez passer la page 48...

M. Bérubé: Oui, la page 48 qui traite plus spécifiquement du transport du bois. J'aimerais vous entendre discuter un peu cette question.

M. Piuze: M. le Président, si vous me permettez, effectivement, même dans les nôtres qu'on a ici, la page n'est pas là. Elle existe. Comme on a un droit de réplique...

M. de Belleval: M. le Président, que personne ne sorte! (15 h 45)

M. Piuze: ... on l'apportera lorsqu'on reviendra.

Une Voix: C'est une erreur d'impression sûrement.

M. Piuze: Comme vous pouvez voir, M. le ministre de l'Energie et des Ressources, on ne pense pas en mal de vous, la page n'est pas là. On va voir ce qu'il y a dedans.

Une Voix: Vous l'avez retirée à la dernière minute.

M. Piuze: Non, elle n'a pas été retirée, c'est par erreur. On n'a pas eu de subvention, nous autres, pour...

M. Bérubé: D'accord. Ce que je veux savoir, c'est lorsque l'on parle du transport du bois, on m'apporte souvent comme argument, qu'à vos demandes, il est important pour l'entrepreneur

forestier d'établir un lien assez étroit avec les camionneurs qui travaillent avec lui, d'abord, parce que le bois est souvent éparpillé un peu partout en forêt, qu'on n'est pas sur les routes nationales du Québec, et que, par conséquent, il faut aller identifier le bois; deuxièmement, que souvent, la machinerie pour charger et décharger est là-bas sur le terrain; enfin, on m'apporte des arguments selon lesquels l'entrepreneur forestier voudra souvent pouvoir négocier un contrat ferme avec un entrepreneur de manière que ce soient toujours essentiellement les mêmes camionneurs, et non pas, comme ce qui peut se passer à un poste d'affectation, où le premier rendu est le premier servi, où enfin, tout le monde passe avec son camion une fois, ce qui fait que vous avez continuellement des camionneurs qui circulent, et vous ne faites jamais affaires avec les mêmes. Vous pouvez parfois avoir des camionneurs qui sont plus lents, qui sont en retard. Enfin, il y a des inconvénients qui peuvent se produire. On aime bien pouvoir faire affaires avec ses camionneurs. Qu'est-ce que vous répondez à cet argument?

M. Piuze: Avec votre permission, M. le Président. M. le ministre, dans les postes d'affectation, la priorité au premier camion ne s'applique pas en forêt. C'est une exception. Incidemment, en forêt, les transporteurs inscrits aux postes qui sont là...

M. Bérubé: Un instant! C'est parce que vous n'avez pas l'exclusivité, mais le jour où vous allez avoir l'exclusivité, ce ne sera pas pareil, vous allez mettre vos conditions.

M. Piuze: II y a des requêtes pendantes devant la Régie des marchés agricoles là-dessus. Si jamais la régie venait à la conclusion qu'on pourrait avoir droit à l'exclusivité par nos permis de courtage, il est évident que le conseil d'administration prendra ses responsabilités et que les camionneurs qui travailleront dans le domaine seront des camionneurs équipés. Nous avons des gens inscrits aux différents postes d'affectation du Québec qui ont quand même des chargeuses et des équipements pour donner ce service. Je ne peux malheureusement, M. le ministre, trop détailler, étant donné que toute cette question est pendante devant la Régie des marchés agricoles, actuellement.

M. Bérubé: D'accord. Si je comprends bien, il y a un engagement moral, au moins de votre part, de faire en sorte que cela fonctionne bien.

M. Piuze: Oui.

M. Bérubé: Si vous avez l'exclusivité, les recours de l'entrepreneur, si jamais cela fonctionne mal, sont limités. C'est peut-être le problème.

M. Piuze: Ces recours ne sont pas limités. Il y a les tribunaux civils et la Régie des marchés agricoles. Les plans conjoints sont régis par elle.

M. Bérubé: Voici l'autre aspect. J'aimerais savoir combien vous avez de camionneurs à l'intérieur de vos postes d'affectation qui font du transport du bois, et quel impact une telle mesure aurait sur les travailleurs qui sont déjà en forêt, qui font déjà du camionnage en quantité importante et qui, à ce moment, forcément, travaillent peut-être pour des entrepreneurs, travaillent pour la compagnie forestière, mais ne sont pas, à strictement parler, des camionneurs artisans, et qui verraient leur emploi menacé. Quel est le pourcentage de Québécois qui perdraient leur emploi, de manière qu'on puisse les remplacer par des camionneurs artisans en passant par les postes d'affectation?

M. Piuze: M. le Président, le pourcentage des camionneurs, je ne peux pas vous le donner. Les postes, on pourra vous les donner tout à l'heure. Il reste une chose. Etant donné que la priorité au premier camion ne s'applique pas sur le transport en forêt... vous allez voir par les conseils d'administration, par les présidents des postes qui vont passer tout à l'heure devant vous, qu'on est prêt à un certain assouplissement sur cette question pour éviter, dans le cas où des accréditations nous seraient accordées, que des gens qui sont dans le milieu depuis longtemps soient pénalisés. Incidemment, dans le règlement actuel — on le dit dans notre mémoire — on est limité à quatre permis pour avoir le droit d'être inscrit au poste. On est prêt à le retirer ce maximum. On est prêt à dire: N'importe qui pourra y inscrire ses camions, mais à la condition de tous les inscrire ou de ne pas en inscrire.

Ceux qui sont en forêt actuellement, qui transportent déjà là, dans le cadre des plans conjoints, par exemple, puisqu'on est devant la régie là-dessus, il est évident que, du jour au lendemain, on ne les pénalisera pas. Plus que ça, en vertu de la loi, s'ils sont titulaires d'un permis de camionnage en vrac, on est même obligé de leur donner le service dans le cas où on obtiendrait l'accréditation. C'est la loi qui le dit.

Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres questions, je vous remercie de votre présentation et j'inviterais le Poste d'affectation de la région 01 Inc., dont M. Anicet Proulx est le président. Vous restez toujours à la disposition de la commission pour la troisième journée?

M. Piuze: On aura la page 48 pour le ministre.

Le Président (M. Jolivet): C'est le mémoire no 13, pour l'information des membres de la commission. M. Proulx, voulez-vous nous présenter les personnes qui sont avec vous?

Poste d'affectation de la région 01 Inc.

M. Proulx (Anicet): M. le Président, MM. les ministres, MM. les députés, ça nous fait plaisir, pour des gens qui viennent de si loin, de la région 01, d'avoir l'honneur de vous soumettre quel-

ques lignes dans le court mémoire que nous présentons. Celui qui vous lira le mémoire est nul autre que le président du Poste d'affectation de la région 01, M. Raoul-Yvon Lepage. Nous avons aussi à nos côtés Me Bernard Piuze. Je laisse la parole à M. Lepage.

M. Lepage (Raoul-Yvon): Je m'excuse, je suis le directeur du poste de la région 01. Nous remercions le Conseil des ministres, de même que MM. les députés d'avoir bien voulu nous entendre à cette commission parlementaire. Ce mémoire n'est qu'un exposé sommaire des problèmes du transport en vrac à cause des délais trop courts entre la réception de l'avis et sa présentation. Nous allons tâcher, cependant, d'apporter certains éléments de solution, mais le tout d'une manière très incomplète à cause des contraintes précitées et de celle invoquée dans la conclusion de ce mémoire. En suivant l'ordre suggéré sur l'avis de convocation, nous allons tâcher d'expliquer la situation dans la région 01 sans procès d'intention, mais bien dans l'esprit de recherche d'une solution la plus hâtive.

Règlementation des permis. 1977, le gel des permis VR décrété par le ministère des Transports. Depuis cette date, des flottes de camions VR sont apparues comme jamais. En voici certaines: Joseph Lefrançois, d'Amqui; Marcel Paquet, du même endroit, 12 camions (il n'en avait que six en 1977); Gallagar et Leblanc (7 vans) achète le permis de Jean-Guy Wagner, le camion ayant passé au feu en septembre 1978... permis 503048 devient le no 507040, mais sans camion; Marcel Trépanier transfère à Gallagar et Leblanc son permis, dans la Gazette officielle du 26 janvier 1980, à la page 963; aucune vente de camion puisque le transfert avait déjà eu lieu de Marcel Trépanier à Yvan Caron, dans la Gazette officielle du 3 février 1979, à la page 712. René-Omer Couture est transféré au même acquéreur, dans la Gazette officielle du 19 janvier 1980, page 440; aucune vente de camion. Il en est de même pour Roland Bujold, Gazette du 5 janvier 1980, page 87; Adéodat Fraser, 19 janvier 1980, page 439.

En plus des formations de flottes, il y a le transport illégal. Après avoir plus que doublé l'immatriculation des VR depuis trois ans soi-disant pour protéger leurs secteurs de travail, les immatriculés F transportent le vrac où ils veulent sans aucun problème, sauf un abonnement de $52 d'amende à toutes les deux ou trois semaines.

Tous les trucs imaginables sont utilisés pour contourner la loi ou les règlements. Pourtant, dans la Gazette officielle du 23 juin 1977, à la page 1627, il est bien dit par le ministre des Transports d'alors, au cinquième paragraphe de l'entente intervenue entre le gouvernement et les camionneurs, et je cite: "La définition du compte propre que l'on retrouve dans le règlement no 112 sera modifiée de façon à éliminer du compte propre le transport des matières en vrac achetées pour être transportées et revendues à des tiers. On élimine là l'illégalité du compte propre."

Rien n'a été fait dans ce sens. On achète les bancs de gravier (Benoît Leblanc, Amqui) ou autre matière de vrac et on les revend, transport inclus. On signe des contrats de coupe de bois et ça nous permet de transporter le bois même si le bois a été coupé par un autre entrepreneur, par exemple, le contrat signé entre Vadnais et Vadnais et Gallagar et Leblanc pour du bois qui avait été coupé par un individu de Rivière-Blanche et Jean-Yves Otis.

Le service de surveillance envoie le contrat au contentieux du ministère et, après que le transport est terminé, on nous apprend que c'était un contrat faux. Des recommandations ont été faites en ce sens au ministre des Transports et à celui de l'Energie et des Ressources. Dans l'une d'elles que nous avons incluse comme annexe no 1, nous suggérions même les mots qui devaient être changés pour éliminer, dans la définition du compte propre, les possibilités de contourner la loi. Une lettre explicative précédait la suggestion. Les postes d'affectation détiennent l'exclusivité du courtage. Comment expliquer les placements de camions sur les chantiers sans que le poste en soit au courant?

Si vous permettez, M. le Président, je vais me reporter à l'annexe no 1. En date du 6 avril 1979, cette lettre était adressée à l'honorable Lucien Lessard. "Monsieur le ministre, "Vous trouverez ci-inclus un extrait du procès-verbal du conseil d'administration du Poste d'affectation de la région 01 qui s'explique de lui-même. "Permettez-moi cependant d'apporter certains aspects du problème forestier. Lorsque le poste s'est formé, il y avait, par exemple pour une compagnie X, 20 transporteurs de produits forestiers non ouvrés. Dix de ces 20 transporteurs ont versé leurs $125 de base, se sont inscrits au poste d'affectation pour un an, ont signé leur code d'éthique et ont payé leur cotisation au poste. Aujourd'hui, les dix non-membres ont eu les mêmes gains que les dix qui sont membres; ils ont bénéficié des mêmes conditions de travail et vont être rappelés au travail de la même manière et au même temps que les autres à partir des listes de "seigneurité" de la compagnie. "Les dix membres du poste nous disent maintenant: Pourquoi avons-nous payé au poste? Quels avantages ça nous a apportés? Pourquoi continuerions-nous à faire partie du poste puisque, sans être membres, nous allons retourner travailler au même endroit et nous bénéficierons des mêmes avantages. "Ceci n'est qu'un exemple pour illustrer le grave problème que nous vivons afin que vous puissiez apporter une solution urgente. "Ce que nous vous suggérons, ce serait d'ajouter à l'article 3 de la section no 2, nonobstant ce qui est mentionné dans la section no 2, article 3, alinéa 2 i), ii), iii), iv): "Tout camion n'appartenant pas en propre à la personne physique ou morale visée aux "items" précités doit faire partie d'un poste d'affectation et en être membre en règle".

"J'espère que ces quelques informations vous permettront de solutionner ce problème dans les plus brefs délais afin d'éviter que notre poste ait à subir des difficultés insurmontables. (16 heures) "Au nom du poste, nous allons remercier le ministre de sa très bonne compréhension".

Dans le secteur des forêts, la confusion est encore plus grande à cause du manque de possibilité de contrôle des quantités devant les différents modes de mesurage par échantillonnage. La pesée est la seule solution. De plus, certains employeurs retiennent de la paie des camionneurs des sommes injustifiables pour avantages sociaux. Il y en a même qui accaparent la subvention fédérale de 17,62% attribuée pour aider les transporteurs de l'Est en retenant une somme équivalant au montant que les camionneurs peuvent réclamer, même si ce sont ces derniers qui doivent en faire la réclamation à la Commission des transports.

M. le Président, me permettriez-vous de me reprendre? J'ai vraiment fait une erreur de page.

Le Président (M. Jolivet): II était question des taux de transport.

M. Lepage: D'accord, je vous remercie. C'était le début de l'article que j'ai terminé. Dans le cadre de l'entente entre le ministre des Transports et les camionneurs, l'article 7 dans la Gazette officielle du 23 juin 1977, page 1628, faisait dire au ministre ce qui suit: "Dans le cas de transport effectué en bas des taux, non seulement le transporteur sera pénalisé, mais aussi le requérant de service".

Qui a la responsabilité de surveiller l'observance des taux. Au temps du comité de surveillance, on nous disait qu'il y avait des pénalités de prévues dans le code d'éthique. D'accord, mais contre qui avons-nous le pouvoir d'ajouter des journées de travail? Contre nos abonnés seulement. C'est dire qu'on aurait le droit de sévir contre nos abonnés qui travaillent pour la ville de Rimouski entre $18 et $22 l'heure pour des camions à dix roues et de laisser libre cours aux non-abonnés.

Lorsqu'un camionneur équipe son camion pour un travail spécifique sur une courte distance avec de l'équipement de moindre qualité pour des travaux en terrain non accidenté et qu'il utilise par surcroît cet équipement au maximum, c'est-à-dire jour et nuit et sept jours par semaine, il est assez facile de faire des travaux choisis sous les taux. Pour donner le service dans les postes d'affectation, un abonné se doit d'être suréquipé pour oeuvrer dans toutes les conditions de travail. Il ne peut choisir seulement ce qui fait son affaire et laisser tomber les autres travaux. Les non-abonnés peuvent le faire. C'est pourquoi le respect des taux est fondamental et essentiel pour un service de qualité et le ministre est le seul à posséder les outils pour les faire respecter.

Dans le secteur des forêts — je l'ai lu tout à l'heure — si vous permettez, je vais passer ce paragraphe.

Impact économique. L'industrie du camionnage en vrac dans la région 01 n'a pas besoin d'être analysée bien longtemps pour réaliser qu'elle est vitale à l'économie de la région. Que l'on pense seulement aux achats de camions chez les distributeurs en termes d'équipement et de carburants de tout genre pour savoir que, si ce n'était d'eux, ceux qui oeuvrent dans le domaine des services ne pourraient offrir la même qualité et la même diversité de choix aux autres utilisateurs de leurs services. Les flottes de camions n'utilisent généralement pas ces services locaux.

L'application de cette réglementation. La réglementation touche à tous les intervenants et devrait mettre de l'ordre et établir une complimentarité des parties. Malheureusement, les événements qui ont précédé les postes d'affectation n'ont pas favorisé l'harmonie dans ce secteur. Il y a eu plusieurs erreurs de parcours.

Le mandat qui avait été donné aux associations rivales de former des postes d'affectation avec représentation au sein du conseil d'administration au prorata de leurs membres s'est avéré un échec parce que des préjugés ont été créés entre deux clans et tout en voulant démocratiser, les exécutants favorisaient nettement la minorité. C'est ainsi qu'en juin 1978, on exigeait intégralement le versement des $125 et signature des codes d'éthique correspondant à une liste assermentée de tous les membres de l'une des associations pendant qu'on acceptait une lettre de marge de crédit d'une banque qui ne correspondait aucunement à la liste de l'autre association qui n'a pas produit non plus la signature du code d'éthique. Bien plus, on a exigé de la première association que les 8 et 9 juin 1978, une photo pour chacun des VR inscrits sur la liste assermentée soit fournie. Ce travail a été fait dans ces deux nuits par les camionneurs chefs de file. Consciemment ou inconsciemment, on a entretenu cette rivalité par le non-respect de la réglementation qui avait établi les règles du jeu et en entretenant chez les contestataires minoritaires un espoir inavoué qu'ils règneraient sur la majorité. Les $125 n'ont jamais été déposés au poste. Plusieurs se sont dissociés et ont été traités équitablement par le poste, mais nous demeurons convaincus que les divisions entre les camionneurs ont été provoquées et entretenues pour des raisons obscures.

Une partie du Règlement 112 a été modifée par l'arrêté en conseil 3159-79 en date du 11 décembre 1979. Cette nouvelle réglementation apporte différentes modifications, entre autres, elle limite les abonnés à ceux qui ne possèdent que quatre VR ou moins. Or, les abonnés qui en possédaient plus que le nombre admissible ont été avisés que, malheureusement, ils ne pourraient plus être considérés comme abonnés au poste à partir du 1er mai 1980. Nous vous soumettons, en annexe 2, une lettre d'un officier de la commission démontrant ce qu'on a proposé à ce monsieur pour contourner la loi nouvellement adoptée. Un haut fonctionnaire du ministère avait déclaré au poste, le 1er août, que suite à des interventions politiques, un officier de la commission avait

conseillé à ce détenteur de VR de mettre un de ses camions sous un autre nom.

M. le Président, l'annexe 2, en date du 4 août 1980, est adressée au Poste d'affectation de la région 01 Inc., à l'attention du directeur: "Monsieur, "Par la présente, je vous informe que M. Ernest Normand a introduit une requête à la Commission des transports pour obtenir l'autorisation de transférer le permis de camionnage en vrac numéro Q-501,166-001 qu'il détient pour transporter des matières en vrac dans la région 01, en faveur de Les Industries E. Normand Inc." "Je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments les plus distingués." Et c'est signé: "Jacques Hadnault, chef de la division des demandes, transport de matières de vrac, bureau de Québec. Copie conforme à M. Camillien Saint-Onge."

Une autre modification apportée par la nouvelle réglementation, c'est l'obligation de faire des nouvelles demandes de poste. Or, nous nous sommes rendus à toutes les exigences de la nouvelle loi; cela nous a exigé trois mois de travail. Une convocation de tous les détenteurs de VR a été expédiée par la Commission des transports pour une séance qu'elle est venue tenir à la Grande Maison de Sainte-Luce. Suite à la tenue de cette séance, les exigences, dont je vous inclus une copie en annexe 3, démontrent encore que la minorité a beaucoup plus de poids que la majorité en ce qui concerne le vrac. Nous vous soulignons que c'était dans une période où les effectifs du poste étaient des plus réduits. Nous avions pratiqué le sens de l'équité entre les abonnés du poste en ne tenant aucun compte de l'association à laquelle ils appartenaient antérieurement et nous avons voulu faire une continuité de ce principe en se gardant d'insérer le nom d'une association à notre nouvelle demande de permis, ce qui semblait être dans l'esprit de la loi. Maintenant, nous nous voyons obligés par la décision de la commission de faire volte-face. Ce n'est plus la minorité qui est à côté qui doit regarder le train, mais la majorité, qui est dans le train, qui doit céder le pas à ceux qui n'ont jamais voulu embarquer.

Je vous réfère, si vous me le permettez M. le Président, à cette annexe III: La partie requérante, Poste d'affectation de la région 01 Inc., devra faire parvenir à la commission d'ici au plus tard le 30 avril 1980, une liste à jour de ses membres abonnés, ladite liste devant inclure le nom, l'adresse, le numéro de permis et être accompagnée d'une copie du certificat d'enregistrement pour l'année 1979 ou l'année 1980 s'il a été renouvelé.

Cette liste devra inclure ou être accompagnée d'une formule d'adhésion au poste signée par chaque titulaire constituant ladite liste.

On devra considérer comme abonné tout titulaire de permis selon la définition de l'article 37.1 a) de la sous-section 1 de la section 4 du règlement sur le camionnage en vrac.

La partie requérante devra faire la preuve que son conseil d'administration est ou sera formé conformément aux dispositions de l'article 44 du règlement sur le camionnage en vrac de chaque comté municipal qui sont abonnés au poste.

Que la partie requérante fasse la preuve à la commission que son code d'éthique, article 44, que son programme d'opération et son budget de revenus et de dépenses, article 41.2, soient soumis pour approbation à ses abonnés et acceptés par la majorité de ceux-ci.

Que sur réception de ladite liste et de la preuve de l'acceptation par les abonnés du code d'éthique, du programme d'opération et du budget de revenus et de dépenses, la commission procède à un ou des scrutins effectués par la poste parmi tous les abonnés en vue de la délivrance d'un permis demandé par la partie requérante, de l'approbation du code d'éthique et de la considération du programme d'opération et du budget de revenus et de dépenses.

La commission continuera la considération de ces affaires, s'il y a lieu, et rendra la décision appropriée après la tenue dudit scrutin.

Le permis de poste d'affectation actuellement détenu par la partie requérante étant toujours en vigueur, la commission pourra considérer les demandes de permis de sous-postes qui seront introduites en autant qu'un permis de poste soit délivré et que les permis détenus par Poste d'affectation de la région 01 Inc., soient convertis en permis de poste et qu'ils se conforment à toutes les dispositions, obligations et conditions prévues à la section 4 du règlement sur le camionnage en vrac.

Pertinence d'accorder des secteurs de travail. Quand on pense à ces gens qui ont peiné 15 à 18 heures par jour à conduire toute leur vie un camion, on n'a pas à se demander si on doit les protéger dans leur secteur de travail ou les recycler dans un autre métier. C'est donc impératif pour tous ceux qui gagnent leur vie uniquement à effectuer du transport en vrac que non seulement les secteurs déjà protégés leur soient conservés mais que d'autres secteurs leur soient protégés. Laissé à la concurrence, le petit propriétaire ne peut concurrencer une organisation qui peut se permettre de fonctionner à perte pour un temps déterminé et prendre ensuite le contrôle lorsque les autres n'auront pu survivre. La deuxième partie de l'article 3 de l'entente entre le gouvernement et l'ANCAl disait: "Le ministre s'engage à ce que 75% du transport de matières en vrac sur les contrats donnés par le ministre des Transports soit effectué via le poste d'affectation." Jusqu'à cette année, il fallait s'informer à chaque contrat si la clause 75-25 était inscrite. La saison dernière, Pavage des Monts, sur sept contrats, la clause n'y était que sur deux seulement et ce, toujours dans la partie du contrat au-dessus de la ligne d'infrastructure, contrairement à l'entente. (16 h 15)

Le rôle du gouvernement à titre de requérant: 1° planifier les travaux du ministère des Transports pour qu'il y ait du travail sur une période de cinq à six mois. Les taux de la Commission des transporte devraient être établis avec le début de l'année du calendrier afin de permettre les estimations des contrats au tout début de l'année, suivies des soumissions et de l'exécution dès que

la saison le permet. De même, certains travaux en terrain avantageux pourraient être "cédulés" plus tard dans la saison selon les possibilités des facteurs intervenants; 2° s'assurer que les garanties nécessaires au paiement complet de tous les camionneurs soient données lors de la signature des contrats. Construction Forillon Inc., via Jean-Paul Morin, projet de Gaspé, en est le plus bel exemple. (Imbroglio judiciaire depuis un an) 23 camionneurs ont dû rembourser à leur banque respective ce qui leur avait été payé par l'employeur. Un contrat de cette année de plus de $300 000 ayant comme seule garantie un chèque de $7000. 3° compte tenu que les quantités transportées sont sous la surveillance directe du ministère, s'assurer que la clause 75-25 soit respectée. A titre d'exemple, le contrat no 107-0109-9 dont les travaux sont effectués par Irenée Saint-Laurent et Fils Inc., partie du contrat en annexe no 4. Sur ce chantier, six semi-"trailers" et deux camions dix roues transportent du matériel depuis le début de juin et les camions du poste ont transporté à ce jour 103 815 tonnes; 340 500 tonnes métriques étaient couvertes par la clause 75-25. A Pointe-à-la-Croix, un autre contrat no 104-0915-9 dont les travaux sont effectués par Morin Inc., et Rely Construction Inc., annexe no 5, quatre camions de 35 tonnes et plus, six camions dix roues et trois "scrapers" y travaillent depuis la fin de mai. Les camions du poste ont effectué à cette date 105 jours de travail. Il est sûrement superflu de dire que le sous-poste de Bonaventure a le plus faible taux de travail de tous nos sous-postes. Les annexes 4 et 5 démontrent la partie couverte par les 75%; c'est une photocopie des contrats où des quantités sont déterminées. Pour le contrat de Saint-Laurent, il s'agit de 102 000 tonnes dans l'emprunt classe A; 100 000 tonnes d'agrégats et 38 500 tonnes d'agrégats concassés. Dans l'autre contrat, il s'agit de 265 000 tonnes, 136 000 tonnes et 45 000 tonnes. Tous ces montants devaient être inclus dans la clause 75-25.

Je reviens à la page 6, M. le Président. Il est pratiquement impossible de donner une image réelle de la situation car les problèmes les plus aigus ne peuvent être abordés sans mettre en danger des gens qui ont besoin de continuer de travailler pour gagner leur vie et qui ne peuvent fournir les preuves des injustices qu'ils subissent sans risquer de perdre leur emploi. Le même problème se pose lorsqu'il s'agit des permis mystérieux qui grossissent les flottes ou lorsqu'il s'agit du non-respect des taux ou des transporteurs sans permis. Il y a toujours des témoins clés qui ne peuvent apporter les preuves sans avoir à subir des répercussions. C'est pourquoi nous venons à la conclusion, sans pour cela minimiser les compétences de la commission parlementaire, qu'une enquête publique couvrant tous les aspects concernant le transport de matières en vrac serait la seule manière d'avoir les lumières nécessaires pour permettre aux législateurs de donner justice aux intervenants de cette industrie importante. Nous sommes convaincus que des choses extrêmement graves sortiraient d'une telle enquête et que les intérêts de tous les citoyens seraient des plus protégés de ces crimes économiques. En attendant cette enquête, pour assurer un minimum de chance de survie aux camionneurs actuels, les ententes de 1977 devraient être respectées intégralement.

M. le Président, honorables MM. les ministres et MM. les députés, merci de nous avoir entendus.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: M. Proulx, M. Lepage, je vois que M. Piuze est assis à la table; je suppose qu'il est aussi le procureur du poste d'affectation 01?

M. Proulx (Anicet): II n'est pas le procureur du poste d'affectation 01 ; nous avons notre procureur, mais j'ai cru que ça coûtait assez cher aux camionneurs et que je pouvais en prendre un à Québec.

M. de Belleval: Pardon?

M. Proulx (Anicet): J'ai cru que je pouvais en prendre un de Québec sans devoir en amener un de Rimouski, car c'est assez dispendieux.

M. de Belleval: Alors, c'est votre procureur actuellement?

M. Proulx (Anicet): II n'est pas notre procureur, dans le dossier que nous avons là, mais M. Piuze est au courant.

M. Lepage: Permettez-nous, M. le Président, M. le ministre, de préciser que notre procureur est de Rimouski; par contre, Me Piuze a été demandé pour nous représenter ici parce qu'il est au courant des problèmes que nous avons vécus dans la région 01 quand même. C'est dans ce sens que le président a demandé à Me Piuze de venir avec nous, ici, à la table. Par contre, Me Piuze n'avait même pas le mémoire en main avant que nous ne lui en donnions une copie ici même.

M. de Belleval: D'accord. Ceci étant dit, vous terminez votre mémoire sur une note assez inquiétante. Vous dites que nous devrions faire un genre de commission d'enquête, si je comprends bien, de style presque policier, une commission royale d'enquête, comme on dit, selon le langage accepté. C'est ce que vous pensez qu'on devrait faire, si je comprends bien?

M. Lepage: C'est ce que nous préconisons, M. le ministre.

M. de Belleval: Parce que, dites-vous, il y aurait des faits très graves qui seraient liés, si je comprends bien, à des agissements criminels ou autres, ou quelque chose comme ça?

M. Lepage: II est peut-être prématuré de parler de criminalité...

M. de Belleval: Mais vous parlez de crimes économiques, c'est...

M. Lepage: C'est un crime économique, c'est d'accord; lorsque l'on pense aux méthodes qui peuvent être utilisées pour obtenir certains contrats et travailler sous les taux de toutes les manières possibles. Lorsque j'ai élaboré ma pensée sur le compte propre, je pense que j'en ai dit pas mal, à savoir qu'il y a des enquêtes qui pourraient être assez approfondies et faire découvrir des choses qui seraient peut-être intéressantes pour toute la population.

M. Belleval: Vous voulez dire quoi? Du chantage, des choses comme ça ou quoi? Du cassage de bras, du cassage de jambes ou quoi?

M. Lepage: Je préférerais que l'enquête puisse prouver justement ces choses.

M. de Belleval: Si je comprends bien, vous-mêmes, vous êtes des missionnaires actuellement comme directeurs du poste d'affectation 01.

M. Lepage: Vous êtes très bien informé, M. le ministre.

M. de Belleval: Si je comprends bien, aussi, en vertu de la nouvelle réglementation, le permis a été refusé au poste 01 ?

M. Lepage: C'est exact.

M. de Belleval: Et le poste risque de perdre son permis définitivement, au mois d'octobre, lorsque ce permis viendra en révision devant la Commission des transports si, d'ici là, il n'a pas réussi à faire la preuve qu'il se conforme à la réglementation en vigueur. Est-ce que c'est vrai aussi?

M. Lepage: C'est une possibilité.

M. de Belleval: C'est une possibilité; autrement dit, vous connaissez actuellement de graves difficultés internes qui vous empêcheraient, entre autres, de faire la preuve que vous représentez un tiers, par exemple, des camionneurs artisans, des détenteurs de permis en vrac de la région. C'est un des aspects qui pourraient vous empêcher d'obtenir votre permis?

M. Lepage: M. le ministre, je pourrais peut-être ajouter que j'ai travaillé 18 ans aussi pour le ministère des Terres et Forêts, mais je sais que vous en êtes au courant. Mais la santé ne me permet plus de donner mon plein rendement à une tâche, mais je suis capable de céder ma place pour le bien de l'organisme pour lequel je travaille et c'est ma conscience qui me le dicte pour conserver ma santé en même temps que celle de ma famille.

M. de Belleval: Oui, M. Lepage. Je ne faisais pas allusion à votre démission. Au contraire. Je pense que votre réputation comme directeur du poste 01 n'est pas à faire. Les raisons que vous avez de laisser maintenant sont personnelles, mais la question que je vous posais n'est pas en relation avec votre démission, mais, cette fois, avec le poste comme tel qui ne serait pas capable d'être accrédité actuellement en vertu de la réglementation. Une des raisons serait que vous n'êtes pas capables de faire la preuve — quand je dis "vous", je m'excuse, c'est peut-être là où il y a eu un malentendu — le poste n'est pas capable de faire la preuve qu'il représente le tiers des camionneurs.

M. Lepage: M. le ministre, nous n'avons pas été capables de faire la preuve dans les délais et le sursis, même, qui nous avaient été accordés à cause du surcroît de travail. Vous connaissez la région 01 et son étendue...

M. de Belleval: Oui.

M. Lepage: ... et, à partir de là, les budgets sont assez restreints au niveau des postes d'affectation puisque c'est dépendant d'une cotisation. A partir de là aussi, lorsque les demandes que j'ai citées en annexe nous ont été formulées, nous n'avions pas de directeurs de sous-postes sur le territoire. C'était assez difficile pour nous de pouvoir passer chaque camionneur et essayer de trouver une machine à photocopier — si vous me permettez l'expression — pour pouvoir avoir des photocopies de VR. Lorsque vous parlez d'avoir le tiers, nous avons présenté une liste assermentée. Je crois qu'il y a des gens assez responsables pour justifier sous serment une liste qui dépasse les deux tiers du nombre des permis dans la région.

Lorsque je fais allusion dans le mémoire à une réunion que la Commission des transports a convoquée à Sainte-Luce avec tous les délais légaux possibles en vue de l'émission du permis, je pense que cette réunion était valable devant le fait, cependant, de l'étendue de la région. Il est entendu qu'il n'y avait peut-être pas la majorité des camionneurs qui étaient présents, mais ceux qui avaient pu se déplacer étaient là pour essayer de défendre leur point de vue. Un vote à main levée a été pris à savoir si les personnes présentes étaient en faveur du poste d'affectation, oui ou non. Je pense qu'il n'y avait pas beaucoup d'opposition.

M. de Belleval: Je comprends. Normalement, de toute façon, cette question pourra être réglée dans le courant du mois d'octobre prochain.

M. Lepage: Je ne crois pas que ce soit un problème.

M. de Belleval: Bon! Je voudrais maintenant relever d'autres points de votre mémoire qui m'apparaissent importants, un entre autres où vous dites que vous trouvez inadmissible qu'on permette à un camionneur qui possède plus de quatre camions de se mettre en règle pour adhérer au

poste d'affectation. En particulier, vous faites allusion à un entrepreneur qui désire se mettre en règle et se départir, donc, d'un cinquième, d'un sixième ou d'un septième permis de façon à pouvoir devenir membre du poste d'affectation. J'aimerais savoir pourquoi vous trouvez qu'un camionneur qui aurait cinq camions n'aurait pas le droit de se mettre en règle.

M. Lepage: M. le ministre, si j'ai apporté cette annexe, c'est pour deux raisons. Premièrement, dans les postes d'affectation, le premier principe du code d'éthique est celui des premier, deuxième, troisième et quatrième camions consacré par le ministre, je crois, chaque fois qu'il émet un permis de poste d'affectation. La personne en cause qui possédait cinq VR était justement venue me voir à cet effet. Elle voulait continuer à être membre du poste et nous étions heureux de la garder avec nous. On aurait voulu trouver une solution réelle à son problème. Elle m'avait même dit: Je vois une chose. Je vais faire annuler un VR. J'en ai cinq, il y en a un dont je ne me sers pas du tout. D'accord? Mais elle a voulu faire une autre chose et c'est dans ce sens que j'ai voulu faire voir, je ne parle pas d'illégalité, mais du moins d'un certain contournement de la loi quand même puisque ce monsieur, avec la clause du premier camion, se trouve à avoir deux premiers camions. (16 h 30)

M. de Belleval: Comment ça?

M. Lepage: En entrant au poste un camion au nom de sa nouvelle raison sociale, il va rentrer aussi un autre camion abonné à son nom personnel. Il a deux camions premiers camions. Le jeu peut se faire, M. le ministre, avec quatre camions. Il n'y a qu'à mettre un autre camion au nom de son enfant et un autre au nom de sa femme. Il va avoir ses cinq camions premiers camions et là c'est grave.

M. de Belleval: Autrement dit, vous dites qu'il y a des camionneurs qui possèdent des camions sous des prête-noms et qui, par conséquent, peuvent faire inscrire effectivement des camions sous le nom de ce prête-nom, ce qui en fait un premier camion. Mais il n'en reste pas moins que vous ne contestez pas à un individu le droit de vendre un de ses permis de bonne foi et de se mettre en règle. Vous êtes d'accord avec cela?

M. Lepage: Je suis d'accord. Par contre, ce que j'ai voulu souligner, c'était le problème que cette histoire soulevait. Deuxièmement, c'est la première fois, depuis que le poste existe, qu'il reçoit un avis de la Commission des transports, à savoir que quelqu'un a transféré un camion.

M. de Belleval: Oui, mais...

M. Lepage: Je n'ai jamais reçu d'avis au niveau du poste d'affectation.

M. de Belleval: Mais ceci étant dit, c'est tout à fait correct qu'un individu se mette en règle et vende un de ses permis.

M. Lepage: Légalement, oui, M. le ministre.

M. de Belleval: Bon! Vous n'êtes pas contre cela.

M. Lepage: Bien.

M. de Belleval: Bon! Il y a une autre question que je voudrais vous poser. Si j'ai bien compris votre opinion personnelle — votre mémoire le reflète — vous dites: Ce que nous essayons de faire, c'est de faire en sorte que tous les camionneurs, quelles que soient leurs allégeances par rapport à une association en particulier qui pourrait les représenter par ailleurs, puissent adhérer sans problème au poste d'affectation, et qu'en conséquence le permis sera demandé au nom de l'ensemble des camionneurs à la suite d'une assemblée générale et non pas au nom d'une association en particulier. Si je comprends bien, vous êtes d'accord pour que le poste soit au nom des camionneurs de l'organisation ou, enfin, de l'assemblée générale des camionneurs comme telle, et non pas via une association particulière qui pourrait exister par ailleurs.

M. Lepage: Dans le mémoire, je cite que, compte tenu que nous avions respecté ce principe, à savoir qu'on ne voulait pas tenir compte de la provenance d'un abonné, de l'association d'où il venait — comme on dit — on ne faisait aucune distinction et tout le monde était traité sur le même pied. Lorsque la nouvelle loi est arrivée, et à partir du fait qu'on n'obligeait plus un abonné à faire partie d'une association en particulier, on s'est dit: Bien, on va essayer d'y aller encore plus dans l'esprit de la loi, peut-être, et on va faire notre demande de permis, notre nouvelle demande de permis de poste au nom suivant: Poste de courtage, région 01 Inc., sans autre chose. On s'est dit: II nous semble que c'est honnête, on montre notre bonne foi et on a donné tout ce qu'on a pu jusque là. Maintenant, la suite nous a déçus et vous comprenez pourquoi.

M. de Belleval: Pour les raisons auxquelles on faisait allusion tout à l'heure, entre autres. Autrement dit, à cause de la grandeur de la région, des difficultés, vous n'avez pas pu encore vous conformer aux dispositions du règlement.

M. Lepage: C'est exact, les photocopies de VR aussi et également des formules d'adhésion.

M. de Belleval: D'accord. Maintenant, j'aurais une dernière question, M. le Président, si vous me le permettez. Dans le cas du monsieur de tout à l'heure, disons, qui avait cinq camions et qui décide d'en transférer un en le vendant à une autre entreprise, ce monsieur pourrait maintenant devenir membre du poste d'affectation. Il n'a qu'à faire sa demande, quoi, et vous allez l'accepter maintenant?

M. Lepage: Voici, M. le ministre. Il y a peut-être certaines réglementations internes au niveau du poste qui pourraient changer dans ce sens.

M. de Belleval: Pourquoi? De quoi s'agirait-il?

M. Lepage: Vous me pardonnerez si je ne puis citer la date, depuis environ deux semaines, à l'avant-dernière réunion du conseil d'administration, il a été décidé qu'à partir de cette date tout nouveau membre devra être accepté par le conseil d'administration avant d'être considéré comme abonné.

M. de Belleval: Vous vous rendez compte qu'en vertu de la nouvelle réglementation et du Code d'éthique qui doit être approuvé, un tel droit de censure ne peut exister.

M. Piuze: Si vous me permettez, M. le Président, M. le ministre, c'est peut-être normal que quelqu'un qui s'adresse à une corporation le fasse d'abord par écrit et c'est peut-être normal que son conseil d'administration en soit saisi. M. Lepage ne dit pas qu'ils vont les refuser. Il dit seulement qu'à l'avenir, au lieu d'être automatique, on devra vérifier si un permis est en règle. Parce que au bureau des véhicules — c'est peut-être cela que M. Lepage aurait dû vous dire tout à l'heure — lorsque la commission nous demande de fournir les preuves d'immatriculation, le moyen le plus facile serait de le faire par l'ordinateur du BVA; mais tout le monde sait qu'il n'y a pas possibilité d'avoir des renseignements de l'ordinateur du BVA. Alors, avant d'entrer au poste de la région 01, le conseil d'administration probablement veut s'assurer que les dispositions de la loi concernant le permis, etc., sont respectées. Cela doit être cela, M. Lepage-

M. Lepage: Veut s'assurer, oui, que le type est qualifié pour être abonné au poste, s'il remplit les conditions nécessaires, sauf qu'auparavant, c'était le directeur qui en avait l'autorité. Maintenant, c'est le bureau de direction qui en a pris la responsabilité.

M. de Belleval: Maintenant, dans le même ordre d'idées, est-ce qu'en vertu des règlements du poste — je pose la question à M. Proulx — il faut être membre de l'ANCAl pour être membre du poste?

M. Proulx (Anicet): Pas besoin d'être membre, M. le ministre, d'aucune association. C'est pour cette raison que M. Lepage tout à l'heure ne l'a pas ajouté, cela doit lui être passé à l'esprit. Il faut mentionner que cela fait douze ans que je travaille dans le camionnage en vrac. J'ai vu en 1977, une chose. J'ai été obligé de parcourir la région no 01 pour ramasser les VR, tous les papiers d'immatriculation, pour me faire dire le soir qu'ils n'avaient plus besoin de cela. Donc, je me suis dit: C'est encore un mode de quêtage pour que je fasse le tour pour me faire dire encore une fois qu'ils n'en ont pas besoin. C'est pour cette raison qu'ils n'ont pas été fournis. Je vais être très honnête avec vous.

M. de Belleval: A savoir que...

M. Proulx (Anicet): C'est pour cette raison que cette fois-ci je n'ai pas fait le tour de la région 01 pour les ramasser, parce qu'en 1977, on a passé une nuit au mois de juin et qu'est-ce que cela a apporté? J'avais tout ramassé cela, j'avais pris la peine de monter des $125 pour les déposer dans la brique d'acier ici, tel que le règlement le demandait, et on s'est ramassé le soir avec des marges de crédit et ces affaires-là. Quand on vient, la deuxième fois, c'est dur à digérer pour les camionneurs.

M. de Belleval: D'accord, merci. M. Lepage: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Lepage: ... me permettriez-vous simplement d'ajouter qu'au poste d'affectation actuellement, il y a comme abonnés au moins une centaine de camionneurs qui, à mon sens, n'étaient pas membres de l'ANCAl auparavant. S'ils étaient membres d'une autre association, c'est possible, mais peut-être qu'ils n'étaient pas membres d'aucune association. Il y a au moins une centaine de membres comme cela.

M. de Belleval: D'accord, merci beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. Lepage, les réponses que vous avez données aux questions que vous a posées le ministre m'ont éclairé quant à un certain nombre de choses que j'aurais moi-même voulu savoir.

Vous dites à la page 5 de votre mémoire que la saison dernière des contrats de Pavage des Monts, la clause 75-25 n'y était que sur deux. Dans votre esprit à vous, depuis 1977, 75-25 devrait s'appliquer à l'ensemble des travaux de voirie et non seulement aux travaux au-dessus de l'infrastructure.

M. Lepage: C'est qu'au début du poste M. le Président, il est sûr que le ciel n'était pas au beau fixe entre l'employeur et les postes d'affectation. L'an dernier, c'était reconnu qu'à partir du fait que les postes d'affectation étaient juridiquement en place ils avaient cette clause de 75-25 sur les contrats du ministère des Transports. A partir de là, par contre, pour la compagnie que j'ai citée, Pavage des Monts, comme je l'ai dit, sur sept contrats, il y a seulement deux contrats — et ce n'étaient pas les plus gros — où la clause apparaissait. Pour les autres contrats, on a essayé de placer nos camions et tous les camionneurs allaient eux-mêmes se placer là, des non-mem-

bres. Et quand on essayait de prendre des mesures un peu plus agressives, on nous disait: C'est regrettable, mais la clause a été omise ou cela a été signé avant juin et on s'est servi des anciennes formules et la clause n'y est pas; on ne peut rien y faire.

M. Gratton: Ce dont je veux m'assurer, une première précision: le 75-25 dont vous parlez, est-ce que c'est seulement celui au-dessus de l'infrastructure ou dans l'ensemble?

M. Lepage: Dans l'ensemble.

M. Gratton: Dans l'ensemble. Dans votre esprit, il n'y a pas de méprise là-dessus, c'est l'ensemble des travaux routiers.

M. Lepage: Absolument.

M. Gratton: Vous savez depuis ce matin que ce n'était pas cela qui était dans l'esprit du ministre des Transports d'alors.

M. de Belleval: Ce n'est pas depuis ce matin qu'on sait cela.

M. Gratton: II faudrait le demander aux camionneurs qui sont ici.

M. de Belleval: Je comprends que vous n'êtes pas un expert dans ce domaine, vous avez été nommé récemment par votre chef là-dedans, mais tout le monde sait, dans le secteur, que, depuis juin 1977, c'est comme cela.

M. Gratton: Je ne pensais pas qu'il fallait être un expert en quoi que ce soit pour savoir lire et pouvoir comprendre ce que les mots disent.

M. Piuze: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. Piuze.

M. Piuze: ... il y avait des camionneurs qui étaient comme le député de Gatineau.

M. Gratton: Vous me faites bien plaisir, parce que j'aime mieux être comme les camionneurs qu'être comme le ministre et son prédécesseur.

M. le Président, je veux savoir ceci de M. Lepage. Le 75-25, indépendamment de la confusion qui existait dans l'esprit du ministre des Transports, le fait demeure qu'il a toujours existé depuis 1972 ou 1973. Dans les contrats, en particulier de Pavage des Monts, n'y avait-il aucune disposition à ce sujet? Est-ce que cela ne fait pas partie du contrat type entre le ministère des Transports et un entrepreneur que le 75-25 s'applique au-dessus de l'infrastructure?

M. Lepage: La clause 75-25, dans les contrats de 1978-1979, a été ajoutée par un addenda au contrat et, justement, c'était cet addenda qui n'était pas inclus. Vous me questionnez sur avant 1978; je n'étais pas dans le domaine, je ne m'y connais pas du tout, malheureusement.

M. Gratton: Une dernière question, M. le Président. Vous mentionnez également — d'ailleurs, l'ANCAl y avait fait référence ce matin — la question de la garantie du paiement à des camionneurs qui travaillent pour des entrepreneurs. On sait que dans la construction d'édifices, par exemple — là, je dois plaider ignorance, le ministre va sûrement s'en réjouir — un sous-entrepreneur qui travaille pour le compte d'un entrepreneur peut enregistrer une créance privilégiée, ce qu'on appelle en anglais le "mechanics lien Act". Est-ce qu'une disposition — je pose autant la question au ministre, s'il en connaît la réponse, qu'à n'importe qui ici; peut-être que Me Piuze peut nous éclairer — analogue existe pour les travaux routiers?

M. Piuze: Effectivement, cela existe; c'est prévu au Code civil, mais cela s'applique aux fournisseurs de matériaux ou à l'ouvrier. Comme le camionneur n'est ni un fournisseur de matériaux, ni un ouvrier, cela ne s'applique pas à lui.

M. Gratton: Dans le mémoire du poste d'affectation, on mentionne que le gouvernement devrait veiller à garantir le paiement. En tant que député d'un comté où il y a beaucoup de camionneurs artisans, je vis assez régulièrement le cas très pénible d'un camionneur qui a fait pour $2000, $3000 ou $4000 de travaux; très souvent, ce sont les mêmes entrepreneurs qu'on retrouve d'un comté à l'autre qui prennent l'habitude et font même une spécialité de ne pas payer leurs camionneurs. Forcément, le ministère ne peut pas apprécier ce genre de chose quand il octroie un contrat à un entrepreneur. Dans votre mémoire, vous ne le suggérez pas de façon précise; vous dites: Le gouvernement devrait garantir le paiement. Est-ce que ce serait là une façon de le garantir, d'inclure le camionneur dans l'éventail de ceux qui peuvent être protégés? (16 h 45)

M. Piuze: M. le Président, avec votre permission, ce que nous avons suggéré ce matin, et c'est probablement ce que suggère le Poste d'affectation de la région 01, c'est que le gouvernement du Québec n'accorde des contrats que lorsqu'il y a une police d'assurance qui garantit l'exécution du contrat, les matériaux et la main-d'oeuvre.

A ce moment-là, le camionneur qui fait le transport est assuré, grâce à la compagnie d'assurance, d'être payé, faillite ou pas faillite, loi fédérale ou pas loi fédérale.

M. Gratton: Vous êtes sans doute conscient comme moi qu'il y a des entrepreneurs qui, pour toutes sortes de raisons qui sont souvent très valables, ne peuvent pas obtenir ces cautionnements d'exécution, ces bons de garantie. Je pense que cela existe dans tous les domaines, dans n'importe quelle construction, cette possibilité de remplacer ce bon de garantie par 10%. Est-ce qu'il ne serait pas plus facile, compte tenu de cela, de

préserver aux entrepreneurs cette possibilité, cette alternative, de pouvoir remplacer le cautionnement par un chèque visé, mais en fournissant au camionneur la possibilité pour lui d'enregistrer une créance privilégiée auprès de l'entrepreneur ou auprès du ministère par le biais de l'entrepreneur?

M. Piuze: Ce serait une possibilité, il faudrait changer le Code civil.

M. Lepage: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Lepage:... pour répondre à cette question, je pense que, dans le mémoire, lorsque je fais allusion à 23 camionneurs qui ont dû rembourser ce qu'ils avaient gagné, c'est justement ce que j'appelle un imbroglio juridique — remarquez bien que je ne suis pas avocat, je ne sais pas au juste si j'ai le vrai terme — mais il reste que c'est quelque chose encore pendant. Il y avait apparemment toutes les garanties possibles. Si on place cela dans l'article "recommandations", c'est dans le but que le ministère puisse protéger éventuellement les camionneurs qui sont dans de tels cas dans la partie des non-garantis. Donc, dans toute déclaration de faillite par exemple, les camionneurs sont considérés comme les non-garantis.

Donc, que ce soit par une police bon de garantie d'exécution, que ce soit par un chèque visé, pourvu que la garantie soit signifiante. J'ai mentionné un contrat actuellement en cours dans notre région de plus de $300 000. Il y a un chèque visé de $7000 pour garantir ce contrat. Je pense que c'est inconcevable. A ce moment, il me semble que si le ministère prenait au moins la précaution de ne pas verser les paiements sans s'assurer que les camionneurs ont été payés, il y aurait déjà pour eux une protection valable.

M. Gratton: M. le Président on me permettra... Comme vous, M. Lepage, je ne sais pas trop quelle est la solution, mais il me semble qu'en principe on devrait tous reconnaître que le ministère a une responsabilité vis-à-vis des camionneurs qui travaillent pour des entrepreneurs à qui le ministère a octroyé un contrat et on devra sûrement trouver une solution, une façon de leur donner un minimum de protection, malgré que les camionneurs ne sont pas considérés comme salariés.

Une dernière question, si on me permet. Vous dites à la première page de votre mémoire, en parlant du gel des permis et je cite: "Depuis cette date, c'est-à-dire 1977, les flottes de camions VR sont apparues comme jamais". Voudriez-vous préciser votre affirmation, parce que je sais que, de l'autre côté, on va dire: Les méchants libéraux ont été responsables d'augmenter sensiblement le nombre de permis au cours de leur mandat? Effectivement, mon collègue de Charlevoix est mieux placé que moi pour en témoigner, il y avait quand même des droits acquis qu'on a considéré du devoir du gouvernement de protéger et c'est ainsi que le nombre de permis VR a été beaucoup plus considérable au bout de trois ou quatre ans qu'il ne l'était au début.

Depuis 1977, il ne s'agissait pas de reconnaître des droits acquis, il s'agissait... D'ailleurs, c'est très concret. C'est très spécifique, parce que vous donnez une série de cas particuliers. Je voudrais que vous nous assuriez qu'on a bien compris que, depuis 1977, comme vous le dites, des flottes de camions VR sont apparus comme jamais et pas nécessairement en fonction de droits acquis par qui que ce soit.

M. Lepage: Ce sont des flottes qui ont grossi, qui sont apparues. Mon terme est précis. Il nous serait difficile d'expliquer la provenance de tout ça, mais il reste que c'est quand même un peu contradictoire avec le principe établi au début.

M. de Belleval: M. Lepage, je pourrais vous l'expliquer très simplement.

M. Lepage: Je vous en remercie.

M. de Belleval: Comme dit le député de Gatineau, il ne faut pas imputer ça aux méchants libéraux ou aux méchants gouvernements qui nous ont précédés, quoiqu'il vient d'admettre que, bien sûr, c'est le parti politique qu'il représente qui a inscrit dans la loi et les règlements ces droits acquis.

Le problème avec les droits acquis, c'est que, quand vous les acquérez, vous les acquérez pour toujours, et quand quelqu'un veut les faire valoir, que ce soit à un moment donné ou à l'autre, vous êtes obligés de les reconnaître. Effectivement, on continue à reconnaître...

M. Mailloux: ...

M. de Belleval: ... des droits acquis, mais le principe lui-même provient...

M. Mailloux: Le règlement...

M. de Belleval:... comme le disait lui-même le député de Gatineau, de ces méchants libéraux.

M. Mailloux: M. le Président, je pense que le ministre me permettra de dire que c'est faux, ce qu'il vient de dire, puisqu'il y avait une date limite pour reconnaître des droits acquis.

M. Gratton: Le ministre est encore dans les patates.

M. de Belleval: ...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

Une Voix: Les deux pieds dans les plats.

M. Goulet: Merci. Je voudrais savoir combien il y a de permis de transport en vrac dans la région 01?

M. Lepage: 712 ou environ.

M. Goulet: Combien y a-t-il de membres en règle?

M. Lepage: 500.

M. Goulet: ... avoir de la difficulté à vous reconnaître comme...

M. Lepage: C'est la raison pour laquelle j'ai dit que dans le cas dont le ministre parlait tout à l'heure en ce qui concerne le permis du poste, je ne voyais pas de problème et, à ce moment-là, je croyais qu'il reliait ma démission à ceci.

M. Goulet: Mais, dans la région 01, quel pourcentage de permis y aurait-il en trop, d'après vous? On dit: II y en a en trop. Est-ce qu'ils sont tous dans la région 01 ou s'il y en a dans d'autres régions? Quel est le pourcentage de permis qui, d'après vous, serait en trop?

M. Lepage: Je l'ignore. Par contre, ça évoque, si vous permettez, une solution qui a été demandée tout à l'heure, à savoir quelle solution on pourrait apporter étant donné qu'il y a trop d'offres pour la demande. La première solution, ce serait justement de contrôler les taux, comme je le fais dans mon mémoire. Parce qu'en contrôlant les taux vous allez éliminer les équipements utilisés à outrance, comme on dit, les équipements qui sont utilisés sept jours par semaine et 24 heures par jour. A ce moment-là, c'est une industrie; ce n'est plus du travail pour gagner son pain.

Alors, je pense que ce serait déjà une diminution indirecte du nombre des permis ou, du moins, une augmentation du travail pour les détenteurs de permis.

M. Goulet: Ce matin... Oui, M. Piuze?

M. Piuze: Je m'excuse, M. le Président. C'est en réponse à une question du député de Gatineau tantôt. C'est une réponse que je viens d'avoir, je m'excuse.

M. Goulet: Ah bon! Cela vient à retardement. Cela ne fait rien.

M. le Président, le monsieur au centre parlait d'un élément de solution. J'ai cru comprendre, dans une réponse qu'il a donnée au ministre ou au député de Gatineau qu'il favoriserait pour contingenter, si on peut employer ce terme, ou diminuer le nombre de permis, de faire affaire d'abord avec le propriétaire-chauffeur — je ne sais pas comment m'exprimer — celui qui possède un camion et celui qui le conduit lui-même. De cette façon, ce dont vous venez de parler, sept jours par semaine, 24 heures par jour, cela n'existerait pas; le gars prendrait au moins une demi-heure par jour pour dormir, et une autre pour graisser son camion, ce serait normal. Deuxièmement, dans cette réponse, j'ai cru comprendre que vous seriez favorable — je ne veux pas vous le faire dire, je ne veux pas dire que c'est ce que je pense — à une telle mesure?

J'ai cru comprendre cela dans une réponse précédente.

M. Lepage: M. le député, je vais biaiser ma réponse, malheureusement. Nous voudrions améliorer le sort des camionneurs, cela va. Le gros problème, c'est le respect des taux. Si les taux étaient respectés, il n'y aurait pas ce qu'on appelle la piraterie, il n'y aurait pas de travail de nuit, il n'y aurait pas de travail hors saison et toutes ces choses qui diminuent le travail lorsque le temps est venu. C'est le point principal, je crois. Si l'on veut réglementer quelque chose, je pense qu'il faut d'abord prendre les mesures nécessaires pour en faire respecter les clauses, le respect des taux. Les postes d'affectation sont là non pas seulement pour essayer de revendiquer. Ils sont là premièrement pour essayer de donner un service de qualité. Pour donner ce service de qualité, il faut que chaque abonné puisse avoir sa part du gâteau pour être en mesure d'avoir un équipement valable. A partir de là, il va pouvoir prendre le fort et le faible. Actuellement, les pirates prennent seulement le fort. Ils vont prendre, par exemple, les transports qui sont courts, les transports qui sont sur le planche, les transports qui sont faits à l'heure, parce qu'ils ont de la machinerie, qu'ils ont de l'équipement qui n'est pas en ordre. Ils ne feront pas partie du poste d'affectation. Le poste d'affectation, il faut qu'il donne le service complet, avec toute la qualité possible. C'est dans ce sens que je dis qu'en plus d'améliorer le sort des camionneurs, qu'on donne une fois pour toutes aux postes d'affectation le contrôle du camionnage. La qualité des services va être de beaucoup améliorée. Tout le monde va mieux vivre. Pour cela, il ne faut pas laisser croire à ceux qui vont sous les taux ou contre la réglementation qu'ils vont avoir la possibilité de régner sur ceux qui ont la majorité.

M. Goulet: Vous avez, en effet, contourné habilement ma question, mais je reviens à la charge, parce que...

M. de Belleval: ... le député de Gatineau.

M. Goulet: Ne vous en faites pas, monsieur, cela fait quatre ans...

M. Gratton: M. le ministre, il est resté, le député de Gatineau, contrairement à celui de Charlesbourg.

M. Goulet: A vous entendre répondre, on dirait que vous avez assisté depuis quatre ans aux réponses qu'on a à l'Assemblée nationale. Ce que je veux savoir, farce à part, c'est si, demain matin, dans la région 01, on était pris pour prendre un vote, on a un problème, c'est qu'il y a trop de camionneurs et pas assez d'ouvrage. Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on doit d'abord favoriser le petit propriétaire, celui que j'appelle propriétaire d'un camion et chauffeur? Est-ce qu'on doit d'abord favoriser ce gars, oui ou non? Ou si on doit continuer à peu près comme maintenant, je

peux avoir un camion au nom de ma femme, un autre au nom de mon fils, un autre au nom de mon voisin, et ainsi de suite. Vous avez dit, tout à l'neure, que le haut fonctionnaire a dit à quelqu'un comment contourner la loi. Demain matin, le ministre des Transports ou le gouvernement ou qui que ce soit vous dit ceci: On veut trouver une solution, il y a 800 permis dans la région et il y a du travail pour 500. A qui donne-t-on ce travail? Quelle serait votre solution? Est-ce que vous voteriez pour cela ou contre cela? Vous n'êtes pas obligé de me répondre, mais je vous pose la question.

M. Lepage: Je vais répondre oui. Je vais répondre d'abord qu'au niveau du poste d'affectation, il est sûr que l'on va préconiser — le principe du premier camion en est la meilleure preuve — l'idée de donner du travail et d'encourager celui qui gagne sa vie, parce que c'est une industrie qui est valable dans la région. (17 heures)

M. Goulet: Lorsque vous parlez d'un premier camion, je veux qu'on s'entende bien, c'est peut-être très minime, mais lorsqu'il s'agit d'un premier camion conduit par son propriétaire, c'est-à-dire que le gars qui gagne vraiment sa vie avec ça a un premier camion, c'est lui qui le conduit, c'est lui qui l'entretient, il travaille avec son camion. Lorsque vous parlez du premier camion, vous avez donné un exemple tout à l'heure, cela peut être mon épouse qui a un premier camion, ou mon frère, mais ça ne règle pas le problème. Lorsque je parle d'un premier camion, je parle du premier chauffeur, c'est le propriétaire qui le conduit.

M. Lepage: La réglementation des postes d'affectation ne fait pas la distinction entre un premier camion conduit par le propriétaire lui-même...

M. Goulet: Elle ne le fait pas. Ecoutez, je m'excuse de vous interrompre, elle ne le fait pas, bien sûr, mais s'il y avait une distinction, est-ce que vous seriez d'accord? C'est ma question.

M. Lepage: Oui.

M. Goulet: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de...

M. Goulet: M. le Président, si vous permettez, j'aurais une autre question.

Le Président (M. Jolivet): D'accord.

M. Goulet: Je ne veux pas être désagréable. Je ne sais pas si j'ai bien compris tout à l'heure. Est-ce qu'il y a un racket de protection dans votre région pour le camionnage? Est-ce ce que vous avez tenté de nous dire tantôt, dans la dernière page de votre mémoire? Est-ce qu'on connaît chez vous ce qu'on a connu dans la construction, un certain local de plombiers, est-ce ce qui existe, oui ou non?

M. Lepage: II y a des effets étranges, mais on ne peut pas en trouver les causes.

Le Président (M. Jolivet): Le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: J'aurais une remarque, M. le Président. Quand on parle de premier camion, il faudrait peut-être une solution mitoyenne, parce que quelquefois le conducteur du premier camion peut être malade. Alors, s'il y en avait un de malade, il ne faudrait pas que les camions restent dans la cour.

M. Goulet: On n'est pas malade à l'année.

M. Mathieu: M. Lepage, quand on parle de pirates qui échappent au contrôle du poste d'affectation 01, pourriez-vous mettre une proportion, 10%, 30% ou 50%?

M. Lepage: Environ 20%.

M. Mathieu: Une autre question rapide. Vous parlez, à la page 1 de votre mémoire, du gel des permis qui devait avoir lieu en 1977. Si le gel avait eu lieu, effectivement, est-ce qu'aujourd'hui, vous vous ramasseriez avec beaucoup de camions supplémentaires ou si ce phénomène se serait pas mal résorbé?

M. Lepage: II me serait impossible de répondre honnêtement à cette question, M. le député, parce que je n'ai pas les données nécessaires. Il est sûr que le sort serait sûrement amélioré.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Piuze: M. le Président, si vous permettez, suite à une question du député de Gatineau tout à l'heure concernant les privilèges des camionneurs pour les assurer qu'ils ne perdront pas d'argent avec les entrepreneurs, il y a une chose que j'avais oubliée, c'est que lorsque le gouvernement prend possession de la route qui est construite, elle devient, bien sûr, propriété de la couronne et vous ne pouvez pas avoir de privilèges de la part de la couronne.

Il y aurait peut-être une disposition qui pourrait se prendre, indépendamment des polices de garantie dont je parlais tantôt, c'est qu'en vertu du règlement concernant les contrats de construction du gouvernement qui régit justement les dépôts de chèques, etc., le gouvernement pourrait modifier ce règlement et retenir 10% ou 15% pour s'assurer du paiement des camionneurs.

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'inviterais maintenant le Poste d'affectation de la région 02 Inc., représenté par Michel Duchesne, président, mémoire 14M.

M. Duchesne, si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent.

Poste d'affectation de la région 02 Inc

M. Duchesne (Michel): D'abord, je voudrais vous faire remarquer que Me Beaudet est ici seulement à titre de conseiller juridique, ayant eu le mandat au poste d'affectation, il nous représente strictement aux fins juridiques.

Je voudrais d'abord...

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous, s'il vous plaît, nous rendre service et approcher votre micro pour qu'on comprenne.

M. Duchesne: Très bien, oui. Je voudrais, tout d'abord, remercier le ministère des Transports, en particulier le ministre des Transports, de m'avoir invité, à titre de président du conseil d'administration de la région 02, à participer à cette commission parlementaire. Je dois vous avouer bien franchement que, si j'avais su, en 1972, lorsque j'ai commencé à faire du transport en vrac, qu'aujourd'hui je me retrouverais ici dans le but de débattre les problèmes du vrac, il est fort probable que je n'en aurais jamais fait. Cependant, étant donné qu'on ne doit jamais regretter ce que l'on entreprend, c'est quand même un plaisir et un honneur pour moi d'être ici devant vous aujourd'hui dans le but de démontrer, le mieux possible, les problèmes que nous vivons également chez nous.

Messieurs les membres de la commission, au nom du Poste d'affectation de la région 02 Inc., je viens ici exprimer ma joie de pouvoir participer à une commission parlementaire sur les problèmes du vrac. Cependant, vous comprendrez que j'éprouve certaines craintes, sans vouloir être pessimiste, sur le résultat de cette commission.

Etant dans ce domaine depuis 1972, soit un an avant l'entrée en vigueur du règlement no 12, qui fut accepté par l'arrêté en conseil 2389-73 du ministre Pinard, qui était au ministère des Transports à ce moment-là, je suis en mesure de pouvoir élaborer et tirer des conclusions sur le problème que nous vivons depuis que le transport est réglementé. Cela ne m'empêche pas, cependant, d'être très au courant des problèmes du vrac avant cet arrêté en conseil, ayant dans ma famille et dans mon entourage des gens qui font ce métier depuis 30 ans.

Pourquoi cette crainte sur le résultat de cette commission? Elle s'explique de cette façon: depuis 1977 en particulier, il s'est passé tellement de choses invraisemblables au ministère des Transports qu'on ne peut faire autrement que se demander si, pour une fois, les gens qui vous écoutent et plus particulièrement ceux qui vous mènent ne viendront pas vous dire encore une fois qu'ils ne sont pas sûrs d'avoir bien compris et qu'il faudrait étudier encore plus profondément les problèmes avant de prendre toute décision, en espérant peut-être prendre suffisamment de temps pour qu'un nouveau ministre ou de nouveaux fonctionnaires prennent la relève et qu'à leur tour ils recommencent à étudier.

J'ai assisté depuis surtout 1977 à tellement de changements de direction du règlement sur le camionnage en vrac que l'on pourrait croire qu'on a voulu faire comprendre aux camionneurs que, s'il y avait des problèmes dans le vrac, c'était parce qu'ils étaient dans une association mal structurée plutôt que de leur donner les outils vraiment nécessaires pour régler ces problèmes. Vous me permettrez certainement cette remarque: On n'est jamais à l'abri dans une maison en changeant les poteaux continuellement si on ne finit pas les murs complètement.

Pourquoi le gouvernement actuel, qui s'est toujours dit au courant du problème, n'a-t-il pas su améliorer ce que le gouvernement précédent avait cru nécessaire de créer?

Pourquoi le gouvernement actuel ne s'est-il pas servi du rapport qu'il a presque lui-même fait — et le ministre Parizeau sait ce dont je parle — soit le rapport Lippé et pourquoi d'autres rapports comme celui qui fut monté dans la région 02 en 1979 par les agents du ministère et qui traite du transport illégal qui s'y fait, ont-ils été jetés à la poussière?

Pourquoi le gouvernement actuel, qui a prêché que l'ancien gouvernement parlait au nom des petits pendant qu'il couchait avec les gros, a-t-il fait exactement la même chose?

Pourquoi le gouvernement actuel n'accepte-t-il pas dans le vrac, comme il l'accepte partout ailleurs, que ce soit la démocratie et le voeu de la majorité qui prime, sans toutefois négliger la minorité?

Pourquoi le gouvernement actuel n'aurait-il pas tenté de comprendre en premier lieu qui était gros ou qui était petit, soit un entrepreneur évalué à lui seul autant qu'une trentaine de camionneurs réunis?

Pourquoi le gouvernement actuel n'a-t-il rien fait pour améliorer le fonctionnement de la Commission des transports après qu'une commission parlementaire a eu lieu il y a plus d'un an afin d'expliquer les problèmes qu'elle vivait?

Voilà certainement au moins quelques points qui pourraient en faire réfléchir plusieurs et même les laisser sceptiques. Si les camionneurs ont manifesté dans les rues malgré qu'ils savaient qu'il y aurait une commission parlementaire, ce n'est pas par manque de maturité, mais plutôt par crainte envers ceux qui prétendent être de grandes personnes et dont on ne doit pas douter. Vous comprendrez que les camionneurs voulaient seulement être bien sûrs qu'on ne les oublierait pas, car il vous sera peut-être plus difficile de nous mettre sur les tablettes, comme ce fut le cas pour certains rapports.

La deuxième partie consiste à démontrer les situations qui existent et qui ont contribué à empirer les problèmes du vrac, des problèmes qui auraient certainement été moindres si le ministre des Transports avait respecté l'entente qu'il avait signée avec l'Association des camionneurs en 1977.

Le premier point portera sur le transport illégal.

Le ministre comprenait la nécessité de détenir un droit de propriété absolu ou d'emphytéose sur

le matériel qui est considéré comme du vrac et qui était transporté par des camions qui n'étaient pas licenciés VR ou LV, pour ceux qui détiennent des permis généraux, option vrac. Il aurait dû prendre les moyens de prouver qu'ils étaient dans l'illégalité. Je parle ici, bien entendu, du compte-poids. Cela aurait permis un pourcentage d'amélioration. Deuxièmement, les fausses locations. Il y en a différentes sortes. 1. On loue soit des camions licenciés F d'autres entrepreneurs ou de concessionnaires. 2.Les camions licenciés LZ de compagnies de location où les chauffeurs sont d'autres compagnies de location ou encore les camions licencés VR qui proviennent de gros détenteurs de permis.

Le ministre savait que le règlement accordait la permission de louer un camion dans le cas de remplacement d'un camion brisé, et ce, pour une certaine période ou encore lorsqu'il n'est plus possible de trouver de camions disponibles dans la région et même dans la province. Le ministre aurait donc dû prendre les mesures nécessaires pour faire respecter le règlement. Encore là, un pourcentage d'amélioration, si le ministre avait su prendre ses responsabilités.

Troisièmement, la vente déguisée. Le ministre savait que certaines compagnies, surtout forestières, vendaient des camions à leurs chauffeurs, tout en faisant croire qu'ils leur appartenaient toujours. Etant donné qu'ils n'avaient pas de permis émis par la commission — je dis bien pour transporter — pourquoi n'a-t-il pas pris les mesures nécessaires pour forcer ces compagnies à marcher dans la légalité? Ceci aurait eu comme conséquence de forcer les dites compagnies à engager les détenteurs de permis, plutôt que de mettre dans une situation plutôt précaire ceux qui se sont fait attraper dans ces achats et qui se sont réveillés plus souvent qu'autrement avec des problèmes jusqu'au cou, tout en causant des problèmes à ceux qui détenaient des permis de vrac. Un autre pourcentage d'amélioration, si la création d'un comité de surveillance avait été instaurée, tel que promis.

Quatrièmement, selon l'arrêté en conseil 3092-79, pourquoi a-t-on permis à ceux qui détiennent déjà des permis de transport général de faire une nouvelle demande? Vous comprendrez que je ne crois pas tellement que c'est parce qu'ils ont oublié ou qu'ils n'ont pas eu le temps de faire leur choix, soit faire du général ou du vrac, au moment où le ministre a décidé de geler les demandes de permis dans le vrac. C'est là un autre pourcentage de problèmes qui auraient pu être évités.

Cinquièmement, les transferts de permis. Le ministre, en donnant priorité au premier camion, savait qu'il fallait prendre également des mesures pour empêcher un détenteur de plusieurs permis de transférer un permis à chacun des membres de sa famille ou formant plusieurs petites compagnies, tout en étant l'unique propriétaire, pour réussir à faire de tous ces camions des premiers camions qu'il pouvait inscrire au poste d'affectation et ainsi recevoir une part du transport qu'il n'aurait jamais eue autrement.

Il y a également les permis qui ont été transférés, alors qu'il n'y a jamais eu de camions rattachés à ces permis, si ce n'est des pick-up ou d'autres véhicules de ce genre. Ou, encore, le propriétaire faisait faillite et, généralement, son permis aurait dû être éliminé après un an, si ce propriétaire était dans l'impossibilité de s'acheter un autre camion.

Comme il est aussi difficile de convaincre la Commission des transports de rejeter ces demandes de permis que de vendre un réfrigérateur à un Esquimau, nous n'avons presque jamais réussi à faire rejeter ces demandes de transfert. J'aurai certainement des exemples à donner tout à l'heure, si j'en ai l'occasion, qui pourraient le prouver également. (17 h 15)

Enfin, ceux qui détiennent un permis devraient posséder une carte du genre Chargex ou assurance sociale pour que la police du transport puisse vérifier si ceux qui ont des camions immatriculés VR ont bien un permis qui s'y rattache ou qui ne serait émis que pour une certaine catégorie de transport. Il y aurait là certainement un autre pourcentage d'amélioration si cela était fait.

Sixièmement, les secteurs de travail. Première partie du transport. Pour bien faire le point sur la situation causée par le manque de secteurs de travail, vous me permettrez de faire une rétrospective de ce que recevaient les camionneurs avant la venue des postes d'affectation uniques et par le règlement 112, ce qui va contredire ceux qui ont prétendu que les postes d'affectation avaient tout reçu et qu'il était impossible de faire plus.

Reculons en 1973 où le ministre des Transports du temps avait accordé aux camionneurs artisans membres de l'ANCAl la clause 75-25 au-dessus de la ligne de l'infrastructure sur l'octroi des contrats de construction de routes, en plus de la correction et de l'asphalte, de même que 100% des travaux qu'elle exécutait elle-même en régie et du transport du sel. Seuls la correction et l'asphalte ont été enlevés en 1975 ou une demande de camions importante pour le Nord québécois donna la chance aux entrepreneurs de faire perdre cette clause pour réussir à placer le surplus de leurs camions. Bien entendu, ils invoquaient la raison que les artisans ne voulaient pas donner le service et pour cause.

Cependant, les camionneurs artisans recevaient de la part des autres ministères, tels que Tourisme, Chasse et Pêche, Terres et Forêts, Richesses naturelles, 100% des travaux qu'ils exécutaient en régie, seul le ministère des Affaires municipales ne donnait rien. Cependant, dans certaines régions comme la 02, les artisans et les entrepreneurs réussissaient à obtenir des clauses de transport des municipalités les plus importantes. Avec le nombre de camionneurs que l'ANCAl possédait à ce moment-là, nombre d'ailleurs qui est sensiblement le même aujourd'hui, avec le transport qui lui était accordé, ceux qui en étaient membres recevaient des revenus supérieurs de 25% à 30% à ceux que nous recevons aujourd'hui, par rapport à l'inflation et au coût de la vie qui monte continuellement.

Maintenant regardons ce que pouvaient recevoir comme transport ceux qui étaient membres de l'Association des camionneurs entrepreneurs; tout d'abord, les entrepreneurs qui exécutaient des contrats pour le ministère des Transports donnaient à l'AQECV tout le transport sous la ligne d'infrastructure qu'ils ne pouvaient exécuter eux-mêmes en plus des 25% au-dessus de la ligne lorsqu'ils ne pouvaient les exécuter avec leurs propres camions. Il était donné également aux entrepreneurs le transport exécuté sur les contrats d'entreprises privées et vous savez sans doute que plusieurs entrepreneurs faisaient partie de cette association. Il y avait également les compagnies forestières dont le transport était exécuté par les deux associations en proportion du pourcentage des camionneurs que chacune possédait.

Secteur de travail. Deuxième partie. Dans la région, voyons maintenant ce que le poste d'affectation peut donner aux membres des deux ou trois associations réunies; je n'en ai nommé que deux, je voudrais faire remarquer qu'il y en avait également une troisième qui était l'Association coopérative des camionneurs. Je m'excuse si je n'ai pas mis cette association dans mon mémoire, il s'agit tout simplement d'un oubli. Tout d'abord, les camionneurs artisans, qui étaient près de 325 en 1977, à qui on a ajouté un nombre de 125 entrepreneurs et de coopératives, se sont rejoints pour se départager les clauses de transport qui suivent: 1°: Du ministère des Transports, toujours la clause 75-25 au-dessus de la ligne d'infrastructure, le sel et les travaux en régie à 100%, la correction et l'asphalte quand l'entrepreneur n'a pas suffisamment de camions pour le faire seul s'il ne veut pas en acheter pour les exécuter. 2°: Le transport sur les contrats du ministère des Transports sous la ligne d'infrastructure à la condition que l'entrepreneur n'ait pas assez de ses camions ou encore s'il ne décide pas d'en acheter comme cela se produit à 90% du temps; pourtant ce transport était donné aux camionneurs de l'AQECV auparavant. Encore là, je peux facilement donner des exemples qui sont assez frappants. 3°: Les municipalités qui avaient donné un pourcentage de transport auparavant aux associations ont accepté de redonner ces clauses aux postes d'affectation uniques. Cependant, cela est devenu plus difficile à faire respecter pour la raison que des entrepreneurs généraux qui étaient avec les entrepreneurs trouvent maintenant qu'ils n'en ont plus assez mais continuent cependant à acheter des camions. C'est à ne rien y comprendre. 4°: Les ministères tels que ceux du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, des Richesses naturelles, des Terres et Forêts ont continué à collaborer comme auparavant. Ils ont donné 100% de leurs contrats en régie. Cependant, il faut déduire de cela les subventions qui, cette année, viennent d'être accordées aux compagnies forestières pour l'exécution des chemins de pénétration. Vous comprendrez que pour nous, ces subventions ne sont pas tombées dans des mains d'alliés car, avec la venue des postes d'affectation uniques, les compagnies forestières ont attrapé le virus galopant. Il y en a peut-être qui vont se poser des questions à savoir ce que c'est. Je veux dire par là qu'on nous a littéralement fui car aucune n'a voulu reconnaître les postes et aucune ne veut vraiment collaborer pour répartir le transport qu'elles font exécuter. Nous pouvons même fournir des lettres qui le prouvent. J'en ai d'ailleurs une copie ici; s'il y en a qui veulent que je la lise tout à l'heure, il me fera plaisir de la lire. 5°: Le transport que les entrepreneurs généraux donnaient sur ces contrats privés aux membres de l'ANCAl a été perdu en totalité par le poste si ce n'est que quelques bons amis à qui certains entrepreneurs continuent de donner du transport et ce, directement. 6°: Hydro-Québec, qui vient d'accorder une clause 75-25 sur ses contrats qui est censée être au-dessus de la ligne d'infrastructure, a oublié que s'il est facile de trouver où se situe cette ligne sur la construction des routes que fait exécuter le ministre des Transports, cela est beaucoup plus difficile à déterminer sur la construction d'une digue pour barrage ou sur la construction de chemins construits temporairement et qui ne contient qu'une seule sorte de matériel, soit du gravier brut. Cependant, en régie, la part du poste est comme auparavant. 7°: Pour le transport du bois, ce fut presque la catastrophe. Pour les raisons décrites précédemment via les compagnies forestières, le poste d'affectation se vit dans l'impossibilité de négocier avec les compagnies forestières, de sorte que tous les camionneurs qui se sont inscrits au poste en juillet 1978 l'ont tous quitté trois mois plus tard quand les compagnies forestières ont décidé, à partir de ce moment-là, qu'elles ne négocieraient avec aucun organisme ou association mais seulement avec les camionneurs directement. Il y a même des membres qui se sont vus menacés d'expulsion si ceux-ci ne quittaient pas le poste dans l'immédiat. 8°: Sur les contrats donnés par Tourisme, Chasse et Pêche, Terres et Forêts, Richesses naturelles, Travaux publics, aucune clause n'a jamais été donnée sauf des belles lettres remplies de promesses.

En conclusion, suite à cette rétrospective, vous trouverez sans doute, sans qu'on ait besoin nécessairement de les nommer, les vrais bénéficiaires des belles promesses du ministre des Transports, M. Lessard, aux 5500 membres des postes, en 1977, dont 5200 en font encore partie.

Vous comprendrez que si le transport qui était exécuté dans la région par les 325 camionneurs artisans, en plus du transport exécuté par les 125 entrepreneurs ou coopératives, avait été octroyé au poste d'affectation unique, on ne serait jamais tombé dans l'entonnoir où nous nous retrouvons aujourd'hui. Il vous appartient de ne pas faire de cette commission parlementaire une risée des camionneurs qui n'ont ni les moyens ni le temps de se faire remettre continuellement aux calendes grecques par des études interminables, des chan-

gements continuels de structure et des fausses promesses.

Vous savez, les camionneurs ne se laisseront pas ridiculiser. Vous savez que la situation est présentement explosive et pourrait devenir très grave. Vous seriez peut-être les premiers à blâmer. Messieurs, vous n'êtes peut-être pas au courant que dans certains endroits la guerre est déjà ouverte entre les camionneurs ou entre camionneurs et entrepreneurs pour savoir qui va s'approprier le plus de transport.

Le premier ministre du Québec, qui a déclaré qu'il était dommage que les camionneurs perdent leurs camions mais que malheureusement il ne pouvait rien y faire, aurait dû y réfléchir auparavant. Il a tout simplement démontré qu'il était mal informé.

Je ne connais personne qui, lorsqu'il a faim ou qu'il est à la veille de tout perdre, surtout si celui-ci a de l'honneur — et Dieu sait si les camionneurs en ont — hésitera à prendre les moyens à sa disposition pour se faire entendre.

Messieurs, il vous appartient donc d'agir en connaissance de cause et de faire en sorte de rétablir le respect de la démocratie, de la majorité, de la justice et de la légalité dans le transport en vrac. Pour ce faire, servez-vous de l'entente de 1977 et d'autres rapports qui ont déjà été soumis sur les problèmes que nous connaissons maintenant.

Même si au début de ce mémoire j'ai fait part de mon appréhension sur le résultat de cette commission parlementaire, je n'en ai pas moins une certaine confiance, car je crois qu'aujourd'hui personne ne peut prétendre être mal informé, surtout vous, messieurs du gouvernement. Dans la région 02 comme ailleurs, les camionneurs artisans comme les entrepreneurs ont accepté d'être réunis au sein d'un poste d'affectation et, c'est logique, n'acceptent pas de voir qu'ils y crèvent tous.

J'espère enfin que nos hommes politiques ont compris que ce n'est pas un problème de structure que nous avons, mais bien un problème de secteur de travail et une application du règlement qui rend justice à la démocratie.

Merci de votre attention. Si vous avez des questions, je suis disposé à y répondre.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Si j'ai bien compris, un peu comme dans le cas du poste 01, votre procureur est aussi celui de l'ANCAl, M. Beaudet.

M. Duchesne: Disons que Me Beaudet a été engagé pour un mandat par les postes d'affectation sur certains points.

M. de Belleval: Si je comprends bien, votre poste est un peu dans le même cas que le poste 01, en instance actuellement devant la commission, parce qu'on a refusé de vous accorder un permis en vertu de la nouvelle réglementation.

M. Duchesne: Le Poste d'affectation de la région 02, présentement, fonctionne toujours selon le permis qui lui a été accordé en 1978, sous l'ancien règlement dû au fait qu'une demande de permis de poste d'affectation par l'Association des camionneurs artisans de la région 02 a été refusée par M. Jean-Guy Alain lors de l'audience de mai dernier, je crois.

M. de Belleval: Pensez-vous être capable de vous conformer à la nouvelle réglementation là encore avant que votre permis soit finalement révoqué?

M. Duchesne: Dès que la Commission des transports aura procédé à la révision présentement en cause, si l'Association des camionneurs artisans n'obtient pas son permis de poste d'affectation, je pense que les camionneurs agiront dans le but de se conformer au règlement.

M. de Belleval: C'est un point important. Vous vous souviendrez que le projet de la nouvelle réglementation avait été discuté avec l'ANCAl et il y avait eu accord entre le ministère et l'ANCAl sur cette nouvelle réglementation, en particulier, sur le fait que les postes d'affectation devenaient des postes publics et non pas des postes de l'ANCAl comme telle.

M. Duchesne: Personnellement je n'ai jamais entendu dire que l'ANCAl était d'accord avec le ministère pour que celle-ci n'ait pas le droit de demander de permis de poste.

M. de Belleval: Ecoutez, rephrasons cela autrement. Une chose sûre et certaine, l'ANCAl était d'accord avec la réglementation.

M. Duchesne: L'ANCAl était d'accord avec la réglementation, mais l'ANCAl n'a jamais été d'accord avec le ministère ou ne s'est jamais mise d'accord avec le ministère sur ce que vous avez dit tout à l'heure.

M. de Belleval: A savoir que...

M. Duchesne: A savoir que l'ANCAl ne pourrait jamais demander de permis de poste.

M. de Belleval: Je pense que c'est très clair dans la réglementation que les postes sont demandés au nom de l'assemblée générale des membres et non pas au nom d'une association en particulier. Je pense qu'on avait été très clair. Cette précision avait été très claire entre nos fonctionnaires, moi-même, M. Dubé et M. Piuze, entre autres, qui était l'autre procureur de la commission présent à cette discussion. (17 h 30)

M. Duchesne: Etant donné que je n'étais pas présent à cette rencontre...

M. de Belleval: Bien sûr, vous n'y étiez pas vous-même.

M. Duchesne: ... peut-être permettriez-vous à M. Beaudet d'y répondre.

M. Beaudet: M. le ministre, je ne sais pas quelle sorte d'entente — à ce moment, je n'étais pas à l'ANCAl — mais il y a une chose qui est sûre: ce qui est écrit dans votre règlement fait présentement l'objet d'un bref d'évocation à la Cour supérieure pour décider si justement l'article permet aux associations de camionneurs artisans de demander le permis, tel que c'est écrit dans le règlement.

M. de Belleval: Selon votre interprétation du règlement.

M. Beaudet: Selon ce qu'on prétend être écrit dans le règlement. C'est en Cour supérieure et cela doit passer le 16 septembre, un bref contre la commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je voudrais que le ministre me renseigne sur une réglementation qui fut adoptée par son collègue. Est-ce que je comprends bien que, dans la région du Lac-Saint-Jean, quand il y a eu obligation de créer des postes d'affectation, l'ANCAl, qui est là-bas majoritaire, aurait refusé aux autres transporteurs en vrac la possibilité d'être inclus dans le poste d'affectation? Est-ce bien ça que j'ai compris?

M. de Belleval: Non, ce que j'essaie de souligner par mes questions, c'est que, dans le cas de la région 02 comme dans le cas de la région 01 actuellement, il y a un problème: on n'est pas capable de former les postes d'affectation parce que les dispositions de la nouvelle réglementation ne sont pas respectées. On se rend compte, au fond, que l'ANCAl est très active dans ces deux régions, que les postes d'affectation, qui sont censés être des postes d'affectation publics, sont quand même représentés actuellement par des procureurs, entre autres, de l'ANCAl. Donc, il y a une espèce, sinon de conflit d'intérêts, du moins certainement d'ambiguïté entre le caractère public du poste et le fait que le poste, de toute évidence, est encore dirigé comme si c'était un ancien poste de l'ANCAl, en vertu des anciens règlements que vous connaissez bien. On se rend compte que ces problèmes internes empêchent que, finalement, les postes d'affectation, en vertu de la nouvelle réglementation, ne puissent être mis sur pied. Moi, ça m'inquiète beaucoup, je dois le dire, parce que je suis très sympathique, par ailleurs, à toutes les inquiétudes que vous manifestez.

Le Président (M. Jolivet): M. Beaudet.

M. Duchesne: Peut-être pourrais-je donner certains chiffres. D'abord, la première des choses, je vous ai bien dit que c'étaient des mandats spécifiques pour telle chose. Maintenant, je vou- drais vous faire remarquer, puisque vous avez donné dans votre rapport certains chiffres, qu'au mois de juin dernier, par exemple, 97% des dépenses encourues par le Poste d'affectation de la région 02 l'étaient par des camionneurs artisans.

D'ailleurs, d'une façon ou d'une autre, avec les chiffres que je vous ai donnés également sur les camionneurs qui ont fait partie, dès sa création en 1978, du poste d'affectation unique, on peut voir qu'il y a une différence assez importante, si on pense, par exemple, qu'à sa création il y avait tout près de 500 camionneurs détenteurs de permis qui en faisaient partie et qu'aujourd'hui on en retrouve entre 350 et 375, dont 97% font partie de l'Association des camionneurs artisans.

M. de Belleval: Je comprends bien ce que vous me dites, mais je ne peux pas m'empêcher de voir que, tantôt, votre prédécesseur, M. Lepage, je pense, ainsi que M. Proulx, ont indiqué que, pour eux, le poste de la région 01, c'est le poste de tous les camionneurs et non pas simplement le poste des camionneurs artisans et qu'ils font tous les efforts en ce sens. Par ailleurs, vous avez vu qu'ils étaient accompagnés de M. Piuze à la table. J'ai bien compris les explications. Maintenant, on se retrouve avec un autre poste, le poste 02, qui est dans les mêmes difficultés, à toutes fins pratiques, que le poste 01, mais qui tient un discours différent. Pour vous, il ne devrait pas y avoir de différence entre le poste d'affectation et l'appartenance à l'ANCAl comme telle et, maintenant, vos deux procureurs sont M. Piuze et M. ... qui est aussi procureur de l'ANCAl.

M. Beaudet: Je ne sais pas si M. le ministre... M. le ministre, l'ancien règlement, celui qui a précédé celui-là, reconnaissait les associations et jusqu'à ce qu'il y ait un nouveau permis émis selon la nouvelle réglementation, c'est l'ancienne qui s'applique. Naturellement, dans le temps, le jeu des associations faisait partie du poste. Vous aviez tant d'administrateurs par groupe de délégués, par association. Or, les camionneurs artisans dans la région 01 représentaient peut-être 90% du poste d'affectation et c'est la même chose dans le moment. Comme il n'y a pas de permis de poste émis selon la nouvelle réglementation, c'est normal que l'Association des camionneurs artisans, qui est majoritaire dans le poste, puisse embaucher des gens de l'Association des camionneurs artisans. Je pense bien que vous ne pouvez avoir quoi que ce soit contre ça. D'ailleurs, on va dans le même ordre d'idées. On demande des choses où il n'y a absolument rien de contradictoire avec ce que demande l'ANCAl là-dedans. Nous autres, on est peut-être de simples avocats ou des avocats simples, mais, de toute façon, on est des avocats et nous ne pouvons pas être identifiés à un seul client toute notre vie. On a le droit d'avoir plus d'un client et nous ne sommes pas en conflit d'intérêts, surtout avec cette réglementation qui était basée sur les associations. A l'avenir, naturellement, si les associations disparaissent, est-ce

qu'il sera interdit aux postes d'affectation de faire affaires avec les procureurs de l'ANCAl, qui sont des procureurs à temps partiel? Je serais un peu surpris de ça. D'ailleurs, que ça s'appelle artisans, postes d'affectation ou bureau de placement, si on représente 90% des gens qui sont là, ces gens-là, à tort ou à raison, vont faire confiance à ceux que la majorité veut.

M. de Belleval: D'accord, M. Beaudet, mais vous admettrez cependant avec moi que, premièrement, je posais des questions.

M. Beaudet: Oui, oui.

M. de Belleval: Je n'ai pas fait d'affirmation. Je voulais essayer d'éclaircir la situation. Deuxièmement, la nouvelle réglementation est en vigueur et son esprit doit être respecté. Aussi, quand je vois des lettres au nom du Poste d'affectationde la région 02 qui est, comme je le dis, un poste public maintenant, en vertu de la nouvelle réglementation, et que ces lettres sont signées par M. Dubé au nom de l'ANCAl, je me dis qu'il y a certainement un problème.

M. Duchesne: II faudrait...

M. de Belleval: Un poste public, c'est un poste public, et l'ANCAl, c'est autre chose. Si vous ne voyez pas, vous, de conflit d'intérêts, c'est votre opinion, mais je pose la question: Est-ce que d'autres ne peuvent pas y voir un conflit d'intérêts, notamment, des camionneurs qui ne sont pas membres de l'ANCAl?

M. Duchesne: M. le ministre...

M. de Belleval: C'est la question que je pose. C'est tout.

M. Duchesne: ... vous pourriez peut-être m'en montrer une d'abord, parce que je n'en ai jamais vu.

M. de Belleval: J'en ai ici. Je peux vous les montrer. J'en ai une ici qui est datée...

M. Duchesne: Une lettre du Poste d'affectation de la région 02?

M. de Belleval: Oui, du Poste d'affectation de la région 02, par Gérard Dubé, président. La signature est là.

M. Duchesne: II faudrait que ce soit prouvé parce que, moi, personnellement, je peux vous dire une chose, c'est qu'il n'y a jamais eu d'autre personne que moi qui ait été président du Poste d'affectation de la région 02 et qui ait été autorisée à signer des lettres. C'est assez curieux. Je pense que c'est plutôt un tour qu'on vous a joué, j'en ai l'impression.

M. de Belleval: On va...

M. Duchesne: A la suite de vos questions, je voudrais faire quand même remarquer à cette commission que le but de mon mémoire n'était pas nécessairement non plus de vanter les mérites d'une association quelconque, c'était plutôt de faire ici une clarification de la situation, à savoir que le problème qu'on avait dans la région 02 comme ailleurs était un problème de transport et pas un problème de structures. Comme je l'ai déjà dit au début, quand on bâtit une maison, si on ne finit pas les murs, on n'est jamais à l'abri. Quand même on changerait les structures continuellement, je n'ai pas l'impression qu'on va régler le problème en vrac. Présentement, dans la région 02, on a un groupe de camionneurs qui a présenté un mémoire qui va probablement être lu ici devant cette commission. Ces camionneurs manquent de travail et, en manquant de travail, ils prennent des dispositions pour tenter d'en obtenir plus et, dans le but peut-être de monopoliser un certain transport dans un secteur, ils demandent un permis de sous-poste qui va obligatoirement créer le danger d'exposer encore plus à la famine le reste des camionneurs de ce secteur.

Je dois dire que le but du Poste d'affectation de la région 02, à mon avis — je l'ai dit plusieurs fois au ministre des Transports du temps, M. Lessard — il y avait au moins une bonne chose que je trouvais dans le règlement 112: c'était la répartition juste et équitable du transport. Je pense que le ministère des Transports devrait s'occuper de ce que le transport soit réparti équitablement plutôt que de se buter, si on veut, à tenter de détruire une association qui, à mon avis, n'a pas fait autre chose qu'essayer d'aider les camionneurs à mieux vivre. Lorsqu'on se fait poser des questions comme celles que vous nous avez posées tout à l'heure — c'est une impression — on a l'impression que vous cherchez à blâmer une association plutôt qu'essayer de trouver vraiment le problème.

M. de Belleval: Non, je ne veux pas blâmer une association, mais je ne peux pas m'empêcher de me rendre compte, puisque votre procureur vient de dire que vous êtes majoritaire dans ces régions, les régions 01 et 02, qu'il ne devrait pas être difficile, puisque vous avez d'ailleurs accepté la nouvelle réglementation, de faire en sorte que les postes d'affectation soient organisés le plus rapidement possible au profit, comme vous le dites, de vos camionneurs. Je partage entièrement votre objectif de ce point de vue.

M. Beaudet: M. de Belleval, l'article 39 de votre règlement ne parle pas de poste public, de poste neutre. Il dit: Les permis de courtage sont délivrés au nom de corporation sans but lucratif — nous en sommes une — ou d'associations coopératives — nos concurrents, eux, ont le droit d'être là — celui de sous-poste se rapporte à une zone à l'intérieur d'une région et celui de poste à une région. Alors, on parle d'émettre des permis de poste à des corporations sans but lucratif. Même si on s'appelle artisans, on est une corpora-

tion sans but lucratif. C'est là-dessus que sont nos prétentions, à savoir qu'on a le droit d'en demander un. Les postes publics, ce n'est écrit nulle part, si vous avez voulu viser cela, d'après nous, ce n'est pas dans le règlement.

M. de Belleval: Quand je disais poste public, c'est un poste qui est constitué en vertu des règlements d'une loi et qui, par conséquent, procède de cette autorité de la loi.

M. Beaudet: Mais on est une...

M. de Belleval: Maintenant, vous avez des prétentions, comme vous le dites, qui seront débattues éventuellement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je voudrais être informé le plus valablement possible. Je suis peut-être trop loin des postes d'affectation et de leur création. Si je comprends bien le règlement qui a été adopté décrétant des postes d'affectation uniques par région, auxquels postes l'ANCAl et les camions en vrac appartenant aux coopératives ou à d'autres associations pouvaient avoir accès, c'est forcément le droit d'une association sans but lucratif d'avoir une majorité. Est-ce que je comprends de votre mémoire... A la fin, vous mentionnez un nombre de camions différent du début. Etant donné que l'ANCAl est majoritaire chez vous, là-bas, fortement, est-ce que je comprends que le droit aux coopérateurs qui sont des transporteurs en vrac également et aux autres transporteurs aurait été refusé...

Une Voix: Présentement...

M. Mailloux: Est-ce que tout transporteur en vrac avait le droit de faire partie du poste?

M. Duchesne: Oui, tous les transporteurs en vrac avaient le droit sauf, selon les dispositions du règlement, bien entendu, les moins de quatre permis, de faire partie du poste et ont fait partie, à un moment donné, du poste, ceux qui l'ont bien voulu, bien entendu.

Il est survenu beaucoup de choses en cours de route, surtout au niveau des transports forestiers, mais on n'a jamais refusé, à venir jusqu'à aujourd'hui, en tout cas, à un détenteur de permis, qu'il soit artisan, entrepreneur ou coopératif, ou camionneur simplement, de faire partie du poste d'affectation.

M. Mailloux: Vous mentionnez deux chiffres dans votre mémoire, quant au nombre des camions. A la page 7 de votre mémoire, vous parlez de 325 en 1977, à quoi on a ajouté un nombre de 125 entrepreneurs et coopératives, forcément vous avez le droit d'aller au poste d'affectation, cela fait 450. Quand vous concluez votre mémoire, là vous parlez de 375. En raison des problèmes forestiers que vous avez rencontrés, il y en a évidemment qui se sont détachés, qui ne voulaient plus rien savoir, et quand vous faites référence aux problèmes que vous avez connus avec les compagnies forestières, c'est à ce moment qu'ils sont disparus? (17 h 45)

M. Duchesne: Oui. C'est exactement ce qui s'est produit. Au tout début, il y avait environ 70 à 75 détenteurs de permis, qui ne faisaient que du transport de bois, qui ont adhéré au nouveau poste d'affectation unique, en 1978. A la suite du travail qui a été tenté et l'Impossibilité de se faire reconnaître par les compagnies forestières, ces gens, après trois mois, ont presque tous quitté sauf quelques-uns.

Je veux mentionner ici un point qui est bien important et la commission des transports est au courant: A un moment donné, le conseil d'administration du poste forêt — puisque chez nous il y a eu un poste forêt qui avait été créé — avait — sans mon accord, d'ailleurs, puisque j'étais contre ce principe — soumissionné sur du transport de "chips" pour une compagnie de transport, pour une compagnie forestière, qui est Donohue Saint-Félicien, et dans le but d'obtenir ce contrat, il avait même soumissionné sous les taux de transport établis par la Commission des transports. A ce moment, j'étais contre, parce que je disais tout simplement ceci: Cela va ouvrir une porte et je suis convaincu qu'autant le ministère que la commission et les compagnies forestières vont entrer dedans. C'est ce qui s'est produit, d'ailleurs. On n'a pas eu le contrat, de toute façon. C'est une compagnie de location qui s'appelle Asselin Transport qui a eu le contrat. La réponse que la compagnie Donohue a donnée à ce moment, a été que nos taux étaient encore trop élevés. Je crois qu'on était, si je me souviens bien, 10% à 12%, je crois, en dessous du taux et c'était encore trop élevé! C'est ce qui a fait qu'à un moment donné les camionneurs transporteurs forestiers, lorsqu'ils ont vu qu'il était impossible de collaborer... Je pourrais vous rappeler des exemples des rencontres qu'on a tenté d'obtenir avec des compagnies forestières. Ces compagnies ont carrément refusé de nous rencontrer prétextant qu'elles ne rencontraient plus les associations ou les organismes, seulement les camionneurs individuels. Tout à l'heure, je vous parlais d'une lettre, si vous me permettez, je vais vous la lire, et la compagnie en question, je ne sais pas si c'est permis de la nommer...

Une Voix: Oui.

M. Duchesne: C'est Consolidated Bathurst Inc. qui écrivait ceci à l'attention de MM.' Piuze, Cantin, avocats. C'est à la suite d'une demande de réclamation de tansport faite par un camionneur de chez nous qui transportait à la verge cube. Alors que le taux était à la verge cube-kilomètre, on le faisait transporter à la verge cube-mille. La différence sur la facture, pour la réclamation... on lui avait donné $1782.30 alors que normalement, selon le

taux, il aurait dû recevoir $2252.52. Je dis bien qu'il transportait à la verge cube-mille. La compagnie dit ceci: "En réponse à votre lettre du 22 octobre, et bien que nous n'ayons aucune obligation envers le Poste d'affectation de la région 02, il nous fait plaisir de vous donner quelques informations concernant nos transports de gravier. Il va sans dire que nous sommes bien au courant des nouveaux tarifs de la Commission des transports pour l'année 1979. Nous veillons de ce fait à ce que les gains des transporteurs soient supérieurs au montant que donneraient les tarifs minimaux de la commission. Dans le cas sur lequel vous attirez notre attention, nous pouvons vous assurer après vérification que les gains à l'heure réalisés par nos employés sont de beaucoup supérieurs au tarif minimum de $24.75 l'heure exigé par la commission, et cela sans tenir compte des bénéfices qui y sont rattachés".

Si vous comprenez bien, la compagnie payait à la verge cube-kilomètre, alors qu'elle aurait dû payer à la verge cube-mille. De plus, elle se basait sur le fait que ce que le camionneur gagnait était supérieur à $24.75 l'heure. Je pense que cela n'a jamais été de cette façon que les taux ont été établis. Je dirais même que le camionneur en question, qui avait présenté cette facture, n'avait pas mis de nom parce que celui-ci craignait justement, s'il l'écrivait dans une lettre... dans ce temps, c'était M. Robert Lavoie qui était directeur de poste, et il disait: Si tu crains que je peux nuire à mon ancienneté, ne bouge en rien; si tel n'est pas le cas, vas-y. Je vous dirai que cette compagnie a réussi à trouver le nom du camionneur en question, l'a fait venir dans son bureau et a dit au gars: Tu vois, sur le mur, c'est l'ancienneté que tu possèdes; si tu n'es pas content du taux de transport qu'on paie, tu as le choix: tu t'en vas chez vous ou tu fermes ta gueule et tu continues à transporter. Le camionneur n'a pas eu d'autre choix que de dire au directeur de poste: Arrête tout, sinon je suis dehors.

C'est pour de telles raisons que les camionneurs transporteurs forestiers ont quitté le poste d'affectation. Je dirais même plus. L'hiver dernier, on a tenté, malgré qu'il n'y a presque plus de transporteurs forestiers qui sont membres du poste, de faire le maximum pour eux, parce qu'il y a des camionneurs qui transportaient pour d'autres compagnies, comme Gagnon & Frères de Roberval, alors que ceux-ci gagnaient jusqu'à $45 de moins du voyage que le taux minimum horaire. Ces camionneurs n'étaient pas membres du poste, mais on a quand même accepté de prendre ces gars et d'essayer de faire des réclamations pour qu'ils reçoivent ce qu'ils auraient normalement dû recevoir.

Il est bien entendu qu'en cours de route, c'est tombé à l'eau parce que, encore une fois, le camionneur a décidé que, s'il faisait quelque chose, cela pouvait être dangereux pour son travail.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Est-ce que vous représentez également la région de Saint-Félicien?

M. Duchesne: Oui.

M. Mailloux: Le secteur forestier est forcément un des volumes les plus importants dans le transport en vrac. J'avais moi-même invité, il y a quelques années, les compagnies forestières qui oeuvrent dans la transformation des matières premières et des richesses naturelles, à tâcher de céder autant que possible le transport à des transporteurs publics.

Je voudrais que vous m'informiez de l'attitude d'une compagnie qui est établie dans votre région, alors qu'au moment où j'invitais ces compagnies à aller vers les transporteurs publics dans Charlevoix, l'ANCAl avait réussi, à des prix que fixait la Commission des transports, à monopoliser l'ensemble du transport forestier de la compagnie Do-nohue à Clermont, quelque 100 000 cordes. Je pense que la compagnie a vendu ses camions et a été satisfaite des résultats.

La question que je voudrais vous poser est la suivante: Cette même compagnie, qui appartient d'ailleurs en partie au gouvernement, est établie dans la région de Saint-Félicien. Je comprends que le transport qu'elle a à faire effectuer n'est pas tant du bois de quatre pieds, mais principalement des copeaux ou du bois de sciage, etc. Quelle attitude la compagnie a-t-elle dans votre région là-bas? Est-ce qu'il est facile de négocier avec elle ou si sa philosophie est différente?

M. Duchesne: D'abord, Me Piuze pourrait plus facilement répondre à cette question, mais je vais quand même vous expliquer un petit peu la façon dont certaines choses se sont passées, plus spécialement l'hiver dernier lorsque la Commission des transports a siégé pour l'audition sur l'augmentation des taux. La compagnie Donohue Saint-Félicien présente sa propre demande d'augmentation de taux qui, généralement, se situe entre 3% et 6%, si je ne me trompe pas, plus bas que les taux établis par la Commission des transports. Je fais peut-être erreur, mais c'est quelque chose de ce genre-là.

A un moment donné, la compagnie Donohue Saint-Félicien nous a même convoqués dans le but d'essayer de nous faire accepter ces demandes de taux là. Cependant, elle refusait carrément de s'engager à prendre de nos camions. Elle disait tout simplement ceci: On va peut-être en prendre, mais on n'en prendra peut-être pas non plus. Mais on vous demanderait quand même d'accepter ces taux-là. En plus de cela, la compagnie Donohue Saint-Félicien a deux ou trois compagnies qui font du transport pour elle, dont les taux ont été acceptés par la Commission des transports sous le taux établi dans d'autres régions parce que la compagnie Donohue Saint-Félicien a fait signer des contrats de transport à ces compagnies-là dont, entre autres, Gérard Larouche, pour une longue durée et ce contracteur-là, soi-disant est

d'accord avec la compagnie pour transporter à tel taux. C'est la façon de procéder de la compagnie Donohue Saint-Félicien.

Pour ce qui est de la collaboration au niveau du poste d'affectation, elle est assez minime, si on peut dire.

M. Mailloux: C'était pour du transport spécialisé à ce moment-là.

M. Duchesne: Du transport de "chips".

M. Mailloux: Du transport de "chips' pour lequel les personnes ou les compagnies que vous avez nommées étaient déjà évidemment équipées. Elles avaient déjà offert des services à d'autres.

M. Duchesne: Oui, mais au moment même où le Poste d'affectation de la région 02 avait déjà soumissionné pour obtenir un transport, on avait déjà plusieurs camionneurs qui étaient équipés et qui pouvaient faire ce transport. Pour ce qui est du taux de transport, comme je vous le disais tout à l'heure, que la compagnie Donohue de Saint-Félicien a voulu nous faire accepter, c'était également pour du transport de gravier en chemin de pénétration.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse, en vous rappelant qu'il reste cinq minutes.

M. Goulet: Très rapidement, M. le Président, avant la création des postes d'affectation, combien l'ANCAl avait-elle de membres dans votre région?

M. Duchesne: Cela s'est toujours situé entre 300 et 325. Le chiffre n'a pas changé, sauf peut-être dernièrement, depuis ce printemps, quand un nombre assez important de camionneurs-entrepreneurs ont décidé, étant donné qu'ils ne possédaient presque plus d'organismes, tout simplement de rentrer dans les rangs de l'Association des camionneurs artisans.

M. Goulet: Actuellement, combien de membres a-t-elle? Le même nombre, même si, à un moment donné, il est venu environ 150 à 200 membres s'y ajouter? Cela veut dire, comme vous avez répondu au député de Charlevoix, qu'il y en a qui ont quitté les rangs?

M. Duchesne: Oui.

M. Goulet: Or, ceux qui ont quitté les postes d'affectation, est-ce que c'étaient des membres de l'ANCAl ou des membres de...

M. Duchesne: Non, il y a quelques membres de l'ANCAl, mais, en grande partie, ceux qui faisaient du transport forestier étaient des membres de l'association coopérative. Il y avait aussi quelques membres entrepreneurs et quelques membres artisans.

M. Goulet: Actuellement, dans quelle proportion les membres qui sont inscrits aux postes d'affectation sont-ils membres de l'ANCAl?

M. Duchesne: A 97% environ, membres artisans.

M. Goulet: Actuellement?

M. Duchesne: Actuellement, depuis le début de mai.

M. Goulet: Je ne veux pas être méchant. Mais je vous pose la question, parce que j'ai pris connaissance d'autres mémoires qui vont venir demain. Est-ce que les gens qui sont membres du poste d'affectation et qui ne sont pas membres de l'ANCAl, doivent s'attendre aux mêmes services que les autres?

M. Duchesne: Monsieur, je vous l'ai dit tout à l'heure, j'ai trouvé au moins une bonne chose au règlement du camionnage en vrac, c'était la répartition juste et équitable du travail. Je peux vous garantir une chose, c'est que si, demain matin, vous êtes capable de prouver que j'ai fait de l'incitation ou que j'ai travaillé dans le sens contraire, je suis prêt à remettre ma démission ici même et ça ne me gêne pas du tout. Parce que, pour moi, ce qui est important, c'est que la répartition du travail soit juste et équitable, peu importe que le gars soit membre d'une association ou d'une autre. Ce qui est important, c'est que le travail soit réparti équitablement.

Je peux dire au moins une chose, c'est que j'ai peut-être la chance d'être parmi ceux qui sont arrivés au même moment ou à peu près que le règlement 12 de 1973, qui régissait le transport en vrac. Je n'ai donc pas connu personnellement, si je puis dire, le patronage qui pouvait se faire avant ces années. Je ne veux blâmer qui que ce soit dans ce temps-là, mais il reste que je sais que ça existe puisque, comme je l'ai dit, je travaille avec des camionneurs qui ont quand même 30 ou 35 années d'expérience et j'ai des gens dans ma famille qui font du camionnage. Dans ce temps, c'était comme cela. Avec la venue du règlement 12, en 1973, cela a commencé à disparaître lorsque les postes d'affectation des associations se sont créés et qu'il y a eu des agents d'affaires nommés dans les comtés et les régions. A ce moment-là, c'est là que le partage équitable du travail s'est fait. Je peux dire qu'avec le nouveau règlement 112 cela s'est encore amélioré à ce niveau, mais, à l'autre niveau, on ne peut pas dire que cela a amené plus de travail. Ce serait faux de le prétendre. Dans mon mémoire, je vous donne des chiffres qui sont exacts. Il y a des clauses de protection ou des clauses de transport qui étaient données aux artisans dans le temps, et il y en a d'autres qui étaient données aux entrepreneurs ou à la coopérative. Les clauses qui étaient données surtout aux entrepreneurs et à la coopérative, ces clauses ont été perdues. Effectivement, on s'est ramassé avec moins de transport.

M. Goulet: M. le Président, la réponse me satisfait. Je dois même féliciter monsieur, qui a présenté ce rapport parce que, franchement, il touche plusieurs points importants. Je vois qu'il revient également... Il aimerait voir au moins l'application du rapport Lippé, même si cela fait quinze ans qu'il a été conçu. Je sais qu'il est 18 heures, mais j'aurais une dernière question à poser au ministre des Transports. La Commission des Transports, qui a juridiction là-dessus? Est-ce le ministre des Transports ou si ce sont des membres nommés par l'Assemblée nationale? C'est un tribunal créé par le gouvernement.

M. de Belle val: M. le député de Bellechasse, avant de répondre à votre question, seulement une petite remarque. Quand vous dites que le Poste d'affectation 02 serait en faveur des recommandations du rapport Lippé, est-ce cela? (18 heures)

M. Duchesne: Je peux dire certainement que le rapport Lippe, dans l'ensemble, a révélé exactement ce qui se passait dans ce temps et ce qui se passe aujourd'hui. C'est sensiblement la même chose. Cet avant-midi, à un moment donné, vous disiez ce que vous pensiez du fait qu'on n'a pas retenu que le rapport Lippé préconisait que les entrepreneurs généraux aient le droit de prendre leurs camions à volonté. Je peux quand même dire que c'est presque fait par contoumement. Si on prend l'exemple suivant: II y a un contrat de construction de route qui se fait à la sortie du parc des Laurentides, à l'entrée de Chicoutimi; le même entrepreneur a eu deux contrats d'affilée, et, depuis deux ans, celui-ci s'est acheté sept camions qu'il a immatriculés F. Il fait tout le dessous de la ligne de l'infrastructure. Pourtant, le matériel ne lui appartient pas. Le matériel est propriété du ministère des Transports ou du vendeur de gravier qui est à côté.

Si le ministère des Transports avait pris des dispositions pour qu'il soit prouvé, par ces entrepreneurs ou ces transporteurs ainsi que par les postes d'affectation, qu'ils étaient bien propriétaires du matériel, ces sept ou huit camions détenteurs de permis qui auraient fait le transport, je suis convaincu d'une chose, c'est que cela aurait certainement amélioré la situation.

M. de Belleval: Je n'en doute pas en ce qui vous concerne, mais on a aussi démontré ce matin que vous avez 77% du transport du camionnage en vrac sur nos routes alors que les entrepreneurs n'en ont qu'un peu plus de 22% et que c'est sur ces pourcentages qu'on joue. Je comprends, je l'admets sans réticence que ce que vous voulez. C'est le plus possible, parce que comme vous l'avez démontré tantôt, le marché n'est pas dans une expansion fulgurante et il y en a plusieurs qui veulent le même marché.

Je pense que le ministre de l'Energie et des Ressources démontrait aussi tantôt que, finalement, tout ça va aboutir à déplacer des camionneurs ou du travail d'un camionneur à l'autre et vous prenez l'intérêt de vos membres. Je ne peux pas vous le reprocher.

Quant à votre question, effectivement, la Commission des transports est un organisme quasi judiciaire et dans ce sens, le ministre des Transports n'est pas le père de la Commission des transports. C'est un organisme autonome.

M. Goulet: M. le Président, je ne sais pas si le ministre des Transports trouve ça curieux, moi, je trouve ça curieux qu'un tribunal créé par le gouvernement, qui fixe des taux, accepte que des entreprises gouvernementales mettent des travailleurs au pied du mur pour leur faire accepter des taux en bas du prix qu'elle a elle-même fixé.

M. de Belleval: Ecoutez, un instant, il y a des tribunaux, il y a des façons de régler ce problème, ce n'est pas le ministre des Transports qui est à la fois législateur, police et juge. Il y a un système judiciaire pour ça et si, effectivement, les réglementations ne sont pas respectées, il y a des moyens juridiques pour obtenir le redressement.

M. Goulet: M. le Président...

M. de Belleval: Je dois dire là-dessus qu'on est conscient au ministère que notre réglementation peut parfois, dans l'état actuel de la loi, être difficile à faire respecter, entre autres les amendes. Vous faites très bien ressortir, comme d'autres d'ailleurs, que les amendes, en cas d'infraction, sont tellement ridicules qu'actuellement ça n'incite pas les gens à respecter la loi. J'ai déjà dit que nous allions changer la loi cet automne pour faire en sorte que ces trous soient bouchés, que la réglementation soit mieux respectée. Je pense que c'est certain, je suis d'accord avec vous là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou de l'autre, vous aurez l'occasion de revenir à cette question, si vous ne voulez pas prendre trop de temps. En terminant, M. Duchesne.

M. Duchesne: J'aurais peut-être une dernière question. La région 02 est la seule — c'est une coïncidence — qui a bénéficié l'année dernière — j'en parle un peu dans mon mémoire — de la présence de deux agents du ministère des Transports, puis, un rapport a été rédigé sur le transport illégal qui s'y fait. Ceux qui possèdent des L, qui normalement devraient avoir des LV ou encore qui ont des licences F, qui font du transport illégal; ils ne devraient pas en faire. Je ne comprends pas, je ne m'explique pas comment il se fait que ce rapport-là n'est pas rendu public et que les moyens ne sont pas pris afin d'éliminer une fois pour toutes ce transport illégal. Ce rapport a été préparé l'année dernière. Cela nous a pris, je dirais, sept à huit mois pour savoir où il était rendu. Finalement, quand on l'a su, on nous a dit que c'étaient les bleus qui l'avaient, mais qu'il n'y avait pas de monde à y consacrer. Le ministère des Transports devrait, immédiatement, prendre des mesures pour que ce rapport-là soit rendu public et prendre les mesures nécessaires pour corriger cette situation-là.

M. de Belleval: Rapidement, il est évident que des rapports qui doivent donner lieu ensuite à des poursuites judiciaires ne peuvent pas être rendus publics, savoir des rapports d'enquête de ce type-là. Cela dit, j'ai examiné ce problème, non seulement avec vous, mais aussi avec d'autres associations qui s'occupent du camionnage, pour faire en sorte qu'on débloque la machine pour que les poursuites soient intentées. Cela dit, vous savez qu'avec le type d'amende que nous avons actuellement et le type de système, c'est très difficile. Il faut changer le système lui-même, il faut changer la loi, il faut changer les amendes; c'est ce que nous allons faire cet automne. Est-ce que vous avez une autre question ou une sous-question?

M. Duchesne: Seulement un mot pour relater un fait, par exemple, chez nous, au sujet des affectations de la région 02, l'année dernière. Après une injonction contre une entreprise qui faisait du courtage illégal, ça a coûté $18 000 au Poste d'affectation de la région 02 seulement pour prouver, en fait, que le règlement sur le camionnage en vrac donnait un droit exclusif au poste du courtage. Mais, en réalité, on peut dire que ça n'a presque rien donné puisque ça fait seulement prouver ça.

M. de Belleval: C'est un bon exemple qui illustre la difficulté d'application de toute cette réglementation. Parce que, de toute façon, en vertu de notre système démocratique, il faut donner aux justiciables le droit de contester s'ils le veulent. Si des gens se mettent à contester, c'est évident que ça va en cour et que ça entraîne des frais. Je pense que ce que vous avez expliqué, ce que vos collègues tantôt ont si bien expliqué aussi au niveau de la région 01, et ce que vous exprimez vous-mêmes avec beaucoup de force, avec beaucoup de conviction et beaucoup de compétence, démontre que ce n'est pas pour rien si, finalement, les autres provinces, les autres Etats américains ne sont pas embarqués dans ce genre de patente-là. C'est que, effectivement, ça amène toutes les difficultés que vous soulignez, qui sont très réelles, je le reconnais. Ce n'est pas pour rien que tous les autres ministres des Transports ont dit: Eloignez de moi ce calice.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures. Nous entendrons alors l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec.

Suspension de la séance à 18 h 7

Reprise de la séance à 20 h 10

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des transports continue ses travaux et, comme on en faisait mention, il y a encore huit mémoires à entendre. Nous étions rendus au quatrième avec l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, représentée par M. Réal Sureau. J'aimerais que M. Sureau présente la personne qui est avec lui.

Association des manufacturiers de bois de sciage

M. Lacasse (Richard): M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, mesdames et messieurs, je dois faire une correction immédiatement. M. Sureau était dans l'impossibilité de venir présenter son mémoire. Alors, c'est le directeur général de l'Association des manufacturiers de bois de sciage, Richard Lacasse, accompagné du directeur de la foresterie de la même association, M. Benoît Lamontagne, qui vont présenter le mémoire et répondre à vos questions.

Je profite de l'occasion qui nous est donnée, à l'Association des manufacturiers de bois de sciage, qu'on appelle couramment l'AMBSQ, pour vous remercier de nous avoir donné l'occasion de présenter notre point de vue sur le transport en vrac.

L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec est une corporation légalement constituée en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies du Québec et regroupe près de 150 entreprises représentant plus de 85% de la production de sciage du Québec, ainsi que la majorité des requérants de service de transport de copeaux de bois et de bois n'ayant subi aucune autre opération que la coupe transversale, l'ébranchage et l'écorçage.

Le transport des matières forestières de l'industrie québécoise du sciage s'effectue à longueur d'année et implique pour les entreprises précitées le versement aux camionneurs d'une somme globale d'environ $170 000 000 annuellement. Compte tenu notamment de son caractère de représentativité et des incidences financières pour ses membres de toute modification aux règlements, taux et tarifs du camionnage en vrac, l'AMBSQ désire intervenir dans le présent dossier dont le but est d'examiner la situation qui prévaut actuellement dans le transport en vrac.

Dans le passé, l'AMBSQ a déjà, à maintes reprises, fait valoir certains points de vue, en particulier lors des audiences de la commission permanente des transports de juillet 1979 concernant l'étude de la Commission des transports par CEGIR.

L'AMBSQ tient à soumettre ses recommandations sur les articles énumérés ci-après et sur lesquels cette commission fera porter son étude. Alors, ce sont la réglementation actuelle au niveau des permis, la fixation des taux de transport, l'impact économique, l'application de cette réglementation et la pertinence d'accorder des secteurs de travail.

Au niveau de la réglementation actuelle et au niveau des permis, la majorité des produits forestiers sont actuellement transportés par des détenteurs de permis VR et des détenteurs de permis L.

La réglementation actuelle cause de graves préjudices à nos membres. Nous croyons le moment opportun pour informer la commission de notre position à ce sujet, position qui, disons-le immédiatement, n'affectera en rien le niveau de l'emploi dans les deux secteurs de transporteurs.

Nous vous demandons de confier en exclusivité aux détenteurs VR le transport sur chemins publics de toute matière ligneuse du lieu d'exploitation à la première usine de transformation et aux détenteurs L l'exclusivité du transport de tous les produits issus de cette première usine de transformation vers les différents marchés.

Il appartiendrait au ministère des Transports de faire en sorte que cette nouvelle répartition soit équitable pour l'ensemble des transporteurs, en tenant compte des permis actuellement émis pour les types de transport ci-haut mentionnés.

Enfin, l'AMBSQ demande au ministère des Transports que les permis VR ne soient plus rattachés à une région particulière. La réglementation actuelle cause des problèmes à plusieurs de nos membres qui, ayant des opérations dans deux régions contiguës, se voient forcés d'utiliser des détenteurs de permis VR de régions différentes.

Les besoins en matière de transport varient d'une région à une autre et cette latitude permettrait à tous les détenteurs de permis VR de bénéficier d'une plus grande flexibilité dans la recherche d'emplois. (20 h 15)

La fixation des taux de transport. L'association croit toujours qu'il n'appartient pas à la Commission des transports de fixer les taux en raison des particularités qui existent d'une région à une autre et même d'un contrat à un autre.

Nous souhaitons que la commission se retire entièrement du domaine de la fixation des taux de transport des produits forestiers et qu'elle laisse à nos membres l'entière liberté de négocier avec les transporteurs des taux réalistes tenant compte des contraintes économiques et techniques.

D'ailleurs, au cours des derniers temps, des taux ont été négociés entre certains de nos membres et des transporteurs. Ces taux ont été déposés et, dans certains cas, ils étaient même inférieurs au taux minimal de la commission. Cela se fait de plus en plus et cela semble satisfaire les parties tout en répondant à la réalité de l'offre et de la demande.

Cette nouvelle attitude de la commission nous laisse croire que nous pourrons enfin voir nos membres jouir d'une liberté d'action dont ils ne connaissent maintenant que le nom.

L'impact économique. Nous vous mentionnons au tout début que les versements de l'industrie québécoise du sciage à l'industrie du transport par camion se sont élevés à près de $170 000 000 en 1978; de ce montant, les transporteurs de vrac ont récolté $90 000 000 et ce, pour du transport d'arbres en longueur, de billots, de copeaux, de sciures, de planures, d'écorce et de gravier.

Par ailleurs, le transport est une composante très importante dans l'établissement du coût de nos produits. En effet, le coût du transport représente 20% du coût total de notre matière première livrée à l'usine et 24% du prix de vente moyen du produit fini livré sur le marché de Montréal. Le marché de bois de sciage suit la conjoncture économique, tantôt à la baisse, tantôt à la hausse; il est impérieux que l'accroissement des frais de transport de nos produits forestiers s'effectue sans hausses excessives comme ce fut malheureusement le cas dans les années passées. Ces chiffres révélateurs démontrent l'importance que revêt pour l'industrie du sciage toute politique reliée au transport de ces produits.

Quatrièmement, application de cette réglementation et pertinence d'accorder des secteurs de travail protégés. L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec s'oppose à ce que l'Etat et tout autre organisme interviennent dans les affaires de l'entreprise privée pour lui imposer tel transporteur. Actuellement, plusieurs camionneurs ont des ententes avec certains de nos membres, ils font même partie du syndicat local. Il ne faut pas qu'un mécanisme tel que le poste d'affectation, considéré comme un service de camionnage, vienne perturber d'une façon quelconque les activités de nos membres.

En réponse à l'une des revendications de l'ANCAl visant à forcer nos compagnies à embaucher leurs membres pour des travaux de construction de chemins de pénétration en forêt, notre association s'y oppose fermement et s'oppose à ce que le gouvernement leur garantisse une proportion desdits travaux; ce serait là, pour l'Etat, faire preuve d'un favoritisme malvenu à l'endroit d'un petit groupe de transporteurs ne représentant pas plus de 20% de l'ensemble des transporteurs de vrac du Québec. Nous croyons toujours que l'employeur doit avoir le droit d'embaucher les camionneurs qu'il juge les plus aptes à effectuer ces travaux. En matière de transport on devrait, là comme ailleurs, laisser jouer les forces de l'offre et de la demande.

En terminant, M. le ministre, M. le Président, MM. les membres de cette commission, l'AMBSQ tient de nouveau à vous remercier de l'occasion qui lui a été offerte d'exposer son point de vue et elle tient à vous assurer de son entière collaboration dans la recherche d'une solution équitable pour toutes les parties.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: Si j'ai bien compris, vous trouvez que les taux fixés par la commission sont trop élevés, en ce qui vous concerne?

M. Lacasse: Les taux ne sont pas nécessairement toujours trop élevés, mais il y a certains taux qui sont trop élevés, et des taux dans certaines régions sont trop élevés.

M. de Belleval: Quand vous dites que vous voudriez qu'il n'y ait plus aucune réglementation en ce qui concerne la fixation des taux, est-ce que vous vous opposeriez au système ontarien de

dépôt des taux, avec possibilité d'opposition si certains croient que les taux sont trop élevés ou pas assez élevés? Autrement dit, laisser les parties décider ensemble des taux et les déposer à la commission pour révision exceptionnelle, s'il y a lieu?

M. Lacasse: C'est une politique qui a déjà cours au Québec depuis quelque temps déjà; il y a des parties qui se sont entendues, certains de nos membres et des transporteurs ont négocié des taux en deçà des taux de la commission et qui ont même été déposés à la commission, taux qui ont été négociés à la satisfaction des deux parties. Alors, c'est le genre de négociations qu'on voudrait, ce genre de libre concurrence entre les transporteurs et l'industrie privée.

M. de Belleval: C'est ce que vous dites d'ailleurs dans votre mémoire, finalement.

M. Lacasse: Oui.

M. de Belleval: Actuellement, quels sont les types de camionneurs que votre association utilise pour les chemins de pénétration en forêt? Est-ce que vous utilisez des camionneurs artisans ou si vous utilisez votre propre machinerie et vos propres employés?

M. Lacasse: Si vous le voulez, je demanderai à M. Lamontagne de répondre. Je dois dire que, étant en fonction depuis peu à l'Association des manufacturiers de bois de sciage, je ne voudrais pas induire cette Assemblée en erreur...

M. de Belleval: D'accord.

M. Lacasse: ... mais M. Lamontagne peut répondre à cette question.

M. Lamontagne (Benoît): M. le ministre, dans notre mémoire on parle d'un pourcentage de 80% de nos matières forestières qui sont transportées par des détenteurs de VR; ça inclut les artisans. Donc, en forêt, pour les chemins de pénétration, c'est le même pourcentage qui demeure que pour l'ensemble de nos autres produits forestiers.

M. de Belleval: Mais pour la construction des chemins eux-mêmes, utilisez-vous surtout des camionneurs artisans ou des entrepreneurs?

M. Lamontagne (Benoît): Des "vracistes " à80%. Je ne peux pas vous dire exactement, des 80%, le pourcentage d'artisans. Je pourrais peut-être vous donner un ordre de grandeur soit 30%.

M. de Belleval: 30% seraient des artisans, et les autres, des entrepreneurs.

M. Lamontagne (Benoît): Exactement. Ce serait un ordre de grandeur.

M. de Belleval: Pourquoi vous opposez-vous à l'utilisation des postes d'affectation? Pourquoi ne pas utiliser les postes d'affectation quand même?

M. Lacasse: On ne s'oppose pas, en principe, aux postes d'affectation, mais seulement lorsque les postes d'affectation interviennent dans les affaires des membres de l'association d'une façon indue. Par exemple, lorsqu'il y a un roulement trop élevé de transporteurs en vrac qui sont dirigés vers certains de nos membres, ce qui cause des problèmes d'adaptation entre le transporteur et le membre et des dépenses indues. Il y a avantage, entre les deux parties, à nouer des liens, à se connaître mutuellement; tout d'abord, à avoir l'équipement requis pour le type de transport que nos membres veulent bien leur faire transporter. Il arrive qu'au niveau des équipements, cela cause des problèmes. On n'a pas toujours les transporteurs avec les équipements voulus. Il y a aussi des conditions de transport qui varient chez un même membre d'une région à une autre, par exemple. En soi, on n'est pas opposé aux postes d'affectation. On est en faveur du statu quo de ce côté-là, contrairement à d'autres gens de l'industrie privée, mais on voudrait quand même qu'on n'intervienne pas dans les affaires de nos membres.

M. de Belleval: Si les postes d'affectation pouvaient traiter directement avec vous, déterminer directement avec vous les tarifs, faire des ententes bilatérales du poste d'affectation avec vos membres et, aussi, remplir certaines conditions au niveau d'une certaine permanence des effectifs qui vous sont envoyés, conclure des contrats à long terme et avec une certaine stabilité de la main-d'oeuvre, après entente, effectivement, sur les équipements, etc., est-ce que vos membres ne seraient pas alors plus favorables à l'utilisation des postes d'affectation?

M. Lacasse: Je ne pense pas qu'on serait opposé, en principe, à une telle procédure, mais je ne vois pas ce que cela pourrait apporter de plus à nos membres d'avoir un intermédiaire entre eux et les transporteurs. Pourquoi ne pas laisser les parties concernées négocier elles-mêmes des tarifs qui tiennent compte des conditions particulières de chaque contrat? On a parlé des conditions de chaque région, mais je dis même de chaque contrat.

M. de Belleval: Vous admettrez avec moi, quand même, que le poste fait du courtage. Donc, il est en mesure de rassembler de la main-d'oeuvre, de l'équipement, ce qui est un service pour ceux qui demandent de tels services. Il y a un aspect de régulation des relations entre le transporteur et celui qui requiert les services qui est utile, qui protège aussi, d'une certaine façon, les intérêts de celui qui transporte, qui se trouve à fixer quand même un cadre de coopération plutôt que de tout simplement négocier avec des camionneurs indépendamment les uns des autres, dans le cas où vous n'utilisez pas un entrepreneur. Un entrepreneur, au fond, c'est ce qu'il fait pour vous. Il a une main-d'oeuvre, sa machinerie, etc., et il vous

assure une certaine stabilité. Au fond, c'est ce que vous aimez aussi, je suppose, dans le fait que vous établissez des rapports comme ceux-là avec des entrepreneurs, disons, en transport. Mais si le poste d'affectation vous offrait, au fond, le même genre de services, la même stabilité! Au niveau de la négociation des taux, il ne s'agit pas d'un intermédiaire de plus que celui que vous avez quand vous négociez avec un entrepreneur. Vous négociez directement avec l'entrepreneur. Le poste d'affectation, dans ce sens-là, est un entrepreneur qui regroupe des transporteurs qui sont peut-être indépendants en ce qui concerne la propriété du camion, mais qui, pour les fins d'un contrat, se regroupent et désignent un représentant pour négocier en leur nom.

M. Lamontagne (Benoît): Le fait demeure qu'il y aura toujours, si cela passe, comme vous dites, par le poste d'affectation, une imposition de la part des postes d'affectation.

M. de Belleval: De quoi?

M. Lamontagne (Benoît): De certains camionneurs. Cela fait que nos membres sont réticents à se faire imposer des camionneurs qui n'ont pas l'équipement approprié ou qui ne remplissent pas les conditions.

M. de Belleval: Mais quand un entrepreneur négocie avec vous, vous ne vérifiez pas d'avance quel chauffeur il va employer. Il peut avoir tel chauffeur pendant un mois, deux mois; après cela, il peut avoir un autre chauffeur avec les mêmes problèmes que vous retrouvez en termes de stabilité, etc. Ce qu'il vous apporte, c'est une garantie en termes d'équipement et une garantie en termes de main-d'oeuvre avec un prix négocié. Pour le reste, au niveau du chauffeur, vous ne savez pas quel chauffeur il va nous amener. Il peut vous en amener des bons, des moins bons, des gens qui connaissent cela ou qui ne connaissent pas cela. Lui aussi doit avoir un roulement de main-d'oeuvre. Si on vous assurait d'une certaine stabilité, etc., autrement dit, si les règles du jeu étaient élaborées conjointement entre vous et les postes d'affectation, chacun étant obligé, évidemment, de s'en tenir à ces règles, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'envisager une utilisation plus grande des postes d'affectation à ce moment?

M. Lamontagne (Benoît): C'est qu'on croit difficilement au bon fonctionnement des postes d'affectation dans cette situation.

M. de Belleval: C'est un problème de confiance, si je comprends bien, en partie?

M. Lamontagne (Benoît): On pourrait dire en partie.

M. Lacasse: II y a aussi le fait qu'il s'établit souvent des relations humaines entre l'entreprise et l'employé, entre celui qui est chargé de s'occu- per des questions de transport et des transporteurs de la région. Alors, il peut effectuer un certain choix qu'il ne pourrait pas effectuer lorsqu'on lui imposerait simplement des camions avec les chauffeurs desquels il pourrait avoir certaines difficultés d'adaptation, si vous voulez. Il y a aussi ce facteur humain qui joue entre l'homme d'affaires et les transporteurs en vrac de la région. Il peut y avoir certaines conditions qui peuvent être posées, qui peuvent être autant à l'avantage du transporteur que de l'industriel, conditions qu'on ne pourrait pas retrouver dans des arrangements entre l'industriel et le poste d'affectation.

M. de Belleval: Vous fonctionnez cependant avec des coopératives qui transportent votre bois, avec des coopératives de transport? Je pense au Saguenay, en particulier, au Saguenay-Lac-Saint-Jean.

M. Lacasse: Ce n'est pas la coutume.

M. de Belleval: Ou bien fonctionnez-vous seulement avec des entrepreneurs privés comme tels, d'une part, et parfois avec des postes d'affectation, d'autre part? (20 h 30)

M. Lamontagne (Benoît): Disons que je ne suis pas familier avec la question des coopératives. C'est plutôt le deuxième point.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Mailloux: Charlevoix.

Le Président (M. Jolivet): Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, en écoutant le mémoire de l'Association des manufacturiers de bois de sciage, il est dit dans un paragraphe que, lors d'une négociation avec des transporteurs, l'association avait réussi à obtenir de meilleurs prix que ceux fixés par la commission, des prix plus bas. Je pense que c'est ce que dit votre mémoire. C'est un exemple qui fait que si on laissait les forces du marché s'exercer, il y aurait possibilité de tenir vos coûts le plus bas possible dans la concurrence que vous fait le marché étranger, que vous auriez des prix moindres.

Il me semble, si ma mémoire est fidèle — je ne sais pas si c'est lors des auditions sur le rapport CEGIR — que le porte-parole de l'Association des transporteurs, devant une question qui aurait été posée à savoir s'il y avait un commerce important de bois de sciage vers l'Ontario, avait répondu oui. On a ensuite précisé la réponse en disant que, malgré les prix que fixe la commission pour le transport du bois alors qu'il n'est pas ouvré et malgré les sommes que vous avez à payer à ceux qui font du transport à longue distance quand le bois est devenu ouvré, vous répondiez quand même très facilement à la concurrence ontarien-ne. Est-ce que je fais erreur en tâchant de me rappeler ce qui avait été dit dans le temps? Est-ce

que, aujourd'hui, vous faites encore facilement concurrence au marché du bois de sciage de l'Ontario?

M. Lacasse: Ecoutez, je n'étais pas, à ce moment-là, avec l'association...

M. Mailloux: Ah! excusez. En fait, je pourrais peut-être commencer par vous demander s'il y a une vente importante vers la province voisine, dans le volume qui est vendu par l'ensemble de l'association.

M. Lacasse: II y a environ 20% de notre production, au Québec, qui sont expédiés vers l'Ontario. Bien sûr, dans certaines régions de la zone limitrophe Québec-Ontario, il y a aussi du bois rond que certains de nos producteurs expédient, transportent ou manoeuvrent, environ 20%.

M. Mailloux: Je comprends forcément l'association et ses membres, devant la concurrence qu'elle va rencontrer, d'essayer d'obtenir les meilleurs prix. Quand on se met à la place du législateur qui, tout en vous laissant exploiter les forêts du Québec, doit également tendre à ce que celui qui assure aussi le transport y trouve également son profit, on est placé dans un dilemme et on voit que votre intérêt ne correspond pas forcément à leur intérêt. Je vous remercie.

M. Lacasse: Je voudrais ajouter là-dessus que 20% de notre production sont expédiés vers l'Ontario et l'an dernier, en 1979, 55% à 60% de notre production ont été dirigés vers les Etats-Unis. On doit faire face à la concurrence de l'Est des Etats-Unis et même de l'Ouest canadien qui, par des volumes importants et des transports bien organisés, un transport maritime bien organisé, réussit à nous concurrencer sur le marché de la côte de la Nouvelle-Angleterre et du "Mid-Atlan-tic" — excusez l'expression anglaise— un peu plus bas, de sorte que, pour nous, ces marchés ne sont pas acquis d'emblée. On concurrence des régions aussi bien organisées que celles-là, l'Ontario, l'Est des Etats-Unis et, plus au sud, on rencontre les régions du Sud des Etats-Unis, les Etats du Sud américain qui ont une main-d'oeuvre meilleur marché que la nôtre, qui ont des transporteurs moins bien rémunérés que les nôtres, des coûts de transport ferroviaire inférieurs aux nôtres. Il arrive une zone où on doit concurrencer ces gens et, naturellement, toute économie qu'on peut faire dans la fabrication de notre produit nous permet de satisfaire ce marché local.

M. Mailloux: Quand vous dites expédier une quantité extrêmement importante vers les Etats américains, est-ce à dire que c'est expédié via rail, via bateau ou camion? Quelle est la prooortion entre les différents systèmes de transport?

M. Lacasse: Par bateau, c'est à peu près insignifiant. Les exportations par bateau, du Qué- bec, c'est plutôt vers l'Europe et le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord. Je dirais que le camionnage pour les Etats-Unis doit représenter, à moins que je ne me trompe, environ 75%. Il y a peut-être des gens dans la salle qui pourraient me corriger, mais je pense que ça peut être 75% à 80%. On a même livré jusqu'à Miami, en camion. C'est pour la flexibilité qu'on utilise le camion, pas toujours en raison de l'économie.

M. Mailloux: Vous me faites sursauter un peu quand vous dites que la proportion est aussi importante par camion pour le transport à longue distance. Tantôt vous avez fait référence, dans votre mémoire, à l'importance des coûts du transport pour le prix complet du bois qui est mis en marché. Est-ce que le coût de transport à longue distance vers ces marchés-là n'est pas passablement plus élevé que le transport du bois d'oeuvre vers l'usine ou si c'est l'inverse qui se produit?

M. Lacasse: C'est-à-dire...

M. Mailloux: Je ne vous ai pas entendu critiquer les taux que vous devez payer aux transporteurs à longue distance qui vont vers les régions qu'on a mentionnées et vous avez fait reproche à la commission de fixer des taux que vous pouvez négocier inférieurement si vous allez de société à entreprise. Je voudrais connaître la différence entre ce que ça coûte pour amener le bois à l'usine et le transformer et après transformation. Est-elle donnée?

M. Lacasse: On a dit dans notre mémoire que le coût de transport de la matière première de la forêt à l'usine de sciage s'élevait à environ 20% du coût de cette matière. Le coût de transport global, c'est-à-dire transport des bois ronds, que j'appellerais, plus le transport des bois usinés vers le marché de Montréal, au total, s'élevait à 24%.

M. Mailloux: Je prends connaissance de cela, mais vous mentionnez le marché important que vous avez vers les Etats américains. Ce ne doit pas être 24% forcément pour le prix vers les Etats américains, ça doit être davantage que sur le marché de Montréal.

M. Lacasse: C'est effectivement davantage sur le marché américain. Naturellement, il y a le fait de la distance. Plus les distances sont longues, ce n'est pas nécessairement proportionnel, comme vous le savez. Je ne peux pas vous donner de chiffres ici, on n'a pas fait le calcul, mais on s'est limité, comme exemple, à prendre le 2" par 4" livré sur le marché de Montréal. Forcément, sur les marchés américains, c'est encore plus élevé, malgré que ce n'est pas proportionnel.

M. de Belleval: Si vous avez de l'argent à épargner, c'est sur le transport entre la forêt et la première usine, ce n'est pas nécessairement entre l'usine et le marché de Montréal.

M. Lacasse: C'est surtout là, M. le ministre, parce que c'est à ce moment-là qu'on transporte des produits, c'est-à-dire qu'on transporte du volume qui ne sera pas transformé en produits utilisables et vendables toujours. J'entends quand même les copeaux, c'est aujourd'hui un produit vendu par les scieries, qui est nécessaire à la rentabilité des scieries, mais vous avez effectivement de l'écorce qui n'est pas vendue.

Dans le volume, vous avez de l'air aussi, vous avez... Alors la différence de 20% à 24% vient du fait qu'il y a les copeaux qui ne sont pas présents dans ce transport-là de l'usine sur le marché du bois de sciage, sur le marché de Montréal.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Trois courtes questions dont deux au niveau des principes seulement. Si je comprends bien, vous reprochez aux postes d'affectation de ne pas vous donner le service adéquat pour vos besoins, parce que vous avez certaines spécificités. D'après ce que j'ai cru comprendre, vous n'êtes pas satisfaits des services offerts par les postes d'affectation. Est-ce ce que vous voulez dire? Vous n'êtes pas satisfaits des services, il y aurait lieu d'améliorer ces services-là? Est-ce que ce ne serait pas plutôt une question d'attitude?

Je vois, entre autres, dans votre mémoire, à moins que je fasse erreur, que vous demandez que les copeaux soient transportés par les propriétaires, les déteneurs de permis L au lieu de permis VR. Naturellement, si on part avec des recommandations comme ça, il n'y a rien pour arranger les choses et avoir de meilleures relations avec les transporteurs du vrac ou avec les postes d'affectation comme tels qui s'occupent de ces transporteurs-là. Est-ce que je me trompe si je raisonne ainsi?

M. Lacasse: Les postes d'affectation ne nous apportent pas grand-chose de valable, en règle générale. Par contre, lorsqu'on a consulté nos membres, on s'est aperçu qu'un certain nombre d'entre eux, dans certaines régions — c'est inégal d'une région à l'autre — avait des opinions différentes. Dans certaines régions, il n'y a aucun problème avec les postes d'affectation, je ne l'ai pas en mémoire et malheureusement, on ne l'a pas inscrit dans notre mémoire, il y a des postes d'affectation avec lesquels on a moins de difficulté qu'avec d'autres.

M. Goulet: Mais pourquoi recommandez-vous que les copeaux soient transportés par les L plutôt que par les VR?

M. Lacasse: On nous demande notre opinion, on est ici pour donner une opinion franche et nette. Je pense qu'il existe actuellement un malaise dans le transport et c'est une vérité de La Palice d'en convenir. Il y a des VR en forêt, il y a des VR sur les routes transportant des produits finis; il y a des L qui sont en forêt et il y a des L qui sont sur les routes transportant des produits finis.

On pense que si on limitait le transport en forêt aux VR et le transport des produits finis ou les produits issus des usines de transformation vers des marchés utilisateurs, on mettrait de l'ordre dans la cabane, comme on dit. Cela simplifierait l'opération, ce qui permettrait, dans certains cas, d'abaisser des coûts de transport d'autres marchandises. Si, par exemple, un camionneur L peut transporter des copeaux, il peut revenir dans sa région avec du transport général, ce qui ferait que c'est sa région qui en bénéficierait, alors que dans le moment, ça ne peut pas se faire. Alors, ce serait un des avantages particuliers.

M. Goulet: Vous parlez souvent dans votre mémoire, au début et à la fin, de la loi de l'offre et de la demande. Je vais vous poser une question. Est-ce que dans ce secteur que vous représentez, les compagnies de bois de sciage n'ont jamais été subventionnées au Québec dans différents domaines, différents secteurs?

M. Lacasse: Ce secteur a été subventionné au niveau des chemins de pénétration pour donner accès à certaines usines qui sont de plus en plus éloignées de la matière première, de façon à permettre aussi une utilisation rationnelle de la forêt québécoise. On a une forêt, c'est notre richesse, alors, lorsqu'il arrive des zones où il n'est pas possible d'exploiter économiquement des bois, parce qu'on ne pourrait pas les vendre à profit, à ce moment-là, il n'y a personne, il n'y a pas de Samaritain au Québec pour faire ce genre de bénévolat.

Il est sûr qu'en certaines occasions, lorsque les prix du marché sont tellement à la hausse, on peut pénétrer certaines régions, même sans subventions, ça se fait, ça s'est toujours fait. On n'a pas toujours besoin de subventions pour construire des chemins de pénétration en forêt. Mais je pense que le ministère de l'Energie et des Ressou-ces serait mieux préparé que moi pour exposer ses arguments.

M. Goulet: Non, ma question était...

M. Lacasse: Maintenant, il y a aussi, si vous me permettez, des subventions qui sont accordées par le ministère de l'Expansion économique régionale, à Ottawa, pour l'expansion des usines. Mais le Québec comme tel ne finance pas l'expansion des usines de sciage.

M. Goulet: Ma question était au niveau du principe. Ce que je voulais dire, c'est que si certains secteurs ont besoin d'être subventionnés pour pouvoir passer à travers, il faut comprendre que d'autres secteurs peuvent avoir besoin d'être protégés, non pas subventionnés, seulement protégés, pour passer eux aussi à travers. C'est la question de principe que je voulais soulever.

L'autre question. Je me réfère à la page 3 de

votre mémoire — ce sera ma dernière question, M. le Président — où vous parlez de la fixation des taux de transport: "L'association croit toujours qu'il n'appartient pas à la Commission des transports de fixer les taux en raison des particularités qui existent d'une région à une autre et même d'un contrat à un autre". Vous renchérissez en disant ceci: "Nous souhaitons que la commission se retire entièrement du domaine de la fixation des taux de transport des produits forestiers et qu'elle laisse à nos membres l'entière liberté de négocier avec les transporteurs des taux réalistes tenant compte des contraintes économiques et techniques". (20 h 45)

Vous me corrigerez si je fais erreur, mais est-ce qu'il est possible que l'an passé, disons il y a environ un an, justement, votre association ait demandé, par le biais d'une lettre, d'un rapport ou d'un mémoire que la Commission des transports fixe le taux du transport des "chips", des copeaux de bois? Est-ce que votre association n'a pas formulé une telle demande à la commission ou au ministre, ou un rapport quelconque qui aurait circulé? Vous ne vous en souvenez pas.

M. Lamontagne (Benoît): Pas à notre connaissance.

M. Goulet: J'étais persuadé...

M. Lamontagne (Benoit): Peut-être des ententes de quelques membres, des ententes particulières, mais l'association même...

M. Goulet: J'ai été énormément surpris lorsque j'ai vérifié dans votre mémoire; j'ai fait de la recherche à l'heure du souper et je n'ai pas pu le trouver, remarquez bien. J'espère que je le trouverai d'ici la fin des travaux. Il me semblait que j'avais déjà vu quelque chose concernant justement votre association qui aurait demandé à la commission de fixer les taux du transport des copeaux et là, vous lui demandez de se retirer dans un autre domaine. Je voyais là deux poids, deux mesures ou deux principes différents. Ecoutez, je sais que votre président n'est pas ici ce soir, mais j'apprécierais beaucoup si vous pouviez vous informer auprès de votre association ou de votre président pour savoir si depuis un an ou deux il n'y a pas eu une telle demande formulée à un niveau quelconque. J'apprécierais, même si les travaux de la commission sont finis, recevoir une réponse à cet effet parce que je demeure encore convaincu que cela ça déjà été fait. Là, vous dites: Probablement, il est fort possible que ça ait été fait par quelques-uns de vos membre? sans que ça passe par l'association comme telle. Je vais faire des recherches de mon côté et je vous invite à faire la même chose du vôtre. Si vous avez une réponse, je l'apprécierais beaucoup et même, peut-être, vous pourriez la faire parvenir aux membres de la commission. En effet, je voyais là deux poids, deux mesures ou deux principes et ça m'étonnait. Vous dites que vous ne vous en souvenez pas. Alors, je prends cette réponse.

M. Lacasse: Notre intention n'était pas de demander de revenir devant la commission, mais on peut revenir sous forme de lettre ou sous forme d'information qui serait livrée au président de la commission et dont vous pourriez prendre con-naissance. Alors, on fera le nécessaire.

M. Goulet: Je l'apprécierais. Merci, M. le Président; je n'ai pas d'autres questions.

M. de Belleval: Une dernière question. Vous dites, à la page 5 de votre mémoire, qu'il ne faut pas accepter la revendication de l'ANCAl d'embaucher leurs membres en leur garantissant une proportion des travaux en forêt parce que ce serait faire preuve de favoritisme pour des transporteurs qui ne représentent pas plus de 20% de l'ensemble des transporteurs en vrac du Québec. Alors, vous avez des chiffres établissant que l'ANCAl ne représente pas plus que 20% des transporteurs en vrac du Québec?

M. Lacasse: M. le Président, ce sont des chiffres que nous avons relevés dans nos statistiques, dans nos mémoires qui ont été obtenus lors d'audiences précédentes et même certaines statistiques viennent du ministère des Transports. Il semble y avoir deux sortes de statistiques: les statistiques de l'ANCAl — je ne peux pas dire si elles sont plus officielles que celles du ministère des Transports — et les statistiques du ministère des Transports. Il se peut que celles-ci originent du ministère des Transports et non pas de l'ANCAl.

M. de Belleval: Autrement dit, si on calcule 10 000 camionneurs en vrac, il y en aurait environ 2000 qui sont membres de l'ANCAl ou sur 12 000, environ 2800 ou 2500, quelque chose comme ça: D'accord.

Corporation Poste d'affectation région 04

Le Président (M. Jolivet): Merci. Je demanderais à la corporation Poste d'affectation région 04 Inc., représentée par le directeur, M. Yvonnic René, de se présenter en avant. M. René, vous nous présentez les membres qui sont avec vous.

M. René (Yvonnic): Ici, à ma droite, Me Bernard Piuze, mandaté par le poste d'affectation pour le représenter à la commission parlementaire, et aussi M. Richard Charest, adjoint au directeur au poste d'affectation.

Depuis le 14 juin 1978, la corporation Poste d'affectation région 04 Inc., détient un permis de courtage exclusif en matière de transport en vrac émis par la Commission des transports du Québec.

Cette corporation regroupe 536 détenteurs de permis de camionnage en vrac, propriétaires d'environ 567 camions, munis d'une plaque d'immatriculation VR. La corporation a divisé le territoire en neuf sous-postes qui voient à la redistribution du transport entre les abonnés. Les services offerts par le poste d'affectation et ces sous-

postes coûtent à chaque détenteur de permis, en moyenne, $40 par mois.

Le poste d'affectation met au service des requérants de services des camions de tout genre. On peut trouver le nombre de camions suffisant et adéquat au poste d'affectation pour répondre à n'importe quelle sorte de réquisitions.

En 1980, les dirigeants du poste d'affectation ont constaté une très importante diminution du volume du transport. Par rapport à la même période de 1978 et1979, le poste d'affectation a connu une diminution d'au delà de 30% du volume de transport.

Devant une telle situation, les dirigeants ont tenté de trouver les causes de cette situation plus que dramatique. Pensant que la qualité de service avait peut-être diminué de la part des transporteurs, les dirigeants ont pu vérifier qu'il fallait rejeter cette éventualité. En effet, les entrepreneurs qui se plaignaient de la qualité des services étaient les mêmes qui offraient de passer à 100% par le poste si les dirigeants acceptaient de faire le transport en bas de taux fixés par la Commission des transports du Québec. Dès lors, il devient plus qu'évident que la seule préoccupation de ces entrepreneurs était les coûts du transport.

Il est évident que les dirigeants des postes d'affectation ne peuvent et ne doivent pas accepter de travailler en dessous des taux fixés par la Commission des transports. Ces taux sont d'ordre public. En tant que corporation publique, nous n'avons pas à jouer avec les taux, parce que nous avons une responsabilité face aux camionneurs et aux requérants de services.

Dans notre région, le transport illégal est devenu une institution. Nous nous appliquerons, dans les paragraphes qui vont suivre, à vous démontrer le genre de transport que les détenteurs de permis ne peuvent accepter. La compagnie Malette-Waferboard a confié à M. Jean Gauthier le transport du bois qu'elle a à faire effectuer. M. Jean Gauthier, qui n'a aucun permis, a redonné en sous-contrat le transport à des propriétaires de camions, sans se soucier s'il avait le droit ou non de faire le transport.

La compagnie Déry Express est une de celles à qui le transport a été confié. Cette compagnie est titulaire d'un permis émis en vertu de l'ordonnance générale sur le camionnage. Elle a le droit de faire du transport dans un rayon de 30 milles de Shawinigan. Or, elle fait du transport sur une distance d'environ 110 kilomètres à l'extérieur de son rayon de 30 milles. De plus, en vertu de dispositions sur le courtage dans les règlements sur le camionnage en vrac, tous les camions dont M. Gauthier a besoin devraient être demandés au poste d'affectation, qui a le seul permis de courtage dans la région 04. Mais ce n'est pas le cas. Le soir, à la brunante, c'est en procession que des camions immatriculés de F ou de L se présentent chez Malette-Waferboard et les camionneurs sont payés par chèques tirés sur le compte de banque de M. Jean Gauthier. M. Jean Gauthier nous a déjà demandé des camions, mais à un taux de $26.50 le cunit, alors qu'il en reçoit de $28 à $29.

Ce transport emploie en moyenne 25 camions par jour pendant huit à dix mois. Malette-Waferboard a reçu des subventions du gouvernement du Québec. Le même M. Jean Gauthier fait le même jeu avec la John Lewis Industrie Limitée de La Tuque. La compagnie Déry Express participe elle aussi à ce petit jeu et John Lewis Industrie Limitée a reçu, comme la compagnie Malette-Waferboard, de grosses subventions du gouvernement du Québec.

Eloi Guillemette, qui est propriétaire de plusieurs camions munis d'une plaque d'immatriculation L, prend des contrats de transport qui dépassent la capacité de ses unités. Au lieu de s'adresser au poste d'affectation, tel que stipulé par la loi, il distribue de l'ouvrage à ses amis, et à quelles conditions! Parmi les contrats importants, il y a l'enlèvement de la neige de la ville de Trois-Rivières.

La compagnie ARCO de Plessisville engage des camionneurs en vrac à forfait et les paie au tarif horaire. Si les camionneurs ne réussissent pas, au cours de la journée, à faire onze voyages de 50 kilomètres chacun, elle coupe une heure de transport par voyage manquant. Chaque camionneur perd en moyenne $100 par jour. Cette méthode permet à ARCO de faire une concurrence déloyale aux autres constructeurs de routes qui basent leurs soumissions sur les tarifs fixés par la Commission des transports du Québec. La dernière soumission accordée à ARCO Construction est d'environ 10% inférieure à l'estimé du ministère des Transports. Les camionneurs en vrac devront-ils encore payer la note?

Depuis un an, le ministère des Transports exige que l'entrepreneur qui obtient un contrat d'asphalte passe par les postes d'affectation pour obtenir des camions autres que les siens. La vérification est très difficile et certaines compagnies qui possèdent des filiales transfèrent tous les camions possédés par ces dernières à la compagnie qui obtient le contrat. Comme l'entrepreneur n'a pas besoin de VR pour son transport considéré comme du compte propre, le transfert de ses camions munis de F peut se faire dans l'intervalle d'une demi-heure. Naturellement, le rôle du poste d'affectation n'est pas celui d'un corps policier. Lorsqu'il y a une entente entre un requérant de services et un transporteur à un taux réduit, il est très difficile de le prouver.

Dans l'année 1975, la Corporation électrométallurgique SKW avait tenté d'obtenir de la Commission des transports la réduction des taux de transport de la pierre blanche entre Saint-Urbain, comté de Charlevoix, et Gentilly, comté de Nicolet. La Commission des transports refusa de diminuer les taux. Cette corporation loua des camions de Location Chouinard Inc. et loua des conducteurs de camions de Transport Marcel Rodrigue Inc. Depuis 5 ans, SKW contourne la décision de la Commission des transports sans que la loi et les règlements puissent interdire une telle situation. Par contre, SKW a reçu des subventions du gouvernement provincial pour un minimum de $10 000 000. Depuis quatre ans, nous soulevons ce problème. L'an dernier, le poste

d'affectation a soumissionné pour ce transport. La soumission que nous avons déposée était aux taux minimums. SKW nous a répondu qu'il y en avait des plus basses et qu'ils gardaient la nôtre au dossier. Enfin, au mois de janvier 1980, la Commission des transports a tenu une audience pour annuler les permis de Location Chouinard Inc. Aucune décision n'est encore rendue et ce genre de transport continue toujours.

Voilà donc des exemples que nous vivons chaque jour et qui jettent le discrédit sur le ministère des Transports et la Commission des transports, qui ont à contrôler l'application de la loi.

Nos camionneurs qui paient près de $500 pour faire partie d'un organisme qui devrait être protégé, qui paient en moyenne $2000 en droits, permis et assurances, chaque année se demandent quel rôle le gouvernement entend jouer pour mettre fin à ces situations et pour encourager ceux qui ont choisi de respecter la loi à continuer à le faire.

Nous avons l'impression que les transporteurs qu'on appelait pirates, fantômes ont pris le contrôle du marché. En plus de tout ce transport déguisé, des problèmes sérieux de perception d'argent sont souvent causés par l'obtention de contrats à des entrepreneurs dont la solvabilité est douteuse. Beaucoup d'entrepreneurs ont des cautionnements de main-d'oeuvre. Seulement, d'autres entrepreneurs n'ont qu'à déposer un chèque qui garantit l'exécution des travaux. Ce chèque est, dans plusieurs cas, accompagné d'une cession de créance en faveur d'une banque. Aucune garantie n'est accordée pour la main-d'oeuvre. Le salaire du camionneur n'est pas privilégié en matière de faillite. Ces contrats accordés à des entrepreneurs qui ne peuvent même pas obtenir une garantie de solvabilité ont fait perdre de l'argent à nos camionneurs. Pourtant le gouvernement nous oblige en tant que poste d'affectation à fournir une garantie de solvabilité. Depuis trois ans, le ministère des Transports est au courant, mais n'intervient pas.

Voyant leur industrie menacée par les transporteurs illégaux, le poste d'affectation et les camionneurs demandent au gouvernement de mettre de l'ordre dans ces domaines. Nous avons l'impression, depuis un an, de vivre dans une période de déréglementation. Ceux qui paient la note sont ceux qui respectent la loi. La réglementation est essentielle dans le camionnage en vrac. La juridiction de la Commission des transports du Québec ne l'est pas moins. Il est du devoir de l'Etat de faire respecter la loi, les règlements et la décision de la Commission des transports du Québec. Les honnêtes citoyens sont en droit d'attendre que l'Etat intervienne pour les protéger contre ceux qui n'ont aucun respect des lois.

Nous soumettons qu'une réglementation saine et même faite de bonne foi ne peut être suffisante pour assurer l'ordre dans le transport. Il faut idéalement que tous les camionneurs détenteurs de permis de vrac s'inscrivent au bureau de courtage et que tous les requérants de services confient leurs demandes au bureau de courtage qu'est le poste d'affectation. Le travail sera ainsi réparti équitablement entre tous les détenteurs de permis. Sur tous les contrats donnés par le ministère des Transports, 75% du volume total du transport en vrac doivent être donnés immédiatement aux postes. C'est cela que le gouvernement du Québec nous avait donné en 1977 et qu'il n'a jamais respecté. Le gouvernement du Québec a établi un mécanisme de distribution de travail qui était considéré comme essentiel en 1977 à la survie du camionneur. Il faut que vous respectiez cet engagement qui privilégie le poste d'affectation. C'est la seule voie pour réellement atteindre un partage équitable. Le transport public devrait être confié à ceux qui passent par les permis de courtage.

Le ministre M. Yves Bérubé nous a fait part qu'il avait donné des subventions aux compagnies forestières de différentes régions du Québec pour aider les camionneurs artisans à résoudre une partie de leurs problèmes. Nous ne voulons pas douter de sa bonne foi, mais en vertu des règlements du camionnage en vrac, pour pouvoir résoudre une partie des problèmes des camionneurs, il faut que les réquisitions soient adressées au poste d'affectation qui doit les partager équitablement entre tous les détenteurs. (21 heures)

Par le biais des subventions, les compagnies forestières pourront engager des camionneurs aux conditions et aux taux qu'elles voudront bien déterminer. Nous aurions préféré qu'une bonne partie du transport soit contrôlée par le poste d'affectation. Dans la région 04, le ministre Bérubé a donné $1 135 300 à trois compagnies en même temps que le contrôle du transport.

Le ministre Bérubé, le 18 juillet 1980, déclarait qu'il avait agi ainsi dans le but d'aider les camionneurs. Qui peut sérieusement soutenir une telle affirmation lorsque le contrôle du transport est passé dans les mains des compagnies forestières?

Parcs Canada a accordé, en 1980, à la firme Continental Asphalte, de Shawinigan, un contrat de correction de chemin dans le parc national de la Mauricie. Cette compagnie a donné tout son transport non pas au poste d'affectation mais au transporteur Jules Millette Inc. Or, ce sont les abonnés du poste d'affectation qui avaient fait la partie la plus difficile du transport, de 1973 à 1979.

Les camionneurs qui ont usé leur camion pour ce transport regardent aujourd'hui passer les camions de Jules Millette Inc. Au moment où les camionneurs inscrits au poste d'affectation auraient pu transporter, dans des conditions idéales, donc plus rentables, voilà qu'on les écarte, et cela alors qu'il n'y avait que ce contrat en marche. Lorsque les camions de Jules Millette Inc. se rendent sur le chantier le matin, ils sont tous chargés de sable qu'ils livrent à la firme Continental Asphalte. Les camionneurs se posent de sérieuses questions sur cette manière d'agir; serait-ce que les taux sont coupés?

Par ailleurs, malgré nos oppositions répétées à la multiplication des permis, la Commission des

transports a créé, de concert avec le ministère des Transports, une flotte imposante de transporteurs en vrac. Des promesses de privilèges de juin 1977 devaient compenser cela. Aujourd'hui, vous vous devez de donner le contrôle du transport en vrac aux titulaires de permis de courtage.

La région 04 a toujours effectué le transport au Lac-Edouard qui est situé dans la région 03. Les transporteurs en vrac de la région 03 doivent faire au minimum 185 kilomètres pour se rendre au Lac-Edouard; les transporteurs en vrac de la région 04 n'ont que 55 kilomètres à faire pour se rendre au même endroit. Il serait donc logique que le territoire du Lac-Edouard, où on ne peut accéder que par la région 04, soit inclus à l'intérieur de la région 04.

Philippe Lamothe Inc., qui a obtenu un contrat du ministère des Transports, en 1979, a décidé, en 1980, de retenir 8% sur les paies des camionneurs parce qu'ils ont décidé de faire valoir leurs droits. Philippe Lamothe, qui fait attendre les camionneurs pendant plusieurs mois avant de les payer, vient de décréter qu'ils n'ont plus le droit de manifester pacifiquement pour protéger leurs droits. Il s'est fait juge et partie et sa sentence est de 8% sur le montant dû aux camionneurs. C'est un vrai tribunal islamique!

Pavage Nicolet Inc., à qui la Commission des transports du Québec avait accordé plusieurs permis de camionnage en vrac, n'a jamais utilisé, à notre connaissance, ses permis comme transporteur public. Cette compagnie a vendu ses permis et a continué à le faire pour son propre compte; c'était autant de camionneurs additionnels qui se sont inscrits au poste et qui ont pris l'ouvrage des petits transporteurs.

Recommandations. 1) Le gouvernement du Québec doit prendre des mesures énergiques immédiates pour s'assurer du respect des décisions de la Commission des transports. 2) Le gouvernement du Québec devrait donner à ses services d'enquête et aux tribunaux les moyens pour inciter les citoyens à respecter la loi et les règlements dans le camionnage. 3) Le gouvernement du Québec se doit de respecter l'entente signée en 1977, en particulier, en donnant immédiatement 75% du volume sur les contrats du ministère des Transports aux titulaires d'un permis de courtage. 4) Le gouvernement du Québec se doit d'obliger les constructeurs de routes à fournir des garanties pour que les transporteurs en vrac soient assurés d'être payés. 5) Le territoire du Lac-Edouard devrait être transféré dans la juridiction de la région 04. 6) II devrait y avoir des sanctions de prévues contre l'entrepreneur qui impose unilatéralement des amendes aux camionneurs qui revendiquent pacifiquement leurs droits. 7) La Commission des transports du Québec devrait avoir le pouvoir de refuser et d'annuler le transfert de tout permis qui n'a pas servi régulièrement pour effectuer du transport pour autrui. 8) Le gouvernement du Québec se doit de forcer les compagnies forestières à utiliser dans une proportion de 80% du nombre de camions pour le transport en forêt en s'adressant, pour leurs réquisitions, aux titulaires de permis de courtage. 9) Le gouvernement devrait obliger les municipalités à passer par les titulaires de permis de courtage pour 75% de leurs travaux.

M. le Président, au nom du conseil d'administration et des abonnés, nous remercions la commission parlementaire de nous avoir donné la possibilité de nous faire entendre. Nous espérons que le gouvernement donnera suite à nos recommandations. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: M. le Président, le phénomène de la chaise musicale continue, d'après ce que je peux voir, on retrouve de nouveau Me Piuze à côté des représentants du Poste d'affectation de la région 04. On retrouve aussi le fait que le poste d'affectation 04 n'est toujours pas reconnu en vertu de la nouvelle réglementation, puisque la décision de la Commission des transports a été suspendue jusqu'à ce que les causes, dont nous avons parlé tout à l'heure pour la région 01 et la région 02, soient réglées devant les tribunaux.

Maintenant, je suppose que Me Piuze nous dira que la situation est normale de ce point de vue, mais j'aimerais lui poser une question. S'il arrive un conflit entre l'ANCAl comme telle, et des camionneurs non-membres de l'ANCAl, mais membres du poste d'affectation, comment allez-vous réagir par rapport à ces demandes de camionneurs non-membres de l'ANCAl et qui sont en conflit par ailleurs avec l'ANCAl?

A titre de procureur du poste d'affectation, vous devez prendre les intérêts de tous les camionneurs, y compris ceux qui ne sont pas membres de l'ANCAl, mais, en tant que procureur de l'ANCAl, vous devez prendre les intérêts de l'ANCAl. Aurez-vous des problèmes à concilier toutes ces choses ou si ça fonctionne très bien et que vous pouvez changer de chapeau sans aucune difficulté, comme l'expliquait tantôt Me Beau-det en disant que vous pouvez avoir plusieurs clients et que ça ne cause pas de problème?

M. Piuze: M. le Président, M. le ministre, effectivement, j'ai des mandats de l'Association nationale des camionneurs artisans, j'ai des mandats aussi très particuliers, dans certains cas, de la corporation Poste d'affectation de la région 04, comme j'en ai d'autres associations et d'autres gens.

A l'intérieur de l'association et de la corporation Poste d'affectation de la région no 04, il y a des clients, des gens, des individus qui donnent des mandats à Me Beaudet ou à moi; je ne vois rien de contradictoire là-dedans. Quand je défends les intérêts du poste, comme ce soir, j'ai un mandat pour ça, je parle au nom du conseil d'administration et de l'assemblée générale qui a ratifié, bien sûr, le document que je vous ai soumis ce soir. Quand je parle au nom de l'ANCAl, c'est la même chose; advenant le cas où il y aurait un conflit, je pense que nous sommes assez honnê-

tes, Me Beaudet et moi, pour informer, comme on l'a déjà fait dans certains cas, notre conseil d'administration.

Je vois mal pourquoi le ministre se fatigue ou semble se poser des problèmes qui pourraient peut-être l'empêcher de dormir puisque, de toute manière, on essaie de respecter la loi du Barreau qui nous régit et, à ma connaissance, je ne suis pas en conflit sur les mandats que j'ai eus jusqu'à maintenant.

M. de Belleval: Mais je suppose que, comme membre du Barreau, comme avocat, ça ne vous est jamais encore arrivé d'être à la fois avocat de la défense et avocat de la poursuite dans une même cause?

M. Piuze: On ne peut pas.

M. de Belleval: C'est impossible, n'est-ce pas? Vous ne pouvez pas défendre un condamné à mort et être procureur de la couronne en même temps.

M. Piuze: C'est ça. Comme le ministère des Transports...

M. de Belleval: Alors, j'aurais un cas à vous soumettre et vous me direz comment vous réagissez. Je pense que, à partir des cas concrets, on pourrait peut-être se comprendre un peu mieux.

A la suite des manifestations de l'ANCAl, il y a quelques semaines, il s'est produit un certain nombre de phénomènes, en particulier dans la région 04, où des camionneurs qui ont refusé d'aller manifester ont été pénalisés par le poste d'affectation quand est venu leur tour d'obtenir de l'ouvrage par le poste d'affectation. Ces gens nous ont écrit et ont écrit à la Commission des transports; ils se plaignent de cette situation.

Normalement, ces personnes pourraient aller voir Me Piuze et lui demander de bien vouloir conseiller au Poste d'affectation 04 de prendre leur intérêt comme membres du poste d'affectation. Mais, par ailleurs, comme procureur de l'ANCAl, je me demande dans quelle situation vous êtes pour conseiller à votre président de rendre justice à ces gens qui se plaignent.

Dans un cas, donc, vous seriez avocat de la défense et, dans l'autre cas, avocat de la poursuite. Je me pose effectivement des questions. Ce n'est pas que ça me fatigue personnellement, mais ça fatigue drôlement le bonhomme qui est dans cette situation, c'est certain. Vous, je me demande si ça vous fatigue. Je vous pose la question.

M. Piuze: Cela ne me fatigue pas, d'une part, parce que je n'étais pas au dossier de cette manifestation à laquelle vous faites allusion. D'autre part, je suis informé par le président que cette manifestation était faite par le Poste d'affectation de la région 04. Troisièmement, je n'ai aucun client qui est venu me voir pour me demander ce que vous me dites. Vous êtes chanceux parce qu'ils vous écrivent à vous...

M. de Belleval: Vous comprenez que... M. Piuze: ... le plus gros employeur.

M. de Belleval: ... ce serait assez surprenant que quelqu'un qui est poursuivi par un avocat aille demander à ce même avocat de le défendre, mais on a des cas. J'ai des lettres. Je voudrais faire part de ces lettres à la commission. On y dit, entre autres, que des transporteurs se sont vus pénaliser de cinq jours de travail et même de dix jours de travail de moins parce qu'ils ne se sont pas rendus manifester à la demande de l'ANCAl. Evidemment, le poste d'affectation n'est pas là, je suppose, pour faire de la discipline auprès des membres d'une association en particulier qui refusent de manifester, à moins que vous ne me disiez que, dans votre esprit, c'est tout à fait correct, que c'est normal, si un membre du poste 04 refuse d'aller manifester contre le ministère des Transports, à un moment donné, qu'il soit pénalisé et qu'on lui enlève des journées de travail. Cela se peut bien, d'ailleurs. Je vois que, comme vous le dites, cela ne vous fatigue pas beaucoup. Vous êtes difficile à fatiguer et peut-être qu'effectivement, dans ce cas-là non plus, cela ne vous fatigue pas, mais je vous pose la question.

M. Piuze: M. le ministre, je vous ai dit tout à l'heure que c'était le poste d'affectation qui avait organisé la manifestation. L'ANCAl n'a rien à voir avec la manifestation à laquelle vous faites allusion. C'est le poste d'affectation. Personne ne m'a demandé quoi que ce soit. Aucun membre ne m'a demandé quoi que ce soit là-dessus. Ne vous dérangez pas, parce que ça fait peut-être quatre ans que je me fais fatiguer par des gens qui occupent certains postes et je n'en suis pas plus malade pour ça.

M. de Belleval: Autrement dit, Me Piuze, tous les articles de journaux qui faisaient allusion à des manifestations de l'ANCAl, évidemment, tout ça, c'était une espèce de mythe entretenu par de mauvais journalistes. Ces manifestations-là, l'ANCAl n'a rien eu à voir avec ça.

M. Piuze: M. le Président, le ministre me parle d'une manifestation dans la région no 04. Il fait allusion à des camionneurs qui ont été arrêtés. Je lui réponds que c'est une manifestation...

M. de Belleval: Non, je m'excuse. Je ne fais pas allusion à des camionneurs qui ont été arrêtés. Je fais allusion à des camionneurs qui ont refusé d'aller manifester et qu'on a pénalisés en leur refusant leur tour d'emploi au poste d'affectation. Je vous pose de nouveau une question très simple. Oublions donc votre situation difficile, puisque, comme vous le dites, votre situation, de toute façon, n'est pas difficile, ni fatigante. Je vous pose une question maintenant comme procureur du poste d'affectation et non pas comme procureur de l'ANCAl.

M. Piuze: Dans ce dossier-ci.

M. de Belleval: Dans ce dossier-ci. C'est ça, exactement. C'est difficile de jouer les Madeleine de Verchères et de changer de chapeau, mais je vois que vous suivez son exemple sans problème. Je vous pose la question, cette fois-là, sous le chapeau du poste d'affectation no 04. Qu'est-ce que vous répondez à un monsieur du poste d'affectation no 04 qui s'est fait refuser son tour d'affectation parce qu'il n'est pas allé manifester au nom du poste no 04? On s'entend bien: tout ça se fait à l'intérieur du poste 04 et n'a rien à voir avec l'ANCAI.

M. Piuze: D'abord, il faudrait qu'il vienne me poser la question. Deuxièmement...

M. de Belleval: Oui. Si je vous pose la question en son nom...

M. Piuze: Si vous me la posez en son nom, d'abord, je ne peux pas vous imposer d'honoraires. C'est la première des choses et...

M. de Belleval: Non. Ce serait bien le bout, n'est-ce pas?

M. Piuze: ... j'ai le droit de vous refuser comme client. Je n'ai pas à répondre à une question hypothétique. Cela ne m'a pas été demandé.

M. de Belleval: D'accord. Disons que tout ça n'existe pas, mais, si ça existait, qu'est-ce que vous me répondriez?

M. Piuze: Je n'ai pas à vous répondre. Cela ne m'est pas demandé.

M. de Belleval: Je vous la pose, moi, la question.

M. Piuze: Je suis procureur du poste pour ce dossier-ci et je vous dis que, lors de la manifestation, je n'étais pas procureur du poste. Je n'avais pas ce mandat-là.

M. de Belleval: Autrement dit...

M. Piuze: Le poste, M. le Président, et les membres, ce sont deux choses différentes.

M. de Belleval: Oui, bien sûr.

M. Piuze: Vous pouvez être membre de Bell Canada et les procureurs de Bell n'ont rien à voir avec les actionnaires, à moins que vous ne vouliez avoir les mêmes procureurs.

M. de Belleval: C'est ça. Le fait d'avoir le téléphone ne vous rend pas actionnaire de Bell Canada, on comprend ça. (21 h 15) .

Revenons a nos moutons. Je poserais dans ce cas-là la question à M. Charest ou au président.

Est-ce qu'il est vrai que vous avez refusé à certains de vos membres leur taux d'affectation parce qu'ils n'étaient pas allés manifester? Est-ce que c'est vrai?

M. Charest (Richard): Non, ce n'est pas dans ce sens-là que cela a été fait. Tous ceux qui sont venus à la manifestation ont eu un cadeau de cinq jours.

M. de Belleval: Ah! Autrement dit, vos pénalités...

M. Charest: Ceux qui ne voulaient pas avoir de cadeau ne sont pas venus.

M. de Belleval: Au lieu de donner des amendes, vous, ce sont des cadeaux plutôt.

M. Charest: Oui, ils disent que ce n'est pas défendu de faire des cadeaux. En ce qui concerne les journaux, qui parlent toujours de l'ANCAI, de la région 04, au sujet de la manifestation, le ministre lui-même, quand il parle, la plupart du temps, c'est de l'ANCAI. N'importe quel fonctionnaire du gouvernement à qui on a affaire, c'est toujours l'ANCAI. Le nom de poste d'affectation passe toujours en deuxième parce qu'ils sont tellement habitués à appeler les camionneurs artisans l'ANCAI qu'ils ont toujours ce mot-là à la bouche. C'est toujours la même chose qui se produit.

M. de Belleval: Mais vous comprendrez qu'on a raison d'être mêlés. Je regarde cela depuis dix heures ce matin et, effectivement, j'ai de la difficulté à suivre ce qui se passe ici, parce qu'on change d'interlocuteur, mais je vois toujours Me Beaudet et je vois toujours Me Piuze. Vous comprenez que cela explique pourquoi on peut être mêlés, nous, un peu parfois.

M. Charest: Si on prend ces procureurs, c'est qu'à 90%, les montants payés aux postes d'affectation sont payés par les camionneurs artisans. Le système de communication qui est fourni dans le Poste d'affectation de la région 04 est fourni par les camionneurs artisans. Le "scout", les bureaux et ainsi de suite, à 90%, tout est fourni par les camionneurs artisans. Les camionneurs artisans paient une cotisation à une association provinciale dans laquelle il y a des procureurs et on verrait bien mal d'aller se payer d'autres procureurs encore une autre fois et de les faire payer encore par des artisans qui paient déjà à un endroit.

M. de Belleval: Je termine là-dessus, M. le Président. Si je comprends bien, vous n'avez pas pénalisé ceux qui n'avaient pas manifesté, mais vous avez fait un surplus d'affectation à ceux qui étaient allés manifester. Autrement dit, vous confirmez les faits que j'expose. Vous êtes d'accord avec cela, mais c'est présenté à votre façon et non pas à la mienne, d'accord?

M. Charest: C'est cela.

M. de Belleval: On se comprend bien.

M. Charest: C'est cela.

M. de Belleval: D'accord. Merci beaucoup, M. le Président.

M. Beaudet: M. le Président.

Une Voix: Un instant! M. Beaudet.

M. Beaudet: M. le ministre des Transports, vu que vous m'avez nommé, j'aurais naturellement une question aussi à poser. La Commission des transports du Québec est un tribunal quasi judiciaire qui a à juger les camionneurs et qui a à juger le Procureur général et le ministre des Transports, qui intervient devant ce tribunal. Ce soir, le commissaire Alain, lui, membre du tribunal quasi judiciaire, qui doit être indépendant, conseille le ministre et le ministère des Transports et personne trouve cela anormal.

M. de Belleval: Est-ce que je pourrais vous dire qu'effectivement je parle au commissaire Alain, mais je vous ai vu tantôt parler au commissaire Alain et je n'ai pas vu de difficulté à cela. Je suppose que tout le monde peut parler au commissaire Alain. Si vous avez des conseils à demander au commissaire Alain, allez-y; moi, cela ne me dérange pas du tout.

M. Beaudet: M. le ministre, tout de même, je parlais avant la réunion au commissaire Alain comme vous parlez à d'autres personnes, mais quand il s'est approché de vous, sûrement, tout à l'heure, c'était pour vous demander des conseils. Je n'ai pas l'impression que vous parliez de la pluie et du beau temps comme on fait ensemble parce que, à part cela, on s'engueule parfois à la cour. Je pense bien qu'il était là pour vous donner des conseils et, plus que cela, le commissaire Alain, cette semaine, était même avec le sous-ministre Vincent pour préparer la commission.

M. de Belleval: Mais, écoutez, M. Beaudet!

M. Beaudet: C'est un pouvoir quasi judiciaire.

M. de Belleval: On n'est pas ici à des audiences de la Commission des transports. Je suppose que cela vous arrive de parler à des juges et de parler à des avocats de la couronne et même de parler au commissaire Alain, et personne ne trouve rien à redire là-dessus. C'est évident que le commissaire Alain ou le juge Prévost, je leur dis bonjour et on parle des problèmes de la commission de temps en temps. Je pense que la population serait la première surprise si elle savait que, chaque fois que je rencontre des fonctionnaires ou des représentants de la Commission des transports, on parle seulement de la dernière partie de golf. C'est évident qu'on parle d'autre chose que cela. Quand on se rencontre, règle générale, on parle des problèmes de la commission, on parle des revendications de tout le monde, on parle des difficultés d'administration de la réglementation, on parle de toutes ces choses-là. Je ne vois pas le problème.

M. Beaudet: M. le ministre.

M. de Belleval: Une chose sûre et certaine, je ne représente pas à la fois l'ANCAl et la population du Québec, je représente l'ensemble de la population...

M. Beaudet: M. le ministre...

M. de Belleval: ... mais vous, je me rends compte que vous représentez à la fois l'ANCAl et que vous représentez des membres du poste d'affectation qui ne sont pas membres de l'ANCAl et il y a des conflits parfois entre l'ANCAl et des membres d'un poste d'affectation qui ne sont pas membres de l'ANCAl. Cela me pose des questions. On l'a vu...

M. Beaudet: M. le ministre, nous ne représentons pas des membres du poste d'affectation, nous représentons un poste d'affectation; il y a une distinction entre les deux. Que la Commission des transports...

M. de Belleval: Vous voulez dire que le poste d'affectation n'appartient pas aux membres?

M. Beaudet: Le poste d'affectation appartient aux membres, mais c'est la corporation qu'on représente, et un poste d'affectation est distinct de ses membres. C'est la première chose qu'ils nous montrent en droit des compagnies, une distinction entre les membres et la corporation, et nous ne représentons pas non plus comme tels les membres de l'ANCAl, mais l'Association nationale des camionneurs artisans. Naturellement, ce sont les membres qui paient au bout la facture de tel ou tel avocat. Je suis bien d'accord avec cela. Mais s'il y a un conflit entre le poste d'affectation et l'Association nationale des camionneurs artisans, naturellement, nous n'interviendrons pas dans le dossier mais, s'il n'y a pas de conflit, nous avons le droit d'intervenir dans les deux. Je pense bien qu'on a des règles du Barreau et si vous avez des plaintes à faire faites-les au Barreau. Quant à nous on se plaint que la Commission des transports est très familière et très près du ministre des Transports même si elle a un pouvoir quasi judiciaire et qu'elle devrait avoir un caractère d'indépendance.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je vous avouerai franchement que je suis un peu déconcerté par la tournure des événements. J'étais venu ici à titre de représentant de l'Opposition officielle pour entendre les intéressés s'exprimer sur les problèmes que les camionneurs et tous les intervenants dans le domaine du transport en vrac rencontrent pré-

sentement. Je ne pensais pas qu'on avait été convoqués pour faire le procès de l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. ou de ses procureurs, bons ou mauvais, de couleur partisane ou pas. Cela ne me surprend pas tellement que le titulaire actuel du ministère des Transports se comporte de la façon qu'il le fait depuis le début de nos travaux. Il aime cela jouer au cow-boy, le député de Charlesbourg. C'est un gars qui est bien fort pour dénicher des situations dangereuses à l'aide de certains commissaires de la Commission des transports qui viennent lui fournir des informations.

Mais moi, M. le Président, j'aurais de loin préféré que le ministre et les commissaires qui travaillent avec lui viennent nous dire ce qu'ils pensent des allégations de votre association, de votre poste d'affectation. Pas un seul mot de la part du ministre. Cela passe à côté parce qu'il semble y avoir un problème extraordinaire, un conflit de personnalités extraordinaire avec Me Piuze et Me Beaudet. Moi, je le dis franchement, je les rencontre pour la première fois ce soir ou aujourd'hui et, même si je les avais rencontrés cet après-midi quelque part, cela n'aurait rien changé dans la perception de ce qu'ils sont comme procureurs. Je ne suis pas avocat, le ministre non plus, mais il me semble que cela saute aux yeux qu'un procureur, cela représente son client quel qu'il soit.

M. le Président, le ministre s'interroge sur la démarche du Poste d'affectation de la région 04 qui a donné un cadeau de cinq jours à ceux qui ont participé à la manifestation. Seulement, il ne peut pas comprendre cela, lui; dans son esprit, quand on est shérif, quand on est le cow-boy avec le fusil, on impose des amendes, on fesse. On ne fait jamais de cadeau à personne, voyons donc. C'est tout à fait contraire à sa perception des choses. M. le Président, je vous dis franchement, j'ai l'impression qu'on perd notre temps et qu'on va tourner en rond longtemps à cette commission parce que le ministre a déjà décidé, lui, que l'ANCAl, M. Dubé et son président et tous les autres sont des gens dont il faut se méfier. Ils représentent 4000 camionneurs. Cela, après tout, qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce que c'est pour un gouvernement si fort? Si fort, ce bon gouvernement qui d'ailleurs devait régler tous les problèmes. C'est bien plus facile de s'attaquer aux personnes que de réaliser que pendant près de quatre ans de mandat on n'a pas fait sa job. Après avoir blâmé les gouvernements antérieurs et avoir dit: C'est eux autres qui étaient la cause de tous les maux, on s'aperçoit que, non seulement on n'a pas réglé les problèmes, mais on les a empirés — et on en a vu une démonstration ce matin — en signant des protocoles d'entente qu'on était empressé de renier par des lettres deux mois plus tard, alors que les camionneurs n'étaient plus devant le parlement, en manifestation.

M. le Président, comment veut-on interroger les gens de la région de Trois-Rivières qui viennent nous faire part qu'ils ont des intérêts? Imaginez-vous que les gens de l'ANCAl aussi bien que les gens de l'Association des manufacturiers de bois de sciage ont des intérêts à défendre. Y a-t-il quelque chose de plus normal que cela? Quand on prend une décision, au gouvernement ou ailleurs, et que cela m'affecte dans ma vie privée, que cela affecte ma famille, je me débats comme un fou. Pourquoi? Parce que c'est dans la nature des choses de défendre ses intérêts. L'ANCAl vient défendre ses intérêts ici et elle a engagé des procureurs qu'elle juge compétents. Malheureusement, le ministre ne les aime pas. Le ministre, du haut de sa hauteur, peut se permettre de juger, lui qui a jugé, au ministère de la Fonction publique, pendant un certain temps, jusqu'à ce qu'on le mute là où il est, jusqu'à ce que la population de son comté le mute aux oubliettes.

Je me limiterai à cela. D'ailleurs, le député de Charlesbourg s'amuse à dire que je n'ai hérité du dossier des transports pour l'Opposition officielle que depuis quelques mois. En effet, je suis pas mal moins connaissant que lui, je n'ai pas été fonctionnaire au ministère des Transports, je n'ai pas été ministre des Transports et je ne le serai probablement jamais. Mais une chose est sûre, c'est que si je voulais régler le problème du camionnage en vrac, il me semble que la façon de procéder ne serait pas de commencer par insulter ceux qui viennent défendre leurs intérêts de façon légitime.

C'est le ministre lui-même qui a dit: On va tenir une commission parlementaire pour entendre les intéressés. Il ne voulait pas de manifestation, de la même façon que son prédécesseur avait signé n'importe quoi, en juin 1977, et je pèse bien mes mots, il a signé n'importe quoi pour que les camionneurs retournent tranquillement chez eux, en juin 1977. Cela, mes chers amis, c'est votre gouvernement transparent, le gouvernement de la transparence qu'on a élu en 1976. Le ministre disait tantôt qu'il parlait au nom de la population. Je m'excuse, il ne parlera jamais en mon nom, il ne parle pas au nom de 59% de la population et, bientôt, si on peut avoir des élections, il ne parlera plus au nom de personne parce que personne ne va l'écouter. J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: M. le Président, nous avons pris connaissance d'un mémoire concernant le Poste d'affectation de la région 04. lis ont soulevé au moins six points importants sur lesquels j'aurais aimé que le ministre puisse se prononcer. Au lieu de cela — je ne suis pas d'accord moi non plus — il a choisi de faire le procès de deux individus et cela représente des problèmes. Ici, j'ouvre une parenthèse pour dire que, que ce soit un cadeau de cinq jours ou une punition de cinq jours, personnellement, je ne suis pas d'accord avec cela parce que le poste d'affectation doit représenter tout le monde et il y a une liberté de choix au niveau de l'association. Je suis favorable à ce principe et, personnellement, je n'accepte pas ce genre de punition.

Ceci dit, j'aurais aimé que le ministre dépense

autant d'énergie qu'il l'a fait pour tenter de discréminer une association ou ses représentants... En passant, j'imagine que les membres du poste d'affectation ont nommé un bureau de direction, et ce bureau de direction a fait appel à un procureur. Si le procureur ne fait pas un travail satisfaisant, ce sera aux membres, lors d'une réunion générale, de le dire à leur bureau de direction et à changer les procureurs; je pense que ce n'est pas au ministre à se prononcer là-dessus. (21 h 30)

J'aurais aimé par exemple, M. le ministre, que vous dépensiez beaucoup d'énergie justement pour nous dire comment il se fait qu'on ne vous a pas entendu, depuis six mois ou depuis un an, formuler publiquement des plaintes ou dénoncer le fait que la Commission des transports ne fait pas respecter les taux qu'elle a elle-même fixés.

Ce n'est pas à vous, comme vous m'avez dit avant l'heure du dîner, de jouer au policier et de faire le travail qu'est censé faire ce qu'on appelle l'organisme quasi judiciaire ou le tribunal qu'est la Commission des transports. Ce n'est pas au ministre des Transports à faire ça et je suis d'accord avec vous, mais il me semble que cela aurait été d'abord et avant tout au ministre des Transports à dénoncer le fait, à le dire publiquement, parce que la Commission des transports est un organisme gouvernemental et le ministre des Transports aurait dû dénoncer le fait que la Commission des transports n'avait pas l'autorité suffisante ou ne faisait pas le nécessaire pour faire respecter ces taux-là. Depuis ce matin, différents mémoires nous disent de façon non équivoque, avec preuve à l'appui, que les taux fixés par cette commission n'ont pas été respectés. Or, si le ministre veut amener un élément de solution au problème du transport en vrac, ce serait d'abord de dire à la commission, par le truchement de la radio, des journaux et de la télévision: Faites respecter d'abord ces taux, je vous le demande en tant que ministre des Transports.

Egalement depuis ce matin, nous avons des mémoires qui se plaignent qu'il se fait énormément de transport illégal au Québec. On nous a donné des plaintes, on a été même jusqu'à nous citer des noms, avec l'adresse et quasiment les numéros de téléphone. Que veut-on de plus? On nous a donné des exemples de compagnies qui contournent les règlements, qui contournent la loi. Voilà ce qu'on a demandé depuis le matin, et il en sera ainsi, j'imagine, pour les trois jours, parce que j'ai pris connaissance des mémoires. On peut être contre une loi, je suis bien d'accord, mais tant qu'elle existe, elle doit être respectée. Moi aussi, il y a des lois que je n'aime pas au Québec.

M. de Belleval: Je peux répondre à votre question?

M. Goulet: Oui, je pourrai compléter... Comme vous voulez.

M. de Belleval: On va répondre tout de suite à cette question-là et ensuite...

M. Goulet: Certainement.

M. de Belleval: Bon, d'accord. D'abord je suis très heureux de voir que le député de Bellechasse n'approuve pas des mesures discriminatoires contre des membres des postes d'affectation.

M. Goulet: C'est-à-dire que je l'ai dit au niveau d'un principe.

M. de Belleval: Oui, d'accord, je suis heureux de savoir ça.

M. Goulet: De liberté d'association. Je veux être objectif au cours des travaux, je l'ai dit ce matin. Il n'est pas question de faire de la politicail-lerie.

M. de Belleval: Je n'ai que des félicitations à vous faire. Je suis heureux que vous soyez en principe contre la discrimination parce que, comme vous l'avez dit, le poste d'affectation doit représenter tous les membres du poste et non pas seulement les membres d'une association en particulier. Je suis content que vous fassiez cette affirmation.

Evidemment, le député de Gatineau a un point de vue totalement contraire, mais je lui laisse la responsabilité de son point de vue. Je suppose qu'il représente l'Opposition officielle quand il a ce point de vue-là. On pourra juger un peu plus tard. La population jugera — c'est elle qui a d'ailleurs le dernier mot, heureusement, dans notre système — la sincérité de gens qui disent qu'ils sont en faveur des libertés individuelles, mais qui ne se scandalisent pas quand ces libertés individuelles sont mises en cause par une discrimination évidente.

Cela dit...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. de Belleval: ... je ne veux pas faire le procès...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de règlement.

M. Gratton: Je ne sais pas si le ministre dans sa remarque fait allusion à son droit individuel que j'aurais brimé...

M. de Belleval: Mon droit?

M. Gratton: Laissez-moi finir ma phrase.

M. de Belleval: Non, je vous dis non, ce ne sont pas mes droits.

M. Gratton: Ce que j'ai voulu dire, c'est qu'en venant ici, on avait l'impression de venir étudier le problème du camionnage en vrac...

M. de Belleval: Où est la question de règlement, M. le Président?

M. Gratton: J'y viens. Je veux que vous compreniez, donc, je vais prendre le temps qu'il faut pour que vous compreniez... non pas pour faire le procès de quelque association que ce soit, de quelque personnalité que ce soit, mais étudier, dans le calme et la sérénité, les solutions au problème du camionnage en vrac. Or le ministre, par son comportement depuis le début de nos travaux, a fait en sorte que c'est devenu presque impossible de faire du travail valable. C'est ce que j'ai voulu dénoncer, et je n'ai pas voulu...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député, mais j'essaie de faire le joint avec ce que le ministre venait de dire. Il parlait de la discrimination qui avait eu lieu et c'est sur ce point de vue qu'il a eu à parler. Donc, si vous avez quelque chose à dire...

M. Gratton: M. le Président, justement, sur la question de règlement, je n'ai fait aucune allusion au problème dont parle le ministre et qu'a soulevé le député de Bellechasse. J'ai parlé du comportement du ministre et je réitère que le comportement du ministre, au moment où on doit essayer de trouver des solutions au problème du camionnage en vrac, n'est pas de nature à trouver ces solutions, mais est de nature à envenimer la situation encore plus. C'est tout. Qu'il ne me prête pas d'intentions, qu'il ne vienne pas me parler des libertés individuelles à ce moment-ci.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le ministre.

M. de Belleval: M. le Président, de nouveau, je laisse au député de Gatineau la responsabilité de l'affirmation qu'il a faite tantôt en disant qu'il ne voyait rien de répréhensible à ce qu'on ait un comportement discriminatoire à l'intérieur du poste 04, tel que je l'ai expliqué.

M. Gratton: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Le ministre est soit sourd ou complètement incapable de comprendre. Ce n'est pas cette question, du tout. La question de discrimination dans les postes d'affectation, je n'en ai pas parlé. S'il y a eu discrimination quelque part, je la condamne d'avance. Je n'en ai pas parlé. Alors, qu'il cesse de me prêter des propos que je n'ai pas tenus. Le ministre est peut-être mal à l'aise, je n'en sais rien; il est peut-être indisposé, sait-on jamais!

Le Président (M. Jolivet): Votre point d'ordre est fait. M. le ministre.

M. de Belleval: Les gens qui écoutent ces débats et qui lisent ces débats pourront relire les déclarations antérieures du député de Gatineau et se rendre compte qu'il vient de virer à 100 milles à l'heure sur un dix cents, bout pour bout, sans doute suite à une conversation qu'il vient d'avoir avec le député de Charlevoix.

M. Gratton: Est-ce qu'il y en a un autre que vous voudriez insulter? Le député de Shefford?

M. Mailloux: M. le Président...

M. de Belleval: Revenons à la question du député de Bellechasse.

M. Gratton: Me Piuze, on est ensemble; on est des pas bons.

M. Mailloux: M. le Président, je m'excuse infiniment, mais, comme le ministre des Transports vient de m'imputer la responsabilité des paroles qu'a dites mon collègue de Gatineau, j'affirme devant la commission que je n'ai donné aucun conseil, ni d'une façon, ni de l'autre, à mon collègue, mais ce qu'il a dit, je l'endosse entièrement, quant à la façon dont il a traité les procureurs et l'ANCAI.

M. Gratton: Mets ça dans ta pipe, beau "smart"!

M. de Belleval: Parfait. Ceci étant dit, la question qui est devant nous est beaucoup plus importante que ce que peuvent penser les députés de Charlevoix ou de Gatineau. Nous avons institué un nouveau système de postes d'affectation en vertu de la réglementation adoptée l'automne dernier et ces postes d'affectation, actuellement, dans certaines régions, ont de la difficulté à s'organiser. Cela n'est pas étranger au fait que cette commission siège actuellement, ces difficultés, et le rôle de l'ANCAI n'est pas étranger au fait que nous tenons actuellement cette commission. Ce que j'ai voulu faire ressortir par mes questions et par de simples questions, c'est la situation qui, à mon avis, est irrégulière entre les positions de certaines personnes en autorité ou en conseil au sein de l'ANCAI et l'organisation même des postes d'affectation qui, comme vous l'avez fait remarquer, M. le député de Bellechasse, doivent fonctionner dans la plus grande équité, dans l'équité la plus parfaite envers tous les camionneurs, qu'ils soient membres de l'ANCAI ou qu'ils n'en soient pas membres.

Il y a une chose qui est importante et dont il faut se rendre compte, c'est que le camionnage en vrac au Québec, c'est une chose et l'ANCAI, c'est une autre chose. Les postes d'affectation, c'est une chose et l'ANCAI, c'est autre chose. Il y a des individus, actuellement, qui sont victimes de situations particulières, qu'on appelle ça des cadeaux ou des amendes, parce que justement ils sont pris, eux simples individus, en sandwich, comme la cacahuète dans le casse-noisettes, entre justement des postes d'affectation, d'une part, qui sont censés les protéger et l'ANCAI, d'autre part, qui poursuit ses objectifs.

Je ne veux faire le procès de personne; je veux tout simplement mettre devant la population et devant les députés de cette Chambre la situation difficile devant laquelle on est et qu'illustrent les exemples que je viens de mentionner. Je pense que ça touche directement aux travaux de notre commission.

Pour répondre à votre question sur ce qui arrive quand les taux de la commission ne sont pas respectés, et qu'il y a des plaintes de portées, nous avons des enquêteurs au ministère des Transports, des plaintes sont ensuite portées devant les tribunaux et des jugements sont rendus par les tribunaux. C'est ce que nous faisons. C'est ce qui se fait au ministère depuis de nombreuses années. C'est ce que nous continuons à faire. Cependant, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les pénalités, les amendes qui peuvent être imposées à la suite d'un non-respect de la réglementation sont actuellement trop basses; elles doivent être révisées; donc, la loi doit être changée. Je me suis engagé d'ailleurs, devant l'ANCAl, devant les procureurs de l'ANCAl, devant le président de l'ANCAl, publiquement, devant tout le monde, à présenter une législation adéquate pour que notre loi ait davantage de dents et qu'on puisse faire respecter véritablement la lettre et l'esprit de la réglementation.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Oui, M. le Président, je ne pensais pas que mes questions allaient susciter autant de commentaires. Pour être bien compris du ministre, M. le Président, j'ai bien dit que — encore là, ça n'a pas été prouvé — s'il y avait eu discrimination de certains camionneurs parce qu'ils n'étaient pas membres de l'ANCAl, ce n'est pas au président ou au directeur général du poste d'affectation à les punir. Je le condamne, si c'est ça qui est arrivé. On va entendre tantôt... Il y a une loi, comme on dit — je ne suis pas avocat, mais, comment est-ce qu'on dit ça — audi alterem partem?

M. de Belleval: Je lui ai posé la question et il l'a admis, c'est tout, très franchement, d'ailleurs, je le félicite.

M. Charest: D'accord, je l'ai dit bien franchement: c'est à la suite d'une assemblée des membres. Ils ont dit: Ceux qui ne viendront pas à la manifestation, on demande au conseil d'imposer ce qu'on a dit tout à l'heure. Ce sont les membres eux-mêmes qui l'ont demandé. C'est pour cette raison que ç'a été fait.

M. de Belleval: M. Charest, je vous remercie de votre franchise.

M. Goulet: Comme ça se fait dans d'autres associations, M. le Président, les membres l'ont décidé ainsi et la direction a tout simplement agi.

Maintenant, le ministre — et ça, je n'aime pas cela, parce que ça va revenir probablement à tous les autres mémoires — semble tenter de mettre toutes les causes à ces malaises sur le dos de procureurs ou d'une association. Le ministre parle des gens qui sont pris en sandwich entre peut-être une association et un poste d'affectation dont ils sont membres. Mais, depuis ce matin qu'on nous dit qu'il y en a des gens qui ont été pris en sandwich. On vous a même parlé quasiment de cassage de bras et de jambes, de personnes ou de compagnies subventionnées par le gouvernement, et on a même mentionné des compagnies qui appartiennent pour une certaine part au gouvernement et qui, elles aussi, mettent certains individus en sandwich et disent: Si tu ne marches pas à des taux inférieurs à ceux fixés par la Commission des transports, tu ne travailleras plus. Et le ministre a laissé passer ça comme du beurre dans la poêle, comme l'eau dans la rivière.

J'aurais aimé que vous mettiez autant d'énergie à ce moment-là à dénoncer ça, ce que des gens de Rimouski sont venus nous dire, des gens de Jonquière sont venus nous dire, ce que des gens de Trois-Rivières viennent de nous dire. Premier point.

Si le gouvernement, par le biais de son ministre des Transports du temps, a singé une entente — qu'elle soit bonne ou pas bonne, ce n'est pas là où j'en suis — en 1977 et que ça ne fait pas son affaire, et qu'elle n'est pas respectée et que c'est la cause de tous les malaises, il ne faudrait toujours pas mettre ça sur le dos d'une association ou d'un ou de deux procureurs.

C'est pour ça que je rappelle le ministre à l'ordre — si je peux me permettre ces propos-là, M. le Président — pour lui dire de ne pas prendre un petit pou, à un moment donné, ou une épingle dans un voyage de foin pour tenter de se laver ou de laver son gouvernement, parce que son gouvernement, et surtout des gens qui l'ont précédé et peut-être lui depuis qu'il est là, ont des torts. C'est ça que ces gens sont venus nous dire: Mettez donc autant d'énergie pour nous expliquer vos torts ou les accusations qu'on formule contre vous et votre gouvernement plutôt que de tenter de faire de la discrimination contre une ou deux personnes.

Il y a des membres qui ont choisi des procureurs. Qu'ils soient compétents ou pas, ce n'est pas au ministre à décider ça, ce sera au poste d'affectation et ce sera aux membres de ce poste, et aux membres de l'association à choisir leur procureur et c'est à eux de décider qui doit venir les représenter ici comme la population a décidé il y a quatre ans qu'un certain gouvernement devait la représenter, devait la diriger. Elle n'a peut-être pas fait le meilleur choix, elle se reprendra. Si ce n'est pas correct dans leur cas, ils feront la même chose, mais ce n'est pas au ministre ni à aucun membre de la commission à décider quel procureur devrait venir représenter telle ou telle association.

Il y a dans trois ou quatre mémoires des accusations de portées contre la Commission des transports et le ministre passe toujours sous la table pour contourner ça. Je lui demande simple-

ment de répondre. Les gens qui sont devant nous sont venus et ils vous ont fait état d'au moins six points précis qui sont la cause de malaises profonds. Alors, répondez donc à ça. Vous avez répondu à un point, sur les procureurs, répondez aux six autres. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. de Belleval: Je suis prêt à répondre à une question de ce côté-là. Sur quel point voulez-vous une réponse?

M. Goulet: On se plaint qu'il se fait énormément de transport illégal, que c'est même une institution dans la région 04. Est-ce que le ministre va le dénoncer publiquement ou va demander — s'il peut, je ne le sais pas — publiquement à la Commission des transports d'intervenir et de faire en sorte que les règlements soient respectés et que les taux soient respectés? Est-ce que le ministre s'engage à faire ça demain matin? Cela en est un point, ça.

M. de Belleval: La réponse que j'ai donnée à votre première question vaut exactement pour votre deuxième.

M. Goulet: Quand?

M. de Belleval: J'ai expliqué que, de toute évidence, la loi actuelle n'a pas assez de dents et que, par conséquent, si on veut faire respecter les taux quand il y a du transport illégal, il faut changer la loi. Alors, demain matin, je suis pris avec la loi actuelle. (21 h 50)

M. Goulet: M. le Président, le premier ministre nous a dit...

M. de Belleval: II faudra changer la loi pour faire en sorte que la force des amendes ait, entre autres, un effet de dissuasion. M. le député, on s'en est parlé. D'ailleurs, l'ANCAl est au courant de toutes mes réponses à ce sujet. Les questions que l'on nous pose dans les mémoires des postes d'affectation sont exactement les mêmes que les mémoires de l'ANCAl nous posaient ce matin, d'ailleurs. Cela se comprend. On voit que ce sont, à toutes fins pratiques, des mémoires qui viennent, tous les quatre, de l'ANCAl ou de gens qui sont liés de très près à l'ANCAl. On le voit, entre autres, par l'identité des procureurs de ces trois postes d'affectation et l'identité des procureurs qui étaient à la table de l'ANCAl ce matin.

Alors, les réponses que nous avons données ce matin valent pour ces mémoires. Mais, pour revenir à votre point en particulier, ce n'est pas avec une amende de $52, comme c'est le cas actuellement, qu'évidemment on peut effrayer des transporteurs illégaux. Alors, il faut changer ça. J'ai promis qu'on le changerait. Cela vaut dans le transport général. J'ai pris le dossier au mois de septembre et, depuis ce temps-là, je rencontre des gens du secteur pour obtenir une bonne perception du dossier et des moyens propres à corriger les lacunes. A la première occasion, l'Assemblée nationale sera appelée à légiférer là-dessus.

M. Goulet: M. le Président, je suis d'accord, mais ces gens-là se promènent depuis 1977 au moins. Ils sont venus cet été, en juillet. Ils ont demandé une commission parlementaire. On leur a donné le mois d'août. Il s'en fait du transport en vrac.

Le premier ministre nous a dit à la télévision, hier: L'Assemblée nationale, si elle siège avant les prochaines élections, ne siégera pas avant le mois de novembre. C'est bien ce que le premier ministre a dit. Alors, une nouvelle loi, quand est-ce qu'on va l'avoir? D'ici un an? Le problème se perpétue.

L'autre point, dans la recommandation no 3 de ces gens-là, on vous demande que le gouvernement fasse respecter l'entente et qu'il donne immédiatement 75% du volume sur les contrats du ministère des Transports aux titulaires d'un permis de courtage. Est-ce que le ministre s'engage à ce que ça soit fait dès demain matin?

M. de Belleval: Cela fait justement partie des revendications de l'ANCAl que cette commission est appelée à examiner et nous allons continuer à étudier cette question lors de la commission. D'autres intervenants vont venir et, une fois que nous aurons tous ces points de vue, c'est justement à ce moment-là qu'on sera en mesure de prendre position là-dessus. C'est l'objet même de la commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, une seule question. Elle fait suite, d'ailleurs, à une observation que vient de faire mon collègue de Bellechasse. Tantôt, le ministre a dit, avec raison, forcément, que pour tout transport illégal, qui est quand même une des facettes importantes du malaise qu'on rencontre dans le camionnage, des plaintes étaient portées et que les cours de justice avaient à décider. Je pense que c'est dans le cours normal des choses. Est-ce que le ministre pourrait informer la commission, qui a besoin de connaître l'ensemble des facettes du problème, du nombre de plaintes qui ont été déposées, du nombre de causes qui ont été plaidées et de l'importance des amendes qui ont été versées? On en parle dans les mémoires; c'est une industrie qui génère des centaines et des centaines de millions.

Cela serait important que la commission sache, devant les milliers et les milliers d'infractions contre les règlements du transport, ce que ça donne, dans les faits, les poursuites qui sont intentées et ce que ça coûte à ceux qui sont pris en infraction, si c'était possible, pendant que la commission siègera.

M. de Belleval: Oui, je pourrai faire les recherches qu'il faut. Ces renseignements sont sans doute disponibles déjà. Je ne les ai pas sous la

main. Mais on pourra vous donner cette réponse avant la fin des travaux de la commission. Vous avez raison de le souligner. C'est un aspect important. La preuve, d'ailleurs, que je suis de votre avis là-dessus, c'est que, comme je l'ai dit, je suis convaincu d'avance, sans vous donner la réponse exacte — on vous la donnera — qu'à l'examen de cette réponse vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il faut changer le système actuel, parce qu'il n'est pas dissuasif.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres questions ou observations? M. Charest.

M. Charest: Dans un autre mémoire, on parle d'un certain entrepreneur qui faisait des retenues sur les paies des camionneurs pendant le temps qu'on a fait la manifestation parce qu'il dit avoir manqué de camions, tandis que, durant le temps de notre manifestation, il était sur la clause 75-25 et il a tout mis ses "trailers" pour faire le transport; je pense que ça a plutôt été rentable pour lui. Mais M. le ministre n'a pas semblé prendre en considération cette chose.

Je pense qu'un entrepreneur qui retient 8% sur la paie de tous les camionneurs pour se faire justice lui-même, cela devrait valoir la peine de prendre cette chose en considération et d'essayer de faire en sorte que les camionneurs soient payés dans les plus brefs délais possible, parce que depuis le mois de mai, ce même entrepreneur n'a pas encore payé les camionneurs. Il leur envoie un chèque de temps en temps et il donne pour raison que chaque camionneur devrait envoyer son état de compte, cette année. L'année passée, il n'en avait pas besoin, il les payait de même. Cette année, il dit: Qu'ils envoient leur état de compte et nous allons les payer. Il retient 8% sur la paie. Je demande qu'au moins l'entrepreneur en question paie les camionneurs dans les plus brefs délais possible.

M. de Belleval: Ecoutez M. Charest, il est évident que je n'approuve aucune mesure de rétorsion, pas plus celles auxquelles j'ai fait allusion de mon propre chef tantôt que celles que pourrait utiliser un camionneur envers vos adhérents. Je pense que cela démontre bien les malaises que nous avons dans cette industrie quand des gens comme cela, que ce soit chez vous, au poste d'affectation, ou des entrepreneurs ou ailleurs, se mettent à prendre des mesures de rétorsion contre des membres de cette industrie. Il est évident que c'est de cela justement qu'il faut sortir. Je suis déjà intervenu, comme vous le savez, auprès de certains entrepreneurs, à votre demande. Dans un cas comme cela, il me fait plaisir d'agir comme intermédiaire entre vous-même et l'entrepreneur en question, bien que vous devez vous rendre compte que je n'ai aucun pouvoir décisionnel sur un entrepreneur ou l'autre qui a un contrat avec des tierces parties.

Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres questions, je vais remercier les gens de la région 04 et je vais demander aux gens du Poste d'affectation de la région 05 Inc., représentés par M. Jean-Guy Perras... Oui?

M. Charest: Si c'est possible, je voudrais signaler le cas de Déry Express qui est rendu avec 4 VR sur ses camions. Après information, hier, à la Commission des transports afin de savoir de quelle façon il avait acquis ces 4 VR, la Commission des transports, répond qu'il n'a pas acquis de permis VR au nom de Jean Gauthier, de Déry Express ou n'importe quel nom que vous pouvez sortir. On ne sait plus sous quel nom il marche mais il a 4 VR sur ses camions. Après avoir rencontré la Compagnie Mallette, hier matin, on a appelé Jean Gauthier lui-même pour lui demander s'il avait bien 4 permis VR. Il a dit: oui. Cela s'est fait dans l'espace de dix jours, quinze jours. Il a transporté pendant quinze jours avec un X, une licence de garage, et maintenant, il est rendu avec des VR. Son affaire est maintenant correcte, il a ses VR.

Il y a un autre type qui transporte depuis un bon bout de temps avec un F. Il disent, lui, il a ses papiers, il ne reste qu'à aller chercher le VR. Il passe devant la Commission des transports, le 8 septembre, pour obtenir son permis. On s'est renseigné auprès de la Commission des transports, il n'a pas de permis, mais il a des VR. Il transporte illégalement, et cela dure depuis trois ans. C'est ce que je trouve drôle. Depuis trois ans, ce même type vient à bout de transporter, même si les amendes sont de $50 à chaque fois qu'il commet une infraction. S'il avait au moins une amende par jour chaque fois qu'il agit illégalement, j'imagine qu'à $50 l'amende, au bout de 100 jours il en aurait assez de payer et il arrêterait de transporter. Il y a quelque chose qui ne marche pas. Les officiers du ministère des Transports sont allés vérifier chez Déry, la semaine passée, pour voir s'il y avait effectivement des VR sur les camions. L'officier trouve bien drôle lui aussi qu'il y ait des VR qui soient à son nom. J'ai dit: C'est bien à son nom? Il a dit: Oui, c'est à son nom. On a vu aucune publication dans les journaux. On ne sait plus d'où cela vient. On ne sait plus où c'est. On se pose des questions. On ne le sait plus.

M. de Belleval: Comme vous l'avez indiqué, vous avez posé la question à la commission qui est responsable de l'administration des permis. Tantôt, votre procureur, d'ailleurs, a expliqué qu'il était favorable à l'indépendance de la commission. Je ne peux pas intervenir auprès de la commission pour casser des décisions ou obtenir des renseignements autres que ceux qui vous sont déjà transmis. Quoi qu'il en soit, je demanderai des renseignements sur les cas que vous soulevez et je vous écrirai là-dessus. Je l'ai toujours fait, d'ailleurs. Vous savez aussi que dans le cas d'entrepreneurs qui sont fautifs, nous avons agi, mais dans le cadre de la loi actuelle qui, tout le monde l'admet, n'est peut-être pas des plus efficaces pour réprimer ce genre d'abus.

Je comprends votre frustration, M. Charest. La mienne est égale à la vôtre, mais moi aussi, je

fonctionne dans le système que l'on m'a laissé et qui semble, d'ailleurs, créer ses propres difficultés, indépendamment des efforts des différents ministres ou fonctionnaires qui se succèdent dans le dossier. S'il y a un dossier qui brûle les ministres et les fonctionnaires, c'est bien ce dossier-là. Cela a l'air à brûler de la chair humaine, mais ça n'a pas l'air, finalement, à donner de meilleurs résultats à l'autre bout.

M. Charest: J'en suis bien conscient. Tout ce que je sais, c'est que cela fait trois ans que ce camionneur transporte de la marchandise illégalement. Comme je l'ai dit, s'il avait eu des amendes aussi souvent qu'il était en infraction, je suis certain qu'il aurait arrêté de transporter. Je ne sais plus s'il y a des amendes, on se pose des questions. La question vous a été posée tout à l'heure; y a-t-il eu des cas assez "pénalisables" qu'ils en vaillent la peine et quel montant ce même entrepreneur aurait-il pu payer? Je ne le sais plus.

M. de Belleval: Pour revenir aux statistiques que me demandait tantôt le député de Charlevoix, par exemple, en 1976-1977 nous avons émis 2052 billets d'infraction. Quand on sait qu'il y a à peine 10 000 permis, 2052 billets d'infraction pour une seule année, je pense que ça commence à être un montant respectable. Au cours de la même période, 461 dénonciations furent envoyées aux procureurs de la couronne, 303 avis préalables ont également été envoyés, 324 mises en demeure et 1120 dossiers ont été classés sans aucune infraction.

Au cours de la même période, 658 condamnations ont été prononcées, 113 plaintes ont été rejetées et 185 avis préalables ont été payés. Donc, on se rend compte que le système de surveillance, le système d'infraction fonctionne.

Cela dit, l'aspect répressif de ce système d'infraction, de poursuite et de condamnation n'enraie pas d'une année à l'autre toutes les infractions. Je vous donne l'exemple de 1976-1977 et je pourrais continuer pour 1977-1978 et pour l'année 1978-1979.

Pour 1977-1978, 2771 dossiers; pour 1978-1979, 1762 billets plus 18 dénonciations, plus 830 avis préalables, plus 1154 mises en demeure. Pour 1979-1980, on est rendu déjà à 1009 avis préalables et à 268 dénonciations. Autrement dit, on fonctionne avec 1500 et 2000 infractions par année pour 10 000 ou 12 000 permis. Si quelqu'un ne voit pas un malaise là-dedans, s'il s'imagine qu'avec encore plus de policiers, encore plus d'infractions, encore plus de procès on va régler le problème, je lui demande quand même de réfléchir à ces chiffres-là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Shefford.

M. Verreault: Le ministre n'est pas tellement précis dans ses informations. Parle-t-il de 2000 infractions relativement au transport illégal ou s'il parle des infractions au Code de la route en général?

M. de Belleval: Je parle des infractions dans le cas du transport en vrac, bien sûr.

M. Verreault: Non, mais est-ce qu'on parle de transport illégal?

M. de Belleval: De transport illégal au règlement sur le vrac, non pas au Code de la route.

M. Verreault: Oui, mais le transport en vrac peut comporter des infractions au Code de la route aussi.

M. de Belleval: Non, vous avez raison. Ne vous inquiétez pas, ce ne sont pas des infractions au Code de la route, mais des infractions au règlement sur le transport en vrac.

M. Verreault: Comme cela, c'est bien précisément relatif au transport illégal? Est-ce du transport illégal?

M. de Belleval: C'est du transport illégal, effectivement.

M. Gratton: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait de demander au ministre s'il accepterait non pas de déposer, parce qu'il n'y a pas de dépôt en commission parlementaire, mais de fournir aux membres de la commission ces documents?

M. de Belleval: Oui, de faire l'équivalent. Demain, ce sera fait. On fera des photocopies, ce sera fait.

M. Gratton: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. Piuze.

M. Piuze: M. le Président, c'était ma question, à savoir si le nombre d'infractions portait sur le règlement sur le camionnage en vrac, sur les taux ou si ça incluait la pesanteur. Le ministre nous dit: Non, cela porte sur le règlement sur le camionnage en vrac, ça ne concerne pas la pesanteur.

M. de Belleval: Sur le règlement sur le camionnage en vrac.

M. Piuze: Exclusivement?

M. de Belleval: Exclusivement.

M. Piuze: Pour les gens qui n'avaient pas lettré leur camion, etc.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: J'aurais juste une petite question. J'aimerais savoir si vous pouvez nous dire combien il y a eu de plaintes de formulées depuis trois ans ou au moins depuis un an au niveau de la région 04 auprès de la commission quant au transport illégal.

M. Charest: II y en a eu plusieurs, elles n'ont pas toutes été formulées par écrit. Vous dire le nombre... Elles ont toutes été formulées aux officiers du ministère des Transports, il y a un bureau à Trois-Rivières. On appelle directement et on formule les plaintes sur du transport illégal, sur du transport sans immatriculation adéquate, etc. Il doit y en avoir eu, j'imagine, une centaine dans la région 04. A un moment donné, avec le résultat obtenu à la suite de nos plaintes, on a été une bonne période de temps pendant laquelle on n'en faisait plus. Cela ne servait à rien, rien ne changeait. A ce moment-là, on se décourage et on arrête d'en faire. (22 heures)

M. Baril: Quand vous affirmez — je ne veux pas contester votre affirmation — qu'il se fait beaucoup de transport illégal dans la région 04, sur quoi vous basez-vous?

M. Charest: Si on voit passer un camion immatriculé avec un L, par exemple, et qu'on fait sortir le dossier à la Commission des transports pour savoir ce que cela lui permet de faire et qu'il n'a qu'un rayon de 30 milles, alors qu'il charrie à 100 milles, il dépasse son. rayon. On étudie la chose avant, on fait la plainte en conséquence et il continue à transporter. Cela fait trois ans qu'on fait continuellement des plaintes contre ce type et il continue à transporter encore; c'est celui que je mentionnais tout à l'heure. Depuis cinq jours à peu près, il a des VR et il continue toujours à transporter.

On a jusqu'à des N et des X qui font du transport pour compte propre; soi-disant, c'est du compte propre, mais c'est du compte public. Cela aussi est illégal, comme le coupage de taux, on n'est pas supposé couper les taux. On porte toutes ces plaintes, mais il est assez rare que nous ayons un aboutissement ou quelque chose de concret à nos plaintes.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Il y a eu consentement tacite pour continuer, compte tenu qu'il y a d'autres questions. Je demande à nouveau les gens du Poste d'affectation de la région 05 Inc., représentés par M. Jean-Guy Perras. Vous allez présenter les autres membres de votre groupe.

M. Gratton: Laissez faire pour le procureur! On le connaît.

M. Beaudet: En blaguant, je n'ai pas de conflit d'intérêts parce que je représente deux associations de transporteurs, mais j'aurais sûrement un conflit d'intérêts s'il fallait que je représente le ministre des Transports!

Poste d'affectation de la région 05 Inc.

M. Perras (Jean-Guy): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, d'abord, nous apprécions le fait d'être entendus ici, aujourd'hui. J'aimerais vous présenter le vice-président au poste d'affectation, M. Morin, et, sans plus tarder, notre directeur du Poste d'affectation de la région 05, M. Letarte, qui nous fera lecture de ce document.

M. Letarte (Pierre): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, notre mémoire se divise en six volets. La première partie se lit comme suit: Composition et structure du Poste d'affectation de la région 05 Inc.

Depuis le 15 juillet 1978, la corporation Poste d'affection de la région 05 détient le permis de courtage exclusif émis par la Commission des transports du Québec. Dans notre région, environ 525 détenteurs de permis de transport en vrac sont inscrits au poste, sur une possibilité de 750.

Le poste d'affectation a divisé la région 05 en dix sous-postes de distribution de travail dont le territoire correspond à la carte des circonscriptions électorales de 1969.

Avant l'avènement des postes d'affectation, les camionneurs en vrac de la région se répartis-saient le travail, à quelques exceptions près, suivant ces lignes.

Après avoir tenté de modifier le territoire par une superstructure, nous nous sommes aperçus qu'au point de vue de la rentabilité et de la répartition équitable les lignes des circonscriptions électorales de 1969 étaient plus adéquates. Neuf des dix sous-postes possèdent des bureaux avec un personnel de répartiteur indépendant, n'ayant aucun permis de transport en vrac. Le poste compte sur des personnes-ressources essentielles à sa bonne marche.

Activités et opération du poste. Le coût moyen d'opération annuel des sous-postes et du poste s'établit approximativement à $550 par abonné. Nous avons, au service du public, toutes les catégories de camions dont un requérant de services peut avoir besoin. Il n'y a aucune commande ou réquisition de services que nous ne puissions remplir.

Volume de transport. De juillet 1978 à juillet 1980, les réquisitions de services se sont maintenues au poste et aux sous-postes. Cependant, le nombre de détenteurs de permis inscrits a augmenté de 10%.

Le transport du sable, terre, gravier, chlorure de sodium est effectué par le poste et les sous-postes dans une proportion approximative de 40%, même si 70% des détenteurs de permis font partie des structures actuelles.

Cette lacune est causée, d'une part, par la compétition que les abonnés se font entre eux et, d'autre part, par la compétition qu'ils font aux postes en s'engageant directement par contrat ou sous-contrat. De plus, nous voyons apparaître chaque jour avec plus d'intensité des transporteurs illégaux et, à cause de ces faiblesses, les perspectives d'avenir du poste sont minimisées.

Dans le domaine forestier, nous n'avons à peu près pas de transporteurs inscrits aux postes et sous-postes, étant donné que les requérants de services dans ce domaine préfèrent contourner la réglementation pour des motifs que nous établi-

rons dans un des chapitres suivants.

Eléments positifs du poste. Le poste d'affectation a, au cours des deux dernières années, offert un service de qualité aux requérants et a aussi permis de regrouper les transporteurs en vrac sous un même toit pour assurer une meilleure répartition du travail entre les détenteurs. Cependant, le poste ayant fait maintenant ses preuves, il est temps de trouver les moyens qui garantiront la rentabilité de ce dernier et de ses abonnés.

Enumération des problèmes rencontrés par le poste avec quelques exemples à l'appui: a) transport en bas des taux, b) transport sans permis, c) pseudo-location, transport en régie, transport forestier et je cite, transport en bas des taux.

Nous pourrions naturellement vous donner 100 exemples du transport effectué en contournant les ordonnances de taux. Il y a, bien sûr, le requérant de services et le transporteur qui s'entendent secrètement sur les taux, mais, ce qui nous surprend le plus, c'est de voir des organismes publics embaucher des transporteurs à taux réduits sans intervention. Ainsi, par exemple, la ville de Plessisville a accepté des soumissions de transport en vrac dont le taux est inférieur de 10% au taux fixé par la commission. La ville de Plessisville a confié depuis le 14 août 1980 les travaux à deux entrepreneurs qui avaient soumissionné en bas des taux, soit H. Nadeau et Fils Ltée et A. Grégoire et Fils Ltée, au taux horaire de $25, alors que le taux minimal horaire fixé par la commission est de $27.25. Il est à noter que ces travaux sont subventionnés en grande partie par le ministère des Transports.

Transport sans permis. Tous les jours et au nom du compte propre, des camions immatriculés F font du transport au détriment des détenteurs de permis VR. Cette manière de procéder est tellement généralisée que, dans la ville de Sherbrooke même, alors qu'il y avait une soixantaine de transporteurs disponibles, Béton de L'Estrie Enr. faisait faire son transport par L. Gosselin et Fils Ltée, de Thetford Mines, avec des camions immatriculés F.

Pseudo-location. L'été 1980 ne nous a pas épargnés sur la nouvelle façon de contourner les taux et toutes les règles de protection accordées aux détenteurs de permis VR. Ainsi, le ministère des Transports avait accordé à la compagnie Béti-con Ltée un contrat de recyclage de béton bitumineux et de correction dans le comté municipal de Frontenac. Béticon Ltée a cédé son contrat avec l'autorisation du ministre des Transports à Les Entreprises Bourget Inc. de Joliette. Les Entreprises de Location Kildair Inc., compagnie parente, loua aux Entreprises Bourget Inc. sept camions munis de VZ. Les conducteurs de ces véhicules loués étaient payés par une tierce personne. Cette méthode a pour premier effet de diminuer les coûts de fonctionnement en se débarrassant de toutes les normes qui comportent le transport public et les exigences des conducteurs, et ensuite la protection accordée aux postes sur ces contrats de béton bitumineux est déjouée. Pendant ce temps, 400 détenteurs de permis inscrits attendaient pour partager le travail équitablement. Il y aurait peut-être lieu de parler de partage équitable entre entrepreneurs et transporteurs.

Transport en régie. Le poste se sent diminué lorsque les camionneurs s'aperçoivent que le transport en régie qu'ils avaient à 100% passe par d'autres canaux soit par l'augmentation du nombre de camions du ministère des Transports ou par l'octroi de travaux en régie par contrat. Ainsi, la firme Couillard construction Ltée possédant des camions immatriculés F, FZ et VR effectue ces contrats qui, dans le passé, étaient réservés au poste. F, FZ et VR participent aux travaux même si cette compagnie a un VR d'inscrit au poste d'affectation, et qui est admissible au partage équitable du travail avec les autres qui la regardent transporter.

Domaine forestier. Après deux ans d'activités et d'effort afin de regrouper les transporteurs forestiers et amener les requérants de services à s'enquérir de nos services, nous constatons que notre travail dans ce sens a été un échec total. Aucun secteur de travail réservé en forêt n'a été confié au poste d'affectation. Cependant, le plus dur coup que nous avons subi vient de la Régie des marchés agricoles. En effet, malgré le règlement concernant le camionnage en vrac qui consacre au poste d'affectation un permis de courtage exclusif, voilà que la Régie des marchés agricoles du Québec accrédite l'Association des transporteurs de bois de l'Estrie Inc. — décision numéro 2887 du 9 mai 1980, dossier 42-11-2 — pour représenter les personnes effectuant le transport du bois des producteurs visés par le plan conjoint des producteurs de bois de l'Estrie. Cette accréditation a permis à cette association de se prétendre courtier dans le transport du bois. De plus, malgré le grand nombre de camions disponibles immatriculés VR, cette association accréditée fait transporter des camions immatriculés F. Au mois de mai 1980, nous avons souligné cette lacune au ministère des Transports, mais nous attendons encore patiemment une réponse. Si le permis de courtage exclusif ne peut être accordé au poste, ce sera ni plus ni moins que de la déréglementation et, par le fait même, l'application de la loi de la jungle.

Solutions suggérées. Après n'avoir énuméré que quelques-uns des problèmes et plaintes des transporteurs et même des entrepreneurs, nous vous suggérons des solutions qui tiendraient compte des problèmes des transporteurs principalement et des droits de l'entrepreneur.

Nous tenons, premièrement, à vous féliciter car le permis de poste a servi à former une structure qui a le potentiel pour réellement distribuer le travail d'une manière équitable. Toutes les réquisitions de services de transport en vrac devraient être adressées au poste. De plus, tous les transporteurs en vrac devraient être obligés d'inscrire au poste tous leurs camions VR. La location, tant pour le transporteur que pour l'entrepreneur, devrait être autorisée seulement et strictement pour remplacer un camion brisé; "depuis le règlement 12, cette formule s'applique pour le transporteur en vrac". Les ordonnances de taux devraient ten-

dre à établir des minimums qui pourraient concurrencer le coût de fonctionnement par un entrepreneur en tenant compte des subventions qu'il peut recevoir et des dépréciations qu'il peut prendre. De cette façon, le poste pourrait être un concurrent sérieux sur le marché. La ligne entre le compte propre et le transport public serait ainsi établie. Encore là, pour que cette solution ait de la valeur, il faudrait que la Commission des transports du Québec annule immédiatement tous les permis inopérants. Pour éviter le commerce des permis, nous préconisons l'abolition des transferts de permis de transport en vrac sans plus de délai. Avec cette solution proposée, vous permettrez aux transporteurs en vrac et aux entrepreneurs de se partager équitablement le transport de matières en vrac. Si ces propositions de solutions étaient retenues, le transport illégal serait éliminé ainsi que la fausse location, ce qui permettrait véritablement d'atteindre le but premier du règlement concernant le camionnage en vrac et le partage équitable du travail entre les détenteurs de permis de vrac. Enfin, ces solutions pourraient éliminer des camions, mais non des détenteurs. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: II y a des choses extrêmement intéressantes dans les suggestions que vous faites et j'aimerais les creuser un peu. Vous dites que les ordonnances de taux devraient tendre à établir des minimums qui pourraient concurrencer le coût de fonctionnement par un entrepreneur. (22 h 15)

Autrement dit, vous dites: On accepte la concurrence, permettez-nous d'être concurrentiels. Si je comprends bien, c'est ce que vous voulez. Donc, la commission établirait des tarifs qui vous permettraient, effectivement, de faire concurrence aux entrepreneurs. Les entrepreneurs, alors, auraient avantage à travailler avec vous plutôt que de prendre tout le trouble de s'équiper, etc. Au fond, c'est un peu la formule de l'Ontario, si je comprends bien, où les taux ne sont pas fixés comme tels par la commission, mais résultent directement de négociations entre les donneurs d'ouvrage et ceux qui offrent l'ouvrage. C'est ce genre de système que vous voudriez voir instaurer?

M. Letarte: Evidemment, conditionnellement à certains faits, aux propositions qu'on fait, toutes les réquisitions de services passent par le poste d'affectation — je les ai énumérés tout à l'heure.

M. de Belleval: Deuxièmement, aussi je pense que le point important — peu importe le moyen, il y a peut-être plusieurs moyens d'arriver à la même fin — je retiens votre suggestion à savoir qu'il faut que le poste soit en mesure de concurrencer l'entrepreneur privé si l'on veut qu'il y ait un avenir. Autrement dit, assouplir la réglementation pour lui permettre de faire cette concurrence. Moi, cela m'apparaît extrêmement valable comme suggestion. De même, vous dites: II faut annuler les permis inopérants, en profiter, puis quand un entrepreneur ou un artisan, je suppose...

M. Letarte: La même chose.

M. de Belleval: ... la même chose... n'utilise pas son permis pendant un certain nombre de mois ou d'années, le permis lui est retiré, c'est cela?

M. Letarte: Oui, quelques mois, même quelques semaines parce que dans la région 05, on a un énorme commerce de permis qui se fait. Même on a des dossiers de policiers qui sont montés actuellement. On s'attend d'aller à la commission prochainement avec ces dossiers. Il y a même des entrepreneurs qui ont dit aux policiers qu'il fallait qu'ils se débarrassent de leurs permis coûte que coûte. On a demandé à quel prix et on n'a jamais pu savoir.

M. de Belleval: C'est un peu la même chose qu'on retrouve, au fond, dans le domaine du règlement de la construction où quand un employé, un ouvrier n'a pas travaillé suffisamment d'heures, il se trouve à perdre sa classification et donc il se trouve à perdre quasiment son permis de travail dans ce cas. Je ne sais pas ce que le député de Gatineau va dire de cela. Finalement aussi, vous dites: Pour éviter le commerce des permis, nous préconisons l'abolition des transferts des permis de transport en vrac sans plus de délai. Autrement dit, le permis serait accordé à un individu ou à un camion qui appartient à un individu en particulier. S'il utilise son permis, c'est parfait; s'il ne l'utilise pas, il risque de le perdre en vertu de votre suggestion précédente. De toute façon, quand il meurt ou qu'il cesse de travailler, il perd son permis et cela vient de s'éteindre, donc, il n'y a plus de valeur marchande accordée au permis comme tel.

M. Letarte: Nous pensons que c'est la seule façon de limiter les permis pour...

M. de Belleval: De limiter les permis éventuellement. Au fond, quand je posais la question tantôt, au tout début de l'après-midi, comment faire pour diminuer le nombre de permis, ce sont les suggestions que vous nous faites. Est-ce que vous pensez que les gens avec qui vous êtes en contact — je vois que vous avez aussi des contacts — sont favorables à cette proposition, Me Beaudet? Est-ce que vous êtes favorable à cela?

M. Beaudet: M. le ministre, je peux vous dire une chose, mes clients, le Poste d'affectation de la région 05, ont décidé en majorité de faire les revendications suivantes. Je ne suis que le conseiller juridique. Sur la question de transfert de permis, ils voyaient un moyen, premièrement, d'éviter le commerce des permis, et, deuxièmement, de multiplier les premiers camions. C'est ce que ce client prétend.

M. de Belleval: Donc, vous n'endossez pas nécessairement ces recommandations.

M. Beaudet: Naturellement, je n'endosse pas non plus les recommandations de l'ANCAl comme telles. J'ai un travail professionnel à faire de conseiller juridique. Je représente mon client et je ne fais pas moi-même les demandes, que ce soit pour l'ANCAl ou pour un autre. Les camionneurs décident de ce qu'ils veulent et nous on vous le présente dans un cadre juridique; nous les avocats nous sommes là pour cela. On vous apporte une nouvelle forme de solution globale qui se tient. Toutes les réquisitions...

M. de Belleval: Autrement dit, je devrais poser la question directement à l'ANCAl quand l'occasion s'en présentera.

M. Beaudet: Sûrement!

M. de Belleval: D'accord, merci de votre suggestion.

M. Le tarte: Peut-être pour...

Le Président (M. Jolivet): Excusez...

M. de Belleval: Non, je vous remercie.

M. Letarte: Pour répondre à votre question, le vice-président du poste d'affectation, qui est mon adjoint, Guy Maurais, a fait une tournée de consultation à travers la région, ainsi que le président, M. Perras, et il semblerait y avoir un consensus dans la région 05 à savoir que ce serait acceptable.

M. de Belleval: Dans la région 05 à cet égard.

M. Letarte: D'après à peu près tous les détenteurs de permis. Evidemment, ce ne serait pas acceptable pour celui qui est prêt à vendre dans quinze jours, mais...

M. de Belleval: Je pense que je n'ai pas besoin d'insister là-dessus, ni vous. On saisit aussi, sans faire beaucoup de discours, que cela soulèverait certainement des problèmes par ailleurs. Quoi qu'il en soit, je voulais être certain d'avoir bien compris.

M. Beaudet: Mon client voudrait faire remarquer aussi que dans cette région 100% des camionneurs, au poste d'affectation, sont membres de l'Association régionale des camionneurs artisans, mais ils ont la liberté dans chaque région de déterminer leur système.

M. de Belleval: Oui, d'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Vous venez de répondre à la première partie de ma question à savoir que 100% des camionneurs en vrac du poste d'affection 05 appartiennent à l'ANCAl.

M. de Belleval: A l'ANCAl régionale. M. Mailloux: A l'ANCAl régionale.

M. de Belleval: C'est bien important de faire la différence.

M. Beaudet: A l'ANCAl provinciale aussi. M. Letarte: Oui, aux deux. M. de Belleval: Aux deux? M. Letarte: Aux deux.

M. Mailloux: Je voulais simplement revenir sur la question que vous a posée le ministre des Transports quant à la fixation des taux par la commission. Vous avez bien dit, en réponse au ministre, que, effectivement, conditionnellement au groupe de recommandations que vous faites, qui se tiennent, les membres de votre poste d'affectation consentiraient à ce que plutôt que des taux soient fixés pour tout type de transport, que ce soit à partir de taux minimaux que vous seriez prêt à accepter, ce qui vous permettrait une meilleure concurrence avec les taux minimaux dont vous avez parlé.

M. Maurais: Ce serait peut-être des taux minimaux aussi, on pourrait tenir compte de certains secteurs à l'intérieur de la région parce que, selon la diversité des travaux à faire, on a des "stock pile" à faire, ce n'est pas tout à fait le même taux applicable que sur les contrats de construction. Cela pourrait aussi être sur une base minimale, comme vous le dites. A un moment donné, pour un camion, si on transporte du matériel d'une carrière à une usine de ciment ou d'asphalte, ce ne sont pas les mêmes coûts que pour une construction de route.

M. de Belleval: ... à tous points de vue.

M. Mailloux: Advenant que la commission fixe des taux minimaux, si tous les requérants de services sont forcément obligés de passer par le poste d'affectation, à ce moment-là, il n'y a pas trop de problèmes. Là, il y aurait une possibilité de n'avoir aucune concurrence en bas du prix minimum fixé par la commission; il faudrait, alors que l'ensemble des requérants soient du poste d'affectation et qu'il n'y ait pas de transport illégal. Si le transport illégal ne disparaît pas, même s'il y avait un taux minimum fixé, le vice que l'on constate actuellement ne serait-il pas perpétué?

M. Maurais: Si vous le permettez, M. le Président, en travaillant à l'intérieur de la structure qu'est le poste d'affectation on sent bien des problèmes, on en vit et il y a toutes sortes de choses qui se présentent. On pense, à un moment donné, qu'il y a un secteur déterminé qui est le vrac, avec une définition de toutes les matières. Il y a des

permis accordés à des camions pour faire ce transport-là. On pense qu'à partir de ça il est inadmissible que des détenteurs de permis ne soient pas tous à la même place pour coordonner et contrôler tout ça dans le même sens. On pense que c'est un non-sens que ce soit réglementé pour certains groupes et que, comme cela existe actuellement, pour ceux qui sont à l'extérieur de nos structures ce soit facile de contrôler tout ça.

De prime abord, on pensait que l'organisation en place qu'est le ministère des Transports — on n'adresse pas de reproche, on constate des faits — pourrait mettre la même application qu'on tente de mettre aux postes d'affectation, mais on voit par le cheminement qui est fait que cela est impossible. Je pense que, si tous les permis étaient à l'intérieur d'une structure, ce serait facile de contrôler notre secteur et ce serait déjà un gros problème de réglé.

M. Letarte: Actuellement, les gens les plus avantagés sont justement ceux qui ne sont pas aux postes d'affectation.

M. de Belleval: Parce qu'ils peuvent concurrencer.

M. Letarte: C'est ça.

M. de Belleval: Mais à partir du moment, justement, où la réglementation est beaucoup plus souple en termes de tarifs, ces gens-là perdraient les avantages qu'ils ont actuellement.

M. Letarte: Définitivement, en étant au poste d'affectation.

M. de Belleval: Même s'ils n'étaient pas dans le poste, vous iriez les concurrencer sur leur propre terrain.

M. Letarte: C'est-à-dire que non, pas nécessairement.

M. Perras: On aime autant ne pas prendre de chances parce que c'est assez délicat.

M. de Belleval: Pardon?

M. Perras: On aimerait autant ne pas prendre de chances parce que c'est assez délicat.

M. Maurais: Mais, M. le ministre, c'est inadmissible, en partant, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, qu'un secteur et tous des gens habillés pareil aient le droit de faire ce qu'ils veulent à l'intérieur de ça. C'est comme si on prenait la police provinciale; ils ont la même formation, l'habillement, ils sont tous équipés pour faire le même travail. S'ils ne sont pas sujets aux mêmes ordres, s'il y a la moitié de vos effectifs au ministère des Transports qui s'occupe de sécurité sur les routes, s'ils ne sont pas tous sujets au même ordre de conduite, qu'est-ce qui va arriver?

M. de Belleval: Je comprends, mais qu'est-ce qui arriverait, par exemple, avec les gens qui ont plus de quatre camions? Où iraient-ils? Ils ne sont pas dans le poste d'affectation, il ne pourrait plus y avoir d'entrepreneurs à l'extérieur, dans le camionnage en vrac.

M. Maurais: Mais, M. le ministre, justement, la misère qu'on a aujourd'hui, c'est qu'il y en a trop qui fouillent dans le même secteur. Je pense qu'il devra se faire une définition entre le compte propre et le compte public. Cela va se faire de cette façon; c'est peut-être un moyen radical, mais c'est la seule façon qu'on voit actuellement pour régler tout ça. M. Letarte.

M. Letarte: L'entrepreneur qui détient plus de quatre camions n'aurait qu'à s'immatriculer avec des F et à ne pas faire du transport public et, tout simplement, à faire ses travaux.

M. de Belleval: C'est ce que je comprends bien. A ce moment-là, ça veut dire qu'il n'y aurait plus comme transporteurs publics que les camionneurs artisans.

M. Letarte: Inscrits aux postes d'affectation. Tous les détenteurs de VR...

M. de Belleval: C'est ce que je veux dire.

M. Letarte: ... que ce soit dans les régions 05, 04, 03 ou 02, tous les détenteurs de VR inscrits aux postes d'affectation, toutes les réquisitions aux postes d'affectation.

M. de Belleval: Maintenant, vous vous rendez compte qu'à ce moment-là, il y a des droits acquis là-dedans, il y a des gens qui ont plus que quatre camions et qui fonctionnent en dehors du système des postes d'affectation. Je pense bien que vous avez pensé aussi à ce problème.

M. Letarte: Dans le domaine de la forêt, en particulier.

M. de Belleval: Dans le domaine du vrac ordinale, aussi. Qu'est-ce qu'on ferait de ces gens? Il y a des gens qui, actuellement, sont propriétaires de plus de quatre camions, ils en ont le droit, en vertu de la réglementation; ils fonctionnent, vous les obligez à entrer dans un système comme celui que vous proposez. Il va falloir que vous les dédommagiez.

M. Maurais: Ce sont peut-être des choses à négocier. Je pense qu'à prime abord, il faudrait tenter d'aller vers une clarté qui va s'établir entre le compte propre et le public. Je pense qu'à ce moment-là, ils deviendront des entrepreneurs sans permis, pour leur propre matériel, leur propre transport.

M. de Belleval: Oui, c'est ce que je comprends. Il n'y aurait plus que le compte propre et

tous les gens du vrac non pour le compte propre seraient dans le poste d'affectation. Je comprends très bien. Il reste, comme je vous dis, que ça pose le problème de ceux qui ne sont pas actuellement dans les postes d'affectation et qui ont le droit de fonctionner en vertu de la réglementation actuelle. (22 h 30)

M. Maurais: Je pense que, pour vous autres, pour les surveillants routiers, ça faciliterait de beaucoup le travail. Ce qu'on voit actuellement, c'est que ces gars n'ont pas la tâche facile. C'est comme quelqu'un qui se promène dans un secteur qui serait marécageux et qui en est toujours au même point. On va porter des plaintes contre certains camionneurs qui font du transport avec des F alors qu'on sait que ce n'est pas leur matériel, on peut les envoyer, une fois par semaine, voir le même type et il va toujours revenir. Autrement dit, ces gars sont toujours au même dossier, mais ça ne rapporte jamais rien à l'autre bout. Je pense que cette façon d'agir éclaircirait les choses.

M. Mailloux: Je ne comprends plus du tout.

M. Goulet: Très rapidement, M. le Président. Est-ce que je comprends bien que vous n'auriez pas objection à ce que la commission baisse ses taux, de façon que vous deveniez concurrentiels pour, à ce moment-là, négocier avec les entrepreneurs?

M. Perras: A la condition que toutes les réquisitions passent au poste d'affectation. C'est très important.

M. Goulet: Vous n'auriez pas objection à ce qu'ils baissent les taux?

M. Letarte: Selon le genre de transport qui se fait.

M. Goulet: Je m'excuse, je n'ai pas compris le dernier...

M. Letarte: Selon le genre de transport qui se fait, je pense que M. Perras peut vous donner certains exemples.

M. Perras: On a parlé tout à l'heure du "stock pile", ça ne se représente peut-être pas...

M. Goulet: Si vous voulez, on ne prendra pas de cas particuliers. Vous parlez du...

M. Perras: Du "stock pile", l'amoncellement de matériaux.

M. Goulet: Peut-être pour votre région. Mais allons-y avec le gravier, ce qui est à peu près commun à toutes les régions, le gravier, le concassé, le sable, ces choses-là.

M. de Belleval:... à partir d'une carrière, d'un amoncellement qui est à côté de la carrière, évidemment, les coûts ne sont pas les mêmes que pour le transport du même gravier sur de longues distances.

M. Letarte: Cela pourrait être un taux.

M. Goulet: D'accord. Pour, disons, la construction de routes ordinaires, vous n'auriez pas objection à ce que la commission révise ses taux quitte à les baisser et que l'entrepreneur, au lieu de louer des camions ou n'importe quoi, puisse négocier avec vous?

M. Perras: Non, on ne parle pas de construction de routes, on a parlé plutôt d'amoncellement.

M. Goulet: Seulement pour l'amoncellement. M. Perras: Oui.

M. Goulet: C'est comme un casse-pierres, par exemple, le type qui va avoir son camion sur le casse-pierres...

M. Perras: L'amoncellement de sable, par exemple, sur une longue distance, sur une distance de 25 kilomètres pour un chantier d'asphalte ou de béton.

M. Goulet: D'accord. Dans votre région — je regarde le mémoire — vous avez environ 500 membres...

M. Letarte: 563 membres.

M. Goulet: Au poste d'affectation et, là-dessus, il y a environ 800 permis dans la région...

M. Letarte: Sur 719 détenteurs de permis, on a 563 permis, c'est-à-dire pour 525 détenteurs.

M. Goulet: Sur les 563, il y en a combien qui sont membres de l'ANCAl?

M. Letarte: 562.

M. Goulet: Est-ce qu'il y a déjà une résolution — je vous pose la question parce que apparemment ça s'est déjà fait dans une région, je poserai la question quand cette région viendra, mais je la pose — chez vous à l'intérieur de vos réunions de façon qu'un membre du poste d'affectation doit obligatoirement payer une cotisation, sa cotisation à l'ANCAl? Est-ce que c'est déjà arrivé chez vous à votre poste qu'il y ait une telle résolution?

M. Letarte: Jamais.

M. Goulet: Ce n'est pas arrivé?

M. Letarte: Non, monsieur.

M. Goulet: Mais, ils sont tous membres quand même?

M. Letarte: Oui. M. Goulet: Sauf un.

M. Letarte: Dans la région 05, ce sont deux organismes qui fonctionnent indépendamment l'un de l'autre.

M. Goulet: D'accord. Une dernière question, M. le Président, vous parlez dans notre mémoire de transfert de permis et vous aimeriez que, dès qu'un permis devient inopérant, il soit immédiatement rappelé par la commission, si on peut employer ces mots. Moi, Bertrand Goulet, demain matin, j'ai un permis de transporteur, un VR et je décède. Mon permis, je le perds. Mais, si je m'appelle Bertrand Goulet Inc., je ne meurs pas; même si je meurs, ma compagnie ne meurt pas. Qu'est-ce qui arrive de mon permis?

M. Letarte: Non transférable. La compagnie, écoutez, il y aurait sûrement des façons, dans la négociation, pour trouver...

M. Goulet: Vous n'avez pas peur qu'il y ait une accumulation de permis par les compagnies?

M. Letarte: S'ils ne sont pas transférables, il n'y aura pas de groupe, il n'y a pas de transfert. On demande le gel des transferts de permis.

M. Goulet: Le gel des transferts. M. Letarte: Oui.

M. Maurais: S'ils n'étaient pas transférables, à ce moment-là, on n'aurait pas la possibilité d'en acheter.

M. Goulet: Cela veut dire qu'une compagnie... M. de Belleval: ... indique monsieur...

M. Letarte: Si la compagnie est vendue, automatiquement, la compagnie étant vendue, le VR tombe.

M. de Belleval: Non, mais une compagnie, vous savez, ça peut être immortel. Les administrateurs d'une compagnie, les actionnaires peuvent mourir, mais la compagnie ne meurt pas. La Compagnie de la Baie d'Hudson, ça fait 400 ans qu'elle existe et elle continue toujours. La Compagnie de Jésus aussi, dans un autre domaine. La question que vous pose M. Goulet, c'est qu'autrement dit il n'y aurait pas de permis possibles pour des compagnies. Seuls des individus conduisant leur propre camion auraient le droit d'avoir un permis; c'est ça que ça veut dire à toutes fins pratiques. Sinon, la question que vous pose M. Goulet, si ce n'est pas ça que vous voulez, il y a un problème parce que la compagnie, elle, ne meurt pas. Goulet peut mourir, mais Goulet Inc. ne peut pas mourir.

M. Goulet: C'est ça. Alors, ça veut dire que ce serait à l'avantage des compagnies, ce que vous suggérez, bien plus que des...

M. Letarte: II faudra préconiser un système pour le gel des transferts de permis sous toutes formes.

M. de Belleval: Mais, vous vous rendez compte?

Je comprends très bien votre position et celle de M. Goulet, mais il faut que vous alliez jusqu'à la logique de votre recommandation. Cela veut dire qu'effectivement les compagnies ne pourraient pas avoir de permis. Seuls, des individus conduisant leurs propres camions pourraient avoir un permis. Vous ne pourriez pas faire conduire votre camion par quelqu'un d'autre que celui qui détient le permis. Sinon, comme dit M. Goulet, votre système n'est pas applicable. Ce qui va arriver, c'est que les permis ne mourront pas, parce que l'individu, lui, va être anonyme.

M. Letarte: Mais c'était prévu dans la réglementation. La minute qu'il y a un changement d'actionnaire dans la compagnie...

M. de Belleval: II n'y a pas de changement d'actionnaire. Il peut y avoir une compagnie formée d'un seul individu. Autrement dit, prenez deux individus qui possèdent un permis: un qui s'appelle M. Goulet. Il a un permis et il décède à un moment donné. Là, le permis s'éteindrait avec lui. Mais si, au lieu de ça, c'est une compagnie qui possède le permis, alors tous les individus auraient intérêt à s'incorporer. Le permis serait automatiquement transféré indéfiniment à un autre utilisateur.

M. Goulet: M. le Président, ce qui arrive, c'est qu'au niveau des permis de boisson, sauf erreur, on me corrigera, le permis, même s'il est à une compagnie, il est toujours au nom d'un individu. Par exemple, l'Association de l'Auberge des gouverneurs, même si c'est une compagnie qui s'appelle... je ne me souviens pas. En tout cas, le permis est au nom d'un individu. Mais au niveau du transport en vrac, la Commission des transports peut émettre des permis à une compagnie. A ce moment, la compagnie n'est pas obligée de mourir. Elle ne meurt pas, justement. Moi, je dis que ça serait au détriment des petits qu'on veut protéger si on arrivait avec une solution semblable.

M. de Belleval: De toute façon, les permis sont délivrés pour un camion et non pas pour un individu, ce qui voudrait dire un changement aussi de ce côté-là.

M. Goulet: La compagnie peut toujours demeurer. Même si la compagnie changeait d'actionnaire, le camion peut toujours demeurer propriété de la compagnie. J'aurais peur qu'il y ait une accu-

mulation de permis. Justement, les gens qu'on veut défendre, les petits, si on peut employer ce mot, comparativement aux compagnies, un jour ou l'autre, c'est eux qui seraient pénalisés. Plus on irait dans le système, plus ces gens-là seraient pénalisés.

M. Letarte: Le mode d'application serait assez délicat à appliquer, mais il me semble qu'il devrait y avoir possibilité de trouver...

M. de Belleval: On pourrait peut-être poser la question à Me Beaudet. C'est un avocat. Il connaît ça et il pourrait vous conseiller là-dessus.

M. Beaudet: M. le ministre, j'ai trouvé que vous étiez revenu vite dans le domaine des compagnies. Vous avez compris rapidement tout ce qui pouvait se passer. Mais, tout de même, M. le ministre, on peut peut-être geler le transfert des actions. Naturellement, il faudrait, pour une fois, après cette commission parlementaire, que les gens aient le loisir de s'asseoir à une table et dialoguer véritablement avec le ministre des Transports. Il y aurait peut-être lieu de trouver une solution, même dans ce domaine.

M. Perras: En tout cas, vous comprenez le sens.

M. de Belleval: Ah oui, je l'ai compris rapidement.

M. Perras: C'est déjà important.

M. de Belleval: Moi, c'est la première fois que je vous rencontre, vous, et les gens du poste 05. C'est un poste qui fonctionne bien, d'ailleurs. C'est peut-être pour ça que je n'ai pas eu besoin de vous rencontrer. Mais je rencontre Me Beaudet assez souvent. On a beaucoup de dialogues. C'est la première fois que j'ai cette suggestion. Lui, ne m'a jamais fait cette suggestion dans les rencontres que j'ai eues avec lui.

M. Beaudet: Cela dépend qui je représente, M. le ministre. La solidarité de... De toute façon...

M. de Belleval: Je veux simplement dire que si vous venez me rencontrer, au nom du poste 05, il me fera grand plaisir de dialoguer, comme vous dites. On n'a jamais eu l'occasion... Mais on a dialogué beaucoup, par ailleurs.

M. Beaudet: Je ne vous dis pas que cela me fait toujours plaisir de vous rencontrer, mais si mes clients me le demandent, je vais sûrement aller vous rencontrer.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Je demanderais... Oui?

M. Beaudet: Qu'est-ce qu'on ne ferait pas!

M. Letarte: Je voudrais apporter peut-être une précision sur une annexe que j'ai attachée au mémoire qui mentionnait à la commission une accréditation qui a été donnée à l'Association des transporteurs de bois de l'Estrie. L'objet est le suivant. C'est une demande d'accréditation pour présenter les personnes effectuant le transport du bois, les producteurs visés par le plan conjoint, les producteurs de bois de l'Estrie.

Effectivement, comme on l'a mentionné, il y a eu une décision voulant que cette association ait exactement les mêmes privilèges que le poste d'affectation, soit le courtage. On comprend difficilement que cette accréditation ait été donnée par un ministère; elle va à rencontre des règlements sur le transport. On aimerait avoir le plutôt possible une clarification dans ce dossier.

M. de Belleval: C'est ce que nous sommes en train de chercher. Vous n'avez pas besoin de nous le dire.

Poste d'affectation de la région 06 Inc.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Poste d'affectation de la région 06 Inc., représenté par M. Hubert Meilleur, président des administrateurs. Mémoire 26. M. Meilleur.

M. Meilleur (Hubert): Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, MM. les députés. Je vous présente le directeur général de la région 06, M. Jean-Louis Bradette, à ma gauche, ainsi que le procureur qui a servi pour les changements de corporation, d'un permis de poste d'affectation en un permis de poste. On l'a invité pour la lecture du mémoire, s'il y a quelques petits problèmes, M. Yvon Chouinard, conseiller juridique.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez un deuxième document, le 26A. Est-ce à partir de ce document 26 que vous allez faire votre lecture?

M. Meilleur: C'est le 26. Le 26A, c'est une annexe.

Le Président (M. Jolivet): Cela va. Merci.

M. Meilleur: Suite à une invitation du ministre des Transports, M. Denis de Belleval, dans une lettre du 18 juillet 1980, nous demandant de participer à cette commission parlementaire, le Poste d'affectation de la région 06 Inc., se fait un devoir d'y répondre pour essayer d'éclaircir et si possible d'améliorer la situation qui prévaut.

Ce mémoire se veut un signe d'appréciation de la nouvelle loi régissant le transport en vrac. Les efforts du gouvernement actuel pour essayer de trouver une solution valable aux problèmes du transport en vrac furent nombreux et bien intentionnés.

Etant moi-même camionneur, président des administrateurs du Poste d'affectation de la région 06 Inc., président de l'Association des camionneurs artisans de la région 06 Inc., et administrateur de l'Association nationale des camionneurs artisans

Inc., je suis, je crois, assez bien placé pour vous donner une vue d'ensemble de la situation qui nous intéresse. Le but recherché par le gouvernement en 1977, lors de l'adoption du règlement 112 créant les postes d'affectation, était de régionaliser le secteur du camionnage en vrac, d'établir un poste d'affectation unique pour chacune des régions et d'éliminer la distinction entre camionneurs artisans et entrepreneurs, donnant ainsi à tout camionneur intéressé le droit de participer au secteur de travail garanti donné aux postes d'affectation régionaux. (22 h 45)

Du fait même, les chicanes d'associations rivales disparurent et la participation des camionneurs, en ce qui concerne la région 06, fut très appréciable. De 750 camionneurs qui bénéficiaient de la clause 75-25, nous avons vu le nombre augmenter jusqu'à 1100 en 1978. Ceci confirme la confiance des camionneurs dans une réglementation juste et équitable. Le Poste d'affectation de la région 06 Inc., après avoir fait les demandes nécessaires à la Commission des transports du Québec pour obtenir son permis de courtage, devint opérationnel le 1er juillet 1978. Les étapes que nous avons dû franchir pour faire appliquer la nouvelle réglementation furent très difficiles. La priorité au premier camion fut contestée par quelques-uns et les journées équitables furent contestées par d'autres. L'augmentation des cotisations pour structurer le poste et les sous-postes fit la manchette pour quelques mois. L'intervention de l'Association nationale des camionneurs artisans obligeant les administrateurs du poste d'affectation faisant partie de leur association à faire adopter une résolution obligeant le poste d'affectation à payer $150 par membre par année à leur association à même le budget du poste d'affectation, créa dans le groupe d'entrepreneurs un climat d'incertitude et de méfiance.

La situation s'étant rétablie vu le paiement des $150 par membre, le poste d'affectation eut un peu plus d'un an pour vraiment se structurer. Après l'engagement d'un personnel compétent, nous nous sommes attaqués aux secteurs de travail promis par le ministre des Transports du temps, M. Lucien Lessard. Ce n'est pas sans difficultés que nous avons concrétisé les ententes avec Hydro-Québec ou avec les autres ministères, mais, à force de persévérance et de bonne volonté, aujourd'hui nous pouvons dire que nous possédons, et d'une façon presque automatique, les secteurs de travail que ce soit au ministère des Transports pour les contrats de voirie, aux Terres et Forêts dans les chemins de pénétration, autant qu'au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche pour lequel nous faisons de gros travaux sur l'île Charron, au ministère de l'Agriculture pour qui nous transportons la pierre à chaux à la Raffinerie de sucre de Saint-Hilaire pour la troisième année, ainsi que tous les travaux occasionnés par l'agrandissement de ladite raffinerie; HydroQuébec, depuis deux ans, dans plusieurs comtés nous a donné plusieurs mois de travail. Il y a aussi le ministère des Richesses naturelles pour qui nous avons fait des digues sur la rivière des Prairies et à Saint-Michel-des-Saints. Je voudrais ajouter ici que dans le moment nous avons un nouveau contrat avec le ministère des Richesses naturelles pour les digues dans le comté de Deux-Montagnes, sur le bord du Lac des Deux-Montagnes. Il y a le ministère des Affaires sociales pour qui nous avons fait l'excavation de l'hpital Pierre-Boucher à Longueuil et l'hôpital Valleyfield, a maintenant inséré une clause de protection pour les postes d'affectation. Le ministère des Affaires municipales est celui qui a le plus de difficultés à respecter la promesse de M. Lucien Lessard.

Le Poste d'affectation de la région 06 Inc., a cerné le problème en faisant des représentations auprès des conseillers municipaux pour donner une clause de protection au "payeur de taxes", membre du poste d'affectation de sa municipalité; les succès dans ce sens furent quasi totaux.

Le transport de sel pour la voirie et le transport de neige pour les municipalités sont aussi des secteurs de travail que le poste négocie chaque année et, maintenant, après deux ans d'efforts, le transport du sel pour les autoroutes est presque assuré d'être fait par les camionneurs des postes d'affectation concernés. En passant, en ce qui a trait au sel pour les autoroutes, vendredi dernier, on a eu une rencontre avec M. Laporte, qui s'occupe des autoroutes, et le sel pour les autoroutes concernées, des Laurentides jusqu'à Sherbrooke, va être transporté par les régions 05, 06 et 10.

Maintenant, l'entreprise privée fait l'objet de nos plus grands efforts. Fer et Titane, de Sorel, nous fait confiance pour le déchargement de ses bateaux. Nous sommes en négociations avec la Dosco pour le même genre d'ouvrage et nous avons négocié avec la compagnie Demix le transport exclusif par les membres du poste d'affectation pour ses trois carrières.

La même entente fut conclue avec les produits Carignan, de Désourdy Construction. Les plus petits entrepreneurs sont sollicités presque tous les jours par nos répartiteurs, qui sont tous reliés aux postes d'affectation de la région par leur radio à ondes courtes, qui est la propriété du poste d'affectation de la région 06 Inc.

Nous couvrons 22 comtés municipaux qui représentent environ 5000 milles carrés — ce n'est pas 500, c'est 5000 milles. L'utilisation de ce système fait que nous pouvons donner un service à la clientèle dans un minimum de temps et en tout temps. C'est ainsi que nous contrôlons la quasi totalité des travaux qui s'effectuent dans notre région.

Les journées ainsi travaillées par nos camionneurs sont compilées sur une formule individuelle créée à cet effet. Cette formule nous donne les renseignements suivants: pour qui il a travaillé, le genre d'ouvrage qu'il a fait, le matériel qu'il a transporté, la durée de la journée et une approximation des sommes gagnées. Une compilation à la semaine et au mois est effectuée pour donner justice à tous nos membres et ainsi permettre aux postes d'affectation d'avoir des données nécessai-

res pour présenter des demandes d'augmentation de taux à la Commission des transports du Québec.

La réglementation du transport en vrac et le maintien des taux fixés par la Commission des transports sont, à notre avis, la survie du camionneur. Celui ou ceux qui pensent à abolir ces deux critères veulent la faillite de plus de 50% des camionneurs oeuvrant dans le domaine du vrac. Il est impensable, de la part de quiconque d'entre nous, de faire revivre la situation des années soixante-dix où les camionneurs étaient à la merci de tous les entrepreneurs peu scrupuleux qui faisaient la pluie et le beau temps dans le domaine et qui payaient ce que bon leur semblait et quand ils le voulaient.

Il est impensable de redonner aux courtiers brokers le champ libre aux abus désordonnés pratiqués par eux au détriment du camionneur qui a un paiement de camion à faire et une famille à faire vivre.

Il est impensable, à notre avis, de punir tant de camionneurs à travers la province de Québec, par la faute d'une association qui s'agrippe à ses cotisations et à ses pouvoirs perdus.

Presque tous les problèmes que nous avons vécus et que nous vivons encore dans plusieurs régions découlent directement de l'Association nationale des camionneurs artisans.

La Commission des transports du Québec et le ministre des Transports, par leurs proposés au vrac, ont pu constater les faits à maintes reprises. Pour ce qui est de nous, du Poste d'affectation de la région 06 Inc., nous avons eu droit, ce mois-ci, à la foudre de cette association et, plus particulièrement, de M. Pierre Beaudet, parce que le Poste d'affectation de la région 06 Inc., n'a pas voulu percevoir les cotisations et que, ainsi, plus de 50% des membres n'ont pas fait leur remise.

M. Pierre Beaudet, l'avocat et meneur de l'Association des camionneurs artisans, accompagné de M. Gérard Dubé, prétendu président, ont incité les camionneurs de la région 06 à ne plus payer leur cotisation au poste d'affectation et à ne plus signer aucun contrat d'adhésion.

Ils se sont permis à la même occasion une période de salissage contre des personnes de la Commission des transports du Québec à la suite de certaines décisions rendues par elle-même, la même chose au sujet de personnes en charge au ministère des Transports, mais surtout contre les dirigeants du Poste d'affectation de la région 06 qu'on veut écraser absolument pour démontrer sa suprématie et ainsi, par l'intimidation, retirer les petites cotisations tout en contrôlant le poste d'affectation.

M. Beaudet, embauché par M. Dubé, de l'Association nationale des camionneurs artisans, au coût de $150 par jour, outrepasse délibérément les droits que le code d'éthique des avocats lui permet car nous croyons qu'inciter quelqu'un à porter atteinte à une loi ou à un règlement du gouvernement est un manque d'éthique professionnelle, surtout lorsqu'on est un avocat et qu'on vit des manquements à ces lois et règlements. Tous ces faits font, messieurs, que, malgré une réglementation améliorée et très acceptable, les postes d'affectation continuent à essayer de s'implanter dans plusieurs régions du Québec. A cet égard, nous demandons une intervention énergique de votre autorité pour empêcher l'ingérence de l'Association nationale des camionneurs artisans dans le fonctionnement des postes d'affectation. La réglementation, telle que modifiée et ceci, à la demande de plusieurs postes d'affectation, surtout au chapitre du nombre d'administrateurs qui siégeront à son conseil d'administration et aussi en donnant une certaine autonomie à des zones qui seront conformes aux exigences de la loi, ceci aura pour effet d'avoir une plus grande participation des intéressés aux décisions qui les concernent comme abonnés du poste. C'était, à notre avis, les plus gros manques de l'ancienne réglementation.

Pour compléter les secteurs de travail, les secteurs d'ouvrage donnés aux postes d'affectation et pour éviter le problème du coupage de taux dans le transport en vrac et, surtout, pour régulariser la situation de l'oubli des clauses, nous annexons à notre exposé un mémoire présenté au ministre des Transports, M. de Belleval, au mois d'octobre 1979 et auquel nous n'avons pas eu de réponse. Vous y trouverez des solutions vraiment valables à plusieurs de nos problèmes. Nous sommes persuadés qu'en contrôlant les mouvements parallèles et en formant un comité spécial composé de gens compétents de la Commission des transports du Québec ou du ministère des Transports où les gens pourraient se faire entendre en cas de litiges graves et avoir une réponse irrévocable ce serait aussi une grosse amélioration du système; qu'il soit nécessaire à une corporation ou poste d'affectation d'avoir l'approbation du comité formé avant de remercier un directeur général d'une corporation au poste d'affectation, afin d'entendre les parties sur les raisons du renvoi. Ceci donnerait une certaine sécurité à des hommes clés qui, souvent, se font manipuler par un mouvement parallèle, ce qui diminue le rendement et l'efficacité des corporations.

Avant de terminer, j'aimerais vous demander, messieurs, au nom de nos 1000 camionneurs du Poste d'affectation de la région 06 Inc., de bien vouloir prendre en considération les efforts et les espoirs ainsi que l'argent investi dans la croyance d'une bonne réglementation.

Nous tous, administrateurs et camionneurs de la région 06, sommes convaincus de la rentabilité pour nous de la réglementation du camionnage en vrac. J'aimerais ajouter ici que le Poste d'affectation de la région 06 s'est structuré. Ce sont des camionneurs de la région 06 qui ont structuré leur propre poste d'affectation. Ils n'ont pas eu besoin de prothèse juridique.

Je vais faire la lecture du mémoire, les solutions qu'on préconise ou bien non...

Une Voix: L'annexe.

M. Meilleur: ... l'annexe. Le secteur du camionnage en vrac est régi par le règlement no 12

adopté en vertu de la Loi sur le transport. Le ministre des Transports, M. Lucien Lessard, adoptait, au cours de 1977, le règlement no 112 amendant le règlement no 12. Le but de cette nouvelle réglementation était de régionaliser le secteur du camionnage en vrac, d'établir un poste d'affectation unique pour chacune des régions et d'éliminer la distinction entre camionneur artisan et entrepreneur.

En considération du regroupement unique des camionneurs et en retour de la collaboration dans l'application du nouveau règlement par la principale association des camionneurs existante, soit l'ANCAl, l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants, le ministre, M. Lucien Lessard, et le président de l'ANCAl signaient une entente le 23 juin 1977. Essentiellement, ladite entente prévoyait que le ministre s'engageait à recommander aux ministères responsables des sociétés de la Couronne d'utiliser les services du poste d'affectation lorsqu'ils doivent utiliser d'autres véhicules que les leurs. Il s'engageait également à ce que 75% du transport de matières en vrac au-dessus de la ligne d'infrastructure sur les contrats donnés par le ministre des Transports soient effectués via le poste d'affectation. Enfin, verbalement, le ministre s'engageait à demander aux divers ministères d'insérer ladite clause 75-25 dans les contrats sous leur responsabilité.

Le ministre a respecté ses engagements. La réponse des différents ministères à la demande du ministre a été positive.

Situation actuelle. Le mode d'application de la clause 75-25 choisi par l'entente, c'est-à-dire par l'insertion de ladite clause dans les plans et devis des divers ministères, s'est avéré, avec l'expérience des deux années, insuffisant pour atteindre le but recherché, soit une protection pour les membres du poste d'affectation.

Absence de l'insertion de la clause 75-25. Pour différentes raisons, et malgré la bonne foi des divers ministères, il arrive régulièrement que la clause ne soit pas insérée dans les plans et que l'entrepreneur soit en conséquence libre d'utiliser ou non les services du poste d'affectation.

Lorsqu'on dit que souvent, c'est malgré leur bonne foi, c'est lorsque le directeur d'un sous-poste ou le répartiteur s'aperçoit que la clause n'y est pas. On communique avec le ministère en question et on vient à bout d'avoir un addenda; on peut dire qu'à 95% la clause est incluse plus tard.

Citons deux cas concrets: L'Hôpital Pierre Boucher de Longueil, comté de Taillon, région 06. Lors de l'appel aux soumissions, les responsables du projet croyaient à tort qu'un règlement sanctionnait la clause 75-25 et, en conséquence, omettaient d'inclure ladite clause malgré la demande du poste, ladite erreur ayant été de toute bonne foi. Ici on a fait le contrat.

Centre d'accueil Henriette-Céré, Saint-Hubert, comté de Taillon. Le centre Henriette-Céré est une reproduction du centre d'accueil de La Malbaie construit en 1977, alors que la clause 75-25 ne faisant pas partie des plans et devis du centre de La Malbaie sans apporter les amendements subsé- quents. En conséquence, ladite clause n'est pas incluse.

Notons que l'expérience de cette année nous montre que toutes les parties intéressées se sont adaptées à l'existence de la clause 75-25 et qu'aucune plainte, du moins, à notre connaissance, n'a été portée quant à un mauvais service de la part du poste d'affectation.

Effets de l'absence de la clause dans certains contrats. La réglementation du camionnage en vrac comprend également la fixation par le ministère des Transports de taux, soit à la tonne, soit à l'heure. En conséquence, de l'inexistence de la clause, le marché libre du camionnage entraîne souvent la réduction illégale des prix par des sous-entrepreneurs afin d'obtenir les contrats de transport en vrac. (23 heures)

Dans ces circonstances, la seule possibilité qui s'offre au poste serait également de réduire les prix. En conséquence, l'illégalité s'installe en pratique un peu partout dans les contrats non pourvus de ladite clause.

Niveaux de remplissage réglementés inégalement. Lorsque nous parlons de travaux d'excavation, il faut distinguer trois niveaux principaux: a) le revêtement bitumineux; b) la fondation supérieure (fondation au-dessus de la ligne d'infrastructure n'incluant pas le revêtement bitumineux); c) la fondation inférieure et la sous-fondation (fondation en bas de la ligne d'infrastructure).

La clause 75-25 jusqu'ici insérée dans les plans et devis ne s'applique qu'à la fondation supérieure. Quant au revêtement en béton bitumineux, le ministère des Transports a ajouté dans ses contrats depuis le début de la présente année une clause par laquelle "l'entrepreneur qui ne possède pas ses propres camions doit utiliser les services du poste d'affectation." Quant à la fondation inférieure, elle ne fait l'objet d'aucune clause, ni réglementation dans aucun ministère. Il y aurait peut-être lieu, afin de clarifier et de généraliser la pratique, de prévoir une réglementation touchant aux trois niveaux: pour les fondations supérieures, la clause 75-25 et, pour les fondations inférieures, ainsi que le revêtement bitumineux, la clause d'utilisation du poste dans les cas où l'entrepreneur n'a pas ses propres camions.

Dans ce dernier cas, aucun préjudice n'est créé envers l'entrepreneur puisque c'est seulement dans le cas où il n'a pas de camions qu'il devrait utiliser les services du poste. On éviterait par cette réglementation générale le problème de la réduction illégale des prix.

Il ne faut pas oublier également que tout camionneur peut être admis dans un poste d'affectation et qu'à prix égaux le poste d'affection donne un service égal en termes de compétence.

Solution proposée: vu les motifs exposés ci-avant et vu l'évolution du dossier, il y aurait lieu de consacrer par réglementation le principe de la clause 75-25 pour le transport de matériaux de fondation supérieure. Ladite clause adoptée par un règlement pourrait se lire comme suit: Lors de

l'exécution de tout contrat relevant de l'autorité de l'un quelconque des ministères gouvernementaux, l'entrepreneur et ses sous-traitants doivent utiliser en tout temps, dans une proportion d'au moins 75% en nombre, pour le transport de matériaux d'emprunt granulaire et de fondation placés au-dessus de la ligne d'infrastructure, à l'exclusion des mélanges bitumineux, les camions appartenant à des détenteurs de permis de camionnage en vrac rattachés au poste unique d'affectation établi conformément aux prescriptions du règlement sur le camionnage en vrac et qui lui seront désignés par ledit poste d'affectation.

La clause 75-25 constitue une obligation pour l'entrepreneur et ses sous-traitants à la condition que le poste d'affectation puisse fournir les garanties nécessaires pour rencontrer le calendrier proposé par l'entrepreneur et accepté par le ministère de qui relève le contrat. Si le poste d'affectation ne peut fournir 75% des camions requis, il peut s'engager à fournir une proportion moindre à condition d'inscrire dans l'entente le pourcentage convenu, lequel devient immuable pour toute la durée de l'entente.

Dans un avenir rapproché et compte tenu de la satisfaction au sujet du service fourni par les postes d'affectation, il y aurait lieu également d'étudier la possibilité de généraliser la protection accordée aux postes sur tous les niveaux en ajoutant alors le paragraphe suivant: Dans le cas des mélanges bitumineux et du transport de fondations placées au-dessous de la ligne d'infrastructure, l'entrepreneur qui n'utilise pas ses propres camions doit recourir aux postes d'affectation pour l'engagement des camions requis pour le transport. L'adoption par le gouvernement du règlement général s'appliquant à tous les contrats sous la responsabilité d'un quelconque ministère plutôt que par l'insertion de clauses individuelles dans les contrats permettrait de régler tous les problèmes soulevés par la formule actuelle appliquée, sans oublier que l'adoption d'un règlement s'inscrit dans l'évolution de tout le dossier du camionnage.

Merci de votre attention.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Merci, M. le Président. Juste un point avant de commencer pour vrai l'examen de votre rapport. Il y a l'histoire du fameux mémoire dont vous venez de parler qui m'aurait été envoyé et auquel je n'aurais pas répondu. Effectivement, j'ai répondu, mais il y a eu, comme vous le savez peut-être maintenant, une espèce d'imbroglio parce que c'est un de vos procureurs, je pense, qui m'avait écrit et j'ai effectivement répondu. J'ai d'ailleurs la lettre ici, datée du 29 novembre 1979, adressée à Me Martine Savard.

M. Meilleur: Ce n'est pas le procureur...

M. de Belleval: En tout cas, elle nous avait écrit.

M. Meilleur: D'accord.

M. de Belleval: Disons qu'il y a eu... Tout cela est venu...

M. Meilleur: C'est parce qu'elle ne s'est pas rendue.

M. de Belleval: II y a des connexions qui ne se sont pas faites, je m'en rends compte.

M. Meilleur: On comprend.

M. de Belleval: Ce n'est pas votre faute et ce n'est pas notre faute non plus, c'est une erreur d'aiguillage. Quoi qu'il en soit, j'avais effectivement répondu. En tout cas, je vois tout simplement mettre cela de côté.

Il est évident que vous apportez un son de cloche drôlement rafraîchissant par les recommandations que vous faites. Je pense qu'il y a des pistes là-dedans qui peuvent peut-être nous permettre de trouver des solutions pour améliorer ce qui existe déjà. Je vous réitère d'ailleurs, comme je l'ai dit ce midi, que mon préjugé est plutôt d'améliorer ce qui existe déjà que, comme vous dites, de retourner en arrière; ce n'est pas possible qu'on fasse cela.

Quand on lit cela, dans le mémoire précédent du poste 05, je pense, on voit qu'il y a des recoupements. J'aurais quelques questions à vous poser, cependant. Entre autres, vous dites qu'au niveau des travaux routiers on pourrait améliorer la situation existante par rapport à l'infrastructure, à la superstructure, par les suggestions que vous nous faites. Si je comprends bien, la façon dont vous l'exprimez correspond en fait à ce qui existe déjà en ce qui concerne la superstructure. Quelle est la différence par rapport à ce qui existe déjà?

M. Meilleur: Dans le moment, c'est une entente, la clause 75-25. C'est de cette façon-là que souvent elle est oubliée.

M. de Belleval: Autrement dit, ce n'est pas un règlement comme tel.

M. Meilleur: Ce n'est pas un règlement comme tel et il arrive souvent qu'elle soit oubliée parce qu'elle n'est pas incluse automatiquement dans les plans et devis, il faut l'ajouter à tout coup. Peut-être que, du côté du ministère des Transports, elle est incluse, mais, du côté des autres ministères, chaque fois qu'on sort un contrat, il faut vérifier pour voir si elle est bien dedans.

M. de Belleval: Ou des municipalités.

M. Meilleur: On n'a pas de difficulté à la faire inclure, mais disons qu'elle est oubliée dans à peu près tous les deux ou trois contrats.

M. de Belleval: D'accord, je comprends.

M. Meilleur: En ce qui concerne l'asphalte, on a la clause disons à 100% près les camions de

l'entrepreneur; nous croyons nécessaire, vu l'augmentation des camions à l'intérieur du poste d'affectation, que cette clause soit étendue sous la ligne d'infrastructure, mais après les camions de l'entrepreneur. On tient quand même à respecter le fait qu'il est tout à fait normal que l'entrepreneur qui a des camions les utilise. Mais, avant de donner le sous-contrat, il devrait respecter le poste d'affectation.

M. de Belleval: Autrement dit, il aurait le droit de prendre ses camions en bas de la ligne d'infrastructure, mais, une fois qu'il aura fini d'utiliser ses camions, il passe 100% par le poste d'affectation.

M. Meilleur: C'est cela, il ne serait pas obligé de donner des sous-postes.

M. de Belleval: D'accord. Il y a cependant un point qui me paraît important pour compléter vos suggestions, c'est la question de la fixation des taux. Vous n'êtes pas sans savoir qu'actuellement, sous beaucoup d'aspects, les taux ne sont pas concurrentiels, on l'a vu tantôt sous d'autres aspects et c'est une des raisons pour lesquelles les postes d'affectation ont souvent des difficultés à concurrencer. Au fond, comme vous dites, ils ne peuvent pas couper les taux, parce qu'ils iraient à rencontre... tandis que d'autres le font peut-être en cachette.

M. Meilleur: Disons à ce sujet, M. de Belleval, que nous avons négocié un contrat pour l'autoroute 30, je crois, à Longueuil. Nous avons obtenu 100% du transport en bas de la ligne d'infrastructure, mais nous avons dû demander à la Commission des transports une baisse de taux.

M. de Belleval: Un taux spécial, c'est cela.

M. Meilleur: Parce que c'était un contrat spécifique.

M. de Belleval: C'est cela.

M. Meilleur: Les camions n'ont pas de limite de charge...

M. de Belleval: C'est cela.

M. Meilleur: ... ils passent à travers le champ. On n'est jamais allé, par exemple, en bas de la rentabilité d'un camion.

M. de Belleval: Autrement dit, vous seriez un peu d'accord avec vos prédécesseurs pour qu'on puisse fixer des taux minimaux, comme vous dites, en dessous desquels cela n'a pas de sens, parce qu'on ne peut pas faire face aux coûts minimaux. Pour le reste, on peut justement négocier des taux comme ceux auxquels vous faites allusion.

M. Meilleur: Oui, disons qu'on pourrait s'en tenir aux taux que nous avons à l'heure actuelle. Mais, sur des contrats spécifiques, avec l'approbation de la Commission des transports, nous pouvons demander des baisses de taux.

M. de Belleval: C'est ça.

M. Meilleur: Mais la formule qui pourrait être appliquée, c'est que ça se fasse plus rapidement.

M. de Belleval: Oui, effectivement.

M. Meilleur: Lorsqu'on fait une soumission sur un contrat, assez souvent, il faut recommencer la semaine suivante.

M. de Belleval: A ce moment-là, ils n'auraient peut-être même pas besoin de l'approbation de la commission. Vous feriez simplement déposer le contrat et ça finirait là.

M. Meilleur: C'est ça. Disons qu'il y a des gens assez compétents à l'intérieur des postes d'affectation. Ce sont des administrateurs qui sont déjà camionneurs. Ils connaissent la rentabilité d'un camion. Alors, on peut dire qu'à certaines places où il n'y a pas de limite de charge, c'est normal, les taux sont peut-être élevés. Mais, lorsqu'il y a une limite de charge, ça nous prend — on peut dire — les taux actuels.

M. de Belleval: Pour reprendre le problème qu'on a examiné avant votre venue avec l'autre poste d'affectation, vous ne réclamez pas l'exclusivité absolue, c'est-à-dire l'obligation pour tous les camionneurs, si on veut — entrepreneurs ou autres — de passer par les postes d'affectation. Il continuerait à y avoir des gens dans votre système qui, par ailleurs, pourraient se trouver de l'ouvrage en dehors des postes d'affectation.

M. Meilleur: Celui qui ne veut pas s'abonner au poste d'affectation, c'est son affaire à lui. Mais il reste quand même que, normalement, c'est presque tous des entrepreneurs.

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: Lorsque cette personne fait des contrats, après l'utilisation de ses camions, elle passerait par le poste d'affectation.

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: II y a sûrement des ententes qui arrivent parfois dans une zone quelconque, lorsque les 80 camions, on peut dire, sont sortis. Si on a un "call" de camion rendu à 1 heure, on va chercher ces entrepreneurs-là, même s'ils ne sont pas membres du poste. Pour cinq ou six heures, pour donner le service, on les prend.

M. de Belleval: Mais comment se fait-i! que, dans votre région, vous faites bon ménage avec ces entrepreneurs-là?

M. Meilleur: On n'a pas de problème, nous, du côté des entrepreneurs. Du côté des autres associations, lorsque le poste d'affectation s'est structuré, on a eu deux ou trois assemblées orageuses avec d'autres associations. Mais ça s'est replacé et on s'est rallié de bonne foi comme quoi les postes d'affectation, c'était une affaire et les associations, c'en était une autre et ça ne nous regardait pas. Lorsqu'on parle de postes, on parle de postes.

M. de Belleval: Vous faites bon ménage dans la région 06 avec les entrepreneurs qui possèdent beaucoup de camions et qui, par ailleurs, soumissionnent pour des contrats pour différentes compagnies?

M. Meilleur: Oui, j'ai même soumissionné sur un contrat d'Hydro-Québec où l'entrepreneur a laissé complètement ses camions dans la cour, parce que nous lui avons fait un meilleur prix. On a été en bas des taux de la commission. Il ne faut pas se le cacher. Mais le contrat ne comportait aucune limite de charge et on passait sur les chemins publics, si vous voulez. Mais le fait de ne pas être obligé de reculer et de "domper" une tonne ou deux... Le camionneur part et s'en va pour $0.10 la tonne sur un prix, mettons, de $1. Cela valait $1.10, on l'a fait à $1. C'est déjà gros, ça. On s'arrange avec l'entrepreneur et là, s'il y a une bonne entente avec l'entrepreneur, ça fonctionne normalement sur les chantiers. Mais lorsqu'on arrive en "poussaillant", ça ne marche pas longtemps. C'est tout à fait normal.

M. de Belleval: D'après ce que je peux voir, vous avez eu un certain nombre de difficultés, malgré tout, non pas à l'intérieur de la région no 06, mais, comme vous dites, avec des gens de l'extérieur.

M. Meilleur: Disons qu'avec les représentants de l'association — il ne faut se le cacher — dans la région, il y a eu certains comtés où c'étaient des dirigeants, si vous voulez, des présidents d'associations qui ont tenu mordicus à l'ancienne réglementation où c'était eux qui "dispatchaient". Mais, avec la venue du poste d'affectation, c'est le poste d'affectation qui est responsable de son permis de courtage. Où un président d'association quelconque pouvait faire un mauvais "dispatch" ou bien ne pas remplir les commandes désirées, le poste d'affectation a été obligé, dans ce secteur, dans ce comté, d'appliquer la loi intégrale, telle quelle. A ce moment, ça a fait comme des genres de comtés en tutelle. Il reste que, pour sauver le permis du poste d'affectation, on était obligé de donner le service aux transporteurs en vrac.

M. de Belleval: Oui, je comprends.

M. Meilleur: On ne s'est pas laissé influencer par rapport à un gars qui dit: Si tu rentres dans mon comté, je ne te paies plus. On a dit: On va ouvrir un bureau. On a des secteurs de travail. On a un service à donner aux corporations et on va le donner. Ceux qui veulent embarquer dans la parade des postes d'affectation embarqueront; s'ils ne veulent pas embarquer, ils n'embarqueront pas. On l'a fait à peu près dans trois comtés et, dans les trois comtés, il y a juste un comté où la Commission des transports est allée faire une assemblée et le type en question, disons qu'il croit à sa religion et il a invité ses 25 membres à ne pas entrer au poste d'affectation. Mais ils sont tous dans la cour depuis le printemps.

M. de Belleval: Quel comté? Rouville?

M. Meilleur: Rouville. On vient justement de faire une assemblée avec la Commission des transports et ils ne veulent rien savoir de la nouvelle réglementation. Alors, on ne punirait pas 1100 membres du poste d'affectation par rapport à 25. Ils vont jeûner une secousse. Quand ils auront fini de jeûner, ils vont rentrer dans la nouvelle réglementation et ils vont finir par la suivre comme tout le monde. C'est un peu normal.

(23 h 15)

M. de Belleval: Mais pourquoi ne veulent-ils pas entrer...

M. Meilleur: Je dis que ça dépend seulement du président. On lui a chanté peut-être une bonne romance et il réussit à entrer ça dans la tête de ses camionneurs. Je ne vois pas autre chose parce que les camionneurs n'ont vraiment pas raison. Le courtage se fait équitablement et on a des formules. Un répartiteur qui ne fait pas bien son travail, on le congédie et ce n'est pas long.

M. de Belleval: Le transport illégal, ce n'est pas un problème chez vous?

M. Meilleur: C'est tel quel. On ne peut pas dire qu'on a du transport illégal à flots. Les 22 répartiteurs qui sont munis de postes de radio à ondes courtes rattachés directement aux postes d'affectation, en plus de quatre directeurs qu'on peut dire adjoints — certains les appellent les créatures, mais, en tout cas, ce sont quatre directeurs adjoints — se promènent à journée longue dans toute la région et le plus petit entrepreneur est sollicité tous les jours. De ce fait, on devient ami avec les petits entrepreneurs et on n'a pas ces problèmes.

M. de Belleval: Oui, je comprends.

M. Meilleur: On ne dit pas que ça n'arrive pas. Quand arrive le transport de réserves de sable pour certaines municipalités, parfois, on a des difficultés parce qu'ils arrivent vraiment jusqu'à $3 ou $4, si vous voulez. Mettons un transport à $5 la tonne, ils vont le vendre à $4, le sable tout fourni. Cela arrive, mais le gars donne son matériel. On ne peut pas l'empêcher de le donner, mais il reste qu'on a des problèmes de ce côté-là.

M. de Belleval: Pensez-vous que les solutions que vous proposez et la façon dont vous fonctionnez dans la région 06 sont applicables à toutes les régions du Québec?

M. Meilleur: D'après moi, la façon appliquée dans la région 06 serait applicable dans toute la province de Québec, mais il faudrait faire sauter l'histoire de la partisanerie, marcher vraiment en corporation, structurer vraiment les postes d'affectation comme ils doivent être structurés et marcher exactement avec la réglementation.

M. de Belleval: Si j'ai bien compris, votre association et, en particulier, vous-même ou certains de vos adjoints étaient parmi les principaux organisateurs de la manifestation touristique de 1977. Est-ce vrai?

M. Meilleur: Oui, c'est officiel.

M. de Belleval: Malgré ça, cependant, vous êtes maintenant satisfaits de l'entente intervenue, de la façon dont c'est appliqué, de la nouvelle réglementation que j'ai adoptée l'automne dernier et qui est maintenant en vigueur.

M. Meilleur: Selon nous, les camionneurs n'ont jamais eu une réglementation aussi valable pour eux. C'est vraiment une réglementation dont on peut dire qu'elle est vraiment applicable, pas très difficile d'application. Mais nous avons des problèmes. Encore vendredi dernier, on a eu un problème dans un comté, mais c'est tout à fait normal. Le président en question, le meneur, si vous voulez, est un individu de l'Association des camionneurs artisans. Il a ouvert un bureau au nom de l'Association des camionneurs artisans et il voulait faire du "dispatching" à même le bureau de l'Association des camionneurs artisans. On est obligé de prendre une espèce de tutelle, mais au fond, ce n'est pas une tutelle. C'est l'application...

M. de Belleval: De la réglementation.

M. Meilleur:... intégrale de la réglementation. S'il n'y a pas de sous-poste, c'est le poste qui fait le "dispatch". Les abonnés de ce secteur deviendront automatiquement des abonnés du poste.

M. de Belleval: Autrement dit, vous qui étiez les meneurs de 1977, en bonne partie, qui étiez tous membres de l'ANCAl, vous êtes satisfaits de la réglementation. Cela fonctionne dans votre région. Par contre, le nombre de vos membres maintenant, qui sont encore membres de l'ANCAl — si j'ai bien compris — diminue constamment puisque, maintenant, le système fonctionnant correctement, ils ont peut-être moins besoin de l'ANCAl. C'est ça?

M. Meilleur: C'est ça. Pour moi, l'ANCAl, il faudrait que ce soit complètement restructuré. Ce devrait être une fédération provinciale. Cette fédération pourrait regrouper les présidents de postes d'affectation et les directeurs généraux. Il ne faut pas se le cacher. Les directeurs généraux, on peut dire que ce sont les hommes clés de tous les sous-postes. Ce sont des hommes qui sont instruits et qui sont capables de faire des négociations dans plusieurs secteurs. Je crois qu'il faudrait complètement modifier le mouvement provincial sous toutes ses formes. Cela a déjà été proposé, mais ça n'a pas l'air de "cliquer".

M. de Belleval: Si je vous interprète bien, autrement dit, si on laissait les postes d'affectation s'organiser dans les régions, comme celles qu'on a vues tantôt, 01, 02, etc., comme ils sont organisés chez vous comme postes d'affectation, indépendamment de l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants Inc. — et d'autant plus que vous êtes bien placés pour le savoir puisque vous étiez les leaders de cette association au fond, le problème se réglerait.

M. Meilleur: Comme je le dis dans le mémoire, si ce n'était pas de l'association qui vient faire des assemblées depuis deux mois quasiment consécutifs, une après l'autre, pour essayer de détruire...

M. de Belleval: Ce que vous avez fait.

M. Meilleur: ... les administrateurs du poste, on n'aurait pas de problème, on n'aurait entendu parler de rien, absolument de rien. C'est parce qu'ils sont partis de 800 membres l'an passé et ils sont tombés à 500 peut-être, je ne le sais pas. Mais je n'ai jamais dit, comme eux autres disent, qu'il était mieux de faire brûler des lampions que de payer leur association; cela n'est pas vrai. Moi, j'ai toujours dit aux membres: Vous savez ce que l'association a fait pour vous autres; si vous voulez payer, payez-la, c'est votre affaire; ce n'est pas moi qui vais vous empêcher de faire un chèque le soir sur votre table avec votre femme ou dans votre salon. Ce ne sont pas mes problèmes. Ce qui nous concerne, c'est qu'on a un permis de poste, on a des obligations à remplir et on va les remplir du mieux qu'on peut.

Mon mandat achève peut-être parce qu'on a fait assez de campagnes électorales pour essayer de me débarquer de là, mais cela ne me fait rien. Je pourrais dire, si jamais je suis débarqué, que la loi est là, elle a été respectée et c'est une très bonne loi. Pour moi, la réglementation actuelle, on peut dire que c'est la crème des réglementations qu'on n'a jamais eue.

M. de Belleval: Et vous avez l'impression que cette attitude est partagée par vos membres.

M. Meilleur: Moi, je croirais que c'est partagé par la majorité des membres...

M. de Belleval: Est-ce qu'il y...

M. Meilleur: ... parce que j'ai une preuve, M. de Belleval. Encore, vendredi dernier, le 22, celui qui est soi-disant mon remplaçant — parce que

c'est moi qui suis le président de l'Association des camionneurs artisans de la région 06, mais on en a nommé un autre à ma place pour représenter l'ANCAl — M. Clover Lauzon, a appelé la compagnie Desourdy et il lui a dit: Vendredi, le 22, pas de camions parce que mes camions manifestent. La compagnie Desourdy nous a appelés — c'est justement le contrat sur lequel on a coupé les prix, soi-disant — mais nous avons déposé un bon de garantie de plus de $100 000 à ce sujet, à savoir qu'on était capable et responsable...

M. de Belleval: Responsable.

M. Meilleur:... du contrat. La compagnie nous a dit: Si mes camions arrêtent une journée, automatiquement tu vas perdre ton bon de garantie. Moi, je n'ai pas un cent à faire perdre aux camionneurs membres du poste d'affectation. J'ai fait un tour rapidement sur les zones; cela ne prend pas de temps, cela prend dix minutes. Il n'y a pas un répartiteur qui a dit que ses membres étaient d'accord pour faire un grève, pas un. Surtout dans l'année qu'on vit, avec l'hiver qu'on vient de passer, il n'y a pas un camionneur qui est capable de perdre trois ou quatre jours d'ouvrage pour aller se promener. Nous autres, dans la région 06 — je ne dis pas que dans d'autres régions ils n'ont pas eu raison de le faire — le travail qui passe, on le prend. C'est assez rare qu'on en manque. Je ne dis pas qu'on n'en manque pas, mais on peut dire que 90% du transport en vrac, on le fait en ce qui concerne les ministères.

M. de Belleval: Maintenant, si j'ai bien compris, les membres de votre poste d'affectation qui sont aussi membres de l'ANCAl ont diminué considérablement.

M. Meilleur: Ils ont diminué du côté de l'ANCAl. D'après moi, ils sont rendus peut-être à 400 ou 500; exactement, je ne le sais pas. Je ne m'en occupe plus, pour être bien franc. Cela ne me donne rien de m'en occuper. Quant à parler et parler à un mur, j'aime autant ne pas parler du tout.

M. de Belleval: Merci beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, comme le ministre disait, c'est en effet pour le moins différent ce son de cloche que nous donne le Poste d'affectation de la région 06. Le ministre l'a qualifié de rafraîchissant à ce point de vue. Je n'ai pas de parti pris. Je dirai qu'il jette un éclairage tout à fait différent de celui qu'on a eu, jusqu'à maintenant, aujourd'hui, et j'en remercie M. Meilleur et son poste d'affectation.

En effet, on constate que la réglementation adoptée en 1977 peut fonctionner et je suis le premier à m'en réjouir. Effectivement, si on recherche des solutions aux problèmes dans le secteur du camionnage en vrac, il faut bien, compte tenu de la complexité de la situation, tenter de trouver les meilleurs solutions possible où qu'elles soient.

Je demanderais, cependant, à M. Meilleur de préciser, pour ma bonne compréhension de la situation qui est peut-être différente dans sa région de ce qu'elle est dans d'autres régions. D'abord, vous parlez — je pense que c'est en 1978 — de 1100 membres ou abonnés à votre poste d'affectation. Combien y en aurait-il maintenant?

M. Meilleur: A l'heure actuelle, on peut dire qu'il y en a environ 1000 parce qu'il y a des deuxièmes camions qui s'étaient enregistrés et qui ont lâché par rapport à la priorité aux premiers camions. Il reste quand même que ces deuxièmes camions, lorsqu'on manque de camions dans la région, on les appelle et ils paient $10 par jour pour travailler. Disons que cette année, on n'a pas eu à le faire. Peut-être qu'à l'automne on aura à le faire parce qu'à chaque automne il y a un surcroît d'ouvrage, si on peut dire.

M. Gratton: Combien peut-il y avoir de camionneurs ou de permis dans la région desservie par votre poste?

M. Meilleur: Je crois que c'est environ 1800. Je ne parle pas des deux ou trois "trucks", mais des permis, c'est environ 2100.

M. Gratton: Des permis qui seraient susceptibles d'être abonnés à votre poste, oui.

M. Meilleur: On va mettre 2100 premiers permis.

M. Gratton: Alors, vous représentez plus de la moitié, donc une majorité des camionneurs.

M. Meilleur: C'est cela, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs là-dedans et de compagnies. Il y a beaucoup de petits entrepreneurs privés qui ont trois ou quatre VR.

Si je regarde mon secteur de Deux-Montagnes que je connais bien, il y a au moins trois entrepreneurs qui ont chacun trois permis VR, mais eux autres, on les prend quand on est vraiment mal pris, parce qu'autrement ils ne font que du privé. Ils font des petites cours d'asphalte. Le type vend un voyage de pierre à un et il prend son VR. Disons que ce sont peut-être des permis qu'on pourrait faire disparaître parce que, dans le fond, ce n'est pas la principale rentabilité du tvpe. Sa rentabilité, c'est lorsqu'il prend un contrat pour une entrée de cour et qu'il la fait. Dans le fond, il n'aurait peut-être pas besoin de VR, mais, quand les permis ont été donnés, tous ceux qui possédaient des bennes basculantes pouvaient avoir un permis VR. Ils étaient bien fous de ne pas en prendre. C'est tout à fait normal. Tout homme d'affaires aurait fait la même chose, il faut le comprendre.

M. Gratton: Est-ce que le poste d'affectation ou quelque autre organisme que vous connaissez dispose de statistiques ou de données qui peuvent démontrer qu'il se fait plus ou moins de travail au point de vue de la construction, en tout cas, de camionnage, si vous voulez, dans votre région que dans d'autres régions qu'on a entendues jusqu'à maintenant aujourd'hui?

M. Meilleur: S'il se fait moins de travail dans notre région que dans d'autres?

M. Gratton: Est-ce que l'activité au point de vue de la construction...

M. Meilleur: Cela dépend des années, mais...

M. Gratton: On parle des trois dernières années où cette réglementation s'applique.

M. Meilleur: On peut dire que cela s'équivaut depuis les trois dernières années.

M. Bradette (Louis): Environ 65% des effectifs depuis les trois dernières années travaillent régulièrement.

M. Gratton: Ce que je voudrais que vous précisiez, si vous en êtes capables, mais peut-être bien que vous n'avez pas les statistiques: Avez-vous l'impression qu'il se fait plus de travaux dans votre région que dans d'autres régions, ce qui pourrait expliquer possiblement que vos membres aussi bien que l'ensemble des camionneurs dans votre région n'ont pas les mêmes revendications à faire que ceux de régions où le travail n'est tout simplement pas là?

M. Bradette: Depuis les trois dernières années, l'Expo étant finie et les Jeux olympiques étant finis, on n'est pas une région qui est plus choyée qu'une autre. Seulement, en essayant de s'attaquer à l'entreprise privée le plus possible, c'est peut-être là qu'on récupère des journées que d'autres n'ont pas.

M. Gratton: D'ailleurs, j'ai compris cela et je vous en félicite parce que c'est évident que vous avez fait des efforts un peu spéciaux avec des résultats, d'ailleurs, qui démontrent bien le succès que vous avez remporté.

Une dernière question, M. le Président, parce qu'il se fait tard: Quand vous parlez de la fameuse clause 75-25, moi, je serais presque porté à dire que je suis d'accord avec vous qu'elle devrait être incluse dans une réglementation générale pour qu'on ne soit pas obligé de la retrouver à chaque plan et devis d'un projet donné. Je dis cela en rapport avec les travaux du ministère des Transports. Si je comprends bien, ce que vous recommandez, c'est que cette réglementation puisse s'appliquer non seulement aux contrats ou au transport de matériel en vrac confié par le ministère des Transports, mais à l'ensemble des ministères du gouvernement du Québec.

M. Meilleur: C'est cela. On peut dire à l'ensemble des ministères parce qu'ils nous le donnent déjà et, quand ils s'adonnent à l'oublier, on les appelle et on l'a. Si on regarde les Richesses naturelles, l'Agriculture, on est justement en soumission sur un cours d'eau qui se fait et il faut transporter la terre. Il faut passer par le député parce que lui, il dit: II n'y a pas de problème, ils sont obligés de la mettre, mais elle n'a pas été incluse. Là, lui est obligé d'appeler son confrère et de dire: Là, n'oublie pas de la mettre, cela a été promis par le ministre de l'Agriculture. C'est tout le temps de même. Ce sont ces répétitions qui deviennent fatigantes parce qu'à un moment donné, s'il y a un contrat, on a beau être abonné au journal des soumissions, Québec construction, il reste quand même qu'on en oublie des fois et, à un moment donné, on s'en aperçoit et la clause est sortie. Celui pour lequel on a le plus de difficultés, c'est les Affaires municipales.

M. de Belleval: Vous voudriez qu'on applique cela, donc, aux municipalités.

M. Meilleur: Aux municipalités. Les Richesses naturelles, les ministères concernés dans le mémoire, eux, passent par nous autres, ce qui fait qu'ils n'auront pas de problèmes à vouloir appliquer la réglementation. Quant aux municipalités, le ministre des Affaires municipales semble un peu plus réticent. Pourquoi? Je ne le sais pas. Mais nous autres, pour cerner un problème, il a fallu faire adopter des résolutions municipalité par municipalité.

M. de Belleval: C'est parce que, dans le cas des municipalités, ce n'est pas le ministère qui donne les contrats. Ce sont les municipalités qui sont des corps autonomes, tandis que, dans le cas des autres ministères, c'est le ministre de l'Agriculture qui signe le contrat, au fond. Ce n'est pas cela dans le cas des municipalités.

M. Meilleur: Lorsqu'on arrive dans les municipalités, par exemple, où ils ont de grosses subventions pour les travaux d'égouts...

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: Voyez-vous? Elles sont subventionnées à...

M. de Belleval: A 66%, disons.

M. Meilleur: ... 66% et, des fois, 70%.

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: A ce moment, on réussit à faire placer la clause si on est bon avec la municipalité.

M. de Belleval: D'accord.

M. Meilleur: Surtout lorsqu'on est bon avec le député, on a encore plus de chances parce qu'on

dirait qu'il les oblige. Mais, dès que c'est subventionné, cela devrait passer par le poste d'affectation parce qu'on réussit quand même à en avoir. Les municipalités des fois, parce que le maire ne s'adonne pas à nous avoir dans l'oeil ou bien possède des camions, s'arrangent pour ne pas l'avoir. Cela arrive dans au moins trois ou quatre municipalités.

M. de Belleval: Je vous avoue que ce que j'aime de vos suggestions, c'est qu'effectivement elles améliorent la situation existante. Elles prennent des éléments de la situation existante, suggèrent au fond de retenir ce qu'il y a de bon là-dedans, mais, en même temps, vous conservez des mesures d'équilibre, entre autres, la possibilité pour l'entrepreneur de prendre ses camions, ce qui lui laisse quand même un certain "bargaining power" en vous en donnant un. (23 h 30)

L'autre chose, c'est que vous permettez une négociation sur les prix, ce qui ne vous barre pas non plus dans un système où vous n'êtes pas capables de soutenir la concurrence.

Je trouve qu'il y a là un certain équilibre et je pense que c'est dans ce sens qu'il va falloir examiner les solutions à venir. Je ne vous dis pas que je retiens vos suggestions comme telles tout de suite ce soir, mais je trouve qu'on a là des éléments de réflexion qui m'apparaissent valables.

M. Meilleur: Pour nous, la réglementation est bonne et ce serait bien de valeur que tant de camionneurs soient punis par une déréglementation ou des pertes de secteurs de travail. Ils ne sont vraiment pas capables d'absorber ce coup. Ces années-ci, il y a un problème économique partout, non seulement ici dans la province de Québec, on vit un problème économique et il est normal qu'on s'épaule et qu'on s'aide et il y a sûrement moyen de s'aider dans ce sens.

M. de Belleval: D'accord.

M. Gratton: M. le Président, je ferai remarquer à M. Meilleur qu'il ne faudrait pas qu'il parte d'ici avec l'impression que quiconque autour de cette table, y compris le ministre, accepte d'emblée qu'on fasse obligation à d'autres ministères que le ministère des Transports quant à la clause 75-25. D'ailleurs, j'imagine que, dans votre région, il ne se fait pas de transport forestier qui fasse partie de ce dont le ministre de l'Energie et des Ressources nous parlait aujourd'hui...

M. Meilleur: Presque pas.

M. Gratton: ... parce que, effectivement, peut-être bien n'auriez-vous pas eu le même succès que vous avez eu dans les démarches que vous avez entreprises jusqu'à maintenant.

M. Meilleur: Quelques chemins de pénétration ont été faits l'an passé. Cette année, il ne s'en fait pas mais, l'an passé, des chemins de pénétration ont été faits par le ministère des Terres et Forêts; il n'y avait pas de problèmes, c'était à 100% par le poste, parce que le ministère n'avait pas de camions mais des travaux forestiers, je ne peux pas dire qu'on en a, on n'en a pas. On n'a pas eu à négocier. Peut-être que, cet hiver, on va avoir à négocier avec une compagnie. Les approches sont déjà commencées. M. Bradette pourrait peut-être vous dire quelques mots là-dessus. Cet hiver, il y aura peut-être une quinzaine de semi-remorques ou quelque chose comme cela.

M. Bradette: II n'y a rien de concrétisé. Le type est à sa coupe de bois et on lui a fait des offres de transport. Il avait l'air bien intéressé; il va falloir le recontacter aux premières gelées. Il nous a dit qu'il nous donnerait un coup de fil. J'ai négocié l'année passée avec la CIP dans le parc du Mont-Tremblant. On avait l'occasion d'aller faire du transport pour elle mais on n'a vraiment pas l'équipement pour cela. Il aurait fallu s'équiper et, à la dernière minute, les gars ont laissé tomber l'affaire.

M. Gratton: M. le Président, une dernière question. Sauf erreur, votre mémoire ne le mentionne pas, je présume que ce n'est pas parce que le problème n'existe pas mais les garanties que revendiquent les autres postes d'affectation pour le paiement du travail effectué par des camionneurs abonnés de votre poste d'affectation qui ne seraient pas payés par des entrepreneurs, est-ce que vous n'en avez tout simplement pas de ces cas ou si vous avez une façon particulière de donner satisfaction à vos membres?

M. Meilleur: M. Bradette va vous répondre là-dessus. Il y a eu justement des choses comme cela.

M. Bradette: Sans conteste. Il y a peut-être eu un oubli de la part du Poste d'affectation de la région 06. On est obligé d'employer une certaine partie de notre budget et c'est la plus grosse partie du budget qui est consacrée aux avocats dans le Poste d'affectation de la région 06, c'est la' récupération des sommes d'argent soi-disant en perte ou des entrepreneurs qui retardent de payer. On paie des frais d'avocat en mises en demeure, en saisies avant jugement et des choses semblables. Depuis les deux ou trois dernières années, on pourrait dire que c'est un fléau malgré qu'on essaie de mettre toutes les chances de notre côté en vérifiant au départ le bon de garantie, en appelant le Better Business Bureau mais, dans le cours de l'exécution de ces travaux, si le gars part avec la femme d'un autre, cela coûte cher...

M. Gratton: Vous ne seriez sûrement pas réfractaire à ce que le ministère adopte une façon quelconque de fournir cette garantie soit en exigeant le cautionnement plutôt que le chèque visé, soit en faisant des retenues dans ces paiements aux entrepreneurs qui font des travaux.

M. Meilleur: Bien sûr. Le ministère, par la nouvelle loi, nous oblige, les camionneurs, à avoir ou à fournir à l'entrepreneur une police de garantie adéquate. Je ne verrais pas pourquoi l'entrepreneur général ne garantirait pas aussi d'une façon quelconque le paiement des camionneurs. Dans les contrats comme ceux du ministère... Vous êtes sûrement au courant qu'il y a des gens comme la compagnie MDC Construction qui prennent de gros contrats. Le seul équipement qu'elle a, c'est une roulotte dans le fond d'un champ. Qu'est-ce que vous allez saisir là? Il y a deux blocs de ciment dans la cour et une roulotte qui vaut à peu près $3000.

Actuellement, il fait des travaux pour le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pèche sur l'île Charron. J'ai à peu près 18 semi-trailers qui sont là et ça fait presque un mois. Un semi-trailer à $600 par jour, ça fait qu'ils doivent environ $17 000, $18 000 à chacun des camionneurs. Là, il va falloir faire encore d'autres pressions. L'année passée, avec le même entrepreneur, il y avait le contrat de la route 116; cela a pris simplement un an et quelques mois et j'ai dépensé $3000 en frais d'avocat pour aller récupérer mon argent.

M. de Belleval: Qu'est-ce qui arrive quand il y a défaut? Est-ce qu'un camionneur artisan individuel est pénalisé?

M. Bradette: Non, les $125 que la loi nous oblige à déposer dans un compte en fidéicommis...

M. de Belleval: Cela sert dans ce cas.

M. Bradette:... sont employés pour garantir la solvabilité.

M. de Belleval: C'est un genre de police d'assurance que vous vous payez vous-même.

M. Bradette: C'est bien ça.

M. de Belleval: Est-ce possible, cependant, d'avoir un contrat d'assurance en bonne et due formule auprès d'une compagnie d'assurance?

M. Bradette: C'est très difficile, on est à but non lucratif. La loi dit que le compte qu'on a actuellement en fidéicomis sert de bon de garantie pour tous les contrats en marche actuellement.

M. de Belleval: Mais ne pourriez-vous pas prendre une assurance auprès d'un courtier d'assurances?

M. Bradette: Je me suis informé, ça prend un bilan financier; ils sont bien prudents face à une compagnie à but non lucratif. Il ne faudrait pas avoir d'autres emprunts sur le montant en fidéi-commis comme quoi l'argent est déjà engagé, surtout si une banque a priorité.

M. de Belleval: Oui, mais si vous payez simplement une prime à une compagnie d'assurance, c'est elle qui va avoir les réclamations.

M. Bradette: Oui, mais il faut des avoirs pour ça.

M. de Belleval: Je ne comprends pas. Si vous payez votre prime, vous la payez!

M. Bradette: Oui, mais il faut que la compagnie prouve une certaine solvabilité.

M. de Belleval: Oui?

M. Bradette: Nous fonctionnons de mois en mois, nous percevons des cotisations de mois en mois, on n'est pas qualifié d'entrepreneur solvable, si on peut dire. On ne possède pas de camions, on possède juste un petit bureau.

M. de Belleval: On pourrait avoir peur que vous n'honoriez pas votre prime.

M. Bradette: C'est cela, mais ce n'est pas impossible, j'ai déjà pressenti la compagnie La Fidélité et on doit se rencontrer avec mes bilans financiers vérifiés pour discuter d'une police d'assurance, ce qui risquerait moins que mon argent...

M. de Belleval: C'est cela. Vous vous rendez compte que, si nous intervenons vis-à-vis des entrepreneurs, les autres fournisseurs de ces entrepreneurs vont demander les mêmes protections. A ce moment-là, si l'entrepreneur est obligé de donner des bons de garantie à tout le monde, c'est le prix des soumissions qui va augmenter et le nombre de soumissionnaires va diminuer radicalement, c'est bien évident. C'est là qu'on est pas mal pris aussi de notre côté.

M. Meilleur: Disons que sur certains chantiers, quand on connaît l'entrepreneur d'avance et quand on sait que c'est un "traineux", parfois au bout d'un mois on arrête les travaux et on lui dit: Là, ça nous prend un chèque. Il arrive qu'on soit obligé de le faire, ce n'est pas une méthode qu'on aime parce que cela fait perdre du temps aux camionneurs, mais il y a certains entrepreneurs avec lesquels on est obligé de le faire. Quand ce sont des sous-contrats, on demande à l'entrepreneur de faire le chèque au nom du poste d'affectation et au nom du sous-contractant; disons qu'on ne se fait pas aimer du sous-contractant, mais, quand même, les camionneurs, eux, perçoivent leur chèque.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: M. le Président, je vais essayer de procéder rapidement. Bien sûr, ce mémoire donne un autre son de cloche. Si j'ai bien compris, tout à l'heure, en réponse au député de Gatineau vous avez dit que grosso modo 65% de vos effectifs travaillaient assez régulièrement.

M. Bradette: C'est bien cela.

M. Goulet: Je peux vous dire que vous êtes chanceux. Chez nous, quand on peut en faire travailler 20%, on est chanceux.

M. Bradette: Hum! Hum!

M. Goulet: On est vraiment chanceux.

M. Bradette: Je parle de la période de pointe.

M. Goulet: Nous autres aussi, dans la période de pointe. Sur 1100 membres, il y a une possibilité de combien?

M. Meilleur: II me semble que c'est 1800 pour permis individuel.

M. Goulet: Cela veut dire qu'au niveau du pourcentage des gens membres du poste d'affectation, c'est à peu près, si je comprends bien, le même pourcentage que dans les autres régions, comme on l'a entendu tout à l'heure. Au niveau du pourcentage, 1100 sur 1800. Pour les autres, on avait 500 sur 700. C'est à peu près le même pourcentage.

M. Bradette: A peu près.

M. Goulet: D'accord. A plusieurs reprises, vous avez dit que ça semble bien aller chez vous; vous avez dit également à plusieurs reprises — peut-être une dizaine de fois même — que la réglementation est bonne, qu'elle est très bonne et bravo! Vous avez dit cela. Par contre, vous avez dit plusieurs fois que vous ne la respectiez pas. Vos gens travaillent. Je me demande si on n'a pas touché à un problème. A au moins deux reprises, vous avez touché deux cas et vous avez dit que, si vous obtenez des contrats, c'est justement parce que vous avez négocié des taux inférieurs à ceux fixés par la commission.

M. Meilleur: II faut dire que la commission nous a donné son accord là-dessus.

M. Goulet: Oui, je suis d'accord, mais je parle du principe. J'ai peur, à un moment donné, si ce système s'instaure un peu dans tous les postes d'affectation, que tous les contrats deviennent spécifiques. A ce moment, tous les postes d'affectation pourraient commencer à négocier.

M. Meilleur: Automatiquement, monsieur, où il y a une limite à charge, où le camionneur, sur un contrat, est obligé de charger à sa limite, vous ne pouvez pas aller en bas des taux. Il n'y a aucun membre, même, qui n'est pas au poste d'affectation qui va aller transporter en bas des taux!

M. Goulet: C'est peut-être la solution. Ce que je veux dire, si vous permettez...

M. Bradette: Excusez-moi, je vais vous faire une petite parenthèse sur le même contrat. Sur le contrat spécifique de Désourdy Construction, sur lequel nous avons demandé une diminution de taux pour des conditions spéciales, les types qui passent dans le chemin et dans le champ et qui chargent ce qu'ils veulent gagnent entre $400 et $450 par jour. Sur le même contrat, on rentre du matériel "rough" en bas de la ligne et on s'en vient avec le matériel, disons de la pierre concassée, des agrégats, par en arrière. On fait 20 kilomètres au début de l'ouvrage. Après ça, on marche au chaînage. Mais un dix roues a de la difficulté à aller chercher $285 par jour.

M. Goulet: Je ne m'oppose pas à ce que le poste d'affectation négocie des taux, surtout si les membres sont prêts à travailler à ce taux-là. Ce que je veux dire, c'est qu'on ouvre une porte. On peut faire ça au niveau du secteur en forêt, par exemple, une pénétration en forêt où le camion n'a pas affaire du tout à aller sur les routes publiques. Le ministre disait, tout à l'heure: C'est peut-être la solution, qu'on permette à chaque postes d'affectation de négocier les taux. On ouvre une porte et je me demande si on ne retombera pas dans la jugle tantôt, parce que ça, ça deviendrait des cas spécifiques. Je n'ai rien contre ça, mais le principe que je voulais soulever c'est que tant qu'une loi ou un règlement existe, on doit le respecter. Ce que je ne comprends pas, c'est qu'à deux reprises vous nous avez dit tout à l'heure, que la commission est intervenue et vous a donné la permission.

Une Voix: Parfaitement.

M. Goulet: Parfait, on pourra faire la même chose dans les autres postes d'affectation. Donc, un camionneur de Sept-lles pourra travailler pour X dollars, un camionneur de Bellechasse pour X dollars. Mais, on tombe au niveau du principe. Chez nous, dans Bellechasse, il y a 25% de chômage. Si on me permet, demain matin, d'engager des menuisiers à $10 de l'heure au lieu de $12 de l'heure, je peux vous dire que mon bureau de député va devenir un bureau de placement et je vais placer du monde. Je vais faire engager des travailleurs et je vais faire baisser le taux de chômage. Autrement dit, on est obligé, au niveau d'un menuisier, par exemple, de prendre M. Untel — je ne parle pas d'un artisan — au niveau d'un contracteur, on est obligé de prendre M. Untel et de le payer $12 l'heure; quant à moi, c'est le même prix pour le gars de Rivière-du-Loup ou de Québec. On sait que chez nous, on pourrait avoir des pères de famille qui seraient prêts à travailler en maudit à $9 ou à $10 l'heure et ils seraient contents de le faire.

La question de principe que je soulevais, je n'ai rien contre ça, mais ça veut dire qu'on devrait permettre à n'importe quel des postes d'affectation... onze jours cette année... les gars qui ont des camions de $65 000 ou $70 000 ont travaillé onze jours. A ce moment, on dit aux postes d'affectation: Ecoutez, les gars. Négociez-nous des contrats en bas du taux fixé par la commission, n'importe quoi, on est prêt, au lieu de gagner $400

par jour, à y aller à $300. On a des paiements à faire, on a une famille à faire vivre et, au moins, on ne veut pas perdre notre "truck". A ce moment, je me demande si ce n'est pas dangereux, si on n'ouvre pas une porte énorme parce que la commission, l'ayant accepté chez vous... Si, moi, j'arrive et je dis: Ecoute, j'ai 25 camionneurs qui, dans 15 jours, vont perdre leurs camions parce qu'ils n'ont pas eu de travail, c'est une bonne raison. A ce moment, il y a tel contrat. Les gars sont prêts à travailler à 10% en bas du taux. La commission serait mal vue de refuser. Je n'ai rien contre cela que le poste d'affectation négocie des taux. Si chez nous, mon poste d'affectation décide de me négocier des contrats, je ne sais pas, moi, les camionneurs sont prêts à travailler et ils disent: Au lieu de travailler 20% du temps, on va travailler 40% du temps, parce qu'on arrive avec des taux compétitifs, on ouvre une porte.

M. Bradette: Mais la commission demande aussi une rentabilité. Elle n'acceptera pas n'importe quel taux que vous allez lui présenter pour pouvoir travailler pour travailler. C'était l'ancien principe, ça. J'ai vécu les deux associations, moi, monsieur.

M. Goulet: Oui. mais...

M. Bradette: J'ai vécu l'association qu'on avait dans le temps, la clause 75-25 au nom de l'association et dans le temps que l'Association des entrepreneurs existait, très active dans notre coin. Mais au printemps, qui respectait les taux? Nous, de l'association, nous les faisions respecter intégralement. Les camionneurs de l'Association et des entrepreneurs y allaient individuellement. Les types faisaient tout l'ouvrage. Nous, on sortait au mois de juin et, eux, ils étaient sortis au mois de mai. Actuellement, la commission ne donne pas à la région 06 des permissions spéciales. Elle donne à tous les postes d'affectation de la province de Québec la possibilité de justifier une rentabilité en bas des taux à des conditions vraiment spéciales. Si vous essayez de contrôler ou de prouver une rentabilité pour un contrat donné, qu'il faut employer les chemins publics et respecter la pesanteur au taux actuel, vous n'êtes pas capable d'aller... (23 h 45)

M. Goulet: Non, ce que je veux dire, ce n'est pas un taux à perte, mais si je comprends bien, on peut aller n'importe quand à la commission en tant que poste d'affectation pour négocier un taux qui peut, sans devenir millionnaire en réalisant ces travaux, faire l'affaire des camionneurs, qui peut être compétitif avec l'entrepreneur de façon que chez nous, l'entrepreneur puisse, un jour ou l'autre, laisser son camion dans la cour, comme monsieur nous l'a dit, et faire travailler nos camionneurs artisans. Sans devenir millionnaire, si le gars peut faire vivre sa famille et n'a pas perdu son camion, c'est déjà beaucoup, même s'il n'a pas mis $100 000 à la banque. Chez nous, il y a des camionneurs qui, demain matin, c'est bien dommage, si la compagnie, entre autres, International, ne laissait pas les camions en disant: On a pris une décision, on laisse les camions, c'est préférable de les laisser dans la cour chez le gars, que de l'avoir dans la cour ici, cela ferait longtemps qu'ils auraient perdu leur camion. A ce moment-là, le poste d'affectation pourrait peut-être négocier des taux spéciaux.

M. Bradette: Assurément.

M. Goulet: Je serais pour ça, mais c'est une porte ouverte. A ce moment-là, ça devient... Je me demande si la loi de la jungle ne s'installera pas à la suite de ça, en passant par les postes d'affectation.

M. Bradette: Oui, on a pensé à la même chose. On a été bien hésitant avant d'embarquer dans le bateau, mais le point principal là-dessus est de justifier la rentabilité du camionneur. Si vous présentez à la Commission des transports un contrat où le gars va changer quatre trente sous pour une piastre, je suis sûr et certain que ça ne passera pas. Ils vous demandent les plans. Ils vous demandent un contrat avec l'entrepreneur, le mode de paiement et 56 affaires. De la paperasse, on en a en masse. Il n'y a pas de problème là.

Cependant, si vous regardez aussi dans la Gazette officielle ou dans la tarification de la Commission des transports, vous allez voir que toutes ou à peu près toutes les compagnies forestières ont des taux préférentiels ou des diminutions de taux accordées par la Commission des transports. Le transport de "chips", de minerai, le transport le moindrement de longue distance, même le sable à ciment — j'entendais le représentant de la région 05 dire ça tout à l'heure — c'est très facile si on est capable, avec un "semi-trailer" de dire: On travaille six jours par semaine, on met tant de tonnes dans un "semitrailer", on a des essieux "spreadés". Cela donne tant. On est capable de dire à un cent près combien on va gagner par semaine, à moins de faire une crevaison, naturellement. Il y a une rentabilité. S'il y a rentabilité, qu'ils le présentent à la Commission des transports et les gars viennent de se trouver un secteur de travail.

M. Goulet: J'aurais une dernière question. Auriez-vous objection à ce qu'on agisse, comme en Ontario, au lieu que la commission fixe les taux, qu'on les dépose devant la commission?

M. Bradette: Non, non. Il y a...

M. Goulet: Non, mais quand ça fait l'affaire.

M. Bradette: Non!

M. Goulet: Non?

M. Bradette: On travaille pour le camionneur, pour trouver une rentabilité chez le camionneur. Qu'on laisse

passer un gros contrat et qu'on donne à l'entrepreneur la chance de faire $25 de plus ou même à prix égal, à profit égal, l'entrepreneur n'a aucune rentabilité à embaucher des chauffeurs, de faire des "payrolls" là-dessus et le "red tape", comme on l'appelle. Il est bien mieux de les laisser là, ses camions, et d'embaucher des camionneurs du poste d'affectation à prix égal ou à profit égal. Même en tirant la couverture un peu de notre bord, on peut dire: II a laissé $5000 de profit sur la table qu'il aurait peut-être fait en plus, mais il n'a pas eu tout le problème d'embaucher et peut-être le problème de renvoi, parce qu'ils sont syndiqués eux aussi. Ces choses-là, vous connaissez ça.

M. Goulet: Cela devait être ma dernière question, mais ça va l'être, M. le Président. Ce point-là m'intéresse, parce qu'on semble avoir trouvé un élément de solution, mais en contournant... Non, pas en contournant le règlement. En faisant ça de façon légale, mais avec la permission de la commission. Avez-vous des chiffres que vous pourriez nous donner nous démontrant le pourcentage de vos travaux cette année, pour l'ensemble de vos camionneurs, qui ont été réalisés en bas des taux? Avez-vous des chiffres, 2%, 40%?

M. Bradette: Ce serait environ 2%. Il y a seulement le contrat de Desourdy...

M. Goulet: Plus celui d'Hydro. M. Bradette: Pardon?

M. Goulet: Plus celui d'Hydro. Vous avez donné deux exemples tout à l'heure.

M. Meilleur: Hydro, c'est un contrat qu'on a fait, il y a deux ans. On en a fait un, peut-être qu'il est fini cette année, dans Laprairie, ou l'année dernière... mais cette année, en haut de la ligne d'infrastructure, il y a peut-être dix milles de route à faire dans toute la région 06, peut-être un peu plus. Je me trompe peut-être.

M. Goulet: C'est très minime comme pourcentage.

M. Bradette: C'est minime en haut de la ligne d'infrastructure.

M. Goulet: D'accord.

M. Meilleur: On a fait le détournement de Saint-Jovite l'an dernier avec la compagnie Miron. On a eu 100% du contrat. On a négocié au prix. On a négocié avec la compagnie Corival. On a négocié avec la compagnie Chomedey Transport, cette année, sur la 125 à Sainte-Julienne. On est payé au taux et on est en bas de l'infrastructure jusqu'au mois de décembre, pratiquement. On y va dans des cas extrêmes et dans des conditions spéciales. Il faut tracer la ligne de démarcation, se dire qu'il ne faut pas en faire une généralité. Cela prend vraiment, dans notre conception à nous, les administrateurs du poste, des conditions spéciales, soit un chemin à l'extérieur des chemins publics pour qu'ils permettent un excédent de charge pour prouver une rentabilité quelconque.

M. de Belleval: Juste une courte question. Qu'est-ce qui arrive dans un cas comme celui que vous nous avez souligné tantôt où vous avez des camionneurs qui travaillent à $400 par jour, à toutes fins pratiques, et d'autres à $250 ou $300? Cela ne cause-t-il pas de jalousie entre le camionneur qui, lui, est affecté à une place par rapport à l'autre?

M. Bradette: Encore là, par l'expérience, ce ne sont pas tous les camionneurs qui vont aller mettre 25 tonnes, souvent métriques, dans une boîte de camion. Cela prend une voiture et cela prend un chauffeur. Je dirais que, si je prends 500 camionneurs, je trouve environ 25 camionneurs qui veulent faire cet ouvrage.

M. de Belleval: Bon.

M. Bradette: Le reste, ce sont des boîtes d'aluminium, des camions plus légers, des semi-"trailers", des hommes qui aiment mieux soit travailler à l'heure, soit travailler sur les chemins publics et charger des charges normales...

M. de Belleval: Normales.

M. Bradette: ... afin de ne pas briser. Il y a différents goûts. Si on a plus de camionneurs qui veulent aller là qu'on a de disponibilité, on fait une rotation normale entre les camionneurs.

M. de Belleval: Qu'est-ce qui arrive dans le cas justement d'infrastructure? Souvent, le matériel est plus grossier, c'est plus difficile, cela brise plus le camion, parfois il y a des "jobs" plus dures que d'autres. Trouvez-moi des camionneurs pour tout cela ou si, à un moment donné, il y en a qui disent: Ah! J'aime autant ne faire que cela? Ils ne sont pas disponibles, avec le trouble que cela implique ou quoi?

M. Bradette: Sur 1100 camionneurs...

M. de Belleval: Vous en avez quelques-uns.

M. Bradette:... on en a quelques-uns naturellement. Mais, en général, le gars suit son tour. C'est une question de logique. Je crois qu'un camionneur qui a une boîte d'aluminium, tu ne l'envoies pas dans le schiste. Journée pour journée...

M. de Belleval: Oui.

M. Bradette:... si tu as de l'affectation pour 50 camions, tu le sais. On les connaît pratiquement tous par coeur. On a des gars qui s'occupent de petits groupes de camionneurs, 50, 60; alors, ils les connaissent tous par leur nom. Ils savent à peu près l'usure de leurs pneus arrière même. L'en-

voyer là ou l'envoyer ailleurs, c'est à peu près le même prix et c'est la même journée d'ouvrage. Alors, cela ne fait pas de chialage entre les parties. En général, on n'a pas de problèmes.

M. de Belleval: Vious avez un poste régional avec des sous-postes locaux, si on peut dire.

M. Meilleur: Les sous-postes ne sont pas encore formés. On attend l'administration complète du poste pour les former.

M. de Belleval: Aucun sous-poste?

M. Meilleur: Disons qu'on peut dire que, sous l'ancienne réglementation, c'étaient des sous-postes.

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: Mais dans le moment, on fonctionne avec 22 "dispatchers" dans les 22 comtés municipaux...

M. de Belleval: C'est cela.

M. Meilleur: ... qui deviendront, fort possiblement; tous des sous-postes.

M. de Belleval: C'est cela.

M. Meilleur: Peut-être que quelques-uns n'auront pas les deux tiers, si vous voulez.

M. de Belleval: Oui.

M. Meilleur: A ce moment-là, ils deviendront des abonnés au poste ou peut-être qu'on trouvera une autre formule. Disons qu'on s'arrange pour que cela fonctionne le mieux possible.

M. de Belleval: Quand tous les camions d'un sous-poste sont utilisés, vous avez un système pour aller aux autres.

M. Meilleur: C'est cela. Cela passe par le... M. Bradette: Le répartiteur téléphone au di- recteur du sous-poste, qui, lui, dit: Dans tel comté, il y a moins de jours que les autres comtés.

M. de Belleval: Oui.

M. Bradette: Alors, téléphone là et prends tes camions là.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. de Belleval: C'est moi qui vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Nous avons encore quatre groupes à entendre. On m'a fait signe, compte tenu de l'heure, qu'on aimerait voir suspendre les travaux ou ajourner plutôt jusqu'à demain matin, dix heures. Maintenant, je dois faire mention aux membres de la commission que les quatre groupes qui restent viennent tous de la région de Hauterive ou de Sept-lles. Donc, je ne sais pas si vous tenez pour acquis qu'ils seront entendus en priorité demain matin ou si on les reporte à une date ultérieure.

M. Gratton: M. le Président, si on nous demande notre avis, quant à nous, cela pourrait être négocié entre vous-même, à titre de président de la commission, et les représentants. Chose certaine, je pense qu'on ne peut pas imposer à nos invités de comparaître à compter de maintenant lorsqu'il en reste quatre. Même à seulement une demi-heure chacun, cela voudrait dire deux heures avant qu'on termine. On a déjà commencé à dix heures ce matin. Nous serions très heureux de vous laisser le soin d'en décider.

M. de Belleval: En priorité demain matin.

M. Gratton: Si c'est ce que les gens désirent, je pense qu'ils devraient avoir le choix.

Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de cette possibilité d'entente, je demanderais aux quatre groupes qui restent de venir me voir ici et on pourra regarder la situation. J'ajourne les travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 55)

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