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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 15 juin 1983 - Vol. 27 N° 111

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 17 - Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Quinze heures vingt-deux minutes)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît;

Je déclare la séance ouverte. Je rappelle aux membres de cette commission que le mandat de celle-ci est d'étudier article par article le projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives.

Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Lafrenière (Ungava), Lavigne (Beauharnois), Mathieu (Beauce-Sud), Leduc (Fabre), Paradis (Brome-Missisquoi), Rocheleau (Hull) et Bordeleau (Abitibi-Est).

Les intervenants sont: MM. Bélanger (Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Fortier (Outremont), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean) et Vaugeois (Trois-Rivières).

La première tâche qui nous incombe est celle de désigner un rapporteur.

Motion proposant le député d'Ungava

comme rapporteur de la commission

M. Johnson (Anjou): M. Lafrenière (Ungava), M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. Lafrenière (Ungava) est proposé.

M. Paradis: M. le Président, sauf erreur, il s'agit d'une motion débattable. Il s'agit quand même, en fin de session, d'une fonction très importante. Ce n'est pas que je veuille mettre en doute les qualités de notre collègue, le député d'Ungava, de faire rapport à l'Assemblée nationale. On a déjà été témoin du travail qu'il a accompli pour d'autres commissions parlementaires, mais il faut se replacer dans les circonstances qui entourent la présentation de ce projet de loi, saisir l'importance que revêt le projet de loi pour l'ensemble des travailleurs, pour l'ensemble des employeurs et pour la relance de l'activité économique au Québec.

Comme le projet de loi a été déposé par le ministre du Travail, non pas le ministre par intérim, mais le ministre du Travail de façon permanente, M. Fréchette, qui est présentement en congé de maladie et à qui l'Opposition réitère, comme elle l'a fait à toutes les occasions qu'elle a eu de le faire, ses voeux de prompt rétablissement; comme le ministre n'a déposé ce projet de loi que le 19 mai; comme il s'agit d'un projet de loi capital, comme la deuxième lecture n'est arrivée qu'en fin de session; comme le rapport sera déposé présumément demain, après-demain ou la semaine prochaine, en même temps que plusieurs autres rapports, comme Opposition, dans l'intérêt des travailleurs, dans l'intérêt des employeurs, dans l'intérêt de la relance économique, on voudrait éviter que ce rapport soit noyé parmi tous les autres rapports des autres commissions, commissions qui sont importantes, mais que l'on juge de ce côté-ci moins susceptibles d'entraîner des inconvénients aux travailleurs et aux employeurs du Québec.

Comme je le disais donc au début de mon intervention, ce n'est pas parce que le Parti libéral ou parce que le député de Brome-Missisquoi en veut au député d'Ungava, mais force nous est de constater que le siège qu'il occupe à l'Assemblée nationale du Québec est placé en arrière, dans un coin. C'est le premier ministre, c'est le whip, c'est le parti ministériel qui a décidé d'assigner une position aussi obscure, à l'extrême droite du poulailler comme on l'appelle communément, au député d'Ungava. Ce n'est pas parce que...

Le Président (M. Blouin): Je m'excuse, M. le député, vous êtes presque en train d'insulter la présidence, c'est presque mon voisin.

M. Paradis: M. le Président, il s'agit d'un excellent point...

M. Johnson (Anjou): ...

M. Paradis: ... que vous soulevez. Je sais que vous êtes situé dans cet entourage-là et que votre entourage est bon. C'est ce que je disais. On n'en veut pas au député d'Ungava, on reconnaît ses qualités, mais quelqu'un au Parti québécois, au gouvernement a décidé, peut-être pour le mieux-être de la société, peut-être pour priver la société de grands talents, de vous situer, vous et votre voisin, le député d'Ungava, dans ce coin de la Chambre.

Peut-être que les travailleurs, les entrepreneurs, la relance économique en souffrent au Québec. Cela ne pourrait pas être pire, M. le Président, je vous l'accorde. Vous pourriez sans doute effectuer une

meilleure tâche, mais la situation qu'il nous faut constater malheureusement, c'est que, lorsque M. Lafrenière se lèvera en Chambre pour déposer le rapport, parce qu'il est mal situé, il ne pourra pas être vu, compris et entendu de l'ensemble de la députation. J'ajouterais, maintenant que vous me soulignez que vous êtes à ses côtés, que les lumières qui rejaillissent tout autour de vous le placeront finalement dans une espèce d'auréole qui nous empêchera de le voir correctement.

Cela n'est pas la faute du député d'Ungava, ce n'est pas la faute du Parti libéral du Québec, ce n'est pas la faute du député qui vous parle mais il y a encore plus important, M. le Président. Lorsqu'on confie la tâche à un membre de cette Assemblée nationale, ce n'est pas obligatoirement - je vous le soumets, M. le Président, et peut-être que je vous adresserai une question de directive sur le sujet - un membre de la majorité servile ministérielle qui doit être nommé rapporteur. On peut profiter des talents d'un membre de l'Opposition qui serait plus en évidence, mieux placé, qui pourrait faire rapport à l'Assemblée nationale d'une banquette avant, ce qu'on appelle un "front-bencher" comparé à un "back-bencher". Peut-être que ce serait préférable pour que les travailleurs, les employeurs du Québec comprennent vraiment ce que contient le projet de loi qu'on est appelé à étudier en commission parlementaire.

Avant de dire non, parce que je n'ai pas encore dit non, il ne faut pas penser, à la suite de ce que je viens de dire, que des qualités personnelles exceptionnelles ne feraient pas en sorte de contrebalancer la location du siège du député d'Ungava. Peut-être que, dans son curriculum vitae, on retrouvera des aspects qui feront en sorte que, finalement, sa personnalité, sa jovialité contrebalanceront le rôle obscur qu'ont voulu lui donner jusqu'à présent le premier ministre du Québec, le gouvernement et le parti ministériel.

Si vous le permettez, M. le Président, nous regarderons ensemble le curriculum vitae du député d'Ungava, qui nous est fourni par l'Assemblée nationale du Québec. Peut-être à l'analyse découvrirons-nous que, effectivement, l'honorable ministre du Travail par intérim avait raison de faire une motion pour que le député d'Ungava occupe cette importante fonction de rapporteur.

Marcel Jim Lafrenière est né à Malartic le 19 juin 1939. Il est dans la force de l'âge. Il est marié, a une occupation stable, est père d'un enfant - et ce n'est peut-être pas fini - et habite à Chibougamau depuis 25 ans. On s'aperçoit que, lorsqu'il occupe un endroit, qu'il se situe géographiquement, soit dans un comté, soit à l'Assemblée nationale, on peut présumer qu'il reste dans le même coin longtemps, et c'est inquiétant. D'ici à ce qu'il soumette le rapport à l'Assemblée nationale, cette stabilité pourrait faire en sorte qu'il ne puisse pas profiter d'une banquette plus avancée. Cette stabilité - 25 ans dans le même coin - ajoute à la crainte que nous avions du côté de l'Opposition que, finalement, le rapport soit rendu, malgré les grands talents qu'on lui reconnaît, dans un coin obscur de la Chambre.

M. Lafrenière: La même rue aussi.

M. Paradis: M. le député ajoute que c'est la même rue et c'est sans doute la même maison également. Cela ajoute à l'élément de stabilité. Je vous en félicite et j'aurais espéré que le Parti québécois vous stabilise à un poste beaucoup plus en évidence, connaissant vos qualités humaines.

Depuis 1972, M. Lafrenière occupe le poste de gérant de l'aréna de Chibougamau. Ce n'est pas un simple poste de rapporteur, c'est un poste de gérant et, lorsqu'on est gérant de quelque chose, on a des gens qui font des rapports qui dressent des procès-verbaux. Cela m'inquiète, parce que, finalement, M. Lafrenière est peut-être trop qualifié pour occuper le poste de rapporteur. Ses antécédents de gérant nous l'indiquent. Il a d'abord été membre des forces armées canadiennes de 1956 à 1959. C'est rassurant. On découvre qu'un péquiste, supposément séparatiste, a quand même un certain attachement au fédéralisme canadien, qu'il avait suffisamment d'idéal pour aller s'enrôler volontairement dans les forces armées canadiennes et qu'il est fier - le député d'Ungava, Jim Lafrenière - d'avoir fait partie des forces armées canadiennes de 1956 à 1959. Il était fier d'être prêt à défendre son pays. Connaissant notre ami le député d'Ungava, je présume que cette fierté d'être Canadien, d'être prêt à défendre son pays l'anime encore.

Si vous me le permettiez, je lui adresserais la question, parce que c'est un élément dont il va falloir que nous tenions compte dans notre décision: S'il avait perdu cette fierté de représenter le Canada, si, au cours des années, son sentiment de patriotisme "se serait"...

M. Johnson (Anjou): S'était.

M. Paradis: Merci, M. le ministre. ... s'était effrité de quelque façon que ce soit, on pourrait penser que le rapport qu'il aura à soumettre à l'Assemblée nationale du Québec pourrait s'effriter en chemin et, comme nous voulons que le rapport soit le plus complet possible, cette situation créerait le doute chez le député de Brome-Missisquoi et - je n'en doute pas - chez mes collègues de l'Opposition. Si on pouvait avoir une indication quant à cette appartenance, à ce

sentiment d'appartenance et de fierté d'être Canadien, d'être prêt à défendre son pays, peut-être que cet élément très positif ferait en sorte que, malgré la position obscure qu'il occupe dans le parti ministériel, nous pourrions lui faire confiance, avoir confiance qu'il ferait un rapport complet et détaillé, rédigé de main de maître à l'Assemblée nationale du Québec, qui saurait éclairer l'ensemble des travailleurs et des employeurs sur ce que contient vraiment le projet de loi et sur les discussions qu'on aura en cette Chambre. J'attends des indications et, sauf indication du contraire, je tiens pour acquis que ce sentiment d'appartenance au Canada, cette fierté d'être Canadien anime toujours le député d'Ungava. Puis... Est-ce une question de règlement, M. le Président? C'est mon droit de parole.

M. Lafrenière: Non. C'était plutôt pour répondre.

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Ungava, question de règlement?

M. Lafrenière: Ce n'est pas une question de règlement. C'est...

Le Président (M. Blouin): Ah! S'il ne s'agit pas d'une question de règlement...

M. Lafrenière: Non? D'accord. Plus tard.

Le Président (M. Blouin): ...M. le député d'Ungava, vous devez d'abord permettre au député qui...

M. Lafrenière: Oui.

Le Président (M. Blouin): ...a la parole de terminer son droit de parole, bien minuté, de 20 minutes et, par la suite, si vous désirez - s'il ne s'agit pas d'une question de règlement, si vous désirez ajouter des commentaires, vous aurez vous aussi un droit de parole bien minuté de 20 minutes, jusqu'à ce que tous ceux et celles qui le désirent se soient exprimés. C'est ainsi que nos règlements balisent ce genre de débat fondamental. M. le député.

M. Paradis: Question de directive. Est-ce que le temps d'interruption est compilé sur mon temps?

Le Président (M. Blouin): Habituellement, lorsque le président prend quelques secondes pour rétablir les choses, pour rétablir la bonne marche des travaux, on ne se formalise pas habituellement de ce genre d'interruption très brève. Vous avez la parole.

M. Paradis: II me fait plaisir de me plier à votre décision et, pour autant que ce ne soit pas de façon répétée, je pense que vous avez rendu pas simplement une décision qui est juste, mais une décision qui est sage et éclairée. Notre ami le député d'Ungava, M. Jim Lafrenière, suivant son curriculum vitae, a été par la suite, en 1960, employé de la compagnie minière Campbell. On aurait des questions à adresser au député d'Ungava sur ce point. Est-ce qu'il était un travailleur syndiqué ou non syndiqué? Est-ce qu'il était un cadre de la compagnie? Parce que le poste qu'il a pu occuper pourrait faire en sorte qu'il ait des préjugés face au projet de loi qui nous est présenté, pourrait faire en sorte qu'à cause de ces préjugés, le rapport qu'il serait appelé à présenter devant l'Assemblée nationale du Québec soit biaisé. Si le député a été un travailleur syndiqué, il a été à même de constater que les règles actuelles du Code du travail, sans modification, permettent le libre accès à la syndicalisation. Il serait donc en mesure de témoigner que les changements apportés ne sont pas de nature à permettre l'exercice d'un droit fondamental qui est reconnu et exercé depuis au moins l'entrée en vigueur de notre Code du travail en 1964.

Le député d'Ungava, notre ami Marcel Jim Lafrenière, est ensuite devenu agent d'affaires pour le Conseil des métiers de la construction, région Côte-Nord et Abitibi, en 1961-1962. À la lecture de cette simple phrase, vous vous rendez à l'évidence que M. Lafrenière a été agent d'affaires pour un syndicat, que M. Lafrenière, à cause de cette position fort honorable qu'il a occupée dans le passé, pourrait être tenté de livrer à l'Assemblée nationale du Québec un rapport qui ne refléterait qu'une partie du dossier. M. Lafrenière et vous, M. le Président, vous avez écouté les mémoires, vous avez vu qu'il y avait plus qu'une partie dans le dossier et que si on pouvait regrouper le tout en une seule partie, c'était strictement au niveau du mécontentement de l'ensemble des parties sur l'absence de réformes en profondeur de notre Code du travail, absence que l'on a blâmée, à juste titre, à cause de l'inaction pendant plusieurs années du ministre du Travail, ministre par intérim aujourd'hui, qui a occupé ce poste jadis, qui avait pris des engagements péquistes dès l'automne 1979 de réformer en profondeur notre Code du travail.

Le proposeur de la motion s'est placé dans une drôle de situation lorsqu'il a proposé que le député d'Ungava occupe cette importante fonction de rapporteur. Par la suite, de 1962 à 1972, le député d'Ungava travaille pour divers entrepreneurs miniers. Encore une fois, est-ce qu'il travaillait comme travailleur syndiqué, comme travailleur non syndiqué? Est-ce qu'il occupait une position de cadre? Son curriculum vitae ne l'indique pas, M. le

Président. À moins que, spontanément, le député d'Ungava ajoute aux brèves notes historiques que nous possédons sur sa vie, nous serons dans le doute, M. le Président. Nous demeurerons dans le doute et, dans le doute, nous préférons sûrement choisir quelqu'un qui puisse nous apporter une certitude, parce qu'on sait ce que fait le doute. Le doute sur l'avenir politique du Québec, cela fait fuir les investisseurs. Cela fait perdre des jobs aux Québécois. Le doute sur l'orientation - et, en le disant, je reprends à mon compte les propos de l'honorable ministre des Finances - du gouvernement quant au régime de relations de travail, cela fait aussi fuir les investisseurs. Cela fait perdre des jobs aux Québécois et ce sont ces doutes que nous voulons, comme Opposition libérale cette hypothèse - vous me prêterez l'expression, M. le notaire - que nous voulons lever sur l'avenir économique du Québec et sur l'avenir des travailleurs et des entrepreneurs québécois.

Je continue la lecture du curriculum vitae de notre bon ami, le député d'Ungava. M. Lafrenière est président du conseil d'administration de l'hôpital de Chibougamau. Il a joué, à ce niveau, un râle important d'employeur. Cela rééquilibre un peu la situation précédente où il était agent d'affaires pour un syndicat, mais, fondamentalement, quel type d'employeur était M. Lafrenière? Le type d'employeur qui vote pour la loi 111? Pour la suspension des chartes des droits et libertés québécoise et canadienne? Cela nous inquiète. Dans les circonstances...

Le Président (M. Blouin): En concluant, M. le député de Brome-Missisquoi.

Motion d'amendement

M. Paradis: ...en concluant, M. le Président, je voudrais apporter un amendement à la motion de l'honorable ministre du Travail par intérim. Cet amendement est bien simple, il s'agit de substituer le nom... Il y a beaucoup de jurisprudence à cet effet, elle est constante, répétée et continue. Avant de rendre une décision, M. le Président - je vous vois hocher la tête - je vous prierais de vérifier auprès d'autres de vos collègues, parce que la présidence ne forme qu'un, mais, dans les décisions importantes, il faut toujours consulter et la jurisprudence est constante. Il s'agit strictement dans la motion de changer le nom du comté d'Ungava par celui de Beauce-Sud, et je m'expliquerai sur cette motion dès que vous l'aurez déclarée recevable. Mais, avant de la déclarer recevable comme telle, je vous réfère à des décisions antérieures qui ont été rendues par plusieurs de vos collègues. Je vous réfère à une jurisprudence constante à l'Assemblée nationale du Québec et à ses commissions. Je vous réfère plus particulièrement au projet de loi 16, qui, dans cette même salle, a fait l'objet d'une modification identique à celle que je vous propose, et au projet de loi 37 ou 39 où il y a eu des amendements répétés qui ont été jugés recevables par tous vos collègues.

Le Président (M. Blouin): M. le député...

M. Paradis: Je vous souligne cette jurisprudence constante, non pas dans le but d'influencer votre décision, mais afin de nous assurer que la jurisprudence, qui est un des éléments les plus importants dans l'interprétation de notre règlement, ne connaisse pas de soubresauts soudains et, pour autant qu'on puisse vérifier rapidement et facilement, s'inscrive dans la grande continuité de nos traditions parlementaires.

Le Président (M. Blouin): D'abord, M. le député de Brome-Missisquoi, je vous signale que ce n'est pas parce qu'à certaines occasions on a pu accepter certains comportements en commission parlementaire ou à l'Assemblée nationale que cela constitue par le fait même des décisions. Deuxièmement...

M. Paradis: M. le Président, sur votre question de règlement, si vous me le permettez.

Le Président (M. Blouin): Deuxièmement...

M. Paradis: Vous avez parfaitement raison quant aux comportements. Quant à la recevabilité, c'est quelque chose d'intrinsèquement impliqué dans le règlement.

Le Président (M. Blouin): ...je vais suspendre les travaux pour quelques minutes afin de vérifier l'application de l'article 70 de notre règlement, qui m'apparaît très clair à première vue, mais afin d'être sûr de rendre la décision la plus juste, la plus équitable et la plus honnête possible, je vais suspendre les travaux pour quelques minutes.

M. Paradis: Très bien, M. le Président. (Suspension de la séance à 15 h 45)

(Reprise de la séance à 15 h 59)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît;

La commission permanente du travail reprend ses travaux. Avant de rendre une décision, je souhaiterais que les membres et les intervenants de la commission qui

désirent le faire interviennent afin que nous puissions juger de la recevabilité ou de l'irrecevabilité de l'amendement qui a été proposé par le député de Brome-Missisquoi. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, au soutien de la validité ou de la recevabilité de l'argument qu'on vous a fait, de l'amendement qu'on a apporté, il s'agit de faire une lecture très stricte et très attentive du libellé de l'article comme tel: "Un amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants: retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres." Vous avez sans doute saisi, M. le Président, qu'en remplaçant le mot "Ungava" par le mot "Beauce-Sud", nous nous sommes conformés à cette partie de l'article.

Le reste de cet article est très important: "II est irrecevable - donc, vous devriez le déclarer tel - si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé et il en est de même d'un sous-amendement par rapport à un amendement."

M. le Président, quelle est la question principale à laquelle nous sommes confrontés? Je vous le soumets bien humblement, la question principale à laquelle cette commission est confrontée est de nommer un rapporteur. C'est la question principale. C'est l'essence et la substance de ce que nous avons à faire à cette commission comme premier devoir. Je vous soumets, sans tomber dans le fond, M. le Président, que la nomination de ce rapporteur peut amener des interventions de tel genre ou de tel autre et apporter un amendement qui n'a pas pour effet d'écarter la question principale. Nous n'avons jamais suggéré de ne pas nommer de rapporteur. Au contraire, nous avons suggéré de nommer un rapporteur et un rapporteur dont le nom est différent de celui qu'avait suggéré le ministre par sa motion principale et, par ce fait, nous nous sommes conformés au premier alinéa de l'article; nous avons tout simplement remplacé des mots par d'autres. C'est mon intervention, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la question de règlement, je ne reprendrai pas la lecture de l'article 70. Je pense qu'il est clair. Je m'arrêterai à la deuxième partie de cet article qui dit que l'irrecevabilité est basée sur le fait que, si l'amendement a pour effet d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé, l'amendement est irrecevable. La question principale à mes yeux, M. le Président, c'est de nommer ce remarquable député qu'est M. Lafrenière, le député d'Ungava, rapporteur de cette commission. Le député de Brome-Missisquoi nous en a d'ailleurs fait l'éloge en lisant son curriculum vitae, c'est quelqu'un qui, à cet égard, justement parce qu'il a occupé à la fois des fonctions syndicales et patronales, est tout à fait apte à remplir ces fonctions de rapporteur d'une commission qui touche le Code du travail.

Nonobstant cela, M. le Président, je pense que je procéderais par analogie. Quand l'Assemblée nationale du Québec nomme le Vérificateur général, quand elle est appelée à nommer l'ombudsman, quand elle est appelée à nommer le président de la Caisse de dépôt et placement ou d'autres personnes qui sont... Dans le cas du président de la Caisse de dépôt, M. le Président, il s'agit d'une nomination par arrêté en conseil, mais un désistement peut être provoqué par les deux tiers de l'Assemblée nationale. Quand l'Assemblée est appelée à nommer une personne, si l'Opposition n'est pas d'accord, elle ne peut pas présenter d'amendement. L'Opposition doit s'inscrire contre la nomination qui est proposée. Or, M. le Président, si le Parti libéral s'oppose à ce que notre estimé collègue d'Ungava soit rapporteur, il aura l'occasion de l'exprimer par un vote.

M. Paradis: Si vous me permettez d'ajouter à l'exemple donné par l'honorable ministre du Travail par intérim, il suffirait de reprendre l'exemple qui nous est donné quant à la nomination du président de l'Assemblée nationale et des articles 7 et suivants qui prévoient cette nomination pour constater que ce que vient de dire l'honorable ministre du Travail par intérim est tout à fait inexact.

M. le Président, les articles 7 et suivants, vous les avez à votre règlement. Si vous voulez que je vous en fasse lecture, je vais le faire très rapidement: "À sa première séance après des élections générales, l'Assemblée doit, avant d'expédier quelque affaire, élire un président parmi les députés. "Le secrétaire préside à l'élection du président qui se fait à la suite d'une motion non annoncée, qui n'est pas susceptible d'amendement et il doit être fait autant de motions qu'il est proposé de députés."

Il n'appartient pas au parti ministériel d'avoir le monopole des propositions, M. le Président. L'article 9 nous le dit clairement: "S'il n'est proposé qu'un seul député, le secrétaire le proclame élu. S'il est proposé plus d'un député, toutes les motions sont débattues à la fois."

Il s'agissait dans ce cas-ci, M. le Président - je vous le fais remarquer humblement - d'un cas où la motion n'était pas susceptible d'amendement mais pouvait

provenir de quelque côté que ce soit de la Chambre. Vous comprendrez que, pour des raisons d'efficacité la motion vient généralement du premier ministre, qui a la majorité en Chambre. Il est possible à l'Opposition officielle ou à quelque autre formation politique de proposer un président, et rien ne l'interdit.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que le député a lui-même invoqué des articles qui, du fait que l'on veuille bien s'y référer à partir de 70, démontrent bien que si 70 avait voulu dire autre chose que l'interprétation que j'en ai faite, il l'aurait fait comme il l'a fait dans un autre cas, c'est-à-dire ce qu'on retrouve aux articles 6 et 7 ou 7 et 8 du règlement. Deuxièmement, on dit bien, et c'est quand même remarquable, que, quand l'Assemblée nationale décide de nommer un président, s'il y a plusieurs candidatures, on débat de tout en même temps.

Je crois comprendre, par la technique qui est amorcée par l'Opposition, qu'on voudrait faire une série de débats sur chacune des nominations qu'on proposerait. À cet égard, M. le Président, dans les circonstances, je pense que les dispositions de 7 et 8 ne s'appliquent pas à l'article 70.

M. Paradis: M. le Président, un dernier mot sur l'article 8. Lorsqu'on indique qu'une motion n'est pas susceptible d'amendement, on le fait expressément. C'est le cas de l'article 8. On ne retrouve pas cet élément dans l'article 70. Au contraire, l'article 70 vise spécifiquement les amendements.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que je ne peux pas apporter plus de lumière à la décision difficile que vous avez à prendre.

Le Président (M. Blouin): Très bien. M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Si vous me permettez un commentaire, avant de rendre votre décision, afin d'éclairer votre lanterne. J'ai toujours prétendu qu'un amendement à une proposition n'avait pas fondamentalement pour effet de changer le sens de la proposition. La première proposition allait dans le sens de nommer comme rapporteur le député d'Ungava. Le député de Brome-Missisquoi fait une motion d'amendement à l'effet de nommer plutôt le député de Beauce-Sud. Quant à moi, quand on connaît les deux députés et, avec tout le respect que j'ai pour l'un et pour l'autre, cela change complètement le sens et le fond de la proposition. Dans ce sens, je dirais que l'amendement est irrecevable, car cela change le sens et le fond de la proposition.

M. Paradis: M. le Président, je pourrais peut-être apporter un dernier éclairage additionnel. La lecture de l'article 161 s'impose également dans le cas qui nous préoccupe: "Dès qu'une commission élue a terminé l'examen de l'affaire qui lui a été référée, elle doit, par l'entremise d'un rapporteur qu'elle a désigné parmi ses membres..." Il ne s'agit pas de donner une exclusivité, on dit "parmi ses membres", et je vous souligne que le député de Beauce-Sud est membre de ladite commission.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Je remercie les membres de la commission de leurs précisions pour appuyer leur position respective. Sur ce, nous allons suspendre les travaux pour quelques minutes. Cela ne devrait pas être très long, je l'espère en tout cas.

(Suspension de la séance à 16 h 09)

(Reprise de la séance à 16 h 40)

Le Président (M. Blouin): La commission élue permanente du travail reprend ses travaux.

Tout d'abord, je remercie les membres de la commission qui ont participé à ce débat de procédure. À la suite des recherches que nous avons faites, je vous fais donc lecture de la décision qui est rendue.

Motion d'amendement jugée irrecevable

L'article 70 de notre règlement indique qu'un amendement ne peut avoir pour effet d'écarter la question principale. Par analogie, l'article 566 de l'ancien règlement Geoffrion est au même effet, particulièrement à l'annotation 8 qui se lit ainsi: "II est irrégulier de proposer de remplacer tout un article par un autre. La manière de procéder quand on veut remplacer un article par un autre, c'est de voter contre l'adoption de l'article à l'étude puis, s'il n'est pas adopté, d'en proposer un nouveau lorsque tous les articles imprimés du bill ont été examinés."

L'auteur Beauchesne dans sa cinquième édition, stipule qu'un amendement qui donnerait le même résultat que le refus pur et simple de la proposition principale n'est pas conforme au règlement.

Les précédents en cette matière, bien que rares, confirment l'irrecevabilité de ce type d'amendement. Ainsi, le 23 février 1983, lors du débat sur le projet de loi 39, le président, en rendant une décision, a dit et je cite les paroles du président qui rendait une décision à cet effet: "Le fait, donc, par un amendement de remplacer le nom d'un rapporteur par un autre équivaut, comme le dit Geoffrion, à remplacer tout un

article par un autre puisque le nom d'un rapporteur, c'est la substance même de la motion."

Ainsi, la question principale soumise à la commission est bien celle de proposer le député d'Ungava à titre de rapporteur de cette commission. Le député d'Ungava est bien le sujet central au coeur de la motion. En conséquence, la motion du député de Brome-Missisquoi est irrecevable.

Je permets donc maintenant au député de Brome-Missisquoi, non pas de revenir sur ce sujet, mais bien de terminer son temps de parole. Il lui restait quelques minutes et, ensuite, s'il n'y a pas d'autres intervenants, nous procéderons et, s'il y en a d'autres, nous les entendrons. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, je me soumets à votre décision comme je le fais habituellement avec tout le respect qu'on doit à la présidence, au poste que vous occupez. Je tiendrais quand même à vous poser une question de directive. Je remarque que mes craintes s'étaient avérées justes et que le député d'Ungava est un petit peu indiscipliné et qu'il n'est pas présentement avec nous.

Est-ce que la personne qui est proposée par motion du ministre - et c'est ma demande de directive avant d'utiliser mon droit de parole, M. le Président - se doit d'accepter le poste dont elle est le sujet par la motion présentée par le ministre? Si, dans l'affirmative, le député en question doit acquiescer à l'importante fonction qu'on lui demande de combler, à ce moment-là, il faudrait vérifier auprès du député d'Ungava s'il est prêt à accepter cette importante fonction.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me permettez, compte tenu du fait que mon collègue, le député d'Ungava, qui a dû subir, je dois le dire, au cours du débat qui vous a amené à prendre cette décision, des quolibets à peine voilés de l'Opposition...

M. Paradis: J'ai dit des choses flatteuses.

M. Johnson (Anjou): Le député d'Ungava - j'aimerais peut-être rétablir ici certaines choses - est, je pense, un collègue absolument estimable, d'autant plus estimable que le règlement dit qu'il constituait la substance de la proposition que j'ai faite quand j'ai proposé qu'il soit rapporteur. Le député d'Ungava était retenu par d'autres travaux, mais il est maintenant avec nous et je pense, M. le Président, que nous pourrons passer à l'adoption de cette motion.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Le député d'Ungava étant maintenant revenu, la question de directive que je vous ai posée va sans doute être sans objet puisqu'il pourra rendre lui-même sa décision et accepter ce mandat fort important.

M. le Président, j'aimerais vous présenter la motion suivante, qui se lirait comme suit: Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de pouvoir prendre la parole et ce...

Le Président (M. Blouin): Une question de règlement, M. le député?

M. Bordeleau: Je ne veux pas interrompre inutilement le député de Brome-Missisquoi, mais, comme nous en étions à la proposition de nommer le rapporteur, avant de passer à une nouvelle motion, vu qu'il s'agit de faire accepter le candidat proposé, j'imagine que vous devriez lui demander s'il accepte, pour qu'on puisse procéder à d'autres motions par la suite et continuer avec un rapporteur.

Le Président (M. Blouin): Nous devrions d'abord... oui.

M. Paradis: M. le Président, j'ai tenu pour acquis, des signes de tête du député d'Ungava, qu'il acceptait cette lourde tâche, mais on a oublié de procéder, conformément à notre règlement, à l'adoption...

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Paradis: ...officielle du consentement, étant donné votre décision.

Le Président (M. Blouin): Si j'ai bien compris, le député d'Ungava sera le rapporteur de cette commission.

M. Lafrenière: C'est bien cela.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi, vous pouvez maintenant procéder en toute liberté. Oui, M. le député.

M. Maciocia: M. le Président, il ne peut s'absenter, s'il veut faire un bon rapport.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, puis-je me permettre de souligner que je crois que vous n'avez pas à rendre une décision qui ferait jurisprudence en cette matière et souligner aussi au député de Viau, je crois?

M. Maciocia: Viger.

M. Johnson (Anjou): Pardon, de Viger -

je les confonds toujours - que le député d'Ungava a été beaucoup plus assidu à cette commission que le député de Viger.

M. Maciocia: M. le Président - je ne sais pas si c'est une question de règlement -mais je viens juste de participer à cette commission; je ne pouvais pas être ici avant à cause d'autres engagements. Vous savez très bien que le ministre enfreint complètement le règlement.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

Motion proposant d'accorder le droit de parole à tous les députés

M. Paradis: M. le Président, sur ces sages paroles, d'une part - je ne dirai rien d'autre - je voudrais faire la motion suivante: Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de prendre la parole, sans devoir obtenir au préalable la permission et ce, pour toute la durée de l'étude article par article du projet de loi 17.

J'aimerais pouvoir m'exprimer sur cette motion pour vous convaincre de son bien-fondé.

Le Président (M. Blouin): M. le ministre, sur la recevabilité.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la recevabilité. Je crois que l'Assemblée nationale, au moment où elle décide en début de session de la formation des commissions, avec le statut d'intervenant et le statut de membre de la commission, dispose de cette question. Il n'est pas du ressort de notre commission de décider de ce qui est du ressort de l'Assemblée elle-même. À cet égard, nous pouvons considérer que la motion du député est irrecevable.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, sur la question de règlement, la motion proposée ne va nullement à l'encontre de la décision de l'Assemblée nationale de nommer une commission élue permanente du travail et de nommer également de part et d'autre de la Chambre les représentants comme membres et comme intervenants.

Je vous réfère plus spécifiquement à l'article 148 de notre règlement qui se lit comme suit: "Tous les députés ont accès aux commissions, mais ceux qui n'en sont pas membres et les autres personnes doivent obtenir la permission de la commission pour s'y faire entendre."

M. le Président, on peut par motion s'entendre, une motion unanime de cette commission. C'est fantastique les choses que l'on peut faire à la majorité, par consentement, par vote ou par décision de la commission.

Le paragraphe 2 stipule que "les commissions doivent entendre les députés qui ont proposé une loi qui y est discutée et qui en font la demande."

L'alinéa 3 dit que lorsqu'une commission étudie les crédits d'un ministère, mais cela ne s'applique pas à notre cas, il s'agit d'une motion qui concerne l'organisation de nos travaux, il est de jurisprudence constante qu'une commission délimite l'organisation de ses travaux au tout début de ces derniers.

À ce moment, avant d'entreprendre l'article 1, si cette commission devait décider d'entendre les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants, on permettrait, sans aller à l'encontre de la décision de l'Assemblée nationale de nommer des membres et des intervenants, à l'ensemble des députés du côté ministériel, où ils sont plus nombreux, c'est le jeu de la démocratie qui le veut ainsi, de même qu'aux députés de l'Opposition, de se faire entendre. M. le Président, je sais que vous, personnellement, vous êtes en faveur du fond de la motion que je n'ai pas le droit de débattre à ce moment-ci. Je sais également qu'il n'y a rien dans notre règlement, aucun article d'ailleurs, le ministre n'en a cité aucun - qui interdit la présentation d'une telle motion.

J'ajouterais même qu'il n'y a rien dans notre règlement qui peut même sembler, avoir une apparence ou un début d'apparence pour rendre irrecevable une telle motion. Je vous soumets donc que ladite motion est recevable et qu'on se doit de la débattre. J'ajouterais, en concluant, que je suis certain que cela ne prendra pas un long débat pour convaincre les membres de la majorité ministérielle, les membres de cette commission, de voter pour une telle motion et de permettre à tous leurs collègues qui ont des travailleurs et des employeurs dans leurs régions, beaucoup de PME, de se faire entendre et d'exprimer leur point de vue sur un projet de loi qui les affectera tous.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, toujours sur la question de règlement, je souhaite que ce soit la dernière intervention que j'aie à faire, je dirai que l'article 148 m'apparaît tout à fait limpide. Il dit que tous les députés ont accès aux commissions mais que ceux qui n'en sont pas membres et les autres personnes doivent obtenir la permission de la commission pour s'y faire entendre.

M. Paradis: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): Or, la notion de

permission n'est pas l'équivalent d'une décision sous forme de motion de cette commission qui s'approprierait ce qui est de la juridiction du Parlement lui-même et de l'Assemblée nationale, mais bel et bien une requête de consentement ad hoc dans chaque cas qui, en tout temps, peut être refusée par un membre de la commission.

M. Paradis: M. le Président, je pourrais vous référer à une décision récente de la commission qui a étudié l'affaire du saccage LG 2 où on a entendu le premier ministre, qui n'était ni membre ni intervenant. Elle l'a décidé ainsi. On me dit qu'une décision plus extensive a été rendue dans le cas de l'adoption de la loi 101 par l'ex-président de l'Assemblée nationale - c'était le député de Jonquière qui présidait ladite commission -et qu'il a qualifié une motion identique à celle que je vous présente, dans une décision qu'il a rendue dans ce cadre, de motion idéalement - c'est le terme qu'il a employé à ce moment - recevable.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je n'ai rien à ajouter. J'ai remarqué que la dernière fois, j'ai eu à faire une intervention. Je vous ai donné mon interprétation et c'était celle de la règle. Je ne pense pas que ce soit le temps qu'on prenne pour exposer les motifs, mais peut-être la clarté qu'on utilise; l'article 148 m'apparaît clair.

M. Bordeleau: M. le Président....

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bordeleau: Quelques mots, justement, sur la question de règlement. Je pense qu'il ne faut pas s'éterniser là-dessus. On parle de permission à l'article 148, effectivement, et la permission équivaut à un consentement. S'il n'y a pas consentement, cela veut dire que c'est fini. La présidence a simplement à demander s'il y a consentement. Si vous n'obtenez pas consentement, M. le Président, vous devez passer à autre chose.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Moi, M. le Président, je trouve qu'au début on devrait établir clairement que si nos collègues de l'Assemblée nationale qui ont d'autres préoccupations, ont des points tout à fait particuliers à traiter... Entre autres, on sait que le monde municipal est affecté d'une façon particulière et que notre collègue est actuellement occupé à d'autres endroits. Je pense qu'on devrait élargir cette permission à tous nos collègues, tant du côté ministériel que du côté de l'Opposition. Je pense que ce serait tout à fait logique de le faire. Je ne vois pas pourquoi, M. le Président, le ministre pourrait s'y opposer, étant donné qu'il...

Le Président (M. Blouin): M. le député, nous ne discutons pas actuellement de l'à-propos de cette motion, mais nous discutons de sa recevabilité.

M. Rocheleau: Je pense, M. le Président, que mon collègue a mentionné tantôt certains articles de la loi qui semblaient permettre cette recevabilité. Je fais simplement allusion au fait que le ministre du Travail par intérim semblait s'opposer à cette recevabilité.

M. Paradis: Pour répliquer à l'argument invoqué par nos amis d'en face, on a mentionné le fait qu'obtenir la permission équivalait au consentement, le signifiait ou était synonyme de consentement. M. le Président, cette commission peut donner la permission d'une façon unanime, par consentement, et elle l'exprime... On pourrait demander un vote unanime, on pourrait demander un consentement...

M. Johnson (Anjou): ...un consentement.

M. Paradis: Avant d'entendre les arguments, vous voyez la réaction de ces gens-là. M. le Président, la permission peut également être octroyée par un vote majoritaire. Si la commission décidait par un vote majoritaire d'accorder cette permission, elle serait accordée.

Maintenant, M. le Président, si la motion est recevable, et c'est le point sur lequel vous devez trancher, elle sera pas la suite débattue et soumise aux voix suivant les prescriptions de notre règlement. Je vous rappellerai tout simplement en terminant la décision rendue par l'ex-président de l'Assemblée nationale, le député de Jonquière, dans le cas de la loi 101, où il avait qualifié ce genre de motion, alors qu'il était dans la même situation que vous l'êtes présentement, de motion idéale.

Le Président (M. Blouin): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, une dernière intervention. Il m'apparaît que la notion de permission est assimilable à celle de consentement. La notion de consentement, dans notre régime de règles du Parlement, implique qu'un individu, un parlementaire peut opposer son consentement et c'est justement la règle du consentement qui est utilisée par opposition à la règle du vote majoritaire. Dans les circonstances, M. le Président, ce serait brimer les droits d'un

membre de la commission en vertu du règlement que de passer de la règle de la majorité à la règle du consentement. Si permission équivaut à consentement, consentement équivaut à veto, si l'on veut, de chacun des membres et, à mon avis, un vote majoritaire ne peut pas remplacer ce qui est un droit de veto des membres.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viger.

M. Maciocia: M. le Président, toujours sur la question de la recevabilité.

M. Johnson (Anjou): Question de règlement, M. le Président.

M. Maciocia: Je ne suis pas sur la liste, c'est ce que vous voulez dire?

M. Johnson (Anjou): Question de règlement, M. le Président. Je pense que le député de Viger n'est pas membre de la commission et qu'il n'est pas non plus intervenant.

Le Président (M. Blouin): Vous avez raison. M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. Je suggérerais aux membres de la commission qu'on s'en tienne à l'application de l'article 148 pour le moment... M. le Président!

Une voix: ...

Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Je ferais la suggestion suivante, M. le Président, pour la bonne marche de nos travaux: qu'on s'en tienne au règlement à l'article 148 qui dit clairement qu'il y a les membres et que, si en cours de route, tout au long de nos travaux, on s'apercevait qu'une demande pouvait être faite de part et d'autre, on posera la question à la commission et on verra à sanctionner cette décision en temps et lieu. Je ne verrais pas pour quelle raison, d'emblée, d'avance, avant même que le cas se présente, on accepte des cas qui ne se présenteront peut-être même pas. Si, toutefois, il venait à se présenter des cas où on devait ajouter ou changer des personnes à la commission, on les évaluera au mérite et on décidera en temps et lieu.

M. Rocheleau: M. le Président, on voit déjà de quelle façon le ministre veut commencer cette commission parlementaire. Déjà, nous avons avec nous le député de Viger et on vient de se faire dire immédiatement qu'on n'acceptait pas qu'il soit inscrit sur la liste des membres ou des intervenants. On voit dans quelle attitude le ministre semble vouloir commencer cette commission. (17 heures)

C'est une des raisons, M. le Président, pour laquelle nous souhaiterions que tous les parlementaires puissent se faire entendre, s'il y a lieu, plutôt que de subir la menace constante du ministre, à savoir s'il veut ou s'il ne veut pas, s'il y a consentement ou s'il n'y a pas consentement. Si on donne l'accord...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Hull, je n'aurai pas à délibérer longuement sur cette question puisque, après avoir entendu les arguments des membres qui se sont exprimés jusqu'à maintenant - je n'étais pas parlementaire à cette époque, mais on m'a précisé qu'il y a eu dans le passé des décisions très précises à cet égard et que les décisions ont eu pour effet de confirmer la recevabilité de ce genre de motion - je ne peux pas faire autrement que de me fonder sur cette jurisprudence et déclarer cette motion recevable.

M. Paradis: M. le Président, en vous remerciant de votre décision à laquelle on se conformera, comme à l'habitude, j'ai une question de directive à vous poser. On vient de souligner le fait, et vous venez de demander au député de Viger de ne pas intervenir parce qu'il n'apparaît pas sur la liste des intervenants ou des membres de la commission. Je souligne simplement qu'il y a des consentements dans la vie qui sont tacites et qu'il y a des consentements dans la vie qui sont explicites. Comme il ne s'agit pas de la première fois que le député de Viger prend la parole au cours de la présente séance, on peut facilement dégager un consentement implicite des parties qui n'ont pas soulevé ce point lors de ses premières interventions.

C'est une question de directive que je vous pose et sur laquelle je vous demande de trancher.

Le Président (M. Blouin): Je n'en ferai pas une décision formelle, à moins que vous me demandiez de le faire.

M. Paradis: Non, je ne vous demande pas d'en faire une décision formelle, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Ce qui est très clair à cet égard, c'est que les membres et les intervenants sont nommément identifiés au début des séances. S'il arrive -et cela arrive de temps à autre - qu'un député vienne s'asseoir, prenne la parole et ensuite reparte, on voit cela à de nombreuses occasions, cela ne fait pas de lui un intervenant ou un membre, comme si on

décidait qu'il était membre, donc quelqu'un qui aurait le droit de vote. Cela ne fait de lui ni un intervenant ni un membre. Le président devrait toujours avoir la présence d'esprit de revenir à la liste qu'il a identifiée au début. On était un peu dans le feu de la discussion, je ne suis pas revenu à cette liste, mais le ministre m'a fait remarquer qu'effectivement - il l'a d'ailleurs fait remarquer à tous les membres de cette commission - le député de Viger n'avait pas été identifié comme étant un membre ou un intervenant de cette commission.

M. Pierre-C. Paradis

M. Paradis: Sur la motion que vous avez déclarée recevable et qui se lit... Je la répète parce que je crois que les indications que nous ont données nos amis d'en face provenaient d'une mauvaise compréhension de la situation.

La motion a pour but de permettre à nos collègues - vous en avez plus que nous qui ne sont pas membres de cette commission, ni intervenants à cette commission - de prendre la parole en tout temps, sans avoir à se plier à chaque occasion à une décision de la commission, sans avoir à obtenir au préalable la permission pour intervenir et ce, pour toute la durée - cela ne peut pas être tellement long, la session prend fin jeudi prochain, ce sera tout de même assez bref, c'est le règlement qui nous dicte ce vocabulaire - de l'étude article par article du présent projet de loi.

Je fais appel au député d'Abitibi-Est pour que, dans l'intervention, sans doute fort éloquente, qu'il fera sur la présente motion, il nous explique pourquoi le député d'Abitibi-Ouest, son voisin, le ministre François Gendron, devrait obtenir une permission avant de venir s'exprimer. Est-ce que le député d'Abitibi-Ouest n'est pas intéressé aux relations du travail dans la province de Québec? Est-ce que le député d'Abitibi-Ouest n'est pas intéressé à une réforme du Code du travail? Est-ce que le député d'Abitibi-Ouest n'a pas d'employeurs, n'a pas de travailleurs dans sa circonscription électorale? Est-ce que le député d'Abitibi-Ouest n'a pas intérêt à s'assurer que les PME de son comté pourront non seulement survivre, mais prendre de l'expansion?

M. le Président, vous comprendrez aisément qu'il ne s'agit pas là du seul député qui pourrait avoir intérêt à venir représenter ses travailleurs et ses employeurs devant cette commission. Le député d'Arthabaska pourrait venir nous parler de l'application -cela touche les coopératives également - de l'implication des modifications du projet de loi 17 sur les coopératives agricoles. Je le souligne, parce que le député d'Arthabaska a été le président-fondateur de la "coopérative locale de consommation de boeuf dans Arthabaska. Le député pourrait également venir ajouter aux arguments de la Chambre de commerce de la province de Québec, parce qu'il a été membre de la Chambre de commerce de Princeville. Il pourrait, à ce titre, ajouter de par son expérience très pratique des commentaires. Il pourrait convaincre les autres membres et intervenants que la position de la Chambre de commerce de la province de Québec était basée sur des expériences vécues, sur une réalité bien sentie, sur un désir de créer de l'emploi, de maintenir de l'emploi, sur un désir de réussir au Québec la relance économique.

Je ne comprends pas comment et surtout pourquoi nos amis d'en face empêcheraient le ministre de l'Environnement, le député de Beauce-Nord, de venir devant cette commission prendre la parole, défendre lui aussi ses travailleurs, défendre lui aussi ses employeurs, défendre lui aussi ses PME comme le député de Beauce-Sud va le faire tout au cours de nos travaux. Est-ce qu'on veut reconnaître du côté ministériel moins de droits au ministre de l'Environnement, le député de Beauce-Nord, que l'on en reconnaît au député de Beauce-Sud? Ou est-ce qu'on soupçonne que le député de Beauce-Nord est moins intéressé au développement économique, à la création et au maintien de l'emploi que le député de Beauce-Sud? Peut-être que, parce que vous le connaissez bien, vous savez qu'il ne porte pas intérêt à cette matière?

Le député de Bellechasse, quant à lui, aimerait sans doute venir, sans avoir à demander une permission spéciale, spontanément prendre la défense de ses travailleurs, prendre la défense de ses employeurs, participer à une réforme du Code du travail qui, au lieu d'ajouter de l'huile sur le feu, au lieu de bâtir du conflictuel sur du conflictuel, au lieu de judiciariser davantage le système des relations de travail, au lieu de changer le vocabulaire juridique qui va prolonger les délais, les délais d'accréditation, les délais de décision sur des griefs... Il va falloir tester au niveau du système de droit commun l'interprétation qu'on donnera à ces nouveaux mots juridiques. Cela va ajouter des délais. Est-ce qu'il ne serait pas intéressé, le député de Bellechasse, à venir manifester ici qu'il s'occupe vraiment des intérêts des travailleurs et des employeurs de son comté? Vous le connaissez sans doute mieux que moi, nos amis d'en face le connaissent sans doute mieux que moi. S'ils concluent que le député de Bellechasse n'est intéressé ni à ses travailleurs, ni à ses employeurs, ni à la relance économique, que voulez-vous qu'on ajoute? Vous voterez contre la motion. Mais, si vous pensez qu'il y est intéressé, vous voterez avec le

proposeur, avec l'Opposition, avec les membres de cette commission pour l'adoption d'une telle motion.

Le ministre délégué aux Relations avec les citoyens, pour ne citer qu'un autre exemple, serait drôlement intéressé par des modifications au Code du travail. Les relations avec les citoyens, c'est vaste comme mandat, c'est vaste comme dossier, mais connaissant le député de Bertrand, ministre délégué aux Relations avec les citoyens, on sait qu'il se ferait un plaisir, sauf si on l'interdit de l'autre côté, sauf si on l'oblige à demander la permission, de venir nous parler devant cette commission des relations du travail, des problèmes que lui soumettent sans aucun doute chaque jour, parce qu'il a la charge du dossier des relations avec les citoyens, les travailleurs et les employeurs. Je comprends qu'il achemine ces problèmes au ministre du Travail, non pas au ministre du Travail par intérim, mais au ministre du Travail régulier. Si le ministre du Travail n'était pas affecté par la maladie, il voterait sans aucun doute pour une telle motion, parce qu'il est conscient des demandes et des préoccupations qui lui sont adressées par le ministre délégué aux Relations avec les citoyens. Mais si vous ne voulez pas que cette fonction de ministre délégué aux Relations avec les citoyens joue pleinement et ait pleinement les effets pour lesquels on a créé ce ministère, pour lesquels on a créé cette fonction, vous voterez contre et cette commission sera privée de cet éclairage. Ce ne sont pas les députés péquistes d'en face qui vont souffrir, ce sont tout simplement les travailleurs, les employeurs et la possibilité d'une relance économique au Québec.

M. le Président, pour avoir siégé pendant neuf semaines avec lui à la commission sur le saccage de la Baie-James et ayant pu constater la pertinence de ses interventions, je vous soumets bien humblement que je serais heureux de voir le député de Bourassa venir à cette commission enrichir les débats de ses nombreuses interventions. Le député de Bourassa, qui a été proclamé l'homme de l'année dans la ville de Montréal-Nord en 1977, à ce titre, avec toute la crédibilité qu'un tel titre lui accorde, lui confère, pourrait venir nous faire part de ses expériences vécues alors qu'il a travaillé dans le domaine de la viande comme boucher.

Le député de Bourget, ministre de l'Éducation, pourrait s'assurer que la réforme du travail ne soit pas - vous allez excuser l'expression - stâlée, arrêtée, bloquée par le manque de matière grise des gens d'en face. Je vois le député de Bourget s'assurer à cette commission parlementaire que nos travaux avanceront lentement mais sûrement. La grande réforme du Code du travail ne serait pas bloquée, ne serait pas arrêtée.

Avec le député de Bourget, ministre de l'Éducation, on serait assuré de cette progression, de ces avancements des travaux tellement souhaités et tellement voulus par l'ensemble des intervenants qui se sont présentés devant cette commission la semaine dernière. Comment refuser au Dr Laurin la permission de venir s'exprimer à cette commission, comme il sait si bien le faire, sur les droits des travailleurs, sur les droits des entrepreneurs, sur la relance économique, domaine qu'il connaît très bien?

Également pour avoir eu l'occasion de siéger avec lui pendant neuf semaines, je n'arrive pas à comprendre comment on pourrait refuser d'intervenir à un homme comme le député de Chambly, qui a été toute une révélation pour ses électeurs, toute une révélation pour l'ensemble des téléspectateurs qui ont suivi assidûment, de même que la tribune de la presse, les travaux de cette commission. J'ajouterais même que le député de Chambly a été une révélation pour le chef de cabinet du premier ministre, M. Jean-Roch Boivin, car il a réussi, par son désir de fouiller le dossier, à garder devant nous pendant au moins 30 minutes de plus un homme aussi occupé que le chef de cabinet du premier ministre. (17 h 15)

Je suis certain que le chef de cabinet du premier ministre ne vous pardonnera pas d'interdire à son ami le député de Chambly, M. Luc Tremblay, de venir faire des représentations, d'autant plus qu'un aspect de notre projet de loi touche le monde municipal. L'expérience acquise par le député de Chambly comme conseiller municipal, de 1975 à 1979, à Chambly nous donnerait cet aperçu pratique, ce vécu pratique. On pourrait, à partir de cette information, compiler un meilleur rapport de nos travaux et permettre à notre bon ami, le député d'Ungava, de le compiler, de l'écrire et de le présenter comme il saura si bien le faire à l'Assemblée nationale.

M. le Président, pourquoi voulez-vous de l'autre côté interdire au député de Champlain, votre collègue M. Marcel Gagnon, la possibilité de venir éclairer cette commission, d'intervenir sans avoir à en demander la permission? Pourquoi ne voulez-vous pas lui donner un statut égal au vôtre? Vous parlez souvent d'égalité au Parti québécois. Là, vous voulez qu'on ait deux classes de députés: ceux qui auront le droit d'intervenir sur le Code du travail et ceux qui n'auront pas le droit, à cette commission parlementaire, d'intervenir sur le Code du travail. Je ne sais pas pourquoi vous ferez cela au député de Champlain, votre collègue, un député péquiste, et qui - je profite de l'occasion pour le souligner - a été lauréat de la médaille d'or du Mérite agricole juvénile en 1956. Si vous avez quelque chose contre les agriculteurs, cela s'affirmera dans

votre vote dans quelques instants.

On pourrait également s'enrichir à cette commission parlementaire des propos combien percutants, on pourrait s'enrichir d'un vocabulaire combien amélioré si on avait la décence de consentir à la motion pour donner la permission d'intervenir au député de Châteauguay qui, lui aussi, s'est illustré à la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James, le fameux saccage où on a réglé pour 200 000 $ une cause de 32 000 000 $ à la suite de l'intervention du bureau du premier ministre.

Vous me faites signe, M. le Président, d'en demeurer à la pertinence du débat. Mon respect pour la présidence et pour le règlement vous assurent que je me conformerai non pas simplement à vos décisions, mais même à vos signes de tête.

Le Président (M. Blouin): M. le député, c'est que les simples mots LG 2 me font tressaillir. Comme président de commission, j'entends.

M. Paradis: M. le Président, je vous comprends. J'ai vu ces mots faire tressaillir à combien de reprises le premier ministre et je ne peux pas...

Le Président (M. Blouin): Je parle du président des travaux.

M. Paradis: Ah! du président des travaux, M. Jolivet, très bien. D'ailleurs, vous savez que le député de Châteauguay aurait pu être le président de cette commission, s'il avait été confirmé à la vice-présidence de l'Assemblée nationale, mais le sort lui réservait sans doute un rôle beaucoup plus important et il occupe aujourd'hui d'autres fonctions. Je dis cela sans minimiser la fonction que vous occupez ni celle occupée par les autres vice-présidents de la Chambre.

On pourrait également accueillir, sans qu'il ait besoin de nous demander la permission, l'honorable ministre de la Justice. Ce serait important à cette commission d'avoir le point de vue du ministre de la Justice. On a eu l'occasion de se rendre compte au cours des échanges que - nous avons eus au préalable avec le ministre du Travail par intérim...

M. Johnson (Anjou): Ministre par intérim au Travail.

M. Paradis: Les deux sont très français. On a eu l'occasion de se rendre compte à quel point ses notions de droit constitutionnel, ses notions de droit administratif ont été soigneusement rangées -je n'en doute pas, connaissant le ministre du Travail par intérim - dans une bibliothèque et qu'il n'a pas eu l'occasion, étant donné ses fonctions de ministre des Affaires sociales, de les revoir dernièrement. (17 h 15)

L'éclairage que pourrait nous apporter le ministre de la Justice serait très intéressant. Il serait sans doute en mesure d'éclairer les membres de cette commission sur les droits des travailleurs, sur les droits des employeurs. Ce serait intéressant d'avoir la vision du ministre de la Justice du Québec sur la déjudiciarisation de notre processus de relations de travail. Peut-être que vous souhaitez de l'autre côté ne pas entendre le ministre de la Justice sur ce sujet parce que vous souhaitez conserver cette déjudiciarisation de nos relations de travail au Québec.

M. le Président, c'est un choix avec lequel vous devrez vivre et vous devrez en supporter toutes les conséquences. Pourquoi interdire à l'affable ministre responsable du scandale de la SHQ, le député de Crémazie et ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur, le plaisir ou l'occasion de venir nous faire part de ses connaissances dans les relations de travail? Sans doute, lorsqu'il a confié à M. Luc Cyr des dossiers importants de réparations majeures, il s'est inquiété des relations de travail de l'équipe de M. Cyr. Il pourrait venir nous raconter quelles sont les implications exactes de son bureau, de M. Cyr, du bureau du premier ministre dans tout ce dossier; peut-être aurions-nous toute la lumière.

M. le Président, pour le connaître et pour l'apprécier, je ne vois pas en vertu de quel principe nos amis d'en face refuseraient la permission au député de Deux-Montagnes, cet homme cultivé, la possibilité de venir nous faire part de ses réflexions sur les relations de travail. C'est sans doute parce que vous ignorez que le député de Deux-Montagnes détient un baccalauréat en philosophie; si vous le savez, cela devrait être suffisant pour vous inciter à voter pour la motion. Mais vous lui tenez sans doute rigueur d'être né à Ottawa en 1923 et d'avoir étudié en philosophie à l'Université d'Ottawa. C'est sans doute ce qui vous incite à voter contre une telle motion.

M. le Président, en terminant, car on m'a indiqué que mon temps est expiré, j'espère avoir réussi à vous convaincre, parce que je n'ai pas eu le temps de faire le tour de tous vos collègues qui ont des travailleurs et des employeurs qui sont intéressés à la relance économique. J'espère que les autres noms vont vous défiler dans la tête d'un autre et que vous ne leur ferez pas l'injure ou l'insulte de leur refuser un droit de parole plein et entier à cette commission. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. le député de Beauharnois.

M. Laurent Lavigne

M. Lavigne: M. le Président, je serai très bref, contrairement au jeu auquel se livre l'Opposition actuellement. Je pense que les gens qui auront l'occasion de suivre nos débats ou de lire le journal des Débats pourront se rendre compte que nos travaux sont commencés déjà depuis quinze heures. Nous sommes rendus à 17 h 20 et nous n'avons pas encore commencé à étudier un projet de loi que je considère important, le projet de loi 17 sur la réforme du Code du travail.

M. Paradis: Question de règlement.

M. Lavigne: On vous a laissé parler, laissez donc maintenant parler les autres!

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi, sur la question de règlement.

M. Paradis: J'ai présenté une motion devant cette commission et vous l'avez jugée recevable, M. le Président. Le député de Beauharnois, sauf erreur, car cela arrive, c'est humain, vous a demandé la permission de parler sur la motion et de traiter du sujet de la motion. Le sujet de la motion, je ne le lui rappellerai pas, vous pouvez le lui rappeler, s'il n'a pas les capacités intellectuelles pour s'en souvenir, mais cela ne fait pas tellement longtemps. Je vous demanderais de le rappeler à la pertinence, parce que, si on ne s'en tient pas à la pertinence, on va déborder dans le temps, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi, je vais relire la motion et tous les membres pourront ainsi s'y conformer. "Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de pouvoir prendre la parole sans devoir obtenir au préalable la permission, et ce pour toute la durée de l'étude, article par article, du projet de loi 17."

Voilà, la motion.

M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: M. le Président, je continue, car je n'en étais qu'à mon préambule. Quant à l'évaluation que fait le député de Brome-Missisquoi de ma capacité intellectuelle de comprendre ses propos, je pense qu'il ne faut pas être un génie pour le suivre. Même les profanes de la politique pourront s'apercevoir qu'il joue un jeu qui n'est pas correct.

Sur ce, je voudrais inviter aussi - et là, je crois que c'est très pertinent au débat ou à la motion qui est présentée et qui est devant nous - tous les gens qui veulent connaître le curriculum vitae de nos députés à voir l'Almanach du peuple. Ils y ont leur photo et leur curriculum vitae. Le député de Brome-Missisquoi s'est évertué à passer tous les députés de l'Assemblée nationale pour dire aux gens qui ils sont et ce qu'ils font. Il a parlé du député d'Arthabaska, qui serait frustré de ne pas venir à cette commission parlementaire pour défendre les travailleurs de son comté. Il a énuméré tous les députés: le député d'Abitibi-Ouest, le député de Beauce-Sud, le député de Bourget. Ce que je voudrais vous dire, c'est qu'à une commission parlementaire - ce n'est pas nouveau, cela a toujours été comme ça - on inscrit d'abord nos travaux. C'est un travail d'équipe. À l'Assemblée nationale, il y a différentes commissions parlementaires qui peuvent fonctionner en même temps que la Chambre. Chacun des députés et des ministres a différentes occupations et choisit son champ d'activité. Ce n'est pas parce qu'on ne vient pas à une commission qu'on est complètement désintéressé des travaux qui se font à cette commission. Chacun fait confiance à chacun dans une équipe et les gens qui ne sont pas à une commission font confiance à ceux et celles qui sont membres de cette commission.

Nous avons été ni plus ni moins les délégués du parti au pouvoir, le parti ministériel, pour venir défendre, discuter article par article le projet de loi 17. Je pense que les gens de notre équipe qui ne sont pas à cette commission nous font confiance et savent que les propos que nous allons tenir sont, à toutes fins utiles, des propos qu'eux-mêmes auraient pu tenir. Donc, je rappelle à la commission qu'il y a des membres inscrits - vous les avez nommés à l'ouverture de nos travaux - et des intervenants aussi. Je voudrais ajouter que, si à l'ajournement de nos travaux, l'Opposition, ou même le parti ministériel, voulait rajuster son tir sur les membres, il sera toujours temps, M. le Président, d'ajouter ou de soustraire des membres à cette commission, comme cela se fait couramment. Mais vouloir voter une proposition qui aille dans le sens que puisse intervenir n'importe qui, n'importe quand, que tous les ministres et députés ministériels et de l'Opposition puissent venir ici discuter de nos travaux, je pense que cela est impraticable. Le but visé, et je le répète, par l'Opposition actuellement - pour les gens qui ne connaissent pas le terme - c'est de faire un "filibuster", elle veut tuer le temps. Je le dis, depuis tout près de trois heures que la commission parlementaire est ouverte, on n'a pas encore commencé à discuter de la première virgule du projet de loi 17.

Je suis sûr qu'après cette motion, M. le Président, on arrivera avec d'autres motions et, pour les gens qui suivent nos travaux, cela sera évident que l'Opposition ne veut pas améliorer le Code du travail, discuter du projet de loi 17, qu'elle veut tuer le temps. Pour ma part, je ne veux pas me prêter à ce petit jeu, M. le Président, et c'est pour cela que je serai aussi bref. Je mets le cap sur mes propos, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Question de règlement, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Je n'ai pas voulu interrompre le savant député qui m'a précédé. Il m'a cité, il a cité mon nom. Est-ce que je pourrais savoir à quel propos il m'implique dans son discours?

Le Président (M. Blouin): M. le député de Beauce-Sud, il ne s'agit pas là d'une question de règlement.

M. Mathieu: Mais j'ai été cité, M. le Président, par le député de Beauharnois.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Moi, j'ai une question de règlement. Notre collègue du parti ministériel a fait une affirmation gratuite -et je le prierais de la retirer - en disant que nos intentions sont de faire un "filibuster". De toute façon, M. le Président, je prierais le ministre de reprendre son siège, s'il a l'intention de prendre la parole. On a un travail sérieux à faire et nous tenons à le faire du début à la fin. L'intervention du député de Brome-Missisquoi était justement de permettre à tous nos collègues de l'Assemblée nationale d'intervenir pour traiter de sujets différents. Alors, M. le Président, vous devriez rappeler à l'ordre le député...

Le Président (M. Blouin): M. le député, le député s'est exprimé, il a émis son avis, ses perceptions de la motion et je ne vois pas en quoi il y a là une question de règlement. Je ne vois pas en quoi... D'ailleurs, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire. Vous deviez prendre la parole, je crois, vous me l'aviez demandé. Le plus simple serait que vous vous exprimiez sur cette motion. (17 h 30)

M. Paradis: M. le Président, sur la question de règlement. Je me suis absenté quelques minutes et, en revenant dans la salle, je me suis rendu compte que le député n'avait pas suivi la directive que vous lui aviez émise immédiatement avant mon départ. Je vous prierais, dans le but d'assurer une bonne marche à nos travaux, pour utiliser une expression bien connue...

Le Président (M. Blouin): Non, monsieur le député.

M. Paradis: ... de veiller à l'application stricte de notre règlement et de rappeler les gens à la pertinence, lorsque nécessaire.

Le Président (M. Blouin): Soyez sûr que j'y veille, M. le député de Brome-Missisquoi, et j'ai bien pris note du texte de votre motion. Je crois que le député s'est exprimé sur le fait qu'un nombre plus considérable de députés puissent prendre la parole sans obtenir une permission au préalable. Je crois qu'on pouvait rattacher les propos du député de Beauharnois à la pertinence de votre motion.

M. Paradis: Je suis sûr que le député de Beauharnois vous sait gré de votre extension, M. le Président, que je respecte.

Le Président (M. Blouin): Non, il n'y a pas d'extension, M. le député de Brome-Missisquoi. Si nous devons considérer que votre propre intervention était directement reliée à cette motion, la sienne était un peu dans le même esprit.

M. le député d'Anjou, vous avez la parole.

M. Johnson (Anjou): Sur la question de règlement, si vous permettez. Tout simplement pour rassurer notre collègue, M. le Président, je peux vous dire, au nom de mes collègues qui siègent à cette commission, que nous n'avons plus l'intention d'intervenir, de quelque façon que ce soit, sur aucune motion dilatoire présentée par l'Opposition à moins, évidemment, que les exposés qu'on nous fera, pour ne pas utiliser une expression du dictionnaire, qu'on nous ânonnera sur certains sujets ne nous incitent à intervenir au nom de la dignité des parlementaires, des individus ou de l'institution.

Le Président (M. Blouin): M. le ministre, je prends note de ce que vous me dites, mais je vous rappelle que tous les membres de cette commission auront droit de parole en tout temps. M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Je comprends, M. le Président, que ce que le ministre vient de nous dire va complètement à l'encontre du règlement. J'ose espérer que le ministre n'exerce pas un contrôle absolu sur les membres du côté ministériel, c'est-à-dire qu'il ne met pas le bâillon à ses propres membres, à ses propres députés, et que les

députés du côté ministériel pourront prendre la parole en toute aise, s'ils le jugent opportun, afin de défendre non seulement les intérêts de leurs commettants, mais aussi ceux de l'ensemble de la population du Québec.

Je comprends que le ministre ne peut pas bâillonner comme il le veut l'Opposition. Je comprends aussi qu'il peut émettre certaines directives auprès de ses collègues du côté ministériel, mais je trouve que ses propos allaient totalement à l'encontre du règlement et étaient aussi antiparlementaires, M. le Président.

Si j'accepte sûrement, et nous en avons discuté il y a quelques instants, la motion présentée par mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, c'est que, M. le Président, si, lors de la commission parlementaire, tous les intervenants qui se sont fait entendre avaient souhaité le projet de loi 17, s'ils avaient vanté ses mérites, s'il y avait eu acceptation globale de la part de tous ces intervenants, je pense que l'Opposition ne pourrait faire autrement que de se féliciter et de féliciter le gouvernement d'avoir adopté un projet de loi qu'il jugeait nécessaire.

Toutefois, dans les circonstances, M. le Président, on doit tenir compte du fait que l'Association des manufacturiers canadiens a apporté des points tout à fait particuliers au projet de loi 17 et qu'elle est très réticente à son adoption. Entre autres, on dit que ces gens s'opposent au projet de loi; c'est un autre pas dans la mauvaise direction. Tous les intervenants du milieu ont été entendus, ce projet de loi est créé pour eux, pour les travailleurs et pour les petites ou moyennes entreprises, pour le monde industriel. En fait, ce projet de loi a pour but de favoriser une correction fondamentale à une refonte du Code du travail que tout le monde souhaitait et que même l'Opposition souhaitait, mais ce n'est pas une demi-mesure que nous voulions. Nous désirions un correctif qui permettrait, à toutes fins utiles, cette relance économique tant souhaitée au Québec. Sachant tous les problèmes que crée le Code du travail actuel, tous les problèmes qui perturbent l'industrie, qui font en sorte que nous avons tant de conflits, je pense qu'on ne peut pas se permettre, M. le Président, de passer outre au fait que tous nos collègues de l'Assemblée nationale doivent être entendus pour exprimer, selon leurs connaissances et selon leur expérience, leur point de vue. J'ose souhaiter que, d'ici les prochaines minutes, le ministre du Travail par intérim accepte cette motion du député de Brome-Missisquoi pour permettre à tous nos collègues de l'Assemblée nationale d'être entendus.

Je citais tantôt l'Association des manufacturiers canadiens. On pourrait citer la Chambre de commerce, qui a émis de sérieuses réserves à l'adoption de ce projet de loi. Je pense qu'il est important de considérer qu'au Québec la Chambre de commerce occupe une place fort importante dans l'économie et dans les recommandations susceptibles de permettre à ce gouvernement d'améliorer les lois du travail.

Si nos députés avaient pu se faire entendre et émettre leur point de vue... Déjà, il y a quelques instants - on en a fait la preuve immédiate - notre collègue de Viger, a osé prendre la parole, alors que son nom n'était pas inscrit sur la liste des membres ou des intervenants, et le ministre du Travail par intérim s'y est opposé. Ce n'est pas de bon augure pour le début des travaux de cette commission, d'autant plus qu'il y a combien de ministres qui sont réellement impliqués, qui ont un portefeuille important par le biais des relations du travail et qui devraient être entendus, qui devraient pouvoir émettre leur opinion?

Je ne sais pas l'attitude du ministre qui a à défendre ce projet de loi en l'absence du ministre du Travail. Celui-ci est malheureusement malade, nous dit-on... J'ose souhaiter que ce n'est pas ce projet de loi qui l'a rendu malade. Pourtant, je suis convaincu, après avoir entendu les intervenants à cette Chambre, c'est sûrement une des raisons qui l'a rendu malade, parce que tous ceux qui sont venus ici ont manifesté une certaine opposition, par exemple, le Conseil du patronat, qui est quand même très important. Encore là, quand on parle de relance économique, quand on regarde et qu'on examine en profondeur la situation que nous traversons au Québec au point de vue de l'économie, quand on se vante d'inviter des investisseurs chez nous et que tout ce que l'on peut présenter à notre population et à l'ensemble du Québec, c'est un projet aussi minable, je pense que ce n'est pas une façon d'intéresser la venue des investisseurs chez nous, de créer des emplois. Chacun des députés de l'Assemblée nationale représentant un comté a sûrement une intervention quelconque à faire qui pourrait améliorer les choses - et peut-être ouvrir les yeux du ministre - et permettre d'analyser beaucoup plus en profondeur tout ce qui concerne le projet de loi dans sa forme actuelle.

L'Union des municipalités, qui a fait aussi des revendications en commission parlementaire, émet de nombreuses réserves. Mais l'Union des municipalités, autant que les municipalités qui y sont représentées, n'a pas les pouvoirs de ce gouvernement, c'est-à-dire de mettre fin à une grève, par l'adoption d'une loi matraque. De même pour l'entreprise privée. Combien de cas particuliers ai-je eus dans ma région, dans mon comté, et je sais que ces mêmes cas, on les retrouve dans tous les comtés du Québec.

Tantôt, on parlait du ministre des Transports. On pourrait tenir compte du député de Duplessis. Le député de Duplessis aurait été une personne tout à fait intéressante à entendre parce qu'on a eu l'occasion de visiter son comté au cours de l'hiver - entre autres, nous avons visité la ville de Schefferville - et on s'est rendu compte qu'il n'y a plus personne qui travaille dans ce bout-là. Est-ce que le Code du travail vise à améliorer, à créer des emplois? Est-ce que c'est pour maintenir des emplois? Est-ce que c'est pour avoir de meilleures relations entre l'employeur et l'employé? On s'aperçoit, M. le Président, du nombre de grèves qu'il y a eu à Schefferville, entre autres à l'Iron Ore, peut-être une cinquantaine en dix ans. On parle aujourd'hui de nous présenter un projet de loi qui est une demi-mesure qui n'apporte aucun correctif sérieux aux relations de travail d'aujourd'hui. Le député de Duplessis aurait pu faire valoir à cette Chambre que les lois que le Québec présente actuellement ne sont pas des lois pour apporter des correctifs pour créer des emplois. Ce sont des lois qui éliminent les emplois, qui augmentent l'agressivité entre employeurs et employés. Nous aurions sûrement pu entendre le député de Duplessis qui, lors de notre visite à Schefferville, il y a quelques mois, demandait au gouvernement, à son gouvernement, d'intervenir dans le but d'activer, de favoriser une relance, de mettre en pratique certains rapports qui avaient été déposés il y a déjà plusieurs années. Sûrement qu'on aurait pu, à l'intérieur d'un discours du député de Duplessis à cette commission parlementaire, détecter de nombreux problèmes auxquels le projet de loi 17 n'apporte aucun correctif.

Nous pourrions continuer. Je mentionnais tantôt l'Union des municipalités. On ne voit pas le ministre des Affaires municipales, qui se doit d'être l'interlocuteur, le défenseur du monde municipal, sur la liste des intervenants, ni sur la liste des membres officiels de cette commission. Il aurait dû être ici présent, il devrait y être entendu, s'il y a raison de l'entendre, pour défendre la position de l'Union des municipalités, qui s'oppose aussi à l'adoption de ce projet de loi 17. Si on touche à la Chambre de commerce, au patronat, à l'Union des municipalités, ce sont des employeurs. On retrouve aussi les centrales syndicales; la CSD a fait des représentations et a trouvé que le gouvernement n'apportait pas les correctifs nécessaires avec le projet de loi 17. Si on prend l'exemple d'une autre centrale importante, la CSN a rappelé à ce gouvernement de procéder à une révision en profondeur du Code du travail. Ce n'est pas cette réforme en profondeur que nous vivons actuellement. Ce sont quelques petits points que le gouvernement, à la suite des demandes antérieures, se sent obligé de mettre sur la table afin d'apporter certains petits bonbons, mais sans pour autant corriger le problème en profondeur.

Il est bien évident que la demande faite à cette Chambre par mon collègue de Brome-Missisquoi a pour but de démocratiser le débat, de permettre davantage à tous les membres de cette Assemblée nationale d'être entendus. On ne demande pas au ministre d'entendre Pierre, Jean, Jacques et de recommencer une commission parlementaire dans l'immédiat. On ne demande pas cela. On demande uniquement la possibilité que tous les membres de cette Assemblée nationale, s'ils ont un point à faire entendre, se fassent entendre. On sait qu'il y a plusieurs ministres qui sont impliqués directement dans leurs fonctions respectives par le Code du travail, mais je ne veux pas m'attarder à ce débat trop longtemps... (17 h 45)

Le député de Frontenac était adjoint parlementaire au ministre de l'Énergie et des Ressources, on aurait pu l'entendre aussi. C'est un bonhomme qui est encore député et qui a connu les problèmes tout à fait particuliers de sa région, la région des mines. Or, le problème des mineurs est sûrement un des problèmes de l'heure. On aurait pu l'entendre. Malheureusement, encore là, l'attitude de ce gouvernement vise à brimer le droit de parole. Le ministre a passé le mot tantôt à la majorité servile de cette Assemblée nationale, mais il ne pourra certainement pas imposer à cette commission - en tout cas, du côté de l'Opposition - de se priver de faire des demandes dans le plus grand respect de cette démocratie.

M. le Président, le ministre devrait réviser sa position. On comprend qu'à la suite de la demande du député de Brome-Missisquoi, et on s'en aperçoit depuis à peu près toujours, il y ait une réticence des ministériels à élargir la possibilité pour tous les députés de l'Assemblée nationale d'émettre leur point de vue. On sait que, du côté ministériel, malheureusement, quand le glas sonne, les mains se lèvent. C'est cette majorité servile qui, malheureusement, permet d'adopter des projets de loi qui sont aussi ambigus, des projets de loi qui ne retiennent pas les éléments les plus importants. Ce projet de loi est un projet, à toutes fins utiles, qui amène très peu de correctifs et qui pourrait perturber davantage le monde du travail. Il pourrait, et j'en suis convaincu, empêcher des investisseurs nouveaux de venir s'établir au Québec. J'irais même plus loin. Il y a certaines entreprises qui sont actuellement au Québec, qui ont vécu des problèmes tout à fait particuliers, des problèmes de négociation, de convention collective, des problèmes qui ont perturbé leur entreprise et qui attendaient avec impatience une réforme du Code du travail.

La réforme ou le projet de loi que le ministre du Travail par intérim nous propose ne permettra pas de rétablir le climat qui existe actuellement au Québec et ne permettra pas de pouvoir considérer l'impact qu'une refonte en profondeur aurait pu apporter. Je vous dirai même, sans citer le nom de certaines compagnies, parce que je me dois d'en protéger l'anonymat - certaines compagnies n'ont pas voulu pour l'instant me permettre de citer publiquement leur nom -que, si le véritable ministre du Travail avait été ici, j'aurais pu lui dire qu'il y a à peine quelques mois je le rencontrais avec une entreprise importante de ma région qui attendait une décision du ministre du Travail, décision qu'elle n'a pas encore eue. Sûrement que cette décision, on ne la retrouve pas à l'intérieur du projet de loi 17. C'est une des raisons pour lesquelles j'aurais souhaité que le ministre du Travail soit ici, pour répondre à certaines questions que j'aurais souhaité lui poser à la suite de la rencontre que nous avions eue avec cette entreprise fort importante qui pensait prendre de l'expansion au Québec. Depuis qu'elle a connu une crise assez grave, une grève assez importante, des pertes assez considérables, cette entreprise qui n'avait ni le moyen, ni la capacité, ni le pouvoir qu'a ce gouvernement d'adopter une loi pour ses employés et de leur dire: Rentrez au travail demain matin... Elles n'ont pas ce pouvoir, les entreprises au Québec. Seul le gouvernement l'a, et il s'en sert assez souvent depuis quelques années. On s'en est rendu compte avec la commission de transport de Montréal, on s'en est rendu compte avec la loi 111, qui a même été aussi loin que de brimer les droits et libertés de la personne.

Il est bien évident que l'ensemble des députés... J'aurais souhaité, dans cette démocratie, que l'on permette au député de Chapleau de venir faire valoir certains points, que l'on permette au député de Pontiac qui a des problèmes percutants dans son coin de venir les faire valoir sans prendre pour autant, M. le Président, une, deux ou trois heures du temps de cette commission. On sait que le temps, c'est précieux.

Chacun de ces députés a un ou des problèmes tout à fait particuliers que l'on retrouve à l'intérieur de ce projet de loi qui n'amène aucun des correctifs souhaités. Je pense entre autres au député de Papineau, car le député de Papineau traverse actuellement une période assez difficile dans son coin.

Prenons le député de Chapleau. On sait que la CIP a fermé son usine de contre-plaqué et cette même usine est sur le point d'être achetée par des gens de la région. Encore ici, M. le Président, on ne retrouve pas, à l'intérieur du projet de loi 17, des mécanismes ou des articles qui permettraient d'apporter les correctifs nécessaires. Si une compagnie a décidé de se retirer, une nouvelle peut être intéressée mais elle se pose de sérieuses questions.

Pour tout ceci, M. le Président, j'ose souhaiter que la présidence va accorder la permission à toute la députation de faire les représentations jugées nécessaires, que les ministériels vont comprendre que, de leur côté, il est possible que certains soient entendus ou veuillent être entendus. De notre côté, du côté de l'Opposition, je suis persuadé, M. le Président, que l'ensemble de la députation libérale est consciente des problèmes économiques que le Québec traverse. Cela dépend beaucoup du Code du travail, M. le Président. Nous, les libéraux, qui sommes pour la liberté, aimerions voir à l'intérieur d'une refonte en profondeur du Code du travail des mécanismes pour protéger autant l'entreprise privée qu'on semble vouloir protéger aussi le travailleur. Je pense que ce serait important qu'on tienne compte de la demande que nous avons faite.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Hull. Avant d'accorder la parole...

M. Fortier: M. le Président, j'étais intervenant dans le passé, mais je ne sais pas si je le suis toujours.

Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député d'Outremont, vous avez la parole.

M. Fortier: Pour commencer, M. le Président, je dois m'excuser, puisqu'il y a des travaux qui me retenaient à l'Assemblée nationale. Je savais que mon collègue débattait ce projet de loi à la commission parlementaire.

Le Président (M. Blouin): Si vous me permettiez de répéter le texte de la motion.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: Je vais vous le lire. Je l'ai justement ici. Il faut vous dire jusqu'à quel point j'ai trouvé que, pendant mon absence, le député de Brome-Missisquoi avait préparé une motion qui m'inspire profondément. Malheureusement, je n'aurai que six ou sept minutes pour en parler.

Cette motion dit: Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de pouvoir prendre la parole et ce, sans devoir obtenir au préalable la permission, et ce pour toute la durée de l'étude, article par article, du projet de loi 17.

M. le Président, je ne sais pas si vous étiez ici, j'étais de ceux qui ont assisté à la présentation des mémoires, du moins la très

grande majorité, à l'exception peut-être de ceux qui ont été présentés durant la dernière journée puisque nous avons terminé très tard. Il en restait deux ou trois, je crois, entre autres celui de l'Association des manufacturiers et celui de la Chambre de commerce. J'ai assisté à la présentation de tous les autres mémoires. Ce qui m'a frappé, ce sont les divergences d'opinions très fortes qui se sont manifestées dans la présentation de tous ces mémoires, que l'on prenne quelque article que ce soit, que l'on prenne les dispositions antibriseurs de grève, que l'on prenne l'accréditation d'une association en particulier, c'est-à-dire d'un syndicat, que l'on prenne le dépôt de première requête en accréditation.

Pour chacun de ces sujets qui ont été soulevés à peu près par tous les intervenants, il y avait une très grande variation d'opinions, c'est le moins qu'on puisse dire. Certains syndicats disaient: II n'y a rien là, mais on va le prendre pareil parce que cela nous semble un peu plus que ce que nous avons. D'autres syndicats disaient: C'est un changement substantiel et nous insistons pour que ces articles de loi soient adoptés.

Du côté patronal, je dois admettre que c'était plutôt unanime d'une façon générale, puisque tous et chacun semblaient dire que cette loi, la loi 17, et les articles les plus importants allaient à l'encontre du développement économique et surtout d'une promesse qu'avait faite le gouvernement de considérer l'ensemble des problèmes du monde du travail, non pas seulement quelques aspects plus particuliers, quelques aspects importants, mais qui fausseraient à l'avenir le débat plus considérable des relations de travail d'une façon générale.

Pour quelle raison, M. le Président? Si vous me rappelez à la pertinence, il faudra que je vous démontre que cette motion nous aiderait à élucider ces variations d'opinions. C'est bien simple, je crois que - et moi, cela m'a frappé - s'il y avait des variations d'opinions considérables, cela viendrait de ce que les faits qui étaient connus des différents intervenants étaient variés. Si on permettait d'intervenir aux différents membres de la commission de l'Assemblée nationale, chacun d'entre nous, chacun dans son comté, a des expériences fort variées. Je suis certain que l'expérience que j'ai en tant que député d'Outremont est très différente de l'expérience que vous avez dans votre comté. Elle est très différente de celle de mon ami de Brome-Missisquoi, de celle de mon collègue de Hull ainsi que de l'opinion de ceux qu'on vient de mentionner, certains de nos collègues qui ont eux-mêmes des difficultés dans leur comté.

Alors, si on pouvait consulter tous ces gens, peut-être qu'il y aurait moyen de décanter le problème et d'élucider la question, de savoir pour quelle raison il y a tant de variations d'opinions sur des articles de loi qui, quand on les regarde - enfin, le projet n'est pas tellement épais, il a une centaine d'articles, c'est déjà assez important - mais comment se fait-il qu'il y ait tant de variations sur un projet de loi qui n'amène pas un changement radical des conditions de travail, qui ne fait qu'accentuer certains pouvoirs et certains privilèges qu'avaient les syndicats, qu'ont obtenus les syndicats dans le passé?

Si on pouvait tabler sur l'expérience des gens de la Côte-Nord, de la Gaspésie, de l'Abitibi... C'est l'expérience régionale, mais le plus important, c'est l'expérience humaine et l'expérience vécue des problèmes des différentes régions du Québec. Si on pouvait compter là-dessus, on pourrait décanter le problème et voir dans quelle mesure les différences d'opinions qui se sont manifestées n'étaient pas des différences d'opinions comme le veut la tradition, c'est-à-dire que les patrons pensent comme ceci, les syndicats pensent comme cela. Je crois qu'il serait possible à ce moment-là d'élucider davantage les raisons profondes qui ont semblé exister lors de la présentation des différents mémoires. Ce faisant, M. le Président, on pourrait savoir pour quelles raisons ces articles du projet de loi sont tant contestés.

Si vous prenez les dispositions antibriseurs de grève, et je crois que c'était patent parce que les questions que nous avons posées nous ont permis de saisir que le Conseil du patronat et la Chambre de commerce dénonçaient ces articles comme étant tout à fait inacceptables, tandis que, du côté syndical, et c'est cela qui m'a frappé plus particulièrement, la CSD disait: Bon, on l'accepte, mais ce n'est pas exactement ce qu'il nous faut. Au contraire, il faudrait repenser les relations du travail.

Ce que la CSD nous a dit, c'est que, dans le passé il y a deux ou trois ans, le projet de loi 45 a donné certains pouvoirs antibriseurs de grève, des pouvoirs importants aux syndicats - indirectement, je crois - et que les avocats qui travaillaient pour une partie ou pour l'autre ont fait en sorte que ces pouvoirs qui avaient été donnés aux syndicats sont devenus moins importants. Autrement dit, les avocats de la partie patronale ont trouvé des façons de passer à côté de ces articles de la loi, et qu'il fallait maintenant revenir à la charge pour redonner des dents à des articles qui en avaient il y a deux ou trois ans pour permettre que les syndicats puissent encore utiliser ces articles qui leur avaient été donnés il y a trois ans déjà et qui, semble-t-il, n'étaient plus aussi efficaces.

La CSD nous expliquait qu'on s'engageait dans un processus assez curieux, un processus par lequel le gouvernement donnait certains droits aux syndicats, les

avocats de la partie patronale cherche de toutes les façons des moyens de passer à côté et en trouvant. Le gouvernement revient à la charge et donne encore plus de pouvoirs aux syndicats, et je suis certain que les avocats des patrons vont trouver encore une fois des moyens de passer à côté.

Alors, on s'engage dans un processus qui, M. le Président, est inéluctable, un processus irréversible et qui ne conduira pas à la solution que nous recherchons. (18 heures)

Je crois que vous me demandez de conclure, M. le Président. Pour toutes ces raisons, je crois que la motion de mon collègue de Brome-Missisquoi est tout à fait pertinente et je l'appuie totalement.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député d'Outremont. Sur ce, nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 01)

(Reprise de la séance à 20 h 16)

Le Président (M. Blouin): La commission reprend ses travaux. Cette commission a pour mandat, je le rappelle, d'étudier article par article le projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives.

Au moment où nous avons suspendu nos travaux, à 18 heures, le député d'Outremont avait terminé son intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous étions à débattre une motion présentée par le député de Brome-Missisquoi. M. le Président, je vous demande une directive. Pourriez-vous, pour nous remettre dans le contexte, relire la motion ou faut-il que je le fasse moi-même?

Le Président (M. Blouin): Avec plaisir, M. le député de Beauce-Sud, je peux vous relire la motion. Elle est ainsi libellée: "Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de pouvoir prendre la parole sans devoir obtenir au préalable la permission et ce, pour toute la durée de l'étude, article par article, du projet de loi 17." Voilà le texte de la motion, M. le député.

M. Mathieu: Comme vous le voyez, M. le Président, c'est une excellente motion présentée par mon collègue, le député de Brome-Missisquoi. Je pense qu'il n'y a rien de plus démocratique que de revendiquer le droit pour tous les députés de prendre la parole sur le projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives. J'ai cru comprendre que mes collègues ne vous avaient pas encore convaincu, M. le Président, de la nécessité d'adopter cette motion.

Le Président (M. Blouin): Ce n'est pas moi, M. le député de Beauce-Sud, qui adopte les motions, ce sont les membres de la commission. Tant que les membres désirent s'exprimer et ne l'ont pas fait, ils ont le droit de le faire. C'est ce que vous faites actuellement.

M. Mathieu: Merci, M. le Président, je vais tâcher de continuer à le faire. C'est une motion importante, parce que le droit de parole de tout citoyen est quelque chose de consacré dans nos chartes des droits et libertés de la personne. Qui plus est, à titre de parlementaires, tous les députés ont le droit de s'exprimer, c'est fondamental. C'est pourquoi je trouverais déplorable qu'un député qui n'est pas membre de la commission et qui veut s'exprimer ne puisse le faire en temps opportun. Je m'associe donc à cette motion de mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, qui, dans sa clairvoyance habituelle, vous a saisi de cette motion que nous débattons présentement.

Il y a sûrement des députés, des membres de l'Assemblée nationale, qui ne sont pas membres de cette commission parlementaire, qui ne sont pas non plus intervenants à cette commission parlementaire et qui auraient des choses à dire sur ce projet de loi 17. C'est pourquoi je crois qu'il est important de revendiquer ce droit de parole, et de m'associer à mon collègue de Brome-Missisquoi pour ce faire, au nom de certains de mes collègues à qui, je suis sûr, il vous fera toujours plaisir d'accorder le droit de parole. Je pense, par exemple, à mon collègue le député d'Arthabaska, qui aurait certainement des choses à dire sur ce projet de loi 17.

Le Président (M. Blouin): M. le député, c'est votre droit de parole. Vous avez toute liberté d'expression, mais je dois vous souligner que le député d'Arthabaska a déjà été encensé au cours de cette motion et que tout le monde sait qu'il aimerait s'exprimer maintenant, selon les dires de l'Opposition, sur cette même motion.

M. Paradis: M. le Président, sur la question de règlement. Cela prouve à quel point nous partageons les mêmes idées sur l'intérêt que porte le député d'Arthabaska à ce projet de loi. Si mon collègue veut continuer à procéder, comme vous l'avez mentionné à juste titre, c'est son droit de

parole.

M. Mathieu: Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?

Le Président (M. Blouin): Très certainement, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci de votre sollicitude toujours aussi empressée, M. le Président. Je reconnais là votre aptitude tout à fait exemplaire à diriger les travaux de cette commission. J'aurais même été tenté de dire que vous-même, sans doute, auriez eu des choses à exprimer à l'occasion de l'étude de ce projet de loi important. Je reviendrai tout à l'heure à mon collègue d'Arthabaska. Vous me dites que d'autres ont vanté ses mérites et son intérêt envers ce projet de loi, c'est à juste titre parce que c'est un député toujours présent, toujours intéressé à ce qui peut concerner ses électeurs.

Ce projet de loi 17 est un projet important. C'est un projet qui modifie plusieurs lois. Il modifie par exemple la Loi sur le barreau. Il modifie la Loi sur l'instruction publique. Il modifie la Loi sur les normes de travail. Il modifie la Loi sur le régime syndical applicable à la Sûreté du Québec. Il modifie la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction. Vous connaissez mon intérêt pour cette dernière loi, la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction. Je me suis permis d'aller voir quelles étaient les modifications apportées par ce projet de loi à la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction. On en trouve une à l'article 107 qui nous dit que l'article 62 de la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction est modifié par le remplacement, dans la dernière ligne du premier alinéa, du chiffre "78" par le chiffre "77". C'est une modification insatisfaisante.

Je reviens à la motion, mais étant donné que le projet de loi 17 modifie cette Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction, je ne peux passer sous silence cet article pour revenir dans quelques instants...

Le Président (M. Blouin): Est-ce que je dois comprendre, M. le député, que vous voulez que nous passions immédiatement à l'étude article par article?

M. Mathieu: Non, M. le Président, parce que j'ai des commentaires très importants à faire avant. Est-ce que je peux continuer? Je retourne à la motion pour me conformer à votre désir. Vous m'avez toujours su respectueux du règlement, respectueux de l'autorité que vous représentez. C'est pourquoi je retourne, selon votre voeu, avant même que vous ne me l'ayez demandé, mais sur votre simple souhait, qui m'est signifié par votre physionomie, par vos signes de la main, à la motion du député de Brome-Missisquoi qui veut permettre à tous les députés qui ne sont ni membres ni intervenants de cette commission de s'exprimer sur le projet de loi 17.

Je me demande comment, M. le Président, nous pourrions refuser à des confrères, à des collègues de l'Assemblée nationale, le droit de s'exprimer sur un projet de loi aussi important. Prenons, M. le Président, par pur hasard, le député de Vimont, M. Rodrigue, ingénieur à HydroQuébec. M. Rodrigue, qui est né à Granby, qui est marié, père de famille, aurait sûrement intérêt à se faire entendre, s'il avait la permission de s'exprimer sur ce projet de loi, lui qui est entré au service d'Hydro-Québec en 1960. Il connaît sûrement le régime de relations de travail, étant donné qu'il a été lui-même à l'emploi de la société d'État, d'une société importante, vu qu'il fut, en 1966, ingénieur de projet et qu'il a occupé le poste de responsable des études d'aménagement des rivières de la Côte-Nord du Saint-Laurent.

M. le Président, pour vous convaincre davantage, puis-je vous rappeler que, de 1964 à 1968, M. Rodrigue, votre collègue et notre collègue de l'Assemblée nationale, député de Vimont, fut président du syndicat des ingénieurs d'Hydro-Québec et, de 1968 à 1976, président de la Fédération des ingénieurs et cadres du Québec? Il a également occupé le poste de représentant du public au Conseil des universités du Québec, de 1969 à 1972. M. le Président, en sa qualité de membre de la Ligue des droits et libertés de la personne, certainement que ce serait intéressant de l'entendre s'exprimer sur ce projet de loi. Ce serait fort dommage que, d'autorité, la présente commission ne lui permette pas de s'exprimer, surtout quand je pense que M. Rodrigue est membre de la Ligue des droits et libertés de la personne depuis 1978. Un article du projet de loi à l'étude suspend l'application de la Charte des droits et libertés de la personne. Vous voyez que c'est important. Vous semblez tout à fait convaincu de la pertinence de mes propos. Je vous en sais gré, M. le Président.

Il y a sûrement d'autres collègues qui seraient intéressés à se faire entendre et dont ce serait vraiment dommage de brimer les droits. Notre collègue et confrère le député de Verchères, un jeune député, aurait sûrement quelque chose à dire sur ce projet de loi, lui qui est diplômé en sciences sociales, qui a obtenu un baccalauréat en criminologie de l'École de criminologie de l'Université de Montréal. Lui, qui, de 1971 à 1976, fut journaliste au Devoir, à la Presse, lui qui est l'auteur du livre La filière canadienne, sûrement qu'il pourrait ici trouver la filière dans ce monde du travail

que l'on promettait de réformer et qui n'est pas réformé grandement, comme vous pouvez le voir. (20 h 30)

M. le Président, notre confrère de Verchères, qui est très sensibilisé aux problèmes de l'heure, a été délégué de l'aile parlementaire au conseil national de son parti, coordonnateur du Comité des affaires intergouvernementales et du caucus régional des députés péquistes pour la rive sud de Montréal, choisi par le ministre de l'Éducation pour être son adjoint aux relations avec les associations étudiantes du Québec. Ce collègue aurait certainement eu des choses intéressantes à dire sur ce projet de loi, comme beaucoup d'autres.

Qu'on songe, par exemple, à notre collègue, le député de Vachon. Vous me direz peut-être qu'il n'est pas né au Québec, mais c'est une raison de plus pour nous apporter la richesse de sa culture. Éducateur syndicaliste, il me semble qu'un syndicaliste comme notre confrère M. Payne aurait certainement des choses à dire sur ce projet de loi. Ce serait intéressant de l'entendre, ce serait même important. S'il manifeste le désir de se faire entendre, ce serait vraiment dommage de voir son droit de parole retiré parce qu'il n'est pas membre de cette commission, parce qu'il n'est pas intervenant non plus. Notre confrère de Vachon a une feuille de route tout à fait impressionnante: conseiller politique auprès du ministre de l'Éducation, détenteur d'une maîtrise en sciences sociales et d'un diplôme en droit et en philosophie, il a fait carrière d'enseignant et, de 1971 à 1973, a participé activement à l'étude de plusieurs dossiers à caractère socio-économique. Notre confrère de Vachon aurait certes grand intérêt à s'exprimer sur ce projet de loi important, comme d'autres de nos confrères et il y en a d'autres, M. le Président.

Je vois, par exemple, notre collègue de Roberval qui, je crois, n'est pas membre de cette commission, mais qui a également une feuille de route impressionnante. On me dit que c'est peut-être heureux qu'il ne soit pas membre de cette commission.

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'il n'y tient pas.

M. Mathieu: Ah! Il ne tient pas à être membre de la commission!

M. Johnson (Anjou): II se fie à moi pour écouter le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Dommage! Notre collègue de Roberval, M. Gauthier, un tout jeune homme, né en 1950, qui a passé toute sa vie dans la région de Roberval, aurait certainement des choses intéressantes à nous raconter. Lui qui a obtenu un brevet à l'Université du Québec à Chicoutimi, lui qui a enseigné pendant cinq ans avant de devenir conseiller pédagogique, qui a été directeur de services éducatifs et directeur général adjoint à la Commission scolaire de Roberval depuis 1978, il serait dommage que son droit de parole soit brimé à cette commission. Je sais que le député me saura gré de plaider sa cause.

Je le répète, étant donné que le député de Roberval n'était pas ici à ce moment-là, la motion du député de Brome-Missisquoi vise à donner à tous les députés de l'Assemblée nationale qui ne sont pas membres de cette commission et qui ne sont pas intervenants à cette commission le droit de parole à cette commission comme s'ils y étaient membres ou intervenants. N'est-ce pas que nous travaillons pour protéger vos droits, M. le député? M. le député de Roberval fut et reste très impliqué dans son milieu, il a été président de la Corporation touristique de Chambord, président de la Chambre de commerce, président du festival Chambord-Soleil, membre du Conseil de surveillance de la Caisse populaire de Chambord. Ce serait important qu'il joue un rôle de conseiller de surveillance auprès de cette honorable commission. Vous me dites qu'il me reste seulement deux minutes, M. le Président?

Le Président (M. Blouin): Mais oui, M. le député de Beauce-Sud. Comme les choses vont rapidement!

M. Mathieu: Comme les choses vont rapidement, en effet, M. le Président! Je conclus donc en invitant tous les membres de cette commission à accepter cette motion de mon collègue le député de Brome-Missisquoi, critique officiel de l'Opposition en matière de relations de travail. C'est lui qui a présenté cette motion tellement pertinente, soucieux, M. le Président, de préserver le droit de parole de tous les parlementaires de cette Chambre. Je l'ai vu, à l'occasion de certains débats, par exemple lors du débat constitutionnel, s'élever contre le fait que le gouvernement du Québec suspende l'application de la Charte canadienne des droits et libertés dans chacune de ses lois. Le député de Brome-Missisquoi s'est élevé, à juste titre et avec raison, contre cette décision inopportune et qui cause certainement ou peut causer préjudice à d'honnêtes citoyens. Je me souviens du discours enflammé du député de Brome-Missisquoi à cette époque; il est sans doute voué à une carrière brillante, je tiens à le mentionner. Comme vous pouvez le constater, ce n'est pas le potentiel qui manque, dans notre parti.

M. le Président, je veux vous indiquer mon désir de voter en faveur de la motion du député de Brome-Missisquoi et j'invite tous les autres collègues autour de cette

table à faire de même. Si le droit de parole de chacun de nos parlementaires est respecté, chacun aura l'occasion de s'exprimer comme il l'entend, comme il se doit.

Mon temps est-il complété M. le Président?

Le Président (M. Blouin): Oui, votre temps est écoulé, et je remercie le député de Beauce-Sud. Sur ce, je demanderai au député de Viau, qui a réclamé le droit de parole, de s'exprimer également sur le contenu de cette motion présentée par le député de Brome-Missisquoi.

M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Je ne vois pas pour quelle raison on s'entêterait, de l'autre côté, à ne pas permettre aux députés qui le désirent de venir ici, en commission parlementaire, au salon rouge, s'exprimer sur un projet de loi qui est extrêmement important. C'est brimer les droits de nos collègues. Je crois que nous n'avons aucun droit. On n'est pas dans une république de bananes. L'adjoint parlementaire au ministre du Travail déclarait, le 27 avril dernier, que, pour lui, siéger en Chambre un vendredi sur une question avec débat était une perte de temps. Je remarque qu'il n'est pas présent ici ce soir. Je ne sais pas où il est présentement. Peut-être trouve-t-il qu'une commission parlementaire pour étudier un projet de loi aussi important est une perte de temps pour lui. Peut-être que c'est sa vision d'un Québec démocratique, mais, pour moi, M. le Président, telle n'est pas ma vision, en tant que parlementaire et élu du peuple.

Je peux vous dire que, dans ma carrière de professeur et de directeur d'école...

M. Johnson (Anjou): Les deux.

M. Cusano: Oui, les deux. Une carrière de dix-neuf ans.

Le Président (M. Blouin): Je vous en félicite, M. le député.

M. Cusano: Merci, M. le Président, vous n'êtes pas les seuls à avoir des professeurs dans le parti, nous en avons aussi.

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Cusano: Mais on a plus de problèmes avec les avocats, par exemple, M. le Président, et j'ai toujours prêché que, dans une démocratie, tout le monde avait le droit de s'exprimer. Je vais simplement reprendre quelques mots, quelques phrases de la motion: "Que cette commission permette..." Le mot "permette" veut dire qu'on laisse un choix. On ne dit pas que cette commission oblige. On ne veut pas obliger tous les députés à venir ici, parce qu'on sait que, du côté ministériel, il y en a qui ne sont pas tellement intéressés à cela. On veut tout simplement permettre à des députés qui ne sont pas membres de s'exprimer. Vous savez que les règlements ne permettent pas d'avoir 122 membres à une commission, les règlements sont tels. J'aimerais bien entendre nos collègues, j'aimerais bien les entendre. Je suis persuadé, comprenant un peu la structure gouvernementale - et on me dit que vous n'avez pas de caucus tous les jours - que la communication, parfois, n'est pas tellement bonne. Je me trompe peut-être, vous pouvez me corriger. En ayant ici les députés, on aurait l'occasion de savoir vraiment ce qui fait bouger ce gouvernement. On dit: "que cette commission permette..." Cela veut dire que c'est un choix de leur part, que, s'ils veulent s'exprimer, ils peuvent venir ici. Chacun a son droit de parlementaire. Depuis que ce projet de loi a été présenté, certainement qu'ils ont reçu des représentations à leur bureau.

M. le Président, je verrais mal comment vous, en tant que président, vous ne seriez pas d'accord. Je sais que vous n'avez pas le droit de vote, mais je ne vois pas comment on peut ne pas être d'accord avec une proposition permettant à des gens de venir s'exprimer. J'ai à l'esprit deux députés. Le député de Bourassa, que je connais depuis fort longtemps, c'est mon voisin de comté, s'est plaint qu'il a été ici, au salon rouge, pendant deux mois consécutifs à une commission parlementaire et qu'il n'a guère eu de grande chance de s'exprimer. Le peu de fois qu'il a pris la parole, on ne le faisait pas taire, c'est lui qui ne voulait pas parler. Il ne voulait pas vraiment connaître la vérité. Le député de Bourassa aurait certainement quelque chose à dire sur ce projet de loi. J'espère que vous aurez au moins la gentillesse de lui dire que son collègue, son voisin du comté de Viau, a proposé qu'on lui donne la permission de venir ici se faire entendre et que c'est vous, messieurs les députés ministériels, qui avez refusé. Il y a un autre collègue, M. le député de Châteauguay, qui était aussi en commission parlementaire. Peut-être qu'il est trop fatigué, je ne l'ai pas vu en Chambre.

M. Johnson (Anjou): II siège à une autre commission.

M. Cusano: Ah! il est à une autre commission. Je suis sûr qu'il pourrait trouver un peu de temps, je suis sûr qu'il a quelque chose à dire ici. C'est mieux qu'il le fasse ici en commission parlementaire que dans

une conférence de presse. On a déjà vu cela de votre côté. Quand des députés n'étaient pas tout à fait contents du discours sur le budget, ils ont formé un petit comité et ils sont allés parler ailleurs au lieu de parler à l'endroit où ils devaient parler. Vous n'avez pas fait cela? Pourquoi ne pas donner la chance à un député comme M. Dussault? Je vous promets une chose, M. le Président. Si le député de Châteauguay vient ici en commission parlementaire, je promets de ne pas parler en anglais. Je sais que cela "l'achale" quand on parle en anglais. (20 h 45)

Si vous consentez à ce qu'il vienne ici s'exprimer, je ne le taquinerai pas et je vais employer la langue de Molière, je le promets.

En parlant de langue, je pourrais, dans les débats, parler en italien. Cela ferait plaisir à quelque 300 000 personnes de la province de Québec qui parlent l'italien. Per que no, Signor Presidente? (Il s'exprime en italien, sa langue). Je peux vous assurer, M. le Président, que tout ce que je dirai en italien est très traduisible. C'est relié à la motion. Je continue en français, je reviendrai à l'italien plus tard. Pour tous mes collègues qui voudraient parler une autre langue, soit le grec, soit l'espagnol, le hollandais, je ne pense pas qu'on exigerait des traducteurs. On ne demande pas d'encourir des dépenses exagérées. Ce qu'on vous demande, c'est que tout membre de cette Assemblée... On ne demande pas à Louis Laberge de venir ici étudier le projet de loi article par article. Je pense qu'il serait bien content d'y venir, je suis sûr et certain qu'il y aurait beaucoup d'amendements. Ce n'est pas M. Laberge qu'on demande. Ce n'est pas à M. Laberge qu'on voudrait permettre d'être ici en commission parlementaire. C'est à nos collègues. Je suis déçu qu'on veuille brimer leur droit de parole. C'est le droit fondamental d'une démocratie.

On connaît très bien la vision de certaines de nos gens en ce qui a trait à la démocratie. On a vu des projets de loi être débattus, des règles de jeu imposées. Vous avez adopté un projet de loi en commission plénière en l'espace de cinq heures. Vous rappelez-vous, M. le Président, lequel c'était? C'est le projet de loi 105. Pourtant, beaucoup de parlementaires voulaient s'exprimer sur ce projet de loi. On est rendu à la fin de la session. On a rencontré des gens dans le comté et ces gens nous disent qu'il y a certaines choses à corriger à ce projet de loi. Très humblement, je représente un comté du nord-est de Montréal. Je crois que ma vision du projet de loi reflète les voeux, les désirs de la population que je représente.

Personnellement, en tant que député, j'aimerais bien savoir l'opinion exprimée dans les amendements qui seraient apportés par le député de Rivière-du-Loup. Dans son rôle de leader adjoint, il aurait certainement beaucoup de choses à nous dire sur ce projet de loi. Il est plus vieux que moi. Il a tellement d'expérience, cela doit avoir ses conséquences. Lui qui est né en 1933 - dix ans de plus que moi - vous savez, cela fait longtemps. Mais je suis sûr que, dans son comté de Rivière-du-Loup, il a reçu la visite de nombreux travailleurs, des présidents de petites et moyennes entreprises et qui lui ont dit de faire valoir certains points ici en commission parlementaire. Même s'il représente Rivière-du-Loup, on voit que c'est un gars qui a voyagé. Il a fait ses études collégiales au Collège de Saint-Hyacinthe. Il sait certainement ce qui se passe. Il doit avoir des amis dans le coin de Saint-Hyacinthe, des collègues de classe, qui auraient certainement quelque chose à dire. À part cela, il a suivi, M. le Président -c'est très important - des cours en assistance sociale. Vous savez, lorsque nous avons au-delà de 600 000 personnes qui bénéficient de l'aide sociale, je pense que quelqu'un qui détient un diplôme en assistance sociale du cégep de Rivière-du-Loup devrait certainement avoir le droit de parole ici, au salon rouge, concernant l'étude de ce projet de loi. Mais cela ne se termine pas là. Le député de Rivière-du-Loup a fait trois ans d'études en droit...

Une voix: Eh bateau!

M. Cusano: ...à l'Université Laval, à Québec. Il a certainement une contribution à apporter.

De plus, ce projet de loi va impliquer certains calculs concernant les coûts et je m'aperçois que le député de Rivière-du-Loup a été aide-comptable. Cela pourrait apporter des éclaircissements. On a beaucoup de questions. Je ne sais pas si le ministre pourrait répondre à toutes ces questions, mais le député de Rivière-du-Loup pourrait le faire. Il a été fonctionnaire au ministère des Affaires sociales. C'est chez vous, M. le ministre, et vous voulez empêcher un ex-fonctionnaire de venir ici s'exprimer...

Une voix: Un ex et un futur...

M. Cusano: Ex et futur, oui. Je pense que ce n'est pas bien encourageant pour les fonctionnaires qui sont là présentement, parce qu'ils ont quelque chose à dire. Ils pourraient le dire par l'entremise du député de Rivière-du-Loup.

Il connaît cela, les commissions, non seulement à titre d'adjoint parlementaire, mais il a aussi été membre de la Commission d'urbanisme de Rivière-du-Loup, en 1963. Plus tard, il en a même été président durant deux ans. Vous ne le saviez pas, M. le ministre? Il a été président de la

Commission d'urbanisme de Rivière-du-Loup durant deux ans. Nous avons eu des mémoires qui ont été déposés ici par des municipalités. Quelqu'un qui a de l'expérience en urbanisme et l'expérience des problèmes de relations du travail devrait avoir droit de parole. Il a aussi été membre de l'Office municipal d'habitation. Quand on parle d'habitation, il me semble qu'on parle de construction aussi, on parle de travailleurs. Pourquoi ne pourrait-il pas venir ici pour éclairer ses collègues relativement aux problèmes de ce projet de loi.

Il a aussi occupé un poste pour la promotion industrielle de la région. C'est extrêmement important. Lorsqu'on a entendu les différents représentants, la semaine dernière, concernant ce projet de loi, mon collègue de Brome-Missisquoi a posé une question systématique à tous les intervenants, à tous ceux qui ont déposé un mémoire, pour savoir comment ce projet de loi allait améliorer la situation économique. Je crois que la présence du député de Rivière-du-Loup, qui a de l'expérience en promotion industrielle, pourrait nous éclairer et nous aider à voir comment ce projet de loi affecterait cette promotion industrielle. À part cela, M. le Président, il faut avoir un peu de respect pour un ancien membre du RIN. Si je ne me trompe c'est le Ralliement de l'indépendance nationale. C'est cela?

M. Johnson (Anjou): Le Rassemblement pour l'indépendance nationale.

M. Cusano: Le Rassemblement pour l'indépendance nationale. C'est un ancien membre du RIN et un militant du Parti québécois depuis 1970. Il sait certainement quelle est sa pensée, son évolution. Y a-t-il eu une évolution dans le domaine du travail chez le Parti québécois? Qui pourrait mieux nous éclairer sur cette évolution que le député de Rivière-du-Loup, le député Jules Boucher? M. le Président, je disais tout à l'heure - excusez-moi, deux minutes? - que je pourrais me permettre de parler en italien. Aurait-on objection à ce que certains membres viennent ici et emploient la langue grecque, une très belle langue? Oui, la langue italienne. En faisant cela, cela coûterait plus cher à l'Assemblée nationale, parce qu'il faudrait certainement avoir des traducteurs pour vous, M. le Président, et pour le ministre. Il a besoin de quelqu'un qui traduise. Je sais que si je parlais très lentement en italien, il me comprendrait, parce que l'italien ressemble beaucoup au français, spécialement lorsque que vous employez vos mains. Vous allez très bien comprendre que la langue italienne est une très belle langue, aussi belle que le français. C'est une langue très expressive et pleine d'émotion. On pourrait certainement demander à ces gens de venir ici, mais à condition - parce qu'on ne peut pas engager des dépenses extraordinaires pour les traducteurs - qu'ils emploient la langue qui nous coûterait le moins cher, que ce soit le français ou l'anglais.

Comme je le disais, cette motion de mon cher collègue Brome-Missisquoi n'impose rien à personne. Ce n'est pas une imposition. On demande, dans la motion de permettre à un député d'intervenir. C'est une permission ou un choix que le député aurait. Je verrais mal cette commission parlementaire bloquer les droits qu'on a tous. Il y a eu des précédents. Ce n'est pas la première fois qu'on demande que les intervenants puissent venir, même s'ils ne sont pas membres. Il y a des précédents qui existent. Je comprends mal pourquoi on s'entêterait, de l'autre côté, à ne pas permettre à tous les...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau, il faut conclure rapidement.

M. Cusano: Oui, je vais conclure.

Le Président (M. Blouin): Vous avez déjà excédé le temps qui vous était alloué.

M. Cusano: Ah! mais il est sûr, M. le Président, qu'il y a des gens qui ambitionnent bien plus que moi.

Le Président (M. Blouin): Oui, mais je ne suis pas sûr que vous ayez le consentement pour poursuivre au-delà de 20 minutes, M. le député de Viau.

M. Cusano: Je comprends mal, parce que, l'autre soir, en Chambre, le ministre...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense qu'on peut se permettre d'être généreux avec un député qui s'exprime aussi rarement.

M. Cusano: M. le Président, pourrais-je terminer?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me le permettez, étant donné que le député a déjà excédé ses 20 minutes et étant donné qu'il s'exprime aussi rarement, je pense qu'on peut lui donner cinq minutes de grâce.

M. Paradis: Sur la question soulevée par le ministre, j'aimerais remercier le ministre de ces cinq minutes de grâce en soulignant que, s'il est d'opinion que le député s'exprime rarement, c'est que le ministre est rarement en Chambre pour l'entendre.

M. Johnson (Anjou): Ce qui est inexact, M. le Président.

M. Cusano: Oui. Je remercie mon

collègue.

Le Président (M. Blouin): Vous concluez, M. le député de Viau, s'il vous plaît. (21 heures)

M. Cusano: Mais y a-t-il consentement? Il y a consentement, M. le Président. Je disais que le ministre, lorsqu'on parle de... Je ne vois pas pourquoi il est de mauvaise humeur ce soir, et ne veut pas me donner la chance de parler. En Chambre, l'autre soir, dans le débat sur ce projet de loi, lorsqu'il est venu nous demander de continuer, c'est-à-dire de dépasser 20 heures, parce qu'il avait un engagement, on le lui a permis, on a été très gentil. Vous vouliez dire quelque chose, ce n'était pas grand-chose, mais le peu que vous avez dit, on vous l'a laissé dire. On ne s'est pas servi du règlement pour dire que la Chambre doit terminer ses travaux à une certaine heure. On a dit, par consentement: Allez-y, M. le ministre, on veut rendre votre tâche très facile. On arrive ici en commission parlementaire, M. le Président, et il essaie de me dire que mon temps est écoulé. J'espérais qu'il démontrerait au moins la même gentillesse que j'ai eue pour lui. Merci de me le rappeler, M. le Président.

Lorsqu'il dit que je me suis rarement exprimé, il parle de cette commission parlementaire. On vient de commencer. Il faut que je parle à mon tour. Ce n'est pas moi qui décide qui a le droit de parole, M. le Président, mais vous. On ne fera pas une chicane à savoir qui va parler avant. De notre côté, on s'entend très bien. On a commencé par l'honorable collègue de Brome-Missisquoi. On s'entend, et il n'y en a pas, entre nous, qui ont une préférence. Il n'y a pas une partie de baseball qui nous attend. Il n'y a pas le Grand Théâtre de Québec qui nous attend. On est ici pour travailler. On est ici pour protéger le droit de tous nos collègues de l'Assemblée nationale, qui ont beaucoup à dire sur ce projet de loi.

En terminant, M. le Président, je ne vois pas pourquoi on s'entête. À part cela, si on nous accorde cette motion, je pense que cela irait même plus vite. Au lieu de débattre les raisons pour lesquelles on veut avoir ces gens ici au salon rouge - on est prêt à passer par-dessus cela - on pourrait passer immédiatement au projet de loi. Je pense que c'est le désir du ministre. Par votre entêtement, M. le Président, je suis convaincu que vous ne voulez pas entendre vos collègues. Je comprends que vous ne vouliez pas nous entendre, puisque vous ne nous écoutez jamais. Mais vos propres collègues, je ne peux concevoir cela.

Que ce soit le député de Beauce-Sud, que ce soit le député de Brome-Missisquoi, lorsqu'ils veulent dire quelque chose, je les écoute toujours, en tant que collègues. On a un esprit très collégial. De votre côté, M. le Président, on s'aperçoit que l'esprit collégial n'existe pas.

Avant que le ministre fasse une crise, M. le Président, je termine en disant que ce serait malheureux que vous alliez établir un précédent, M. le Président, pour empêcher un de nos collègues de venir s'exprimer sur un projet de loi. C'est inacceptable. Merci.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le député de Viau. M. le ministre.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la motion du député de Brome-Missisquoi, je veux simplement dire quelque chose avant qu'il y ait une conclusion sur cette motion.

La première, c'est que vous avez rendu une décision quant à la recevabilité, que je ne conteste pas, M. le Président. Dans votre sagesse, vous avez décidé de considérer que cette motion était recevable.

La deuxième chose, c'est de dire que l'objectif manifeste de l'Opposition en présentant cette motion c'était de lui permettre d'amener ici l'ensemble de nos collègues d'en face, de telle sorte qu'ils puissent disposer d'une longue période de temps pour nous entretenir de choses qui, dans bien des cas, ne sont pas nécessairement pertinentes au projet de loi, mais on comprend que c'est de bonne guerre.

Cependant, ce qui m'a frappé, M. le Président, c'est le fait qu'on a invoqué, pour cette motion, que ce sont les gens du gouvernement, les députés ministériels. Contrairement à ce qu'affirmait le député de Viau, le caucus ministériel se réunit régulièrement, surtout en fin de session. Aucun des collègues mentionnés par le député de Viau, le député de Beauce-Sud ou les autres députés, le député d'Outremont ou le député de Brome-Missisquoi, ne m'a fait valoir qu'il entendait intervenir sur ce projet. Si jamais un député changeait d'idée, M. le Président, je suis sûr que, parmi mes collègues, certains seraient prêts, lors d'une séance, à laisser leur place, tel que le prévoit notre règlement.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, loin de vouloir brimer la liberté de parole de qui que ce soit, mais strictement aux fins de nous permettre d'aborder enfin ce projet de loi, au fond, et de l'étudier article par article, comme c'est notre responsabilité de le faire, étant conscients également que nos collègues qui, de part et d'autre, voulaient s'exprimer sur ce projet ont eu l'occasion de le faire en deuxième lecture ou auront l'occasion de le faire, lors de la prise en considération du rapport ou lors de la troisième lecture, pour ces raisons, je m'oppose évidemment à la

motion présentée par le député de Brome-Missisquoi.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre. Je vous signale cependant que j'ai émis l'avis que cette motion était recevable, mais qu'il ne s'agit pas d'une décision formelle de la présidence. Donc, est-ce que je dois relire la motion du député de Brome-Missisquoi?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Blouin): La motion dit ceci: "Que cette commission permette à tous les députés qui ne sont ni membres, ni intervenants à la commission élue permanente du travail de pouvoir prendre la parole et ce sans devoir obtenir au préalable la permission, et ce pour toute la durée de l'étude, article par article, du projet de loi 17." Cette motion est-elle adoptée?

M. Johnson (Anjou): Rejeté, M. le Président.

M. Paradis: Vote, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Nous allons donc procéder au vote nominal.

M. le député de Sainte-Marie n'est pas là.

M. le député de Viau.

M. Cusano: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Prévost n'est pas là. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Contre, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Contre. Mme la députée de Maisonneuve n'est pas là.

M. le député d'Ungava n'est pas là. M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Contre, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Pour.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Hull n'est pas là.

M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bordeleau: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): La motion est rejetée.

M. Paradis: M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

Motion proposant d'inviter à la

commission la Conférence des

arbitres du Québec

M. Paradis: J'avais une motion à soumettre à l'attention de cette commission, et la motion se lit comme suit: "Que cette commission invite la Conférence des arbitres du Québec à se présenter devant la commission permanente du travail, le vendredi 17 juin 1983, à 11 h 30, afin de renseigner les membres et intervenants de ladite commission relativement aux modalités du projet de loi 17."

Le Président (M. Blouin): M. le député, je pourrai vérifier, mais je crois avoir reçu une lettre de la Conférence des arbitres m'indiquant qu'ils avaient déposé leur rapport et qu'ils ne désiraient pas être entendus à la commission. Je ne sais pas si...

M. Paradis: M. le Président...

Le Président (M. Blouin): C'est une lettre assez récente, que j'ai eue ce matin. Je ne l'ai pas avec moi.

M. Paradis: M. le Président... Le Président (M. Blouin): Oui.

M. Paradis: Si vous me le permettez, sur la question que vous soulevez, pour vous apporter un peu d'éclairage, on vient de terminer, dans cette même salle, une longue commission, qui a duré neuf semaines, sur le saccage de la Baie-James. Il y a beaucoup de personnes qui ont envoyé des lettres ou des télégrammes et qui ne voulaient pas être invitées. Il y en a d'autres qui ont envoyé des lettres et des télégrammes indiquant qu'elles voulaient être invitées. La décision de la présidence, soit le vice-président de l'Assemblée nationale, dans chacun des cas, a été la suivante: La commission est maîtresse de ses invitations.

Le Président (M. Blouin): ... serait à l'effet de les contraindre.

M. Paradis: Les contraindre. De les

inviter, M. le Président...

Le Président (M. Blouin): D'accord, mais dans le sens de...

M. Paradis: ... avec toute la force...

Le Président (M. Blouin): Même s'ils expriment...

M. Paradis: ... que prévoit notre règlement, la Loi sur l'Assemblée nationale. Je suis certain qu'étant gardien de cette loi et de ce règlement, vous vous ferez un devoir, si vous déclarez la motion recevable, d'écouter les explications des partis. Si vous avez des doutes sur la recevabilité, je pourrais vous citer des précédents.

Le Président (M. Blouin): Non, non, je n'ai pas de doute formel.

M. Mathieu: M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Avant que vous rendiez votre décision...

Le Président (M. Blouin): Je ne crois pas que je rendrai de décision, M. le député de Beauce-Sud. À sa face même, cette motion m'apparaît très recevable. Cependant, je voulais exprimer l'avis que ce même organisme a signifié qu'il ne désirait pas être entendu.

M. Mathieu: Justement, sur cette question, M. le Président. Même si l'organisme vous a mentionné qu'il ne désirait pas être entendu, il est par exemple du désir de certains membres de la commission de l'entendre pour lui poser certaines questions, pour avoir des éclaircissements plus approfondis. Je crois, M. le Président, que c'est le sens de la motion de mon collègue, le député de Brome-Missisquoi.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi, sur cette question.

M. Paradis: M. le Président, si la motion...

M. Bordeleau: S'il vous plaît!

M. Paradis: Est-ce que c'est sur la recevabilité?

M. Bordeleau: C'est une question de règlement.

Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député.

M. Bordeleau: Non, ce n'est pas sur la recevabilité. M. le Président, vous avez indiqué que vous la receviez. À partir de ce moment-là, c'est sur la motion qu'il faut parler. Je vous invite simplement à demander aux collègues qui ont quelque chose à dire sur la motion de le dire.

M. Paradis: Cela va.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Alors, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: Je tiens à rassurer mon confrère: c'est ce qu'on s'apprêtait à faire. M. le Président, la lecture du mémoire qui a été déposé par la Conférence des arbitres du Québec soulève chez les parlementaires de ce côté-ci de la Chambre, en tout cas... J'espère que, de l'autre côté, on en a fait la lecture et que cela a également soulevé des questions importantes. Vous vous souviendrez des interventions du ministre au Travail par intérim...

M. Johnson (Anjou): Du Travail.

M. Paradis ...ministre au Travail par intérim...

M. Johnson (Anjou): Du Travail.

M. Paradis M. le Président, on vérifiera la réplique...

M. Johnson (Anjou): Du Travail.

M. Paradis M. le Président, c'est mon droit de parole.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! La parole est au député de Brome-Missisquoi. Vous aurez votre tour à l'occasion. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Cusano: Excusez-moi, M. le Président, je veux bien savoir...

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le député de Viau. J'ai donné la parole au député de Brome-Missisquoi.

M. Cusano: Je voulais seulement savoir, M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Non, vous n'avez pas la parole. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Cusano: Le ministre est bien au travail?

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!

M. Cusano: II est bien au travail?

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Brome-Missisquoi. Sur la motion.

M. Paradis M. le Président, je me souviens avoir entendu à l'occasion de l'audition des mémoires ainsi qu'au moment de la deuxième lecture, le ministre lui-même ainsi que plusieurs autres membres de la flopée péquiste intervenir et nous dire qu'un des objets essentiels du projet de loi 17 était de raccourcir les délais au niveau des requêtes en accréditation et au niveau de l'arbitrage des griefs. L'un des principes du projet de loi voulait déjudiciariser le processus des relations du travail, faire en sorte que cela soit plus simple, qu'il y ait moins de conflits, etc.

À la page 3 de leur mémoire, les arbitres nous disent ce qui suit et cela soulève beaucoup de questions dans mon esprit. Cela soulève sans doute également beaucoup de questions dans l'esprit de tous ceux qui ont pris connaissance dudit mémoire. Et on jugera, par les questions posées, combien d'entre nous ont pris connaissance dudit mémoire. Je vous cite donc le troisième paragraphe de la page 3. Ce sont les arbitres qui parlent: "Nous devons souligner que nous croyons qu'une convention collective imposée par un arbitre unique aura un caractère beaucoup plus judiciaire que si celle-ci est le fruit d'une démarche tripartite." M. le Président, à la lecture, à sa face même, on comprend ce que cela veut dire. Le projet de loi 17 ne déjudiciarise pas les relations du travail au Québec. Au contraire, les arbitres, qui sont drôlement situés au centre des discussions, nous disent que le système d'arbitre unique que propose le ministre au Travail par intérim aura un caractère beaucoup plus judiciaire que si la convention est le fruit d'une démarche tripartite, ce qu'on connaissait ou qu'on connaît présentement. Mais le ministre au Travail par intérim a peut-être très peu de respect pour les arbitres. Il ne considère sans doute pas qu'il faut prendre en sérieuse considération les remarques de cet organisme. Il les prend sans doute, sans barrière de langue, avec un grain de sel, M. le Président. (21 h 15)

Mais il sait - ou s'il ne le sait pas, on va le lui apprendre - que son vrai patron, le chef de cabinet du premier ministre René Lévesque, M. Jean-Roch Boivin, a déjà été un arbitre. On a appris cela à l'occasion de la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James. Le chef de cabinet du premier ministre a déjà été un arbitre. Donc, ce que les arbitres disent, cela doit être important. Si j'étais ministre des Affaires sociales, je me soucierais de ne pas chatouiller à l'envers du poil - comme on dit - celui-là même qui conseille le premier ministre dans les affectations. C'est peut-être un risque qu'entend courir le ministre des Affaires sociales. On verra s'il conserve le ministère du Travail longtemps. Je lui prédis que, dans très peu de temps, il va perdre ce ministère parce qu'il n'aura pas compris l'importance des arbitres, qu'il n'aura pas compris que le chef de cabinet du premier ministre a déjà été un arbitre.

Il y a plus, il n'y a pas simplement le chef de cabinet du premier ministre qui a déjà été arbitre, M. le Président. On a appris au cours de la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James que Me Rosaire Beaulé, l'ancien associé d'affaires du chef de cabinet du premier ministre et qui, dans le conflit LG 2, était l'avocat des syndicats américains, il était un spécialiste en relations du travail et que lui, à ce titre, se présentait souvent devant les arbitres. Peut-être que le ministre au Travail par intérim aurait intérêt à vérifier les relations étroites entre M. Jean-Roch Boivin, chef de cabinet du premier ministre, et Me Rosaire Beaulé, procureur des syndicats américains dans l'affaire LG 2.

Ce n'est pas tout, M. le Président. Il y a des gens qu'on rencontre et qui auraient été intéressés à dévoiler des choses au moment de la commission parlementaire sur LG 2, qui viennent du monde syndical. L'évocation du nom de Maurice Pouliot va sans doute faire sursauter le ministre, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): Question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je comprends que notre mode démocratique de fonctionnement doit permettre à l'Opposition de s'exprimer même, dirais-je, de façon presque futile sur certaines choses. C'est le prix à payer pour la démocratie. Cependant, je pense qu'il est de votre devoir - si je me permets, M. le Président - de rappeler quand même au député de Brome-Missisquoi, qu'il semble s'être trompé de commission parlementaire, de date ou de semaine - je ne suis pas sûr - et qu'il est à la mauvaise commission parlementaire. Il nous parle de l'énergie et des ressources alors qu'on est en train d'étudier le Code du travail. Je pense, M. le Président, que vous devriez le rappeler à l'ordre et à la pertinence du débat simplement. Ceci dit, je l'écouterai et je subirai son discours pendant les 20 minutes auxquelles il a droit.

M. Paradis: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le

député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Sur la question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): Non, pas nécessairement sur la question de règlement. C'est tout simplement une interrogation que le ministre se pose. Je vous demande simplement de reprendre votre droit de parole tout en revenant à la pertinence de votre motion.

M. Paradis: M. le Président, je sais exactement à quelle commission on se situe. Les noms que j'évoque rappelleront sans doute des rencontres au ministre des Affaires sociales, rencontres qu'il a eues au cours de l'été 1978, l'été qui a précédé le règlement hors cours du saccage de la Baie-James. Tous ces noms évoquent sans doute chez lui un paquet de souvenirs qu'il aurait pu venir nous raconter spontanément au cours des neuf semaines qu'on a siégé, mais je ne veux pas faire un plat de cette affaire-là.

J'en étais donc au syndicaliste Maurice Pouliot, du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, que le gouvernement a refusé d'entendre dans le cas de la commission sur LG 2. Je fais le parallèle. Peut-être que cette personne qui a eu à se présenter souvent dans sa vie devant des arbitres pourrait devant cette commission venir nous raconter comment cela se passe et si c'est vraiment déjudiciariser le système que de prévoir que la première convention collective va être arbitrée par un seul arbitre. Que voulez-vous. Paraît-il que le citoyen Maurice Pouliot n'est pas un ami personnel du premier ministre, ni de son dauphin et donc qu'il n'a pas voix au chapitre dans la collectivité québécoise.

M. le Président, il y a également tout un aspect du monde syndical, du monde de l'arbitrage, qu'on pourrait entendre. On en a entendu par bribes du notaire "Ti-Lou" Gauthier, conseiller spécial au bureau du premier ministre. Oui, j'en viens à l'arbitrage, M. le ministre. Vous me dites arbitrage, vous allez comprendre pourquoi. "Ti-Lou" Gauthier, conseiller spécial au bureau du premier ministre, avait été le tuteur du local 791. Je pense que c'était la fonction qu'il occupait au moment où je l'avais rencontré à l'été 1978. Il a recommandé Rosaire Beaulé, l'ex-associé du chef de cabinet du premier ministre, le spécialiste en relations du travail...

M. Johnson (Anjou): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): En tout respect pour les personnes qui ont déjà eu à subir les invectives, à mon avis, dans certains cas, un peu indécentes du député de Brome-Missisquoi dans une autre commission parlementaire, il m'apparaît inapproprié... Pour sa part, il peut dire tout ce qu'il veut, tout ce qu'il a de fin à dire, y compris ce qu'il a de pas fin à dire, ce à quoi il est assez habitué, sur le Code du travail, sur celui qui vous parle, mais je pense qu'il ne doit pas revenir sur ce qui a fait l'objet d'une autre commission parlementaire dans laquelle il s'est joyeusement cassé le nez.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le député de Brome-Missisquoi, en vous rappelant qu'on apprécierait que vous reveniez à l'objet de la motion que vous avez vous-même faite à la commission.

M. Paradis: Je veux quand même répliquer aux propos du ministre, M. le Président. Celui qui avait l'air pas fin à la télévision, et la population a pu le constater, a été le dernier témoin ou invité qu'on a entendu en commission parlementaire. Je comprends que le dauphin s'énerve quand on parle de son patron. C'est très compréhensible.

Le Président (M. Bordeleau): ... parler sur la motion, M. le député.

M. Paradis: Maintenant, ceux qui se sont cassé le nez n'étaient certainement pas les députés du Parti libéral du Québec qui, dans le but de restaurer l'intégrité de notre Parlement, de notre institution, ont mis leurs sièges en jeu, ce qui a été refusé par une décision de la présidence, mais ils auraient pu être mis en jeu de consentement, si le premier ministre ne se limitait pas strictement aux bravades et aux menaces.

Sur ce, on va donc dans l'entourage du premier ministre. Il y a des gens qui ont déjà été des arbitres, Jean-Roch Boivin, son chef de cabinet, des gens qui ont déjà été des tuteurs syndicaux, "Ti-Lou" Gauthier, le tuteur du 791 aujourd'hui, conseiller spécial au bureau du premier ministre, une personne comme Rosaire Beaulé, ex-associé d'affaires de Jean-Roch Boivin, spécialiste en relations du travail. Je sais que ces gens pourraient apporter une solution qu'on pourrait prendre à partir du mémoire soumis par la Conférence des arbitres du Québec et une solution qui pourrait aboutir au niveau de la loi 17 à un règlement hors cour. On sait comment ces gens sont habiles dans l'obtention d'un règlement hors cour. Si on pouvait en arriver, entre les parties patronales et les parties syndicales, à un règlement hors cour et si le premier ministre faisait ce qu'il a fait dans le dossier LG2, qu'il y mettait tout le poids de son bureau,

qu'il s'en occupait à tous les niveaux comme il s'en est occupé au niveau du dossier du saccage, on pourrait possiblement aboutir à un règlement hors cour, cette fois-ci non pas au détriment de l'ensemble de la collectivité québécoise, mais au bénéfice de l'ensemble de la collectivité québécoise.

Cela ne serait pas strictement, dans le cas qui nous concerne, à l'avantage de Louis Laberge, qui avait déclenché tout le mécanisme du règlement de LG 2 en appelant Jean-Roch Boivin, mais à l'avantage de l'ensemble du monde syndicaliste et du monde patronal au Québec. M. le Président, le mémoire soumis par la Conférence des arbitres du Québec a strictement été déposé devant cette commission sur l'aspect de la déjudiciarisation du système tant souhaitée par la CSD, et son président nous a rendu un élogieux témoignage devant cette commission. On pourrait interroger ces arbitres. On aurait la CSD qui souhaite la déjudiciarisation du système. On aurait la CSN qui souhaite la déjudiciarisation du système. On aurait la Centrale de l'enseignement du Québec qui souhaite la déjudiciarisation du système. On aurait le Conseil du patronat du Québec qui souhaite la déjudiciarisation du système. On aurait l'Association des manufacturiers du Canada, section Québec, qui souhaite la déjudiciarisation du système. On aurait la Chambre de commerce de la province de Québec qui souhaite la déjudiciarisation du système. Tous ces gens pourraient obtenir satisfaction. On ne sait pas, et c'est là que c'est ambigu, si la FTQ, elle, souhaite la déjudiciarisation du système, parce que plus c'est judiciaire pour la FTQ, plus il y a des possibilités de régler hors cour par l'entremise du bureau du premier ministre. Mais on aurait quand même créé un consensus assez large, consensus qui profiterait à qui? Qui profiterait à l'ensemble du monde syndical, à l'ensemble du monde patronal, aux travailleurs, aux employeurs et qui créerait également un climat de confiance au Québec, seul capable d'assurer la reprise de l'économie, seul capable d'assurer la création et le maintien des emplois au Québec.

Est-ce que le Parti québécois va voter contre cette motion? C'est un éclairage additionnel que ces gens nous apporteraient et c'est peut-être ce qui manque aux députés d'en face pour les convaincre que le projet de loi 17 judiciarise davantage le système. C'est peut-être ce qui manque pour convaincre nos bons amis d'en face, dont le ministre du Travail par intérim, que cela ne raccourcit pas les délais, les modifications qu'ils apportent au Code du travail par le projet de loi 17. Au contraire, en changeant le vocabulaire juridique, ils sont certains que les délais vont être prolongés, parce qu'ils auront judiciarisé le système davantage et qu'ils auront fait en sorte que les parties iront tester devant les tribunaux le sens profond, la substance de la nouvelle terminologie juridique.

Ces tests prendront combien de temps à être résolus? Combien cela prendra-t-il de temps avant d'avoir une réponse positive, une réponse affirmative de la Cour d'appel du Québec ou de la Cour suprême du Canada -que le mot plaise au ministre ou pas - avant d'avoir une décision judiciaire finale qui pourra peut-être par la suite, à plus long terme, permettre de raccourcir les délais, comme c'est l'intention du gouvernement? Mais, pour au moins trois ans, c'est certain que cela va prolonger les débats. Ce n'est pas compliqué, c'est certain que cette judiciarisation à outrance du système va prolonger les délais. Qui va payer pour ces prolongations? Le ministre du Travail par intérim? Les députés d'arrière-ban péquistes? Non, M. le Président, mais les travailleurs du Québec, les employeurs du Québec et l'ensemble de l'économie au Québec. On va leur faire payer une autre facture, alors qu'on est en pleine crise économique. Ce gouvernement nous dira par la suite: On n'est pas responsable, c'est la faute des autres, c'est la faute d'Ottawa, c'est la faute des libéraux, c'est la faute de Reagan, c'est la faute de la Communauté économique européenne, mais, après combien d'années de gouvernement péquiste, ce n'est jamais la faute de ces pseudo-administrateurs. Ils nous ont tellement répété que ce n'est pas leur faute qu'on commence à les croire et qu'on va être obligé - j'hésite, M. le Président, parce que je ne sais pas si le mot est antiparlementaire; s'il l'est, je vais le retirer, mais je vais vous demander une directive - de penser que ces gens sont irresponsables, carrément irresponsables, ce n'est jamais leur faute.

Quelqu'un de responsable, c'est sa faute. Que ça aille bien ou que ça aille mal, il en prend la responsabilité, il est responsable; c'est ce qu'on appelle un gouvernement responsable. Avec le gouvernement péquiste, c'est toujours la faute des autres. Quand c'est toujours la faute des autres, c'est un gouvernement irresponsable, M. le Président - je vois que vous ne m'avez pas interdit l'utilisation du terme, il doit donc s'agir d'un terme parlementaire. C'est dur d'utiliser un mot comme ça dans un tel forum, mais cette irresponsabilité, elle se fait sur le dos de qui? Elle se fait sur le dos des travailleurs, des employeurs et de l'ensemble de l'économie au Québec. Ceux qui paient la plus grosse partie de cette facture, ce sont les jeunes au Québec, ceux qui poussent et qui n'ont pas accès au monde du travail, qui n'ont pas accès aux activités économiques du Québec, qui ne peuvent pas mettre leur talent, leur génie, leur instruction - qui a

coûté cher à la population du Québec - qui ne peuvent mettre tous ces talents dans la création d'une richesse qu'on pourrait par la suite redistribuer. (21 h 30)

Avec le PQ, ce n'est pas compliqué, tout le monde égal, tout le monde pauvre; on redistribue la pauvreté. C'est sa philosophie socio-économique. M. le Président, nous n'en sommes pas, nous du Parti libéral, de cette philosophie socio-économique.

Le mémoire soumis par la Conférence des arbitres du Québec mérite, à cause de sa qualité intrinsèque... Je comprends qu'il y a peut-être des arbitres qui, à la dernière minute, ont craint de contester ouvertement le gouvernement parce que le gouvernement a un mot à dire dans la nomination des arbitres et qu'ils ont préféré, après avoir rédigé un document de qualité, un document d'idéologie, un document qui aurait pu faire avancer le débat, le porter à la connaissance des parlementaires et ne pas contester ouvertement et publiquement le projet de loi 17 dans cette enceinte de l'Assemblée nationale, dans cette commission parlementaire.

Pour leur rendre la tâche plus facile, ces gens, s'ils étaient invités unanimement par les membres de cette commission, n'auraient pas de représailles à craindre. C'est avec empressement, j'en suis convaincu, que ces gens viendraient à Québec demain matin et qu'ils répondraient aux questions que soulève un mémoire fouillé, réfléchi, basé sur de l'expertise. C'est peut-être cela qui effraie les gens d'en face, c'est peut-être cela qui fera que le ministre se prononcera contre et que la flopée d'en arrière fera écho à son vote. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Brome-Missisquoi. M. le député de Viau, vous avez la parole.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Je dois répéter que les gestes que l'autre côté... Je ne vous visais pas, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): De la violence. Vous avez des propos fracassants.

M. Cusano: Fracassants, oui, M. le ministre. Je ne comprends pas pourquoi on n'accepterait pas la motion de mon collègue. Moi, en tout cas, je ne comprends pas. Du côté ministériel vous êtes habitués à convoquer les gens que vous voulez et à ne pas convoquer ceux qui devraient l'être. Nous avons vécu l'expérience en ce qui regarde les personnes qui désiraient témoigner à la commission parlementaire qui était censée faire toute la lumière sur l'implication du bureau du premier ministre dans le règlement hors cour...

M. Johnson (Anjou): M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Question de règlement. Je pense que notre collègue de

Viau est dans la mauvaise commission lui aussi.

M. Cusano: Non, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): Je ne sais pas ce que ces gens ont bu ce soir ou mangé, mais...

M. Cusano: Non, M. le Président. On parle de la motion de mon collègue, le député de Brome-Missisquoi. C'est d'inviter quelqu'un à venir ici. Je ne suis pas dans la mauvaise commission parlementaire et, en ce qui nous concerne, c'est très pertinent parce qu'on veut ici, du côté du ministre, empêcher quelqu'un, un groupe d'individus qui connaissent très bien les problèmes dans le domaine du travail, de venir nous donner des explications. Ceci joint le même problème qui a été vécu en commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James. M. Pouliot y était directement impliqué, il a été un des signataires du règlement hors cour comme les arbitres signent les documents lorsqu'il s'agit de convention collective ou de tout autre document. Pour moi, M. le Président, c'est parce qu'on n'est vraiment pas intéressé de l'autre côté à faire toute la lumière.

Vous savez, ce ne sont pas seulement les ministériels qui ont la vérité sur tout. Ils ne l'ont pas, la vérité, sur tout.

Une voix: En veilleuse.

M. Cusano: Oui, on parle de la fameuse veilleuse de 1981, de mettre cette option en veilleuse. C'est camoufler un peu les choses. Cela va bien. C'est bien dans l'esprit du député de Prévost, adjoint parlementaire, lorsqu'il faisait allusion à une république de bananes.

Pourquoi s'entête-t-on - et j'emploie le mot "entêtement" - de l'autre côté à ne pas vouloir convoquer ces gens qui sont directement impliqués, qui ont une expérience entre eux? Je veux bien croire que le ministre du Travail par intérim -parce qu'il est au travail présentement, cette clarification est nécessaire - en tant qu'ancien ministre du Travail connaît les problèmes, mais les connaît-il aussi bien que les arbitres qui sont impliqués au jour le jour dans les problèmes de relations du travail?

Pourquoi ne veut-il pas les entendre? Pourquoi ne veut-il pas nous permettre de leur poser des questions? Il me semble que, de la même façon que vous l'avez fait à la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James, vous empêchez les membres de cette commission de prendre des décisions bien fondées.

De plus, M. le Président, je dois vous dire qu'il n'y a pas très longtemps ici au Québec, il y a eu un congrès des arbitres d'Amérique du Nord. Lorsqu'on parle de l'ouverture, lorsqu'on parle du contexte nord-américain, de l'économie nord-américaine, des relations de travail nord-américaines, je suis sûr, je suis convaincu que ces arbitres pourraient nous éclairer beaucoup plus que mes collègues de l'autre côté de cette table.

C'est sûr qu'on pourrait me donner le nombre d'heures pendant lesquelles ces arbitres ont travaillé. Ils sont même déçus lorsqu'ils disent dans leur mémoire: L'expérience passée nous a révélé qu'on avait prêté une oreille très attentive à nos remarques. Est-ce que c'est dans le passé? Ils ont certainement dialogué avec le ministre du Travail, qui est en congé de maladie. On n'a pas le ministre du Travail pour nous dire quel a été ce dialogue et on ne veut pas permettre à ces arbitres de venir ici pour expliquer, en termes très concrets et très précis, quels sont les problèmes dans ce domaine.

Les arbitres ont un rôle très important à jouer, parce que, par ce projet de loi on est en train de changer un processus et, eux, comme ils le disent dans leur mémoire, représentent une réalité, la réalité de ce qui se passe au jour le jour lorsqu'ils sont au travail. Je me demande quelle a été la dernière fois que des ministériels ici présents ont participé activement à un travail d'arbitres. On parle de faire toute la lumière, mais on ne veut pas la faire. Pourquoi? Est-ce pour montrer que les ministériels sont supérieurs intellectuellement? Ah non! On sait qu'il y en a qui ne sont pas supérieurs intellectuellement et qu'il y aurait des arbitres qui pourraient nous dire très carrément les problèmes qu'ils envisagent. Si je veux acheter une automobile usagée, je ne vais pas voir un ministre.

Une voix: S'il en a une!

M. Cusano: Eh bien, je ne l'achèterais pas dans ce cas-là. Mais si on veut acheter une voiture usagée et qu'on veut avoir une expertise, on va consulter un mécanicien. Ici, avec un projet de loi, on ne veut pas consulter les personnes qui vivent au jour le jour le problème.

Une voix: C'est une très bonne comparaison.

M. Cusano: Oui, vous voyez que c'est une très bonne comparaison, M. le Président.

Je voudrais vous rappeler, M. le Président, que le rôle des arbitres est très important. J'aimerais souligner ce qu'on nous dit, parce qu'on aimerait avoir des explications encore plus concrètes, à la page 6. Permettez-moi de vous lire le paragraphe tel quel: "Un arbitre unique appelé à façonner et rédiger une première convention collective devant régir toutes les règles et les conditions - c'est toute une tâche - entre les parties qui n'ont pu s'entendre aurait, à notre sens, une très lourde responsabilité à accomplir ses fonctions. De plus, il serait démuni de plusieurs moyens auxquels il peut faire appel pour remplir cette tâche."

Ce paragraphe dit beaucoup de choses. Il nous dit la lourdeur de la responsabilité. Que veut dire la lourdeur de la responsabilité? Est-ce que cela veut dire que ces gens ne veulent pas de cette responsabilité, ou sont-ils préoccupés de rendre de bonnes décisions? On aimerait le savoir. Et: "...il serait démuni de plusieurs moyens auxquels il peut faire appel...". Alors, lorsqu'on trouve dans un mémoire de telles phrases, de tels paragraphes, je pense qu'il est légitime qu'on les invite ici pour qu'ils nous fournissent, comme tous les autres qui ont eu la possibilité de le faire, des explications. Je sais que, pour les ministériels, lorsqu'on a entendu des gens de la CEQ, de la CSN, de la FTQ, il n'y avait pas beaucoup de questions. C'est leur privilège. Je ne veux imposer personne. Le projet de loi était très clair. C'était très clair qu'on nous avait promis un consensus, une consultation et le seul consensus qui s'est développé dans tous les mémoires, c'est que personne n'est d'accord avec le projet de loi. On n'est pas satisfait du projet de loi. Il y en a qui sont satisfaits de quelques articles et une grande majorité trouve que ce projet de loi ne ferait que retarder les changements majeurs au Code du travail. Cela fait combien de temps qu'on nous a promis des changements majeurs au Code du travail?

On voudrait que ces gens-là viennent ici parce qu'on ne veut pas que l'ex-ministre du Travail, qui est en congé de maladie, ait induit la Chambre en erreur. On ne voudrait pas qu'il tombe dans ce piège-là. Alors, les arbitres, eux, disent à la première page qu'ils ont eu des dialogues avec le ministre -vous me permettrez que je l'appelle le ministre Fréchette pour faire la distinction -mais le ministre Fréchette n'est pas ici. Les arbitres ne seront pas ici. (21 h 45)

Peut-être que le ministre a écouté toutes les discussions, mais nous voudrions bien, si le ministre du Travail, M. Fréchette, revenait de son congé de maladie, savoir exactement quelles ont été ces discussions qu'ils ont eues. Est-ce qu'ils ont proposé des

solutions différentes de celles qui sont incluses dans le projet de loi? Ils ont certainement dû le faire, leur expérience est énorme. Ils sont directement impliqués. Ils l'ont vécu certainement plus que moi, M. le Président, car je n'ai jamais fait d'arbitrage tel quel. Le ministre n'en a pas fait beaucoup non plus, il en a fait peut-être un peu.

Je verrais mal, M. le Président, qu'on essaie de camoufler encore une fois... On fait de beaux discours ici en Chambre, mais, lorsque je regarde le projet de loi, ça me fait rire un peu. Les notes explicatives sont presque aussi longues que le projet de loi lui-même. Les arbitres pourraient certainement nous dire s'il devrait y avoir des changements autres que ceux qui sont proposés afin que ça fonctionne mieux, M. le Président... Pardon? Vous voulez corriger mon français? Je m'en excuse, M. le Président. Je n'ai pas eu la chance que vous avez eue.

M. Johnson (Anjou): Non, c'est pour collaborer, c'est tout. Il ne faut pas prendre ça personnellement.

Une voix: II ne faut pas s'alarmer...

M. Cusano: Non, on ne s'alarmera pas avec ça, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau, vous avez la parole.

M. Cusano: Merci. Il pourra toujours m'envoyer une petite note chaque fois que je ferai une erreur. Cela me fera bien plaisir, M. le Président. C'est ce qu'on appelle de la tolérance. La tolérance, c'est d'accepter les gens pour ce qu'ils sont et non pour ce qu'on voudrait qu'ils soient. Je peux vous dire, M. le Président, que je suis satisfait d'avoir fait ce que j'ai fait. J'ai peut-être fait plus que ce que vous avez fait, M. le ministre.

M. Bordeleau: Là, vous présumez.

M. Cusano: Je présume. M. le Président...

M. Johnson (Anjou): II faudrait être tolérant.

M. Cusano: Je ne voudrais pas faire choquer le ministre, mais je ne vois pas pourquoi, lui qui n'était pas présent lors des discussions ou des recommandations qui ont été faites par les arbitres... On dit ici très clairement qu'il y a eu des dialogues avec le ministre Fréchette, qu'il y a aussi eu des recommandations. Est-ce que vous connaissez ces recommandations-là? Moi, je ne les connais pas et j'aimerais bien que ces gens puissent venir ici nous dire clairement ce qui s'est passé parce que là - pour employer une expression entendue à la commission parlementaire sur LG 2 - on ne veut pas se retrouver dans la situation où on parle à la personne qui a vu l'ours qui a vu l'ours. On veut s'adresser aux personnes qui sont directement impliquées.

Je vois mal, M. le Président, pourquoi l'on n'accepterait pas cette motion du député de Brome-Missisquoi. Si c'est notre objectif ici en commission parlementaire de légiférer en toute connaissance de cause, M. le Président... En parlant de connaissance de cause, cela me rappelle le vote sur la loi 110, où tous les ministériels ont voté en connaissance de cause.

Puisque je suis membre... Oui, oui, le salaire des députés, vous vous souvenez de cela, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): Le gel.

M. Cusano: Oui, le gel des salaires, l'augmentation, tous les adjoints parlementaires qui ont été nommés par cette loi...

M. Johnson (Anjou): La réduction des pensions.

M. Cusano: Oui, la réduction des pensions, je vous en parlerai. Je vous parlerai aussi du fonds... du bien-être social pour les députés qui seront défaits à la prochaine élection, qui recevront...

M. Johnson (Anjou): Vous allez en avoir besoin.

M. Cusano: Non, je ne suis pas inquiet, M. le Président, j'ai une majorité plus forte que la vôtre dans le comté et je serais même prêt à aller dans Anjou à n'importe quel moment.

M. Johnson (Anjou): Oui, ça, j'aimerais cela par exemple. On gagnerait Viau et puis on gagnerait Anjou.

M. Cusano: Oui, on ferait certainement une belle joute.

En toute connaissance de cause, M. le Président, les ministériels se sont levés, ils ont prononcé de beaux discours et, au moment du vote, les machines à voter se sont toutes levées. Elles étaient toutes en faveur de ça, M. le Président. Comme je le disais, en tant que membre du Bureau de l'Assemblée nationale, je m'aperçois présentement qu'il y a beaucoup de ministériels qui se posent des questions. Il y en a même qui ont dit: C'est cela qu'on a voté? En toute connaissance de cause, est-ce que c'est cela qu'on a voté? On a entendu des discours en Chambre. On va procéder à l'étude article par article de ce projet de loi

et les gens, de l'autre côté, vont nous dire qu'en toute connaissance de cause, c'est ce qu'il y a de mieux pour améliorer les relations du travail et pourtant...

Le Président (M. Blouin): Si vous voulez conclure, M. le député de Viau, s'il vous plaît:

M. Cusano: Je vais conclure, M. le Président. Et pourtant, on refuse de nous éclairer. On ne demande pas à M. X, du comté de Viau, de venir ici. On ne demande pas à M. Untel, du comté d'Anjou, de venir ici. On le demande aux gens qui sont directement impliqués dans ce projet de loi, qui vont être là, qui vont vivre les problèmes au jour le jour. Pourquoi? Est-ce que c'est encore un autre camouflage? On l'a vécu en commission parlementaire sur le saccage à LG 2. Je trouve que mes collègues ont fait un excellent travail - je ne faisais pas partie de cette commission -et j'aimerais avoir l'occasion de pouvoir étudier ce projet de loi article par article en toute connaissance de cause. J'aimerais que ces gens-là... D'abord, je vais être obligé de contacter les arbitres...

Le Président (M. Blouin): Pour le moment, M. le député de Viau, vous êtes obligé de conclure dans les secondes qui suivent.

M. Cusano: Oui, je conclus, M. le Président. Je vais être obligé de contacter ces gens-là pour leur demander si ce qu'ils ont présenté au ministre du Travail, le ministre Fréchette, c'est vraiment ce qui est reflété dans ce projet de loi.

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Cusano: Et je crois que vous allez me mettre dans l'obligation... Si je suis obligé d'être au téléphone, je ne peux pas être ici, M. le Président. Ce serait plus facile - je sais que cela contenterait les gens de l'autre côté - mais...

Le Président CM. Blouin): Je m'excuse, M. le député de Viau. Votre temps de parole est complété.

M. Cusano: Alors, je termine, M. le Président, en disant tout simplement que je ne vois pas pourquoi il y a un tel entêtement de la part du ministre. Je sais qu'il a apporté des amendements. Une fois qu'on aura été...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau, je vais maintenant devoir donner la parole à un autre député. M. le député de Beauce-Sud, vous avez la parole.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Concernant la motion de mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, qui demande que cette commission puisse entendre la Conférence des arbitres du Québec, je trouve que c'est une demande fort légitime. Je voudrais féliciter mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, d'avoir eu la clairvoyance de présenter cette motion. Nous savons que la Conférence des arbitres du Québec est un organisme important, un organisme expérimenté. Tout à l'heure, l'on a dit, de l'autre côté, qu'il n'était pas nécessaire de convoquer la Conférence des arbitres du Québec, parce que cette dernière aurait mentionné qu'elle ne désirait pas être entendue. Or, même si la Conférence des arbitres du Québec ne désire pas s'imposer -je la comprends - je crois que nous aurions avantage à recevoir ces gens, à les inviter, à les entendre, à dialoguer avec eux, afin de pouvoir nous faire une idée.

Étant conscient de la somme d'expérience qu'elle a accumulée depuis sa constitution, la Conférence des arbitres du Québec a présenté un mémoire daté du 3 juin 1983, un mémoire bien préparé, mais qui laisse place à certaines questions après la lecture de ce mémoire. La conférence nous dit dans son mémoire, à la page 2: "Le projet de loi, ainsi qu'il apparaît dans les notes explicatives, vise à accélérer l'arbitrage des différends en remplaçant le conseil ou le tribunal d'arbitrage par un arbitre unique. Il est prévu que l'arbitre pourra, à la discrétion des parties, être assisté d'assesseurs syndical et patronal." Elle désire adresser des remarques sur ces deux thèmes qui sont importants, à son point de vue, à savoir, en premier lieu, l'opportunité qu'un différend soit dévolu à un arbitre unique et en deuxième lieu qu'il soit assisté d'assesseurs syndical et patronal.

À la lecture des notes explicatives du projet de loi 17, nous voyons très bien que ce projet vise à accélérer l'arbitrage de différends et de griefs en remplaçant le conseil ou le tribunal d'arbitrage, lesquels peuvent être tripartites, par un arbitre unique. Cet arbitre pourra, si les parties le désirent, être assisté d'assesseurs syndical et patronal. Ce projet de loi précise aussi les pouvoirs de cet arbitre et les règles relatives aux griefs et au déroulement de l'arbitrage. Je continue les notes explicatives: II prévoit - c'est-à-dire le projet de loi - qu'il pourra y avoir arbitrage d'une première convention collective dès que, selon l'arbitre, il apparaîtra improbable que les parties pourront en venir à la conclusion d'une convention dans un délai raisonnable.

Ce qui étonne et ce qui inquiète dans ce projet de loi, c'est qu'il introduit du droit nouveau dans le domaine de»; relations du

travail et nous savons que, lorsqu'il y a droit nouveau, il arrive que chaque mot et même la ponctuation peuvent être testés devant les tribunaux. Si on veut que le test soit complet, il faut épuiser toute la gamme des recours prévus dans les instances de notre droit ici au Canada, c'est-à-dire la Cour supérieure; si une des parties n'est pas satisfaite, la Cour d'appel, et, si une des parties n'est pas encore satisfaite ou les deux parties, la Cour suprême du Canada. Une fois que le grief a été entendu par la Cour suprême du Canada, cette dernière institution rend jugement en dernière instance et nous savons l'interprétation exacte qu'il faut donner à chacun des termes. Nous voyons qu'il y aura certainement des délais considérables parce que dans une cause, avant que le jugement soit rendu par la Cour suprême, si on doit passer par toutes les étapes prévues, on peut bien compter trois ans, et même plus, quatre, cinq ou six ans. Que se passe-t-il dans l'intervalle?

Si le projet de loi apportait une réforme globale au Code du travail, aux relations du travail que nous connaissons, cela serait plus compréhensible. Cela vaudrait la peine de faire les tests devant les tribunaux, mais ce n'est qu'une réformette en réalité qui apportera certainement des inconvénients, qui causera sûrement des préjudices. On sait qu'un salarié pourra avoir une bonne cause mais ne se rendra pas nécessairement en Cour suprême pour faire valoir ses droits. Même s'il se rend en Cour suprême avec tous les délais que cela peut requérir, dans sept, huit, neuf ou dix ans, les préjudices seront irréparables dans bien des cas. Il arrive que la personne puisse être décédée dans l'intervalle, puisse avoir pris sa retraite. Quand on est mort, on a beau avoir les meilleurs droits, dans bien des cas, cela ne donne pas grand-chose. (22 heures)

C'est très dangereux de modifier les lois et surtout de le faire avec une certaine improvisation comme on le fait présentement dans les derniers jours d'une session, un peu sous la pression que nous vivons.

Je reprends le mémoire des arbitres, M. le Président. Ils nous disent, à la page 2: "Nous vous soumettons qu'une convention collective réglemente en très grande partie les relations entre deux parties et ce, pour une durée d'au moins un an et jusqu'à deux ans. On peut dire que la convention collective constitue la loi des parties. Quoique normalement, un différend existe dans des secteurs, bien particularisés, il n'en demeure pas moins que des clauses très importantes d'une convention soient alors décidées par un conseil ou un tribunal d'arbitrage. D'ailleurs, les clauses salariales constituent une préoccupation importante d'un tribunal d'arbitrage"

La conférence des artibres en parle certainement en connaissance de cause, elle, dont c'est le boulot quotidien de régler ce genre de différend.

Les arbitres nous disent: "Surtout, il faut insister sur le fait qu'une décision à laquelle les parties ont collaboré de très près - et ceci est important - a beaucoup plus de chance de représenter la réalité vécue dans une entreprise quelconque. Aussi, il en ressort normalement une bien plus grande facilité d'application que si, au contraire, elle est revêtue d'un caractère juridique. En effet, un conseil ou tribunal d'arbitrage comprend certes un président, mais aussi deux arbitres que chacune des parties a désignés. Ces arbitres désignés par les parties jouent un rôle important dans le façonnement et l'élaboration d'une décision qui tiendra lieu d'une convention collective." Les arbitres nous disent également: "Nous devons souligner que nous croyons qu'une convention collective imposée par un arbitre unique aura un caractère beaucoup plus judiciaire que si celle-ci est le fruit d'une démarche tripartite."

M. le Président, nous avons un exemple très éloquent de la véracité de cet énoncé. Pensons, par exemple, à la convention imposée par la loi 105 aux secteurs public et parapublic. Si l'État a cru, en imposant cette convention collective, éviter le système judiciaire, nous voyons qu'il y a déjà des jugements rendus et qui se dirigent vers la Cour suprême, alléguant que cette loi 105 était anticonstitutionnelle. Je pense que nous aurions grand intérêt ou grand avantage à écouter les arbitres, à les inviter et à les interroger, compte tenu de l'expérience considérable qu'ils ont accumulée au cours des années. Le gouvernement, dans le règlement de ses griefs avec les employés des secteurs public et parapublic, avec la CEQ, dans l'imposition d'une convention collective, aurait certainement eu grand intérêt et grand avantage au nom, d'abord, des droits de ces personnes, au nom de la paix sociale, au nom de l'efficacité de l'administration publique, au nom de la dignité que l'on doit donner aux employés de l'Etat et à leur travail, à suivre le conseil de ces arbitres, puisqu'un arbitre unique ne sera certainement pas quelque chose de souhaitable. Ce n'est pas quelque chose de souhaité non plus par la majorité des employés et même par la partie patronale.

La conférence des arbitres nous dit également: "Avant de terminer nos propos quant à ce premier aspect de l'arbitrage de différends, nous osons soulever des doutes que l'utilisation du procédé d'un arbitre unique puisse réellement accélérer l'arbitrage des différends." On vous le dit ici, à vous qui désirez faciliter l'arbitrage, qui désirez amenuiser les délais. Je pense que vous

faites fausse route quand on reprend la déclaration de la conférence des arbitres. Ceux-ci nous disent encore: "De plus, nous nous permettons de soulever que, même s'il y avait un certain gain à procéder ainsi, il ne faut pas mettre de côté l'objet principal d'une convention collective qui est de régir et d'assurer les conditions de travail qui s'appliquent réellement à un ensemble de personnes qui correspondent à la réalité d'un établissement ou d'une entreprise."

Ce n'est pas tout, M. le Président, de vouloir bâcler une convention collective en un temps record. C'est facile de bâcler les choses comme le gouvernement l'a fait, avec la loi 105, par des décrets. Ce serait facile pour un arbitre. Ce serait rapide et expéditif, bien sûr. Mais est-ce que cela serait souhaitable pour l'efficacité? Est-ce que cela serait souhaitable pour le respect des personnes? "À ce sujet - nous disent les arbitres - nous nous permettons de croire que le conseil ou le tribunal d'arbitrage peut remplir beaucoup plus adéquatement cette tâche que l'arbitre unique."

C'est facile à comprendre, M. le Président, parce que si un différend est réglé par l'entremise d'un tribunal d'arbitrage, il n'est pas décrété par l'autorité d'une seule personne. La partie syndicale nomme un arbitre, la partie patronale nomme un arbitre et les deux arbitres nomment un troisième arbitre. Donc, la partie patronale comme la partie syndicale ont la certitude, la garantie que le travail sera fait d'une manière complète, impartiale, consciencieuse.

Même si l'on nous dit que le système d'arbitre unique sera plus rapide, s'il y a accumulation par la suite, lors de l'application de la convention, de griefs, si la partie syndicale ne se sent pas à l'aise, n'accepte pas dans les faits, n'accepte pas dans son coeur cette convention collective, cette décision imposée par un seul arbitre, elle n'aura certainement pas l'impression que l'arbitre a travaillé en sa faveur et a compris ses revendications. C'est pourquoi c'est très important non seulement pour la rapidité... Le facteur rapidité, c'est-à-dire bâcler une convention collective dans des délais très rapides, ne m'impressionne pas au premier abord, M. le Président. Ce qui m'impressionne, c'est d'une convention collective qui a été acceptée par les parties ou négociée par les arbitres selon le processus du conseil d'arbitrage, de manière que les deux parties, syndicale et patronale, aient la certitude que leurs revendications ont été entendues, que l'on a réellement mesuré les avantages et les inconvénients.

Je trouve déplorable que l'on rejette du revers de la main des conseils qui sont aussi sages et aussi empreints d'expérience. C'est pourquoi nous aurions beaucoup de questions à poser aux représentants de la conférence des arbitres. J'ose espérer - je ne crois pas être présomptueux - que tous les membres de cette honorable commission voteront pour la motion de mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, M. le Président.

La Conférence des arbitres du Québec nous dit également des choses importantes en matière d'arbitrage de première convention collective. Elle nous dit: "Les remarques que nous avons faites précédemment s'appliquent, selon nous, encore avec plus d'acquité lors de l'arbitrage d'une première convention collective. Comme nous soulevons qu'il est très important d'avoir recours à un conseil d'arbitrage lors de l'arbitrage de différends, cette remarque vaut encore plus dans le cas d'une première convention collective. "Il y a plusieurs motifs - nous disent-ils - que nous pouvons invoquer au soutien de cette allégation. Tout d'abord, les parties n'ont jamais établi de règles fixes entre elles et, nécessairement, elles n'ont jamais convenu entre elles d'une convention collective qui contient l'ensemble des dispositions devant les régir." C'est facile à comprendre, c'est le cas d'une première convention; alors, la partie syndicale, dans ce cas, n'a pas d'expérience et la partie patronale non plus. Et elle continue: 'il est donc plus difficile de faire adopter par les parties tout cet ensemble de dispositions. Aussi, il est à noter que, dans de très nombreux cas, lors d'un différend, nous assistons à des cas où le tribunal n'a à décider que d'amendements quant à certaines dispositions déjà existantes ainsi qu'à déterminer les clauses salariales."

Le Président (M. Blouin): Veuillez conclure, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Je conclus, M. le Président, en vous disant que le différend n'intéresse en grande partie que certains secteurs de la vie économique. Une première convention collective s'adresse à des industries tout à fait disparates et diverses.

Or, en concluant, M. le Président, je sollicite l'accord de tous les collègues de cette commission pour appuyer cette motion du député de Brome-Missisquoi qui me semble très importante, c'est-à-dire de recevoir devant cette commission la Conférence des arbitres du Québec, afin que nous puissions nous faire éclairer comme il se doit par son expérience. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le député de Beauce-Sud. M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Il est vrai que nous sommes obligés de multiplier les efforts entre l'Assemblée

nationale où on discute actuellement du projet de loi 19 et la commission parlementaire où on étudie le projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives.

M. le Président, la motion qu'a proposée le député de Brome-Missisquoi est très appropriée, surtout dans le contexte dans lequel nous examinons ce projet de loi. Ce que je trouve très surprenant, c'est que, du même coup, et sans expliciter le fond, nous rencontrions cet après-midi le président de l'Assemblée nationale qui traite actuellement d'une réforme parlementaire en profondeur et qui, à toutes fins utiles, constate que l'Assemblée nationale, le Parlement, les parlementaires, tant du côté ministériel que du côté de l'Opposition, n'ont pas suffisamment de temps pour faire l'examen approfondi de chacune des lois qui sont déposées à cette Assemblée nationale... Encore moins quand on nous dépose un projet de loi à la fin du mois de mai et qu'on nous donne à peine quelques semaines pour, d'une part, entendre les intervenants et, d'autre part, commencer la deuxième lecture suivie de la commission parlementaire. Si le ministre responsable du Travail par intérim ne comprend pas les besoins...

Des voix: Au Travail.

M. Rocheleau: Au Travail, si vous voulez. Je m'excuse. Alors, si on a répété la même erreur, on s'excuse, pour autant que vous ayez compris, M. le député.

M. le Président, nous avions demandé dans une motion qui a précédé de permettre d'entendre tous les parlementaires du côté ministériel et de l'Opposition; on a refusé. (22 h 15)

Maintenant, on demande d'entendre la conférence des arbitres. La commission parlementaire a reçu un mémoire qui traitait de points très pertinents par rapport au projet de loi que nous étudions. Je suis surpris que le gouvernement - et plus particulièrement le ministre - n'ait pas accédé à cette demande, n'ait pas accepté de permettre à la conférence des arbitres de venir faire entendre des points qui touchent de très près à son domaine. C'est elle, en somme, qui est sur le terrain. C'est elle qui a vécu les problèmes à l'intérieur des conflits de travail qui ont perturbé le Québec au cours des dernières années. C'est elle qui est en mesure de nous renseigner sur les points les plus importants. À moins que le ministre considère la demande de l'Opposition, et plus particulièrement cette motion présentée par le député de Brome-Missisquoi et qui a été reprise par le député de Beauce-Sud et le député de Viau, nous insistons pour que ces gens soient entendus.

Je ne voudrais pas mêler le sport aux relations du travail, mais j'ai l'impression que les relations du travail sont beaucoup plus importantes que le sport. Pourtant, M. le Président, dans le sport, on retrouve trois arbitres. Au hockey, il y a les arbitres de lignes et l'arbitre principal. C'est la même chose au baseball. C'est la même chose au football. On retrouve justement des arbitres. Ces arbitres peuvent se consulter et arriver à des éléments plus importants, à une décision plus rationnelle, plus éclairée tenant compte de tous les aspects.

Dans le contexte actuel, justement, la conférence des arbitres soulève ces points qui sont très importants pour améliorer, M. le Président, les relations du travail au Québec. Vous savez combien les relations du travail ont été perturbées par un climat qui s'est détérioré au cours des dernières années et qui, de fait, a tenu à l'écart la possibilité de voir des investisseurs venir profiter d'un ensemble d'avantages que le Québec pouvait offrir. On est à l'écoute actuellement. On suit le débat et on se pose de sérieuses questions. J'oserais tout simplement souhaiter, M. le Président, que le gouvernement, dans un projet de loi aussi important, tienne au moins compte des principaux intervenants.

Avant le souper, on a discuté des nombreux mémoires qui ont été entendus à cette commission de la part de tous les intervenants, de la part du patronat, de la part de la CSN, de la CSD, de la Chambre de commerce et d'autres qui sont, à toutes fins utiles, contre ce projet de loi pour toutes sortes de raisons valables, toutes sortes de raisons qui nous ont permis de constater que le dépôt à la hâte de ce projet de loi, une refonte déguisée, une refonte pour apaiser certains éléments du monde du travail, ce n'est absolument pas ce que cela prend.

D'autre part, tel que mon collègue de Brome-Missisquoi l'a souhaité, entendre les arbitres ou la conférence des arbitres, ne venez pas dire, M. le Président, que cela ne pourrait pas éclairer davantage cette commission parlementaire, à moins que le ministre responsable, qui remplace le ministre du Travail, M. Fréchette, qui a pris un congé de maladie... On peut réellement commencer à comprendre la raison qui a motivé son collègue à prendre ce congé de maladie. On lui souhaite un prompt rétablissement et on l'invite à revenir le plus rapidement possible, M. le Président, à sa responsabilité, celle du travail.

J'ose souhaiter que, dans sa hâte, le ministre responsable, sachant qu'il a aussi une responsabilité importante au niveau des affaires sociales - ne vise pas uniquement, M. le Président, à se débarrasser le plus rapidement possible de ce projet de loi en le votant à la sauvette et en évitant des intervenants aussi importants que la Conférence des arbitres du Québec. Je pense

que, de toute façon, une fois que le projet de loi 17 sera adopté, les arbitres auront un rôle très important à jouer et continueront à le jouer. Ce rôle est très important, parce que ce sont eux qui, à toutes fins utiles, ont la décision finale. Quand on parle d'arbitrage, on tient compte du fait qu'on devrait éliminer le droit de grève dans certains secteurs, dans le secteur des hôpitaux, des foyers d'hébergement et d'autres secteurs qui pertubent considérablement non seulement les relations du travail mais aussi les citoyens qui bénéficient de certains services. Ces gens-là - cette Conférence des arbitres du Québec - ont tous les éléments en main, car ils ont vécu sur le terrain. Je suis bien convaincu que le ministre des Affaires sociales, qui prend la relève pour son collègue, n'est pas sur le terrain, qu'il ne comprend pas la portée du problème, qu'il ne comprend pas non plus ou qu'il ne veut pas comprendre, en n'acceptant pas que la Conférence des arbitres du Québec fasse entendre certains points de vue.

Cela est absolument aberrant. C'est sérieux, M. le Président, le fait que le ministre soit borné au point de dire: J'ai tant de temps pour faire adopter mon projet de loi, il faut qu'il soit adopté de toute façon. Parlez ou ne parlez pas, écoutez-nous ou ne nous écoutez pas, il va arriver à un moment donné. J'espère qu'on n'ira pas jusqu'à bâillonner l'Opposition qui tente de faire un travail sérieux. Si on doit prendre quelques minutes, quelques heures, pour permettre une certaine réflexion du côté ministériel pour comprendre et accepter le fait - on l'a dit à plusieurs reprises - que ce gouvernement était complètement déconnecté de la réalité, je pense que vous avez encore cette occasion, qu'on vous fasse des recommandations. Parce que cela vient de l'Opposition, ce n'est pas acceptable. Je suis bien prêt à ce qu'on ne le dise à personne, que cette suggestion, que cette recommandation provient du député de Brome-Missisquoi. À ce moment-là, si ce n'est pas nous qui l'avons faite et si c'est le ministre responsable qui l'a trouvée, on ne le dira pas. On ne le dira pas aux journaux et on demandera que cela soit fait complètement à l'écart, mais qu'on tente au moins de faire l'impossible pour apporter les correctifs nécessaires.

Je reviens à un élément important. Les ministériels ont été consultés par le président de l'Assemblée nationale sur la réforme parlementaire. Les ministres ont sûrement dû être consultés, parce que la réforme parlementaire prendra probablement en considération l'ensemble des parlementaires. Certains se posent des questions sur ce qu'ils font à l'Assemblée nationale. Cela nous permettra peut-être de jouer un rôle plus important. Le président, qui est nouvellement élu dans sa fonction, vient de comprendre que cela n'avait absolument pas de sens de se faire brusquer, de hâter les choses, de nous passer des projets de loi à la sauvette et d'arriver encore avec des erreurs de fond qui vont continuer à perturber le climat des relations du travail. J'essaie de comprendre la raison pour laquelle on a empêché tous les parlementaires, tous les députés de cette Assemblée nationale, de venir se faire entendre. La décision a été prise. On arrive avec la Conférence des arbitres du Québec et on se dit qu'on a au moins un point important. Ce sont ces gens qui auront toute la responsabilité de l'odieux de ce gouvernement qui a imposé à l'intérieur du projet de loi 17 une réforme chambranlante, un peu, sur le côté, sur le cant. Ce sont eux qui auront à imposer cela et on ne veut même pas les entendre. Je me pose de sérieuses questions, à savoir si on devient un régime presque totalitaire où seulement le gouvernement, où seulement certains de ses ministres ont la science infuse, ont la vérité absolue et que tout ce qu'on écrit dans un projet de loi, indépendamment des erreurs qu'on peut y faire, indépendamment des coquilles qu'on peut y retrouver, c'est bon, qu'il ne faut absolument pas y toucher. M. le Président, j'écoutais très attentivement ce matin le président de l'Assemblée nationale qui est venu rendre visite au caucus de l'Opposition officielle, je pense que, dans l'histoire c'est la première fois que le président de l'Assemblée nationale vient expliquer la réforme parlementaire au caucus, et je pense qu'il vient de rendre visite aussi au caucus du parti ministériel pour traiter de cette réforme. En même temps les ministres qui se sont impliqués dans cette réforme parlementaire nous bousculent, ils tentent de hâter... Je ne sais pas si on peut aller aussi loin que de dire qu'on va passer tous les projets de loi à la sauvette, qu'on va bousculer tout le monde et, après cela, qu'on va se conformer à une réforme parlementaire qui va permettre une revalorisation du rôle du député, qui va permettre d'avoir des commissions, des sous-commissions et qui va permettre à chacun de nous de jouer réellement le rôle pour lequel il a été élu, c'est-à-dire défendre les intérêts et les libertés de ses concitoyens.

J'ose croire, M. le Président, que, dans cette réforme parlementaire on n'aura plus à voir cette majorité servile à la merci du gouvernement, à la merci de certains de ses ministres. J'ai même pu constater avant le souper que le ministre des Affaires sociales et responsable par intérim du dossier du travail avait sommé ses collègues du parti ministériel de ne plus intervenir. C'est le ministre qui a décidé qu'il était le seul à intervenir, s'il y avait des points litigieux ou des répliques sérieuses à faire aux propos tenus par l'Opposition.

M. le Président, c'est absolument impossible. J'espère que la transcription des galées va être gardée confidentielle pour les prochaines heures pour permettre au ministre de pouvoir reconsidérer... Est-ce que c'est possible ou est-ce qu'on s'engage dans une commission parlementaire qui va étudier très prochainement le projet de loi article par article? Est-ce que cela veut dire qu'il y a un blocage systématique de la part du ministre et qu'il y n'y a absolument personne dans cette province qui va pouvoir faire comprendre au ministre qu'il commet une erreur? Tout le monde le lui a dit. Que ce soit l'Opposition, c'est compréhensible, cela pourrait paraître un peu partisan. Mais que ses propres employés qui voudraient être entendus, qui ont soumis un mémoire...

M. Johnson (Anjou): Ce ne sont pas des employés.

M. Rocheleau: Les employés de l'État, qui sont mandatés par l'État pour arbitrer... Bien oui, vos arbitres! On vous permet de rêver un peu. Mais il n'en demeure pas moins que tous ces éléments devraient sensibiliser le ministre, surtout qu'il est ministre des Affaires sociales. C'est important, cela. Bien oui, il est au Travail par intérim, parce que ce projet de loi a rendu malade le ministre actuel. Il l'a rendu malade, il est parti pour permettre à quelqu'un d'autre d'aller au bâton. M. le Président, ce n'est absolument pas acceptable.

En terminant... Je ne sais pas si on peut continuer?

Le Président (M. Blouin): Je ne vous demande pas de conclure, je vous demande simplement d'être un peu délicat à l'égard du ministre du Travail.

M. Rocheleau: Je suis très délicat. Je suis très peiné, M. le Président, d'avoir appris il y a quelques jours que le ministre du Travail était malade. Je n'ai pas dit à quelle place il était malade, j'ai dit qu'il était malade. Il est bien évident que...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me permettez une question de règlement, vous allez peut-être m'aider en me disant quel article... Je veux bien qu'on agrémente les discours à l'occasion de quelque humour, mais pas de cynisme et du genre d'humour noir qui fait que je pense que le député de Hull a juste dépassé les bornes du respect à l'égard de son collègue. (22 h 30)

M. Rocheleau: M. le Président.

M. Paradis: Question de règlement, M. le Président. Il est interdit par notre règlement de prêter des intentions malicieuses à un député. C'est notre règlement qui l'interdit formellement.

M. Johnson (Anjou): ...concernant le saccage de la Baie-James.

M. Paradis Ah oui! Cela a été soulevé à plusieurs reprises lorsque les députés péquistes sont intervenus. M. le Président, les paroles du député de Hull, je les cite sans avoir les galées. Elles ont été les suivantes: "Je ne sais pas à quelle place il est malade". C'était à peu près cela. M. le Président, il y a une façon malicieuse de l'interpréter.

M. Johnson (Anjou): Venant du député de Hull, je pense qu'on le sait, M. le Président. Si vous voulez prendre cela sur ce ton-là.

M. Paradis: M. le Président, j'invoque le règlement. On n'a pas le droit de prêter de telles intentions au député de Hull. Je ne le sais pas, moi non plus. Je vais vous le dire sérieusement.

Une voix: Vous pourriez peut-être parler d'autre chose, à ce moment.

M. Paradis: J'ai offert, au nom de l'Opposition et de tous nos collègues, M. le Président - je tiens à le souligner - et à plusieurs reprises nos voeux de prompt rétablissement à notre collègue, M. Fréchette.

M. Johnson (Anjou): C'est grossier.

Le Président (M. Blouin): M. le député, M. le député...

M. Paradis Je pense que vous étiez en Chambre lorsque cela a été fait. De la part du ministre, c'est mesquin de prêter de telles intentions au député de Hull.

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'ilvous plaît; M. le député de Brome-Missisquoi, ces choses étant dites de part et d'autre, je crois qu'il serait convenable qu'on poursuive le débat sur la motion que vous avez présentée. M. le député de Hull.

M. Rocheleau: D'accord, M. le Président. Je dois quand même rappeler au ministre responsable du dossier que je n'ai pas été grossier, absolument pas. Au contraire, tout au long de ce débat qui a été amorcé cet après-midi, nous avons quand même tenu un langage assez sobre. Nous nous sommes permis de faire des constatations. Je peux comprendre que le ministre ne soit peut-être pas heureux de piloter ce dossier à la dernière minute. Je peux le comprendre.

II ne reste pas moins une chose, nos interventions ont été faites d'une façon très sérieuse. Les intervenants que nous avons invités sont sérieux, impliqués. Ils sont ceux qui auront à appliquer cette loi. Si on veut une amélioration du climat social dans les relations du travail au Québec, je pense qu'on doit se donner une loi qui va tenir compte de tous les éléments et du côté patronal et du côté syndical et faire en sorte que ces deux parties se rencontrent à une table pour négocier. S'il y a un bris de négociation, les arbitres devront trouver la solution.

M. le Président, si nous avions accepté, si le ministre avait accepté - je souhaite encore qu'il accepte - de permettre à la Conférence des arbitres du Québec de venir se faire entendre et d'expliquer chacun des points de son mémoire sur lesquels il semble y avoir un certain blocage, celle-ci en même temps, pourrait éclairer le ministre et celui-ci pourrait modifier son projet de loi pour tenir compte de tous ces éléments.

Là-dessus, je conclus en réitérant ma demande et, insistant, je dis au ministre que, si on veut adopter actuellement des lois, si on est bousculé dans le temps, ce n'est quand même pas la faute de l'Opposition. Ce n'est pas nous qui déposons à l'Assemblée nationale les projets de loi. On est ici depuis le mois de février. On a attendu uniquement à la fin de la période permissible, c'est-à-dire le 31 mai, pour déposer plusieurs projets de loi qui exigent d'être étudiés avec tout le sérieux possible afin de donner aux citoyens du Québec la meilleure réglementation possible.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Hull. M. le ministre.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): M. le Président, la motion est en ce sens de permettre à la Conférence des arbitres du Québec de venir témoigner devant cette commission. Je dirai trois choses: D'une part, elle a eu l'occasion de le faire; deuxièmement, la conférence, en plus de participer, d'être consultée assez régulièrement au CCTM a produit un mémoire, troisièmement, la conférence a choisi de ne pas témoigner, ce dont elle m'a fait part le jour même où elle devait comparaître devant cette commission, ce dont elle vous a fait part aussi, M. le Président.

Pour reprendre un peu les comparaisons sportives de l'athlétique député de Hull, M. le Président, je dirais que l'Opposition s'est élancée au bâton, qu'elle a demandé que les arbitres puissent être entendus. La conférence ayant choisi de ne pas être entendue, c'est une autre fausse balle du député de Hull.

Sur le contenu, je dirai que nous avons lu, avec respect et avec tous les égards qui lui sont dus le mémoire de la Conférence des arbitres du Québec. De façon générale celle-ci accomplit des fonctions délicates, complexes et qui exigent une très grande expertise. Nous avons étudié ce mémoire ainsi que les addenda qu'elle y a faits, mais nous avons choisi un point de vue qui est celui de remettre en cause la notion de l'arbitrage à trois pour les fins de l'arbitrage unique. Cependant, nous pourrons répondre, et je l'ai annoncé lors de la deuxième lecture, à une partie des préoccupations qu'ont la conférence et certaines des parties au niveau de l'arbitrage des différends qui touchent justement les premières conventions collectives - le cas des policiers et pompiers - où la notion de la présence d'assesseurs sera une notion obligatoire à moins que les parties ne conviennent qu'il n'y a pas d'assesseur.

Dans ce sens, je pense que nous aurons réussi ce progrès qui, d'une part, vise à raccourcir les délais et, deuxièmement, à faciliter la tâche à tout le monde. C'est pour ces raisons que nous nous opposerons à la motion de l'Opposition, à savoir de faire comparaître la Conférence des arbitres du Québec, qui a déjà choisi de ne pas comparaître tout en nous soumettant son mémoire.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant relire cette motion et, ensuite, nous allons passer à son adoption ou à son rejet. Je la relis: Que cette commission invite la Conférence des arbitres du Québec à se présenter devant la commission permanente du travail le vendredi 17 juin 1983, à 11 h 30, afin de renseigner les membres et intervenants de ladite commission relativement aux modalités du projet de loi 17.

M. Paradis Vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Très bien, nous allons procéder au vote. M. Bisaillon n'est pas là; le député de Sainte-Marie n'est pas là, M. le député de Viau.

M. Cusano: Pour.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Prévost n'est pas là. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Contre.

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de Maisonneuve n'est pas là. M. le député d'Ungava non plus. M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu; Pour.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Contre.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Pour.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Pour.

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bordeleau: Contre.

Une voix: Le député de Hull joue au baseball.

M. Paradis: C'est un match nul. Une voix: Quatre à quatre.

M. Johnson (Anjou): Vous devez jouer un rôle d'arbitre unique, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): MM. les membres de la commission, je me serais bien passé de cet arbitrage. Cependant, les règlements...

M. Paradis: On peut suspendre la séance et revenir demain matin pour votre décision sur le vote, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Ce n'est pas la première fois que je le vois, même si cela ne fait pas tellement de temps que je siège en ce Parlement. Quand de pareilles circonstances se présentent, je crois qu'il est de tradition que la présidence accorde son appui à la majorité ministérielle. En conséquence, je voterai contre cette motion. Elle est donc rejetée. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, pour la suite de nos travaux, nous avons convenu avec notre collègue, le député de Brome-Missisquoi, qu'il aurait - ce qui a été fait, je pense, depuis 20 h 15 - l'essentiel du plancher avec ses collègues. Vous avez remarqué avec quelle parcimonie nous sommes intervenus de ce côté, volontairement, pour permettre à l'Opposition d'exprimer tous ses points de vue dans ses différentes motions, que je ne qualifierai pas. Certains diraient qu'elles sont inqualifiables.

Nous avons convenu qu'à la suite de l'ordre de la Chambre demain, nous pourrions entreprendre l'étude article par article du projet de loi après des exposés que nous acceptons, en ce qui nous concerne, y compris l'exposé préliminaire, de limiter à dix minutes. Nous présumons que l'Opposition fera de même et entreprendra réellement les travaux de cette commission sur le projet de loi 17 demain matin.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, les paroles du ministre sont conformes à l'entente, sauf ses commentaires sur les motions. On remarquera que le ministre n'a pas voulu entendre les arbitres. Il refuse d'entendre... Cela me fait penser un peu à la commission de LG 2. On semble avoir des choses à cacher. Cela sent le "cover-up" un petit peu. Les motions avaient pour but de faire toute la lumière, d'inviter à nous rencontrer des gens concernés qui avaient des choses à dire. Le gouvernement s'y refuse. Si ces motions ont été qualifiées par le ministre d'inqualifiables, c'est parce qu'il n'avait pas trouvé le mot qu'il cherchait pour les qualifier. C'était le mot "transparence".

Le Président (M. Blouin): Sur ce, nous allons donc probablement ajourner nos travaux jusqu'à demain, après la période des questions, selon l'ordre de la Chambre.

La commission élue permanante du travail ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 22 h 40)

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