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Commission permanente du Travail et de la
Main-d'Oeuvre
Bill 38 Loi concernant l'Industrie de la
construction
Séance du mardi 6 octobre 1970
(Dix heures quarante minutes)
M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de
la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! Je déclare la séance
ouverte.
A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! Je déclare la
séance ouverte et la commission va siéger, ce matin, en entendant
d'abord les parties non présentes au litige. J'aimerais que ces parties
s'identifient immédiatement, et nous allons les entendre jusqu'à
épuisement des noms.
M. Pepin, vous désirez prendre la parole?
M. PEPIN: Oui, M. le Président, avec votre permission, je
voudrais faire deux remarques. Y aurait-il moyen, à une autre
séance, d'avoir une salle qui nous permettrait de travailler un peu plus
à l'aise, parce qu'avec toute la documentation qui est ici nous sommes
tous entassés les uns sur les autres. Ce ne sont pas de bonnes
conditions. Peut-être que ça pourrait régler le
problème.
M. LAPORTE: Même si nous songions à agrandir, les
problèmes de la construction nous retarderaient peut-être.
M. PEPIN: Cela ne voudrait peut-être pas dire de construire
immédiatement, M. le ministre; je sais que ça coûterait
trop cher avec l'égalité des salaires. Mais, il y a
peut-être, dans un autre lieu, une salle qui serait plus
appropriée à nos travaux.
M. LAPORTE: La seule qui soit plus grande, c'est l'Assemblée
nationale, le Parlement lui-même, et il n'est pas question que nous y
aillions, quant à moi.
M. PEPIN: L'ancienne salleduConseil législatif ne serait-elle pas
plus appropriée, ne pensez-vous pas? Je ne sais pas.
DES VOIX: C'est rouge. Cela aveugle pas mal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le Grand Théâtre.
Ordre du jour
M. PEPIN: De toute façon, c'est la première chose. Voici
la deuxième chose que nous aimerions connaître, si possible: Quel
est le programme de cette semaine? Nous voudrions déterminer, nous
aussi, notre ordre du jour pour le reste de la semaine.
M. LAPORTE: Disons que l'ordre du jour que je vais suggérer aux
membres de la commission, dans quelques minutes, va partiellement être
fonction du nombre de ceux qui veulent se faire entendre et qui ne sont pas une
des sept parties à la table des négociations. Si on me le
permettait, M. le Président, je suggérerais une réponse
à la question de M. Pepin dans quelques minutes seulement, quand les
gens se seront identifiés.
M. DUMAIS: La ville de Montréal, Claude Dumais.
M. DESILETS: L'Association des entrepreneurs de travaux
mécanisés, Ubald Désilets.
M. GRAVEL: Le Syndicat de la construction de Montréal,
André Gravel.
M. BRUNET: Catalytic Entreprises limitée et Canadian Vickers,
Yves Brunet.
M. PERRAULT: Conseil du patronat, du Québec, Charles
Perrault.
M. KENTZINGER: Gérard Kentzinger,...
M. LAPORTE: Comment cela s'écrit-il étant donné que
nous n'avons pas un président sténographe?
M. KENTZINGER: Gérard Kentzinger, Corporation des entrepreneurs
en réfrigération.
M. LAPORTE: Votre nom, s'il vous plaît? M. BELLEFEUILLE: Gilles
Bellefeuille.
UNE VOIX: Industrie du pétrole de Montréal-Est.
M. DUMESNIL: Fédération des commissions scolaires, Mario
Dumesnil.
M. LAPORTE: Un instant! Cela va trop vite. M. JOLIN: Paul Jolin. Le
groupe Reynolds,
le groupe Marine, Belolt, Sorel et Engineering Products.
M. MARCHESSAULT: Jacques Marchessault. Le groupe Alcan, les distilleries
Melchers, Lines Brothers Canada, l'Association provinciale des
propriétaires de camions-citernes, Cresswell-Pomeroy, Sido
Limitée, Beaconing Optical and Precisions Limited, Klockner-Moeller
Limited, Alva Craft Limited, Direct Motor Express Limited et la Compagnie de
transport Richard, Inc.
M. BRUNELLE: Jean Brunelle. Centre des dirigeants d'entreprise du
Québec.
M. DUROCHER: Jacques Durocher, HydroQuébec.
M. LE PRESIDENT: Dans quel ordre, est-ce qu'on commence? A l'ordre!
M. LAPORTE: M. le Président, messieurs, la salle est petite; on
vient de nous le faire remarquer. H y a beaucoup de monde. Alors, est-ce qu'on
pourrait demander, d'abord, pour le bon entendement et la compréhension
de toutes les choses qui seront dites ici, qu'il n'y ait qu'une seule
réunion à la fois?
Je sais que cela sera difficile, que le travail sera long, que
l'atmosphère peut devenir moins sereine de temps à autre, mais je
fais appel à tous pour que nous procédions tout à fait
dans l'ordre.
Nous avons devant nous un bon nombre d'associations qui ont
demandé à être entendues. Deux problèmes se posent:
le problème de l'ordre dans lequel ces groupes, ou ces individus, seront
entendus. Je suggère que cela soit dans l'ordre où ils se sont
identifiés. Deuxièmement, le problème de certaines
associations; certains groupes peuvent, à notre avis, être
déjà membres de l'une des parties en cause. Sur ce point de vue,
personnellement, j'ai l'intention d'être très large, afin que
chacun ait l'impression qu'il a pu se faire entendre, mais nous ne voudrions
pas que l'une ou l'autre des parties au dossier ait deux ou trois fois
l'occasion de se faire entendre, alors que d'autres ne parleraient qu'une seule
fois.
Ces deux problèmes posés, M. le Président, je
suggère que nous siégions jusqu'à midi et demi, puis que
la séance reprenne à deux heures et demie jusqu'à six
heures, et enfin, que nous siégions de huit heures à dix heures,
ce soir. Et demain, nous siégerons de dix heures à midi et demi,
de trois heures à six heures. J'imagine qu'à ce moment, nous
pourrons avoir terminé l'audition des différents mémoires
qui nous sont proposés ce matin. Nous ajournerions mercredi soir pour
entreprendre, jeudi matin, l'audition des plaidoiries des sept parties au
dossier. Jeudi, nous aurons également trois séances et nous
aurons aussi des séances vendredi.
Ceux qui ont prétendu que le gouvernement voulait se
traîner les pieds auront peut-être une opinion différente,
j'espère; devant le rythme de nos séances, je pense qu'il est
normal que nous agissions de la sorte.
Si nous terminions ce soir, par exemple, l'audition des personnes qui
nous font l'honneur de nous visiter ce matin, nous pourrions ajourner à
jeudi matin pour que les députés aient le temps de prendre
connaissance des mémoires qui leur sont soumis. M. le Président,
c'est le rythme que je suggère, pour le travail de cette commission;
j'espère que mes collègues le trouveront acceptable et qu'il en
sera de même pour les personnes qui nous visitent aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: Auriez-vous des remarques sur la procédure? Le
député de Bagot.
M. CARDINAL: Est-ce que je pourrais demander au leader parlementaire de
rappeler les heures de la journée de demain, si nous devons
siéger?
M. LAPORTE: Nous siégerons demain de dix heures à midi
trente. Comme il y aura séance du comité de législation
d'une heure trente à trois heures, je demanderais que l'on puisse
siéger ici de trois heures à six heures. Il n'y a pas
théoriquement de séance prévue pour demain soir, mercredi,
mais, si nous n'avions pas terminé le travail quant aux messieurs qui ne
sont pas l'une des parties au dossier, nous devrions siéger demain
soir.
Des mémoires ont été déposés. Je ne
crois pas que cette commission exige ou même souhaite que nos amis de
l'autre côté de la barre lisent en entier tous ces
mémoires. Nous aimerions mieux qu'ils soient résumés dans
leurs points essentiels et commentés. Cela nous permettrait, ensuite, de
poser des questions sans que nous ayons à lire in extenso tous ces
mémoires, dont j'ai eu l'occasion de prendre connaissance partiellement,
et qui peuvent, je pense, se résumer assez brièvement. Cela
répond à votre question?
M. CARDINAL: Oui, merci.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions des membres de la commission sur la
procédure?
M. DEMERS: Quant à nous, nous acceptons de bonne grâce
l'échéancier et l'horaire que le leader du gouvernement vient de
proposer. Si on pouvait se mettre à la tâche le plus tôt
possible parce qu'il y a énormément de travail à
faire cela nous permettrait non seulement de cerner le problème,
mais d'en sortir un jour.
M. LE PRESIDENT: Avant de procéder à l'audition des
parties hors litige, Je tiens à remercier les parties qui, elles, sont
au litige d'avoir procédé aussi rapidement à la
présentation de leur mémoire. Je crois que cela fait suffisamment
de travail pour les députés. Il y en aura pour quelques jours, du
moins. Nous allons commencer immédiatement l'audition des parties, en
procédant selon l'ordre d'identité, c'est-à-dire la ville
de Montréal, d'abord.
Si vous vouliez vous identifier à nouveau avant la lecture de
votre mémoire, les membres de la commission l'apprécieraient.
Ville de Montréal
M. DUMAIS: Mon nom est Claude-René Du-mais, avocat de la ville de
Montréal, membre du contentieux de la ville de Montréal,
chargé des relations industrielles.
Je pense que, comme le disait le ministre du Travail, il n'est pas
nécessaire pour nous de répéter tout ce que nous avons dit
là-dedans. Tout ce que la ville de Montréal désire, c'est
ce qu'elle avait jusqu'ici, c'est-à-dire l'exclusion, pour les travaux
qui sont faits par ses travailleurs permanents, du décret de la
construction.
Jusqu'à présent et, autant que je me rappelle, jusqu'au
mois de mai, et même cela a été continué en partie
par l'ordonnance numéro 12 jusqu'au 1er novembre, dans le décret
613 du district de Montréal, 11 y avait une exemption pour les
cités, villes et corporations municipales pour ce qui est des travaux de
construction, réfections, réparations et autres, faits par leurs
propres employés.
Evidemment, nous remarquons que le bill 290, chapitre 45 des lois de
1968, ne spécifie pas exactement de quoi il s'agit lorsque l'on parle
d'entretien. Pour la ville de Montréal, ceci pose un problème
énorme car nous avons entre autres près de 3,000 employés
qui s'occupent à temps partiel, si l'on veut, de construction. C'est
notre propre construction qui se fait et nous ne sommes pas en concurrence dans
nos travaux avec les divers organismes de constructeurs. Nous avons même
des employés tellement spécialisés qu'ils n'existent pas
ailleurs.
Si l'application d'un décret devait leur être
imposée, c'est très simple, ils ne seraient absolument pas
capables de passer l'examen pour obtenir les cartes de compétence
nécessaires à l'ensemble d'un métier.
De la sorte, et je dois le dire sans qu'il y ait là aucune
trace de menace nous serions forcés de mettre à pied
plusieurs employés à la ville de Montréal à cause
de l'application d'un décret qui, au fond, vient d'une loi qui ne
s'applique pas à des corps qui, comme nous, ne sont absolument pas en
concurrence sur le marché, entre constructeurs.
Si l'on regarde on n'a pas besoin d'aller loin pour ça
les origines de la Loi des conventions collectives qui ont donné
ensuite lieu à la loi de 1968, et surtout le chapitre 45, au sujet des
relations dans l'industrie de la construction, nous nous apercevons de ce que
ceci touche spécifiquement et veut éviter. La première loi
avait été votée en 1938, je pense, sous l'égide de
M. Tremblay et d'autres; elle avait pour but d'empêcher une concurrence
malhonnête par des baisses ou des hausses de salaire, etc., entre les
divers constructeurs vis-à-vis d'une soumission.
Or, dans le cas de la ville de Montréal, il n'en est absolument
pas ainsi. Nous faisons nos propres travaux. Lorsqu'il y a de gros travaux,
je suis prêt à dire ceci en toute déférence
à votre commission ces travaux sont donnés à
l'extérieur. Il y a ensuite il ne faut pas l'oublier nos
conventions collectives qu'il nous faut respecter, entre autres et le
président de la centrale en sait quelque chose les fameuses
clauses de contrat à forfait. Nous serions très mal foutus
vis-à-vis de ces clauses-là si nous devions, du jour au
lendemain, être aux prises avec le décret.
Pour toutes ces raisons-là, nous croyons donc qu'à
l'article 5, entre autres, qui est actuellement en discussion et qui doit
être discuté par les parties qui ont été
jugées représentatives par le chapitre 45, nous croyons, dis-je
que notre problème ne doit pas être sujet à un
décret, et que la ville de Montréal devrait avoir le droit de
faire elle-même ses propres travaux sans être touchée par
les décrets. N'oubliez pas que lorsqu'elle fait des travaux qui sont
supérieurs ou des travaux d'un ordre tel qu'ils ne peuvent être
faits par nos employés, et, je suis prêt à en donner
ici toutes les preuves ils sont toujours donnés par soumissions
à l'extérieur.
Nous, ce que nous voulons garder, c'est le droit pour nos
employés permanents de faire les travaux que nous avions
déjà le droit de
faire et qui étaient exclus du décret de la région
de Montréal. Je ne vois pas et aucune partie n'a soulevé
jusqu'à maintenant une raison qui nous empêcherait d'y être
exclus une raison nouvelle qui nous en empêcherait.
C'est à peu près tout ce que j'ai à dire. S'il y a
des questions dans l'assemblée, je suis prêt à y
répondre également au nom de la ville de Montréal.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dumais.
M. LAPORTE: Pour que ce soit très clair, vous dites dans votre
document: Le décret a été abrogé parce que tous les
décrets ont cessé d'avoir force à ce moment-là;
mais cette clause dont vous parlez a été prolongée par une
ordonnance...
M. DUMAIS: L'ordonnance numéro 12.
M. LAPORTE: ... de la Commission du salaire minimum, comme toutes les
autres prescriptions de ces décrets. Vous êtes encore couverts par
ces prescriptions-là...
M. DUMAIS: C'est exact.
M. LAPORTE: ... et vous voudriez que dans le prochain décret ces
exclusions demeurent.
M. DUMAIS: D'ailleurs vous, comme ministre, pouvez le faire en vertu, je
crois, de l'article 58 du bill.
M. LAPORTE: Ces vertus-là, monsieur, c'est aussi
inquiétant que réjouissant.
M. DUMAIS: Je ferai remarquer à M. le ministre, si mon souvenir
est bon, que l'ordonnance numéro 12 ne vaut que jusqu'au 1er novembre
1970. Je prie tout le monde pour que ce soit réglé pour ce
temps-là, si possible.
M. LAPORTE: II y a le bill 38 qui est là pour prolonger ce qui
existait...
M. DUMAIS: D'accord. C'est vrai.
M. LAPORTE: Autrement dit, nous avons pris des dispositions à
l'Assemblée nationale pour que, à aucun noment, nous ne soyons
pris de panique, ou obligés de régler dans des délais trop
courts un travail qui puisse, autant que possible, satisfaire tout le
monde.
M. DUMAIS: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre. Je vous remercie,
messieurs.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dumais... M. LAPORTE: Est-ce que vos
collègues...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Il y aurait
peut-être d'autres membres de la commission qui désireraient poser
des questions.
Il n'y a pas d'autres questions, donc, au suivant.
D'autres personnes dans la salle désirent poser des
questions.
M. DESJARDINS: Je voudrais seulement apporter à l'attention de la
commission parlementaire que, la ville de Montréal apporte certains
problèmes lorsque l'on parle d'entretien...
M. LE PRESIDENT: Auriez-vous l'obligeance de vous identifier?
M. DESJARDINS: André Dejardins, directeur de la FTQ, porte-parole
aux tables des négociations.
Lorsque la ville de Montréal veut parler de l'entretien, etc.
prenez, par exemple, lorsque commencent les travaux de l'Expo que
ce soit pour l'entretien ou pour la construction, elle emploie des centaines
d'hommes supplémentaires dont elle a besoin, réellement, pour
faire les travaux réguliers. Ces gars-là sont
rémunérés, non pas au prix de la construction. Par contre,
ce sont des gars de la construction et ces gars-là sont seulement
temporaires. Après, quand vient le temps de fermer l'Expo ils
voient à ce que l'Expo soit fermée complètement à
cause du gel, etc. ces gars-là retournent dans la construction et
perdent toutes les conditions qu'ils avaient au préalable, telle que
l'assurance-santé-salaire, tels que les fonds de pension qui
étaient déjà établis dans la construction...
Alors, on demanderait aux députés de veiller à ce
que la ville de Montréal, dans ses revendications... Nous croyons
sincèrement, par exemple, que le mot « entretien » est
très large pour elle. Elle ne voit pas la différence entre le mot
« entretien » et remplace parfois complètement un
pavillon.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. DUMAIS: Est-ce que je peux répondre, avec votre permission?
Tout simplement, c'est qu'après six mois un employé a sa
permanence. Etant donné que ces employés sont
représentés par la FTQ, vous devriez savoir effectivement
qu'ils l'ont. Pour moins de six mois, ceci est très difficile, et
je pense que tout le monde connaît le caractère de l'Expo.
M. LAPORTE: M. le Président, je veux bien que M. Desjardins et M.
Dumais s'expliquent, mais cela ne tournera pas en assemblée
contradictoire, là!
M. DESJARDINS: Du tout.
M. LAPORTE: Je vais vous en poser une question, moi. Les abus que vous
craignez mis de côté, êtes-vous en faveur de ce qu'il y a
déjà dans la loi?
M. DESJARDINS: Leur fameuse période de six mois, ils renvoient
l'employé au bout de cinq mois et demi. Après cela, ils disent:
On va te réengager. Là, il y a une autre période de six
mois qui commence.
M.LAPORTE: Oui.
M. DESJARDINS: C'est ça que je voulais porter à
l'attention de la commission.
M. LAPORTE! M. Desjardins, cela ne répond pas à ma
question.
UNE VOIX: Enlevez les abus.
M. LAPORTE: Si la période de six mois cesse d'être floue,
êtes-vous en faveur de ce qu'il y à déjà dans la
loi?
M. DESJARDINS: S'il reste réellement employé à
l'entretien de la ville et non pas comme supplémentaire, comme ça
se fait présentement.
M.LAPORTE: Je prends votre réponse pour un oui et je le mets au
compte de votre prudence connue.
M. LE PRESIDENT: M. Dumais, vous aviez quelque chose à
ajouter?
M. DUMAIS: Non, J'ai répondu simplement à la question. Je
ne veux pas entrer dans la polémique, ainsi que nous le demandait M. le
ministre.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions des membres de la commission? Alors,
si vous voulez, nous allons passer au deuxième orateur. Mais auparavant,
je voudrais aviser la commission que Me Guy Gagnon, de l'Association de
l'industrie du verre plat du Québec, désire se faire entendre par
la suite.
Le deuxième orateur est M. Gravel.
UNE VOIX: De quelle maison?
M. LE PRESIDENT: II va nous le dire.
M. GRAVEL: André Gravel, du Syndicat de la construction de
Montréal.
Syndicat de la construction de Montréal
M. LE PRESIDENT: Je crois que votre syndicat est affilié au
Conseil central de Montréal.
M. GRAVEL: C'est bien ça. Nous avons un point de vue particulier
à présenter à la commission parlementaire. Nous avons
préparé un texte de quelques pages et qui est très court.
Si la commission le permet, après mon intervention, nous pourrons le
distribuer i tous les membres.
M. LAPORTE: Une première question préliminaire, M. Gravel:
Est-ce que vous vous sentez représentés par la partie syndicale
CSN à la table des négociations? Etes-vous couvert par cette
unité de négociations ou pas?
M. GRAVEL: Pas exactement. C'est pour ça qu'on a
présenté un point de vue autonome et qu'on voudrait se faire
entendre par la commission parlementaire. Nous représentons 7,000
membres à Montréal. Nous avons des problèmes particuliers.
Nous aimerions prendre quelques moment de votre temps pour faire valoir notre
point de vue.
M. LAPORTE: Mais, est-ce que par la convention collective qui sera
signée par les sept parties ou par le décret qui sera
publié dans la Gazette officielle, vous serez liés?
M. GRAVEL: Exactement, oui.
M. LAPORTE: Est-ce que vous êtes actuellement, par la CSN, par ses
négociateurs, même si ceci ne concorde pas toujours avec vos vues,
légalement représentés?
M. GRAVEL: En fait, c'est la question qu'on se pose parce qu'à la
suite des bills 290 et 38 notre situation devient floue, étant
donné nos relations au sein de notre mouvement.
Aussi, sur certaines conditions de travail, nous avons cru plus simple
de nous adresser directement à la commission parlementaire pour faire
valoir notre point de vue.
M. LAPORTE: Je laisse à la commission le soin de décider
si l'on doit ou l'on ne doit pas vous entendre. Encore une lois, remarquez bien
que nous voulons être très...
M. DEMERS: Est-ce que c'est une répétition?
M. GRAVEL: Non, non, d'aucune façon. M. LAPORTE: Bon, alors... M.
DEMERS: Et la CSN n'a pas d'objection? M. PEPIN: Aucune objection.
M. LAPORTE: Je ne m'attends pas à des objections de la CSN.
Evidemment, si la CSN trouvait le tour de faire entendre les quinze syndicats
qu'il y avait autrefois, j'ai l'impression qu'elle n'aurait pas d'objection.
C'est aux autres qu'il faut demander cela.
M. PEPIN: J'ai répondu à la question qu'on m'a
posée.
M. LAPORTE: C'est cela.
M. DEMERS: Je comprends. Je ne vous ai posé que cette
question.
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons la deuxième voix de la CSN.
M. GRAVEL: Messieurs les membres de la commission, le Syndicat de la
construction de Montréal est directement intéressé aux
résultats qui émaneront de votre commission. Le Syndicat de la
construction de Montréal existe et représente des travailleurs de
la construction dans la région de Montréal depuis plusieurs
dizaines d'années. Actuellement, nous représentons plus de 7,000
travailleurs qui ont mis leur confiance en nous et nous croyons
sincèrement que c'est à eux de choisir leurs représentants
et pas à d'autres. Pour nous, la liberté synci-cale n'est pas un
vain mot. Pas plus le législateur que d'autres ne devrait imposer de
carcan aux travailleurs. Nous désirons prendre position devant vous sur
les différentes clauses en litige, énumérées dans
le document parlementaire numéro 71. Plus particulièrement, nous
nous attacherons à certains points essentiels.
Il y a d'abord la question des droits acquis. Des années de lutte
et de pratique syndicales ont acquis aux travailleurs de la construction de
Montréal le premier droit, c'est-à-dire la reconnaissance. Le
premier des droits acquis est sans conteste la reconnaissance.
La démarche, l'évolution actuelle de la négociation
si on peut toujours parler de négociation dans le cadre actuel
va dans un sens dangereux qui ferait qu'en pratique notre syndicat
serait complètement expulsé du processus légal.
Dans le cadre des nouvelles législations, le syndicat perd en
fait tout droit de parole et de représentation.
Nous avons notre existence légale depuis toujours et nous tenons
à la conserver. Par ailleurs, notre existence de fait durera, quoi que
fassent les lois.
Les militants de notre syndicat sont disposés à se battre
pour conserver leur droit d'association et ce qui en découle. Nous
tenons trop à notre existence et à notre liberté pour
disparaître du jour au lendemain de la main du législateur de
manière directe ou indirecte. On n'efface pas par une loi des
années de lutte. La réalité est plus forte que tous les
artifices.
Le Syndicat de la construction de Montréal est une entité
propre qui existe par la volonté des travailleurs. L'Importance
numérique et la détermination de notre « membership »
représentent un état de fait qui ne saurait être
écarté du revers de la main si nous recherchons réellement
un esprit de démocratie et de saines relations
patronales-ouvrières.
Nous demandons donc que notre organisation soit reconnue formellement
comme les représentants authentiques des membres actuels et futurs du
Syndicat de la construction de Montréal avec tous les droits et
privilèges que cela confère.
L'article 1.11 du document parlementaire 69 ne répond pas du tout
à la réalité de fait que nous vivons. Il faudrait
remplacer cet article par: « Le Syndicat de la construction de
Montréal ayant siège social au 7333 Saint-Denis, Montréal.
»
Encore dans les droits acquis, il y a la question du comité
conjoint.
En second lieu, l'outil légal d'application de la
convention-décret qu'est le comité conjoint est trop important
pour que nous le sacrifiions.
Le comité conjoint de l'Industrie de la construction de
Montréal est le plus ancien des comités conjoints de la province.
A travers les années, nous en avons amélioré
l'efficacité (pensons à l'étude Price Waterhouse, aux cas
de la sécurité au travail, etc. ). Nous avions un certain
contrôle sur lui.
Nous sommes opposés à ce qu'il soit assassiné pour
être remplacé par une superstructure provinciale, sur laquelle
nous n'aurions, en fait, aucun contrôle parce que trop
éloignée des travailleurs. Craignons le gigantisme. La
taille et le mandat du comité conjoint actuel sont
adéquats pour assurer l'efficacité que nous sommes en droit
d'attendre. Un immense comité aurait pour conséquence de diluer
l'efficacité actuelle. Nous favorisons donc un comité conjoint
par région de décret.
Pour ce qui est des autres droits acquis, il suffit de consulter les
conventions sources et les autres documents de négociation pour y
retrouver les différents éléments. Il va sans dire que
nous trouvons inacceptable toute soustraction aux trop peu nombreux avantages
que nous avons acquis à travers les années, sous prétexte
d'uniformisation provinciale.
Voyons maintenant la question des frais de déplacements. Pour les
frais de déplacements, chambre, pension et repas, cette clause doit
être rigide afin d'éviter que certains entrepreneurs puissent la
contourner par des artifices. Ces frais sont très importants
étant donné la grande mobilité qui existe dans cette
industrie.
Quant au quantum et à la formulation, nous suggérons que
la commission se réfère à la demande syndicale, CSN, FTQ,
du 17 février 1970.
Pour la clause d'ancienneté, le principe de l'ancienneté
de mise à pied devrait être retenu. L'application de cette
ancienneté aurait pour conséquence de stabiliser la main d'oeuvre
et de mettre un peu de chair au squelette des propositions du juge Allan b.
Gold. Nous croyons que cette question de l'ancienneté est très
liée à tout le problème de la sécurité
d'emploi. Une petite remarque: Des informations que nous avons prises au
comité conjoint de Montréal nous permettent de penser que ce
système-là peut difficilement être mis en oeuvre. Alors,
cela va avoir énormément d'implications sur la clause
d'ancienneté et il faudrait que ce soit étudié
sérieusement.
Les contremaîtres doivent être assujettis de plein droit
à la convention collective; entre autres, à la
sécurité syndicale. Plusieurs facteurs influent dans ce sens.
D'abord, le bill 290 ne les exclut d'aucune façon. Ensuite, de fait, et
cela depuis plusieurs années, la plupart d'entre eux sont
déjà syndiqués. De plus, plusieurs contremaîtres
alternent du poste de contremaître à celui d'ouvrier. Une telle
solution est apte à simplifier de beaucoup l'application de la
convention-décret.
Le Syndicat de la construction de Montréal souscrit
entièrement à la revendication de parité salariale
à l'échelle provinciale. Nous sommes entièrement
solidaires des travailleurs des autres régions. Nous croyons que, pour
un même travail, il doit y avoir un même salaire. Nous avons aussi
des intérêts à promou- voir cette revendication. Un salaire
uniforme limiterait l'afflux de travailleurs de la province vers
Montréal à la recherche d'un salaire supérieur. Aussi,
grâce à la parité salariale, nos membres, lorsqu'ils iront
à l'extérieur de notre région, ne subiront pas de baisse
de salaire.
Quant à la qualification professionnelle, nous voulons souligner
le danger que pourrait représenter la division des travailleurs en
catégories: les bons, les moyennement bons, les pas bons, etc., par le
biais de la qualification. Pas plus que les ghettos géographiques, les
ghettos à l'intérieur d'un métier, dans une même
région, ne sont acceptables.
Quant à toutes les autres clauses actuellement en litige, nous ne
pouvons malheureusement les traiter en détail ici à la
commission, parce que c'est assez long. Par ailleurs, les documents syndicaux
de base sont très clairs et exprimant bien les besoins minimaux des
travailleurs. Nous endossons toujours, pour notre part, ces revendications.
Messieurs, nous osons croire que vous saurez tenir compte des droits des
milliers de membres de notre syndicat. Par ailleurs, soyez persuadés que
nous espérons avec impatience le jour où, enfin, nous pourrons
voir à nos affaires nous-mêmes. Nous allons continuer à
travailler d'arrache-pied pour rapprocher ce grand jour.
Je vous remercie. Si c'est le désir de la commission, je peux
remettre ces quelques feuilles.
M. LE PRESIDENT: La commission désire que vous déposiez le
mémoire. Si vous voulez demeurer à la disposition des membres de
la commission, nous allons faire déposer le document.
Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Gravel, je ne veux pas entrer dans un problème de
régie interne ni quoi que ce soit avec la CSN. On a dit tantôt que
vous étiez une partie représentée par la CSN. Pour le
bénéfice des membres de la commission, est-ce que vous pouvez,
sans élaborer, dire exactement quelle est votre situation par rapport
à la CSN? Vous dites que vous n'aviez pas droit de parole aux
négociations ou quelque chose de ce genre-là.
M. GRAVEL: Notre syndicat a affronté des difficultés, au
cours de la dernière année, au sein du mouvement et plus
particulièrement quand la commission parlementaire a endossé
cela nous cause des problèmes juridiques
directement le document parlementaire 69 qui contient, entre
autres clauses, celle qui définit le mot « syndicat ».
Elle le définit de telle sorte que pour être reconnu, il
faut être un syndicat; la définition de syndicat comprend un
organisme, etc. qui est affilié à la Fédération
nationale du bâtiment et du bois et 3. la Confédération des
syndicats nationaux.
Or, actuellement, nous avons été radiés de la
Fédération nationale du bâtiment et du bois. Notre cause
est en appel, mais nous considérons que cela peut causer des
préjudices aux membres actuels et futurs du Syndicat de la construction
de Montréal, parce que, de cette façon, ils ne seront plus
représentés. Pour nous, nos membres ont choisi librement
d'adhérer au Syndicat de la construction de Montréal pendant les
délais légaux prescrits au bill 290. Leur liberté a
joué à ce moment-là et elle devrait s'exercer
jusqu'à la fin de la convention, qui est de trois ans.
Je voudrais aussi faire remarquer à la commission que la CSN,
dans la région de Montréal, a acquis la
représentativité au sens du bill 290, par notre
intermédiaire. Dans la région de Montréal, ce sont les
membres du Syndicat de la construction de Montréal qui ont donné,
en fait, le droit de représentativité à la CSN.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions de la part des membres de
la commission?
M. BURNS: Au sujet du rapport Gold, M. Gravel, dois-je comprendre que
vous trouvez le rapport Gold insuffisant pour vous protéger au niveau de
l'ancienneté, ou quoi? Vous avez parlé du rapport Gold, disant
qu'il fallait y mettre de la chair dessus, ou quelque chose comme
ça.
M. GRAVEL: A ce sujet-là, toute la question de la
sécurité d'emploi par la voie des bureaux de placement est une
revendication que le Syndicat de la construction de Montréal a
poussée depuis des années. Mais malheureusement, à travers
les événements, il a été transformé de telle
sorte qu'aujourd'hui, il n'assure pas la sécurité que nous sommes
en droit d'attendre pour les travailleurs de la construction.
Actuellement, entre autres choses, le système du juge Gold dit
que pour être reconnu comme régulier, il faut avoir
travaillé 800 heures dans la dernière année ou 2,400
heures dans les trois dernières années. Si les travailleurs ont
moins d'heures que ça, ils sont classés temporaires.
Effectivement, a notre connaissance, il n'y a personne qui a les informations
suffisantes pour déterminer le nombre d'heures des travailleurs.
Etant donné que le comité conjoint de Montréal a
été inopérant pendant une période de six ou sept
mois l'année dernière et d'un mois ou un mois et demi cette
année, le trou d'informations que nous retrouvons à cet
endroit-là, pour nous, rend ce système inapplicable parce que
n'importe quel individu ou groupe d'individus se sentant
désavantagé par la division des travailleurs en catégories
pourrait contester l'application de ce système qui deviendrait en fin de
compte inopérant par suite d'un manque d'informations, de bases
sérieuses de travail.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais poser une
question à M. Gravel. Dans la dernière page de son
mémoire, au dernier paragraphe, il dit ceci: « Par ailleurs, soyez
persuadés que nous espérons avec impatience le jour où
nous pourrons voir à nos affaires nous-mêmes ». Qu'est-ce
que veut dire exactement ce « nous pourrons voir à nos affaires
nous-mêmes »? Qu'est-ce que cela signifie en termes de relations
avec la centrale dont vous faites partie?
M. GRAVEL: Dans cette phrase, nous avons voulu souligner le fait qu'a
notre sens il n'est pas normal que ce soit une commission parlementaire, que ce
soit le gouvernement qui tranche une négociation entre les parties
syndicales et la partie patronale. C'est ce que nous avons voulu souligner et
nous espérons de tout coeur, de grand coeur, revenir à des
négociations directes avec nos patrons.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.
M. LE PRESIDENT: Y aurait-il d'autres questions de la part des membres
de la commission? Non?
Merci, M. Gravel de ces explications.
J'inviterais donc M. Yves Brunet...
Catalytic et Vickers
M. BRUNET: Yves Brunet, avocat du bureau Ogilvy-Cope, de
Montréal; je représente Catalytic Entreprises limitée et
Canadian Vickers limitée.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. CARDINAL: Le rapport écrit que vous aviez l'intention de
présenter?..
M. BRUNEI": Les rapports écrits, M. Cardinal, ont
déjà été soumis à la fois par Canadian
Vickers et par Catalytic Entreprises limitée. Ils ont été
envoyés au ministre du Travail.
M. LAPORTE: On va d'abord débrouiller cela si vous permettez.
M. LE PRESIDENT: Si M. Brunet veut attendre un petit instant, on va
essayer de déblayer.
M. CARDINAL: Ma question à M. Brunet est la suivante. Il avait
été convenu, à la première séance de cette
commission permanente, que tous les rapports qui seraient
présentés je pense que vous n'étiez pas
présent passeraient par une seule voie, qui serait la voie du
secrétariat de la commission, de façon que les
députés soient informés, en même temps qu'il n'y ait
pas de réponses d'une partie par rapport à une autre. Cela n'est
pas un blâme à votre égard, mais une demande
d'éclaircissement pour les députés, parce que
présentement...
M. BRUNET: Est-ce que je peux préciser certaines choses?
M. CARDINAL: Certainement.
M. BRUNET: Est-ce que j'ai la permission de parler?
M. LE PRESIDENT: C'est votre droit.
M. BRUNET: Merci. En ce qui concerne la convocation à la
commission parlementaire de ce matin, nous avions, depuis fort longtemps
déjà, soumis des mémoires, par écrit, aussi bien de
la part de la Canadian Vickers que de celle de Catalytic Entreprises
limitée. Nous avions reçu des accusés de réception,
de même, et nous avons été convoqués à
l'assemblée de ce matin, par pur hasard, hier, durant la journée;
si bien qu'on a essayé de s'informer parce que, malheureusement, excusez
notre ignorance, nous ne savions pas ce que M. Cardinal vient de nous
mentionner, à savoir que nous devions soumettre, ce matin, une reprise,
ou une réduction nouvelle, des mémoires que nous avions
déjà soumis.
M. LAPORTE: Excusez. Ça va très bien, votre affaire, mais
j'aimerais bien préciser certaines choses. Vous avez envoyé votre
mémoire au ministère du Travail.
M. BRUNET: C'est ça.
M. LAPORTE: Le ministère du Travail était censé
faire polycopier les documents puis les envoyer à tout le monde.
M. BRUNET: M. le ministre, si on avait su... Je suis prêt
maintenant à donner ma place à un autre et à revenir
à la fin de cette assemblée.
M. LAPORTE: La seule chose, vous n'avez pas de mémoire, ce n'est
quand même pas un crime, mais je ne voudrais pas que ce soit le
ministère du Travail qui soit responsable du fait que vous n'ayez pas de
mémoire ce matin.
M. BRUNET: Non, mais M. le ministre, je pense qu'étant
donné que nous avions soumis un rapport écrit et que vous avez
demandé, ce matin, aux tiers, non partie des associations
représentatives, de venir vous faire connaître, à la
commission parlementaire, leur savoir et leurs dires quant au prochain
décret de la construction, eh bien, nous, si nous avions su à
l'avance qu'il fallait le soumettre... Je vois que plusieurs autres, ce matin,
le savent déjà, nous, malheureusement, par défaut de
communications, peut-être que ce défaut-là est de notre
côté, je ne le mets d'aucun côté. Nous n'avons pas pu
soumettre les mémoires en question, si bien que c'est pour cette raison,
M. le ministre, que je vous demande s'il est possible de remettre à plus
tard ce que j'ai à vous dire concernant le décret proposé.
A ce moment-là, je pourrai arriver devant la commission parlementaire
avec les documents dactylographiés et...
M. LAPORTE: Je pense bien que cette commission serait d'accord pour vous
inviter à résumer votre mémoire et à vous demander
d'avoir l'obligeance de nous le faire parvenir ensuite dans les meilleurs
délais.
M. BRUNET: Parfait. J'ai entendu, dans les branches, que c'était
cent copies, est-ce bien la situation? J'aimerais le savoir clairement, de
manière à ce que je puisse agir en conséquence.
M. LE PRESIDENT: Vous êtes sur la bonne branche.
M. BRUNET: Merci, M. le Président. Maintenant que je suis
branché sur la bonne branche, je vais vous faire valoir les commentaires
que j'ai, ce matin, à présenter au nom de Catalytic Entreprises
limitée et de Canadian Vickers. Vous connaissez sans aucun doute la
Canadian Vickers mais vous ne la voyez pas venir faire des
représentations dans le domaine de la construction. Les
représentants...
M. LE PRESIDENT: On la voit de moins en moins,
M. BRUNET: Merci, M. Bossé, c'est ça! Mais il demeure
quand même que l'élargissement du décret, tel que
présenté, nous a justement présenté certains
problèmes dans la définition du mot « construction ».
Je vais vous dire immédiatement que le but de nos remarques, aussi bien
en ce qui concerne Catalytic que Canadian Vickers, se limite strictement au
champ d'application industriel, la base centrale de l'argumentation
étant une industrie de l'entretien industriel. Ce mot-là, pour
certains, peut paraître nouveau parce que, dans la province de
Québec, l'entretien industriel, comme entreprise séparée
de l'entreprise qui fait ses propres produits, est assez nouveau.
Mais dans le monde, aussi bien aux Etats-Unis que dans les autres
provinces, ce n'est pas une situation nouvelle. J'aimerais définir
brièvement ce qu'est une industrie de l'entretien industriel.
L'industrie en question se rapporte à l'entretien de l'équipement
mécanique et autre qui se trouvent à l'Intérieur d'une
industrie. Si on prend un exemple, le cas de la Canadian Vickers
malheureusement, il faut mentionner des noms mais dans une raffinerie
d'huile, on fait l'entretien de l'équipement et non pas de la
construction.
Ces services qui sont rendus ne sont pas des services de construction,
mais des services d'entretien généraux. Ces services ont
été rendus nécessaires avec le temps, à cause de la
qualité et des exigences de l'équipement qui est dans ces
industries. Précédemment vous le savez fort bien
les entreprises faisaient leur propre entretien industriel de leur propre
machinerie. Il est arrivé un moment où la croissance dans les
difficultés des machines et leur complexité ont rendu
nécessaire la formation d'une nouvelle industrie, c'est-à-dire
l'industrie de service, un service particulier, l'entretien industriel.
Ce sont pour des raisons de qualité et aussi des raisons de
moindres coûts que cette industrie a été formée.
Elle existe au Québec depuis 1963. Il y a environ six compagnies dont je
n'ai, malheureusement, pas tous les noms, mais les deux compagnies que je
représente devant vous, ce matin, sont membres de cette nouvelle
industrie de service.
Je tiens à vous faire remarquer, en passant, que cette industrie
emploie au Québec entre 500 et 1000 employés à l'heure
actuelle, et c'est une industrie qui est appelée à se
développer à mesure que la complexité de
l'équipement grandit.
A l'heure actuelle, les raisons de notre comparution devant vous sont
simples. Lorsqu'on lit le bill 290, que vous connaissez sans aucun doute par
coeur, étant donné mon absence de présomption, je
lirai quand même l'article...
M. LE PRESIDENT: Vous ne le connaissez pas par coeur?
M. BRUNET: C'est pour éviter, M. Bossé, qu'on puisse me
dire que fais dire au texte des choses qu'il ne dit pas.
M. DEMERS: C'est une sage précaution. M. BRUNET: Merci.
M. LAPORTE: Vous réussirez peut-être cela quand
même.
M. BRUNET: M. le ministre Laporte, je pense que cela arrive de temps
à autre dans notre profession.
M.LAPORTE: C'est vrai.
M. BRUNET: D'ailleurs, on se fait accuser par d'autres
représentants, ici, de se faire des choses comme celle-là.
Dans le bill 290, chapitre 45, je vous référerai à
l'article 1-e) où on définit les travaux de construction. On dit:
« Les travaux de construction sont les travaux de fondation,
d'érection, d'entretien j'attire particulièrement votre
attention sur celui-là de rénovation, de
réparation, de modification et de démolition de bâtiments
et d'ouvrages de génie civil exécutés sur les lieux
mêmes du chantier et à pied d'oeuvre... » Etant donné
que je ne suis pas spécialiste dans le domaine, j'ai lu le texte anglais
pour savoir ce que signifiait « à pied d'oeuvre », c'est
« dans l'entourage », « in vicinity ». Je continue:
« ... y compris les travaux préalables d'aménagement du
sol. » Donc, c'est la définition qu'on donne au mot «
construction », et le bill 290 porte là-dessus.
A l'article 1-r) dans ce même bill 290, on définit, en
tenant bien compte de la signification du mot « construction » que
l'on vient de définir, « le salarié permanent
d'entretien». C'est « tout salarié préposé
habituellement à des travaux d'entretien de bâtiments ou
d'ouvrages de génie civil ». Et je vous fais grâce de la
suite. Je lirai le dernier article que j'ai à vous citer, dans le bill
290, c'est-à-dire l'article 2: « La présente loi s'applique
aux
employeurs et aux salariés de l'Industrie de la construction;
toutefois, elle ne s'applique pas aux exploitations agricoles ni aux
salariés permanents d'entretien embauchés directement par un
employeur autre qu'un employeur professionnel. »
Le but du décret, à notre humble avis, est de couvrir des
travaux de construction tels que définis à l'article 1 -e). Et
lorsqu'on parle d'entretien dans cette définition de l'article 1-e) et
que par suite on en parle à l'article 1-r) et à l'article 2, on
n'a pas voulu, aussi bien à l'article 1 -r) qu'à l'article 2,
élargir par le fait même le sens donné au mot «
construction » dans l'article 1-e), c'est-à-dire toujours
exécuté sur le lieu du chantier et à pied d'oeuvre,
c'est-à-dire dans les alentours.
C'est ma première remarque pour maintenant vous amener à
ces précieux documents que j'ai lus avec plaisir et qui s'appellent les
documents 69, 70 et 71. Je vais en particulier attirer votre attention
nécessairement, c'est mon point sur le champ d'application ou de
juridiction industrielle. Pour ce qui est de ce champ d'application
industrielle, dans le document 71, proposition syndicale, l'article 1.02, on
définit le chantier de construction comme étant « le lieu
où s'effectue tout travail régi par la convention ». Et,
par la suite, on définit à l'article 5.00 tout le champ
d'application. Lecture éminemment difficile à faire dans les onze
pages de nomenclature sans fin qu'on trouve dans cet article. Et tout
particulièrement l'article 5.04 où on lit enfin dans la
proposition syndicale que « ces travaux du présent article sont
couverts et j'attire votre attention là-dessus qu'ils
soient exécutés sur chantier ou en atelier. Cependant, le travail
de production en série exécuté dans les boutiques, usines
et fabriques n'est pas couvert ». Or, immédiatement à la
vue de cet article 5.00, généralement parce que si
j'entrais dans le détail de chacun des paragraphes je pourrais vous
tenir longtemps et je ne pense pas que ce soit le but 1e voudrais vous
démontrer, par ce paragraphe 5.04, qu'on se trouve immédiatement
à étendre la juridiction industrielle du décret.
On me répondra que, dans les anciens décrets, avant que le
bill 290 ne devienne loi, cela existait. Je suis bien d'accord
là-dessus; je ne le contesterai pas. Cependant, le bill 290 régit
l'industrie de la construction et non pas les travaux exécutés en
atelier. D'ailleurs, il exclut expressément par l'article 1-e) les
travaux qui sont exécutés hors du chantier ou dans ses alentours,
puisqu'il faut procéder à contrario à partir de cet
article 1-e.
Ici, avant de quitter cette proposition syndi- cale, je tiens simplement
à faire remarquer d'abord à la commission parlementaire mon doute
profond quant à l'article 5.00 qui énumère des choses. On
ne sait plus où on s'en va lorsqu'on le lit. Je pense que, si on veut
couvrir toutes les situations, justement on s'adonne à couvrir et
là j'arrive à mon point l'entretien industriel d'où
je suis parti tout à l'heure.
Je vais vous faire le lien immédiatement, mais je fais d'abord
une parenthèse sur l'article 1.02. On définit le chantier,
je vous l'ai dit tout à l'heure comme étant le lieu
où s'effectue tout travail régi par la convention collective. Or,
ce travail régi par la convention collective, on le définit comme
étant un travail de construction exécuté sur le chantier
de construction. Je ne sais pas si je parle trop vite, mais vous voyez un peu
qu'on fait une comparaison entre un élément et un autre et qu'on
les définit l'un par l'autre dans le même document sans
préciser ce que cela veut dire. Cela arrive justement à la
solution à laquelle on est arrivé dans l'extension du champ
d'application industrielle, c'est-à-dire à couvrir l'industrie de
l'entretien industriel.
J'arrive donc à mon point, qui est le point final, après
vous avoir introduits dans l'industrie qu'on appelle l'entretien industriel
dans ce bill 290, avec les projets qui sont ici, et je vous soumets
c'est ma soumission au nom des deux compagnies que je représente ce
matin que ce décret devrait exclure expressément les
travaux d'entretien industriel. Je pense en effet que personne ne contestera
que le décret qui va être adopté, même si c'est
à la suite d'une loi d'exception qui s'appelle le bill 38, il demeure
que ce doit être dans le champ d'application industrielle du bill 290 et
non pas quelque chose d'autre.
Précédemment, on n'avait que la loi des décrets de
convention collective. On faisait des décrets par rapport à cette
loi et, les parties ou les associations représentatives
établissaient leur propre lit, c'est-à-dire qu'on
établissait ceci et l'industrie dont nous sommes les parties
représentatives.
Or, le bill 290 est un bill qui porte sur une industrie en particulier
et non pas sur toutes les industries qui peuvent être connexes,
parallèles, disons, qui peuvent former tout un grand contour. Si on
voulait couvrir ici toute la table par le bill 290, on se trouve, par le
décret, à couvrir toute l'assemblée qui est ici. Je dis
donc que c'est une prolongation qui est soumettons-le respectueusement
sans aucun doute, ultra vires, en dehors de l'application du bill
290.
Maintenant que j'étudie ce sujet-là, il faut
peut-être préciser un peu, pour la commission
parlementaire, que les conditions de travail sont différentes dans
l'industrie de l'entretien industriel par rapport à l'industrie de la
construction. D'abord, comme j'ai mentionné au tout départ, il
est bien clair que l'industrie de la construction n'est pas une industrie de
service dans le sens où on l'entend normalement. C'est-à-dire que
l'industrie d'entretien industriel vient rendre un service, une fois
terminée, la construction d'une usine, c'est-à-dire au moment
où l'usine a commencé à fonctionner. A ce
moment-là, on entretient l'équipement de l'employeur.
M. LE PRESIDENT: Un instant, je vais vous aider, un peu de silence, s'il
vous plaît, pour permettre à M. Brunet de finir son
exposé.
M. BRUNET: Merci, M. le Président, il semble qu'on ne veuille pas
m'écouter avec un bien vif désir. Je vais parler encore plus
fort.
M. LE PRESIDENT: Vous auriez peut-être intérêt
à abréger,
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais faire une
observation, si vous me le permettez, et demander à M. Brunet de nous
donner une description exacte de ce qu'est cette industrie de l'entretien.
Jusqu'à présent, j'estime avoir une intelligence moyenne
j'avoue ne pas avoir saisi exactement ce qui différencie cette
industrie de l'entretien. Est-ce que vous faites de la construction ou si vous
n'en faites pas? Expliquez-nous cela d'une façon rapide pour qu'on
saisisse, en nous donnant un exemple.
M. BRUNET: Eh bien, l'industrie de l'entretien, j'allais justement,
monsieur... j'ai failli vous appeler M. le ministre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.
M. LAPORTE: Faites-le, cela leur faitplai-sir, et cela ne change
rien.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Allez-y, allez-y, c'est une anticipation.
M. PAUL: C'est parce que vous parlez d'expérience!
M. BRUNET: Merci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous vous recyclez tranquillement.
M. CADIEUX: Votre affaire allait bien, ne la gâtez pas.
M. BRUNET: Je m'appliquais justement à faire comprendre ce que
j'ai qualifié d'industrie de service par rapport à industrie de
construction et entrer dans le détail de ce qu'est l'industrie
d'entretien industriel. Vous avez la construction d'une usine, je parle
particulièrement ici d'usines chimiques et d'usines de produits
huiliers. La Compagnie Catalytic Entreprises s'occupe spécialement dans
la province de Québec d'usines qui font des produits chimiques et le
Canadian Vickers s'occupe des industries de produits huiliers.
Une fois que l'installation, c'est de la construction
toute l'usine est construite, que tout l'équipement est installé,
normalement, comme je l'ai dit au départ, le propriétaire de
l'entreprise entretiendrait son propre équipement à son compte,
par son employé. Qu'est-ce qu'entretien veut dire? Eh bien, ça
veut dire huiler, réparer, etc. Comme je l'ai dit au départ,
étant donné la complexité des machines qui se trouvent
à ces endroits, une industrie de service s'est créée, une
industrie hautement spécialisée, qui engage des hommes de
métier, spécialisés dans l'entretien d'équipement
chimique. C'est très particulier, et, à ce moment-là,
c'est l'industrie dont je vous parle ils font, en fait, ce que
l'employeur faisait précédemment lui-même. Or, l'employeur
n'a jamais, lorsqu'il faisait son propre travail d'entretien industriel,
été couvert par un décret de construction. Personne
n'aurait pensé à cela, et personne n'oserait d'ailleurs dire que
cela en est. Mais, le jour où cela devient une industrie
séparée et que cela se développe à l'heure
actuelle, depuis 1963, comme je vous l'ai dit, on est rendu à peu
près à 1,000 employés dans l'industrie à ce
moment-là, puisque c'est une industrie indépendante, on veut, par
le biais de l'article 5 des propositions du décret, couvrir cette
industris-là. Si on lit toute cette nomenclature, moi aussi, je
suis d'intelligence moyenne, j'ose l'espérer je ne suis pas
capable de deviner si cela l'est ou ne l'est pas, parce que, quand on
énumère une suite de mots, on se trouve finalement à se
demander où on s'en va et c'est en plein le cas.
M. CARDINAL: M. le Président, si vous me le permettez, je
voudrais apporter une précision de plus. Les employés de cette
industrie de service qui ont remplacé les employés permanents de
l'industrie principale, si on peut ainsi l'appeler, sont membres de quel
syndicat présentement?
M. BRUNET: Je vais vous dire ça immédiatement.
M. CARDINAL: Y en a-t-il plusieurs ou un seulement?
M. BRUNET: Cela dépend. Ecoutez, ils sont syndiqués par
usine. Nécessairement, ils peuvent être indépendants les
uns des autres et il peut y avoir, en principe, plusieurs syndicats qui les
représentent, parce que ces employés-lâ sont ni plus ni
moins les employés de l'industrie de service. Ils forment une
unité de négociation par eux-mêmes et sont
représentés par des syndicats.
M. CARDINAL: Je vais préciser ma question.
M. BRUNET: Vous voulez avoir le nom exact, je vais vous le donner.
M. CARDINAL: Ce ne sont pas les noms exacts. Si vous me le permettez, je
vais poser la question autrement.
M. BRUNET: Oui.
M. CARDINAL: Est-ce que ces unités syndicales-là font
partie des unités syndicales de la construction?
M. BRUNET: Cela peut arriver. M. CARDINAL: Bon, très bien.
M. BRUNET: Pour répondre à la question de M. Cardinal, il
ne faut pas oublier que le bill 290, c'est quand même quelque chose de
nouveau. Je vais vous donner l'exemple d'un endroit où j'ai eu le
plaisir de négocier. Dans la même industrie, comme il arrive
très souvent dans l'industrie de la construction, vous avez, d'autre
part, ceux qui sont soumis au bill 290 et, d'autre part, ceux qui demeurent sur
le chantier pour extraire de la roche et tout ça. Par cette aile qui les
rattache à la construction j'entends leur bras du
côté du bill 290 ils sont couverts et font partie des
associations représentatives syndicales, mais il n'empêche que, de
l'autre côté de la barrière, ces mêmes
syndicats-là représentent des employés qui sont
accrédités au sens du code du travail et qui possèdent un
certificat d'accréditation.
M. CARDINAL: Si vous me le permettez, ce n'est pas pour vous
harceler...
M. BRUNET: Non, non, allez-y, cela me fait plaisir.
M. CARDINAL: ... mais pour comprendre vraiment. Quand vous dites: Il
peut arriver que certains de ces employés fassent partie d'une
unité syndicale qui tombe sous ce qu'on appelle la construction
on sait que, dans ce do-maine-là, ces unités sont nombreuses
dites-vous « il peut arriver » parce que vous ne savez pas
exactement si ça arrive ou si c'est parce que c'est déjà
arrivé ou parce que ça pourrait arriver?
M. BRUNET: Je parle au présent, mais je pense aussi parler pour
l'avenir. Donc, âl'heu-re actuelle, il y a certaines unités de
négociation qui sont déjà accréditées au
sens du code du travail depuis 1967 et qui appartiennent à des
syndicats. En 1967, eh bien, étant donné que le bill 290
n'existait pas, ces syndicats-là faisaient partie, de ce qu'on appelle
aujourd'hui des associations représentatives syndicales. D'autre part,
je dis que, dans l'avenir, il se pourrait très bien que ça ne
soit pas le cas. C'est pour ça que je réponds à votre
question en disant qu'actuellement il y a certaines unités de
négociations qui sont accréditées et que les syndicats
sont membres d'associations représentatives syndicales.
Toutefois, il faut bien s'entendre là-dessus, il demeure que ce
sont des hommes de métiers spécialisés, mais, à
l'intérieur de n'importe quelle entreprise, vous avez des excusez
le mot anglais; je ne trouve pas le mot français «
pipe-fitters ». Vous en avez dans la construction, mais vous en avez
à plein dans l'industrie.
M. CARDINAL: Si vous me permettez une dernière intervention, je
pense que le ministre du Travail verra immédiatement où je veux
en venir. Votre situation est différente de celle de la ville de
Montréal tantôt où ce sont des employés permanents.
Laissons de côté la question des cinq mois et demi ou de six mois.
Il s'agit là d'une industrie ancillaire de service qui peut être
répartie entre diverses sociétés ou diverses
compagnies...
M. BRUNET: C'est ça.
M. CARDINAL: ... et dont les membres peuvent faire partie de diverses
cellules syndicales. Le problème pour le gouvernement, s'il
préparait un décret ce que personne d'entre nous, dans le
fond, ne souhaite; tant
mieux s'il y avait entente avant serait de faire des distinctions
à partir de la thèse que vous présentez ou à partir
de la réalité syndicale. Je ne sais pas si le ministre du
Travail...
M. BRUNET: M. Cardinal, s'il fallait partir de la réalité
syndicale, on pourrait englober à peu près n'importe quelle
industrie, parce que ça dépend de la constitution interne d'un
syndicat. J'ai vu des syndicats de fonctionnaires de la province de
Québec représenter des employés de l'industrie
privée. Ma première objection en tant qu'avocat au niveau de
l'accréditation a été nécessairement: Eh bien, je
doute que vous n'ayez les pouvoirs. On m'a répondu: Notre constitution
nous permet de représenter aussi bien les fonctionnaires que les
employés d'une entreprise ordinaire. Si bien que si dans votre question
au ministre, vous partez de ce que vous appelez la réalité
syndicale, à ce moment-là, ça veut dire que vous faites fi
complètement de la loi de base qui s'appelle le bill 290.
M. CARDINAL: Pardon, si c'est ce que vous comprenez, j'ai
été mal interprété. Ce que je veux dire, c'est que
le critère de distinction qu'il pourrait y avoir dans un nouveau
décret pourrait être fondé sur l'une ou l'autre des choses.
Je ne me suis pas prononcé sur le fond de la question. Il y a des
situations...
M. BRUNET: Je me suis prononcé.
M. CARDINAL: ... oui, évidemment, vous...
M. BRUNET: J'ai soumis, respectueusement, à la commission
parlementaire...
M. CARDINAL: ... c'est votre devoir de le faire. Ce n'est pas la
première fois que nous avons des situations aussi farfelues. Il existait
autrefois au Parlement du Québec une loi rendant obligatoire
l'enregistrement des volumes, de quelque nature que ce soit, et cela se faisait
au ministère de l'Agriculture.
M. BRUNET: Comme conclusion je ne voudrais quand même pas
prendre le temps de votre commission, quoique j'estime que le problème
que je vous soumets est d'une importance capitale. J'ai, ce matin,
représenté deux compagnies, mais je pense que, pour le
bien-être du décret, c'est-à-dire son avenir intra vires,
les remarques que j'ai à vous faire sont importantes. Je complète
brièvement en vous donnant un exemple qui concrétise un peu ma
pensée dans le domaine du bill 290.
J'ai dit tout à l'heure que, dans le cas de l'employeur qui
recourt à ses propres employés pour faire l'entretien de son
équipement, personne n'a douté que cet employeur était
dans l'industrie de la construction. Quand cela devient une industrie de
service, à ce moment-là on se dit: Là, il y a un
doute.
Je vais vous donner un exemple que je viens de vivre auprès de
votre ministère. C'est l'exemple du décret du camionnage de la
région de Montréal. C'est très semblable au cas que je
vous expose. Jusqu'à récemment, il y avait, couverte dans le
décret du camionnage, une industrie qui s'appelait l'industrie de la
location, même si les employeurs louaient des camions pour transporter
leur propre marchandise. Je ne veux faire de publicité pour qui que ce
soit, mais prenons un magasin bien connu de Montréal ou de Québec
qui, au lieu d'acheter ses propres camions, les louait à un tiers pour
transporter sa propre marchandise. Jusqu'à récemment, on a eu
l'idée que l'employeur qui achetait ses camions n'était pas
découvert par le décret du camionnage. Mais l'employeur qui
louait parce que, là encore, c'est une industrie de service
à la compagnie de location ses camions pour transporter sa propre
marchandise, se trouvait à ce moment-là, pour ses employés
seulement, couvert par le décret du camionnage.
C'est ici la même chose. Je vous l'ai dit tout à l'heure,
j'ai des doutes quant à l'article 5, parce que c'est si long qu'on ne
peut rien voir, on ne couvre pas, d'une part, l'employeur qui fait son propre
entretien, mais quand il s'agit d'une industrie de service, on le couvre.
Le résultat du décret du camionnage a été
récemment à l'effet de mettre de la clarté dans cette
affaire-là et d'éliminer toute location parce que, sur la base
suivante, selon le bill 290, si le décret du camionnage s'adresse au
camionnage, c'est-à-dire le transport pour autrui moyennant
rémunération, la construction s'applique à la construction
et non pas à quelque chose d'autre, même si c'est connexe. A ce
moment-là, en effet tout est connexe à l'édification d'un
édifice, parce qu'on y travaille dedans une fois qu'elle est faite.
Je soumets respectueusement que, pour fins de clarté, au moins
dans le décret parce que nos représentations s'adressent
aussi au bill 290 il faudrait exclure expressément du champ
d'application industrielle les entreprises ou les travaux d'entretien
industriel.
Comment définir les travaux d'entretien industriel? Puisqu'on
parle de construction, je pense que, dans un domaine aussi difficile, il
est préférable d'aller par négation, quoique cela
ne clarifie pas la situation, mais l'article 5 ne clarifie rien non plus
par sa nomenclature ce seraient des travaux d'entretien autres que des
travaux d'entretien faits pendant une construction. Je pense en effet que, tout
le monde s'imagine bien ce que c'est qu'un chantier de construction. Si
quelqu'un peut s'imaginer que si une compagnie fait l'entretien de son propre
matériel, à l'intérieur, par un service extérieur,
c'est de la construction, et bien, je soumets que c'est complètement en
dehors du champ d'application du décret. Je soumets aussi que, pour fins
de clarification et pour empêcher le décret de se trouver en
dehors des cadres du bill 290, il faudrait avoir cette
précision-là dans le décret.
Les représentations que j'ai soumises ce matin, comme je vous
l'ai dit au départ, sont à la fois pour Catalytic Entreprises et
Canadian Vickers, qui sont toutes les deux dans la même situation quant
à une partie de leur ouvrage, c'est-à-dire le service d'entretien
industriel.
Si ces messieurs ont des questions, je suis prêt à y
répondre avec plaisir.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunet. Les membres de la commission ou des
députés présents ont-ils des questions? Le
député de Bagot.
M. CARDINAL: Ce n'est pas une question. Il y a, dans l'exposé de
Me Brunet, qui a été fort convaincant, une chose que je n'accepte
quand même pas pour des raisons de purisme, même si je ne suis pas
le ministre des Affaires culturelles.
M. BRUNET: Pour des raisons de...
M. CARDINAL: De purisme ou de sémantique. « A pied d'oeuvre
», cela me paraît impossible que ce soit traduit par « in the
vicinity ». Enfin, il me semble que, selon le génie de la langue
française, c'est quand on parle du début; ce serait « from
the rock-bottom», si vous voulez, ou quelque chose du genre. Si la loi
est ainsi traduite, je pense bien qu'il y a une coquille ou une erreur qui ne
nous permet pas d'interpréter le texte français par le texte
anglais.
M. BRUNET: Ecoutez, je n'ai pas lu les clauses d'interprétation,
à la fin.
M. CARDINAL: Ah non, je ne vous demande pas de recommencer tout
ça.
M. BRUNET: Non, non. Mais je pense que les clauses...
M. CARDINAL: J'aimerais apporter cette précision, parce que
ça me paraît brouiller la clarté de vos explications. Je ne
voudrais pas revenir sur la question. Je voudrais simplement que, pour les fins
des travaux de la commission, l'on n'accepte pas cette traduction comme
étant nécessairement une traduction...
M. BRUNET: Est-ce que je serais obligé... M. CARDINAL: ...
fidèle.
M. BRUNET: ... de me mettre à douter des traductions?
M. CARDINAL: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, oui.
M. LAPORTE: Vous devez douter d'autant plus des traductions que, si par
hasard la traduction anglaise n'est pas conforme au texte français,
c'est le texte français qui a préséance.
M. BRUNET: C'est très bien.
Etant donné que « à pied d'oeuvre » est une
expression du métier, je pense, je croyais que le traducteur, pour le
moins, avait suivi, sinon le mot véritable, du moins le sens qu'on a
voulu donner à « à pied-d'oeuvre ». Je me ferai un
plaisir d'étudier longuement le sens de « à pied d'oeuvre
» pour la commission. Je l'étudierai très bientôt. Je
ferai parvenir les documents.
M. LAPORTE: Me Brunet, je pense que, fondamentalement, la thèse
que vous nous avez présentée ce matin est: Est-ce que
l'entretien, c'est de la construction? Si c'est de la construction, dites vous,
ceci devrait normalement être partie au décret. Mais comme
à votre avis l'entretien n'est pas de la construction, ceci ne devrait
pas être inclus dans le décret.
M. BRUNET: M. le ministre,...
M. LAPORTE: Et que ce soit dit très clairement,
suggérez-vous.
M. BRUNET: ... j'ai tout simplement une dernière remarque
à faire. Je ne prétends pas que l'entretien exécuté
sur les chantiers de construction, tel que défini au sens...
M. LAPORTE: Cela, d'accord.
M. BRUNET: ... de 1-e), n'est pas couvert par le décret.
M. LAPORTE: C'est clair.
M. BRUNET: Je prétends que l'entretien qui n'est pas
exécuté sur les chantiers de construction n'est pas
expressément couvert par le décret.
M. LAPORTE: Disons que c'est une des décisions qui devront
être prises. Mais, je voudrais vous faire remarquer combien ce n'est pas
facile. Vous représentez un client, vous l'avez fait avec beaucoup de
talent et de conviction, mais ce n'est pas aussi simple.
M. BRUNET: Je le sais, M. le ministre.
M. LAPORTE: Puis-je vous faire remarquer que récemment nous avons
eu, et ce n'est pas tout à fait réglé encore, à
résoudre un problème. A l'intérieur de l'usine, à
cause de transformations qui arrivent à tous les ans dans ce genre
d'usine, il y avait des travaux de construction à faire. Or, les
ouvriers de la construction se sont adressés au patron pour dire: Si
nous ne faisons pas ces travaux de construction, nous allons piqueter l'usine,
faire une grève. Et les ouvriers qui étaient à
l'intérieur ont dit: Si vous acceptez les ouvriers de la construction,
c'est nous qui faisons la grève.
M. BRUNET: C'est pour cela que ce matin, M. le ministre, je suis venu
prétendre qu'il y avait des clarifications à y mettre, parce
que...
M. LAPORTE: Oui.
M. BRUNET: ... justement, lors des problèmes qui se sont
présentés au cours des mois de mai et juin 1970, dans les
entreprises qui me concernent, les employés se sont mis en grève
en même temps que les autres, prétendant qu'ils étaient
couverts par l'industrie de la construction, au sens du bill 290.
Plus tard, lorsque l'avantage a été de l'autre
côté, on a prétendu que c'était plutôt la
convention...
M. LAPORTE: Autre question... M. BRUNET: ... que le bill 290.
M. LAPORTE: ... que nous devrons nous poser, Me Brunet: Est-ce qu'il y a
une différence entre la compagnie...
M. BRUNET: Catalytic etCanadianVickers? M. LAPORTE: Est-ce qu'il y a une
différence entre la compagnie X qui, avec son propre personnel, ses
propres employés, fait ses travaux d'entretien et vos deux
sociétés qui se sont incorporées partiellement pour faire
de l'entretien à profit? Est-ce qu'il y a une différence entre
les deux, à votre avis?
M. BRUNET: A mon avis, aucune, parce que...
M. LAPORTE: Aucune différence.
M. BRUNET: ... ce qu'on regarde, M. le ministre, je le soumets
respectueusement, ce n'est pas si c'est à profit ou si c'est pour soi ou
pour autrui qu'on le fait, mais bien le sens que l'on donne à la loi,
c'est-à-dire: Est-ce de la construction ou pas?
M. LAPORTE: Bien oui, tout le problème se ramène à
ça, évidemment.
M. BRUNET: M. le ministre, j'ai donné l'exemple du décret
ducamionnage, tout simplement pour expliciter cette même question.
C'est-à-dire que la question centrale est que ce n'est pas de la
construction, soumettons-nous, de la même façon que la location
n'était pas du camionnage, même si cette location était
faite à des personnes qui transportaient leur propre marchandise.
Parce qu'on l'appelle camionnage, cela se détruit
peut-être, j'ose l'admettre, beaucoup plus facilement que la
construction, mais je ne pense pas, par ailleurs, que l'article 5 tel qu'il
apparaît au document parlementaire 70, proposition syndicale, et
même proposition patronale parce que je l'ai lu soit
très convaincant. Eh bien, on élargit, sans aucun doute, le champ
d'application industrielle pour couvrir ce qui n'est pas de la construction, si
bien que la question que je pose, que je soumets je propose ma solution,
nécessairement, je suis ici pour proposer certaines choses à
votre attention est que cet entretien industriel n'est pas de la
construction. Que cela soit fait par l'employeur ou par un tiers, cela ne
change pas l'aspect du problème.
M. TREMBLAY: (Chicoutimi): Vous nous obligez à prendre le
problème à pied d'oeuvre.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. CARDINAL: M. le Président, ce n'est pas une question à
M. Brunet. C'est une réponse à la suite de l'intervention du
ministre du Travail. Il restera quand même, M. le Ministre, je pense,
deux questions.
Nous avons eu le cas, tantôt, de la ville de Montréal qui a
ses propres employés d'entretien. Nous avons le cas, maintenant, d'une
société séparée de la société
mère qui, à profit, fait dos travaux dits d'entretien. Même
si le gouvernement réussit à distinguer ce qui est construction
et entretien, il restera quand même cette différence entre les
employés d'une maison qui fait son propre entretien ou sa propre
construction et les compagnies séparées comme dans le cas du
camionnage. C'est-à-dire que je pense qu'on ne peut pas dire qu'il n'y a
qu'une seule question. Les deux questions se poseront.
M. LE PRESIDENT: Merci. Est-ce qu'il y aurait d'autres questions de la
part des membres de la commission ou d'autres intervenants? Vous avez une
question?
M. DESJARDINS: Permettez-moi de me présenter: André
Desjardins, directeur, entre autres, et en même temps...
M. LE PRESIDENT: Vous vous représentez.
M. DESJARDINS: ... tel que M. Degré l'a dit, spécialiste
« pipe-fitter » ayant travaillé pour la Canadian Vickers
pendant quatre ans à son usine d'entretien. Par contre, je n'ai pas pu
remplir ma fonction pendant quatre ans à l'entretien, étant
donné que souvent, on me transférait à la construction
pour la Canadian Vickers. Je revenais à l'emploi de la Canadian Vickers
à l'usine de construction de temps en temps... Il peut le voir,
même, à l'emploi de ses hommes; mon numéro de
sécurité sociale est 202 809 331.
UNE VOIX: M. Villeneuve, de la Canadian Vickers, vous
reconnaît.
M. DESJARDINS: Il dit justement que M. Villeneuve, de la Canadian
Vickers, me reconnaît.
En ce temps-là, lorsque j'étais à l'emploi de la
Canadian Vickers, souvent il est arrivé de la construction neuve
à l'usine de B.P. Refinery. Alors, on demandait un prix à
beaucoup de compagnies, dont la Canadian Vickers, qui était sur place.
Elle soumettait un prix et me disait : André, à partir de demain
matin, avec trois autres hommes, tu n'es plus sur l'équipe telle et
telle de l'entretien; tu travailles pour la construction. On faisait des lignes
neuves à l'intérieur de la B.P. Refinery, à pied d'oeuvre
ou à une « facilité », comme vous voulez
l'entendre.
Nous avions, en même temps, des gars qui prenaient de l'âge.
C'est pour cela que les compagnies ont commencé à engager des
gars de la construction. Parce que des gars de 50 ans, 55 ans ou 60 ans, ce
n'est pas trop vieux pour l'entretien, mais pour la construction, au froid, vu
que c'est dehors et qu'ils ne peuvent plus monter haut, elles les remplacent
par des jeunes. Voilà l'avantage pour les compagnies B.P, Shawinigan
Chemicals, tout cela; voilà pourquoi elles emploient maintenant des gars
de la construction. Elles ne sont plus obligées de garder à leur
emploi ces gars qui, parfois, ne sont plus capables de bouger. Il y a
également, toujours, à toutes les années, ce qu'on appelle
des « shut down ». L'usine est complètement fermée et
on remplace tous les conduits, on nettoie tous les conduits concernant la
même raffinerie. Et dans ce temps-là, la Canadian Vickers,
justement au mois de mai, avait à l'entretien au moins environ 300 ou
400 hommes de plus que ses hommes d'entretien, et s'il veut savoir si ces gars
appartiennent à un syndicat plus qu'à un autre, eh bien, il y en
a aucun qui n'appartient pas à un syndicat de la construction depuis
1931. Aucun dans tous ceux-là. Plus que cela, dernièrement,
à la Shawinigan Chemicals, donc Catalytic que monsieur
représente, il y a eu une explosion, trois hommes sont morts et on a eu
pendant à peu près un mois et demi 400 ou 500 hommes de plus au
travail. Et cela, on disait encore que c'était de l'entretien.
Alors, l'entretien, où arrête-t-il quand ces gars demeurent
toujours au sein de la même compagnie, avec de l'ouvrage garanti? C'est
impensable. Dernièrement, il y a un de mes membres, un monsieur Maranda
cela faisait un bout de temps qu'il était pour la compagnie
parce qu'il n'a pas voulu monter pas mal plus haut que les autres, la
compagnie l'a remercié de ses services.
Je crois bien que, tant que c'est de l'entretien, si un gars n'est pas
capable de monter très haut, bien, on devrait lui donner de l'ouvrage
ailleurs, vu son ancienneté: Si vous croyez vraiment que ce n'est pas de
l'entretien, je me demande quand et comment cela sera de l'entretien. N'oubliez
pas, souvent, ils m'envoyaient à la Canadian Oil ou à la Shell
Oil remplir des fonctions de « pipe-fitter » ou de « foreman
», etc., pas toujours «foreman », je ne veux pas me vanter,
mais, par contre, au sein de la Canadian Vickers, je faisais des travaux de
construction, en dehors de la ville, à part ça. Alors, si la
Canadian Vickers est une compagnie d'entretien seulement, je ne vois pas
comment ces gars-là seraient couverts pour leurs fonds de pension, leur
assurance-santé-salaire, etc, s'ils n'étaient pas, comme ils
l'ont toujours été, protégés par le
décret de la construction. Merci beaucoup.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Desjardins.
M. BRUNET: Est-ce que vous me permettez de répondre très
brièvement?
M. LE PRESIDENT: Oui, vous pouvez répondre brièvement.
Maintenant, il ne faudrait pas commencer des marathons.
M. BRUNET: Non, cela va être, un, deux, trois, simplement.
M. LE PRESIDENT: Très bien.
M. BRUNET: D'abord, monsieur vient de parler des difficultés de
savoir quand on passe de construction à non-construction. Je vous ai
donné, tout à l'heure, l'exemple de l'entreprise qui prend une
personne à l'intérieur pour travailler dans sa carrière et
qui, un jour, l'envoie à l'extérieur travailler sur le chantier.
A ce moment-là, elle se trouve à faire la même chose. C'est
très connu de la part de nous tous, ici, que, lorsqu'un individu passe
de la carrière au chantier de construction i l'extérieur, il
passe d'un certificat d'accréditation sous le code du travail à
des conditions de travail sous le bill 290. Donc, le problème ici est de
savoir si, parce qu'on passe de l'un à l'autre, eh bien, on ne doit pas
distinguer. Moi, je dis que non.
J'arrive immédiatement à mon deuxième point. Je
demande à la commission parlementaire si le fait d'avoir des
difficultés ou de problèmes à distinguer entre entretien
et construction fait que la commission parlementaire et le gouvernement par la
suite se doivent de dire: Etant donné le problème, je me ferme
les yeux et j'inclus tout, moi, je soumets que non. Justement, si la commission
parlementaire s'est réunie et s'il y a autant de représentants
des tierces parties qui viennent vous faire des représentations, c'est
précisément parce qu'en ne distinguant pas on finit par englober
toutes sortes de choses. Je vous dis ici, ce matin, que, malgré les
difficultés, il y a lieu de distinguer. Ce ne sont pas ces
difficultés qui doivent arrêter la distinction. Il s'agit de
difficultés que je connais bien. C'est tout, je n'ai pas d'autre
remarque.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunet. Maintenant j'inviterais M. Ubald
Desilets que, par inadvertance, j'ai omis d'appeler à son tour. Alors,
si M. Desilets veut s'approcher.
Les entrepreneurs de travaux
mécanisés
M. DESILETS: M. le Président, je représente l'Association
des entrepreneurs de travaux mécanisés. Ce sont de petits
entrepreneurs. L'association groupe 350 membres. Ces personnes vivent dans les
centres ruraux principalement ou les très petits centres urbains. Leur
représentation, ce matin, n'a pas l'intention d'attaquer en
détail toutes les clauses qui restent en litige. De façon
globale, nous sommes de la catégorie des employeurs. Nous adoptons le
point de vue qu'ont défendu les associations représentatives.
Nous voulons, cependant, soumettre des considérations sur deux
points.
Le premier, très sommairement, c'est la parité salariale.
Les entrepreneurs de travaux mécanisés s'opposent à la
parité salariale dans la province pour la raison qu'il leur semble
évident qu'il y a dans la province plusieurs marchés de travail
différents. Il y a des régions économiques
différents. Nos clients sont dans les régions pauvres. Les
membres estiment qu'ils n'ont pas les moyens de payer, dans leur milieu, les
mêmes salaires que dans les régions les plus riches.
M. PAUL: Vous n'avez pas la sécurité d'emploi.
M. DESILETS: Non. Nous n'avons pas la sécurité d'emploi
pour les employés et nous ne l'avons pas pour nous, non plus. Nous avons
le sentiment net que la parité salariale accroîtra
l'insécurité d'emploi parce que plusieurs de nos travaux peuvent
être faits par le client lui-même et qu'il cessera d'avoir recours
à nos services. J'ai dit « généralement, »
parce qu'il y a aussi cet aspect à considérer.
Les travaux que nous faisons se résument comme ceci: ce sont des
travaux de drainage, d'ameublissement des fermes, de déneigement,
d'excavation. Evidemment, ce sont des travaux qui sont demandés,
payés et exécutés sur place. Nous ne pouvons pas les
exporter dans des régions plus riches et obtenir un transfert de
revenus. Une parité salariale nous acculera à une
réalité plus dure; nos clients seront plus pauvres et nous
aussi.
Quant au régime patronal qui est inséré dans la
convention collective, il nous inquiète. D'abord, la fixation d'une
cotisation patronale ne devrait pas être faite dans la convention
collective. Il n'appartient pas aux centrales syndicales et à un certain
groupe d'associations patronales, qui ne représentent pas,
estimons-nous, la majorité des entrepreneurs de la pro-
vince, de convenir dans un contrat de la cotisation patronale.
Il n'appartient pas aux patrons, non plus, de fixer la cotisation des
syndicats. Evidemment, sur le principe d'être cotisés, nous sommes
d'accord. Les relations de travail sont une nécessité; c'est un
service important et ça coûte de l'argent. Nous trouvons
raisonnable que tous les entrepreneurs de la province soient cotisés. Il
n'appartient pas à un petit groupe ou à un groupe plus ou moins
étendu, soit les membres des associations patronales
représentatives, de payer tout seul. Nous sommes d'accord pour payer,
mais nous disons que ce que nous devons payer ne doit pas être
fixé par la partie syndicale en accord avec un certain nombre
d'associations patronales. Cela devrait être fixé dans la loi pour
échapper à certaines fluctuations qui pourraient être
intéressées, discriminatoires et abusives aussi. Cela pourrait
être fixé dans la loi dans le décret, mais dans une clause
qui relèverait de l'initiative et de la responsabilité du
ministre du Travail.
Pour nous, cette cotisation a une fonction précise. Elle doit
rendre un service, pas tous les services dont les entrepreneurs ont besoin. Les
entrepreneurs qui se groupent en association le font pour plusieurs motifs. Il
est possible de s'associer pour une seule raison, mais,
généralement, les entrepreneurs se groupent en association pour
défendre plusieurs intérêts: des intérêts
économiques, des intérêts professionnels. Les relations de
travail sont un intérêt. Il est important, mais ce n'est pas le
seul. Nous ne devrions pas nous épuiser en contributions seulement pour
celui-là. La contribution patronale, par conséquent, doit
être payée par tout le monde, mais sa norme doit correspondre au
coût des négociations et de l'application des conventions
collectives. Pour ça, ça devrait être fixé dans la
loi et par le ministre.
En outre, nous ne devrions payer qu'une seule cotisation, pas dix. Quand
un entrepreneur creuse un trou, si dans le trou on érige un pilier, il
faudrait payer à une des cinq; si c'est une maison, un solage, on paye
à une autre des cinq; si c'est un édifice commercial, nous allons
payer à une troisième des cinq. Nous estimons, M. le
Président, que ça n'a pas de sens. Nous ne devrions payer qu'une
seule cotisation patronale.
Cette cotisation devrait être minimale et elle doit être
distinguée de l'adhésion. Je' le dis parce que j'ai lu
sommairement les mémoires. Chacune des cinq se tranche un champ de
juridiction. Il y en a même qui appellent ça le gâteau.
C'est sûr que c'est un gâteau parce que depuis un an et demi
tous les entrepreneurs de la province, y compris nos membres, ont
été sollicités par tout le monde en disant: Nous avons le
privilège d'être un des cinq, et puis, il y a la police en
arrière qui nous oblige à rentrer puis à payer. Alors,
évidemment, c'est un partage de gâteau qui ne nous rassure pas
beaucoup.
Nous ne devrions pas être obligés d'appartenir, pour le
moment du moins, plus tard c'est autre chose. Les associations se
développeront et deviendront... Elles sont déjà
concurrentes. Pour solliciter la clientèle des entrepreneurs, elles nous
feront peut-être des règlements, des conditions qui nous assurent
qu'on y entrera selon les principes démocratiques, parce qu'on a
été sollicité. On a demandé déjà de
rentrer dans certaines associations, mais on ne nous donnait pas de
représentation. On posait comme condition de laisser mourir notre
association, puis on prendra vos membres, par exemple.
Alors, pour le moment, nous estimons que cette contribution devrait
être minimale et distincte de l'allégeance, ou de
l'adhésion obligatoire à une des cinq associations
représentatives. Mais si on n'entre pas, on paiera cette contribution
dans un fonds patronal commun qui pourrait être administré
sûrement par les cinq, mais par d'autres aussi.
Il y a trop de conflits d'intérêt actuellement, ce n'est
pas assez rodé. Il faudrait la présence d'autres pour s'assurer
que la contribution que nous versons répond au besoin que nous voulons
servir, c'est-à-dire le coût de la négociation et de
l'application des conventions collectives. Voilà, en
résumé, notre position.
M. LE PRESIDENT: C'est tout ce que vous aviez à dire, M.
Desilets.
M. DESILETS: C'est ça.
M. LAPORTE: Un seul point. Vous avez parlé de la parité
salariale, n y a uns chose qui revient de temps à autre dans divers
mémoires. Je voudrais bien que l'on puisse élucider ce point
ensemble. Vous dites, page 2 : Le gouvernement a consacré ces faits, il
y a des disparités économiques dans le Québec que chacun
imagine, je pense. Vous dites: Le gouvernement a consacré ces faits en
décrivant une dizaine de régions économiques. Est-ce que
le gouvernement n'a pas plutôt décrit une dizaine de
régions administratives, sans qu'on ne se réfère, à
aucun moment, aux problèmes économiques, ce qui est très
différent, vous en conviendrez.
M. DESILETS: Depuis deux ou trois ans, dans toutes les discussions
d'associations que nous formons, on nous parle de régions
économiques. C'est peut-être au texte du décret ou de la
disposition: Est-ce par décret, est-ce par loi, est-ce que c'est une
règle du ministère de l'Industrie et du Commerce? Ecoutez, je
n'ai pas vu le texte original, mais c'est de notoriété publique
que l'on parle des régions économiques proposées par le
gouvernement. C'est pour cette raison que j'ai dit cela dans ce texte.
M. LAPORTE: II serait bon que les employeurs, d'une façon
générale, n'utilisent pas, comme parole de l'Evangile, une
affirmation qui n'est pas exacte. J'ai ici, devant moi, le document et on
décrit très en détail des régions administratives
avec capitales régionales, avec des sous-centres, afin que le
gouvernement, lui, puisse regrouper autour d'une capitale locale certains
services pour promouvoir le développement économique.
Je n'accepterais pas, personnellement, par exemple, si nous devions ne
pas avoir la parité salariale, que l'on dise: Vous avez là dix
régions économiques qui sont divergentes les unes des autres,
parce que le gouvernement en a décidé après étude.
En 1966, le gouvernement a décidé d'ailleurs, le document
a chevauché des administrations; celui que j'ai devant moi a
été rendu public en août 1966 qu'il y avait lieu de
décrire, pour le développement harmonieux du Québec, dix
régions administratives. Quant aux disparités économiques
qui peuvent exister, je pense bien que c'est un autre problème. Mais, je
vous connais suffisamment pour savoir que vous n'aimez pas vous appuyer
comme argumentation sur des documents qui ne sont pas conformes à
ce qu'on vous a dit.
M. DESILETS: ' Je le dis bien franchement, je n'ai pas vu le texte. Mais
ce que je dis et je le reprends à mon compte je ne m'appuie pas
sur le gouvernement je dis: II y a des marchés de travail
différents dans la province, il y a vraiment des régions
économiques différentes dans la province. Et je vous
laisse de côté lorsque Ottawa parle des zones
sous-désignées, cela doit être pour autre chose que pour
l'administration. Cela doit avoir un sens économique.
M. LAPORTE: Disons que vous nous transportez rapidement...
M. DESILETS: Non, non...
M. LAPORTE: ... ailleurs.
M. DESILETS: Ecoutez...
M. LAPORTE: Oui, oui.
M. DESILETS: Je ne réponds pas...
M. LAPORTE: Non, non, votre argumentation est raisonnable...
M. DESILETS: Oui.
M. LAPORTE: ... lorsque vous parlez de disparités
économiques...
M. DESILETS: Vos remarques...
M. LAPORTE: Cela fait plusieurs fois que je lis dans des
mémoires: Le gouvernement nous a d'ailleurs donné raison en
disant qu'il y avait dix régions économiques; or, ce n'est pas le
cas. Ce n'est pas un argument acceptable pour cette commission, parce que le
gouvernement a décrit des régions administratives. Si vous voulez
maintenant faire la preuve que ces dix régions administratives
correspondent à dix régions économiques bien
différentes, c'est un autre problème.
M. DESILETS: Je comprends, je comprends.
M. LE PRESIDENT: Entendez-vous développer cette thèse?
M. DESILETS: Pardon?
M. LE PRESIDENT: Entendez-vous développer cette thèse?
M. DESILETS: Le ministre l'a développée.
M. LE PRESIDENT: S'il y a d'autres membres...
M. DESILETS: Les gens en prendront note, le gouvernement n'a pas
consacré des régions économiques, il a consacré des
régions administratives. Je n'entreprendrai pas ce matin
d'ailleurs, je fausserais mon mandat de décrire exactement s'il y
en a dix, onze ou douze, certains nous parlent de dix-sept; moi, je dis
simplement que la réalité est qu'il y a des régions
différentes. En tout cas, nos clients sont plus pauvres. Cela
coûte sûrement plus cher d'enlever un pied de neige sur la rue
Sainte-Catherine qu'en face de la maison du rang Saint-Emilien. C'est
sûr.
M. LE PRESIDENT: S'il y a d'autres membres de la commission...
M. DESILETS: L'individu va sortir sa pelle chez nous et, là-bas,
il ne le fera pas.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres membres de la commission qui
désirent poser des questions à M. Desilets? Pas d'autres
questions?
M. LAPORTE: C'est clarifié.
M. LE PRESIDENT: On remercie M. Desilets au nom de l'association qu'il
représente. J'avais M. Charles Perrault comme suivant, mais, comme il
reste à peine dix minutes, je préférerais qu'on l'entende
cet après-midi. S'il y avait d'autres associations ou d'autres groupes
représentatifs qui pouvaient nous faire leurs représentations
brièvement, en moins d'une dizaine de minutes, nous serions heureux de
les entendre à ce moment-ci. Je crois bien que M. Perrault ne voit pas
d'inconvénient à ce qu'on le remette à cet
après-midi. Très bien.
M. PERRAULT: Je peux y aller, ce ne sera pas tellement long.
M. LE PRESIDENT: Très bien.
UNE VOIX: Je ne sais pas, il s'identifiera comme les autres.
M. KENTZINGER: Mon nom est Gérard Kentzinger, président de
la Corporation des maîtres-entrepreneurs en
réfrigération.
M. LE PRESIDENT: Vous êtes dans les choses froides?
M. KENTZINGER: Exactement. Nous essayons de les réchauffer
actuellement, mais nous ne savons pas si nous réussirons. M. le
ministre, messieurs...
M. LE PRESIDENT: M. Kentzinger, avez-vous présenté un
mémoire?
M. KENTZINGER: Oui.
M. LE PRESIDENT: Très bien, merci. Allez-y.
Les entrepreneurs en
réfrigération
M. KENTZINGER: Merci, M. le Président. M. le ministre, messieurs,
membres de la commission, la raison de la présentation de notre
mémoire est l'omission de notre profession hautement
spécialisée dans le bill 290. Nous ne sommes pas contre l'esprit
du bill 290 que nous trouvons très louable, mais contre la structure
patronale. Et j'ouvre ici une parenthèse en me demandant comment il se
fait qu'il y ait 5 associations patronales de nommées dans le bill 290
quand, pour le reste des associations patronales, c'est:
Débrouillez-vous, les « boys », essayez de vous «
fitter » là-dedans.
Ce critère d'être obligé d'appartenir à une
association patronale du bill 290, nous le trouvons injuste. Nous croyons qu'il
faudrait refaire cette structure, non pas nécessairement le bill 290,
mais cette structure patronale. Notre corporation est une corporation
communément appelée ouverte. Les compagnies de
réfrigération ne sont donc pas tenues d'y appartenir, mais
malgré cela notre corporation compte 80% des compagnies frigorifiques de
la province de Québec. Cela prouve une volonté d'association, une
volonté d'identification très personnelle.
Messieurs, si la majorité d'un corps professionnel s'exprime
ainsi, nous pensons que cela est la preuve irréfutable qu'il y a un
malaise. Notre profession a été trop longtemps confondue avec
d'autres. H est temps qu'elle soit reconnue, comme il se doit. Imaginons pour
un instant que soient appliqués les 15 jours de vacances du mois de
juillet, en pleine saison frigorifique et d'air climatisé. Je n'ai pas
besoin d'énumérer les conséquences; c'est aussi impensable
qu'un cultivateur qui prendrait ses vacances au moment de sa
récolte.
S'il n'est pas possible d'être adéquatement
représentés au bill 290, nous vous suggérons la solution
inscrite dans le mémoire que vous avez devant vous, messieurs.
J'aimerais vous rappeler que, pendant les quinze ans où
l'industrie de la réfrigération négociait avec la section
réfrigération du syndicat, il y a eu une semaine de grève.
Le bill 290 existe depuis à peu près un an, et nous avons trois
semaines de grève. J'aimerais porter à votre attention
qu'à l'exception de Montréal, les comités paritaires de la
province ne reconnaissent pas notre profession comme faisant partie de la
construction. Ils refusent les cotisations que nos membres veulent leur
verser.
Messieurs, je vous remercie de m'avoir écouté. La
Corporation des maîtres-entrepreneurs en réfrigération de
la province de Québec espère que ce mémoire vous permettra
d'étudier son cas et d'en arriver à une solution pour
le bien de l'Industrie de la réfrigération et de la
climatisation.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Kentzinger. Y a-t-il des questions de la part
des membres de la commission? Pas de questions. Donc, nous vous remercions, M.
Kentzinger.
M. KENTZINGER: Merci.
Reprise de la séance à 14 h 32
M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de
la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! La séance est ouverte. Il
appartient maintenant à M. Charles Perrault de faire ses
représentations.
M. PERRAULT: M. le Président, avec votre permission, je
présenterai mon plaidoyer d'ici et je resterai assis, puisque je
relève d'une attaque virulente qui m'a terrassé durant quelques
jours.
M. LE PRESIDENT: Lorsque vous êtes assis, M. Perrault, vous
êtes à ma hauteur.
M. PERRAULT: J'ai déjà dit ici qu'il ne fallait pas
confondre la grandeur et la longueur, M. le Président.
UNE VOIX: C'est Napoléon qui a dit ça.
Le Conseil du patronat
M. PERRAULT: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, le Conseil du patronat du Québec a déposé, la
semaine dernière, devant vous, deux mémoires: un traitant de la
parité salariale et, le deuxième, du champ d'application
industriel. Je les commenterai dans cet ordre. Permettez-moi, au départ,
de vous rappeler que le Conseil du patronat est une confédération
d'une soixantaine d'associations patronales qui oeuvrent au Québec. Le
conseil détient le mandat bien précis de faire valoir les
intérêts généraux du patronat
québécois tant auprès des pouvoirs publics que des agents
de la vie économique et de l'opinion publique. Nous ne sommes pas ici en
tant que porte-parole des cinq associations patronales parties à la
négociation en cours, mais en tant que représentants des soixante
associations et de la presque totalité des employeurs du
Québec.
Parité salariale
M. PERRAULT: La parité des salaires est sans contredit une des
questions clés des négociations actuelles dans le secteur de la
construction. Il s'agit, en effet, d'une des demandes essentielles de la CSN
afin que soit établie la parité des salaires pour tous les
travailleurs de la construction sur l'ensemble du territoire
québécois.
Nous soumettons, dans notre mémoire, qu'une telle parité
aurait une influence considérable sur le coût de la main-d'oeuvre
de la construction dans les régions éloignées de
Montréal, les régions qui seraient affectées par une telle
parité.
A son tour, cet accroissement des salaires serait reflété
dans un accroissement important des coûts de la construction avec
certaines conclusions économiques que nous pouvons prévoir. Et
notre mémoire développe également l'effet sur le
développement régional d'une telle décision pour autant
qu'on puisse l'évaluer en fonction des chiffres dont nous disposons.
Finalement, il y a à craindre les distorsions qu'une telle
parité entraînerait vis-à-vis d'autres secteurs de la vie
économique, vis-à-vis d'autres entreprises qui oeuvrent dans les
régions en dehors de Montréal.
Nous avons effectivement établi, dans notre mémoire,
certains principes. Premièrement, que la construction est une industrie
à forte intensité de main d'oeuvre. Donc, une industrie où
l'accroissement du coût des salaires est reflété, dans une
large mesure, dans le coût des services rendus. Deuxièmement, nous
établissons que cette proportion qui varie d'une sorte de construction
à l'autre peut être déterminée en fonction des
écarts de salaires qu'il s'agirait de combler, si la parité
était accordée. Enfin, l'accroissement de productivité
dans la construction, c'est-à-dire les moyens par lesquels on peut
réussir à surmonter des coûts additionnels de
main-d'oeuvre, sans augmenter proportionnellement le coût des services,
cet accroissement de productivité, dis-je, est faible. Et tout cela, en
se rappelant que la construction est une industrie concurrentielle.
Les services vendus par les entrepreneurs le sont le plus souvent
à la suite de demandes d'offres et le contrat est adjugé à
celui dont les prix sont les meilleurs.
Pour en venir à l'augmentation des coûts, disons que le
coût de la main-d'oeuvre dans la construction, comme je le disais tout
à l'heure, représente de 20% à 30% du prix de revient dans
la construction lourde et de 40% à 50% dans la construction
résidentielle.
M. LE PRESIDENT: M. Perrault, excusez-moi. Je demande un peu d'ordre,
s'il vous plaît, un peu de silence pour qu'on puisse entendre M.
Perrault.
M. PERRAULT: Merci, M. le Président.
M. PEPIN: Pas le comprendre, mais l'entendre!
M. PERRAULT: Un peu de compréhension, c'est bien aussi.
M. LE PRESIDENT: Qu'on l'entende, en fait. Je m'excuse.
M. LABERGE: Moi, je vous entends et je vous comprends.
M. PERRAULT: Merci, M. Laberge.
Si on applique l'augmentation des coûts de main-d'oeuvre que nous
estimons nécessaires pour amener la parité des salaires dans
toute la province aux proportions que je viens de donner concernant la
quantité de main-d'oeuvre dans différents contrats, nous
concluons que l'augmentation des prix conséquente à la
parité des salaires serait d'environ 15% dans le secteur de
l'habitation, de 12% pour les constructions industrielles et commerciales et de
10% à 15% pour les travaux municipaux, la construction routière
et les grands travaux de génie civil.
Nous soutenons, M. le Président, qu'à la lumière de
la nature concurrentielle de la construction, de tels accroissements de
coûts sont impossibles & absorber par l'entrepreneur. Il n'est pas
besoin de vous rappeler que le secteur de la construction est un de ceux
où on trouve le plus grand nombre de faillites commerciales ni de
souligner que nous vivons une période où la construction
connaît un marasme tout particulier.
C'est donc dire que si les coûts d'opération sont
augmentés pour l'entrepreneur, comme je viens de l'indiquer, il n'a de
choix que de faire reporter ces coûts sur ses clients. Ses clients,
à leur tour, peuvent accepter de payer ces coûts accrus ou peuvent
refuser de le faire. Il est difficile de prévoir dans quelle mesure
l'une et l'autre de ces éventualités primera, mais on peut
prévoir qu'il y aurait une certaine réduction du volume
d'affaires, qui voudrait dire, à son tour, que certains entrepreneurs
disparaîtraient comme tels, probablement les plus faibles, et
qu'un certain nombre d'emplois, consé-quemment, disparaîtrait
à son tour.
La plus forte partie de l'augmentation se retrouverait payée par
les usagers des services; il faut donc mesurer l'effet d'une telle politique
sur les différents acheteurs de services de la construction pour se
faire une idée de ce que cela pourrait représenter.
Essentiellement, messieurs, vous avez trois catégories
d'acheteurs des services de la construction. Vous avez l'acheteur individuel,
qui est surtout préoccupé par la construction
résidentielle; vous avez l'acheteur commercial et in-
dustriel, et vous avez enfin l'Etat, les différents paliers de
l'Etat et les travaux qu'il fait exécuter pour la collectivité
par les entrepreneurs.
Examinons, si vous le voulez, les trois cas séparément. Le
cas de la construction résidentielle est celui où on frappe,
comme je l'ai dit, l'individu le plus fortement. Il s'agit ici d'un
marché essentiellement local. Il s'agit de vendre des maisons à
ceux qui habitent la localité. Le fait d'augmenter le coût de la
construction à Matane ou à Val d'Or se fait ressentir par les
gens de cette région qui ont des maisons à acheter là et
ont tendance, si les maisons deviennent plus coûteuses, à s'en
passer, à payer un loyer plus élevé, ou à se
satisfaire d'une accomodation inférieure.
Et 11 est peut-être utile de faire ressortir, ici, un point sur
lequel nous avons appuyé dans notre mémoire. Les travailleurs de
la construction sont déjà, d'après les statistiques, parmi
les mieux payés au Québec et, généralement, parmi
les mieux payés, région par région. C'est-à-dire
que, dans le cas de l'acheteur individuel, on demande effectivement à la
moyenne de la population, moins bien payée que les travailleurs de la
construction, de subventionner une certaine catégorie de travailleurs
qui ont une force de négociation peut-être meilleure, ou certains
mécanismes de négociation meilleurs, et de payer à ce
groupe, déjà favorisé, des salaires plus
élevés.
Passons maintenant au cas de la construction industrielle et
commerciale. Ici encore, la construction industrielle est très souvent
une question locale. La construction commerciale l'est presque toujours.
L'entretien commercial est à peu près toujours confié
à des entrepreneurs locaux. Toutes ces activités seraient donc,
dans leur accroissement de coûts, portées par la
collectivité locale, par le marchand, par le chef d'entreprise, par
l'entreprise locale qui comme vous le savez et comme j'en parlerai un
peu plus loin dans des régions éloignées de
Montréal, connaissent le plus souvent des conditions de fonctionnement
plus marginales que celles que l'on retrouve dans la métropole.
Il y a, enfin, l'effet de cette majoration sur les pouvoirs publics. On
a laissé entendre que, parce que environ 45% des contrats dans la
construction étaient octroyés par les pouvoirs publics, on
pouvait facilement se servir d'un tel mécanisme pour justifier une
parité de salaires en faisant une comparaison avec certaines politiques
gouvernementales de salaires égaux dans certains services.
Je vous soumets, messieurs, que cette comparaison est boiteuse et qu'il
y a des différences importantes à souligner. La première,
c'est que les dépenses de l'Etat, en termes de construction,
n'émargent pas toutes, loin de là, au budget du gouvernement
provincial. Il y en a, en effet, une bonne partie qui est la
responsabilité des gouvernements locaux. Or, ces gouvernements locaux
dépendent, dans une très large mesure, d'une assiette
d'imposition locale.
Vous n'êtes pas sans savoir que l'assiette d'imposition locale des
municipalités est très largement constituée par la taxe
foncière qui est, à son tour, une taxe sur le logement. Donc, la
partie des dépenses gouvernementales assumée par les
autorités locales ne saurait être répartie sur toute la
population de la province, comme c'est le cas pour certaines dépenses
d'éducation et de bien-être. C'est la population locale d'une
ville, qui doit faire faire des travaux d'égout ou d'aqueduc, qui est
obligée de financer ces travaux à même l'impôt
foncier principalement. C'est, d'ailleurs, un de leurs griefs importants, et
vous le savez.
Mais, ce sur quoi j'insiste, c'est que l'accroissement du coût de
ces travaux revient sur la taxe foncière qui est probablement
l'impôt le plus régressif que nous connaissions.
Par contre, il est entendu que la partie du coût additionnel des
travaux de l'Etat provincial pourrait, si l'Etat en décidait ainsi,
être répartie sur toute la population.
Cependant, il s'agit d'un montant très considérable pour
lequel, à ce que nous sachions, il n'y a aucune prévision
budgétaire.
Il s'agirait d'une dépense de l'ordre de $40 millions à
$50 millions par an, selon les chiffres que nous avons, qu'il faudrait trouver
quelque part dans un budget provincial déjà étiré
et ce, messieurs, toujours en fonction de la redistribution des revenus vers un
groupe de travailleurs qui est un des mieux traités de la province.
M. PEPIN: Sauf les spécialistes.
M. PERRAULT: Examinons un instant, si vous me le permettez, l'effet
d'une telle politique sur l'expansion régionale ou la croissance des
milieux en dehors de Montréal. Je ne suis pas sans savoir que la
réduction des disparités régionales dans la province est
un des buts visés par le gouvernement et c'est un but absolument
essentiel pour le renforcement économique de la province.
Je vous soumets cependant que la réduction des disparités
régionales est un problème extrêmement complexe qui
dépend de la possibilité économique de chaque
région et qui ne peut être réglé par simple
décret. Il serait très facile, par exemple, d'appliquer, par la
loi du
salaire minimum, une ordonnance comme quoi les salaires de la
Gaspésie ne seraient pas inférieurs à $3 l'heure. Vous
savez qu'une telle décision n'affecterait en rien l'état
économique réel de la Gaspésie. De la même
façon, messieurs, le fait d'établir, pour un certain groupe de
travailleurs de la construction, des salaires qui ne correspondent pas aux
exigences du marché est de nature à créer des distorsions
locales et à augmenter le coût des travaux locaux.
Ces résultats entraîneront non pas une réduction de
la disparité régionale, mais tendrons à l'accroître.
Nous avons, en effet, une législation qui prévoit que le
gouvernement fédéral et le gouvernement provincial peuvent
octroyer, à des entreprises qui s'établissent dans les
régions excentriques du Québec, des sommes importantes pour
faciliter l'implantation de nouvelles industries.
Une politique de parité salariale, en accroissant le coût
de la construction de ces usines ou de ces Industries dans les régions
éloignées de Montréal, irait diamétralement
à l'opposé de cette politique d'incitation à la
décentralisation industrielle.
Il ne faut pas négliger dans l'étude de cette question
l'effet d'entraînement sur les autres secteurs industriels que cause une
telle décision. Puisqu'une décision de créer la
parité salariale ne serait appuyée d'aucune façon sur des
critères économiques, il en résulterait des distorsions
importantes avec les entreprises déjà établies dans la
région, pour ne parler que de celles-là et ne pas mentionner
celles qui pourraient s'y installer plus tard. Il a toujours existé,
comme vous le savez, des points de comparaison entre les salaires de la
construction et ceux payés dans l'industrie, notamment à certains
métiers d'entretien qui s'y rapprochent.
Dans le passé, certains facteurs ont réussi à
maintenir un écart quelconque entre ces salaires en faveur de la
construction puisque ce travail, en général, était moins
stable, mais il y a quand même eu des rapports qui ont toujours
été appliqués. Ce que nous craignons, c'est que
l'augmentation importante de salaires dans la construction
qu'entraîneraient la parité ait tendance à se
répercuter dans les autres secteurs qui sont actuellement, dans bien des
cas, aux prises avec des difficultés graves.
Encore une fois, cette distorsion ne résulterait pas d'un
mouvement appuyé par des forces économiques, mais tout simplement
par des salaires décrétés. Je me permets, à ce
moment-ci, de souligner qu'il ne semble pas y avoir, dans la demande de
parité salariale, d'insistance sur l'absence de main-d'oeuvre. Ce n'est
pas pour attirer la main-d'oeuvre qu'il serait nécessaire d'avoir la
parité salariale dans toute la province, mais plutôt pour obtenir
une égalité avec un autre secteur qui est Montréal.
Pour terminer, M. le Président, il est utile de rappeler les
ententes déjà prévues entre les parties, que je ne
rappellerai pas d'une façon extensive, mais pour souligner qu'il y a,
dans les ententes, des références à des certificats de
qualification qui n'existent pas encore et qu'il y a dans la loi sur la
formation professionnelle certaines prévisions en fonction de la
reconnaissance de certificats déjà existants.
Tout cela, pour dire simplement, que les ententes existantes, la loi sur
la qualification professionnelle et son article 55 pourraient mener à
une parité salariale que le législateur n'a pas prévue et
contre laquelle nous nous érigeons pour exactement les mêmes
raisons. C'est-à-dire que si la parité salariale ne doit pas
être consentie, pour des raisons que nous avons énoncées,
par la porte d'en avant, elle ne devrait pas non plus se faire par la porte de
côté.
Messieurs, je crois qu'il serait sage de séparer la
présentation des deux mémoires afin de répondre aux
questions que vous pourriez avoir sur cette première tranche et ne pas
mêler les deux questions.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault, pour cette brève tranche.
J'inviterais les membres de la commission qui ont des questions à poser
à M. Perrault de le faire immédiatement.
Le député de Bagot.
M. CARDINAL: J'en aurais une. Il y a une chose qui ne me paraît
pas tout à fait claire, au tout début. Vous avez mentionné
très précisément que vous n'étiez pas le
porte-parole des cinq ou sept associations patronales qui étaient
à la table des négociations, mais, si ma mémoire est
bonne, que vous représentiez 60 associations patronales. Ma question
précise est celle-ci: Est-ce que, parmi ces 60, se trouvent quand
même les 5 ou 7 qui se trouvent à la table?
M. PERRAULT: Il s'en trouve trois, M. Cardinal, trois sur cinq.
M. CARDINAL: Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Perrault, dans votre mé-
moire, à la page 5, votre conseil dit « qu'il est convaincu
tant en principe qu'en pratique que la parité salariale absolue pour les
travailleurs de la construction était économiquement
indéfendable », sauf erreur. Je ne sais pas si vous êtes au
courant d'une certaine publication du professeur Jean-Guy Loranger,
économiste, qui lui, ne semble pas avoir le même point de vue que
vous là-dessus et je me réfère en particulier à la
page 64 de son petit bouquin. Je ne sais pas si vous avez eu la chance de le
lire.
Je cite la page 64: « A notre avis, il est plus raisonnable de
penser que l'égalité des salaires avec Montréal
provoquerait une hausse moyenne du coût de l'habitation nettement
inférieure à 10% pour les trois prochaines années, ce qui
représenterait une hausse moyenne inférieure à 3% par
année. » Est-ce que vous êtes au courant de cet
énoncé? Est-ce que vous êtes en mesure d'infirmer cela
ou...?
M. PERRAULT: Moi, je n'ai pas vu le document que vous avez en main. Je
crois que cela reflète un peu ce qu'on retrouve dans le document jaune,
mais je ne l'ai pas.
M. BURNS: De toute façon, l'énoncé que je vous
fais, est-ce que cela vous frappe comme étant une
hérésie?
M. BEDARD: Ce n'est pas exact, c'est beaucoup plus considérable
que ce qui est mentionné là.
M. PERRAULT: Excusez-moi, je ne sais pas si nous sommes ici pour
discuter du mémoire de la CSN.
M. BURNS: Je ne discute pas du mémoire de la CSN, M. le
Président, sauf que je discute, je pense, avec une autorité en
main. Qu'est-ce que vous voulez, vous avez un économiste de London
School of Economics, professeur à l'Université de Montréal
et je ne suis pas économiste. Je suis donc obligé d'avoir des
sources.
UNE VOIX: Vous êtes tombé sur celui-là.
M. BURNS: Je suis tombé sur celui-là parce qu'il semble
contredire...
M. LE PRESIDENT: La question est opportune ici, si M. Perrault peut y
répondre évidemment.
M. BURNS: M. Perrault, je ne vous dis pas cela pour vous embêter.
Je vous pose cette question parce que, tout au long de votre mémoire, de
votre exposé, on sent chez vous des préoccupations d'ordre
économique, je pense. D'abord, je ne pense pas qu'il y ait quelque chose
d'idéologique dans votre affaire; du moins, on ne la pas senti. C'est
pour cela que je vous pose ces questions.
M. PERRAULT: M. le Président, en réponse à cette
question, il est clair que nous étions particulièrement
sensibles, lorsque nous avons préparé notre argumentation,
à la possibilité que cela puisse sembler un argument en faveur du
maintien des disparités régionales et que le fait d'accorder la
parité salariale dans la construction soit un pas, si petit soit-il,
vers une telle réduction des disparités régionales.
Le Conseil du patronat tel quel ne s'est jamais prononcé
là-dessus, mais personnellement je suis favorable à la
réduction des disparités régionales non seulement dans la
province, mais dans le pays, dans la plus grande mesure possible. On peut
bâtir tout un argument là-dessus à partir de raisons
économiques sans même toucher aux questions sociales. Cependant,
je crois que l'opinion que j'ai énoncée quant à l'effet
possible de la parité salariale serait partagée par un bon nombre
d'économistes. J'en ai consulté quelques-uns, mais je ne peux pas
les amener ici à la table avec moi. Je me permets de citer ceux qui ont
préparé un mémoire qui est déjà devant vous,
je crois, et qui a été commandité par la Corporation des
maîtres électriciens du Québec. C'est un mémoire qui
est signé par trois économistes de l'Université de
Montréal: MM. Lacasse, Raynauld et Marion.
On y trouve, à la page 27, les mots suivants: « Par
conséquent, de quelque point de vue que ce soit, l'établissement,
par l'autorité provinciale, de la parité des salaires dans
l'industrie de la construction ne peut être considéré, au
mieux, que comme moyen très inefficace de réduire les
inégalités régionales et, de façon plus
réaliste, comme une politique allant à l'encon-tre de cet
objectif ».
M. BURNS: Comme ça, vos sources admettent, M. Perrault, que la
parité régionale ou l'augmentation dans d'autres régions
que Montréal au taux de salaire de Montréal pourrait être
un facteur de stimulation économique dans les régions
défavorisées? Est-ce ça que je dois comprendre?
M. PERRAULT: Bien, quand vous parlez de stimulation
économique...
DES VOIX: Ah!
M. BURNS: Bien, je pose la question à M. Perrault, qu'il me
réponde.
M. DEMERS: M. le Président, est-ce que je pourrais faire
remarquer que l'on s'éloigne peut-être en voulant se rapprocher
trop?
M. LE PRESIDENT: II faudrait s'en tenir, autant que possible, au sujet
et limiter les débats à l'intérieur de l'enceinte.
M. BURNS: Je ne fais pas de débat, M. le Président, je
pose une question à M. Perrault.
M. LE PRESIDENT: Non, ma remarque s'adressait plutôt à ceux
des auditeurs qui semblaient engager un débat entre eux. La parole est
au député de Maisonneuve.
M. BURNS: Je suis bien d'accord pour le laisser répondre, c'est
d'ailleurs pour cela que j'ai posé la question.
M. PERRAULT: Est-ce que vous voulez que je réponde à votre
question?
M. BURNS: Bien oui.
M. PERRAULT: M. le Président, il est entendu que vous stimulez
l'activité économique en créant simultanément
certaines distorsions. C'est-à-dire que vous augmentez les revenus d'un
certain nombre de personnes, les travailleurs de la construction mais vous
faites payer cette augmentation largement par les personnes de l'endroit et
vous n'avez pas effectivement de stimulation économique. Cette
argumentation, d'ailleurs, est quantifiée dans l'étude que je
viens de citer. Là, je vous la donne simplement en grands termes, mais
elle est quantifiée, ici.
M. BURNS: Je me réfère encore au petit bouquin, M.
Perrault, justement sur ce problème de stimulation. Je ne sais pas si
vous êtes familier avec la démonstration du fonctionnement du
multiplicateur qui se trouve à la page 100 de ce petit document.
M. LE PRESIDENT: On pourrait peut-être en remettre une copie
à M. Perrault.
M. BURNS: Je l'ai reçu ce matin. Il n'est pas tellement
volumineux, il est très concis.
UNE VOIX: On vient de l'avoir.
M. PERRAULT: Je voudrais poser une question. Est-ce que M. Burns a une
copie de notre document?
M. BURNS: Oui, j'ai une copie du vôtre. Moi, je veux être
éclairé sur les deux positions, M. Perrault. J'ai entendu la
vôtre et je veux savoir ce que vous pensez en regard de l'autre position
qui nous est offerte.
En somme, le principe, d'après ce que j'ai pu comprendre
les économistes dans la salle me corrigeront si je me trompe la
démonstration que le professeur Loranger... Vous m'écoutez, M.
Perrault?
M. PERRAULT: Je vous écoute.
M. BURNS: La démonstration que le professeur Loranger semble
vouloir nous faire, si je l'ai bien comprise...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, me permettez-vous, je
m'excuse auprès du député de Maisonneuve.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je m'excuse auprès du
député de Maisonneuve, mais je pense que nous avons là
entre les mains un document qui demanderait que nous requérions l'avis
des experts, ne serait-ce que pour nous expliquer la signification des
graphiques et des tableaux statistiques.
M. LAPORTE: Nous expliquer leur contradiction.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux bien que M. Perrault réponde
à ces questions, mais nous allons nous engager dans une discussion qui
va nous obliger à demander les services de tous les économistes
qui ont pu travailler pour l'une ou l'autre des parties qui sont ici
représentées. Nous avons là l'avis d'un économiste
et il y en a des centaines d'autres. Le premier ministre en est un, nous
dit-on, alors il va nous falloir les demander tous.
M. BURNS: C'est ce qu'on dit du moins, que le premier ministre en est
un...
M. LE PRESIDENT: J'admets que...
M. BURNS: Ecoutez, M. le Président, je comprends très bien
ce que le député de Chicoutimi veut dire par là,
peut-être que lui-même
ne se sent pas prêt à digérer immédiatement
ce document. Je le comprends très bien, d'ailleurs.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas une question de digestion.
M. BURNS: Je n'allègue pas, personnellement, l'avoir
digéré au complet, sauf que j'ai vu quelques points qui semblent
être en nette contradiction avec ce que M. Perrault nous dit.
Je pense qu'il serait dans l'intérêt de cette commission de
savoir exactement ce que M. Perrault peut penser de certains
avancés.
M. DEMERS: Ici, on s'attend qu'il y ait de la contradiction.
M. TREMBLAY: Voici, M. le Président...
M. DEMERS: C'est la place de la contradiction.
M. BURNS: On s'y attend mais, écoutez, je suis bien
d'accord...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux bien acquiescer à la
requête du député de Maisonneuve. Toutefois, après,
je me réserve le soin de demander au député de
Maisonneuve, ou à M. Perrault, ou à quelqu'un qui est ici, membre
des parties représentées, d'expliquer la relation de
comportement: grand R égale petit a, plus petit b; grand R plus grand A,
c'est-à-dire grand R égale crochet 1, mois 1, moins B; entre
parenthèses, a plus grand A. Alors...
M. DEMERS: Voilà pourquoi votre fille est muette.
M. LE PRESIDENT: II faut admettre que le document est assez complexe,
quoiqu'il requerrait quand même certaines explications...
M. BURNS: Jusqu'à maintenant je n'ai pas fait
référence à des équations savantes. J'essaie tout
simplement... Il y a des énoncés de principe quand même,
dans ces textes-là qui, peut-être, pour des économistes,
sont appuyés par ces grands A et ces petits b, ces deltas et tout cela.
Je me réfère à cela et, d'après cette
démonstration, du moins, le professeur en arrive à une conclusion
qui me fascine un peu. C'est en relation directe avec la question
précédente que j'ai posée à M. Perrault,
c'est-à-dire sur la stimulation d'une région
sous-développée ou économiquement faible.
M. LAPORTE : M. Burns, je pense bien que nous avons en main les deux
documents. Nous pouvons bien demander à M. Perrault de nous donner son
avis; nous pourrons ensuite demander à M. Loranger de nous donner le
sien. Ce qui va en sortir, malheureusement, c'est que, sur un même point,
est-ce que la parité salariale va stimuler l'économie? Vous avez
un groupe d'experts, tout à fait savants, que je respecte beaucoup, qui
disent oui. Vous avez un autre groupe d'experts, tout à fait aussi
savants, que je respecte autant, et qui disent non. Ce qui, hélas! ne
simplifie pas le problème pour nous. Est-ce M. Loranger qui a raison, ou
est-ce M. Raynaud? J'ai du respect pour les deux et nous sommes obligés
de décider quand même. Que voulez-vous que nous disions?
M. BURNS: Ecoutez, est-ce que nous sommes venus ici pour nous faire
éclairer, ou si nous sommes venus ici tout simplement pour
écouter les parties, attendre que le délai se passe et ensuite
que le lieutenant-gouverneur en conseil fasse son arrêtté en
conseil?
M. LAPORTE: M. Burns, vous avez l'habitude de réagir de
façon plus intelligente que cela.
M. BURNS: C'est votre opinion, M. le ministre.
M. LAPORTE: Si vous pensez qu'on veut vous empêcher de parler,
bien, mon Dieu! allez-y et prenez tout l'après-midi.
M. BURNS: Je ne sens pas qu'on veuille m'empêcher de parler. Je me
demande tout simplement si, quand on évite les vrais problèmes...
Parce que tout au long du mémoire du Conseil du patronat, on entend
parler d'arguments économiques.
M. LAPORTE: Vous nous aideriez davantage...
M. BURNS: C'est là-dessus que cette commission
parlementaire...
M. LAPORTE: ... en tentant de départager les deux. Que va-t-on
décider? Est-ce Loranger ou Raynaud qui a raison?
M. BURNS: Je n'essaie pas de départager les deux, j'essaie de
m'éclairer personnellement. C'est cela mon problème
actuellement.
M. LAPORTE: D'accord.
M. BURNS: Je ne suis pas un économiste, malheureusement.
M. LE PRESIDENT: Ayant devant moi les deux documents, je permettrai que
l'on donne les explications mais aussi brièvement que possible; ne pas
entrer dans la théorie complexe. Je pense que les membres de la
commission pourront consulter les documents.
M. BURNS: M. le Président, j'aimerais bien que vous me disiez
à quelle place je suis entré dans des théories bien
complexes jusqu'à maintenant.
M. LE PRESIDENT: On s'en vient bien.
M. BURNS: Je me suis justement bien gardé de faire cela.
D'ailleurs, j'en serais totalement incapable.
M. LE PRESIDENT: J'en suis très heureux. Donc,
procédez.
M. BURNS: Bon. Je veux tout simplement demander à M. Perrault et
c'était la question que je voulais poser au début, je me suis
référé à des termes techniques, ce qui a
amené les hauts cris chez certaines personnes... Mais, la conclusion
à laquelle le professeur Loranger semble arriver est que, si vous
augmentez, dans une région économique, les revenus moyens, ces
résultats grâce à un calcul que moi,
personnellement, je ne serais pas capable de faire sont cinq fois plus
grands sur l'économie en général de cette région;
si je comprends bien.
Je lis à la page 101, en tous cas: « On voit donc que
lorsque la propension marginale à consommer est de .8, une hausse
autonome de la consommation entraîne une augmentation cinq fois plus
grande sur le revenu ». Alors, c'est là que vous ne comprenez pas,
mais, quant à moi, cela me fait dire que c'est exactement en
contradiction avec l'énoncé de principe fait par le Conseil du
patronat à savoir, premièrement, que si vous augmentez les
salaires, cela va diminuer la vente des maisons, ou des domiciles, cela va
diminuer la construction dans un coin.
C'est cela que je me pose comme problème, tout simplement.
J'aimerais bien avoir les commentaires de M. Perrault là-dessus.
M. LE PRESIDENT: M. Perrault, la parole est à vous.
M. PERRAULT: M. le Président, brièvement, je crois que
nous sommes, comme le disait M. le ministre du Travail, dans le champ des
experts en économique et je me défends bien d'en être
un.
Je crois cependant que la réponse à la question de Me
Burns se retrouve dans le document des trois économistes, que j'ai
cité tout à l'heure. Je vous lis rapidement les paragraphes qui
s'y rattachent et qui ne comportent pas de formule très longue, M.
Tremblay. On dit ceci: « Augmentation de la demande régionale.
Dans le premier cas, on doit comparer la stimulation de la demande
régionale aux augmentations de coût qu'entraîne
également la parité. Ces hausses ont été
passées en revue dans les sous-sections précédentes. On
peut maintenant situer l'ordre de grandeur de la stimulation de demande
régionale qu'entraîne la parité. « Prenons le cas le
plus favorable à cette hypothèse, celui de la région
où l'augmentation de salaire serait la plus forte; 34.4% à
Rimouski. En supposant que les travailleurs de la construction
représentent 5%, maximum, de la main-d'oeuvre et du revenu total de la
région, la hausse de demande globale sera de 1.7%. Or, cette demande
accrue ne se fera pas entièrement pour les biens et services produits
dans la région. Si, pour l'ensemble du Québec, on estime que le
secteur « importations » est de 50%, on pourrait croire que pour
des entités économiques aussi restreintes que nos régions,
ce coefficient se situe au moins à 75%. « Ainsi, la hausse de
revenu nominal qui se fera sentir dans la région du fait de la
parité serait de 1.7% multiplié par 1/4, soit 0.42%, environ 2/5
de 1%, et ce dans la région où la parité
entraînerait les augmentations de salaires les plus fortes ».
Les auteurs concluent: « Bref, même dans les circonstances
les plus favorables, l'effet possible de l'augmentation des revenus nominaux
dans la construction est négligeable comme stimulus à
l'activité économique régionale. »
UNE VOIX: Est-ce assez clair?
M. BURNS: Est-ce assez clair? J'ai votre point de vue, c'est celui de M.
Raynauld.
M. DEMERS: Là, on comprend. M. BURNS: Là, vous comprenez?
M. DEMERS: Là, c'est clair. M. BURNS: Là, c'est clair!
M. DEMERS: Oui. M. BURNS: Bon.
UNE VOIX: M. le Président, un autre mémoire.
M. BURNS: Dernière question, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Je vous en prie.
M. BURNS: Dans votre mémoire également, M. Perrault,
à la page 24, vous affirmez que l'incidence de la parité sur le
budget gouvernemental se chiffrera entre $40 millions et $50 millions. Encore
une fois, je vous réfère au petit livre qui, lui, arrive à
des conclusions différentes à la page 90 du volume du professeur
Lo ranger.
Il en arrive à la conclusion que ceci devrait entraîner une
revision budgétaire de $12 millions, $14 millions ou $16 millions, selon
les trois hypothèses déjà envisagées, parce que le
chiffre duquel il part est variable. Selon certaines hypothèses, il
arrive à $12 millions, $14 millions ou $16 millions, ce qui est assez
différent des $40 millions et $50 millions que vous citez. Est-ce que
vous seriez en mesure de nous dire à partir de quelle base vous en
êtes arrivé à ces calculs quant au gouvernement?
M. PERRAULT: Est-ce que je peux me permettre de vous suggérer que
cette question soit posée au représentant de l'Association des
constructeurs de grandes routes. Cela fait partie de leur plaidoyer. Ils
doivent paraître devant vous et ils ont toute la documentation qui a
servi de base à ce calcul.
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, vous préférez qu'on
remette la question...
M. BURNS: Je la posais à M. Perrault parce que...
M. LE PRESIDENT: Je demanderai au député s'il est
satisfait de cette réponse.
M. LAPORTE: M. Perrault, étant donné que j'aime bien que
les situations soient claires, les constructeurs de routes auront l'occasion de
nous donner leur avis. Mais les chiffres de $40 millions et $50 millions pour
les routes seulement, je me permets de vous dire en toute amitié que
c'est de la haute fantaisie.
S'il vous plaît! Quand on dit des choses... Cela a
été révisé. Ils sont partis de ce chiffre.
En collaboration avec les fonctionnaires du ministère de la
Voirie et ceux du ministère du Travail, disons qu'on en arrive
aujourd'hui à des chiffres qui me paraissent à moi plus
réalistes et qui seront exposés un jour.
Mais je tiens pour acquis votre affirmation que la parité des
salaires entraînerait certainement une augmentation des salaires. Quant
à ses dimensions, on pourra l'établir d'une autre façon,
mais ce n'est certainement pas de $40 millions à $50 millions.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. BURNS: Je n'avais pas d'autre question, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Un instant, s'il vous plaît. La parole est au député
de Bagot d'abord. Par la suite, vous aurez l'occasion de poser toutes vos
questions.
M. CARDINAL: Ce n'est pas tellement une question; c'est une constatation
que je veux soumettre à cette assemblée. C'est que
moi-même, lorsque nous avons discuté, en deuxième lecture,
du projet de loi 38, j'ai souligné que le gouvernement se rendrait
responsable des conséquences budgétaires dans le cas où
lui-même serait partie contractante parce qu'il serait responsable de
l'augmentation, ce qui ne serait pas le cas dans le domaine strictement
privé.
Mais, même en retenant cette affirmation que je continue à
croire exacte, les chiffres que l'on pourrait établir je suis
d'accord avec le ministre peuvent varier infiniment. Si l'on
considère le phénomène des commissions scolaires, on voit
que la subvention vient en partie d'un accord fédéral-provincial,
par exemple, en partie d'un financement local, en partie, parfois, d'un effort
local, dans le cas de dépenses non subventionnées. Si l'on
considère le cas de la voirie, qui est tout à fait
différent, où le gouvernement est un agent direct; si l'on
considère les travaux publics où le gouvernement est un agent
direct; si l'on considère maintenant que, dans d'autres cas, les
ministères agissent à travers des offices, lesquels ont
eux-mêmes des accords avec des offices d'un autre gouvernement
c'est le cas de la construction des foyers de vieillards, des centres pour
personnes inadaptées, etc. je suis d'accord avec le ministre
qu'on peut établir, à ce moment-là, 25 chiffres
différents et que chacun d'eux prouvera tout simplement qu'on a pris des
bases différentes, en ne tenant pas compte de tous les
éléments pour les établir.
Je ne pense pas que c'est sur ce cas, en particulier avec tout le
respect que j'ai pour Perrault et pour le député qui a
posé la question que l'on pourra décider d'un
décret ou de la substance de ce décret. Ceci est une question qui
regarde, d'ailleurs, le gouvernement directement et qui n'a rien à voir
avec les conséquences que cela peut entraîner sur le plan
régional, local ou autre. Dans ces cas, il l'assumera, soit directement,
soit par des offices et lui seul a probablement en main les critères qui
lui permettent de l'établir.
J'ajouterai un seul autre détail, c'est que le gouvernement peut
poser un autre geste. D'ailleurs, cela a été souligné
à l'occasion du débat sur le même projet de loi qui est
devenu une loi. Il peut, dans la préparation de son prochain budget,
tout simplement diminuer des travaux et, par conséquent, ne pas
obérer davantage le budget. On est donc dans des hypothèses
lorsque l'on se base sur ces chiffres.
M. LE PRESIDENT: Merci. Maintenant, M. Gagnon avait demandé la
parole. Voulez-vous vous approcher du micro?
M. GAGNON; M. le Président, notre fraternité a
déposé un mémoire. Nous le commenterons plus tard. Pour le
moment, je veux strictement poser deux questions.
M. LE PRESIDENT: A M.Perrault, je crois? M. GAGNON: A M. Perrault.
M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous vous identifier?
M. GAGNON: Henri Gagnon, Fraternité internationale des ouvriers
en électricité, FTQ, M. Perrault nous a donné des chiffres
et il nous a dit qu'il y avait trois catégories dans la construction
résidentielle, commerciale et industrielle et l'Etat. J'aimerais, pour
ma part, savoir quel est le pourcentage des salariés dans chacune
d'elles.
Alors, vu qu'on parle de disparités salariales pour des vivants
qui sont dans ces catégories-là, il serait bon de savoir quelle
est la portion.
J'ai une deuxième question, pour ne pas revenir, parce que c'est
loin, je reste à l'autre bout. Je lui demande comment il peut concilier
les paragraphes 3 et 4 de la page 10, qu'il a lui-même écrits,
avec son opposition à la parité salariale. Après tout,
nous vivons dans une province à 80% de salariés, si je ne me
trompe, si on prend l'ensemble de la province.
Il nous dit, à un moment donné, que le tout dépend
de la capacité: Or, la capacité de payer dépend dans une
large mesure des conditions économiques locales, plus exactement des
revenus locaux disponibles.
Or, quels autres revenus locaux sont disponibles en dehors des salaires,
dans une population de 80%? Je crois que cette parité salariale et cette
augmentation... Je suis d'accord avec ces deux paragraphes qui sont la base de
tout le développement économique, à savoir que la
parité salariale, si j'ai bien lu ce qu'il a dit, est la base de tout le
développement économique et que, en même temps, cela
dépannerait la province.
Moi, je maintiens que la disparité régionale est un
empêchement à la croissance économique de la province. Je
dis non seulement que la parité salariale est possible, mais qu'elle est
réalisable. Je dis que c'est devenu une nécessité pour
l'ensemble de la province. De toute façon, vu que c'est une question, je
vous inviterais à relire ceci, à la page 10 du document de M.
Perrault, aux paragraphes 3 et 4.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Gagnon. M. Laberge.
M. PERRAULT: Est-ce que vous voulez que je réponde, M. le
Président?
M. LAPORTE: Ah! il y a deux questions.
M. LE PRESIDENT: Oui, je pense que ce serait opportun que vous
répondiez.
M. LAPORTE: Je n'avais pas remarqué les points d'interrogations,
mais ils y étaient.
M. PERRAULT: Quant à la première question, M. Gagnon, nous
demande si nous avons la proportion des travailleurs de la construction
impliqués dans chacune des catégories? La réponse est non.
Nous avons produit des chiffres statistiques basés sur le coût des
travaux, mais certains entrepreneurs vont dans plusieurs de ces
catégories, comme vous le savez, et je ne sais même pas si on
pourrait retrouver des chiffres valables établissant comment cela se
situe... D'ailleurs, les travailleurs de la construction vont,
fréquemment, dans toute une gamme d'activités, ils sont mobiles
et leurs employeurs sont mobiles à cette fin. On pourra donc
peut-être trouver ces renseignements-là quelque part, nous ne les
avons pas.
Quant à la seconde question, celle d'établir une
contradiction, dans les paragraphes 3 et 4,
de la page 10, je n'en vois pas du tout. Quand, dans notre texte, nous
parlons des clients et que nous parlons des revenus locaux, nous parlons de
toute la population. Nous ne parlons pas seulement des travailleurs de la
construction, ces quelques pour cent des travailleurs qui seraient
affectés par une telle mesure. Or, si la parité salariale
entraîne une hausse de revenus pour une petite proportion des
travailleurs, c'est quand même le reste de la population, y compris la
très grande partie des travailleurs, qui doit subir cette augmentation
de coût. C'est essentiellement ce que cela veut dire.
Dans l'argumentation des trois économistes de l'université
de Montréal, on établit que les hausses de salaires et de prix
conséquence de l'établissement de la parité
auraient tendance à réduire les quantités de services, et,
dans la mesure où la sensibilité de la demande par rapport aux
prix est la même pour toute l'industrie, on peut croire que, du seul fait
des réductions dans les quantités demandées de biens
produits par l'industrie de la construction, la parité entrafnerait des
baisses d'emploi dans la construction de 4 1/2% à 17.7% selon les
régions.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault. C'est terminé, je crois? M.
Laberge.
M. LABERGE: Louis Laberge, FTQ. Je demanderais à M. Perrault si
le conseil du patronat est au courant de la théorie qui a
déjà été exprimée, il y a quatre ou cinq
ans, par l'expert en économique des deux gouvernements
précédents, Jacques Parizeau, qui, lui, préconisait la
disparition des différences dans les salaires, la disparition des zones
au Québec, la modernisation des moyens de transport et le fait
qu'aujourd'hui les insdus-tries, qui étaient éloignées de
leur marché, étaient rapprochées de leurs produits bruts.
Il disait que par rapport à cette modernisation dans les transports, les
raisons qui ont peut-être, à un moment donné,
justifié des disparités salariales dans les régions
là je ne parle pas que de la construction, mais en général
de toutes les industries étaient disparues. S'il y a des
coûts additionnels pour transporter un produit fini pour un manufacturier
qui est éloigné de son marché, il y a par contre des
avantages: des terrains à meilleur prix, le rapprochement du produit
brut. Le Conseil du patronat est-il au courant de cette théorie?
M. LE PRESIDENT: Vous voulez une réponse
immédiatement?
M. LABERGE: Oui.
M. LE PRESIDENT: M. Perrault, pourriez-vous répondre
immédiatement?
M. PERRAULT: M. le Président, je ne sais pas si le Conseil du
patronat est au courant, mais je connais les thèses de M. Parizeau; nous
avons siégé ensemble à de nombreux organismes, nous avons
croisé le fer à maintes reprises. Je connais ses théories
et une théorie que je ne partage pas.
M. LABERGE: Une autre question. Le Conseil du patronat pourrait-il nous
donner le pourcentage du coût de la main-d'oeuvre dans la construction
d'une habitation, prenant en considération, encore une fois, le
coût des terrains, qui est moins élevé dans de petites
localités que dans de grandes localités, le rapprochement, de la
construction, du produit brut? Je pense que le pourcentage du coût de la
main-d'oeuvre dans la construction d'une habitation est quelque chose que les
députés devraient connaître. Moi, je ne vous parlerai pas
de A plus petit b moins grand B. Il est bien évident que ce
bouquin-là ne s'adressait ni au Conseil du patronat ni aux
députés; c'est évidemment pour les gars de la
construction, qui, eux, comprendront ça.
M. CROLSETIERE: C'est fort. M. DE MERS: C'est la plus forte. UNE VOIX:
C'est la meilleure. M. CARDINAL: M. le Président,...
M. LE PRESIDENT: Pendant que le Conseil du patronat cherche la
réponse, je permets au député de Bagot de poser une
question.
M. CARDINAL: Merci. Ce n'est pas pour poser un problème. Je veux
simplement en appeler aux gens, pour que les dévoués
employés du journal des Débats puissent quand même
écrire ce que nous sommes en train de dire aujourd'hui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons demander à M. Laberge de
nous expliquer le petit livre, aussi.
M. le Président, allez-vous nous permettre, tout à
l'heure, de demander à M. Laberge de nous expliquer ça?
M. LE PRESIDENT: Je suis certain qu'il le fera habilement.
M. Desjardins, préférez-vous l'expliquer
vous-même?
M. DESJARDINS: Je pourrais poser une autre question au Conseil du
patronat.
UNE VOIX: II n'a pas encore répondu.
M. LABERGE: Qu'il commence par répondre à la
première question.
M. LE PRESIDENT: Je comprends, M. Desjardins, que vous n'ayez pas eu le
temps de vous préparer pour nous l'expliquer. Alors, je demande au
Conseil du patronat de nous donner la réponse.
M. PERRAULT: Les chiffres que nous citons dans notre étude, M. le
Président, quant au pourcentage de la main-d'oeuvre dans la
construction, sont obtenus à partir des index de construction Southam,
que nous citons dans notre rapport.
Nous, nous établissons entre 40% et 50% du coût de la
construction résidentielle l'apport de la main-d'oeuvre. Dans
l'étude préparée par les économistes de
l'Université de Montréal, on se sert de 37.5%, ce qui serait
apparemment la pondération utilisée par le Bureau
fédéral de la statistique. Voilà l'ordre des chiffres.
Dans nos calculs à nous, il nous a semblé que c'était de
40% à 50%. Les économistes de l'Université de
Montréal se servent de 37 1/2% et se basent sur les chiffres du Bureau
fédéral de la statistique.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que ça répond à votre
question, M. Laberge?
M. LABERGE: Oui. Autre question, est-ce qu'il y aurait aussi le
pourcentage du coût du terrain, du coût des matériaux? Je
pense en effet que c'est extrêmement important, lorsqu'on parle de
construction domiciliaire.
M. PERRAULT: Les pourcentages de matériaux sont établis
sur le même tableau, Louis; je ne les ai pas comptés, mais ils ont
été tirés de la même source.
M. LABERGE: Je ne suis pas bien fort sur les tableaux.
M. PERRAULT: Il faut que tu travailles un peu.
M. LABERGE: Si le président me le permet, nous avons
travaillé assez fort lors de la préparation de notre
mémoire. Vous nous posez des questions nous vous donnerons des
réponses. Nous espérerions la même chose.
M. LAPORTE: Vous n'êtes pas d'accord, M. le Président?
M. LE PRESIDENT: Pour le moment, ça répond à la
question.
M. PERRAULT: Je permettrais maintenant à M. Pépin, de la
CSN, de prendre la parole.
M. PEPIN: Marcel Pepin, de la CSN. Je voudrais tout simplement faire une
remarque préliminaire. Comme nous aurons à commenter
éventuellement le mémoire du Conseil dupatro-nat, je souhaiterais
ardemment que le président du conseil soit ici, parce que, pour ma part,
j'ai l'intention de l'attaquer suffisamment et je n'aime pas à attaquer
quand les gens n'y sont pas. S'il pouvait rester avec nous jusqu'à
vendredi ou jusqu'au moment où on attaquera son mémoire, si sa
santé le lui permet, j'aimerais beaucoup qu'il y soit.
J'ai seulement quelques questions à poser pour essayer
d'éclairer moi aussi ma lanterne. Vous avez affirmé dans votre
mémoire, à la page 20, M. Perrault, que, quant à vous, le
volume de la construction est en nette régression au Québec et
particulièrement pour les six premiers mois de cette année, si
vous le comparez aux six mois de l'an dernier. Il me semble, dans votre
mémoire, si je l'interprète bien, que vous en imputiez la cause
à la hausse des salaires dans cette industrie.
M. PERRAULT: Non, non.
M. PEPIN: Ce n'est donc pas à cause des salaires, s'il y a eu une
baisse des investissements.
M. PERRAULT: Nous ne l'imputons à ça nulle part.
M. PEPIN: Donc, ce n'est pas à cause de ça.
M. PERRAULT: Je n'ai pas dit ça. J'ai dit que nous ne l'imputons
pas à ça.
M. PEPIN: L'imputez-vous ou si vous ne l'imputez pas?
M. LABERGE: Il l'impute à cela en partie.
M. PEPIN: Est-ce que c'est une des raisons ou si ce n'est pas une des
raisons? C'est ça que j'essaie de découvrir.
M. PERRAULT: Je ne sais pas quelles sont les raisons.
M. PEPIN: Donc, vous ne le savez pas. Quand vous écrivez quelque
chose, vous ne le savez pas.
M. PERRAULT: Je dis que c'a baissé d'une année à
l'autre et que c'est contre une industrie en regression qu'il faut
étudier les questions qui sont devant nous, celles d'une parité
salariale d'un bout de la province à l'autre.
M. PEPIN: Indépendamment des salaires, ça, il n'y a pas de
raison de s'occuper de ça, ce n'est pas relié à ça,
pour vous.
M. PERRAULT: Pas nécessairement.
M. PEPIN: Pas nécessairement, mais aussi nécessaire que
Mackenzie King.
UNE VOIX: A peu près.
M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, mais est-ce que c'est bien à la
page 20, sous la rubrique: Effets de la parité sur les acheteurs?
M. PEPIN: C'est à la page 20 du mémoire du conseil du
patronat, M. le Président. Donc, s'il n'y a pas de relation, quant
à eux, M. le Président, entre la hausse des salaires et le volume
des investissements. Je prends acte de la déclaration de M. Perrault;
j'en suis heureux, parce que j'aurais aimé, à ce
moment-là, faire la relation avec d'autres provinces, dont l'Ontario. Je
n'ai qu'un seul autre point, j'aurai à y revenir éventuellement
devant vous, l'égalité a été admise, pour beaucoup
d'employeurs qui sont membres du Conseil du patronat du Québec. Je pense
à l'aluminium, je pense à l'acier, je pense au papier, à
beaucoup d'autres secteurs. Je crois qu'ils défendent une thèse
à laquelle leurs membres mêmes font opposition.
M. LE PRESIDENT: Merci. Maintenant, M. Desjardins.
M. DESJARDINS: Je demanderai au patronat si la hausse des salaires est
un empêchement à l'investissement. Prenez, par exemple, la
construction, si vous allez dix ans en arrière, lorsqu'il y avait besoin
de dix hommes, par exemple, pour remplir une telle tâche.
Maintenant, avec les nouveaux produits et la nouvelle machinerie, cela
prend cinq hommes pour accomplir la même tâche. Alors, ce que cela
prenait en salaires il y a dix ans, c'est la même chose aujourd'hui. Je
peux vous le prouver n'importe quand, pour n'importe quelle industrie, que cela
soit dans la construction domiciliaire ou industrielle. Si cela coûtait
$3. en main-d'oeuvre, il y a dix ans, maintenant, c'est $5, avec les nouveaux
produits comme je vous l'ai dit.
Par exemple, avant on filetait les tuyaux; maintenant, c'est de la
tuyauterie en cuivre et c'est deux fois plus vite. Alors, le gars qui prenait
quatre heures pour faire de la tuyauterie auparavant le fait maintenant en deux
heures. C'est la même chose pour les divisions et pour tout le reste du
matériel qui a été installé dans la
construction.
M. LE PRESIDENT: M. Perrault a quelque chose à répondre
à cela, M. Desjardins.
M. PERRAULT: M. le Président, c'est une affirmation que nous
entendons de temps à autre de différentes personnes. Plusieurs
l'ont reprise, surtout du côté syndical. On nous affirme
régulièrement que la main-d'oeuvre dans la construction a
baissé régulièrement à la suite de toute une
série de choses.
L'étude de l'index de construction que nous rapportons aux
tableaux B et B-2 de notre mémoire prouve effectivement le contraire: la
part des salaires dans le coût total de la construction est restée
sensiblement la même.
M. LE PRESIDENT: M. Perrault, je crois que vous avez à nous faire
part d'un commentaire sur la deuxième tranche. Voulez-vous le faire
immédiatement ou préférez-vous attendre?
M. PERRAULT: S'il vous plaît, M. le Président, si cela vous
convient.
M. LE PRESIDENT: Allez. Cela nous convient.
Champ d'application industriel
M. PERRAULT: M. le Président, la deuxième question dont
nous avons à traiter est peut-être plus complexe que la
première et les intérêts se divisent bien autrement. Si
vous me le permettez, je m'inspirerai largement de notre mémoire
puisqu'il s'agit d'une question assez complexe.
Le document parlementaire 71, déposé à
l'Assemblée nationale lors de la convocation de
cette dernière le 7 août dernier, mentionnait que la clause
numéro 5 du projet de convention collective, clause portant sur le champ
d'application industrielle du décret à venir, n'avait pas fait
l'objet d'une entente globale. Il n'y a pas eu d'entente globale depuis.
Même si cette clause est toujours considérée comme
étant en litige, il n'en reste pas moins que plusieurs des articles qui
la composent ont déjà été paraphés par les
parties en cours des négociations. Ce sont ces ententes,
déjà paraphées, que le présent mémoire
entend remettre en cause, compte tenu du cadre juridique de la loi 290.
La Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction,
sanctionnée en décembre 1968, consacrait dans ce secteur
économique un régime de relations du travail tout à fait
particulier. Elle remplaçait, dans cette industrie, le code du travail
et la Loi des décrets des conventions collectives qui ne s'y appliquent
plus, sauf dans la mesure où la nouvelle loi y fait
référence.
Il n'est pas dans notre intention de porter quelque jugement que ce soit
sur cette loi.
Tout au plus voulons-nous établir nettement que l'intention du
législateur en établissant une loi spécifique des
relations du travail en ce secteur était d'établir pour les
partenaires sociaux du secteur de la construction des règles
particulières de négociation qui tenaient compte des conditions
inhérentes à leur genre d'activité économique.
Quelles que soient ces règles cependant, elles s'insèrent
à l'intérieur d'un cadre juridique bien établi au premier
chapitre de la loi.
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, je ne voudrais pas vous brimer de votre
droit de parole, mais je me demande s'il ne serait pas possible que vous
commentiez votre document il est évident que tous les membres de
la commission l'ont en main que vous commentiez brièvement sur
chacun des sujets que vous trouvez opportun. Je pense que cela pourrait retenir
l'attention des membres de la commission et des principaux
intéressés, beaucoup plus que de le lire.
M. PERRAULT: Je vais le faire autant que possible, M. le
Président. Le document est quand même assez dense. Disons que dans
la loi elle-même le législateur a tenté de préciser
le champ d'application au moyen de toute une série de
définitions. Et cette orientation est confirmée à
l'article 2, chapitre 2, de la loi lorsqu'on énonce qu'elle ne
s'applique qu'aux employeurs et salariés de l'industrie de la cons-
truction. Donc, il semble bien au départ que la loi n'autorise pas les
parties à s'immiscer dans d'autres domaines que ceux qui leur sont
réservés, et il n'aurait pas été possible de faire
autrement sans consulter les tiers.
Maintenant, une étude des ententes déjà
paraphées à l'égard du champ d'application industrielle
indique le contraire, c'est-à-dire qu'il y a dans les articles
paraphés un champ d'application qui est en contradiction flagrante avec
les dispositions de la loi. Je vous réfère évidemment aux
article 5.02 et 5.03-8 des ententes paraphées que je ne lirai pas, mais
qui étendent l'application de la construction à l'entretien,
à la machinerie, à l'équipement et à une foule
d'autres champs qui étaient préalablement exclus.
Nous avons donc dans le cas actuel, M. le Président, d'abord des
objections de principe. C'est qu'une loi conçue pour prévoir des
relations entre certaines parties en fonction d'une économie
particulière engage ces deux parties et elle ne saurait régir les
conditions de travail des tiers d'autres entreprises en dehors du secteur en
question. Quand un secteur prépare des lois, c'est pour lui, ces
lois-là; ce n'est pas pour le voisin, ce n'est pas pour les autres. Cela
ne peut être pour eux que si les autres personnes ont le droit de se
faire entendre et de faire valoir leurs droits lorsque ceux-ci sont
brimés.
Maintenant, nous avons également des objections précises
au champ d'application industrielle projeté et ces objections,
brièvement, sont celles-ci: Cette loi conduirait à une multitude
de conflits en relations industrielles et elle créerait effectivement un
chevauchement de deux régimes où il y aurait une multitude de
conflits et de problèmes qui seraient à l'encon-tre de
l'intérêt tant des travailleurs que des employeurs.
Il est essentiel que chaque entreprise ou service puisse compter,
à l'intérieur de ses propres cadres, sur un personnel
spécialisé et compétent. C'est une question
d'efficacité et de rendement élémentaire. Il serait
inconcevable que l'entreprise doive aller à l'extérieur pour
trouver une certaine qualité de personnes et que ceci lui soit
imposé par une réglementation venant de l'extérieur.
D'ailleurs, si cela se faisait comme certains l'ont fait valoir ce matin
et comme d'autres le feront sûrement valoir par la suite cela
entraînerait au sein des entreprises industrielles des mises à
pied et des gestes qui iraient à l'encontre de conventions collectives
déjà signées avec les syndicats industriels en place.
Il est entendu que le champ d'application in-
dustriel projeté augmenterait les coûts de production
puisque les salaires prévus dans la construction sont
généralement plus élevés que ceux prévus
dans l'industrie manufacturière et de service. Ceci aurait des effets
désastreux sur la position concurrentielle des entreprises du
Québec et sur la possibilité pour le Québec d'attirer
d'autres entreprises. Enfin, les conflits intersyndicaux possibles et le champ
d'application industriel proposé ouvrent la porte à toute une
série de conflits éventuels d'interprétation entre
entrepreneurs et syndicats.
Nous avons donc, M. le Président, formulé certaines
recommandations pour vous aider à ce stade-ci et en fonction de ce
problème bien particulier qui fait partie de la masse.
Considérant la loi 290 et son cadre juridique;
Considérant le champ d'application industriel en partie convenu
par les parties;
Considérant que ce champ d'application dépasse les cadres
du bill 290 et interfère dans les activités des secteurs
industriels et de service;
Considérant que de telles interférences, volontaires ou
pas, son préjudiciables aux secteurs industriels et de service qui ne
sont pas parties à la négociation et conduiraient à de
nombreux conflits dans le domaine des relations industrielles notamment par la
juxtaposition de deux lois fondamentales distinctes;
Nous considérons que la seule façon, sur courte
période, de régler cette question est de faire en sorte que la
clause actuelle relative au champ d'application industriel soit rayée
comme telle de la convention collective ou du décret à venir, et
que la convention collective ou que le décret à venir ne comporte
dans cette question du champ d'application industriel qu'une
référence globale aux chapitres I et II de la Loi sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction.
Il appartiendrait alors au ministère du Travail, en vertu de
l'article 58, chapitre 12, de ladite loi, d'émettre une
réglementation pertinente avec les objectifs recherchés par la
loi.
Cette réglementation, émise après entente des
parties au bill 290, des tiers, et du Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, permettrait de résoudre une question d'une telle
importance.
Il est clair qu'une telle orientation impliquerait, à compter de
la signature de la convention collective, une réglementation
générale transitoire. Cette réglementation transitoire ne
devrait également être émise qu'après entente des
parties, des tiers et du Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre.
Nous considérons, cependant, que même si cette orientation
permet, sur courte période, de résoudre les problèmes que
soulevé actuellement la détermination du champ d'application
industriel, certaines difficultés n'en continueront pas moins à
se présenter.
Il importe donc, à plus ou moins brève
échéance, d'apporter des amendements majeurs à la loi 290,
de telle sorte que cette loi puisse être viable et atteindre ses
objectifs sans risque d'interférence dans les activités des
secteurs industriels et de service.
Ces amendements devront être réalisés après
consultation véritable de tous ceux qui peuvent être
touchés de près ou de loin par cette loi.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault, de ces explications.
M. LAPORTE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Les membres de la commission ont évidemment le
document et l'étudieront très sérieusement avec les
autres. Avec la permission de MM. Bellefeuille, Du-mesnil et Jolin, je
permettrais à ce moment-ci à l'Hydro-Québec,
représentée par M. Jacques Durocher, de nous présenter
immédiatement son mémoire, avec ses commentaires; c'est
apparemment assez bref. Si j'ai donc la permission de MM. Bellefeuille,
Dumesnil et Jolin, ce sera ensuite M. Marchessault, qui doit partir pour des
raisons très particulières.
M. LABERGE: Je n'ai pas voulu interrompre M. Perrault dans le
deuxième mémoire du Conseil du patronat, traitant du champ
d'application, mais vous savez qu'il y a une commission, la commission Mirault,
qui siège justement pour essayer de trouver une solution à ce
problème du champ d'application. Ma question: Est-ce que la commission
parlementaire entend décider de cette question ou si la commission va
être chargée de continuer ses travaux?
M. LAPORTE: La commission parlementaire, M. le Président, si je
peux m'autoriser la permission de parler en son nom, va entendre des gens comme
M. Perrault, dans quelques jours, des gens comme vous, M. Pepin, et d'autres
représentants patronaux et syndicaux. A ce moment-là, nous aurons
certainement des commentaires à faire quant à la mission de M.
Mirault. Jusqu'à nouvel ordre, ce travail continue et nous avons ferme
espoir qu'avec la collaboration de tout le monde le travail pourra être
conduit à bonne fin. Les mem-
bres de la commission ou l'un quelconque d'entre vous ne doivent pas
tenir pour acquis que le problème est réglé. Vous
êtes bien autorisés à en discuter devant nous.
M. LABERGE: Je voulais tout simplement mentionner qu'en ce qui concerne
les travaux de la commission, nous n'avons absolument rien
préparé sur cette question du champ d'application.
M. LAPORTE: Disons qu'il serait fort intéressant que les sept
parties en cause nous disent la même chose, parce qu'elles ont
accepté la mission Mirault. Mais, si elles ont une autre attitude
à exprimer, elles sont bien libres de le faire.
M. LE PRESIDENT: Alors, je permettrai donc à
l'Hydro-Québec de présenter immédiatement son
mémoire et, par la suite, ce sera M. Marchessault.
Hydro-Québec
M. BOULANGER: Je voudrais, tout d'abord, m'identifier. Mon nom est Jean
Boulanger, je suis avocat à l'Hydro-Québec et directeur du
contentieux. Sont avec moi, ici présents, pour répondre aux
questions des membres: M. Alexandre Beauvais, directeur général
du personnel; M. Jacques Durocher, directeur des relations syndicales, et M.
Antoine Rousseau, directeur, coordination et contrôle, à la
direction générale du génie.
Disons, en premier lieu, que nos représentations cet
après-midi couvriront principalement le point du champ d'application
industrielle, qui cause à l'Hydro-Québec le plus de
difficultés. Dans notre mémoire, nous avons expliqué ce
qu'était l'Hydro-Québec. Nous avons souligné
principalement que nous étions avant tout, non pas une entreprise de
construction, mais une entreprise chargée d'assurer un service aux
citoyens de cette province. Nous utilisons à cette fin environ 12,000
employés permanents et aussi, au besoin, nous avons des employés
de la construction pour nos grands chantiers.
Notre entreprise est déjà fortement syndicalisée.
Nous avons des conventions collectives de signées ou en voie de
négociation avec des syndicats tant de la CSN que de la FTQ. Ces
différentes conventions ou négociations sont plus amplement
décrites dans notre mémoire. Nous mentionnons, quant à ce
problème de la description de l'application du champ territorial, que
nous avons déjà eu un problème similaire lors de
l'application des décrets. En 1963, l'Hydro-
Québec avait présenté un mémoire au Conseil
supérieur du travail et, présentement, nous sommes
exemptés de l'application des décrets par mention
spécifique dans chacun de ces décrets.
Notre idée du bill 290, c'est qu'il constitue nous nous
référons ici aux notes explicatives du bill 290 un code du
travail particulier pour les employés et les employeurs de l'industrie
de la construction. Dans la mesure où il empiète sur d'autres
secteurs de l'industrie ou des services publics ou parapublics, il
dépasse le champ qui avait été prévu par le
législateur.
A l'Hydro-Québec, les activités de construction comme
telles ne constituent qu'un moyen d'atteindre nos objectifs qui sont de fournir
de l'énergie électrique.
Je voudrais distinguer principalement les activités de
construction proprement dites de l'Hydro-Québec et les activités
d'exploitation. Dans les activités de construction, nous
bénéficions déjà par la loi elle-même
et je réfère les membres à l'article 69 d'une
exception pour nos chantiers actuels. Notre mémoire donne les raisons
qui justifient cette exception et nous pensons qu'elle devrait être
maintenue et même qu'elle devrait inclure les chantiers futurs de
l'Hydro-Québec, peut-être, qui sait, celui de la baie James.
IL y a bien, actuellement, dans le bill, une exception à
l'article 26 qui permet, pour des travaux d'envergure de l'ordre de $25
millions et plus, de faire des ententes particulières. Mais, cette
exception nous paraît un peu illusoire, parce que, d'abord, il nous faut
le consentement de toutes les parties en cause tant patronales,
syndicales que le propriétaire lui-même que les conditions
ne seront déterminées que s'il y a lieu et, enfin, qu'à
défaut d'entente les discussions ne peuvent aller au-delà du
stade de la conciliation.
J'en viens plus particulièrement aux activités
d'exploitation. C'est ici que nous voudrions expliquer aux membres les
difficultés réelles que nous affrontons.
Le bill 290 s'applique aux employeurs et aux salariés de
l'industrie de la construction. Il ne s'applique pas, et c'est une exception
contenue à l'article 2, aux salariés permanents d'entretien
embauchés directement par un employeur autre qu'un employeur
professionnel. Nous pensons, d'après les objectifs que nous poursuivons,
que nous ne sommes pas un employeur professionnel, donc que nos employés
salariés permanents, d'après l'état actuel de la loi, ne
sont pas visés par la loi.
Or, ces employés s'identifient principale-
ment à nos employés de métier, au nombre d'environ
4,300, auxquels on peut ajouter aussi quelques techniciens et certains
employés de bureau. Ces employés exécutent pour
l'Hydro-Québec, dans sa fonction d'exploitation, des tâches
variées, toutes les tâches qui sont requises pour maintenir en bon
état nos centrales, nos postes de transformation, nos réseaux et
aussi pour assurer un service constant aux abonnés.
Ces tâches sont variées. Je vous laisse le soin d'en
imaginer. Quelques-unes sont citées dans notre rapport. Elles sont
souvent entremêlées et difficiles à distinguer. C'est
ainsi, par exemple, que des équipes affectées aux lignes
souterraines peuvent être appelées indifféremment à
faire de l'entretien, du remplacement et aussi de l'installation de nouveaux
câbles souterrains. Il s'agit, évidemment, d'un travail
extrêmement spécialisé qui demande des gens qui ont de
l'expérience. Toutes ces activités, que ce soient des
activités d'entretien ou des activités de reconstruction ou de
construction, sont confiées au personnel permanent d'exploitation de
1'Hydro-Québec, déjà lié avec cette dernière
par des conventions collectives de travail qui leur garantissent des droits
chèrement acquis.
L'application du bill, si l'on doit strictement isoler les fonctions de
construction des fonctions d'entretien, fait en sorte que les mêmes
employés pourront être régis par deux régimes de
conditions de travail entièrement différents: celui des
conventions collectives et celui du décret de la construction.
On peut même imaginer qu'un ou plusieurs employés pourront,
dans la même journée, passer d'une tâche à l'autre et
être régis, le matin, par leur convention collective de travail
et, l'après-midi, par le décret de la construction.
Nous croyons qu'il s'agit là d'une situation difficile qui
devrait être évitée et que l'on devrait empêcher que
de tels imbroglios puissent causer des injustices aux employés de
1'Hydro-Québec.
On a mentionné tantôt l'extension donnée dans les
négociations en cours par l'article 5.01 ou 5.02. Si on lit cet article,
on verra toutes les implications qu'il peut avoir pour l'Hydro-Québec
à l'égard de ses employés d'exploitation. Il s'agit, en
fait, de deux régimes de relations de travail destinés à
répondre aux besoins particuliers d'industries de types
différents. Les conditions qui en résultent sont
nécessairement différentes.
Ainsi, par exemple, dans le secteur hydroélectrique, comme aussi
dans le secteur in- dustriel, le facteur de la sécurité d'emploi
joue un rôle primordial dont l'importance se concrétise par la
proportion considérable qui est attribuée aux
bénéfices marginaux. Chez nous, les bénéfices
marginaux représentent une rémunération additionnelle
d'environ 30%.
Par contre, dans la construction, le caractère saisonnier des
emplois offerts est compensé par des taux de salaires horaires plus
élevés.
Il y a ils sont énumérés dans le rapport
un grand nombre d'autres points qui sont différents dans nos
conventions collectives de travail et dans les décrets de la
construction. Nous pensons que l'on devrait éviter les conflits de
juridiction possibles et que l'on devrait conserver aux employés qui
sont déjà bien protégés, les employés de
l'exploitation, le mécanisme de relations de travail qu'ils ont
présentement.
Nous suggérons tout simplement de faire comme on a fait pour les
décrets, d'exclure l'Hydro-Québec de l'application du champ
industriel de l'industrie de la construction. D'ailleurs, cela serait conforme
à l'attitude déjà prise par le gouvernement lui-même
à l'égard des fonctionnaires et des ouvriers de la fonction
publique, ce qui a été fait par un amendement à la Loi de
la Fonction publique en 1969.
Il serait possible également, si on ne veut pas aller aussi loin
que cela, de limiter les modifications pour protéger simplement les
employés de l'exploitation eux-mêmes et non tous les
employés de l'Hydro-Québec.
C'étaient là les principaux points que nous voulions vous
expliquer cet après-midi.
M. LAPORTE: Est-ce qu'on peut s'imaginer que le point de vue que vous
exprimez est analogue à celui que la ville de Montréal nous a
présenté ce matin?
M. BOULANGER: Je n'ai malheureusement pas pu entendre les
représentations de la ville de Montréal, mais je présume,
ayant déjà travaillé à la ville de Montréal,
que la situation comporte de grandes analogies.
M. LAPORTE: La ville de Montréal a suggéré à
cette commission que les employés qui travaillent pour la ville de
Montréal, à l'entretien et même à la construction,
qui sont déjà syndiqués ailleurs, ne soient pas partie de
l'unité de négociation.
M. BOULANGER: Je pense que ce serait une très bonne solution au
problème.
M. LAPORTE: Je demande si c'est la même chose.
M. BOULANGER: C'est à peu près dans le même
sens.
M. LAPORTE: Parce qu'on pourrait facilement me faire tirer des
conclusions, vous savez.
M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Boulanger. Pour ne pas faire
d'exception, évidemment, s'il y a des brèves questions à
poser, je les permettrai. S'il n'y a pas de questions de la part des membres de
la commission, je remercie M. Boulanger.
M. LAPORTE: Merci, M. Boulanger.
M. LE PRESIDENT: J'invite M. Marches-sault à nous faire son bref
exposé.
M. Desjardins, auparavant, a une question à poser.
M. DESJARDINS: A entendre toutes les parties, présentement
nous avons eu la ville de Montréal; après cela, nous avons eu le
représentant de la compagnie Catalytic et de la Canadian Vickers, nous
avons eu, après, le mot « machinerie » qui veut dire
beaucoup de choses, tel que les machines à papier que l'on veut exclure
de la construction; maintenant, nous avons l'Hydro-Québec nous
pourrions demander au ministère du Travail: Où nos ouvriers se
recycleront-ils pour aller travailler quelque part? Ce serait peut-être
une question...
M. LAPORTE: Vous semblez oublier, monsieur, que ce sont des
représentants patronaux. Bientôt, nous entendrons la FTQ et la
CSN.
M. DESJARDINS: Très bien, mais, comme c'est là,
étant donné qu'il y a beaucoup de préfabrication qui se
fait en usine, il ne restera pas grand-chose pour les ouvriers de la
construction.
M. LAPORTE: Je vous ai connu moins nerveux que cela. Je ne sais pas ce
que vous avez aujourd'hui.
M. DESJARDINS: C'est parce que j'ai part à la décision,
justement.
M. LE PRESIDENT: Soyez sans crainte, M. Desjardins. M. Marchessault.
Alcan, Melchers, etc.
M. MARCHESSAULT: Jacques Marchessault. Je représente le groupe
Alcan, Compagnie Aluminium du Canada, les Distilleries Melchers,
Cresswell-Pomeroy, Sido, Beaconing Optical, Klockner-Moeller, F.P.E. &
Marlou les six dernières compagnies font partie d'un groupe de
manufacturiers de la ville de Granby la compagnie Lines Brothers de
Waterloo, qui fait partie du même comté est mieux connue du
député de Shefford que je vois ici et qui reconnaîtra
sûrement les gens du patelin la compagnie Alva Craft Limited et
les compagnies de transport suivantes: Direct Motor Express, la compagnie de
transport Richard et l'Association provinciale des propriétaires de
camions-citernes.
Malheureusement, la convocation de M. Jean Boily, qui nous est
arrivée très tardivement je ne lui en fais pas de reproche
ne nous invitait pas à présenter de mémoire. J'ai
ici une copie du télégramme. Si on veut bien m'en dispenser, je
pourrai produire par la suite un mémoire en bonne et due forme pour
compléter votre dossier.
M. LE PRESIDENT: Dans quel délai pouvez-vous produire un
mémoire?
M. MARCHESSAULT: Je pourrai le faire d'ici la fin de semaine.
M. LE PRESIDENT: D'ici la fin de semaine, très bien. Vous pouvez
procéder.
M. MARCHESSAULT: Parlons d'abord de l'Alcan qui, avec ses subsidiaires,
compte quinze usines au Québec et emploie 10,000 employés, dont
environ 3,500 sont uniquement préposés à l'entretien. Il
faut distinguer dans nos remarques les travaux accessoires des travaux de la
construction. Alcan ne fait pas de construction majeure, mais participe dans
une quantité de travaux qui sont connexes. Par exemple, vous avez dans
le champ d'application industrielle certains travaux de décrits qui ne
sont pas strictement de la construction, mais qui sont nécessaires chez
Alcan pour parer à des bris, pour maintenir les constructions ou pour
assurer le bon fonctionnement des usines.
A Arvida, il existe une usine d'un mille et demi de long et de trois
quarts de mille de large. Ce qui peut en surprendre quelques-uns et qui
nécessite un système de tuyauterie, de transport
d'énergie, un système de routes, de transport de matériaux
de route, un système de voies ferrées et d'entretien de voies
ferrées, de transport de minerai à l'intérieur des
usi-
nes pour transformation. Ceci implique évidemment l'entretien de
toute la machinerie et de tout l'équipement requis aux diverses phases
des opérations de cette compagnie.
Pour tous ces travaux, l'Alcan dispose depuis nombre d'années
d'un personnel régulier et permanent, qui est spécialement
entraîné et qualifié. D'ailleurs, dans ces fonctions, les
employés sont déjà assujettis à des conventions
collectives qui leur assurent la sécurité d'emploi.
M. LE PRESIDENT: Silence, s'il vous plaît, pour permettre à
M. Marchessault de nous expliquer son point de vue.
M. MARCHESSAULT: Je disais donc que ces employés sont
déjà assurés de leur sécurité d'emploi et
que l'employeur est obligé de faire exécuter ces travaux par ses
propres employés plutôt que de les confier à des
sous-traitants. C'est là où j'expliquerai tout à l'heure
qu'il nous arrive un problème majeur dans le cas de cette cliente.
Au risque d'être fastidieux, qu'il me soit permis de vous
référer à la page 3 du document très court que j'ai
eu le temps de vous mettre à la poste et qui énumère en
somme certains travaux qui sont faits tous les jours par 3,500 employés
de l'Alcan. Ceci inclut des machinistes, des tôliers, des ferblantiers,
des soudeurs, des nettoyeurs, des ajusteurs, des outilleurs.
L'énumération apparaît dans le court fascicule que j'ai
déjà envoyé à M. Jean Boily. Maintenant, lorsqu'on
parle d'entretien de chemins de fer, comment pouvons-nous imaginer qu'on
pourrait se référer aux métiers de la construction pour
aller y chercher les employés qui seraient qualifiés pour faire
ces travaux d'entretien?
Ce qui nous concerne ensuite spécifiquement, c'est l'entretien
à l'intérieur des usines de l'Alcan où, dans 90% des cas,
l'employeur doit se soucier du procédé continu. Ce sont des
opérations qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d'arrêt.
Il faudra nécessairement prévoir des exclusions. Il faudrait y
penser parce qu'à notre avis, ce serait punir indirectement cette
industrie que de lui imposer de faire appel aux travailleurs de la construction
pour effectuer ces travaux. En effet, quand, dans la majorité des cas,
les problèmes suivants se poseraient.
D'abord, la non-disponibilité de la main-d'oeuvre requise, le
manque d'expérience particulier pour une foule de tâches qui
doivent être accomplies sur le champ par des hommes de métier et,
enfin, le dommage important qui pour- rait résulter d'un arrêt
inévitable de la production.
La paix industrielle, on en a déjà parlé, mais
permettez-moi de souligner que l'Alcan, dans ses quinze usines, a
déjà subi les pressions du syndicat qui a fortement
insisté pour que, précisément, tous les travaux
d'entretien soient faits exclusivement par les employés syndiqués
de l'Alcan. La compagnie Alcan s'est même engagée à ne pas
traiter avec des sous-traitants et de faire faire ses travaux à
l'intérieur de ses usines, après une série d'arrêts
de travail dont quelques-uns d'entre vous sont sûrement au courant.
Maintenant, à titre d'exemple, la réparation de supports
de cuve d'électrolyse est un cas typique. Depuis cinq ans, ces travaux
sont de plus en plus effectués à l'intérieur de l'usine.
D'ici trois mois, ils seront tous réintégrés pour
être faits par les propres employés de l'Alcan. La compagnie ne
pourrait évidemment pas céder, en même temps, aux pressions
de l'intérieur, de la part des gens syndiqués sur place, et de
l'extérieur, à ceux qui viendront du domaine de la
construction.
Tout le monde est d'accord sur le principe du bill 290, si on veut par
là assurer la sécurité d'emploi. Il serait dommage,
cependant, qu'une loi précisément pour atteindre cette fin
réussisse à assurer la sécurité d'un groupe
d'employés au détriment d'un autre groupe qui a quand même,
par ses conventions collectives; négociées depuis moult
années, des droits chèrement acquis, comme on l'a
déjà souligné.
En terminant, j'aimerais souligner le problème de certaines
définitions. La disparition de la définition de l'employeur
professionnel, par exemple, pourrait créer à l'intérieur
de l'usine certains problèmes majeurs. Vous seriez peut-être
surpris d'apprendre que, à l'Alcan, il y a des milliers de carreaux de
fenêtres qui doivent être remplacés par année soit
par vétusté, par bris ou par contamination. Peut-on imaginer quel
problème cela poserait que de faire appel à des employés
de l'extérieur chaque fois qu'il s'agit de poser un carreau, de changer
une serrure ou de faire l'assouplissement d'une porte? Cela semble des
détails, mais si on les multiplie à l'infini, comme c'est le cas
pour les quinze usines que j'ai l'honneur de représenter, on peut
facilement imaginer l'ampleur du problème.
L'usine d'Arvida qui est la plus grosse usine de réduction
d'aluminium au monde, est quand même située dans une petite ville.
Il serait impossible de recruter de l'extérieur une main-d'oeuvre
qualifiée pour satisfaire à des besoins et à des exigences
aussi divers.
Si on pouvait s'arrêter une seconde sur la définition de
salariés permanents d'entretien, n'est-il pas d'abord essentiel de faire
une distinction entre la fonction elle-même et l'employé? La
fonction, elle, est permanente mais l'employé ne l'est pas
nécessairement et cela est typique au temps des vacances. Il faut
imaginer que durant la période des vacances à l'Alcan, on doit
faire la recherche de substituts dont le nombre peut atteindre de 500 à
600 seulement pour Arvida. Multipliez avec les autres usines, on peut donc,
facilement en arriver à un nombre dépassant 3,000. Chaque
été, ces employés savent à l'avance qu'ils ne sont
pas permanents. Ils agissent en qualité de substituts durant la
période de vacances.
Il serait fastidieux, comme je l'ai déjà dit,
d'énumérer et de se replanter dans toutes les descriptions qui
apparaissent au champ d'application industrielle. Mais il me semble que,
peut-être, une solution que j'ose humblement suggérer pourrait
être étudiée aux termes de la loi 290, au chapitre 45, si
en regardant le champ d'application, au paragraphe deuxième, on
éliminait un mot et on en ajoutait un autre pour y lire en somme, au
lieu de :« La présente loi s'applique aux employeurs et aux
salariés de l'industrie de la construction. » Comme les
employés de la construction sont déjà définis dans
cette loi au sous-paragraphe « r », ne pourrait-on pas dire,
messieurs: « La présente loi s'applique aux employeurs
professionnels et à leurs salariés?
Je crois qu'ainsi on pourrait éviter de confondre ce que mon
prédécesseur appelait une codification juxtaposée au code
du travail.
Je répète, M. Bossé; le texte que je
suggérerais bien humblement se lirait simplement comme suit: La
présente loi s'applique aux employeurs professionnels et à leurs
salariés. Si vous lisez l'article 2, c'est ce qu'il veut dire en somme,
mais il le dit de façon négative: « La présente loi
s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la
construction ils sont déjà définis dans la loi
toutefois, elle ne s'applique pas aux exploitations agricoles ni aux
salariés permanents d'entretien embauchés directement par un
employeur autre qu'un employeur professionnel.» Or, comme les mots
« employeur professionnel » sont disparus des bills 38, 49 et 51,
de façon à éviter toute possibilité de mêler
et de juxtaposer deux lois qui pourraient gêner, dans leur application,
les relations ouvrières de toute une province, je suggère
respectueusement que nous pourrions avoir des documents additionnels à
déposer, si on voulait nous entendre de nouveau. Mais, pour le moment,
nous avons la sugges- tion ci-haut énoncée, que nous vous
soumettons respectueusement.
Pour ce qui est des autres employeurs que j'ai l'honneur de
représenter, je leur fais toutes les remarques que j'ai faites pour
Alcan au sujet des travaux d'entretien. Il s'agit des compagnies que j'ai
énumérées dans le secteur des Cantons de l'Est, le
comté de Shefford. Pour ce qui est des compagnies de transport que je
représente, celles-ci s'inquiètent de l'aspect juridictionnel en
ce qui concerne deux choses: d'abord, l'entretien et la réparation des
machineries évidemment, mais également cet article qui est
décrit au paragraphe 27, je crois, relativement au transport de
matériaux.
Une des compagnies, la compagnie de transport Richard, qui
détient un permis de la Régie des transports du Québec, a
spécialisé son transport de façon à donner un
service de tout point à tout point dans la province de Québec,
pour les matériaux de construction. On peut voir facilement comment le
syndicat de cette compagnie viendrait immédiatement en conflit pour un
cas d'espèce, si on n'excluait pas de son domaine les employés de
la construction.
Je terminerai en disant que la distillerie Melchers m'a souligné
l'importance d'avoir son propre personnel, qui constitue 40% de sa
main-d'oeuvre totale, qui est tout à fait spécialisé pour
une machinerie très spéciale et qui est sujet aux restrictions
d'accise que vous pouvez imaginer, parce que tout le monde ne peut
pénétrer sur les lieux. Les difficultés seraient
multipliées dans son cas. Je déposerai au nom de Melchers le
document que je viens de recevoir seulement hier soir, pour compléter le
mémoire que je fais pour mes gens. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Marchessault. J'inviterai
maintenant, avec la permission de MM. Bellefeuille, Dumesnil et Jolin, M.
Brunelle, qui nous promet d'être très bref et qui doit partir,
malheureusement, immédiatement.
M. BELLEFEUILLE: M. le Président, est-ce que je peux avoir la
parole?
M. LE PRESIDENT: Certainement.
M. BELLEFEUILLE: Gilles Bellefeuille. Ce que j'ai à
présenter ne devrait pas prendre plus de dix minutes et j'aimerais bien
le présenter maintenant, s'il y avait moyen.
M. LE PRESIDENT: Prenez vos dix minutes immédiatement, M.
Bellefeuille.
M. BELLEFEUILLE: Merci beaucoup. Je suis Gilles Bellefeuille, le
porte-parole de l'ensemble des industries pétrolières et
pétrochimiques de Montréal-Est.
M. LE PRESIDENT: M. Bellefeuille, vous n'avez pas de mémoire.
Est-ce que vous entendez en produire un?
M. BELLEFEUILLE: Je m'excuse, nous n'avons pas de mémoire
présentement, mais nous pouvons en produire un d'ici une semaine. Nous
allons vous le faire parvenir dans les plus brefs délais.
M. LE PRESIDENT: Très bien.
Industries pétrolières et
pétrochimiques
M. BELLEFEUILLE: ... L'industrie du pétrole et l'industrie
pétrochimique de la région de Montréal a
déjà fait des représentations auprès des
entrepreneurs et des associations d'employeurs dans le but de faire
disparaître certaines dispositions que nous considérons
discriminatoires à son égard et qui sont contenues dans les
différentes conventions collectives et dans les décrets qui
régissent l'industrie de la construction.
Notre point de vue peut se résumer de la façon suivante.
Nous ne sommes pas partie à la négociation dans l'industrie de la
construction, bien que nous soyons des donneurs d'ouvrage et que nous soyons
affectés en tant que donneurs d'ouvrage par les dispositions des
décrets et des conventions collectives.
Deuxièmement, nous sommes à la merci des ententes conclues
à l'unique table des négociations où les deux parties
établissent des conditions particulières à certaines
catégories de clients.
Troisièmement, les conventions collectives qui régissent
différents métiers de la construction, par exemple les
électriciens, les tuyauteurs, les soudeurs, etc., contiennent des
dispositions spécifiques aux travaux exécutés dans les
« raffineries, usines chimiques, métallurgiques,
sidérurgiques et les moulins à papier ». Ces dispositions
spécifiques ont trait par exemple au temps de déplacement. De
façon générale, dans la région de Montréal
on dit qu'il n'y a aucune obligation pour l'employeur de payer le temps de
déplacement dans un rayon de 25 milles de la ville de Montréal,
mais à l'exception des raffineries, usines chimiques, etc., ce que j'ai
énuméré précédemment.
Ces dispositions ont aussi trait à la prime de temps
supplémentaire. En temps supplé- mentaire on paie
généralement la somme de $0.15 l'heure. Dans l'industrie
pétrolière, pétrochimique, etc., c'est 15%. Il y a donc
une différence considérable entre $0.15 l'heure et les 15% qui
peuvent souvent équivaloir à $0.60 ou $0.70 l'heure. Il y a aussi
les dispositions que nous considérons discriminatoires pour ce qui est
de la prime... Je m'excuse, ce que je viens d'énumérer, les $0.15
et les 15% s'appliquent a la prime d'équipe. Pour ce qui est de la prime
de temps supplémentaire, les deux premières heures sont
généralement payées à temps et demi et
l'excédent est payé à temps double dans le cas de
l'industrie pétrolière et pétrochimique. Encore une fois
pour les industries qui y sont associées dans les décrets, le
temps est toujours payé à temps double à partir de la
première heure.
En plus de cette convention collective, certains décrets relatifs
à l'industrie et aux métiers de la construction transposent ces
mêmes dispositions que nous jugeons toujours discriminatoires.
Enfin, nous avons vu tout récemment dans le document
parlementaire numéro 70, qui s'est appuyé, je crois, sur le
même principe, une réglementation particulière qui
s'applique aux délégués syndicaux dans l'industrie du
pétrole. Cette recommandation dit que, de façon
générale, dans n'importe quelle industrie, les
délégués syndicaux doivent être choisis parmi les
employés de l'employeur, sauf dans l'industrie pétrolière,
pétrochimique etc., où ces délégués
syndicaux peuvent être choisis parmi des gens qui ne sont pas
nécessairement des employés des employeurs.
Quoique nous comprenions qu'il est raisonnable que des primes soient
payées dans certains cas, il nous est difficile d'admettre que les
employés de la construction soient traités de façon
différente à cause du genre d'industrie où ils doivent
travailler. En ce qui nous concerne, nous ne voyons aucune explication logique
et raisonnable pour ceci. Nous soumettons respectueusement à la
commission la recommandation que ces dispositions que nous jugeons
discriminatoires soient retirées des décrets, du document
parlementaire et du bill 38 et que le gouvernement déclare inacceptables
les dispositions de conventions collectives particulières qui traitent
les tierces parties de façon discriminatoire. Ce sont les remarques que
j'avais à vous adresser cet après-midi. Je vous remercie
beaucoup.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie de votre brièveté. Pour
ne pas faire d'exception, y a-t-il des membres de cette commission
qui désirent poser des questions? Sinon, je vous remercie et
j'invite maintenant M. Brunelle à nous communiquer ses commentaires.
Dirigeants d'entreprises
M. BRUNELLE: Jean Brunelle, Centre des dirigeants d'entreprise.
M. le Président, à cause de son envergure, il est
évident que tout ce qui se passe dans l'industrie de la construction
affecte inévitablement tout l'ensemble de l'économie. Nous sommes
un peu portés à croire que l'industrie de la construction
approche si elle ne l'a pas atteint ce que les Anglais appellent
le point de « diminishing return ». Le danger est grave
étant donné le nombre de personnes qui y travaillent. Il est
évident que tout taux de chômage important dans la construction
devient une responsabilité sociale et affecte l'ensemble de la
communauté.
Mais, voici qu'à la faveur des dernières
négociations l'industrie de la construction a pris des décisions
qui affectent, comme on le sait maintenant, l'ensemble du monde patronal et la
province en général.
On a mentionné déjà la parité salariale. Je
pense que les économistes notre mémoire le mentionne
qui sont en faveur de la parité salariale prônent
également, d'ordinaire, l'application d'un mécanisme d'aide aux
entreprises qui permettrait aux plus faibles d'entre elles qui seraient
affectées outre mesure par une politique de parité de recevoir
des subventions afin de pouvoir passer le cap et de s'adapter à des
conditions nouvelles.
Quant au champ d'application industriel, je n'ai pas l'intention
d'insister, si ce n'est pour appuyer entièrement le mémoire qui a
été présenté sur le sujet par le Conseil du
patronat. Nous avons eu souvent l'occasion, dans le passé, de protester
contre les projets d'extension juridique de conventions collectives. Je pense
que le même problème se pose en principe et nous sommes totalement
opposés à cette mesure.
Selon le CDE, M. le Président, il semble bien que le bill 290
lui-même devra être modifié en ce qui concerne l'extension
juridique. Premièrement, au paragraphe r) de l'article 1, je pense qu'il
faudrait définir « salariés d'entretien permanents. »
Je connais nombre d'entreprises qui se font un devoir de maintenir au travail
douze mois par année des employés qu'elles pourraient limoger. Il
est évident, comme on l'a déjà souligné, que les
conventions particulières contredisent dans la plupart des cas
l'extension du champ d'application.
Nous suggérons également, à l'article 2, une
modification selon laquelle il devrait être reformulé de
façon à préciser que le bill s'applique uniquement et
exclusivement aux employeurs professionnels. Dans un autre domaine, nous
proposons que les organismes publics: municipalités, corporations
publiques et parapubliques, soient soustraits à l'application du bill
290. L'application se traduirait inévitablement par des augmentations de
coût considérables et le Québec, étant taxé
comme il l'est, nous pensons que c'est un luxe inutile qu'il ne peut pas se
payer.
Dans un autre domaine, nous pensons qu'il existe à la table des
négociations un certain déséquilibre. La partie patronale,
évidemment, a toute sa stratégie, mais il arrive que les cinq
associations patronales engagées dans le conflit sont limitées
dans leurs intérêts au domaine de la construction. Or, nous venons
de constater que leurs gestes ou leurs décisions sont en voie d'engager
l'ensemble des patrons du Québec, c'est-à-dire la population
elle-même. Nous pensons qu'il faut rétablir là un
équilibre qui manque. Pour rétablir un équilibre patronal
d'ensemble, nous ne voyons pas d'autre moyen nous nous excusons de le
proposer nous-mêmes devant le Conseil du patronat, mais je pense que nous
sommes justifiés de le faire que de demander que le Conseil du
patronat soit invité à siéger à la table des
négociations à titre d'observateur privilégié. Nous
ne suggérons pas qu'il remplace les parties dans la négociation,
mais qu'il représente là les intérêts de l'ensemble
du monde patronal.
Il faut donc, à nos yeux, éviter de traiter le conflit de
la construction comme un phénomène isolé. Il faut le
considérer dans l'ensemble de la situation socio-économique du
Québec qui peut être affectée dangereusement si cet
équilibre-là n'est pas assuré. Nous pensons
également que le CCTM, qui est un organisme paritaire, pourrait
être accommodé par la formation d'une commission spéciale
et invité à régler le conflit de la construction.
Evidemment, on peut songer ce qui arrive souvent à une
intervention de l'Etat qui, d'autorité, réglerait le
problème. Je pense qu'il se pose ici un problème de concertation
extrêmement grave.
L'organisme que je représente pense qu'il faut faire aux gens du
milieu une confiance minimale, quitte, s'il le faut, à leur lancer des
défis. Les négociations ont déjà duré un an
et demi et nous ne sommes pas près, semble-t-il, d'une solution. Nous
avons l'impression qu'en créant, au sein du CCTM, une commission qui
rassemblerait tous les éléments principaux, tous les gens
intéressés: Etat, syndicats et patro-
nat, dans un même organisme, on aurait la possibilité de
mettre sur la table les véritables problèmes et de les
régler une fois pour toutes. Même s'il fallait un délai un
peu prolongé, nous avons le sentiment très net que ce serait plus
profitable que de procéder par l'intervention de l'autorité.
Pour mémoire, je tiens à souligner ici, au nom da
l'organisme que je représente, une vieille marotte...
M. LAPORTE: Si je peux me le permettre, M. Brunelle, aimez-vous mieux
terminer avant qu'on vous pose des questions? Terminez donc et j'aurai quelques
questions après.
M. BRUNELLE: J'avais simplement l'intention, M. le ministre, de dire
que, dans l'absence d'un conseil de planification, nous assistons au
Québec à une confusion des voix et à
l'impossibilité, semble-t-il, d'établir un consensus entre les
corps intermédiaires. Nous faisons la recommandation que le conseil de
planification soit créé le plus tôt possible.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Je crois que le ministre a quelques
questions à poser.
M. LAPORTE: Vous suggérez la création d'autres organismes
où l'on pourrait plus facilement s'entendre. Vous dites que, même
là, cela pourrait prendre un certain temps. Est-ce que vous avez une
opinion sur les délais que l'on pourrait accorder avant qu'une autre
autorité intervienne ou si l'on devrait laisser le climat se
détériorer comme c'était le cas récemment?
M. BRUNELLE: Est-ce que le statu quo, M. le ministre, ne pourrait pas
être prolongé pour une période, disons, de six mois et les
parties fortement invitées à mettre les véritables
problèmes sur la table? Vous savez comment les négociations se
passent. Siégeant ensemble, peut-être qu'il serait plus facile
pour elles, collectivement, d'arriver à une entente qui, actuellement,
n'est pas près de se produire.
M. LAPORTE: D'accord. Les humains étant ce qu'ils sont, avec
toute l'amitié que je peux avoir pour tout le monde, j'imagine que l'on
prolonge de six mois et que, pendant que la négociation continue,
certains avantages nouveaux ne sont pas accordés. Est-ce que vous croyez
qu'il n'y a pas des parties qui auraient intérêt à ce que
la discussion dure?
M, BRUNELLE: Evidemment, vous posez un problème. Je pense qu'il
faudrait les envisager à la table des négociations. Est-ce que
l'on pourrait procéder à des modifications en cours de route? Je
pense que c'est le groupe lui-même qui pourrait apporter des
réponses à ces difficultés-là.
M. LAPORTE: M. Brunelle, ce sera ma dernière question, ou
suggestion. J'avais demandé je vais le faire disons plus
officiellement à la fin de notre étude aux sept parties en
cause actuellement, vu la difficulté de la négociation, que
chacune suggère à cette commission quels pourraient être,
à son avis, les amendements à apporter au système pour que
l'on puisse atteindre des résultats meilleurs plus rapidement. Il serait
peut-être intéressant que les gens que vous représentez
nous suggèrent dans un mémoire, des amendements, soit à la
loi, soit à la façon de négocier, soit à la
constitution de l'unité de négociation, pour qu'on puisse arriver
à des résultats. Je crois que vous nous rendriez service en le
faisant.
M. BRUNELLE: Nous le ferons avec plaisir, M. le ministre.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Un instant. Le député
de Bagot a une question à vous poser.
M. CARDINAL: M. Brunelle, deux questions. Nous avons entendu le
représentant du Conseil du patronat du Québec déjà.
Vous représentez le Centre des dirigeants d'entreprise du Québec.
Peut-on savoir quelles sont les différences, les relations ou la nature
de ces deux organismes, l'un par rapport à l'autre? Le Conseil du
patronat du Québec est une espèce de fédération; si
je me trompe, on me corrigera. Comment situerait-on le Centre des dirigeants
d'entreprise du Québec? Est-ce qu'il existerait entre les deux groupes
ou entre le Centre des dirigeants d'entreprise du Québec et certains des
patrons à la table des négociations en français, on
appelerait cela des chevauchements des « overlaps »?
M. BRUNELLE: Bien, cela donne peut-être l'impression, de
l'extérieur, d'être des chevauchements. Nous sommes membres du
Conseil du patronat. J'espère ne pas être contredit par les gens
du Conseil du patronat en disant que les relations sont amicales. Par ailleurs,
nous ne sommes pas contraints, puisque nous ne sommes pas une
fédération, au devoir de coordination
auquel est soumis le Conseil du patronat. Vous me direz que nous aurions
pu discuter avec les gens du Conseil du patronat des recommandations que nous
vous faisons aujourd'hui. Cela n'a pas été possible pour toutes
sortes de raisons. Nous nous sommes permis de faire la suggestion que je viens
de proposer au ministre en espérant qu'elle pourrait constituer une
contribution acceptable à votre commission.
M. CARDINAL: Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Pas d'autres questions de la part
des membres? Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Brunelle, dans son mémoire, à la page 2, le
CDE soutient qu'une hausse immodérée des salaires dans
l'industrie de la construction aurait pour effet de provoquer des augmentations
injustifiables des prix, des produits et des services. Est-ce que ça
veut dire que, dans votre esprit la parité de salaires, telle que
demandée par les syndicats, c'est une hausse immodérée de
salaires?
M. BRUNE LLE : Bien, tout dépend de la hausse globale qui
justifierait l'augmentation. Je pense qu'il faut faire la distinction. Quand
nous parlons de hausse immodérée des prix dans le texte que vous
venez de citer...
M. BURNS: Dans le texte que je cite, vous soutenez, semble-t-il, qu'une
hausse immodérée des salaires dans l'industrie amènerait
une hausse des produits et des services.
Ce que je veux savoir, c'est, vu que vous en parlez, à propos de
parité des salaires, si vous soutenez que la parité telle que
demandée provoquerait une hausse immodérée des
salaires.
M. BRUNELLE: On sait qu'au cours d'un conflit récent 300 ou 400
entreprises ont dû fermer leurs portes, dans le domaine de la
construction. Je pense que c'est un indice assez révélateur des
marges extrêmement petites, limitées, dans lesquelles fonctionnent
un grand nombre d'entreprises.
M. BURNS: Est-ce que vous pouvez nous assurer avec certitude que c'est
à cause des salaires que ces entreprises ont fermé leurs portes
ou si c'est autre chose?
M. BRUNELLE: Ecoutez, avant de répondre de façon
affirmative à une pareille question, j'aimerais faire des recherches
plus poussées. Mais il est clair que, depuis déjà quelques
années, par exemple, depuis 1965, certains entrepreneurs en construction
concluent avec leurs employés des contrats de travail à des prix
inférieurs aux taux officiels, parce que la clientèle manque.
Vous savez comme moi que la clientèle de la construction est
coincée au Québec: Ou elle acceptera des prix, ou elle
s'interdira de donner des contrats. Je sais déjà, depuis
plusieurs années, que des gens manquent de contrats
précisément parce que les taux de salaires sont trop
élevés.
M. BURNS: C'est votre conclusion là-dessus.
M. BRUNELLE: C'est une connaissance de faits qui m'a été
donnée par des gens du métier.
M. BURNS: Je dois donc comprendre que votre affirmation s'applique
à la parité de salaires. Vous voulez dire que s'il y a
parité de salaires, tel que demandé, cela serait une hausse
immodérée? Est-ce cela?
M. BRUNELLE: Etant donné la marge de base, oui; dans certaines
régions, ce serait une hausse immodérée.
M. BURNS: Et vous avez étudié, dans ces régions
spécifiques, les effets que cela pourrait avoir?
M. BRUNELLE: Ce sont des informations qui nous sont données par
des gens du métier.
M. BURNS: Bon. A la page 2 de votre mémoire, vous nous dites
également que la parité de salaires dans l'industrie de la
construction constituerait un précédent. Est-ce que vous
êtes au courant que le précédent est déjà
créé actuellement dans le secteur public, en grande partie,
hôpitaux, fonctionnaires, même à l'Alcan?
M. BRUNELLE: C'est un danger que nous avions prévu depuis
longtemps. Le secteur public déborde sur le secteur privé. Je
pense que cela crée un état de confusion assez grave.
M. BURNS: Est-ce que vous concevez que cette situation de parité
qui a été créée dans le secteur public a mis la
province dans un marasme économique?
M. BRUNELLE : Je pourrais vous retourner
la question: Trouvez-vous que nous sommes dans une situation
économique satisfaisante?
M. BURNS: Cette situation est améliorable, sûrement, mais
est-ce que...
M. BRUNELLE: Le problème que j'ai soulevé justifie, je
pense, de croire qu'on pourrait examiner tous ces problèmes et les peser
les uns contre les autres, de façon ordonnée, à
l'intérieur d'un mécanisme approprié.
M. BURNS: Je vous pose cette question parce que, dans votre texte, il
semble que le gros problème soit partout celui des salaires. C'est cela
qui cause le problème.
M. BRUNELLE: Dans notre texte, nous traitons des salaires. Il aurait
évidemment fallu plus qu'un mémoire de quatre pages pour
régler d'une façon plus complète les problèmes que
vous soulevez. Je le reconnais très sincèrement.
M. BURNS: Une dernière question, M. Brunelle. Je me
réfère encore, peut-être au désagrément de
mes collègues, sans citer des grands A et des petits a, au volume du
professeur Loranger. Il semble affirmer, dans son volume, que
l'égalité de salaires serait justement un des moyens pour aider
les régions défavorisées économiquement.
M. DEMERS: Quelle page?
M. BURNS: A compter de la page 48. Une chance que je le savais!
Vous semblez, vous, d'autre part, soutenir le contraire. Sur quelle base
pouvez-vous réfuter cette thèse sur le plan économique?
Est-ce que vous avez étudié cela sur ce plan ou si c'est
intuitivement?
M. BRUNELLE: Nous avons des contacts fréquents avec les
entreprises. Cela ne repose pas sur une étude scientifique
appropriée au problème que vous soulevez, mais nous savons qu'une
marge excessive de salaires, dans certains cas, rend impossible la survie de
l'entreprise. Nous savons, moi comme tout le monde, qu'un tas d'entreprises,
dans le secteur, doivent disparaître. Celles qui sont rentables dans des
conditions données, est-ce que ce n'est pas mieux de les laisser
fonctionner dans ces conditions, à des conditions de travail
inférieures, plutôt que de créer un chômage qui est
déjà suffisamment élevé?
M. BURNS: Vos études vous portent à conclure que celles
qui sont rentables, actuellement, et efficaces, disparaîtraient avec
cela?
M. BRUNELLE: Ecoutez, il faudrait distinguer beaucoup. Votre question
est lourde de toutes sortes de sens.
M. BURNS: Vos affirmations aussi, M. Brunelle. C'est pour cela que je
pense qu'il faut s'y arrêter sérieusement. Ce sont des
affirmations lourdes de conséquences.
M. BRUNELLE: Vous vous rendez compte comme moi qu'il faudrait une
enquête extrêmement complexe pour régler de façon
objective les questions que vous posez. Il faudrait commencer par mettre
d'accord les économistes, ce qui me parait à peu près
impossible.
M. BURNS: De toute façon, si je comprends bien, votre affirmation
là-dessus n'est pas basée sur une stricte conclusion
scientifique.
M. BRUNELLE: Non. Elle est basée, comme je vous le dis, sur des
renseignements qui nous viennent de personnes engagées dans
l'entreprise.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions de la part des
membres de la commission? Alors, je vous remercie, M. Brunelle. J'inviterais M.
Dumesnil à faire l'exposé pour le groupe qu'il
représente.
Commissions scolaires
M. DUMESNIL: M. le Président, Messieurs. Mon nom est Mario
Dumesnil. Je représente la Fédération des commissions
scolaires et la Commission des écoles catholiques de Montréal.
Nous n'avons pas pu présenter de mémoire et nous aimerions avoir
une semaine pour vous en produire un très court. Mon intervention est
très brève. Nous demandons tout simplement l'exclusion, pour les
commissions scolaires, pour les travaux faits aux immeubles scolaires, travaux
de réfection, de réparation et de construction, par leurs propres
employés permanents pour tout contrat d'une valeur de $25,000 et moins,
incluant matériaux et main-d'oeuvre, pour un travail donné, dans
un lieu donné, bien précisé. C'est la position des
commissions scolaires et elle est fondée sur des facteurs très
pratiques que je développerai dans le mémoire que je vous
soumettrai.
D'une valeur de $25,000 et moins. Pourquoi $25,000? Nous nous appuyons
sur l'expérience
passée. Nous avons colligé tous les décrets qui
avaient de telles exclusions. Ils étalent tous de $25,000, ni plus, ni
moins. C'est tout ce que j'ai à dire. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Ce fut très bref. Je vous remercie. Maintenant,
si vous voulez attendre un instant, le député de Bagot
désire vous poser une question.
M. CARDINAL: Est-ce que j'ai bien compris?
UNE VOIX: On n'entend pas du tout, quand ceux qui sont au micro
parlent.
M. LE PRESIDENT: Nous demandons aux gens qui vont au micro de s'exprimer
plus fortement.
M. CARDINAL: Alors la question que je pose est celle-ci: je voudrais
savoir si j'ai parfaitement compris, Me Mario Dumesnil. Vous ne parlez
d'exception que pour les employés permanents des commissions scolaires
et non pas...
M. DUMESNIL: Exact.
M. CARDINAL: ... pour tout le travail de construction, en
général, fait par les commissions scolaires, membres de la
fédération ou de la CE CM.
M. DUMESNIL: Pas du tout.
M. CARDINAL: Dans le fond, c'est une position semblable à celle,
par analogie, de la ville de Montréal.
M. DUMESNIL: Pas tout à fait semblable. Nous ne demandons pas
l'exemption totale.
M. CARDINAL: Non, vous avez votre limite, votre marge de $25,000.
M. DUMESNIL: Pour les menus travaux. $25,000 et moins.
M. CARDINAL: C'est-à-dire qu'au lieu de définir ce qu'est
une construction ou un entretien, vous dites, c'est bien simple: Si on fait
faire les travaux par des employés permanents qui sont à
définir et que c'est moins que $25,000, ce sera considéré
comme entretien, au-delà, ce sera considéré comme
construction.
M. DUMESNIL: Pour les menus travaux rapides qui doivent être faits
dans une commission scolaire et qui ne peuvent pas attendre.
M. CARDINAL: Vous ne craignez pas qu'à ce moment-là il se
fasse une certaine déviation du décret ou de la loi, en ce sens
qu'il serait facile de faire deux contrats pour un travail de $50,000 pour que
chacun ne vaille que $24,500?
M. DUMESNIL: Pas du tout. Nous avons dit: pour un travail donné,
dans un lieu donné et bien précisé. Nous demandons que ce
soit très bien précisé pour éviter tout
échappement possible.
M. CARDINAL: Remarquez que ce n'est pas la bonne foi, ni du
représentant des commissions scolaires, ni de la
fédération. Mais comme le disait tantôt le ministre du
Travail, la nature des hommes étant ce qu'elle était, le nombre
des commissions scolaires étant ce qu'il est et le nombre des
commissaires étant encore évidemment plus élevé et
variable d'un endroit à un autre, et la nature des travaux étant
très variable d'une commission scolaire à une autre...
L'école de Saint-Théodore-de-Bagot, ce n'est pas la même
chose qu'une école polyvalente dans la ville de Montréal. C'est
pourquoi je vous pose ces questions pour que le problème soit vraiment
cerné et que l'exception que vous demandez, sans la juger, nous en
sachions les limites très précises.
M. DUMESNIL: Nous voulons qu'elle soit précisée de
façon très claire, très nette. Nous ne voulons aucun
échappatoire et nous voulons exactement ce que nous demandons pour les
travaux mineurs de $25,000 et moins, pour les menues réparations,
construction dans les écoles, les affaires urgentes et autres, par nos
employés d'entretien. Nous n'avons aucune objection à ce que ce
soit très bien cerné. Aucune.
M. CARDINAL: Est-ce qu'on peut vous demander les raisons précises
de cette demande d'exception limitée?
M. DUMESNIL: n y en a plusieurs. D'abord, cela va soulever un
problème de comptabilité assez difficile. Parce que vous allez
avoir un employé permanent qui va faire le travail de construction, mais
s'il prend 1/5 de son temps, s'il prend une demi-heure dans sa journée,
s'il prend une heure dans sa journée pour faire un travail de $45
à $50, cela va nous amener à une comptabilité
extrêmement difficile. Je passe rapidement.
Deuxièmement, vous avez le problème de deux conventions
collectives. Parce que tous ces employés sont déjà
couverts par la convention collective. Alors vous allez avoir le chevauchement
du décret, le chevauchement de notre pro-
pre convention collective, lesquelles peuvent être contradictoires
pour dix ou quinze minutes de travail, une heure de travail dans une semaine
par tel et tel employé. Vous avez des commissions scolaires qui ont 400
à 500 employés, d'entretien comme la CECM.
Alors, ça va demander un contrôle impossible, une
comptabilité impossible. C'est pour ça que nous demandons que le
problème soit cerné. Nous n'avons aucune objection à ce
qu'il soit très bien cerné. L'autre problème, c'est que,
si nous n'avons pas l'exemption, nous serons obligés de faire des
soumissions pour des contrats de $1000, $2000, $3000 ou $4000, avec les retards
et les délais. Quand il faut réparer quelque chose à une
école et le faire rapidement, nous n'avons pas le temps de demander des
soumissions pour un montant de $500 ou de $600.
M. CARDINAL: Ai-je compris que vous avez l'intention, au nom des deux
groupes que vous représentez, de déposer un mémoire?
M. DUMESNIL: Oui. Nous n'avons pas eu le temps de le faire vu que nous
avons été convoqués il n'y a que deux ou trois jours.
Alors, ça nous a été impossible. Mais, nous allons vous
soumettre un mémoire, avec des chiffres et des arguments à
l'appui.
M. CARDINAL: Merci.
M. LAPORTE: Votre argumentation m'invite à ajouter à ce
qu'a dit le député de Bagot. Dans le mémoire que vous
allez nous présenter, je voudrais que vous insistiez sur un point. On
est venu nous dire, ce matin, que l'entretien n'est pas de la construction et
qu'à cause de cela nous devrions confier à des gens qui ne sont
pas soumis au décret de la construction les travaux d'entretien. La
ville de Montréal, l'Hydro-Québec et vous-même venez de
nous le dire, pour vos clients, sans vous prononcer sur le principe. Pour les
travaux d'un montant de $25,000 et moins, nous demandons à être
relevés du décret et, pour les travaux de $25,000 ou plus, nous
serions soumis au décret. C'est un principe nouveau. Reconnaissez-vous,
quant à vos clients, que l'entretien peut, à un certain moment,
être classé comme de la construction et que vos gens soient soumis
à toutes les clauses du décret de la construction? Est-ce le
montant qui détermine cela? J'aimerais bien, sans que nous
élaborions cet après-midi...
M. DUMESNIL: Sans élaborer, nous vous disons franchement que nous
reconnaissons que des travaux faits par nos hommes d'entretien sont des travaux
de construction. Nous le reconnaissons, mais nous vous disons: C'est impossible
d'application, à cause des faits que je vous ai donnés.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. CARDINAL: Tout ce qui vient d'être dit est très
important. Me Dumesnil...
M. LAPORTE: Je comprends.
M. CARDINAL: ... étant avocat, le ministre de la Justice aussi,
l'on sait comment il est difficile là, je prends un exemple par
analogie pour les techniciens en certaines matières de
distinguer, dans la vie civile, selon le code civil, entre ce qu'on appelle des
gros travaux et de petits travaux, pour savoir si, par exemple, c'est le
locataire ou le propriétaire qui doit le faire. Toute cette section du
code civil, qui vient distinguer par des principes, fait que, dans la
réalité des choses, les avocats ont beaucoup de travail, non pas
pour clarifier les principes de nos codificateurs, mais...
M. LAPORTE: Pour les embrouiller.
M. CARDINAL: ... pour essayer de les mettre en pratique. Depuis ce
matin, nous avons assisté à deux phénomènes, je
pense: d'une part, le procès de la loi 290 beaucoup plus que les
négociations qui sont en cours depuis une année et demie; d'autre
part, beaucoup de demandes d'exception. Là, pour la première
fois, quelqu'un nous dit bien franchement: La différence entre
l'entretien et la construction est tellement ténue que tenter d'en faire
une définition serait illusoire. Mettons donc un cran d'arrêt et
nous pourrons partir de là pour établir des exceptions, ce qui a
été fait, d'ailleurs, dans plusieurs lois sous forme de statuts
quand on n'a pas pu établir des distinctions qui pouvaient dans la
pratique s'appliquer.
Je tiens à le souligner parce que je pense que, pour le
gouvernement je ne dis pas que j'accepte le montant de $25,000 ou le
principe il y a quand même un tournant qui vient de se faire
depuis les auditions de ce mâtin.
M. LAPORTE: Oui. Dans le même ordre d'idées, ce que vous
dites est fort important.
M. DUMESNIL: Je vais vous donner un cas. La CECM a environ 400
écoles. Alors, il faut de l'entretien, il faut des réparations
qui sont de leur nature des petites réparations. L'année pas-
sée, la CECM a donné pour $25 millions de contrats
à d'autres, mais, à l'intérieur de la CECM, par exemple,
vous avez eu, dans ces écoles-là, environ $350,000 à
$400,000 de réparations de la nature de constructions qui ont
été faites par les employés de la CECM, qui sont 700 ou
800 dans environ 400 écoles ou autres immeubles.
Alors, c'est de la construction, mais c'est de la menue construction. Ce
sont des montants de $100, $200, $1,000, $1,200, mais c'est fait par des
employés de la CECM qui sont syndiqués, qui ont une convention
collective et qui ont le métier de menuisier ou d'autres
métiers.
M. LAPORTE: Est-ce que vous suggérez que les contrats,
appelons-les d'entretien pour qu'on puisse se bien comprendre, que vous donnez
à l'extérieur, d'un montant de moins de $25,000, ne soient pas
soumis au décret?
M. DUMESNIL: Non, nous ne donnons aucun contrat. Quand je parle de moins
de $25,000, il faut bien me comprendre. Ce sont les travaux d'une commission
scolaire. Cela peut être $25,000 pour une commission scolaire comme la
CECM, $8,000 ou $1,000 pour une autre commission scolaire. Ces travaux sont
faits par les employés permanents de la commission scolaire. Quand je
parle de l'exclusion de $25,000 et moins, c'est pour des travaux faits par les
employés permanents de la commission scolaire.
M. LAPORTE: Très bien. C'est clair. Dans votre mémoire,
puisque vous reconnaissez, disons presque sans discussion, le principe que les
travaux d'entretien sont analogues à des travaux de construction, il va
maintenant falloir que vous nous expliquiez c'est une question
véritable en vertu de quel principe les ouvriers de la
région de Montréal, même à partir de $1, seraient
privés des avantages et soumis aux inconvénients du
décret. Pourquoi $25,000 plutôt que $2, puisque c'est de la
construction?
M. DUMESNIL: Nous avons corrigé, nous avons ici les exemptions,
nous avons tous les décrets depuis 1963-1964. Le montant de $25,000 est
pas mal le montant permanent.
Ce que nous voulons faire comprendre, c'est que nos employés
permanents qui font de l'entretien en font pour les quatre cinquièmes de
leur temps. Un cinquième de leur temps peut être consacré
à des travaux de menue construction de $400, de $350, par exemple. Ce
sont ces travaux qui, dans une commission scolaire donnée, peuvent se
chiffrer par $10,000 par année, $11,000, $200 ou $2,000. Comme c'est
fait par nos employés permanents, nous demandons l'exemption. Comme je
vous l'ai expliqué, je ne veux pas me répéter...
M. LAPORTE: Je sais que vous êtes un garçon fort
intelligent et que je connais depuis très longtemps, mais je veux savoir
pourquoi $25,000, pourquoi la convention cesserait-elle de s'appliquer à
$24,900? Si vous admettez que c'est de la construction, pourquoi la
règle ne s'appliquerait-elle pas à la commission scolaire de
Montréal? La ville de Montréal vient nous dire: Ce n'est pas de
la construction, c'est de l'entretien. L'Hydro-Québec vient nous dire:
Ce n'est pas de la construction, c'est de l'entretien. Là, au moins, on
décide que oui ou non, mais on a quelque chose. Vous nous dites, vous:
Quant à nous, nous admettons que c'est de la construction, mais, en bas
de $25,000, nous voudrions être soustraits du décret.
M. DUMESNIL: Oui, nous allons vous dire pourquoi; c'est parce que nous
avons nos employés permanents liés par une convention collective
et payés pour les travaux. Ils sont déjà amplement
protégés, ils ont toute la protection voulue.
M. LAPORTE: Vous aviez ça, disons, dans toute la province de
Québec, vous aviez diverses conventions. A un moment donné, est
arrivé le bill 290, est arrivée une convention unique qui a
couvert tous les ouvriers qui s'occupent de construction.
M. DUMESNIL: Non, ce n'est pas la même chose.
M. LAPORTE: C'est ça que je vous demande de nous expliquer.
M. DUMESNIL: Ce n'est pas la même chose.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi, d'abord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Dumesnil, pour bien comprendre cette
question de distinction entre travaux d'entretien et travaux de construction et
à partir de ce barème de $25,000 dont vous parlez, supposons
qu'au début de l'année, pour des raisons urgentes, vous ayez
besoin d'aménager le bureau du directeur ou du proviseur du
collège. Est-ce de la construction, à votre avis, ou de
l'entretien?
Disons que ça va coûter éventuellement
$8,000, $10,000; est-ce de la construction ou de l'entretien?
M. DUMESNIL: II peut y avoir pour moitié de la construction, pour
moitié de l'entretien. Nous autres, nous ne nous acharnons pas au
montant.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien voici, vous ne vous acharnez pas
aux...
M. DUMESNIL: Ce que je veux dire, c'est ceci; par exemple, dans une
école donnée, vous avez des réparations à faire,
mais les réparations, ça peut être de la réfection.
De la réfection et des réparations, pour moi c'est de la
construction. C'est mon idée. L'entretien, ce n'est pas ça.
L'entretien, ce sont tout simplement des choses ordinaires qui ne demandent pas
de corps spécialisés pour le faire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Dumesnil, vous n'avez pas répondu
exactement à ma question. Le ministre l'a souligné tout à
l'heure, ça nous préoccupe, ce problème. Vous demandez une
exemption, je vous pose une question très précise. Au
début de l'année, comme ça se fait chaque année
dans les écoles, on a besoin d'aménager des bureaux. Et votre
conseil de l'école estime que, pour aménager le bureau du
directeur, ça va coûter $8,000 ou $10,000. Est-ce que vous allez
demander à requérir les services des employés permanents
ou si vous allez confier ça à un entrepreneur en construction? Si
ce sont les employés de la commission scolaire ou quelqu'un de
l'extérieur qui le fait, est-ce que ces gens-là font de la
construction ou non?
M. DUMESNIL: Pour répondre à votre question...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne parle pas de déplacer des
ampoules et quelques fils électriques.
M. DUMESNIL: Non, non. Si la commission scolaire le fait faire par les
employés permanents, il est évident qu'il va y avoir une partie
de ces travaux qui vont être de la construction, de la réfection
et une autre partie qui vont être des travaux normaux de
réaménagement d'un bureau qui ne demandent absolument rien. Et la
commission scolaire, si elle n'a pas les moyens de le faire, si elle n'a pas le
personnel pour le faire, elle pourra y aller par appel d'offres et alors, cela
pourra devenir un contrat de construction. Mais ce qui arrive, c'est justement
cette difficulté de départager, dans un travail donné, par
les employés permanents, ce qui est entretien proprement dit et ce qui
est construction proprement dite dans ces menus travaux, dans ces travaux
courants: réparations d'une porte, bris d'ascenseur, des choses comme
cela. C'est la difficulté de répartir dans les petits travaux,
dans les menus travaux, ce qui est entretien proprement dit et construction.
Prenez, par exemple, un employé qui va vérifier un système
donné dans une école. L'entretien va demander qu'il
vérifie et qu'il répare, à un moment donné, mais en
faisant ce geste-là, il se peut qu'il y ait une parcelle qui soit de la
construction proprement dite. C'est cela que l'on veut éviter; ce sont
des difficultés d'application. On ne nie pas qu'il y ait une certaine
partie qui soit de la construction, on ne le nie pas, au sens que vous
l'entendez, pas du tout. C'est la difficulté d'application. Sur cinq
heures, il peut y avoir une heure de construction proprement dite; le reste,
c'est quatre heures. Mais cela n'est pas divisé en une heure et quatre,
c'est ensemble et de là, la difficulté, pour les commissions
scolaires.
C'est pour cela que nous demandons l'exemption. Nous avons dit $25,000;
le montant de $25,000 est basé sur les décrets antérieurs.
Nous n'y tenons pas plus que cela à ce montant de $25,000. Que ce soit
un montant plus bas que $25,000, aussi près que $25,000 que possible. Le
montant de $25,000 n'est pas un montant qu'on a pris en l'air, c'est un montant
basé sur les anciens décrets que je déposerai avec notre
mémoire.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Dumesnil, je voudrais savoir, quand vous parlez du $25,000,
si vous voulez dire $25,000 par année ou pour chaque contrat de
$25,000.
M. DUMESNIL: Je veux dire au moins $25,000 par travail donné,
dans un lieu donné, dans une école donnée, dans un endroit
donné.
M. BURNS: Dans le cas que vous nous citiez tantôt, par exemple la
CECM qui donne pour $450,000 de travaux à l'extérieur.
M. DUMESNIL: Non, non, la CECM se trouve à avoir, par exemple,
dans une année, entre $300,000 et $400,000 de travaux faits à ces
400 écoles environ, par ses hommes d'entretien. Mais ce
montant-là n'est pas totalement
pour de la construction. Il peut y en avoir trois quarts pour
l'entretien et un quart pour la construction, la réfection et la
réparation.
M. BURNS: Je m'excuse, j'avais mal compris.
M. DUMESNIL: Elle a le personnel voulu pour ça et c'est
déjà couvert, tout est là. Ce serait très difficile
de départager...
M. BURNS: Prenons ces $300,000, chaque travail pourrait, s'il
était de moins de $25,000 et si votre suggestion était
acceptée, être fait en dehors de la juridiction du
décret...
M. DUMESNIL: C'est ça qu'on aimerait entendre.
M. BURNS: ... et de façon...
M. DUMESNIL: C'est ça; pour des raisons que nous expliquons:
difficulté d'application, difficulté de comptabilité,
chevauchement de la convention collective, clauses contradictoires dans les
conventions collectives et cotisations syndicales qui peuvent être
différentes. Alors, il faudrait calculer les 10 minutes que prend un
employé pour un contrat de $800, ce qui est vraiment au décret,
l'extraire et le payer selon le décret tandis que pour les 50 autres
minutes il sera payé suivant la convention collective.
M. LE PRESIDENT: ... Silence, s'il vous plaît pour que l'on
entende M. Dumesnil.
M. DUMESNIL: C'est la difficulté d'application tout simplement.
Nous ne demandons aucunement une exemption totale pour les commissions
scolaires. Le montant de $25,000, je le répète, est le montant
qui avait été fixé par le législateur auparavant,
aussi récemment que 1969; depuis 1961, je les ai tous ici, on les a tous
colligés.
M. LE PRESIDENT: Le législateur en tiendra compte. Le
député de Bagot.
M. CARDINAL: J'aurais deux remarques, M. le Président. La
première il y a un député qui vient de la faire à
voix basse, je lui en donne le crédit, c'est le député de
Terrebonne c'est que, à ce moment-là, c'est une
distinction purement pragmatique qui n'est fondée que sur des questions
de réalités.
M. DUMESNIL: Oui.
M. CARDINAL: Mais, cependant, cela conduit à des conclusions qui
sembleraient, parce que l'on part d'une prémisse pragmatique, à
des conclusions qui seraient fonctionnelles mais qui, au contraire, vont
devenir irrationnelles. Je prends trois cas différents. Vous avez une
commission scolaire qui fait faire des travaux en deça de la somme
de$25,000 par des permanents, parce qu'elle en a. Cela échappe au
décret. La commission scolaire voisine, parce qu'elle n'a pas de
permanents, fait faire le même genre de travaux, pour le même prix
et cela tomberait sous le décret. Troisièmement, si le
ministère de l'Education accepte le projet RAS après les
études IRNES, pour ceux qui ne saventpas ce que c'est, c'est le
projet qui permet de construire des écoles par modules y compris les
murs, les plafonds, le système d'éclairage, le chauffage,
l'aération, etc. ceci veut dire qu'à tout moment, à
chaque année ou à tout moment dans une année
donnée, on pourrait modifier dans ces écoles, déplacer les
modules.
A ce moment-là, est-ce que ce serait de la réfection, de
l'entretien, de la construction! Cela nous donne trois situations
différentes.
M. DUMESNIL: M. Cardinal, c'est pour ça que nous vous disons que
nous sommes d'accord, que ce soit bien cerné, bien
précisé. Nous ne voulons pas d'échappatoire. Quant au cas
que vous donnez, celui d'une commission scolaire bien organisée au point
de vue de l'entretien, puis d'une autre, cela ne change pas le
problème.
Le problème, c'est la commission scolaire, qui a des
employés d'entretien avec lesquels elle a une convention collective,
avec des clauses précises. C'est cette commission scolaire qui va
être frappée; pour l'autre, ça ne change rien, elle ira sur
le marché, elle fera ses appels d'offres, puis elle acceptera la ou les
meilleures. Cela ne change rien.
M. CARDINAL: Mais vous acceptez que, entre, par exemple, les commissions
scolaires locales et les commissions scolaires régionales et les
commissions scolaires immenses, les conséquences seront
différentes, parce que les locales, qui sont en très grand
nombre, n'ont pas le personnel d'entretien suffisant, même pas pour
agrandir la cour d'école.
M. DUMESNIL: Ces commissions scolaires seront soumises au décret,
il n'y a pas de problème. Mais ce sont les commissions scolaires qui
sont déjà constituées avec leur propre...
M. CARDINAL: C'est-à-dire que le fait qu'il
n'y ait pas de problème, c'est ce qui me paraît être
le problème. Remarquez, je ne critique pas votre thèse. Je l'ai
dit tantôt, ç'a été un tournant dans la discussion
aujourd'hui, mais je pense que vous avez exposé clairement ce que vous
vouliez, qu'il n'y a pas absence de problème, mais que le
problème est cerné.
M. DUMESNIL: C'est ça.
M. CARDINAL: Evidemment, le gouvernement décidera, maintenant
qu'il a décidé...
M. DUMESNIL: Mais, je tiens à le répéter, le
problème est cerné et nous voulons un texte clair et
précis pour éviter toute échappatoire. Nous avons des
commissions scolaires très bien charpentées avec un personnel
d'entretien capable de faire ces menus travaux. Le montant de $25,000, je le
répète, c'est puisé dans une législation
déjà existante ou autrefois existante; le montant n'a pas
d'importance. Nous disons que, quand il s'agit de $25,000 et moins, mais aussi
près que possible de $25,000, il faut laisser faire ça par les
commissions scolaires pour éviter des difficultés d'application,
des difficultés de comptabilité, de vérification et de
chevauchement, de contradiction aussi entre les clauses du décret
à venir et les clauses de la convention collective nous liant et
existant entre la commission scolaire donnée et ses employés.
M. CARDINAL: J'aimerais bien que le ministre de l'Education soit ici
pour nous dire s'il va rester seulement 180 commissions scolaires au lieu de
1,200 l'automne prochain, car cela changerait les conséquences de votre
thèse.
M. LAPORTE: Vous communiquerez avec lui, quand vous en serez rendu
là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda désire
vous poser une question, M. Dumesnil.
M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question
à M. Dumesnil. Vous avez mentionné tantôt que vous aimeriez
profiter d'une exemption de $25,000 pour chacun des contrats. Est-ce bien
ça?
M. DUMESNIL: C'est-à-dire que ce n'est pas pour les contrats,
mais pour les travaux. Prenez, par exemple, la CECM, qui a un travail à
faire dans une école; ce travail peut se chiffrer les coûts par
$1,800. Elle fait faire le travail de $1,800; ce peut être un travail de
construction, de réparation ou de réfection, même ce qui
tomberait sous le décret autrement. Elle peut faire faire ce travail,
elle a les moyens de faire faire ce travail par ses propres employés. Vu
que ça ne coûte que $1,800, ce serait alors la convention
collective de la CECM qui régirait le travail et non pas le
décret. C'est ça qu'on veut dire.
Quand on dit $25,000, c'est que si c'était un travail ou une
réparation ou quelque chose qui demanderait un montant supérieur
à $25,000, nous irions alors en appel d'offres comme tout le monde et
nous ferions appel aux soumissions parce que ce serait un travail
considérable.
M. SAMSON: Mais, dans votre optique à vous, qui pourrait
être appelé à en faire le contrôle pour que ça
se passe dans les normes?
M. DUMESNIL: Disons que ce seraient les autorités responsables du
décret. Là-dessus, nous n'aurons aucune objection à tout
contrôle possible; les livres sont ouverts, ce sont des livres publics.
Les livres seraient ouverts en tout temps et on pourrait vérifier
combien dans telle école a coûté tel travail de
réfection; nous avons nos comptables, qui donneraient les chiffres. En
cela, nous n'avons aucune objection à tout contrôle possible. Au
contraire, nous vous le disons, nous demandons d'être exempt, et nous
demandons que la clause soit bien faite pour qu'il n'y ait pas
d'échappatoire, avec tous les contrôles possibles.
M. SAMSON: Pourrait-il arriver, par exemple, qu'au lieu d'entrevoir des
travaux de $48,000 d'un seul coup vous prévoyiez de faire deux fois des
travaux de $24,000 pour échapper à ça?
M. DUMESNIL: II y a peut-être là un danger, mais on ne peut
pas présumer que les connussions scolaires feraient ça. S'il y
avait vraiment quelque intention de contourner la loi, que les punitions et les
sanctions s'appliquent. Donnez des dents à votre décret pour
punir la commission scolaire qui se permettrait un truc comme
celui-là.
M. SAMSON: Nous sommes d'accord avec vous qu'on ne peut pas
présumer. Mais nous prenons bonne note de ce que vous venez de dire
à l'effet qu'il y a un danger.
M. DUMESNIL: Que votre décret nomme aussi ceux qui vont jouir
d'exemptions; qu'ils soient punis sévèrement s'ils essaient de
contourner la loi par le truchement d'une exemption. Cela ne peut pas
être plus clair. C'est notre position.
M. LE PRESIDENT: Merci bien, M. Dumesnil. Je crois que quelqu'un veut
poser des questions à M. Dumesnil. Voulez-vous rester disponible, M.
Dumesnil.
M. LEFEBVRE: Mon nom est Claude Lefebvre. Je représente
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec.
Plutôt qu'une question, ce serait une autre considération
pragmatique sur les $25,000 mentionnés par M. Dumesnil. Cela
représente dans notre domaine quelque chose comme deux maisons
d'habitation unifamiliale. Cela représente aussi 50 contrats de
plomberie pour 50 maisons. Si l'on figure le taux à 40% de
main-d'oeuvre, sur $25,000 de travaux, cela représente, $10,000 de
salaires et si vous calculez un salaire à $5 de l'heure, cela
représente quand même 2,000 heures d'ouvrage.
Or, la demande de Me Dumesnil dit toujours: Bien voici, il est difficile
de calculer. Je conçois avec lui que, pour une commission scolaire,
calculer deux, trois ou quatre heures d'ouvrage, cela peut devenir difficile au
cours d'une semaine de 40 heures. Mais lorsque l'on parle de travaux de l'ordre
de $25,000, cela correspond au minimum à 2,000 heures de travail. Je
pense qu'à ce moment-là, il est facile pour une commission
scolaire comme pour un simple entrepreneur de le calculer.
M. LE PRESIDENT: M. Desjardins.
M. DESJARDINS: Dans le bill 290, à l'article 26, il y a la
même exception, mais c'est pour des travaux au-dessus de $25 millions.
Voici maintenant ce qui arrive. Prenez par exemple l'aéroport de
Sainte-Scholastique. Il y a des travaux qui sont commencés. Etant
donné qu'ils sont donnés par tranches, il n'y a eu aucune
rencontre avec les autorités fédérales et les travaux de
$25 millions n'ont pas encore été donnés.
Dernièrement, lundi passé, j'ai rencontré le
représentant d'une compagnie qui a un contrat en province. Le contrat
total est de $100 millions. La première tranche est seulement de $10
millions. J'ai demandé s'il y aurait une rencontre, tel que l'article 26
le stipule. Il a dit: II ne s'applique pas à nous; notre contrat est de
seulement $10 millions. C'est seulement une partie du contrat. Il y a donc un
gros danger que la somme de $25,000, tout le monde joue avec elle, comme c'est
le cas présentement pour l'aéroport et comme beaucoup
d'entrepreneurs le font.
M. LE PRESIDENT: Le suivant, pourriez-vous vous identifier, s'il vous
plaît?
M. CAMPEAU: Aimé Campeau de la CECM, directeur des relations
industrielles. Sans revenir sur ce que M. Dumesnil nous a
présenté tantôt, j'aimerais ajouter que pour ce qui est de
la CECM seulement, la définition qui existe actuellement et qui a
été négociée entre les parties peut causer,
à mon avis, d'énormes difficultés à un employeur
comme la CECM, comme cela en causait, vous l'avez vu cet après-midi,
à la ville de Montréal, à l'Hydro-Québec, etc. Je
suis surpris de ne pas voir des employés de syndicats d'entretien venir
ici donner leur point de vue. Cela me surprend énormément. Est-ce
qu'ils viendront plus tard? Peut-être. Mais je pensais les voir
aujourd'hui.
Je pense par exemple à des cas pratiques que vous allez
peut-être trouver ridicules, mais qui pourraient très bien se
produire. Quand un homme d'entretien fait pendant deux heures de la
journée un travail qui est censé être un travail de
construction, même si on s'entendait sur le fait qu'il en fait vraiment,
de la construction, qu'est-ce que l'on va faire au point de vue de l'employeur?
Est-ce que l'on va avoir un petit nègre pour le suivre afin de savoir
s'il a travaillé une heure et demie ou deux heures pour le payer
à un taux différent? H pourrait fort bien arriver
également et cela serait au détriment des employés
que le taux que l'on devrait payer à un employé pour de la
construction serait inférieur à un moment donné à
ce qu'on le paie actuellement pour de l'entretien. Ce serait peut-être un
problème qu'il faudrait examiner.
Il y a un tas de choses qui peuvent se produire et je pense qu'il y a
assez d'experts autour de la table pour les deviner aussi. Un bonhomme qui se
blesse au travail pendant qu'il fait de la construction, est-ce que l'on va lui
donner des journées de maladie comme à un homme d'entretien ou
est-ce qu'on va le payer d'après ce qui est prévu dans le
décret de la construction dans ce cas-là? Quant à la
caisse de retraite, est-ce qu'il va verser à deux caisses de retraite?
Je pense que s'il n'y a pas une définition aussi précise que
possible, disant ce qu'est un travail d'entretien ou donnant la permission
à certains employeurs tels que la CECM de les exclure pour des raisons
qui ont été expliquées par d'autres, cela pourrait causer
énormément de difficultés, et ce n'est pas applicable.
M. LE PRESIDENT: Merci. D'autres représentations? Auriez-vous
l'obligeance de vous approcher du micro, s'il vous plaît?
M. BRUNET: Yves Brunet. Je viens de
faire quelques commentaires. Je pensais que c'était une
période de questions. Mais comme c'est une période de
commentaires et que j'ai eu le plaisir de passer le premier et non maintenant,
je voudrais faire quelques commentaires.
La base monétaire, pour faire la distinction entre entretien et
construction, me semble tout simplement farfelue. Le meilleur exemple de cela a
été le représentant des habitations, si je ne me trompe,
qui a dit, justement, que l'on peut construire plusieurs maisons en bas
de$25,000, comme on peut faire plusieurs travaux de plomberie en bas de
$25,000. Donc, la solution proposée, basée sur un certain montant
d'argent, à mon point de vue, est une solution farfelue. On essaie
d'éviter, à ce moment-là, une distinction qui, au fur et
à mesure des représentations qui sont faites, s'impose entre
entretien et construction. Cette distinction je l'avoue avec tout le
monde qui est ici est difficile à faire. Mais, encore ce matin,
j'ai dit à la fin et je le répète maintenant: Ce n'est pas
parce que la distinction entre ce qui peut être construction et ce qui
peut être entretien est difficile à faire qu'il faut dire: C'est
trop difficile; nous allons nous asseoir là et laisser les parties
s'amuser par la suite.
Je prends comme exemple, l'industrie que je représente
aujourd'hui. Pour ceux qui n'étaient pas ici, c'était cette
industrie de services qui s'appelle Catalytic et Canadian Vickers. En ce qui
concerne l'industrie de services à l'extérieur, eh bien, $25,000,
pour nous, cela ne veut rien dire, puisque nous avons un contrat permanent
d'entretien de l'équipement à l'intérieur d'une usine qui
appartient à un tiers qui est, en fait, le client du client que je
représente. S'il s'en va faire, dans son usine, des travaux purement
d'entretien, est-ce que ces travaux sont évaluables à $25,000? Ce
n'est pas une question d'évaluation. On fait un contrat à
l'année j'aurais dû préciser, ce matin, que ce sont
des contrats même plus longs que cela; cela peut aller jusqu'à
cinq ans - où notre client, Catalytic aussi bien que Canadian Vickers,
s'en va travailler à une autre usine pour entretenir la machinerie et
l'équipement en général, pour une période de cinq
ans. A ce moment-là, est-ce $25,000, est-ce $30,000, est-ce $10,000?
Cela n'a aucune importance puisque, pour moi je le soumets
respectueusement aux membres de la commission et aux députés
présents la distinction entre l'entretien et la construction ne
peut pas être faite sur une base monétaire, mais plutôt
selon le genre de travail effectué.
Je pense qu'il est difficile d'arriver immé- diatement avec une
définition de l'entretien, mais je suis prêt à offrir mes
services où que ce soit, à qui que ce soit, sur quoi que ce soit
pour essayer de travailler sur le sujet. Je pense que c'est un sujet
d'importance et qu'on le laisse de côté sous prétexte de
difficulté.
Je soumets respectueusement, encore une fois, que cette distinction est
essentielle.
M. LE PRESIDENT: Merci. Cependant, je ne voudrais pas que vous gardiez
l'impression qu'il y a quelque chose de laissé de côté
ici.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, non seulement nous
n'avons pas laissé de sujets de côté, mais nous avons
demandé à M. Brunet, ce matin, des précisions. Je suis
encore à me demander s'il est capable de nous dire exactement ce qu'est
l'entretien et ce qu'est la construction, particulièrement dans le cas
évoqué par la CECM.
M. BRUNET: Me Cardinal a fait une distinction entre les
réparations locatives et les réparations de propriétaire.
Cette distinction, elle existe depuis une éternité. Il y a eu des
thèses d'écrites sur chacun des sujets et on ne le sait pas
encore. Pourtant, on a quand même maintenu cette distinction. Je
m'excuse...
M. LAPORTE: Oui, disons que...
M. BRUNET: Tout à l'heure, j'essayais d'écouter ce qu'on
disait, avec intérêt. Je me prenais les oreilles par en avant,
mais, malheureusement, je n'entendais pas.
M. DE MERS: Maintenant, nous allons nous boucher les oreilles.
M. BRUNET: Je vais baisser la voix.
M. LE PRESIDENT: La commission a très bien compris ce que vous
vouliez lui expliquer.
M. BRUNET: Eh bien, c'est qu'une question m'était posée.
On me demandait de définir l'entretien. J'ai commencé à
faire la distinction entre les réparations locatives et les
réparations de propriétaire. Cette distinction, je le soumets,
peut être acceptable entre entretien et construction. Il est clair qu'on
passe imperceptiblement par ce qu'on pourrait appeler une zone grise entre
entretien et construction, mais je suis loin d'admettre que construction
égale entretien. Bien au contraire. Mais, comme dans la
réparation locative et la
réparation du propriétaire, on passe une zone grise
imperceptible qui est, à un moment donné, de la réparation
du propriétaire et, à un autre moment, de la réparation
locative. C'est la même distinction qui s'impose ici. Je pense que, si
elle est difficile, elle l'est autant au point de vue du code civil. Elle
devrait être faite dans le cas présent. Merci.
M. LE PRESIDENT: J'inviterais maintenant M. Jolin à faire des
représentations.
M. JOLIN: Je m'excuse auprès des membres de la commission de
n'avoir pas pu déposer un mémoire. Un malentendu, qui n'est que
ma seule responsabilité, a eu comme résultat que j'ai
été dans l'impossibilité de le faire et je demanderais de
pouvoir le faire d'ici un maximum d'une semaine.
M. LE PRESIDENT: Permission accordée. Maintenant pourriez-vous
vous identifier?
M. JOLIN: Oui, mon nom est Paul Jolin, avocat. Je représente le
groupe Beloit, le groupe Reynolds et le groupe Marine, qui comprend les
industries de Marine, Volcano, Forano, Fo-resteel et autres.
M. CARDINAL: M. le Président, avant que le représentant ne
s'exprime, à plusieurs reprises, depuis le début, certains
mandants ont exprimé le désir de présenter un
mémoire, ce qui est fort louable, et ont demandé un délai
d'une semaine. Ce matin, nous avons parlé d'une cédule de travail
qui nous conduisait à vendredi. D'après certaines rumeurs, que
les journalistes pourraient peut-être nous confirmer, il semblerait qu'il
y aurait d'autres événements qui attireraient notre attention,
qui réclameraient notre travail la semaine prochaine. Je ne voudrais pas
que les mémoires de ceux qui se présentent devant nous arrivent
après que les travaux de la commission seront terminés. Comme le
ministre du Travail n'est pas présent, je ne demande pas à M.
Jolin de répondre à la question, mais j'aimerais que la question
soit référée au ministre du Travail et qu'il nous donne le
point de vue du gouvernement à ce sujet.
M. LE PRESIDENT: II semble avoir été admis, tout à
l'heure, qu'un délai maximum de cinq jours était suffisant pour
permettre la présentation des mémoires.
M. JOLIN: D'accord en ce qui me concerne, en cinq jours, je serai en
mesure de soumettre un mémoire.
M. CARDINAL: Mais il faudra que cela s'applique à tout le monde.
C'est surtout cela que je veux dire. Parce que nous avons eu le même
problème à la première réunion où nous ne
savions pas si ça devait être le 1er octobre, ou le 2 octobre;
finalement cela a été entendu pour le 6 octobre, pour la tenue de
la commission. Je pense qu'il faudrait avoir la même convention pour que
les gens soient tous égaux dans leurs discussions, leurs
répliques et leurs exposés.
M. LE PRESIDENT: D'accord. Un délai de cinq jours est suffisant
en ce qui vous concerne?
M. JOLIN: On fera l'impossible.
M. LE PRESIDENT: Comme d'habitude. Merci.
M. CARDINAL: Vous ferez comme nous, vous travaillerez en fin de
semaine.
M. JOLIN: Cela arrive, M. Cardinal.
Groupes Reynolds, Beloit et Marine
M. JOLIN: J'aimerais vous soumettre, Messieurs, certaines
considérations pratiques, parce qu'il serait un peu prétentieux
de ma part de revenir sur les exposés assez complets qui ont
été faits jusqu'à maintenant, considérations
pratiques qui, je crois, pourraient s'appliquer, sans que j'en aie le mandat
nécessairement, à tous ceux qui oeuvrent dans le secteur
industriel et manufacturier.
Le groupe Beloit, pour vous permettre de vous situer, s'occupe de
fabriquer des machines destinées à fabriquer le papier, des
pompes pour fins industrielles et commerciales, et, éventuellement, de
fabriquer, si le marché le permet, et compte tenu de certaines
dispositions législatives, des machines-outils. Le groupe Reynolds,
comme vous le savez sûrement, s'occupe de la transformation de
l'aluminium sous toutes ses formes pour fins industrielles, commerciales et
domestiques. Quant au groupe Marine, ses activités sont fort connues et
très variées. Elles vont du dragage à la construction
maritime, en passant par la construction et l'installation de turbines et je
dirais aussi à l'entretien de turbines et à toutes les autres
activités qui peuvent se situer en de ça de ces limites.
Tous les employés des clients que je représente sont
actuellement liés par une convention collective en vigueur. Tous, sans
exception. Quand j'entends tous, ce sont ceux qui pour-
raient éventuellement être liés par le
décret, si on conservait la juridiction industrielle que les parties ont
actuellement négociée. Quand je parle des parties, je parle des
parties contractantes.
Nos clients, en aucun temps, sauf en de très rares exceptions, ne
font ce qu'on appelle généralement de la construction. Lorsqu'ils
en ont à faire, ils retiennent les services d'entrepreneurs
spécialisés, ou s'assujettissent aux divers décrets, comme
la loi l'exige, paient les taux de salaires et maintiennent les conditions de
travail exigées par les décrets. Ce ne sont pas des employeurs
professionnels au sens de la loi et ils constituent, dans le domaine
industriel, un secteur important, puisqu'ils emploient environ 6,000 à
6,500 employés.
Ce qui a surpris mes clients, c'est qu'on a voulu les assujettir
à des dispositions législatives conçues dans un contexte
de construction, donc un contexte économique démographique
totalement différent de celui où ils oeuvrent
généralement. Nous ne faisons aucune construction; nous
procédons à l'occasion, évidemment, à
l'installation d'équipement et de machinerie, ce sur quoi je reviendrai
dans quelques instants.
J'avais prévu entretenir les membres de la commission de l'aspect
ultra vires de certaines dispositions de la législation actuelle et de
ce qui a été négocié par les parties; je m'en
abstiendrai pour faire miens les commentaires de Me Brunet et du Conseil du
patronat, là-dessus.
Au point de vue pratique, que voulons-nous? Nous voudrions qu'on exclue
du mot « construction » ce qui suit: d'abord, toute fabrication en
atelier quelle qu'elle soit; deuxièmement, tous travaux d'entretien,
avant tout. Je suis parfaitement conscient du problème que
soulève cette distinction qu'on doit établir entre ce qu'est la
construction et l'entretien, mais, encore là, je ne vois pas d'autre
moyen plus utile, plus facile ou plus adapté dans les circonstances que
de retenir les distinctions que le code civil a déjà faites en ce
qui concerne les améliorations locatives, les réparations
mineures ou majeures. Je suis parfaitement d'accord qu'il n'y a aucun texte de
loi, si sages soient nos législateurs, pour régler tous les
problèmes et il restera cette zone grise où il y aura des litiges
qui se soulèveront à l'occasion.
Je soumets respectueusement que la position que Me Dumesnil a prise est
juridiquement absolument intenable et qu'elle ne concerne que ses propres
clients. Je crois que nous sommes ici devant la commission non pas pour
régler un problème particulier je fais exception
maintenant de cas comme l'Hydro, par exemple, la ville de Montréal ou
ceux sous l'empire de la Loi des cités et villes mais pour
régler le cas d'une collectivité, le secteur industriel et
manufacturier en regard du secteur de la construction.
Alors, j'ai dit: Exclure la fabrication en atelier, tous travaux
d'entretien, de rénovation ou de réparation effectués par
un employeur non professionnel, par ses propres employés et pour son
propre compte. J'exclus ainsi, en ce qui concerne le secteur industriel, de
vouloir effectuer des travaux de réparation pour autrui. Je voudrais
exclure aussi l'entretien, la réparation de machinerie,
d'équipement et de machines-outils. Si vous lisez bien et comprenez
comme je l'ai compris la juridiction industrielle que les parties ont bien
voulu se donner, vous y verrez qu'on a voulu inclure cet entretien.
L'érection et le montage en usine ou à pied d'oeuvre de
machinerie et d'équipement de toutes sortes.
Pour les employeurs du groupe Marine, il faudrait absolument exclure,
d'abord, les travaux de dragage ce n'est pas de la construction
les travaux de construction maritime qui requièrent un équipement
et un personnel hautement spécialisés et pour lesquels la plupart
des requérants, sauf exception, n'ont pas l'équipement
nécessaire; il faudrait aussi exclure la construction navale, parce que
ça n'a rien à voir avec la construction, au sens où on
l'entend généralement, et tous les travaux effectués avec
de l'équipement naviguant et flottant, en tenant pour acquis que cette
généralité n'inclut pas la description que j'ai faite
précédemment.
Au point de vue pratique, de quelle façon, à notre avis,
devrait-on procéder pour pouvoir inclure, à un moment
donné, ces exclusions?
Nous soumettons respectueusement qu'actuellement les dispositions telles
quelles du décret et du bill 38 rendent la légalité des
dispositions trop délicate pour que nous puissions nous engager dans des
modifications.
Nous suggérons que vous adoptiez le décret tel quel, mais
la seule référence que vous pourriez faire à la
juridiction industrielle serait d'y répéter les articles 1-e) et
2 de la loi 290 dans le décret.
Amender la loi 38 pour permettre au ministre de donner des avis,
c'est-à-dire d'abord une publication et des avis d'audition pour, par
après, adopter une réglementation selon la représentation
que les parties auront bien voulu lui faire.
En conclusion, je crois qu'on a voulu, avec le bill 290, faire une
tentative de planification et de pacification d'un secteur, avec des
résultats plus ou moins heureux selon les circonstances. Je peux assurer
l'assemblée que, si
les exclusions dont je vous ai fait part ne nous sont pas
accordées, j'ai l'impression que vous allez créer un autre
problème qui va se soulever au niveau d'un conflit entre les syndicats
qui représentent les ouvriers du secteur industriel et commercial et
ceux qui représentent les ouvriers du secteur de la construction. La
guerre est déjà commencée; moi-même, j'ai
été témoin d'un conflit survenu à
Trois-Rivières où, à cause d'une certaine
difficulté d'interprétation, il y a eu une guerre intersyndicale
entre des gens de la construction et des gens du secteur de la fabrication ou
de la transformation.
Vous voulez la paix; nous aussi, nous voulons la paix. Nous voulons
oeuvrer dans un secteur pacifique, rentable. Nous voulons être en mesure
d'offrir nos produits à des taux qui sont comparables pour nous
permettre de faire face à la concurrence tant sur le marché local
que sur le marché étranger. Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me Jolin. Maintenant, l'honorable
député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Jolin, juste une question. Vous nous avez dit que vous ne
vouliez pas élaborer sur certaines dispositions que vous
considériez ultra vires de diverses lois. Sans élaborer, est-ce
que vous pourriez... Est-ce que j'ai bien compris quand...
M. JOLIN: Je me suis peut-être mal exprimé. Je
prétends que le bill 290 ne peut permettre aux parties de définir
leur propre juridiction industrielle parce que ceci ne constitue pas, à
mon humble avis, une condition de travail. Donc, ce faisant, ça devient,
à mon avis, ultra vires.
M. BURNS: Ah bon! Vous ne vous référiez pas au bill 290
qui était ultra vires à certains égards ?
M. JOLIN: Pas encore.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions de la part des membres de la
commission? Alors, je vous remercie Me Jolin, et nous invitons, Me Guy Gagnon
à faire ses représentations.
Industrie du verre plat
M. GAGNON: M. le Président, messieurs les membres. Guy Gagnon,
avocat. Je représente l'Association des employeurs de l'industrie du
verre plat du Québec. Nous avons soumis un mémoire à votre
commission qui ex- prime le point de vue de l'association d'employeurs qui
groupe 80% sinon 90% de tous les employeurs de l'industrie du verre dans la
province de Québec et dont les salariés sont tous assujettis
à des conventions collectives de travail, en vertu de certificats
d'accréditation accordés depuis plusieurs années par la
Commission des relations ouvrières du temps.
Voici une autre industrie qui vient vous demander l'exclusion du
décret de la construction. Evidemment, je suis conscient, arrivant
à la fin de la journée comme ça, que les exclusions qu'on
vous demande semblent nombreuses.
Je me suis demandé pourquoi il y avait tant de réactions
dans ce sens-là, pour quelles raisons il y avait tant d'industries qui
venaient ici s'adresser à vous pour obtenir une exclusion
spécifique dans le décret.
Je pense que la raison fondamentale résulte de la façon
dont les parties à la table des négociations ont tenté
d'élargir leur juridiction industrielle et d'y englober non pas
simplement les juridictions qui avaient trait exclusivement à leur
domaine, c'est-à-dire à l'industrie de la construction, comme
l'exige le bill 290, mais à un ensemble d'industries satellites qui,
à l'occasion, se rendent sur les chantiers de construction.
Je pense qu'une distinction qui ne semble pas avoir été
faite jusqu'à maintenant, ici, c'est la suivante: Dans la construction
d'un immeuble, s'il y a, d'une part, des industries qui sont attachées
directement à cette construction et qui sont conditionnées par le
chantier, où l'employeur et le salarié sont conditionnés
par le chantier de construction lui-même, il y a une foule d'industries
satellites qui, elles, fabriquent en usine et ensuite vont faire l'installation
sur le chantier de construction.
Les problèmes de ces deux secteurs de l'industrie sont
complètement séparés et distincts. Dans le cas des
industries qui sont centrées sur les chantiers de construction, il va de
soi que ce phénomène d'être attachées au chantier de
construction en toute circonstance joue un rôle
prépondérant dans l'élaboration de la convention
collective. Il va de soi également que les parties contractantes qui se
sont assises à la table pour négocier étalent
essentiellement des parties qui représentaient ce secteur essentiel de
la construction. Toutes les industries satellites qui n'ont pas de
représentation substantielle dans l'industrie prenez par exemple
l'industrie du verre qui groupe un maximum de 3,000 ouvriers dans toute la
province de Québec; il n'y a aucun moyen pour les employeurs
de prétendre représenter les 20% prévus dans la loi
pour être assis à la table des négociations toutes
ces industries, dis-je, se trouvent, par la force des choses,
éliminées de la table et ne peuvent pas exprimer le point de vue
qu'elles doivent exprimer.
Il s'ensuit également que toutes ces industries, qui ont
généralement des conventions collectives, se trouvent à
participer à un régime mixte de relations ouvrières qui
n'a pas grand sens. D'une part, on tente en tout cas, en vertu des textes des
conventions proposées, de les assujettir à un régime
où il n'y a pas de certificat d'accréditation, où il n'y a
pas de convention particulière et où le salarié ne vit
qu'en fonction d'un chantier de construction. Par ailleurs, elles-mêmes
ont des salariés qui sont assujettis à un régime de
convention collective, qui sont assujettis à des certificats
d'accréditation et qui sont appelés a aller, de temps à
autre, à l'extérieur de l'usine, soit en chantier, soit i des
endroits qui ne sont pas des chantiers.
L'application pratique de ces deux régimes à la même
entreprise s'avérera certainement impossible. Dans les circonstances,
pour ce qui est de l'industrie du verre, nous avons soumis un mémoire
exposant d'une façon très précise les motifs pour lesquels
l'industrie peut être considérée comme une industrie qui
n'est pas l'industrie de la construction. Le bill 290 dit à l'article 2,
que la présente loi s'applique aux employeurs et aux salariés de
l'industrie de la construction. Or, le lieutenant-gouverneur en conseil, en
1963 ou 1964, par le décret no 2051, a reconnu que l'industrie du verre
était une industrie distincte et a consacré cette reconnaissance
en établissant une juridiction professionnelle et industrielle qui a
trait à tout le travail exécuté par un employé ou
un employeur de l'industrie du verre, que ce soit dans son usine ou à
l'extérieur, en chantier ou non.
Je soumets respectueusement qu'il faudrait maintenir cette distinction,
qu'il faudrait exclure l'industrie du verre du décret de la construction
et cela ne pose pas de difficulté quant à l'application du
bill 290 et maintenir le décret de l'industrie du verre qui ne
devrait pas être affecté.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gagnon. Maintenant, je ne veux pas
déroger i la tradition. Y a-t-il des questions? Pas de question?
Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voudrais simplement poser une question
à Me Gagnon. Les entreprises que vous représentez fabri- quent du
verre. Vous voulez naturellement qu'on exclue ces entreprises du décret.
Maintenant, vous fabriquez et d'autre part vous installez
également...
M. GAGNON: Par les mêmes salariés.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et ce sont les mêmes gens qui font ce
même travail. Ils fabriquent et ils installent. Evidemment, il y a des
catégories spécialisées à l'intérieur de ces
industries. Mais à partir du moment où on installe une devanture
de magasin, etc., est-ce que c'est de la construction, à votre avis, ou
non? Si je fais faire chez moi, par exemple, un portique en verre, est-ce qu'on
fait de la construction, à votre avis?
M. GAGNON: Evidemment, c'est une activité qui ressemble
étrangement à de la construction, puisque c'est une
activité qui consiste à travailler sur un immeuble. Mais si cela
participe de la construction, cela n'appartient pas à l'industrie de la
construction comme telle. C'est la distinction qui doit être faite, je
pense. L'inconvénient de ce qui se passe actuellement, dans l'esprit en
tout cas des gens qui sont assis à la table des négociations,
c'est qu'ils veulent assujettir des personnes qui ne sont pas là et
qu'ils veulent assujettir des activités qu'ils ne font pas, avec le
résultat évident qu'ils vont imposer des conditions
inapplicables. La raison de toutes les objections que vous avez eues
jusqu'à présent, si vous les analysez, la raison fondamentale est
toujours celle-là. Ces gens disent: C'est très bien tout ce que
vous dites, mais cela ne s'applique pas chez nous; ce n'est pas possible, il
n'y a aucun moyen de le faire.
Je peux vous donner un exemple concret dans l'industrie du verre. Il y a
une question de limitation d'heures de travail, je pense, dans le décret
de la construction qui ferait qu'il n'y aurait pas possibilité de faire
du travail en dehors des quarante heures. Bien, dans l'industrie du verre,
c'est impossible. Quand une vitrine est cassée la nuit, il faut la
réparer. Vous avez eu les événements du 7 octobre l'an
dernier. Si l'industrie du verre avait été incapable de
répondre aux besoins de cette situation, cela aurait été
tragique. Vous avez le problème de la mobilité de la
main-d'oeuvre. Les salariés spécialisés se trouvent
groupés à Montréal et à Québec. Si on a
besoin de faire un travail à Sherbrooke malheureusement, il n'y a
pas de salariés spécialisés pour faire ce genre de travail
à Sherbrooke on ne peut pas, en vertu de l'article 16, imposer
aux sa-
larlés d'aller à Sherbrooke s'ils ne veulent pas le faire.
Il est clair que c'est une application absolument impossible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Gagnon, poussons ça à la
limite. Vous nous demandez une exemption pour un type d'industrie bien
caractérisée. Mais prenons chacune des industries qui fabriquent
un matériau qui entre dans la construction, est-ce que ces entreprises
n'en viendront pas à nous demander pareille exclusion? Prenez les
fenêtres d'aluminium, par exemple. On fabrique à un certain
endroit des fenêtres d'aluminium...
M. GAGNON: Cela fait partie de notre industrie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon. Qui est-ce qui les pose? Et au moment
où on les installe, est-ce que les gens qui les posent sont des
employés, des ouvriers de la construction ou si ce sont des
employés de la manufacture?
M. GAGNON: Ce sont les employés de l'Industrie du verre et il
n'en a jamais été autrement.
M. LAPORTE: II peut arriver avec le développement technique qu'un
immeuble en verre ait encore plus de verre que jamais et que ce ne soit pas de
la construction.
M. GAGNON: Bien, je soumets que si ça appartient à une
Industrie spécialisée qui peut être facilement
distinguée de l'industrie de la construction, il n'y a aucune raison
de...
M. LAPORTE: Très bien. Alors là, on va pousser le
raisonnement, si vous voulez. H y a des gens qui vont maintenant faire de la
préfabrication, du précontraint, des murs complets et tout ce
qu'il y a c'est un mur complet et du verre parce que ces deux fabrications qui
sont des spécialités, ce n'est pas de la construction au sens de
la loi, à votre avis?
M. GAGNON: Evidemment, moi, je m'attache exclusivement à ce qui
intéresse mes clients qui est l'industrie du verre.
M. LAPORTE: Mais si demain...
M. GAGNON: Il serait difficile pour moi de parler d'industries autres
que celle-là.
M. LAPORTE: Est-ce que je peux imaginer que si vous veniez demain nous
parler du précontraint, vous auriez une autre attitude?
M. GAGNON: Je représente certaines compagnies dans le
précontraint. Je doute qu'elles veuillent manifester le même point
de vue, parce que le problème n'est pas du tout le même. Dans
l'industrie du verre, il y a toute une foule d'activités que le
même salarié exécute...
M. LAPORTE: D'accord.
M. GAGNON: ... en dehors de l'usine et qui ne se déroulent pas
dans un chantier de construction.
M. LAPORTE: J'ai l'impression que si on enlevait de la construction tout
ce qui n'est pas de la construction, la construction ne serait pas
terminée.
M. GAGNON: Evidemment, il n'y a rien à dire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon...
M. GAGNON: Cela n'empêche pas les salariés d'être
protégés par des conventions collectives.
M. LAPORTE: Oui.
M. GAGNON: Cela n'empêche pas les régimes de
sécurité syndicale et de sécurité d'emploi
d'agir.
M. LAPORTE: Sur cela, je suis d'accord qu' ils ont une autre protection.
Mais quand le législateur décide il est évidemment
facile de constater aujourd'hui que cela ne se fera pas sans heurt et que c'est
très complexe de regrouper autant que possible en une seule
unité tout ce qui est construction, cela pose un problème
différent de celui que vous soulevez. Ce n'est pas tellement la
protection de l'ouvrier ou de l'employeur, mais c'est l'unité.
M. GAGNON: Oui, évidemment, mais ce que je soumets
là-dessus, c'est que la distinction que la loi permet de faire, et qui
permettrait de résoudre plusieurs de ces problèmes, n'est pas
faite présentement. Si cette distinction était faite, je pense
qu'il y aurait davantage possibilité de régler les
problèmes que vous avez devant vous, parce que les parties
concernées auraient un mot à dire dans l'élaboration des
conditions de travail qui les concernent. Cest ce qui fait présentement
défaut
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Gagnon, j'ai encore deux observations ou
questions à vous poser. Supposez, par exemple, qu'on veuil-
le faire disparaître toutes les fenêtres qu'il y a ici et
qu'on les remplace par une immense panoramique, et qu'on fasse appel aux
services des entreprises que vous représentez. Est-ce qu'à ce
moment-là l'installation de la panoramique est de la construction?
M. GAGNON: C'est de la construction dans le sens large du mot. Cela
n'appartient pas à l'industrie de la construction comme telle. C'est
ça la distinction qu'il faut faire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais vous poser une autre question en
partant d'un exemple que je connais bien. Il y a dans la région de
Chicoutimi un ingénieur qui a mis au point un système de
fabrication appelons cela des briques, si vous voulez, des blocs de
plastique au moyen duquel on pourra construire des maisons comme un
enfant bâtit n'importe quoi avec un jeu de blocs. Cest au point, c'est
approuvé et n'importe qui pourra emboîter ces blocs et construire
une maison.
Cette entreprise vient donc ici devant nous et nous demande exactement
la même exemption. Or, le but de cette entreprise, c'est de construire
des maisons. Est-ce que cette entreprise serait une entreprise de construction
ou non, ou simplement une entreprise de fabrication? Vous voyez. Je vous donne
cet exemple...
M. GAGNON: D'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et je ne vous demande pas d'avis
là-dessus. Je connais bien le problème là-bas. Mais je
vous donne cet exemple pour faire sentir aux membres de la commission qu'il est
extrêmement difficile de considérer toutes ces demandes
d'exemption ou d'exclusion à partir des critères que vous avez
défendus très brillamment et dans une langue dont je vous
félicite, M. Gagnon. Cest extrêmement difficile pour le
législateur, pour le gouvernement, d'acquiescer à votre
requête, si chacune des entreprises fait une demande analogue
prétendant que ce qu'elle fait relève exclusivement de la nature
de son entreprise, et, même si ça doit prendre place dans de la
construction, ce n'est pas de la construction.
M. GAGNON: Est-ce que vous me permettez de faire un commentaire?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie, M. Gagnon.
M. GAGNON: Dans le cas que vous avez soulevé, je pense qu'il est
assez clair que l'ac- tivité essentielle de l'industriel est le chantier
de construction. Dans le cas de l'industrie du verre, cette affirmation n'est
pas possible. Le chantier de construction n'est qu'une partie infime de son
activité. La pose du miroir, par exemple, ne peut pas être
considérée comme de la construction. La réparation d'une
vitrine ne peut pas être considérée comme de la
construction. Elle ne l'a jamais été.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La pose d'une vitrine...
M. GAGNON: La pose d'une vitrine...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... fait partie de la construction d'un
magasin, par exemple.
M. GAGNON: Cela fait partie d'un immeuble mais ce n'est pas de la
construction, n y a une distinction très importante à faire, je
pense.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. GAGNON: C'est parce que cette distinction n'est pas faite je
vous le soumets avec tout le respect que je vous dois que les
problèmes se posent. Parce que, à ce moment-là, on
élimine de la négociation les parties qui ont un
intérêt à négocier et qui savent de quoi elles
parlent.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député de Maisonneuve,
d'abord.
M. BURNS: M. Gagnon, vous avez dit que le travail, en somme, se
partageait en deux parties: une partie en atelier, c'est-à-dire la
fabrication, et une partie plus proprement dite, dans les chantiers, lors de la
pose du verre, etc. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire quelle
est la proportion de l'un et de l'autre qui est faite par ces
employés?
M. GAGNON: Non, malheureusement, pour une raison très simple. Sur
les 250 employeurs qu'il y a dans l'industrie du verre, il y en a
peut-être trois ou quatre qui sont de grandes entreprises et qui, elles,
pourraient techniquement diviser leur travail de manière que des gens
soient exclusivement dans les chantiers de construction. Cela serait pensable
parce que l'orientation de leur travail pourrait permettre une distinction
comme celle-là. Mais l'ensemble de l'entreprise et celle qui souffre le
plus de la situation présente et qui est menacée de disparition,
ce sont tous les petits
entrepreneurs qui, eux, font en somme du service. Ils iront
peut-être jusqu'à ce qu'on appelle la devanture de magasins; ils
n'iront certainement pas à d'autres formes de travail. Tous ces gens se
trouvent dans une situation absolument désespérée parce
que le même salarié doit, nécessairement, travailler
à tous les niveaux de l'entreprise. Les divers degrés de
salaires, les régimes mixtes dans lesquels ils se trouvent
plongés rendrent la tâche absolument impossible. Ils ne sont pas
capables de contrôler les heures de travail de ces salariés qui
travaillent souvent seuls et sur lesquels il n'y a aucun moyen d'exercer un
contrôle.
M. BURNS: Vous n'avez pas le moyen de nous dire qu'elle est la
proportion d'heures faites, disons, dans le cas où vous avez les
mêmes salariés qui feraient le travail du début à la
fin. Vous ne pouvez pas nous dire la proportion des heures faites en atelier et
à l'extérieur?
M. GAGNON: Je regrette. Je peux vous en donner une idée
mais...
M. BURNS: Non, non, d'accord.
M. GAGNON: ... cela serait de la haute fantaisie.
M. BURNS: Maintenant, quand vous nous dites que cela participe à
l'industrie de laconstruction mais que cela n'est pas un travail de
l'industrie de la construction, en quoi cela n'est-il pas de la
construction?
M. GAGNON: Bien, si vous considérez tous les décrets
jusqu'à maintenant, dans l'industrie de la construction...
M. BURNS: En fait, c'est une raison historique que vous nous donnez.
M. GAGNON: Bien c'est une raison qui s'impose des faits. Lorsqu'on nie
les faits, on finit par les payer chèrement. Si on fait l'historique des
décrets de construction, tous les décrets se sont toujours
appelés des décrets relatifs aux métiers de la
construction. C'était une orientation de convention collective par
métiers, sur chantier de construction. Tout ce qui conditionnait ces
conventions de travail était précisément le chantier de
construction. Lorsqu'on arrive avec un concept industriel, comme dans le cas de
l'industrie du verre, toutes les relations patronales-syn- dicales se placent
sur un plan complètement différent et il n'y a pas moyen de
mêler les deux. C'est le problème majeur auquel nous faisons face
depuis plusieurs années et particulièrement depuis que le bill
290 semble s'appliquer à une partie de nos activités.
M. BURNS: Bien, justement, je relie votre réponse à
l'absence de réponse antérieure, si vous voulez. Je comprends
bien que vous n'ayez pas les chiffres en main, mais, s'il advenait, par
exemple, que la majeure partie du travail, c'est-à-dire la partie
importante du travail, à cause d'une meilleure mécanique pour
fabriquer votre verre, soit faite sur les chantiers, à ce
moment-là, en quoi pourriez-vous défendre le point de vue que ce
n'est pas de la construction?
M. GAGNON: Ce serait indéfendable. Je n'ai jamais prétendu
le contraire. C'est sûr que, si l'activité essentielle de
l'employeur et du salarié est le chantier de construction, on n'a rien
à dire. Mais, ce n'est pas le cas, précisément. Les cas
d'exception ne devraient pas régler le problème de
l'industrie.
M. LE PRESIDENT: M. Lefebvre.
M. LEFEBVRE: Monsieur s'est plaint tantôt que ses employeurs
n'étalent pas représentés, je pense, à la table des
négociations. Est-ce que vos employeurs, monsieur, ont été
refusés parmi les associations patronales représentatives?
M. GAGNON: Bien, je peux vous dire là-dessus qu'ayant
été avisés, par le ministère qu'il était
possible que notre décret soit affecté par le bill 290 et par les
circonstances qui l'entourent, nous nous sommes adressés
immédiatement à la fédération pour dire: Nous avons
un intérêt particulier et très facilement
définissable. Auriez-vous l'obligeance de nous recevoir parmi vos
membres et de nous déléguer à la table des
négociations, pour que nous puissions faire les représentations
qui s'imposent? Cela nous aurait permis évidemment, de préserver
le caractère industriel de nos activités.
Cette demande a été refusée et nous ne sommes pas
à la table des négociations. Nous protestons depuis toujours,
mais ça ne donne pas de résultats efficaces.
M. LEFEBVRE: Mais ma question était; Avez-vous fait la demande
pour adhérer aux associations patronales représentatives, comme
le veut l'article 404 des décrets actuels?
M. GAGNON: C'est précisément la réponse qu'on nous
a donnée: Appartenez à deux associations, la vôtre et la
nôtre; là, vous aurez l'occasion de nous faire vos
représentations et nous irons à la table pour vous. C'est
précisément ce que nous ne trouvons pas acceptable, parce que
ça nous impose en fait d'appartenir à deux associations et de
payer des cotisations qui sont assez lourdes merci dans les deux
associations.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.
M. MARCHAND: M. Gagnon, dans le cas d'une maison d'appartements de 100
à 120 étages, nous voyons souvent les camions de vos industries
sur les lieux, une, deux ou même trois semaines, tailler, recouper et
placer le verre. A ce moment-là, c'est comme un madrier ou un feuille de
contreplaqué qu'on coupe, qu'on découpe et qu'on replace. Je
pense que ça devient un peu de la construction.
M. GAGNON: Remarquez que je n'ai pas nié que l'activité
elle-même participe de la construction. Ce serait une erreur monstrueuse.
Ce que je dis, c'est que l'activité elle-même n'appartient pas
à l'industrie de la construction. La loi no 290 nous dit que les
employeurs et les salariés de l'industrie de la construction sont
couverts. Notre prétention, c'est que, d'accord, nous avons des
activités qui à l'occasion s'apparentent à la
construction, sont de la construction, mais ce n'est pas comme employeurs de
l'industrie, et comme tels, il est relativement facile de nous exclure
puisqu'on n'a pas voulu nous permettre de faire les représentations
appropriées en temps voulu. Les conséquences pour nous sont
désastreuses. Si nous sommes assujettis maintenant, l'avenir est
imprévisible. C'est quand même 2,500, 3000 employés qui
sont en cause et qui travaillent douze mois par année, contrairement au
caractère saisonnier du travail de la construction.
M. MARCHAND: Ils sont répartis en combien de compagnies?
M. GAGNON: A peu près 250.
M. MARCHAND: Toutes ces compagnies fabriquent-elles le verre?
M. GAGNON: Aucune de ces compagnies ne fabrique le verre comme tel, dans
le sens que le verre n'est pas coulé chez elles; elles le
travaillent.
M. MARCHAND: Elles le taillent pour la construction.
M. GAGNON: Elles le taillent, elles font des châssis, des
comptoirs, des miroirs. Elles font une multitude d'objets.
Evidemment, je n'ai pas toute l'industrie en tête, mais elles
fabriquent une multitude de produits qui sont généralement
destinés à l'immeuble, mais qui peuvent être
destinés à d'autres activités ou à d'autres
fins.
M. LE PRESIDENT: Le président de la FTQ. UNE VOIX: IL est six
heures.
M. LABERGE: Non, non, non, je vais être très bref. Si j'ai
bien compris la thèse de M. Gagnon, vu que ça prend plus de temps
pour fabriquer le verre plat dans l'usine que pour l'installer sur le chantier,
ça ne devrait pas être de la construction. A ce moment-là,
est-ce que M. Gagnon appuierait la thèse suivante: vu qu'il ne faut que
cinq minutes pour installer une poutre d'acier, extraire le minerai, le
charrier au four, le faire fondre et en faire une poutre, ça ne devrait
pas être de la construction?
M. GAGNON: C'est apparent que c'est du « charriage ». C'est
le cas de le dire. Je soumets que poser la question, c'est y répondre
puisque M. Laberge parle de plusieurs industries et non pas d'une seule.
L'extraction du minerai est faite par une industrie; le « processing
» se fait par une autre. Je ne pense pas qu'on parle de la même
chose.
M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux, je crois, avait une question à
poser. Si vous voulez vous approcher.
M. DION: Michel Dion, de la fédération. Je ne voudrais pas
engager un débat avec une autre partie patronale, mais seulement
souligner certains problèmes auxquels M. Gagnon a fait allusion.
D'abord, sa demande de reconnaissance au niveau de la
fédération.
Vous savez que l'industrie du verre plat a obtenu, il y a, je pense,
deux ou trois ans, une reconnaissance pour négocier son propre
décret. Nous n'avons pas d'objection à ce que l'industrie du
verre plat négocie ses conditions de travail en ce qui concerne les
travaux d'atelier. Comme fédération, c'est clair que nous ne
pouvons pas admettre que l'industrie du verre plat, en tant que faisant des
travaux sur chantier, à pied d'oeuvre, soit exclue de l'industrie de la
construction. Or, il semblait que l'une des exi-
gences de cette association-là, c'était qu'une fois admise
au sein de la fédération, la fédération la
défendrait pour exclure l'industrie du verre plat des décrets de
la construction.
Alors, disons que c'était déjà, quant à
nous, un empêchement à reconnaître cette
association-là. Le deuxième problème est le suivant: il
faut quand même avouer qu'en faisant l'installation de leurs produits sur
les chantiers, la majorité de leurs membres sont membres de nos
associations régionales. Alors, nous ne croyons pas avoir pu, à
ce moment-là, causer de préjudice à l'association. Il faut
quand même avouer, à ce moment-ci, que la fédération
je pense que le ministre du Travail est au courant en vertu d'un
mémoire qu'on lui a soumis étudie des modifications
à ses structures de façon à pouvoir agrandir son champ de
représentativité à l'égard de groupements tels que
celui-là. C'est clair que ça fait tousser des gens. H est clair
que nous n'aurons jamais l'intention...
M. LAPORTE: Pouvez-vous m'expliquer ce rhume collectif qui vient de
s'installer en arrière?
M. DION: Je vous demande pardon, M. le ministre, mais je n'ai pas
compris.
M. LAPORTE: Ecoutez ce rhume collectif.
UNE VOIX: Cela vient de techniciens qui sont au courant.
M. DION: C'est parce qu'il y a tellement peu de parties qui ont pu se
mettre au courant du mémoire.
Messieurs les membres de la commission, même si, à un
moment donné, nous modifiions nos structures, pour admettre les gens du
verre plat, pas plus que les gens du fer ornemental ou d'autres industries, si
ce sont des travaux de construction, ils ne pourraient être exclus du
décret de la construction. Ils devront, quant à nous, être
inclus dans le décret de la construction parce que ça fait partie
d'un tout, du travail de la construction.
Je veux, quand même, vous souligner un dernier problème. Il
n'y a pas tellement longtemps, on a eu affaire aux gens de l'association du
verre plat qui sont en grande majorité situés dans la
région de Montréal. On leur a offert de former une section du
verre plat à Montréal de façon à leur donner un
droit de parole valable. Il est clair que tous et chacun des individus dans la
province ne peuvent pas demander d'avoir une place à la table des
négociations. Alors, on a tenté de trouver un mé- canisme
qui leur permette un droit de parole valable. Ce droit de parole, au niveau de
l'association de Montréal, ils l'ont refusé. Je ne voudrais pas
qu'on laisse la commission avec l'impression que la fédération a
tenté d'éliminer les gens du verre plat de l'industrie de la
construction.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais corriger d'abord votre identité, M.
Dion.
M. DION: Michel Dion, de la Fédération de la
construction.
M. GAGNON: Si vous me le permettez, j'aimerais juste faire deux
commentaires là-dessus. Le premier, c'est que nous avons demandé
de devenir membres de la fédération comme association, pour
être admis à la table des négociations. Ce n'était
donc pas pour en être exclus. Deuxièmement, lorsque M. Dion
affirme que nos membres sont membres des associations régionales, je
pense qu'il exagère légèrement. Il y a peut-être
quelques membres qui ont dû, par nécessité, devenir membres
de certaines associations de construction régionales, mais, la plupart
sont strictement membres de l'Association de l'industrie du verre.
Quant au refus de faire partie d'une section, la condition sine qua non
était de devenir membre comme individu de l'Association de la
construction et non pas comme association. A ce moment-là, par
solidarité, tous les membres de l'industrie du verre ont refusé
ça catégoriquement. Cela fait des années que l'Association
de la construction de Montréal veut nous manger; nous sommes
habitués.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, Me Gagnon. Quant à moi, ceci
termine la longue liste des organismes non impliqués dans la
négociation, qui avaient à faire des représentations.
M. DELAGE: Puis-je intervenir? Mon nom est Pierre Delage, de
l'Association des manufacturiers canadiens.
M. LE PRESIDENT: M. Delage, vous pouvez procéder,
malgré...
M. LAPORTE: Est-ce le dernier? Si nous n'avons que M. Delage à
entendre, nous allons l'entendre; autrement, nous allons ajourner la
séance à huit heures. Si M. Delage est le dernier qui veut
être entendu, je pense que cette commission serait d'avis que nous
prenions quelques minutes pour que nous puissions ensuite passer toute notre
veillée à lire les nombreux mémoires qui nous ont
été remis.
M. GAGNON: J'ai un document que je voudrais présenter au nom de
la fraternité. J'aimerais passer tantôt, j'ai une élection
municipale à gagner à Montréal. Vous comprenez
ça.
M. LAPORTE: Nous ne sommes pas des électeurs, là!
M. LE PRESIDENT: En définitive, il y aurait deux
représentations à faire, si je saisis bien?
UNE VOIX: Deux courtes. On est aussi bien de régler ça
tout de suite.
M. LE PRESIDENT: M. Delage, vous êtes invité à
prendre la parole.
M. DELAGE: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, il se fait très tard et je sais que ce que j'ai à
dire a déjà été dit à maintes et maintes
reprises. Je ne voudrais pas le répéter.
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous, s'il vous plaît, vous identifier
ainsi que votre association.
M. DELAGE: Pierre Delage, de l'Association des manufacturiers
canadiens.
M. LE PRESIDENT: C'est de la construction ça, M. Laberge.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ou de l'entretien.
Manufacturiers canadiens
M. DELAGE: Nous avons deux points que nous voulons traiter ici. Le
premier est la juridiction, le champ industriel, qui est proposé dans le
décret de la construction; le deuxième est la parité
salariale.
La juridiction, il en a été traité, on en a dit
beaucoup là-dessus, je n'ai aucunement l'intention de
répéter ce qui a été dit. Je fais miennes les
opinions qui ont été données par le Conseil du patronat,
par les différents avocats qui sont ici présents. Des situations
sont créées par cet élargissement, si vous voulez, des
situations intolérables chez les industriels, donc chez nos membres, les
manufacturiers.
Vous allez prendre connaissance, dans le mémoire, des
répercussions pratiques. Je voudrais aussi parler des objections
juridiques qui ont également été discutées
aujourd'hui. Il ne me semble pas nécessaire de le faire encore,
c'est-à-dire il me semble que le champ d'application qui est
proposé est ultra vires, si l'on considère les définitions
données dans le bill 290 concernant la construction.
Messieurs je vous fais donc grâce de cette argumentation. Vous
avez le texte devant vous. Finalement, puisque nous avons déjà un
mécanisme qui est le bill 290, qui permet grâce au
lieutenant-gouverneur en conseil, d'accepter ou de refuser le champ
d'application industriel qui est proposé, je ne vois pas comment il
serait nécessaire de proposer autre chose. Il appartient aux gens, aux
parties contractantes de négocier le champ d'application et de le
soumettre, et ils peuvent le faire en vertu du bill 290. Je suggère donc
que ce mécanisme qui existe soit maintenu.
J'aurais aussi une autre recommandation. L'entretien qui est visé
et qui est le propre, je crois, de l'industrie manufacturière,
n'appartient pas à l'industrie de la construction et il ne devrait pas
être considéré comme tel. Il y a peut-être des
différences à faire pour décider ce qui est de l'entretien
ou de l'industrie de la construction. Je pense qu'elles sont claires et assez
évidentes. Toutefois j'offre mes services, si jamais il était
décidé que l'on veuille faire une définition; je serais
prêt à offrir ma collaboration.
Ainsi, si l'entretien n'est pas inclus aux termes du bill 290, et
c'est ce qui est bien indiqué dans la loi je crois qu'il serait
permis de préciser ici le voeu que l'association formule,
c'est-à-dire de façon là, je traite d'un
problème très particulier à l'industrie
manufacturière à donner une garantie adéquate de
fonctionnement, et qu'il soit permis aux manufacturiers de machinerie et
d'équipement et je parle de ceci parce qu'il est bien question
dans le décret proposé qu'on inclue la machinerie et
l'équipement de faire faire l'installation et l'entretien, s'il y
a lieu, s'ils le désirent, par leurs propres employés.
J'en viens finalement à la parité salariale. Eh bien, je
vous réfère encore au document que vous avez devant vous. Nous
craignons les répercussions qu'il pourrait y avoir, si la parité
salariale était accordée dans l'industrie de la construction,
puisque ceci se réfléterait évidemment dans l'industrie
manufacturière. Nous nous opposons donc à la parité
salariale pour les raisons que vous avez dans le document.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Delage. Je ne sais pas s'il y a des questions
de la part des membres de la commission. Sinon, nous vous remercions.
Nous invitons M. Gagnon, même si cela va
à l'encontre de la procédure prévue, à
s'exprimer le plus brièvement possible.
M. DELAGE: M. le Président, j'aimerais vous faire part du fait
que je représentais ici, en même temps, M. Alex Harper, du Board
of Trade, qui était avec moi. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions de votre
brièveté.
Nous invitons M. Gagnon à ne pas frapper trop fort.
Ouvriers en électricité
M. GAGNON: J'essayerai d'être bref. Je comprends que tout le monde
est pressé, moi aussi. On a discuté longuement, ici,
d'économie. Tout le monde a semblé se perdre. Il y avait des
raisons. C'est que la science économique développe ses propres
lois au fur et à mesure du développement. Or, on ne peut pas
employer les barèmes employés en 1900 lors de l'accumulation
primitive du capital et les transporter tout simplement dans une situation
où les monopoles jouent un rôle important.
Je trouve qu'il est un peu osé, pour ne pas dire stupide, de nous
demander: Etes-vous pour la parité salariale absolue ou non? Aussi bien
nous demander tout de suite si nous sommes pour la vertu absolue ou non?
Essayez de répondre à celle-là et vous pourrez
répondre à l'autre question.
Il est évident que ce sont des objectifs humains que l'on place
devant nous. Je suis pour une situation ou le gouvernement et les parties
intéressées maintiennent l'objectif de la parité
salariale. Je dis, en plus de cela, qu'il est non seulement possible mais
absolument nécessaire d'appliquer immédiatement la parité
salariale. Je dis plus que cela qu'elle est déjà
réalisée en grande partie, dans l'industrie lourde de la
construction, dans là proportion d'à peu près 95%. Notre
devoir n'est pas de restreindre cela, mais de l'élargir. C'est cela, un
objectif humain.
Il est faux de penser que les humains, en 1970, sont simplement des
esclaves de quelques barèmes économiques...
Les humains sont plus armés que ça à l'heure
actuelle. Il ne faudrait pas oublier, lorsqu'on parle de ça, que nous
vivons dans une province de fournisseurs de matière première, une
province où les investissements américains et autres ont une
large part. Et cela va influencer et cela influence sans aucun doute, à
savoir si on est en Afrique ou bien dans la province de Québec, dans un
contexte donné. Je dis qu'on est dans une province qui dépend
largement des investissements étrangers, une province de fournisseurs de
matériaux. Qui va maintenant essayer de maintenir, après qu'on a
fait le point, que nous sommes dans des grands ensembles internationaux? Qui
pourrait maintenir que la parité salariale à Saint-Romuald va
ébranler le cours de la Bourse à New-York? Mais, c'est de la
folie furieuse, cette affaire-là! Cela ne tient pas. C'est, cependant,
le genre d'arguments qu'on a. Que la parité salariale à
Baie-Comeau va faire monter soudainement le prix du Boston Daily Paper, cela ne
tient pas plus. Il va falloir arriver en ville, en 1970, et s'apercevoir qu'il
y a autre chose en économique. C'est pour l'industrie lourde.
Cest à peu près la même chose pour les autres
secteurs. On a parlé du secteur commercial. Qu'est-ce qui arrive dans le
commerce? Ce sont des centres commerciaux qui s'établissent un peu
partout dans la province. Quels sont ces commerçants? C'est Steinberg's,
Zeller's, Dominion Stores. Est-ce qu'ils vendent moins cher à ces
endroits qu'ils vendent à Montréal? Alors, comment justifier
cette disparité? Elle n'a plus de sens. Elle n'a plus de sens dans la
mesure où c'est en train de se monopoliser, et on trouve cela dans les
quatre coins de la province.
En ce qui concerne le gouvernement, messieurs, je vois difficilement un
gouvernement qui perçoit à peu près les mêmes taxes
partout faire une différence entre ses contribuables. Ils doivent
être placés au même diapason, sans compter que, dans la
mesure où on n'aura pas de parité salariale, je ne vous vois pas
recevoir des gros montants en taxes de la Gaspésie. Cela va plutôt
coûter cher en assistance publique. On a le choix, à un moment
donné: ou rester dans l'«arriérisme » le plus complet
et ne pas sortir du pétrin dans lequel on est à cause des
disparités salariales, ou prendre le boeuf par les cornes, pour vous
donner une image de style, et avancer dans la bonne direction.
Moi, je crois que l'objectif que s'était donné le bill 290
est bon. Je ne dis pas qu'on va l'atteindre telle semaine, mais je dis qu'il
doit être maintenu, et qu'il doit être étendu partout
où c'est possible.
Mais je m'aperçois ici, par exemple, qu'il y a un fort groupe de
gens qui ont peur. Nous disons, nous, que c'est un stimulant, mais il y a par
contre un autre gros groupe de gens qui ont une peur irraisonnée de
cette parité salariale possible, même dans des domaines qui ne
sont pas le leur.
Quels sont les arguments devant les nôtres? Je dis les
nôtres, c'est par extension, car je voudrais en avoir un tort groupe avec
moi. L'argument principal, c'est que cela perturbera l'économie. Moi, je
maintiens que cela perturbera les bas salaires et il est temps qu'on le fasse.
C'est la première des choses. Quant à l'autre argument
clé, ou qui semble être un argument clé, il nous dit ceci:
D'autres voudront l'avoir. Et là, nous allons arrêter tout cela,
parce que d'autres voudront l'avoir. Mais ce n'est pas un barème
scientifique, cela. Moi, je peux bien désirer votre salaire, messieurs,
mais cela ne change rien. C'est un désir, c'est une émotion, mais
il n'y a rien de scientifique là-dedans. Alors aussi bien
déclarer tout de suite qu'à force de voir un singe grimper dans
un poteau, nous allons devenir les meilleurs grimpeurs du monde! C'est cela,
l'effet de l'entraînement, en somme. Il n'y a rien d'autre chose que
cela.
Or, il y a d'autres lois que cela ne riez pas trop fort, car je
suis pressé, et vous me dérangez il y a d'autres lois que
ça. Il y a le fait que les salaires s'équilibrent selon des lois
économiques. Or, dans les métiers de la construction, moi qui
représente les métiers mécaniques, je dois vous dire que
la seule base qu'on peut prendre pour expliquer pourquoi un électricien
reçoit tant et pourquoi un député reçoit tant
aussi, c'est que les heures de travail sont déterminées par la
somme d'efforts qu'on fait. Cela veut dire concrètement que, dans
l'heure de travail d'un électricien, on inclut, les dix ans où il
a été obligé d'apprendre sans rien retirer, les cinq ans
d'apprentissage durant lesquels il a retiré très peu.
C'est de même que s'établissent les heures de travail et
non pas simplement par l'effet d'entraînement. Les médecins ont
jusqu'à un certain point, très petit, raison de dire qu'il est
difficile d'oublier qu'ils ont 14 ans, 16 ans et 20 ans d'études.
Autrement, tout le monde refuserait d'être député pour
être charbonnier, parce qu'on commence à recevoir de gros salaires
tout de suite. Il n'est pas gros, le salaire.
Il y a ici tout le problème du travail simple et du travail
complexe dans lequel entrent d'autres catégories d'énergies. Ceux
qui veulent changer pour devenir des gars de la construction, qu'ils se
préparent à quelque chose de sérieux, à travailler
à peu près cinq ou six mois par année. C'est bien beau de
venir nous dire: Les gars de la construction gagnent $150 par semaine en
général, mais il n'y a pas de général. Il n'y a pas
d'hommes riches chez nous. Il y a des gars qui chôment six mois par
année. Alors, prenez les $153, puis divisez ça en deux, vous
allez avoir un maudit beau portrait de l'affaire. Et c'est de même d'un
bout à l'autre! Sans compter qu'on peut être député
peut-être jusqu'à 60 ans, messieurs, mais qu'on ne peut pas
être électricien sur la construction jusqu'à 60 ans.
La vie active d'un électricien diplômé, c'est entre
20 ans et 25 ans; ensuite, c'est un homme fini. Une dernière chose pour
attirer votre attention sur le fait que, dans les problèmes connexes
qu'apporte notre mémoire, on a découvert ceci, c'est que, dans la
région de Montréal, avec l'aide des gouvernements passés,
on a 8,000 permis d'électriciens en circulation, plus que dans le reste
de la province. Il va falloir faire quelque chose pour changer certaines lois.
Il y a 8,000 permis d'électriciens dans le décret 613 et à
peu près 7,000 dans le reste de la province. Sans compter que, sur les
15,000 là, d'un bout à l'autre, il y en a au moins 3,000 de trop.
Alors, on vous demanderait d'arrêter de nous en « pitcher »
par la tête plus vite qu'on peut en digérer.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Gagnon de cet exposé original. Je
crois que ceci met fin aux auditions. La séance est ajournée
à demain après-midi trois heures.
M. LAPORTE: M. le Président, oui, à demain
après-midi, trois heures. Disons que nous allons siéger demain
après-midi pour entendre les sept parties à la table des
négociations, dans un ordre qui n'est pas encore
déterminé. Nous pourrions peut-être nous entendre sur
ça demain matin.
Nous ne siégerons pas demain soir. Nous allons siéger
jeudi matin, jeudi après-midi, jeudi soir et vendredi matin, si cela est
nécessaire. Comme certains collègues me posaient la question tout
à l'heure, il est déjà prévu, puisque le premier
ministre l'a annoncé tout à l'heure, que le Parlement va
siéger lundi à 3 heures pour s'occuper d'un problème que
vous imaginez déjà.
M. le Président, demain après-midi, trois heures.
M. LABERGE: Je voudrais poser une question. Etes-vous au courant que le
café du Parlement est fermé demain?
M. LAPORTE: Oui, M. le Président. Vous ferez comme nous, vous
apporterez votre boîte à lunch.
UNE VOIX: Il est fermé jusqu'à mardi. M. LAPORTE:
Réparations d'urgence.
(Fin de la séance: 18 h 23)