L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration

Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mercredi 23 novembre 1977 - Vol. 19 N° 254

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 45 — Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 45 Loi modifiant le Code du travail

et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour continuer l'examen, article par article, du projet de loi no 45 intitulé Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond) est remplacé par... alors, M. Brochu (Richmond), au cas il se présenterait. M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Couture (Saint-Henri), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke) est remplacé par M. Vaillancourt (Jonquière); c'est bien ça?

M. Johnson (Anjou), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Marois (Laporte) est remplacé par M. Mercier (Berthier); M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud).

M. Forget: M. le Président, il y aura peut-être M. Ciaccia qui sera remplacé par M. Blank.

Le Président (M. Clair): M. Ciaccia (Mont-Royal) est remplacé par M. Blank (Saint-Louis).

M. Chevrette: Avant que ne débute...

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: ... nous avons parlé à M. le député de Saint-Laurent et à M. le député de Johnson pour que la commission puisse faire rapport en Chambre sur le projet de loi 69. Etant donné qu'hier, le président de la commission avait dit que le même rapporteur servirait pour les deux projets de loi, et comme on n'a pas commencé l'étude du projet de loi 45, on pourrait sans doute, avec le consentement des membres, faire préparer un rapport spécifique sur le projet de loi 45 et sur le projet de loi 69.

Le Président (M. Clair): Je pense que c'est conforme à l'esprit de notre règlement.

M. Forget: C'est ce que j'avais compris, M. le Président, même à partir de vos remarques hier, en disant que le rapporteur ferait rapport sur le projet de loi 69 au moment opportun. J'avais cru que le moment opportun serait présumément avant le moment opportun pour le projet de loi 45. Mais je n'ai aucune objection.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson?

M. Bellemare: M. le Président, comme je l'ai dit au député de Joliette, ce n'est pas conforme à notre règlement. C'est un peu un cas spécial, je suis prêt à l'accepter; parce que le projet de loi 69 a été vidé, examiné, je pense que je n'ai aucune objection, même si c'est contraire au règlement, je suis prêt à faire...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, peut-être qu'en vertu de l'article 161 qui dit, à l'alinéa 2...

M. Bellemare: Article 161.

Le Président (M. Clair): ... "une commission peut, en tout temps, faire à l'Assemblée des rapports spéciaux ou intérimaires", on peut peut-être considérer cela comme un rapport spécial ou intérimaire.

M. Bellemare: Oui, mais l'article 161 dit aussi, "une commission peut, en tout temps, faire à l'Assemblée des rapports spéciaux ou intérimaires".

Mais, toutefois, un membre d'une commission peut s'opposer au dépôt. N'oubliez pas cela. Toutefois, un membre d'une commission peut s'opposer au dépôt du rapport par cette commission, en exposant brièvement les motifs de son opposition.

Si je voulais, ce matin, comme le député de Saint-Laurent, on pourrait s'opposer et dire: On nous a fait siéger, à la commission du travail et de la main-d'oeuvre, mais sur deux projets de loi, 45 et 69; on a donné la priorité à 69, il est terminé. Je n'ai aucune objection à ce qu'il passe.

Le Président (M. Clair): Soyons de bon compte et considérons cette affaire close. Demandons au rapporteur, le député de Berthier, de faire rapport à l'Assemblée nationale. Lorsque nous avons ajourné nos travaux hier, nous en étions rendus à l'exposé préliminaire du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, concernant le projet de loi no 45, Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. M. le ministre du Travail.

M. Laplante: Pouvez-vous vérifier exactement qui est rapporteur? Dès la première audition, on nous a dit que c'était M. Jolivet, de Laviolette, et aujourd'hui, c'est M. Mercier. Pourriez-vous faire une vérification, s'il vous plaît?

Le Président (M. Clair): Si c'était M. Jolivet qui avait été désigné rapporteur au tout début, c'est M. Jolivet qui l'est toujours. Hier, lorsque j'ai posé la question, d'un commun accord, les membres de la commission avaient dit que c'était le député de Berthier. Je vais demander

au secrétariat des commissions de vérifier et je vous indiquerai le résultat plus tard. M. le ministre du Travail.

Exposé préliminaire du ministre, M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, nous abordons ce matin l'étude, enfin, article par article, du projet de loi 45. Je vais essayer, dans mes propos dits préliminaires, ce matin, de me limiter à resituer dans son contexte le projet de loi 45 ainsi que les amendements que j'y ai apportés hier.

Je vais faire un bref rappel. Il y a eu, à une certaine époque, sous le gouvernement qui nous a précédés, un projet qui s'appelait le projet de loi no 24, qui avait été soumis au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Ce projet comprenait différentes dispositions qu'on retrouve aujourd'hui dans le projet de loi 45, dispositions, d'ailleurs, qui ont fait l'objet, pendant deux ans et demi, de discussions considérables par les différents agents intéressés à la question des relations du travail au Québec et à l'application du Code du travail.

Le gouvernement actuel a choisi, dans le projet de loi 45, d'ajouter à plusieurs de ces dispositions certaines autres dispositions ainsi que d'y confirmer certains arrêts de la jurisprudence quant à l'interprétation de certains articles.

Parmi les dispositions qu'on qualifierait de nouvelles dans le projet de loi 45, on retrouve évidemment le précompte syndical obligatoire qui n'est pas la formule Rand et, je le répète, celui qui vous parle n'a jamais prétendu qu'il s'agissait de la formule Rand, mais, pour les fins de la compréhension, on a souvent fait allusion à cette formule, le précompte syndical obligatoire que nous justifions, en vertu de deux principes; le premier, que j'appellerais un principe de réalité qui est l'existence de fait de cette formule de précompte syndical obligatoire quand ce ne sont pas carrément des dispositions qui vont beaucoup plus loin quant à la nécessité d'appartenance au syndicat dans au-delà de 90% des conventions collectives et, un second principe, celui qui a été invoqué de façon générale en Amérique du Nord, quand on parle de "compulsory check off", aux Etats-Unis en particulier, c'est-à-dire que les personnes qui bénéficient des dispositions d'une convention collective devraient évidemment participer au financement de l'organisme par le truchement duquel elles obtiennent de telles conditions, c'est-à-dire l'association accréditée.

On retrouve également, dans le projet de loi 45, des dispositions dites antibriseurs de grèves qui, sur le plan de la rédaction, sont, en fait, une prohibition imposée à l'employeur. Ce sont des articles prohibitifs ou exclusifs dans leur application et nous ne tentons pas de définir ce qu'est un "scab"; on utilise généralement cette appellation dans le milieu du travail. Simplement, nous balisons le cadre dans lequel l'employeur peut fonctionner ou maintenir un minimum d'activités en affirmant clairement le principe que l'individu qui est en grève légale ne doit pas se voir remplacé par une personne de l'extérieur.

Cependant, avec les amendements que nous avons apportés hier, nous croyons qu'il s'agit là du maintien du principe. Quoiqu'on en dise, ce projet de loi, malgré les amendements qui ont été apportés hier, demeure un des projets de loi les plus progressistes dans ce domaine dans le monde.

Cet amendement que nous avons apporté hier, sur lequel nous aurons l'occasion de discuter, je présume, peut-être pas d'ici quelques heures, mais d'ici quelques jours, cet amendement prévoit le maintien ou l'empêchement à la détérioration grave ou à la destruction des biens meubles et immeubles et vise simplement à ne pas forcer à mettre dans l'illégalité un employeur qui prendrait les mesures nécessaires pour ne pas voir ses biens meubles et immeubles détruits à cause d'un arrêt de travail. Il ne s'agit pas de soustraire l'employeur à l'application de l'article qui, en pratique, dans bien des cas, signifie une diminution ou un arrêt de la production.

Quant au vote secret qui a fait également l'objet de longues discussions sur la place publique et qui a soulevé l'ire de la plupart des centrales syndicales, je pense que c'est en vertu du principe que les syndicats, dans notre société, occupent une place de nature quasi publique, que ce vote secret devient obligatoire. Encore une fois, faut-il constater que le principe de la réalité qui prévaut dans cet article est fondamental. La réalité, c'est que l'immense majorité des syndicats procède au vote secret pour des grèves, et même celles qui risquent de causer le plus d'ennuis. On en connaît une en ce moment.

Cependant, le projet, à ce niveau, et comme pour d'autres dispositions, a valeur, à mon avis, de message d'une certaine façon auprès des parties. Il est un message par l'affirmation claire du Parlement — je l'espère, quand ces articles seront adoptés — que la démocratie syndicale, la santé et la pureté des structures syndicales passent nécessairement par le respect du vote secret, de la possibilité pour le salarié en conscience de poser un geste dans l'isoloir, un geste qui habituellement affecte son bien-être, pour qu'il puisse le faire librement, sciemment et en toute connaissance de cause.

Cela dit, je tiens à le répéter, il s'agit de dispositions qui sont aujourd'hui même, sans même qu'il n'y ait de loi, généralisées dans la plupart des syndicats.

Au sujet du vote secret, les amendements que nous avons rendus publics hier, en fait, simplifient une mécanique qui risquait de devenir l'objet d'une guérilla judiciaire qui n'est souhaitée par personne. On rencontre également des dispositions concernant l'arbitrage de la première convention collective.

Il s'agit, en pratique, au niveau de la réalité, de ces 23 à 29 cas par année qu'on retrouve au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre de-

puis maintenant cinq ou six ans. Ce sont des grèves ou des lock-out qu'on peut qualifier généralement de grèves ou lock-out de reconnaissance syndicale. Les articles, avec les amendements que nous avons introduits hier, se veulent à la fois une incitation envers les parties à régler, en même temps que la possibilité de mettre fin, de façon même préventive, à un conflit qui risque de perdurer. En effet, les négociations d'une première convention collective qui ont donné lieu à des grèves, tout comme ces grèves où il y a emploi de scabs, sont des grèves qui durent plus longtemps que la moyenne des grèves.

On retrouve évidemment, dans ce projet de loi, d'autres dispositions qui touchent ce que j'appellerais un nouveau mécanisme dans les relations de travail, l'introduction de la conciliation volontaire, qui est un choix délibéré, accepté par les parties depuis fort longtemps, qui risque évidemment de changer considérablement la dynamique du rôle et le rôle, dis-je, du service de conciliation du ministère et avec lequel nous apprendrons à vivre. Je pense que, fondamentalement, ces dispositions sont bonnes. Je pense que ces dispositions, qui nous feront connaître sans doute certaines difficultés, sont fondamentalement un effort pour restaurer la responsabilité au niveau des parties de la négociation. En ce sens-là, la conciliation volontaire, ainsi que la conciliation qu'on pourrait juger, ou la préconciliation préventive qu'on introduit par l'avant-dernier article du projet de loi, sont, je pense, la base d'une nouvelle approche en matière de relations de travail au Québec. Cette approche sera caractérisée, je pense, par la responsabilité ou la non-responsabilité des parties. Celui qui vous parle, comme ministre du Travail, est convaincu que, de façon générale, les parties au Québec qui ont démontré dans le passé qu'elles pouvaient conclure des contrats collectifs dans une proportion de 95%, sans avoir recours aux grèves ou aux lock-out, sont aptes à assumer ce type de responsabilité dans un contexte de conciliation volontaire.

C'était là, M. le Président, l'essentiel des dispositions qui m'apparaissent les plus fondamentales dans ce projet de loi.

Je voudrais terminer en explicitant d'autres dispositions, celles-là de nature plus technique, mais qui m'apparaissent également traduire fondamentalement ce qu'est la philosophie de ce gouvernement face au syndicalisme.

Ce sont ces dispositions qui visent à faciliter le droit d'association. Dans un contexte de contestation parfois très émotif, de la part surtout des milieux patronaux, il serait facile pour celui qui vous parle d'affirmer qu'il y a un clivage entre la "base" et "l'establishment" syndical.

Celui qui vous parle est convaincu que le syndicalisme a passé le test le plus important qui existe dans une société, c'est le test de l'histoire. S'il n'y avait pas eu de syndicalisme en Amérique du Nord, on retrouverait aujourd'hui des enfants de douze ans dans les mines. S'il n'y avait pas eu de syndicalisme en Amérique du Nord, on retrouverait encore un état d'anarchie dans certains secteurs et un irrespect des droits des salariés. Les salariés forment, au Québec, la majorité de la population. Ils forment également ceux qui participent, par leurs deniers, par les impôts qu'ils paient, au plus gros montant de l'assiette fiscale du gouvernement et, à ce titre, les salariés, au Québec, ont le droit d'avoir au moins une oreille attentive de la part du gouvernement.

Je pense que les dispositions qui facilitent le droit d'association visent d'abord et avant tout à reconnaître que le syndicalisme... Et je parle du syndicalisme, je ne parle pas de ceux qu'on a appelés establishment syndical, sans faire cette distinction qui parfois à mes yeux, est absolument artificielle et démagogique, le syndicalisme, comme mouvement collectif d'êtres humains qui choisissent de prendre en main au maximum leurs responsabilités, à travers les structures qu'ils se donnent et qu'ils tentent ou qu'ils maîtrisent. Le syndicalisme doit être vu, je pense, d'abord, comme faisant partie de la réalité quotidienne au Québec.

Ceux qui mènent encore des combats d'arrière-garde pour se prémunir contre le syndicalisme ou ceux qui adoptent des tactiques qui, fondamentalement, sont des tactiques rétrogrades — il y en a encore dans notre société — qui voient le syndicalisme comme étant une menace à l'entreprise privée, comme étant une menace à un mode de fonctionnement sur un plan économique dans une société, je pense qu'ils se trompent.

Ceux qui font vivre certains experts en matière de relation de travail ou certains avocats en utilisant parfois, de façon que je qualifierais de très peu de bonne foi, le Code du travail. Ils se trompent car l'évolution du syndicalisme va de pair avec l'évolution de notre société. Les articles portant sur le droit d'association en ce sens, M. le Président, m'apparaissent fondamentaux.

En terminant, M. le Président, et avant que nous entendions les exposés de nos collègues de l'Opposition, j'aimerais simplement référer à ces amendements que j'ai rendus publics hier et que, quoi qu'on en dise, à mon avis, ne changent évidemment pas les principes fondamentaux de ce projet de loi. Les principes fondamentaux, ce sont, au-delà des amendements qu'on a qualifiés de techniques, la formule de précompte syndical obligatoire, une disposition antibriseurs de grève qui demeure la plus progressiste au monde, l'arbitrage de la première convention collective et le vote secret, évidemment. Les amendements que j'ai apportés hier ont été faits pour satisfaire celui qui vous parle et satisfaire ce gouvernement, et non pas pour satisfaire quelque groupe que ce soit. Celui qui vous parle, comme ce gouvernement, croit que son devoir est d'abord et avant tout envers l'ensemble de la collectivité québécoise et non pas envers un groupe particulier. Merci.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

Remarques de l'Opposition M. Claude Forget

M. Forget: M. le Président, j'ai le même objectif que le ministre dans ses remarques préliminaires. Je n'ai pas l'intention d'anticiper l'étude, article par article, d'un seul coup et en un seul bloc au moment de ces remarques préliminaires. J'aimerais situer un peu l'étape à laquelle nous nous trouvons, dans le moment, dans l'étude de ce projet de loi, pour au moins essayer de communiquer aux membres de la commission et au public la perception qu'on a de ce processus de révision du Code du travail dans lequel on est engagé, le chemin qui a été parcouru depuis quelques mois et ce qu'on peut attendre pour l'avenir, en considérant non seulement le projet de loi 45, les débats qui ont eu lieu depuis son dépôt et finalement les modifications que vient d'introduire le ministre.

On se souvient que, l'été dernier, on a mis beaucoup de hâte à déposer un projet de loi, quelque trois semaines après la nomination du ministre, à assurer la deuxième lecture du projet de loi, moins de deux mois après la nomination du même ministre, tout ceci se faisant comme si on voulait à tout prix faire une affirmation solennelle, à l'époque, on l'a dit, le gouvernement l'a dit, le premier ministre lui-même l'a dit de façon assez imagée: le gouvernement a fait son lit.

On a procédé très rapidement au dépôt et à l'adoption, en deuxième lecture, du projet de loi; c'était ça, faire son lit. C'est ce qu'on nous a fait comprendre. C'était un peu comme si on voulait s'assurer que cette affirmation ne faisait pas l'objet d'un examen trop attentif, étant donné que tout cela s'est fait durant l'été, pendant l'espèce de désert des vacances, je pense bien que les débats du Parlement n'ont pas eu beaucoup d'écho dans la population. On a éliminé une véritable commission parlementaire avant la deuxième lecture pour diminuer encore davantage les chances que cette affirmation symbolique que le gouvernement voulait faire à l'époque, le plus rapidement possible et avec le minimum de discussion, justement afin qu'elle ne soit pas exposée à un barrage d'analyses et de critiques qui en montrerait le caractère un peu vide.

Ce n'est pas un événement isolé que cette façon de légiférer. On est maintenant en face d'amendements qui démontrent combien l'analyse du projet de loi a pu susciter de doutes et d'interrogations, pas seulement dans le public, mais au sein du gouvernement lui-même. Le gouvernement du Parti québécois, depuis un an, nous habitue, je pense — ce n'est pas exagéré de le dire — à la notion de législation par étapes, on fait de l'étapisme législatif. On est aussi habitué de plus en plus à découvrir que la trouvaille du siècle arrive à la deuxième étape.

La deuxième étape qui nous a été présentée, hier, est sensiblement différente, quoiqu'en dise le ministre, sur la permanence des principes, de la première étape.

Encore une fois, le premier projet, le projet 45, tel que déposé l'été dernier, c'était, nous l'avons dit à l'époque, largement un trompe-l'oeil. On pourra nous accuser de vouloir déprécier le projet de loi. C'était certainement un symbole — c'est peut-être un mot un peu plus neutre — du préjugé favorable aux travailleurs qui était ce lit dans lequel le gouvernement voulait se coucher, soi-disant.

La deuxième version améliore sensiblement, sur le plan technique, je dois le dire en commission, devant le ministre, un certain nombre de dispositions.

Mais les dispositions essentielles elles-mêmes, celles que le ministre a mentionnées, dans leur forme modifiée, ne donneront satisfaction à personne. Ce n'est pas surprenant, parce que leur raison d'être initiale, la mesure "anti-scabs", en particulier, n'est pas de régler un problème bien précis. Elle est d'affirmer une espèce de symbolisme gouvernemental. Quand on se met à jouer dans les symboles, on leur fait perdre leur caractère symbolique, sans, d'un autre côté, leur donner un sens bien précis. Le symbole a largement disparu dans sa dernière version de la mesure "anti-scabs", sous prétexte de modifications techniques. Le symbole a disparu et on n'a pas, pour autant, une disposition qui va aider qui que ce soit, qui va satisfaire qui que ce soit.

Il y a une certaine préoccupation qu'on pourrait qualifier de technocratique, une certaine préoccupation technique, disons, quant à l'efficacité de certains mécanismes, mais il n'y a pas, dans ce projet, tel que révisé, une perception claire des caractéristiques essentielles, fondamentales des relations de travail.

Les positions que certains observateurs du milieu académique ou que certains spécialistes des relations de travail ont défendues, par exemple, sur le plan des libertés fondamentales du travailleur, face au patron, face à tous les organismes qui déterminent son environnement, ce sont, bien entendu, des modifications auxquelles on peut applaudir.

Mais ces modifications ne semblent pas procéder d'une conception claire et nette des caractéristiques fondamentales des relations de travail. Ce sont des concessions à des pressions, mais ce n'est pas l'expression d'une vision d'ensemble de ce que devraient être les relations de travail, de ce que devrait être le cadre juridique des relations de travail.

Le patronat a fait aussi des représentations. On lui a fait, sur certains points également, des concessions. Mais on ne peut pas dire que ce qui en résulte exprime de façon cohérente et claire une vue d'ensemble, communicable, de ce que devraient être les relations de travail. J'y reviendrai un peu, et même beaucoup, lors de l'étude, article par article.

Mais il est bien clair, si on regarde les prescriptions "anti-scabs", qu'on s'est éloigné d'une espèce de mesure exclusive, comme l'a dit le ministre, ou d'une prohibition générale, pour la

qualifier de toutes sortes de façons. C'est une concession évidente à des représentations, pour ne pas dire à des pressions qu'a exercées le patronat sur le gouvernement.

Ce qui en résulte, c'est quelque chose d'à peu près indéfinissable, une espèce de symbole qualifié, qui, encore une fois, ne satisfera ni les syndicats — on en a eu dès hier, par la réaction de la CSN, une démonstration claire... Il faut tout à fait s'attendre que les autres centrales syndicales réagissent de la même façon. Cela ne correspond plus à rien de bien précis chez eux. Pour le patronat, même si c'est une concession, ce n'est certainement pas un gain, c'est quelque chose qui se trouve dans la loi, dont la signification va probablement faire l'objet de litiges, de controverses. Donc, c'est quelque chose qui demeure, malgré tout, négatif.

De façon générale, M. le Président, on doit déplorer l'absence de pertinence de ce débat sur le Code du travail et de ses modifications depuis quelques mois. Ce qui me frappe, en tant que nouveau venu dans ce domaine, c'est le degré avec lequel l'esprit juridique s'est emparé des relations de travail. Je crois qu'on a une très bonne démonstration, par cette discussion, de ce que l'esprit juridique est incapable de faire, dans un sens positif, des limites de l'esprit juridique.

C'est un malaise qui est particulier au Québec, puisque les avocats au Québec, à mon avis, se sont emparés des relations de travail, un peu de la même façon que, parfois, ils s'emparent des relations conjugales, avec à peu près le même effet désastreux.

M. Bellemare: Vous ne parlez pas des assurances.

M. Forget: Oui, on pourrait parler de certains autres domaines aussi. Je ne veux pas en faire une condamnation générale de la profession juridique que j'ai d'ailleurs reçue à une autre époque, mais je pense que, lorsque tout un domaine d'activités humaines devient imprégné d'un esprit professionnel, de l'esprit d'une profession donnée avec sa mentalité antagoniste naturelle, parce qu'on a toujours affaire éventuellement ou on risque de toujours avoir affaire à un tribunal, donc, à une opposition des parties où le litige et la façon de régler les litiges font partie de la mentalité juridique, je crois qu'on trouve là un des problèmes fondamentaux.

Bien sûr, la profession juridique peut toujours dire que la nature craint le vide ou déteste le vide et qu'elle est entrée dans ce domaine parce que d'autres ne l'occupaient pas. Il se peut très bien que le patronat, à l'origine, ait une grande part de responsabilité, puisque la réaction presque instinctive, lors de la venue d'un syndicat dans une entreprise, ce n'était pas de traiter cela comme un problème de gestion, mais d'appeler son avocat pour voir s'il ne pouvait pas faire quelque chose contre cela.

Ce n'est peut-être pas étonnant qu'avec les années, on ait pris ce pli, mais, sur le plan législa- tif, nous tous, membres de la commission, comme législateurs, je crois qu'on n'a peut-être pas fait les efforts suffisants pour nous sortir de cela et pour observer les comportements, essayer de les comprendre, essayer de les faire évoluer plutôt que d'essayer de légiférer sur la vertu. C'est là que le symbolisme qui était compris dans le projet de loi 45 tel qu'il a été déposé l'été dernier participe et est imprégné de cette mentalité juridique.

On a présumé, dans ce projet de loi, qu'il s'agissait de prononcer de grands principes pour faire avancer les choses, de grands principes qui servaient de symboles et qui servaient à témoigner une certaine orientation qu'on voulait donner au gouvernement et on s'est rendu compte qu'avec ce symbolisme, après réflexion, on s'engageait dans une voie sans issue, pas seulement parce que les symboles étaient peut-être un peu mal trouvés, mais surtout parce qu'ils étaient très superficiellement définis en termes purement juridiques. Cela ne peut pas porter de fruits.

M. le Président, le ministre nous a donné des indications, à plusieurs reprises, durant les dernières semaines, qu'une enquête qui serait faite sur l'ensemble de ces problèmes, ce qui nous laisse entendre que tous ceux qui ne sont pas satisfaits du projet de loi 45 et des amendements qu'il y a apportés hier peuvent, malgré tout, conserver l'espoir d'avoir gain de cause, éventuellement, dans un monde plus ou moins idéal ou imaginaire qui verra le jour lorsqu'on aura jugé bon de former la fameuse commission d'enquête et qu'elle aura jugé bon de recruter son personnel, d'entendre tout le monde encore une fois, de rédiger laborieusement son rapport, de le soumettre officieusement et officiellement, après, au gouvernement et que celui-ci aura jugé bon, après étude, de le publier et de faire connaître son point de vue et, après, de rédiger, peut-être, un projet de loi. Tout ceci nous met dans des échéances extrêmement lointaines. A mon avis, il devient clair qu'après l'affirmation symbolique du projet de loi 45 qui, je pense — c'est tout à fait juste de le dire pour le titulaire actuel du ministère — était plutôt le fait d'un ministre du Travail doctrinaire, on a actuellement une opération qui est menée par un véritable homme politique qui est le ministre actuel du Travail qui se rend compte que cette avenue est sans issue et qui préfère, peut-être sagement sur un plan strictement politique, faire certaines concessions quant au projet de loi qui est devant nous et, d'autre part, noyer le poisson dans une commission d'enquête qui ne verra le jour, quant à ce qui est de son rapport, que dans des échéances qui sont confortablement éloignées, qui se situent très probablement après une éventuelle élection à la fin du mandat du gouvernement actuel.

Je le dis avec un peu d'ironie, parce que, finalement, il n'y a presque pas d'autre façon de comprendre ce qui nous arrive dans tout cela. C'est assez grave finalement, car ce nouveau gouvernement a disposé durant la dernière année d'une période d'accalmie, qui était due autant au fait que c'était un nouveau gouvernement à qui on voulait attribuer, donner toutes les chances possi-

blés, et, sans aucun doute, il les méritait. D'autre part, les grandes échéances dans le domaine des relations de travail, dans le secteur public, étaient soit passées ou à venir. Il y avait donc une période de répit. C'est un petit peu tragique qu'on se retrouve, à la fin de cette année, avec une espèce de projet qui, dans le fond, n'est ni chair ni poisson, et seulement une promesse de remettre à un avenir indéfini l'étude du problème qui, au Québec, est peut-être le problème le plus important. Je le dis avec toute la conviction dont je suis capable. C'est un domaine auquel je me suis attaché depuis un an et auquel, je peux peut-être le dire, je me serais peut-être attaché, de toute façon, en toute circonstance, pas parce que j'ai la prétention d'avoir des solutions, mais parce qu'il me semble être au coeur du problème du Québec. Alors, cela me désole d'autant plus car, même avec tous les éléments positifs dont jouissait le nouveau gouvernement, ce délai, cette possibilité de faire un départ, de repartir à zéro en quelque sorte, je n'ai pas l'impression, en ayant suivi le débat depuis quelques semaines et en voyant le genre de projet sur lequel on débouche, qu'on fait un progrès sensible pour la solution de ce problème, un problème de retrouver un certain consensus social au Québec.

Je n'en fais pas le blâme entièrement au gouvernement, parce que ce serait injuste. Je pense que la bonne volonté est évidente de ce côté. Ce que l'on peut critiquer, c'est le jugement, mais pas la bonne volonté. Je ne m'embarquerai pas dans cela, parce qu'on a eu d'autres démonstrations, hier, que c'est un terrain qui peut être désagréable, pas ici en commission, je dois le dire. Ce n'est pas la mauvaise volonté qui fait défaut, ce n'est pas seulement le gouvernement, bien sûr, qui peut régler le problème, mais le gouvernement a un rôle de catalyseur évident à jouer là-dedans. Je ne suis pas sûr, encore une fois, qu'il ait saisi la chance de le jouer dans tout cela. Il y a des responsabilités du côté patronal, c'est clair qu'il y a des attitudes patronales, répréhensibles. Elles ne sont pas chez les organismes représentatifs qui, eux, ont appris, se sont mis à l'heure de 1977. Le Conseil du patronat, autant que j'ai entendu ses représentants, n'a jamais exprimé des vues antisyndicales et des conceptions du XIXe siècle, mais c'est un organisme représentatif, c'est aussi peut-être l'avant-garde du mouvement patronal qui s'exprime par un organisme comme celui-là. Mais il y a encore des résistances dans le monde patronal. Je crois que le Conseil du patronat en est conscient et, sans qu'il en fasse l'aveu publiquement, il va sans aucun doute travailler à faire évoluer les mentalités de son côté. De toute façon, il a une responsabilité de ce côté.

Il y a du côté syndical aussi des responsabilités très lourdes qui doivent être assumées. Pour avoir participé à un tas de colloques et de discussions et avoir écouté un tas de représentations sur le sujet depuis quelques mois, il est clair que le syndicalisme québécois est à la croisée des chemins. Il y a des démons qu'il doit exorciser en son propre sein. On peut douter de la possibilité, pour la société dans son ensemble, de savoir comment agir ou réagir face au mouvement syndical tant que celui-ci n'a pas clarifié sa conception de la société et la conception du rôle qu'il entend y jouer. Je pense que je n'apprends rien à personne. Il y a des tiraillements à l'intérieur du mouvement syndical. Il y a des orientations. Il y a des vocabulaires qui s'en vont dans toutes les directions à la fois.

Le syndicalisme est trop important, de nos jours, le mouvement syndical est trop important dans la société pour que ce genre de surenchère ou d'hésitation du côté syndical n'ait pas des effets très profonds. Bien sûr, le gouvernement n'est pas en mesure, de ce côté-là, de trancher pour le mouvement syndical, pas plus qu'il n'est en mesure de trancher pour le patronat. Mais il me semble que cette façon de faire avancer les choses, par des lois comme celle qui est devant nous, n'est pas susceptible de stimuler, d'aiguillonner ni l'un ni l'autre des grands agents économiques à faire vraiment des progrès.

Depuis trois ou quatre mois, chacun est braqué, dans le fond, contre l'autre et, dans une certaine mesure, contre le gouvernement au sujet de mesures qui ne régleront rien de fondamental, qui n'apporteront aucune solution. D'abord, dans leur formulation essentielle, elles n'étaient peut-être pas censées en apporter, c'était du symbolisme. Maintenant, il y a certaines mesures un peu plus concrètes, mais étant donné que cela s'est fait dans ce climat, je ne pense pas qu'il faille en attendre des déblocages.

Alors, M. le Président, je termine ici en concluant sur un ton un petit peu déçu, en félicitant malgré tout le ministre pour certains amendements qui améliorent des choses — j'aurai l'occasion de les relever, de les soulever. Des détails, des techniques, mais des détails parfois importants et des techniques qui apporteront leur contribution. Cela, je veux bien le reconnaître et, encore une fois, j'y reviendrai. Mais, sur l'essentiel, c'est une loi qui ne satisfera personne et qui laisse le Québec exactement dans le même état qu'il était, pas mieux, ni pire, mais aussi indécis, aussi incertain de l'avenir des relations de travail à la fin de l'automne 1977 qu'il l'était malheureusement — c'est tout à fait vrai de le dire — l'année précédente.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: M. le Président, le 29 juillet de cette année, lorsque le ministre du Travail a déposé le projet de loi no 45, cela m'a donné l'impression, moi, personnellement, que c'était un projet de loi improvisé et spécialement fait pour jeter de la poudre aux yeux à bien des personnes. Le 26 août, lorsqu'on en a fait la deuxième lecture, mon collègue de Richmond a fait un discours que j'ai relu avec plaisir. Il y avait certaines notes discordantes et il attirait l'attention du gouvernement sur certains faits particuliers.

Aujourd'hui, je pense que c'est avec beaucoup de maturité, malgré son jeune âge, bien qu'il ne soit ministre que depuis quelques jours, qu'il apporte 46 amendements à ce projet de loi no 45. C'est un volumineux document, mais, comme je l'ai dit moi-même et je le répète, à la suite de bien d'autres, le ministre s'est engagé sur la voie d'une amélioration plus considérable, en préconisant probablement une commission royale d'enquête sur tout le Code du travail.

Si c'est vrai qu'on évolue plus vite maintenant dans le domaine des relations de travail qu'on ne l'a fait pendant 20 ans ou 30 ans, ce n'est pas simplement pour s'emparer, comme le disait tout à l'heure le député de Saint-Jacques, d'un esprit juridique. Non, je pense que c'est le temps, les circonstances, les modalités nouvelles, les conventions collectives qui ont un peu changé leur orientation, qui demandent beaucoup, aujourd'hui, de conseils juridiques. C'est aussi une protection plus personnifiée de l'intérêt public qu'ont apportée l'employeur et les syndicats. Ce sont aussi les droits des citoyens, en vertu de la nouvelle charte des droits de l'homme, qui ont évolué d'une manière plus rapide. C'est tout ce consensus de l'esprit juridique que l'on retrouve, beaucoup plus aujourd'hui que lorsque je fus moi-même ministre du Travail.

Ce n'est pas seulement un symbole. Au contraire, je pense que c'est une activité qui est nécessaire et le législateur, particulièrement nous qui avons la responsabilité d'orienter les responsabilités vis-à-vis de l'application du Code du travail, je pense que c'est notre devoir de pouvoir orienter ces 750 000 syndiqués sur 2,3 millions travailleurs.

Nous aurons avant longtemps, d'ici 1980, 1985, probablement pas loin de 900 000 ou un million de nouveaux syndiqués et ce sera un bataillon rangé auquel le gouvernement, les employeurs, les industriels devront faire face.

Alors, nous qui sommes ici avec une certaine expérience voulons répondre au moins à certains besoins urgents qui font que le projet de loi 45 retrouve, véritablement, en 1977, sa juste place, et particulièrement après les recommandations que nous avions faites en Chambre, les recommandations que nous ont faites le Conseil du patronat et les centrales syndicales.

Nous devons, nous aussi, prendre nos responsabilités. Je pense que, si ces amendements sont de nature technique, il faut se rendre à l'évidence qu'un grand nombre apporte des modifications importantes à plusieurs principes sur lesquels nous nous sommes prononcés en deuxième lecture, d'ailleurs.

Simplement à titre d'exemple, je vous rappelle qu'on apporte des modifications de base sur les votes syndicaux — article 8 — arbitrage des griefs, aux articles 46 à 50; la formule Rand, si l'on préfère, le précompte syndical obligatoire, à l'article 28; arbitrage d'une première convention collective, à l'article 44; il y a la clause "anti-scabs», les briseurs de grève, à l'article 51 et aussi le rappel au travail, à l'article 52...

Sur ces trois points, le ministre le sait, la controverse a été assez vive. Tant des patrons que les syndicats ont fait valoir devant nous, à cette commission parlementaire, sur une base plus restreinte que nous ne l'aurions souhaité, mais tout de même, cela nous a permis au moins de les entendre brièvement...

Je dis que les patrons et les syndicats nous ont fait valoir les raisons pour lesquelles ils approuvaient ou ils désapprouvaient tel ou tel article du projet de loi.

M. le Président, à la lecture des propositions d'amendements que le ministre nous a soumises hier, je me rends compte que cet exercice que nous avons fait n'a pas été futile et particulièrement inutile.

Ce document des amendements qui nous est parvenu hier — nous avons passé un certain temps, hier soir, à l'examiner très sérieusement — est la preuve que nous avions raison de nous battre pour que le cadre de la commission parlementaire soit élargi. Même si nous n'avons pas obtenu la véritable commission parlementaire, cela a permis à tous les intéressés ici de constater que cela a porté fruit, mais je suis d'autant plus satisfait que le ministre lui-même, dans une déclaration qu'il a faite ces jours derniers et qu'il nous a annoncée en Chambre, a dit qu'une commission formée de deux personnes de son ministère étudiait la possibilité d'une commission royale d'enquête sur le Code du travail.

En 1964, quand le premier Code du travail nous est arrivé, je n'ai pas besoin de vous dire qu'on était dans l'Opposition à l'époque et j'avais fait ajouter quelque quarante articles d'amendement qui ont peut-être servi à quelque chose, mais cela faisait 20 ans, 30 ans et on n'avait jamais eu véritablement un Code du travail.

On marchait, selon les relations patronales-ouvrières, selon la Commission des relations du travail, mais on n'avait pas réellement de Code du travail qui était devenu une nécessité.

De 1964 à 1974, il y a eu une grande évolution. De 1974 à aujourd'hui, les media d'information, les journaux, les avantages qu'on a, entre les différents groupes, pour donner son point de vue, particulièrement à cause de l'étendue considérable qu'ont prise, comme mainmise, les conventions collectives sur certaines responsabilités, certains droits qui appartenaient à l'employeur. On l'a fait consentir à céder devant un esprit de persévérance, mais avec certains arguments qui ont obligé même les patrons à reculer et à céder certains droits qui leur appartenaient. Aujourd'hui, on étudie une loi qui établit plutôt, à cause des amendements, un juste équilibre. Je n'irai pas jusqu'à dire, comme l'honorable député de Saint-Laurent, qu'on revient à l'ancien temps, non. On progresse. Pour moi, en tout cas, je dis: On progresse. On ne reste pas dans le statu quo, on progresse et il faut progresser. Ce que nous faisons ici ce matin, dans deux ans, trois ans, nous assisterons peut-être à un changement aussi draconien. Il y a cinq ans, il y a dix

ans, je me souviens, quand l'honorable leader de la province, le député de Maisonneuve a présenté une loi pour la formule Rand, il faudrait que vous relisiez le journal des Débats pour entendre ce qu'avait dit dans le temps le parti au pouvoir. Aujourd'hui, la formule Rand est admise dans 90% ou 95% des cas. Il reste un léger pourcentage où la formule Rand n'est pas appliquée. Ce ne sera peut-être pas la formule Rand, mais ce sera peut-être la formule Burns, dans le temps, concernant certains droits et certaines exigences qu'avait mis dans son jugement de 1926 le juge Burns. Une chose rare dans ce gouvernement qui se plaît à se qualifier de transparent... 1948? C'est 1946 que j'ai dit?

M. Forget: 1926.

M. Bellemare: Non. J'étais au pouvoir. Chose rare dans ce gouvernement qui se plaît à se qualifier de transparent, je constate également, tout à l'honneur du nouveau ministre, que ce dernier a non seulement écouté, mais il a compris et il a agi avec courage en conséquence. Je ne dis pas qu'il sera sans faute, non, parce que plusieurs pourraient me jeter la première pierre, mais le ministère du Travail, c'est probablement le ministère le plus ingrat qu'un membre d'un gouvernement puisse avoir. L'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce le sait lui aussi pour avoir été ancien ministre du Travail du Canada. Avec quelle chaleur et quelle amitié il nous recevait, à Ottawa, nous, les ministres du Travail du Québec et d'ailleurs lors de caucus ou de conférences au cours desquels nous avons véritablement fait du progrès grâce à la générosité, au dévouement qu'apportait l'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce.

C'est, de la part du nouveau ministre, un signe de maturité — je le dis très sincèrement ayant connu sa famille plus particulièrement — il tient cela de son "véritable"père... pas "véritable", mais vénérable, parce qu'il ne serait pas tout à fait d'accord. Tous les syndicalistes et tous les employeurs, le Conseil du patronat, ont raison d'avoir confiance. C'est prometteur pour l'avenir.

A-t-on vu un ministre, en si peu de temps, apprendre aussi rapidement toutes ces techniques qui sont extrêmement difficiles. On a beau dire qu'on a des compétences en droit ouvrier, mon Dieu qu'on en a à apprendre! Mon Dieu qu'il faut référer souvent pour savoir si véritablement on a le mot juste ou l'expression juste!

Je retrouve dans les propositions d'amendement du ministre, qu'il nous a remis de bonne grâce hier matin, malgré que le délai était très court, un très grand nombre de modifications que nous avions essayé de démontrer nous aussi. Ce sont des modifications qui visaient particulièrement l'amélioration et le véritable sens de la responsabilité collective pour établir un juste équilibre entre la loi 45 qui était, à mon sens, plutôt une loi improvisée au début, mais une loi qui va devenir demain une loi beaucoup plus souple et intéressante pour tous les partis.

La lettre même de nos amendements qu'on avait déjà rédigée, on la retrouve presque textuellement dans le cadre des amendements. Je ne sais pas s'il y a eu du coulage chez nous, si quelqu'un a décidé de venir prendre nos amendements, mais en tout cas, on en retrouve beaucoup, et cela va faciliter, je pense, l'étude en commission parlementaire.

Ce que je souhaiterais le plus, c'est que devant la démonstration qui nous a été faite ici par une association patronale et par les centrales syndicales, qu'il y ait un moyen de trouver un terrain d'entente entre eux. Ce n'est pas par des lois, par des législations, par de la bureaucratie qu'on va finir par établir véritablement un consensus de la paix entre ces deux organismes. C'est extrêmement difficile, je le comprends, mais chacun y mettant sa part, sa bonne foi, je pense qu'on pourrait faire avancer énormément, et on pourrait s'empêcher d'adopter des lois restrictives.

Je ne comprends pas pourquoi le ministre qui a déposé une masse de documents de 46 amendements n'a pas fait réimprimer le projet de loi. Je pense que cela aurait été plus facile pour nous et cela aurait accéléré nos travaux. Le député de Saint-Laurent a parlé tout à l'heure d'une commission d'étude sur les projets d'avenir du Code du travail. Je pense qu'il a parfaitement raison parce que j'ai préconisé, en Chambre, par motion spéciale, deux motions, une le mercredi et une autre qui nous a été accordée en vertu de l'article 24, une motion tout à fait privilégiée pour demander au gouvernement du temps d'entendre, pas seulement ceux qui critiquent, pas seulement ceux qui viennent nous demander des choses presque irréalisables, avec le couteau sous la gorge. Non, j'ai demandé, dans une commission royale d'enquête, d'entendre ceux qui, aujourd'hui, dans le monde du travail, sont des penseurs, des planificateurs, des professeurs d'université, des syndicalistes qui ont vécu le syndicalisme pendant des années, le monde du patronat, ceux qui peuvent nous fournir, pour l'avenir, des solutions pratiques qui feraient que la conciliation qu'on veut essayer d'établir entre patrons et syndicats soit plus effective. Ne pensez pas que c'est facile et que ça va être plus facile à l'avenir. Non.

Je suis convaincu que les syndicalistes ce matin, que les syndicats vont critiquer sévèrement les amendements. J'en suis convaincu. Mais que le ministre ne se laisse pas apitoyer parce que je suis convaincu que les amendements qu'il a apportés prouvent sa maturité et établissent un juste équilibre.

A l'avenir, s'il y avait moyen que la commission royale d'enquête soit à la recherche de nouveaux piliers, de nouveaux sommets pour que la législation ouvrière n'arrive pas après les événements, mais arrive avant, pour donner une orientation nouvelle à tout ce qu'on peut suggérer dans le monde ouvrier.

Je dis donc, en terminant, M. le Président, que les syndicalistes devraient être conscients qu'un ministre a une responsabilité qui dépasse

de loin celle d'un membre d'un syndicat. J'ai eu l'honneur d'être ministre du Travail tout en étant syndicaliste et, souvent, j'ai été pris avec certains problèmes personnels que j'ai dû surmonter, pour prouver que j'avais le mandat de représenter tout le monde, pas seulement les syndicats.

Je demande aux syndicalistes, aujourd'hui, de faire confiance au ministre. Il a démontré, en peu de temps, qu'il avait véritablement de la maturité. Il est sur le bon chemin. Il a accepté de faire certains amendements qui vont peut-être déplaire et qui vont peut-être changer le courant du bon vent qu'avait dans les voiles le Parti québécois.

Mais aussi je demande, en terminant, à la partie patronale, lorsqu'elle fait des suggestions, lorsqu'elle présente des mémoires, lorsqu'elle veut obtenir certains nouveaux amendements au Code du travail, de bien réfléchir sur l'importance qu'il y aurait de faire, de temps en temps, des réunions au sommet pour que patrons et syndicalistes puissent se rencontrer.

Il y a, vous allez me dire, le Conseil supérieur du travail qui peut le faire, mais mon Dieu! combien de fois a-t-on été obligé d'intervenir pour essayer d'obtenir au moins une paix fictive!

M. le Président, tout en remerciant les membres de cette commission d'avoir eu l'obligeance de m'écouter — j'ai pris encore trop de temps, mais vous savez tous combien je suis attaché aux lois du travail —je félicite le ministre d'avoir, malgré certains bureaucrates qui auraient pu lui faire des crocs-en-jambe — et il sait de qui je parle — passé par-dessus cela. Il nous a apporté des amendements réellement sérieux, qui ont bonifié énormément la loi 45.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Jonquière.

Autres intervenants M. Claude Vaillancourt

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le Président. Très brièvement, quelques mots seulement pour réaffirmer mon appui presque total au bill 45 et aux amendements qui ont été déposés hier par le ministre du Travail.

Je pense, comme bien d'autres, que le bill 45 va faire en sorte d'apporter un certain équilibre qui n'existait pas entre les différentes parties à une convention collective, malgré ce que certains peuvent prétendre.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Jonquière, j'ai omis de demander la volonté des membres de cette commission de vous entendre, vu que vous n'en faites pas partie.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je m'excuse, je remplace le député de...

Le Président (M. Laplante): Je m'excuse, je vois que vous remplacez M. Gosselin, de Sherbrooke. Continuez.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est cela.

M. Mackasey: ... parce qu'il a beaucoup d'expérience comme président de notre assemblée. Il est très rigide, il suit toujours les lois et demande aux témoins de faire la même chose.

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Bellemare: ... à certaines personnes qu'on trouve un peu trop étroites.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour revenir au bill 45, j'aimerais vous dire que j'ai eu l'occasion, au cours des récents mois, de constater que ce bill était généralement très bien perçu par la population en général; du moins, je peux parler pour le comté de Jonquière.

Je dis oui aux grands principes, au vote secret, à la première convention collective et je pense que nous avons eu au Québec des cas célèbres. En tout cas, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, nous avons le cas Woolworth, le cas d'une première convention collective qui a fait les manchettes de la presse nationale ou, du moins, de la presse provinciale dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je pense que des articles ou ces principes affirmés dans le bill 45 vont faire en sorte d'empêcher des cas comme celui de Woolworth, un employeur qui a voulu refuser la syndicalisation de ses travailleurs, à Chicoutimi, vont empêcher ces événements de survenir à l'avenir.

Je dis également oui à l'article 38 modifié du Code du travail, dans le bill 45, qui rend obligatoire le précompte syndical. M. le Président, d'autre part, je me dois de dire que l'amendement apporté à l'article 97c du Code du travail, même si cela ne m'empêchera pas de voter pour le bill 45 en troisième lecture, m'apparaît une limitation extrêmement sérieuse à la disposition de l'article 97a du Code du travail. L'interprétation large de l'article 97c tel qu'amendé pourrait même faire en sorte d'empêcher l'application et le principe de l'article 97a.

J'ai vécu la grève de l'ALCAN à Arvida où 5000 des 6000 travailleurs étaient impliqués. L'article 97c tel que rédigé permettrait, par exemple, à une compagnie comme l'ALCAN, le 3 juin 1976, lorsque les 6000 travailleurs ont décidé d'user de leur droit de grève, si ce projet de loi était adopté, de faire en sorte que l'ALCAN, dont les salles de cuves étaient complètement gelées le matin du 3 juin, en raison de l'abandon des 6000 travailleurs, puisse engager des gens pour faire en sorte que les salles de cuves de l'ALCAN ne soient pas brisées ou détériorées. Je pense que c'est là l'un des buts de la grève. Lorsque l'on ne s'entend pas entre patrons et syndicats, on donne un pouvoir à l'employeur qui est le lockout, on donne un pouvoir au syndicat qui est la

grève, et la grève est le seul moyen actuellement à la disposition des syndicats pour faire en sorte que l'employeur accepte les demandes syndicales.

Je pense qu'il y aurait lieu, à l'article 97c tel qu'amendé — d'ailleurs, j'aurai des amendements à proposer à l'article 97c — de faire en sorte qu'au moins l'on demande au syndicat, avant de permettre à l'employeur d'engager de ces employés, s'il ne voudrait pas pallier cette situation et envoyer des équipes de secours pour faire en sorte que les bains ne soient pas brisés. C'est arrivé régulièrement lors de la grève de l'ALCAN.

Lors de la grève de l'ALCAN, la compagnie parlait continuellement au syndicat pour lui dire: Si vous ne faites rien, les wagons de chlore qui sont à l'intérieur de l'usine peuvent exploser et la population d'Arvida peut en subir des conséquences. Immédiatement, le syndicat donnait sa collaboration.

Les salles de cuves ou les "pots", en jargon d'aluminium, étaient gelés. On appelait régulièrement au syndicat pour lui demander d'envoyer cinq à six spécialistes de ses syndiqués qui étaient en grève pour venir aider à faire en sorte que les dommages soient les moins grands possible, non pas pour repartir les salles de cuves, mais pour faire en sorte que les dommages soient le moins élevés possible et le moins grands possible.

Je pense que, tel que rédigé, l'amendement à l'article 97c est une limitation sérieuse au principe sur lequel je suis d'accord et émis à l'article 97a du bill 45. Je pense qu'il y aurait lieu, en cours de route, avant de permettre à l'employeur l'utilisation de ceux dont on veut empêcher l'utilisation, de permettre un premier moyen, c'est-à-dire une demande de l'employeur au syndicat pour pallier cette situation et, en cas de refus du syndicat, à ce moment-là, de faire en sorte que l'entreprise puisse se servir des dispositions de l'article 97c, afin que ses biens ne soient pas détruits ou détériorés de façon très grande.

Je pense que l'article 97c tel que rédigé est un manque de confiance quant au dialogue éventuel entre un syndicat et un employeur. Dans bien des grèves, sur de simples appels téléphoniques entre un président d'un syndicat et un directeur général des compagnies, on voit à régler ces situations.

Je pense que l'article 97c, du moins tel que rédigé, est une limitation sérieuse à un principe sur lequel je suis d'accord, sur lequel l'Union Nationale est également d'accord pour avoir voté en faveur en deuxième lecture, mais je pense qu'on devrait, en cours de route, faire en sorte de penser à d'autres moyens, parce qu'il y a d'autres moyens. Le Code criminel est toujours là. Lorsque le syndicat ou les syndiqués brisent la propriété d'autrui, le propriétaire peut toujours, en vertu de ce droit de propriété, faire appel à toutes sortes de moyens qui sont des procédures criminelles...

M. Bellemare: Quand il y a des procédures, le gouvernement remet $50 millions à ceux qui ont manqué, mon cher monsieur, à l'étiquette... Ecoutez, on en a des preuves.

M. Vaillancourt (Jonquière): S'il vous plaît, M. le député de Johnson...

M. Bellemare: Oui, excusez-moi.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... je ne voudrais pas m'embarquer sur ce terrain...

M. Bellemare: Non, c'est qu'on a vécu cela dernièrement.

M. Vaillancourt (Jonquière): En terminant, M. le Président, je donne mon appui le plus total au bill 45. Mes félicitations au ministre pour les amendements qu'il a apportés et sur lesquels je suis d'accord. Des réserves très sérieuses à l'amendement apporté à l'article 97c qui me paraît non pas une négation, mais une limitation extrêmement sérieuse d'un principe généralement admis dans notre société. Il n'en reste pas moins que cette disposition de l'article 97a est peut-être la plus progressiste au monde, mais je me demande si elle le sera encore si on adopte l'article 97c tel que rédigé. Le tout soumis respectueusement.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Bryce Mackasey

M. Mackasey: Merci, M. le Président. Mes commentaires seront brefs. D'abord, le député de Saint-Laurent a exprimé pour notre parti une observation que je partage entièrement. Je pense que nous avons en place, potentiellement, au moins, un bon ministre du Travail. J'en arrive à cette conclusion par la position qu'il prend maintenant, par exemple, dans les conflits à Montréal. On a souligné que ce n'était pas le rôle du gouvernement d'agir comme police et d'essayer de régler tous les conflits un, deux ou trois jours après le début de ces conflits. Autant que possible, je partage ces sentiments. Le ministre devrait rester à côté et laisser les patrons et le syndicat régler eux-mêmes leurs conflits. Naturellement, ce sont les droits de la collectivité qui rendent nécessaire le partage de la responsabilité par le ministre.

Après avoir étudié les amendements, je pense que le ministre du Travail est très mal pris, et je le dis en toute sincérité, comme ami, comme membre d'un club assez exclusif. Nous sommes trois ici qui avons été ministres du Travail. Moi-même et le député de Johnson, qui a été ministre du Travail longtemps dans la province de Québec, voulons vraiment pour le meilleur de la province de Québec un climat stable, surtout dans le domaine du travail. Je pense que dans cette période de notre histoire, c'est très nécessaire pour l'avenir du Québec de passer aux entreprises, qu'on appelle en anglais "cap-

ital intensive", et de moins en moins aux entreprises de "labour intensive".

Cela prend beaucoup de restriction, pas seulement de la part des gouvernements, des patrons, mais aussi des syndicats, pour comprendre que, dans notre période de transition, peut-être pour les cinq ou dix ans à venir, on demandera plus, en toute probabilité, aux syndicats et aux patrons de travailler ensemble.

Souvent, pour sauver une entreprise, et là, je parle d'une entreprise dans le sens sectoriel, si vous voulez, dans le domaine du textile, on devra faire plus d'animation.

On peut créer du chômage, surtout à court terme. Alors, c'est très nécessaire que nous acceptions, nous, de l'Opposition, autant que le ministre, les responsabilités pour en arriver à un projet de loi qui aide à la stabilité du climat au

Québec.

Nous avons en même temps ces autres courants qui, normalement, peuvent créer la violence, comme on le voit à l'hôpital Victoria. C'est que les ouvriers craignent de perdre leur emploi, pas autre chose, vis-à-vis de la nécessité de restreindre, si vous voulez, les dépenses de l'hôpital.

Mais comme je l'avais souligné, à la deuxième lecture, M. le ministre, je pense que ce n'est pas votre faute. Je pense que vous êtes arrivé et que vous avez été obligé d'accepter un projet de loi qui était déjà imprimé, si vous voulez, déjà accepté par le Cabinet, déjà préparé par les fonctionnaires. C'est regrettable, parce que je pense que si vous aviez accepté le conseil de l'Opposition et probablement privément par vos collègues, vous l'auriez recommencé le projet de loi no 45, recommencé peut-être avec un livre blanc qui aurait permis au patronat, aux syndicats et à d'autres de se prononcer sur le projet de loi.

Le contraire est arrivé, comme vous le savez, M. le ministre. Vous étiez obligé de venir avec le projet de loi no 45, et je me rappelle, dans mon intervention, vous avoir dit que, sans doute, vous veniez avec des amendements plus nombreux que les clauses dans le projet de loi initial et vous voyez ici que nous avons les amendements qui... Le député de Johnson l'a souligné. C'est très difficile pour nous de connaître exactement les effets des amendements avant que le bill ait été imprimé, très difficile, et, deuxièmement, je pense que du moment que les effets de ces amendements seront étudiés un peu par le patronat et par les syndicats, on va en arriver à un point où les syndicats ainsi que le patronat seront encore très mécontents du projet de loi. Je ne veux pas, à ce moment-ci actuellement, traiter de cas bien particuliers. On va garder nos observations pour plus tard. Mais je demande encore au ministre de songer encore une fois à remettre ce projet de loi après une commission royale d'enquête, afin que... Peut-être que cela va prendre six mois de plus, mais il va arriver avec un projet de loi qui va répondre aux besoins de tout le monde.

J'ai peur, par exemple, quand vous parlez de vote secret, je partage vos sentiments selon lesquels chaque constitution de chaque syndicat devrait contenir des clauses sur le vote secret. Mais ça, c'est le cas aujourd'hui. Alors, vraiment, vous demandez ce qui existe. Ce n'est pas ça que la population demande. La population veut, en plus de ça, une participation, avec raison ou non, de la part du gouvernement; ce n'est pas assez pour la population. C'est peut-être assez pour moi, mais pas assez pour la population, pour le patronat, pour les tiers qui sont affectés par les grèves. Ce n'est pas assez pour eux de dire: Ah! Le vote secret, c'est dans la constitution de chaque syndicat. Ce n'est pas assez. On veut que la constitution soit respectée. C'est une autre chose complètement, et vos amendements vont, je pense, accélérer, si vous voulez, pour ceux qui ne comprennent pas le domaine syndical et les relations industrielles, et l'autre va dire: C'est un "cop-out", comme on dit. C'est un effort de rendre service pour satisfaire les syndicats.

Tandis que, quand vous arrivez à la section sur l'"anti-scabs", là sans doute, le syndicat va dire: Cela ne fait pas notre affaire. Cela ne fait pas notre affaire du tout. Ce que vous avez fait avec vos amendements, c'est de rendre cette clause inutile. Alors, après vos audiences publiques avec les syndicats, avec le Conseil du patronat et d'autres, vous avez essayé, par vos amendements, M. le ministre, surtout dans les secteurs importants, de faire plaisir à tout le monde, et c'est impossible.

C'est impossible, par vos amendements, de faire accepter la clause "anti-scabs" au patron, pas plus que vous n'êtes capable par vos amendements au vote secret de donner satisfaction au patron. Vous êtes placé entre deux chaises. Il est temps que vous décidiez une fois pour toutes d'aller avec le syndicat dans une clause ou avec le patron dans l'autre.

Je pense que vous serez précisément... Vous trouverez que ni les patrons, ni les syndicats seront contents. Surtout, le problème ici n'est pas seulement le patron et le syndicat, mais c'est le syndicat contre le syndicat. Je vais terminer ici, je pourrai en dire plus lorsqu'on discutera des amendements.

Si on accepte tous les amendements tels qu'ils sont nous arriverons avec un projet de loi qui créera plus d'animosité entre les patrons et les syndicats. Je demande encore au ministre de changer, de retarder ce projet de loi jusqu'à la fin de la commission royale d'enquête ou du moins d'accepter le principe que les témoins, les syndicats et les patrons aient la permission de venir ici devant la commission parlementaire pour discuter des amendements, parce qu'il n'y a aucun amendement...

Merci.

Le Président (M. Laplante): Le député de Beauharnois.

M. Laurent Lavigne

M. Lavigne: M. le Président, je m'en voudrais de ne pas souligner, pour ma part, l'importance du projet de loi 45. Un projet de loi, si ce n'est pas le seul, parmi ceux que j'attendais avec le plus d'impatience depuis l'arrivée du nouveau gouvernement du Parti québécois au pouvoir. Cette impatience provient du fait que je suis originellement un gars d'usine, un gars de chantier, un gars qui a connu ce que c'était, jusqu'à un certain point, avoir un patron. J'ai travaillé pour une compagnie qui pouvait avoir un grand nombre d'employés au moment où les syndicats n'existaient pas encore.

Donc, ce fameux projet de loi 45, je l'attendais avec impatience. Lorsqu'on regarde dans la pratique ce qui se passe finalement, on se rend compte qu'il y a un très grand déséquilibre entre ce que le Code du travail pouvait donner comme pouvoir aux patrons par rapport à ce que les travailleurs pouvaient avoir. Quand il s'agissait d'une négociation, tout ce qui restait pour les travailleurs, ou presque, c'était de pouvoir dresser une ligne de piquetage et de négocier pendant ce temps. Mais on sait très bien qu'une ligne de piquetage, c'est un geste symbolique et que, légalement, si on veut outrepasser la ligne de piquetage, on peut le faire.

Donc, témoin d'une grève qui a duré trop longtemps à Stanchem, dans le comté de Beauharnois, l'an passé, c'est exactement ce qui s'est produit. Devant cette espèce de déséquilibre qu'il y avait entre les deux parties, la partie patronale avait, à mon avis, beaucoup trop de pouvoir par rapport à ce que les travailleurs pouvaient avoir pour négocier. Se fiant sur le pouvoir que les patrons ont, on tient les travailleurs en respect trop longtemps, en se disant qu'ils vont lâcher.

Pendant qu'on négociait, il y a eu des "scabs". Des camions de marchandise et des trains ont franchi les lignes de piquetage. Il y a eu des injonctions, ce qui fait que finalement, lorsqu'on regarde cela globalement, on se dit: On ne s'en sortira jamais. Or, avec l'aide du projet de loi 45 qui, bien sûr, n'est pas une fin en soi, au niveau des aménagements éventuels, je pense qu'un remaniement complet du Code du travail s'imposera dans le temps, mais quand même, c'est un pas en avant. Je pense, en particulier, à l'article 51, la fameuse clause qui a trait à la loi "anti-scabs", aux antibriseurs de grève.

Je pense qu'il est important pour le travailleur qui est en grève, pendant que les syndicats négocient, qu'il puisse être en grève en paix, dans le sens qu'il va savoir, à partir de la loi 45, qu'il n'y a pas d'autres employés qui pourront aller prendre sa place pendant les négociations et il n'aura pas l'inquiétude aussi d'être rejeté de la compagnie quand la grève sera terminée, les négociations seront terminées. Il se trouve à être protégé par le projet de loi 45. Cela s'imposait. Je pense que c'est un geste qui était dû, que le gouvernement devait poser.

Par cette loi, je pense qu'on va corriger, pas tout, mais on va quand même corriger certaines lacunes qu'on connaissait dans le monde du travail, dans le monde des relations ouvrières. Ce que je voudrais dire ici avant de terminer, c'est que finalement, ce qui compte le plus, à mon avis, c'est une espèce de respect que les patrons devraient avoir de plus en plus pour les travailleurs qui travaillent dans leur usine. Je pense qu'il faut qu'ils comprennent une fois pour toutes que finalement, s'il n'y avait pas ces travailleurs, leur usine ne fonctionnerait pas et il ne faudrait pas que ces gens soient considérés comme des numéros, mais comme des êtres humains et il n'y a pas une loi qui va pouvoir faire en sorte qu'un patron soit plus ou moins humain. Je pense que c'est un climat qu'on doit favoriser; on a commencé à le faire avec les rencontres syndicales patronales dans les différents sommets, que ce soit les gros sommets ou les mini sommets et les relations que le gouvernement doit entretenir avec la partie patronale aussi bien qu'avec la partie syndicale feront en sorte que ce climat soit plus sain et on n'attendra pas qu'il y ait des montagnes devant nous avant d'agir, on devra être aux aguets et suivre quotidiennement ou presque les rapports qui devront exister entre les patrons et les syndicats et les employés. Je pense qu'avec la loi 45 on va quand même aider ou favoriser ce climat. Je vous remercie.

Le Président (M. Laplante): Avant d'appeler l'article 1, j'aimerais avoir le consensus, comme c'est l'habitude de le faire, pour que le cahier d'amendements apporté par le ministre fasse partie du projet de loi 45 automatiquement. Comme il se fait normalement. C'est le cahier que vous avez reçu, qu'il soit lu dès l'article 1 comme faisant partie du projet de loi au lieu de prendre un vote à chaque amendement que le ministre peut apporter.

M. Bellemare: Cela aurait été plus facile s'il avait été réimprimé.

Le Président (M. Laplante): Là n'est pas la question. Je n'ai pas ce pouvoir, M. le député de Johnson. La seule chose que je demande c'est votre approbation sur une méthode de travail. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Blank: Consentement.

Etude article par article Commissaire du travail

Le Président (M. Laplante): Merci, j'appelle l'article 1. M. le ministre.

M. Johnson: A l'article 1, M. le Président, il s'agit d'une modification; si on regarde les projets d'amendement qui, essentiellement, font deux alinéas au lieu d'un seul, le premier pour

indiquer le changement d'appellation du commissaire-enquêteur dans le Code du travail et le second pour indiquer ce changement dans les autres lois. C'est une précision, évidemment, d'ordre purement technique. On change également l'appellation d'enquêteur, qui en fait est équivoque dans la fonction publique et qui, en plus, ne décrit pas finalement très bien le rôle des personnes qui remplissent cette fonction, par l'expression agent d'accréditation qui paraît évidemment plus juste.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous avez des remarques, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, M. le député de Saint-Louis?

M. Blank: Le commissaire, est-ce que ce n'est pas vraiment un enquêteur? Pour quelle raison a-t-on changé les mots? Le commissaire-enquêteur peut toujours agir comme un enquêteur. Pourquoi ôter cela?

M. Johnson: C'est parce qu'il y a aussi des enquêteurs... Vous parlez de la première partie?

M. Blank: Oui.

M. Johnson: D'accord. Le commissaire-enquêteur, oui. C'est que, dans d'autres lois il existe, en vertu d'autres lois, des commissaires-enquêteurs et finalement ils n'ont pas le même rôle que ceux qu'on appelle les commissaires-enquêteurs chez nous. Il s'agit finalement de donner au commissaire du travail une appellation qui fait que ce sont les pouvoirs découlant du Code du travail et non pas ceux qui pourraient découler d'autres lois. C'est une précision essentiellement d'ordre sémantique, cela ne change rien quant à leur pouvoir.

M. Blank: Cela ne change rien, mais on a toujours appelé une personne selon la position qu'elle occupe. Le commissaire enquêteur était vraiment un enquêteur. Maintenant, on l'appelle commissaire général du travail; ça ne change rien au fond, mais...

M. Johnson: C'est-à-dire qu'il y a les enquêteurs, il y a le commissaire du travail et le commissaire général du travail, qui est le commissaire-enquêteur chef, si on veut, auquel on est habitué.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je suis prêt à l'accepter. M. Blank: On accepte...

Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté tel que...

M. Johnson: M. le Président, j'aimerais suspendre, si c'est possible, l'article 2 et passer à l'article suivant.

Le Président (M. Laplante): Article 1. Adopté. Article 2.

M. Johnson: Article 2, suspendu, s'il vous plaît.

Le Président (M. Laplante): Article 2, suspendu.

M. Johnson: Article 3.

Participation à la formation d'une association

Le Président (M. Laplante): Article 3.

M. Bellemare: II est bien important qu'on se mette bien d'accord.

M. Johnson: D'accord pour l'article 3. A l'article 3, M. le Président, il s'agit d'ajouter le mot "formation", "tout salarié a droit d'appartenir à une association de salariés de son choix et de participer à la formation de cette association, à ses activités et à son administration". En ajoutant le mot "formation", on écarte une décision: Bergeron contre la compagnie d'assurance Les Provinces Unies, 1967, Revue du droit du travail, qui avait décidé que le droit de former une association n'en était pas un qui résultait du code. Le Tribunal du travail avait cependant corrigé la situation dans une décision du juge Filion; la modification, en fait, confirme donc la décision prise par le Tribunal du travail en 1972 pour qu'il n'y ait plus d'ambiguïté au niveau de la jurisprudence.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Je constate aussi que, dans cet article le même salarié a droit d'être membre de plus d'une association. Il n'y a aucune restriction au nombre d'associations auxquelles il appartient. Non. Il y a aussi le fait, lorsqu'il y a protection... Ici, je veux proposer un amendement, ajouter les mots: "le droit des salariés de ne pas appartenir à une association". Je ne veux pas qu'avec l'article 3, ce soit obligatoire d'appartenir à une association. Je propose l'amendement suivant: "que l'article 3 soit modifié en ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant: "tout salarié a également le droit de ne pas appartenir à une association de salariés".

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez apporter votre modification.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Sur la recevabilité, M. le ministre.

M. Johnson: Enfin, pas sur la recevabilité, sur l'opportunité. Il est bien évident que je considère que l'amendement du député de Saint-Louis

est absolument inapproprié. Le Code du travail confère des droits, il n'a pas à conférer le droit de ne pas faire. Cela m'apparaît évident. Ce que vise le député de Saint-Louis, c'est probablement... Je lui ferai remarquer qu'à un article plus loin dans le code, on prévoit la fin du "closed shop", l'article 38, et je pense que le type de réalité qu'il essaie de viser est visé par l'article 38. S'il veut retirer son amendement, cela me fera plaisir d'accepter qu'il le retire, ce qui éviterait un long débat.

M. Blank: Je vais vérifier l'article 38 avant de donner mon accord.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson, en attendant que le député de Saint-Louis ait vérifié l'annotation de l'article 38.

M. Bellemare: Je ne vois pas la nécessité d'établir ce principe dans le Code du travail. Tout salarié a également droit de ne pas appartenir à une association de salariés, parce que, dans le Code du travail...

Le Président (M. Laplante): Juste une petite remarque pour être conforme au règlement. Je n'ai pas encore jugé la motion recevable. Vous ne pouvez pas parler là-dessus. Si vous avez quelque chose à dire sur la non-recevabilité, d'accord.

M. Bellemare: Sur la non-recevabilité?

Le Président (M. Laplante): Oui, je ne l'ai pas encore jugée recevable. Elle a juste été présentée...

M. Bellemare: Quelle sorte de principe nouveau? Après qu'il ait lu sa motion, après que le ministre ait répondu, après qu'on ait donné des arguments, pourquoi le député de Johnson n'aurait-il pas le droit de parler sur la motion que vous auriez dû arrêter dès le début?

Le Président (M. Laplante): Je donne la parole au député de Saint-Louis. Avez-vous lu votre article 38? Est-ce que vous conservez...

M. Blank: Je ne suis pas d'accord avec le ministre. Le nouvel article 38, dans ses amendements, n'empêche pas le "closed shop" du tout. Je ne veux pas discuter de l'article 38, mais il y a un petit paragraphe qu'on a ajouté: "sauf si le salarié est embauché à l'encontre d'une disposition de la convention collective." Si la convention collective parle d'un "closed shop", comment peut-on dire qu'il n'y a plus de "closed shop"?

Le Président (M. Laplante): Pour enlever toute ambiguïté, je vais juger la motion recevable tout de suite.

M. Johnson: L'amendement est reçu?

Le Président (M. Laplante): II est reçu.

M. Johnson: Est-ce que je peux reprendre la parole sur l'amendement, au sujet de l'article 38? Ce que l'article 38 dit... M. le Président, est-ce que le ministre a préséance sur un membre de l'Opposition?

Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur.

M. Johnson: Je ne voudrais pas brimer en aucune façon le droit d'association ou autre du député de Johnson.

En fait, d'abord, sur le plan des principes fondamentaux, je pense que c'est clair que le Code du travail confie des droits. Il n'a pas à confier un droit qui serait, en fait, la négation d'une liberté qui existe pour lui, déjà, dans la Charte des droits et libertés de la personne, à l'article 3.

Deuxièmement, l'article 38 du projet de loi, tel que modifié, avec les amendements que nous y avons apportés, met fin à l'atelier parfait fermé. Je l'explique pour les besoins du député de Saint-Louis, si jamais il y avait des ambiguïtés. Dorénavant, on dit qu'une convention collective ne pourra pas contenir... Il y a interdiction de priver un individu de son emploi, s'il perd, en cours de route, son statut de membre de l'association accréditée, tout en demeurant dans l'unité. C'est le "closed shop" parfait.

Cependant, le projet de loi n'interdit pas l'embauche syndicale, c'est-à-dire la nécessité, au moment de son engagement, d'avoir effectivement une carte de membre de l'association accréditée.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, je pense que le droit d'association est reconnu dans le Code du travail depuis toujours. On a le droit et on peut, en vertu de l'article 12 du Code du travail... C'est clair, c'est net, c'est bien précis: on n'a pas le droit d'intimider, on n'a pas le droit de forcer quelqu'un à appartenir à l'union. C'est l'article 12. Un ouvrier reste responsable de son adhésion ou de sa non-adhésion, en vertu de l'article 12. Nul ne doit user d'intimidation ou de menace pour amener quiconque à devenir membre ou à s'abstenir de devenir membre, ou à cesser d'être membre d'une association de salariés ou d'employeurs, ni pour amener un salarié à signer, à refuser, à révoquer ou à établir une autorisation à retenir un montant sur son salaire, comme condition.

L'article 12 est bien précis. D'ailleurs, dans le Code du travail qui est la loi générale, il est bien entendu que c'est un droit exclusif de l'ouvrier d'appartenir ou de ne pas appartenir à un syndicat. Pour le précompte syndical, c'est sûr et certain qu'il est obligé de payer. En vertu de la loi, par la formule Rand, il va être obligé de payer. Justement, on en tient compte dans les amendements.

Je pense que l'amendement soumis par le député de Saint-Louis ne justifie pas ses craintes.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, cette question est une question de principe. On pourrait se borner à dire: C'est une question de principe, voici pourquoi nous présentons un amendement comme celui-là. Cela va plus loin que cela.

M. Johnson: C'est un symbole.

M. Forget: Non, ce n'est pas un symbole, je vais vous expliquer comment cela joue un rôle, ou cela devrait jouer un rôle dans l'ensemble des dispositions du Code du travail.

Il est assez évident — mais, comme tout ce qui est évident, cela va encore mieux, quand on l'exprime — l'ennui, c'est que ces articles viennent à la fin, je vais donc, M. le Président, vous demander la permission d'au moins y faire allusion, comme on vient de le faire à l'article 38, qu'il y a une position que nous entendons défendre, soit celle de l'autonomie des organismes syndicaux quant à leur régie interne, quant à leur fonctionnement.

Or, un principe d'autonomie interne des syndicats ne peut se défendre que dans la mesure — mais il se défend très bien dans cette mesure — où les membres individuels de l'organisme en question, s'ils ne sont pas d'accord sur la façon dont le syndicat administre leurs affaires, de la façon dont les votes se prennent ou ne se prennent pas, de la façon dont les finances du syndicat sont administrées, enfin toutes les dimensions de l'activité du syndicat, ont un droit. C'est une espèce de recours ultime à la dissidence. C'est corrélatif, la liberté interne des syndicats et le droit d'un individu qui, fondamentalement, n'est pas d'accord, de dire: Ecoutez, si je ne suis pas capable d'entraîner une majorité avec moi au sein de cet organisme, si, pour toutes sortes de raisons légitimes ou illégitimes, il se sent brimé ou pas représenté adéquatement, d'en sortir et, d'en sortir, bien sûr, sans pénalisation. C'est important.

Comme nous avons l'intention d'insister sur la liberté et l'autonomie interne du syndicat, nous croyons qu'il est tout aussi important de bien faire ressortir que la sanction de cette autonomie interne du syndicat, c'est le droit à la dissidence et la protection par la loi du droit à la dissidence.

J'ajoute immédiatement que, lorsque l'on parle du droit à la dissidence, bien sûr, cela doit se faire dans le cadre des lois. Cela n'exclut pas du tout le précompte syndical obligatoire. Le précompte syndical obligatoire, c'est une contrepartie nécessaire et, à mon avis, inévitable du fait que notre Code du travail consacre la notion du syndicat majoritaire qui a un mandat exclusif de représentation et que le Code du travail dit explicitement que tous les avantages que le syndicat acquiert pour ses membres, il doit aussi, dans le fond, en faire bénéficier les non-membres, puisque les mêmes conditions de travail s'appliquent aux non-membres.

Il y a là une question de justice. Ceux qui exercent leur droit à la dissidence contribuent, malgré tout, à une somme proportionnelle aux avantages qu'ils en retirent, c'est-à-dire la cotisation syndicale de base. Malgré tout, quant à tous les autres aspects, de l'avis du syndicat, ils peuvent être dissidents, ils peuvent se retrancher d'un organisme en lequel ils n'ont pas confiance ou sur lequel ils ne se sentent pas capables d'avoir l'influence normale. Qu'ils portent eux-mêmes le jugement sur le caractère démocratique ou non démocratique de leur syndicat, sur l'orientation qu'il prend ou qu'il ne prend pas, selon les opinions qu'ils ont eux-mêmes.

Bien sûr, il y a ultérieurement, à l'article 38, un certain geste qui est posé, geste important et significatif du ministre et du gouvernement lorsqu'ils annoncent que, par cet amendement, l'atelier syndical parfait sera exclu. Il reste que, dans la logique que nous avons, l'atelier syndical imparfait même, c'est-à-dire l'exigence que l'employé, au moment de son engagement fasse partie du syndicat, est en soi une certaine entorse à ce principe de dissidence. C'est, je pense, un principe suffisamment important pour être affirmé au début, à l'article 3.

Remarquez que, dans l'article 3, le droit qui est affirmé là, c'est un peu, comme le ministre le disait, un symbole, en ce sens qu'il n'a de sens que par le chapitre relatif à l'accréditation. On dit: C'est important au départ d'annoncer sur quel principe l'ensemble du système fonctionne. C'est pourquoi il nous semble approprié à cet article de dire: C'est la liberté d'association dans son sens le plus complet. Les salariés sont libres de s'associer. Il faut que, quand ils veulent s'associer, l'exercice de cette liberté soit protégé par des articles appropriés dans les mécanismes d'accréditation. On aurait pas mal de choses à dire là-dessus.

Quand ils sentent qu'ils doivent être dissidents, ils veulent voter, en quelque sorte, d'une certaine façon, exprimer leur désaccord fondamental avec ce qui se passe à l'intérieur de cet organisme. C'est à eux qu'il appartient de le dire. Ce n'est pas au gouvernement à passer des jugements là-dessus, à moins, bien sûr, qu'ils se livrent à des activités légales, mais si c'est un jugement sur le fonctionnement interne de l'organisme, sur la façon dont ils fonctionnent, etc., c'est d'abord et avant tout aux syndiqués...

Il faut que la loi dise: Bien oui, on lui reconnaît ce droit, le droit d'être dissident. On va le protéger quand il l'exerce, ce qui implique, évidemment, dans d'autres chapitres, y compris les chapitres sur l'accréditation, la possibilité pour les membres dissidents d'un syndicat d'exercer leur dissidence sans être pénalisés, pas seulement au point de vue de l'emploi et du congédiement, mais au point de vue du mécanisme

d'accréditation lui-même. Je crois qu'il y aura aussi beaucoup de choses — je ne veux pas anticiper sur le débat — là-dessus qui pourraient être dites, étant donné certaines tendances qu'on peut observer, par exemple aux Etats-Unis, dans le mouvement syndical, etc.; il y a une forme de militantisme ouvrier qui prend des formules assez nouvelles. Je pense que la loi doit le protéger. C'est pour ça qu'on insiste... Moi, j'insiste personnellement pour que, dans toute la mesure du possible, ce principe soit affirmé. La liberté d'association, c'est un couteau à deux tranchants, si l'on veut. C'est à la fois le droit de former un syndicat, mais c'est aussi, pour l'individu, le droit d'être celui qui, en dernier ressort, juge son syndicat, pas d'autres. C'est lui qui en juge et, quand il en juge positivement, il continue à y adhérer. Mais s'il juge négativement, il faut qu'il ait une possibilité d'exprimer ça.

Le Président (M. Clair): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Ecoutez! C'est impossible qu'on accepte, dans une loi, une chose pareille, parce que la loi y pourvoit et depuis longtemps. L'article 12 est formel. L'article 25, c'est encore plus précis. Quand on lit l'article 25: Le commissaire-enquêteur peut ordonner le vote au scrutin secret d'un groupe désigné de salariés chaque fois qu'il le juge opportun et, en particulier, lorsqu'il est d'avis qu'une contrainte a été exercée pour empêcher un certain nombre desdits salariés d'adhérer à une association de salariés ou les forcer d'y adhérer ou s'il appert que lesdits salariés sont membres de plus d'une association en nombre suffisant pour influencer la décision. C'est clair, c'est reconnu qu'un salarié peut être, indépendamment de tout ce que vient de dire le député de Saint-Laurent, reconnu comme ne faisant partie d'aucune union ou de plusieurs unions. Ce sont les articles 12 et 25 qui s'appliquent. Je ne vois pas pourquoi on irait ajouter un autre amendement comme celui-là. Je suis totalement... Je me fais énormément de... Je n'ai pas peur qu'on puisse dire: Toi, il faut que tu sois reconnu. Je n'ai pas peur de ça.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je suis assez surpris, moi, de l'amendement, parce que je vous avoue que l'Opposition officielle qui s'affiche, depuis le 15 novembre, comme les défenseurs du syndicalisme, chose assez surprenante, permettez-moi de le dire...

Vous niez, à toutes fins pratiques, par cet amendement, la sécurité syndicale même, et toutes les clauses de sécurité syndicale n'auraient à peu près plus de sens, l'atelier parfait, l'atelier imparfait, l'atelier fermé n'auraient à peu près pas de sens. L'atelier fermé, un "closed shop", de toute façon, est prévu, parce que cela pourrait être considéré comme une entrave du droit même au travail. C'est pour ça que le ministre apporte un amendement à l'article 38 en disant: Ecoutez! Le droit au travail, c'est quelque chose de sacré, mais, pour le reste, donner une sécurité syndicale, s'assurer qu'au départ, les gens ont même le droit de participer à changer leur propre mouvement par l'intérieur...

A toutes fins pratiques, avec votre proposition, vous risquez d'encourager des affrontements entre le patronat et le mouvement syndical, en allant engager des individus nettement bien identifiés comme des antisyndicaux irréductibles qui ne signeraient pas leur carte de membre dès le départ et qui viendraient semer la zizanie à l'intérieur même de l'usine.

Personnellement, je considère que les clauses de sécurité syndicale ont toujours été considérées comme très compatibles avec la liberté d'association et si vous aviez été logique même dans votre propre proposition, vous auriez marqué au moins: "Tout salarié a droit d'appartenir à toute association" et non pas à une association. Vous ne restreindriez pas cela uniquement à une association. Vous diriez "toute association". Je ne comprends pas du tout où vous voulez aller avec cet amendement.

Votre souci devrait être d'abord et avant tout, comme législateur, de protéger le droit au travail. C'est un souci que je comprendrai et que je partagerai avec vous, mais le souci d'intervenir même dans les clauses de sécurité syndicale dénote un certain corporatisme.

Je suis surpris de voir que des membres d'une corporation fermée osent proposer un tel amendement quand eux-mêmes se sont coincés au bout...

M. Blank: ...

M. Chevrette: C'est vous qui l'avez présenté, M. le député de Saint-Louis, et vous en êtes un.

M. Blank: Oui, d'accord.

M. Chevrette: Et vous savez quelle liberté vous avez si vous voulez fonctionner.

Le Président (M. Clair): A l'ordre messieurs, s'il vous plaît!

M. Blank: ... "the perfect closed shop on the board."

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Blank: Après cela, les médecins...

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement à l'article 3 a été proposée, si je comprends bien, par le député de Saint-Louis.

M. Blank: Les médecins et les avocats, les deux.

M. Mackasey: Comme vous êtes membre des deux organisations, vous êtes dans...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! La motion d'amendement proposée par le député de Saint-Louis est-elle adoptée?

M. Chevrette: Rejeté.

Le Président (M. Clair): Rejeté. Article 3. Adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté sur division. Article 4.

Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: L'article 4 fait suite à une recommandation unanime du comité no 1 sur l'accès en forêt formé par le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Il s'agit ici de préciser qu'une simple autorisation de précompter la cotisation syndicale constitue bien le paiement de cette cotisation parce que cette objection a été soulevée dans le passé devant le commissaire-enquêteur.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Comme la discussion détaillée de cet article nous ferait entrer dans le bois, pour en sortir, on ne fera pas de discussion détaillée. Du moins, je n'en ai pas personnellement à faire là-dessus. Je remarque, effectivement, qu'il y a eu des recommandations unanimes du CCTMO. Il y a eu une concordance puisqu'il n'y a plus de droit d'entrée qui est exigé comme condition à l'accréditation. Alors, on supprime cela aussi. Cela m'apparaît de pure concordance.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je pense, moi aussi, que c'est une modification de concordance, le précompte syndical obligatoire. Je suis parfaitement d'accord, particulièrement parce que le présent article ne s'applique pas à l'exploitation forestière effectuée sur la propriété par un cultivateur ou un colon.

Le Président (M. Clair): Alors, l'article 4 est-il adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté. Article 5, M. le ministre du Travail.

M. Johnson: II s'agit d'un article, M. le Président, qui modifie l'article 10 du code et qui fait état du fait que tout employeur a le droit d'appartenir à l'association d'employeurs de son choix et de participer à la formation de cette association. C'est en fait une concordance avec ce même article qu'on a vu quant aux salariés.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... par le député de Saint-Louis sur l'article 5 pour permettre à tout employeur de ne pas appartenir...

M. Bellemare: C'est ce que j'allais dire.

M. Forget: C'est un amendement, M. le Président, qui serait plus radical que cela.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! M. Blank: On va voir, un moment...

Le Président (M. Clair): Alors, vous savez tous, messieurs, qu'on doit demander la parole normalement en commission parlementaire. Cela vaut autant pour le député de Jonquière, de Sainte-Marie, de Saint-Louis que de Saint-Laurent. Qui demande la parole? Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, c'est évidemment un article qui, dans sa formulation, dans la loi 45, est de concordance par rapport à des modifications à l'article 3. Cependant, c'est un article qui apparaît comme un cheveu sur la soupe dans le Code du travail. On a entendu abondamment dans les discussions sur ce projet de loi, de la part, en particulier, des organismes syndicaux... Je pense que c'est vrai de dire qu'ils sont, vis-à-vis du Code du travail, selon leur expression, toujours en demande et qu'ils envisagent le Code du travail essentiellement comme un ensemble de dispositions leur permettant d'exercer leurs droits plutôt que comme une espèce de grande charte des relations patronales-ouvrières.

Effectivement, ce jugement est exact, parce que tout le code, toutes les dispositions, à l'exception de choses, dans le fond, comme celles-là qui essaient de donner une impression contraire sans vraiment y parvenir, toutes les dispositions sont relatives aux modalités, aux possibilités pour une association de salariés d'exercer ses droits, d'obtenir la négociation, de forcer la négociation d'une convention collective, d'aller en grève si elle ne l'obtient pas.

Il n'y a vraiment pas, du côté des employeurs, une tentative de la part du législateur, de dire: Voici, les droits de gestion, etc., se définissent de telle et telle façon; ce n'est véritablement pas le but du Code du travail, je ne prétends pas du tout que ça devrait être le but du Code du travail. Il reste que cette espèce d'équilibre un peu factice qui est établi par l'article 10 n'a pas vraiment sa raison d'être. Cet article a introduit un peu de confusion et c'est la raison pour laquelle il me semble qu'on pourrait profiter de l'ouverture de la loi pour abroger tout simplement cet article. Il n'a pas sa raison d'être dans le Code du travail.

C'est le but de l'amendement, M. le Président, qui se lirait comme suit: "Que l'article 5 soit modifié en remplaçant tous les mots, après le mot "est" de la première ligne par le mot "abrogé". L'article amendé se lirait comme suit: "L'article 2 du code est abrogé."

M. Bellemare: Le même matin, à la même heure, presque à la même minute, mon cher monsieur, une contradiction pareille.

M. Johnson: M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président, même s'il est vrai que notre Code du travail est perçu, comme le dit le député de Saint-Laurent, comme étant essentiellement la mécanique de référence pour les salariés, pour exercer les droits qui lui leur sont confiés dans ce code, il demeure quand même qu'il y a des choses qui font l'objet d'un débat, à mon avis, fondamental dans notre société depuis quelque temps. On évoque la notion d'accréditation multipatronale, c'est quelque chose qui est dans l'air en ce moment. On sait qu'en vertu de la loi 290, par exemple, il existe un précompte "entreprenal" obligatoire dans le cas de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Finalement, je pense que dans la perspective des modifications en profondeur du Code du travail, dans les années qui viennent, je pense que ce serait mauvais de fermer la porte, parce qu'on risque d'assister à une définition des rapports et des obligations, ainsi que des droits des entrepreneurs qui se regrouperaient.

J'ai eu l'occasion, comme le député de Saint-Laurent le sait, depuis deux mois, de participer à une série de colloques et particulièrement certains colloques qui réunissaient des entrepreneurs, des employeurs qui justifient parfois leur anxiété chronique face à l'apparition du syndicat. Je voudrais faire mienne ici la réserve qu'a faite le député de Saint-Laurent quant aux représentants représentatifs du patronat qui, à mon avis, démontrent une maturité et une capacité de faire face au phénomène de syndicalisa-tion, qu'on ne retrouve pas toujours chez les entrepreneurs et chez les employeurs, individuellement, qui perçoivent comme menaçant le syndicat.

Or, de plus en plus, on sait que des groupements comme la chambre de commerce, comme le Conseil du patronat, comme différentes associations sectorielles tendent à mettre en commun certains services aux entreprises, dans l'optique où on considère que l'avènement du syndicalisme pose une question au niveau de l'entreprise. Je pense que cet article 5 sera peut-être utilisé à l'avenir, beaucoup plus qu'il ne l'a été dans le passé et sûrement, fera l'objet d'une réflexion importante au niveau de cette commission qui étudiera l'ensemble des lois du travail.

Le Président (M. Clair): M. le député de Sainte-Marie avait demandé la parole. Ensuite, ce sera le député de Johnson.

M. Bisaillon: Quant à moi, je m'étonne un peu de la nature de cet amendement, d'autant plus que je voudrais demander au député de Saint-Laurent ce qu'il fait avec la loi 290 où il existe un regroupement d'employeurs, qui a été forcé par une loi, et, où il y a un précompte patronal qui a été imposé dans la loi. On a donc senti, à un moment donné, l'obligation de regrouper un certain nombre d'employeurs.

Si on acceptait l'amendement du député de Saint-Laurent, qu'est-ce qui arriverait avec la loi 290 et le regroupement des employeurs que la loi 290 a forcé?

M. Johnson: Cela fait partie du Code du travail.

M. Chevrette: Cela serait peut-être bon de le regarder.

M. Bellemare: II y a l'article 85 du règlement également qui dit: "tant qu'une motion n'a pas été mise en délibération, elle peut être retirée avec la permission du député qui l'a présentée."

Si je vais à l'article 70: ... "il est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé". Je dis que dans la même heure, dans la même minute, dans le même avant-midi, on voit une contradiction entre l'article 3 et l'article qui est en discussion.

Mais est-ce que la loi a été faite pour les syndicats seulement? Le Code du travail? Ou bien pour les deux? Elle a été faite pour les employeurs et pour les syndicats. C'est la quintessence même de la base de toutes nos discussions. On n'a pas le droit, en vertu de ces deux articles de notre règlement, de ficher en l'air... D'ailleurs, un amendement avait été apporté lors de l'étude du projet de loi 101 — et j'ai cela dans mon bureau — selon lequel tout ce qui était de nature à changer le principe même de l'application d'une loi, c'était déjà refusé d'avance.

Il y a de la jurisprudence qui est prise. Moi, je suis d'accord que... Je ne peux pas concevoir que ce n'est pas assez clair et assez... Dans le Code du travail, on voit les responsabilités des employeurs et toute la négociation.

Le Président (M. Clair): Vous avez terminé votre intervention, M. le député de Johnson? M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Bisaillon: J'aimerais savoir si le député de Saint-Laurent va me répondre, par exemple.

Le Président (M. Clair): Oui, à son tour. Il prend des notes actuellement; je le vois. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: J'ajouterais que pour être logique, il faudrait retirer... Si on adoptait l'amendement du député de Saint-Laurent, il faudrait

abroger l'article 56 du code actuel, qui parle des associations de...

Quand une convention collective est conclue entre une association d'employeurs, il faut leur reconnaître un droit de s'associer, à ce moment-là. Automatiquement, il y aurait un paquet de concordances à faire.

Deuxièmement, je suis plutôt d'accord avec l'opinion de M. le député de Johnson. On aurait dû discuter sur la recevabilité de la motion et la faire déclarer irrecevable, parce qu'elle change le principe même de la loi. En troisième lecture, on n'a pas le droit de changer des principes fondamentaux, parce qu'on est ici pour étudier un projet de loi, en conformité avec les principes de base. Je suis entièrement d'accord avec le député de Johnson là-dessus.

Le Président (M. Clair): Dois-je comprendre, M. le député de Joliette-Montcalm, que vous vous opposez formellement à la recevabilité de la motion ou est-ce que vous soulevez...

M. Chevrette: C'est-à-dire que, si c'est pour être plus long, j'inviterais plutôt le député de Saint-Laurent à la retirer, ce serait bien plus court.

Le Président (M. Clair): ... simplement ce fait dans votre argumentation sur le fond?

M. Bellemare: Le mot "formellement"...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur la question de règlement, je n'ai pas mon règlement ici, mais je pense que l'article 70 dit qu'un amendement est irrecevable s'il a pour effet d'écarter la motion principale. Or, la motion principale, c'est l'article 10. L'amendement qu'on a devant nous a pour effet d'écarter cette motion principale.

Le Président (M. Clair): Je comprends, c'est ce que...

M. Vaillancourt (Jonquière): Je corrobore les propos du... Je pense que l'article 86 ou 87 pourrait s'appliquer. Je corroborerais la demande du député de Johnson selon laquelle on pourrait assister à un retrait de l'amendement, puisqu'il semble irrecevable.

M. Bellemare: ... l'article 87, l'article 85.

Le Président (M. Clair): C'est ce que j'avais compris de l'intervention du député de Johnson, sauf que j'avais également cru comprendre qu'il n'en faisait pas une objection formelle, pas plus que le député de Joliette-Montcalm.

M. Bellemare: Non, je serais bien d'accord... Le Président (M. Clair): Mais si on pose véri- tablement la question de la recevabilité de la motion d'amendement, j'entendrai les gens strictement sur la recevabilité et je rendrai une décision sur la recevabilité.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, cela va être plus long. Je préférerais que le député de Saint-Laurent retire sa motion d'amendement. Sinon, j'invoque l'article 70.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, sur le point de règlement, au départ, je ne voudrais pas que vous vous prononciez sur le point de règlement tel qu'il a été présenté par, je ne sais plus trop qui, parce que tout le monde a réclamé la paternité finalement. Serait-il vrai que, dans une commission parlementaire procédant à l'étude, article par article, on ne puisse envisager de recommander — je ne parle pas nécessairement de cet amendement-ci, mais je parle de façon générale — l'abrogation d'aucun article d'un projet de loi qui amende un projet de loi antérieur? Je pense que c'est aller très loin dans l'interprétation du règlement et dire que chaque article représente une motion qui a été approuvée en principe, c'est vider de son sens l'étude, article par article, d'un projet de loi.

Il est clair que les articles particuliers ne représentent pas chacun un principe qui a été adopté en deuxième lecture, mais représentent des modalités d'application de principes généraux qui ne se retrouvent pas, d'ailleurs, au nombre de 85 ou de quelque chose du genre, qui est le nombre d'articles qu'il y a dans la loi, mais qui se retrouvent au nombre de trois ou quatre probablement. Je pense que c'est une voie très dangereuse sur laquelle on s'avance quand on dit: Comme l'article est dans la loi, on ne peut même pas recommander son abrogation. La prochaine étape, c'est qu'on ne pourra pas recommander sa modification. Alors, on pourra procéder très rapidement à l'étude article par article, à ce moment. Je ne veux pas insister puisqu'on n'a pas fait une motion principale. Je voulais simplement mettre cela au journal des Débats pour qu'on n'invoque pas cela comme un argument accepté par tout le monde.

Pour ce qui est du fond — comme j'exerce mon droit de réplique, je vais terminer dans l'espace de quelques secondes tout au plus — j'ai remarqué que, dans le fond, les illustrations qui ont été données par ceux qui ont dit qu'il ne fallait pas abroger l'article 10 de la loi, c'étaient des illustrations futuristes et hypothétiques. Alors, c'est un peu le but que je poursuivais en présentant cet amendement. Il est très clair qu'on ne peut pas faire état de grand-chose de concret. C'est exactement ce que j'ai dit en présentant l'amendement. Ce sont des voeux pieux. Cela crée l'impression qu'il y a un parallélisme et une harmonie parfaite dans le Code du travail. Ce n'est pas du tout le cas. Ce n'est pas comme

cela qu'il s'est élaboré. Ce n'était pas son objectif. Quand on parle de prochaine négociation sectorielle, évidemment, on va attendre qu'elle vienne et on verra si l'article 10 est utile oui ou non.

Pour ce qui est de la loi 290, je pense que, simplement y faire allusion, démontre aussi combien, dans le fond, on peut se poser des questions, même sur le principe qu'il y a là-dedans. L'article 56, est-ce que c'est un article qui est très utile? S'il n'y avait pas d'article 56, est-ce que des associations d'employeurs ne pourraient pas en venir à des ententes à peu près de la même façon, avec peut-être quelques signatures de plus sur un même document, plutôt que d'agir par un mandataire? Il faudrait être un juriste pour vraiment voir qu'il y a là quelque chose de vraiment substantiel dans le Code du travail. Ma prétention, c'est qu'il n'y a rien de substantiel dans le Code du travail. La loi 290, laissons-la parler pour elle-même et se défendre sur ses propres pieds. Je pense qu'il y a fort à faire de ce côté, mais c'est la première fois que j'entends invoquer la loi 290 comme un argument en faveur de quoi que ce soit.

M. Bellemare: C'est parce que vous n'avez pas vécu le climat, vous.

M. Forget: Je suis fort heureux de l'entendre, mais je pense que ce n'est pas concluant.

Le Président (M. Clair): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, le député de Saint-Laurent m'a mal compris. J'ai posé une question au député de Saint-Laurent. Je n'ai fait aucune affirmation. Je lui ai demandé ce qu'il faisait avec la loi 290, qu'il a d'ailleurs votée.

M. Forget: C'est vrai. Quand on y viendra, on pourra peut-être se poser la question. Je suis d'accord avec le député de Sainte-Marie, à ce moment. Moi aussi, je me pose la question. C'est d'ailleurs parce que je me pose toutes ces questions que je me dis: Cet article, qui semble être le principe sous-jacent, c'est vraiment plutôt une farce.

Quant aux hypothèses futuristes et possibles sur l'utilisation future de l'article, ce ne sont pas des arguments pour le retenir, mais, encore une fois, M. le Président, je sais très bien le sort qui sera réservé à la motion. Cela fait très bien ressortir ce que je voulais faire ressortir par la motion, savoir que c'est, dans le fond, un voeu pieux qu'on va garder, parce qu'on aime bien les voeux pieux dans notre législation. On en a d'autres exemples, d'ailleurs, mais ça n'a aucune autre espèce d'importance que ça.

Le Président (M. Clair): Messieurs, s'il n'y a pas d'autres objections à la recevabilité de cette motion, je l'appelle pour adoption. Cette motion du député de Saint-Laurent se lit comme suit: "Que l'article 5 soit modifié en remplaçant tous les mots après le mot "est" de la première ligne, par le mot "abrogé" est-elle adoptée?

M. Chevrette: Rejeté.

Le Président (M. Clair): Rejeté...

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Clair): Sur division. L'article 5 est-il adopté?

M. Chevrette: Adopté.

M. Bellemare: L'article 5a...

Le Président (M. Clair): Adopté. Nous reprendrons l'article 5a plus tard.

La commission du travail et de la main-d'oeuvre ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 18)

Reprise de la séance à 16 h 50

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour continuer l'étude, article par article, du projet de loi no 45, intitulé Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Les membres de la commission sont M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal) remplacé par M. Blank (Saint-Louis), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Couture (Saint-Henri) remplacé par M. Vaillancourt (Jonquière); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Johnson ("D'Anjou"), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Marois (Laporte), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud).

Au moment où nous avons ajourné nos travaux à midi, nous étions à l'article 6 du projet de loi.

M. Chevrette: A l'article 5a.

Le Président (M. Clair): A l'article 5a, vous avez raison.

M. Johnson: Je suis à vous immédiatement, M. le Président. Si vous me permettez d'abord, le nom de mon comté, c'est Anjou et non pas D'Anjou. Etant donné que c'est le comté de Anjou, je vous prierais dorénavant d'appeler le ministre, le député de Anjou.

Très bien. Article 5a. En fait, M. le Président, il s'agit d'une modification à l'article 12 du Code du travail qui est ce qu'on pourrait considérer comme un amendement de concordance, si on accepte la notion de précompte syndical. En effet, on remarquera qu'à l'article 12 qui a été cité abondamment ce matin par le député de Johnson, on dit que nul ne doit user d'intimidation ou de menaces pour amener quiconque à devenir membre, à s'abstenir de devenir membre, à cesser d'être membre d'une association de salariés ou d'employeurs, ni pour amener un salarié à signer, à refuser, à révoquer ou à rétablir une autorisation de retenir un montant sur son salaire comme cotisation.

Donc, il s'agit, par concordance avec l'établissement du précompte obligatoire, que l'article se lise comme suit: "Nul ne doit user d'intimidation ou de menaces pour amener quiconque à devenir membre, à s'abstenir de devenir membre ou à cesser d'être membre d'une association de salariés ou d'employeurs".

M. Forget: Adopté.

Réintégration de l'emploi et indemnité

Le Président (M. Clair): Adopté. Article 6.

M. Johnson: Je vous réfère évidemment aux amendements. Pour faire suite à une suggestion du Barreau canadien, on revient à la tournure de phrase qui parle de l'équivalent du salaire ou des autres avantages dont l'a privé le congédiement. Il s'agit du cas de congédiement pour activité syndicale qui est à l'actuel article 14 du code qui assure la relation de cause à effet entre le congédiement et la perte de revenu qui s'ensuit et l'obligation pour le salarié de minimiser les dommages, tel que reconnu par la jurisprudence. Le deuxième alinéa devient nécessaire pour indiquer que l'indemnité est causée jusqu'au moment du rappel par le travail ou par le refus du salarié de travailler et enfin, on précise que le défaut du salarié commence à partir du moment de son rappel par l'employeur.

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Clair): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'avais pris connaissance également du mémoire du Barreau et je suis d'accord sur la précision que vient d'apporter le ministre en éliminant une source d'ambiguïté possible, parce que la rédaction initiale, dans le projet de loi 45, laissait une possibilité d'interprétation, ce qu'a souligné le Barreau; la solution adoptée par le ministre est donc conforme à la suggestion du Barreau, à la page 7 de son mémoire. Je pense même que cela reprend mot pour mot la suggestion que le Barreau faisait.

Cependant, il y a deux autres points sur cet article 14 du Code du travail qui méritent, je pense, d'être soulignés. Il y a également d'ailleurs, dans le mémoire du Barreau, une autre recommandation que le ministre n'a pas retenue, mais qui nous semble assez pertinente et qui est à l'effet suivant: Le Barreau suggère de préciser les pouvoirs du commissaire du travail afin qu'il puisse qualifier l'ordonnance de réintégration. En pratique, nous dit-on, et c'est le témoignage du Barreau sur lequel je m'appuie pour l'affirmer, les parties ont accepté l'inscription de l'employé sur une liste de rappel au lieu de la réintégration immédiate lorsqu'il y a eu, de bonne foi, des mises à pied.

Comme exemple: l'activité de l'entreprise était réduite pour des causes économiques ou autres, pertes de contrat, etc., il y a eu des mises à pied subséquentes à la mise à pied qui a fait l'objet d'une ordonnance de réintégration, des mises à pied de bonne foi, ce qui fait qu'il y a moins d'employés au moment de l'ordonnance qu'il y en avait au moment du congédiement, ce qui, si on impose la réintégration, peut conduire à contredire le principe de réintégration selon l'ancienneté. Parce qu'un employé a été congédié contrairement aux dispositions de l'article 14, il se trouve à jouir d'un précédent sur des gens qui ont été congédiés après lui et qui ont possiblement plus d'ancienneté que lui.

Alors, en pratique, les syndicats, qui ont agi dans des griefs ou dans des interventions de ce genre, ont accepté de placer le syndiqué qui fait

l'objet d'une ordonnance de réintégration sur une liste de rappel, où il viendra prendre sa place dans son rang normal, selon l'ancienneté. Je pense que c'est là une argumentation à laquelle il est difficile d'échapper. Parce que, finalement, je comprends qu'on doit exiger qu'il soit restauré dans ses droits, mais, de là à lui donner plus de droits qu'il en aurait eus s'il n'avait pas été congédié au départ, afin de lui donner une préférence de réintégration par rapport à d'autres qui ont pu être congédiés pour d'autres raisons, c'est un peu curieux comme effet, c'est certainement un effet non souhaité de la mesure. Il semble qu'il y ait une pratique selon laquelle cela se fait selon une liste de rappel. Evidemment, il s'agirait que le commissaire puisse le faire dans des cas où cela apparaît la chose à faire, mais il ne s'agit pas d'en faire une prescription de la loi qui devrait s'appliquer; il ne s'agit pas de dire: II n'y a pas de réintégration forcée, il y a une liste de rappel. S'il pouvait la qualifier et dire que ça prendra effet par l'inscription sur une liste de rappel quand ça deviendra opportun, il me semble que cela serait plus approprié comme ça.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Ne croyez-vous pas, M. le député de Saint-Laurent, par exemple, que la jurisprudence... M. le Président, je voudrais demander au député de Saint-Laurent s'il est au courant que la jurisprudence sur la réintégration, les sentences qui parlent de réintégration sont toujours basées sur la situation actuelle dans l'industrie ou dans l'enseignement. Par exemple, il arrive des congédiements, il y a une réintégration. A ce moment-là, le juge prend la précaution de s'enquérir des listes d'ancienneté pour voir si la réintégration doit être faite à temps complet.

J'ai même vu des griefs, j'ai même assisté à des arbitrages, j'ai même été arbitre; ces tribunaux ont réintégré des gars pour huit mois seulement en disant: Vous auriez été mis à pied de toute façon, en vertu de la fermeture d'une école, en vertu de la diminution de la clientèle. Il y a des individus... Vous seriez parmi ceux-là, vous n'auriez pas été réintégrés, pour l'année suivante. De la sorte, on tenait compte, dans le quantum à verser à l'individu, du délai qui permettait à l'individu de recouvrer tous ses droits.

Je ne le sais pas, mais si on introduit une notion comme ce que vous dites, je pense que, d'abord, on présumerait de l'action, du jugement des présidents, qui en ont toujours tenu compte, et je me demande si cela ne serait pas, d'autre part, une incitation pour le monde patronal à se servir de cela pour dire: Ecoutez... C'est une fermeture. Je vous demanderais de bien y penser, parce que la jurisprudence démontre qu'il n'y a pas eu d'abus là-dedans et cela serait mal venu d'introduire une notion nouvelle qui pourrait servir plutôt d'incitation à faire des choses qui ne se faisaient pas dans les faits.

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: J'aurais une question à poser au ministre. C'est plutôt sur la philosophie du Code du travail. Je m'excuse, je ne suis pas tellement familier avec le Code du travail du Québec, mais...

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous indique immédiatement, à titre préventif, qu'on discute actuellement de l'article 6. Ce matin, tous les députés qui ont désiré intervenir sur le principe général de la loi ont pu le faire.

M. Mackasey: Exactement. Je comprends bien cela.

Le Président (M. Clair): Alors, sur l'article, s'il vous plaît, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: Je pense qu'on parle du problème des employés congédiés ou suspendus, n'est-ce pas? Ce n'est pas l'employeur.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour activités syndicales.

M. Mackasey: Pour désigner le représentant du gouvernement ou du ministère, on a changé le terme, on l'appelle maintenant le commissaire; s'il décide que l'employeur est en défaut, pourquoi le deuxième paragraphe, si le salarié a travaillé ailleurs au cours de la période précitée? Pourquoi le salaire qu'il a ainsi gagné doit-il être déduit de cette indemnité?

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est l'ancien article. Ce n'est pas l'amendement.

Le Président (M. Clair): L'article 6 est-il adopté?

M. Forget: M. le Président, étant donné que, sur le point que j'ai soulevé, le député de Joliette-Montcalm a, en somme, non pas tellement formulé une objection qu'attiré l'attention sur le fait qu'il y avait une jurisprudence, je suis d'accord que c'est la jurisprudence. C'est d'ailleurs l'argument que tient le Barreau. Il y a une jurisprudence qui n'est pas absolument conforme au libellé de l'article.

Il attire justement l'attention du législateur sur l'opportunité comme d'ailleurs cela a été fait dans plusieurs articles à l'occasion de cette refonte ou cette révision du Code du travail, que la loi prévoie autre chose que la réintégration ou l'indemnité, parce que, sur un plan strictement formel, il est assez clair qu'il y a une réintégration ou une indemnité et que, dès que la jurisprudence sur laquelle on se base utilise une autre hypothèse de règlement, il y a au moins une possibilité, une ouverture à la contestation.

II est possible que les parties aient décidé de ne pas contester une certaine jurisprudence qui s'est établie comme cela, peut-être plutôt par tolérance qu'autrement, mais comme il y a divergence entre le texte... parce qu'il est clair que si le texte dans le droit statutaire s'interprète restrictivement, si on dit au commissaire qu'il peut faire deux choses et ne peut pas en faire une troisième, il la fait, malgré tout, et que personne ne s'y oppose, cela tient, mais, le jour où quelqu'un s'y opposera en disant qu'il a outrepassé les pouvoirs que la loi lui donne, je pense qu'une partie ou une autre qui serait intéressée à le contester pourra faire casser l'ordonnance.

Quant à faire, il est aussi bien de le préciser, puisqu'il ne s'agit pas d'empêcher cette possibilité que le député de Joliette-Montcalm a soulignée, avec raison, il s'agit au contraire de dire: Oui, cela se fait et, désormais, non seulement cela se fait, mais on va reconnaître explicitement dans le texte que c'est une souplesse qui est appropriée.

C'est du moins un raisonnement que le Barreau tient. Ce sont des spécialistes en droit du travail. Enfin, ce n'est pas apparent pourquoi on dit que leur inquiétude est superflue. Cela me paraissait une inquiétude assez légitime.

M. Johnson: M. le Président, étant donné que je n'ai pas pris la parole, je vais la prendre en réplique au député de Saint-Laurent pour dire que j'abonde absolument dans le sens du député de Joliette-Montcalm.

Donner lieu à la suggestion du Barreau pourrait prendre la forme presque d'une incitation, je pense, à l'employeur de trouver dans certains cas — on sait que, dans certains cas, cela peut exister — des moyens de modifier ses effectifs, de modifier la destination d'une partie de son entreprise aux seules fins de non-réintégration d'un salarié ou d'un groupe de salariés.

Dans ce sens, on ne voudrait pas que ce soit incitatif. On pourrait, évidemment, arriver à la situation où on a affaire à une ordonnance d'intégration, d'un individu dans une usine qui n'existe plus, mais le tribunal a toujours démontré dans le passé que, habituellement, il n'ordonnait pas la réintégration de quelqu'un à une entreprise qui était inexistante.

Le Président (M. Clair): L'article 6 est-il adopté?

M. Forget: M. le Président, sur un autre point, j'ai dit qu'il y avait deux points qui méritaient d'être soulignés. Mon collègue a déjà soulevé ce point. Je pense qu'il est peut-être bien de le faire de façon systématique. Le temps était venu de le souligner, mais comme il l'a déjà mentionné, il me fait plaisir de lui laisser la parole pour qu'on puisse également se pencher sur ce point.

Le Président (M. Clair): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: M. le ministre et MM. les membres de la commission, je veux tout simplement souligner le fait que c'est l'occasion de régler bien des injustices dans le Code du travail, si possible. Je ne peux pas comprendre comment, d'après le Code du travail actuel même après les amendements proposés par le gouvernement, on pénalise l'employé. Peut-être que je ne comprends pas. Si un salarié est congédié pour des activités syndicales, etc., et si après enquête par quelqu'un désigné par le ministre selon la loi, on en vient à la conclusion que le salaire n'est pas en défaut, que ce n'est pas sa faute, c'est la responsabilité de l'employeur de le réengager, parce que ce n'était pas lui qui était en défaut selon la loi, mais l'employeur. A cet égard, je pense que nous sommes tous d'accord.

Si nous sommes arrivés à la conclusion que c'est l'employeur qui est en défaut, je ne peux pas accepter le Code du travail tel qu'il est, M. le ministre, parce que même si ce n'est plus le salarié qui est en défaut — c'est établi par le commissaire — on demande à ce salarié quand même de verser à l'employeur l'argent qu'il a gagné pendant qu'il était congédié pour les raisons qui étaient certainement illégales de la part de l'employeur.

Je ne peux pas comprendre cette philosophie du tout. Si quelqu'un est congédié ou perd son travail pendant un mois, deux mois ou trois mois, si vous voulez, que quelqu'un d'impartial décide que c'est la faute de l'employeur, et que, pendant un mois, deux mois ou trois mois, l'employé, le salarié a travaillé, a été obligé de le faire, je me demande pourquoi on prend ça en conséquence. Ce n'est pas sa faute s'il a été obligé d'aller travailler ailleurs. Peut-être qu'il a gagné seulement la moitié du salaire qu'il aurait gagné si vraiment il avait été engagé...

M. Chevrette: Est-ce que vous me permettez de vous poser une petite question, M. le député de... M. le Président, est-ce que je peux demander au député de...

Le Président (M. Clair): Si le député vous permet de lui poser une question.

M. Chevrette:... Notre-Dame-de-Grâce. Le Président (M. Clair): M. le député. M. Chevrette: Dans les faits... M. Mackasey: Oui.

M. Chevrette: ... vous voudriez voir disparaître le paragraphe 2...

M. Johnson: De l'article 14? M. Chevrette:... de l'article 14?

M. Mackasey: Avant de décider ça, peut-être... Je sais que vous...

M. Chevrette: Non, mais est-ce que l'essentiel de votre argumentation, c'est...

M. Mackasey: Je veux savoir, premièrement, du ministre, quelle est, pour le moment, la philosophie du deuxième paragraphe.

M. Johnson: Quelle est la philosophie du deuxième paragraphe de l'article 14?

M. Mackasey: Oui.

M. Johnson: La jurisprudence a établi — c'est la pratique — qu'une personne qui est congédiée pour activités syndicales, mais qui exerce son métier ou un métier analogue ailleurs, ne doit pas obtenir, par le Code du travail, une compensation qui serait bien plus une compensation de nature... qu'on retrouverait, par exemple, en vertu de l'article 1053 du Code civil ou en vertu de certains contrats individuels.

Il s'agit de protéger, par une mesure, d'ailleurs essentiellement dissuasive à l'égard des employeurs, l'activité des salariés qui s'adonnent à des activités syndicales. Il ne s'agit pas de chercher un moyen de double indemnisation dans le cas où l'employeur a abusé. Je pense que l'objet de la loi, c'est celui-là. Ce serait évidemment ajouter une pénalisation de plus. C'est possible à l'employeur, ou, enfin, ça ne change rien pour l'employeur, mais ça donne plus d'argent au salarié. Je ne vois pas en vertu de quel principe, par définition, si on a obtenu une compensation pour un travail ailleurs, on obtiendrait également une restitution totale de l'argent puisque ce qu'on vise, c'est lui redonner son poste et faire en sorte qu'il n'y ait pas de pertes pécuniaires.

M. Mackasey: Oui, mais, si je comprends bien...

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: Je vais le dire pour moi-même en anglais: When an employee is dismissed, suspended or transferred by the employer or his agent because of the exercise by such employee of a right granted him by the Code... within eight days of the service of the decision, with all his rights and privileges to pay him as an indemnity the equivalent of the salary, je suis d'accord, l'équivalent du salaire et d'autres avantages dont le congédiement l'a privé, la suspension ou le déplacement.

Malgré la jurisprudence, parce que la jurisprudence existe sûrement parce que le code est écrit ainsi, ce n'est pas une raison...

Si le salarié a travaillé ailleurs au cours de la période précitée, le salaire qu'il a ainsi gagné doit être déduit de cette indemnité. Je me demande pourquoi cela devrait être déduit de cette indemnité.

Je sais que la jurisprudence... mais la juris- prudence, tout simplement à cause de cet article écrit...

M. Chevrette: Je peux donner un bout de réponse. Même avant que vous n'ayez cela dans le Code du travail comme tel, si on regarde toutes les vieilles sentences arbitrales depuis l'avènement du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, c'est clair, vous voyez toujours, dans la conclusion — comment dirais-je? — nous obligeons l'employeur à réintégrer le travailleur et à lui verser les sommes équivalant à la perte de traitement effective.

Donc, le gars est même obligé de produire devant le tribunal, dans bien des cas, la preuve de ses gains, de ses pertes de bénéfices, par exemple.

M. Mackasey: M. le député de Joliette-Montcalm, excusez-moi. Avec votre expérience, c'est clairement indiqué par le commissaire que l'employeur est en défaut, pas l'employé. Laissez faire la jurisprudence. C'est l'employeur qui est en défaut, et non pas l'employé.

Alors, pourquoi pénaliser l'employé en lui demandant de verser à l'employeur une partie d'une indemnité que l'employeur doit à cet employé? Si on veut être juste, débarrassez-vous complètement du deuxième paragraphe. C'est la justice qu'on veut pour les employés du Québec?

M. Johnson: Au niveau des principes, je trouve cela absolument inspirant.

M. Mackasey: Le principe est clair. C'est le commissaire qui décide.

M. Johnson: Cependant, le...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! Un à la fois et on s'adresse toujours au président.

M. le ministre.

M. Johnson: Vous permettez? Au niveau des principes, je trouve cela évidemment bien séduisant. Cependant, le député de Notre-Dame-de-Grâce acceptera avec moi qu'il y a des cas qui ne sont peut-être pas si évidents et si patents.

Il y a peut-être des cas où la réinstauration à son poste du salarié découle d'une appréciation des faits et, de façon générale, je pense que le tribunal et le commissaire-enquêteur donnent plutôt un bénéfice du doute au travailleur.

Or, dans le cas où il décide d'imposer la réintégration du salarié, mais sur la base, finalement, d'un jugement, qui est un bénéfice du doute, je pense que cela serait injustement pénaliser l'employeur dans ce cas-là.

D'autre part, on sait qu'en fin de compte, malgré le paragraphe 2 de l'article 14, le salarié a une indemnisation totale puisque, s'il n'a pas trouvé de travail ailleurs, il obtient le plein montant qu'il aurait dû avoir s'il était resté en fonction et, s'il a trouvé du travail ailleurs, le total, de

toute façon, le "take home pay", si vous me permettez l'expression demeure le même et, dans ce sens, je pense que les choses sont comme elles doivent être.

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: Si vous êtes content, M. le ministre, de votre proposition; même si l'employeur est en défaut et que l'employé, quand même pour partager les dommages dans le sens de renverser une partie ou peut-être toute son indemnité durant un mois ou deux mois qu'il a été absent à cause d'une action illégale de la part de l'employeur; si vous, comme gouvernement, êtes prêt à accepter cette philosophie, ce n'est pas moi qui vais la changer.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Dans la loi actuelle, il n'y a pas d'alternative, c'est la réintégration ou le versement de l'indemnité ou le congédiement complet. L'expérience des tribunaux du travail a prouvé que dans bien des cas, placé devant une situation où on n'a pas de multiple choix... On en a deux, ou vous réembauchez ou vous congédiez, ce qui a amené graduellement le tribunal du travail à dire, par les présidents des tribunaux: On va vous donner la différence de salaire perdu précisément pour ne pas introduire la dimension de pénalité différente; et on dit: Ecoutez, six mois de suspension, cela aurait peut-être été juste, trois mois de suspension, cela aurait peut-être été suffisant dans tel cas. La loi a gardé son caractère d'alternative d'embauche ou de congédiement, mais elle a introduit une question de gains effectifs et c'est à partir de là que, malgré que moi aussi les principes me séduisent beaucoup, à partir de ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce a dit, je trouve cela vertueux et je trouve cela bien. Mais placé devant une situation de président du tribunal, combien de fois les gars donnent le bénéfice du doute aux travailleurs disant: Je vous garantis que ce n'est pas drôle de jouer avec le droit au travail, parce que dans le fin fond, vous auriez mérité une pénalité de quinze jours à trois semaines. C'est ce qui arrive, bien souvent, et c'est ce qui explique que ceci s'est introduit graduellement dans les lois du travail, cette notion de balance du "take home pay" pour arriver au bout de la course avec une paie identique.

Le Président (M. Clair): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Qu'est-ce qui arrive, M. le ministre, si, entre le moment du congédiement et la décision ordonnant la réintégration, l'employeur effectue des mises à pied et que c'est de bonne foi?

M. Johnson: Vous voulez dire: II ferme des postes?

M. Bellemare: Oui. Le commissaire du travail pourrait-il déférer l'application de l'ordonnance de réintégration, comme par exemple, en plaçant l'employé sur une liste de rappel, comme cela se fait maintenant? En pratique, dans des cas semblables, c'est presque devenu les us et coutumes. Parce qu'il y a véritablement une question de bien-être qu'on recherche entre le moment du congédiement et la décision ordonnant la réintégration. L'employeur effectue souvent des mises à pied. Est-ce que le commissaire du travail pourrait différer l'application de la réintégration, par exemple en plaçant son nom sur une liste de rappel comme cela se fait présentement dans bien des cas? C'est une question pour éclairer ma lanterne, parce que la lettre tue et l'esprit du législateur vivifie. Là, je me demande ce qui arriverait.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent ou le ministre du Travail est-il disposé à répondre? Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'allais simplement dire que ce que le député de Johnson dit, c'est exactement le point de vue que je défendais tout à fait au début.

M. Bellemare: J'étais pris en Chambre.

M. Forget: Je ne vous fais pas de reproche, M. le député de Johnson, mais c'est pour souligner que le point de vue qui vient d'être exprimé est également un point de vue qui apparaît justifié. On veut régler un problème en donnant des pouvoirs au commissaire, mais on lui donne le choix, non pas de prendre une décision, compte tenu de toutes les circonstances. Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a mentionné que vis-à-vis du montant de l'indemnité on ne lui donne pas le choix non plus et vis-à-vis du moment de la réintégration, le député de Johnson, après que je l'ai fait moi-même, mentionne qu'on ne lui donne, dans le fond, aucune discrétion. Cela a été affirmé, d'ailleurs, dans certaines décisions des tribunaux, que le commissaire du travail, le commissaire enquêteur à l'époque, ne jouit pas de discrétion et tout le problème qui est soulevé c'est que, effectivement, cela n'a pas été jugé suffisant dans le passé, parce que les parties s'entendent pour aménager les choses avec discrétion.

A moins que le ministre soit d'avis, mais cela n'a pas été démontré, qu'il ne faut pas qu'il y ait discrétion, dans le sens suivant: quand ces arrangements sont contre l'ordre public, mais ce n'est manifestement pas le cas, du moins il me semble. Il apparaîtrait plus normal que le commissaire ait une marge de manoeuvre qui permette l'inscription sur une liste de rappel, qui permette dans certains cas aussi, peut-être, que l'indemnité puisse être appréciée.

Je comprends que c'est une question délicate, on n'a pas vu imposer de pénalisation, mais prenons l'exemple d'une situation où il pourrait y avoir... On peut être dans une industrie susceptible de fluctuations saisonnières. Les fluctuations saisonnières peuvent fournir une occasion merveilleuse à l'employeur de congédier de façon sélective ses employés de manière à faire une épuration annuelle, épuration dont il n'aura pas à assumer le coût parce que, dans la mesure où ces gens se reclasseront ailleurs dans d'autres occupations, etc, le coût net de l'opération pourra être assez léger.

De toute façon, il y en a qui peuvent décrocher complètement et on peut régler, par l'usure, une partie de son problème. Toute la question des commissaires du travail, c'est peut-être ça le problème de fond. On ne voit pas jusqu'à quel point cette institution, plus elle s'ancrera dans les moeurs, pourra éviter de devenir progressivement une extension du Tribunal du travail. C'est peut-être ça le problème de fond qu'on soulève, je ne le sais pas.

M. Bellemare: ...

M. Forget: Evidemment, comme on regarde ce projet de loi un peu par le petit bout de la lorgnette ou je ne sais pas quoi, on est peut-être un peu handicapé pour poser la question de fond, parce qu'elle ne se pose nulle part de façon précise, dans aucun des articles qui nous sont soumis. Mais est-ce que c'est normal que tant de décisions importantes soient prises dans un cadre extrêmement étroit, alors qu'il y a un Tribunal du travail qui devrait être l'organisme qui rend des décisions peut-être un peu plus larges dans des cas comme celui-là?

L'articulation des deux mécanismes, le Tribunal du travail et le commissaire du travail, sauf pour des droits d'appel qui sont compris dans certains cas et qui ne sont pas compris dans d'autres, on ne sait pas trop pourquoi, sauf la tradition, l'articulation des deux mécanismes n'est pas très claire. C'est ce qui me pousse à dire, malgré les arguments qui ont été avancés, qui sont basés un peu sur le fait que les textes étaient comme ça dans le passé et on a vécu avec, cela devrait être encore assez bon pour l'avenir, mais...

M. Johnson: Plus que ça un peu.

M. Forget: Un peu plus, mais pas beaucoup plus que ça...

M. Johnson: Je vais y revenir.

M. Forget:... parce qu'on a quand même une différence entre les textes et l'utilisation qu'on en a fait. Si on dit: On va continuer à ignorer cette différence, parce que cela n'a pas été le sujet de si grandes difficultés jusqu'à maintenant, oui et non. De toute façon, on a une occasion de le régler. Cela me pousserait à faire une motion, de façon un peu plus formelle, pour qu'on sache au moins de quoi on parle, pour suggérer — c'est loin d'aller aussi loin qu'on pourrait aller, ça touche un aspect — "que le paragraphe 14 de l'article 6 soit modifié en ajoutant l'alinéa suivant...

M. Chevrette: Quel alinéa?

M. Forget: Le paragraphe 14. Excusez-moi, ce n'est peut-être pas le paragraphe 14.

M. Johnson: L'article 14. M. Forget: L'article 14.

M. Johnson: L'article 6 du projet de loi 45 référant à l'article 14 du code.

M. Forget: C'est ça, "soit modifié en ajoutant l'alinéa suivant, "le commissaire du travail"— cela ira à la fin, je pense, tout simplement — "le commissaire du travail peut différer l'application de l'ordonnance de réintégration si les circonstances le justifient."

C'est conforme au point soulevé par le député de Johnson et par moi-même.

M. Bellemare: C'est parfait, M. le Président, si vous me permettez une légère intervention. Dans les recommandations qu'a faites le Barreau, il y avait celle qui est contenue présentement dans les amendements qui sont justifiés. Mais dans la deuxième recommandation qu'a faite le Barreau, j'ai cru déceler l'expression de la motion du député de Saint-Laurent, parce qu'on disait ceci: "En raison de la sanction sévère prévue dans de tels cas, il aurait certes lieu de préciser que le commissaire du travail peut différer l'application de l'ordonnance ou la réintégration dans les circonstances." C'est exactement, je pense, le sujet de...

M. Johnson: De l'amendement du député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: Oui.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail.

M. Johnson: Je vais m'opposer à cet amendement pour la raison que le commissaire du travail, l'ancien commissaire-enquêteur, a des pouvoirs qui sont presque quasi judiciaires, si on me passe l'expression. Ce sont des personnages qui, sur un plan administratif, au niveau du ministère, bénéficient d'une autonomie d'action comme aucun autre fonctionnaire n'en bénéficie, sauf ceux qui sont attachés aux tribunaux.

Puisque, d'autre part, ils ne sont pas assimilables aux membres d'un tribunal et donc aux obligations d'un tribunal et puisqu'il y a peu de mécanismes d'appel de leurs décisions, il y a

donc nécessité à mes yeux de limiter considérablement le champ de leur appréciation et le champ où peut jouer la subjectivité. Je pense qu'en ce sens, on suit l'économie de la loi.

C'est non seulement en vertu d'un principe de droit administratif, mais également pour protéger d'une certaine façon le commissaire du travail, pour ne pas le mettre dans une situation où, finalement, il serait appelé à apprécier des événements qui ne sont pas reliés directement à ce qui est visé par l'article 14, comme, par exemple, les raisons pour lesquelles une entreprise fait des mises à pied, à une certaine époque.

Or, dans la réalité, que se passe-t-il avec l'application de cet article, malgré les modifications qu'on y apporte et l'absence d'additions qu'y verrait le Barreau canadien? Le commissaire pourra ordonner la réintégration de celui qui a été congédié pour activités syndicales, si son poste n'existe plus ou si l'entreprise a mis fin à une bonne partie de ses activités, et donc, des effectifs, ou envisage de le faire, il pourra être réintégré pour une période de 24 heures et, à ce moment-là, ce sont les règles normales, les mécanismes de la convention collective, dans le cas où il y en a une, évidemment, qui jouent. Cela mettrait le commissaire du travail dans une situation à la fois d'appréciation subjective de certains événements qui n'ont rien à voir en soi, en eux-mêmes, avec la notion de congédiement pour activités syndicales. D'autre part, cela présupposerait son intervention au niveau des règles d'interprétation d'une convention collective qui, au chapitre de la sécurité d'emploi, par exemple, contient de nombreuses dispositions quant aux règles d'ancienneté qui prévalent dans les mises à pied.

Pour protéger à la fois ce principe qui veut qu'on restreigne le champ d'application de l'activité des commissaires-enquêteurs à cause de leur nature, et, deuxièmement, pour protéger les commissaires-enquêteurs eux-mêmes de la nécessité de porter des jugements éminemment subjectifs, je rejetterai la proposition du député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: M. le Président, le ministre semble oublier l'usuel, ce qui se produit aujourd'hui. Il plane pour essayer de trouver une situation...

M. Johnson: Un exemple, s'il vous plaît, M. le député de Johnson!

M. Bellemare: Aujourd'hui, il se fait des listes de rappel après une grève. Le gars qui se sent lésé fait son grief et reçoit sa réintégration, et il est payé jusqu'au jour de sa réintégration. Après sa réintégration, il reste sur la liste d'appel. Il ne faudrait pas oublier cela. Il est payé jusqu'à la date où le juge, le commissaire du travail, a rendu une décision favorable. D'accord.

Dans l'usuel, il reste sur la liste d'appel mais on ne le rappelle pas. On dit qu'on devrait prévoir que le commissaire du travail ait le droit de retarder sa décision ou, comme le dit l'amendement, puisse différer l'application de l'ordonnance, de la réintégration. Il y a une liste d'appel et on dirait que celui qui a gagné contre le patron, est payé jusqu'à cette date de réintégration, mais, comme le dit le ministre, il peut être appelé pour 24 heures et, après cela, il retombe sur la liste d'appel pour X temps.

C'est l'usuel. Aujourd'hui, c'est de renommée publique. Le gars qui...

M. Johnson: Cela n'existe pas nécessairement partout.

M. Bellemare: Pardon?

M. Johnson: Cela n'existe pas nécessairement partout et de façon systématique. Il s'agit— et c'est cela que j'essayais d'expliquer...

M. Bellemare: Ecoutez, systématique...

M. Johnson: C'est cela que j'essaie d'expliquer, ce que le député de Johnson qualifie de "planage". J'essaie d'expliquer au député de Johnson qu'il s'agit de faire en sorte que le commissaire-enquêteur ne soit pas appelé à porter un jugement qui déborde le cadre, les raisons pour lesquelles il existe.

M. Bellemare: C'est d'accord.

M.Johnson: II existe pour protéger. M. Bellemare: II l'a fait.

M. Johnson: Dans le cas de l'article 14, le congédiement pour activités syndicales.

M. Bellemare: II l'a fait; il a répondu au grief.

M. Johnson: On n'a pas à lui demander d'interpréter des clauses d'une convention collective sur le rappel.

M. Bellemare: Seulement, aujourd'hui, il va faire ses 24 heures, vous avez raison, il va être payé pour tous ses arrérages, mais, à partir de là, il va passer sur la liste de rappel; il sera rappelé quand?

M. Johnson: A son rang, selon la convention, selon ce qui a été négocie normalement par le syndicat.

M. Bellemare: C'est cela que je vous dis qui se fait aujourd'hui. C'est cela qui se fait aujourd'hui chez les employeurs.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je pense qu'on ne se comprend pas. Dans les faits, on n'a pas le choix; quand il y a une ordonnance, le gars, c'est vrai qu'il est payé jusqu'au moment de l'ordonnance. Je pense que c'est établi et que c'est fait.

M. Bellemare: ...

M. Chevrette: II entre à nouveau au travail.

M. Bellemare: 24 heures.

M. Chevrette: L'employeur le remet à pied. Dès qu'il le remet à pied, ce sont les mécanismes des conventions existantes qui jouent. A-t-il été remis à pied selon sa liste d'ancienneté ou selon les mécanismes de mise à pied de la convention collective?

M. Bellemare: Non, simplement parce que...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, je fais appel à votre collaboration pour laisser le temps au député de Joliette-Montcalm de présenter son point.

M. Bellemare: Vous n'avez pas besoin de me le dire, c'est vrai, mais, en tous les cas...

M. Chevrette: S'il le remet à pied non conformément aux mécanismes de la convention collective, ce sont les mécanismes de la convention collective qui prévalent. S'il le met à nouveau à pied pour activités syndicales, le lendemain, au bout de 24 heures, le mécanisme recommence. Il y a une nouvelle plainte au commissaire du travail. Le commissaire du travail peut statuer à partir du fait qu'il a été seulement 24 heures dans l'usine et ce n'est pas un problème, la sentence va venir vite.

Je ne connais pas vraiment l'objectif, mais, d'après moi, c'est venir déborder le rôle des tribunaux d'arbitrage sur l'interprétation et l'application des conventions collectives, ce que vous voulez apporter là, et ce n'est vraiment pas le rôle du commissaire du travail, qui est de statuer sur le bien-fondé d'un congédiement pour activités syndicales et non pas pour fins d'application et d'interprétation d'une convention collective.

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: M. le Président, il faut comprendre que nous sommes tous des philosophes dans ce domaine et qu'il n'y a aucun témoin. On peut être un peu flexible quand on parle directement. Le ministre a bien dit qu'il veut protéger le commissaire, je suis d'accord, mais il veut le protéger concernant le salarié uniquement et non pas concernant l'employeur. Je suis contre ce principe.

Si le salarié est congédié, suspendu ou déplacé par l'employeur pour une raison que le salarié ne trouve pas logique selon la loi, l'article 15 probablement, qu'il porte plainte, qu'il utilise son privilège comme citoyen et il y aura une investigation par le commissaire et celui-ci décidera si le salarié a raison. S'il n'a pas raison, il ne sera pas engagé à nouveau, je suis d'accord.

On parle maintenant du cas d'un salarié qui est congédié ou déplacé par l'employeur ou son agent; dans le présent cas, le commissaire-enquêteur pourra ordonner à l'employeur de le réintégrer. Ce n'est sûrement pas la faute du commissaire, M. le ministre, c'est sûr que c'est la faute de l'employeur. On ne demande pas au commissaire de décider s'il y a 80-20 ou 70-30, c'est pour empêcher que cela arrive au commissaire d'agir comme arbitre ou comme une commission d'arbitrage, comme, je pense, le député de Joliette-Montcalm l'a souligné. Pour protéger contre cela, quand même, on met toute la pénalité de la protection sur le dos du salarié. On dit: Si vous êtes congédié illégalement, pour deux ou trois mois, si vous avez quand même eu l'initiative de vous trouver un emploi ailleurs et, après l'investigation, nous savons que vous avez été congédié illégalement.

L'argent que vous avez gagné pendant la période de trois mois, il faut verser cela à l'employeur qui est responsable d'avoir violé le Code du travail. Je pense que cela n'a pas d'allure. On est bien mieux de laisser tomber complètement ce deuxième paragraphe.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense qu'on n'était pas à l'amendement du député de Saint-Laurent.

M. Mackasey: Non, pas tout à fait. Je pense que l'amendement du député de Saint-Laurent est plus flexible. Il laissait au ministre plus de flexibilité pour que le commissaire décide si c'est 80%-20% ou 70%-30%, en calculant qui est en défaut. Comme c'est écrit, le salarié, même s'il est à 100% innocent, n'a que l'avantage de son ancienneté, si vous voulez. Il est obligé de remettre tout le salaire qu'il a gagné pendant qu'il était congédié illégalement. Cela n'a pas de bon sens. Ce n'est certainement pas de la justice.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, MM. les députés de Jonquière et de Johnson!

M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'ai pas demandé la parole, mais j'avais seulement une question à poser au député de Johnson. Je ne sais pas si c'est possible...

Le Président (M. Clair): Si vous n'aviez pas demandé la parole, je ne...

Une Voix: II faut que tu la demandes.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je la demande. Est-ce que cet exemple auquel il faisait allusion tout à l'heure, je parle de l'amendement du député de Saint-Laurent, c'était l'exemple du salarié qui, après avoir été congédié pour activités syndicales, est réintégré et qui, 24 heures après, est recongédié par son employeur encore une fois pour activités syndicales?

M. Bellemare: Non, pas nécessairement pour activités syndicales.

M. Vaillancourt (Jonquière): De bonne foi? M. Bellemare: De bonne foi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour une raison...

M. Bellemare: Pour une raison qui est acceptable et contre laquelle vous ne pouvez pas avoir de grief, mais cela est écrit.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est la convention collective qui s'applique dans ce cas.

M. Bellemare: Oui, je comprends que, selon la convention collective, il a droit à un grief, mais, normalement, selon les us et coutumes, ce qui se fait actuellement, le gars tombe dans ce "no man's land" des rappels, qu'est-ce que tu veux? Il s'en va là.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pourquoi faire une discrimination entre le gars qui est réintégré, qui revient prendre son emploi et qui est congédié 24 heures après et le gars qui n'a pas été congédié pour activités syndicales, qui a toujours occupé son emploi et qui, tout à coup, lui aussi...

M. Bellemare: M. le Président, je m'adresse à vous, parce que c'est à vous qu'il faut parler...

M. Vaillancourt (Jonquière): Ex-ministre du Travail.

M. Bellemare: Malgré qu'il se fait un peu une lutte entre les deux pour la vice-présidence à la Chambre; en tout cas, je vous souhaite bon succès tous les deux; je ne sais pas lequel va gagner, mais, en tout cas, je garde ma réflexion pour quand il sera élu.

M. Chevrette: C'est plus sage.

M. Bellemare: Je pense que l'amendement du député de Saint-Laurent est facile à comprendre. Le commissaire du travail peut — je ne dis pas "doit" — différer. Cela veut dire que, peut-être, sans que ce soit suspendu sur la tête de l'employeur, avec le nombre de jours, de mois qu'il va être obligé de payer à la suite de sa réintégration, cela va peut-être permettre à l'employeur de régler plus vite et de l'accepter. C'est cela qui est dit. C'est simplement mettre... D'ailleurs, le Barreau est bien d'accord. C'est la recommandation du Barreau qui est là, la deuxième. Je pense que les hommes de loi sont meilleurs que nous, les "brakesmen" pour interpréter le véritable sens juridique de l'application du deuxième paragraphe qui dit qu'il y aurait, certes, lieu de préciser que le commissaire-enquêteur du travail peut différer. Pourquoi a- t-on mis dans le rapport du Barreau ces mots "peut différer"? Je pense qu'il y a une raison fondamentale dans l'application même de la procédure. Les avocats ont vécu ce modus vivendi et ils arrivent avec le "peut différer". L'application de l'ordonnance de réintégration pourrait être plus bénéfique pour les parties. Si vous croyez que ce n'est pas nécessaire, moi, je prétends que le député de Saint-Laurent a raison; pour une fois on est d'accord. Il y a des fois où on ne l'est pas, mais...

M. Forget: J'apprécie.

M. Bellemare: ... pour une fois, on est d'accord, parce que ce que j'ai vécu, moi, me prouve aujourd'hui qu'il y a, dans le monde du travail, un malaise considérable dans le rappel. On le fait de bonne foi, mais je vous garantis qu'on est sur le "line-up". Alors, moi, je suis en faveur de l'amendement du député de Saint-Laurent pour ajouter: "Le commissaire du travail peut différer l'application de l'ordonnance de réintégration si les circonstances le justifient", exactement ce qui est contenu dans le rapport d'hommes de loi qui ont dû vivre ce problème bien des fois et qui ont, au point de vue du Code du travail, un certain éclairage qui nous manque, peut-être, à tous. Ces derniers, qui sont continuellement dans la procédure et dans ces questions de griefs et de suspensions, n'ont pas écrit ça seulement pour dire: On a pensé que ce serait mieux. Ils avaient des raisons valables. Je dis que l'amendement du député de Saint-Laurent est justifiable et je voterai en faveur.

Le Président (M. Clair): L'amendement du député de Saint-Laurent, qui se lit comme suit: "Que le paragraphe 14 de l'article 6 soit modifié en ajoutant l'alinéa suivant: Le commissaire du travail peut différer l'application de l'ordonnance de réintégration si les circonstances le justifient" est-il adopté?

M. Chevrette: Adopté sur division.

M. Bellemare: L'amendement n'est pas à moi, mais on peut, selon le règlement, le retirer ou l'adopter sur division. Je ne sais pas ce que le député veut faire.

M. Forget: Excusez-moi.

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division.

M. Bellemare: Non, j'ai dit: En vertu du règlement, il y a deux manières de procéder, soit de le retirer complètement ou de l'adopter sur division.

M. Forget: Je pense que j'aime mieux qu'il soit rejeté sur division.

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division. L'article 6 est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

M. Bellemare: On aura le droit d'en parler quand même en troisième lecture...

Une Voix: Oui.

M. Bellemare: ... sur les modalités.

M. Forget: M. le Président, avant d'adopter l'article 6, il y a, dans le mémoire de Me Barré, une recommandation, sur l'article 6, qui m'apparaît, au moins, mériter d'être discutée. Je ne suis pas en mesure d'en juger, n'étant pas un spécialiste, n'ayant pas accès à des spécialistes de la question; mais Me Barré, qui a fait un long mémoire — je remercie le ministre de nous l'avoir communiqué, d'ailleurs — sur le projet de loi no 24, qui a été amendé et modifié lui aussi, ou retapé, comme le dit le ministre, pour servir également pour le projet de loi no 45, fait un parallèle intéressant entre les ordonnances de retour au travail face à des grèves illégales. Il dit: Dans ce cas-là, il y a un ordre qui est donné par un tribunal de retourner au travail. C'est un ordre que le tribunal adresse aux syndiqués, et il dit: II devrait y avoir un parallèle entre ça... enfin, non seulement il dit qu'il devrait y en avoir un, mais il le trace explicitement entre des congédiements illégaux: II devrait y avoir non pas un processus basé essentiellement sur une pénalité financière, mais il devrait y avoir une ordonnance de réintégration qui est...

Il parle d'une réintégration forcée. Elle est forcée si on met des amendes assez lourdes. Je pense que la distinction n'est pas tellement sur la question d'être forcé, parce qu'il y a un aspect de pénalité dans tout ça, mais j'imagine que dans son texte, c'est qu'il n'explique pas vraiment très bien... Il y a l'idée que ce soit la solution, c'est que l'employeur soit tenu de reprendre l'employé.

Je ne sais pas comment on fait la distinction entre cela et la mesure dans le projet de loi. Mais ne serait-ce que pour clarifier cela, étant donné que c'est un mémoire et qu'il dit une absence de symétrie... On a tellement parlé d'équilibre et d'absence d'équilibre dans le projet de loi et, comme ce cas précis marque une absence d'équilibre, il serait peut-être bon d'entendre le ministre là-dessus pour savoir pourquoi cette solution n'est pas différente, peut-être, ou n'est pas retenue.

M. Johnson: Elle est retenue à l'article suivant alors qu'on affirme que le dépôt de la décision lui confère la même force et le même effet que s'il s'agissait d'un jugement émanant de la Cour supérieure et est exécutoire comme tel. En ce sens, c'est la formulation que nous avons trouvée pour donner suite à cette suggestion. On la rencontre à l'article 7 du projet de loi 45, tel que modifié par les amendements, correspondant à l'article 18a du Code du travail, une fois que ce sera adopté.

M. Forget: Je ne veux pas anticiper sur la discussion de l'article 7 à l'article 6. Si le ministre dit qu'on en discutera à l'article 7, on en discutera. Je verrais une distinction, mais il est fort possible que cela soit une bonne réponse.

Le Président (M. Clair): Article 6, adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté. Article 7.

M. Johnson: L'article 7. Je réfère les membres de la commission au texte des amendements qu'ils ont. Il s'agit de modifier l'article 18 du Code du travail. D'abord, il y a quelques corrections d'écriture de la version française. Il y a, d'autre part, ce changement de la nécessité, au niveau de l'article 18 du code actuel, d'obtenir une ordonnance du tribunal si l'on veut exécuter une décision du commissaire-enquêteur et, ensuite, la procédure d'homologation. On sait que la Cour supérieure se sert parfois de la procédure d'homologation pour intervenir au fond et malgré les tentatives considérables des gouvernements provinciaux, de celui-ci, en tout cas, depuis le début de la confédération, on sait, malgré les récents arrêts, y compris l'arrêt Tomko dans le cas de la Nouvelle-Ecosse, je crois, on sait combien il est difficile d'affirmer la compétence absolue d'un tribunal de nature provinciale.

On simplifie également la procédure donc en faisant homologuer directement la décision du commissaire par la Cour supérieure ou la Cour provinciale, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir au préalable une ordonnance du tribunal. Donc, on gagne un temps considérable.

M. Bellemare: C'est plus rapide.

M. Johnson: Actuellement, il faut qu'il y ait une contestation entre les parties, quant au quantum sur l'indemnité, pour qu'une requête soit possible. Avec l'amendement projeté dans la série d'amendements que j'ai distribués, le simple défaut ou l'absence de réponse d'une partie permettra alors à l'autre de faire une telle requête.

C'est l'essentiel. D'autre part, j'aimerais vous dire qu'il y a une erreur d'écriture dans les amendements que je vous ai donnés. Il ne s'agit pas de quatorze jours, mais bien de quinze jours à l'article 18a: "A l'expiration des délais d'appel ou, s'il y a lieu, à l'expiration des quatorze jours..." Il s'agit de quinze jours, suivant la décision. Il s'agit de préciser que non seulement... Donc, la décision du commissaire est exécutoire, mais aussi celle du tribunal.

Le texte n'était pas clair d'ailleurs à ce sujet. On abandonne donc la procédure d'homologation d'une décision d'un commissaire. On adopte plutôt une procédure expéditive comme dans les autres provinces pour l'exécution de la décision par son simple dépôt au greffe de la Cour supérieure, ce qui, je pense, répond à la préoccupa-

tion du député de Saint-Laurent, et on fait de même pour l'exécution de la décision du tribunal lui-même.

Ce dépôt ne peut être fait avant quinze jours pour permettre à une partie d'exécuter la décision ou de la contester si cela est possible. Une fois déposée, la décision a l'effet d'un jugement de la Cour supérieure est exécutoire comme tel et donne ouverture à l'outrage au tribunal. Ce dépôt doit être fait dans les six mois de la décision. Pardon, monsieur?

M. Bellemare: Je voulais seulement poser une question, parce qu'il vient de parler d'outrage au tribunal. Est-ce que c'est concurrent à la pénalité des $500?

M. Johnson: Je pense que c'est additif, c'est-à-dire qu'il est possible qu'il y ait outrage au tribunal pour non-respect d'une décision homologuée par la Cour supérieure de la même façon que c'est un jugement de la Cour supérieure et, d'autre part, il y a des sanctions pénales prévues au code qui pourraient s'appliquer.

M. Bellemare: Les $500 de pénalité, est-ce que cela s'applique aussi ou non?

M. Johnson: A mes yeux, oui.

Le Président (M. Clair): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président...

M. Bellemare: Je m'excuse auprès du député de Saint-Laurent.

M. Forget: Je vous en prie, il n'y a pas de quoi.

M. Bellemare: II venait de parler d'outrage au tribunal.

M. Forget: II n'y a pas de quoi, on a l'esprit large, M. le député de Johnson.

J'ai écouté l'explication du ministre. Je dois dire qu'on avait, dans l'étude du projet de loi 45, préparé un amendement qui avait exactement cet effet. On avait lu le texte de Me Barré sur ce point-là, cela apparaissait évidemment une lourdeur inutile dans la mise en application ou l'exécution des ordonnances. Si c'est dans ce sens-là que le ministre a compris les remarques que Me Barré fait dans son mémoire sur l'article 6 qu'on vient de souligner, je pense que cela clarifie la question que je posais tout à l'heure.

Il reste que ce n'est pas entièrement clair à mes yeux et c'est peut-être parce que je ne suis pas un expert en droit du travail. Qu'est-ce que cette disposition-là vient faire à l'article 18?

Je m'explique. C'est un problème de rédaction, mais c'est aussi un problème de fond à cause de la question que vient de poser le député de Johnson. On a, tout à coup, en plein mi- lieu d'un chapitre, un article qui dit: Le commissaire du travail qui fait toutes sortes de choses — on décrit les pouvoirs d'un bout à l'autre du code — qui rend des ordonnances sur toutes sortes de sujets et, à un moment donné, on passe à l'exécution des ordonnances du commissaire du travail pour l'article 18; ce qui veut dire que quand il rend des ordonnances en vertu d'autres articles, ce ne sont plus les mêmes règles d'exécution des ordonnances et, l'amendement qu'on avait préparé dans cet esprit en venait à dire: C'est très bien, ce que Me Barré fait comme suggestion, mais ce qu'on proposerait, qu'on proposait et que je propose encore au ministre, à moins qu'il n'ait des explications pour le faire ainsi, c'est de garder seulement l'article 18 là-dedans et 18a, garder ce texte et l'envoyer quelque part, à la fin du Code du travail où on parle de l'exécution des ordonnances etc., de façon synthétique, de manière que justement le problème posé: Est-ce $500 en plus, au lieu de, etc... Qu'on ait un endroit où on sache comment on met en marche ce processus d'exécution pour un certain nombre de décisions. Là, ce n'est presque pas compréhensible tel qu'on l'exprime. Cela l'est dans le contexte immédiat et c'est un très bon amendement. Je ne le critique pas là-dessus. Je pense que le ministre, en trouvant des réponses à l'article 18 tel qu'il est, a trouvé une bonne réponse, mais c'est justement, l'article 18, tel qu'il est, parle d'exécution seulement dans un cas, alors que présumément il doit se poser à bien d'autres endroits.

M. Johnson: Justement pas, M. le Président, si vous le permettez, en ce sens que la seule obligation de faire... la seule ordonnance que peut émettre le commissaire-enquêteur sous l'ancien code ou le commissaire du travail maintenant, c'est celle-là. Le reste des gestes posés par le commissaire du travail sont des gestes, par exemple, sur l'accréditation, mais il ne s'agit pas d'ordonner de faire.

Or, le seul endroit dans le code où on trouve un pouvoir entre les mains du commissaire d'ordonner de faire, c'est celui-là. Et la sanction, comme on le sait, en vertu des principes du droit administratif et du droit civil, c'est que l'ordonnance de faire est celle qui est sujette à une injonction en vertu du Code de procédure civil. Comme il s'agit du seul geste d'ordonnance de faire, c'est à celle-là, qu'on confère un pouvoir exécutoire assimilable à celui de la Cour Supérieure.

M. Bellemare: Si vous me permettez, votre réflexion est peut-être juste dans votre idée, mais dans la pratique, quand on a à référer à quelque chose, on prend le chapitre de l'accréditation. Dans ce chapitre, on retrouve tous les pouvoirs qui sont dévolus au commissaire du travail. On termine en disant: Voici, si telle chose n'est pas faite, il y aura telle sanction qui s'appliquera. Pour la référence, je pense que c'est le chapitre 2, la section I du droit d'association qui

comporte 16, 17, 18. Autrefois, il y avait le mot homologation, mais il n'existe plus. Le commissaire-enquêteur doit ordonner de refuser de réintégrer... on donne tout le sujet dans le code.

M. Forget: A l'exception de la réponse à votre question de tantôt, on dit aussi à la fin du code que, quand il y a des infractions, il y a des pénalités, et ça s'applique aussi. Donc, ce n'est pas entièrement vrai, quoique je comprenne votre explication. Mais il y a aussi que ce chapitre s'interprète en lisant les autres chapitres. Parmi les obligations de faire, la distinction qu'a faite le ministre est bonne, c'est la seule obligation de faire. Je me demande si, dans le nouveau chapitre de l'accréditation, aux articles 20 et suivants, quand le commissaire du travail va découvrir qu'il y a entre 35% et 50% et qu'il va ordonner un scrutin à ce moment-là auquel tout le monde va devoir collaborer de manière que ça se fasse de façon régulière...

M. Johnson: II le fait en ce moment.

M. Forget: C'est lui qui le fait. Ça implique aussi que les autres respectent son pouvoir de le faire. Donc, est-ce qu'il n'y a pas là une invitation explicite qui va se retrouver dans un paragraphe quelconque en disant: L'employeur et le syndicat doivent collaborer à la tenue de ce scrutin? Ça devient, pour eux, des obligations de faire ou des obligations de ne pas gêner ce qui est, dans le fond, l'équivalent des ordonnances. Enfin, c'est un point technique, mais non sans importance, parce que, si le scrutin est gêné par l'employeur, ça devient une ordonnance qui devrait pouvoir être exécutée par la Cour supérieure comme un mépris de cour.

Enfin, c'est un point de forme que je soulève, mais, de toute façon, je n'en ai pas d'autres parce que vous avez anticipé nos motions d'amendement. Je n'ai rien d'autre à dire là-dessus. Je suis satisfait là-dessus.

M. Johnson: Simplement un dernier commentaire, M. le Président, si vous le permettez. Une des préoccupations du député de Saint-Laurent était simplement la question de la technique de rédaction...

M. Bellemare: La forme. M. Johnson: Pardon? M. Bellemare: La forme.

M. Johnson: Je devrais pousser la qualification de la forme par la technique de rédaction. Or, nous introduisons deux articles, 18 et 18a, qui sont d'ailleurs des articles auxquels on réfèrera quand on parlera plus tard des sentences arbitrales.

Finalement, peut-être qu'en principe, ils pourraient être à la fin du code, avant les dispo- sitions transitoires ou dans le dernier chapitre de cette partie du code. Mais il demeure quand même que ces articles sont bien isolés, et ils confèrent précisément ce pouvoir analogue à celui de la Cour supérieure par le simple dépôt.

Le Président (M. Clair): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: J'aimerais passer un certain nombre de commentaires sur l'article 7. Je voudrais souligner le fait que, par rapport à l'article 7 du projet de loi initial, cet article est amélioré de beaucoup par rapport à ce qu'on avait dans le projet de loi de base, ce n'est pas inutile de le souligner.

M. Johnson: Je suis heureux de voir qu'encore une fois, l'Opposition concourt de façon unanime à mes vues.

M. Bisaillon: ... préparer ses arrières, n'est-ce pas?

M. Bellemare:...

M. Bisaillon: On appelle cela préparer le terrain, M. le Président.

M. Bellemare: II reste encore des places.

M. Bisaillon: J'ai cependant trois remarques à faire, M. le Président. La première concerne le dernier paragraphe de l'article 18. A un moment donné, on voit apparaître: "Ce dépôt doit être opéré dans les six mois, à compter de la décision du commissaire du travail, ou s'il y a eu appel, de la décision du tribunal."

Il me semble que pour clarifier davantage l'application de l'article 18a, il y aurait avantage — et j'en fais une suggestion — à ce qu'on retrouve ce paragraphe immédiatement après le troisième paragraphe de l'article 18a, c'est-à-dire au moment où on parle du dépôt de la décision. On laisse passer trois paragraphes et on arrive avec un paragraphe qui dit: ce dépôt. Mais c'est quel dépôt? Celui dont on vient de parler effectivement au deuxième paragraphe.

M. Johnson: Oui.

M. Bisaillon: C'est juste une suggestion. Cela ne change rien au texte. Mais il me semble que cela change quelque chose à la bonne compréhension.

Deuxièmement, je me pose par ailleurs des questions sur les deux dernières phrases de l'avant-dernier paragraphe de l'article 18a qui se lisent comme suit: "Ces pénalités peuvent être infligées derechef jusqu'à ce que le contrevenant se soit conformé à l'ordonnance."

On parle donc des pénalités qu'on nous explique un peu plus haut, qui consistent en une amende n'excédant pas $50 000, avec ou sans emprisonnement pour une durée d'au plus un an.

Ce que je me demande est ceci: Est-ce que ces deux phrases veulent dire que s'il y avait condamnation, par exemple, à une amende de $2000 et un mois d'emprisonnement et qu'au moment où la sentence est émise, $2000 d'amende et un mois d'emprisonnement, si l'employeur se soumet à la sentence, l'applique, réintègre l'employé, etc., il échapperait à la sentence qui aurait été ordonnée, c'est-à-dire qu'il serait délié de l'obligation de purger la pénalité d'emprisonnement d'un mois ou encore de payer l'amende de $2000? S'il y a eu seulement une amende et qu'il l'a versée, au moment où il se conforme à l'ordonnance, est-ce qu'on lui retourne l'amende imposée?

Dans le fond, cette phrase ne me semble pas claire par rapport à l'application. On dit: "Ces pénalités peuvent être infligées derechef", donc, de façon automatique, mais jusqu'à ce que le contrevenant se soit conformé. Je comprends que l'intention devait être de vouloir dire "dans la période de temps où on ne s'est pas conformé", mais il me semble que ce n'est pas ce que dit le texte actuel. Il y aurait peut-être lieu de demander au ministre de nous répondre là-dessus, pour savoir si c'est vraiment l'intention de la loi et si on ne pourrait pas améliorer le texte pour lui faire dire vraiment ce qu'on voulait lui faire dire.

Je prétends que ces deux lignes peuvent porter flanc à interprétation. On pourrait vouloir faire dire à ce texte que les pénalités peuvent être remises.

Troisième commentaire, c'est sur l'endroit où l'article 18a ou le contenu de l'article 18a devrait se situer. Il y a eu des commentaires dont celui du député de Saint-Laurent. Quant à moi, je pense que la loi est faite pour les citoyens qui n'ont pas nécessairement une connaissance complète des codes de procédure, de la façon dont on procède et pour qui souvent une loi est difficile à lire et à comprendre. Moins il y aura de références dans une loi, plus ce sera compréhensible pour les citoyens. Le Code du travail s'applique au départ, vise les travailleurs, les syndiqués. Je conviens avec le député de Johnson qu'il faut le laisser dans la partie qui concerne le droit d'association. C'est là, quand un salarié a un problème, qu'il va aller voir et il faut qu'il voie immédiatement ce qui peut arriver à l'employeur quand il ne respecte pas la loi qui s'adresse aux travailleurs. Il me semble que c'est un principe et que cela n'empêche pas, par la suite, que les dispositions générales du chapitre VIII s'appliquent à l'ensemble du code.

Le Président (M. Clair): Au cas où on pourrait procéder à l'adoption de l'article 7, je vais donner la parole au ministre, étant donné qu'il est 18 heures et qu'on devrait ajourner, mais je pense qu'il conviendrait que le ministre réponde. Peut-être qu'on pourra procéder à l'adoption ou suspendre.

M. Johnson: Rapidement, M. le Président, sur les deux propositions du député de Sainte-Marie. Quant à la première, il est bien évident que la question d'inscrire l'alinéa 5, après l'alinéa 2, c'est-à-dire que ce dépôt réfère effectivement au paragraphe qui réfère à un dépôt, est une excellente suggestion.

Quant à la deuxième question, je préférerais garder l'article en suspens pour être sûr qu'on...

M. Bellemare: Parce que le dernier paragraphe, c'est simplement une interprétation de la prescription.

M. Bisaillon: C'est cela.

M. Bellemare: A partir de là, que ce soit en dernier ou que ce soit ailleurs, je ne pense pas qu'il y ait un gros changement au point de vue de...

M. Bisaillon: Du point de départ, on pourrait mettre le point d'arrivée tout de suite après le point de départ, et, après cela, expliquer les modalités.

M. Bellemare: Au point de vue de la prescription dans la loi...

M. Bisaillon: Maintenant, pour les deux phrases, je comprends qu'on les laisse en suspens pour l'instant?

Le Président (M. Clair): La commission du travail et de la main-d'oeuvre et de l'immigration ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)

Document(s) associé(s) à la séance