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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mercredi 11 mai 1977 - Vol. 19 N° 65

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère du Travail

et de la Main-d'Oeuvre

(Dix heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Marcoux): La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Les membres de la commission sont M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Gravel (Limoilou); M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Couture (Saint-Henri), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent); M. Godin (Mercier) remplacé par M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette); M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lefebvre (Viau), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud).

Nous en étions rendus à l'étude du programme 4.

Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Services de main-d'oeuvre

M. Couture: M. le Président, je crois que je ne dirai pas grand-chose pour introduire le programme 4 parce que, comme on me l'a signalé quelques fois, j'avais parlé longuement à la première séance.

Je veux simplement signaler que c'est un programme qui m'apparaît, dans la conjoncture actuelle, extrêmement important et je dis à l'avance que j'ai l'intention d'y accorder une priorité pour cette année et de rechercher aussi à certains points de vue une meilleure cohérence dans certains aspects de ces programmes. On aura l'occasion probablement d'en débattre tout à l'heure.

M. Forget: Je voudrais d'abord féliciter le ministre pour l'intérêt qu'il a affirmé à plusieurs reprises pour la partie de la main-d'oeuvre de son ministère.

Je crois que c'est un développement très bienvenu d'avoir un ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui s'intéresse beaucoup aux problèmes de la main-d'oeuvre. Comme il l'a indiqué dans le passé, il y a peut-être eu une insistance explicable par les circonstances par les personnalités, etc., beaucoup plus grande donnée à l'aspect des relations de travail au point même où on peut se poser la question: Jusqu'à quel point l'attention qu'on peut y accorder sur le plan du type de personnalité, du genre d'homme qui peut avoir du succès dans l'un ou l'autre de ces domaines d'activités? Si la présence, dans un même ministère, des deux types de préoccupations est justifiable à long terme et, évidemment, c'est là une question sur laquelle bien sûr le ministre ne pourra pas nous donner beaucoup d'indications...

C'est plutôt le premier ministre qui est impliqué là-dedans et l'ensemble du Conseil des ministres, mais je pense, pour ma part, que l'opportunité d'une division du ministère pour traiter séparément et distinctement ces deux aspects est une question qui se pose vraiment, très sérieusement.

A tout événement, on peut, encore une fois, féliciter le ministre de vouloir s'intéresser à la question de la main-d'oeuvre, la question de la main-d'oeuvre et tous les services de main-d'oeuvre du ministère québécois du Travail et de la Main-d'Oeuvre. La partie de la main-d'oeuvre a été, dans une certaine façon, l'enfant pauvre du gouvernement du Québec depuis bien des années, non seulement en termes d'effectif ou de budget, parce que cela est tout à fait relatif aux tâches devant être exécutées, mais étant donné le succès avec lequel un trop grand nombre de ministères ont ravi une partie de juridiction au service de main-d'oeuvre. Lorsqu'on arrivera à l'élément 2, j'aurai toute une série de questions à poser et à l'élément 3, également, j'aurai toute une série de questions sur ses intentions relativement au rapatriement, si l'on veut, d'un certain nombre d'activités qui sont éparpillées un peu partout à travers différents ministères du gouvernement du Québec et qui devraient certainement être mieux coordonnées et, je pense, intégrés tout simplement au ministère de la Main-d'Oeuvre.

Je vais borner mes remarques, pour être le plus spécifique possible, à l'élément no 1. J'aurai, comme je viens de l'indiquer, plusieurs questions à poser relativement à l'élément 2 et à l'élément 3, mais, relativement à l'élément no 1, je me permets d'exprimer mon étonnement, au départ, devant révolution des crédits. On parle de la contribution à la connaissance du marché du travail, mais on assiste à une diminution de près de $900 000 aux crédits et ça, bien sûr, on va pouvoir me répondre que c'est un problème peut-être, encore là, de crédits périmés et de gel d'effectif. Mais ce n'est pas vraiment satisfaisant, si c'est là l'explication. J'aimerais que le ministre m'indique quelles sont ses priorités, telles qu'il les voit, dans le domaine de la connaissance du marché du travail. Il ne semble pas qu'on puisse dire qu'on a tellement bien fait dans le passé qu'on puisse désormais diminuer ces budgets.

De fait, s'il y a quelque chose qu'on peut dire, c'est qu'il y a une activité très disparate, très dispersée, au point de vue de la connaissance des marchés, pas tellement parce que les instruments manquent, quoiqu'on soit en train de les diminuer, à regarder l'évolution des budgets, mais peut-être parce qu'on ne s'est pas fixé d'objectifs clairs au niveau de la connaissance des marchés. L'information, dans la mesure où elle est disponible, ne semble pas être beaucoup disponible à l'extérieur du ministère et de ceux qui sont en charge de l'administration des programmes, alors que, par sa

nature même, l'information sur le marché du travail devrait être assez facilement accessible et de façon systématique.

J'aimerais que le ministre nous dise pourquoi il veut diminuer le budget de cet élément et surtout comment il entend remédier au manque de cohérence du programme et quelles sont les priorités qu'il voudrait définir dans ce domaine de la connaissance du marché.

M. Couture: Je remercie le député de Saint-Laurent de partager avec moi cette préoccupation de la valorisation des services de la main-d'oeuvre du Québec, et je dois dire aussi qu'en l'écoutant, déjà il prenait certaines formules que j'aurais moi-même aimé utiliser. En effet, dans l'élément 1, dans cette contribution à la connaissance du marché du travail, il faudra sûrement apporter beaucoup plus de cohérence. On demande pourquoi le budget diminue. C'est sans doute...

M. Bellemare: M. le Président, je ne voudrais pas déranger le ministre, mais je comprends que ce sont des remarques générales avant l'étude article par article. C'est que l'honorable député de Saint-Laurent...

M. Couture: Je pense qu'on est passé...

M. Bellemare: ... a fait des remarques générales, mais il est revenu sur un article.

M. Couture: II était rendu à l'élément 1, je crois.

M. Bellemare: C'est son privilège de dire qu'il a des questions à l'élément 1. J'ai des remarques générales. Il faudrait bien respecter cela.

M. Couture: Je pourrais laisser...

Le Président (M. Marcoux): Nous reviendrons. M. le ministre peut répondre immédiatement, mais nous reviendrons aux remarques générales ainsi qu'aux questions.

M. Bellemare: Je ne voudrais pas qu'on entreprenne l'étude article par article, élément par élément, sans que j'aie donné certaines remarques générales.

M. Forget: II n'y a aucune objection de ma part à faire des remarques générales plus tard.

M. Bellemare: Vous étiez sur un article en particulier et je pensais qu'on avait, avant de commencer l'étude d'un élément comme celui-là, un programme.

M. Couture: M. le Président, je laisserais le député de Johnson élaborer aussi ses remarques générales, avant d'arriver à des précisions sur les éléments.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Je m'excuse auprès du député de Saint-Laurent, mais ce n'est pas pour... La question qu'il a posée est aussi pratique que celle que je vais essayer d'élaborer dans les quelques remarques qui sont très brèves. La contribution à la connaissance du marché du travail. Le ministre a annoncé à l'occasion de la conférence fédérale-provinciale des ministres du Travail à Ottawa, en février, la création d'une commission régionale de main-d'oeuvre. Cela m'a fort surpris, parce que je me suis posé des questions et j'ai commencé à regarder mes anciennes annotations que j'avais gardées lorsque j'étais ministre du Travail et je me suis dit: De quoi s'agit-il au juste? Le ministre recommande la formation d'une commission régionale de la main-d'oeuvre. Est-ce que le ministre a envisagé la possibilité de se servir de l'article 41 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelle de la main-d'oeuvre qui lui permet de constituer des comités consultatifs spéciaux pour des fins bien spécifiques qu'il détermine au préalable? En vertu de l'article 41, il a le droit de le faire, c'est sûr. Il s'agit d'un comité connu sous le nom de Conseil de la main-d'oeuvre, tel que qualifié dans le temps. C'est à la page 70 du rapport annuel 1975-1976. On indique clairement les objectifs de ces comités. Or, il n'en existe qu'un seul et le ministre le connaît.

M. Couture: Est-ce que je peux donner un point d'information au député de Johnson? Je pense que vous confondez Conseil de la main-d'oeuvre et comité consultatif, dont vous avez parlé précédemment. Ce n'est pas la même chose.

M. Bellemare: Je pense que notre commission régionale de la main-d'oeuvre arrive en plein dans ce tableau des relations de travail et particulièrement dans le service de la main-d'oeuvre. A la page 70 du rapport annuel 1975-1976, on indique clairement les objectifs de ces comités — dans votre rapport — et c'est justement là qu'on le re-touve. Or, il n'en existe qu'un seul actuellement. Y en aurait-il, d'autres ailleurs? Je ne le sais pas. Au niveau de l'adaptation de la main-d'oeuvre, le rapport annuel 1975-1976 mentionne que, pendant sept années, les interventions du ministère ont été menées sur 80 comités touchant 303 691 travailleurs et on retrouve cela à la page 71. Il s'agit des' comités composés de représentants de l'employeur et des salariés afin d'élaborer des mesures d'adaptation autorisées par le Conseil du trésor le 26 novembre 1974.

Le rapport annuel dit que le nombre de travailleurs a considérablement augmenté depuis un an. C'est dans votre rapport. Quelle est la nature précise de cette augmentation en pourcentage? Ce serait intéressant de l'avoir ce matin. D'où viennent ces travailleurs? Dans quel secteur d'activité particulier, puisque votre rapport dit qu'il y a une augmentation considérable qui se fait? Le rapport prend la peine de noter qu'il ne s'agit pas de licenciements. Combien y a-t-il eu de licenciements depuis le 31 mars, par exemple — vous êtes capable de nous donner ça — du 31 mars 1976 au 31 mars 1977, pour vérifier avec le rapport annuel

1976 qu'on a devant nous? Y a-t-il augmentation sensible avec l'année précédente?

Je pense que le Centre de main-d'oeuvre du Québec se transformera complètement pour donner naissance au centre du travail Québec, à l'intérieur duquel se formera une commission régionale de la main-d'oeuvre. C'est une déclaration du ministre, faite à Hull le 23 février 1977. "C'est la première fois que M. Couture, ministre, précise le sens de la transformation qu'il entend apporter au Centre de main-d'oeuvre, du Québec qui est devenu, selon lui, inefficace. La compétition fédérale dans ce domaine, a-t-il dit, est valable. Il est donc plus avantageux pour les Québécois d'améliorer le sens et le rôle de l'actuel système de main-d'oeuvre. Selon des observateurs près du ministre, ces nouvelles intentions figurent parmi les priorités du ministère et des mesures concrètes seront prises en ce sens lors de la prochaine session de l'Assemblée nationale. "La nouvelle Commission de la main-d'oeuvre du Québec, selon le ministre québécois, selon l'honorable M. Couture, traitera des principaux problèmes auxquels font face les différentes régions du Québec dans le domaine du travail. A titre d'exemple, il a cité le salaire minimum, les accidents du travail, les fermetures d'entreprises, les licenciements d'employés, et le reste, et le reste. Elle pourra donc prévoir et prévenir les difficultés ouvrières qui sont nées du domaine ouvrier. La commission pourrait être formée par des syndicalistes, par des chefs d'entreprise, des représentants de groupes populaires, des employés, des citoyens qui se réuniraient une fois par mois pour étudier les grandes causes des méfaits du chômage. "M. le ministre, de passage pour la conférence fédérale-provinciale à Hull, a estimé que la création de cette commission constituerait un nouvel organisme de participation pour les citoyens et un nouvel instrument de prévention pour son ministère".

M. le Président, il y a sûrement des questions qui devront avoir une réponse. Maintenant, l'adjoint parlementaire du ministre est allé plus loin que ça; M. Chevrette, le député de Joliette, a dit: "II faut un ministère des ressources humaines". Je pense bien que le ministre est au courant de ces déclarations qu'il vient de faire le 26 avril 1977. Je pense que vous les avez lues et que vous les avez retenues. Elles sont un peu en contradiction avec ce que vous prônez. Bien, il y en a un qui dit vrai et l'autre qui dit faux. Il va falloir trouver lequel est le bon.

Si vous avez deux ministres, un en titre et l'autre pour parader, il va falloir savoir lequel parade. "Parce que le Québec doit se doter immédiatement d'un ministère des ressources humaines afin de regrouper en un seul endroit tous les éléments actuellement épars d'une véritable politique globale de la main-d'oeuvre." C'est le député de Joliette qui a dit ça, le 26 avril. "L'adjoint parlementaire québécois du Travail et de la Main-d'Oeuvre a ressuscité cette proposition oubliée de la commission Cliche. Hier, devant la Société pour le progrès de la rive sud, s'engageant à vendre l'idée au ministre", et l'idée était pourtant bien énoncée au chapitre des recommandations de la commission Cliche.

On voit, à la page 389, à l'article 109, c'était votre adjoint parlementaire qui disait cela dans sa recommandation, quand il était commissaire à la commission Cliche: "Que le gouvernement du Québec assume pleinement et immédiatement sa responsabilité dans l'élaboration et l'application d'une véritable politique de la main-d'oeuvre particulière à l'industrie de la construction. "De plus, la commission est d'opinion que le gouvernement du Québec doit regrouper, en un seul endroit, tous les éléments actuellement épars d'une véritable politique globale de la main-d'oeuvre. La création d'un ministère des ressources humaines constituerait une action positive en ce sens".

Il disait cela quand il était dans l'Opposition. Il blâmait les libéraux de ne pas le faire, d'avoir une politique éparse. Il est au pouvoir, il est adjoint parlementaire, il est près du ministre et il donne des conseils dans des conférences qu'il a faites, le 26 avril. Le ministre ne semble pas lire ces conférences. Je ne sais pas si c'est par dédain ou si c'est par précaution.

M. Couture: II les lit, le ministre; il les lit.

M. Bellemare: II y a une chose certaine, c'est qu'il doit exister quelque chose. On déplore qu'au Québec tout le monde fait de la formation professionnelle, tout le monde forme des spécialistes. Des pseudo-spécialistes ne trouvent pas toujours de l'emploi quelque part, les ministères de l'Education et du Travail, par exemple, vivent cloisonnés et ne semblent guère se préoccuper de former une main-d'oeuvre qui réponde aux besoins de l'industrie. Ecoutez, c'est chez vous, c'est dans votre maison. Je ne sais pas si vous avez une oreille qui entend mal ou si vous avez un oeil qui ne lit pas bien, mais il y a une chose qui se passe.

Il est donc essentiel que le Québec se dote d'une véritable politique de main-d'oeuvre. Il n'y en a pas, selon lui. Je regrette qu'il ne soit pas là ce matin.

M. Couture: II s'excuse profondément

M. Bellemare: Moi aussi, de parler en son absence. Il va relire cela. J'espère, dans le journal des Débats. "Pour le moment, précise M. Chevrette, il s'agit d'une idée personnelle de Guy Chevrette. Il ne s'agit donc pas d'un projet officiel du ministère du Travail ni, bien sûr, du gouvernement."

Y a-t-il des cloisons étanches entre vous autres? Entre le ministre et son adjoint?

M. Couture: Non, nous sommes un parti démocratique.

M. Bellemare: Oui, oui, démocratique quand cela fait votre affaire, comme tous vos prédéces-

seurs. Je l'ai été, ministre du Travail, et je sais combien c'est démocratique quand cela fait notre affaire.

M. le Président, je pense que, dans un domaine comme celui-là, un ministère des ressources humaines serait peut-être... le ministre en a peut-être parlé hier soir, il a peut-être mentionné la possibilité d'établir une relation plus étroite avec le monde du travail. Mais je vois ici, dans sa recommandation en tant que commissaire, qu'il recommande d'une manière particulière, à la page 389 "pour une véritable politique de main-d'oeuvre dans le domaine de la construction"... il y a là une recommandation spécifique qui a quand même été mise en oeuvre. Aujourd'hui, il est au pouvoir et il pourrait peut-être influencer son ministre. C'est la grâce que je vous souhaite de tout mon coeur.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: M. le Président, quelques commentaires d'ordre général. Je trouve cela assez intéressant que le député de Johnson nous fasse profiter à nouveau des réflexions de membres de notre parti. Je pense que c'est justement l'objectif visé. C'est que ce débat soit sur la place publique. Evidemment, quand c'est un députe qui est adjoint parlementaire, cela a une certaine force, et je m'en réjouis, parce qu'effectivement les idées qui ont été soulevées sont des idées qui sont l'objet de nos réflexions profondes, non seulement nos réflexions, mais aussi qui alimentent des projets d'avenir.

Il y a certaines questions auxquelles nous répondrons en temps et lieu sur les licenciements, quand on arrivera à ces éléments.

En parlant des commissions régionales, pour qu'il n'y ait pas de confusion, cela couvre exactement — je ne sais pas quel nom on retiendra — la même réalité décrite que quand j'ai parlé des comités tripartites régionaux.

M. Bellemare: Des quoi?

M. Couture: Des comités tripartites régionaux de main-d'oeuvre, des commissions régionales. Je ne pense pas avoir employé cette expression. C'est possible que, parfois, des journalistes changent un mot, cela arrive, mais la véritable réalité, c'est ce projet des comités tripartites régionaux dont le principal mandat est l'application des lois du ministère et aussi d'être l'instrument de consultations et de recommandations au ministre sur les problèmes de main-d'oeuvre du milieu, de l'emploi, etc. Je pense qu'on aura aussi l'occasion d'en parler tout à l'heure.

M. le Président, j'en reste là pour le moment.

Le Président (M. Marcoux): Programme 1, élément 1.

M. Forget: J'ai posé des questions au ministre tout à l'heure, j'aimerais avoir la réponse.

Le Président (M. Marcoux): Sur l'élément 1?

M. Forget: Oui.

M. Couture: Dans cet élément 1, vous avez les plans de carrière et la diminution du budget est liée directement à cette partie du budget, les plans de carrière. Semble-t-il, qu'on a été trop optimiste dans l'élaboration de ce programme et, effectivement, l'année précédente, il y avait des montants, je ne sais pas le dire techniquement, des excédents, qui ne sont pas utilisés. Cela a forcé au moins à réviser l'ordre de grandeur du budget.

Pourquoi les plans de carrière sont-ils moins développés? On nous dit que la capacité de travail est actuellement au maximum dans ce programme qui fonctionne par des commandes du ministère de l'Education dans des profils de professions dans les entreprises et autrement. C'est la raison directe de la diminution du budget à ce programme. Est-ce qu'il y avait une autre question?

M. Forget: Avant de quitter ce sujet spécifique, est-ce qu'on pourrait nous expliquer un peu ce qu'on entend par le travail sur les plans de carrière? Intuitivement, j'imagine un peu ce que cela peut être, mais est-ce qu'on pourrait nous donner un peu plus les coordonnées du programme?

M. Couture: Je vais demander à M. Laporte de vous le décrire précisément.

Effectivement, les plans de carrière, c'est de décrire le travail comme il se fait à l'usine, dans chaque métier, dans chaque profession, pour aider le client éventuel à se faire une idée de l'orientation qu'il doit suivre. Toutes les commandes nous viennent évidemment du ministère de l'Education, comme la formation professionnelle dépend du ministère de l'Education et que la formation générale dépend du ministère de l'Education.

Habituellement, cela nous vient par secteur, par métier. Dans le passé, toutes les monographies d'emplois ont été données à des firmes de consultation qui se sont spécialisées dans ce domaine, sauf qu'on a beaucoup de problèmes, à cause des budgets, à dépenser l'argent qui nous a été alloué dans les budgets précédents. Vous remarquerez que les crédits périmés étaient de l'ordre de $1 million à peu près, chaque année. On ne réussisait pas, malgré tous les efforts qu'on déployait, à attirer assez de firmes pour répondre aux commandes que nous avions.

Les commandes ont donc baissé et on est arrivé à une capacité de travail qu'on dit maximale dans les circonstances. Compte tenu du fait que le Conseil du trésor nous avait gelé des budgets de l'ordre de quasiment $3 millions, si je me souviens bien, il y $1 million qui avait été pris à partir de ce programme, parce que, justement, on ne l'utilisait pas depuis au moins deux ou trois ans.

M. Forget: Est-ce que cela ne reflète pas une espèce de jugement, malgré tout, sur la nature de l'activité? Est-ce qu'il n'y a pas un scepticisme considérable vis-à-vis de ces efforts, de faire des profils professionnels? Dans le passé, est-ce qu'on a un exemple ou quelques exemples que cela ait été vraiment utile?

M. Couture: Oui, vous prenez, par exemple, le secteur des produits manufacturiers, des produits électriques ou électroniques, cela a servi amplement.

M. Bellemare: Pourriez-vous parler un peu plus fort, parce que le vieux commence à être sourd?

M. Couture: Excusez-moi. Si on se réfère au ministère de l'Education par les commandes qu'il nous donne, cela semble être un instrument privilégié pour aider à l'orientation des étudiants dans des professions données ou dans des métiers donnés.

J'avancerais l'hypothèse ici qu'effectivement, plus ces profils de professions seront complétés, j'imagine que le besoin se fera moins sentir d'en faire d'autres.

M. Forget: Quand vous nous dites que cela a été utile, est-ce que c'est un jugement que vous portez vous-même, est-ce que c'est un jugement qui est porté par les utilisateurs ou est-ce que ce n'est pas contesté, l'utilité de ces choses?

M. Couture: Dans certains secteurs, c'est contesté, peut-être à cause de la minutie de la description de la profession exercée, telle qu'exercée. Depuis ce temps, et ce n'est pas un jugement personnel, c'est un jugement qui nous a été transmis par les utilisateurs dans un secteur donné, qui est celui des produits manufacturiers des appareils électriques. Par contre, dans certains secteurs, on a dit qu'on avait décrit trop minutieusement, qu'on ne s'était pas arrêté à décrire la profession telle qu'exercée, mais à décrire la profession telle qu'elle devrait être exercée. Il y a des correctifs qui ont été amenés depuis ce temps. On s'est ajusté.

M. Forget: Comment expliquez-vous l'incapacité de trouver des gens pour faire ce travail, incapacité qui s'échelonne sur plusieurs années? Si le travail est utile, s'il est productif et s'il y a des disponibilités, je trouve inexplicable qu'on ne puisse pas trouver des gens pour le faire.

M. Couture: Je vais essayer de vous l'expliquer. Ce qui arrive, c'est ceci: Vous comprendrez que c'est un programme qui n'est pas un programme permanent. A un moment donné, on va arriver au bout de la ligne, quand on aura fait le tour des professions, le tour des métiers.

M. Forget: Cela risque de prendre du temps.

M. Couture: Deuxièmement, compte tenu de ce fait, on a pris l'orientation de ne pas engager de fonctionnaires à temps plein, sachant qu'un jour ou l'autre cela arrêterait. On s'est donc servi de consultants. On a essayé de développer une certaine expertise avec certains consultants. Ce n'est pas tout le monde qui s'intéresse à faire de la monographie d'emplois et ceux qui s'y intéressent sont en nombre limité. Alors, plutôt que d'avoir n'importe qui faisant n'importe quoi, on a choisi un groupe de consultants qui s'intéressaient à la monographie d'emplois. Leur capacité de travail est ce qu'elle est. Ils ne veulent pas eux non plus engager du personnel quand ils savent qu'à un moment donné, l'année prochaine, par exemple, ils ne pourront pas s'en servir.

M. Forget: Au rythme actuel, quand prévoyez-vous que cela va se terminer?

M. Couture: Je ne saurais vous répondre.

M. Forget: Vous devez quand même avoir une idée, si vous dites que tout le monde a pris des décisions en fonction d'un arrêt éventuel.

M. Couture: On pense déjà à commencer à spécialiser nos fonctionnaires sur la façon de rajuster la monographie d'emplois. On peut facilement prévoir que, d'ici deux ou trois ans, on aura fait le tour.

M. Forget: Est-ce que le ministre serait disposé à répondre à mon autre question sur le premier élément, c'est-à-dire: Quelles sont les priorités telles qu'il les voit dans l'organisation des connaissances sur le marché du travail? Parce qu'encore une fois, je crois que ce n'est pas très clair qu'il y en a eu dans le passé. Il semble qu'il y ait un peu une perte d'énergie.

M. Couture: II y a aussi des programmes qui semblent, à certains points de vue, se chevaucher. La priorité que je vois, c'est évidemment au niveau de la prévention, de la projection des besoins de main-d'oeuvre, donc, se donner des instruments pour prévoir, assez longtemps à l'avance, ce type de besoins en main-d'oeuvre dont le Québec aura besoin, et, face à cela, mettre en place des mécanismes de prévention, d'adaptation et de recyclage de la main-d'oeuvre. Je pense que c'est lié à l'objectif que nous cherchons d'avoir un excellent inventaire des besoins actuels de main-d'oeuvre, à voir à se donner des connaissances, à aller chercher des connaissances suffisantes pour éventuellement faire des projections de besoins de main-d'oeuvre, les détailler dans les secteurs concernés.

Face à cela, il s'agit véritablement de mettre en place ces mécanismes qu'on a, d'ailleurs, à certains éléments, ou des comités de main-d'oeuvre, de prévention qui travailleraient à préparer la main-d'oeuvre en conséquence, une fois la connaissance, l'information acquises. Cela, c'est une priorité où il y a une espèce de fouillis. Je pense qu'on n'a pas encore le véritable inventaire de tous les besoins de main-d'oeuvre au Québec. On n'a pas de projections claires là-dessus. Mais on a quand même des instruments — on les a en place; la loi nous permet de les utiliser — d'adaptation de la main-d'oeuvre de prévention.

M. Forget: Dans le fond, le ministre me dit

quel genre d'étude... Je ne vois pas de priorité claire, sauf de dire que ces études devraient servir à la formation et à l'orientation des activités de formation et d'enseignement professionnel, etc. Mais c'est un domaine immense. Cela peut se faire sur un horizon de dix ans, de cinq ans. Cela peut se faire sur un horizon de 25 ans. Ce n'est pas le même genre d'étude et ce n'est pas le même degré de certitude non plus, évidemment, quant aux résultats qu'on obtient.

Est-ce qu'à l'intérieur de ce grand domaine — parce que c'est clair que la connaissance du marché du travail, ça doit servir à quelque chose qui ressemble de très près à ce que le ministre vient de décrire — qui est tellement vaste, dans le fond, c'est vers le moyen terme ou vers le plus long terme que le ministre voit l'orientation? Est-ce que c'est dans tous les secteurs d'activités? Avec quel degré de détails? Et, en particuliers, dans ce contexte, j'aimerais qu'il commente un peu le résultat d'une opération tout à fait analogue à celle qu'il décrit. Elle a été réalisée au cours des quatre ou cinq dernières années, non pas par son ministère mais par le ministère de l'Education, dans le même esprit, relativement aux sciences de la santé, par exemple, la fameuse opération OSS, opération sciences de la santé, qui était inspirée par les mêmes objectifs que le ministre vient de décrire. Il y a sûrement des leçons à tirer de ça, parce que ça ne m'apparaît pas, pour ma part, comme ayant été un grand succès. Peut-être que je suis injuste et, si oui, je suis bien prêt à écouter les arguments selon lesquels c'est effectivement très bien. Mais je n'ai pas l'impression que ça va aider grand monde, finalement, que ce soit dans le secteur de l'éducation ou dans le secteur de la santé.

M. Couture: Je pense qu'il faut travailler à court terme et à moyen terme. Je me méfie peut-être un peu, comme vous, des grandes études qui s'échelonnent sur une génération. Je crois qu'on a vraiment besoin, à court terme, de déblayer le terrain des connaissances du marché du travail et des besoins de main-d'oeuvre. Il y a une série d'études qui se font à droite et à gauche. Le fédéral en fait. Le provincial en fait. Il y a des organismes privés qui en font. Les universités en font. On a des spécialistes dans certaines universités du Québec. D'ailleurs, j'avais une conversation avec M. Sexton dernièrement, qui est un spécialiste là-dedans, qui travaille beaucoup dans le domaine, et, véritablement, on sent le besoin d'abord de coordonner ce type d'études et aussi de pouvoir, plus scientifiquement, avoir cet inventaire précis des besoins de la main-d'oeuvre. C'est à court terme.

A moyen terme, moi, j'essaierais de me donner trois a quatre ans pour... D'abord, si on veut élaborer une véritable politique de main-d'oeuvre québécoise — tout le monde en parle, je pense, d'année en année — il faut avoir les instruments pour l'élaborer. Il faut d'abord avoir la connaissance du marché, la connaissance des besoins et, effectivement, contrôler les instruments d'inter- vention dans le secteur de la main-d'oeuvre. Cela, c'est un projet de trois à quatre ans. Disons, au cours de notre mandat, j'espère qu'on pourrait véritablement avoir prise sur ces mécanismes de connaissance et de contrôle. Je pense que la cueillette des données doit se faire à court terme, on doit les coordonner, en faire une étude et une évaluation, et, après ça, utiliser nos instruments en conséquence.

M. Forget: Le ministre, M. le Président, a surtout insisté sur l'élément "Projection et étude prospective des besoins futurs de main-d'oeuvre". Est-ce que cela veut dire que selon lui la connaissance du marché du travail, tel qu'il fonctionne au moment où on se parle, est suffisamment bonne? Est-ce que ce n'est pas un prérequis que de mettre d'abord de l'ordre dans la connaissance du marché tel qu'il est avant de faire des projections?

M. Couture: Elle est insuffisante, certainement M. le Président.

M. Forget: Est-ce que, d'ici un an, parce que ce sont des choses qui existent, je crois que dans les lois du ministère du Travail il y a toutes sortes de pouvoirs pour obtenir de l'information, constituer des fichiers, etc., il n'y a pas moyen, dans cet ordre de grandeur du point de vue du temps, de mettre sur pied un tableau, par la voie d'une publication périodique, par exemple, qui permettrait à tous ceux qui s'intéressent au fonctionnement du marché du travail, soit par secteur, soit globalement, de connaître, à un moment donné — comme base des études et des projections, c'est essentiel — l'état du marché du travail? Dans le fond, tout ce qu'on a dans le moment, ce sont des études et des statistiques assez globales venant du ministère fédéral. Il y a sans aucun doute plusieurs besoins de ce genre-là. Il serait peut-être intéressant de savoir lesquels, selon le ministre, mériteraient d'être éclairés plus complètement de façon que ceux qui agissent dans le domaine et ceux de son ministère en premier lieu, aient un tableau complet et très précis dans les cas où la précision est importante de la situation du marché du travail.

M. Couture: II faut tenir compte aussi de l'apport du ministère de l'Industrie et du Commerce qui est absolument indispensable à cause des fluctuations économiques que nous connaissons. Je pense que, pour avoir ce tableau à court terme, un tableau un peu exhaustif du marché du travail et de ses tendances, dans le fond, ce qu'on a besoin de connaître plus précisément, ce sont les tendances du marché du travail. On en reparlera sans doute tout à l'heure. On ne peut pas aller complètement à l'aventure en préparant des gens à droite et à gauche dans toutes les disciplines possibles et impossibles sans avoir le profil du marché du travail à court et à moyen terme. Alors, je peux vous dire l'intention que nous avons au ministère de faire cette cueillette des données, d'aller les chercher là où elles sont, de faire participer éventuellement des gens des milieux univer-

sitaires qui sont des spécialistes et évidemment de s'adjoindre la contribution du ministère de l'Industrie et du Commerce pour dégager cette espèce de problématique du marché du travail québécois.

M. Forget: Est-ce que vous croyez que, d'ici un an, il y aura quelque chose de concret, un résultat tangible de cela dont on pourrait prendre connaissance?

M. Couture: Oui. Je pense que, dans quelques mois, on pourra au moins sentir un commencement de déblocage et de déblayage. Enfin, c'est l'intention que je manifeste.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: M. le Président, certaines considérations là-dessus, sur la connaissance du marché du travail. Le ministre vient de signaler que nos connaissances sont relativement parcellaires là-dessus. J'aimerais quand même savoir si on a des données sur l'évolution des choses au Québec à partir du chiffre global de la population active qui devrait se situer autour de 2 700 000 à 3 000 000 de personnes, les quantités d'emplois qui sont du secteur primaire, secondaire et tertiaire et l'évolution des choses dans ces secteurs d'emploi. On dit que le nombre d'emplois primaires est rendu très mince, les emplois secondaires ou l'emploi manufacturier baissent régulièrement d'une année à l'autre à cause de l'automation. Je ne sais si on a des relevés exacts de cette évolution et également du secteur tertiaire qui, au cours de la dernière décennie a pris un essor considérable. Est-ce qu'on a des évaluations exactes sur les quantités de main-d'oeuvre engagées dans ces divers secteurs? Sur les degrés de saturation qui sont atteints à certains endroits, sur les axes, les orientations qu'il va falloir donner à notre politique de main-d"oeuvre?

M. Couture: On a pas mal de données, je pense, factuelles. On peut dire, par exemple, qu'il y a dix ans — je pense que ce serait plus facile à comparer si on se rapporte 25 ans en arrière — la tructure de l'emploi au Québec était carrément du côté secondaire.

Actuellement, il y a une espèce de fléchissement vers le tertiaire qui s'est développé considérablement depuis une quinzaine d'années évidemment.

Ce qui nous manque, ce sont des bonnes analyses socio-économiques sur cette évolution et l'impact social que ça crée et, si on peut dire aussi, les besoins nouveaux que ça crée pour la société québécoise. Je regarde le sud-ouest de Montréal, qui a été le bassin industriel du pays, du Québec et de la région montréalaise, il y a un choc culturel important pour une population considérable qui était dans le secondaire depuis le début du siècle. Ces emplois secondaires ont diminué, il y a eu des demandes dans le tertiaire, il y avait un manque de préparation de cette main-d'oeuvre et il y a toute une main-d'oeuvre qui s'ajuste difficilement à la nouvelle réalité socio-économique québécoise.

Ce dont je pense qu'on a besoin actuellement, c'est de bonnes analyses sur ces transferts de main-d'oeuvre, de leur facilité d'adaptation aux nouvelles réalités et éventuellement aussi, comment ces espèces de nouveaux transferts continueront dans le même ordre de grandeur et comment on se prépare en conséquence. Cela ne s'est pas fait, ces analyses, et je pense que ce serait extrêmement important de les avoir, parce qu'au niveau humain je constate qu'il y a de nombreux travailleurs auébécois, toute une catégorie de travailleurs québécois, dont la caractéristique c'est l'instabilité, le mauvais ajustement à la nouvelle dimension de leur travail.

A un moment donné, il y a eu une espèce de saut historique peut-être, les gouvernements ont probablement été pris au dépourvu aussi dans ce domaine. Je crois qu'il y a un travail en profondeur à faire pour davantage stabiliser cette main-d'oeuvre, la mieux préparer, la suivre et l'analyser au fur et à mesure qu'elle se déploie.

M. Gosselin: Remarque complémentaire là-dessus. Il semble, comme observation générale, comme vous venez de la signaler, que la main-d'oeuvre québécoise est particulièrement marquée par une certaine forme d'insécurité et c'est la marque des pays, des nations ou des régions moins favorisés. C'est commun aux provinces maritimes, c'est commun aux Etats du sud des Etats-Unis, où on constate qu'il y a une énorme population en transit. Selon les relevés de Statistique Canada, au chapitre du chômage, on découvre que près du quart de tous les travailleurs québécois et les mêmes proportions doivent exister dans les provinces maritimes, sont en chômage à un moment ou l'autre de l'année.

Cela veut dire qu'il y a un travailleur sur quatre qui ne jouit pas d'un emploi stable, qui est dans un va-et-vient continuel; cela crée une population itinérante et ce phénomène est très marqué. Comme travailleurs saisonniers, pendant les vacances d'été, assez souvent, au tabac en Ontario ou dans d'autres régions, on peut constater facilement que ce sont les Québécois qui se déplacent le plus l'été chez les travailleurs canadiens vers les emplois saisonniers, soit dans le secteur des travaux forestiers, ou lés travaux d'agriculture, vers l'Ouest canadien. On se promène, on s'en va aux Etats-Unis, dans les Etats du Sud ou dans certains autres Etats du nord. On constate un va-et-vient continuel d'une main-d'oeuvre québécoise qui émigre pour aller travailler pendant un bout de temps dans certains Etats américains.

C'est un phénomène assez considérable, je me demande s'il a déjà été analysé; je crois que c'est un phénomène qui mérite d'être sérieusement analysé et qui devrait nous amener à déchiffrer, pour cette population flottante, pourrait-on dire, une toute nouvelle problématique de l'emploi et de la main-d'oeuvre. C'étaient quelques considérations que je voulais faire là-dessus. Je pense

que le phénomène mérite vraiment d'être étudié au cours des prochaines années.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Pour confirmer ce que vient de dire le député de Sherbrooke, je suis d'avis que le rapport que vient de publier l'OPDQ est dans ce sens. Il a été rendu public cette semaine. Notre structure économique est extrêmement malsaine, puisque, dans le secteur primaire, il y a environ 4% seulement, dans le secondaire, on en retrouve environ 25% et, dans le tertiaire, on en retrouve 60%. C'est une tendance qui continue sûrement à s'aggraver et qui continue à être néfaste pour nous dans la province de Québec.

Vous avez parfaitement raison, et je pense qu'au ministère du Travail il y a un virement de la main-d'oeuvre à opérer. Je ne sais pas si vous avez vu le rapport de l'OPDQ, mais il est bien caractéristique sur cela.

Pour revenir à mon propos, si c'est à mon tour.

M. Forget: C'est toujours à votre tour.

M. Bellemare: Si je prends la loi, au sujet de ce dont on parle: "Le ministre peut, sur la recommandation d'un directeur général, instituer — l'article 41, il est bien au courant de cela —des comités consultatifs régionaux." On parle de comité tripartite. Il n'y en a pas de mentionné dans la loi, mais il a le droit d'en former quand même, c'est sûr, des jurys d'examen, des conseils d'arbitrage, des comités consultatifs pour fins spécifiques qu'il détermine, tout cela peut être compris dans l'article 41. Mais quand je vois les objectifs que le ministère doit rechercher, qui sont inscrits dans le rapport annuel, je me demande si on ne fait pas fausse route, si on compare ce qu'on a le droit de faire et ce qu'on veut faire, ce qu'on a l'intention de faire et ce qu'on veut réaliser. Quand on lit les objectifs qu'on recherche, au point de vue de la main-d'oeuvre, assurer la concertation et la consultation de partenaires socio-Etat, afin de promouvoir l'adaptation des services de main-d'oeuvre aux besoins nouveaux et recommander les amendements appropriés aux diverses législations touchant l'emploi direct de la main-d'oeuvre.

Deuxièmement, favoriser le développement d'un meilleur climat de relations de travail, dans un secteur donné, en amenant les partenaires sociaux à discuter et à résoudre certains problèmes dans un contexte différent de celui de la négociation collective.

Troisièmement, amener les partenaires sociaux à adapter leur politique d'utilisation des ressources humaines, selon le contexte maintenant en évolution, en 1977.

Je suis sûr que si des comités consultatifs régionaux sont établis selon l'article 41 et que le ministre veut voir véritablement à la formation et à la qualification de la main-d'oeuvre, il a toute la disponibilité pour le faire.

M. Couture: C'est tout à fait dans la ligne de ce que j'ai dit. Au lieu de multiplier comité sur comité, je voudrais qu'on ait, dans toutes les régions du Québec, un instrument privilégié qui pourrait, localement, régionalement, faire un certain nombre de travaux. Aider le ministre à mieux connaître, dans une situation donnée, dans une région dont les différences sont évidentes, et qui pourrait lui indiquer, dans telle région, de quelle façon l'application des lois se fait ou devrait se faire. Comment les mécanismes et les instruments qu'on a pour faire face à la main-d'oeuvre pour les services que nous voulons donner, comment, selon les régions, il serait utile ou non de procéder, et de vraiment nous recommander précisément certaines indications, face à tel type d'intervention.

M. Forget: Si vous me permettez d'intervenir, il me semble que le député de Johnson demande au ministre, actuellement, pourquoi, ayant annoncé ses intentions à plusieurs reprises — il l'a fait dans ses remarques d'introduction, il l'a fait à plusieurs reprises au cours des débats, en commission parlementaire — étant donné qu'il a les pouvoirs de le faire, pourquoi ne le fait-il pas maintenant, pourquoi il attend un avenir incertain avant de le faire.

M. Couture: L'avenir est certain là-dessus.

M. Forget: Peut-il nous annoncer à quel moment et à quelle date les comités régionaux seront formés?

M. Couture: Je pense qu'on verra le jour de ces comités régionaux, peut-être les uns après les autres. Il faut quand même tout mettre en place, à partir de septembre prochain...

M. Bellemare: Ils vont remplacer les conseils de main-d'oeuvre.

M. Couture: II y a des comités consultatifs dont chacun sait qu'ils ne remplissent pas exactement les objectifs qu'on souhaiterait.

M. Bellemare: Pourquoi ne pas améliore ceux-là?

M. Couture: Cela peut être une base, mais je veux dire qu'on va améliorer notre mécanisme pour avoir plus d'efficacité. L'évaluation qu'on fait des comités consultatifs et les objectifs que nous nous donnons au ministère, où non seulement nous voulons que les gens...

M. Bellemare: Vous avez les outils en main et vous ne vous en servez pas. C'est ce qu'a dit le député de Saint-Laurent, et c'est ce que je vous répète. Vous avez les outils, et vous allez encore installer un autre comité tripartite par-dessus cela, quand vous avez, en vertu de la loi 41, tous les privilèges, tous les pouvoirs.

M. Couture: Je veux élargir le mandat de ces

comités consultatifs qui existent en théorie dans certains milieux. Je veux non seulement les élargir, mais les aider à avoir une efficacité plus grande. Pour donner un mandat plus...

M. Bellemare: Le Conseil de la main-d'oeuvre de la forêt est le seul conseil en activité actuellement, c'est dans le rapport annuel, il n'y en a pas ailleurs. Commencez par en établir ailleurs avant de vouloir réformer et réformer. Vous n'en avez pas d'autres à réformer. Ici, dans votre rapport, dans le volume, Le Conseil de la main-d'oeuvre de la forêt est le seul conseil en activité. Vous voulez former un autre comité tripartite pour que l'autre qui ne marche pas marche encore.

M. Couture: Je pense que vous confondez le conseil de main-d'oeuvre...

M. Bellemare: Je ne confonds pas, je vous comprends mal.

M. Couture: Le conseil de main-d'oeuvre qui est mis en place pour étudier dans un secteur particulier, comme la forêt, la main-d'oeuvre, les besoins, les interventions qu'on doit faire dans ce domaine, et les comités consultatifs, selon la loi de formation professionnelle, où les partenaires doivent théoriquement informer le ministère, la région donnée des besoins en formation, je pense que vous confondez les deux. Ce n'est pas la même chose.

M. Forget: Cette deuxième série de comités va-t-elle disparaître et être absorbée par les conseils régionaux, les comités régionaux?

M. Couture: Je pense que, dans certains cas, cela peut être la base de la formation de ces comités tripartites, mais ce qui va arriver dans la majorité des cas, c'est qu'effectivement, ce que nous allons faire, nous allons créer quelque chose qui n'existe plus.

M. Bellemare: L'article 41d) de la loi de la main-d'oeuvre, de la loi de la qualification professionnelle de la main-d'oeuvre permet au ministre de constituer des comités consultatifs spéciaux pour des fins spécifiques qu'il détermine. C'est cela, ce que vous voulez y mettre?

M. Couture: On a tous les outils dans la loi!

M. Bellemare: Je comprends, mais, à 41, vous l'avez. En tout cas, je ne vais pas me disputer ce matin. Je n'ai pas le goût de cela, pas du tout. Si le ministre ne veut pas... On va voir cela l'année prochaine. Je vais certainement y être encore. Mais vous, je ne suis pas sûr!

M. Couture: Je vous le dis là-dessus, M. le député de Johnson, on a tous les instruments dans la loi. Ce que je déplore depuis que je suis au ministère, c'est que certains de ces comités ne fonctionnent pas comme ils devraient fonctionner.

Face à de nouveaux objectifs de participation du milieu, non seulement dans l'application des lois mais dans les suggestions pour améliorer nos lois, et une espèce de prise en charge collective du milieu sur certains aspects de la main-d'oeuvre et du travail, j'ajoute des éléments nouveaux pour cette base de comités qui existe, que la loi nous permet de mettre en place.

M. Forget: Quand vous parlez des régions, est-ce que ce sont des régions administratives ou si c'est une autre base?

M. Couture: C'est une autre base. Il y a des sous-régions qu'on crée à cause du territoire trop considérable, où la population est trop importante.

M. Forget: Est-ce que vos consultations auprès des syndicats et du patronat pour la composition de ces comités dans chaque région et sous-région sont commencées? Avez-vous demandé des suggestions?

M. Couture: C'est à peine amorcé. Le mandat qu'on se donne pour les prochains mois est de rencontrer les intervenants dans ces secteurs et de travailler avec eux à la formation de ces comités tripartites.

M. Bellemare: Est-ce que cela a été soumis aux conseils consultatifs?

M. Couture: Oui, c'est-à-dire que je n'ai pas soumis le projet comme tel, mais déjà, il y a plusieurs mois, j'ai discuté avec eux du projet et il y avait une réaction favorable.

M. Bellemare: Mais ils ne vous ont pas écrit? M. Couture: Non, pas encore.

M. Forget: Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris le ministre quand il dit, si oui ou non, les comités qui s'occupent de la qualification, de la formation professionnelle, vont être absorbés par ces nouvelles structures ou s'ils vont rester en parallèle.

M. Couture: Ils vont se greffer à cette structure.

M. Forget: II va y avoir une espèce de comité en deux paliers. Il va y avoir le comité régional auquel se greffent d'autres comités?

M. Couture: Je vois très bien, comme il y en a aux conseils consultatifs d'ailleurs, des comités tripartites régionaux qui ont un mandat plus global, et selon les besoins particuliers. Par exemple, dans la région de Drummondville, c'est évident que le problème du textile est flagrant. Là, il pourrait y avoir des comités ad hoc sur des problèmes particuliers. Le comité consultatif sera une annexe à ces comités tripartites qui auront le mandat de nous informer sur les besoins de main-d'oeuvre de la région.

M. Bellemare: C'est peut-être pour cela que, ce matin, dans la région de Drummondville, on annonce des mises de fonds de $6 millions, pour fins de développement.

C'est peut-être grâce à votre géniale idée qu'ils vont développer le nouveau secteur. Peut-être que c'est cela. Je ne sais pas. Vous l'avez peut-être dit à eux autres. On ne le savait pas nous. C'est peut-être à cause de cela qu'on apprend, ce matin, qu'il y a un développement considérable dans le textile à Drummondville, pour $6 millions dans les nouvelles techniques, dans les nouvelles bases de recherche. Vous êtes peut-être trop confidentiel. Vous ne nous en dites peut-être pas assez, ou bien eux autres sont trop bavards.

M. Couture: II faut se réjouir.

Le Président (M. Marcoux): Le programme 4, élément 1. Adopté.

M. Bellemare: Un instant!

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse de brusquer...

M. Bellemare: Elément 1... Quelle est la réponse? Vous n'avez pas voulu nous donner une réponse tout à l'heure. Je comprends que, sur l'affaire du nouveau ministère des ressources humaines de M. Chevrette...

M. Couture: Vous pourrez toujours demander au premier ministre...

M. Bellemare: Non, non, je vais le lui demander, parce qu'il l'a annoncé officiellement le 26 avril dernier. Il dit que c'est son idée personnelle.

M. Couture: Dans un paragraphe que vous avez cité tout à l'heure, d'ailleurs, M. le député de Joliette disait que c'était une idée personnelle. Il en ferait une recommandation. Il vendrait son produit au ministre.

M. Bellemare: Ah oui, oui, oui! Il dit qu'il n'a pas grand-chance, je crois bien.

M. Couture: II n'a pas dit qu'il n'avait pas grand-chance.

M. Bellemare: Non, il n'a pas dit cela, mais je dis qu'il n'a pas grand-chance.

M. Couture: Je demanderais au député de Johnson d'être fidèle à la citation.

M. Bellemare: Ah oui, oui! oui, pour le moment, précise-t-il.

M. Couture: II n'a pas dit qu'il n'avait pas grand-chance.

M. Bellemare: II ne s'agit donc pas d'un projet officiel. M. Chevrette rappelle que ce n'est évidemment pas pour rien que ses collègues, Robert Cliche, Brian Mulroney et lui-même préconisaient une telle mesure. Il est bien confiant de convaincre le ministre et le gouvernement. M. Chevrette a dénoncé la guerre de prestige que se sont toujours livrée les ministères de l'Education et du Travail, au Québec, et a parlé de la nécessité pour les deux ministères de s'asseoir enfin en face l'un de l'autre et de décider une fois pour toutes qui est le responsable de la formation au Québec afin de bâtir des programmes véritablement adaptés aux besoins de l'industrie. Cela doit être vrai quelque part.

M. Couture: C'est excellent, cela. M. Bellemare: C'est excellent, hein?

M. Couture: Je suis tout à fait d'accord avec cette dernière déclaration.

M. Bellemare: Est-ce que cela va se faire?

M. Couture: Cela risque de se faire assez rapidement.

M. Bellemare: Cela risque? Une minute! une minute! Un ministre n'a pas le droit de dire que cela risque. C'est quitte pour les mites.

M. Couture: D'ailleurs, ce sont des opinions...

M. Bellemare: C'est un programme que doit avoir le ministre de collaborer avec le ministère de l'Education pour rendre plus...

M. Jolivet: Cohérent.

M. Bellemare: ...cohérent, merci, M. le député de Laviolette.

M. Couture: C'est même la récupération de ce qu'on a dans la loi sur la formation professionnelle.

M. Bellemare: Je ne suis pas un érudit et j'accepte que... Pardon?

M. Couture: Je disais ce qu'on énonce dans cette...

M. Bellemare: Ah bon! l'auteur qui arrive! Cela fait 20 minutes qu'on en parle.

Le Président (M. Marcoux): Programme 1, élément 1, adopté?

M. Bellemare: II va falloir. On est rendu à l'article 5. Excusez. J'étais rendu au ministre des ressources humaines.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. Programme 2, élément 2? Excusez, je me suis trompé. Programme 4, élément 1, adopté. Programme 4, élément 2?

M. Forget: M. le Président, il y a des questions peut-être dans le même esprit.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Est-ce que j'ai la permission?

Le Président (M. Marcoux): Vous avez votre permission pour commencer.

M. Forget: Dans le même esprit, celui de la création d'une approche peut-être plus cohérente vis-à-vis des services de la main-d'oeuvre, le ministre nous a expliqué dans ses remarques d'introduction, qu'il voyait plus facilement un rôle pour les centres de main-d'oeuvre du Québec dans des services à des clientèles cibles, qu'il a identifiées d'ailleurs.

Un certain nombre de ces clientèles cibles nous amènent à poser le problème, justement, de l'intégration, au moins de la coordination, des activités de placement qui sont effectuées par plusieurs instances au sein du gouvernement du Québec et à l'extérieur aussi. On y reviendra par après; je pense, par exemple, aux bureaux de placement privés, à l'attitude du ministre relativement à leur action, à leur statut juridique, etc.

Avant de toucher à cela, j'aimerais demander au ministre quelle attitude il a, face aux activités du ministère de l'Industrie et du Commerce, par exemple, relativement aux programmes étudiants et aux services d'emploi qui, si je comprends bien, sont assumés en partie par le service du ministère de l'Industrie et du Commerce. A-t-il abordé ce sujet avec son collègue? Au niveau des fonctionnaires, y a-t-il des discussions pour intégrer ces activités telles qu'elles devraient l'être? Je pense aux activités des centres de main-d'oeuvre?

M. Couture: Voulez-vous préciser? A quoi faites-vous allusion quand vous dites que le ministère de l'Industrie et le Commerce assume du placement?

M. Forget: Je vais transformer mon affirmation en question. N'est-il pas vrai que le ministère je l'industrie et du Commerce exerce certaines activités reliées, de près ou de loin , au placement, relativement à des programmes pour les étudiants, relativement à des services d'emploi auprès de l'entreprise?

M. Couture: Non. Pas à notre connaissance. Avez-vous des renseignements à nous donner là-dessus? La réponse est non.

M. Forget: Les renseignements que j'ai, qui sont de mémoire, c'est qu'il y en a et que cela pose certains problèmes de coordination. Maintenant, si cela n'existe plus, tant mieux. Le problème a peut-être été résolu.

M. Couture: Je note votre question.

M. Forget: Je vais prendre votre parole. Vous pouvez nous affirmer qu'il n'y a aucun problème de coordination entre le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère du Travail, relativement à l'emploi et au placement.

M. Couture: A ma connaissance, il n'y en a pas. Je note quand même votre question et je verrai si, effectivement, ce genre de problème existe et je vous en ferai part. Je vous donnerai ma réaction.

M. Forget: D'accord. Maintenant, le service de placement effectué par les centres de main-d'oeuvre a souvent été évalué en termes du nombre de personnes placées, comme tous les services de placement. De ce côté, les évaluations ne sont pas toujours très généreuses. On dit que l'efficacité est plus ou moins forte. Il y a vraiment des problèmes de ce côté. Ce sont peut-être des comparaisons injustes qu'on peut faire avec d'autres organismes de placement: mais, étant donné, justement, les clientèles cibles qui ont été identifiées par le ministre, particulièrement chez les jeunes, mais aussi chez les personnes de plus de 40 ans, pour lesquelles le chômage, souvent, et la recherche d'un emploi représentent et symbolisent ou sont le symptôme, dans le fond, d'une nécessité de réorientation, dans le cas des jeunes, c'est un problème d'orientation, le ministre pourrait-il nous dire s'il entrevoit des actions pour valoriser le rôle d'orientation ou de réorientation professionnelle tel qu'exercé par les centres de main-d'oeuvre, plutôt que de simplement prendre des demandes et des offres d'emplois et essayer de faire un pairage mécanique, un service de "counselling" en quelque sorte et d'orientation qui doit être joué auprès de ces clientèles cibles et aussi auprès des personnes d'un peu plus de 40 ans, chez qui le problème d'emploi peut être assez aigu, là où il y a un problème de vente auprès des milieux de travail?

Le ministre voit-il des possibilités concrètes — avec les crédits mis à sa disposition, qui sont un peu plus généreux, mais, finalement, avec les augmentations de salaire, il n'y a peut-être pas beaucoup plus de monde on reviendra à cela tantôt — de donner une dimension qualitative à l'action des centres de main-d'oeuvre?

M. Couture: De façon générale, je dirais qu'il faut agir sur deux plans è ce niveau. Peut-être que cela déborde cet élément, mais j'y reviendrai dans la deuxième partie de la réponse. Je pense effectivement que notre première préoccupation, à mon avis, est d'essayer de maintenir l'emploi chez les 40 ans et plus. Il y a un phénomène assez curieux et qui est assez révoltant, à bien des points de vue, surtout dans les entreprises non syndiquées, c'est qu'on se débarrasse de nos travailleurs supposément âgés, dès qu'ils ont 40 ou 45 ans. C'est monnaie courante.

C'est une préoccupation qui devient prioritaire chez moi, de chercher les moyens de maintenir l'emploi chez les personnes de 40 ans et plus. Comment cela pourrait-il se passer? Eventuellement, dans l'article 45 de la loi 49, où on fait état

du licenciement et où on exige des préavis de licenciement, je crois qu'on pourrait s'inspirer de certaines législations européennes, où, effectivement, congédier ou licencier des travailleurs de 40 ans et plus devrait devenir assez pénalisant pour l'entreprise.

Tellement, éventuellement, que l'entreprise pourrait y penser deux fois avant de les licencier.

Il ne faut pas seulement essayer de reclasser ou de replacer des travailleurs de 40 ans et plus, mais il faut avoir cette préoccupation de trouver des moyens de les garder à l'emploi. Je pense qu'on a un peu trop oublié cette dimension dans le passé.

Pour arriver plus précisément à voir comment nos centres de main-d'oeuvre pourraient arriver à aider ces travailleurs de 40 ans et plus, je crois que, d'abord, on a d'ailleurs dans le budget, un soutien, un organisme privé qui aide l'embauche des travailleurs de 40 ans et plus...

M. Forget: Des partenaires associés?

M. Couture: Oui. Il ne s'agit pas pour nous de les absorber, mais de continuer à les soutenir et peut-être de profiter de leur expérience dans la formation de nos agents de main-d'oeuvre, puisqu'on a un pool d'agents de main-d'oeuvre. Comme on va former des agents de formation dans ces centres de main-d'oeuvre, dans ces centres Travail-Québec, on veut, dans les prochains mois aussi, les préparer d'une façon beaucoup plus spécialisée à des types de clientèles. Ceux qui auront la responsabilité d'aider les travailleurs de 40 ans et plus, je pense qu'il y a une préparation de psychologie et de connaissance de ce type de travailleurs, et aussi l'expérience de ceux qui se sont occupés d'eux pour les préparer à être plus efficaces et pour apporter un service plus humain à ces travailleurs.

Il y a aussi le...

M. Bellemare: Tandis que le ministre...

M. Couture: Est-ce que je peux terminer, M. le Président?

M. Bellemare: C'est que je voulais savoir s'il y a une augmentation sur le budget de $24 000 que vous avez donné?

M. Couture: Cette année, je pense qu'il n'y a pas d'augmentation.

M. Bellemare: II n'y a pas d'augmentation? M. Couture: Non.

M. Bellemare: Est-ce que la subvention de $24 000 que vous avez donnée l'an passé va se répéter?

M. Couture: Oui.

M. Bellemare: Ils ont placé 577 personnes?

M. Couture: Oui, ils font un travail assez extraordinaire.

Pour poursuivre là-dedans, je pense aussi que pour le travailleur de 40 ans et plus qui a à aller vendre son produit aux entreprises, ce n'est pas toujours facile. On sait à quel point ces gens, dans le type de société que nous connaissons, se sentent humiliés, dévalorisés, parce que, à toutes fins pratiques, ils sont un peu mis au rancart du marché du travail. Ce n'est pas facile pour eux d'aller chercher de l'emploi.

Cette intervention auprès de chefs d'entreprise, cette animation dans le milieu même, j'y crois beaucoup. Quand j'étais au service de reclassement du ministère entre 1970 et 1972, on avait fait l'expérience, à Granby, entre autres, où on avait beaucoup de travailleurs de 40 ans et plus, d'essayer de sensibiliser le milieu à ses responsabilités face à ce type de travailleurs.

Non seulement l'agent de main-d'oeuvre mieux préparé va aider le travailleur de 40 ans et plus à se trouver un emploi, mais on veut aussi faire les contacts, chez les chefs d'entreprise, chez les gens du milieu, pour qu'on ajoute les intervenants pour aider cette clientèle.

C'est un peu le portrait que je pourrais vous donner à ce stade-ci de notre approche face à cette catégorie de travailleurs qui, effectivement, est dans une situation extrêmement pénible.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Si c'est bon, le montant de $24 000 pour 577 personnes, pourquoi ne pas l'avoir augmenté sur le budget? Vous me dites que cela n'a pas été augmenté. Si cela a produit 577 placements, tel que le dit le rapport...

M. Couture: Oui.

M. Bellemare: Ce n'est pas cher pour placer des gens de 40 ans et plus?

M. Couture: C'est exact.

M. Bellemare: Pourquoi ne l'avez-vous pas. augmenté?

M. Couture: On aurait pu soit l'augmenter, soit développer nos services nous-mêmes, dans ce domaine. C'est l'intention que nous avons.

C'est un peu un coup de fouet que le groupe des partenaires associés nous a donné. D'une façon physique, ils ont porté le problème sur la place publique. Ils nous ont peut-être dit: Vous, le gouvernement et vos services, que faites-vous pour ces gens? Vous ne faites pas assez. Non seulement on veut continuer à les encourager dans leur travail, mais ils nous révèlent notre propre responsabilité. C'est la raison pour laquelle — les partenaires associés ne sont pas à Joliette, à Chicoutimi, à Rimouski — on profite de leur expérience, dans nos centres de Travail-Québec, pour étendre un peu ce type de travail.

M. Bellemare: Parce qu'à ce prix-là cela ne fera pas très cher pour un placement, mais ce qui me surprend le plus, et ce sur quoi je voudrais bien avoir des preuves, c'est de voir dans votre rapport annuel que vous avez placé 3000 travailleurs désavantagés, c'est-à-dire des assistés sociaux, 3000, écoutez, je me suis demandé... 3000 personnes qui retirent de l'assistance sociale, qui figurent dans un rapport annuel, et c'est marqué en toutes lettres: Au cours de l'année 1975/76 plus de 3000 bénéficiaires d'aide sociale ont été placés par le ministère. Je ne demande pas la liste, parce qu'elle serait peut-être difficile à fournir, mais 3000, cela me surprend énormément qu'ils aient été intégrés par vos services. Comme le disait tout à l'heure le député de Saint-Laurent, vous passez pour avoir un service qui est lent et inefficace.

M. Couture: Ce n'est donc pas mauvais qu'à l'occasion de l'étude des crédits on s'aperçoive qu'il y a des choses qui se font.

M. Bellemare: En 1975/76, vous avez eu 64 639 inscriptions. Il y a eu des présentations aux employeurs pour 42 657. Et il y a 25 964 personnes qui ont été placées. Je voudrais bien avoir les chiffres de 1976/77. Les avez-vous?

M. Couture: Non, pas encore. M. Bellemare: Non? 1976/77...

M. Couture: Ce que je peux vous dire, c'est que vous...

M. Bellemare: Sur 64 000 candidatures, il y en a 42 000 qui ont été référées aux employeurs.

M. Couture: Oui.

M. Bellemare: Sur le montant, il y en a 25 964 personnes qui ont été placées.

M. Couture: Et quels sont vos commentaires?

M. Bellemare: Mes commentaires? Ecoutez, le bureau fédéral de la statistique prouve que le placement fédéral est plus effectif que le vôtre. Test sûr. Et tous les jours, et toutes les semaines, on a des pages et des pages dans le Nouvelliste ou dans d'autres journaux où on nous montre des employés du fédéral qui vont placer, des gens qui font des démarches et on ne voit rien dans la province de Québec. Cela me choque.

M. Couture: M. le Président, je ne ferai pas un débat là-dessus. Je vous donne entièrement raison parce que, je l'ai dit au début aussi, le fédéral a $60 millions pour faire du placement au Québec et nous avons à peine $10 millions. C'est évident que nous n'avons pas du tout les mêmes instruments pour placer les chômeurs québécois. C'est la raison pour laquelle je ne veux pas que nos centres de Travail-Québec, dans la même catégorie de travailleurs, essaient de faire concurrence au fédéral.

Je crois que c'est gaspiller l'argent du public. Les mêmes taxes vont à Ottawa et à Québec, et il y a un bon service qui se donne au fédéral, je veux bien qu'on essaie de récupérer, mais, en attendant, je ne veux pas qu'on joue à une fausse concurrence quand on n'a pas du tout le même type d'instruments. C'est la raison pour laquelle on se spécialise, et je pense que c'est la vocation des centres Travail-Québec de se spécialiser et d'aller au-delà du placement, de faire de la prévention, de faire de l'information, de faire de l'animation de milieu pour qu'à long terme cela devienne effectivement beaucoup plus bénéfique et efficace.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Sur le même sujet des partenaires associés et de la subvention de $24 000 qui est donnée, c'est intéressant de voir que, seulement en faisant un calcul rapide sur le coin d'un bloc-notes, on se rend compte que chaque placement fait par les partenaires associés a coûté au gouvernement $50 à peu près, plus ou moins quelques cents. Et que si on utilise le même chiffre de $50...

M. Couture: Je peux vous arrêter tout de suite. Relativement à l'argent qui est reçu par les partenaires associés, ils ont différentes sources de subventions.

Si on essayait d'avoir un calcul exact afin de donner une bonne image de ce que vous voulez prouver, il faudrait aussi avoir le coût global de l'administration. L'argent qui vient des contribuables ou autrement...

M. Forget: Ce n'est justement pas cela que je veux prouver. Je ne veux pas essayer de faire une analyse de leur efficacité, mais, étant donné que le gouvernement a des objectifs et des ressources, nous dit-on, très limités, ce n'est pas plus important qu'il le faut pour le gouvernement de se poser la question à savoir si cela coûte plus cher que ce que cela lui coûte pour atteindre un objectif donné.

Ce qui est important, c'est que l'objectif soit atteint et que les ressources soient utilisées le mieux possible.

M. Couture: Je suis tout à fait d'accord.

M. Forget: Si on prend le chiffre de $50 par placement et qu'on l'applique aux 25 000 placements effectués par les services de main-d'oeuvre, on découvre qu'il devrait y avoir un budget de $1 250 000 pour obtenir ce résultat. Le budget qu'on nous présente est de $9 900 000. C'est une bonne indication de l'ordre de grandeur.

L'implication pratique de cela, ce n'est pas de supprimer les centres de main-d'oeuvre, mais c'est de poser au ministre la question suivante: Comme les partenaires associés sont actifs seulement dans un quartier d'une ville au Québec, le problème des travailleurs âgés de plus de 40 ans se

pose aussi dans d'autres régions, est-ce que ce ne serait pas une bonne utilisation des fonds publics et, en plus de cela, conforme à la philosophie du ministre, au moins par hypothèse, de susciter des organismes communautaires analogues pour obtenir aussi ces autres fonds? J'imagine qu'ils doivent être disponibles à d'autres ou qu'on peut les susciter pour d'autres organismes communautaires dans d'autres villes ou dans d'autres quartiers des grandes villes de manière à aider ces gens avec une dépense de fonds publics qui soit minimale.

Peut-être en impliquant aussi le plus possible les milieux, comme cela a été le cas des partenaires associés, qui sont eux-mêmes des gens de plus de 40 ans, qui ont lancé cela à un moment donné, ils se sont dit que s'ils n'avaient plus de travail, ils allaient essayer d'être utiles à des gens mal pris comme eux et de leur âge. C'est comme cela que ceci a commencé. Il y en a un peu partout au Québec. On va leur dire: Organisez-vous, on va vous aider puisqu'on a l'expérience que cela marche mieux de ce qu'on peut faire avec des dépenses d'argent qui sont de l'ordre de 1 à 10 par rapport à ce que cela coûte.

C'est ma question. Pourquoi ne pas imiter cela ailleurs plutôt que de prendre l'option. Ils nous ont donné un exemple, on va leur voler leurs idées maintenant et on va les appliquer en faisant des dépenses beaucoup plus considérables dans un réseau qu'on a de la difficulté à développer autant qu'on le voudrait?

Si on a des ressources tellement limitées, c'est d'autant plus important d'utiliser des formules qui sont peu coûteuses et très efficaces.

M. Couture: La question mérite une bonne explication. C'est un bon débat aussi, parce qu'il y a des choix. Je voudrais d'abord absolument préciser que les $9 millions dont vous parlez, ce n'est pas seulement pour le placement. Cela va sur d'autres opérations aussi.

C'est évident qu'à la limite on pourrait dire que tout ce qu'il y a de groupes privés qui font de la main-d'oeuvre, cela coûterait moins cher à l'Etat et aux contribuables de les soutenir et de les encourager à continuer.

Le problème que cela pose est que je voudrais bien que peut-être dans toutes les villes du Québec il y ait ce type d'organisme. C'est que, à un moment donné, l'Etat et le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre ont une responsabilité, au nom même des contribuables, au nom même des citoyens, d'une politique cohérente de main-d'oeuvre et d'un type d'intervention dans tout le réseau du Québec. C'est-à-dire, que...

M. Forget: Encourager la participation, cela fait aussi partie d'une politique cohérente.

M. Couture: Oui, mais est-ce que je peux terminer? Je vais vous rejoindre un peu plus loin. Ceci dit, nous avons cette responsabilité. C'est, d'ailleurs, comme dans un ministère que vous avez bien connu, puisque vous en avez été minis- tre, à un moment donné, il y a eu un rapport Castonguay-Nepveu. Il disait: II y a un tas de petits hôpitaux privés, il y a des maisons pour personnes âgées et toutes sortes de choses. A certains endroits, c'est formidable, cela va très bien et, à d'autres endroits, c'est très mauvais, c'est déficient, on n'a pas la qualité de service.

Donc, il y a des citoyens québécois qui, parce qu'ils sont dans tel quartier, ont un bon service, parce qu'ils sont dans un autre village à 100 milles de là, ont un mauvais service.

Quelle est la responsabilité de l'Etat face à cela? Je pense que la responsabilité de l'Etat c'est, d'une part — sans porter de jugement, on est peut-être allé un peu trop vite dans cette espèce d'abolition de ce qu'il y avait d'organismes privés, c'est un jugement personnel qui n'engage pas le gouvernement — mais je dis, quand même, qu'on avait cette responsabilité d'une certaine planification, d'une coordination et d'un souci de donner un même type de qualité à tous les usagers. Je crois qu'on s'entend là-dessus.

Je pense que c'est un peu la même chose qu'on pourra dire au sujet du placement des travailleurs de 40 ans et plus. Il y a d'autres organismes qui s'occupent du placement, il y a Action-Chômage, il y en a qui s'occupent des assistés sociaux et le reste. Je crois que l'un n'exclut pas l'autre.

Je dirais ceci, et peut-être pourrons-nous nous rejoindre là-dessus: II évident que dans la région de Montréal, où les partenaires associés travaillent, font du boulot efficace, nous n'irons pas en face d'eux pour faire la même chose. Ce qu'on va quand même faire, ce sera de conserver des liens très étroits avec eux et nous allons leur faire partager nos préoccupations d'une certaine cohérence de politique de main-d'oeuvre dans ce secteur. Nous pourrions peut-être ajouter des services qu'ils n'ont pas concernant les travailleurs de 40 ans et plus. Mais il reste que, sans abolir ce genre d'organisme, nous avons la responsabilité d'étendre à tout le Québec une même qualité de service et c'est seulement à ce niveau que je défends notre façon d'aborder les choses.

M. Forget: Je suis d'accord avec le ministre qu'il a une responsabilité de maintenir un certain niveau de service. Je crois — et dans le fond c'est ce que je l'invite à faire, ce sur quoi je l'invite à réfléchir — que cela peut très bien faire partie d'une politique cohérente qui permette des services partout, que, non seulement, on le fasse quand la pression locale pour qu'on aide un organisme est assez forte et que les gens ont assez d'initiative et sont assez têtus pour obtenir finalement une subvention, mais aussi dans le cadre d'une politique cohérente, qu'un ministère comme le sien dise: On est réceptif à l'idée d'aider les groupes communautaires déjà intéressés et on va aller au-devant d'eux d'une certaine manière. On va attendre qu'il y en ait qui aient suffisamment d'initiative pour le demander, mais il y a une possibilité, une porte ouverte. Ce n'est pas une exception. C'est une chose qui peut se faire ailleurs et qui est la bienvenue parce qu'on

a vu que cela marchait bien et, quand c'est fait avec l'intérêt et la participation des intéressés, cela vaut mieux que ce qu'on peut faire avec nos propres services. Cela peut être tout à fait cohérent, ce qui n'empêche pas le ministère de donner des services là où il n'y a personne pour le faire.

M. Couture: J'avais oublié un élément. Dans ce souci d'animer un peu le milieu, c'est-à-dire de lui faire prendre conscience de sa responsabilité collective face à certaines catégories de citoyens, je pense que le ministère s'oriente dé ce côté-là. Qu'on soit peut-être, justement, à certains points de vue, un peu le mécanisme révélateur, dans le milieu même, des responsabilités locales et qu'on incite au besoin des groupes à faire un certain travail de prise en charge de catégories de travailleurs pour, éventuellement, les soutenir, en gardant quand même cette responsabilité. Personne ne peut nous l'enlever. On a ce mandat, cette responsabilité. Que cela soit fait dans la cohérence, que cela soit dans ce souci de donner la même qualité à tous les Québécois, où qu'ils soient.

M. Forget: M. le Président, juste un commentaire. J'approuve l'idée du ministre de donner une formation particulière aux agents de main-d'oeuvre. Mais on va donner souvent à un agent de main-d'oeuvre qu'on vient d'engager, qui peut avoir 22 ans, un cours sur la psychologie des travailleurs de 40 ans et plus, alors que, s'il pouvait susciter, à la basse-ville de Québec ou ailleurs, un organisme comme les partenaires associés, on pourrait prendre les gens du milieu, on n'aurait pas besoin de leur donner des cours sur leur propre psychologie. Ils savent très bien comment on se sent, quand on a 45 ans et qu'on est sans emploi.

M. Couture: II n'est pas question qu'on prenne des gens de 22 ans pour aider des...

M. Forget: Non, mais cela peut se produire. Cela n'est pas planifié comme cela, mais c'est le genre de chose qu'on fait très facilement dans une grosse administration, parce qu'à un certain moment on décide de développer un programme pour les travailleurs âgés et cela s'adonne qu'on a besoin de nouveau personnel et quand on a be-soin de nouveau personnel ce sont souvent des jeunes qu'on engage. On fait comme les employeurs privés, on leur donne, pour toutes sortes de raisons, la chance de réussir des concours, plus qu'à d'autres etc., et on aboutit à des situations de non-sens. Je pense qu'il y a là des éléments sur lesquels il faudrait réfléchir.

Maintenant, l'autre sujet, mais relié à celui-ci. Le ministre a dit qu'il voulait rendre plus onéreux le congédiement des travailleurs de plus de 40 ans, qu'il n'était pas seulement content de les replacer quand ils perdaient leur emploi. Il voulait voir à ce que, éventuellement, les entreprises y pensent à deux fois avant de congédier, en premier lieu, des employés plus âgés.

Je rapproche cela d'une autre affirmation qu'il a faite lorsqu'on discutait des conditions minimales de travail, à savoir que l'ancienneté ne ferait pas partie de cela, c'est-à-dire des conditions minimales de travail.

A ce moment, quel autre mécanisme envisage-t-il? Parce qu'on pourrait imaginer que, dans des règles minimales de travail, lorsqu'il y a des mises à pied, par exemple, elles se font selon un certain ordre. Cela pourrait être imaginable. Je ne sais pas si c'est opportun ou non; évidemment, il faudrait faire des consultations pour le découvrir.

Si les conditions minimales de travail excluent cette dimension, quels sont les éléments concrets auxquels le ministre pense pour rendre onéreux, justement, ou faire réfléchir les employeurs avant de faire des congédiements en commençant par les plus vieux?

M. Couture: II y a une seule avenue. Dans les conditions minimales, j'avoue que j'aurais beaucoup le goût d'introduire cet élément. C'est encore à discuter. Je ne veux pas donner immédiatement de détails sur le projet de loi.

L'autre avenue, c'est la modification à l'article 45 de la loi 49 sur le préavis, où ces règles de préavis rejoignent toutes les entreprises québécoises. Je sais qu'en certain pays d'Europe, entre autres, il y a des catégories de travailleurs qui bénéficient d'une période de préavis plus longue, liée même à un dédommagement matériel. C'est dans ce sens qu'on pourrait agir, mais ce n'est certainement pas pour cette année. Hélas! cela fait partie de notre réflexion à moyen terme, c'est-à-dire qui pourrait éventuellement nous apporter des modifications pour l'année prochaine.

M. Forget: Une dernière question sur la composition technique de l'élément no 2. On a dit que ce ne sont pas seulement les centres de main-d'oeuvre qui sont couverts par ces crédits. Est-ce qu'on peut nous expliquer comment cela est divisé?

M. Couture: Ce sont les services de main-d'oeuvre, mais ce n'est pas seulement le placement qui était couvert par les $9 millions. Il y a, effectivement, la consultation, la qualification, la formation et le reclassement.

M. Forget: Ce qui veut dire que la formation, à l'élément 3, ce n'est pas "compréhensif". Il y a des coûts du programme de formation professionnelle qui sont à l'élément 2 également.

M. Couture: ...le reclassement, contrôle de la qualification de placement et de projets spéciaux.

M. Forget: ...le reclassement.

M. Couture: Si vous voulez avoir une réponse plus exacte, je vais demander au sous-ministre de nous détailler ces titres.

M. Forget: Oui, s'il vous plaît.

M. Couture: Ce qui se fait, effectivement, dans les régions, dans ce qu'on appelle les centres de main-d'oeuvre, ce sont les activités de reclassement, les activités du contrôle de la qualification, les activités du placement et certains projets spéciaux, par exemple le contrôle des projets comme PEN qui se font dans les régions. C'est cela que les $9 millions de cet élément regroupe.

M. Forget: Je vois, mais cela ne représente pas, en pourcentage, une grosse partie de l'activité, malgré tout cela.

M. Couture: Sur le plan des effectifs, cela en représente une grosse partie.

M. Forget: Des centres de main-d'oeuvre.

M. Couture: Oui, des centres de main-d'oeuvre. Il y a le reclassement aussi qui est là-dedans, les centres de main-d'oeuvre et les directions régionales, parce que les centres de main-d'oeuvre dépendent des directions régionales.

M. Forget: Le budget des directions régionales est dans l'élément 2?

M. Couture: C'est à l'élément 2, c'est cela.

M. Forget: Cela couvre les bureaux locaux et les bureaux régionaux.

M. Couture: C'est cela. Le reclassement, c'est vraiment un gros morceau. Vous avez les professionnels, dans les régions mêmes, qui sont appelés à travailler aux comités de reclassement quand il y a des licenciements. Ils ne font pas du placement directement, tout le temps. Ils travaillent aux comités, ils analysent les besoins de chacun des individus. Ils cherchent, avec les partenaires patronaux et syndicaux, des solutions pour chaque cas. Tout le temps qu'ils passent là-dedans, c'est ce qu'on appelle l'opération reclassement. Ce n'est pas, directement, simplement recevoir quelqu'un et le placer.

M. Forget: Le placement, non, d'accord. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, est-ce l'intention du ministre de répéter, cette année, les subventions pour les programmes d'emplois nouveaux?

L'an passé, vous avez eu 54 projets qui ont nécessité $3 675 180 qui ont procuré de l'emploi à 2050 bénéficiaires d'aide sociale. Est-ce votre intention cette année?

M. Couture: Oui, il y a encore un programme là-dessus cette année. C'est combien le montant? $3 500 000 pour cette année.

M. Bellemare: $3 500 000 cette année. Parce qu'il y avait une question à laquelle on avait répondu en Chambre qui m'avait surpris énormément, sur les années 1973/74, il y avait eu $4 540 000 de votés, en 1974/75, $2 500 000, et en 1973/74 des emplois permanents, il n'y en avait eu que 77 de créés avec cette...

M. Couture: Des emplois permanents ou des projets?

M. Bellemare: Non. Des emplois permanents. Des emplois temporaires, il y en a eu 2017. En 1974, la réponse que m'a faite le ministre, c'est qu'il y avait eu 13 emplois sur $2500 et des emplois temporaires, 1033. Alors si cette année les 2050 bénéficiaires sont dans le même ordre, il y en a eu 2000 qui ont été permanents...

M. Couture: Temporaires.

M. Bellemare: Temporaires. Il y en a eu 50 qui ont été permanents.

M. Couture: Vous voulez avoir la réponse là-dessus?

M. Bellemare: Je voudrais savoir si c'est un peu dans le même ordre d'idées que la réponse que m'avait donnée le ministre dans le temps. Parce que comme permanents, c'est très peu. Et comme temporaires, il y en avait eu en 1973/74, 2017 et en 1974/75, 1033. Cette année, vous nous dites dans votre rapport annuel que le montant de $3 675 000 a procuré de l'emploi à 2050 bénéficiaires d'aide sociale. Est-ce que le programme se continue et dans quelle proportion il y a permanents et occasionnels?

M. Couture: On ne peut pas spécifier la proportion de permanents et d'occasionnels là-dedans. On a...

M. Bellemare: C'est parce que je voudrais revenir à ce qu'a dit tout à l'heure le député de Saint-Laurent sur le placement des travailleurs de 45 ans et plus par les partenaires associés. $24 000, ce n'est pas cher pour 577 placements.

M. Couture: Ce n'est pas la même catégorie de...

M. Bellemare: Non, ce n'est pas la même chose, mais c'est le même argent du public, par exemple, qui s'en va à $24 000 dans un endroit et qui produit véritablement un heureux effet. Et ici on a des totaux de $10 632 000 qui procurent à peu près 90 permanents et à peu près 3000 occasionnels pour deux ans.

M. Couture: Je prends note de vos considérations là-dessus. On a les chiffres qui nous disent quand même qu'il y a un effort qui est fait pour aider des assistés sociaux à se placer. J'évaluerai moi-même si on doit modifier l'orientation de ce côté, mais je me réjouis quand même qu'il y ait quelque chose qui se fasse. On a déjà eu des époques où il n'y avait rien qui se faisait.

M. Bellemare: Dans les engagements des occasionnels chez vous, à votre ministère, vous ne devez plus en avoir, je suppose?

M. Couture: II n'y en a pas beaucoup, une trentaine, me dit-on.

M. Bellemare: Dont l'emploi se termine au bout de six mois?

M. Couture: Oui.

M. Bellemare: Et à quatre mois? Et au bout de quatre mois, ils sont soit permanents ou...

M. Couture: Ils peuvent être renouvelés.

M. Bellemare: Ils peuvent être renouvelés! Ils sont renouvelés comme occasionnels?

M. Couture: Oui. Ils peuvent être renouvelés pour une période additionnelle de deux mois. On peut leur donner deux mois additionnels.

M. Bellemare: Oui, deux mois additionnels, cela fait six mois; c'est ce que je dis. Au bout de six mois, en vertu de l'arrêté en conseil, leur engagement est terminé.

M. Couture: C'est cela, c'est exact.

M. Forget: Est-ce que les crédits pour les emplois nouveaux sont toujours au ministère des Finances?

M. Couture: Oui, c'est un transfert qui se fait.

M. Forget: Je comprends que lorsque le programme était expérimental, quand c'étaient les premières années, on ne savait pas si cela durerait ou pourrait se justifier, mais est-ce que le temps ne serait pas venu pour rapatrier cela au ministère du Travail?

M. Couture: C'est bizarre. On essaiera de rapatrier.

M. Bellemare: A la page 77 de votre rapport annuel... D'ailleurs, je voudrais vous poser une question. Est-ce que M. Claude Mérineau qui s'occupait de main-d'oeuvre chez vous est encore à votre service?

M. Couture: Oui, il est actuellement au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, mais il est prêté à la CAT pour un projet de soutien au programme de décentralisation de la CAT. Comme il a des connaissances en main-d'oeuvre, il aide actuellement l'opération décentralisation à la CAT.

M. Bellemare: II est seulement prêté, il n'est pas muté?

M. Couture: Non, il n'est pas encore muté. M. Bellemare: Encore?

M. Couture: II n'est pas muté, point. M. Bellemare: Je vois venir le coup.

M. Couture: Non, non il n'y a pas... je demande...

M. Bellemare: Claude Mérineau est sur la branche? C'est pour cela qu'il a été envoyé là?

M. Couture: M. le Président, je ne voudrais pas qu'on prête d'aucune façon...

M. Bellemare: Non, non, je ne vous prête rien, je vous laisse tout. Il est au comité de restructuration pour la CAT, pour redistribuer dans les régions le personnel, faire la décentralisation.

M. Couture: Oui, il travaille au projet de la décentralisation. Je voudrais quand même préciser, afin que cela ne prête pas à confusion, que quand j'ai dit "pas encore muté" c'est que, de fait, il y a une demande de la CAT pour utiliser ses services. On étudie la question.

M. Bellemare: Vous ne le retiendrez pas. M. Couture: Ce sera la décision du ministre.

M. Bellemare: A la page 77 du rapport annuel, on mentionne que $675 000 ont été consacrés à deux projets pilotes à Drummondville et au Lac-Saint-Jean pour la formation de groupes locaux de concertation. On demandait de réaliser une stratégie communautaire d'emplois dans ces régions. Ces comités ont été formés en 1975. Est-ce que...

M. Couture: C'est avec le fédéral.

M. Bellemare: Est-ce que cela continue encore en 1977?

M. Couture: II y a un projet à Drummondville, m'a-t-on dit.

M. Bellemare: Où sont-ils rendus, ces projets?

M. Couture: Le projet est en cours. C'est dans le domaine des loisirs. J'avoue que suis assez sceptique sur ce genre de collaboration avec le fédéral pour les projets d'emplois communautaires. L'intérêt pour nous d'être présents à ce stade-ci, c'est peut-être de profiter de l'expérience qui est vécue et éventuellement — j'en fais aussi une intention politique — de travailler au niveau du ministère de Travail et de la Main-d'Oeuvre à l'établissement possible d'emplois communautaires — on a eu des essais — pour pouvoir, peut-être plus systématiquement, organiser l'emploi communautaire au Québec pour les années à venir.

Je déplore, entre autres, que finalement, c'est peut-être un peu la faute du Québec, mais le fédéral a eu beaucoup d'imagination. Il faut lui reconnaître que, depuis 1971, il a eu beaucoup d'imagination po'ur susciter , l'emploi communautaire,

mais c'est allé dans toutes les directions, souvent sans cohérence, en enjambant joyeusement les juridictions provinciales.

Au moins, on peut profiter de l'expérience, de ce qui a été vécu. J'ai demandé, d'ailleurs, au ministère de faire une analyse de ces emplois communautaires style PIL. Horizons nouveaux, et le reste, pour nous aider à préparer une stratégie d'intervention du ministère québécois, même dans ce type d'emploi.

M. Bellemare: Une dernière question, parce que le mercredi on finit à midi à cause des caucus. Je m'explique mal qu'à la baie James on ait pu employer 8467 personnes et que les bureaux de placement provinciaux puissent en avoir placé seulement 504.

Cela, je me l'explique bien mal. Les 7963 travailleurs ont été envoyés à la baie James sur demande expresse des employeurs?

M. Couture: Oui, et nous avons été une courroie de transmission, nous les centres de main-d'oeuvre du Québec. Vous avez raison de vous interroger et je vais tout de suite vous dire que le ministre s'interroge profondément là-dessus. Nous cherchons, éventuellement, à récupérer ce service qui avait déjà été donné dans le passé à la baie James. Il y a des négociations, actuellement, avec les employeurs et les syndicats par rapport à la baie James.

Le Président: Programme 2, élément 2, adopté?

M. Forget: Non, M. le Président, j'aurai d'autres questions sur l'élément 2.

M. Chevrette: Pour donner un chiffre précis à M. le député de Johnson...

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le député de Johnson, les dernières statistiques de la baie James indiquent 99,4% d'assignations directes.

M. Bellamare: 99,4%

M. Chevrette: Cela veut dire qu'il reste 0,6% en termes de placements extérieurs, autrement dit. Cela veut dire que les employeurs embauchent directement, à raison de 99,4%.

M. Bellemare: C'est à la page 78 du rapport annuel.

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Marcoux): La commission du travail et de la main-d'oeuvre ajourne ses travaux sine die.

On m'informe que le leader a l'intention de proposer à la Chambre que la commission continue ses travaux demain matin, de 10 heures à 13 heures.

M. Couture: C'est possible que j'informe notre leader que j'aimerais que ce soit plutôt demain après-midi, parce que nous avons une réunion du comité de développement social et nous aviserons s'il y a un changement. Vous le saurez en Chambre.

Fin de la séance à 12 h 1)

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