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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 19 mai 1976 - Vol. 17 N° 54

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de l'Immigration


Journal des débats

 

Commission permanente du travail,

de la main-d'oeuvre et

de l'immigration

Etude des crédits du ministère de l'Immigration

Séance du mercredi 19 mai 1976 (Dix heures douze minutes)

M. Bédard, Chicoutimi (président de la commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!

Nous étudierons les crédits du ministère de l'Immigration, à l'intérieur de la commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration. Les membres de la commission sont MM. Belle-mare (Johnson), Boudreault (Bourget), Burns (Maisonneuve), Charron (Saint-Jacques), Déziel (Saint-François); Mme Bacon (Bourassa) remplace M. Harvey (Jonquière); MM. Harvey (Dubuc), La-chance (Mille-Iles), Malépart (Sainte-Marie), Pagé (Portneuf), Saint-Germain (Jacques-Cartier), Samson (Rouyn-Noranda); M. Tremblay (Iberville) remplace M. Veilleux (Saint-Jean), et le dernier membre de la commission est M. Verreault (Shefford).

M. Burns: Maintenant, j'aurais une demande de substitution pour la séance seulement; il s'agit de remplacer M. Charron par M. Jacques-Yvan Morin, député de Sauvé, chef de l'Opposition. Remarquez que techniquement ce n'est pas nécessaire, parce qu'il fait partie en principe de toutes les commissions, mais le chef de l'Opposition m'a indiqué qu'il aimerait venir se joindre à nous, à un moment donné. C'est pourquoi je propose cette modification, mais ce n'est même pas nécessaire.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Ce n'est même pas nécessaire d'être membre de la commission pour avoir le droit de parole. Maintenant, nous allons faire le changement; M. Jacques-Yvan Morin remplace M. Charron (Saint-Jacques).

Je demanderais à la commission de procéder à la nomination d'un rapporteur.

Une Voix: Le député des Mille-Iles.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Alors, la commission est d'accord que M. Lachance (Mille-Iles) agisse comme rapporteur?

M. Burns: Est-ce qu'il est qualifié? Oui. Il va faire un bon rapport, oui?

M. Lachance: Un très bon rapport. M. Burns: Bon, d'accord.

M. Boudreault: II a passé ses examens avec succès.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Au dé- but des travaux, nous allons entendre un exposé du ministre de l'Immigration, de même que du leader de l'Opposition. Egalement, je crois que les deux ont exprimé le désir qu'après les exposés il y ait une discussion générale avant de procéder à l'étude programme par programme. Les membres de la commission sont d'accord?

M. Burns: Oui.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Accepté. Alors, le ministre de l'Immigration.

Exposé préliminaire du ministre Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, je ne saurais laisser passer l'occasion qui m'est offerte, en ce début de l'étude des crédits 1976/77, du ministère de l'Immigration, pour vous dire que j'éprouve beaucoup de satisfaction à l'idée de m'entretenir avec vous de cette question importante qu'est l'immigration pour l'avenir du Québec.

Mon collègue, Jean Bienvenue, s'était vu confier un lourd mandat en 1972. N'eût été la confiance illimitée de mon prédécesseur en l'apport de l'immigration pour le Québec et n'eût été sa détermination de voir ce Québec exercer pleinement ses pouvoirs en matière d'immigration, je ne pourrais aujourd'hui vous témoigner de la volonté ferme du gouvernement auquel j'appartiens d'occuper ce champ de juridiction qui est sien. Cette volonté ferme du gouvernement, volonté que j'assume pleinement, l'a conduit à proposer, dans le dernier discours inaugural, un élargissement.du mandat pour assurer l'avenir de la société québécoise. Si vous le permettez, je reviendrai sur cette question plus tard.

Ma nomination comme ministre de l'Immigration étant encore très récente, je veux tout d'abord vous assurer que j'entends, à mon tour, vous proposer des politiques et des mesures qui permettront, en matière d'immigration, d'assurer le développement de notre société québécoise, tant sur le plan économique que sur les plans social et culturel. Je sais que pour ce faire je puis compter sur la collaboration soutenue de mes collègues et, en particulier, des membres de cette commission ainsi que sur celle de tous les fonctionnaires de mon ministère.

J'aimerais souligner ici la présence de M. Bernard Bonin, mon sous-ministre qui assume l'intérim; M. Marcel Cloutier, sous-ministre adjoint; de même que trois fonctionnaires de mon ministère, MM. Pierre Veilleux, directeur à l'administration; Guy Fournier, directeur du personnel et Paul-Emile Arsenault, chef par intérim des services financiers.

Il me sera d'autant plus possible de proposer des politiques et des mesures que je sais maintenant que nous disposons d'une bonne partie des instruments essentiels pour ce faire et que certains autres instruments nous seront accordés grâce, j'en suis assurée, à votre collaboration dans les mois qui viennent.

Je veux maintenant faire un tour d'horizon sur

les progrès accomplis et vous indiquer où nous en sommes à l'heure actuelle. L'an dernier, les membres de cette commission ont posé une question fondamentale, à savoir le ministère de l'Immigration a-t-il des pouvoirs et quels sont-ils?

Lorsque nous voulons apporter une réponse satisfaisante à cette question, il nous faut indiquer, en premier lieu, que mon ministère a cherché à affiner certains outils de la connaissance. En Effet, au cours des dernières années, le ministère de l'Immigration a amélioré son expertise en connaissant mieux la clientèle immigrante, en oeuvrant avec les divers groupes ethniques, en développant certains programmes d'intégration à la majorité francophone du Québec et en assurant une certaine présence à l'étranger auprès des principaux bassins d'immigration vers le Québec et, enfin, en se penchant sur certaines questions qui ont trait aux caractéristiques de notre population, tant sur ie plan quantitatif que qualitatif.

Ainsi, après sept années d'existence, tout le chemin parcouru par mon ministère dans l'approfondissement de ses connaissances et de son expérience, dans l'adéquation de sa structure aux besoins et réalités de l'immigration québécoise me confirme l'importance de l'immigration pour l'avenir du Québec.

Convaincu de cette nécessité, sachez que le gouvernement occupera au maximum le champ de compétence qui lui est dévolu à l'article 95 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Plusieurs manifestations incontestables de la volonté du Québec en la matière sont connues du grand public. Qu'il me suffise de mentionner la réponse du Québec au livre vert fédéral, l'entente And ras-Bienvenue, deux documents déjà en votre possession. J'ai cru bon vous transmettre un document explicatif sur la signification et la portée de l'entente And ras-Bienvenue, ainsi qu'un autre document qui fait le point sur la situation de nos postes à l'étranger.

Finalement, suite à l'engagement formel du premier ministre et du gouvernement, je déposerai prochainement des projets de loi susceptibles de consolider le leadership du Québec en matière d'immigration. J'ai aussi développé la conviction que l'intégration des immigrants est la pierre angulaire de l'élaboration de nos politiques d'immigration. Seule la concertation entre le gouvernement du Québec, la population en général et chacun de nous permettra d'obtenir des résultats probants au chapitre de l'intégration des immigrants.

Nous voulons que ceux qui ont eu le priviliège d'immigrer chez nous soient reconnus comme des citoyens à part entière. Le Québec est, d'ailleurs, un des seuls Etats au monde offrant aux nouveaux arrivés la quasi-totalité des mesures offertes à ses autochtones, notamment dans les secteurs des affaires sociales et de l'éducation.

L'approche sociologique du ministère de l'Immigration visant à reconnaître les valeurs culturelles de nos nouveaux compatriotes ne peut que concourir à notre enrichissement national. Je souhaite qu'au Québec nous ayons un climat capable de promouvoir un dialogue constructif et une meilleure compréhension entre les citoyens de toutes les origines ethniques.

Toutefois, je suis consciente qu'il nous faut assurer les conditions nécessaires à notre équilibre social et la qualité de la vie au Québec et ce, autant pour les immigrants eux-mêmes que pour la population actuelle du Québec. Pour ce faire, nous tiendrons compte des besoins de la population québécoise, du marché du travail et de la répartition géographique de la population.

Un mot maintenant pour vous dire que tout comme vous j'entends consacrer mes efforts à contrer le plus possible l'émigration d'une partie de ressources humaines du Québec vers les autres provinces. D'ailleurs, les dernières données disponibles sur cette question me réconfortent car, comme le déclarait récemment le premier ministre, le mouvement migratoire du Québec vers les autres provinces et les Etats-Unis s'est atténué.

Je crois enfin qu'une collaboration soutenue devrait continuer à être assurée entre le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral, mais de façon plus immédiate. Je crois en une collaboration renouvelée entre tous les ministères et organismes du Québec soucieux de faire progresser le dossier de l'immigration auquel le gouvernement donne son entier appui.

Pour rentabiliser au maximum l'action du ministère de l'Immigration, j'ai la conviction que son mandat devrait être élargi. J'estime personnellement que le plein essor de ce ministère pourra être atteint dans la mesure où il y aura relation étroite entre les politiques en matière d'immigration, de main-d'oeuvre et de population. Je demanderai, dans les prochains mois, un mandat clair et sans équivoque de l'Assemblée nationale. En ce sens, dans une première étape, j'entends déposer prochainement trois projets de loi, la Loi du ministère de la population et de l'immigration, la Loi sur l'immigration et la Loi sur le conseil de la population et de l'immigration.

Cette présentation de projets de loi est la suite logique de l'engagement formel du gouvernement tel qu'annoncé dans le dernier discours inaugural. Au plan de l'organisation administrative du ministère de l'Immigration, les changements apportés au mois d'août dernier nous ont permis de nous doter d'une structure organisationnelle à la mesure des défis que pose l'immigration et même de ceux qui nous seront posés à la suite de l'adoption des projets de loi que je viens de mentionner.

C'est donc sans heurts que mon équipe pourra poursuivre avec efficacité le travail entrepris. C'était là, M. le Président, le message que je voulais livrer aujourd'hui, l'occasion m'étant offerte pour la première fois de faire un tour d'horizon en matière d'immigration et de vous indiquer les voies vers lesquelles nous nous dirigeons.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable leader de l'Opposition.

Remarques de M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, c'est également la première occasion qui m'est offerte de souligner

la récente nomination du nouveau ministre de l'Immigration, que je félicite pour cette nomination. Je l'avertis d'avance que, dans beaucoup de mes interventions, j'aurai malheureusement à lui faire porter le fardeau de certaines déclarations de son prédécesseur. Ce n'est pas méchamment que je le ferai, ce sera toujours dans le même esprit qui nous a animés lorsque nous avons approché le ministère de l'Immigration, c'est-à-dire dans un grand esprit de collaboration. Je tiens à vous dire, Mme le ministre, comme je l'avais dit à votre prédécesseur, que l'Opposition est particulièrement intéressée à ce que le ministère de l'Immigration joue véritablement son rôle, de sorte que vous bénéficierez, comme votre prédécesseur, de notre appui le plus total. Cet appui peut-être vous apparaîtra même, à certaines occasions, encombrant parce qu'il tentera de vous pousser dans le dos et de vous faire aller un peu plus loin que, normalement, ce gouvernement semble vouloir aller. Il reste que le ministre précédent ne s'était pas plaint de notre collaboration, bien au contraire, je pense.

Lors de l'étude des crédits, l'année dernière, M. le Président, le ministre de l'Immigration du temps, le député de Crémazie, rappelait que le ministère de l'Immigration du Québec "a été créé en décembre 1968, a démarré à la fin de 1969, m'a été confié — disait-il — en février 1972 et fonctionne normalement depuis le printemps 1973, soit depuis seulement deux années". Cette remarque, vous pouvez la trouver à la séance du mardi 6 mai 1975, au journal des Débats, p. B-2698.

Ce premier énoncé du ministre était, à nos yeux en tout cas, quelque chose qui était assez factuel, mais aussi une admission qu'à toutes fins pratiques le ministère ne fonctionnait, à cette époque, que depuis deux ans.

Cette jeunesse du ministère a très souvent été invoquée pour justifier des interprétations quasi contradictoires. D'une part, encore jeune, le ministère est à se mettre sur pied, à démarrer, à se donner des cadres, à trouver son assiette de roulement, à naviguer dans le corridor étroit entre les moyens d'agir qu'il faut obtenir du Conseil du trésor et la latitude qu'il faut arracher par concessions d'Ottawa.

Voilà pourquoi l'Opposition devrait être patiente, selon les dires du ministre du temps, indulgente, pas méchante pour l'adolescent qui prend son élan. D'autre part, au contraire, cette jeunesse du ministère dit toutes les promesses d'avenir. C'est en elle, justement, qu'il faut retrouver le pilier contre l'anglicisation, le bastion de la culture québécoise francophone et — tenez-vous bien — la meilleure garantie de la souveraineté culturelle du Québec.

Depuis quelques années, donc, c'est dans ce ballottement entre l'impuissance du nouveau-né et la glorification de la culture que l'Opposition a dû s'écarquiller largement. A l'étude des crédits pour 1974/75, nous avions choisi de poser un très grand nombre de questions, les faisant porter sur les effectifs, les structures, les moyens financiers et administratifs. En somme, nous avons cherché à nous assurer que le ministère était en bonne voie de réussir son démarrage définitif.

A l'étude des crédits pour 1975/76, soit l'année dernière, nous avions choisi, au contraire, de nous arrêter davantage sur la vocation du ministère: y fait-on, par exemple, vraiment de l'immigration? Y a-t-on des pouvoirs de recrutement et de sélection? Utilise-t-on des pouvoirs conférés au Québec par l'article 95 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique?

C'est donc dans cet esprit, qui veut aller, une fois pour toutes, à l'essentiel, que nous avons proposé au ministre du temps qu'une commission parlementaire siège en présence de témoins experts, de façon que les parlementaires de tous les partis puissent enfin avoir l'occasion d'une rencontre en profondeur sur la vocation même du ministère. C'est à partir de ce point qu'il nous semblait qu'il fallait très constructivement apporter la collaboration de l'Opposition, comme je le mentionnais tout à l'heure au nouveau ministre, pour assurer le succès de toutes les étapes subséquentes.

Je pense pouvoir dire que la nature de notre proposition était suffisamment claire, positive, constructive pour que le ministre responsable souligne elle-même et qu'elle accepte formellement notre proposition.

Cette proposition de l'Opposition de même que l'accueil favorable que le ministre lui a réservé nous paraissait d'autant plus fructueux que la tenue de séances par la commission parlementaire se situait dans le cadre général de grandes décisions à prendre, en nécessitant donc une réflexion et une aération maximales.

Ainsi le discours inaugural du 18 mars 1975 annonçait l'insertion de l'immigration dans le cadre d'une politique et même d'un ministère des ressources humaines. Le ministère lui-même faisait miroiter l'oasis d'un livre blanc qui, dans le ton du ministre, avait toutes les caractéristiques de la Somme théologique de l'immigration. Et pendant que le ministre québécois nous parlait mystérieusement de livre blanc et de livre brun, son homologue fédéral en était au livre vert. En somme, quiconque pouvait être le moindrement intéressé à l'immigration, en 1975, n'avait aucune difficulté à entendre partout les appels aux nouvelles définitions, au nouveau mandat, aux nouveaux pouvoirs. C'est d'ailleurs l'Assemblée nationale elle-même qui avait sonné l'ouverture de ces olympiques de l'immigration, en décembre 1974, en confiant formellement au ministère les pouvoirs sans réserve d'informer, de recruter et de sélectionner.

Quoi de plus normal alors, de plus constructif que de voir le gouvernement et l'Opposition s'entendre à merveille pour donner aux parlementaires intéressés l'occasion de s'impliquer à fond dans une démarche aussi vitale que celle de définir la politique d'immigration au Québec.

Or, notre proposition acceptée par le ministre n'a eu aucune suite. J'y reviendrai éventuellement dans mon intervention, un peu plus tard. Tous, sans exception, comprendront, sans difficulté au-

cune, que cette nouvelle occasion, celle de l'étude des crédits de 1976/77, s'ouvre forcément pour l'Opposition sur une note de déception, d'illusions perdues et même de scepticisme profond. Tous, sans exception, comprendront également que, par la faute du gouvernement, nous en sommes aujourd'hui au même point qu'il y a un an. Pourtant, avec ou sans prétention, je pense pouvoir affirmer que l'Opposition n'a jamais eu d'autre attitude face au ministère que la sympathie la plus vaste et l'appui le plus total.

Il n'y a personne ici qui ignore que les seuls vrais adversaires du ministère de l'Immigration du Québec se trouvent les uns à Ottawa, les autres au Conseil des ministres à Québec. Pourtant, c'est de l'Opposition que le ministère a choisi d'abuser.

Nous revoilà donc cette année sérieusement désillusionnés, mais plus déterminés que jamais, comme je le mentionnais au ministre tout à l'heure, à vider la question essentielle. C'est donc pourquoi nous entendons aborder l'étude des crédits 1976/77 sous les angles suivants: Premièrement, comment le ministre actuel explique-t-elle son refus d'appuyer ou d'associer les parlementaires à une démarche essentielle pour que le Québec exerce véritablement sa juridiction en matière d'immigration? Comme je le disais tout à l'heure au ministre, possiblement que dans ce cas elle supporte le poids d'une décision ou d'un manque de décision qui relève beaucoup plus de son prédécesseur, mais dans l'aspect parlementaire et continuel de ce ministère, évidemment, elle doit en supporter le poids.

En second lieu, quelle est la portée réelle de l'entente Bienvenue-Andras? Troisièmement, quelle est l'efficacité réelle des bureaux et des agents du Québec à l'étranger? Quatrièmement, comment le ministère est-il équipé financièrement et administrativement pour se décharger de ses tâches concrètes d'accueil et d'établissement? Cinquièmement, quelle est la portée réelle de ces mirages répétitifs quant à un ministère des ressources humaines, un ministère de la population-immigration, une grande consultation populaire, etc.? Sixièmement, enfin, l'ancien ministre, connu par tous pour son style biblique — je me rappelle ses fameuses phrases "en vérité, je vous le dis " et combien d'autres de ce même style — tirait ses inspirations du livre des Prophéties, mais ses réalisations tenaient davantage de l'Apocalypse. L'actuel ministre, elle, a-t-elle seulement le temps de s'occuper d'immigration au Québec? C'est une question que je voudrai discuter avec le ministre.

Quant à la première partie, je suis prêt à l'aborder tout de suite, à moins que le ministre veuille répliquer à mes remarques d'ouverture immédiatement. C'est à son choix.

Mme Bacon: J'aimerais peut-être qu'on commence la discussion immédiatement. Déjà, le député de Maisonneuve m'avait offert sa collaboration, que je retrouve dans son exposé. Je pense qu'on pourra arriver, à mesure que la discussion évoluera, à apporter certaines rectifications ou, tout simplement, donner ma propre manière de voir des problèmes, compte tenu aussi des déclarations de mon prédécesseur et de l'offre de collaboration du député de Maisonneuve.

Contrôle de l'immigration

M. Burns: D'accord. Relativement au premier point que j'ai soulevé, et celui qui, possiblement, m'apparaît comme étant une des raisons d'être vraiment, si je peux dire, désappointé, c'est cette fameuse promesse que nous avions obtenue, l'année dernière, du ministre du temps, d'avoir une commission parlementaire.

Je pense que l'étude des crédits du ministère pour l'année 1974/75, avait donné, comme je le disais tout à l'heure, l'occasion à l'Opposition officielle de passer en revue, autant "au peigne fin" que possible, un grand nombre d'activités spécifiques du ministère et que l'étude des crédits de 1975/76 nous avait incités à opter davantage pour un examen global de la vocation générale du ministère. C'était, on s'en souviendra, la grande époque des grandes déclarations de grands principes: la loi 46, le livre vert, le livre brun, le livre blanc, les mirages de discours inaugural, etc.

Nous étions donc dans la grande phase "technicolor", si je peux dire, nourris des visions bibliques qu'affectionnait le ministre du temps. A tout cela, l'Opposition officielle, appuyée d'ailleurs par le député de Beauce-Sud, répondait par une question fondamentale l'année dernière: Le Québec maîtrise-t-il son immigration?"

Et le 6 mai 1975, l'Opposition a même convenu avec le ministre d'un "marché ' important. Permettez-moi de me citer, je n'aime pas le faire, mais j'y suis obligé. Etant la seule source, semble-t-il, par rapport à ce problème, ou une des sources, je vais être obligé de me citer, en même temps que le ministre et le député de Beauce-Sud. D'ailleurs, on retrouvera cela au journal des Débats aux pages B-2713 et suivantes. Alors je commence par me citer, malheureusement: "M. Burns: Moi, en tout cas, monsieur le ministre, je serais satisfait d'avoir participé à ces crédits, cette année, si j'en sortais avec l'assurance d'un geste concret et je vais vous le proposer, je ne sais pas si vous allez être en mesure de l'accepter...

Je serais drôlement intéressé si, véritablement, on sortait de cette commission avec l'assurance qu'il va y avoir une consultation.'

Et, un peu plus loin dans ce même texte, je poursuivais en disant: "M. Burns: Je me demande si, avant de faire une consultation sur un livre blanc... il ne faudrait pas que vous, M. le ministre, convoquiez en commission parlementaire un certain nombre de gens, par exemple, M. Bonin, M. Harvey, M. Henripin ou d'autres personnes que les membres de l'Opposition pourraient vous citer, vous indiquer, pour examiner la possibilité, simplement cela, avant de se lancer plus loin, de rendre le ministère de l'Immigration québécois plus efficace, tant au niveau de l'information, du recrutement, de la sélection.

etc., par rapport aux problèmes qui sont constatés justement dans le rapport Harvey-Henripin. "

Et M. Bienvenue répondait, de façon très laconique, mais de façon très significative: "M. Bienvenue: D'accord."

Plus loin, je continuais: "M. Burns: C'est la suggestion que je vous fais. Je la veux très positive, dans le sens de dire qu'on n'aura pas, cette année, simplement examiné des crédits ensemble; que le ministre ne se sera que forcé inutilement à nous démontrer l'utilité de son ministère dont il n'est pas absolument convaincu lui-même, j'en suis sûr...

Et un peu plus loin je continuais également: "M. Burns: Je serais satisfait si on sortait de cette commission avec l'assurance, de la part du ministre, qu'il va y avoir une réunion en dehors de l'examen des crédits, simplement sur ce point de consulter des experts." Maintenant, cela me fait plaisir de dire que je me citerai moins par la suite. C'est le député de Beauce-Sud qui endossait carrément ma position, disant textuellement ceci: "M. Roy: J'endosse la suggestion du député de Maisonneuve, qui me plaît énormément."

Plus loin il ajoutait ceci: "M. Roy: Je dis que la suggestion du député de Maisonneuve doit être retenue et cela devrait se faire le plus tôt possible, même avant l'ajournement pour les vacances d'été. Je vais jusque-là, avant l'ajournement de la session, pour les vacances d'été, on devrait avoir plus de commissions parlementaires, une, deux ou trois séances si nécessaire, pour que nous examinions cette question. A la suite de cela, le gouvernement aura en main les données nécessaires pour préparer une loi pour l'automne et pourra faire quelque chose en 1975."

Voici la réponse du ministre, que je cite in extenso, car je pense que cela a extrêmement d'importance pour se remettre un peu dans l'atmosphère de l'année dernière. Le ministre répondait ceci: "Je reçois, M. le Président, avec énormément de plaisir la démarche commune des deux membres de l'Opposition, d'allégeance différente, mais qui jouent parfaitement leur rôle. Le député de Maisonneuve a tellement raison de dire, après ceux qui l'ont dit, ceux qu'il a cités, que le Québec ne contrôlait pas son immigration." Un peu plus loin, il ajoutait ceci: "Vous avez totalement raison. C'est avec infiniment de plaisir — je parle évidemment en mon nom, mais je me chargerai — j'insiste — de convaincre ceux du gouvernement auquel j'appartiens, je pense au premier ministre, au leader du gouvernement dont je ne suis que le faible et pâle adjoint. Je vois d'un très bon oeil", etc. Il continuait en disant qu'il voyait d'un très bon oeil cette suggestion.

Un peu plus loin, il ajoute ceci: "J'ai toujours été tenant de la théorie que les députés, les membres de l'Assemblée nationale sont prioritaires, font partie d'une assemblée souveraine; ils doivent être consultés les premiers, c'est ma modeste opinion. Ensuite, il y aurait moyen de penser à une étape ultérieure qui serait de l'ouvrir et de consulter sur un plus vaste plan l'opinion publique, les organismes. Est-ce que ça vous irait?" Je réponds: "Cela mirait". Le président après quelques autres échanges, déclare: "Je dis donc que le budget de l'Immigration est adopté". M. Roy ajoute: "Adopté avec réserve". Le président: "Adopté avec réserve, mais adopté quand même". M. Bienvenue dit — ce n'est pas moi — "Avec les engagements que j'ai pris tout à l'heure". Et moi, je dis, évidemment: "C'est cela".

Je vous ai cité, in extenso, ces extraits du journal des Débats de l'année dernière, parce que je les trouve particulièrement importants, dans le sens qu'il s'agit là d'une promesse qui avait été faite formellement par le ministre, sans aucune ambiguïté. C'était, à toutes fins pratiques, la conclusion à laquelle nous en étions arrivés, à la suite de l'examen des crédits du ministère, l'année dernière.

Nous avions eu, donc, une promesse formelle de tenir une commission parlementaire où des experts, tels ceux que je nommais, entre autres, MM. Bonin, Harvey, Henripin et peut-être d'autres personnes que le ministère aurait choisi d'inviter, pourraient venir se faire entendre devant nous et peut-être nous donner quelques conseils, quelques indications sur la façon d'agir pour rendre véritablement efficace le ministère de l'immigration.

J'ajoute que le député de Beauce-Sud insistait encore plus que moi, s'il y a quelque chose. Tout en m'appuyant, il disait qu'il fallait que cela se fasse avant les vacances d'été. Le ministre nous a donné cette assurance et je n'en ai plus entendu parler.

Alors, c'est le genre de question, peut-être moche, à poser à l'actuel ministre qui n'a pas à supporter nécessairement le poids de cette affaire, mais je voudrais bien qu'elle nous dise ce qui s'est véritablement passé. Pourquoi n'y a-t-il pas eu de commission parlementaire? D'autre part, je voudrais connaître son opinion quant à l'utilité d'une telle commission parlementaire. Est-ce qu'elle est prête, elle, à prendre cet engagement qu'avait pris le ministre antérieur?

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable ministre de l'Immigration.

Mme Bacon: M. le Président, je m'en voudrais de répondre pour mon prédécesseur en disant pourquoi il n'y a pas eu de commission parlementaire entre l'adoption des crédits et ma nomination, le 20 janvier dernier, au ministère de l'Immigration. Je pense que le changement de ministre, évidemment, m'obligeait à prendre connaissance, d'abord.

Je ne dois parler que pour moi-même, et le député de Maisonneuve va le comprendre. Le changement de ministre m'amenait à prendre connaissance des dossiers, à mon arrivée au ministère, ce qui, quand même, doit prendre une assez bonne somme d'heures de travail. Evidemment, j'ai mentionné, dans le court préambule, la législation qui est mise de l'avant par le ministère, ce qui amènera un échange de vues ou une dis-

cussion au niveau d'une commission parlementaire — et je n'ai rien contre la tenue d'une telle commission parlementaire — où nous devrons explorer davantage certaines avenues.

Je pense que, l'an dernier, si ma mémoire est fidèle, il s'agissait d'une commission parlementaire sur l'immigration. Je pense qu'avec le dépôt des trois lois qui sera fait bientôt, le champ d'action va être beaucoup plus vaste que seulement l'immigration. Quand on considère que le ministère aura une nouvelle vocation qui s'appellera le ministère de l'Immigration et de la Population, on se donnera un cadre bien précis dans lequel nous pourrons évoluer. Cet échange pourra avoir lieu et, pour ma part, je ne ferai pas de grandes promesses, M. le Président, je n'ai pas l'intention d'en faire aujourd'hui. La collaboration de l'Opposition étant acquise et celle de mes collègues de la commission, je sais que nous pourrions avoir des discussions fort intéressantes et y inviter, évidemment, certaines personnalités québécoises qui peuvent nous aider dans cette recherche. Nous l'avons fait pour présenter ces trois projets de loi, mais nous pensons que dès qu'il sera possible de tenir la commission parlementaire, nous pourrons continuer à explorer davantage cette vocation du ministère de la population et de l'immigration, et compte tenu du champ d'action que nous voulons explorer ou que nous voulons un jour détenir. Cette connaissance des dossiers qui nous permet maintenant d'échanger davantage, il est évident qu'il a fallu y mettre du temps et connaître davantage ce qui se passait au ministère, mais je ne peux pas répondre, évidemment, pour les engagements qui avaient été pris par mon collègue et qui se sont passés entre l'adoption des crédits et le mois de janvier. Je ne peux répondre que pour moi-même.

M. Burns: Vous savez, madame le ministre, que je vais être très mal pris l'année prochaine si, par malheur, on vous remplace au courant de l'année. Je vais être placé à me frapper à un autre ministre qui va dire: Je ne peux pas répondre sur ce qui s'est passé antérieurement. Ce que madame Bacon a fait...

Mme Bacon: Mais je n'ai pas pris d'engagement formel ni fait de promesse.

M. Burns: Mais présentement vous êtes en train de prendre un engagement sans vous en rendre compte; vous êtes en train de nous dire que nous pourrons, sans aucun doute, avoir un échange très intéressant et même avec des experts, lors de l'étude des projets de loi que vous nous annoncez.

Mme Bacon: Des différents projets de loi.

M. Burns: Cela veut dire qu'à toutes fins pratiques vous accepterez que lors...

Mme Bacon: C'est cela.

M. Burns: ...d'une commission parlementaire, on fasse venir des experts, des gens qui peuvent nous guider relativement à ce sujet. Cela en est un.

Mme Bacon: Vous avez bien compris.

M. Burns: Mais je veux être bien sûr que c'est un engagement que vous prenez.

Mme Bacon: Oui, oui.

M. Burns: Pour que je n'aie pas besoin, lorsque le projet de loi sera déposé, de faire une motion de retarder à six mois l'adoption du projet de loi pour entendre...

Mme Bacon: Ce ne sera pas une apocalypse.

M. Burns: Non, ce ne sera pas une apocalypse. Cela ne sera sûrement pas une prophétie non plus.

Mme Bacon: Non.

M. Burns: D'accord. En somme, ce serait probablement l'occasion. Vous n'avez pas d'indication de raisons précises pour lesquelles votre prédécesseur n'a pas convoqué... Je suis obligé de revenir là-dessus parce que, comme l'engagement était tellement formel et comme il y a une certaine continuité à l'intérieur d'un ministère, comme je le mentionnais au tout début, vous êtes la seule personne à qui je peux m'adresser pour poser cette question. Je ne peux aller aux crédits de l'éducation pour demander cela à l'ex-ministre de l'Immigration, je serais très mal venu. Je suis convaincu, M. le Président, que vous me rappelleriez à l'ordre, si je le faisais.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Exactement, vous avez raison.

M. Burns: Mais vous n'avez pas d'indication sur la raison; est-ce que c'était tout simplement parce qu'on pensait déposer, éventuellement, le projet de loi sur le ministère de la population et de l'immigration?

Mme Bacon: II faudrait se référer à certaines déclarations de mon prédécesseur, entre autres celle qu'il faisait en décembre, au moment où il croyait pouvoir déposer ces projets de loi. Evidemment, il y a encore le délai entre l'adoption des crédits et décembre. Le député de Maisonneuve aurait raison de me dire: Qu'est-ce qui s'est passé entre ces mois? Il y a eu quand même cette tournée qui a été faite, si je me rappelle bien, à l'automne, avec les membres de la commission parlementaire, dans les différents pays pour, évidemment, étudier une partie de ce qui se fait, une partie importante de ce service du ministère à l'étranger. Je pense qu'il y a sûrement dû y avoir beaucoup d'échanges entre les membres de la commission parlementaire qui accompagnaient le ministre à ce moment-là.

M. Burns: J'ai l'intention de vous en parler d'ailleurs.

Mme Bacon: Aussi, je pense qu'il y avait différents tenants de philosophies qui étaient aussi différentes que les gens qui composaient la délégation.

M. Burns: Je vois que vous avez eu un rapport de très, très proche.

Mme Bacon: J'ai dit que j'ai pris le temps de connaître mes dossiers, M. le Président; je pense que cela a été fort sage de ma part de me donner du temps avant d'arriver à cette commission parlementaire et surtout avant le dépôt des trois lois, qui se fera le plutôt possible.

M. Burns: D'accord, je vous rappellerai votre engagement lorsque vous déposerez votre loi. Je pense bien que, s'il n'y a pas de remaniement ministériel d'ici ce temps, on ne devrait pas avoir de problème à obtenir notre commission parlementaire.

Quant au deuxième point que j'ai soulevé, c'est-à-dire relativement à la portée réelle de l'entente Bienvenue-Andras, j'aimerais à nouveau me référer au journal des Débats du 6 mai 1975. A compter de la page B-2709 où on peut lire, de la part du ministre de l'Immigration, l'énoncé suivant: "Cette entente — c'est-à-dire l'entente Bienvenue-Andras — va justement être ce jalon important, cette étape, ce bond considérable en avant, comme je me plais à l'appeler, qui va, je n'aime pas me servir de mathématiques pour expliquer ma pensée, mais qui pourra représenter un pourcentage combien accru du pourcentage de ce que pouvait donner l'entente précédente Lang-Cloutier en termes de résultats concrets pour le Québec".

Le ministre continue: "C'est dans cette entente que l'on retrouvera bien concrétisés et figés les mots: recrutement, sélection et information, qui sont à la base de la loi 46. C'est dans et par cette entente approuvée par le fédéral que les représentants du Québec à l'étranger pourront participer de façon absolument conjointe, étant parfaitement présents à toutes les candidatures de ceux qui se destinent au Québec. Comme je disais dans mes remarques préliminaires, l'officier du fédéral qui a, qu'on le veuille ou pas, dans l'état actuel des choses, le mot final pour ce qui est de la décision de permettre ou de refuser l'entrée, devra prendre en considération l'opinion, le jugement de la partie québécoise. Si on relit, pour un instant, l'ancienne entente... on verra le progrès incroyable qui aura été fait depuis l'époque en question".

Alors, l'entente Bienvenue-Andras a été effectivement signée par le Québec et par le Canada le 17 octobre 1975. Le ministre québécois du temps nous l'avait annoncée comme un jalon, ce jalon important, cette étape, ce bond considérable en avant, un progrès incroyable. A la même occasion, le ministre avait dit, et je le cite à nouveau, il s'adressait à moi: "Vous avez totalement raison. A force d'entendre dire: Si on pouvait savoir si le

Québec va se donner les outils pour contrôler son immigration, les députés de l'Opposition me donnent une tentation folle de sortir, laisser traîner devant eux, si je le pouvais, pendant quelques instants, le papier que j'ai dans mes documents évidemment, il se référait à l'entente Bienvenue-Andras. C'est ce projet d'entente qui, je le dis— il n'a pas dit "en vérité"— sans vouloir ne rien trahir, répondrait honnêtement ou alors répondra à leurs attentes, mais hélas! les crédits sont venus avant".

On constatera difficilement que ce grand "passage du Rubicon" de M. Bienvenue devait au minimum répondre aux objectifs adoptés pour le ministère de l'Immigration par l'Assemblée nationale dans la loi 46, c'est-à-dire "informer, recruter, sélectionner ces personnes, de rendre possible leur établissement au Québec et d'assurer leur intégration harmonieuse au sein de la société québécoise et plus particulièrement de !a majorité francophone".

Ceci apparaissait comme un minimum vital non seulement à l'Opposition officielle, qui a donné un appui enthousiaste à la loi 46, mais aussi au gouvernement puisque, le 26 mai 1974, le premier ministre menaçait d'établir un contingentement sur les immigrants anglophones — on peut retrouver un article qui résume, dans la Presse du 1er novembre 1975, cet énoncé qui avait été formulé le 26 mai 1974 par le premier ministre — et puisque le ministre de l'Immigration disait, à l'Assemblée nationale, le 26 mars 1974, qu'à défaut d'un pouvoir de véto du Québec, "on devrait sans doute se résigner à légiférer sur un éventuel permis de travail au Québec". On retrouve cela également dans le même article de la Presse du 1er novembre 1975.

Or, quelle contribution positive, précise et concrète l'entente Bienvenue-Andras apporte-t-elle à une véritable politique d'immigration au Québec telle qu'établie "dans les mots" par la loi 46?

C'est peut-être en se référant à un communiqué qui a été émis par le ministre de l'Immigration du temps qu'on en retrouvera le sens et qu'on pourra voir jusqu'à quel point, dans le concret, dans la vie de tous les jours, en matière d'immigration, on a réussi à donner un sens à tout cela.

Dans ce communiqué, qui coïncidait avec la publication de l'entente Bienvenue-Andras, on lit ceci: "Bien que la décision finale relative à la sélection des immigrants continuera d'être exercée par le gouvernement fédéral, a dit M. Bienvenue, les agents d'immigration de la province de Québec en poste à l'étranger pourraient désormais donner à leurs homologues fédéraux leur avis...".

Je voudrais savoir de la part du ministre — c'est ma question — si le fait de donner leur avis, pour les agents en poste à l'étranger, c'est ce qui veut dire exercer sa juridiction, pour le Québec. Est-ce ce que cela veut dire?

Mme Bacon: M. le Président, dans le livre des crédits, j'ai remis cette entente Andras-Bienvenue et ce qu'il en est quand on parle de communications, recrutement, sélection, mais je pourrais

peut-être apporter aussi encore certaines précisions sur cette entente.

Il y a des changements majeurs par rapport à l'entente Lang-Cloutier. D'abord, il y a l'échange de renseignements qui est fait entre les représentants du gouvernement fédéral et ceux du Québec. Il y a des missions conjointes, il y a des visites planifiées qui sont faites aussi avec les représentants des deux paliers de gouvernement. L'agent du Québec voit toutes les candidatures qui se destinent au Québec ou qui pourraient se destiner au Québec. L'agent du fédéral doit prendre en considération, aussi, l'avis du Québec et devra ensuite communiquer sa décision à l'agent du Québec. L'agent québécois peut faire du recrutement. Il se prononce aussi sur les résidents temporaires et visas d'emploi temporaires. Ce sont, je pense, des changements majeurs par rapport à ce qui existait auparavant dans l'ancienne entente Lang-Cloutier.

Il y a aussi des modalités d'application. Il y a un comité mixte fédéral-provincial qui a été formé et qui discute à ces deux paliers les quelques difficultés administratives qui pourraient résulter des travaux à envisager. Il y a aussi un voyage d'un des sous-ministres adjoints, M. Cloutier, avec un représentant du gouvernement fédéral qui a été fait en novembre dernier pour exposer aux agents l'entente et les conditions d'application.

On commence aussi maintenant des missions aux Etats-Unis, soit dans la région de Boston et dans la région de New York. Presque tous nos agents à l'étranger sont maintenant embauchés et seront présents dans les postes que nous... Je pense qu'on avait mentionné certains endroits, l'an dernier, à l'occasion de l'étude des crédits. Dès que tout ce qui est des tests de sécurité sera terminé, aux deux niveaux, soit au niveau provincial et au niveau fédéral, ces agents seront en poste. Il y en a plusieurs qui sont maintenant à Montréal, qui reçoivent un entraînement bien défini et qui se destinent à ces postes à l'étranger.

Quand on pense à ces changements majeurs, quand on pense aussi aux modalités d'application de cette entente Andras-Bienvenue, cela a été un pas en avant qui a été fait par le ministère de l'Immigration et par le Québec pour avoir une meilleure sélection, un meilleur recrutement, participer à cette sélection et à ce recrutement, et établir une communication constante entre le niveau fédéral et le niveau provincial.

M. Burns: Le ministre croit-il vraiment que de la façon qu'ils sont énoncés les objectifs de la loi 46, entre autres, informer, recruter, sélectionner, sont véritablement respectés par l'entente Andras-Bienvenue?

Mme Bacon: Ils sont respectés, M. le Président.

M. Burns: Si vous me permettez simplement un aparté, c'est peut-être le moment de parler du fameux voyage qu'un certain nombre de parlementaires ont fait. Je vois le député d'Iberville qui nous accompagnait. Ce sont probablement les deux tendances auxquelles vous faisiez référence, les siennes et les miennes, qui étaient assez différentes à l'intérieur de la délégation. En somme, pour replacer...

M. Tremblay: M. le Président, je m'excuse. M. le député de Maisonneuve, vous voulez parler de quoi en parlant de tendances?

M. Burns: Vous allez me comprendre...

M. Tremblay: II faut s'entendre, parce que c'est un voyage qui fut fort agréable.

M. Burns: Qui fut très agréable.

M. Tremblay: Alors, les tendances quelles sont-elles?

M. Burns: Je dois dire, M. le ministre, que le député d'Iberville et moi, on ne s'est pas chicané durant ce voyage, même si on avait des tendances différentes.

M. Tremblay: Ah, vous voulez parler des tendances politiques!

M. Burns: Les tendances idéologiques. Mme Bacon: Des philosophies différentes. M. Tremblay: Je crois qu'au niveau de...

M. Burns: Cela n'a rien à faire avec les autres orientations.

M. Tremblay: A i'échelle des tendances précisément idéologiques du ministère de l'Immigration, je pense que nous nous rejoignions passablement.

M. Burns: Sauf quand vous avez parlé, en Italie, du bill 22; je ne vous rejoignais pas du tout.

M. Tremblay: Qu'est-ce que vous voulez! Il ne faut toujours pas...

M. Burns: De toute façon, pour ceux qui ne seraient pas au courant, un certain nombre de parlementaires, dont le député d'Iberville et moi-même, accompagnaient le ministre de l'Immigration, au cours de l'automne dernier, dans un voyage où nous avons pu, de visu, constater, sur les lieux, ce que faisaient nos agents d'immigration à l'étranger, en particulier en France et en Italie. On devait aller au Liban, mais, à cause de la situation qui existait là-bas, on a cru préférable d'éviter le Liban. Pour ne pas causer d'élections complémentaires au Québec plus qu'il n'en faut, on n'est pas allé au Liban. On est allé en Angleterre également.

Ce que j'ai constaté — c'est ce pourquoi j'y fais référence immédiatement — dans cette tournée, c'est qu'effectivement — je suis obligé de l'admettre ouvertement — j'ai été agréablement surpris de voir ie bon boulot que font nos agents d'immigration à l'étranger, du moins dans ces

pays qu'on a pu visiter, en particulier à Rome, à Paris et à Londres. Je reviendrai sur un autre aspect qui comporte pour moi un certain nombre de points d'interrogation cependant. Mais, qu'ils soient présents, qu'ils soient véritablement en communication directe avec les agents d'immigration fédéraux, c'est un fait. On ne peut pas le nier; on a vu le travail. On a vu le pourcentage d'immigrants qui se destinent au Québec, qui passent entre leurs mains. Effectivement, ils ont un certain pouvoir moral, une certaine autorité morale auprès de l'agent d'immigration fédéral.

Tous nos agents d'immigration québécois à l'étranger ont confirmé aux membres de la délégation qu'effectivement ils étaient très très écoutés par les autorités fédérales, lorsque c'était clairement établi que quelqu'un se destinait au fédéral. J'ai même pu constater, en Italie, que la plupart des gens qui se destinaient au Québec passaient d'abord entre les mains de notre agent d'immigration, avant daller voir l'agent d'immigration fédéral. Et cela, je pense que je ne peux pas m'en plaindre. Je faisais référence à cela parce que je pense que l'entente Bienvenue-Andras n'a rien à faire avec cela. C'est dans les faits que ces choses sont arrivées. L'entente Bienvenue-Andras qui, à toutes fins pratiques, devait le consacrer, consacrait un état de fait déjà existant. C'est peut-être par le sens de la diplomatie de nos agents d'immigration à l'étranger qu'effectivement cette situation de fait est arrivée.

Je ne pense pas que l'entente Bienvenue-Andras soit venue changer quoi que ce soit. C'est dans ce sens-là que je voulais y faire référence tout de suite. Je ne sais pas si le ministre est en mesure de me contredire là-dessus, mais c'est une lente progression qui a amené, éventuellement, cette situation de fait.

Par exemple, un personnage dont je peux maintenant parler, je pense qu'il n'est plus en poste, comme M. Marteau qui était en poste à Rome — je pense qu'il est rapatrié maintenant — c'est par son sens de la diplomatie qu'effectivement il a réussi à s'introduire et à se placer les pieds à l'intérieur du service de l'immigration du temps. Je ne pense pas que l'entente Bienvenue-Andras, pas plus et encore moins que l'entente Lang-Cloutier, soit venue changer quoi que ce soit à cela.

Mme Bacon: Je pense que cela consacre quand même, dans les faits, que des pas en avant ont été faits depuis l'entente Lang-Cloutier. On parle de collaboration; il est évident qu'il y a une collaboration de tous les instants entre les membres du niveau fédéral et nos représentants provinciaux à l'étranger. Il y a une chose qu'il ne faut pas oublier, tout de même, c'est que nous sommes encore dans un pays qui s'appelle le Canada. Cette collaboration très étroite entre les deux paliers de gouvernement a fait que nous pouvons participer à ce recrutement, à cette sélection, qu'il y a une communication constante entre les deux paliers de gouvernement.

Théoriquement, il est vrai que les représentants du fédéral peuvent refuser certains étrangers qui se destinent au Québec, même si nous avons droit de regard sur cette sélection, ce recrutement, et même si nous acceptions d'intégrer ces immigrants à la communauté québécoise. Mais tant et aussi longtemps que nous faisons partie du Canada, le Québec n'étant pas encore souverain, il est nécessaire de tenir compte...

M. Burns: C'est une juridiction concurrente, en vertu de l'article 95 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Mme Bacon: Oui, mais je pense que nous avons exercé entièrement et complètement le droit de regard que nous avions. Cet objectif, en tout cas, de l'exercer entièrement a été atteint par le ministère de I Immigration québécoise, évidemment, avec la collaboration des deux paliers de gouvernement, des représentants qui sont sur place dans différents pays, qui travaillent en étroite collaboration.

M. Burns: D'accord, mais on parlait tout à l'heure de nos agents d'immigration qui sont particulièrement placés dans des endroits où vous avez des immigrants francophones ou tout au moins, selon l'expression de votre prédécesseur, "francophonisables"; aussi bizarre que cela puisse paraître, je pense qu'en Angleterre on a énormément d immigration "francophonisable". J'ai cru constater, là-bas, qu'il y a beaucoup plus.. .Ce que je peux dire, c'est que les Anglais de là-bas ne sont pas les Anglais d'ici, c'est-à-dire que les Anglais de là-bas, les Britanniques, ont beaucoup plus de facilité à apprendre le français; d'ailleurs, la plupart le parlent. C'est cela, le problème, dans le fond. C'est pourquoi on a des agents d'immigration à l'étranger, pour essayer d'augmenter, je pense, en tout cas j'espère, l'immigration québécoise francophone ou "francophonisable".

II reste que le pouvoir, si vous voulez, définitif reste entre les mains d'Ottawa. Cela va pour ces endroits, mais qu'est-ce qui arrive quant aux autres, quant à l'ensemble de l'immigration qui peut venir du Pakistan, qui peut venir des Indes ou qui peut venir de Nouvelle-Zélande ou d'Australie où nous n'avons pas en poste des agents d'immigration? A ce moment-là, ce sont les menaces des contingentement, par exemple, de la part du premier ministre, en 1974, ou encore le droit de veto que réclamait votre prédécesseur, relativement à un certain pourcentage d'anglophones ou de non-francophones ou de non "francophonisables" ou "d'anglophonisables" qui viennent changer un certain nombre de proportions. Qu'est-ce qu'il advient de ces propositions? Le permis de travail, entre autres, qui était annoncé par M. Bienvenue comme étant peut-être une mesure coercitive à l'endroit du fédéral.

Est-ce qu'on y songe encore au ministère de l'Immigration? Dans le fond c'est cela la question globale que je veux poser.

Mme Bacon: En fait, on peut revenir. Il est évident que le poste de Paris, et je l'admets, fonc-

tionnait en dehors de l'entente Lang-Cloutier mais, pour les autres postes, c'était tout à fait différent. Les gens étaient à la merci en fait des décisions prises au niveau fédéral. Maintenant c'est un droit pour nous et une nécessité, de la part du fédéral, de collaborer très étroitement avec les représentants du gouvernement provincial.

Il y a des pays où le gouvernement provincial n'est pas représenté même si on a beau augmenter sensiblement nos représentants à l'étranger; par rapport à ce qui existait il y a même un an, c'est déjà assez considérable, on y reviendra probablement à l'étude des crédits de ce service à l'étranger. Il y a des missions itinérantes...

M. Burns: Ce n'est sûrement pas avec un budget de $10 millions que vous allez pouvoir augmenter grand-chose cette année.

Mme Bacon: On ne coupe rien des services qui sont donnés par le ministère.

M. Burns: Vous voyez que ce que je vous disais au début est vrai. Je vous aide auprès du Conseil des ministres, qui est un de vos principaux ennemis dans votre ministère.

Mme Bacon: Cette primauté fédérale qui est exercée peut-être dans les pays où nous sommes absents, c'est le fait de cette absence qui évidemment lui donne cette primauté. Nous avons l'intention, si c'est possible avec nos budgets, de faire des missions itinérantes avec nos représentants, parce que nous avons toujours une dizaine de représentants du service à l'étranger qui sont en poste à Montréal et qui servent à promouvoir ces missions à l'étranger. Nous voulons avoir une présence dans le coin de Manille ou Hong Kong ou ces coins-là, pour donner un exemple. Il sera possible d'y aller et de voir à ce que nous ayons notre mot à dire dans la sélection et le recrutement des immigrants pour le Québec.

Il y a d'autres régions, quand on pense aux francophones, ou même aux "francophonisables", où il nous faudra accorder plus d'attention et avoir aussi des missions itinérantes Seulement, nous sommes déjà en poste à plusieurs endroits. Nous augmentons le nombre de nos représentants. Evidemment, quand on dit qu'on a quelqu'un à Rome, un autre à Milan ils ne font pas que Rome et Milan, ils couvrent aussi plusieurs autres pays. On y reviendra tout à l'heure dans les postes à l'étranger.

M. Burns: Mme le ministre, peut-être qu'un problème pratique se pose. Il semble que le ministère de l'Immigration — c'est cela la question de fond — du Québec n'ait aucun pouvoir lorsque vous avez un problème pratique. Je peux vous en citer quelques-uns qu'on a vécus depuis quelques années. Le problème des Haïtiens, vous vous souvenez, où le ministre du temps, votre prédécesseur encore une fois, à des question posées en Chambre tant par l'Opposition officielle que par les autres partis de l'opposition, se disait totalement in- capable d'intervenir, et c'étaient pourtant des Hai-tiens qui étaient en résidence au Québec.

Le problème des Colombiens; vous vous souvenez des fameux Colombiens de Louiseville? Le général Quang; je peux vous citer d'autres cas, les Kiamminsky; l'autre, comment est-ce qu'il s'appelait l'autre général? Un autre général qui nous est tombé sur les bras, un autre Vietnamien; en tout cas peu importe. Je vous cite cela uniquement à titre d'exemple. Dans des situations concrètes, où on veut exercer, sinon une juridiction, tout au moins une certaine influence, on se fait dire régulièrement, de la part des autorités du ministère de l'Immigration, que ce n'est pas nos affaires, qu'on n'a rien à dire là-dedans. Alors comment concilier cela avec une certaine juridiction qu'on semble vouloir exercer à l'étranger? Mais le problème se pose même ici, même à l'intérieur de nos frontières, même si elles ne sont pas fermées avec le reste du Canada, du moins pour le moment. J'espère qu'elles ne le seront jamais d'ailleurs, ce qui ne veut pas dire qu'on ne sera jamais indépendants. Mais comment peut-on concilier ces deux attitudes? Il y a cette volonté d'être présent au niveau de la sélection des immigrants, puis, une fois qu'ils sont rendus ici, on n'a plus aucun contrôle.

C'est cela en somme que je soulève. Quand il nous arrive des situations concrètes comme celles que je viens de vous citer à titre d'exemples, il apparaît qu'on n'a aucun mot à dire.

Mme Bacon: II est évident que les expulsions sont les prérogatives du gouvernement fédéral. Il y a même un tribunal spécial qui existe pour faire l'expulsion des non désirables.

Nous faisons, au niveau des comités de travail, au niveau des deux paliers de gouvernement, les représentations nécessaires et il y a un échange continuel ou continu qui se fait par ces différentes réunions de travail. Il y a aussi des rencontres au niveau, évidemment, politique, au niveau des deux ministres, assez régulièrement, qui nous permettent d'avoir cet échange et de faire connaître le point de vue du gouvernement provincial.

Il y a eu amélioration, au cours des dernières années. Je pense qu'on peut dire qu'on a marqué des points. Ces différentes ententes qui ont été signées, même si on prétend que cela existait, je pense que, quand même, elles ont amené beaucoup d'amélioration dans les relations entre nos représentants à l'étranger et aussi entre les deux ministères, le ministère provincial et le ministère fédéral.

Il est évident, compte tenu de la spécificité du Québec et du nombre d'immigrants qui y entrent, qu'ils soient francophones ou "francophonisables", que !e gouvernement du Québec essaie autant que possible d'exercer pleinement le rôle du ministère de l'Immigration, afin, par ces échanges, par ces différentes discussions, par ces rencontres, par ces réunions de travail, de mieux faire connaître au gouvernement fédéral le point de vue du ministère de l'Immigration provincial, et, par des droits acquis, par les ententes signées, de vé-

ritablement le mettre en application et avoir droit de regard sur les immigrants qui entrent ou qui entreront au Québec.

M. Burns: Je reviens sur cette affaire, parce que je trouve cela particulièrement important, même si cela ennuie peut-être le ministre de me répondre si j'ai l'air de ne pas vouloir comprendre.

Je reviens au communiqué qui accompagnait la publication de l'entente Andras-Bienvenue ou Bienvenue-Andras, et je cite un extrait. Il est intéressant de voir comment le texte anglais et le texte français sont différents. Dans le texte français, on lit ceci: "Ces mesures permettront de donner à la province un rôle actif dans le processus de sélection des immigrants".

Le texte anglais, fort probablement qu'il a été préparé à Ottawa, dit: "These measures will permit an active role for the province during the selection process".

La question que je pose au ministre, c'est: Est-ce que, dans son esprit — et comment cela peut-il affecter l'entente Bienvenue-Andras — un rôle actif dans un processus et un rôle actif durant un processus, parce que c'est cela le texte anglais, c'est la même chose? J'aimerais savoir comment le ministre comprend cela. J'aimerais savoir, également, si le ministre a eu des difficultés ou encore si les fonctionnaires de son ministère lui ont indiqué que son prédécesseur avait eu des difficultés, ou encore si son prédécesseur lui avait dit qu'il y avait des difficultés avec Ottawa, dans cette interprétation qui peut être différente, selon qu'on lit le texte anglais ou le texte français.

Mme Bacon: Si je m'en tiens au texte français, je pense que c'est beaucoup plus véridique pour ce qui est de la situation qui existe. La façon actuelle, c'est que nos agents à l'étranger participent et au recrutement et à la sélection des immigrants pour le Québec. En même temps, dans la sélection il y a trois choses: il y a la sécurité, il y a le côté médical et il y a les critères de sélection, comme, par exemple, au cours des entrevues, les points qui sont accordés. Nous intervenons sur les critères de sélection, les entrevues; en ce qui concerne la sécurité et le côté médical, le gouvernement fédéral intervient. Mais, nous sommes là pour les critères de sélection, faire les entrevues et rencontrer les étrangers qui désirent venir s'installer au Québec.

Je pense que le troisième point est aussi très important quand on pense à cette sélection. Evidemment, le côté médical et la sécurité relèvent du gouvernement fédéral et n'entravent pas du tout nos possibilités de recrutement ou de sélection.

M. Burns: Par exemple, est-ce que cette collaboration et cette part active ou, si vous voulez, ce rôle actif dans le processus de sélection va jusqu'à, par exemple, permettre au ministère de l'Immigration du Québec de convaincre le ministère fédéral d'une révision du système de pointage, entre autres. Comme le ministre le sait fort bien, lorsqu'un immigrant fait sa demande pour entrer au Canada, il est soumis à un système de pointage. On lui accorde un certain nombre de points selon une série de critères, dont celui de la langue; on accorde, entre autres, plus de points à quelqu'un qui parle l'anglais et le français qu'à quelqu'un qui ne parle que le français. On accorde également moins de points à quelqu'un qui ne parle que l'anglais. Il y a une série d'autres critères. Entre autres, il y a les critères de professions protégées ou sélectionnées. Je ne connais pas le terme exact, mais il s'agit des professions où il y a un certain manque de main-d'oeuvre au Québec. Nécessairement, vous avez plus de points si vous êtes dans ces métiers ou ces professions.

Mais cette collaboration provinciale-fédérale va-t-elle jusqu'au point où vous auriez, selon vous, une certaine influence dans la révision du mode de pointage en vue de la sélection des immigrants? Lorsqu'on parle de sélection, on parle justement de l'aspect technique qui se traduit par un pointage. Si l'immigrant rencontre — je pense que c'est 60, maintenant — l'exigence minimale de 60 points, il lui est en principe possible d'immigrer au Québec ou au Canada en général.

Mme Bacon: II y a une révision de la loi fédérale qui est en cours. D'ailleurs, je dois avoir une rencontre avec mon homologue fédéral la semaine prochaine. Nous serons consultés sur cette révision de la loi fédérale. Nous travaillons, présentement, au niveau du ministère, à l'élaboration des critères différents, s'il y a lieu de le faire. Nous en discuterons, avec le gouvernement fédéral au moment où aura lieu la consultation sur la nouvelle loi ou la révision de cette loi.

Lorsqu'on parle de la langue, que ce soit le français ou l'anglais, je pense que c'est un des points qui devraient être soulevés à l'occasion de nos rencontres, mais nous avons l'intention de faire des représentations auprès du gouvernement fédéral à l'occasion de la révision de la Loi sur l'immigration fédérale.

M. Burns: D'accord. Toujours sur cette fameuse entente Lang-Cloutier, pardon Andras-Bienvenue...

Mme Bacon: D'autres prédécesseurs.

M. Burns: Vous allez voir que le lapsus s'explique, parce que je veux faire une comparaison avec l'entente Lang-Cloutier. Je pense qu'on nous avait dit à de nombreuses reprises, le premier ministre en tête et surtout le ministre de l'Immigration:... Il me semble qu'il s'engageait beaucoup parce qu'il savait fort bien que son ministère n'était pas supporté par le Conseil des ministres, malheureusement. Cela lui permettait de prendre beaucoup d'engagements et de dire ensuite: Je ne peux pas les remplir.

Mme Bacon: Une affirmation gratuite.

M. Burns: Non, je pense qu'il était sincère; je ne mets pas en doute sa sincérité lorsqu'il faisait ces affirmations. Entre autres, il a affirmé, à de

nombreuses reprises, ici même en commission, qu'en matière d'immigration, le Québec n'était pas une province comme les autres. Alors, le communiqué qui accompagnait l'entente Andras-Bienvenue disait que "le gouvernement fédéral était conscient de l'intérêt particulier de chacune des provinces en matière d'immigration".

Etait-ce là une reprise plus diplomatique, si vous voulez, de l'article 11 de l'entente Lang-Cloutier — vous voyez le lapsus — qui affirmait qu'"une présence québécoise au bureau fédéral n'a pas pour objet et n'aura pour effet de placer le Québec par rapport aux autres provinces dans une position privilégiée en matière de recrutement et de sélection des immigrants?

Cette conception a-t-elle déjà été discutée avec votre homologue fédéral? C'est une des tendances qui divisaient certains membres de la délégation, c'est-à-dire la présence du Québec à l'étranger comme une province différente des autres à cause du problème francophone, entre autres, et du besoin plus grand au Québec d'une immigration à caractère francophone ou "franco-phonisable". Cela a-t-il déjà fait l'objet de discussions?

Au fond, la question que je vous pose, est-ce que l'entente Bienvenue-Andras n'est pas, à toutes fins pratiques, dans sa conception idéologique, une répétition de l'idée qui se trouvait à l'article 11 de l'entente Lang-Cloutier qui faisait du Québec une province comme les autres?

Mme Bacon: M. le Président, je maintiens que l'entente And ras-Bienvenue était un pas en avant, marquait un pas important dans le recrutement et la sélection des immigrants destinés au Québec. J'ai parlé tantôt de la spécificité du Québec et je le maintiens; je pense que le Québec n'est pas une province comme les autres, à cause justement de la majorité francophone qui vit au Québec et à cause aussi du fait que nous recherchons davantage l'immigration francophone ou "francophoni-sable". Cette entente Andras-Bienvenue nous donnait ce droit au recrutement et à la sélection. Evidemment, aussi, le Québec est la seule province à avoir un ministère de l'Immigration, quand on pense que les autres provinces n'ont pas de ministère de l'Immigration.

M. Lachance: M. le Président, si le député de Maisonneuve me permet, je voudrais poser une question sur l'entente Bienvenue-Andras.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député de Mille-Iles.

M. Lachance: C'est relatif à l'article 8 a) et b) de l'entente Bienvenue-Andras. J'aimerais citer l'article 8 a): "Comme le Canada doit entretenir de bonnes relations avec les autorités de tous les pays où il compte des missions diplomatiques et consulaires, les parties contractantes ne seront pas liées par la présente entente si le pays d'accueil s'opposait aux dispositions qui y sont prévues". Ma question est celle-ci: Est-ce qu'il y a eu des pays qui se sont opposés à l'entente?

Mme Bacon: Non, M. le Président, pas pour le moment. Aucun pays ne s'est opposé à cette entente.

M. Lachance: Une autre question aussi, à l'addenda, qui concerne l'article 1, on mentionne: "Toutefois, le ministère de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigration ne pourra divulguer à la province les renseignements sur les requérants obtenus de source extérieure à l'égard de questions d'ordre médical, délictueux et sécuritaire". Est-ce que cela veut dire que le fédéral peut garder secret le fait que certains immigrants ont un casier judiciaire?

Mme Bacon: En fait, je pense avoir répondu tout à l'heure à cette question. C'est que le gouvernement fédéral garde encore ses prérogatives sur tout ce qui est du domaine de la sécurité et tout ce qui est d'ordre médical. Le gouvernement provincial a droit de regard sur le recrutement et la sélection.

M. Lachance: Mais il peut garder des choses secrètes...

Mme Bacon: Ce sont les prérogatives...

M. Lachance: ... s'il ne veut pas les divulguer.

Mme Bacon: ... du gouvernement fédéral.

M. Lachance: Même s'il y a un casier judiciaire...

Mme Bacon: Cela concerne le gouvernement fédéral et non provincial.

M. Burns: En somme, je dois dire au ministre, et je le dis avec toute l'estime que j'ai pour elle, qu'elle n'a pas réussi à me convaincre jusqu'à maintenant — et c'est ce dont je voudrais m'assurer — que dans l'esprit du gouvernement du Québec, l'entente Bienvenue-Andras devrait vouloir dire que le Québec va exercer sa juridiction, en fait une juridiction que lui reconnaît ce qui nous sert actuellement de constitution canadienne.

Ce que je crains, et je le crains particulièrement par les réponses du ministre, c'est qu'on ne veuille considérer l'entente Bienvenue-Andras que comme une simple entente de collaboration entre deux gouvernements, alors que le Québec a effectivement une juridiction à exercer en matière d'immigration.

Mme Bacon: Le député de Maisonneuve n'a sûrement pas saisi toutes mes réponses.

M. Burns: Bien, c'est cela, peut-être que j'ai... Mme Bacon: Quand je dis...

M. Burns: ... je ne suis pas encore habitué au style du ministre. Je vais peut-être m'habituer, je vais être obligé de m'ajuster peut-être.

Mme Bacon: Quand je parle de prérogatives

au niveau fédéral et de prérogatives du provincial, j'insiste pour mentionner que les prérogatives du gouvernement provincial, en matière de recrutement et de sélection, sont des prérogatives que nous exerçons présentement, selon cette entente, et que nous continuerons d'exercer. Je n'ai pas l'intention de lâcher sur ces prérogatives, comme ministre de l'Immigration. Au contraire, je veux discuter davantage avec mon collègue Andras pour, s'il y a des possibilités, élargir encore certaines prérogatives du gouvernement provincial, compte tenu du fait que nous sommes la seule province à avoir un ministère de l'Immigration et compte tenu aussi de la spécificité du Québec.

Même si M. Andras s'est déjà prononcé en faveur d'une immigration francophone, il est nécessaire que le Québec use de toutes les prérogatives possibles pour maintenir cette immigration vers le Québec, maintenir aussi ses prérogatives en matière de recrutement et de sélection et donner son avis dans la sélection des immigrants. Et même quand je mentionnais tantôt les missions itinérantes, c'est parce que nous voulons vraiment exercer ces prérogatives du Québec.

Je ne sais pas si j'ai été plus claire pour le député de Maisonneuve.

M. Burns: Oui, oui. Je veux simplement m'assurer que le ministre n'a pas l'intention...

Mme Bacon: Non.

M. Burns: ... de diluer, de perdre un peu de l'enthousiasme qui nous apparaissait assez présent chez le ministre précédent. C'était peut-être parce que c'était son seul ministère, lui.

Mme Bacon: Je pense que tout est dans le style, M. le Président.

M. Burns: Evidemment, vous n'avez pas le style biblique! Je l'admets.

Mme Bacon: Je n'ai pas le style biblique, je n'ai pas l'habitude de faire de grandes déclarations sur la place publique mais plutôt de travailler à des dossiers de la façon la plus sobre possible et de les faire avancer. Je pense avoir réussi dans les trois projets de loi qui seront déposés en Chambre. Je l'ai fait sans tambour ni trompette. Au contraire, à la lumière des dossiers du ministère, j'essaie de travailler de la façon la plus réaliste possible, avec les instruments que nous avons mais aussi en tentant d'aller de l'avant dans tous les dossiers qui nous concernent.

M. Burns: Avant de quitter l'entente Bienvenue-Andras, j'ai remarqué l'article 5 — sans doute que le ministre en a pris connaissance — qui se lit comme suit: "Afin d'assurer le respect des lois locales et d'éviter de froisser les autorités des pays sources, la province consultera le Canada avant de s'engager à recruter à l'étranger."

Personnellement, je trouvais cela aberrant que des ministres québécois, d'un gouvernement qué- bécois, aient accepté de signer une telle entente. Particulièrement, je m'attache aux mots: "Afin d'assurer le respect des lois locales et d'éviter de froisser les autorités des pays sources." Qu'on soit obligé de se mettre à genoux devant le Canada avant d'essayer d'aller ouvrir un bureau à Haïti... C'est peut-être pour cela, d'ailleurs, qu'il n'est pas encore ouvert et qu'il nous est annoncé depuis deux ans ou à peu près. On déclare et on dit, à tout le monde, qu'on a une vocation en matière d'immigration, qu'on a une juridiction qui nous est propre — conjointe, d'accord, je l'admets — mais une juridiction, en matière d'immigration. Surtout qu'on a un intérêt particulier. Est-ce que le ministre n'est pas prêt à nous assurer qu'elle va tenter de faire enlever cela de l'entente lorsqu'elle sera renouvelée?

M. Bacon: I! y a, en fait, une question de droit international mais aussi une question de diplomatie. Je pense que nos prérogatives ne nous empêchent pas de garder une certaine diplomatie face au gouvernement fédéral et face aussi aux pays sources d'immigration pour le Québec. Cela n'enlève rien de nos prérogatives et je pense que cela fait partie, aussi, de discussions normales dans un pays comme le nôtre, parce que c'est encore le Québec dans un Canada, je dois le rappeler au député de Maisonneuve. Nous devons, je pense, faire montre de diplomatie au moment où des décisions sont prises au niveau du ministère.

Mais je ne sache pas, en tout cas depuis mon arrivée au ministère, qu'on nous ait refusé l'ouverture de bureaux dans les pays qui avaient été jugés utiles comme source d'immigration par le ministère provincial.

M. Burns: Mais ne pensez-vous pas qu'à un moment donné c'est froissant pour nous, du Québec, même si j'admets avec le ministre qu'on est encore dans le Canada? D'ailleurs, il y a un ministère fédéral du Revenu qui se charge de me rappeler qu'on est encore dans le Canada, qui me le rappelle annuellement. Je pense que tout en admettant cette situation de fait, il y a quelque chose de froissant pour le Québec, qui veut exercer une juridiction, d'avoir un texte que le plus minable des locataires ne signerait pas avec son propriétaire. C'est aussi simple que cela.

Mme Bacon: En fait, cette entente a été signée pour une période de trois ans, mais avec une révision annuelle. C'est dire qu'il y a sûrement certains points de l'entente qui peuvent être révisés chaque année.

M. Burns: Est-ce qu'entre autres celui-là, dans l'esprit du ministre, ne pourrait pas faire l'objet...

Mme Bacon: C'est un de ceux qui pourraient faire l'objet de révision.

M. Burns: ... tout au moins dans sa phraséologie et...

Mme Bacon: Cela et d'autres.

M. Burns: ... dans sa façon, en tout cas, parce que cela met le Québec, à mon avis, dans un état de sujétion qui n'est absolument pas compatible avec, entre autres, l'article 95 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Mme Bacon: Non, le numéro 5 et d'autres points bien précis peuvent être...

M. Burns: J'ai deux dernières questions, si le ministre veut être patient, sur l'entente Bienvenue-Andras. Je vais me limiter à ces deux dernières questions.

L'article 6 d) de l'entente Bienvenue-Andras se lit comme suit: "II est bien convenu que la décision relative à toute demande d'admission doit nécessairement être prise en fonction de la loi, du règlement du Canada et des critères d'immigration établis par le Canada ".

Dans l'actuel état des choses, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique — et j'y reviens, je trouve cela particulièrement essentiel — à l'article 95, fait de l'immigration un pouvoir fédéral-provincial conjoint, en même temps qu'il spécifie: "Une loi de la Législature d'une province concernant l'agriculture et l'immigration n'y aurait d'effet qu'aussi longtemps et autant qu'elle ne sera pas incompatible avec une loi du Parlement du Canada."

Ce que j'aimerais savoir de la part du ministre c'est ceci: Dans les faits le Québec n'a jamais, jusqu'ici, recouru, en matière d'immigration, à tout le pouvoir qui lui est réservé par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique que je viens de vous citer et dont la seule limite est l'incompatibilité avec une loi fédérale. Or, par l'article 6d) de l'entente que je viens de citer, le Québec se subordonne volontairement à un pouvoir fédéral, aux lois fédérales, aux réglementations fédérales en matière d'immigration. Comment le ministre peut-il nous expliquer non seulement que le Québec ne cherche pas véritablement à exercer le pouvoir qui lui est dévolu par l'article 95, mais, plus que cela, qu'il est conscient officiellement par entente qu'il accepte de diminuer ce pouvoir? Dans le fond, c'est cela. Vous savez que l'entente Bienvenue-Andras qui nous était annoncée avec tambours et trompettes, cette fois, je pense, n'était pas quelque chose — et cela est un autre exemple — dont on avait à se vanter. Peut-être que ce sont certains aspects de l'entente Bienvenue-Andras, comme le ministre le disait tout à l'heure, en matière de recrutement puis de collaboration des agents fédéraux d'immigration et provinciaux; peut-être que cela concrétisait et venait mettre sur papier une entente qui existait, en tout cas nous donnait une assurance que cela continuerait. Mais quand vous retrouvez des textes de cette nature, est-ce que, dans le fond — c'est cela la question de base — on ne recule pas par rapport à nos droits, en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique?

Mme Bacon: Non, quand on regarde l'article 6d), je l'ai mentionné tantôt et je dois le redire, nous aurons une consultation au niveau des deux ministères, compte tenu de la révision de la Loi de l'immigration du fédéral. Nous travaillons aussi à l'élaboration de critères provinciaux. L'idéal c'est que l'élaboration des lois et des règlements se fasse conjointement entre les deux ministères, soit le ministère provincial et le ministère fédéral. Je pense que nous partageons réellement cette juridiction avec ces ententes. Cela prendrait, à ce moment, son plein sens, si l'élaboration des lois et des règlements se faisait conjointement entre les deux ministères. Evidemment, il y aurait des modalités à établir. Tout cela fait partie de discussions qui sont en cours entre les deux gouvernements et des rencontres que nous aurons dans les semaines qui viennent.

M. Burns: Puisque vous allez faire des rencontres, je vous signale un autre article que je considère particulièrement rabaissant pour le Québec, c'est l'article 8 — je le laisse à votre considération, encore une fois — qui nous dit ceci: a) Comme le Canada doit entretenir de bonnes relations avec les autorités de tous les pays où il compte des missions diplomatiques ou consulaires, les parties contractantes — c'est-à-dire le Canada et le Québec — ne seront pas liées par la présente entente si le pays d'accueil s'opposait aux dispositions qui y sont prévues. "b) II appartiendra au ministère des Affaires extérieures du Canada d'établir s'il existe quelque objection à la mise en oeuvre de l'entente de la part des pays d'accueil et de conseiller les parties contractantes en conséquence. La province sera informée de la teneur de toute objection à cet égard."

C'est encore, à mon avis, un autre texte de l'entente Bienvenue-Andras qui nous place dans une position, tant psychologiquement que de facto, qui n'a aucune commune mesure avec les droits que nous avons en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Je trouve cela regrettable. Remarquez que je suis bien heureux d'avoir comme vis-à-vis, cette année, l'actuel ministre de l'Immigration, mais je regrette que l'ancien ministre de l'Immigration ne soit pas ici cette année pour venir répondre de textes comme ceux-là qui, à mon avis, sont avilissants pour le Québec et qui sont nettement rétrogrades par rapport à des positions qu'il pourrait prendre en vertu de la loi.

Je signale au ministre cet autre texte. Je lui signale que l'ensemble de l'entente Bienvenue-Andras n'est pas bien réjouissante pour — prenons un mot autour duquel tout le monde pourra se rallier — l'autonomie du Québec en cette matière. Ce n'est pas une autonomie complète, mais tout au moins un pouvoir conjoint avec le fédéral. Ce n'est pas particulièrement réjouissant, cette entente Bienvenue-Andras. Tout en applaudissant la venue du nouveau ministre de l'Immigration, qui est mon vis-à-vis cette année, je regrette que l'ancien ministre ne soit pas ici pour venir recevoir nos critiques là-dessus. Je signale, entre autres, ce texte-là. Je pense que l'ensemble de l'entente Bienvenue-Andras est teintée de ce type de positions ou d'articles qui sont rétrogrades par rapport à nos positions. En tout cas, je le signale au ministre.

Quant à l'entente Bienvenue-Andras, c'est terminé à moins que quelqu'un d'autre n'ait quelque chose à dire.

Mme Bacon: Ce que je puis ajouter, c'est que, comme je le disais tout à l'heure, même si c'est une entente conclue pour une période de trois ans, les modalités d'application sont sujettes à révision annuellement. C'est ce que j'ai l'intention de faire.

Postes à l'étranger

M. Burns: D'accord. Quant aux postes à l'étranger, on y a touché un peu. Je vois, dans le document que le ministre nous a remis, qu'il y a un certain nombre de postes qui seront augmentés. Je cite directement: Les effectifs à Paris, qui couvrent la plupart des pays de l'Europe du Nord, devraient passer, dans les prochains mois, de quatre à sept; à Londres, de un à trois; à Rome, pour l'Italie...

Mme Bacon: Juste une correction.

M. Burns: Actuellement, si je ne me trompe pas, il y en a un seul à Rome.

Mme Bacon: Pour Rome, il y ajuste une correction. On dit que le nombre passera à trois conseillers au lieu de un; ce sera deux à Rome et un à Milan.

M. Burns: Bravo! C'est, d'ailleurs, une suggestion que je voulais vous faire.

Mme Bacon: C'est rare!

M. Burns: C'est rare qu'un ministre précède l'Opposition!

Mme Bacon: Pour une fois qu'un ministre devance l'Opposition!

M. Burns: C'est un ministre qui nous joue des tours.

Mme Bacon: Je vous l'ai dit que je travaillais dans l'ombre.

M. Burns: D'ailleurs,c'est une des constatations que nous avons faites au cours de cette tournée. Je signale au ministre que le type d'immigrants qui s'adressent au bureau de la délégation du Québec à Milan constituent une immigration qui est très intéressante pour le Québec, c'est-à-dire qu'elle est...

Mme Bacon: Elle est différente.

M. Burns: ... différente de celle qui s'adresse à notre bureau, à Rome. Là, on a affaire, disons dans une proportion plus importante, à ce type d'immigrants qui peuvent venir investir véritablement au Québec. Vous avez très souvent, je pense, des demandes d'immigrants et peut-être qu'après les prochaines élections en Italie, votre bureau de Milan va être plus occupé qu'il ne l'est. Il va peut-être même être surchargé; cela dépendra du résultat. J'avais cru constater une certaine inquiétude, de la part des industriels en Italie, face à la montée du Parti communiste; on peut se le dire ouvertement. Je pense qu'il est très important qu'on ait quelqu'un à Milan.

Evidemment, le délégué du Québec qui a son bureau à Milan peut peut-être essayer de remplacer l'agent d'immigration qui passe la majeure partie de son temps, je pense, à Rome, mais ce n'est pas sa fonction comme telle, même si c'est un autre employé du Québec. Je pense qu'il a une vocation qui est beaucoup plus vaste que cela et beaucoup plus large que le problème de l'immigration. Même là, je pense que c'est une très bonne amélioration que le ministère fera.

Maintenant, je vois que ces postes sont augmentés comme je le disais, de quatre à sept à Paris, de un à trois à Londres, de un à trois à Rome, c'est-à-dire Rome et Milan, de deux à Beyrouth. On nous signale également qu'il y aura deux conseillers à Port-au-Prince, qu'il y en aura trois à Buenos Aires et deux à Lisbonne. Si je me rappelle bien, on nous avait annoncé, entre autres, l'ouverture du bureau de Port-au-Prince, du bureau de Buenos Aires, et le bureau de Lisbonne, on nous l'avait annoncé l'année dernière.

Ce que je crains, c'est qu'avec le type de budget que vous avez, si on parle strictement en chiffres, avec le type de budget que vous avez, c'est-à-dire une réduction de $12 099 300 pour l'année 1975/76 à $10 576 300, je me demande si, l'année prochaine, vous ne serez pas obligée de me dire: Je n'avais pas le budget nécessaire pour mettre en poste ces gens, pour augmenter ces postes-là. Est-ce que le ministre a attaché une certaine considération à ce problème?

Mme Bacon: II y a eu un dégel de postes que j'ai réussi à obtenir en février et nous pouvons dire qu'en ce moment il y a des agents en poste à l'étranger, ceux que vous avez dû rencontrer au cours de vos voyages. Il y a aussi des agents qui sont à l'administration centrale, d'autres en cours de formation à Montréal à l'administration centrale et en cours d'affectation. Alors, je pense que c'est l'ensemble de ces postes, quand on veut augmenter les postes à l'étranger, soit à Paris, Londres, Rome, Beyrouth, Port-au-Prince, Buenos Aires, Lisbonne ou Madrid. Ces agents sont déjà recrutés, et lorsque les procédures de sécurité — parce que cela prend un délai qui est assez considérable — seront terminées, nos agents quitteront immédiatement.

M. Burns: II va falloir obtenir l'autorisation du gouvernement fédéral avant de les nommer pour vrai, ou quoi?

Mme Bacon: Ils sont déjà nommés, les nominations sont faites, les affectations acceptées, mais ils devront être en poste au moment où ils satisferont la sécurité au niveau fédéral.

M. Burns: Mais par exemple, ceux qui ne sont pas encore en poste?

Mme Bacon: Ceux qui sont embauchés. Ceux qui sont mentionnés.

M. Burns: Tous ceux qui sont mentionnés là sont embauchés actuellement?

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: Ah bon. Est-ce que, par exemple, les gens de Port-au-Prince, Buenos Aires, Lisbone sont également embauchés?

Mme Bacon: Nous avons des gens pour tous ces postes. Disons que l'effectif était de sept, le 31 mars 1975, et le 10 mai 1976 il est de 32.

M. Burns: Maintenant quant aux postes de Buenos Aires.

Mme Bacon: Vous avez le tableau. Je pourrais peut-être vous demander de consulter le tableau, vous avez le nom de chacun. Il y a des gens, sûrement, que le député de Maisonneuve va reconnaître dans les agents à l'étranger.

M. Burns: J'en connais un en particulier.

Mme Bacon: Alors, il y en a qui sont en cours de formation, comme vous voyez, d'autres qui sont en cours d'affectation.

M. Burns: Je peux vous dire que mon bureau perd un très bon employé, mais le ministère de l'Immigration en gagne aussi un très bon.

Je voulais tout simplement mentionner ceci, quant à ceux de Port-au-Prince, Buenos Aires et Lisbonne, est-ce qu'ils vont être logés à l'ambassade du Canada ou bien s'ils vont fonctionner de façon autonome?

Evidemment, à des endroits comme l'Italie, où nous avons une délégation, à Paris, à Londres, on peut les faire travailler à l'intérieur de la délégation générale ou de la délégation du Québec, mais aux endroits où il n'y en a pas, est-ce qu'ils vont être placés sous l'aide de l'ambassade du Canada?

Mme Bacon: Pour Buenos Aires, Lisbonne, c'est l'ambassade, ils seront à l'ambassade. A Port-au-Prince, ils seront en dehors de...

M. Burns: Dans un bureau autonome? Mme Bacon: Oui, dans un bureau autonome.

M. Burns: Vous nous mentionnez que le nombre de ces postes sera vraiment augmenté, en fait, il l'est par l'embauchage déjà, mais les gens ne sont pas en poste.

Mme Bacon: Ils le sont déjà.

M. Burns: Vous parlez de quelques mois, cela veut dire combien de temps, à peu près? De quel ordre de grandeur cela peut...

Mme Bacon: Cela peut vouloir dire deux mois, cela peut vouloir dire trois mois. Je pense que pour être...

M. Burns: Un maximum de trois mois?

Mme Bacon: Oui. Aussi, il faut compter le nombre de semaines où ils sont en période de formation à Montréal. En fait, ce qui arrive c'est que nous embauchons les gens; ils sont en formation à Montréal, en attendant d'avoir le feu vert évidemment pour la sécurité.

M. Burns: Dans l'immédiat, en somme, vous projetez d'ouvrir de nouveaux postes, en tout cas, dans trois pays.

Mme Bacon: C'est cela.

M. Burns: Est-ce que le ministère envisage, à plus long terme, d'ouvrir des postes ailleurs, dans d'autres pays? Est-ce quelque chose qui est à l'étude actuellement? Où est-ce que cela en est?

Mme Bacon: Oui et je pense qu'on ne peut pas se contenter que de ces postes-là. J'ai parlé tantôt des missions itinérantes qui seront faites par un groupe de représentants du ministère. Je pense que ces missions pourront nous aider à déterminer à quel endroit il y a un avantage, une immigration qui soit francophone ou "francophoni-sable " ou qui pourrait être destinée très facilement au Québec.

Alors, nous comptons beaucoup sur le résultat de ces missions itinérantes. J'ai mentionné tantôt des missions comme, par exemple, la région de Boston, la région de New York, où il y a des Franco-Américains qui sont prêts à revenir au Québec et qui sont encore des francophones. Les deux premières rencontres se sont avérées très intéressantes et une autre mission partira bientôt encore pour cette région.

Alors, ce sont des endroits — quand on pense à l'Asie aussi — où on peut faire un recrutement fort valable pour le Québec. Par ces missions itinérantes, nous pourrons déterminer les endroits où nous pourrions ouvrir des bureaux d'immigration pour le Québec.

M. Burns: Au moment où on se parle, vous n'avez pas de projet précis, même à long terme?

Mme Bacon: Non, les trois sont ceux qui avaient déjà été annoncés, mais qui seront ouverts.

M. Burns: D'accord. Alors, cela couvre, M. le Président, le point que j'avais annoncé relativement à l'efficacité. Avant de laisser ce sujet, je pense qu'on peut résumer. Je ne sais pas si le député d'Iberville partage mes vues là-dessus, mais cela ferait au moins un point d'unanimité entre lui et moi, on peut dire que l'efficacité de nos bureaux à l'étranger reposait, dans le fond, sur la force de bras des individus qui y étaient. Je suis particulièrement heureux de voir qu'on va leur adjoindre un personnel additionnel. Je pense, par

exemple, à M. Castonguay en Angleterre, se retrouver tout seul avec un boulot comme celui-là...

M. Tremblay: ...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député d'Iberville a demandé la parole.

M. Tremblay: M. le Président, j'allais tout à l'heure dire que le député de Maisonneuve, dans son verbiage fort intéressant d'ailleurs, m'a enlevé beaucoup de paroles de la bouche. Moi aussi, j'aurais aimé exprimer cette joie et cette satisfaction bien personnelles de Québécois quand j'ai vu à l'oeuvre nos représentants dévoués, je dirais même courageux, affronter cette vie quotidienne difficile d'un agent d'immigration dans un pays, par exemple, comme l'Italie ou l'Angleterre, peut-être un peu moins la France... c'est encore drôle.

Cela m'a réellement convaincu de la nécessité, pour le gouvernement du Québec, de continuer à promouvoir davantage, par l'entremise de son ministère de l'Immigration, cette fameuse relève francophone chez nous. L'histoire récente nous raconte bien, avec chiffres à l'appui, que nous ne pouvons plus compter, apparemment, sur nos propres moyens de régénérescence, pourrait-on dire.

Cela nous amène à inviter à vivre avec nous des personnes émanant de pays francophones, peut-être, mais des personnes "francophonisables", à toutes fins utiles. C'est ce choix sélectif que nos représentants de l'immigration, en Europe en particulier, s'efforcent de faire. J'ai vu moi-même, comme le disait le député de Maisonneuve, ces gens oeuvrer avec un dévouement fort remarquable et je pense bien qu'avec les effectifs nouveaux qui vont arriver à leur rescousse, nous pourrons certainement, au Québec, apporter le concours très précieux de ceux qui seront appelés à vivre avec nous et surtout partager avec nous les efforts pour faire de ce Québec une province plus forte en apportant leur concours dans tous les domaines inhérents à cette société québécoise que nous voulons améliorer et voir constamment sur la route du progrès.

M. Déziel: Le programme 1 est adopté.

Mme Bacon: Seulement une remarque pour terminer, M. le Président. Je veux seulement ajouter qu'il est évident qu'avec quatre bureaux, nous pouvions rencontrer environ 50% des candidats qui se destinaient au Québec. Lorsque tous nos bureaux seront ouverts nous pourrons rejoindre environ 90% des candidats qui se destinent au Québec. Les agents ont contribué à recruter des candidats fort intéressants pour le Québec en effectuant des missions dans le territoire couvert par l'entente. Ils ont contribué au recrutement de main-d'oeuvre à l'étranger pour le compte des employeurs québécois; ils ont aussi contribué à recruter les immigrants investisseurs. Il y a plusieurs dizaines de millions de dollars qui ont été investis depuis quelques années au Québec, grâce au travail de nos représentants à l'étranger, parce qu'on appelle les immigrants investisseurs. Nous devons souligner qu'avec les quatre bureaux actuels, nous faisons un travail considérable, mais je pense qu'avec l'ouverture de prochains bureaux, nous pourrons avoir, encore une fois, des immigrants fort intéressants pour le Québec.

M. Burns: Le ministre vient de mentionner le recrutement de main-d'oeuvre à l'étranger, via nos services. Etait-ce dans ce qu'on appelle des professions désignées en vertu du fédéral? Le ministre a-t-il des informations sur le type de main-d'oeuvre qu'on a recruté?

Mme Bacon: Forcément, cela fait suite aux ententes qui ont été signées. Maintenant, il est évident qu'on doit faire davantage, compte tenu des besoins qu'on a au Québec, des différents secteurs de main-d'oeuvre qui ne sont pas couverts ici par la main-d'oeuvre québécoise et...

M. Burns: En particulier dans ces cas, le ministre peut-il nous dire, sinon en détail du moins globalement, quel type de main-d'oeuvre on recrutait?

Mme Bacon: Je pense par exemple, à l'hôtellerie, où il y a eu du recrutement qui a été fait par nos agents à l'étranger; c'est un domaine où nous commençons à peine à produire des gens qui sortent de notre école d'hôtellerie. Il a donc fallu faire appel à une main-d'oeuvre étrangère pour combler les postes ouverts ici au Québec.

M. Burns: La raison pour laquelle je vous demandais cela, c'est que dans cette tournée à laquelle on a fait référence à quelques reprises, j'ai été étonné d'apprendre qu'à cette époque — si je comprends bien, les professions désignées changent de trois mois en trois mois — et je me souviens que le député de Rouyn-Noranda poussait les hauts cris quand il a appris cela lui aussi, une des professions réservées était la profession d'infirmière, et Dieu sait qu'il y a même de nos étudiantes en nursing qui ont de la difficulté à se placer au Québec. Alors, cela nous apparaissait assez bizarre. C'est la raison pour laquelle je me demandais si...

Mme Bacon: Mais nous avons aussi les mécaniciens et les ouvriers spécialisés de toute sorte; ce sont des postes qui peuvent être comblés...

M. Burns: D'accord. Une dernière question avant qu'on suspende, parce que si je comprends bien, nous allons suspendre à midi et je ne voudrais pas, madame le ministre, avec votre permission, me lancer dans ma quatrième partie que j'intitulais tout à l'heure Les moyens financiers et administratifs du ministère, parce que j'aimerais autant la commencer et la finir en bloc.

Participation fédérale

M. Burns: Avant qu'on aborde ce sujet, le ministre peut-il nous dire quelle est, dans le budget

de $10 576 300, la proportion qui vient de la subvention fédérale? Si vous vous référez aux crédits des années antérieures, cette subvention était montrée de façon autonome, alors qu'elle ne l'est pas cette année.

Mme Bacon: Cela se chiffre par environ $6,4 millions ou $6,7 millions.

M. Burns: $6,4 millions?

Mme Bacon: Je vais avoir le chiffre exact.

M. Burns: Est-ce qu'il y a moyen de l'avoir, le chiffre?

Mme Bacon: Oui. Je pense, par exemple, à ... M. Burns: Simplement.

Mme Bacon: $6,7 millions, quelque chose comme cela.

M. Burns: $6,7 millions? Ce serait encore...

Mme Bacon: Je vais avoir le chiffre exact. C'est $6 534 000.

M. Burns: $6 534 000. L'année dernière, Mme le ministre, il était de $5 325 000, ce chiffre-là et, l'année précédente, il était de $5 125 900. C'est à la veille d'être un ministère fédéral, vous savez, votre ministère. Je ne le dis pas pour porter atteinte au boulot que vous essayez de faire; au contraire, c'est pour vous aider que je vous le mentionne. Je trouve que c'est absolument aberrant.

Mme Bacon: Je l'avais d'ailleurs dit au départ: M faut aller trop loin pour aller plus loin.

M. Burns: II faut pousser dans le dos du ministre pour l'aider, tout simplement, à faire de son ministère un véritable ministère. C'est notre but. Mais je vous signale cela parce que, simplement, sans entrer dans le détail, alors que l'année dernière le budget total de votre ministère était de $12 099 300, la subvention fédérale était de $5 millions, c'est-à-dire moins de 50%, à peu près 50%. En 1974, elle était de 64%, la subvention fédérale. Là, je n'ai pas fait le calcul de la proportion par rapport au budget global, mais cela va péter quelque chose comme 75%. C'est pour cela que je vous dis — je ne le dis pas de façon péjorative ou méchante, ou quoi que ce soit — que c'est à la veille d'être un ministère fédéral.

Mme Bacon: Mon calcul me donnait 33% pour le provincial.

M. Burns: Donc, on n'est pas loin.

M. Lachance: —67%.

M. Burns: 67%. En tout cas, je ne suis pas fort en chiffres.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 58)

Reprise de la séance à 16 h 35

M. Bédard, Chicoutimi (président de la commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration continue l'étude des crédits du ministère de l'immigration.

L'honorable ministre.

Mme Bacon: Au départ, j'aimerais peut-être corriger certains chiffres qui ont été donnés ce matin quand on parlait de la participation du fédéral. On a mentionné $6 534 000 et il faudrait corriger pour $5 800 000. Je pense qu'on a aussi distribué aux membres de cette commission la répartition des travailleurs immigrants admis au Québec en 1975 par emplois projetés. Cela nous donne peut-être une idée un peu plus juste de cette répartition des travailleurs.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Est-ce que tous les membres de la commission ont reçu cette information?

Mme Bacon: Est-ce que tous les membres ont...

M. Burns: Oui, M. le Président. Simplement, madame le ministre — on n'en a rien qu'une, on n'est pas pour la maganer — j'aimerais vous poser une question anodine, à savoir d'où vient ce changement de quelque $700 000. Est-ce que c'était tout simplement un chiffre qui était inexact ou s'il y a une affectation qui était mise de côté ou qui était considérée comme fédérale, alors qu'elle ne l'était pas?

Mme Bacon: C'est le taux de jours-élève qui avait été projeté et qui a été modifié. Alors, les montants ne sont pas les mêmes, ceux qui sont reçus. C'était 1485 et c'est modifié à 1230.

Direction et gestion interne

M. Burns: En somme, c'est une subvention que vous n'avez pas encore mais qui, selon les normes qui existent actuellement, va vous être versée et que vous considérez comme déjà dans la caisse, selon un taux de jours-élève.

M. le Président, j'avais soumis comme quatrième question: Comment le ministère est-il équipé financièrement et administrativement pour se décharger de ces tâches concrètes d'accueil et d'établissement? Cela m'inspire de vous dire que, si parler de la vocation du ministère de l'Immigration du Québec finit souvent par être l'art de jouer à l'inflation verbale et à la glorification de la vertu, il n'en est pas de même et d'aucune façon quand on parle des moyens financiers et administratifs mis au service d'un si noble idéal.

Je comprends que le ministre actuel va mettre de côté — du moins, c'est ce que j'ai semblé comprendre ce matin — l'inflation verbale pour essayer d'arriver à des résultats concrets au ni- veau de ce ministère. Si tel est le cas — on ne le dira pas assez souvent — je répète au ministre qu'il aura l'appui entier, total et même insistant de l'Opposition.

Dire que le gouvernement a fait, du ministère de l'Immigration du Québec, l'enfant pauvre de la famille constitue, à mon avis, une vérité bêtement élémentaire. Le ministère a le douteux privilège d'offrir un symbole clair de l'ensemble de l'action de ce gouvernement qui met son argent là où sont ses intérêts et sa phraséologie soufflante là où il voudrait que les électeurs croient que sont ses intérêts. Ainsi, en façade, les proclamations de souveraineté culturelle, mais, en pratique, pour l'appuyer concrètement, un budget réel inférieur à celui de la Régie de la langue française.

On pourrait croire qu'au moins, au plan financier, les responsables du ministère manifesteraient de la cohérence, mais, au contraire, et je pense que c'est bon de le citer. Le 9 avril 1974, le ministre disait — c'était évidemment M. Bienvenue, à l'époque — "Si le Québec veut une véritable politique d'immigration qui réponde à la triple exigence que je viens de décrire, il lui faudra se décider à donner à mon ministère les moyens suffisants". C'était assez clair comme énoncé, de la part du ministre.

Et le ministre de continuer:"!! me faudrait également une dizaine de millions supplémentaires. Je vous fais donc part, dès maintenant, de mon intention de demander un budget supplémentaire". Je vous réfère au journal des Débats, à la page B-696.

C'est bien le "fun " quand c'est enregistré, ces choses-là, parce que deux ans après, on peut les relire et on dit: Ecoutez donc, qu'est-ce qui s'est passé depuis ce temps-là?

Le 22 mai 1974, le ministre disait — je vous dis, madame le ministre, que vous prenez toute une succession — "Le premier ministre a vu d'un très bon oeil une demande que je lui ai faite des crédits supplémentaires". Page B-2262 du journal des Débats.

Pour 1975/76, le ministre recevait $10,6 millions, en regard de $8,1 millions pour 1974/75. C'est sérieusement loin, à notre avis, d'un quinzaine de millions supplémentaires et pourtant le ministre a trouvé le moyen de dire: "Nous avons obtenu exactement ce que nous avions demandé et nous sommes entièrement satisfaits". Le Devoir, le 27 mars 1975.

Si le masochisme est de rigueur au ministère — j'espère que non — il faudra croire que le nouveau ministre se trouve au comble de la joie, puisque voilà, pour 1976/77, les crédits demandés sont de $10 576 300, soit une diminution de $1 530 000 par rapport à ceux de l'année précédente.

Ma question vis-à-vis de cela, évidemment, apparaît comme tout à fait évidente. Est-ce que le ministre actuel est disposé à prendre à son compte les propos de son prédécesseur de l'année précédente? Nous avons obtenu exactement ce que nous avions demandé et nous sommes entièrement satisfaits."

Quels sont les besoins financiers réels du mi-

nistère? Ces besoins ont-ils été transmis au Conseil du trésor? Le ministre a-t-il l'intention de se contenter de la situation actuelle? Je pense que ce sont les questions de fond. C'est là-dessus que le ministre peut peut-être ou ne peut peut-être pas avoir notre appui vis-à-vis d'un débat beaucoup plus fondamental, c'est-à-dire de décider une fois pour toutes si le ministère de l'Immigration au Québec existe ou n'existe pas?

Je conçois que le ministre actuel a d'autres préoccupations, mais je voudrais quand même — je lui dis au nom de l'Opposition — que le ministère de l'Immigration soit également une très grande préoccupation à ses yeux. C'est dans ce sens que je pose cette question.

Mme Bacon: Je voudrais rassurer immédiatement, M. le Président, le député de Maisonneuve. Il est évident, quand on accepte les responsabilités d'un ministère, qu'on accepte d'en être préoccupé au point d'y passer le plus de temps possible, dans les heures qui nous sont données durant une semaine et d'essayer aussi de faire davantage pour faire avancer certains dossiers.

A la première question, je continuerai dans une sobriété qui, j'espère, me caractérisera. C'est "non". Je ne peux pas faire miennes les paroles de mon prédécesseur. Quels sont les besoins financiers réels du ministère? Tout dépend ce que l'on veut en faire. On peut peut-être prendre un exemple. Si l'on désire étendre les cours de français non seulement aux immigrants qui se destinent au marché du travail, mais aux autres, il y a un problème qui me tient à coeur. Ce sont les femmes de ces immigrants qui sont sur le marché du travail. Il est clair qu'il faudrait davantage d'argent.

Il y a un autre exemple. Si l'on veut être présent, dans la plupart des pays étrangers, il faudrait plus d'argent et davantage de crédits. Il n'est donc pas possible de dire quels sont les besoins financiers réels du ministère. Il est évident qu'avec ses services actuels, tels qu'ils sont constitués, le ministère peut fonctionner assez bien, mais, évidemment, dans une période d'austérité budgétaire actuelle, il faut tenir compte que le ministère doit faire sa part comme d'autres ministères, mais ces besoins se font sentir et il faudrait toujours faire davantage, compte tenu de possibilités ou de besoins connus comme ceux que je viens de mentionner, les exemples que je viens de donner.

Est-ce que ces besoins ont été transmis au Conseil du trésor? Il est évident que les besoins qui me paraissaient prioritaires, au cours des mois qui viennent de passer, par exemple, le dégel des onze postes à la direction des services a l'étranger, de sept postes à l'emploi, cela a été des priorités auxquelles j'ai accordé le plus d'attention possible.

Il y a aussi une accélération du recrutement à la recherche, parce qu'il est évident que ce sont des postes importants au niveau d'un ministère comme le nôtre. Ceia me paraissait, en tout cas, indispensable, si on veut, que l'entente Andras-

Bienvenue, qui avait été signée, quoi qu'en pense le député de Maisonneuve, porte des fruits. Si on veut faire davantage...

M. Burns: Je ne dis pas qu'elle ne porte pas de fruits, mais je dis qu'elle est humiliante à certains égards...

Mme Bacon: D'accord, mais si on veut l'améliorer davantage...

M. Burns: ... et à plusieurs...

Mme Bacon: ... je pense qu'on devait faire du recrutement à la recherche et faire en sorte d'en arriver à des propositions concrètes au niveau des négociations entre les deux paliers de gouvernement. Je n'ai pas l'intention de me contenter de la situation actuelle, parce que, présentement, il y a des projets de loi dont j'ai parlé ce matin, les trois projets de loi que j'ai mentionnés. Il est évident que ces projets de loi demanderont que nous allions chercher dans les fonds consolidés de la province les fonds nécessaires pour faire avancer ces politiques que nous mettrons de l'avant, à l'occasion de l'adoption de ces projets de loi, par exemple, quand on pense au conseil consultatif, si on veut que cet organisme soit important, si on veut qu'il soit vraiment le miroir de ce que la population pense du ministère. Je pense en effet que les ministères ne doivent pas avoir peur de se mirer de temps à autre, même si l'image qui est reflétée, n'est pas toujours celle qu'on voudrait voir se refléter. Je pense qu'il est nécessaire d'avoir un conseil consultatif qui fonctionne bien, qui soit capable de nous faire des recommandations valables, qui soit à l'écoute d'une population et représentatif aussi de cette population et qui apporte au ministère des suggestions et des recommandations qu'il nous est permis de suivre par la suite.

Pour cela, il faut développer les fonds nécessaires, ce qui sera fait à l'adoption des trois projets de loi que nous soumettrons.

M. Burns: Si je comprends bien, il n'est pas question, dans votre esprit, au stade où on se parle, de procéder par voie de budget supplémentaire, éventuellement, pour combler des choses qui n'apparaissent pas au budget général; mais ce serait beaucoup plus à l'occasion de l'adoption de la loi ou des trois lois que vous aurez à réviser la situation, parce que...

Mme Bacon: A l'adoption des trois lois, je mentionnais les fonds consolidés, mais il est évident que si nous voyons qu'il est nécessaire d'obtenir des crédits supplémentaires, nous irons les chercher ou nous ferons les pressions nécessaires pour aller chercher certains crédits supplémentaires pour continuer à donner exactement le même service que nous donnons dans le moment. Evidemment, il faut réduire un peu l'expansion de certains services, mais nous n'avons pas cessé de donner les services qui étaient déjà offerts par le ministère de l'Immigration.

M. Burns: Quels services, entre autres? Lorsque vous dites qu'il faut retenir — je ne sais pas si c'est l'expression que vous avez utilisée — ou ne pas envisager l'expansion de certains services, est-ce qu'il y a certains services, en particulier, que vous visez à ce moment?

Mme Bacon: Je peux peut-être en nommer. Le programme OVAL, par exemple, le programme VIVAQ, qui fait que cette intégration, soit des enfants ou des adultes dans la société francophone, cet heureux mélange que nous tentons de faire avec le plus d'harmonie possible, sont autant de programmes fort valables qui ont amené de très bons résultats. Si nous n'avions pas à connaître cette période d'austérité, il nous serait peut-être possible de faire davantage. Mais ce sont des préoccupations que nous gardons à l'esprit, et dès qu'il nous sera possible de le faire, nous pourrons augmenter ces programmes. Ce sont deux exemples que je donne.

M. Burns: Les trois principales catégories où il y a des réductions, et dans deux cas, de façon absolument incroyable, ce sont les traitements et les services. Vous avez les autres... Je m'excuse. Il y en a deux où vous avez une diminution très sensible, c'est-à-dire la catégorie 1: Les traitements, et la catégorie 4: Les services, où, respectivement, vous avez une diminution de $1 070 000, dans le premier cas, et de $1 370 300, dans le deuxième cas.

Mme Bacon: La diminution des traitements de $1070 000 s'explique essentiellement par la compression budgétaire équivalente à 50% des sommes qui étaient prévues pour les postes vacants. C'est le montant qui était prévu pour les postes vacants.

M. Burns: C'est-à-dire que... Mme Bacon: Et quant...

M. Burns: ... les autres postes vacants, ceux qui n'ont pas été comblés, au moment où on se parle ne seront pas comblés.

Mme Bacon: Non.

M. Burns: C'est ce que ça veut dire.

Mme Bacon: Et quant aux services, la diminution de $1 370 300 s'explique principalement par la prise en charge des nouveaux COFI sous la juridiction directe du ministère. Les montants qui étaient auparavant budgétisés sont maintenant répartis entre les autres catégories budgétaires dont les plus importantes sont les traitements, par exemple, les fournitures. Il y a des COFI qui sont passés directement sous la juridiction...

M. Burns: Vous diminuez au niveau des traitements. C'est fort peu probable que vous avez fait des ajoutés à ce niveau.

Mme Bacon: Vous les trouverez sous les traitements, aux catégories 1 et 2 ou dans les catégories 7 et 8.

M. Burns: 7 et 8?

Mme Bacon: Oui. Dans les traitements 1 et 2 et 7 et 8. Le montant des services diminue à la catégorie 4. Il y a une répartition.

M, Burns: Oui.

Mme Bacon: II y a, évidemment, les fournitures, l'équipement, les manuels, etc.

M. Burns: Au niveau de ce qu'on appelle les autres rémunérations, il y a, par contre, une augmentation de $274 200 à $673 400, c'est-à-dire une augmentation de $399 200. Proportionnellement, c'est une des plus grosses augmentations, à part celles des fournitures et des autres dépenses, sur laquelle je vous demanderai... quoique le chiffre est de moindre importance par rapport au budget global, en quoi consiste ces autres rémunérations et surtout comment s'explique l'augmentation de ces autres rémunérations?

Mme Bacon: Cela s'explique par le fait que le ministère de l'Immigration a obtenu, au cours de l'exercice financier 1975/76, l'autorisation d'embaucher 41 hommes-année additionnels, au chapitre des employés à temps partiel. Nous avons eu l'autorisation du Conseil du trésor en décembre 1975. Cette autorisation visait, principalement, à permettre au ministère d'engager des occasionnels dans les COFI pour permettre au ministère de remplacer les occasionnels qui étaient malades.

M. Burns: Au niveau de l'enseignement ou au niveau du soutien?

Mme Bacon: Pour remplacer les professeurs malades ou en vacances.

M. Burns: Soit dit en passant — je m'excuse de cette question peut-être stupide, mais, vu que je ne suis pas au COFI — les employés de soutien sont-ils couverts par ce budget? Oui, aussi!

Mme Bacon: Ce montant servait à défrayer le coût des professeurs seulement et...

M. Burns: Mais, dans l'ensemble, le ministère assure les employés de soutien.

Mme Bacon: Oui. A cette somme, on ajoutait aussi des crédits supplémentaires de... Disons que le montant initial prévu était de $45 000 pour les professeurs, pour remplacer les professeurs malades ou les professeurs qui étaient absents, et il y a eu des crédits supplémentaires de $229 200 pour le projet spécifique des Vietnamiens. C'est ce qui fait que le montant est de $399 200. Quant à l'année budgétaire 1976/77, il fallait, par conséquent, prévoir des traitements suffisants pour l'embauche

de 48 hommes-année au chapitre des employés à temps partiel. C'est tout cela que vous retrouvez dans les autres rémunérations.

M. Burns: Pour les autres augmentations qui nous apparaissent assez importantes, telles que les fournitures, je pense que le ministre, tout à l'heure, nous a laissé entendre qu'il y avait une partie des services qui se retrouvait là. J'aimerais tout simplement que le ministre nous donne des détails sur les autres dépenses qui passent de $23 600 à $82 600, soit une augmentation totale de $59 000. Par rapport au budget global, ce n'est peut-être pas un montant très important, mais est-ce qu'on peut savoir quelle est la cause de ce pourcentage de 250% du budget de l'année passées?

Mme Bacon: En fait, les $59 000 d'augmentation ont été rendus nécessaires pour assurer le perfectionnement du personnel enseignant au tarif de la convention collective qui régit ce personnel et l'application de la nouvelle politique...

M. Burns: Excusez-moi, madame, je n'ai pas compris.

Mme Bacon: Le perfectionnement du personnel au tarif de la convention collective et un deuxième point, c'est l'application de la nouvelle politique: Cadre de développement planifié des ressources humaines qui est effectuée à partir du 1er avril 1976.

M. Burns: C'est-à-dire que vous auriez des gens qui sont déjà au ministère et que vous introduisez dans un plan de perfectionnement et ce sont les coûts que cela représente.

Mme Bacon: Ce sont les coûts.

M. Burns: Combien de personnes sont visées par ce programme? Le savez-vous?

Mme Bacon: Environ 200 personnes.

M. Burns: C'est 200 personnes. D'accord. Toujours relativement aux moyens financiers et administratifs, je ne peux que vous référer aux mots explicatifs qui accompagnent le cahier des crédits. Ils nous apprennent que la diminution des crédits de $1 523 000 cette année est faite en raison surtout de la terminaison au début de l'exercice 1976/77 du programme spécial d'assistance aux immigrants vietnamiens. En ce qui me concerne, je n'ai jamais entendu parler de ce programme spécial d'assistance aux immigrants. Peut-être que j'écoutais et que je regardais ailleurs lorsqu'on nous en a parlé, mais je ne l'ai vu nulle part, ni à l'Assemblée nationale, ni dans les journaux. Personnellement, cela me surprend un peu, lorsqu'il s'agit surtout d'une somme de l'ordre de $1,5 million, ce qui représente à toutes fins pratiques 15% du budget du ministère. Nous sommes encore bien davantage surpris aujourd'hui quand nous reprenons certains propos du ministre du temps.

En effet, le Soleil du 8 avril 1975 rapporte, à la page A-18 les propos suivants: "Le ministre de l'Immigration du Québec, M. Jean Bienvenue, entretient des doutes sur la moralité de l'opération visant à transporter en Amérique, aux Etats-Unis, au Canada ou au Québec, des millions d'orphelins sudvietnamiens. C'est ce que nous a déclaré hier après-midi l'attaché de presse du ministre, M. Claude Péloquin — un autre qu'on ne peut pas engueuler parce qu'il n'est pas ici aujourd'hui, mais on ne l'engueulerait pas — ajoutant que le ministère provincial de l'immigration préférait assurément ne pas être mêlé à cette affaire. "Nous n'avons pas eu de contact avec le fédéral. On n'est pas dans la partie, nous n'avons pas été consultés, on ne sait pas combien d'orphelins aboutiront dans la province de Québec. On ne sait pas combien de parents québécois se sont portés volontaires à l'adoption, le fédéral n'a pas requis notre opinion, je n'ai aucune espèce d'idée — je présume que c'est toujours M. Péloquin qui parle — sur le sort qui est réservé à ces enfants à leur arrivée au pays. Le ministère de l'Immigration n'a pas été consulté durant cette opération et le ministre Bienvenue se demande encore pourquoi le ministère des Affaires sociales, lui, a été considéré comme le seul interlocuteur valable par le gouvernement fédéral pendant que le ministère des Affaires sociales et le ministère fédéral de l'Immigration s'échangeaient des télex, le ministre provincial de l'Immigration, M. Jean Bienvenue, tenu incomunicado par le gouvernement fédéral, se posait des interrogations sérieuses sur les avantages à long terme d'une semblable opération". C'est la fin de la citation rapportée du journal Le Soleil.

Voilà qu'en mars 1976 on apprend que vient de se terminer un programme d'assistance spéciale aux Vietnamiens au coût de $1,5 million, soit environ 15% du budget du ministère. J'aimerais savoir du ministre quel était ce programme spécial qui l'a mis en branle, qui en était responsable au cours de son application, quel était le rôle réel du ministère des Affaires sociales dans ce programme, combien de Vietnamiens ont été admis suite à une autorisation réelle du ministère de l'Immigration du Québec.

Parmi ces Vietnamiens, il y avait, je dois le mentionner, le général Dang Van Quang, soupçonné de traffic international de stupéfiants, considéré par le ministre Andras comme une personne indésirable, mais néanmoins admise au Québec grâce à un permis ministériel fédéral. Ce personnage a été admis au Québec en mai 1975 et s'y trouve encore, selon nos informations.

J'ai d'autres questions. Voulez-vous que je vous les pose toutes d'un coup? Etant donné que j'ai déjà remis le texte de mes questions au ministre, peut-être que je peux passer à travers toutes les autres questions.

Le ministère a-t-il procédé au recrutement de M. Quang? Le ministère a-t-il décidé de l'expulser? Est-on intervenu auprès du ministre Andras relativement au problème de M. Quang? Le ministère possède-t-il au moins le dossier de M. Quang? Le permis ministériel de M. Quang lui a été retiré en

juillet 1975 et un ordre fédéral de déportation a été émis contre lui, à la même date. Le ministère a-t-il au moins prié le gouvernement fédéral de respecter ses propres décisions? Et finalement, qu'entend faire le ministre actuel face à ce candidat indésirable, face au danger de son séjour prolongé au Québec, qui risque de nuire aux bonnes relations de notre pays avec la république du Sud-Vietnam?

Vous savez que, dans l'entente Bienvenue-Andras, on a dit qu'il ne fallait pas choquer, il ne fallait pas énerver le monde, relativement aux ententes qu'on pouvait avoir avec d'autres pays, nous autres, les petits gars et les petites filles du Québec. Ce sont peut-être des choses qui méritent d'être examinées actuellement et ce sont des positions contradictoires.

Le ministre a le texte de mes questions, je lui ai remis...

Mme Bacon: Je vais tenter d'apporter le plus de réponses possible à ces nombreuses questions.

M. Burns: Je vous suis.

Mme Bacon: D'abord, disons que ce programme destiné aux Vietnamiens a été préparé après la défense des crédits. Quand on considère la somme de $1 523 000, on pourrait retrouver un montant d'environ $913 200 qui était nettement destiné aux Vietnamiens et un autre montant de $535 600 pour la convention collective.

Il s'agit d'un programme d'enseignement du français, des principaux éléments de la vie québécoise, d'une durée de 30 semaines. Il ne s'agissait pas du tout d'accueil aux orphelins. Ce programme était destiné nettement aux adultes. Le ministère de l'Immigration du Québec était responsable de l'application de ce programme spécial, de la même façon qu'il est responsable du programme des COFI.

Le ministère des Affaires sociales n'était pas partenaire dans ce programme puisqu'il s'agissait surtout d'enseignement du français. Cela n'avait rien à voir avec le ministère des Affaires sociales.

Environ 5000 Vietnamiens ont été admis au Québec et ce mouvement de réfugiés s'est fait avant la signature de l'entente And ras-Bienvenue.

M. Burns: C'est effrayant comme certaines choses coïncident. Il y a du monde qui passe entre deux portes là-dedans, c'est incroyable.

Mme Bacon: Si vous me permettez de continuer, M. le Président...

M. Burns: Mais oui. Je m'excuse, madame le ministre.

Mme Bacon: Le Québec a accompagné le fédéral à l'île de Guam et au camp de Pendleton en Californie pendant une certaine partie de l'opération. Les agents du Québec n'ont donc pas rencontré tous les candidats qui désiraient alors s'établir au Québec. C'est ainsi que le Québec n'a pas eu connaissance de la demande d'immigration du général Quang qui émanait d'un autre endroit que Pendleton ou l'île de Guam et les agents québécois n'étaient pas présents à cet endroit. Il n'appartient donc pas au Québec d'expulser le général, mais au gouvernement fédéral.

Mon ministère a fait savoir au ministre Andras qu'il désirait que cette question soit réglée dans les meilleurs délais possibles et il est évident que je me propose moi-même, à ma prochaine rencontre avec le ministre Andras, de discuter de toute cette question ou de tout ce problème.

M. Burns: Vous êtes intervenue relativement à M. Dang Van Quang?

Mme Bacon: Je le fais la semaine prochaine.

M. Burns: Vous le faites?

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: Cela n'a pas été fait encore?

Mme Bacon: Par moi, non. Je pense que cela répond à pas mal toutes les questions.

M. Burns: A pas mal toutes les questions. C'est-à-dire que, dans votre dernière réponse, vous répondez à quatre questions. Evidemment, il s'agit de quatre questions relativement au général Quang.

Mme Bacon: Ce sujet est à l'ordre du jour de la rencontre prévue pour le 25 mai.

M. Burns: Vous n'aurez pas d'objection, même si les crédits du ministère sont terminés à ce moment-là, parce qu'on ne continuera pas à siéger encore pendant les deux prochaines semaines à l'études des crédits du ministère de l'Immigration, à moins qu'il n'arrive quelque chose de bien spécial qui nous empêche de terminer. Vous n'aurez pas d'objection, à ce moment, à répondre à une question en Chambre, par la suite de votre rencontre avec votre homologue fédéral.

Mme Bacon: Non, je donnerai la réponse à ce moment.

M. Burns: D'accord. Toujours dans ce domaine, j'aurais une question relativement à la main-d'oeuvre, M. le Président. Il est sûr qu'un des problèmes majeurs des immigrants arrivant au Québec est celui de se procurer un emploi. Je sais qu'il y a un service d'accueil aux immigrants. Je sais que ce service semble être en train de se roder, de façon très sérieuse. Je sais, en tout cas, que l'ancien ministre — probablement que l'actuel ministre va poursuivre sa politique là-dessus — considérait ce service d'accueil aux immigrants, une fois arrivés au Québec, comme très important.

Ce que je voudrais savoir, de façon beaucoup plus spécifique, c'est comment le ministère est-il

équipé pour fournir, pour répondre à ces demandes, concernant la main-d'oeuvre des immigrants? Combien d'employés du ministère sont affectés à cette fonction? Combien d'immigrants s'adressent, chaque semaine, en moyenne, au ministère, à cause de problèmes de main-d'oeuvre? A-t-on des chiffres comparatifs du nombre d'immigrants qui s'adressent au centre de placement des immigrants du gouvernement fédéral, rue Atwater, à Montréal, par rapport à ceux qui s'adressent à votre service, rue McGill, à Montréal? Le ministère possède-t-il le tableau des besoins de main-d'oeuvre du Québec? C'est très important, je pense. Cela peut passer pour une question anodine, au cours de l'examen de ce problème de la main-d'oeuvre immigrante, mais j'ai toujours pensé qu'une des aberrations les plus fondamentales au Québec, c'était qu'on ne savait pas, à moins que le ministre me dise qu'on les a déjà, quels étaient les besoins de la main-d'oeuvre, eu égard à la nouvelle main-d'oeuvre qui arrive sur le marché, venant de nos écoles québécoises, de nos CEGEP québécois, etc., de nos besoins par rapport à l'expansion des entreprises, etc. Cela pourrait être une discussion très longue, quitte à ce que j'y revienne en question supplémentaire.

J'insiste sur cette question, parce que je la trouve particulièrement importante. Finalement, sur ce point de la main-d'oeuvre, le ministère a-t-il un plan de collaboration avec le ministère québécois du Travail et de la Main-d'oeuvre?

Mme Bacon: M. le Président, le service de l'emploi compte 26 postes au ministère de l'Immigration du Québec. La fonction de ce service, est une fonction permanente de placer les immigrants. Si l'on considère qu'il en a placé environ 1595, l'an dernier, ce n'est pas négligeable, je pense, comparativement au nombre d'immigrants qui entrent ici au Québec, car, souvent, les immigrants nous arrivent, après n'avoir rien trouvé, soit au CMC ou, au niveau québécois, aux Centres de main-d'oeuvre du Québec. Il y a une prospection intense du marché du travail qui nous permet d'obtenir ce résultat, d'avoir obtenu 1595 emplois, l'an dernier.

M. Burns: Je m'excuse, madame. Est-ce qu'on vous... C'est une question que je me suis toujours posée, qui relève de cette première... Est-ce que, au ministère de l'Immigration, vous avez souvent des demandes venant d'employeurs québécois? Est-ce qu'on vous indique les besoins qu'on a, mis a part le fait... Je vous demande de ne pas considérer ou de mettre de côté les cas de professions — j'oublie le terme encore, l'épithète — désignées qui, déjà, évidemment, sont à votre connaissance, sont inscrites de trois mois à trois mois dans votre système.

Je vous parle d'autres emplois. Par exemple, un emploi de journalier, actuellement je pense que ce n'est pas nécessairement quelque chose où il y a un sous-emploi incroyable. C'est un des endroits où, effectivement, il y a toujours des gens qui sont capables de remplir ce poste. Mais, dans des cas comme ceux-là ou des cas qui ne sont pas des emplois désignés, est-ce que vous avez des approches qui sont faites par des employeurs québécois, pour vous dire, si jamais il y a des immigrants, nous autres, on est prêt à les recevoir, parce que, dans tel ou tel domaine, outre les emplois désignés, nous sommes prêts à en embaucher?

Mme Bacon: Oui, il arrive que les employeurs québécois font la demande directement au ministère de l'Immigration du Québec. Nous tentons de créer, avec les employeurs, les liens les plus étroits possibles, pour trouver les immigrants qui seraient susceptibles d'assumer ces emplois ou de combler ces postes et, en même temps, pour trouver aussi de l'emploi aux immigrants qui viennent en demander à notre service.

Il y a aussi certaines demandes qui sont dirigées vers notre service à l'étranger où nous pouvons, dans le recrutement que nous faisons ou dans les différents postes à l'étranger, faire davantage pour aider ces employeurs. Tout cela doit être créé par un lien très étroit entre notre service de l'emploi, les employeurs et, évidemment, les immigrants qui arrivent ici au Québec. Quant au nombre des immigrants qui s'adressent à notre ministère chaque semaine, je pense qu'on pourrait donner un chiffre global, c'est de l'ordre de 335 par mois. On n'a pas de chiffre comparatif du nombre d'immigrants qui s'adressent au niveau fédéral et de ceux qui s'adressent au niveau provincial. Il est évident que le ministère tente de tracer des statistiques du mieux qu'il peut et en tenant compte des travaux du fédéral. Evidemment, il y a une série de statistiques sur les postes vacants, il y a les travaux du Conseil économique, du ministère de la Main-d'Oeuvre et de l'Immigration, il y a également les travaux du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui ont des services semblables. En plus, il y a deux personnes...

M. Burns: Je ne veux pas vous contredire, Mme le ministre, mais êtes-vous bien certaine qu'au ministère du Travail, on a...

Mme Bacon: C'est différent, puisque les immigrants viennent souvent nous revoir...

M. Burns: Pardon?

Mme Bacon: Je l'ai mentionné tantôt, ceux qui n'ont pas d'emploi, qui ont tenté d'avoir un emploi au niveau fédéral et au niveau provincial de la main-d'oeuvre, viennent chez nous pour trouver des emplois. Alors, c'est...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député de Saint-François.

M. Burns: Je m'excuse, M. le Président...

M. Déziel: Sur la même question.

M. Burns: ... si le député de Saint-François

veut me permettre tout simplement, il n'y a pas de problème pour qu'il embarque dans cette situation, seulement un point précis...

Mme Bacon: Quant au tableau des besoins, je pense qu'il est assez difficile de l'établir on essaie autant que possible d'être fidèle à la situation, mais je pense que...

M. Burns: Oui, mais est-ce que le ministre ne croit pas que c'est une chose essentielle actuellement pour des ministères clés en matière d'embauche tels que le ministère de l'Immigration et le ministère — pour l'aspect de la main-d'oeuvre, en tout cas — du Travail et de la Main-d Oeuvre?

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: Est-ce que le ministre doit faire des représentations ou a fait des représentations relativement à cela, pour ces statistiques? J'ose affirmer, Mme le ministre, et j'aimerais que vous me contredisiez là-dessus, qu'actuellement au Québec, on a des statisques tout à fait imparfaites qui nous viennent de Statistique Canada, relativement à l'emploi, qui ne tiennent pas compte des besoins de main-d'oeuvre, qui ne tiennent pas compte, entre autres, des gens ou, si vous voulez, du flot de personnes qui arrivent sur le marché de la main-d'oeuvre, je pense, entre autres, aux étudiants? Je pense — il y en a de plus en plus — aux "drop outs", au niveau scolaire qui, avant terme, arrivent sur le marché du travail. Je pense aux gens qui perdent des emplois à cause de la fermeture d'entreprises, etc. Vous avez possiblement un certain nombre d'entreprises dont on nous annonce régulièrement qu'elles vont fermer. Je pense également aux besoins qui sont créés dans une entreprise en voie d'expansion, etc. Pour tout cela, il n'y a pas, en somme, de véritable inventaire de la main-d'oeuvre au Québec. Je trouve qu'entre autres, le ministère de l'Education, le ministère de l'Immigration, le ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre sont trois ministères particulièrement intéressés à cela. C'est évident que si on laisse à chacun le soin de le faire, ce ne sera jamais fait, parce que cela ne sera — et chaque ministère va être découragé de le faire — jamais complet. Cela veut dire qu'il a besoin, appelons-le ainsi, d'un comité interministériel à ce niveau ou, en tout cas, d'un système de collaboration avec ces trois ministères de façon latérale pour en arriver à cela. Je considère que c'est absolument essentiel.

Je ne sais pas si le ministre partage mes vues là-dessus ou non.

Mme Bacon: Je suis tout à fait d'accord avec le député de Maisonneuve. Il est évident qu'on n'a pas de statistiques bien précises. C'est un peu pour cela que je mentionnais tout à l'heure la priorité que j'accordais à notre direction, à notre service de recherche. Nous avons deux personnes de la direction de la recherche qui sont présentement au travail sur tout ce problème. Il est évident que quand on commpare cela aux 300 personnes au niveau fédéral, c'est bien minime. Tout de même, je pense que cela peut faire avancer ce dossier. C'est quand même une étape que nous tenterons de franchir, à savoir que certaines statistiques qui nous sont fournies par d'autres milieux ou à d'autres niveaux pourront être explorées davantage par notre service de recherche, mais nous devons nous-mêmes nous pencher sur ce problème.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député de Saint-François, qui nous a indiqué que c'était une question sur le même sujet, puis le député de Mille-Iles.

M. Déziel: C'est ça.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L'honorable député de Saint-François.

M. Déziel: Mme le ministre, concernant la répartition des travailleurs, on retrouve un point, à savoir qu'il y a environ 598 travailleurs dans le domaine du bâtiment. J'ai déjà eu à orienter quelques immigrants qui sont venus me rencontrer à mon bureau, et on sait que même si ces immigrants sont entrepreneurs ou sont spécialistes à l'intérieur de leurs fonctions dans le pays où ils vivaient auparavant, lorsqu'ils sont rendus au Québec, ils sont obligés de se recycler au niveau des qualifications. Le problème majeur est l'émission d'un permis de travail. Y a-t-il eu, Mme le ministre, une rencontre ou une représentation qui aurait pu être faite au ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre, de façon à faciliter la tâche de la possibilité, je dirais, de recevoir un permis de travail pour ces immigrants qui arrivent au pays et qui sont sans le sou et réellement pris au dépourvu? Y aurait-il possibilité d'avoir une réponse à cette question?

Mme Bacon: Le ministère de l'Immigration tente de coordonner ses travaux avec le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Quant à d'autres professions, nous avons aussi des rencontres avec l'Office des professions, en vue des cours de recyclage, par exemple, dans certaines professions.

M. Déziel: Parce que ces gens, Mme le ministre, sont prêts à se recyler, comprenez-vous, mais le problème, c'est qu'ils ne peuvent pas obtenir leur permis de travail de l'Office de la construction.

Mme Bacon: Dès leur arrivée.

M. Déziel: Dès leur arrivée, et le Centre de main-d'oeuvre ne peut pas se permettre de les placer dans le domaine de la construction, parce que le permis de travail n'est pas émis. C'est un gros problème.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Les propos seront enregistrés au nom du ministre.

Mme Bacon: II y a aussi une distinction à éta-

blir entre les immigrants indépendants et les parrainés ou les nommément désignés. Si vous êtes un indépendant depuis octobre 1974, vous n'entrez pas si vous n'êtes pas déjà dans ce qu'on appelle une profession désignée. Il y en a une liste comme on en discutait ce matin, par exemple, qui est révisée à intervalle régulier.

Les cas auxquels vous faites allusion sont vraisemblablement des parrainés ou des nommément désignés, c'est-à-dire des gens qui sont venus sans une promesse d'emploi ferme, et à ce moment, ils ont évidemment un peu plus de difficulté à se caser dans le milieu du travail.

M. Déziel: Oui, mais dans certains cas, comme un spécialiste en réfrigération, lorsqu'on l'a embauché là-bas, lui faisant miroiter le fait qu'il aurait un emploi et n'aurait aucune difficulté, il arrive ici et est tout décontenancé de voir qu'il n'y a aucune possibilité d'avoir accès à sa profession, parce qu'il n'a pas de permis de travail en conséquence.

Mme Bacon: Est-ce qu'il est arrivé avant octobre 1974? Est-ce que vous êtes...

M. Déziel: II est arrivé l'an passé, en 1975.

Mme Bacon: S'il est arrivé l'an dernier, normalement, il ne devait venir qu'à la condition d'avoir une promesse d'emploi ferme.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): L honorable député de Mille-Iles.

M. Lachance: Justement, Mme le ministre, je veux en revenir à une question qui a été posée par le député de Maisonneuve, et je pense qu'il n'a pas bien établi l'esprit. C'est entre le ministère de l'Immigration — c'est suite au discours inaugural — et le ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre, y a-t-il un mécanisme de coordination d'établi entre les deux ministères, concernant la main-d'oeuvre? C'est un peu ça, je pense, l'esprit de la question du député de Maisonneuve. Est-ce qu'il y a un mécanisme d'établi entre les deux?

Mme Bacon:... si le député de Mille-Iles me le permet, nous avons une série de questions. Je pense que le député de Maisonneuve a sûrement en tête... Il nous a mentionné tantôt qu'il poserait des questions concernant la main-d'oeuvre. On pourra peut-être y revenir au moment où j'apporterai des...

M. Lachance: C'est relatif à une question qu'il vient justement de poser. L'esprit de la question qu'il a posée, ça revient à ça.

M. Burns: Je pense que le député de Mille-Iles vous demande l'aspect collaboration entre les deux ministères...

Mme Bacon: Entre les deux ministères.

M. Lachance: Entre les deux ministères, s'il y a un mécanisme.

M. Burns: ... alors que moi, je vous demandais s'il y a un inventaire total de...

M. Lachance: Un mécanisme de coordination entre les deux concernant la main-d'oeuvre.

M. Burns: Je pense que ça se rejoint comme question.

Mme Bacon: ... un comité de travail.

M. Lachance: C'est l'esprit de la question.

Mme Bacon: II y a un comité de travail au niveau des deux ministères sur les professions désignées. Les gens siègent assez régulièrement à ce comité de travail pour discuter de ces problèmes.

M. Lachance: Le livre brun? Est-ce que c'était cela?

Mme Bacon: Non.

M. Lachance: Je sais qu'on a parlé, à un certain moment...

Mme Bacon: C'est un comité de travail qui a été formé, un comité interministériel qui a été formé.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Sur les travailleurs qui ont trouvé de l'emploi en 1975, avez-vous un dossier sur ces gens? Suivez-vous leur évolution? Savez-vous, par exemple, s'ils sont encore dans la province, actuellement, et s'ils travaillent encore?

Mme Bacon: J'ai les renseignements au ministère, mais je ne les ai pas ici. Je ne peux vous les donner.

M. Saint-Germain: Non, mais dans vos dossiers, tout de même...

Mme Bacon: Oui.

M. Saint-Germain: ... pouvez-vous dire qu'il y a un pourcentage de tant de travailleurs qui vont quitter la province après un an, deux ans, trois ans? Ceux qui y demeurent constamment ou longuement?

Mme Bacon: II y a possibilité d'un "suivi", mais ici même, je n'ai pas...

M. Saint-Germain: Mais au ministère, vous l'avez tout de même?

Mme Bacon: Oui.

M. Saint-Germain: Oui.

M. Burns: M. le ministre, je trouve que c'est une très bonne question...

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: ... soit dit en passant, mais pour l'ensemble également des immigrants.

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: J'avais suggéré, dans des conversations privées avec votre prédécesseur, le ministre de l'Immigration du temps, de voir à trouver un mécanisme de collaboration avec le gouvernement fédéral pendant qu'on y est et tant et aussi longtemps qu'on en sera, et de voir exactement, au niveau de l'acquisition de la citoyenneté, parce que c'est l'autre gouvernement qui a les statistiques relativement à cela, et d'essayer de faire un parallèle par rapport aux services que nous donnons par le ministère de l'Immigration du Québec, soit au niveau de l'accueil, au niveau même... Remarquez que cela peut peut-être demander, au départ, un travail énorme, mais je me demande si cela ne serait pas très utile — justement, dans le sens que le député de Jacques-Cartier mentionne — pour en arriver à savoir exactement ce qui arrive aux immigrants qui passent entre les mains du ministère de l'Immigration du Québec et qui, éventuellement, peut-être, se retrouvent à Vancouver après deux ans.

Comme vous le savez, dans le système de pointage auquel je faisais référence ce matin, les endroits choisis par l'immigrant sont un élément de pointage aussi, c'est-à-dire que, si quelqu'un décide de s'en aller à Toronto, actuellement, cela donne plus de points que de s'en aller à Sainte-Tite-des-Caps et, si un immigrant italien décide de s'en aller à Saint-Tite-des-Caps, là-dessus, il aura zéro au point de vue du pointage alors que, s'il s'en va à Toronto, il a de fortes chances d'avoir cinq points, ce qui va l'aider à acquérir...

Alors, quelqu'un qui a le moindrement de connaissances dans ce domaine se rendra compte que c'est mieux de dire qu'on s'en va à Toronto que de s'en aller à Saint-Tite-des-Caps et cela vaudrait la peine par... Et l'inverse est vrai. Quelqu'un peut peut-être dire qu'il s'en va à Loui-seville pour travailler dans les usines de textile, ce qui lui donne plus de points que de dire qu'il s'en va à Montmagny et ce sont des choses...

Si on avait un système de statistiques relativement à cela, tant au point de vue de la main-d'oeuvre qu'au point de vue de l'immigrant une fois arrivé et une fois canadianisé par le système de nationalisation ou de... Comment appelle-t-on cela?

M. Lachance: Suite... est-ce qu'on les suit? C'est cela?

M. Burns: Oui, c'est cela.

Mme Bacon: II y a quand même chez les immigrants une mobilité dans la main-d'oeuvre et souvent un immigrant qui arrive au Québec peut déménager très facilement dans une autre province et, à ce moment, c'est presque impossible pour nous de pouvoir le suivre, à moins qu'il ne revienne au ministère de l'Immigration et...

M. Burns: Au moment où il obtient sa citoyenneté canadienne, cela serait une espèce — il me semble, en tout cas...

Mme Bacon: Pour faire une comparaison avec l'arrivée.

M. Burns: ...que c'est l'endroit le plus facile pour faire un test pilote. Je veux dire: II y a tel monsieur qui est entré il y a cinq ans ou il y a six ans ou il y a sept ans, peu importe s'il attend plus de temps que ces cinq ans requis, tel monsieur ou telle madame est arrivée ici et, maintenant, on sait qu'elle est rendue à tel endroit.

Il y a moyen d'essayer de suivre si l'immigrant qui est arrivé à Montréal pour s'installer à Sorel, à un certain moment, est encore à Sorel ou si cette personne n'est pas rendue à Baie-Comeau, actuellement.

Ce sont des choses tout à fait vérifiables, si vous aviez une espèce de collaboration au niveau de la citoyenneté au fédéral.

Mme Bacon: Cela rejoint aussi une préoccupation du ministère, parce que non seulement on a, comme préoccupation, l'immigration, mais l'émigration aussi, qui vaut autant pour les Québécois d'origine, que les immigrants.

M. Burns: C'est cela, oui.

Mme Bacon: Je pense qu'à ce moment-là c'est une des préoccupations du ministère. Il faudrait peut-être prévoir certains mécanismes. La suggestion du député de Maisonneuve est fort valable et on pourrait prévoir certains mécanismes, établir des comparaisons, peut-être, entre le métier ou la profession qui est exercée à l'arrivée, après cinq ans où normalement, au moment de l'obtention de la citoyenneté.

M. Burns: Remarquez que, si vous voulez faire un bon boulot dans ce domaine, il va falloir convaincre vos collègues du Conseil des ministres de vous donner des crédits un peu plus respectables que ceux qu'ils vous accordent actuellement.

M. Bacon: J'ai d'ailleurs répondu que je n'étais pas satisfaite...

M. Burns: Passons, cela fait assez de fois que je le dis, vous allez penser que je commence à radoter.

Je vous ai posé un certain nombre de questions relativement à la main-d'oeuvre tout à l'heure. Je pourrais peut-être vous poser, mais de façon plus concise, toutes les mêmes questions relativement au service de l'habitation. D'abord, est-ce que ce sont les mêmes personnes qui s'occupent du placement des immigrants que ceux qui s'occupent du logement des immigrants? Si oui, à ce moment-là, les réponses que vous m'avez fai-

tes, quant à l'élément précédent, pourraient valoir, j'imagine, pour le placement au niveau du logement des immigrants.

Mme Bacon: Ce n'est pas le même service qui traite des problèmes d'habitation. Nous avons un fonds assez minime de dépannage et c'est le secrétariat du ministère, qui traite de ce que nous appelons les cas spéciaux, qui fournit souvent une assistance aux immigrants qui ont des problèmes de logement. Notre action s'arrête à peu près à ce dépannage que nous offrons par le service du secrétariat. Nous ne sommes pas très actifs au niveau de ce que l'on pourrait appeler la formulation d'une politique de l'habitation. Je ne pense pas que ce soit à nous de le faire. Ce que nous tentons de faire, c'est justement de dépanner les immigrants par ce fonds spécial ou de traiter un à un les cas spéciaux qui nous sont référés au ministère. C'est la seule action que nous entreprenons concernant l'habitation.

M. Burns: Vous avez combien de personnes affectées directement à cela? Il n'y en a pas directement...

Mme Bacon: Au secrétariat il y a quatre personnes.

M. Burns: Est-ce que la demande est très forte là-dessus? Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a des immigrants qui sont l'objet d'une rebuffade de la part du ministère de l'Immigration du Québec? C'est absolument incroyable — je vous mentionne cela en passant — le nombre d'immigrants qui, très souvent, de façon surprenante, considèrent le ministère de l'Immigration du Québec comme étant le ministère auquel ils doivent, en priorité, s'adresser. La frustration qu'ils subissent est absolument incroyable. Ce matin, je me disais très heureux de l'annonce que le ministre faisait du nouveau poste créé à Milan. Un grand nombre d'immigrants italiens à Montréal, qui sont arrivés, mais qui ont encore des parents dans la région de Milan et au nord, nous ont dit: Ce n'est pas possible de ne pas avoir un officier en poste à Milan... Je sais que le chef de l'Opposition a reçu énormément de représentations là-dessus. J'en ai reçu personnellement, également. Je pense que le député de Saint-Jacques et le député de Lafontaine devraient, en principe, en avoir. Je ne peux pas vous dire qu'ils en ont reçu, mais ils devraient, en principe, en avoir reçu, parce que cela semble tellement généralisé dans Montréal, ce phénomène. Vous avez l'Italien qui maintenant est en voie d'acquérir sa citoyenneté canadienne à Montréal et qui sait qu'il a des parents qui veulent s'adresser à notre bureau à Milan, pour eux, c'est la façon d'entrer au Québec. Ils s'en viennent au Québec, ils veulent s'adresser au ministère de l'Immigration du Québec. C'est particulièrement important qu'on se rende compte de ce phénomène. Si on reconnaît le phénomène, cela veut dire qu'il faut absolument faire autre chose que ce qu'on fait actuellement et dire: Malheureusement, on a seule- ment un ou deux postes de gens qui s'occupent, entre autres, de placer les gens au point de vue de logement, etc.

Pour placer les gens au point de vue de la main-d'oeuvre, on a 26 postes apparamment. Tant mieux s'il peut y en avoir plus. Je voudrais que le ministre soit très conscient de cela.

Mme Bacon: En plus du service de secrétariat du ministère, il y a aussi le service d'accueil aux immigrants. Il y a un service d'hôtesses à Mirabel qui accueillent les immigrants et qui répondent souvent en partie aux besoins immédiats d'un immigrant qui arrive. Il y a le ministère des Affaires sociales aussi, qui donne le service d'accueil aux voyageurs immigrants, ce qu'on appelle le SAVI. C'est un service qui ressemble un peu à ce service qu'on pourrait offrir. Nous avons en plus du secrétariat, les hôtesses qui sont à Mirabel et qui répondent en grande partie aux besoins immédiats dès l'arrivée d'un immigrant.

M. Burns: Elles font quoi, comme accueil?

Mme Bacon: C'est un peu aussi ce dépannage de l'immigrant.

M. Burns: L'hôtesse à Mirabel ne trouvera pas un logement pour l'immigrant ou l'immigrante qui descend de l'avion.

Mme Bacon: L'hôtesse travaille en étroite collaboration avec le secrétariat du ministère.

M. Burns: Si on passait toujours dans ce domaine, mais sur un autre sujet, Mme le ministre, à moins que quelqu'un d'autre ait une question là-dessus.

Par votre document qui nous a été déposé ce matin, vous avez répondu à un certain nombre de mes questions. Je vais éviter de vous les poser; vous m'avez précédé là-dessus. Cependant, relativement aux subventions, j'aimerais savoir si le Centre d information et de recherches pour immigrants, c'est-à-dire le CIRI, a fait des demandes auprès du ministère et quelles réponses ont été données à ces demandes. Je n'ai pas à expliquer longtemps, mais je suis convaincu que le ministre sait, que par le biais d'un projet PIL, un projet d'initiatives locales, des gens du CIRI, en collaboration avec des experts ont appliqué un questionnaire à 3000 immigrants de treize groupes ethniques différents. Le fédéral avait attribué $48 000 pour faire effectuer cette recherce. Nous avons une copie du questionnaire de 27 pays et nous avons la très forte impression que ces 3000 questionnaires remplis contiennent une quantité, une qualité surtout, extraordinaire de renseignements qui pourraient très largement contribuer à orienter la politique de l'immigration du Québec. C'est dans ce sens que je pense que le ministère devrait collaborer au travail du CIRI.

Simplement pour vous le mentionner rapidement, des groupes qui sont actuellement à étudier via ce questionnaire, sont des groupes syrien, li-

banais, espagnol, arabe, hispano-américain, italien, portugais, haïtien, arménien, grec, plus les groupes québécois francophone et anglophone, puis canadien, en tant que groupes témoins.

Cette masse de données n'a pas été compilée faute de moyens financiers. C'est cela le problème particulier en ce moment. C'est une espèce de banque d'information. Je voudrais savoir, relativement au CIRI, si des demandes d'aides ont été faites à votre ministère. Quelle a été la réponse du ministère? En somme, comment envisagez-vous utiliser cette banque qui est à votre disposition?

Mme Bacon: Le CIRI a fait, comme bien d'autres organismes, une demande de subvention au ministère. Nous étudions présentement cette demande. Evidemment, nous tenterons de donner une réponse le plus tôt possible à cette demande. Dans les prochains jours, nous étudierons, à leur mérite, les demandes de subventions qui sont nombreuses, comparativement au montant que nous pouvons donner en subventions.

On pourrait donner des chiffres.

Aujourd'hui on a des demandes de subventions pour $800 000 et nous avons un budget de $300 000 que nous pouvons accorder en subventions aux différents organismes qui font appel au ministère.

C'est dire qu'il est évident que le CIRI sera considéré, comme d'autres organismes, et la valeur des travaux du CIRI sera aussi prise en considération au moment où nous accorderons les subventions.

M. Burns: Est-ce que le ministre a pris connaissance du questionnaire ou peut-être que ses fonctionnaires ont pris connaissance du questionnaire du CIRI?

Mme Bacon: Oui, cela a été analysé par les fonctionnaires du ministère.

M. Burns: Est-ce que le ministre considère que la banque de données qui peut sortir de cela puisse être d'une certaine utilité pour le ministère?

Mme Bacon: Fort impressionnante et surtout très utile.

M. Burns: Alors, cela veut dire que la demande sera très sérieusement considérée. Est-ce que le ministre peut me donner une vague indication de la date à laquelle elle sera prête à nous donner une réponse relativement à cette demande de subvention?

Mme Bacon: D'ici deux semaines.

M. Burns: D'ici deux semaines. Alors, d'ici deux semaines, je pense que le ministre...

Mme Bacon: II y aura peut-être une question en Chambre?

M. Burns: II y aura peut-être une question en

Chambre. C'est que, dans mon entourage, on me soufflait: Est-ce qu'on peut l'annoncer tout de suite?

Mme Bacon: Non. J'annonce rarement une subvention avant qu'elle soit accordée.

M. Burns: II y a tellement de mauvaises habitudes qui ont été prises par les députés libéraux, dont celle d'annoncer...

M. Lachance: Les séparatistes aussi.

M. Burns: Qu'est-ce qu'ils ont donc? Mon Dieu, ils sont bien nerveux. C'est une mauvaise habitude, il n'y a rien d'illégal dans cela. Mais il y a une mauvaise habitude qui a été prise par les députés libéraux d'annoncer des subventions statutaires dans leur comté, comme si c'était eux qui les payaient de leur poche.

M. Lachance: Vous le faites vous aussi.

M. Burns: Pour une fois que je pourrais dire publiquement que je ne paie pas de ma poche une certaine subvention, mais qu'on a réussi — je ne le dis pas méchamment — à réveiller le ministre relativement à un certain problème, cela me ferait plaisir de pouvoir le dire.

Mme Bacon: Pas réveiller, mais sensibiliser. Je pense même que le ministre était déjà sensibilisé au problème...

M. Burns: Donc, je ne l'ai pas sensibilisé, mais je l'ai peut-être réveillé.

Mme Bacon: Non, j'étais déjà sensibilisée au problème, je l'ai dit tantôt. Quand on considère le montant de $800 000 dans l'ensemble des subventions qui nous sont demandées et le montant de $300 000 que nous pouvons offrir, le député de Maisonneuve comprendra qu'on doive quand même étudier chacune des demandes de subvention avec beaucoup de sérieux et apporter le plus de justice possible dans la distribution des subventions.

M. Burns: Vous voyez quand même cette demande d'un très bon oeil, eu égard au travail sérieux que ce groupe fait, sans vous...

Mme Bacon: Je pourrais même dire que si jamais nous entrions en possession des résultats de l'enquête, on pourrait en faire parvenir une copie au député de Maisonneuve.

M. Burns: Je l'apprécierais beaucoup. Mais, avant cela, il faut qu'un certain autre travail soit fait entre les deux et ils ont besoin d'assistance pour y arriver.

En tout cas, je tiens pour acquis... Dernier point, madame le ministre. Je vais essayer d'être bref. Je pourrais vous citer de longs extraits, mais je vais quand même m'en payer une couple. Je

pourrais vous citer de fort longs extraits de ce que votre prédécesseur a dit relativement au ministère de la population et de l'immigration.

Simplement dans le but de situer le problème et surtout du fait que, ce matin, vous nous avez dit que, d'ici quelques mois, nous aurions à prendre connaissance d'un projet de loi dans ce sens-là, j'aimerais tout simplement vous référer à un extrait du discours inaugural du 18 mars 1975. Cela fait un an de cela, mais il y a tellement de choses qui ont été dites dans ce discours et qui ont été redites dans le discours de cette année, certaines ont été diluées dans le discours de cette année, certaines autres n'ont même pas été répétées dans le discours de cette année, que j'essaie de nous situer par rapport à ce futur ministère de la population et de l'immigration.

Dans le discours du 18 mars 1975, on lisait ceci: "L'immigration est un problème qui dépasse le strict champ culturel. Elle s'inscrit, en fait, au coeur de la politique démographique d'une société. Une intense recherche débouchera sur la publication d'un livre blanc sur les ressources humaines." Remarquez que je ne l'ai pas vu encore. Cela fait un an de cela et je n'ai pas vu encore le livre blanc, concernant les ressources humaines.

Peut-être que le ministre a quelque chose de spécial à nous annoncer, relativement à cela. Il va peut-être me dire: Le député de Maisonneuve fait de la démagogie, cela n'a pas de bon sens. Je vais déposer mon livre blanc la semaine prochaine.

Si c'est le cas, je vais prendre ma pilule et je vais l'accepter. "Ce livre blanc — continuait le discours inaugural — servira de base à une large consultation populaire, dans le cadre d'une commission parlementaire de cette Assemblée." On en a parlé ce matin. Je n'y reviens pas. Le ministre qui précédait l'actuel ministre a fait des promesses bibliques et des prophéties que nous avons décrites ce matin. On a réglé le problème entre nous. Le discours continuait ainsi: "Vous serez ainsi appelés à élargir le mandat du ministère de l'Immigration, le situant dans le cadre plus vaste des ressources humaines qui relie étroitement les problèmes de population, de main-d'oeuvre et d'immigration."

Dans le discours inaugural, cette année, c'est également un des rares cas où on revenait à la charge. Cela veut dire que ce doit être sérieux. J'espère qu'on ne reviendra pas l'année prochaine, en 1977, avec un autre énoncé semblable. Mais, cette année, on disait, le 16 mars 1976: "L'évolution démographique du Québec, tout autant que les problèmes d'adaptation de l'individu et de la famille aux changements technologiques, soulève le problème fondamental des ressources humaines de la collectivité. Le gouvernement se propose de reconnaître cette nouvelle dimension de la réalité politique en nous présentant un projet de loi qui élargira — remarquez que la phraséologie est tout à fait semblable; je me demande même si on ne l'a pas copiée; cela me fait de la peine que M. Jean-Claude Rivest, qui assistait à nos débats, tout à l'heure, ne soit pas ici pour nous écouter, parce que j'ai l'impression qu'il a son mot à dire dans la rédaction de ces textes — le mandat du ministère de l'Immigration pour en faire un ministère de la population et de l'immigration. Le gouvernement compte également — pour continuer le discours — organiser sur une base plus fonctionnelle les instruments de compilation, de recherche et d'analyse des données démographiques."

Je cesse là mes citations. Je demande simplement au ministre, vu l'annonce qu'elle nous a faite ce matin que, d'ici environ deux ou trois mois, nous aurions le dépôt de trois projets de loi, dont l'un concernant ce sujet, si le ministre peut nous dire, dès maintenant, sans révéler des secrets de cabinet, bien évidemment — je n'ai pas l'intention de lui faire manquer à son serment d'office — s'il y a possibilité, à ce stade-ci, de nous donner les grandes lignes d'une telle loi? Entre autres, et plus particulièrement, quels domaines seraient visés par cette espèce de ministère qui, je présume, serait un ministère qui chapeauterait d'autres juridictions existantes, actuellement, au Québec, dont l'immigration, et, possiblement, certains éléments, si je le comprends bien, du ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre — cela pourrait répondre à une question que je vous ai posée tout à l'heure — et certains éléments du ministère des Affaires sociales? Ceci répondrait également à d'autres questions que je vous ai posées tout à l'heure.

Je ne sais pas si je vous forcerais à manquer à votre serment de discrétion à l'endroit des discussions au cabinet, personnellement, je ne le crois pas, si vous nous donniez simplement les grandes lignes et les grandes orientations de cette loi.

Mme Bacon: M. le Président, je m'en voudrais de dévoiler à la commission parlementaire, malgré tout le respect que j'ai pour la commission parlementaire, les grandes lignes du projet de loi que je déposerai à l'Assemblée nationale dans les semaines qui viendront, avant la fin de cette présente session.

M. Burns: A moins que le premier ministre mette fin à la session rapidement.

Mme Bacon: Ce serait une décision du premier ministre et non la mienne. J'ai mentionné ce matin que nous déposerions trois projets de loi, soit une loi sur le ministère de la Population et l'Immigration, une loi sur le ministère de l'Immigration et une autre loi créant un conseil consultatif de la population et de l'immigration. C'est évident que cela touchera à cet aspect démographique qui est important pour le ministère de l'Immigration et établira des structures bien précises quant aux responsabilités et aux pouvoirs du ministre de l'Immigration et à ses devoirs aussi. Alors, je pense qu'il est assez difficile pour moi de dévoiler entièrement ou même en partie, mais le député de Maisonneuve le comprendra,...

M. Burns: J'ai moi-même fait la réserve en vous posant la question.

Mme Bacon: Tout ce que je peux donner, ce sont les titres de ces projets de loi.

M. Burns: Est-ce que le ministre, sans dévoiler de secret du cabinet, peut me dire si, effectivement, des juridictions de d'autres ministères, comme le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre ou encore des Affaires sociales, pourraient être transférées à ce futur ministère de la Population et de l'Immigration?

Mme Bacon: En dehors de ces trois projets de loi, nous travaillons présentement — et j'essaie de peser mes mots, parce que je ne veux quand même pas dévoiler tous les secrets — sur différents problèmes. Nous tentons d'y trouver des solutions par de nouveaux projets de loi qui pourraient être déposés à l'automne, qui touchent, évidemment, le ministère des Affaires sociales, qui peuvent toucher le ministère de la Justice ou d'autres ministères. Cela ne fera pas partie des trois projets de loi que je viens de mentionner, mais cela fera l'objet d'une rédaction d'autres projets de loi. Nous sommes présentement à travailler, nous nous penchons sur ces différents projets de loi qui s'ajouteront aux trois lois que j'ai mentionnées ce matin dans mon exposé, qui sont des lois qui amènent des structures. Je pense qu'il faut meubler un peu les structures aussi avec les lois que nous pourrons déposer à l'automne. On s'est fixé certains délais qui compléteront...

M. Burns: Est-ce que je dois comprendre que cette loi du ministère de la Population, entre autres, ne sera pas nécessairement une loi-cadre dans le sens qu'elle pourra englober beaucoup plus de terrain qu'on ne l'envisage actuellement. Si le ministre me dit qu'à l'automne, il prévoit qu'il y aura des amendements à d'autres lois qui peuvent concerner d'autres ministères, à ce moment, je suis obligé de dire au ministre que ce n'est cas ma compréhension d'une loi-cadre.

Mme Bacon: C'est un peu une loi d'organisation parce qu'il faut quand même mettre des structures en place sans souffrir de structurite. Ces trois premières lois que nous déposons, sont des lois qui nous permettent une organisation possible avec des structures que nous mettrons en place à l'aide de ces lois.

M. Burns: Vous savez que vous me faites bien peur, Mme le ministre, quand vous me dites...

Mme Bacon: ... de la Loi de l'immigration, qui est tout autre.

M. Burns: ... une loi pour mettre en place des structures. Moi, je me rappelle le bill 88, la Loi de l'expropriation, qui est adoptée depuis deux ans, sinon plus. Le président de la commission, qui est beaucoup plus familier avec ce domaine, pourrait vous donner probablement la date exacte, mais la Loi de l'expropriation, en tout cas, est adoptée depuis au moins deux ans, et il y a encore une partie de la Loi de l'expropriation qui n'est pas en vigueur.

Mme Bacon: Je fais une réserve sur la loi sur l'immigration, qui est...

M. Burns: Je vous donne un autre cas, beaucoup plus récent, le bill 50, la Loi sur les droits de la personne, qu'on appelle communément le bill des droits de l'homme au Québec, qui vise également la femme, Mme le ministre, heureusement, mais où vous avez purement une structure en place, c'est-à-dire que vous avez...

Mme Bacon: C'est assez aberrant, en fait, d'avoir à cacher...

M. Burns: ... et ces lois ne...

Mme Bacon: ... le contenu de ces lois. Je pense que, pour moi, c'est assez difficile de répondre...

M. Burns: Non, je ne veux pas... Mme Bacon: ... de façon...

M. Burns: ... et je m'en voudrais vraiment de tenter de vous faire sortir des secrets de cabinet et vraiment, je le dis en toute sincérité. Ce que je voulais savoir, c'est l'espèce de grande orientation que pourraient avoir ces projets de lois. Ce que je voulais savoir, entre autres, c'est si on est en droit de s'attendre à la permanence du ministère de l'Immigration comme il est là, ou encore à son inclusion dans ce ministère, à toutes fins pratiques, à la création d'un superministère. Parce que ce ne serait pas créer un superministère, entre vous et moi, que de prendre le ministère de l'Immigration, d'en changer le titre et de l'appeler le ministère de la Population et de l'Immigration. Cela, ce n'est pas créer un superministère. C'est la question, dans le fond, que je vous pose. Est-ce que c'est un superministère? Si on crée un superministère, c'est qu'on va chercher des juridictions qui existent ailleurs actuellement, qui sont dans d'autres juridictions ministérielles.

Mme Bacon: Même si nous allions chercher d'autres juridictions, je conteste l'emploi du mot "superministère" par le député de Maisonneuve, parce qu'il n'est pas dans mon intention de créer un superministère, mais bien de se donner des structures et aussi de se donner des possibilités dans nos droits et nos pouvoirs de faire un meilleur travail, de canaliser vers le ministère de la Population et de l'Immigration certaines préoccupations qui font l'objet de travaux au niveau d'autres ministères. Je pense que notre ministère est l'endroit idéal pour canaliser ces préoccupations et y faire les travaux nécessaires, afin de trouver des solutions. C'est un peu ce que je tente d'expliquer sans dévoiler le contenu des lois ou la possibilité d'y ajouter d'autres juridictions qui sont détenues par d'autres ministères...

M. Burns: Je vous pose la question différemment, et peut-être de façon beaucoup moins impliquante, si vous me passez l'expression. En dehors de l'Immigration, quelles seraient les préoccupations de cet éventuel ministère?

Mme Bacon: Le titre l'indique: Le ministère de la Population et de l'Immigration.

M. Burns: La population vous intéresserait, mais, en principe, ça intéresse tous les ministères.

Mme Bacon: Oui. Il y a les objectifs démographiques qui font partie de ma préoccupation pour le moment et qui nous amènent à présenter certains projets de lois au Conseil des ministres, parce que ce sont des objectifs qui sont très importants et pour l'Immigration et pour le gouvernement en général.

Comme je le disais tout à l'heure, il faut canaliser ces travaux vers un ministère afin de trouver les meilleures solutions possibles et non pas que cela soit réparti dans différents ministères, parce que lorsqu'on arrive avec des objectifs démographiques, il nous est permis, à ce moment, de récupérer certaines juridictions qui appartiennent à d'autres ministères.

M. Burns: Si je comprends bien, le ministère de I Immigration serait intégré à ce futur ministère, comme tel, comme partie vraiment intégrante de ce ministère, c'est-à-dire qu'il n'y aurait pas le ministère de la Population et un autre ministère qui s'appellerait le ministère de l'Immigration.

Mme Bacon: Non. Nous ajoutons au ministère de l'Immigration tout ce secteur de population. Nous ajoutons des juridictions au ministère de l'immigration, mais nous ne transposons pas l'immigration à d'autres ministères.

M. Burns: Le phénomène budgétaire vous préoccupe-t-il également par rapport à cette éventuelle expansion? On peut l'appeller ainsi. Il y a deux façons de le voir: Ou bien le ministère de l'Immigration se fait hara-kiri et devient partie intégrante du futur ministère, ou bien encore le futur ministère de la Population est, à toutes fins pratiques, le ministère de l'Immigration élargi.

Vous êtes-vous préoccupé jusqu'à maintenant du problème budgétaire que cela comportera éventuellement? J'espère que vous ne vous satisferez pas, dans ce cas, si vous êtes le ministre titulaire, de ces $10 millions et quelque cent milles dollars qu'on jette au ministère de l'Immigration? Ces os qu'on jette au ministère pour le tenir tranquille.

Mme Bacon: J'ai déjà dit qu'avec l'adoption des trois lois que j'ai mentionnées ce matin, il nous serait possible d'aller chercher dans les fonds consolidés de la province le budget nécessaire pour continuer de fonctionner avec ce ministère de la Population et de l'Immigration; s'il s'avère nécessaire de demander des crédits addi- tionnels, nous le ferons. C'est ce que je disais d'ailleurs ce matin et cet après-midi.

M. Burns: Dernière question, Mme le ministre. Ce matin, vous nous avez parlé, dans le cadre de la première question que je vous avais posée, des séances de la commission parlementaire. J'aimerais simplement vous faire préciser une chose. Je tiens pour acquis que vous n'avez pas changé d'idée depuis ce matin et que vous ne changerez pas d'idée dans les semaines à venir. Relativement aux séances de la commission parlementaire, lors du dépôt de ces projets de loi, voulez-vous tenir des commissions parlementaires uniquement pour les parlementaires ou envisagez-vous la possibilité d'une consultation populaire extérieure à l'Assemblée nationale dans ces cas?

Mme Bacon: Au niveau de la commission parlementaire, j'envisageais des séances avec les membres de la commission parlementaire et des invités. On avait mentionné...

M. Burns: Des experts et non pas...

Mme Bacon: Des experts...

M. Burns: ... comme on l'avait demandé l'année dernière, mais pas nécessairement une consultation des groupes de l'extérieur.

Mme Bacon: Non. Cela répond d'ailleurs à la demande du député de Maisonneuve de faire venir des experts devant la commission parlementaire pour qu'il y ait cet échange.

M. Burns: Oui, mais cela a pris un an. Depuis ce temps-là, j'ai eu le temps de réfléchir et j'ai le droit d'augmenter mes demandes.

Mme Bacon: Mais je pense qu'on ne fait pas de commission parlementaire...

M. Burns: L'inflation s'applique même à cela.

M. Bacon: Je verrais mal faire des auditions de mémoires sur des lois qui constituent... disons une législation sur des structures. Je pense qu'on pourrait attendre une autre occasion pour faire des auditions de mémoires, rencontrer la population en général sur d'autres sujets qui pourraient être plus utiles à la commission parlementaire que tout simplement sur un élément comme les structures. Je pense qu'il serait fort utile aussi pour les membres de la commission parlementaire de dialoguer ou d'établir la communication avec des experts qui pourraient nous apporter plus de lumière sur ce que nous pourrions faire ou sur leur perception du ministère.

M. Burns: Si je comprends bien, vous ne fermez pas la porte non plus à des organismes qui désireraient se faire entendre relativement à cette loi.

Mme Bacon: Non. Je suis tout à fait d'accord.

M. Burns: Sans faire nécessairement un grand charabia qui durerait deux, trois mois ou six mois.

Mme Bacon: Non. Tout ce qui peut apporter plus de lumière sur...

M. Burns: Vous êtes ouverte à une formule de consultation.

Mme Bacon: Oui.

M. Burns: Une dernière question, madame, avant de vous remercier pour la façon dont... Pardon.

M. Lachance: Vous aviez dit que c'était la dernière

M. Deziel: Cela fait trois fois qu'il dit cela. M. Burns: Moi, c'est toujours la dernière.

M. Lachance: C'est parce qu'on aurait voulu en poser nous aussi.

M. Burns: C'est parce que je m'aperçois qu'on n'est pas encore rendu à six heures, et il nous faut gagner notre salaire comme il faut jusqu'à six heures. Il n'y a pas de problème, surtout que cette question, à mon avis, est assez importante et n'est en rien personnelle. Je ne voudrais pas que vous preniez cette question comme personnelle. Vous détenez actuellement deux ministères en titre, le ministère des Consommateurs, Compagnies et Corporations... Coopératives, c'est vrai, vous avez interchangé, Consommateurs Coopératives et Institutions financières, c'est cela? Et également le ministère de l'Immigration. Est-ce que vous croyez véritablement. — je le dis de façon très constructive, et non pas méchante — que vous avez le temps de consacrer au ministère de l'Immigration tout le temps que l'on doit normalement consacrer à un ministère comme celui-là? Je ne vous poserais pas la question si j'allais vous voir la semaine prochaine, probablement à l'étude de vos crédits au ministère des Consommateurs. A ce moment-là, vos crédits vont être pas mal plus élevés. Je n'ai pas le montant en mémoire, mais cela dépasse $10 millions, je pense bien, à l'autre ministère.

Naturellement, sans qu'on vous y force, vous allez possiblement être portée à accorder beaucoup plus d'importance à l'autre ministère qu'à celui-ci. Avez-vous, vous-même — même si c'est une question qui vous apparaît comme personnelle, mais je m'adresse à vous en tant que personne détenant une fonction publique dans le sens le plus élevé du mot — accordé à cette question certaines réflexions? Si je me la pose, c'est parce que j'ai vu, dans le passé, des ministres détenir deux ministères et qui, automatiquement, accordaient à peu près toute l'importance à l'un des deux ministères. Vous êtes humaine comme on l'est tous. Vous n'êtes pas capable de vous diviser en plusieurs morceaux. Vous allez être obligée de concentrer vos efforts à un certain endroit.

Je ne veux pas vous perdre comme ministre de l'Immigration, ce n'est pas cela que je vous suggère, mais est-ce qu'à ce moment il a été question que vous ne fassiez que passer au ministère de l'Immigration. Si tel est le cas, j'aimerais le savoir. Même si je faisais des allusions à cela ce matin, ce n'était pas quelque chose que je souhaitais. Je dois vous dire tout de suite que j'ai bien apprécié le genre de réponses franches que vous nous avez données tout au long de l'étude des crédits. Je ne serais qu'heureux que vous continuiez à détenir ce poste jusqu'à ce que quelqu'un de notre parti occupe le poste, et qu'à ce moment, cela devienne un vrai ministère.

Remarquez que ce n'est pas de votre faute si cela n'en est pas un. Je vous pose très sérieusement la question et, encore une fois, je vous le dis, ce n'est pas méchamment que ces choses-là sont dites. C'est uniquement sur une base pratique de voir à ce que ce ministère, qui à mon avis, est considéré comme pratiquement un ministère secondaire par le cabinet des ministres et par ce gouvernement... Cela est une chose que je regrette, soit dit en passant, parce... Je dois entre parenthèses, rendre hommage à tous les fonctionnaires de votre ministère, en tout cas, à tous ceux que j'ai rencontrés, qui se sont fait une affaire personnelle de voir à ce que ce ministère devienne quelque chose d'important.

Je pense que cela serait démobilisant, dévalorisant de façon incroyable pour eux, si, en plus du fait qu'on se retrouve avec un budget qui est tout à fait secondaire, même négligeable, eu égard à la partie que le gouvernement du Québec y met, si, en plus de cela, le ministre considérait que c'est son emploi à temps partiel. C'est dans ce sens que je posais la question.

Mme Bacon: M. le Président, je dois protester avec véhémence devant certaines affirmations gratuites que vient de faire le député de Maisonneuve. Je serais presque tentée de dire que ses fonctions de leader parlementaire et ses fonctions de député de Maisonneuve sont un cumul de fonctions pour lui aussi. Mais on ne peut mesurer ces fonctions avec...

M. Burns: J'en ai encore une de moins que vous.

Mme Bacon: ... les fonctions de deux ministères. Il est évident que le ministère de l'Immigration requiert un ministre à temps plein. Je serais malhonnête si je disais qu'un ministre qui doit cumuler les deux fonctions devrait le faire pour le temps que durera son mandat.

J'ai accepté ce ministère parce que c'est un défi à relever. Je pense, comme je l'ai dit au cours de l'étude de ces crédits, qu'il était normal que je fasse le moins de déclarations possible, mais que j'étudie bien les dossiers et que je tente, d'une façon réaliste, de faire avancer certains dossiers.

Je pense y avoir réussi par le dépôt des trois lois que j'ai fait au Conseil des ministres et de deux autres qui seront déposées d'ici l'automne.

C'est peut-être un travail qui n'est pas sur la place publique, qui ne démontre pas le nombre d'heures passées au niveau du ministère de l'Immigration, mais je ne pense pas avoir failli à la tâche et du ministère de l'Immigration et du ministère des Consommateurs, où nous avons aussi déposé une loi importante qui avait été préparée au cours des derniers mois.

M. Burns: J'espère que vous avez bien compris le sens de ma question. Ce n'était pas une attaque personnelle à votre endroit.

Mme Bacon: Non, mais je pense qu'il est normal que le ministère de l'Immigration, qui deviendra le ministère de la Population et de l'Immigration, ait un titulaire à temps plein. Il est évident que c'est dans les prérogatives du premier ministre de faire des nominations. Je me verrais mal nommer un remplaçant. Dès que le premier ministre jugera à propos de faire des changements, il aura sûrement à le considérer. Je serai la première à lui rappeler de considérer de nommer un ministre à temps plein au ministère de l'Immigration, ce qui est nécessaire.

M. Burns: C'est ce que je vouiais entendre, madame.

Mme Bacon: C'est un ministère d'importance, pour moi Si je n'y avais pas cru, je n'y aurais pas passé le nombre d'heures. On dit qu'on est une seule personne avec deux ministères. Il est évident que certaines heures qu'on aimerait passer ailleurs, nous les passons au travail, afin de donner le plus grand nombre d'heures possible au niveau des deux ministères et d'accorder le plus d'attention possible aux dossiers qui méritent notre considération, tant au point de vue du ministère de l'Immigration que du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

M. Burns: C'est ce que je voulais vous entendre dire. Il ne me reste, M. le Président, qu'à vous remercier, d'avoir présidé, de façon aussi impartiale. J'avais peur, je vous avoue, M. le Président, au début. J'ai dit: J'ai l'impression qu'il va me couper la parole à tout bout de champ, me rappelant certains caucus.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Oui

Disons que la situation est différente dans les caucus.

M. Burns: II ne me reste qu'à vous remercier et à remercier également le ministre pour sa collaboration ainsi que les fonctionnaires qui l'entourent. Je pense, particulièrement, pour le silence des députés libéraux...

M. Lachance: ... à poser des questions, à cette heure...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Qui termine l'étude des crédits du ministère de l'Immigration, s'il vous plaît?

M. Burns: On peut continuer, je n'y ai pas d'objection.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Ceci termine...

M. Burns: D'autre part, je ne veux brimer personne. Moi, j'ai terminé mes questions à l'endroit du ministre. S'il y a des députés ministériels qui veulent continuer les travaux, je suis bien prêt à revenir, dès demain matin, si le ministre est prêt, pour continuer à entendre les...

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): A moins que...

M. Burns: ... réclamations que les députés ministériels pourraient avoir à l'endroit du ministère de l'Immigration.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): A moins que d'autres députés aient l'intention, comme il est 18 heures, de poser des questions, est-ce que tous les membres de la commission sont d'accord...

M. Lachance: J'ai dit que c'était adopté. Il est passé 18 heures.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Est-ce que tous les membres de la commission sont d'accord pour terminer, pour que ceci constitue la fin des travaux, concernant l'étude des crédits du ministère de l'Immigration, sans que quiconque n'ait été lésé dans ses droits de quelque manière que ce soit?

M. Déziel: On va poser des questions directement au ministre à la prochaine occasion.

Mme Bacon: Si je comprends bien, nos crédits sont adoptés?

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Je tiens à remercier Mme le ministre, les différents membres de la commission pour leur travail, également, mesdemoiselles et messieurs les fonctionnaires, de leur présence et de leur contribution. Je pense que les discussions ont été constructives. parce que ces discussions ont été faites dans un climat agréable. Peut-être doit-on tirer la conclusion que la présence d'une femme, Mme le ministre, contribue à diminuer l'agressivité au niveau de l'étude des crédits.

M. Burns: C'est un baume pour moi. M. le Président.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): J ai déjà connu le leader de l'Opposition plus agressif. Pour ma part, cela m'a fait plaisir de présider.

M. Burns: Quand le ministre répond aux questions, je ne vois pas pourquoi on se choquerait.

Mme Bacon: J'aimerais remercier le député

de Maisonneuve et faire mention que ses questions étaient fort pertinentes et ses recherches fort bien préparées. Je pense bien que cela amène les discussions qu'on a eues aujourd'hui. Mes collègues libéraux auront sûrement l'occasion de poser certaines questions à d'autres niveaux. Je les remercie aussi de leur collaboration.

Nous pourrons, au cours de la prochaine commission parlementaire, lorsque nos projets de loi seront déposés, continuer les discussions et ils pourront, à ce moment, se faire entendre.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Pour ma part...

M. Boudreault: Le député de Chicoutimi vou- lait tellement présider cette commission... avec le sexe faible!

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): Pour ma part...

Mme Bacon: Considérez-moi comme un collègue.

Le Président (M. Bédard, Chicoutimi): J'ai des tendances très normales. Pour ma part, je n'ai pas eu l'occasion de mettre à l'épreuve mes modestes connaissances de la procédure. Je remercie tous les membres de la commission.

(Fin de la séance à 18 h 8)

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