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Commission permanente du travail
et de la main-d'oeuvre
et de l'immigration
Etude des recommandations du rapport Cliche
Séance du mercredi 11 juin 1975
(Dix heures seize minutes)
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail et de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre,
messieurs!
La commission du travail et de la main-d'oeuvre et de l'immigration
siège ce matin le 11 juin pour entendre certains corps
représentatifs au sujet du rapport Cliche.
Les membres de la commission pour la séance de ce matin sont: MM.
Bellemare (Johnson), Brown (Brome-Missisquoi), Boudreault (Bourget), Burns
(Maisonneuve), Charron (Saint-Jacques), Ciaccia (Mont-Royal), Cournoyer
(Robert-Baldwin), Déziel (Saint-François), Harvey (Charlesbourg),
Lachance (Mille-Iles), Lecours (Frontenac), Malépart (Sainte-Marie), Roy
(Beauce-Sud), Verreault (Shefford).
Le rapporteur de la séance pour la commission sera M. Boudreault
(Bourget).
Une Voix: Ce n'est pas le député de Bourget.
J'avais l'impression, messieurs, que c'était M. Boudreault qui
était rapporteur.
M. Harvey (Charlesbourg): J'avais été nommé
rapporteur à la séance antérieure et M. Boudreault
était rapporteur pour la commission étudiant les
crédits.
Le Président (M. Séguin): On va prendre un vote
à main levée. Est-ce qu'il y a consentement de la part de la
commission?
M. Harvey (Charlesbourg): Je me désiste en faveur de M.
Boudreault.
Le Président (M. Séguin): A défaut d'autres
candidats, M. Harvey (Charlesbourg).
M. Harvey (Charlesbourg): Non, voici, je me désiste en
faveur de M. Boudreault (Bourget).
M. Boudreault: C'est Harvey qui avait été
désigné; allez-y, M. Harvey.
Le Président (M. Séguin): Est-ce qu'il y a
consentement unanime pour que M. Boudreault (Bourget) soit rapporteur?
M. Harvey (Charlesbourg): Oui, oui.
Le Président (M. Séguin): Nous entendrons ce matin
le ou les représentants de la Confédération des syndicats
nationaux. Auparavant, je vou- drais faire part, aux membres de la commission
du télégramme suivant, datant du 5 juin et adressé
à M. Jacques Pouliot, secrétaire des commissions parlementaires,
Hôtel du Gouvernement, Québec. "Monsieur, suite à notre
télégramme du 30 mai 1975, nous vous avisons que nous ne
participerons pas à la commission parlementaire du travail et de la
main-d'oeuvre et de l'immigration sur le rapport Cliche. La
Fédération de la construction du Québec, la Corporation
des maîtres électriciens du Québec, la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, l'Association
des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l'Association
provinciale des constructeurs d'habitation du Québec, l'Association de
la construction de Montréal et du Québec."
M. le ministre, avez-vous des commentaires à faire?
M. Cournoyer: Je n'ai aucun commentaire, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): J'inviterais donc le ou
les représentants de la Confédération des syndicats
nationaux.
Peut-être pourrait-ils d'abord s'identifier et, ensuite, faire
leurs commentaires à la commission.
Confédération des syndicats
nationaux
M. Pepin (Marcel): Merci, M. le Président. Mon nom est
Marcel Pepin. Je suis président de la CSN. J'ai, à mes
côtés, M. Michel Bourdon, qui est président de la FNSBB, la
Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois,
affiliée à la CSN; M. Florent Audet, qui est directeur
exécutif du Syndicat de la construction de Montréal; M. Yvon
Leclerc, qui est le secrétaire de la FNSBB, la fédération
dont M. Bourdon est président, et M. Lucien Poulin, qui est le directeur
professionnel de la fédération.
L'un ou l'autre, à un moment donné, selon les questions,
pourra intervenir si la Commission le permet.
Ce matin, je n'ai pas l'intention d'être long, au point de
départ. Ce qui sera plus constructif, me semble-t-il nous nous
sommes concertés là-dessus sera d'avoir plutôt un
échange, s'il y a lieu, avec les membres de la commission, s'ils
désirent poser des questions. Nous n'avons pas cru utile, à ce
stade-ci, de présenter un mémoire écrit.
Déjà, dans le passé, nous avons présenté
moult mémoires à des commissions parlementaires sur le même
sujet. Je pense que si on relevait leur nombre, il a dû y en avoir cinq
ou six, peut-être même sept, qui ont toujours porté à
peu près sur les mêmes aspects.
J'imagine que les membres de la commission sont fort au courant de notre
opposition véhémente aux lois qui ont été
adoptées. Je n'ai pas l'intention d'y revenir puisque la loi est la loi,
et je pense que les députés ne peuvent pas, sauf en demander le
rappel, en discuter lorsque la loi est adoptée.
Mais nous nous y opposons. Nous avons noté d'ailleurs une
particularité dans la loi 30, qui porte
sur les délégués de chantier. Vraiment, elle nous a
assez surpris parce que, avec les structures syndicales qui sont
différentes entre nous, la CSN et la FTQ, on se trouve à
permettre à celle-ci des délégués de chantier,
sept, huit ou dix fois plus nombreux qu'on peut en permettre à la CSN,
avec la même loi.
Si vous regardez l'article je crois que c'est l'article 32 n) de
la loi tel que vous l'avez adopté à l'Assemblée
nationale, vous avez changé pour dire: "Toute union ou syndicat a droit
à un délégué de chantier." La définition de
l'union: "C'est le groupement qui est affilié à une association
de salariés, tel que prévu par l'ancienne loi 290".
Dans notre structure, nous avons des syndicats à caractère
régional, ce qui veut dire que nous avons le droit, lorsqu'il y a sept
membres sur un chantier, à un délégué de chantier.
Dans la structure FTQ, comme elle est divisée par métiers, s'il y
a plusieurs métiers qui travaillent au même moment sur le
chantier, ils peuvent avoir autant de délégués qu'ils ont
de métiers sur le chantier.
Je pense que vous pourrez immédiatement convenir qu'il y a
là, quant à nous, une autre source de friction importante et je
crois que nous ne sommes pas placés sur un pied d'égalité
avec l'autre groupement.
La commission Cliche, au meilleur de mon souvenir il s'agira de
voir les textes avait mentionné un délégué
par association représentative, donc un par centrale. Les textes ont
été changés pour en arriver à ce que je viens de
vous décrire.
Maintenant, M. le Président, peut-être que certains membres
de votre commission ont pu être surpris de la prise de position de la CSN
sur le rapport même de la commission Cliche, parce qu'on y lit des choses
intéressantes, pour ce qui concerne la CSN, dans le rapport Cliche. Par
exemple, il est clair que nous n'avons pas de système de corruption, de
banditisme comme celui décrit pour certains locaux ou certaines unions
de la FTQ-Construction. De là, peut-être, on aurait pu conclure:
Puisqu'on est blanchi, il vaudrait mieux être en faveur des
recommandations de la commission Cliche. Cela n'a pas été notre
thèse, parce que nous voulons faire du syndicalisme, et nous croyons que
les conclusions de la commission Cliche ne nous permettent pas de faire du
véritable syndicalisme.
Je crois, M. le Président, que les deux grands points sur
lesquels je vais de nouveau insister, ce seront le placement et
l'ancienneté. Si vous aviez l'occasion je sais bien que vous n'en
aurez pas le temps et je ne vous le propose pas non plus de lire les
témoignages que nous avons rendus à la commission Cliche, vous
pourriez constater que nous avons essayé d'identifier que les
problèmes se situaient à ce niveau. Si l'Assemblée
nationale ne règle pas le problème du placement, vous n'aurez
rien fait, Si vous le réglez de n'importe quelle façon, bien
sûr que vous n'aurez pas mieux agi.
Le placement, c'est la clé de voûte de tout le
système, de tout ce qui a conduit à ce qu'on sait maintenant de
la construction. C'est en raison du placement que cela a été.
Nous avons, nous, tellement insisté pour dire aux députés:
Commencez par régler ce problème; c'est bien plus important que
d'adopter les lois 29 et 30. Lorsque vous aurez réglé la racine
du mal, il y a bien des chances que tout le reste soit important mais que ce
soit plutôt de la mécanique que des affaires fondamentales.
Dans le rapport Cliche, nous ne sommes pas satisfaits de la formule du
placement qui dépend de l'office de la construction. M. le
Président, c'est assez simple.
Quand vous soumettez à l'Assemblée nationale une loi sur
les entrepreneurs pour leurs qualifications, vous prévoyez, dans
l'organisme qui va appliquer cette loi, qu'il va y avoir cinq entrepreneurs, me
semble-t-il, et deux autres personnes sans doute nommées par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
Lorsqu'il s'agit du placement, qui nous intéresse d'une
manière primordiale comme travailleurs, nous ne sommes nullement en
place et nous ne pouvons pas vérifier ce qui arrive.
Là, vous allez peut-être me dire: Ecoutez, vous autres,
vous avez déjà été d'accord sur les centres de
main-d'oeuvre du Québec pour faire le placement. Cela est vrai, je vous
le concède. Mais, avec ce que nous avons connu à la commission
Cliche comme efficacité d'abord du centre de main-d'oeuvre et comme
centre de patronage aussi, disons les mots clairement nous
croyons à l'heure actuelle que le placement peut être fait dans le
cadre d'un office. S'il y a un office, j'espère que ce ne sera pas
n'importe quel office non plus. Et dans ce cadre, il devrait y avoir un
comité où les unions, les centrales qui ont une
représentativité seront présentes, où les
critères de placement seront connus publiquement, évitant ainsi
toute possibilité de tricherie. Et dans l'hypothèse où les
représentants syndicaux disons pour les fins de mon propos qu'il
s'agirait de deux gars de la FTQ et de deux gars de la CSN ne suivent
pas les critères, critères qui sont publics, qu'il y ait un appel
immédiat, à ce qu'on peut appeler le président de
l'office, ou par un autre truchement, pour corriger ces erreurs.
Je pense que là nous aurions un système valable.
Là, vous auriez commencé à régler une bonne partie
du problème de la construction. Si vous ne le faites pas, je me
répète pour essayer de le marteler le mieux possible, vous aurez
une autre commission Cliche dans X années car les mêmes causes
vont produire les mêmes effets. Voilà pourquoi j'y mets une telle
insistance.
Deuxième point. Dans cette industrie qui s'appelle la
construction, il n'y a pas de règle d'ancienneté. Avec le
système de placement, il y aura une règle d'ancienneté
d'embauchage, mais il n'y a pas d'ancienneté de débauchage, de
mise à pied. Vous comprendrez aussi que si vous voulez faire respecter
vos normes de sécurité, le minimum de sécurité, et
que cela entraîne des déboursés de la part de l'employeur
dans une période de basse conjoncture, dans une période où
la main-d'oeuvre est considérable, vous aurez aisément le
problème suivant: l'employé qui réclame l'application des
lois, des règlements peut être facilement
mis à pied, même s'il a été embauché
longtemps avant celui qui restera au travail.
Tant et aussi longtemps qu'on n'acceptera pas de régler ces deux
clés du problème, on n'aura pas vraiment touché le coeur
de l'industrie. M. le Président, je pense que si vous parlez à
tous ceux qui ont un minimum d'expérience, et je ne me considère
pas comme étant de cette catégorie, mais un minimum
d'expérience dans l'industrie, qu'ils soient patrons ou qu'ils soient
ouvriers, ils vont tous vous dire que, d'abord et avant tout, il faut que vous
régliez l'affaire du placement. Si vous ne le réglez pas, vous
aurez tout simplement passé à côté. Voilà, M.
le Président, les quelques mots d'introduction que je voulais dire.
Maintenant je suis prêt, et l'équipe qui est avec moi est
disposée aussi à répondre à toute question pour
autant qu'on est capable de le faire, à tenter en tout cas de
répondre à toute question qui pourrait venir de vous, des
députés. Nous sommes ici pour essayer de collaborer. Nous avons
bien crainte que les choses n'aillent pas assez vite, mais c'est vous autres
qui décidez, ce n'est pas nous autres, on vous fait uniquement des
recommandations. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. Pepin. Est-ce
que le ministre...
M. Cournoyer: Je vais commencer, si vous me le permettez, M. le
Président. Vous reconnaissez, M. Pepin, que le clé de tout cela,
c'est le placement et, bien sûr, la situation du travailleur en emploi,
par rapport à d'autres travailleurs. Cela est votre position d'une
façon générale. Maintenant, mettons qu'on arriverait
à la conclusion qu'on doive établir le réseau de placement
par l'organisme en question, que ce soit l'office ou autrement. Vous posez un
certain nombre de doutes quant à l'office proprement dit,
c'est-à-dire la constitution de l'office. J'ai déjà
annoncé que nous créerions l'office. Donc, a partir de là,
il s'agit de savoir quelle est la constitution de l'office. Vous savez que la
commission Cliche recommande qu'il soit formé de trois membres dont un
juge de la cour Provinciale et les deux autres issus du mouvement syndical ou
issus du mouvement patronal. Moi, je mets beaucoup l'accent sur l'office
lui-même à cause de la recherche que vous faites, comme moi je
fais, de l'objectivité de l'office, d'un côté, mais aussi
une sorte de surveillance, par ceux qui sont les premiers impliqués, des
activités de l'office et non pas seulement par le truchement, à
l'Assemblée nationale ici, des réponses du ministre qui lui
seront dictées par l'office. C'est une question de responsabilité
et de surveillance. Si je suis toute la recommandation de l'office, et je ne
mets pas le placement de côté, comprenez-moi bien, je sais que
vous pouvez peut-être me prêter cette intention, je vais vous
laisser me la prêter jusqu'à ce que...
M. Pepin (Marcel): Je ne vous ai rien prêté.
M. Cournoyer: Mettons que vous voulez me la prêter. Je vais
vous laisser me prêter cette inten- tion jusqu'à ce qu'elle soit
manifestée publiquement par moi-même devant le Parlement. Tant et
aussi longtemps que ce n'est pas cela, c'est un prêt que vous me
faites.
M. Pepin (Marcel): Cela prend du temps.
M. Cournoyer: Je le considère comme un prêt et je
vous le remettrai au moment où j'aurai décidé
autrement.
M. Pepin (Marcel): J'ai hâte à ce moment.
M. Cournoyer: Moi aussi, j'ai bien hâte à ce moment.
De toute façon, vous savez que je ne peux pas abolir le placement sans
que l'office fasse du placement.
M. Pepin (Marcel): Oui.
M. Cournoyer: Je ne peux pas l'abolir et dire: II n'y a plus de
placement qui se fait, sauf par l'office, alors que l'office n'est pas capable
de le faire. Il faut quand même que je le fasse faire par quelqu'un. Il
ne semble pas qu'il soit souhaitable, à ce moment, que les centres de la
main-d'oeuvre du Québec le fassent. Il semble qu'il soit souhaitable que
l'office le fasse. Selon les recommandations de la commission Cliche, il me
semble que c'est à l'office que cela devrait revenir.
Ce dont nous pourrions discuter, cependant, calmement, sans nous
énerver...
M. Pepin (Marcel): Est-ce que cela m'arrive de m'énerve
r?
M. Cournoyer: ... ce serait de la constitution de l'office, en
présumant qu'il aura le mandat de placement. Vous et moi, nous pouvons
présumer qu'il aura le mandat du placement. Mais comment verriez-vous la
constitution de l'office? Vous avez parlé de quatre personnes,
tantôt, dont deux de la FTQ et deux de la CSN. Cela ne ressemble-t-il pas
à la CIC? Du côté patronal, j'imagine qu'il y aurait la
même sorte de représentation.
M. Pepin (Marcel): Si vous voulez me le permettre, quand j'ai
parlé des quatre personnes, M. le ministre, cela s'appliquait à
un comité relatif uniquement au placement. Je n'ai pas touché
à l'office. J'ai dit que, quand ces quatre personnes ne suivraient pas
et n'appliqueraient pas les critères publics parce que je
désire que les critères de placement soient publics quand
il y a un membre, un syndicat ou même un patron qui dit: Ils ne les ont
pas appliqués, tel que c'est voulu, que c'est connu, par
règlement public, à ce moment, il y a un appel à une
instance supérieure qui, là, pourrait être l'office auquel
vous référez.
Si vous voulez maintenant que j'entre dans le débat de la
constitution de l'office, je peux le faire immédiatement, parce que
c'est important.
M. Cournoyer: Je croyais que c'était l'office
révisé, mais vous appliquez cette affaire strictement au
placement.
M. Pepin (Marcel): Ayant lu le rapport Cliche, ayant un peu suivi
vos déclarations sur la constitution de l'office, je me suis dit:
L'office a l'air de s'en venir. Je ne sais pas quand. Peut-être que le
ministre ne le sait pas lui-même. Cela dépend des travaux de la
Chambre, sans doute. Je me suis dit: II faut au moins se protéger dans
ce qu'il y a de plus vital, le placement. La protection la meilleure, à
mon avis, c'est que, s'il y a un office peu importe sa composition; pour
l'instant, je la mets de côté qu'il y ait au moins un
comité obligatoire où les deux syndicats, pour les fins de mon
propos, sont représentés, mais doivent appliquer quelque chose de
public. Dans l'hypothèse où il y a un appel, un appel est
possible à une instance supérieure qui pourrait être
l'office concerné.
Maintenant, si vous me permettez de développer un peu mon
idée sur la question de l'office, je pense d'abord que la recommandation
du rapport Cliche, lorsqu'il nomme des gens, même s'ils sont issus de la
construction pour deux personnes, mais qu'ils sont complètement
dégagés des parties, est une mauvaise solution.
Je crois, quand même que la CIC présente a
été l'objet d'attaques très justifiées. Je pense
que vous en conviendrez avec moi; d'ailleurs, le rapport Cliche en est farci de
ce côté-là. A l'heure actuelle, nous croyons que les
parties doivent avoir quelque chose à voir dans l'application de leur
décret ou de leur convention collective. Dans ce cas-ci, c'est toujours
un décret.
On pourrait faire une analogie avec la situation d'une entreprise
privée, par hypothèse, disons les chantiers maritimes de Lauzon.
Je ne veux pas faire de la simplification outrée; c'est simplement pour
vous démontrer un chemin qui, à mon avis, pourrait être
acceptable. A Lauzon, ils signent une convention avec la Davie Shipbuilding; le
lendemain de la signature, un grief est soulevé. Les parties se
rencontrent, ne s'entendent pas et vont voir un arbitre, lequel tranche le
litige. Quelquefois, c'est un peu long, mais ce n'est pas le problème.
Vous ne pensez pas qu'à ce moment-là on pourrait reprendre
exactement la même formule vous allez me dire que c'est l'ancienne
CIC dans la CIC rénovée, où les parties
représentatives sont vraiment là pour voir à l'application
du décret. A défaut d'entente unanime, un arbitre est là
et il tranche. C'est une autre forme d'office, dans le fond. Qu'il y ait
seulement un gars plutôt que quatre ou cinq, à ce
moment-là, les parties sont directement là et l'arbitre peut
jouer très rapidement. Dans la construction, tout le monde va le
reconnaître, cela prend des décisions hâtives. Si cela
retarde trop, le chantier ferme et cela n'a pas de bon sens.
Avec une telle formule, je pense que vous régleriez votre
problème d'office. Les parties seraient présentes et je crois que
c'est une formule qui serait travaillable et acceptable. Que ce soit un juge de
la cour Provinciale qui soit le président, cela ne me fait absolument
rien. Je me demande, d'ailleurs, pourquoi un juge serait là, mais, s'ils
ont du temps pour aller là, eux, ils iront. Probablement que c'est bien
plus pour d'autres raisons; c'est pour assurer leur sécurité
d'emploi qu'ils veulent que ce soit un juge. Je comprends cela, mais je pense
qu'il n'est pas nécessaire que le président soit juge. Si vous
décidez que c'en est un, c'en sera un. Je ne sais pas si vous comprenez
mon raisonnement.
M. Cournoyer: Oui, je comprends. En fait, vous voudriez qu'on
corrige beaucoup plus les défauts qu'on a découverts que changer
totalement la structure, en la remplaçant par une toute nouvelle qui
exclut la participation des parties.
M. Pepin (Marcel): La participation des parties, pour nous, c'est
l'essence même des rapports collectifs de travail. Il faut que les
parties soient là. Le rapport Cliche, je comprends fort bien pourquoi il
en est arrivé à cette conclusion, vous savez. Vous aussi, je
pense bien, vous le comprenez. Mais cela ne veut pas dire qu'on doit fatalement
être en accord sur leur conclusion même si, pour les commissions,
c'est très logique qu'il en soit ainsi. Pour nous autres, c'est
très important que les parties soient présentes.
Qui négocie le décret? Dans ce cas, c'est vraiment une
négociation du décret; c'est rare qu'on puisse employer cette
expression, mais, dans ce cas, c'est vraiment cela. On négocie le
décret avec un certain esprit, chez les deux parties. Parfois même
on fait des erreurs quand on rédige une clause de décret. On
s'entend sur quelque chose, puis il arrive qu'on écrive autre chose.
L'expérience nous l'a fréquemment démontré. On va
arriver après, puis ça va être trois personnes qui n'ont
rien fait dans les négociations qui vont dire: Cela s'interprète
de telle façon, Moi, je pense que ce sont les parties d'abord qui
doivent voir si elles sont unanimes entre elles. Si elles sont unanimes, il n'y
a pas besoin d'arbitrage dans ce cas. Si elles ne s'entendent pas, là
l'arbitre serait le président de l'office, pour employer les mêmes
expressions, si on veut sauver au moins les mots. A ce moment, cela pourrait
fonctionner de cette façon.
M. Cournoyer:Mais vous comprenez, M. Pepin, qu'il y a, dans le
mandat de l'office, tel qu'il est créé ici, une marge très
grande entre la CIC et l'office, c'est-à-dire que l'office, si je
comprends bien je pense bien que c'est clair dans les textes ne
ferait plus d'interprétation du décret. C'est le système
d'arbitrage sur chacun des chantiers qui est établi pour faire
l'interprétation et du décret et des conflits de juridiction de
métiers, enfin de tout ce qui est convenu entre les parties. La seule
difficulté que j'ai, et c'est pourquoi je parlais de 40 ans d'histoire,
la semaine passée, c'est que, dans l'industrie de la construction, il a
semblé que cette méthode de surveillance du décret par les
parties à un niveau universel était une méthode
enviée un peu partout dans le Canada, et on l'a, ici, vécue
pendant 40 ans avec les avatars ordinaires des conflits et des situations que
nous avons connus. Mais il reste que la mettre de côté du revers
de la main et dire: Maintenant ce sont des arbitres sur chacun des chantiers de
construction, ce sont les agents d'affaires ou les
délégués de chantier qui vont, au fil des jours,
régler les pro-
blèmes d'interprétation d'une convention qu'ils n'ont pas
plus négocié individuellement, à l'échelon des
chantiers, cela me paraît et je le dis officiellement comme
dépassant, et de beaucoup, ce qu'on a voulu corriger.
Ce qu'on a voulu corriger, ce que la commission a voulu corriger, ce
sont les abus qui ont été décrits par la commission. Ce
sont des situations d'hommes, d'individus et peut-être aussi de
structures que la commission Cliche a voulu corriger. L'abolition totale de la
participation des parties à l'administration de leur convention
collective me paraît comme dépassant, et de beaucoup, les
objectifs premiers que la commission Cliche voulait remplir. Ainsi, je peux
vous dire que, dans le cas de la création d'un office, je devrai aller
plus loin dans le sens suivant: C'est que la participation devrait être
une forme de participation; non pas juste une question "d'être issu de",
mais une participation réelle. Donc, nommer les membres de l'office pour
dix ans n'est pas possible. C'est-à-dire que, pour moi, il y a une
question de responsabilité. S'il n'y a pas de participation du tout des
mouvements syndicaux ou patronaux, là, on peut les nommer pour dix ans.
Ils ne sont responsables devant personne, mais, d'un autre côté,
je peux dire que si cela s'appelle l'office, il est impossible que j'accepte
trois personnes, mais que la participation soit comme une forme
d'exécutif des trois personnes et que la première
responsabilité de l'administration soit un conseil d'administration
formé sur une base paritaire. Les trois personnes viennent tout
simplement s'ajouter au président de la CIC qui, lui-même, avait
un peu les pouvoirs que vous déterminiez tantôt. Dans
l'éventualité où il y avait unanimité des parties,
les parties faisaient la loi ou l'interprétation de leur propre
décret. Ce n'est pas le président qui disait: Voici, je me bats
avec vous autres, je l'interprète de telle manière, même si
vous vous entendez sur l'interprétation ensemble.
Quand il y avait une partie, par exemple, qui était
lésée, on pouvait en appeler au président, lorsqu'on dit
"une partie contractante qui aurait été minoritaire".
Mais si nous révisons l'office, c'est-à-dire si nous
révisons l'organisme qu'on appelle la CIC pour intégrer la
recommandation de l'office par la commission Cliche, j'ai l'impression que nous
pouvons rejoindre assez facilement l'objectif que vous nous avez
mentionné. Mais, en même temps, nous sommes obligés de
mettre de côté l'une des recommandations de l'office qui dit: Le
décret est administré à l'échelon du chantier,
c'est-à-dire que c'est le chantier et l'arbitre au chantier, avec
l'addition du mandat de tout couvrir ce qui est dans le décret. A cela,
je serai obligé de dire non, en même temps que j'aurai une
participation différente à l'administration proprement dite des
conditions de travail.
M. Pepin (Marcel): Vous ouvrez un volet de la discussion qui,
pour nous, est très important. C'est cette application du décret
par les parties. Il me semble que quand les commissaires, ont
décidé cela, ils ont dû avoir comme schème de
référence une toute autre industrie que celle de la construction.
Et, là-dessus, du côté de la CSN, nous croyons que les
parties doivent appliquer le décret, avec le recours dont on parle
depuis quelques minutes ou un certain recours parce qu'il faut que les
problèmes se règlent.
Vous savez, d'ailleurs, je vais aller plus loin que ça. Si les
parties ont elles-mêmes, uniquement et exclusivement, à appliquer
le décret, cela pourra conduire aussi à beaucoup de choses que
personne ne va aimer, qui sont décrites dans le rapport Cliche.
Si vous êtes en tractation, un agent d'affaires, avec un
employeur, de petites ententes peuvent se faire en dessous de la table:
"Laisse-moi faire, je ne paierai pas le surtemps, mais ne me fais pas de grief,
voici tu as $3,000."
M. Cournoyer: Ce n'est connu de personne. M. Pepin (Marcel):
Pardon?
M. Cournoyer: Ce n'est conn u de personne, sauf à
l'occasion...
M. Pepin (Marcel): Personne ne sait que les $3,000 sont
là.
M. Cournoyer: ... d'une enquête sérieuse.
M. Pepin (Marcel): Et personne n'a le droit d'intervenir....
M. Cournoyer: C'est ça.
M. Pepin (Marcel): .... sauf le membre. S'il intervient, son
union peut dire: Aie, toi, pas un mot, si tu veux avoir une autre "job". Cela
se passe de même. A ce moment-là, je pense que les commissaires,
de bonne foi, n'ont pas vu, avec la grandeur du territoire de la construction
et la profondeur du mal qui peut exister dans cette industrie, qu'ils
recréaient une autre source que je vais appeler directement de
banditisme avec ça. Parlez-en à des entrepreneurs ou à des
associations d'entrepreneurs. Je comprends qu'ils ne viendront pas vous le
dire, je ne sais pas pourquoi d'ailleurs, mais ils ne viendront pas vous le
dire. Mais, si vous aviez l'occasion de leur en parler, je pense que vous
auriez à peu près les mêmes remarques que je fais
là-dessus.
Donc, nous, nous croyons que l'administration du décret doit
rester entre les mains des parties. Cependant, ce que nous aimerions
suggérer au ministre d'ajouter, dans l'hypothèse ou l'office, ou
le conseil, peu importe le nom, ne remplit pas sa "job", cela arrive aussi,
pourquoi, contrairement à la loi 290, vous ne permettriez pas à
un syndicat de faire grief, de le faire arbitrer aussi? Je ne sais pas si vous
me comprenez.
S'il arrive que l'inspecteur de la CIC, ce sont tous des êtres
humains, l'inspecteur de l'office ou peu importe l'appellation, ne remplit pas
la fonction et ne fait pas la réclamation, que le syndicat qui le
représente, puisse dire: Ils ne veulent pas le faire, nous, on va le
faire. Par quel mécanisme? A
ce moment-là, ce serait exactement le même. Je ne voudrais
pas avoir deux structures pour régler les problèmes. Je ne sais
pas si vous me suivez aussi.
M. Cournoyer: Oui.
M. Pepin (Marcel): Je ne voudrais pas avoir la structure
d'arbitre individuel ou par chantier et, disons, une CIC,
présidée par un arbitre, et je choisirais l'une ou l'autre. Non.
Il faudrait toujours que j'aie mon même canal.
Si, comme syndicat, je soulève un grief parce que, sur tel
chantier, on ne respecte pas ou les normes de sécurité, ou les
salaires, ou le temps supplémantaire, je m'en vais, moi aussi, comme
syndicat, à la même place et je leur dis: Voici mon
problème. A ce moment-là, s'il n'y a pas accord entre les
parties, l'arbitre, qui serait le président de l'office,
déciderait.
Je voudrais aussi toucher un autre aspect de votre intervention, M. le
ministre. Lorsque vous dites que vous prévoyez un conseil
d'administration de trois personnes en tout cas, c'est une
hypothèse que vous formulez je vous suggère fortement de
regarder la réalité aussi. De notre côté, il n'y a
pas qu'une centrale syndicale. On va pouvoir présumer aisément et
on va choisir...
M. Cournoyer: Remarquez bien que ce que je voulais dire
là-dedans, c'est que je conservais, dans mon esprit ce n'est pas
décidé les structures paritaires employeurs et syndicats
telles qu'elles sont actuellement, sans pour autant parler de vote
prépondérant et de ces choses-là, mais j'ajoutais trois
personnes par-dessus, qui deviendraient en définitive, des
exécutants. Je ne sais pas si vous me suivez. Je veux aller plus
loin.
M. Pepin (Marcel): J'ai bien peur que, quand vous parlez
d'exécutants, cela va être du monde issu, pour deux en tout cas,
du milieu, je suppose.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que...
M. Pepin (Marcel): Ce ne sont pas trois juges en tout cas.
M. Cournoyer: Non, non, non. D'abord, je n'ai pas pris la
décision que cela doit, par la loi, être des juges. Cela pourrait
être un juge. Il n'y a personne qui va dire qu'un juge, parce qu'il est
juge, n'est pas bon; d'un autre côté, quant à inscrire dans
la loi que cela doit être un juge de la cour Provinciale, j'ai de
sérieux doutes quant à la vocation ordinaire d'un juge. Ce sont
des doutes que j'ai personnellement. C'est de l'administration qu'on est
censé faire là et de l'arbitrage, mais on peut espérer que
de l'arbitrage, cela ne se fait pas et qu'il n'y en a pas, c'est-à-dire
que les parties s'entendent sur l'interprétation, comme c'est le cas
depuis un bout de temps. Il semble que cela va très bien.
M. Pepin (Marcel): Cela va beaucoup mieux, en tout cas.
M. Cournoyer: On s'entend sur l'interprétation du
décret et il y a juste des problèmes-d'exécution de mandat
qui sont survenus. Là-dessus, soyons clairs. Ce que je veux dire par
là, c'est que je penserais plausible, dans les circonstances, de
modifier le poste de président de la CIC pour lui donner deux adjoints,
mais de ne pas modifier sensiblement la composition peut-être dans
le vote de la CIC.
Dans ce sens, on pourrait se diriger vers une participation effective du
monde syndical et du monde patronal à l'administration de ce que
j'appelle leur convention collective, mais avec un exécutif qui serait
sorti, au moins, du contexte dans lequel il a pu ou a dû évoluer
pendant les trois ou quatre dernières années, c'est-à-dire
que ce sont des décisions d'ordre politique qui, en fait, on
influencé la présence de tel ou tel individu à
l'intérieur de la structure administrative de la CIC.
Si on s'en va, par exemple, dans le sens de l'emploi du personnel pour
réaliser des objectifs, je verrais un paralléisme possible avec
ce qui se produit au gouvernement. C'est qu'il y a une Commission de la
fonction publique qui détermine si une personne est admissible ou non au
poste et qui détermine aussi la catégorie ou la classe de poste
et les conditions pour y accéder. Ce n'est pas un organisme politique
qui le fait, c'est déterminé par une commission neutre.
Quand je dis commission, ici, à titre d'exemple seulement, le
conseil d'administration de la CIC pourrait décider que, dans le budget
de dépenses de l'office en question, 25% ou 30% doivent être
affectés à la sécurité. Donc, 25% ou 30% d'un
montant global qui est déjà établi. Là, on pourrait
établir que si cela prend plus d'inspecteurs de sécurité,
si cela prend plus de programmes de sécurité, vous devez le
faire. Mais le faire ne relèverait pas de l'administration
journalière de la commission ou du groupe de personnes qui sont, en
définitive, des des représentants syndicaux et des
représentants patronaux. Une fois le mandat déterminé,
l'autre n'a qu'à l'exécuter. Il n'y a plus d'interférence
entre l'exécution et ce qu'on peut appeler, entre vous et moi, un
certain climat politique, un certain climat de politique de relations
patronales-syndicales.
C'est cette distinction que la commission Cliche, je pense, a voulu
faire en disant: Bien, cela redevient une table de bataille, cette histoire,
où chacun va essayer de tirer le plus possible de ficelles pour mettre
le plus grand nombre possible de ses amis à l'intérieur de la
structure administrative.
Dans ce sens, je ferais la distinction entre l'exécutif et le
législatif tout en conservant l'interprétation du décret
aux parties avec droit d'arbitrage du président de l'office.
M. Pepin (Marcel): Je voudrais faire une suggestion. Avec cette
structure que vous mettez comme hypothèse ou comme possibilité de
travailler là-dessus, ou bien vous nommez une personne ou bien vous en
nommez cinq. Moi, cela ne me paraît pas nécessaire d'en nommer
cinq. Trois,
avec la composition des parties, je pense que c'est une source de
conflit inutile. Une personne, à mon avis, serait suffisante pour faire
ce que vous venez de dire. Mais, si vous croyez que c'est mieux d'en avoir plus
d'une, ne vous arrêtez pas à trois, allez-y à cinq.
Je comprends, pour résumer et pour voir si j'ai bien saisi
l'idée que vous avancez, qu'on garde la CIC telle qu'elle est dans sa
composition, donc la représentation des parties. C'est possible que la
question des votes soit changée, et elle prend des décisions
d'application du décret. Elle décide si elle doit poursuivre ou
non tel employeur ou des affaires comme cela. A défaut d'entente, elle
va voir les trois personnes dont vous avez parlé, vous. Et, quand il
s'agit d'embauchage de personnel, elle a des recommandations à faire et
peut-être des décisions à prendre quant au partage du
budget, on veut avoir 40% pour telle fin, 10% pour telle autre fin, etc. Quant
à l'exécution de cela, ce sont les trois personnes qui seraient
chargées de le mettre en oeuvre pour éviter que les parties
fassent de l'escrime pour en arriver à nommer leurs beaux-frères,
leurs amis, etc.
Moi, ce que je vous suggère, si vous voulez avoir plus d'une
personne, c'est d'en nommer cinq. Ma thèse, à mon avis, est
qu'une personne devrait être suffisante pour s'occuper de cela.
M. Cournoyer: En fait, vous dites que c'est un président
directeur général que cela prend, le président qui agit
dans la fonction d'arbitre de conflit d'interprétation lorsqu'ils ne
s'entendent pas et qui agit comme exécutant des décisions.
M. Pepin (Marcel): II n'y a rien qui empêche cette personne
d'avoir du personnel de ressource parce que cela ne peut être universel.
Il peut avoir son propre contentieux, il peut avoir un avocat qui travaille
avec lui, je ne sais pas, un comptable, en tout cas les
nécessités sont là. Il me semble que vous seriez mieux, si
ce n'est pas une personne, c'est cinq, mais je vous recommande bien plus une
personne, il me semble que c'est suffisant. Mais vraiment que le comité
paritaire reste là et que les parties puissent...
J'ouvre un autre volet. Nous, cela nous fatigue beaucoup d'être
obligés de payer la demie de l% pour l'application des conditions de
travail décrétées. C'est rare dans la
société que l'on a à faire ce paiement. D'ailleurs, le
rapport Cliche,là-dessus, maintient la cotisation et nous refile
l'application du décret. Cela fait des moyens prix pour les
travailleurs. Je vous demande d'examiner cela sérieusement.
Nous, nous voudrions que cette administration soit payée par le
trésor provincial et que ni les travailleurs, ni les employeurs n'aient
à débourser la demie de l%. Je voulais vous en faire la
suggestion et je pense que c'est important. Il y a pas mal de malaise dans
cette industrie. Les taux de salaire horaire' sont généralement
plus élevés qu'ailleurs, cela, je pense que tout le monde le
sait. Après cela, il y a cette déduction d'une demie de l%. Cela
existe aussi dans d'autres décrets, mais on sait que le nombre de
décrets tend à décroître. Je ne sais pas où
cela en est rendu à l'heure actuelle, mais je pense que...
M. Cournoyer: Cela a pas mal baissé.
M. Pepin (Marcel): ...cela a diminué
considérablement depuis quatre ou cinq ans. Je pense que ce n'est pas
une formule d'avenir dans les autres secteurs non plus.
Je voudrais vous demander d'éliminer cette demie de l% que les
travailleurs ont à payer pour appliquer leurs conditions de travail.
M. Cournoyer: II faudrait en discuter avec vous, M. Pepin, de
l'abolition de cette demie de l%, mais il semble que cette participation des
travailleurs à leur propre administration et à leurs propres
affaires commence traditionnellement par une participation au financement. Je
me suis fait dire très souvent dans certaines autres affaires, par
exemple la Commission des accidents du travail, que ce sont les employeurs qui
paient tout. Parce que ce sont les employeurs qui paient tout, on devrait
plutôt penser qu'à la Commission des accidents du travail, ce sont
eux qui mènent, étant donné que ce sont eux qui paient
tout. Combien de fois me suis-je fait dire cela!
Je ne veux pas annoncer qu'on va financer la Commission des accidents de
travail différemment. Je ne crois pas que ce soit mon propos, mais cette
argumentation qu'on paie tous... Lorsque nous avons établi dans
l'industrie de la construction le fonds de pension, par exemple, au point de
départ, on a cru bon, pour faire un peu différent de certains
fonds de pension qui étaient totalement payés par les employeurs,
de faire administrer celui-là par la Commission de l'industrie de la
construction. A l'époque, c'était le comité conjoint, et
la participation à l'administration devenait beaucoup plus forte du fait
qu'il y avait $0.05 du fonds de pension qui étaient payés par les
employés proprement dits. Mais les $0.05 du fonds de pension
payés par les employés étaient en fait payés par
les employeurs. On a ajouté les $0.05 le 1er janvier et on les a
déduits en même temps qu'on les ajoutait. Mais il avait
été prévu de les ajouter pour cette fin, en particulier,
d'un fonds de pension. Théoriquement, on peut toujours dire que c'est
l'employeur qui paie tout, mais là, il y a une déduction,
c'est-à-dire que cela fait partie du prix payé pour la
main-d'oeuvre.
M. Pepin (Marcel): Donc, à ce moment, on peut toujours
dire que moi, je me prive de $0.25 l'heure que l'employeur ne me donne pas
parce qu'il les verse au fonds de pension. C'est du salaire
différé...
M. Cournoyer: Oui, bien oui.
M. Pepin (Marcel): ...et, effectivement, c'est le salarié
qui se trouve à les payer, M. le ministre. D'ailleurs, tout le monde le
réalise de cette façon. Je me demande pourquoi on ne pourrait pas
être dans l'administration du fonds de pension quand c'est l'employeur
qui verse, au total, sa part. Au-
jourd'hui, il y a une grande réunion, vous le savez
peut-être, au Quebec Hilton, de l'ACARR, l'Association des
administrateurs des régimes de rentes. D'ailleurs, votre institution, la
Régie des rentes, est là. Je devais y être ce matin pour
présenter un mémoire, mais d'autres y vont. Toutes ces questions
sont discutées. Il est sûr, tout le monde reconnaît que
c'est du salaire différé. Donc, ce sont les employés qui
se trouvent à payer.
M. Cournoyer: Assurément, mais c'est l'économie qui
se trouve à le payer.
M. Pepin (Marcel): Non, non, ce sont les employés. Dans le
cas de la construction, bien sûr que le gouvernement en paie une bonne
partie. Si c'est lui qui est donneur d'ouvrage à 60%, il se trouve
à payer 60% de cela.
M. Cournoyer: Maintenant, retournons à la demie de 1%
parce que le fonds de pension est peut-être un très mauvais
exemple. C'est-à-dire qu'il s'agit de salaires différés,
comme vous le dites, et mon opinion est faite là-dessus depuis un
certain temps. De toute façon, il a été conçu dans
la construction comme cela. Au lieu de vous donner $0.05 dans votre paie, je
les mets dans votre paie, mais c'est pour les mettre dans le fonds de pension.
C'était tellement clair dans le temps. M. Audet était là
dans le temps, c'était $0.05 dans le fonds de pension, mais je vous les
donne dans votre poche et je vous les ôte tout de suite avant que vous
n'y touchiez. On avait peur aussi que la loi qui permettait
l'établissement du fonds de pension ne passe pas avant le mois de
décembre parce que les gars auraient eu droit aux $0.05 le premier
janvier et s'ils y avaient goûté pendant une semaine ou deux, cela
aurait été un drame. De toute façon, cela s'est fait il y
a déjà longtemps.
Quand on arrive à la demie de 1%, il est clair que, dans ce cas
en particulier, c'est l'administration d'une convention collective et que
l'office de la construction, ou la CIC est formée sur une base paritaire
et que cette base paritaire vient du fait qu'il s'agit d'une convention
commune, c'est-à-dire que cela appartient aux deux parties, une
convention, et que chacune des parties paie ses frais.
Si on suivait la recommandation du rapport Cliche d'envoyer
l'administration de la convention collective à des arbitres, non pas sur
chacun des chantiers, mais à un réseau d'arbitres, donc avec une
obligation du syndicat d'assumer ce qui est maintenant assumé par la
CIC, à partir de ce moment, nous devrions couper immédiatement la
demie de 1%, les deux demies de 1% en définitive, parce que l'Office,
dans son rôle tel que décrit, est un organisme gouvernemental qui
s'occupe d'un certain nombre de choses, mais qui ne touche pas à ce qui
appartient aux deux parties de la convention collective. Cependant, quand on ne
l'enlève pas, on dit que cela reste votre propriété. Je
vois d'un oeil interrogateur, pour ne pas dire un peu soucieux, qu'on dise
maintenant que la demie de 1% tombe et que c'est l'Etat qui administre cette
convention en particulier, qui l'administre avec la participation des parties.
Etant donné qu'il s'agit toujours du domaine privé, même si
c'est l'Etat qui est là et que la CIC, c'est semi-public, il s'agit
d'une convention privée qui, comme vous le disiez tantôt,
négocie un décret. En définitive, on pourra oublier le mot
décret et dire que c'est la convention collective qui fait oeuvre entre
les parties et laisser faire le gouvernement dans la convention collective. On
n'a pas besoin de cela, sauf pour la protection des tiers et il n'y a plus
beaucoup de tiers dans la construction. Dans ce sens, je vois d'un très
mauvais oeil le retrait de la demie de 1% qui ne correspond pas à une
augmentation des obligations du syndicat proprement dit.
M. Pepin (Marcel): M. Bourdon voudrait dire quelque chose
là-dessus.
M. Bourdon (Michel): En fait, même dans la situation
actuelle, la CIC a été amenée à ne pas seulement
appliquer la convention entre les parties, mais à appliquer des lois et
règlements d'ordre public. Je pense à la qualification
professionnelle où elle a des responsabilités de contrôle
des cartes de qualification. Je pense également à la
sécurité sur les chantiers, puisqu'elle applique là la Loi
sur les établissements industriels et commerciaux. Dans ce sens, les
travailleurs se trouvent placés sur un pied différent de celui
des travailleurs d'autres secteurs qui, eux, n'ont pas à payer pour
l'inspection de leur sécurité. La plupart du temps, ils n'ont pas
d'inspection ou à peu près. Peu importe, le peu qui se fait, ils
n'ont pas à le financer eux-mêmes directement. Sans compter que ce
qui accentue encore cela, c'est que ce n'est même pas déductible
de l'impôt, alors qu'en fait c'est un coût qu'ils assument pour se
policer en appliquant une entente qui les lie aux employeurs.
M. Cournoyer: Sur le dernier aspect de vos remarques, selon, bien
sûr, le mandat que nous allons donner à l'office en
sécurité, si, de notre côté, par exemple, nous
donnions à l'office le soin de s'occuper de toute la
sécurité, c'est-à-dire de prendre lui-même des
actions sans passer par le ministère de la Justice, nous ajoutons, comme
gouvernement et comme Parlement, un fardeau additionnel en nous en
départissant. A ce moment, dans l'établissement des budgets
cela peut être évaluable, parce que nous avons un certain
nombre de coûts, comme gouvernement nous pouvons nous obliger,
d'une façon ou d'une autre, à compenser pour le fardeau
additionnel que nous nous trouvons à mettre sur la demie de 1% qui est
là.
Vos remarques à cet effet m'indiquent que je dois penser à
cela aussi, dans l'établissement de la loi. Si j'ajoute des obligations
à l'office ou à la Commission de l'industrie de la construction,
je me sentirais obligé d'ajouter au moins le montant que je
dépense comme gouvernement, à ce titre, pour l'industrie de la
construction, dans le budget de la CIC. Je serais obligé de faire cela.
Je pense que nous pouvons regarder cela d'une façon très
objective. La même chose dans le cas de la qualification
professionnelle.
Remarquez que, dans le cas de la qualification professionnelle, c'est
pratiquement la seule industrie qui en bénéficie. Le
règlement no 1, qui est là le règlement no 2
comprend ce qui n'est pas dans le règlement no 1, qui n'est pas
nécessairement de la construction on pourrait peut-être
penser qu'on va le faire négocier par les parties, mais c'est
pratiquement ce que nous faisons, remarquez bien. Souvent, on peut trancher
comme arbitre de l'intérêt public. De toute façon, quant
à la question de la qualification, pour ma part, encore là, s'il
y avait lieu de compenser la Commission de l'industrie de la construction pour
cette action en qualification qui, normalement, devrait relever du
gouvernement, si nous décidions de la faire relever de l'office,
à ce moment, il faudrait établir la compensation
pécuniaire et ne pas alourdir davantage l'imposition qui est
là.
On me disait, la semaine dernière, à la suite de
l'étude du budget de la CIC, qu'on pensait on ne m'a pas
donné le papier, par exemple à réduire la demie de
1%, pour des questions budgétaires ou autres; on pensait à
réduire cette taxe qui pèse sur les travailleurs de la
construction et sur leurs employeurs.
On m'a indiqué cela très rapidement, dans une
conversation. Donc, si j'ajoute...
M. Pepin (Marcel): M. le ministre, on me dit que les budgets sont
très serrés. C'est Michel Bourdon qui a dit cela ici.
M. Cournoyer: C'est pour cela que je comprends mal qu'on me dise
qu'on veuille réduire la perception, en même temps qu'on dit: Les
budgets sont très serrés.
M. Bourdon (Michel): C'est parce qu'on voulait aller chercher le
budget ailleurs.
M. Cournoyer: Ce n'est pas vous qui m'avez dit cela. Ce sont de
mes fonctionnaires qui m'ont dit qu'ils songeaient à réduire la
demie de 1%.
C'est sûr que, s'il y avait compensation d'ailleurs, vous le
réduiriez dans la proportion. C'est un peu le genre de conversation que
nous avons. Si je vous oblige à davantage et que je paie ce qui
relève normalement des responsabilités gouvernementales, à
ce moment, votre budget d'une demie de 1%,, normalement, pourrait être
réduit. Je ne le sais pas. Compte tenu des compensations pour des
rôles qui ne relèvent pas actuellement de l'autorité de la
Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction, mais de
l'autorité d'autres lois dont on a confié l'administration, en
partie ou peut-être en totalité avec une nouvelle loi, à
cet organisme qu'on appelle l'Office de la construction, je pense qu'il y a une
question pécuniaire qu'il faut examiner immédiatement, afin de
savoir quel est le degré de compensation que nous devons consentir
à l'office qui serait financée, en fait, par deux sources au lieu
d'une.
Actuellement, son financement, tel qu'il est décrit non seulement
dans l'office, mais dans la
CIC, est d'une demie de 1% au maximum de chaque côté et
pour toutes les obligations qu'elle a. Mais, si j'ajoutais la formation
professionnelle, par exemple, forcément, les budgets de formation
professionnelle, qui sont au ministère du Travail, administrés
par le ministère du Travail, il faudrait les consentir à l'Office
de la construction qui administrerait la formation professionnelle.
M. Pepin (Marcel): J'aimerais revenir sur une discussion que nous
avions préalablement, sur toute la question du placement. Est-ce que
vous êtes autant en accord que nous pour dire que c'est vraiment la clef
de tout le système et que, si on ne règle pas cette
question-là, vraiment, on n'a pas réglé grand-chose. Il me
semble que c'est important, comme représentants syndicaux, que nous
sachions ces choses.
Deuxièmement, j'aimerais bien savoir si, partageant cet avis par
hypothèse, comme je crois que vous le partagez, on peut vraiment
s'attendre au dépôt d'une loi avant l'ajournement de
l'été. C'est plus important même que le projet de loi no 24
ou que les amendements au projet de loi no 24; vous le savez fort bien,
d'ailleurs.
M. Cournoyer: II est clair que le placement, si je me fie
à ce qui a été décrit et à ce que nous
savions aussi un peu avant, a été utilisé à des
fins qui n'ont rien à voir avec le service que, normalement,
l'institution de placement devrait être pour le travailleur. Je pense
bien qu'on va comprendre, vous et moi, que vous avez donné ce service
à vos propres membres. Ce n'était pas nécessairement en
concurrence avec l'autre; c'est parce que vous avez décidé,
à un moment donné, qu'il s'agissait d'un service à donner
à vos membres.
Pour ma part, si nous le prenons essentiellement comme étant un
service, il s'agit de donner le meilleur service possible. On recommande que
l'office soit responsable du placement au Québec dans l'industrie de la
construction. Je vous dis: Oui, l'office sera ou devrait être responsable
du placement dans l'industrie de la construction. Cela sera inscrit dans la
loi.
M. Pepin (Marcel): Seriez-vous prêt à faire un bout
de chemin pour que les parties soient là? La suggestion que je vous fais
n'est pas dans le but de négocier, mais il me semble que c'est concret,
que c'est quelque chose. Les parties, le comité conjoint prévu
dans la loi, seront là. Prévoyez les mécanismes au cas
où une partie décide de bouder ou de ne pas être là
ou même que les deux parties décident de foutre le camp; cela ne
me fait rien, mais qu'on s'assure que cela fonctionne.
Cela me paraît essentiel que les critères de placement
soient connus publiquement, partout le monde, par toutes les associations,
qu'on puisse fournir cela aux membres qui veulent les avoir. A ce
défaut, si on n'a pas cela, le service auquel vous vous
référez, on ne pourra jamais le rendre. Vous nous parlez de notre
expérience du placement; on en fait, du placement. Je sais aussi quelles
sont les conséquences de cela. Je ne pense pas qu'on ait triché
systématiquement avec cela.
Si on avait tellement triché, le rapport Cliche le dirait fort
bien. Cependant, vous comprendrez le poids qu'un agent d'affaires a sur une
assemblée syndicale. La question de la démocratie syndicale
thème que vous développez fréquemment est
facilement en cause à ce moment-là.
Si je vais m'enregistrer à un organisme paritaire, que les deux
unions sont là et que je dis: Bon, je viens d'être mis à
pied hier, je veux m'inscrire, j'ai tel métier, menuisier ou autre.
Quand vous aurez de l'ouvrage, je suis disponible. Les gars, quand ils ont des
demandes d'ouvriers, peuvent m'envoyer là. S'ils ne m'envoient pas
là alors que c'est mon tour, que tout se fait correctement, j'ai un
droit d'appel. Vous ne sortez pas les parties de là. Regardez ce que
vous faites pour les entrepreneurs en construction dans votre projet de loi qui
est adopté en deuxième lecture, je pense.
M. Cournoyer: Pas encore.
M. Pepin (Marcel): II est en première lecture,
seulement.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que les discours de
deuxième lecture ne sont pas finis.
M. Pepin (Marcel): Ah bon! Regardez dans ce projet de loi. Les
entrepreneurs ont une place assez prépondérante. Il n'y a pas de
représentant syndical là. Je ne fais pas de réclamation ce
matin là-dessus, mais, simplement par voie analogique, pourquoi, dans ce
qui nous intéresse de plus fondamental, la question de l'ouvrage, de la
sécurité du gars, on ne serait pas là? C'est pour cela que
j'insiste. Autrement, on va redonner cela au gouvernement, le placement.
On sait ce que vous en avez fait à la baie James et c'est bien
décrit là aussi. En tout cas, je ne dis pas vous personnellement,
individuellement, mais l'appareil étatique tout simplement. Cela a
conduit à des aberrations et on voudrait prendre le chemin pour
éviter tout cela.
Reprenez le jugement Gold de 1970. Peut-être que tout n'est pas
bon là-dedans, mais, en tout cas, il y a des critères qui avaient
été partiellement amenés par les parties, puis il y avait
eu à arbitrer seulement les différends entre nous et les
associations patronales. Ces critères, vous pouvez les inscrire dans une
loi. Si vous aimez mieux procéder par règlements, vous pouvez le
faire aussi, mais je préférerais avoir une protection
législative.
Je reprends ma question. Est-ce que vous croyez qu'on peut s'attendre au
dépôt d'une loi là-dessus dans les jours qui viennent? En
tout cas, pas trop tard, parce que la situation évolue vite et vous
savez comme moi qu'au mois d'octobre il y a une question qui s'en vient. Je ne
sais pas si vous avez décidé d'appliquer les conclusions du
rapport Cliche là-dessus. On n'en sait rien.
M. Cournoyer: Disons que je parle toujours de l'office. J'ai
entendu la suggestion que vous avez faite tantôt. En fait, sur le
placement, ce que vous suggérez, c'est que la CSN et la FTQ fassent le
placement en vertu de critères législatifs, mais ensemble.
M. Pepin (Marcel): Oui.
M. Cournoyer: Vous oubliez la CSD d'une façon un peu
cavalière.
M. Pepin (Marcel): J'ai toujours dit: Par hypothèse, les
deux syndicats.
M. Cournoyer: Parce que c'est un mot que vous ne voulez pas dire,
CSD.
M. Pepin (Marcel): Je n'ai pas à le dire pour rien.
Cependant, à ce moment, ce que je veux vous dire, c'est que si elle est
représentative, elle y sera, si la FCAI est représentative, elle
y sera. Qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse?
D'ailleurs, je comptais sur vous pour me la rappeler.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Bourget.
M. Boudreauli: Justement, je voulais vous poser cette question,
M. Pepin: Dans le domaine de la construction, quel pourcentage
représentez-vous au niveau des ouvriers spécialisés dans
la construction?
M. Pepin (Marcel): Je ne le sais pas. M. Boudreault: Vous
ne le savez pas.
M. Pepin (Marcel): Très peu de gens, d'ailleurs, peuvent
dire exactement quelle est cette représentativité. Les
critères utilisés par la loi 9 pour en arriver là sont des
critères bâtards. Cela est mon avis, j'ai au moins le droit de le
dire.
M. Cournoyer: Vous en avez le droit.
M. Pepin (Marcel): Ils sont peut-être excellents pour le
ministre, mais il n'y a pas beaucoup de gens qui peuvent dire que, vraiment, la
FTQ c'est 72%. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui peuvent l'affirmer
avec certitude.
M. Cournoyer: Si nous appliquions le rapport Cliche, on pourrait
l'affirmer avec certitude.
M. Pepin (Marcel): Oui, alors appliquez-le là-dessus.
M. Cournoyer: Là-dessus. Là-dessus, je peux vous
dire qu'il y a un critère qui va tomber dans l'évaluation et je
peux vous dire aussi que cela va se faire par l'office. L'un des mandats de
l'office sera de prendre soin et de la période de maraudage et du vote
ou de la décision des individus devant l'office.
M. Pepin (Marcel): Faites attention, il faudrait
que les parties puissent voir un peu ce qui se passe aussi dans cette
affaire.
M. Cournoyer: Et qu'est-ce que c'est que l'office?
M. Pepin (Marcel): Oui, c'est ça. Moi, je ne sais pas ce
que vous allez décider. Je vous dis que c'est un ou cinq.
M. Cournoyer: Tout cela est relié. L'office, c'est quoi?
Vous pouvez avoir confiance en tel office puis moins confiance en tel autre
office. Pour l'objectivité dont on parle ici dans l'établissement
des critères, vous pouvez avoir confiance en cet office ou en tel autre
office.
M. Pepin (Marcel): Me permettez-vous une autre suggestion?
M. Cournoyer: Vous pouvez toujours en faire.
M. Pepin (Marcel): Je sais que vous n'êtes pas bien
"écouteux". Vous ne passez pas souvent aux actes de ce
côté. Voici la suggestion que je vous fais. Si vous faites un
office de cinq personnes, nommez un président qui sera qui vous voudrez,
sûrement un gars du bon bord, par exemple, et demandez aux parties de
vous recommander... La CSN, par exemple, demandez-lui de vous désigner
un représentant rappelable. Je vais attendre qu'il m'écoute un
peu... Ces représentants des parties seront rappelables par les parties
à volonté. Si vous décidiez de suivre ce cheminement non
seulement pour un tel office, mais pour plusieurs autres commissions qui
existent, je pense qu'on pourrait éviter pas mal de problèmes.
Si, par exemple, la CSN décide de me désigner comme
représentant, vous êtes obligé de me nommer. Cependant, au
bout de six mois ou un an, si la CSN se rend compte que je ne fais pas le
travail que je devrais faire, elle a le droit de me rappeler et d'en
désigner un autre.
A ce moment, c'est une surveillance directe des opérations. Et
puis, pour le Parlement, ça le met à couvert, à mon avis,
parce qu'il n'a plus besoin de faire de patronage, ces choses... Ce serait une
solution que je vous suggère d'examiner. Sans doute allez-vous le faire.
Je ne suis pas sûr des réponses.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que, là-dessus, je pense
bien que, même dans le cas de la CIC actuelle, les représentants
des parties sont rappelables par les parties.
M. Pepin (Marcel):... à volonté.
M. Cournoyer: Cela fait deux ou trois fois que je change.
Peut-être pas nécessairement des cas du côté de la
CSN mais, à un moment donné, je reçois un avis comme quoi
la personne suivante est remplacée par un autre et on la
désigne.
Alors, comme je vous l'ai dit tantôt, la composition de l'office
n'est pas déterminée encore. Nous allons créer l'office.
Ce que je ne voudrais pas, c'est que ce soit un vain mot, qu'on ait
créé un office et qu'on nous dise, le lendemain matin: C'est
seulement un changement de termes. Cela s'appelait la CIC hier et c'est
l'office aujourd'hui. Cela aussi, il va falloir y songer ensemble et, encore
une fois, je vous le dis, pour ma part, le placement pour revenir au
placement est l'une des préoccupations de l'office. Et la
suggestion que vous avez faite, de confier le placement aux centrales
syndicales, là, il va falloir que je vois jusqu'à quel point cela
se marie avec certaines observations qui sont faites par la commission Cliche
sur l'activité des syndicats là-dedans.
Est-ce que le seul fait de rendre publics les critères serait
pour les personnes une garantie que cela fonctionnerait? Cela, je ne le sais
pas. Peut-être que oui, peut-être que non. Il reste que ce seraient
des syndicats et des syndicats qui sont dans des proportions, les uns
vis-à-vis des autres, un peu différentes et on ne sait pas ce qui
va arriver à la suite du maraudage. Est-ce que, en le confiant aux
syndicats, on ne prend pas le risque de le confier a un seul syndicat si
jamais, par le truchement de la campagne de maraudage, il n'en restait qu'un
sur le carreau?
M. Pepin (Marcel): A mon avis, il n'y a pas de problème
là-dessus, M. le Président. Examinez-le comme vous voudrez. S'il
arrivait qu'il n'y ait qu'un seul syndicat après la période de
maraudage disons la CSD, puisque vous voulez que j'utilise le mot
il serait to ut seul, à ce moment-là, ce serait lui qui ferait le
placement avec les critères publics. Et, les membres, qui ne seraient
pas d'accord, parce qu'ils prétendraient que cela n'a pas
été suivi, en appelleraient. Je pense qu'il n'y a pas de
problème.
Ce que je vous demande, c'est de ne pas éliminer la participation
des travailleurs, de leurs représentants dans une fonction aussi
capitale et surtout de ne pas le prendre entre vos mains.
M. Cournoyer: C'est une bonne chose que vous me suggériez
ça.
M. Pepin (Marcel): Certainement. Vous savez pourquoi.
M. Cournoyer: J'avais déjà décidé
que... Pour vos raisons, je le prendrais entre mes mains, je n'ai pas de
problème. Mais, pour d'autres raisons, je pense bien qu'il n'est pas
nécessaire...
M. Pepin (Marcel): II y a des raisons qui militent en faveur du
fait que vous ne le preniez pas entre vos mains.
M. Cournoyer: Oui. Pas les vôtres.
M. Pepin (Marcel): Je ne les ai pas encore dites.
M. Cournoyer: Non, et je ne veux pas que vous les disiez. Si vous
voulez les dire, dites-les aux journalistes après.
M. Pepin (Marcel): Après. D'accord.
M. Cournoyer: Oui.
M. Pepin (Marcel): Moi aussi.
M. Cournoyer: Alors, je vais penser à cette
affaire-là.
M. Pepin (Marcel): Une bonne idée.
M. Cournoyer: Cela a de l'allure. C'est correct, vous êtes
positif, ce matin, M. Pepin.
M. Pepin (Marcel): C'est rare que je sois négatif.
M. Cournoyer: Cela dépend. Cela dépend comment vous
l'amenez.
Ceci étant dit, on a parlé du placement, on a parlé
de la participation des syndicats.
M. Pepin (Marcel): L'ancienneté, M. le ministre?
M. Cournoyer: Vous parlerez de l'ancienneté à
l'organisme en question qui va faire ça.
M. Pepin (Marcel): Pourquoi ne voulez-vous pas en entendre
parler?
M. Cournoyer: Bien. C'est parce que j'ai des recommandations de
la commission Cliche, ici, qui nous disent comment faire le placement.
M. Pepin (Marcel): Mais, des fois, vous avez eu des
recommandations et vous les avez changées aussi.
M. Cournoyer: Peut-être que je vais revenir à
l'original de la commission Cliche.
M. Pepin (Marcel): Ah oui? Vous feriez une erreur.
M. Cournoyer: Pardon?
M. Pepin (Marcel): Vous feriez une erreur.
M. Cournoyer: Bien...
M. Pepin (Marcel): Dans la loi 29, il me semble que vous
allez...
M. Cournoyer: ... j'aurais bien moins de problèmes
à dire que la commission Cliche a raison.
M. Pepin (Marcel):... plus loin que la commission Cliche.
M. Cournoyer: Pardon?
M. Pepin (Marcel): Dans la loi 29, vous êtes allé
plus loin que Sa commission Cliche.
M. Cournoyer: Quand il faut aller plus loin, on va plus loin.
Quand il faut aller...
M. Pepin (Marcel): L'intérêt public pour
commencer.
M. Cournoyer:... aussi loin, on peut aller aussi loin. Et quand
il faut aller moins loin, on va aller moins loin.
M. Pepin (Marcel): Mais, l'ancienneté, vous reconnaissez
que c'est un problème de taille dans cette industrie. Je comprends que
vous pouvez me dire: Tu en parleras à un autre. Mais, c'est un
problème de taille, là-dessus.
M. Cournoyer: C'est un problème de taille.
M. Pepin (Marcel): Oui, mais à part ça, cela a des
conséquences, le fait qu'il n'y ait pas d'ancienneté, de
débauchage, j'entends. Vous le savez comme moi.
M. Cournoyer: Oui, mais, ce sont des négociations
habituellement qui font ça. Dans les autres industries, comment
allez-vous régler ces problèmes?
M. Pepin (Marcel): Par voie de négociations. M.
Cournoyer: Bien oui.
M. Pepin (Marcel): Le placement aussi, on le règle par
voie de négociations, généralement.
M. Cournoyer: Oui.
M. Pepin (Marcel): Là, vous sentez la
nécessité d'intervenir et vous avez raison d'intervenir. Cela
dépend comment. Mais, dans le cas de l'ancienneté, il me semble
que la loi devrait prévoir que l'ancienneté est un critère
à respecter dans le cas de débauchage.
Je sais que vous connaissez la vie de tous les jours. Mais, les gars,
dans la construction, qui sont aux prises avec le non-respect d'un
règlement ou de lois, mais qui n'osent pas parce qu'ils se disent: Moi,
je peux être mis à pied, sans aucun recours, quand ce n'est pas un
congédiement pour cause; alors je n'ai plus de travail. Ton bleu,
vendredi, prends-le, même s'il y en a un autre plus jeune qui reste sur
le chantier. Là, on ne parle pas d'une entreprise localisée dans
un lieu donné, c'est une industrie qui couvre tout le territoire.
Cela a déjà été expérimenté,
M. le ministre, les clauses d'ancienneté, certainement. Avant la loi
290, il y en avait à Hauterive, à Sept-lles. Il y en avait une
partie, aussi, à Montréal.
M. Cournoyer: II y en avait sur des chantiers de très
longue durée.
M. Pepin (Marcel): Non, non, non. Quand on parle de Hauterive et
de Sept-lles, ce n'étaient pas
des chantiers de très longue durée. On ne parle pas de la
Manicouagan. A Manicouagan, nous avons la clause d'ancienneté et fort
heureusement. Cela va relativement bien. A Montréal, c'était par
métier et il y avait des clauses d'ancienneté qui, juste avant
1968, avaient été négociées.
M. Cournoyer: A Montréal, il y avait des clauses
d'ancienneté, M. Audet?
M. Pepin (Marcel): Pour les tuiles, le marbre et le terrazzo.
M. Audet (Florent): Le plâtre. M. Pepin (Marcel): Le
plâtre.
M. Cournoyer: Dans les industries bien identifiées et avec
un taux d'emploi assez régulier, par exemple. Dans le terrazzo...
M. Audet: Les tuiles, le marbre, le terrazzo, les
plâtriers.
M. Cournoyer: Oui. Y en a-t-il encore des plâtriers?
M. Audet: II en reste quelques-uns.
M. Cournoyer: II en reste quelques-uns.
M. Bourdon: Les échasses sont parties.
M. Cournoyer: Pardon?
M. Bourdon: Les échasses sont parties.
M. Cournoyer: Les échasses, vous pourrez parler de cela
avec le député de Saguenay, vous!
M. Pepin (Marcel): Pour revenir à l'ancienneté,
toute la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean l'avait avant 1968, aussi, M.
le ministre.
M. Bourdon: En fait, on est conscient aussi que cela prendrait
des formes adaptées à l'industrie, mais ce n'est pas
extrêmement compliqué, cependant, de dire que, dans un
métier ou une occupation, les gens quittent le chantier dans l'ordre
inverse de leur arrivée. Autrement dit, le premier entré est le
dernier à partir et vice versa, de façon que, lorsque l'employeur
veut faire un congédiement comme ailleurs et qu'à ce
moment-là il y ait possiblement un arbitrage pour en décider.
Mais nous, on maintient le rapport Cliche, malheureusement, n'est
pas allé assez au fond des choses là-dessus qu'une des
principales causes des accidents, c'est que les gens acceptent de faire quelque
chose de dangereux. Par voie analogique, on dit que si, à Manic, ils
n'acceptent pas de faire quelque chose de dangereux le taux d'accidents,
à Manicouagan, est décroissant; il n'y a pas eu d'accident mortel
depuis trois ans c'est un facteur réel, parce qu'on ne peut pas
croire que c'est par absence d'instinct de conservation que quelqu'un accepte
de faire quelque chose de dangereux. On pense que la principale cause, c'est
que le débauchage, les mises à pied pour manque de travail se
font dans n'importe quel ordre, ce qui permet toutes sortes de manipulations
sur le chantier.
M. Cournoyer: Mais vous avez, M. Bourdon, de gros chantiers, de
moyens chantiers et de petits chantiers. Admettons qu'on applique la formule
d'ancienneté de débauchage, vous mariez cela, bien sûr,
avec la formule de placement, parce que les deux sont intimement reliées
dans votre esprit. Il arrive, surtout dans cette industrie, que les derniers
entrés sont les premiers sortis. Quand vous avez un type qui,
après un certain temps sur la liste de placement de quelque bureau de
placement que ce soit, se déplace dans l'industrie de la construction,
se trouve, grâce au bureau de placement, un emploi, que cet emploi dure
deux ou trois jours et qu'il retourne encore au bureau de placement, comment
arrive-t-il au bureau de placement, ce gars-là? Il est toujours le moins
ancien.
M. Pepin (Marcel): Dans le rapport, vous avez une partie de
réponse.
M. Cournoyer: II est le plus ancien dans le placement et il est
le moins ancien sur la "job".
M. Pepin (Marcel): Je pense que, dans ce cas, il n'y a pas de
choix. Quand vous êtes inscrit le premier, vous avez le premier choix.
Nous avions prévu, cependant, que tu n'es pas obligé de prendre
l'emploi qu'on t'offre, si c'est un emploi d'une durée moindre de x
jours. C'était un des critères de placement. Au meilleur de mon
souvenir, c'était cinq jours, mais cela pouvait être trois jours.
En tout cas, c'est à revoir. Je n'ai pas relu, hier soir, le rapport
Gold. Mais nous avions pensé à cette réalité. Une
fois que tu es rendu sur le chantier, si tu arrives le premier et qu'il y a de
l'ouvrage dans ton métier que tu es capable de faire, tu vas sortir le
dernier. Il me semble que c'est réalisable. Cela pourrait régler
pas mal de situations pour des conditions de vie humaines du travailleur
individuel, sa vie de tous les jours. Cela pourrait aider
considérablement.
C'est pour cela que j'insiste pour que vous l'examiniez plus
sérieusement que de dire: Tu discuteras cela ailleurs.
M. Cournoyer: Non, ce n'est pas parce que je veux vous renvoyer
ailleurs, M. Pepin. Ce n'est pas cela. Vous êtes ici, devant la
commission parlementaire, avec l'intention de nous aider j'imagine que
c'est votre première intention et d'aider les travailleurs de la
construction. Je ne vous prête pas d'intentions. Je dis que vous
êtes ici. Ce n'est pas pour vous renvoyer ailleurs. Mais je dis: Est-ce
que nous allons mettre cela dans la loi? Est-ce qu'on n'enlève pas,
encore une fois, un autre point de discussion à une table de
négociation, par autorité gouvernementale? Peut-être qu'il
y a lieu de le faire.
M. Pepin (Marcel): Oui, je pense qu'il y a lieu.
M. Cournoyer: S'il y a lieu de le faire, on va examiner la
chose.
M. Pepin (Marcel): Combien de fois, dans la construction,
êtes-vous intervenu par voie de règlement, par voie
législative?
Je ne sais pas combien de fois, mais, chaque fois qu'il y avait une
crise, vous interveniez.
M. Cournoyer: Oui.
M. Pepin (Marcel): Là, avant que la crise n'arrive, ce
serait peut-être le temps d'avoir des formules qui seront, à mon
avis, très bénéfiques à l'ensemble des travailleurs
et à l'ensemble de l'industrie de la construction.
M. Cournoyer: On va regarder cela.
M. Pepin (Marcel): D'un oeil sympathique.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que, pour l'ancienneté,
vous ne pouvez pas penser que le ministre du Travail n'est pas sympathique aux
travailleurs de la construction. Vous pouvez le dire, mais en le pensant
réellement, vous vous tromperiez royalement. La seule difficulté
que j'ai, comme ministre du Travail, actuellement, c'est de déterminer
la clause d'ancienneté qui serait susceptible d'être
appliquée dans cette industrie, d'autorité gouvernementale.
L'autre difficulté est de savoir si nous ferions bien de faire adopter
cela par le Parlement. Lorsque le Parlement l'aura adopté, s'il y a des
modifications à apporter à cause des difficultés
administratives qu'on retrouve après, il faudra retourner devant le
Parlement. Là-dessus, je me pose de sérieuses questions quant
à l'opportunité de mettre cela dans une loi, clairement et
rapidement, l'ancienneté de l'individu au travail. C'est clair qu'il
doit partir le premier s'il est entré le dernier.
M. Pepin (Marcel): Est-ce que je comprends bien que, sur le
placement, on aura un projet de loi incessamment? C'est ce que j'ai
compris.
M. Cournoyer: Vous comprenez que lors de la création de
l'office, il y aura des dispositions quant au placement.
M. Pepin (Marcel): Et vous examinez de près la suggestion
que nous vous faisons que les parties elles-mêmes voient au
placement...
M. Cournoyer: Quand vous parlez des parties, vous parlez des
syndicats, vous?
M. Pepin (Marcel): Oui. Quand vous parlez des entrepreneurs, vous
parlez des entrepreneurs dans la loi sur la qualification professionnelle.
M. Cournoyer: Oui, je ne suis pas contre cela.
M. Pepin (Marcel): Si vous avez un observateur patronal qui
regarde cela avec une longue-vue, d'un peu loin, ce n'est pas là-dessus
qu'on va se chicaner.
M. Cournoyer: Bon, l'autre partie, M. Pepin, qui doit être
réglée bientôt, c'est la négociation. Après
le mois de juillet, il y aura, avec l'amendement dont je vous ai parié
tantôt, un des critères qui va sauter dans l'établissement
de la représentativité syndicale, au moins, et il y a l'autre
partie qui parle d'association patronale unique.
M. Pepin (Marcel): Oui.
M. Cournoyer: II est dit que, du côté patronal, ce
sera une association patronale unique et, du côté syndical, il y a
les associations qui seront déclarées représentatives,
leur degré de représentativité devant être
établi.
Sans que cela soit une recommandation précise, il me semble qu'on
puisse en inférer que la déduction des cotisations syndicales
devra être faite et remise à l'office de la construction.
M. Pepin (Marcel): II me semble que cela paraît assez clair
dans ce sens.
M. Cournoyer: Oui, on dit que l'office, par son mandat, remet aux
centrales syndicales et à l'association patronale unique les cotisations
des patrons et les cotisations des syndiqués.
Comment voyez-vous, comme centrale syndicale, cette remise des
cotisations à un tiers qu'on appelle l'office et qui les remet aux
différents syndicats impliqués?
M. Pepin (Marcel): Je pense que vous n'auriez pas à vous
embarquer là-dedans. Je ne pense pas que ce soit une mesure heureuse de
faire percevoir ces sommes par un organisme d'Etat. A un moment donné,
cela va aller plus ou moins bien avec le gouvernement pas le
vôtre, mais un autre gouvernement et là, les coups de
téléphone se font: On garde les fonds. Je pense que l'on serait
soumis à une forme d'arbitraire inutile. Et puis quelle est la
difficulté à l'heure actuelle alors que les employeurs font le
prélèvement et l'envoient à l'association?
M. Cournoyer: Mais...
M. Pepin (Marcel): Je comprends que leur objectif serait de dire
que le démêlage va se faire là-bas, à l'office. Je
ne crois pas que nous puissions accepter uniquement ce motif. Je pense qu'il y
a trop de risque de mise en tutelle du syndicalisme pour accepter cela.
M. Cournoyer: Mais est-ce que le motif ne serait pas de maintenir
un individu, au moins pour la durée du décret, dans le syndicat
qu'il a choisi au moment où il avait le droit et le pouvoir de choisir
librement?
M. Pepin (Marcel): Je pense que cela a été le motif
qui les a conduits à en décider ainsi. Mais, avec les autres
dispositions du rapport, les pénalités puis vous en
connaissez un certain nombre du côté patronal et du
côté syndical je pense que l'on n'a pas besoin de se rendre
jusqu'à l'ultime de leurs recommandations parce qu'il y a un autre
principe qui est en jeu pour nous et qui est important, c'est que notre argent
serait collecté par un organisme d'Etat et remis aux associations par
après.
Je pense que c'est de l'intrusion inutile à l'heure actuelle.
C'est mon avis, je vous le livre comme cela.
M. Cournoyer: Je voulais savoir.
M. Pepin (Marcel): Vous connaissez un peu mes tendances. Chaque
fois que le Parlement veut toucher à l'intérieur du monde
syndical, vous savez comment je réagis: très mal. Peut-être
que j'ai tort, mais, en tout cas, c'est toute ma conception syndicale qui me
force à répondre ainsi.
M. Cournoyer: Oublions cette partie pour le moment. Je ne dis pas
que je l'oublie dans la loi, mais oublions-la pour le moment. La structure des
négociations, voyez-vous cela comme la commission Cliche le
recommande?
M. Pepin (Marcel): M. Bourdon va parler là-dessus.
M. Bourdon: Pour ce qui est de la structure des
négociations, si on retient les modalités essentielles, on dit
que toutes les parties sont à la table où cela se négocie.
On dit d'autre part que si une partie est absente, a été
convoquée mais est absente, cela n'empêche pas les
négociations de se dérouler. Troisièmement, on dit que,
pour conclure une entente, lui donner une extension juridique par voie de
décret, il faut qu'elle ait été conlue pour et au nom de
75% de la représentativité, parce que la commission retient les
critères des heures et du nombre de membres, ce sur quoi on n'est pas
d'accord. Nous, on pense que les heures...
M. Pepin (Marcel): Pour les heures.
M. Bourdon: Quant à nous, on pense que tout le
système électoral, depuis le XIXe siècle, a oublié
la capacité financière d'un individu comme marque de son
intérêt dans les questions collectives qui lui sont soumises. On
ne pense pas que cela aiderait une structure plus que l'autre de dire que
chaque personne donne à sa centrale une voix par adhésion, parce
que, selon les régions, les métiers où chacun est fort,
les occasionnels adhèrent plutôt à la centrale qui est
forte, soit dans le métier, soit dans la région où ils
vont. On pense aussi qu'un régime de placement et de
sécurité d'emploi pourrait stabiliser l'effectif dans l'industrie
de la construction, ce qui enlèverait ce problème. Pour le reste,
on dit que, pour conclure cela prend 75% des associations patronales. Nous
autres, tenant compte de ce que j'ai dit avant sur l'importance relative des
personnes en fonction de leurs heures parce que évidemment,
lorsqu'on parle de cela, on pense toujours aux occasionnels
d'après nos calculs, dans un système comme cela, un plombier de
Rimouski qui travaille et qui gagne sa vie dans la construction depuis nombre
d'années, représenterait 1% comme représentativité,
et un plombier de Montréal 1.7%. Or, on ne voit pas entre ces deux
personnes les différences de qualité que cela pourrait
représenter. Mais, sur le principe de faire conclure par la ou les
associations syndicales qui représentent 75% des travailleurs de la
construction, on est porté à être d'accord. Cela n'est pas
comme tel le mécanisme du veto, mais il y a des garanties que l'entente
représente le voeu d'une majorité suffisante de travailleurs de
la construction.
M. Cournoyer: Maintenant, si je marie cela avec la
démocratie, dans les recommandations de 1 à 11, vous avez le vote
secret et on dit que ce n'est pas pour le contrôler par l'Etat, mais pour
donner une chance de participation au plus grand nombre. Oublions le
contrôle par l'Etat et disons qu'il y a le vote secret. A quelle place
situez-vous le vote secret pour l'approbation de la convention collective?
Si je comprends bien, afin que ce soit clair au moins pour moi, vous
auriez les 75% requis, avec une composition de l'une ou l'autre des
associations représentatives. Mais chacune des associations
représentatives reste libre et doit se conformer à ses propres
structures de démocratie pour approuver le geste de signer la
convention.
Je prends l'hypothèse suivante, qui commence à se
développer un peu dans la province de Québec, où des
projets de convention collective sont refusés par les assemblées
des membres. On en voit assez souvent de ce temps-ci. Vous avez, par exemple,
une négociation où, par hypothèse, la CSN
représente 60% de la main-d'oeuvre, en vertu des critères qui
sont là, faute de mieux, la FTQ en représente 20% et la CSD en
représente 20%. L'obligation qui existe, si j'applique le rapport
Cliche, est en fait que les deux centrales syndicales soient là pour
pouvoir négocier et conclure, mais pas pour signer. Pour signer, il va
falloir que, dans chacune des centrales syndicales, on observe les
règles, à l'intérieur des centrales syndicales,
d'autorisation de signer une convention collective.
Vous allez au vote secret admettons qu'on ne parle pas de vote
secret vous allez au vote, après que la chose est
réglée. Supposons que la CSD, avec laquelle vous avez
naturellement des affiliations, et la CSN se sont entendues pour commencer les
négociations ensemble, au moins pour avoir le caractère de 75%,
ce qui fait 80% ici, et que la CSD vous fasse dans les mains. Ces gens n'ont
pas l'autorisation de signer la convention collective et vous autres, vous
l'avez, comme membres de la CSN. Que se passe-t-il?
M. Pepin (Marcel): Je ne le sais pas.
M. Cournoyer: Moi, non plus.
M. Pepin (Marcel): Je pense qu'à ce moment il faut
recommencer les négociations et voir ce qui va se passer.
M. Cournoyer: Donc,la minorité de l'ensemble va
décider que c'était comme cela que cela se passait, et,
même si vous êtes d'accord, il va falloir que la majorité
recommence.
M. Pepin (Marcel): Je pense qu'il y a quelque chose de vrai dans
ce que vous dites. Maintenant, il faut trouver les meilleures formules
possible.
Je reviens sur la question du vote secret. Cela ne me fait rien de
retoucher les aspects que vous avez mentionnés. Vous savez, parfois, le
vote secret n'est pas absolument nécessaire. Si vous négociez
avec un employeur, disons que vous obtenez $2 l'heure d'augmentation, vous
convoquez vos assemblées régulièrement, vous faites la
publicité qu'il faut pour que les gens viennent, ils arrivent à
l'assemblée. On fait un rapport de la négociation. On dit: Vous
aviez demandé $1.50 l'heure, l'employeur vous offre $2. Maintenant, nous
allons prendre un vote au scrutin secret. Vous pouvez être sûr que,
dans la salle, les gens vont dire: Non, non, pas de vote secret. Nous sommes
d'accord, nous sommes d'accord. Cela ne se présente pas avec l'exemple
que je viens de donner.
M. Cournoyer: Cela se présente mal!
M. Pepin (Marcel): Cela se présente quand même que
vous soyez dans une assemblée syndicale et qu'on dise: Oui, je suis
d'accord sur le rapport, mais je ne trouve pas nécessaire de prendre un
vote au scrutin secret.
Ce que nous avons développé comme stratagème dans
nos assemblées, c'est qu'avant un seul membre pouvait exiger un vote au
scrutin secret, peu importe la question. Maintenant, nous nous disons que
c'était peut-être un peu charrier. Si on a une assemblée de
1,000 personnes et qu'un gars se lève pour demander le vote secret, le
président de la séance est obligé de l'accorder. On s'est
dit: On va prendre un minimum. Je pense qu'on a fixé cela à 25 ou
30 personnes, suivant la catégorie des assemblées. Cependant,
quand il y a ce nombre de personnes, le vote secret est
décrété.
Nos constitutions prévoient aussi que s'il s'agit d'une
grève, si elle est recommandée, à ce moment, on tient un
vote au scrutin secret.
Dans la construction, c'est bien plus difficile qu'ailleurs.
J'espère qu'on va le réaliser. C'est facile d'écrire vote
secret, vote secret! Que se passe-t-il dans cette industrie? Les gars
travaillent dur. C'est vrai. Ils travaillent dans des conditions parfois
difficiles et, tout à coup, ils nomment un contremaître qui ne
fait pas l'affaire. Ce n'est pas parce que ce n'est pas un bon gars, mais cela
ne marche pas avec les gens. L'autorité du "boss" étant en cause,
il dit: Je maintiens le contremaître. Il a peur de reculer. Les gars
sortent en grève. Pensez-vous qu'ils prennent un vote au scrutin se-
cret à ce moment? On aurait beau farcir le code de
pénalités, ces situations sont multiples.
Souvenez-vous, quand vous avez adopté la loi 38, c'était
à l'été 1970, au meilleur de mon souvenir. Là, vous
aviez mis des pénalités là-dedans: Tu ne feras pas ceci,
tu ne feras pas cela. En face, ils contruisaient des appartements et, tout
à coup, il arrive que les gars sont en grève un matin. On
était en pleine commission parlementaire et c'était Pierre
Laporte qui était ministre du Travail à l'époque. On
rencontre Pierre Laporte et on lui dit: Regardez, les gars sont en
grève, allez-vous les poursuivre? Vous avez l'autorité de les
poursuivre, ils ne veulent pas rentrer tant qu'un tel surintendant ne sera pas
partie. Evidemment, cela peut être abusif, pour un groupe de gars, de
choisir leur surintendant ou de choisir dans la négative, d'en
éliminer un. Mais, les gars considéraient qu'il y avait un
véritable problème.
M. Laporte, qu'est-ce qu'il a dit? Il a dit non, non. C'est pour cette
fin que j'ai adopté la loi, il n'y aura pas de procédure. Ils ont
fait des tractations avec un employeur dont je ne me rappelle pas le nom et,
finalement, le problème s'est réglé, le surintendant a
été changé. Prenez le cas des mesures de
sécurité, des normes de sécurité. Les gars
décident qu'il n'y a rien de respecté. Il y avait un employeur au
Québec qui était reconnu, d'ailleurs, la CAT l'avait salé
un peu, Dominic Supports que vous connaissez bien. Je ne sais pas s'il existe
encore d'ailleurs. Il n'y avait pas de mesures de sécurité,
à l'époque. Les gars qui avaient décidé de sortir
en grève ne prennaient pas un vote au scrutin secret pour faire
cela.
Je comprends que la situation idéale, c'est bien celle-là.
Mais, plaçons-nous quand même dans l'industrie de la construction,
pas ailleurs.
M. Cournoyer: M. Pepin, je vous reprends tout de suite.
M. Pepin (Marcel): Allez-y.
M. Cournoyer: De toute façon, c'est un geste
illégal.
M. Pepin (Marcel): Quoi?
M. Cournoyer: De sortir en grève quand c'est
défendu. Disons...
M. Pepin (Marcel): Cela dépend si c'est défendu ou
non.
M. Cournoyer: Je ne voudrais pas demander qu'on tienne un vote
secret en se conformant à la loi pour faire un geste illégal.
M. Pepin (Marcel): C'est un point de vue à retenir.
M. Cournoyer: Ce serait un peu fatigant de dire que vous avez le
droit de faire un geste illégal parce que vous l'avez voté au
scrutin secret, conformément à la loi.
M. Pepin (Marcel): C'est parce qu'on veut être
démocratique, vous savez. On a déjà fait des votes
pour savoir si on respectait une injonction ou non.
M. Cournoyer: J'ai vu cela.
M. Pepin (Marcel): Et vous avez d'ailleurs apprécié
que nous poussions la démocratie jusque là, j'en suis
sûr.
M. Cournoyer: Moi? Non.
M. Pepin (Marcel): Vous n'avez pas apprécié
cela?
M. Cournoyer: Ah, Seigneur!
M. Pepin (Marcel): Vous êtes contre la démocratie,
maintenant?
M. Cournoyer: Oui, je suis contre ces affaires-là. Je suis
pour la démocratie. J'ai eu ce problème dans le cas de notre
conflit de l'an passé, à la Commission des transports, M.
Pepin.
M. Pepin (Marcel): Oui.
M. Cournoyer: A cette époque, il y a des gens qui
disaient: S'il y avait un vote au scrutin secret, ils retourneraient tous au
travail.
M. Pepin (Marcel): Ils sont retournés aussi.
M. Cournoyer: Cela se peut-il que le ministre du Travail demande
à des gens, en assemblée générale, au scrutin
secret, de décider d'observer ou de ne pas observer la loi? Après
cela, qu'est-ce que je vais faire avec le scrutin secret? Vont-ils observer la
loi? S'ils disent: Non, on ne rentre pas au travail. Cela veut-il dire que ce
sera bon? D'abord que c'est au scrutin, ils ont le droit de faire des gestes
illégaux. Voyons donc! C'est ce problème que j'ai eu l'an
passé avec vous, M. Pepin. Vous étiez là comme
médiateur.
M. Pepin (Marcel): Moi, j'étais là uniquement pour
observer les choses, pour voir ce qui se passait.
M. Cournoyer: Vous négociiez au nom de ceux qui
n'étaient pas en grève.
M. Pepin (Marcel): De ceux qui étaient techniquement en
grève illégale.
M. Cournoyer: Non, vous négociiez techniquement au nom de
ceux qui n'étaient pas en grève.
M. Pepin (Marcel): C'est cela. A un moment donné, je vous
ai "switché" ailleurs et puis... En tout cas, on a réglé,
pourquoi s'en plaindrait-on?
M. Cournoyer: On savait qu'il fallait étendre ce
règlement à tout le monde. Encore un autre geste
illégal...
M. Pepin (Marcel): Sur l'autre point que vous avez
soulevé, pour l'instant, je n'ai pas d'autre réponse que celle
que je vous ai fournie. On peut y penser collectivement, et
éventuellement, on peut vous fournir notre réponse, mais je n'en
ai pas pour l'instant.
M. Cournoyer: Mais l'association patronale unique?
M. Pepin (Marcel): Cela ne me fait rien. Qu'ils s'arrangent. Je
ne suis pas ici pour parler des employeurs
M. Cournoyer: Non, pour parler de la structure des
négociations.
M. Pepin (Marcel): La structure, alors, si vous
décidez...
M. Cournoyer: Là, je vais aller dans les questions de
scrutin secret en particulier. Remarquez bien qu'on est dans une industrie
on le sait, vous et moi assez particulière. Dans tous les
autres cas où nous n'avons pas de négociations par association
comme ça, il n'y a pas d'anonymat réel, c'est-à-dire que,
quand la compagnie X dit non, on sait que c'est cette compagnie qui dit non.
Mais, quand vous arrivez avec une association patronale unique, elle est
constituée d'une variété assez imposante, je vous en prie,
d'employeurs dans l'industrie de la construction. Cela va de quelqu'un qui
n'emploie personne à quelqu'un qui en a 600, peut-être 1,200,
peut-être 1,300 employés. Cela, c'est du pareil au même dans
une association patronale unique. Est-ce qu'il n'est pas facile alors, dans un
vote secret, de mettre la faute sur les petits pour ne pas régler le
problème de ceux qui emploient du monde?
M. Pepin (Marcel): Cela doit arriver fréquemment.
M. Cournoyer: Est-ce qu'on n'arrivera pas, en pratique, à
l'absence totale de conventions collectives dans l'industrie de la
construction, strictement par la composition de cette volonté que chacun
des employeurs conserve l'anonymat dans une décision d'association? Il
n'y a pas de problème; il n'a qu'à dire que, pour lui, il
réglerait bien le problème; mais qu'il n'est pas capable de le
faire étant donné que la majorité des entrepreneurs est en
désaccord. D'autre part, nous avons la disposition qui, sans
modification, prolonge la durée du décret jusqu'à ce qu'il
soit remplacé par un autre.
M. Pepin (Marcel): Le domaine patronal, je sais que vous le
connaissez beaucoup mieux que moi. Je ne sais pas exactement comment cela
marche là-dedans.
M. Cournoyer: Je vous ai parlé tantôt de la
prolongation du décret aussi.
M. Pepin (Marcel): Oui, d'accord. Aussi, il y a
un autre aspect qui me paraît, dans le rapport Cliche, non
retenable pour vous, c'est la question du maximum du décret. C'est un
minimum, puis un maximum; cela se tient un peu, toutes ces affaires. Je suis
allé avec Michel Bourdon à la baie James, il n'y a pas tellement
longtemps, voir les gars sur les chantiers, les voir travailler, discuter avec
eux. S'ils sont pour tout prévoir dans le décret, ils ne peuvent
plus rien rien faire, qu'ils sont ligotés et que cela devient un
délit d'aller un peu plus loin, moi, je pense qu'il y aura des
situations terribles dans la province de Québec. Le décret, pour
moi, c'est un strict minimum. Je peux bien ne pas avoir le droit de signer des
conventions; la loi actuellement le défend. Je peux bien même ne
pas avoir le droit de faire des ententes qui ne seraient pas une
définition d'une convention collective, cela me va. Mais si vous avez
des situations particulières; à la baie James, on a pu voir cela,
il y a des conditions particulières, par exemple, le temps du lunch. Si
le décret prévoit que tu as une demi-heure pour luncher, tu ne
peux pas avoir trois quarts d'heure, parce que c'est un maximum partout. Alors,
à la baie James, ils seraient collés dans des conditions
où ils ne pourraient pas respecter ça et, s'ils ne le respectent
pas, cela devient un délit. Ce qui est vrai pour la baie James peut
être vrai aussi dans d'autres régions du Québec où
des situations peuvent se développer, que les parties n'avaient
même pas prévues.
M. Cournoyer: Des conditions qui n'étaient pas
prévisibles.
M. Pepin (Marcel): Imprévisibles, bien souvent.
M. Cournoyer: A Hull, par exemple. Vous avez des membres à
Hull, collés sur Ottawa. Si les conditions de travail à Ottawa
ont une tendance à changer plus rapidement que les conditions de travail
dans la province de Québec, je me demande comment un entrepreneur de
Hull peut commettre un délit juste pour recruter de la main-d'oeuvre
qui, autrement irait travailler à Ottawa.
M. Pepin (Marcel): C'est ça. S'il y a une haute
conjoncture à Ottawa, il n'y aura pas de travailleurs disponibles pour
Hull. Et si les salaires varient je pense que, à l'heure
actuelle, c'est $1 ou $2 de différence.
M. Cournoyer: Encore une fois, voici un endroit où, juste
comme observation, comme ministre, je dis: Voici ce que la commission Cliche a
voulu corriger, c'est-à-dire cette force de persuasion multipliée
par le bureau de placement, multipliée par un certain nombre de bras
pour forcer des employeurs à payer plus cher ou à changer les
conditions de travail du décret. On a dit: Etant donné que cette
force a pu être utilisée, même si on annule la force, il
faut aussi annuler l'effet néfaste, dans certains cas, et oublier la
partie qui est en fait positive.
Demander, par exemple, à la province de Québec, sur une
base paritaire et indépendamment de quoi que ce soit, d'établir
le taux de salaire unique dans la province de Québec et de se maintenir
en concurrence surtout sur les frontières, c'est demander de la vertu
à ceux qui ne peuvent pas en avoir. Ce n'est pas nécessairement
de la vertu. Cela peut être antivertueux de ne pas commencer par essayer
de réaliser ou de régler un problème de Hull, à la
manière de Hull, à cause des circonstances qui entourent Hull,
sans demander la permission à Gaspé qui n'est pas du tout dans
les mêmes circonstances.
Je vous dis donc que, là-dessus, je m'interroge très
sérieusement sur l'opportunité d'inscrire dans la loi qu'il
s'agit d'un minimum et d'un maximum, à cause de ces choses que nous ne
connaissons pas aujourd'hui et qui peuvent survenir, à mon sens, la
semaine prochaine. Cela peut survenir et on ne sait pas aujourd'hui ce qui peut
survenir la semaine prochaine.
M. Pepin (Marcel): Pour ce qui nous concerne, on ne vous
suggère pas que la loi prévoie un minimum et un maximum. Mais je
comprends comme vous les motifs qui ont amené la commission à
faire la recommandation. Mais nous, notre thèse, c'est que si on
règle les clés du problème, on n'aura pas besoin d'autres
dispositions qui vont nous causer, fatalement, beaucoup d'embarras.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaîti
M. Cournoyer: Alors, M. le Président, j'ai bien
aimé la discussion avec la CSN sur les problèmes qui sont
là-dedans. Je peux dire à la CSN que je vais considérer
toutes les remarques qu'elle a faites. Cela ne veut pas dire pour autant que je
doive être d'accord sur les remarques qu'elle a faites.
Cela m'a fait plaisir de les voir ici, par exemple, dans un climat
relativement paisible. Je ne sais pas si c'est parce qu'il n'y a pas de
"goons". La dernière fois que je vous ai vu ici, M. Pepin, il y avait
des gens qui nous avaient fait une visite un peu impromptue.
M. Pepin (Marcel): Inpromptue.
M. Bourdon: C'est peut-être parce que les "goons" se
recyclent, comme surintendants et cadres ne sont pas disponibles.
M. Cournoyer: Oui. Voyez-vous encore une remarque qui ne nous
regarde pas, cela regarde d'autres.
Une Voix: Elle impliquait des tiers.
M. Cournoyer: Mais, il faut dire que le geste avait toutes les
apparences des gestes spontanés dont M. Pepin parlait tantôt.
M. Pepin (Marcel): Cela semble être ça.
Le Président (M. Séguin): Voici...
M. Pepin (Marcel): Vous avez eu des procédures
après, d'ailleurs.
Le Président (M. Séguin): Est-ce qu'il y a d'autres
questions de la part des députés? On doit ajourner a midi moins
dix minutes. C'est pour ça que je me pose des questions.
M. Cournoyer: Sine die.
Le Président (M. Séguin): Alors, la commission
ajourne ses travaux sine die.
M. Pepin (Marcel): Je vous remercie.
(Fin de la séance à 11 h 52)