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Version finale

31e législature, 5e session
(24 octobre 1980 au 24 octobre 1980)

Le jeudi 28 août 1980 - Vol. 22 N° 5

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Le transport en vrac au Québec


Journal des débats

 

Camionnage en vrac au Québec

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des transports se réunit à nouveau aujourd'hui pour entendre les mémoires concernant le camionnage en vrac. Je fais la nomenclature des associations qui devront être appelées une après l'autre: L'Association du camionnage du Québec Inc.; Delangis Inc.; Les Entreprises Bourget Inc., et Kildair Service Ltée; Nil Girard Transport Ltée; L'Association des industries forestières du Québec Ltée; La Compagnie de transport Canadien Pacifique Ltée; la ville de Montréal; L'Association des camionneurs entrepreneurs en vrac de la région 01 Inc.; L'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec; M. Claude Bourque; le Poste de transport en vrac, région 08 Inc., en collaboration avec les sous-postes de la région 08, en tenant compte qu'on a aussi, selon l'entente intervenue au début de cette commission, un rappel si nécessaire et utile, de la part de l'ANCAl, l'Association nationale des camionneurs artisans Inc., qui aura à donner son opinion sur l'ensemble des rapports déposés.

Les membres de cette commission sont: M. Baril (Arthabaska), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Goulet (Bellechasse), M. Gratton (Gatineau), M. Grégoire (Frontenac) remplacé par M. Bertrand (Vanier); M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. O'Neill (Chauveau), M. Proulx (Saint-Jean), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Verreault (Shefford).

Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. Mailloux (Charlevoix), M. Mathieu (Beauce-Sud), M. Michaud (Laprairie), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Perron (Duplessis).

Le rapporteur est toujours M. Bertrand (Vanier).

Au moment où nous nous sommes quittés hier, nous en étions rendus à l'Association du camionnage du Québec Inc., dont M. Claude Gosselin est le représentant. Avant de lui accorder la oarole, j'aimerais faire mention d'un document qui à été déposé et qui provient des Coopératives de camionneurs, qui sera distribué à chacun des membres de cette commission. La lettre est adressée au ministre des Transports et se lit comme suit: "Lors de notre intervention devant la commission parlementaire sur le camionnage en vrac le 27 août 1980, vers la fin de l'après-midi, nous avions alors pris connaissance de la demande formulée par le sous-poste d'affectation de Dubuc-Sud, région 02, de placer le poste d'affectation de la région 02 sous tutelle. Comme nous avons présenté notre mémoire en fin d'après-midi et que l'heure d'ajournement arrivait, nous n'avons pu indiquer notre entier appui à cette demande du poste d'affectation de Dubuc-Sud. Nous espérons que la présente pourra suppléer à la commission. Bien à vous, la Coopérative des camionneurs, par Roland Fradet".

Donc, ces documents seront distribués à chacun des membres de la commission.

M. Gosselin, vous présentez vos membres et vous faites la lecture de votre document ou le résumé.

(10 h 15)

Association du camionnage du Québec Inc.

M. Gosselin (Claude): M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la commission parlementaire. En premier, je vais vous présenter, à ma droite, M. Jacques Alarie, qui est vice-président exécutif de l'Association du camionnage du Québec et à ma gauche, M. Gilles Bélanger, conseiller juridique de l'Association du camionnage du Québec. Je suis moi-même, Claude Gosselin, président de l'association du camionnage.

Messieurs, l'Association du camionnage du Québec Incorporée est heureuse de la décision du Parlement de confier à une commission parlementaire le soin d'étudier la situation qui prévaut dans le domaine du camionnage en vrac. Notre association est un organisme sans but lucratif; elle représente plus de 1400 membres dont 70% ont cinq camions et moins. Ceux-ci génèrent un chiffre annuel de plus de $1 000 000 000 et fournissent un emploi stable à plus de 60 000 collaborateurs. Parmi ceux-ci, un nombre important travaillent régulièrement ou occasionnellement dans le secteur du camionnage en vrac, et ceci, depuis que les camions existent.

De plus, nous voulons, d'emblée, attirer votre attention sur le fait que le camionnage en vrac ne se fait pas qu'au moyen de camions à bennes basculantes. Pratiquement tous les types de camions ou remorques peuvent être utilisés pour faire du transport en vrac. Or, le problème auquel vous êtes confrontés concerne surtout le transport des matières décrites au règlement 12, pour lesquelles, après 13 arrêtés en conseil successifs en six ans, on cherche toujours une solution. Nos membres qui font du transport en vrac le font non seulement avec des permis émis en vertu du règlement 12, mais aussi en vertu de l'ordonnance sur le camionnage 4995.

A vrai dire, ce n'est pas le transport de matières décrites au règlement 12 qui cause un problème, mais l'existence d'un excédent de camionneurs détenant des permis en vertu de ce règlement.

Quant au règlement 12, il diffère, entre autres, de l'ordonnance 4995 sur les points suivants: premièrement, permis délivré au nom d'une personne pour un camion désigné. Deuxièmement, courtage réservé exclusivement à des postes ou des sous-postes d'affectation constitués en corporations sans but lucratif ou coopératives composées exclusivement d'un certain nombre de titulaires de permis d'une région donnée, possédant

quatre camions ou moins. Ces postes d'affectation ont, de plus, le privilège d'obtenir, pour fins de répartition de leurs abonnés, 75% de certains types de transport. Ce privilège, connu dans le milieu sous le nom de "clause 75-25", a, du reste, été jugé illégal, le 10 décembre 1979, lorsque la ville de Sept-lles a voulu l'utiliser.

En résumé, vous faites face à deux genres de camionneurs, soumis, dans bien des cas, aux mêmes lois et règlements. Les uns fonctionnent en hommes d'affaires, c'est-à-dire dans un contexte de libre entreprise et de concurrence réglementée. Les autres font le même travail avec une certaine aide et protection de l'Etat qu'ils estiment insuffisantes. Vous aurez donc, distingués membres de la commission parlementaire, à juger des mérites du protectionnisme comparés à ceux de la libre entreprise dans le cadre d'une réglementation générale du transport routier.

L'idée sous-jacente et maîtresse du présent mémoire est de représenter qu'en libéralisant l'industrie du camionnage en vrac afin de lui permettre d'évoluer normalement dans un cadre réglementaire plus souple, on permettra à cette industrie de s'adapter par elle-même au marché de l'offre et de la demande sans qu'il soit nécessaire à l'Etat d'intervenir par des mesures incitatives ou coercitives pour maintenir artificiellement cette industrie quelque part en-deçà ou au-delà du point d'équilibre.

Ici, aux pages 3 à 9, considérant que la plupart des gens connaissent l'historique du règlement en vrac, je pense qu'il est de mise qu'on ne reprenne pas tous les règlements et les arrêtés en conseil.

Aussi, je m'excuse de ne pas vous l'avoir mentionné au début, il y a certains changements — on pensait passer hier soir — afin d'abréger le texte, suite à la demande du président. Si, des fois, vous ne suivez pas, on va se retrouver, à un moment donné, dans le texte.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, on avait compris, d'ailleurs avec le texte que vous lisiez, on était content de voir que vous en faisiez un résumé.

M. Gosselin: D'accord, merci.

Si en 1972, le législateur a voulu régler les problèmes du transport en vrac en le réglementant et en réservant certaines catégories ou certaines proportions de ces transports au profit exclusif d'une nouvelle classe de camionneurs, qu'il créait du même coup, le moins qu'on puisse dire après sept ans d'expérience, c'est que l'objectif n'a pas été atteint.

Il n'est pas exagéré d'affirmer que ce qui paraissait une solution idéale en 1972 a réussi le tour de force de mécontenter tout le monde, du ministre des Transports jusqu'au simple automobiliste paralysé sur nos routes.

Face à une pareille situation, le législateur est placé devant l'alternative de corriger encore une fois le système en place ou de le remplacer.

Le système actuel est basé sur l'idée, généreuse en apparence, qu'en réservant une certaine part de marché aux petits camionneurs, on allait permettre à ceux-ci d'entrer dans la ligue mineure du camionnage, avec une certaine protection de l'Etat qui les mettrait au moins partiellement à l'abri des grands de ligues majeures jusqu'à ce qu'ils se sentent, à leur tour, de taille à y entrer.

Or, c'est exactement l'inverse qui se produit. Considérant cette aide gouvernementale, qui se voulait un appoint pour stimuler l'esprit d'initiative et d'entreprise de jeunes camionneurs, comme un droit acquis et une protection permanente, le système a attiré par centaines et peut-être par milliers des chauffeurs qui, sans ça, n'auraient même pas rêvé d'acheter un camion. Comme le "droit d'entrée" dans cette ligue mineure n'était rien de plus que la simple possession d'un camion, nous nous retrouvons, d'une part, avec des milliers de camionneurs artisans en trop par rapport aux besoins du marché et, d'autre part, avec des individus qui n'ont pas la formation requise pour développer une entreprise de camionnage viable.

En conséquence, les plus vulnérables de ces camionneurs artisans se sont regroupés pour chercher une planche de salut qu'ils croient avoir trouvée en biaisant la volonté originale du législateur. Ainsi, selon eux, le gouvernement ne devrait pas seulement leur fournir du travail, mais aussi, au moyen d'une loi, "garantir la paie aux camionneurs". Ceci, on trouve ça dans la résolution no 2.19 de l'ANCAl, datée du 13 avril 1980.

Dans cette optique, les camionneurs artisans semblent avoir choisi d'abandonner le désir de développer des entreprises en fonction des besoins du marché. Ils demandent au gouvernement de suppléer aux besoins du marché par des mesures d'assistance basées sur les besoins financiers des camionneurs artisans. En outre, comme les mesures d'agitation sociale et les mesures coercitives à l'égard des fournisseurs de travail arrivent de plus en plus fréquemment et de façon imprévisible sur un chantier ou l'autre, le manque de fiabilité dont font preuve ces artisans incite tous ceux qui le peuvent à se passer de leurs services en se procurant leurs propres camions, ce qui ne fait qu'aggraver le problème de ces artisans. Leur inaptitude à s'adapter aux règles du jeu du marché les a amenés à ne voir d'autre solution à leurs maux que leur prise en charge par le gouvernement.

Comment en sommes-nous arrivés là? En faisant abstraction de la réglementation des taux et tarifs dont l'analyse détaillée, ici, deviendrait fastidieuse, mais dont l'incident sur l'échec auquel nous faisons face est loin d'être négligeable.

Voici, résumée à grands traits, la genèse du problème. Vers 1935, débute un certain contrôle gouvernemental des rouliers publics. En 1949, constitution de la Régie des transports. Le 8 juillet 1972, création de la Commission des transports du Québec. Selon le premier rapport de cette commission, au 31 mars 1973, il y avait à cette date 3775 transporteurs routiers enregistrés avec 85 755 unités, alors qu'il y avait 620 327 camions et véhicules commerciaux de tous genres immatriculés au BVA.

En ce qui concerne le vrac, ces permis n'apparaissent dans les statistiques qu'à partir de 1975. Ils sont émis au rythme de 6596 en 1975 et 6102 en 1976, ce qui donne un total d'environ 12 000, puis 13 000 en 1977. Ensuite, baisse régulière du total jusqu'à ce jour où le chiffre est de 11 494 en date du 31 mars.

Il ressort donc de ces chiffres que le nombre de camionneurs artisans et/ou entrepreneurs — la distinction importe peu — ne pouvait qu'être estimé très approximativement au moment où se débattait la législation en 1972. Or, il est de notoriété publique que les années 1973-1976 furent des années fastes pour les vendeurs de camions à benne basculante.

Même si la construction du stade olympique se situe à cette période, le gros de la demande vint surtout de la décision gouvernementale de réserver aux camionneurs artisans un premier choix dans le gâteau de ses besoins en transport. Si, à l'origine, la manne gouvernementale pouvait paraître suffisante pour assurer le développement ou au moins la prospérité de quelques milliers de camionneurs artisans, la soudaine multiplication de ceux-ci a vidé la mesure de toute la substance.

En d'autres mots, il aurait fallu connaître le nombre de bénéficiaires avant de mettre le programme en vigueur et contrôler la croissance de ces derniers. Ce ne fut pas fait car c'était quasi impossible à faire et, conséquemment, ce qui est apparu comme une solution n'a pas corrigé le malaise. Le moment est venu de voir la réalité en face et de tenter de sauvegarder cette industrie avant qu'elle ne s'effrite complètement.

Afin de mieux comprendre pourquoi le législateur a pu s'engager sur une voie qui, aujourd'hui, paraît sans issue, nous croyons utile de rappeler dans quel climat ces décisions furent prises au début de 1972.

En 1968 éclatent un peu partout dans le monde des révoltes et des grèves en réaction contre des injustices sociales. Des quartiers entiers passent au feu dans nombre de villes.

En 1970 le Parti libéral promet la création de 100 000 emplois et est élu. Automne 1970, affaires Cross et Laporte, loi des mesures de guerre. En conséquence, tout ce qui pouvait d'une façon ou d'une autre contribuer à rétablir ou à maintenir la paix sociale était prioritaire. On ne lésinait pas sur les dépenses et on ne cherchait pas longtemps pour établir le bien-fondé d'une mesure dès que celle-ci pouvait avoir des répercussions sociales apaisantes.

Voilà le climat dans lequel furent adoptées les règles du système auquel vous cherchez une solution de rechange. Nous vous avons exposé tantôt quel climat a permis cette génération spontanée de détenteurs de permis de camionnage en vrac émis en 1974. Nous faisons face aujourd'hui à un problème pire que celui qu'on croyait pouvoir résoudre au moyen des permis VR et des postes d'affectation nantis de certains privilèges. D'une part, nous avons des permis de camionnage en vrac en surnombre, d'autre part, ces détenteurs de permis considèrent que le gouvernement, parce qu'il leur a reconnu la nécessité de détenir un permis, est par le fait même et en retour tenu de leur fournir du travail ou, au moins, leur garantir un revenu minimum.

Cette notion de travail ou de revenu minimum garanti est une notion tout à fait nouvelle qui s'insère dans le débat et nous paraît totalement inadmissible tant sur le plan du principe qu'au plan pratique.

Au plan du principe ça équivaudrait à créer au Québec un précédent qu'on ne tarderait pas à invoquer dans tous les milieux qui détiennent une forme quelconque de permis provinciaux, en associant le permis à l'obligation pour l'Etat de veiller à ce que ces détenteurs aient des revenus adéquats, au plan pratique, ça reviendrait à demander à l'Etat de prendre à sa charge quelques milliers de camionneurs excédentaires.

Sur le sujet fort discuté de la réglementation, l'Association du camionnage du Québec est en faveur d'une réglementation applicable et surtout appliquée. (10 h 30)

Dans le cas du vrac, la réglementation actuelle aboutit automatiquement à condamner la plupart des camionneurs artisans à des périodes d'inaction plus ou moins prolongées simplement à cause de notre climat et à cause de la spécialisation de l'équipement nécessaire dans les divers secteurs du camionnage en vrac. En conséquence, il n'est ni sage ni économique de limiter à ce point leur droit de travailler et de rentabiliser leurs véhicules.

La réglementation actuelle sur le camionnage en vrac est, à nos yeux, un bel exemple de la réglementation limitative à l'excès. Appliquée à la lettre, elle suppose: A) Des prix gonflés durant les périodes de travail pour compenser les pertes des périodes d'inaction. B) Une aide sociale de la part du gouvernement pour combler le manque à gagner si le détenteur d'un permis VR travaille au prix du marché. C) Un degré de sainteté qu'on ne peut décemment exiger d'un camionneur artisan pour résister à la tentation de violer un pareil règlement.

Le problème consiste dès lors à trouver, tout en respectant le principe de la réglementation, un moyen qu permettrait au détenteur de permis VR de travailler douze mois par année.

Quant au contrôle de l'application de la réglementation, il doit être fait vite et bien, sans délais interminables qui en annulent tout l'effet. Nous n'en tondons pas par là que tout doit être contrôlé tout le temps, mais nous demandons une amélioration dans la qualité et la fréquence des contrôles. De même, les sanctions ou amendes, modérées pour une première offense, devraient être sévères en cas de récidive dans les deux ans. Contrôle complet, sanctions rapides, récidives coûteuses sont la clé d'un contrôle efficace qui n'a finalement pas d'autre raison d'être que de dissuader ceux qui seraient tentés de ne pas respecter les règlements et les lois.

Fonctionnement des postes d'affectation. Sur ce point, la position de notre association ne varie

pas: Ils ne devraient pas exister de façon monopolistique. Ces postes qui étaient censés fournir l'appoint ou le complément de travail aux camionneurs artisans pour leur permettre de travailler lorsque, par leurs propres moyens, ils n'arrivaient pas à obtenir suffisamment de travail, n'ont pas réussi à remplir ce rôle. En tentant d'imposer un monopole régional pour la distribution du travail dans certains secteurs de l'activité touchés par le camionnage en vrac, l'Etat ne peut faire autrement que se diriger vers un échec, puisqu'il brime ainsi les libertés de tout le monde. En effet, les camionneurs artisans seront, dans la pratique, plus ou moins limités au travail que pourra ou voudra bien leur founir les postes d'affectation.

Les postes ne cesseront jamais de réclamer de nouveaux secteurs exclusifs. Les entrepreneurs en camionnage en vrac verront leur marché s'éro-der en faveur des artisans. Les usagers des services de camionnage en vrac se verront frustrés dans leur liberté de commerce. Lorsque les revendications seront de nouveau devenues suffisamment incontrôlables, que restera-t-il? Peut-être une autre commission parlementaire.

La rentabilité de l'industrie: Sur ce point, toutes les études, statistiques et analyses concordent. Le camionnage est une des industries les moins rentables au Québec. Dans le domaine du vrac, sujet de la présente commission, la question de rentabilité se rapporte à la fois à des données économiques et à des considérations sociales. Il n'est donc pas possible d'obtenir une réponse mathématique tant que l'offre et la demande n'auront pas atteint un certain équilibre. Le Québec a été bâti dans le cadre des lois de la libre entreprise, et donc des marchés. Bien que tout ne soit pas parfait, ces lois ont fait leur preuve en nous permettant d'atteindre le haut degré de développement que nous connaissons. Il n'y a aucune raison valable pour les abandonner. En conséquence, la rentabilité dans le camionnage en vrac doit également être recherchée sur ces mêmes bases. En attendant, parler de la rentabilité d'un système qui impose trois camions là où deux suffisent à la tâche, n'est qu'une farce tragique pour ceux qui y ont cru, et inutilement coûteuse pour le contribuable. Car aux dépenses superflues occasionnées par l'assistance et le soutien d'une flotte de milliers de camions inutiles, il faut aussi ajouter les impôts non perçus chez ces artisans.

Perspectives d'avenir: Si les Etats meurent rarement à la suite de leurs erreurs, il n'en est pas de même pour les entreprises. En conséquence, il est normal qu'elles perçoivent avec beaucoup plus d'acuité tous les dangers réels et potentiels qui les menacent. C'est pourquoi le cas du camionnage en vrac touche même les entreprises de camionnage qui n'en font pas. Cette afirmation peut paraître paradoxale, mais elle s'explique par la perception, qu'ont ces dernières, de l'enjeu du débat actuel. C'est surtout la création d'une classe de camionneurs qui, de plus en plus ouvertement, aspirent à former une caste intouchable et plus ou moins à l'abri des lois qui régissent les normes économiques au Québec qui leur paraît dange- reuse, donc inacceptable. C'est un nouveau cheval de Troie qui, loin d'assainir le climat socio-économique du Québec, risque plutôt de l'infecter en officialisant l'existence d'une classe d'entrepreneurs, en leur accordant la sécurité d'emploi que connaissent les salariés du gouvernement.

Hormis l'assistance directe du gouvernement à ces camionneurs, il n'y a pas d'autre solution qu'un retour à un équilibre entre l'offre et la demande. Nous estimons à environ 4000 ce nombre excédentaire de camionneurs artisans. Les statistiques de la CPQ nous révèlent une diminution d'environ 500 permis par an depuis 1977. A ce rythme, nous avons encore pour huit ans, malgré les privilèges et une infusion de fonds gouvernementaux, avant d'en arriver à un nécessaire équilibre. Cette réduction est causée par l'inutilisation de permis qui sont annulés par un défaut de renouvellement.

D'ici là, l'Etat doit prendre des mesures qui limiteront les incidences sociales d'une inévitable réduction des effectifs. La première est évidemment de maintenir le gel du nombre de titulaires de permis tant que le nombre visé n'aura pas été atteint. Il devrait également prendre des mesures incitatives assorties aux besoins de certaines compensations pour favoriser la réduction des permis VR.

La difficulté consiste à éviter de commettre une injustice sociale pour réparer une erreur de parcours, tout en évitant également d'instaurer un système de camionnage social parallèle, ce qui constituerait une hérésie économique. Il n'est ni socialement acceptable, ni financièrement supportable de consacrer l'existence d'une catégorie de camionneurs qui ne travaillent que la moitié du temps. Ni l'économie, ni la paix sociale n'ont à gagner avec une solution de ce genre. Félix Leclerc n'a-t-il pas dit que le plus sûr moyen de tuer un homme est de le payer à ne rien faire?

A l'inverse, si ces camionneurs artisans continuent à végéter, nous aurons, en permanence, un groupe de mécontents manifestant ici et là à tout moment. Il n'y a qu'une solution viable et juste à long terme, c'est que les camionneurs artisans deviennent tout simplement des camionneurs avec les mêmes droits et devoirs que tout autre entrepreneur.

Les recommandations de l'association. Le vice fondamental qui nous vaut la présente commission parlementaire réside dans le fait d'avoir deux poids et deux mesures pour réglementer le transport. En premier, que toute personne ou entreprise désireuse de faire du transport contre rémunération, après avoir fait sa preuve des nécessités à la Commission des transports, puisse le faire sans être limitée à une seule spécialité. Nous référons au règlement 12 qui précise tantôt quelles matières peuvent être transportées, tantôt quel type de véhicule doit être utilisé pour le transport de tel type de matières.

Il en résulte une difficulté d'interprétation dans tous les cas et parfois des contradictions. Ce qui est plus grave encore, nous avons là un cloisonnement excessif qui empêche pratique-

ment toute possibilité de rationaliser l'exploitation de l'équipement. Cette limitation excessive ignore la réalité du transport routier au Québec. C'est pourquoi nous recommandons une réglementation des matières seulement et non des types de véhicules autorisés à transporter tel ou tel type de matière, exception faite pour les produits comportant certains dangers.

De plus, empêcher un détenteur de permis de transport en vrac de transporter d'autres marchandises ou vice versa est contraire aux principes les plus élémentaires d'une saine gestion. De là, vient aujourd'hui que nous avons des camionneurs qui n'arrivent pas et n'arriveront jamais à rentabiliser leur entreprise. C'est pourquoi nous recommandons que, sous réserve de preuves des nécessités, le transport en vrac, aussi bien que le transport général, soit accessible à tous les détenteurs de permis, compte tenu de notre recommandation de ne pas augmenter le nombre de titulaires. 2e Que le monopole du courtage en faveur des postes d'affectation soit aboli. 3°, Que les permis soient délivrés à l'entreprise et non au véhicule. 4°, Que la clause 75-25, déjà jugée illégale, soit abolie. 5°, Que la structure tarifaire régissant le transport en vrac soit assouplie. 6°, Que la réglementation du transport en vrac soit applicable et appliquée. 7°, Que le gouvernement prenne les mesures qui s'imposent pour réduire à un niveau économiquement justifiable le nombre de permis de camionnage en vrac. 8°, Que ces changements soient faits dans les plus brefs délais.

Nous espérons, M. le ministre et distingués membres de la commission parlementaire, avoir réussi à exposer clairement notre point de vue sur les problèmes du camionnage en vrac.

Notre intervention est inspirée par l'expérience et les solutions que nous proposons, si elles ne sont pas particulièrement originales, elles ont cependant fait leur preuve dans d'autres secteurs.

Je tiens à remercier tout le monde de nous avoir écoutés, d'avoir porté une si bonne attention et j'espère que ça a été aussi clair que possible. Nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Merci messieurs. Vous prétendez qu'il y aurait 4000 camions en vrac de trop, compte tenu du marché. Comment êtes-vous arrivés à ce chiffre de 4000.

M. Alarie: M. le ministre, si on regarde un peu les mémoires qui ont été présentés, on s'aperçoit que les postes d'affectation sont utilisés à environ 60% de leur capacité. On regarde aussi certaines études qui ont été publiées par le ministère de l'Industrie et du Commerce, lorsqu'il y a eu l'émission de ces permis en vrac, et on s'aperçoit qu'il y avait un certain marché. Tout d'un coup, on a vu l'arrivée d'une vente de bennes basculantes et de tout équipement semblable. On conclut, selon les chiffres qui nous ont été donnés, selon ce que nos membres nous disent, qu'il y a environ 4000, soit à peu près 40% de permis ou de camions en vrac de trop.

Si on se fie également à ce que nos membres nous rapportent, ceux qui travaillent à 60%, on voit que les camions sont dans la cour ou des choses du genre. Mais on s'aperçoit, même, avec le fonctionnement des postes d'affectation, qu'on est obligé d'y aller par priorité et on regarde le nombre de jours travaillés et on voit... Disons que le chiffre 4000, ce n'est pas un chiffre qui est fondé sur des statistiques approfondies, mais c'est à peu près l'évaluation la plus valable possible.

M. de Belleval: Cela voudrait dire qu'il y aurait le tiers de trop de camions?

M. Alarie: De camions ou de permis, selon la façon de voir.

M. de Belleval: En tout cas, vous savez que ce point de vue-là, à savoir qu'il y a trop de camions, a été contesté hier en particulier par les gens des coopératives de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac-Saint-Jean, certains disant que ce n'est pas tellement qu'il y a trop de camions, mais que le marché est mal organisé, est mal réparti. Quoi qu'il en soit, il ne faut pas oublier non plus que tout le marché du camionnage, y compris pour les artisans, ne passe par les postes de courtage, les postes d'affectation. Cela ne veut pas dire qu'un camionneur prend tout son travail du poste d'affectation. Plusieurs camionneurs, y compris les membres des postes d'affectation, réussissent à se trouver du travail directement par leurs propres efforts. Il faudrait faire attention aussi quand on interprète les chiffres qu'on trouve dans les postes d'affectation. Je pense que c'est bien connu que les camionneurs se trouvent du travail par eux-mêmes aussi, du travail légal, d'ailleurs. (10 h 45)

M. Alarie: M. le Président, M. le ministre, si vous me le permettez, chez nous, ce n'est pas seulement bien connu; c'est la méthode de travailler. On trouve nous-mêmes notre travail. On a des flottes de camions qui font du transport en vrac, qui ont des permis VR et qui grandissent. Ce n'est pas tout le monde qui perd des camions. Il y en a d'autres qui cherchent à en acheter, parce qu'il y a un marché. Ils vont chercher le marché là où il est. Le chiffre de 4000 qu'on avance, c'est un chiffre d'ensemble. C'est certain que celui qui est entrepreneur et qui veut réussir en affaires, qui veut grossir sa compagnie, va trouver les moyens de trouver du travail et d'agrandir sa flotte. Donc, pour lui, il manque de permis, dans son cas.

M. de Belleval: Par ailleurs, votre recommandation d'enlever l'exclusivité du courtage aux postes d'affectation, ça veut dire, à toutes fins pratiques, qu'on retourne à un système où le

marché se désorganise davantage au lieu de s'organiser. Je veux bien croire qu'on doit laisser à chacun le sens de l'initiative, etc. On a vu dans le cas du poste 06 que c'est exactement ce qu'ils font. Ils s'organisent et ils essayent d'aller chercher des marchés. L'Association des camionneurs en vrac, hier, n'avait rien contre ce genre de concurrence. Mais vous ne trouvez pas que, de la même façon que si on abolissait la réglementation dans le transport général on se retrouverait devant une désorganisation du marché, au moins à court terme, jusqu'à ce que les plus forts réussissent à survivre et réorganisent le marché, peut-être même avec des forces monopolistiques dangereuses, la même chose se produirait dans le camionnage en vrac? Si on leur enlève le courtage exclusif, on va se retrouver encore une fois avec des bureaux de courtage comme ceux qu'on avait autrefois: les bureaux de courtage de l'ANCAl, ceux des coopératives, ceux de certains entrepreneurs ou associations de camionneurs, les battes de baseball qui rassortent ou, enfin, l'intimidation d'un poste de courtage à l'autre.

Dans l'état actuel du surplus d'offre par rapport à la demande, ça ne vous apparaît pas dangereux. Si je suivais vos recommandations en ce qui concerne le vrac entièrement et que j'appliquais cela au général, je pense que vos membres ne trouveraient pas la solution bien agréable en ce qui concerne le transport général, en tout cas. Avez-vous pensé à ça?

M. Alarie: Oui. Je ne sais pas sur quel point vous dites que nos membres ne trouveraient peut-être pas ça agréable. Mais, lorsqu'on parle de la clause 75-25, on prend deux classes de transporteurs.

M. de Belleval: Excusez-moi, je ne parlais pas de la clause 75-25 qui est un privilège effectivement consenti à une classe de camionneurs. Mais l'exclusivité du courtage comme telle c'est un moyen d'organiser l'industrie — ce n'est pas nécessairement un privilège — de la même façon que l'organisation de l'industrie par la Commission des transports ou la réglementation sur le transport général, c'est une façon de civiliser et d'organiser la concurrence. Alors, c'est ce que je veux dire. Si on appliquait votre raisonnement en ce qui concerne le courtage exclusif — je ne parle pas de la clause 75-25 — aussi au transport général, en disant: On va laisser la concurrence jouer, plus besoin de permis, chacun desservira où il le veut en allant chercher de la "business" où il le veut, je pense que vous ne seriez pas d'accord avec une pareille proposition. Alors, je me demande pourquoi vous faites cette proposition dans le cas du camionnage en vrac.

M. Bélanger (Gilles): M. le Président, si vous me permettez de tenter de répondre à la question du ministre...

M. de Belleval: A première vue, autrement dit, je trouve votre suggestion un peu excessive. En tout cas, je vous laisse répondre. Je m'excuse.

M. Bélanger: La suggestion n'est pas d'éliminer les postes d'affectation comme courtiers ou entreprises de courtage.

M. de Belleval: J'ai compris cela.

M. Bélanger: Le courtier est quand même un intermédiaire entre une entreprise réglementée et les usagers de ce type de service. A notre avis, en enlevant l'exclusivité du courtage, ça permettrait à ces entreprises, à ces postes de courtage de compétitionner avec d'autres postes de courtage et avec des entrepreneurs.

Nous sommes dans une réglementation à double palier; je soutiens que la comparaison avec l'entreprise du camionnage ou l'association du camionnage, les camionneurs généraux, est un peu boiteuse parce qu'elle se réfère à la réglementation de base, tout de même, qui continue et qui continuerait d'exister parce que les permis sont là, les permis existent. Par les permis, on a voulu mettre de l'ordre dans cette industrie, mais on a ici une réglementation au deuxième palier où on veut forcer les entreprises à passer par un même courtier. Le courtage existe dans plusieurs domaines, dans plusieurs secteurs de l'industrie et il existe même dans le camionnage; dans le camionnage, il n'y a pas d'exclusivité.

M. de Belleval: Oui, mais n'oubliez pas que, dans le cas du camionnage général, même si c'est au premier palier, comme vous le dites, que cela se passe, il n'en reste pas moins qu'au premier palier, il y a une ordonnance de la concurrence. On ne permet pas à n'importe qui de faire concurrence à n'importe qui, n'importe où.

M. Bélanger: On a cela aussi dans le règlement en vrac.

M. de Belleval: Dans le cas du règlement en vrac, l'offre de service est atomisée entre — on l'a vu — plusieurs milliers de petits entrepreneurs, si l'on veut, d'entrepreneurs artisans ou petits entrepreneurs. A ce moment-là, la façon qu'on a trouvée pour organiser le marché, c'est de trouver des bureaux de courtage, ce que sont les postes d'affectation, et de leur réserver cette activité, compte tenu, justement, de l'atomisation de l'offre. Il ne s'agit pas de trois ou quatre entreprises qui se font concurrence sur une route donnée, comme c'est le cas dans le transport général; il s'agit de centaines de petits entrepreneurs qui se font concurrence sur de vastes territoires entre tous les points de ce territoire, et même entre des points du territoire et d'autres territoires, comme on l'a vu.

Que ce soit au premier palier ou au deuxième palier, il me semble que les principes qui valent pour le camionnage général doivent valoir aussi pour le transport en vrac. Je vous le demande, est-ce que vous accepteriez, justement, la même libéralisation du côté du transport général que ce que vous demandez pour le transport en vrac?

M. Alarie: M. le ministre, si vous me permettez, ceci revient à dire qu'il faudrait instituer des

postes de courtage dans la ville de Montréal parce que, pour le transport général, et ce qu'on appelle le transport local, cinq milles/trente milles, on sait qu'à Montréal, il y a 900 détenteurs de permis alors qu'il y a un besoin d'à peu près 600 et qu'on fait face à une industrie artisanale.

A ce moment, cela veut dire qu'on se revire de bord et on met des postes d'affectation pour répartir le travail à parts égales entre tous les détenteurs de permis généraux. Qu'est-ce qui va arriver? On va faire face à un autre problème. Quel travail?

M. de Belleval: Oui, mais, M. Alarie, comme vous le mentionniez tantôt dans votre mémoire, où il y avait une forte faveur sociologique — que j'ai d'ailleurs trouvée fort intéressante — à savoir que l'agitation sociale amène des gouvernements nerveux, si je puis dire, à prendre des mesures d'apaisement qui, même si elles ont des effets difficiles ou désastreux à long terme, ont en tout cas le mérite à court terme de renvoyer les gens chez eux un peu plus de bonne humeur que lorsqu'ils en sont sortis, c'est un facteur dont il faut tenir compte dans le cas du transport général en vrac.

La paix sociale a un certain prix, mais elle a aussi un certain avantage pour tout le monde, vous l'admettrez. Dans le cas de ce qui se passe à Montréal pour le transport général, que je sache, il n'y a pas encore de camionneurs qui se sont livrés à des assauts sur d'autres camionneurs. On n'a pas vu de manifestations et de troubles sociaux; ces gens réussissent à s'organiser. Je suppose que cela veut dire que le système, finalement, ne fonctionne pas si mal; ce qui ne veut pas dire qu'un système de courtage ne serait pas utile non plus pour rationaliser tout cela, mais les gens qui sont dans cette industrie, pour l'instant, ont l'air de s'en accommoder.

Je n'ai pas besoin de vous dire que si on voulait retourner à l'ancienne situation, au Québec, je pense que les événements de mai 1968 et tous les autres dont vous avez parlé pourraient revenir au Québec dans le cas du camionnage en vrac.

M. Alarie: Remarquez bien, M. le ministre, qu'il faut quand même faire un choix. Bâtit-on le système des transports au Québec sur des bases de protection sociale ou si on le bâtit sur des bases de libre entreprise et d'entrepreneurs qui se font concurrence et le plus fort passe à travers? C'est là la première décision à prendre. A ce moment-là lorsqu'on donne une garantie de travail, soit une clause de 75-25 ou le courtage exclusif, on l'enlève quelque part ce travail-là. Il a été dit depuis le début de la commission parlementaire qu'il n'y a pas plus de travail qu'il y en avait il y a deux ou trois ans. La seule chose c'est qu'on cherche à aller chercher des marchés exclusifs, des parts de marché et, plus ça va aller, plus on va chercher à agrandir cette part de marché.

Lorsque la réglementation sur le vrac a été adoptée dans les années 1969 et 1970 et qu'elle est devenue effective en 1972, le premier problème c'était pierre, sable et gravier. Si on prend l'énumération des produits dans i, ii, iii, on s'aperçoit qu'on a mis les grains de provende et toutes les moulées qui étaient transportées par les transporteurs généraux, on a mis les copeaux, on a mis tous les produits pour essayer de donner plus de marchés. Qu'est-ce qui arrivera, est-ce que cela veut dire que toutes les fois qu'on va manquer de travail on va se tourner de bord, on va ajouter une matière et on va la faire passer par les postes d'affectation? C'est-à-dire que tout le système de transport soit pareil. Qu'on prenne le transport général et qu 'on dise qu 'on forme des gros postes d affectation et qu'on appelle les transporteurs camion par camion et qu'on leurdonne du travail. Si c'est ce qu'on veut, qu'on le fasse complètement. Mais, si on bâtit notre système de transport sur un système de libre entreprise qui donne un service à une population à un coût raisonnable, il ne faut pas enlever le travail aux entrepreneurs qui, au bout de l'année, ne font pas des profits énormes pour le donner à des travailleurs et annuler des emplois. Les chauffeurs de nos entrepreneurs ou les chauffeurs des gens qui travaillent sur un camion ne sont peut-être pas artisans, les camions ne sont peut-être pas à eux, mais ils travaillent aussi, ils ont le droit de travailler.

M. de Belleval: Je comprends bien votre point de vue là-dessus, mais au fond la clause 75-25 ce n'est pas moi qui l'ai consentie, c'est mon collègue de Charlevoix dans le temps et M. Pinard, je pense, qui était ministre à cette époque. Je pense que vous étiez son adjoint parlementaire. Vous avez participé à toutes ces tractations-là. L'idée était, à ce moment-là, la suivante, je pense, devant les troubles sociaux. Il y en avait des troubles sociaux, vous avez raison de le mentionner; je ne sais pas s'ils étaient en relation avec tous les autres troubles dont vous avez parlé, c'est un point secondaire, restons-en au niveau du camionnage en vrac. On n'a pas besoin de faire appel aux événements de mai en France, il n'en reste pas moins qu'il y avait du trouble ici suffisamment. C'est ce qui a amené le gouvernement d'alors, à tort ou à raison, à essayer de régulariser la situation, à créer des postes de courtage et à leur donner une certaine stabilité de départ en leur donnant, disons, un secteur exclusif pour leur permettre de s'établir. Je pense que c'était ça au fond l'idée; le député de Charlevoix pourra peut-être tantôt me corriger là-dessus ou donner des explications supplémentaires, mais je pense que c'était l'idée. C'était de dire: On va donner une chance aux postes de courtage de s'établir en leur donnant une base de départ. Mais, à partir de ça, la question qui se pose, et là je vous rejoins, c'est: Est-ce qu'on n'est pas allé trop loin et est-ce qu'on n'est pas embarqué dans un engrenage où on n'aide plus certaines personnes à s'organiser, à rétablir une certaine paix sociale, mais où on leur donne à leur tour des privilèges exorbitants? Je pense que c'est dans cette direction qu'il faut orienter notre réflexion, mais je me rends compte

que ce que vous proposez à toutes fins utiles, c'est de ramener l'horloge avant 1968, 1970, 1972, selon le cas, si je suis bien vos exemples.

Pour l'instant je termine là mes réflexions, je vous remercie beaucoup pour votre contribution quand même parce qu'elle apporte d'autres points de vue et nous permet de mieux cerner le problème.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, normalement ça devrait être mon collègue de Gatineau qui intervienne à ce moment-ci, étant donné que c'est un des mémoires importants qui est présenté principalement par la partie adverse puisque ceux qui sont à la barre représentent l'Association du camionnage du Québec. (11 heures)

II est permis à un membre de la commission de parler en son nom personnel et je voudrais vous dire que ces réflexions ou ces observations, je les fais étant donné que, d'abord, je me sens mis en cause. Probablement que mon prédécesseur est mis en cause également. Je voudrais les faire à titre personnel, parce que je voudrais dire immédiatement que ce n'est pas en consultation avec le parti, mais d'après l'expérience que j'ai connue.

On ne va pas chercher des sympathies et je sais pertinemment, d'abord, que la direction de l'Association du camionnage n'aime pas plus qu'il ne faut celui qui parle. Je pense bien que c'est son droit, en raison de l'ensemble de la réglementation et des modifications qui ont été apportées depuis 1970 ou à peu près. Quand, à la page 13 de votre mémoire, vous décrivez le climat de 1970 et que vous mentionnez, comme prémisses aux décisions qui ont été apportées à ce moment-là, l'affaire Cross-Laporte, les 100 000 emplois, le moins que je puisse dire, c'est que votre association a beaucoup d'imagination.

Nous faisons face, à ce moment-là. M. Pinard et moi, de même que le gouvernement qui était en place, à une période assez difficile où il y avait des tensions dans la société, où les mouvements syndicaux prenaient de l'importance, où les revendications à l'endroit des gouvernements s'accentuaient. Je pense que c'est une évolution normale à laquelle les gouvernements devaient faire face. Mon précédesseur, je ne le mettrai pas trop en cause, parce que je vous avouerai franchement que dans ce qui s'est passé dans le vrac, je peux prendre une bonne part des responsabilités, parce que c'est pour et en son nom que j'ai agi.

Dans les deux jours qui ont précédé le malaise que voulait corriger la commission Lippé, qui avait étudié le problème en 1965, et contrairement à ce que vous affirmez, si on regarde l'intention du législateur, qui n'a pas donné les effets voulus — ça, je l'avoue bien franchement — on a donné suite à une commission dûment nommée par le Parlement qui avait étudié l'ensemble du problème. Et dans des mémoires précédents, je pense que cela a été avoué, on a donné suite à peu près à l'ensemble des suggestions de la commission Lippe.

Il y a eu la Loi sur les transports. Il y a eu la formation, à la suite de la loi, à la Commission des transports. Il y a eu les règlements qui ont suivi qui régissent les actions de la Commission des transports, qui est un tribunal quasi judiciaire. On a dit hier, et le ministre actuel, je pense, a accepté ça également, qu'on ne pouvait pas accuser les politiciens d'avoir voulu aller chercher des votes en tâchant de poser certains gestes dans le domaine du transport en vrac parce qu'il n'y avait pas de votes à aller chercher là-dedans. On cherchait à régler un problème aigu. On a dit également que, dans l'esprit de M. Pinard, de moi-même et d'autres, de la commission Lippé, on constatait déjà qu'il y avait un trop grand nombre de camions dans l'activité donnée du transport en vrac. Cela tout le monde le constatait. On a dit qu'on reconnaissait, nous, qu'il y avait des droits acquis qu'il fallait respecter, chez vous comme chez d'autres. C'est pour ça que, jusqu'en 1975 ou 1976, des délais ont été accordés pour que ceux qui avaient des droits acquis les fassent valoir devant la Commission des transports.

A ce moment-ci, je serais loin d'accuser la Commission des transports d'avoir donné trop de permis, parce qu'à travers les règlements qui ont été adoptés — je ne suis pas homme de loi moi-même, mais il y en avait plusieurs à mes côtés — on n'a pas prévu toutes les conséquences qu'entraînerait à la commission le règlement qui régissait ces décisions.

On constate que des gens qui n'étaient pas dans l'activité ou qui possédaient des unités inoccupées depuis des mois ont réussi, par le biais ou en contournant la réglementation, d'aller faire reconnaître des droits acquis qui, en fait, n'existaient pas. Ce n'est pas là qu'était l'intention du législateur, parce que le législateur voulait absolument paralyser l'addition de nouvelles unités, car on en avait déjà trop à ce moment. Que des anomalies se glissent dans l'adoption d'une loi ou des règlements, après avoir été 18 ans en Chambre, j'ai toujours déploré l'abolition du Conseil législatif, parce qu'à chaque fois qu'il y a une loi adoptée, le Conseil législatif qui siégeait ici — même qu'il y en avait peut-être trois ou quatre qui étaient hommes de loi — nous retournait parfoi; des projets de loi avec des amendements considérables. Cela évitait à l'Assemblée nationale de faire des erreurs.

Je ferai simplement référence à un bébé qu'a entre les bras mon successeur: quand on a passé comme mesure de sécurité routière le règlement de points de démérite — c'est possible que si j'avais été homme de loi moi-même, je me serais aperçu de l'anomalie — on voulait apporter un système de points de démérite qui tende à réduire le nombre d'accidents sur les routes et, à un moment donné, il s'est glissé une anomalie dans le règlement dans le sens que c'était le directeur qui devait enlever les points de démérite et, comme ce n'est jamais le directeur qui les enlève,

le système de points de démérite a été foutu par terre. Je ne pense pas que c'était parce que le législateur voulait, évidemment, que le système ne soit pas valable. C'est parce qu'il y a eu une erreur qui s'est glissée quelque part et qu'aucun procureur ne s'en est aperçu sur le moment, mais après cela, devant les cours de justice, les avocats ont vite trouvé le vice du système.

Changeant de sujet, je pense — vous me corrigerez si je fais erreur — que vous avez toujours contesté la trop grande réglementation. Vous prônez un système ou la libre entreprise, la libre force du marché puisse s'exercer. Tantôt, le ministre y a fait allusion un peu. Vous parlez de la clause 75-25 comme une mesure d'assistance sociale déguisée qui a été donnée. Je voudrais que vous me disiez, vous autres qui êtes nés principalement, dont l'ensemble de vos membres sont nés principalement de l'ancienne Régie des transports, ce n'est pas par un système d'assistance sociale que vous êtes venus au monde, que vos membres sont venus au monde, mais ils sont venus au monde dans un système très bien protégé et je ne sache pas que quand un permis vous était accordé par la Régie des transports du temps, n'importe qui pouvait entrer dans le même circuit. Je pense bien qu'à ce moment, vous aviez une réglementation quand même assez sévère et celui qui voulait demander un permis sur un circuit existant, devait faire la preuve devant la Régie des transports qu'il avait un besoin supplémentaire, sinon, il avait un refus. Bien sûr, il y a eu des anomalies. Je ne voudrais pas en mentionner aucune, mais on sait comment certaines anomalies se sont produites dans ce temps-là. Je sais également que vous étiez satisfaits, votre association était bien satisfaite de la Régie des transports du temps et tout ce que cela a apporté.

M. le Président, si on retournait complètement à la libre entreprise et aux forces du marché, dans le camionnage à longue distance, je ne suis pas certain non plus que les prix, pour un certain temps, ne seraient pas réduits si la libre force du marché pouvait s'exercer et si d'autres pouvaient entrer dans les circuits de ceux que vous défendez. Probablement que pour un certain temps, le contribuable y gagnerait en réduction de tarif parce qu'il y aurait une guerre qui arriverait immédiatement. Pour combien de temps le contribuable en bénéficierait-il? Qui, en définitive, réussirait à surnager dans une telle déréglementation complète ou à peu près, parce que c'est un peu ce que vous suggérez? Dans le domaine du vrac où il y a trop de monde actuellement, il y a une déréglementation la plus accentuée possible.

Dans l'activité qui vous concerne, il y a un autre phénomène que vous semblez oublier, c'est que la construction des routes du Québec a pour effet d'aider l'ensemble des contribuables du Québec. Mais s'il y a, je pense, une activité qui en bénéficie, peut-être en taux qui ne s'élève pas trop vite, c'est également le transport de longue distance, qui use les routes du Québec sûrement plus vite que l'automobiliste, avec un véhicule de 3000, 4000 ou 5000 livres. Je serais loin de parler d'assistance sociale déguisée, parce que c'est pour le bien de l'ensemble du public, pour maintenir les taux forcément à des coûts acceptables pour le contribuable, mais ça aide quand même, en premier lieu, l'activité qui vous concerne.

J'ai parlé hier de certaines matières qui vous ont été enlevées, le sel en particulier, ce qui a pu apporter des problèmes assez difficiles à certains de vos membres. C'était votre droit de protester. Mais je ne pense pas qu'en enlevant 700 000 tonnes de transport au camionnage du Québec, dans une matière de vrac — je pense que du sel, ça doit être considéré comme du vrac — je ne pense pas que ce soit ça qui ait permis que l'Association du camionnage du Québec et ses membres soient en difficulté. C'est pour cette raison qu'on a jugé, dans le temps, qu'il fallait absolument aider ceux qui étaient dans l'autre activité.

Pour en revenir aux conclusions que vous amenez quant aux postes de courtage et autres, j'ai déjà dit moi-même qu'à la suite de tout ce qu'on constate depuis les quinze dernières années et dû au fait qu'il n'y a pas eu d'amélioration sensible, une certaine déréglementation doit être nécessaire pour faire en sorte qu'à partir de prix, peut-être minimum, les forces du marché s'exercent et que ceux qui, dans le domaine du vrac, peuvent faire la preuve qu'ils doivent demeurer dans l'activité, puissent continuer leur activité. Je pense qu'il y a une certaine déréglementation qui doit être nécessaire, sans qu'elle soit accentuée à l'infini ou cela apporterait une autre difficulté profonde. (11 h 15)

On a mentionné hier, qu'il faudrait que le gouvernement ou que les gouvernements puissent trouver une forme de dédommagement pour ceux qui ne peuvent continuer à cause du trop grand nombre d'unités qu'on retrouve dans l'activité qui ne sont pas en mesure d'espérer un volume de travaux acceptable, alors que la construction des routes s'en va quand même en déclinant. Je pense que là également, il va falloir que les gouvernements s'évertuent à trouver une formule par laquelle ces gens-là pourront changer d'activité.

Par contre — qu'on aime ça ou non, je vais être obligé de l'avouer — j'ai toujours cru qu'au moment où mon successeur, M. Lessard, formait les postes de courtage, ça permettrait aux artisans, aux autres transporteurs vrac qui appartiennent à d'autres associations, coopératives, à ceux qui possèdent trois ou quatre camions, de former une certaine unité et que l'ensemble de ceux qui sont dans ce métier pourraient faire un front commun.

On constate — c'est peut-être un peu logique que ça aille dans ce sens-là — que l'ANCAl, de la majorité qu'elle possède, ou crée certaines injustices, ou agit à l'endroit des autres dans un sens qui, j'imagine, n'est pas le plus équitable possible. Quelle formule pourrait-on trouver, afin que ceux qui devront rester à l'intérieur d'un poste de courtage ou d'un sous-poste et qui veulent demeurer dans l'activité, qui permettra que la distribution se fasse de la manière la plus équitable possible, alors que des gens qui devraient être des frères

arrêtent de se déchirer entre eux? Forcément, il va falloir que tous les intervenants qui sont dans ce métier fassent un examen de conscience et voient dans quel sens ils sont en mesure de se partager l'activité qui va en diminuant.

J'avais d'autres observations à faire, mais elles sont tellement personnelles que je les éliminerai. De toute façon, votre association a le droit de protéger ses intérêts. Je ne la blâme pas, mais je ne suis pas sûr, ayant vécu l'expérience, que sous le couvert de rentabilité, ce qui vous a été enlevé et donné à ceux qui sont dans le vrac, a été tellement nocif à vos membres que cela ait pu les mettre en difficulté financière. Je pense que le malaise, il n'est pas chez vous, il est chez les autres. Je ne regrette pas que certaines matières leur aient été concédées, nonobstant les malaises qu'on a rencontrés depuis.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. J'aimerais savoir des représentants de l'Association du camionnage du Québec, qui ils représentent.

Lorsque vous dites que 70% de vos membres ont moins de cinq camions, est-ce que je dois comprendre que les autres 30% comprennent les compagnies comme on peut en connaître, à savoir les flottes de 100 camions, 200 et même 1000 camions de transport général? Est-ce que ces compagnies sont membres chez vous? Ce qu'on appelle le transport général, pour en nommer: Guilbault, Maislin, Bellechasse, Rimouski, Speedway, toutes ces compagnies-là, est-ce qu'elles sont parmi vos membres? Est-ce que vous parlez au nom de ces compagnies aussi?

M. Alarie: On représente les compagnies de un à un nombre illimité de camions, c'est-à-dire que les compagnies que vous avez citées en exemple sont membres chez nous aussi bien que celui qui fait un travail artisanal et qui n'a qu'un camion.

M. Goulet: Le but de la commission, c'est de comprendre des mémoires, d'interroger des gens et de voir si Ies propositions, les recommandations qu'ils font peuvent aider, soit le gouvernement, le ministre ou les intéressés à régler le problème.

Quand quelqu'un vient et emploie des mots comme pureté, sainteté ou qu'il parle de principe, je suis intéressé davantage et, bien souvent, ça me rend allergique.

C'est pourquoi vous me permettrez, tenant compte de ces remarques, de relever certains points de votre mémoire afin de savoir si j'ai bien compris, de façon à connaître également le fait que vos recommandations aideront vraiment à régler le problème qui est nôtre, soit le problème des camionneurs artisans et le problème du transport en vrac au Québec. Parce que, à l'intérieur de votre mémoire, vous touchez à certains principes et plus loin, vous faites certaines recommandations.

Je voudrais savoir si j'ai bien compris, parce que vous touchez à des principes et, ensuite, vous semblez — je dis bien "vous semblez", peut-être que j'ai mal compris — en venir à des conclusions qui vont à l'encontre de ces principes.

Je vais vous donner des exemples et vous me corrigerez si je fais erreur. Je pense que c'est le but de la commission. Lorsque vous dites, à la page 2 de votre mémoire: Pendant six ans, il y a eu jusqu'à treize arrêtés en conseil, n'est-il pas vrai que, s'il y a eu des arrêtés en conseil en très grande quantité, c'est parce que, d'abord et avant tout, ils ont été faits suite à des pressions justement, du transport général et souvent même des membres de votre association?

M. Alarie: M. le Président, M. le député, il y a beaucoup d'arrêtés en conseil qui ont été faits grâce à des pressions de notre association. Les raisons sont simples. C'était pour sauvegarder les droits que nos camionneurs avaient. D'ailleurs — je voudrais juste ouvrir une parenthèse ici — M. Mailloux et le gouvernement d'alors... Dans notre mémoire, on n'a pas cherché à mettre la faute sur un gouvernement quelconque. Lorsqu'on parlait du climat d'antan, c'était pour essayer de situer dans le temps dans quel climat on se plaçait. Ce n'était pas une attaque contre le législateur du temps, au contraire, mais plutôt pour essayer d'établir les faits le mieux possible.

M. Goulet: Cela va. Juste une correction, en passant. A la page 3 de votre mémoire, vous dites que la clause 75-25 a été jugée illégale. Je pense qu'il serait bon d'apporter une clarification ici, de façon à ne pas induire, non plus, les gens en erreur. N'est-il pas vrai que cette clause a été jugée illégale peut-être une fois? Il s'agit d'un contrat qui avait été accordé par une ville du Québec. Cette clause a été jugée illégale dans ce cas précis parce que le contrat avait été négocié avec une ville. Mais la clause n'a pas été jugée illégale à la suite d'un contrat négocié, par exemple, avec le ministère des Transports ou le gouvernement.

Est-ce que vous ne faites pas allusion, lorsque vous parlez de décembre 1979, à la cause qui avait été jugée à Sept-lles concernant la ville même de Sept-lles et non pas la clause 75-25 qui apparaît dans le règlement? Ce sont deux choses différer tes.

M. Alarie: II est exact, M. le Président, que la référence que nous faisons est évidemment à la décision concernant le contrat signé par la ville de Sept-lles. Il y a des situations semblables qui peuvent exister avec d'autres organismes gouvernementaux et avec d'autres organismes subventionnés, si on veut pousser plus loin l'application de la clause 75-25.

M. Goulet: D'accord. Mais, dans ce cas précis, elle a été jugée illégale pour un contrat négocié avec une ville, mais pas pour un contrat négocié avec une entreprise gouvernementale. Quand vous

dites: Cela a été jugé illégal, il semblerait qu'on veut généraliser et ce n'est pas le cas, parce qu'il faut faire une distinction. Dans la clause 75-25, il n'était jamais question des villes ou des villages. Il était dit: On va recommander aux villes et aux villages de la suivre. C'est un voeu que le ministre avait formulé à ce moment. Mais il n'était pas question dans ce règlement que la clause 75-25 touche les villes. C'était surtout pour une partie des contrats du ministère des Transports. Quand vous faites allusion à ça, je dis que ce sont deux choses complètement différentes.

M. Alarie: La recommandation, M. le Président, du ministère des Transports qui vaut auprès d'autres ministères, des villes et des entreprises subventionnées, c'est une recommandation. Mais à partir du moment où cette clause ou le contrat peut être déclaré quant à cette partie illégal par une cour dans le cas d'une ville, ça pourrait possiblement s'appliquer dans le cas d'un autre ministère. Je ne veux pas replaider cette cause, mais ça pourrait s'appliquer dans le cas d'un autre ministère. Là tout à fait sujet à vérification, cela pourrait peut-être s'appliquer au ministère des Transports. Cela n'a pas été testé encore par les cours.

M. Goulet: C'est ce que je voulais simplement vous faire dire, que ça n'a pas été testé. La charte d'une ville et la charte d'un ministère, ce sont deux choses différentes. La cause présente que vous mentionnez ici, il s'agit d'une cause avec une ville précise, qui n'a pas la même charte que le ministère des Transports. Sauf erreur, dans le cas du ministère des Transports, cette clause n'a jamais été jugée illégale jusqu'à présent. Elle est encore bonne. C'est ça que je voulais dire.

M. Alarie: Mais je voudrais préciser, M. le député, que la clause n'a pas été jugée illégale vu un manque de pouvoir de la ville ou dans la charte de la ville. Elle a été jugée illégale sur l'existence même de la clause 75-25.

M. Goulet: Toujours en tenant compte de vos recommandations, je voudrais bien qu'on fasse la lumière. Je parlais tantôt de principe, c'est parce que je me dis qu'on peut être pour un principe, on peut également être contre un principe, mais il est difficile d'être pour les deux en même temps. Je ne veux pas être méchant, je ne veux pas être désagréable, mais, encore une fois, je voudrais vous ramener à la page 3 de votre mémoire lorsque vous dites, à la toute fin de la page: "Vous avez donc, distingués membres de la commission parlementaire — vous vous adressiez à nous, à ce moment-là — à juger des mérites du protectionnisme comparés à ceux de la libre entreprise dans le cadre d'une réglementation générale du transport routier."

Vous représentez vraiment des transporteurs, comme le disait mon collègue de Charlevoix, qui ont été dans bien des cas surprotégés, avec des circuits réservés et même, dans bien des cas, avec des subventions. Il y a beaucoup de compagnies de transport général, entre vous et moi — j'espère que les autres n'écoutent pas — qui existent actuellement, qui ont grossi leur flotte de camions et qui donnent un très bon service — je n'en suis pas là-dessus — mais s'il n'y avait pas eu de circuits protégés, je me demande si elles aussi, aujourd'hui, n'en seraient pas rendues au "bien-être social", comme vous en accusez les camionneurs artisans. Tous les domaines du transport général, actuellement, sont protégés.

Je suis résident du comté de Bellechasse et j'ai été pendant treize ans propriétaire d'un commerce qui faisait de l'importation et du transport. Je peux vous dire que je n'avais pas la liberté de faire affaires avec qui je voulais quand je voulais; j'avais la liberté de faire affaires avec une ou deux compagnies qui donnaient le service dans ma région et au taux que cette compagnie exigeait. Vous allez dire: Oui, c'est fixé par la compagnie. Mais si j'avais eu la liberté de prendre le transporteur que j'avais voulu, bien des fois, j'aurais mis de l'argent dans mes poches. Vous allez dire: II y a des règlements qui existent, mais vous avez des circuits protégés. Je me demande comment il se fait que vous soyez défavorable à ce qu'un gouvernement ou une loi puisse protéger un groupe de camionneurs quand le groupe de camionneurs qui nous dit cela a justement, dans bien des cas, pu monter sa flotte de camions et en venir à une belle réussite — je les félicite — d'abord et avant tout parce qu'ils s'assuraient d'un circuit protégé.

M. Bélanger: M. le Président, je vais répondre que rien n'a jamais empêché le député du comté de Bellechasse de demander un permis pour soutenir la concurrence sur les routes déjà dites, entre guillemets, "protégées" pour d'autres transporteurs. Les transporteurs ont toujours la liberté, présentement, de se présenter devant la Commission des transports, de demander des permis. Je vous assure, M. le député, que ça se produit tous les jours. La commission rend tous les jours des décisions favorables après avoir entendu la preuve présentée par les transporteurs.

Nous existons dans un contexte réglementé, de même que le camionnage en vrac, indépendamment des postes d'affectation, existe aujourd'hui dans un domaine réglementé. Nous ne sommes pas contre le fait que le camionnage en vrac soit réglementé; nous recommandons seulement qu'en enlevant l'exclusivité au poste d'affectation, on permette plus de concurrence dans le domaine. On a déjà protégé l'existence de permis, on a déjà protégé ces permis d'une région à l'autre. Il n'est pas facile de se transporter, pour un camionneur en vrac, d'une région à l'autre pour travailler n'importe où. Cette protection réglementaire existe déjà et on ne veut pas l'enlever; on veut simplement enlever, si possible, la trop grande protection.

Je voudrais, à ce niveau — parce que ça cadre bien dans le sujet — revenir à une situation soulevée par M. le député de Charlevoix. M. Mailloux nous a parlé tout à l'heure des remarques

de notre mémoire concernant le trop grand nombre de permis. Notre mémoire ne voulait pas — et si c'est l'impression qu'il a créée, nous nous en excusons — reprocher aux gouvernements antérieurs, au gouvernement actuel ni à la Commission des transports l'existence de ce trop grand nombre de permis. Nous avons bien dit dans notre mémoire qu'il était impossible de connaître les implications. (11 h 30)

II est impossible de savoir d'avance où nous conduirait le nombre de permis et je vais vous dire pourquoi. Il n'était pas nécessaire de détenir un permis avant 1972 ou avant 1974 pour transporter du gravier. Tous les gens qui transportaient du gravier à l'occasion, qui faisaient un voyage une fois ou deux par semaine pour ajouter à leur revenu, ces gens-là qui n'étaient pas de véritables camionneurs artisans, qui ne vivaient pas du transport par camionnage de gravier à ce moment-là, dans le cadre de la réglementation il fallait qu'ils protègent leur droit occasionnel de transporter. Alors ils sont allés chercher un permis et à partir... Je ne connais pas le nombre de transporteurs qui vivaient cela à ce moment-là. Il y en avait peut-être 4000, il y en avait peut-être 6000, il y en avait peut-être 8000, mais le fait de l'exigence du permis obligeait tous ceux qui le faisaient occasionnellement pour pouvoir maintenir cette possibilité d'obtenir un permis. On en a fait des camionneurs en vrac autorisés détenteurs de permis. Il le fallait. C'est pour ça que sont apparus tout à coup de nombreux camions. Cela n'a rien à voir avec l'administration gouvernementale d'alors, mais ça n'a fait que rejoindre un fait qui existait.

Ces gens-là ont dû nécessairement se protéger. Il le fallait pour aller chercher ce revenu d'appoint additionnel qui existait. On a ainsi créé un surplus de camionneurs. Il y a d'autres dispositions réglementaires qui disent qu'à partir du moment où vous êtes détenteur de permis il faut dépenser $2000 par année pour acheter des plaques d'immatriculation sur ce véhicule, il faut dépenser tant pour les assurances, il faut faire des rapports financiers, il faut faire ci et ça. Evidemment, ça créait des dépenses additionnelles. Il fallait aller chercher des revenus additionnels et tous ceux qui faisaient deux voyages ont commencé à voir la nécessité de travailler deux jours, trois jours ou quatre jours, autant que faire se pouvait.

C'est donc par la nécessité de détenir ces permis-là et de satisfaire à toutes les conditions que s'est ajouté ce trop grand nombre de permis. On ne pouvait pas éviter ça parce que — M. le député de Charlevoix l'a mentionné à plusieurs reprises depuis le début de cette commission — il fallait évidemment, parce qu'on réglementait un domaine qui était laissé à la libre concurrence antérieurement, protéger les droits acquis. Il ne fallait pas brimer ce qui avait existé auparavant. Il ne fallait pas enlever aux gens ce qui était devenu une entreprise, même si elle était occasionnelle pour eux.

C'est une situation de fait devant laquelle on se retrouve, ce n'est pas une situation de mauvaise administration. La Commission des transports a agi dans le cadre des règlements. On a dit: Chacun de ceux qui ont des droits acquis... Et les droits acquis ce n'était pas de travailler pour $50 000 par année ou de travailler cinq jours par semaine. Les droits acquis c'était de faire du travail dans ce domaine-là. On ne pouvait faire autrement. Alors la commission a respecté les droits acquis. Il n'y avait pas possibilité de faire autrement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: J'ai demandé au député de Bellechasse de me permettre de faire une observation. Je pense que oui, à ce moment-là, on a voulu respecter les droits acquis, mais j'ai déjà dit que, dans la réglementation que devait suivre la Commission des transports, on n'a pas assez accentué certains droits acquis qui ne pouvaient être respectés parce que certaines personnes étaient sorties de l'activité depuis un certain temps. On a mentionné hier des cultivateurs et autres qui ont pu, sous le couvert de droits acquis, entrer dans l'activité et je comprends que des associations qui naissaient à ce moment-là cherchaient des membres et il y avait une pression qui se faisait. Mais, dans tout le débat qui nous occupe actuellement, la plus grande conséquence dont on ne s'est pas préoccupé, si on se reporte aux années 1970, 1972 ou à peu près, même avec le trop grand nombre de permis, c'est qu'on n'a pas pensé que les camions à quatre ou six roues qui existaient dans le temps deviendraient des mastodontes. Si on recule de huit à dix ans, au lieu de transporter cinq ou six tonnes, vous savez pertinemment combien on transporte de tonnes dans chaque véhicule des artisans. Il y a plus de volume possible que le gouvernement peut offrir pour des unités qui peuvent évidemment transporter cinq ou six charges à la fois qu'il y en avait dans le temps. C'est ça qui a été, je pense, le plus grand vice de notre absence de prévision à ce moment-là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de...

M. Bélanger: M. le Président, si je pouvais revenir...

Le Président (M. Jolivet): Rapidement, oui.

M. Bélanger: II est évident qu'en 1974, le problème qui existe aujourd'hui n'était pas visible à ce moment-là, parce qu'en 1974, l'économie fonctionnait et ce n'était pas seulement ici, c'était partout en Amérique et presque partout dans le monde. C'était la même chose pour les gens que nous représentons ici, en 1974. Tout le monde ne fournissait pas d'acheter des véhicules pour transporter ce qui devait être transporté. Au moment où sont apparus tous ces permis, il y avait beaucoup

de choses à transporter et, en partant, cela a fonctionné. Beaucoup de gens trouvaient de l'ouvrage. Mais, aujourd'hui, c'est l'économie qui a sombré et c'est l'économie mondiale qui a sombré. Alors, le travail n'existant plus, les transporteurs artisans, pour qui c'est le gagne-pain, se retournent vers le ministre des Transports et disent: On a besoin d'aide. Les transporteurs que nous représentons vendent des camions, parce que le transport n'est plus là.

Evidemment, on est dans deux circonstances économiques différentes et il faut nécessairement faire face à la situation. Ce que nous vous demandons, c'est si chaque fois que l'économie va mal, il faut craindre que les détenteurs de permis de toutes sortes, qui obtiennent des permis de l'Etat, vont se retourner vers l'Etat et dire: Vous nous avez donné un droit dans un domaine donné. Maintenant, fournissez-nous les revenus pour vivre avec ce droit-là. C'est un peu le contexte dans lequel nous sommes.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement, M. le Président. Je sais que le temps passe assez vite. Moi, j'en suis d'accord sur votre principe de l'offre et de la demande. Je n'ai rien contre ça. Ceux qui me connaissent savent que je suis pour ce principe. Mais si vous défendez ce principe pour le transport en vrac, est-ce que vous accepteriez également qu'on le demande pour le transport général? Prenons des régions comme chez nous où plusieurs camionneurs, tout les mardis ou mercredis, descendaient à Québec pour, comme on dit, aller porter des produits au marché ou porter de la viande. En revenant dans le comté, ils pouvaient rapporter ce qu'on appelle du "freight", des boîtes de toutes sortes. Aujourd'hui, ils ne peuvent plus le faire parce qu'il y a deux ou trois compagnies très importantes qui détiennent le monopole du transport dans la région. Si c'est bon pour le transport en vrac, pourquoi ne pourrait-on pas permettre également le libre marché? Si je peux, demain matin, faire faire du transport par mon voisin qui veut me rapporter une boîte de Québec pour $8, pourquoi est-ce que je paierait $13.50 ou $13.75 pour une petite boîte de 20 livres à la compagnie de transport? C'est un des principes.

Votre recommandation 2, elle peut être bonne, mais si elle est bonne pour l'un, il faut qu'elle soit bonne pour l'autre. Quand vous suggérez que le monopole du courtage soit retiré des postes d'affectation, je dis: Alors, il faudrait retirer aux grosses compagnies, pour aller dans le sens de votre principe, le monopole de leur circuit, parce que, qu'on le veuille ou non, aujourd'hui, ce sont des monopoles.

Ecoutez, vous êtes desservis aujourd'hui, de Montréal peut-être jusqu'au Nouveau-Brunswick; par à peu près deux grosses compagnies impostantes et quelques autres. Si c'est bon pour le transport en vrac, parfait. Maintenant, est-ce qu'on veut en venir là pour faire disparaître les camion- neurs artisans, comme on a fait disparaître les petits camionneurs qu'on avait dans nos régions et pour favoriser deux ou trois grosses compagnies, qui donnent un très bon service, mais au prix qu'elles veulent bien le donner? La liberté, c'est la liberté, et le principe, c'est le principe. Je vous l'ai dit tantôt, on peut être pour un principe; on peut être contre, mais on ne peut pas être pour les deux en même temps.

M. Alarie: M. le Président, M. le député de Bellechasse, permettez-moi de faire juste une observation. Il faut quand même faire une distinction entre un circuit et le travail. Un circuit nous permet de desservir une clientèle dans une région. Vous avez dit tantôt vous-même que lorsque vous déteniez un commerce, vous aviez le choix entre deux, trois, quatre compagnies. Vous aviez un autre choix, celui d'y aller tout seul, de le faire vous-même et vous aviez d'autres choix qui s'offraient à vous, qui vous permettaient de vous donner le service. Vous n'étiez pas captif ou obligé de passer par un seul poste.

M. Goulet: Ce que j'ai dit, c'est que si je prenais une ou deux de ces compagnies pour faire venir une boîte de vingt livres de Québec ou de Montréal, cela me coûtait $10 ou $12, quand j'aurais pu la faire venir par mon voisin ou mon deuxième voisin qui pouvait aller à Montréal porter je ne sais pas quel produit, et en revenant, me l'aurait apportée peut-être pour $6. C'est ce que je voulais dire. Je n'avais pas le droit de le faire. Ou j'allais le chercher moi-même avec mon camion, ou je passais par l'entrepôt des camionneurs, par une de ces deux compagnies. Si c'est bon pour le transport en vrac, cela aurait pu être pareil pour le fret.

M. Alarie: Vous avez le même droit aujourd'hui de prendre un paysagiste qui n'a pas de permis pour faire venir un voyage de terre sur votre terrasse. C'est la même chose, ce que vous dites.

M. Goulet: II faut que ce soit son produit à lui. S'il veut se conformer aux règlements, il faut que le paysagiste transporte son produit à lui, il faut que la terre lui appartienne.

M. Alarie: C'est justement là. Vous ne faites pas la distinction entre le travail, le produit transporté et le droit de circuit. Le droit d'aller d'un endroit à l'autre n'est pas l'obligation de passer par quelqu'un pour se faire donner un service. C'est différent.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais en premier lieu m'excuser auprès des membres de la commission ainsi qu'auprès des intervenants, spécialement ceux de la Côte-Nord qui se sont présentés devant cette commission. Je voudrais

toucher certains points du mémoire qui a été présenté par l'association relativement aux recommandations à la page 22.

Premièrement, effectivement, l'article 2, lorsqu'on parle de monopole du courtage, demande que le monopole du courtage soit retiré aux postes d'affectation. Personnellement, je pense qu'au moment où on se parle et à la suite du travail qui a été fait par l'ancien ministre des Transports relativement à l'ancien règlement 12, de même que le règlement 112 qui a été ratifié le 23 juin 1977 par la suite, on a donné, à ce moment, un droit à des camionneurs artisans et même à certains entrepreneurs de faire partie d'un poste d'affectation. Personnellement, je serais d'accord pour que ce soient strictement les artisans avec un camion et non pas quatre, ainsi de suite. C'est ma position personnelle. Ce n'est pas la position du gouvernement.

Cependant, lorsqu'on parle de monopole, d'une part, je suis d'accord avec le député de Bellechasse lorsqu'il dit que vous parlez de déréglementer une partie du règlement actuel parce que vous autres, dans le domaine du transport général, vous avez effectivement des droits acquis, vous avez de la réglementation qui existe et qui vous protège dans certains domaines. Je ne vois pas du tout un camionneur artisan aller faire du transport général. A partir de là, il me semble qu'un droit acquis de la part des artisans, on devrait le protéger et continuer à le protéger parce qu'eux aussi doivent vivre autant que vous autres. Sur cette question, je serais carrément contre le fait d'enlever des postes d'affectation et les sous-postes actuellement. Je serais aussi, bien entendu, contre le fait d'enlever le courtage qui est fait par ces dits postes.

Quant à la clause 75-25, c'est sûr et certain que, dans le domaine des camionneurs artisans, ces derniers ont aussi obtenu — si ma mémoire est bonne, c'est en 1974 ou 1973 — un droit. Ce droit, aujourd'hui, est toujours là. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas protéger le camionneur artisan en faisant en sorte que cette clause 75-25 soit abolie. Vous faites référence au cas de la ville de Sept-lles. Je voudrais ajouter ceci. Dans la décision du juge Moisan, si ma mémoire est bonne, cette décision était basée non pas sur les règlements du ministère des Transports, mais bel et bien sur la Loi des cités et villes. Il faudrait peut-être regarder cette chose attentivement. Cela n'a rien à voir avec la clause 75-25 qui est mise en force par le ministère des Transports.

D'autre part, je voudrais que vous m'expliquiez ce que vous voulez dire avec votre recommandation no 3, que les permis soient délivrés à l'entreprise et non aux véhicules, parce que je ne comprends pas tout à fait. Je voudrais que vous me l'expliquiez.

M. Alarie: Si vous me permettez, M. le député, premièrement, notre association et nos membres n'ont pas l'intention de faire mourir les autres, de tout accaparer et de s'arranger pour que tout le monde meure autour de nous, loin de là. Lorsque nous parlons de courtage, lorsque nous parlons de ces choses, qu'est-ce qu'on fait avec ceux qui ont quatre camions et plus et, plus tard, avec ceux qui ont un camion et plus? Est-ce qu'on leur permet de travailler ou si on dit: Non, c'est réservé à ceux qui ont un camion et plus. C'est une question qu'on se pose. (11 h 45)

Lorsque vous parlez de permis à l'entreprise au lieu de permis par véhicule, on a cité tantôt comme exemple que présentement, si un détenteur de permis par véhicule veut garder ses droits, il doit absolument maintenir l'immatriculation sur un véhicule, peu importe le véhicule. On a vu des exemples d'automobiles, même des petits "pickup", à ce moment-là, on crée quoi, une banque artificielle de permis de camions. Lorsqu'on parle d'un permis à l'entreprise, c'est que par le permis à l'entreprise, on encourage le leadership, on encourage quelqu'un, par lui-même, à se développer un commerce. Il pourrait augmenter sa flotte de 1, 2, 3, 4 et peut-être venir à 100, 150, 200 camions. Lorsqu'on limite à un permis par camion, cet individu est limité; à chaque fois qu'il va agrandir sa flotte, il doit acheter un permis, ce qui augmente le prix du camion. Parce qu'on sait que les permis ont une valeur marchande, présentement.

Celui qui a un camion, qui veut avoir un deuxième camion, doit acheter un deuxième permis et ajouter ça au prix du camion. C'est pour ça qu'on dit qu'avec un permis d'entreprise, l'individu pourrait se développer un commerce et engager des employés et un jour, devenir patron.

M. Perron: Quand vous mentionnez la question des permis que vous devez maintenir, si les entreprises doivent maintenir leur permis face à la réglementation qui existe actuellement en rapport avec le transport général, c'est que les camionneurs artisans qui sont très souvent seuls, parce qu'il y en a à peu près 7000 au Québec, ils doivent aussi maintenir leur permis. Alors, un revient à l'autre, en d'autres mots, c'est d'égal à égal. Ils doivent faire la même chose que vous autres.

M. Bélanger: C'est justement, M. le Président, l'objet de la recommandation à laquelle fait référence le député de Duplessis. Dans le camionnage général, le renouvellement d'une plaque d'immatriculation suffit pour renouveler l'ensemble du permis. C'est ce qu'on recommande, pour le transporteur en vrac, qu'il ait un camion ou qu'il en ait 150, que le renouvellement d'une plaque renouvelle tous les permis, de sorte qu'il puisse continuer à subsister dans les périodes où le travail diminue.

M. de Belleval: J'ai une précision à vous demander là-dessus. Justement, si c'est la procédure qui est appliquée, à ce moment-là, ça va contre une autre de vos suggestions, de réduire le nombre des permis, entre autres, par une application rigoureuse du règlement qui dit que quand un permis n'est pas utilisé, il devient périmé. C'est comme ça, actuellement, qu'environ 400 permis

deviennent périmés au Québec. Si on enlève le permis du véhicule pour le donner à l'individu qui a 2, 3, 40 véhicules ça peut être 80 ou 100 véhicules — il y en a qui sont dans cette situation — on s'enlève le moyen de diminuer le nombre de permis. Cela me paraît contradictoire avec votre autre proposition.

M. Bélanger: Ce n'est pas, M. le Président, contradictoire, parce que nous recommandons que le nombre de titulaires de permis qui veulent travailler dans le domaine du camionnage en vrac, demeure stable, c'est-à-dire soit gelé, mais qu'à l'intérieur...

M. de Belleval: S'ils ont le pouvoir d'augmenter le nombre de camions, ça ne donne rien.

M. Bélanger: C'est là, M. le ministre, où la libre entreprise jouera.

M. de Belleval: Oui, mais on va se retrouver, non pas avec 8000 camions sur le chemin, mais peut-être 10 000, 12 000, 15 000, 20 000 à ce moment-là, avec le même nombre de détenteurs de permis que nous avons actuellement, mais avec deux fois le nombre de camions.

M. Bélanger: On va se trouver à suivre l'évolution du marché, comme c'est le cas dans le camionnage général. Il y a beaucoup moins de véhicules...

M. de Belleval: Oui, mais vous rendez-vous compte que vous venez de nous dire qu'il y a 4000 camions de trop et que votre suggestion aurait pour effet, en tout cas pendant un certain temps, d'augmenter le nombre de camions plutôt que de le diminuer.

M. Alarie: Pas nécessairement, M. le ministre. Si le besoin pour des camions n'existe pas. Est-ce qu'on va acheter un camion pour acheter un camion? Il faut quand même avoir du travail pour ce camion.

M. de Belleval: C'est ce qui s'est passé, M. Alarie. Si on a 4000 camions de trop, c'est parce qu'il y a des gens qui, individuellement, ont pris la décision de s'acheter un camion. Qu'est-ce que vous voulez, le camionneur artisan, comme le tabaconiste du coin, ne lit pas la bourse de Montréal tous les jours et il ne suit pas la conjoncture économique mondiale tous les jours. Il ne sait pas que pendant qu'il prend une décision, il y en a 200 ou 300 autres à côté qui prennent exactement la même décision, dans le même sens et qu'à la fin, tout le monde va se retrouver dans un cul-de-sac parce qu'il va y avoir trop d'offres pour la demande. C'est ça, le problème.

C'est ce qui est arrivé, dans le passé. Pourquoi a-t-on 4000 camions de trop, à supposer que ce soit vrai qu'il y a 4000 camions de trop? C'est parce que tout le monde s'est dit: ça va bien, il y a un contrat qui vient de sortir, lançons-nous là-dedans, un autre a dit la même chose et au bout d'un certain temps, tout ce monde s'est rendu compte que c'était beau pendant deux ou trois mois, pendant deux ou trois ans, et qu'après ça, ce n'était plus bon, parce que tout le monde avait pris la décision dans le même sens. C'est ce qui va arriver avec votre suggestion.

Au début, ceux qui n'ont fait que renouveler leur permis, vont le faire. S'ils ont la chance d'avoir un contrat par ci par là, ils vont y aller, ils vont s'acheter d'autres camions et, finalement, ça va vouloir dire que le nombre de camions qui est gelé actuellement, va être dégelé, à toutes fins pratiques.

M. Bélanger: M. le Président, le malheur avec la situation actuelle à ce niveau-là vous a été présenté dans le dernier mémoire hier soir. Il y a des entreprises qui existent, qui avaient aussi des droits acquis, mais on les empêche de fluctuer avec le marché présentement, dans le cadre de la réglementation. C'est ce qui est malheureux. L'entreprise de camionnage général peut fluctuer avec le marché. Je vous assure, M. le ministre, que les grandes entreprises de transport bien connues au Québec ont beaucoup moins de véhicules en leur possession présentement, au moment où je vous parle, qu'elles en avaient en 1974-1975. Pourquoi? Parce qu'elles se sont adaptées au marché. Elles ont diminué leur flotte.

M. de Belleval: Je suis d'accord avec vous. On l'a vu hier que le système de gel de permis pénalise sans doute proportionnellement plus les propriétaires de flottes que le camionneur artisan parce que, comme ils nous l'ont dit, c'est plus facile pour un camionneur artisan, malgré tout, de réussir à garder son permis en opération, peut-être des fois de peine et de misère, que quelqu'un qui a 80 camions et qui, à un moment donné, est obligé de se débarrasser de 10 parce qu'il y a assez d'ouvrage seulement pour 70 et plus ça va, au fond, il ne peut simplement faire, ce gars-là, que de baisser, il ne peut quasiment pas augmenter. Cela, je comprends ça. On l'a vu hier. Mais, il n'en reste pas moins que la suggestion que vous nous faites, à cause de l'analogie avec le permis général, amènerait à une augmentation du nombre de camions et non pas une diminution. Probablement une augmentation du nombre de camions artisans et non pas une augmentation du nombre de camions des flottes.

M. Alarie: M. le Président, M. le ministre, si vous me permettez, il faut quand même faire une distinction aussi dans l'évaluation du problème actuel. On parle d'un problème, ni plus, ni moins, qui touche la voirie, qui touche l'excavation. Le règlement no 12 touche plus que ces matières-là. Et, lorsqu'on s'en va dans le domaine des copeaux, dans le domaine du blé ou dans tous ces domaines-là où il y a un marché, où ces produits étaient transportés par le biais de transporteurs généraux, et si ces transporteurs généraux dé-

bloquent encore des marchés, ils ne peuvent augmenter leur flotte parce qu'ils sont limités au niveau du nombre. Il faut quand même une distinction entre les contrats de voirie ou les contrats d'excavation.

M. de Belleval: Je suis d'accord avec vous. Dans ces domaines-là en particulier, vous avez raison. A mon avis, vous avez raison, dans ces domaines-là en particulier.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe, mais je pense que le député de Charlevoix aurait un petit mot à ajouter, je ne sais pas si...

M. Mailloux: C'est suite aux observations que vient de faire le ministre. J'imagine que dans la recommandation que vous faites d'attacher, comme c'est dans le règlement du camionnage général, le permis à l'entreprise et non pas à l'individu, vous supposez que le gouvernement, d'abord, doit déréglementer, enlever les clauses de protection et laisser les forces du marché s'exercer. Je pense bien que c'est dans ce sens-là qu'on doit le comprendre. Si on laisse les forces du marché s'exercer, les véritables spécialistes dans le transport des copeaux et d'autres matières en vrac, dans une matière déréglementée, les forces vont jouer et les véritables entreprises spécialisées vont profiter. Il n'y aura peut-être pas des dizaines et des dizaines de milliers de camionneurs de plus, sauf que, par contre, ceux qui existent actuellement, eux, déréglementés, vont disparaître. Je pense que c'est un peu l'effet direct qui arriverait si on attachait le permis à une entreprise et non pas à un individu. A la minute où ce serait déréglementé, on verrait les forces du marché s'exercer, les véritables entreprises spécialisées se coter de manière à pouvoir avoir le nombre d'unités requises à l'entreprise. Ce sont ceux qui sont là actuellement qui disparaîtraient, je pense, de manière absolument directe.

M. Alarie: M. le Président, M. Mailloux, disons qu'on essaie de régler le problème des transporteurs par benne basculante de pierre, sable et gravier. Maintenant, on crée des problèmes à ceux qui font des matières autres que pierre, sable et gravier. A ce moment-là, si on veut contingenter juste ceux qui ont des contrats gouvernementaux d'excavation, au moins, qu'on sorte les matières du règlement no 12 qui peuvent être facilement adaptables à la libre concurrence des marchés et qu'on n'oblige pas ces gens-là à passer par des postes d'affectation et des requérants de service parce que même les postes d'affectation, dans l'ensemble, ne sont pas intéressés à ces marchés-là; les camionneurs eux-mêmes n'ont pas l'équipement pour être intéressés à ces marchés-là. Lorsqu'on dit: laisser le permis à l'entreprise, c'est bien plus dans le sens des autres matières que pierre, sable et gravier. Il faut quand même faire une distinction...

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais arrêter personne, mais on a été bien généreux sur l'heure, si vous remarquez. On a déjà dépassé de près de trois quarts d'heure l'heure normale. Je comprends que c'est un document important dans l'ensemble des discussions jusqu'à maintenant. Mais je vais vous limiter jusqu'à midi parce qu'il faut passer à d'autres. On en a onze à passer aujourd'hui. Je n'ai pas l'intention de siéger jusqu'à minuit ou 2 heures cette nuit.

M. de Belleval: En ce qui me concerne, M. le Président, j'avais terminé.

Je trouve que vous avez apporté des distinctions intéressantes, des suggestions intéressantes, bien que je maintienne aussi certaines des remarques que j'ai faites en ce qui concerne d'autres suggestions plus générales que vous avez faites.

Le Président (M. Jolivet): II reste trois personnes actuellement: le député de Duplessis qui n'a pas terminé, le député de Saint-Hyacinthe et le député d'Arthabaska.

M. Perron: Très brièvement, M. le Président. J'endosse entièrement ce que disait le ministre, ainsi que le député de Charlevoix lorsqu'ils disaient tout à l'heure — on semblait dire ça, de toute façon — que la recommandation no 3 dans votre mémoire et la recommandation no 7 vont à rencontre l'une de l'autre. Cela pourrait être dangereux dans le cadre de la réglementation de l'émission des permis de vrac ou du maintien. Cela ne contribuerait sûrement pas à réduire le nombre de permis de vrac tel que vous le recommandez à la recommandation no 7.

Par contre, on sait parfaitement bien que, depuis le moratoire qui a été apporté le 23 juin 1977, pour l'information de la commission, les permis de vrac, à ce moment, si ma mémoire est bonne, étaient d'environ 13 200. Aujourd'hui, les permis de vrac, autant aux entrepreneurs qu'aux partisans, sont autour de 11 300. Donc, il y a eu réduction, mais on sait qu'on doit aller encore plus loin que ça. Alors, si on suit votre recommandation no 3, ça pourrait être très dangereux. On pourrait remonter à 13 000, 14 000 et 15 000.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Si j'ai bien saisi tout ce que vous avez dit, c'est bien sûr que vous représentez l'Association du camionnage du Québec Inc. Vous représentez les grosses compagnies, etc., et les petites aussi. Par contre, depuis quelle date les petits transporteurs en vrac font-ils partie de votre association? Est-ce que, dans votre association, il y a un secteur qui veut protéger vos membres transporteurs en vrac?

M. Alarie: M. le Président, M. le député, depuis quand a-t-on des membres qui font du transport en vrac? Je pense qu'on en a depuis que

s'effectue ce genre de transport. Tous les jours, on a de nouveaux membres. On en perd, on en gagne. Cela fait partie des règles du jeu d'une association. Comme représentativité, je pense que, depuis le temps qu'on fait des représentations au niveau des commissions parlementaires, même les gens qui ont des permis de transport général, qui ont des clauses de vrac, qui ont moins de quatre camions sont membres chez nous. On représente du monde. On n'en représente peut-être pas dans le domaine de la pierre, du sable et du gravier, mais il y a d'autres secteurs qui sont couverts par le règlement en vrac, soit les copeaux, le grain. Ce ne sont pas de gros camionneurs. Ce sont des camionneurs qui ont un, deux ou trois camions. C'est certain qu'il y a de nouveaux membres, de jour en jour, qui entrent chez nous, comme il en entre dans d'autres associations. On essaie de répondre aux besoins de nos membres.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: Seulement un point. A la page 10 de votre mémoire, vous faites mention qu'une résolution de l'ANCAl — il y a un numéro, il y a plusieurs chiffres — demanderait au gouvernement de leur fournir non seulement du travail, mais aussi de "garantir la paie aux consommateurs". Pouvez-vous m'expliquer ce que c'est en gros?

M. Alarie: Je reçois quand même des revues. Dans la revue qui apporte habituellement les données de l'ANCAl ou toutes ses résolutions, on voit ici à la résolution 2.19 "que le gouvernement passe une loi afin de garantir la paie aux camionneurs." Ce sont des résolutions de l'ANCAl.

M. Baril: Est-ce qu'il y a quelque chose actuellement qui garantit la paie ou le revenu des camionneurs? Admettons qu'un entrepreneur fait faillite; est-ce qu'il y a un délai pour payer les camionneurs?

M. Alarie: Si vous prenez l'exemple du transporteur général, vous avez juste à regarder les faillites qu'il y a eu dans le courtage au niveau du transport général où le courtage n'est pas réglementé pour voir les montants que nos compagnies de transport ont perdus. Vous allez voir que, si on ne perçoit pas notre argent par nos moyens, on perd. On n'est pas protégé.

M. Baril: Oui, mais... (12 heures)

M. Alarie: Si on ne réclame pas notre argent par nos moyens, on perd, on n'est pas protégé. Notre garantie de paiement, même si le règlement nous oblige à percevoir nos comptes dans un délai fixé, si l'individu refuse de payer, notre seul recours c'est d'avertir la Commission des transports et de lui dire qu'on ne nous a pas payés. C'est notre Seul recours; autrement, c'est le recours judiciaire.

M. Baril: Pour l'artisan?

M. Alarie: Dans notre domaine, les entrepreneurs membres chez nous n'ont pas de garantie de paiement, à moins d'en signer du même genre que les autres. Ils doivent s'assurer de percevoir eux-mêmes leurs comptes, ils ne sont pas premiers payeurs; peut-être dans certains cas où ils demandent des garanties, mais, dans la majorité des cas, ils ne sont pas nécessairement premiers payeurs.

M. Baril: C'est cela que l'ANCAl veut se voir assuré par le gouvernement, que le salaire de l'artisan soit garanti d'une façon quelconque. Ce n'est pas cela que la résolution veut demander?

M. Alarie: Je n'étais pas à l'assemblée générale de l'ANCAl lorsque cette résolution a été adoptée, mais lorsqu'on voit garantie de salaire ou garantie de ci, on se dit une chose, c'est que ces sommes vont être prises quelque part, soit en enlevant les matières à être transportées à d'autres transporteurs, soit en garantissant ces montants par des subsides gouvernementaux. Il faut que ce soit pris quelque part; on ne garantit pas un salaire à quelqu'un si on n'a pas le moyen de le payer.

M. Baril: La garantie qu'ils veulent avoir, c'est que leur travail sera payé; ce n'est pas un revenu annuel qu'ils veulent se voir garantir.

M. Bélanger: M. le Président, je crois qu'on y faisait référence dans le mémoire de l'ANCAl alors qu'on demandait au gouvernement certaines garanties auprès des entrepreneurs pour s'assurer que quoi qu'il advienne, le transporteur soit payé. On demande au gouvernement de s'organiser pour que les sommes dues aux camionneurs soient garanties d'une façon ou d'une autre. Evidemment, chaque fois que le gouvernement donne des garanties, il faut que ces garanties viennent de quelque part. Cela implique une série de conséquences.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, la question à ce niveau, il sera beaucoup plus facile de la reposer aux membres de l'ANCAl lorsqu'ils reviendront expliquer leur position. Je pense que cela clarifierait la situation.

M. Goulet: Ce n'était pas une subvention directe, c'était d'exiger un bon; il y a une différence.

Le Président (M. Jolivet): On vous remercie.

Delangis Inc., Entreprises Bourget Inc. et Kildair Service Ltée.

Nous appelons maintenant le groupe Delangis Inc., les Entreprises Bourget Inc., et Kildair Service Ltée, représentées par Me Pierre Perreau It, le document no 10.

M. Perreault.

M. Delangis (Jean): M. le Président, messieurs les membres de la commission, j'aimerais en premier lieu vous présenter mon frère, Pierre Delangis, président des Entreprises Bourget Inc. Mon nom est Jean Delangis, président de Delangis Inc., et de Kildair Service Ltée.

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous juste pour le besoin, approcher le micro? C'est pour nous permettre de mieux vous entendre.

M. Delangis (Jean): Nous désirons remercier le ministère des Transports de la province de Québec de nous avoir donné l'occasion de présenter ce bref mémoire représentant nos commentaires sur la situation du transport en vrac, et plus spécifiquement sur l'efficacité des postes d'effec-tation créés par la loi et des conséquences faisant suite à la décision administrative de conférer la clause 75-25 à une catégorie de transporteurs publics, soit les camionneurs en vrac faisant partie d'un poste d'affectation et, pour être plus précis, propriétaires de camions immatriculés VR dont le nombre que possède le même propriétaire ne dépasse pas quatre unités.

De façon à clarifier notre intervention et pour bien situer notre intérêt au niveau de la présentation de ce mémoire, nous établirons la situation et ('interrelation de chacune des compagnies-soeurs qui sont citées en rubrique. Nous sommes actionnaires et administrateurs des trois compagnies, lesquelles oeuvrent dans les domaines suivants. Les Entreprises Bourget Inc., oeuvrent dans le milieu de la construction et d'aménagement de travaux en voirie. Cette compagnie se spécialise de façon particulière dans la production et l'épan-dage de béton bitumineux avec deux usines d'asphalte dont l'une est fixe, et l'autre mobile. Cette entreprise détient également plusieurs permis de camionnage en vrac délivrés légalement par la Commission des transports du Québec.

Deuxièmement, Delangis Inc. oeuvre dans le domaine du transport public intraprovincial, à qui la Commission des transports du Québec a émis des droits additionnels de transport en vrac à l'intérieur des limites de son permis, le tout d'une façon légale, et suite à la preuve faite par la compagnie qu'elle effectuait du transport en vrac depuis environ 50 ans au Québec.

Troisièmement, Kildair Service Ltée oeuvre dans le domaine de la location de véhicules de commerce, camions, tracteurs et semi-remorques agencés soit pour le transport de marchandises générales, soit pour le transport de marchandises en vrac.

L'existence des différentes activités de ces trois corporations remonte à 1929 en ce qui concerne le transport général et le transport en vrac, à 1945 en ce qui concerne la construction de routes et enfin à 1969 en ce qui concerne la location de véhicules de commerce.

L'ensemble de nos activités engendre approximativement un montant supérieur à $4 000 000 en salaires annuellement, et nos investissements en immeubles et en équipement de toute sorte représentent une somme supérieure à $5 000 000.

Ce préambule est spécifiquement fait de façon à démontrer clairement et sans ambiguïté que nos corporations sont en affaires depuis plus de 50 ans et que pendant toute cette période nous n'avons jamais demandé l'intervention directe de qui que ce soit. Au contraire, nous avons assumé nos obligations et nous avons toujours payé les droits de toutes sortes, droits qui étaient nécessaires à nos activités au cours de cette période.

Même si la compagnie Delangis Inc. et les Entreprises Bourget Inc. ne jouissent pas du privilège de la décision administrative concernant la clause 75-25, ces deux compagnies précitées ont fait du transport de matières en vrac et ce, de façon régulière, depuis leur origine, soit depuis plus de 50 ans.

Nous avons pris et assumé nous-mêmes les initiatives nécessaires de façon à diversifier nos activités et de façon à offrir au public et aux institutions gouvernementales les services auxquels ils sont en droit de s'attendre pour le prix payé, et ce, conformément aux règles générales du commerce et du risque.

Bref, nous ne nous sommes jamais fiés au protectorat ou au paternalisme d'une institution pour réaliser les buts que nous nous étions fixés et pour verser une somme supérieure à $4 000 000 annuellement. Et pourtant nous sommes toujours dans le domaine du transport et avons l'intention d'y demeurer encore quelques années.

La preuve de notre sérieux est une fois de plus démontrée clairement par les récents investissements que nous avons effectués en matière de recyclage de béton bitumineux, en cette période d'incertitude énergétique, et ce, en dépit de plus de la conjoncture économique incertaine et du peu d'expérience tant du ministère des Transports que de nous-mêmes en ce domaine. Nous faisons référence ici à l'acquisition d'une machine que l'on appelle "roto mill" qui est une planeuse et qui récupère les pavages usés des routes pour fins de recyclage et cet équipement seulement coûte à peu près $300 000.

Dans les circonstances, cette dernière initiative nous semble absolument contraire au processus suivi au niveau des artisans par le ministère des Transports. En effet, d'un côté, celui-ci tire avantage de nos risques par une réduction des coûts au niveau des contrats que nous effectuons et, d'un autre côté, suit un processus tout à fait contraire en garantissant à une catégorie spécifique de transporteurs en vrac, soit les camionneurs artisans, un volume de travail à des prix fixés par un organisme indépendant qui est la Commission des transports du Québec, sur laquelle d'ailleurs le ministère n'a aucun contrôle, sauf celui d'intervenir en audience publique, ce qu'il n'a pas fait jusqu'à maintenant.

Tout ceci implique malheureusement que cette catégorie spécifique de travailleurs que sont les artisans vont, d'une part, acquérir le volume de transport au ministère des Transports et, d'autre part, font fixer leurs taux par la Commission des

traansports du Québec selon le volume qu'ils ont pu acquérir antérieurement, ce qui déséquilibre nettement le jeu normal de l'offre et de la demande.

A ce stade-ci de notre étude, un problème juridique d'envergure se pose entre les buts recherchés par le ministère et la curieuse application dont nous devons observer les conséquences.

En effet, d'une part, le ministère autour de 1973, a cru bon de réglementer, d'une façon définitive, le transport de matières en vrac, ce qui, d'une façon générale, est extrêmement légitime dans les circonstances, étant donné qu'un marasme certain était en train de ronger ce domaine particulier de transport spécialisé. Le législateur a donc voulu, par diverses réformes générales, consentir certains avantages aux propriétaires de camions indépendants qui gagnent leur vie à transporter des marchandises ou des matières en vrac.

Le but et le grand principe visés par le législateur sont donc de protéger ces petits transporteurs en leur conférant certains privilèges, tout en leur faisant assumer, par contre, certaines obligations parce que le fait de détenir un permis de transport oblige ces mêmes transporteurs à remplir aussi certaines obligations au niveau de la collectivité et du public en général et ce, quant aux services qu'ils ont à donner, eu égard aux permis octroyés légalement par la Commission des transports du Québec.

Par contre, dans un deuxième temps, le ministère des Transports, dans un but louable mais difficilement explicable, si ce n'est dans un but de paternalisme non avoué, a conféré ultérieurement certains droits et certains privilèges au niveau d'une catégorie seulement de transporteurs publics, soit les camionneurs en vrac, dont le nombre de camions est moins de quatre. Cette catégorie de transporteurs s'est vu conférer le privilège d'effectuer 75% des matières en vrac au moment de l'octroi de certains contrats donnés par le ministère des Transports du Québec. Malheureusement, ce grand principe social, louable en théorie, s'avère définitivement néfaste et dangereux à tous les niveaux.

En effet, l'initiative personnelle a fait place à la haine. Le désir de travailler à l'intérieur d'une saine concurrence a été remplacé par la facilité de tout acquérir par des pressions auprès du ministère, et les privilèges accordés selon les très grands principes humanitaires ont été remplacés par des droits acquis qui doivent être défendus non pas avec acharnement, mais par tous les moyens. Le ministère se rend ainsi l'otage et la victime innocente de ces droits acquis de façon peu orthodoxe.

Malheureusement, le problème que nous vous soulignons plus haut au niveau légal est le suivant: La loi a reconnu depuis longtemps et à divers paliers de gouvernement que le recours à des soumissions publiques demeurait encore le meilleur moyen de protéger l'intérêt de la collectivité en éliminant, d'une part, tout danger d'entra- ve, de restrictions et de favoritisme, et en faisant jouer, d'autre part, les forces économiques de l'offre et de la demande, le jeu de la libre concurrence et la liberté de commerce.

De façon à éviter toute ambiguïté et de façon aussi à démontrer aux membres de la commission parlementaire que nous ne sommes certainement pas les seuls à penser de cette façon, le paragraphe précédent a été tiré d'un jugement prononcé par l'honorable juge Moisan, de la Cour supérieure, le 10 décembre 1979, dans le district de Mingan, dans la cause à laquelle on faisait référence tout à l'heure, la cause de Sept-lles.

Il s'agissait, dans ce dernier cas, de la cause d'Achille Houde, domicilié à Sept-lles, contre la ville de Sept-lles, corporation défenderesse, dans les circonstances, qui avait, au cours de ses activités, adopté une résolution conférant aux camionneurs artisans ou plutôt à une certaine catégorie de camionneurs artisans une clause 75-25, la même clause, d'ailleurs, donnée ou conférée par le ministère.

Les paroles du juge Moisan sont absolument générales et, dans les circonstances, celui-ci s'attarde assez longuement, dans ce jugement, à démontrer que le meilleur moyen de protéger le public en général est d'éliminer tout danger d'entrave, de favoritisme ou de paternalisme, quel qu'il soit, et de laisser jouer les forces économiques de l'offre et de la demande et le jeu de la libre concurrence dans une liberté totale de commerce.

Nous pouvons d'ailleurs nous apercevoir — nous citerons des exemples plus loin — qu'au moment où ce jeu de la libre concurrence n'existe plus, c'est l'anarchie la plus complète qui s'établit dans un système et, dans tel cas, la libre concurrence et la liberté de commerce font place à divers moyens d'entrave, de favoritisme, de menaces ou de paternalisme, etc.

Bref, les buts du ministère, quoique louables au départ, sont absolument dangereux dans leur application. L'obligation, par un entrepreneur général, de ne faire lui-même que 25% du transport et d'en confier 75% à des camionneurs artisans en répartissant entre eux ce travail aussi équitablement que possible constitue une entrave sérieuse qui n'est en aucune façon justifiée par la nature du contrat ou de n'importe quel contrat, et qui n'est aucunement justifiée par l'ordre normal des choses et encore moins par les exigences d'ordre scientifique ou technique. (12 h 15)

Cette obligation peut procéder d'un sentiment très bon ou très pur, dans un but d'équité et de protection de revenus des camionneurs artisans, mais ce but, si louable et généreux soit-il, n'en demeure pas moins une entrave au libre jeu de la concurrence en matière de soumissions publiques. Il nous paraît contraire à l'intérêt public en général que l'on impose aux soumissionnaires ce type d'obligation qui peut, éventuellement, les soumettre à des exigences exorbitantes de la part des camionneurs artisans et qui, de toute façon empêche l'exercice du jeu normal de la libre concurrence lorsqu'il s'agit de transport.

II est donc évident que l'intérêt de la collectivité en général est beaucoup plus mal servi au moment où des privilèges ou des avantages sont faits à une catégorie de travailleurs. L'intérêt du public, l'intérêt de la collectivité en général est beaucoup mieux gardé, est beaucoup mieux protégé, est beaucoup mieux garanti par un jeu normal et libre d'une saine concurrence.

Un autre problème légal important se soulève à ce stade du mémoire. En effet, le ministère des Transports a créé la Commission des transports du Québec. Cette dernière commission a été créée pour émettre des permis et fixer des taux pour tous les transporteurs. Au moment où un transporteur général ou spécialisé veut effectuer du transport à contrat, il doit en demander l'autorisation à la Commission des transports du Québec qui en dispose après audition publique en tenant compte de l'intérêt général et de la collectivité.

Jamais dans l'histoire de la commission et dans l'histoire du ministère des Transports, le ministère n'est intervenu à quelque stade que ce soit pour remplacer ou rendre inopérantes des décisions de la Commission des transports du Québec. L'exception confirmant la règle, le ministère est intervenu au niveau de la clause 75-25, et pareille décision a un effet direct d'ingérence au niveau des conséquences et des effets de l'administration de la Commission des transports du Québec. En effet, c'est le seul cas qui existe où le ministère a confié directement des droits à une catégorie spéciale de transporteurs en vrac sans passer par la Commission des transports du Québec, et ceci, en prenant les entrepreneurs comme boucs émissaires pour respecter les directives émises par le ministère. En outre, il y a lieu de se demander si le ministère avait les pouvoirs nécessaires pour accorder un tel privilège. En effet, d'une part, l'article 42 de la loi oblige tout détenteur de permis à fournir le service prévu au public en général et, d'autre part, le ministère interdit à une catégorie de détenteurs de permis de plus de quatre camions de fournir plus de 25% des travaux au-dessus de la ligne d'infrastructure. La décision du ministère semble en contradiction avec la loi qui est un acte du Parlement.

En effet, ceux qui doivent appliquer ces directives sont les entrepreneurs qui sont dans l'obligation de respecter les droits acquis et garantis à cette catégorie spéciale de camionneurs artisans. Le ministère renie ainsi sa propre politique générale et l'esprit même de la Loi des transports en conférant un privilège, 75-25, parce que la Commission des transports du Québec a été créée et formée spécifiquement pour émettre des permis, selon les besoins du public en général, pour garantir une saine concurrence au niveau de la qualité du service des transports publics et pour rendre toute autre décision concernant le transport, et plus spécifiquement au niveau d'un contrat pouvant exister entre transporteurs et expéditeurs, de façon que les décisions protègent le plus possible la collectivité contre les pressions, les abus, et enfin pour garantir une qualité de services équitables au public en général.

Malheureusement, par sa décision, le ministère a fait exactement et indirectement ce que la loi et l'esprit de la loi des transports refusaient totalement de faire directement. Si nous analysons scrupuleusement la décision du ministère dans l'octroi de la clause 75-25, la seule raison logique pour expliquer une telle largesse serait que le ministère ait voulu émettre une directive parce que les entrepreneurs refusaient de faire eux-mêmes ce genre de transport. Le ministère, dans de telles circonstances, aurait donc été justifié d'obliger les entrepreneurs à utiliser les transporteurs publics. Le ministère n'avait absolument pas le droit de donner des directives en ce sens et, encore moins, d'émettre une directive qui touchait une catégorie seulement de transporteurs publics, soit les propriétaires dont le nombre de véhicules est moins de quatre.

Cette décision, que nous considérons illégale, non seulement privilégie une certaine catégorie de camionneurs à l'intérieur des transporteurs publics, mais exclut de plus toute autre compagnie sérieuse dont la compagnie Delangis Inc. et les Entreprises Bourget Inc. qui pourtant font du transport de matières en vrac depuis plus de cinquante ans.

De plus, la directive du ministère qui privilégie un certain nombre de camionneurs seulement oblige les entrepreneurs à confier le transport de matières en vrac à cette dite catégorie spécifique de privilégiés, mais ne les oblige nullement à effectuer le travail, en dépit du fait que l'essence même d'un permis n'est pas de détenir des droits acquis ou des droits garantis, mais d'offrir au public en général le service de transport.

A ce niveau-là, le ministère pourrait obliger les choses les plus farfelues au niveau de n'importe quelle catégorie de camionneurs et on pourrait, par exemple, obliger facilement tout entrepreneur ayant un contrat à la Baie James à requérir les services d'un transporteur possédant plus de 100 camions pour toute marchandise devant être livrée sur le chantier. Telle décision serait, à notre avis, de la discrimination.

Nous pourrions donc soumettre à la commission parlementaire de nombreux cas précis avec preuve à l'appui, indiquant des conséquences néfastes et irraisonnables de cette clause 75-25. Nous n'en soulignerons que quelques-uns et nous pouvons assurer les membres de la commission que ces exemples se multiplient par un coefficient très élevé. Au cour de l'été 1980, les Entreprises Bourget Inc., ont signé un contrat avec les Entreprises Que-Mar. Il s'agissait d'ailleurs d'un sous-contrat pour des travaux d'aqueduc et dégoûts, incluant le transport d'agrégats des lieux du chantier à un site déterminé par les parties.

Il ne s'agissait nullement d'un contrat issu du ministère des Transports et la clause 75-25 était absolument inexistante, tant légalement que moralement. Le contrat en question était signé à Joliette. Avant l'exécution dudit contrat, les représentants du poste d'affectation de la région de Joliette ont fait diverses pressions auprès des entreprises Bourget pour obtenir la clause 75-25. Les

artisans considéraient à ce moment-là que les droits acquis du ministère des Transports s'étendaient aussi à tous les contrats qui se donnaient dans la province de Québec.

Le porte-parole de l'association nous a même souligné que si la clause ne leur était pas consentie, les travaux seraient arrêtés par diverses manifestations et que divers problèmes pourraient éventuellement surgir. Effectivement, les travaux ont été arrêtés et immobilisés à quelques reprises par la manifestation de plusieurs camionneurs artisans, de sorte que les forces de l'ordre ont dû intervenir et ce, en grand nombre, étant donné que les manifestations étaient d'envergure.

Au cours de l'été 1980, au moment de l'exécution d'un contrat à Mont-Laurier, pour remplir certaines obligations de la Ben ro, nos fonctions étaient de procéder à l'épendage de béton bitumineux et la clause 75-25 n'existait pas. Au cours des premiers jours de nos travaux, 50% seulement des effectifs demandés aux postes d'affectation nous ont été fournis, contrairement à notre demande initiale, ce qui a eu pour effet de diminuer considérablement nos opérations. Malgré la garantie du poste d'affectation à l'effet qu'il nous fournirait les camions nécessaires, ils nous ont déclaré au moment de l'exécution des travaux, qu'il existait en ce moment, une carence des effectifs.

Au cours de ce même contrat, les camionneurs qui nous avaient été référés n'ont pas voulu travailler un samedi. Vous savez qu'au cours de cet été, la température n'a pas été tellement favorable pour le pavage de routes, alors, nous avons profité de toutes les occasions qui se présentaient, incluant le samedi. Les artisans ont refusé de travailler le samedi. Ce qui nous a compliqué drôlement la tâche au niveau des opérations afin de rentabiliser notre entreprise et de pouvoir exécuter la totalité des contrats qu'on avait cette année.

Enfin, pour finir le plat, au cours de la dernière journée d'opération à Mont-Laurier, au moment où deux camions, propriété d'artisans de la région, et un camion des Entreprises Bourget vaquaient ensemble à certaines occupations de transport relativement à ce contrat, les deux camionneurs artisans, dont nous avons les numéros d'immatriculation nous ont fait savoir directement que si le camion de la compagnie des Entreprises Bourget ne cessait pas immédiatement ses opérations, les deux artisans quitteraient les lieux ipso facto.

Ne s'attendant pas à de telles réactions pour le moins bizarres, nous avons dû nous plier à leurs exigences, pour le moins malhonnêtes, étant donné qu'aucun choix ne nous était laissé sur les lieux de notre contrat, et vu l'urgence de le terminer.

Par contre, il est évident — et nous tenons à le souligner — que si nous avions pu prévoir un tel dénouement, nous aurions assigné les effectifs nécessaires. C'est-à-dire nos propres camions auraient été sur les lieux mêmes d'opération, ce qui aurait eu pour effet de provoquer nécessairement une autre manifestation sur le chantier où nous exécutions nos travaux.

Un troisième exemple, au cours de l'été 1980 et au moment de l'exécution d'un contrat expérimental de recyclage d'asphalte sur la route 269 dans la Beauce, nous avons engagé légalement des chauffeurs de camions de cette région pour conduire les véhicules que nous avions loués légalement de la compagnie Kildair Service Ltée, de façon à procéder à l'enlèvement du vieux pavage avec l'équipement spécial que nous avons mentionné précédemment. Nous faisons référence ici au "roto mill", que nous avons décrit.

Quelques jours après le début de ces travaux de planage et avant de commencer les travaux de chargement du chemin, en vertu d'un contrat du ministère des Transports, mais qui ne contenait aucune clause 75-25, nous avons reçu un appel téléphonique du président du poste d'affectation de la région de Sherbrooke nous informant que le transport des agrégats sur ce contrat appartenait aux camionneurs artisans de la région et qu'il était préférable pour la sécurité de nos véhicules de cesser nos opérations de transport et de retourner nosdits véhicules à Joliette puisque, l'année précédente, un entrepreneur de Montréal s'était rendu exécuter un contrat dans leur région et que, par malheur, certains de ses véhicules avaient eu quelques petits problèmes ou avaient été endommagés. Nous avons donc informé le président de l'association que si nos opérations étaient compromises de quelque façon, nous enverrions sur les lieux tous nos camions et nous n'engagerions aucun des camionneurs artisans membres de leur poste d'affectation.

Par la suite, nous avons eu une rencontre à notre bureau de Joliette, et le président du poste d'affectation de la région de Sherbrooke a exigé que nous leur conférions, à même ce contrat, 75% du transport.

Au cours de nos discussions, le président en question réduisit ses exigences à 50%, nous informant du même souffle que nous aurions de sérieux problèmes si nous ne pouvions lui garantir au moins ce volume. Nous avons carrément refusé de nous rendre aux exigences du président de la région de Sherbrooke tout en lui indiquant que nous aurions, par contre, certainement besoin de véhicules, mais que nous ne pouvions, en aucun cas, lui garantir de pourcentage.

Dans l'intervalle, nous avons informé le ministère des Transports qu'il était dans nos intentions de commencer nos opérations de transport de gravier jour et nuit et nous avons été informés par les autorités du ministère qu'à moins d'une entente avec le poste d'affectation de Sherbrooke, il serait impossible pour le ministère de nous accorder l'autorisation de commencer nos opérations jour et nuit et ce, malgré le fait que, dans ce contrat, il n'existait aucune clause 75-25.

Pendant ce temps, les artisans de la région de Sherbrooke ont fait tellement de visites ou de pressions ou de représentations au niveau du ministère que ledit ministère s'est retrouvé dans une position peu confortable et a été dans l'obligation de nous indiquer que nous devrions préférablement régler nos problèmes avec les artisans afin d'obtenir l'autorisation d'entreprendre les travaux

de transport d'agrégats et de gravier jour et nuit.

Nous avons donc été dans l'obligation de faire parvenir un télégramme sévère au poste d'affectation de la région de Sherbrooke de façon à l'informer que nos opérations débutaient à une date précise et que s'il ne pouvait pas nous fournir le nombre nécessaire de véhicules pour l'exécution de nos contrats, selon la demande que nous pourrions faire audit poste, nous nous verrions dans la malheureuse obligation d'organiser nous-mêmes le système de transport en utilisant notre propre flotte de camions pour la totalité du contrat et des travaux à faire.

L'association nous répondit que, finalement, elle acceptait notre offre. Ceci étant fait à la toute dernière minute et, du même coup, à la suite de ces pressions indues de la part de l'association, le ministère se trouva naturellement dégagé d'une situation fort complexe où il était situé entre l'arbre et l'écorce et fut capable à un tel moment de nous donner l'autorisation de commencer les travaux de chargement de chemin, tel que prévu.

J'aimerais ajouter que, sur ce contrat en particulier, les camionneurs artisans de la région de Sherbrooke ont eu 80% de tout le transport effectué.

Nous avons jugé bon de vous transmettre cet exemple afin de démontrer à quel point l'intervention du poste d'affectation de Sherbrooke n'a absolument pas été faite dans le but de nous offrir un service de camionnage tel que prévu par la Commission des transports du Québec, mais plutôt de nous imposer l'usage de ses véhicules en dépit de toute liberté que nous avions en ce domaine d'après ce contrat.

La façon ou la formulation du problème au moment où il a été présenté par l'Association des camionneurs artisans du poste d'affectation de Sherbrooke, était basée strictement sur de pseudo-droits acquis ou de pseudo-garanties comme détenteur de permis. Par contre, les droits considérés comme acquis et immuables par les artisans en sont rendus non seulement aux privilèges conférés par le ministère, mais aussi aux droits que les artisans pensent qu'ils devraient acquérir pour monopoliser totalement le transport en vrac. Nous sommes de la catégorie des gens qui pensent que les libertés des uns se terminent où les libertés des autres commencent. (12 h 30)

Au cours de l'été 1979, les Entreprises Bourget ont effectué un contrat de confection de route au complet, incluant le transport de gravier et de toutes sortes d'agrégats, pour le compte du ministère des Transports. La clause 75-25 existait dans ce contrat qui se faisait à Berthier. Les Entreprises Bourget, au moment de l'exécution de ces travaux, ont engagé, par le biais du Poste d'affectation de la région de Berthier, un très grand nombre de camionneurs artisans.

Au cours de l'exécution, donc, le poste d'affectation envoyait sur le chantier, d'une façon quotidienne, les camionneurs artisans venant de Joliette et de Berthier, le tout suivant notre besoin et notre demande pour la bonne exécution des travaux. A un certain moment, les travaux au complet ont été immobilisés à cause d'une querelle entre les membres camionneurs artisans du Poste d'affectation de la région Joliette et que les travaux étaient effectués à Berthier et ce, malgré le fait, naturellement, que tous les camionneurs artisans sont membres du même poste d'affectation. J'ai mentionné que c'était du Poste d'affectation de Joliette, alors que c'était celui de Berthier.

Le résultat de ces querelles intestines est tout simplement que les Entreprises Bourget Inc., ont perdu une journée de travail et d'opération normale dans l'exécution de ces travaux. Pendant le temps de cette querelle, le poste d'affectation nous promettait d'envoyer les effectifs nécessaires. Mais, malheureusement, le temps de régler cette triste querelle, la journée était terminée et nous avons dû garder sur les lieux tous nos autres effectifs, dont les opérateurs de machinerie lourde, les journaliers, les signaleurs, les contremaîtres, et tout le matériel fut complètement immobilisé.

Cet exemple cocasse, s'il en est un, a quand même des répercussions néfastes et onéreuses. En effet, l'immobilisation de tout ce monde et de tout ce matériel sur les lieux pendant une journée cause non seulement des dépenses inutiles et accrues, mais nous impose également diverses pénalités au niveau de l'exécution des contrats qui ne sont pas effectués dans les délais.

Tous ces exemples que nous avons cités plus haut prouvent incontestablement le manque de sérieux de cette catégorie de transporteurs publics, appelés camionneurs artisans, qui loin de se soucier du service qu'ils ont à donner au niveau de la collectivité et du public, se fichent éperdument, au contraire, des dommages qu'ils peuvent causer en cours de route, étant, de toute façon, non responsables desdits dommages provoqués. Ici, je fais référence aux modifications du connaissement de transport, qui, dans le transport public, rend les transporteurs publics responsables des délais lorsque la marchandise est livrée en retard, ce qui n'existe pas dans le cas des transporteurs en vrac.

Les grands buts louables visés par le législateur n'ont pas donné les résultats escomptés. Au contraire, les artisans, qui réclament à grands cris non seulement la conservation, mais l'augmentation de leurs droits acquis ou immuables, selon eux, ont oublié qu'ils n'étaient pas seuls au monde et surtout pas dans le domaine du transport. Profitant des privilèges qui leur ont été donnés par le ministère des Transports, lesdits artisans profitent de la situation et exercent certaines formes de pression, souvent discutable, de façon à obtenir de plus en plus de droits, de garanties qui leur permettraient d'être rois et maîtres au niveau du transport en vrac et, de ce fait, qui leur permettraient aussi de contrôler, par tous les moyens possibles, le transport en vrac.

Les camionneurs en vrac réclament à grands cris la clause 75-25, partout, pour tous les travaux de transport en vrac pouvant exister au Québec,

même les travaux pour compte propre. Quand les entrepreneurs, qui défendent chèrement leur vie par le jeu de la saine compétition, osent répondre qu'ils ne céderont jamais à de telles pressions, lesdits artisans, en bons pères de famille, bloquent les routes, arrêtent les travaux, refusent d'effectuer le travail qui leur est donné et causent des préjudices à la population en général, population qu'ils doivent pourtant desservir parce que le transport en vrac est un service public.

Nous ne devons jamais perdre de vue l'essence même d'un permis de transport émis par la Commission des transports du Québec qui autorise et qui privilégie un détenteur à effectuer non seulement du transport, mais également à assumer les obligations d'un service public.

A partir des exemples que nous avons soumis et aussi à partir de plusieurs exemples que nous pourrions souligner dans ce mémoire, mais qui vous seront certainement donnés aussi par d'autres organismes, nous devons en arriver incontestablement à deux conclusions: la première, l'abolition purement et simplement des postes d'affectation; la deuxième, le retour au jeu de la libre concurrence et à la liberté de commerce par l'élimination directe et immédiate de toute clause de favoritisme et de protectionnisme comme la clause 75-25.

J'aimerais, dans la première conclusion, m'étendre davantage sur l'intention que nous avions en la mettant sur pied. En fait, surtout après avoir entendu les camionneurs artisans qui sont venus eux-mêmes se plaindre de différents problèmes qui s'apparentent passablement à ceux que nous pouvons avoir, j'ai l'impression que cette première conclusion pourrait surtout s'interpréter comme une tentative de trouver un moyen de soustraire les postes ou les sous-postes d'affectation au contrôle que l'ANCAl peut avoir à l'intérieur. Si on réussissait cela, j'ai l'impression que les camionneurs artisans qui, foncièrement, sont des gens honnêtes et des gens d'affaires, pourraient de façon libre et concurrentielle, offrir les services pour lesquels l'essence même des permis ont été émis. Les résultats que nous recherchons depuis longtemps seraient atteints en partie.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: Je voudrais reprendre la dernière remarque que vous venez de faire. Vous dites, au fond: Les camionneurs artisans, en général, dans leur très grande majorité, je suppose...

M. Delangis (Jean): Oui.

M. de Belleval:... sont des gens qui sont prêts à travailler honnêtement et dans un contexte réglementaire de neutralité, comme on l'a souligné hier, et si on leur laissait la chance de travailler dans un contexte de neutralité, ça pourrait aller bien, les postes d'affectation, à ce moment-là?

M. Delangis (Jean): De toute façon, actuellement, étant donné le genre de pressions qu'on a pu voir depuis le début et qui s'apparentent très bien au genre de problèmes qu'on a eus, ces gens-là, lorsqu'ils sont sortis de ce genre de processus, ne peuvent pas faire autrement que de retomber dans la compétition et, éventuellement, pouvoir offrir les services qu'ils sont obligés de rendre, étant donné les privilèges qui leur sont conférés.

M. de Belleval: A ce moment-là, dans ce contexte, vous seriez quand même d'accord avec les postes d'affectation?

M. Delangis (Jean): Dans ce sens, je serais d'accord. C'est plutôt le sens qu'on a tenté de donner à cette conclusion en la décrivant comme telle. Le vrai sens, c'est que si on peut libérer les postes d'affectation de l'influence et du contrôle extérieurs de gens que je ne connais pas et que je n'ai pas à juger, mais dont les résultats parlent par eux-mêmes, ces gens seraient certainement en mesure de prouver la nécessité de leurs services et de faire fonctionner leurs camions.

En particulier, je pourrais peut-être donner un exemple. Lorsque la Commission des transports du Québec statue sur les taux, elle ne statue que sur un tarif. Il me semble que le rôle de l'Association des camionneurs artisans, par exemple, serait peut-être de faire en sorte que la structure tarifaire soit rendue flexible, non pas pour les mettre à la merci des entrepreneurs qui pourraient en abuser, mais au moins pour ne pas les exclure des prix lorsqu'il y a de gros contrats intéressants et que leurs prix, étant déjà trop élevés, les entrepreneurs eux-mêmes achètent leurs véhicules, et les artisans — i! y a déjà trop de camions, on le constate — demeurent chez eux parce que les chances deviennent inégales. Les entrepreneurs qui pourraient les employer, par exemple, à $25 l'heure plutôt qu'à $27.50 se rendent légalement responsables pour l'excédent qu'ils n'ont pas payé par rapport à la décision de la commission. Ces gens se mettent dans une situation où, en présence des contrats intéressants pour lesquels ils pourraient soumissionner, la loi les empêche de le faire, et leur association ne les a certainement pas bien conseillés pour pouvoir avoir des structures tarifaires qui puissent leur permettre de travailler, parce qu'il y en a du travail.

M. de Belleval: Ce point de vue en confirme d'autres qu'on a eus hier, je pense, et la commission, ici, semblait au niveau de plusieurs de ses membres, partager cette idée, qu'en assouplissant la tarification, on pourrait permettre aux postes d'affectation de faire jouer la concurrence à plein et donc d'augmenter le volume de travail pour les camionneurs artisans.

J'ai lu attentivement votre mémoire et je vous ai écoutés attentivement. Je n'ai pas besoin de vous dire que je rends hommage à votre courage, là encore, parce que vous avez été victimes de certains actes de chantage, de toute évidence, du moins selon votre témoignage, et en venant ici, vous manifestez, je pense, un grand sens civique, parce que vous éclairez ainsi la population sur une facette importante de ce dossier.

Quant à moi, je veux simplement dire que ce qu'il faut effectivement, c'est que le système fonctionne en toute équité, en toute impartialité en dehors de pressions du type de celles dont vous avez parlé et que c'est la responsabilité d'un gouvernement de faire que de telles pressions, qui s'apparentent à des gestes comme on dit irréguliers, c'est le moins qu'on puisse dire, ne se fassent pas parce que c'est comme ça que la paix sociale est mise en danger dans une société, quand on permet de tels gestes, et on a vu dans d'autres circonstances où cela pouvait mener.

Vous pouvez être certain que, dans les recommandations que je ferai au gouvernement, je tiendrai compte de cet aspect de la situation. Je vous en remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, quelques très brèves remarques. Je comprends que vous nous donniez dans votre mémoire l'expérience que vous avez vécue depuis bon nombre d'années. Cependant, une chose me laisse un peu perplexe. Je ne nie pas l'expérience qui est la vôtre. Par contre — loin de moi l'idée de porter une accusation; n'étant pas avocat, je ne pourrais pas être accusé d'errer en loi — je me demande si vous avez le droit de défendre forcément une philosophie et, d'après l'expérience que vous avez connue, de faire des suggestions. Quand on regarde la nomenclature des activités qui sont les vôtres, on voit que vous fabriquez du béton bitumineux, vous avez des permis de transporteurs en vrac, vous avez des permis de transport général et, en même temps, vous avez une compagnie de location. Vous nous parlez des postes d'affectation et du libre jeu de la concurrence. Peut-on penser que dans un jeu de libre concurrence, une compagnie qui touche à toutes ces activités, qui a fait la preuve qu'avec son équipement elle était en mesure d'offrir des services suivant sa conception et sa volonté d'agir ferait appel aux artisans ou aux autres qui sont dans le transport en vrac? Je suis en mesure de penser qu'il faudrait que ce soit à des conditions bien inférieures que cet appel serait fait; sinon, vous feriez le travail vous-mêmes, avec l'ensemble des activités qui sont vôtres.

Je ne dis pas forcément que vous commettriez une erreur, mais il demeure qu'on peut supposer que ce serait le cas chez des compagnies qui ont de telles activités; ça englobe à peu près l'ensemble de toutes les activités dont on parle ce matin.

De toute façon votre mémoire est bien préparé, il signale avec passablement d'exactitude les lacunes malgré le geste généreux qu'a voulu poser le législateur mais qui n'arrive pas aux conclusions qu'on espérait. Ce sont quand même des faits que vous prenez à votre compte mais qui sont probablement véridiques, et vous avez fait l'expérience en cours de route. (12 h 45)

II y a une question qui me vient à l'esprit au moment où on parle d'une possibilité de déréple-mentation, partielle ou totale. Loin de moi l'intention de blâmer la Commission des transports, qui est un tribunal quasi judiciaire, dans ses décisions sur les tarifications. La Commission des transports doit fixer des taux d'après le règlement qui la régit. Fixer des taux dans le transport en vrac, devant le peu de volume qu'ont les transporteurs de vrac, aurait-il eu pour effet d'influencer la Commission des transports à accorder des taux trop élevés pour un transport donné, alors qu'elle pouvait penser que, pour que ces gens-là puissent vivre avec un volume peu important ou pas assez important, elle devait évidemment forcer un peu sur l'élévation des taux? Loin de moi toute idée d'insinuation, mais ça peut quand même avoir joué dans l'augmentation des tarifs. (12 h 45)

II est indiscutable qu'un des points importants qui vont ressortir de cette commission, après avoir entendu tous les intervenants, c'est qu'il va falloir, peut-être pas que les forces de la libre concurrence jouent entre elles, parce que, jusqu'à ce point-là aussi, ça peut mener à l'anarchie, il va falloir quand même qu'une certaine souplesse découle de cette commission et des gestes qui seront posés après, je pense. Même si je suis dans l'Opposition actuellement, ce serait impensable pour ma part de laisser croire aux artisans et aux autres transporteurs de vrac qui ont été ajoutés, petits entrepreneurs ou pas, que le gouvernement va sans arrêt leur accorder de plus en plus de secteurs privilégiés de transport. Le nombre est trop grand. Il va falloir, dans les années qui vont suivre, vis-à-vis des véritables transporteurs de vrac, devant une modification des contraintes des prix actuellement, que les forces jouent davantage qu'elles ont joué jusqu'à maintenant.

Je vous remercie de votre mémoire. Devant un conflit d'intérêts possible, je suis bien forcé de penser que, dans toutes les activités, vous avez le droit de défendre les intérêts qui sont les vôtres. Mais je doute énormément, par contre, que, possédant des intérêts dans toutes les activités du transport, vous feriez beaucoup appel aux artisans s'il n'y avait pas certaines clauses de protection.

M. Delangis (Jean): Si vous me permettez, j'aimerais vous répondre que, même si nos activités sont diversifiées à ce niveau, il nous est impossible de pourvoir nous-mêmes à l'ensemble de tous les contrats qu'on peut avoir avec nos propres camions. Si on les faisait un par un, on pourrait fort bien envoyer sur un chantier le nombre suffisant, comme on a failli le faire dans le cas de...

M. Mailloux: ... location?

M. Delangis (Jean): Pardon?

M. Mailloux: Même par le biais de la location?

M. Delangis (Jean): Même par le biais de la location, parce que ces véhicules ne sont pas toujours disponibles chez nous pour la construction. Par exemple, je fais référence au contrat dans la Beauce où les artisans craignaient évidemment que l'on fasse tout le transport, mais ce n'était pas notre intention.

Le seul point que nous voulons soulever dans ça, c'est que c'était anormal de vouloir nous imposer une clause 75-25 alors qu'elle n'existait pas. La raison pour laquelle on a voulu nous imposer la clause 75-25, c'est qu'elle existait ailleurs et ça devenait un droit acquis à des endroits où elle n'existait pas.

Sur ce contrat en Beauce, on avait besoin, si ma mémoire est bonne, d'environ une quarantaine de camions. Au début des travaux, évidemment, on en a envoyé cinq pour procéder à l'enlèvement du pavage, et à l'usine d'asphalte, on peut maintenir encore à peu près quatre ou cinq véhicules, selon les distances qu'on a à couvrir. En même temps, on avait également le chargement du chemin à faire, jour et nuit, qui se faisait à la fois avec nos camions et évidemment avec ceux des artisans, puisque cela nous prônait à peu près quarante camions pour faire ce transport à 20 milles du site du contrat.

Evidemment, il y a des contrats qu'on va pouvoir faire nous-mêmes en totalité, par exemple, à l'usine mobile que nous avons et qui requiert un nombre d'à peu près 12 véhicules. En fait, on a 17 camions tracteurs. Les camions de dix roues que nous avons pour transporter soit les agrégats, soit l'usine pour fins de fabrication, soit l'asphalte lors de l'épandage, sont des camions dix roues avec des boîtes "dumper". Lorsqu'arrive le temps du déménagement, on enlève les boîtes "dumper" en question, on met cela sur une semi-remorque plate-forme, on met des "fifth wheels" aux camions tracteurs, et on a là dix voyages de faits. L'expérience nous a montré que cet équipement est très fragile à transporter; il y a de l'équipement électronique, il y a toutes sortes de choses auxquelles il faut faire bien attention.

Au premier déménagement, les chauffeurs qui participaient pour la première fois à ce déménagement nous ont créé des dommages d'à peu près $5000 à $10 000. Cela nous prend donc des chauffeurs spécialisés jusqu'à un certain point pour le transport de l'usine. Nos véhicules, une fois rendus sur place, on les fait travailler. L'excédent de véhicules dont on a besoin pour l'exécution du contrat, on doit nécessairement le prendre sur place. On pourrait, au cas où il y a carence, comme à Mont-Laurier, envoyer des véhicules additionnels parce que, dans certains cas de l'application de la clause 75-25, où on a été pris à donner 75%, on était en mauvaise posture pour remplir les déficits de véhicules qui n'étaient pas là vu qu'on fait face à des problèmes de pression.

M. Mailloux: La seule chose que je voudrais ajouter, c'est ceci; je pense que le ministre actuel et moi avons eu de nombreux exemples. Je sais pertinemment que le mariage possible entre un entrepreneur en construction de routes et un artisan n'est pas facile à faire. Si chacun cherche son intérêt, l'entrepreneur a l'obligation, quand il prend un contrat, de faire le beau et le mauvais. On sait pertinemment, pour en avoir vu de nombreux exemples, que quand on est dans l'excavation, en terrain difficile, les artisans, pour protéger leur véhicule, ne sont pas trop intéressés à y aller. A ce moment, l'entrepreneur est aux prises avec des problèmes très particuliers. Au moment où cela devient plus facile, on comprend que l'artisan, pour protéger son intérêt, voudrait travailler autant que faire se peut, d'où le problème éternel que, quand on place deux parties sur un même contrat, ce n'est pas facile de les faire s'entendre. Cela a donné lieu à nombre des conflits qu'on a vécus. Chacun veut protéger son intérêt, et son intérêt n'est pas le même. Vous avez une exécution à faire, et l'autre voudrait bien travailler, mais travailler dans des conditions acceptables. Il n'est pas obligé de faire tout le...

M. Delangis (Jean): Pour préciser ma pensée, si vous le permettez sur le besoin de s'approvisionner en services de transport à l'extérieur, notre usine d'asphalte est à La Morandière, quelque 60 milles au nord-est de Val-d'Or. Il faudrait qu'en envoie, de Joliette à Val-d'Or, une distance d'à peu près 650 milles, 10 à 15 camions, ou 20 camions, avec des "dumpers", pour travailler là-bas pendant quinze jours à transporter le gravier nécessaire au chargement du chemin. Ce ne serait même pas pensable pour nous. Si on est obligé de le faire, parce qu'il y a carence dans un certain milieu, là, on les envoie. Mais on ne fait pas d'argent avec ces véhicules, sauf que notre opération continue et notre première préoccupation est d'étendre de l'asphalte ou de finir le contrat le plus rapidement possible à compter du moment où on l'a commencé.

Si on achète des véhicules pour pallier la carence qu'on peut avoir à certains endroits, à un moment donné, on arrive à un endroit où il y a trop de camions artisans qui sont là. On ne peut pas stationner ces véhicules dans notre cour en attendant qu'il manque d'autres camions ailleurs pour pouvoir pallier ce besoin. On organise donc notre système de transport de façon à avoir une espèce de zone tampon qui va faire que, si on est mal pris, on va pouvoir se défendre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement, M. le Président. Est-ce que vous avez eu des problèmes avec tous les postes d'affectation où vous avez travaillé? Par exemple, dans la région 08, est-ce que cela a bien été?

M. Delangis (Jean): Où, dans la région 08? M. Goulet: L'Abitibi.

M. Delangis (Jean): Quant à l'approvisionnement des camions, on n'a pas eu de problèmes.

D'ailleurs, je pense qu'au cours de l'été, c'est un des postes qui nous a donné sa collaboration. Il est arrivé un incident mineur avec un de nos camions qui s'en allait livrer son chargement dans l'épandeur. Ce camion chargé d'asphalte était un tracteur semi-remorque, on en avait un besoin urgent à l'usine. Notre opérateur d'usine avait appelé par radio le contremaître du chantier et avait dit: Ecoute, retourne-moi ce camion immédiatement ici, j'en ai besoin pour faire du fardier pour transporter une pièce d'équipement.

On a tenté de faire vider immédiatement ce camion. On a eu cinq artisans et douze camions qui ont dit: II n'en est pas question, on va perdre notre tour. Ils n'ont rien perdu. C'est un incident mineur, si vous voulez, qui n'aurait absolument rien changé, mais je tiens à le souligner quand même.

A part ça, dans la région Val-d'Or, on a eu une collaboration de 100%.

M. Goulet: D'accord. Seulement une autre question. Vous avez donné des exemples où ça prenait des chauffeurs spécialisés pour transporter de l'équipement et je comprends que ça peut se défendre. Mais, au niveau de la rentabilité de votre entreprise, quand il s'agit du planeur, votre auto 1000, comment pouvez-vous expliquer que ça prend absolument un camion de la compagnie pour mettre à côté ou en dessous de ça? L'asphalte, le vieux bitume que vous enlevez, les agrégats qui vont dans le camion et qui seront ensuite déchargés... Pourquoi est-ce que ce n'est plus rentable pour vous? Ou quelle spécialité est-ce que ça prend pour que ce soit un camion venant de Joliette qui va aller dans le Bas-du-Fleuve plutôt que de prendre des artisans?

M. Delangis (Jean): Le but d'avoir nos propres camions sur le roto-mill, c'est ceci. Premièrement, cette équipe est nouvelle sur la route et ce que nous tentons de faire, c'est à la fois utiliser notre "roto mill" dans un sens pour transporter des agrégats à notre usine d'asphalte pour y apporter l'asphalte récupéré et réutiliser ces véhicules dans le sens contraire, pour amener du pavage nouveau sur la route à construire. Evidemment, tout le processus n'est pas encore en marche, mais l'équipe de transport et le but que nous poursuivons, c'est éventuellement d'avoir des véhicules qui vont transporter dans les deux sens pour avoir de l'efficacité.

M. Goulet: Je comprends, mais quand votre "roto mill" travaille, pourquoi un camionneur artisan de la région ne pourrait-il pas faire ça, justement, aller porter les agrégats que vous venez d'enlever, à votre usine et les ramener? On m'a exposé des cas semblables et les gens disaient: C'est un peu un acte de provocation, parce que la clause 75-25 n'est pas respectée.

M. Delangis (Jean): D'accord. Premièrement, il n'y a pas de clause 75-25 sur ce genre de contrat.

M. Goulet: Cela dépend comment on l'interprète. Au-dessus de la ligne d'infrastructure...

M. Delangis (Jean): Non, c'est du pavage, l'asphalte en est exclue.

M. Goulet: Ce que vous enlevez. Cela dépend comment c'est interprété.

M. Delangis (Jean): Les agrégats d'asphalte, etc., c'est exclu.

M. Delangis (Pierre): Aussi, concernant le planage des équipements, je tiens à vous mentionner que c'est une machine qui est sensible aux cassures, brisures et difficile d'entretien. Sur une journée de travail de douze heures, ça peut arriver que l'équipement va briser à 9 h 30 et le travail va reprendre à 14 heures. Est-ce qu'on va être obligé de garder des camionneurs artisans sans les payer? Je doute qu'ils restent là longtemps. Si ce sont nos propres camions, on peut toujours s'arranger plus facilement. On paie nos chauffeurs, point. Le camion, s'il ne roule pas, ne dépense pas de diesel.

M. Goulet: Est-ce qu'il y a d'autres raisons?

M. Delangis (Pierre): Cela en est une entre autres.

M. Goulet: Est-ce qu'il y en a d'autres?

M. Delangis (Jean): Oui, il est dans la nature même de ce contrat que c'est du compte propre et que Bourget peut faire lui-même son transport et trouver des moyens plus économiques. Par exemple, si on transporte des marchandises dans les deux sens, nos coûts d'exécution du contrat sont inférieurs. On peut soumissionner à meilleur prix et, évidemment, avoir des contrats additionnels au bénéfice des contribuables, alors que les taux de la Commission des transports du Québec nous obligeraient à payer plein prix dans les deux sens.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

M. O'Neill: M. le Président, j'ai un commentaire à faire sur le document qui a été soumis à notre attention et deux brèves questions à poser.

On dit à la page 5, concernant la réglementation, qu'elle engendrerait l'anarchie. Je voudrais tout simplement signaler aux auteurs du rapport que c'est quand même un peu curieux. On dit: La libre concurrence, quand elle n'existe plus, donc, quand il y a une réglementation, ça engendrerait l'anarchie.

Je vous signale que c'est quand même, comme approche du problème, quelque chose qui me semble poussé un peu loin. La réglementation, ça engendre des contraintes et c'est justement très souvent parce qu'il y a des genres de libre concurrence qui, eux, engendrent l'anarchie que le législateur intervient avec une réglementation.

Mais, comme vous êtes, de toute façon, sûrement préoccupé par ce problème d'anarchie et d'ordre social, je voudrais ici vous poser une première question. C'est pour savoir si, au plan de l'ordre, de la paix sociale, vous avez l'impression que la mise en application des deux propositions contenues à la page 13 favoriserait, dans le contexte actuel, la paix sociale: abolition des postes d'affectation, retour au jeu de la libre concurrence et à la liberté de commerce par l'élimination directe de la clause 75-25. Avez-vous l'impression que cela ramènerait la paix?

Voici ma deuxième question, si vous permettez que je la pose tout de suite. Vous avez fait une analyse assez sévère de certains comportements. Je ne nie pas l'objectivité des faits décrits. Mais est-ce que vous ne pensez pas qu'il y a parfois des circonstances ou des frustrations qui durent depuis trop longtemps, des situations insupportables au plan financier par les camionneurs artisans, ce que j'appellerais un état d'écoeurement, font qu'à un moment donné des gens qui peuvent être d'excellents citoyens posent des gestes qu'ils n'auraient jamais posés autrement? Autrement dit, quand on met, de force, des gens, je dirais, dans des situations particulièrement pénibles, ils ont à ce moment des comportements qu'ils n'auraient pas en temps ordinaire.

Si vous acceptez cette analyse, cette évaluation, cette explication de certains comportements, est-ce que ça ne nous amènerait pas à nuancer un peu le jugement que vous avez, qui est inclus dans le rapport, à la page 12, lorsque, de façon très générale, vous dites: "Ces exemples prouvent incontestablement le manque de sérieux de cette catégorie de transporteurs publics appelés les camionneurs artisans"? Est-ce que ce n'est pas un peu gros comme appréciation générale? Est-ce que vous ne seriez pas porté maintenant à nuancer quelque peu cette affirmation? (13 heures)

M. Delangis (Jean): J'aimerais répondre à votre première question concernant les conclusions. La première conclusion a été expliquée. Le texte, l'idée qu'on avait en parlant d'élimination des postes d'affectation a été expliquée de façon à être plus claire. Je ne vois pas grand-chose à ajouter sur cette première conclusion. Quant à la deuxième conclusion concernant la clause 75-25, si c'est l'intention du Parlement de protéger les camionneurs artisans de quelque façon — ce n'est pas ça que je mets en jeu — c'est au gouvernement de le décider.

La façon dont il doit le faire, à notre avis, ce n'est toutefois pas par une décision administrative, c'est de passer par la Commission des transports du Québec, de lui donner le mandat de favoriser une certaine catégorie de camionneurs. Par exemple, on pourrait dire: La Commission des transports du Québec va émettre des permis spéciaux de transport aux artisans qui, eux, vont travailler pour le ministère. Les autres détenteurs de permis de transport en vrac transporteront autre chose que pour le ministère des Transports.

Le but, dans cela, ce n'est pas tellement l'idée que le gouvernement a de les protéger, mais la façon dont ils ont été protégés, et ce qui, à notre avis, doit se faire autrement, doit se faire par le processus normal de la Commission des transports du Québec qui, elle, dans ses décisions, n'est pas dans une position où elle peut être influencée aussi facilement que les politiciens peuvent l'être. C'est leur rôle de recevoir les doléances de Pierre, Jean, Jacques, mais ils sont souvent mis dans des situations où ils prennent des décisions, à un moment donné, qui, tout en étant louables, font que les gens qui les utilisent le font de façon abusive comme ceux mêmes qui leur ont donné ces privilèges. Qu'on retransmette, si c'est l'intention, à la Commission des transports le fardeau de l'application de ces volontés.

Quant aux circonstances qui font que, à certaines occasions, on peut avoir des problèmes, je ne sais pas trop ce que vous voulez dire. Dans un des cas où on dit: On s'est fait faire des menaces avant même l'exécution du contrat parce que c'étaient des préjugés d'avance, c'étaient de mauvaises informations, on a dit à ces gens: Ecoutez, on ne peut pas vous garantir une chose qui ne nous est pas premièrement imposée et, deuxièmement, si on s'engage envers vous pour des choses qui nous seront impossibles à faire — pour l'application des contrats, vous avez le ministère des Transports, parce qu'on est obligé et on a la responsabilité de ces contrats — on vient peut-être de se mettre le doigt dans l'oeil. On va vous donner du transport suivant le besoin, comme ça doit être, et ne vous énervez pas pour rien; ça veut dire cela.

Pourquoi avoir un problème semblable? Je ne vois pas le problème dans ce cas. Il faut également avoir un peu confiance les uns aux autres et on est dans un système de liberté.

Dans le deuxième cas, celui où j'ai parlé de la clause 75-25 où elle s'appliquait, nous n'avions aucun camion sur le chantier et c'était entre eux qu'ils se chicanaient et nous, dans le milieu, on payait la note.

Dans le troisième cas, qui ne va pas directement pour vous mais peut-être pour éclairer le député de Bellechasse, pour revenir au "roto-mill ", nous avons fabriqué des équipements de transport spéciaux pour l'asphalte. Cela n'est pas tout encore organisé, mais ces véhicules sont des semi-remorques de 24 pieds qui sont isolées avec du polyuréthane de 3 pouces, ce qui fait une capacité d'isolation équivalente à 9 pouces de laine minérale. Le but de cet équipement est que premièrement, dans notre nouvelle usine en particulier, on tente de fabriquer l'asphalte le plus froid possible pour économiser l'énergie tout en le livrant au ministère aux conditions exigées.

En cours de route, il faut perdre le moins de chaleur possible. Les véhicules affectés à ça doivent être agencés de façon spéciale pour le transport et, si on doit les utiliser dans les deux sens, il faut que cela s'applique dans les deux sens et il faut commencer par un bout. On est encore au ni-

veau expérimental dans ce domaine. Je ne parle pas au niveau de la conservation de la chaleur ou de la qualité du produit qu'on va livrer à destination, je parle au niveau du "roto-rnill" lui-même, mais tout ça fait partie d'un processus qui va se concrétiser éventuellement à 100%. Ces véhicules dont je vous fais mention et qui sont isolés de façon particulière nous ont permis par exemple l'an dernier de convaincre le ministère des Transports. Sur une route au nord de Saint-Michel-des-Saints, il y avait approximativement 20 000 tonnes d'asphalte à faire et, si nous n'avions pas eu ce genre de véhicule, l'asphalte y serait du pavage économique, de qualité beaucoup inférieure à celle du pavage conventionnel qu'on a pu fabriquer à Joliette à 60 milles de distance de Saint-Michel-des-Saints. On a pu le livrer là-bas dans le même état, indépendamment des conditions atmosphériques, indépendamment de la distance, indépendamment des délais parce que notre épan-deur pouvait avoir des problèmes sur la route. Alors on utilisait ces véhicules isolés de façon spéciale pour l'asphalte, mais on peut également les utiliser à d'autres fins pour avoir une meilleure efficacité dans l'ensemble.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

M. O'Neill: Encore une fois, M. le Président, pour bien me faire comprendre, je ne mets pas en doute les faits que vous avez décrits, mais ce que je veux dire, c'est que je pense que ce pourrait être dangereux d'étendre votre interprétation comme vous l'avez fait dans votre rapport; on a l'impression d'un jugement global sur l'ensemble des camionneurs artisans. En disant ceci, encore une fois, quand à un moment donné, une question est pourrie, les gens les meilleurs dans une société peuvent avoir à l'occasion des comportements répréhensibles et ça pourrait arriver à n'importe qui d'entre nous dans certaines situations. Cependant, disons-nous bien que, lorsqu'une question est pourrie, il ne faut pas d'abord s'en prendre aux victimes du pourrissement, mais poser des questions à ceux qui ont laissé pourrir ce problème.

M. Delangis (Jean): Ecoutez, je suis parfaitement d'accord avec vous et c'est un peu ça qu'on a tenté d'expliquer. Evidemment il faut prendre les mots à un moment donné pour dire ce qu'on a à dire...

M. de Belleval: M. Delangis, je peux vous arrêter une seconde? C'est parce que le député de Chauveau n'était pas ici au moment où nous avons discuté de cet aspect de la question à la fin de votre mémoire. Peut-être que vous n'êtes pas au courant ou que vous ne vous êtes pas aperçu que le député de Chauveau n'était pas là à ce moment-là, c'est pourquoi vous devriez peut-être vous expliquer de nouveau, pour le bénéfice du député de Chauveau.

M. O'Neill: Non, j'étais là au moment de ce mémoire, M. le ministre.

M. de Belleval: Non, juste à la fin du mémoire, vous vous êtes absenté quelques minutes et, à ce moment-là, nous avions parlé de cet aspect des choses. M. Delangis avait expliqué que, pour autant que les postes d'affectation fonctionnent dans un contexte de neutralité, il est d'accord...

M. O'Neill: J'étais ici, M. le Président.

M. de Belleval: Vous y étiez à ce moment-là?

M. O'Neill: Oui, M. le Président.

M. de Belleval: Ah! Je m'excuse, M. le député.

M. O'Neill: II y a des fois où je suis absent, mais là, j'étais bien présent, M. le Président.

M. de Belleval: Je m'excuse.

M. Delangis (Jean): Pour répondre à votre question, je pense que l'essence même des camionneurs artisans est bonne, et ce n'est pas ça que je mets en jeu. Je comprends fort bien ce que vous voulez dire. Je suis même d'accord avec ce que vous dites, d'autant plus que je prétends qu'on devrait pouvoir libérer les postes d'affectation des éléments, à l'intérieur de leur système, qui profitent d'eux à leur profit individuel, peut-être. C'est un certain groupe que je ne connais pas. Ma conclusion vient des résultats que j'ai pu entendre ici et des résultats qui correspondent aux mêmes problèmes qu'on a eus. On devrait pouvoir les débarrasser de ce qu'ils peuvent avoir comme mauvais éléments et les informer réellement de leurs vrais droits et de leurs vraies obligations en même temps. Et qu'on leur donne, au niveau des tarifs, la possibilité d'être en affaires, car ces gens-là sont en affaires.

A Joliette, au moment où on a été appelé à soumissionner sur un contrat de transport en vrac, par exemple, 1 500 000 tonnes annuellement — c'est du tonnage — on a comparu devant la Commission des transports du Québec une des premières fois où elle statuait sur les taux. Nous demandions donc pour ce client en particulier, des taux spéciaux, étant donné que, premièrement, c'était un contrat annuel, dans des conditions particulières. Enfin, on a fini par convaincre la Commission des transports que, pour ce tarif, c'était rentable pour nous et on pouvait même le faire à meilleur compte que notre client lui-même, parce que, sans ça, il achetait ses camions. Pour faire une grande histoire courte, il est sûr qu'on n'aurait jamais fait le transport chez ce client aux taux fixés de façon générale par la commission. Elle nous a fixé des taux particuliers et ces taux-là existent depuis quatre ou cinq ans et on fait de l'argent avec le contrat.

Enfin, l'Association des camionneurs artisans a retiré son opposition devant la commission, mais, de toute façon, elle était parfaitement justifiée d'en faire une, c'était son droit. Au lieu de prendre cette attitude, de faire fixer un taux, ce que j'appellerais dans le transport général un taux de LTL pour tout, sans considérer ce que l'on

appelle les "truck loads" qui, à un moment donné, parce qu'il y a des volumes spéciaux à certains endroits, et que les conditions sont particulières, y trouvent quand même une rentabilité, au lieu, dis-je, de prendre cette attitude, si elle avait elle-même offert ses services à notre client, ce serait peut-être elle actuellement qui serait en affaire et ses camions ne seraient pas inactifs chez elle. Et 1 500 000 tonnes par année, je vous assure que cela génère des revenus.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures.

Suspension de la séance à 13 h 11

Reprise de la séance à 15 h 8

Le Président (M. Jolivet): La commission des transports reprend ses travaux, pour continuer l'étude des mémoires qui lui sont présentés en regard du camionnage en vrac. Je fais mention aux membres de la commission qu'il leur sera distribué une lettre qui vient de nous parvenir, simplement pour leur information. Je ne ferai pas la lecture complète de la lettre, elle provient du Poste d'affectation de la région 02 Incorporée, de la part de Michel Duchesne, le président du Poste d'affectation de la région 02. Il donne son opinion sur des allégations qui ont été faites par d'autres personnes lors de l'audition du mémoire de M. Gilles Fillion, président des camionneurs en vrac de Dubuc-Sud.

Donc, je fais dépôt, à cette assemblée, à chacun des membres, de cette lettre.

Le rapport de M. Nil Girard Transport Limitée, par M. Rodrigue Girard...

M. Goulet: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Je m'excuse auprès de M. Girard, tout le monde semble vouloir accélérer le processus des travaux, on ne veut pas brimer personne de son droit de parole. Il y a des gens dans la salle qui nous ont demandé si c'était possible d'avoir accès aux mémoires, avant qu'on commence à le lire, de façon que ça puisse accélérer les travaux. En ce qui me regarde, je les ai; mais est-ce que c'est possible? Trois personnes m'en ont fait la demande. Je ne sais pas si elles se sont adressées à d'autres membres de la commission; alors, en leur nom, je formule le voeu.

Le Président (M. Jolivet): Elles se sont adressées à moi. Mais je n'ai pas les pouvoirs de leur permettre d'avoir accès aux documents; je dois même dire que la commission, pour permettre aux gens d'être au courant, a permis une distribution qui se faisait chaque fois, au fur et à mesure de la présentation des documents. Mais on sait très bien que les responsables des commissions parlementaires auraient bien pu leur refuser tout accès, compte tenu qu'ils n'ont pas à imprimer ces documents.

Pour la bonne marche des travaux, on leur a permis l'accès aux documents de façon non habituelle. Ordinairement, ce sont les membres de la commission et les journalistes qui y ont accès et je n'ai pas le pouvoir de donner cet accès à tous ceux qui le désireraient, avant même la lecture des mémoires.

Ce que j'ai répondu aux gens, c'est que compte tenu qu'il y aura quand même une période de questions, pour ceux qui ont intérêt à voir l'ensemble du document, ce serait possible s'il y avait des résumés qui étaient faits ici, en avant, par les gens qui présenteront leurs rapports. Nous sommes assurés que ce sont des gens qui sont habitués à lire rapidement des documents et d'en faire un résumé rapide. Mais si les membres de la commission le permettaient, je vérifierai avant de donner mon accord.

M. Goulet: Une deuxième directive, M. le Président. Est-ce qu'il est en votre pouvoir, même si une personne n'est pas convoquée spécifiquement, de l'inviter pour quelques secondes à venir à la table afin de répondre à une question d'un membre de la commission? Je parle de M. le commissaire Alain de la Commission des transports qui est dans la salle. Mais, est-ce qu'au cours de l'après-midi, il serait de mise...

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas en mon pouvoir, parce qu'il n'est pas parmi ceux qui ont manifesté le désir d'être entendus par cette commission. D'un autre côté, si les membres de la commission, d'un consentement unanime, le permettaient, je pourrais, avant de prendre une décision, vérifier. Mais, je dois dire que compte tenu qu'il n'a jamais manifesté l'intention, dans les délais prévus, d'être devant nous, ce n'est pas en mon pouvoir de l'accorder.

M. Gratton: M. le Président, quant à moi, je consentirais à la première demande du député; mais quant à la deuxième, je pense qu'il s'agirait là de créer un précédent très dangereux. En tout cas, je n'accorderai pas mon consentement à la deuxième demande.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Quant à la première demande, je fais des vérifications si c'est possible et je donnerai ensuite ma décision. Pour le moment, M. Rodrigue Girard.

Nil Girard Transport Ltée

M. Girard (Rodrigue): Je remercie, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, de l'occasion que vous me donnez d'apporter mon opinion sur le problème du transport en vrac devant la commission parlementaire. Nil Girard Transport effectue du transport de marchandises générales et des matières en vrac depuis 1930.

Aujourd'hui, je vais démontrer les problèmes que nous avons de conserver le volume de matières en vrac qu'on transporte depuis longtemps. Je m'excuse de ne pas avoir un mémoire de plusieurs pages; c'est concentré dans quelques lignes. Je suis ici pour donner des explications et faire connaître mon opinion. Je vais le lire et ensuite je pourrai peut-être ajouter mes commentaires.

Vu l'intérêt que nous avons dans le transport par camion de la marchandise générale et de matières en vrac, nous sommes intéressés à vous émettre notre opinion sur les problèmes du transport en vrac actuellement.

A notre avis, le volume de transport en vrac devrait appartenir aux camionneurs qui s'en sont fait une profession et sont en mesure de servir le public profitablement.

Dans le passé, avec l'avènement de la réglementation des matières en vrac qui n'existait pas auparavant, soit le règlement no 112 mis en vigueur...

Nous ne pouvons connaître l'efficacité de ce règlement parce qu'il n'a pas été respecté dans une bonne mesure. Il a été institué pour placer sous permis ceux qui effectuaient du transport de matières en vrac non réglementées précédemment et, par la suite, s'en sont prévalus un grand nombre qui possédaient des camions de toute catégorie, n'effectuant pas ce genre de service ou le faisant sur un nombre de matières très restreint, soit pour leur propre compte ou pour autrui.

Il a été facile de le constater vu le grand nombre d'attestations au permis en vrac transférées ou cédées à plusieurs nouveaux intéressés à faire du transport de matières en vrac, ce qui a fait augmenter le nombre de véhicules utilisés pour le transport en vrac. La grande partie du transport en vrac est effectuée présentement par les entrepreneurs en construction de chemin, en excavation, en entretien de chemins d'hiver. Ceux-ci profitent de la situation pour inclure des tarifs de matières de transport en vrac avec d'autres opérations. Après avoir profité du volume de transport en vrac sur leurs contrats ou leurs chantiers, ils bénéficient de la portion distribuée par le poste d'affectation. (15 h 15)

Si le règlement 112-L doit être modifié, qu'il le soit en fonction des besoins de vrais transporteurs de matières en vrac. L'émission de deux permis distincts devrait être étudiée, soit un permis de catégorie transporteur, qui donnerait droit aux matières mentionnées dans le règlement 112-L pour le public en général; soit un permis restreint, catégorie entrepreneur, leur permettant de transporter des matières en vrac inscrites dans le règlement 112-L sur le chantier de construction dont ils sont le principal signataire et non sous-traitant. Le problème actuellement est que les entrepreneurs prennent arrangement entre eux pour faire tout le transport en vrac et, par le fait même, les vrais transporteurs camionneurs ne sont pas les bienvenus dans le domaine.

Que les matières en vrac réglementées dans l'ordonnance générale du camionnage avant l'avè- nement du règlement 112 soient clairement mentionnées et demeurent un droit et que ceux qui effectuent ce genre de service depuis de nombreuses années soient maintenus dans leur permis de transport général. Que l'application du règlement sur le transport soit rigoureusement contrôlée par une équipe compétente et efficace.

Que ceux qui utilisent des services dans l'illégalité soient poursuivis, mais que des sanctions soient prises au même titre que pour les opérateurs fautifs. Les frais de l'enquête devraient être à la charge de ceux qui sont, après l'enquête, déclarés coupables d'acte illégal et non pas l'ensemble de ceux qui respectent les lois, comme c'est le cas présentement et que le courtage en matières en vrac soit permis pour employer seulement les détenteurs de permis de la catégorie entrepreneur.

Nous prétendons que la réglementation sur le transport en vrac devrait être maintenue pour protéger les intéressés dans ce domaine et pour qu'il soit profitable à l'Etat.

Nous vous remercions de l'occasion que vous nous fournissez de vous faire connaître notre opinion sur le sujet ci-haut mentionné.

Le Président (M. Jolivet): Un instant! Je m'excuse, simplement pour les besoins; normalement, est-ce que vous aviez une permission pour faire l'enregistrement? Il n'y a pas d'enregistrement possible de son en commission parlementaire. Il n'y a pas possibilité de...

M. le ministre, sur le mémoire.

M. de Belleval: Vous dites qu'on devrait modifier le règlement 112-L — peut-être qu'il doit être modifié — et qu'il le soit en fonction des besoins des vrais transporteurs; l'émission de deux permis distincts devrait être étudiée: un permis de catégorie transporteur, qui donnerait droit aux matières mentionnées dans le règlement 112-L pour le public en général, soit un permis restreint catégorie entrepreneur leur permettant de transporter les matières en vrac inscrites dans le règlement 112-L sur leur chantier de construction, dont ils sont le principal signataire et non un sous-traitant.

Vous n'avez pas l'impression que ça compliquerait davantage la réglementation et que ça donnerait lieu à d'autres litiges, encore d'autres poursuites, d'autres difficultés?

M. Girard: Cela amènerait peut-être les entrepreneurs à se servir du poste d'affectation ou à se servir des camionneurs qui ont le permis en vrac pour transporter ces matières. Présentement, le vrai problème, c'est qu'ils accaparent tout le transport à l'insu du poste d'affectation. Le vrai problème dans tout cela, c'est le non-respect du règlement 112 dans une bonne proportion; c'est simplement cela. Nous avons déjà eu des droits que nous avons par la suite conservés en fournissant la preuve qu'on avait transporté certaines matières qui étaient réglementées avant le règlement 112. On a continué de transporter ces matières. On s'aperçoit aujourd'hui que ces matières nous

échappent par l'entremise de camionneurs non détenteurs de permis, avec l'avènement de nouveaux camionneurs qui se sont prévalus du droit de posséder des permis quand ils avaient un camion.

Le véritable problème que vit présentement Nil Girard Transport, c'est l'invasion des transporteurs en vrac qui ne sont pas détenteurs de permis pour transporter les matières auxquelles on avait droit anciennement, auxquelles on a encore droit aujourd'hui mais non eux. On perd ce volume-là...

M. de Belleval: Pouvez-vous donner un exemple?

M. Girard: Oui, par exemple le minerai fini. Je vais vous faire un historique plus loin. Nil Girard Transport s'est développé avec la région en effectuant du transport général et du transport en vrac en 1930, 1935, 1940, 1950 et 1960. Depuis les années soixante, on a évolué dans le transport général et dans le transport en vrac aussi. On a modifié notre équipement pour les besoins. Il est survenu toutes sortes de besoins. Les industries se sont installées, elles ont eu du minerai fini qui était réglementé sous l'ancienne loi de l'ordonnance générale du camionnage et on a transporté ces matières-là longtemps. Dans les années soixante on transportait toutes ces matières et toutes les matières en vrac en même temps qu'on faisait du transport général, mais il est arrivé un certain groupe de transporteurs qui nous ont dit: Toi, tu fais du général, tu n'as pas affaire dans le transport du sable, de la terre et du gravier.

On leur a concédé des choses-là sans se battre, on n'a pas voulu faire de chicane et on a placé nos efforts ailleurs. Mais autant on a concédé les matières en vrac, sable, terre et gravier, à ces gens-là, autant on s'est dit on va au moins conserver les matières qui sont réglementées, les produits finis pour les usines qu'on avait dans notre région. Cela faisait notre affaire et a continué jusqu'en 1970. Cela allait assez bien; eux transportaient sable, terre et gravier et nous transportions pour certains clients qui étaient proches de nous. On avait concédé que sable, terre et gravier, ce n'était pas réglementé et qu'on pouvait leur accorder ça. Par contre, on avait conservé les matières qui étaient réglementées et ça faisait notre affaire. Il est arrivé à un moment donné en 1970 que ces matières ont augmenté, on s'est développé avec ces matières-là en ayant de l'équipement approprié.

M. de Belleval: Et là on introduit par exemple le minerai dans le transport en vrac, d'autres choses, le blé, etc...

M. Girard: C'est ça et on a transporté toutes ces matières-là. Alors est arrivé le règlement 112. On s'est dit: Avec le règlement 112 ça va être clarifié, on n'aura pas de problème, on a une chance d'avoir une part de l'autre marché et on a laissé filer ça. Mais la vraie pagaille a commencé vers 1975, dans le sens que tous ceux qui ont obtenu des permis de transport en vrac ont accapare notre volume qu'on avait si bien conservé et dont on leur avait concédé une certaine partie. Aujourd'hui, notre plainte, c'est qu'on est en train de perdre toutes les matières auxquelles on avait droit et auxquelles eux n'ont pas droit. C'est pour ça qu'on prétend que le nouveau règlement 112 modifié en 1977, bien qu'on soit satisfait de sa teneur, doit être clarifié une fois pour toutes. On s'est dit: Cela va être suivi, le poste d'affectation. On va conserver nos matières. Eux ne la transportent pas, ça ne leur fait pas mal. On a peut-être une chance d'avoir une partie qu'on a perdue, l'ordre va être établi.

Ce n'est pas ça qui s'est passé. La pagaille a pris de plus belle. Tous les camionneurs se sont ingérés dans nos matières. Plutôt que de se battre, on a laissé aller. On s'est plaint beaucoup au ministère. On a critiqué des gens du ministère en disant qu'ils ne faisaient pas leur travail. On s'est aperçu par la suite que le travail était fait, mais que ça n'aboutissait à rien. C'est pour ça qu'on est en commission parlementaire aujourd'hui. Si le travail des inspecteurs, qu'on a tant critiqués, a été fait — et le rapport a été très bien préparé — et si ça n'aboutit pas, ces transporteurs, depuis trois ou quatre ans, transportent régulièrement quand même, on dit devant la commission parlementaire: Si ce n'est pas nécessaire de changer la loi, au moins, faisons-la respecter dans une bonne mesure.

Vous semblez être satisfaits des postes d'affectation. Vous avez même posé une question, M. le ministre, au président du Poste d'affectation de la région 02, à savoir pourquoi il semblait avoir de la difficulté à avoir la majorité. Il n'a rien à vendre, lui. Tout ce qu'il a à vendre aux membres, c'est la partie que le ministère lui accorde automatiquement. Tout le volume de transport qui devrait être dirigé vers le poste d'affectation pour lui et ses seuls courtiers en transport, il ne l'a pas. Les courtiers en transport, ce sont les camionneurs eux-mêmes qui se passent les contrats de l'un à l'autre. Le poste d'affectation n'a rien à vendre, lui. C'est pour ça qu'il a de la difficulté à avoir des membres. Je peux vous citer des faits pendant une journée. Les membres se rapprochent de ceux qui leur donnent de l'ouvrage. Actuellement, ceux qui leur donnent de l'ouvrage, ce sont les courtiers en transport, des camionneurs qui sont courtiers en transport qui ne devraient pas l'être. Lorsqu'on parle de transport illégal, ce n'est pas toujours un camionneur qui fait un voyage illégal. Ce sont les courtiers qui donnent du transport illégalement.

On a entendu hier la Scierie Outardes nous dire qu'elle donnait beaucoup de transport en vrac. Cela nous a touchés aussi, nous. C'est vrai qu'elle donne du transport en vrac. Mais c'est sur la façon qu'elle le donne qu'on n'est pas d'accord. Elle ne vous a pas dit, par exemple, qu'elle enfreignait la loi ou, si elle ne l'enfreignait pas elle-même, elle incitait les camionneurs à enfreindre la loi. Je vais vous donner un exemple en passant: II s'est transporté, pour le compte de la Scierie Outardes, dernièrement, pour $150 000, à peu près

60 voyages de bois préparé de la région de Chicoutimi à Baie-Comeau. Ils ont donné le contrat à un transporteur en vrac de Sacré-Coeur, qui possède un camion. Ils lui ont donné de l'ouvrage pour dix camions. Ce camionneur de Sacré-Coeur m'a téléphoné. Il savait qu'on faisait du transport dans la région et qu'on avait de l'équipement pour transporter de la région de Chicoutimi au quai de Baie-Comeau. J'ai dit: Je n'ai pas de problème, moi. Je trouve ça curieux quand même que tu aies le contrat. Mais, en tout cas, on travaille, nous, et la situation, on la connaît, tout le monde travaille comme ça. J'ai dit: Quel prix paies-tu? Ils nous ont offert des prix 30% inférieurs aux mêmes marchandises qu'on transportait en 1979.

C'en sont des lacunes lorsqu'ils viennent vous dire: On est dans le transport en vrac, tant de pourcentage. C'est tout vrai, cela, mais c'est de la manière dont ils le présentent, que ce n'est pas vrai et que c'est fautif. C'est un exemple, entre autres, auquel je pense. Le poste d'affectation — je ne veux pas prendre sa défense — je fais partie du poste d'affectation depuis le début. J'avais confiance au poste d'affectation. Je m'aperçois aujourd'hui que ces gens n'ont pas... Je ne dis pas qu'ils n'ont pas le support, je les supporterai très certainement. Le résultat n'est pas bon parce qu'ils n'ont rien à vendre, quand ils pourraient vendre une bonne partie du transport en vrac. Le problème qu'on a dans notre région, actuellement, c'est que les matières visées que je voudrais défendre, sol, terre et gravier — je vous en ai parlé — qui reviennent aux gens du camionnage qui étaient habitués à les transporter depuis longtemps et qui en ont besoin pour vivre, vont aux mains des transporteurs illégaux qui ne sont pas détenteurs de permis et qui agissent en plus comme courtiers en transport pour les donner à d'autres transporteurs. Ils sont doublement illégaux.

On sait que la compagnie est d'accord pour faire affaires avec un petit camionneur, parce qu'il est à sa main, mais on est quand même sérieux, cela fait trente ans qu'on est là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, avez-vous des questions?

M. Gratton: Non, seulement pour remercier M. Girard de son témoignage.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse, avez-vous des questions?

M. Goulet: Ce que je retiens, c'est que si on était capable d'avoir un vrai contrôle sur l'application des règlements on pourrait assumer le succès des postes d'affectation.

M. Girard: Je le prétends. Ce qu'on a constaté, nous... On s'est plaint beaucoup, on a même été achalants. A force d'être achalants, on a appris des choses aussi. A force d'achaler les gens du ministère, on a appris qu'il y avait des rapports faits contre certains transporteurs illégaux évi- dents qui transportaient illégalement depuis un an. On s'est plaint à ces gens. On leur a dit: Ecoutez, cela n'a pas de bon sens. On en a dit pas mal long. A force de se plaindre à eux et de se plaindre à leur supérieur, on a compris — ils ne nous l'ont pas dit — que le malaise n'était pas dans le rapport qui était fait mais dans le résultat qu'il n'y avait pas. C'était remis à un bureau de contentieux. On a dit: C'est le contentieux qui a cela. On s'est informé au bout de six mois. On a dit: Qu'est-ce qu'il advient de notre affaire au contentieux? Ils ont dit: Notre travail est fait. Cela a été remis au contentieux. Notre problème n'est pas réglé. Je prétends qu'il doit y avoir une application et des résultats assez courts. Cela se passe ailleurs. Je peux vous en citer un cas. On se glissait en Ontario. On a fait du transport de bois préparé dans la région de la Nouvelle-Angleterre. Je dois vous dire, en passant, que quand on va du côté américain on "check nos claques". On desservait la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et la région de Montréal. On s'est glissé en Ontario de temps en temps. On s'est fait attraper. Quand on se faisait attraper, on recevait un avis de cette infraction dans un temps assez court pour ne pas oublier qu'on était passé par là.

Ensuite, on s'est reglissé une deuxième ou une troisième fois; on a encore reçu des infractions assez substantielles pour nous faire penser à ne pas aller là. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a demandé le permis pour l'Ontario, on l'a obtenu. On y va légalement aujourd'hui. Ce que je veux dire, c'est que c'est le règlement, à mon avis, qui doit être changé; c'est à vous de l'étudier, en tenant compte de toutes les doléances de ceux qui ont passé avant moi. Pour ma part, présentement, le règlement me satisfait. Si j'ai déjà concédé antérieurement certaines choses, je ne suis pas prêt à perdre ce qui me reste. (15 h 30)

Le Président (M. Jolivet): Pas d'autres questions? L'Association des industries forestières du Québec Limitée, représentée par Anatole Côté, mémoire no 4.

Pendant qu'on vient ici, en avant, chercher les documents, je vais donner ma décision concernant la première demande qui a été faite. Je me dois, malheureusement, de la refuser pour les raisons suivantes: simplement pour l'éthique professionnelle des gens qui présentent un mémoire et selon la formule habituelle, les membres de cette commission doivent être les premiers avertis du contenu de ce mémoire, pour se bien préparer à poser les questions les plus pertinentes possible; la seconde, c'est qu'il serait anormal que d'autres groupes prennent connaissance des mémoires avant les membres de cette commission, et avant que les personnes désignées pour témoigner devant cette audience n'aient pu le présenter. Cela créerait un précédent qui pourrait devenir dangereux et permettre, comme cela s'est déjà vu, par d'autres moyens, de tenir des conférences de presse sur un témoignage non encore rendu par des témoins. Comme membres de cette commission, avec un peu de décence, nous devons

d'abord entendre les intéressés avant de permettre la distribution de leur texte.

Donc, même si les membres de cette commission étaient consentants à les remettre en totalité aux autres personnes ici présentes qui voudraient l'avoir, je m'y refuserais comme président.

M. Anatole Côté, si vous voulez présenter les gens qui sont avec vous.

M. Côté (Anatole): M. le Président, j'aimerais vous présenter mes compagnons, M. Jean Filteau, M. Edward Mooney et notre porte-parole, Me Claude Girard.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Girard.

Association des industries forestières du Québec

M. Girard: MM. les membres de la commission, je vais d'abord faire une lecture de notre mémoire qui se veut relativement court.

L'Association des industries forestières du Québec regroupe une trentaine des plus importantes compagnies forestières du Québec. L'association et ses membres se sont préoccupés, depuis nombre d'années, du coût du transport des matières premières pour l'approvisionnement des usines, et du transport de leur produit fini. Cela s'est révélé d'autant plus vrai depuis l'adoption du règlement 12 sur le camionnage en vrac.

En effet, depuis la tenue des toutes premières audiences publiques relatives à la fixation des taux et tarifs pour le transport des matières en vrac, l'association a été représentée devant la Commission des transports du Québec.

Les matières en vrac qui sont habituellement transportées pour le compte des membres de l'association sont: les graviers, les copeaux de bois, les rebus de bois et ce qu'on appelle le bois n'ayant subi d'autres opérations que la coupe transversale, l'ébranchage et l'écorchage.

Nous avons pris connaissance, par la voie des media d'information, des revendications faites par l'Association nationale des camionneurs artisans auprès du gouvernement du Québec aux fins d'obliger les compagnies forestières à utiliser les services de ses membres lors de la construction des chemins en forêt. Selon ce que nous avons cru comprendre, cette demande était justifiée, au dire de l'ANCAl, vu que le gouvernement subventionne les compagnies forestières à l'occasion de certains de ces travaux.

Un échantillonnage récent, que nous avons fait le 9 juillet 1980 auprès de nos membres, révèle que le transport des matériaux requis lors de la construction des routes forestières, tant celles qui font l'objet de subventions que celles qui n'en font pas l'objet, était fait par des propriétaires de véhicules autres que ceux appartenant à nos membres dans une proportion de 95% dans le cas des routes qui font l'objet de subventions et de 86% dans le cas des routes qui ne font pas l'objet de subventions.

D'autre part, dans un mémoire sur la forêt préparé en avril dernier par l'ANCAl et soumis au ministre de l'Energie et des Ressources, il était mentionné, et nous citons: "II ne faudrait quand même pas oublier que 85% du transport effectué actuellement en forêt l'est par des membres de l'Association nationale des camionneurs artisans."

Malgré cet état des faits, il ne nous apparaît pas justifié d'accorder à une catégorie particulière de transporteurs l'exclusivité totale ou partielle du transport des matériaux requis lors de la construction des chemins forestiers ou des autres matières forestières.

Quant aux tarifs, la fixation de ceux-ci décrétée par la Commission des transports du Québec a toujours été au coeur des audiences publiques tenues devant cette organisme. On ne peut ignorer les débats qui s'y déroulent entre les représentants des requérants de services et ceux des transporteurs ou les problèmes soulevés par la fixation des taux.

Par contre, lors des récentes démarches de l'ANCAl et notamment dans un article publié dans la revue éditée sous la surveillance de cette association, l'ANCAl a tout au moins laissé planer un doute sur l'honnêteté des compagnies forestières quant au respect des décisions de la Commission des transports. Ainsi, retrouvait-on à la page 12 du numéro de juillet 1980 de "La Voix de l'ANCAl", l'extrait suivant: "La très grande majorité des camionneurs savent et admettent de plus que les taux établis par la Régie des transports ne sont à peu près jamais respectés en forêt."

Il n'est pas de notre intention de disserter sur ce sujet, mais nous rappelons à ceux qui se croient lésés qu'il existe des recours pour régler de tels griefs. Certaines personnes d'ailleurs ont déjà porté des plaintes à ce sujet auprès des autorités compétentes qui les ont étudiées et jugées sans fondement.

Un autre point que nous avons retenu des revendications récentes de l'ANCAl, est le fait que le transport des matières forestières devrait être assujetti au contrôle des postes d'affectation.

Nous désirons attirer tout spécialement l'attention de cette commission sur le fait que les personnes qui transportent des matières forestières pour le compte de la plupart des compagnies de pâtes et papiers, sont membres du syndicat local couvrant les employés de ces compagnies. Aux termes des conventions collectives, les personnes inscrites sur la liste d'ancienneté doivent être rappelées au travail de préférence à toute autre personne et selon le rang qui est indiqué sur ladite liste d'ancienneté. De plus, le transport du bois se fait sur des périodes assez prolongées et n'a pas le caractère d'un transport occasionnel qui nécessite l'intervention d'un poste d'affectation. Permettre aux dirigeants des postes d'affectation de répartir le transport des matières forestières entre différents camionneurs créerait, selon nous, une double juridiction et pourrait être l'objet d'un conflit entre les postes d'affectation et le syndicat des employés de chaque compagnie forestière impliquée.

Nous remercions les membres de cette commission pour l'occasion qui nous est donnée de soumettre quelques précisions sur le camionnage

en vrac et nous demeurons à la disposition des membres de cette commission.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Cela va. Je vous remercie. Cela confirme un certain nombre de renseignements qui nous ont été fournis plus tôt, ça va dans le même sens. On a posé un certain nombre de questions, on a reçu des réponses, alors, dans ce sens-là, je n'ai pas de questions particulières à poser.

La situation semble assez claire maintenant en ce qui concerne le transport en forêt. Il y a un point, cependant, qui est intéressant dans votre mémoire et qui n'avait pas été soulevé auparavant, c'est que vous prétendez que 95% des travaux en forêt sont effectivement faits par des camionneurs artisans.

M. Girard: Pas nécessairement par des camionneurs artisans, mais par des camions qui n'appartiennent pas aux compagnies forestières.

M. de Belleval: C'est cela.

M. Girard: Cela peut être des entrepreneurs, cela peut être des artisans.

M. de Belleval: Cela peut être des entrepreneurs. Est-ce que vous avez la répartition à ce moment-là entre les travaux qui sont faits par des entrepreneurs et ceux qui sont faits par des artisans? Est-ce possible d'avoir cette répartition?

M. Girard: Non, je ne pense pas, M. le ministre, d'autant plus que cela dépend au point de départ de ce qu'on donne comme définition de camionneur artisan et de camionneur entrepreneur.

M. de Belleval: Un camionneur artisan, c'est un camionneur qui possède moins de 4 véhicules.

M. Girard: Même là, ce n'est pas possible de faire ce relevé. On ne sait pas qui est membre de quelle association.

M. de Belleval: Je ne faisais pas allusion à une association. Vous avez raison de le souligner, il y a peut-être un malentendu entre une association qui a dans son sigle les mots camionneurs artisans et un camionneur artisan qui est un terme technique pour désigner, au fond, un petit camionneur qui conduit son propre camion et qui ne possède que deux, trois ou quatre camions.

M. Girard: Je ne pense pas qu'il soit possible de faire cette répartition, M. le ministre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je suis de l'avis du ministre à savoir qu'on a entendu les revendications que vient de nous faire l'association à d'autres reprises. On a sûrement tout l'éclairage voulu. En tout cas, je le pense. Je dirais, pour votre information, que, quant a nous de l'Opposition officielle, nous ne croyons pas que la solution au problème général du camionnage en vrac passe nécessairement par l'obtention par quelque groupe de camionneurs que ce soit de champs exclusifs de travail, parce qu'on se rend compte, par les témoignages qu on a entendus depuis trois jours ici, qu'effectivement, privilégier un groupe de travailleurs nécessite de léser d'autres groupes de camionneurs dans leurs droits. Donc, à partir de ce principe, je pense que vous voyez déjà que, quant à nous, une de vos recommandations serait déjà obtenue. Pour ce qui est du reste, je pense que votre mémoire reflète très bien ce que nous avons entendu jusqu à présent et nous vous en remercions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Je n'ai pas de questions, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci, messieurs!

Maintenant, la Compagnie de transport Canadien Pacifique, représentée par M. Jean Doucet. Le no 21. Pendant que M. Doucet vient s'installer à la table, les membres de cette commission recevront un rapport qui vient de nous arriver et qui, semblerait-il, serait une partie de la réplique des gens de l'Association nationale des camionneurs artisans, pour besoin de préparation. M. Doucet.

Compagnie de transport Canadien Pacifique Ltée

M. Doucet (Jean): M. le Président, MM. les commissaires, M. le ministre, mémoire présenté à la commission permanente des transports relativement au camionnage en vrac. La Compagnie de transport Canadien Pacifique Limitée, ci-après désignée CPT, et sa filiale en propriété exclusive, la Compagnie de transport H. Smith Limitée, détiennent des permis du Québec pour le transport en vrac intra et interprovincial. CPT aimerait attirer respectueusement l'attention de la commission sur un nouveau développement dans le transport en vrac, développement auquel CPT participe de plain-pied au Canada et que la commission devrait peut-être ne pas perdre de vue au moment d'envisager toute modification éventuelle à la réglementation relative au camionnage en vrac.

Il s'agit de l'avènement des conteneurs-citernes ISO en service intérieur au Canada. En raison de l'inadaptation de leur structure aux impacts de la voie et au mouvement des navires, les camions-citernes et les remorques-citernes ne conviennent pas au transport intermodal. Par contre, les conteneurs-citernes ISO constituent une méthode sûre d'acheminement des produits en vrac par route, fer ou eau, la citerne étant soutenue et entourée par un cadre robuste.

CPT estime que les expéditeurs de produits en vrac devraient être en mesure de se prévaloir des

avantages économiques que présente le transport intermodal en vrac. L'utilisation de la technologie des conteneurs pour éviter les transbordements de produits en vrac de wagons ou navires à des camions-citernes peut contribuer à comprimer les coûts. Il est possible d'entreposer sur place des conteneurs-citernes tandis que les remorques-citernes chargées ne peuvent être dételées de leur tracteur et doivent être déchargées pendant que le chauffeur attend.

Ce nouveau développement devrait avoir des conséquences heureuses pour les entreprises de camionnage en vrac, surtout si elles peuvent attirer à cette nouvelle technologie les produits en vrac actuellement acheminés dans des barils ou des sacs. A cette fin, elles devront prévoir des coûts en capital pour l'achat de nouveaux matériels qui, prévoit-on seront construits au Canada. Les compagnies désireuses de s'équiper pour le transport intérieur de conteneurs devraient pouvoir compter sur les fonds d'investissements nécessaires, à la condition qu'une réglementation appropriée et une surveillance efficace de cette réglementation par la Commission des transports du Québec puissent assurer la stabilité dans l'industrie du camionnage en vrac.

M. de Belleval: Quel genre de réglementation devriez-vous obtenir? Est-ce que ces produits ne sont pas actuellement transportés au titre du transport général?

M. Doucet: Pas nécessairement. En réalité, ce sont des produits en vrac, que ce soit du liquide ou...

M. de Belleval: Oui, mais est-ce qu'ils sont actuellement assujettis à l'ordonnance sur le vrac ou s'ils sont assujettis à l'ordonnance sur le transport général?

M. Doucet: Dans le moment, il n'y a pas d'ordonnance pour cela.

M. de Belleval: Quel genre de réglementation désireriez-vous avoir pour cela?

M. Doucet: On a le permis de transporter de la marchandise en vrac; notre idée, c'est qu'on veut conserver ce permis...

M. de Belleval: D'accord.

M. Doucet: ... pour pouvoir transporter ces conteneurs.

M. de Belleval: Je comprends.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Gatineau, cela va? M. le député de Bellechasse?

M. Goulet: Cela va.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Doucet.

Ville de Montréal

La ville de Montréal, représentée par Me Gérald Bélanger, de Péloquin, Badeaux, Allard et Lacroix, mémoire no 20.

Me Bélanger, vous présentez les membres qui vous entourent?

M. Bélanger (Gérald): M. Gérard Douville, qui est adjoint au directeur du service des travaux publics de la ville de Montréal, M. de Maisonneuve, ainsi que M. Gilles Allaire, qui sont représentants du service de l'approvisionnement.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que vous pourriez, s'il vour- plaît, simplement approcher votre micro?

M. Bélanger: M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, il me fait plaisir, au nom de la ville de Montréal, de vous faire part de certains commentaires et de certaines suggestions dans le but d'améliorer les lois régissant le camionnage en vrac et principalement dans la région 10. Une des préoccupations premières de la ville de Montréal consiste dans la fixation des taux et tarifs par la Commission des transports. (15 h 45)

Comme vous le savez, M. le Président, au fil des ans, la commission a donné d'année en année des avis de fixation de taux proprio motu et cette façon de procéder a, à notre avis, poussé la tarification à la hausse à un tel point que dans certaines matières les taux qui devaient être des minimums sont devenus des maximums. Nous croyons que, pour pallier cette difficulté, une des solutions serait de remettre plutôt aux principaux intéressés, soit les artisans et requérants de services, le pouvoir d'eux-mêmes s'adresser à la Commission des transports quand bon ils le jugent pour demander des modifications dans des catégories de transport bien déterminées.

Actuellement dans certaines matières la ville de Montréal ne peut procéder par voie de soumissions publiques, les taux étant rendus à un maximum. La seule possibilité qui s'offrirait serait de négocier des taux à la baisse qui seraient illégaux et je tiens à vous dire que dans la région 10, les seuls à respecter les taux sont la ville de Montréal et le ministère des Transports. Je pourrais vous citer un exemple; en matière de transport de sable, terre et gravier, les taux sont depuis deux ans à $24.75 l'heure et nous avons eu il y a quelques mois des offres de transport à $20 l'heure.

Pour remédier à cette situation nous croyons qu'en matière d'octroi de contrat par voie de soumissions publiques ou invitations la tarification de la Commission des transports ne serait pas obligatoire, ce qui pourrait même donner à la Commission des transports un instrument valable pour prendre le pouls du marché à l'état actuel et non pas essayer par toutes sortes de spéculations ou calculs mathématiques de trouver une espèce de taux qui n'a aucune concordance avec la réalité.

Ce qui m'amène à parler un peu de la procédure actuelle devant la Commission des transports qui a toujours respecté toutes les parties et leur a permis de se faire entendre. Malheureusement, avec une procédure, qui n'est pas assez rigide, cela a causé certains abus. Je ne voudrais viser personne, mais certaines associations, dont les plus grosses, présentent à la Commission des transports lors des auditions des mémoires qui varient en épaisseur d'un pied à trois pieds et vous n'avez même pas la possibilité de vous préparer, de contre-interroger les témoins et de faire une preuve valable devant cette commission.

Nous croyons qu'avec une procédure plus sophistiquée et eu égard aussi à l'importance des montants en jeu, la commission aurait de meilleurs instruments pour évaluer les taux, ce qui permettrait aussi aux parties de se faire entendre de façon valable et ce qui élèverait la qualité du débat, car nous croyons qu'une procédure... Ce qu'on suggère ce n'est pas une "procédurite" dans le but de faire gagner des honoraires additionnels à des avocats, mais c'est en tenant compte aussi des montants considérables qui sont en jeu à chaque fois. Lorsque les taux peuvent monter de $0.01 dans le transport de la neige, cela occasionne à la ville de Montréal une dépense de $100 000 et, si on applique ça au ministère des Transports, on parle de millions qui sont en jeu. Je crois que les parties qui sont intéressées au transport et qui vont devant la commission pour demander des tarifications ne seraient pas brimées par l'addition d'une procédure peut-être un peu plus rigoureuse dans ces matières.

J'aimerais, en parlant de cette procédure, souligner quelques anomalies dans la législation actuelle. D'abord en ce qui concerne le règlement sur le transport en vrac, on donne au directeur du poste d'affectation un pouvoir consultatif auprès de la Commission des transports. Nous croyons que c'est donner à une partie qui normalement devrait intervenir comme toute autre un pouvoir privilégié. Ce que nous proposons, c'est que toute partie qui est intéressée dans la fixation des taux arrive au même pied que tout le monde devant la commission et, si elle a des moyens ou des arguments ou de la preuve à soumettre, qu'elle le fasse devant tout le monde.

Une autre pratique qui, à mon avis, pourrait être améliorée est le fait que la commission peut obtenir de l'information de fonctionnaires ou d'experts à son emploi. Nous n'avons pas d'objections à cette façon de procéder, mais comme cela se fait dans d'autres tribunaux administratifs. Pour vous donner un exemple, je pourrais vous parler de la Régie du gaz et de l'électricité où la commission est représentée par un procureur. Celui-ci peut contre-interroger les témoins et même soumettre de la preuve devant la commission, ce qui ne placerait peut-être pas la Commission des transports dans un certain embarras. Tout ce que la commission prendrait en considération, c'est ce qui aurait été déposé devant elle au vu et au su de toutes les parties intéressées.

Une dernière remarque en ce qui concerne encore la Commission des transports est l'absen- ce d'un tribunal d'appel. On ne vous apprend rien en vous disant qu'une décision de la Cour suprême a déclaré inconstitutionnel le Tribunal des transports. On n'a pas trouvé d'alternative ou de remplacement à ça, ce qui crée une difficulté réelle en ce que, lorsque la décision de la commission ne plaît pas aux parties, même si la commission a toujours été ouverte à reconsidérer, il faut quand même penser que la commission se trouve dans une situation où elle siège en appel de sa propre décision. Vous allez devant quelqu'un et vous lui dites: Monsieur, nous ne sommes pas d'accord avec vous. Lui vous dit: En mon âme et conscience, ce que j'ai dit là, c'est bon. Vous ne pouvez pas lui en demander plus. Mais je crois qu'il serait possible de trouver un mécanisme où les parties pourraient aller en appel d'une décision de la commission, soit sur une question importante de procédure ou sur une question de fond.

Maintenant, dans le mémoire que je vous ai soumis au nom de la ville de Montréal, j'avais intitulé une section: Poste d'affectation. Il aurait été plus réaliste de dire: Répartition du travail dans la région 10, puisque ce n'est que tout récemment qu'il y a eu la création d'un poste d'affectation. Toutefois, dans la situation actuelle ou qui prévalait avant et qui va continuer à prévaloir après la création de ce poste, dans sa façon de procéder, la ville de Montréal a toujours favorisé le regroupement — et ce, même avant les réglementations provinciales — des artisans et ce, sans forcer les entrepreneurs qui ont des contrats avec la ville de Montréal à embaucher des artisans camionneurs. Nous n'avons pas de clause 75-25 ou 100%-0%. Mais, dans les faits, 80% des sommes versées au transport par la ville de Montréal vont à des artisans. Et plus particulièrement dans le transport de la neige, sur une somme de $5 000 000, 80%, quand il y a de la neige, vont aux artisans. La façon de procéder de la ville a été de favoriser l'octroi de contrats par voie de soumissions publiques. Et on a vu le phénomène que le législateur a peut-être toujours voulu favoriser, le regroupement des artisans. Les artisans se sont regroupés soit en sociétés coopératives ou ont même fait des entreprises conjointes avec des entrepreneurs pour obtenir des contrats. Même le mémoire qui vous a été soumis pas le Poste de la région no 10, où personne ne s'est plaint de la façon de procéder de la ville, montre bien que la situation actuelle n'est pas si mal. Bien sûr, il y a toujours place à une certaine amélioration et le but de notre mémoire n'est pas de tout chambarder, mais de vous dire: Si vous voulez améliorer, il y a quelque chose à faire.

J'aimerais rectifier, lorsque je parle de contrats de transport, certaines allégations où nous devons nous inscrire en faux. On vous a dit que les prix payés par la ville étaient trop bas. Je vous ferai remarquer que les représentants du poste 10 ont signé, l'an dernier, une entente pour la reconduction des taux et tarifs et que, deuxièmement, bien que nous ayons exhorté ces gens à soumissionner à des contrats de la ville, et ce depuis cinq ans, ils ne se sont pas encore prévalus de ce privilège alors que d'autres artisans le font. Avant

de condamner quelque chose, il faut au moins faire l'effort de l'essayer.

Actuellement, soit par un concours de circonstances ou autrement, nous croyons que le gouvernement est un peu à une croisée des chemins. Il a à choisir entre la création d'un monopole avec l'inconvénient que le monopole enrégimente les camionneurs, qu'il enlève, à toutes fins pratiques, la concurrence et la possibilité d'évaluer le prix du marché d'un tel transport et qui va même contre la volonté d'autonomie que le ministre des Transports a soulignée à juste titre dans l'allocution qu'il a faite au début, à l'ouverture de cette commission. Ces dangers ne sont pas seulement quelque chose d'hypothétique. Nous avons même vu le Poste d'affectation de la région 10 hier qui nous en a donné un exemple criant du danger de créer un monopole. On nous a dit: Si la ville refuse de nous donner ce que nous voulons, nous allons nous servir de la Commission des transports du Québec pour faire paralyser toutes les activités de déneigement de la ville. Avec une candeur déconcertante, on vient nous dire après cela: Donnez-nous le contrôle absolu du transport en vrac.

Je crois que l'alternative à cette solution extrême serait, pour la région 10 toujours, de favoriser la formation de plusieurs postes d'affectation, puisqu'un tel regroupement, une telle mesure favoriserait d'abord le regroupement des artisans qui se fait déjà, la spécialisation du transport et en plus, permettrait une meilleure tarification, car il ne faut pas oublier que la région 10 est quand même particulière en ce qu'il y a beaucoup de requérants de services d'une certaine importance, contrairement à d'autres régions où vous avez seulement deux requérants de services importants, soit le ministère des Transports et les compagnies forestières.

Maintenant, j'aimerais, avec votre permission, ajouter un certain corollaire au mémoire que je vous avais soumis, en ce qui concerne les petits camions à l'emploi de la ville de Montréal. C'est un problème bien particulier, bien régional, je l'admets, mais j'aimerais vous souligner que pour ce qui est de ces camions, ils ne sont pas à l'emploi exclusif de la ville de Montréal, comme on l'a prétendu. Le fait de leur donner un permis tellement restreint serait de créer un ghetto qui rendrait ces camionneurs captifs de la ville de Montréal, car la ville retient leurs services peut-être cinq jours par semaine, certains trois, certains quatre heures par semaine. Nous avons, d'ailleurs, déjà écrit aux fonctionnaires du ministère des Transports à ce sujet, en réponse à une demande qui avait été faite par l'association qui vous a présenté un mémoire pour la région 10. Nous attendons toujours une décision. Le ministre des Transports, hier, a mentionné qu'il désirait rencontrer ou discuter du problème avec les représentants du Poste d'affectation no 10. Nous croyons que si une telle rencontre a lieu, elle devrait être faite en présence de la ville de Montréal et surtout de l'association qui représente les camions qui sont à l'emploi de la ville.

Je vous remercie et j'espère que les commentaires de la ville vous permettront de bonifier et d'améliorer la situation du transport dans la ville de Montréal.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Je vais commencer par la fin. Concernant l'histoire des petits camionneurs à l'emploi de la ville de Montréal, on est en train d'étudier le dossier, on va essayer de trouver une solution. Effectivement, c'est un cas particulier. Pour ce qui est de procédures devant la Commission des transports, on voit que le mémoire a été écrit par des avocats. Ce que vous suggérez est de compliquer encore plus les choses, pour permettre à encore plus d'avocats de faire encore plus de représentations, donc plus d'honoraires devant la Commission des transports. Je ne vous le reproche pas, mais c'est cela le résultat de l'affaire. Quoi qu'il en soit, je vais transmettre vos recommandations à la Commission des transports. Il y a des points qui vont au-delà de cela cependant, entre autres l'impartialité des témoignages, faire témoigner les fonctionnaires de la commission comme tierce partie. Ce sont des choses qui me paraissent valables en principe, en tout cas, en termes de qualité du droit, comme vous le soulignez. Cependant, je faisais allusion, dans ma remarque un peu taquine, à tous les droits d'appel que vous voulez inscrire, jusqu'en Cour suprême, s'il le faut. (16 heures)

M. Bélanger: Je n'ai pas écrit ça de cette façon, M. le ministre.

M. de Belleval: Non, mais quand on s'embarque dans cet engrenage, on sait où ça finit. Nous, on le sait régulièrement au niveau du gouvernement du Québec.

M. Bélanger: Avec votre permission, M. le ministre, comme je vous l'ai dit, le but de nos remarques n'était pas de créer une procédurite aiguë, mais c'est quand même de trouver le juste milieu. Nous comprenons que la commission, dans certains cas, doit avoir une procédure expé-ditive. Et même la ville de Montréal, dans l'administration même de sa cour municipale tend à, peut-être qu'on appelle ça déjudiciariser...

M. de Belleval: En tout cas, j'ai bien...

M. Bélanger:... c'est un bien beau mot, mais il faut quand même prendre en considération que dans le transport en vrac et même à votre ministère, il y a des sommes importantes qui sont en jeu et que malheureusement, la structure actuelle ne permet pas de voir vraiment ce qui se passe en matière de transport en vrac.

M. de Belleval: Quoiqu'il en soit, comme je l'ai déjà indiqué, il faut changer la nature même de

la commission. Plusieurs ont fait des suggestions là-dessus et c'est quelque chose qui devrait être revu dans un contexte plus large que celui que vous mentionnez.

Finalement, en ce qui concerne le Poste d'affectation 10, il y a maintenant un poste d'affectation, vous l'avez noté, qui a l'exclusivité du courtage dans la région 10; ça va certainement modifier votre pratique en ce qui concerne l'octroi des contrats de neige pour l'an prochain, parce que désormais, dans la région 10, c'est ce poste d'affectation qui aura l'exclusivité du courtage. Le poste d'affectation, d'ailleurs, pourra soumissionner pour le contrat de la ville de Montréal s'il le désire. Je ne sais pas si vous avez bien compris les obligations nouvelles qui vont vous être imposées maintenant.

Si vous engagez des entrepreneurs qui se mettent eux-mêmes à faire du courtage pour remplir leurs contrats, c'est-à-dire vont engager individuellement des camionneurs individuels, artisans, ils vont se trouver en état d'illégalité, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant.

M. Bélanger: Le poste d'affectation est tout récent et depuis une semaine ou plus, la situation qui prévaut en matière d'octroi de contrat est la suivante; la ville de Montréal donne beaucoup de contrats par voie de soumissions publiques. A ce moment-là, ceux qui veulent se regrouper, à mon avis, il n'y a pas d'entrave à le faire.

M. de Belleval: La question n'est pas là.

M. Bélanger: La question est pour les dénei-geurs qui doivent retenir les services d'artisans pour faire le transport. Mais la ville de Montréal comme telle, lorsqu'elle donne des contrats à des déneigeurs...

M. de Belleval: En tout cas, je vous engage à rencontrer les gens du poste 10 et à en discuter à fond, parce que comme la situation change, je ne voudrais pas qu'à cause de l'application générale d'une loi qui vient de rejoindre maintenant Montréal, — et Montréal est une île, c'est le cas de le dire, parfois même sous certains autres aspects, notamment psychologiques — je ne voudrais pas qu'il y ait des problèmes à la première neige, l'année prochaine. Je pense bien qu'il n'y a pas de raison qu'il y en ait, mais c'est important que vous regardiez à fond les nouvelles règles du jeu qui sont établies.

Remarquez que c'est à la lecture de votre mémoire que je viens de réaliser ça, mais...

M. Bélanger: C'est bien sûr que ça va changer substantiellement les façons de procéder. Par contre, jusqu'à première vue, le poste d'affectation a quand même une approche qui est peut-être plus encourageante, en ce sens qu'ils font des affaires et qu'on en fait. Ce qui évite beaucoup de problèmes.

M. de Belleval: II n'y a pas de raison qu'il y en ait, si les règles du jeu sont respectées. Ça devrait bien aller, mais ce ne sont plus les mêmes règles qu'autrefois.

M. Bélanger: C'est exact.

M. de Belleval: Alors, il y a toujours une période d'adaptation. Vous êtes mieux de faire la période d'adaptation au mois d'août plutôt qu'au mois de novembre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je suis sûr que Me Bélanger et la ville de Montréal, en présentant le mémoire et en faisant les recommandations qu'il faut au sujet des modifications à la procédure et au droit d'appel, sont inspirés par des motifs autres que celui de fournir plus de travail à des avocats. Moi non plus, je ne suis pas avocat, et on fait souvent, en boutade, la remarque que les avocats compliquent souvent les lois de façon à se créer plus d'ouvrage. Mais je pense qu'il y a un bien-fondé à ce que la ville de Montréal nous représente aujourd'hui. Je suis sûr que le ministre, quand il aura eu le temps d'y réfléchir, d'ailleurs c'est déjà fait, admettra que votre recommandation s'inspire d'autre chose que de ces motifs.

Pour ce qui est de vos autres recommandations, il me semble qu'étant donné qu'elles proviennent d'un des plus gros fournisseur d'ouvrage en matière de camionnage dans la province, c'est-à-dire la ville de Montréal, elle mérite sûrement d'être retenue et étudiée à sa juste valeur. Je suis sûr que tant le ministre que l'Opposition officielle le feront. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse. D'accord, merci messieurs.

Association des camionneurs entrepreneurs en vrac de la région 01 Inc.

L'Association des camionneurs entrepreneurs en vrac de la région 01 Inc., représentée par Me Marc M. Delage, Saint-Hilaire, DeBlois, Richard, Leclerc, Gingras et Delage, mémoire no 11.

Me Delage, vous allez nous présenter vos membres.

M. Delage (Marc): Avec plaisir, M. le Président. Si on commence par ma droite, M. Roger Dubé, directeur de l'association; Michel Saint-Hilaire, mon associé à mon bureau d'études et M. Camilien Saint-Onge, consultant en transport pour l'association que nous représentons.

A ma gauche, M. Camil Lavoie, le président de l'association; M. Ernest Normand, un directeur de l'association; M. Marcel Rioux, vice-président de l'association; M. Marcel Paquet, secrétaire-trésorier de l'association, ainsi que M. Paul-Eugène Levesque, qui est un autre directeur de l'association.

M. le Président, avec votre permission, je demanderais que M. Camilien Saint-Onge fasse la lecture de notre mémoire.

Le Président (M. Jolivet): Juste avant qu'il ne débute, nous avons vu l'épaisseur de votre document et nous sommes assurés que vous n'avez pas l'intention de lire les jugements.

M. Delage: Pardon?

Le Président (M. Jolivet): Vous n'avez pas l'intention de lire les jugements.

M. Delage: Non, les annexes seront reproduites pour fins de référence. On se contentera de lire le mémoire.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Saint-Onge (Camilien): M. le Président, MM. les députés, MM. les membres de la commission parlementaire. Une fois de plus, l'Assemblée nationale s'est transformée en commission parlementaire pour étudier les problèmes du camionnage en vrac, problèmes qui ont réussi à tenir en haleine tous les ministères des Transports depuis 1972, soit depuis la date où le gouvernement a décidé de réglementer le camionnage en vrac.

A cette date, le règlement no 12 devenu depuis le règlement no 112, avait été promulgué comme devant faire suite à la cédule des justes salaires afin de permettre aux camionneurs, compte tenu de l'envergure des travaux gouvernementaux pour la construction de l'infrastructure routière du Québec, de participer de la meilleure façon possible au transport gouvernemental.

Au départ, ce que le législateur avait en vue, c'était d'assurer des retombées régionales aux contrats de voirie qui s'exécutaient dans tous les différents comtés de la province et d'assurer un juste revenu des camionneurs régionaux travaillant pour les entrepreneurs qui avaient obtenu des contrats de voirie.

A ce moment, le gouvernement, dans le but de favoriser une politique à l'avantage des petits camionneurs, avait instauré un secteur particulier et privilégié pour le volume gouvernemental, soit la décision dans une directive administrative d'octroyer 75% du transport de la ligne d'infrastructure aux membres de l'ANCAI.

Cette norme administrative connue comme la clause 75-25 qui a exclu par la suite le transport de béton bitumineux, a permis aux entrepreneurs d'utiliser, dans une proportion de 25%, les camionneurs entrepreneurs ou les camionneurs non membres de l'ANCAI.

Le règlement no 12 sur le camionnage en vrac a connu, comme on le sait, depuis le 23 juillet 1973 jusqu'à ce jour, une multitude de changements, refontes, corrections et modifications sans pour autant que l'on puisse assurer aujourd'hui et dire de façon catégorique que ce règlement a apporté les solutions escomptées dans l'industrie du camionnage en vrac.

Ce règlement, à son origine, divisait la province en dix régions économiques pour fins de transport en vrac, classifiait les camionneurs en deux groupes, soit les artisans et les entrepre- neurs. Il créait dans chacune de ces régions économiques, des postes d'affectation qui, à l'origine, étaient divisés entre les postes d'affectation d'artisans et les postes d'affectation d'entrepreneurs.

De conflit en conflit, ledit règlement a été amendé. En 1978, on fit l'abolition des classes de camionneurs et permit leur réunion dans chacune des régions au sein d'un poste d'affectation unique. Depuis cette date, de nouveaux amendements ont été apportés dans la création des postes d'affectation afin de tenter de permettre aux camionneurs de se regrouper unanimement au sein d'un poste d'affectation unique. Les derniers amendements avaient comme objectif l'union des camionneurs en vrac afin de leur permettre de contrôler leur industrie. Malheureusement, les derniers objectifs n'ont pu être atteints car le règlement en est devenu un qui a pratiquement pour effet d'assurer à un groupe donné de camionneurs une mainmise totale sur le volume de transport gouvernemental, soit les camionneurs membres de l'ANCAI.

Lors des amendements de 1978, lorsque le gouvernement a décidé d'instaurer les postes d'affectation uniques, d'éliminer les privilèges conférés uniquement à une classe de camionneurs, tous ont bel et bien espéré que la nouvelle formule des postes d'affectation serait la solution idéale à tous les maux qu'a connus l'industrie du camionnage en vrac. Cependant, une étude rapide de la situation nous démontre, au contraire, que la réglementation actuelle n'a rien changé à la situation préexistante où les malaises de fond venaient non pas de la réglementation elle-même, mais d'une décision administrative accordant à l'ANCAI 75% d'un certain volume de transport gouvernemental. Cette décision administrative s'est transformée pour accorder les mêmes 75% aux postes d'affectation uniques, mais ces postes d'affectation sont devenus des officines de l'ANCAI, de telle sorte qu'en ce qui concerne le transport donné par le ministère des Transports, même si techniquement on a changé la réglementation et la politique administrative du gouvernement, on en est actuellement dans la même situation qui existait dans le passé.

Nous affirmons catégoriquement qu'actuellement les postes d'affectation qui ont été octroyés en vertu de la réglementation qui remonte à 1978 sont ni plus ni moins que les ombres de l'ANCAI, que cet organisme exerce toujours actuellement auprès des camionneurs en vrac, ainsi qu'auprès des requérants de services la même présence qu'il avait antérieurement et exerce sur chacun d'eux les mêmes pressions monopolisantes qu'il a toujours exercées dans le passé.

Les postes d'affectation ne sont pas des organismes qui sont créés et organisés à l'avantage des camionneurs pour une saine gestion de leur industrie, mais ils ne sont effectivement qu'un camouflage légal pour permettre à l'ANCAI d'agir directement sur les camionneurs en vrac et sur les requérants de services. Une simple étude des dirigeants des postes d'affectation qui sont connus

actuellement dans les différentes régions de la province de Québec nous démontrera que, personne pour personne, il s'agit effectivement des mêmes dirigeants de l'Association nationale des camionneurs artisans, de même que les dirigeants des associations régionales et des associations de comté des camionneurs artisans. On a voulu créer les postes d'affectation pour une principale raison, soit permettre aux camionneurs de prendre le contrôle de leur industrie. Qui des camionneurs n'a pas espéré à ce moment qu'enfin l'industrie du camionnage en vrac pourrait atteindre une libéralisation des ingérences de l'ANCAl dans son industrie? L'expérience actuelle nous prouve bien le contraire et nous démontre, une fois de plus, que l'ANCAl contrôle directement et indirectement tout le courtage du camionnage en vrac légalisé par la réglementation actuelle.

De simples exemples peuvent nous permettre de prouver cette affirmation. Nous annexons au présent mémoire deux jugements rendus par les cours de droit commun de notre province concernant des conflits que des camionneurs ont pu avoir dans l'industrie du camionnage en vrac et mettant en cause des associations de camionneurs artisans. Dans une première cause, dans un jugement de l'honorable Claire L'Heureux-Dubé rendu dans le district judiciaire de Rimouski, on note que la cour a condamné les associations régionales de camionneurs artisans, de même que les associations de comté pour des troubles qu'ils avaient causés lors du blocage d'un chantier lors de la construction d'une route. Les événements rapportés dans ce jugement remontent à l'année 1973, soit au début de l'implantation du règlement sur le camionnage en vrac. Une lecture attentive de ce jugement nous montre à quel point les camionneurs de ce groupement à cette époque même étaient complètement disposés et concertés pour éliminer tous les camionneurs qui ne faisaient pas partie de leurs rangs et qui osaient faire du transport octroyé par le gouvernement.

Depuis ce jugement, la réglementation a changé. Les postes d'affectation uniques ont été créés et on espérait effectivement pouvoir se libérer de l'ingérence des artisans dans l'industrie du camionnage en vrac. Mais l'histoire s'est avérée contraire aux objectifs recherchés.

Il nous suffit d'expliquer un autre jugement rendu cette fois en 1980 par la Cour provinciale du district de Matane, le 20 juin, dans le même district judiciaire que le jugement précédemment cité. (16 h 15)

Nous annexons au présent mémoire copie de ce jugement. On remarque, malgré bien des années, que le conflit chez les camionneurs est toujours présent. Dans cette cause, l'honorable juge Charles Quimper, de la Cour provinciale, en rendant son jugement, vient à la conclusion que le président de l'Association des camionneurs artisans du comté en question est en quelque sorte l'éminence grise du poste d'affectation et que, malgré le fait que le poste puisse avoir des employés, un conseil d'administration autonome, c'est bel et bien par les agissements des repré- sentants des associations de camionneurs artisans, qui sont en quelque sorte l'âme dirigeante de ces postes d'affectation.

Nous reproduisons la copie dans ce mémoire du texte intégral du jugement, qui parle par lui-même à cet effet.

Comme nous le notons, dans ce jugement, et ce, de façon claire, nette et précise, il a été clairement établi dans cette cause que, pour profiter des effets et pouvoirs du Poste d'affectation de la région 01, pour pouvoir profiter, de par le fait même, de la clause 75-25 octroyée par le gouvernement au poste d'affectation, il faut non seulement être membre du poste d'affectation, mais aussi être membre de l'Association des camionneurs artisans, bien payer sa cotisation à l'ANCAl, obéir aux diktats de l'ANCAl, tout ceci de la même façon que cela se passait à l'époque où les contrats de voirie étaient assortis d'une clause accordant 75% du transport en haut de la ligne d'infrastructure à un camionneur artisan membre de l'ANCAl.

Non seulement l'ANCAl a gardé cette mainmise sur le volume gouvernemental, mais elle a aussi gardé les mêmes méthodes. S'il s'agit du transport de gravier ou de sable, l'ANCAl ne tolérerait pas, même s'il s'agit d'un volume de transport non soumis à la clause 75-25, qu'un autre camionneur qui n'est pas membre de l'ANCAl puisse transporter une seule tonne de matériaux. Cette mainmise se manifeste aussi par l'intervention que l'ANCAl fait systématiquement contre toute demande de transfert de permis à un transporteur non membre. Si les membres de l'ANCAl font des demandes de transfert de permis entre eux, tout va bien; s'il s'agit d'un non-membre, c'est l'opposition systématique.

Cette malheureuse expérience est de plus en plus connue à travers la province de Québec depuis un certain temps. Que ce soit dans la région 04, la région 05 ou dans la région 01, de même que dans toutes les autres régions de la province, combien de fois les camionneurs membres de l'ANCAl ou des personnes-ressources ou un porte-parole de ces dernières n'ont-ils pas exercé auprès des requérants de services des pressions-menaces afin de forcer les camionneurs privés ou indépendants à quitter les chantiers de construction pour faire travailler les membres de l'ANCAl ou les postes d'affectation, et les entrepreneurs obéissent pour ne pas avoir de problèmes avec l'ANCAl.

Qu'on regarde actuellement les chantiers de construction, et on notera que tous et chacun des camionneurs qui font le transport de béton bitumineux sur les chantiers en cours actuellement sont des membres de l'ANCAl et des postes d'affectation, même si ce matériel ne fait pas partie du volume protégé par la clause 75-25.

Le gouvernement du Québec a encore, depuis certains mois, encouragé cette politique afin de donner aux postes d'affectation le transport de béton bitumineux en faveur des membres des postes. Les camionneurs-entrepreneurs, les camionneurs qu'on peut appeler les privés, soit ceux

qui ne sont pas membres des postes d'affectation, soit ceux qui ne veulent pas être membres de l'ANCAl et d'associations de camionneurs artisans, qui dans le passé faisaient le transport du béton bitumineux comme étant la seule possibilité de faire du transport non protégé et non concédé en faveur de l'ANCAl sont maintenant bannis des chantiers de construction de routes pour la pose de béton bitumineux au profit des camionneurs membres de l'ANCAl.

Où sont rendus ces camionneurs qui ramassaient les miettes gouvernementales du fait qu'ils n'étaient pas membres de l'ANCAl? Ils n'ont pas bien le choix, ils sont maintenant soit membres de l'ANCAl ou ont abandonné purement et simplement ce volume de transport. Au début de la réglementation, en 1972, l'ANCAl prêchait la vertu du pauvre camionneur-propriétaire d'un seul camion qu'il conduisait lui-même. Ce pauvre camionneur, à cause d'une situation financière souvent précaire et d'une expérience souvent non échelonnée, se devait d'être un camionneur protégé, entre les mains et la protection gouvernementales. Comme on le sait, la restriction de la propriété unique d'un camion est une entreprise qui était vouée à l'échec et à la faillite.

Cette solution est venue d'elle-même, lorsqu'on a pu réaliser combien de camionneurs artisans avaient, au moyen de prête-noms, soit leur épouse, frère, soeur, beau-frère et belle-soeur, des camions qui pouvaient travailler au même endroit. Devant cette situation, le législateur a étendu, en 1979, la notion de membre d'un poste d'affectation en la limitant au propriétaire de quatre camions et moins.

Le gouvernement, par sa réglementation sur le camionnage en vrac, a pris sept années d'expérience dans l'industrie du camionnage en vrac pour conclure que les camionneurs en vrac ne pouvaient être divisés et devaient être unifiés sous la même catégorie.

Devant cet heureux principe qui visait à l'unité des camionneurs en vrac, on a, de façon radicale, en mai 1978, aboli la classe des camionneurs artisans et camionneurs-entrepreneurs afin de les mettre sur le même pied et sous le nom de camionneurs en vrac. Cependant, cette longue recherche d'unité n'a pas eu pour effet d'être bien longue car, un an après cet amendement, le gouvernement est revenu instaurer une nouvelle catégorie de camionneurs en vrac: les propriétaires de quatre camions et moins, et les propriétaires de plus de cinq camions.

Le drame de cette situation se fait maintenant sentir à vive allure pour les raisons suivantes:

II est possible qu'un propriétaire de plus de quatre camions puisse être classifié comme une entreprise économique autonome qui fonctionne d'elle-même et qui n'a pas besoin de poste d'affectation pour vivre. L'expérience de l'industrie du camionnage en vrac pourra nous apporter une réponse à cette situation. Mais le drame vient bien plus de ceux qui ont quatre camions et moins et que le gouvernement, par sa politique administrative pour le protectionnisme du transport gouver- nemental, force à être membres d'un poste d'affectation.

L'expérience vécue dans les postes d'affectation qui ont été instaurés depuis 1978 nous amène à faire des constations d'abord pour les propriétaires de plusieurs camions.

D'une part, ils se voient, par les règlements internes des postes d'affectation, forcés de payer des cotisations en nombre bien supérieures aux propriétaires uniques.

Cependant, par la politique du ministère des Transports qui avait comme principal objectif de permettre l'unité des revenus chez les camionneurs et de permettre, en autant que faire se peut, le principe de la priorité du premier camion, on est arrivé à une situation aussi ridicule que la suivante, à savoir que le propriétaire de quatre camions paie des cotisations et des droits d'entrée quatre fois supérieurs à ceux d'un camionneur ordinaire, qu'on tient compte de tout le transport et tout l'ouvrage qu'ils peuvent effectuer à l'extérieur et à l'intérieur d'un poste d'affectation pour affecter les revenus de son premier camion inscrit au poste.

Comment voulez-vous qu'une entreprise qui possède quatre camions, dont les camions sont inscrits au poste, puisse attendre un appel du "dispatcher" du poste pour son deuxième, son troisième et son quatrième camion, sans pour autant qu'on fasse même appel à son premier camion?

Quand ce même "dispatcher" prend, par la même occasion, les revenus du deuxième, du troisième et du quatrième camion pour les créditer sur le travail du premier camion, on arrive devant une situation aussi illogique que, parce qu'il a quatre camions, ce camionneur ne peut même pas faire travailler son premier camion.

Qui fait le transport à sa place? Ce sont toujours les propriétaires d'un camion qui, comme on le sait, à cause de l'organisation des postes d'affectation, sont les membres actifs de l'ANCAl.

Cette division artificielle des camionneurs et les politiques des postes d'affectation, lesquelles ont été approuvées par le ministre des Transports lorsqu'il a approuvé les codes d'éthique de chacun des postes d'affectation, a permis, par une façon très ingénieuse, aux membres de l'ANCAl d'éliminer la majorité du transport effectué par les entreprises de deux à quatre camions.

En 1972, au début de la réglementation, l'ANCAl prêchait les vertus du camionneur qui façonnait le réseau routier de la province de Québec. Aujourd'hui, le réseau routier de la province de Québec étant majoritairement complété, le valeureux camionneur artisan ne veut rien de moins que 80% du transport du bois.

On vous réfère ici à un extrait du journal de l'ANCAl, annexé au présent mémoire, et qui parle par lui-même.

Au début, lors de l'implantation de la clause 75-25, l'ANÇAI n'en voulait qu'au transport gouvernemental, car il était payant, comme on le sait.

Aujourd'hui, l'ANCAl demande que le gouvernement lui accorde le droit exclusif de transporter les choses qui appartiennent à des tiers.

Aujourd'hui, les dépenses gouvernementales sont moins élevées dans le domaine routier. Ceci a comme conséquence bien évidente que l'ouvrage gouvernemental se voit par le fait même abaissé.

Il est bien entendu que chacun de nous sait très bien que l'infrastructure routière de la province de Québec a connu dans le passé ses bonnes années et qu'aujourd'hui les dépenses gouvernementales sont moins élevées. Ceci a comme conséquence bien évidente que l'ouvrage gouvernemental, soit les travaux de construction d'infrastructures et de routes se voit par le fait même abaissé.

Il ne faut cependant pas oublier que, dans l'industrie du camionnage en vrac, il n'existe pas seulement que les membres de l'ANCAl et qu'il y a, dans notre province, un grand nombre de camionneurs en vrac qui sont aussi intéressés que ceux de l'ANCAl à vivre sainement de leur industrie.

Dans le passé, lorsque les camionneurs entrepreneurs ou, comme on les appelle maintenant, les camionneurs privés, se sont vus chassés du transport des agrégats vu qu'ils n'étaient pas membres de l'ANCAl, ils se sont réfugiés dans les autres secteurs du transport, notamment dans le secteur du transport forestier. Ils ont investi des sommes énormes, ont appris leur métier, se sont familiarisés avec de l'équipement de plus en plus sophistiqué. La majorité d'entre eux ont très bien réussi, pour la simple et unique raison qu'ils sont devenus des transporteurs, administrateurs d'entreprises et qu'ils ont su faire progresser leur entreprise en fonction d'un principe bien simple qui est celui de l'offre et de la demande, de la qualité de services et de la bonne relation avec les commettants.

Maintenant que le gros volume de transport en vrac se voit dirigé vers le transport forestier, on constate malheureusement que l'ANCAl décide soudainement de s'y intéresser, non pas que les membres actuels de l'ANCAl sont pris à faire tel transport, car, dans le mémoire de l'ANCAl présenté le 27 mai dernier, dont copie est annexée aux présentes, l'ANCAl affirme que si le gouvernement oblige les compagnies forestières à faire effectuer à 75% le transport de produits de vrac par les sous-postes et les postes d'affectation, ce qui revient à dire que les membres de l'ANCAl... telle disposition permettrait aux titulaires de permis d'être en mesure de s'équiper adéquatement sur ce transport.

Ce n'est donc pas que les membres de l'ANCAl soient prêts à faire tel transport et qu'ils possèdent l'équipement pour ce faire. Ce que cela veut dire, c'est qu'ils deviendront des transporteurs forestiers au moment où il y aura une clause d'exclusivité en leur faveur. De plus, il est dit, dans ce mémoire, qu'une telle exclusivité permettrait ainsi à l'ANCAl de récupérer les titulaires de permis qui transportent en forêt sans être membres des postes et des sous-postes d'affectation.

Cette revendication est-elle une revendication légitime des camionneurs? N'est-elle pas tout simplement un procédé habile pour l'ANCAl de tenter de dominer des secteurs de travail où elle n'a effectivement jamais eu aucune force de pression? Cette revendication de l'ANCAl est une aberration sur le système de l'industrie du camionnage en vrac, car il est impossible dans l'esprit de l'ANCAl de pouvoir s'imaginer que des camionneurs en vrac peuvent vivre de leur industrie, sans pour autant être membres de leur association. Voilà le crime. Il existe des camionneurs entrepreneurs en vrac, des camionneurs privés qui ont réussi à ne pas être sous la botte de l'ANCAl; il faut les récupérer au plus tôt.

Pourtant, pendant que les membres de l'ANCAl construisaient des routes, il s'est fait, dans la province de Québec, du transport forestier et on peut dire qu'il s'est fait du transport sans complications majeures dans une relation équitable entre les requérants de services et les camionneurs.

Si le gouvernement donne raison à l'ANCAl, s'il lui octroie, par le biais des postes d'affectation, un secteur protégé dans le transport forestier, où vont aller les camionneurs en vrac spécialisés dans ce secteur? Est-ce une façon d'étendre l'industrie du camionnage en vrac en vue de la répartir à tous les camionneurs, ou n'est-ce pas plutôt une dangereuse direction de l'ANCAl afin de tenter d'éliminer de la forêt les camionneurs qui y oeuvrent depuis des années et qui ne sont malheureusement pas membres de l'ANCAl?

Non seulement les camionneurs ont-ils exécuté des transports de bois, mais ils ont acquis les équipements nécessaires et accessoires à ces opérations des transports de bois. Faut-il maintenant éliminer ces gens au profit de l'ANCAl? Serait-il sain pour l'industrie du camionnage en vrac de forcer les transporteurs forestiers à être membres d'un poste d'affectation où il n'y a aucune affinité, où le principe de la répartition du travail en fonction de la priorité du premier camion n'a rien à voir avec les ententes négociées depuis des années avec les requérants de services? Est-il sain dans l'industrie du transport en vrac d'imaginer que les transporteurs forestiers qui ont réussi à vivre dans ce secteur en tentant, dans la mesure du possible, d'établir des relations d'affaires solides entre les commettants et eux, seront forcés, ces mêmes camionneurs, à être membres d'un poste d'affectation dirigé par des gens qui travaillent contre leur intérêt?

Lors de la venue, en 1972, de la clause 75-25, les camionneurs en vrac qui n'étaient pas membres de l'ANCAl et qui se sont vus bannis des travaux gouvernementaux concernant le transport du sel, le transport du ministère de la Voirie en régie, du transport d'infrastructures, ont recherché dans d'autres secteurs de travail des débouchés leur permettant de vivre et de faire fonctionner leur industrie.

Une grande partie se sont dirigés vers le transport forestier, comme on vient de l'expliquer. Une autre partie, sinon aussi grande et aussi importante en nombre dans la province de Québec, se sont orientés vers le transport des ministères du gouvernement, vers les entreprises pa-

rapubliques, les travaux municipaux et les travaux privés.

(16 h 30)

L'ANCAI demande au gouvernement de forcer les compagnies de la couronne et la municipalité à passer par les postes d'affectation. N'y a-t-il pas là une tactique de l'ANCAl pour lui permettre d'acquérir encore une fois d'autres secteurs protégés? Qui bénéficiera de ces avantages si le gouvernement cède en faveur des postes d'affectation? Les camionneurs en vrac ou les membres de l'ANCAl?

M. le Président, nous croyons que la situation, telle qu'elle prévaut dans l'industrie du camionnage en vrac, doit attirer l'attention du gouvernement, non pas dans le but de créer de nouveaux secteurs de travail protégés, mais bien plus pour vérifier, au moyen d'enquête publique à l'exemple de l'enquête Cliche, quels sont les causes, les procédés d'ingérance de l'ANCAl dans cette industrie. Les camionneurs en vrac de la province de Québec gagneraient bien plus à pouvoir se permettre de se libérer de l'ingérence de l'ANCAl dans leur industrie, que de se faire donner de nouveaux secteurs protégés sur lesquels elle pourrait encore exercer des pressions.

Avant de faire une nouvelle réglementation dans le camionnage en vrac, il vaudrait bien mieux s'interroger sur les causes réelles qui ont fait la désunion des camionneurs en vrac dans la province de Québec, à cause de l'ingérence indue de l'ANCAl qui voulait tout contrôler au profit de certains de ses membres seulement. Qu'il nous suffise de voir l'expérience de la Commission des transports dans l'implantation d'un poste d'affectation, compte tenu des règlements concernant le courtage dans le transport en vrac qui ont été modifiés en 1978 et remodifiés en 1979. Depuis plus de deux ans maintenant, on a exploré le système des postes d'affectation uniques dans chacune des régions de la province de Québec, et au dire des fonctionnaires qui ont travaillé à ce projet, cette réforme avait pour but d'unifier les camionneurs et de leur permettre de prendre personnellement en main leur industrie. Depuis maintenant plus de deux ans, il y a eu de nombreuses causes devant la Commission des transports du Québec pour permettre l'instauration des postes d'affectation uniques, soit sur le règlement de 1978 ou sur celui de décembre 1979.

Qu'il nous suffisse, à la suite de la tournée de la Commission des transports du Québec au cours de l'été 1978, de voir et de constater à qui ont été donnés les permis de poste d'affectation. On peut bien s'en remettre de façon artificielle en disant qu'ils ont été octroyés à des corporations qui s'appelaient dans chacune des régions: Poste d'affectation de la région 01, Inc., 02, etc. Qui sont les administrateurs de ces postes? La simple lecture de l'envoi de l'ANCAl en date de juillet 1980, publié dans ses propres journaux, nous démontre effectivement que les administrateurs des postes d'affectation sont tous délégués à des associations de camionneurs artisans de chacune des régions.

Devant cette situation, le gouvernement a réagi en amendant en 1979 les permis de poste d'affectation afin, semble-t-il, selon les renseignements qu'il nous donnait, d'enlever l'ingérence des associations dans les postes d'affectation et de permettre que soient accordés des postes aux camionneurs en vrac dans chacune des régions, afin que ces camionneurs puissent prendre leur industrie en main. Depuis ces amendements, il va y avoir bientôt un an, la Commission des transports du Québec, comme on le sait, a presque fait le tour de chacune des régions de la province de Québec, dans le but de convertir les anciens permis de postes d'affectation en permis de poste dans chacune des régions en conformité avec le dernier règlement.

Au moment de la confection de la présente, la Commission des transports du Québec n'avait émis que dans deux régions des permis de postes d'affectation en conformité avec la dernière réglementation, soit dans la région 06 et dans la région 08. Encore une fois, qu'on fasse l'étude des administrateurs représentant ces postes d'affectation et nous constaterons malheureusement qu'il s'agit encore de personnes ayant directement ou indirectement des intérêts dans l'ANCAl ou les associations de camionneurs artisans.

Cependant, le drame se voit dans d'autres régions de la province de Québec, où le conflit est survenu entre membres de l'ANCAl qui s'arrachaient le pouvoir de contrôle des postes d'affectation. La Commission des transports du Québec pourrait nous citer des exemples de ce conflit dans diverses régions, exemples qui démontrent une fois de plus que l'ANCAl n'a qu'un seul et unique objectif, maintenir son contrôle des postes d'affectation. Cette intention est d'autant plus flagrante que nous pouvons facilement voir, dans les requêtes qui ont été déposées auprès de la Commission des transports du Québec, que l'ANCAl ou des associations de camionneurs artisans des régions concernées ont elles-mêmes produit la demande de permis de poste. Nous croyons bien simplement que la Commission des transports du Québec, en acceptant la charge d'implanter les postes d'affectation en fonction du nouveau règlement sur les postes d'affectation, avait un travail fastidieux et pour le moins complexe.

L'exemple du Poste d'affectation de la région 01 Inc. est concluant dans ce sens. Le permis des postes a été émis en juin 1978. Une requête en non-renouvellement des permis a été déposée en mars 1979. De plus, en mars 1980, une demande de conversion a été présentée par le Poste d'affectation de la région 01.

Au moment des présentes, dans cette région, le permis de poste qui prévaut est un permis qui repose sur l'ancien règlement sur le courtage en camionnage en vrac et remonte en mai 1978. Dans les mesures transitoires sur les amendements apportés en décembre 1979, on a dit que le permis de poste détenu de par les décisions de mai 1978 demeure en vigueur et est soumis à ce nouveau règlement.

Bien que n'ayant pas encore eu le jugement sur la requête en non-renouvellement de permis, la commission, dans sa décision du 4 août 1980, a

justement rejeté la demande de permis de poste d'affectation, étant donné que ce dernier n'avait pu établir, tel qu'exigé, les preuves requises sur le nouveau règlement. Devant cette situation, nous avons une corporation qui effectue actuellement le courtage de camionnage en vrac dans la région 01, alors même que la Commission des transports, en rejetant sa demande de conversion, n'a pas qualifié cet organisme comme ayant tous les critères légaux prévus au règlement pour lui permettre d'obtenir un permis de poste d'affectation.

Nous ne sommes pas ici pour blâmer de quelque façon que ce soit la Commission des transports du Québec. Nous sommes ici pour vous démontrer que la réglementation sur des permis de postes d'affectation est pour le moins difficile à appliquer, sinon inapplicable, et qu'il n'y a pas un organisme au Québec qui a les pouvoirs nécessaires, les pouvoirs de contrôle et de surveillances nécessaires pour permettre aux postes d'affectation d'être implantés de façon saine et adéquate et selon un accord majoritaire des camionneurs.

M. le Président de la commission, MM. les membres de la commission parlementaire, nous croyons que lorsqu'un camionneur en est rendu à posséder un à quatre camions, comme la réglementation le prévoit actuellement, quand ces camionneurs atteignent facilement un investissement qui peut se chiffrer modestement entre $150 000 et $250 000, on n'est plus un simple ouvrier.

On est réellement en affaires et on a un besoin, pour faire fructifier et faire valoriser son entreprise, d'une liberté d'opération et cette liberté d'opération doit se faire sans contrainte gouvernementale afin de permettre à chacune de ces entreprises, qu'elle soit de 1, 2, 3, 4 camions ou plus, de pouvoir vivre et travailler en conformité au principe bien légitime de l'offre et de la demande.

Le gouvernement n'a pas pour mission de faire vivre artificiellement des camionneurs ou des entreprises de transport qui n'ont pas les reins assez solides, qui ne sont pas capables de survivre dans leur industrie.

L'industrie du camionnage en vrac doit être, comme tout autre forme d'industrie dans notre province, une industrie libre, avec du marché libre, où le principe de la libre concurrence, de la qualité du service, de l'équipement approprié doit être le seul facteur dirigeant de cette industrie.

Les camionneurs en vrac n'ont pas besoin de permis de poste d'affectation pour survivre. Ils ont tout simplement besoin de prendre eux-mêmes en main leur entreprise et de la faire fructifier selon les principes honnêtes de toute bonne entreprise.

Le rôle du gouvernement n'est plus d'intervenir dans ce secteur de travail de l'industrie du camionnage en vrac.

Le gouvernement du Québec ne doit pas non plus intervenir pour créer des secteurs de transport protégés en ce qui concerne son propre transport ou celui appartenant à des entreprises parapubliques, aux secteurs municipaux ou d'un tout autre secteur d'une entreprise privée. Comme requérant de services, nous croyons qu'il serait certainement plus sage que le ministère des Transports fasse son propre transport, en laissant l'accès libre à chaque camionneur qui désire s'inscrire dans sa division de voirie, la possibilité de faire ce transport.

Comme agent de subventions indirectes qu'il peut faire, avec ses ministères les entreprises parapubliques ou l'entreprise privée, le gouvernement doit s'abstenir d'étendre des privilèges aux matières en vrac transportées par les tiers.

Le seul rôle du gouvernement dans ce secteur de l'industrie est de permettre la réalisation d'une législation sur le transport en vrac qui reconnaîtra l'obligation des camionneurs de détenir un permis pour effectuer du camionnage en vrac. Cette législation devra tenir compte aussi de l'expansion naturelle d'une entreprise de transport qui lui permet d'accroître sa flotte de transport en fonction des besoins du marché et de la saine expansion d'une entreprise.

Le rôle gouvernemental dans cette législation pourrait être aussi, par la Commission des transports, de lui laisser les pouvoirs de fixer les taux et tarifs du transport en vrac afin de permettre cette démarche d'équilibre entre l'offre et la demande. Cette législation devrait, par contre, prolonger les pouvoirs de la Commission des transports en lui donnant les pouvoirs réels de contrôle nécessaires à la réalisation de cet objectif. Cette législation devrait aussi permettre que la Commission des transports puisse tenir compte des facteurs régionaux dans la détermination des taux de transports et de permettre la saine discussion entre requérants de services et transporteurs dans l'instauration des taux de transport.

M. le Président, messieurs les membres de la commission parlementaire, notre groupe veut conclure de la façon suivante, en vous transmettant ses principales recommandations qui sont les suivantes: 1)ordonner immédiatement une commission d'enquête publique sur les agissements, les opérations et les rôles tenus par les membres de l'ANCAl dans le camionnage en vrac et plus particulièrement dans les opérations des postes d'affectation ; 2)abolir la réglementation sur les postes d'affectation afin d'enlever immédiatement le contrôle de l'ANCAl dans le courtage sur le camionnage en vrac et afin de permettre à l'industrie du camionnage en vrac de vivre et de progresser de façon individuelle en fonction du principe bien légitime de l'offre et de la demande; 3)abolir les décisions administratives qui assureraient la protection d'un volume gouvernemental aux postes d'affectation et, par voie de conséquence, aux membres de l'ANCAl; 4)s'abstenir de donner des privilèges de transport exclusif sur des matières en vrac appartenant ou contractées par des tiers, tels les différents ministères du gouvernement, les entreprises parapubliques, les municipalités et les entreprises privées; 5)que le ministère des Transports, en tant que requérant de services, fasse exécuter et assurer

son propre transport en permettant à tous les camionneurs de s'inscrire librement et volontairement à sa division de voirie respective et en répar-tissant également son volume de transport à tous les camionneurs inscrits dans sa division de voirie; 6)maintenir la réglementation des permis par unité sur le camionnage en vrac en permettant cependant de reconnaître le principe et le pouvoir de s'adresser à la Commission des transports du Québec afin d'augmenter sa flotte de transport en fonction des besoins particuliers de chaque entreprise de transport et compte tenu du marché de l'offre et de la demande de l'industrie du camionnage en vrac; 7)maintenir le pouvoir de la Commission des transports du Québec dans le système de fixation des taux et tarifs pour le camionnage en vrac afin de permettre l'équilibre entre l'offre et la demande et la rentabilité des entreprises de transport; permettre que la Commission des transports ait, d'autre part, les pouvoirs nécessaires à ce que les taux de transport tiennent compte du marché régional, d'ententes particulières entre les requérants de services et les camionneurs. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: A la page 12 de votre mémoire, vous dites qu'un propriétaire de quatre camions ne peut, finalement, même inscrire ou voir son premier camion requis à cause d'un système qui est le suivant, que vous décrivez au paragraphe 3 de la page 12: "Quand ce même "dispatcher" prend, par la même occasion, les revenus du deuxième, troisième et quatrième camions pour les créditer sur le travail du premier camion, on arrive devant une situation aussi illogique que, parce qu'il a quatre camions, ce camionneur ne peut même pas faire travailler son premier camion."

Si je comprends bien, le mécanisme d'inscription du travail des trois autres camions sur le premier, c'est le travail qui est fait à l'extérieur du poste d'affectation?

M. Saint-Onge: Les deux. M. de Belleval: Pardon?

M. Saint-Onge: Ce sont les deux. Tous les travaux faits à l'extérieur par ses autres camions sont crédités au premier.

M. de Belleval: Mais, en vertu du fonctionnement d'un poste d'affectation, en vertu de quoi le poste d'affectation peut-il créditer du travail fait à l'extérieur du poste d'affectation? Est-ce que c'est légal? Est-ce que c'est permis par le règlement?

M. Delage: M. le ministre, si on se reporte au premier code d'éthique qui avait fait l'objet de l'approbation ministérielle, il prévoyait la priorité du premier camion...

M. de Belleval: Oui.

M. Delage: ... et le principe de la répartition égale de travail entre les camionneurs. C'était très clair. Il y avait aussi, si ma mémoire est bonne, dans le code d'éthique une disposition qui prévoyait qu'on devait tenir compte du travail effectué. Ce que la clause prévoyait, c'était le travail gouvernemental effectué par les deuxième, troisième et quatrième camions sur le revenu du premier camion.

M. de Belleval: Oui.

M. Delage: Lorsque nos clients, dans le mémoire, font état de la situation qui prévaut actuellement, c'est que, sans parler de la légalité ou pas du code d'éthique, cette clause a été étendue délibérément, ce que nous soumettons, par les postes d'affectation, ce qui fait qu'on a tenu compte, dans la pratique, dans la répartition de l'ouvrage des premiers camions, effectivement, du transport effectué par les deuxième, troisième et quatrième camions. (16 h 45)

Si quelqu'un a deux camions — on va arrêter de parler des quatre camions — prenons un camionneur qui a deux camions, qui a un camion d'inscrit au poste et un autre qui fait des travaux privés en dehors, si effectivement, d'une façon habile, on veut atteindre le principe de la répartition égale des revenus, on va tenir compte du revenu du deuxième camion. On va dire: Ecoute, ton camion a travaillé tant de jours...

M. de Belleval: Le revenu du deuxième camion qui n'est pas inscrit au poste...

M. Delage: Qui peut être ou ne pas être inscrit au poste, cela ne change rien.

M. de Belleval: ... mais qui travaille à l'extérieur pour du travail fait à l'extérieur du poste.

M. Delage: C'est cela. Vous avez fait des revenus de tant, un autre camionneur dans le poste a eu des revenus de tant, donc...

M. de Belleval: Mais comment peut-on contrôler le travail fait à l'extérieur du poste?

M. Delage: On va exiger des camionneurs qu'ils rapportent au poste l'ouvrage exécuté. Ce que le code d'éthique prévoit.

M. de Belleval: Qu'est-ce qui garantit que le travail est rapporté ou pas...

M. Delage: Pardon?

M. de Belleval: Qu'est-ce qui garantit que le travail est rapporté ou pas? Ce doit être extrêmement discriminatoire, certains le rapportant, d'autres ne le rapportant pas, etc.

M. Delage: II semble que l'expérience vécue a démontré qu'on prenait les moyens de vérifier effectivement ce que les autres camions faisaient. S'ils étaient déclarés, il n'y avait pas de problème, ils étaient au rapport...

M. de Belleval: S'ils n'étaient pas déclarés?

M. Delage: II y a des cas où il semble, effectivement, qu'on vérifiait même ce que les autres camions faisaient.

M. de Belleval: Cela doit pouvoir varier d'un cas à l'autre. Le poste d'affectation n'est pas équipé d'un système administratif ou policier pour aller vérifier ce que chacun fait à telle date, à telle heure, etc. Autrement dit, il doit y avoir beaucoup de latitude dans l'appréciation de ce travail qui est fait à l'extérieur.

M. Delage: Pour répondre à cette question, évidemment, elle est assez précise...

M. de Belleval: Répondez-moi donc directement, dites ce que vous en pensez; au lieu de me faire des grands sourires, dites-moi donc ce qui se passe!

M. Saint-Hilaire: M. le ministre, est-ce qu'on pourrait affirmer tout simplement que, dans la région 01, qui est la Gaspésie, le réseau de communications est très rapide? On n'a pas plus à dire que cela. Si, dans une paroisse donnée où il n'y a pas de nombreux habitants, un propriétaire a trois camions, il y a deux camions partis, cela se rend très vite au poste d'affectation.

M. de Belleval: Vous êtes satisfaits? Les renseignements sont très précis, parfaits, etc.? Vous êtes meilleurs que le ministère du Revenu?

M. Saint-Hilaire: Ce n'est pas toujours précis.

M. de Belleval: On devrait vous engager au ministère du Revenu?

M. Saint-Hilaire: Je ne le voudrais pas, M. le ministre.

M. Delage: C'est un genre de méthode dont on a pu voir qu'elle existait. Je ne vous dirai pas qu'elle est parfaite à 100% parce que je suis entièrement d'accord que, d'une façon strictement théorique, il peut y avoir un paquet de camionneurs qui ont deux ou trois camions qui puissent travailler sans se faire rapporter, mais il reste que le phénomène est le suivant et qu'un propriétaire de trois camions, en s'engageant dans un poste d'affectation peut arriver devant une situation où il n'a même pas le droit, lui, à cette priorité du premier camion. C'est cela en fait qui est important.

M. de Belleval: II faut quand même voir... C'est qu'au fond il n'a pas le droit à son premier camion, parce que ses deuxième et troisième travaillent bien ailleurs.

M. Saint-Hilaire: Même si ce n'est pas de l'ouvrage gouvernemental.

M. de Belleval: Même si ce n'est pas de l'ouvrage gouvernemental, c'est ce que je dis. Vous dites que c'est injuste. C'est injuste parce que cela ne respecte pas la lettre de la réglementation. Mais, au point de vue de l'égalité de la répartition du travail entre les camions, cela apparaît correct à la première vue.

M. Delage: M. le ministre, affirmer ce que vous dites peut être très logique et peut nous amener à dire que, parce que vous avez plus d'un camion, vous tombez dans un système qui fait qu'on vous empêche délibérément de travailler.

M. de Belleval: On ne vous empêche pas délibérément de travailler.

M. Delage: Au profit du premier camion, de la priorité du premier camion pour tous les camionneurs. Je suis d'accord.

M. de Belleval: Si vous ne travaillez pas à l'extérieur, votre premier camion va travailler. Ensuite, votre deuxième, ensuite votre troisième, ensuite votre quatrième. Si je saisis bien, cependant, si ce système était appliqué correctement de cette façon et que vous n'allez pas travailler à l'extérieur, quelqu'un qui a plus d'un camion par le poste d'affectation, chacun de ses camions travaille pour le quart de ce qu'un seul camion travaille. C'est cela que ça revient à dire. A ce moment-là, vous ne pouvez pas vivre avec cela.

M. Saint-Hilaire: Cela revient à dire que vous avez une incitation à revenir à un camion.

M. de Belleval: C'est cela. Autrement dit, le système ne peut pas fonctionner véritablement pour les gens qui ont plus d'un ou deux camions.

M. Saint-Hilaire: Plus d'un camion.

M. de Belleval: Pas plus de deux peut-être? A deux, cela pourrait peut-être aller?

M. Delage: On n'est pas ici pour trancher des mesures, on est ici pour faire part d'un principe qui fait qu'un camionneur qui a des permis, qui a des camions...

M. de Belleval: Au fond, cette trouvaille intéressante qui était de couper à quatre camions, c'est boiteux.

M. Saint-Hilaire: Cela n'a pas traversé le système de l'ANCAI.

M. de Belleval: A toutes fins utiles, le poste d'affectation exclut les gens qui ont plus d'un

camion, sauf que ça leur donne malgré tout la possibilité de jouer sur les deux tableaux, c'est-à-dire d'aller se trouver du travail à l'extérieur du poste d'affectation, comme tous ceux qui ont plus de quatre camions. C'est ce que ça revient à dire, au fond. Vous avez un privilège supplémentaire, si vous avez plus d'un camion, mais moins de cinq, c'est que vous pouvez, en plus, vous inscrire au poste, mais, en pratique, vous êtes considéré comme quelqu'un qui a plus de quatre camions, de facto. Est-ce que je saisis bien, en pratique?

M. Delage: C'est cela.

M. de Belleval: A cause, évidemment, de cette façon d'aller imputer au premier camion le travail qui est fait à l'extérieur. Dans les régions où le tam-tam fonctionne correctement, ça marche; je suis certain que, dans d'autres régions — je pense à une région comme Montréal — le tam-tam ne doit pas être aussi bon que dans la Gaspésie ou sur la Côte-Nord.

M. Delage: Je ne sais pas si, à Montréal, on utilise le tam-tam, M. le ministre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. de Belleval: Un instant!

Le Président (M. Jolivet): Excusez.

M. de Belleval: Quand je parle du tam-tam, je pensais aux grands signes que me faisait M. Lepage, en arrière, pour me dire que ce n'est pas difficile de savoir ce qui se passe un peu partout à travers toutes les paroisses de la région 01 quand un camion sort. Tout le monde et sa voisine le regardent aller, ce qui n'est pas le cas dans une grande ville.

Je comprends le système, j'ai appris une autre chose; on en apprend tous les jours là-dedans, et plus on en apprend, plus on se rend compte qu'on en a encore à apprendre. C'est un peu décourageant, mais c'est comme ça.

Vous dites ensuite que, dans les régions 06 et 08, il y a eu des permis d'émis. On a vu aussi qu'il y en a maintenant un dans la région 10. Là encore, vous dites que ce sont des dirigeants de l'ANCAl qui sont responsables des postes 06 et 08; c'est ce que vous dites dans votre mémoire? C'est cela que ça veut dire?

M. Delage: En fait, le fond du problème et ce qu'on veut effectivement dire — il faut le comprendre clairement — quand on parle de l'ANCAl...

M. de Belleval: C'est à la page 19.

M. Delage:... on parle de l'ANCAl telle qu'on la connaît effectivement. Mais on parle aussi dans notre mémoire des membres de l'ANCAl.

M. de Belleval: Oui, d'accord.

M. Delage: Ce qu'on veut dénoncer, en fait — si on peut employer le terme — c'est qu'il y a carrément, selon nous, un réseau qui fait de l'ANCAl, telle qu'on la connaît, une association de comté où il y a effectivement...

M. de Belleval: Votre mémoire est très clair là-dessus. La question précise que je vous pose est la suivante: vous dites qu'il y a deux régions, finalement, où il y a eu des permis, et maintenant une troisième, la région 10. La région 10, si j'ai bien compris, ce ne sont pas, de toute façon, des gens de l'ANCAl qui sont là, cela n'a rien à voir avec l'ANCAl, l'ANCAl n'est pas présente comme telle à Montréal.

Dans la région 06, on sait que l'ANCAl est très présente, elle a été très présente dans le passé. Si je comprends bien ce que vous dites, à la page 19, dans le bas, vous vous plaignez que ce soient encore des membres éminents de l'ANCAl qui soient à la tête du poste d'affectation de la région 06, par exemple. Est-ce que c'est ça que vous dites? Vous dites: "Encore une fois, qu'on fasse l'étude des administrateurs représentant ces postes d'affectation — ce sont les postes d'affectation 06 et 08; voulez-vous me suivre en lisant votre texte? — nous constaterons malheureusement qu'il s'agit encore de personnes ayant directement ou indirectement des intérêts dans l'ANCAl ou dans des associations de camionneurs artisans".

M. Saint-Hilaire: Ce que nous voulons établir, M. le ministre, c'est que, chaque fois que vous aurez un conseil d'administration à un poste d'affectation, ce ne sera pas l'ensemble des camionneurs en vrac de la région qui y seront; exclusivement, et de façon totale, ce seront des membres de l'ANCAl.

M. de Belleval: Si je comprends bien, dans le cas...

M. Saint-Hilaire: Dans le cas des régions 06 et 08, ça vient tout simplement confirmer ce qu'on a établi à l'avance.

M. de Belleval: D'accord. Je voulais être bien sûr de cette affirmation. Cependant, on a vu qu'il y a des mouvements internes très profonds que vous soulignez dans le cas de l'ANCAl. Il y a des dissidents de l'ANCAl; l'ANCAl est fragmentée maintenant entre plusieurs groupes et, dans le cas de la région 06, on a vu que c'est un poste qui semble fonctionner, peut-être pas parfaitement, mais assez bien. Il s'agit effectivement d'un groupe qui est plus ou moins de ce qu'on pourrait appeler l'ANCAl nationale.

Le nombre de membres de l'ANCAl semble d'ailleurs diminuer dans cette région et on ne fait pas de discrimination, semble-t-il, en tout cas, dans la région 06 entre membres ANCAI et non-membres ANCAI. C'est un poste où même si ces dirigeants sont d'anciens membres ou sont encore des membres de l'ANCAl, il ne semble pas y avoir de discrimination dans la distribution des contrats,

du moins à ma connaissance. Je n'ai pas eu de plaintes comme dans les régions 01, 02, 03 et 04. Est-ce que vous êtes conscients de cet aspect des choses?

M. Delage: En fait, on a pris connaissance, comme les membres de la commission parlementaire, du mémoire qui a été présenté par le poste de la région 06. Je respecte intégralement ce qui a été dit dans ce mémoire-là et les faits qui ont été décrits sont très clairs. Mais je dois vous dire...

M. de Belleval: Cela semble être aussi le cas dans la région 08 je pense.

M. Delage: Un instant! Lorsque notre mémoire a été fait, on ne connaissait pas les représentations qui avaient été faites dans la région 06. Par contre, je pense que, si on prend le texte de notre mémoire et des problèmes qui ont été soulevés, même par le poste de la région 06, sans pour autant dire qu'il y a des problèmes, il y a en fait — appelons-le carrément — une recherche de contrôle. D'accord?

M. de Belleval: Oui, ce qu'on a vu, c'est que le poste semble fonctionner actuellement sans discrimination et c'est justement parce qu'il a l'air de fonctionner comme ça, je ne sais pas si c'est à cause de ça mais, quoi qu'il en soit, on semble vouloir reprendre le contrôle via l'ANCAl nationale.

Je fais remarquer ça parce que votre affirmation me paraissait, disons, excessive. Autrement dit, il peut y avoir des postes où les dirigeants sont des gens de l'ANCAl, mais ce poste peut fonctionner d'une façon correcte sans discrimination contre les non-membres. Il ne faudrait pas faire une équation absolue entre les membres de l'ANCAl et discrimination. Dans le cas du poste 06 en tout cas, ça semble correct. Je voulais connaître votre avis là-dessus parce que je trouvais l'affirmation cette fois-là excessive, bien que, dans les autres cas dont on a parlé, on a bien vu qu'il y avait des problèmes.

M. Delage: Pour me permettre de répondre sans trop m'étendre sur ce problème-là, on est parfaitement conscient des représentations qui ont été faites dans cette région-là. Pour faire le lien, qu'on note simplement le conflit que cette région-là peut avoir aussi pour savoir effectivement si oui ou non, un jour, on n'aura pas encore des membres de l'ANCAl qui seront à la tête de ça.

M. de Belleval: Effectivement...

M. Delage: Je suis d'accord que, dans le "tempo" qu'on parle, il y a matière à faire une précision là-dessus.

M. de Belleval: Des nuances, oui.

Le Président (M. Jolivet): Le président veut ajouter quelque chose, je pense?

M. Lavoie (Camille): Je crois, M. le ministre, que dans l'affaire des régions 06 et 08, on n'a rien blâmé parce que, ce qui s'est produit, il me semble que ces deux régions-là ont un peu moins écouté les conseils qui sont donnés que probablement dans notre bout à nous. Il y a des conseillers pour l'ANCAl. Certains les écoutent un peu moins et d'autres les écoutent plus, ils ont une petite tendance. Alors, dans ce coin-là, ils ont eu moins de tendance que dans notre bout. C'est pour ça que ça va mieux.

M. de Belleval: Je n'ai pas été d'ailleurs sans remarquer qu'à ce moment-là, quand les gens de la région 06 sont venus, ils avaient changé de procureur aussi.

M. Lavoie (Camille): Oui.

M. de Belleval: Je voudrais maintenant aller à vos recommandations proprement dites. A toutes fins utiles, ce que vous proposez c'est de ne pas donner de secteur protégé supplémentaire à ceux qui existent déjà et même, si je comprends bien, en enlever en plus les secteurs protégés actuels et même abolir, s'il le faut, les postes d'affectation pour permettre au ministère des Transports d'établir sa propre liste de rotation et d'assurer lui-même le juste partage des contrats.

Vous vous rendez compte de toutes les implications que cela a sur le ministère des Transports, cette façon d'agir mais, si je saisis bien, c'est essentiellement parce que vous ne faites pas confiance à l'impartialité des postes d'affectation que vous demandez ça.

Si les postes d'affectation fonctionnent d'une façon impartiale comme dans le cas, semble-t-il, des régions 06, 08 et 10, est-ce que vous maintiendriez cette recommandation ou si vous ne la maintiendriez qu'en toute hypothèse?

M. Delage: Votre remarque mentionne beaucoup d'aspects sur lesquels je voudrais revenir. Premièrement, permettre peut-être d'adapter le rapport à d'autres rapports qui ont été effectivement transmis par d'autres groupements. (17 heures)

Dans la région 01 aussi, on va reconnaître le fameux principe que, d'après nous, il y a actuellement trop de permis par rapport à l'offre économique qu'il peut y avoir dans cette région pour affecter et faire travailler tous les camionneurs. En fait, on est d'accord pour que cette région suive la même courbe qu'il peut y avoir dans la province.

Quand vous parlez des secteurs protégés, particulièrement aussi dans la région 01, qui a une vocation forestière très développée, il reste que ces secteurs de transport sont couverts en partie par ceux qui sont membres du poste, et sont couverts aussi — ce qu'on prétend, nous, de façon très adéquate — par les camionneurs qui ne sont pas membres de ce poste. En créant d'autres secteurs protégés, tel que revendiqué par les groupements qui se sont présentés devant vous et en

forçant, en fait, les compagnies forestières à passer par les postes d'affectation, compte tenu de l'expérience effectivement vécue dans cette région pour la question d'implantation des postes d'affectation, pour nous, ça nous apparaît une façon claire, nette, précise, non pas hypothétique, mais vécue, d'éliminer les camionneurs qui ne sont pas membres desdits postes d'affectation, ni membres de l'ANCAl, de continuer de les éliminer, enfin, de leur secteur de travail. Parce que le jour où vous aurez des secteurs protégés additionnels, vous donnerez exactement le même moyen qui a été donné, en fait, dans le passé par une clause de protection. C'est inciter les gens en disant: Vous avez une clause de protection, on vous donne de l'ouvrage, venez avec.

Dans cette région, les transporteurs forestiers n'ont pas eu besoin de clause de protection pour faire du transport et c'est absolument inconcevable de pouvoir penser que ces mêmes camionneurs seraient obligés de passer par un système qui n'a absolument rien à voir avec la façon dont se donne l'ouvrage sous le motif, en fait, de faire travailler les camionneurs par des secteurs protégés.

M. de Belleval: En tout cas, ça semble assez clair. Si j'ai bien compris les interventions du représentant de l'Opposition officielle là-dessus, c'est un point de vue que l'Opposition officielle partage, mais je laisserai bien sûr le représentant de l'Opposition officielle faire des commentaires sur ce point en particulier.

Ma question allait plus loin que ça. Concernant les postes d'affectation, si vous avez la conviction ou s'il y a des moyens qui sont pris pour faire en sorte que les postes d'affectation fonctionnent d'une façon impartiale, est-ce qu'à ce moment-là, vous maintiendriez toujours votre recommandation voulant que ce soit le ministère des Transports, par exemple, qui se charge, à toutes fins utiles, de la répartition du travail?

M. Delage: Le mémoire et les représentations de l'association ne sont pas en fonction d'hypothèses. Ils sont en fonction d'une situation vécue. Pour le groupement que nous représentons, nous croyons qu'actuellement la seule façon de régler le problème de l'industruie du camionnage en vrac est d'empêcher les associations, quelles qu'elles soient, d'avoir un contrôle dans le courtage du camionnage en vrac, et d'avoir un contrôle nonobstant le fait que la nouvelle réglementation, telle qu'elle existe depuis 1979, a enlevé ces pouvoirs ou l'ingérence de ces associations dans le courtage. La situation est telle qu'actuellement...

M. de Belleval: Ecoutez, c'est un point de vue que je pourrais partager, mais, ceci étant dit, il y a des postes d'affectation dans des régions où ça fonctionne correctement. Est-ce que je dois pénaliser les sections où ça fonctionne correctement ou seulement les sections qui ne fonctionnent pas bien?

M. Lavoie (Camille): Vous pouvez certainement le faire dans les sections qui ne fonctionnent pas bien.

M. de Belleval: Oui, ce serait une autre possibilité.

M. Lavoie (Camille): Ce serait une possibilité. Je demanderais aussi que vous imposiez le silence à ceux qui chuchotent en arrière; parce que nous avons toujours écouté sans chuchoter en arrière des autres. On entend continuellement le contraire de ce qu'on a fait, ils placotent sans savoir ce qu'ils disent. J'aimerais qu'on ait la liberté de parler et de s'exprimer, comme on l'a laissé faire au début. Cela fait trois jours qu'on est ici...

Le Président (M. Jolivet): Monsieur, je comprends votre intervention. Je n'ai pas entendu ces chuchotements, c'est pour ça que je ne l'ai pas fait. Mais si je les entendais, je me permettrais de le faire.

M. Lavoie (Camille): Je crois qu'ils sont assez forts pour que vous les entendiez.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Shefford.

M. Verreault: Merci, M. le Président. J'ai simplement quelques petites questions techniques, en somme. J'ai écouté attentivement, comme mes collègues, le mémoire de l'organisme en question. Ce que j'aimerais savoir — c'est peut-être parce que j'ai manqué des bouts tout à l'heure — votre organisme, ce sont les entrepreneurs de la région 01. Cela regroupe combien de membres et combien de véhicules dans la région 01 ? Egalement, votre organisme se retrouve dans chacune des régions du Québec.

M. Saint-Onge: C'est l'Association des camionneurs entrepreneurs en vrac de la région 01 uniquement.

M. Verreault: Oui, la région 01. M. Saint-Onge: La région 01.

M. Verreault: Mais vous avez la même association, j'imagine, comme l'ANCAl, dans toutes les régions du Québec?

M. Saint-Hilaire: A ce moment, je dois dire qu'il y en a déjà eu. Il reste encore des noyaux, mais ce n'est pas actif partout, après la prise de contrôle par l'ANCAl des postes d'affectation, ces associations qui, à l'origine, lorsqu'on a instauré des postes, devaient participer aux postes, s'en sont vu éliminer, et elles se sont plus ou moins dissoutes à différents endroits de la province.

M. Verreault: La plupart de vos membres sont de la région de la Gaspésie. Combien comptez-vous de membres actuellement?

M. Saint-Onge: Environ 250.

M. Verreault: Ils représentent combien de camions? Est-ce qu'on peut faire une moyenne de trois camions chacun?

M. Saint-Onge: Une moyenne d'à peu près 2,2 ou 2,3, pas plus.

M. Verreault: Ce qui voudrait dire à peu près 500 à 600 camions.

M. Saint-Onge: Tout près de 500.

M. Verreault: On a répondu à mes questions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. J'aimerais m'adresser au président de l'Association des camionneurs entrepreneurs de la région 01. Est-ce que, dans votre région, la région 01, il y a actuellement un poste d'affectation qui détient un permis de courtage en conformité à la loi ou les règlements qui régissent actuellement le transport en vrac au Québec?

M. Lavoie (Camille): Actuellement, il y a un vieux permis qui est en suspens, parce qu'il y a eu des oppositions. On a eu des demandes, parce que le permis, actuellement, dans le fond, n'a pas été renouvelé. Vous le savez comme nous autres. On n'a jamais adhéré au poste.

M. Goulet: Actuellement, au moment où nous nous parlons, il y a un poste d'affectation qui détient un permis de courtage dans la région 01.

M. Lavoie (Camille): Oui, il y a un poste actuellement.

M. Goulet: Est-ce que les...

M. de Belleval: M. le député de Bellechasse, la demande de conversion du poste a été refusée par le commissaire de la Commission des transports. Il y a un appel devant les tribunaux de cette décision similaire dans un autre poste. Autrement dit, l'ancien permis est ni plus ni moins en sursis actuellement.

M. Goulet: Cela veut dire que, depuis 1978, il y a eu quand même un poste d'affectation dans la région 01 qui détenait un permis.

M. Lavoie (Camille): Oui.

M. Goulet: Vous venez de dire: Nous n'avons jamais été membres... J'aimerais savoir, sur les 250 membres que vous représentez, étant donné que le permis est en sursis, reculons de trois ou quatre mois, combien de ces membres étaient en règle en 1978 ou 1979 au moment de la création du poste d'affectation, combien de vos 250 mem- bres. Quand le poste s'est créé — ne parlons pas d'aujourd'hui, le permis est en sursis, les gars ne le renouvelleront pas probablement, vous ne paierez probablement pas votre cotisation demain, parce que vous attendez une décision — cela commençait, parmi vos 250 membres, combien ont été membres en règle de ce poste d'affectation la première année?

M. Lavoie (Camille): II y en avait 250 ou 260.

M. Goulet: Ces 250 avaient payé leur cotisation?

M. Lavoie (Camille): Ils avaient payé leur cotisation.

M. Goulet: II y a quelqu'un qui est venu déposer un mémoire hier ou avant-hier et on nous avait dit qu'au lieu de payer la cotisation — certains membres dans votre région, je ne sais pas si c'est de votre association, mais on parlait d'une association rivale — les $125 pour être membre en règle du poste d'affectation, on avait tout simplement déposé une espèce de garantie bancaire, ou des choses comme cela. Est-ce vos membres qui ont fait cela ou d'autres?

M. Lavoie (Camille): L'argent a été déposé dans un compte en fiducie à la banque de ceux qui ont payé. C'est ce qui se produit actuellement.

M. Goulet: Si vous permettez, l'argent a été déposé en fiducie à la banque. C'est l'argent de 1978.

M. Lavoie (Camille): C'est cela.

M. Goulet: Qui a pensé à cela? Quand on est membre d'une association, on a une cotisation à payer. Si je comprends bien, au lieu de payer la cotisation pour se mettre en règle, il y a des gens qui ont récupéré ces $125 et les ont mis en fiducie dans une banque et, à la place, ils ont donné une espèce de garantie bancaire. On pensait, à ce moment, que c'était suffisant pour être membre en règle. Est-ce que c'est bien cela qui s'est passé?

M. Lavoie (Camille): A ce moment, je n'étais pas président. Je ne crois pas que ce soit exactement ce que vous dites. Je peux laisser répondre ceux qui étaient là à ce moment, parce qu'il y en a qui sont ici.

M. Goulet: Non. J'aimeais poser la question au président actuel. Lorsque vous m'avez dit tout à l'heure que l'argent avait été déposé en fiducie, de quel argent s'agissait-il?

M. Lavoie (Camille): Des $125 de nos membres qui avaient été déposés dans le temps. Personnellement, si je voulais commencer à vous parler du début et de tout ce qui s'est passé, et du mariage qu'on nous a promis, alors qu'il y avait déjà un divorce enregistré avant le mariage, si on

commençait par tout ça, ça deviendrait la réponse à la question que vous me posez. Mais je suis obligé d'aller trop loin pour cela.

M. Goulet: M. le Président de la commission, car je m'adresse encore au président... Je ne voudrais pas que vous me répondiez par des si, parce qu'hier il y a eu d'autres organismes... Cela fait trois jours qu'on est ici, on entend des accusations de toute part. J'aimerais être assez objectif pour pouvoir personnellement, si c'était possible, à la fin des travaux de la commission, dire au ministre ou aux gens: Voici, je pense telle chose. Il n'y a pas de si. Cet argent qui a été mis en fiducie, c'était quoi? Ce n'était pas la cotisation qui devait aller justement au poste d'affectation pour devenir membre en règle et qui n'a jamais été envoyée au poste d'affectation? Ce n'est pas ça?

M. Lavoie (Camille): Du tout.

M. Goulet: C'était quoi, ces $125? Est-ce qu'il y a moyen de le savoir?

M. Lavoie (Camille): Dans le temps, quand les $125 ont été demandés et qu'on nous a proposé de nous unir aux autres — je réponds à votre question — à un moment donné, il fallait les déposer et il fallait nous unir ensemble. A la dernière minute, on ne les a jamais déposés au poste d'affectation, parce que ce n'était pas possible de les déposer là et de continuer avec le même système d'avant. A la demande de tous ceux qui ont payé, ils ont dit: On ne va pas là.

M. Goulet: M. le Président, je m'adresse aux membres de la commission: Comment peut-on reprocher à des gens d'avoir été nommés à un bureau de direction, d'avoir monopolisé même un poste d'affectation, si justement on n'a jamais été membre en règle de ce poste d'affectation, donc, si on n'a jamais eu le droit d'aller voter légalement, dûment, pour élire son conseil d'administration?

M. de Belleval: Vous voulez que je réponde? M. Goulet: Oui.

M. de Belleval: Le problème qu'ont posé certains requérants devant nous n'est pas celui-là. Le problème qui se pose, selon des plaintes que nous avons eues au ministère, à la commission, selon des plaintes qui ont été mises en évidence ici et qui ont été admises, d'ailleurs, entre autres, par le poste 04 ou le poste 03, c'est que des membres dûment inscrits aux postes d'affectation, des membres qui paient leur cotisation, tel que prévu par les règlements du poste, se voient pénalisés par le poste d'affectation parce qu'ils refusent de participer à des manifestations organisées par une association parallèle. C'est ça, le problème.

M. Goulet: M. le Président, si vous me le permettez, le ministre contourne complètement la question. Ce n'est pas de ça qu'il s'agit. Les gens qui sont en face de nous nous ont dit que, dans la région 08, dans la région 06 — et c'était généralisé à la grandeur du Québec — une association avait monopolisé un poste d'affectation. Je me dis que, si je veux élire mon monde à la direction d'un poste d'affectation ou d'un bureau de direction, d'abord, j'entre membre en règle de l'association; ensuite, je vais voter. Je ne parle pas de ce qui s'est passé par la suite, mais d'abord, au moins une fois dans ma vie, je deviens membre en règle de ce poste d'affectation.

D'après ce qu'on nous dit, on n'est jamais devenu membre en règle. Donc, on n'a pas pu se faire élire ou faire élire nos gens au bureau de direction. Ce n'est pas sur ce qui s'est passé après, les pénalités. S'il y a eu des pénalités, je suis vraiment en désaccord et je l'ai dit justement au représentant de la région, je ne me souviens pas de laquelle, je pense que c'est 04. J'ai dit: Si vous avez donné des pénalités ou des récompenses, votre chapeau ne vous permettait pas de faire ça et je vous blâme. Je le lui ai dit de façon non équivoque pour qu'il le comprenne.

M. Lavoie (Camille): Est-ce à nous que vous posez la question?

M. Goulet: Oui. Comment peut-on reprocher à des gens, pas d'avoir donné des pénalités six mois après, mais de s'être fait élire à un poste d'administration quand on n'est pas membre en règle et qu'on ne va pas à la réunion, qu'on n'a pas le droit de vote?

M. Lavoie (Camille): II y a eu une assemblée pour ça et cela a été réglé à trois heures du matin. Il y a eu des membres au poste, il y a tout eu. Mais il y a une chose que la commission ne s'est pas réservée. On a demandé à ce moment-là d'avoir un directeur de poste avec un paquet de qualifications accrochées dans le dos. On est arrivé, l'ANCAl en a présenté, on en a présenté un. Malheureusement, ce n'est pas nous qui avons choisi; c'est la commission avec des juges qui a dit: On veut avoir un homme compétent. De leur décision, ils ont pris un homme compétent, mais ils n'ont pas gardé la réserve de donner droit à ceux qui avaient été nommés là, en majorité, de le garder là, ce gars-là.

Trois jours après, ils sont arrivés et ils ont dit: Ce gars-là, on ne veut pas l'avoir là, parce que ce n'était pas eux qui l'avaient présenté. Ils l'ont mis dehors et ils ont engagé qui ils ont voulu et à leur goût, un gars qu'ils voulaient manipuler à leur goût. Cela marche depuis ce temps-là. C'est à ce moment-là que les membres qui s'étaient présentés ce soir-là ont dit, à trois heures du matin: Nous autres, on ne veut plus aller là, ça continue comme avant; il n'y a pas eu de marque de bonne foi. C'est pour ça que ça s'est produit de cette manière. C'est comme cela que ç'a commencé au tout début et c'est comme ça que ça marche depuis le début. (11 h 15)

II y en a qui ont rentré au poste depuis ce temps-là. Il y en a qui ont rentré par humiliation, par toutes sortes de choses. Il y en a même qui ont embarqué dans les manifestations l'autre jour parce qu'ils se sont fait décharger leur voyage de bois le long du chemin et ils ont dit: Tu embarques ou on te casse. Et ils ont embarqué; c'était de nos membres et ils l'ont embarqué malgré eux. Je crois que M. le ministre en a eu des échos de ça. Cela a toujours été la même chose. Cela fait trois jours qu'on est ici et ce sont des plaintes comme ça continuellement. Vous devez être au courant de ce qui se passe.

M. Goulet: Je suis d'accord, M. le Président. Ce que je voulais démontrer, c'est comme si je disais: A partir de demain matin, je ne paie plus de taxe, je ne paie plus d'impôts et je ne vote plus au Québec justement parce qu'il y a 70 députés qui viennent d'une autre formation politique et ils ont toujours la majorité. Alors, c'est à moi de me battre et à la prochaine élection d'essayer de faire élire mes gars et encore à une autre élection. Cela peut prendre deux ou trois ans, mais les gens doivent persister. Quand il y aurait eu une réélection de ce bureau de direction, ils auraient pu essayer d'y mettre deux de leurs membres et, à la prochaine élection, trois. Peut-être qu'aujourd'hui vous auriez le monopole du bureau de direction.

M. Lavoie (Camille): Je vais vous dire... M. Goulet: Non, cela ne se fait pas?

M. Lavoie (Camille): Cela se fait quand les gars... Un moment donné, tu n'as pas le contrôle tout seul; mais, quand ça fait plusieurs années que tu as commencé dans le transport, que ça fait environ 20 ans que tu fais du transport et même davantage et que tu dois recommencer au tout début, les gars se reculent, ils craignent et ils ont peur. C'est ça qui se produit. Ceux qui n'ont pas peur, ils sont ici aujourd'hui. C'est ça qui se produit actuellement.

M. Goulet: Ce n'est pas facile d'être en minorité. Je connais ça, surtout avec la formation politique que je représente; ce n'est pas facile, mais on espère qu'un jour le soleil luira, et c'est la même chose pour vous. M. le Président...

M. Lavoie (Camille): Oui, mais vous n'avez pas eu les sabotages qu'on a eus, M. le député.

M. Goulet: Vous ne le savez pas.

M. Lavoie (Camille): Cela commencerait à être le temps de...

M. Goulet: M. le Président, j'ai...

Le Président (M. Jolivet): Des preuves, M. le député.

M. Goulet: M. le Président, j'ai une dernière question. Non, je pense que je ne voudrais pas...

M. de Belleval: M. le Président, juste un mot. Vous avez raison.

M. Goulet: De toute façon, il y en a, pour ce qu'ils ont fait le temps qu'ils étaient là, pendant quatre ans, ils n'ont pas fait grand-chose non plus. C'est hors d'ordre, M. le Président, je le savais.

L'Association des camionneurs entrepreneurs en vrac de la région 01 Inc., 174 boul. Saint-Benoît, Amqui, c'est bien votre association?

M. Lavoie (Camille): Oui.

M. Goulet: Un moment donné, est-ce qu'il se peut que vous ayez écrit à vos membres et que vous ayez dit à peu près ceci: Après vérification par nos procureurs...? Vous parliez d'une soi-disant association. Je voudrais savoir de laquelle vous parliez. Une association rivale. Vous dites ceci: Cette nouvelle association n'est pas enregistrée — c'est une mise en garde que vous faites à vos membres — au ministère des Institutions financières du Québec, c'est-à-dire ne possède pas de lettres patentes et les administrateurs du poste d'affectation, et ce en voulant dire qu'ils ne sont pas dûment... Est-ce qu'au mois d'août dernier vous n'auriez pas écrit une telle lettre à tous vos membres? Quand vous parliez d'une association rivale, de laquelle parliez-vous? Est-ce que vous parliez du Poste d'affectation de la région 01?

M. Lavoie (Camille): Oui, et, à ce moment-là, je laisserai répondre mon procureur parce qu'il est au courant.

M. Delage: C'est qu'à la suite de la décision de la Commission des transports qui a été rendue le 4 août 1980, dans la région 01, on a eu des demandes d'inscription pour rentrer dans le poste d'affectation au nom d'une corporation qui s'appelle Transport en vrac de la région 01 Inc. La demande d'avis — vous parlez de procureurs, je pense que vous allez nous laisser répondre — qu'on a eue est: Est-ce qu'il existe une corporation qui porte ce nom? Après vérification aux Institutions financières, à moins que nos renseignements soient erronés, il n'y avait aucune corporation, sous les première, deuxième ou troisième parties, qui avait un statut corporatif au nom de Transport en vrac de la région 01 Inc. Par contre, les camionneurs qui se faisaient solliciter par les représentants du poste d'affectation actuel dont le nom légal est Poste d'affectation de la région 01 Inc. se faisaient recruter au nom d'une corporation dont on ignore encore d'où elle sort. Et l'avis qui a été donné, c'est un avis de mise en garde parce que, légalement, le permis qui existe, c'est le permis de Poste d'affectation de la région 01 Inc. On a su qu'il y avait eu un changement de nom pour permis de courtage — je ne sais pas — de la région 01. Mais, effectivement, on faisait la réquisition auprès des camionneurs, qui ne sont pas informés de ça, au nom d'une corporation qui, en fait, n'avait certainement pas de permis de poste d'affectation.

M. Goulet: Mais vous ne croyez pas à ce moment-là que ça mêlait les membres et que tous vos membres qui ont reçu cette lettre pensaient qu'il s'agissait justement... Quand vous parliez de cette association qui n'était pas en règle, tout le monde ou à peu près 99% des membres l'ont identifiée au poste d'affectation. Ils pensaient que leur poste d'affectation n'était pas membre en règle.

M. Delage: Les représentations qu'on leur faisait pour signer et devenir membres du poste étaient que c'était la corporation qui détenait le permis de poste de la région 01.

M. Goulet: Bon. Mais là vous avouez aujourd'hui qu'il ne s'agissait pas du tout de cette corporation-là, c'était une troisième qui était arrivée dans le décor.

M. Delage: C'est ça.

M. Goulet: Ah! bon. C'est bon de le savoir. Une dernière petite question, si vous me le permettez. M. le Président, tout à l'heure, a parlé d'un directeur qui avait été proposé et qui a été refusé. Le directeur du poste d'affectation, au début, avait été proposé et, à un moment donné, cela a été refusé. Ils ont nommé ceux qu'ils ont bien voulu nommer. N'avez-vous pas dit quelque chose comme cela ou si je fais erreur?

M. Lavoie (Camille): Je peux laisser répondre le directeur qui a été suspendu. Il est justement...

M. Oelage: J'aimerais apporter une correction parce que les événements que vous relatez feront l'objet d'une décision judiciaire et j'aimerais qu'ils soient, au moins, reportés dans le cadre précis où ils ont été faits. Lorsque la Commission des transports, le 8 juin 1978, si ma mémoire est bonne, a siégé à Matane, pour l'audition du permis de poste d'affectation, elle a délivré un permis de poste d'affectation à la région 01 Inc., avec la représentativité qui existait à ce moment-là, c'est-à-dire 4 délégués, parce qu'on était sous le règlement de 1978, 4 délégués des associations des artisans et 2 délégués des entrepreneurs. La Commission des transports, après avoir délibéré avec les parties jusqu'à trois heures du matin, a pris acte d'une décision — pas de la Commission des transports, mais j'aimerais que ce soit précisé — du Poste d'affectation de la région 01 Inc., d'engager et de choisir un directeur de poste qui a fait, lui, l'objet de l'approbation par la Commission des transports conformément au règlement qui existait. Quand M. le président Lavoie fait état de ce remplacement, c'est que la personne qui avait été légalement choisie par la corporation et dont le choix avait été entériné par la commission, n'a effectivement jamais, jamais, pu opérer, parce qu'avant même qu'elle puisse rencontrer, en fait, l'organisme qui l'avait engagée, on l'a carrément avertie qu'elle n'était même plus directeur du poste qui avait été changé. On a engagé effectivement un autre directeur du poste d'affectation, et celui-là n'a jamais fait l'objet de l'approbation des autorités de la commission.

M. Goulet: M. le Président, je vous demande une directive. Est-ce que les gens qui sont en avant ont, comme les députés, l'immunité parlementaire? Oui?

Le Président (M. Jolivet): Les gens qui sont en avant...

M. Goulet: Je veux dire les invités.

Le Président (M. Jolivet): Oui. Oui, les invités. Non, je n'ai pas dit oui à cela.

M. Goulet: Je ne veux pas aller plus loin, mais j'aurais aimé que quand...

Le Président (M. Jolivet): J'ai bien compris. Une minute. M. le député, laissez-moi répondre à votre question.

M. Goulet: Je m'excuse.

Le Président (M. Jolivet): Selon la Loi de la Législature, il est évident que chacun des membres qui sont des députés, ici, autour de cette table, ont l'immunité parlementaire, selon les articles — si je me souviens de mémoire — 43 et 44 de la loi. Ce n'est pas tout à fait clair, mais j'aime autant faire une mise en garde qui s'impose. Je lis, à l'article 44: "Nulle personne n'est passible de dommages et intérêts ou n'est sujette à aucun autre recours en raison d'actes accomplis sous l'autorité de l'Assemblée nationale, agissant dans la mesure de ses pouvoirs." Cela fait référence, bien entendu, à l'article 43, qui concerne le témoin et dit: "L'Assemblée nationale peut désigner et contraindre toute personne à comparaître devant elle ou un de ses comités ou à y produire toute pièce qu'elle juge nécessaire à ses actes de délibération."

Compte tenu de ces deux articles, en étant assez large sur l'interprétation, mais compte tenu que cela n'a jamais fait l'objet de décisions judiciaires à ce niveau, on peut croire qu'il y a une forme d'immunité qui n'est pas encore, en aucune façon, prouvée. Cependant, compte tenu de cela, ce que je peux vous dire, c'est que dans l'avant-projet qui a été déposé en Chambre, lors de la dernière session, de la Loi de la Législature, il sera carrément inscrit que les gens qui sont en face de nous et qui viennent témoigner à la demande de la commission ont cette immunité parlementaire qui est dévolue actuellement à la députation. Mais il reste que ceci n'étant pas clair, n'ayant aucun jugement de cour en ce sens, en étant assez large d'interprétation des articles, mais en laissant, cependant, au juge le droit de déterminer, on peut, à la rigueur, penser qu'il y a une forme d'immunité qui n'est peut-être pas parlementaire, mais qui permet aux gens de témoigner.

M. Goulet: J'ai terminé mes questions, M. le Président, mais j'aurais aimé qu'on puisse nous dire si on connaissait les vraies raisons pour lesquelles ce directeur avait été refusé, ou simplement remplacé. Il y a sûrement eu une raison, est-ce qu'on la connaît, est-ce que c'est la même?

M. Lavoie (Camille): Vous avez vu celui qui l'a remplacé, hier, vous pouvez le lui demander. Il va peut-être savoir quoi dire. Je crois qu'il va bégayer, comme il l'a fait hier.

M. Goulet: Cela fait trois jours que je participe à cette commission et je peux vous dire que je n'ai... Si vous permettez, M. le Président, on semble vouloir insinuer des choses.

J'ai personnellement lu avant de venir à cette commission, et pendant trois semaines à raison de huit ou dix heures par jour, tous les mémoires qui ont été déposés. Pour ceux que je ne comprenais pas, j'ai pris la peine de m'informer, M. le Président, sur le camionnage en vrac. Je pense que c'est le devoir de tous les membres de la commission d'agir ainsi, car aucun membre de la commission n'est à la solde de qui que ce soit. Je pense que ceux qui me connaissent savent que je suis assez grand et assez peu gêné pour poser les questions que je veux poser.

Les gens qui viennent ici depuis trois jours pour lancer de telles accusations, devraient à un moment donné donner des précisions. Je trouve malheureux que les débats d'une commission parlementaire fonctionnent ainsi. Les gens disent n'importe quoi et, quand c'est le temps d'avoir la preuve, on ne l'a pas. Si c'était comme au tribunal où, au moins, les accusés ont le droit de se faire entendre, on pourrait poser des questions au lieu de "tataouiner" pendant trois jours et on pourrait avoir des réponses beaucoup plus précises.

Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, simplement une minute, je voudrais faire une observation. Le groupe de la région 01 qui est devant nous représente quand même probablement des camionneurs qui sont parmi ceux qui ont été le plus massacrés au moment où des clauses de protection ont été accordées aux artisans. A les écouter tantôt, alors qu'on demandait s'il y avait des associations semblables dans la province, il y en avait forcément, mais elles sont disparues par la force des choses étant donné la clause de protection qui avait été accordée aux artisans. C'est la raison pour laquelle il n'y en a pas partout dans les régions.

En 1975, quand la clause de protection sur le béton bitumineux fut enlevée, une des raisons pour lesquelles nous l'enlevions, c'était effectivement parce que tous ceux qui étaient propriétaires de deux, trois ou quatre camions avaient été lésés dans le transport; on voulait qu'ils puissent y participer, au moins en partie.

On a depuis formé des postes d'affectation; je ne veux pas revenir sur les accusations ou contre-accusations, je mets cela de côté. Mais quand on demande à des gens qui sont camionneurs en vrac de faire partie d'un poste d'affectation où on sait d'avance qu'une majorité de camionneurs peut contrôler le poste, il ne faut pas demander aux autres qui sont minoritaires de supposer qu'ils peuvent avoir la plus grande mesure de justice possible. Ce serait rêver en couleur d'espérer cela.

Cela veut donc dire que les postes d'affectation, tels qu'ils sont créés actuellement et de la façon dont ils sont conduits, j'ai l'impression que c'est une formule qui est également boiteuse. Il y a eu quantité de suggestions qui ont été portées à l'attention des autorités gouvernementales au sujet des erreurs passées ou de l'interprétation qu'on a faite de la loi et des règlements. Il faudrait, après cette commission, revoir ces erreurs afin d'éviter d'en commettre d'autres. Je suis de ceux qui pensent que vos recommandations, comme d'autres qui ont précédé, méritent, avant que d'autres changements soient faits, une attention des plus approfondies de la part des autorités du ministère actuellement.

Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci, c'est terminé.

Je demande à l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, représentée par M. Damien Morissette, de s'avancer.

Pendant ce temps, je fais lecture d'une lettre que j'ai transmise à chacun des membres de cette commission. C'est une lettre de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec: "Suite à la question posée par le député de Bellechasse, M. Goulet, lors de la présentation de notre mémoire à savoir si la AMBSQ avait déjà demandé à la commission de fixer les taux pour le transport de copeaux, notre association désire par la présente, afin d'éclairer cette commission et M. le député de Bellechasse, vous informer qu'en aucun temps notre association n'a demandé à la Commission des transports du Québec une fixation des taux précités. Cependant, des ententes tarifaires sont déjà intervenues entre certains membres de notre association et certains transporteurs, ententes que la commission a entérinées."

C'est signé de Richard Lacasse, directeur général.

Je dépose ici, à cette commission, une résolution de la municipalité de Disraeli qui se lit comme suit: "Que la corporation municipale de la paroisse de Disraéli porte à l'attention de la commission parlementaire sur le camionnage en vrac son opposition à la demande de l'Association des camionneurs." C'est signé par la sécrétaire-trésorière, Florence P. Couture. (17 h 30)

Nous demandons donc à M. Damien Morissette de présenter les membres qui sont avec lui. Le no 17.

Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec

M. Morissette (Damien): M. le Président, je vous présente à mon extrême gauche l'assistant

directeur du contentieux, Me Serge Caron, immédiatement à ma gauche Me Micheline Laliberté, directrice du contentieux et à ma droite M. Carol Wagner, président directeur général de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec.

M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la commission, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec est heureuse de vous présenter aujourd'hui le présent mémoire sur la situation du transport en vrac au Québec. Nous vous sommes très reconnaissants de l'occasion que vous nous donnez d'exprimer nos idées et recommandations sur ce dossier toujours d'actualité qu'est le transport en vrac au Québec.

C'est d'ailleurs la tenue d'une commission parlementaire sur le transport en vrac que nous avions demandée à votre prédécesseur M. Lucien Lessard dans une lettre datée du 6 juillet 1979 et à la suite des manifestations de 1977 de l'implantation du règlement 112 dans trois régions du Québec et de la crainte de perte de contrôle qu'éprouvaient certains groupes de camionneurs.

M. Lessard avait fait la sourde oreille à nos demandes, se contentant de discuter du dossier en l'absence des entrepreneurs en construction, malgré le fait que ceux-ci doivent transiger selon les devis, pressions ou chantage avec ce secteur de travail protégé qu'est le transport en vrac, secteur né d'un patronage politique de nos gouvernements.

Le présent mémoire est le fruit d'une consultation directe de tous les entrepreneurs en construction spécialisés dans les travaux de voirie et génie civil membres de notre association. Les requérants de services que nous avons l'honneur de représenter aujourd'hui se sont penchés très attentivement sur le dossier du transport en vrac et vous soumettent leur point de vue au cours des pages qui suivent.

Nous sommes convaincus que la commission permanente des transports apportera à nos recommandations toute l'attention qu'elles méritent et ce, dans l'espoir de trouver des solutions définitives au malaise dans l'industrie du camionnage en vrac au Québec.

Verrons-nous un gouvernement poser un geste concret à ce problème politique? Je demanderais maintenant à Me Laliberté de faire la lecture du mémoire.

Me Laliberté (Micheline): L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec a été incorporée en 1944 et regroupe exclusivement des entreprises de construction spécialisées dans les travaux de voirie et génie civil. Ces travaux de construction comprennent notamment ceux de voirie, grand travaux, agriculture, travaux municipaux, déneigement, transport d'énergie, production et fourniture de béton préparé, béton bitumineux, pierre concassée et agrégat.

Le Président (M. Michaud): Est-ce que vous auriez objection à ce qu'on passe directement aux recommandations en vous assurant que le texte de votre mémoire soit inscrit au journal des Débats, pour accélérer les choses, étant donné qu'il est déjà 17 heures 30.

M. Morissette: M. le Président, si les membres de la commission sont au courant du mémoire et si M. le ministre également a jugé qu'on peut se dispenser de la lecture du mémoire, on va se soumettre à vos désirs.

Le Président (M. Michaud): Je vous fais cette suggestion après avoir consulté le ministre et les députés de l'Opposition. Si tout le monde est d'accord on pourrait passer par cette procédure afin d'accélérer un peu.

M. Morissette: D'accord, on va accepter votre proposition, M. le Président.

M. Gratton: M. le Président, si on me permet, quant à nous de l'Opposition officielle, et je suis convaincu qu'au ministère aussi, nous avons pris connaissance du mémoire, on a d'ailleurs une analyse complète qui a été effectuée par notre service de recherche et on pourrait effectivement, surtout avec la clause conditionnelle de reproduire le texte intégral au journal des Débats pour ceux qui voudraient pouvoir en prendre connaissance là, on pourrait sûrement faire une étude sérieuse de votre mémoire en procédant à la lecture des recommandations.

Le Président (M. Michaud): M. le député de Bellechasse vous êtes d'accord?

M. Goulet: Naturellement j'ai pris connaissance du mémoire et je serais prêt à formuler mes questions immédiatement. C'est une suggestion que vous leur faites M. le Président, ils savent que s'ils veulent le lire, libre à eux. C'est à leur discrétion. Je pense qu'il n'est pas question de brusquer personne mais quant à nous, nous l'avons lu.

Le Président (M. Michaud): Si tous les membres de la commission sont consentants, je crois qu'on pourrait passer directement aux recommandations et passer à la période des questions tout de suite après.

M. Morissette: Nous sommes d'accord, M. le Président. (Voir annexe)

Le Président (M. Michaud): Madame.

Me Laliberté: Les recommandations: L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec soumet respectueusement les recommandations suivantes à la commission permanente des transports.

Recommandation 1: Abolition de la clause dite 75-25 sur les contrats du gouvernement et organismes paragouvemementaux ou de toute

autre forme d'obligation contractuelle visant l'engagement obligatoire de camionneurs en vrac.

Recommandation 2: Maintien du gel dans l'émission des permis de camionnage en vrac, tel qu'édicté dans l'arrêté en conseil 2079-97 du 22 juin 1977.

Recommandation 3: Instauration du gel dans les transferts de permis de camionnage en vrac à la Commission des transports du Québec.

Recommandation 4: Maintien d'une fixation de taux et tarifs de transport en vrac par la Commission des transports du Québec.

Recommandation 5: Maintien du système de répartition et d'affectation de transport en vrac par les postes et sous-postes d'affectation, mais sans obligation d'y adhérer pour le transporteur ou d'y recourir des services pour l'entrepreneur.

Recommandation 6: Réinstauration des catégories camionneurs artisans et entrepreneurs et privilège d'adhérer aux postes et sous-postes d'affectation pour les camionneurs artisans seulement.

Le Président (M. Michaud): Merci, madame. M. le ministre.

M. de Belleval: Dans votre mémoire, vous suggérez de remplacer les taux minimaux par des taux fixes. Or, plusieurs intervenants, qui sont venus devant la commission, ont suggéré au contraire qu'on devrait plutôt s'en tenir à des taux minimaux, mais faciliter cependant les relations entre les requérants de services et les fournisseurs de services et la Commission des transports pour déposer des taux ad hoc, ce qui permettrait d'améliorer la concurrence entre les différents intervenants.

Je ne saisis pas en quoi justement votre recommandation serait de nature à simplifier les choses. Est-ce qu'elle ne serait pas plutôt de nature à compliquer davantage, à bureaucratiser davantage le système?

M. Morissette: M. le ministre, il faut regarder cette recommandation dans l'ensemble des recommandations que nous avons faites. Nous ne sommes pas, à la base, opposés à ce qu'une négociation des taux se fasse, que les taux ne soient pas fixes. Seulement, si jamais on conserve des secteurs protégés et l'obligation de passer par les postes d'affectation, on pense que c'est plus simple et que ça peut éviter des négociations ardues et inégales.

M. de Belleval: D'accord, je comprends. Autrement dit, c'est dans le cadre de secteurs protégés que vous faites cette recommandation.

M. Morissette: Evidemment, on serait pris à négocier des taux avec quelqu'un qu'on est obligé d'engager.

M. de Belleval: C'est ça, et vous seriez ni plus, ni moins, les otages de ceux à qui vous êtes obligés de vous adresser de toute façon.

M. Morissette: C'est ça, M. le ministre.

M. de Belleval: Je saisis. Plusieurs recommandations que vous faites ont été faites aussi par d'autres intervenants et je ne veux pas revenir là-dessus, mais sur des points particuliers que vous soulevez.

Entre autres, vous dites que dans le cas des mélanges de béton bitumineux, les postes d'affectation causent des difficultés en particulier en ce qui concerne la dimension et la contamination des bennes, etc. Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?

M. Wagner (Carol): Si on se reporte avant 1975, la clause existait, le 75-25 était appliqué aussi au béton bitumineux, je pense que les producteurs de béton bitumineux ont eu des difficultés, en ce sens que quand on exécute des contrats avec le ministère des Transports — dans ce temps-là, du moins — il y a la question de la productivité; si on a une équipe d'asphalte qui travaille sur un chantier, si on a à préserver le mélange à une certaine température, etc., il faut se limiter, question d'efficacité, à 600 tonnes par jour. Qu'est-ce qui arrive aussi? Il faut absolument, dans ces cas-là, avoir ce qu'on appelle des camions fiables, des camions d'une certaine longueur de boîte qui s'adaptent aux paveuses en question.

Il y a aussi la question du travail dans les régions urbaines où, parfois, on a des intersections à faire, où on a des rues de très faibles dimensions. C'est souvent recommandable d'avoir quelques six roues pour travailler. C'est très important que le contrôle soit automatiquement fait par le producteur de béton bitumineux. Je suis certain qu'avant que le ministère ait pu concéder sa clause 75-25 et l'enlever en 1975, la question de qualité, de pose et d'efficacité entrait en ligne de compte.

Je suis presque convaincu que la question de prix, qui étaient soumis au ministère, était aussi affectée en ce sens. Ce n'est pas pour rien que le ministère des Transports, en 1975, a relevé ces clauses de béton bitumineux.

M. de Belleval: Qu'est-ce qui arrive dans le cas où les postes d'affectation ne sont pas capables de vous fournir des camions adéquats? Est-ce que cela arrive souvent?

M. Wagner: Ce qui arrive, c'est qu'avec le système des postes d'affectation actuels, avec le système, comme on dit, de répartition égale ou d'une certaine équité qui est prôné théoriquement par les postes d'affectation, il est très difficile pour l'entrepreneur d'avoir le contrôle sur les camionneurs. C'est une tierce personne qui est arrivée là peut-être à la dernière minute. Pour donner des exemples assez concrets, supposons qu'on a cinq ou dix camions sur un projet; la première chose dont qu'on s'aperçoit, c'est qu'à 15 h 30 il nous arrive un camion de l'extérieur. On n'a aucun contrôle dessus. Le poste d'affectation l'a envoyé.

On sait fort bien que, pour l'équipe qui est là, avec l'équipement qu'il y a là, il faut absolument établir des critères d'efficacité. Si on a soumissionné pour 800 tonnes par jour, c'est 800 tonnes; si c'est 600, c'est 600; si c'est 1000, c'est 1000. En fin de compte, il ne faut pas se leurrer, la soumission tient compte de la rentabilité.

C'est pour cela qu'il est très important que le contrôle soit donné à l'entrepreneur, d'autant plus que vous avez au ministère des Transports votre système de pénalités. Comment voulez-vous qu'on ait le contrôle complet sur les camionneurs qui nous sont envoyés par le poste d'affectation, soit d'une région ou d'une autre, qui viennent d'arriver sur un chantier d'excavation de terre ou de gravier? S'il a reçu l'ordre de se rapporter à l'usine d'asphalte no X, la première chose qu'il fait, c'est qu'il met de l'huile assez rapidement, qu'il se place en dessous de la benne, qu'il charge et s'en va porter le voyage. On n'a pas le temps de vérifier à chaque fois si le camion est propre, impropre, etc. Par contre, ce sont nos entrepreneurs qui sont responsables de la qualité finale du béton bitumineux; sinon, ils sont pénalisés par le ministère.

M. de Belleval: Maintenant, vous dites qu'il y a un chantage ni plus ni moins ou du refus de fournir un nombre suffisant de camions si le poste n'obtient pas la clause 75-25 même dans des domaines où vous n'êtes pas obligés de respecter cette clause. Est-ce que cela arrive souvent? Est-ce qu'il y a des régions qui sont plus touchées que d'autres?

M. Morissette: M. le ministre, on n'a pas cru bon d'élaborer sur certaines situations pénibles qu'on a vécues, parce que vous en avez assez entendu parler pendant deux ou trois jours. Mais, effectivement, il y a des régions, je pense à la Gaspésie, où des entrepreneurs ont subi des intimidations. Il y en a eu à Saint-Hyacinthe, il y en a eu un peu partout.

M. Wagner: On pourrait peut-être élaborer. On donne des exemples dans notre rapport, dans la région 06 et dans la région 05. Il faut peut-être expliciter ce qui a été dit ici à la commission parlementaire. Premièrement, concernant peut-être Arco, l'entrepreneur Arco, de la région 04, nous a dit: C'est impensable, ils nous pénalisent une heure de temps si nos camions ne font pas onze voyages. Cela me chicotait et j'ai vérifié auprès de la compagnie Arco ainsi qu'auprès des autres entrepreneurs. C'est d'abord un contrat qui est en bas de l'infrastructure pour lequel l'entrepreneur n'a aucune raison d'utiliser les camions du poste. C'est clair et net. Sur le projet concerné, le camionneur a utilisé 27 de ses camions et 15 des camions artisans, après des pressions faites du poste d'affectation dans un domaine qui ne lui était pas du tout octroyé. Ils ont commencé à faire des pressions, ainsi que des menaces. Il a fallu que la compagnie Arco fasse venir le commissaire Alain, qui s'est rendu sur le chantier pour discuter avec le président-directeur des postes. Je pense qu'il a fallu qu'il admette qu'il n'avait aucun droit en bas de l'infrastructure.

L'entrepreneur lui-même a engagé ces quinze camions. Ce qui arrive par la suite, il a dit: On va vous payer à l'heure. Si mes camions font onze voyages, vous allez suivre nos camions. Il ne faut pas se leurrer ici, ça n'a pas été dit, mais les camionneurs artisans ont des walkies-talkies, ça se parle entre eux! Fais attention, le superviseur s'en vient, il faut commencer à se grouiller. Je n'ai rien contre les bons artisans, je pense que plusieurs de nos entrepreneurs les utilisent, mais il ne faudrait pas attribuer toutes les causes à nos entrepreneurs. (17 h 45)

II y a aussi la question de la retenue de 8% qui est attribuée à Philippe Lamothe, je crois bien, sur un projet de Saint-Etienne-des-Grès. L'entrepreneur a signé un contrat en bonne et due forme avec les textes au ministère des Transports, à l'effet qu'une retenue sera faite et 8% seront saisis si les camionneurs ne respectent pas les clauses. Ils ont signé, je pense, au mois de septembre 1979 et ces messieurs font des grèves, font des manifestations et ils ont arrêté, pendant deux jours, huit de ces camions à la sortie de la carrière.

L'entrepreneur a dit: Je vous retiens un montant, vous êtes des personnes responsables et, en plus, je vais vous poursuivre pour la différence. Je pense que ces choses, il faut les dire.

Deuxièmement, quand on parle dans notre mémoire de la région 05, je pense qu'on le soutient, dans la région 01, il ne faut pas se leurrer, si je me rappelle bien, ma mémoire est bonne, peut-être que vos dossiers le disent, il y a eu la question de Beaudet et Marquis où le ministre précédent a eu à intervenir pour essayer de régler le problème. Je pense que les problèmes sont assez nombreux — j'appelle ça du contrôle des postes — où des associations s'immiscent dans un domaine qui ne leur appartient pas encore.

M. de Belleval: Pouvez-vous donner une appréciation de la différence de coûts entre l'utilisation de vos propres camions et celle des camions des artisans?

M. Morissette: Pour quelle catégorie de transport? Pour quel genre de transport? Est-ce qu'on parle des matériaux en haut ou en bas de l'infrastructure?

M. de Belleval: L'un et l'autre.

M. Morissette: L'un et l'autre, parce qu'il faut regarder les deux séparément, je crois, parce qu'en haut...

M. de Belleval: C'est ce que je veux dire, l'un et l'autre, mais séparément.

M. Morissette: En haut de l'infrastructure, je pense que, selon les distances de transport, il peut y avoir une différence de 25% et plus.

M. de Belleval: Pour ce qui est en haut...

M. Morissette: Pour les matériaux transportés en haut de l'infrastructure, parce qu'on peut établir que les camionneurs, pour un transport normal, vont le faire aux taux stipulés par le ministère des Transports des taux de l'ordre de $40 à $45 l'heure, pour un transport moyen, en haut de l'infrastructure, pendant que le coût d'un camion peut être de $25 à $30 l'heure, je vous donne des chiffres approximatifs, parce que chaque camion peut avoir un coût différent...

En bas de l'infrastructure, ça peut varier énormément. C'est difficile à évaluer, parce que vous savez que les matériaux qui sont transportés en bas de l'infrastructure, ça peut être fait avec différents équipements et, généralement, ce sont des matériaux qui proviennent des déblais de deuxième classe qui sont transportés pour faire des remblais; des déblais de deuxième classe, vulgairement, ce sont des matériaux qu'on enlève à un endroit et qu'on va placer à l'autre. Cela se fait sur des distances très courtes. A ce moment-là, on peut utiliser sur quelques centaines de pieds des tracteurs; si c'est sur un demi-mille, ou une couple de milliers de pieds, les décapeuses sont plus économiques. Si c'est au-delà d'un mille, il faut utiliser des camions, mais, encore là, tout dépend du matériel qu'on excave; ça peut être des camions hors routes, ou des camions normaux, des dix-roues ordinaires.

Si je prenais, par exemple, un transport très fréquent, d'un demi-mille environ, c'est la déca-peuse qui est généralement utilisée par les entrepreneurs pour des matériaux de deuxième classe, de la terre, non pas du roc.

Pour vous donner un aperçu des chiffres, pour une distance d'environ 2000 pieds, déplacer un mètre cube de terre avec des décapeuses peut coûter environ $0.75, alors que ça vous coûtera $1.00 avec des camions de l'entrepreneur et peut-être $1.25 si vous utilisez des camions suivant les taux de la Commission des transports. Alors, pour répondre à votre question, si ce sont des matériaux en bas de la ligne d'infrastructure, je dirais qu'avec des camions de l'entrepreneur, ça peut coûter peut-être 25% à 30% de plus, pour l'exemple de la décapeuse, et peut-être 50% à 60% de plus pour utiliser les camionneurs privés, des transporteurs en vrac. Mais, ce qu'il est important de souligner ici, si on parle des transports en bas de la ligne d'infrastructure, c'est que c'est difficilement acceptable, c'est inadmissible parce que ce n'est pas du transport défini de matériaux d'un point à un autre. C'est du transport qui varie avec chaque contrat. C'est une nature de matériaux qui varie avec chaque contrat. Les coûts vont être en proportion de la difficulté de construire des chemins ou des choses semblables. Est-ce que ça répond à votre question?

M. de Belleval: Une précision en ce qui concerne les travaux en haut de l'infrastructure. Vous calculez qu'en moyenne, en utilisant ses propres camions, un entrepreneur épargne combien, en pourcentage, vous dites?

M. Morissette: Je vous ai donné l'ordre des chiffres, l'ordre de grandeur. Vous avez des statistiques, au ministère des Transports, qui vont vous dire que pour un transport moyen, disons de zéro à cinq milles ou dix kilomètres, le revenu d'un camion, pour un transport ordinaire, va être de $40 à $45 l'heure, pendant que le coût d'un camion s'établit entre $25 et $30. Alors, si vous prenez $15...

M. de Belleval: 25% de plus, en gros. M. Morissette: Au moins.

M. de Belleval: Au moins 25%. Autrement dit, en accordant la clause 75-25 aux tarifs de la commission, on se serait trouvé, d'après vous, à augmenter inutilement le coût de réalisation des routes au Québec.

M. Morissette: Indiscutablement.

M. de Belleval: Je laisserai mon collègue, M. le député de Charlevoix, commenter ces chiffres-là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Dans votre association, vous avez environ 600 membres qui emploient une centaine de milliers d'employés. Je ne sais pas combien.

M. Morissette: Exactement 600 membres.

M. Gratton: 25 000 ouvriers spécialisés. C'est sûr que vous êtes ceux qui avez le plus été affectés par la règle 75-25, depuis 1972. Outre le facteur coût, le mémoire les mentionne, en toute justice, pour la bonne compréhension de tous, pour-riez-vous nous résumer les autres problèmes que vous occasionne cette règle 75-25, à part le facteur coût.

M. Morissette: La clause 75-25 nous oblige à contracter avec des sous-traitants ou des fournisseurs de services. Elle nous oblige à contracter avec eux. Alors, c'est automatiquement une ingérence dans notre direction de chantier. On ne peut pas commencer quand on veut, on ne peut pas finir quand on veut, on ne peut pas toujours avoir le nombre de camions qu'on veut. Alors, grossièrement, c'est la direction du chantier qui est affectée. La direction du chantier étant affectée, ce sont des coûts qui sont supplémentaires à ça. Cela nous occasionne des frais supplémentaires; on refile la facture aux donneurs d'ouvrage. On veut vous signaler que ça coûte plus cher.

Etant donné que nous défendons ardemment la libre entreprise et la loi de l'offre et de la demande, évidemment, nous nous opposons à une clause semblable de secteur protégé. On ne voit pas pourquoi nous sommes soumis à des soumissions publiques et qu'on joue le jeu de la libre entreprise. Je ne vois pas pourquoi une partie

de nos travaux serait forcément accordée à une tierce partie. Encore là — on l'a répété, on l'a dit — on ne s'oppose pas à ce que... Nous sommes certains que des camionneurs rendent des services aux entrepreneurs et que si nous les remettons dans le cadre normal de la libre entreprise, ils vont continuer de rendre des services qui sont appréciés et les entrepreneurs vont continuer à les engager. Mais ils vont travailler dans les mêmes circonstances que l'entrepreneur, c'est-à-dire — j'ai déjà entendu cela au cours des travaux de la commission — qu'ils vont travailler aux conditions de l'entrepreneur, comme l'entrepreneur travaille aux conditions du donneur d'ouvrage et, si c'est le ministère des Transports, ils travaillent aux conditions du gouvernement, le gouvernement aux conditions du peuple et la roue recommence à tourner. Chacun est conditionné, à un moment donné, à quelqu'un d'autre.

M. Gratton: Les chiffres dont vous parliez tantôt au point de vue de l'augmentation des coûts que cela représente, je présume que vous incluez là-dedans ce qu'on appelle, quand on prépare une soumission, les impondérables, c'est-à-dire les perturbations possibles des chantiers à cause de la 75-25, toujours. Ce n'est pas en plus des chiffres que vous avez mentionnés tantôt.

M. Morissette: II est difficile d'inclure des impondérables dans nos soumissions, M. Gratton, des impondérables, comme des perturbations de chantiers. Si vous demandez au ministre des Transports actuellement, il va vous dire qu'actuellement les entrepreneurs ne mettent pas beaucoup d'impondérables dans leurs soumissions.

M. Gratton: Forcément, parce qu'il n'y a pas d'ouvrage, mais l'entrepreneur... Il n'y en a pas autant qu'il devrait y en avoir. Pour l'entrepreneur quel qu'il soit, que ce soit dans le domaine des routes ou dans celui de la construction industrielle, il y a toujours quand même un montant qui est prévu dans la soumission pour couvrir les impondérables jusqu'à une certaine limite. Le pourcentage de cela peut varier selon les conditions du marché. Quand un entrepreneur a des employés à ne rien faire, c'est sûr qu'il coupe un peu plus, il affile son crayon, comme on dit. Je présume que les chiffres dont vous avez parlé tantôt incluent cet aspect.

M. Morissette: Les chiffres dont j'ai parlé tantôt sont les coûts directs. C'est qu'un camion qui transporte...

M. de Belleval: ... de vos camions, etc. Cela comprend tout, au complet ou bien juste le coût d'opération sur place?

M. Morissette: Oui. Oui. Je vous ai dit tout à l'heure...

M. de Belleval: Est-ce que le coût d'administration et le bénéfice, sont compris dans les chiffres que vous m'avez donnés?

M. Morissette: Oui. Quand on vous a dit qu'un camion coûtait de $25 à $30 de l'heure à opérer, il est compris là-dedans.

M. de Belleval: Cela comprend l'amortissement, etc., et le coût d'opération de ce camion et le salaire de votre employé, de celui qui le conduit.

M. Morissette: Si je vous parle de $25 à $30 l'heure, c'est le...

M. de Belleval: C'est ce que ça vous coûte, incluant votre profit et vos frais d'administration.

M. Morissette: Pour le camion, mais peut-être pas pour les frais d'administration du contrat. Autrement dit, si le camion artisan coûte $40 l'heure et le camion coûte $25 ou $27 l'heure, ça ne comprend pas l'administration et le profit du contrat; cela comprend les coûts d'opération du camion.

M. de Belleval: D'accord.

M. Gratton: D'ailleurs, chez les entrepreneurs, il n'y a pas de problème. Mais on sait que la municipalité, elle, et même le ministère, dans le fond, va souvent faire des estimations de ce que ça coûte de se servir de ses propres camions, dans le cas d'une municipalité versus location de camion. Même si ce sont des contrats d'infrastructure d'égout et d'aqueduc, certaines municipalités vont préparer des soumissions et soumissionnent contre vos membres. Souvent, ce qui arrive, c'est que dans la location de camion, aussi bien que tout l'équipement de construction, on n'inclut aucun coût pour l'amortissement mécanique.

Quand on achète cinq camions au ministère — aussi bien que quand on le fait pour une municipalité — c'est un règlement d'emprunt, ce n'est pas une dépense d'opération. Dans la préparation de la soumission, souvent, c'est ce qui permet à des municipalités de se justifier elles-mêmes d'utiliser et de se procurer l'équipement, alors qu'en réalité, ça coûte beaucoup plus aux contribuables que si elle avait engagé un entrepreneur. Je ne dis pas cela pour faire la promotion de l'entreprise privée, mais c'est un facteur qu'on oublie souvent quand on fait des comparaisons de coûts dans le domaine public vis-à-vis du domaine privé.

Cela étant dit, j'aurais seulement une dernière question — parce qu'on sait que tout le monde voudrait terminer — je ne pense pas que votre mémoire le mentionne. Vous avez entendu plusieurs camionneurs, artisans ou autres, se plaindre de la situation qui est faite à certains de leurs membres qui sont placés devant des faillites — peut-être pas de vos membres, mais des entrepreneurs en construction de routes; j'ai moi-même plusieurs cas chez nous — et qui n'ont aucune garantie quant au paiement. Ils ont des garanties dans le cas où ils ont un bon de garantie, mais je parlais surtout des cas où des entrepreneurs, en soumissionnant ou en signant un contrat, fournissent un chèque de 10%, ce qui

n'est pas toujours suffisant pour couvrir les créances.

Est-ce que vous avez une suggestion à faire? On a suggéré, par exemple, dans certains milieux, que le ministère fasse des retenues jusqu'à ce que le ministère soit satisfait et que tous les locateurs de camions aient été payés. Sûrement, si cela devait être retenu par le ministère, vous auriez quelque chose à dire à ce sujet. Je vous demande de nous dire ce que c'est.

M. Morissette: D'abord, votre question m'étonne un peu parce que — les remarques qui ont été faites au cours des travaux m'ont étonné aussi — les grands travaux qu'on exécute, c'est généralement pour des organismes publics: le ministère des Transports, Hydro-Québec ou la SEBJ; on l'a dit, il y a des cautionnements d'exécution qui sont là pour garantir les gages, matériaux et services et si ce n'est pas ça, c'est un chèque de dépôt de 10% plus les retenues sur chaque décompte mensuel de 5% ou de 10%. Ce qui fait que lorsque le temps du transport est arrivé, la construction d'une route par exemple, il y a déjà des retenues assez appréciables sur les décomptes. De plus, je crois savoir que, officieusement, si un sous-traitant qui travaille pour un entrepreneur n'a pas été payé en temps et qu'il dénonce la situation au ministère des Transports, le ministère des Transports va s'occuper de lui, ou du moins va parler à l'entrepreneur et lui dire de régler ses affaires, parce qu'il va avoir des problèmes à se faire payer son décompte mensuel. Plus le fait que les camionneurs artisans sont payés généralement quinze jours après avoir rendu des services; c'est la coutume. L'entrepreneur est payé 60 jours après en général. 60 jours à partir du temps où le travail a été exécuté.

Vous avez toutes ces situations, qui font que les sous-traitants, les fournisseurs, les camionneurs sont quand même protégés. Il peut y avoir des cas de faillite ou je ne sais trop, il peut y avoir eu des exceptions, mais il me semble que ça ne peut pas être généralisé.

Je voudrais revenir un instant sur votre remarque; elle m'a plu d'ailleurs. On s'oppose éner-giquement à ce que les municipalités exécutent leur travail elles-mêmes, parce que si elles oublient de réclamer la dépréciation du camion, nous, les entrepreneurs, ne pouvons pas l'oublier. Si on l'oublie, on ne travaillera pas longtemps. Je suis bien content que vous ayez mentionné que les municipalités auraient peut-être avantage à faire réaliser leurs travaux par les entrepreneurs.

M. Gratton: C'est peut-être une déformation professionnelle chez moi, avant de mal tourner en 1972, en devenant député, je faisais de la location d'équipements et...

M. de Belleval: Ce n'est pas en devenant député que vous avez mal tourné. (18 heures)

M. Gratton: ... j'ai réussi à convaincre un certain nombre de municipalités, malheureuse- ment pas toutes. Je voudrais simplement préciser qu'effectivement on ne parle pas d'une généralité lorsqu'on parle de camionneurs artisans qui sont pris avec des factures impayées par des entrepreneurs, on ne parle peut-être même pas d'aucun de vos membres. Mais vous connaissez sûrement des entrepreneurs qui changent de nom à chaque contrat de route qu'ils obtiennent du ministère des Transports et qui laissent un grand nombre de camionneurs artisans avec leurs factures et qui, malheureusement, parce que le camionneur artisan n'étant peut-être pas aussi bien organisé que vos membres, au moment où il fait la réclamation au ministère des Transports on lui répond que toutes les retenues ont été payées et il ne reste plus rien. Et en cas de faillite, bien entendu, il n'y a rien à faire.

M. Morissette: Comme vous dites, ce doit être des cas assez particuliers, parce que je ne vois pas qu'un gars qui transporte avec son camion attende un an ou deux avant d'être payé. Généralement, au bout de quinze jours, le gars va voir l'entrepreneur et dit: Ecoute, si tu nous paies pas, on ne sera pas là la semaine prochaine. L'entrepreneur a besoin de camions et il paie. Ces gars-là doivent être très rares, j'imagine, aujourd'hui en tout cas.

M. Gratton: Ils sont tellement rares qu'on n'en a qu'un ou deux par année, mais c'est le député qui l'a et, éventuellement, le ministre.

Une Voix: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, avant de vous accorder la parole, compte tenu qu'il est passé 18 heures et qu'on devra prendre, comme membres de cette assemblée, une décision à savoir si on continue avec le groupe qui est devant nous ou si on revient après le souper. Oui?

M. Goulet: J'aurais une suggestion, M. le Président: qu'on puisse peut-être terminer avec le groupe qui est avec nous et qu'après on suspende peut-être une minute. J'aimerais qu'entre les membres on puisse discuter pour ce soir.

Le Président (M. Jolivet): Alors, nous allons terminer avec le groupe et, ensuite, nous...

M. Goulet: Une suspension d'une minute pour pouvoir...

Le Président (M. Jolivet): Je vais vous en donner deux. Donc, allez-y.

M. Wagner: La question a été soulevée que certains camionneurs ne sont pas payés. Je pense qu'il serait bon que le gouvernement définisse, surtout le ministère des Transports, ce qu'est un camionneur artisan. Est-ce que c'est la définition qui est donnée par la Commission des accidents du travail, selon laquelle c'est une personne qui

exploite elle-même son camion, ou si c'est un sous-traitant?

Premièrement, si c'est un salarié, automatiquement, il est protégé par les créances en cas de faillite. Si, par contre, il devient sous-traitant, il est protégé par le cautionnement, s'il y a un cautionnement. Ce serait très important, une fois pour toutes, dans votre ministère, de déterminer ce qu'est un camionneur artisan. Est-ce que c'est comme dans le décret? Certaines associations prônent qu'on devrait être considéré comme artisan. C'est celui qui travaille de ses propres mains.

M. Gratton: Excellent, je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Je vous ai vu sourire lorsque j'ai demandé la suspension. Je voudrais que vous compreniez que ce n'est pas pour ce que vous pensez, bien que...

Le Président (M. Jolivet): Non, c'est seulement que j'ai l'habitude, avec vous, qu'un petit projet de discours ici, souvent, est un long projet!

M. Goulet: Non, mais il est quand même préférable de prendre deux minutes pour aller aux toilettes que deux heures pour faire sécher ses pantalons, M. le Président.

Vous semblez demander une enquête sur les postes d'affectation. Est-ce que, dans les dix postes d'affectation, il y en a au moins un ou deux où vous n'avez pas de plainte à formuler ou si vous avez des plaintes à formuler contre les dix postes d'affectation?

M. Morissette: Je voudrais préciser. Je ne crois pas qu'on demande d'enquête sur les postes d'affectation là-dedans?

M. Goulet: Non! A nulle part?

M. Morissette: Je vais demander à Me Lali-berté de préciser, mais je ne crois pas.

Mme Laliberté: Non, je n'ai pas l'impression qu'il y a effectivement d'allégation d'enquête dans notre mémoire.

M. Goulet: Cela va bien avec les postes d'affectation, vous êtes pour le maintien des postes d'affectation?

M. Morissette: Cela ne veut pas nécessairement dire que ça va bien, mais on ne réclame pas d'enquête à ce niveau-ci.

M. Goulet: Est-ce qu'il y a des postes où ça va mieux que d'autres? Est-ce qu'il y en a au moins un où ça va très bien?

M. Wagner: II y a peut-être eu des incidents malheureux dans chaque poste, même celui de la région 06 où on dit que cela va bien. J'ai considéré que le poste 06 est un poste qui possède un très bon vendeur d'une très grande efficacité. Mais si on se rappelle bien, l'an passé, ils ont arrêté l'entrepreneur qui travaillait sur la route 20 qui avait droit au béton bitumineux et il n'avait pas le droit du tout d'utiliser les camions artisans. Ils ont retardé le déchargement du béton bitumineux — heureusement qu'il n'y a pas eu d'accident grave sur la route 20 parce qu'il y aurait eu des répercussions graves — deuxièmement, ils ont commencé à parader sur le chemin de Saint-Dominique sur deux voies à quelques milles à l'heure. Je considère que c'est par intimidation qu'ils ont obtenu d'utiliser les camions des postes d'affectation lorsqu'un entrepreneur n'a pas ses propres camions. Je pense que c'est à cause d'ingérence du bras, comme on dit, que le ministère des Transports a accédé à leur demande.

M. Goulet: D'accord. Une dernière question, M. le Président. A deux ou trois endroits, vous préconisez la libre entreprise, la loi de l'offre et de la demande. Cela se comprend pour quelqu'un qui produit des emplois et qui fait le travail que vous effectuez mais ce qui me surprend, c'est qu'après avoir défendu ces principes, dans vos recommandations 2 et 3, vous préconisez le gel des permis. Pourquoi, là comme ailleurs, la loi de l'offre et de la demande ne prévaudrait-elle pas?

M. Wagner: Si M. le député veut demander à Me Laliberté de répondre? Je pourrais préciser en partant que notre recommandation de geler le permis et de geler les transferts de permis, c'est tout simplement soumettre un moyen parce qu'on dit qu'il y a un problème énorme, il n'y a pas assez de travail et trop de camions. Alors, on suggère un moyen mais on n'est pas le messie que vous attendez; on n'a pas la réponse à votre problème. On veut seulement, si cela peut vous aider, vous suggérer un moyen; ce n'est pas plus que cela.

Peut-être que mon président me permet de faire une remarque. On a assisté à la commission parlementaire à laquelle 4000 camionneurs peut-être se plaignent d'être persécutés ou de manquer de travail et ils réclament un secteur protégé. Mais il ne faut pas oublier que, sur les 12 000 camionneurs qui ont des permis, il y en a 8000 qui ne sont pas satisfaits. Je pense que c'est une chose à considérer aussi. On se dit: Si par hasard il faut encore respecter les droits acquis, 75%-25%, que le ministère des Transports leur a accordés dans le temps, de grâce, laissons-leur ce qu'ils ont au ministère des Transports mais pas ailleurs, parce qu'il ne restera plus de travail pour personne. C'est cela le problème. Je pense qu'il faut être réaliste face au problème. Je ne peux pas concevoir d'augmenter la capacité d'un secteur protégé sans qu'elle ne soit au détriment des autres. J'espère qu'à la suite de cette commission les entrepreneurs ainsi que tout le monde ici auront une planification à long terme pour savoir exactement ce qu'on va faire dans l'avenir.

II ne faut pas se leurrer, nous, les entrepreneurs, sommes toujours sur la sellette. Doit-on acheter des camions ou ne pas en acheter? Si on n'avait pas de camions, ils pouvaient jouer un peu avec nos nerfs. Pas tous, je dis bien que ce n'est pas tous, parce que j'ai été moi-même longtemps dans une entreprise où on embauchait peut-être plus de 75% de camionneurs artisans. On n'a jamais eu de problème. Je parle de l'ensemble, à titre de directeur. Par contre, aussitôt que l'entrepreneur achetait des camions, woup! La 75-25 était respectée à 100%. Je pense qu'une planification à long terme est très importante. C'est quoi, la politique du gouvernement dans le secteur dont on discute ce matin?

Lé Président (M. Jolivet): Merci beaucoup. Oui?

M. Morissette: M. le Président, on vous remercie. On aurait aimé être à votre disposition davantage si cela avait été utile, mais si vous me le permettez, je demanderai à Me Laliberté de vous faire part d'une copie de télégramme qui avait été envoyé au ministre des Transports.

Le Président (M. Jolivet): Cela va.

Mme Laliberté: Pour le bénéfice des membres de la commission, c'est un télégramme qui est expédié par l'Association des employeurs de la Baie James et qui dit ceci: "M. le ministre, comme vous le savez sans doute, l'Association des employeurs de la Baie James regroupe, en plus de la Société d'énergie de la Baie James, Société de développement de la Baie-James, municipalité de la Baie James et Hydro-Québec, tous les entrepreneurs en construction oeuvrant à la Baie James qui utilisent les services de camionnage en vrac. Après consultation de son comité exécutif, l'Association des employeurs de la Baie James appuie le mémoire qui vous a été soumis par l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. L'Association des employeurs de la Baie James est d'accord avec les six recommandations qui vous sont soumises par l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, même si la clause dite 75-25 ne s'applique pas à la Baie James, car nous croyons qu'aucun secteur du marché du travail ne doit être protégé puisque, selon nous, les règles de la libre concurrence devraient s'appliquer à ce secteur comme elles s'appliquent aux autres secteurs d'activité économique. De plus, comme le souligne l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, nous touchons le coeur du problème du camionnage en vrac lorsque nous parlons du gel dans l'émission et du transfert du permis des postes d'affectation et surtout de la définition même du camionneur artisan. Nous croyons sincèrement que si des modifications devaient être apportées à la réglementation du camionnage en vrac, elles devraient l'être dans le sens proposé par l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du

Québec et cette industrie ne s'en porterait que mieux". Et c'est signé par M. Alcide Fournier, gérant général de l'Association des employeurs de la Baie James.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous vous remercions beaucoup. Suspension pour quelques instants.

Suspension de la séance à 18 h 10

Reprise de la séance à 18 h 12

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

Pour nous permettre de bien recevoir les deux autres groupes qui restent ainsi que l'ANCAl, après avoir discuté avec les représentants de l'Association nationale des camionneurs artisans, nous nous sommes entendus sur une procédure que nous définirons au retour, à 19 heures. Afin de permettre à chacun de prendre une petite bouchée, nous allons suspendre et nous reviendrons à 19 heures. Nous entendrons alors M. Claude Bourque, le Poste transport de vrac, région 08 Inc. ainsi que l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. Donc, à 19 heures.

Suspension de la séance à 18 h 13

Reprise de la séance à 19 h 7

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

Nous reprenons nos travaux. M. Claude Bourque est appelé. Auparavant j'aimerais vous lire un télégramme qui nous est parvenu qui se lit comme suit: Aux membres de la commission. Messieurs, contrairement aux allégations depuis trois jours, en ce qui concerne le Poste de courtage de la région 01 Inc., à l'effet que le poste d'affectation a préparé son mémoire en collaboration avec l'ANCAl, nous déclarons que toutes les conditions pour l'obtention d'une demande de permis ont été remplies depuis le 28 février 1980 et distribuées à tous les abonnés et présentées à la commission et au ministère des Transports par notre procureur, Me Jean-Claude Gagnon, de Rimouski. Je pense que c'est Jean-Claude, Jean-C. Gagnon, peu importe. Les services juridiques des procureurs de l'ANCAl envers les abonnés du poste sont les mêmes que ceux donnés par les procureurs de l'Association des entrepreneurs, soit des services individuels à leurs membres respectifs, rien de plus.

Le mémoire présenté à la commission n'a pas été connu par l'ANCAl avant le 26 août à sa présentation comme tous les autres. Il en va de même pour la demande de permis de poste.

L'ANCAI n'en a jamais pris connaissance.

Cela prouve que le seul obstacle à l'émission de notre permis de poste, c'est le refus par le poste de livrer une guerre ouverte à l'ANCAI. C'est vraiment regrettable. Merci quand même. Le Poste de courtage de la Région 01 Inc., par le président, Anicet Proulx, si je ne me trompe pas.

Est-ce que vous voulez approcher votre micro?

Camionneurs de la Moyenne-Côte-Nord

M. Bourque: Claude Bourque, Rivière-au-Ton-nerre, représentant les camionneurs de la Moyen-ne-Côte-Nord. Bonjour, M. le ministre, MM. les distingués membres de la commission parlementaire, mesdames et messieurs.

Je voudrais apporter une petite correction en partant. Je ne suis pas de la région no 08, mais de la région no 09, du secteur 31-98.

C'est une petite suggestion qu'on a à apporter vu qu'on ne connaît pas grand-chose dans les commissions parlementaires, dans le camionnage. C'est ce qu'on a cru bon de vous présenter.

La présente est pour vous donner un aperçu de la situation qui existe dans le domaine du camionnage en vrac dans le secteur 31-98. Nous désirons vous soumettre à ce sujet quelques demandes concernant ledit secteur. D'abord, une demande d'un sous-poste dans le secteur 31-98, ce qui permettrait de porter une attention toute spéciale à la réglementation d'en contrôler l'application et d'assurer la rentabilité.

Deuxièmement, pour nous rendre à notre travail, il nous faut parcourir des longues distances, ce que les camionneurs résidents sur place n'ont pas à défrayer. Nous demandons une heure rémunérée lorsque la distance à parcourir est de 40 milles.

Troisièmement, un minimum de trois heures payées lorsqu'un appel provenant d'une autre localité nous parvient pour effectuer du travail et que nos camions sont arrêtés à cause du mauvais fonctionnement de la machinerie, chargeuse ou mauvaise température alors que nous sommes obligés de payer pension en attendant l'ouvrage.

Quatrièmement, nous demandons un délai de 30 jours à tous les ministères pour les paiements qui nous sont dûs.

Cinquièmement, nous demandons au Bureau des véhicules de remettre une copie du permis à la Commission des transports.

Sixièmement, serait-il possible de savoir si le "break" est uniforme au Québec pour les camionneurs car certains ministères n'en paient pas.

Septièmement, nous demandons l'égalité par secteur dans les villes nordiques.

Huitièmement, une demande d'un taux différent kilomètre/tonne/heure, comme pour d'autres secteurs, car nous sommes parfois obligés d'attendre quatre à cinq jours pour les pièces venant de Québec parce qu'il n'y en a pas à Sept-lles et que le coût des pièces est très élevé. Je veux ajouter aussi que le carburant est plus cher chez nous qu'à Sept-lles. On le paie $0.30 le litre.

Espérant que vous prendrez nos demandes en considération, bien à vous, nous vous remercions.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre. Oui, M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, à titre d'information et pour le bénéfice des membres de cette commission, M. Bourque représente actuellement sept détenteurs de permis de vrac sur la Moyenne-Côte-Nord, entre Sheldrake et Hâvre-Saint-Pierre, et compte tenu que le mémoire fut préparé par ce groupe de camionneurs en vrac, je voudrais intervenir dès le début pour expliquer la situation actuelle.

Je voudrais surtout commenter la demande d'un sous-poste dans la région de Sheldrake et Hâvre-Saint-Pierre. Actuellement, ce district relève du sous-poste d'affectation de Sept-lles, mais cela couvre tout de même un assez grand territoire qui a une longueur d'à peu près 200 milles de côtes. Ces sept camionneurs voudraient obtenir un sous-poste mais j'aurais quelques questions à poser à M. Bourque en rapport avec ce sous-poste qui est demandé. Je vais toucher seulement à l'article 1 puisque les autres articles, 2 à 8, sont surtout des voeux faits pour les prochaines négociations avec la Commission des transports du Québec — si ma mémoire est bonne — tel que vous en avez discuté avec moi aujourd'hui. Je crois qu'il est important qu'on touche le point no 1.

Lorsque vous parlez d'un sous-poste, est-ce que vous voulez dire que ce sous-poste devrait couvrir de Sheldrake à Hâvre-Saint-Pierre ou de Sheldrake à Blanc-Sablon?

M. Bourque: On avait pensé de Sheldrake à Natashquan. On a eu des pourparlers avec les camionneurs de Natashquan et ils nous ont dit qu'ils nous donneraient leur appui. Présentement, on travaille de Sheldrake à Hâvre-Saint-Pierre.

M. Perron: Présentement, vous travaillez de Sheldrake à Hâvre-Saint-Pierre, ce qui fait sept détenteurs de permis de vrac, des artisans.

M. Bourque: Oui.

M. Perron: L'autre secteur dont vous parlez, c'est celui de Natashquan, Aguanish, l'Ile Michon, Pointe-Parent, où il y a aussi sept détenteurs de permis de vrac. Donc, pour un sous-poste d'affectation, vous présumez qu'avec environ quatorze membres, ce serait assez pour faire vivre un sous-poste. Je me pose de sérieuses questions là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous approcher votre micro un peu plus parce qu'on a de la difficulté à vous entendre? Merci. (19 h 15)

M. Bourque: Oui. Nous ne travaillons que quatre ou cinq mois par année. Avec quatre ou cinq mois par année, avec ce qu'on paie à l'extérieur, le

temps qu'on travaille, on peut avoir assez de revenus, si on peut dire, tous ensemble pour avoir du personnel pour s'occuper de nous. Après ça, on peut tout faire nous-mêmes puisqu'on ne travaille pas.

M. Perron: D'accord. Merci, M. Bourque. J'aurais une autre question à vous poser. Avez-vous discuté antérieurement avec le sous-poste d'affectation de Sept-lles pour qu'on puisse vous donner un genre de district où vous auriez priorité pour les sept camions ou encore un genre de protocole d'entente qui pourrait être signé entre les deux parties parce qu'on sait qu'ils ont le droit de signer des protocoles d'entente avec des groupes de camionneurs?

M. Bourque: On n'a pas eu de protocole d'entente avec Sept-lles.

M. Perron: Non, mais avez-vous négocié avec eux?

M. Bourque: Oui, on a essayé de négocier, mais dans ce temps-là ils négociaient pour eux-mêmes, pour les sous-postes qu'ils n'avaient pas. Donc, ils ne pouvaient pas...

M. Perron: Bon! D'accord. Merci, M. Bourque. Je voudrais seulement terminer là-dessus, M. le Président, ainsi que M. le ministre. Lorsque M. Bourque mentionnait qu'il y avait des coûts énormes en rapport avec le carburant, les matériaux et surtout les pièces pour réparer les camions, c'est effectivement vrai à cause de la distance que doivent parcourir ces pièces et à cause aussi du fait que les magasins de pièces n'existent pas dans le secteur de la Moyenne-Côte-Nord. Toutes les pièces doivent venir de Sept-lles, de Montréal et, très souvent, ça doit venir par avion. Cela cause énormément de préjudice à ces camionneurs. Il y aurait peut-être une possibilité d'examiner les tarifs éventuellement pour voir si on ne pourrait pas accrocher quelque chose pour ces camionneurs afin de leur permettre de mieux vivre avec les bénéfices du camionnage en vrac. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Oui. Effectivement, la plupart de vos demandes s'adressent, au fond, à la Commission des transports dans le cadre de l'exercice de ses responsabilités en ce qui concerne la fixation des taux. Je suis certain, comme l'a dit mon collègue de Duplessis, que la commission se fera un devoir d'examiner ce genre de questions. S'il y a des points aussi qui relèvent de nous, nous allons les examiner et nous allons essayer d'apporter une réponse à vos demandes. Merci beaucoup d'avoir participé à notre commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, pourrais-je demander à M. Bourque — peut-être l'a-t-il dit, mais je n'ai pas saisi — combien de camionneurs il représente ce soir?

M. Bourque: Sept.

M. Gratton: Sept? Parfait. Ah oui! D'ailleurs, vous l'aviez dit. Je me le rappelle maintenant. Je vous dirai simplement que le ministre a raison de dire que plusieurs de vos demandes relèvent de la commission. Nous, en tant qu'Opposition, on a un rôle: c'est de fournir une voix à ceux qui n'en ont pas et qui voudraient parler au gouvernement. Je vous invite, si vous n'obtenez pas les réponses que vient de vous promettre le ministre, à vous adresser à nous et on vous aidera à tâcher de les obtenir. Je vous remercie de votre témoignage.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Bourque: Merci beaucoup.

M. Perron: Je sais que ça ne se fait pas en commission parlementaire, mais je voudrais dire ceci: C'est qu'ils ont aussi un représentant dans le comté de Duplessis, qui s'appelle le député de Duplessis, qui a été élu le 15 novembre 1976, et je suis en très bon contact avec les gens de la Moyenne-Côte-Nord, de la Basse-Côte-Nord aussi, ainsi que de la Haute-Côte-Nord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Contrairement à mon collègue de Gatineau, M. le Président, il n'y aura pas de commercial.

Poste transport de vrac région 08 Inc., et sous-poste

Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite le Poste transport de vrac région 08 Inc., en collaboration avec le sous-poste de la région 08, représenté par M. Gérard Thiffault, directeur général, à venir à l'avant et à présenter les personnes qui l'accompagnent. C'est le document 29.

M. Langevin (Georges): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés et membres de la commission parlementaire, je me présente. Je suis Georges Langevin, président du Poste transport de vrac de la région 08 Inc. Ici, à ma table, il y a mon conseil d'administration. Si vous le permettez, M. le Président, je les présenterai l'un après l'autre.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît.

M. Langevin: A ma gauche, c'est André Moris-sette, secrétaire-trésorier du poste. De l'autre côté, à l'autre bout, c'est M. Emilien Champagne, de Témiscamingue. De ce côté-ci, c'est M. Robert

Noël, administrateur au poste 08 qui représente l'Abitibi-Est.

Ensuite, nous avons le directeur du sous-poste d'Abitibi-Est en la personne de M. Georges Genesse. Il y a Me Chouinard qui est ici pour nous représenter auprès de la commission. Je pense que je vais passer la parole à Me Chouinard. Je vous remercie, M. le Président.

M. Chouinard: Merci, M. Langevin. D'abord, M. Thiffault s'excuse de ne pas être ici aujourd'hui pour des raisons personnelles et, en l'absence de M. Thiffault, c'est M. Georges Genesse qui va nous donner lecture des recommandations au mémoire. On va faire abstraction des deux pages de présentation du mémoire. Maintenant, quand je dis des raisons personnelles dans le cas de M. Thiffault, c'est que M. Thiffault a accepté un poste de directeur d'un établissement pour personnes âgées dans la région de Montréal et, dans les prochaines semaines, il ne sera plus à l'emploi du Poste d'affectation de la région 08 Inc. M. Thiffault nous a demandé de le représenter et de donner lecture du mémoire devant la commission parlementaire.

M. Genesse: Règlements du camionnage en vrac, situation existante et situation désirée. Le fait pour le ministère des Transports d'avoir permis à certains transporteurs de type L d'acquérir des permis de transport de vrac VR et d'en faire des LV permet à ces derniers de s'approprier certaines matières qui faisaient partie auparavant des matières du transport de vrac et enlève, par le fait même, des possibilités de transport à nos camionneurs sans que, pour autant, les transporteurs de vrac aient eu quoi que ce soit en retour ou en échange.

Situation suggérée. Il serait très souhaitable que les transporteurs de transport général ne puissent bénéficier, à l'avenir, de tels avantages, qu'ils transportent les matières pour lesquelles leur permis initial L leur a été octroyé ou qu'une certaine partie des matières appartenant au transport général soit dorénavant réversible et pouvant être transportée aussi par les transporteurs VR. Exemple: tuyaux d'aqueduc, ciment sur palette, etc., pour compenser ce dont les transporteurs en général se sont déjà emparé. Sinon, il devrait y avoir des réglementations de certaines matières générales et de certaines matières de vrac.

Le règlement sur le camionnage en vrac parle d'association coopérative. L'emploi de ces mots représente un danger de confusion et de retour possible à une multitude d'associations de camionneurs comme notre région, par exemple, a déjà connu.

Situation désirée. L'emploi des mots "association coopérative" devrait être enlevé du règlement sur le camionnage en vrac. Ce même règlement ayant comme volonté de créer et de développer une structure de postes et de sous-postes, aucune confusion possible ne devrait nourrir les espoirs de ceux qui pourraient vouloir l'affaiblissement ou, pire encore, la disparition de cette structure.

Les associations de camionneurs ont certainement fait beaucoup pour ces derniers dans le passé, mais le règlement sur le camionnage en vrac a comme base les postes et les sous-postes, et c'est cette structure qu'il faut absolument mettre de l'avant et ce, sans équivoque possible.

Présentement, les transporteurs de vrac ont la liberté d'adhérer ou non au poste de leur région et au sous-poste de leur zone.

Situation désirée. Tous les détenteurs de permis VR devraient avoir l'obligation d'adhérer au poste de leur région. Les raisons sont les suivantes: le travail des postes bénéficie à tous les détenteurs de permis VR d'une région, que ces derniers soient ou non abonnés au poste de leur région; répartirait, de façon équitable, les cotisations que les abonnés ont à verser à leur poste pour le maintenir et le développer; diminuerait, par cette participation obligatoire de tous les détenteurs de permis VR, la cotisation des camionneurs qui sont présentement abonnés à leur poste. Cependant, il pourrait y avoir une cotisation moindre pour les détenteurs de permis qui sont seulement abonnés au poste pour la cotisation du poste.

En ce qui touche les sous-postes, les camionneurs de type VR devraient avoir la liberté d'adhérer ou non au sous-poste de leur zone et, par le fait, la proportion de 2/3 présentement exigée pour former un sous-poste devrait être enlevée complètement.

Dans le règlement sur le camionnage en vrac, il est fait mention de transporteurs qui transportent pour leur compte propre.

Situation désirée. Les mots "compte propre" ne sont pas clairement définis dans le règlement. En effet, c'est la confusion totale qui règne dans l'application de la sémantique de ces mots. Il appert qu'il suffit de devenir entrepreneur pour pouvoir transporter des matières qui appartiennent aux titulaires de permis VR. Cette compétition déloyale pénalise ces derniers et diminue encore une fois leur champ d'activité.

La raison d'être des postes ne permet pas à ces derniers d'agir dans les situations mettant en cause le bien de leurs transporteurs. Qu'il soit noté tout le domaine du transport illégal, la lenteur des transferts de permis et les coûts s'y rattachant, la non-application des taux décrétés par la Commission des transports du Québec par certains requérants de services, etc.

Situation désirée: Le rôle des postes devrait être précisé et le champ de leurs activités devrait être agrandi. Un poste devrait avoir, entre autres, la possibilité de faire les représentations nécessaires auprès des organismes habilités à faire respecter les règlements si, un jour, le gouvernement vient à en instaurer, avec pouvoir de servir immédiatement.

Un poste pourrait aussi simplifier, diminuer les délais et coûts inhérents aux transferts de permis en agissant pour et au nom de la Commission des transports du Québec à cet effet ou, tout au moins, en collaboration avec cette dernière.

Un poste devrait avoir au moins le suivi

lorsqu'il dépose une plainte relativement à tout le domaine du transport illégal auprès des instances reconnues à cette fin, c'est-à-dire que ce même poste sache, connaisse les conclusions de cette même plainte.

Les postes devraient être reconnus devant les organismes en place qui ont les pouvoirs de faire respecter les taux décrétés par la Commission des transports du Québec. De plus, il va de soi que les postes devraient être les seules instances reconnues dans la présentation de demandes de fixation de taux pour les détenteurs de permis VR.

Les postes devraient pouvoir s'impliquer davantage dans la circulation de permis additifs d'une région à une autre afin de protéger le plus possible le travail des camionneurs de chaque poste en particulier.

En accordant de telles possibilités aux postes, le ministre donnerait vraiment au vrac ce qui lui revient et le tout pourrait être contrôlé et coordonné par la Commission des transports du Québec. De plus, les postes deviendraient vraiment des organismes représentatifs et défenseurs des transporteurs de vrac de leur région respective.

Présentement, la Commission des transports du Québec a la responsabilité de l'application du règlement sur le camionnage en vrac.

Situation désirée: La Commission des transports du Québec devrait continuer à jouer le rôle qu'elle joue présentement. Cependant, des pouvoirs devraient lui permettre d'agir de façon complète, rapide et fonctionnelle afin de pouvoir corriger certaines situations pénibles pour les transporteurs de vrac déjà mentionnés dans le présent mémoire, d'une part, et d'autre part, afin de pouvoir améliorer certaines situations, certains services offerts aux transporteurs. En résumé, la Commission des transports du Québec devrait avoir non seulement la responsabilité de l'application du règlement et de la dispensation des services, mais devrait avoir tous les moyens pour réaliser ces mandats.

Présentement, les secteurs de travail sont tout à fait insuffisants pour assurer aux transporteurs de vrac le minimum de rentabilité de leur entreprise. Certains ministères du gouvernement du Québec, par exemple, ont ou se font le devoir de s'en remettre aux postes et aux sous-postes d'une région et d'une zone pour leurs besoins de camionnage en vrac. Ils sont cependant trop nombreux. Cette façon de faire diminue encore davantage le travail des transporteurs de vrac et permet toutes sortes d'irrégularités de la part des requérants de services.

Situation désirée: Tous les ministères des gouvernements, provincial et fédéral, tous les organismes gouvernementaux et paragouvernemen-taux, toutes les municipalités, les comités de citoyens, les conseils de comté de même que toutes les compagnies bénéficiant de subventions gouvernementales devraient avoir l'obligation de s'en remettre aux postes et aux sous-postes pour leurs besoins de camionnage en vrac, ainsi que les compagnies obtenant des contrats des gouvernements fédéral, provincial, municipal ou tout orga- nisme paragouvernemental ou compagnies subventionnées (forêts) devront obligatoirement faire la demande aux postes et aux sous-postes dans la mesure des camions disponibles dans ces mêmes postes et sous-postes.

Les détenteurs de permis VR étant des contribuables et ayant à payer des coûts d'immatriculation pour leurs camions, il serait juste et raisonnable que les instances susmentionnées en tiennent compte prioritairement relativement à leurs besoins de transport de vrac.

Présentement, les conditions de travail des transporteurs de vrac sont trop souvent à la merci des requérants de services en ce qui touche les commodités à offrir aux transporteurs, les heures de travail, les conditions de chargement et de déchargement, et le reste. Mais, ce qui est pire encore, c'est que certains requérants de services prennent trois ou quatre mois et même davantage après le début du travail des camionneurs en vrac pour leur verser une partie de ce qui leur est dû. Cette situation est intolérable car on demande à des petits transporteurs de financer ces mêmes contrats et ces derniers doivent en défrayer la note en payant des coûts d'intérêts élevés pour pouvoir rencontrer leurs obligations.

De plus, ce sont les ministères du gouvernement du Québec de même que certaines sociétés publiques et parapubliques telles que HydroQuébec qui sont les plus fautifs en ce sens. (19 h 30)

Le gouvernement du Québec devrait assurer aux détenteurs de permis VR des conditions de travail minimales décentes. Il est bien entendu que les transporteurs doivent se plier à certaines exigences des requérants de services mais de là à être à la merci de ces derniers, il y a toute une différence. En ce qui touche le paiement des sommes dues aux camionneurs par les requérants de services, ces derniers devraient avoir la stricte obligation de verser les sommes d'argent dues aux camionneurs 30 jours après le début des travaux des camionneurs en ce qui concerne la première paie et, par la suite, à toutes les semaines. De cette façon, les transporteurs pourraient garder leurs minces bénéfices au lieu de les remettre aux différentes institutions prêteuses.

Le présent mémoire avait pour but de démontrer un certain nombre de situations pénibles avec lesquelles les détenteurs de permis VR ont à composer. Il est bien certain que la perfection en ce sens est de la rêverie mais tout au moins, si le gouvernement qui est le principal requérant de services faisait les efforts nécessaires à la correction des anomalies graves, il aurait certainement beaucoup plus de facilités d'exiger autant des autres requérants de services. Que justice soit donnée aux camionneurs par des conditions de travail acceptables avec un revenu décent par la protection de leurs droits et le vrac s'en portera beaucoup mieux.

Ceci constitue nos principales revendications mais si le gouvernement ou le ministère des Transports du Québec est décidé à appliquer et à faire respecter son règlement, il y aurait d'autres

modifications d'ordre technique à apporter à ce règlement dans un avenir très rapproché; il serait trop long de les énumérer dans ce mémoire devant cette commission. Le gouvernement a réglementé le vrac et maintenant il doit respecter et faire respecter ce même règlement en ne reconnaissant que des structures de postes et de sous-postes, en donnant toute l'aide nécessaire à l'établissement et au développement de cette même structure, en faisant en sorte que ces mêmes postes et sous-postes soient les vraies, les seules instances représentatives du vrac.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. de Belleval: Plusieurs de vos demandes recoupent celles d'autres intervenants. Je ne veux donc pas y revenir, non pas que je ne les trouve pas intéressantes ou importantes mais tout simplement parce qu'on a épilogué assez longuement là-dessus. Il y a un point que je voudrais tout de même soulever. Au fond, vous aussi réclamez des secteurs protégés plus vastes. Vous réclamez aussi que différents organismes très nombreux passent exclusivement par le poste d'affectation. Je comprends cette demande. Si j'étais à votre place, sans doute que je ferais la même demande mais le problème, c'est que je suis obligé de m'occuper de l'ensemble de la population, l'ensemble des citoyens et pas simplement d'un groupe en particulier. Comment pouvez-vous justifier les demandes que vous faites? Comment pouvez-vous concilier cela avec le fait qu'il y a d'autres entrepreneurs, d'autres artisans dans le domaine qui, eux aussi, ont le droit de gagner leur vie, qui eux aussi paient des taxes, comme vous le dites, et qui, par conséquent, ont eux aussi droit de concurrencer pour aller chercher des travaux et obtenir des travaux de la part des différents gouvernements, groupes de citoyens, etc.? Comment conciliez-vous cela?

M. Genesse: Premièrement, on concilie cela parce que le ministère des Transports a décidé d'avoir un règlement et lorsqu'il y a un règlement, on s'imagine qu'il est là pour quelque chose. Si on a des secteurs de travail, il va être question des taux, on est prêt à concurrencer sur beaucoup de choses mais lorsqu'on est complètement à la merci des entrepreneurs, les artisans dont vous parlez qui ne sont pas dans le sous-poste, pour quelle raison ne seraient-ils pas dans le sous-poste? Si vous instaurez un système, il devrait être bon pour la catégorie de gens qui sont dans ce domaine.

M. de Belleval: Oui, mais vous n'oubliez pas que, de toute façon, ceux qui ont plus de quatre camions ne peuvent pas être membres du poste.

M. Genesse: Là-dessus, M. le ministre, nous n'avons pas fait mention de cela. Je peux vous dire que notre position serait que celui qui a plus de quatre camions, s'il en a cinq, qu'il les mette dans le poste ou le sous-poste comme les autres.

M. de Belleval: II va faire la rotation comme tout le monde?

M. Genesse: II paiera pour ses cinq camions. Le matin où il aura cinq opérateurs assis sur l'établi dans son garage, ce sera ses problèmes. Cela n'est pas notre problème, il réglera son problème lui-même mais on n'a pas peur de la priorité au premier camion. Chez nous, on n'en a pas peur.

M. de Belleval: Non, vous n'avez pas peur mais celui qui a cinq camions va avoir peur en batêche.

M. Genesse: Pourquoi va-t-il avoir peur?

M. de Belleval: Je n'ai pas besoin de dessin, il y en a qui vous en ont fait. Ce qui arrive quand on a plus que un ou deux camions, le système de poste, de toute évidence, avec sa rotation, ne peut pas permettre à un petit entrepreneur... On ne parle pas d'un millionnaire, d'une multinationale. On parle de gens comme vous et moi qui ont travaillé fort — je ne parle pas de moi, je parle de vous — qui ont réussi à se ramasser de l'argent. Ils ont eu le malheur d'acheter plus d'un camion. Ils en ont acheté trois, quatre, cinq ou dix et avec votre système, il est bien évident que ces gens seraient coincés bien raide.

M. Genesse: Ils seraient coincés. Ils auraient la possibilité... Il reste autre chose à l'extérieur parce que les travaux du gouvernement... Si vous prenez les membres... Nous ne parlons pas de clause 75-25.

M. de Belleval: Vous dites les travaux du gouvernement, mais quand vous avez... J'ai lu votre liste et il ne reste plus beaucoup de travaux quand vous avez enlevé les groupes de citoyens, les gouvernements fédéral et provincial, les municipalités. Finalement, je ne sais pas qui va leur donner du travail.

M. Genesse: Oui, mais dans notre mémoire, on ne parle pas de clause 75-25. On dit qu'ils demandent les camions aux postes. Si on a 50 camions dans un sous-poste, on ne pourra pas en fournir 200. Si les autres camions sont à côté, quand on aura fini de fournir nos camions du sous-poste, les autres viendront remplir le contrat. Mais quand vous avez peur de celui qui a cinq camions qui embarque avec nous, ce devrait être nous qui devrions avoir peur de celui qui a un camion et on n'a pas peur qu'il vienne. S'il a cinq camions, ils auront le droit d'aller au travail chacun leur tour comme nous, pas plus, pas moins.

M. de Belleval: Je comprends bien, mais à toutes fins pratiques, ce que vous demandez, ça aboutirait à la ruine de ces gens parce qu'on voit déjà que même à quatre camions, le système ne peut pas fonctionner. La preuve qu'il ne fonctionne pas, c'est que les camionneurs artisans eux-

mêmes qui possèdent quatre camions se mettent à les transférer à d'autres gens pour en faire des premiers camions. C'est ce que plusieurs intervenants sont venus dire tantôt: tout le système des deuxième, troisième ou quatrième camions qui sont transformés en premiers camions; et ce serait un système répandu. Avec votre système, ce serait encore pire. Ce serait le dixième camion qui deviendrait le premier camion.

Tout ça pour dire que, d'accord, vous avez donné votre réponse. Je vous comprends. Vous continuez à vouloir avoir toute la tarte, mais le problème, c'est que j'ai beaucoup d'enfants. Je suis obligé de séparer la tarte.

M. Genesse: II n'y a pas de problème. On sait qu'on ne l'aura pas toute, mais ça ne coûte rien de la demander.

M. de Belleval: Autrement dit, un gars a le droit de s'essayer. D'accord. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, comme le ministre, je remarque que les revendications que vous faites rejoignent plusieurs de celles qu'on a entendues de d'autres postes d'affectation. Je remarque, en particulier... Je posais la question à l'Association des constructeurs de routes plus tôt, à savoir dans quelle situation ou dans quelles conditions des camionneurs artisans pouvaient se retrouver en défaut de paiement. Je remarque, à la page 12 de votre mémoire, que vous dites que ce sont les ministères du gouvernement du Québec, de même que certaines sociétés publiques et parapubliques telles Hydro-Québec qui sont les plus fautives en ce sens par rapport aux paiements. Forcément, on ne parle pas de n'être jamais payés, mais on parle d'être payés en retard. Il y a une question qui me vient tout de suite à l'esprit. Les camionneurs artisans ont-ils droit, comme les autres fournisseurs du gouvernement, à un remboursement d'intérêts pour des paiements en retard?

M. de Belleval: Oui, ils ont droit à un versement d'intérêts qui est rendu, je pense, actuellement à 15%.

M. Gratton: Après 30 jours? M. de Belleval: Après 30 jours. M. Gratton: Sur demande?

M. de Belleval: Sur demande... Je ne sais pas s'il y a un déclic dans l'ordinateur qui se fait pour que ce soit automatique...

M. Gratton: Non.

M. de Belleval: ... ou bien s'il faut que la personne le demande, mais en tout cas, disons qu'on ne lésine pas.

M. Gratton: Que je sache, ce n'est pas automatique, justement. C'est peut-être ce qui fait qu'il y a peut-être beaucoup de fournisseurs, incluant les camionneurs artisans, qui ne savent pas que c'est disponible sur demande, un remboursement d'intérêts. Forcément, ça ne règle pas le problème complètement, mais au moins ça rend une certaine justice. Je dois reconnaître — ce n'est pas souvent que je dis que le gouvernement a fait de bonnes choses, surtout celui-là — que c'est une des bonnes choses qu'il a instituées. A condition que les gens qui pourraient y recourir en soient informés. En tout cas, si vous n'étiez pas informés, là, je vous en informe.

Quels sont les autres? Forcément, vous parlez des entrepreneurs, j'imagine, qui ne paient pas et qui...

M. Genesse: Certaines compagnies, les constructeurs de routes, certains — on ne veut pas dire en général, on ne généralisera pas ici, on n'est pas venu pour ça, d'ailleurs — certains constructeurs de routes, on a de la difficulté avec eux. Nous avons des problèmes. Tous les moyens sont bons.

Dans le règlement no 112, dans le moment, un article dit qu'il faut produire un compte au requérant de services, on produit un compte. Chez nous, on a deux secrétaires dans le bureau qui s'occupent simplement de facturer les compagnies. Ce sont les camionneurs qui paient cela. Quand la facture arrive à la compagnie, il y a des compagnies pour qui c'est parfait. Dès qu'il y a une petite erreur, les gens entrent en contact avec les secrétaires, ils s'entendent et ils paient. Les autres, c'est envoyé par autobus, par Purolator et, pendant ce temps, la paie n'entre pas, parce qu'il manque un kilomètre, il y a un kilomètre de trop ou la distance n'est pas bonne. Tous les moyens sont bons. Dans le moment, on est en cour avec un; on l'a actionné et on va le traîner jusqu'à ce qu'il ait un lacet de bottine à lui. On a saisi de l'argent au gouvernement l'automne passé. C'est avec ce genre d'entrepreneur qu'on ne voudrait pas avoir affaires. Il y a des bons entrepreneurs comme il y a des bons camionneurs. Mais on est pris. Quand ils ont un contrat, il faut travailler pour eux et, ensuite, quand la paie n'entre pas, bloquer les chantiers. Le ministère n'aime pas cela et on devient des méchants garnements. Quand il n'entre pas de nourriture dans le frigidaire, les enfants n'aiment pas tellement cela non plus. On est à la merci de beaucoup de gens qui ont le contrôle sur notre industrie et les moyens de recours... Pour ma part, je suis allergique aux avocats. Puis, ils disent: Vous avez les moyens légaux, prenez des avocats.

M. Gratton: Le ministre aussi. Excusez-moi, mais en ce sens, le ministre aussi l'est un peu.

M. Genesse: Sur ce côté-là, on pourra s'entendre. C'est déplorable de se faire dire par la commission des taux qui est instaurée par le ministère des Transports, qui est située sur le boulevard Hamel... Cela n'a pas de pouvoir d'agir. Les gens nous disent, quand on leur dépose des plaintes: Prenez les moyens légaux. On demande

au ministère d'instaurer des organismes qui pourront faire cela au lieu que ce soit les avocats. Les avocats vont se trouver des causes. Ils vont en faire avec une feuille blanche. Il n'y a pas de problème, ils vont vivre. Mais je ne veux pas qu'ils vivent du sang des camionneurs et de l'argent des camionneurs plus qu'il ne le faut. Cela a été dit et cela fait longtemps que je le dis. On ne veut pas qu'un gouvernement soit complice de nous pousser dans les pattes de ces organisations-là. Il devrait y avoir moyen, avec un ministère — vous avez un règlement — de dire: Cela va agir dans tant de temps, cela va se faire et cela ne coûtera rien. On porte la plainte, le poste porte la plainte et cela débloque. C'est cela qu'on voudrait qu'il se fasse. On devient, avec l'entrepreneur, en méchants termes. Il ne paie pas, on lui téléphone. Cela travaille mal. Les compagnies qui nous paient, il n'y a pas de problème, on va passer par-dessus beaucoup de choses si notre paie arrive.

M. Gratton: Je prends très sérieusement en note ce que vous me dites, de façon très sérieuse, mais je me permettrai une boutade. Vous n'avez pas remarqué comment les oreilles de votre confrère de gauche ont rougi tantôt.

Une dernière question, M. le Président. Dans votre région, on a entendu des postes d'affectation venir nous dire, au cours des trois derniers jours — la plupart nous l'ont dit — il y a trop de camions chez nous pour l'ouvrage qu'on a à faire. Par contre, on a entendu quelques exceptions nous dire le contraire. Quelle est la situation chez vous? Est-ce qu'il y en a trop de camions, s'il n'y en a pas assez ou si le nombre que vous avez présentement vous apparaît répondre à la demande normale actuellement?

M. Genesse: Dans la région 08, tout le monde le sait et toute la province, dans le moment, on ne dit pas qu'il y a trop de permis VR, mais il y a trop de transporteurs illégaux, de F. Depuis 1975 et 1976, les premières années, ils ont eu peur. Pour 1973, les F ne sont pas sortis. Quand ils ont vu que les règlements n'étaient pas respectés, que les règlements n'avaient pas de dents, qu'ils avaient le temps d'user un camion avec un F avant que la première infraction de $50 arrive, en 1976, plusieurs camionneurs ont commencé à acheter des camions. Dans notre région comme dans plusieurs autres, on a porté des plaintes aux agents du ministère, ils ont fait des constatations, mais ils constatent et ils constatent, et le camionneur transporte quand même. Même avec les transporteurs illégaux, à certaines périodes, dans la région 08, on peut dire, si on veut être honnête, qu'on a été une région depuis quelques années, par rapport aux travaux de la Baie James, de la forêt, qui n'a pas manqué d'ouvrage tellement. Mais il y a eu des périodes, le printemps, l'automne — c'est comme partout ailleurs, avant que les contrats ne débutent... En période d'été, on a toujours eu des camionneurs qui sont venus de l'extérieur. (19 h 45)

II y a une chose que je dois dire ici: Les régions devraient en prendre connaissance et elles devraient au moins essayer de faire ce qu'on a fait. Si la région 08, en 1970, avait fait, comme beaucoup de régions ont fait, quand le projet de la Baie James a été lancé, on aurait peut-être, dans la région 08 — il y a 750 à 800 VR — 3000 VR. Mais on a tenu dans la région 08 par tous les moyens possibles. Il n'y a pas de danger qu'on se fasse actionner, c'est passé, mais il n'est pas toujours légal de dire aux gens: Ne vous achetez pas de camions parce qu'il n'y aurait plus de mineurs dans les mines, ils seraient tous sur la terre. On a tenu à cela. On faisait venir des permis de l'extérieur et on a alimenté la région de cette façon. Mais il y a d'autres régions aujourd'hui qui sont prises avec le problème. Elles ont trop de camions. Les cultivateurs qui ont 150 vaches, comme cela s'est dit, ont sorti les camions de derrière la grange, ils ont mis cela sur la route. Certains mouvements ne se sont pas occupés de surveiller cela et aujourd'hui ils sont pris avec. Mais, dans la région 08, ce n'est pas le cas. Le cas qu'on demande au ministère de régler de façon urgente, c'est qu'il arrête le transport illégal. On fera venir des gens de l'extérieur avec des VR et on sera très heureux de cela. On le fait, d'ailleurs.

M. Gratton: Je vous remercie. S'il y a une chose, en passant, dont je me suis convaincu au cours des trois derniers jours, c'est qu'effectivement le règlement 12 n'a pas été respecté, ni le 112. En supposant que le gouvernement veuille le faire respecter — et je suis sûr que comme tout gouvernement, il va vouloir finir par le faire respecter — il reste à savoir si le règlement devrait être plus complet ou plus compliqué ou plus simple possiblement de façon qu'on puisse le faire respecter. On peut bien avoir le règlement le plus parfait qui soit sur papier et dans les structures, mais, si la volonté et, en fait, la possibilité de le faire respecter n'existe pas, on perd tous notre temps.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Rapidement, M. le Président. Vous demandez au ministère des Transports de favoriser le développement des postes et des sous-postes. Mais vous aimeriez que tous les camionneurs soient obligés d'adhérer aux postes, mais pas nécessairement aux sous-postes. Pourquoi?

M. Genesse: C'est officiel. Le poste régional dans l'ancien règlement, c'est lui qui avait le permis de courtage. Avec le nouveau règlement, le courtage se fait par les sous-postes. Donc, nous autres, on a pour optique de dire: Le poste régional devrait voir aux problèmes — d'ailleurs, il le fait — de la collectivité régionale. Les avocats, eux, sont encore à l'université et ils entrent dans le Barreau. Ils se protègent, eux. Les médecins entrent dans le Collège des médecins. Nous

autres, on prétend qu'un camionneur qui a un VR dans une région, bénéficie du poste d'affectation qui plaide les taux, voit à faire arrêter les transports illégaux. A ce moment, ces gens ont une responsabilité envers le poste d'affectation. Ils bénéficient des services du poste d'affectation.

La question de dire que c'est obligatoire, les postes d'affectation, c'est cela. Celui qui ne veut pas aller sur les contrats — en français, ce sont les répartiteurs — se faire "dispatcher", serait libre de ne pas venir aux sous-postes. Quand on le rencontrerait sur la route, on saurait qu'il a payé le même prix. Il est payé pour transporter, mais il a payé sa part. C'est presque des miracles de tenir des organismes en place. On n'a pas de formule Rand, on n'a rien. C'est par la volonté des gens, des camionneurs. En arrière, on traîne un certain nombre de types qui se servent de ceux qui sont dans le poste, ils exploitent ces gens. En plus des entrepreneurs qui nous exploitent et, souvent, du gouvernement, on a de nos semblables qu'il faut traîner et il faut faire accepter à nos membres de dire: "Coudon", payez.

Si tous les VR étaient dans le poste, il y aurait une justice sociale au départ. Les camionneurs ne pourraient pas dire: Lui transporte. On serait peut-être moins exigeant sur les clauses, quelque chose comme cela. L'idée de cela, c'est d'avoir une justice sociale. Si on a un permis, on a des privilèges; donc, celui qui a un VR a des responsabilités aussi envers la société.

M. Goulet: Dans un autre ordre d'idées, M. le Président, j'aurais aimé poser cette question à l'un ou l'autre des postes d'affectation, mais je la pose à celui-ci étant donné que c'est le dernier. On parle souvent de camionneurs qui choisissent les endroits pour travailler, comme on dit ils choisissent les "jobs". Ils vont quitter l'endroit de travail à 2 heures de l'après-midi. Il y a des entrepreneurs qui nous ont fait part de certaines plaintes, à savoir que le camionneur pouvait faire un peu ce qu'il voulait. Il arrivait à l'heure qu'il voulait, il quittait à l'heure qu'il voulait. D'abord est-ce que c'est fondé? Est-ce que cela arrive?

Deuxièmement, est-ce qu'il y aurait lieu, au niveau des postes d'affectation, sans que ce soit fait par une association, mais bien par le poste d'affectation, d'imposer des pénalités à ces camionneurs — si c'est vrai que ça existe — de façon qu'ils ne nuisent pas à la crédibilité et au bon nom des autres camionneurs qui veulent vraiment donner un service aux entrepreneurs ou aux compagnies, tout dépend de la réquisition? On s'est fait dire ça à plusieurs reprises. D'abord, est-ce que ça existe et, deuxièmement, est-ce qu'au niveau d'un poste d'affectation, tout en étant à l'intérieur des règlements, il y a moyen de régir, je ne sais pas, une espèce... Je sais qu'il y a un code d'éthique, il y a toutes sortes de choses, mais qu'est-ce que vous avez pour empêcher ça? Qu'est-ce qui existe pour empêcher cela dans les règlements d'un poste d'affectation?

M. Genesse: Chez nous, dans le sous-poste d'Abitibi-Est — et, je crois qu'il y en a d'autres qui ont la même chose — pour ceux qui quittent le chantier quand bon leur semble, on a un tableau de "dispatch" comme on dit; celui qui quitte un chantier, sa carte s'en va en bas du tableau. Les camionneurs ne sont pas incités tellement à quitter le chantier. Cela ne fait pas longtemps, on a approuvé ça à l'assemblée du sous-poste en 1978 et nous n'avons pas trop de problèmes. Sur ce côté-là, on peut dire que ça dépend un peu de celui qui fait la répartition du travail. Il y a toujours moyen de faire comprendre aux camionneurs que c'est à eux l'ouvrage et, s'ils le font exprès, ils vont perdre des travaux, ils vont perdre des compagnies.

M. Goulet: II reste que le directeur d'un poste a le pouvoir de sévir. Mais si, un moment donné, suite à une telle action, le camionneur, par exemple, le vendredi après-midi décide de quitter le chantier et le directeur du poste d'affectation décide de le pénaliser et de le placer au bas de la liste ou, je ne sais pas, de lui faire perdre une journée — apparemment qu'il n'a pas le droit — qu'est-ce qui couvre le directeur du poste d'affectation contre des accusations de ce camionneur s'il vient dire par la suite qu'il a subi des préjudices, que le directeur du poste d'affectation ne lui aime pas la figure et peut-être se servir d'autres arguments pour...

M. Genesse: Qu'est-ce qui nous couvre? C'est que chez nous et dans la région du Nord-Ouest — je pense que c'est une pratique partout — on a des assemblées, les camionneurs sont invités, tout se passe devant tout le monde et on décide à une assemblée que ça fonctionne de telle façon. Les codes d'éthiques on en a fait, on les a repris et les camionneurs discutent de leurs affaires. Quand il y a quelque chose qui est décidé, le chef du sous-poste, qui est le "dispatcher" normalement, s'il l'applique, le camionneur, normalement, devrait être à l'assemblée ou les autres le savent. On est protégé. On ne décide rien individuellement, pas de ma part, et je ne crois pas que ça se fasse à nulle part.

M. Goulet: Ce que je veux dire, c'est que ça pourrait être décidé lors d'une assemblée générale. Mais qu'est-ce qui vous couvre pour ne pas vous faire accuser par la suite d'avoir défavorisé certains camionneurs ou, je ne sais pas, d'avoir agi discriminatoirement auprès de certains camionneurs même si ça a été voté en assemblée? Je ne l'ai pas, la solution, mais je trouve cela dangereux si vous agissez ainsi parce que je pense que vous n'avez pas le droit de le faire. Même si c'est voté en assemblée générale, vous n'avez pas le droit de pénaliser un camionneur. Je pense qu'il manque quelque chose au niveau... Vous avez le droit?

M. Genesse: II y a un comité de discipline. Dans le moment, on attendait que le permis sorte, que tout sorte, il y a un comité de discipline de prévu, mais je pense que ça peut dépendre de certaines gens. Mais, chez nous, on en a mis, des

pénalités, il y en a eu et le camionneur, quand tu lui mets les yeux en face du problème, quand il est dans le tort, il n'a pas le choix. Comme de raison, si on pénalise un camionneur par rancune ou par vengeance ou parce qu'il n'est pas dans la bonne association ou des choses comme ça, chez nous, en tout cas, dans le Nord-Ouest, ni à nulle part, je ne crois pas qu'il y ait discrimination ou de rancune qui revienne. C'est dur sur le moment. Le camionneur va être fâché, il va sauter, il va crier, mais ça va finir là. Il va comprendre qu'il n'avait pas raison de faire ça. Ce ne sont pas des enfants.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. Un instant, M. Chouinard.

M. Chouinard: Je m'excuse, juste une observation concernant les coûts des travaux. On a répandu une rumeur qui n'est pas nécessairement fondée surtout sur la base de calcul qu'on a présentée à savoir que le fait d'utiliser les taux de la commission pour faire du transport coûterait 25% de plus au gouvernement pour ses travaux.

Quant à la base de calcul qui a été utilisée, on vous a dit que les coûts d'opération d'un véhicule étaient entre $25 et $30, ce qui est, comme on le sait assez près, de toute façon, du taux fixé par la commission pour le travail à l'heure, qui est de $27.25. Par contre, quand on a dit que cela coûtait $40 à un camionneur, on a oublié de vous dire que le revenu à l'heure d'un camionneur qui travaille à la "job", qui travaille à forfait, est de $40, ce qui est complètement différent. On ne peut pas comparer un travail à l'heure avec un travail à la production parce que c'est évident que le gars qui réussit à se faire un revenu de $40 l'heure, c'est parce qu'il se grouille. D'ailleurs, comme on dit dans le cas des camionneurs, les gars sont affamés de ce temps-ci, c'est peut-être le temps de les faire travailler. Il est évident qu'ils vont en arriver à une production beaucoup plus élevée, de telle sorte que le chantier va durer moins longtemps, de telle sorte que le coût total du chantier va être moins élevé que ce qu'on a laissé entendre cet après-midi en disant qu'il y avait une différence de $25.

Ce n'est pas un sophisme, c'est vrai ce que je vous dis.

M. de Belleval: Vous n'avez pas besoin de me faire un dessin.

M. Chouinard: D'accord. Une autre affaire...

M. de Belleval: Vous respectez davantage les limites de vitesse quand vous êtes payés à l'heure.

M. Chouinard: On voudrait pouvoir utiliser notre production à forfait, le travail à forfait, pour pouvoir fixer nos taux à l'heure, mais les compagnies ne veulent pas qu'on fasse cela.

M. de Belleval: Je pense bien!

M. Chouinard: Un autre point que j'aimerais souligner, si vous me le permettez, c'est la ques- tion des taux minimums. Les taux minimums c'est à la fois dangereux et peut-être à la fois avantageux. C'est toujours tentant d'utiliser des taux minimums parce qu'on pense, au départ, que cela ne cause pas de problèmes. Cela ne cause tellement pas de problèmes que ce ne sont pas des taux. Là où il y aurait peut-être quelque chose à apporter en matière de tarifs, et je parle en connaissance de cause parce que ça fait plusieurs années que je travaille au niveau des tarifs dans le vrac, ce serait une souplesse au règlement pour permettre à la commission de recevoir des demandes de taux à l'extérieur de la période prévue, qui est le mois de décembre généralement, à tous les ans. Comme dans le camionnage général, à partir de certaines règles qui seraient établies, par exemple, au règlement de conditions générales, il pourrait y avoir du transport, ce qu'on appelle à taux convenus, de telle sorte que pour un gros contrat, dans des conditions spéciales, compte tenu des facteurs que les camionneurs connaissent et que les entrepreneurs connaissent aussi, on pourrait avoir un tarif qui serait différent du tarif fixé par la commission, qui pourrait être inférieur, mais qui pourrait être aussi, dans certains cas, supérieur. Les compagnies vous disent que, dans des cas, le taux est trop haut, mais elles vous disent rarement que le taux est trop bas. Quand elles n'entretiennent pas leurs chemins, quand les gars font $125 par jour à la job, c'est parce que les conditions sont vraiment affreuses. Dans ce temps-là, elles ne viennent pas se plaindre que le taux n'est pas assez élevé. Il y aurait peut-être lieu, de ce côté-là, de regarder au niveau du règlement et d'apporter cette souplesse à la commission dans le sens qu'on le met vraiment dans les normes de tarifs de la commission, pour lui permettre d'ouvrir assez rapidement, selon une procédure expéditive. Pas d'affaire à la cachette, mais qu'on arrive à avoir des taux qui soient peut-être, dans certains cas, plus réalistes. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. de Belleval: Vous avez quelque chose...

M. Genesse: Oui, j'aurais quelque chose à ajouter. Ce n'est pas dans notre mémoire, mais on l'a discuté et on l'a ajouté, aujourd'hui, à la main. Après avoir entendu tout ce qu'on a entendu ici depuis trois jours, nous sommes très malheureux de ce qui s'est dit, de ce qui s'est passé chez certaines personnes, certains organismes ou quoi que ce soit.

Nous, on a une suggestion: dans le règlement, qu'il soit dit qu'aucun d'administrateur d'association coopérative ne peut être administrateur d'un poste ou d'un sous-poste. S'ils veulent avoir des associations, ceux qui seront dans des associations s'occuperont d'autres choses, du courtage, du poste et du sous-poste. Les leaders, dans chaque région, ne pourraient pas être assis sur leurs chaises, ils choisiraient l'une ou l'autre. Je pense qu'à partir de là, si c'est légal de l'instaurer dans le règlement, je ne le sais pas, mais nous, on prétend, chez nous — on n'a pas le problème dans

le moment, cela est venu à bout de se régler, ce problème de chicane d'association, le poste fonctionne, on est très heureux de cela — on dit que ça peut fonctionner un poste, et, que des camionneurs, ça peut s'endurer entre eux. Avec ce qu'on a entendu cette semaine, je pense qu'il y aurait lieu d'y penser. Ils choisiront, les associations joueront te rôle qu'elles doivent jouer si elles en ont à jouer, elles vendront des sièges sur le coin de la rue ou d'autre chose. Mais pour notre part, nous, de la région 08, nous prétendons que ce serait une solution pour enlever ces chicanes sur le dos des camionneurs, qui ne devraient pas exister, et empêcher de déblatérer sur la place publique comme cela s'est fait ici cette semaine. Nous, de la région 08, nous avons déploré cela. C'est malheureux, une commission parlementaire où le venin est sorti comme ça. (20 heures)

M. de Belleval: Je suis heureux de vous entendre dire ça, parce que vous avez un des postes qui fonctionnent le mieux, où il n'y a pas, semble-t-il, de chicane interne et où, si je comprends bien, il n'y a pas de discrimination entre des gens qui appartiennent à une association ou à une autre. Il n'y a pas de problèmes comme ça. Il y a des associations qui existent dans votre secteur?

M. Genesse: II y en a, et dans certains comtés, l'ANCAl existe encore, les FACEV ont certains membres. La coopérative de Matagami ne fonctionne pas, mais elle est là. L'Abitibi-Est, notre association, n'est pas discontinuée, parce qu'on a des bureaux de l'association et tout ça. Mais on ne parle plus de ça. Cela se fait, parce qu'on le fait et on n'est pas différents des autres de la province et ça peut se faire ailleurs. Mais je pense qu'il y aurait une leçon à tirer dans certaines régions. On pense aux camionneurs quand on dit ça, qu'il y a moyen de se comprendre. Cela n'a pas toujours été rose dans la région 08 plus qu'ailleurs. On a fait comme les autres. Mais il faut mettre de l'eau dans son vin, d'un côté et de l'autre. Ceux qui me connaissent savent que j'en ai mis, de l'eau dans mon vin, parce que dans la région, ça a déjà brassé dur. Aujourd'hui, tout le monde semble heureux. On suit le règlement et on veut le suivre et on veut des améliorations dans le camionnage en vrac.

Quand on entend parler de déréglementation, ça nous fait mal, parce que ce n'est pas ça qui va régler le problème du camionnage.

M. de Belleval: Je ne peux pas être plus d'accord avec ce que vous venez de dire. Je pense que, malgré tout, même s'il y a peut-être eu, comme vous dites, des incidents tristes, il faut crever un abcès à un moment donné; ça fait mal sur le coup mais après ça, on se sent mieux. En tout cas, je vous félicite, encore une fois. Je vous encourage à continuer.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: J'endosse les deux dernières phrases du ministre sans aucune réserve.

Le Président (M. Jolivet): Merci, nous demandons à l'Association nationale des camionneurs Inc. et leur représentant...

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Gratton: Je m'excuse. J'aimerais que le député de Duplessis nous présente... Est-ce qu'il s'agit de son colistier à la prochaine élection générale qui l'accompagne?

Le Président (M. Jolivet): Avant de demander aux personnes de nous présenter leur mémoire, voici sur quoi nous nous sommes entendus. Si je fais erreur, on pourra me corriger. La première chose, c'est qu'on a dit qu'on déposait le mémoire qui peut s'appeler la réplique, à l'ensemble des mémoires déposés, cette réplique étant textuellement inscrite au journal des Débats, ce qui se fait, dans certains cas, de façon exceptionnelle.

Quant aux documents produits, je vais en faire la liste complète, je vais donner celle que je possède, du moins. Si ce n'est pas ça, vous me le direz. Il y a d'abord l'annexe A: Jours de travail, document traitant des jours de travail dans la région 06, télex et télégrammes; l'annexe A-1, lettres de M. Yvan Coulombe, employé du Poste d'affectation de la région 06 Inc. qui fait des offres à un employeur d'une drôle de façon; l'annexe A-2, en liasse, lettre de réponse du ministre Denis de Belleval à l'avocat du Poste d'affectation de la région 06 Inc., à la suite du mémoire présenté par la région 06, sous l'exécution, à 75% de la fondation inférieure et aussi, lettre de M. Jean-Louis Bradette, commentant la lettre du ministre de Belleval.

Il y a aussi l'annexe A-3, lettre de M. Jean-Louis Bradette imposant les mesures disciplinaires, pour incompétence, à certains camionneurs qui ne voulaient pas accepter de travailler en bas des taux et qui, naturellement, sont membres de l'Association nationale des camionneurs artisans Inc., l'annexe B, jugement de l'honorable juge Louis-Philippe Bouchard, refusant au Poste d'affectation de la région 02 Inc. d'intervenir devant les tribunaux pour quoi que ce soit, à cause du défaut de lettre patente; l'annexe C, commentaires sur des mémoires en forêt; l'annexe D, jugement de l'honorable juge Paul-Etienne Bernier, rejetant la première injonction de l'Association des transporteurs en vrac de la région 03 Inc.; l'annexe E, article paru dans le journal Le Soleil sur notre ministre des Transports; l'annexe F, affidavit de M. Gérard Dubé, président de l'ANCAl, et une liste des membres de l'ANCAl remise au président de la commission parlementaire; l'annexe G, lettre prétendument signée par M. Gérard Dubé, et commentaires.

Ce sont tous les documents qui ont été placés en annexe aux mémoires en contre-réplique. Je vais demander à quelqu'un d'aller chercher la liste

des membres qui ne nous a pas été fournie avec ces documents.

M. Piuze: M. le Président, la liste des membres, c'est 3581, il y en a deux qui sont entrés aujourd'hui, à la suite de la commission parlementaire.

Le Président (M. Jolivet): Donc, pour bien se comprendre, il y aura d'inscrit au journal des Débats l'ensemble du mémoire. (Voir annexe) Quant aux annexes, elles sont déposées à la commission parlementaire, elles sont mises à la disposition de toute personne qui veut en prendre possession, en les demandant selon la formule habituelle... excusez-moi, on va revenir.

Nous disons donc que l'ensemble des documents déposés en annexe peuvent être disponibles à toute personne qui en fera la demande à la Bibliothèque nationale. Juste avant, j'ai autre chose à ajouter. Est-ce sur cette partie-là que vous voulez intervenir, M. Piuze?

M. Piuze: Oui, M. le Président, peut-être que M. Dubé aurait juste une petite remarque à faire sur...

Le Président (M. Jolivet): Tout d'abord, il y a une autre chose. J'ai une lettre de M. Pierre Beau-det, avocat. Vous, M. Piuze, me disiez que vous étiez en accord avec la composition de la lettre, le texte de la lettre, de telle sorte que, si vous aviez eu à la composer, vous en auriez composé une semblable. C'est bien ce que j'ai compris?

M. Gratton: M. le Président, est-ce qu'un membre de la commission peut s'opposer à la lecture de cette lettre?

Le Président (M. Jolivet): Un membre de la commission peut s'opposer à la lecture de cette lettre, oui.

M. Gratton: Je ne m'y oppose pas, M. le Président, malgré le premier paragraphe dont je partage la teneur.

M. de Belleval: Est-ce qu'on pourrait d'abord lire la lettre pour savoir si on peut s'opposer ou non? M. le député de Gatineau a lu la lettre.

M. Gratton: Non, j'ai lu le premier paragraphe. C'est une boutade encore. Je m'excuse, je suis fatigué.

M. de Belleval: Vous avez raison, le premier paragraphe est...

M. Gratton: Le président s'est chargé de la montrer à tout le monde.

Le Président (M. Jolivet): Non, non, non.

M. de Belleval: M. le Président, vous êtes en conflit d'intérêts.

Le Président (M. Jolivet): La lettre se lit donc, comme suit: "Au Président, "Au nom de mes clients et en mon nom personnel, permettez-moi de vous féliciter pour le doigté remarquable avec lequel vous avez dirigé cette commission. "Cependant, je voudrais vous faire remarquer que, depuis le début de cette commission, le ministre des Transports semble très inquiet au sujet des mandats que j'accepte. "Premièrement, je tiens à vous dire que je suis régi par le Barreau du Québec et que si votre ministre des Transports a des inquiétudes, il n'a qu'à s'adresser au Barreau du Québec. Cependant je note que Me Yvon Chouinard, avocat du Poste d'affectation de la région 06 Inc., — entre parenthèses — (tonique rafraîchissant pour le ministre des Transports) et aussi avocat de l'Association des entrepreneurs de la région 03, n'a pas été victime des sarcasmes du ministre des Transports. "M. le ministre des Transports s'inquiète d'une lettre que j'avais adressée au Poste d'affectation de la région 03 Inc. Je tiens à lui dire qu'entre le 1er septembre 1977 et le 31 août 1979, je détenais un contrat qui me liait à l'Association nationale des camionneurs artisans Inc., d'une façon exclusive. J'ai bien accepté de contribuer à établir les postes d'affectation en vertu de l'engagement qu'avait pris l'ANCAI. Cependant, j'en avais par-dessus la tête avec les problèmes juridiques de l'ANCAI. "Au mois de septembre 1979, j'ai quitté l'ANCAI et mon contrat exclusif n'a pas été renouvelé. Au mois d'avril 1980, je suis redevenu l'un des procureurs de l'ANCAI, mais à temps partiel et sans contrat exclusif. Ce contrat qui expire le 1er septembre 1980 était de quatre jours par semaine. Il était clair et net pour les dirigeants de l'ANCAI que j'avais le droit d'avoir d'autres clients, comme mon confrère Chouinard et tous les autres avocats de la province de Québec. "Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes meilleurs sentiments,

Pierre Beaudet, avocat".

Oui?

ANCAI

M. Dubé: M. le Président, je voudrais vous remercier de nous avoir fourni l'occasion de venir répondre à certaines accusations. C'est surtout sur les accusations personnelles que j'ai eues au cours des deux jours qui viennent de passer, j'aimerais apporter un peu de lumière. Je ne trouve peut-être pas agréable mais normal qu'on porte des accusations contre une association qui est, on peut dire, la seule association de ce genre, opérante et active, qui défende les intérêts de ses membres. Je trouve cela un peu normal. Même à cela, il ne faudrait pas aller plus loin. Il est aussi normal, lorsqu'il y a des conflits ou des accrochages à travers la province, qu'on retrouve parmi ce groupe des camionneurs de l'ANCAI. En gros, nous sommes 8 camionneurs sur 10 dans les

postes d'affectation. C'est ce que cela fait. Mais il ne faudrait pas attribuer à l'ANCAl, parce qu'il y a des gars qui sont membres de l'ANCAl, ces choses, si jamais il y a des accrochages. C'est une chose que j'ai déplorée que, dès qu'il y avait quelque chose, on disait toujours: Voilà l'ANCAl. Je suis le président de l'ANCAl depuis 4 ans, il y a des faits qui n'ont jamais été portés à mon attention, dont je n'ai jamais été au courant et on m'accusait d'être dans cela.

Ce à quoi je voudrais en venir, c'est surtout à une prétendue lettre qui a circulé. Le ministre semblait trouver cela assez amusant, car cela semblait je ne dirais pas une chose courante, mais il se produisait que le président de l'ANCAl signait des lettres avec des en-têtes de postes d'affectation. Monsieur, aujourd'hui, j'ai fait analyser le charmant document. Par contre, ce document, je le précise, n'a même pas de date, il n'est adressé à personne. C'est un bout de papier qui circule, qui n'est compromettant pour personne. Par contre, on voudrait, dans l'esprit de ce document, semer le doute, je le dis, moi, je signe des documents d'à peu près n'importe qui.

Les personnes responsables, les personnes qui connaissent les lettres, ont, par contre, un imprimeur et ont trouvé que le document était composé de deux sortes d'écritures de deux sortes de machines. Pour ma part, je vous ai donné un affidavit assermenté que je n'ai jamais signé ce document. Si cela continuait, je ferais une enquête, s'il le faut. Je saurais qui s'amuse, quel enfantin essaie de semer la discorde. Je pense qu'on a assez de problèmes dans le vrac — je vais revenir au vrac parce que nous sommes ici pour le vrac — sans s'amuser à faire des folies pareilles. Quel intérêt, lorsque vous regardez ce document, aurais-je eu à signer cela? D'ailleurs, il n'y a plus de place dans le bas, c'est quasiment dans le bas de la feuille que cela a été fait. De toute façon, ceci dit, moi, je n'y attache pas plus d'importance, si on ne revient pas encore avec cela.

D'autre part, je voudrais aussi revenir sur ce que disaient M. Blouin, président ou directeur des entrepreneurs de la région 03, et M. Fradet, de la région 02, hier soir, qui, eux, connaissaient tous les problèmes de l'ANCAl, sous toutes les formes et tous les accrochages qui pouvaient avoir eu lieu depuis x années. Par contre, lorsque M. Gratton l'a questionné, en tout cas, lorsque quelqu'un de la Chambre l'a questionné, il ne savait plus combien il y avait de membres, il ne savait plus rien.

Je vous dis que les autres associations ne m'intérssent pas. Je suis président de l'ANCAl, je connais les problèmes à l'intérieur de l'ANCAl, je sais combien on a de membres. Je le dis publiquement, même si vous avez un document assermenté dont on a fait mention tout à l'heure, nous avons actuellement, pour l'année en cours, 3581 membres. J'insiste pour dire ceci parce qu'hier on faisait mention qu'en 1978-1979 il y avait des postes d'affectation qui, probablement, avaient perçu de l'argent pour l'ANCAl. Pour la cotisation 1979-1980, pas un seul poste d'affectation n'a fait simplement une commission pour dire: Envoyez une cotisation à l'ANCAl. Ce sont des membres qui ont adhéré librement; vous savez, on n'a pas de formule Rand, il n'y a donc pas eu de perception à la base, ces membres sont libres.

Il y a une petite diminution comparativement à l'année dernière. Les raisons sont simples: il y a d'abord des restrictions économiques, pour nous en tout cas. Si on avait un surplus, ça regarderait mal lorsqu'on se plaint qu'il n'y a pas de travail. On a des camionneurs dont le camion est retourné à la finance; il y a des camionneurs qui m'appellent et qui me disent: M. Dubé, laissez-nous sur la liste. Ils ne sont pas en règle, mais on continue à leur donner des services parce que ça n'a pas de bon sens. Les gars disent: On va avoir de l'argent, on va travailler, on va vous payer. Il y en a peut-être 25 ou 30, mais ils ne sont pas sur les listes, je le répète. C'est une chose qui fait qu'il y a moins de membres.

Par contre, il y a aussi la région 06 où on disait que l'ANCAl avait peut-être fait tort au poste d'affectation — on a insinué cela au cours de la semaine — le poste d'affectation s'est attaqué à l'ANCAl, et ç'a coûté à peu près 200 membres, à l'heure actuelle. A part cela, dans les autres régions, il y a un nombre même plus élevé que celui de l'année dernière. J'insiste pour dire qu'il n'y a pas un seul poste d'affectation qui a fait la perception. C'est cela, la situation de l'ANCAl, et je pense qu'il y en a plusieurs qui ne se casseront pas la tête. Hier, dans un document, on disait: 20% de 10%, c'est 2000 membres. Lorsqu'on a posé la question au gars, il a dit: J'ai pris ces renseignements au ministère.

Tantôt, dans un autre document — vous avez les documents, vous pourrez les vérifier — on parlait de 2500. Vous avez le nombre de membres, ne vous cassez plus la tête, personne, les adresses sont dans les documents; si vous voulez vérifier, vous avez beau.

Pour ma part, je crois avoir donné assez d'éclaircissements. Vous pouvez me poser des questions pour des éclaircissements supplémentaires mais je pense que, de cette façon, les procureurs ont préparé les documents — on a préparé cela ensemble, cet après-midi — pour répondre à d'autres questions. Je ne voudrais pas abuser de votre temps; en ce qui me concerne, je suis à votre disposition, mais j'ai terminé.

De plus — je l'ai fait au début, mais je le dis quand même — je veux remercier le ministre des Transports, la commission parlementaire, remercier ses collègues, en somme, tous ceux qui sont responsables, les gens de l'Opposition, que ce soit l'Opposition officielle ou M. Goulet, de l'Union Nationale, qui ont travaillé; je ne dis pas qu'ils ont travaillé pour quelqu'un en particulier, mais ils ont travaillé pour faire en sorte que la lumière se fasse sur les problèmes qu'on a.

Ce que j'ai trouvé malheureux, ce sont des questions, comme le disait M. Genesse tout à l'heure, qui étaient complètement hors sujet, des questions qui attaquaient des personnes et dont on ne pouvait pas faire la preuve. (20 h 15)

Pour ma part, c'est la première fois que j'assiste activement à une commission parlementaire et je ne suis pas très très heureux de ça. Je pense qu'on devrait être plus sérieux que ça. Cela m'a fait penser un peu à un jeu de bluff, à un moment donné on y mettait le paquet. On était passés les premiers, on ne pouvait pas revenir et là, vous nous l'avez accordé, je vous remercie. J'aurais sûrement bien aimé lire les documents qu'on a ici parce que les personnes dans la salle auraient été à même de constater que chaque fois qu'on nous a accusés, on vous donne des raisons, on s'explique, on dit pourquoi on est accusé. Je sais que vous les avez en main, que ce sera dans le journal des Débats et tous ceux qui vont vouloir le voir vont l'avoir. Je suis très heureux.

En terminant, je vous remercie encore une fois et je compte beaucoup que cette commission parlementaire, ces débats qui ont fait déranger beaucoup de personnes, qui nous ont fait travailler — et j'en suis heureux — vont compter un peu pour rendre la vie un peu plus facile aux camionneurs qui sont impliqués. Ceux qui prétendaient perdre leur camion vont garder l'espoir encore une fois d'attendre la neige à l'automne, à la condition qu'il en tombe. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que d'autres personnes ont des commentaires? Non? M. le ministre.

M. de Belleval: J'ai presque envie de vous dire, M. Dubé, que s'il ne neige pas cet hiver, vous pourrez peut-être faire comme vous avez fait l'hiver dernier, venir me voir.

M. Dubé: En tout cas, je vous assure que si je suis encore président de l'ANCAl et si vous êtes encore ministre, ça me fera plaisir de venir vous voir, M. le ministre.

Une Voix: C'est deux gros "si". M. Gratton: Le deuxième surtout.

M. de Belleval: Je n'ai pas voulu jouer au père Noël, quand vous êtes venu me voir, mais en tout cas vous avez eu une réponse. Ce n'est peut-être pas une mauvaise façon d'entreprendre mon exposé, parce que je pense qu'il est bon que je fasse une rétrospective rapide de mes relations avec l'association que préside M. Dubé. M. Dubé est un citoyen du comté de Charlesbourg, et même avant que je sois nommé ministre des Transports, nous avions eu, à plusieurs reprises, des communications et j'étais intervenu auprès de mon collègue, M. Lessard, en faveur des demandes que l'Association nationale des camionneurs artisans indépendants faisait dans l'intérêt de tous les camionneurs du Québec, disons des camionneurs artisans, pour être plus précis.

Je pense que nos relations ont été extrêmement cordiales. Cela a été la même chose pendant que j'ai été ministre des Transports. Je faisais allusion tout à l'heure au fait que lorsque les camion- neurs artisans dans plusieurs régions du Québec se sont retrouvés dans des difficultés pressantes à la suite du manque de neige — et là-dessus, je vous ferai remarquer, M. Dubé, que la température est de juridiction fédérale — nous sommes intervenus, et j'ai débloqué environ $18 000 000 de travaux, ce qui n'avait jamais été fait auparavant.

Mon collègue, le ministre des Finances, me l'a reproché à mots non couverts, d'une certaine façon, puisqu'il comptait un peu sur ces $18 000 000 pour certains crédits périmés, mais, en tout cas, ç'a été pour des travaux utiles et ce sont de nombreuses régions du Québec qui en ont profité en même temps que les camionneurs artisans; ça n'a pas été de l'argent gaspillé, loin de là.

Nous avons eu des relations étroites et cordiales jusqu'à ce printemps ou, disons, jusqu'au début de l'été. Je pense que c'est important, pour les membres de la commission, que je relate ces faits, parce que ç'a une incidence directe sur les travaux de cette commission et sur l'avenir.

Je n'ai pas besoin de vous dire que je ne suis pas le premier ministre des Transports à passer au "bat", comme on dit, aux mains des procureurs ou des dirigeants de l'ANCAl. C'est un peu normal. L'ANCAl est une association légitime qui défend ses membres vigoureusement et, là-dessus, je rappellerai les paroles de mon collègue, M. O'Neill, député de Chauveau, ce matin, quand il disait: Est-ce qu'il n'est pas un peu normal, quand des gens sont pressés par les événements, quand ils sont soumis à des forces économiques difficiles, qu'ils réagissent?

Je répondrais à ça: Oui, effectivement c'est normal que des gens pressés par des événements, par l'adversité, réagissent. Ce sont des choses qui se sont produites dans le passé. Chaque fois qu'il y a eu une certaine adversité, l'ANCAl a réagi fortement. Je ne suis pas le premier ministre des Transports dont vous demandez la démission; les fonctionnaires qui m'accompagnent aujourd'hui ne sont pas non plus les premiers fonctionnaires que vous critiquez amèrement. Je vais retirer l'histoire de la démission, si vous voulez, je vois que vous faites une délégation, tant mieux.

Donc, je ne suis pas le premier ministre des Transports auquel vous vous frottez et les fonctionnaires qui m'accompagnent, les membres de la commission ne sont pas non plus les premiers que vous critiquez sévèrement, tellement, d'ailleurs, que je dois dire, au profit des membres de la commission, qu'il est extrêmement difficile, actuellement, au ministère des Transports — c'est le cas d'ailleurs depuis de nombreuses années — de recruter des fonctionnaires — c'est la même chose à la Commission des transports — qui acceptent de travailler dans le dossier du vrac, parce que c'est devenu un dossier maudit, un dossier auquel les employés du gouvernement tentent d'échapper le plus possible, et on les comprend.

Tout cela pour vous dire qu'en juin, nos relations ont changé soudainement à la suite d'un refus que j'ai dû opposer à deux demandes de

l'ANCAI. La première voulait que nous étendions les secteurs protégés de 75% pour les travaux de superstructure à 50% ou 75% à l'ensemble des travaux routiers octroyés par le ministère. J'ai dû aussi refuser d'appuyer la demande de l'ANCAI auprès de mon collègue, le ministre de l'Energie et des Ressources, d'octroyer un secteur protégé supplémentaire, à savoir celui du bois, au profit des camionneurs artisans.

Je pense que c'était la première fois que je refusais quelque chose à l'ANCAI. N'oubliez pas que, l'automne dernier, nous avions fait un accord complet sur un changement au règlement 112 qui est actuellement en voie d'application et toutes ces choses se sont faites dans la plus grande harmonie. Tout ça pour dire qu'évidemment, un ministre ne peut pas toujours dire oui et que c'est plus facile de dire oui que de dire non. Mais vous prenez vos responsabilités et vous vous dites: Dans ce cas-là, je suis obligé de dire non. Je vous ai dit non, à ce moment. Je vous ai dit non et je vous ai dit aussi, lors d'une réunion que nous avons eue — nous avons eu de nombreuses réunions — que, devant l'avalanche de demandes que vous me soumettiez, à partir de ce moment, il était absolument irréaliste que je puisse y faire face dans un espace de temps très court et que, d'ailleurs, beaucoup de ces demandes m'apparaissaient d'importance inégale et, de toute façon, n'allaient pas au coeur des problèmes. En tout cas, plusieurs de ces demandes sont revenues au fil des jours.

C'est important que je relate ces faits, parce que ça démontre le point d'accrochage. Il est survenu sur quelque chose de très précis, et il est survenu, d'ailleurs, d'une façon très soudaine, dès que j'ai été obligé de dire non. Ce non, d'ailleurs, je l'avais fait entériner d'abord par le Conseil des ministres, et je suis revenu vous dire: Ce n'est pas possible. Là, évidemment, vous avez utilisé — c'est votre droit — des moyens de manifestation, qui, dans le passé, ont peut-être pu vous apparaître valables. Quoi qu'il en soit, le climat s'est détérioré entre nous. On a abouti finalement à cette commission parlementaire.

Je veux vous dire qu'en ce qui me concerne, je reconnais entièrement le droit à quelque camionneur du Québec d'appartenir à quelque association volontaire choisie par lui. Je reconnais à cette association volontaire le droit d'utiliser toutes les ressources de notre démocratie, ce que nos lois reconnaissent pour faire valoir son point de vue.

Ceci étant dit, je reconnais aussi que, dans le cadre du nouveau règlement sur le camionnage en vrac, il existe maintenant des postes d'affectation qui sont chargés, non pas de représenter des membres d'associations qui ne doivent plus être les relais d'associations quelles qu'elles soient, coopératives ou votre association, mais qui doivent administrer les lois et les règlements d'une façon impartiale.

Il m'a semblé, et devant cette commission, nous nous sommes rendus compte qu'il y avait des malaises, pour dire le moins, dans plusieurs secteurs et que ces malaises provenaient en particulier, dans ces secteurs, du fait que l'impartialité requise ne semblait pas exister, d'après les témoignages qui ont été déposés, envers tous les membres des postes d'affectation.

Par ailleurs, nous avons eu les témoignages d'autres postes d'affectation, d'autres régions, où au contraire, on retrouvait des problèmes généraux à tous les postes, qui ont été expliqués durant cette commission, les difficultés d'application du règlement 112 qui ont été expliquées devant cette commission, mais où l'on ne retrouvait cependant pas ces problèmes de discrimination entre camionneurs appartenant à différentes associations. Le plus bel exemple, c'est le Poste de courtage de la région 08. On a vu d'autres régions où la même situation semblait exister.

Ce sont des régions qui connaissent des difficultés, qui ont des revendications à faire, des revendications qui rejoignent largement vos propres revendications, des revendications dont certaines sont certainement légitimes, que je reconnais et auxquelles je vais m'attaquer d'ailleurs. Mais ils sont tous venus nous dire, ces gens-là: Cela va bien, ou ça ne va pas si mal, parce qu'il n'y a plus de lutte d'influence entre différentes associations dans notre région. S'il y en a, nous avons réussi, jusqu'à maintenant, à maintenir le fort; c'était le cas, entre autres, de la région 06.

Plusieurs membres de la commission ont noté, je pense, qu'une des causes — pas toutes les causes — importantes du malaise actuel était justement cette espèce de lutte de pouvoir que des associations continuent à poursuivre. Là-dessus, je ne veux pas dire seulement l'ANCAI, de toute évidence. Je ne veux pas faire le partage entre l'ANCAI et les autres associations. Mais je dois constater, comme tous les membres de cette commission, qu'il existe effectivement des luttes. Qui réagit? Qui est le premier à commencer la chicane? J'ai de la difficulté à le déterminer. Je ne suis absolument pas compétent pour le déterminer. Je ne pense pas que cette commission ait pu obtenir des preuves à ce sujet, pour déterminer qui est le premier responsable de quoi.

Une chose sûre et certaine, c'est qu'effectivement, dans ces régions, dans ces postes d'affectation, il y a des luttes d'influence entre membres d'associations, au nom de ces associations.

Là-dessus, je veux vous dire que je vais effectivement examiner très en profondeur les recommandations, les revendications qui ont été faites.

Pour ma part, j'ai appris beaucoup de choses. C'est d'autant plus normal que je ne suis ministre des Transports que depuis moins d'un an et que c'est un des dossiers les plus difficiles qui existe au sein du ministère. Grâce à cette commission, j'ai pu me faire une idée beaucoup plus précise des problèmes du camionnage en vrac au Québec.

Je suis déterminé, avec toute la sincérité que je possède, à faire en sorte de régler, sinon tous ces problèmes, du moins une partie de ces problèmes, les plus cruciaux. Mais, d'avance, je sais aussi qu'il me sera absolument impossible de contenter toutes les parties, absolument impossi-

ble. On l'a vu, en particulier, en ce qui concerne vos deux revendications principales, M. le président — je parle au président de l'ANCAl, je m'adresse à vous, M. le Président, en même temps que je m'adresse à l'autre président; c'est gênant, dans une salle où il y a tant de présidents et si peu de ministres — vos deux revendications fondamentales qui ont fait que nos chemins se sont, pour un moment, séparés, à savoir l'augmentation des secteurs protégés, en votre faveur... ces deux revendications du côté du porte-parole de l'Opposition officielle ne semblent pas agréées et, en ce qui concerne ma propre position, je dois déclarer que j'ai des réticences très grandes à aller dans le sens de ces deux revendications.

Par contre, d'autres aspects des revendications que vous avez faites me paraissent légitimes. Comme je l'ai dit, je vais certainement m'attaquer à ces lacunes. Qu'on pense, par exemple, au système de surveillance, au système de contraventions, de poursuites devant les tribunaux, à la possibilité pour la Commission des transports d'intervenir de façon rapide et efficace en cas d'infraction. (20 h 30)

Qu'on pense aussi à la détermination des taux, à la souplesse qu'il faut introduire dans la réglementation pour permettre aux postes d'affectation de concurrencer d'une façon efficace les autres intervenants. Sur toutes ces questions et sur d'autres, je pense que nous pourrons faire des réformes à court terme. Certaines, comme vous le savez, demandent cependant de la législation.

Je le répète: II sera absolument impossible de satisfaire toutes les parties qui se sont présentées devant nous. Mais il me semble que, si nous réussissons à établir un climat minimum de sérénité, si, pendant un certain temps tout au moins, on accepte de donner sa chance à la réglementation actuelle, qu'on accepte de considérer les postes pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire des organismes à vocation publique faits à l'avantage de l'ensemble des camionneurs qui en font partie, si les différentes associations acceptent de laisser ces postes faire leur travail en toute sérénité, je pense qu'à ce moment-là ces postes, d'abord, seront équipés eux-mêmes pour s'occuper de leurs membres, pour aussi faire des représentations au nom de leurs membres et ceci, ils pourront sans doute le faire, d'ailleurs, en collaboration à l'occasion, mais volontairement, avec les associations qui existent par ailleurs.

Cela m'apparaît une condition essentielle si on veut rétablir la paix dans le secteur du vrac, si on veut permettre aux fonctionnaires qui sont dévoués, sincères et compétents, tant à la Commission des transports qu'au ministère, de faire leur travail avec les divers intervenants, si on veut permettre aussi au ministre des Transports de s'attaquer à ces différentes questions et de trouver un minimum de solutions qui ne feront peut-être pas l'unanimité ou qui ne seront peut-être pas le paradis, mais qui auront pour mérite — j'espère qu'on le reconnaîtra — d'aller dans le bon sens et d'améliorer les choses, d'aller de l'avant et non pas de reculer. Je pense qu'à ce moment-là les conditions minimales seront établies pour nous permettre de trouver des solutions. Quant à moi, je vous tends la main, je vous dis que je suis disponible. Par ailleurs, cette disponibilité, je devrai, bien sûr, l'exercer dans le respect du bien commun.

M. Dubé: M. le ministre, quand vous dites que nos positions sont devenues tendues et se sont durcies, c'est à la suite d'un refus catégorique. C'est fini? Non. Maintenant, est-ce qu'à la suite de cette commission vous gardez encore la même attitude sur le côté amendes, sur le côté infractions? Vous en avez déjà parlé, mais je parle d'une amélioration qui va aller à nos camionneurs dans les postes et sous-postes? Evidemment, ce sont eux qui font la distribution du travail. Est-ce que vous êtes aussi rigide et que vous allez dire non ou s'il peut y avoir, en dehors des deux clauses dont vous faisiez mention tout à l'heure, des améliorations qui soient données? Il y a énormément de choses qui peuvent être données pour améliorer la situation des camionneurs qui font partie des sous-postes. Ou, est-ce aussi durci que c'était?

M. de Belleval: Ecoutez, M. Dubé, ma position, vous l'avez peut-être interprétée comme un durcissement, mais je vous ai averti aussi, quand j'ai dit non, que je n'étais pas le genre de ministre à "fafiner", à vous dire des béni-oui-oui ou des béni-non-non et à vous traîner de semaine en semaine et de mois en mois sous de fausses promesses ou sous des perspectives incertaines, mais toujours éloignées. Je vous ai dit: Si vous me demandez demain matin de recommander au Conseil des ministres de vous octroyer davantage que la clause 75-25 en ce qui concerne les travaux de voirie, ce qui vous a été refusé par tous mes prédécesseurs, et si vous me demandez d'appuyer votre revendication d'avoir un secteur réservé dans le domaine du bois, je ne peux actuellement recommander au Conseil des ministres d'accéder à cette demande.

M. Dubé: Si je précisais trois choses...

M. de Belleval: Je vous ai dit cependant que j'étais disposé à étudier la question et, en particulier, c'est à ce moment que je vous ai proposé la tenue d'une commission parlementaire. C'est la seule position que j'ai tenue. Aujourd'hui, je me rends compte, à la suite des audiences de cette commission, que j'ai eu raison de prendre la position que j'ai prise. J'ai dû subir les conséquences, des manifestations et, évidemment, des scènes ou des paroles disgracieuses de tous bords, peut-être. Mais je pense que c'était la seule position que je devais tenir.

J'ai observé la position de mon collègue de l'Opposition, et là-dessus, je veux lui rendre hommage; je pense que, malgré les taquineries qu'on se fait de temps en temps de chaque côté de cette table, on veut, tous les deux, tous les trois, tous

les membres ici — je pense aux représentants officiels des oppositions — on veut tous trouver une solution. Le député de Charlevoix, qui connaît bien le dossier, a bien dit que ce n'était pas, au fond, un problème politique, un problème de parti-sanerie politique; quel que soit le parti au pouvoir, nous serions tous devant les mêmes problèmes. Je veux rendre hommage à l'Opposition officielle et à l'Union Nationale, qui m'ont aidé aussi à essayer de trouver la lumière.

Pour revenir à l'Opposition officielle, vous avez vu que son représentant a fait part à plusieurs reprises à différents intervenants qu'il ne lui apparaissait pas approprié d'étendre les secteurs réservés aux postes d'affectation aux dépens d'autres agents dans le domaine. On sait très bien pourquoi il a pris cette position et, comme je vous l'ai dit, après avoir écouté tout le monde, je me rends compte que mes réserves là-dessus continuent à être les mêmes. Mais pour répondre à votre question, il est évident que dans d'autres domaines— Et là-dessus, je vous avais indiqué, d'ailleurs, que j'étais prêt à faire voter une loi cet automne pour faire en sorte que les éléments dont j'ai parlé tout à l'heure soient réglés. J'ai fait d'ailleurs la même promesse à l'Association du camionnage du Québec pour le transport général, où là aussi il y a de graves difficultés. Il ne faut pas oublier que c'est l'ensemble du domaine du camionnage au Québec qui est soumis à de graves difficultés. Vos problèmes ont l'air plus dramatiques parce qu'effectivement quand il y a 200 camions, que j'appelle vos tonkas, sur le boulevard Saint-Cyrille, c'est évident que cela frappe plus, mais il y en a d'autres problèmes, des gens qui peut-être ne manifestent pas de la même façon, mais qui ont des problèmes aussi importants.

Il faut que j'oeuvre dans ce domaine. Il faut que je trouve des solutions, mais je ne peux pas les trouver dans un climat de manifestation comme cela s'est passé il y a quelques années; finalement on trouve, non pas des solutions à long terme mais de simples palliatifs. Il faut prendre le temps de trouver des solutions et accepter de part et d'autre qu'on ne pourra pas trouver la solution qui nous satisfera complètement. Je le faisais remarquer tantôt au président du poste 08. Il me répondait: On demande plus, au fond, pour avoir moins. Je reconnais qu'on peut demander plus pour avoir moins, mais, à un moment donné, il faut savoir accepter moins, effectivement.

M. Dubé: Sur le transport illégal, vous semblez disposé à faire quelque chose. D'accord. Mais sur la location, qui n'est pas illégale en somme, mais qui étouffe énormément nos camionneurs, si vous faites des enquêtes, vous vous rendrez compte que lorsqu'on loue 15 ou 20 "semitrailers", qu'on déplace les gars, qu'on les met à la place... On ne peut pas dire que c'est illégal, mais est-ce qu'on peut faire quelque chose pour arrêter la location qui remplace les petits camionneurs, qui les laisse dans le fond de la cour et qui travaille à leur place? En somme, ce sont les grosses compagnies, parfois multinationales, qui louent ces locations.

M. de Belleval: Dans quel domaine?

M. Dubé: Dans le domaine du vrac. Je parle du vrac.

M. de Belleval: Non, mais dans le transport de quel type de matériel?

M. Dubé: Terre...

M. de Belleval: Certainement pas dans le gravier.

M. Dubé: Terre, sable, gravier, n'importe quoi. Il arrive que l'entrepreneur n'achèterait pas de camions pour un emploi de trois ou quatre mois.

M. de Belleval: Je voudrais vous arrêter. Est-ce que vous faites allusion, par exemple, au témoignage de l'entreprise Delangis, qui est une petite ou moyenne entreprise québécoise...

M. Dubé: Cela en est une! Cela en est une qui vient travailler...

M. de Belleval: Est-ce que vous seriez contre ce genre de choses que fait la compagnie Delangis, par exemple?

M. Dubé: C'est sûr qu'on est contre une chose qui laisse nos camions dans la cour et qui travaille à leur place. L'entrepreneur n'achèterait pas de camions pour trois mois, mais, par contre, le gars peut les louer pour trois mois. C'est cela. Je ne vous dis pas que c'est illégal, c'est permis de le faire. Est-ce qu'il y a moyen de faire quelque chose dans ce domaine?

M. de Belleval: Sur toutes ces questions, je pense qu'il va falloir s'asseoir et parler sérieusement. Remarquez que, pendant les huit ou neuf mois où j'ai assumé les fonctions de ministre des Transports, alors que nous nous sommes rencontrés régulièrement, parfois à mon bureau de comté, parfois au ministère, vous ne m'avez pas souligné tous ces problèmes d'une façon également intensive, ni même tous ces problèmes du tout. Nous avons eu à travailler sur un certain nombre de questions, et sur toutes les questions sur lesquelles nous avons travaillé, j'ai réussi à vous donner satisfaction. Mais quand vous venez me voir pour me dire: Tel entrepreneur en travaux de voirie possède ses propres camions; c'est-y un peu insultant de voir ces beaux camions aller travailler sur tel contrat alors que mes camionneurs artisans ne travaillent pas! Ne me demandez pas de mettre cet entrepreneur en faillite. Ne me demandez pas de changer, du jour au lendemain, les règles du jeu de cet entrepreneur en lui disant: Ecoute, mon vieux, à partir de maintenant, l'ANCAl ne veut plus que tu travailles sur les travaux de voirie et tu ne travailleras plus sur les travaux de

voirie; au lieu de travailler dans le cadre de la réglementation actuelle, par exemple, 75-25, à l'avenir, ce sera 75-25, mais sur l'ensemble des travaux.

Je pense que, là-dessus, le député de Gatineau va partager mon opinion. Il y a des choses qu'on peut faire, mais on ne peut pas exercer une discrimination à rebours au profit de certains membres de la société. Je pense qu'il faut que vous vous rendiez compte qu'il y a des limites dans mon action, dans l'action du gouvernement.

Quoi qu'il en soit, pour en revenir à la location, c'est vrai que la location peut avoir un effet bénéfique, peut être légitime. C'est un moyen nouveau maintenant, on le sait, de financer, par exemple, des équipements, l'achat-bail, l'achat-location, etc. Toutes ces choses sont correctes. Par contre, ça peut donner lieu à des abus, ça peut donner lieu à de la pseudo-location. J'ai le même problème dans le transport général. Tout le monde admet aussi que ce n'est pas facile de faire la différence entre l'un et l'autre.

Vous savez, les filous dans notre société sont bien plus intelligents que les gens honnêtes pour trouver des moyens de se faufiler entre deux avocasseries.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président...

M. de Belleval: Parlez-en à Me Beaudet, il va vous en expliquer, des trucs.

M. Gratton: M. le Président, en écoutant le ministre...

M. Beaudet: Vous présumez.

M. de Belleval: C'est une taquinerie, ce n'est pas sérieux; j'espère que vous l'avez compris, Me Beaudet.

M. Beaudet: J'y suis habitué. Je commence à m'habituer, avec vous.

M. de Belleval: D'abord, vous m'avez l'air bien bâti, vous êtes capable d'en prendre, moi aussi.

M. Beaudet: Oh oui!

M. de Belleval: Je suis certain qu'on est capable de se respecter mutuellement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Goulet: ...

Le Président (M. Jolivet): N'entrez pas dans le débat, vous!

M. Gratton: Attendez votre tour.

M. Goulet: N'empêche qu'on ne sait pas quand vous êtes sérieux ou pas; c'est ça qui est le problème.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, maintenant.

M. Gratton: M. le Président, j'avais hâte que le ministre me laisse la chance de dire moi-même ce qu'il est en train de me faire dire.

M. de Belleval: Je le savais, c'est pour cela que j'insistais.

M. Gratton: M. le Président, je suis très heureux de la façon dont se terminent nos travaux. Je le prouverai en disant que j'avais préparé cet après-midi certaines notes qui devaient me servir de conclusion, quant à moi, à cette commission. Sauf pour changer le temps de certains verbes du futur que j'avais au présent, je n'ai eu à faire aucun changement à la suite des propos que vient de tenir le ministre, et j'en suis fort heureux.

Je désire d'abord remercier tous ceux qui se sont donné la peine de venir exprimer leur point de vue à cette commission dont le mandat consistait à identifier les causes du malaise actuel dans le transport de matériel en vrac et surtout tenter d'élaborer des hypothèses de solution. On aura constaté, au cours des trois derniers jours, que les individus, associations ou organismes qui ont témoigné ont surtout défendu leurs intérêts particuliers. Les postes d'affectation, par exemple, nous ont généralement demandé d'élargir les secteurs de travail qui pourraient leur être réservés en exclusivité totale ou partielle, alors que les entrepreneurs nous ont recommandé d'aller en sens contraire. (20 h 45)

II ne faut pas se surprendre, M. le Président, ni surtout se scandaliser de cela. Au contraire, il me semble qu'il est tout à fait légitime pour chacun de défendre ses propres intérêts face à une réglementation qui le touche aussi directement que celle-là. D'ailleurs, on n'est jamais mieux protégé que par soi-même. Les camionneurs artisans sont les premiers à le savoir.

Le gouvernement, celui qui élabore la réglementation et qui doit pourvoir à son respect et à son application, quel intérêt doit-il défendre? Le ministre nous a donné la réponse qui est évidente: l'intérêt commun, bien entendu, c'est-à-dire celui de l'usager des services de camionnage autant que celui qui fournit les services, mais, également le citoyen qui n'est ni l'un ni l'autre, mais qui risque d'être touché par le malaise social qui a déjà régné et qui pourrait possiblement régner à nouveau dans cet important secteur d'activité.

A la lumière d'opinions aussi diamétralement opposées que celles que nous avons entendues à cette commission, la tâche de pondre une telle réglementation devient presque une mission impossible. Je n'envie donc pas le ministre des Transports qui est pris avec la commande, mais je

me serais presque permis, s'il ne m'avait pas déjà devancé, de lui faire une suggestion; cela aurait été de lui recommander d'attaquer cette tâche en tentant de susciter des consensus plutôt qu'en recherchant la facilité des confrontations. Certains groupes ont tour à tour été accusés d'être les seuls responsables de la situation actuelle. L'ANCAI en particulier a été la cible de plusieurs témoins. A mon avis, le ministre, lorsqu'il disait tantôt que la décision qu'il avait prise il y a quelques mois était la bonne, a peut-être raison de le prétendre mais peut-être aussi son attitude n'a-t-elle pas été l'attitude idéale.

Quoi qu'il en soit, il est sûr que l'ANCAl n'est pas exempte de tout blâme. Avec 3581 membres — je l'apprends ce soir — le contraire surprendrait, car même à l'intérieur d'un parti politique, les membres ne sont pas toujours tous sans mériter certains blâmes, comme on l'a vu — et là, je m'excuse, je suis obligé de faire une petite boutade en passant, mais ce n'est pas une boutade, je le pense sérieusement — au sein du Parti québécois dernièrement.

Sérieusement, il n'est pas plus vrai que l'ANCAl est la seule responsable des difficultés qu'il est vrai, comme certains autres l'ont prétendu, que tous les entrepreneurs exploitent d'une façon éhontée les camionneurs artisans.

Je suis donc heureux de constater que la conclusion que tire le ministre ce soir ne se limite pas, comme je l'ai craint à un moment donné au début de nos travaux, à blâmer l'ANCAl, car, dans ce cas, il se serait lui-même voué d'avance à échouer dans ses efforts de résoudre le problème. Je pense que les travaux de notre commission ont clairement démontré cela.

Je suis donc heureux de la nouvelle ou peut-être bien de l'ancienne ouverture d'esprit, mais qui est plus évidente ce soir, du ministre. Cette attitude est beaucoup plus conciliante et cela lui sera sûrement beaucoup plus profitable dans ses efforts.

En tout cas, je voudrais lui dire que je lui souhaite sincèrement bonne chance et je l'assure de l'entière collaboration de l'Opposition officielle dans la recherche objective et honnête de la solution la plus simple possible à un problème qui, comme on l'a vu, est très complexe.

Je m'en voudrais de ne pas mentionner la différence entre l'attitude que j'adopte au nom de l'Opposition officielle et celle qu'une autre Opposition parlementaire avait adoptée devant un autre gouvernement, un gouvernement libéral.

Vous savez, la tentation pour un politicien, surtout à la veille d'une élection, est souvent grande de tirer un profit partisan, électoral, d'une situation en se disant: Si jamais on se retrouve au pouvoir, on trouvera bien le moyen d'arranger cela.

Je crains que ce soit un peu l'attitude que le prédécesseur du ministre actuel avait prise, sûrement pas malicieusement, sûrement pas avec de mauvaises intentions, mais c'est ce qui l'a probablement amené à ne plus être ministre des Transports, aujourd'hui.

Je vous avoue franchement, j'ai entendu des choses, à la commission, mais j'ai entendu des choses dans les coulisses aussi, M. le Président; j'ai entendu des camionneurs-artisans dire: S'ils en veulent des manifestations, on va leur en faire en pleine campagne électorale, parce qu'on ne s'apprend rien en disant: C'est fort possible qu'il y en ait une, et pas mal plus vite qu'on pense à part ça! En tout cas, moi, je le souhaite.

M. le Président...

M. de Belleval: Quand on est dans l'Opposition, on n'a rien à perdre!

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Goulet: La manifestation ou l'élection? Ou les deux?

M. Perron: Est-ce que vous souhaitez la manifestation ou les élections?

M. Gratton: Je pense que le fait de poser la question, M. le député de Duplessis, prouve que vous avez, pour le moins, un mauvais goût de la boutade.

J'allais justement dire que j'aimerais plutôt inviter les dirigeants de l'ANCAl et surtout leurs membres à aborder la tâche de bonifier la réglementation, d'en arriver à une solution en limitant, si possible, leurs interventions à des discussions du genre de celles qu'on a eues ce soir. D'ailleurs j'en remercie et j'en félicite M. Dubé, qui a été attaqué de façon assez rude par certaines personnes qui ont témoigné devant la commission. Je le félicite de la magnanimité avec laquelle il répond à ces accusations ce soir.

Je l'invite, lui et ses membres, à ne pas profiter d'une campagne électorale pour mettre le ministre actuel et le gouvernement actuel dans la situation de devoir possiblement signer des ententes ou faire des concessions qui, à court terme, pourraient vous donner une certaine satisfaction, mais qui, à long terme — on l'a vu au cours des trois derniers jours — ne régleront absolument rien, bien au contraire, et contribueront tout simplement à remettre à plus tard la solution que tous recherchent, c'est-à-dire une solution équitable pour tous, les camionneurs, les usagers et les pauvres politiciens comme le ministre, moi et les membres de la commission.

Encore une fois, M. le Président, je pense que les travaux de la commission se terminent sur une note beaucoup plus heureuse, beaucoup plus encourageante que ne le laissaient présager les premiers jours. C'est de bon augure! Je répète mes souhaits de bonne chance et je réitère à tous nos invités mes plus sincères remerciements. Je dirai, comme le ministre l'a dit cet après-midi, moi aussi — et peut-être plus que lui — j'ai appris beaucoup, et moi aussi je me rends compte que j'en ai encore pas mal à apprendre. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. D'abord, je peux également dire que j'ai été extrêmement heureux de participer aux travaux de cette commission. A la conclusion de ces travaux, je retiens d'abord que le domaine du transport en vrac est encore plus complexe que je ne le croyais et, deuxièmement, qu'il n'y a pas de solution miracle.

Il serait facile, à la fin de ces travaux, de s'en prendre peut-être au gouvernement qui, tout en apportant ou en tentant d'apporter des solutions, n'a peut-être pas encore trouvé celle qui permettrait de faire respecter par les parties concernées les ententes ou les règlements qui sont déjà intervenus. Il serait facile, bien sûr, de jeter la pierre à l'adversaire, mais beaucoup plus difficile d'admettre que, de chaque côté — et on l'a constaté au cours des travaux de la commission — chaque partie a probablement ses fautes et a peut-être, à certains moments, abusé de la situation pour en tirer le meilleur profit possible. On dit souvent: Là où il y a de l'homme il y a de "l'hommerie"; on l'a constaté encore une fois durant les travaux de cette commission.

D'auire part, il est vrai que le secteur du transport en vrac est très complexe. On l'a constaté, bien sûr; ses problèmes sont très nombreux. De fait, la commission parlementaire sera peut-être un élément de solution pour régler ou tenter de régler certains problèmes. En tout cas, je pense que cette commission aura permis de constater une volonté de part et d'autre de redéfinir les règles du jeu pour que chacun puisse y trouver sa juste part du gâteau. On sait, par ailleurs, que personne ne veut mourir et chacun emploie — c'est de bonne guerre — des moyens et revendique des solutions qui ont l'avantage de le favoriser — lui ou elle — personnellement, lorsqu'on parle d'association ou de regroupement et je dirais que c'est normal.

Il ne s'agit pas pour autant de favoriser ou de vouloir favoriser indûment une catégorie de travailleurs pour ensuite en brimer une autre. Ce ne serait pas la solution. Comme je l'ai dit au début de la commission, ce ne serait que déplacer le problème et non pas le régler. Les travaux de la commission auront permis d'aller plus en profondeur de ce côté.

Il faudra encore travailler très fort pour apporter des solutions, afin d'obtenir justice et équité pour tous. Je suis confiant qu'on pourra y arriver, à la suite des travaux de cette commission.

Avec mon collègue de Saint-Hyacinthe, je me joins aux membres de la commission pour remercier tous ceux et celles qui se sont déplacés et qui sont venus de très loin, pendant trois jours. Ils sont venus, ici, devant cette commission pour nous conseiller dans le domaine du transport en vrac, nous conseiller, parce que vous êtes des experts, vous vivez du transport en vrac et vous connaissez les problèmes du transport: Souvent, pour régler un problème, on dit toujours qu'il faut revenir à la base. C'est ça, je pense, le but premier d'une commission parlementaire, de convoquer les personnes qui sont vraiment compétentes, même si elles divergent au niveau de certaines opinions, de convoquer ces personnes qui s'y connaissent et de venir dire au législateur où sont les problèmes, d'abord, pour les identifier et souvent, l'aider à trouver les éléments de solution.

C'est de vous que viendront les solutions. C'est tout à votre honneur que vous vous soyez déplacés et que vous ayez participé activement et objectivement aux travaux de cette commission.

Quant à moi, M. le Président, vous vous en êtes certainement aperçu durant les travaux de cette commission, à chaque fois que je prenais la parole pour aborder un problème du transport en vrac, pour interroger sur ce dossier très complexe du transport en vrac, à chaque instant, je me rappelais une parole que mon père me disait souvent et c'est à peu près celle-ci — je pense que c'est un vieux proverbe chinois — il disait: Si nous ne parlons pas, nous passons pour ignorants et, si nous parlons, il arrive de prouver que nous le sommes. C'est cette peur que j'avais chaque fois que je prenais la parole.

J'ai été extrêmement heureux, M. le Président, de découvrir, durant les travaux de cette commission, que le problème fondamental, majeur, est d'abord et avant tout un problème d'attitude. C'est cette attitude qu'il faudrait changer. Je pense que la solution n'est pas trop loin si chacun y met de la bonne foi et change un peu l'attitude qu'il a envers l'autre.

Je vous remercie et je remercie les gens qui ont participé à cette commission.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que quelqu'un de l'ANCAl a l'intention de réagir avant qu'on permette d'intervenir aux deux autres personnes qui auront à adresser la parole? Il y a M. le député de Gatineau et M. le ministre, pour terminer.

M. Piuze: Merci, M. le Président, c'est juste pour le ministre des Transports. Il a parlé beaucoup, surtout la première journée, de mon confrère, Me Beaudet et de moi-même. Pour lui démontrer qu'on ne lui garde pas rancune, Me Beaudet et moi, on lui offre une pipe. Si jamais il pensait à des avocats, il fumera la pipe.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je suis très heureux de constater... (21 heures)

Le Président (M. Jolivet): Dépôt de document.

M. Gratton: Je suis très heureux... Le Président (M. Jolivet): M. Piuze.

M. Piuze: J'ai failli vous demander une directive, à savoir si on pouvait déposer à une commis-

sion parlementaire un objet comme une pipe, mais vous aviez lu cet après-midi qu'on parlait de documents. C'est pour ça qu'on la remet directement au ministre; on ne la dépose pas.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, seuls les membres de cette commission ont le droit de demander une directive, mais je vous l'aurais quand même permis.

M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je ne peux pas laisser passer l'occasion. Je vais vous citer, sans commentaire, un passage de nos travaux, le 26 août, avant-hier, R/661-T, page 2, M. Mailloux: "M. le Président, je m'excuse infiniment, mais, comme M. le ministre des Transports vient de m'imputer la responsabilité des paroles qu'a dites mon collègue de Gatineau, j'affirme devant la commission que je n'ai donné aucun conseil, ni d'une façon, ni de l'autre, à mon collègue, mais ce qu'il a dit, je l'endosse entièrement quant à la façon dont il a traité les procureurs et l'ANCAI." On note: "M. Gratton: Mets ça dans ta pipe, beau "smart"! Là, il en a une pour le mettre dedans.

M. le Président, en terminant, je voudrais simplement ajouter moi aussi aux propos du premier paragraphe de la lettre de Me Beaudet à votre endroit. Je vous avais dit, en boutade, en aparté, qu'au cours de la prochaine campagne électorale je serais peut-être un de ceux qui iraient promouvoir l'élection de votre adversaire libéral dans votre comté. Je vous ai également dit de ne pas vous en faire trop trop, que ça pourrait plutôt vous aider que vous nuire. Alors, ce soir, je ne voudrais pas vous nuire plus qu'il ne faut, mais, moi aussi, j'endosserai les propos de Me Beaudet en disant que vous avez très bien présidé nos travaux et je vous en remercie.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. de Belleval: Je veux remercier aussi très sincèrement tous ceux qui ont travaillé très fort, chacun de son côté, pour présenter des mémoires. Je veux remercier mes deux collègues porte-parole de l'Opposition officielle et les autres collègues. Mais, quant à mes deux collègues de l'Opposition officielle, je veux surtout rendre hommage à leur sincérité et aussi parfois à leur humour. Quant à cette pipe, je suppose que vous me l'avez donnée aussi longue pour pouvoir me la tirer encore plus facilement.

Félicitations et merci à vous, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Quant à moi, avant d'ajourner cette commission sine die, je retiens du député de Gatineau une partie de son intervention qui disait que ce pourrait être une mission impossible que d'essayer de trouver un règlement à cet ensemble de discussions qu'on a eues depuis trois jours, mais espérons que, comme l'émission, ça se terminera bien.

Fin de la séance à 21 h 4

ANNEXE A

Mémoire de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Messieurs les membres de la Commission,

L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec est heureuse de vous présenter aujourd'hui le présent mémoire sur la situation du transport en vrac au Québec. Nous vous sommes très reconnaissants de l'occasion que vous nous donnez d'exprimer nos idées et recommandations sur ce dossier toujours d'actualité qu'est le transport en vrac au Québec...

C'est d'ailleurs la tenue d'une commission parlementaire sur le transport en vrac que nous avions demandée à votre prédécesseur, M. Lucien Lessard' dans une lettre datée du 6 juillet 1979 et à la suite des manifestations de 1977, de l'implantation du règlement 112 dans trois (3) régions du Québec et de la crainte de perte de contrôle que craignaient certains groupes de camionneurs. M. Lessard avait fait sourde oreille à nos demandes, se contentant de discuter du dossier en l'absence des entrepreneurs en construction..., malgré le fait que ceux-ci doivent transiger, selon les devis, pressions ou chantages, avec ce secteur de travail protégé qu'est le transport en vrac, secteur né d'un patronage politique de nos gouvernements.

Le présent mémoire est le fruit d'une consultation directe de tous les entrepreneurs en construction spécialisés dans les travaux de voirie et génie civil membres de notre association. Les requérants de services que nous avons l'honneur de représenter aujourd'hui se sont penchés très attentivement sur ce dossier du transport en vrac et vous soumettent leur point de vue au cours des pages qui suivent.

Nous sommes convaincus que la Commission permanente des transports apportera à nos recommandations toute l'attention qu'elles les méritent et ce, dans l'espoir d'apporter des solutions définitives aux malaises dans l'industrie du camionnage en vrac au Québec.

Verrons-nous un gouvernement poser un geste concret à ce problème politique...?

Damien Morissette

Président du Conseil d'administration

INTRODUCTION

L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec a été incorporée en 1944 et regroupe exclusivement des entreprises de construction spécialisées dans les travaux de voirie et génie civil. Ces travaux de construction comprennent notamment ceux de voirie, grands travaux, agriculture, travaux municipaux, déneigement, transport d'énergie, production et fourniture de béton préparé, béton bitumineux, pierre concassée et agrégats. Notre association, à appartenance sur base volontaire, n'en regroupe pas moins la très grande majorité des entreprises de construction spécialisées dans ce secteur bien précis de travaux de construction.

Ses quelque six cent (600) membres [constructeurs et fournisseurs), répartis sur tout le territoire de la province de Québec, exécutent environ pour plus de quatre-vingt-dix (90) pour cent des budgets en immobilisation des différents donneurs d'ouvrage tels le ministère des Transports du Québec (et autres ministères), les municipalités, l'Hydro-Québec, la Société d'énergie de la Baie James, etc.

Dans l'ensemble, plus de vingt-cinq mille (25 000) ouvriers spécialisés (métiers, occupations, emplois) sont directement a l'emploi de cette industrie, sans compter le nombre plus élevé de ceux qui dépendent d'industries parallèles: aciéries, cimenteries, industries pétrochimiques, carrières, usines d'asphalte et évidemment camionnage.

Dans l'exécution de leurs travaux journaliers, les entrepreneurs en construction (voirie et génie civil) font appel aux services de transporteurs en vrac, que ce soit volontairement ou par le biais d'obligations contractuelles; ces transporteurs se voient souvent confier le transport de sable, terre, gravier, pierre et béton bitumineux. Les constructeurs sont donc très familiers avec les rouages de la réglementation et les aspects pratiques du transport en vrac, en leur qualité de requérants de services.

L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec a pour objectif primordial la défense, la sauvegarde et la promotion de l'intérêt général de ses membres. Elle s'acquitte de ce mandat en faisant valoir les intérêts légitimes de ses membres devant tous les organismes impliqués dans l'industrie de la construction ou ses industries parallèles, dont l'industrie du camionnage en vrac.

C'est donc empreints d'un sentiment de légitimité et d'objectivité que nos membres vous adressent aujourd'hui leur point de vue et leurs recommandations sur le transport en vrac.

RÉGLEMENTATION ACTUELLE AU NIVEAU DES PERMIS ET FIXATION DES TAUX DE TRANSPORT

Les entrepreneurs en construction membres de notre association et en leur qualité de requérants de services connaissent la réglementation actuelle dans le*domaine du transport en vrac. Ils sont très familiers avec le Règlement sur le camionnage en vrac dans sa teneur actuelle (A.C. 1079-78 du 26 avril 1978) ainsi que des différentes décisions de la Commission des transports du Québec quant à la fixation des taux et tarifs de transport des matières en vrac Cfixation annuelle).

Nous croyons qu'une réglementation modifiée sur le transport en vrac peut demeurer, car elle offre aux transporteurs et aux requérants de services des règles d'opération connues de tous et appliquées par tous. Nous jugeons utile au bien-être de cette industrie en général que l'Etat garde une certaine forme de contrôle tant sur l'accessibilité à l'industrie que sur son mode de rémunération; de façon générale, la réglementation peut servir adéquatement les intérêts légitimes des parties en présence.

Malgré le fait que nous approuvions le principe de la réglementation dans le transport en vrac, nous estimons que certains correctifs devraient être apportés au niveau de la réglementation actuelle et nous nous permettons ici d'en discuter.

1 - RÉGLEMENTATION ACTUELLE AU NIVEAU DES PERMIS A— Émission des permis

Nous recommandons à cette commission de maintenir le gel dans l'émission des permis de camionnage en vrac, tel qu'édicté par l'A.C. 2079-97 du 22 juin 1977 et en vigueur le 20 juillet 1977. Nous croyons que l'état actuel de l'économie québécoise ne peut assurer un plus grand volume de travail à des nouveaux arrivants dans le transport en vrac, le volume actuel étant nettement insuffisant à ceux qui opèrent déjà: les événements des dernières semaines sont à même de nous le confirmer...

Au surplus, nous recommandons que les distinctions "camionneur artisan" et "entrepreneur", telles qu'antérieurement en vigueur dans le Règlement 12 sur le camionnage en vrac (A.C. 2389-73 du 29 juin 1973 et en vigueur le 27 juillet 1973) soient réinstaurées: camionneur artisan: toute personne physique qui ne possède qu'un camion, qui le conduit elle-même et l'utilise pour faire du camionnage en vrac. entrepreneur: toute personne qui possède plusd'un camion et qui les utilise pourfairedu camionnage en vrac.

D'ailleurs, cette véritable notion d'artisan est également appliquée dans d'autres législations dont: Loi sur la santé et la sécurité du travail artisan: une personne qui, dans le cours de ses affaires.seule, en équipe ou en société, pour son propre compte et sans travailleur à son service, exécute un travail.

Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction artisan: une personne physique faisant affaires pour son propre compte, qui exécute elle-même, pour autrui et sans l'aide de salarié, des travaux de construction.

Ces distinctions, abolies par l'arrêté en conseil 2079-97 du 22 juin 1977, devraient être réinstaurées dans la réglementation. En effet, nous considérons qu'une personne physique propriétaire de plus d'un véhicule 0e règlement sur le camionnage en vrac en mentionnait même quatre Ç4)) et faisant opérer ces véhicules par des chauffeurs, ne mérite aucunement l'appellation camionneur artisan, mais est bel et bien un entrepreneur en transport en vrac. À ce titre, nous croyons que cet entrepreneur en transport en vrac ne doit pas jouir des mêmes avantages que le réel camionneur-artisan qui lui, tire sa source de revenus uniquement de son camion.

Par conséquent, nous recommandons que soit réinstaurée la vraie notion d'artisan et que seuls cesdits camionneurs artisans soient admis comme abonnés aux postes ou sous-postes d'affectation pour des fins de répartition et d'affectation de transport en vrac. De cette façon, les vrais camionneurs artisans pourront se partager le volume de travail de cette industrie qui, par le fait même, n'en sera qu'accru pour eux.

B- TRANSFERT DES PERMIS

Nous croyons également qu'il est indispensable de s'interroger sur la nécessité que la Commission des transports du Québec continue à accepter des transferts de permis de camionnage en vrac. Nous l'avons déjà dit, le volume actuel de travail dans le transport en vrac est nettement insuffisant pour tous les détenteurs actuels de permis. Non seulement doit-on interdire l'accès au marché de nouveaux arrivants, mais doit-on également tenter de réduire le nombre actuel de détenteurs de permis dans le butd'ajuster le volume de travail

à la main-d'oeuvre disponible. Dans cette optique, nous recommandons le gel dans les transferts de permis de camionnage en vrac.

De plus, et si l'on considère qu'en vertu de l'article 23 du Règlement sur le camionnage en vrac, la Commission des transports du Québec doit être convaincue de la nécessité du service et de l'absence de ce service par un autre titulaire de permis avant d'accepter une demande de transfert de permis, nous nous interrogeons fortement quant à l'acceptation des 1926 en 1977,1740 en 1978 et 1178 en 1979 demandes de transferts accordées par la Commission, étant en présence d'un trop grand nombre de détenteurs de permis pour le volume de travail possible. Depuis 1977 que les transporteurs se plaignent ouvertement de ne pas avoir de travail: y-a-t-il eu vraiment nécessité du service et absence de service...? Nous blâmons sévèrement la Commission des transports du Québec de ne pas avoir apprécié cet état de fait et d'avoir permis à des transporteurs de payer chèrement l'achat d'un camion et aussi d'un permis, disons-le, pour opérer dans une industrie où peu de travail leur était accessible. Il est grand temps que tout cela cesse!

2- RÉGLEMENTATION AU NIVEAU DES POSTES D'AFFECTATION

Nous sommes pour le maintien d'un système de répartition et d'affectation de transport en vrac au moyen des postes et sous-postes d'affectation, tel que contenu dans le Règlement sur le camionnage en vrac. Nous croyons qu'un tel système offre aux requérants de services un bassin central de main-d'oeuvre appréciable et offre aux transporteurs de bonnes sources de travail. Cependant, nous croyons qu'aucune obligation légale ou contractuelle ne doit contraindre le requérant de services ou le transporteur d'y recourir. Â l'exemple de ce qui prévaut actuellement dans l'industrie de la construction, salariés et employeurs sont libres de recourir aux mécanismes de placement en place, soit les bureaux syndicaux de placement, le bureau de placement de l'O.C.Q., le Centre de main-d'oeuvre du Québec; ils peuvent également embaucher des salariés de la construction directement sur le chantier et lorsque de tels salariés s'y présentent. Il devrait en être de même dans l'industrie du transport en vrac, en regard des postes et sous-postes d'affectation: liberté totale d'y faire appel.

3- RÉGLEMENTATION ACTUELLE SUR LA FIXATION DES TAUX DE TRANSPORT

Nous sommes tout à fait d'accord avec une fixation générale de taux et tarifs de transport des matières en vrac par la Commission des transports du Québec. Comme nous l'avons précisé antérieurement, des taux de transport, déterminés à partir des représentations des transporteurs et des requérants de services, constituent une base d'opération dans une industrie de ce genre. D'ailleurs, transporteurs et requérants de services ont toujours le loisir d'y participer et d'apporter leurs recommandations au niveau d'interventions devant la Commission des transports du Québec.

L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec intervient depuis le tout début dans la fixation des taux de transport devant la Commission des transports du Québec et ce, au nom et après consultation de tous ses membres.

Cependant, et à l'inverse de ce qui prévaut actuellement, nous estimons qu'une révision annuelle des taux de transport sur avis proprio motu de la Commission des transports du Québec, à pareille date et de façon automatique à chaque année, est injustifiée. Nous croyons que telle révision ne devrait avoir lieu que sur requête d'un groupe intéressé, et ce dépendamment des besoins de révision s'il y a lieu.

De plus, nous souhaitons vivement que la Commission des transports du Québec songe sérieusement à instaurer des taux fixes de transport, soit des taux comportant à la fois un minimum et un maximum (à l'exception de la région 10); présentement, seuls les taux tonne/kilomètre le sont, et il devrait en être de même pour les taux horaires. En effet, nous croyons que l'établissement de taux fixes éviterait de devoir négocier des taux, ce qu'entraînent présentement des taux minimums.

Finalement, et si l'on se remémore quelque peu le déroulement de la fixation des taux en 1980, nous estimons que la Commission des transports du Québec doit juger elle-même, et à la lumière des représentations des intervenants, de la fixation des taux; elle ne devrait pas nécessairement endosser les ententes intervenues entre les requérants.

IMPACT ÉCONOMIQUE ET APPLICATION DE CETTE RÉGLEMENTATION

L'application de la présente réglementation, dans sa forme actuelle, cause déjà un préjudice à l'entreprise de construction. Le plus bas soumissionnaire sur certains projets du ministère des Transports, de certaines villes, municipalités, Hydro-Québec et autres, doit faire appel aux postes d'affectation et est soumis à la clause 75/25. D'une part, il y a obligation du plus bas soumissionnaire de passer par le poste d'affectation et, d'autre part, le poste d'affectation n'est pas tenu de se soumettre au plan d'exécution de l'entrepreneur.

Prenons par exemple un projet de revêtement de béton bitumineux Ccouche d'usure), où il est reconnu que l'exécution des contrats est de courte durée.Déjà l'entrepreneur est tenu d'assurer le taux horaire minimum pour la première journée dû à une décision en ce sens de la Commission des transports du Québec. Dans le passé, pour un tel contrat, l'entrepreneur pouvait compter sur une dizaine de camions, soit quelques six (6) roues et quelques dix [10) roues pour exécuter ses travaux de pavage en milieu urbain et

rural. Si l'entrepreneur n'utilisait pas ses propres camions, il était victime d'un chantage ou du moins de pressions de la part des postes d'affectation. On se rappellera que, l'an dernier, la pose de revêtement de pavage bitumineux sur la route 20 dans la région de St-Hyacinthe a été perturbée par des arrêts de travail. L'entrepreneur ne possédait pas ses propres camions et utilisait des camionneurs artisans, conformément à la définition du règlement no 12. Cependant, l'entrepreneur n'était pas obligé de passer par les postes d'affectation, ni par les devis, ni par contrat; à cause de l'arrêt de travail causé par les camionneurs du poste d'affectation no 6, à cause de leur manifestation qui a obstrué toute la circulation dans la région de St-Hyacinthe, à cause de leurs menaces et â cause du pouvoir discrétionnaire du poste d'affectation sur les camionneurs eux-mêmes, le ministère a dû s'en mêler et régler le problème: il a cédé à l'intimidation et il a inséré une nouvelle clause dans l'addenda du "transport en vrac". Voici les termes de l'addenda: "Pour les mélanges bitumineux et les granulats pour accotements et correction avant revêtement, l'entrepreneur qui n'utilise pas ses propres camions doit engager, via le poste d'affectation situé dans le territoire où sont livrés ces matériaux, les camions requis pour en effectuer le transport". Le ministère pensait par là avoir réglé le problème. D'abord, l'entrepreneur, étant obligé de passer par les postes d'affectation, risque de se faire imposer des camions qui ne possèdent pas la longueur de boite voulue pour décharger dans les paveuses ou encore des camions provenant de chantiers d'excavation et contenant des matières organiques, affectés au transport du béton bitumineux dans la même journée. Si, à cause de ces matières organiques, on altère la qualité du mélange ou de l'échantillon prélevé, l'entrepreneur risque d'être pénalisé par son donneur d'ouvrage, en l'occurrence le ministère des Transports du Québec, celui-là même qui l'oblige à utiliser les camions venant du poste d'affectation. Peut-on être juge et partie, messieurs du M.T.Q.? Et que dire des changements de camions qui surviennent au cours d'une même journée sous divers prétextes. Il est indispensable que l'entrepreneur, soumis à une clause de pénalités sur le produit de béton bitumineux, soit le seul responsable de toutes les opérations nécessaires à la livraison d'un produit de qualité au donneur d'ouvrage. Donc, la contrainte de passer par les postes pour les entrepreneurs qui ne possèdent pas leurs propres camions doit être enlevée. Pourtant, l'expérience passée du M.T.Q. avait éliminé cette pratique ou cette obligation de se soumettre aux volontés d'une tierce personne en ce qui regarde les pavages de béton bitumineux.

D'autre part, nous n'osons croire que le gouvernement actuel accordera à ces transporteurs en vrac des privilèges accrus pour permettre à ce groupe protégé d'avoir droit à un pourcentage du transport en dessous de la ligne d'infrastructure. Au point de vue économique, les coûts de production augmenteraient d'au moins 15 à 25%, ce qui représenterait des montants très appréciables pour les contrats donnés par les divers donneurs d'ouvrage, c'est-à-dire les ministères concernés et les organismes publics et parapublics. Les travaux en dessous de l'infrastructure sont soumissionnés en fonction des méthodes de travail de chaque entrepreneur et en tenant compte de l'outillage disponible. Les méthodes d'exécution peuvent se faire â l'aide de pelles mécaniques.de rétrocaveuses, de tracteurs sur roues et sur chenilles, de décapeuses, de niveleuses, de chargeurs sur roues et de camions sur routes et hors routes. C'est à cause de cet agencement d'outillage et en tenant compte de sa disponibilité et des travaux en cours que l'entrepreneur offre le prix le plus avantageux au donneur d'ouvrage. Cet entrepreneur est responsable de l'exécution des travaux et doit allier production, efficacité, contrôle et qualité pour remettre le produit soumis au donneur d'ouvrage ou en subir les conséquences graves du côté financier. Si l'Hydro-Québec, la S.E.B.J. et les divers ministères se vantent de réaliser des économies sur les prévisions budgétaires, ces économies sont dues en grande partie à l'ingéniosité d'entrepreneurs à trouver des méthodes d'exécution des plus avantageuses. Toute forme de contrainte de nature à affecter la gérance d'un projet et imposée à l'entrepreneur se traduira par une augmentation substantielle des coûts. Les entrepreneurs n'ont pas de secteurs protégés et assurés et ils doivent s'ajuster à l'offre et à la demande. Il est impensable dans le système de soumissions publiques d'imposer des méthodes de travail. Le transporteur en vrac est équipé pour transporter dans les routes carrossables et il ne saurait être question de l'utiliser en partie pour des travaux en dessous des lignes d'infrastructure, lesquelles sont décrites à la section no 26 - Terrassement des devis du ministère des Transports du Québec. On constate que ce genre de travaux ne pourrait être payé à la tonne/kilomètre, car le soumissionnaire doit tenir compte de la méthode de mesurage et du mode de paiement décrit dans les devis du ministère des Transports du Québec. Le prix unitaire exigé doit comprendre l'achat du matériel, le décapage de la chambre d'emprunt, l'extraction, le chargement, la construction des chemins de halage, l'épandage, le compactage ainsi que la fourniture de la main-d'oeuvre, de l'outillage et des autres dépenses incidentes. Pour l'emprunt de classe "B" dont le transport est inclus en totalité dans le prix unitaire à la verge/cube ou au mètre/cube, tout en tenant compte du choix de l'outillage et des distances de déplacement, les prix unitaires peuvent varier en moyenne de 15 à 25%; nul ne peut nier que la méthode d'utilisation des décapeuses pour un chantier déterminé entraîne une économie de l'ordre de 20 à 25% sur la méthode qu'on utilisait avec les chargeuses sur roues et camions.

La réglementation actuelle, loin de rétablir l'ordre dans l'industrie du transport en vrac, a créé des monopoles régionaux. Le règlement 112, sous le couvert de la démocratie et d'une répartition équitable des revenus pour les transporteurs en vrac inscrits aux postes, a ébranlé les associations de camionneurs existantes. Il leur a fallu un certain temps pour rétablir un certain contrôle et se répartir les régions du Québec. Constatant les pouvoirs que se donne le directeur du poste, les entrepreneurs ont remarqué la similitude des méthodes de ces postes d'affectation et de celles des bureaux de placement syndicaux dénoncées par le

rapport Cliche. Quand on a des pouvoirs discrétionnaires sur ses membres, et qu'on leur restreint le libre choix de se trouver eux-mêmes du travail, on peut se faire taxer de brimer les droits élémentaires de l'homme. Tout ce qui manque à ces postes d'affectation pour ressembler aux bureaux de placement tels que nous les avons connus avant la Commission Cliche, c'est d'obtenir l'agrandissement de leur secteur protégé. Voici un exemple illustrant bien ce que nous avons avancé. Dans les villes de Montréal et de Québec, avant même l'existence des postes d'affectation et du secteur protégé, les transporteurs en vrac se rendaient aux carrières, se plaçaient à la file indienne et attendaient leur tour pour livrer la pierre aux destinataires. Le respect mutuel des camionneurs constituait et demeure encore un poste de répartition gratuit. Ces vrais camionneurs qui vivent seulement des gains de leur véhicule seront d'accord avec nous pour affirmer qu'on ne peut tolérer l'ingérence graduelle des postes d'affectation dans le domaine de l'entreprise privée. Quand on veut travailler et qu'on possède des normes personnelles de travail, il n'est pas nécessaire d'être sous l'emprise des pouvoirs discrétionnaires des postes d'affectation. Il est temps que le gouvernement, qui a créé ces postes, mène une enquête des plus minutieuses sur ce qui se passe dans les organismes qu'il a lui-même créés et même subventionnés.

Nous pouvons affirmer que ce secteur protégé amène des abus de pouvoirs de la part des postes d'affectation. Dans la région no 5, un entrepreneur soumissionne et obtient un contrat de l'Hydro-Québec. Aucune obligation contractuelle ne lie cette entreprise à la clause 75/25. Par chantage et pressions, on a intimidé l'entrepreneur et celui-ci reçoit une recommandation voilée de son "donneur d'ouvrage" signifiant: "Si tu ne veux pas avoir de trouble sur ton chantier, soumets-toi aux exigences du poste d'affection no 5". De quel droit nous impose-t-on une tierce partie par la force? Car on ne peut pas compter individuellement sur la défense théorique de faire appel à la Sûreté du Québec etc. Dans cette même région no 5, un de nos membres, pour faire un chemin de détour, a utilisé ses propres camions un vendredi afin que le lundi suivant le travail reprenne normalement. Cet entrepreneur a toujours respecté la clause de son contrat avec le ministère et la proportion de 75/25 pour le projet, mais le directeur du poste ne fut pas satisfait car ce vendredi-là il avait utilisé ses propres camions. Il incite donc les camionneurs à faire la grève. N'est-ce pas là un abus de pouvoir? En ce qui regarde la régie interne des postes d'affectation, qu'on peut qualifier de pseudodémocratie, nous laissons à nos gouvernements le soin de vérifier l'impact socio-économique de ces structures qu'il a créées lui-même. Quant à nous, nous réclamons des mesures immédiates de la part du gouvernement pour éviter toute forme d'ingérence de la part des postes d'affectation dans nos opérations d'exécution.

Si les camionneurs se plaignent du manque à gagner, il en est de même pour les entrepreneurs. La construction est soumise à des cycles; tant et aussi longtemps que les gouvernements n'agiront pas à titre de catalyseur dans les périodes creuses, nous connaîtrons le phénomène des hauts et des bas. Le dicton demeure encore vrai "Quand la construction va, tout va". Nous reproduisons en annexes no 1 et no 2, les courbes d'heures travaillées dans l'industrie de la construction, tel que préparé par l'Office de la construction du Québec et on se rend compte de la période critique que nous vivons suite à la période apparente de prospérité qu'on a connue de 1972 à 1975, alors que les entrepreneurs et les camionneurs se dotaient d'équipements pour faire face à une demande très haute et à court terme, mais qui ne s'est pas maintenue par la suite. Il existe des problèmes pour tous dans la construction et nous croyons qu'on devrait relire et continuer d'appliquer de nombreux extraits des recommandations de la Commission Cliche (1) et aussi des recommandations du Conseil économique du Canada (2) afin d'éviter ou d'atténuer cette instabilité cyclique de la construction, laquelle est directement liée aux problèmes du transport en vrac [voir annexes no 3 et no 4).

UNE PLANIFICATION À LONG TERME ÉVITERAIT DES PROBLÈMES QUE TOUT LE MONDE CONNAÎT PRÉSENTEMENT.

SECTEURS DE TRAVAIL PROTÉGÉS

Les entrepreneurs en construction membres de notre association onttoujours prôné l'application du principe de "la libre entreprise au Québec". Dans cette optique qui, croyons-nous, est la base normale à toutes bonnes pratiques de commerce, nous ne voyons aucune pertinence â ce que le gouvernement du Québec accorde des secteurs de travail protégés.

Ce principe de "la libre entreprise" exige et implique que le Québécois qui désire faire commerce dans n'importe quel secteur d'activités puisse le faire librement, tant au niveau du choix de son secteur d'activités qu'au niveau du choix de ses cocontractants.

Pourquoi l'État, et â même les deniers publics, imposerait-il â une certaine catégorie de la population l'obligation de contracter avec une certaine autre? Pourquoi et au nom de quel principe l'État privilégierait-il un groupe de commerçants et souvent au détriment d'un autre...? Est-ce le rôle de l'État d'assurer et de garantir à un groupe donné un volume de travail, un revenu annuel, ou ne devrait-on pas laisser agir les règles normales de l'offre et de la demande et l'appréciation individuelle de la situation économique...?

(1 ) Rapport de la Commission d'enquête sur l'exercice de la liberté syndicale dans l'industrie de la construction (2) Pour une croissance plus stable de la construction.

Contrats du ministère des Transports: clause dite 75/25

Le gouvernement du Québec, depuis environ quinze (15) ans, privilégie de façon directe une catégorie de commerçants appelés transporteurs en vrac. En effet, et par le biais d'une obligation contractuelle dite "clause 75/25", l'Etat oblige les entrepreneurs en construction à transiger avec une catégorie déterminée de la population: les transporteurs en vrac. Qu'il suffise de rappelerque la clause 75/25 stipuleque l'entrepreneur et ses sous-traitants doivent utiliser en tout temps, dans une proportion d'au moins soixante-quinze (75) pour cent en nombre, les services de camionneurs artisans, lesquels camionneurs artisans doivent avoir été embauchés via le poste d'affectation: cette clause 75/25 s'applique pour le transport de matériaux placés au-dessus de la ligne d'infrastructure. Les entrepreneurs en construction, s'ils veulent soumissionner et décrocher des contrats du ministère des Transports du Québec, n'ont d'autre choix que d'accepter cette clause et de s'y conformer: peut-on trouver plus bel exemple d'un secteur de travail protégé? Les entrepreneurs en construction oeuvrent dans un système de soumissions publiques et nous estimons qu'il est injustifié de poser de telles barrières, restrictions ou contraintes dans les demandes de soumissions publiques: nous le répétons, l'entrepreneur doit être libre de choisir ses cocontractants comme bon lui semble et quand bon lui semble.

Nous endossons les propos de l'Honorable juge Jean Moisan de la Cour supérieure dans son jugement dans l'affaire ACHILLE HOUDE -VS- CITE DES SEPT-ILES -ET- GEORGES BÉLANGER du 10 décembre 1979: "Cette obligation (clause 75/25) créée par la Ville (Sept-lles) peut procéder d'un bon sentiment, dans un but d'équité et de protection du revenu des camionneurs artisans, mais ce but, si louable et généreux qu'il soit, n'en demeure pas moins une entrave au libre jeu de la concurrence en matière de soumissions publiques. Il nous apparaît contraire a l'intérêt du public en général que l'on impose aux soumissionnaires ce type d'obligation qui peut éventuellement le soumettre à des exigences exorbitantes de la part des camionneurs artisans et qui, de toute façon, empêche l'exercice du jeu normal de la libre concurrence lorsqu'il s'agit du transport..."

Hormis ces propos du Juge Moisan, nous considérons que l'actuelle clause 75/25 est nettement préjudiciable à l'entrepreneur et ce, pour les principales raisons suivantes.

Premièrement, il faut toujours garder à l'esprit que bon nombre de compagnies de construction possèdent tout l'équipement technique nécessaire à la réalisation de leurs contrats; les contrats de construction comportant très souvent une partie transport, les entrepreneurs possèdent fréquemment les camions nécessaires pour effectuer ce transport. Peut-on nous blâmer d'exécuter nos contrats avec nos propres véhicules? Pour de telles entreprises, l'application de la clause 75/25 les contraint à ranger leurs équipements et à engager des camionneurs artisans? Devraient-ils eux aussi venir manifester sur la colline parlementaire...? Pourquoi favoriser le camionneur en vrac et pénaliser l'entrepreneur? Pourquoi l'entrepreneur qui possède les véhicules suffisants ne peut-il pas les utiliser sur ses propres contrats? Pour les entreprises possédant les équipements nécessaires, l'application de la clause 75/25 leur cause un net préjudice financier et ce, directement en faveur des camionneurs en vrac. Nous croyons qu'une telle situation est injustifiée, inacceptable et nettement discriminatoire à l'endroit des entrepreneurs en construction.

Deuxièmement, et même pour les entreprises ne possédant pas tout l'équipement nécessaire à la réalisation de leurs travaux de construction, la clause 75/25 n'en demeure pas moins inacceptable. Nous croyons, et au risque de nous répéter, que l'entrepreneur doit toujours demeurer libre de transiger avec le cocontractant de son choix et ce, dans le but de soumettre le meilleur prix à son donneur d'ouvrage. Pourquoi une fois de plus privilégier le camionneur en vrac au détriment de certains autres organismes spécialisés dans le transport et offrant parfois un service très supérieur en qualité?

Troisièmement, la clause 75/25 oblige non seulement l'entrepreneur à engager des camionneurs en vrac mais oblige également que leur engagement se fasse via le poste d'affectation. Non seublement oblige-t-on l'entrepreneur à un choix déterminé dans ses cocontractants, mais encore ne lui laisse-t-on même pas le loisir de les engager où il veut...

Il est de commune renommée que les entrepreneurs en construction sont soumis, lors de l'exécution de leurs contrats, à des calendriers d'exécution requis et approuvés par le donneur d'ouvrage. L'entrepreneur doit posséder tous les outils nécessaires à la planification de son chantier et rencontrer â la lettre les délais d'exécution du donneur d'ouvrage; en engageant les camionneurs en vrac via le poste d'affectation l'entrepreneur perd carrément la planification de son transport et doit se soumettre aux bonnes volontés du directeur du poste d'affectation dans le nombre de camions requis, le temps et l'endroit. Existe-t-il un seul homme d'affaires au Québec qui accepterait que le succès ou l'échec de son projet dépende d'une tierce partie non impliquée directement au contrat...?

Forts de leur garantie de travail entraînée par la clause 75/25 et devant l'établissement de taux minimums de transport à l'heure établis par la Commission des transports du Québec, les camionneurs en vrac sont en position de force et l'entrepreneur n'a d'autre choix que de négocier ou subir des intimidations sur son chantier; cependant, c'est lui seul qui en récolte les néfastes retombées auprès de son donneur d'ouvrage... Il nous semble raisonnable que, comme dans tous les autres domaines, les camionneurs en vrac soient placés dans une position d'efficacité et de disponibilité et qu'ils ne jouissent pas plus que l'entrepreneur, de favoritisme.

En conséquence, nous recommandons l'abolition de la clause 75/25 sur les contrats du gouvernement et des organismes paragouvernementaux, et ce dans le but de rétablir le rapport de forces entre le camionneur en vrac et l'entrepreneur et laisser libre cours au jeu naturel de l'offre et de la demande. Nous ne pouvons endosser et assumer l'octroi de secteurs de travail protégés et rejetons toute forme d'obligation contractuelle en matière de transport en vrac. De plus, nous croyons que la pratique passée qui consistait à ce que le ministère des Transports du Québec incite ouvertement les différents donneurs d'ouvrage, telles les municipalités, à instaurer des clauses du genre 75/25 dans leurs devis devrait être abandonnée ou interrompue immédiatement.

Loin de vouloir éliminer les transporteurs en vrac, l'abolition de la clause 75/25 permettra aux transporteurs et requérants de services de conclure des contrats de transport sur une base juste et équitable pour les deux parties et fera assumer par chacun les obligations qu'entraînent leurs commerces respectifs.

ANNEXE B

Second mémoire de l'ANCAl

RÉPLIQUE

Monsieur le Président,

Nous remercions d'abord toutes les parties d'avoir accepté, vu que nous étions les premiers à nous adresser âcette commission, de nous donner le droit de réplique.

En nous présentant devant cette commission, le ministère des Transports a déposé un document plein de chiffres et de statistiques qu'il nous était malheureusement difficile de vérifier dans les deux (2) jours qui ont suivi.

Avec tout le personnel que le ministère des Transports possède, il aurait pu au moins, nous remettre ce document quelques jours avant cette commission.

Si nous nous fions aux chiffres rapportés en ce qui nous concerne, le ministère des Transports est dans l'erreur.

En effet, nous comptons 3579 membres qui ont acquitté la cotisation exigée par notre conseil d'administration.

Bien sûr, la façon dont nous a traité le ministre des Transports depuis le début de cette commission, il voudrait nous voir moins nombreux, cependant, depuis qu'il a commencé sa politique de destruction de l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. ÇA.N.C.A.I.) par la voix de SA commission et de ses fonctionnaires, le nombre de nos membres a augmenté. Les transporteurs se sont aperçu qu'en tentant de nous détruire, de nous ignorer ou de nous diminuer le ministre des Transports s'attaquait à ceux qui demandent depuis treize [13) ans l'amélioration des conditions de travail pour les transporteurs en vrac.

La solution que l'on retrouve aux pages 17 et 18, du contre-mémoire, est une solution cruelle, inhumaine, née d'une situation créée de toutes pièces par la Commission des transports du ministre des Transports. En effet, le secteur de travail réservé a été pendant cinq [5) ans une solution logique et valable pour les associations des camionneurs artisans.

Les vertueux fonctionnaires du ministère des Transports ont tenté de démontrer que les recommandations du rapport Lippé ont été appliquées en majeure partie.

Comme d'habitude, certaines choses ont été appliquées mais les plus importantes ne l'ont pas été; et nous citons ici l'honorable Lucien Lessard qui connaissait parfaitement le dossier et qui disait sur ce sujet, le 23 avril 1978:- "Comme tant de ministres des Transports depuis le rapport Lippé, rapport qui avait justement pour objet d'étudier les problèmes du camionnage en vrac et de proposer des solutions, rapport qui est d'ailleurs resté sur les tablettes, j'aurais pu laisser aller les choses et ne rien faire. Sachez qu'il aurait été plus facile pour moi d'agir ainsi; je me serais probablement évité beaucoup de problèmes, tant avec l'Association du camionnage du Québec qu'avec le Conseil du patronat ainsi qu'avec vous autres."

Une des conclusions du rapport Lippé, si elle était appliquée aujourd'hui, affaiblirait les camionneurs parce que depuis le rapport Lippé est apparu le phénomène de la location.

Comme il s'agit d'une clause qui pourrait possiblement affaiblir les camionneurs artisans, le ministre des Transports se bombe de torse devant cette solution.

Evidemment, tout ce qui peut nuire à l'Association nationale des camionneurs artisans Inc., et à ses membres comme vous avez pu le voir depuis le début de cette commission, prend une ampleur disproportionnée dans l'esprit de notre vénérable ministre des Transports.

En ce qui a trait à l'entente, les fonctionnaires ont encore induit notre vénérable ministre en erreur.

POINT DE L'ENTENTE no 1:-

Vous devez sûrement vous être aperçu, à la façon avec laquelle le ministre des Transports traite I'A.N.C.A.I., seul mouvement provincial existant avec plus de 500 membres, qu'il n'est pas intéressé à voir des associations provinciales.

Le ministre des Transports, en sa grande sagesse, a décidé de remplacer le mouvement provincial par SA Commission des transports qui promet même aux camionneurs de faire des séminars pour leur trouver de l'ouvrage.

Pour lui, ancien fonctionnaire, c'est beaucoup moins de trouble de discuter avec SA Commission des transports qu'avec des associations qui revendiquent pour des camionneurs.

POINT DE L'ENTENTE no 2:-

Depuis l'avènement du ministre de Belleval, ce point qui avait été respecté par le ministre précédent, commence à être contourné.

Vous avez sûrement entendu les représentants de la région 05 vous citer le cas de COUILLARD CONSTRUCTION INC., qui obtient à contrat des travaux jadis effectués en régie par le ministère des Transports. Nous avons des plaintes aussi du même état de fait dans d'autres régions du Québec.

POINT DE L'ENTENTE no 3:-

Le ministre des Transports a envoyé des lettres à ses confrères mais il a omis de nous dire comme le souligne le rapport Dupéré, qu'il avait rencontré dans les autres ministères, méfiance et hostilité envers le camionneur en vrac.

En ce qui concerne ce que M. Lucien Lessard a paraphé de sa main, nous pensons que le ministre des Transports ne peut être juge et partie en même temps. Ce sera aux tribunaux de droit commun à régler cette situation.

POINT DE L'ENTENTE no 4:-

Le ministre des Transports n'a jamais gelé de permis mais bien gelé le droit de déposer des demandes après le mois de juillet 1977 alors que tous et chacun avaient eu le droit de déposer des demandes depuis le 27 juillet 1973.

Il y a une différence entre geler les permis et geler les demandes de permis. De plus, il a permis à une certaine catégorie de transporteurs généraux de demander des permis de vrac et ce, du mois de décembre 1979 jusqu'au mois de février 1980, même si ces transporteurs avaient eu le droit entre 1973 et 1975.

POINT DE L'ENTENTE no 5: -Cet article a été inséré dans le Règlement 112 mais comme plusieurs des autres articles qui auraient pu protéger les camionneurs, son application a semblé être très difficile pour le ministre des Transports.

POINT DE L'ENTENTE no 6:-Ce point a été respecté.

POINT DE L'ENTENTE no 7:-

Ce point qui aurait été très important pour le respect des taux a été inscrit comme réalisé dans le contre-mémoire, même si ce point est encore à l'étude.

Il y a trois (3) ans et deux [2) mois que l'entente a été signée et le ministre des Transports n'a pas encore eu le temps de faire amender sa loi, mais apparemment ses avocats s'en occupent.

POINT DE L'ENTENTE no 8:-Ce n'est pas le ministre des Transports qui a établi la priorité au premier camion mais bien le code d'éthique préparé par la majorité des camionneurs et les avocats de l'A.N.C.A.I. C'était au temps où le ministère des Transports dialoguait encore avec la plus grande association du camionnage en vrac au

Québec.

Le code d'éthique est un règlement des corporations de Postes d'affectation et ne fait aucunement partie du Règlement concernant le camionnage en vrac.

POINT DE L'ENTENTE no 9:-

Ce point n'a jamais été réglé et s'est même amplifié.

POINT DE L'ENTENTE no 10:-

Si le ministère des Transports par ses statistiques (ce qui fait partie de l'art des politiciens) prétend que la flotte du ministère n'a pas grossi, nous pouvons vous dire au moins que ses camions ont grossi et que les quatre (4) roues du ministère des Transports sont peut-être devenus des dix (10) roues.

De toute façon nous savons qu'un divisionnaire à lui seul a acheté 30 camions dix [10) roues. Pour accepter les statistiques du ministre des Transports, il faudrait prétendre que 100% de nos dirigeants sont malades et ne savent pas compter.

Cependant, nous apprenons qu'on a créé des escouades volantes, qui se promènent de district en district.

POINT DE L'ENTENTE no 11:-

Ce point a été respecté. POINT DE L'ENTENTE no 12:-

Ce point a été respecté. POINT DE L'ENTENTE no 12a):-

Ce point a été respecté. POINT DE L'ENTENTE no 13:-

Le point 13 avait été respecté par Me Pierre Angers quia disparu du décor après ses promesses de $120 000 000 00.

POINT DE L'ENTENTE no 14:-

Ce point de l'entente a été respecté. Dans ce temps-là, le bon ministère des Transports vu que la commission des Transports avait établi des taux minimums à l'heure, avait cru bon de baisser les camionneurs aux taux minimum.

POINT DE L'ENTENTE no 15:-

Ce point a été respecté en partie par l'ancien ministre des Transports mais il semble que le ministre actuel ne veut pas discuter avec l'A.N.C.A.I.

Comme nous l'avons vu au cours de cette commission, le ministre actuel n'est pas le protecteur des petits camionneurs mais le champion de la libre entreprise qui lui permettrait de faire une sélection naturelle et cruelle des détenteurs de permis en vrac.

Le contre-mémoire du ministère des Transports fait grand état aussi d'un jugement de la Cour supérieure du district de Mingan. Encore une fois, son rôle d'employeur l'aveugle à un point qu'il n'a même plus le courage de défendre sa propre politique antérieure de transport.

En effet le jugement rendu à Sept-lles l'a été sans l'intervention des bénéficiaires de la clause et touchait une clause municipale. Depuis ce temps, la Loi des cités et villes a été amendée.

Enfin, l'avocat qui défendait les intérêts de la ville de Sept-lles avait déjà donné comme opinion juridique à la ville de Sept-lles, que la clause était illégale.

Nous serions des plus curieux de voir les notes sténographiques. Cependant nous ne doutons aucunement de l'intégrité des gens qui ont eu à rendre justice dans cette cause.

Pourquoi le ministère des Transport qui dilapide son argent pour détruire I'A.N.C.A.I, comme vous avez pu voir depuis le début, n'intervient-il pas pour tenter de protéger ses propres clauses au lieu de se servir de ce jugement comme argument pour faire mal aux transporteurs en vrac?

Nous tenons aussi à vous souligner de nouveau que pour établir les Postes d'affectation, nous avons dépensé à même les cotisations de nos camionneurs plus d'un million de dollars. Aujourd'hui, on veut nous voir disparaître et on nous accuse de discrimination.

Dans la région 06, de juin 1978 à septembre 1979 pour aider principalement au développement du Poste d'affectation de la région 06, l'Association nationale des camionneurs artisans Inc. a versé un salaire de $325.00 par semaine à M. Jean-Louis Bradette.

De plus, l'A.N.C.A.I, a payé à plein temps un avocat au coût de $18 000.00 par année, plus dépenses, pour aider à établir le Poste d'affectation dans ce grand territoire, durant la même période.

Enfin, Me Pierre Beaudet et moi-même avons fait trois (3) assemblées pour convaincre les camionneurs de la région 06 d'adhérer au Poste d'affectation.

Cependant comme la formule du Poste d'affectation du temps ne permettait pour tous ses camionneurs, que trois (3) ou (4) administrateurs, nous avons demandé à messieurs Jean-Louis Bradette et Hubert Meilleur

de consulter le plus possible, les dirigeants des sous-postes d'affectation et les camionneurs avant de prendre tel ou tel décision.

Alors que le coût d'opération du Poste d'affectation de la région 03, qui compte un nombre à peu prés identique de camionneurs à celui de la région 06, réussit a d'administrer avec $84.00 par membre, par année, le Poste d'affectation de la région 06 charge pour chaque membre $318.00 par année.

Evidemment nos camionneurs artisans, malgré ce que peut en penser le ministre des Transports, ont le droit eux aussi de se plaindre d'une administration en place qui charge très cher.

Nos 593 membres de la région 06 veulent aussi savoir combien le directeur du Poste d'affectation gagne parce que depuis que I'A.N.C.A.I, ne le paie plus, les camionneurs ne peuvent savoir quel montant on lui paie.

Au mois d'avril 1980, la corporation Poste d'affectation de la région 06 demandait la conversion du permis de Poste d'affectation à Poste.

Nous ne nous sommes pas opposés à la délivrance d'un permis, cependant nous avons demandé à la Commission des Transports du Québec de les obliger à tenir une assemblée générale des membres, de faire approuver un code d'éthique par l'assemblée générale, et de procéder le plus rapidement possible aux élections.

Des élections ont effectivement eu lieu et 15 représentants sur 22 sympathisants de I'A.N.C.A.I, ont été élus. Messieurs Meilleur et Bradette contestent les élections.

Etant donné que ces gens se montrent vis-à-vis le ministère des Transports et la Commission des transports comme des anti-A.N.C.A.I., ils reçoivent tous les égards du ministre des Transports et de SA commission.

Il y a aussi une requête pour l'Assemblée générale spéciale de signifiée à la corporation Poste d'affectation parce que cette dernière n'a pas le courage de tenir son assemblée annuelle, craignant les décisions de la majorité.

Comme toutes les minorités, ils retrouvent une place de choix dans le coeur du ministre des Transports.

En effet, vous n'avez qu'à cracher et àvociférer sur I'A.N.C.A.I, et vous trouverez tous les égards de la part du ministre des Transports et de SA commission.

M. Meilleur vous a dit dans son mémoire qu'il avait présenté un mémoire au ministre des Transports et qu'il n'avait jamais eu de réponse.

Eh bien, il avait effectivement eu une réponse et le directeur du Poste d'affectation a écrit à tous les autres directeurs des Postes d'affectation en leur incluant le mémoire, la réponse du ministre de Belleval et une lettre signée par M. Jean-Louis Bradette qui disait textuellement que la réponse du ministre manquait de sérieux (voir lettre incluse).

Comme vous l'avez vu hier, ledit mémoire décrivait l'A.N.C.A.I. et ses avocats. Cette attitude de messieurs Bradette et Meilleur à l'endroit de l'A.N.C.A.I. leur a donc permis d'être un tonique rafraîchissant pour le ministre des Transports.

Nous avons été surpris aussi que le ministre des Transports fasse des commentaires sur nos avocats alors qu'il ne fait aucun commentaire sur Me Yvon Chouinard, avocat du Poste d'affectation de la région 06 Inc., et avocat de plusieurs transporteurs généraux, en plus d'être l'avocat des transporteurs entrepreneurs de la région 03.

Cependant, nous reconnaissons le fait que Me Yvon Chouinard, comme nos avocats d'ailleurs, ait le droit d'avoir plusieurs clients, et Me Richard Ramsay, avocat de la Coopérative de la Côte-Nord, du Poste d'affectation de la Côte-Nord et même d'un camionneur membre de l'A.N.C.A.I.

Nous voulions tout simplement un partage équitable du transport entre les compagnies forestières, dont vous avez pu voir l'attitude pendant cette commission, et les transporteurs en vrac.

Nous sommes convaincus que les compagnies forestières qui exploitent nos richesses naturelles, ont le droit de vivre mais nous aussi.

En effet, sur environ $14 000 000 .00 de distribués en subventions aux compagnies forestières, les compagnies suivantes ont obtenu $10 000 000.00:

Consolidated Bathurst: $1 909 000.00

Domtar: $1253 300.00

Price: $1384 800.00

Kruger: $ 729 350.00

CI.P.: $1 331 150.00

Maclaren: $ 573 700.00

Reed Paper: $ 677 750.00

Quebec North Shore: $1 825 800.00

Si ces compagnies n'ont pas les moyens de se construire des routes pour exploiter nos richesses, elles doivent sûrement pouvoir partager le transport suivant des conditions d'égal à égal entre les Postes d'affectation et elles.

Il y a tout de même $14 000 000.00 à même nos taxes qui leur sont donnés pour augmenter leur pouvoir d'exploiter nos richesses naturelles.

Le ministère de l'Energie et des Ressources semble plus préoccupé par la pauvreté des compagnies que nous venons d'énumérer, que par le sort des transporteurs en vrac.

Au cours de cette commission, nous avons pu remarquer que le ministre des Transports était beaucoup plus préoccupé par I'A.N.C.A.I, que par les nobles buts de cette commission.

Une autre association qui prend beaucoup de poids aux yeux du ministre des Transports est l'Association du camionnage du Québec. C'est cette association qui réclame la déréglementation pour les autres et une réglementation beaucoup plus serrée pour elle.

Cette même association, qui loue les vertus de la libre concurrence, a demandé au ministre des Transports, la formule Rand patronale ainsi que plusieurs changements â la réglementation qu'elle aurait obtenue au mois de juillet 1980.

Le ministère des Transports et eux auraient établi comme priorité l'enraiement du transport illégal sous le couvert de la pseudo-location. Ils ont aussi demandé un gel temporaire des permis dans la région de Montréal.

Nous disons immédiatement à M. Alary qu'il a trouvé la bonne formule pour obtenir ses demandes. Cette formule est maintenant connue de tous, elle s'appelle: Crachez et vociférez sur I'A.N.C.A.I., vous serez bien considérés par le ministre des Transports, SA commission et ses fonctionnaires.

Cependant, cette même Association du camionnage du Québec, au lieu de nous épauler pour l'enraiement de la pseudo-location, préfère nous envoyer sur le marché cruel de la libre concurrence pour qu'eux puissent garder leurs matières le plus réglementés possible et le plus protégées.

Cette même association, par la voix de son vice-président exécutif dans la revue TRANSPORT ROUTIER DU QUÉBEC, du mois d'août 1980 conclut:- "que l'industrie du camionnage au Québec, est celle qui a le plus de difficulté à se développer viablement. En cherchant la causes de cette difficulté, nous remarquons le non-respect des lois en transport, la tolérance d'un double système de concurrence et l'établissement des coûts sur des bases différentes pour le transporteur privé vs le transporteur public."

Sans vouloir être aussi bas que cette association, nous demandons au gouvernement parce qu'il ne sert à rien de demander quelque chose au ministre des Transports, de considérer qu'il y aurait peut-être lieu de donner des permis de transport généraux aux transporteurs en vrac, afin que ces messieurs du transport général sachent véritablement ce que c'est que le marché de la libre concurrence.

Quant à nos employeurs, l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux, bien entendu comme tout employeur qui a dans sa politique de sauver le plus d'argent possible, demande à cette commission d'abolir les clauses.

Cependant, ces demandes restent propres et se discutent à une table de négociations. Ils ont eu au moins le courage de ne pas cracher sur nous d'une façon dégoûtante pour obtenir bonne bouche du ministre des Transports et de SA commission.

Quant aux associations d'entrepreneurs qui sont venues dénoncer l'A.N.C.A.I., il serait très important de savoir combien elles représentent de membres, quelle est leur cotisation annuelle, et si elles ont accepté de payer comme tout le monde leur cotisation aux Postes d'affectation.

Nous ne recommencerons pas la tenue de la commission, cependant permettez-nous de vous dire que l'A.N.C.A.I. est prête à toute enquête sur son administration, sur ses dépenses et sur tout ce qui peut la concerner, comme exemple la tenue d'élections démocratiques.

Le ministre des Transports et son gouvernement sont invités à venir vérifier tout le système.

Nous aimerions cependant aussi que l'enquête porte sur les agissements de la Commission des transports du Québec dans la prolifération des permis, sur les activités des fonctionnaires du ministère des Transports en rapport avec le dossier vrac, sur la relation du tribunal quasi-judiciaire qu'est la Commission des transports du Québec et le ministère des Transports, sur l'administration et particulièrement celui de la région 09 qui était administré par nos compétiteurs, la Coopérative de la Côte-Nord qui ont le droit d'avoir un permis de courtage.

En conclusion monsieur le ministre des Transports, vous avez voulu faire, par cette commission le procès de l'A.N.C.A.I., et votre attitude nous démontre des préjugés discriminatoires à l'égard de l'A.N.C.A.I., ses associations filiales, ses membres et en plus, ses avocats.

Comme nos membres ne sont pas des imbéciles, ils ont découvert depuis longtemps votre véritable jeu, et nous vous disons immédiatement que même si vous souhaitez la mort de l'A.N.C.A.I., elle vivra plus longtemps que le temps que vous pensez.

La commission parlementaire n'avait pas pour but de faire le procès de l'A.N.C.A.I..cependant, l'A.N.C.A.I. en a fait plus pour les transporteurs que vous et vos amis n'en ferez jamais de votre vie.

Une commission d'enquête dont les membres seraient nommés par d'autres que vous, serait sûrement une solution temporaire à nos problèmes.

Nous lutterons monsieur le ministre, jusqu'à la fin pour assurer un revenu convenable aux détenteurs de permis en priorité.

Avec votre solution il est vrai que nous aurions pu travailler à 100%, il suffit de travailler en dessous des coûts d'opération et de crever. C'est une solution qui ne tient pas compte de ce camionneur que vous étiez supposé, protéger.

Vous avez entendu aussi la présentation des mémoires de l'Association des camionneurs entrepreneurs de la région 03 et celui de M. Fradette de la région 02.

Ces derniers ont blâmé l'A.N.C.A.I. Cependant ce qu'ils ont oublié de vous dire, c'est que le 13 novembre 1978, le juge Louis-Philippe Bouchard de la Commission des transports du Québec, décrétait que la charte de la corporation Poste d'affectation de la région 02 Inc. ne permettait pas à ses administrateurs de s'adresser à la Commission des transports du Québec pour demander quoi que ce soit.

Comme les chartes des postes d'affectation des régions 1 à 9 avaient été préparées par les fonctionnaires du gouvernement et qu'elles étaient toutes faites de la même façon, les Postes d'affectation des régions 02 et 03 s'en sont remis à l'A.N.C.A.I. pour la demande d'augmentation de taux devant la C.T.Q. qui avait lieu au mois de décembre 1978.

Cette année-là, la méchante.A.N.C.A.I, a réussi à obtenir 12% d'augmentation ce qui a permis à M. Fradette, (M. Blouin s'il avait encore un camion), M. Lafleur et M. Viens de voir leur gain augmenter de 12%.

Ces mêmes associations de camionneurs, naturellement viennent dire aujourd'hui que l'Association nationale des camionneurs artisans Inc., a fait tel ou tel chose.

Cependant, nos camionneurs qui ne sont pas imbéciles, trouvent qu'il serait logique qu'à partage équitable du travail il y ait partage égal des dépenses.

Evidemment, cette année-là, les camionneurs de ces associations étaient bien contents de voir augmenter les taux.

Nos camionneurs prétendent que pour qu'une association soit logique, il faut qu'un secteur distribue le travail, une région veille à une répartition équitable et qu'un mouvement provincial veille aux représentations générales et à l'information, tel l'Association du camionnage du Québec et l'Association des constructeurs de routes.

Nos camionneurs, sans être plus méchants que les autres, pensent qu'à partage égal du travail, cotisation égale.

M. Blouin a omis de vous dire qu'un premier jugement interlocutoire rendu par l'honorable juge Paul-Etienne Bernier avait rejeté leur demande d'injonction interlocutoire.

Une nouvelle demande d'injonction avait été demandée suite à une nouvelle résolution, et elle a été accordée par l'honorable juge Edouard Laliberté. Nous avons respecté cette injonction.

Au premier septembre 1979,dans le but de laisser respirer les Postes d'affectation, nos camionneurs ont réduit la cotisation provinciale de $150.00 à $75.00 par année (il est vrai cependant, qu'elle sera réajustée à $100.00 au 1er septembre 1980). Aucune cotisation ne nous est parvenue par l'entremise d'un Poste d'affectation.

M. Blouin a aussi omis de vous dire que lorsque le Poste d'affectation a été accordé dans la région 03 et que ce Poste ne pouvait avoir un local convenable avant deux (2) ou trois (3) mois, l'A.N.C.A.I. les a hébergés dans ses bureaux à un loyer dérisoire en ne leur chargeant que les interurbains, et en leur fournissant une secrétaire qu'ils payaient au quart d'heure, à la demi-heure ou à l'heure.

Ces mêmes gens venaient à des réunions au bureau de l'A.N.C.A.I. et ils ont été très bien reçus.

Cet après-midi vous avez vu M. André Viens assis à côté de M. Raymond Blouin. En 1974 et 1975 il était secrétaire-trésorier de l'A.N.C.A.I. et président des camionneurs artisans du comté de Lévis.

Pour les années 1974 et 1975, M. André Viens obligeait les camionneurs du comté de Lévis non seulement à payer $100.00 pour la cotisation de l'A.N.C.A.I. mais il obligeait les camionneurs à verser à un bureau d'avocats $100.00; sinon le membre ne travaillait pas.

Aujourd'hui il vient se scandaliser de l'attitude de l'A.N.C.A.I., au sujet des aspirations légitimes des camionneurs artisans tant sur le plan travail que sur le plan fédération provinciale majoritaire. Nous vous incluons copie d'une lettre adressée à M. André Viens qu'il a sûrement oublié de vous produire lorsqu'il accompagnait M. Raymond Blouin.

Cette lettre est de Me Pierre Angers et parle par elle-même.

Est-ce que le ministre des Transports peut nier que l'association que représente M. Fradette a reçu dans les mois qui viennent de s'écouler, une subvention du ministère des Transports pour payer ses frais d'avocats?

Est-ce que le ministre des Transports peut nier que les avocats de l'A.N.C.A.I. se sont rendus au moins à trente [30) reprises au ministère des Transports pour préparer un modèle de code d'éthique?

Est-ce que le ministre des Transports peut nier que les méchants avocats de l'A.N.C.A.I. ont préparé les règlements généraux de toutes les corporations?

L'A.N.C.A.I. a un but principal, celui d'agrandir l'assiette des transporteurs publics et prétend que le seul moyen est de faire l'unité chez les véritables transporteurs publics. Dans les deux (2) régions qui nous ont si vertement critiqués, nos camionneurs sont majoritaires à 80%.

Monsieur le ministre, vous avez tenté d'insinuer que l'A.N.C.A.I. avait inspiré ou préparé cette clause de diminuer les jours travaillés aux camionneurs qui ne manifestaient pas.

Nous vous demandons d'avoir le courage de répéter cela en dehors de la Chambre.

Enfin cette attitude du ministre de Belleval à l'égard de l'A.N.C.A.I., suit sa grande logique politique. par/Gérard Dubé GÉRARD DUBÊ, président de l'A.N.C.A.I.

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