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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mercredi 20 décembre 1978 - Vol. 20 N° 243

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 71 - Loi modifiant la Loi de la conservation de la faune


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 71

(Vingt-trois heures)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre! La commission du tourisme, de la chasse et de la pêche est réunie pour faire l'étude, article par article, du projet de loi no 71, Loi modifiant la Loi de la conservation de la faune.

Les membres de la commission sont: M. Chevrette (Joliette-Montcalm) remplacé par M. Jolivet (Laviolette); M. Desbiens (Dubuc), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) remplacé par M. Mercier (Berthier); M. Marchand (Laurier) remplacé par M. Pagé (Portneuf); M. Michaud (Laprairie), M. Perron (Duplessis), M. Picotte (Maskinongé) remplacé par M. Gratton (Gatineau); M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marquis (Matapédia), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Verreault (Shefford).

A la fin de la session, le président agit d'office comme rapporteur des travaux de la commission. Je vous en informe.

Remarques générales

Avant d'appeler l'article 1, est-ce que le ministre a des remarques générales?

M. Duhaime: Non, M. le Président. Mes remarques ont été largement élaborées en deuxième lecture cet après-midi.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que M. le député de Portneuf a des remarques générales avant l'appel de l'article 1?

M. Pagé: Oui, M. le Président. Merci, M. le Président. Effectivement, il me fait plaisir de revenir à mes anciennes amours, si je puis dire cela comme cela, remplacer au pied levé mon bon ami et collègue de Maskinongé, qui est occupé ce soir et qui ne peut malheureusement se joindre à nous pour l'étude du projet de loi 71, article par article. Cependant, M. le Président, le député de Maskinongé a très bien énoncé la position adoptée par l'Opposition officielle ici à l'Assemblée nationale avant-hier soir, dans la nuit, lorsque celui-ci fut appelé à faire son discours sur le projet de loi 71. C'était une intervention, M. le Président, qui définissait la position de notre parti, qui l'énonçait et qui faisait part au gouvernement que l'Opposition officielle souscrivait au principe du projet de loi déposé à l'Assemblée nationale par l'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et député de Saint-Maurice.

Je ne voudrais pas, M. le Président, reprendre ici tout le débat, toute la question des différents aspects que soulève le projet de loi 71, que ce soit le chapitre de la conservation de la faune, que ce soient les pouvoirs, les attributs que le ministre se confère par le projet de loi 71. Cependant, je voudrais vous indiquer M. le Président, que j'apprécierais dans un premier temps que le ministre, dans ce que je souhaite être un dialogue des plus cordiaux, un dialogue bien franc, nous donne sa version sur ce qu'on a soutenu, sur ce qu'on a demandé lors de l'étude en deuxième lecture. On se rappellera, M. le Président, qu'en plus de souscrire au principe, on a formulé des recommandations, on a demandé des modifications dans ce projet de loi, notamment en ce qui concerne le contrôle. Le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche se rappellera que j'ai moi-même, et ce à plusieurs reprises, souligné que, dans cette approche globale, dans cette approche générale du gouvernement du Québec, la critique principale que j'avais formulée se situait au niveau du contrôle... Le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, M. le Président, sait pertinemment que le député de Portneuf a toujours souscrit au principe suivant, que ce soit en matière de tourisme ou que ce soit en matière de faune, que les biens, le patrimoine, les équipements, servent aux nationaux d'abord. Cependant, M. le Président, même si le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche a énoncé ce principe et cela, si ma mémoire est fidèle, c'était le 12 ou le 22 décembre l'année dernière, le principe du déclubage, c'est un principe qui était très défendable, mais là où j'ai eu l'occasion d'exprimer des réserves, c'était au chapitre du contrôle. A la lumière de l'expérience d'une année, le gouvernement devrait, normalement, selon moi, être placé face à des constats qui aboutissent à des conclusions et à des positions.

Au chapitrede la conservation, une première. On a demandé, lors de notre débat en deuxième lecture que soit rétabli, dans les délais les plus brefs pour que cela puisse s'appliquer lors de la prochaine saison de pêche, le permis de pêche. Selon nous, M. le Président, le permis de pêche présente l'avantage pour le pêcheur des questions d'assurance et tout ça, mais c'est aussi le moyen légal et juridique d'assurer un contrôle, si élémentaire et si minimal soit-il.

J'aimerais bien que le ministre me fasse part de sa position là-dessus. J'aimerais bien, de plus, qu'il nous fasse part de ses commentaires, suite à la demande que nous avons formulée visant à ce que les pénalités, dans les cas de suspensions de permis de chasse, notamment pour une période de quinze mois... On se rappellera que le ministre veut, par le projet de loi 71, assouplir toutes ces questions.

Je vous dirai, M. le Président, non pas comme député mais pouravoirvécu de ces cas comme avocat, que pour un garde-chasse, pour une personne qui a à vivre de la conservation de lafaune à longueur d'année, pour une personne qui a à évoluer dans ce secteur, ce n'est pas toujours facile. C'est bien souvent après de longues enquêtes — mes collègues qui

ont des territoires de chasse et de pêche dans leur comté pourront certainement abonder dans le même sens que moi —que les agents de conservation de la faune ont l'occasion, lorsqu'ils ont cette occasion, de présenter des poursuites en Cour des sessions de la paix, ce qu'on appelle la cinquième division.

M. le Président, nos mécanismes judiciaires étant ce qu'ils sont, on y voit régulièrement, le mercredi après-midi, des personnes acquittées, après que de longues et laborieuses enquêtes aient été menées, rédigées, bien souvent pour un motif d'absence de preuve, bien souvent pour une preuve qui est contradictoire, des choses comme celles-là. Je conviens que notre société a peut-être passé l'étape où la punition était le meilleur remède à un acte reprochable. Notre société a peut-être suffisamment évolué pour que dans certains cas on mette de côté cet aspect de nos mécanismes judiciaires que constituent les pénalités. Mais il va de loi que dans le secteur de la conservation de la faune, quand une personne sait pertinemment que si elle enfreint une loi ou un règlement elle risque de voir son permis suspendu pour une période de quinze mois, c'est particulièrement incitatif pour ne pas dire coercitif, M. le Président.

On a demandé au ministre de maintenir cet ordre ou ce degré de pénalité. On a demandé, de plus, que le service de la conservation de la faune soit maintenu tel qu'il est actuellement, car, selon nous, un ministre du Tourisme s'attribuedes pouvoirs exorbitants et je suis convaincu que mes collègues, si ceux-ci veulent s'inscrire et s'engager dans un débat qui se veut franc, sérieux, vont abonder dans le même sens que moi.

M. le Président, je peux peut-être faire confiance au ministre du Tourisme actuel, le député de Saint-Maurice; il sait pertinemment cependant que ce ne sera pas toujours le député de Saint-Maurice qui occupera le fauteuil du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Cela pourrait éventuellement... le député de Laviolette semble avoir des réserves à ce sujet. Cela pourrait éventuellement entraîner des abus, ça pourrait éventuellement entraîner des modifications d'interprétation et autres.

M. le Président, c'était là l'essentiel de mes commentaires au tout début des travaux de cette commission. Avant même d'aborder l'étude du projet de loi article par article, j'aimerais que le ministre me réponde sur les différents aspects que j'ai voulu soulever. Peut-être que cela pourra, par la suite, éviter des questions de débat.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, très rapidement, à l'heure où on commence l'étude de la loi... On sait qu'on doit ajourner à minuit si on n'a pas terminé. Je ne voudrais pas être trop long. Lorsqu'un avocat prend la parole, on a tendance à compter les minutes, lorsque c'est un député, on compte les heures, et quand c'est un avocat-député, je pense qu'on doit regarder le calendrier.

M. Pagé: Le principal, c'est d'être intéressant, mon cher collègue.

M. Grenier: La loi qu'on a déposée ici... M. Pagé: ...

M. Grenier: ... comprend 50 articles et vient corriger une loi qui avait été déposée par le ministre no 1 du Tourisme, qui était M. Loubier, et qui a été sanctionnée le 12 décembre 1969. C'était une excellente loi qu'on est obligé d'adapter avec le temps.

M. Duhaime: Vous allez me permettre de dire au député de Mégantic-Compton que ce qu'il vient de dire est vrai.

M. Grenier: Cela commence bien. Espérons qu'on va s'entendre. Il s'agit de l'accessibilité à la chasse. On verra ce que cela peut donner. Cette protection de la faune va être faite par une réglementation qu'on a en main, où le ministre sera conscient qu'il peut accepter certains articles de modification. Il y a déjà des amendements qui sont déposés et qu'on va faire aux articles dans quelques instants.

Je ne voudrais pas éterniser, mais je veux vous dire qu'on est ici pour collaborer, afin d'améliorer cette loi. Je pense que le ministre va être assez souple également pour accepter nos propositions au fur et à mesure qu'on va avancer dans l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je remercie mes collègues de l'effort qu'ils doivent fournir à cette heure-ci. Je dois souligner que le mois de décembre est certainement le meilleur mois pour s'occuper des affaires de la faune. Ce n'est pas un précédent que nous avons créé lorsque nous avons élaboré la politique de l'Opération gestion-faune et qu'on l'a annoncée le 22 décembre 1977. Le chef, non pas de l'Union Nationale, M. le député de Mégantic-Compton, mais le chef de Unité Québec...

M. Grenier: ... de l'époque.

M. Duhaime: Par la suite, le 12 décembre — c'était en décembre, en 1969 — a fait adopter et sanctionner par l'Assemblée nationale, la loi no 58.

C'est cette loi que nous voulons modifier par le projet de loi 71 qui est devant nous ce soir. Je pourrai très certainement disserter sur chacun des articles, de même que sur les quelques amendements que j'aurai à vous présenter, en vous disant tout de suite, au départ, que la grande majorité des amendements sont, ou bien mécaniques ou de concordance et quelques-uns impliquent des questions de fond que je vous soulignerai.

Je voudrais peut-être dire tout de suite à mon collègue, le député de Portneuf, qui, soit dit en passant, est un des rares députés de l'Opposition qui est préoccupé par l'état des cheptels au Québec, qui s'occupent des questions de la faune, et je suis convaincu que déjà l'ennui s'empare de

lui dans les affaires du travail et qu'il regrette son poste dans le "shadow cabinet"...

M. Pagé: ... du travail, d'ailleurs.

M. Duhaime:... sur les questions du tourisme, de la chasse et de la pêche.

Le député de Portneuf sait pertinemment que ce n'est pas dans la loi que l'on traite du permis de pêche...

M. Pagé: C'est dans le pouvoir réglementaire.

M. Duhaime:... mais que c'est dans le pouvoir réglementaire du lieutenant-gouverneur en conseil, et qu'il n'est pas question que l'on rétablisse les permis de pêche au Québec. Ils n'existent plus en Ontario, ils n'existent plus dans les Maritimes, dans beaucoup d'Etats américains. Je voudrais peut-être simplement redire ce que j'ai eu l'occasion d'expliciter à des dizaines de reprises, à savoir qu'au cours de l'année 1977, qui a été la dernière année où un permis de pêche devrait être détenu, nous en avons émis environ 700 000.

Le permis de pêche donnait droit, bien sûr, contre paiement, à une limite quotidienne et permettait aux agents de conservation de contrôler la limite de possession. Or, nous atteignons exactement le même objectif, sans permis de pêche, pour une raison assez simple, c'est que la limite de possession est la même et que nous avons déjà suffisamment, dans nos poches, des cartes-soleil, des cartes Régie d'assurance-maladie...

M. Pagé: Bientôt carte d'électeur? (23 h 15)

M. Duhaime: Non, il n'en est pas question. Comment l'appelle-t-on, celle du fédéral? L'assurance sociale. Il faut bien comprendre que, pour le gouvernement, c'était beaucoup plus l'émission d'un permis pour aller chercher des fonds. Si vous multipliez simplement 700 000 par $3.25 ou $3.50, cela vous donne une idée du montant d'argent qu'on allait chercher avec cela. Et, à partir du moment où on en est venu à vouloir établir une politique d'accessibilité et un nouveau climat de liberté, si je puis dire, où l'ensemble de notre société devait normalement contribuer à ces activités sportives qui sont pratiquées — je parle de la pêche et de la chasse essentiellement — par à peu près toutes les familles du Québec, de la même manière que le fonds consolidé contribue à financer des arénas, à financer des centres de skis, à financer le Parc olympique — c'est un détail, mais il est quand même là — on s'est dit que, si on donnait des possibilités de financement aux associations de chasse et de pêche agréées, responsables du territoire qu'on leur confiait — et cela a été fait pour la première fois cette année — une possibilité d'aller chercher des fonds en exigeant un paiement de $15, pour toute une famille, on rejoignait à peu près les mêmes montants d'argent.

Alors, pour répondre bien clairement à mon collègue de Portneuf — ce n'est pas à regret, d'ailleurs, que je ne me rends pas à sa demande — il n'est pas question pour nous de rétablir le permis de pêche.

Sur le deuxième point, nous avons été, bien sûr, très sensibles à cette espèce d'émoi qui a été créé parce qu'on abrogeait l'article 49 de la loi 58 et qu'on le référait à l'article 77b de la loi 71, qui était le pouvoir réglementaire; 77b, l'article 45 du projet de loi se lit comme suit: "établir les motifs, conditions, modalités et périodes de suspension du certificat du chasseur." C'était essentiellement le pouvoir réglementaire et il faut bien comprendre — et je pense que cela mérite une explication — que la loi actuelle est complètement aveugle dans le sens suivant: Peu importe la nature de l'infraction, qu'elle soit mineure, majeure, que ce soit une récidive ou non, c'est automatiquement la suspension, non pas du certificat, mais du permis, dans la loi 58. La suspension du certificat est venue par la suite, par un pouvoir réglementaire qui aurait pu, et je le dis sous toute réserve, être contesté.

Nous retenons l'intervention de mon collègue, le député de Maskinongé, de même que de beaucoup d'organismes qui s'intéressent à ces questions et je vais tout à l'heure, lorsque nous arriverons à l'article pertinent, vous proposer un amendement.

Nous allons retenir la suspension automatique, et ce sera l'amendement que je développerai peut-être tantôt, mais, en gros, pour les infractions que nous appelons majeures, que nous allons "lister", si vous me passez l'expression, cela entraînera la suspension du certificat de chasseur.

Pour les infractions que l'on appelle mineures, nous allons vous demander, par le même amendement, d'ouvrir une mécanique qui pourrait nous permettre d'implanter un système de points de démérite. Je vous donne un exemple: Au mois de juillet, quelqu'un tue 10 orignaux femelles ou de sexe indéterminé, peu importe. Il est évident que, s'il était condamné pour une telle infraction, que j'appelle majeure, cela entraînerait automatiquement la suspension de son permis.

Par ailleurs, celui qui prendrait au collet un lièvre de plus que sa limite permise, pour lui aussi, on suspend le permis.

Cela nous apparaît que, dans la balance, il y a une contradiction, non pas une contradiction, mais cela ne nous apparaît pas normal, pour deux types d'infraction aussi différents dans leur gravité, que cela entraîne le même effet, quant au maintien du permis, pour l'instant, et du certificat.

Alors, pour ce qui est des infractions mineures, et c'est une intention, je le dis bien, d'introduire au ministère un système de points de démérite qui rejoindrait à peu près la formule qui est retenue en ce qui est des infractions au Code de la route, de sorte que le cumul se ferait sur un délai de deux ans.

Je pense que nous retenons les interventions de nos collègues de l'Opposition, nous retenons également les interventions de la Fédération québécoise de la faune, du Conseil de la faune, de l'Association ou de la Fédération québécoise des SACERF, qui sont allés dans le même sens, de la

Fédération nature 2000 également et nous allons nous rendre, pour une très large partie, à cette demande de l'Opposition.

Il faut bien vous dire aussi que de la façon que nous avons déposé le projet de loi, nous espérons obtenir de nos collègues de l'Opposition un consensus unanime sur cette loi, parce qu'elle a des dents.

On y reviendra tantôt, parce que le chef de l'Union Nationale a sûrement été induit en erreur, lorsqu'il a dit, cet après-midi, en deuxième lecture, que cette loi réduisait les peines ou les amendes attachées aux infractions, alors que la loi 71 les augmente.

Le troisième point du député de Portneuf: II s'agit du service de la conservation et je vous renvoie à l'article 2 du projet de loi et je pense que cela réfère aussi à l'article 2 de la loi 58. Je vous lis l'article 2 du projet de loi 58: "Un service de la conservation de la faune est institué au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Ce service est formé du directeur de la conservation de la faune, des directeurs adjoints ainsi que des agents de conservation et des autres fonctionnaires et employés jugés nécessaires."

Je pense qu'on va s'entendre tout de suite au départ pour dire que le service est mis sur pied et que le reste de l'article 2 de la loi 58 est déclara-toire ou simplement descriptif.

Ce que nous faisons, dans l'amendement, ce n'est pas abolir le service de la conservation. J'ai l'organigramme du ministère dont mon collègue pourra prendre connaissance; dépendant de la direction générale de la faune, il y a le service de la protection de la faune. Ce que nous voulons faire avec la modification proposée, c'est donner dans la loi une responsabilité que le ministre a dans les faits.

Je pense que mes collègues de l'Opposition qui suivent le dossier de la faune sont les premiers à poser, de temps à autre, des questions à l'Assemblée nationale en disant: II y a du braconnage, il y a des infractions, il y a ceci et cela. On ne pose pas ces questions au service de la protection, on les pose au ministre qui, lui, dans les faits, est responsable de ce service, parce que l'article 2 dit: "Le ministre doit veiller à la conservation de la faune. A cette fin..."

Une Voix: C'est implicite.

M. Duhaime: Non, ce n'est pas implicite; ce n'était pas dans la loi 58. "A cette fin, des agents de conservation, fonctionnaires ou autres employés sont nommés et rémunérés suivant la loi de la Fonction publique. Les agents de conservation sont notamment chargés de veiller à l'application de la loi et des règlements, etc." Ce qui veut dire que dans les faits, le ministre de ce portefeuille est responsable devant l'Assemblée nationale du service de protection. Ce sont des employés du ministère comme tous les autres. Alors, on ne modifie rien. Ce n'est pas le service de protection qui disparaît, au contraire, il est maintenu et on ajoute une responsabilité ministérielle.

Je termine mon intervention là-dessus, M. le Président, en vous disant qu'il n'y a pas de drame pour ce qui est du service de la conservation. Il existe, il est là et il est clairement écrit maintenant dans la proposition que nous faisons, dans le projet de loi 71; le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche est responsable. Je vais vous donner le texte exact: "Le ministre doit veiller à la conservation de la faune. A cette fin," etc. Alors, je termine mes remarques, M. le Président.

M. Pagé: M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Est-ce qu'on peut se permettre d'être assez large dans le débat avant d'aborder l'étude de l'article 1? Cela nous permettra, si vous me le permettez M. le Président, d'échanger comme cela, d'aller peut-être un peu plus vite tout à l'heure dans l'adoption des articles. Vous me le permettez, M. le Président?

Le Président (M. Marcoux): Oui.

M. Pagé: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre. Je conviens que ce soir il nous dise: Le lit du gouvernement est fait, l'opinion du gouvernement est arrêtée, il n'est pas question de rétablir le permis de pêche. Le ministre, en alléguant qu'il ne devait pas en tant que ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche rétablir le permis de pêche, a surtout insisté sur l'aspect financier, l'aspect des rentrées d'argent qu'impliquait le maintien du permis de pêche. Ce sur quoi le ministre ne s'est évidemment pas hasardé à intervenir, c'est sur l'aspect strictement des contrôles.

Il faut tenir pour acquis que des infractions à la chasse et à la pêche, il y en a eu, même si les possibilités d'accès étaient plus limitées qu'elles ne le sont aujourd'hui. Des infractions de chasse et de pêche, M. le Président, il y en a eu et ce, même si on avait un service de protection de la faune qui était des plus vigilants.

On se retrouve, M. le Président, avec les zones d'exploitation contrôlées. Dans mes échanges avec les représentants des zones d'exploitation contrôlées, un dénominateur commun de leurs remarques a été toute cette question de la protection et de la conservation.

Qu'on prenne un cas bien spécifique, M. le Président, le bonhomme qui se fait arrêter, le pêcheur qui se fait arrêter par un agent de conservation; on constate qu'il a commis une infraction. M. le Président, lorsque le permis de pêche existait, il y avait une possibilité de recours pour limiter ce pêcheur en suspendant son permis. Le danger de perdre ce permis était certainement très incitatif. La possibilité pour lui de contrevenir à nos lois...

Aujourd'hui, un pécheur ne risque plus de perdre son permis de pêche parce que le permis a

été aboli. Je me dis que cela a un impact, qui est peut-être difficilement appréciable, qui est peut-être difficilement calculable, j'en conviens, mais qui est certainement important, selon moi. D'ailleurs, M. le Président, le ministre du Tourisme — il y a un an, ou à peu près, le 12 décembre, dans son comté même, à Shawinigan, dans le comté de Saint-Maurice, à dix jours du dépôt de la nouvelle politique, ici, à l'Assemblée — disait à un groupe de pêcheurs que, non seulement le permis de pêche serait maintenu, mais qu'il serait augmenté à plus de $5. Du jour au lendemain, et ce n'est peut-être pas la place ici pour faire écho de tout le dossier, le ministre, curieusement ou non, a changé d'opinion. Oui, curieusement ou non; vous ne saviez pas cela, mon cher collègue de Mégantic-Compton? Dans un délai de dix jours, vous savez que samedi, si ma mémoire est fidèle, ce n'était pas le 12, c'était le 10...

M. Perron: ...

M. Pagé: ... c'est le 10 décembre que le député de Saint-Maurice, ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, devant une assemblée bondée, à Shawinigan, dans son comté, disait: Le permis de pêche sera maintenu. Non seulement il disait qu'il serait maintenu, mais il plaidait en faveur du permis de pêche, celui-ci devenant un moyen incitatif et coercitif pour limiter les infractions et faire réfléchir tout pêcheur désireux de contrevenir aux règlements. Il ajoutait même, M. le Président, que non seulement il serait maintenu, mais il serait augmenté. Dix jours après, du jour au lendemain ou à peu près, suite à des incitations, pour ne pas dire autre chose, le ministre change d'idée. Il présente — c'était avant la fête de l'Esprit-Saint, M. le Président — sa politique et abolit purement et simplement le permis de pêche.

Je conviens que c'était peut-être emballant, motivant, édifiant pour le gouvernement, pour les fonctionnaires, pour les collaborateurs du ministre qui ont vendu cette idée au titulaire du ministère d'essayer une première année d'enlever le permis de pêche, étant donné que cela s'inscrivait dans une approche globale. C'était défendable, peut-être, ce n'est pas ce que je dis, mais peut-être. Je lui donne le bénéfice du doute. (23 h 30)

Aujourd'hui, on a l'expérience d'une année; un des éléments importants de la constatation des conseils d'administration des zones d'exploitation contrôlée, c'est le fait qu'au chapitre des contrôles, il y a un manque, et un des éléments pour ajouter au contrôle, si contrôle il y a, dans certains cas, c'était le permis de pêche, ce serait le permis de pêche et ce pourrait être le permis de pêche. C'est essentiellement, M. le Président, ce pourquoi on a demandé, au nom de l'Opposition officielle — je vais vous dire bien humblement qu'on a participé et j'ai participé personnellement à l'étude, l'analyse de ce projet de loi — qu'on prenne position. Or, un des éléments que l'Opposition défend et que je défendrai, M. le Président, c'est le maintien de ce permis de pêche.

Sur l'autre aspect, en plus d'en faire un commentaire, je vais poser une question. Je conviens que le chapitre des pénalités, le nouveau système de points de démérite ou "demerit marks", c'est intéressant. Ce sera cependant compliqué. Cela impliquera du "listing" dans la réglementation. Cela impliquera des jugements de valeur, nécessairement, de la part du ministre, à savoir si ce sera plus grave de tuer un mâle qu'une femelle, si ce sera plus grave de prendre un lièvre que de tuer une perdrix.

M. Perron: II ne faut pas couper les cheveux en quatre. Un orignal demeure un orignal.

M. Pagé: Non, cela peut être éventuellement cela. Je conviens que le député de Duplessis ramène son dialogue à couper les cheveux en quatre, mais ce n'est pas mon intention ce soir. D'ailleurs, vous n'en couperiez pas beaucoup. N'en coupez pas trop. N'en abusez pas. Or, sérieusement, M. le Président, je vais vous dire que cela obligera... Le député de Laviolette devra en couper des cheveux, en quatre, par exemple, M. le Président, et il aurait de quoi à en couper. Sérieusement, M. le Président, cela impliquera un jugement de valeur, cela obligera le gouvernement à porter un jugement de valeur sur certaines infractions.

Je conviens que le ministre a donné l'exemple du type qui descend une dizaine d'orignaux, au mois de juin ou au mois de juillet. Vous savez, ce gars-là, quand même on lui suspendrait son permis de 15 mois, ce n'est pas ce qui va l'inciter à tuer des orignaux, parce que ce gars-là, c'est ce que j'appelle un carpon et un "faucher" et un braconnier.

Mais, M. le Président, qu'il soit condamné 10 fois, j'en conviens. Qu'il paie 10 fois la pénalité, cela, c'est très bien, j'en conviens et je suis pour cela, 10 fois 80 jours.

M. Duhaime: Non, 10 fois 8, c'est 3000 balles.

M. Pagé: Combien? Est-ce que vous imposerez un délai minimum? un mois?

M.Duhaime: Un mois, un mois minimum, 10fois un mois.

M. Pagé: D'accord. Revenons à l'aspect de l'exemple que donnait le ministre. Votre gars qui tue un lièvre, qui prend un lièvre au collet de plus que le quota, ce n'est peut-être pas grave. Maiss'il en prend un de plus que son quota tous les jours, c'est un peu plus grave. Comment allez-vous faire pour déterminer et jouer dans ce mécanisme, à l'intérieur d'un système de mérite ou de démérite? Pourquoi, M. le Président, le ministre... je conviens, M. le Président, qu'il est 11 h 30, qu'on est à 24 heures et demie de l'ajournement de la session et ce, même s'il reste encore une trentaine de lois au feuilleton, il y a encore probablement 4 ou 5 heures de travaux, dans le projet 71, mais quand même, il faut que le ministre soit plus sérieux.

Pourquoi ne prévoyez-vous pas, dans votre loi, des pénalités minimales dans certains cas? Dans les cas où vous considérez que c'est une infraction

mineure, pourquoi ne laissez-vous pas un pouvoir discrétionnaire aux tribunaux, un pouvoir pour que le juge puisse déterminer lui-même la pénalité au complet? Je vais vous donner un exemple...

M. Duhaime: Je veux ouvrir une parenthèse.

M. Pagé: Je vais vous donner un exemple, avant votre parenthèse. Prenons le cas d'une personne qui, en période de chasse, est prise avec une arme de chasse qui n'est pas dans la valise ou dans le coffre. On voit des cas, M. le Président, on peut voir des cas où, si cette personne se promène avec une arme qui n'est pas dans son contenant, le ministre se rappellera ses principes de la mens rea, même si cela n'intervient pas dans cela, parce que c'est statutaire, avec une intention, mais, M. le Président, dans d'autres cas, il peut n'y avoir aucune intention d'illégalité, aucune intention de chasser illégalement, aucune intention de chasser dans le véhicule.de sortir le fusil et d'abattre l'animal.

M. le Président, selon la loi, telle qu'elle est faite, actuellement, j'en conviens, le juge est obligé de suspendre le permis pour 15 mois. J'ai eu un cas encore tout récemment, dans mon comté, où, selon moi, c'est bien personnel, l'appréciation que j'avais de la preuve et de la défense, c'était que le permis de chasse ne devrait pas être retiré pour une période de 15 mois. Mais, dans ces cas, le juge n'a aucune latitude.

Pourquoi ne pas laisser une latitude au juge dans le cas de ces infractions-là plutôt que d'en arriver à un système de listes, somme toute, préférentielles parce que le ministre devra porter des jugements de valeur sur les infractions, sur la gravité de tuer tel genre d'animal par rapport à tel autre genre d'animal. C'est essentiellement, M. le Président, ce qu'on demande: conserver un minimum dans certains cas de gravité, j'en conviens et, dans un autre temps, permettre une plus grande latitude de la part des tribunaux.

Je n'hésite pas à croire que c'est peut-être un bon "move" que vous faites, excusez le terme; c'est peut-être une bonne orientation que vous avez avec le système de mérite et démérite, mais cela vous obligera à faire des jugements de valeur par la loi ou les règlements, d'une part, et d'autre part, ce sera encore un paquet de procédures administratives.

M. Duhaime: M. le Président, je suis heureux d'entendre le député de Portneuf parler comme cela, parce que je pense que, pour la première fois en deux ans, on va être d'accord sur quelque chose. Si vous...

M. Pagé: Je suis d'accord pour d'autres choses.

M. Duhaime: Si vous regardez l'article...

M. Pagé: Rappelez-vous vos dépenses exagérées; vous étiez d'accord avec moi là-dessus!

M. Duhaime: ... 49 de la loi 58 que nous voulons amender par le projet de loi, il faut bien comprendre que le certificat de chasseur n'est pas dans la loi 58; cela n'existe pas. C'est un pouvoir réglementaire, donc il ne peut s'agir, à cet égard, d'une discrétion de la cour; c'est dans le pouvoir réglementaire.

M. Pagé: Oui.

M. Duhaime: Une seconde. L'article 49 dit ceci: "Toute condamnation du détenteur d'un permis pour une infraction commise à l'encontre de la présente loi ou des règlements entraîne l'annulation de plein droit du permis de ce détenteur". Au sens normal des mots, si je commets une infraction à la Loi de la conservation de la faune à l'endroit de ce qu'on appelle le petit gibier et que j'étais porteur d'un permis de petit gibier, l'article 49 de la loi peut permettre l'annulation du permis de petit gibier. C'est dans le pouvoir réglementaire que le lieutenant-gouverneur, à la suite de l'adoption de la loi 58, a introduit la question du certificat. Nous allons beaucoup plus loin et je voudrais que le député de Portneuf m'écoute attentivement et il va être d'accord avec moi. La loi actuelle ne laissera aucune discrétion à la cour pour des infractions qu on appelle majeures; ce sera la suspension des permis et du certificat. Dans la loi, pour ce qui est des infractions mineures, les amendes ont été doublées. J'invite le député de Mégantic-Compton — je sais qu'il suit notre échange de façon et d'une oreille très attentive, parce que son chef disait cet après-midi qu'on était en train d'enlever des dents à la loi. Je lui ai expliqué que c'était le contraire, mais au moment où je le lui ai expliqué, il était parti. Cela m'a fait de la peine, mais je suis convaincu qu'il va relire cela...

Une Voix: II est bien difficile à suivre.

M. Duhaime: Je vous donne un exemple: L'article 41 du projet de loi 71, au chapitre des pénalités, pour les infractions qu'on appelle mineures, autrefois, l'amende était de $25; elle est portée à $50. "Quiconque contrevient aux articles 17, 20 ou 28, etc., ou aux articles 21, 23, 25b, etc. de la présente loi commet une infraction et est passible en outre du paiement des frais, pour une première infraction, d'une amende de $50 et pour toute récidive dans les deux ans, d'une amende de $200 à $400 — et ceci est important — ou d'un emprisonnement de 15 jours et d'au plus, 30 jours."

La loi actuelle, l'amende "plancher" si je puis dire, c'était $25 et, dans le cas de récidive, c'était $100 à $200 et c'était "ou d'un emprisonnement d'au plus 15 jours ou des deux peines à la fois".. C'est-à-dire, d'un emprisonnement d'au plus... il n'y avait même pas de peine d'emprisonnement... Donc, les amendes sont doublées et la cour n'a plus cette discrétion que réclame justement le député de Portneuf de dire "d'au plus, trois mois",

la sentence est automatique. C'est $50 d'amende — et je ne vous dis pas cela en faisant une ronde de pratique — $50 d'amende et les frais ou, à défaut, et pour toute récidive dans les deux ans, d'une amende de $200 à $400 et les frais et, à défaut, un emprisonnement d'au moins 15 jours, alors qu'autrefois, on disait: "D'au plus, un mois".

M. Pagé: Oui, mais à quinze jours, M. le Président, le ministre sait pertinemment, étant avocat, que le gars va faire quatre jours.

M. Duhaime: II est mieux de faire quatre jours que de ne rien faire parce que la loi 58 faisait en sorte qu'il ne faisait rien.

M. Pagé: C'est possible, les gars s'en tiraient peut-être avec une journée, j'en conviens.

M. Duhaime: Tantôt, j'ai donné l'exemple où le ministère — et ce n'est pas une très longue expérience, mais je vous la soumets, cela vaut ce que cela vaut — comme procureur de la défense, réussissait très facilement à convaincre les juges que l'amende et la sentence devaient être de $300 pour l'amende, dans certains cas, parfois $500 ou à défaut, une journée de prison.

Je le disais cet après-midi, la journée de prison consistait à passer quelques heures dans le palais de justice à manger un petit poulet et, vers 17 heures, on s'en retournait chez soi. Comme résultat, c'était désastreux sur deux plans.

M. Pagé: Cela coûtait plus cher d'avocat que d'amende.

M. Duhaime: L'amende était, de façon générale, récupérée par le procureur. Cela avait deux conséquences désastreuses: Premièrement, le citoyen qui était ainsi mal condamné, à mon point de vue, ne prenait pas au sérieux les dispositions de la Loi de la conservation de la faune, il s'en foutait royalement. La deuxième conséquence désastreuse, c'est que ces causes, surtout après procès, coûtent énormément d'argent. Les agents de conservation doivent sortir de la forêt, préparer les interrogatoires, venir à la cour, parfois de plusieurs centaines de milles de distance...

M. Pagé: Passer une journée pour une remise.

M. Duhaime: Une remise, s'il n'en était que de cela, j'ai déjà vu 16 remises dans la même cause et les mêmes agents de conservation...

M. Pagé: Avoir été juge, je n'aurais pas accepté cela.

M. Duhaime: II y a des juges itinérants, surtout quand on est dans des régions éloignées. De sorte que la loi n'atteignait pas son but.

M. Pagé: M. le Président, le député de Laviolette vient de faire une référence à Portneuf; je lui dirai bien respectueusement que je n'ai pas de palais de justice ni de district judiciaire dans mon comté.

M. Duhaime: On pourrait parler de Parent, c'est un endroit beaucoup plus familier à mon collègue de Laviolette. Windigo...

M. Jolivet: Weymontachingue...

M. Duhaime: ... Casey, le pays Atikamek, la Manouane. Tout cela pour vous dire que c'étaient des frais très onéreux, qui coûtaient des centaines et des centaines de dollars, parfois davantage, au gouvernement, donc à tous les citoyens, et cela se résumait à passer deux heures au palais de justice à prendre un Coke avec le greffier. J'ai toujours trouvé cela ridicule. Je pense qu'aujourd'hui, avec ce resserrement — et j'espère que le député de Mégantic-Compton va faire le message à son chef, le député de Lotbinière, pour qu'il en prenne note — nous avons doublé les amendes et le plancher discrétionnaire que les tribunaux ont exercé dans le passé.

Je pense qu'il faut dire que les juges — et je vais en nommer un, le juge Quimper, entre autres, qui est peut-être un de ceux qui donnent l'exemple — aux Cours des sessions de la paix, surtout ceux de Montréal, ne sont jamais allés à la chasse et ne connaissent pas l'impact d'une telle loi.

M. Pagé: Faites attention! Il y a de très bons chasseurs et pêcheurs parmi eux.

M. Duhaime: On a déjà chiffré dans le passé, cela vaut ce que cela vaut, qu'un orignal coûte $10 000 au Québec — actif, colonne de gauche — et quand les tribunaux usent... A mon sens, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas voulu laisser cette discrétion parce qu'on n'est pas convaincu qu'elle a été bien utilisée. Donc, nous resserrons la loi.

Les amendes pour les infractions mineures sont doublées, il n'y a plus de pénalité de $25 et de $50.

M. Pagé: Cela fait seulement $50.

M. Duhaime: Oui, comme dirait votre collègue, le député de Jacques-Cartier, vous avez mathématiquement raison. Mais les amendes sont doublées; les amendes de $100 sont portées à $200. Les récidives sont également doublées et il y a une peine d'emprisonnement qui y est rattachée. Je pense qu'on a fait un effort et je pense que cela s'imposait. La Loi de la conservation de la faune va avoir des dents et je suis très heureux que mes collègues de l'Opposition se joignent à moi sur ce point.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que...

M. Pagé: M. le Président, juste avant d'appeler l'article 1, il y a une petite parenthèse que le ministre me permettra puisqu'on discute de cette question. Tout député pourra s'opposer, mais je

suis convaincu que cela les concerne également parce que des problèmes comme ceux-là leur ont déjà été soulevés. Dans les cas de saisie d'armes à feu, est-ce qu'il serait possible, lors des ventes de ces armes, qu'il y ait une publicité qui soit plus adéquate?

M. Duhaime: Oui.

M. Pagé: Cela, je l'espère. Vous savez, une personne, aujourd'hui, qui se fait saisir une arme de $300 ou $400... (23 h 45)

M. Duhaime: J'écrirai avec beaucoup d'empressement à mon collègue, le ministre des Travaux publics et député de Hull une lettre en ce sens et je vous transmettrai copie, au député de Portneuf, au député de Mégantic-Compton de même que mes collègues de ce côté-ci. On va le faire.

M. Pagé: Je l'apprécierais, M. le Président. Il n'est pas rare aujourd'hui qu'une personne se fasse confisquer une arme de $300 ou de $400. J'apprécierais, non pas qu'on lui remette son arme, s'il y a un pouvoir de confiscation et si le tribunal décide que la plainte implique confiscation, mais que cette personne ait au moins, le droit de participer ou de soumissionner à l'enchère, peu importe le mécanisme, pour ravoir son arme une fois qu'elle est saisie.

M. Duhaime: Non pas cette promesse, M. le Président, mais cet engagement sera tenu. Pendant qu'on parle de confiscation, je ne sais pas si ledéputé de Portneuf me permettrait une question. Est-ce que vous seriez d'accord pour que la confiscation soit élargie dans le cas d'infractions majeures, que la cour soit tenue de confisquer les embarcations motorisées, des véhicules ou des aéronefs dans des cas bien précis d'infractions majeures?

M. Pagé: M. le Président, écoutez, évidemment tout cela doit être traité au mérite de chacune des causes. Je souscrirais à ce que le ministre s'interroge dans les cas de récidive, d'infractions majeures.

M. Duhaime: Dans les cas de récidive seulement.

M. Pagé: M. le Président, vous savez qu'il y ait un pouvoir, cela doit être l'automérite. M. le ministre donnait l'exemple du type qui a tué dix orignaux au mois de juin; qu'on saisisse son embarcation, son avion, ses fusils, qu'on saisisse le gars et qu'on le mette dedans, pendant un mois, si on le veut, aucun problème, mais il y a aussi le gars qui a tué un orignal ou qui a un problème avec le fameux timbre appliqué — l'étiquetage — le coupon de transport. J'ai plaidé cet été, M. le Président, une cause que j'ai d'ailleurs gagnée, évidemment — mais le gars s'est fait confisquer sa viande. On la lui a ramenée un an après. Dans ces cas, dans un cas, par exemple, aussi banal, selon moi, cela peut être une erreur ou cela peut être strictement une omission bien banale.

M. Duhaime: Une omission majeure.

M. Pagé: Encore là, on revient à ce que vous qualifiez, à ce que vous pourrez éventuellement déterminer comme étant une infraction majeure ou une infraction mineure.

M. Duhaime: Pas par arrêté en conseil, mais dans la loi. Quand je vous parle d'une infraction majeure, ce seraient des infractions bien clairement identifiées dans... Je vais vous donner un exemple. Supposons que mon collègue de Duplessis soit un braconnier irréductible, le propriétaire d'un appareil Cesna, il chasse le caribou dans le Grand-Nord. Il tire des orignaux ou des caribous à partir de son avion. Est-ce que vous seriez d'accord pour que, sur constatation d'une telle infraction, il y ait amende et confiscation automatique de l'appareil.

M. Pagé: Oui.

M. Duhaime: Oui. Alors, M. le Président, je me rends compte qu'on va sauver énormément de temps, parce que c'est un des amendements que je voulais apporter.

M. Pagé: Parfait. On est d'accord avec cela.

M. Duhaime: Dans les cas de récivide, c'est bien sûr, l'autre cas, c'est celui où l'on pourchasserait, mutilerait ou tuerait volontairement un animal avec un véhicule, un aéronef ou une embarcation motorisée.

M. Pagé: D'accord, il y a une question que je me pose tout de suite...

M. Duhaime: Ce seraient les deux seuls cas, je le dis pour mes collègues de cette commission, et pour tout le public, qui aura sûrement l'occasion de relire nos travaux fort intéressants, par ailleurs, nous avons un problème sérieux au Québec et depuis de longues années, entre autres, au nord du 50e, le 55e, c'est encore pire, et peut-être dans certains coins du Québec. Si on pouvait confisquer ces avions, nous n'aurions qu'à les repeindre et nous en servir pour faire la protection de la faune. C'est une vieille tactique japonaiseque le député de Portneuf connaît fort bien. Pour parler sérieusement...

M. Pagé: Vous avez vu trop de films de guerre!

M. Duhaime: Si nous devions, M. le Président, assurer une surveillance et un contrôle dans le nord, particulièrement dans le nord, il nous faudrait, ou bien des Mirage, des Mig 21, des Phantom ou je ne sais quelle sorte d'escadrille et à des coûts que mon collègue Laurin qualifierait de faramineux.

Je pense que cela remonte peut-être à nos souvenirs pendant nos humanités, mais la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse.

M. Pagé: On en sait quelque chose.

M. Duhaime: Arche sophias o Théou phobos. Je me demande comment on va écrire cela. J'ai une bonne pensée pour les gens du secrétariat.

II est bien certain qu'une telle pénalité... Certains m'ont dit, M. le Président, que cela paraissait être une massue pour écraser une mouche, mais je vous assure que ceux qui braconnent avec des aéronefs... On parle d'une façon générale d'avions, mais nous avons vu des dossiers où on chassait et où on quadrillait le terrain à l'aide d'hélicoptères. On avait enlevé les portes des deux côtés, on approchait du gibier et c'était un véritable massacre. La loi actuelle ne nous permet à peu près pas... On peut intervenir, mais c'est à la discrétion de la cour, et il y a toutes espèces de moyens de s'en tirer, par exemple, en invoquant le droit de propriété d'un tiers, en invoquant un contrat de vente additionnelle. Je reviendrai tantôt sur les amendements mais c'est sur ces deux infractions majeures et ce seraient les deux seules, M. le député de Portneuf; si vous étiez d'accord avec moi, je pense que cela vaudrait le coup qu'on s'organise un voyage de chasse à vos frais.

M. Pagé: Pour l'instant, mes responsabilités familiales ne me le permettraient pas, évidemment. Le ministre sait pertinemment qu'après cinq ans de mariage, on est maintenant sept à table; 40 pintes de lait par semaine, c'est bien le cas. Vous savez, M. le Président, je fais beaucoup plus de voyages à l'épicerie que de voyages de chasse. Mais, quand même, M. le Président, M. Biron est un très bon chasseur.

M. Jolivet: C'est pour cela que je dis cela.

M. Pagé: On abordera cette question, M. le Président, plus spécifiquement avec tous ses impacts, lors de l'étude de l'amendement que proposera le ministre. Il y a évidemment toute cette question: Est-ce qu'une latitude doit être laissée aux juges ou si cela doit être "doit"? Qu'est-ce qui arrivera dans les cas de propriété à un tiers, d'avions loués, etc.? Evidemment, il y aura possibilité que des garanties de la part des locateurs, des assurances ou je ne sais quoi puissent se prendre, mais cela mérite certainement non seulement d'être étudié, mais d'être pris en très sérieuse considération et il me fera plaisir de me joindre au débat sur cette question si je peux le faire. Vous savez qu'on n'a pas le don d'ubiquité malheureusement; je me demande à quel moment la loi sera ramenée demain, parce qu'il est déjà minuit moins cinq et on a le projet de loi 110 qui doit venir demain matin.

M. Duhaime: Avec le consentement de la commission, on pourrait proposer dès maintenant l'arrêt de la pendule. Et si Dieu nous prête vie, j'ai l'impression que, dans une trentaine de minutes, avec la discussion très large que nous venons d'avoir, nous pourrions passer les amendements, si vous me permettez de vider cette question.

Nous avons, en nous inspirant d'une disposition de la Loi de l'idemnisation des victimes d'accidents d'automobile, bien cerné les cas — et je rejoins votre dernière intervention, M. le député de Portneuf — où un tiers pouvait faire intervenir son droit de propriété. Cela se limite à celui qui peut revendiquer en vertu d'un contrat de vente conditionnelle, c'est-à-dire que lui n'aurait pas le droit. Une maison de finance, par exemple, ne pourrait pas invoquer un contrat de vente conditionnelle pour faire une requête à la cour en vertu des dispositions de l'article 15 de la loi actuelle. Celui-là est exlu. Mais si votre beau-père prête son avion — ou votre belle-mère, peu importe — le droit de le revendiquer existe et cet appareil ne serait pas assujetti à saisie.

M. Pagé: Quoique, bien souvent, on peut présumer...

M. Duhaime: Ce sont les deux seuls cas...

M. Pagé: ... qu'il est prêté à la condition d'avoir une partie de la fesse d'orignal.

M. Duhaime: Ce sont les deux seuls cas où la cour doit confisquer et, dans les amendements qu'on va vous soumettre, pour des infractions majeures mais d'autre nature, la discrétion est laissée à la cour, ce sera: La cour peut confisquer.

M. Pagé: D'accord.

M. Duhaime: Je n'ai pas eu la réaction de mon collègue de Mégantic-Compton, je vois, par l'expression de son visage, qu'il est parfaitement d'accord.

M. Grenier: Après deux nuits sans sommeil, on semble naturellement d'accord. Si, par exemple, on supposait que c'est un avion prêté ou un avion loué, comment cela peut-il se régler?

M. Duhaime: II n'y a pas de problème, à ce moment-là. C'est le propriétaire réel de l'appareil qui fait valoir, s'il est sous saisie, son droit de propriété à la cour et, même avant l'étape de la cour, auprès du ministère, et l'appareil est retourné. Le cas que nous voulons viser, c'est le propriétaire individuel ou une corporation qui est propriétaire d'un appareil, mais dont l'appareil est assujetti à un contrat de vente conditionnelle, la clause classique, Household Finance, etc. A ce moment-là, la maison de finance ne pourrait pas faire valoir son droit de propriété éventuel, au cas de défaut de paiement par le débiteur.

M. Grenier: Seriez-vous capable de faire détecter une complicité du prêteur de l'avion, de l'appareil?

M. Duhaime: A ce moment-là, on portera plainte contre le prêteur.

Une Voix: A ce moment-là, il embarque.

M. Duhaime: Je ne parle pas de la maison de finance, je parle du beau-frère qui prête son appareil, si on est en mesure de faire la preuve qu'il

peut être partie à l'infraction; alors, il sera reconnu coupable, en vertu del'article 71.

Interprétation

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que je peux maintenant appeler l'article 1 ? Alors, j'appelle maintenant l'article 1. L'article 1 sera-t-il adopté?

M. Pagé: La définition, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Oui. Est-ce que l'article 2 sera adopté?

M. Pagé: J'aimerais tout simplement savoir si la définition de l'étui a été corrigée.

M. Duhaime: Oui, l'article 1g.

M. Pagé: Cela n'a pas été corrigé par rapport à l'article 58.

M. Duhaime: Je pense que l'étui n'était pas défini.

M. Pagé: II n'était pas défini. M. Duhaime: II n'était pas défini.

M. Pagé: Parce que, tel que rédigé, c'est un contenant spécialement conçu par sa forme et sa disposition pour recevoir une arme à feu. On voyait que, dans certains cas, il suffisait, et cela, on a vu cela devant les tribunaux, d'une couverture ou d'une enveloppe... Cela, c'est fini. Cela prendra l'étui.

M. Duhaime: Ce pourrait être de fabrication artisanale ou manufacturière, peu importe. Pour autant qu'il sera spécialement conçu.

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse...

M. Pagé: Entre autres, M. le Président, avant de procéder à l'adoption de l'article 1, je suis heureux de constater que, selon le ministre du Tourisme, lequel a très bien suivi cela, je présume, à la lettre, les recommandations du ministre des Affaires intergouvernementales, en ce qu'il n'a pas suivi par la rédaction de l'alinéa r) et de l'alinéa s), les prises de position combien fracassantes, mais qui ont eu combien d'impact, et cela, ce sera visible d'ici quelques semaines, lors du remaniement ministériel, les déclarations, dis-je, du ministre actuel des Communications, lorsqu'il disait que les Canadiens étaient des étrangers. Je suis heureux que le ministre fasse amende honorable de la part du gouvernement et considère que les gens du Canada sont bien des gens de chez nous.

Le Président (M. Marcoux): L'article 1 est-il adopté?

M. Pagé: Oui, M. le Président. Cependant, M. le Président, je me vois dans l'obligation, et j'en suis bien peiné, de vous dire qu'on devra suspendre à minuit, non pas que je ne veuille pas continuer, mais c'est le règlement qui prévoit qu'on doit ajourner à minuit, d'une part. Vous comprendrez, M. le Président, que, d'autre part, nous avons à aborder dans quelques minutes la commission plénière sur un autre projet de loi qui peut intéresser d'autres collègues. Par surcroît, M. le Président, je conviens qu'on aurait peut-être pu, dans un délai d'une heure, une heure et demie, procéder à l'adoption des différents articles. Je ne voudrais quand même pas enlever le plaisir, je ne veux pas faire mauvaise fortune à mon collègue de Maskinongé qui, ce soir, au pied levé, a dû se rendre remplacer une personne en autorité dans le parti, et qui n'a pas pu être avec nous. Or, celui-ci, demain, M. le Président, sera...

M. Duhaime: Le futur député d'Argenteuil!

M. Pagé: Non, M. Ryan, le futur premier ministre du Québec est avec nous ce soir. M. le député de Maskinongé devrait normalement, s'il est revenu, être avec nous, demain, après la période des questions, pour continuer l'étude du projet de loi, article par article. J'ose donc espérer que les travaux de la Chambre me permettront de venir à nouveau dialoguer sur tout cet aspect de la conservation de la faune avec mon bon ami, le député de Saint-Maurice.

Le Président (M. Marcoux): Or, comme il n'y a pas consentement, la commission du tourisme, de la chasse et de la pêche ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 24 heures.

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