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Commission permanente du travail,
de la main-d'oeuvre et de l'immigration
Etude des problèmes de l'industrie de la
construction
Séance du mercredi 15 janvier 1975
(Dix heures huit minutes)
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre,
messieurs!
Les membres de la commission, pour la séance d'aujourd'hui, sont
les suivants: MM. Bellemare (Johnson), Bérard (Saint-Maurice), Lachance
(Mille-Iles), Boudreault (Bourget), Burns (Maisonneuve), Charron
(Saint-Jacques), Bellemare (Rosemont), Cournoyer (Robert Baldwin),
Déziel (Saint-François), Tremblay (Iberville), Pelletier
(Kamouraska-Témiscouata), Car-pentier (Laviolette), Malépart
(Sainte-Marie), Roy (Beauce-Sud).
La parole est au député de Maisonneuve..
M. Burns: Merci M. le Président. Alors, hier, quand on
s'est quitté, M. Langlois, vous nous aviez parlé de la
façon dont vous en étiez arrivés à certains
chiffres. J'aimerais que vous nous disiez... Dans votre mémoire,
à la page 4, on retrouve l'affirmation suivante: "L'absence
complète de respect du décret et de la loi, la baisse de la
productivité qui atteignait 50% avant même le début de la
bataille de l'indexation".
Alors, là-dessus, j'aimerais bien que vous nous disiez comment
vous êtes arrivés aux chiffres suivant lesquels la baisse de la
productivité atteignait 50%, surtout à partir de quels chiffres
calculez-vous cette baisse.
Association de la construction de Montréal et
du Québec (suite)
M. Langlois: On est arrivé à dire 50% uniquement
à partir de déclarations ou de contacts, de conversations faites
avec les entrepreneurs depuis en fait deux ou trois ans, où il y a
constamment des plaintes de baisse de productivité. Alors, avant
même la bataille de l'indexation, lorsqu'on parlait à des
entrepreneurs, en particulier à ceux qui travaillent sur les chantiers
d'envergure, les gros chantiers, les chantiers industriels, ainsi de suite, non
seulement à Montréal mais dans toute la province, les
entrepreneurs évaluaient le taux de productivité à environ
50% de ce qu'il pouvait être, disons, il y a cinq ans ou quelque chose
comme ça.
M. Burns: Est-ce que vous vous êtes penchés sur les
raisons de cette baisse de productivité? Est-ce que vous avez
été capables de mettre le doigt sur des causes
précises?
M. Langlois: Je ne pense pas qu'il y ait une raison, c'est un
ensemble de raisons, c'est un ensemble d'événements qui ont fait
que c'est aujourd'hui une sorte de mentalité qui s'est
établie.
Par contre, lorsque nous avons présenté notre
mémoire à la commission Cliche, on a fait un exposé
beaucoup plus exhaustif de tout ce problème, et on afait une liste de ce
qui nous apparaissait comme des facteurs,"peut-être pas des explications
directes, une série de facteurs dont l'action commune pouvait expliquer
la baisse de productivité et l'ensemble des problèmes qu'on
a.
M. Burns: Par exemple, est-ce que l'augmentation des normes de
sécurité sur les chantiers a pu être un facteur? Ce que je
veux dire, c'est que je pense vous allez l'admettre avec moi, M.
Langlois que, depuis quelques années, je dirais depuis les cinq
dernières années, il y a eu, du côté syndical, une
campagne beaucoup plus sérieuse en faveur de la sécurité
sur les chantiers. Je pense qu'il y a eu des normes de sécurité
beaucoup plus rigides qui ont été imposées, par exemple,
simplement dans la façon de monter les échafaudages et tout cela.
Techniquement, je pense que vous vous y connaissez plus que moi
là-dessus. Je sais qu'il y a eu des améliorations importantes qui
ont été forcées à la suite des réclamations
syndicales.
Est-ce que l'augmentation des normes de sécurité,
justement, peut être un facteur, à votre avis? Je vous donne un
exemple qui est bien simple: Si, à un certain moment, en temps normal,
on arrivait sur le chantier et on prenait plus ou moins de soin à
protéger le travailleur, c'est évident que le travail va
commencer plus vite. Si, d'autre part, on prend la peine d'établir des
normes de sécurité plus grandes, afin d'éviter que les
travailleurs se blessent ou se tuent au travail, à ce moment, c'est
possible que, si vous calculez durant le même temps de travail, vous
allez arriver à une baisse de productivité. Mais cela, cela peut
être une cause. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus, si
possible.
M. Langlois: Jamais on n'a prétendu que
l'amélioration des normes de sécurité pouvait être
une des causes de la baisse de la productivité. Ce n'était
absolument pas dans notre mémoire à la commission Cliche. De
fait, c'est le contraire. On a présenté à la commission
Cliche le problème de la sécurité comme étant un
problème, en lui-même, extrêmement sérieux, et qui
méritait une étude approfondie. On est allé plus loin et,
lorsque la question de la sécurité est devenue... a beaucoup fait
parler d'elle, tout le monde s'est senti effectivement il était
temps obligé d'y jeter un coup d'oeil très
sérieux.
Chez nous, dans notre organisation, il y a eu, à ce moment,
création d'un comité de sécurité formé
d'entrepreneurs qui a commencé à chercher des solutions aux
problèmes de sécurité et il y a eu, entre toutes les
associations patronales, création d'une association de
sécurité qui s'appelle l'ASIC, qui est l'Association de
sécurité de l'industrie de la construction. Et cette
dernière a demandé d'être subventionnée par la
Commission des accidents du travail pour pouvoir fonctionner
adéquatement et améliorer les normes de sécurité,
faire de l'éducation auprès des entrepreneurs et les encourager
à mettre l'accent là-dessus parce qu'on constate, comme vous, que
c'était et que c'est toujours un problème très
sérieux.
Malheureusement, la subvention a été refusée de
telle sorte que l'association de sécurité est restée un
"nom", si vous voulez.
M. Cournoyer: Etes-vous au courant de la raison pour laquelle la
subvention a été refusée, M. Langlois?
M. Langlois: Oui. Il y a un règlement un article
dans la Commission des accidents du travail je ne me rappelle
plus le numéro exact qui dirait qu'effectivement les associations
de sécurité doivent être conjointes pour être
subventionnées, selon l'interprétation qui a été
donnée par la Commission des accidents du travail.
Cette question n'est pas encore terminée, en ce qui nous
concerne. On essaie toujours de faire des démarches, de clarifier
l'article en question parce qu'on espère toujours obtenir cette
subvention.
M. Burns: Toujours dans cet aspect de sécurité
même si vous ne l'avez pas allégué comme tel, c'est
ainsi que je comprends votre réponse n'est-il pas logique de
croire, M. Langlois, que, si on augmente les normes de sécurité,
cela peut avoir un effet sur la productivité? Je vous donnais un exemple
tout à l'heure. Si vous avez besoin de deux personnes pour
préparer le travail de cinq autres personnes, il est fort possible que
vous calculerez sept salaires, dans ce cas, mais que vous aurez, effectivement,
cinq personnes qui produisent directement, les autres s'occupent du travail
préparatoire ou de sécurité. Dans ce sens, n'estimez-vous
pas logique de croire que, si vous augmentez les normes de
sécurité, vous allez, nécessairement, découvrir une
baisse de la productivité?
M. Langlois: Non.
M. Burns: Et que cela n'est pas nécessairement dû
à toutes sortes de choses qu'on semble vouloir laisser entendre, que
cela soit le ministre de l'Industrie et du Commerce ou le ministre du Travail
et de la Main-d'Oeuvre ou le ministre de la Justice ou le premier ministre
lui-même ou vous-mêmes, les employeurs.
On laisse entendre que ce sont dans le fond, les chicanes qu'il peut y
avoir sur les chantiers relativement soit aux conditions de travail, ou entre
centrales, ou relativement à l'application du décret. Je vous
demande simplement si vous ne croyez pas que ça peut avoir une incidence
sur la productivité.
M. Langlois: Non. Lorsqu'on parle de productivité, on ne
parle pas de ça. C'est-à-dire que les normesde
sécurité, leurmise en application, le fait de les rendre plus
difficiles et coûteuses à appliquer pourrait créer une
augmentation des coûts, peut-être, des travaux. Disons qu'avant il
n'y avait pas l'obligation d'avoir des officiers de sécurité, par
exemple; vous avez, à un moment donné, eu l'obligation, sur
certains gros chantiers, d'avoir des officiers de sécurité
à temps plein. Ce sont des coûts qui augmentent effectivement
l'ensemble du coût des travaux de même que les installations de
premiers soins et ainsi de suite.
M. Burns: Votre calcul de la productivité, comment le
faites-vous? Prenez-vous le coût d'un projet pour le diviser par le
nombre d'hommes-heure sur le projet? C'est ce que j'aimerais que vous
m'expliquiez.
M. Langlois: Non. C'est simplement la quantité de travail
fait par un ouvrier au cours d'une journée de travail. Disons, dans la
tuyauterie, qu'à un moment donné ça peut se calculer sur
le nombre de pouces de tuyau qui a été soudé durant la
journée et des choses comme cela. Cela s'évalue uniquement de
cette façon-là. Effectivement, dans la construction, je dois
l'avouer, tout l'aspect du "personal management", de l'administration du
personnel est assez embryonnaire dans les entreprises de construction de telle
sorte que l'évaluation précise de ces choses, malheureusement,
ça n'existe pas encore pourqu'on puisse les utiliser.
M. Cournoyer: Est-ce qu'il ne serait pas aussi logique de
conclure que des meilleures règles de sécurité, mieux
suivies, ça peut améliorer aussi la productivité?
M. Langlois: Je pense que oui. Les normes de
sécurité, si elles sont respectées et mises en
application, pourraient conduire à cela. On pourrait améliorer le
climat, d'une façon générale.
M. Cournoyer: S'il y a moins d'accidents...
M. Langlois: Le rendre plus sain. Evidemment, s'il y a moins
d'accidents... En plus de cela, peut-être rendre l'ouvrier plus
sécuritaire lui-même, qu'il se sente mieux dans sa peau lorsqu'il
est sur le chantier; ce serait et c'est assurément une des façons
d'améliorer le climat général dans l'industrie.
M. Cournoyer: Je pense bien que le député de
Maisonneuve vous pose la question: Comment arrive-t-on à 50%? Les 50%,
je pense bien qu'entre vous et moi, on peut aussi bien dire 30%, 20%, 10%, cela
dépendra des individus qui sont en face de nous autres.
Chaque fois que vous allez prendre un projet de construction en
particulier, vous avez plusieurs causes de diminution de la
productivité. Il n'y a pas et je pense bien que c'est cela que le
député de Maisonneuve voudrait vous faire dire que ce que,
en définitive, vous avez affirmé ici qui soit la seule cause de
la baisse de la productivité, il y a plusieurs causes. Par exemple,
quand il n'y a pas de ciment qui peut être livré pour une raison
ou pour une autre, que ce soit une grève dans les cimenteries, pendant
qu'il n'y a pas de ciment, il y a quelqu'un qui ne produit pas autant qu'il
produisait quand il y avait du ciment. Les cimentiers ne travaillent pas fort
pendant ce temps. A la fin de la journée, est-ce qu'on ne peut pas
conclure que, s'il n'y a pas eu de ciment de la journée, la
productivité était à zéro dans cette
journée?
M. Langlois: Non, ce n'est pas du tout ce à quoi on pense,
ce à quoi on fait allusion quand on parle de baisse de
productivité. C'est évident que ce que vous dites c'est vrai.
S'il n'y a pas de ciment qui arrive et que les gars sont encore là, ils
ne produisent pas.
M. Cournoyer: C'est vrai dans n'importe quel contexte.
M. Langlois: Par contre, lorsqu'on parle de productivité
dans notre mémoire, vous savez très bien qu'on fait allusion
à la quantité de travail effectué dans des conditions
normales, avec l'outillage normal, par un travailleur au cours de sa
journée de travail.
M. Cournoyer: J'ai déjà lu, quand j'étais
avec vous, que la productivité d'un charpentier-menuisier en
Colombie-Britannique était de 35%. Est-ce que la réduction ici
est de 50% de 35%?
M. Langlois: Est-ce que la réduction ici...
M. Cournoyer: Vous dites qu'elle a baissé de 50%.
M. Langlois: Oui.
M. Cournoyer: J'avais lu dans un rapport de la
Colombie-Britannique que la productivité était de 35% pour un
menuisier.
M. Langlois: En Colombie-Britannique.
M. Cournoyer: Mais cela fait longtemps, c'est en 1963. Ma
question est: Est-ce que les 50% que vous mentionnez c'est 50% de 35%? Nous
sommes rendus à seulement 17% de productivité? Vous feriez mentir
mon ministre du Commerce, qui a dit que c'était 30%. C'est une
augmentation.
M. Langlois: Non, ce n'est pas ce que nous voulions dire, M. le
Président.
M. Cournoyer: Ce n'est pas ce que vous vouliez dire.
M. Burns: Toujours sur cette question de productivité, M.
Langlois, j'ai entendu à plusieurs reprises, tant du côté
syndical que du côté patronal, des gens se plaindre, depuis la
mise en application du bill 49, de la façon dont la formation
professionnelle se fait. Même, je pense que M. Dion quand il a
témoigné hier en a touché un mot. Je pense que la FTQ y a
touché également brièvement. Est-ce qu'à votre avis
le système de formation professionnelle peut avoir une influence nocive
sur le taux de productivité?
M. Langlois: C'est plutôt l'absence de système de
formation professionnelle actuellement qui a une conséquence
évidente sur le vieillissement de la main-d'oeuvre compétente et
son non-remplacement par une nouvelle main-d'oeuvre formée
particulièrement aux nouvelles techniques. J'endosse à 100% les
remarques faites par mon collègue, Dion, là-dessus, hier. Je
pense qu'il a expliqué l'affaire très clairement. En plus de
ça, je me permettrais d'ajouter que le règlement no 1 actuel, qui
régit la formation professionnelle dans la construction, c'est lui qui
ne fonctionne pas dans le moment.
Il y a eu, sur l'initiative du ministère du Travail, des
rencontres des parties pour essayer de corriger et de pondre un nouveau
système qui visait à ce moment-là, de toute
évidence, à le remettre, sinon complètement, du moins en
bonne partie, aux parties elles-mêmes, aux associations.
M. Burns: Comme cela existait avant le bill 49.
M. Langlois: Enfin, plus ou moins comme cela existait parce que,
selon le projet qui s'en venait, qui a été pas mal
complété, je dirais à 95%, le ministère gardait
l'autorité suprême, en ce sens que les parties fonctionnaient,
mais, si elles ne fonctionnaient pas, le ministère se gardait une porte
pour intervenir. De toute façon, on a eu des rencontres de toutes les
parties sur la formation professionnelle, à la fin de 1973 et au
début de 1974. Il est sorti de ça un projet de modification au
règlement no 1. Il y a eu quasi-unanimité, c'est-à-dire
qu'il y a eu unanimité d'à peu près 95% à 97% de
toutes les associations...
M. Burns: Vous voulez dire du côté patronal et
syndical.
M. Langlois: ...patronales et syndicales sur le nouveau
système d'apprentissage. C'est-à-dire que tout le monde veut le
reprendre en main. C'étaient seulement des questions de détail
qui étaient à régler. Malheureusement, le nouveau
règlement no 1 n'a pas encore été publié et on
attend sa publication.
M. Burns: Est-ce qu'un rapport a été
rédigé par les parties concernées lorsque vous avezf ait
cette étude relativement aux changements de la formation
professionnelle?
M. Langlois: Oui, il y a un rapport qui n'a pas été
rédigé par les parties elles-mêmes. L'étude de ce
nouveau système de formation prof essionnelle avait été
confiée à des hauts fonctionnaires du ministère du Travail
qui présidaient et dirigeaient les assemblées. Ce sont eux qui
ont fait un rapport durant le mois de mai 1974, je pense.
M. Burns: Est-ce que vous autres, les parties
représentatives dans l'industrie de la construction, en avez eu une
copie, de ce rapport?
M. Langlois: Je pense que nous n'avons pas eu de copie du rapport
final. Ce que nous avons eu, ce sont des projets de règlement. A mesure
qu'on avançait et qu'on modifiait le règlement, je pense qu'on a
eu trois projets de règlement.
Evidemment, on avait une bonne idée du projet final parce qu'on
s'était tous entendu sur presque tout. On avait une bonne idée,
mais on n'a pas eu le rapport des fonctionnaires au ministre du Travail.
M. Burns: Le ministre garde cela caché. Il garde cela
secret, ces rapports-là, le ministre?
M. Cournoyer: Non, c'est qu'il y a, d'autre part, une entente
avec le Parlement selon laquelle avant de faire
adopter de nouveaux règlements de qualification je dois confier
cela à la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre,
parce que cela implique, en soi, un contrôle qualitatif et quantitatif de
la main-d'oeuvre. A partir du moment où il est question de
contrôle qualitatif et quantitatif, j'avais promis au Parlement, avant de
le proposer au conseil des ministres, de confier le rapport en question
à la commission parlementaire. Je pense que cela a été
convenu par une motion du député de Beauce-Sud, il y a
déjà un certain temps.
L'intention que nous avons, c'est de vous le soumettre dès la
semaine prochaine à la commission parlementaire, parce qu'il y a aussi
cette partie-là des difficultés. C'est que les sept parties
s'entendent ensemble. Il reste, cependant, qu'il y a des citoyens, en plus des
sept parties. Je ne voudrais pas minimiser l'importance des parties, mais,
compte tenu du fait que cela implique beaucoup plus que les parties, que cela
implique les citoyens québécois devant être
qualifiés, j'avais promis au Parlement de le soumettre avant. Alors, je
dois le soumettre avant.
Il est rédigé et j'attendais l'occasion de le faire
après qu'un certain nombre d'autres choses seront réglées
pour pouvoir vous le soumettre en commission parlementaire. Je peux vous
assurer ici, de même qu'aux parties patronales et syndicales,
qu'aussitôt que nous aurons terminé les travaux de cette
commission parlementaire nous allons soumettre ce document à la
commission parlementaire et, en même temps, aux parties
contractantes.
Je dois noter cependant que, dans le cas de l'organisme administratif
qui redeviendrait, en définitive, une commission d'apprentissage
professionnel et sectoriel de la construction, c'est à peu près
cela, ceci nécessite un amendement à la loi 49, excluant
l'industrie de la construction de l'application de la loi 49 et lui donnant
l'autorité sur la formation professionnelle dans la construction.
Cela peut sembler très simple entre vous et moi, la sortie de
cette chose-là de la Commission de formation professionnelle.
Mais, cela implique un certain nombre d'ajustements des commissions de
formation professionnelle telles qu'elles existent actuellement, pour redonner
à l'industrie l'autorité sur la compétence professionnelle
des travailleurs, il s'agit de l'enlever de l'endroit où elle est.
Surtout sur la question de formation professionnelle, il peut arriver que ce
soit plus difficile que les parties peuvent le penser elles-mêmes.
L'éléphant que nous avons créé par les
commissions de formation professionnelle, est malheureusement
créé. Or, lui enlever une patte, c'est possible qu'il ait de la
misère à transporter toute l'affaire.
M. Burns: Tout son poids. M. Cournoyer: Pardon? M.
Burns: Tout son poids.
M. Cournoyer: Toute la tête. Enfin, dès aujourd'hui,
il est possible de demander à mes fonctionnaires de remettre, au moins
aux membres de la commission parlementaire, le règlement de
qualification, qui a une incidence de quantification, par exem- ple pour
se comprendre qui est conditionnel à l'abolition des permis de
travail.
Je dois noter que, dans le cas des journaliers, dans le
règlement, ils devront, à compter d'une date prévue,
posséder un certificat démontrant qu'ils ont suivi des cours de
sécurité avant d'avoir la permission de travailler.
M. Burns: Et cela serait pour la semaine prochaine?
M. Cournoyer: Oui, mais je pourrais vous le donner
immédiatement, quitte aux leaders parlementaires de s'entendre quant
à la date d'une prochaine rencontre là-dessus.
M. Roy: M. le Président, je suis d'accord, c'est bien
important d'en prendre connaissance avant que la commission parlementaire ne
soit convoquée...
M. Cournoyer: Oui.
M. Roy: ...pour qu'on ait le temps de l'examiner à
fond.
Une Voix: Dernière...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît! Juste un instant, pour une clarification. Advenant le cas
où ce document serait distribué aux membres de la commission, je
vous préviens immédiatement que je n'accepterai ni débat,
ni discussion, ni commentaire, à l'occasion de cette commission
relativement à ce rapport. Ce sera pour une autre séance
convoquée à un autre moment fixé par le ministre.
M. Burns: On peut vous assurer de cela, on a assez de
problèmes comme cela.
Le Président (M. Séguin): C'est ça, je
voulais simplement faire cette mise au point. Je n'accepterai pas de discussion
quant à ce rapport si toutefois le rapport était
déposé aujourd'hui, ici, aux membres de la commission.
M. Charron: Je suis d'accord sur votre proposition, mais est-ce
que la commission, qui étudiera cette réglementation, se penchera
là-dessus avant United Aircraft ou après United Aircraft?
Le Président (M. Séguin): Vous posez une question
qui ne dépend pas de moi. Je ne saurais vous répondre.
M. Cournoyer: Vous m'avez défendu de répondre,
hier, donc je ne voudrais pas répondre aujourd'hui.
Le Président (M. Séguin): Alors, nous revenons au
député de Maisonneuve.
M. Burns: Dernière question, M. Langlois, toujours sur
cette question de formation professionnelle, eu égard à la
productivité, etc. Est-ce que vous avez des montants sur le taux de
succès ou le taux de non-succès des examens que subissent les
apprentis, pour entrer dans un métier ou un autre?
Parce que, me dit-on, il y aurait un taux d'échecs assez
élevé. Est-ce que vous êtes au courant? Est-ce qu'il y a
des chiffres que vous êtes en mesure de citer ou est-ce que vous avez
connaissance d'une certaine situation qui pourrait vous permettre de conclure
de cette façon?
M. Langlois: De ce côté-là, je suis à
peu près au même point que vous, c'est-à-dire, me dit-on,
à moi aussi, qu'il y a effectivement beaucoup d'échecs aux
examens. D'ailleurs, la formation professionnelle se fait sous la direction de
la direction générale de la main-d'oeuvre du ministère du
Travail. Lorsque l'apprenti a terminé ses heures d'apprentissage, qui
sont par tranches de 2,000, 4,000, 6,000, correspondant théoriquement
à des années de travail, à ce moment-là, il a
l'obligation de se présenter à son examen.
Maintenant, je vous avoue que les données manquent
là-dessus. Elles sont très difficiles à obtenir. Toute
information relativement à la formation professionnelle, de ce temps-ci,
est très difficile à obtenir, de toute façon que cela
concerne les examens, la façon dont les carnets d'apprentis sont mis
à jour, par exemple, la façon dont les apprentis passent de la
première année à la deuxième année et ainsi
de suite. Tout cela semble être dans un état de quasi-fouillis et
mérite certainement d'être remis en place au plus tôt.
Par contre, ce que je peux vous dire là-dessus, peut-être
une indication, c'est qu'il n'y a pas de cours qui sont donnés. A toutes
fins pratiques, disons, il y en a quelques-uns dans quelques polyvalentes et
quelques CEGEP qui sont plus ou moins reconnus, enfin. Mais, par contre,
parlons des centres de formation professionnelle qui avaient été
bâtis avec l'argent des travailleurs et des employeurs de la
construction, particulièrement à Montréal et à
Québec, où il y a deux gros centres de formation professionnelle,
des centres d'apprentissage. A partir du bill 49, les ouvriers de la
construction ont commencé à disparaître et ont
cédé la place tranquillement à des bouchers, à des
caissières, des esthéticiennes et ainsi de suite, qui occupent
toute la place aujourd'hui. A l'heure actuelle, par exemple, au centre de
Montréal, il se donne un cours qui peut se rapprocher un peu de
l'industrie de la construction et c'est le cours de soudure. Et le cours de
soudure, lorsque les gars ont fini, ils ne s'en vont pas dans la construction,
ils s'en vont chez Vickers, Marine Industrie et ces compagnies.
Autrement dit, nos centres de formation professionnelle ne nous servent
plus du tout. Donc, il n'y a pas de cours. Si vous avez une description de
fonction dans le règlement no 1, qui comporte, supposons, 25
activités que le gars est censé connaître en pratique pour
passer l'examen avec succès et qu'il ne suit pas de cours, il fait donc
tout son apprentissage sur le chantier. Or, on sait que l'apprentissage sur le
chantier, la plupart du temps, ce n'est pas tellement bon. Je veux dire que le
gars va commencer, souvent il va apporter le café ou des choses comme
ça. Il n'apprend pas le métier d'une façon
complète. Parce que, très souvent, l'entrepreneur, lui, il ne
s'adonnera pas... Si on prend la menuiserie, par exemple, il va juste apprendre
à faire des formes. Il n'apprendra pas à faire la finition. Tout
cela fait partie, actuellement, de la même définition de
fonction.
De telle sorte que lorsque le gars va se présenter à son
examen et que cela fait trois ans, ou je ne sais pas combien de temps, qu'il
fait des formes, il va couler complètement sur l'aspect de la finition.
Donc, cela lui prendrait des cours théoriques en atelier, où il
apprendrait les 24 ou 25 étapes du métier et, enfin, des stages
sur les chantiers où il complèterait son apprentissage
théorique par de la pratique. A la fin, il connaîtrait au moins un
peu toutes les étapes pour pouvoir réussir l'examen et être
un gars plus polyvalent, ce qui le rendrait moins sujet au chômage et
à de telles choses.
M. Burns: Enfin, M. Langlois, une dernière question: A la
page 7 de votre mémoire, vous nous dites que les problèmes que
vous avez énumérés dans votre mémoire ne peuvent
pas trouver remède dans les amendements que le ministre va apporter au
décret. Moi, si j'ai bien compris le ministre hier, il ne voulait
même pas nous dire quels étaient les amendements au décret.
Les connaissez-vous?
M. Langlois: Je ne les connais pas, malheureusement.
M. Burns: Pourquoi nous dites-vous que les amendements qu'il va
apporter ne régleront pas les problèmes?
M. Langlois: Parce que les problèmes ne peuvent se
régler par de simples amendements au décret, parce que les
problèmes sont beaucoup plus fondamentaux et exigent des amendements
fondamentaux à la loi, des changements en profondeur.
M. Cournoyer: Comme quoi, par exemple, comme amendements à
la loi, parce que...
M. Langlois: M. le ministre, si vous me permettez, j'aimerais
mieux ne pas commencer à discuter de cela. Nous avons remis, à la
commission Cliche.un rapport complet, et nous attendons, de la commission
Cliche, des recommandations qui, dans ce sens... Nos recommandations à
la commission Cliche, vous le savez, touchaient un tas
d'éléments...
M. Cournoyer: Oui, tout cela.
M. Langlois: ...les bureaux de placement, les
délégués de chantier, les hommes en place, enfin, et
évidemment la liberté syndicale en bonne partie...
M. Cournoyer: Oui.
M. Langlois: Je vous référerais à ce rapport
qui explique les votes à l'intérieur des associations syndicales
et la procédure de maraudage et ainsi de suite. Ce sont des choses
très longues, très complexes. Je n'ai pas mon rapport ici et, en
fait, c'est strictement cela que je voulais dire, lorsque nous avons
déclaré, dans cette page 7, que les amendements au décret
ne pouvaient pas régler les problèmes. C'est parce que cela ne
peut pas être suffisant pour régler les problèmes. J'irai
plus loin que cela. Si on avait pensé, nous si nos entrepreneurs avaient
pensé, avaient été certains que des amendements au
décret auraient pu effectivement ré-
gler ce qu'on appelle les problèmes fondamentaux de l'industrie
de la construction, ils se seraient assis et ils auraient
négocié, et ils auraient essayé de le travailler, ce
décret, pour essayer de régler les problèmes. C'est parce
qu'ils étaient convaincus du contraire qu'ils ne l'ont pas fait. C'est
pour cela qu'on dit cela, ici.
M. Burns: Vous ne croyez pas que cela peut améliorer la
situation, même de si peu que ce soit?
M. Langlois: C'est possible, mais là, je suis
obligé de vous dire: On va attendre de voir le projet... Pas le projet,
mais la solution que le ministre va nous apporter.
M. Burns: M. le Président, je vous demande... M.
Cournoyer: ...fais aussi bien de te lever.
M. Burns: ...de dire au ministre que je me lève à
peine. Il veut m'envoyer me coucher. On va attendre à ce soir.
M. Cournoyer: Je m'excuse.
Le Président (M. Séguin): Pour autant que je sache,
le bill 201 n'a aucun rapport avec les levers et les couchers. Alors, si vous
voulez revenir au sujet, s'il vous plaît.
M. Burns: Je n'avais pas d'autre question, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): La parole est au
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Merci. A la page 7 de votre mémoire, vous faites
référence à une déclaration de la FTQ. D'ailleurs,
M. Daoust nous a dit hier qu'il y avait environ 70% des travailleurs de la
construction qui avaient déjà réussi à atteindre
une forme d'indexation avec leurs employeurs. Vous dites un peu plus loin que
vous êtes en mesure d'affirmer qu'au maximum 20% à 25% des
travailleurs ont des conditions de travail supérieures à celles
du décret.
Quand vous dites: ... nous sommes en mesure d'affirmer...", avez-vous
des chiffres, avez-vous des exemples à nous donner? Avez-vous fait une
étude de la question pour pouvoir nous dire dans quel domaine ou dans
quel secteur ou dans quelle région, particulièrement, les
travailleurs auraient-ils réussi à pouvoir
bénéficier de cette indexation?
M. Langlois: C'est la première question que le
député de Maisonneuve m'avait posée hier soir. On arrive
à ce pourcentage de 20% à 25%. La FTQ dit: 70% des travailleurs
de la construction... Or, le porte-parole a dit hier soir que c'étaient
70% des membres de la FTQ, ce qui donnerait 70% de 72%, 72% étant leur
représentativité, ce qui fait 50%. C'est encore le double de ce
que nous prétendons, et, comme je l'ai dit hier, nous en arrivons
à ces pourcentages, en prenant la masse salariale payée par les
entrepreneurs, membres de l'ACM, et la masse salariale payée par les
entrepreneurs membres de la Corporation des maîtres électri- ciens
et de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie, ce qui
donne 52%. Chacune des trois associations, de par les consultations qu'elle a
faites intérieurement et on a discuté de ces chiffres
hier, en profondeur, entre les associations patronales évalue
à 50% et moins le nombre de travailleurs employés par ses membres
qui auraient des conditions de travail supérieures à celles du
décret. Je ne dis pas indexées.
Jenedispasqu'ilsreçoivent$0.50ou$0.75. Il peut y avoir un tas de
formules qui ont été imaginées. C'est à partir de
cela qu'on arrive à 20% ou à 25% de la masse salariale, donc, ce
qui nous donnerait de 20% à 25% des heures travaillées qui sont
payées àdes taux plus élevés que ceux d,u
décret. Pourquoi seulement l'ACM et l'ASECQ, les deux corporations?
C'est parce que l'Association des constructeurs d'habitations, la
Fédération de la construction et l'Association des routes et
grands travaux n'ont eu aucun rapport de leurs membres, à toutes fins
pratiques, indiquant que leurs membres ont été affectés
par ce qu'on a appelé la bataille de l'indexation. Cela se restreindrait
à l'ASECQ, les deux corporations, et nous de l'association de
Montréal, où, chez nous, nous avons des gros entrepreneurs
industriels, des gros chantiers.
M. Roy: A votre connaissance, y a-t-il des entrepreneurs qui ont
négocié après l'adoption du bill 9 des contrats dans
lesquels on aurait tenu compte de l'augmentation des $0.50 de l'heure? Y a-t-il
des entrepreneurs qui ont négocié des contrats et qui en ont tenu
compte dans leurs négociations? Autrement dit, ils ont obtenu des prix
pour exécuter les travaux qui leur permettent de payer les $0.50 aux
travailleurs.
M. Langlois: Voulez-vous parler des entrepreneurs qui ont
signé des mini-ententes?
M. Roy: Après l'adoption du bill 9, il y a certainement eu
des contrats qui ont été accordés à des
entrepreneurs.
M. Langlois: Pourquoi parlez-vous du bill 9 à ce
moment-ci?
M. Roy: Je parle du bill 9 parce que, lorsque ce bill a
été adopté par l'Assemblée nationale, il y a
eu...
M. Langlois: Oui.
M. Roy: ...des dispositions bien claires dans le bill 9 et tout
le monde a parlé, à ce moment, de la fameuse augmentation des
$0.50 l'heure.
M. Cournoyer: Je veux vous corriger pour éviter que vous
en alliez sur une mauvaise "track". La bataille de l'indexation n'a pas
commencé avec le bill 9. Elle a commencé cette année, et
le bill 9 a été adopté en 1973.
M. Roy: La bataille de l'indexation, d'accord. M. Coumoyer:
Oui.
M. Roy: Mais il y a eu la question des $0.50 de l'heure...
M. Cournoyer: Non. Le problème des $0.50 l'heure se pose
depuis le début de l'été...
M. Roy: ...après que le bill 9...
M. Cournoyer: ...1974.
M. Roy: Oui, c'est cela.
M. Cournoyer: Le bill 9 a été adopté en mai
1973.
M. Roy: C'est cela. De toute façon, la question des $0.50
l'heure... Y a-t-il des entrepreneurs qui ont négocié des
contrats et qui, dans leurs négociations, ont tenu compte de cette
obligation de payer ou de ce désir de payer les $0.50 l'heure
d'augmentation?
M. Langlois: Oui, certains entrepreneurs qui ont sûrement
tenu compte des augmentations parce qu'ils les sentaient venir. Ils les
sentaient venir, ces augmentations-là. Maintenant, je connais seulement
deux chantiers où, effectivement, il y a eu un ordre de donné par
le propriétaire, littéralement, qui, lui, avait signé une
entente avec la FTQ pour donner l'augmentation que la FTQ demandait, deux gros
chantiers; sur ces chantiers, le propriétaire a dit aux entrepreneurs de
payer et les entrepreneurs, effectivement, doivent payer pour rester sur le
chantier.
M. Cournoyer: Est-ce que je pourrais préciser un peu la
question du député de Beauce-Sud? Depuis la bataille de
l'indexation, depuis l'été passé, est-ce qu'il y a des
entrepreneurs qui, négociant ou non négociant, soumettant des
prix à des propriétaires, ont tenu compte du fait qu'il y avait
une demande d'augmentation de salaire assez pressante qui était faite et
qui l'ont mise dans leur soumission?
M. Langlois: Oui, je m'attendais à ce que vous
précisiez la question du député de Beauce-Sud.
Effectivement, comme je l'ai dit tantôt, c'est possible que certains
entrepreneurs aient fait cela, qu'ils aient prévu dans leur coût
de construction on ne sait pas combien, on ne sait pas qui ils sont, on ne sait
rien de cela mais c'est possible qu'il y en ait qui l'aient prévu. Il y
a 15,000 entrepreneurs en construction au Québec et on ne sait pas
combien l'ont fait.
Si on regarde la vaste majorité des entrepreneurs qui travaillent
effectivement avec des contrats à prix fixe, est-ce qu'on peut tenter
une chance? Supposons qu'il y en aurait seulement 1,000 sur 15,000 qui sont
à prix fixe et qui ne l'auraient pas prévu, qu'est-ce qui arrive?
Est-ce qu'ils auront les épaules assez larges pour assumer, de leur
poche, une augmentation qu'ils n'avaient pas prévue? C'est un
problème, je pense, que le ministre connaît très bien. Il y
a effectivement des régions où la pression a été
inexistante jusqu'à maintenant. A toutes fins pratiques, selon la
Fédération de la construction, dont les membres sont en dehors de
Montréal, leurs membres, ils n'en ont pas eu, actuellement, de demande
d'indexation et, pour eux, c'est un problème qui existe un peu comme si
ça existait ailleurs, dans d'autres pays, si vous voulez. Pour eux, j'ai
l'impression que le coût serait extrêmement grand.
En ce qui nous concerne, on n'a pas seulement des gros entrepreneurs
chez nous. On a, même chez nous, une majorité d'entrepreneurs de
moyenne envergure. Je suis loin d'être convaincu que la majorité a
prévu quoi que ce soit au point de vue de l'augmentation dans les
contrats qui leur ont été octroyés récemment ou
dans leurs soumissions.
M. Cournoyer: En fait, M. Langlois, vous ne pouvez
répondre à cette question d'une façon exacte.
M. Langlois: Je ne pense pas.
M. Cournoyer: Habituellement, on ne vous demande pas la
permission pour faire une soumission. L'entrepreneur est pris avec son
problème et il soumissionne.
M. Langlois: Assurément, M. le ministre. Je ne peux pas
répondre d'une façon exacte.
M. Roy: Vous dites, un peu plus loin dans votre mémoire,
que l'augmentation de $1 l'heure signifierait une augmentation de coût de
main-d'oeuvre de $100 millions à la fin de l'année. Je voudrais
savoir comment vous avez calculé les $100 millions.
M. Langlois: C'est très conservateur. Je l'ai dit hier, en
le lisant. Je pense qu'il y a eu 140 millions d'heures de travail faites en
1973 selon les chiffres de la CIC; alors, ce n'est pas $100 millions, c'est
$140 millions plus 25%, selon les chiffres de 1973; en 1975, ça peut
être plus et ça peut être moins. On ne sait pas où on
s'en va.
M. Roy: D'accord. Dernière question, M. le
Président. Dans le bas de la page 9, vous avez fait une
déclaration. "Souvenons-nous que, si le Québec se prépare
à donner des dizaines de millions de dollars par année, il
n'obtient, en retour, aucune garantie de paix syndicale". C'est là que
je veux vous poser une question. Après tout, le Québec, lui,
n'est pas en mesure d'exiger quoi que ce soit de la FTQ construction. Vous avez
fait une déclaration et vous n'avez donné aucune explication
là-dessus. J'aimerais que vous nous disiez, en commission parlementaire,
ce que vous avez voulu dire par ça.
M. Langlois: Vous dites que j'ai fait une affirmation et que je
n'ai pas donné beaucoup d'explications. C'est une phrase qui
résume à peu près tout le reste, à toutes fins
pratiques.
Ce que j'ai essayé de dire, c'est que depuis cinq ans, les
associations syndicales et, en particulier, la FTQ, parce qu'elle devenait
rapidement la plus forte, ont fait des demandes, pas seulement des demandes et
même rarement des demandes qui venaient d'en haut comme celle qu'on a
là, c'est-à-dire une demande d'indexation générale,
mais je me réfère encore plus à des demandes faites
quotidiennement sur les chantiers pour n'importe quoi, les choses les plus
extravagantes que vous pouvez imaginer. Je me réfère à
cela et à la non-utilisation des structures prévues, des
instruments prévus pour régler les griefs, pour régler les
problèmes sur les chantiers. Au lieu de prendre la procédure
de
grief ou le conseil d'arbitrage ou le commissaire de la construction,
selon la nature de problème, on utilise ce qu'on appelle l'arbitrage
instantané, c'est-à-dire que vous envoyez quatre ou cinq arbitres
de forte taille sur un chantier et ce n'est pas long que vous avez une
décision. C'est à cela que nous faisons allusion quand nous
disons que, de toute façon, même si vous en venez à une
entente, s'ils ne respectent pas l'entente, si au niveau du chantier vous
continuez d'avoir des demandes extravagantes parce que vous avez toute une
machine qu'ils ne sont peut-être plus capables de contrôler
eux-mêmes et, entre autres, 2,000 délégués de
chantier dont la plupart ont été entraînés sur les
gros chantiers de la Côte-Nord et qui ont justement acquis cette attitude
d'exigence constante de n'importe quoi, à longueur de journée et
cette certitude qu'ils vont l'obtenir et que, s'ils ne l'obtiennent pas, ils
ferment tout. C'est cette attitude à laquelle je fais allusion et je dis
que nous ne sommes pas en mesure de régler cela aujourd'hui et que,
malgré cela, on s'apprête à donner des dizaines de millions
de dollars. C'est ce que je veux dire.
Le Président (M. Séguin): Le député
des Mille-Iles.
M. Lachance: A la page deux de votre document, vous parlez de
2,000 délégués de chantier contrôlant parfaitement
leurs 75,000 membres. Je voudrais savoir quel est le mode de
rémunération de ces délégués de chantier au
taux horaire et au taux hebdomadaire. C'est combien?
M. Langlois: Ce qui a pu vous mélanger, c'est qu'à
un moment donné j'ai dit qu'il y avait 185 délégués
qui ne travaillaient pas. Le délégué de chantier est un
salarié de la construction à l'emploi des entrepreneurs. C'est un
employé comme les autres qui théoriquement devrait travailler
puisqu'il est payé au même taux horaire que les autres. Il est sur
la même liste de paie que les autres. Donc, son taux varie selon son
métier et il fait les mêmes heures que les autres avec qui il
travaille.
M. Lachance: II a une compétence professionnelle.
M. Langlois: Je m'excuse.
M. Lachance: Le délégué de chantier a une
compétence professionnelle.
M. Langlois: Pas nécessairement. Cela peut être un
délégué journalier qui n'a pas de qualifications
professionnelles. A ce moment-là, il est payé au taux horaire de
journalier comme les gars avec qui il travaille.
M. Lachance: Est-ce que ces délégués de
chantier travaillent effectivement à la productivité?
M. Langlois: Cela varie énormément. Je n'affirmerai
certainement pas que tous les délégués de chantier sont
pareils et que cela se passe de la même façon sur tous les
chantiers et dans tous les secteurs de l'industrie.
M. Lachance: Ces délégués de chantier,
est-ce qu'ils sont nommés par la partie syndicale?
M. Langlois: Ce sont des gens qui représentent leur
association syndicale sur le chantier et qui ont justement une description de
fonction dans le décret, qui est très mal faite et qui ouvre la
porte à tous les excès imaginables. Il y a certainement des
améliorations très grandes à être apportées
de ce côté.
M. Lachance: Concernant ces délégués de
chantier, combien peut-il y en avoir sur un chantier de 600 travailleurs?
Est-ce qu'il y a une norme?
M. Langlois: Je vais vous expliquer. Il y a trois sortes de
délégués de chantier. C'est assez complexe. Il y a le
délégué de chantier qu'on appelle ordinaire. Cela
correspond à des sortes de chantiers, en fait. Le
délégué de chantier ordinaire, vous allez avoir cela pour
une école, par exemple, ou la construction résidentielle,
n'importe quelle construction. Dans le cas du délégué de
chantier, l'association syndicale doit avoir sept de ses membres sur le
chantier pour nommer un délégué. Elle doit le nommer parmi
les salariés déjà à l'emploi de l'employeur. Cela
en est un.
Le deuxième, c'est le délégué dans
l'industrie lourde, sur les chantiers industriels. Celui-là, c'est le
premier qui entre sur le chantier pour l'employeur. Il n'est pas choisi parmi
les salariés de l'employeur mais il est parachuté par
l'association syndicale directement. Donc, vous pouvez avoir,
théoriquement, sur un gros chantier industriel, 30 entrepreneurs. Si
vous avez 30 entrepreneurs qui utilisent chacun des gens, pour simplifier, de
la CSN et de la FTQ. Vous allez avoir pour chaque métier un
délégué de chantier, pour chaque union, pour chaque
entrepreneur. C'est comme ça qu'on est arrivé à Sept-lles
à 185 délégués de chantier au moment où le
chantier avait peut-être 1,500 ouvriers en tout, incluant les
délégués de chantier. Or, les 185
délégués de chantier refusaient de travailler parce qu'ils
disaient qu'ils étaient trop occupés a surveiller la mise en
application du décret.
Effectivement, si vous essayez quoi que ce soit, de les faire
travailler, si vous essayez de quelque façon que ce soit de leur dire
qu'ils sont censés au moins faire une partie de journée
d'ouvrage, vous avez alors un drame sur votre chantier qui peut prendre toutes
les formes, je laisse ça à votre imagination.
M. Lachance: M. Langlois,
ledéléguédechan-tier, plus que tout autre ouvrier, est-ce
qu'il fait plus de temps supplémentaire qu'un ouvrier ordinaire?
M. Langlois : Oui, il fait plus de temps supplémentaire
parce que la clause de préférence d'emploi du
délégué de chantier est également très mal
faite dans le décret et ouvre la porte à tous les excès.
Elle est interprétée par les associations syndicales comme
obligeant l'employeur à toujours avoir un délégué
de chantier sur les lieux s'il y a des gars de son équipe qui
travaillent. De telle sorte que, si vous avez un chantier où
l'entrepreneur a quinze hommes qui font leur journée de travail, avec un
des quinze qui est délégué de chantier et qu'il doit faire
du temps supplémentaire le soir, n'oublions pas que le
délégué de
chantier ne travaille pas mais il exige d'être là lorsque
le temps supplémentaire commence à temps et demi ou à
temps double. Si, par exemple, l'entrepreneur garde trois ou quatre hommes, il
va être obligé de garder en plus son délégué
de chantier, sinon... Cela coûte extrêmement cher, vous avez un
homme sur quatre qui ne travaille pas.
M. Lachance: Est-ce que vous pouvez donner un exemple concret,
une moyenne de ce que ça peut coûter, un
délégué de chantier qui ne travaille pas, en somme, qui
est supposé pousser sur les employés pour la production?
M. Charron: Ce n'est pas un contremaître, en somme, il ne
travaille pas.
M. Cournoyer: Ce n'est pas un "pusher", un
délégué de chantier, c'est un "antipusher".
M. Charron: Ce n'est pas un contremaître.
M. Cournoyer: II y a le "pusher" et "l'anti-pusher".
M. Lachance: Je sais bien que ce n'est pas un
contremaître.
M. Bellemare (Rosemont): Si le délégué de
chantier fait une réunion le dimanche avec ses hommes pour discuter s'il
vont faire la grève ou non, est-ce qu'il est payé par
l'entrepreneur à ce moment-là?
M. Langlois: J'espère que non. D'abord, j'espère
que la réunion ne se fera pas sur le chantier.
M. Bellemare (Rosemont): Ou est-ce qu'il réclame du temps
supplémentaire?
M. Cournoyer: C'est malheureux.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Mille-Iles.
M. Langlois: Je pense que non, M. le député.
M. Lachance: M. Langlois, les délégués de
chantier existent depuis quand?
M. Langlois: Depuis quand ça existe?
M. Cournoyer: Depuis 1970.
M. Langlois: Depuis avant mon arrivée, je peux vous le
dire quand je suis arrivé, c'était là.
M. Cournoyer: Non, le bill 38.
M. Langlois: Le bill 38 avec le premier décret qui a suivi
à toutes fins pratiques, le bill 290.
M. Cournoyer: Non, document sessionnel.
M. Langlois: Dans le document sessionnel, c'est à peu
près le premier, en 1970.
M. Cournoyer: M. Langlois, vous et moi n'étions pas
là.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Mille-Iles.
M. Lachance: A la page 3, il y a quelque chose qui me frappe.
Vous parlez de plombiers qui ont assisté à la pose de conduites
d'eau et d'aqueduc, des tuyaux de béton, je présume, ou d'autres
sortes de tuyaux.
M. Langlois: Oui.
M. Lachance: Est-ce que cela relève véritablement
des plombiers?
M. Langlois: La juridiction est très claire: Le plombier,
c'est écrit, n'a pas juridiction sur les tuyaux d'égout et
d'aqueduc, mais ils exigent la juridiction. Ils envoient des arbitres sur les
chantiers et, effectivement, l'entrepreneur est obligé de payer deux ou
trois plombiers qui regardent, parce qu'ils ne veulent pas toucher à
ça, pas une miette. Eux-mêmes trouvent que ce n'est pas de leur
juridiction mais, s'il y en a au local qui ne travaillent pas, l'union va
s'arranger pour les faire regarder des journaliers poser des tuyaux
d'égout et d'aqueduc. Cela, les tuyaux d'égout et d'aqueduc, vous
savez comme moi qui paye ça d'une façon très directe.
M. Lachance: Habituellement, ce sont les municipalités, le
gouvernement.
M. Langlois: Les municipalités. M. Lachance: C'est tout,
merci.
M. Cournoyer: M. Langlois, il y a eu une affirmation qui a
été faite la semaine dernière par M. Daoust en particulier
qui se réfère au fait qu'à l'intérieur des
associations patronales un certain nombre auraient plus d'importance que
d'autres et ne seraient reconnues qu'à une importance uniforme dans le
sens que M. Daoust a prétendu la semaine dernière.
Du moins je l'ai entendu prétendre ceci: que si les constitutions
des associations patronales étaient changées pour donner le
pouvoir à ceux qui avaient le plus grand nombre d'employés, les
problèmes seraient réglés. Vous avez dit tantôt
qu'il devrait y avoir des modifications à la démocratie
syndicale, est-ce que, de votre côté, vous pensez qu'il devrait y
avoir des modifications à la démocratie patronale?
M. Langlois: Je pourrais encore vous dire que la commission
Cliche va regarder cela avec un grand intérêt, j'en suis
convaincu, mais rassurez-vous, je vais vous dire autre chose.
M. Cournoyer: C'est mieux. Ce n'était pas pré-
sente dans le mémoire à la commission Cliche, ce
n'était pas marqué cette partie-là.
M. Langlois: Nous, nous avons parlé effectivement du
côté patronal. On sait, M. Charron l'a dit hier, que la commission
Cliche va se pencher sur les entrepreneurs. Toute amélioration au climat
général va être fort bien reçue,
assurément.
S'il y a des améliorations à apporter dans le
fonctionnement interne des associations patronales, je peux vous dire une
chose, c'est que, chez nous, vous nous avez vus fonctionner, je regarde
fonctionner cela et je trouve que la démocratie, la prise de
décision et la consultation se font d'une façon satisfaisante,
bonne. Lesgenspeuventfaire passer leur voix. On a suffisamment de
réunions de toutes sortes où ils peuvent venir nous dire ce
qu'ils pensent de nous et de ce qu'on fait. On a toujours la possibilité
que 25 entrepreneurs et là, je parle de l'organisation que je
représente nous fassent une demande pour une assemblée
générale. A ce moment-là, nous sommes obligés de
convoquer une assemblée générale de tous les membres.
Je ne sais pas si cela existait dans le temps, mais on a eu, à
notre dernière assemblée générale, un vote secret,
écrit, ce qui, je pense, est un peu mieux que ce qui se fait du
côté syndical. Les entrepreneurs ont été libres de
prendre la décision qu'ils voulaient concernant tout le conflit de
l'indexation.
Maintenant, il est possible que certains entrepreneurs ne soient pas
satisfaits du fonctionnement interne des associations patronales. Il est
possible que cette non-satisfaction soit montée en épingle et
mise en très grande évidence par la partie syndicale, c'est
normal. Par contre, on est disponible, ils ont la chance de nous le dire. Ils
ont eu la chance de nous l'expliquer clairement. Théoriquement en tout
cas et en ce qui nous concerne, la porte est ouverte aux discussions avec les
entrepreneurs chez nous, qui peuvent se sentir lésés par
façon, par notre processus de prise de décision. Jamais le
conseil d'administration de l'ACN n'a rejeté du revers de la main des
discussions pour améliorer cet aspect de notre fonctionnement.
Le Président (M. Séguin): Pas d'autres questions?
Merci beaucoup. M. Langlois.
M. Langlois: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Nous allons entendre
maintenant la Confédération des syndicats nationaux. Si vous
voulez, messieurs, vous approcher un peu plus près du centre. Que la
personne représentant le syndicat se nomme, si vous voulez bien, pour le
journal des Débats. M. Pepin.
Confédération des Syndicats
nationaux
M. Pepin (Marcel): Marcel Pepin. M. le Président, au point
de départ, j'aimerais vous expliquer pourquoi on a décidé
de ne pas avoir de mémoire écrit. On a pensé vous exprimer
verbalement notre point de vue, parce que, depuis 1971, à maintes
reprises, nous avons été convoqués devant une commission
parlementaire du travail sur les problèmes de la construction.
Nous avons, à toutes ces occasions je pourrais vous
montrer la brassée des documents que nous avons alors produits
préparé mémoires, commentaires; nous avons envoyé
aux députés toutes sortes d'informations. Mais, pour des raisons
inconnues de moi, connues de vous autres, jamais quoi que ce soit n'est sorti
de ces commissions et des travaux que nous pensions sérieux de vous
soumettre.
Aujourd'hui, on s'est dit: On va s'essayer autrement. On va y aller
verbalement, peut-être qu'on aura plus de chance d'en arriver à un
résultat concret. Je pense, cependant, que les sujets que nous avons
à aborder sont d'une extrême importance. J'espère que, ce
soir ou demain, puisque les journaux nous le rapportent ainsi, la
décision du cabinet des ministres sera une décision qui
réglera des problèmes et qui ne sera pas de nature à
susciter davantage d'autres sources de malaises, d'autres sources de
conflits.
Mon deuxième point est pour faire une requête au
président et aux membres de la commission. Nous avons ici, dans cette
salle, les représentants des ferrailleurs. J'ai bien l'impression que si
vous êtes en séance aujourd'hui, comme hier, c'est possiblement
suite au conflit des ferrailleurs, je voudrais donc demander au
président et aux membres de la commission d'entendre au moins un de
leurs représentants, le président du front commun, Michel
Galarneau. Si vous êtes d'accord, il pourra parler après mon
intervention ou à la suite des autres intervenants, tel que vous l'avez
stipulé, hier, dans votre liste. Alors, je vous en fais la demande au
nom des ferrailleurs et au nom de mon confrère Galarneau qui est ici
avec nous.
Entendez-vous discuter ce sujet immédiatement ou si vous voulez
que je continue sur autre chose?
Le Président (M. Séguin): M. Pepin, en prenant en
considération votre demande, pourriez-vous nous affirmer que la personne
que vous venez de nous demander d'entendre parle, de fait, au nom de la
CSN?
M. Pepin: C'est un membre de la CSN. Il pourra parler au nom de
la CSN.
Le Président (M. Séguin): II pourrait parler au nom
de la CSN.
M. Pepin: Si vous me permettez de donner l'explication. Il est
président du front commun des ferrailleurs qui livrent, actuellement, la
lutte; ils sont en journées d'étude ils ne se disent pas
en grève, mais en journées d'étude depuis six ou
sept semaines.
Le Président (M. Séguin): Avec l'autorisation de
parler au nom de la CSN, comme vous nous la donnez, je serais prêt
à l'entendre.
M. Pepin: Très bien.
Le Président (M. Séguin): Maintenant, vous
comprendrez l'hésitation. Puisque nous avons convo-
que neuf organisations intéressées dans les conflits de la
construction, nous voulons nous en tenir à ces neuf. Sans cela, on n'en
finira plus à entendre toutes sortes d'organisations qui auraient le
même droit d'exception. Le fait que vous confirmez que la personne en
question parlera au nom de votre syndicat, je serai disposé à
l'entendre.
M. Pepin: Très bien, je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): Toujours à
l'intérieur du temps alloué, prolongé un peu si
nécessaire.
M. Pepin: Cela m'a l'air un peu flexible, quand même, cette
question de temps.
Le Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Pepin: J'ai cru remarquer cela, depuis hier.
Le Président (M. Séguin): Oui, mais encore une
fois, c'est dans le but d'essayer d'entendre le plus de gens possible et
d'entendre toutes les précisions voulues.
M. Pepin: D'ailleurs, je n'ai pas l'intention de faire perdre le
temps des membres de la commission, parce que votre temps est sûrement
très très précieux.
Le Président (M. Séguin): Procédez.
M. Daoust: M. le Président, nous n'avons pas objection
à ce qu'un ferrailleur parle au nom de la CSN. Par ailleurs, il y a un
autre groupe aussi qui est en grève, depuis déjà quelques
semaines. Il s'agit des monteurs de lignes. On voudrait qu'on permette la
même liberté à un représentant des monteurs de
lignes qui viendrait exposer le problème, et il parlerait au nom de la
FTQ.
Le Président (M. Séguin): Je n'ai pas
d'objection.
M. Cournoyer: Bon, voilà. Alors, M. Dion, est-ce que vous
en avez qui sont impliqués?
Le Président (M. Séguin): Alors, je regrette. Je
dois retirer l'autorisation. M. Pepin, continuez. Je refuse donc d'entendre qui
que ce soit qui n'est pas représenté sur la liste. Je croyais que
c'était un cas d'exception acceptable. Maintenant, puisque le cadre
s'élargit, je ne l'autorise pas; je retire et je change ma
décision de tout à l'heure.
M. Pepin: Ah! En tout cas, cela vous regarde. J'avais
pensé qu'il était préférable, pour vous, pour le
cabinet des ministres, pour le public d'avoir l'expression directe de ce monde
qui est dans le conflit. Mais je respecte la décision que vous avez
prise, tout simplement.
M. Cournoyer: Mais vous comprenez, M. Pepin, que la
décision directe du monde qui est impliqué dans le conflit
déborde, et de beaucoup, les ferrailleurs.
M. Pepin: Ah oui, oui!
M. Cournoyer: Vous comprenez qu'il y a aussi les gars des lignes
de transmission et vous comprenez que chacun des employeurs aussi est
impliqué dans ce conflit.
M. Pepin: C'est sûr.
M. Cournoyer: Vous êtes le représentant
autorisé de la Confédération des syndicats nationaux, qui
représente...
M. Pepin: Oui.
M. Cournoyer:... officiellement, comme partie
représentative, un grand nombre de ferrailleurs, sinon l'immense
majorité des ferrailleurs.
M. Pepin: Ah! Je ne le sais pas encore. Une question de
temps!
Le Président (M. Séguin): Allez-y.
M. Pepin: M. le Président, je voudrais donc commencer par
un premier point qui a été longuement traité hier et ce
matin, soit la question de la productivité. Je comprends que ni une
commission parlementaire, ni un débat ici entre nous sur cette question
de la productivité ne pourraient régler le problème, s'il
y en a un qui est aussi grave que celui qui est mentionné par les
employeurs et par certains représentants gouvernementaux.
Toutefois, j'ai trouvé certaines discussions un peu exorbitantes.
Lorsque vous discutez sur la construction de séries de bungalows pour
conclure que la productivité a des chances d'être diminuée,
je pense bien que le ministre, quand il questionnait là-dessus, savait
fort bien que le cadre des discussions était beaucoup trop
étroit. S'agissait-il du même monde qui, un jour, prenait 180
heures pour faire tel travail et l'année suivante 280 heures?
S'agissait-il exactement du même personnel? Est-ce qu'on peut affirmer
qu'ils ont moins de qualifications professionnelles? Est-ce qu'on peut dire que
la gérance locale est exactement la même? Est-ce qu'on peut dire
que l'arrivée des matériaux se fait à temps? Il y a une
série de facteurs qui n'ont pas été avancés. Je
pense que M. Dion, d'ailleurs, a sorti cet exemple in extremis, à la
toute fin, mais ce n'est pas un exemple qui peut entraîner, me
semble-t-il, la moindre conclusion.
Dans le dernier mémoire, celui de l'ACM, bien sûr, on
avance des chiffres selon lesquels la productivité baisse. On a pris
certains critères, certains moyens de référence pour
conclure. Mais, encore là, je pense que tous ces moyens qui sont
avancés devant la commission et, aujourd'hui, publiquement restent des
choses qui sont partielles je ne dis pas partiales, je dis partielles. Je ne
pense pas que l'on puisse conclure présentement quoi que ce soit de
valable, même pas de scientifiquement valable, parce que c'est difficile,
je présume, dans ce domaine de la construction d'en arriver à
établir, d'une manière rigoureuse, ce que sont exactement les
faits sur la productivité.
D'autre part, il y a un courant d'opinions qui se crée, qui est
alimenté. Entre autres, je me réfère au ministre
de l'Industrie et du Commerce du Québec qui a affirmé,
à plusieurs reprises, que les taux de productivité dans la
construction avaient dangereusement diminué. Au meilleur de mon
souvenir, il aurait même mentionné un chiffre de 30% ; si mon
chiffre n'est pas exact, je suis prêt à me corriger. Mais tout
cela laisse entendre que la situation se dégrade, se
détériore. Peut-être que c'est vrai, peut-être que
c'est exagéré aussi et peut-être que cela n'existe pas.
Il me semble qu'on n'a même pas besoin d'amender le décret
sur cette question pour fouiller les causes, s'il y a une situation
détériorée. Il me semble qu'il y a une série de
facteurs qui nous viennent à l'esprit, qui peuvent conduire au fait que
la productivité ne soit pas celle que l'on voudrait avoir, celle que
l'on désirerait. Très peu ont parlé de la question de la
sécurité d'emploi. Il est bien clair que, dans une meilleure
conjoncture, lorsqu'il y a beaucoup d'emplois dans la construction, le gars qui
va perdre son emploi parce que la construction où son métier, est
requis, sera terminée, s'il croit que, le lendemain ou dans une semaine,
il va se replacer, peut-être que sa sécurité d'emploi
entraîne un effet sur la productivité.
Ce sont des êtres humains comme les autres. S'il arrive que le
contrat étant terminé, le gars, le travailleur n'a pas d'emploi
ailleurs, du moins, il n'a pas de prévision d'emploi, il est possible
que son taux de productivité s'en ressente, à tout le moins.
J'aurais une suggestion concrète à faire, et au ministre
et à la commission parlementaire, sur cette question de
productivité. Au lieu de laisser aller les choses, dire toutes les
choses contradictoires parfois dans le même paragraphe ou dans la
même déclaration, pourquoi ne serait-il pas approprié qu'il
y ait une équipe spécialisée, ce qu'ils appellent une
"task force", qui examine toute la situation de la productivité. S'il y
a constat que la productivité, ici, est plus faible que ce qui existe
ailleurs, ou encore, oubliant les points de comparaison, si on imagine que la
productivité peut être augmentée ou qu'elle a lourdement
diminué ces dernières années, au moins, on aura une
enquête, une étude qui pourra nous servir d'appui, et cette "task
force", cette équipe spécialisée ne devrait pas se
contenter d'en faire uniquement les constats, elle devrait regarder aussi les
raisons, les causes qui font que la situation est ce qu'ils auront
découvert.
Je pense qu'alors, au lieu de se plaindre uniquement du
côté patronal et du côté gouvernemental, nous
pourrons avoir des choses qui seront concrètes. S'il arrivait que ce
sont des directives syndicales qui causent une perte, une diminution de
productivité, on le saura tout simplement. S'il arrive que ce sont
d'autres causes, la non-abondance de matériaux, la gérance trop
faible, quand la productivité est faible, les employeurs peuvent se
regarder eux aussi et peuvent se dire pourquoi elle est faible. Est-ce que ma
gérance est en cause?
Voilà donc, sur ce point, M. le Président, la suggestion
concrète que je voulais mettre devant vous, et encore une fois, je ne
pense pas que de traiter de ce sujet aujourd'hui peut entraîner le
règlement des problèmes qui nous confrontent et qui nous
rassemblent ici aujourd'hui.
Hier, le ministre du Travail a refusé de dire, ici, aux membres
de la commission et à nous, quelle serait la suggestion miracle que
certains ont traitée, mais quelle serait cette suggestion qu'il ferait
au cabinet des ministres. J'ai, moi aussi, regretté que le ministre ne
nous ait pas dit là où il en était dans ses
réflexions. Mais cela le regarde, et son mode de fonctionnement, je n'ai
pas à le critiquer. Toutefois, on apprend par les journaux qu'il semble
que la formule qui serait décrétée serait de $0.59,
à partir du 1 er janvier 1975, je présume, $0.13 le 1 er mai,
$0.17 le 1 er octobre. Je ne sais pas si cela est exact ou non. Je dis, au
moins, que les journaux nous rapportent ce qui en est. Mais le ministre me fait
signe que ce n'est pas cela. Si ce n'est pas cela, c'est autre chose.
Je voudrais dire, avant d'entrer dans les arguments purement techniques,
qu'il y a quelque chose, à l'heure actuelle, dont il faut à tout
prix tenir compte. Du côté de la FTQ, on affirme que 70% au moins
de ses membres auraient déjà, et les premiers $0.50 et les
deuxièmes $0.25, ce qui fait $0.75. Du Côté de l'ACM, elle
soutient que c'est de 20% à 25%, les travailleurs de la construction qui
auraient donc les deux montants que je viens de mentionner.
Quant à moi, je n'ai pas de chiffres à vous fournir. Je
prends tout simplement ces deux chiffres etje me dis: La vérité,
il est probable, se situe sans doute à un chiffre intermédiaire
entre les deux. Si mon affirmation est exacte, de toute façon, les
employeurs acceptent de dire que de 20% a 25%, cela existe, ce fait est exact,
s'il arrive que le cabinet des ministres décrète, ce soir ou
demain ou un autre jour, une formule qui ne contiendrait pas à tout le
moins les $0.75, la décision du cabinet sera source de prolongation de
conflit, et ce sera source aussi d'autres conflits.
Souvenez-vous que, dans le cas des ferrailleurs, pour une partie d'entre
eux, à tout le moins et je crois que c'est suite au jugement
intérimaire du juge Vallerand, il y a des ferrailleurs qui avaient $0.50
de plus et à qui on les a enlevés.
J'ai bien l'impression que vous pouvez imaginer qu'une partie du
problème des ferrailleurs prend sa source dans la diminution de
traitement. Nous le disons aux membres de la commission et au ministre, s'il
devait y avoir une formule qui était inférieure à celle
qui est reconnue comme étant appliquée pour une partie importante
pour les uns, plus importante pour les autres, si cette formule donc devait
être moindre que le chiffre connu, je pense que vous vous embarquez dans
une autre situation extrêmement difficile.
Je vais maintenant dire quelques mots des relations de travail dans
cette industrie et me référer à la loi 290, loi de
décembre 1968. Comme on l'a dit hier, c'est toujours en décembre,
à la fin des sessions que les choses se font, cette loi avait
été vpulue et demandée par toutes les parties
représentatives, sauf la CSN.
Nous avions alors exprimé l'idée que c'était une
mauvaise loi et je pense que ceux qui étaient présent le
ministre était là comme représentant d'associations
patronales se souviennent fort bien de nos nombreuses objections
à cette loi, mais la loi a été adoptée et je ne
connais pas de lois qui ont été violées aussi souvent sans
que personne soit puni. Il n'y a pas de lois adoptées par
l'Assemblée nationale, que je connaisse, qui ont connu un sort
comme la loi 290 et, depuis ce temps, on ne fait que du
rapiéçage. On fait ce qu'on peut appeler du "patchage". On se
rend compte qu'il y a un trou ici? On essaie de le bloquer par une loi
spéciale, par un règlement particulier. On demande une
convocation de la commission parlementaire, on s'en va dans des situations
abracadabrantes.
M. le Président, si on veut régler le problème
actuel avec une formule qui ne tiendrait pas compte de ce qui s'est produit
dans les mois passés, de ce qui se passe aujourd'hui, de ce qui est
susceptible de se passer et je parle uniquement au niveau salarial, au niveau
de la rémunération, je pense qu'on se prépare encore de
durs lendemains.
Il est arrivé qu'hier on nous a dit que cela avait
été créé de toutes pièces par les dirigeants
syndicaux. L'inflation ne peut avoir été créée par
nous. Ce n'est pas vrai. Encore ce matin, la radio nous annonce qu'il y a une
augmentation du coût de la vie pour le mois de décembre 1974, de
1%. C'est l'indice du Canada. L'indice de Montréal n'est pas encore
connu. Il est toujours connu deux ou trois semaines plus tard. C'est un
problème qui est réel et comme le mémoire de l'ACM le
mentionne notre organisation nous avons soulevé la
question dès le mois d'avril ou de mai 1974 parce que nous croyons que
si le problème ne se réglait pas, on pourrait en arriver à
des situations d'impasse comme celles que nous connaissons aujourd'hui.
Je plaide donc devant vous pour éviter les
répétitions du passé et que vous ne fassiez pas
vous comme membres de la commission parce que vous n'avez pas de pouvoir
décisionnel mais que le cabinet des ministres ne s'embarque pas
dans une formule qui sera source de nouveaux conflits.
On a parlé aussi des responsables. Pourquoi cela va-t-il mal? On
essaie d'indentifier bien sûr les coupables, de trouver des boucs
émissaires. J'ai bien l'impression qu'on doit tous avoir un peu notre
part.
On ne doit pas tous être des anges, personne, ni du
côté patronal, ni du côté syndical et probablement
pas du côté gouvernemental non plus. Je voudrais quand même
regarder un peu comment on peut identifier la responsabilité. J'ai
à dire que, du côté patronal, ce qu'on vient d'entendre, ce
matin et hier, c'est qu'on se plaint, à l'heure actuelle, de la
situation. Je dis que l'on a encouragé, par bon nombre d'entrepreneurs,
le viol systématique, entre autres, de la liberté syndicale. Je
pense qu'il y en a qui viennent de parler et qui dans plusieurs cas, ont
accepté que les travailleurs ne puissent pas avoir leur
liberté.
Je pense aussi que, du côté patronal, le fait qu'on n'ait
pas suivi tellement bien les règlements de sécurité a
été une source constante d'un très profond malaise. Je
sais que le ministre s'y attend; je dois le dire devant lui comme je le dis
ailleurs. Je crois que le ministre et le gouvernement parce qu'il n'est
pas seul là-dedans sont aussi responsables d'une grande partie
des choses qui se déroulent présentement. Je ne dis pas que ce
sont des péchés de commission tout le temps, mais des
péchés d'omission. Cela arrive quand il vous réunit
uniquement dans une période de crise, uniquement quand il y a un
problème et qu'il faut le régler, mais on règle les
problèmes à la petite journée. On n'a pas de politique
d'ensemble.
Depuis combien d'années le Parlement a-t-il été
appelé à se prononcer sur des pièces
détachées, mais non pas sur un programme d'ensemblequi
auraitpucréerun autre climat? Je ne sache pas que vous avez eu à
étudier ou à adopter des lois dans le domaine du travail en
général, dans le domaine de la construction en particulier, sauf
quand des périodes de crise s'élevaient. Aujourd'hui, ce que je
vous demande encore, c'est de ne pas répéter cette triste
expérience.
Voilà maintenant quelle formule nous préconisons. Vous
verrez qu'entre les propos tenus hier par la FTQ et la formule que nous mettons
de l'avant, il y a quelques points de divergence. Nous, au lieu de
réclamer les $0.25 en janvier 1976, nous demandons d'y substituer une
formule qui réglerait, d'une manière plus permanente, le
problème, une formule d'indexation.
Comme tout le monde, j'espère que nous ne reviendrons pas en
arrière avec la fameuse question de la parité salariale. S'il
arrivait que le cabinet des ministres décide qu'il y a un taux à
Montréal et un taux en province, que l'augmentation ne serait pas la
même à Montréal par rapport à la province, je vous
dis tout de suite que cela, de nouveau, serait une autre source énorme
de conflits. Des luttes épiques ont été livrées
pour en arriver à la parité salariale. Souvenez-vous du bill 38,
souvenez-vous de la commission parlementaire au cours du bill 38,
c'était en 1970. Souvenez-vous des autres séances des commissions
parlementaires, des conflits, des troubles que l'absence de parité a
occasionnés.
Si, dans la situation présente, on ne devait pas
considérer le rattrapage dans la province comme était le salaire
qu'ils auraient dû recevoir et qu'il faut partir de là pour
ajuster les traitements, on bouleversera beaucoup de concepts au Québec
et on accroîtra le nombre de conflits sur les chantiers. Je vous rappelle
qu'il y a à peine quelque temps c'est du oui-dire, on me l'a
raconté dans une ville pas loin de Montréal, un
entrepreneur a décidé de payer $0.50 supplémentaires
à ceux de l'extérieur de la ville et ne les a pas donnés
à ceux qui étaient résidents de la ville. Cela a pris,
semble-t-il, à peine quelques heures; le problème s'est
réglé, les gars ont arrêté de travailler.
Si vous pensez établir un taux à Montréal et quand
la main-d'oeuvre de Montréal s'en ira en province, elle transportera son
taux, comme cela se faisait dans le temps, vous vous en allez tout simplement
dans un cul-de-sac. Pour ne pas trop m'étendre là-dessus, je vous
rappelle qu'il y a de nombreuses catégories de salariés au
Québec qui ont le même traitement quoi qu'ils fassent, où
qu'ils exercent leur métier, que ce soient des médecins, que ce
soient des fonctionnaires, des employés d'hôpitaux, des
enseignants, j'irais même jusqu'à dire des députés.
C'est normal sans doute. Même si vous représentez un comté
de 8,000 personnes, je suppose que vous devez avoir le même traitement
qu'un député qui en représente 50,000 ou 75,000.
J'espère donc que le cabinet des ministres
n'appliquera pas une thèse différente aux salariés
de la construction de celle qu'il s'applique lui-même et qu'il applique
à la députation. Lorsque je reviens à la formule des $0.75
plus indexation, je vais tenter de donner certaines explications techniques et
je ne pense pas utile et nécessaire d'aller dans les moindres
détails ou dans les méandres techniques de toute cette
formule.
Hier, dans le mémoire de la FTQ, vous aviez déjà
une illustration de la façon dont les choses peuvent être
calculées. D'autres méthodes peuvent être retenues. Je vous
rappelle aussi que, dans le mémoire de la Fédération de la
construction, on trouve des formules de justification. Dans le domaine
statistique, je pense que c'est connu de tout le monde. On essaye toujours de
trouver la période qui nous sert, pas la période qui nous
dessert. C'est ainsi que la Fédération de la construction prend
comme mode de référence, comme base de référence,
l'année 1969. Je soupçonne je ne suis pas dans leurs
secrets, loin de là que leurs chercheurs ont dû essayer
deux ou trois autres bases avant de choisir celle-là parce qu'ils ont
dû se dire: C'est celle-là qui nous donne le meilleur
résultat. Ils ne sont pas les seuls à agir ainsi. Probablement
que, du côté syndical, cela doit se produire aussi. Je ne suis pas
très au courant, mais probablement aussi que cela doit se produire. Je
voudrais vous dire que les travailleurs n'achètent rien en fin de
semaine par des statistiques. Ils achètent leur panier de provisions
avec de l'argent, pas avec l'argent qu'ils ont gagné en 1969 ou les
fameuses bases de référence. On pourrait, quant à nous,
dire: II faut tenir compte d'un enrichissement, il faut tenir compte aussi de
ce qui était la prévision de l'augmentation du coût de la
vie. Cela a été discuté devant vous hier.
Qu'est-ce que les négociateurs se sont dit en 1973
là-dessus? Il est bien possible qu'ils ne se soient rien dit. Je n'y
étais pas. La première fois au Québec, je crois, qu'on a
parlé de cela dans ces termes, cela a été dans le front
commun du secteur public et parapublic. C'est là, je pense, qu'on a
identifié les choses. On a dit: C'est tant pour cent, 2.5% pour tenir
compte de l'enrichissement, le reste, qui va jusqu'à 6% dans des cas,
c'est pour tenir compte de l'augmentation du coût de la vie. Si le
coût de la vie n'augmente pas de 3.5%, les travailleurs en auront
davantage. S'il dépasse cela, on a négocié une certaine
formule d'indexation que vous connaissez déjà. Je pense que, dans
la construction, même si je fais l'hypothèse que l'on ne s'est pas
dit les choses ainsi: C'est tant de cents pour l'enrichissement, tant de cents
pour tenir compte du coût de la vie, les négociateurs du temps ont
dû quand même se dire: Le coût de la vie, j'imagine qu'il va
augmenter d'un certain pourcentage, mais pas dans l'ordre de ce que l'on
reconnaît à l'heure actuelle. Le reste servira à
améliorer le sort des travailleurs de la construction.
A combien doit-on ou peut-on établir cela? Il y aura des
méthodes scientifiques ou pseudoscientifiques pour y arriver en se
basant sur le passé, en se disant: Si, dans le passé,
c'était à peu près 4%, on pourrait l'établir. Je
pense que je dois travailler plutôt d'une manière empirique de ce
côté-là et, d'une manière empirique, nous avons dit
que, au moins pour l'enrichissement, il devrait y avoir $0.30 l'heure par
année. Après cela, on a examiné l'évolution des
salaires, l'évolution du coût de la vie, mois par mois, et on a
fait des projections pour l'avenir, comme tout le monde en fait.
Les projections, vous pouvez les faire à .7, à .8,
à .9, à 1%, à 1.2 d'augmentation d'indice, tout
dépend de ce qui vous passe par la tête, pour autant que c'est
dans des choses un peu raisonnables.
On a pris ces taux pour ce qui concerne trois types de salaires:
journalier, compagnon, et on s'est trouvé une espèce de point
milieu. On a additionné le taux du journalier avec le taux de
l'électricien, divisé par 2, on a ainsi le point milieu. On a
suivi l'évolution. Suivant que vous êtes moins payé, ou
suivant que vous êtes plus payé, le coût de la vie, quand on
parle en pourcentage, vous atteint différemment dans le cas de la
construction parce qu'il s'agit d'augmentation horaire à taux fixe et
non pas en pourcentage. On a suivi tous ces raisonnements et on a essayé
de tenir compte de la question soulevée hier par le député
de Beauce-Sud relativement aux $0.20 qui, le 1er mai 1974, ont
été appliqués pour le fonds de retraite alors qu'avant
c'était uniquement $0.05 pour la sécurité sociale. On
s'est dit: Doit-on tenir compte de ces $0.20 ou ne pas en tenir compte? On a
fait les deux calculs quand on a vu ça, parce que les $0.20, certains
peuvent dire, c'est de l'épargne. De l'épargne peut-être un
peu forcée dans ce cas, mais de l'épargne dont je retirerai les
bénéfices et les fruits uniquement à la fin de ma
carrière active. Ces $0.20, même si c'est de l'épargne, je
ne les ai pas pour acheter mes pommes de terre en fin de semaine, ils ne sont
pas là parce qu'ils sont épargnés.
On a pensé qu'il valait mieux tenir compte que les $0.20
donnés au fonds de retraite ne devaient pas être pris en ligne de
compte lorsqu'on fait la progression des salaires mais toute autre personne
peut soutenir une thèse opposée. La seule chose concrète
que je peux dire, c'est que vraiment, en fin de semaine, les $0.20 ne sont pas
dans mon enveloppe de paye, c'est assez clair. Les autres thèses
économiques peuvent se soutenir mais les travailleurs, ils n'ont pas ces
$0.20. Avec tous ces calculs, les tableaux statistiques que nous avons pu
sortir, je pense qu'il est assez simple, suivant les corps de métiers et
même au niveau du point milieu, de justifier les $0.75 au 1er
janvier.
Pour le futur, nous ne pensons pas que la formule mise de l'avant par la
FTQ devrait être celle à retenir par le cabinet des ministres
parce qu'on ne sait pas quelle sera l'allure, l'évolution du coût
de la vie. S'il arrive que le coût de la vie se mette à grimper,
dans des proportions plus importantes que celles que nous connaissons
statistiquement, il y a une raison à cela. Regardez le discours
d'avant-hier du président Ford qui n'entend plus combattre l'inflation,
il entend combattre la récession. Combattant la récession, il
envoie du pouvoir d'achat pour $12 milliards ou $13 milliards uniquement sur
l'impôt sur le revenu, ce qui normalement, dans une économie
libérale, a des chances de faire augmenter les prix parce qu'il y aura
une demande accrue des biens. Si cela se produit, ce qui est la norme
régulière du système dans lequel nous vivons, nous aurons
un impact sur le Canada et le Québec, il est possible que le taux
d'inflation soit plus élevé au cours des mois qui
viendront, justement en raison d'une telle décision
économique.
Or, si nous sommes pris uniquement avec les $0.25 du mois de janvier
prochain, il est encore possible que nous soyons aux prises avec d'autres
conflits, d'autres grèves, parce que les travailleurs vont se dire: Mon
pouvoir d'achat se détériore trop, l'érosion de mon
argent, c'est trop fort. Tandis que si le cabinet des ministres étudie
et applique une formule d'indexation véritable, d'abord, il doit tenir
compte d'un certain moment d'enrichissement, j'en ai déjà
parlé, je l'ai établi, quant à moi, empiriquement, autour
de $0.30 l'heure par année. Une fois qu'il a établi son taux
d'enrichissement, il peut commencer, en janvier 1975, s'il ne veut pas reculer
avant, une forme d'indexation trimestrielle.
Ce que je lui suggère, c'est de prendre un taux d'indexation de
$0.01 par .25 d'augmentation. Je m'explique, parce qu'on pourrait me dire: Dans
la bataille du front commun, vous avez dit $0.01 par .3. Cela a
été la norme. Quand on a pris .3, c'est qu'on a pris des salaires
moyens dans tout le territoire du Québec.
C'est parce que vous faites affaires avec du monde de la construction
dont les taux horaires sont plus élevés en partie, en raison du
fait que leurs heures de travail n'ont pas la même stabilité
généralement que dans d'autres secteurs. Voilà pourquoi,
si le gouvernement retient cette formule d'indexation, il va se trouver
à régler au moins une bonne partie des problèmes.
Là, vous allez peut-être me dire: Mais les entrepreneurs eux,
comment vont-ils faire pour soumissionner?
Les entrepreneurs, je les soupçonne de savoir compter autant que
nous. Je les soupçonne d'être capables de faire de la projection,
de la prévision économique. Cela ne veut pas dire que l'un ou
l'autre ne se trompera pas en disant qu'il avait prévu, projeté
que le décret augmenterait de $0.03, $0.05 ou $0.10, alors qu'il
augmentera de quelques sous de plus, parce que la prévision
d'augmentation du taux d'inflation n'aura pas été la même.
Je pense que cela est prévisible et que cela est applicable par eux.
Bien sûr, on nous parlera des risques de faillites. Je pense que
cet argument a longuement été développé en 1970-71.
Ceux qui étaient présents se souviendront des cris qui
étaient soulevés par des associations patronales, disant: Cela
n'a pas de sens; on va tous faire faillite, ou un bon nombre.
Dans la situation actuelle cela a été
mentionné devant vous, il n'y a pas de chiffres pour le démontrer
je crois que bon nombre d'entrepreneurs remplissent déjà
des contrats, gèrent des contrats. Ils ont déjà
prévu les augmentations, même la question des $0.75. C'est
peut-être une affirmation gratuite; je n'ai pas de statistiques à
vous fournir, c'est ce que je pense.
Je voudrais aussi dire au gouvernement que, s'il avait l'intention de
copier une formule disons la formule du front commun et de la
copier dans la construction, de faire attention aux distinctions qui s'imposent
entre ceux du secteur public et ceux du secteur privé,
particulièrement ceux de la construction.
Dans le cas de la construction, je vous rappelle que la
sécurité d'emploi n'est pas très considérable, que
les heures de travail ne sont pas toujours stables. Je vous rappelle que les
permis de travail, entre autres, étant partis au niveau des journaliers,
pour l'instant, vous n'avez pas une possibilité de travail toujours
aussi grande pour le même journalier.
Voilà pourquoi je vous fais donc une autre recommandation de ce
côté-là. Je ne sais pas si j'ai été trop
long. Vous avez semblé un peu impatients; alors, j'arrête
immédiatement. Merci.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. Pepin. M. le
ministre.
M. Cournoyer: Dans les dernières semaines, M. Pepin,
même depuis le mois d'avril l'an passé, la CSN, de même que
la FTQ, s'est toujours dite prête à négocier avec les
associations patronales; la CSD également, je ne voudrais pas l'oublier,
parce qu'elle aussi était prête à négocier.
Est-ce que les circonstances ont changé aujourd'hui, au point que
le genre de négociation qui serait possible avec des associations
patronales, c'est: Prenez ou laissez ce qui est mis sur la table actuellement?
Est-ce que nous sommes rendus au point où on ne peut plus
négocier, sauf pour appliquer à tous ce que certains ont
obtenu?
M. Pepin: Je n'ai participé moi-même à aucuns
pourparlers. Les rapports qu'on m'a fait, cependant, c'est qu'il y avait, du
côté patronal, une fin de non-recevoir. Je ne sais pas s'il y a
changement de situation. A la lecture de leurs mémoires, ceux qu'on a
déjà entendus, je me risque aisément à dire qu'il
ne me semble pas possible d'en arriver à un accord entre les parties.
C'est mon sentiment personnel.
M. Cournoyer: Disons un accord, parce que, d'une part, les
associations patronales ont manifesté leur intention de ne pas ouvrir le
décret, parce qu'on n'ouvre pas un décret pendant sa
durée, selon la prétention patronale, jusqu'ici. Il y a certaines
indications où ils nous ont dit: Peut-être qu'on aurait pu ouvrir
le décret si on avait eu des assurances, etc.
Mais de toute façon, sur le fond même, cette seule raison
étant celle-là, la première, c'est qu'on n'ouvre pas un
décret pendant sa durée, on n'a jamais été du
côté des associations patronales sur le contenu de la demande
syndicale. Ce que j'essaie de vous demander c'est: Est-ce qu'à ce
moment-ci, au moment où nous nous trouvons, le janvier 1975, la partie
de la négociation possible du côté syndical est
amenuisée par le fait que vous ne pouvez pas négocier autre chose
que ce qui a déjà été obtenu par un certain nombre
de travailleurs?
M. Pepin: Votre question me semble multiple. Je vais essayer de
répondre sur toutes les facettes ou tous les volets, au moins, que je
comprends. D'abord, je pense que la loi 201 est loin de favoriser des
négociations. Mais, je n'ai pas à faire de grief, la loi 201 est
là. Avant, les employeurs ne voulaient pas négocier, maintenant,
c'est le cabinet des ministres, le lieutenant-gouverneur en conseil qui
décide.
A mon avis, je n'en suis pas sûr, il n'y a qu'une seule
façon envisageable. Que le ministre annonce ses couleurs, dise ce qu'il
a, à l'heure actuelle, dans la tête, convoque toutes les parties,
comme on le fait ici, mais on est obligé de vous parler dans l'abstrait,
parce qu'on ne sait pas ce que vous avez dans la tête. C'est une
bonne chose pour vous, pour nous autres c'est un peu moins bon, mais ce
n'est pas bien bien grave. On lit les journaux simplement.
Alors, ce qui peut donc être possible...
M. Cournoyer: Cela m'arrive tellement souvent d'apprendre des
choses par les journaux, moi aussi, d'ailleurs.
M. Pepin: C'est bien sûr. C'est bon de lire les journaux un
peu, et cela instruit.
M. Cournoyer: II y a d'excellents journalistes.
M. Pepin: Ce qui est donc possible, c'est que vous disiez: Voici
la formule à laquelle je pense, à l'heure actuelle. J'ai
réuni toutes les parties, si vous pouvez en négocier une
meilleure ou si vous pouvez me convaincre du contraire, faites-le. A ce moment,
là,, peut-être des pourparlers sont envisageables. Mais c'est la
seule façon que je vois qu'il y aurait une possibilité.
Quand vous avez une loi comme celle-là, je pense que c'est un peu
dans le cas du bill 38, la même situation. Il arrive que cela ne sert
à rien de m'ouvrir à une table de négociation, si je ne
sais pas... A l'autre bout, tout à coup on serait prêt à me
donner le double de ce que je réclame, ou du côté patronal
s'ils sont prêts à accepter tel niveau, tout d'un coup le
gouvernement va aller beaucoup en bas de cela. C'est cela qui rend la
négociation très difficile.
N'oubliez pas que, dans la construction, M. le Président, M. le
ministre, à part 1969, le gouvernement n'a jamais laissé aller
les rapports de force. Vous êtes toujours intervenus avec des petites
lois, des petits règlements, etc.. A mon avis, ce n'est pas très
sain, cela peut déteindre sur le climat des relations industrielles.
M. Cournoyer: En fait, le problème dans tout cela, c'est
qu'il y a un gouvernement?
M. Pepin: Le gouvernement actuel.
M. Cournoyer: Cela est votre opinion. Si c'était un autre
gouvernement, ce serait encore un problème qu'il y ait un
gouvernement.
M. Burns: M. Pepin, je suis bien d'accord avec vous.
Le Président (M. Séguin): Est-ce que vous avez
d'autres questions?
M. Cournoyer: Je n'ai pas d'autres questions à poser
à M. Pepin.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Burns: Moi, j'ai simplement une question, M. Pepin, juste une
précision. J'aimerais voir si j'ai bien compris la formule que vous
mettez de l'avant.
Si je comprends bien, quant aux premiers $0.75, votre position n'est pas
différente de celle de la FTQ, c'est-à-dire les premiers $0.50
pour mai 1974 et $0.25, en janvier?
M. Pepin: La même chose.
M. Burns: Quant à ce qu'il doit se passer après,
vous, vous suggérez une formule d'indexation, vous avez mentionné
$0.01 des .25, $0.01 à chaque fois que .25 de l'indice du coût de
la vie arrive?
M. Pepin: C'est cela.
M. Burns: Est-ce que vous faites partir cela, à tous les
trois mois, et à compter de janvier 1976?
M. Pepin: De janvier 1975.
M. Burns: Une fois que les $0.25 de janvier 1975 sont mis en
application, par la suite, à tous les trois mois, vous révisez le
taux, suivant l'augmentation de l'indice?
M. Pepin: Pour ce qui est de l'ensemble de la formule, je pense
qu'il est important de faire la précision. Je relève au point de
départ du décret de la construction, de mai 1973, je fais toutes
mes augmentations de taux, j'exclus mes $0.20 de sécurité sociale
dont j'ai parlé tantôt, je fais ma projection de l'augmentation du
coût de la vie. Je ne pars pas avec mon indice à 100% en janvier
1975, je pars de mai 1973 et je tiens compte que, pour l'année 1975,
j'ai le droit à $0.55 d'augmentation. A l'intérieur de cela, je
me dis: Prenons-en $0.30 pour les fins d'enrichissement mais tenons compte du
reste, les $0.25, il faut en tenir compte.
Et, nous semble-t-il, cela règle d'abord le problème d'une
manière plus permanente et je pense que, si le coût de la vie
continue à grimper comme il est là, cela va
légèrement dépasser les $0.25 demandés par la FTQ.
Je crois que cela va être plus applicable et à tous les trois
mois, ce serait versé.
M. Burns: Bon. Maintenant, je veux juste vous poser une autre
question puisque vous y avez touché en passant. Vous parliez du besoin
de réviser la Loi des relations de travail dans l'industrie de la
construction, le fameux bill no 290.
Selon vous, est-ce que cela doit se faire en convoquant les parties
actuellement représentées au décret, ou est-ce que cela
devrait passer par l'entremise du Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, ou bien si vous avez une autre formule que vous envisagez? Je
vous pose la question parce que c'est une histoire qui, depuis cinq ans, me
chicote et même avant ça cela me chicotait aussi, mais
particulièrement parce que je partage entièrement vos vues
lorsque vous dites que ce n'est pas en révisant en pièces
détachées ce type de législation qu'on va
véritablement arriver, peut-être un jour, à une solution
des relations de travail dans le domaine de la construction.
M. Pepin: Bon. D'abord, M. le député, il y a tout
le problème de la commission Cliche qui nous annonce qu'elle fera des
recommandations pour qu'il y ait des modifications, je présume,
substantielles à la loi.
S'il n'y avait pas une telle commission Cliche, je vous demanderais de
ne pas le référer au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre parce que je pense qu'il faudrait que ce soit plus
spécialisé que cet organisme. Il faudrait du monde beaucoup plus
de la
construction qu'il y en a au conseil. Mais je pense que les parties et
le ministère auraient dû et devraient maintenant, si la commission
Cliche nous décevait quant à ses recommandations, s'asseoir et
trouver de nouveaux mécanismes.
Vous savez, des problèmes d'ancienneté dans la
construction, il faut que ce soit réglé à un certain
moment. Je sais que les travailleurs ne veulent pas d'ancienneté. Je les
comprends. Mais il y a là, à mon avis, la source d'un malaise
profond parce que c'est le seul monde où il n'y a pas
d'ancienneté. La sécurité d'emploi, telle qu'on l'avait
négociée avec M. Cournoyer dans le temps, en 1969, il
était signataire d'une partie patronale quand il est devenu ministre...
L'arrêté en conseil no 4119, vous vous en souvenez, on a fait des
luttes aux commissions parlementaires. L'arrêté en conseil no
4119, il a pris le bord du panier parce qu'il a dit: Ce n'est pas applicable.
Il y a des raisons pourquoi ce n'est pas applicable. Alors, si on n'a pas une
certaine forme de sécurité d'emploi, si on n'a pas une clause
d'ancienneté, on aura beau avoir les meilleurs salaires au monde, bien,
j'ai l'impression que, constamment, les gars de la construction seront dans une
insécurité telle qui se retraduit sur l'industrie, sur l'ensemble
du climat, sur le chantier même avec le surintendant, ou le
contremaître, ou le "boss" lui-même et qui se traduit après
dans tout le territoire du Québec.
On a toujours eu peur, à mon avis, de prendre des
décisions et d'appliquer des solutions dans cette industrie, même
si on devait prendre des éléments qui existaient ailleurs, dont
la question de sécurité d'emploi, dont la question
d'ancienneté. Pourquoi? Quand un gars de la Davie Shipbuilding perd son
emploi parce que le bateau a été lancé, a-t-il le droit
d'aller sur la construction, indépendamment que d'autres travailleurs de
la construction soient en chômage, du même métier, avec les
mêmes qualifications? Mais quand le chantier de la Davie Shipbuilding
rouvre ses portes, le gars de la construction n'a pas le droit d'aller prendre
la place de l'autre. Je ne le réclame pas non plus. Mais ce que je
réclamerais, c'est qu'il y ait une certaine sécurité
d'emploi pour ce qu'on peut appeler, ce que l'on appelait dans le temps "les
professionnels de l'industrie de la construction". Je suis sûr
qu'à moyen terme, je ne dis pas à court terme, tout le monde au
Québec, on va y trouver notre compte, y compris les employeurs. Ce n'est
pas d'être antipatronal ou de vouloir tout changer le système
économique que de réclamer que les travailleurs de la
construction aient une forme de sécurité d'emploi, adaptée
à leur situation mais comparable à ce qui existedansd'autres
secteurs de la vie économique.
M. Burns: Merci, M. Pepin.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: J'ai seulement une question à poser à M.
Pepin. M. Pepin, vous avez parlé tout à l'heure d'une formule
d'indexation trimestrielle. En supposant que cette formule soit mise de l'avant
et soit imposée je ne dirai pas proposée par le
gouvernement parce que le gouvernement se propose de l'imposer
j'aimerais que vous me précisiez à ce sujet si vous ne croyez pas
que seuls les gros entrepreneurs pourraient s'accommoder facilement d'une telle
formule.
Les petits et les moyens entrepreneurs je parle des petits et des
moyens entrepreneurs sérieux n'auraient-ils pas beaucoup plus de
difficultés, eux, à s'adapter à ce système? Ceci
pourrait avoir, je dis bien, ceci pourrait avoir comme conséquence que,
dans bien des régions, on se retrouve avec encore plus de chômage
dans le secteur de la construction.
M. Pepin: C'est difficile de faire de la projection, même
sur la base de la question que vous posez. Mais on peut quand même
essayer de voir l'expérience du passé. Souvenez-vous, quand la
parité salariale est arrivée graduellement, je le disais
tantôt dans mon exposé, des hauts cris, parce que cela conduirait
le monde en faillite, et que, dans la région de la Beauce ou
dansd'autres régions, cela accroîtrait le chômage dans la
construction. Moi, j'ai l'impression que les faits n'ont pas été
ceux-là, que la construction n'a pasdépéri à la
suite de la parité salariale, et même pas en province. Je ne dis
pas qu'il n'y a pas un certain entrepreneur, dans un cas isolé, qui a
subi des sévices suite à l'application de la parité
salariale. Mais je ne pense pas, M. le député, que les
conséquences soient celles que l'on pourrait imaginer en
théorie.
Je voudrais aussi vous rappeler que, s'il y a indexation trimestrielle,
la somme d'argent à ajouter trimestriellement n'est pas d'environ $0.10
ou de $0.20 d'augmentation. Evidemment, si le coût de la vie faisait un
bond de 8% en un certain mois, ce qui est tout de même un peu
imprévisible, là, on s'en irait dans des pays de
l'Amérique latine tout simplement. Mais si la progression se fait entre
.8 et 1.2 par mois d'augmentation en pourcentage, j'ai bien l'impression que
l'augmentation je n'ai pas le chiffre en tête pourrait
être $0.05, $0.07, $0.08, tous les trois mois, et ce n'est pas, à
mon avis, quelque chose qui peut déséquilibrer et
déboussoler à un point dramatique un employeur, surtout que,
connaissant l'imposition que le ministre en fera, il va pouvoir, quand il va
soumissionner pour une maison unifamiliale, un bungalow ou pour une autre
catégorie de construction, avoir lui-même fait sa projection et
dire: Je prévois que cela va être 1%, donc dans trois mois,
j'aurai $0.05 ou $0.06 à donner de plus; il pourra l'avoir
calculé.
M. Roy: Si je vous pose ces questions, c'est parce que, lorsqu'on
se retrouve dans les régions rurales, non seulement dans la mienne, mais
vous savez, dans la région du Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, le
Témiscamingue, c'est de la construction domiciliaire, et ce sont surtout
des bungalows, en particulier, qui se construisent. Disons que c'est le gros de
la construction. Alors, on ne peut pas ignorer le fait je suis convaincu
que vous y pensez également que la personne qui fait construire
une résidence peut nécessairement
avoir recours à un emprunt. Or, lorsque le montant
prêté parl'institution, que ce soit une caisse populaire ou une
société d'assurance, est complètement
dépensé, et que, à cause justement des variantes de
coût pendant la construction, l'employeur aussi vous avez non
seulement le cas de l'entrepreneur, mais vous avez celui de la personne qui
décide de construire elle-même, en engageant sa main-d'oeuvre
elle-même se trouve, à ce moment, obligée de faire
face à des dépenses additionnelles qui peuvent aller
jusqu'à concurrence de $500, $800, avec les difficultés que cela
implique.
C'est la raison pour laquelle je veux bien avoir des précisions,
et que le ministre se rende bien compte, ainsi que tous les gens, de la
situation qui pourrait arriver dans ce secteur. Personne n'ignore actuellement
que nous avons un ralentissement dramatique dans l'industrie de la construction
domiciliaire dans les milieux ruraux. D'ailleurs, on a qu'à voir les
politiques gouvernementales, fédérales ou provinciales, au niveau
de la Société d'habitation du Québec. Il y a des
statistiques qui sont assez effrayantes de ce côté. C'est cela que
j'aimerais savoir, et j'aimerais bien être rassuré de la part du
président de la CSN.
M. Pepin: M. le député, je voudrais d'abord vous
dire que, dans la construction, il me semble que le gros problème,
présentement, dans le secteur domiciliaire, c'est le taux
d'intérêt. Cela me paraît être un
élément majeur. On ne peut pas le régler ici. Mais ce sont
des taux d'intérêt qui varient de 10% à 14% et à
14.5%... Je dois aussi ajouter que je n'ai pas l'impression que la masse
salariale, dans une construction petite, est de forte intensité
relativement. Mais je n'ai pas de chiffres, je ne suis pas un expert dans ces
choses. Je dois vous dire aussi que, dans les régions où la
situation est dramatique, vous avez parlé entre autres du
Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, c'est vrai que c'est dramatique
là, mais je ne pense pas que ce soit le fait de la construction.
L'activité économique est complètement au ralenti
dans ce territoire. On n'a pas réussi à débloquer,
à créer un pôle d'attraction qui ferait que
l'activité serait plus grande. D'autres régions sont aux prises
avec le même problème, mais si vraiment, M. le
député, il y avait augmentation, en raison du coût de la
vie, pour l'année, mais distribués de $0.30 ou de $0.40
trimestriellement, je ne pense pas que cela affecte dangereusement
l'économie. On est dans le domaine de l'économie et de la
perspective économique; c'est difficile d'avoir une réponse qui
est certaine. C'est de la prévision que nous faisons.
M. Roy: C'était le point que je voulais soulever et je
vous remercie des réponses. Je pense bien que tout le monde est d'accord
que les travailleurs de la construction doivent bénéficier
d'augmentations de salaire correspondant aux augmentations du coût de la
vie, mais je m'interrogeais un peu sur la formule prévoyant qu'un
montant fixe soit accordé par certaines périodes, plutôt
que l'indexation à être fixée, tenant compte de
l'évolution ou tenant compte du taux d'inflation.
Je vous remercie, M. Pepin.
M. Pepin: Merci.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Saint-François.
M. Déziel: M. Pepin, si vous me le permettez, si on veut
revenir au grand réalisme que l'on vit présentement, vous
n'êtes pas sans savoir que, pendant l'été, nous avions
peut-être environ $11 milliards en chantiers de construction dans tout le
Québec.
M. Pepin: La baie James?
M. Déziel: La baie James pourrait probablement être
incluse. Vous avez également des entrepreneurs généraux,
avec des sous-traitants qui ont eu à vivre des soumissions, avant avril,
et spécialement ceux qui ont figuré vers la fin de 1973, qui
figuraient vers les trois derniers mois de 1973.
Si vous vous souvenez dans ce temps, l'essence coûtait, au mois de
septembre 1973, $0.34 le gallon et, dans l'espace de trois mois, elle
coûtait $0.60 le gallon. D'accord? Ils ont eu à subir une
inflation et différents contrats à prix forfaitaire, garantis par
des soumissions de 90 jours, ont dû être respectés par
différents entrepreneurs. Je veux en venir à ceci: ces
entrepreneurs, déjà déficitaires en commençant
leurs chantiers, auront, évidemment, à vivre une certaine
indexation, de par les demandes syndicales. Je veux en venir encore à
ceci: Qui, d'après vous, devrait payer la note?
M. Pepin: Qui devrait payer la note? Tout ce que je peux vous
dire, c'est que cela ne devrait pas être les travailleurs. En effet, en
quoi peuvent-ils être responsables de la hausse effrénée du
coût de la vie à l'heure actuelle? Dans le temps, on vous disait:
Ce sont vos augmentations de salaires. C'est cela qui fait augmenter tous les
prix. Je n'ai jamais cru à cette thèse et je l'ai combattue
à fond, mais, depuis cette poussée galopante des prix, y a-t-il
encore quelqu'un qui peut soutenir que c'est à cause des salaires que le
pétrole a augmenté, que les dérivés du
pétrole ont augmenté, que tout le reste a suivi, la viande, etc.,
alors qu'on connaît la proportion salariale dans les endroits où
ils dépècent la viande, où ils produisent?
Je pense que l'inflation ne peut pas être absorbée par les
travailleurs, mais, à l'heure actuelle, nous en payons quand même
une bonne partie. Même avec une formule d'indexation de trois mois, le
coût est moins lourd, mais, si le coût de la vie augmente en
décembre de 1 %, en janvier par hypothèse de 1 %,
je subis cela. Si mon ajustement est trimestriel, cela serait à la fin
de février, alors que l'indice du coût de la vie serait connu
uniquement plusieurs semaines après la fin du mois. Pendant cette
période, j'ai une zone grise où j'ai quand même perdu du
pouvoir d'achat.
Je comprends que maintenant vous allez vous tourner du côté
des entrepreneurs et dire: Comment vont-ils faire pour arriver? Je pense qu'il
est possible qu'il y ait des entrepreneurs qui soient à prix fixe, comme
on l'a mentionné hier et ce matin, je crois, et qu'ils n'aient pas
beaucoup d'élasticité. Cela peut arriver.
Généralement, j'ai bien l'impression que, depuis le temps
où il est question de l'inflation, il y en a un bon
nombre qui ont dû prévoir dans leurs soumissions pour des
contrats qui n'étaient en cours alors certains montants. Ils savaient un
peu ce qui se passait au Québec.
Quand les prix des matériaux augmentent, les entrepreneurs sont
obligés de payer le prix du marché. Dans ce cas, ils n'ont pas
à rechigner. Ils n'aiment sans doute pas cela, mais ils paient.
Quand c'est la main-d'oeuvre dont le prix doit augmenter en raison de
l'inflation, je ne vous dis pas que c'est comparable totalement, mais il y a
des points d'analogie qu'il faudrait inclure.
M. Déziel: Vous n'êtes pas d'accord que ces gens se
sont basés sur le décret qui avait été
promulgué par la Gazette officielle pour, premièrement, sortir
des prix précis.
Deuxièmement, je retiens les paroles de M. Dion lorsqu'il a
mentionné, hier, qu'il pourrait y avoir environ 242 entrepreneurs qui
pourraient être dans une situation précaire. Pensez-vous
qu'advenant le cas d'une indexation, alors que des milliers d'entrepreneurs ou
de sous-traitants seraient dans un marasme économique, ce marasme
économique ne se répandrait pas dans tout le Québec?
M. Pepin: S'il arrive qu'il y ait un marasme, qu'il n'y ait plus
de construction au Québec, je vous garantis que c'est dommageable pour
les travailleurs aussi. Ce que je soutiens, c'est que tel ne sera pas le
développement de la situation. J'ajoute que dans le passé on nous
a fait les mêmes peurs. Le Bonhomme-Sept-heures, on l'a sorti et
solidement devant les députés qui étaient là dans
le temps. Finalement, je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de faillites. Dans la
construction, il y a des faillites qui ne sont pas nécessairement dues
aux hausses de coût ni aux hausses de salaires, il y a aussi d'autres
raisons qui existent. Je ne pense pas que la situation sera celle que vous
semblez appréhender.
Je voudrais aussi vous dire que du côté des travailleurs,
quand le coût de la vie augmente et qu'il y a érosion de leur
pouvoir d'achat, ils ont le droit, eux aussi, de vivre à toutes les
semaines. Il me semble qu'il faut tenir compte aussi de ce fait.
M. Déziel: Vous avez dit, tout à l'heure, que dans
le domaine domiciliaire il y avait tout de même un aspect assez
étroit.
M. Pepin: Assez quoi?
M. Déziel: Qu'il y avait tout de même un aspect
assez étroit. Dans mon secteur du comté de Saint-François,
un projet de 290 bungalows va bientôt débuter. Cela
représente tout de même un montant de $5 à $6 millions. Je
ne vois pas pourquoi le côté domiciliaire serait
négligé en rapport avec des travailleurs qui sont dans des
chantiers paragouvemementaux, gouvernementaux ou industriels quelconques. La
dernière question...
M. Pepin: Qu'aucune carrière ne soit
négligée, aucun travailleur et aucune catégorie. Si...
M. Déziel: D'accord. Maintenant, au niveau de la
sécurité sociale, dans les négociations qui sont
intervenues syndicalement et patronalement, je sais que dans le corps des
maîtres électriciens, il y a une retenue salariale de $0.70, ce
qui fait $28 par semaine. N'y aurait-il pas eu possibilité de repenser
cette situation? Je rejoins l'idée du député de Beauce-Sud
qui mentionne le fait que sur $20, à un certain moment, il reste tout
simplement $2.99. S'il arrivait un marasme économique en quoi que ce
soit, selon la décision finale qui sera prise, vous n'avez pas
l'impression qu'on devrait, au niveau gouvernemental, repenser les charges de
taxation qui diminueraient d'autant plus ces $2.99.
M. Pepin: Les $0.70, ce n'est pas de la retenue syndicale. Ce
à quoi vous vous référez...
M. Déziel: Non, non, c'est paritaire.
M. Pepin:... c'est la retenue sociale, soit pour les fins de
fonds de retraite et d'assurance-groupe.
M. Déziel: La sécurité sociale.
M. Pepin: Ce débat a été soulevé,
hier, par M. Dion. Quant à moi, je l'ai traité d'une autre
façon, tantôt, en disant: Je ne tiendrai pas compte des $0.20 qui
ont été ajoutés à la sécurité sociale
parce que je ne les ai pas dans ma poche pour vivre. Je pense que le
débat que vous ouvrez, il a été ouvert hier. Il y a
beaucoupdetravailleursde laconstruc-tion qui, d'après les rapports que
j'ai, disent: II y a trop d'argent mis dans le système de
sécurité sociale et particulièrement au niveau du fonds de
retraite.
Il est bien sûr que, si on le regarde en chiffres absolus, en fin
de semaine, le montant est assez élevé; $0.70, si c'est 40
heures, cela fait $28. Maintenant, pour la part qu'ils envoient au fonds de
retraite, du côté des travailleurs, c'est $0.25 de leur argent
direct. Je ne pense pas que ce montant soit très élevé. Je
sais qu'il y en a beaucoup chez nous, des travailleurs, qui
préféreraient que ces $0.25 leur soient retournés et
gardés complètement. C'est tout le débat qu'on a à
faire. Est-ce que la sécurité sociale gouvernementale va se
développer suffisamment pour assurer une caisse de retraite universelle
plus substantielle que celle que nous avons à l'heure actuelle? Si c'est
l'hypothèse que nous formulons, inutile d'avoirdes plans
supplémentaires de retraite ou de régime de rentes. Est-ce
vraiment cela qui va arriver? Moi, je me questionne beaucoup,
présentement, sur la thèse que nous devrions avoir.
Dans le front commun, j'ai participé aux négociations d'un
plan de pension applicable à tous dans le secteur public et paraphublic;
même, il devenait obligatoire. On avait de la réticence et tout
cela mais, finalement on l'a négocié parce qu'on s'est dit: leur
vieillesse, leur troisième âge sera mieux assuré.
Mais est-ce que c'est encore un bon raisonnement que nous faisons ou
s'il ne vaudrait pas mieux, comme
vous semblez le suggérer, laisser à la
sécurité sociale gouvernementale le soin d'en tenir compte?
Le deuxième aspect que votre question me suggère, c'est
toute la question de l'indexation des impôts. Je l'ai moi-même
soulevée à plusieurs reprises réclamant l'indexation des
impôts. Du côté gouvernemental, on nous a toujours
répondu que c'était une formule régressive et que le
gouvernement du Québec préférait ne pas indexer les
impôts. Je pense que, si nous regardons les chiffres produits par le
gouvernement en raison de l'inflation, l'impôt et la taxe de vente, il
reçoit des dizaines et des dizaines de millions de plus. C'est une forme
de taxation souterraine, déguisée et il me semble que c'est tout
un autre débat parce que, s'il y a indexation des impôts, cela
sera valide non pas seulement pour ceux de la construction, mais pour
l'ensemble de la population. Je continue à croire qu'en indexant les
impôts, on va favoriser la classe moyenne et probablement aussi ceux qui
sont en bas de ce qu'on peut appeler théoriquement le classe
moyenne.
Le gouvernement, de son côté, se dit: Je
préfère en donner plus à ceux qui ne sont pas imposables
ou augmenter mon niveau de taxation, ma période d'exemption. Je pense
que, de toute façon, avec la non-indexation des impôts, vous vous
trouvez, au Parlement, à voter des augmentations de taxe sans le dire au
monde. Il me semble que je préférerais, s'il vous manque, pour
administrer la province, $100 millions ou $200 millions, plutôt que de le
retirer d'une manière déguisée en raison de l'inflation,
s'il vous manque cet argent, le Parlement doit être saisi d'un projet
disant: II me manque $100 millions, voici où je prendrai cette taxation.
Là, vous et le public faites le débat. Vaut-il mieux le prendre
dans les compagnies multinationales ou le prendre dans la poche des
salariés ou dans quelle proportion? Vaut-il mieux continuer à
donner des subventions à ITT ou s'abstenir de le faire pour que vraiment
nous ayons une assiette fiscale qui se tienne? En tout cas, je suis pour la
thèse de l'indexation des impôts, mais pas uniquement pour ceux de
la construction, bien sûr, pour tout le monde.
M. Déziel: Une dernière question, M. le
Président. Est-ce que vous ne voyez pas un certain danger concernant
l'indexation, à savoir qu'il pourrait y avoir un grave danger pour la
petite et la moyenne entreprises d'être supprimées parce qu'elles
ont une forte concurrence à affronter?
M. Pepin: Parlez-vous uniquement de la construction?
M. Déziel: Uniquement de la construction.
M. Pepin: Je pense qu'il y a concurrence, mais cette concurrence,
si tout le monde est astreint au même niveau de
rémunération, ce n'est pas sur la concurrence salariale que le
débat se fait, c'est sur la concurrence de meilleure gérance,
meilleure prévision, je ne sais trop. Mais dès que le
décret est là, dès que le décret prévoit que
petites, moyennes, grandes entreprises, c'est tel taux de salaire si le
coût de la vie augmente. Dans trois mois, il y aura tant de cents
d'ajoutés. Il me semble qu'il n'y a pas beaucoup de danger, sur
l'argument de la concurrence à tout le moins, parce que tout le monde
serait dans le même bain.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Laviolette.
M. Carpentier: M. le Président, il y a quelques minutes,
le député de Saint-François vous a posé la
question, à savoir qui paierait pour ces augmentations, ces ajustements
et tout. Vous avez défendu avec beaucoup d'énergie que ce ne
seraient certainement pas les travailleurs. D'accord. Mais qui d'après
vous va payer ces coûts? Ceux qui avaient des contrats avant,
déjà signés depuis trois ou quatre mois, ou, dans la
petite industrie, sur le plan industriel, ceux qui avaient des contrats de
maisons ou autres ou n'importe quelle sorte de contrats? Qui va payer cette
différence?
M. Pepin: Je pense qu'on n'a pas à se mettre la tête
dans le sable. Les entrepreneurs ne sont pas là pour nos beaux yeux
à nous. Ils sont là pour faire de l'argent. Alors, si le
coût de la construction augmente parce que le coût salarial, le
coût de la masse salariale augmente, il est bien clair, à tout le
moins pour les contrats futurs, qu'ils vont le refiler à un client qui
pourra s'appeler le gouvernement, qui pourra s'appeler moi, qui peut s'appeler
vous. C'est évident qu'ils vont le refiler quelque part. La seule chance
que nous pourrions avoir dans cette industrie, s'il y avait un meilleur ordre,
s'il y avait enfin l'établissement de relations convenables, c'est qu'il
pourrait y avoir une productivité qui serait meilleure et, à ce
moment-là, l'influence de l'augmentation des coûts salariaux se
ferait beaucoup moins sentir.
Dans beaucoup d'entreprises, des augmentations de salaire de 5%, 6%, 10%
n'entraînent pas d'augmentation de prix parce qu'il y a augmentation de
productivité, nouvelle machinerie, nouveau processus de travail, etc.
Mais, répondant le plus clairement possible à votre question,
c'est bien évident que, s'il y a augmentation des prix, c'est le client
tantôt qui va recevoir l'addition et je pense bien que les entrepreneurs
vont agir de cette façon, qu'ils ne l'assumeront pas
eux-mêmes.
M. Carpentier: Entièrement d'accord pour les contrats
futurs, c'est très clair qu'un entrepreneur qui soumissionne, peu
importe dans quel domaine, c'est bien évident qu'il va tenir compte de
la nouvelle augmentation s'il y a lieu. Mais pour les contrats signés
antérieurement, ceux qui ont été signés en juin,
juillet, août, l'an passé, durant l'année 1973, il y a
encore des parties de parachèvement dans ça. Qui va payer la
note?
M. Pepin: N'êtes-vous pas d'opinion que, dans bon nombre de
cas, la question de l'indexation étant en l'air, des entrepreneurs ont
dû faire un peu de prévision. J'ai lu il y a peu de temps, dans un
journal, je ne sais pas si c'est vrai, qu'il y avait eu une brève
enquête auprès de certains entrepreneurs, particulièrement
à Montréal il n'identifiait pas les entrepreneurs
les gars répondaient que, dans bien des cas, c'était
prévu. Ils
avaient prévu une augmentation, je ne sais pas exactement quel
montant. Maintenant, il peut y avoir aussi des contrats qui sont donnés
à prix fixe, mais, parfois, ce sont des drôles de prix fixes. Je
pense qu'il y a des contrats, je ne veux pas m'aventurer dans un domaine que je
connais moins que vous ou moins que d'autres ici, qui doivent prévoir
que, si le décret augmente, le prix du contrat augmentera aussi. Je
pense qu'il y en a, mais, s'il n'y en n'a pas, ne tenez pas compte de ma
réponse.
M. Cournoyer: Dans le cas de certaines entreprises publiques, pas
la majorité, je pense que, dans les devis généraux de la
ville de Montréal, par exemple, donc, par conséquent,
peut-être dans ceux de la communauté urbaine, il y a une clause
qui dit qu'on s'ajuste au taux du décret.
M. Pepin: Je n'ai donc pas tout à fait tort.
M. Cournoyer: Dans ce cas particulier, oui, mais, dans le cas du
gouvernement provincial, il n'y a pas de telle clause d'indexation dans les
contrats à prix fixe. Cela veut dire que c'est transporté dans le
cas des hôpitaux et dans le cas des commissions scolaires où il
n'y a pas de clause, non pas d'indexation mais d'ajustement du prix, compte
tenu de l'augmentation des taux de décret.
M. Burns: Je m'excuse mais, à la commission des
engagements financiers, il arrive très souvent, très, très
souvent justement, que des contrats qui ont été donnés
à prix fixe nous soient montrés comme ayant subi des ajustements
à cause d'une augmentation de coût et c'est constant. D'ailleurs,
c'est malheureux que le député de Beauce-Sud ne soit pas
là parce qu'il est très souvent à cette commission pour le
constater.
M. Cournoyer: Je disais qu'il n'y a pas de telle disposition dans
le devis.
M. Pepin: On va avoir une démonstration ici.
M. Cournoyer: Je ne dis pas que le gouvernement, dans la question
des engagements financiers, ne révise pas les contrats de construction
qu'il a consentis, je dis qu'il n'y a pas de clause dans le devis qui dit que
ça va être révisé en fonction des taux du
décret. Dans le cas de la ville de Montréal, il y a une telle
disposition.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Laviolette.
M. Carpentier: Est-ce que vous pouvez nous fournir certains
documents là-dessus pour nous apporter une preuve démontrant que
cela a été fait ou n'a pas été fait? Est-ce que
vous pouvez nous donner des chiffres là-dessus?
M. Pepin: Je n'ai pas de chiffres que je peux vous fournir. Je
peux vous donner des indications comme une correspondance pour un CEGEP
où on a demandé au gouvernement d'ajuster pour les $0.50, je ne
sais pas si le gouvernement l'a accepté ou non. Pour d'autres aussi, on
demande des ajustements. Parfois, dans de gros contrats, je pense qu'il y a la
question des "extra", je ne connais pas tellement ça.
M. Carpentier: Prenez par exemple tout le cas de l'habitation,
les petits et moyens entrepreneurs qui ont déjà des contrats
signés avec un individu pour la construction d'une maison. Ce contrat
était signé antérieurement, disons avant le mois de
juillet, soit une maison d'appartements, une petite construction, qui va payer
pour? Est-ce que ça va être le client, est-ce que ça va
être l'entrepreneur? Vous plaidez avec toute l'énergie possible
pour que ce ne soit pas le travailleur. Je suis entièrement d'accord
avec vous mais il faudra que quelqu'un paie pour ça, qui va payer?
M. Pepin: Je ne sais pas de quelle nature sont ces contrats
signés avec des gens du domaine privé, il est bien clair que si
l'entrepreneur signe un contrat ferme, c'est $20,000 pour la construction que
je vais te faire. En cours de route, lorsque les prix augmentent, quand les
matériaux augmentent ils augmentent les matériaux dans ce
temps-ci, comme le reste qui paie?
M. Bédard (Montmorency): On soumissionne à des prix
garantis.
M. Pepin: Vous l'avez prévu à l'avance.
M. Bédard (Montmorency): On soumissionne à des prix
garantis.
M. Pepin: Non. Vous pouvez prévoir une augmentation du
prix des matériaux jusqu'à un certain point. C'est de la
prévision que vous faites. C'est prévu donc ce n'est pas un
contrat fixe en ce qui concerne les matériaux. Pour les hommes, par
exemple, passe par là.
M. Carpentier: Mais si un individu signe un contrat avec un
entrepreneur quelconque, pour la construction d'une maison, par exemple pour un
montant de $25,000, et qu'à la fin, avec toutes les augmentations,
coût de matériaux, coût de construction et tout cela, on
arrive à $28,000...
M. Pepin: C'est une mauvaise prévision, certain.
L'entrepreneur a signé un mauvais contrat, certain.
M. Carpentier: Alors si cela se répète?
M. Pepin: On ne peut pas dire que c'est la faute des
salaires.
M. Carpentier: Si cela se répète à trop
d'exemplaires, qu'est-ce qui va arriver au bout de la ligne? Il va certainement
y avoir des démissions.
M. Pepin: Quel est le pourcentage du coût de la
main-d'oeuvre dans le coût total d'une maison? Est-ce qu'on peut imaginer
cela? Cela peut-être 25% ou 30% ou 40%. Je pense bien qu'entre 25% et 30%
je ne me trompe pas tellement.
Si c'est 25%, c'est le quart. Disons que la maison est de $20,000; le
quart, cela ferait $5,000 pour la main-d'oeuvre. En tout cas, si c'est 50%, mes
chiffres
changeront tout simplement, mais je crois que c'est plus faible que
50%.
Mais si les salaires augmentent, cela n'augmente pas de 10% du
coût global, cela augmente de 10% des $5,000 si c'est $5,000. C'est pour
cela que, lorsque j'ai répondu au député de Beauce-Sud,
j'ai fait attention en disant que la masse salariale, dans un contrat comme
cela, est importante, c'est évident, mais elle n'est pas très
large, comparée à d'autres ouvrages, je présume.
M. Carpentier: Si vous avez une augmentation de $1 l'heure sur un
salaire de $5, par exemple, cela ne représente plus 25%, cela
représente 20%. C'est beaucoup plus considérable que vous nous le
laissez croire.
M. Pepin: Si mon chiffre de 25%, comme étant attribuable
à la main-d'oeuvre, est vrai, si le contrat est de $20,000 pour finir la
maison, c'est $5,000 qui s'en vont pour la masse salariale. Peu importe si je
gagne $5 ou $6 ou $7 l'heure. S'il est vrai de dire, aujourd'hui, que c'est le
quart qui s'en va à la main-d'oeuvre je ne vous
réfère pas au taux horaire à ce moment-là la
masse salariale pour construire une maison, si, par hasard, c'est 40%, changez
les chiffres, transposez les chiffres.
M. Carpentier: Pas si loin que cela. Si vous avez une
augmentation de $1 l'heure sur une possibilité de $5, cela veut dire
20%. Si vous payez $5,000, cela représente $1,000.
M. Pepin: $1,000, c'est évident, cela s'additionne comme
cela.
M. Carpentier: Alors, cela commence déjà à
faire quelque chose.
M. Pepin: Bien sûr, parce que le coût de la vie
augmente et le gars, il en a besoin.
M. Carpentier: On réalise cette partie de la question,
là. Nous le savons. Mais qui va payer pour les contrats en
arrière? Disons qu'on arrête au mois X en 1974...
M. Burns: Le même gars qui paie notre salaire.
M. Pepin: Si le gars a un contratfermé, comme celui que
vous imaginez, si son taux de profit n'est pas assez élevé, c'est
sûrque, dans ce cas-là, il va subir une perte. Mais il est
possible qu'il obtienne d'autres contrats aussi et qu'il se venge un peu, je ne
le sais pas.
M. Carpentier: Je trouve que c'est pas mal
hypothétique.
Le Président (M. Séguin): Le député
d'Iberville.
M. Tremblay: M. Pepin, je vous ai entendu dire ceci tout à
l'heure, au soutien de votre thèse à l'indexation des
impôts au Québec. Dans un geste qui vous est familier, vous avez
dit que le gouver- nement drainait, d'une façon souterraine, des
dizaines de millions de dollars à l'insu des contribuables. Est-ce que
vous avez omis, sciemment, de parler dans le sens suivant quant à cette
augmentation du produit national brut au Québec à chaque
année? Avec un bon gouvernement, cela se produit à chaque
année depuis au moins cinq ans, nous avons une augmentation naturelle du
produit national. Conséquemment, c'est une augmentation normale,
démographique, économique, etc.
Bien sûr que cela amène des revenus additionnels dans les
coffres du gouvernement. Si cela amène des revenus additionnels dans les
coffres du gouvernement, le gouvernement, ce n'est pas une personne, c'est la
population du Québec dans l'ensemble qui en bénéficie.
Cette augmentation du produit national amène
nécessairement une hausse dans les services et dans les
responsabilités que le gouvernement s'est engagé à assumer
envers la population. Tout cela veut dire que l'augmentation normale de la
situation économique au Québec, dans son ensemble, amène
une hausse naturelle des revenus dans les coffres du gouvernement, mais, en
conséquence, également, amène le gouvernement à
faire face à des obligations additionnelles. Je crois qu'il aurait
été bon d'ajouter cela.
M. Pepin: M. le député, c'est vraiment sciemment
que je n'ai pas soulevé cela, parce que je ne partage pas votre point de
vue.
Quand vous me parlez du PNB, vous me parlez du produit national brut,
tout le monde sait cela. Vous savez qu'à l'heure actuelle le PNB
n'augmente pas et vous avez des taxes et des suppléments de taxes, quand
même. C'est parce qu'il faut bien porter le problème où il
est. Si c'est une augmentation du PNB en termes constants ou en valeur
réelle, je crois qu'il faut être suspicieux là-dessus.
Ce que je dis de vous autres, c'est que l'inflation de 12% vous
entraîne des revenus. Evidemment, je sais bien que vous ne gaspillez pas
cet argent, le moins possible, en tout cas, je l'espère.
M. Tremblay: Je suis content de vous l'entendre dire, tout de
suite.
M. Pepin: Quand vous recevez ces dizaines ou ces centaines de
millions de plus, je dis que c'est l'inflation qui vous draine cela ici
à Québec et que cela est une augmentation de taxe
déguisée, parce que vous appauvrissez des citoyens et, comme vous
avez besoin des $100 millions, vous allez les appauvrir quelque part. Mais
là où je ne marche pas avec vous je ne peux pas faire de
débat public et vous non plus, comme député c'est
que vous ne pouvez pas décider où vous allez piger votre argent
pour administrer la province, parce que ce n'est que l'inflation avec les taux
marginaux, les tables d'impôt, la taxe de vente qui vous drainent plus
d'argent, tandis que, si vous aviez une indexation des impôts, là
vous pourriez dire, sur la proposition du ministre des Finances: J'ai besoin de
$100 millions de plus pour administrer le Québec; je propose que la taxe
soit
prise à même les corporations, les multinationales, le
reste, pour une partie, dans la poche des citoyens, en augmentant les taux
d'impôt. Là, vous pouvez au moins faire ce débat, que vous
ne pouvez pas faire, à l'heure actuelle.
Le PNB, je vous le rappelle, il ne croît pas depuis trois ou
quatre mois, semble-t-il.
M. Tremblay: Je ne veux certainement pas faire de débat
là-dessus.
M. Pepin: Bien, ça m'avait l'air de cela.
M. Tremblay: Mais vous admettrez avec moi, même si vous ne
partagez pas mon opinion, que ces surplus de revenus qui viennent
automatiquement, causés par l'augmentation générale,
l'inflation, occasionnent naturellement aussi des dépenses
additionnelles. On en verra peut-être une preuve tangible d'ici quelques
heures.
M. Pepin: Comme l'augmentation des députés, par
exemple. Il faut bien que ce soit pris là.
M. Tremblay: Oui, certainement. Puis l'augmentation que le
président de la CSN s'est fait voter l'année passée.
M. Pepin: Pardon, ce n'est pas l'an passé.
M. Tremblay: Ou il s'en fera voter une prochainement.
M. Pepin: Mais ce n'est pas à même les taxes, quand
même, que c'est payé, je ne pense pas.
M. Tremblay: Mais à toutes fins utiles...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Pepin: Ce n'est pas à même les taxes qui sont
reçues ici, ne charriez pas.
M. Tremblay: M. Pepin, moi, je voulais... Le Président
(M. Séguin): A l'ordre!
M. Tremblay:... simplement attirer l'attention des gens qui nous
écoutent. Je respecte le bien-fondé de vos allégations.
N'allez pas croire que je manque de respect envers votre syndicat. Ce n'est pas
du tout là l'objet de mon intervention. C'était simplement de
soulever la question qu'également il y a des responsabilités
additionnelles et des services additionnels qui sont inhérents à
une hausse de revenus. C'est normal.
Maintenant, tout le débat sur l'indexation de l'impôt, cela
viendra peut-être un jour.
Le Président (M. Séguin): La commission suspend ses
travaux jusqu'à quinze heures, cet après-midi. Nous entendrons,
dès l'ouverture, l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
Reprise de la séance à 15 h 3
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre,
messieurs!
L'Association provinciale des constructeurs d'habitations du
Québec. Voulez-vous vous identifier pour le journal des
Débats?
Association des constructeurs d'habitations du
Québec
M. Rousseau (Orner): Orner Rousseau, représentant de
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec.
Trois heures, M. le Président, c'est une très belle heure. Cela
me rappelle qu'une certaine personne s'est déjà fait crucifier
à cette heure!
Or, j'aimerais débuter. Pour fins de présentation, je dois
vous dire que l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du
Québec représente 3,500 membres; elle représente presque
exclusivement les constructeurs d'habitations et, je dois dire, le secteur de
l'habitation.
Nous représentons 24% des employeurs de toute l'industrie, selon
le certificat d'accréditation émis par le ministère du
Travail. Et, pour fins de négociation, puisqu'il y a trois
critères qui sont additionnés, nous représentons 10%,
à peu près, en masse salariale et de 10% à 15% au point de
vue du nombre de salariés embauchés par nos employeurs.
Je dois ajouter aussi que mes membres ont des entreprises de petite et
moyenne tailles et que nous faisons directement affaires avec le public
consommateur, c'est-à-dire celui qui achète une maison et dont
les contrats ne sont pas de $1 million, mais entre $20,000 et $30,000. Je dois
vous dire que ce sont tous des contrats fermés.
Or, je débute. Depuis le temps que le conflit de l'industrie de
la construction dure sur la question de l'indexation des salaires, nous n'avons
pas, messieurs les membres de cette commission parlementaire et messieurs du
gouvernement, à vous décrire dans tous ses détails la
situation qui prévaut actuellement sur les chantiers de construction.
Vous en êtes sûrement bien informés puisque vous avez
accepté, le 24 décembre dernier, d'amender la Loi des relations
de travail, permettant ainsi au lieutenant-gouverneur en conseil, sur
recommandation du ministre du Travail, de modifier le décret si ce
dernier est d'avis que, dans l'intérêt public, cette solution est
la seule qui puisse remédier à la situation existante.
Ainsi, vous avez sans doute évalué la situation et
sûrement pris cette décision d'amender la Loi des relations de
travail en connaissance de cause. Il n'y a donc que peu de chose que vous ne
sachiez déjà.
Nous n'avons pas à vous préciser la position de notre
association dans l'actuel conflit. A maintes reprises, nous avons clairement
exprimé nos vues sur le sujet, à la fois au premier ministre et
au ministre du Travail. Enfin, régulièrement, nous avons
manifesté publiquement notre pensée afin d'informer nos membres
et le public en général.
En effet, nous venons aujourd'hui non pas exposer une situation que tous
connaissent, non pas déclarer
notre position maintes fois publiée, mais reprendre uniquement
les raisons qui ont motivé et motivent encore notre position.
Les raisons de notre refus à l'indexation des salaires. Depuis
bientôt deux ans, la faveur des critiques économiques rend
l'inflation responsable de tous les déboires de l'économie
mondiale. Dernièrement, les associations syndicales de la construction
partaient de ce point de vue pour revendiquer l'indexation de leurs
salaires.
En mai 1973, l'industrie de la construction venait de se doter d'un
cadre sérieux qui assurait les trois prochaines années d'un
climat favorable et productif. Pour les trois ans, tel que
démontré dans l'annexe A, l'industrie avait accordé,
uniquement au chapitre des salaires, des augmentations de l'ordre de 27%
à 40% et, si on ajoute les avantages sociaux, des augmentations variant
entre 36% et 45%.
Ces chiffres ont été compilés à partir des
principaux centres de la province: Montréal, Valleyfield, Hull,
Québec, Thetford Mines, Sherbrooke, Bois-Francs,
Saguenay-Lac-Saint-Jean, Joliette; et pour les métiers suivants:
charpentier-menuisier, peintre, plombier, électricien, plâtrier,
briqueteur. L'éventail des régions, de même que les
principaux métiers, présente l'image réelle des avantages
du dernier décret.
Dans la revue Bâtiment de décembre 1974, pour
l'année 1974, on peut lire ceci: "Selon les dernières
compilations de Statistique Canada, les travailleursde la construction
conservent toujours une bonne première place quant aux revenus
hebdomadaires moyens au pays. Le salaire moyen d'un ouvrier de la construction
se situait, en effet, à $256.33, en comparaison de $237.57 dans
l'industrie minière, $186.22 dans l'industrie manufacturière,
$144.31 dans le commerce et $127.70 dans les services".
A partir de ces chiffres, on est en droit de se demander si les
salariés de la construction ont raison de réclamer une
augmentation de salaire actuellement.
Malgré ces salaires alléchants, la FTQ devait revenir
à ses tactiques usuelles, dans un premier temps, débauchant par
la violence la majorité des syndiqués de la construction, dans un
deuxième temps... Ici, je dois me corriger. Ce ne sont pas les
syndiqués, mais les salariés.
Dans un deuxième temps, en maintenant une productivité
à son plus bas niveau pour forcer les employeurs à accepter des
mini-ententes et créant des pénuries artificielles de
main-d'oeuvre.
Dans un troisième temps, en faisant des grèves
illégales et en maintenant des grèves par la force.
Dans un quatrième temps, en servant des ultimatums au
gouvernement qui a cédé, en adoptant, le 24 décembre
dernier, la loi 201.
En ce début de 1975, nous nous demandons si le gouvernement saura
protéger le principe du respect des obligations contractuelles de la
môme manière qu'il a su protéger le principe de la
liberté syndicale.
Le principe des obligations contractuelles est primordial et
défendu depuis qu'existe la moindre forme de vie sociale et
communautaire.
Par le décret, les parties ont établi leurs relations de
travail pour trois ans et, de ce fait, ont renoncé au droit de
grève et de lock-out pendant la même période.
Se basant sur ce décret, les constructeurs ont éta- bli
des prévisions budgétaires et contracté des obligations
avec leurs clients qui, eux aussi, ont fait la même démarche que
nous. On vient maintenant nous demander d'accepter de chambarder tout le
régime avec les employés de la construction. Cependant, avant de
changer quoi que ce soit, nous devons aussi considérer que les
constructeurs sont aux prises, d'un autre côté, avec leurs clients
qui n'accepteront pas de changement au contrat, le gouvernement étant
l'un de ceux-ci.
A court terme donc, il serait très néfaste à toute
notre économie que le gouvernement fasse en sorte que le principe
obligationnel change.
A long terme, il faudrait repenser en profondeur tout notre
système juridique, tant pour régler les relations de travail que
pour régler toute obligation, si on permet maintenant à une
tierce partie de modifier les obligations contractuelles face aux agissements
de l'une ou l'autre des parties au contrat.
Il est vrai qu'une situation de fait existe, mais cette situation est
illégale.
Nous savons très bien qu'il s'agit de placer le gouvernement
devant une situation de fait pour qu'il agisse. Un des ministres, M. Jean-Paul
L'Allier, déclarait dernièrement qu'on vit dans une
société de violence. On accepte maintenant comme allant de soi
que la force et la violence sous toutes ses formes soient les principales
sources d'où proviennent, pour ceux qui ont à prendre des
décisions, les lignes de conduite à suivre.
Il faut cependant s'interroger sur l'action que doit porter le
gouvernement. S'agit-il de légaliser la situation ou de sanctionner plus
efficacement les règles établies afin que cette situation ne se
perpétue pas?
A titre d'exemple, pourquoi le législateur a-t-il institué
la Loi pour la protection du consommateur? Nous répondons que c'est
parce qu'il existait une situation de fait par laquelle le public, en
général, était exploité par certains parasites
insouciants de l'intérêt général.
Il s'agit donc maintenant de juger de l'intérêt
général pour voir à sa protection. C'est ce que dit la loi
201.
La situation existante est celle d'une violence constante, psychologique
et physique, que subissent les constructeurs et les salariés par les
organisations syndicales. Doit-on approuver ou résorber cette
violence?
Notre code civil contient une section au chapitre des contrats par
laquelle toute forme de violence peut permettre d'annuler un contrat. C'est la
base primordiale de toute entente et de toute paix sociale. Faudra-t-il en
venir, à plus ou moins longue échéance, à changer
cette partie du code civil ou doit-on encore tenter de la faire respecter, ce
que nous faisons depuis plus de 100 ans?
Certains vont croire que le raisonnement est poussé à
l'absurde, mais nous croyons qu'il est tout à fait réaliste face
à la situation existante.
C'est à cette alternative que fait face le gouvernement
aujourd'hui et c'est à ce niveau que se retrouve l'intérêt
public.
En modifiant le décret parce que l'une des parties prend des
mesures répréhensibles pour nous forcer à le faire, nous
encourageons l'illégalité et ceci pour le plus grand mal de
l'intérêt général.
Cet intérêt général veut que, dans la
période d'inflation que nous vivons, nos gouvernements prennent des
mesures efficaces pour maintenir le pouvoir d'achat et
le standard de vie de leurs administrés tout en refoulant
l'inflation.
Tel que nous le disions au premier ministre en juin 1974, l'achat d'une
maison unifamiliale constitue un but dans la vie de nombreux
Québécois. Déjà, la construction domiciliaire a vu
ses coûts augmenter de façon dramatique et nous ne croyons pas que
le consommateur moyen, dont le salaire est certainement inférieur
à ceux payés dans notre industrie, soit en mesure de payer un
coût supplémentaire.
Ainsi, pour le consommateur moyen ce qui peut répondre,
dans une certaine mesure, à une des questions de ce matin dont le
prix d'achat pour une maison est de $25,000, l'augmentation de $1 l'heure, soit
15%, aurait comme conséquence d'augmenter le coût de production de
7% à 8%, prenant comme base de calcul que le coût de la
main-d'oeuvre est évalué à 40% du coût total de
construction. C'est donc dire qu'une maison évaluée à
$25,000 aujourd'hui coûterait demain $26,500. Pour une maison de $30,000,
le coût passerait à $31,800.
Enfin, si le gouvernement cède à la pression syndicale en
brandissant l'intérêt public, il ne fait que motiver les
mêmes travailleurs à remettre en marche la même
stratégie dans un avenir plus ou moins proche.
Maintenant, M. le Président et messieurs les membres de cette
commission, si vous permettez, avant que vous commenciez à poser vos
questions, j'aimerais peut-être y aller de quelques commentaires pour
répondre à certaines questions qui ont été
soulevées hier au cours du débat et même ce matin, puisque
le centre du débat a porté très souvent sur le domaine de
l'habitation. On s'est toujours référé au domaine de
l'habitation en disant ceci: Le représentant de l'habitation viendra
répondre pour nous. C'est pourquoi je dis, dans une certaine mesure,
qu'il y a un secteur de l'habitation dans l'industrie de la construction.
Il y a une question qui a été soulevée ce matin ou
hier et qui était la suivante. Les constructeurs ont dû
sûrement indexer ou penser ajouter le coût à leurs contrats.
Or, je dois dire que, d'une part, je pense que les constructeurs n'ont pas
additionné le coût de l'indexation qu'on semble vouloir nous
annoncer très bientôt ou en prévision de... Ils n'ont pas
indexé le coût de construction, parce que je dois vous dire qu'il
y a une concurrence farouche dans ce domaine. Quand vous avez un constructeur
qui construit une même maison, à peu près de même
capacité, c'est-à-dire à peu près 900 pieds
carrés, 925 pieds carrés, 1,000 pieds carrés, à peu
près les mêmes modèles, il fait affaires avec les
mêmes institutions prêteuses, il fait affaires aussi avec la
Société centrale d'hypothèques et de logement qui
évalue aussi le coût de construction avant d'assumer un prêt
à un consommateur. Elle évalue aussi à quoi a droit le
constructeur au point de vue du profit. Elle évalue à partir du
décret et non pas en faisant des extrapolations qu'il y aura
peut-être une indexation, mais bien à partir du décret, le
coût de main-d'oeuvre assez juste. Je dois vous dire qu'à ce
moment-là les taux ne sont pas prévus.
D'autre part, je dois vous dire aussi que la Société
centrale d'hypothèques et de logement rencontre
régulièrement notre association et je dois ajouter qu'il y a une
chicane farouche justement sur les questions d'évaluation d'estimation
de coûts. Cette estimation se fait surtout au niveau des coûts
directs, c'est-à-dire les matériaux, le coût de la
main-d'oeuvre et ensuite, c'est certain, il y a encore de grosses discussions
sur les frais indirects, tels les certificats de localisation, la passation de
contrats, etc. Or, je dois vous dire qu'à l'heure actuelle les
constructeurs d'habitations travaillent avec des contrats fermés parce
qu'ils travaillent avec le consommateur. Il n'y a absolument aucun consommateur
qui ne voudrait marcher à "cost plus" au niveau d'une maison
d'habitation. Il veut bien avoir une maison bien déterminée, il
veut bien savoir aussi comment cela va lui coûter à la fin de la
"run". C'est assez clair de ce côté.
Or, il y a l'autre question qui a été posée: Qui va
absorber le coût si jamais il y avait indexation? Moi, je dois vous dire,
en premier lieu, que pour les maisons déjà vendues parce
que les constructeurs ont déjà vendu des maisons pour
livraison en juin, juillet ou mai, en tout cas dans un délai de cinq
à six mois, c'est l'entrepreneur général qui va assumer le
coût, qui va assumer la perte. Possiblement, il y en a qui vont faire
faillite.
Dans un deuxième temps, ce sera sûrement le consommateur
qui va absorber. Pas simplement le consommateur qui aura acheté une
maison unifamilliale, parce que chez nous, on ne fait pas simplement de la
maison unifamiliale, on fait des immeubles d'habitation... Vous savez que toute
la population doit se loger, inévitablement, elle doit assumer le
coût. C'est, dans une certaine mesure, toute la population en
général qui aura à assumer, tôt ou tard,
l'indexation. Je ne dis pas la perte, parce que la perte va être
assumée complètement par l'entrepreneur général et
elle ne sera pas portée dans un second temps par le consommateur. Mais
lorsque le constructeur sera aux prises avec de nouveaux taux, advenant une
indexation, lorsqu'il va présenter à la Société
centrale d'hypothèques et de logement, une demande de prêt pour
son client, la Société centrale d'hypothèques et de
logement va lui dire: Ton coût, compte tenu de l'indexation, est le
suivant, c'est ça. La perte ne sera pas additionnée.
Je dois vous dire que le constructeur d'habitation est pris dans un
carcan qui est loin d'être flexible. Je vous disais qu'il y avait une
distinction entre une construction de $20,000 et une construction de $1
million. Je pense que, dans une construction de $1 million, il y a plus de
facilité à pouvoir, tout au moins, apporter des coûts
imprévisibles.
Je reprends l'exemple que j'ai présenté dans mon
mémoire, selon lequel $1 l'heure représenterait à peu
près une augmentation de $1,500. Le constructeur qui bâtit, c'est
à peu près le profit qu'il fait. Je dois vous dire qu'à
l'heure actuelle c'est un gros profit, $1,500 par maison. Il y a des gens qui
font des profits de l'ordre de $500 à $600, mais cela inclut, quand on
parle de profit, le salaire qu'il se paie. C'est-à-dire qu'il doit
prendre son salaire à même ce profit-là.
Or, je dois vous dire également qu'il y a beaucoup de
constructeurs; ce ne sont pas tous de gros constructeurs, il y en a de petits.
Si on peut réussir à avoir une certaine concurrence des petits
employeurs par rapport aux gros, c'est parce que, dans une certaine mesure, le
petit constructeur travaille avec ses mains, en collaboration avec ses
salariés, pour arriver à sortir le meilleur prix possible.
Je dois vous dire qu'à l'heure actuelle je prends
simplement novembre et décembre les mises en
chantier ont baissé d'à peu près 60%. Si vraiment
on indexait à l'heure actuelle, le pouvoir d'achat étant
tellement restreint, on réduirait encore plus les mises en chantier et
je pense qu'on amènerait le constructeur d'habitations à fermer
ses portes dans certains cas.
Si j'ai d'autres commentaires à ajouter tout à l'heure, je
le ferai avec plaisir. Je suis prêt à répondre aux
questions, si vous voulez, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Là-dessus, vous
pouvez être assuré d'avoir des questions. M. le ministre.
M. Rousseau: C'est bien possible.
M. Cournoyer: Quelle proportion de vos membres agiraient par
devis et marchés?
M. Rousseau: Je n'en ai pas.
M. Cournoyer: Aucun n'agit par devis et marchés?
M. Rousseau: On fonctionne, chez nous, toujours par contrats
fermés. Il n'y a absolument rien, à l'heure actuelle, qui peut
permettre d'ajouter une formule quelconque d'indexation.
M. Cournoyer: Je ne vous parle pas de cela. Quelle est la
proportion de vos membres qui agissent ou qui font affaires par devis et
marchés?
M. Rousseau: A peu près, je ne sais pas, 900. M.
Cournoyer: Tant que cela?
M. Rousseau: A peu près 900 constructeurs, c'est à
peu près cela, la proportion.
M. Cournoyer: Sur combien?
M. Rousseau: Nous avons, à l'heure actuelle, 3,500
membres. Nous avons approximativement 2,500 membres, comme vrais employeurs de
l'industrie de la construction, en vertu de la loi, parce que j'exclus les
fournisseurs et tous ceux qui sont affiliés.
M. Cournoyer: Mais, 2,500 membres, donc des constructeurs? Des
entreprises qui organisent la construction de chantiers domiciliaires par devis
et marchés?
M. Rousseau: Oui.
M. Cournoyer: Dont 900 sont par devis et marchés?
M. Rousseau: Oui, c'est cela, 900 par devis et marchés,
parce que les autres sont des sous-entrepreneurs.
M. Cournoyer: Ma question est un peu différente. Je
voudrais faire la distinction entre devis et marchés,
c'est-à-dire que je vous présente un projet de maison et vous me
faites un prix sur cette maison. Vous êtes donc astreint à ce
prix, comme une autre entreprise générale. Parce qu'ils peuvent
être aussi bien dans la fédération que dans l'association.
N'importe quel entrepreneur peut faire cela par devis et marchés. Mais
chez vous, la proportion qui agit comme cela, c'est-à-dire sur une
maison en particulier, je vous présente un prix et ce prix est
ferme.
M. Rousseau: Je pense que ce serait difficile de répondre
à votre question. Mais je vais essayer d'y répondre en ce sens.
Je dois avoir approximativement, sur les 900 membres constructeurs parce
que le reste, ce sont des sous-entrepreneurs peut-être de 30%
à 40% qui fonctionnent en préparant des projets globaux.
M. Cournoyer: C'est-à-dire des projets domiciliaires.
M. Rousseau: C'est cela, ils fonctionnent comme cela.
M. Cournoyer: Un groupe domiciliaire.
M. Rousseau: Et d'autres constructeurs qui fonctionnent selon
qu'on leur présente un plan et qu'ils font une estimation.
M. Cournoyer: Est-ce que, depuis le début de la bataille
de l'indexation dans le domaine domiciliaire, vous avez des
problèmes?
M. Rousseau: Je m'excuse, quelqu'un me parlait.
M. Cournoyer: Depuis le début de ce qu'on peut appeler la
bataille de l'indexation, vous, comme représentant de l'Association des
constructeurs d'habitations, vous devez en avoir des problèmes. Vous
êtes un représentant patronal et vous avez des problèmes,
mais, du côté de vos membres, est-ce qu'il y a aussi des
problèmes de harassement, par exemple, comme ceux qu'on retrouve dans
les mémoires qui ont été présentés
avant?
M. Rousseau: A cette question, je dois vous répondre. Je
sais que tous les gens pensent que le secteur de l'habitation est un secteur
particulier et assez favorisé. Je dois admettre que le secteur de
l'habitation est assez favorisé. Par contre, en fonction du dernier
conflit, justement le conflit auquel on essaie de mettre un terme, nous avons
fait parvenir au ministre de la Justice plus de 600 plaintes d'intimidation, de
violence.
C'est-à-dire que les salariés ont été
obligés de sortir du chantier. Je peux même vous ajouter qu'il y a
des plaintes que nous avons soumises en tout cas, tout au moins une,
à ma connaissance suivant lesquelles un constructeur a
été obligé de se servir d'un fusil pour sortir justement
ce genre de fiers-à-bras il ne faut pas se cacher le mot
du chantier, pour protéger ses propres salariés afin qu'ils
puissent continuer à travailler. Cela, nous l'avons soumis à la
commission Cliche.
M. Charron: Quand vous dites que vous avez porté des
plaintes, c'est l'association ou les entrepreneurs individuellement?
M. Rousseau: Ce sont les entrepreneurs qui nous
ont fait parvenir, chez nous, les plaintes et nous, nous les avons
dirigées au ministre de la Justice et aussi, en même temps, nous
avons fait parvenir le même dossier à la commission Cliche.
M. Cournoyer: Donc, ce serait dans l'ordre de 600 plaintes
connues.
M. Rousseau: Ce sont 600 plaintes...
M. Cournoyer: Dans le domaine, connues...
M. Rousseau: ...connues.
M. Cournoyer: ...ou révélées... Le
harassement, dont vous faites état, cela aurait sa place dans le domaine
domiciliaire autant que dans le domaine industriel.
M. Rousseau: Je pense qu'il faut comprendre que le secteur de
l'habitation, quoique très souvent ce soient de petits chantiers, que ce
soient des entreprises de moyenne taille, que ce ne soient pas de grandes
équipes d'hommes... Il faut quand même se dire une chose: C'est
que nous sommes tributaires, de par les lois, de par les règlements, de
toutes les conditions qui existent au niveau du secteur industriel, enfin, sauf
avec quelques particularités. Mais nous sommes quand même
tributaires, parce qu'il ne faut pas oublier une chose, au niveau de
l'habitation, il y a des délégués de chantier.
Peut-être que les délégués de chantier n'ont pas la
même forme ou la même corpulence que ceux des gros chantiers. Ce
n'est peut-être pas nécessaire d'avoir des armoires à glace
sur les petits chantiers d'habitation. C'est plus facile. Aussi, il faut dire
une chose. Ces mêmes délégués de chantier sont quand
même capables et ils travaillent dans une certaine mesure.
Mais quant vous entrez dans un conflit, l'habitation n'embarque pas tout
de suite. Elle ne subit pas tout de suite les incidences du secteur industriel
et du secteur commercial. Mais cela a une chaîne, cela a un effet
d'entraînement. Quand cela se produit au niveau de l'industriel, pas
longtemps après, on le subit, au niveau de l'habitation. Quand les
délégués de chantier sont là, ils ne sont pas
exempts aussi de subir des pressions qui viennent d'autres
délégués de chantier ou des centrales syndicales. Alors,
ils n'ont pas le choix, c'est-à-dire ils procèdent aussi de la
même façon. Nous subissons toujours le contrecoup. Ce n'est jamais
nous au départ, mais c'est toujours nous à la fin. C'est
certain.
M. Cournoyer: II y a une affirmation, qui est faite assez
régulièrement, selon laquelle il y aurait, chaque année,
4,000 entrepreneurs qui disparaissent de la circulation dans le domaine de la
construction et 4,000 nouveaux qui y entrent. Est-ce que vous en avez, vous,
qui disparaissent et qui entrent chaque année?
M. Rousseau: Je dois admettre que, chez nous, il y en a une
partie, probablement une bonne partie, d'autant plus qu'il y en a probablement
plus chez nous qui entrent parce que, lorsque tu commences à être
entrepreneur, tu ne commences jamais gros. Enfin, normalement, tu commences
petit. Je dois dire que, chez nous aussi, en même temps, ce sont des
salariés qui deviennent, du jour au lendemain, employeurs et on les
retrouve chez nous.
Mais il y a une partie des entrepreneurs qui laissent la construction
d'habitations, qui abandonnent. C'est pourquoi nous avons toujours voulu avoir
une loi de la qualification des entrepreneurs pour être certains que ceux
qui deviennent entrepreneurs soient vraiment des gens qualifiés au point
de vue technique, au point de vue de l'administration et au point de vue de la
solvabilité.
Or, c'est sûr que cela va protéger un certain nombre de
constructeurs déjà établis dans des positions
financières très fortes. Mais je dois vous dire que ce serait
nécessaire pour éviter certains problèmes qu'on
connaît à l'heure actuelle.
M. Bellemare (Rosemont): Quel est le pourcentage...
M. Rousseau: Je ne comprends pas...
M. Bellemare (Rosemont): Quel est le pourcentage de vos
entrepreneurs qui s'en vont annuellement?
M. Rousseau: On a peut-être un "turnover" ou un
roulement...
M. Bellemare (Rosemont): Un "turnover", oui, c'est d'accord.
M. Rousseau: ...peut-être de l'ordre de 10% à peu
près. Mais cela ne veut pas nécessairement dire... Il faudrait
que je regarde pour voir s'il y a eu des changements de raison sociale, je
voudrais aussi savoir s'il n'est pas passé à une autre
association, parce qu'il ne faut pas nier qu'au niveau des associations
patronales, il existe un certain maraudage, un maraudage assez poli, sous forme
de publicité, mais cela existe. On l'admet. On le fait
nous-mêmes.
M. Cournoyer: Regardez donc celai
M. Charron: Qu'est-ce que c'est, un maraudage poli?
M. Cournoyer: Ils s'écrivent des lettres.
M. Rousseau: Un maraudage poli... Je vais vous donner un
exemple.
M. Cournoyer: II n'y a pas de fiers-à-bras.
M. Rousseau: L'an dernier, je n'avais pas d'association dans la
région de Val-d'Or. Mon confrère, Michel Dion, en fait, tout au
moins, représente une association dans la région de Val-d'Or. Il
en représentait une, il y en avait une. Je suis allé m'installer.
Maintenant, j'en ai une association. Je représente des constructeurs de
la région de Val-d'Or. Pas un gros groupe. Mais quand je forme une
association, je pars sur le critère que je représente
l'habitation. Or, s'il y a des constructeurs d'habitations dans la
fédération, possiblement, je serai en mesure d'aller les
chercher, et nous le faisons sous forme de publicité. Nous n'avons pas
56 vendeurs sur les routes et sur les chantiers.
M. Charron: Quand vous maraudez poliment entre vous, dans des
régions comme... Quels sont les arguments que vous faites valoir? Je
connais le maraudage syndical, reconnu d'ailleurs à la fin d'une
période de décret ou d'une convention collective, reconnu par la
loi, et je sais quels sont les arguments, par exemple, qu'une partie syndicale
A va faire valoir auprès de syndiqués B pour les retirer de B et
les faire entrer dans A. Quels sont les arguments, sur quoi tablez-vous pour
qu'un constructeur, par exemple, quitte la fédération et rejoigne
votre association? Est-ce que vous faites valoir la sécurité sur
les chantiers? Vous assurez, par exemple, à vos constructeurs que s'ils
étaient avec vous plutôt qu'avec l'association de M. Dion, ils
auraient moins de problème avec la partie syndicale, parce que vous avez
des moyens plus efficaces que M. Dion pour bien vous entendre avec la partie
syndicale?
M. Rousseau: Bon! Comme on est toujours extrêmement poli,
je dois vous dire que c'est vrai que le maraudage... Enfin, je reprends, que le
maraudage chez nous se fait d'une façon extrêmement polie, en ce
sens que nous, lorsque nous voulons avoir des membres, nous misons sur le fait
que nous représentons des constructeurs d'habitations et que nous
connaissons leurs problèmes. Aussi, parce que nous sommes en constante
liaison avec les principaux organismes, tels la Société centrale
d'hypothèque et de logement, d'où dépend
nécessairement la Loi nationale de l'habitation, d'où les fonds
viennent, à 95% et à 100%, j'ai l'impression, mis à part
les fonds privés, parce que nous faisons affaires aussi, dans une
certaine mesure, avec la Société d'habitation du Québec...
S'il advient qu'il y ait une politique d'habitation, on va sûrement
essayer de travailler encore plus fort de ce côté, et aussi, je
pense que vous avez souligné tout à l'heure la question de
sécurité lorsque la commission de l'industrie de la
construction a décidé de renseigner, d'éduquer le
salarié au point de vue de la sécurité, nous avons
été une des associations à regrouper nos employeurs, et
ces employeurs amenaient leurs salariés à nos secrétariats
pour être en mesure de leur donner des cours.
Or, nous avons encouragé nos employeurs à participer
à ces cours. D'ailleurs, je dois vous dire que dans le règlement
sur la qualification des salariés, l'élément de la
sécurité est inclus, tel que le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre le mentionnait ce matin. En effet, le salarié sera
obligé d'avoir des notions de sécurité, les nouveaux et
même les anciens qui sont sur les chantiers devront aller se chercher une
attestation d'expérience confirmant qu'ils ont suivi des cours de
sécurité et qu'à tout le moins, ils ont passé un
examen pour se qualifier, connaissant assez bien les normes de
sécurité. Nous avons été l'une des associations
à demander cela parce que je dois vous dire que, lorsque nous avons
appliqué les normes de sécurité et je dois me
reporter à à peu près deux ans c'est à ce
moment que nous avons commencé la grosse campagne pour l'application des
normes de sécurité sur les chantiers de construction.
Les constructeurs, de même que tous les employeurs je pense
à tous les nouveaux, ont subi des contrecoups parce qu'on a collé
infraction par-dessus infraction, sans vouloir essayer d'instruire
l'entrepreneur et le salarié. Je pense que la sécurité au
niveau des chantiers est l'affaire un peu de tout le monde, les salariés
et les employeurs.
Or, nous essayons, dans une certaine mesure, d'y participer. Si je
reviens encore sur la question de maraudage, je dois vous dire qu'elle se fait
c'est vrai d'une façon très normale et
détendue.
M. Cournoyer: Vous avez dit tantôt, dans votre
mémoire: "Cependant, avant de changer quoi que ce soit, nous avons
considéré que les constructeurs sont aux prises d'un autre
côté avec leurs clients qui n'accepteront pas de changement au
contrat, le gouvernement étant l'un de ceux-ci."
Parliez-vous, à ce moment, au nom de l'industrie ou parliez-vous
au nom de l'association seulement?
M. Rousseau: Un instant. Ce que nous voulions dire par là,
c'est que nous ne croyons pas que le gouvernement devra accepter d'adopter une
loi forçant le consommateur à payer l'ajustement du coût
que le constructeur aura à subir, si jamais il y avait indexation.
M. Cournoyer: Le gouvernement n'est pas un de vos clients, si je
comprends bien le texte que j'ai devant moi.
M. Rousseau: Non.
M. Cournoyer: A la page 5, on dirait que le gouvernement est un
de vos clients.
M. Rousseau: Non.
M. Cournoyer: Avez-vous déjà eu des membres dans
votre association qui, après avoir vendu une maison, découvrent
qu'ils auraient pu la vendre plus cher et qui ont changé d'un coup sec
le contrat? Je vous informe tout de suite que je viens de Dollard-des-Ormeaux
et que je suis le député du comté de Robert Baldwin.
M. Rousseau: Je sais à quoi vous faites allusion. Vous
faites allusion à quelques plaintes qui ont été
logées dans le coin de Beaconsfield.
Le Président (M. Séguin): Ecoutez! Vous êtes
rendu dans mon comté!
M. Rousseau: Est-ce que je vous touche de très
près, M. le Président?
Le Président (M. Séguin): Oui. Je vous demanderais
de choisir d'autres municipalités, parce que...
M. Rousseau: C'est parce que cela ne s'est pas produit dans
d'autres régions ou dans d'autres municipalités.
M. Cournoyer: Prenez la mienne. M. Rousseau: Ni la
vôtre?
M. Cournoyer: J'accepte que cela ait pu se produire chez
nous.
M. Rousseau: Cela s'est produit là et c'est pourquoi nous
voulons avoir une offre d'achat uniforme, et nous y avons travaillé de
façon que, justement, il n'y ait pas d'imbroglio là-dessus.
Mais il faut quand même regarder le fait que lorsqu'un
consommateur signe une offre d'achat avec un constructeur, lui aussi a des
prérogatives dans le contrat. Il doit quand même suivre certaines
clauses et très souvent, il ne les suit pas. Alors, le constructeur,
c'est sûr, advenant qu'il y ait une possibilité d'avoir un
meilleur prix ailleurs en a peut-être profité. Mais, je pense, ce
sont peut-être quelques cas qui se sont produits.
Mais je pense que le ministre Tetley a rencontré ces
constructeurs. Ces cas ont été justifiés et nous n'avons
pas eu de suite à cette démarche.
M. Cournoyer: II n'y a pas eu de suite. Mais j'ai un exemple qui
me touche de très près, j'étais à peine sorti de
l'université, cela fait longtemps, j'imagine que les entrepreneurs ont
changé depuis ce temps, que ce n'est pas tout à fait pareil.
Maintenant qu'ils sont tous membres d'associations patronales, ils doivent
avoir changé. J'avais acheté une maison de $12,500 parce que
c'était tout ce que je pouvais m'off rir avec le salaire que
l'Association de la construction de Montréal me payait. Vous
voulez que j'arrête
M. Charron: C'est un peu mieux aujourd'hui? M. Rousseau:
Avez-vous changé d'association? M. Cournoyer: Non, j'ai
changé de "job". M. Charron: II n'en a même plus
besoin.
M. Cournoyer: Aujourd'hui, j'ai appris ce matin, de la bouche de
M. Pepin que j'avais une diminution de 10% qui vous permettra d'accepter plus
facilement l'augmentation de salaire que vous avez eue puisque M. Pepin
considère que la pension de retraite doit être exclue du
salaire.
J'avais acheté, suivant plans et devis, et l'entrepreneur
s'était trompé, j'imagine. De toute façon, il m'a dit: Ce
n'est plus $12,500, quand je suis venu pour signer le contrat. C'est $15,000.
C'est à prendre ou à laisser ou poursuivez-moi.
M. Rousseau: Mais c'est avant de signer.
M. Cournoyer: Le contrat, l'offre d'achat était
déjà signée.
M. Rousseau: C'était déjà signé, vous
étiez rendu au contrat.
Vous étiez avocat?
M. Cournoyer: Certainement. M. Rousseau: Qu'avez-vous
fait?
M. Cournoyer: Mais comme tout cordonnier est très mal
chaussé et que je n'avais pas le temps de m'occuper de mes propres
affaires, étant très occupé dans l'Association de la
construction à Montréal...
M. Rousseau: Je vous comprends, M. le ministre.
M. Cournoyer: ...j'ai été obligé d'accepter
cette décision et ils n'ont tout simplement pas vendu à
Cournoyer. Je comprends que je suis un très mauvais client. Quand j'ai
acheté la maison dans laquelle j'habite maintenant, l'entrepreneur avait
tout simplement... Non, non, c'est à Dollard-des-Ormeaux.
Le Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Cournoyer: C'est un cas personnel. Il y en a d'autres cas
semblables qui peuvent se retrouver dans la société, j'imagine.
On m'a promis que le petit bout de terrain qu'il y avait à
côté était utilisé par autre chose. Finalement, ma
femme s'était habituée à ce site merveilleux dans lequel
je vis, aimait la maison dans laquelle elle allait habiter. Au mois de
décembre, juste avant Noël, il n'y a pas que les gouvernements qui
font des choses avant Noël, il y en a d'autres aussi qui font cela juste
avant Noël, on me dit: Le petit bout de terrain à
côté, il faut que tu l'achètes à $1 du pied pour
pouvoir avoir la maison qui est là. J'ai négocié un peu
parce que là je commençais à être habitué,
j'ai réglé pour $0.50 le pied. Mais il reste que l'entrepreneur,
à ce moment-là, a réglé son problème sur mon
dos, pas sur le sien. J'espère que cela a changé, remarquez que
vous allez me donner des exemples où ce n'est pas comme cela,
j'espère que cela a changé, mais c'est l'expérience
personnelle de deux achats de maison.
M. Rousseau: Je dois vous dire...
M. Cournoyer: Je n'en achèterai pas d'autre, je vous le
jure.
M. Rousseau: J'ai un malade à côté de
moi.
M. Cournoyer: Cela, je le savais depuis longtemps.
M. Rousseau: Je dois vous dire, M. le ministre, que c'est un cas
particulier, c'est vrai.
M. Cournoyer: Vous voulez me dire que je suis épais.
Dites-moi que je suis épais. Il vous arrive de dire cela hors de ma
présence, dites-le moi tout de suite.
M. Rousseau: Vous êtes épais, M. le ministre. Mais
je dois vous dire...
M. Cournoyer: On a des consommateurs maintenant avertis.
Même les ministres se font prendre par les constructeurs.
M. Rousseau: J'ai une note et je dois la passer parce qu'il
semble qu'il y a des gens qui me forcent le bras.
M. Cournoyer: Attention, si vous la passez, c'est vous qui avez
l'air aussi fou que l'autre.
M. Rousseau: Oui, oui, oui. Je vous remercie, M. le
ministre. Je laisse la note de côté parce que j'admets
qu'il est fou à côté.
C'est un cas particulier. Je dois vous dire que la majorité de
nos membres, à 99.9%, sont des constructeurs honnêtes qui
fonctionnent dans un système bien ordonné. Les abus de ce genre,
nous les avons dénoncés très souvent.
C'est pourquoi, dans une certaine mesure, nous avons demandé, et
à maintes reprises, à avoir une loi de la qualification pour
enlever ces gens-là. Or, lorsqu'on aura des gens qui sont vraiment
solvables, qui auront une entreprise vraiment sérieuse, je pense qu'on
ne retrouvera plus ce problème.
D'ailleurs, chez nous, au niveau de l'association de la région de
Montréal métropolitain, pour une de nos dix régionales
affiliées, nous avons implanté depuis...
Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous
plaît, seulement un point de règlement. Le député de
Rosemont voulait avoir une précision sur un commentaire que vous avez
fait. Je ne lui permets pas d'entrer dans le débat.
M. Bellemare (Rosemont): Lorsque vous parlez des chiffres qui ont
été compilés à partir des principaux centres de la
province, vous parlez de Montréal. La seule banlieue que vous avez
incluse, ce sont les Bois-Francs. Est-ce que vous incluez Montréal et
toutes les banlieues ou seulement Montréal? C'est à la page
trois, je crois.
M. Rousseau: Oui, à la page trois, mais je vous demande
simplement de vous référer à l'annexe A, la
première page des tableaux. Je vais vous l'expliquer d'une façon
assez précise. Le premier tableau démontre:
charpentier-menuisier, région de Montréal et Valley-field, parce
qu'à ce moment-là les salaires étaient identiques. Nous
avons pris la formule qui nous sert. Comme disait la CSN, tous les gens
prennent un peu la formule qui les sert et, en même temps, je pense que
nous avons pris simplement les augmentations de salaire et aussi les avantages
sociaux prévus au décret que nous avons négociés en
1973. Pour le charpentier-menuisier, c'est marqué aujourd'hui, mais il
faut changer cela par 30 avril 1973, puisque ce sont des tableaux que nous
avons préparés lors des dernières négociations et
que nous avons modifiés pour les circonstances actuelles.
Alors, le 30 avril 1973, le salaire était de $5.29 et là
vous voyez toutes les augmentations pour arriver à une augmentation de
$1.56 pour la durée du décret.
M. Bellemare (Rosemont): Pour ne pas prendre le temps de la
commission, la seule précision que je voulais avoir était: est-ce
seulement Montréal ou les banlieues incluses?
M. Rousseau: J'ai la région de Montréal
métropolitain et lorsque vous tombez dans Joliette...
M. Bellemare (Rosemont): Montréal-Nord, etc.? M.
Rousseau: Oui.
M. Bellemare (Rosemont): C'est tout ce que je voulais savoir.
M. Cournoyer: J'ai une autre question beaucoup plus
sérieuse que la première, je l'espère du moins, et que
cela ne fera pas rire M. Dion. Quand vous comparez le salaire d'un mineur avec
le salaire d'un employé de la construction, vous les placez à
$256.33 par comparaison à $237.57. M. Pepin a parlé ce matin,
avec un certain degré d'insistance, de la sécurité
d'emploi. Est-ce que vous pouvez nous dire si le salaire du mineur peut
facilement se comparer au salaire du travailleur de la construction, compte
tenu de la durée d'emploi annuelle?
M. Rousseau: Je dois vous dire que la sécurité
d'emploi au niveau de l'industrie de la construction, les vrais travailleurs de
l'industrie de la construction peuvent la trouver. Je peux même aller
jusqu'à dire que j'ai des constructeurs lorsqu'arrive le temps
des Fêtes, l'hiver, janvier, février qui gardent leurs
principaux salariés, ils les payent presque à ne rien faire,
simplement pour faire un peu de "maintenance" pour leurs maisons
modèles, pour donner du service après vente. Or, je pense que si
un salarié est bien qualifié, compétent et polyvalent le
plus possible, tout au moins au niveau du charpentier-menuisier, qui, en plus
d'être capable de faire du "rough", est capable de faire de la finition,
il y a de l'ouvrage à l'année. Il n'y a absolument aucun
problème de ce côté. Mais de là à dire qu'on
serait prêt à instituer un genre de sécurité
d'emploi au niveau de l'industrie de la construction, tout au moins au niveau
de l'habitation, ce serait extrêmement difficile.
M. Cournoyer: Je ne suggère pas cela. Remarquez bien que,
malgré toutes les opinions que vous pouvez avoir contre le ministre du
Travail, j'ai déjà vu la construction aussi. Ce n'est pas cela.
J'ai dit: M. Pepin a fait état de la sécurité d'emploi. La
comparaison que vous faites, dans un des paragraphes de votre mémoire,
est d'un salaire d'un ouvrier de la construction à $256.33 par rapport
à un salaire de l'industrie minière de $237.57. Est-ce que le
même salaire, sur une base annuelle, est identique pour le travailleur de
la construction par rapport à ce qu'il est pour le travailleur de
l'industrie minière?
M. Rousseau: Je pense qu'au niveau de l'habitation, on peut
croire que la main-d'oeuvre est assez stable, a de l'ouvrage
régulièrement. Je pense que ces chiffres sont admissibles.
M. Cournoyer: Vous ne fermez jamais. M. Rousseau:
Pardon?
M. Cournoyer: Dans l'habitation, vous n'arrêtez pas
l'hiver.
M. Rousseau: Oui, on arrête.
M. Cournoyer: Vous suspendez, vous ralentissez. Si je comprends
bien, ce dont vous parliez tantôt, c'est que vous utilisez ce qu'il est
convenu d'appeler les "key
men" pour faire "la maintenance" pendant la période d'hiver, mais
vous ne commencez pas de nouvelles constructions en hiver, maintenant, depuis
que les travaux d'hiver sont arrêtés.
M. Rousseau: Je dois vous dire qu'à l'heure actuelle,
depuis ces dernières années, les constructeurs construisent
encore plus, tout au moins, cela devient équilibré.
Les saisons, c'est pareil. L'hiver, on construit normalement plus, parce
que la Société centrale d'hypothèques et de logement sort
ses fonds à ce moment-là.
M. Cournoyer: Dans la diminution des constructions, est-ce que le
taux d'intérêt vous apparaît comme étant un des
facteurs de la diminution des constructions?
M. Rousseau: Je m'excuse, je n'ai pas compris, M. le ministre. Ce
n'est pas parce que vous ne parlez pas assez fort.
M. Cournoyer: Quant à la diminution des travaux de
construction domiciliaire qu'on observe vous avez dit tantôt qu'il
y avait une diminution des travaux de construction domiciliaire est-ce
qu'on peut attribuer cela au problème de l'indexation seulement ou si on
doit en attribuer une partie au taux élevé des hypothèques
ou peut-être à l'absence de fonds?
M. Rousseau: II y a, c'est vrai, une certaine absence de fonds,
mais je dois vous dire que le problème majeur n'est pas
nécessairement le taux d'hypothèque. Parce qu'on peut trouver
à l'heure actuelle des taux l'hypothèque variant de 10 1/4%
à 11 1/4% ou 11 1/2%.
Mais c'est surtout l'incertitude dans laquelle le consommateur vit
aujourd'hui. Dans une certaine mesure, il a perdu le pouvoir d'achat. Il n'a
pas le choix, il faut qu'il se restreigne quelque part. Je pense surtout que
c'est à cause de la non-disponibilité des fonds. Il n'y a pas de
fonds disponibles à l'heure actuelle. On annonce que, très
bientôt, on aura des fonds.
M. Cournoyer: Mais, maintenant, vous allez avoir besoin
d'acheteurs, si vous avez des fonds.
M. Rousseau: Oui.
M. Cournoyer: Les acheteurs, c'est le petit consommateur, chez
vous en particulier, c'est-à-dire celui qui a besoin ou qui veut
résider dans une maison unifamiliale ou multifamiliale, la
majorité de vos membres étant dans le résidentiel.
M. Rousseau: Oui.
M. Cournoyer: Pour qu'il ait plus d'argent, vous consentez qu'il
ait l'indexation de son salaire de son côté pour qu'il puisse
acheter votre produit.
Remarquez bien que ce n'est pas un jeu de mots. Le problème de
l'indexation ne vient pas du simple fait de l'attitude des syndicats. Il y a
l'inflation, je ne veux pas vous enseigner ça, vous le vivez, c'est vous
qui avez affirmé tantôt que l'inflation gruge tout sur le petit,
et comme vous vendez au petit, il n'est pas capable de s'acheter une maison.
Même si vous aviez de l'argent demain matin, il va falloir qu'il augmente
son revenu pour pouvoir s'acheter une maison, il l'augmente d'une façon
générale dans la province de Québec. Je ne vous raconte
pas de conte en vous disant qu'il y a 250,000 employés de la fonction
publique qui ont au moins une compensation, compte tenu des projections qu'ils
faisaient de l'augmentation du coût de la vie. Je ne raconterai rien non
plus si je dis qu'à l'Hydro-Québec, on a consenti une
compensation. Je ne raconte rien non plus si je dis qu'à l'ALCAN, on a
rouvert le contrat. Je ne raconterai rien non plus si je dis qu'à I'lron
Ore on a rouvert le contrat. Je ne raconterai rien non plus si je dis que, dans
40 cas, durant l'été passé à part la
construction, bien sûr les gens ont obtenu, après
manifestations, j'en conviens, beaucoup plus souvent sans manifestation, une
révision des conventions collectives qu'ils avaient ou une
révision de leur taux de salaire. Je ne raconte rien, l'inflation existe
pour tout le monde. Elle existe aussi pour le travailleur de la
construction.
C'est là qu'on peut se séparer vous et moi. Vous me dites
que c'est de la violence. Parfait, c'est de la violence. Par ailleurs,
l'inflation a existé dans la province de Québec depuis un bout de
temps et les seuls efforts que le gouvernement a dû faire, cela a
été d'aider les gens à trouver une façon de
s'ajuster à l'inflation. Parce qu'on ne peut pas la couper, pas plus que
vous pouvez la couper. Mais quand vous me dites en commission parlementaire,
aujourd'hui, que l'inflation gruge le salaire, la possibilité d'achat de
l'individu, vous avez totalement raison. Mais elle gruge la possibilité
d'achat de votre travailleur de la même manière. Et les autres
entreprises ont révisé les salaires.
M. Rousseau: Je suis d'accord avec vous. Mais indexer les
salaires... Vous êtes quand même conscient que le coût de la
maison devient de plus en plus prohibitif à l'heure actuelle.
M. Cournoyer: D'accord avec vous, mais il devient prohibitif;
êtes-vous capable de me dire que les matériaux de construction
n'ont pas augmenté sensiblement dans les six derrjiers mois ou dans les
trois dernières années?
M. Rousseau: Je suis d'accord.
M. Cournoyer: Le gyproc se vend plus cher qu'il ne se vendait,
l'huile se vend plus cher qu'elle ne se vendait. Est-ce que le bois se vend
plus cher qu'il ne se vendait? Ce sont des facteurs d'augmentation de vos
coûts. Il faudrait peut-être me dire qu'il y a des facteurs
d'augmentation des coûts.
Vous avez parlé tantôt, à juste titre, j'en
conviens, dans les cas de construction d'habitations, de 40% du contenu en
main-d'oeuvre. Vous avez dit 40%.
S'il s'agit de 40% du contenu en main-d'oeuvre, ne venez pas me faire
croire que ce sont les seules choses qui augmenteraient sensiblement dans le
domaine de la construction domiciliaire, au moment où on se parle? Tout
augmente.
M. Rousseau: Oui, je suis d'accord là-dessus.
M. Cournoyer: Sans vouloir se battre, tout augmente. Le
matériau, quand il augmente, est-ce que ce n'est pas vrai que
l'entrepreneur demande des révisions de prix à ses clients?
M. Rousseau: Pas chez nous.
M. Cournoyer: Pas chez vous. Je pose la question, parce que,
effectivement, peut-être que ce n'est pas vrai. J'entends dire cela.
M. Rousseau: Non, le constructeur, face à l'acheteur, il
ne demande pas de révision de prix, c'est-à-dire qu'il vend selon
ce qui a été spécifié au contrat.
M. Cournoyer: Mais un contrat chez vous, par exemple, dans le
domaine résidentiel en particulier, cela dure combien de temps? Combien
cela prend-il de temps à construire une maison ou un groupe de
maisons?
M. Rousseau: On vend aujourd'hui pour livraison au mois de mai,
au mois de juin. C'est quand même un assez bon décalage. C'est
quatre ou cinq mois à venir.
M. Cournoyer: Vous vendez aujourd'hui. J'imagine qu'au moment
où vous vendez vous avez déjà fait les solages dans un
grand arrondissement et vous avez déjà commencé à
construire la maison et vous la vendez à un prix aujourd'hui.
Je ne veux pas vous placer dans une situation ambiguë,
comprenez-moi bien.
M. Rousseau: Non.
M. Cournoyer: Je dis que, si on veut savoir quel est votre
problème, le premier problème se situe dans une augmentation des
prix des maisons déjà vendues.
M. Rousseau: C'est cela.
M. Cournoyer: Vous êtes "poignés" avec quelque chose
que vous n'aviez pas prévu. C'est vrai dans le domaine des
matériaux comme dans le domaine de la main-d'oeuvre. Dans le cas des
matériaux, on ne vous demande pas la permission pour changer les prix.
On vous dit: Cela vous coûte tant. Vous avez fait très
certainement une provision si on peut utiliser ce terme-là, ce
n'est peut-être pas français pour augmentation possible du
coût des matériaux, compte tenu du fait qu'il change tellement que
très souvent les entrepreneurs sont obligés de marquer "livraison
dans 30 jours", autrement le prix va changer. Est-ce que cela se peut que cette
possibilité existe, livraison dans 30 jours, autrement je ne peux plus
le garantir?
M. Rousseau: Oui.
M. Cournoyer: Dans ce cas-là en particulier. Donc, il est
possible, dans le cas des matériaux de construction, avec une livraison
qui dépasserait les 30 jours, que l'individu acheteur soit tenu de payer
plus cher pour un matériau de construction?
M. Rousseau: Oui, c'est vrai pour les matériaux de
construction. Mais, lorsqu'il s'agit de salaires, le constructeur, à
l'heure actuelle, est habitué de fonctionner avec un décret
où c'est bien mentionné et il n'extrapole pas au cas où il
devrait payer plus cher dans un mois, deux mois ou trois mois.
M. Cournoyer: D'accord là-dessus. Vous avez
été habitués à dire et à prétendre,
avec raison aussi, qu'une convention comme celle-là était une
convention fixe.
M. Rousseau: Oui.
M. Cournoyer: Vous avez dit: Elle est fixe pour la durée
du décret ou la durée de la convention collective. Elle ne
changera pas, donc je fais mes prix à même cette provision. C'est
vrai, mais l'individu qui l'a signé avec vous, est-ce qu'il n'est pas
possible, à ce moment-ci de nos discussions, compte tenu de l'inflation
que nous avons connue dans les derniers mois ou dans les dernières
années, de penser qu'il n'aurait pas signé ce contrat s'il avait
su que l'inflation aurait été ce qu'elle est? Ce n'est pas
possible cela à un moment donné?
Vous étiez là, je pense bien, à la
négociation de 1973; enfin quelqu'un de votre association était
là en 1973 et vous avez signé une convention collective. Les
conventions collectives, de la nature même des choses, spécifient
les conditions de travail de vos employés. Est-ce qu'il n'est pas juste
de penser qu'en 1973 les expectatives étaient différentes des
constatations qu'on fait en 1975 et que, s'il avait su, il n'aurait pas
signé le même contrat?
L'entrepreneur qui m'a vendu la mienne, ma maison, ses expectatives
étaient qu'elle coûterait $12,500 et ses constatations
étaient qu'elle lui coûtait $15,000. Quand ses expectatives
étaient qu'elle coûterait $12,500, de bonne foi, il me l'a vendue,
le gars, à $12,500. Sais-tu pourquoi elle a coûté $15,000?
C'est parce que la maison modèle n'était pas finie quand il me
l'a vendue. Puis, après avoir fait la maison modèle, l'avoir
terminée, il a découvert ce qu'était son prix réel.
Il me l'a vendue à $15,000, parce qu'elle valait $15,000, pas parce
qu'elle valait $12,500. Il n'a pas voulu me voler, le gars; il n'a tout
simplement pas voulu perdre. Il avait le droit de ne pas vouloir perdre. Je
pense bien que vous et moi, on ne veut rien perdre.
Je ne l'excuse pas, je le comprends. Dans le cas des actes
illégaux, je ne les excuse pas, je les comprends, parce qu'ils en ont
fait dans mon cas des actes illégaux.
A partir de là, je dis: Monsieur, je vous ai demandé,
l'été passé, de discuter avec les représentants
syndicaux. Vos représentants sont venus dans mon bureau, vous êtes
restés debout, vous m'avez dit: Non, jamais! Et pourtant, c'était
il y a six mois. Il y a six mois, le problème aurait peut-être pu
être réglé à l'avantage des entreprises de
construction. Aujourd'hui, vos projections pour les coûts de construction
qui s'en viennent seraient très correctes pour les entrepreneurs de
construction. Vous passeriez peut-être au consommateur le produit de vos
discussions, mais il en est le premier bénéficiaire. Très
simplement de la constatation de la réalité par un certain nombre
d'entreprises de la province de Québec, d'une compensation pour
l'augmentation effrénée du coût de la vie que nous avons
eue.
Je ne vous accuse pas de vous être placé dans cette
position, mais je vous dis: II y a six mois, vous aviez comme intention
très fermement arrêtée de ne pas rouvrir un contrat,
malgré les représentations qui vous étaient faites, que
les prévisions qu'on faisait en 1973 ne correspondaient à aucune
forme de la réalité qu'on constatait en 1974. Le transport des
responsabilités à d'autres, il est arrivé très
souvent que vous l'avez fait en disant: C'est le ministre du Travail qui doit
être changé. Ne passons pas tous pour des fous en même
temps. Je suis peut-être le seul fou dans cette assemblée, mais,
en définitive, quand les problèmes se discutent à un
moment où il est opportun d'en discuter, il est peut-être
préférable de saisir l'occasion de discuter de ces
problèmes, puis d'en arriver à des conclusions.
Le mémoire qui a été présenté, hier,
par la Fédération de l'industrie de la construction est un
mémoire extrêmement sérieux. Le vôtre est
extrêmement sérieux et je dois vous dire que, si vous aviez
expliqué tout cela aux parties syndicales, peut-être que les
parties syndicales ne parleraient pas aujourd'hui de $0.75 mais parleraient
d'une constatation avec vous autres, des problèmes que vous avez et des
problèmes qu'ils ont comme représentants syndicaux. Au fur et
à mesure qu'on continue, ces problèmes continuent de grandir.
M. Rousseau: Mais pourquoi, M. le ministre, accepterait-on de
discuter d'indexation de salaires avec les syndicats, alors que, lorsqu'on a
signé une convention collective, nous croyons avoir donné des
augmentations prévoyant, dans une certaine mesure, l'inflation? Ces
augmentations de salaires font que ce sont les salariés, à
l'heure actuelle, qui sont assez bien nantis dans l'industrie de la
construction.
M. Cournoyer: Pourquoi accepteriez-vous? Pour la même
raison qu'on accepte, à un moment donné, de discuter d'un
problème d'entrepreneurs et de dire: Les circonstances sont
peut-être changées. Cela ne veut pas dire qu'elles sont
effectivement changées. Cela ne veut pas dire que vous n'aviez pas
prévu justement, au moment de la signature de la convention, une
compensation pour l'augmentation du coût de la vie dans les sommes que
vous aviez déjà consenties. Mais ces choses s'expliquent entre
personnes civilisées, entre vous.
M. Rousseau: On a quand même toujours dit aux syndicats:
Nous sommes prêts à considérer l'indexation des salaires,
mais seulement lorsque viendra le temps de la prochaine négociation.
Nous avons signé un contrat avec vous, respectez-le. Je pense que le
contrat était assez avantageux pour eux.
Or, si, lors de la prochaine convention, il faut discuter d'indexation
parce que là c'est un problème important, on regardera cela de
plus près. En fait, il nous a été soumis, au tout
début, par la FTQ une formule d'indexation. Tout ce qu'on a dit: C'est
$1 qu'on veut avoir. Alors, nous, à des arguments de $1 l'heure on
répond: Non.
M. Cournoyer: C'est zéro. Vous avez répondu:
Zéro.
M. Rousseau: Mais pendant tout ce temps-là, est-ce que le
gouvernement fédéral n'a pas compensé pour la perte du
pouvoir d'achat de ses propres employés par tout le Canada? Est-ce que
l'Alcan n'a pas compensé la perte du pouvoir d'achat par ses
employés et ils avaient une "désespoir" de belle
convention, les employés de l'Alcan, et cela ne faisait pas longtemps
qu'elle était signée? Est-ce que l'Iron Ore ne l'a pas fait? Ce
sont là de grosses entreprises. Est-ce que le gouvernement provincial
n'avait pas prévu lui-même une formule de compensation pour la
perte du pouvoir d'achat? Bien sûr qu'on l'a trouvée douloureuse,
la compensation. Bien sûr que le premier ministre me dit qu'elle
coûte bien cher. Mais elle aurait coûté cher à
l'individu en bas par exemple. Parce que l'inflation, c'est le gars d'en bas
qui en subit les premières conséquences. Il faut penser à
celui-là, aussi.
Dans votre cas, dans la construction, il est bien possible que vous ayez
prévu tout cela. Il est possible que ce soit défendable de cette
façon. Il est possible que la partie syndicale aurait compris les
problèmes que vous avez, comme entreprises, si vous en aviez
discuté avec elle.
M. Rousseau: Nous, si nous avions discuté l'indexation et
prenant pour hypothèse que nous l'aurions accordée, cette
indexation, aux salariés de l'industrie de la construction, il n'en
demeure pas moins qu'à ce moment-là on favorisait simplement une
couche, une partie des travailleurs.
Moi, je vais vous poser une question, M. le ministre. Est-ce que le
gouvernement provincial ne serait pas en droit de penser à tous ses
administrés? Est-ce que, par la formule, qui a été
avancée ce matin par la CSN, qui dit "pourquoi ne regarderions-nous pas
la possibilité d'indexer le tableau d'impôt", à ce
moment-là, on ne réglerait pas le problème pour tout le
monde en même temps? Est-ce que ce ne serait pas équitable pour
tout le monde? Est-ce que ce ne seraient pas simplement certains employeurs qui
auraient à payer la facture à l'heure actuelle? Est-ce qu'il n'y
aurait pas simplement une certaine couche des salariés qui profiteraient
de cette occasion, qui profiteraient de l'indexation, parce que certains
employeurs l'ont donnée, ou que d'autres se sentiraient obligés,
ou que d'autres vont être forcés de la donner? Est-ce que ce ne
serait pas préférable que le gouvernement pose un geste dans ce
sens-là? A ce moment-là, on est certain que cela va être
équitable pour tout le monde, autant pour vous, pour moi que pour le
salarié parce que, moi aussi, le pouvoir d'achat, je le subis. Je ne le
subis pas au même titre peut-être que le salarié. Le
salarié de l'industrie de la construction ne le subit peut-être
pas au même titre que celui qui gagne le salaire minimum.
Je pense que cette question, enfin quand on parle d'indexation,
d'inflation, c'est un cercle vicieux, et je pense aussi que si le gouvernement
regardait sa table d'impôt, il pourrait sûrement arriver à
une formule pour compenser tout le monde et cela éviterait
peut-être aussi de remettre en question tout le système de
relations de travail, pas simplement au niveau de l'industrie de la
construction, mais dans tous les secteurs, même en vertu du code du
travail.
M. Cournoyer: J'espère que le premier ministre entend cela
parce qu'il a son moniteur et il écoute cela dans son bureau.
M. Rousseau: J'espère...
M. Roy: Oui. Est-ce que le ministre...
M. Rousseau: ...qu'il n'y a pas que le premier ministre.
J'espère qu'il y en a d'autres.
M. Cournoyer: II a tout entendu. M. Pepin a dit la même
chose ce matin sur l'indexation des impôts. Le Conseil du patronat a
demandé la même chose il y a déjà un certain temps.
Je pense bien que c'est une décision du premier ministre. Est-ce que
cela réglerait le problème de la construction?
Des Voix: Non.
M. Cournoyer: Pas tous? Non?
M. Rousseau: Pourquoi est-ce qu'ils disent non?
M. Cournoyer: Je ne le sais pas.
M. Rousseau: Moi non plus, je ne le sais pas.
M. Cournoyer: Je serais prêt à discuter avec eux
pour savoir pourquoi ils disent non.
M. Rousseau: Moi, je crois que oui.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Saint-Jacques.
M. Burns: II n'est pas là et on n'a pas d'autre question.
Les questions ont été posées par le ministre.
Le Président (M. Séguin): Alors, le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Non, pas de questions, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): M. Rousseau, nous vous
remercions.
M. Rousseau: Nous vous remercions également.
Le Président (M. Séguin): Nous entendrons
maintenant la Centrale des syndicats démocratiques. Je demanderais
encore une fois à la personne qui fait la présentation de
s'identifier, ainsi que son association.
Centrale des syndicats démocratiques
M. Dalpé (Paul): Paul Dalpé, CSD.
M. le Président, la grève des ferrailleurs n'est pas un
cas particulier. Cette grève se situe dans l'ensemble des luttes que
font les travailleurs pour indexer leur salaire à la hausse du
coût de la vie. Les travailleurs de la construction n'ont pas
échappé à ce mouvement général. Ils ont
déclenché plusieurs grèves depuis juin 1974.
Bien que la majorité du patronat se soit opposée à
accorder la compensation demandée, une minorité a
acquiescé aux demandes syndicales, ce qui a contribué à
perturber grandement l'industrie. Le ministre de l'In- dustrie et du Commerce
prétend que la productivité dans cet important secteur de
l'économie a diminué jusqu'à 30% de son efficacité
normale. Si cette assertion était fondée, ce serait un
désastre. Devant cette situation, on veut rendre les unions responsables
du fouillis économique dans lequel semble se trouver l'industrie.
Le gouvernement a fait voter, par l'Assemblée nationale, le
projet de loi 201, donnant au ministre du Travail des pouvoirs exceptionnels
d'intervention dans les relations de travail dans la construction, les parties
ayant été incapables de s'entendre pour redresser la situation
lors de la rencontre du 20 décembre 1974.
Le problème de l'indexation des salaires au coût de la vie
se pose différemment, dans le secteur de la construction, de celui des
secteurs manufacturiers et publics pour les quatre raisons suivantes:
Premièrement, dans le secteur de la construction, la négociation
est sectorielle et provinciale en vertu d'une loi spéciale.
Deuxièmement, les relations du travail dans ce secteur font actuellement
l'objet d'une enquête de la part de la commission Cliche.
Troisièmement, les taux horaires payés dans cette industrie
dépassent de beaucoup le taux de salaire moyen de l'industrie
manufacturière et, pourtant, le salaire moyen gagné est
inférieur. Quatrièmement, la productivité dans ce secteur
est plus sujette à des fluctuations que celle du secteur de fabrication.
Pour ces raisons, le problème de l'indexation apparaît donc
beaucoup plus complexe, sans pour autant négliger l'absence
complète de dialogue entre les parties, frustrées bien plus par
la passation de lois spéciales favorisant les unes au détriment
des autres, que par une baisse de la productivité soi-disant importante.
On se trouve alors dans le vrai problème. D'une part, le patronat
prétend qu'il ne peut y avoir de discussion sur les salaires, si l'on ne
trouve pas avant, des mesures à prendre pour accroître la
productivité. D'autre part, pour les syndicats, la hausse du pouvoir
d'achat de leurs membres leur apparaît essentielle.
Devant toute cette situation, la CSD prétend qu'il ne faut pas
organiser de chasses aux sorcières contre qui que ce soit. Les trois
parties en présence doivent accepter chacune leur part de
responsabilités.
Selon le régime de négociations collectives en vigueur, il
existe une division fondamentale dans les relations de travail que l'on peut
exprimer par les deux postulats suivants: premièrement, l'employeur est
exclusivement responsable de la marche générale de son
entreprise, des prix, de l'organisation de la production et de la
productivité.
Deuxièmement, le syndicat, de son côté, est plus
particulièrement responsable du salaire, des conditions de travail et du
bien-être des travailleurs.
Jusqu'à aujourd'hui, l'employeur s'est bien accommodé de
ce régime qui lui accordait une grande liberté d'action dans la
poursuite d'une efficacité accrue et de marges de profits plus
généreuses.
Le syndicat s'est retranché dans la seule revendication, le
régime ne leur demandant pas d'assumer des responsabilités quant
à la bonne marche de l'entreprise, particulièrement quant
à l'accroissement de la productivité.
Aujourd'hui, l'on constate que ce partage de responsabilités
telles que définies dans la Loi des relations
de travail dans l'industrie de la construction repose sur de faux
postulats.
En effet, on accuse les syndicats d'être responsables de la
diminution de la productivité. De deux choses, l'une: Ou les syndicats
ont une responsabilité à l'égard de la productivité
et la loi leur reconnaît ce droit de décision avec la direction,
ou ils ont une responsabilité indirecte et on continue de les exclure du
droit de décision tout en leur demandant du même souffle de
prendre des décisions informelles et officieuses pour accroître la
production.
Les principaux responsables de la diminution de la productivité
sont les employeurs. Ils doivent donc en assumer le principal fardeau.
Premièrement, c'est la compétence de gestion des
entreprises qui est mise en cause; ce sont les employeurs qui fixent les
coûts et les délais de livraison et qui ne peuvent les respecter.
Pour chaque contrat d'importance, les entrepreneurs trouvent moyen
d'étirer les délais de livraison et d'augmenter les
coûts.
La plupart du temps, c'est dû à une mauvaise planification
parce qu'on minimise certains facteurs, tels l'approvisionnement de
matériaux, l'empiétement des sous-entrepreneurs, etc.
Les employeurs, en deuxième lieu, ont cédé au
chantage. Sur les chantiers importants, industriels et commerciaux, les
employeurs ont voulu acheter la paix en donnant des prébendes à
des délégués de chantier reliés à la
pègre, tel que l'ont démontré certains témoins
à la commission Cliche.
Troisièmement, les pseudo-négociations. La
répétition du scénario des pseudo-négociations de
mai 1973, cautionné par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
lui-même, amenant des employeurs à conclure des ententes
séparées à l'encontre de toute décence par rapport
aux lois existantes, a prolongé le secteur de la construction dans le
fouillis actuel et perturbé à nouveau le climat des relations
patronales-syndicales.
Par esprit de revanche, pour ce qu'ils avaient dû avaler en 1973,
les employeurs, malgré l'évidence, ont refusé de discuter
des conséquences de l'inflation vis-à-vis des salaires des
travailleurs de l'industrie de la construction.
C'est donc dire que les uns et les autres sont responsables, au
même titre, des ralentissements de travail qui ont pu survenir sur les
chantiers depuis juin 1974.
Les unions de la construction, inspirées par une volonté
de contrôler l'industrie, ont utilisé les services de placement
syndicaux pour mater les patrons récalcitrants en ne leur fournissant
pas la main-d'oeuvre qualifiée et requise. Elles ont fait appel à
des rasta-quouères à qui l'on donnait des certificats de
qualification afin d'introduire sur les chantiers de construction les moyens
classiques de corruption de la pègre: taux usuriers, loterie,
prostitution, etc., et ils ont été également
chargés de prendre des mesures pour ralentir la production et intimider
les travailleurs; ils avaient aussi la responsabilité de fermer les
chantiers sans que les travailleurs n'aient été consultés
sur l'opportunité de faire la grève.
Le gouvernement est responsable, lui aussi, de la diminution de la
productivité sur les chantiers de construction, particulièrement
pour les raisons suivantes: premièrement, manque de politique de
formation professionnelle dynamique et réaliste. Depuis l'abolition des
centres de formation professionnelle, la Loi sur la formation et la
qualification professionnelles où l'on a soutiré la
responsabilité aux parties de s'occuper de l'apprentissage, le
gouvernement s'est embourbé dans la technocratie. Il n'a, à
toutes fins pratiques, rien fait pour développer une main-d'oeuvre
qualifiée, laissant au ministère de l'Education le soin de former
des apprentis avec un équipement inadapté à l'industrie de
la construction.
Deuxièmement, l'abolition de la sécurité d'emploi.
En abolissant la sécurité d'emploi et les permis de travail qui
devaient favoriser le travailleur qualifié, le gouvernement a
créé une plus grande instabilité chez les travailleurs
déjà affectés par les emplois de courte durée, la
"saisonnalité" et le taux de chômage qui est trois fois plus
élevé que chez les travailleurs des autres secteurs. Cela est un
extrait d'un document préparé par le Conseil économique du
Canada, intitulé Pour une croissance plus stable dans la
construction.
Le taux horaire plus élevé pour le travailleur de la
construction par rapport au taux du travailleur affecté à
l'industrie de fabrication ne doit pas être un argument valable pour
empêcher d'accorder des rajustements de salaires qui sont dus, à
cause de l'inflation, aux travailleurs de la construction. "Les employeurs,
sachant que le niveau des prix ne décourageait pas les acheteurs et
qu'il entraînait des revenus accrus pour l'industrie de la construction,
ont opposé une résistance moindre aux revendications syndicales
et ont même consenti à des ententes tacites au lieu d'entreprendre
une véritable négociation des salaires. "Un autre facteur
important a permis aux sociétés de construction, aux
entrepreneurs et aux sous-traitants, tant au Canada qu'aux Etats-Unis,
d'absorber des augmentations salariales dépassant la moyenne; ils ont
réussi à moderniser les techniques de construction, à
recourir à l'assemblage modulaire, à substituer un
équipement plus productif aux travailleurs et, de façon
générale, à réaliser des économies
considérables de main-d'oeuvre. On pourrait croire que, depuis 1968, les
fortes hausses de salaires des travailleurs syndiqués ont grandement
contribué à accroître la part des revenus de l'industrie
allant aux travailleurs. En fait, cette augmentation a été
modeste car, pour compenser l'accroissement des coûts unitaires du
travail, les employeurs ont substitué de plus en plus des techniques
à fort coefficient de capital". C'est également une citation
tirée du même document: Pour une croissance plus stable de la
construction, du Conseil économique du Canada.
Par ailleurs, en examinant le tableau illustrant les gains annuels selon
le métier et le statut, on s'aperçoit que la moyenne des salaires
est située à $5,409 en 1973. Donc, inférieure au salaire
moyen gagné au Québec qui dépasse $7,000 par
année.
Cette moyenne de salaire des travailleurs de la construction s'explique
par le faible nombre d'heures de travail. C'est ce que nous démontre le
tableau suivant. Je pense que vous me dispenserez de m'y référer
de façon directe. Il est devant vos yeux.
Les éléments de solution. L'indexation des salaires doit
être une première étape pour relancer l'industrie de la
construction. Dans le régime de négociations collec-
tives, les différends qui surviennent sont habituellement
portés à la connaissance du ministre du Travail qui
délègue son représentant ou agit lui-même pour
amener les parties à résoudre les problèmes.
Dans le présent conflit, le ministre du Travail n'est plus en
mesure de jouer ce rôle capital parce que les parties en cause ont
totalement perdu confiance en lui et ont même réclamé, en
des occasions diverses, sa démission.
Nous avons donc conscience que la présence des parties à
cette commission est dénuée de tout sens logique. Mais, vu que la
loi 201 nous impose de venir exposer à cette commission notre point de
vue, la CSD fait appel à l'équité qui est la seule capable
de trouver un règlement satisfaisant à ce conflit.
Cette équité commande que tous les taux horaires du
décret de l'industrie de la construction soient majorés de $0.75
l'heure à compter du 1er janvier 1975; les augmentations prévues
au décret continuent de s'appliquer aux dates fixées; le
décret prévoit une clause d'indexation des salaires au coût
de la vie à partir d'octobre 1975 ou dès le moment où
l'indice des prix à la consommation de Montréal atteint
178.1.
Toute tentative ou intention, venant de qui que ce soit, d'accorder des
augmentations de salaire à des groupements distincts de travailleurs ou
de revenir aux disparités scandaleuses qui ont déjà
existé, ou encore entretenir l'illusion magique de la division du
secteur de la construction en catégorie industrielle et domiciliaire
avec des taux différents, ne peuvent, en aucune circonstance et pour
quelque considération que ce soit, être envisagées comme
des solutions au problème actuel. L'un ou l'autre de ces cataplasmes ne
ferait que précipiter des réactions à la chaîne dont
les conséquences seraient encore plus tragiques pour l'économie
que la véritable solution d'équité énoncée
plus haut, en plus d'être un affront à l'endroit des
véritables travailleurs professionnels de la construction.
Le pouvoir d'achat étant ainsi rétabli selon les exigences
de l'inflation, cette équité commande en retour aux travailleurs
d'accomplir le travail exigé. Ce qu'ils s'empresseront sans doute de
faire.
Le gouvernement devra, également, s'empresser de créer les
conditions nouvelles nécessaires pour que les employeurs et les
travailleurs accroissent la productivité à son niveau normal. A
cette fin, le gouvernement devra appliquer toutes les recommandations de la
commission Cliche qui contribueront à créer le climat
nécessaire pour que la paix industrielle règne sur les chantiers
de construction.
L'indexation des salaires paraît donc indispensable pour relancer
l'industrie de la construction en 1975 et la loi 201 donne plein pouvoir au
gouvernement d'agir dans ce sens.
Quant à l'annexe, M. le Président, elle contient des
commentaires sur des formules utilisées pour arriver à
l'indexation qui est réclamée. Je pense que je pourrais
être dispensé de la lire.
Le Président (M. Burns): Merci, M. Dalpé. Le
ministre du Travail.
M. Cournoyer: Pas de question.
Le Président (M. Burns): Le leader de l'Opposition en
aurait une, mais il est mal placé.
M. Cournoyer: Je vais changer de place avec vous.
Le Président (M. Burns): Si la commission y consent, je
veux simplement...
M. Cournoyer: J'y consens.
Le Président (M. Burns): Je veux simplement
souligner...
M. Cournoyer: D'accord, on lui donne la permission?
M. Roy: Permission accordée. Le Président (M.
Burns): Merci.
M. Roy: A la condition que ce ne soit pas considéré
comme un précédent pour les autres présidents qui
viendront à cette commission.
-Le Président (M. Burns): C'est beaucoup plus une
remarque, M. le Président, que je veux faire et je pense que je serais
mieux de passer la parole au député de Beauce-Sud.
M. Roy: Non, vous pouvez y aller. Le Président (M.
Burns): Allez-y. M. Roy: Vous pouvez y aller.
Le Président (M. Burns): Aie! C'est moi qui mène.
Allez-y.
M. Bellemare (Rosemont): Ce n'est pas pareil.
M. Roy: Le président est en train de créer un
précédent dangereux que je dois signaler.
Le Président (M. Burns): C'est vrai.
M. Roy: Parce que le président n'a pas à imposer la
parole. Il s'agit que le député qui veut prendre la parole la
demande au président et, dans les circonstances, je ne l'avait pas
demandée.
Le Président (M. Burns): Alors, vous ne la voulez pas?
M. Roy: Non. Je n'ai pas de question à poser pour le
moment. Je voulais attendre.
Le Président (M. Burns): Est-ce qu'il y a d'autres
députés qui...
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, j'en aurais
une.
Le Président (M. Burns): Le député de
Rosemont.
M. Bellemare (Rosemont): Oui. J'en aurais une. M. Dalpé,
c'est bien ça votre nom? Vous demandez la tête du ministre.
Avez-vous une solution de rechange et, deuxièmement, seriez-vous
prêt à affronter l'électorat et devenir ministre du
Travail?
M. Dalpé: Je pourrais peut-être vous répondre
en disant que je pourrais être nommé temporairement et voir ce que
je peux faire. Si les électeurs ne sont pas satisfaits de ce que j'aurai
fait, ils me battront. C'est déjà arrivé d'ail leurs que
des ministres ont agi avant d'être élus.
M. Bellemare (Rosemont): D'accord. C'est votre réponse,
mon cher ami. Mon autre question va être celle-ci. Si les patrons, dans
un élan de collaboration, vous accordaient vous êtes
ministre du Travail, remarquez bien l'augmentation que vous demandez,
remarquez que je crois bien que tous les députés qui sont ici
présents sont favorables à l'augmentation, il n'y a aucun doute
de ce côté, alors, vous êtes toujours ministre du Travail,
dans un élan de collaboration avec le patronat, seriez-vous prêts,
les chefs d'union, à garantir la productivité des employés
sur les chantiers de construction?
M. Dalpé: Dans le mémoire que nous avons
présenté, nous avons fait état de la carence de
productivité dont parle le ministre, nous ne pouvons pas dire que nous
sommes d'accord avec lui. S'il a des chiffres, nous imaginons qu'il n'a pas
dû les lancer en l'air sans les vérifier. Mais tout le contexte de
la productivité est quand même relié aux aspects que nous
avons soulevés dans le mémoire. Donc, tenter d'obtenir, de la
part de quelque chef syndical que ce soit, une garantie formelle que la
productivité va retrouver son taux normal si $0.75 l'heure sont
donnés en janvier plus ce qui est demandé, je pense que personne
ne pourrait prendre un tel engagement. Nous pouvons cependant dire ceci: Un
minimum de satisfaction régnant sur les chantiers de construction, il y
a lieu de s'attendre de la part de quelqu'un qui est satisfait à un
meilleur rendement que de quelqu'un qui est en instance de revendications et de
chicanes. Je pense qu'à partir de cela, vous pourriez tenir pour acquis
que le travailleur de la construction, ayant reçu satisfaction au plan
salarial, devrait retrouver son rythme de croisière normal de
travail.
M. Bellemare (Rosemont): Remarquez bien, M. Dalpé, que je
n'ai absolument rien contre les unions, au contraire. Par contre, je trouve que
vous avez des formules très faciles, des formules incitatives pour
demander à vos travailleurs de faire la grève et cela va comme
cela. Mais quand vous allez les inciter à la productivité sur les
chantiers de construction, sciemment ou inconsciemment, vous ne trouvez plus de
formule.
M. Dalpé: Je pense que le rôle des unions n'est pas
de faire valoir que la productivité va produire pour eux des effets dont
ils vont être les bénéficiaires. Les travailleurs, comme
tels, sont quand même des citoyens qui savent que, pour obtenir quelque
chose, il faut le faire, donc le produire. Mais le moyen de résistance
qu'ils ont dans certaines circonstances, c'est de ralentir ou de cesser de
travailler. Je pense qu'il n'est pas nécessaire pour quelque chef
d'union, lorsque les conditions ont été rétablies, surtout
celles qu'il désire, de dire aux travailleurs en cause: Maintenant, tu
vas produire. C'est l'effet normal qui se produit chez lui comme chez n'importe
quel autre citoyen.
M. Bellemare (Rosemont): Je vais poser ma question d'une autre
façon. Si, demain matin, vous pouviez collaborer avec les patrons, avec
une entente parce qu'on dit souvent que la plus mauvaise des ententes
vaut mieux que le plus beau des procès seriez-vous prêt
à faire toute la publicité vis-à-vis de vos membres pour
les inciter à la productivité sur les chantiers de construction,
après les demandes que vous aurez obtenues du patronat, comme vous avez
fait pour les inciter à la grève?
M. Dalpé: Je pense qu'il y a des distinctions à
faire quant à l'incitation à la grève. Vous n'avez pas le
droit de généraliser parce que ce n'est pas général
dans le moment et, quant à la centrale, nous n'avons demandé
à personne de faire la grève.
M. Bellemare (Rosemont): Je n'ai pas
généralisé, j'ai dit que vous étiez ministre du
Travail.
M. Dalpé: Alors, à titre de ministre du Travail, je
vais lancer l'appel à tous les travailleurs, non seulement de la
construction, mais à tous les travailleurs qui ont
bénéficié d'une formule d'indexation, pour qu'ils donnent
le rendement qu'on attend d'eux. Ils savent ce que cela veutdire. Je n'ai pas
besoin d'insister là-dessus.
M. Bellemare (Rosemont): Vous ne pensez pas que le ministre l'a
fait à ce jour?
M. Dalpé: Pardon?
M. Bellemare (Rosemont): Vous ne pensez pas que le ministre l'a
fait déjà cette demande-là?
M. Dalpé: Oui, sauf que les travailleurs en cause n'ont
pas encore l'indexation.
M. Bellemare (Rosemont): Ils ont plus confiance en vous qu'au
ministre?
M. Dalpé: Pas nécessairement. Dès qu'ils
auront l'indexation, quand quiconque va leur demander de donner le rendement
normal, ils vont retrouver leur rendement normal.
M. Bellemare (Rosemont): Je ne vous comprends plus ou je ne vous
suis plus.
M. Dalpé: Vous êtes devant une situation où
quelqu'un se plaint de ralentissements de travail et même, dans d'autres
cas, on a cessé complètement de travailler. C'est pour signifier
qu'on attend quelque chose comme rajustement. Quand le rajustement sera
donné, que la cause des arrêts ou des modifications du rythme de
travail aura été abolie, je pense qu'il faut s'attendre que le
rythme
normal va reprendre. Je pense qu'il est tout à fait normal de
s'attendre à cela.
M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que c'est une pure
hypothèse ou si vous pensez que cela va être cela?
M. Dalpé: Je crois que cela va être cela. Ce n'est
pas une hypothèse dans mon cas; je crois que cela va être cela. A
notre point de vue, cela va sûrement être cela.
M. Bellemare (Rosemont): En tant que ministre du travail, tout le
temps?
M. Dalpé: Toujours, en tant que ministre. Les
élections, c'est quand?
Le Président (M. Burns): Le député de
Saint-François a demandé la parole.
M. Dalpé: ...de prendre des décisions comme
ministre, à un moment donné, il va falloir que je me fasse
élire.
M. Déziel: M. le Président, si vous le permettez,
j'aimerais porter à l'attention de M. Dalpé, à la page 4,
le paragraphe a), la responsabilité du patronat. Vous dites, à un
moment donné, que c'est la compétence de gestion des
entrepreneurs qui est mise en cause, qu'à chaque contrat d'importance
les entrepreneurs trouvent moyen d'étirer les délais de livraison
et d'augmenter les coûts.
Je ne sais pas si vous êtes au courant que durant l'annéee
1974, que ce soit au niveau du patronat ou au niveau de l'administration des
villes et des municipalités, à l'intérieur de ces
organismes il y a eu des administrateurs de grande importance qui n'ont pas pu
prévoir, par exemple, la livraison de camions, qui était de 18
mois, ou de transformateurs, qui était de 12 à 18 mois,
même deux ans. Dans le domaine de la construction également, il y
a eu de forts délais au niveau de la livraison des matériaux.
Lorsqu'on dit que cela devient de la mauvaise administration concernant
le domaine du patronat, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous.
J'aimerais avoir de plus amples explications sur cette mauvaise
administration.
M. Dalpé: Je pense qu'il faut tenir pour acquis que
l'entrepreneur, lorsqu'il prend des engagements vis-à-vis de son client,
doit être en mesure de fournir la construction demandée dans les
délais prévus.
Si, pour obtenir le contrat parce qu'il se dit en concurrence
avec un autre il laisse entendre à son client que lui est en
mesure d'avoir ceci beaucoup plus vite qu'un autre, qu'il a des passes, qu'il a
des tuyaux, qu'il n'a pas de problème avec un tel, s'il est prêt
à lui mentir, je pense qu'il doit accepter le blâme qu'on
déverse actuellement dans notre mémoire. C'est sûrement le
cas de plusieurs entrepreneurs qui font miroiter à leurs acheteurs leurs
capacités personnelles, leur expérience et toute la kyrielle de
chansons pour obtenir le contrat. Je pense que cela est indéniable.
Ceux-là, ils sont visés sans qu'on les nomme.
M. Déziel: Mais dans le contexte d'inflation qui a
existé, M. Dalpé, n'êtes-vous pas d'accord qu'il n'y a eu
aucun contrôle possible dans ce domaine-là, au niveau de tous les
sous-traitants ou des entrepreneurs généraux, d'une part? Il n'y
avait aucun contrôle possible.
M. Dalpé: Je ne veux pas nier que tous ces entrepreneurs
ont pu avoir des problèmes. Nous nous en tenons aux promesses qu'ils ont
faites à leurs clients. Si, intérieurement, ils pouvaient
soupçonner que des problèmes surviendraient et qu'ils n'ont pas
fait savoir à leurs clients ce qu'ils pensaient, je pense qu'ils
méritent les blâmes. On a le droit, à ce moment-ci, de les
considérer comme de mauvais administrateurs. Je pense que le minimum
d'honnêteté vis-à-vis de leur clientèle les
obligeait à laisser voir que, dans le contexte actuel, ils ne pouvaient
pas garantir, de façon formelle, la livraison ou le service à tel
moment.
M. Déziel: Dernière question, M. le
Président, si vous me permettez. Quelle serait votre réponse
à la question que je posais, ce matin, au président de la CSN,
relativement aux contrats qui ont été soumissionnés vers
la fin de 1973, et même ceux avant avril 1974, où il
n'était pas question d'indexation, et où il y a eu des prix
fermes, des prix forfaitaires qui ont été soumis, de façon
fixe, par des entrepreneurs généraux? Par la suite, lorsqu'on
sait qu'il y a eu inflation, ils ont eu à subir des pertes de
départ peut-être de $250,000 à un demi-million, mais pour
conserver leur intégrité au niveau des bons de performance ou des
bons de garantie ou quoi que ce soit, ils ont voulu maintenir leur contrat,
respecter leur signature et, par le fait même, exécuter le contrat
proprement dit. On sait que ces types n'ont éventuellement pu
prévoir aucune indexation à venir, celle qu'on discute
présentement, ou l'inflation qui est entrée en cause dans ce
temps. Quelle est votre réponse là-dessus? Qui doit payer la note
d'après vous?
M. Dalpé: Je dois dire, au départ, que c'est
malheureux, si ces situations existent. Mais si, d'une part, on doit trouver
une formule pour régler le problème de ces soumissionnaires, de
ces entrepreneurs, je pense que, d'autre part, on va, par équité,
être obligé de trouver une formule pour d'autres situations aussi
pénibles dans lesquelles tous les citoyens ont pu être pris. Je
pense qu'on va être obligé d'envisager cela.
Quant au cas spécifique dont vous parlez, c'est possible que
certaines de ces pertes soient déductibles quelque part. Je ne suis pas
tellement familier avec les impôts des industries ou des entreprises,
mais j'imagine qu'il doit y avoir moyen de passer là-dedans une partie
des pertes. Je ne serais pas surpris que certains entrepreneurs
réussissent le tour. A ce moment, ils en auront certainement
diminué une bonne partie. L'autre partie, cela fait partie du jeu normal
de la vie dans laquelle tout le monde est pris. La ménagère qui
n'a pas acheté, la semaine dernière, certaines provisions et qui
se fait prendre, cette semaine, avec l'augmentation de prix, on ne se demande
pas qui va payer pour cela. C'est malheureux pour elle, c'est la semaine
dernière qu'elle aurait dû les acheter. Cette semaine, elle va les
payer plus
cher. Il en est ainsi, si on veut multiplier les cas à
volonté.
M. Déziel: Vous parlez de la ménagère, je
suis d'accord avec vous, mais elle a l'entière liberté de
l'acheter ou de ne pas l'acheter. Tandis que l'entrepreneur dont je veux parler
est obligé, par contrat forfaitaire, de voir à l'exécution
des travaux. Vous n'avez pas répondu à ma question, lorsque je
vous demande: Qui va payer la note?
M. Dalpé: Je n'ai pas besoin de répondre, parce que
j'ai l'impression que vous répondez vous-même. S'il ne passe pas
la note à quelque part, c'est lui qui va la payer.
Je vous place dans la situation où il réussit à la
passer à quelqu'un, ce sera un consommateur éventuel ou
l'impôt, quelque chose comme cela. D'ailleurs, je pense que les
employeurs doivent se battre un peu la poitrine, aujourd'hui. Si, en juin, ils
avaient accepté d'ouvrir le dialogue, de discuter, la
pénalité qu'ils s'apprêtent à subir ou qu'ils
craignent serait certainement moindre, ajourd'hui, à endurer.
M. Déziel: Là, vous venez de souligner que c'est le
patron qui doit payer la note. Devant le fait qu'il pourrait, dans une
situation semblable, y avoir éventuellement un marasme
économique, au niveau du Québec, avec un lot de faillites que
différents entrepreneurs généraux et sous-entrepreneurs
auraient à encourir, devant ce marasme économique, qui, encore
là, devrait payer la note?
M. Dalpé: Dans un cas de marasme, je pense que c'est toute
la population qui est prise pour écoper. Cela a des réactions
à chaîne. Si telle chose ferme, ce sont des travailleurs qui ne
travaillent plus. Ne travaillant plus, ils n'achètent pas. Donc, ceux
qui produisent et qui achetaient, produisent moins, etc. On comprend toute la
situation.
Dans le cas spécifique dont il est question, je pense que ceux
qui ont refusé d'ouvrir le dialogue au moment où il était
possible de le faire doivent quand même s'attendre d'être
pénalisés un peu si, par malheur, ils ont des contrats à
prix fixe, qui ne leur permettent aucune échappatoire.
M. Déziel: A l'intérieur de votre organisme, M.
Dalpé, est-ce que vous avez essayé de trouver une formule
quelconque pour essayer d'élucider ce problème?
M. Dalpé: Je n'ai pas saisi le début, je
regrette.
M. Déziel: A l'intérieur de votre organisme,
lorsque vous avez préparé votre mémoire, devant un tel
état de choses qui pourrait se produire, est-ce que vous auriez
essayé, éventuellement, de trouver une formule qui pourrait
répondre aux données de ce problème que je viens de vous
soumettre?
M. Dalpé: Je dois vous avouer que nous n'avons pas
été préoccupés par les conséquences de la
demande pour la simple raison que nous ne croyons pas que la situation va
être catastrophique au point de re- quérir une attention
particulière de notre part là-dessus. Nous ne croyons pas
à la catastrophe qui va venir parce qu'il y aurait addition au
décret de taux supplémentaires d'augmentation de salaire et
même de l'indexation. Du tout.
Certains pourront être serrés mais nous avons la conviction
qu'ils vont trouver le moyen dans les temps à venir de se rattraper. Ils
existent actuellement et ils semblent faire des affaires, être
prospères jusqu'à un certain point. Je ne vois pas pourquoi ils
cesseraient d'être prospères parce que les conditions ont
été changées, conditions d'ailleurs qu'ils utilisent
à volonté. Ce sont les patrons qui en ont fait l'admission.
Lorsqu'ils soumissionnent ils se couchent sur le décret. Alors, à
ce moment-là, leurs taux sont prévus et sont une
répétition fidèle de ce qu'un client éventuel peut
s'attendre à payer.
M. Déziel: Une dernière question, M. le
Président. Si vous me le permettez, on va prendre un sous-traitant qui
fait un petit contrat domiciliaire, admettons, de $600. Normalement, un profit
légitime, qui, je le calcule, à mon sens, est très minime,
peut lui rapporter au maximum 5% net. A raison de 5% net, il faut comprendre
également qu'il ne faut pas qu'il y ait l'épée de
Damoclès des faillites au-dessus de sa tête, d'une part. A raison
de 5%, vous savez que cela lui donne $30 net pour un contrat de $600?
Qu'arrive-t-il à ce type avec une indexation lorsque, sur une
période à long terme, prenons un projet domiciliaire de 250 ou
300 bungalows, il a donné un prix ferme pour fins
d'exécution?
M. Pelletier: M. le Président, j'aurais une
question...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre,
s'il vous plaît! Je vais vous passer la parole après le
député de Rosemont. Avez-vous terminé?
M. Déziel: Non. J'ai posé une question à M.
Dalpé...
Le Président (M. Séguin): Bon, alors...
M. Déziel: ...je voudrais avoir une réponse. Le
Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Dalpé: Le cas précis auquel vous vous
référez, où un entrepreneur met en chantier une
série de maisons, 250, je pense que ce n'est pas le cas le plus
pénible. Assez souvent, les 250 maisons ne sont pas vendues
immédiatement. C'est ce qui lui permet de se rattraper lors de
l'apparition du client éventuel pour l'acheter. Il n'est pas assez fou,
le gars, pour mettre ses 250 maisons sur pied, finies et de les offrir en
vente. C'est au fur et à mesure qu'il les vend. Bien sûr,
connaissant le besoin d'habitations, on sait qu'elles vont se vendre assez
vite.
A ce moment-là, il les vend au fur et à mesure. Donc, les
pertes dont on peut parler ne sont pas aussi grosses que ça. Ses 5%, il
va s'arranger pour les retrouver.
M. Déziel: M. Dalpé, j'ai bien souligné que
c'était le
cas d'un sous-traitant et non pas d'un entrepreneur
général.
M. Dalpé: Mais le sous-traitant a contracté
à ce prix-là.
M. Déziel: A un prix fixe.
M. Dalpe: Oui. Alors, il va payer.
M. Déziel: C'est cela qui arrive. Voyez-vous, on est dans
un ghetto et on n'est pas capable d'en sortir, d'une façon ou de
l'autre. J'ai fini, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Rosemont.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, ma question va
être très courte. Encore une fois, pour la presse surtout, je veux
très bien dire que je n'ai rien contre les unions. Au contraire, je suis
pour.
Le Président (M. Séguin): Dites-le au
président, pas à la presse.
M. Bellemare (Rosemont): Je voudrais savoir une chose de M.
Dalpé. A la page 4 de votre mémoire, "responsabilités du
patronat", vous nous dites: "...que les principaux responsables de la
diminution de la productivité sont les employeurs. Ils doivent donc en
assumer le principal fardeau. "1. C'est la compétence de gestion des
entreprises qui est mise en cause."
Ma question est celle-ci: Seriez-vous prêt a admettre que le
mouvement de la CSN a eu une mauvaise gestion lorsque sa caisse est devenue
presque à sec, ce qui n'est souhaitable pour aucune union, ou si c'est
dû à l'inflation des grèves?
M. Dalpé: Vous comprendrez que je ne répondrai pas
pour la presse!
Je n'ai rien à faire avec la CSN, je ne suis pas en relation avec
la CSN, et je ne vois pas pourquoi je traiterais de la situation de la CSN.
M. Bellemare (Rosemont): D'accord, je vous suis.
M. Dalpé: Ce que vous voulez, à toutes fins
pratiques, m'amener à dire, c'est que s'il y a des
responsabilités à quelque part, nous pouvons aussi être
responsables. Je pense que, plus loin, j'ai bien fait la part de
responsabilité de la part des unions.
M. Bellemare (Rosemont): Remarquez bien, M. Dalpé, que ma
question, je la voulais très courte. Mais là, vous m'obligez
à vous en poser une autre.
Supposons que, chez vous, à la CSD, vous avez prévu 10,000
ouvriers en grève au cours de deux années. Mais malheureusement,
vous en avez 30,000, ce que vous n'aviez pas prévu. C'est une inflation
de grève qui arrive. Cela ne veut pas dire que vous avez fait une
mauvaise gestion. Pensez-vous que cela peut vous arriver, chez vous?
M. Dalpé: Cela peut sûrement nous arriver, mais je
ne vois pas la relation...
M. Bellemare (Rosemont): Ce qui n'est pas souhaitable, remarquez
bien, pour l'ouvrier, parce que pendant ce temps, l'ouvrier, vous ne pouvez pas
le payer à toutes les semaines comme vous donnez $30 ou $40, selon le
nombre d'enfants. Malheureusement, vous n'avez plus de fonds. Le pauvre gars,
qui a des enfants, qui a une famille, est obligé de manger quand
même, il n'a plus droit à l'assurance-chômage, il n'a plus
droit au bien-être social. Il faut faire quelque chose pour ces gens. Ce
sont les ouvriers qui en souffrent. Mais, malheureusement, votre fonds est
à sec à cause de l'inflation des grèves. C'est une
mauvaise gestion de votre part.
M. Dalpé: A ce moment, M. le député, je vais
vous dire ceci: Avant que les travailleurs décident d'aller en
grève ce sera leur décision ils sauront que la
centrale n'est pas en mesure de les appuyer. Est-ce que les entrepreneurs,
auxquels vous faites allusion et que nous mentionnons, agissent de cette
façon?
M. Bellemare (Rosemont): Je ne fais allusion à aucun
entrepreneur, même pas à une union, si vous me permettez.
Là, vous pouvez me dire que je généralise, oui, autant du
côté patronal que du côté syndical. C'est une
situation qui peut se présenter. Elle s'est présentée
à la CSN. C'est malheureux. Moi, je le déplore. Elle peut se
présenter chez vous. Elle peut se présenter à la FTQ ou
à une autre union. Peu m'importent les unions. Dans ce cas, c'est de
trouver aussi un programme à l'effet que, si l'union est à sec,
on pourra aider, d'une certaine façon, l'ouvrier qui n'a rien pour
manger. C'est dans ce sens que je veux le dire. Je pense que vous me comprenez
très clairement.
M. Dalpé: Je vous comprends très bien.
M. Bellemare (Rosemont): Cela ne veut pas dire que c'est une
mauvaise gestion.
M. Dalpé: Non.
M. Bellemare (Rosemont): Cela veut dire que c'est l'inflation des
grèves qui a amené cela.
M. Dalpé: Oui.
M. Bellemare (Rosemont): Vous admettez cela?
M. Dalpé: Bien sûr! Cela peut arriver. C'est une
situation...
M. Bellemare (Rosemont): C'est cela... M. Dalpé:
...hypothétique possible.
M. Bellemare (Rosemont): ...que je voulais vous faire dire.
M. Dalpé: Je vous dis ceci: S'ils décident de faire
la
grève, ils auront pris connaissance de la situation de la caisse.
Donc, ils auront accepté d'y aller sans recevoir immédiatement ou
peut-être jamais les prestations qu'on leur verse normalement.
M. Bellemare (Rosemont): Vous allez dire: On a $500,000 en
banque, par exemple. Vous avez 10,000 grévistes sur les bras à
$40 par semaine. Vous faites le compte, sur une période de cinq à
six mois, vous allez les payer pendant combien de temps?
M. Dalpé: On va les payer tant qu'on en aura et tant qu'on
sera capable d'en trouver.
M. Bellemare (Rosemont): D'accord!
M. Dalpé: Quand on n'en trouvera plus, on leur dira. Comme
ils sont parmi ceux qui doivent payer un jour ou l'autre, ils prendront les
décisions. C'est de cette façon que cela fonctionne.
M. Bellemare (Rosemont): Remarquez bien que la question que je
vous pose, c'est surtout pour le bien de ces ouvriers qui sont en grève.
C'est dans ce sens que je voudrais que vous me compreniez. C'est pour que ces
gars ne restent pas à sec quand ils sont en grève. C'est surtout
cela.
M. Dalpé: Alors, à ce moment, si le gouvernement a
des préoccupations de cet ordre, on pourra lui demander de nous avancer
l'argent et les gars feront la grève le temps que cela durera.
M. Bellemare (Rosemont): Vous demanderez cela au ministre. Dans
ce temps-là......le ministre du
Travail.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre,
s'il vous plaît! C'est très intéressant, ce dialogue, mais
nous, on est ici pour rien à ce moment-ci. Si vous avez des questions ou
des commentaires à faire, passez-les donc par le président. Au
moins, les membres de la commission pourront bénéficier de votre
très intéressant commentaire.
M. Bellemare (Rosemont): Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): C'est cela. Avez-vous
terminé?
M. Bellemare (Rosemont): Oui. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Kamouraska-Témiscouata.
M. Pelletier: M. le Président, ma question s'adresse au
président de la CSD. Je remarque que vous voyez bien que l'indice du
coût de la vie, de 1972 à 1974, a été de 18% et,
d'après votre rapport, si on constate les chiffres, au 30 avril 1974 et
au 31 décembre 1974, c'est indiqué $5.39, comparativement
à $4.38, ce qui représente une augmentation de 23%.
C'est donc dire que l'indexation n'aurait pas sa place, en ce sens que
l'augmentation de salaire a été de 23%, et celle du coût de
la vie, de 18%. Le tableau à l'annexe: Salaire indexé, indice de
Montréal. Tableau numéro 1.
M. Bedard (Montmorency): Première page en annexe. Premier
tableau.
M. Dalpé: Quelle est votre question? Que les augmentations
de salaire ont été de...
M. Pelletier: L'indexation du coût de la vie a
été de 1.8%...
M. Dalpé: Oui.
M. Pelletier: ...et l'augmentation de salaire de 23%.
M. Dalpé: A partir de...?
M. Pelletier: De 1972 à 1974, augmentation de 18%...
M. Dalpé: Cela va. 18%: coût de la vie. 23%:
augmentation. L'indexation ou le coût de la vie, c'est une chose.
L'augmentation du mieux-être qui résulte de la
productivité, autrement dit, le produit national brut s'accroît
chaque année, les citoyens ont droit à une partie de cet
accroissement; vous n'en tenez pas compte lorsque vous parlez des 23%. Les 23%
ont tenté d'en tenir compte et c'est pour cela qu'on retrouve
l'écart de 5% de 18% à 23% parce que vous ne parlez
que du coût de la vie alors qu'à cela, il faut ajouter, et cela de
façon constante les syndicats négocient toujours les
augmentations en fonction du mieux-être le
bénéfice...
M. Pelletier: Oui.
M. Dalpé: ...de la productivité. Ils ont droit
à une augmentation sur ce chapitre. Il faudrait ajouter cela.
M. Pelletier: C'est donc dire qu'ils satisfont à...
M. Dalpé: Si vous partez de 1972, cela fait trois ans,
cela fait 9% au minimum, à 3% par année. Alors, 18% plus 9%, cela
devrait faire 27% au lieu de 23%.
M. Pelletier: ...l'augmentation du coût de la vie
présentement. ' M. Dalpé: Oui, mais si vous dites: Prends
toujours ton augmentation de bien-être pour compenser l'indexation ou
l'augmentation du coût de la vie, vous n'êtes pas tellement
honnête avec lui. C'est lui qui fait les frais de l'augmentation du
coût de la vie en prenant ce que le produit national brut lui doit pour
vivre de façon décente. Je ne pense pas que cela soit la
façon connue, traditionnelle, de négocier.
M. Pelletier: D'accord.
Le Président (M. Séguin): M. Dalpé, nous
vous remercions. Afin d'ajouter un peu de "pouvoir" et surtout
d'éclairer, le prochain groupe que nous entendrons
sera la Corporation des maîtres électriciens du
Québec. Voulez-vous s'il vous plaît vous identifier, ainsi que le
groupe que vous représentez.
M. Roy: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Un instant. A l'ordre! M.
le député de Beauce-Sud.
M. Roy: Question préalable. Selon les renseignements que
vous nous avez fournis, au début de la séance, il reste trois
organismes.
Le Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Roy: J'aimerais savoir un peu de quoi il retourne
jusqu'à maintenant, quelles sont les intentions de la commission
parlementaire, à savoir si nous ajournons sine die à six heures
ou si la commission parlementaire entendra les trois groupes qui sont devant
nous...
Le Président (M. Séguin): Absolument. M. Roy: Y
aura-t-il des limites de temps?
Le Président (M. Séguin): Pas plus que
jusqu'à présent.
M. Roy: Vous pouvez nous assurer que les trois organismes seront
entendus devant la commission.
Le Président (M. Séguin): Si ces organismes sont
présents pour se faire entendre.
M. Roy: Et deuxièmement, le ministre aura-t-il l'occasion
et la permission de nous faire part de ses décisions si ses
décisions sont prises devant la commission? Troisièmement,
aurons-nous l'occasion, comme membres de la commission, d'interroger le
ministre ou de faire des commentaires sur les décisions qu'il pourrait
annoncer? Avant la dernière question, il y a l'avant-dernière
question. J'ai demandé si le ministre fera connaître ses
décisions devant la commission parlementaire. Je m'excuse de revenir un
peu là-dessus. Cela a été la première question que
j'ai posée hier, mais, à ce moment, avant qu'on ajourne les
travaux de la commission sine die, sans avertissement, à six heures,
comme cela a malheureusement déjà été le cas,
j'aimerais savoir, pour la gouverne de tout le monde, vers quoi nous nous
dirigeons.
Le Président (M. Séguin): Premièrement, je
n'ai pas l'intention d'ajourner les travaux de la commission sine die. Lorsque
nous ajournerons, nous aurons terminé nos travaux. En ce qui concerne
les commentaires que le ministre aura à faire, je pense que votre
question devrait être posée au ministre et non pas au
président.
D'abord, si je m'en tiens au texte de la loi, c'est-à-dire notre
agenda pour cette rencontre, cette séance, il est bien
spécifié, dans cet agenda et dans la loi 201, que la commission
est convoquée pour les seules fins d'entendre les parties
intéressées.
J'ai nommé, au début de la séance, si vous vous en
souvenez, les neuf associations ou grou- pes qui devaient être entendus
par la commission. Je vous assure immédiatement que les neuf, pourvu que
chacun de ces neuf veuille être entendu, naturellement, seront
entendus.
En ce qui concerne les commentaires que le ministre aura à faire
ou qu'il devra faire, ou que vous voudriez qu'il fasse, c'est lui
naturellement, dans un cas semblable, qui doit assumer cette
responsabilité.
M. Roy: Me donnez-vous la permission de lui demander s'il a
l'intention de le faire devant la commission?
Le Président (M. Séguin): Pas à ce
moment-ci. Ce que je demanderais au député, c'est de suivre
l'ordre que nous avons adopté et, comme j'ai appelé la
Corporation des maîtres électriciens du Québec, nous allons
procéder avec cette formule. C'est dire que nous entendrons maintenant
monsieur...
Electriciens et mécaniciens en tuyauterie
M. Guilbault: Yvon Guilbault, représentant de
l'Association des sous-entrepreneurs en construction du Québec et
porte-parole de la Corporation des maîtres électriciens du
Québec et de la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec.
M. le Président, la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec devait être entendue
après la Corporation des maîtres électriciens du
Québec. Mais étant donné que l'Association des
sous-entrepreneurs en construction en est le porte-parole, le mémoire
que nous vous présentons contient les représentations des deux
corporations qui sont des associations représentatives reconnues par la
loi.
Le Président (M. Séguin): A ce moment-ci vous
parlez au nom...
M. Guilbault: De deux associations représentatives...
Le Président (M. Séguin):... de deux associations,
la Corporation des maîtres électriciens du Québec et la
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du
Québec.
M. Guilbault: C'est cela.
Le Président (M. Séguin): C'est dire qu'il n'y a
pas deux organisations qui parleront mais vous parlerez au nom des deux. Je
vous remercie. Vous pouvez procéder.
M. Guilbault: Alors, les représentations qui vont suivre
sont celles de la Corporation des maîtres électriciens du
Québec et de la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec, deux des associations représentatives de
l'industrie de la construction et qui ensemble re-
présentent 23% de l'industrie selon les critères
exprimés dans le bill 9 adopté par l'Assemblée nationale,
le 1er juin 1974.
En matière de relations de travail, ces deux associations
s'expriment par l'entremise de l'Association des sous-entrepreneurs en
construction du Québec dont elles sont membres et qui constituent leur
porte-parole officiel. Il est bon de souligner que nous nous exprimons au nom
de 4,500 entrepreneurs répartis dans toutes les régions du
Québec.
Au moment de notre convocation à cette commission parlementaire,
nous ignorions le sujet exact sur lequel la commission désire nous
entendre mais, étant donné les pouvoirs conférés au
ministre du Travail par la loi 201, nous sommes nettement conscients que la
voix que nous aurions pu faire entendre dans d'autres circonstances, comme
association représentative, est maintenant réduite à celle
d'un simple groupe de pression, qui, par ses revendications, veut sensibiliser
le ministre du Travail qui, de son propre chef, semble
décidé à amender le décret en le mettant en
garde contre des solutions simples, face à des problèmes
complexes.
C'est pourquoi il estde notre intention de mettre l'accent sur les
points majeurs du conflit actuel pour que la commission soit pleinement
consciente des conséquences des décisions qui pourront être
prises par le ministre du Travail. Je pourrais ajouter par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
Mésentente chronique entre les parties et intervention inefficace
du gouvernement. Il est sûrement inquiétant de constater que,
depuis 1968, le gouvernement est intervenu dans à peu près tous
les conflits qui ont sévi dans l'industrie de la construction
malgré le fait qu'il a lui-même mis sur pied, par le bill 290, des
structures qui en matière de relations de travail
devaient, théoriquement, permettre aux associations
représenta-tivesde régler leurs propres problèmes.
Toutefois, ces associations représentatives n'ont jamais pu s'entendre
entre elles pour résoudre les conflits qui, à chaque fois, ont
exigé une intervention du gouvernement qui s'est exécuté
timidement et à contrecoeur, malgré l'impact considérable
de l'industrie de la construction sur l'économie du Québec. A de
nombreuses reprises, le gouvernement s'est vu dans l'obligation de modifier,
par législation, un système de relations de travail qu'on ne peut
que qualifier de boiteux et d'inefficace.
Depuis le bill 290, le gouvernement ne s'est contenté que de
raccommoder les pièces selon les circonstances sans aller au fond du
problème et étudier les raisons pour lesquelles les parties en
cause ne pouvaient à peu près jamais en venir à une
entente.
Bien plus, le gouvernement est aujourd'hui tellement convaincu de
l'impossibilité des parties de s'entendre entre elles qu'il a
présenté la loi 201 qui lui permet d'amender le décret
à sa guise sans que ces mêmes parties ne puissent s'y opposer. De
toute façon, il peut donc amender le décret sans avoir à
modifier la Loi des relations de travail dans l'industrie de la construction
comme il l'a fait si souvent dans le passé ce qui est
certes plus pratique pour lui, mais combien significatif de la faillite du
système des relations de travail dans l'industrie de la
construction.
Si l'on s'en remet aux récentes déclarations du ministre
du Travail, ce dernier désire que les parties expliquent devant cette
commission les raisons pour lesquelles elles ne se sont pas entendues dans le
conflit de l'indexation. Mais une telle question aurait pu être
posée à chacun des conflits qu'a connus l'industrie de la
construction.
Bref, nous sommes convaincus que le problème de l'indexation
n'est qu'un problème parmi tant d'autres qui démontrent que le
système des relations de travail dans l'industrie de la construction est
périmé en 1975. Il est à prévoir que, lors d'un
conflit ultérieur, le gouvernement devra intervenir de nouveau si le
statu quo est maintenu relativement à ce système de relations de
travail qui, disons-nous, s'est avéré inefficace et
inopérant. Les nombreuses interventions gouvernementales
antérieures le prouvent. En effet, ces interventions à courte vue
n'ont fait que pallier plus ou moins efficacement des problèmes
d'actualité sans aller au fond des choses. Bien entendu, nous comptons
sur la Commission royale d'enquête sur la liberté syndicale dans
l'industrie de la construction pour y établir un système viable,
mais en attendant le gouvernement, dans ses interventions, doit faire preuve de
clairvoyance, en tenant compte des contraintes propres à la nature
même de l'industrie de la construction et qui sont à l'origine des
mésententes perpétuelles entre les parties. Toute intervention
contraire à cette optique ne saurait qu'entretenir le pourrissement de
la situation actuelle.
Quelles sont les causes de la mésentente qui affecte les
relations interpatronales et patronales-syndicales? J'aurais pu ajouter
intersyndicales.
Il serait facile de dire que les associations sont irréalistes ou
irresponsables mais nous croyons plus utile d'exposer les véritables
causes de dissension.
Les relations interassociations patronales. C'est un secret de
polichinelle de dire que les relations entre les associations patronales sont
ardues en matière de relations de travail. Chacune d'elles tente de
représenter adéquatement la volonté de ses membres, mais
il se produit que les membres de ces associations n'ont pas
nécessairement les mêmes problèmes, ce qui ne peut
qu'occasionner une dissension plus ou moins latente entre eux et, par
conséquent, leurs associations. Le mandat donné à chacune
des associations par les entrepreneurs diffère donc selon les
circonstances et les besoins.
Ces circonstances sont les suivantes:
A) La vocation première des associations patronales n'est pas les
relations de travail.
Les six associations patronales de l'industrie de la construction
reconnues par la loi n'ont pas été formées pour des fins
de relations de travail contrairement, par exemple, aux associations
syndicales.
Ce n'est que les circonstances qui ont voulu qu'elles s'occupent de
relations de travail; sans les relations de travail, elles continueraient fort
probablement d'exister. En effet, plusieurs entrepreneurs sont membres de
plusieurs associations à la fois pour des raisons tout à
fait autres que les relations de travail. Pourtant, chacune de ces associations
a le mandat de les représenter en relations de travail.
B)Le conflit entre la région de Montréal et le reste de la
province est un facteur dont il faut tenir compte.
Il n'y a pas de doute que la plupart des conflits ont leur origine dans
la région de Montréal et spécialement chez les
entrepreneurs qui emploient un nombre important de salariés. Le reste de
la province est régulièrement exempté des problèmes
de la région de Montréal, de sorte que les associations
patronales dont les membres proviennent de l'extérieur de la
région de Montréal ne subissent pas de pressions aussi grandes
que les autres. Ce facteur a un reflet direct sur le mandat donné
à l'association.
C)La taille des entreprises faisant partie des associations.
Ce ne sont pas toutes les entreprises qui ont une ampleur suffisante
pour embaucher un nombre appréciable de salariés impliquant la
présence de délégués de chantier et l'utilisation
des bureaux syndicaux de placement. Or, il est connu que les conflits
débutent dans ce genre d'entreprises qui sont majoritairement
situées dans la région de Montréal.
Il est évident que les associations qui possèdent parmi
leurs membres peu de grandes entreprises ne sont pas enclines à se plier
à un dialogue susceptible de régler un problème auquel
leurs membres ne se butent pas.
La structure démocratique des associations patronales permet un
vote égal en matière de relations de travail à l'artisan
comme à l'entrepreneur qui a à son emploi de nombreux
salariés.
D) Les genres de travaux effectués dans la construction
constituent le handicap majeur à toute entente. Il a souvent
été question dans la construction de la création de
secteurs qui tiennent compte des différences entre les travaux qui ne
sont pas de même nature. Ainsi, l'entrepreneur qui oeuvre dans le service
à domicile ou dans la construction domiciliaire oeuvre dans un domaine
différent de celui qui entreprend à la baie James ou à la
construction de routes.
Pourtant, le décret de la construction ne fait pratiquement
aucune nuance entre ces différents genres de travaux, à tel point
que le salarié qui fait de la réparation à domicile pourra
prendre sa période de quinze minutes de repos dans le salon du client,
tout comme le salarié de la baie James y a droit.
Toutes ces raisons, qui sont reliées entre elles, constituent
à notre avis les causes d'une mésentente chronique. On pourra
toujours prétendre qu'une association devrait se rallier à une
autre même si ses membres n'ont pas de problèmes de
façon à régler un litige pour le bien de l'industrie, mais
c'est faire preuve d'angélisme.
Les relations patronales-syndicales. Les associations syndicales et
particulièrement la FTQ construction possèdent avec leurs
délégués de chantier et leurs bureaux de placement
syndicaux des pouvoirs démesurés de sorte qu'ils imposent leur
loi aux entrepreneurs et lancent leurs reven- dications sous forme d'ultimatum.
Aucune discussion n'est possible dans ces circonstances. D'ailleurs, il est
même à se demander si elles ne préfèrent pas que les
associations patronales ne discutent pas avec elles, comme l'a laissé
entendre M. André Desjardins, ex-directeur général de la
FTQ construction, dans une conversation entendue à la commission Cliche
avec le président de la Commission de l'industrie de la construction, Me
Fernand Morin.
Après une telle révélation, comment croire que la
FTQ construction discute de bonne foi? Nous sommes plutôt enclins
à penser qu'elle préfère utiliser sa force
démesurée pour obtenir gain de cause.
De fait, la FTQ construction nous a laissé savoir à
maintes reprises qu'elle n'accepterait pas moins de $0.75 l'heure
d'augmentation de salaire en guise d'indexation et qu'il y avait même
possibilité pour elle de défier toute loi qui lui accorderait un
montant moindre. Toute discussion avec un groupe qui a un tel état
d'esprit est inutile. Ce genre d'ultimatum que la FTQ construction a
lancé au gouvernement a aussi été lancé aux
associations patronales à maintes reprises et spécialement lors
de la rencontre de toutes les associations représentatives au
ministère du Travail, le 20 décembre 1974.
Les associations patronales sont conscientes que la FTQ construction
impose sa loi dans l'industrie et que sa récente demande se limitait
à leur demander de signer une entente qui leur permettrait
d'officialiser une augmentation immédiate de $0.50 l'heure qui a
été obtenue à coups de pressions arrêts de
travail et ralentissements illégaux devant lesquelles,
contrairement à la loi, le gouvernement est resté passif.
Il est certain que nous déplorons la situation actuelle et toutes
les causes qui l'ont engendrée. Il peut être facile d'accuser les
associations patronales d'irréalisme ou d'irresponsabilité, mais,
si on va au fond des choses, nous croyons que ce sont les structures
établies qui sont périmées. Il incombe au gouvernement la
responsabilité d'implanter des structures adéquates. Ce sont,
croyons-nous, les raisons pour lesquelles les parties peuvent difficilement
arriver à un accord.
Quoi qu'il en soit, nous nous interrogeons sur le moment choisi par le
gouvernement pour intervenir dans ce conflit qui dure déjà depuis
plus de six mois. Nous nous rappelons amèrement qu'aux mois de juin,
juillet et août de l'an dernier ce même gouvernement a
systématiquement refusé d'intervenir dans ce conflit, alors que
plusieurs régions du Québec étaient touchées par
des ralentissements de travail, du sabotage et des grèves. Il nous
paraît clair que la cause de la présente intervention
gouvernementale est l'arrêt du chantier olympique de Montréal. Or,
nous craignons que le gouvernement, dans le but de régler ce seul
problème du chantier olympique, sacrifie toute la province, par une
indexation peut-être rapide des salaires ou autre méthode sans
tenir compte des conséquences pour le public consommateur, de la
productivité sur les chantiers, des garanties de
paix pour l'avenir et des différents secteurs d'activité
dans l'industrie de la construction.
Une intervention gouvernementale trop brutale peut prendre plusieurs
entrepreneurs par surprise et affecter la survie de leur entreprise. Il faut
que le gouvernement tienne compte de la nature des contrats signés entre
les entrepreneurs et les donneurs d'ordres dans l'industrie de la construction.
Le gouvernement doit être prêt à indexer ces contrats, tout
comme il semble prêt à le faire pour les salaires.
Toute forme de modification au décret, s'il y a lieu, doit aussi
tenir compte du public consommateur qui est lourdement pénalisé
par des conditions pécuniaires qu'il supporte difficilement, ce qui met
en péril la survie même de plusieurs petites entreprises et
encourage le braconnage, mettant en danger la santé et la
sécurité du public.
Compte tenu de ces considérations, le gouvernement peut
être assuré que les deux corporations, par l'entremise de l'ASECQ,
vont contester toute modification unilatérale du décret qui ne
tient pas compte: a) D'une garantie de paix sur les chantiers dans l'avenir; le
gouvernement a le devoir de faire respecter la loi et il se doit de prendre les
mesures pertinentes; b)D'une augmentation de la productivité des
salariés. Le ministre de l'Industrie et du Commerce a confirmé
les doléances des associations patronales sur les problèmes de
productivité sur les chantiers en évaluant à 30% le
degré de productivité sur les chantiers, spécialement pour
les métiers d'électricien et de plombier; c)De la capacité
de payer du consommateur affectant ainsi la survie de la petite et moyenne
entreprise; d)Des différents secteurs d'activité dans l'industrie
de la construction. Il faut que la distinction soit faite entre la construction
domiciliaire, la construction de routes, le service à domicile et les
travaux du secteur commercial et industriel; e)Du décret où des
taux ont déjà été prévus et qui
prévoit l'augmentation du coût de la vie; f)De la nature
même de l'industrie de la construction alors que plusieurs contrats a
prix ferme sont actuellement en exécution, basés sur des
soumissions calculées sur les taux actuels du décret.
Si ces conditions ne sont pas respectées, nous craignons d'avoir
à nous présenter à nouveau devant la même commission
dans quelques mois pour un problème similaire, puisque rien n'aura
été résolu. Il est important que le gouvernement cesse de
penser à court terme et qu'il envisage des solutions à longue
portée, de telle sorte que les parties puissent discuter en toute bonne
foi.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. Guilbault. M.
le ministre, avez-vous des questions? M. le ministre du Travail.
M. Cournoyer: Non, franchement, je n'ai pas de questions à
ce moment-ci à poser. Je pense qu'il y a beaucoup de choses qui sont
dites là-dedans qui ont dû être dites à la commission
Cliche, particulièrement au début de votre mémoire. Les
reproches que vous nous adressez sont normaux. Assis de l'endroit où
vous êtes et assiss à l'endroit où je suis, ce sont des
sièges différents et cela va continuer comme cela.
M. Guilbault: Je m'excuse, M. le ministre, je vous entends
très mal.
M. Cournoyer: Je dis qu'assis à l'endroit où vous
êtes et assis à l'endroit où je suis, ce sont deux
sièges différents. On peut toujours mettre un blâme assez
certain sur celui qui est responsable des relations de travail au Québec
parce qu'il ne va pas aussi vite que vous croyez qu'il devrait aller, ou qu'il
ne fait pas ce que vous croyez qu'il devrait faire. Vous remarquez cependant
que la confusion règne et c'est difficile, entre les associations
patronales, comme vous l'avez décrit, c'est difficile entre les
syndicats également. C'est au ministre d'essayer de sortir toute la
vérité de six associations patronales et trois associations
syndicales. Cette difficulté-là, je pense bien que c'est à
moi de la vivre, ce n'est pas à vous.
M. Guilbault: M. le ministre, est-ce que vous n'avez pas de
questions précises à me poser? Est-ce que je peux me permettre
certains commentaires?
M. Cournoyer: Sur quoi? Parce que je n'ai pas de questions
à poser?
M. Guilbault: Sur mon texte en particulier, non pas sur vous et
votre rôle. Je ne pense pas que cela réglerait quoi que ce soit,
de toute façon.
M. Cournoyer: C'est-à-dire continuer la
présentation de votre texte? Vous voulez préciser davantage?
Allez-y, je vous en prie.
M. Guilbault: La question est qu'au moment où nous avons
été convoqués à la commission parlementaire, il y
avait quand même beaucoup de tentatives qui avaient été
faites je dis bien des tentatives entre les parties, pour
résoudre quelque chose. Vous savez les démarches qui ont
été faites entre les parties et par votre ministère.
Je peux vous dire que cela fait deux jours que nous sommes assis ici
à écouter les représentations de toutes les parties.
Probablement que les autres parties vont faire le même commentaire
après nous avoir entendus, l'ASECQ, mais je pense que c'est à peu
près la première fois que toutes ces parties tentent de justifier
les raisons de leur position.
Si je vous rappelais qu'au moment où la FTQ construction avait
convoqué toutes les associations patronales, le 30 mai, à
Montréal, pour faire sa demande d'indexation des salaires en
passant, la CSN et la CSD n'étaient pas là, mais elles aussi ont
fait des représentations ce matin le porte-parole de la FTQ
construction, à ce moment-là, pour justifier leurs demandes
d'indexation de salaires au coût de la vie, expliquait cela de la
façon suivante.
Vous allez voir jusqu'à quel point les parties patronales ont
raison de réagir et de dire que ces gens veulent se servirde
leurforcedémesurée. Le
porte-parole a dit ce qui suit cela a été
très court: Ma femme me disait que la crème glacée a
monté du double depuis un an, il faut faire quelque chose. Qu'est-ce que
vous faites? On vous de-mande $0.50 tout de suite, $0.25 le 1er janvier 1975 et
$0.25 le 1er janvier 1976. Cela n'a jamais bougé de là, jamais.
C'était une demande inébranlable qu'on nous présentait
sous forme d'ultimatum. On a bien fait évidemment, selon les
associations patronales, selon le genre et la nature des travaux
effectués par leurs membres des tentatives pour régler le
problème. Vous savez que toutes les associations patronales, un certain
pourcentage, vous êtes bien placés pour le savoir, la FTQ est
à 72% je pense que les membres de la commission en sont
conscients ontdespréoccupations différentes. Vous avez
entendu l'Association des constructeurs d'habitations dont les membres sont des
petites et moyennes entreprises et font affaires dans un secteur bien
particulier. Vous avez entendu la Fédération de la construction
du Québec qui fait affaires surtout dans le reste de la province, et
aussi l'Association de la construction de Montréal, dont les membres
varient de la petite à la moyenne et à la grande entreprise. Ces
gens, selon le mandat qu'ils reçoivent, évidemment,
réagissent différemment. Il se produit que même si une
partie voulait régler un problème, mais avec 23%, 25% ou 26%, on
n'en a pas assez. Et même si on réglait un problème
spécifique, comme le secteur industriel, les raffineries, où tous
les désordres commencent à tout coup, parce qu'il y a des
délégués de chantier où, du côté du
syndicat, les militants sont à peu près les plus actifs, si on
veut régler ce problème, comme association, il faut penser
à nos membres dans la province qui font du service à domicile,
qui travaillent dans la construction domiciliaire, qui font un peu des deux.
C'est peut-être pour ça que, chaque fois qu'on a discuté
des secteurs, il y a eu des difficultés à prendre des
décisions, parce qu'il y a des gens qui oeuvrent dans le domicile, dans
l'industriel, dans le commercial. Puis mettre une ligne, ce n'est pas toujours
facile. J'admets cela.
Par contre, quand on regarde du côté patronal, j'ai
tenté, dans le mémoire, au nom de l'ASECQ, de l'exprimer le plus
honnêtement possible. Cela aurait peut-être été
facile de dire pour l'ASECQ: Les associations patronales s'entendent tout le
temps et tout va sur des roulettes. On a des problèmes. Pas parce qu'on
ne veut pas s'entendre. J'imagine qu'on doit être aussi intelligent que
du côté syndical; les syndicats non plus ne s'entendent pas
toujours. Moi, je me dis: A partir de ce moment, c'est l'objet du
mémoire, s'il se produit un autre conflit dans l'industrie de la
construction, comme sur le chantierolympique qui est un endroit
stratégique, alors qu'on dit qu'aux mois de juin, juillet et août
de l'an dernier, il y avait des problèmes pour les associations,
à notre avis, beaucoup plus graves qu'actuellement, parce que ce n'est
pas le chantier olympique...
On se dit pour le chantier olympique: On est conscient les
associations patronales que, du point de vue politique, du point de vue du
prestige international, il faut faire quelque chose. Mais on est très
conscient aussi qu'en présentant nos mémoires devant cette
commission, on veut rendre ces membres et le lieutenant-gouverneur en conseil,
comme j'ai précisé tout à l'heure, conscients qu'il ne
faut pas sacrifier la province pour un problème qui est quand même
très localisé.
C'est pour cela, à la fin du mémoire, M. le ministre,
qu'on vous dit que s'il se présente un autre conflit où
excusez l'expression les syndicats ou les employés peuvent
prendre les entrepreneurs par... à ce moment, il est impossible, encore
une fois, que les parties puissent s'entendre. Je vous donne un autre exemple.
A la fin du mois d'août 1974, si ma mémoire est bonne,
l'Association de la construction de Montréal a convoqué toutes
les parties représentatives de la construction à une rencontre
à Montréal. Toutes les parties sont venues. Je pense que la CSD
s'est absentée cette fois on me corrigera s'il le faut la
CSN et la FTQ étaient là. Toutes les associations patronales
étaient là. La FTQ a vu sur les lieux des représentants de
la CSN, la FTQ s'est retirée; si la CSN est là, on ne parle pas.
Ce n'est pas facile de parler avec des gens comme cela. Comme ils peuvent vous
dire, de l'autre côté, ce n'est pas facile de parler avec des gens
des associations patronales. Mais on nous arrive toujours avec des ultimatums.
A un moment donné, on se dit: II faut faire quelque chose. On n'a pas en
main la solution pour faire quelque chose.
Vous trouvez peut-être que les parties vous accablent souvent de
tous les maux. Mais, parfois il faut accabler des gens pour que les
problèmes puissent se régler, surtout lorsque consciemment on
sait et je pense que tout le monde le sait que ces
problèmes, on ne peut pas les régler. Il faut pratiquement que
cela vienne toujours au gouvernement qui, en même temps, doit faire la
partie patronale et la partie syndicale afin d'essayer de contenter un peu tout
le monde.
J'admets que, dans les circonstances, c'est difficile. On vous a fait,
à maintes reprises, des déclarations disant que si le
gouvernement, en approuvant un arrêté en conseil, accordait moins
de $1 l'heure, il va avoir des problèmes. La CSD est venue vous le dire.
La CSN est venue vous le dire. La FTQ est venue vous le dire. Je comprends que
cela peut être difficile, pour vous, de donner $0.50 au lieu de $1. Vous
pouvez craindre encore des troubles et votre problème du chantier
olympique ne sera peut-être pas réglé. Peut-être que
ce problème du chantier olympique va s'en aller en province et dans
d'autres chantiers de la région de Montréal. On comprend
cela.
Par contre, on est très conscient qu'on se présente devant
vous, avec tous les pouvoirs qui vous ont été
conférés par la loi 201, pour sauver les meubles. Je pense que je
ne reviendrai pas sur tout l'aspect des questions qui ont été
posées, à savoir si la perte du pouvoir d'achat a
été comblée. Elle n'a pas été
comblée. Je ne pense pas que ce soit le problème, à moins
d'éclairer évidemment les membres de la commission. Chaque partie
est venue s'exprimer sur les différents points en apportant des
statistiques. Sachez, messieurs, que c'est quand même la
première
fois que tous les membres des associations patronales ou syndicales
présentent je ne dis pas mutuellement un document pour
justifier leurs positions.
Quant à ce document, présenté hier par la FTQ
construction justifiant son augmentation de $1.05 mais on va se
contenter de $1, on est bon prince vous savez que c'est la
première fois qu'elle vient justifier sa demande par des statistiques.
Il y a quand même un bout. On demande $1. Cela, je peux vous dire que
cela a été pris en l'air: Tout de suite $0.50, $0.25 et $0.25. Il
y a aussi M. Pepin qui a dit qu'avec les statistiques, c'est connu qu'on peut
se servir de différents critères pour arriver à ce que
l'on veut. Eux, ils sont arrivés à $1.05. Ils auraient pu
arriver, dans d'autres circonstances, possiblement à $0.50. Mais
là, il fallait arriver à $1. Il fallait le justifier parce qu'on
parlait à des gens qui ont des décisions à prendre. Il
faut justifier logiquement les gestes qu'on a posés.
Quand je vous dis qu'on se présente devant vous, M. le ministre
M. le lieutenant-gouverneur en conseil, si je pouvais vous appeler comme
ça pour sauver les meubles, quand je parle, à la toute fin
du mémoire, des différents points qui sont apportés,
à peu près cinq ou six points, dans les différents
secteurs d'activité, la capacité du public de payer, cela a
déjà été traité, il y a des questions qui
ont été posées là-dessus. On a quand même de
nos membres qui sont maîtres électriciens, maîtres
mécaniciens en tuyauterie, qui font du service à domicile.
Evidemment, si ce maître électricien, à cause de la
montée très rapide des salaires, en arrive à facturer
à un client $16 l'heure, qui peut être vous, qui peut même
être le ministre du Travail à sa maison de Dollard-des-Ormeaux,
cela arrive aussi, vous comprendrez que ce n'est pas facile, pour un
salarié, de payer $16 l'heure. La capacité du public à
payer a une certaine limite. On est très conscient que le secteur de la
construction est très important et a énormément
d'influence sur le reste de l'économie.
C'est pour ça qu'un entrepreneur, qui travaille dans la
région de Drummondville, par exemple, où un électricien
gagne $6.74 l'heure dans les manufactures, à Drummondville, il y
a du textile, c'est la 27e ville de la province où les salaires ne sont
pas les plus élevées, mais les plus bas vous comprendrez
que le gars qui travaille à la Canadian Celanese ou à la Dominion
Textile, qui gagne $3.50 et que l'électricien en fait $6.74 dans sa
région, qui a son milieu social dans ce coin et qu'il a sa famille, vous
comprendrez que lorsqu'il y a un entrepreneur ou une association patronale qui
vient vous dire que c'est un gars bien nanti, on sait de quoi on parle. Et
s'ils n'ont pas de problème dans ce coin, c'est parce que ces gars sont
quand même heureux de travailler à $6.74 l'heure plutôt que
de travailler à $3.50 à la Canadian Celanese.
Ce sont des facteurs dont il faut tenir compte. Quand les associations
syndicales viennent vous faire des représentations pour englober tout le
Québec, pour dire que tout le monde est malheureux, tout le monde ne
produit pas parce qu'ils sont malheureux, eh bien, allez demander aux gens des
régions de Gaspésie, d'Abitibi qui, contrairement aux gens qui
travaillent dans l'industrie, gagnent un salaire qui, parfois, se rapproche du
double des autres.
Vous comprendrez qu'à ce moment, souvent, c'est très
difficile de convaincre ces travailleurs de revendiquer, par certains moyens de
pression, une indexation qu'ils pensent avoir eue, surtout quand, au 1er
janvier, pour la plupart, ils ont eu $0.25 l'heure d'augmentation.
M. le ministre du Travail, sachez qu'on n'a pas l'intention, à
l'ASECQ de vous accuser de tous les péchés du monde. On n'a pas
l'intention de demander votre démission, parce qu'on n'est pas capable
de répondre à la question: qui va vous remplacer? Il y avait une
caricature dans la Presse aujourd'hui qui disait: "Le bonhomme, il a encore du
nerf!" Ce sont des choses qu'on considère. Il y a des facteurs humains
qu'on considère. Par contre, le point majeur sur lequel on voulait vous
faire nos revendications je pense que vous en êtes parfaitement
conscient c'est que les parties, qu'arrive n'importe quel conflit,
à cause des différents secteurs dans l'industrie de la
construction, de la taille des entreprises, à cause des pouvoirs
démesurés des syndicats... Peut-être que les entrepreneurs
y ont contribué, c'est possible. La commission Cliche va probablement
nous éclairer sur cette question. On attend beaucoup de la commission
Cliche. On essaie quand même de vous faire comprendre on sait que
vous le savez, mais on veut l'exposer publiquement qu'on ne s'entendra
jamais. Quand on dit que le gouvernement est toujours arrivé avec des
solutions à court terme, c'est parce que les problèmes à
régler devaient être vite réglés. Nous autres, on
dit: Essayons de nous pencher pour notre part, on est prêt
à collaborer dans toute la mesure du possible pour trouver un
système. Autrement, on va revenir encore une fois et le ministre du
Travail sera encore dans l'eau chaude et dira: Faites de moi un martyr. On ne
veut pas cela.
M. Cournoyer: On ne peut demander cela.
M. Guilbault: II en a déjà assez comme cela. C'est
dans ce sens, M. le ministre, qu'on est intervenu.
Le Président (M. Séguin): Le ministre du
Travail.
M. Cournoyer: Suite aux explications complémentaires que
vous avez eu l'amabilité d'ajouter à votre mémoire, vous
me dites, dan s des termes différents de ceux que M. Pepin a
utilisés ce matin, et que M. Daoust a utilisés, que M.
Dalpé a utilisés aussi peut-être d'une façon
plus calme, plus sereine pour M. Dalpé que les syndicats ont dit
ce matin: On ne se contentera jamais de moins de $0.75.
J'ai entendu cela et je ne l'ai ni pris, ni laissé. Je
considère que les remarques ont été faites
sérieusement. J'imagine que c'est à cause de la crainte qu'ils
ont, probablement, de la réaction de ceux qui ont maintenant $0.75, qui
ne l'auraient plus par une décision ministérielle, si elle disait
zéro, par exemple. D'après ce que je dois suivre, je devrais dire
zéro, dans certains cas, parce que tout a été
prévu. Je lis maintenant votre remarque, à la fin. Vous me dites,
vous, comme représentant de l'ASECQ: Compte tenu de ces
considéra-
tions, le gouvernement peut être assuré que les deux
corporations, par l'entremise de l'ASECQ, vont contester toute modification
unilatérale du décret qui ne tienne pas compte,
premièrement, d'une garantie de paix sur les chantiers de construction
dans l'avenir. Le gouvernement a le devoir de faire respecter la loi et il doit
prendre les mesures pertinentes.
Depuis longtemps, les entrepreneurs se sont plaints d'activités
illégales de certains délégués de chantiers et de
certains agents d'affaires sur les chantiers de construction. Cela n'a pas
commencé l'année dernière, ces activités de type
illégal. Cela fait longtemps que cela traîne. Avant, les
employeurs avaient de la difficulté à poursuivre pour des gestes
illégaux. Ils ne poursuivaient presque jamais pour des gestes
illégaux. On se souviendra de certains incidents qui s'étaient
produits à Montréal, vers 1960, ou 1958 ou 1959, au coin des rues
Guy et Dorchester, sur l'édifice de la Canadian Westinghouse, si je me
souviens bien. Les actions prises, les appels entrepris par la partie
syndicale, etc., ont fait qu'à un certain moment, compte tenu des
circonstances, les employeurs laissaient tomber les actions entreprises. Je
pense bien que l'histoire démontre cela. Les employeurs avaient une
certaine faiblesse face à la partie syndicale. Peut-être pas face
à la partie syndicale, mais face à des gestes posés sur
les chantiers de construction.
Avec le bill 15, nous avons dit: C'est le procureur
général qui va prendre les actions maintenant. Vous n'avez
qu'à vous plaindre au procureur général.
Nous n'avons pas, cependant, changé les procédures
ordinaires devant les tribunaux selon lesquelles, pour condamner quelqu'un, il
faille faire la preuve d'un acte criminel ou encore d'un acte
répréhensible en vertu de la loi. Ce n'est pas changé.
Mais j'imagine que vous ne souhaitez pas que nous changions ce
système strictement lorsqu'il s'agit du domaine des relations
patronales-syndicales, mais qu'il faudrait peut-être repenser le
système en général et dire: Maintenant, on pourra
condamner et, après cela, le gars se défendra. Si c'est cela, il
y a plusieurs personnes qui seront condamnées et nos prisons ne seront
jamais assez grandes, et cela ne sera pas toujours pour des activités
syndicales.
Ce que je voulais dire, principalement, c'est ceci: Même si,
à bien des reprises, les entreprises se sont plaintes à mes
bureaux, il n'y a pas beaucoup de gens qui étaient capables d'aller
jusqu'au bout de la preuve qui aurait été susceptible
d'être maintenue devant un tribunal ordinaire, au Québec et au
Canada.
C'est probablement la seule raison, je vous en prie, qui a fait que le
ministre de la Justice et le ministère de la Justice n'ont pas pris
toutes les actions pour toutes les plaintes qui ont été
portées à leur attention, et Dieu sait qu'il y en a.
Le représentant de l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations disait 600. Si je prends les autres associations qui ont d'autres
contrôles, on va peut-être découvrir qu'il y a des milliers
de plaintes qui ont été portées au ministère de la
Justice. Je n'ai pas à défendre le ministre de la Justice ici. Je
n'ai qu'à dire qu'il n'est pas plus facile pour le ministre de la
Justice de faire une preuve qu'il était facile pour un employeur d'en
faire une avant ou, pour un syndicat, d'en faire une avant.
Faire respecter la loi, c'est une chose, mais la faire respecter
comporte qu'on utilise, sans autres ambages, le système de respect des
lois que nous avons. Jusqu'ici, je pense bien que depuis le bill 15 le ministre
de la Justice prend les actions qu'il peut prendre avec les preuves qu'on lui
met dans les mains. C'est ce point que je voulais commenter en particulier.
M. Guilbault: M. le ministre, vous avez attaqué,
évidemment, le problème du point de vue juridique. Je pense que,
dans ce que vous avez dit, vous avez quand même parfaitement raison, en
mentionnant, par exemple, que les poursuites judiciaires prennent beaucoup de
temps et que les entrepreneurs, souvent, négligent de poursuivre parce
que cela prend du temps.
M. Cournoyer: Ils n'ont pas de possibilités.
M. Guilbault: Leurs problèmes, pendant ce temps,
continuent d'exister. Nous, nous ne voulons pas être dans les nuages.
Pour nous, ce qu'il y a à changer, ce sont les structures de
façon à modifier l'attitude des parties.
Je pense que c'est plus fondamental que de faire du légalisme et
on croit à cela, parce qu'on dit: Lorsqu'on peut se parler, on
connaît les problèmes qui existent. On pense qu'on pourrait
amenuiser énormément les conflits s'il y avait possibilité
de se parler.
On parle, par exemple, d'imposer la loi. Dans le contexte actuel, avec
les problèmes que les gens ont, avec les délégués
de chantier, sur certains chantiers, qui sont très actifs, qui incitent
les gens à ne pas produire, il est bien certain que ces gens se tournent
vers l'appareil judiciaire. Je suis d'accord. C'est peut-être pour cela
qu'il y a tellement de poursuites. Si le système était
changé ou si on pouvait se parler...
M. Cournoyer: Je ne blâme pas... Remarquez bien.
Premièrement, vous avez dit qu'il faut faire respecter la loi. Je dis:
Voici le contexte dans lequel on se trouve pour faire respecter la loi,
à moins qu'on ne change et que cela ne soit plus les tribunaux qui
fassent respecter la loi ou qu'on n'ait plus à se présenter
devant les tribunaux pour faire respecter la loi. C'est une
difficulté.
Sur le deuxième point, vous avez parlé d'une augmentation
de la productivité des salariés. Donc, avant que je puisse
décider, il faudrait que j'aie la garantie qu'il y a une augmentation de
la productivité des salariés. Ce matin, M. Pepin a fait une
suggestion. Il l'a faite, bien sûr, au ministre parce qu'il parlait au
ministre, mais en définitive je crois qu'il s'adressait d'abord aux
parties patronales et syndicales, ses collègues et amis, sur cette
étude conjointe des vraies causes de la diminution de la
productivité sur les chantiers de construction. C'est une suggestion qui
est faite. Le ministre peut décréter qu'il y aura un "task
force", comme M. Pepin disait ce matin. Mais cela vous sourit-il comme
possibilité? Le dialogue pourrait peut-être commencer en regardant
quelles sont les causes profondes de la diminution de productivité sur
les chantiers de construction pour tenter, dans la mesure où le
décret en serait une cause, d'en modifier les termes.
M. Guilbault: Une chose est certaine, M. le
ministre. La loi 201 vous donne le pouvoir d'amender le décret.
Tous les problèmes ne sont pas seulement dans le décret. On est
bien conscient que les taux de salaires sont dans le décret, par
exemple, mais on est bien conscient aussi que, quant à la
productivité, vous pouvez mettre à peu près n'importe quoi
dans le décret pour dire que le gars va faire une journée
normale; s'il ne veut pas la faire, il ne la fera pas.
C'est bien certain que la suggestion de M. Pepin, si elle permettait aux
parties d'établir certains mécanismes... Parce que vous avez
quand même remarqué que, pour établir les pourcentages de
productivité dans la construction, ce n'est quand même pas aussi
technique et facile que cela peut l'être dans l'entreprise
manufacturière où souvent la production va être
routinière, répétitive, assez simplement.
Par contre, il s'établit souvent, pour chacun des entrepreneurs,
des normes de productivité et ces entrepreneurs, au cours des mois, au
cours des années, s'aperçoivent que, pour le même genre de
travail qu'ils faisaient il y a un an, deux ans, dans leur estimation,
ça prend beaucoup plus d'heures de travail. Ils se posent des questions
et, quand ils se posent des questions, ils viennent nous dire: La
productivité sur les chantiers a baissé. Quand il y en a un qui
nous le dit, peut-être qu'il administre mal son affaire, c'est possible.
Mais quand un paquet d'entrepreneurs viennent nous dire: Cela n'a plus
d'allure; moi, il y a deux ans, cela me coûtait tant pour faire tel genre
de choses et aujourd'hui, il m'en coûte tant parce que ça me prend
plus d'heures de travail entre autres facteurs; je ne voudrais pas que vous
m'arriviez encore avec les matériaux, je vais vous dire oui, cela peut
être un des facteurs. A ce moment-là, le gars se pose des
questions et se poser la question, à savoir pourquoi cela arrive, nous
sommes bien intéressés à avoir les réponses. Si les
parties veulent discuter, nous sommes bien d'accord. Parce que nous nous disons
que, dans le fond, c'est l'attitude, premièrement, qu'il faut changer;
deuxièmement, le problème de la compétence a
été touché, et je pense que c'est un facteur très
important.
Je pense que c'est le représentant de l'ACM qui disait que le
comité Dion... On a siégé là-dessus à
maintes reprises, la dernière fois qu'on a siégé, c'est le
28 mai; on n'en a jamais entendu parler; on a hâte que ces choses se
passent de façon que les gens soient vraiment formés pour
l'industrie de la construction.
M. Cournoyer: Moi aussi. Je suis d'accord avec vous.
M. Guilbault: Aujourd'hui, un apprenti arrive dans l'industrie de
la construction et il n'a aucun critère. C'est peut-être une des
causes de la diminution de productivité. On veut que des choses soient
faites là-dessus et non pas qu'il y ait un laisser-aller total et c'est
"au plus fort la poche" qui l'emporte. Ce n'est pas normal, il faut qu'il y ait
un climat de concurrence saine et aujourd'hui il n'existe plus parce que les
entrepreneurs, dans la situation actuelle, ceux qui se sont fait prendre pour
les $0.50, ils se sont dit: Peut-être que si je me fais prendre encore
pour les $0.25...Ils ont de la difficulté à soumissionner selon
des bases sta- bles. Les membres de la commission posaient des questions, hier
et aujourd'hui, pour savoir si certains entrepreneurs ont pu augmenter leurs
soumissions; c'est sûr que cela existe, ce ne sont pas des fous. Mais,
par contre, c'est possible que cet entrepreneur, s'il avait vécu dans un
climat plus sain, aurait peut-être été celui qui aurait
décroché le contrat. Parce qu'il y en a un qui se pensait plus
sûr que l'autre et a coté selon des prix stables; l'autre,
normalement, il l'aurait fait, mais il est inquiet. Cela bouleverse
pratiquement toutes les règles du jeu; c'est malheureux et, si c'est un
laisser-aller, c'est certain qu'on va se revoir encore. Ce n'est pas parce que
cela ne nous fait pas plaisir de vous rencontrer, mais en d'autres
circonstances.
M. Cournoyer: Ce n'est pas parce que ça ne me fait pas
plaisir de vous voir, mais je n'aime quand même pas cela. Il y a toujours
des conflits quand je vous vois. Il faudrait que vous m'invitiez à un de
vos "parties" de temps à autre, je pourrais vous voir dans d'autres
domaines que ceux des conflits.
La capacité de payer du consommateur affectant ainsi la survie
des petites et moyennes entreprises, quand vous parlez des petites et des
moyennes entreprises, vous parlez du consommateur de vos services.
M. Guilbault: Je m'excuse, je n'ai pas compris la question.
M. Cournoyer: Dans votre paragraphe c), vous parlez de la
capacité de payer du consommateur affectant ainsi la survie des petites
et moyennes entreprises. Parlez-vous ici des petites et moyennes entreprises
consommatrices de vos services ou...
M. Guilbault: Non, non.
M. Cournoyer:... s'il s'agit des petites et moyennes entreprises
de mécanique, par exemple, ou d'électricité?
M. Guilbault: Oui, oui.
M. Cournoyer: C'est de celles-là.
M. Guilbault: C'est sûr. Parce qu'elles font affaires, la
plupart du temps, avec le particulier, le public consommateur, qu'on appelle.
Ces gens ont une capacité de payer, à un moment donné, qui
peut réduire certains besoins au minimum et qui fait
qu'évidemment, si les contrats sont moindres, l'entreprise est
assurément en danger.
M. Cournoyer: Oui, mais dans...
M. Guilbault: Moins il y a d'argent, moins il y a de
demandes.
M. Cournoyer: Dans ce cas particulier, la capacité de
payer serait changée selon les régions de la province de
Québec.
M. Guilbault: Cela peut-être un facteur. C'est bien
sûr qu'en Gaspésie, ils n'ont pas la même capacité de
payer qu'à Montréal.
M. Cournoyer: C'est surtout dans le service que vous avez des
problèmes.
M. Guilbault: II y a dans le service. Il y a ceux qui oeuvrent
dans le domaine domiciliaire et ceux qui... Ce sont surtout ces deux services.
Ceux qui font du service et de la construction domiciliaire, un peu de
commercial.
M. Cournoyer: Si on va dans le service pour quelques secondes, le
décret est dans l'industrie de la construction d'une façon
générale. Donc, à peu près tout le monde a
l'impression qu'il s'agit de la construction d'un carré de maison et du
filage de cela, de la plomberie. Le monde s'imagine que c'est de cela qu'il
s'agit. Le service, en définitive. Quelles sont donc les
difficultés qu'on a voulu régler en disant que le service d'un
maître électricien ou d'un électricien proprement dit
devait être assujetti au décret de la construction?
M. Guilbault: J'ai très mal compris votre question, je
dois vous l'avouer. Vous dites: Quels sont les services...
M. Cournoyer: II y a tellement de différences entre le
service, c'est-à-dire la réparation du robinet dont parle M.
Picard, la réparation d'un appareil électrique.
M. Picard:... pour changer un "washer" de $0.25 environ.
M. Cournoyer: Oui.
M. Guilbault: C'est le genre de service dont vous parlez?
M. Cournoyer: Ils disent cela, justement. Ce service en
particulier. Pourquoi le service fait-il partie du décret de la
construction?
M. Guilbault: II peut y avoir bien des causes.
Premièrement, je constate qu'il est là. A partir de ce moment,
vous me dites: Quelles sont les causes?
M. Cournoyer: Non, je dis: Pourquoi?
M. Guilbault: II se produit quand même que les gens, les
employés, les salariés qui travaillent dans ce secteur vont
c'est là où je vous parlais tout à l'heure de zones
grises aussi travailler dans le secteur commercial, par exemple, ou cela
peut être des compagnies qui font appel à des entreprises pour
faire du filage. Il est bien certain que c'est là qu'est tout le
problème qu'on vous soulignait tout à l'heure. Il est bien
certain que l'employé qui va faire du service, qui va travailler aussi
dans le commercial, c'est probablement une des raisons pour lesquelles on l'a
mis là. On n'a pas été capable de tirer la ligne. Je
n'étais pas là, mais je présume que cela peut être
cela. Cela pourrait être une bonne raison, mais cela peut être une
bonne raison de problèmes aussi.
M. Cournoyer: Pourriez-vous expliquer à M. Picard pourquoi
cela coûte $16 pour changer un robinet?
Est-ce que vous pourriez expliquer les raisons fondamentales qui font
que cela coûte $16 pour changer un robinet.
M. Guilbault: Supposons qu'on est à Montréal. Cela
coûte $6.74 l'heure un électricien ou un maître
mécanicien en tuyauterie ou un plombier.
M. Cournoyer: C'est le même prix. M. Picard: Un
plombier. M. Guilbault: C'est la même affaire. M. Picard:
Un petit "washer" à $0.25.
M. Guilbault: $6.74 l'heure. Il y a aussi pour l'entrepreneur
$0.45 l'heure qui va dans...
M. Cournoyer: Le fonds de retraite.
M. Guilbault: ... le fonds de retraite. Il y a la Commission des
accidents du travail qui coûte $4.50 les $100 payé que
l'entrepreneur doit absorber. Il y a les vacances, 10% maintenant il
faut que je m'adapte depuis le 1 er janvier, du taux de base, et la
Commission de l'industrie de la construction, 1/2% du taux de base plus les
vacances. Il y a l'assurance-chômage que l'entrepreneur doit payer, le
Régime des rentes, le fonds d'indemnisation. Enfin, il y a aussi
l'administration, ce qu'on appelle l"overhead".
M. Cournoyer: Et le profit.
M. Guilbault: II y a le profit, il y a le voyage. Ce qui fait
qu'à un moment donné, si ma mémoire est bonne, les
coûts fixes je peux parler ainsi que l'entrepreneur doit
absolument défrayer pour ne pas perdre $0.01, et si j'exclus son
"overhead", son administration et si j'exclus son profit, c'est quelque chose
comme $8.75. Autrement dit, un entrepreneur qui facturerait son client plus bas
que $8.75 perdrait de l'argent. Dans cela, son administration, son estimateur,
ses bureaux, son loyer, les amendes qu'il doit payer, enfin, tout ce qu'on
appelle T'overhead", ce n'est pas compté. Son profit n'est pas
compté. Ce qui fait qu'actuellement un maître mécanicien en
tuyauterie qui va aller faire du travail chez vous va vous demander à
peu près $13.25 l'heure. C'est de là que cela vient, et cela
inclut à peu près un profit de 10%.
M. Cournoyer: L'heure dont il est question commence à
compter au départ de la boutique, aller retour.
M. Guilbault: Oui, parce que l'entrepreneur paye les huit heures
de salaire.
M. Cournoyer: C'est ça. En fait, je sais que c'est cher,
mais le changement de robinet comporte qu'un type est parti d'une boutique, il
est retourné à la boutique...
M. Guilbault: C'est ça.
M. Cournoyer: Est-ce que le mécanicien en tuyauterie ne
doit pas être là avec un apprenti aussi?
M. Guilbault: Ce n'est pas nécessaire. M. Cournoyer:
Pas nécessaire.
M. Guilbault: Cela coûte plus cher s'il y en a un qui y va
et souvent la partie syndicale va exiger que le compagnon ait son apprenti mais
c'est une autre paire de manches.
M. Cournoyer: Parfois, les délégués de
chantier ne sont pas toujours là.
On voit donc que les coûts, juste pour le service, en soi,
comportent plusieurs facteurs en plus du facteur salaire. Le simple fait de
payer le salaire à partir d'une boutique jusqu'à ce qu'il soit de
retour à la boutique, parce que l'entrepreneur l'emploie sur une base de
huit heures et qu'il met le "traveling time" à l'intérieur, peut
faire que ça coûte $13 et $16 pour changer un robinet.
M. Guilbault: Actuellement, je vous dis que c'est pour une heure
de travail.
M. Cournoyer: Oui, mais s'il fait plus long de travail parce
qu'il y a plus de choses à faire que de changer seulement un robinet, on
répartit les coûts généraux dans une
journée.
M. Guilbault: Cela coûte $13.35 l'heure suivant la
longueur.
M. Cournoyer: Pour expliquer encore ça et pour ne pas vous
placer dans une mauvaise situation, quand il vient, si le client ne lui a pas
dit ce qu'était la défectuosité, s'il trouve que c'est un
robinet qui est défectueux et que cette sorte de robinet n'est pas dans
son coffre à outils, il est obligé de retourner à la
boutique pour chercher ce qu'il faut.
M. Guilbault: Ce serait logique.
M. Cournoyer: II va chercher ce qu'il lui faut, ça fait
deux voyages payés dans la même journée pour le même
"désespoir" de robinet.
M. Guilbault: Ce serait logique que ça se fasse comme
ça.
M. Cournoyer: Normalement. Cela arrive
régulièrement, à moins que l'entrepreneur soit celui qui a
construit la maison et qu'il sait parfaitement de quoi il s'agit, que ce soit
du standard, il n'y a pas de problème de transport. Mais ça
augmente le coût de votre changement de robinet. Il ne change pas son
robinet ou il le change tout seul. Il fait comme moi.
M. Roy: S'il demeure dans deux localités où il n'y
a pas personne, autrement dit, qualifié selon les règles pour le
faire, qu'est-ce qui arrive?
M. Cournoyer: II le chanqe tout seul.
M. Roy: Cela peut coûter jusqu'à $50 pour
réparer un robinet dans des régions rurales.
M. Cournoyer: II fait venir le gars de Montréal et
téléphone au délégué de chantier et dit:
Envoie-m'en un.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre s'il vous
plaît, il ne faudrait pas toujours parler de robinet, il doit y avoir
autre chose.
M. Cournoyer: En définitive, on parle de robinet, on parle
de choses aussi précises que cela quant il s'agit de
productivité. J'ai fait une distinction entre le service et la
construction, il y a un certain coût dans les services et, à cause
de la nature du service qui est rendu, ça fait que cela a l'air bien
cher pour le service. Mais, par ailleurs, si vous avez une période de
construction plus longue, un certain nombre de vos coûts sont
répartis sur un plus grand montant d'argent, donc, sur une occupation
plus sérieuse. Est-ce que vous verriez d'un bon oeil qu'il y ait
distinction entre le service et la construction en matière
d'électricité et de plomberie?
M. Guilbault: Ecoutez, la question que vous me posez, vous savez
que vous l'avez déjà posée bien avant aujourd'hui,
hein?
M. Cournoyer: Oui, souvent.
M. Guilbault: II est certain que cela pourrait être l'objet
d'une étude, il y en a déjà qui ont été
faites. Mais on dit que cela cause un problème. Et si à un
problème on essaie de trouver une cause et à une cause, on essaie
de trouver une solution... Si vous me demandez, rapidement, si je verrais
ça d'un bon oeil, même si je vous répondais n'importe quoi,
vous allez me dire après: On va partir maintenant avec le commercial.
Est-ce que vous verrez d'un bon oeil que le commercial soit
séparé de l'industriel? Encore une fois, il faudrait que je fasse
une nuance.
M. Cournoyer: J'arrivais là, c'est parce que j'arrive
à d). Je voulais me préparer à arriver à d).
M. Guilbault: Une fois que je l'ai vu, oui. Vous ne l'avez pas
appris par coeur, pas les lettres en tout cas.
M. Cournoyer: A cause de l'uniformisation des conditions de
travail, des choses qui semblent coûter trop cher pour ce qu'elles valent
et des choses qui ne semblent pas coûter assez cher pour ce qu'elles
valent, d'après les conflits que nous avons.
Il serait onéreux et difficile de faire une distinction entre le
service et la construction, étant donné qu'il s'agit
d'employés de la même entreprise. Donc, il ne faudrait
peut-être pas s'en aller trop vite dans ce sens-là et faire une
distinction entre le service et la construction. C'est probablement pourquoi
les gens n'ont pas fait la distinction entre le service et la construction,
dans le passé.
J'arrive maintenant au paragraphe d). Là on dit qu'il faut tenir
compte des différents secteurs d'activité dans l'industrie de la
construction. Il faut que la distinction soit faite entre la construction
domiciliaire, la construction
de routes, le service à domicile et les travaux du secteur
commercial et industriel.
Je ne me pose pas une très grande question, mais, très
souvent, depuis le début de ces auditions et même avant, il nous
est arrivé de songer à une différence entre le
domiciliaire, les routes, très certainement, par rapport aux autres
corps d'activité, et le service à domicile dont vous venez de
parler et dont je viens de vous entretenir, les travaux du secteur commercial
et industriel. Par quel procédé pourrais-je dire qu'un
employé qui travaille sur le résidentiel ou le domiciliaire est
différent d'un employé qui travaille sur l'industriel et le
commercial?
M. Guilbault: Ils peuvent être multiples, mais cela peut
amener des causes de désaccord, justement à cause des zones
grises dont je vous ai fait mention tout à l'heure. Je vous ai dit il y
a quelques minutes que ce n'est pas la première fois que la question est
posée, mais nous, on pense que c'est un élément de
solution, parce que, quand on parle de la construction domiciliaire, on parle
du public consommateur, du particulier qui achète une maison.
Si on parle de distinction, c'est sûr qu'on vous envoie cela comme
cela, on sait que ce n'est pas une solution facile, mais nous sommes conscients
que c'est une tribune et on veut expliquer des problèmes.
Je constate. Mais on se dit qu'étant donné que, dans le
service à domicile, par exemple, quand un entrepreneur va faire une
réparation chez un client, chez un particulier, sa capacité de
payer peut, à un moment donné, dans les métiers
régis par des lois des deux corporations, mettre la santé et la
sécurité du public en danger, cela a été
mentionné tout à l'heure dans le mémoire.
Si on parle de la construction de routes, les
représentants vont venir vous exposer leur point de vue tout à
l'heure vous savez fort bien que c'est un secteur tout à fait
particulier, comparé par exemple au commercial et à l'industriel.
La construction domiciliaire je pense que le représentant de
l'association tout à l'heure a parlé d'un secteur lui aussi
c'est sûr que, dans votre esprit, il peut être difficile de
faire la distinction entre ce qu'est le secteur et ce que n'est pas le secteur,
comme il est quelquefois difficile de faire la distinction entre ce qui est de
la construction et ce qui n'en est pas.
Comme vous pouvez rencontrer des difficultés, si vous
procédez par législation, parce qu'il faut changer des choses au
point de vue du salaire on est conscient de cela c'est bien
certain que les associations syndicales vont dire: Si le gars travaille dans le
domiciliaire, il va avoir le même salaire que celui qui travaille dans le
secteur industriel. On est conscient de ces problèmes. On est conscient
que, par exemple, il faut en parler. Il faut parler de cela. Quand on parlait
de créer des mécanismes où les parties peuvent se
rencontrer et se parler, c'est de cela qu'on voudrait leur parler. Ces
gens-là, lorsqu'on leur parle, sont conscients de ces problèmes.
Ils sont fort conscients que le gars qui travaille dans le commercial ou dans
le résidentiel ne va à peu près jamais travailler dans
l'industriel. Même s'il est électricien ou plombier, il ne va
jamais travailler dans l'industriel. Après cela, on nous dit qu'il y a
de la main-d'oeuvre disponible. Il y a de la main-d'oeuvre disponible, mais le
gars n'est pas capa- ble d'aller travailler dans le résidentiel. Il a
travaillé toute sa vie dans l'industriel; c'est un problème et
les gens en sont conscients.
Ce sont des choses dont il faut discuter. Il est bien certain, comme je
vous l'ai dit, par votre loi 201, que vous ne pouvez pas changer tout cela.
Mais, par exemple, on vous dit: Pensez à cela et arrangez donc
cela pour qu'on puisse se parler. Vous avez souvent essayé, d'accord,
mais peut-être pas à l'intérieur des cadres dans lesquels
on aurait dû se parler. On se dit: II faut parler de cela, c'est
important. Peut-être qu'on viendra à trouver une solution, comme
peut-être, actuellement, vous avez pensé à des solutions
découlant des pouvoirs qui vous sont conférés par la loi
201. On ne les connaît pas, mais je suppose que vous allez faire quelque
chose. Mais nous, nous vous faisons part des points sur lesquels on pense qu'il
y a des problèmes.
M. Cournoyer: Je suis totalement d'accord sur votre
présentation. Il n'y a pas de problème là-dessus. En
définitive, ce sont tous les problèmes de l'industrie de la
construction qu'on pourrait résumer dans ce genre de questions à
poser. Il n'y a pas d'antagonisme, de ma part, à vous poser ces
questions. Mais je vous les pose comme des problèmes que j'aurais, moi,
ou que l'industrie doit avoir immédiatement après. Qu'est-ce que
c'est la construction de routes? Tout le monde sait cela. C'est une route et
c'est identifié. Mais, dès que tu entres dans le domaine de
l'électricité ou de la plomberie ou de la construction tout
simplement de choses qui sont pour l'abri des personnes, que ce soit un
édifice à bureaux, que ce soit une maison de 35 étages
à logements, ou une maison tout simplement unifamiliale ou
multifamiliale, les problèmes peuvent être totalement
différents.
Est-ce qu'il s'agit, cependant, tout le temps, du seul taux de salaire?
On peut se poser la question, au moment où l'on se parle. On peut parler
de productivité, encore là. Dans le décret, l'examen dont
M. Pepin parlait ce matin, il y a peut-être des dispositions qui sont
facilement applicables et originairement applicables à certains genres
de constructions et qui sont transportées dans d'autres genres de
constructions où ils n'ont pas d'affaire à être là
du tout.
Par exemple, on peut parler des "Johnny-on-the-spot". Il n'y a pas de
plomberie là-dedans, mais quand, par exemple, un entrepreneur construit
des lignes de transport d'énergie électrique et que ces lignes
sont réparties sur 135 milles de long, puis qu'il est obligé
d'avoir un "Johnny-on-the-spot" à chacun des endroits de travail, puis
qu'il n'y a pas un "moses" de gars qui va dedans, parce qu'ils sont en plein
champ, il y a toujours des limites. On l'a forcé, cependant cela
a été interprété par les parties après
à avoir un "Johnny-on-the-spot" sous chaque tour en construction.
Pourquoi? Parce qu'il était déterminé que, sur un chantier
de construction, il devait y avoir des endroits pour aller aux toilettes. Mais
imaginez-vous donc, sur une ligne de 135 milles de long, combien cela prend de
toilettes en été?
Je me souviens, dans le temps, qu'on pensait à un édifice
situé sur la rue Sainte-Catherine à Montréal où le
type était dans la rue, puis n'était pas capable de faire ses
besoins là où il voulait. Mais on a transporté ce concept
sur tous les chantiers de construction, parce
qu'on a un seul décret et que les conditions de travail de ce
décret sont applicables sur tous les chantiers de construction."
Il y a des choses que les constructeurs domiciliaires ont certainement
à l'idée, pour améliorer davantage le statut de leurs
employés, des choses de même nature du côté des
constructeurs de routes et du côté des constructeurs de ligne de
transport d'énergie électrique. Actuellement, parce que ces
choses sont discutées sur une base uniforme et universelle par toutes
les associations patronales en même temps, qui ont, ce que vous avez
décrit comme des obligations différentes, des capacités
différentes. On se retrouve dans une situation où un certain
nombre de situations auraient pu facilement être réglées
par les premiers intéressés. Mais, à cause du fait
qu'elles ont un effet d'entraînement direct sur des gens qui ne sont
absolument pas intéressés, on ne donne pas à certains
travailleurs ce à quoi ils auraient légitimement droit dans cet
endroit et que l'employeur est prêt à donner, mais que dans cet
endroit, c'est impossible de le donner.
L'uniformisation des conditions de travail à travers la province
a fait qu'aujourd'hui nous avons un certain nombre de problèmes. Je
disserte peut-être, mais il faudrait que vous vous rappeliez que
j'étudie de temps en temps, moi aussi, et que je lis le décret,
moi aussi. Je vois les imperfections qu'il y a dans le décret. Je vois
les difficultés d'application de ce décret, mais je vois surtout
les énormes difficultés à le négocier.
Bien sûr, j'ai des pouvoirs assez exorbitants dans la loi 201. Je
n'ai pas le pouvoir de changer, cependant, les comportements des gens. Cela, je
ne peux pas le faire.
Les concurrences entre centrales syndicales et les concurrences entre
associations patronales; c'est dans le domaine concurrentiel que nous sommes.
Tant et aussi longtemps qu'on sera dans le domaine concurrentiel, ceux qui vont
être les plus beaux vont avoir plus de membres. S'ils sont très
beaux, très fins, très sages et qu'ils mènent l'industrie
de la construction comme il faut, au dire de la population, ces gens doivent
être là pour les régler. Je ne m'opposerai pas à
cela du tout.
Mais le comportement des gens, par exemple, à un moment
donné, fait qu'on se dit: II ne faudrait pas qu'ils empêchent
l'intérêt public d'avoir préséance aussi une fois de
temps en temps. Là-dessus, c'est l'intention du bill no 201.
J'espère que c'est la dernière fois que j'aurai
l'obligation de me servir du bill no 201. Les études faites par la
commission Cliche actuellement, en dehors de l'enquête publique, vont
certainement, compte tenu des mémoires assez importants et volumineux
qui ont été présentés au début des auditions
de la commission Cliche, faire que la commission Cliche va, à la suite
des représentations de tout le monde, recommander, j'espère,
à toutes les parties, en plus du gouvernement, les modifications qui
s'imposent. Je l'espère, sur tous les sujets dont vous avez
parlé.
Mais vous me dites au début de ce paragraphe que les membres de
l'ASECQ, ou l'ASECQ, vont contester toute modification unilatérale du
décret qui ne tienne pas compte des différents secteurs
d'activité dans l'industrie de la construction; il faut que la
distinction soit faite entre la construction domiciliaire, la construction de
routes, le service à domicile et les travaux des sec- teurs commercial
et industriel. J'espère que vous n'aurez pas le même ton que vous
avez prêté à M. Pepin, ce matin, qui vous a dit qu'il ne se
contenterait pas d'autre chose que $0.75.
M. Guilbault: Je vais vous dire une chose. J'ai affirmé
tout à l'heure que par la loi 201 vous avez le pouvoir de modifier le
décret et non la loi. J'ai dit aussi par ce mémoire, comme la loi
201 le dit, qu'il fallait exposer devant la commission parlementaire les
raisons pour lesquelles les parties ne se sont pas entendues; c'est ce à
quoi nous nous sommes employés.
M. Cournoyer: C'est bien.
M. Guilbault: On est très conscient que, lorsque l'on
parle des secteurs, cela déborde le décret comme tel. Cela prend
autre chose. Cela prend des prérequis. Et vous avez souligné, et
je les ai soulignés aussi, les problèmes, les zones grises qui
peuvent exister entre ces différents secteurs. Par contre,
peut-être auriez-vous préféré que je dise:
Peut-être allons-nous contester? Je ne voudrais pas en faire une question
de sémantique. Mais je voudrais juste vous dire qu'on est tellement
conscients que ce sont des problèmes qui existent et on veut
qu'ils soient discutés que si une autre tribune nous est
prêtée et si d'autres moyens sont nécessaires,
dépendant de l'espèce de climat d'inquiétude qui existe
chez les entrepreneurs, on va aviser. C'est certain qu'il y a des pressions qui
vont être faites. Mais il ne s'agit pas dans le texte comme je le
dis, je ne veux pas faire de sémantique de menaces. Il s'agit de
mettre un peu d'insistance pour expliquer que ce sont des points
importants.
M. Cournoyer: Je vous remercie.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Burns: J'ai seulement une question, M. Guilbault. Parmi vos
membres, est-ce qu'il y en a qui déjà, à votre
connaissance, ont accordé les $0.50 l'heure ou encore les $0.75
l'heure?
M. Guilbault: Evidemment, je vous ai expliqué tout
à l'heure que l'ASECQ, qui est formée des deux corporations, a
des membres de la petite, de la moyenne et de la grosse entreprise,
c'est-à-dire dans le secteur industriel. Je pense que, par les journaux,
il est à peu près connu de tous que, du côté de la
FTQ construction, les locaux les plus actifs et les mieux structurés,
qui se sont subdivisés en locaux et coiffés par le Conseil
provincial des métiers, ce sont les locaux des électriciens et
plombiers.
Alors, quand la bataille de l'indexation comme on se plaît
à l'appeler aujourd'hui a débuté, une
guérilla s'est déclarée sur les chantiers. Dans un groupe
d'entrepreneurs, on choisissait un entrepreneur qui avait parce que les
gens connaissent les besoins des entrepreneurs besoin de main-d'oeuvre,
ou qui avait à finir un contrat le mois suivant. On provoquait, par
l'entremise des délégués de chantier, des ralentis-
sements de travail, dans certains cas, du sabotage. Si cette compagnie
faisait appel au bureau de placement syndical, à ce moment-là il
y avait refus de fournir de la main-d'oeuvre, refus de faire du temps
supplémentaire, enfin un paquet de pressions unilatérales et
excessives qui ont fait que des entrepreneurs devaient céder ou
être acculés à la faillite. Je vais vous donner un exemple
précis. Je connais un entrepreneur qui a douze employés et qui
travaillait sur un certain chantier. Pour lui, il n'était pas question
c'est au tout début, cela de rien céder parce que
ses employés ne lui avaient jamais rien demandé et ses
employés étaient heureux.
Il n'avait pas de problème jusqu'au moment où le
délégué des chantiers, qui a rencontré l'agent
d'affaires, a dit: Cela prend $0.50. Il s'est produit que lui, dit: II n'est
pas question pour moi de donner ces $0.50. Je l'ai revu la semaine suivante. Il
lui restait quatre gars. Il dit: Je les donne, les $0.50, ou je suis en
faillite la semaine prochaine. Il y en a un qui a cédé de cette
façon. Après cela, on va voir son concurrent à
côté, on dit: Regarde. Un tel les a donnés. Pourquoi ne les
donnerais-tu pas? De toute façon, le gouvernement va approuver un
arrêté en conseil. Cela sera officiel dans deux semaines.
L'entrepreneur, qui a quand même autre chose à faire que de suivre
tous les textes de loi, tous les arrêtés en conseil qui existent
dans la construction, parfois, il en vient qu'à ne plus savoir qui
croire. A un certain moment, si cela ne fait pas, lui aussi on lui
enlève des hommes. Ce qui a fait qu'à un certain moment,
spécialement pour les électriciens et pour les plombiers, il y a
quand même un certain nombre d'entrepreneurs qui, par ces menaces, cette
persuasion, ont versé les $0.50. Evidemment, pendant que ces troubles se
passaient, en province, il n'y avait rien, pas de trouble. Ce sont les
problèmes qu'il y avait sur les gros chantiers comme Place Desjardins,
dans les raffineries, ainsi de suite.
Il y a de nos membres, de nos gros membres, je dirais, pour être
honnête, de nos gros membres, en majorité, qui ont subi ces
pressions et qui versent aujourd'hui les $0.50. Ils ne sont pas très
heureux, il va sans dire, parce que cela alourdit quand même le climat de
concurrence. On ne sait plus trop à quoi s'en tenir; il y a aussi les
membres de l'ACM qui ont été très fortement
touchés. Aujourd'hui, parce qu'on s'est servi de ces moyens pour faire
plier des entrepreneurs, on dit: II y a 70% des gars dans la province qui les
reçoivent. C'est un chiffre farfelu, pour moi. Je sais fort bien que, en
province, il n'y a à peu près personne qui donne les $0.50.
D'ailleurs, les gars, on eu $0.25 d'augmentation au 1er janvier, pas $0.25 sur
le bras, comme on s'est évertué à le dire, mais $0.25
prévus au décret. Quand on dit 70%, c'est y aller un peu fort. Il
y a 50% des salariés dans la région de Montréal. Si on en
met 90,000, cela en fait 45,000. En dehors de la région de
Montréal, il n'y en a pas qui les reçoivent, ou à peu
près pas, à part certains gros chantiers. Quand on dit 15% ou 20%
des salariés, c'est le gros maximum. Ce sont surtout des membres de
l'ACM et des membres de l'ASECQ.
M. Burns: Vous, ce serait dans quelle proportion, M.
Guilbault?
M. Guilbault: A peu près dans cette proportion, j'imagine.
Je n'ai aucun indice qui me fait donner un chiffre précis. Cela peut
varier. Cela peut être 10%, comme cela peut être 20%.
M. Burns: Non, mais cela peut être 10% des entrepreneurs.
Mais comme vous me dites, ce sont les gros entrepreneurs qui sont membres chez
vous. Cela peut peut-être être une plus grosse proportion que cela
des travailleurs visés.
M. Guilbault: Oui, mais, par contre, il faut aussi mentionner,
comme je vous l'ai dit, qu'il y a 50% des salariés à
l'extérieur de la région de Montréal. Alors, comment
voulez-vous que ce soient 70% des salariés de la construction, quand on
sait qu'à l'extérieur de Montréal, il n'y a personne qui
les paie?
M. Burns: Mais chez vous, dans les 50% des travailleurs
visés, dans la région de Montréal, votre estimation serait
de combien de ce groupe qui les reçoivent déjà?
M. Guilbault: De salariés, qui travaillent pour... M.
Burns: Oui...
M. Guilbault: ... des membres de notre association?
M. Burns: ... parce que si on parle d'entreprises, cela ne me dit
rien, parce que vous pouvez avoir dix entreprises qui ont dix employés
chacune...
M. Guilbault: Non, je vous parle de...
M. Burns: ... comme vous pouvez avoir deux entreprises qui ont
400 employés.
M. Guilbault: Quand je dis 15% à 20%, je vous parle des
salariés.
M. Burns: Des salariés, selon vous.
M. Guilbault: Oui, dans la région de Montréal. A
l'extérieur, il n'y en n'a pas qui les versent.
M. Burns: A l'extérieur... M. Guilbault:
Très peu.
M. Burns: ... ils ont eu le rattrapage. Les $0.25, c'est $0.25 de
rattrapage.
M. Guilbault: Oui, je l'ai mentionné, mais vous me parliez
des $0.50 qui avaient été accordés...
M. Burns: Oui, d'accord!
M. Guilbault:... en dehors des cadres du décret.
M. Burns: Oui.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: Mes questions ont été posées, une
par le
député de Maisonneuve et l'autre par le ministre. Je n'ai
rien à ajouter.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Saint-François.
M. Déziel: Pour ma gouverne, M. le Président,
à un certain moment, à la page 11, vous parlez de braconnage. A
l'intérieur de la loi 172, qui couvre les installations
électriques et la loi qui couvre les installations à tuyauterie,
avez-vous des dispositions pour vous protéger contre le braconnage?
M. Guilbault: Oui, par la loi. En fait, les deux corporations
possèdent un pouvoir...
M. Déziel:... pas la loi 172, n'est-ce pas? M.
Guilbault: Pas la loi?
M. Déziel: La loi 172, qui couvre les installations
électriques. Vous parlez de la loi 146, qui, par le truchement de la
Corporation des maîtres électriciens, vous donne probablement des
dispositions, mais pas la loi 172, n'est-ce pas? Est-ce que vous avez
déjà fait des pressions auprès du ministère du
Travail pour être protégés par le truchement du bureau des
examinateurs électriciens?
M. Guilbault: Oui. La Corporation des maîtres
électriciens travaille de concert avec le bureau des examinateurs
électriciens et c'est la corporation qui est chargée d'appliquer
la loi comme telle. Evidemment, s'il y a des poursuites à prendre contre
des personnes qui ne sont pas qualifiées aux termes de la loi du BEE et
de la loi régissant la Corporation des maîtres
électriciens, à ce moment, la corporation possède le
pouvoir légal de poursuivre ces gens. C'est la même chose pour la
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie. Je ne sais pas
si je suis assez clair.
M. Déziel: Je me demandais si vous aviez l'entière
coopération de la loi 172 avec la loi 146 qui vient du Bureau des
examinateurs électriciens.
M. Guilbault: II faudrait que je consulte parce que, de
mémoire, en nommant les numéros, je ne suis pas capable
d'identifier ce à quoi vous faites allusion.
Le Président (M. Séguin): Avez-vous terminé,
M. le député de Saint-François?
M. Déziel: Je veux seulement souligner, M. le
Président, qu'il est sûr qu'avec les indexations ou quoi que ce
soit, le braconnage augmentera de plus en plus.
Le Président (M. Séguin): M. Guilbault, nous vous
remercions ainsi que vos collègues.
M. Guilbault: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre du jour, nous
avons encore l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec. Si vous voulez vous présenter, s'il vous plaît.
Lorsque vous serez prêt, le commentaire habituel, votre nom et
l'association que vous représentez ou les associations que vous
représentez.
Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec
M. Fournier (Alcide): Alcide Fournier, de l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la
commission, messieurs les députés, à l'heure et au rang
où nous sommes entendus, nous devons faire preuve, je pense, d'une
certaine philosophie et selon nos sources généralement mal
informées, la décision serait déjà prise. Nous ne
voudrions surtout pas vous mêler avec les faits. Cependant, à
votre aimable invitation, nous vous présentons quand même notre
mémoire.
L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec est l'une des associations patronales représentatives au
sens de la Loi des relations de travail dans l'industrie de la
construction.
Comme son nom l'indique, notre association regroupe dans ses rangs la
presque totalité des entreprises de construction
spécialisées dans les travaux routiers et de génie civil,
en général, y compris les lignes de transport et de distribution
d'énergie électrique.
Nos représentations à cette commission se limiteront donc
à ce champ d'activité à l'intérieur de l'industrie
de la construction, car les autres associations patronales vous ont
parlé des autres secteurs de l'industrie et il est inutile de
répéter leurs propos, d'autant plus que nous faisons nôtres
leurs commentaires.
On a parlé de secteurs, on a parlé de productivité,
on a parlé de bureaux de placement, on a parlé d'un tas de
choses. Sans vouloir insister sur un des points qui nous tient à coeur,
c'est-à-dire les secteurs, nous réservons, selon votre
disponibilité, à la fin de la présentation de notre
mémoire, les questions que vous aimerez bien nous poser sur ce
sujet.
Si nous sommes tous réunis ici aujourd'hui, c'est qu'encore une
fois la construction au Québec connaît des problèmes
graves: des chantiers sont fermés, des salariés font la
grève alors que le décret est en vigueur, il y a des
ralentissements de travaux, la productivité est désastreuse,
etc.
Pour bien comprendre ce qui se passe aujourd'hui dans l'industrie de la
construction, il faut remonter à la source, c'est-à-dire à
la Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction, et ce
à partir de 1968, pour tenter de dégager les causes du marasme
actuel des relations patronales-ouvrières.
Dans un premier temps, on vous fait un court historique de ces causes
et, dans un deuxième temps, on vous fera l'historique des salaires aussi
qu'on a connus plus particulièrement dans la voirie.
Alors, l'historique. La Loi des relations du travail dans l'industrie de
la construction fut adoptée en décembre 1968. Les buts de cette
loi étaient louables et les principes fondamentaux qui l'animaient
rencontraient l'assentiment de la plupart des parties
intéressées.
Cette loi prévoyait, entre autres choses, la pleine et
entière liberté syndicale des travailleurs de la construction,
elle favorisait une négociation unique pour toute la province et pour
tous les métiers, faisant ainsi disparaître les décrets
régionaux, au nombre de quinze, et certains décrets provinciaux.
Le secteur voirie régi par la cédule des justes salaires devenait
désormais assujetti à cette loi.
La loi prévoyait également que des associations patronales
et syndicales étaient seules reconnues, avec droit de veto, pour
négocier la convention collective qui devait ensuite être
"extensionnée" par décret.
Le premier essai. La première négociation en vertu de
cette nouvelle loi se déroula en 1969. Après une grève
générale d'environ trois semaines, un protocole d'entente
était signé entre les parties grêce à la
médiation spéciale du ministre du Travail. Outre les questions de
parité salariale et de sécurité d'emploi, un des points
majeurs en litige était la syndicalisation obligatoire de tous les
travailleurs de la construction.
Les associations syndicales ont fait de cette clause une condition de
règlement des conflits; les associations patronales, pour acheter la
paix, ont consenti à une telle clause. Le gouvernement, qui avait
favorisé la signature du protocole du 11 juillet, a "extensionné"
cette clause par le décret du 27 octobre 1969. C'est ainsi que les
quelque 20,000 travailleurs du secteur voirie et génie civil ont appris
qu'éventuellement ils devraient être syndiqués.
Le deuxième essai. En 1970, à nouveau les parties ne
s'entendent pas. Le 10 août, l'Assemblée nationale adopte le bill
38 mettant fin aux grèves. La région de Montréal avait
été paralysée dès le début de
l'été. La question en litige: les délégués
de chantier. Cette clause qui n'avait pas été acceptée par
toutes les parties fut cependant imposée par la loi 38 et inscrite au
décret. Ce décret était en vigueur jusqu'au mois d'avril
1973.
Cependant, même si un décret est en vigueur, tout ne va pas
pour le mieux dans le secteur de la construction et le gouvernement doit
adopter une nouvelle loi, le bill 15, pour mettre fin aux émeutes de la
Côte-Nord en prévoyant de fortes amendes pour les responsables de
grèves ou de lock-out illégaux. Nous ne traiterons ici ni du bill
68, ni du bill 58, ni du bill 14, ni du bill 15, etc.
Troisième essai. En 1973, l'échec de la négociation
fut encore plus complet que lors des deux essais précédents. Il
ne fut même pas possible d'asseoir toutes les parties
représentatives à une même table de négociations
pour tenir une seule séance de négociations.
Encouragées par le médiateur du ministère du
Travail, des associations patronales, dont la nôtre, ont signé des
ententes illégales avec la FTQ construction. Ces ententes
illégales non seulement ont été "exten-sionnées"
par décret, mais le gouvernement a amendé la loi pour les rendre
légales et les imposer rétroactivement à ceux qui n'y
avaient pas consenti. Cela a été fait par les bills 9 et 14.
Depuis ce temps, nous n'avons connu que cela, des gestes illégaux
dans la construction; grèves, ralentissement de travail, violence,
etc.
D'ailleurs, ici, je me permets de me référer au
mémoire de la CSD qui est en accord avec nos propos sur ce sujet.
Le bilan de l'application de cette loi. Il faut se rendre à
l'évidence, la Loi des relations du travail dans l'industrie de la
construction n'a pas donné les résultats que l'on escomptait lors
de son adoption, en 1968. Il est cependant possible d'identifier certains
facteurs qui ont contribué à rendre la loi inopérante et
à amener le marasme actuel des relations
patronales-ouvrières.
La disparition de la liberté syndicale du travailleur de la
construction par l'instauration de l'empire des centrales syndicales avec la
collaboration des associations patronales et du gouvernement. En 1968, la Loi
des relations du travail dans l'industrie de la construction prévoyait
que le salarié pouvait, s'il le désirait, appartenir à
l'association syndicale de son choix.
Cette liberté d'allégeance fut de courte durée car
le premier décret disait: "Comme condition du maintien de son emploi le
salarié doit devenir membre d'une centrale et le demeurer". Tous les
salariés de la construction devinrent donc des syndiqués.
Pour devenir syndiques les quelque 20,000 travailleurs du secteur de la
voirie et du génie civil n'avaient pas été
consultés, ce n'était que le début. La clientèle
des syndicats et des unions devenait donc une clientèle captive et,
comme ils devaient tous être syndiqués, il ne restait aux
centrales syndicales qu'à les recruter. Selon la loi, il s'agissait de
périodes de "maraudage". Ce furent des périodes de violence sans
précédent sur les chantiers de construction, chaque centrale
tentant d'avoir le plus grand nombre de membres. Tous les moyens furent
utilisés, certains furent menacés, d'autres perdirent leur emploi
parce qu'ils n'étaient pas de la bonne centrale, etc. Encore
aujourd'hui, l'emploi du salarié dépend souvent de son
appartenance syndicale.
Le travailleur de la construction fut également la victime des
grèves de 1969, 1970 et des nombreuses grèves en 1974. On ne l'a
jamais consulté, il a été sorti des chantiers par des
fiers-à-bras, il n'avait qu'à faire ce qu'on lui disait. Pendant
ce temps, ce fut la course au monopole entre les centrales syndicales. En 1969
elles obtinrent la syndicalisation obligatoire de quelque 100,000 travailleurs
de la construction. En 1970, elles obtinrent les délégués
de chantier: véritable armée de surveillants des faits et gestes
de tous les travailleurs. Ces derniers doivent faire ce que dit le
délégué de chantiers ou le représentant syndical.
Le monopole ou la majorité fut enfin obtenu par la FTQ en 1973 et
après quelle période de maraudage!
Les parties patronales et le gouvernement ne furent pas étrangers
à ces phénomènes. Bien que leur rôle ne soit pas de
protéger les travailleurs contre leurs centrales syndicales, nous
croyons que les associations patronales auraient dû refuser d'accorder la
syndicalisation obligatoire de tous les travailleurs, refuser la mise sur pied
du système des délégués de chantier même si
ces concessions ont été faites pour éviter des
grèves. Le ministère du Travail, pour sa part, a prolongé
ce système dans les décrets et l'Assemblée nationale par
la loi 9 a consacré le monopole FTQ dans la construction.
La deuxième partie. Historique des augmentations de salaire
depuis 1969 dans le secteur de la voirie et du génie civil.
Durant tous les conflits dont nous venons de parler, il n'a pas
été question uniquement de sécurité syndicale, il
fut également question de salaires. Il en est
encore question aujourd'hui par la demande d'indexation des
salaires.
Dans leurs demandes, les centrales syndicales parlent de perte du
pouvoir d'achat du travailleur de la construction, de son faible revenu et que
ces augmentations de salaire actuellement prévues au décret sont
insuffisantes pour couvrir le taux d'inflation que nous connaissons.
Avant de faire de telles affirmations, il nous faut vérifier si
dans les faits elles ont un fondement quelconque. Dans le domaine de la voirie,
pour effectuer ces vérifications, il faut se replacer au moment de la
négociation de 1973. A cette époque, se terminait le
décret qui, pour la première fois, avait régi le secteur
de la voirie et qui, de plus, avait été imposé aux parties
patronales et syndicales par le bill 38 au mois d'août 1970. A cette
époque, il nous fallait concilier les augmentations accordées par
le bill 38 et celles à accorder pour équilibrer nos salaires avec
ceux du reste de la construction. Nous avons eu pour la période de
décembre 1970 à avril 1976 les augmentations suivantes:
Alors, si on prend le tableau no 1, nous donnons quatre exemples de
régions c'est-à-dire le Bas Saint-Laurent, Québec,
Trois-Rivières, Montréal pour pouvoir couvrir un peu l'ensemble
de la province. Nous donnons également l'exemple de trois métiers
qui nous concernent plus particulièrement, soit les opérateurs de
pelle, les opérateurs de machinerie lourde et les manoeuvres.
Si on regarde la région du Bas-Saint-Laurent, l'opérateur
de pelle qui en avril 1970 gagnait $2.50, en ajoutant les 4% de vacances, cela
lui faisait $2.60. En avril 1976, le taux du décret est de $6.95. Il
faut ajouter à ce taux 10% de vacances et $0.45 de
sécurité sociale, ce qui lui fait un salaire horaire de $8.10
l'heure, soit une augmentation de 212% et en argent $5.50 en cinq ans.
Il y a un commentaire que je voudrais ajouter ici. Sur le fonds de
retraite, c'est à la demande expresse, en 1973, de la centrale
syndicale, avec laquelle nous avons signé une convention
illégale, que ces $0.45 ont étét insérés
dans le décret.
Evidemment, pour l'employeur, il s'agit d'un déboursé.
Pour l'employé, il s'agit d'un revenu dont il pourra
bénéficier à long terme. Les 10% pour les vacances sont un
revenu dont il peut bénéficier deux fois par année, soit
aux mois de décembre et juillet. Evidemment, quand ce n'est pas avant le
mois de juillet, au mois de juin. Si on regarde les autres régions, par
exemple, celle de Québec, prenons l'opérateur de pelle. Nous
voyons qu'il y a une augmentation de 208%, c'est-à-dire $5.62 l'heure.
Pour la région de Trois-Rivières, il y a une augmentation de
248%, c'est-à-dire $5.93 l'heure. Pour la région de
Montréal, il y a une augmentation de 119%, c'est-à-dire $4.52
l'heure.
Il faut dire aussi que, selon la source Statistique Canada, le
coût de la vie, durant cette période, aurait augmenté de
29.1%.
On nous dira sans doute que nous considérons seulement les
chiffres qui font notre affaire et que nous ne parlons pas des années
1973, 1974 et 1975, durant lesquelles l'inflation s'est fait le plus
sentir.
Examinons le tableau 2, où nous vous donnons, pour les
mêmes régions et pour les mêmes métiers, les
comparaisons salariales pour chaque année, en vous donnant aussi, pour
chaque année, l'augmentation en argent et l'augmentation en pourcentage
et, à la fin, l'augmentation totale en pourcentage et en argent.
Prenons, comme exemple, l'opérateur de pelle dans la
région de Bas-Saint-Laurent nous pourrons vérifier aussi
les autres régions, si vous le désirez nous partons, en
avril 1973, avec un salaire de $4.88; en avril 1974, avec un salaire de $5.93,
ce qui fait une augmentation de $1.05 l'heure, soit 22%. En avril 1975, $6.76,
une augmentation de $0.83 l'heure, soit 14%. En avril 1976, $8.10, une
augmentation de $1.34, soit 20%. Ce qui fait une augmentation totale pour les
trois ans de 66%, c'est-à-dire $3.22 l'heure.
Si nous regardons l'augmentation du coût de la vie durant la
même période, il est évident qu'elle n'a jamais atteint ces
pourcentages, ni ces chiffres réels.
En compilant toujours des pourcentages, il devient facile d'estomper la
notion de salaires en chiffres absolus. Pour ne pas perdre cette notion, nous
vous donnons le tableau suivant, pour visualiser le salaire hebdomadaire d'un
travailleur de la construction dans notre secteur de la voirie et du
génie civil.
Au tableau 3, vous avez, pour la région de Montréal, les
mêmes métiers. Au 1er janvier 1975, c'est-à-dire
aujourd'hui, un salaire de $6.60 l'heure, multiplié par 50 heures, ce
qui donne $330 par semaine; pour les vacances: $33; pour la
sécurité sociale: $22.50, ce qui fait un salaire hebdomadaire de
$392.10.
Au tableau 4, nous ajoutons les bénéfices indirects, ou
les coûts que l'entrepreneur doit assumer, de toute façon,
c'est-à-dire les accidents de travail qu'on calcule à 4% dans la
plupart des cas, à cause de la clause de mérite et de
démérite; c'est d'environ 6%. On calcule, de toute façon,
à 4%, soit $15.68; l'assurance-chômage à $5.49; la
Régie des rentes à 1.8%, soit $7.05; l'assurance-maladie à
0.8%, soit $3.13: le prélèvement à 1/2%, soit $1.96; le
repos journalier: $19.60; le fonds d'indemnisation à $0.01 l'heure, soit
$0.50, ce qui fait un salaire payable par l'entrepreneur, en
bénéfices directs ou indirects, de $445.51. .
Evidemment, ces calculs ne tiennent pas compte des frais de chambre et
pension que, dans notre secteur, malheureusement, ou heureusement, nous payons,
en grande majorité, parce que les chantiers de routes ou de lignes,
habituellement, ne se situent pas dans une ville ou très près
d'une ville. Nous ne tenons pas compte non plus du temps supplémentaire
qui, à cause des pourcentages, augmente encore plus les coûts.
A la vue du tableau précédent, nous constatons que le
travailleur de la construction retire quand même une bonne paie
hebdomadairement. La question qui surgit à notre esprit, c'est: Que se
passe-t-il dans les autres secteurs?
Selon le Conseil économique du Canada et Statistique Canada, la
situation des salaires dans la construction, par rapport aux autres secteurs,
est la suivante:
Nous vous fournissons ci-joint le graphique qui a été
publié par Statistique Canada, la courbe des salaires de la construction
étant pointillée et la courbe des autres secteurs étant
une ligne continue.
On s'aperçoit que les salaires de la construction atteignent tout
près de 275 points tandis que, dans les
autres secteurs, c'est environ 208 points, pour 1975.
A la page suivante, on vous donne la comparaison, toujours
d'après les mêmes sources, de la productivité de la
construction et de l'ensemble des autres secteurs. La construction, c'est
encore la ligne pointillée et l'autre ligne, c'est l'ensemble des autres
secteurs. On se rend compte que la production du secteur de la construction est
d'environ 125 points tandis que la production des autres secteurs est d'environ
150 points, même si les salaires de la construction sont plus
élevés et que le salaire des autres secteurs est moins
élevé.
Un autre fait qui est à remarquer, c'est que, depuis 1970, la
courbe de l'augmentation de la production des travailleurs de la construction
subit un fléchissement marqué. Malheureusement, nous n'avons pas
les chiffres pour 1975.
Conclusion et recommandation. A l'aide des chiffres que nous venons
d'exposer, il nous semble évident que les augmentations de salaire
reçues par les salariés de la construction sont amplement
suffisantes pour couvrir le taux d'augmentation du coût de la vie.
Il est également inutile d'ajouter qu'une modification du
décret à ce moment-ci ne ferait que ruiner le système des
décrets qui régissent la construction, d'autant plus qu'il s'agit
d'un problème qui a été monté de toutes
pièces par une centrale syndicale. C'est enfin une affirmation qui se
base sur les autres mémoires que vous avez entendus et que vous avez pu
commenter.
Recommandation. Bien que la commission Cliche ait actuellement le mandat
d'étudier cette question, la gravité et l'urgence de la situation
actuelle commandent une action immédiate; c'est pourquoi nous nous
permettons de faire une seule recommandation et elle concerne la liberté
syndicale dans l'industrie de la construction.
Nous sommes d'avis que tous les problèmes que l'on connaît
dans la construction sont nés graduellement du manque total de
liberté du travailleur. Si les travailleurs de la construction pouvaient
s'exprimer librement, nous ne serions pas rendus là où nous
sommes actuellement. Il faut donc redonner une véritable liberté
syndicale par les moyens suivants: a) La liberté syndicale garantie par
la loi et non négociable par les parties.
Nous croyons que c'est la base du rétablissement d'une paix
industrielle. Cette garantie dans la loi aura pour effet d'éviter la
tentation à la centrale syndicale la plus forte de demander l'atelier
fermé pour elle au détriment des autres centrales. Cela
évitera aussi aux associations patronales de consentir à une
telle demande pour mettre fin à une grève et cela évitera
finalement au ministère du Travail, pour acheter la paix,
d'étendre cette clause par décret. b) Allégeance de tous
les travailleurs par un vote libre et contrôlé par un organisme
indépendant.
La loi prévoit actuellement des périodes dites de
maraudage durant lesquelles le travailleur peut changer d'allégeance
syndicale. Depuis l'adoption de la loi, ces périodes ont donné
lieu à de l'intimidation, à des menaces et même à de
la violence dans certains cas contre des travailleurs. La victime de toutes ces
batailles a toujours été le travailleur qui, parfois, pour se
débarrasser des représentants syndicaux, va signer trois cartes
d'allégeance, ce qui est contraire à la loi.
A tout le moins, nous croyons que le travailleur devrait pouvoir choisir
librement la centrale syndicale qu'il désire, sans que des pressions
indues s'exercent sur lui. A cette fin, un système de vote par
ordinateur pourrait facilement être mis sur pied et ce vote aurait de
grands avantages à être contrôlé par un organisme
indépendant. c)Consultation obligatoire de tous les travailleurs sur
tout sujet les concernant par un vote libre et contrôlé par un
organisme indépendant.
Actuellement, lors du déclenchement d'une grève, et en
particulier celle de 1974, qu'elle soit légale ou non, les travailleurs
sont tout simplement sortis des chantiers de construction. Ils sont tout
simplement privés de leur gagne-pain, sans qu'ils aient quelque chose
à dire.
Cette situation est tout à fait anormale et nous croyons que les
travailleurs devraient pouvoir exprimer leurs opinions démocratiquement
par un vote libre sur ordinateur et que ce vote soit contrôlé par
un organisme indépendant. d)Sanctions.
Nous pouvons écrire le système démocratique
idéal. Cependant, si personne ne le respecte, nous n'aurons pas
amélioré la situation. Il faut donc que des sanctions fortes,
contre ceux qui seraient tentés de brimer la liberté du
travailleur, soient prévues à la loi et surtout que ces sanctions
soient appliquées rigoureusement.
En conclusion, n'oublions surtout pas que les entrepreneurs de routes et
travaux du génie civil transigent, dans la très grande
majorité des cas, avec des donneurs d'ouvrage à qui sont
confiés des deniers publics; les gouvernements fédéral,
provincial et municipaux. Dans la décision que vous aurez à
prendre, MM. les membres de la commission et M. le ministre, nous vous prions
de retenir deux points. Premièrement, les salaires que les entrepreneurs
devront débourser affecteront directement le pouvoir d'achat des divers
donneurs d'ouvrage dont les budgets ne sont pas élastiques.
Deuxièmement, tout climat d'incertitude, tel que celui que nous
connaissons actuellement, ne pourra éventuellement que contribuer
à élever les coûts des travaux.
Messieurs, c'est la fin de notre exposé. Nous souhaitons,
maintenant, à l'heure qu'il est, entendre le verdict sur l'audition qui
se déroule ici depuis deux jours.
Le Président (M. Séguin): Si vous me permettez, M.
Fournier, tout en vous remerciant pour vos commentaires et votre
mémoire, je cède d'abord la parole au ministre s'il a des
questions.
M. Cournoyer: Vous avez affirmé, tantôt, que le
coût de la vie avait augmenté de 29%; depuis quelle
période, déjà?
M. Fournier: D'après ce que j'ai noté, 29.1%,
depuis 1970.
M. Cournoyer: A ce moment-ci, cela?
M. Fournier: C'est une note, d'ailleurs, que j'ai prise dans un
autre mémoire qui vous a été présenté, au
début des débats.
M. Cournoyer: C'est une information que j'ai, M. Fournier.
L'indice de janvier 1971 était de 124.4% dans la région de
Montréal.
M. Fournier: Oui.
M. Cournoyer: Et, en janvier 1976, on prévoit qu'il sera
à 185.2%.
M. Fournier: 185.2%.
M. Cournoyer: II devrait l'être, étant donné
qu'on projette, j'en suis sûr, après la dernière
année. Les salaires que vous avez consentis comportent un
élément pour le coût de la vie ou la totalité pour
le coût de la vie, si j'ai bien compris le raisonnement?
M. Fournier: Pardon, j'ai mal compris.
M. Cournoyer: Les salaires consentis comportaient augmentation du
coût de la vie, augmentation de salaire réelle, etc., ils
comportaient tout cela, si j'ai bien compris?
M. Fournier: Oui. D'ailleurs, si vous regardez les pourcentages
d'augmentation, si on veut comparer, par exemple, au pourcentage de
l'augmentation du coût de la vie, je vais vous en donner juste
quelques-uns: 212%, 191%, 205%, 248%, 260% d'augmentation des salaires.
Même si on dit que l'augmentation des salaires a été de
10%, 12%, 50% ou même de 60%, je pense que dans notre cas,le secteur de
la voirie, les augmentations de salaire ont facilement et très largement
comblé toute augmentation du coût de la vie prévue ou
imprévue, parce que c'est 200% en montant.
M. Cournoyer: Si, pour une raison ou pour une autre, nous
excluions le domaine routier d'une décision que nous croirions utile de
prendre au nom de l'intérêt public, qu'est-ce que cela vous
ferait?
M. Fournier: Moi, je pense qu'il faut d'abord relier la question
à l'ensemble des travaux qui peuvent être exécutés
par les membres de notre association.
Nous voyons que les conditions de travail du secteur de la voirie et du
génie civil, tel qu'on l'entend dans ce secteur, doivent être
uniformes, c'est-à-dire que les augmentations de salaire que nous avons
consenties jusqu'à présent comblent à notre avis et le
coût de la vie et l'amélioration du sort du travailleur, etc.
Mais, quand même, à l'intérieur de ce secteur, qui comprend
la voirie, l'excavation, les travaux municipaux, etc., nous prétendons
que les conditions devraient quand même demeurer uniformes à
l'intérieur de ce secteur. Il faut comprendre que la main-d'oeuvre de
notre secteur est complètement différente de la main-d'oeuvre,
par exemple, de l'habitation, de la main-d'oeuvre du bâtiment ou des
autres travaux. C'est-à-dire que nous, nous allons engager, par exemple,
un menuisier à l'occasion. La main-d'oeuvre, fondamentalement, chez
nous, ce sont des opérateurs d'équipement lourd, ce sont des
journaliers, ce sont des mécaniciens, que vous ne retrouvez dans aucun
autre secteur.
Il est évident qu'à l'intérieur du secteur, nous
pensons que les conditions salariales doivent demeurer les mêmes,
c'est-à-dire qu'un opérateur d'équipement lourd qui
travaille à des travaux de voirie, qui va travailler dans l'excavation,
va travailler dans des travaux municipaux, etc., conserve son salaire à
l'intérieur. Cela est notre point de vue. Il est évident que, si
l'on pense de cette façon, les augmentations qui ont été
reçues par nos employés, à notre avis, sont suffisantes
pour couvrir le coût de la vie, d'autant plus que, dans aucun cas, depuis
le début de la bataille de l'indexation, aucun travailleur chez nous en
tout cas n'a débrayé volontairement pour réclamer des
augmentations de salaire.
Cela a été, évidemment, en juin, une ronde
provinciale, un effet d'entraînement. Mais si on regarde à partir
du 28 juin, lorsque les entrepreneurs ont rouvert leurs chantiers, le calme
s'est rétabli, la productivité a été bonne. En
passant, je dois dire que, dans le domaine des opérateurs
d'équipement lourd et de la main-d'oeuvre que nous engageons
habituellement, actuellement nous avons quand même une main-d'oeuvre qui
est productive, qui est qualifiée. Nous connaissons, malheureusement,
une pénurie de ce côté. Mais on doit quand même
reconnaître ce qui est vrai, c'est qu'on a une main-d'oeuvré qui,
quand même, est qualifiée, qui est productive.
M. Cournoyer: Mais est-ce qu'il n'est pas plus facile de mesurer
le travail d'une main-d'oeuvre routière que de mesurer le travail d'un
électricien dans le secteur domiciliaire?
M. Fournier: C'est assez difficile pour moi de pouvoir faire une
comparaison parce que l'électricien, dans le domaine domiciliaire, je ne
connais pas du tout son mode de fonctionnement.
M. Cournoyer: Non, mais en termes routiers...
M. Fournier: Chez nous, c'est quand même facile, je pense,
de pouvoir évaluer un opérateur de pelle, par exemple, qui va
charger trois camions par jour et l'autre, à côté, qui va
en charger quinze; je pense qu'on peut quand même faire la
différence, et comparer un chauffeur de camion qui va faire d'un point X
à un point Y douze voyages pendant que l'autre va en faire deux. C'est
quand même facile de déterminer lequel est productif ou lequel ne
l'est pas.
M. Cournoyer: Admettons maintenant que nous fassions une
distinction, toujours dans l'hypothèse d'une distinction dans le domaine
routier. Vous dites, vous, que cela va prendre tous les travaux que vos membres
font et non pas seulement le domaine routier, donc des travaux de génie
civil, des travaux municipaux. Admettons qu'on dise, par exemple, que sur les
sites industriels non pas parce que je suis bien d'accord sur cela mais
je pose la question les salaires sont élevés de tant, pour
telle raison, et que telle entreprise, qui n'est pas de chez vous, emploie
aussi un opérateur de machinerie lourde et que, par hypothèse,
vous preniez ou qu'un de vos membres prenne un contrat de pavage, d'un parc de
stationnement avec le drainage dedans. Est-ce qu'il n'y aurait pas risque de
difficulté pour celui
qui opérerait votre équipement lourd par rapport à
celui qui opère l'équipement lourd de l'autre entreprise de
construction?
M. Fournier: Je pense que cette difficulté, en fait, on la
vit depuis peut-être 100 ans, c'est-à-dire que la cédule
des justes salaires n'a jamais été égale aux
décrets de la construction, de façon générale, sauf
qu'elle va le devenir en 1976.
Ce danger, chez nous, est beaucoup moins évident parce que la
main-d'oeuvre est complètement différente, c'est-à-dire
qu'un opérateur d'équipement lourd, de façon
générale, va travailler au genre de travaux que nous
exécutons. Dans certains cas, il va aller faire, par exemple, du
terrassement dans une raffinerie d'huile. Dans ce cas, on dit: C'est le taux
qui s'applique au secteur qui normalement devrait s'appliquer. Si j'engage, par
exemple, un menuisier de finition parce que je veux me faire finir quelque
chose, je devrai, s'il y a un secteur bâtiment, payer le taux du
bâtiment, parce que le gars, dans le bâtiment, gagne ce taux. Donc,
si je l'emploie à des travaux de génie civil, je devrai payer ce
taux également, comme un gars du bâtiment, qui veut se faire
creuser un trou quelque part, devra payer le taux de l'opérateur
d'équipement lourd, qui est payé dans l'ensemble des travaux
d'excavation.
M. Cournoyer: N'a-t-on pas eu cette situation pendant un certain
nombre d'années à Montréal, par exemple, et dans la
région limitrophe de Montréal où la cédule des
justes salaires s'appliquait dans une partie de la région de
Montréal et, dans l'autre partie de la région de Montréal,
c'était le décret qui s'appliquait dans le domaine de la
voirie?
M. Fournier: Oui, en fait, je dois dire que sur l'île de
Montréal, la cédule des justes salaires est disparue depuis 1966.
Je pense que vous êtes...
M. Cournoyer: Sur l'île même?
M. Fournier: ...parfaitement au courant de ce
phénomène.
M. Cournoyer: Oui.
M. Fournier: II faut dire que, depuis 1966, sur l'île de
Montréal, tout ce qui s'est fait, ce sont des travaux d'autoroute, soit
élevée ou soit en dépression. Ce sont justement deux
exceptions qui, dans le décret, existaient et qui prévoyaient le
paiement du taux du décret. A partir de 1976, il n'y a plus aucune
différence entre le taux du décret et le taux de la
cédule. Même ceux qui travaillaient sur ces autoroutes, à
ce moment, n'ont pas eu de difficulté à se trouver de la
main-d'oeuvre et, lorsqu'ils allaient travailler sur un chantier de voirie,
après, à un taux moindre, ils n'ont pas eu de problèmes,
non plus. Cela s'appliquait, évidemment, dans des cas bien particuliers.
On ne peut pas dire qu'on pourrait continuer la situation de façon
régulière, c'est-à-dire deux ou trois taux à
l'intérieur du même secteur. Celui qui fait de l'excavation de
façon générale, à un certain moment, à un
contrat de voirie, devrait alors diminuer les salaires de son gars c'est
le même on ne pourrait pas vivre cela de façon
générale, parce qu'évidemment cela crée des
problèmes. C'est pour cela qu'on dit, nous qu'à
l'intérieur du secteur les taux devraient quand même être
uniformes.
M. Cournoyer: A l'intérieur de tout le secteur.
M. Fournier: Oui, tout le secteur voirie et génie
civil.
M. Cournoyer: Et provincial. M. Fournier: Pardon?
M. Cournoyer: Et provincial, c'est-à-dire qu'il ne doit
pas y avoir de distinction entre les régions.
M. Fournier: Je pense que nous sommes devant un fait accompli. Ce
n'est pas parce que nous y avons consenti. En 1970, lors de la première
négociation, il avait été non pas entendu, mais
pratiquement dialogué, en tout cas, que la cédule des justes
salaires rattraperait le décret; deuxièmement, que les
décrets régionaux rattraperaient ceux de Montréal. C'est
pour cela que nous, on a, en fait, ramassé deux rattrapages,
c'est-à-dire celui des décrets régionaux, celui des
décrets régionaux vis-à-vis de Montréal, et
troisièmement, un autre rattrapage intermétiers,
c'est-à-dire qu'on a regroupé, par exemple, dans
l'équipement lourd, les opérateurs de "Beavers" excusez le
mot anglais de chargeuses en butte frontale, etc. On a regroupé
tout cela dans un seul métier. Evidemment, dans une région, par
exemple, on a pris le taux le plus haut et tout le monde s'est rattrapé
là. Mais on ne pense pas que ce soit une bonne chose de revenir, etc.,
parce qu'on pense peut-être que cela nous créerait beaucoup plus
de problèmes que d'essayerde trouver une solution qui pourrait
satisfaire tout le monde.
M. Cournoyer: Est-ce que les carrières sont dans le
décret de la construction, maintenant?
M. Fournier: Non, elles ne le sont pas. M. Cournoyer: Est-ce que,
dans les...
M. Fournier: M y a les carrières, les usines d'asphalte,
il y a les garages des entrepreneurs, il y a tout le camionnage qui se fait. La
seule exception, c'est que, si l'usine d'asphalte ou l'usine de concassage se
situe à l'intérieur même du chantier ou si le transport se
fait uniquement à l'intérieur du chantier, à ce moment,
ils deviennent couverts par le décret. C'est une interprétation
du commissaire de l'industriede la construction. Il y a les
arpenteurs-chaîneurs aussi qui sont couverts par le décret.
M. Cournoyer: A un certain moment, n'y a-t-il pas eu des
difficultés assez grandes du côté des entreprises qui
exploitent des carrières et qui sont assujetties, d'un
côté, au code du travail ordinaire et qui ont des
accréditations et, de l'autre côté, à la Loi des
relations du travail dans l'industrie de la construction?
M. Fournier: II est évident que cela crée un
paquet
de problèmes, si je peux m'exprimer ainsi. Entre autres choses,
dans notre domaine, c'est ce qui fausse les statistiques de la Commission de
l'industrie de la construction. Prenons, par exemple, un mécanicien qui
travaille dans le garage principal de la compagnie de construction et qui, une
journée par semaine ou même une demi-journée par semaine,
est appelé à aller réparer une machine sur le chantier. A
ce moment, il devient couvert par le décret. Il reçoit un certain
taux du décret et, lorsqu'il retourne dans le garage, il suit la
convention du garage.
Evidemment, au niveau des statistiques de la construction, lorsque vous
avez, par exemple, un gars qui a gagné $18. dans une année, cela
fait baisser une moyenne, surtout les mécaniciens. D'après les
vérifications que nous pouvons faire, avec les travaux de
déneigement, les travaux d'exploitation d'usine d'asphalte, de
concassage, etc., on voit un exemple concret qu'on peut confirmer
que nos opérateurs de pelle, actuellement, dans une compagnie, leur
salaire annuel varie entre $17,000 et $21,000 par année, sur la
construction.
Prenez, par exemple, un conducteur de camion; pendant l'hiver il
travaille au déneigement et, l'été, il travaille sur le
transport. Lorsqu'il travaille à l'intérieur d'un chantier, il
devient couvert par le décret. On prend cette portion de salaire et on
fait les statistiques parce que la commission, de toute façon, a
juridiction uniquement sur cette portion. Lorsqu'on parle d'un salaire annuel
moyen d'un conducteur de camion, il est évident que c'est
complètement faussé parce qu'on ne compte pas l'exploitation de
la carrière, on ne compte pas l'exploitation de l'usine d'asphalte, on
ne compte pas le transport qu'il fait, par exemple, pour aller livrer de la
pierre chez des clients et on ne compte pas non plus toutes les
activités de déneigement durant l'hiver.
C'est pour cela que la statistique de la CIC, surtout dans notre cas,
est incomplète. On a des activités qui sont
séparées de la construction et d'autres qui sont couvertes;
alors, cela fausse généralement la statistique.
M. Cournoyer: Celle dont s'est servi M. Dalpé cet
après-midi comporte, par exemple, pour le mécanicien de chantier
dont vous parlez, quand il est mécanicien sur le chantier...
M. Fournier: Je pense qu'il y a une distinction à faire
entre mécanicien de chantier et mécanicien de machinerie
lourde.
M. Cournoyer: Millwright?
M. Fournier: Oui, millwright et...
M. Cournoyer: Où est le mécanicien?
M. Fournier: On retrouve le mécanicien de machinerie
lourde dans leur mémoire. La moyenne, les gains annuels totaux, $9,206
pour la construction seulement. Si on prend, par exemple, un mécanicien
qui a le moindrement travaillé à l'extérieur de la
construction, l'hiver pour les travaux de déneigement, dans le garage
des entrepreneurs, le salaire est beaucoup plus élevé que
cela.
M.Cournoyer: Cela signifie que les chiffres qui sont dans le bas
de cette page n'auraient pas été pondérés en aucune
manière.
M. Fournier: De quelle page parlez-vous?
M. Cournoyer: Je parle du mémoire de M. Dalpé.
M. Fournier: Non. Je pense que les chiffres...
M. Cournoyer: Ils viennent du conseil économique ou de la
Commission de l'industrie de la construction? Je ne sais pas.
Analyse des caractéristiques de la population active de la
construction. -
M. Fournier: On me dit que c'est la Commission de l'industrie de
la construction. Il faut comprendre cette dernière. Son seul champ de
juridiction, c'est le chantier de construction. Elle ne peut pas aller chez un
employeur demander des informations sur les travaux de déneigement, sur
les usines d'asphalte et les carrières, etc. Même son mandat ne
lui donne pas l'autorité d'aller chez un employeur pour demander cela.
C'est pour cette raison que cela peut, comme je disais tantôt, fausser
drôlement les statistiques.
D'ailleurs, si vous me permettez, M. le ministre, je pense qu'à
l'intérieur même du décret, actuellement, il y a une clause
spéciale pour les travaux de voirie.
M. Cournoyer: Oui.
M. Fournier: L'article 18.013). Il y a aussi des conditions
spéciales pour les lignes de transmission, et c'est peut-être le
commentaire que je voudrais faire, parce qu'en suivant la règle
générale, pour tous les chantiers, on se retrouve dans de
drôles de situations. Par exemple, dans les lignes de transmission
vous en faisiez état un peu tantôt je vais vous citer
seulement un exemple, et c'est l'application du règlement pour les
explosifs.
C'est-à-dire que si vous entreposez des explosifs sur un
chantier, vous devez le faire dans une cache spéciale
éclairée et entourée de fils de fer barbelés. Vous
construisez une ligne de Micoua à Québec à 300 milles dans
le nord, vous vous en venez à Québec. Si quelqu'un veut se
procurer de la dynamite, vous n'avez qu'à prendre un
hélicoptère et regarder tous les points éclairés,
là, c'est de la dynamite. C'est à peu près cela
l'application qui peut résulter dans certains cas. Vous parliez un peu
d'autres...
M. Cournoyer: Ce n'est pas moi qui ai fait le
règlement.
M. Fournier: Ce qui peut être très logique sur un
chantier de bâtiment qui est dans une ville, concentré dans un
endroit peut-être de 1,000 pieds carrés, est complètement
inapplicable dans notre secteur.
Par exemple, les toilettes sur le travail. Prenez, par exemple, un
chantier de pavage. Si vous faites cinq milles par jour de pavage, allez-vous
l'attacher en arrière du "paver"? Sauf que, dans le règlement de
sécurité, dans le décret, vous devez avoir une
toilette.
Ce sont des choses qui évidemment paraissent drôles, ce
sont les points qui nous sautent le plus aux
yeux. Mais c'est à peu près comme cela pour toutes les
clauses. Si vous regardez, par exemple, le préavis de mise à
pied, qui est une clause un peu plus sérieuse, dans un travail de
voirie, vous êtes conditionné, et dans les lignes de transport de
l'énergie, c'est la même chose, par le temps. C'est-à-dire
que s'il commence à pleuvoir, alors que vous étiez en train de
paver, vous dites: On va arrêter les travaux, il pleut, on ne peut plus
paver. Cela dure une journée, deux jours. Aussitôt que cela a
dépassé 48 heures, vous venez de payer seize heures de
pénalité parce que vous n'avez pas donné de préavis
de mise à pied. Sauf que vous n'avez quand même pas pu
prévoir le fait que la pluie va se mettre à tomber, personne ne
peut le prévoir, ni le travailleur, ni l'employeur.
Mais à cause de l'application générale,
c'est-à-dire dans un bâtiment où vous avez un toit sur la
tête, ou dans l'habitation, ce sont des choses qui peuvent être
appliquées de façon normale. C'est-à-dire que si vous
prévoyez la fin du chantier, vous avisez vos travailleurs que la fin
approche, etc. Tandis que nous autres, pour des conditions de temps on ne peut
pas les aviser et on est pincé avec une amende de seize heures, selon
l'interprétation de la commission.
M. Cournoyer: La semaine de travail est toujours de 50
heures?
M. Fournier: Oui.
M. Cournoyer: Remarquez que votre mémoire...
M. Fournier: Evidemment, c'est encore une condition de temps si
l'on peut dire, parce que si vous regardez, par exemple, les chantiers
d'asphalte, même avec toutes les expériences qui se font à
l'heure actuelle, à partir de novembre jusqu'au mois de mai, il ne se
fait pas de pavage; qu'on le veuille ou non, c'est impossible.
Evidemment, si on veut quand même avoir une production pour les
coûts d'investissement et si le travailleur veut quand même se
faire une paie, à un moment donné, il faut faire des heures.
M. Cournoyer: Font-ils effectivement 50 heures?
M. Fournier: Ils font effectivement 50 heures, je dirais
même jusqu'à 60 ou 65. Quand le temps est beau, il est
évident qu'il se fait beaucoup de pavage et les heures sont longues,
c'est certain, avec le temps supplémentaire, temps double, selon le
décret.
M. Cournoyer: Je regardais non pas tellement la courbe, mais la
description des salaires, vous avez pris le salaire, bien sûr, pour 50
heures par semaine.
M. Fournier: Oui, oui.
M. Cournoyer: C'est 50 heures sans limite journalière,
c'est-à-dire qu'il y a une limite de 15 heures je suppose, est-ce qu'il
y a une limite?
M. Fournier: C'est sans limite. Aucune limite.
M. Cournoyer: Jamais, aucune. De toute façon, les limites,
la nature se charge de vous en mettre.
M. Fournier: Oui, assurément, parce que vous ne pouvez pas
commencer surtout dans une période...
M. Cournoyer: Pas à la noirceur.
M. Fournier: Vous fonctionnez toujours à la clarté,
toujours.
M. Cournoyer: Mais vous avez bien pris, par exemple, comme
statistique que c'était $330 par semaine qu'ils gagnaient.
M. Fournier: Oui, mais on ne compte évidemment pas le
temps supplémentaire.
M. Cournoyer: Vous ne comptez pas non plus le temps qui est
perdu.
M. Fournier: Sur cette question, M. le ministre, il
faudrait...
M. Cournoyer: Je pose la question parce qu'on m'a toujours dit
qu'il y a des gars qui perdaient du temps sur les routes parce que, quand il
pleut le lundi ou qu'il a plu toute la journée du dimanche, on ne peut
pas commencer à travailler sur les routes avant le lundi midi, ceci
à la condition qu'il ait commencé à faire beau vers quatre
heures du matin et peut-être qu'on commencera seulement le mardi matin
aussi. Cela dépend, bien sûr, de la période et du genre de
pluie qui est tombé. En hiver, travaillez-vous bien fort?
M. Fournier: Je pense que, sur les chantiers de pavage, ce que
vous venez de dire peut s'appliquer et encore, car cela dépend de
certaines circonstances, surtout des fondations sur lesquelles vous mettez
votre pavage parce que, sur certaines fondations, vous pouvez même paver
quand il pleut. Aujourd'hui, avec les fondations, etc.
M. Cournoyer: Dans les fondations, il n'y a pas de
problème, je parle de la route.
M. Fournier: En fait, le pavage dépend de la fondation que
vous avez. Si vous avez une mauvaise fondation, aussitôt qu'il pleut,
cela devient...
M. Cournoyer: Oui, je comprends, vous mettez les grandes housses
de cellophane.
M. Fournier: Nous ne sommes pas encore rendus au baseball encore.
Mais si on regarde, il y a quand même certains travaux qui peuvent
être exécutés même l'hiver, c'est-à-dire dans
les chantiers de terrassement, entre autres la coupe de roc ou des choses comme
cela. Il est évident que tous les travaux ne peuvent pas être
exécutés pendant l'hiver. Il y a certains travaux, tout
dépend de la nature du sol, qui peuvent être
exécutés l'hiver.
M. Cournoyer: Moins.
M. Fournier: Moins, mais il y a un autre aspect qu'il
faut ajouter, c'est que les entrepreneurs en construction avec
l'équipement qu'ils ont à leur disposition, des camions sur
lesquels ils peuvent ajouter des grattes, etc., la plupart de nos membres font
du déneigement l'hiver, ce qui veut dire que les employés
demeurent à l'emploi, je ne dirais pas de façon totalement
annuelle, mais en grande partie. C'est-à-dire que, si on prend un
opérateur de pelle, vous savez que sur l'équipement il faut quand
même faire de l'entretien et il faut surtout, après un certain
nombre d'heures d'opération, faire une révision de cet
équipement si on ne veut pas avoir des bris à tout bout de champ
lorsqu'on va commencer la production réelle. Ce qui veut dire que la
plupart des opérateurs se retrouvent dans les garages de l'entrepreneur
durant l'hiver pour faire la réparation de cet équipement, faire
la réparation des usines d'asphalte, faire la réparation des
usines de concassage, de tout l'équipement lourd qui sert durant
l'été pour les travaux.
M. Cournoyer: Vous avez utilisé un graphique, le graphique
2. Dans ce graphique, compte tenu de plusieurs affirmations qui ont
été faites soit par le ministre de l'Industrie et du Commerce,
soit par à peu près tous les mémoires des employeurs. Il
est inscrit qu'il y a eu augmentation de la productivité ou de la
production des hommes, même si elle n'est pas correspondante à
l'augmentation de la courbe des salaires. Parmi les affirmations que nous avons
entendues, il y avait diminution de la productivité. Pourriez-vous
m'expliquer comment on peut arriver à une augmentation tout en ayant une
diminution.
M. Fournier: Si on regarde le graphique, malheureusement nos
sources se limitent à 1971.
M. Cournoyer: Oui, j'ai remarqué cela.
M. Fournier: Ce que nous avons constaté de la baisse de
productivité qui a été exposée par les autres
associations, cela a été en 1972, 1973, 1974. Nous avons
communiqué avec les organismes où nous avons puisé nos
sources et malheureusement ils n'ont pas pu nous fournir les chiffres pour
1972,1973 et 1974. Ils nous ont cependant dit que la tendance qui est
exprimée depuis 1969 dans le secteur de la construction s'est
accentuée. C'est-à-dire que, si on regarde le graphique, à
partir de 1969, on voit qu'en 1968, etc., la courbe est montante
continuellement. En 1969 cela fléchit, en 1970 cela fléchit
encore et finalement, en 1971, on a pratiquement une ligne horizontale. Je dois
le mentionner, l'économiste de l'Association canadienne de la
construction nous a dit qu'avec l'influence des grèves, principalement
en 1974 dans la province de Québec, d'après lui, la courbe de la
productivité baisserait en 1974 pour la région du Québec.
Malheureusement, je n'ai pas l'enregistrement de cette conversation, mais c'est
ce qu'on m'a dit. Lui-même n'avait pas fait le bilan des arrêts de
travail etc., mais la tendance, d'après lui, dans le Québec, est
encore beaucoup plus à la baisse que ne l'indique la moyenne
canadienne.
M. Cournoyer: Mais, dans le cas de vos membres, vous avez
affirmé que cela allait bien.
M. Fournier: Oui, je dois dire que nos chantiers ont
été fermés. C'est pour cela que nous disons que les
problèmes sont différents. Nous avons été
fermés lors du tour provincial, c'est-à-dire en juin. On a tous
été fermés, en oubliant les raisons. Tous nos chantiers
ont été fermés sauf certains chantiers dans le fond des
bois ou des choses comme cela. De façon générale, tout a
été fermé. Le 28 juin, à la demande du premier
ministre, on a demandé à nos membres de réouvrir leur
chantier. Les chantiers ont été rouverts et fonctionnent depuis
ce temps-là.
Quand l'association de Montréal, ou quand l'ASECQ vient vous dire
qu'elles ont été plus affectées que nous par la situation,
c'est vrai, sauf dans certaines régions, soit celle de Montréal,
où on a eu le même problème que tout le monde,
c'est-à-dire que, sur la construction des viaducs, etc., sur les
autoroutes 13, 40 ou 440, il est évident qu'il n'y avait pas un
ferrailleur qui travaillait, donc on ne travaillait pas. Mais le terrassement
et les autres travaux qui n'étaient pas de structure ne
nécessitaient pas la présence d'un ferrailleur et ils se sont
poursuivis.
M. Cournoyer: Dans votre conversation téléphonique
avec le monsieur de Statistique Canada, a-t-il été question des
grèves de la construction ou des grèves susceptibles de faire
perdre du temps à des gars qui étaient en travail sur la
construction?
M. Fournier: II a été question des grèves de
la construction.
M. Cournoyer: De la construction.
M. Fournier: Oui. Il est évident que c'est assez
difficile, au niveau des statistiques, de dissocier des chantiers de voirie des
chantiers de bâtiments. On peut les dissocier en phénomènes
régionaux, d'après ce qu'on m'a dit, mais en secteurs, c'est
beaucoup plus difficile. Cela prend une étude beaucoup plus
poussée.
M. Cournoyer: Mais quand on prend de la production par
heure-homme, j'imagine qu'on compte les heures de travail. On ne compte pas les
heures durant lesquelles ils sont en grève.
M. Fournier: Oui, c'est cela.
M. Cournoyer: Dans le cas de certaines grèves qui ont
peut-être affecté certains constructeurs de routes et grands
travaux, par exemple, la grève du ciment, à Montréal, il
est possible qu'elle en ait affecté un certain nombre, à cause
d'un manque de production. Pendant ce temps, il y avait un certain degré
d'inactivité ou de ralenti avant que les mises à pied ne soient
faites. C'est pour cela que je me pose la question de l'utilisation de cette
statistique en particulier.
M. Fournier: Oui, certainement.
M. Cournoyer: D'un côté, la courbe de production
augmente par heure-homme de travail, j'imagine que ce sont les heures de
travail, et que la productivité dont il est souvent question ici
reflète beaucoup plus des gens au travail que des gens en
grève.
M. Fournier: Oui.
M. Cournoyer: Quand les gens sont en grève, ils ne
travaillent pas. Donc, c'est sûr que pour employer le raisonnement que
vous avez énoncé tantôt, une journée de grève
va peut-être changer la statistique, peut-être que quinze jours de
grève vont changer la statistique, parce qu'ils ne travaillent pas
beaucoup pendant ce temps. Mais quand ils sont en ralentissement de travail et
qu'ils sont chez vous, cela doit avoir un certain effet.
M. Fournier: C'est cela. En fait, si je peux résumer un
peu ce qu'ils me disaient, parce que je ne suis pas du tout spécialiste
dans la matière, c'est évidemment l'influence, par exemple, de la
non-livraison de certains matériaux, etc. Le gars qui est sur le
chantier et qui s'aperçoit que s'il fait trop de formes, il va
être obligé de laisser son emploi parce qu'il n'a pas de
béton à mettre dedans et qu'il ne pourra pas faire l'étage
au-dessus ou qu'il ne pourra pas continuer sa structure, il est évident
qu'il est influencé par cela. Quant à la forme, on va agir
prudemment, avant que le béton arrive. Il est évident que ce
phénomène accentue la non-productivité ou la baisse de
productivité dans certains cas.
Si on regarde, par exemple, la région de Montréal, elle a
été choyée, je dirais, au niveau des grèves, soit
du béton, soit de la construction. Quand ce n'était pas le
béton, c'était la construction. Quand ce n'était pas la
construction, c'était le béton. Cela n'a pas arrêté.
Si vous regardez l'échéancier des chantiers, ils sont en retard
un peu partout. C'est évident. Je pense que je ne vous apprends
rien.
M. Cournoyer: A la page 8, vous dites que la loi 9 a
consacré le monopole de la FTQ dans la construction.
M. Fournier: Avant la loi 9, elles étaient trois.
M. Cournoyer: Non. Avant la loi 9, elles étaient seulement
deux.
M. Fournier: La CSD est arrivée après. D'accord.
Disons qu'elles étaient deux. Avant cela, il y avait les deux centrales
syndicales qui connaissaient les mêmes problèmes, etc. Avant la
loi 9, avant la négociation de 1973, nous avons eu une période de
maraudage qui a quand même été très difficile.
M. Cournoyer: C'était avant la loi 9.
M. Fournier: Oui. C'était toujours avant la loi 9. A notre
avis, la loi 9 est venue tout simplement dire: La FTQ, c'est 73. La CSN, c'est
environ 30.
Avant cela, si on regarde les organismes comme la CIC, si on regarde le
processus de négociation, les conseils d'arbitrage ou des choses comme
cela, cela fonctionnait, évidemment, avec ,la même voix à
toute le monde.
Après la loi 9, si on regarde la CIC, cela fonctionnait pour
autant que la FTQ était d'accord, parce que cela prenait une double
majorité, une majorité syndicale et une majorité patronale
de 50 et plus.
Du côté syndical, il n'y avait pas de questions à se
poser, la FTQ avait 73%. Il était évident que, du
côté syndical, c'est elle qui représentait, c'est elle qui
disait...
M. Cournoyer: La majorité.
M. Fournier: ...Si je dis oui, cela va être oui; si je dis
non, cela va être non. Il est évident que les travailleurs de la
construction, à mon avis je peux me tromper qui voient
cela, qui voient que la centrale syndicale... S'il appartient à la FTQ,
il est chanceux. S'il appartient à la CSD, il dit: La CSD, à la
CIC, qu'est-ce que vous dites? Vous avez un gars là, la CSN, deux gars
là et, si la FTQ dit non, vous êtes "foul ball".
Il est évident que ce phénomène a consacré,
à mon avis je peux me tromper la priorité de la
FTQ.
M. Cournoyer: La priorité de la FTQ!
M. Fournier: En fait, je me dis que c'est un monopole à
brève échéance.
M. Cournoyer: Ah oui?
M. Fournier: Je ne sais pas. Si je devais me faire
représenter par un organisme, peut-être que je prendrais le plus
fort, que selon le genre de règlement que nous allons faire en vertu de
la loi 9, cela va peut-être être plus difficile pour la FTQ
d'utiliser les méthodes qui sont racontées devant la commission
Cliche pour obtenir des membres.
M. Fournier: D'ailleurs, c'est tout ce qu'on dit dans notre
mémoire. On dit tout simplement: Laissons donc le travailleur
décider lui-même, sans qu'il sache qu'il va peut-être se
faire taper. Peut-être qu'il y en a un qui va dire: Si tu ne fais pas
cela, tu perds ta "job", ou des choses comme cela. Laissons donc la
possibilité au travailleur d'aller à un endroit, le temps de se
faire une idée, et dire librement ce qu'il en pense de la patente, s'il
pense être pour la FTQ, s'il pense être pour la CSN ou pour la CSD.
Ce qu'il pense du fonds de retraite, ce qu'il pense des offres patronales lors
d'une négociation, lui laisser la possibilité, d'abord, de se
faire une idée et surtout de l'exprimer.
Si on regarde certaines affirmations qui ont été faites
devant la commission Cliche, je pense que tout le monde est un peu au courant.
Si vous regardez une assemblée qui a été tenue à
LG-2, ceux qui sont allés là pour voter, c'étaient des
gars qui étaient convaincus. Ceux qui n'étaient pas sûrs,
ils ne sont pas entrés dans la salle.
Je me dis que le gars de la construction, dans le fond, c'est lui qui
paie tout le temps. Actuellement, c'est lui qui est encore dans la rue. Si,
demain matin, les délégués de chantier n'ont pas assez de
pouvoirs, c'est encore lui qui va être dans la rue. C'est toujours lui
qui est dans la rue.
Nos gars sur la voirie on l'a l'exemple actuellement ont
été sortis au mois de juin. Le 28 juin, on les a laissés
entrer. Ils sont entrés depuis ce temps-là. La
productivité est bonne depuis ce temps-là. Après l'analyse
qu'on a faite, on a consulté nos membres et on leur a demandé ce
qu'ils avaient constaté comme problèmes sur les chantiers. Les
gars ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent. C'est ce qu'on constate sur nos
chantiers. Lorsque l'agent d'affaires arrive et dit: Ecoute, 12 voyages par
jour, ce n'est plus cela; tu en fais juste 9, parce qu'à 12 voyages, tu
vas sûrement péter ta transmission.
M. Cournoyer : Pourtant vous me dites que cela va bien?
M. Fournier: Oui, je dis que cela va bien. Il y a des
problèmes sur certains chantiers. On ne peut pas dire qu'il n'y a pas du
tout de problèmes, c'est impossible.
M. Cournoyer: II y a les problèmes naturels. M.
Fournier: Oui.
M. Cournoyer: Mais vous me dites que la production est bonne sur
les chantiers de construction de routes ou, du moins, celle de vos membres?
M. Fournier: De façon générale.
M. Cournoyer: Celle de vos membres, de façon
générale, gela va bien?
M. Fournier: Oui, sur les chantiers de routes.
M. Cournoyer: Est-ce qu'il y a des délégués
de chantier sur vos chantiers?
M. Fournier: Je dirais que, dans 50% des cas, il y en a.
M. Cournoyer: Les autres sont plus petits, j'imagine?
M. Fournier: Plus petits. Mais ce qui arrive, sur nos chantiers,
c'est quand même beaucoup plus difficile.
M. Cournoyer: Ils sont longs.
M. Fournier: Les chantiers sont longs. Evidemment, le
délégué de chantier qui veut aller jaser avec
l'opérateur de "bull" qui est à un mille, c'est pas mal plus
difficile. Mais, sur un chantier de bâtiment, c'est très facile;
le gars est juste à côté. Sur nos chantiers, c'est plus
difficile. Sur une machine qui ne produit plus, on peut s'en apercevoir assez
rapidement. Tandis qu'un gars qui est caché derrière une porte
quelque part, c'est plus difficile.
M. Cournoyer: En fait, parce que vous pouvez mieux gérer
votre affaire, vous avez moins de problèmes avec les
délégués de chantier?
M. Fournier: Non, je ne suis pas prêt à dire cela
parce qu'avec le local 791, pour ne pas le nommer, on a quand même eu des
problèmes. Je ne veux pas dire qu'on n'a jamais eu de problèmes;
on en a eu des problèmes.
M. Cournoyer: Maintenant, vous en avez moins?
M. Fournier: Non, je ne dirais pas qu'on en a moins ou qu'on en a
plus. De façon générale, si vous prenez nos chantiers en
province, cela va assez bien. Il y a évidemment certains chantiers
où on a des problèmes.
On a eu des arrêts de travail, ici à Québec, sur
l'autoroute Dufferin-Montmorency. On a eu certains problèmes. On en a
encore à Montréal. On en a, entre autres, à Mirabel
où, par exemple, un plombier arrive et nous dit: Les tuyaux, ce ne sont
pas des journaliers qui font cela, c'est un plombier qui fait cela. Sauf que le
plombier, lui, on est obligé de l'engager, l'asseoir sur le bord du trou
et ce sont les journaliers qui vont continuer. Dans un cas, ils sont même
allés plus loin, ils ont dit: L'opérateur de la "crane" qui
descend les tuyaux, c'est un plombier, parce qu'indirectement il touche aux
tuyaux. Il est évident qu'on a des problèmes.
Une Voix: Ce n'est pas vrai.
M. Cournoyer: Ceux qui rient et pensent que ce n'est pas vrai, je
garantis que ce qu'il dit est vrai. Ce sont des gars du 144 qui parlent? Je ne
sais pas qui est-ce, mais c'est vrai. Je l'ai entendu, puis je l'ai vu. Je me
le suis fait affirmer par un de vos représentants; c'était
à lui le tuyau; tout le tuyau, c'est à lui, le tuyau de
grès, le tuyau de béton puis n'importe quelle sorte de tuyau.
M. Fournier: Oui, oui, tous les tuyaux.
M. Cournoyer: Y toucher avec des gants ou pas de gants, c'est
pareil. Il y a une grève à la General Motors, juste pour
décharger le tuyau; les journaliers n'ont pas été capables
d'y toucher. Il faut que les plombiers le déchargent.
On est rendu que ça va prendre une permission, comme j'ai
déjà entendu dire, ça va prendre une permission et
être membre de la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie, pour coucher avec une femme.
Le Président (M. Séguin): As-tu terminé,
Jean? M. Cournoyer: J'en ai assez!
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Burns: M. Fournier, le groupe des monteurs de lignes,
actuellement, qui sont en grève, les gens que certains de vos membres
emploient, je présume, est-ce qu'à votre connaissance, le
problème de l'indexation est un problème dans cette
grève?
M. Fournier: Evidemment, la réclamation syndicale, c'est
l'indexation. On doit dire que les monteurs de lignes ont reçu
exactement la même augmentation que les travailleurs de la construction
générale, en 1973, plus $0.33.
M. Burns: Ce qui fait quoi au total?
M. Fournier: L'idée, lors de la négociation de
1973, c'était de maintenir le taux du monteur de lignes à peu
près semblable à celui de l'électricien. C'est pour cela
qu'à un moment donné, il y a eu un rajustement de $0.33, ce qui
fait des augmentations supérieures à toutes celles qui ont
été consenties aux autres travailleurs de la construction, si on
prend le taux de Montréal. Il faut ajouter que les monteurs de lignes
ont un taux provincial, c'est-à-dire qu'il est identique dans toutes les
régions, parce qu'ils se promènent d'une région à
l'autre. Si on regarde, par exemple, l'augmentation de Montréal qui a
été de 14%, alors, eux autres, c'est 14% plus $0.33, ce qui veut
dire à peu près 20%.
M. Burns: En général, est-ce exact j'ai des
chiffres, moi que, dans les trois dernières années, ils
ont eu une augmentation de $1.56 l'heure?
M. Fournier: II faudrait que je vérifie.
M. Cournoyer: Ce serait le salaire moyen. L'augmentation moyenne
de salaire était prévue à $1.56 pour la durée du
présent décret.
M. Fournier: Je n'ai pas le chiffre exact. Cela a
été l'augmentation générale qui se situait à
$1.51, je pense, plus $0.33. Alors cela fait $1.81.
M. Burns: Est-ce que vous diriez qu'actuellement, dans leur
arrêt de travail, c'est une des principales réclamations qui
justifie le phénomène de l'indexation?
M. Fournier: Bien, j'ai entendu parler, j'ai lu dans les journaux
que c'était relié aussi à la carte de compétence
pour les monteurs de lignes. Je dois dire que, sur la carte de
compétence, on a déjà eu des rencontres. Il n'y a pas de
blocage à ce niveau. C'est-à-dire que les entrepreneurs sont
quand même conscients que c'est une main-d'oeuvre plus qualifiée
que le journalier. C'est tout simplement de continuer les rencontres pour
essayer de trouver un moyen terme, si c'est possible d'en trouver un.
Mais je pense que cela a été associé, je ne connais
pas exactement la teneur, à la question d'indexation. C'est qu'ils
voulaient la reconnaissance du métier avec ça. Mais, de ce
côté, il n'y a aucun blocage de notre part.
M. Burns: C'est-à-dire que votre corporation... M.
Fournier: On a eu des rencontres.
M. Burns: ...ne s'oppose pas au phénomène du
certificat de compétence?
M. Fournier: Ce n'est pas qu'on ne s'oppose pas, mais on veut
tenter de trouver un système qui pourra favoriser et le travailleur et
l'entrepreneur, non pas, par exemple, s'embarquer comme on l'a
été un peu, à un moment donné, dans
l'équipement lourd. Parce que, dans l'équipement lourd, ce qui
est arrivé, c'est qu'on a regroupé, dans les opérateurs
d'équipement lourd, l'opérateur de tracteur, l'opérateur
de niveleuse, l'opérateur de paveuse d'asphalte, de profileuse, etc.
C'étaient quand même des métiers qui n'avaient aucun point
commun, sauf que c'était une machine.
A un moment donné, on s'est aperçu qu'aux examens tout le
monde bloquait parce que si c'était un opérateur de tracteur, par
exemple; il bloquait à cause de l'opération du rouleau d'asphalte
ou du paveur d'asphalte. Si c'était un gars d'asphalte, il bloquait
parce qu'il y avait des questions sur le tracteur.
M. Burns: Oui, mais vous n'avez pas... M. Fournier: Alors,
on a été obligé...
M. Burns: ...les mêmes problèmes pour les monteurs
de lignes.
M. Fournier: ...de rediviser...
M. Burns: Un monteur de lignes, j'imagine, c'est un monteur de
lignes. Ce n'est pas...
M. Foumier: Oui. Il y a deux choses... M. Burns: A moins
que... M. Foumier: ...qu'il faut distinguer... M. Burns: ...je
comprenne mal.
M. Fournier: ...assurément. Il y a le monteur de
transport, c'est-à-dire la construction de lignes de transport
d'énergie et le monteur de distribution d'énergie
électrique. Parce qu'il y en a un qui travaille sur le mort et l'autre
travaille sur le vif, si on peut appeler cela comme ça.
M. Burns: Oui, d'accord.
M. Foumier: C'est que celui qui travaille à la
construction, comme on dit couramment, n'a pas de jus tandis que l'autre
travaille sur le jus. Alors, il est évident que, sur la distribution, il
faut que le gars connaisse un tas de méthodes pour ne pas
s'électrocuter.
M. Burns: Mais est-ce qu'il y a des discussions qui se tiennent
actuellement avec le groupe des monteurs de lignes?
M. Foumier: Nous avons eu des discussions, je pense, fin
novembre. Ici, durant les dernières auditions, j'ai eu l'occasion de
rencontrer mes représentants de ce côté. On ne s'est pas
entendu, mais on a ajourné au début de février parce que
nous, à l'association, nous avons quand même un congrès
à la fin janvier, etc. Il y a certaines obligations qui nous
empêchent pour le moment, mais, en février, c'est prévu que
peut-être on se rencontrera sur cette question.
M. Burns: Est-ce que je me tromperais en pensant que vous
attendez pour voir ce que le ministre va faire avec son décret avant
de...
M. Foumier: Oh! Absolument pas. M. Burns: ...faire quoi
que ce soit?
M. Fournier: Sans ça, on aurait refusé de les
rencontrer en décembre ou à la fin de novembre.
M. Cournoyer: Pourquoi? M. Foumier: Mais non! M. Burns:
Non, mais la loi...
M. Foumier: On me demande si j'attends votre décision.
M. Burns: ...201, M. Fournier, a été adoptée
seulement le 24 décembre. Alors, si vous les...
M. Foumier: Oui, mais...
M. Burns: ...avez rencontrés... M. Fournier: Non,
mais...
M. Burns: ...en novembre, ce n'était pas quelque chose qui
vous engageait beaucoup.
M. Fournier: Non, la loi 201, à mon avis, n'a absolument
aucun rapport avec la carte de qualification parce que la carte de
qualification dépend du bill 49, Loi sur la qualification
professionnelle de la main-d'oeuvre, elle ne relève pas du tout de la
Loi des relations de travail dans l'industrie de la construction. Alors,
à mon avis, cela n'a aucun rapport. Cela n'a pas
empêché...
M. Burns: Mais malgré ça...
M. Fournier: ...de se dire: Je veux $0.50 et moi je dis que tu ne
l'auras pas.
M. Burns: Malgré cela, vous dites que vous ne
prévoyez pas de rencontre avec eux avant le mois de février.
Est-ce que je vous ai bien compris?
M. Fournier: Sur la carte de compétence; je pense qu'il
faut quand même comprendre qu'on organise un congrès pour la fin
de janvier. Cela demande de la préparation pour les assemblées,
les ateliers de travail, etc. Justement, les entrepreneurs de lignes vont se
rencontrer à ce moment, cela sera un des sujets à discuter. A
partir de février, on sera en mesure de continuer les discussions avec
les montants donnés.
M. Burns: D'ici ce temps, vous n'en prévoyez pas?
M. Fournier: Malheureusement, nous sommes le 15, notre
congrès est dans une semaine et demie. C'est difficilement possible dans
le temps.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, je n'ai pas de question à
poser, parce que nous avons, devant nous, je pense bien, des gens bien
patients, comme tous ceux qui ont présenté des mémoires et
tous ceux qui sont ici. On a tous hâte d'entendre la voix du ministre
pour nous dire quelles sont les décisions que le gouvernement
prendra.
Je veux seulement souligner un point à votre attention, parce que
cela sera consigné au journal des Débats. Vous avez dit, à
la fin: Messieurs les membres de la commission, suite aux décisions que
vous prendrez. On ne prend pas de décisions, nous, les membres de la
commission. Je veux tout simplement le souligner à votre attention. Je
vous dis cela tout bonnement. Ce ne sont pas les membres de la commission qui
vont prendre les décisions. Je pense que les décisions sont
déjà prises.
M. Fournier: Je vous remercie du renseignement.
M. Roy: On discute ici tout simplement pour attendre un peu les
réponses du ministre. D'ailleurs, il y a quelqu'un qui a souligné
tout à l'heure que les décisions étaient prises.
M. Burns: Ce que le député de Beauce-Sud demande,
M. le ministre, à ce stade-ci, maintenant que... A moins qu'il y ait
quelqu'un qui ait d'autres questions...
Le Président (M. Séguin): II y en a un autre, c'est
pour cela que je vous interromps. Le député d'Iberville.
M. Tremblay: Seulement une remarque, M. le Président. M.
Fournier, vous avez peut-être oublié de spécifier que le
minimum de 50 heures en vigueur chez vos membres, c'est pour compenser les
trois mois ou trois mois et demi de travail où vous avez des mises
à pied, à toutes fins utiles. 40 semaines à 50 heures ou
50 semaines à 40 heures, cela fait 2,000 heures quand même.
M. Fournier: En fait, ce n'est pas pour compenser les mises
à pied. Par exemple, un travail d'asphalte, vous ne pouvez le faire que
l'été.
M. Tremblay: Même à cela, cela vous donne une
comparaison avec les autres travailleurs de la construction, qui font, en
moyenne, 2,000 heures par année.
M. Fournier: Certainement, quant aux... M. Tremblay: C'est
sur ce que je...
M. Fournier: ...heures de nos opérateurs. Prenez, par
exemple, les chiffres moyens qui nous ont été fournis par la CSD
pour l'opérateur de machinerie lourde, l'opérateur de pelle,
l'opérateur de grue et le mécanicien de machinerie lourde. Sans
me tromper, c'est pratiquement supérieur à tous les salaires
moyens dans la construction, sauf peut-être les plombiers ou
électriciens, mais c'est certainement supérieur...
M. Tremblay: Mais le fait de demander aux gens, qu'ils ont
accepté d'ailleurs dans leur convention collective, de travailler un
minimum de 50 heures par semaine, c'est en prévision, justement, des
intempéries, des accidents de la nature et de telles choses.
M. Fournier: Oui, parce que la période...
M. Tremblay: II y a trois mois d'hiver finalement où il y
a des mises à pied qui se font dans les compagnies de pavage. On le
sait.
M. Fournier: Oui. La production est très courte,
évidemment.
M. Tremblay: D'accord! Ce n'est que là-dessus que je
voulais...
M. Fournier: Comme j'ajoutais tantôt, la plupart des
compagnies, grâce à l'équipement dont elles se servent pour
la construction, peuvent, durant l'hiver, faire des travaux de
déneigement. Alors, si on regarde les statistiques qui nous sont
fournies par la Commission de l'industrie de la construction, elles ne donnent
que la partie de la construction. Le salarié, dans au moins 50% des cas,
continue de travailler durant l'hiver, ce qui lui rapporte un revenu
additionnel, mais qui n'apparaît pas, nécessairement, dans les
statistiques.
M. Tremblay: Ce que je voulais vous faire dire surtout, c'est que
cela n'était pas 50 heures par semaine... Ce n'était pas
exagéré sur le rendement, parce qu'il y a des profanes qui vont
dire: Comment se fait-il que ces gens travaillent 50 heures par semaine et que,
dans la construction, c'est une semaine de 40 heures? Est-ce que ce sont des
"drivers", etc? Il faut peut-être expliquer aux gens qui vont lire dans
les journaux que la semaine de...
M. Fournier: II faut dire qu'auparavant c'étaient 60
heures. Cela a été diminué à 50 heures. Il y avait,
évidemment, eu un phénomène de négociations,
à un certain moment, où les heures ont été
réduites.
M. Tremblay: Je vous aide à protéger votre image.
M. Cournoyer: C'est une remarque excellente.
M. Fournier: Dommage que les journalistes ne l'aient pas
prise!
M. Burns: Merci bien.
Le Président (M. Séguin): Le député
a-t-il terminé ses questions? Oui?
M. Tremblay: Oui.
Le Président (M. Séguin): Vous avez terminé.
J'ai interrompu deux membres de la commission tout à l'heure pour donner
la parole au député d'Iberville, pour entendre ses questions. Je
redonne donc le droit de parole au député de Beauce-Sud...
M. Roy: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): ...et après vous,
sans vous répondre, je reviendrai au député de
Maisonneuve.
M. Roy: On aimerait savoir...
M. Burns: Je pense qu'après que le député de
Beauce-Sud aura posé sa question, je n'aurai pas besoin d'en poser parce
que je pense que c'est la même.
M. Roy: La question qu'on veut poser, que je veux poser au
ministre est celle-ci: Je veux savoir si la décision est prise et quelle
est-elle? Je pense que c'est le but des deux journées de travaux de la
commission parlementaire. Tout le monde a été entendu. Les neuf
organismes ont présenté leur mémoire. On aimerait bien
savoir, parce qu'il circule des rumeurs à l'intérieur de cette
enceinte selon lesquelles déjà, depuis un certain temps, les
décisions seraient prises.
M. Cournoyer: La décision n'est pas prise et,
immédiatement après cette séance, je me rendrai
auprès du premier ministre pour discuter avec lui de la décision
à prendre.
M. Burns: Vous allez vous rendre auprès du premier
ministre. Vous dites cela comme si vous alliez à son chevet.
M. Cournoyer: Comme si c'était le
lieutenant-gouverneur.
M. Burns: En vertu de la loi 201, M. le ministre, c'est sur votre
recommandation que le lieutenant-gouverneur en conseil peut modifier, abroger,
prolonger, toute la bebelle. Mais, pour le bénéfice des membres
de la commission, pour le bénéfice encore également de
certaines parties représentatives qui sont encore ici j'en vois
quelques-unes êtes-vous en mesure de nous dire quelle serait,
à ce moment-ci, votre recommandation si vous aviez à en faire
une?
M. Cournoyer: C'est celle qui sera acceptée par le conseil
des ministres, s'il l'accepte, bien entendu.
M. Burns: Non. Je ne vous demande pas ce que le conseil des
ministres va faire ou va dire. Je conçois très bien que, si la
décision n'est pas prise encore, comme elle ne devrait pas l'être
d'ailleurs parce que la loi prétend que vous devez consulter avant que
la décision ne soit prise...
M. Cournoyer: Je dois entendre auparavant...
M. Burns: ...Vous devez entendre les parties, ce que nous venons
de faire.
M. Cournoyer: C'est cela.
M. Burns: Peu importe ce que fera le conseil des ministres. Je
sais bien que vous ne pouvez pas lier le cabinet; mais vous-même, M. le
ministre, qui avez la responsabilité de l'application de cette loi, qui
avez la responsabilité d'une recommandation au conseil des ministres,
êtes-vous en mesure, à ce stade-ci, de nous dire quelle serait
votre recommandation si vous aviez à en faire une?
M. Cournoyer: II y a deux façons de lier un conseil des
ministres, c'est de lui faire une recommandation publique qu'il n'a plus le
pouvoir de rejeter.
M. Burns: II pourrait toujours faire cela, il a
déjà outrepassé certains de vos avis.
M. Cournoyer: Cela est arrivé souvent, mais rarement
lorsque je les avais faits en public. J'ai toujours fait mes avis réels
en public après avoir consulté le conseil des ministres. Dans les
circonstances actuelles, ayant entendu toutes les parties, je recommanderai au
conseil des ministres la meilleure attitude à prendre, et c'est lui, le
conseil des ministres, qui décidera en définitive.
M. Burns: Pouvons-nous quand même avoir une indication sur
lé moment où le conseil des ministres rendra publique sa
décision?
M. Cournoyer: Quant à la rendre publique,
j'espérerais que ce soit ce soir, mais je ne veux pas limiter la
discussion du conseil.
M. Burns: Mais on peut s'attendre à ce qu'au plus tard
demain on soit en mesure de savoir...
M. Cournoyer: C'est une décision que le gouvernement
considère comme urgente dans un sens ou dans un autre. En
conséquence, il prendra sa décision aujourd'hui ou demain. Mais
la réunion du conseil des ministres devrait commencer dans quelques
minutes.
M. Burns: Mais on peut s'attendre à ce qu'une fois la
décision prise, elle sera rendu publique, même avant les
proclamations requises dans la Gazette officielle du Québec, etc?
M. Cournoyer: Dans ce sens-là, oui.
Maintenant, je ne dis pas que le conseil des ministres n'a pas, cet
après-midi, étudié une proposition qui n'a pas
été formelle, cependant. Je n'étais pas là,
j'étais ici et je n'ai signé aucune recommandation encore au
conseil des ministres.
Le Président (M. Séguin): Alors, messieurs... M.
Burns: M. le Président, une dernière question.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Roy: M. le Président, avant, nous avons la visite du
premier ministre...
M. Burns: Ah! Nous allons avoir la décision. M. Roy:
Nous pouvons... Une Voix: II n'a pas le droit de parole. Le
Président (M. Séguin): Je regrette. M. Roy: Nous
pouvons lui accorder.
Le Président (M. Séguin): Justement, messieurs, une
décision a été prise, hier. On a dû refuser la
permission à plusieurs députés de parler ou de poser des
questions. Or parmi ces députés, il y avait le chef de
l'Opposition, le premier ministre et d'autres députés. Alors, je
ne reviendrai pas sur cette décision prise, hier, à l'occasion de
cette séance de la commission du travail.
M. Burns: Une dernière question, M. le Président,
pour le ministre.
Le Président (M. Séguin): Posez la question, mais
il ne répondra pas.
M. Burns: II a déjà partiellement répondu
à une question à laquelle il ne voulait pas du tout me
répondre. Alors je m'essaie sur une deuxième. Dans le cas de
United Aircraft, quand va-t-on siéger?
M. Cournoyer: Aussitôt que possible. M. Burns: C'est
sérieux?
Le Président (M. Séguin): Je considère que
la question est hors du mandat de cette commission.
On me permettra, au nom des membres de la commission et en mon nom
personnel, de remercier M. Fournier et les huit autres qui ont voulu
présenter des mémoires. J'espère que la décision
sur tout cela saura vous plaire. Je vous remercie de votre
coopération.
La commission ajourne ses travaux sine die. C'est le terme
habituellement employé, mais en réalité, c'est la fin du
mandat de cette commission.
(Fin de la séance à 19 h 40)