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Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration

Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le mercredi 28 mai 1975 - Vol. 16 N° 112

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère du Travail


Journal des débats

 

Commission permanente du travail,

de la main-d'oeuvre et de l'immigration

Etude des crédits du ministère du Travail

Séance du mercredi 28 mai 1975

(Dix heures dix-sept minutes)

M. Séguin (président de la commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration commence l'étude des crédits budgétaires du ministère du Travail. Les membres de la commission pour la séance de ce matin: MM. Bellemare (Johnson), Bérard (Saint-Maurice), Boudreault (Bourget), Burns (Maisonneuve), Charron (Saint-Jacques), Ciaccia (Mont-Royal), Cournoyer (Robert Baldwin), Déziel (Saint-François), Harvey (Charlesbourg), Lachance (Mille-Iles), Lecours (Frontenac), Malépart (Sainte-Marie), Roy (Beauce-Sud), Ostiguy (Verchères).

Le rapporteur serait qui, messieurs?

M. Harvey (Charlesbourg); Le député de Bourget, un excellent porte-parole.

Le Président (M. Séguin): M. BoudreauIt (Bourget) sera rapporteur pour la commission. Nous ajournerons nos travaux à midi, sur la demande du ministre, qui a une occupation ailleurs à ce moment-là.

M. le ministre.

M. Harvey (Charlesbourg): On aura peut-être terminé à ce moment-là! Il faudrait quand même noter l'absence des membres de l'Opposition, M. le Président, si le ministre le permet. Je ne sais pas et je ne voudrais pas les accuser de mauvaise foi en étant absents ce matin. Dans leur opinion, il devait peut-être s'agir de la commission qui étudie le rapport Cliche, puisque nous avons siégé hier et ajourné sine die. Ce matin, nous avons l'étude des crédits, selon le mandat reçu par la Chambre; je ne vois aucune espèce d'explication maintenant. Je peux peut-être qualifier cela de mauvaise foi, leur absence, si on tient compte de leur façon de s'exprimer hier et surtout de bouder la commission parlementaire. Je trouve que leur geste était condamnable hier et qu'il l'est davantage ce matin, puisque nous avons comme mandat d'étudier les crédits du ministère. C'est mon opinion, M. le Président.

Le Président (M. Séguin): Vous avez droit à votre opinion. Je n'ai pas d'autre commentaire à faire que celui d'indiquer que la commission siège avec quorum. Sans plus de préambule, la parole est au ministre.

Exposé général du ministre

M. Cournoyer: Je n'ai pas l'habitude, M. le Président, de faire une revue de ce que le minis- tère a fait. Et peut-être que, dans les années passées, on m'a reproché de ne pas dire ce que nous faisions dans ce ministère, au début de l'étude des crédits. C'est une occasion qui m'est donnée de vous donner une indication non seulement générale, mais très précise également de ce que nous faisons au ministère.

Il n'y a pas, comme vous le savez, que cet iceberg qui fait que nous sommes toujours dans le milieu des conflits. Il y a, bien sûr, en plus de ça, un certain nombre d'autres choses que nous faisons régulièrement et qui ont le privilège de passer inaperçues, vu le fait qu'il y a tellement de problèmes qui font surface. On oublie qu'il y a d'autres choses qui se font dans le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. J'aime à le rappeler de temps à autre.

Dans la direction générale de la recherche, disons qu'au point de départ, nous avons, au ministère, cinq grandes sections, cinq grandes directions générales: la direction générale de la recherche, la direction générale des normes, ladirection générale du travail, la direction générale de l'inspection et la direction générale de la main-d'oeuvre.

Au titre de la recherche, les travaux de l'année dernière ont été relativement discrets mais comportent certaines approches fondamentales qui permettront à ceux qui continueront d'oeuvrer dans le ministère du Travail de faire un meilleur travail et surtout d'avoir une meilleure information sur certaines choses qui existent.

Nous avons donné à la direction générale de la recherche le mandat d'étudier particulièrement la rationalisation du revenu dans la construction. Je sais que dans le rapport de la commission Cliche il y a une série de recommandations qui portent essentiellement sur la garanti du revenu du travailleur de la construction.

Si vous avez lu le rapport, il y a trois catégories de personnes auxquelles la commission Cliche s'attarde particulièrement, de façon différente. Elle classerait les travailleurs en trois catégories. Pour eux qui ont participé à des nombres d'heures différents dans l'année qui précède, le programme suggéré par la commission Cliche comporterait qu'on garantirait ou on assurerait le revenu qui ressemble un peu au revenu annuel précédent, même si la personne ne trouvait pas d'emploi régulier qui lui permettrait de remplir la même somme de travail que l'année d'avant.

Cela est une suggestion que la commission Cliche fait à la suite d'études qui ont été commandées par la commission Cliche et dont j'espère, bientôt, nous aurons copie.

En même temps que cette étude se faisait par la commission Cliche, suivant l'autorité de la commission Cliche, la direction générale de la recherche, chez nous, faisait l'étude de la provenance des revenus des travailleurs de la construction. L'étude de la provenance des revenus des travailleurs de la construction, pour nous, répond à un besoin d'une sécurité de revenu accrue chez le travailleur de cette industrie et à une stabilisation de l'industrie. Un rapport est en voie de rédaction en ce qui concerne trois sources de revenu de

la part de ces travailleurs: ceux tirés du secteur de la construction, ceux tirés d'autres secteurs d'activités et, bien sûr, les prestations d'assurance-chômage.

Par ailleurs, on vise aussi à prévoir le niveau des activités pour les prochaines années. C'est une autre tranche, en fait, du rapport de la commission Cliche concernant la planification des travaux de construction, soit gouvernementaux, soit de l'entreprise privée, soit de gouvernements municipaux. Vous retrouvez encore une série d'observations et de recommandations de la commission Cliche dont le service de recherche n'a pas fait état, étan donné que ces études ne se sont pas faites sur une base parallèle. Des études, au ministère du Travail, se faisaient et la commission Cliche avait l'autorité de chercher ce qu'elle voulait chercher et de la manière qu'elle voulait le chercher.

Je ne voudrais pas que ceci soit interprété comme un double emploi. Je veux juste mentionner que ce que nous faisons comme recherches en matière de rationalisation des revenus des travailleurs de la construction n'est pas incompatible avec ce que la commission Cliche a entrepris elle-même. Cela vise essentiellement à la même chose, mais, comme la commission Cliche avait l'autonomie de décider de l'ampleur ou de la façon de faire ses recherches, nous n'avons pas cru bon de l'assujettir à des recherches faites au ministère du Travail. Nous avons voulu qu'elle soit totalement indépendante du ministère du Travail quitte à comparer, lorsque les deux études seraient terminées, les résultats. Probablement qu'on ne peut pas arriver à d'autres choses qu'aux mêmes méthodes.

Quand on parle ici, au service de la recherche, d'en arriver à planifier non seulement pour voir à ce que les travailleurs aient une sécurité du revenu, mais qu'on dit que cette sécurité du revenu doit être aussi garantie par une sorte de stabilisation de l'industrie, on parle essentiellement de la même chose que la commission Cliche dans un groupe de recommandations qu'elle a faites. A ce sujet, on a identifié une soixantaine de responsables de projets de construction à qui on a administré un questionnaire. Le questionnaire est à dépouiller maintenant, tandis qu'on vise à améliorer l'échantillon de l'enquête en collaboration avec le BSQ.

Ceci nous permettra d'en arriver à la structure des occupations puis de lui appliquer éventuellement les années disponibles concernant les prévisions de la demande de travail.

Le service de recherche a également fait et fait périodiquement l'étude de l'impact du salaire minimum. Cette étude périodique est effectuée en vue d'aider la préparation des ordonnances de la Commission du salaire minimum. Elle consiste à évaluer l'impact d'une hausse donnée du salaire minimum sur la masse salariale des différents secteurs de l'économie, ainsi que le nombre de personnes qui seraient touchées par cette hausse. Il s'agit également de traduire les hausses en pourcentage des coûts totaux ou des ventes dans les différents secteurs, afin d'estimer la répercussion possible de la hausse du salaire sur les prix. Il y a eu remise à jour des calculs d'impact vers la fin de l'année financière. Les résultats ont été intégrés à l'étude du groupe de travail dirigé par M. Caston-guay sur la politique du salaire minimum. De plus, on reprend ces calculs sur la base des dernières données disponibles.

J'ai fait imprimer dans la revue Travail-Québec cette étude en particulier. Je ne sais pas si les députés ont reçu copie de cette étude. De toute façon, c'était destiné à la consommation publique dès que le rapport Castonguay a été rédigé et terminé.

Il y a aussi la relance du salaire minimum. Les études d'impact sur le salaire minimum ne peuvent mesurer que les effets directs sur les salaires et les prix. Les effets indirects doivent l'être par des enquêtes auprès des firmes avant et après une hausse donnée du taux du salaire minimum. La relance comprend donc deux phases. La première enquête sur le terrain a permis de recueillir des renseignements sur 854 entreprises. Ces données sont prêtes en ce moment à être exploitées. La seconde enquête a fourni des renseignements sur 785 entreprises et ces données sont à l'étape du travail informatique. Les résultats concernant les deux enquêtes seront normalement livrés au cours du prochain exercice et devraient constituer un support appréciable aux prochaines révisions du salaire minimum.

M. Harvey (Charlesbourg): Si le ministre me le permet, je voudrais faire amende honorable à l'endroit du député de Maisonneuve, parce que nous avons remarqué son arrivée tout à l'heure. Dans son cas, je m'excuse d'avoir gratuitement laissé porter une accusation de mauvaise foi, puisque nous avons dû, par un quorum majoritairement ministériel, entamer l'étude des crédits et, quelques secondes plus tard, le député de Maisonneuve est arrivé. Je voudrais, à son endroit, m'excuser et faire amende honorable.

M. Burns: Je remercie le député de Charlesbourg.

M. Cournoyer: La politique du salaire minimum. Il s'agit d'études effectuées en collaboration avec le groupe de travail présidé par M. Castonguay concernant l'élaboration d'une politique de salaire minimum au Québec. La direction générale de la recherche a été chargée de l'examen des effets économiques du salaire minimum, des clauses non salariales qui pouvaient être incluses dans la loi, d'une étude des législations en la matière, dans les autres provinces et pays, ainsi que d'un historique de l'évolution de cette législation au Québec.

Les études sont terminées et le groupe de travail a remis son rapport aux autorités du ministère, lequel rapport a été publié récemment. C'est une autre tranche de ce dont je vous parlais tantôt.

Il y a aussi les statistiques du travail. Afin de

pouvoir alimenter nos études à l'aide de données détaillées et récentes, un comité de la direction générale de la recherche et du BSQ a été formé pour tenter d'ajuster les enquêtes réalisées par Statistique Canada et le Bureau de la statistique du Québec à nos besoins et orienter les enquêtes futures. Ce comité s'est réuni à quelques reprises au cours de l'année et un travail conjoint est en cours en ce qui concerne les enquêtes sur la structure des occupations ou métiers par secteur et par région. Cette structure des occupations au Québec est essentielle à la plupart des recherches sur le monde du travail.

Dans le domaine des décrets, il s'agit d'études plus ou moins poussées dans certains secteurs dans le but d'aider à la direction générale des normes à prendre position lorsqu'un décret arrive à échéance ou que des problèmes particuliers se posent. En 1974/75, on a procédé à une enquête par questionnaire dans le secteur de la coiffure. L'échantillon comprenait 252 personnes de Québec, employeurs, salariés et artisans, et 303 de Montréal. Cette enquête a fait l'objet d'un rapport en avril I974. On a également effectué cette année une brève enquête dans les secteurs de la robe et de la lingerie afin d'aider à trancher un litige chez les parties portant sur le champ d'application de deux décrets; le décret, j'imagine, du tricot et le décret de la confection pour dames. Ce travail est terminé.

Dans le but de savoir si la protection de tous les travailleurs est assurée par les présentes normes de travail et s'il n'y a pas lieu d'améliorer le système actuel, la direction générale de la recherche a procédé à une étude comparative des normes générales et industrielles, décrets, ordonnances et le "industrial labor standards" au Québec, dans les autres provinces canadiennes, aux Etats-Unis et au Bureau international du travail. L'étude a donné lieu, d'abord, à une série de tableaux concernant les normes minimales, lesquels tableaux ont été publiés au cours du dernier exercice. Un rapport intégral, assorti d'autres tableaux et annexes, a également été produit, le tout devant être publié au début de l'été I975, donc très bientôt.

Nous avons fait une étude aussi sur la participation des femmes au marché du travail. Ce projet vise, dans un premier volet, à connaître les caractéristiques principales de la main-d'oeuvre québécoise afin de juger, entre autres choses, de la pertinence ou de l'impact des lois et d'aider à les mieux adapter aux besoins. On donne comme exemple ici le projet du Conseil du statut de la femme. Les principales variables étudiées sont la croissance des taux d'activité, le taux de participation selon l'état civil par groupe d'âge, le niveau d'instruction et la distribution des travailleurs par profession.

Un second volet de cette étude concerne des problèmes particuliers de la main-d'oeuvre féminine, par exemple: la parité salariale, les congés de maternité, les garderies et tout ce qui ressort habituellement des problèmes des femmes dans la province de Québec lorsqu'elles désirent travailler.

On a ainsi procédé, en 1974/75, à un sondage auprès de certains organismes de la fonction publique québécoise afin de connaître les besoins en matière de garderies sur les lieux de travail. On a communiqué avec 7,000 fonctionnaires et, parmi eux, 244 parents de jeunes enfants nous ont fait connaître leurs besoins en cette matière. Un rapport a été remis aux autorités à ce sujet.

Il y a eu l'enquête CMT-200 qui a été réalisée à l'été de I973, qui a porté sur un échantillon d'environ 4,500 établissements et qui visait à recueillir une information générale et statistique sur le monde du travail. La direction générale de la recherche a poursuivi l'ensemble du travail en 1974/75. Les données de l'enquête ont été dépouillées en grande partie et ont fait l'objet de deux documents: répartition des jours fériés, payés selon le nombre d'établissements et d'employés touchés, et répartition des employés réguliers selon le statut bureau ou hors-bureau et le sexe.

La direction générale de la recherche fait aussi l'analyse des conventions collectives, mais cette activité vise à fournir aux conciliateurs, aux chercheurs et aux parties intéressées des renseignements de base en ce qui a trait au contenu des conventions collectives. L'analyse quantitative des conventions est réalisée avec l'aide du Centre des relations industrielles de l'université McGill et en consultation avec le service de conciliation du ministère. Ce type d'analyse a été révisée en profondeur cette année afin de compléter l'information et d'en améliorer la présentation. C'est ainsi que l'on a ajouté les clauses salariales à l'ensemble des autres: vacances, heures de travail, sécurité d'emploi, avantages sociaux, procédures de griefs. Un vaste secteur a été analysé cette année suivant cette nouvelle formule à titre de secteur pilote. Il s'agit de l'ensemble des conventions collectives du secteur municipal au Québec: policiers, pompiers, cols blancs et cols bleus. Les renseignements sont classés suivant ces quatre catégories de personnel et indiquent toutes les modalités prévues dans les conventions suivant la taille de la ville et le nombre des syndiqués dans l'unité de négociation.

Enfin, une demande spéciale de renseignements de la part du groupe de travail dirigé par M. Castonguay a été acheminée à la banque de données de l'université McGill. On a ainsi pu tirer des renseignements précis sur 17 sous-secteurs industriels concernant certains bénéfices sociaux qui font d'ailleurs l'objet de recommandations de la part de M. Castonguay dans le rapport qui vous a été également distribué.

Les conventions collectives font également l'objet d'une analyse d'ordre qualitatif par l'intermédiaire du laboratoire d'analyse des conventions collectives de l'université Laval. En 1974/75, un rapport a été remis concernant les clauses de sécurité d'emploi en regard des changements technologiques, ce qui découle principalement des problèmes de fermeture d'établissements ou de modernisation donnant lieu aux mises à pied.

Il y a le calendrier des expirations des conventions collectives. Cette activité permet de publier

chaque année la date d'expiration des conventions collectives par secteur. Des renseignements particulièrement utiles aux conciliateurs et aux négociateurs sont traités par ordinateurs et sont présentés suivant diverses variables: entreprises et syndicats en cause, régions, etc.

Et, finalement, le recueil de jurisprudence. Ces recueils périodiques répondent depuis déjà plusieurs années à un besoin d'information de la part des arbitres de griefs, des négociateurs et des chercheurs.

Chaque publication rapporte les conflits les plus intéressants, de façon intégrale, à la suite de l'exposé sommaire du cas. Des index analytiques sont offerts à chaque numéro et une consolidation annuelle est publiée à la fin de l'année.

Rappelons le titre de ces publications: Sentences arbitrales, Griefs, Tribunal du travail et Décisions des commissaires enquêteurs.

Par ailleurs, le service des études juridiques s'est rendu à Genève, afin de communiquer avec divers représentants du Bureau international du travail et échanger des expériences en matière de jurisprudence et de droit du travail. Plusieurs études ont déjà été reçues du BIT, lesquelles constitueront un appui considérable à la recherche. On peut mentionner entre autres les documents suivants: Recueil de jurisprudence publiée à l'étranger; Résultats d'enquêtes à l'étranger sur la liberté syndicale; La situation des législations concernant le salaire minimum; Les études portant sur l'inflation et les relations professionnelles.

Nous avons aussi une analyse des infractions pénales dans les lois du travail. Ce projet comportait deux phases. La première envisageait de dresser un tableau comparatif Québec-Ontario-Canada, des infractions pénales des lois du travail, ainsi que des peines prévues. Cette étape est terminée.

La seconde phase avait pour objet de dégager les principes fondamentaux qui pourraient sous-tendre la politique ministérielle sur le sujet. Un rapport sur le sujet a été transmis aux autorités du ministère, au cours de l'année.

Statistiques sur l'arbitrage des griefs.

Le but de ce projet est de cerner les difficultés pratiques en matière d'arbitrage de griefs, les nominations des arbitres, les disponibilités ministérielles, l'enregistrement des sentences, des plaintes, etc. Pour ce faire, une série de tableaux ont été confectionnés, à partir des statistiques existantes, et ont fait l'objet d'analyses. Un rapport statistique a été présenté au Conseil consultatif du travail et de lamain-d'oeuvreetdoitservirentreautresà la confection de la liste annuelle des arbitres de griefs. On envisage par ailleurs, la publication annuelle de ce rapport statistique.

Activités à court terme: Analyse du projet de modification du code du travail. Le service des études juridiques a analysé le projet de modification au code du travail et a soumis ses commentaires aux autorités du ministère.

L'analyse des projets présentés par l'Office de révision du code civil: Un service d'étude juridique a examiné et commenté divers rapports pro- venant de l'office, tels le rapport concernant le contrat de société, le rapport du comité des états civils, le rapport sur l'enregistrement des personnes et le rapport sur la famille.

Le but est d'informer les autorités du ministère du développement de ces questions, en regard des matières sous leur propre responsabilité.

Nous avons également fait une étude sur la promotion des cadres. Ce projet, confié à l'extérieur, vise à recueillir des renseignements "factuels " sur les politiques de promotion des cadres. La recherche est basée sur une enquête reposant sur les réponses des cadres à un questionnaire. Le rapport est attendu au cours de l'été 1975.

Nous avons le service des études en main-d'oeuvre. Dans ce service d'étude, l'un des principaux projets qui a été fait — j'ai le rapport sur le bureau, et j'ai demandé qu'il soit possiblement publié — c'est l'étude sur la semaine comprimée de travail. Cette recherche vise à connaître le phénomène de la semaine de travail comprimée au Québec ainsi que ses conséquences sur les travailleurs. Il s'agit, dans la perspective du rôle du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, de voir si ce phénomène n'entraîne pas des répercussions néfastes au niveau de la santé des travailleurs et, s'il y a lieu, de réviser les normes en ce qui concerne les heures de travail. La dimension psychosociale du phénomène est étudiée à la direction générale de la recherche, alors que les aspects économiques et physiologiques ont été confiés à l'extérieur, moyennant une coordination étroite des diverses approches.

A la fin de cet exercice, le projet en est à la phase de la cueillette des données à l'aide d'un questionnaire qui atteint 2,800 travailleurs au Québec. Par ailleurs, des tests physiologiques sont appliqués à un certain nombre d'entre eux. Les résultats finals devraient être produits au cours du prochain exercice. Il porte également sur les horaires flexibles qui ne sont pas les horaires comprimés. Cette recherche vise également à connaître le phénomène des horaires flexibles et ses conséquences sur le travailleur, particulièrement au niveau de la santé. En 1974/75 on a procédé à un recensement des entreprises expérimentales d'horaires flexibles ainsi qu'à une précision des étapes à venir.

En plus de cela, nous avons les analyses des profils occupationnels. Ce projet, confié à l'extérieur, vise à établir des profils psychologiques en fonction des professions de façon à pouvoir déceler à l'avance le rendement futur du travailleur dans une profession, à partir des critères retenus, aptitudes mentales, personnalité, caractéristiques personnelles et biographiques, motivation. L'étude est réalisée aujourd'hui dans le secteur de la forêt.

Propension aux accidents. Cette recherche vise à déceler les caractéristiques personnelles et les profils de personnalité qui font qu'un individu est plus affecté que d'autres aux accidents de travail, un peu comme c'est le cas dans d'autres types d'accidents. La recherche confiée à l'extérieur a débuté à la fin de l'exercice 1974/75 par une revue des connaissances sur le sujet et de définitions

plus précises de l'approche de la question. Le rapport final est attendu vers la fin de l'été 1975.

Recensement des normes de sécurité sur les chantiers de construction. Cette recherche vise à recenser l'ensemble des normes s'appliquant au secteur de la construction en matière de sécurité physique sur les chantiers. La recherche confiée à l'extérieur a débuté à la fin de l'exercice 1974/75 et s'oriente vers une période de renseignements sur le terrain. Je pense qu'il y a peut-être, encore là, une possibilité d'interprétation de double emploi avec ce que la commission Cliche a fait elle-même dans sa recherche sur la sécurité dans le cas des travailleurs de la construction. Je ne veux pas m'excuser, mais je dois me référer à des choses qui sont faites par la direction générale de la recherche, chez nous, indépendamment du mandat qui avait été confié à la commission Cliche et des études que la commission Cliche a voulu entreprendre de sa propre autorité, avec, bien sûr, le budget du ministère, mais de sa propre autorité. Je doute fort qu'il y ait incompatibilité entre les résultats de la commission Cliche ou de ceux qui ont recherché pour la commission Cliche et ceux qui font la recherche chez nous.

Taux d'activités des parents de familles à faible revenu et régime public de sécurité du revenu. Ce projet, confié à l'extérieur, a débuté en 1973 par la préparation et le test d'un modèle opérationnel en vue de répondre utilement à la question suivante: Dans quelle mesure les prestations de sécurité de revenu affectent-elles la décision des parents de familles à faible revenu de participer ou non au marché du travail? Les approches sont psychologiques, d'une part, et économiques, d'autre part. Le projet pilote doit donner lieu à un premier rapport en 1974 et l'enquête proprement dite réalisée auprès de 500 familles a été effectuée au cours de l'exercice 1974/75. L'analyse des résultats débute maintenant.

Je pense que la dimension de cette recherche va sauter aux yeux. C'est que , très souvent, vous avez des accusations globalisées ou généralisées de refus de travail à cause de prestrations sociales trop élevées. On dit que plus les prestations sociales augmentent, moins il semble que les travailleurs veuillent travailler. Ce n'est probablement pas la conclusion à laquelle nous en arriverons avec l'échantillonnage que nous avons fait ici. Il s'agit strictement non pas de répondre d'avance à la question posée ou à l'observation régulièrement faite, mais d'avoir l'instrument de réponse dans la recherche d'un revenu garanti dans la province de Québec ou dans le Canada. C'est un instrument de réponse dont nous avons besoin comme les autres instruments d'ailleurs que nous avons décrits ici dans le service de recherche du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Je m'excuse de répéter cela, c'est tout dire ce que le service de la recherche a entrepris et ce qu'il est sur le point de faire, mais je pense que c'est l'occasion de le faire on n'a jamais l'occasion d'entendre des questions des députés ministériels ou de l'Opposition sur ce que fait le service de recherche du ministère du Travail.

Il y a la sécurité sociale et le marché du travail. Ce champ d'études comprend d'abord la mise à jour de la documentation concernant les liens entre les régimes de sécurité sociale, l'aide sociale, l'assurance-chômage, les accidents de travail, les rentes du Québec et le marché du travail. Il vise également à développer les connaissances sur des questions plus particulières, telles celles de l'incitation au travail dans les régimes publics de sécurité du revenu. Un rapport descriptif sur cette question a été produit et remis en 1974/75. Je le note pour ceux qui veulent des fois avoir l'étude et ne savent pas que l'étude se fait. Vous pouvez toujours au moins la demander. Je n'ai pas de cachette là-dessus. Je peux au moins vous donner les résultats des études qui on été faites avec les fonds publics.

Il y a un autre projet: Situation et évolution du marché du travail québécois dans le contexte canadien. Ce projet vise à obtenir une vue d'ensemble du marché du travail québécois et à approfondir les mécanismes de son évolution. Pour ce faire, l'évolution de différentes variables macroéconomiques — pas économiquement macro — du marché du travail, est examinée tels que l'emploi, les salaires, la productivité, etc. En 1974/75, on a complété les informations statistiques nécessaires à ce projet et une banque de données a été constituée sur fichier mécanographique.

Perspectives d'évolution de la main-d'oeuvre québécoise par âge et par sexe pour 1981. Ce projet qui visait à des prévisions de main-d'oeuvre était basé sur des méthodes scientifiques de projection des taux de participation québécois et des volumes de main-d'oeuvre. Il reposait sur des projections de tendance démographique et d'un ensemble de d'autres facteurs socio-économiques pouvant influer sur la croissance de la main-d'oeuvre. Un rapport préliminaire a été remis vers la fin de l'exercice. De plus, afin d'échanger les expériences québécoises et françaises en ce qui a trait à l'estimation des besoins en main-d'oeuvre, on a rencontré en France une quinzaine d'autorités en la matière. Les grandes conclusions qu'on a tirées à la suite de cette mission, sont contenues dans un rapport remis au ministère. De nombreux documents sont reçus à la suite de cette mission.

Construction d'indicateurs de besoins en main-d'oeuvre. Cette recherche vise à éclairer la prise de décision concernant la formation professionnelle de niveau secondaire ou collégial en développant et en appliquant les indicateurs de besoins en main-d'oeuvre aux statistiques existantes. Un premier rapport a été produit en 1974/75, lequel constitue une phase exploratoire du projet. Le travail se poursuit à ce niveau. Par ailleurs, afin de compléter les sources et statistiques nécessaires au développement futur de ces indicateurs, on procède à une compilation des postes vacants à l'aide des annonces classifiées, ainsi que des relevés fournis par les centres de main-d'oeuvre du Canada.

Etudes sectorielles de main-d'oeuvre. Les problèmes de la main-d'oeuvre se posent souvent par secteur ou sous-secteur et il importe de mieux connaître, à plus ou moins long terme, le dévelop-

pement des situations par secteur. A ce sujet, des estimations de main-d'oeuvre quantitatives et qualitatives constituent un objectif de base impliquant l'aspect de la demande et l'aspect de l'offre de main-d'oeuvre. Ces estimations sont particulièrement utiles en matière de formation professionnelle.

Au cours de 1974/75, l'attention s'est portée en particulier sur deux secteurs: ceux de la construction et de la forêt. Encore une fois, je pense bien que, sans qu'il y ait double emploi, la commission Cliche a aussi, dans ses remarques et ses observations, de même que ses recommandations, un chapitre particulier, dont j'ai déjà parlé, sur les estimations de besoin de main-d'oeuvre, en construction en particulier et des recommandations de planification sont incluses dans son rapport. Nous devrons, dans très peu de temps, prendre des orientations sur l'acceptation ou le rejet des recommandations de la commission Cliche.

En construction, par exemple, on a cherché, dans ce secteur, à préciser la structure des occupations en vue d'établir des prévisions de main-d'oeuvre par occupation. Il y a eu des contacts, auprès du Bureau de la statistique du Québec, de statistique Canada et de la Commission de l'industrie de la construction afin de mettre au point une enquête auprès des responsables de projets de construction et d'évaluer le niveau des activités futures au Québec dans ce secteur.

Comme ce projet ne peut porter de fruits à court terme, on s'est orienté, vers la fin de l'exercice, vers une étude descriptive de l'offre de la main-d'oeuvre. En forêt, on a procédé, dans ce secteur, à l'examen critique de différentes études des prévisions en main-d'oeuvre, ainsi qu'à un travail d'obtention de données de diverses sources. Un lien a été assuré avec le conseil de la main-d'oeuvre de la forêt.

Diverses activités de la direction générale de la recherche se greffent au programme dont je viens de parler. On cite les activiés suivantes, à titre d'exemple: participation aux réunions du conseil d'administration de l'Institut de recherche appliquée au travail, participation des juristes aux travaux du comité de législation, liens réguliers avec le ministère de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration au sujet des professions désignées dans le cadre de l'immigration, lien avec un projet réalisé avec l'extérieur et consistant à une analyse des coûts-bénéfices des fermetures d'usines. De plus, collaboration avec le service des plans de carrières, dans le développement d'une méthode quantitative de validation des analyses de tâches, intégration du service des plans de carrières, au printemps 1975, ce qui vient de se faire; liens avec le responsable du programme de la préparation à la retraite, participation au comité Lapointe qui supervise une étude sur la coordination administrative en matière de sécurité et hygiène au travail ainsi que de normes et relations de travail On cite aussi un relevé des renseignements sur le travail dans des conditions d'éloignement et d'isolement pour la commission Pilote-Belleville, participation à la conférence sur les statistiques du travail de Statistique Canada, participation au comité inter- ministériel sur la main-d'oeuvre et l'emploi, discussion et coordination de programmes de main-d'oeuvre, en particulier, la formation des adultes et le programme de formation d'emplois communautaires. J'en passe pour le moment sur le chapitre.

Pour l'édification des gens, nous avons acheté pour $2,535 de volumes, dans la bibliothèque. C'est à peu près tout ce que j'ai à dire sur le service de recherche du ministère ou sur la direction générale de la recherche du ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre. Y a-t-il des questions à poser sur cet élément en particulier ou si vous entendez poser des questions sur le reste, d'une façon glc baie?

Je passerai donc, M. le Président, aux activiés de la direction générale des normes, pour 1974/75. C'est plus court, cette fois-ci. Nous avons, cette année, adopté 40 arrêtés en conseil, modifiant les décrets qui existent dans l'industrie, au Québec. Ce n'est pas seulement dans l'industrie de la construction qu'il y a des décrets. Dans toutes les autres industries, il y a eu 40 arrêtés en conseil adoptés, cette année. Il y a eu neuf refontes de décrets qui ont été préparées et acheminées au service des communications pour impression.

Vous savez que les décrets subissent régulièrement des amendements, à la demande des parties. Quand il y a consensus, habituellement, nous acceptons les amendements mais, finalement, vous avez des décrets qui sont épais comme cela, avec des feuilles plus ou moins détachées; des refontes, on en a fait neuf, cette année. La direction générale en a fait neuf. Huit de ces refontes sont maintenant disponibles et la dernière doit nous être livrée très bientôt; en fait, c'est une question d'impression, ce n'est pas autre chose que cela.

L'administration des comités paritaires. Pendant cette période, un total de 74 arrêtés en conseil touchant des statuts et règlements des comités paritaires ont été approuvés. Ces arrêtés en conseil se répartissent comme suit: neuf approuvant de nouveaux statuts ou modifiant des constitutions et règlements déjà existants; seize approuvant ou modifiant les règlements spéciaux tels que tenue du registre, rapport mensuel et frais de déplacement; 49 approuvant des règlements de prélèvement pour chacun des comités paritaires. Trois comités paritaires ont été liquidés au cours de cet exercice financier; ce sont ceux du verre, région de Québec, du gant de cuir et du commerce des taverniers, région de Québec.

De plus, le décret de l'imprimerie de la région de Québec ayant cessé d'exister le 30 septembre 1974, le comité paritaire chargé de son application a été également liquidé. Cependant, cette liquidation se continue toujours étant donné les poursuites et réclamations encore en suspens. C'est-à-dire que cela n'a pas été totalement liquidé, les obligations et les droits devant être exercés, encore une fois, par les liquidateurs officiels.

Les visites aux comités paritaires sont effectuées régulièrement pour vérifier les prévisions budgétaires, les données contenues dans les rapports annuels des représentants des parties

contractantes, etc. D'autres visites sont rendues nécessaires à la suite de la réception de plaintes pour fournir de l'aide technique aux administrateurs ou encore pour procéder à des ententes de service entre comités quant aux procédés administratifs. Le nombre de ces visites est donc relatif aux besoins des comités paritaires.

M. Burns: J'aurais juste une question, là-dessus, au ministre. Je n'ai pas l'intention de revenir là-dessus, on est aussi bien de s'en débarrasser tout de suite. Dans les cas de telles liquidations, si jamais il arrive qu'il y a des fonds qui sont encore disponibles et au crédit du comité paritaire en question, comment met-on en application le re-tour à des organismes semblables ou à des sources...?

M. Cournoyer: On a un lot de comités paritaires; par exemple, l'imprimerie, à Québec. Admettons que, le décret de l'imprimerie étant tombé, il y ait liquidation parce qu'il n'y a plus de décret. Admettons que les parties contractantes au décret de l'imprimerie — d'ailleurs, elles ont manifesté le désir de recommencer un système de décret qui n'incorporerait pas, par exemple, l'imprimerie des hebdos ou des choses comme cela, la question des journaux hebdomadaires — les parties en viennent à une entente, l'argent qui reste est habituellement versé au fonds consolidé de la province et pour remplir des fins similaires. On ne peut pas l'utiliser... Du moins, s'il y avait un organisme qui avait des fins similaires... Est-ce qu'on l'a déjà fait?

M. Burns: Par exemple, il y a quelques années, vous aviez les employés de l'alimentation au détail, à Joliette, qui ont décidé de mettre fin à leur décret et il n'y a pas eu de remplacement. Il y a peut-être eu les syndicats qui se sont formés individuellement mais il n'y a pas eu de remplacement au point de vue du décret. Dans des cas comme celui-là, comment agit-on?

M. Cournoyer: L'argent s'en va au fonds consolidé. En fait, c'est un fonds spécial qui se trouve à servir de façon légale, je pense, en fiducie. Il n'appartient pas au fonds consolidé proprement dit, c'est un fonds en fiducie qui est détenu pour remplir des fins similaires. Il peut arriver, par exemple, qu'un comité paritaire, qui a des dettes, la balance soit le contraire, c'est-à-dire...

M. Burns: Que ce soit le fonds qui paie.

M. Cournoyer: A un moment donné, on est tenu, nous autres — je pense qu'on l'a fait à deux ou trois reprises — de compenser à même ce fonds qui est, en fait, un fonds de la loi des décrets de convention collective de compenser certaines dettes qui ne doivent pas émerger au budget général de la province, mais qui émergent aux budgets généraux des comités paritaires. Dans ce sens-là, cela joue dans les deux sens. Il y a certains comités paritaires qui, lorsqu'ils ont été abolis, ont laissé un certain nombre de dettes.

M. Burns: Peut-être que le ministre n'est pas celui à qui je dois poser cette question. Est-ce qu'on a idée de l'importance de ce fonds, en fidéicommis, relativement aux liquidations des différents organismes semblables? C'est peut-être au ministre des Finances que je devrais poser cette question: Est-ce qu'il est sous l'administration du ministre des Finances, ce fonds?

M. Cournoyer: II est sous l'administration du ministre des Finances, mais on me dit, du moins ceux qui sont chargés de l'administration ici, que c'est entre $300,000 et $400,000, mais c'est un maximum de $500,000...

M. Burns: Bon.

M. Cournoyer: ... qu'il y aurait actuellement.

M. Burns: C'était surtout cela, un ordre de grandeur.

M. Cournoyer: Nous passons maintenant à la direction générale du travail qui est peut-être la plus évidente, celle qui semble être la seule préoccupation du ministre. Pour la période 1974/75, ici, je n'ai pas de bonnes nouvelles.

M. Burns: Qui est la seule.

M. Cournoyer: Ce n'est pas la seule, je tiens à vous dire cela. C'est votre opinion, mon cher confrère.

La période de 1974/75 a été, pour le monde des relations du travail, l'une des plus agitées qu'ait connues le Québec depuis longtemps. C'est une constatation que vous aviez faite comme député.

M. Burns: C'est ce qu'on peut appeler "the understatement of the year".

M. Cournoyer: C'est la plus agitée qu'on ait eue depuis longtemps. C'est parce qu'il y a plus de syndicats qu'il n'y en avait. Depuis que l'accréditation va mieux, il y a plus de syndicats qu'il n'y en avait. Donc, on a plus de monde qui négocie des conventions collectives qu'avant.

M. Burns: C'est cela.

M. Cournoyer: Les proportions étant ce qu'elles doivent être habituellement, les gens qui ont un droit nouveau l'exercent, qu'est-ce que vous voulez? Je trouve cela bien normal que les gars qui ont un droit l'exercent de temps en temps. D'ailleurs, les activités du service de conciliation et d'arbitrage du ministère du Travail, surtout les interventions conciliatrices, viennent confirmer de façon fort éloquente cette conclusion.

Ainsi, le nombre de cas référés au service de conciliation durant la période 1974/75 a enregistré un accroissement de l'ordre de 8.2%, passant de 1,335 cas pour 1973/74 — là, je voudrais bien mentionner qu'il n'y a pas que les cas où le ministre est "poigné", il y en a 1335 cas — à 1,455.

M. Burns: II y en a 35 où le ministre ne s'est pas mis le nez.

M. Cournoyer: Je prends cette observation comme n'étant pas gratuite, mais payante en désespoir. S'il faut qu'il n'y en ait que 35 où je ne me sois pas mis le nez, que fis-je cette année?

M. Burns: Vous n'avez sûrement pas légiféré, en tout cas.

M. Cournoyer: C'est sur le point de. M. Burns: Sauf sur des cas spéciaux.

M. Cournoyer: De ces 1,455 cas soumis à la conciliation, je voudrais mentionner très fort que 1,092 ont été réglés suite aux interventions du conciliateur, sans intervention du ministre, parce que ces gens-là font leur travail, leur boulot régulièrement, dans l'ombre. Ainsi, il doit être retenu que, compte tenu de la conjoncture actuelle où les règlements sont de plus en plus difficiles — on doit le dire —le service de conciliation a néanmoins réussi à régler 75% de ces 1,455 cas qui lui ont été référés. Les règlements deviennent de plus en plus difficiles et la conjoncture est là. Tout en ne faisant pas de politique ce matin, de petite politique, que voulez-vous, c'est une conjoncture qui fait que les gens sont mal à l'aise. Ceux qui ont le droit et l'organisation pour les défendre réagissent; cela devient plus difficile de faire des règlements.

Nous estimons que ce résultat, en soi, constitue à lui seul un témoignage fort éloquent de l'efficacité du travail de nos services de conciliation — les places où le ministre est intervenu, il n'a pas encore réussi; j'aime mieux parler de ceux qui ont réussi quelque chose que des places où moi, je n'ai pas réussi — et de ceux qui le composent.

Arbitrage. Le nombre de différends soumis à l'arbitrage, de 33 cas enregistrés l'an dernier, est passé à 31 cette année. Cela, ce sont les pompiers qui n'y sont pas allés et les policiers non plus.

M. Burns: Ce sont des cas où vous êtes intervenus malgré l'arbitrage.

M. Cournoyer: Oui, mais ils ne sont pas allés à l'arbitrage, cette année. Cela fait deux cas de moins d'arbitrage. Ceux qui exècrent le système d'arbitrage voient une tendance marquée vers la réduction du nombre d'arbitrages.

M. Burns: C'est bon signe.

M. Cournoyer: Les grèves. L'agitation ouvrière que nous avons connue durant la période 1974/75 s'est traduite par un accroissement de 25% dans le nombre de grèves, par rapport à la même période l'an dernier.

M. Burns: L'indexation.

M. Cournoyer: Surtout. Il y a eu l'indexation, mais il y a eu plusieurs grèves illégales.

M. Burns: Comptez-vous les grèves illégales ou prétendues illégales?

M. Cournoyer: Non, je ne les regarde pas, celles-là.

M. Burns: D'après vos statistiques, il y a seulement les grèves en vertu...

M. Cournoyer: Légales.

M. Burns: ... des dispositions de la loi.

M. Cournoyer: Mais l'indexation était là aussi dans le cas des grèves légales. La plupart des cas de grèves illégales, ce sont des gens qui avaient signé leur convention collective à peu près un an avant qu'on ne sente, d'une façon définitive, l'augmentation rapide du taux d'inflation. Ceux qui avaient signé six mois avant, ils avaient peut-être des prévisions différentes et il y a eu moins de problèmes là. Mais, quand est arrivé le temps de signer des conventions renouvelées dans cette année-là, le problème de l'indexation, qui était aigu pour ceux qui avaient déjà des conventions collectives, prenait une acuité encore plus grande pour ceux qui étaient en voie d'en signer une.

La demande ne se faisait pas sentir d'une façon différente non plus, quoique c'était légal. Ils étaient en droit de le demander et de l'obtenir s'ils voulaient.

M. Burns: Est-ce qu'on a des statistiques précises sur les causes générales des arrêts de travail? C'est peut-être assez difficile à sortir du problème.

M. Cournoyer: C'est pas mal difficile, cela.

En fait, vous le savez, il peut y avoir dans chaque cas un ensemble de causes. Une cause peut être facilement identifiée pour qu'on dise: C'est celle-là. Mais, dans le fond, tu réglerais celle-là que dans l'ensemble tu ne réglerais pas ton problème non plus. Tu seras obligé d'expliquer la grève par l'ensemble et non pas un comportement, par exemple.

M. Burns: Bien souvent, dans un cas de grève, on peut mettre le doigt sur trois ou quatre problèmes importants.

M. Cournoyer: Oui, trois ou quatre problèmes importants.

M. Burns: Je veux dire, si on a des statistiques relativement à ce type de problème...

M. Cournoyer: Je peux demander au conciliateur, par exemple, de faire l'analyse ou faire des examens de cadavres après. Pourquoi y a-t-il eu une grève dans cette affaire? Il y a de plus en plus, selon notre appréciation, où on en est beaucoup plus qu'aux statistiques, un affrontement presque constant, selon la nature des relations qu'on a eues pendant la durée de la convention précédente. La durée de la convention précédente de-

vrait normalement indiquer aux employeurs et aux syndicats que c'est elle qui fait qu'on peut s'entendre facilement à la fin, beaucoup plus que tel point en particulier. C'est que les gens sont habituellement choqués. S'ils ne font pas de gestes illégaux pendant la durée de leur convention collective, ils se préparent le voyage à la fin de la convention collective, lorsqu'ils auront le droit légal de faire la grève. Très souvent, c'est un climat général qui est la cause de la grève. Avant même de s'aventurer dans le fond, c'est-à-dire ce qui est le plus apparent, l'identification, par exemple, de l'indexation, avant de s'aventurer là, il faut ôter les autres affaires qui font que, même si on réglait l'indexation, on n'aurait pas réglé le problème après. Quand on a identifié le problème comme étant celui de l'indexation. Je ne veux pas parler d'un cas qui s'appelle United Aircraft mais, les six points étant maintenant réglés, on a le problème du retour au travail. Mettons cela, en particulier. En fait, on est allé discuter le problème du retour au travail proprement dit; c'est un point de la convention, comme on se l'est déjà dit. Mais avec combien de griefs à être réglés à l'occasion de la signature d'un protocole de retour au travail, les griefs qui provenaient des derniers mois de la convention collective qui est expirée en 1973 et qui avaient eux-mêmes été le résultat de l'existence d'un climat relativement malsain à l'intérieur de la compagnie.

M. Burns: II y a le problème d'approche de la part du management aussi.

M. Cournoyer: Certainement.

M. Burns: II est bien clair que c'est une histoire qui remonte à 1967 et peut-être même avant.

M. Cournoyer: Avant cela, dès le début. Il y a l'autre cause générale...

M. Burns: En 1967 c'était le moment où cela a peut-être été plus souligné.

M. Cournoyer: II y a l'autre cause générale, si vous me permettez cette observation, encore une fois, au pifomètre. La grande difficulté d'accréditation — c'est-à-dire si le syndicat a eu de la difficulté à être accrédité — ne cause pas nécessairement une grève, mais elle aussi est indicative du genre de relations de travail que nous vivrons par la suite, lorsque le syndicat sera accrédité, conformément aux lois du Québec. Plus c'est difficile, plus des obstructions ont été faites, quand la décision du commissaire-enquêteur arrive, on a déjà créé un climat tel qu'on ne veuille pas se regarder trop trop bien, étant donné la bataille de naissance, ce conflit de naissance; le bébé est bleu en arrivant. Si vous me comprenez bien, c'est un conflit de naissance.

M. Burns: C'est un cas de siège.

M. Cournoyer: C'est un cas de siège et un cas de siège cela prend un docteur pour arranger cela. Heureusement que nous avons d'excellents conciliateurs chez nous. Ils ne restent pas tous bleus.

M. Boudreault: Cela devient difficile de faire l'avortement.

M. Cournoyer: II y en a qui viennent rouges.

Donc l'agitation ouvrière dont je parlais tantôt s'est soldée par un accroissement de 25% dans le nombre de grèves légales, par rapport à la même période, l'an dernier.

Ainsi des 194 grèves enregistrées à pareille date, l'an dernier, ce nombre s'est accru à 264, durant l'année 1974/75. Je préfère ne pas utiliser le jour/homme perdu. C'est une méthode de calcul qui est assez intéressante, mais il me semble qu'elle est injuste, pas pour nous, mais il me semble qu'il est injuste de comparer jour/homme perdu. Si je prends la grève de United Aircraft ou encore celle de Canadian Gypsum, à chaque semaine, à United Aircraft, 2,300 personnes, pendant un an de temps perdaient 40 heures, mais ce n'était qu'une cause de grève. Mais quand vous calculez d'une façon globale le nombre de jours/hommes perdu et que vous dites: Cela va mal, je trouve que c'est identifier le problème de façon trop globale. Je dis: Ecoute, cela ne va pas si mal que cela, même si tu compares le nombre de jours/hommes perdus avec celui de l'Ontario, par exemple. En Ontario il pourrait arriver qu'il y ait 75 grèves et je n'en ai qu'une qui me donne exactement le même nombre de jours/hommes perdus et elle n'a qu'une cause chez nous. En Ontario, il y en a 75.

M. Burns: De toute façon le ministre sait sans doute que depuis de nombreuses années, le nombre de jours/hommes perdus à cause des grèves est habituellement inférieur, peut-être sauf une année — je pense que c'est 1971 ou 1972 — aux jours/hommes perdus pour des raisons d'accidents de travail. C'est assez intéressant comme statistique.

M. Cournoyer: En ce sens, oui.

M. Burns: Je veux dire, il y a plus de gens qui perdent du travail, il y a plus de jours/hommes perdus pour des raisons d'accidents de travail que pour des raisons de grèves. On fait souvent des montagnes avec les grèves puis avec le nombre de jours/hommes, d'heures/hommes perdus, mais effectivement quand on s'arrête à un autre problème du milieu du travail qui est drôlement important, celui des accidents du travail, on s'aperçoit que cela a une importance telle que c'est encore plus important, au point de vue de la perte en jours/hommes.

M. Cournoyer: Je pense bien que cela, il faut le mentionner et il faut le répéter. C'est à l'occasion de cette discussion qu'il m'est permis de le faire. Le nombre de jours/hommes perdus par accidents de travail équivaut, et il est même supérieur du côté des accidents de travail, quand on le calcule. Mais on sait qu'il y a plusieurs causes, dans le cas des accidents de travail, tandis que dans le cas des grèves, vous pouvez les identifier. Je n'ai que 194 grèves. Ce n'est pas drôle pour les

194 grèves, mais quand on dit que le système est mauvais, je dis: Posez-vous des questions. Il y a 1,335 cas soumis à la conciliation, donc 75% ont été réglés en conciliation. Cela, indépendamment de ceux qui ne sont pas venus en conciliation, parce que les parties ne viennent pas toutes en conciliation. Elles règlent leurs problèmes.

M. Burns: Ce n'est pas moi qui vais vous engueuler là-dessus, M. le ministre.

M. Cournoyer: Je le sais.

M. Burns: J'ai toujours pensé qu'on pourrait appliquer au milieu du travail l'expression: Les peuples heureux n'ont pas d'histoire. On n'entend jamais parler des nombreuses conventions collectives qui se signent sans aucun conflit, sans difficulté. Malheureusement, on est porté à l'oublier. Les gens qui mettent l'accent sur les grèves, la prépondérance de ces conflits de travail, etc., oublient souvent le fait que de nombreuses fois, dans la grande majorité des cas, il y a des relations normales qui s'exercent entre patrons et syndicats et qui sont tout à fait dans l'intérêt des travailleurs et souvent dans l'intérêt de l'entreprise aussi.

M. Cournoyer: Malheureusement, nous avons plutôt tendance à nous regarder sous le mauvais jour. Certaines provinces du Canada ont tendance aussi à nous regarder sous le mauvais jour, à nous regarder en disant: Voici la paille qu'il a dans son oeiï. Mais on ne peut voir que la paille étant donné la poutre que nous avons dans le nôtre. Je ne veux pas faire de commentaires désobligeants chez mes voisins de l'Ontario, mais chaque fois que nous avons une grève ici, elle prend des dimensions en Ontario qui n'ont aucune correspondance avec la réalité que je vis comme ministre du Travail. C'est dans ce sens que parfois je me rebelle, non pas contre nos journalistes, mais contre les journalistes qui écrivent dans le Globe and Mail et qui écrivent dans le Toronto Star qu'au Québec, ça va mal.

M. Burns: On ne peut pas dire que ça va bien.

M. Cournoyer: Mais à chaque fois qu'il y a une grève...

M. Burns: Ils n'ont pas tout à fait tort.

M. Cournoyer: M. le Président, à chaque fois... Oui mais ça va bien...

M. Burns: Vous voyez le bordel dans la construction. Il ne faut pas blâmer les journalistes.

M. Cournoyer: Non, mais il ne faudrait pas...

M. Burns: Je vais vous dire d'ailleurs tout à l'heure qui il faut blâmer.

M. Cournoyer: C'est moi. C'est à moi que vous vous adressez, donc, c'est à moi qu'il faut adresser les blâmes.

M. Burns: Vous en avez...

M. Cournoyer: Non, non. Je dis: C'est moi qu'il faut blâmer. Qu'est-ce que vous voulez, il y en a un qu'il faut blâmer et c'est aussi bien de prendre celui-là; il est capable de le prendre. De toute façon, qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse? Je vais régler le problème de la construction très rapidement avec le rapport Cliche dans les mains, avec ou sans votre collaboration, bien entendu. Mais il faudra le faire.

M. Burns: Vous avez notre collaboration toutes les fois où on pense que, véritablement, vou-voulez régler le problème. Quand on pense qu vous ne voulez pas le régler, on ne veut pas être des cautions du régime.

M. Cournoyer: Vous avez raison. Continuez comme ça; vous jouez votre rôle et moi, je joue le mien. Je respecte l'Opposition dans...

M. Burns: Bon.

M. Cournoyer: ... toutes les façons qu'elle juge de jouer son rôle.

M. Burns: Enfin, je vais pouvoir dormir ce soir; j'ai la bénédiction du ministre du Travail!

M. Cournoyer: Les caractères particuliers des conflits qui ont agité la scène des relations du travail durant 1974/75. Ces conflits offrent, comme vous me le demandiez tantôt, certaines particularités que ne souligne aucune statistique.

En effet, ces statistiques, qui, d'ordinaire, sont suffisantes pour esquisser les grandes lignes de la situation des relations du travail, réussissent mal, pour la période de 197'4/75, à faire ressortir clairement les principaux faits saillants qui s'imposent à notre attention.

Les positions des parties face à la conjoncture économique actuelle. La conjoncture économique trouble que nous connaissons présentement a fait, sinon se transformer, du moins se modifier les positions respectives des deux parties à la table de négociations. Du côté patronal, l'accroissement de l'indice du coût de la vie se traduisant par une augmentation du coût de production, ajouté à l'instabilité des marchés et au caractère récessif des économies en général a donné lieu à une opposition de plus en plus vive face aux demandes monétaires syndicales, généralement parlant.

Du côté ouvrier, la perte du pouvoir d'achat, occasionnée par l'augmentation incessante de l'indice du coût de la vie, a fait s'accroître ces demandes monétaires dans des proportions jusqu'ici sans précédent, les demandes étant jugées par eux comme correspondant, au moins, à l'augmentation du coût de la vie.

C'est pour la même cause, et pour des réactions identiques de part et d'autre de la table. Cette réticence de plus en plus marquée de part et d'autre, le caractère de plus en plus serré de la négociation, l'intransigeance de plus en plus marquée qu'affichent les parties, de même que les

écarts de plus en plus considérables qui les séparent d'un règlement confèrent de plus en plus au service de conciliation une importance qui ne fait que s'accroître, à cause de ces écarts qui deviennent stigmatisés dès le point de départ de la négociation.

L'importance croissante de la conciliation et les problèmes qui en résultent. Le caractère de plus en plus ardu de l'intervention du conciliateur, qui se traduit par une augmentation incroyable de démarches nécessaires à un règlement, impose au personnel du service de conciliation, autant conciliateurs qu'employés de soutien, un accroissement du fardeau de travail qui dépasse l'entendement. Je suis obligé de le noter. Trop fréquemment doit-on, pour rencontrer les demandes de conciliation, assigner à un même conciliateur plusieurs cas dans une même journée, alors que souvent un seul de ces cas nécessitera une intervention continue qui ne se terminera qu'aux petites heures du matin.

Il doit être également souligné que le rôle du conciliateur n'est pas et ne doit pas uniquement se limiter à la conciliation. Il doit, en plus, à titre de médiateur, intervenir lors des règlements de grèves. Chez nous, ils font une distinction entre la conciliation formelle, suivant le code du travail, la loi qui existe actuellement, c'est-à-dire la période de conciliation de 30 jours, et lerapport, qui est un rapport très simple, comme vous le savez, et qui dit: Bien, je n'ai pas réussi. Par la suite, la grève, si elle a lieu...

M. Burns: Souvent la réinsertion du conciliateur...

M. Cournoyer: A titre de médiateur. M. Burns: ... à titre de médiateur.

M. Cournoyer: C'est la même personne, habituellement, que nous retrouvons là.

M. Burns: D'ailleurs, M. le ministre, c'est peut-être la seule chose sur laquelle je peux vous féliciter. Ce n'est peut-être pas vous qui méritez les félicitations.

M. Cournoyer: Non, ce n'est pas moi; c'est mon ministère.

M. Burns: Mais je pense que votre service de conciliation mérite des félicitations, du directeur lui-même, M. Yvan Blais, en descendant. Je pense qu'en général, il y a un très bon travail qui se fait de ce côté, malgré les difficultés que vous mentionnez, c'est-à-dire le fardeau de travail très lourd qu'on impose aux conciliateurs, et malgré également les conditions de travail qui sont souvent très difficiles au point de vue des horaires, au point de vue des déplacements, etc.

M. Cournoyer: Oui.

M. Burns: Alors, je pense que cela vaut la peine de le souligner en passant. Je pense que ces gens font un très bon travail; on ne les mentionne pas assez souvent, malheureusement.

M. Cournoyer: Alors, c'est un peu pour ça que je fais ce genre de remarques lors de l'étude de mes crédits, aujourd'hui.

M. Burns: Oui.

M. Cournoyer: Parce que je veux que non seulement vous entendiez...

M. Burns: Profitez-en, c'est la seule fois où je vais vous féliciter.

M. Cournoyer: Je veux non seulement que vous m'entendiez mais que certaines autres personnes m'entendent également.

M. Burns: D'accord.

M. Cournoyer: Est-il nécessaire de souligner que, dans la conjoncture actuelle, ces interventions sont de plus en plus fréquentes et leur durée de plus en plus longue? A ces fonctions doit également s'ajouter la médiation spéciale. Ce genre d'intervention, commandée le plus souvent par le ministre ou le sous-ministre, quoique moins fréquente, n'est pas moins courante.

Jusqu'à présent, nous avons pu répondre à l'appel avec les moyens du bord. Cependant, il ne nous est pas permis de croire que l'on puisse continuer ainsi longtemps. L'accroissement incessant du fardeau de travail que l'on doit imposer à notre personnel ne peut plus se maintenir sans que ne soit affectée l'efficacité de nos interventions.

Ainsi, il serait aberrant qu'au moment même où la conjoncture des relations de travail impose comme un besoin impérieux la conciliation, au moment même où les parties s'en remettent de plus en plus à la conciliation pour convenir d'un règlement, au moment même où cette crédibilité que nous avons su bâtir et conserver contre vents et marées semble, de toute évidence, être reconnue d'une façon générale, alors que le caractère valable et la réputation du service semblent être confirmés par la confiance que nous témoignent les parties, il serait aberrant, dis-je, qu'à ce moment des organismes responsables de l'appareil gouvernemental soient les seuls à ne pas reconnaître l'importance croissante de notre service, ou, ce qui n'est guère concevable, reconnaissent l'importance de notre rôle mais ne nous reconnaissent pas les moyens de l'assumer.

Que l'on se tienne pour dit que le service de conciliation ne peut qu'être appelé à se développer et que cette expansion n'est pas un voeu pieux mais une éventualité qui n'échappe à personne, sauf peut-être à la fonction publique.

Que l'on retienne...

M. Burns: Est-ce qu'on peut s'arrêter pour souligner ce que vous êtes en train de dire...

M. Cournoyer: Oui, très calmement.

M. Burns: ... et insister sur le fait que la fonction publique ne comprend pas toujours les besoins de certains services du ministère du Travail?

M. Cournoyer: Et en particulier du service de conciliation.

M. Burns: Surtout du service de conciliation. C'est une indication directe au ministre de la Fonction publique de voir à ce que cet aspect soit réglé.

M. Cournoyer: Ou à la Commission de la fonction publique.

M. Burns: Bien, je pense que c'est un peu les deux parce que la politique de la fonction publique est défendue, très mal défendue d'ailleurs — cela me fait de la peine de le dire parce qu'il est absent mais, de toute façon, je le lui ai dit déjà, alors je n'ai pas l'impression de lui parler dans le dos — par le ministre de la Fonction publique.

Maintenant, c'est une question, à mon avis, d'atmosphère qui provient du gouvernement lui-même. En tout cas, je ne veux pas embarquer dans une discussion qu'on a déjà eue l'année dernière, mais je pense que c'est également le rôle de chacun des ministres qui siègent au cabinet de pousser sur cette attitude et non pas de passer à côté des règles habituelles pour satisfaire un besoin immédiat.

M. Cournoyer: Oui.

M. Burns: Je ne reviendrai pas sur le cas Laporte, ni quoi que ce soit. Mais...

M. Cournoyer: II ne le faudrait pas.

M. Burns: ... c'est l'exemple peut-être le plus flagrant d'un ministre qui veut régler son problème sans penser à l'envergure de l'ensemble du problème.

M. Cournoyer: Oui! Sur l'envergure du problème, je tiens a vous dire...

M. Burns: Toujours en disant à mon bon ami, Gilles Laporte, qu'il n'y a pas de doute, c'est un gars compétent. Bon. Ce n'est pas du tout sa compétence...

M. Cournoyer: Non.

M. Burns: ... qu'on discute à ce stade-ci. C'est une méthode de fonctionnement que je trouve absolument inacceptable...

M. Cournoyer: Oui, on en reparlera... M. Burns: ... et qui contribue justement... M. Cournoyer: ... si vous voulez.

M. Burns: ... à permettre à la Commission de la fonction publique et au ministre de ne pas réagir, de dire: Bien, oui, c'est ça, la solution est comme ça. Bien, cela coûterait pas mal plus cher si on voulait régler cela. Mais j'invite le ministre à agir de façon beaucoup plus radicale au cabinet.

M. Cournoyer: Ce que j'ai l'honneur de vous dire maintenant, c'est que j'ai bien mentionné, au point de départ, que je ne voulais pas seulement que cela tombe dans vos oreilles mais que cela tombe dans d'autres oreilles en même temps.

M. Burns: J'ai bien compris ça.

M. Cournoyer: Vous avez compris ça.

M. Burns: D'ailleurs, je pensais ajouter ma voix à la vôtre pour que cela tombe au moins dans deux oreilles.

M. Cournoyer: Mais c'est parce que j'ai peur que lorsque vous ajoutez votre voix à la mienne, la mienne devienne diminuée!

M. Burns: Vous pensez que cela ne tombe pas dans les mêmes oreilles quand c'est moi qui parle?

M. Cournoyer: II y a des...

M. Burns: II y a pourtant un ministre qui est bien content des critiques que nous faisons à l'endroit de son ministère parce qu'il a l'impression que cela aide.

M. Cournoyer: Ce n'est pas ça que je veux dire.

M. Burns: Je ne nommerai pas le ministre parce que c'est assez pour qu'au prochain remaniement ministériel il se retrouve adjoint parlementaire.

M. Cournoyer: Ce que j'essaie de vous dire, c'est que lorsque vous critiquez, ce n'est pas mal, mais quand vous êtes d'accord avec le ministre, là, cela devient "enfargeant"!

M. Burns: M. le ministre, je vais vous faire plaisir. Pour le reste des crédits, je ne serai jamais d'accord avec vous.

M. Cournoyer: Cela va être parfait, là je vais être bien! Je vais me retrouver dans mon élément, en face de vous.

M. Burns: Bien oui, c'est cela.

M. Cournoyer: Que l'on tienne cet essor... S'il est partiellement explicable par la conjoncture économique actuelle, il l'est surtout par l'efficacité de plus en plus reconnue de notre service. Pour mériter et maintenir cette réputation qui est l'oeuvre de plusieurs années de travail et d'efforts, il est essentiel que la fonction publique reconnaisse le

bien-fondé de nos demandes qui sont aussi impérieuses que le sont nos besoins. Ces demandes ont pour objet non seulement de maintenir notre réputation et notre efficacité, mais de nous permettre de répondre aux exigences futures qui laissent prévoir une expansion du service de conciliation. Face à cette situation, il est donc urgent non seulement d'accroître le nombre de conciliateurs, mais surtout d'accroître le traitement offert aux futurs candidats. C'est à cette seule condition qu'il nous sera possible de recruter des candidats dont la formation et l'expérience seront de nature non seulement à assurer, mais à accroître le prestige du service. Je dois dire que l'an dernier, à cause des règles, nous avons réussi à dénicher deux conciliateurs et, lorsque nous leur avons, par le truchement de la Commission de la fonction publique, offert les traitements, ils se trouvaient à être inférieurs à ceux qu'ils gagnaient déjà. En appliquant des règles de professionnels, les règles des professionnels ordinaires du gouvernement, on s'est donc placé dans la conjoncture de ne pas être capable de retenir les services de ces personnes, parce que ceux avec qui nous sommes en concurrence, jusqu'à un certain point, pour obtenir du personnel de cette qualité, semblent avoir beaucoup plus de facilité que nous à payer les gens d'une façon telle que notre offre...

M. Burns: Notre bataille de salaires, par exemple, est considérable.

M. Cournoyer: Le maximum, c'est 20.

M. Burns: 20?

M. Cournoyer: $20,000.

M. Burns: Dans le monde syndical, il y a très peu de représentants syndicaux qui gagnent cela.

M. Cournoyer: C'est un peu pour cela que...

M. Burns: Sauf, qu'il y a, évidemment les bénéfices marginaux. Je vois le sous-ministre qui me fait signe qu'il y a autre chose. C'est un fait qu'il y a des bénéfices marginaux qui, évidemment, viennent compléter la valeur des fonctions dans le milieu syndical.

M. Cournoyer: C'est un peu pour cela, M. le Président, qu'on accuse très souvent le ministère du Travail de n'employer que d'anciens syndicalistes comme négociateurs. C'est que, d'abord, il y a l'expérience dont...

M. Burns: II n'y a pas un avocat syndical qui va y aller à ce prix-là.

M. Cournoyer: ... il faut tenir compte. Ce ne sont pas nécessairement des avocats...

M. Burns: non.

M. Cournoyer: ... mais l'expérience...

M. Burns: Du côté patronal, ce sont habituellement des avocats qui sont spécialisés ou des diplômés de relations industrielles qui se spécialisent et qui, déjà, gagnent beaucoup plus que cela pour une entreprise.

M. Cournoyer: C'est cela. J'explique donc, sans vouloir me défendre de cela, comment nous cherchons des gens qui ont l'expérience de la négociation. Parce que pour s'asseoir entre deux parties, il faut quand même avoir été dans le milieu, il faut voir ce que c'est et, surtout, pouvoir déceler rapidement les difficultés de l'une et l'autre partie. De plus en plus, la difficulté principale, c'est de déceler la difficulté de l'agent d'affaires syndical. Parce que ceux qui ne comprennent pas — et je le dis encore une fois d'une façon honnête, même pour mes confrères ici — qu'un agent syndical n'est pas un directeur autocratique et qu'il doit répondre à une assemblée générale s'imaginent des choses qui n'existent pas selon le ministre du Travail. De moins en moins, nous avons de ces directeurs, des dirigeants syndicaux qui peuvent, par leur seule capacité d'expression, vendre n'importe quoi à un groupe de syndiqués réunis en assemblée générale. Les syndiqués sont beaucoup plus alertes qu'ils ne l'étaient. J'imagine qu'ils comprennent mieux les textes des conventions collectives, mais lorsqu'ils ont demandé quelque chose, l'agent syndical est très souvent... Cela devient de plus en plus fréquent que l'agent syndical s'essaie en assemblée générale et qu'il soit rejeté, pas comme agent syndical, mais que le règlement qu'il propose de faire soit rejeté par une assemblée générale et il n'est pas du tout l'ingénieur du rejet. On va lui prêter cela le lendemain, mais, d'une façon générale, il n'est pas l'ingénieur du rejet, il est de bonne foi. Aussi, quand un conciliateur ne comprend pas cette difficulté, il ne comprend pas une dimension principale du rôle de ceux qui représentent les salariés.

Il doit comprendre cela. C'est pour cela que peut-être, du côté du service de conciliation du ministère, la nature de l'origine de nos conciliateurs, qui est plutôt syndicale que patronale, leur permet d'effectuer plus de règlements que s'ils avaient une formation strictement universitaire, sans l'expérience requise et la connaissance des milieux dans lesquels ils se trouvent à évoluer malgré eux, c'est-à-dire non seulement à une table de négociations, mais à cet ensemble qui est derrière chaque table de négociation et surtout l'ensemble syndical qui est derrière la table de négociations syndicales, en particulier.

Lorsque nous disons que nous devons accroître le prestige de notre service, ce n'est pas parce qu'il n'est pas bon actuellement, mais compte tenu de ce que nous prévoyons comme participation, nous devons accroître les revenus de nos conciliateurs pour les garder, pour garder ceux que nous avons, parce que ces gens sont soumis aux mêmes lois d'offre et de demande que ceux avec qui nous faisons affaires, ce qui n'est pas nécessairement vrai du cas de tous les professionnels du gouvernement. Ceux-là, en particulier nos

conciliateurs, sont assis dans le milieu de parties qui les examinent et qui examinent leur comportement. Vous avez des offres qui viennent de la part de la compagnie X, Y ou Z à nos conciliateurs. Je ne parle pas nécessairement d'offres d'achat, d'offres d'argent, de pots-de-vin, ce n'est pas cela du tout, mais d'une offre de l'employé après que la conciliation est terminée.

M. Burns: En compétition avec le marché du travail.

M. Cournoyer: On est en concurrence avec le genre de personnes qui sont là, ce qui n'est pas nécessairement vrai du cas de tous les professionnels du gouvernement. Quand on prend comme règle que les conciliateurs sont des professionnels, que leurs conditions de travail sont identiques à tous les professionnels du gouvernement, cela veut dire qu'on a établi une norme, que cette norme est proche d'une moyenne, mais que, dans le cas de la recherche de ce genre de personnes, et particulièrement en 1976/77 et dans les prochaines années, la recherche de personnes de la qualité de nos conciliateurs fera que, si nous n'augmentons pas leur salaire et ne considérons pas les conciliateurs comme étant une catégorie de professionnels spéciale — que d'autres ministères fassent des catégories spéciales, ils feront leur propre argumentation, c'est leur problème — si on ne fait pas une catégorie spéciale de salaires pour nos conciliateurs, dis-je, on se retrouvera avec moins de conciliateurs de la nature de ceux que nous avons, leur expérience les ayant placés en face de personnes qui peuvent leur donner beaucoup plus pour cette expérience en particulier.

D'autre part, nous avons de la concurrence dans la recherche du genre de conciliateurs et l'attirance du monde, de ces personnes qui sont de plus en plus rares. On ne peut pas continuer d'espérer que nous pourrons recruter des gens qui, du jour au lendemain, se retrouvent au milieu des parties. On ne peut pas dire qu'on va former des conciliateurs à l'université, ce n'est pas vrai. Dans mes livres, cela ne se fera pas, peut-être plus tard, on va donner une formation de base, mais l'expérience dans cela est cent fois plus importante que les seuls qualifications académiques. Le directeur du service chez nous est un ancien chauffeur d'autobus, comme vous le savez.

M. Burns: Caissier d'autobus.

M. Cournoyer: C'est-à-dire caissier d'autobus. C'est le directeur du service qui fait son travail d'une façon, comme vous l'avez mentionné tantôt, merveilleuse, en autant que le ministre est concerné et que le sous-ministre est concerné. Il n'est pas un diplômé d'université. Il ne fait pas affaires avec des diplômés d'université, il fait affaires avec du monde — comme la CSN se plaît à le dire — bien ordinaire. Plus il est ordinaire, mieux c'est pour le règlement de certains conflits. C'est vrai pour la plupart des conciliateurs que nous avons. Je crois opportun de le mentionner. Si on recherche des diplômes et qu'on qualifie nos gens en fonction des diplômes qu'ils ont et qu'on n'est pas capable de les payer en fonction du pouvoir qu'ils ont d'avoir une "job" plus payante, parce que d'autres se préoccupent moins des diplômes, dans les deux prochaines années, nous perdons la crème de nos conciliateurs au profit soit de l'entreprise privée, soit du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral aussi a certains problèmes de relations de travail et certains problèmes de conciliation. Les taux de salaires qu'il offre sont tellement, nettement supérieurs à ceux que nous offrons que notre recherche ou notre marché sera bientôt encombré.

M. Harvey (Charlesbourg): Cela semble être plus qu'une occupation, même une inquiétude, de votre part, mais, comme suggestion pratico-pratique, soit au ministre de la Fonction publique ou à la commission du même nom, qu'est-ce que vous-même suggéreriez dans un tel cas?

M. Cournoyer: Cela a déjà été suggéré, et l'expression que j'ai ce matin ne vient que renforcer ce que nous avons déjà demandé à la Commission de la fonction publique et au ministère de la Fonction publique de même qu'au Conseil du trésor.

M. Harvey (Charlesbourg): L'an dernier, lors de l'étude des crédits, vous aviez opiné dans le même sens ou à peu près sur la qualité des personnes-ressources et sur l'importance de les bien payer, justement à cause de la concurrence qui existe dans ce domaine et aussi la spécialisation de l'individu. Idéologiquement, comment verriez-vous l'établissement d'une échelle de salaire pour qu'elle soit proportionnel le à ce qui se fait dans l'entreprise privée, peut-être même supérieure?

M. Cournoyer: Sans vouloir créer de précédent, car, apparemment, il ne faut pas créer de précédent, ce vers quoi nous devrions tendre, ce sont des ajustements de salaire qui tiendraient plus compte de la concurrence que nous affrontons, de l'équilibre chez nous, sans pour autant payer plus cher.

M. Burns: Je peux vous signaler, M. le ministre, que vous n'êtes pas le seul ministère ainsi affecté; je pense au ministère du Revenu, par exemple, où on agit véritablement comme une école de formation pour le gouvernement fédéral. Nos agents-vérificateurs, au Québec, sont en général payés 50% de moins que les agents-vérificateurs qui font exactement la même fonction au fédéral. Et l'on se demande comment il se fait que le ministère du Revenu, au Québec, est moins efficace que le ministère du Revenu au fédéral. J'ai souvent eu des révisions de cotisation par le fédéral, mais je n'en ai jamais eu par le provincial. Je ne l'invite pas à le faire, remarquez, mais c'est tout de même un signe, et je ne suis pas le seul à noter cela. Sur le plan de l'efficacité, on se rend compte également que le ministère du Revenu fédéral donne une réponse beaucoup plus rapide à une

demande de révision de cotisation, ou encore à une demande de remboursement ou quoi que ce soit. C'est un phénomène qui, à mon avis, dénote une espèce d'absence de flexibilité dans la politique salariale au Québec. On a l'impression que, parce qu'une certaine politique salariale a été établie, cela va nuire aux négociations que de dire: Pour telle fonction, c'est évident que nous sommes en dehors du marché. Le cas des conciliateurs est un exemple peut-être aussi flagrant que celui des agents-vérificateurs. Il me semble que c'est une question de mentalité qui doit être mise de l'avant à l'approche de la révision de certaines catégories de salaires. Cela est vrai pour les conciliateurs, c'est vrai pour les agents-vérificateurs, mais cela est aussi vrai pour l'ensemble de la catégorie des professionnels, où nous sommes constamment obligés de faire appel à l'extérieur, à des contractuels, des gens qui ne sont pas des permanents de la fonction publique. Je ne m'embarquerai pas dans tout le champ des possibilités de patronage, mais cela existe tout de même. Je me demande jusqu'à quel point il n'y a pas des gens qui voient à ce que les choses se passent ainsi; mais, au ministère du Travail et au service de conciliation, il n'y a pas de raison que cela se fasse ainsi; il n'y a pas de contrats, ou très rarement, qui sont confiés à l'extérieur, à des gens pour aller concilier dans tel ou tel conflit.

M. Cournoyer: De moins en moins, c'est-à-dire que nous n'en avons pas, nous.

M. Burns: Mais il y en a eu.

M. Cournoyer: II y a eu, je pense, seulement le cas de la United Aircraft, avec M. Dufresne, l'an dernier.

M. Burns: Mais les supermédiateurs que l'on amène à un moment donné, ça...

M. Cournoyer: Les autres...

M. Burns: J'aurai une question à vous poser là-dessus lorsque vous aurez terminé votre exposé relativement au service des...

M. Cournoyer: On a parlé du service de conciliation, mais j'aimerais aussi y revenir plus tard non pas au service de conciliation mais à tout le service du droit d'association, j'aimerais vous indiquer où nous en sommes dans le service du droit d'association.

M. Burns: Est-ce que je puis, dès maintenant, vous poser une question...

M. Cournoyer: Sur la conciliation.

M. Burns: ... sur la conciliation? Vous connaissez, M. le ministre, notre préoccupation exprimée à plusieurs reprises d'ailleurs, depuis que vous êtes ministre, depuis 1971, relativement à la création d'un pool, si je puis m'exprimer ainsi, de supermédiateurs, de personnes ayant le pres- tige, l'expérience, la qualité qui sont requis pour intervenir dans les conflits où tout a été fait normalement, selon les services habituels de la conciliation.

Je pense, par exemple, à un personnage souvent utilisé au niveau fédéral, M. Cari Goldenberg, ou en tout cas d'autres personnes comme le juge Montpetit qui, à de nombreuses reprises, a été utilisé comme l'espèce de solution de dernier recours alors que tout a été fait, normalement à l'intérieur des services habituels.

Je suis de ceux qui pensent que le ministère devrait se réserver les services d'un certain nombre de personnes, pas à temps plein, mais de personnes qui seraient en disponibilité, triées sur le volet, utilisables dans des conflits. Par exemple, dans le cas de United Aircraft on a utilisé M. Dufresne pour une raison bien spécifique, soit parce que M. Dufresne a déjà l'expérience en matière de génie industriel etc. Je ne suis pas certain — ce n'est pas une critique à l'endroit de M. Dufresne — que c'était la personne toute désignée pour s'occuper du conflit de United Aircraft, eu égard aux problèmes qui se posaient à United Aircraft. Si on avait— et cela ne veut pas dire que M. Dufresne, d'autre part, ne devrait pas intervenir dans ces cas, je veux qu'on me comprenne bien, ce n'est pas une critique à l'endroit de M. Dufresne qui, d'autre part, est un ingénieur industriel très compétent et qui connaît le milieu des relations de travail— à un moment donné, une espèce de pool de supermédiateurs, considérés comme tels par le ministère, que ces personnes se considèrent comme étant en disponibilité éventuelle auprès du ministère, il me semble qu'on pourrait dire: II y a dix personnes qui ont le prestige, les qualifications, les connaissances pour intervenir dans un conflit et qu'on puisse en arriver à choisir, au bon moment, la bonne personne pour intervenir dans tel dossier.

Le ministère pense-t-il à mettre sur pied, sinon un tel service, du moins une telle organisation qui serait, à mon avis, supplétive aux services de bonne qualité qui sont donnés par les conciliateurs?

M. Cournoyer: La difficulté d'établir un tel service est que son existence même au service amènerait peut-être un certain nombre de parties à oublier qu'il y a des gens qui sont conciliateurs et qui vont faire leur travail. C'est une difficulté, je pense bien, que vous avez sans doute remarquée. Dès que vous faites quelque chose d'extraordinaire — quand je dis extraordinaire, ce n'est pas parce que c'est quelque chose d'extraordinaire, mais c'est "extrastructure", si vous voulez — il y a une sorte d'invitation qui se fait à tout le monde d'amener leur conflit en dehors de la structure. C'est un reproche que vous me faites assez souvent.

M. Burns: C'est d'ailleurs un des reproches que je vous fais, à vous, peut-être que vous intervenez — non seulement peut-être, j'en suis convaincu — de bonne foi dans les dossiers où

vous intervenez personnellement. Mais, à un moment donné, cela peut créer justement, le traumatisme de dire: On va laisser faire M. Untel, M. Untel qui est conciliateur. De toute façon, le ministre va intervenir éventuellement. Je pense que ce n'est pas dans ce sens que je l'approche parce que l'intervention qu'on attend de vous et qui, dans le fond — je le dis sans arrière pensée — nuit peut-être à l'approche qu'on peut avoir au service de conciliation, est une intervention qui a un caractère politique, forcément puisque vous êtes un ministre. Mais, d'autre part, quand je parle d'un service de superconciliateurs cela n'a pas ce caractère d'intervention politique. Je pense à la fameuse grève de 1967 quand vous parliez des autobus tout à l'heure, la grève qui a donné lieu à l'adoption du projet de loi no 1 qui était la loi assurant les services des transports dans la ville de Montréal. Pendant cette grève on a utilisé deux espèces de superconciliateurs. Il y a eu le juge Chevalier dont la première intervention, à quelques jours de la grève, a été un échec.

A la suite de l'adoption du projet de loi, on a utilisé le juge Ouimet, dont l'intervention s'est soldée par une convention collective, à toutes fins pratiques, négociée entre les parties malgré la loi. C'est à cause de son tact, à cause de sa connaissance du milieu, à cause de sa façon de travailler. Evidemment, je vous parle de juges, ce sont les seuls que nous connaissons actuellement. Mais il devrait, je pense, y avoir auprès du ministère une recherche de ce côté de personnes-ressources à être utilisées, non dans le but de dire aux parties: N'utilisez pas nos services de conciliation normaux. Il ne faut pas s'imaginer, ni du côté syndical, ni du côté patronal, que les gens désirent les conflits. Les gens sont mis en face des conflits. Ils sont "poignés" dedans, à un moment donné. Je suis convaincu que, même avec l'existence d'un groupe ou d'un pool de superconciliateurs, on ne provoquera pas davantage de conflits. Les gens ont une tendance normale à vouloir régler le problème entre eux. Si les services normaux de conciliation ne les aident pas, si on en arrive à une solution de conflit telle que cela devient inextricable, c'est là que je dis que nous devrions avoir un nombre de personnes disponibles, triées sur le volet...

M. Cournoyer: En fait...

M. Burns:... pour intervenir, pour agir une fois que tout ce qui a été normalement fait n'a pas réussi.

M. Cournoyer: ... M. le Président, il y a non pas une liste, parce qu'une liste comme celle-là, vous savez fort bien qu'à chaque conflit suffit sa peine! Qu'on le veuille ou non, il reste que la nature de chacun des conflits fait que, lorsque nous nommons un médiateur spécial, ce n'est pas la continuation normale du travail du conciliateur. C'est ce que nous faisons actuellement, c'est la continuation du travail du conciliateur qui réussit dans la plupart des cas.

Durant toute l'année passée, malgré l'apparence, nous n'avons eu aucune intervention du ministre, sauf dans United Aircraft. Comprenons-nous bien.

M. Burns: Vous vous êtes amélioré là-dessus.

M. Cournoyer: L'intervention du ministre ne s'est pas faite.

M. Burns: Cela n'a pas amélioré la législation.

M. Cournoyer: Vous pouvez trouver cela incompatible de s'améliorer et de ne pas améliorer la législation; c'est peut-être que la législation est bonne.

M. Burns: Je trouve cela incompatible, parce que, pendant que vous êtes dans les conflits et que vous passez des nuits à négocier, vous ne passez pas des journées et des nuits à penser à ce qu'on devrait faire à long terme pour changer la législation ou l'améliorer, l'adapter à la situation.

M. Cournoyer: Je pourrais en dire autant de toutes les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. Nous discutons, discutons et ne réglons pas le fond des problèmes.

Ce que je veux dire par là, c'est que, lorsque nous avons tel conflit, par exemple, et que, par décision ou par demande de l'une des parties, nous discutons avec les parties de la qualité de la personne qu'elles veulent, très souvent, nous faisons approuver ce choix par les parties.

Si nous étions restreints dans un pool quelconque — d'abord, il faudrait les avoir tous dans le pool — il peut arriver que les gens qui seraient susceptibles d'aider ne soient pas du tout les personnes que les parties voudraient avoir dans leur conflit.

Dans le cas de United Aircraft, M. Dufresne a été choisi par les parties. Le ministre l'a nommé, mais cela a été après discussion avec les deux parties. Finalement, le ministre a accepté le choix fait par les deux parties, mais il était ad hoc. Qu'il n'ait pas réussi, que voulez-vous? Ce n'est pas lui qui remplace les parties.

M. Burns: II ne faudrait pas comprendre ma remarque sur M. Dufresne comme un blâme à son endroit. Loin de là.

M. Cournoyer: II faut comprendre qu'un conciliateur essaie.

M. Burns: Cela n'a rien à faire avec le règlement ou le non-règlement de United Aircraft.

M. Cournoyer: Dans les autres conflits que nous avons eus, il y a eu le conflit de la Canadian Gypsum qui a été assez long, merci! Cela a été l'intervention de M. Laporte qui a participé à ce dossier d'une façon intensive.

Par ailleurs, nous avons évité un conflit majeur sur la Côte-Nord, dans le bout de Sept-lles, entre les compagnies de mines, de métaux, de fer et les syndicats des métallos, en particulier, en envoyant, pour la première fois dans ce milieu, Ro-

ger Pilote, qui est un conciliateur, mais désaffecté. Il ne fait pas le cas par cas ordinaire. Nous l'avons envoyé là pour trois mois, en dehors totalement de la période ordinaire de conciliation; il a participé à l'évolution du dossier à partir de son début.

C'était aussi à la demande des deux parties. On n'accepterait pas facilement, par exemple, que toutes les parties nous disent: C'est ce conciliateur qu'on veut. Il y a une question d'ordre aussi et le directeur du service serait mal pris.

Mais, dans le cas d'une demande comme celle qui a été faite d'affecter Roger Pilote sur la Côte-Nord, nous avons dit "oui", parce que les parties le requéraient toutes les deux et qu'elles le requéraient à partir du début de leur négociation et non pas pour venir régler ou tenter de régler un problème dont il ne connaissait pas la nature exacte.

M. Burns: C'est une espèce de préconciliation.

M. Cournoyer: C'est ce qu'on peut appeler une sorte de conciliation préventive...

M. Burns: C'est cela.

M. Cournoyer: ... qui a réussi dans ce cas et qui pourrait ne pas réussir la prochaine fois, selon le climat qui prévaut à l'avis des parties ordinairement.

Mais, dans ce cas en particulier, nous avons évité une grève par la présence du conciliateur, Roger Pilote, qui, lui-même, est une personne qui, sans être extrafonctionnaire, est une personne qui travaille chez nous, mais qui n'est pas affectée aux cas réguliers. On le prend. Il est respecté par un certain nombre de parties également.

Je dois l'envoyer, par exemple à Cyanamid of Canada Ltd. Peut-être que le cas Cyanamid of Canada Ltd. va se régler, mais c'est encore une fois l'utilisation de ce genre de spécialiste. On avait M. Dansereau. M. Dansereau, avec le rapport Cliche, a décidé de s'orienter ailleurs, j'imagine.

M. Burns: II avait raison.

M. Cournoyer: Cependant, cela rend de plus en plus difficile le choix des individus. La conciliation, c'est la conciliation.

M. Harvey (Charlesbourg); En termes d'employés permanents, vous en avez combien?

Le Président (M. Séguin): M. le député si vous avez une question, demandez tout simplement au ministre si vous pouvez la lui poser.

M. Lecours: J'aurais une question à vous poser à propos de la grève de l'amiante.

M. Cournoyer: Je vais répondre à cette question qui m'est posée par un confrère ici. Nous n'avons que 20 conciliateurs au Québec.

Une Voix: Ce n'est pas beaucoup, M. le ministre.

M. Cournoyer: Je viens d'exprimer, ici, qu'il n'y en a pas suffisamment. Ils sont surchargés et ils sont souspayés.

M. Lecours: M. le ministre, dans la grève de l'amiante, avez-vous vous eu une demande formelle des deux parties pour un conciliateur ou si c'est seulement une préconciliation présentement qui existe là-bas?

M. Cournoyer: Dans la grève de l'amiante, nous avons eu une demande de conciliation ordinaire, suivant le code du travail.

M. Lecours: Des deux parties?

M. Cournoyer: Non, je pense que l'avis de conciliation, c'est une partie qui l'a demandé.

M. Burns: Pas besoin d'avoir les deux.

M. Cournoyer: Je ne me souviens pas si c'est le syndicat. Il me semble que c'est le syndicat, habituellement, sauf qu'il y a une tendance marquée, aujourd'hui, à certains employeurs de demander la conciliation. Dans le cas de l'amiante, cela a été demandé par le syndicat ou les syndicats.

M. Harvey (Charlesbourg): Après le vote de grève.

M. Burns: Non, avant.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est-à-dire dans les négociations.

M. Burns: Pour arriver au droit de grève, il faut absolument qu'il y ait une conciliation dans le style actuel de la législation.

M. Cournoyer: ... demande.

M. Harvey (Charlesbourg): D'accord, mais cela n'avait été demandé ni par l'un ni par l'autre. C'est le ministère du Travail qui le délègue à ce moment?

M. Cournoyer: C'est-à-dire que la demande est faite par l'une des parties. En l'occurrence, ici, je pense que ce sont les syndicats qui ont donné l'avis qu'ils demandaient la conciliation au ministre. Nous avons nommé M. Vassard. M. Vassard a été le conciliateur de l'amiante et il l'est encore. Il agit comme médiateur aujourd'hui. Pardon?

M. Burns: Bon. Puis?

M. Cournoyer: C'est vrai, c'est un Belge. M. Vassard agit encore dans le conflit de l'amiante. C'est la même personne qui avait été... Il n'avait pas été choisi. On ne peut pas dire que les parties l'ont choisi. Mais, comme il y a trois sortes d'unions là-dedans, la CSD, la CSN et la FTQ, on est aussi obligé de penser aux origines des gens qui vont là. Cela aussi fait partie de la sélection du conciliateur.

M. Burns: M. Vassard est très polyvalent à cet égard.

M. Cournoyer: A cet effet, il y a les Travailleurs unis de l'automobile qui est une organisation fort indépendante, habituellement, des structures habituelles qu'on reconnaît.

M. Lecours: M. le ministre, pour tenter de régler le problème, avez-vous l'intention d'adopter l'arrêté en conseil pour énumérer les mineurs atteints d'amiantose et reconnus comme tels, à l'heure actuelle? On l'attend depuis deux ou trois semaines, surtout dans ma région, on est assez anxieux, à l'heure actuelle.

M. Cournoyer: Je dois vous dire que la lettre que j'ai envoyée à la Commission des accidents du travail a reçu une réponse de leur part et que, sa suggestion ce n'est pas un arrêté en conseil, c'est une loi spéciale...

M. Lecours: Une loi spéciale.

M. Cournoyer: ... pour régler le problème des gens qui sortiraient éclopés de l'application intégrale du règlement du ministère des Richesses naturelles visant à retirer le permis de mineurs ou de ceux qui travaillent dans la poussière. Cela ne s'applique pas seulement aux mineurs de l'amiante, cela s'applique aux employés de carrières et aux mines de métaux également qui sont affectés par la silicose, qui sont affectés par le même règlement 887.

M. Burns: Le règlement 887.

M. Cournoyer: La Commission des accidents de travail m'indique dans sa lettre... Le projet de loi est écrit et il reste une décision du conseil des ministres que je devrais faire prendre aujourd'hui, à midi. Normalement, c'est une loi spéciale visant à donner un certain nombre de bénéfices. Parallèlement à cela, cependant, et compte tenu de ce que nous proposons dans ce milieu, lorsqu'il y a perte de permis, nous nous devrons, dans un deuxième temps, de demander des choses semblables pour les autres travailleurs qui pourraient subir la même sorte de perte, compte tenu des accidents de travail.

M. Lecours: Est-ce qu'on peut espérer, pour la semaine prochaine, le dépôt de cette loi spéciale?

M. Cournoyer: Je ne peux vous garantir la réaction du conseil des ministres. C'est le conseil des ministres qui va prendre une décision, ce n'est pas le ministre du Travail. L'orientation que le ministre du Travail a donnée est clairement exprimée. Les décisions sont prises, les évaluations sont faites. Les évaluations maximales, le coût de cela, c'est $12 millions par cent personnes. C'est un coût maximal, alors il ne faudrait pas s'énerver avec cela. Il ne s'agit pas de donner une pension à des individus qui ne travailleraient pas du tout, leur incapacité étant de travailler dans la poussière et non pas une incapacité de ne pas travailler du tout. Ils ont le pouvoir de travailler. Il s'agirait pour nous de compenser, à la Commission des accidents du travail, la perte réelle de revenu occasionnée par le retrait du permis de mineur et de garantir que cet individu, jusqu'à la fin de ses jours, ait le revenu qu'il aurait eu s'il était demeuré mineur, c'est-à-dire en suivant, à chaque année, les conventions collectives...

M. Burns: Sur ce point, on est obligé de tenir compte du fait que, dans la région de l'amiante, les mines emploient à peu près 70% de la main-d'oeuvre, de sorte que, si vous retirez le permis du mineur en question, c'est quasiment lui demander de déménager s'il veut se trouver d'autres emplois.

M. Cournoyer: Oui, mais disons que l'une des dispositions du projet de loi et du mémoire que j'ai écrit au conseil des ministres est que, s'il refuse un emploi dans la région, il perdrait le bénéfice, mais s'il s'agit de refuser un emploi dans l'Abitibi, quand il vient des mines d'amiante ou de la région de l'amiante, c'est une expatriation d'un certain nombre de personnes qui, si je me fie à la durée de temps pour souffrir d'amiantose, sont des gars qui sont plus âgés, plutôt âgés que jeunes, donc plus difficiles à expatrier d'une région à cause de l'enracinement qu'ils y ont pris. C'est de père en fils que ces choses se produisent.

M. Burns: Et plus difficiles à réinsérer, d'ailleurs, dans le marché du travail aussi.

M. Cournoyer: Oui, mais ce que nous disons, enfin, ce que le ministre du Travail dit, c'est que la difficulté de réinsertion dans le marché du travail relève de deux causes. La première, c'est le fait que certaines compagnies n'aient pas pris des précautions nécessaires, donc qu'elles devraient payer les dommages causés; la deuxième, c'est le fait que le gouvernement les empêche de travailler dans un métier qu'ils ont connu tout le temps de leur vie, cela peut-être vingt ans là-dedans. Alors, on se dit: Ce qu'il nous faut assurer à l'individu, c'est d'abord une réinsertion dans le milieu social ordinaire, celui qu'il a. Si on n'est pas capable de lui trouver des emplois, de tout simplement faire payer par ceux qui seraient la cause originale de la perte de ce permis, parce que c'est encore toujours une maladie des voies respiratoires contactée à cause de son travail. Ce n'est pas n'importe quelle maladie des voies respiratoires attrapée lorsqu'on est allé à la chasse dans les îles de Sorel, ce n'est pas de celle-là dont on parle. On parle d'une cause directe de l'amiantose et de la silicose, parce que cela ne s'applique pas qu'à ceux qui souffrent d'amiantose. On peut dire que quand on offre un emploi dans la région... J'ai établi tantôt le maximum possible par cent personnes, c'est $12 millions. C'est $12 millions pour le coût total, c'est-à-dire que j'en prends cent et je dis: Je vous maintiens le salaire que vous auriez eu, pace que ce n'est pas le salaire qu'il a, c'est le salaire qu'il aurait eu s'il

était demeuré mineur, c'est une forme d'indexation, quoi!

M. Lecours: Qu'est-ce que vous prévoyez, M. le ministre, pour ceux qui sont déjà à leur retraite, mais qui sont reconnus comme porteurs d'amiantose et qui reçoivent une pension présentement? Est-ce que la loi va en faire mention de ceux-là?

M. Cournoyer: On n'enlève rien à ces gens.

M. Lecours: Ils vont continuer à recevoir leur pension.

M. Cournoyer: Vous me parlez des gens à la retraite.

M. Lecours: Oui, il y en a plusieurs parmi ceux-là.

M. Cournoyer: D'accord.

M. Lecours: La plupart de ceux qui souffrent d'amiantose ont 60 ans et plus aujourd'hui.

M. Harvey (Charlesbourg): On ne crée pas de préjudice en leur laissant leur pension.

M. Cournoyer: Vous me parlez, par exemple, d'une personne qui a été ou qui est... Le problème que j'ai actuellement, ce ne sont pas les personnes qui souffrent ou qui ont souffert de tuberculose et qui ont perdu leur permis. Le problème est là. Ces ouvriers ont perdu leur permis en vertu du même arrêté en conseil. Ce que nous avons à faire et ce que je pense que la Commission des accidents du travail doit faire, c'est d'examiner tout le monde, c'est d'ailleurs prévu dans l'arrêté en conseil, ou plutôt dans la déclaration du ministre, de réexaminer tout le monde, même ceux qui auraient été examinés et qui auraient été déclarés malades à 20% ou encore qui auraient été retournés... Ce qu'on fait, c'est un réexamen général tel que prévu dans la déclaration de M. Massé. La conséquence de cela, c'est que des gens vont perdre leur permis de mineur, même s'ils l'ont aujourd'hui et qu'ils travaillent. Pour ceux qui ne travaillent pas, je n'ai pas été préoccupé par eux dans ce que je cherchais, mais je note cependant votre observation.

M. Lecours: Oui, parce qu'il y en a plusieurs qui réclament un nouvel examen. Ils prétendent qu'ils sont évalués trop bas.

M. Cournoyer: Là, on parle de l'évaluation. Mais le principe étant la compensation intégrale du salaire, si, par exemple, on donne une évaluation de 20%, tout ce que je vous dis, c'est que cette évaluation de 20% de perte de capacité respiratoire va donner lieu maintenant à une perte total de permis. Donc, tu n'as plus le droit de travailler.

M. Lecours: Oui.

M. Coumoyer: Si nous disons à un individu:

Tu n'as plus le droit de travailler, et que c'est le gouvernement qui pose ce geste en disant: Tu ne travailles plus dans les mines ou dans les endroits empoussiérés, à partir de là, nous disons: Nous te garantissons le revenu que tu aurais eu si tu avais continué, et il sera révisible chaque année, compte tenu des conventions collectives qui évoluent. Ceci veut dire que ce que tu aurais eu cette année, cela aurait été le revenu prévu à ta convention collective et, l'année prochaine, si elle se modifie, bien, tu vas avoir le nouveau revenu qu'on va te garantir, c'est la différence entre ce que tu gagnes effectivement et ce que tu aurais gagné si tu étais là-bas. Sur ce qu'il gagne effectivement, il peut arriver que la majorité d'entre eux veuillent travailler, qu'ils se trouvent des emplois dans la région, ou qu'ils veuillent partir de la région. Il peut arriver que des individus partent d'une région. A partir du moment où ils ont un emploi, ce n'est pas une incitation à ne pas travailler qu'on fait, si on dit: On va vous garantir ce que vous aviez avant. C'est tout. Là, le détail dont vous venez de me parler, j'imagine que vous pourrez le noter, docteur, et voir si cela en tient compte. D'une façon générale, ce que nous avons voulu compenser ou voulons compenser, c'est la perte du droit de travailler dans la région de l'amiante.

M. Lecours: C'est ce qui est le plus urgent, d'ailleurs.

M. Déziel: Est-ce que cette loi qui serait créée, par le fait même, comme précédent, en fait, couvrirait également les autres maladies industrielles?

M. Cournoyer: Ce sont les seules maladies industrielles qu'elle couvre actuellement, ce ne sont pas toutes les maladies industrielles, comprenons-nous bien. Elle ne couvre que les maladies industrielles qui découlent, c'est-à-dire la perte de l'emploi d'un individu par décision gouvernementale, parce que la maladie qu'il a l'empêche d'aller gagner sa vie. Il perd un permis, il perd le permis du mineur ou il perd le permis de travailler dans une carrière ou il perd le permis de travailler dans une mine souterraine. Cela ne couvre que celles-là.

M. Déziel: Cela couvre seulement celles-là, mais vous allez prendre celui qui va faire la soudure du métal en feuille et qui respire l'oxyde qui s'en dégage, automatiquement, cela devient une maladie industrielle aussi.

M. Cournoyer: Je comprends que je doive me préoccuper de celle-là aussi. On doit s'en préoccuper. J'en ai discuté la semaine dernière avec le ministre des Affaires sociales. A la suite de la commission parlementaire qui a rencontré les gens responsables de la Commission des accidents du travail...

M. Burns: Qui a commencé à étudier le problème.

M. Cournoyer: Oui, commencé à étudier, j'ai

dit: Qui a rencontré. Vous les rencontrerez à nouveau. Il est nettement de mon intention d'aller plus loin dans l'évaluation, dans les conséquences des accidents du travail chez les individus.

Le Président (M. Séguin): Messieurs, je constate qu'il est midi.

M. Cournoyer: Avant que vous ne partiez, pourrait-on vous distribuer l'analyse du budget, telle qu'elle est faite par nous, avec les clauses?

M. Burns: Cela pourra éviter des questions de détail.

Le Président (M. Séguin): A la reprise de nos travaux, messieurs, si le ministre a encore quelques notes d'ordre général à nous apporter, il continuera. Ensuite, le député de Maisonneuve a demandé la parole.

Je voudrais tout simplement vous faire remarquer qu'en commission, lorsque nous étudions les crédits, du moins lorsque je préside, si nous pouvions procéder de cette façon, la parole est donnée à un membre de la commission. Si un député a une question à poser, qu'il demande tout simplement à la personne qui a la parole si elle consent à se faire interrompre. Sans cela, je devrai empêcher les questions incidentes qui arrivent au cours de nos travaux. Pour la procédure, une personne à la fois devrait parler. Cela, autrement, deviendrait un méli-mélo.

M. Déziel: Cela veut dire, M. le Président, qu'on peut questionner le député de Maisonneuve?

Le Président (M. Séguin): Oui, vous le pouvez.

M. Burns: Je vous donne d'avance la permission. Cela va me faire pratiquer à être ministre.

Le Président (M. Séguin): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h I)

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