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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le jeudi 10 juin 1982 - Vol. 26 N° 150

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 72 - Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Onze heures cinquante-quatre minutes)

Le Président (M. Gagnon): La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu se réunit aux fins d'étudier le projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives.

Sont membres de cette commission: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Brassard (Lac-Saint-Jean), Dauphin (Marquette), Dean (Prévost), Mmes Dougherty (Jacques-Cartier), Harel (Maisonneuve), MM. Lavigne (Beauharnois), Marois (Marie-Victorin), Perron (Duplessis), Rivest (Jean-Talon) et Vallières (Richmond).

Les intervenants sont: MM. Chevrette (Joliette), Gauthier (Roberval), Hains (Saint-Henri), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Leduc (Fabre), Mailloux (Charlevoix), Paquette (Rosemont), Polak (Sainte-Anne) et Rochefort (Gouin).

À ce moment, je vous demanderais...

M. Rivest: En ce qui nous concerne, le député de Sainte-Anne est membre? Oui?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Rivest: Vous l'avez nommé, je crois.

Il faudrait peut-être que vous fassiez une place au député de Laurier, M. Christos Sirros, ainsi qu'au député de Portneuf.

Mme Lavoie-Roux est-elle membre?

Le Président (M. Gagnon): Non.

M. Rivest: II faudrait la nommer. Trouvez de la place, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): À la place de Mme la députée de Jacques-Cartier, puisqu'elle va...

M. Rivest: Non, Mme la députée de Jacques-Cartier, essayez de la garder.

Le Président (M. Gagnon): Oui. M. Rivest: Marquette.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Richmond.

M. Rivest: Oui. Vous pouvez remplacer le député de Richmond...

Le Président (M. Gagnon): ... par le député de Laurier.

M. Rivest: Par le député de Laurier.

Le député de Marquette par la députée de L'Acadie.

Est-ce qu'il y a de la place pour le député de Portneuf?

Le Président (M. Gagnon): Le député de Marquette est remplacé par la députée de L'Acadie.

M. Rivest: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Portneuf à la place du député de Jean-Talon? Non?

M. Rivest: Non. En tout cas, s'il se pointe...

Le Président (M. Gagnon): À ce moment-ci, cela me prend une proposition pour nommer le rapporteur de la commission.

M. Rivest: Est-ce que c'est débattable M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): C'est débattable. Qui sera rapporteur de la commission?

M. Marois: Le député de Beauharnois, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Beauharnois.

M. Marois: Adopté. M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle maintenant l'étude du projet de loi article par article. M. le ministre.

M. Marois: Je n'ai aucun commentaire additionnel à formuler à ce moment-ci de nos travaux.

Je serais prêt à procéder à son étude article par article.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

Remarques préliminaires M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le Président, si le ministre en convient, on aurait peut-être trois ou quatre questions d'ordre général à discuter au début des travaux, avant d'aborder chaque article. Certaines peuvent être recoupées, mais on y reviendra plus en détail au moment de l'étude article par article.

Ma première question. Je voudrais au moins que le ministre s'exprime sur une des préoccupations qu'on lui a déjà signalées, savoir la question des délais, que le ministre soit un peu plus précis sur ce qui s'est passé. Je sais que le ministre a eu un problème personnel que l'on comprend volontiers. Donc les délais qui ont amené le gouvernement, à la suite de la commission parlementaire à la fin de septembre, à déposer le projet de loi sur les services essentiels simplement le 1er juin. Il s'est quand même écoulé neuf mois, je ne sais trop, je le dis en me référant à une déclaration du ministre ou du premier ministre voulant que - enfin, cela semblait l'indiquer, je n'ai pas la déclaration au texte - un tel projet de loi pour être étudié à son mérite ne devait pas arriver dans une période où les stratégies patronales ou gouvernementales ainsi que syndicales commencent à se déployer. Je lisais ce matin un mémoire, un commentaire de l'Association des hôpitaux entre autres qui, justement, critique certains aspects du projet de loi et laisse entendre que l'attitude du ministre sur le projet de loi des services essentiels, est reliée au fait que le gouvernement par son retard et ses délais s'est peut-être placé dans une conjoncture où il ne pouvait quand même pas en mettre plus contre les prétentions et les vues syndicales au moment où les milieux syndicaux sont au prise avec la loi 70, la loi 68 et en plus, la loi 72 qui restreint d'une certaine façon leur liberté traditionnelle.

Je voudrais que le ministre me dise comment il se fait qu'on a dû attendre aussi longtemps avant d'en arriver à une loi comme la loi 72. Est-ce que le ministre ne craint pas que cette étude, d'abord qui arrive en fin de session, dans le charivari des fins de sessions habituelles, qui a été fortement dénoncé dans le passé, et qu'on se retrouve là-dedans... Je voudrais avoir ses commentaires, un bref commentaire là-dessus, je voudrais que cela soit plus spécifique.

Le Président (M. Paquette): M. le député, est-ce qu'on pourrait appeler l'article 1 avant de...

M. Rivest: Je ne sais pas, mais j'ai trois ou quatre considérations d'ordre général.

Le Président (M. Paquette): Trois ou quatre? D'accord, très bien.

M. Rivest: Techniquement, si vous voulez. On peut faire cela sur appel.

Le Président (M. Paquette): J'appelle l'article 1 et on va faire ce débat sur l'article 1, si vous voulez.

M. Rivest: D'accord, on est sur l'article 1. (12 heures)

M. Pierre Marois

M. Marois: M. le Président, je vais répondre très rapidement, je l'ai moi-même mentionné dans mon intervention d'ouverture lors du débat de deuxième lecture, je l'ai fait de nouveau lors de mon intervention de clôture du débat de deuxième lecture. C'est vrai - je vais utiliser l'expression que j'utilise souvent concernant des projets qui, je crois, sont importants - que cela ne va jamais au rythme de mon impatience personnelle, la mise au point d'un certain nombre de choses, de projets, surtout quand il s'agit de sujets aussi complexes, de sujets qui ne sont pas faciles. Surtout un sujet comme celui-là, parce que, encore une fois, au bout du compte, je pense que tout le monde l'admet, cela touche l'humain et cela touche la santé et la sécurité des citoyens.

On a pris le temps et tout le temps qu'il fallait, encore une fois, pour présenter le projet qui est devant nous, qui nous semble être, à notre avis, une façon responsable de répondre aux préoccupations fondamentales des citoyens. Forcément, aussi, ce genre de projet suscite des débats. Par son expérience passée, M. le Président, je pense bien que le député sait fort bien que ce n'est pas le genre de projet qui est accepté en une seule séance d'un Conseil des ministres. Il est normal que le gouvernement aussi prenne connaissance d'un mémoire, d'un projet de loi, l'examine, l'étudie, etc., que cela s'achemine à travers les comités permanents et qu'il y ait des discussions. Cela prend un certain temps.

Ceci étant dit, il y a une chose, par exemple, que je n'accepte pas et qu'a relevée plus ou moins à nouveau, qu'a faite sienne, un peu comme commentaire personnel, le député de Jean-Talon. Je laisse à chacun le soin de juger, je respecte les opinions des uns et des autres. On pourra formuler les jugements qu'on voudra; on pourra me prêter les intentions qu'on voudra, j'ai toujours bien droit, personnellement, à ma conscience personnelle; personne ne peut me l'enlever. Je nie catégoriquement que le moment du dépôt du projet de loi, qui

effectivement arrive au moment ou d'autres projets de loi importants sont débattus, ait eu quelque influence que ce soit, en ce qui me concerne, sur le contenu du projet de loi, pour faire plaisir à l'un, un peu moins à l'autre, un peu plus à l'autre. Ce sont des choses, d'ailleurs, qui ont été évoquées dans des discours de certains parlementaires. J'ai mis là-dedans ce qui, je pense, selon ma conscience personnelle - je ne prétends pas avoir la vérité absolue et je ne prétends pas que c'est l'absolu non plus, je l'ai dit - était le meilleur moyen, compte tenu de l'état de l'évolution des mentalités au Québec, pour faire en sorte que soit consacrée encore une fois dans les faits la primauté de l'accès des citoyens aux services essentiels, en y ajoutant des éléments qui me semblent importants et qui sont nouveaux. Quant au calcul, de quelque ordre que ce soit, personnellement, je respecte ceux et celles qui peuvent porter et qui porteront les jugements qu'ils voudront. J'ai droit aussi à ma conscience et je nie cela formellement, catégoriquement. Pas sur un sujet comme celui-làl Je n'accepterai jamais cela. On peut bien avoir chacun ses conceptions de la vie politique, mais si la politique consiste à faire des petits maudits calculs sur le plan tactique ou stratégique pour des choses aussi fondamentales que celles-là, je ne marche pas là-dedans.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

Discussion générale

M. Rivest: J'ai posé la question, parce qu'il reste qu'au bout du compte - je ne doute pas que ce que le ministre vient d'exprimer soit effectivement, connaissant le ministre depuis longtemps, une de ses convictions profondes - on se trouve à étudier un projet de loi qui ne correspond pas aux intentions formellement exprimées par le premier ministre sur la démarche à suivre et l'échéancier. Le premier ministre disait - j'ai retrouvé la citation - le 5 novembre 1980: "II faut profiter de la période qui nous sépare de la prochaine ronde de négociation pour revoir de fond en comble le système - il s'agissait bien du système des services essentiels - qui prévaut chez nous depuis une quinzaine d'années." Or, à tout le moins, quelles que soient les raisons, il reste que, sur le plan de l'échéancier, ce n'est pas exact qu'on soit arrivé à faire des choses et à prendre des décisions importantes et fondamentales en dehors du contexte de la prochaine ronde de négociation; on est en plein dedans. Je regrette cela, comme d'autres l'ont regretté. Je pense que - là-dessus en tout cas - le ministre a sans doute fait son possible. Le Conseil des ministres a suivi le cheminement qui lui est propre - il n'est pas nécessairement rapide - mais, au bout du compte, je regrette qu'une telle discussion sur un sujet aussi important arrive dans le contexte précis dans lequel on est. Ceci étant dit, je voudrais demander au ministre, a moins que... Est-ce que l'adjoint a des commentaires là-dessus? Non.

M. Paquette: Moi, j'en aurais un. Très brièvement, je pense que tout le monde aurait aimé très certainement que ce projet de loi arrive plus tôt. Cependant, si, comme le député le dit, il y a déjà d'autres éléments dans l'air - en fait, les négociations ne sont pas commencées, l'expiration de la convention collective est à la fin de décembre - c'est plutôt que la situation économique et budgétaire a fait que l'échéance du gouvernement est arrivée plus rapidement sur d'autres sujets. Je pense que c'est ce qui explique que ce projet se trouve proche de démarches, de négociations qui devraient être entreprises, en tout cas, espérons-le, mais c'est plutôt la rapidité, la bousculade qui est devenue nécessaire à cause de la détérioration de la situation économique dans tous les pays occidentaux que le gouvernement a accéléré d'autres démarches qui n'ont rien à voir avec celles-ci.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais ajouter quelques mots à ce que dit M. le député de Jean-Talon. Sur les intentions du ministre, je n'ai pas à juger; je pense qu'on peut lui donner le bénéfice du doute sur ses bonnes intentions... Si vous voulez que je vous en prête, je peux vous en prêter.

Ce que je veux dire, c'est qu'en juin 1979, exactement il y a trois ans, on avait assisté, pendant trois mois et demi au moins, à des problèmes extrêmement pénibles dans les hôpitaux de Québec, et je vous ferai grâce de réciter les comités des experts. Je pense que tout le monde est au courant de cela. Et à la fin de juin en Chambre, j'ai demandé au ministre s'il ne jugerait pas opportun que ce qui avait été prévu pour le maintien des services essentiels soit révisé, compte tenu que dans l'ensemble du secteur public - et à ce moment, ça devait toucher les hôpitaux de Montréal d'une façon plus générale - cela surviendrait en janvier, février, mars 1980, soit revu, et on m'a dit non. J'ai compris à ce moment qu'il y aurait un type de services essentiels maintenu pour un type de travailleur, et que, pour d'autres, ce n'était pas possible. Je ne suis pas revenue à la charge, mais le problème était déjà très, très aigu en juin 1979 et même quelques mois auparavant, et on avait fait la

preuve que la loi 59 ne pouvait pas fonctionner et n'assurait pas justement cette primauté des services essentiels dans le domaine de la santé aux bénéficiaires.

Alors, il y a eu le référendum, en 1980. À ce moment-là, les conventions étaient signées, elles se sont signées, disons, en mars, avril 1980. On n'a rien fait, entre 1980 et 1981, et pourtant, c'était le temps où le gouvernement nous disait que tout allait bien dans le domaine économique. Tout allait très bien. Comment se fait-il qu'il ne se soit rien passé, alors que le problème, on l'avait vécu d'une façon plus aiguë à Québec, on l'avait revécu au printemps de 1980 et là, qu'on ait attendu l'échéance des élections? D'ailleurs, en janvier 1980, le ministre des Affaires sociales, qui était ministre du Travail à ce moment-là, dans un colloque à l'Université de Montréal, je pense, en relations industrielles, avait dit: Nous convoquerons d'ici très peu de temps une commission parlementaire. Alors, là, nous sommes toujours en janvier 1981. Il y a eu l'élection en 1981, c'est possible. Mais il reste qu'il y a eu une année totale complètement perdue entre le référendum et l'élection. À ce moment-là, ce n'était plus une priorité pour le gouvernement, et on ne peut pas faire valoir trop l'argument que le député de Rosemont nous a donné à l'effet que vos priorités sont passées aux questions économiques.

Il y a un an d'inaction totale qui est vraiment inexplicable. Maintenant, je n'entrerai pas dans les autres cadres dont le député de Jean-Talon vient de nous faire part, de septembre à aujourd'hui, et qui apparemment, selon le ministre, sont reliés au cheminement difficile qu'il y a eu à l'intérieur du Conseil des ministres pour finalement en arriver à une position. Mais qu'on ne vienne pas dire à la population qu'on s'est dépêché de voir à ce problème avant la prochaine négociation. Je vous parle d'il y a trois ans, alors que vous étiez fort bien sensibilisés à cela, même avant il y a trois ans, parce que cela avait commencé en février, mars, avril, mai, vous ne pouviez pas agir avant la fin des négociations. Il y a eu une année complète de perdue.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je voudrais simplement relever une chose, je pense que la députée de L'Acadie l'admettra. Elle m'a prêté une expression en disant que j'aurais parlé du cheminement difficile du Conseil des ministres. Ce n'est pas l'expression que j'ai utilisée...

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est vrai qu'il n'est pas difficile, mais je pense qu'on pouvait en conclure....

M. Marois: Je pense qu'elle l'admettra, je n'ai jamais dit une chose comme celle-là, vous pouvez conclure ce que vous voulez, prêter les intentions que vous voulez...

Mme Lavoie-Roux: On le sait...

Le Président (M. Gagnon): Vous avez la parole...

Mme Lavoie-Roux: ... on le sait qu'il y a eu des déchirements...

Le Président (M. Gagnon): S'il vous plaît; M. le ministre, vous avez la parole.

M. Marois: M. le Président, je crois que j'ai l'habitude de respecter le droit de parole des gens.

Mme Lavoie-Roux: Je retire le mot "difficile" si cela heurte le ministre, M. le Président.

M. Marois: Cela ne me heurte pas, je n'ai jamais dit une chose comme celle-là. Il me semble que c'est simplement un comportement responsable d'un gouvernement; un projet de loi qui porte sur des domaines ou des choses ou des problèmes complexes importants, on n'escamote pas cela en une discussion d'une demi-heure ou de vingt minutes. Ceux et celles qui ont vécu l'expérience du fonctionnement interne d'un gouvernement savent très bien que ce n'est pas comme cela que les choses se passent.

Mme Lavoie-Roux: Cela n'explique pas l'année que vous avez perdue.

M. Marois: Cela prend un certain temps. Quant à l'année 1981 en particulier, je voudrais tout de même rappeler une chose qui est exacte aussi, qui n'explique pas tout, mais je n'ai pas la prétention de tout expliquer non plus. Cette année, cela a été particulièrement l'année où on a procédé à l'évaluation systématique de ce qui s'était passé dans l'ensemble des divers établissements, notamment du réseau des affaires sociales, à partir de l'examen systématique des expertises, toute une série d'études qui ont été menées. D'ailleurs, on en a largement parlé entre nous, j'ai fourni des copies de je ne sais plus combien de pièces de documents aussi bien aux membres de l'Opposition qu'aux membres de notre équipe qui étaient là lors des travaux en commission parlementaire. Cela me semblait important qu'on puisse procéder à une évaluation rigoureuse de ce qui s'était passé à partir des faits.

M. Rivest: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député

de Jean-Talon.

M. Rivest: ... je retiens de cet échange, en tout cas, - et je pense bien que ma collègue sera d'accord, d'ailleurs beaucoup de gens l'ont signalé - que très certainement le gouvernement s'est traîné les pieds manifestement dans ce dossier et il faut le regretter. En tout cas, on souhaite que ce retard que le gouvernement a mis à se décider n'entachera pas l'efficacité des mesures modestes que le projet de loi propose pour régler un problème qui est très important.

J'ai une deuxième question à poser au ministre. Il y a donc eu la commission parlementaire au mois de septembre 1981. De très nombreux organismes y sont venus, ont déposé leurs mémoires et dans ce cheminement, j'allais dire, difficile du Conseil des ministres - je ne le qualifierai pas pour ne pas indisposer le ministre - est-ce qu'il y a eu, de la part du ministère, du ministre ou de ses collaborateurs, des contacts suivis avec tous les intervenants qui sont venus présenter des mémoires, afin de discuter avec eux des propositions qu'ils avaient faites? Est-ce qu'on les a laissés complètement dans le décor après avoir reçu leurs mémoires, avec toute la courtoisie que les mémoires méritaient? Est-ce qu'on a cheminé, en laissant tout le monde en dehors, tous les intervenants qui avaient des expertises et des connaissances extrêmement concrètes? Est-ce qu'on a consulté d'une façon systématique ces gens pour leur permettre de cheminer avec le Conseil des ministres?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Le député me pose une question très précise, je vais lui donner une réponse aussi précise que sa question. Est-ce qu'on a assuré un suivi de consultation systématique avec chacun des - je ne me souviens plus - 55 à 60 groupes qui nous ont présenté des mémoires? C'est évident que la réponse est non. Pas chacun des 55 à 60 groupes, franchement! Il y a eu des contacts, des consultations en cours de route, oui, avec un certain nombre de groupes pour avoir des précisions.

M. Rivest: Avec lesquels, en particulier? (12 h 15)

M. Marois: Non, tout de même, M. le Président. Avec un certain nombre de groupes pour avoir des précisions sur un certain nombre de points, des contacts qui ont été établis, que ce soit par des fonctionnaires du ministère, que ce soit par des membres du cabinet ou qu'à l'occasion j'aie eu aussi personnellement des contacts avec un certain nombre de personnes tout au long de notre analyse, étude, en plus des divers mémoires qui nous ont été présentés, je me permets de rappeler au député combien d'heures... 56 heures, je pense, de travaux, de discussions, d'échanges en commission parlementaire. Cela ne s'est pas produit souvent dans les dix dernières années, si ma mémoire est bonne. Cela s'est produit sur quelques dossiers/problèmes, ou projets, enfin un nombre relativement limité, tout le monde l'admettra.

M. Rivest: M. le Président, le sentiment que j'ai... Je le dis comme on me l'a dit, les gens ont eu l'impression, après avoir présenté leur mémoire et compte tenu de la longueur... Quand on regarde d'ailleurs le poids des mémoires, enfin ce que les mémoires disent, quand on regarde le résumé et ce qu'il y a dans le projet de loi le gouvernement est libre de prendre ses décisions, on en convient, mais il y a toute une distance entre ce que le projet de loi contient et ce que substantiellement les 56 mémoires ont signalé. Quand on regarde simplement le droit de grève, on pourrait revoir le maintien ou l'abolition du droit de grève ou l'abolition sélective, on a l'impression que tout le monde a été laissé dans le décor, que le Conseil des ministres a cheminé seul avec les retards qu'on lui adresse, que le ministre me dit: Oui, j'ai rencontré, etc., je voudrais savoir s'il y a eu quelqu'un quelque part dans le ministère...

Il me semble que lorsqu'on fait une commission parlementaire et qu'on recueille, c'est sûr qu'on ne peut pas accepter toutes les prétentions des uns et des autres parce qu'elles sont dans une très large mesure contradictoires... Mais quand on chemine pour un projet de loi, il y a des contacts, on reprend contact avec les gens. Le Conseil des ministres évolue, il y a des hypothèses qui sont présentées au Conseil des ministres, pour les vérifier, on n'associe pas simplement dans un geste formel d'une commission parlementaire où on fait causer les uns et les autres, on associe les gens au processus. Je crois que la réaction que le ministre a eue à son projet de loi dans le milieu autant le milieu patronal que syndical, disons que cela n'a pas été un concert d'éloges que le ministre a reçu avec son projet de loi de part et d'autre, et j'y vois la cause sur le fait que vous avez pris beaucoup de distance, vous avez créé une distance beaucoup trop grande entre le gouvernement et les principaux intéressés qui sont les gens qui travaillent dans le secteur; cela est mon opinion, je vous la dis très franchement, et je pense traduire l'opinion des gens qui ont pris connaissance, le 1er juin, du projet de loi no 72.

Le Président (M.Gagnon): M. le député.

M. Marois: Je voudrais relever quelques affirmations. Le député de Jean-Talon a droit à ses émotions, à ses sentiments, à ses perceptions, et je les respecte, bien que je ne les partage pas. Si vraiment le député de Jean-Talon pense que sur une question aussi fondamentale, délicate et complexe, il est possible de présenter et de déposer un projet de loi qui rallierait spontanément une batterie aussi large, aussi importante non seulement en nombre, mais en qualité aussi d'opinions basées sur les expériences des uns et des autres, je lui souhaite bonne chance. Cela aurait été facile, oui cela aurait été facile, il y aurait eu moyen d'avoir un concert d'éloges, de faire du spectaculaire, du tape à l'oeil, je l'ai évoqué; cela aurait été facile de tomber dans ce panneau-là.

Ce n'est pas facile. Le député a assez d'expérience pour savoir très bien que sur un problème et un sujet aussi délicat et aussi fondamental que ça pourrait être une voix et un certain nombre de voix bien simples, bien faciles, qui pourraient soulever des appaudissements, que quand on recherche des solutions qui capitalisent sur l'acquis, qui tiennent compte du rythme normal d'évolution d'une société, qu'on cherche à se donner des balises, je ne me suis jamais attendu à recevoir des tonnerres d'appaudissements sur la place publique. Ma préoccupation fondamentale sur ce projet-là, ce n'est pas celle-là et ce n'est pas cela que j'ai recherché et ce n'est pas celle-là que je recherche non plus. Je sais fort bien que jamais dans les semaines, les jours, les mois qui viennent probablement même dans un certain nombre d'années, avant un bon bout de temps, j'ai moi-même évoqué que la société québécoise avait encore un long cheminement à faire, qu'il y avait une maturation qui était loin d'être terminée et qu'il ne fallait pas la bloquer, qu'il fallait l'épauler, la stimuler, l'animer, mais qu'il y avait encore des perceptions qui étaient complètement à l'opposé les unes des autres. Je l'ai mentionné. Quand on va dans des textes des commentaires où un éditorialiste évoque, utilise d'une part à l'extrême le mot "lâcheté" et qu'un autre à l'autre extrême utilise le mot "courage", bien cela donne la dimension.

M. Rivest: Un autre. Bon!

M. Marois: Un autre, bien sûr. Cela donne la dimension... Même si le député de Jean-Talon dit "bon". M. le Président, je respecte son droit de parole, je suis certain que par son "bon" il veut signifier qu'il entend à partir de maintenant respecter le mien aussi. Par voie de conséquence, comme je le mentionnais, cela met drôlement bien en relief à quel point on touche un domaine qui est au coeur même des fibres, du tissu d'une société. Bien sûr, oui, ce serait facile de faire quelque chose, de pondre quelque chose de bien vite, bien rapide, spectaculaire, remarquable, avec des tonnerres d'applaudissements et les risques que cela implique pour le lendemain. Je n'ai pas voulu prendre cette piste.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Ce ne sont pas les applaudissements. Les critiques, ce n'est pas une question d'applaudir ou de ne pas applaudir le ministre; c'est une question de confiance dans les mesures qui sont proposées. Il m'a semblé que dans le secteur il y avait, disons, pour s'entendre avec le ministre, un très large scepticisme sur l'efficacité de la loi 72 au regard des objectifs par ailleurs extrêmement nobles qu'elle poursuit.

J'ai deux éléments. Entre autres, dans sa réplique, je crois, le ministre a évoqué -et on retrouve cette notion tout au long du projet de loi - la question de la santé et de la sécurité publique par rapport à celle de l'intérêt public, qui traînait dans le décor ou enfin qui a été évoquée autour de ces questions. Est-ce que le ministre a des documents ou a fait des recherches pour voir exactement ce que cette expression qu'on emploie, qui est une expression un peu passepartout, pouvait signifier, comment elle avait été interprétée par les tribunaux? Existe-t-il une expertise d'ordre juridique autour de cette notion qui nous permettrait d'évaluer le critère qui dans la loi va être celui sur lequel le gouvernement va exercer son pouvoir de décret? La santé et la sécurité, c'est une notion qui est difficile à saisir. Sauf que si on la laisse sans balises... Est-ce que le ministre a fait des études avant de dire oui? Je vais m'arrêter à cette expression spécifique?

M. Marois: Oui, on a examiné très attentivement cette notion de santé ou sécurité publique versus la notion d'intérêt public ou d'autres notions plus larges. Ce qui ressort au bout du compte particulièrement dans un très récent jugement de la Cour suprême. Effectivement, il y a eu une décision unanime qui a été rendue le 31 mai dernier et qui concerne l'affaire de l'Association canadienne des contrôleurs du trafic aérien et Sa Majesté la reine du chef du Canada, représentée par le Conseil du trésor, l'Alliance de la fonction publique du Canada, l'Institut professionnel et le reste. Cette notion introduite dans le projet de loi est fondamentalement collée à un moyen -qui est prévu - d'intervention du gouvernement, notamment pour décréter que dans tel service public il devra y avoir des services essentiels assumés et assurés pour les citoyens ou à la lumière des rapports, de

l'expertise qui sera d'ailleurs rendue publique provenant du conseil, pour décréter une suspension de l'exercice du droit de grève.

En d'autres termes, cette notion est constamment greffée, de la façon dont on l'introduit, au pouvoir de décréter. La question qui se pose est de savoir si, libellée de cette façon, elle est suffisamment large pour couvrir toute une série de situations permettant véritablement de répondre aux préoccupations fondamentales des citoyens. En d'autres termes, est-ce qu'il y aurait des trous sur le plan juridique? Partant de ce que je viens de dire, pour répondre encore de façon plus précise, sur le plan de la procédure, dans l'hypothèse où quelqu'un tenterait de contester la procédure qui a été utilisée, parce que la santé ou la sécurité n'était pas en cause, vous ne pouviez pas décréter une suspension, ou décréter, à cause d'appréhension, que dans tel service public il doit y avoir services essentiels. Sur cela, ce qu'on a comme indication et qui ressort d'ailleurs clairement du jugement que j'ai cité, c'est que, non, ce serait absolument impossible de contester sur le plan de la procédure. Pas plus d'ailleurs que quant à l'appréciation du danger, quant à l'appréciation sur le fond.

Par exemple, il pourrait être question pour la Cour supérieure d'exercer son jugement en lieu et place du gouvernement. La jurisprudence de la Cour supérieure reconnaît déjà par ailleurs le droit pour l'exécutif du Conseil des ministres, lorsqu'il doit prendre une décision de ce type, de recourir à son personnel, de recourir à ses fonctionnaires pour procéder à une telle évaluation.

Donc, cela ne semble pas poser de problèmes et j'ai voulu m'en assurer. Encore une fois, c'est le plus récent jugement de la Cour suprême qui est très clair sur ce point, ce serait le seul cas, une décision ne pourrait être contestée valablement que si le gouvernement la prenait avec mauvaise foi et preuve de mauvaise foi équivalant à fraude, ce qui lui vaudrait de perdre la juridiction qu'il a en vertu du jugement.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je retrouve mes vieilles notions de droit administratif qui, semble-t-il, ont été confirmées récemment par la Cour suprême.

C'est exact. Ce que je veux dire, c'est que le fait que vous ayez lié la notion de santé et de sécurité publique à l'exercice de la discrétion ministérielle qui doit se faire, je pense que c'est une notion très établie en droit, qui peut être erronée bien sûr, mais dont les cours ne peuvent connaître de cela, sauf dans le cas, signalé par le ministre, d'une mauvaise foi équivalant à fraude. C'est une notion qui a été probablement précisée dans le jugement que le ministre vient de citer. Un des arguments qui ont été très largement évoqués par un certain nombre d'intervenants extrêmement documentés, est-ce que cela ne dispose pas finalement du fait que si le gouvernement ne s'était pas donné, dans le projet de loi, un pouvoir de décret pour le confier plutôt à un organisme avec des pouvoirs judiciaires et quasi judiciaires, est-ce que les avis juridiques que le ministre a obtenus ne seraient pas à l'effet que le pouvoir de contrôle et de surveillance des tribunaux supérieurs sur un tel organisme a été beaucoup plus large que ce qu'il serait du fait que la notion de santé et de sécurité est maintenant une prérogative laissée au jugement du gouvernement? (12 h 30)

M. Marois: Oui. Je pense que le député a parfaitement raison. Je suis content que cela soit évoqué. Je comptais le faire ultérieurement mais si cela vient à ce moment, tant mieux. Je pense que c'est extrêmement important parce que c'est tout à fait exact. Il va de soi, quand on pense, par exemple, au pouvoir de surveillance, de contrôle, à la possibilité de prises de brefs d'évocation etc., que c'est beaucoup plus large dans le cas d'une régie, d'une commission, même d'organismes quasi judiciaires. Je me souviens que, lors de l'examen de la question de l'injonction en matière de relations du travail, une des hypothèses parmi d'autres qui a été regardée, c'est celle de déplacer le pouvoir d'injonction pour le situer au niveau du Tribunal du travail. Même dans le cas du Tribunal du travail, il y a des doutes que cela puisse ouvrir la porte.

Évidemment, cela paraît technique, mais cela fait ressortir clairement une chose, c'est que cette notion de santé ou de sécurité publique est reliée au pouvoir de l'exécutif constamment, ce qui met à l'abri sur le fond, sauf dans les cas où le gouvernement se comporterait vraiment, comme je l'ai évoqué, avec une telle mauvaise foi, dont la preuve serait faite. Mais cela permet aussi d'introduire une notion qui, en droit, je dirais, concrétise dans les faits, à la lumière des appréhensions fondées qu'il est possible d'avoir à un moment précis.

Je vais l'illustrer autrement. J'ai entendu récemment un commentaire à la radio d'une personne pourtant qualifiée, dont je ne mets absolument pas en cause la compétence, quant à la responsabilité qu'elle assume. Elle disait: Oui, justement, dans le cas de la CTCUM, à Montréal, formulons l'hypothèse que cela s'applique et que, par voie de conséquence, avec le projet de loi tel qu'il est formulé, à cause de la notion de santé ou de sécurité publique, cela ne puisse

s'appliquer au transport en commun. L'exemple qu'elle prenait, c'était le cas du transport pour les personnes handicapées. Elle disait: Vous voyez, la santé ou la sécurité, dans le cas des handicapés, s'il y a un débrayage ou une grève illégale, à la suite d'un décret du gouvernement, la santé des personnes handicapées qui sont transportées n'est pas en cause, par définition, puisqu'elles se servent du transport pour aller travailler et, quant à leur sécurité, il va de soi que, quand tu es à la maison, c'est plus sécuritaire encore que même d'utiliser le transport en commun. C'est un réflexe de gros bon sens. Je comprends la réaction d'un bon nombre de gens qui ont réagi dans ce sens, mais, en droit, la notion est beaucoup plus large.

Sur des rapports, des recommandations, une évaluation qui serait faite, dans l'hypothèse où le gouvernement, par exemple, décréterait que, dans le cas précis du transport en commun... Prenons le cas de Montréal. Il doit y avoir des services essentiels. Se fondant sur la notion telle qu'elle est inscrite, ce serait inattaquable en droit, certainement pas sur le plan de la procédure, certainement pas sur le fond, sauf dans le cas de mauvaise foi. Mais j'apprécie que le député de Jean-Talon pose cette question, parce qu'évidemment c'est technique, c'est juridique, mais, en même temps, c'est extrêmement important.

J'entendais, par exemple, le député de Sainte-Anne - je sais que des gens partagent ces appréhensions - qui disait: II faudrait introduire une notion de - ce n'est pas l'expression qu'il a utilisée, mais j'allais dire - chambardement économique, social. Or, c'est déjà, en soi, inclus dans la notion de droit de santé ou de sécurité publique; c'est relié cependant au pouvoir de l'exécutif. C'est une clef.

M. Rivest: Mais ce que le député de Sainte-Anne avait probablement à l'esprit, c'était...

M. Marois: II a dit, si ma mémoire est bonne: une grave perturbation sociale.

M. Rivest: Le député de Sainte-Anne, qui est un homme très cultivé et très au fait des textes contemporains sur la question, se référait et avait problablement à l'esprit, à l'époque, le texte de l'encyclique Laborem exercens de Sa Sainteté le pape Jean-Paul II, qui disait exactement ceci: "En outre, on ne peut jamais oublier que, lorsqu'il s'agit de services essentiels à la vie de la société, ces derniers doivent toujours être assurés, y compris, si nécessaire, par des mesures légales adéquates. L'abus de la grève peut conduire à - c'est là que le député de Sainte-Anne rejoignait Sa Sainteté - la paralysie de toute la vie socio-économique."

Dans le cas du transport en commun, effectivement pourquoi intervient-on au fond? C'est principalement la vie socio-économique d'une ville comme Montréal qui se trouve paralysée. C'est la raison première. Je pense que le ministre a raison en disant que l'expression santé et sécurité en droit et dans notre loi ne doit pas être prise à la lettre mais doit être prise en droit. Je pense que l'expression peut certainement être habilitée.

À moins que d'autres collègues aient des points de vue sur cet aspect, j'ai un autre aspect d'introduction.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que nous sommes à l'article 1?

M. Rivest: Oui, nous sommes toujours à l'article 1. C'est l'article le plus important.

Le Président (M. Gagnon): Cela me semble épais.

M. Rivest: C'est l'article de départ. Le Président (M. Gagnon): Pardon?

M. Rivest: Le gouvernement a mis des mois avant d'arriver à l'article 1. On peut tout de même passer une heure.

M. Marois: Toujours est-il que continuant sur l'article 1, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Continuant sur l'article 1, si je pose la question, c'est que je me suis fait remplacer au moment où on a appelé l'article 1. Alors je croyais qu'on était dans les discussions préliminaires.

Mme Lavoie-Roux: Le député de Rosemont, qui agissait comme président, a décidé qu'on n'avait pas d'objection...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Lavoie-Roux: ... à ce qu'il appelle l'article 1 et qu'on fasse les observations générales sous cette rubrique.

Le Président (M. Gagnon): D'accord.

M. Paquette: Le député de Jean-Talon nous a assurés que ce serait bref.

M. Rivest: C'est vrai.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon, vous avez la parole.

M. Rivest: Quelques notions préliminaires pour ne pas revenir plus tard sur des questions.

L'autre question que je voudrais poser, c'est dans le but d'amener le ministre qui a

déclaré à plusieurs reprises que dans certains cas, il fait référence à certains témoignages même de la partie syndicale surtout dans le domaine de la santé et des services sociaux... Il affirme avec beaucoup de conviction à l'Assemblée nationale, je crois qu'il est, comme d'habitude, extrêmement sincère dans son énoncé, que dans certains types d'établissements le droit de grève ne peut être que symbolique, pour reprendre son expression. Je voudrais savoir, dans la mesure où nous partageons cet avis au point d'ailleurs d'aller jusqu'à enlever le symbole, parce que cela nous paraît tellement important que dans les institutions, on l'a déjà indiqué, il n'existe pas de diminution de services et pour pouvoir évaluer la différence qui existe entre la conviction que nous avons acquise pour les personnes âgées, les handicapés, les malades psychiatriques et les malades chroniques, nous disons, comme vous le savez, qu'il ne doit pas exister de droit de grève ou de diminution de quelque manière des services essentiels...

Le ministre probablement se réfère aux mêmes types d'institutions et a à l'esprit le même genre d'institutions lorsqu'il dit que le droit de grève doit être symbolique. Où est la différence? S'il n'y a pas de différence, on pourra certainement avoir une discussion très utile pour convenir ensemble d'inscrire dans la loi notre commune perception des choses pour les clientèles captives, les bénéficiaires captifs dans les établissements de santé et de services sociaux dont il est question.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, à chaque fois que j'y ai fait référence, et que j'ai fait allusion à ce comportement responsable, possible, venant spontanément de la part des parties impliquées ou suite à une spontanéité aidée, surveillée, encadrée, j'ai constamment fait allusion à un certain nombre de cas concrets illustrant le symbole. Soit dit en passant en ouvrant une paranthèse. C'est là que nous divergeons fondamentalement d'opinions lorsque le député faisant état largement de la position de sa formation politique dit: II faudrait même faire disparaître le symbole. C'est là qu'il prend un risque, à notre avis, extrêmement dangereux.

Je vais revenir de nouveau et citer un extrait de nos débats lors de la commission parlementaire que nous avons eue. C'est au journal des Débats. Il s'agissait du témoignage d'une des porte-parole de la Fédération québécoise des infirmières et infirmiers, Mme Gosselin.

Ma dernière question serait la suivante: Peut-être est-ce que je me trompe, mais, Mme Gosselin, il me semble que lors d'un colloque, l'an passé, vous auriez déclaré que certains services, certains départements, faisant allusion à certaines unités ou départements d'hôpitaux généraux à vocation multiple, devaient être assurés à 100% du personnel en temps de grève. Si ma mémoire est bonne, vous aviez donné des exemples. Vous aviez illustré votre pensée. Je lui demandais de nous le refaire, de nous l'expliquer à nouveau. Elle a répondu ceci: J'avais parlé - c'est elle qui parle - d'unités qui devaient demeurer ouvertes avec le personnel qu'il fallait. C'était d'ailleurs la position qu'on avait tenue dans la négociation des services essentiels avec nos employeurs. J'avais aussi dit, par exemple, qu'on ne pouvait déterminer provincialement ce que pouvaient être pour chacun des établissements les services essentiels requis en cas de conflit dans les établissements parce qu'il y a la dimension nationale, régionale ou locale du conflit dont il faut tenir compte. C'est vrai que les réalités sont différentes d'une localité à l'autre, d'un établissement à l'autre, même à l'intérieur d'une même région.

Elle continuait de la façon suivante: II y a également la notion de catégorie de personnel qui est employée ou non par un établissement; il y a également la notion du personnel non syndiqué dont il faut tenir compte; il faut aussi tenir compte du nombre de salariés en grève. Effectivement, il y avait des unités pour lesquelles on avait recommandé à nos membres de donner 100% du personnel, et c'est effectivement ce qui a été fait dans certains cas. Je suis revenu à la charge en lui disant: Oui, vous aviez été plus concrète, plus précise que cela. Elle a répondu ceci, faisant toujours allusion à ces 100% ou presque, l'idée de symbolique: J'avais parlé - et là elle cite des cas - de services d'urgence, de soins intensifs, d'obstétrique, je veux dire les salles d'accouchement. Je me souviens d'avoir parlé au moins de ces unités, et le reste.

En voilà une illustration. On pourrait la transposer, songer à d'autres types d'établissements où, par exemple, se trouvent dans un même établissement, à vocation unique dans ce cas, des clientèles particulièrement fragiles, particulièrement des personnes lourdement handicapées qui ont peu ou pas d'autonomie, où il va de soi... Cela s'est passé d'ailleurs de cette façon dans un pourcentage extrêmement important d'établissements, que ce soit venu par entente, par liste ou par la pratique des choses. Il y a eu des cas où effectivement les services fondamentaux, cela veut dire un pourcentage extrêmement élevé. Bien sûr, pour la personne affectée à l'entretien des pelouses, la personne affectée à la comptabilité, et le reste, tout le monde comprend parfaitement bien.

Il y a des pratiques en Europe, je l'ai

évoqué, il y a des pratiques aussi au Québec. Ce dont nous voulons absolument nous assurer, c'est que ces pratiques non seulement se maintiennent, se poursuivent, mais que dans les cas où de telles pratiques n'interviennent pas, ne se produisent pas, l'intérêt public prévale. Le principe de la primauté du droit des citoyens d'avoir leurs services essentiels, dans certains cas, cela veut dire que si tant est que le droit de grève aux yeux de certains et de certaines, doive s'exercer, cela ne peut être que symbolique, parce que, en même temps, il y a là une reconnaissance, de la part des syndiqués, qu'il y a une primauté fondamentale des hommes et des femmes à ne pas être pris en otages mais à obtenir les services auxquels ils ont droit. Les moyens, on doit se les donner comme société.

Ultimement, le gouvernement peut faire en sorte que les gens l'obtiennent et, le cas échéant, que des mesures, des sanctions pénales, civiles et autres, des mesures disciplinaires soient prises, en y ajoutant aussi et en en tenant compte - il ne faut jamais les perdre de vue - les pouvoirs additionnels qui existent dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux qui permettent, à certaines conditions, de mettre en tutelle des établissements. Il y a toute une batterie de moyens et d'instruments. Voilà, M. le Président, ce que je voulais dire.

M. Rivest: Là-dessus... (12 h 45)

M. Marois: Si le député me permet de terminer, nous ne croyons pas qu'il soit possible de définir dans une loi, de façon juridique, avec toute une série de critères très précis, provincialement, compte tenu de la nature différente des établissements, notamment les uns par rapport aux autres, dans le réseau, des situations qui sont changeantes d'une localité à l'autre, à l'intérieur même d'une région, d'une région à l'autre et, en plus, compte tenu du fait que nous ajoutons - là, il s'agit de tout un pan nouveau, additionnel, par l'inclusion de services publics - que, par voie de conséquence, nous préférons retenir, mais en allant plus loin cependant, la recommandation du rapport Picard, qui proposait l'introduction d'un protocole-cadre, donnant même ultimement le pouvoir au gouvernement de l'établir par règlement. En ayant des consultations et des discussions entre les parties, si elles s'entendent, le conseil a le pouvoir de l'établir ultimement, de le retransmettre au gouvernement, mais le gouvernement peut le modifier, l'ajuster, le changer et le décréter par règlement avant que le droit de grève soit acquis et que puisse être mis en marche le processus concernant les services essentiels.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon, après quoi je reconnaîtrai Mme la députée de L'Acadie.

M. Rivest: J'ai posé cette question et je suis content, dans un certain sens, de la réponse du ministre, parce qu'effectivement l'usage que le ministre a fait de l'expression "grève symbolique" et les explications qu'il lui a données, ce sont les intentions du gouvernement, enfin c'est sa façon de voir sa responsabilité comme gouvernement face aux besoins essentiels. Je pense qu'il l'a bien résumée dans sa dernière intervention, mais la grande difficulté que nous avons et que d'autres que nous d'ailleurs ont sur ce plan, c'est qu'un projet de loi doit traduire, les intentions du gouvernement il doit y avoir une vue claire à l'intérieur du projet de loi des intentions du gouvernement.

Or, la critique fondamentale qui a été adressée ici à l'Assemblée nationale comme à l'extérieur, sur ce plan précis, c'est qu'il n'y a pas de vue claire des pouvoirs des uns et des autres et des mécanismes qu'on met en place qu'effectivement l'objectif du gouvernement est de rendre, pour certains bénéficiaires des services de santé et des services sociaux, le droit de grève purement symbolique dans le sens que le ministre vient de l'indiquer.

Le ministre nous dit: On pourra... bien sûr, il y a ceci, il y a cela, on fait ceci, on fait cela. D'ailleurs, quand il introduit la notion des services publics par rapport aux services publics et parapublics où on retrouve la question des services de santé et des services sociaux, au fond, à part du délai, tout le mécanisme, toute la tuyauterie, dans un sens non péjoratif, qu'il met en place, sont absolument identiques.

Ce que je voudrais, c'est que, quant aux services de santé et aux services sociaux, pour les clientèles captives, ce soit visible dans le corps même du projet de loi, c'est-à-dire une décision de l'Assemblée nationale qui serait contraignante pour le gouvernement et que, pour tous ceux-là, effectivement, pour les clientèles captives, le droit de grève soit symbolique ou qu'il n'en existe pas du tout, parce que cela n'a pas de bon sens qu'il y ait ce droit pour certaines clientèles captives. C'est cela qu'on reproche au gouvernement et qu'on va suivre tout le long de l'étude article par article avec le ministre pour essayer de l'amener, dans la mesure où on pourra le faire, à traduire dans la loi cette intention gouvernementale par ailleurs maintes fois exprimée et qui tombe sur le sens commun.

M. Marois: M. le Président, l'Opposition va avoir sa ligne de pensée, mais j'aime mieux dire clairement au point de départ que je n'ai pas l'intention de dévier de la mienne. Nous avons une divergence de vues

sur le plan juridique, c'est-à-dire sur la façon de formuler des choses dans un texte de loi.

Je ne disconviens pas d'une chose avec le député de Jean-Talon, c'est que la façon dont nous avons traduit cette intention dans le texte a le désavantage d'avoir moins de clarté. Je n'en disconviens pas, mais, comme je l'ai évoqué tantôt en réponse à une remarque ou à un commentaire d'ordre plus général, je n'ai pas l'intention de mettre dans la balance un peu plus, un peu moins de clarté en contrepoids des moyens, des outils qui, me semble-t-il, sont requis sur le plan juridique pour atteindre l'objectif.

Je vais m'expliquer encore plus clairement. Un des articles clés concernant la question qui est évoquée, c'est l'article 111.0.12 qui prévoit la mise en place de ce qu'on appelle le protocole - cadre. On aura l'occasion de l'examiner en détail. Mais tout est là et tout est dit dans cet article. Cela n'a pas, encore une fois, la visibilité que souhaiterait le député de Jean-Talon.

Ma crainte fondamentale, et c'est là que nous allons diverger d'opinions, encore une fois, concerne la technique juridique. Bien sûr, une des façons d'aborder les choses concernant l'article 111.0.12, serait d'y ajouter quelque chose dans le genre. Je crois que c'est à peu près ce que cela reflète et ce serait une façon, sans vouloir absolument tronquer sa pensée, de traduire ce qu'évoque le député de Jean-Talon, de dire: Dans le cas de tel type d'établissements des services sociaux ou des services de santé, on devra prévoir telle chose ou telle chose; en d'autres termes: déterminer toute une série précise de critères. Évidemment, plus on allonge la liste, cela n'est pas sans avoir des conséquences juridiques. Le député le sait fort bien, je pense. C'est une technique juridique. Elle a un désavantage fondamental d'un double point de vue. D'une part, c'est que, si on le fait pour certains établissements et qu'on veut être suffisamment précis pour un certain type d'établissements prenons par exemple, des établissements à vocation multiple - il va falloir être aussi précis, mais en s'ajustant à une autre réalité qui est celle des établissements à vocation multiple. Je reviens à mon image - je sais qu'elle est un peu caricaturale, en un certain sens, mais je ne veux pas être injuste - quand j'évoquais l'exemple d'un quatrième nord où sont logés des bénéficiaires handicapés lourdement relativement au quatrième étage sud du même établissement où se trouve le service de gynécologie, ou relativement à tel autre quatrième étage est de tel hopîtal où se trouve un type de clientèle complètement différent. Il faudra, encore là, établir des critères. Cela, c'est une difficulté extrêmement importante qui enlèverait, en partant, la souplesse et en même temps la rigueur, parce qu'il y a une rigueur de base, mais aussi une souplesse inhérente à la formulation de l'article 111.0.12 que nous avons retenu, qui permet de s'ajuster aux réalités, au concret dans chacun des coins.

La deuxième difficulté m'apparaît aussi extrêmement importante. C'est qu'à partir du moment où on définit dans une loi, toute une série de critères et où, encore une fois, plus on allonge la liste, plus on est précis, cela ouvre automatiquement la porte. Je ne dis pas que cela va se faire, je ne dis pas que c'est un automatisme et que cela va se réaliser nécessairement le lendemain matin; c'est possible. À partir du moment où c'est possible, je pense qu'il est préférable de ne pas prendre ce risque, mais on ouvre la porte à des contestations sur le plan juridique de n'importe qui qui pourrait dire: Oui, mais vous n'avez pas retenu le critère tel numéro prévu à tel article de la loi. Cela ouvre la porte à des contestations de type juridique. On voit bien qu'analogiquement le député de Jean-Talon le sait, je pense que le domaine juridique, le métier d'avocat est un très beau métier, mais cela peut être aussi un métier terriblement vicieux, quand on le veut.

Le Président (M. Gagnon): Oui. M. le député de Rosemont.

M. Raquette: Simplement que je dois aller à une autre commission cet après-midi. Tout en trouvant très intéressants les échanges, je ne sais pas si les députés de l'Opposition seraient d'accord pour qu'à 15 heures on puisse commencer l'étude des amendements et l'étude article par article du projet de loi?

M. Rivest: À 14 heures ou 15 heures.

M. Paquette: C'est parce qu'on peut finir les questions générales ce matin et commencer...

Mme Lavoie-Roux: II reste trois minutes.

M. Paquette: Oui.

Mme Lavoie-Roux: On en a pour plus de trois minutes.

Le Président (M. Gagnon): Je pense qu'actuellement j'aurais le droit de parole sur le débat général avant l'étude par article par article. On m'avait dit que cette commission, sans avoir une entente formelle, devait être terminée vers 18 heures.

M. Rivest: Pardon?

Mme Lavoie-Roux: Vers 18 heures?

Il va falloir envoyer la nouvelle à la

grande presse.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Prévost avait demandé la parole.

M. Dean: M. le Président, tout en faisant miennes les observations de nature juridique du ministre, j'aimerais y ajouter quelques éléments. D'abord, on constate que plusieurs provinces et le gouvernement fédéral, dans le domaine général de relations du travail, depuis quelques années déjà et avec beaucoup de succès d'ailleurs, ont vu évoluer un processus de déjudiciarisation des relations du travail dans les sens de créer des instruments qui utilisent la médiation, la conciliation etc., pour résoudre des problèmes. Je pense que cela souligne l'importance de ne pas tomber dans le piège, dans un processus profondément humain comme on veut établir ou encadrer ici, de judiciariser ces relations au point de les rendre peut-être plus difficilement inapplicables. Le milieu de santé surtout, on parle surtout de cela aujourd'hui, a déjà évolué et a déjà développé lui-même, là où le comportement était acceptable dans les conflits passés, des critères valables pour l'administration de ce genre de problèmes: là où on n'a pas eu de problème lors des conflits de travail dans le maintien de services essentiels, c'est le milieu même qui a déterminé un comportement interne. Un grand nombre de ces comportements sont inscrits dans un espèce de brouillon, de modèle de protocole-cadre que l'ancien conseil a légué à la postérité.

Je pense qu'il faut tout de même faire confiance à la conscience professionnelle, à la conscience sociale, à la conscience humaine non seulement des hommes et des femmes du milieu patronal et syndical qui ont déjà manifesté cette conscience et ont déjà exercé le droit de grève de façon humaine et responsable. Cela s'est fait dans de nombreux cas. Il faut avoir aussi confiance à la conscience professionnelle, sociale et humaine de ceux et celles qui seront choisis au conseil des services essentiels. (13 heures)

Tout cela pour élaborer par la voie du protocole-cadre des barèmes précis, des grilles d'analyse de comportement et des mécanismes. Le chef de l'Opposition, dans le débat en deuxième lecture, a parlé de comités conjoints sur les lieux pour surveiller ces comités. Là où cela allait bien à ce jour, ces comités qui existent déjà seraient consacrés dans le modèle de protocole-cadre et tout cela serait élaboré d'abord avec le milieu; à défaut que ce soit complet, on pourrait profiter de la compétence, de la sagesse et de la conscience humaine des membres du conseil. Finalement, tout cela serait consacré dans un protocole-cadre qui serait déterminé par règlement. Je pense qu'on a déjà les éléments. de ce comportement à 110% responsable, correct et humain pour maintenir les services essentiels dans les meilleurs us et coutumes chez ceux et celles qui ont bien fait dans le passé. Ce qu'il s'agit de faire, par la coercition que peuvent apporter les modifications à la loi, le projet de loi, etc., c'est que ceux qui n'ont pas agi de façon correcte dans le passé soient tassés fermement et qu'ils exercent le même comportement que celui qui est déjà exercé par les autres.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. Rendez-vous à 15 heures, même salle, même poste. La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 01)

(Reprise de la séance à 15 h 07)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu reprend ses travaux.

Mme la députée de L'Acadie, vous aviez la parole.

M. Rivest: Même le ministre aurait voté avec nous, s'il avait lu les journaux.

Mme Lavoie-Roux: Là, nous sommes en ondes, M. le député de Jean-Talon.

M. Marois: Et les propos du député ont été enregistrés.

M. Rivest: Ils seront retenus contre lui.

Le Président (M. Gagnon): La parole est toujours à Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le "débat juridique" auquel nous avons eu le droit d'assister entre le député de Jean-Talon et le ministre, député de...

M. Rivest: Marie-Victorin.

Mme Lavoie-Roux: ... Marie-Victorin, je m'excuse.

M. Marois: C'est vrai que mon comté change de nom d'une élection à l'autre depuis 1970.

Mme Lavoie-Roux: Marie-Victorin. Je suis sûre qu'il y avait un fondement à ce débat...

M. Marois: C'est un très beau nom.

Mme Lavoie-Roux: ... mais ce que j'en retiens surtout, c'est que, dans l'argumentation que le ministre a faite, peut-être qu'au fond il avait un peu les mêmes objectifs - un peu beaucoup peut-être - que l'Opposition, mais il ne retenait pas le même mode d'expression pour réaliser ces objectifs. Il a parlé de visibilité, disant que, pour... Je m'excuse, parce que je sais que le ministre est susceptible des fois; je ne veux pas fausser ses paroles, mais dans mon esprit, c'est ce que j'ai retenu. Il faut dire que vous avez cité souvent les paroles de notre chef hors de leur contexte; c'est une parenthèse, M. le Président. Pour les ministres, ce n'était pas tellement la visibilité et, par contre, il voulait quelque chose qui soit très opérationnel au plan juridique, etc. Il a fait état de la difficulté que présenterait à l'intérieur d'une loi une énumération qui, plus elle était longue, plus elle risquait de donner lieu à des contestations sur le plan juridique, etc.

M. le Président, j'ai bien l'impression qu'il y aurait moyen, tout en atteignant les objectifs que l'Opposition vise, c'est-à-dire de protéger d'une façon réelle les personnes les plus en besoin dans ce contexte de services essentiels, au moment de conflits dans les relations du travail, d'inscrire dans la loi certaines catégories sans risquer que ce soit une énumération si longue qu'elle ouvre la porte à bien des contestations. Quand on identifie deux types d'établissements, les centres hospitaliers de soins prolongés et les centres d'accueil pour adultes et enfants, cela ne semble pas une liste ou une énumération si longue qu'elle prête à tellement d'interprétations.

Là où je suis prête à reconnaître que le ministre peut avoir raison, c'est quand il s'agit de transférer ces mêmes catégories de clientèles à l'intérieur des établissements à vocation multiple. Peut-être, que dans ce sens, il serait plus judicieux, si on avait vraiment à coeur de les protéger et pour éviter justement ce type de conflit vu les vocations multiples de ces institutions, de procéder par règlement ou de procéder dans ce qu'il appelle son cadre de référence pour établir les grands critères des services essentiels.

Le fait de penser qu'on va pouvoir atteindre de la même façon les objectifs qu'on vise par une question de réglementation, j'ai vraiment l'impression que ce ne sont pas tellement les difficultés juridiques qui causent un problème ou les possibilités de discuter d'interprétation juridique que le manque de volonté politique du gouvernement pour des raisons siennes. D'essayer, finalement, de ne pas avoir l'air de trop se compromettre ou de prendre position trop dans un sens ou dans l'autre.

Comme le disait un journaliste, ce matin, c'est un projet de loi qui n'est ni chair, ni poisson. Je cite M. Pelchat dans le Soleil de ce matin, si je ne m'abuse.

Une voix: Oui...

Mme Lavoie-Roux: Je vois que vous l'avez bien lu.

Ce que le ministre ne semble pas réaliser, c'est que cela crée un climat tout à fait différent dans une institution lorsqu'on sait que le droit de grève ne s'exercera pas dans un établissement précis et que, dans l'autre, il y a toujours possibilité de droit de grève avec l'établissement d'une liste pour assurer les services essentiels. Il faut connaître le désordre, si je peux dire, ou les inconvénients extrêmement sérieux que présente la possibilité d'une grève appréhendée même avec des services essentiels. On connaît le climat extrêmement difficile que ceci provoque dans toutes les institutions. Il reste que dans la solution du ministre, même s'il mettait dans ses règlements tous les cas qu'il prévoit voir être couverts par les services essentiels, ces derniers devront tout de même faire l'objet d'une négociation entre les deux parties, c'est-à-dire la partie patronale et la partie syndicale, à l'intérieur de l'institution avec tout ce que ceci provoque d'appréhensions, d'inquiétudes et de mesures qui doivent être prises. Là, cela demeurera un établissement où pourra s'exercer le droit de grève. Il se peut que le règlement fonctionne et que tous les gens soient protégés à l'intérieur de cet établissement, mais vous n'aurez pas éliminé tout le scénario de la possibilité d'une grève.

Maintenant, j'aimerais demander au ministre si, par les règlements qu'il introduirait, cela serait que dans certains établissements tous les services seraient reconnus comme essentiels. Je pense qu'il reconnaît que certains types de clientèles doivent être à l'abri de tout arrêt de services puisqu'il s'agit de clientèles captives extrêmement dépendantes et où, dans des institutions, il n'est pas possible ou à peu près pas de diminuer la clientèle parce que pour ces gens c'est leur chez-soi et ils sont tellement dépendants qu'ils ne peuvent pas retourner dans des maisons privées ou quelles que soient les raisons. Est-ce que dans son règlement, il entrevoit ou dit d'une autre façon: Nous aussi, nous reconnaissons qu'il y a des institutions ou des établissements où tous les services devraient être essentiels, mais au lieu de le reconnaître dans la loi nous le ferons par règlement ou dans le cadre des règlements. Si tel est le cas, je m'explique mal que le ministre veuille pour des raisons soi-disant juridiques entretenir la psychose de conflits possibles à l'intérieur de ces établissements, alors qu'ils pourraient être fort bien identifiés dans la loi, sans créer les problèmes dont on parle... Tout à l'heure, il était occupé, mais je faisais

exception pour les unités. J'admets qu'il peut y avoir un problème et que peut-être pour ceux-là, il faudrait intervenir par règlement. (15 h 15)

Même si vous aviez procédé par règlement, M. le ministre, je vous ferai remarquer qu'à l'article 14, 111.12: "Dans le cas d'un établissement, la grève ne peut être déclarée par une association accréditée à moins qu'une entente n'ait été transmise au Conseil ou qu'une liste ne lui ait été transmise ainsi qu'à l'employeur." Dans l'article antérieur, vous dites: "Sous réserve de l'article 111.15, une partie peut déclarer une grève ou un lock-out..." J'aurais dû commencer par celui-là. Ensuite, vous apportez celui-ci, qui est une espèce de tempérament de l'article 111.11, mais il reste que, selon la compréhension que j'en ai, la grève pourra quand même être déclenchée, la seule obligation qu'on fait, tant à la partie patronale qu'à' la partie syndicale, c'est qu'une liste ait été transmise au conseil et que, dès ce moment, la grève pourrait commencer.

Le conseil, en l'examinant, pourra dire: La liste n'est pas suffisante, et faire une recommandation particulière au ministre qui dira: C'est exact, vous avez raison, il faut que cette institution observe la liste que vous jugez être la bonne liste et là j'interdis ou je suspends le droit de grève. Mais il reste qu'entre le moment où le syndicat, parce que cela pourra fort bien être la liste syndicale, si elles ne se sont pas entendues, aura transmis sa liste au conseil et que le conseil se sera prononcé sur le bien-fondé de la liste qui lui a été envoyée par la partie syndicale et qu'il s'y oppose ou la complète et qu'elle aille au Conseil des ministres, il se sera passé passablement de temps, M. le Président.

À ce moment-là, je suis convaincue que la population ou les bénéficiaires ne seront pas plus protégés qu'avant, du moins pour un certain temps, puisqu'on peut présumer, s'il n'y a pas trop de jugements politiques compliqués qui interviennent par la suite, que le ministre pourra suspendre éventuellement le droit de grève, mais ceci reste une situation très précaire.

M. le Président, hier, au moment de mon discours en deuxième lecture, j'ai fait état des articles ou des dispositions qui sont contenus tant dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux que dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Dans les deux cas, je me demande comment le ministre peut défendre sa position qui est celle de ne pas restreindre le droit de grève dans les institutions pour personnes âgées ou personnes handicapées, de même que dans les institutions pour la jeunesse, communément appelées centres d'accueil. D'ailleurs, je vous avouerai, M. le Président, que, personnellement, même le droit de grève dans les établissements de santé en général, cela me crée un problème, puisque la loi prévoit que le ministre exerce les pouvoirs que la Loi sur les services de santé et les services sociaux lui confère, de telle façon qu'il doit rendre accessible à toute personne, d'une façon continue et pendant toute sa vie, la gamme complète des services de santé et des services sociaux, y compris la prévention et la réadaptation de façon à répondre aux besoins des individus, des familles et des groupes au plan physique, psychique et social. C'est quand même une disposition de la loi. Évidemment, s'il n'y a pas un centre hospitalier dans la région X, c'est vrai que les soins de santé ne leur sont pas accessibles d'une façon aussi immédiate ou concrète que cela ne l'est dans une autre ville qui possède tel ou tel type d'établissement, mais il reste que, quand ces établissements existent, on peut se demander pourquoi en priver la population. Je sais que là on se retrouve devant le dilemme de l'équilibre à garder entre ces dispositions de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et aussi les dispositions prévues au Code du travail pour que la négociation puisse avoir lieu avec ou sans l'exercice du droit de grève. C'est une question fondamentale et je pense que de notre côté c'est évidemment parce qu'on a eu de la difficulté à concilier ces deux choses qu'on a dit qu'il fallait le limiter aux hôpitaux de soins prolongés et aux centres d'accueil, mais le problème reste quand même posé pour un gouvernement, quel qu'il soit, strictement l'exercice du droit de grève eu égard à cette disposition de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

La situation est bien plus délicate quand on regarde la Charte des droits et libertés de la personne. Je ne sais pas si le ministre a demandé l'opinion de la Commission des droits de la personne. On avait soulevé cette question en septembre dernier et il me semble qu'on disait ne l'avoir jamais demandée, que c'était une question très délicate sur laquelle se prononcer. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, on l'avait posée quand elle était venue pour... Ah! elle n'était pas venue à notre commission, elle était allée à la commission parlementaire qui se tenait sur la révision de la Charte des droits et libertés de la personne. Je lui avais posé la question à ce moment-là et il ne semble pas qu'on lui ait demandé de se prononcer sur une question comme celle-là.

Mais quand vous regardez les dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne et que vous retrouvez, en page 48, que toute personne âgée ou toute personne handicapée a le droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation et que vous regardez la page

antérieure où on dit: Tout enfant a droit à la protection, à la sécurité et à l'attention que doivent lui porter sa famille ou les personnes qui en tiennent lieu, il est évident - et je ne veux pas revenir aux nombreux exemples qui ont été cités ces dernières années ou même ces derniers mois sur cette question - la preuve a été faite hors de tout doute, et pas uniquement à un cas d'exception, parce qu'on dirait: C'est l'exception qui confirme la règle, tout va bien, il y a un cas d'exception, mais cela a été prouvé hors de tout doute que dans les centres d'accueil pour enfants ou hôpitaux pour enfants mésadaptés, cette sécurité n'est pas accordée aux enfants quand ils sont placés d'une façon permanente dans les centres d'accueil. Dans le cas des centres d'accueil ou de soins prolongés pour adultes, je pense qu'on a eu le témoignage du Comité provincial des malades, les témoignages d'administrateurs d'hôpitaux. On avait d'ailleurs communiqué au ministre toute une liste de centres de soins prolongés et même de centres hospitaliers de courte durée qui démontrait qu'il était évident que cette santé et cette sécurité n'étaient pas observées.

Le ministre a dit: Je veux faire confiance aux professionnels, aux travailleurs, à leur sens des responsabilités. Ce n'est pas cela qu'on remet en question ici, M. le Président. Il se peut que des professionnels ou des travailleurs de la santé n'exercent pas toujours d'une façon absolument parfaite leur sens des responsabilités, mais d'une façon très générale ils le font. Le problème, c'est que dans le contexte des négociations collectives, on ne se trouve plus dans un contexte où un individu exerce un rôle professionnel, remplit une tâche professionnelle ou une tâche reliée aux services aux bénéficiaires, on se trouve dans un contexte qui fausse tout le fonctionnement professionnel des personnes. On se trouve dans un contexte de rapport de forces entre un syndicat et une partie patronale où l'objet des pressions, l'objet sur lequel s'exercent les pressions se trouve le bénéficiaire.

Alors, ce n'est même pas la question de savoir s'ils auront le sens des responsabilités ou pas, c'est que les règles du jeu sont totalement changées. On ne leur demande pas de les exercer dans le contexte qui est habituellement le contexte d'un travailleur ou d'un professionnel dans un établissement de santé ou de services sociaux. À ce moment-là, ce n'est plus le bénéficiaire qui devient l'objet de tout? l'action, c'est vraiment un rapport de forces entre, en l'occurrence, un gouvernement et des travailleurs, et c'est dans ce sens qu'il ne faut même pas le situer sur le plan de la question du sens des responsabilités. Je suis d'accord avec le ministre que, même dans ce contexte, la plupart essaient dans cette situation très difficile, très ambiguë, de s'acquitter de leur tâche professionnelle le mieux possible, mais c'est là que le problème se situe et je ne crois pas que les dispositions qui sont mises là réussissent à contrer ces dangers ou ces risques auxquels on expose les bénéficiaires.

M. le Président, j'ai déjà posé une question précise sur la question des règlements, sur ce que le ministre entend faire par ces règlements. Enfin, il y aura moins de visibilité, mais ce sera aussi efficace pour protéger les bénéficiaires. Deuxièmement, comment concilie-t-il ceci, avec les risques qu'il court dans son projet de loi, avec les dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne en ce qui touche les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées qui ne doivent pas faire l'objet d'exploitation? On le sait fort bien, et le ministre le sait, il y avait devant lui des listes de centres de soins prolongés dans lesquels les services essentiels étaient zéro. Ce n'est pas la majorité. Je suis d'accord aussi avec le ministre quand il dit que, dans des centres hospitaliers de soins aigus, je pense, sans grand débat, on a religieusement observé que les unités, par exemple, de soins chroniques n'étaient pas touchées, que tous les services étaient assurés. Je l'ai toujours dit, mais n'y aurait-il qu'un cas et ce serait un cas de trop et ce n'est pas qu'un cas, il ne faut pas se conter d'histoire. Il ne s'agit pas de savoir si on souffre pendant cinq jours ou si on souffre pendant deux jours, c'est tout le climat de grève appréhendée, d'espèce de psychose, de conflits qui se crée â l'intérieur de l'institution qui, même s'il n'y avait pas d'arrêt de travail, déjà rend la vie difficile pour tout le monde à l'intérieur de ces institutions parce que tous sont totalement dépendants des personnes qui oeuvent auprès d'eux.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je comprends que, malgré l'urgence d'un projet de loi, l'Opposition entend discuter profondément, poursuise en quelque sorte une forme de débat de deuxième lecture. L'urgence d'aboutir demeure à ses yeux toujours là, bien sûr...

M. Rivest: C'est extrêmement pressant.

M. Marois: ... mais en prenant bien le temps d'aller au fond des choses.

M. Rivest: C'est cela.

M. Marois: Je ne suis pas de ceux qui vont dire le contraire, c'est ce que j'ai

expliqué. Cela a aussi fait partie de notre démarche. Il y a des remarques et des commentaires qui sont faits par Mme la députée de L'Acadie qui me semblent pertinents. J'ai noté une ou deux remarques d'ordre général relativement précises, une ou deux questions précises aussi. Je voudrais bien réagir en ce qui concerne les commentaires et les remarques et répondre en ce qui concerne les questions.

Quant à cette question d'ordre général ou ce commentaire d'ordre général, appréhensions, psychose, angoisses, craintes face à une grève appréhendée, plus particulièrement en ce qui concerne des groupes de citoyens particulièrement démunis, comme l'a si bien décrit Mme la députée de L'Acadie, je pense qu'il faut être franc dans le sens suivant: Quelle que soit la formule, quel que soit le moyen, il n'y aura jamais d'absolu. Personne ne pourra jamais, honnêtement, franchement, sans aucune démagogie - il n'y a pas seulement les citoyens qui sont concernés par ce type de service ou par d'autres types de services, aussi, dans d'autres domaines - dire aux citoyens: Vous savez, vivant dans une société où il y a des humains, où il y a des droits, les appréhensions, les anxiétés, les angoisses vont disparaître. Quand, il y a environ deux mois, j'ai eu l'occasion de visiter l'hôpital Notre-Dame, il n'y avait pas de grève appréhendée. On n'était pas en période... Non, il y a deux mois, on n'était pas en période de grève appréhendée. (15 h 30)

Mme Lavoie-Roux: On pourra revenir là-dessus.

M. Marois: J'étais là, j'ai passé quelques nuits à l'hôpital Notre-Dame à ce moment-là. Ce n'était pas en période d'étude, d'examens, d'échange de points de vue entre des parties syndicales ou patronales pour voir si on pouvait s'entendre sur ce qui constitue des services essentiels. Le feu a pris dans les cuisines. Il y avait de l'angoisse, de l'anxiété, des appréhensions et des craintes. En d'autres termes, il n'y a pas d'absolu. Ce que j'arrive bien difficilement à comprendre - je vous le dis très franchement et je ne prétends pas avoir la vérité absolue, surtout pas dans un domaine comme celui-là - c'est justement, partant de ce qui est évoqué par Mme la députée de L'Acadie, comment vous pouvez justifier la position que vous adoptez de préconiser une abolition sélective du droit de grève. Je ne reprendrai pas mon intervention de clôture du débat de deuxième lecture, j'invite Mme la députée de L'Acadie à la lire, mais ce dont on parle, ce sont finalement les cas où il se produit des choses qui sont inacceptables. Dans les cas où cela va bien, si tout va bien partout, on ne serait même pas là pour en discuter. On a une responsabilité comme parlementaires et forcément aussi comme gouvernement, c'est d'assumer la responsabilité de l'intérêt public et, dans ce domaine, d'assumer et de s'assurer que, dans les faits, se traduit la reconnaissance de la primauté des citoyens à des services essentiels, particulièrement de ceux et de celles dont elle parle. Par l'abolition sélective forcément, le jour où le pire arrive, et je présume comme elle -prenons l'hypothèse où c'est à la marge -précisément dans le genre d'établissement dont elle parle, qu'il y a un débrayage illégal, si, par définition, le droit de grève est aboli, qu'il soit aboli sélectivement, comme je le disais, un peu, beaucoup, passionnément. Comme l'évoquait mon collègue, le ministre des Affaires sociales, dans le cas d'abolir un droit, il n'y a jamais d'équation automatique entre l'abolition d'un droit et le changement ou l'abolition d'une réalité. Et s'il se produit un débrayage illégal, vous me direz: Prenons nos responsabilités comme gouvernement, toutes les mesures disciplinaires requises, les sanctions pénales. Oui, très bien, mais, pendant les quelques heures ou les quelques jours où cela se produit, par définition, s'il n'y a pas de droit de grève, forcément, il n'y a pas de mécanismes ou de services essentiels d'assurés. À ce moment-là, dans tout un ensemble d'établissements, est-ce qu'il n'y aura pas l'angoisse, la psychose, l'anxiété? En d'autres termes, je le dis dans le respect de l'opinion de l'Opposition officielle, je ne crois pas qu'il y ait d'absolu là-dedans. Ceci, de façon générale.

De façon plus précise et plus particulière, parce que Mme la députée de L'Acadie a mentionné les articles 111.12, 111.11 qui précèdent, il faut bien voir que, pour chacun de ces articles, en y ajoutant aussi les autres qu'elle n'a pas évoqués et qui concernent toute la question des délais, tout cela se passe durant la période avant, précédant l'acquisition du droit de grève, avant que le droit de grève ne soit acquis. C'est là qu'il faut s'assurer que les choses soient mises, pour reprendre mon image, dans le processus qui est comme une espèce d'entonnoir pour faire en sorte de réduire au maximum les cas où pourraient se produire des abus et qu'il faudrait mettre en marche le mécanisme prévu pour prévenir, en allant, le cas échéant, jusqu'à l'exercice des moyens et des pouvoirs qui sont conférés ultimement au gouvernement. Tout cela intervient dans un délai de trois mois avant, je me permets de le rappeler. Par le règlement, c'est l'article 110.0.12 concernant le protocole-cadre. Rien ne nous empêche... La question de la députée de L'Acadie était: Est-ce que, par règlement, le ministre peut nous dire que, dans certains types d'établissements, notamment les établissements qu'elle décrivait, il sera possible de faire en sorte que les services soient assurés, que tous les

services soient donnés? C'est l'expression qu'elle a utilisée.

Mme Lavoie-Roux: Que tous les services soient considérés comme essentiels.

M. Marois: Que tous les services soient considérés comme essentiels, ce qui revient au même, mais je vais prendre l'expression de Mme la députée. On reprend à l'envers, par un autre biais, la discussion qu'on avait ce matin quand le député de Jean-Talon me demandait de traduire concrètement ce que je voulais dire quand j'utilisais l'expression "grève symbolique", si tant est que ce droit sent le besoin de s'exercer, qu'il sent le besoin de s'exercer dans la reconnaissance du droit des uns et des autres, et à la primauté dans les services essentiels. J'ai concrètement illustré ma pensée.

Pour être très précis en réponse à votre question, bien sûr que non. Je vais m'expliquer. Si vous voulez me dire qu'il faut absolument que se fasse le service d'entretien des aménagements extérieurs de l'établissement, qui font partie de l'établissement - c'est du personnel de l'établissement - l'entretien des pelouses, des fleurs, etc., non, entre nous, franchement, mais le service de la comptabilité, pendant deux jours, c'est vraiment essentiel. En d'autres termes, il faut assurer tous les services essentiels pour les citoyens et je vais par ce biais aussi rejoindre l'autre commentaire, la question très large qu'a formulée Mme la députée de L'Acadie en faisant allusion de façon très précise à des articles de la Loi sur les services sociaux et les services de la santé et la Charte des droits et libertés de la personne.

Peut-être que je devrais me servir des propos du chef du Parti libéral pour convaincre Mme la députée de L'Acadie. La Charte des droits et libertés de la personne établit des droits fondamentaux dans une société, notamment ceux qui sont mentionnés concernant les jeunes, les personnes âgées, les handicapés. On sait bien qu'une société traduit ces droits quand c'est la forme que cela doit prendre dans des services - dans certains cas, cela prend d'autres formes - à la mesure des capacités que cette société a de se les payer et de se les développer. C'est à ce point vrai qu'effectivement, on peut constamment évaluer que, dans une région donnée par rapport à une autre région, c'était l'exemple que Mme la députée de L'Acadie prenait elle-même, il y a des besoins qui ne sont pas encore suffisamment comblés, il y a des régions qui sont mieux desservies que d'autres, par rapport à des besoins.

En d'autres termes, le droit fondamental n'est pas encore nécessairement toujours traduit dans la réalité, mais le droit fondamental est là, il est reconnu, et le reliant à la Loi sur les services sociaux et les services de la santé et à ce dont on parle aujourd'hui dans le cadre du projet de loi 72, ce dont il faut absolument s'assurer -et on diverge de vues sur les moyens pour y arriver, je ne crois pas qu'on diverge de vues sur l'objectif - c'est encore une fois de se donner les moyens de faire que les services qui existent, dans les cas où ils doivent être donnés, à toutes fins utiles, presque à 100%, là où s'insère la notion de symbolique dans certains cas, qu'ils le soient. Ou bien parce que les parties ont ce sens des responsabilités qui fait que, par entente ou par liste, c'est suffisant, ou dans les cas où le sens des responsabilités fait défaut, la responsabilité étant une responsabilité surveillée, cette responsabilité est aidée pour qu'elle s'exerce et que les droits des gens soient respectés.

Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez me permettre juste une petite remarque. Je trouve que c'est un peu un sophisme quand le ministre dit: En temps régulier, je suis allé dans un hôpital et il y a eu un feu qui a débuté. Évidemment on sentait de l'angoisse chez le personnel et la sécurité n'est pas quelque chose d'absolu. Je suis d'accord, mais ce sont d'une certaine façon des cas fortuits, s'il y a un feu qui se déclare quelque part. Mais quand, nous, on pose consciemment des gestes qui, on le sait, vont provoquer un arrêt ou une diminution des services, qu'on les pose parce que les dispositions qu'on a prises pour les empêcher ne sont pas adéquates et qu'on sait que ces conditions ne sont pas adéquates, je pense que c'est très différent du feu auquel vous faisiez allusion. Je ne veux pas entrer dans un autre débat, mais on sait fort bien que dans le moment, à cause des coupures budgétaires, il y a des hôpitaux qui fonctionnent avec beaucoup de tension, sous beaucoup de pression et que cela crée de l'angoisse et de l'appréhension chez les gens, peut-être pas les gens qui sont dedans, mais les gens qui sont à l'extérieur. Je dis que là où on peut prendre nos responsabilités pour empêcher que de telles choses ne se produisent, je pense qu'on a au moins le devoir de faire le minimum pour empêcher cela. Cela m'apparaît très différent, loin de l'autre.

Quand vous dites également: Ce sont des droits fondamentaux qui sont inscrits dans la charte, c'est un idéal à atteindre, je dis que là où les institutions n'existent pas, qu'on essaie de corriger le mieux possible pour que tel service qui n'est pas disponible dans telle région soit accordé à un individu dans une autre région. Mais là où les institutions existent, là où sont les établissements, là où il y a de la clientèle, ce n'est pas un manque de ressource à ce moment-là, c'est juste qu'on empêche les

ressources d'être à la disposition des gens de la façon la plus satisfaisante possible. À mon point de vue, ce sont deux choses assez différentes.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: J'ajouterai simplement deux choses, M. le Président: Là où les services existent et où on peut - je reprends l'expression de Mme la députée de L'Acadie - prendre nos responsabilités, je dirai qu'on doit prendre nos responsabilités pas pour assurer le minimum, pour assurer ce qui doit être assuré en conformité d'une traduction dans les faits de ce principe de la primauté des services essentiels aux citoyens. Je dis que le maximum de ce qui est humainement possible doit être fait. Là-dessus, on s'entend. Ce qui nous divise, ce sont les moyens pour y arriver. Mais fondamentalement, là-dessus, je suis parfaitement d'accord avec Mme la députée de L'Acadie.

Deuxièmement - et je termine là-dessus - on peut bien ici se lancer d'un côté et de l'autre de la table des sophismes, si tant est que c'est cela, mais je vous le dis comme je le pense et comme je le sens: Quand le feu a pris dans les cuisines à Notre-Dame, les patients qui étaient en neurologie, ce n'était pas du sophisme pour eux. Ils ne faisaient pas la distinction entre le cas fortuit et le cas pas fortuit, et le reste...

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas vous qui l'aviez provoqué, ce n'est pas le gouvernement qui l'avait povoqué.

M. Marois: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): La parole est au ministre. (15 h 45)

M. Marois: ... je respecte le droit de parole de Mme la députée de L'Acadie, je pense qu'on a l'habitude de discuter fermement mais en respectant - je suis sûr qu'elle s'est emportée prématurément... Bien sûr que ce n'est pas le gouvernement qui a provoqué le feu. On n'est quand même pas un gang de maniaques. Ce n'est pas plus le gouvernement, pour l'amour du bon Dieu, qui provoque - j'espère que ce n'est pas cela que Mme la députée de L'Acadie veut dire ou a voulu laissé entendre il y a deux secondes -de façon délibérée, non pas le cas fortuit, l'opposé du cas fortuit - je pense que Mme la députée de L'Acadie sait fort bien ce que c'est. Ce n'est certainement pas le gouvernement qui, de façon délibérée, comme un gang de maniaques, intentionnellement, ferait ce qui doit être fait pour provoquer un conflit dans un établissement. Qu'on soit, choisissant les voies et moyens que nous proposons ou que ce soit en refroidissant les voies et moyens que propose l'Opposition, je suis convaincu qu'il n'y a personne d'assez maniaque...

Mme Lavoie-Roux: ...

M. Marois: En d'autres termes, ce que je veux dire là-dessus - on peut bien faire les distinctions qu'on voudra - c'est qu'il y a des choses qui sont prévues dans la Charte québécoise des droits et libertés qui se traduisent au mieux qu'une société peut se les donner dans des services qui existent dans certains cas. Dans les cas où ces services existent, on doit faire tout ce qui est humainement possible pour que ces services soient assurés et, dans certains cas, dans certains établissements, de par leur nature même, ou dans certaines unités ou services de certains établissements, il faut prendre les moyens pour faire en sorte que ces services soient donnés, si tant est qu'on considère que ce sont des choses du domaine des services essentiels pour les citoyens.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Prévost.

M. Dean: J'avais l'impression que M. le ministre avait pris des notes à la suite de la déclaration de l'intervention de la députée de L'Acadie. J'ai l'impression que la question de psychose - je voulais juste revenir là dessus - parce que dans le projet de loi, il me semble qu'on peut... S'il y a un minimum de bon sens, il me semble qu'il n'y aura plus de psychose, comme l'a évoquée la députée de L'Acadie, une fois qu'un certain nombre de principes de comportement seront consacrés et actualisés dans le protocole-cadre et dans les ententes ou dans les listes considérées, selon le texte comme suffisantes par le conseil. Même moi, je considère que le protocole-cadre, une fois développé, après entente entre les parties ou décision du conseil proclamée par décret, des éléments de stabilité, de principe et de fonctionnement consacrés dans tout ce domaine seront établis et ne seront plus laissés au hasard du jeu. Il me semble que cette stabilité qui ferait développer une espèce de philosophie de fonctionnement qui serait écrite et qui serait maintenue dans les faits et tout cela aura pour effet d'éliminer ce qu'on peut appeler une atmosphère de phsychose.

Il y a un autre point sur lequel je voudrais intervenir, c'est que, dans mon discours en deuxième lecture, j'ai commencé à le dire, mais à cause du temps qui me restait, je l'ai perdu. Le ministre l'a commencé avec les mêmes notes et il les a perdues en cours de route. Prenons votre cas...

M. Rivest: Ils ont les mêmes notes.

M. Dean: Quand on garde nos papiers, on n'a pas besoin d'en écrire d'autres.

M. Rivest: Ils travaillent en collaboration, eux autres.

M. Dean: Reprenons votre...

M. Marois: Chez nous, on est généralement sur la même longueur d'onde.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Prévost a toujours la parole.

M. Dean: Nous nous partageons des notes, pas des éditoriaux. Mais prenons votre centre pour soins prolongés, votre centre pour personnes âgées, votre centre pour personnes handicapées, votre centre pour enfants handicapés ou sous les soins d'un psychiatre, etc., on a évoqué le préposé à l'entretien, le poseur de tapis, le gars qui peinture des murs, le gars qui tond le gazon - je ne parle pas de pelleter la neige parce que j'avoue que dans la situation de l'hiver, pelleter la neige serait une fonction de sécurité - les services de comptabilité, les standardistes jusqu'à un certain point; tout ce beau monde-là n'a pas un impact direct sur les soins donnés aux patients. On entre dans la buanderie, le personnel... On pourrait débattre cela, est-ce qu'on a besoin de tout notre linge? Disons qu'on a besoin de tout ce qui se fait dans la buanderie à 100%, mais ça peut se faire aussi par 100% du personnel moins deux personnes, avec entente que ces deux personnes-là soient des cadres...

M. Rivest: Est-ce que le député me permet une question?

M. Dean: Cuisine...

M. Rivest: Qu'est-ce que ça vaut de donner le droit de grève dans une unité à deux personnes, à celle qui coupe le gazon et à une autre? Cela devient symbolique, ça devient un mot; au fond, ce serait tellement plus clair et tellement plus simple de dire: Les gens ont besoin de services essentiels, on les leur accorde; quand bien même il y aurait deux personnes dans l'unité qui feraient la grève; franchement, si 98% sont au travail.

M. Dean: M. le Président, c'est la différence entre traiter...

M. Rivest: C'est une distinction de l'esprit, cela.

M. Dean: M. le Président, c'est la différence entre traiter des gens en adultes ou les traiter en enfants irresponsables, et il y a beaucoup plus de dignité et de responsabilité dans le geste syndicaliste de dire: J'ai le droit de grève, mais j'accepte que dans telle unité de soins infirmiers, c'est 100% moins deux personnes; ces deux personnes sont des cadres professionnels infirmiers; il y a un élément de dignité, de responsabilité qui doit être laissé individuellement et collectivement...

M. Rivest: Si le député me permet.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Dean: ... à ces professionnels qui se comportent en professionnels responsables et consciencieux...

M. Rivest: D'accord.

M. Dean: Et, si les gens se comportent bien, on n'a pas besoin de les forcer à bien se comporter.

M. Rivest: C'est cela.

M. Dean: Ce sont ceux qui se comportent mal qu'il faut forcer à bien se comporter.

Dans d'autres pays on a évoqué cela dans les débats et des pays pas aussi loin que cela; on ne parlera pas de pays idéologiques, mais de la France. On revient encore là. Le monde a le droit de grève en tout temps et tout le monde a le droit de grève en tout temps, mais dans les secteurs publics, surtout le secteur de la santé, la conscience syndicale, humaine, sociale est ainsi développée que ça ne s'exerce pas ou de façon très symbolique, même s'il ne s'agit que de se promener dans le corridor entre deux seringues hypodermiques ou deux fioles de pilules avec une petite pancarte "pas méchant". Il y une différence fondamentale que, je crois, la loi n'a pas le droit d'enlever à ces personnes.

M. Rivest: Simplement une petite remarque, si on me permet. Cette thèse, enfin cette expression d'opinions, que le ministre développe et que son adjoint parlementaire reprend, c'est que - Dieu sait que le député de Prévost va être sensible à cela - au fond les travailleurs qui réclament le droit de grève dans le secteur public, même dans le secteur privé c'est la même chose... Le droit de grève, c'est un moyen de pression sur l'employeur pour l'amener à négocier des conventions collectives, d'accord? Or, si on convient que dans le secteur public on a même employé l'expression dans les audiences antérieures, je pense, ici au bout de la table - le droit de grève ça doit faire mal pour être efficace, dans un sens un peu fort du terme, pour être

efficace, il doit exercer une pression. Or, toutes ces belles déclarations qu'on nous fait concernant le gars qui tond le gazon, une grève symbolique, etc...

Au fond, ce que vous faites, enfin d'après ce que vous dites de vos intentions, c'est que pour les employés... Parlons des clientèles captives, ce qu'on appelle les clientèles captives, les personnes âgées. On enlève le droit de grève, on enlève ce moyen de pression-là aux travailleurs et on en est parfaitement conscient. D'après le langage que vous tenez, au fond, quand vous dites que ce doit être 100% dans certains coins -et vous en convenez volontiers - et que le droit de grève doit être purement symbolique, ce que vous faites, ce que vous voulez en réalité, c'est exactement la même chose, c'est-à-dire rendre à toutes fins utiles le droit de grève inutile, ne pas en faire un instrument de pression sur l'employeur, parce que ça blesse et ça heurte les gens qui sont les plus vulnérables. Entre notre position et la vôtre, au fond, vous faites un baroud d'honneur au droit de grève avec vos gens en disant: II va y avoir deux ou trois personnes dont ils n'auront pas besoin, voire le gars qui tond le gazon; mais, en pratique, vos intentions sont d'enlever le droit de grève dans le domaine. Dans le projet de loi -c'est cela que j'ai dit tantôt - vous ne le dites pas, parce que, mon Dieu, c'est dangereux de le dire. J'imagine que cela doit être pour cela...

Mme Lavoie-Roux: Comme la question référendaire.

M. Rivest: ... alors que, nous autres, on le dit. C'est cela la différence. Dites-le donc clairement.

Le Président (M. Gagnon): Aviez-vous terminé, M. le député de Prévost?

M. Rivest: Je m'excuse auprès du député.

M. Dean: Les règles de procédure sont respectées à certains moments et ne le sont pas à d'autres.

Mme Lavoie-Roux: Nous ne sommes pas très procéduriers, nous autres.

M. Dean: Non?

M. Rivest: On va aller vite après, vous allez voir.

M. Dean: Je ne veux pas fomenter une bagarre généralisée.

Mme Lavoie-Roux: Si vous mettez plus de procédure, cela pourrait être plus dur.

M. Dean: Mais la grève fait mal. Il y a des façons, si vous voulez, de faire mal. Je prétends qu'une grève qui fait mal ne devrait pas faire mal à des personnes en état de fragilité. Ce ne sont pas eux, les patrons. Une grève doit faire mal de façon économique ou politique. Dans une industrie, la grève fait mal quand cela crée une pression économique. La grève dans une industrie privée ou dans une mine, cela fait mal quand cela fait mal économiquement au patron. Tu n'as pas besoin de faire sauter l'usine pour faire mal à l'employeur; cela fait mal à tout le monde quand tu fais sauter l'usine. Tu fais mal à l'employeur par une pression économique.

Il se peut que, dans le secteur public, le mal que le syndiqué cherche à faire à son employeur, soit un mal de nature politique, mais ceux qui disent qu'une grève doit faire mal et qu'elle doit donc faire mal à des êtres humains démunis, ce n'est pas vrai, je ne l'accepte pas.

M. Rivest: Alors, on l'arrête.

M. Dean: Non, on ne l'arrête pas...

M. Rivest: On la garde tout de même.

M. Dean: ... mais il y a une différence fondamentale. Il y a une différence entre un geste posé d'une façon responsable et digne par des adultes et un geste obligé par un papa policier, contraint par une loi. Il y a là, selon moi, une différence énorme.

M. Marois: M. le Président, je vais certainement intervenir là-dessus, parce que je ne peux pas laisser le député de Jean-Talon nous prêter des propos, nous prêter des intentions. Je le laisse parfaitement libre de nous expliquer ses intentions, ses pensées les plus secrètes, les plus intimes, les plus cachées à travers les méandres de sa pensée dont le cheminement a été, d'ailleurs, fort complexe et laborieux tout au long des mois...

M. Rivest: Pardon?

M. Marois: Oui, complexe et laborieux au long des mois. Je vais l'étoffer et l'étayer d'un certain nombre de déclarations, s'il le faut. Ce n'est pas une nuance, c'est fondamentalement quelque chose de différent quant aux moyens qui sont proposés pour atteindre un objectif sur lequel on s'entend. Nous misons sur un sens des reponsabilités des parties. Vous n'y croyez pas. C'est cela la différence fondamentale.

M. Rivest: Non.

M. Marois: C'est tellement vrai que, de notre côté, nous proposons de capitaliser sur

ce sens des responsabilités en le surveillant. Si ce sens s'exerce de façon responsable et dans la reconnaissance, dans les faits, du droit des citoyens d'obtenir leurs services essentiels, très bien, mais si ce sens des responsabilités devient, dans son comportement, l'équivalent d'un sens irresponsable, nous nous donnons les moyens d'intervenir avant que le droit de grève ne soit acquis.

Vous ne croyez pas à ce sens des responsabilités et, pourtant, lors de nos travaux en commission parlementaire, en septembre, les propos du député de Jean-Talon amenaient un éditorialiste du Soleil, à l'époque, à dire ceci: Porte-parole libéral, M. Jean-Claude Rivest a renchéri sur les propos du ministre, que cite et que rappelle l'éditorialiste du journal Le Soleil, qui avait souligné avec à-propos, disait l'éditorialiste et c'était son opinion, qui disait qu'une telle interdiction du droit de grève... (16 heures)

M. Rivest: Globale.

M. Marois: ... ne ferait qu'envenimer et détériorer encore plus la situation. La preuve, c'est ce qui se passe ailleurs où les services ne sont même pas assurés; plutôt que le chaos social, le gouvernement préfère que l'exercice du droit de grève se fasse sans désordre et d'une manière civilisée.

Le porte-parole libéral, M. Jean-Claude Rivest, a renchéri en faisant état du caractère illusoire de certaines solutions simplistes qui conduiraient le Québec, non pas sur la voie du progrès et de la paix sociale, mais sur celle du chaos et du désordre. Et ce que vous ne voulez pas dire, c'est que votre abolition sélective - bien que vous l'admettiez, vous l'avez dit en débat de deuxième lecture et vous avez raison, parce que vous savez que cela est vrai - cela va présenter des problèmes d'application pratique et technique. Vous l'avez dit et vous savez que c'est exact. Par l'abolition sélective, je cite textuellement les propos du député de Jean-Talon, lors du débat de deuxième lecture, ce sont ses propres paroles: Que ce soit - c'était votre proposition telle que rendue publique en janvier - l'abolition sélective dans certains établissements à vocation unique et également dans des unités ou des départements de certains établissements à vocation multiple... C'est un tel pourcentage des établissements, un tel pourcentage des effectifs, et vous savez en plus que les effectifs d'une unité ou d'un département...

Mme Lavoie-Roux: 200 sur 800.

M. Marois: ... peuvent participer de différentes unités d'accréditation, que ce n'est absolument pas applicable et qu'en plus, c'est un tel pourcentage et qu'à toutes fins utiles, vous courez un risque, parce que c'est presque l'équivalent d'une abolition complète, presque, étant donné l'ampleur et le pourcentage que cela implique d'établissements, de travailleurs. Dans certains cas, parce que vous savez que si cela était fait, vous allez directement dire à des gens qui se sont comportés dans bon nombre de cas de façon responsable: Que vous vous soyez comportés de façon responsable, peu importe, on ne court aucun risque, on considère que vous êtes irresponsables; en partant, on vous l'enlève, le droit de grève, même le bout symbolique que cela peut représenter dans certains cas. Là où on vous suit et où on est d'accord, c'est dans les cas où il y a des comportements irresponsables. Cela, ce ne peut être accepté. Tout ce qui est humainement possible doit être fait pour ne pas que cela se reproduise, mais c'est à cela que ça mène fondamentalement, ce que vous proposez.

Ce qui veut dire que vous n'acceptez pas qu'il y ait eu, dans un pourcentage important, un comportement responsable. Cela mène exactement à ce qu'évoquait le député de Jean-Talon lors de nos travaux en commission parlementaire en septembre. Et cela, c'est un risque que moi, personnellement, mes collègues et le gouvernement, nous croyons que, comme société, on ne peut pas se permettre de courir si tant est que c'est vrai que nous voulons faire en sorte que soit assurée la primauté des services essentiels pour les citoyens.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon; après quoi, le député de Beauharnois qui attend depuis longtemps.

M. Rivest: M. le Président, il faudrait peut-être clarifier cela parce que, sans doute...

Le Président (M. Gagnon): Pardon?

M. Rivest: Non, juste parce qu'il m'a quand même mis en cause, je ne veux pas en faire une question de règlement, mais on va porter ce débat jusqu'à la fin de nos travaux, bien sûr. Ce que je veux simplement rappeler, c'est que le ministre se réfère au fait qu'il y a eu effectivement des ententes dans un nombre de cas - et là-dessus le ministre a raison - où il n'y a pas eu de problème majeur pour les bénéficiaires. Mais, quand le ministre dit du même souffle - et il l'a redit - que pour certains établissements ou vis-à-vis de certains bénéficiaires, c'est à toutes fins utiles, se basant d'ailleurs en cela sur la déclaration de Mme Gosselin, 100% ou à peu près des effectifs, et l'adjoint parlementaire a donné un certain nombre de personnes qui pourraient faire la grève... Au fond, ce que je dis et qui nous fait tout un

plat, parce qu'on enlève le droit de grève d'une façon sélective à 100% et lui, il dit que c'est inadmissible... Le droit de grève doit exister, pour faire comprendre mon point de vue, parfois dans un certain nombre d'établissements qui sont sensiblement les mêmes clientèles de bénéficiaires qui nous préoccupent, qui sont les gens les plus vulnérables et les 90%, 97%, ou je ne sais trop, effectivement ne doivent pas avoir le droit de grève.

Alors, moi, je dis simplement, quant à son adhésion au principe du maintien du droit de grève, qu'il adhère à un principe qui est verbeux - je ne le dis pas dans un sens péjoratif - . Ce sont des mots, parce qu'effectivement les travailleurs en cause qui tiennent à leur droit de grève que nos lois reconnaissent à l'ensemble des travailleurs, l'exercice effectif du droit amputé de 98%, qu'est-ce qu'il vaut pour les travailleurs qui doivent négocier leur convention collective et utiliser le droit de grève qui leur sera reconnu dans la lettre de la loi et qui en pratique n'aura aucune espèce de signification concrète? Le monsieur qui coupera le gazon ou les services de la comptabilité, ce n'est pas cela qui va exercer une pression sur le patron pour essayer d'améliorer les conditions de travail des gens. Alors, c'est pour cela que nous parlons de deux dimensions bien précises, les dommages qui sont causés aux personnes lorsque le droit de grève est accordé et, deuxièmement, la situation de risque dans laquelle sont placés les gens puisque ce droit de grève existe théoriquement.

Quand le ministre nous dit - il a droit à son opinion, j'en conviens volontiers - que notre position n'est absolument pas responsable, au fond, en d'autres termes, dans un autre contexte, il dit exactement la même chose parce que son droit de grève qu'il dit continuer de reconnaître aux employés dans le secteur, il ne veut strictement rien dire. Disons clairement, compte tenu de l'expérience et du vécu des Québécois dans ce domaine au cours des dix ou quinze dernières années - nous parlons de la primauté des droits humains sur les droits des travailleurs par ailleurs légitimes, reconnus par notre loi du travail - disons que là, tout le monde, on peut convenir que d'exposer des malades psychiatriques, des handicapés, des personnes âgées à l'exercice du droit de grève, c'est inadmissible, inacceptable. Si cela est vrai, ça se traduit au niveau de la loi. Pour les travailleurs en cause, parce que cela aussi fait partie de notre proposition, on a élaboré, on a suggéré un certain nombre de techniques qui leur permettraient effectivement de bénéficier de l'économie de nos lois du travail dans le sens des pressions qu'ils doivent exercer pour améliorer leur convention collective, moyens qui ne pénaliseraient pas les travailleurs dans ce secteur. C'est notre position et très franchement ce n'est pas une solution simpliste au sens où certains, à mon avis, et là-dessus je ne suis pas d'accord, où certains sont venus dire - je pense que c'est la position de notre parti également - qu'il faut abolir le droit de grève dans les secteurs public et parapublic, point, à la ligne et partout. Moi, je ne suis pas d'accord sur cela.

Si je suis d'accord sur une abolition sélective - c'est la position du parti - c'est parce que, selon notre position, il y a des clientèles très identifiées, clientèles, qui ne doivent pas être exposées au droit de grève et des clientèles d'ailleurs, dont tout le monde convient, y compris un très grand nombre de syndiqués, y compris le gouvernement et le ministre quand il parle de grève symbolique, qu'au fond le moyen de pression qui est le droit de grève pour améliorer des conventions collectives, ça n'a pas sa place quand ça risque de heurter les personnes qu'on a désignées dans notre position. C'est tout et notre position a certainement le mérite d'être beaucoup plus claire. Elle ne contient aucune espèce d'ambiguïté au niveau du discours et elle ne vit pas sur les apparences d'une conservation du droit de grève que de toute façon vous ne voulez pas conserver en termes pratiques et que vous ne voulez pas devoir exercer contre les personnes qui sont les plus vulnérables dans notre société. C'est cela notre position.

M. Marois: M. le Président - après, je vais laisser la parole à mes collègues - est-ce que le député mesure concrètement, pas verbeusement, entre guillemets, au sens où il l'a utilisé, concrètement, ce qu'il dit? Si on limitait l'abolition sélective, et ce n'est pas votre position, vous allez plus loin que cela, du droit de grève aux établissements à vocation unique, les centre hospitaliers de soins prolongés et les centres d'accueil, on toucherait à 51% des établissements. Si cette abolition selon votre proposition visait aussi les établissements dont une partie seulement est consacrée aux soins prolongés, on toucherait alors à 64% du total des établissements.

M. Rivest: Vous faites une abolition... M. Marois: II est important...

Le Président (M. Gagnon): Â l'ordre, à l'ordre!

M. Rivest: Vous maintenez symboliquement le droit de grève...

M. Marois: M. le Président...

M. Rivest: ... pour la même proportion

d'établissements.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! À l'ordre s'il vous plaît!

M. Rivest: C'est la même chose que vous dites.

Le Président (M. Gagnon): Avant de remettre la parole à vous aussi, M. le ministre. Il faut que je respecte aussi le droit de parole des gens de cette commission. J'ai des gens qui m'ont demandé la parole depuis longtemps. J'aimerais bien qu'on puisse donner le droit de parole aussi aux autres.

Alors, M. le ministre.

M. Marois: Bien sûr, M. le Président.

Je ne vois pas pourquoi le député de Jean-Talon devient nerveux comme cela. Il m'interrompt, ses collègues aussi...

M. Rivest: Vous dites la même chose que moi, sauf que vous faites...

M. Marois: ... depuis le début, cela recommence encore une fois. De ce côté de la table, on écoute...

M. Rivest: M. le Président, est-ce que c'est une question de règlement? Il m'accuse d'être nerveux.

M. Marois: ... très attentivement les propos des députés de l'autre côté. Est-ce qu'il se rend compte en plus qu'il y aurait plus d'une centaine d'établissements qui seraient soumis à un double régime de droit de grève dans certains coins et d'absence de droit ...

M. Rivest: II y aura 100 établissements qui vont avoir le droit de grève symbolique et il y en a 100 qui vont l'avoir. C'est la même affaire.

M. Marois: ... de grève. Encore une fois, le député s'énerve, tente de m'interrompre. Je respecte toujours son droit de parole. Je ne l'interromps pas. Est-ce qu'il se rend compte de cela.

M. Rivest: C'est la même chose.

M. Marois: Est-ce qu'il se rend compte de cela? Alors, à ce moment, il me pose la question: Qu'est-ce que cela vaut le droit de grève? Je vais répondre ceci. Cela vaut ce que vaut un droit de grève qui s'exerce comme cela s'exerce et comme cela s'est passé au Québec dans certains cas et cela vaut ce que cela vaut quand cela s'exerce dans certains pays européens, dans le respect du droit fondamental et en reconnaissant la primauté des citoyens d'avoir droit à leurs services essentiels plutôt que de prendre le pari de ce que le député appellait lui-même le chaos ou le désordre social. C'est ce que cela vaut. Cela mène on le sait, dans le premier cas, quand cela s'exerce de façon responsable même dans des coins où cela doit être symbolique et cela s'exerce de façon symbolique à des règlements de convention négociée de façon civilisée plutôt que le risque du désordre comme cela s'est produit. On n'a pas besoin d'aller chercher les exemples bien loin.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Beauharnois après Mme la députée de Maisonneuve et Mme la députée de L'Acadie.

M. Lavigne: Très brièvement, M. le Président, je pense que cela a été dit, mais je tiens à le répéter. On a des divergences de vues sur les moyens. Je crois que tout le monde est d'accord sur cela. Par ailleurs, sur les objectifs fondamentaux à permettre à ce que les citoyens dépourvus, qu'on les appelle les handicapés, les personnes âgées ou les malades chroniques, je crois que, pour ces gens, les deux côtés de la table sont d'accord pour qu'ils aient tous les services essentiels voulus dans une société civilisée.

Par ailleurs, sur la divergence des moyens, c'est à l'effet de conserver ou d'abolir, dans certaines de ces institutions, le droit de grève. Je dis que d'abolir le droit de grève dans ces institutions, c'est ne pas reconnaître ou ne pas se donner les moyens de permettre à des citoyens qui sont les travailleurs de ces institutions d'évoluer comme citoyens dans une société civilisée. Je pense que, lorsqu'on a été dans l'enseignement ou lorsqu'on a été père ou mère de famille, on a développé ces moyens d'éduquer ses enfants ou d'éduquer ses élèves, non pas dans la défense de poser des gestes, mais en responsabilisant les gens à poser ou à ne pas poser des gestes. Je pense qu'actuellement si on enlève le droit de grève aux travailleurs de nos institutions, c'est qu'on ne leur fait pas confiance dans l'évolution qu'ils pourraient faire à se responsabiliser face aux gestes ou aux tâches qu'ils ont à accomplir. Je pense que c'est fondamental comme prise de position à partir du moment où on croit à l'évolution d'une société. Le fait d'enlever à quelque individu que ce soit par obligation des gestes qui lui, librement, pourrait poser parce qu'il a évolué, c'est de ne pas lui faire confiance, c'est le considérer comme n'étant pas un être humain capable de faire cette démarche. On agirait, à ce moment, d'une façon paternaliste sans comprendre ou sans croire qu'un être humain pourrait être aussi responsable que celui qui lui enlèverait ou lui permettrait de poser ce geste.

Même si l'on devait seulement réfléchir sur ce point, je crois que c'est fondamental

et très important. Je dis que le jour où on enlèvera, par décret ou par loi, la possibilité à un individu de poser librement un geste et qu'on ne lui aura pas permis de réfléchir sur la façon dont il aura eu à poser ce geste, c'est un manque de confiance flagrant et c'est s'empêcher d'évoluer dans une société. On ne peut pas discuter de cela, à partir du moment où on discute de cela; c'est de ne pas croire à une société. (16 h 15)

M. Rivest: Donnez le droit de grève aux policiers.

M. Lavigne: On parle des services essentiels. Pour moi, c'est un argument qui me tient à coeur et je crois qu'il est important. Psychologiquement, c'est aussi très important, il suffit de de pas avoir droit de poser un geste pour avoir le goût de le poser. Si librement, psychologiquement, on a le droit, on peut poser un geste, on est capable de réfléchir beaucoup plus profondément sur l'effet que le geste posé dans un sens ou dans l'autre peut apporter.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, on s'entend tous sur le fait que d'abolir le droit de grève, ce ne sera quand même pas abolir la grève. À partir de là, nous disons qu'il faut se méfier des solutions simples parce qu'elles peuvent conduire au résultat inverse de celui que nous recherchons. Je relisais le rapport Martin-Bouchard qui disait: La nature des services assurés par l'État confère à première vue un pouvoir de négociation très grand à la partie syndicale. Cet aspect de la question ne doit cependant pas leurrer pour deux motifs complémentaires: d'une part, la grève dans les services assurés par l'État est toujours impopulaire auprès de la population et, d'autre part, les syndiqués impliqués dans un tel conflit comptent eux-mêmes parmi les usagers de ces services.

Il est évident que, dans une société démocratique, il y a un certain niveau de complexité qu'on ne retrouve pas dans d'autres sociétés. Si vous me permettez certaines analogies, je pense, par exemple, aux pratiques abusives dans le domaine électoral qui ont pu être dénoncées il y a vingt ans, à ces pratiques complètement illégales, complètement odieuses et cela ne nous avait tout de même pas amenés à remettre en question le suffrage universel ou le régime démocratique dans lequel nous sommes. J'entendais le chef de l'Opposition, à l'émission de Denise Bombardier à Radio-Canada, samedi passé, dire qu'il préférait une presse avec des faussetés qu'une presse qui serait obligée d'écrire une vérité obligatoire. Évidemment, il y a bien d'autres domaines où on se rend compte qu'il y a une certaine complexité dans les rapports sociaux, dans les rapports collectifs qui font que le projet de loi m'apparaît raisonnable, dans la conjoncture actuelle, à deux conditions.

Dans le milieu syndical - je pense bien que vous-même qui avez été au cabinet du premier ministre de l'époque, le savez - on revendique pour soi et, aussi, on a une certaine légitimité dans son discours, parce qu'on revendique pour l'ensemble. On se considère souvent comme une locomotive qui traîne l'ensemble des travailleurs, par exemple, assujettis au salaire minimum, concernant ce qu'on obtient comme les congés parentaux, le droit à la retraite, les allocations ou primes d'éloignement et autres. Il est de bon ton de convenir dans ce milieu qu'il est légitime que ce qui est obtenu, fait progresser, en termes de transformation sociale bénéfique l'ensemble de la population.

Le projet de loi qui est devant nous a des chances réelles de succès dans la mesure où il y a un changement d'attitude, pas seulement du côté syndical mais aussi du côté de l'État employeur, à savoir que, dans l'économie générale des relations du travail, il ne soit plus nécessaire d'en arriver à une grève générale ou illimitée pour obtenir gain de cause. Si on se réfère, par exemple, à ce qui se passe dans les relations du travail en France, il demeure qu'un certain avertissement, une simple grève d'avertissement, même toute symbolique qu'elle puisse être ou avec un caractère aussi modeste qu'elle puisse avoir, a un effet relativement important et une efficacité en soi. Il est certain que cela suppose une certaine métamorphose dans les relations entre l'État et ses organisations syndicales. Cela suppose que l'État est à l'écoute des premières manifestations, qu'il n'attend pas que ces manifestations dégénèrent. Cela suppose également qu'il y a une très large ouverture faite à la syndicalisation dans le privé. Il n'en restera pas moins vrai que sur le plan structurel, si ce sont les employés du secteur public qui servent à élaborer les "pattern" dans les relations du travail auront toujours d'une certaine façon une démonstration à faire et ce qu'il faut souhaiter, c'est une syndicalisation beaucoup plus large, parce qu'on sait qu'au Québec nos 39% ou 40% de syndicalisation sont trompeurs parce qu'ils recouvrent 75% de la syndicalisation du secteur public et à peine 19% ou 20% du secteur privé.

Ce qu'il faut souhaiter, c'est qu'il y ait, en plus de ces nouvelles dispositions qu'on retrouve et qui me semblent extrêmement raisonnables, d'autres dispositions qui facilitent l'accès à la syndicalisation dans le secteur privé pour en arriver à la situation que ce ne soit plus le public qui soit la locomotive des relations du

travail au Québec.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Sur le caractère symbolique du droit de grève, symbolique au sens où il y a très peu de personnes dans l'unité de négociation pour les clientèles dont on discute, est-ce que vous tenez quand même à l'exercice de ce caractère symbolique tel que l'adjoint parlementaire l'a exprimé? Est-ce qu'à ce moment-là le droit de grève ne devient pas, à toutes fins utiles, vidé de son sens premier qui est d'exercer une pression sur l'employeur? Il n'a plus aucun effet.

Mme Harel: Dans une négociation classique peut-être, mais il reste que l'ensemble de la collectivité québécoise réévalue les rapports qu'elle a entretenus jusqu'à maintenant. Il me semble que de cela doit surgir une certaine mutation dans les rapports entre l'État et les organisations syndicales qui représentent les employés de l'État, dans la mesure où l'État pourra réagir assez rapidement à des avertissements sans attendre qu'il y ait détérioration de la situation.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je peux me tromper dans mon interprétation, mais j'ai cru que, de part et d'autre, on était d'accord sur les objectifs, c'est-à-dire protéger le plus possible ceux qu'on vient d'appeler entre nous les bénéficiaires les plus vulnérables. Mais à écouter le raisonnement du ministre qui dit: Le droit de grève, alors que les syndiqués ont été des gens responsables, je ne vois pas pourquoi on le leur enlèverait parce que d'autres ont été irresponsables. Enfin, son raisonnement est basé sur cette notion de responsabilité. C'est un choix que le gouvernement a tout à fait le droit de faire. Ce n'est pas à nous de lui en tenir rigueur, je pense que la population jugera en temps et lieu.

Pour le gouvernement, il m'apparaît que ce à quoi il accorde la priorité, c'est à l'exercice du droit de grève pour les syndiqués. De notre côté, ce à quoi nous accordons la priorité, c'est aux soins et à la protection des citoyens malades ou des citoyens ayant besoin de protection. Selon nous, l'expérience a démontré que depuis, disons, quinze ans, peut-être davantage, en dépit des diverses lois qui ont été adoptées, que ce soit la loi 259 ou 253, et maintenant la loi 72 - évidemment, on ne sait pas quels en seront les résultats - trop de risques ont été pris et trop d'injustices ont été commises, même si elles ne représentaient que 5% par rapport à 100%; personne d'entre nous ne peut établir de pourcentage certain. Il y a eu trop de risques et trop d'injustices commises à l'endroit de personnes sans défense. Je ne veux rien dramatiser, je pense que tout le monde sait ce dont on parle; comme députés, on a tous visité des hôpitaux et des centres d'accueil ou enfin des institutions de ce type. Pour nous, je pense que ce pourcentage de personnes qui ont été victimes de notre mode de fonctionnement dans les relations du travail justifie qu'à ce moment-ci les plus faibles soient protégés de la façon la plus absolue possible. Je suis d'accord avec le ministre qu'il n'y a pas d'absolu, mais je pense que c'est la responsabilité du gouvernement d'assurer, dans toute la mesure possible, ce qui pourrait être un absolu quant à la totalité des soins ou des services auxquels on a droit. Pour moi, les objectifs - vaguement, on s'entend sur les objectifs - ne sont pas les mêmes, parce que pour nous, c'est la protection du citoyen, la protection des bénéficiaires et pour le ministre - et c'est son choix, je ne le lui reproche pas - c'est encore la primauté du droit de grève. C'est pour cela que...

Une voix: Ben non, ben non!

Mme Lavoie-Roux: ... même si le préambule de la loi dit: Nous voulons consacrer la primauté du droit des citoyens, je pense que j'ai droit de dire que la loi, telle qu'elle est présentement, n'assure pas cet objectif. Évidemment, personne ne pourra faire la démonstration tant que la loi ne sera pas en exercice; on va essayer d'y apporter le plus possible d'amendements. C'est vraiment là, la différence entre le parti ministériel et le parti de l'Opposition. Évidemment, on nous parle toujours... Durant la commission parlementaire du mois de septembre d'ailleurs, le ministre avait annoncé ses couleurs dans ce sens, en disant et en répétant à plusieurs, plusieurs reprises que c'était bien beau d'empêcher la grève, qu'à ce moment-là c'était... D'ailleurs, il a cité même le député de Jean-Talon qui le disait dans le contexte bien précis. Il ne parlait pas de l'abolition du droit de grève général. Là-dessus, je pense que notre position est très claire: c'est vraiment vis-à-vis d'une catégorie particulière de la population et je le répète. Même si elle couvre - et c'est exact - probablement les deux tiers des établissements parce qu'il y a plus de centres d'accueil et d'hôpitaux de soins prolongés, en nombre minime, qu'il y a d'hôpitaux de soins aigus, il reste que, du point de vue du nombre d'employés, je pense que la proportion s'inverse parce que le personnel des hôpitaux de soins aigus est beaucoup plus élevé que dans les établissements de santé. On fait beaucoup appel à la notion de responsabilité, etc. Dans

le cas d'une abolition, même sélective, du droit de grève, on risque de créer le chaos, d'avoir plus de grèves, finalement, qu'on en aurait si l'on n'abolissait pas le droit de grève de cette façon sélective. Je pense que ce sens des responsabilités, il faudrait aussi que les syndiqués l'exercent à l'égard de la loi. Cela aussi, c'est un sens des responsabilités qui est tout aussi important que l'autre à l'égard des citoyens. Alors, je pense que, dans notre esprit, ce sens des responsabilités auquel vous faites appel, l'on peut lui faire appel de la même façon et peut-être d'une façon encore plus valable sans prendre de risques, en demandant aux syndiqués de l'exercer vis-à-vis d'une catégorie bien identifiée de citoyens et aussi à l'égard de la loi parce que la loi, il faut que les gens la respectent. L'expérience a démontré que là où les grèves n'étaient pas permises dans des secteurs particuliers, il y a eu beaucoup moins de grèves, même s'il y a eu des arrêts de travail, ils ont été très... Enfin, c'est infime comparé aux endroits où c'est très ouvert quant à l'exercice du droit de grève. Alors, je pense que c'est peut-être inutile de continuer ce débat, mais c'est vraiment là que je le situe: notre primauté ne s'exerce pas à l'égard des mêmes objets.

Le Président (M. Gagnon): Merci, madame. Avant de vous laisser la parole, M. le ministre, je ferai remarquer que nous sommes ici pour étudier article par article le projet de loi. J'ai l'impression que, depuis le début de la discussion, on refait la discussion en deuxième lecture.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'était pas long, la deuxième lecture; elle n'a duré que 20 petites minutes.

Le Président (M. Gagnon): Oui, jusqu'à maintenant. J'aimerais appeler l'article 1, puisqu'il a été appelé depuis 11 heures cet avant-midi. Est-ce que l'article 1 sera adopté?

M. Rivest: Non, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Non. M. le député de... M. le ministre.

M. Rivest: M. le Président. Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Rivest: Je pense que le ministre voudrait répliquer.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Rivest: J'ai une question qui va prendre cinq minutes avant qu'on n'aborde votre article 1 auquel vous tenez si courageusement depuis ce matin. (16 h 30)

M. Marois: M. le Président, bien sûr, la députée de L'Acadie a droit à son interprétation de nos intentions, des textes, et le reste. Elle a droit de nous prêter des intentions cachées, doit celle de camoufler des primautés qu'on placerait à une autre place. Elle a le droit d'interpréter ce qu'indiquent clairement et nettement les notes explicatives du projet de loi et le projet de loi lui-même: libre à elle. Elle a dit: II y a eu trop de risques. Est-ce qu'elle répondrait à une question bien précise qui serait la suivante: II y a eu trop de risques; expliquez-moi, dans le cas où le droit de grève est aboli sélectivement et où il y a un débrayage illégal, si vous ne pensez pas que c'est tout un risque que vous prenez là puisque, forcément, il n'y a rien de prévu, absolument rien; si, par définition, le droit de grève est aboli, sélectivement tant qu'on voudra, il n'y a rien de prévu. Dans votre proposition, vous allez même inclure des unités et des départements de centres hospitaliers à vocation multiple. Est-ce que vous ne pensez pas - c'était votre proposition du mois de janvier qui était rendue publique - qu'il n'y a rien d'autre de prévu que cette afirmation-là? Et dans le cas où il arriverait un seul cas, de débrayage illégal, est-ce que vous ne pensez pas que vous venez de prendre tout un risque? Et comment se traduit, à partir de cette hypothèse-là, votre préoccupation de rassurer la primauté des services essentiels? J'aimerais bien que vous m'expliquiez cela concrètement, que je comprenne clairement, parce que je n'ai jamais entendu de la part de l'Opposition, au-delà de l'affirmation générale de cette proposition, comment elle allait se traduire dans le concret et quel risque on fait courir à la société et particulièrement aux citoyens dont on parle, aux bénéficiaires dont on parle? C'est ma première question.

Ma deuxième question, dans des chambardements dans le domaine des relations du travail, avec des objectifs aussi généreux qu'ils puissent être au point de départ, dans la perspective d'une abolition sélective, est-ce que vous ne pensez pas que vous risquez de heurter des attitudes, des comportements qui, dans certains cas, ont été responsables et que, par voie de conséquence, cela pourrait avoir certaines répercussions parce que, là, on ne parle pas de tablettes de chocolat, on parle d'humains, aussi bien de bénéficiaires que de ceux qui donnent ces services-là? Je pense que Mme la députée est assez consciente de ce que cela implique que de travailler dans un certain type d'établissements où il y a des clientèles, comme on dit, particulièrement lourdes et qui nécessitent beaucoup de soins. Dans certains cas, ça demande pas mal de

dévouement. Est-ce que vous ne pensez pas qu'il y a un risque, et un joyeux rjsque, parce qu'on parle d'humains, et, dans chacun des humains, il y a souvent le meilleur et le pire - dont les effets qui se répercutent à l'interne dans les comportements de ceux et de celles qui donnent justement ces services-là? Par voie de conséquence, comment mesurez-vous, sur ce deuxième plan-là, les risques que vous prenez de faire encourir précisément aux bénéficiaires?

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je suis bien aimable de vouloir répondre au ministre, parce que je pensais que c'était lui qui était le ministre, mais en tout cas.

Dans le premier cas, je vous ferai remarquer, par exemple, que, dans le moment, puisque vous faites appel au sens des responsabilités, il y a un premier point. On ne dit pas aux gens: Vous ne faites pas de grève, sans, en contrepartie, les assurer qu'eux aussi pourront bénéficier de conditions de travail. C'est dans ce sens-là qu'on a parlé de clause-remorque, etc. Si on disait seulement: On vous enlève le droit de grève et vos conditions de travail vont se régler je ne le sais pas, même pas vers le 1er mai, elles vont se régler au hasard des choses, je pense que là, vous les laissez vraiment à découvert. Enfin, ce n'est pas un compromis ou un fonctionnement, je pense, qui les respecte. Je pense que ce qui est prévu, c'est que, pour le même type, la même classe de travailleurs, vous avez des conditions identiques, vous avez la clause-remorque ou, si vous aimez mieux, l'offre finale, enfin vous avez votre service de relations du travail, cela se fait ailleurs, il y a moyen de trouver un fonctionnement. Nous avons parlé de clause-remorque comme étant peut-être la solution la plus pratique. D'ailleurs, c'est déjà ce qui se fait, même à l'égard du maintien des services essentiels, parce qu'il y a des conditions de travail qui, finalement, s'appliquent même à ceux qui doivent prendre la responsabilité des services essentiels.

Deuxièmement, dans le cas où il n'y a pas de définition de services essentiels, ce qui n'empêche pas... D'ailleurs, on avait prévu que des services essentiels puissent être définis de la même façon par le conseil sur le maintien des services essentiels, prenez les médecins dans le moment, il n'y a rien qui s'applique à eux pour savoir quels sont les services essentiels qu'ils doivent observer ou ne pas observer, enfin il n'y a pas de liste des services essentiels pour eux. Jusqu'à ce moment-ci, je ne sais pas en tout cas si c'est parce que les deux parties se protègent, parce que cela aussi se produit, le gouvernement et les institutions, les syndicats et le gouvernement, les professionnels et le gouvernement, mais jusqu'à ce moment-ci, ils ont quand même eu la conscience professionnelle, pour autant qu'on le sache, d'observer même plus que les services essentiels. Enfin, il ne semble pas que, d'une façon aiguë en tout cas, la population en ait souffert.

Vous pourriez aussi avoir, dans le cas d'une grève illégale, en admettant qu'il y aurait une grève illégale, cette possibilité que les gens soient aussi responsables à ce moment-là que vous dites qu'ils peuvent être responsables à d'autres égards, mais il n'y a rien qui empêche de... Ils font la grève, il y a des sanctions de prévues.

M. Marois: Êtes-vous en train de me dire qu'une grève illégale, par définition, est responsable?

Mme Lavoie-Roux: Non, mais je pense qu'on peut aussi, dans une grève illégale, avoir un comportement humain et un comportement respectueux des bénéficiaires autant que dans une grève légale.

M. Rivest: II y a eu des grèves illégales.

Mme Lavoie-Roux: II y en a eu des grèves illégales.

M. Marois: Mais, par définition... Mme Lavoie-Roux: Est-ce que...

M. Marois: M. le Président, le député de Jean-Talon interviendra tantôt.

M. Rivest: Oui, mais c'est parce que...

M. Marois: J'ai posé une question à la députée. J'essaie de comprendre la réponse...

M. Rivest: Oui, mais il y a eu des grèves illégales avec le régime actuel et il n'y avait pas de services essentiels.

M. Marois: ... de la députée de L'Acadie...

Le Président (M. Gagnon): Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Dans le cas de...

M. Marois: ... parce qu'à cet instant, je n'ai pas eu de réponse à ma question.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que, si vous ne voulez pas l'entendre, c'est une autre chose.

M. Marois: J'écoute très attentivement.

Mme Lavoie-Roux: L'autre chose, je pense qu'il y a aussi, comme vous l'avez dans le cas du maintien ou du non-maintien des services essentiels, des sanctions sérieuses qui doivent être prévues. Je pense que vous allez avoir des inconvénients, mais, à mon point de vue, des inconvénients que vous subiriez peut-être pendant 48 heures ou 24 heures, avant que vous ne puissiez intervenir, s'il y en a, je crois autant à la responsabilité des gens vis-à-vis du non-exercice du droit de grève que vous semblez croire à une espèce de droit de grève symbolique, de toute façon. Je pense que c'est la réponse que je peux apporter à votre question. Les dangers encourus dans le cas d'abolition du droit de grève dans des domaines très sensibles sont moindres que les dangers encourus dans les mécanismes que vous prévoyez pour maintenir des services essentiels dans votre projet de loi.

M. Marois: J'aimerais bien savoir sur quelles données de fait et sur quelles pratiques vous vous basez pour faire une affirmation comme celle-là.

M. Rivest: Sur la pratique, M. le ministre, si vous permettez, de la loi 59 qui a sensiblement le même mécanisme et que vous vous efforcez de changer avec le présent projet de loi. On l'a vécu, vous l'avez vécu ce problème. Le problème de l'illégalité, ce n'est pas lié à l'abolition du droit de grève.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a une différence entre cela et la loi 59?

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marois: Vous ouvrez la porte de façon générale à un débrayage illégal, puisque vous abolissez sélectivement...

M. Rivest: Pas du tout.

M. Marois: ... dans plus d'une centaine d'établissements...

M. Rivest: Absolument pas. Le vécu dont vous faites état très souvent...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Marois: Vous ne répondez pas à ma question.

M. Rivest: Je...

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre!

M. Marois: Un débrayage illégal pourrait être fait de façon responsable avec peut-être des services essentiels. M. Rivest: Non. Mme Lavoie-Roux: Je... Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! M. Marois: Peut-être pas, n'est-ce pas? M. Rivest: Oui.

M. Marois: C'est un risque, n'est-ce pas, un joyeux risque?

Mme Lavoie-Roux: Je pense que le risque que vous courez ici...

M. Rivest: Le risque est bien plus grand, avec votre mécanisme, votre tuyauterie. Avant que cela arrive au bout du tuyau, les gens vont...

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre...

M. Marois: Avant que le droit de grève soit acquis cependant.

M. Rivest: Les gens sont sortis.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre peut nier que, là où il y a abolition du droit de grève, les grèves n'existent à peu près pas?

M. Rivest: Voyons, sans cela, on n'aurait pas ce projet de loi.

Le Président (M. Gagnon): M. le...

Mme Lavoie-Roux: Des grèves illégales, il n'y en a pas, pratiquement pas.

M. Marois: Ah bon!

Mme Lavoie-Roux: Que vous regardiez les pompiers, que vous regardiez les policiers, que vous regardiez les gens qui n'ont pas le droit de grève, où sont les grèves illégales? Elles sont minimes.

M. Marois: Oui, et vous avez regardé ce qui s'est produit dans les services sociaux et les services de santé dans les provinces qui nous voisinent, qui sont à côté de nous?

M. Rivest: Oui, quel est le nombre?

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de comparaison.

M. Marois: II n'y a pas de comparaison.

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de comparaison.

M. Rivest: II n'y a aucune comparaison avec ce qui s'est passé au Québec.

Mme Lavoie-Roux: Et à part cela, la négociation n'est pas centralisée dans ces autres provinces. Cela fait une énorme différence.

M. Rivest: J'en arrive à ma dernière question.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que c'est...

M. Rivest: Si vous me permettez, j'ai une dernière question d'introduction. Cela va prendre cinq minutes.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui. M. le ministre, avant d'aborder l'article 1...

M. Marois: Toujours pertinente à l'article 1?

M. Rivest: Oui, toujours, M. le ministre. Plusieurs intervenants, dans toute cette question du droit de grève, ont demandé au gouvernement - et d'ailleurs ce n'est pas récent devrions-nous dire - d'essayer de protéger l'ensemble des citoyens contre un exercice du droit de grève et de regarder de nouveau - et le ministre lui-même, je pense, a eu des échanges avec les intervenants à l'époque - toute la question de la structure des négociations, leur degré de centralisation, la place qu'occupaient les organismes qui ne sont pas de nature gouvernementale, la nature de leur rapport entre un hôpital, un établissement et la table centrale. Enfin, on l'a vu également dans le domaine de l'éducation. Je vous réfère, en particulier, aux affirmations de l'Association des hôpitaux, du Québec; elle disait que le gouvernement ne soit pas engagé directement dans la négociation, qu'un mécanisme de négociation remplace la table centrale et que l'organisation de la partie patronale tienne compte davantage des responsabilités et des pouvoirs des partenaires et toute cette dimension qui a été très largement discutée dans les 56 heures, on n'a pas vu - en tout cas, pas à ma connaissance, à moins que je ne me trompe - dans le projet de loi, l'ombre d'une conséquence ou d'une réflexion ou d'un commencement de réflexion que le gouvernement aurait fait sur les structures de négociation, en particulier la nature de ces rapports entre le gouvernement et ses partenaires et que cela avait pu, comme le sait le ministre. Enfin il y a bien d'autres organismes, je ne veux pas être injuste, il y a même la FTQ qui avait traité de cette question, l'Association des centres d'accueil du Québec, l'Association des centres de services sociaux, l'Association des centres hospitaliers des centres d'accueil privés du Québec et un certain nombre d'autres organismes avaient soulevé cette question et on a rien vu paraître encore.

Est-ce que ce n'est pas un élément dont il faut tenir compte dans la mesure où toute l'économie de la Loi sur le maintien des services essentiels privilégie et, à bon droit, la spécificité de chacun des établissements, etc., alors que toute la machine et l'appareillage bureaucratique que constitue le grand rendez-vous de négociations au Québec depuis 10 ou 15 ans s'affrontent par le haut, et que les gens, autant les administrateurs que le personnel dans les établissements sont plus ou moins, en fait, c'est l'impression générale, laissés pour compte.

Je veux demander au ministre ce qui arrive de cette réflexion sur les structures de négociation, sur leurs conséquences, sur le degré de responsabilités que la centralisation et la bureaucratisation de ces appareils ont pu avoir sur la quantité de grèves ou des difficultés qu'on a connues dans le passé. Est-ce qu'il y a une réflexion qui a été amorcée? Elle ne se traduit pas dans ce projet de loi, mais est-ce qu'elle va aboutir quelque part ou si la structure actuelle, l'expérience des 10 ou 15 des meilleures années fait que, finalement on dit: Cela va bien?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Très rapidement, le présent projet de loi concerne la question des services essentiels et vise fondamentalement à assurer, cette primauté des services essentiels qui doivent être assurés aux citoyens. La réflexion... Effectivement, il y a eu une longue réflexion qui a été faite dans la foulée des discussions parlementaires concernant toute la question des structures de négociation, la nature des relations du gouvernement avec ses partenaires patronaux et, également, la nature des relations avec les partenaires syndicaux et l'aboutissement de ces réflexions se traduira dans les échanges. Cela ne suppose pas, à notre point de vue au moment où on se parle, d'ajustements ou de modifications d'ordre législatif, mais fera plutôt partie des échanges qui seront amorcés entre les partenaires aux tables pour définir, par exemple, les matières négociables et le reste, la façon de s'entendre sur les clauses qui les uns et les autres considèrent important de réexaminer, et le reste et le reste. (16 h 45)

Le Président (M. Gagnon): Merci. Est-ce que l'article 1 sera adopté?

M. Rivest: Avec une dernière question, M. le Président. Évidemment, les lois spéciales restent toujours une possibilité.

M. Marois: Cela fait une heure trente que c'est toujours la dernière question.

M. Rivest: C'est très long, les lois spéciales...

M. Marois: Tout cela, dans un contexte d'urgence...

M. Rivest: Une loi spéciale, c'est toujours...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on a fait la démonstration ce matin que cela fait trois ans qu'on attend. Alors, ce ne sont pas 24 heures qui vont y changer quelque chose.

Franchement, je comprends...

Le Président (M. Gagnon): Je vous ai permis la réplique sur cette dernière remarque. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: À travers tout cela, la possibilité d'une loi spéciale, à un moment donné, pour mettre fin à une grève, reste toujours dans le décor, évidemment. L'Assemblée nationale n'a pas abdiqué ses pouvoirs avec cela.

M. Marois: L'Assemblée nationale n'abdique, à ce que je sache, que rarement ses pouvoirs.

M. Rivest: Donc, il est possible...

M. Marois: ... si le député le permet...

M. Rivest: Je veux accélérer les travaux, étant donné qu'il y a urgence.

M. Marois: Oui, j'ai compris cela depuis une heure, deux heures, trois heures...

Mme Lavoie-Roux: Cela fatigue le ministre qu'on fasse cela.

M. Rivest: II n'aime pas cela préciser ses mots, comme "symbolique". Cela le fatigue.

Mme Lavoie-Roux: Moi, je trouve que...

M. Marois: Cela va me faire plaisir de répondre aux questions des membres de l'Opposition. Je les trouve particulièrement nerveux, M. le Président, ce matin. Habituellement, ils respectent le droit de parole des uns et des autres. Ils écoutent attentivement. On a des échanges très positifs.

Le Président (M. Gagnon): Vous n'avez pas commencé, M. le ministre, à répondre. Je voudrais juste vous demander une chose pour un peu le respect des employés du journal des Débats. Quand on parle plusieurs en même temps, je comprends que les gens ont de la difficulté à tout inscrire ce qui se dit. Alors, s'il vous plaît, y a-t-il possibilité de parler l'un après l'autre? Alors, M. le ministre...

Mme Lavoie-Roux: II n'y en a plus un qui ose parler.

M. Rivest: ... la loi spéciale, cela reste toujours.

M. Marois: L'Assemblée nationale n'abdique pas, bien sûr, ses pouvoirs. Cependant, encore une fois, il n'y a pas d'absolu là-dedans, mais, dans la mesure où nous croyons que les voies et moyens qui sont proposés pour atteindre les objectifs visés permettraient - et nous croyons que cela va le permettre - une amélioration substantielle des choses, cela réduirait, forcément, d'une façon importante, surtout quand on tient compte du fait que tout le bloc des services publics se trouve ici potentiellement couvert, réduirait de façon potentielle - on verra à l'usage et à l'usure - ce type de recours.

Code du travail

M. Rivest: L'article 1, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1 est-il adopté?

M. Rivest: Je voudrais savoir si le ministre a quelque chose à dire sur cet article énigmatique.

M. Marois: Je crois que l'article est très clair en lui-même, M. le Président. Le député de Jean-Talon a certainement examiné l'ensemble des divers articles du projet de loi; il les a fouillés abondamment et il me les a commentés partiellement. Je crois que l'article est très clair.

M. Rivest: Alors, M. le Président, je le lis pour les fins de l'entendement du journal des Débats et des lecteurs: L'article 1 du Code du travail est modifié par la suppression du paragraphe.

M. Marois: Je n'ai pas l'amendement proposé à cet article.

M. Rivest: M. le Président, quelle est la signification de cet article?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: C'est le sens de l'article du Code du travail qui concerne les services publics et que connaît fort bien le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Est-ce que ce ne serait pas qu'il s'agit simplement d'une abrogation de concordance, dans la mesure où la notion de service public est réinscrite au paragraphe 110.0.16 de l'article 6 du projet de loi 72?

M. Marois: Le député de Jean-Talon a tellement bien compris, ce qui prouve qu'il me posait des questions inutiles.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Le ministre ne pouvait pas répondre.

M. Rivest: Manifestement.

Mme Lavoie-Roux: Manifestement.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1 est-il adopté?

M. Rivest: M. le Président, est-ce qu'il n'y a pas d'autres commentaires sur l'article 1, parce que c'est un article extrêmement important et qu'il y eu des échanges très positifs. Alors, l'article 1 est adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 2.

M. le ministre.

M. Marois: Pas de commentaires.

M. Rivest: Quel est le sens de l'article 2, M. le ministre?

M. Marois: Alors, l'article 2 modifie l'article 109.1 du code en remplaçant un certain nombre de paragraphes qui sont bien connus de la députée de L'Acadie qui maîtrise parfaitement bien le Code du travail, d'une part en remplaçant dans les paragraphes a, c et d partout où elle s'y trouve l'expression "aux articles 111" par les articles pertinents du présent projet de loi. C'est l'article 111.0.3 qui se retrouve à remplacer l'article 111 du code actuel concernant la grève dans les services publics, deuxièmement, qui remplace le paragraphe b du code actuel par le texte qui est proposé là forcément, par voie de conséquence et par voie de concordance avec les articles 111.0.23, 111.11, 111.12, qui sont les articles dont on a d'ailleurs discuté en partie depuis ce matin et dont un a été cité d'ailleurs par la députée de L'Acadie, 111.12, tel que c'est formulé dans le présent projet de loi, l'article 2.

M. Rivest: Molière eût ajouté: Et voilà pourquoi votre fille est muette. Pour plus d'entendement, peut-être, pour les gens qui liront le journal des Débats, il s'agit manifestement d'articles de concordance. Il s'agit de façon concrète d'un alignement des dispositions du Code du travail portant sur l'embauche des briseurs de grève, sur les modifications apportées par le projet de loi no 72, de la manière suivante: Actuellement, M. le ministre, vous savez que l'interdiction d'embaucher des briseurs de grève lorsque, dans le cas d'un service public, une grève est conforme aux prédictions légales, aux prescriptions de légalité et d'avis précités à l'article 111, premier alinéa... Le projet de loi no 72, votre projet de loi, M. le ministre, abroge l'article 111 et inscrit les dispositions de légalité et d'avis à l'article 111.10.23 alors que celui-ci remplace 111 partout où il apparaît à l'article 109.1.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Voilà. Quant au député de Jean-Talon, il a parfaitement bien lu les notes qui lui ont été savamment préparées..

M. Dean: Tellement bien que ces remarques étaient inutiles.

M. Rivest: M. le Président, quant au deuxième paragraphe, actuellement vous savez, M. le ministre, que l'interdiction d'embaucher des briseurs de grève ne s'applique pas lorsque entre autres raisons, il existe une entente ou une liste sur les services essentiels. C'est le sous-paragraphe iii. Le projet de loi no 72, votre amendement, instaure un mécanisme de services publics désignés par décret qui deviennent sujets à la négociation des services essentiels et au dépôt d'entente et de liste sur de tels services. C'est pourquoi, M. le ministre, votre article 111.0.18 vient s'ajouter à l'article 111.10 qui prévoit de telles dispositions pour les services de santé, services sociaux au sous-paragraphe iii du paragraphe b de l'article 109.1.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non, M. le Président. J'aurais une question.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si c'est à ce moment, mais puisqu'on parle de l'interdiction d'embaucher des briseurs de grève, on sait que l'un des problèmes qui a été soulevé au moment des grèves dans le secteur de la santé, cela a été la question des bénévoles. D'ailleurs, le problème se pose

dans un établissement d'un autre ordre présentement. Je ne veux pas faire de la digression sur cela, mais le ministre sait à quoi je fais référence.

Est-ce que déjà cela a été prévu? Qu'est-ce qu'on prévoit pour ne pas créer de conflit à l'égard de ce problème?

M. Marois: M. le Président, si Mme la députée de L'Acadie le permet, on pourrait discuter de cette question au moment où on abordera l'article 111.0.12 dans le cadre du protocole. C'est vraiment là que cela se situe.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 2 est adopté.

L'article 3.

M. Marois: À l'article 3, dans la foulée des notes que nous a lues tout à l'heure le député de Jean-Talon qui lui ont été bien préparées par des gens compétents qui ont compris le projet de loi, par voie de conséquence, 109.2 du présent code qui introduisait une exemption à ce qu'a évoqué le député, qui se trouve modifiée, il nous faut ajuster l'article 109.2. On le modifie en prévoyant que dans le cas de violation par un syndicat, l'association accréditée ou les salariés qu'il représente, d'une entente, d'une liste, et forcément il faut prévoir le cas d'un décret - on y reviendra plus loin - qui est visé à divers sous-paragraphes de l'article 109.1... On s'est trouvé par l'article 2 qu'on vient d'adopter à exempter l'employeur de l'application de l'article 109.1. Donc, c'est l'exemption telle que prévue réajustée à la réalité nouvelle, telle que modifiée par l'article 2: l'employeur se trouve exempté de l'application de 109.1 dans la mesure où cela est nécessaire pour assurer le respect de l'entente, de la liste ou du décret qui a été violé. En d'autres termes, il s'agit de concordance de cette exemption pour tenir compte des amendements qui ont été apportés antérieurement.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon. Article 3, adopté?

M. Rivest: Article 3, adopté.

M. Marois: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 4, adopté?

M. Rivest: L'article 4, en ce qui concerne l'article 111... Prenons-le si vous le voulez, M. le ministre, par paragraphe, l'article 111 du Code du travail. Qu'arrivera-t-il des délais et des avis?

M. Marois: Du présent article?

M. Rivest: 111 est abrogé au complet, mais il y a plusieurs paragraphes.

M. Marois: On 'sait que dans le code il y a des délais d'avis qui varient. On a uniformisé ces délais, on le verra plus loin quand on y reviendra. Donc, les avis sont maintenus mais uniformisés, d'une part. D'autre part, évidemment, l'article 111 est abrogé par le présent paragraphe. Comme on le sait, en introduisant toute une série de dispositions qui concernent certains services publics, forcément, on se trouve à modifier substantiellement l'économie de l'article 111 et le pouvoir de suspendre 'qu'avait par cet article le gouvernement. On sait que c'était un droit passablement théorique, très difficile d'application parce que, tel qu'il était formulé, il impliquait pour l'essentiel la mise en place d'une commission d'enquête investie du pouvoir d'un conseil d'arbitrage avec obligation de formuler des recommandations, etc. Nos discussions ainsi que nos débats de deuxième lecture ont permis de voir que cela se trouvait modifié de façon substantielle pour faire en sorte qu'ultimement on se donne des articles de loi qui permettent de véritablement exercer la responsabilité gouvernementale dans le sens de ce que j'ai évoqué en disant qu'on gardait un oeil ouvert, vigilant.

M. Rivest: M. le ministre, il y a cependant - oui, je comprends, c'est l'ancien article 99 du Code du travail - une difficulté, et je demanderais au ministre d'y porter attention. C'est que l'article 111, en son dernier alinéa, parlait - le mécanisme de l'article 111 s'est avéré assez inefficace dans le passé - du domaine de l'éducation et le dernier alinéa de l'article 111 dit: Le présent article - c'est-à-dire la création d'une commission d'enquête au cas où la santé et la sécurité, etc. - s'applique à une grève appréhendée ou en cours qui compromet l'éducation d'un groupe d'élèves comme à une grève qui met en danger ou en péril la santé et la sécurité publique.

Or, M. le Président, la loi 72 exclut complètement le domaine de l'éducation de son champ d'application en vertu d'autres articles qu'on verra un peu plus loin. Si bien que dans le domaine de l'éducation, puisque le gouvernement amende l'article 111... Est-ce que j'interprète bien l'amendement du ministre, soit que désormais, pour ce qui est de l'éducation, le gouvernement n'aura plus aucune espèce de moyen à sa disposition, puisqu'il élimine l'article 111, au cas où une grève mettrait en danger l'année scolaire des enfants? Qu'arrivera-t-il...

M. Marois: Mais non, M. le Président: Le député de Jean-Talon sait fort bien,

comprend fort bien, je suis certain qu'il est équipé de notes suffisamment claires, complètes et bien vulgarisées lui permettant de maîtriser la portée du dernier paragraphe de cet article 111.

M. Rivest: M. le Président, il y a un peu de mépris dans votre dernière remarque. (17 heures)

M. Marois: Non, c'est dans un profond respect et en reconnaissant la compétence des recherchistes qui accompagnent toujours le député de Jean-Talon pour l'épauler dans ses travaux, dans l'examen de questions qui sont parfois complexes. Le député de Jean-Talon sait fort bien, blague à part, que le dernier paragraphe de l'article 111, de toute manière, ne donnait que le pouvoir général de l'article 111, c'est-à-dire forcément celui, à toutes fins utiles, pour le secteur de l'éducation. Les seuls pouvoirs étaient de constituer en vertu de l'article 111, une commission d'enquête afin de pouvoir obtenir une injonction de la Cour supérieure, injonction qui devait prendre fin, d'ailleurs, au plus tard, vingt jours après l'expiration d'un délai de 60 jours accordé à la commission d'enquête pour la production de ce rapport. En d'autres termes, il s'agissait là, somme toute, d'une espèce de ce que les Anglais appellent "cooling off", d'une période où on en profite pour calmer les esprits et qui servait le plus souvent à se rendre à la fin de l'année scolaire, quand cela pouvait permettre de régler le problème. On sait très bien ce qui est arrivé dans la pratique.

Je me permets de rappeler le cas de la Commission scolaire des Vieilles Forges où la dernière injonction a été prise en vertu de l'article 99; si ma mémoire est bonne, il n'y en a pas eu en vertu de l'article 111. La dernière qui a été prise l'a été en vertu de l'article 99; elle touchait justement les Vieilles Forges et cela n'a même pas été respecté. Donc, cela ne donnait vraiment pas un pouvoir au gouvernement. En d'autres termes, on ne change pas, fondamentalement, ce qui était déjà prévu dans les pouvoirs généraux d'intervention du gouvernement, en ce qui concerne le secteur de l'éducation, le cas échéant, via les pouvoirs généraux de l'Assemblée nationale.

M. Rivest: Donc, cela veut dire que... M. Marois: Cela veut dire que...

M. Rivest: C'est important, parce que cela a été commenté...

M. Marois: Cela veut dire que si tant est que le gouvernement devait évaluer qu'une année scolaire pouvait être mise en péril par des comportements, le gouvernement se verrait dans l'obligation, ultimement, après les opérations de médiation, de conciliation et le reste, de recourir à une loi spéciale.

Le Président (M. Gagnon): L'article 4...

Mme Lavoie-Roux: On n'est pas pour l'abolition du droit de grève dans le secteur de l'éducation.

M. Rivest: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): L'article 4 est adopté.

Article 5.

Mme Lavoie-Roux: II reste seulement les lois spéciales.

M. Rivest: Les lois spéciales, les lois matraques...

Le Président (M. Gagnon): Article 5, M. le ministre.

Mme Lavoie-Roux: Attendez d'avoir votre mère dans un centre d'accueil.

M. Rivest: ... comme on les appelait à une certaine époque.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Rivest: Le vocabulaire change, mais la réalité demeure.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, vous avez toujours la parole.

Mme Lavoie-Roux: Elle va finir par y aller.

M. Marois: À l'article 5. C'est l'article qui introduit toute une série de dispositions. D'abord, l'article 5 change le titre du présent Code du travail, chapitre V.I: Dispositions particulières applicables aux secteurs public et parapublic. On modifie en introduisant la notion de service public.

M. Rivest: Qui est-ce qui vous a dit cela, vos sous-ministres ou vos collaborateurs?

M. Marois: M. le Président, je ne répondrai même pas.

Le Président (M. Gagnon): L'article 5 est adopté.

À l'article 6. L'article 6 comprend plusieurs...

M. Marois: Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): ... comprend

plusieurs...

Conseil des services essentiels

M. Marois: L'article 6 introduit dans ce nouveau chapitre, toute une série de nouvelles dispositions concernant le Conseil des services essentiels dans une section I et, dans une section II, la notion des services publics, ce qui est complètement nouveau et a été évoqué, d'ailleurs, dans le titre. Une section III concerne les secteurs public et parapublic et le reste.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 6 est adopté.

M. Rivest: Mon Dieu, M. le Président, que vous êtes optimiste. Est-ce que le ministre conviendrait qu'on prenne l'article 6, évidemment, qui compte un nombre assez important d'articles qu'on y aille avec la formulation 111.0.1? D'accord?

Alors, M. le ministre, là-dessus, 111.0.1, c'est l'idée d'un Conseil des services essentiels. Comme on le sait, il a déjà existé un Conseil des services de santé ou des services sociaux dans le cadre de l'ancienne loi; bien sûr, on le verra dans les articles qui suivent. Le ministre s'est référé au fait que le mandat de ce conseil est très largement élargi, si je peux m'exprimer ainsi, dans la mesure où il regroupe l'ensemble des secteurs public et parapublic et de ce qu'on vient d'appeler les services publics. La nature même de ce conseil, étant donné le caractère permanent qu'on lui confère, est évidemment un sujet qu'il faut apprécier, que la commission doit apprécier, comme le mode de nomination de ce conseil et les pouvoirs de ce conseil.

Ma première question relève d'une certaine inquiétude que nous avons; on peut la prendre de différentes façons. L'une des préoccupations qui m'est venue à ce sujet concerne l'idée d'un conseil permanent: est-ce que c'est une bonne chose, une mauvaise chose, est-ce au fond la meilleure chose ou la moins pire ou je ne sais trop? Dans le domaine de la santé et des services sociaux, l'une des questions qui nous est venue à l'esprit et que d'aucuns nous ont suggérée: pour connaître au fond, pour essayer de favoriser les ententes au niveau des établissements avec des gens qui connaissent bien le réseau de la santé et des services sociaux, est-ce que le ministre a pensé - je comprends que c'est un conseil qui va embrasser un peu tout - étant donné la nature particulière du milieu des services de santé et des services sociaux, si les CRSSS ne pourraient pas faire fonction - j'essaie de voir le cheminement qu'a suivi le ministre, en essayant d'échapper le moins de choses possibles - si les CRSSS ne pourraient pas, effectivement, remplir ou n'auraient pas pu remplir efficacement le râle que l'on confie, de par la loi, à un conseil, pour ce qui est de cela? Est-ce qu'il n'y aurait pas une expertise là? Est-ce que vous avez étudié cette possibilité, pour le domaine de la santé et des services sociaux, de donner ce mandat, dans la mesure, M. le ministre, où les gens qui travaillent et qui oeuvrent, qui ont d'autres types de responsabilités, bien sûr, dans le sens de regarder l'évolution des institutions pour une région donnée, mais ils acquièrent, de ce fait, je pense, une connaissance très précise du quotidien, du vécu et des personnes autant de la direction que des employés, au niveau de chacun des établissements et connaissent les spécificités de l'établissement, les caractères de la région? Est-ce que cette hypothèse, au lieu de donner un mandat un peu à tous azimuts à un grand conseil, a été examinée d'abord et, deuxièmement, quels sont les inconvénients, si tant est que cela a été examiné, qui vous sont apparus pour ne pas demander aux CRSSS d'aller là-dedans?

Je vous signale cependant, M. le ministre, qu'à l'article - avec cette numérotation très curieuse - 111.10.6 - en tout cas, je vous pose la question parce que j'ai constaté que ce n'est pas... - déjà, vous reconnaissez, je pense, un certain rôle aux CRSSS, puisque l'article 111.10.6 dit: "Un Conseil régional de la santé et des services sociaux institué en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, doit, lorsqu'il reçoit une plainte relative à des services essentiels au sens du présent chapitre, en informer immédiatement le Conseil des services essentiels". Donc, c'est lorsqu'il y a un problème. Je me demandais -quant à l'article 111.10.6: "...lorsqu'il reçoit une plainte... que les services essentiels" cela, c'est ce qui est dans la loi - si l'on avait pensé avoir, si vous avez eu des contacts avec votre collègue des Affaires sociales - je ne sais pas d'ailleurs ce que ma collègue de L'Acadie en pense - mais je vous pose la question comme cela. Est-ce que vous comprenez le sens de ma question sur le rôle des CRSSS? Avez-vous pensé à cette formule? Cela aurait permis de... Au lieu de créer une structure pour laquelle tout le monde est en faveur, mais une structure qui sera permanente et Dieu sait que, enfin, le caractère permanent risque d'être un peu altéré, parce qu'on va surtout travailler dans une période - il va y avoir des gens qui vont travailler là-dedans - de compression budgétaire. Est-ce qu'il n'y aurait pas eu une voie économique, pratique, en confiant aux CRSSS cette responsabilité de favoriser les ententes, d'examiner les listes, de faire rapport au ministre dans le réseau de santé et des services sociaux?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Oui, M. le Président, on a examiné cette hypothèse-là, et on pense que, déjà, en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, il y a déjà des missions, des mandats propres aux CRSSS qui leur sont confiés par la loi en question, l'émission des mandats qui ont déjà une portée suffisamment large et qui ne concernent pas comme tels, comme préoccupation première et principale, le domaine des relations du travail, d'une part, et plus particulièrement en période de conflit, de négociation, cette préoccupation qu'il est important de faire ressortir comme une préoccupation première, unique, celle d'assurer les services essentiels. Donc, on n'a pas retenu cette hypothèse, d'autant plus que, notamment, et comme disait l'autre, pas exclusivement les CRSSS, ça fait partie de leur mission et de leur mandat, et ils doivent se préoccuper de la qualité des services d'une façon générale et en tout temps.

Ceci étant dit cependant, on aura noté que nous n'avons pas proposé de remettre sur pied un conseil d'information qui existait autrefois; c'est donc une structure qui est disparue, qui est abolie; on a pensé qu'au contraire il valait mieux regrouper en un seul centre, mais enfin, comprenons-nous, en un seul centre qui aurait forcément aussi des antennes régionales, c'est prévu par le projet de loi, le pouvoir général d'information du public également et plus particulièrement dans les cas où il s'agit d'évaluer la suffisance ou l'insuffisance de ce que pourrait donner une entente, une liste ou une situation donnée dans un établissement donné. C'est pour cela qu'on en est revenu à cette hypothèse de base qui avait été évoquée durant nos travaux en commission parlementaire.

On a voulu lui donner un caractère de permanence pour assurer une continuité et faire en sorte que la cueillette des informations des expertises puisse donner lieu dans les périodes qui se situent entre des périodes de négociation à des évaluations beaucoup plus serrées, beaucoup plus raffinées, au maintien des contacts avec les parties, au raffinement des protocoles-cadres, et le reste, en d'autres termes, que ce soit un mécanisme qui ne travaillera pas avec la même intensité qu'en période de négociation, mais qui pourrait permettre encore une fois, en capitalisant sur l'acquis, de faciliter la poursuite d'un cheminement qui nous reste à faire, comme je l'évoquais dans mon intervention de deuxième lecture, de faciliter, dis-je, la poursuite de ce long cheminement.

Cependant, il nous est apparu extrêmement important, à la lumière des témoignages entendus, des contacts qu'on a eus et d'un examen aussi que j'ai eu l'occasion de faire avec mon collègue des

Affaires sociales, qu'autant il ne fallait pas confondre la vocation des deux organismes, c'est-à-dire les CRSSS d'une part, et le Conseil des services essentiels, autant il semblait extrêmement important d'assurer un relais serré, étroit entre les deux, et que ce relais soit prévu par la loi elle-même, d'où l'article 111.10.6 qu'a évoqué avec pertinence - il lui arrive souvent d'ailleurs d'évoquer des choses avec pertinence - le député de Jean-Talon.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre devrait savoir que le député de Jean-Talon est un homme très positif.

M. Marois: Ceci étant dit, pour terminer...

M. Rivest: Je m'excuse auprès du ministre, j'ai perdu le fil, parce qu'on m'a lancé dans la campagne du financement du Parti libéral par inadvertance.

Le Président (M. Lavigne): Le compliment de la fin.

M. Rivest: Est-ce que...

M. Marois: C'est bien connu qu'il semble se poser un certain nombre de problèmes.

M. Rivest: Est-ce que vous pourriez reprendre juste la dernière partie de ce que vous avez... Au moment où je vous ai quittés, vous étiez en train de me faire un compliment. (17 h 15)

M. Marois: Voilà, je le réitère. Ceci étant dit, poursuivant, il arrive dans les faits que des citoyens portent plainte et sont habitués à avoir des contacts avec les CRSSS.

Or, on a constaté, et cela ressort de témoignages entendus - le député évoquait ce matin, les consultations qui ont été faites avant d'aboutir au projet de loi - il est apparu que, durant la dernière ronde de négociation, les citoyens portaient plainte devant le CRSSS et que ces plaintes n'étaient pas toujours automatiquement et rapidement portées à la connaissance du Conseil des services essentiels. Donc, on a voulu s'assurer qu'il y avait là un relais, avec une base juridique prévue, en faisant une obligation de retransmettre les plaintes des citoyens au Conseil des services essentiels, que ce soit à son antenne régionale ou à son bureau national, pour faire en sorte qu'aucune plainte ne reste là pendant une certaine période sans qu'il y ait intervention pertinente, requise et prévue par la loi. Sans compter que ce relais, ayant une base obligatoire, n'exclura pas forcément que se développe avec le temps l'échange, la

transmission d'informations sur l'évaluation des constats qui peuvent être faits concernant tel ou tel établissement donné.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Ma collègue aura probablement des questions, mais il y a l'autre aspect sur lequel je voudrais entendre le ministre. Je pense bien que le ministre ne me tiendra pas rigueur de passer les éléments, parce qu'on ne peut pas parler simplement d'un mot, il faut évoquer d'autres aspects du conseil.

M. Marois: Ce que le député est en train de nous proposer en quelque sorte, M. le Président, c'est un examen de l'ensemble du bloc des articles de la section I, quitte par la suite à adopter l'ensemble de ces articles.

M. Rivest: M. le Président, sous réserve de certaines questions spécifiques à l'un ou l'autre des éléments.

M. Marois: C'est sûr.

M. Rivest: Deuxièmement, vous savez que lors des audiences, M. le ministre, au début de septembre, un des mémoires qui avait eu un impact assez considérable et qui était très bien fait était celui du Conseil du patronat qui avait insisté sur la création...

M. Marois: Une régie.

M. Rivest: ... d'une régie, enfin, un conseil, mais une régie permanente des services publics formée de spécialistes dont la compétence serait confirmée dans le domaine.

Deuxièmement, ce qui était un aspect très important, est que cette régie devait pouvoir prendre les moyens pour que les services décrits comme essentiels soient effectivement maintenus en tout temps.

Je vais vous lire un court extrait du mémoire du Conseil du patronat: Cela suppose que la loi donne aux décisions de la régie une autorité équivalente à celle d'un ordre de la cour et prévoie des sanctions assez graves pour décourager toute volonté de passer outre aux décisions de la régie. Dans la mesure où les services essentiels décrits par la régie seraient assurés, le droit grève ou le lock-out s'exercerait dans tous les secteurs, etc.

Enfin, c'était tout le problème des pouvoirs effectifs d'un conseil ou d'une régie. Laissons tomber les termes pour les fins de la discussion. Je voudrais savoir les raisons qu'on a évoquées - je pense que le ministre a commencé à répondre à cette question dans l'échange préliminaire qu'on a eu - qui ont amené le gouvernement à décider qu'effectivement le conseil du maintien des services essentiels ou ledit Conseil des services essentiels n'aurait aucun pouvoir d'ordre décisionnel, quel qu'il soit.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Je ferais une nuance à la dernière affirmation du député de Jean-Talon, que le conseil n'aurait aucun pouvoir décisionnel, quel qu'il soit. Quand le conseil, pour relever un simple exemple, dans les pouvoirs qui lui sont conférés décide, après évaluation, avant que soit acquis le droit de grève, après être intervenu auprès des parties pour leur signaler que l'entente ou la liste, peu importe, est nettement insuffisante, décide de retransmettre un rapport au ministre. Forcément, on voit comment la dynamique va jouer à partir du moment où le conseil, par ses représentants, intervient auprès des parties pour leur indiquer que c'est insuffisant ce qu'il a entre les mains. Déjà les parties savent très bien qu'un processus risque de s'enclencher avant que soit acquis le droit... oui, bien sûr, risque... Tant mieux, tant mieux si cela -oui, cela déclenche des choses - a pour effet, les parties prenant conscience...

M. Rivest: C'est fortement incitatif.

M. Marois: ... de ce que mentionne le conseil, reconnaissant la pertinence de ce que souligne le conseil, que des ajustements se font et que cela règle le problème. Mais si tant est que cela n'est pas le cas, le conseil, et c'est sa décision, retransmet publiquement au ministre un rapport indiquant... C'est un pouvoir décisionnel qu'il a entre les mains, il faut dire... Si on reprenait coin par coin, angle par angle, chacun des éléments de la proposition qui était contenue dans le mémoire du Conseil du patronat, je pense qu'on admettra que des morceaux importants ont été retenus. Ce qu'on n'a pas retenu fondamentalement, c'était ce pouvoir quasi judiciaire qu'on nous recommandait de donner au conseil. Je pourrais énumérer une batterie de raisons, je vais n'en mentionner que deux.

La première c'est, compte tenu des implications, au bout du compte, des décisions qui doivent être prises, compte tenu du problème dont on parle, il nous a semblé que ce genre de décision revient -compte tenu que c'est lui qui a assumé la responsabilité de veiller à l'intérêt public -véritablement au gouvernement, d'une part.

D'autre part, pour une autre raison, plus juridique celle-là mais qui n'est pas sans avoir des conséquences quant au fond qui était mentionné ce matin, à partir du moment où on donne de tels pouvoirs quasi

judiciaires à un tel organisme, là se posent tous les problèmes qu'on a évoqués ce matin: le pouvoir de surveillance de tribunaux supérieurs, notamment la Cour supérieure, et le genre de problèmes juridiques dans lesquels cela peut nous entraîner.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Et ce faisant, M. le ministre, vous savez qu'étant donné l'amplitude du projet de loi, c'est-à-dire la variété de domaines, services publics, secteurs public et parapublic, qui est dans le champ du mandat, la plus récente proposition au sujet de la nature d'un tel organisme, dans la détermination des services essentiels, cela a été les recommandations qui ont été formulées, qui ont été adressées au ministre par une personne extrêmement compétente dans le domaine des relations du travail, à qui le ministre a confié un mandat au sujet de la Commission de transport de Montréal, le commissaire Jutras. Or, Me Jutras, évidemment, parlait dans le cadre du transport en commun, mais ses recommandations débordaient largement le problème. Surtout au chapitre de ses recommandations, je me demande comment le ministre, je comprends ses raisons... M. Jutras recommande au ministre, d'une façon toute à fait récente, qu'aucune grève ou aucun lock-out ne puisse être déclaré avant que les services essentiels ne soient définis au préalable par décision d'une personne ou d'un organisme approprié, il mentionne un tribunal, une régie de services essentiels ou un commissaire aux services essentiels et qu'il puisse y avoir appel de cette décision à la Cour d'appel. Sauf qu'il devrait être prévu que cette décision s'applique et est exécutoire nonobstant appel et tant qu'elle n'est pas renversée, ce qui, entre parenthèses, dispose des effets négatifs sur la fourniture des soins du processus de judiciarisation, dans la mesure où on préciserait que la décision est exécutoire malgré appel, mais je veux savoir ceci. Est-ce que le ministre, face à cette recommandation précise du commissaire Jutras pour les fins du transport en commun, bien sûr, mais qui peut s'étendre, ça veut dire qu'il met complètement de côté cette recommandation du rapport Jutras?

M. Marois: Non, ce n'est pas exact. Je pense bien que le député a pris connaissance de l'article 111.0.16 qui vient introduire toute une série de services publics, notamment les transports en commun; il a certainement lu très attentivement l'article 27 du présent projet de loi, qui recoupe l'économie générale d'un certain nombre de recommandations du rapport Jutras, la clé étant fondamentalement qu'il soit prévu que des services essentiels seront donnés.

M. Rivest: Ce n'est pas là ma question. Avec votre projet de loi, parce que votre projet de loi, je suis très conscient qu'il va s'appliquer à la Commission de transport de Montréal, la recommandation du commissaire Jutras est mise de côté. Il n'y aura pas une personne, un organisme approprié qui va décider des services essentiels. Le commissaire Jutras propose qu'avant que le droit de grève soit acquis, ce soit par la décision d'une personne et d'un organisme, alors que tout votre projet de loi, ce n'est pas cela. Votre projet de loi crée un conseil qui avise, favorise des ententes. C'est le gouvernement qui, finalement, décide d'agir. Ce n'est pas du tout le sens des recommandations du Conseil du patronat qui parle d'une régie des services essentiels non plus que d'une recommandation spécifique du commissaire Jutras. Cette recommandation avec votre projet de loi même avec l'article 27, qui est un article au fond pour attrapper le conflit de la commission de transport, ça ne change rien à la réalité que cette recommandation spécifique du commissaire Jutras est mise de côté.

M. Marois: C'est exact, dans le sens que je n'ai pas retenu la recommandation qui ferait et qui viserait à confier à une personne ou à une régie le pouvoir de prendre des décisions qui, à notre avis, en fin de compte, doivent, si tant est que ça doit s'exercer, revenir entre les mains du gouvernement qui a la responsabilité de l'intérêt public.

Cela dit, dans le projet de loi tel qu'il est formulé, il y a l'article 27, le député l'a noté. Il y a bien sûr aussi l'article 110.0.16. Il est aussi prévu dans l'ensemble des articles qui concernent le rôle, les pouvoirs, les devoirs du conseil, la possibilité que le conseil mette à contribution, cela va de soi, compte tenu de la nature des problèmes qui peuvent se poser, qui sont bien différents quand on parle d'établissements de santé ou du transport en commun, pour l'aider à procéder à ses évaluations, un ou des experts au besoin pour examiner telle ou telle situation donnée.

J'ai retenu fondamentalement cette idée que dans le transport en commun, le cas échéant, les services essentiels, on devait se donner les moyens de faire en sorte qu'ils puissent être assurés.

M. Rivest: Une autre question. Dans le domaine des relations du travail, dans les secteurs public et parapublic, il existe, j'en suis au niveau des structures, je vois que d'après les réponses du ministre, les avenues, il semble jusqu'à maintenant les avoir explorées et j'en suis fort aise, déjà un bureau de recherche sur la rémunération qui

s'acquitte, dans tout l'appareillage, des négociations. Ce bureau est permanent, il s'occupe de faire des recherches d'ordre statistique. Il va y avoir un Conseil des services essentiels et il y a d'autres personnes, après cela, on parle souvent de négociations permanentes dans le domaine, c'est souvent une idée qui est évoquée à gauche et à droite pour éviter que tout le monde se précipite à la fin pour arriver avec quelque chose. Je ne veux pas déborder le cadre du projet de loi, mais je trouve qu'il va commencer à y avoir pas mal de gens qui vont se mêler de cela en termes de structure gouvernementale. (17 h 30)

Au fond, c'est toujours la même chose qui est en cause, c'est la négociation d'une convention collective. Je vous ai parlé des structures du réseau des affaires sociales et il y en a peut-être d'autres. À un moment donné, est-ce que vous avez une vision claire, précise pour savoir comment la structure que vous créez va s'insérer dans l'ensemble du paysage des négociations des secteurs public et parapublic?

M. Marois: M. le Président, pour l'instant, me réservant, le cas échéant, des commentaires additionnels, le député dit: II commence à y avoir pas mal de monde, faisant notamment allusion à un certain nombre de structures qu'il a mentionnées. Je me permets de lui rappeler que le présent projet de loi, si on parle de structures, en fait disparaître une.

M. Rivest: Oui. M. Marois: Oui.

M. Rivest: Je serais tenté de vous citer les phrases absolument remarquables de votre collègue, l'ancien ministre du Travail, lorsqu'il créa le bureau de l'information et toutes les ambitions qu'il avait pour ce bureau d'information dans l'ancienne loi; cela s'appelait le Bureau d'information sur les négociations. Je sais que vous en faites disparaître une. Vous créez des structures et on se demande souvent où cela va. Je vous demande de baliser cela, de me dire: Oui, il y a bien des gens. Voici celui sur les services essentiels. Je vous ai parlé de la structure au début des négociations. Il y a tellement de monde dans cela. Il me semble qu'il y aurait une structure rationnelle à donner sur l'approche du gouvernement avec ses partenaires, sur le gouvernement en ce qui concerne ses responsabilités au niveau des services essentiels, sur le gouvernement relativement à la possibilité de mener une négociation continuelle, où on s'entendrait au moins sur les chiffres, sur le Bureau de la recherche sur la rémunération. Tout cela, c'est lié et je voudrais sentir une espèce de rationalité ou de logique dans l'action du gouvernement en disant: On a tel ou tel morceau, on met ceci là, on met cela ici, il va y avoir tel nombre qui va aller là. Tout le monde s'exprime sur tout, ne serait-ce que, par exemple, le négociateur en chef du gouvernement qui, actuellement, négocie. Il est un excellent négociateur qui émet des opinions sur le droit de grève, sur les services essentiels. C'est toujours le gouvernement qui parle. C'est cela que je veux dire. Est-ce que vous vous êtes posé cette question en créant cette structure?

M. Marois: Si le député, à 17 h 35, veut engager et ouvrir une large discussion sur des structures qu'il connaît aussi bien que moi, sachant pertinemment bien les personnes impliquées, le rôle, les responsabilités, les mandats de ces diverses structures, je veux bien écouter et on peut bien en amorcer une autre à ce moment de nos travaux, si tant est que le député sent le besoin de faire une pause dans l'examen des articles, article par article, et revenir à un débat d'ordre plus général. Je veux bien l'écouter très attentivement.

S'il veut plutôt vraiment scruter, examiner l'ensemble et les détails du Conseil des services essentiels proposé, tel que formulé, je suis prêt à le faire. Mais que le député m'indique dans quelle voie il veut se diriger. Un conseil qui est créé...

M. Rivest: L'article 111.0.1, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.1. Adopté.

M. Rivest: L'article 111.0.2. "Le conseil se compose de huit membres dont un président." Huit, pourquoi pas cinq? Pourquoi pas quinze? On passe de sept à huit. Pourquoi? D'où vient ce nombre? Je sais que c'est lié à une question de représentativité sur laquelle je m'inscris totalement en faux parce que j'indique tout de suite, si vous le voulez, M. le ministre, qu'on extrapole quelque peu. Que les membres du conseil soient nommés par le gouvernement, sur cela, je vous en dirai un mot, mais je suis complètement contre le fait que le Conseil des services essentiels soit une espèce de... qu'on réintroduise, au niveau du Conseil des services essentiels, le rapport de forces qui existe au niveau de la négociation, c'est-à-dire des représentants de la partie syndicale et de la partie patronale. Cela constitue - on peut étudier ces deux questions en même temps, si vous voulez -un changement par rapport à la loi 59, où des gens étaient nommés par le juge en chef du tribunal. Est-ce que c'est prouvé que le mode de nomination que prévoyait la loi antérieure était mauvais, s'est avéré

inefficace? Pourquoi cette augmentation du nombre? Pourquoi le chiffre 7 ou 8?

Deuxièmement, pourquoi avoir complètement modifié la structure interne du conseil? Notre prétention - et on l'a dit à plusieurs reprises lors des audiences - n'est absolument pas... La question des services essentiels n'a qu'une finalité: celle des bénéficiaires, des usagers. Ce faisant, nous avons toujours dit - je pense que le ministre recherche certainement cet objectif également - qu'il faut à tout prix éviter que la question des services essentiels donne prise à un rapport de forces entre les deux parties qui sont nécessairement engagées dans une négociation qui implique le jeu d'un rapport de forces. Si le ministre est d'accord avec cela, en quoi la procédure prévue dans la loi antérieure, où on demandait au juge en chef du Tribunal du travail de nommer les membres, était-elle mauvaise? Pourquoi est-ce le gouvernement? Vous voyez un peu le cadre des questions que j'ai là-dessus.

M. Marois: Je vois, je vois le cadre et les questions. Comme l'a évoqué le député, on passe de 7 à 8. Ce n'est pas là qu'est le problème. On a modifié la composition - là il y a un élément clef - pour y introduire des gens qui y seraient nommés. Je parle d'un bloc de quatre, y compris le président, ayant comme préoccupation fondamentale -je l'avais dit dans le discours de deuxième lecture - d'introduire des mécanismes permettant d'associer aussi les citoyens à l'ensemble du processus et de la démarche. Cela est complètement nouveau. Cela m'apparaît extrêmement important.

Deuxièmement, nous nous sommes posé effectivement la question, à savoir si, partant de là, il fallait maintenir deux choses: ce qui existait dans l'ancien conseil, c'est-à-dire des représentants, au sens strict de ce que ce mot veut dire, du monde syndical et du monde patronal. C'est comme cela qu'était composé le dernier conseil choisi par le Tribunal du travail dans un cadre qui implique forcément, par le juge en chef, un contexte plus judiciaire de relations du travail, etc.

Nous avons opté pour - j'attire l'attention du député sur la formulation - des personnes choisies après consultation des associations de salariés. En d'autres termes, on introduit la notion de personnes issues de, et ce ne sont pas juste des mots, ce n'est pas "représentants de", dans le sens: Voici ma liste de ceux que j'aimerais bien avoir, avec forcément les difficultés, les tractations pour arriver à cette composition.

On introduit la notion "issu de". Deux et deux. Pourquoi maintenant les deux et deux, "un issu de privé"? Un bon exemple, pour illustrer ma pensée, ce que je veux dire par " issu de privé". Par exemple, l'adjoint parlementaire, le député de Prévost, imaginons un instant qu'il ne serait pas député, ni adjoint parlementaire et que depuis un certain nombre d'années il aurait quitté le milieu syndical, il est "issu de". La même chose, forcément aussi, en ce qui concerne les services publics. C'est la même chose du côté de la partie patronale. Pourquoi avons-nous maintenu cela? On s'est posé comme vous la question. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que ce soit essentiellement et uniquement des gens représentant les citoyens? On est obligé, c'est la conclusion à laquelle on en est venu, d'introduire des représentants du public, c'est important, c'est nouveau et forcément c'est un bloc de quatre avec le vote prépondérant du président.

Deuxièmement, il nous a semblé important de maintenir deux et deux "issus de", donc avec déjà des nuances importantes par rapport à ce qui se passait autrefois, selon l'ancienne composition pour, d'une part...

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, M. le ministre. Quelle est la différence avec l'ancienne composition dites-vous?

M. Marois: Fondamentalement, dans les faits...

Mme Lavoie-Roux: C'était aussi après les consultations.

M. Marois: Bien sûr, mais dans les faits, on sait très bien, - il y a des écrits là-dessus, il y a eu des analyses de faites, il y a eu des rapports de faits - que, finalement, à toutes fins utiles, cela a été des représentants de.

Pour maintenir, parce que c'est important, il y a les citoyens, ce sont eux qui sont la préoccupation première. Il y a aussi qu'on est dans un contexte de négociation, dans un contexte de relations du travail et on a pensé qu'il était important de maintenir, par le biais de gens "issus de", qui ont acquis une certaine expérience du milieu, qui peuvent avoir aussi certains préjugés favorables... Mais ayant pris un certain recul pour maintenir un pas de relations purement humaines aussi, qui sont extrêmement importantes dans ce genre d'opération, l'expérience pratique l'a démontré. Voilà, M. le Président.

M. Rivest: Juste une précision. Quand le ministre dit que dans l'ancien conseil, ils étaient représentants de, je n'ai malheureusement pas le texte de l'ancienne loi...

M. Marois: Ce n'est pas par le texte, c'est par la mécanique et dans les faits...

M. Rivest: Je lis la loi et c'est marqué

dans l'ancienne loi, si le ministre me le permet...

M. Marois: Oui.

M. Rivest: "Ce conseil est formé d'au moins cinq membres et d'au plus sept membres nommés par le juge en chef du tribunal, après consultation, etc." Alors, nulle part il n'y avait, en tout cas dans le texte de la loi, à moins que mon texte ne soit incomplet, l'idée qu'ils étaient "représentants de". Je dirais au ministre que même la distinction qu'il a faite avec "issu de"... Je pense que ce projet de loi n'a rien à voir avec les négociations; en fait j'espère qu'il n'a rien à voir avec un contexte de négociation ou un contexte de rapport de forces. Dans ce projet de loi, d'après la lecture que j'en ai faite, ce sont des services essentiels et cela veut dire bénéficiaires. Je voudrais - en tout cas c'est notre conviction - que ce soient des gens qui soient les meilleurs possible qui jugent de cela sans être liés par leur carrière, par leur amitié ou par leur contact, enfin des relations humaines normales, qu'ils ne soient issus d'aucun milieu particulier, que ce soient des gens qui n'aient aucune espèce d'attache au milieu particulier de la négociation.

M. Marois: Je laisserai le député réfléchir, durant cette période de répit, de relais d'ici 20 heures, sur cette notion. On est tous issus de quelque chose, à l'exception, semble-t-il, de cette notion des...

M. Rivest: M. le Président, je voudrais qu'ils soient issus de nulle part, de quelque façon que ce soit, liée à la négociation d'une convention collective. Moi, M. le Président, je n'ai jamais négocié une convention collective, ni en tant que syndiqué, ni en tant que patron. Alors, je me propose comme candidat et je laisse le ministre, pendant l'heure du lunch, réfléchir à cela. Je voudrais également que le ministre réfléchisse pendant l'heure du lunch au fait que nous nous opposons également à ce que le gouvernement désigne ces personnes.

Le Président (M. Gagnon): À ce moment-ci, je demande la permission à la commission pour suspendre les travaux jusqu'à 20 heures. Les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

(Reprise de la séance à 20 h 19)

Le Président (M. Rochefort): La commission permanente élue du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu reprend ses travaux aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. À l'ajournement de nos travaux, nous en étions à l'étude de l'article 6 au paragraphe 111.0.2. M. le ministre.

M. Marois: Non, nous en étions dans le cadre de questions et de commentaires portant sur l'ensemble des articles de la section I pour, par la suite, procéder systématiquement, toutes choses étant dites alors, à l'adoption à la file.

Le Président (M. Rochefort): On m'avait informé que vous aviez commencé à adopter les paragraphes, puisque le premier avait été adopté.

M. Marois: Oui, les paragraphes 111.0.1 et 111.0.2.

Le Président (M. Rochefort): Nous pouvons donc aborder immédiatement l'article 111.0.2.

M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Voici une question que ma collègue de L'Acadie va peut-être développer, c'est-à-dire exprimer au ministre notre objection à une chose. Les gens du conseil sont nommés par le gouvernement, contrairement à la loi du prédécesseur du ministre, l'actuel ministre des Affaires sociales qui avait confié cette responsabilité au juge en chef du Tribunal du travail. Je demande au ministre...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon, je m'excuse, je ne veux pas vous interrompre inutilement. Toutefois, je crois que c'est à l'article 111.0.3.

M. Rivest: On s'est entendu, M. le Président - parce que c'est le conseil, au fond - pour jouer un peu dans les numéros.

Le Président (M. Rochefort): Alors, je vous laisse jouer.

M. Rivest: On vous remercie de votre très grande libéralité, M. le Président. Moins vous vous en mêlerez, M. le Président, mieux cela ira. Ce sont les conventions...

Le Président (M. Rochefort): De toute façon, il n'en tient qu'à vous.

M. Rivest: Non, remarquez que ce n'est pas juste à votre endroit. C'est toujours la convention qu'on a avec le député de Marie-Victorin. On les traite très bien les présidents, vous allez voir, vous n'aurez jamais à intervenir.

Le Président (M. Rochefort): Je vous écoute.

M. Rivest: Vous n'aurez jamais à intervenir, vous avez compris.

Le Président (M. Rochefort): J'ai dit que je vous écoute.

M. Rivest: Pourquoi le ministre a-t-il modifié cet article? Quels sont les problèmes qui l'ont amené à changer d'avis? D'autant plus que je signale au ministre que le gouvernement n'est pas dans ce domaine un être de raison. D'ailleurs, le gouvernement actuel l'est très rarement. C'est une partie à la négociation et aux problèmes. Je me demande si, la partie syndicale en vue de favoriser les ententes et tout cela, ce n'est pas une excellente chose, une excellente trouvaille que l'ancien ministre du Travail avait eue lorsqu'il avait confié cette responsabilité au juge en chef du Tribunal du travail. Qu'est-ce qui a motivé le changement? Qu'est-ce que vous répondez -pour la crédibilité même du conseil, je pense que c'est essentiel dans la loi, pour l'application de la loi - au fait que le gouvernement nomme des gens?

M. Marois: Oui, M. le Président, blague à part, indépendamment des jeux du député tous azimuts, je comprends que le député de Jean-Talon sent le besoin de se détendre un peu; il était particulièrement nerveux depuis ce matin. C'est normal!

Ceci étant dit...

M. Rivest: Là, M. le Président, il y a une question de règlement parce que votre collègue, qui vous a précédé, a réglé cette question; il a établi très clairement que c'était le ministre qui était nerveux parce que son projet de loi a été décrié par tout le monde.

Le Président (M. Rochefort): Je vais prendre cette question en délibéré...

M. Rivest: Le président a déjà décidé de cette question.

Mme Lavoie-Roux: On a rarement vu une telle unanimité à l'endroit d'un projet de loi, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Je me référerai à l'intervention de mon prédécesseur et je rendrai une décision d'ici la fin de la séance. M. le ministre, vous pouvez poursuivre.

M. Marois: Je poursuis, M. le Président, sans interrompre mes collègues de l'autre côté de la table, très respectueux de leur droit de parole comme on l'a été depuis le début.

Effectivement, sur la base de l'économie, de la conception de la loi 59, il pouvait s'avérer intéressant, dans la mesure où le conseil était essentiellement composé de représentants des parties patronales-syndicales, de le faire par le biais du Tribunal du travail qui, comme on le sait, a une vocation précise en vertu du Code du travail.

Ce dont on parle dans l'économie générale et les objectifs de la présente loi, c'est d'une chose d'une nature bien différente. D'une part, le conseil n'est plus temporaire; l'ancien conseil, je me permets de le rappeler, était temporaire. Nous introduisons la notion d'une permanence du conseil. D'autre part, la composition est substantiellement modifiée puisqu'on y introduit des représentants du public.

Également, j'ai expliqué l'économie, l'objectif, la façon dont nous voyons les choses, de telle sorte que, quant au bloc des deux et deux personnes nommées après consultation, mais étant dans notre esprit issues de, c'est-à-dire ayant tout de même pris un certain recul, j'ai expliqué pourquoi, dans quel esprit cela avait été conçu et en vue d'atteindre quels objectifs.

Partant de tout ça et des objectifs de la loi et depuis le temps que les uns et les autres disent, pensent et croient que le gouvernement se doit d'assumer pleinement les responsabilités puisqu'il est ultimement chargé de l'intérêt public, dans cette perspective, il nous semble bien clair qu'il revient au gouvernement de faire ces choix.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Mon collègue de Jean-Talon n'a pas fait de proposition formelle, il interrogeait le ministre sur le motif pour lequel les nominations des membres du conseil étaient faites par le gouvernement plutôt que par le juge en chef du Tribunal du travail, comme c'était le cas dans la loi 59. S'il devait en faire une proposition formelle, je l'appuierais certainement.

M. Rivest: J'en fais une proposition formelle, madame.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Je vais certainement l'appuyer parce qu'on sait, par expérience - je peux parler d'une façon plus pertinente de la dernière ronde de négociations, non pas que je ne veuille pas parler des autres, mais je n'y étais pas - on sait pertinemment que le gouvernement, comme le soulignait le député de Jean-Talon, est le principal intéressé dans cette

négociation. Il doit obtenir des rapports d'un conseil qui devrait être le plus neutre possible, qui devrait être le plus détaché possible du gouvernement. L'objectif de ce conseil, c'est vrai qu'il est de conseiller le gouvernement, si on veut, mais sa fonction première, c'est vraiment de voir à ce que la population hospitalisée soit protégée. C'est vraiment cela, le premier objectif - en tout cas, à mes yeux - du conseil sur le maintien des services essentiels, soit qu'il aide à définir les services ou à les mieux définir. Son deuxième rôle, c'est d'être le gardien ou le protecteur de la santé publique et, plus particulièrement, de celle des bénéficiaires. Un conseil dont les membres sont nommés par le gouvernement, même si c'est après consultation - là, je ne voudrais pas irriter le ministre, je sais qu'il a parfois l'épiderme un peu sensible... Que disait le...

M. Rivest: Soupe au lait.

Mme Lavoie-Roux: ...malheureusement, je ne m'en souviens pas. Donc, je sais que le ministre a l'épiderme sensible, mais la réalité est que...

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cela équivaut à un rappel à l'ordre, votre intervention?

Mme Lavoie-Roux: Non, cela me revient. Ce que j'allais dire, c'est que le ministre va nous dire que c'est fait après consultation auprès des associations d'employeurs les plus représentatives, auprès de la Commission des droits de la personne et de l'Office des personnes handicapées. On sait fort bien ce que veut dire la consultation pour ce gouvernement et cela ne me gênerait pas du tout de dire, par exemple, que la loi 27 prévoyait, pour la nomination des membres sur les conseils d'administration des établissements de santé et de services sociaux, que le ministre doive consulter et, après, il peut nommer ou faire une recommandation au Conseil des ministres. Il a effectivement nommé des gens, mais il n'a même pas consulté. Ce n'est même pas après avoir consulté. Après cela, il fait à sa tête, mais il n'a même pas consulté. Admettons que le ministre consulte - on va lui donner le bénéfice du doute, je n'ai pas de raison de croire qu'il ne consulterait pas - après cela, les nominations, on en a eu une démonstration ce matin à l'Assemblée nationale, M. le Président, concernant la nomination des présidents d'élection. J'ai même appris des choses sur mon comté. Je vous croyais toujours très purs, mais j'ai appris des choses fort intéressantes. (20 h 30)

Une voix: Madame, perdez vos illusions et rapidement.

Mme Lavoie-Roux: Parfois, il m'en reste quelques-unes.

Plus sérieusement - parce que la question est sérieuse - je pense que ce n'est pas suffisant de dire que le ministre va consulter. Tant et aussi longtemps que c'est le gouvernement qui nomme les personnes à un conseil dont le rôle est de voir d'abord et avant tout à l'intérêt du public, je pense que les membres de ce conseil doivent être le plus indépendants possible à l'égard du pouvoir politique, compte tenu du fait que dans cette négociation le pouvoir politique est une des parties - c'est certainement la partie la plus intéressée - et que, de l'autre côté, il y a les travailleurs. M. le Président, si on veut vraiment assurer qu'à un moment donné ces gens ne se sentent pas en conflit d'intérêts, de loyauté, de fidélité ou de ce que vous voudrez et qu'ils ne soient soumis à aucune sorte de pression - c'est extrêmement important à mes yeux - de la part du pouvoir politique, cela me semble impératif que l'on maintienne la formule qui existe dans la loi 59, c'est-à-dire qu'ils soient nommés par le juge en chef du Tribunal du travail.

J'aimerais faire l'amendement suivant, M. le Président: "Que le paragraphe 111.0.3 de l'article 6 soit modifié en remplaçant, à la première et à la deuxième ligne, les termes "le gouvernement, sur proposition du ministre" par les mots "le juge en chef du Tribunal du travail"."

Le Président (M. Rochefort): Avez-vous une copie de votre proposition d'amendement?

M. Marois: M. le Président...

Le Président (M. Rochefort): Seulement un moment, M. le ministre.

M. Marois: Certainement.

Le Président (M. Rochefort): Avant de discuter de cette proposition d'amendement, dois-je comprendre que cela dispose de l'alinéa .0.2?

M. Rivest: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Parce qu'il faut quand même y aller dans l'ordre au moins pour l'adoption des amendements. Vous en convenez? Donc...

Mme Lavoie-Roux: J'aurais seulement aimé...

Le Président (M. Rochefort): Oui? Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse... M. Rivest: On peut le suspendre et on

y reviendra.

Mme Lavoie-Roux: J'avais une question à poser sur l'alinéa .0.2, mais on peut peut-être...

Le Président (M. Rochefort): Si vous...

Mme Lavoie-Roux: ...compléter .0.3. Cela ne change rien à .0.2.

Le Président (M. Rochefort): Non...

Mme Lavoie-Roux: Je pense que l'un est indépendant de l'autre jusqu'à un certain point.

Le Président (M. Rochefort): Oui, je suis d'accord. Toutefois, je ne voudrais pas qu'on se promène à faire des amendements sur différents articles et qu'on revienne. Suspendons .0.2 pour l'instant et on va étudier...

Mme Lavoie-Roux: Oui. La prochaine fois, on les fera en ordre, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): C'est cela. Donc, sur la proposition d'amendement à l'alinéa .0.3, M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je vais certainement m'opposer à l'amendement et, le cas échéant, si tant est que c'est ainsi qu'il faut faire, demander le vote et m'assurer que cet amendement n'est pas retenu pour une... Je ne rappellerai pas tous les arguments que j'ai évoqués tout à l'heure. On ne parle plus du tout du même genre de conseil. Ce n'est plus du tout la même chose, ni par sa composition, ni par ses pouvoirs, ni par son mandat. C'est complètement autre chose. Et puis, il y a plus. Le gouvernement va assumer, par ce projet de loi, une batterie de responsabilités qui lui reviennent, y compris la responsabilité de suspendre, le cas échéant, le droit de grève. Il me paraît normal qu'il assume aussi, par voie de conséquence, la responsabilité de la nomination des membres du conseil, tout de même!

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je comprends que dans la mécanique du projet de loi effectivement le conseil a un rôle qui est peut-être, à certains égards, différent de celui de l'ancien, mais le point fondamental - et l'argument du ministre, à mon avis, n'a pas répondu à cet argument - c'est que ce qu'il va faire, ce conseil, essentiellement, c'est émettre des avis sur la suffisance ou l'insuffisance des ententes et des listes au regard d'une chose fondamentale qui s'appelle les services essentiels pour la population. C'est ce qu'il va faire. Or, ces ententes auront été conclues entre deux parties qui seront la partie patronale, c'est-à-dire le gouvernement ou ses partenaires, et la partie syndicale. Si j'ai bien lu le projet de loi du ministre - d'ailleurs, je pense que dans une déclaration antérieure, dans un échange antérieur, le ministre a insisté pour dire qu'effectivement ce conseil aurait des pouvoirs s'approchant de pouvoirs de décision dans la mesure où le rapport va être rendu public, où cela aura un impact considérable, où il peut reparler aux parties, etc. - l'objet de notre préoccupation, le seul argument, à mon avis, qu'on peut et qu'on doit invoquer dans de telles circonstances, c'est de nous assurer que le conseil va avoir absolument toute la crédibilité nécessaire pour juger et apprécier la valeur des ententes et être crédible de part et d'autre. Le gouvernement, c'est dans la nature des choses, va être partie à cela. Par exemple, pour exprimer d'une autre façon cet argument, on ne l'a pas inventée. M. Johnson, votre prédécesseur, disait pourquoi il introduisait la notion d'un comité formé par le juge en chef du tribunal. Je le cite: Donc, un comité qui a toutes les garanties possibles et humaines, dans un contexte comme le nôtre, d'être neutre sinon objectif. L'objectif de la proposition de ma collègue de L'Acadie, l'argumentation, c'est justement ce qui est en jeu et je ne vois absolument aucun inconvénient - je souligne des avantages - à ce qu'on confie la nomination des membres, du président, au juge en chef du Tribunal du travail. Si on veut inscrire la dynamique des deux parties, ce que le ministre a dit, issues des milieux, on peut demander l'avis, par exemple, on pourrait même l'ajouter - je n'en fais pas une suggestion formelle - mais que ce soit sur l'avis du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre ou quelqu'un d'autre. Mais peu importe la mécanique que vous choisiriez, la raison principale de notre argument, c'est de savoir que le gouvernement ne doit pas, par le fait qu'il nomme les membres, qu'il en fixe les rémunérations, etc., être entaché. Une partie syndicale, par exemple... Il faut penser aussi que les décisions du conseil vont arriver dans une situation conflictuelle où, de toute évidence, les partenaires, malheureusement, disparaissent très rapidement du décor et la dynamique - on l'a vécu drôlement - ce sont les syndicats contre le gouvernement. À ce moment-là, le conseil va dire: Votre liste n'est pas suffisante. Immédiatement, je suis convaincu - ce n'est pas un reproche - c'est dans la nature des choses - que très spontanément va arriver l'argument de dire -lorsqu'un représentant quelconque aura le micro - au journaliste qui pourra demander: Le conseil a dit que la liste que vous avez

faite est insuffisante, il va dire: Le conseil est une "patente" du gouvernement. On veut éviter cela.

C'est le sens de l'amendement. Le ministre devrait y penser et voir s'il n'y aurait pas lieu de réfléchir. Je ne vois, en pratique, absolument aucun inconvénient non plus à ce que ce ne soit pas le gouvernement. Si le ministre m'a donné un inconvénient majeur à ce que le gouvernement se départisse de cette responsabilité, je suis prêt à regarder la chose. Notre préoccupation est dans le sens d'une valorisation de l'opinion que le conseil va émettre sur des ententes qui seront négociées avec une partie patronale, où le gouvernement est forcément présent par ses partenaires directement et la partie syndicale. D'autant plus, au bout du corridor qu'il ne faut pas oublier que le conseil rend son rapport public. Donc, le conseil peut s'adresser aux deux parties. Il me semble que c'est important qu'il soit neutre, on parle vraiment de deux parties. D'autant plus que le conseil lui-même soumet son rapport au gouvernement qui peut exercer ses pouvoirs de décret tel que la loi.

Donc, c'est un peu curieux. Le gouvernement va agir à recommandation d'un organisme dont il va contrôler la nomination des membres. Si le gouvernement va lui-même exercer, dans chacune des situations et des rapports qui lui seront adressés par ce conseil, son libre jugement et assumer les responsabilités qui lui paraîtront en raison de plus de l'espèce, pour s'assurer que celui qui l'avisera jouisse, autant en regard des parties que vis-à-vis de lui-même du gouvernement, d'un statut d'indépendance.

Je pense que - en tout cas, j'en suis vraiment convaincu - il y a là une argumentation très sérieuse. J'inviterais le ministre à y porter toute l'attention qu'elle mérite. D'autant plus qu'il n'a absolument pas été démontré par la formule antérieure, au niveau de la loi no 59, que le juge en chef du Tribunal du travail ne serait pas en mesure de remplir cette responsabilité; je pense qu'il peut très bien le faire. C'est l'argument que nous présentons au ministre et nous aimerions savoir si le ministre conserve exactement la même opinion. Je trouve qu'il risque d'entacher la crédibilité d'un des mécanismes-charnières extrêmement importants dans l'ensemble de la structure qu'il nous propose d'adopter pour assurer les services essentiels à la population.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je dirai un dernier mot. Certains de mes collègues voudront intervenir. Encore une fois - je pense que je n'insisterai jamais assez - il s'agit d'un conseil permanent, non pas temporaire, d'une nature bien différente du conseil qui existait en vertu du code actuel; un conseil qui, en plus, implique une association dans le processus de la participation des citoyens, qui dispose de pouvoirs plus larges aussi, qui est un tiers intervenant, qui doit aider les parties et qui en plus doit évaluer, faire rapport au ministre du Travail qui fait rapport, par voie de conséquence, au gouvernement. C'est le ministre du Travail qui formule les recommandations, si tant est que cela mène à une suspension du droit de grève, le cas échéant. Le gouvernement, en vertu de cette loi no 72, va assumer des responsabilités beaucoup plus importantes que par le passé et cela me paraît normal. Il me paraît aussi par voie de conséquence - j'avoue qu'on y a pensé longuement, on a examiné l'une et l'autre formule et bien d'autres en plus qui pourraient être mises sur la table - il m'est apparu... encore une fois, il n'y a jamais de formule absolument parfaite, à toute épreuve, je n'en connais pas, mais il nous a semblé que c'était la formule la plus cohérente dans le cadre de l'économie du présent projet de loi.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si j'ai bien compris, l'un des arguments du ministre, c'est qu'il s'agit d'un conseil sur le maintien des services essentiels qui est très différent de celui qu'on retrouvait dans le projet de loi no 59. Compte tenu du fait qu'il s'agit d'un conseil permanent, dont le président, en tout cas est nommé pour cinq ans et les membres, peut-être pour trois ans - il faudrait que je revoie - ceci est exact, mais il faut peut-être rappeler au ministre qu'il y a d'autres organismes permanents qui ont des mandats d'une durée au moins aussi longue. Par exemple, si l'on pense à la Commission des droits de la personne, c'est un organisme permanent et la nomination des membres fait l'objet d'un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale, et il s'agit d'un organisme permanent. C'est justement pour donner à cet organisme ce caractère d'objectivité et de neutralité dont on parlait tout à l'heure. Alors, l'explication du ministre suivant laquelle le caractère est permanent, pour moi, cela ne modifie pas foncièrement la vocation du conseil. La vocation première et fondamentale du conseil est toujours d'être l'instrument qui va permettre que va assurer qu'en tout temps, le mieux possible, la population sera servie. (20 h 45)

J'aimerais rappeler au ministre qu'un conseil - et je ne le dis pas d'une façon, peut-être que le ministre n'y a pas réfléchi -qui serait strictement une émanation du

Conseil des ministres, à mon point de vue, perdrait beaucoup de sa crédibilité, peut-être à tort des fois - ce moment-là, on sait fort bien - et j'ai eu l'occasion de le dire, je ne sais pas si c'est lors d'un discours de deuxième lecture, mais en d'autres occasions - dans des situations de conflit ou de grève dans le secteur public, plus particulièrement dans le domaine de la santé - dans le fond, si on parle de services essentiels, on en parle surtout en regard des services de santé, même s'il y a d'autres domaines -d'un côté comme de l'autre il y a un autre rapport de forces qui joue et joue, celui-là, plus dans le même sens. Les travailleurs doivent conserver dans l'opinion publique quand même une image de respectabilité et de responsabilité et, de son côté, le gouvernement - Dieu merci, je l'ai assez vécu avec l'ancien ministre des Affaires sociales - doit rassurer la population dans le sens qu'il ne se passe rien ou que tout est sous contrôle - ce serait plus juste de dire cela - on n'a pas besoin de s'inquiéter. Les gens se souviendront combien, jour après jour ou deux jours après deux jours, le ministre des Affaires sociales se levait pour me dire: Tous les services essentiels sont assurés, le rapport du conseil nous dit que les services essentiels sont assurés. Pourtant, il a fallu qu'on obtienne les rapports des experts - pas les derniers que nous avons eus au moment de la commission parlementaire, mais ceux que j'avais eus, je pense, à l'automne 1979, pour bien réaliser, quand on examinait les rapports des experts de près, que les services essentiels en bien des endroits étaient plus que déficients. Alors, je me dis que c'est dans l'intérêt du gouvernement et c'est dans l'intérêt de la population que cet organisme — qu'il ait un mandat prolongé, permanent ou temporaire, ça ne change pas sa tâche fondamentale - ait aux yeux du public la plus grande crédibilité possible.

Ce que le public demande — c'est au moins ce qu'on peut demander au ministre qui tient à sa formule, elle est presque intouchable selon lui - c'est la meilleure formule, l'économie de ce projet de loi, mais il faut au moins assurer le public que ce conseil n'a pas d'attache politique avec le gouvernement. À cet égard, ses avis doivent être l'objet d'un respect de la part de la population et des parties qui pourront le remettre en cause. Dans un cas, ça peut être la partie patronale qui soit fautive; dans un autre cas, il peut s'agir de la partie syndicale.

M. le Président, je n'ajouterai rien, mais ça me semble tellement évident l'importance... Écoutez, le ministre nous parle toujours, il a une expression: Ça touche aux fibres humaines du tissu - il a tout un vocabulaire autour de cela qui est très sincère...

Une voix: Des hommes et des femmes.

Mme Lavoie-Roux: Non, il n'a pas parlé de cela. Enfin, je pense que ce qu'il veut dire, c'est que c'est quelque chose qui nous tient à coeur, c'est quelque chose de fondamental, ça incarne les valeurs de notre société, les valeurs fondamentales de notre société, le respect qu'on a de l'intégrité des personnes. Je pourrais, moi aussi, en faire un grand discours, mais je pense qu'on tient le même discours là-dessus. Je pense qu'il a toujours voulu indiquer que c'était aussi important que cela. Si c'est vraiment aussi important que cela dans son esprit, il devient impératif que ce conseil qui justement, va permettre l'application de tous ces principes dont nous venons de parler, d'un côté et de l'autre de la Chambre, soit à l'abri de toute critique partisane, surtout qu'il remplisse sans aucune attache, d'une façon absolument indépendante la fonction extrêmement importante qui va lui incomber.

Le Président (M. Rochefort): Merci. Est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

M. Marois: Non, M. le Président. Je voudrais tout de même ajouter une chose. J'avoue que l'argumentation m'étonne un peu. Encore une fois, on a pensé à ces diverses formules, mais l'argumentation m'étonne un peu. D'une part, à certains moments depuis le début de nos travaux, des débats sur cette question-là, on me dit: II faut dissocier cela d'un état de négociation. Il faut bien démarquer cela d'une situation de relations du travail, de conflits, de négociations. C'est un argument qui a été souvent évoqué et mentionné par des membres de l'Opposition dans les diverses interventions.

À l'opposé maintenant, quand il s'agit du conseil, on me dit: II faut que ce soit le Tribunal du travail. Ce sera crédible, et le reste et le reste. Ce sera un tiers qui va venir, qui va se charger de cela.

Mme Lavoie-Roux: On va trouver un autre tribunal.

M. Marois: Non, justement, il ne peut pas y avoir deux poids deux mesures. Il n'y a pas un argument qui porte quand cela fait l'affaire et qui ne porte plus quand cela ne fait pas l'affaire. Le Tribunal du travail a une vocation, une mission bien particulière qui est bien décrite dans le Code du travail. Le présent projet introduisant entre autres -je pourrais ajouter d'autres éléments - la participation d'un représentant du public, sa mission étant marquée au coin de contribuer de façon substantielle à faire en sorte que se traduise dans les faits l'objectif visé par la présente loi, le gouvernement y assumant encore une fois des responsabilités

extrêmement importantes, c'est lui, au bout de la ligne, qui va être jugé là-dessus. Il va les assumer pleinement, ses responsabilités. On me dit que c'est délicat parce que c'est important - là-dessus, je suis parfaitement d'accord - la personnalité des gens qui vont être nommés, leur compétence, en d'autres termes, la crédibilité de l'équipe d'hommes et de femmes qui vont composer le conseil éventuellement. C'est extrêmement important. C'est vrai, je suis parfaitement d'accord. Quelle que soit la piste, la voie, le moyen qu'on choisit pour la nomination, indépendamment de la voie et des moyens, il est évident qu'un des éléments clefs, c'est la personnalité, la compétence, la crédibilité des gens qui vont être nommés. Ce n'est certainement pas l'intérêt du gouvernement de commencer à zigonner avec cela parce que le premier qui va écoper, c'est lui. Celui qui va écoper au premier chef, c'est celui qui va être le ministre du Travail, qui va faire les recommandations après les consultations, parce qu'il ne faut pas perdre de vue que le projet de loi, sans en faire un absolu, prévoit qu'il doit y avoir un certain nombre de consultations, notamment mais non exclusivement, et avec des groupes précis. On sait bien ce que cela signifie, le moindrement que se met en marche un processus de consultation. Cela signifie que forcément, un jour ou l'autre, surtout depuis maintenant un certain nombre d'années, les tables et les bureaux ministériels sont remplis de trous... Tout sort, tout fuit, tout se sait. Tant mieux! En d'autres termes, au bout de la ligne, ce n'est pas pour les parties patronales et syndicales d'abord que ces personnes sont nommées, mais au premier chef pour les citoyens.

Mme Lavoie-Roux: C'est ce que je prétends.

M. Marois: Bien sûr. Au bout de la ligne, celui qui va écoper, parce qu'il assume la responsabilité et qu'il est mieux de se surveiller... mais, il a cette responsabilité, il l'assume, et il va la porter et il sera jugé sur ce qu'il fera.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le Président, si vous maintenez cette chose, à mon avis - je pense que c!est ce que disait la députée de L'Acadie au fond - à tort ou à raison, les avis qui vont être donnés par votre conseil risquent d'être perçus de la façon suivante: le gouvernement va se donner un avis à lui-même. C'est ce qui va arriver au bout de la ligne. Ce n'est pas un conseil qui est en l'air. Il va être permanent, d'accord. Au moment où il va vous émettre des avis sur la suffisance de la liste c'est un climat d'affrontement nécessaire. Donc, raison de plus pour articuler cela. Autrement, entre vous et moi, vous n'auriez même pas besoin de conseil. Vous pourriez constituer un réseau quelconque d'information sur la situation et envoyer des fonctionnaires pour faciliter les ententes; vous les nommeriez, vous prendriez, par exemple, une équipe mobile dans le réseau du ministère des Affaires sociales qui pourrait arriver, rencontrer les gens, faciliter les ententes, émettre cinquante dollars. Si vous créez une chose gouvernementale qui va donner un avis au gouvernement; or, la dynamique et celle-là même on ne l'a pas inventée, c'est dans la loi de M. Johnson en 1978. M. Johnson a mis le juge en chef du Tribunal du travail. Le ministre me dit: "Le juge en chef a des fonctions très précises." C'était lui en 1978, c'est le gouvernement. Si vous maintenez -je vous le dis et je vous répète le point essentiel - le conseil malgré tout le processus de consultation nommé et désigné par le gouvernement au moment où le conseil va dire que telle entente ou telle liste est insuffisante, l'une ou l'autre des parties dont le conseil jugera d'une façon négative l'action au niveau des ententes et des listes, va automatiquement dire: "Cela, c'est bien regrettable c'est le gouvernement" et, entre autre, la partie syndicale nécessairement parce qu'elle est en lutte, à ce moment, contre le gouvernement dans le cadre de la négociation, elle va dire: "L'avis est largement exagéré, ces gens sont des gens du gouvernement."

Je pense que c'est dans le sens de la démarche de votre prédécesseur M. Johnson lorsqu'il a inscrit dans la loi - d'ailleurs j'en ai cité un extrait où il était stipulé que c'était pour garantir la neutralité et l'objectivité du conseil de l'époque. Il a passé au juge en chef du tribunal. Quelles que soient les fonctions statutaires qu'il exerce, il lui a donné ce pouvoir de nommer cela. Je me dis que c'est extrêmement important que le conseil qui avise le gouvernement ne prête flanc à aucune critique sur le plan de sa neutralité et de son objectivité et que, surtout, il n'apparaisse pas au niveau même de sa création et de sa constitution comme étant une émanation du gouvernement qui, ultimement, crée un conseil objectif et neutre pour lui donner des avis pour pouvoir exercer son jugement de la manière la plus respectueuse des responsabilités qu'il a vis-à-vis les bénéficiaires.

J'ai écouté les arguments que vous avez donnés. Je ne pense pas que vos arguments aient disposé de la question centrale, non seulement de la neutralité - il va y avoir des bonnes personnes dans cela, je n'en doute pas - mais du fait que ce conseil va non seulement être neutre, mais qu'il va apparaître, aux yeux de tous les

interlocuteurs, effectivement neutre et objectif. À ce moment, si vous acceptiez notre suggestion, je suis convaincu que vous valoriseriez à l'avance, vous donneriez des assurances de la crédibilité des avis que le conseil donnerait au gouvernement et de la démarche aussi parce qu'il ne faut pas l'oublier là, que le conseil proprio motu dans la loi doit faire en retournant vers les parties en leur disant: "Voici votre liste ou votre entente, elle n'est pas suffisante; voulez-vous la corriger, etc"? Parce que le conseil va dans les deux sens. S'il va dans les deux sens, c'est vraiment la charnière de la loi au niveau des institutions et du mécanisme qui y est introduite. Il me semble que le gouvernement est au bout. Il y a les institutions; le gouvernement est présent au niveau des institutions par ses partenaires, il y a la partie syndicale et il y a un conseil entre les deux qui va à l'un ou l'autre selon les circonstances et qui doit être crédible et qui ne doit pas être une émanation du gouvernement. Il me semble que cela risque de nuire considérablement à l'action du conseil vers les parties ou à l'action du conseil vers le gouvernement. C'est cela l'argument central. Il me semble que vos arguments ne disposent pas de cette crainte, plus que crainte, de cette réalité qui risque de survenir au niveau de la crédibilité des avis émis par le conseil. (21 heures)

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Cela va être très court M. le Président. Je veux simplement citer un autre extrait du journal des Débats, à l'occasion de la discussion en commission parlementaire sur la loi no 59 et dans laquelle le ministre Johnson disait: L'objectivité a préoccupé bien des philosophes depuis quelques centaines d'années. Mais, en tous cas, je vois cet organisme comme n'ayant pas a priori de motivation de partialité. C'est cela qu'on recherche dans cet organisme. On veut faire en sorte qu'il soit composé de gens nommés par l'extérieur et non pas par le gouvernement, par le juge en chef du Tribunal du travail après consultation de différents organismes. On veut, enfin, lui donner également le mandat, etc.

Mais, enfin, c'est un peu dans le même sens que l'autre extrait que mon collègue de Jean-Talon a lu, mais je pense que l'ancien ministre avait saisi cette dimension extrêmement importante de la nécessité d'une totale impartialité ou d'une perception de totale impartialité de ce comité-là.

M. Marois: Bien sûr, bien sûr, et mon collègue avait raison dans le cadre et dans le contexte de la loi no 59, c'est tout à fait exact. On ne parle pas du tout du même cadre, on ne parle pas du tout du même contexte et de toute manière, au bout de la ligne, tout le monde admettra une chose: qui que ce soit qu'il va nommer, une des clés du conseil tient à la personnalité, pas uniquement à une crédibilité à cause de la source de nomination, mais à la crédibilité tenant aux personnes elles-mêmes qui seront choisies pour constituer le conseil. Cela me paraît extrêmement important.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis d'accord avec le ministre là-dessus, que la personnalité, la compétence et la crédibilité morale, si je peux dire, des personnes qui sont nommées ont aussi une importance. Il n'y a aucun doute dans notre esprit là-dessus, mais c'est simplement, enfin, un autre aspect de la question. J'aimerais que le ministre, quand même, nous précise vraiment ce qu'il y a de différent, de si fondamentalement différent, dans le rôle du conseil prévu dans la loi no 72 par rapport au rôle qu'il exerçait dans la loi no 59. Je sais qu'il est permanent, mais l'objectif demeure quand même le même, sauf qu'il va contribuer à réviser les listes, les ententes et cela, c'est une raison supplémentaire justement pour que les syndicats également le perçoivent comme une personne neutre, une personne morale neutre, si on veut. À part cela, après, c'est de conseiller le gouvernement, etc. Je ne vois vraiment pas là, sauf le caractère temporaire ou permanent, plus un mandat élargi en fonction de l'établissement des listes... Il voyait déjà à la révision des listes, de toute façon, le conseil sur le maintien des services essentiels, il examinait déjà cela dans le projet de loi no 59.

Le Président (M. Rochefort): Alors, est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

M. Rîvest: Non, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Un vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Un vote nominal. Alors, j'appelle donc les votes sur la motion d'amendement à l'alinéa 0.3 qui se lirait comme suit: Que le paragraphe 111.0.3 de l'article soit modifié en remplaçant à la première et à la deuxième lignes, les termes "le gouvernement, sur proposition du ministre" par les mots "le juge en chef du Tribunal du travail".

M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Lavoie-Roux

(L'Acadie)?

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Rochefort): Pour. M.

Dean (Prévost)?

M. Dean: Contre.

Le Président (M. Rochefort): Mme

Dougherty (Jacques-Cartier). Mme Harel (Maisonneuve). M. Lavigne (Beauharnois)?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Marois (Marie-Victorin)?

M. Marois: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Perron (Duplessis)?

M. Perron: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Rivest (Jean-Talon)?

M. Rivest: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Sirros (Laurier) n'est pas ici. Or, donc, la motion est rejetée: quatre contre, deux pour. Nous revenons donc au texte du projet de loi.

M. Rivest: M. le Président, en vue de... Nous sommes toujours à 111.0.3?

Le Président (M. Rochefort): Oui, c'est cela.

M. Rivest: M. le Président, dans la même veine, je préviens tout de suite le ministre qu'au niveau du rapport nous aurons à revenir sur cet aspect que nous considérons comme extrêmement important.

Mme Lavoie-Roux: Dans le fond, je me demande pourquoi on se soucie tellement du bien-être du gouvernement; vraiment, c'est le bien-être de la population.

M. Rivest: C'est parce que, malheureusement, ce gouvernement-là est encore le gardien de l'intérêt public.

Mme Lavoie-Roux: Ah! c'est ça!

M. Rivest: C'est une conversation entre nous, M. le ministre.

M. le Président, dans la même veine, je voudrais faire un pas additionnel - cela a d'ailleurs été évoqué par ma collègue au passage - pour dire ceci. À tout le moins, dans la mesure où l'Assemblée nationale a eu à intervenir dans le passé pour protéger la santé et la sécurité publique, qui est l'objet de nos préoccupations à l'intérieur de ce projet de loi, je voudrais proposer un autre amendement qui serait le suivant: "Que le paragraphe - on me permettra quelques explications par la suite - 111.0.3 de l'article 6 soit modifié, premièrement, en ajoutant, après le mot "conseil" les mots "à l'exception du président" et, deuxièmement, en ajoutant l'alinéa suivant: "Le président du conseil est nommé sur proposition du premier ministre par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale." Est-ce que c'est recevable?

Le Président (M. Rochefort): Pourriez-vous me fournir le texte de votre amendement?

M. Rivest: Voilà.

Le Président (M. Rochefort): Oui, votre proposition est recevable. Vous avez la parole.

M. Rivest: M. le Président, la proposition est très simple, c'est justement pour essayer de mettre le plus de distance possible en regard du mandat que le conseil se voit octroyer dans la loi, afin d'éviter -aux yeux des parties à la négociation et, particulièrement, aux yeux des représentants des travailleurs - que les avis du conseil sur la suffisance ou l'insuffisance des ententes ou des listes soient perçus comme une émanation du gouvernement qui, à cause du vote précédent, contrôlerait la nomination des membres du conseil.

Comme amendement second, nous croyons qu'en recourant à l'Assemblée nationale en ce qui a trait à la nomination du président, on peut au moins essayer de mettre de la distance entre l'institution du conseil et le gouvernement. Je pense bien que, sur cette base, le ministre pourra difficilement trouver des arguments absolument convaincants pour s'éloigner de cela, d'autant plus qu'en raison même de la nature des avis du conseil qui concernent la santé et la sécurité publique, l'Assemblée nationale peut être un instrument pour donner au président son autorité, premièrement, parce que le président, qui va faire rapport au gouvernement, va également faire rapport au public, car son rapport sera rendu public et le gouvernement devra prendre une décision par la suite.

Nous ne dérogeons pas à cette pratique; je pense que nous nous inscrivons dans une tradition qui existe chez nous lorsqu'on demande à des hauts fonctionnaires d'émettre des avis sur des situations. Effectivement, dans tout autre domaine, mais qui peut être aussi important que celui dont nous traitons, cette procédure existe. Je pense, par exemple, aux vérificateurs du gouvernement; je pense, par exemple, aux gens des élections; je pense, par exemple - et c'est d'une façon très analogue - à la façon dont sont nommés les membres de la Commission des droits de la personne, qui sont nommés

directement par l'Assemblée nationale justement pour avoir une espèce d'autorité morale.

J'aurais presque aimé qu'on nomme -peut-être qu'on ira plus loin, si le ministre agrée à cette proposition - peut-être tous les membres, sur proposition du premier ministre, par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale. Cela pourrait d'ailleurs être une bonne suggestion, mais commençons par voir la réaction du ministre à cette seule proposition formelle pour l'instant de nommer le président du conseil sur proposition du premier ministre - on reconnaît donc le droit d'initiative au gouvernement - qu'il soit nommé par les deux tiers de l'Assemblée nationale. L'analogie la plus proche, je la rappelle au ministre, c'est celle de la Commission des droits de la personne dont non seulement le président, mais tous les membres sont nommés par l'Assemblée nationale parce que probablement qu'on a considéré que le mandat de cette commission traitait de choses à ce point fondamentales, les droits et libertés de la personne... On est dans un domaine qui est drôlement proche, parce qu'il s'agit des droits de la population à la santé et à la sécurité, tels qu'ils sont exprimés par le projet de loi. Je ne pense pas non plus, M. le ministre, qu'il y ait quelque inconvénient que ce soit à ce que le président soit nommé selon la proposition que nous formulons.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je vais très rapidement expliquer pourquoi je vais intervenir contre la motion d'amendement, pour un certain nombre de raisons...

Mme Lavoie-Roux: On va bien écouter.

M. Marois: Oui, vous pouvez prendre note, vous pourrez le relever, ce sera écrit. Vous utiliserez abondamment la transcription. J'avoue qu'on y a pensé.

Une voix: ... affaires.

M. Marois: II arrive qu'il n'y a pas de département de miracles là-dedans. C'est une des choses qui ont été effectivement envisagées et, en fin de compte, nous sommes aujourd'hui - l'Opposition nous l'a assez servi depuis quelques jours qu'elle doit tout de même avoir une certaine logique, une certaine cohérence - le 10 juin, M. le Président...

M. Rivest: Cela veut dire que vous n'avez aucune idée des gens que vous allez nommer là, c'est tragique.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marois: ... les travaux de cette Assemblée, de par le règlement, seront ajournés ou prorogés, peu importe, d'ici quelques jours et les mêmes personnes qui nous disent que cela a trop retardé, que c'est venu trop tard, seraient prêtes à courir le risque, compte tenu de l'importance de ce choix... Ce n'est pas un choix qu se fait en deux jours, ce n'est pas vrai. Bien sûr, il peut y avoir eu des consultations préliminaires, mais je pense bien que tout le monde comprend et conviendra rapidement que les gens ne s'engagent pas dans une fonction comme celle-là sans connaître la nature définitive d'un projet qui, dans l'état où il est ou une fois amendé, deviendra loi. Cela me paraît un élément qui n'est pas un détail, un élément pratique. Alors, l'Opposition serait prête à courir le risque, toujours sous le biais de l'importance de la crédibilité, etc., qu'on se retrouve devant une Assemblée nationale qui ne siège pas, alors qu'il faut procéder... On a dit: Vous êtes déjà tellement en retard, vous avez pris tellement de temps, comment se fait-il que vous n'ayez pas abouti plus vite, etc. L'Opposition serait prête à courir le risque de faire en sorte qu'il y ait un vide complet pendant une période X de temps. M. le Président, je ne peux pas retenir cela.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

M. Rivest: M. le Président, je trouve et je le dis, comme dirait le ministre, comme je le pense, tout à fait incroyable et impensable qu'actuellement le gouvernement n'ait même pas une idée des personnes qui vont effectivement composer...

M. Marois: M. le Président, le député de Jean-Talon...

M. Rivest: ... le conseil, parce que, s'il en a une, il a juste à la proposer.

M. Marois: M. le Président, le député de Jean-Talon me fait dire des choses - on l'aura bien noté et on le relèvera précisément dans la transcription de nos débats - que je n'ai absolument pas dites. (21 h 15)

M. Rivest: Parce que, M. le Président, justement, vous avez réduit le délai de 180 jours à 90 jours pour faire en sorte... Imaginez-vous dans quelle histoire on s'embarque. Il va falloir que, d'ici le 30 septembre, à toutes fins utiles - on est en juin, juillet, août, c'est la période d'été -tous les établissements du réseau des affaires sociales aient conclu une entente, enfin que tout le mécanisme, la dynamique, tous les

contacts personnels entre les membres de ce conseil s'établissent au niveau des institutions. On est à la fin de juin. D'après la réponse du ministre - si je fais erreur, il me corrigera...

Mme Lavoie-Roux: 180 jours.

M. Rivest: ... il me semble que le ministre, que le premier ministre, que le gouvernement, dans trois ou quatre jours, quand ce projet de loi pourrait être adopté, pourrait - cela prend 15 minutes - appeller le chef de l'Opposition au sujet de ces nominations. Il n'y a personne qui va critiquer quoi que ce soit. C'est sûr qu'il a en vue et qu'il a en tête, j'imagine, une personne responsable et facilement acceptable. Cette consultation prend quelques heures, on peut voter cela à l'Assemblée nationale. Cela n'a jamais causé de problèmes à ma connaissance pour les membres de la Commission des droits et libertés de la personne. La réponse du ministre m'inquiète drôlement, parce que tout le monde l'a dit, la relative inefficacité du conseil Picard a été justement due aux délais de la constitution de ce conseil par rapport aux actions qu'il devait entreprendre et qui étaient beaucoup plus rapprochées, puisqu'il y avait des conventions collectives au moment où le conseil a été formé, a été constitué, qui étaient expirées, etc.

Je rappelerai au ministre - là-dessus, le ministre devrait être attentif et comprendre l'inquiétude que nous manifestons - que, la dernière fois, alors que les délais d'implantation et de constitution du conseil ont été tellement courts - d'ailleurs, je pense que M. Picard, dans son rapport, le mentionnait - le projet de loi a été sanctionné le 23 juin 1978 et que les personnes prévues ont été nommées - il n'y avait rien de compliqué, d'autant plus que c'était beaucoup plus expéditif que ce que nous proposons, d'après la version du ministre, parce que c'était le Tribunal du travail - le 17 janvier 1979. Juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre, décembre, janvier, sept mois pour constituer le conseil après la sanction de la loi, pour établir des liens personnels, comme le disait le ministre.

Je crois effectivement que c'est très important que les membres du conseil, que les experts et les personnes que le conseil va engager pour travailler sur le terrain établissent des liens personnels avec les établissements et que le ministre nous indique - au fond, il ne répond pas au mérite de notre proposition, l'argument du ministre est purement à côté, il est incident, on n'a pas le temps, parce que c'est la fin de la session, c'est cela l'argument du ministre -qu'actuellement le ministre ou le premier ministre n'a pas approché d'une façon sérieuse des personnes pour être membres de cet organisme. Cela m'inquiète grandement quant à ce qui va se passer dans les prochaines semaines et au cours de l'été et au travail qui va devoir être fait par le conseil qui est censé animer tout cela, aller voir les gens, favoriser les ententes, pour que les établissements arrivent à une entente le 30 septembre 1982 - nous sommes dans une période d'été où les administrateurs prennent leurs vacances, les représentants des syndicats, pas juste les établissements de santé, parce qu'il y a tout le reste. La CTCUM, à l'article 27, si vous êtes dans cette situation, comment allez-vous pouvoir y faire face avec votre conseil? Oubliez ce conflit et essayez de vous débrouiller avec les ressources de votre ministère, mais ne pensez pas avoir l'instrument de cette loi pour passer à travers la présente négociation à la CTCUM. Vous n'en aurez manifestement pas le temps. L'article 27, dans ce sens, essaie de rattraper le temps d'une façon très légitime, mais cet objectif n'a purement rien à voir avec cela. Si c'est le type d'argumentation, d'approche et de situation où vous vous trouvez, vous m'inquiétez. Je demande que vous nous rassuriez. Si vous êtes en mesure de nous rassurer là-dessus, je pense que vous devez à ce moment examiner au mérite la proposition que nous vous faisons, parce que le mérite de notre proposition, c'est de donner de la crédibilité au conseil. On ne peut pas passer à côté de cela, parce que c'est un point fondamental dans votre loi.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, il y a une chose que je voudrais dire. Je ne reviendrai pas sur l'argumentation de fond. En ce qui concerne l'article 27, pour ne prendre justement aucun risque, j'annonce tout de suite que je présenterai au moment opportun, lorsqu'on y arrivera, un amendement qui se lira comme suit: "Si, lors de l'entrée en vigueur du présent article, le Conseil des services essentiels n'est pas constitué, le ministre nomme une personne pour exercer quant aux parties visées les pouvoirs et les fonctions dévolus au conseil en vertu des articles 111.0.18 à 111.0.21 et 111.0.23 jusqu'à ce que celui-ci soit constitué." On va l'insérer après le troisième alinéa de l'article 27.

M. Rivest: Pourquoi ne faites-vous pas cela partout de la même façon? Pourquoi y a-t-il un conseil, si c'est un moyen efficace?

M. Marois: Non. Je ne peux pas acheter l'argumentation du député, vraiment.

M. Rivest: Non, mais je fais des

remarques qui démontrent...

M. Marois: C'est pour répondre à une partie des inquiétudes viscérales du député de Jean-Talon.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne reviendrai pas sur l'argumentation que j'ai faite tout à l'heure quant à la crédibilité du conseil. Évidemment, je trouvais que la nomination du président par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale assurait cette crédibilité. Je pense que la personne qui assume une fonction qui a été approuvée par les deux tiers de l'Assemblée nationale, c'est une personne qui reçoit l'assentiment général de l'Assemblée nationale, parce qu'il n'y a pas de dissidence sur ces questions, c'est un minimum de personnes qui doivent être présentes. Comme ce sont tous les membres, à toutes fins utiles, de l'Assemblée nationale qui, officiellement, approuvent cette nomination, je pense que, dans un domaine comme celui que nous touchons, cela donne à cette personne un pouvoir moral supplémentaire, une autorité morale supplémentaire, d'autant plus que les membres de l'Assemblée nationale des deux côtés de la table représentent l'ensemble des citoyens. Ce sont ceux que les citoyens se sont donnés. Ce sont des gens que les citoyens ont élus pour défendre leurs intérêts, défendre leur point de vue, etc. Cela ajoute une autorité morale considérable.

Je pense qu'en ce sens, c'est peut-être encore une meilleure formule, du point de vue de la représentation, que la nomination par le juge en chef du Tribunal du travail. Je regrette que le ministre la rejette. J'attendais ses explications et je pensais qu'il nous en donnerait beaucoup, parce que j'avais un peu badiné en disant que je les prendrais en note, mais la seule explication qu'il nous a donnée jusqu'ici est le manque de temps. Il nous dit d'ailleurs: On avait un peu joué avec cette idée ou envisagé cette hypothèse, mais, au moment où vous avez envisagé cette hypothèse, je me demande quel est l'argument qui vous l'a fait rejeter, parce que vous n'étiez pas rendu au 10 juin, mais vous étiez probablement, j'espère, au mois de mai au moins. L'avez-vous rejetée sur cette seule base, le manque de temps, parce qu'à ce moment-là, vous auriez eu le temps de trouver un président? Cela vous donnait un bon mois, si cela avait vraiment été l'hypothèse que vous vouliez retenir comme étant la formule qui était la plus satisfaisante possible.

M. le Président, je regrette que le gouvernement rejette cet amendement qui est fait dans l'intérêt de tous, des deux parties et de la population. Il ne pourra s'en prendre qu'à lui-même, je pense, si, au moment d'un conflit, la crédibilité du conseil est mise en question, si sa neutralité est mise en question, comme je le disais tout à l'heure, à tort ou à raison, par les différentes parties. Tout ce débat qui surgit même dans les meilleures conditions possible, parce que, dans ces situations de conflit, les uns soupçonnent les autres, etc., et la population doit, en quelque sorte, arbitrer de loin les opinions qui sont données, je le dis très sincèrement, M. le Président, je pense que c'est un effort véritable pour aider le gouvernement - c'est peut-être une bonne motivation - mais c'est vraiment d'assurer qu'on permette au conseil de fonctionner dans les meilleures conditions possible.

Le Président (M. Rochefort): Merci. Est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

M. Marois: Non.

M. Rivest: Vous n'avez rien d'autre à ajouter là-dessus. Est-ce que le ministre...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon, à moins d'un consentement, vos 20 minutes sur cette proposition sont expirées.

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas pris 20 minutes, vous savez. J'aurais pu le faire.

Le Président (M. Rochefort): Oui, mais j'ai simplement signalé que cela prenait un consentement. Est-ce qu'il y a un consentement pour laisser intervenir le député de Jean-Talon?

M. Rivest: J'ai juste une remarque.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Sur cette question, compte tenu de l'argumentation qui a été donnée de part et d'autre, est-ce que le ministre accepterait de consulter ses collègues du Conseil des ministres, brièvement, pour voir s'il n'y aurait pas possibilité de répondre affirmativement aux propositions que nous avons formulées sur la...

M. Marois: C'est déjà fait, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Mme Lavoie-Roux: Vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Un vote nominal. J'appelle donc le vote sur la motion

d'amendement à l'article 6 qui se lit comme suit: Que le paragraphe 111.0.3 de l'article 6 soit modifié: premièrement, en ajoutant après le mot "conseil", les mots "à l'exception du président"; deuxièmement, en ajoutant l'alinéa suivant: "Le président du conseil est nommé sur proposition du premier ministre par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale."

J'appelle donc le vote. M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie).

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Dean (Prévost).

M. Dean: Contre.

Le Président (M. Rochefort): Mme

Dougherty (Jacques-Cartier), Mme Harel (Maisonneuve), M. Lavigne (Beauharnois).

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Marois (Marie-Victorin).

M. Marois: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Perron (Duplessis).

M. Perron: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Rivest (Jean-Talon).

M. Rivest: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Sirros (Laurier).

La motion d'amendement est donc rejetée: quatre contre, deux pour.

Nous revenons donc à l'article du projet de loi 111.0.3.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'avais une question sur l'article 111.0.2; si vous vous souvenez, on l'a laissé de côté.

Le Président (M. Rochefort): Oui, si vous me le permettez, on va disposer de l'article 111.0.3 complètement...

Mme Lavoie-Roux: Oui, je pensais qu'il était adopté.

Le Président (M. Rochefort): Alors, est-ce que l'article 111.0.3 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Sur division.

Le Président (M. Rochefort): Sur division. Alors, Mme la députée de L'Acadie, sur l'article 111.0.2, vous aviez une question.

Mme Lavoie-Roux: C'est simplement une question technique au ministre. Peut-il me dire pourquoi on opte pour huit membres au lieu de neuf? Est-ce qu'à ce moment-là vous n'obligez pas le président à intervenir très souvent pour utiliser une voix prépondérante?

M. Marois: Pas nécessairement. Bien malin qui pourra dire ou qui pourrait dire à l'avance dans combien de cas cela pourrait se présenter.

Encore une fois, je pense que cela tient fondamentalement aux personnes qui seront au conseil. Il s'agissait de bâtir quelque chose qui soit équilibré avec cette idée de deux, deux, accrochée au concept de "issu de", en y ajoutant trois personnes chargées de représenter le public, un président auquel on accorde en plus un vote prépondérant, ce qui lui donne carrément et clairement l'autorité requise au conseil. Neuf personnes, peut-être que cela aurait donné, à première vue, un espèce d'apparence que les votes auraient été automatiquement majoritaires. Ce n'est pas l'économie du projet et en plus on partait d'un conseil qui était composé de sept personnes. On ne pensait pas qu'il était pertinent d'augmenter le nombre, de le porter à neuf, on s'est arrêté à huit pour les raisons que je viens de mentionner, avec forcément un vote prépondérant pour y accrocher une autorité très nette et très claire.

Le Président (M. Rochefort): L'article 111.0.2 est-il adopté?

M. Marois: Adopté.

Mme Lavoie-Roux: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté.

L'article 111.0.4. (21 h 30)

M. Rivest: M. le ministre. Sur l'article 111.0.4, ma collègue aura sans doute d'autres remarques, mais il y en a une qui m'inquiète beaucoup et qui m'apparaît évidente, c'est que dans l'ancien conseil, tous les gens étaient nommés par le président du Tribunal du travail, ce qui m'apparaissait une excellente chose. Après consultation de la Commission des droits de la personne, l'Association des médecins-dentistes évidemment, parce que c'était limité aux services de la santé et aux services sociaux. Mais il y a une chose que vous introduisez dans l'article 111.0.4, toujours dans la perspective de donner le maximum de crédibilité au conseil. Alors, il y a trois membres qui sont nommés et qui vont représenter les bénéficiaires ou, enfin, qui sont nommés après consultation de la

Commission des droits de la personne, du Comité de la protection de la jeunesse, d'autres personnes et d'autres organismes, c'est au paragraphe c; pas de problème là-dessus. Mais le problème sur lequel j'attire votre attention, c'est qu'il va y avoir deux personnes qui vont provenir d'une consultation avec les associations accréditées et deux personnes qui vont provenir de consultation avec la partie patronale, mais les deux qui vont provenir d'une consultation avec les associations accréditées n'auront pas été agréées par les consultations qui seront menées par la partie patronale et vice versa. Tandis que dans l'autre formule, toutes les personnes avaient été agréées par les organismes qui avaient été consultés, si bien que - comprenez-vous ce que je veux indiquer? - par rapport à la formule de l'ancien conseil avec celui-là, je crains que vous institutionnalisiez, justement ce que nous essayons d'éviter.

Je pense que vous souhaitez vous-même éviter cet écueil, c'est-à-dire que, issues ou représentantes, les deux personnes qui vont provenir du milieu ou enfin, après consultation du milieu syndical, vont être des personnes syndicales. Enfin, je dis cela avec toutes les réserves qui s'imposent, j'en conviens, tandis que les deux personnes patronales, les patrons et les syndicats, n'auront pas donné leur accord sur la personne de l'autre camp.

Je crains que vous institutionnalisiez des camps à l'intérieur même du conseil. Alors que l'autre formule de désigner les membres du conseil dans la loi de 1978, toutes les personnes, qu'elles soient issues du milieu syndical ou du milieu patronal, avaient été agréées par les organismes et, en réalité d'ailleurs, quand on voit les personnes nommées sur ce conseil, je pense que tout le monde a reconnu leur excellence et leur probité et vous évitiez, dans l'ancienne formule, la polarisation qui risque d'exister au conseil et qui a été soulignée par plusieurs commentateurs où on a eu l'impression que la nouvelle formule du conseil était une formule pour transposer au niveau du conseil la dynamique de la négociation qui va exister sur le terrain.

M. Marois: Oui, je comprends parfaitement bien l'argumentation du député de Jean-Talon. Agréer, par l'ensemble, des blocs, que ce soient ceux ou celles qui seraient nommés issus de tel coin ou issus de tel autre coin. C'est effectivement, si ma mémoire est bonne, la façon dont cela s'est passé en théorie, la dernière fois, pour la composition d'un conseil d'un type quand même différent, mais peu importe. Nous avons voulu marquer, dans un premier temps, qu'il ne s'agissait pas de gens qui seraient représentants de... Cela, je pense que c'est une première chose importante à noter. La deuxième chose: dans les témoignages, les études et les commentaires qui ont été lus, entendus sur le fonctionnement de l'ancien conseil, malgré cette prétention théorique quant à la formulation dans la loi, il est ressorti que dans le fonctionnement du conseil, on a souvent évoqué la lenteur. On a dit: C'est un mécanisme lent. Vous vous souviendrez de cela. Et on a souvent dit: Cela va être la même chose. Dans ce cas, cela va donc être lent comme fonctionnement et, constamment, on parlait des expertises, de la nécessité de bouger vite. Quand il y a une plainte, il ne faut pas que ça traîne, il faut qu'il y ait une expertise et que ça se fasse vite; il faut qu'une décision soit prise, qu'un rapport soit fait et que ça sorte.

Or, justement, le fait que les gens aient été agréés théoriquement par tout le monde n'a pas empêché que dans le fonctionnement d'un conseil, qui était quand même d'un type différent puisqu'il n'y avait pas de représentants du public, il s'est avéré dans les faits que les lenteurs ou les longueurs ne tenaient pas tellement, et même pas du tout, au laps de temps que ça prenait pour donner suite à une plainte, procéder à l'expertise, aller sur les lieux, vérifier, faire un rapport. Lorsque le rapport était rendu au conseil, malgré une composition qui aurait été faite et agréée par les uns et les autres, comme l'évoquait le député de Jean-Talon, il s'est avéré que dans la pratique les rapports ont donné lieu à des discussions à n'en plus finir, à des négociations sur des virgules quant à la formulation des rapports. Les rapports étant entre les mains du conseil, c'est là que cela a pris du temps avant que les rapports soient par la suite retransmis à qui de droit.

Nous voulons tenir compte de cela dans les faits et c'est pourquoi nous modifions la base juridique telle qu'elle est formulée quant à la façon, quant au mode de consultation et de choix, ce qui n'exclut pas, ça va de soi, il n'y a rien dans la loi qui empêche le gouvernement de faire cette consultation croisée, le cas échéant. Nous avons voulu marquer bien clairement ce qui a été dans les faits un élément d'entrave dans le fonctionnement et une des causes de lenteur et de longueur dans le fonctionnement du conseil pour la retransmission des rapports. C'est cela la raison première.

M. Rivest: Si c'est le...

M. Marois: Le libellé même, encore une fois - je comprends ce que le député mentionne - n'empêche pas cette consultation croisée.

M. Rivest: Si le diagnostic du ministre au sujet des lenteurs, enfin, de la difficulté,

est ce qu'il était dans l'ancien, je crains que la façon dont le présent conseil est constitué, alors qu'il y a des gens issus d'un certain milieu qui est patronal et syndical, les discussions vont être encore beaucoup plus difficiles que dans le passé, d'autant plus qu'à l'intérieur même de ce conseil il va se produire un arbitrage qui va être l'arbitrage des trois représentants des bénéficiaires. Là, vous allez avoir, à mon avis, enfin, vous risquez d'avoir - personne ne peut l'affirmer - sur la façon dont le présent conseil est constitué beaucoup plus de discussions avec l'un et l'autre pour en arriver à des consensus peut-être, enfin, on l'espère, rapides, les plus rapides possible -moi, je pense qu'ils risquent d'être plus longs parce qu'ils sont vraiment issus de l'un et l'autre milieux - et après vous allez avoir les bénéficiaires qui vont être placés littéralement dans la situation, et quand je dis cela je réalise qu'on tient quasiment pour acquis qu'on réintroduit le rapport de forces au niveau du conseil, ce qu'on veut éviter, à ce moment-là, les trois bénéficiaires vont être placés dans la situation d'arbitres de choses qui vont leur être soumises de toute façon par des personnes qui vont être extérieures au conseil mais qui vont être les employées du conseil.

Alors, notre conception de la chose, je la dis au ministre tout de suite, on serait aussi bien, et je reviens à ce que je disais au début, de n'avoir que les trois bénéficiaires ou, enfin, qu'ils soient cinq et qu'il n'y ait personne issu d'un milieu qui vienne par sa carrière et ses réflexes nécessairement représenter un milieu. Dans ce sens-là, notre préoccupation au niveau de la constitution du conseil - on l'a déjà exprimée - c'est vraiment que ce soient des gens, des bénéficiaires du public, des gens responsables, bien sûr, qui n'ont pas de liens - il n'y a pas de liens juridiques non plus que de liens institutionnels, j'en conviens volontiers - mais qui n'aient pas de liens de carrière avec l'un et l'autre milieu. Si cela a été lent à cause de cela dans l'ancien conseil, alors que c'étaient des gens qui avaient été agréés par tout le monde, je crains que là, maintenant que les uns et les autres n'auront pas été agréés par tout le monde, enfin... Le bon sens va se manifester sans doute, j'en conviens volontiers, il n'y aura pas d'objection de catastrophe mais là, les gens vont être issus d'un milieu identifié comme tel et on va avoir trois personnes qui vont arbitrer. Elles vont dire: "Vous, vous exagérez, on le sait, parce que vous avez tel réflexe; vous, les administrateurs, écoutez, ce n'est pas si pire que cela ce que les gens proposent." Là, les uns et les autres vont discuter et les trois bénéficiaires vont arbitrer ce conflit à l'intérieur même d'un conseil qui doit agir très vite sur le terrain. C'est la crainte que nous avons; je pense que ma collègue pourra trouver d'autres...

Le Président (M. Rochefort): M. l'adjoint parlementaire.

M. Rivest: ... commentaires, mais c'est vraiment la crainte que j'ai.

M. Dean: Vous avez le droit d'avoir des craintes. On peut avoir des craintes de toutes sortes sur chaque solution. Une des raisons qui a motivé cette décision, c'est justement le contraire qu'on veut éviter dans le rapport de forces. Ce seraient des gens issus de, mais non pas impliqués politiquement dans le milieu, des personnes issues de, qui ont pris un certain recul, qui apportent avec elles parce que issues de leurs connaissances, leurs expériences vécues, pour aider à l'élaboration du fameux protocole-cadre...

M. Rivest: Qu'est-ce que vous envisagez exactement?

M. Dean: ... qui fait qu'elles feront d'avance le jugement de trois personnes représentant la population. Ces gens ne sont plus actifs. En d'autres termes, ce n'est pas pour utiliser des noms. On n'aura pas Donatien Corriveau ou le président de la FAS ou un conseiller technique de la FAS. Cela serait quelqu'un qui a déjà évolué dans le milieu, mais qui n'est plus dans ce milieu. La même chose du côté patronal, quelqu'un qui a vécu des expériences, l'acheminement des années vers une plus grande "responsabilisation" et qui a des connaissances. C'est une extension du principe de l'implication du milieu, mais sans l'implication directe et politique des parties avec comme arbitre... Il est à souhaiter que cela devienne un arbitrage moral et un arbitrage de consensus et non pas un arbitrage tranché juridique. S'il faut que quelqu'un le tranche, c'est le président qui va le trancher, mais après avoir eu l'intrant des trois, je pense, ce qui est souhaitable. Si ceux et celles qui sont nommés reflètent la philosophie de la loi, je pense que le débat public qui s'est fait autour, c'est que cela serait plutôt un arbitrage moral qu'un arbitrage juridique ou légal au sein du conseil.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: M. le Président, je voudrais juste ajouter à l'argumentation de l'adjoint que, de toute façon, M. le député de Jean-Talon, que vous choississiez ces sept personnes excluant le président dans une masse de personnes, vous allez retrouver des gens qui, tout au long de leur vie ont travaillé peut-être pas d'une façon spécifique

mais qui sont bien articulés comme patron ou comme syndiqué et comme bénéficiaire. Cela veut dire que là, vous retrouvez d'après la formule, d'après ce qu'on retient dans le projet de loi, deux personnes qui seraient issues de par leurs antécédents du côté patronal, mais qui n'en feraient plus partie au moment où elles exerceraient leurs fonctions au comité; deux autres personnes - c'est la même chose - qui arriveraient du monde syndical de plus ou moins près, mais qui connaîtraient tout de même jusqu'à un certain point ce qu'est un conflit, ce qu'est une négociation. Je pense que ces gens apporteraient leur expérience et une espèce d'expertise qui permettrait justement d'éclairer trois autres personnes qui, elles, ne seraient pas issues de l'un ou de l'autre de ces deux milieux de façon plus particulière que les deux groupes de deux personnes et que, de toute façon, à la fin du compte, si toutefois il y avait un partage des opinions devant le conflit, le président est toujours là pour finalement trancher la question. Je pense qu'il y a tout de même une espèce de tampon de trois personnes qui se rangeraient plus en bloc vers l'un ou l'autre des deux groupes de deux. Ce qui ferait, à ce moment-là, un sept contre deux et cela amène aussi l'explication du nombre de huit au comité plutôt qu'un nombre impair. (21 h 45)

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le Président, la mathématique, justement, à la lecture du projet de loi...

M. Lavigne: Ce sont des hypothèses.

M. Rivest: Effectivement, notre premier réflexe, c'est de regarder cela en disant: il va y avoir deux contre deux, trois qui vont arbitrer et le président.

M. Lavigne: On est tenté de le faire.

M. Rivest: Moi, il me semble que ce que j'essaie d'exprimer, c'est que je ne voudrais absolument pas cela, c'est pour cela que ma préférence serait que ce soient des gens, les meilleurs possible, les plus compétents, les plus disponibles qui seraient agréés par des organismes comme la Commission des droits et des libertés de la personne et qui ne se prêteraient pas par leur carrière, par leur conception des choses, à ce genre de choses, mais qui n'auraient -parce que c'est cela la dynamique première -finalement qu'une préoccupation, celle de dire devant des faits qu'on leur rapporterait, puisqu'il s'agit essentiellement de faits: Cela n'a pas de bon sens, il faut que cela cesse. Alors, ils retourneraient de bord et les aviseraient ou iraient voir le gouvernement pour lui dire: Voyez, telle situation n'a pas de bon sens sur les faits, ou encore ils iraient voir les parties et diraient: Vraiment, cela n'a pas d'allure.

D'autant plus que la partie expertise qu'ils peuvent avoir va leur être accessible par un autre article du projet de loi qui donne au conseil le pouvoir de s'adjoindre, d'abord du personnel, bien sûr, pour le conseil et pour ses fins propres et de fonctionnement, mais aussi des personnes - je ne me rappelle pas de quel article - qui connaissent le milieu - il y a un article qui indique cela. Moi, je voudrais que ce soient des généralistes - vous voyez un peu ma conception - qui diraient: Nous, notre mandat, c'est la santé et la sécurité publique; quand on a des faits qui nous indiquent ceci et puis là toute l'histoire d'être issue d'un milieu, d'être aussi avec l'autre, de ne pas donner la majorité à un milieu par rapport à l'autre et de placer, en quelque sorte, le paragraphe c, les trois bénéficiaires, c'est tout cela que j'aurais personnellement - je ne le sais pas, je ne l'ai pas discuté avec ma collègue de L'Acadie - mais je vous dis ce que j'en pense, c'est tout cela que j'aurais évité en mettant des généralistes, enfin dans...

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: Oui, oui, je comprends, M. le Président. Je voudrais juste ajouter un mot à ce qui a été dit. Je comprends la préoccupation du député de Jean-Talon. Il faut aussi, cependant, la coller à la réalité. Des gens prennent et peuvent prendre un certain recul par rapport aux expériences personnelles vécues de milieux de vie, que ce soit syndical ou patronal, et on peut aussi former l'hypothèse - parce que comme l'évoquait le député de Jean-Talon, on peut bien jouer avec la mathématique aussi - qu'il faut le voir d'une façon plus dynamique que cela. Il est fort possible que dans bon nombre de cas - c'est pour cela d'ailleurs qu'on ne voulait pas que ce soit agréé dans le sens de représentants pour qu'il y ait quand même une distanciation de prise par rapport à certaines expériences de vie vécues, d'une part. Mais si tant est qu'en fin de compte se présentent un ou des cas où il faut un arbitrage, la population et les représentants du public justement seront là.

M. Rivest: Je sais que c'est la perception, c'est cela qui donne - je le signale, c'est cela que je venais de dire à ma collègue - c'est cela qui a donné -d'ailleurs, j'ai un commentateur, ici, justement, j'avais une citation - à tout l'appareillage - au fond, c'est le réflexe tout à fait traditionnel du gouvernement ou des gouvernements ou des gens qui sont au

gouvernement - au niveau de la condition du conseil, son allure bureaucratique, alors que je pense que la nature - c'est le réflexe traditionnel. Le gouvernement a fait des choses, deux de ceci, deux de cela, trois de ceci, trois de cela; cela a toujours été comme cela dans toutes nos lois. Là-dedans, il s'agit de la santé et de la sécurité et je ne vois pas comment des gens de bon entendement, de bon jugement, qu'ils soient issus de n'importe quel milieu et qui ne peuvent pas exercer des jugements sur des réalités qui concernent des situations... Au fond, il ne s'agit pas de juger si cela est bon ou pas dans le domaine des relations du travail - c'est à juger si la santé ou la sécurité des gens est affectée et cela, c'est un jugement de sens commun. J'aimerais qu'il y ait des gens de sens commun, avec le meilleur sens commun possible. C'est cela qui a l'air bureaucratique parce qu'on dit: II faut en mettre deux qui viennent de milieux syndicaux ou enfin qui y sont issus, deux de cela et trois là. C'est tout cela qui donne à la mécanique du projet de loi un point qui risque peut-être d'empêcher - peut-être pas "empêcher", c'est trop fort - de nuire aux objectifs que, par ailleurs, on veut viser, que ce soient des jugements rapides, des jugements sains, de bons jugements de situation, et qu'on le dise, qu'on agisse très vite, parce qu'au Conseil des ministres, au fond, qui va exercer son jugement final, ce ne sont pas des gens qui sont issus de ceci et cela, qui sont ceci et qui sont cela, ce sont des gens qui sont élus, qui viennent de tous les milieux du monde. C'est un jugement politique dans le sens le plus noble du terme que le conseil va porter sur une situation qui va être de la même nature que le jugement que le Conseil des ministres va porter sur la situation. Ce sera un jugement politique dans le sens d'une situation. Ce sera exactement la même chose finalement qui va nous être présentée.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, on peut spéculer longtemps, ce sera ma dernière intervention sur ce point, on peut dire: II pourrait se passer ceci, il pourrait se passer cela. Il y a une chose que j'ajouterai, qui me vient à l'esprit en écoutant attentivement le député de Jean-Talon. Il me dit: Cela prend des gens qui ont un sens commun, le bon sens. Oui, justement. Cela prend aussi des gens qui ont une connaissance du milieu. Avoir une connaissance du milieu, cela n'exclut pas qu'on ait un sens commun non plus.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: En fait, c'est un peu dans le sens de la dernière intervention du ministre. Je pense que ce n'est pas parce qu'on a oeuvré une partie de sa vie dans un secteur d'activité donné. On prend juste l'exemple de Mme Lavoie-Roux, qui a oeuvré dans le milieu des commissions scolaires et qui a été choisie par les gens de son comté, qui est aujourd'hui députée. Je pense qu'elle ne perd pas pour autant son sens commun parce qu'elle a travaillé dans les commissions scolaires et qu'elle est capable de faire une analyse objective de certains dossiers. Je me dis que ce n'est pas parce que M. Dean a travaillé à un moment donné dans le milieu syndical et qu'il est aujourd'hui député qu'il fait un député biaisé. Je pense qu'il ne perd pas pour autant son sens commun. Par ailleurs, quand il est question d'analyser un dossier de conflit syndical-patronal, parce qu'il a travaillé dans le milieu, il est plus articulé, il va saisir des choses peut-être plus vite, plus rapidement qu'une personne qui n'y a jamais travaillé. Donc, c'est cet avantage qu'on se donne de mettre des gens dans ce conseil, qui ont déjà travaillé dans des milieux spécifiques et qui en sont retirés au moment où ils oeuvrent dans le comité, mais qui, par ailleurs, n'ont pas perdu pour autant leur sens commun.

M. Rivest: Si vous permettez, je m'excuse de prolonger la discussion, mais on parle du conseil. Le ministre, dans son projet de loi - je ne doute pas que des gens doivent connaître le milieu des relations du travail, que ce soit du côté patronal ou du côté syndical - a même prévu cela, mais pas dans le conseil. Il l'a prévu en mettant les personnes "issues de". On n'a pas besoin d'avoir cela, à mon avis, parce qu'à l'article 111.0.10, je vous donne l'exemple de l'adjoint parlementaire, vous avez bien raison, le conseil va avoir le personnel dont il a besoin pour fonctionner, "le conseil peut recourir aux services de personnes - dans l'ancienne version, on les appelait les "experts" - pour aider les parties à conclure une entente conformément aux articles, donc, une des missions est d'aider les parties - il y a donc une certaine connaissance des relations du travail et du vécu des relations du travail -pour le conseiller quant à l'évaluation des services prévus à une entente ou à une liste - pour évaluer la liste en ayant cette expertise des relations patronales-ouvrières, et aller jusqu'au bout - ou pour lui faire rapport sur le maintien des services essentiels lors d'une grève", donc en ayant une connaissance du vécu d'une situation de grève. Donc, cette expertise à laquelle se réfère le député, et avec raison, à mon avis, elle est déjà expressément prévue par les membres qui vont entourer les personnes du conseil, si bien que c'est un argument, à mon avis, additionnel qu'on n'a pas besoin,

au niveau du conseil, d'avoir nécessairement des personnes issues d'un milieu particulier -c'est une raison additionnelle - et que cela doit être des gens de bon jugement, comme je les ai appelés, mais des gens de sens commun. C'est cela mon point. Peut-être que le ministre...

Le Président (M. Rochefort): L'article 111.0.4 est-il adopté?

M. Marois: Je n'ai pas autre chose à ajouter. Ce que le député vient de faire, il vient de très bien expliquer l'article qu'il a commenté.

M. Rivest: Pardon?

M. Marois: Je disais que le député de Jean-Talon vient d'expliquer parfaitement le sens et la portée de l'article 111.0.10.

M. Rivest: Oui.

M. Marois: Bien. Mais ce qu'il a dit n'exclut pas l'autre pour autant.

M. Rivest: Ce n'est pas ce que j'ai dit, j'ai voulu dire qu'on n'avait pas besoin, au niveau de la composition du conseil, d'avoir des gens issus du milieu, parce qu'on a 110.0.10. C'est ça que j'ai dit.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

M. Marois: Oui, j'ai bien compris que c'est ça que vous aviez dit, mais l'un n'exclut pas l'autre, compte tenu des travaux et des responsabilités du conseil comme tel. Je ne reprendrai pas toute l'argumentation du député de Prévost, adjoint parlementaire.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais simplement parler dans le même sens que le député de Jean-Talon. C'est évident que par cette formule on recrée, au niveau du conseil, le genre de conflit qui existe à l'occasion d'une négociation de convention collective. Ce que je crains, en plus du fait que les uns, malgré eux, se sentent un peu représentants - même si vous dites "issus" et non pas "représentants" - du milieu syndical et les autres du milieu patronal, que les trois personnes qui vont assister à cela, il y a de forts risques, par rapport aux spécialisations des personnes provenant les unes du milieu patronal et les autres du milieu syndical, qu'elles portent bien davantage un jugement qui soit influencé par les arguments d'une partie ou de l'autre.

Le député de Beauharnois donnait comme exemple que, du fait que l'adjoint parlementaire du ministre du Travail a oeuvré dans le domaine syndical, cela n'implique pas nécessairement que, comme député, il ne soit pas capable de faire un travail objectif, un travail qui ne soit pas biaisé. Ce qu'il faut bien rappeler, c'est qu'il a aussi donné comme exemple mon expérience passée. Dans le cas du député de Prévost comme dans le mien, il faut bien dire que maintenant nous sommes élus par la population et que nos comptes, nous les rendons à la population qui, la prochaine fois, décidera si elle en a assez de nous ou si elle veut renouveler notre mandat, ce qui nous met dans une situation très différente. Pour moi, il n'y a pas de comparaison possible avec les autres personnes qui sont issues du milieu syndical ou du milieu patronal.

M. Rivest: Un administrateur scolaire et un syndicaliste, deux bonnes nominations!

M. Marois: Le député vient d'illustrer parfaitement ma pensée!

M. Lavigne: Tout ça a été repris du discours du député de Beauharnois, M. le Président...

Mme Lavoie-Roux: Mais, strictement parlant, à mon point de vue, ce n'est pas comparable parce que ce sont fonctions tout à fait différentes; les gens qui seront nommés n'auront à répondre qu'au gouvernement qui les aura choisis et nommés.

Pour ne pas prolonger cette discussion et comme ça nous paraît extrêmement important, j'aimerais faire l'amendement suivant, M. le Président: Que le paragraphe 111.0.4 de l'article 6 soit remplacé par le suivant: "Les membres du conseil sont nommés après consultation de la Commission des droits de la personne, de l'Office des personnes handicapées du Québec, du Comité de la protection de la jeunesse, du Protecteur du citoyen, des associations de salariés et d'employés dans le domaine des services publics et dans celui de la santé et des services sociaux ou d'autres organismes ou associations."

M. Rivest: Ce serait parfait, ça n'enlève aucunement...

Mme Lavoie-Roux: Cela n'enlève absolument rien.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que je peux avoir une copie de votre amendement?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Rivest: II pourra, s'il le veut, prendre quelqu'un issu d'un milieu ou d'un autre. Cela ne lui donnera aucune marge, mais ça donne une tout autre perspective au conseil.

Mme Lavoie-Roux: Ce ne sont pas des mauvais amendements qu'on vous présente.

Le Président CM. Rochefort): Vous remplacez...

Une voix: Pourriez-vous le relire, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Président (M. Rochefort): Je vais essayer de commencer par comprendre avant de vous le relire, si vous le permettez. Vous remplacez a, b et c, c'est ça?

M. Rivest: On a un bon recherchiste, mais il écrit très mal.

Mme Lavoie-Roux: Moi qui venais de lui dire qu'il écrivait bien! (22 heures)

Le Président (M. Rochefort): Cela va. La proposition d'amendement est recevable. Je vais maintenant tenter de vous la lire. Le paragraphe 111.0.4 de l'article 6 est remplacé par le suivant: "Les membres du conseil sont nommés après consultation de la Commission des droits de la personne, de l'Office des personnes handicapées du Québec, du Comité de la protection de la jeunesse, du Protecteur du citoyen, des associations de salariés et d'employeurs dans le domaine des services publics et dans celui de la santé et des services sociaux, d'autres personnes, organismes ou associations." Est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

Mme Lavoie-Roux: On dit dans l'article 02, c'est 8.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cette motion à l'amendement est adoptée?

M. Marois: Non.

Le Président (M. Rochefort): Non. M. l'adjoint parlementaire.

M. Dean: On comprend et comme nos amis l'ont souvent souligné, cela a pris du temps pour accoucher d'un projet de loi et on dit que c'est parce que c'était complexe, parce que c'est humain, parce que c'est une question de charge émotive. Il est vrai qu'on a tout exploré. Ce n'est pas parce qu'on est plus fins que d'autres, mais on a entendu 55 opinions avec à peu près 355 options différentes presque sur chaque question. On a pesé le tout et on a essayé de faire quelque chose avec cela. Il me semble qu'il y a un symbole et un fait pratique dans cette affaire, c'est que dans le diagnostic du... Une voix: ...

M. Dean: ...attends une minute, mosus, c'est "tough" de choisir ses mots. Voulez-vous que je fasse écrire mes textes par quelqu'un?

Le Président (M. Rochefort): Vous avez la parole.

M. Dean: C'est qu'on a une société où on dit: On est déchiré, il y a des choses qui ne se font pas bien dans une situation et on dit qu'il y a des valeurs qui devraient surpasser, dépasser ou transcender - je ne sais pas si c'est un bon mot - les intérêts égoïstes de différentes parties. Mme la députée de L'Acadie a parlé de modèle de conflit, mais peut-être est-ce un modèle de conflit dans ce sens qu'on amène deux parties en conflit et une autre partie qui paie, qui a des droits et qui subit ces conflits et on les amène, en quelque sorte, à la même table dans l'espoir de faire en sorte qu'il se dégage non pas un conflit, mais un consensus basé sur des valeurs supérieures aux allégeances de chacun de ces groupes. Il me semble qu'un représentant syndical dans le groupe dit "flyé", je ne pense pas qu'il accepterait de siéger sur le conseil. Un patron borné consacré absolument à gagner tous ses conflits à 100%, je ne pense pas qu'il accepterait d'aller là. Pour essayer d'indiquer ce qui peut être utile dans cette formule et un peu pour répliquer à l'argument basé sur l'utilisation des experts, c'est que l'expert est une personne qui a des connaissances techniques et sans doute des compétences humaines. Dans l'établissement, il est chargé d'évaluer des faits et aussi de concilier les parties, mais il fait aussi son rapport au conseil. On va utiliser un bon exemple, celui de Mme la députée de L'Acadie et le mien. Je suis membre du conseil. Je ne retire pas un salaire seulement pour recevoir des papiers, les estampiller "oui" ou les estampiller "non", et les transmettre dans un sens ou dans l'autre. Rendu au conseil, je suis un ancien syndicaliste. On constate un problème. L'expert, lui, a vu des faits, est chargé au meilleur de ses connaissances d'interpréter le protocole-cadre dans une situation de fait et de travailler avec les parties, mais, quand son rapport est fait, on constate qu'il y a quelque chose de pas correct. C'est bien beau qu'il retourne à l'établissement avec une autre directive et qu'il essaie d'amener les parties à un terrain d'entente, mais il peut être très utile et, il me semble, non seulement utile, mais essentiel à la fonction que j'agisse. Si le problème appelle un comportement syndical, comme ancien syndicaliste, je connais M. Untel qui est en

poste, à un poste supérieur dans le syndicat, la fédération ou la centrale. Mme la députée de L'Acadie a des contacts. Elle est issue d'un milieu. Elle connaît des gens. Elle a du prestige là-dedans. Autrement, elle n'aurait pas été agréée. C'est quelqu'un qui est bien connu ou relativement bien connu et qui a non seulement des connaissances du milieu, des connaissances techniques, mais aussi des contacts, comme on dit. Devant un comportement patronal difficile, ce n'est peut-être pas au niveau de l'établissement que le problème ou une pression morale pourrait s'exercer ou un appel. Écoute, veux-tu parler à ton monde sur le plan de l'établissement. Cela n'a pas d'allure. Voici ce qui se passe. Veux-tu aller influencer cette personne pour l'amener dans la bonne direction? Je pense que c'est ce rôle de conciliateur, de médiateur sage de la société que seront appelés à exercer les membres du conseil.

Quant au dernier point, vous avez bien fait, Mme la députée de L'Acadie, de faire une distinction entre une personne élue politiquement, un député, et la personne qui fait partie du conseil, mais cette personne ayant aussi accepté une charge publique, elle a elle aussi une certaine responsabilité politique dans ce sens vis-à-vis de la population, vis-à-vis du bien commun et vis-à-vis de ceux qui l'ont nommée. Si elle fait mal son travail, elle ne restera pas là longtemps. Il me semble que tous ces facteurs justifient les choix que le gouvernement a faits.

M. Rivest: La seule chose...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: ...très brièvement, tout ce que le député vient d'évoquer, franchement, je n'ai pas d'objection à cela, c'est que le texte de l'amendement de Mme la députée de L'Acadie n'empêche absolument pas le ministre ou le gouvernement, puisque ce sera lui qui désignera les personnes et qui verra à les nommer, de faire cela, de prendre des gens "issus de", mais qui ne sont pas "représentants de". Il pourra prendre tout cela. Il n'y a absolument rien dans le texte de l'amendement de Mme la députée de L'Acadie qui l'empêche, mais une chose est claire à ce moment-là, c'est que le texte dit des choses, bon, très bien, mais c'est encore et toujours la même chose que j'exprime de la façon suivante: c'est la crédibilité du conseil qui est en cause. Il faut qu'il soit crédible dans sa composition et il faut surtout qu'il apparaisse crédible à tout le monde. Si, en fait, dans la lettre, dans l'institution et dans le texte de loi, on dit "issu de", vous avez simplement une perception qui n'est sans doute pas de mauvaise foi, mais qui n'est pas exacte. Regardez ce que cela donne. Elle n'est pas exacte. Prenez la Presse, par exemple, du mercredi 2 juin, à l'éditorial de M. Vincent Prince. C'est certainement un journaliste qui fait bien son boulot, qui a certes ses opinions, mais regardez comment un homme comme M. Vincent Prince, qui a de l'expérience, lit cet article et dit: "D'autre part, en raison encore de sa composition qui comprend des représentants patronaux et des représentants syndicaux, on est en droit de présumer que sa prise de décision sera très ardue. On sera porté tout simplement à y poursuivre la négociation." M. Prince, à mon avis, fait une erreur de lecture du projet de loi, parce que ce ne seront pas des représentants patronaux et des représentants syndicaux. Mais il en a fait cette lecture parce que vous avez inscrit dans le conseil, a, b, c et il n'est pas le seul qui a fait cette lecture. Déjà, dans l'esprit de M. Vincent Prince, regardez ce qui arrive en faisant une mauvaise lecture, une lecture erronée, au fond, du projet de loi. Son jugement est qu'il entache à l'avance, par les remarques et le propos qu'il tient, la crédibilité de cela, alors que, s'il avait eu le texte de Mme la députée de L'Acadie, le ministre aurait été absolument libre de choisir. Je pense que cela peut se justifier, malgré que je trouve que c'est un peu redondant avec le fait que le conseil peut le faire au niveau des personnes. La crédibilité du conseil - c'est notre démarche ce soir, ce dont on essaie de vous convaincre - ne serait pas entachée si le texte de Mme la députée de L'Acadie était accepté par le gouvernement ou par le ministre.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marois: On me permettra d'ajouter un commentaire. Si je comprends bien, chacun fait la lecture du mieux qu'il peut du texte de loi comme tel. Le député de Jean-Talon vient de donner une bonne illustration d'une certaine lecture qui donne une certaine perception des choses et, dit-il, qui entache la crédibilité. Je dirais qu'au bout du compte on a quand même tenu à démarquer des choses; ce n'est pas pour rien qu'on l'a formulé. Je ne veux pas reprendre toutes les explications, ce qui n'exclut absolument pas la consultation croisée qui a été évoquée.

On verra quelle sera l'opinion de M. Prince, pour prendre ce cas-là - on pourrait en citer beaucoup d'autres - lorsque les personnes seront nommées, sur la personnalité de ces gens, sur leur compétence. C'est une clé de la crédibilité. Je voudrais ajouter deux choses, parce qu'on présente cela comme si les choses allaient presque mathématiquement, automatiquement se braquer, se polariser et le reste. Il faut

bien voir comment les choses vont se présenter. Dans l'hypothèse où vous avez quelqu'un qui viendrait du milieu des services publics, issu du syndical ou issu du patronal, peu importe, quelqu'un issu du syndical ou du patronal du milieu des services sociaux et des services de santé - ce n'est pas du tout, dans ce sens, le même type de composition que l'ancien conseil - cela commence à faire des côtes à remonter avant qu'on en arrive à ce niveau de polarisation et de braquage qui impliquerait automatiquement, comme une espèce de fonctionnement systématique, que les représentants du public soient systématiquement et constamment des arbitres, pas du tout.

Je voudrais aussi ajouter un dernier commentaire. Le député de Jean-Talon, en faisant ses commentaires sur le mode de nomination des gens du conseil, a commenté avec justesse d'ailleurs 111.0.10. Il faut faire bien attention à ne pas confondre les deux. Je vais illustrer ma pensée. L'issu, par exemple, des services publics pourrait fort bien, imaginons, être quelqu'un qui viendrait d'Hydro-Québec et qui siégerait sur le conseil. Cela ne signifie pas pour autant qu'il s'agit d'une personne qui est familière, qui connaît bien le fonctionnement, les problèmes techniques de fonctionnement, par exemple, du transport en commun à Montréal. Donc, il faut faire une distinction - c'est pour cela, d'ailleurs, que l'autre article, 111.0.10, est là - quant à la possibilité de mettre à contribution ad hoc, pour une période X de temps, des personnes-ressources pour procéder à l'évaluation d'une situation donnée dans un milieu donné et faire rapport au conseil. (22 h 15)

M. Rivest: Si vous permettez, s'il n'a pas besoin à cause de l'article 111.0.10 où on mentionne les personnes... Le type qui viendrait de la partie patronale d'Hydro, pour prendre votre exemple, vous dites, et avec raison, qu'il ne peut connaître les problèmes techniques du transport en commun. De toute façon, l'article 111.0.10 va fournir cette expertise dans le transport en commun au conseil. Alors, où est le besoin qu'ils viennent de la partie patronale d'un service public, soit Hydro?

M Marois: Mais pour toutes les autres raisons qui ont été évoquées depuis le début.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cette motion est adoptée?

Mme Lavoie-Roux: Non, M. le Président. Quant à moi, je suis prête à ce qu'on prenne le vote nominal.

Le Président (M. Rochefort): Vote nominal. J'appelle donc le vote sur la motion d'amendement à l'article 6, 111.0.4 qui se lit comme suit: Que le paragraphe 111.0.4 de l'article 6 soit remplacé par le suivant: "Les membres du conseil sont nommés après consultation de la Commission des droits de la personne, de l'Office des personnes handicapées du Québec, du Comité de la protection de la jeunesse, du Protecteur du citoyen, des associations de salariés et d'employeurs dans le domaine des services publics et dans celui de la santé et des services sociaux, d'autres personnes, organismes ou associations."

M. Bisaillon (Sainte-Marie). M. Brassard (Lac-Saint-Jean). Mme Lavoie-Roux

(L'Acadie).

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Dean (Prévost).

M. Dean: Contre.

Le Président (M. Rochefort): Mme

Dougherty (Jacques-Cartier). Mme Harel (Maisonneuve).

Mme Harel: Contre.

M. Rivest: Ah! Contre quoi?

Le Président (M. Rochefort): M.

Lavigne (Beauharnois).

M. Lavigne: Contre.

Mme Harel: La non-représentation.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît! M. Lavigne (Beauharnois).

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Marois (Marie-Victorin).

M. Marois: Contre.

Le Président (M. Rochefort): M. Perron (Duplessis). M. Rivest (Jean-Talon).

M. Rivest: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Sirros (Laurier). Il n'est pas ici.

Alors, cette motion d'amendement est rejetée; quatre contre, deux pour. Nous revenons donc au texte initial 111.0.4.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: J'ai été surprise que, dans les groupes qui seront consultés

quant aux trois personnes choisies en c, on ait retranché le Comité provincial des malades. Avant que j'aille plus loin, peut-être que le ministre peut me donner une réponse.

M. Marois: La raison, je pense que Mme la députée s'en souviendra. Durant le témoignage même du comité des malades -on pourra faire un relevé très précis de nos délibérations - j'avais posé très précisément la question au comité des malades - j'ai eu l'occasion de les revoir depuis - et c'est eux-mêmes qui l'avaient demandé. Alors, on a acquiescé à cette demande. C'est la seule et unique raison. Cela étant dit, donc, le libellé du texte reprend sensiblement ce qui était déjà dans le code, à cette exception près, que Mme la députée de L'Acadie vient de mentionner. Il s'agit d'un certain nombre d'organismes qui, en d'autres termes, doivent être consultés, ce qui n'en exclut absolument pas d'autres. C'est, cependant, je me permets de le dire, mon intention de les consulter de toute façon.

Mme Lavoie-Roux: Alors, il faut les ajouter en troisième lecture.

M. Marois: Ahî ce n'est pas pour les... Non, je n'ajouterais pas le nom du groupe dans le texte, à moins qu'ils ne le demandent, pour une simple et unique raison, on s'en souviendra, c'est eux-mêmes qui l'avaient demandé. C'est cela la raison.

Mme Lavoie-Roux: J'ai oublié, mais c'est possible. Je ne mets pas en doute la...

M. Marois: Mais, c'est certainement mon intention de les consulter.

M. Rivest: II y a l'autre... Allez-y. Ah! Vous pouvez parler dans mon microphone. La voix du Parti libéral est...

Mme Lavoie-Roux: Non, ce qui m'étonne, c'est que dans les groupes qui sont consultés expressément, tous les groupes sont des organismes gouvernementaux; évidemment, les membres de la Commission des droits de la personne sont nommés par les deux tiers des voix de l'Assemblée nationale; l'Office des personnes handicapées, c'est une nomination gouvernementale; le Comité de la protection de la jeunesse, c'est la même chose; pour le Protecteur du citoyen, il y a aussi cette garantie de la nomination aux deux tiers des voix de l'Assemblée nationale et pour d'autres personnes ou organismes qu'on ne connaît pas. Peut-être que vous avez en tête le Comité provincial des malades, entre autres, mais il me semble que les personnes sont toutes choisies par des organismes gouvernementaux, c'est-à-dire que les organismes consultés sont des organismes gouvernementaux.

M. Marois: Effectivement, pour ceux qui sont nommés, c'est exact; dire le contraire serait inexact, mais j'ai bien pris la peine d'ajouter "et d'autres personnes ou organismes". Ce que j'avais en tête, et j'avoue honnêtement que je trouve un peu délicate la discussion qu'on a là et je crois qu'on me comprendra facilement; encore une fois, on pourra procéder à un relevé de cela. Le comité des malades qui était...

Mme Lavoie-Roux: J'oublie cela, je le laisse de côté.

M. Marois: Je veux bien que vous l'oubliiez, mais moi je ne l'oublie pas, et je tiens à être très précis parce que, comme c'est évoqué, ça peut apparaître, à première vue, un peu, ça peut même apparaître mesquin...

Mme Lavoie-Roux: J'ai accepté l'explication du ministre là-dessus.

M. Marois: ...d'enlever ce comité, mais il m'apparaissait important d'ouvrir la porte par le membre de phrase qui dit: "et d'autres personnes ou organismes"; donc ce n'est absolument pas exclusif, cela évite de nommer, cela permet de consulter d'une façon plus large.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais je ne vois pas ce qu'il y a de délicat à vous le demander; pour le Comité provincial des malades, on s'entend, je prends la parole du ministre, je ne l'ai pas mise en doute du tout; d'ailleurs, on aura juste à faire le relevé et vaguement, maintenant que vous l'avez dit, peut-être que je pense même m'en souvenir un peu. Mais quels sont les autres personnes ou organismes que vous avez en vue?

M. Marois: Notamment, l'association dont on vient de parler et on pourrait aussi reprendre...

Mme Lavoie-Roux: ...par exemple.

M. Marois: Par exemple; AFEAS, par exemple. Reprenons la liste. On en a eu combien? 55, 56, tout près de 60, si ma mémoire est bonne. Si vous reprenez la liste, on peut en faire le relevé d'un certain nombre. Ceux qui ont été mentionnés là l'ont été... D'abord, pour l'essentiel, ça reproduisait ce qui était déjà mentionné dans le code. Ce qui était mentionné de façon non limitative, ce n'est pas parce qu'il s'agit d'organismes gouvernementaux, mais plutôt en raison de leur finalité ou de leur vocation. Pour le reste, je me permets de

retourner Mme la députée de L'Acadie à la liste des groupes de personnes qui sont venus témoigner devant nous. Je viens de mentionner quelques-uns des organismes. On pourrait relever la liste.

Mme Lavoie-Roux: Alors, cela va.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.4 est-il adopté?

M. Rivest: Sur division, pour manifester notre souci de préserver la crédibilité du conseil et de ses décisions.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.5 est-il adopté?

M. Rivest: Deux remarques.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Évidemment, le conseil est permanent, il va avoir des choses à faire en dehors des rondes de négociations.

M. Marois: Oui, j'écoute le député.

M. Rivest: Le conseil va avoir des choses à faire en dehors des périodes où on établit les listes, enfin les 90 jours qui précèdent... Oui, probablement, parce qu'à l'expiration des conventions collectives, étant donné qu'il y a un service public, et les dates, c'est comme... Est-ce que vous avez vérifié un peu le mécanisme de tout cela? Y a-t-il un volume? J'imagine que vous vous êtes interrogés sur cela. Il n'y aura pas d'espace, à un moment donné, où il n'y aura strictement rien à faire?

M. Marois: Un vide complet risque fort de se présenter rarement, j'ai l'impression. Enfin, même dans l'hypothèse...

M. Rivest: Même mince à l'occasion, pendant quelques mois?

M. Marois: Cela pourrait être mince à l'occasion oui, effectivement. Cependant il est aussi prévu qu'après l'exercice... Oui, mais j'ai entendu le député dire: "Cela coûte cher, M. le Président". D'après l'évaluation qu'on fait - d'ailleurs on se souviendra qu'on a eu cette discussion au moment de l'examen des crédits du ministère - on abolit, d'une part, un organisme qui était le conseil d'information. Il y a des économies et il y a des coûts. Si tant est que c'est vrai, c'est à peu près l'ordre de grandeur, je l'avais mentionné au moment de l'étude des crédits. Après la ronde de négociations, celle à laquelle tout le monde pense, règle générale, le conseil va aussi avoir à dresser un bilan complet du déroulement des négociations. On va avoir à mettre à jour des données factuelles en ce qui a trait au maintien des services dans les établissements du réseau. On va avoir à améliorer le contenu, déterminer des paramètres qui pourraient apparaître au protocole-cadre, et le reste. C'est cela.

M. Rivest: Est-ce que les membres du conseil qui sont nommés, je comprends qu'ils sont nommés en permanence - je ne me rappelle pas l'avoir vu - sont à temps plein?

M. Marois: Les membres du conseil, oui.

M. Rivest: Nulle part dans le texte de loi c'est dit qu'ils sont à temps plein. Dans certaines lois, je le dis comme cela simplement de mémoire, on prend la peine de le préciser.

M. Marois: Je prends note du commentaire du député et je vais vérifier.

Effectivement, dans certaines lois concernant en certains cas certaines commissions, en nombre tout de même limité, il a semblé pertinent d'ajouter et de préciser à temps plein. Le fait de la permanence, règle générale, en droit, comme c'est le cas présentement, le fait d'une nomination pour une période donnée tel que c'est libellé avec les additions prévues à l'article 111.0.6, etc.

M. Rivest: Je veux bien le croire, mais effectivement on le met dans plusieurs lois, pas seulement pour la raison que je crois déceler dans les remarques du ministre. On le retrouve très souvent. Il peut y avoir des cas particuliers, j'en conviens volontiers. À ce moment il y a la règle. Peuvent-ils occuper un autre emploi? Est-ce que même le ministre pourrait confier, par exemple, à ces personnes, dans les moments où il y aurait moins de choses, certains travaux qui seraient connexes à leurs responsabilités ou à leur expertise? Je ne sais pas. Je signale cela parce que tout le monde a dit: C'est bien beau un organisme permanent. La question qui est venue souvent dans les témoignages c'est: Mais est-ce qu'il va y avoir de l'ouvrage sur une base permanente? Vous devriez vous mettre...

Mme Lavoie-Roux: Le fait que vous fixiez leur traitement, les traitements additionnels, les allocations et les honoraires des membres du conseil, est-ce qu'à ce moment ce n'est pas un...

M. Rivest: C'est la formule usuelle. C'est toujours ainsi. (22 h 30)

M. Marois: Oui, c'est le texte classique. Par exemple, dans la loi no 17 sur la santé

et la sécurité du travail, il y a un article qui dit: Le président et les vice-présidents doivent s'occuper exclusivement des devoirs de leur fonction. On me dit que, en règle générale, on ne l'écrit pas. Mais, quant à moi, je n'ai pas de...

Mme Lavoie-Roux: Bien, cela existe à l'Office des garderies et à l'Office de la langue française. Il me semble que, si, dans votre esprit, ce doit être un emploi à temps plein, ce devrait être à temps plein.

M. Marois: Je ne vois pas d'objection.

M. Rivest: Alors, on va vous laisser faire l'amendement, M. le ministre, parce que nous avons très peu de succès avec nos amendements et on ne voudrait pas améliorer notre moyenne.

M. Lavigne: Allez-vous voter pour si on...

M. Rivest: Nous déciderons sur le bien-fondé. On ne se prononce pas avant d'avoir vu les textes. Pas comme vous.

M. Lavigne: C'est rare que vous votez sur un amendement du gouvernement.

M. Marais: Alors, M. le Président, les gens vont travailler sur le projet.

Le Président (M. Gagnon): Alors, on va suspendre l'article pour le moment?

M. Rivest: Oui, c'est cela. Oui, il n'y en a plus d'autres. Oui, attendez, c'est un autre, je ne voudrais pas compliquer... C'est cinq ans pour le président et trois ans fermes pour les autres. Il n'est pas question de rotation, c'est beaucoup trop compliqué.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.5 est suspendu, on va y revenir tantôt. 111.0.6 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoîe-Roux: Non, qu'est-ce que vous voulez dire par les...

M. Rivest: Celui qui est suspendu, M. le Président, je suis d'accord pour les fins de l'amendement...

Mme Lavoie-Roux: "Le gouvernement fixe le traitement ou, s'il y a lieu, les traitements additionnels". Qu'est-ce que vous entendez par "traitements additionnels"? C'est-à-dire que je comprends bien ce que cela veut dire mais...

Une voix: Ils sont en plus, mais pourquoi?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Marois: Or, c'est la formule classique pour prévoir le paiement de frais de déplacement, frais de voyage et le reste.

M. Rivest: M. le ministre, c'est fini?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Là-dessus, M. le ministre, étant donné que vous incluez les services publics dont certaines entreprises sont privées, ordures ménagères, électricité, gaz et tout cela, est-ce que ce ne sera pas également utile que vous examiniez la clause usuelle qu'on retrouve dans plusieurs projets de loi sur les conflits d'intérêts?

M. Marois: Selon le commentaire qu'on me fait, la clause sur les conflits d'intérêts, on la retrouve toujours dans les textes de loi où les membres peuvent être en situation de conflits d'ordre financier.

M. Rivest: Le ministre dit que la clause de conflit d'intérêts est strictement d'ordre financier; mais il ne faut pas oublier évidemment, on pense toujours en perspective de grève, en termes de grève, c'est notre première réflexion - comme il y a des entreprises privées, il y a toute la question du lock-out. Une personne qui se trouverait issue d'une entreprise privée qui aurait une fonction là-dedans et qui aurait des liens avec celle-là, il peut y avoir quelque chose... Je me demande si effectivement - j'aimerais bien vérifier le texte, je le dis comme cela parce que je m'excuse, cela m'est venu comme cela - les clauses de conflit d'intérêts dans nos lois ne réfèrent qu'à des questions financières, je n'en suis pas sûr. Le plus souvent, c'est évident, c'est le conflit d'intérêts pécuniaire.

M. Marois: Et en plus, dans les cas de fonction élective.

M. Rivest: Je m'excuse, je ne sais absolument pas ce que le ministre veut dire par là.

M. Marois: Bien, dans les fonctions électives, dans les fonctions où des gens sont élus.

M. Rivest: Non. Parce que dans le... M. Marois: Conseillers municipaux.

M. Rivest: Vérifiez les clauses des administrateurs de REXFOR, SGF, tout cela,

il y a toutes les clauses comme cela.

M. Marois: Oui. Alors là, le député rejoint l'argument pécuniaire, bien sûr.

M. Rivest: Peut-être, en tout cas. Je le signale comme ça, je n'en fais pas un drame. Cela ne m'apparaît pas tellement... Enfin, ce serait assez étonnant qu'on arrive avec une situation comme celle-là. On ne sait jamais.

Mme Lavoie-Roux: Dans la Charte de la langue française, le président a une clause de conflit d'intérêts, et il n'est pas élu, il est nommé.

M. Dean: Je pense qu'il y en a aussi dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, au niveau des CRSSS, dont un certain nombre sont nommés, à moins que je me trompe.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

Mme Lavoie-Roux: À la Commission des normes minimales, est-ce qu'il n'y a pas cette clause?

M. Marois: Oui, cette clause concernant le temps plein.

Mme Lavoie-Roux: Conflit d'intérêts.

M. Marois: C'est possible, je me souviens très bien du temps plein.

M. Rivest: Quelqu'un qui vient du conseil d'administration d'une compagnie de gaz - mettons que vous pensiez à celui-là -il siège au conseil, ça va, il remplit bien son mandat. Survient un problème à cette compagnie qui met en cause l'affaire; il doit émettre un avis sur les listes, et les ententes que sa compagnie peut avoir existent, qu'est-ce qui arrive? J'imagine que cela ne fera pas des drames, mais comme à chaque fois qu'on le met dans une loi, on ne le met pas pour rien. Vous savez, c'est toujours, encore là, la crédibilité de l'organisme. Si cela arrivait? Si jamais cela arrivait? On en trouve des affaires.

M. Marois: Je songe à la possibilité.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, moi je regrette, quand on me dit que les traitements additionnels sont des allocations de déplacement, un traitement, c'est un salaire. En français, c'est un salaire. Alors, quand vous parlez de traitement ou, s'il y a lieu, de traitement additionnel, j'aimerais bien qu'on me donne des explications.

M. Marois: C'est la formule qu'on retrouve...

Mme Lavoie-Roux: Elle n'est peut-être pas bonne.

M. Marois: Peut-être qu'elle n'est pas bonne; sur le plan du français, souvent il y a un léger écart entre le sens commun, en français, de certaines expressions et le sens juridique aussi de certaines expressions.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Marois: C'est la formule usuelle. Je vous cite un autre texte: "Le gouvernement fixe le traitement ou, s'il y a lieu, les traitements additionnels, les honoraires ou les allocations de chaque membre du conseil d'administration."

M. Rivest: Ce doivent être les primes de séparation.

Mme Lavoie-Roux: Dans quel texte?

M. Marois: Dans la loi 17. Cela permet la marge de manoeuvre. C'est la formule habituelle.

Mme Lavoie-Roux: Dans la loi aussi de l'Office de la langue française, les honoraires, les allocations ou le traitement du président et des autres membres de l'office. Pour moi, je regrette, quand on dit un traitement et qu'on dit un traitement en plus, c'est un autre salaire.

M. Rivest: Ce n'est pas l'idée qu'ils vont travailler sur des périodes très fortes, qu'ils doivent faire du surtemps ou je ne sais trop. C'est absolument insensé, si c'est ça.

Mme Lavoie-Roux: Écoutez, ce n'est pas autre chose que ça. Maintenant, M. le député de Prévost, regardez ça; le traitement ou, s'il y a lieu, d'autres traitements.

M. Lavigne: Comme nous autres ce soir.

Mme Lavoie-Roux: C'est bien ce que cela veut dire.

M. Marois: La seule raison de la formulation, si tant est qu'elle n'est pas bonne - on peut bien regarder les corrections qui peuvent s'imposer - c'est la formule classique qu'on retrouve habituellement. On me cite un cas d'exception, mais c'est la formule usuelle.

M. Rivest: On l'a pris au hasard.

Mme Lavoie-Roux: Oui, on l'a pris au hasard, un cas d'exception. On n'a pas fait de recherche.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je voudrais qu'on dispose de cela.

Mme Lavoie-Roux: Moi, je vais faire un amendement pour le retrancher.

M. Rivest: Avant que madame fasse son amendement, pour compléter la discussion, je vais citer une loi, l'évangile, rien de moins: la loi 101. Je suis convaincu qu'il va me donner raison. Conflit d'intérêts pécuniaire, ce que le ministre disait du bout des lèvres en ayant l'air de dire: J'espère qu'il n'y a pas d'autres textes qui sont non pécuniaires. Voici un texte de la Charte de la langue française et c'est exactement le cas que j'ai cité: "Les membres de l'Office de la langue française ne peuvent prendre part aux délibérations sur une question dans laquelle ils ont un intérêt personnel. L'office décide s'ils ont un intérêt personnel dans la question. Les membres en cause ne peuvent participer à cette décision". Voilà un texte qui me paraîtrait très bien répondre au problème que je soulevais et c'est l'évangile, selon saint Camille, verset 107.

M. Marois: Dans l'exemple que vient de prendre le député, les membres sont à temps plein, tous?

M. Rivest: À l'office? M. Marois: Oui.

M. Rivest: Je ne parle pas de temps plein, je parle de conflit d'intérêts.

M. Marois: Oui, bien sûr.

M. Rivest: C'est la même chose, là aussi, ils sont à temps plein, les vôtres, en ce moment.

Mme Lavoie-Roux: Une correction que je voudrais faire...

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je ne voulais vraiment pas induire...

Une voix: C'est parce qu'on parle de deux choses en même temps.

Mme Lavoie-Roux: ... la commission en erreur.

M. Rivest: Le ministre est capable d'en prendre.

Mme Lavoie-Roux: Quand je vous ai dit: Le gouvernement fixe les honoraires, les allocations et le traitement du président et des autres membres de l'office, je pensais que c'était fini. C'est "ou, le cas échéant, leur traitement supplémentaire." Je vous le dis, parce que je n'ai pas voulu vous tromper.

M. Marois: C'est la formule.

M. Lavigne: M. le Président, si vous me permettez...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: ... une interprétation à ma façon. C'est qu'il y aurait le traitement qui est le salaire de base ou des traitements ou un traitement additionnel qui serait les allocations.

Mme Lavoie-Roux: Non, un traitement est un salaire. Vous ne pouvez pas en sortir; c'est un salaire, un traitement. Ce que cela veut dire, c'est que la personne reçoit son salaire qui est fixé et on prévoit une possibilité de traitement supplémentaire. Je trouve cela absolument inadmissible parce que ce sont des personnes qui ont des salaires plus que convenables, qui les méritent sans aucun doute, ce n'est pas ce que je veux mettre en question. Quand on est rendu à introduire cela dans les lois - et il me semble que ce soit dans toutes les lois, je ne l'avais jamais remarqué - je trouve cela tout à fait anormal.

M. Lavigne: II faudrait enlever les traitements additionnels, et mettre: "s'il y a lieu, les allocations, honoraires..."

Mme Lavoie-Roux: Où je suis arrêtée dans ma lecture sans le vouloir.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Oui, M. le Président, je comprends cette recherche profonde de l'Opposition pour bonifier le projet de loi.

Mme Lavoie-Roux: C'est important.

M. Marois: Prenons, par exemple, le cas des conflits d'intérêts. Le député me donnait un exemple - pourriez-vous mettre à la disposition du député l'autre gros document -c'est très bien, on comprend parfaitement bien le sens et la portée. Introduisons une notion de conflit d'intérêts tel qu'il vient de le définir au sens large dans le texte qui est là. Qu'est-ce qui arrive si un malin, un avocat particulièrement compétent et qualifié, a été nommé sur le conseil et que cette personne est issue de...? Est-ce qu'en

droit je ne pourrais pas prétendre que cette personne est en situation de conflit d'intérêts basé sur sa simple provenance, compte tenu des décisions qu'elle a à prendre?

M. Rivest: Oui, mais, M. le ministre, votre conseil n'a aucun pouvoir décisionnel au sens judiciaire du terme. Donc, cela ne donnerait pas ouverture à une contestation d'ordre légal, ce conseil ne décide rien. Je parle de décider dans le sens de créer des droits et des obligations à quiconque. C'est l'expression du caractère. Donc, cela ne donne absolument aucune espèce d'ouverture, mais c'est toujours au niveau de la crédibilité de l'office. J'ai même un autre texte où il s'agit de l'Office de la radio-télédiffusion du Québec, l'autre télévision. "Aucun membre de l'office ne peut, sous peine de déchéance de sa charge, avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise, mettant en conflit son... (22 h 45)

Voyez, il y a toutes sortes de formulations dans les lois, sauf que je vous demanderais de regarder cela non dans une perspective d'ouverture au recours judiciaire - ce n'est pas possible, ce n'est pas un organisme quasi judiciaire le conseil - mais dans la perspective d'une garantie absolue de la crédibilité des avis du conseil. Enfin, je peux compléter ma recherche, mais pour des raisons pratiques qui ne peuvent paraître au journal des Débats je vais cesser ma recherche d'ordre juridique. Je vous demande de réfléchir à cette question-là, je ne vous demande pas de me dire oui, de me présenter un texte tout de suite, mais on pourra en reparler, consulter vos gens, et voir si cela a de l'allure ou pas.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.6 est-il adopté?

M. Rivest: Oui, j'aurais juste une dernière remarque sur le temps plein.

Le Président (M. Gagnon): Une dernière remarque, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Un autre texte de Camille, verset 164 de la charte de...

Mme Lavoie-Roux: Comment est-ce qu'on appelle le docteur?

M. Rivest: Le Dr Laurin.

Mme Lavoie-Roux: Non, l'autre docteur.

M. Rivest: Par exemple un texte très simple sur l'incompatibilité ou le temps plein: la qualité de président de la commission de surveillance est incompatible avec l'exercice de toute autre fonction. Voyez un texte de cette nature-là, je pense, conviendrait très bien aux membres de l'office pour dire qu'ils sont à temps plein. Alors voilà.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.6 est-il adopté?

M. Rivest: Un instant.

Mme Lavoie-Roux: Les traitements additionnels...

M. Rivest: Oui, les traitements additionnels, qu'est-ce qui arrive avec cela, vous allez regarder?

M. Marois: Non, cela est la formule consacrée....

Mme Lavoie-Roux: En somme, c'est une bien mauvaise formule.

Le Président (M. Gagnon): Ceci est enregistré.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.7 est-il adopté?

M. Rivest: Un instant. Adopté

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée, 111.0.7 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui. Le Président (M. Gagnon): 111.0.8. M. Rivest: J'ai une inquiétude. M. Marois: Une de plus.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Nous avons raison, avec la situation budgétaire actuelle, de nous inquiéter du gouvernement.

Mme Lavoie-Roux: Oui, cela est adopté.

M. Rivest: Mais, mon inquiétude c'est qu'il n'y a pas... M. le Président, vous suivez.

Le Président (M. Gagnon): J'essaie de suivre, j'espère que tout le monde désire suivre parce que des fois on est deux ou trois à parler en même temps. J'aimerais qu'on fasse attention. Vous avez la parole, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: L'article 111.0.8: "Les membres, y compris le président, décident à la majorité des voix; s'il y a égalité, le

président a voix prépondérante." On a parlé beaucoup des consensus, le ministre a dit qu'il voyait cela dans le sens d'un consensus, mais il y a une procédure de vote; néanmoins, elle est nécessaire. Mais ma question n'a aucun rapport avec ce que je viens de dire, ma question a trait au fait qu'il n'y a pas de dispositions pour le quorum. Étant donné qu'il y a des personnes "issues de" et "issues de", prévoyez un quorum.

Mme Lavoie-Roux: Très pertinent, mon collègue de Jean-Talon.

M. Rivest: Vous avez voulu garder votre texte.

M. Dean: M. le Président...

M. Rivest: S'il faut qu'une personne "issue de" ne participe pas au vote, alors qu'une autre personne "issue de" participe au vote, quelle est la crédibilité du conseil?

M. Marois: M. le Président, je comprends les recherches absolument remarquables qui seront notées et rapportées par les historiens politiques, cette contribution absolument, j'allais dire spectaculaire, tant elle est fouillée, du député de Jean-Talon, mais tout de même il y a un article qui dit que le conseil se donne des règles de régie interne et de fonctionnement.

Le Président (M. Gagnon): Alors, 111.0.8 est-il adopté? M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Mais comment vont-ils faire pour adopter vos brillantes règles de régie interne s'ils n'ont même pas quorum?

M. Marois: M. le Président...

M. Rivest: Mais cela existe dans toutes les lois, le quorum. Si ma question est ridicule, faites un amendement omnibus et enlevez-moi cela de toutes les lois quand il y a un organisme et qu'on fait disposition sur le quorum, voyons donc. Je ne veux pas vous prendre au piège, je vous demande si cela ne serait pas utile de l'avoir.

M. Marois: J'ai bien compris que ce n'était absolument pas votre intention.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Prévost avait demandé la parole.

M. Dean: Non.

M. Rivest: II n'y a pas de disposition de quorum, vous n'en voulez pas. On n'a pas adopté les règlements.

M. Marois: L'ancien conseil - le député s'en souviendra peut-être, peut-être ne le sait-il pas; je me permets alors de l'informer de ce fait - une fois nommé, s'était fait des règles de régie interne, règles qui prévoyaient le quorum. Cela a fonctionné.

M. Rivest: Ah oui! je n'en doute pas. M. Marois: Voilà.

M. Rivest: Oui, mais, dans l'ancien conseil, mon argument, M. le ministre... Convenons qu'un article qui parle du quorum existe dans notre législation et, deuxièmement, dans l'ancien conseil, M. le ministre, il n'y avait pas, au niveau des membres du conseil, les paragraphes a, b et c avec des gens issus de.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Oui, et alors?

M. Rivest: Si une décision du conseil -imaginez-vous la crédibilité de votre affaire - disant, déclarant une liste insuffisante et on s'aperçoit que, finalement, les deux membres issus de la partie patronale n'étaient pas là, ou le contraire. Avec les règles de régie interne, tous les documents sont publics. Il y a une décision du conseil, tout le monde l'attaque, non pas judiciairement, mais attaque sa crédibilité. Qu'est-ce que vous voulez? Chaque fois, d'ailleurs, dans nos lois - je pense que c'est la règle - dans un conseil d'administration où il y a des représentants ou des gens issus de ceci et de cela, on prévoit toujours une règle de quorum. Sans cela, ça n'a pas de sens ce que vous avez mis, avec les gens ici et là. Vous auriez dû accepter l'amendement de la députée de L'Acadie.

M. Marois: C'est l'opinion du député de Jean-Talon, je la respecte, je ne la partage pas quant à dire que cela n'a pas de sens.

M. Rivest: Pourquoi cela n'a-t-il pas de sens? Il y a une procédure de vote.

M. Marois: Mais vous voulez absolument aussi, vous me l'avez mentionné... Je vous ai expliqué à je ne sais trop combien de reprises que demeurait aussi ouverte cette possibilité de la consultation croisée pour atteindre un objectif dans la composition. Il y a aussi l'objectif de faire en sorte de choisir, autant que faire se peut, des gens qui soient, tout de même, compétents, qualifiés, crédibles. C'est aussi la crédibilité du gouvernement qui est un peu en cause, je pense.

Suspendant pour l'instant cette question

de quorum, M. le Président, à 111.0.5, qu'on a tenue en suspens, je n'aurais aucune espèce d'objection à ajouter l'une ou l'autre des deux formulations à la fin du deuxième alinéa. On pourrait soit ajouter après les mots "ou remplacés": "et doivent s'occuper exclusivement des devoirs de leurs fonctions", ou bien les mots: "et exercent leurs fonctions à temps complet".

M. Rivest: J'aime mieux la première version.

M. Marois: Je n'ai pas d'objection quant à la première...

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'amendement se lirait comme suit: il faudrait le donner exactement...

M. Marois: ...et doivent...

Le Président (M. Gagnon): ...si vous voulez, après la deuxième...

M. Marois: Ajouter, à la fin du deuxième alinéa, les mots...

Le Président (M. Gagnon): Ajouter, à la fin du deuxième alinéa, après les... Le deuxième alinéa, c'est: "Les membres du conseil demeurent en fonction jusqu'à ce qu'ils aient été nommés de nouveau ou remplacés" et on ajoute: "et doivent s'occuper exclusivement des devoirs de leurs fonctions." C'est cela. Alors, est-ce que cet amendement est adopté?

M. Rivest: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Adopté et l'article 111.0.5 tel qu'amendé est adopté? Adopté.

M. Rivest: Adopté, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: On vient de faire une brèche.

M. Rivest: La glace vient d'être brisée. Nous avons défoncé les...

Mme Lavoie-Roux: ... murs.

M. Rivest: ...les murs. Est-ce que la question du quorum est suspendue?

Le Président (M. Gagnon): On revient à l'article 111.0.8. Le ministre avait demandé de suspendre temporairement pour son amendement. On revient à l'article 111.0.8.

M. Rivest: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Vous aviez la parole, Mme la député de L'Acadie, ou vous l'aviez demandée.

Mme Lavoie-Roux: C'était sur le quorum, c'était à l'article 111.0.9.

M. Marois: Le ministre a suspendu non pas l'article, mais la question.

Le Président (M. Gagnon): Ah boni Alors, est-ce qu'on avait adopté l'article 111.0.8?

M. Rivest: Oui. M. Marois: Oui. Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Je m'excuse, j'avais oublié de l'inscrire. L'article 111.0.9.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que le ministre y réfléchit présentement. "Le Conseil peut adopter des règles de régie interne et créer des bureaux régionaux et locaux." S'il n'y a pas de quorum d'établi, lorsque le conseil adoptera ses règles de régie interne - si vous vous référez à l'article 111.0.2, le conseil se compose de huit membres dont un président - cela nécessitera la présence des huit membres pour l'adoption des...

M. Marois: Oui.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.9 est-il adopté?

M. Rivest: Non.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Concernant la création des bureaux régionaux et locaux, est-ce que le ministre a à la portée de la main - parce que cette disposition existait sous l'ancien conseil - des données à savoir s'il s'en est créé et combien? Est-ce que le ministre pourrait nous dire si, effectivement, des bureaux régionaux et locaux dans ce contexte, ont été créés? Est-ce qu'ils ont été efficaces? Deuxièmement, est-ce que, dans la perspective nouvelle du ministre, les conseils régionaux et locaux sont permanents également?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Prévost.

M. Rivest: Deux questions sur les conseils régionaux. Est-ce qu'il y en a qui ont été créés dans le passé et combien? Je

ne veux pas avoir le chiffre, c'est approximatif, régionaux ou locaux. Deuxièmement, qu'est-ce que c'est et, troisièmement, est-ce qu'ils sont permanents?

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Non. Est-ce qu'ils sont payés? Oui. Le fonctionnement a été le suivant. C'est un fonctionnement qui n'est pas lourd. Cela s'est présenté de la façon suivante. Je ne voudrais pas induire le député en erreur, je n'oserais pas citer de nombre. Dans des régions, il y a des contractuels dont les services ont été retenus pour une période de temps requise; il y a des effectifs de base de prévus qui, forcément, se gonflent pour une période donnée, une période durant laquelle on a besoin de plus d'effectif et, après, cela dégonfle. Donc, des contractuels, dont les services ont été retenus, étaient installés en région dans des bureaux publics, des bureaux gouvernementaux, soit les bureaux du ministère du Travail en région ou les bureaux de CRSSS en région. Pardon?

M. Rivest: Ils faisaient quoi exactement?

M. Marois: Ils étaient en contact avec les établissements. Donc, c'étaient des antennes régionales du conseil où les gens pouvaient s'adresser, loger des plaintes. En plus, ces gens étaient en contact avec les établissements, etc.

M. Rivest: Dans l'ancien texte, il était spécifiquement prévu que le gouvernement fixait les traitements, etc., et cela a disparu. Je ne sais pas, cela peut être redondant, je n'en fais pas un plat. C'est exact?

M. Marois: Non. Cela n'a pas disparu.

M. Rivest: Quatrième paragraphe de l'ancien... Quand on parle de l'ancien texte, c'est l'ancienne loi. C'est l'article 111.0.9, paragraphe 4: "Le gouvernement fixe le traitement ou, s'il y a lieu, les traitements additionnels, les allocations ou les honoraires des membres du conseil ainsi que des membres des conseils régionaux ou locaux.

M. Maroix: On le retrouve à l'article 111.0.13.

M. Rivest: Ah oui! Excusez-moi. Ce que le ministre vient de me dire, à savoir que c'étaient des antennes régionales et locales, est-ce que cela ne fait pas double emploi avec l'introduction, dans le projet de loi no 72, de la mission que le ministre confie maintenant aux CRSSS, dans la mesure où il m'a dit qu'il était arrimé aux CRSSS? (23 heures)

M. Marois: Pas du tout, cela ne fait pas double emploi. Quand j'ai parlé des CRSSS, j'ai bien expliqué que les CRSSS ont le rôle, l'ambition, le mandat, le pouvoir, en règle générale, de s'assurer de la qualité des services. C'est une chose. Ce que j'ai dit, c'est qu'il est arrivé que des gens, au lieu de se présenter, de contacter la personne qui était en région pour le conseil des services essentiels portait plainte à des conseils régionaux de services sociaux et de services de santé. Ces plaintes n'étaient pas retransmises, donc, c'est une chose, on fait cette correction pour s'assurer que lorsqu'une plainte est logée à un CRSSS, elle est obligatoirement retransmise au conseil.

M. Rivest: La chasse des plaintes. Ce sont les plaintes qui lui arrivent parce que les gens vont à lui.

M. Marois: C'est une chose. M. Rivest: Du CRSSS.

M. Marois: Je parle du CRSSS. Lorsqu'il reçoit les plaintes, c'est là que ça se présente concernant les problèmes des services essentiels; il doit les retransmettre au conseil des services essentiels, ce qui n'exclut pas et ne fait absolument pas double emploi avec la présence du conseil comme tel en région, pas du tout, qui, lui, a son travail à faire tel que prévu dans le présent projet de loi.

M. Rivest: Parce que ce n'est pas dit dans le texte, qui est le même travail au niveau régional et local que l'ensemble des fonctions qui sont attribuées au conseil...

M. Marois: C'est ça.

M. Rivest: Tandis que les fonctions qui sont attribuées au conseil...

M. Marois: C'est ça.

M. Rivest: Ce qui est arrivé, ce que j'ai cru comprendre, c'est que dans le passé des gens du réseau, ou des établissements ou même des usagers ou même le public se rendaient aux CRSSS pour dire que telle chose se passe et le CRSSS n'avait pas le pouvoir de recevoir ces choses et vous lui avez donné le pouvoir pour qu'il les reçoive et les transmette. Le CRSSS, en cas de conflit, n'a pas par le texte que vous avez fait, qui est quelque part un peu plus loin, le mandat de surveiller comment une grève se passe. Il n'a pas du tout ce mandat dans le projet. Vous ne lui avez pas du tout confié ce mandat.

M. Marois: Pas au CRSSS. C'est le conseil des services essentiels qui l'a,

M. Rivest: C'est ça. Sauf que...

M. Marois: Pour ne pas qu'il y ait de confusion des rôles, des responsabilités.

M. Rivest: Cela n'apparaissait pas...

M. Marois: Oui, mais cependant, que l'information circule particulièrement au premier chef quand une plainte est logée.

M. Rivest: Êtes-vous d'accord, madame? Dernière question, est-ce que dans le budget - dans la mesure où ils sont payés ou traités - l'ordre de grandeur dont on a discuté antérieurement avec le ministre sur le budget du conseil, est-ce que ça comprend les dépenses des bureaux régionaux et locaux, d'ailleurs...

M. Marois: Oui, la réponse est oui.

M. Rivest: ...ils vont être logés physiquement dans les locaux des CRSSS.

M. Marois: Pas nécessairement les bureaux des CRSSS, si tant est que dans une région ou dans une localité, c'est l'endroit qui se prête le mieux pour répondre aux besoins, très bien. Si dans un autre coin, c'est un bureau du ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qui est le mieux localisé et qui se prête le mieux à ce genre de mandat, on choisira cet endroit. Je ne vois pas pourquoi on serait absolument rigide, les choses étant toutes fixées d'avance, on va laisser le conseil...

M. Rivest: Comment sont formés les conseils régionaux et locaux? Est-ce que c'est la même - mutatis mutandis - structure qu'au niveau du conseil? Vous n'avez pas élaboré beaucoup.

M. Marois: Non, non. Ce n'est pas un conseil, ce n'est pas une...

M. Rivest: Est-ce que c'est un bureau administratif ou si c'est un organisme?

M. Marois: Ce sont des gens dont les services sont retenus par le conseil permettant au conseil d'exercer ses fonctions en région.

M. Rivest: Alors, quelle différence y a-t-il avec l'article suivant 111.0.10?

M. Marois: Cet article vise un objectif bien précis. Dans le cas d'un problème précis, prenons le cas dont on a parlé si souvent, les transports en commun. Le conseil des services essentiels est forcément présent par son antenne régionale à Montréal. Une plainte est portée où, par décret, il est déterminé, précisé que des services essentiels doivent être établis dans un service public donné. On a besoin d'une expertise d'un type particulier, c'est le genre de problème auquel vient répondre l'article 111.0.10, ce n'est pas du tout la même chose. C'est vraiment quelqu'un dont on retient les services sur une question précise ou un problème ad hoc. C'est une chose. Quant à la présence en région du conseil, c'est la mission et le rôle général du conseil dans une région donnée.

M. Rivest: Peut-être que le ministre trouvera tatillon ce genre de question, sauf qu'il y a un conseil. Je réalise l'ampleur de la structure qui est mise en place. Il y a un conseil, le conseil a des experts et les experts ont un mandat, à peu près suivi, de faciliter les ententes, de vérifier les ententes ou les listes, de vérifier les situations de grève. La partie qui m'inquiète, c'est lorsqu'ils doivent faire rapport - c'est l'article suivant où on parle de "personnes" -sur le maintien des services essentiels lors d'une grève. Il y a une grève, il y a une situation, il y a des faits qui se produisent. Ces personnes vont devoir travailler là-dessus. Il y aura un bureau local qui va faire un peu la même chose dans une situation de grève et de conflit, il y aura un bureau régional et il y aura le conseil qui sera quelque part, à Québec ou je ne sais où.

Le déploiement d'une structure sur le terrain, je ne veux pas la caricaturer, mais elle est inscrite comme cela dans le texte de loi et j'essaierais de mesurer son amplitude. Cela peut être très gros, sans doute que ce n'est pas ce qu'envisage le ministre, ou cela... Je me demande pourquoi on a besoin de tout cela.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, je pense que cela pourrait peut-être répondre au député de Jean-Talon. Je vais prendre l'exemple de ma région. Lors du dernier conflit, il y a eu seulement un endroit sur 850 milles de côte, plus les trois villes nordiques de Gagnon, Fermont et Schefferville, où il y a eu un problème où le conseil a dû s'impliquer. Donc, si, dans une région donnée, il n'y a pas de problème plus qu'il ne faut, ce sont des bureaux locaux qui peuvent être impliqués, pas nécessairement des bureaux régionaux. Cela peut être un bureau local, par exemple, à Havre-Saint-Pierre ou à Gagnon. À ce moment-là, la structure n'est pas si lourde qu'on pense.

Compte tenu du fait que, par exemple, sur la Basse-Côte-Nord du golfe Saint-

Laurent, à Saint-Augustin, il n'y a pas de bureau du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, il pourrait y avoir une entente pour que quelqu'un soit à Saint-Augustin, mais à l'intérieur du bureau du CRSSS, avec un mandat spécifique.

M. Rivest: C'est tout un appareil]

M. Perron: II ne faut pas oublier que ces bureaux locaux et ces bureaux régionaux seront seulement en période de grève, normalement. Normalement, dis-je bien.

M. Rivest: Non.

M. Perron: Parce que le conseil n'est pas dans l'obligation, le conseil "peut". Donc, il peut les maintenir juste pour la durée du conflit, par exemple.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marois: Je n'ai pas autre chose à ajouter pour l'instant.

M. Rivest: Dans le budget, je veux voir l'amplitude de ces bureaux régionaux et locaux. Dans les dépenses du conseil Picard, j'aimerais que le ministre, ultérieurement, nous dise combien, dans le montant, sensiblement de l'ordre de 1 000 000 $, qu'aurait coûté le fonctionnement du conseil Picard, a été attribué au conseil par rapport au budget qui a été consacré à ces bureaux régionaux et locaux.

M. Marois: Je n'aurai sûrement pas les réponses aux questions ce soir...

M. Rivest: Non, un ordre de grandeur.

M. Marois: ... ni comme ordre de grandeur, non plus ce soir.

M. Rivest: Je ne veux pas avoir cela ce soir.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.9 est-il adopté?

M. Marois: Aux crédits, c'était un bon endroit pour me poser toutes ces questions.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.9...

M. Rivest: Nous avions tellement de choses, M. le Président, que nous ne pouvions pas aller au fond des choses.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0,9 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 111.0.10 est adopté aussi, je présume?

M. Rivest: Oui, les personnes et les experts, c'est la même chose. Avant on les appelait les experts, vous avez changé pour "personnes", je ne sais pas pourquoi, mais en tout cas! C'est cela, M. le ministre?

M. Marois: Oui.

M. Rivest: II n'y a rien là. Attendez juste une seconde. Dans l'ancien texte - je ne l'ai pas - enfin, j'ai une note qui m'indique que le choix de ces personnes était sujet à la ratification du juge en chef du Tribunal du travail. Cela a sauté. Pourquoi?

M. Marais: Bien sûr.

M. Rivest: Les personnes.

M. Marois: Oui.

M. Rivest: Pourquoi cela a-t-il sauté?

M. Marois: Forcément. Le député se souviendra de notre discussion antérieure concernant la nomination du conseil.

M. Rivest: Oui. M. Marais: Oui. M. Rivest: J'essaie.

M. Marois: Sous la loi qui nous régit présentement, la nomination provenait du juge en chef du tribunal. Voilà, c'est dans la logique et la cohérence; forcément, on ne le retrouve pas là.

M. Rivest: Le numéro 10, avez-vous des questions sur le personnel?

Le Présidente (Mme Harel): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: 111.0.10, non merci.

Le Présidente (Mme Harel): Alors, 111.0.10 est-il adopté?

M. Rivest: Adopté.

Le Présidente (Mme Harel): 111.0.10 est adopté. Alors, 111.0.11.

M. Marois: Mme la Présidente, si on me permet, concernant les conflits d'intérêts, je proposerais, pour répondre aux préoccupations de l'Opposition et aux nôtres aussi, l'amendement suivant...

Le Présidente (Mme Harel): Qui serait

situé à 111.0.5?

M. Rivest: ...M. le ministre.

M. Marois: Non, c'est qu'il y a un problème de numérotation d'articles, si on veut être capable de se retrouver.

M. Rivest: On fait confiance à la présidente.

M. Marois: Le numéro 111.0.4 deviendrait le deuxième alinéa de 111.0.3. On enlèverait 111.0.4, ce serait le deuxième alinéa de 111.0.3. 111.0.5 deviendrait, par voie de conséquence, 111.0.4 et on introduirait un article 111.0.5 qui se lirait comme suit...

Le Présidente (Mme Harel): Alors, je le lis. Donc, ça deviendrait 111.0.5: Le président ne peut, sous peine de déchéance de sa charge, avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui du conseil. Toutefois, cette déchéance n'a pas lieu si un tel intérêt lui échoit par succession ou par donation, pourvu qu'il y renonce ou en dispose avec toute la diligence possible. Un autre membre du conseil qui a un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de déchéance de sa charge, le révéler par écrit aux autres membres du conseil et s'abstenir de participer à une décision portant sur l'entreprise dans laquelle il a cet intérêt.

M. Rivest: C'est très bien dit.

Le Présidente (Mme Harel): C'est bien lu?

M. Rivest: Oui.

Le Présidente (Mme Harel): Alors, des interventions? Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Peut-être que ça n'a pas besoin d'être là. Supposons qu'un membre qui vient, par exemple, de l'hôpital Notre-Dame - ça se peut que ce soit quelqu'un qui travaille à l'hôpital Notre-Dame ou à n'importe quel autre centre hospitalier - soit nommé membre du conseil. Est-ce qu'il y a une décision à prendre, disons, sur la liste de l'hôpital Notre-Dame ou sur la façon dont les services essentiels sont maintenus ou pas? Ce n'est pas couvert. Je veux simplement voir quelle sorte d'extension on donne à cela, parce que je me demande si le conflit d'intérêts dans ce cas du conseil sur le maintien des services essentiels ne se manifestera pas d'une autre façon que par des intérêts pécuniaires?

M. Rivest: Je pense que la solution à ce type de problème-là - ça pourrait arriver, incidemment, ce serait peut-être de dire que si le conseil est saisi - je ne sais pas comment on le dirait - qui s'abstient de participer à la discussion et aux délibérations. Il y a une formule là-dessus. (23 h 15)

Mme Lavoie-Roux: II ne faut pas qu'il y ait des intérêts pécuniaires en dessous de cela.

M. Marois: Un membre du conseil qui a un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de déchéance de sa charge, le révéler par écrit aux autres membres du conseil et s'abstenir de participer à une décision portant sur l'entreprise dans laquelle il a cet intérêt.

M. Rivest: M. le ministre, cet article-là réfère uniquement aux entreprises privées. C'est là-dessus que cela va se poser, avec votre texte. Tandis que ce qu'évoque la députée de...

M. Marois: Cela, c'était pour répondre à votre inquiétude, M. le député.

M. Rivest: Oui, c'est cela. La députée de L'Acadie, ce qu'elle pose, c'est surtout lorsque - elle donne l'exemple de l'hôpital Notre-Dame - il arrive un problème que le conseil doit évaluer une liste et que la personne est issue, qu'elle soit un administrateur ou un travailleur, de l'hôpital Notre-Dame; est-ce qu'elle participe aux discussions du conseil?

M. Marois: Moi, M. le Président, j'avoue que j'ai d'énormes réticences à cela et je pense qu'à vouloir faire l'ange, des fois, on sait ce qui arrive. L'intérêt - si Mme la députée me permet de finir mon intervention - dans une entreprise, bon, on le couvrirait par l'amendement qui est là. Mais, aller au-delà de ça, qu'est-ce qu'on cherche à couvrir comme problème? Moi, je veux bien qu'on essaie de s'en créer théoriquement. Est-ce qu'un problème du genre s'est posé dans le fonctionnement du dernier conseil?

Mme Lavoie-Roux: Alors, vous savez que...

M. Marois: Ils étaient tous, tous, tous des gens qui avaient un intérêt au sens large par définition; ce n'était pas "issu de", là.

Mme Lavoie-Roux: Ils étaient nommés d'une façon temporaire.

M. Marois: Ah, oui, oui, bien sûr, temporaire tant qu'on voudra, mais il y avait un travail bien spécifique à faire qui concernait le maintien des services.

M. Rivest: Ils ne vérifiaient pas la liste syndicale; là, ils vérifient la liste syndicale. Vous leur donnez une certaine fonction très précise. Ils apprécient la suffisance ou l'insuffisance d'une entente et d'une liste et l'ancien conseil ne faisait pas cela.

M. Marois: M. le Président, pour l'instant, on pourrait suspendre cette dimension-là. Je veux bien y penser. Je veux bien qu'on soumette des textes tant qu'on voudra, mais...

Le Président (M. Gagnon): Qu'est-ce qui arrive avec l'amendement, M. le ministre?

M. Marois: Je comprends que cet amendement-là est un peu...

M. Rivest: On peut y repenser, M. le ministre.

M. Marois: C'est ce que je dis, on y songe.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement qui fait la renumérotation, c'est-à-dire où 111.0.4 devient le deuxième alinéa de 111.0.3, c'est cela?

M. Marois: Oui.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.5 devient 111.0.4.

M. Marois: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Alors, vous avez un amendement à 111.0.5, qui serait le nouveau 111.0.5, et il est suspendu actuellement. C'est cela?

M. Marois: Non, celui-là, je comprends que...

Le Président (M. Gagnon): II est bon? M. Marois: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Alors, le nouvel article 111.0.5 est adopté, c'est-à-dire cet amendement-là?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Nous en sommes à 111.0.10.

M. Rivest: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Alors 111.0.10, est-ce qu'il est adopté?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Mme Lavoie-Roux: On peut toujours reculer, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): 111.0.11. Est-ce qu'il est adopté?

M. Rivest: J'ai une question au ministre. "Le conseil peut informer le public sur toute question relative au maintien des services essentiels." Cela est une responsabilité selon le jugement du conseil; cela n'a rien à faire avec le rapport public. C'est complètement différent. Est-ce que dans votre esprit, lorsque vous avez mis cela, vous souhaitiez que le conseil informe le public autant des problèmes que du fait que cela fonctionne normalement?

M. Marois: C'est un pouvoir général d'information.

M. Rivest: Et c'est vraiment cela. Derrière tout cela, il y a tout le problème, qui a été largement commenté par M. Picard dans son rapport, des immenses difficultés qu'il a eues, semble-t-il, avec la presse. Enfin, il y a eu des jugements dont le ministre se souvient sans doute. Par ailleurs, il peut se produire une situation vraiment pénible; cela peut arriver, c'est déjà arrivé. Cela peut être lancé dans l'opinion publique même si c'est une information très pénible. Par exemple, un hôpital pour enfants. Le conseil constate qu'il survient un problème, que c'est absolument inacceptable ce qui se passe et il lance cela dans le public. Les parents qui reçoivent cela...

M. Marois: M. le Président, distinguons deux choses. Il y a un pouvoir général d'information qui suppose l'exercice d'un certain jugement. Ces gens, comme l'invoquait le député de Jean-Talon, ont un certain sens commun. Cela est une chose qui implique fondamentalement un jugement.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je n'ai pas la Loi 59, mais je pense que le conseil était chargé d'informer le public, selon l'ancienne formulation. Ce n'est pas sur le fait que cette formulation a été changée, mais nous avons l'expérience des dernières grèves dans le domaine de la santé et le rôle joué par le conseil sur le maintien des services essentiels. Les rapports publics du conseil étaient faits avec trop de retard pour que ce soit de quelque utilité. Cela était une chose. Ensuite, les rapports publics faits par le conseil étaient incomplets et étaient très laconiques. On maintient cette situation, et on s'en est rendu compte seulement après qu'on a eu accès aux rapports des experts; on a tout à coup réalisé que les rapports

étaient faits trop tard et qu'ils étaient incomplets. Je me dis que c'est exactement du pareil au même. "Le conseil peut aussi informer le public sur toute question relative au maintien des services essentiels." La seule chose qui sera vraiment rendue publique, c'est lorsqu'il fera rapport au ministre sur le fait qu'il juge les services incomplets. Au même moment où il fait rapport au ministre, il doit le rendre public, j'imagine. Je vous assure qu'entre le moment où il va décider de le transmettre au public, on va se retrouver dans les mêmes situations de confusion qu'auparavant. S'il n'y a pas plus de...

M. Marois: M. le Président, je pense que Mme la députée aurait intérêt à lire, à la page 12, l'article 111.10.2. Elle trouvera là une réponse précise à sa question. C'est pour le cas des services de santé et des services sociaux. Dans le cas des services publics, c'est l'article 111.0.20. L'article dont nous parlons présentement, c'est le pouvoir général d'information. C'est bien ça.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.11 est-il adopté?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi. Je m'excuse d'impatienter le ministre. Je trouve que c'est la question la plus importante ou une des questions les plus importantes. Vous dites que c'est son mandat général d'informer le public. Vous dites: C'est précisé dans le 111.0.20. Je le vois. Quand il fait rapport au ministre, c'est précisé. Mais dans le cas où il juge qu'il n'a pas à faire rapport au ministre et qu'il hésite à faire rapport au ministre et ainsi de suite, à ce moment, qu'est-ce qui se passe? Il ne sera pas obligé d'informer le public que, par exemple, les services essentiels sont maintenus. Il n'y aura aucune communication avec le public avant qu'on arrive à 111.0.20 ou à moins qu'il n'applique 111.0.20.

M. Marois: Pas du tout. M. le Président, Mme la députée de L'Acadie nous a expliqué, d'une part, que les rapports portant sur un problème précis, une situation précise dans un établissement donné étaient incomplets, pas suffisamment balisés, ne contenaient pas suffisamment de contenu. C'est pour répondre à ce genre de problème qu'ont été mis au point et insérés les articles que je viens de mentionner.

Mme Lavoie-Roux: ... M. le ministre.

M. Marois: D'autre part, nous avons voulu aussi donner un pouvoir général d'information du public sur toute question relative au maintien des services essentiels dans la région 06-C; il est important de faire savoir que ça va bien. Le conseil fera savoir que ça va bien. Dans le cas où un problème précis...

Mme Lavoie-Roux: II vous le rapporte.

M. Marois: Voilà. Et c'est public et cela doit indiquer et contenir un certain nombre de choses. C'est prévu dans les articles que je viens de mentionner. Ce contenu doit préciser en quoi les services prévus, dans le cas où il s'agit, où cela intervient avant que le droit de grève soit accordé, ou effectivement rendus dans l'autre cas sont insuffisants et dans quelle mesure cela constitue un danger pour la santé ou la sécurité publique.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, pourquoi le conseil ne rendrait-il pas publique une liste qui est devenue la liste officielle, l'entente qui est devenue l'entente officielle pour...

M. Marois: C'est prévu, M. le Président, dans le protocole-cadre.

M. Rivestt Le protocole-cadre n'est pas très explicite dans le projet de loi. 111.0.12, protocole-cadre. (23 h 30)

M. Marois: Dans le protocole-cadre qui était contenu, par exemple, à titre de première hypothèse en annexe du rapport Picard, on se souviendra qu'une des clauses du protocole-cadre qui sera discuté entre les partis, convenu entre les partis, établi par le conseil, recommandé au Conseil des ministres qui peut même à la fin, au moment où il l'établit par règlement, y ajouter des choses, le compléter, le modifier et le reste, prévoyait l'affichage des ententes ou des listes.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela a été fait?

M. Marois: Non, c'était une recommandation du...

Mme Lavoie-Roux: Une recommandation, excusez-moi.

M. Marois: ... rapport Picard.

Mme Lavoie-Roux: Alors, est-ce que c'est une recommandation que vous retiendrez dans le...

M. Marois: C'est une recommandation

que j'ai l'intention de faire au conseil.

M. Rivest: M. le ministre, sur l'affichage des ententes, il faudrait mettre les listes également. Dans le domaine de la santé et des services sociaux, il me semble que le conseil pourrait y penser ou peut-être que le protocole-cadre lui indiquera dans les règlements. C'est tellement important; Dieu sait que, dans ce genre de conflit, l'évolution de l'opinion publique est une affaire capitale, autant pour le gouvernement que pour le syndicat, que pour les administrateurs. Je verrais très bien, par règlement - je ne le demande pas dans la loi - et faisant suite à ce que ma collègue demandait, que le conseil songe à utiliser, dans les responsabilités qui lui sont imparties sur le plan de l'information, les médias locaux et régionaux pour qu'il y a effectivement grève, mais que les services dans un établissement hospitalier, l'accès est garanti par une entente, les deux parties sont d'accord, on maintient les services d'obstétrique, les services coronariens.

Je pense qu'on s'est tué, le ministre, son adjoint parlementaire, tous les parlementaires et nous-mêmes, à dire que cela s'est fait dans la plupart des cas. Je vous jure - et je rappelle le cri du coeur de l'adjoint parlementaire dans la campagne électorale qui disait qu'il tenait le droit de grève à bout de bras. Très récemment, en Mauricie, dans un colloque, je présidais un atelier là-dessus et quand je disais cela à des gens qui étaient là, ils étaient complètement renversés, ils ne savaient même pas que dans les établissements hospitaliers, même dans le passé, dans les bouts les plus durs, pendant une grève, les gens pouvaient avoir accès aux services coronarien et d'obstétrique. Les gens ont dans la tête - et c'est d'ailleurs ce qui explique en grande partie les sondages - qu'il n'y a rien nulle part qui fonctionne, parce qu'il n'y a jamais eu personne pour le dire. Peut-être que certains établissements localement en ont pris l'initiative, sans doute que certains l'ont fait, mais il s'agirait d'utiliser les postes de radio locaux et régionaux et dire: II y a grève, voici les services ouverts à la population. Je suis sûr que si c'était fait et prévu, on pourrait faire un chemin immense dans la maturation de tout ce problème social qu'on vit depuis tellement d'armées au Québec.

M. Marois: C'est tout à fait exact et c'est pour cela que, pour y arriver, il faut absolument donner au conseil un pouvoir général d'information, qui implique l'utilisation des médias locaux, régionaux, écrits, électroniques et le reste.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 111.0.11 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.12 est adopté aussi, je présume? M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: L'article 111.0.12. D'abord, la première question concerne le protocole-cadre, l'affichage, par exemple. Pourquoi le protocole-cadre ne s'applique-t-il qu'aux établissements? Pourquoi tout le domaine des services publics est-il exclu? D'après la lecture que j'ai faite - si je fais erreur, le ministre me corrigera - dans le cas d'un établissement visé au paragraphe 2 de l'article 111.2, cela ne concerne que les secteurs public et parapublic et même les établissements de santé. Pourquoi, par exemple, parle-t-on d'un règlement ou d'un protocole sur l'affichage? Supposons qu'il y a une grève dans le transport en commun, par exemple, il pourrait certainement y avoir un protocole qui dirait: Les handicapés, vous avez ceci, il y a de l'information qui vous serait transmise ici. Je prends cet exemple, parce que c'est un élément du protocole, la question de l'affichage ou de la publication de ce qui existe.

M. Marois: Dans ce cas c'est exact que cela concerne les services sociaux, les services de santé; là à cause fondamentalement du nombre d'établissements impliqués dans un réseau et par voie de conséquence du nombre de listes ou d'ententes qui doivent être convenues ou établies, il ressort clairement qu'il faut un cadre établissant un certain nombre de choses qui doivent se traduire avec une coloration locale ou régionale. Cela est fondamental.

Le problème est bien différent lorsqu'il s'agit d'un service public bien précis qui est d'une nature très particulière propre à une région donnée et qui n'a aucune commune mesure même dans un cas de transport en commun, par exemple, selon qu'on est dans la grande région métropolitaine ou à Québec, ce n'est pas du tout le même type et le même genre de problème. Alors, on comprend bien ce que vise le protocole-cadre en ce qui concerne le réseau des affaires sociales au sens large, ce qui n'exclut absolument pas dans le cas d'un service public bien précis que, par les moyens généraux d'information, soit divulgué en ce qui concerne un service public précis.

M. Rivest: Je comprends très bien la perspective et je remercie le ministre de sa précision. Le protocole-cadre qui a été préparé comme esquisse par M. Picard, faisait suite à son expérience dans le domaine de la santé et des services publics; selon les 19 points qu'il énumère à l'annexe de son rapport on voit carrément que c'est

conçu dans la perspective des services de santé et des services sociaux. Mais dans ce protocole-cadre, il y aurait quand même des choses. Je comprends très bien que dans tous les autres secteurs, ça devient très disparate et très particulier, le gaz, l'électricité, le transport en commun, les ordures ménagères, ce sont des univers extrêmement particuliers, mais il y a quand même des choses qui peuvent, par exemple, au cas d'une... enfin, il est mentionné dans ce domaine: épidémie, conflagration, situation de force majeure... voyez-vous, il y aurait peut-être des actions à prévoir au niveau de la réglementation ou d'un protocole-cadre pour assurer les services essentiels au cas où cette chose-là se passe. Je pense, par exemple, au transport en commun où comme on a vu à Montréal, s'il arrivait un incendie, je ne sais trop. Il y aurait quand même avantage à y penser. Peut-être que le gouvernement pourrait faire une disposition particulière pour mettre l'accent sur la santé, mais se donner un autre article qui donnerait un pouvoir de règlementation quitte à ce qu'on demande aux parties elles-mêmes de convenir entre elles d'un certain protocole-cadre sur des points majeurs dans les services publics en général.

M. Marois: II faut bien comprendre la distinction fondamentale. Dans le cas du réseau des affaires sociales et le député comprend bien qu'il doit y avoir un cadre uniforme de base, mais qui conserve une souplesse pour pouvoir correspondre à certaines réalités qui sont quand même changeantes ou différentes d'un certain type d'établissement à un autre, mais il faut un cadre minimum uniforme; dans le cas d'un service public, où l'inquiet député de Jean-Talon me parle du pire, d'une épidémie ou d'une situation de force majeure dans le genre apocalyptique, il reste une chose à faire très rapide pour le conseil, c'est de dépêcher son expert qui se retourne immédiatement pour décréter tout de suite au ministre qu'il va de soi que les services sont insuffisants, et par voie de conséquence, les gestes qui s'imposent s'imposeront d'eux-mêmes, me semble-t-il.

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.12 est-il adopté?

M. Rivest: Non, M. le Président. Alors, bon, très bien au niveau des établissements. Je poursuis la lecture: "Dans le cas d'un établissement visé au paragraphe 2 de l'article 111.2, le conseil détermine par règlement, après consultation des parties à l'échelle nationale, la forme d'une entente ou d'une liste - bon, cela va, c'est formel -ainsi que les éléments qu'elles doivent contenir dont notamment le libre accès d'un bénéficiaire à l'établissement." Il y a la forme et il y a le contenu, n'est-ce pas? Il y a des éléments de contenu et, nommément, je vais vous en donner un, c'est le libre accès.

Quand vous avez mis cela dans la loi, j'imagine que vous aviez en tête d'autres éléments de contenu qui vous paraissaient devoir être inscrits dans le protocole-cadre d'une entente. C'est cela? Oui? Est-ce que vous pouvez nous indiquer qu'est-ce que vous avez en tête, où en est rendue votre réflexion? Je vous dis cela parce que, compte tenu des délais et de la mécanique, encore là, c'est capital. Il faut que ce soit fait rapidement et dans les prochains jours parce que les parties vont devoir arriver avec des ententes dans les établissements pour le 30 septembre, alors qu'il n'y apersonne de nommé. Il faut que le gouvernement ait une idée... D'abord, est-ce qu'il existe un projet de règlement que le ministre, peut-être, pourrait nous soumettre, le règlement en vertu de l'article 111.0.12?

M. Marois: Le projet auquel je peux référer le député est le projet qui a été préparé par la commission elle-même, qui était en annexe 2 du rapport Picard et qui contient bon nombre d'éléments de contenu.

M. Rivest: C'est tout? Il n'y a pas d'autres...

M. Marois: Et qui ne sont pas des détails.

M. Rivest: Non, ils sont importants. Page 48, M. le ministre. Je vous laisserai en donner des exemples, non? Mais est-ce qu'actuellement vous m'indiquez que le gouvernement en est au niveau de la réflexion sur son règlement, à ce stade, tel qu'on le retrouve aux pages 48, 49, 50 et 51 du rapport Picard. On n'a pas plus que cela? Si c'est cela, je suis pas mal inquiet parce que ce règlement, il faut qu'il soit publié la semaine prochaine, car il faut qu'il soit communiqué... Il faut d'abord consulter les parties à l'échelle nationale, il faut le rédiger, il faut faire les arbitrages nécessaires, il faut qu'il soit publié très tôt pour qu'au cours des mois de juillet, août et septembre, les parties puissent, en ayant en main ce protocole-cadre négocier des ententes qui doivent être conclues le 30 septembre dans le domaine de la santé et des services sociaux.

J'espère que vous n'avez pas de projet de vacances pour l'été, M. le ministre, parce que là, vraiment, c'est une affaire extrêmement importante. Si vous n'avez rien là - enfin, je ne veux pas vous faire à cette heure-ci tout un plat pour vous faire sourire - si vous n'avez rien, non seulement je suis inquiet mais je suis très inquiet. D'accord?

M. Marois: J'avais déjà noté, M. le Président, à quel point le député de Jean-Talon est d'une nature très inquiète.

M. Rivest: C'est vrai, s'ils n'ont rien, c'est incroyable.

Mme Lavoie-Roux: C'est absolument fondé.

M. Rivest: Incroyable!

Le Président (M. Gagnon): L'article 111.0.2 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non.

M. Rivest: Bien minute! c'est capital cela. Il y a un conseil qui n'est pas formé, il n'y a pas de membres qui sont approchés, puisque les consultations ne sont pas prêtes, et là on arrive avec un protocole-cadre sur des éléments essentiels qui fait état d'une expérience pénible à bien des égards et le ministre me dit que son règlement n'est pas prêt. Donc, les établissements au niveau local, les deux parties ne peuvent se voir parce qu'elles ne savent pas dans quel cadre cela va se faire et puis on arrive aux vacances du mois de juillet, du mois d'août et, le 30 septembre, tout cela doit être mis en place. Quand le règlement sera-t-il prêt? Vous pourriez peut-être, mais enfin, je ne le demande pas pour moi, je le demande pour....

M. Marois: II faudrait d'abord, M. le Président, adopter une loi.

Mme Lavoie-Roux: Ahi écoutez, des fois vous nous déposez les règlements en même temps que la loi. (23 h 45)

M. Rivest: II aurait fallu, pour adopter la loi à temps, que M. le ministre la dépose à temps.

Mme Lavoie-Roux: Et puis, à part cela, M. le Président, si vous me donnez la parole...

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de L'Acadie, vous l'avez prise déjà.

Mme Lavoie-Roux: Non, je vous la demande. Je ferai remarquer au ministre, M. le Président, qu'il est arrivé que, dans plusieurs cas, au moment de la discussion d'une loi article par article, au début, on déposait des règlements afférents. 101 est un exemple.

M. Marois: Oui et je voudrais rappeler au député le texte de 111.0.12: "le conseil détermine par règlement". Le conseil a un travail de déblayage lui-aussi à faire à partir d'un certain nombre d'hypothèses. On pourra certainement aider le conseil qui devra, pour ce faire, consulter les parties et, par la suite, soumettre le projet au ministre et au Conseil des ministres qui décidera du contenu final du protocole.

Le Président (M. Gagnon): Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on a déjà établi un besoin prioritaire, le libre accès d'un bénéficiaire à l'établissement. Nous sommes totalement d'accord sur cela. N'y avait-il pas d'autres éléments importants qui auraient pu être retenus, comme par exemple, la dépendance et la captivité des clientèles? Pourquoi n'a-t-on retenu que le libre accès à l'établissement? C'est très bien, mais je pense qu'il y a d'autres éléments qui sont très importants et qui auraient quand même déjà eu un effet bénéfique, je pense, du point de vue de l'opinion publique et du cadre de référence.

M. Marois: II pourrait y avoir, M. le Président, effectivement beaucoup d'autres choses. D'ailleurs, le projet contenu en annexe du rapport Picard contient beaucoup d'autres choses. On a reproduit dans le texte ce qui était dans l'article 111.10 qui est présentement dans le code. Je vous relis l'avant-dernier paragraphe: "Une entente ou une liste doit notamment prévoir le libre accès d'un bénéficiaire". Nous l'avons reproduit dans le texte parce qu'on ne voulait pas que qui que ce soit, en lisant le texte de loi, ait l'impression qu'on avait retiré une chose qui était déjà prévue dans la loi. Sur un strict plan juridique, on aurait pu le faire, parce que c'est un droit qui est prévu dans la charte. On aurait pu le faire. Bon. Vous ou d'autres auriez pu me faire un plat en me disant: Vous allez retirer un droit qui était déjà prévu, etc. Alors, on l'a reproduit, encore une fois, avec le "notamment".

M. Rivest: M. le ministre, est-ce que vous avez pris connaissance d'un texte qui nous est parvenu cette semaine de l'Association des hôpitaux du Québec, qui est quand même drôlement impliquée là-dedans? Je vous lis simplement un court passage, à la page 11: "Que le mandat du conseil soit spécifique quant à la détermination de lignes directrices - là, il s'agit du protocole - de normes et de critères à partir desquels les parties doivent convenir d'une entente sur la détermination des services essentiels; que, pour le réseau des services de santé et des services sociaux, ces lignes directrices contiennent des dispositions précises concernant des facteurs qui doivent obligatoirement être considérés pour la détermination des services à maintenir tels que - et cela, c'est quand même des gens

qui vivent dans le réseau - la situation géographique de certains établissements et les ressources alternatives - chose qu'on ne retrouve pas dans l'énoncé de protocole de M. Picard - le degré de dépendance ou de captivité de certaines catégories de bénéficiaire - dont ceux requérant des soins prolongés ou psychiatriques dont parlait ma collègue - le nombre de cas électifs et ceux admis par l'urgence au cours d'une période de référence, en relation avec leur pathologie respective et le niveau des soins requis, les services de soutien qui devront être maintenus en relation avec le nombre de bénéficiaires envisagés; et que le projet de règlement - le texte répond à cet objectif, le dernier objectif - à être soumis au gouvernement pour approbation fasse l'objet d'une consultation préalable". Vous voyez, il y a quand même des éléments proposés par des gens qui vivent dans le réseau et qui connaissent beaucoup mieux la réalité des choses. Ils sont arrivés à faire cela, arriver à faire un projet de règlement sur ces éléments qui ne sont sans doute pas improvisés. Ce sont des gens du réseau...

Le ministre peut trouver drôle que j'emploie toujours la même formulation quand je dis qu'avec son projet de règlement ou, enfin, avec le règlement dont il s'agit, sans qu'il nous donne aucune espèce d'indication et sans qu'il veuille mettre plus dans la loi que la question du libre accès des bénéficiaires en termes de contenu, en tout cas, il y a certainement lieu d'être extrêmement sceptique sur l'efficacité concrète pour l'automne prochain qu'aura cette disposition qu'il nous demande d'inclure dans la loi à ce moment.

M. Marois: Bien, alors, M. le Président, le député pourra dormir sur son scepticisme si tant est qu'il se sent ainsi. Ceci étant dit, j'ai effectivement reçu le mémoire de l'Association des hôpitaux du Québec au gouvernement et j'ai pris attentivement connaissance des recommandations. Le député vient de m'en citer une. Il y a plusieurs autres recommandations dans le mémoire. Il y en a effectivement, huit. Un certain nombre des recommandations - c'est peut-être une question de lecture du texte - se retrouvent déjà dans le texte de loi. Je me permets un commentaire général parce qu'effectivement c'est, à ma connaissance, le seul organisme qui nous a fait parvenir un document. Donc, comme il s'agit d'un organisme qui s'est donné la peine, en plus de travailler, de mettre cela au point, de nous faire parvenir un document comme celui-là, on a porté une attention tout à fait particulière, oui, au document en question. Cette recommandation qui est la deuxième, du rapport à la page 11, effectivement, contient des éléments extrêmement intéressants dont bon nombre pourraient vraisemblablement et devraient être inclus dans le règlement.

C'est pour ça, et je le rappelle, que le dernier paragraphe de 111.0.12 est là: Un règlement visé "est soumis à l'approbation du gouvernement qui peut le modifier." Ceci signifie qu'il est possible pour le gouvernement d'y inclure un certain nombre d'éléments qui devront être considérés pour la détermination des services à maintenir. On aurait pu choisir l'autre piste qui aurait été de mettre dans le texte de loi toute une série de ces éléments. On préfère le faire en travaillant avec les parties en laissant le conseil faire son travail quitte à l'aider, quitte à lui donner certaines indications quant à nos intentions en fin de compte pour éviter qu'il ne travaille inutilement ou n'oublie des choses importantes, l'aviser à l'avance, au point de départ même, que certains éléments, à notre avis, devront être dans le projet de règlement. Si tant est qu'ils ne s'y retrouvaient pas, le gouvernement a le pouvoir de modifier le projet qui lui sera soumis, de telle sorte que le député, bien sûr, peut toujours dormir -ce qui demeure, quand même passablement inconfortable - sur son scepticisme, mais c'est déjà prévu par un pouvoir réglementaire.

Si on met tout ça dans la loi, si on établit une liste dans la loi, c'est une approche, c'est une façon de légiférer très rationnelle, très logique, très rigoureuse, mais qui ouvre toujours une porte. C'est une approche, mais c'est une approche qui est dangereuse sur le plan juridique parce qu'on peut toujours plaider - je m'excuse, c'est peut-être ma déformation professionnelle qui joue - que tel critère, telle norme prévue par la loi n'a pas été respectée et que, par voie de conséquence, telle entente n'est pas valable. Quelqu'un pourrait s'en servir à d'autres fins que les fins pour lesquelles c'est prévu. C'est pour ça qu'il y a le pouvoir de modification ultime du gouvernement pour la promulgation du règlement.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. Est-ce que l'article 111.0.12 est adopté?

M. Rivest: Non.

M. Rivest: M. le Président, je voudrais que le ministre m'indique, d'une façon très précise, là où en est rendu le gouvernement au niveau de ses services dans l'élaboration de ce protocole d'entente. Je voudrais aussi demander au ministre les mesures qu'il entend prendre pour s'assurer à quel moment environ le conseil - d'après son évaluation sur le plan administratif - pourra être constitué, deuxièmement prendre acte de tout le travail des gens qui vont être

nommés; il va falloir qu'ils prennent connaissance de tout ce qui existe dans le dossier, faire un règlement sur les éléments essentiels d'un protocole, procéder à la consultation, le soumettre au gouvernement.

Je voudrais que le ministre puisse, demain, étant donné qu'il est minuit, me rassurer et m'indiquer le moment où les gens, dans le réseau des affaires sociales et des services de santé, pourront avoir en main un tel protocole-cadre ou un tel règlement pour commencer à se parler au niveau des ententes et des listes qu'ils devront avoir conclues avant le 30 septembre.

M. Marois: Je peux tout de suite dire au député, M. le Président, dans les meilleurs délais, les plus rapides après l'adoption de la loi.

M. Rivest: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Rivest: On ajourne, d'accord.

Le Président (M. Gagnon): La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 58)

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