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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le vendredi 17 juin 1983 - Vol. 27 N° 118

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 17 - Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Vingt heures dix-huit minutes)

La Présidente (Mme Lachapelle): À l'ordre, s'il vous plaît! La séance est ouverte. Nous reprenons l'étude article par article du projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et diverses dispositions législatives.

Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Bordeleau (Abitibi-Est), Perron (Duplessis), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Ciaccia (Mont-Royal), Champagne (Mille-Îles), Bélanger (Mégantic-Compton), Lincoln (Nelligan), Lachance (Bellechasse), Mme Dougherty (Jacques Cartier), M. Middlemiss (Pontiac).

Les intervenants sont: MM. Champagne (Mille-Îles), Fortier (Outremont), Leduc (Fabre), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon), Proulx (Saint-Jean) et Vaugeois (Trois-Rivières).

Nous en sommes à l'article 2. Est-ce qu'il y a des intervenants?

M. le député de Mont-Royal.

Le refus d'embaucher une personne

qui a exercé un droit découlant

du Code du travail (suite)

M. Ciaccia: Oui, Mme la Présidente. Vous n'étiez pas...

La Présidente (Mme Lachapelle): II ne vous reste qu'à conclure.

M. Ciaccia: Oui, il me reste une minute. Je voulais seulement en conclusion, Mme la Présidente, réitérer que cet article 2 démontre de l'ambiguïté, de l'imprécision et se prête à des difficultés d'interprétation de la façon dont il est rédigé. Par exemple, on ne définit pas le terme "représailles", on ne définit pas les mesures discriminatoires auxquelles on se réfère dans cet article. Si on cherche un équilibre entre le secteur patronal et le secteur des employés syndiqués, je pense qu'on n'encourage pas cet équilibre; on peut même causer des problèmes assez sérieux. Par exemple, les mots "représailles" et "mesures discriminatoires" pourraient être invoqués à tout propos. Quelqu'un pourrait qualifier à peu près n'importe quel comportement de l'employeur, il pourrait se plaindre. C'est vrai qu'il n'y a pas de présomption contre l'employeur, mais le fardeau de la preuve est sur les épaules de l'employeur, c'est l'employeur qui doit démontrer qu'il n'y a pas eu de représailles, ni de mesures discriminatoires.

Dans ce sens, c'est presque une présomption de faute. Je sais qu'il ne me reste plus de temps pour faire valoir mes arguments contre l'article 2, contre les amendements à l'article 2, mais, à cause de son ambiguïté et de son imprécision, je crois qu'il devrait au moins y avoir des amendements apportés à cet article.

La Présidente (Mme Lachapelle): Merci. M. Cusano... Est-ce que vous voulez prendre la parole, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): Oui, Mme la Président, pour commenter très rapidement les propos que nous a tenus le député de Mont-Royal, hier soir et ce soir, dans le cas du refus d'embauche, non seulement il n'y a pas de présomption - je pense que le texte est très clair à cet égard - il y a cependant un recours pénal. À ce que je sache, en vertu de notre droit, dans une poursuite pénale, s'il n'y a pas de présomption spécifique, c'est la présomption d'innoncence, et le fardeau de la preuve revient à celui qui poursuit. En ce sens, le député de Mont-Royal faisait peut-être alllusion à d'autres aspects du code, mais sûrement pas aux dispositions que j'ai évoquées.

M. Ciaccia: Est-ce qu'on me permettrait une question?

La Présidente (Mme Lachapelle): Oui, allez-y, mais très courte.

M. Ciaccia: Très courte. Est-ce que le ministre nous affirme que, à l'article 2, quand on prévoit que l'employeur ne peut refuser d'employer, etc., et qu'on parle de mesures discriminatoires ou de représailles et que si un employé utilise ces arguments contre l'employeur, cela va être à l'employé de démontrer que l'employeur a utilisé des mesures discriminatoires? Autrement dit, l'employeur a seulement à refuser l'embauche de l'employé et cela va être à l'employé de faire la preuve?

M. Johnson (Anjou): Dans le cas du refus d'embauche, Mme la Présidente, qui est prévu à l'article 14, la seule sanction pour refus d'embauche - contrairement au code

canadien qui prévoit une intervention avec possibilité de faire embaucher une personne -est une saction pénale. Deuxièmement, il n'y a pas de présomption établie en faveur du salarié. Cependant, dans le cas des personnes déjà au service d'un employeur, l'article 15 est très clair. Je pourrais simplement le lire et le député comprendrait, j'en suis sûr. Là, il y a présomption, mais il ne s'agit pas du cas d'embauché. Il s'agit de mesures de représailles contre quelqu'un qui est déjà à son emploi et qui se livre à des activités syndicales comme dans le Code canadien du travail.

La Présidente (Mme Lachapelle): Je regrette, M. le député, mais vous avez dépassé votre temps de trois minutes. La parole est donc à M. Cusano, député de Viau.

M. Ciaccia: Je voudrais seulement clarifier quelque chose, Mme la Présidente.

M. Johnson (Anjou): Une dernière question, Mme la Présidente, je veux bien.

La Présidente (Mme Lachapelle): Oui, s'il vous plaît, très courte.

M. Ciaccia: C'est exact que, dans le cas d'un employé déjà au service d'un employeur, le fardeau de la preuve incombe à l'employeur. Dans ce sens-là, je ne me suis pas trompé et c'est seulement dans le cas d'un refus d'embauche que l'employé a le fardeau de la preuve.

M. Johnson (Anjou): C'est exact, Mme la Présidente.

M. Ciaccia: C'est encore assez sérieux. C'est encore assez sérieux.

M. Johnson (Anjou): C'est ce que dit le code et c'est contraire à ce qu'affirmait le député de Mont-Royal. C'est finalement l'économie générale de notre code à l'égard des présomptions créées en faveur de ceux qui se livrent à des activités syndicales.

La Présidente (Mme Lachapelle): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, Mme la Présidente, voisine du comté de Viau et native du comté de Portneuf. On est très heureux de vous voir occuper le siège du président, ce soir. Je dois vous avouer que vous paraissez mieux que l'autre président.

La Présidente (Mme Lachapelle): À l'ordre, s'il vous plaîtl

M. Cusano: C'est un compliment, madame.

Cet article, M. le Président, est un peu...

Une voix: Mme la Présidente.

M. Cusano: Mme la Présidente, excusez-moi. On est tellement habitué à dire "M. le Président". Je ne suis pas sexiste, je vous assure.

M. Ciaccia: C'est son héritage culturel.

M. Cusano: C'est mon héritage culturel d'après mon collègue de Mont-Royal. Mais j'essaie de m'adapter, madame.

Je suis bien inquiet de cet article, car j'ai personnellement vécu certains problèmes.

Une voix: Comme enseignant?

M. Cusano: Non, pas comme enseignant. Je m'entendais très bien avec mes patrons lorsque j'étais enseignant. Je n'ai jamais eu de difficulté de ce côté-là. Je veux d'ailleurs dire, spécialement au député de Prévost que, comme enseignant, j'ai fait partie du syndicat. Cela le surprend. J'ai fait partie du syndicat et j'ai même été secrétaire du Syndicat des professeurs de l'île de Montréal. Une chose qui m'a toujours frappé durant ce temps-là - d'ailleurs, il le sait très bien - c'est qu'à plusieurs reprises, en tant que responsable de certains griefs ou d'autres choses, on se trouvait toujours dans la position où on était obligé de défendre les incompétents de la profession, M. le député de Prévost. Je pense que vous avez connu cela quand vous étiez syndicaliste.

Mes relations avec mes patrons ont toujours été excellentes en tant que simple enseignant. J'ai eu des relations un peu difficiles parfois en tant qu'administrateur d'une école. C'est pour cela que cet article m'inquiète parce que c'est un article très ambigu. L'ambiguïté, c'est peut-être bon pour les avocats, parce que cela leur donne la chance de plaider devant un juge, de faire valoir des arguments. Est-ce que c'est cela qu'on veut faire?

M. Johnson (Anjou): Cela va durer longtemps jusqu'à...

M. Cusano: Excusez, M. le ministre. Est-ce que vous me portez une oreille attentive?

M. Johnson (Anjou): Oui, je porte une oreille attentive, car je vous ai entendu dire: "Excusez, M. le ministre."

M. Cusano: C'est que je ne voudrais pas parler pour rien. Je dois vous souligner en passant, Mme la Présidente, que je suis très heureux que le ministre des Affaires sociales soit ici, ce soir, étant donné qu'il

fait très chaud. Nous ayant fait travaillé toute la journée et à cause de ma condition physique, je suis très heureux qu'il soit ici et non le ministre du Travail. Car, s'il nous arrivait quelque chose, je suis certain qu'il prendrait bien soin de nous et qu'il laisserait toute partisanerie de côté, Mme la Présidente.

Lorsqu'on parle d'ambiguïté dans cet article et qu'on parle de "refuser d'employer une personne à cause de l'exercice par cette personne d'un droit qui résulte du présent code, ni chercher par intimidation des mesures discriminatoires", des mesures discriminatoires, Mme la Présidente, cela veut dire beaucoup de choses pour différentes personnes, c'est un peu comme l'amour, Mme la Présidente. L'amour veut dire différentes choses pour différentes personnes.

J'ai eu, dans mes dix ans d'expérience en tant qu'administrateur du collège, une des plus grandes écoles élémentaires de la province de Québec. Vous savez, des écoles élémentaires de 600 ou 700 élèves, vous n'en trouvez plus dans la province de Québec. J'en avais une, Mme la Présidente. Je dois préciser, à cause de l'incurie de ce gouvernement, que j'étais pris avec 650 ou 700 élèves répartis dans quatre édifices différents parce que le gouvernement n'a jamais voulu bâtir l'école qui était nécessaire. (20 h 30)

Je vois encore des situations semblables malgré que, dans le domaine scolaire, elles vont diminuer, parce que je crois que le nombre d'élèves diminue énormément et qu'on ne trouvera plus d'écoles, avec le projet Laurin qui s'en vient, où les élèves seront éparpillés un peu partout. Si je vois cet article, je me place dans la situation que j'ai vécue, où l'administrateur pourrait se trouver dans de drôles situations. On parle d'intimidation, je vais vous donner un exemple. J'avais un syndicat du côté des enseignants aussi militant que les amis de M. Dean - excusez, M. le député de Prévost -et, à certaines occasions, lorsque j'ai eu des problèmes, cela a été des problèmes où la représentante syndicale dans ce cas précis, c'était une dame - je ne fais aucune référence à vous, Mme la Présidente -lorsqu'on arrivait dans une période de négociation, décidait qu'elle ne me parlait plus; elle ne parlait plus à la direction. Elle a même fait un grief sur le fait que je l'intimidais, disait-elle parce que, le matin, lorsqu'elle entrait à l'école, je lui disais bonjour. C'est pour cela que cette question d'intimidation veut dire beaucoup de choses. It means different things to different people, happiness is, as the song goes, different things to different people. - Pardon? - Dans le même sens, lorsqu'on dit: Happiness is different things to different people, misery is also different things to different people, Mme la Présidente.

Dans ce cas, si je regarde cet article, il est extrêmement ambigu quand on parle d'intimidation. On l'a vue en Chambre, ici, l'intimidation. On fait toutes sortes de menaces et après, cela tombe; le premier ministre fait toutes sortes de menaces et, après cela, il se retire et il dit: Ce n'est plus de l'intimidation.

Lorsqu'on parle de mesures discriminatoires, dans le cas de mon école, c'est un fait très précis. J'ai encore bien des documents en ma possession, même si je n'ai plus la position dont je parlais. Comme je vous expliquais, dans le cas de cette représentante syndicale qui, à la fin d'une année, puisque j'avais mes quelque 600 élèves répartis... Je m'aperçois, Mme la Présidente, que personne ne semble écouter de l'autre côté, les députés de l'autre côté n'ont pas l'air tout à fait intéressés aux vrais problèmes des travailleurs et des travailleuses, des enseignants et des enseignantes. On veut seulement protéger les droits d'un syndicat et de quelques amis très spécifiques. Même si c'était seulement par courtoisie, on pourrait au moins prétendre écouter.

Si je reviens à mon histoire vécue, par l'incurie, ce gouvernement refusait de bâtir une école, non pas à Saint-Laurent, mais à Rivière-des-Prairies. C'est une situation bien drôle. Pour situer le ministre, en 1974, on m'a demandé de regrouper les enfants de Rivière-des-Prairies. Savez-vous où on a trouvé des écoles? Ceci illustre les grandes solutions du ministère de l'Éducation: On a trouvé quatre bâtisses dans Montréal-Nord. Dans le temps des libéraux, il faut bien comprendre qui était là au ministère de l'Éducation, en 1974, mon cher ami et qui prenait les décisions, notamment M. Benjamin et M. Dozois; on s'en souviendrait très bien, il ne faut pas oublier les gens infiltrés dans le Parti libéral et qui donnaient des statistiques qui n'étaient pas exactement précises. Vous voulez en parler de cette question? On va en parler sûrement, parce que je l'ai vécue.

La Présidente (Mme Lachapelle): S'il vous plaît, M. le député je vous ramène à la pertinence du débat article par article. La loi 17, s'il vous plaît!

M. Cusano: Oui, oui, madame, je parle d'ambiguïté. Lorsqu'on parle d'intimidation et de mesures discriminatoires, c'est ambigu pour moi, madame. Est-ce clair pour vous? Excusez-moi, je sais que vous n'êtes pas capable de trancher, mais, pour moi, c'est très ambigu. J'aimerais revenir à cette question de l'ambiguïté et des mesures discriminatoires. Pour votre information, c'était l'école Amos. Ce n'était pas à Amos,

Québec; c'était sur la rue Amos, dans Montréal-Nord. On m'avait donné quatre duplex à Duplessis. Vous connaissez cela, Mme la Présidente, des duplex à Duplessis, dans Montréal? Certainement que vous connaissez cela. Vous savez, toutes les petites bâtisses qui ont été édifiées et dont le plan a été fait par le même architecte. On en a bâti partout à Montréal. On appelle cela des duplex à Duplessis.

Une voix: Le plan Dozois.

M. Cusano: Non, non, pas le plan Dozois, les duplex à Duplessis. Il a fallu que j'y loge ces enfants-là. Et lorsqu'on parle de questions de harcèlement de la part d'un syndicat ou d'un représentant syndical, la situation que j'ai vécue était la suivante: lorsque j'ai planifié mes classes, la représentante syndicale a demandé d'être localisée dans une des quatre bâtisses; elle avait choisi une bâtisse - merci, Mme la Présidente, cela a été très gentil de votre part - cette personne Mme la Présidente, M, le Président, excusez-moi, avait décidé, elle, qu'elle devait se localiser dans une certaine bâtisse. Pour fins d'organisation, selon le voeu des parents, en consultation et aussi en consultation avec le comité de l'école, on avait décidé que, dans cette bâtisse, on allait loger des enfants des première et deuxième années. Mais, madame, elle, enseignait une quatrième année et il a fallu que je la place dans une autre bâtisse. Cette dame - peut-être que cela surprend le député de Prévost - a crié à la discrimination: elle a trouvé que je l'empêchais de fonctionner en tant que représentante syndicale parce qu'elle avait choisi une bâtisse en particulier. C'est cela, la question d'ambiguïté, lorsqu'on parle... D'après elle, c'étaient des mesures discriminatoires.

Une voix: Elle n'était pas correcte.

M. Cusano: Je pense bien que vous êtes d'accord avec moi que, dans ces circonstances, M. le Président, ce n'est pas lorsqu'on est aux prises avec certaines situations - et il y a beaucoup d'employeurs ici qui vont être affectés, qui ont plusieurs succursales dans toute la province, etc. Des individus peuvent alors invoquer des mesures discriminatoires, parce qu'ils n'ont pas été affectés au bon endroit.

M. le Président, lorsqu'on parle de telles choses, on essaie de faire plaisir à tout le monde et, en fin de compte, on ne fait plaisir à personne. Quand ce n'est pas clair, ce n'est pas clair. Et je vous en parle en tant que pédagogue dans une classe. C'est qu'il faut être très clair. Parfois, je regarde les gens ici à l'Assemblée nationale et je me souviens de mes jours anciens en classe à voir la manière dont les gens agissent, je pense à ce temps-là. Je ne voudrais pas lancer des pierres seulement aux gens du côté ministériel, mais parfois même à nous autres; cependant, mon collègue de Mont-Royal fait bien les choses.

M. Ciaccia: Merci.

M. Cusano: Mais, vous savez, cette ambiguïté... Si l'article était extrêmement clair... Lorsque vous parlez de représailles, lorsque vous parlez de menaces, qu'est-ce que cela veut dire, menacer quelqu'un, M. le Président? Je pensais que ma définition était très claire, mais, j'ai vu ce qui se passait ici à l'Assemblée nationale, je ne parle pas de ce qui s'est passé au salon rouge, mais de ce qui s'est passé au salon bleu et je vous avoue franchement que je ne sais plus ce que c'est que des menaces. Un jour des paroles semblent être des menaces, d'autres jours on voudrait nous faire croire qu'une menace serait un assaut contre la personne. Vous savez, psychologiquement on peut faire toutes sortes de menaces: des menaces verbales, même un clin d'oeil peut être une menace, selon les personnes. Je vous donnais l'exemple d'une personne tout à l'heure. Je vous disais que cette personne se sentait menacée parce que je lui disais bonjour. Elle trouvait que c'était une menace; d'après elle, je voulais signaler sa présence. Est-ce qu'on est gêné de signaler la présence de quelqu'un? Je pense que personne ici ne se gênerait. Que je vous dise bonjour, M. le Président, je pense que vous en seriez bien heureux, si on se rencontre dans le corridor. Je suis sûr que vous êtes un homme très sage et que, pour vous, une telle chose ne serait pas une menace. Mais, pour certains individus et pour certains syndicats, ce sont des menaces.

Cet article m'inquiète, M. le Président. Lorqu'on parle d'ambiguïté et qu'on va faire perdre du temps... Vous savez, quand quelque chose est très clair, il n'y a pas de problème. On le voit bien ici. Vous faites des lois, vous les présentez à l'Assemblée nationale et, après cela, il faut revenir, parce que cela n'est pas tout à fait clair. Là, vous essayez de préciser des ambiguïtés, vous tombez dans d'autres ambiguïtés et personne n'y comprend plus rien. J'ai même entendu dire que le juge en chef donnait sa démission aujourd'hui. Je l'ai entendu dire, je ne vous l'annonce pas comme une vérité absolue, j'ai entendu la rumeur. On m'a dit qu'il trouve qu'il n'y a plus de justice dans la province de Québec.

Une voix: C'est vrai.

M. Cusano: C'est inquiétant. Vous me corrigerez, si je me trompe, je n'ai pas le monopole de la vérité absolue, comme les gens de l'autre côté qui pensent qui l'ont sur

tout. Si je me trompe, vous me corrigerez. Je trouve cela inquiétant. La langue française est une langue extrêmement précise et même, comme l'a souligné le député d'Anjou l'autre soir, lorsqu'il a voulu me corriger sur une certaine expression, je l'ai apprécié. Je n'ai pas une connaissance approfondie de la langue française, mais j'ai toujours trouvé que c'était une langue très précise. C'est beaucoup plus précis que l'anglais, vous allez l'admettre.

Mais, de la façon dont vous présentez vos lois, vous massacrez la langue, à mon avis. Vous y mettez tellement d'ambiguïtés que les gens n'y comprennent plus rien.

Le Président (M. Desbiens): II vous reste une minute.

M. Cusano: Pardon, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): II vous reste une minute.

M. Cusano: II me reste une minute et je ne fais que commencer. Je n'ai parlé que de mesures discriminatoires et de représailles, je n'ai pas encore parlé du mot "chercher".

M. Bélanger: Je vais m'en charger.

M. Cusano: Vous allez vous charger d'essayer de savoir ce que le mot "chercher" veut dire? On cherche, on cherche quoi? On cherche. Cet article m'inquiète, il inquiète mon collègue de Mont-Royal, il l'a dit déjà. Vous, de l'autre côté, cela n'a pas l'air de vous inquiéter. Il y a bien des lois qui ne vous ont pas inquiétés. Il y a des personnes qui votent pour des lois et après elles se demandent pourquoi elles ont voté. Cela m'inquiète. On est ici pour essayer d'éclaircir un peu la situation, mais vous vous entêtez. Vous pensez que vous avez la vérité absolue. Enfin, on aura certainement des choses à vous proposer. (20 h 45)

J'espère que, lorsqu'on vous fera ces propositions, elles seront acceptées. Personnellement, j'ai la conviction qu'elles sont acceptables, mais je ne sais pas si elles seront acceptées, car vous avez une certaine crainte, vous du côté ministériel, seulement à penser que d'autres connaissent peut-être la vie un peu mieux que vous. Cela vous inquiète. Dans la vie, lorsqu'on est capable de reconnaître qu'on ne possède pas la vérité, c'est à partir de là qu'on devient très sage. Lorsqu'on dit qu'on possède la vérité sur tout, cela devient un peu inquiétant.

M. le Président, je sais que mon temps est terminé et d'autres de mes collègues ont certainement beaucoup de choses à dire.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je regrette de déranger une si belle entrée en la matière, mais votre temps est déjà écoulé. Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Bélanger: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: ...je fais une demande de directive. Est-ce que j'ai le droit de parole?

Le Président (M. Desbiens): Vous remplacez le député de Brome-Missisquoi, mais celui-ci a déjà utilisé son droit de parole?

M. le député de Prévost.

M. Dean: M. le Président, pendant que les membres de l'Opposition conversent, je vais dire quelques mots. Le député de Viau cherche des expériences de vie pour rendre ses remarques pertinentes à ce débat. Il a fait référence...

M. Cusano: Pouvez-vous répéter cela, M. le député?

M. Dean: C'est clair qu'il vient d'un milieu syndical ouaté, celui du monde de l'enseignement. Je pense - il y en a peut-être d'autres aussi qui le pensent, je l'ai déjà dit et je continue à le dire - qu'il y a, au Québec, entre 80% et 85% des travailleurs qui ne travaillent pas dans le secteur public. De ces 80% ou 85%, à peine 25% sont syndiqués. Ces non syndiqués, surtout, occupent des emplois assez souvent difficiles. Ils travaillent pendant 40 heures, 45 heures et même davantage, chaque semaine, et assez souvent dans des conditions de saleté, de danger; en somme, des conditions dures, insalubres.

Si on cherche à apporter un certain nombre d'amendements, c'est pour faciliter l'exercice du droit d'association. Au fond, très peu d'enseignants au Québec actuellement n'ont pas pu se syndiquer. Je pense que ce serait beaucoup plus pertinent dans le présent débat de parler de cas, d'exemples qui touchent la masse des hommes et des femmes du Québec qui ne sont pas syndiqués et qui, peut-être, voudraient l'être.

Le député de Viau a parlé d'intimidation. Il a dit que ce mot ne devrait pas être dans le code. Il ne semble pas savoir que le mot "intimidation" est dans le Code du travail depuis au moins 1964, si ce n'est pas 1944. Le mot "intimidation" n'est pas un nouveau mot, ce n'est pas cela, l'amendement au code. Il a parlé de menaces. Le mot "menace" est aussi dans le Code du travail du Québec depuis 1964 au

moins. Donc, dans tout ce qu'il a dit indique, il ne sait pas de quoi il parle ou bien il parle pour rien. Ce n'est pas cela, l'amendement.

Une voix: II n'a pas le choix.

Une voix: C'est à peu près cela, oui.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Dean: II dit aussi que les mots qu'on veut ajouter à cette clause - je souligne que c'est pour protéger le travailleur ou la travailleuse contre certaines mesures, comme des représailles, des mesures discriminatoires autres que le congédiement ou la suspension, par exemple. Ce sont ces mots qu'on cherche à ajouter à la loi. Si on cherchait des modèles, on pourrait faire un grand plaisir à nos amis d'en face en leur citant le Code du travail fédéral où on retrouve le mot "discriminatoire", où les mots "intimider", "menacer" ou "prendre d'autres mesures disciplinaires" y sont déjà inscrits depuis longtemps.

M. Cusano: Ils peuvent faire quelque chose de bon, de temps en temps, n'est-ce pas, ceux du fédéral?

M. Dean: Je n'ai pas interrompu le député de Viau pendant son intervention!

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Prévost, vous avez la parole.

M. Dean: En Colombie britannique, le mot "discrimination" est dans le Code du travail. Dieu sait que c'est là depuis au moins 1973. Le gouvernement de M. Bennett a eu amplement le temps de changer ce mot, mais ce mot est dans toutes les lois et dans presque toutes les conventions collectives. À l'article 14, on parle de poursuites pénales. Les poursuites pénales, cela se fait devant un juge du Tribunal du travail. Dire qu'un juge du Tribunal du travail ne peut pas imaginer le sens à donner aux mots "mesures discrimatoires ou représailles", c'est prendre toute une série de savants juges pour des caves. Ces mots ont un sens précis dans la jurisprudence arbitrale, dans la jurisprudence du travail. Il n'y a pas de problème. Les gens concernés, que ce soit dans les tribunaux d'arbitrage ou devant le tribunal, jugent les accusations en fonction de ces clauses et ils sont très compétents dans leurs évaluations.

Je veux justement vous parler de ce qui pourrait être visé dans le concret par ces choses-là. Par exemple, on ne vise pas seulement les congédiements, les menaces ou les rétrogradations. Il y a, dans les usines ou ailleurs, certaines occupations qui sont considérées comme particulièrement difficiles, particulièrement sales. Parfois, les parties s'entendent entre elles pour décider qui aura les emplois les plus difficiles, les plus sales ou les plus odieux d'une façon ou d'une autre. Il s'est déjà produit qu'on identifie quelqu'un à un sentiment syndical et on trouve le moyen de lui attribuer, plus souvent qu'à son tour, des emplois très sales ou le contraire. Ce n'est pas une question de congédiement, ce n'est pas une suspension, ce n'est pas une rétrogradation, c'est le fait d'attribuer à quelqu'un un travail particulièrement odieux.

Au contraire, à certains endroits, on a l'occasion de faire un peu plus d'heures supplémentaires que dans d'autres emplois. Donc, pour certains travailleurs, les emplois où on a la possibilité de faire un peu d'heures supplémentaires, surtout quand on travaille à 4 $ ou 4,50 $ l'heure, sont des emplois convoités. Si quelqu'un ose avoir des idées syndicalistes, si quelqu'un veut simplement se syndiquer, s'il n'a pas encore appris toutes les nuances que les syndicalistes ouatés de M. le député de Viau ont appris, probablement parce qu'ils ont eu des cours très avancés, etc., un travailleur de ce genre qui veut se syndiquer risque de se trouver privé d'un emploi où il pourrait faire des heures supplémentaires.

Il y a toute une série d'exemples semblables. On ne pourra jamais arriver à faire une liste de toutes ces mesures. Si jamais on le faisait, les juristes, qui connaissent quelque chose aux textes législatifs, nous diraient: Cela n'a pas de sens, tu ne peux prévoir en détail toutes les utilisations possibles et impossibles, imaginables ou inimaginables des mots "mesures disciplinaires ou représailles". Donc, on insère ces mots.

Le député de Viau a parlé d'une déléguée syndicale - je le souligne tout bonnement - qui a fait toutes sortes d'interprétations farfelues. J'aimerais bien savoir si cette personne a déjà gagné en plaidant ce genre de cause devant un tribunal d'arbitrage, parce qu'on pourrait un peu se douter du bon sens de tel arbitre, si jamais telle chose se produisait.

Je pense qu'on aurait intérêt, dans ce débat, à au moins essayer d'être sérieux, même si cela est difficile, à essayer d'envisager ces textes dans le sens où un juge compétent, ayant une bonne formation d'avocat siégeant au Tribunal du travail va évaluer et apprécier le sens à donner à ces mots dans les cas concrets et réels qui lui sont présentés par des travailleurs et travailleuses victimes de mesures discriminatoires ou de représailles du fait de vouloir exercer ou avoir exercé certains droits reconnus par le Code du travail.

Le Président (M. Desbiens): L'article 2 est-il adopté? Adopté.

M. Cusano: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. Article 3.

Mesures discriminatoires

M. Johnson (Anjou): Article 3, M. le Président, il s'agit, dans ce cas de congédiement, de suspension, de déplacement, de mesures discriminatoires ou de représailles chez un salarié appartenant à l'entreprise. Ce sont des mesures qui permettent la réintégration du salarié qui a été congédié pour ses activités ou d'autres mesures jugées appropriées par le commissaire du travail. Je pense que l'article parle de lui-même, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): L'article est-il adopté?

M. Cusano: Non, M. le Président. Pas pour le moment, toujours.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais répondre aux remarques du député de Prévost. Je pense que ceci entre dans la pertinence de l'article 3, parce que l'article 3 est la conséquence des droits énoncés dans l'article 2. Le député de Prévost a mentionné le Code canadien du travail, il a dit: Les mesures discriminatoires en cause et les termes employés dans ce projet de loi sont contenus dans le Code canadien du travail. Je pense qu'il y a une différence assez fondamentale entre le Code canadien du travail et les mesures que l'on prévoit inclure, que l'on inclut dans le projet de loi actuel. Je pense qu'il faut faire la distinction car le fait que certains mots se trouvent dans les deux codes ne constitue pas une justification pour le présent projet de loi. Par exemple, le Code canadien du travail est très spécifique, il exprime les actions, au présent, d'un employé, il n'ouvre pas la porte à des abus possibles, car c'est ce qui s'est produit dans le passé. Il énumère des activités syndicales assez précises, ce que le projet de loi actuel ne fait pas. Je pense que ce n'est pas tout à fait exact d'essayer de justifier le présent projet de loi en se référant aux termes contenus dans le Code canadien du travail. Si je voulais faire un "filibuster", je pourrais lire l'article 184, alinéa 3 du Code canadien du travail; ce n'est pas mon intention, je ne le lirai pas.

Je suis assez certain que le député de Prévost est au courant des termes qui sont inclus dans le code canadien, il n'a pas besoin de moi pour lui en rappeler les termes précis, mais c'est juste le principe, car celui-ci est un peu différent; cela veut dire que les possibilités d'abus sont moindres. Vous savez, on a fait le point hier, mais le député de Prévost n'était peut-être pas ici. (21 heures)

M. Ciaccia: On ne veut pas - on a posé ce principe - qu'un employeur puisse congédier ou abuser de ses pouvoirs à l'endroit d'un employé qui a des activités syndicales. C'est toutefois la question de savoir comment on va rédiger la législation. Est-ce qu'en essayant de consacrer ce principe on n'ouvrira pas la porte à des abus possibles? C'est le seul but de nos interventions. On l'a dit et on le répète: si on prend toutes les mesures les plus avant-gardistes dans chaque code du travail à travers le Canada et qu'on les inclut dans un code idéal au Québec, cela devient le code le plus contraignant au pays et la concurrence devient alors plus dificile. Car qu'on le veuille ou non, je voudrais moi aussi vivre dans une utopie. Je voudrais moi aussi avoir les conditions idéales...

M. Johnson (Anjou): Vous ne faites pas partie de mon utopie, John.

M. Ciaccia: Non, je ne serais pas là, une chance. Le député d'Anjou ne serait pas non plus dans la mienne, M. le Président, je vous l'assure. Mais je suis trop poli pour le dire.

Dans le monde réel, on peut établir certains principes de base. C'est cela qu'on veut faire.

M. Johnson (Anjou): Tell me about that.

M. Ciaccia: C'est cela qu'on veut faire. Mais il faut aussi avoir un équilibre. Et si nous avons des conditions où, pour utiliser les termes de votre premier ministre, les dés sont "loadés" en faveur d'un... Si l'on rend les conditions plus difficiles pour la création d'emplois, est-ce que les employés vont vraiment en bénéficier? Si on crée des ambiguïtés et des possibilités d'abus, est-ce qu'on a vraiment atteint notre objectif?

M. le Président, je crois qu'il n'est pas tout à fait exact de faire la comparaison entre le code canadien et le projet de loi qui est devant nous. Comme point d'intérêt, je voudrais citer les propos du député de Prévost lorsqu'il a fait son intervention en deuxième lecture. C'est au rouleau 3051, page 1, et je le cite: "Donc je suis très heureux et très fier d'appuyer ce projet de loi et d'encourager mes collègues de l'Assemblée nationale à faire de même". C'est la première phase. Dans un deuxième temps, on reviendra avec la consultation des partenaires sociaux et la consultation populaire nécessaire pour faire en sorte qu'on se donne, dans un certain nombre de mois ou peut-être quelques années, un code du travail qui serait plus à notre mesure en 1983.

Possiblement, sans être conscient du fait, je crois que le député de Prévost a vraiment exprimé nos inquiétudes que le projet de loi que vous proposez présentement n'est pas à notre mesure en 1983 - j'utilise vos propres mots - et c'est ce que nous aurions voulu. Nous favorisions un Code du travail, c'est-à-dire une refonte du Code du travail tel qu'il avait été promis par le ministre qui remplace maintenant le ministre du Travail à cette commission parlementaire, lequel était ministre du Travail en 1979. Lui aussi nous l'avait promis... Ah! c'est comme cela qu'on appelle cela? Le ministre du Travail par intérim?

M. Lavigne: On appelle cela un ministre du Travail par intérim.

M. Ciaccia: Ah! c'est comme cela qu'on le nomme: ministre du Travail par intérim ou plutôt ministre "au" Travail par intérim?

M. Lavigne: Excusez, ce n'est pas cela qu'il avait dit.

M. Cusano: II n'aime pas cela le mot "au" Travail.

M. Ciaccia: Mais, ce soir, on est au travail, c'est vendredi soir et on est au travail jusqu'à minuit.

M. Cusano: C'est ce que je lui ai dit l'autre soir et il n'était pas d'accord.

M. Ciaccia: En 1979, curieusement et ironiquement, c'est le député d'Anjou qui avait déclaré qu'il devait nous soumettre à l'automne une refonte totale du Code du travail; nous entendons maintenant les mêmes refrains de l'adjoint parlementaire qui est, si je ne fais pas erreur, le député de Prévost. C'est ce que nous aurions voulu, et non pas procéder à des changements à la pièce. Car, lorsqu'on effectue un certain changement dans un article, sans revoir tout l'ensemble de la loi, cela peut avoir des répercussions auxquelles on ne s'attend pas. C'est notre préoccupation. Je pense que les difficultés qui existent dans le présent projet de loi, même si le ministre et l'adjoint parlementaire, le député de Prévost, essaient de les justifier, sont très sérieuses et sont admises par les ministériels. Je voulais faire ces brèves remarques au sujet de l'article 3, en réponse aux propos du député de Prévost.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Pour revenir à ce que disait le député, la notion de l'exercice d'un droit par le salarié existe déjà dans le Code du travail, à l'article 15. Elle n'est pas introduite par le projet de loi 17, au cas où il y aurait quelque ambiguïté dans ses propos.

Deuxièmement, cette notion de l'exercice d'un droit a connu des interprétations jurisprudentielles. Le jugement le plus récent est celui du juge Bernard Lesage, que le député connaît sans doute, dans l'affaire impliquant Réal Chapdelaine et les Emballages Domtar Limitée, division de papier et carton Kraft, dans lequel on dit ceci: "Dans plusieurs autres dispositions du code, le législateur énumère des actes précis qui constituent pour un salarié, individuellement, ou pour un syndicat l'exercice pratique d'une composante du droit d'association. Citons comme exemple le droit d'adhésion syndicale, le droit de porter plainte à un commissaire, le droit de négocier, le droit de faire grève, le droit de faire grief. "D'autres manifestations individuelles ou collectives du droit d'association ne sont pas articulées dans des dispositions spécifiques du code, mais doivent tout de même être reconnues comme telles en raison de leur relation substantielle avec le concept décrit à l'article 3 susdit, à savoir l'appartenance à une association ou la participation à sa formation, ses activités, son administration. Il en est ainsi du droit de recruter des membres, d'assister à des assemblées syndicales, d'être officier d'association. "C'est également le cas de tout ce qui concerne les objectifs fondamentaux pour lesquels une association accréditée existe, lesquels sont énumérés à l'article la du Code du travail et comprennent, entre autres, la promotion des intérêts des membres, ce qui se réalise surtout, mais pas exclusivement, par la passation de conventions collectives. Le code a ainsi édicté en rejetant les interdits anciens contre le complot qui, suivant un cadre précis, la faculté de recourir au concours de confrères de travail, était le truchement privilégié pour rétablir l'équilibre des forces en présence lorsque peut être affectée la sauvegarde des intérêts du groupe. Le recours à l'assistance syndicale dans cette perspective est l'exercice concret d'une composante du droit d'association."

À cet égard, la notion de l'exercice d'un droit existe dans le code. Elle a été l'objet d'interprétations jurisprudentielles par le Tribunal du travail et, à cet égard, ces dispositions nous apparaissent tout à fait adéquates, précises et se rattachant aux principes qu'on retrouve dans le code.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je vais être très bref parce que je pense que l'objectif du gouvernement, tout comme celui de l'Opposition, est de faire en sorte que nous puissions étudier le plus grand nombre d'articles possible, ce soir. Il y a quand même des choses qu'il faut... Il ne faudrait cependant pas croire que le Parti libéral - je tiens à le mentionner avant d'en arriver à mes commentaires sur l'article 3 - s'oppose à la syndicalisation. Au contraire, si les députés étaient syndiqués, je ne crois pas qu'un vendredi soir, après avoir travaillé 90 heures, on serait encore ici, à 21 h 10, peut-être jusqu'à minuit. Je pense qu'il s'agirait d'une clause discriminatoire dans le sens de votre article 2.

Je vais vous dire que je crois au proverbe. Jamais deux sans trois, parce que l'article 3 n'est pas beaucoup mieux que l'article 2. Il y a encore de nombreuses ambiguïtés qui démontrent une fois de plus que ce projet de loi - je regrette de le dire - n'a pas été préparé avec soin; il a été préparé - je n'oserais pas dire sans connaissance de cause, parce qu'on croit qu'il y a des gens compétents qui ont mis la main à la pâte pour en arriver à ce projet de loi - de façon non claire. Je m'explique.

Lorsqu'on parle d'une indemnité pour un déplacement, je vais vous lire ce qu'on dit: "Cette indemnité est due pour toute la période comprise entre le moment du congédiement..." Cela, je le comprends. S'il y a un congédiement non justifié, non motivable, si l'employé a gain de cause et que le patron est obligé de lui payer son indemnité, il n'y a pas de problème. Jusque là, tout va très bien. Quand on parle de suspension, c'est à peu près la même chose. S'il a été suspendu injustement, c'est juste et équitable que l'employé réintègre ses fonctions et que le patron le paie plein salaire parce que, finalement, il a posé un geste qui n'était pas justifié.

Or, là j'accroche, M. le Président - je suis convaincu que vous allez accrocher avec moi, de l'autre côté de la table également -c'est quand on parle de déplacement. Si un patron déplace un employé en lui donnant une augmentation de salaire, je ne vois pas pourquoi il serait obligé de lui payer une indemnité en plus. Si on déplace un employé...

M. Johnson (Anjou): II n'aura pas d'indemnité.

M. Bélanger: M. le Président.

M. Johnson (Anjou): L'indemnité est accordée pour perte, M. le Président.

M. Bélanger: Ce n'est pas mentionné à l'article 3. Je lis l'article 3 et...

M. Dean: Ce n'est pas mentionné dans la loi actuelle qui est là depuis...

M. Bélanger: Ce n'est pas mentionné dans la loi. Vous voyez comme c'est ambigu. J'avais raison, je l'avais dit, d'ailleurs. J'ai dit: Je suis sûr que, de l'autre côté de la table, on va dire exactement comme moi.

M. Dean: Cela a été adopté par le Parti libéral en 1964.

M. Bélanger: C'est exactement ce qui est arrivé. On a dit: C'est vrai, ce n'est pas écrit dans la loi. C'est un fait, ce n'est pas écrit dans la loi. Un employé, par exemple, qui subirait un déplacement dans le but, dans certains cas, de conserver son emploi, il ne faudrait pas en plus qu'on soit obligé de lui donner une indemnité. Qui va déterminer le préjudice subi par l'employé? Je comprends que ce n'est pas plaisant, un déménagement, lorsqu'on travaille à Montréal et qu'à un moment donné on doit aller travailler à Wabush. Il n'y a rien d'agréable là-dedans, mais il reste une chose, c'est qu'il faut quand même que le personnel ait une certaine mobilité. On ne peut pas demander à un patron d'embaucher quelqu'un et de dire: Tous les matins, à 9 heures, au même endroit, tu entres par la même porte.

C'est une chose qui va arriver si la loi est adoptée telle qu'elle est actuellement. Il va se produire des cas très ambigus. Je ne sais pas de quelle façon on pourrait trouver une solution à ce problème. Je n'en fais pas une motion d'amendement mais, à mon avis, il faudrait tout au moins retirer ou biffer le mot "déplacement", car on ne peut pas dire qu'un employé a été pénalisé parce qu'il a été déplacé. S'il est rendu à son quatorzième accident avec le petit camion dans la cour et qu'on lui dit "aujourd'hui, tu vas chauffer la fournaise", ce sont peut-être des mesures de précaution pour le protéger contre lui-même. Il ne faudrait pas que le patron soit soumis à payer une indemnité de déplacement. Il l'a pourtant bel et bien déplacé. Il n'est plus au même endroit; il n'occupe plus la même fonction.

Cela prouve une fois de plus que le projet de loi n'est pas prêt; il n'a pas été mûri profondément; il n'a pas été préparé avec soin. Moi, j'ai des doutes. Je pense que le projet de loi a été préparé à toute vitesse, pour refaire l'image du gouvernement auprès des syndicats. On sait que c'est un besoin qu'il a de refaire son image auprès des syndicats, mais ce n'est pas suffisant. Il faudrait refaire son image auprès de la population et je pense que c'est une chose irréalisable. Je ne pense pas que ce soit possible. On peut croire une fois en des rêves, mais on ne peut pas croire deux fois au même rêve, surtout pas la population du Québec, qui est l'une des plus évoluées de

l'Amérique du Nord.

Encore une fois, je vais être très bref, je ne veux pas retarder les travaux de la commission. J'ai lu l'article deux fois et, tout de suite, j'ai accroché au mot "déplacement" et je suis convaincu qu'il ne faudrait absolument pas que cette loi soit adoptée dans sa forme actuelle. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Merci. Il n'y a pas d'autre intervenant? Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Ciaccia: M. le Président, j'aurais une question à poser.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je pense que le ministre a fait référence tantôt à un jugement qui définissait... Est-ce que c'était un jugement du juge Bernard Lesage?

M. Johnson (Anjou): Oui, oui, c'est cela.

M. Ciaccia: Et est-ce que cela faisait référence à l'exercice d'un droit?

M. Johnson (Anjou): Oui, oui, c'est la définition de la notion de l'exercice d'un droit dans la jurisprudence.

M. Ciaccia: Le problème que j'avais soulevé ne concernait pas l'exercice d'un droit. C'était la définition des mots que vous avez ajoutés dans ce projet de loi qui est devant nous, où il est question de mesures discriminatoires. Je ne pense pas qu'il soit approprié de citer le jugement du juge Lesage définissant l'exercice d'un droit. On sait que, sous cet aspect, un employé peut exercer son droit, mais vous introduisez, je crois, dans ce projet de loi, les mots "mesures discriminatoires". La question que je me pose est celle-ci: Quelle est la définition de "mesures discriminatoires"? Est-ce que cela pourrait donner lieu à certains abus?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, peut-être que le député avait fait un lapsus, mais il regardera les galées et il va se rendre compte que sa première intervention portait sur la notion de l'exercice d'un droit et non pas sur la notion de mesures discriminatoires. J'ai répondu à cette partie. Maintenant, s'il veut parler de la notion de mesures discriminatoires, je lui dirai que cette notion n'existe pas dans le code; donc, elle n'a pas été définie par le Tribunal du travail, sauf qu'elle existe dans le code canadien et dans d'autres codes. Elle fait l'objet d'interprétation par des Labour Relations Boards et des tribunaux, comme des tribunaux de droit commun, à cet égard. Elle n'existe pas dans le code canadien d'une façon autre qu'évoquée et non pas définie. La notion de mesures discriminatoires est dans le code canadien, mais la définition des mesures discriminatoires, cela tombe sous le sens commun, c'est une question d'appréciation des faits. Donc, on laisse cela aux tribunaux.

La notion de l'exercice d'un droit, il est vrai, est une notion plus facilement définissable que notre code ne définit pas, mais que notre jurisprudence définit de façon très précise.

M. Ciaccia: Non, M. le Président, on pourrait regarder les galées...

M. Johnson (Anjou): C'est comme la notion de bonne foi. Le député de Mont-Royal va me comprendre; c'est comme la notion de bonne foi, elle n'est pas définie dans le code.

M. Ciaccia: C'est difficile mais...

M. Johnson (Anjou): Alors, la notion de mesures discriminatoires est de même nature.

M. Ciaccia: Oui, mais ce n'est pas la même chose.

M. Johnson (Anjou): À moins que le député n'ait une suggestion d'amendement à faire, M. le Président, pour définir la notion de mesures discriminatoires...

M. Ciaccia: Non, j'aurais plutôt une motion pour enlever ces mots du contexte dans lequel vous les placez. Vous faites toujours référence au code canadien, mais ces mots-là ne sont pas utilisés de la même façon dans le code canadien que vous ne les utilisez dans votre projet de loi. Je n'ai pas remis en question la notion de l'exercice d'un droit.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je répète exactement ce que vient de dire le député de Mont-Royal. Il dit: Ces mot-là, dans le code canadien, ne sont pas utilisés de la même façon. Or, le code canadien dit: Refuser d'embaucher ou de continuer à employer ou suspendre, transférer et mettre à pied ni autrement prendre contre une personne des mesures discriminatoires en ce qui concerne un emploi.

M. Ciaccia: M. le Président...

M. Johnson (Anjou): C'est exactement, ou à peu près, textuellement ce qu'on retrouve dans le code canadien.

M. Ciaccia: M. le Président, dans le code canadien, on énumère les activités

syndicales au présent.

M. Johnson (Anjou); C'est l'exercice des droits, M. le Président, ce n'est pas la dimension discriminatoire.

M. Ciaccia: M. le Président, je ne veux pas invoquer la protection de la présidence mais, si le ministre voulait me laisser terminer mon droit de parole...

M. Bélanger: Je lui cède mon tour.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, ce n'est pas parce qu'on est mieux préparé qu'on est arrogant, mais c'est parce qu'on travaille plus fort.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Vous étiez tellement préparés dans d'autres commissions parlementaires que, vraiment, cela faisait pitié.

Une voix: On en a eu une où on était préparé...

M. Ciaccia: Si vous le voulez, on va se calmer. Ce n'est pas nous qui avons demandé de siéger le vendredi soir...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, nous étions prêts à siéger cet après-midi et vous avez refusé votre consentement.

M. Ciaccia: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: On n'a pas siégé hier soir, car on a fait une motion de bâillon, à l'Assemblée nationale, après une journée ou deux de discussions. On nous oblige à siéger le vendredi soir. Je ne voudrais pas que le ministre commence à se plaindre que c'est notre faute si on siège le vendredi soir.

M. Johnson (Anjou): On est payé pour cela.

M. Ciaccia: Si le projet de loi ici devant nous avait été déposé à l'Assemblée nationale en février, mars ou avril et si on avait pu le discuter avec le temps voulu... Le gouvernement ne veut pas cela. Il veut faire adopter ses projets de loi à la vapeur. Il présente les projets de loi à la fin de la session spécialement pour éviter qu'ils soient discutés en profondeur et pour que la population ne soit pas tout à fait au courant de ce qui arrive ici. C'est de cette façon que ce gouvernement fait adopter ses projets de loi, spécialement ceux qu'il serai peut- être un peu plus difficile de faire avaler à la population. C'est la première remarque.

La deuxième remarque - si le ministre pouvait écouter sans m'interrompre - c'est que le contexte dans lequel vous introduisez certains aspects ou certains mots qui sont contenus dans le code canadien, ce n'est pas du tout le même contexte qui est dans votre projet de loi. Je ne répéterai pas tous les arguments que j'ai évoqués en réponse au député de Prévost quand il a essayé de nous dire que ces concepts, ces idées étaient contenus dans le code canadien. Il y a des différences fondamentales entre le code canadien et le projet de loi que vous avez déposé à l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne l'exercice d'un droit, je ne pense pas qu'on ait besoin des leçons du ministre du Travail par intérim. On sait que la jurisprudence définit la façon d'exercer un droit; il y a le jugement que le ministre nous a cité. Mais les questions que nous avions sur l'article 2 ou l'article 3 concernaient la façon dont ces articles sont rédigés pour introduire la notion de discrimination, mais dans un contexte beaucoup plus global, beaucoup plus difficile à interpréter que le code canadien, sans avoir des mesures qui pourraient rétablir un équilibre.

On a l'impression qu'on essaie de répondre aux exigences de certains groupes ou de certaines personnes, individuellement, qui sont responsables... Je ne veux pas donner des noms, parce que je ne veux pas commencer un débat là-dessus. Au lieu de trouver une solution globale qui bénéficierait à tous les travailleurs et qui serait équilibrée, on veut donner l'image qu'on veut favoriser ou protéger les employés. En ce faisant, on crée des abus possibles.

Pourquoi introduire à ce moment-ci, de la façon dont le gouvernement le fait, la notion de mesures discriminatoires sans en donner la définition, sans avoir d'autres mesures dans le projet de loi qui pourraient un peu protéger ceux qui seront impliqués dans cette situation? C'est un reproche qu'on pourrait faire. On ne répétera pas tous les arguments. Pourquoi faites-vous des changements seulement à certains articles? On sait qu'on a un problème global. Pourquoi n'avez-vous pas procédé? Quelle est l'urgence de faire adopter ce projet de loi maintenant?

M. Johnson (Anjou): Si c'était urgent, on ferait une motion d'urgence.

M. Ciaccia: Je ne veux pas utiliser tout le temps de parole...

M. Johnson (Anjou): On va seulement faire une motion de clôture.

M. Ciaccia: ...qui m'est alloué. Je voulais seulement rétablir certains faits et

faire ces remarques en réponse au ministre et au député de Prévost.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, c'est simplement pour préciser ce que dit l'article. La notion de mesures discriminatoires, c'est ce que vise à sanctionner le code. Les raisons pour lesquelles le code vise à sanctionner la discrimination, c'est que c'est l'exercice d'un droit. L'exercice d'un droit, dans la législation canadienne, est énuméré sous forme d'une série de sous-paragraphes dans un article du code canadien, alors que, dans le code du Québec la notion de l'exercice d'un droit est une notion jurisprudentielle.

Est-ce que l'article 3 est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, je n'"embarquerai" pas dans la discussion des droits. Je n'ai pas de formation en droit, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): On est ici pour faire des lois.

M. Cusano: Oui, c'est vrai. Vous savez que, dans un bon Parlement, il faut avoir de tout.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Il faut faire la loi.

M. Cusano: Oui, il faut faire la loi, mais il faut aussi regarder la façon... Êtes-vous en train de me dire, M. le ministre, que seuls les avocats devraient être des députés?

M. Johnson (Anjou): Non, bien au contraire.

M. Cusano: Au contraire, oui.

M. Johnson (Anjou): Bien au contraire, M. le Président, je dis simplement que c'est le rôle des députés de faire des lois.

M. Cusano: Oui, exactement, alors, c'est bien important...

M. Johnson (Anjou): Donc, je pense qu'il faut qu'on s'en occupe.

M. Cusano: Je ne veux pas "embarquer", en ce qui me concerne, dans ce dialogue. Je reviens à la question des mesures discriminatoires. C'est parce que le Code du travail n'est pas réservé qu'aux avocats. Le travailleur, lui...

M. Johnson (Anjou): Surtout.

M. Cusano: Certainement. Je ne dis pas qu'il le lit tous les soirs avant d'aller se coucher, mais, assurément, une fois de temps en temps il le regarde. Les travailleurs ne sont pas tous des avocats. Alors, lorsque vous arrivez avec des mots comme "mesures discriminatoires", c'est tellement assujetti à une interprétation. Je vais vous dire franchement, je suis entièrement d'accord avec le reste de l'article...

Une voix: ...

M. Johnson (Anjou): Ah oui?

M. Cusano: Non, non, je n'ai pas parlé sur l'article 3.

M. Johnson (Anjou): Vous êtes d'accord. Ah, vous n'avez pas parlé sur le trois?

M. Cusano: Je n'ai pas parlé sur le trois.

M. Johnson (Anjou): C'est votre collègue, le député indépendant de Mégantic.

M. Cusano: Nous sommes très libéraux de pensée de ce côté-ci, M. le Président. Nous ne sommes pas tous des machines à voter. On l'a déjà démontré. On ne se lève pas tous ensemble. On ne croit pas fermement au pouvoir comme fin, mais plutôt à nos principes. Lorsque vous parlez de mesures discriminatoires, il me semble de voir l'employé qui peut parfois ne pas être très heureux dans son emploi. Il peut se sentir, dans son interprétation, parce que c'est une question d'interprétation: c'est toujours cela le point de ces fameuses mesures discriminatoires. J'aurais pu évoquer la discrimination en tant que Néo-Canadien, par exemple... Si je n'avais pas été élu dans le comté de Viau, on aurait pu dire: C'est de la discrimination contre une personne d'origine italienne. Cela laisse la porte ouverte à tellement d'interprétations.

Même si le ministre semble être convaincu, du côté de l'Opposition on est intéressé à passer à travers ces articles.

M. Johnson (Anjou): Ce ne sera pas long.

M. Cusano: Oui, oui. On voudrait voir les 110 articles. C'est peut-être une question à laquelle on ne pourra pas me répondre, M. le Président, mais, avec le temps qu'il nous reste, même si on voulait, comme c'est l'habitude, passer cela à la vapeur, les 107 articles qu'il nous reste à voir, si quelqu'un a une petite montre, il peut certainement calculer que, si on voulait adopter tous ces articles ce soir, il faudrait les adopter en-dedans d'une seconde et demie chacun.

Je suis sûr et certain que, lorsque vous

avez rédigé ce projet de loi - il y a quelqu'un qui l'a rédigé - vous avez compté le nombre d'heures qui ont été employées... je trouve cela aberrant. Je ne sais pas. Je ne veux pas vous embarrasser en vous demandant combien d'heures, mais peut-être que vous pourriez répondre combien d'heures il a fallu pour rédiger ce projet de loi. Pas vous, parce que vous n'étiez pas là, quand il a été rédigé, M. le Président, mais l'adjoint parlementaire pourrait certainement nous le dire. On me demande d'adopter 107 articles dans l'espace de deux heures et demie.

M. Lavigne: Si vous aviez commencé à tempsl

M. Cusano: M. le Président, je ne l'ai pas interrompu...

M. Lavigne: Cela a pris trois jours pour deux articles.

M. Cusano: Lorsqu'il m'interrompt comme cela, cela m'empêche de procéder. J'allais proposer un simple amendement. Je vous donne même la liberté de le faire de votre côté.

Ces mots "mesures discriminatoires" m'inquiètent. J'aimerais que l'adjoint parlementaire nous dise combien de "man-hours" cela a pris au ministère pour rédiger ce document.

M. Johnson (Anjou): On y travaille ensemble depuis un ou deux ans.

M. Dean: Nous avons des conditions de travail très humaines dans la fonction publique. On n'a pas minuté cela. On n'a pas de "time study men" dans le gouvernement. Si on en avait, vous diriez que c'est trop.

M. Bélanger: C'est pour cela que les taxes sont trop élevées.

M. Cusano: Alors, vous ne savez pas combien de temps cela a pris pour en arriver à cela?

M. Dean: Les plus bas salaires possible, pas de syndicats et du "time study" partout: cela va bien.

M. Bélanger: Et vous avez le courage de voter les lois 70 et 1051

M. Dean: On va savoir quels sont les intérêts qu'ils défendent.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Viau a la parole.

M. Cusano: Je remarque que l'adjoint parlementaire...

M. Bélanger: ...et vous voulez nous les faire adopter du jour au lendemain, en 24 heures!

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. Perron: ...

M. Bélanger: Le député de Duplessis est fatigué.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le député de Viau, vous avez la parole sur l'article 3.

M. Cusano: M. le Président, si cela ennuie le député de Duplessis d'être ici. Je n'ai pas d'objection, il peut quitter la salle.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! l'article 3, s'il vous plaît!

M. Bélanger: On peut le déplacer.

M. Cusano: Oui, on peut le déplacer. Sur cette question de déplacement qui a été soulevée, c'est vrai que... Vous ne voulez pas que j'en parle?

Une voix: On va les laisser terminer...

M. Johnson (Anjou): La dernière fois que j'ai vu cela, c'était à une émission qui s'appelait "Le travail à la chaîne".

M. Cusano: Est-ce que j'ai le droit de parole, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): Vous avez toujours le droit de parole sur l'article 3, monsieur.

M. Cusano: Merci, "mesures discriminatoires", c'est cela. Peut-être devrait-on revenir aux intimidations, car, de l'autre côté, on essaie de faire de l'intimidation en ce moment.

M. Johnson (Anjou): Oui, si on parlait d'intimidation.

M. Cusano: J'aimerais bien passer à travers tout cela. La taverne est ouverte, M. le Président, je pense. À propos des mesures discriminatoires, est-ce qu'on pourrait me définir exactement ce quelles sont? Je ne voudrais pas qu'on embarque dans du jargon de droit. Est-ce qu'on pourrait me le dire en termes très simples?

Le Président (M Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je ne prétends pas répondre à ce que peuvent être toutes les mesures descriminatoires. Encore une fois, la

notion de "discriminatoire" comme la notion de "bonne foi" est une chose qui se fait à partir de l'interprétation des faits. Le député de Prévost a donné de très bons exemples de ce que peut être un comportement descriminatoire ou des mesures discriminatoires à l'égard d'un individu. Par exemple, le fait de confier, pour des motifs de l'exercice d'un droit découlant du code, des tâches plus lourdes à une personne, et les tribunaux - on peut le présumer -n'interpréteront pas cela comme des imbéciles. Au contraire, le Tribunal du travail est composé de gens d'expérience, qui, par définition, ont à interpréter des situations de faits et à appliquer autour de la notion du mot "discriminatoire" les sanctions qu'ils voient à partir des faits qu'ils ont, le cas échéant.

Pour répondre à une autre question du député - je pense qu'il en avait deux, il en a oublié une en cours de route en se concentrant sur la deuxième - à propos du nombre d'heures, je lui dirais qu'au rythme où vont les choses, cela prendra 220 jours pour adopter ce projet de loi.

M. Cusano: Vous ne parlez pas de bonne foi, monsieur, lorsque vous répondez cela.

M. Johnson (Anjou): Je pense que j'ai répondu sur la notion de "discriminatoire". Je pense que c'est une question de fait et les questions de fait doivent être interprétées par le commissaire ou le tribunal et je pense que l'on peut présumer que, de façon générale, le commissaire et le tribunal comprennent des membres, des individus, des hommes et des femmes aptes à interpréter adéquatement les faits en fonction du principe de la discrimination.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: C'était tout simplement ma préoccupation, M. le Président, et c'est la préoccupation du travailleur qui lit le Code du travail. Oui, je suis d'accord, les tribunaux vont décider de ce que sont des mesures discriminatoires. Lorsqu'on parle de bonnes relations du travail - on a souvent entendu le député de Prévost parler de bonnes relations du travail - c'est de fournir des documents, qui sont clairs et précis afin qu'on ne commence pas à charrier sur une question de mesures discriminatoires. C'est là mon inquiétude. Je vous dis cela en tant que personne sortie du peuple, de personne très simple. Cela pourrait apporter des ennuis aux travailleurs et à l'employeur parce que commencer à enclencher tout ce processus lorsqu'on pense qu'il y a des mesures discriminatoires, c'est, un peu, une perte de temps pour tout le monde.

Lorsqu'on parle dans cet article de mots comme "congédier" - c'est clair, ce mot, c'est bien clair - je n'ai pas d'objection au mot "congédier"; aux mots "suspendre", c'est clair cela. Pourquoi l'autre n'est-il pas aussi clair? Je sais qu'il y a beaucoup de chômage au Québec; est-ce pour donner du travail aux avocats qu'on a inclus cet article sur les mesures discrimatoires? Il me semble que, au lieu d'améliorer les relations du travail, on prépare des textes énormes, M. le Président. Vous savez, j'y ai déjà fait référence ici à la Chambre, je me demande si le député de... Si l'on prend la convention collective - je ne devrais pas appeler cela une convention collective, parce qu'elle n'existe plus - ou plutôt le décret s'appliquant aux enseignants... Vous connaissez le nombre de pages que contient ce décret? Eh bien! en Saskatchewan, l'entente collective entre la majorité des commissions scolaires, (les school boards), et les professeurs, est contenue dans une page et demie. Il est clair qu'ils ont moins de problèmes. Pourquoi en avons-nous? On s'accroche sur des virgules, des points-virgules, etc. Sur ce plan aussi, il y a "mesures discriminatoires". En ce qui nous concerne, nous croyons que cela portera à confusion.

Lorsqu'une personne est convaincue d'être victime de mesures discriminatoires, même si elle va devant les tribunaux et qu'on dit qu'il n'y a pas de mesures discriminatoires, lorsque cette personne retourne au travail, c'est parce qu'un juge l'a décidé. Cela ne veut pas dire qu'elle comprend cette situation.

M. le Président, je ne vois pas la nécessité d'avoir inclus, dans ce projet, le terme "mesures discriminatoires". Qu'on parle de congédiement, c'est précis, qu'on parle de suspension, c'est aussi précis. Le mot "déplacer" même, comme l'a mentionné le ministre était déjà dans le code tel quel, le mot "déplacer" est ambigu. "Déplacer" veut dire... Vous consulterez le dictionnaire, je vois que vous voulez...

M. Lavigne: La définition du mot "discriminatoire", M. le député, si vous me le permettez, à ma façon, très très simplement...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le député de Viau, vous avez la parole. M. le député de Beauharnois, vous pourrez donner votre définition lorsque vous utiliserez votre temps de parole.

M. Lavigne: À moins que vous ayez l'assentiment, M. le Président, du député qui a la parole? Je pense que le député accepterait...

Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il

y a consentement?

M. Cusano: Non, M. le Président, il n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, lorsque les ministériels ont la parole, aussitôt que j'ouvre la bouche, vous m'interrompez, mais lorsqu'ils commencent à m'interrompre, il semble que cela prend un peu plus de temps...

M. Lavigne: Vous êtes certain que vous étiez très ouvert et très compréhensif...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cusano: C'est la question qui nous concerne. Ce sont des textes clairs et précis. Dans ce projet de loi, au lieu de rendre le Code du travail plus clair et plus précis, on le rédige de façon à le rendre encore plus ambigu. Ce sera peut-être à l'avantage des avocats et des syndicats, parce que les syndicats doivent avoir une raison d'être. Vous savez, s'il n'y a pas de litiges entre l'employeur et l'employé, le syndicat n'a plus sa raison d'être.

Une voix: ...

M. Cusano: C'est exactement ce que je dis, M. le Président. Pour justifier l'existence d'un syndicat, on rend les textes plus...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre s'il vous plaît!

Une voix: II est tanant, lui;

M. Lachance: Question de règlement, M. le Président. J'aimerais savoir combien il reste de temps au député de Viau?

Le Président (M. Desbiens): II lui reste 5 minutes.

M. Lachance: C'est triste, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci. Ceux qui désirent quitter de bonne heure, je voudrais leur rappeler que ce n'est pas moi qui les ai obligés à venir ici, c'est leur leader. Il y a peut-être un meilleur dialogue entre moi et le leader.

C'est mon inquiétude et si on veut vraiment faire quelque chose de bien, il me semble qu'il faudrait rendre ce texte plus clair, M. le Président. En ce qui me concerne, il ne l'est pas. C'est sur ce sujet que je termine.

M. Johnson (Anjou): Le mot "discrimatoire", M. le Président, est contenu dans le dictionnaire. La première chose que font les juges, les avocats ou les individus, lorsqu'ils essaient d'interpréter les lois, est de consulter le dictionnaire. Il n'est pas nécessaire d'être avocat pour faire cela, soit dit en passant. On se comprend sur ce point, Dieu merci!

M. Cusano: Lorsque j'étais professeur, je m'y référais assez souvent M. le ministre...

M. Johnson (Anjou): Je sais que le député, qui a une longue carrière dans l'éducation, a sûrement ouvert à quelques occasions le dictionnaire. Il verra qu'au mot "discriminatoire", on dit ceci: "Qui tend à distinguer un groupe humain des autres à son détriment." On retrouve cela dans le dictionnaire Littré ou Larousse, non c'est le petit Robert.

M. Cusano: Ah! C'est le petit Robert.

M. Johnson (Anjou): II s'en vient chez vous, cela ne sera pas long. Discrimination: "le fait de séparer un groupe social des autres en le traitant plus mal." Il y a deux notions. Il y a une notion de "distinguer entre des personnes ou des groupes" et, deuxièmement, d'"agir au détriment de". Il y a une troisième notion, qui est assez fondamentale, qu'on retrouve dans le Code du travail, qui s'appelle l'interdiction de la modification des conditions de travail au moment où on est en processus d'accréditation; c'est à l'article 59. Or, cet article 59 lui-même, à l'égard du maintien des conditions de travail, a fait l'objet d'une jurisprudence absolument abondante. On peut présumer, je pense, d'une façon assez raisonnable, qu'un juge devant interpréter la notion discriminatoire se référera, d'une part, au petit Robert et à d'autres dictionnaires; deuxièmement, à la jurisprudence issue de l'article 59 et, troisièmement, à la jurisprudence des Labour Relations Boards canadiens qui appliquent la notion de "discriminatory measures". Je pense qu'avec tout cela, il y a des instruments pour interpréter fort bien ce que signifie le mot "discriminatoire" en se rappelant évidemment que, à chaque fois, il s'agit d'une question de fait.

M. Ciaccia: Est-ce que le Code canadien du travail prévoit aussi une indemnité, s'il est prouvé qu'il y a eu des mesures discriminatoires à l'éqard de ce salarié, - je n'ai pas cet article du code

canadien devant moi - équivalente au salaire et aux autres avantages dont l'a privé la sanction? On semble fixer l'indemnité dans le projet de loi. Est-ce que...

M. Johnson (Anjou): Oui, à l'article 189 du code canadien, chapitre L-1, on prévoit que l'équivalent de notre commissaire, le "board member", peut effectivement accorder une indemnité. De la même façon que non seulement il peut forcer la réintégration ou ordonner d'autres mesures, il peut également obliger un employeur à embaucher, ce que notre code ne prévoit pas malgré les modifications faites par le projet de loi 17.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Très brièvement, M. le Président, au cas où la définition du dictionnaire, du petit Robert n'aurait pas permis au député de Viau de comprendre le mot "discriminatoire", je voudrais juste lui donner un exemple selon lequel la discrimination pourrait être inacceptable si on devait l'appliquer ici, dans nos travaux en commission parlementaire ou à l'Assemblée nationale. En supposant qu'on ferait une distinction entre les différentes ethnies chez les députés et qu'on n'accorderait pas le droit de parole aussi long à un député italien qu'à un député québécois, je ne pense pas que vous accepteriez cela. Cela serait une règle discriminatoire. Je pense que, à toutes fins utiles, cela serait inacceptable. Vous qui êtes d'ethnie italienne, je pense que vous seriez le premier à rouspéter s'il fallait qu'on vous donne seulement 10 minutes d'intervention quand on en donne 20 à un député québécois. Déjà, par votre signe de tête, vous n'admettriez pas cela. Cela serait de la discrimination et je pense que c'est à peu près le sens que donne le petit Robert à sa définition du mot "discriminatoire". C'est pour cela qu'on l'introduit dans le projet de loi, parce qu'on ne voudrait pas que cela se produise chez les travailleurs qui, pour un même travail donné, auraient un salaire différent. Cela serait de la discrimination. Pour un même travail, qu'une ethnie soit moins payée qu'une autre, exemple, moins payer les Noirs que les Blancs pour un même travail, cela serait de la discrimination. C'est autant d'exemples qu'on pourrait donner. Je pense qu'il serait inacceptable qu'on introduise cela.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: il n'y a pas de question de privilège à une commission parlementaire.

M. Lavigne: Ce n'est pas une question de privilège que j'ai faite, M. le député. C'est une intervention que j'ai faite, tout simplement. (21 h 45)

M. Ciaccia: Très souvent, on est assujetti non pas par la majorité des membres du Parti québécois, mais, très souvent, par certains membres du Parti québécois à des remarques que je qualifierais de racistes. Les remarques - j'invoque le règlement - les remarques du député de Beauharnois sont de nature raciste. Pour invoquer...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la question de règlement.

M. Ciaccia: Laissez-moi finir. Se référer à l'origine ethnique d'un des députés de l'Assemblée nationale, je crois que c'est tout à fait déplacé. Cela trahit la pensée du député. Nous sommes tous des Québécois, nous avons tous les mêmes droits. Essayer d'introduire cette notion dans nos discussions, je trouve cela totalement inacceptable. J'ai participé à une autre commission parlementaire où l'un des témoins a essayé d'utiliser cela comme exemple et le président l'a ramené à l'ordre d'une façon très péremptoire. J'espère que nous pourrons continuer nos travaux sans qu'il soit besoin de nous référer à l'origine ethnique des membres de cette Assemblée et que nous pourrons nous en tenir au fond du projet de loi et continuer à discuter dans un esprit plus démocratique que les propos...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la question de règlement.

M. Ciaccia: ...du député de Beauharnois le laissent entendre.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Sur la question de règlement, M. le Président. Je ne suis pas sûr des articles qu'invoque le député.

M. Ciaccia: L'article 99.

M. Johnson (Anjou): L'article 99? M. le Président, si je ne me trompe, cela concerne la question de privilège, et ce n'est pas applicable en commission parlementaire.

Nonobstant ceci, étant donné que le député a manifesté son point de vue, je vais manifester le mien. Nous étions en train de discuter, à la demande même du député de Mont-Royal et du député de Viau, de la notion de mesures discriminatoires. L'Opposition s'est efforcée d'étirer le débat pendant une demi-heure pour finalement poser une question précise qui était: "Qu'est-

ce qu'on entend par "discriminatoire"? Donnez-nous des exemples."

J'ai cité le dictionnaire, M. le Président, et le député de Beauharnois a dit qu'un exemple de ce qu'est la discrimination, ce serait une mesure qui viserait, sur une base ethnique, par exemple, à restreindre le droit de parole d'une personne. Cela m'apparaît clair et je pense que d'affirmer que les propos du député de Beauharnois sont de nature raciste relève de la paranoïa du député de Mont-Royal et d'un esprit parfaitement mesquin.

M. Ciaccia: M. le Président, le député d'Anjou a vraiment contrevenu à l'article 99 en m'imputant des motifs, en utilisant des paroles qui sont... Son arrogance, comme je l'ai signalé hier, est surpassée seulement par son manque de respect pour les autres membres de cette commission, spécialement les membres de l'Opposition. Il n'y a pas de paranoïa. La paranoïa existe de l'autre côté. Les exemples qui ont été donnés, je le répète, ce sont des exemples qui traduisent, qui trahissent plutôt la pensée de ceux qui les ont cités et je pourrais faire la même remarque quant aux propos du député d'Anjou.

M. le Président, je pense qu'on devrait continuer notre...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous permettez. Étant donné que le député est intervenu à deux reprises, je pense que je peux le faire aussi. Je rappellerai simplement au député de Mont-Royal que je suis d'origine irlandaise.

M. Ciaccia: Et puis, qu'est-ce que cela prouve? Je n'ai jamais invoqué l'origine du député d'Anjou, qu'elle soit irlandaise ou autre.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît'. M. le député de Mont-Royal, messieurs les députés. Il n'y a pas, dans l'article 99...

M. Ciaccia: M. le Président, je demande que le député d'Anjou retire ses paroles sur la paranoïa.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si le député de Mont-Royal veut retirer l'accusation de racisme qu'il a portée à l'égard du député de Beauharnois, je voudrai bien retirer mes paroles. Autrement, non, M. le Président.

M. Ciaccia: M. le Président, si, pour la bonne marche de nos travaux... Et je pense que je n'ai pas porté d'accusation de racisme contre le député de Beauharnois, mais j'ai dit...

M. Johnson (Anjou): Ah, oui! Ah oui! Vous regarderez les galées!

M. Ciaccia: ...que cela démontre un esprit. Ce sont des propos. Je ne l'ai pas accusé d'être raciste. Je pense que vous devriez être un peu plus précis. Si vous avez une formation juridique, M. le député d'Anjou, vous devriez être un peu plus précis.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Ce sont des propos racistes. Je ne l'ai pas accusé d'être raciste. Une personne peut énoncer des propos qui ont l'air d'être et qui semblent racistes sans qu'elle soit elle-même raciste. Je n'ai pas porté cette accusation. Et si j'ai porté cette accusation... M. le Président, c'est qu'on veut défendre des droits qui sont fondamentaux. Vous parlez de mesures discriminatoires, cela fait des années qu'on essaie de défendre certains droits contre le genre de propos qu'on a entendus ce soir. C'est malheureux qu'on ait évoqué cet exemple dans le contexte actuel. Je n'ai pas porté d'accusation de racisme mais j'ai dit que c'étaient des propos plutôt racistes.

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal...

M. Ciaccia: S'il faut que je retire ces paroles - je ne veux pas porter d'accusation de racisme - si mes paroles ont dépassé ma pensée, je suis prêt à les retirer.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, dans les circonstances, étant donné que le député veut bien retirer ses paroles à l'égard du député de Beauharnois, s'il y a une question d'interprétation je dirai simplement que cela relevait d'une interprétation paranoïaque, de la même façon qu'il parle de propos racistes. Je veux bien retirer mes paroles, si je l'ai traité de paranoïaque.

Le Président (M. Desbiens): Alors, de propos en propos, l'article 3 est-il adopté?

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.

M. Cusano: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. J'appelle l'article 4.

M. Johnson (Anjou): Article 4, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): II s'agit de la formulation de la plainte. C'est simplement la mécanique prévue dans l'application de l'article 15 du code ou de l'article 3 précédent tel que modifié par l'article 3 du projet de loi. Je pense que l'article parle de lui-même, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Ciaccia: Si je comprends bien, l'article 4 prolonge les délais: au lieu d'être 15 jours, ce sera 30 jours. Je pense, M. le Président, que c'est une mesure que nous devons approuver, parce que souvent quelqu'un a des droits et, à cause de délais trop courts, cette personne ne peut pas les exercer; c'est vraiment un déni des droits de la personne concernée, de l'employé concerné. Nous acceptons qu'on prolonge le délai de 15 à 30 jours pour permettre au syndiqué, à l'employé d'avoir le délai nécessaire pour se prévaloir de ses droits. Cela élargit aussi un peu les droits de l'employé, qui ne sont pas limités aux questions de congédiement, de suspension, de déplacement mais s'appliquent aussi aux sanctions du Code du travail ou aux mesures dont il se plaint.

Je crois que l'article, de la façon qu'il est rédigé, est assez clair. Il prolonge les délais, donne l'occasion à l'employé de se prévaloir de ses droits dans un délai raisonnable, parce que 30 jours, je crois que c'est un délai raisonnable; peut-être que 15 jours, c'était un peu trop limitatif. Cela élargit aussi les conditions dont l'employé peut se plaindre.

M. le Président, je suis d'accord avec la rédaction, l'esprit et le contenu de cet article.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, je reviens encore à mon mot "déplacé" parce que, à l'article 4, on le retrouve encore une fois. J'aimerais pour une fois que le ministre nous réponde sérieusement. Le salarié qui croit avoir été illégalement congédié - ce n'est pas un problème - ou suspendu ou déplacé, j'aimerais que le ministre me donne un exemple de cet employé qui pourrait être illégalement déplacé.

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'encore une fois le député de Prévost a donné d'excellents exemples tout à l'heure; si on le permet, il pourrait prendre la parole là- dessus. Est-ce que le député accepte? M. Bélanger: Oui. M. Dean: Quel article?

M. Bélanger: Article 4. Un employé qui aurait été illégalement déplacé.

M. Dean: Un employé muté d'un poste à un autre avec perte de salaire parce qu'il a exercé un droit reconnu par le code.

M. Bélanger: Ce n'est pas mentionné ici: déplacé avec perte de salaire. C'est écrit: un salarié qui croit avoir été illégalement congédié. Est-ce qu'on peut illégalement déplacer quelqu'un? C'est cette question que je me pose.

M. Johnson (Anjou): C'est illégal si cela a été fait de façon discriminatoire à la suite de l'exercice d'un droit résultant du code. La notion de déplacement, c'est une notion objective. L'individu est passé de telle assignation à telle autre assignation. On présume que l'endroit où il est affecté après le déplacement est un endroit qui le défavorise. Il se ramasse dans une équipe de nuit, il se ramasse dans un emploi plus difficile, avec une charge plus lourde ou, encore, il est moins payé à l'endroit où il est déplacé. Le déplacement, c'est une question de fait et objective. Cela devient illégal dans la mesure où on dit que l'employeur l'a fait parce qu'il a été "discriminant" à son égard, qu'il y a eu une mesure discriminatoire. Pourquoi a-t-elle été discriminatoire? Parce que le travailleur invoque le fait qu'il a exercé un droit en vertu du Code du travail et qu'on l'a fait parce qu'il exerçait un droit. Par exemple, il a essayé de se syndiquer, il a décidé de déposer un grief sur autre chose et il se fait déplacer. Le commissaire constate: Est-ce qu'il y a eu déplacement; ce déplacement, en pratique, est-il pénalisant, d'une façon ou d'une autre - pas nécessairement financièrement, mais ce peut être financièrement comme ce peut être pour d'autres raisons, parce que c'est plus lourd, moins intéressant? - Enfin est-ce que ce déplacement résulte d'un comportement discriminatoire, qui est présumé dans la mesure où l'individu a exercé des activités syndicales en vertu de l'article qui suivra?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Prévost.

M. Dean: Je voudrais bien aider à faire l'éducation du député de Mégantic-Compton sur le sens des mots dans le Code du travail. Mais je cherche dans l'article 4 qu'on discute, ou si, par erreur, l'article 4 a été adopté, l'article 5 aussi; je ne vois le mot

"déplacement" ni dans l'un, ni dans l'autre. C'est pour cela que je me pose des questions. Je suis bien prêt à répondre à des questions, mais qu'on les pose sur le sujet en discussion.

Le Président (M. Desbiens): C'est parce que l'article 4 se réfère à l'article 3.

M. Johnson (Anjou): Voyez comme on est large, on répond même aux questions que vous posez sur les mauvais articles!

M. Dean: Vous avez sûrement devant vous la loi 17, province de Québec, Canada.

M. Bélanger: M. le Président, c'est évident que c'est dans la loi 17, c'est évident qu'on retrouve ce mot "déplacé" à l'article 3 et également à l'article 4.

M. Dean: Non, ce n'est pas là. En tout cas, on a répondu quand même.

M. Bélanger: Peut-être qu'on n'étudie pas la même loi, c'est pour cela qu'on a de la difficulté à s'entendre. Peut-être que cela irait beaucoup plus vite si tout le monde avait les mêmes documents.

Une voix: II ne ferait pas de "filibuster" s'il n'avait pas la bonne loi.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je pense que ce n'est pas le député de Mégantic-Compton qui ne lit pas la bonne loi, c'est le député de Prévost. On fait référence aux mesures visées à l'article 15. À l'article 15, on parle de déplacement. Le mot "déplacement" se trouve, par définition, par implication, dans l'article 4.

M. Dean: À trois, on finit par se comprendre. J'ai commencé par répondre à la question de bonne foi, même si c'était déplacé.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Cusano: Un instant, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Le député de Valleyfield... M. Lavigne: ...de Beauharnois.

M. Cusano: Le député de Beauharnois. Valleyfield est dans Beauharnois.

M. Lavigne: C'est dans Beauharnois.

M. Cusano: Je connais très bien la ville de Valleyfield. Cela m'a un peu surpris que vous ayez cité ce genre d'exemple.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau, sur l'article 4...

M. Cusano: Oui, oui.

Le Président (M. Desbiens): ...et non pas sur une question de règlement qui a été réglée.

M. Cusano: Oui, oui, mais cela me surprend qu'il ait mentionné cela. Je voulais simplement dire...

M. Ciaccia: Vaut mieux écouter les propos du ministre que ceux du député de Beauharnois.

M. Bélanger: Un si beau coin de pays si mal représenté!

M. Cusano: Parfois, quand on fait partie d'une minorité, pas seulement parlementaire mais autre, on a certains problèmes.

Le Président (M. Desbiens): Sur l'article 4, M. le député de Viau, s'il vous plaît!

M. Cusano: Je suis d'accord sur le délai de 15 jours à 30 jours. Parfois, la bureaucratie est tellement énorme que j'accepte cela volontiers. Le droit du travailleur tel quel ne sera pas brimé. Il y a encore une question de précision. J'ai bien aimé la façon dont cette question de déplacement a été définie par le ministre et par l'adjoint. Quel mal y aurait-il à définir ce placement de la façon dont vous l'avez fait, très éloquemment?

M. Johnson (Anjou): C'est parce que c'est une question de fait.

M. Cusano: Ah bon! (22 heures)

M. Johnson (Anjou): Je pense que le député va comprendre l'objectif de notre démarche commune autour de cette table, si on peut y aboutir. C'est d'établir les balises, les principes, certaines définitions qui indiquent l'orientation que l'Assemblée nationale donne par une loi de la "volonté" du législateur. Les tribunaux regardent le mot "déplacer", consultent le dictionnaire, examinent les faits et essaient de voir si ce qu'ils voient dans le dictionnaire et l'interprétation de la réalité les amènent à considérer qu'il y a un déplacement.

M. Cusano: Seulement une précision, M. le ministre, si vous me le permettez.

M. Johnson (Anjou): On ne peut pas faire cas d'une nomenclature épaisse comme un annuaire de téléphone de la ville de Québec ou de Montréal pour chaque cas. Le député de Mégantic-Compton parlait d'un l'individu qui serait déplacé du camion à la chaufferie parce qu'il y a eu des accidents à la chaufferie. On ne peut pas inclure dans le code, de tels exemples: quelqu'un est déplacé du camion à la chaufferie. Il y a des milliers de situations. Alors, on prend le mot "déplacer" et on présume que quelque part, un juge appelé à se prononcer sur ces questions, va regarder la réalité, le dictionnaire et la loi, et va considérer qu'il y a eu un déplacement et voir si ce déplacement est visé par l'article.

M. Cusano: M. le Président, ma préoccupation, c'est encore cette question. Lorsqu'on parle de bonnes relations du travail - et je reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure - c'est la question du travailleur... Votre explication telle quelle, je suis sûr que... Même si nous, politiciens, pensons que tout le monde nous écoute et lit le journal des Débats, ce n'est pas cela. Qu'est-ce que le travailleur regardera? Ce sera justement le code tel qu'amendé. C'est pour cela que j'aurais apprécié une définition aussi claire dans cet article. Quand vous le voulez, vous êtes capable d'être très clair, M. le ministre. C'est dans ce sens, parce que je me place dans les souliers de ces travailleurs. Pour éviter tout problème ou toute préoccupation définie de telle façon, que l'article n'y soit pas ou qu'il soit défini de façon très concrète. C'est cela ma préoccupation.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que c'est une préoccupation tout à fait pertinente. C'est pour cela que le ministère du Travail publie, à l'occasion et périodiquement, les fascicules des résumés qui illustrent... Lorsqu'on a adopté la loi 45, dans les mois qui ont suivi, on a publié une série d'une dizaine de fascicules qui reprenaient les principes de base du code, mais écrits dans un langage quotidien et précisés par des exemples et même par certains dessins pour fins de précision.

Je ne pense pas qu'on puisse rédiger nos lois ainsi. Je dis simplement que la conjonction des articles et la lecture de différents articles que j'ai évoqués tout à l'heure peut amener quelqu'un, s'il veut l'écrire sous forme de prose, à donner le type d'explications qu'on donnait tout à l'heure. C'est pour cela que le ministère publie de tels fascicules, à l'occasion, qui sont disponibles. C'est rêver que de s'imaginer que les lois vont pouvoir être écrites très différemment de la façon dont on les écrit encore aujourd'hui. Cela va continuer. Depuis la deuxième partie de l'Empire romain que cela dure et cela va durer encore un bon bout de temps. Je suis sûr que vous ne m'en voudrez pas d'avoir évoqué l'Empire romain.

M. Cusano: Pas du tout, M. le Président. Peut-être serait-il bon de mentionner que l'Empire romain est tombé une fois. J'ai seulement un commentaire sur cet article. Lorsque vous allez préparer ce fascicule, j'espère qu'on va se référer aux rubans et qu'on emploiera les mots tels que vous les avez employés, et pas d'autre interprétation.

Le Président (M. Desbiens): L'article 4 est-il adopté?

M. Cusano: Sur division.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.

J'appelle l'article 5. Est-il adopté?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'article 5, c'est la formulation de la présomption qu'on évoquait tout à l'heure. Ici, elle est assez classique. Elle correspond au type de présomption qu'on retrouve habituellement dans le code. Encore une fois, elle s'applique ici à la notion de mesures discriminatoires, déplacement, suspension ou congédiement.

L'article 5 est-il adopté, M. le Président?

M. Cusano: Non, non, un instant, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Ciaccia: Excusez-moi, M. le Président. Si je comprends bien, l'article 5 comporte un amendement à l'article 17 du Code du travail. À l'article 17, dans la loi actuelle, non modifiée, il y a une présomption limitée en faveur du salarié en cas de congédiement, de suspension, de déplacement à cause de l'exercice du droit du salarié. Autrement dit, au moment où le salarié exerçait un droit résultant du code sur une question de congédiement, de suspension ou de déplacement, il y avait une présomption en sa faveur.

Maintenant, on semble ajouter à cette présomption toute sanction qui lui aurait été imposée. Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer cet ajout? Est-ce qu'on ne crée pas des situations qui peuvent être maintenant beaucoup plus difficiles? Lorsqu'on parle de congédiement, de suspension ou de déplacement, ce sont des cas assez précis et c'est peut-être quelque chose qui peut être identifié. L'employeur doit prouver que le congédiement ne résulte pas de causes pour lesquelles le salarié se plaint. Pourquoi

ajouter cela à toutes les autres sanctions, parce qu'il peut y avoir des causes difficiles à prouver?

M. Johnson (Anjou): D'accord. L'amendement à l'article 17 du code a essentiellement pour objet d'introduire les mots suivants: "...l'objet d'une sanction ou d'une mesure visée à l'article 15..." À toute fins utiles, c'est pour établir la concordance avec l'article 15, étant donné qu'on a introduit le principe de discrimination dans le cadre de l'exercice d'un droit. Quand on parle de la présomption, il faut se référer à l'article 15.

Je fais remarquer ici au député qu'on ne se réfère pas à l'article 14. Donc, cela ne couvre pas la notion d'embauché, cela ne couvre que la notion de déplacement, suspension, mesures discriminatoires ou congédiement.

M. Ciaccia: Mais la référence à l'article 15 est-elle un amendement que vous avez apporté au projet de loi?

M. Johnson (Anjou): Non. C'est-à-dire que l'article 17 du Code du travail est modifié par l'article 5 du projet de loi 17. Est-ce qu'on se comprend bien?

M. Ciaccia: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): Le seul contenu, la substance de l'article 5 est dans le sens de faire en sorte que, à l'article 17 du code, qui existait déjà et dans lequel il y avait déjà une présomption dans le cas de congédiement, de suspension et de déplacement, cette présomption puisse s'appliquer dans le cas de mesures discriminatoires ou de représailles à cause de l'exercice d'un droit résultant du code. Pour faire cela, il faut introduire les mots: "...l'objet d'une sanction ou d'une mesure visée à l'article 15..."

M. Ciaccia: Vous ajoutez les mots "sanction"...

La Présidente (Mme Lachapelle): Est-ce que l'article 5...

M. Ciaccia: Un instant, j'essaie de comprendre. Je ne vois pas que les mots que le ministre a mentionnés se réfèrent à l'objet d'une sanction à l'article 15. Je ne l'ai pas dans ma copie. II se peut que ce soit un amendement que le ministre a apporté. J'aimerais le voir. J'aimerais qu'il me le réfère. Je ne vois pas ces mots dans la copie que j'ai devant moi.

Je vais vous lire...

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. Je me référais à l'article 4...

M. Ciaccia: Non, je suis à l'article 5.

M. Johnson (Anjou): ...en vertu du même raisonnement, l'article 5 ajoute: "...la sanction lui a été imposée et que la mesure a été prise contre lui..." Bon!

M. Ciaccia: Contre lui. Bon!

M. Johnson (Anjou): Puisque, à l'article 3 du code, on introduit la notion de mesures discriminatoires dans le cas de l'exercice d'un droit résultant du code, il faut bien référer à ces mesures si on veut que le présomption s'y applique. C'est pour cela qu'on ajoute les mots "...la sanction lui a été imposée..." ou "...la mesure a été prise contre lui..." C'est pour se référer au nouvel article 15 du code.

M. Ciaccia: Je comprends qu'une fois que... Non, ce n'est pas une réponse à la question que je vous ai posée. Vous me donnez la raison pour laquelle vous avez élargi l'article 17 ou l'article 5, c'est parce que vous voulez inclure non seulement le congédiement, la suspension ou le déplacement, mais aussi toutes les autres sanctions incluant les mesures discriminatoires ou de représailles.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

M. Ciaccia: Vous voulez créer une présomption contre l'employeur pour ces mesures additionnelles ou ces droits additionnels que vous donnez.

M. Johnson (Anjou): On veut effectivement... On élargit la présomption qui était en faveur du travailleur qui se plaint dans le cas de congédiement, déplacement ou suspension; on veut étendre cela aux mesures de nature discriminatoire ou aux sanctions qui auraient été prises.

M. Ciaccia: Vous ajoutez aux cas de congédiement, de suspension ou de déplacement les autres sanctions. Est-ce que cela pourrait s'appliquer dans des situations autres que le congédiement, la suspension ou le déplacement?

M. Johnson (Anjou): Oui, les représailles, les mesures disciplinaires. On dit bien à l'article 15...

M. Ciaccia: Je comprends. Dans ma question, je vous demande pourquoi vous voulez créer une présomption contre l'employeur dans les autres mesures qui sont déjà un peu nébuleuses et difficiles à définir. Vous pouvez citer le dictionnaire pour ce qui est des mesures discriminatoires, vous aurez une définition, mais l'application peut en être assez difficile. Si vous procédez en

créant une présomption contre l'employeur dans ces autres mesures, est-ce que vous ne créez pas une situation qui sera extrêmement difficile pour l'employeur? Comment allez-vous réfuter la présomption dans une question discriminatoire? C'est presque impossible.

M. Johnson (Anjou): La présomption de l'article 5 n'est pas une présomption que tel geste était discriminatoire; c'est une présomption selon laquelle un geste jugé discriminatoire l'a été parce qu'il y a eu exercice d'un droit résultant du code. C'est ce que dit l'article 17. On ne présume pas qu'une mesure est discriminatoire. La seule présomption dont bénéficie le travailleur quand il se plaint, c'est la présomption que, s'il établit d'une part qu'il a essayé de faire un syndicat et qu'il s'est ramassé dans la "job" la plus dure de l'usine, alors qu'il n'était pas le plus jeune, qu'il avait de l'ancienneté et que, normalement, il ne devait pas y aller, et qu'en plus de cela c'est sur l'équipe de nuit, s'il établit qu'il était actif sur le plan syndical...

M. Ciaccia: II y a une présomption...

M. Johnson (Anjou): ...s'il établit ensuite qu'il y a une mesure qui est prise à ses dépens, pas à son avantage... La présomption de l'article 17 dit bien ceci: "S'il est établi à la satisfaction du commissaire saisi de l'affaire que le salarié exerce un droit qui lui résulte du code..." Il dit: Moi, j'ai vendu des cartes de la FTQ ou de la CSN dans mon usine et, deux jours après, je me suis retrouvé dans telle "job". Que fait le commissiaire du travail? La première chose qu'il dit c'est: Monsieur, vous avez vendu des cartes, j'ai vu cela. Il y a un témoin qui est venu me dire que vous avez vendu des cartes. Vous avez exercé un droit résultant du code. Deuxièmement, vous avez eu une "sanction" de la nature d'un déplacement ou d'un changement d'équipe. Je présume que ce changement a été fait parce que vous vendiez des cartes. Si l'employeur vient démontrer que c'est un individu qui entre à l'ouvrage systématiquement deux heures en retard, qui est ivrogne et que ce n'est pas pour cela, que ce n'est pas parce qu'il a vendu des cartes, il l'établira. C'est cela l'objet de la présomption. Cela ne présume pas que tous les déplacements ou toutes les choses qui changent dans l'usine sont discriminatoires. Cela présume seulement que, si l'individu a eu des activités syndicales qu'on peut présumer, c'est à l'employeur de prouver que ce n'est pas parce qu'il avait des activités syndicales que de telles mesures ont été prises contre lui. C'est tout.

M. Ciaccia: L'exemple que vous m'avez donné est un déplacement. Dans le cas d'un congédiement, d'une suspension ou d'un déplacement, je pense que c'est assez clair. Est-ce qu'il y a d'autres situations où il n'y aurait pas...

M. Johnson (Anjou): Une sanction, je peux peut-être demander au député de Prévost qui...

M. Dean: C'est la troisième fois que je donne trois exemples de ce qu'est le déplacement. Le travailleur est déplacé d'un département à l'autre et perd 0,10 $ l'heure. (22 h 15)

M. Johnson (Anjou): Mais en dehors du déplacement. Il dit: en dehors du déplacement.

M. Ciaccia: Le déplacement, c'était déjà dans l'article 7. Ce que je voudrais savoir, c'est au sujet des autres sanctions que le déplacement.

M. Dean: Bon! Ce sont les mêmes exemples que j'ai déjà donnés une fois et que le ministre a repris. Il y a un emploi dans l'usine qui est convoité par les travailleurs... ou disons le contraire, un emploi très salissant, très difficile, et le travailleur en question, celui qui a porté une plainte, lui, il ne faisait pas ce travail-là, et il est victime de...

M. Ciaccia: Ce ne serait pas encore un déplacement cela?

M. Dean: Non, ce n'est pas un déplacement, cela peut être en guise de représailles.

M. Ciaccia: Non, mais s'il occupe un certain emploi...

M. Dean: Le mot "déplacement" a un sens consacré depuis 18 ans dans la jurisprudence; au moins 18 ans, si ce n'est pas 30 ans, parce que cela remonte à 1964. Il y a d'innombrables cas de travailleurs qui ont bien compris ce que cela veut dire. Ils ont allégué être victimes de ces déplacements illégaux et d'innombrables commissaires et juges du Tribunal du travail ont décidé au cours des années que les travailleurs avaient raison ou avaient tort, et ainsi, on définit à partir de faits établis le sens à donner au mot "déplacement". Le gars est assigné à une "job" salissante, dure, difficile, à la suite de l'exercice d'un droit: on prouve qu'il a signé une carte, comme disait le ministre tantôt. Alors, l'employeur a le fardeau d'établir la preuve qu'il n'a pas affecté ce travailleur à un travail salissant pour des raisons d'activités syndicales.

M. Ciaccia: Mais l'exemple que vous

me donnez, d'après vos propres mots, c'est encore un déplacement. Vous venez de me dire que c'est un déplacement.

M. Dean: Pas nécessairement.

M. Johnson (Anjou): Pas nécessairement. Je vais vous donner un exemple. Cela peut être la fréquence. Par exemple, il y a des emplois en rotation ou des équipes en rotation dans des usines où il ne s'agit pas d'un déplacement. Tout le monde passe par l'équipe de nuit. Dans le cas de l'individu qui dirait: Moi, cela fait six fois qu'on m'envoie sur l'équipe de nuit alors que, normalement, j'aurais dû y aller quatre fois, ou deux fois, ou pas une seule fois, ce n'est pas un déplacement au sens strict du terme. Tout le monde est soumis à cela dans l'usine. C'est la répétition de certains événements et je pense que c'est un exemple. Il y en a sans doute d'autres. Maintenant, les raisons pour lesquelles la présomption existe, je veux le rappeler, c'est qu'il est, à toutes fins utiles, impossible pour un salarié de faire la preuve d'intention de l'employeur. C'est pour cela qu'il y a une présomption dans notre code qui vaut pour les salariés pour beaucoup de choses. La preuve d'intention de l'employeur, il faut se lever à bonne heure pour la faire. L'employeur en général peut repousser la présomption par des faits, par les nécessités de l'emploi, par la conjoncture économique qu'il subit alors que le travailleur, lui, peut difficilement faire le contraire. Prouver une intention discriminatoire, c'est quelque chose. La repousser avec des faits, je pense que c'est plus facile.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 5 est adopté?

M. Ciaccia: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. J'appelle l'article 6.

M. Johnson (Anjou): M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): C'est l'abrogation de l'article 18 du code sur l'indemnité, parce qu'on l'énonce à l'article 15. C'est de concordance.

Le Président (M. Desbiens): L'article 6 est adopté? Adopté. J'appelle l'article 7. Est-ce que l'article 7 est adopté? M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai un papillon à l'article 7.

Le Président (M. Desbiens): Alors l'amendement qui est proposé à l'article 7 du projet de loi, c'est de remplacer l'article 7 par le suivant.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, le papillon que je dépose, c'est simplement pour inscrire le mot "doit" plutôt que le mot "peut" dans le cas de l'indemnité. Pour faire courte, une longue histoire courte, pour des raisons constitutionnelles de juridiction sur la notion du taux d'intérêt légal, il faut, si on veut permettre - que ce soit au ministère du Revenu, au commissaire du travail ou à quelqu'un d'autre - d'accorder l'équivalent d'un intérêt légal, prendre cette formule extrêmement complexe, mais qui signifie essentiellement qu'une indemnité peut être accompagnée d'un taux d'intérêt. Pour permettre à un fonctionnaire de juridiction provinciale d'accorder ce taux d'intérêt, il faut faire en sorte de l'obliger à prendre le taux d'intérêt légal moins celui du revenu auquel il ajoute l'équivalent du taux courant. Je ne sais pas si on me suit. Je pense que le député de Mégantic-Compton me suit et je suis heureux de le constater. Je ne me retrouve pas toujours dans ce bout-là.

Essentiellement, si le taux d'intérêt légal est à 5% et si le taux du marché est à 9%, on veut faire en sorte qu'il puisse accorder 9%. C'est seulement cela, mais il faut faire cette pirouette pour cela. La raison du papillon que nous mettons ici, c'est pour obliger le commissaire, à toutes fins utiles, à appliquer ce principe et non pas lui donner une discrétion de donner 6%, 7% et peut-être 9%, c'est de donner le taux que, à toutes fins utiles, sera le taux équivalent du taux courant.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Le ministre m'a donné de très bonnes explications, mais, quand même, c'est assez difficile de définir le taux d'intérêt légal, d'une part, et le taux du marché est également difficile à définir. Le taux d'intérêt pour le marché des obligations peut être de X% et le taux d'intérêt aux certificats de placement peut être de Y%; le taux d'intérêt pour une municipalité qui connaît une bonne situation financière peut être un taux privilégié. Sur quoi va-t-on se baser pour en arriver...

M. Johnson (Anjou): C'est le taux prévu dans la loi fédérale au chapitre 1-18 des Statuts du Canada, qui est le taux légal en vertu de la juridiction fédérale en cette matière. Quand on parle du taux d'intérêt légal, c'est celui qui est prévu dans les lois.

M. Bélanger: Ce n'est pas le taux

d'escompte?

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Bélanger: Ce n'est pas le taux d'escompte?

M. Johnson (Anjou): Non, ce n'est pas le taux d'escompte. Le taux légal prévu en ce moment, au fédéral, c'est 5%; il est prévu à l'article 3 de la loi qui concerne l'intérêt au chapitre 1-18 des Statuts du Canada. Ce qu'on permet au commissaire de faire, c'est de partir de cela...

M. Bélanger: Puis de rejoindre le marché.

M. Johnson (Anjou): Puis de rejoindre, à toutes fins utiles, l'équivalent du taux courant. À partir de quel critère? À partir de celui établi par le ministère du Revenu.

M. Bélanger: Celui qu'il exige des contribuables ou celui qu'il verse? Le ministère du Revenu a deux taux d'intérêt différents.

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Bélanger: Si je ne me trompe, le ministère du Revenu a deux taux d'intérêt différents. Il paie un certain intérêt lorsqu'il fait des remboursements en retard. Il pénalise également à un taux d'intérêt différent lorsque c'est le contribuable qui est en retard dans ses paiements. C'était cela, jusqu'à tout récemment, je ne sais pas si cela a changé.

M. Johnson (Anjou): Je répète que c'est la formule consacrée au Code de procédure civile. L'article 28 de la Loi sur le ministère du Revenu permet la fixation de ce taux qui, à toutes fins utiles, correspond plus à un taux courant qu'au taux légal de 5%. C'est la seule façon d'arriver à cet ajustement, par cette pirouette juridique qui permet au commissaire, quand il fixe un taux, de se référer à celui du ministère du Revenu et même l'y oblige.

M. le Président, est-ce que l'article est adopté?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Quand les explications sont claires, on avance plus vite. À l'article 7, lorsque vous dites: "Sur la requête de l'employeur..." dans quel délai cette requête peut-elle être faite au commissaire du travail? Lorsque vous dites: "Sur requête de l'employeur...", est-ce qu'on...

M. Johnson (Anjou): C'est la règle générale du droit civil qui s'applique, ce sont les prescriptions du Code civil. Supposons que le commissaire dit: Vous avez déplacé quelqu'un ou vous lui avez fait subir une mesure discriminatoire qui a entraîné une perte de revenu. Six mois plus tard, il rend son jugement après enquête et audition. Il dit: Vous lui devez l'équivalent de 1000 $ pour perte de salaire. Le salarié ou l'employeur peut dire: Oui, mais je veux aussi le taux d'intérêt.

M. Cusano: Mais les mots "sur requête de l'employeur"...

M. Ciaccia: Dans quel délai cette requête doit-elle être faite? Ce n'est pas le jugement.

M. Johnson (Anjou): On me dit qu'il n'y a pas de prescription. Il n'y a pas autre chose que les prescriptions courantes qui s'appliquent. Il n'y a pas de délai spécifique qui est imparti là-dedans.

M. Ciaccia: Est-ce que cela peut être deux ans? Si je me souviens, une action en dommages, c'est bien deux ans ou encore un an?

M. Bélanger: Pour les blessures corporelles.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. La pratique, c'est que, dans le fond, qui a intérêt là-dedans? En pratique, c'est le salarié qui se voit réintégré après un certain nombre de semaines ou de mois et qui dit: On me doit 1000 $; cela fait six mois; je veux mon taux d'intérêt. Il n'attendra pas 30 ans, mais, théoriquement, c'est la prescription du Code civil qui s'applique. C'est la prescription trentenaire. En pratique, ce n'est pas cela.

Par ailleurs, on ne veut pas introduire d'autres délais, des délais additionnels et d'autres prescriptions dans la loi. Cela nous apparaît adéquat.

Le Président (M. Desbiens): Alors, l'article 7 est-il adopté?

M. Johnson (Anjou): Tel que modifié par le papillon, M. le Président, n'est-ce pas?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: C'est un peu inquiétant, Vous dites que cela peut être la prescription trentenaire.

M. Johnson (Anjou): C'est la prescription d'un jugement.

M. Ciaccia: Est-ce que vous trouvez

cela raisonnable de dire: On va laisser cela...

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'on pourrait avoir une longue discussion sur le fait en soi et se demander si une prescription pour l'exécution d'un jugement, trente ans, cela a de l'allure en général. Probablement que cela en a. C'est en 1867 qu'on a mis cela dans le Code civil. Cela correspondait aussi à la tradition du droit coutumier français.

M. Ciaccia: Dans ce temps-là, on n'avait pas de Code du travail.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Il reste que, dans ce cas-là, je le présume, si on pose la question ici, on pourrait la poser pour bien d'autres choses. Dans la mesure où c'est dans la nature d'un jugement, on préfère ne pas fixer de délai sur une demande de requête parce que, par du droit statutaire, à toutes fins utiles, on intervient dans un domaine qui est plutôt régi ou essentiellement régi par le Code civil et le Code de procédure civile à l'égard des prescriptions générales et à l'égard des jugements.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Prévost.

M. Dean: M. le Président, je voulais seulement souligner que, depuis longtemps, même quand on rédige un grief - cela ne prend pas un avocat - si on a une réclamation de paiement rétroactif parce que le travailleur allègue qu'il a perdu de l'argent, on spécifie, à la face même du grief, comme règlement demandé, le paiement du montant d'argent: salaire perdu plus l'intérêt au taux juridique. Avec l'introduction dans la loi du droit de commissaire-enquêteur, en plus d'ordonner un remboursement de salaire perdu et d'ajouter le taux d'intérêt, je présume que, dorénavant, tout conseiller syndical ou tout avocat qui conseille un travailleur, le jour où il dépose sa plainte, va insérer à la face même de la plainte la réclamation de salaire perdu et l'intérêt. Personne n'attend l'employeur dans le détour. Tu as tout intérêt à écrire ta réclamation dès la première journée d'une plainte.

M. Johnson (Anjou): Les juristes me soulignent qu'en ce sens, la première partie du paragraphe 19 est dans le Code du travail depuis un certain temps. La seule chose qu'on a changée, c'est la partie sur les intérêts. L'absence de délai pour la requête pour fins d'indemnité a toujours été là. À ma connaissance, elle n'a pas causé de problème. On ne m'a rapporté personne qui, quinze ans après, a demandé de fixer une indemnité à la suite de sa réintégration pour perte de salaire d'un mois...

M. Bélanger: II est à sa retraite après quinze ans.

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Ciaccia: II y avait aussi une référence à l'exercice de ce droit si le salarié ne le faisait pas dans les 24 jours, et le commissaire avait le droit d'exercer pour le salarié le recours qui résultait de la décision du commissaire du travail. Alors, il y avait implicitement un délai.

M. Johnson (Anjou): Mais on conserve cela parce que l'article 7 du projet de loi ne modifie que le premier alinéa. Le deuxième alinéa reste dans le code. Donc, cela reste là. C'est la subrogation, n'est-ce pas? (22 h 30)

Le Président (M Desbiens): L'article 7 tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Sur division. M. Cusano: Sur division.

Le Président (M Desbiens): Adopté tel qu'amendé, sur division. L'article 8.

M. Johnson (Anjou): C'est une modification pour... Étant donné qu'on a élargi la notion de réintégration à prendre des mesures ou suspendre des sanctions, etc., c'est par concordance, encore une fois, à l'article 15 et à l'article 17 du code. Est-ce que cela est adopté, M. le Président? L'article 8 est-il adopté?

M. Cusano: Sur division.

Le Président (M Desbiens): L'article 8 est adopté sur division, l'article 9?

M. Johnson (Anjou): Papillon, M. le Président. Il en manque trois. Est-ce que vous avez les autres papillons?

Accréditation

Le Président (M Desbiens): L'article 9 du projet de loi est remplacé par le suivant: "9) l'article 21 de ce code est modifié: le) par le remplacement, dans la troisième ligne du premier alinéa, des mots "à l'article 37 "par les mots" aux articles 32 et 37";

M. Johnson (Anjou): 2e) par l'insertion... C'est bien cela, M. le Président. Voulez-vous que j'en fasse lecture, M. le Président?

Le Président (M Desbiens): Ce n'est pas la lecture...

M. Johnson (Anjou): Le papillon que je dépose est à l'effet de remplacer complètement l'article 9 du projet de loi par l'article suivant.

Le Président (M Desbiens): Alors 2e) dans ce cas, cela va: "par l'insertion, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant: "A également droit à l'accréditation l'association de salariés qui, dans le cas prévu à l'article 37.1, obtient le plus grand nombre de voix à la suite d'un scrutin." Est-ce que le nouvel article 9 est adopté?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'objet du papillon est essentiellement une coquille dans l'article 9 du projet de loi: dans les cas prévus à 37.1, Or il n'y a qu'un cas à 37.1. Donc le papillon est à l'effet de remplacer le mot "les cas prévus" par "le cas prévu" simplement.

Le Président (M Desbiens): Enlevez le "s".

M. Johnson (Anjou): L'objet de l'article lui-même, une fois modifié, c'est la concordance... Je pense que le débat de fond, à moins qu'on le veuille toute de suite là-dessus, est la concordance à l'égard de la règle de la majorité.

Le Président (M Desbiens): Est-ce que le nouvel article 9 est adopté?

M. Ciaccia: À propos de la question d'accréditation, je comprends que c'est pour le rendre en concordance avec l'article... Est-ce que c'est l'article 32? Sur la question d'accréditation, nous reviendrons à l'autre article, M. le Président.

Le Président (M Desbiens): L'article 9 est adopté? Sur division.

Sur division, tel qu'amendé. J'appelle l'article 10. M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): C'est le guichet fermé, M. le Président, qui, comme on le sait, est un des principes qu'on introduit dans ce projet de loi, faisant en sorte qu'au moment du dépôt d'une demande d'accréditation le guichet se ferme et qu'on puisse se prononcer sur cette demande sans allonger les délais.

M. Ciaccia: M. le Président, nous allons discuter les modalités de l'accréditation et la manière dont les associations sont accréditées lorsque nous en serons à cet article. L'article 10 est donc adopté sur division.

Le Président (M. Desbiens): Parfait. L'article 10 est adopté sur division. J'appelle l'article 11. Est-ce qu'il est adopté?

M. Johnson (Anjou): II s'agit d'accorder, à l'article 11, un nouveau pouvoir au commissaire général du travail qui consiste à le dessaisir d'une affaire et pourvoir à son remplacement, en tout temps, avant audition ou, par la suite, lorsque ce commissaire du travail est absent ou devient incapable d'agir.

Pour des raisons administratives, il peut arriver qu'un commissaire général du travail qui est, en quelque sorte, le juge en chef de l'accréditation veuille dessaisir un commissaire avant l'audition d'une requête: par exemple, parce qu'il anticipe que ce commissaire sera appelé à l'extérieur plus tard, qu'il a déjà des requêtes abondantes et considérables devant lui et que, pour des raisons de délais, un autre s'est vu libérer parce que les parties se sont désistées. S'il veut assigner le dossier le plus rapidement possible à un autre, il faut lui accorder le pouvoir spécifique de dessaisir le commissaire du travail du dossier, mais nous avons bien précisé, contrairement à un avant-projet qui a circulé à un certain moment, qu'il faut qu'il le fasse avant audition. Alors, quel que soit le motif, il peut le faire avant audition. Pendant audition, ce n'est que dans le cas où il est absent ou incapable d'agir qu'il peut, évidemment, le dessaisir d'un dossier.

Encore une fois, l'objectif de l'article est essentiellement d'accélérer les choses ou de faire en sorte qu'au commissiariat du travail on puisse équilibrer le plus possible la répartition des tâches des commissaires.

M. Ciaccia: Avant audition, il n'y a pas de motif précis. Il peut y avoir plusieurs raisons, parce que c'est un pouvoir qui n'a pas de limitation ou de restriction quant aux motifs pour lesquels il peut dessaisir...

M. Johnson (Anjou): II peut y avoir essentiellement deux raisons et, en ce sens, on donne une discrétion au commissaire général du travail à l'égard de ses commissaires pour deux raisons.

La première est l'équivalent du rôle de pratique à la Cour supérieure. Le juge en chef décide d'assigner des causes au juge avant audition pour différentes raisons. Ce sont essentiellement des raisons administratives qui peuvent l'amener à le faire. Il peut évidemment y avoir des notions de conflit d'intérêts comme cela arrive probablement dans les tribunaux supérieurs mais, en général, cela se fait par voie de désistement de la part du juge. Cela pourrait être une raison mais, règle générale, ce qui est visé ici, ce sont des raisons de souplesse administrative et d'efficacité afin de s'assurer qu'on tire le maximum du commissariat du travail pour les fins des parties.

M. Ciaccia: Mais vous n'incluez pas

dans la rédaction de cet article les raisons pour lesquelles il pouvait... Est-ce qu'il y a une raison spéciale pour laquelle vous le laissez complètement "at large"?

M. Johnson (Anjou): Selon l'exemple qu'on me donne, c'est essentiellement dans le cas des gens du commissariat ou des juristes, l'équivalent des tâches du juge dans un râle de division de pratique. Il s'agit de ' faire en sorte qu'on répartisse le "case load", si on veut. Ce sont des raisons qui sont essentiellement de nature administrative. Je pense qu'on peut difficilement cerner cela dans un texte juridique, mais on a bien dit que, dans le cas où une audition est commencée par le commissaire il y a seulement deux raisons pour lesquelles cela peut être fait: soit qu'il est incapable d'agir ou qu'il est absent.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 11 est adopté?

M. Cusano: Article 11, oui.

Le Président (M. Desbiens): L'article 11 est adopté. J'appelle l'article 12.

M. Johnson (Anjou): À l'article 12, nous avons des papillons; est-ce que cela a été distribué? Le papillon vise à introduire la notion que, quand une requête est déposée, elle doit être accompagnée des formules d'adhésion prévues au paragraphe b de l'article 36.1. À toutes fins utiles, ce sont les cartes d'adhésion. Les raisons pour lesquelles nous modifions le projet de loi no 17 sont les suivants. D'abord, l'objet de l'article 25 est de prévoir le dépôt de la requête. C'est l'enclenchement du processus d'accréditation pour le commissaire, c'est la saisie d'une requête du commissariat. Ce qu'on dit, en ajoutant ce papillon, c'est que cette requête doit être accompagnée des formules d'adhésion.

M. Ciaccia: Vous parlez strictement de la mécanique, de la façon dont le processus d'accréditation se fait.

M. Johnson (Anjou): Exactement.

M. Ciaccia: C'est l'article qu'on pourra discuter plus tard sur le fond, la philosophie, les raisons de l'accréditation.

M. Johnson (Anjou): II n'y a pas beaucoup de philosophie là-dedans. C'est un peu comme si on disait: La requête est écrite sur une feuille 8 1/2 x 14 et doit comprendre les noms des parties, etc. On dit simplement qu'elle doit être accompagnée des formules d'adhésion qui sont prévues au paragraphe b de l'article 36.1. Les deux parties sont d'accord là-dessus, elles nous en ont fait la demande. Le Conseil du patronat l'accepte, les centrales syndicales l'acceptent et, à toutes fins utiles, cela va permettre d'accélérer les choses.

Notamment, si une requête, à sa face même, compte tenu du nombre d'adhésions qu'elle implique, permet au commissaire du travail de déléguer des agents d'accréditation à plusieurs endroits où cela a l'air manifeste et où il n'y aura pas beaucoup de problèmes, cela permet d'assigner plus adéquatement les dossiers.

Le Président (M. Desbiens): L'article 12 du projet de loi...

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): On va commencer par lire l'amendement. L'article 12 du projet de loi est remplacé par le suivant:

L'article 25 de ce code est remplacé par le suivant: "L'accréditation est demandée par une association de salariés au moyen d'une requête qui doit être adressée au commissaire général du travail, accompagnée des formules d'adhésion prévues au paragraphe b de l'article 36.1. Cette requête doit être autorisée par résolution de l'association, signée par ses représentants mandatés et indiquer le groupe qu'elle veut représenter. "Sur réception de la requête, le commissaire général du travail en transmet une copie à l'employeur, lequel, dans les cinq jours de sa réception, doit afficher dans un endroit bien en vue la liste complète des salariés de l'entreprise visés par la requête avec la mention de la fonction de chacun d'eux. L'employeur doit transmettre sans délai une copie de cette liste à l'association requérante et en tenir une copie à la disposition de l'agent d'accréditation saisi de la requête."

Est-ce que le nouvel article 12 est adopté?

M. Cusano: On est d'accord, mais on l'adopte sur division à cause de la question de l'accréditation. Adopté sur division.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division, tel qu'amendé.

M. Johnson (Anjou): Article 13, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Article 13.

M. Johnson (Anjou): Nous avons un papillon et il est devant vous, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): L'article 13 du projet de loi est remplacé par le suivant: "Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 27, de l'article suivant: "27.1 Le dépôt d'une requête à l'égard d'un groupe de salariés qui n'est pas représenté par une association accréditée rend irrecevable une requête déposée à compter du jour qui suit le premier dépôt à l'égard de la totalité ou d'une partie des salariés visés par la première requête. "Aux fins du premier alinéa, une requête est réputée avoir été déposée au bureau du commissaire général du travail le jour de sa réception à son bureau."

L'amendement est-il adopté?

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): ...d'abord, sur l'objet du papillon. Son objet est de remplacer la notion "au moment de" par "le jour de". On a eu des discussions là-dessus, les parties nous en ont parlé. Le principe de base introduit au nouvel article 27 du Code du travail est celui du guichet fermé. Si un groupe de salariés n'est pas visé, n'est pas couvert par une accréditation, dès qu'il y a une requête en accréditation, cela ferme le guichet et cela interdit à d'autres associations de venir s'y ajouter ce qui, soit dit en passant, est une des plus grandes sources de délai dans le problème des accréditations. (22 h 45)

Le problème survient si deux requêtes en accréditation arrivent "au même moment". Il y en a une qui n'est plus bonne. Laquelle? S'il y en a une qui arrive à 10 h 15 et l'autre à 10 h 20, qui décidera? Avec la version originale de l'article 13, on aurait pu dire: Ce qui va décider, c'est l'estampille du bureau du commissaire, avec l'équivalent d'un poinçon de temps. C'est un peu absurde quand on y pense. La notion d'heures et de minutes, dans notre droit, ce n'est pas une notion très fréquente. La notion de jours est beaucoup plus claire. On dit que toute requête qui arrive le jour suivant le jour du dépôt est nulle, n'est pas recevable. S'il y en a deux qui entrent le même jour, le commissaire procédera comme il procédait quand il y en avait deux et il fera en sorte d'entendre les deux.

La probabilité qu'il en reçoive cinq pour la même unité, le même jour, est assez mince. La probabilité qu'il en reçoive deux pour la même unité, le même jour, est une probabilité qui existe. À ce moment-là, ce sont les règles habituelles qui s'appliquent, c'est-à-dire qu'on procède au vote, qu'on entend les parties, un peu comme on le fait aujourd'hui. Dans la mesure où une requête est déposée une journée et qu'il n'y en a pas d'autre déposée la même journée, c'est le guichet fermé qui s'applique et ce n'est que sur cette association que les travailleurs se prononcent.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: Cela veut dire qu'il est fort possible que le même jour on reçoive deux demandes d'accréditation. On peut en recevoir une tôt le matin et en recevoir une autre en fin de journée. De la façon que cela est présenté, c'est seulement l'estampille de la journée et non le chronomètre, comme le ministre l'a dit. Il y a quand même huit heures de différence entre 9 heures et 17 heures. N'y aurait-il pas lieu de trouver un mécanisme quelconque qui ferait en sorte que celui qui a déposé sa requête le matin ait la priorité. Je ferai remarquer au ministre que, lors de l'ouverture de soumissions, que ce soient de petites ou d'importantes soumissions, il y a des heures déterminées. Si c'est 15 heures et que vous arrivez à 15 h 10 avec votre soumission, vous êtes disqualifié.

M. Johnson (Anjou): Je comprends ce que dit le député. La réponse à cela est qu'il y en a une heure et que c'est minuit. Quand vous donnez l'exemple des soumissions, si on dit que c'est à 15 heures, cela veut dire qu'on peut déposer sa soumission à 8 heures, 9 heures, 12 heures, 13 heures jusqu'à 15 heures. La loi dit, telle que rédigée, qu'on a jusqu'à minuit pour déposer, par définition. Dès que minuit est passé, on est rendu à l'autre journée et l'heure de soumission des requêtes est donc passée.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 13 tel qu'amendé est adopté?

M. Cusano: Une question, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Qu'arrive-t-il dans un nouvel établissement... Un grand syndicat est mieux préparé, sachant que quelques personnes travailleront à un endroit mais, même avant que le groupe soit en place et puisse faire une demande pour une association non affiliée, cela cause des problèmes, n'est-ce pas?

M. Johnson (Anjou): C'est le principe du premier arrivé, premier servi, si on veut. Que ce soit le syndicat local, que ce soit un syndicat indépendant ou une centrale syndicale, au moment où un groupe de travailleurs est à s'organiser, quel que soit le

groupe qui est en train d'aider les travailleurs à s'organiser, quelle que soit la fédération ou la confédération ou l'association indépendante qui le fait, c'est la première requête qui...

M. Cusano: Je me suis mal exprimé. M. Johnson (Anjou): ...ferme le guichet.

M. Cusano: Je me suis peut-être mal exprimé.

M. Johnson (Anjou): J'ai peut-être mal compris.

M. Cusano: Dans un nouvel établissement...

M. Johnson (Anjou): ...syndiqué.

M. Cusano: ...pas syndiqué. Dans un nouvel établissement, où il n'y a pas de travailleurs, mais on sait qu'il y en aura. Les personnes qui, éventuellement, arriveront à une date précise n'auront pas eu l'occasion de se rencontrer, de discuter en tant que groupe.

M. Dean: M. le Président, le député de Viau touche le principe qu'on appelle la requête prématurée. Il y a une nouvelle usine ou un nouvel entrepôt qui est construit. On embauche une, deux, trois, quatre, cinq personnes. À un moment donné, le syndicat arrive, dépose une requête. Est-ce qu'un employé sur 1000 peut déposer une requête?

Les règles de jurisprudence sont déjà établies, il y a une série de critères établis par les tribunaux qui indiquent jusqu'à quel point on est arrivé à ce qu'on peut considérer comme un niveau un peu normal des activités. En d'autres termes, si l'usine, éventuellement, dans six mois, propose d'engager 1000 personnes, s'il y a seulement 10 personnes en poste et qu'un syndicat dépose une requête, il se peut, selon une série de critères établis dans la jurisprudence, que le commissaire ou le tribunal décide que 10, c'est trop peu. Donc, la requête est prématurée et serait rejetée.

Je pourrais, par contre, vous donner un exemple frappant de choses qui peuvent arriver. Je vous donne l'exemple d'un employeur qui est allé à la pêche avec un organisateur syndical pas trop scrupuleux...

Une voix: Est-ce que cela a été déposé?

M. Dean: Je n'ai pas déposé une requête, mais j'ai été victime d'un fait que je vais vous raconter. Alors, il est allé à la pêche avec son "chum". C'était un dépôt de vente et service d'un centre de camionnage.

Il a fait embaucher le frère de sa secrétaire et son propre frère, il a fait embaucher les deux, et une requête a été déposée le lendemain. Quand il y a collusion patronale avec les syndicats, les requêtes procèdent très rapidement. On a des accréditations très rapidement. C'était un record mondial pour le commissaire du travail. Le syndicat était accrédité avec deux membres sur un potentiel de 35 ou 40. Quand c'est malhonnête, cela se fait vite, parce que l'employeur ne s'y oppose pas, c'est dans son intérêt, mais quand c'est une requête légitime, faite par un syndicat ordinaire, il se peut que l'effet prématuré de la requête dans un nouvel établissement soit soulevé. Comme je l'ai dit, il y a des règles de jurisprudence qui évaluent ces choses-là et qui décident si la requête est prématurée ou non et, dans ce cas, elle est rejetée.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le nouvel article 13 est adopté tel qu'amendé?

M. Cusano: Un instant, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Oui.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article précédent est adopté, l'article 13?

M. Cusano: Non, pas encore, j'ai demandé qu'on attende un instant. Vous me l'accordez, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Ces craintes ont été formulées dans un mémoire déposé par les infirmières du SPIIQ. Pensez-vous que l'article, dans sa version actuelle, va solutionner quelque chose ou si les craintes qui ont été exprimées ne seront pas dissipées?

M. Johnson (Anjou): Effectivement, on a reçu le mémoire de la Fédération de SPIIQ qui est un mémoire assez bien fait. Il soulevait une chose qui, a priori, ne nous avait pas sauté au visage avant. On a regardé cela et on a consulté les fonctionnaires du ministère des Affaires sociales, j'étais à même de faire la liaison là-dessus. Les réponses qu'on nous a données au commissariat du travail sont que ce n'est pas inquiétant.

On pourrait prendre comme exemple l'hôpital Pierre-Boucher qui a été ouvert à Longueuil, c'est une autre réalisation du gouvernement. Chacun a les siennes. Quand un hôpital ouvre ses portes, il est bien évident, au début, qu'il y a très peu d'infirmières. Il y a beaucoup de personnel

d'administration, de personnel de soutien technique, etc., avant que les patients entrent.

Théoriquement, on pourrait être dans une situation où il y a une demande d'accréditation du personnel de laboratoire, qui veut inclure les infirmières alors qu'on sait que, à la fin, il y aura 800 infirmières. Ce qu'on me dit, quant à cela, c'est que la jurisprudence en requête prématurée est là.

Deuxièmement, il y a aussi, et il faut bien le voir, parce que c'est cela qui préoccupe les infirmières, une jurisprudence très précise dans le cas des affaires sociales. Les infirmières chez nous, parce qu'elles sont une corporation professionnelle, à toutes fins utiles, la jurisprudence, au niveau des accréditations, ne les mêle pas à d'autres groupes. Il y a des groupes interprofessionnels, par exemple, dans les laboratoires ou ailleurs. Dans le cas des infirmières, on nous dit qu'on trouverait extrêmement étonnant la façon de se donner une garantie à 100% à leur égard. Ce serait, par contre, établir une règle qui s'appliquerait à toutes les autres et cela deviendrait extrêmement complexe. Je dois dire que les réponses qui m'ont été données m'ont satisfait à la fois à l'égard du projet de loi 17 comme les impératifs du ministère des Affaires sociales.

D'ailleurs, le sous-ministre me le souligne, l'employeur va s'opposer assez rapidement.

M. Cusano: Oui.

M. Johnson (Anjou): II veut un syndicat d'infirmières. Il ne veut pas un syndicat d'infirmières et d'administration en même temps. Adopté.

Le Président CM. Desbiens): Est-ce que l'article 13 est adopté?

M. Johnson (Anjou): II n'en reste que 95, M. le Président.

M. Cusano: Oui, on progresse assez bien.

Une voix: On n'aura pas besoin de M. Ryan.

M. Cusano: C'est exactement cela.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 14 est adopté?

M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article 14 est adopté, M. le Président?

M. Bélanger: Non, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Métantic-Compton.

M. Bélanger: On est rendu à l'article 14, M. le Président. Vous allez voir qu'on n'arrête pas là pour rien, car il y a quelque chose d'extraordinaire. On y dit: "Si l'employeur refuse son accord sur l'unité de négociation demandée, il doit, par écrit, en expliquer les raisons - je n'ai pas d'objection là-dessus - et proposer l'unité qu'il croit approprié..." Cela n'a pas de bon sens. En quelque sorte, on demande à l'employeur entre deux maux de choisir le moindre.

M. Johnson (Anjou): Entre avoir un syndicat et ne pas en avoir?

M. Bélanger: Non, on demande entre deux maux de dire... Par exemple, on sait que, si c'était au gouvernement, on suggérerait évidemment la FTQ. Cela se comprend?

M. Johnson (Anjou): Non, je m'excuse.

M. Bélanger: Oui. On demande à l'employeur de proposer. Il dit: Celui-là je ne le veux pas et il explique les raisons pour lesquelles il ne le veut pas. On lui dit: Proposez donc celui que vous voudriez avoir. C'est pour cela que je dis qu'on demande à l'employeur, de deux maux, de choisir le moindre. (23 heures)

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense qu'il y a peut-être une confusion sur les mots. Quand on parle d'unité, on ne parle pas de syndicat. L'unité, c'est...

M. Bélanger: Ce n'est pas l'unité syndicale?

M. Johnson (Anjou): Non, c'est le regroupement des personnes. Par exemple, une centrale syndicale va organiser des travailleurs dans une usine et dit: On propose que l'unité de négociation soit formée des techniciens, des employés d'entretien et des employés de bureau. Cela, c'est l'unité d'accréditation. C'est ce qu'on appelle l'unité. Qu'est-ce qui va être couvert par ce syndicat, par le groupe qui va négocier et qui va obtenir une accréditation? Alors, ce qu'on affirme, c'est quand l'employeur dit: Moi, je ne suis pas d'accord que le personnel de bureau fasse partie de cela ou je ne suis pas d'accord que les ingénieurs superviseurs sur les machines fassent partie du syndicat. Il doit nous exprimer ce que devrait être, à ses yeux, l'unité couverte, parce que, en ce moment, le Code du travail prévoit et tout ce qu'il fait, c'est de s'opposer. Il n'est pas obligé de proposer une alternative aux regroupements de travailleurs. Ce sont essentiellement des questions d'organisation

de travail. On ne lui demande pas de choisir entre la CSN et la FTQ. On lui dit seulement: Si la CSN ou la FTQ entre chez vous, qui est-ce que cela devrait couvrir?

M. Bélanger: Je comprends très bien, mais il reste quand même une chose. Pourquoi le patron devrait-il dire: Je voudrais que tel secteur ou tel employé soit dans telle unité? Je présume que c'est déjà suffisant de lui demander d'écrire la raison pour laquelle il ne veut pas qu'une telle unité soit syndiquée, sans toutefois dire: Je ne suis pas d'accord avec cela. J'aimerais mieux avoir l'autre, ou j'aimerais mieux que le groupe des employés de bureau, comme l'a dit le ministre, ne fasse pas partie du même syndicat ou de la même unité de négociation que le personnel cadre. Pourquoi avez-vous fait ce changement?

M. Johnson (Anjou): Ah bon! Voilà! C'est une question bien pertinente. Je vais laisser la parole au député de Prévost, qui a sûrement des choses à dire là-dessus.

M. Dean: C'est un des éléments. Lorsqu'on parle de délais ou de mesures dilatoires possibles pour retarder des causes d'accréditation syndicale, on frappe un des noeuds du problème actuel. Cela veut dire presque automatiquement. Dès que l'unité de négociation, même dans la loi actuelle, est contestée par l'employeur, le cas est enlevé des mains de l'agent d'accréditation et référé au commissaire de travail. Donc, déjà, c'est un transfert qui, selon les statistiques, implique un délai de trois ou quatre mois. D'accord? Actuellement, l'employeur n'est pas obligé de définir l'unité de négociation qu'il considère appropriée; tout ce qu'il a à faire, c'est d'inscrire qu'il n'est pas d'accord. Là, il peut compter sur une audition et sur une longue procédure où il peut ou peut ne pas préciser sa pensée. Le désir, c'est qu'il décide assez rapidement quelle est l'unité de négociation qu'il considère appropriée, qu'il le fasse rapidement de façon à permettre de situer le débat, si débat il y a, et d'accélérer le processus d'accréditation. Ce n'est pas l'unité de négociation qui décide si, oui ou non, le syndicat sera accrédité. C'est le nombre de cartes signées, déposées et légitimes qui indiquent une majorité. Mais c'est pour préciser. Dans la pratique, actuellement, l'employeur de bonne foi, assez souvent, va négocier l'unité de négociation presque par téléphone avec le syndicat. Si c'est légitime et si ce qu'il a à dire a du bon sens, dans bien des cas, là où il y a de la bonne foi, cela se règle assez rapidement. Mais l'employeur peut profiter de ce manque de définition de sa pensée pour occasionner des délais qui peuvent ajouter trois, quatre, six mois, etc., au processus d'accréditation. C'est cela la raison. C'est une chose clé lorsqu'on parle de déjudiciarisation et d'éliminer des pépins et des empêchements à l'accréditation. C'est une des mesures clés que l'on propose.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, admettons au départ que l'employeur a proposé une unité. Est-ce que le commissaire du travail sera dans l'obligtion d'en tenir compte ou si cela sera encore à son entière discrétion?

M. Johnson (Anjou): Cela reste à la discrétion du commissaire, mais il entend les parties. Dans la mesure où on impose une obligation de définir ce que devrait être l'unité à l'employeur plutôt que de simplement lui permettre de dire: Je m'y oppose, cela permet de mieux circonscrire le débat. Il y a, je crois, un avantage, à la fois pour l'employeur et le syndicat, dans un cas comme cela. Dans la mesure où le débat est précis et clair, il oblige aussi l'employeur à se faire une idée, dans sa propre usine, de ce qu'il considère comme des unités pour les fins de production, de confidentialité, et de rapports hiérarchiques entre les groupes. Je pense que, d'une part, cela va sauver des délais et, que c'est aussi à l'avantage des deux parties que le débat soit créé.

Le Président (M. Desbiens): Le député de Prévost.

M. Dean: Je voulais juste ajouter que, si ce que l'employeur indique par écrit au commissaire a de l'allure, cet amendement va permettre au commissaire de téléphoner au syndicat et de lui dire: Écoutez, l'employeur a proposé telle unité, est-ce que cela a de l'allure? Si cela a de l'allure, cela va se régler par entente écrite entre les deux parties ou elles vont s'entendre sur l'unité de négociation et on n'aura même pas besoin de faire une audition.

M. Bélanger: Mais l'employeur ne peut pas lui non plus imposer l'unité qu'il désire. Cela restera toujours à la discrétion du commissaire.

M. Dean: En fonction de la loi, c'est au commissaire enquêteur de décider de l'unité appropriée, c'est actuellement prévu à la loi et cela va rester comme cela, quand les deux parties finissent par s'entendre sur quelque chose. En plus de cela, il y a toute une jurisprudence sur le type d'emploi qui habituellement peut-être exclu, etc. Alors, profitant de tous ces éléments, il y a possibilité de...

M. Bélanger: Je n'ai pas autre chose.

M. Ciaccia: Le but de cet article est donc seulement de donner la possibilité aux employeurs de signaler un voeu aux commissaires.

M. Dean: Mais un voeu, quand il est précisé, dans la mesure où il a de l'allure, il peut vraiment accélérer les choses et créer une meilleure atmosphère pour le début de l'accréditation.

M. Johnson (Anjou): C'est plus qu'un voeu; il doit le proposer. C'est plus qu'un voeu...

M. Bélanger: C'est plus qu'un voeu. C'est un voeu, comme on a entendu parler en commission parlementaire.

M. Johnson (Anjou): ...il doit le faire. La décision appartient quand même au commissaire, sauf qu'il faut bien voir que cela met le commissaire dans une situation où, si l'employeur ne le fait pas, il n'y a pas, à toutes fins utiles, à tenir compte des objections de l'employeur. Si l'employeur veut faire des objections, il faut qu'il propose une alternative, et, à partir de là, le commissaire discute et regarde, mais il a circonscrit le débat, tandis qu'en ne modifiant pas le code, on continue à permettre à l'employeur de s'opposer mais sans jamais rien préciser et d'obliger le commissaire... l'agent d'accréditation à envoyer cela au commissaire et le commissaire à attendre plus longtemps...

Le Président (M. Desbiens): L'article 14 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. J'appelle l'article 15. Est-ce que l'article 15 est adopté?

M. Johnson (Anjou): L'article 15 donne le pouvoir au commissaire général du travail d'ordonner d'interrompre une enquête quand il a raison de croire que l'article 12, c'est-à-dire la nomination de syndicats libres non dominés par l'employeur, est enfreint.

Alors, je peux peut-être préciser, pour les fins du débat, pendant que nos collègues lisent le texte, la notion de syndicat dominé: c'est le syndicat contrôlé par l'employeur, ce qui va à l'encontre des principes de notre code qui préexiste de beaucoup à la loi 17. Auparavant, on disait qu'un tiers pouvait soulever le fait que le syndicat est dominé. On a eu un exemple, d'ailleurs, le cas de Commonwealth Plywood, qui a fait les annales et qui s'est ramassé ici, devant le parlement. Il y avait un problème de syndicat dominé. Les procureurs de l'employeur et les procureurs d'un des syndicats étaient les mêmes. C'est une infraction au code. Ce qu'on dit, c'est que, maintenant, ce n'est pas seulement à un tiers de soulever cela. Le commissaire du travail peut décider lui-même d'office de réclamer une enquête parce qu'il lui est souligné par un agent d'accréditation que le syndicat qui a fait une requête en accréditation est un syndicat dominé. Donc le commissaire peut ordonner d'interrompre les procédures et ne pas accorder l'accréditation.

M. Cusano: Lorsque vous dites que l'agent d'accréditation indique qu'on a des raisons de croire. N'est-ce pas nécessaire d'avoir certaines balises pour qu'il ait des raisons de croire? Ce serait quoi exactement, en rapport avec ce cas spécifique? Quelle serait la latitude qu'on pourrait accorder à cette raison de croire?

M. Johnson (Anjou): La pratique sur le terrain, c'est que l'agent va dans l'usine et parle aux travailleurs comme c'est son rôle de le faire. Il évalue l'unité, la représentativité, il vérifie si les gens ont signé les cartes. Il peut alors se faire dire, sous le sceau de la confidence, par un travailleur: Écoutez, j'ai vu le patron, hier; il était assis avec un tel ou un tel et il nous a proposé telle chose. À ce moment, l'agent peut avoir raison de croire qu'il y a domination ou tentative de domination en vertu de l'article 12. Comme on introduit la notion de guichet fermé, il faut bien voir qu'il faut se le donner, qu'il a ses avantages, mais qu'il a l'inconvénient de permettre, si on ne fait pas attention, que des syndicats de boutique dominés, à toutes fins utiles, accaparent les accréditations. Il faut avoir quelque part un instrument pour empêcher cette situation et l'instrument, c'est l'évaluation. Je dirais que la décision revient au commissaire général du travail, qui est quand même le juge en chef, à partir des raisons de croire qu'il a et qui lui parviennent habituellement de l'agent d'accréditation.

Il faut voir quand même que, dans la hiérarchie des décisions, ce n'est pas une évaluation fantaisiste dont on parle. Cela passe par un processus et c'est le commissaire général du travail qui décide. Il est obligé de respecter certaines règles, on peut en appeler de ses décisions, il y a une jurisprudence à son égard. Il doit respecter tout cela, ce n'est pas purement arbitraire. Je comprends que le Conseil du patronat voudrait que ce soit beaucoup plus restreint. Je ne veux pas en faire le procès, mais on sait ce qu'on vise ici. C'est clair. On vise ce qui est, à toutes fins utiles, l'un des principes fondamentaux du Code du travail qui existe depuis que le code a été adopté. C'est le fait qu'un syndicat dominé n'est pas

un syndicat au sens du Code du travail. C'est aussi simple que cela.

Un syndicat dominé n'est pas nécessairement ce qu'on désigne trop facilement comme un syndicat de boutique. Il y a des syndicats indépendants, par exemple, la FSSA à l'Alcan, au Saguenay-Lac-Saint-Oean, qui n'appartient ni à la CSN ni à la FTQ ni à d'autres. Personne ne viendra m'expliquer que c'est un syndicat dominé. C'est un syndicat indépendant, mais non un syndicat dominé. Il faut faire la distinction entre les deux.

Le code n'interdit pas les syndicats indépendants, il interdit les syndicats dominés. Lorsque le Conseil du patronat nous dit qu'il voudrait que ce soit balisé, il est assez évident que l'on sait de quelle préoccupation il s'agit lorsqu'il dit cela.

C'est aussi comme les chauffeurs d'autobus à Montréal. Ils ont un syndicat indépendant et ne sont pas affiliés à la CSN ni la FTQ. Ce n'est pas un syndicat dominé, toutefois. On a vu cela, n'est-ce pas?

M. Bélanger: Non, on a assez marché pour se rendre compte de cela.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 15 est adopté?

M. Cusano: Sur division.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Est-ce que l'article 16 est adopté?

M. Johnson (Anjou): Cela s'ajoute un peu par concordance à ce qu'on disait il y a quelques instants. C'est le pouvoir du commissaire de soulever le fait que le syndicat auquel il fait face est peut-être un syndicat dominé.

Le Président (M. Desbiens): L'article 16 est-il adopté?

M. Cusano: Adopté sur division.

Le Président (M. Desbiens): L'article 16 est adopté sur division. J'appelle l'article 17.

M. Johnson (Anjou): Aux articles 17 et 18, il y a des papillons, M. le Président, que je fais circuler immédiatement.

Le Président (M. Desbiens): L'article 17 du projet de loi est remplacé par le suivant: "L'article 32 de ce code est remplacé par le suivant: "32. Le commissaire du travail saisi de l'affaire doit décider, après enquête tenue en présence de toute association en cause et de l'employeur, toute question relative à l'unité de négociation et aux personnes qu'elle vise; il peut à cette fin modifier l'unité proposée par l'association requérante. (23 h 15) "II doit également décider du caractère représentatif de l'association requérante par tout moyen d'enquête qu'il juge opportun et notamment par le calcul des effectifs de l'association requérante ou par la tenue d'un vote au scrutin secret. "Sont seuls considérés comme parties intéressées quant au caractère représentatif d'une association de salariés, tout salarié compris dans l'unité de négociation ou toute association de salariés intéressée."

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'objet du papillon répond à une préoccupation de l'Opposition qui a été soulevée notamment lors de l'audition du Conseil du patronat ou d'autres. Le projet de loi 17 introduisait la notion suivante: un salarié n'est pas une partie intéressée à la définition de l'unité. Nous retirons cette disposition. À toutes fins utiles, c'est ce qu'on fait - et on laisse la jurisprudence, dans l'affaire Me Caffrey qui est en Cour suprême ou en Cour d'appel - en Cour suprême - on va laisser la jurisprudence trancher là-dessus. Est-ce que le salarié comme individu peut être considéré comme une partie intéressée au moment de l'enquête, de l'audition, et des différentes étapes de l'accréditation?

La règle veut qu'en général on ait considéré qu'un salarié n'a jamais été une partie intéressée juridiquement. Nous avions introduit dans le projet de loi 17 un article qui disait, à cause de l'affaire Me Caffrey ou à cause de certaines tendances qui semblaient se manifester, que le code très spécifiquement l'excluait. Car, de plus en plus, ou enfin à quelques occasions, des procureurs sont venus représenter des salariés individuellement qui s'opposaient à la formation de l'unité, à la définition de l'unité - à savoir quel groupe appartient au syndicat. On voit tout de suite le genre d'avalanche que cela peut produire à un moment donné si chacun individuellement peut venir discuter de l'unité; on voit le genre de problèmes et de délais qui se poseront. Néanmoins, nous retirons cette disposition que nous proposions dans le projet de loi 17. Nous maintenons cependant une modification par l'article 17 à l'article 32, qui vise à favoriser la tenue de scrutins comme un des moyens que le commissaire juge utiles de développer aux fins de mesurer le caractère représentatif de l'association.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement...

M. Cusano: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Lorsque vous dites au deuxième alinéa: "...l'association requérante par tout moyen d'enquête qu'il juge opportun...". Pouvez-vous expliquer ce que veulent dire les mots "par tout moyen d'enquête"?

M. Johnson (Anjou): L'objectif de cette disposition est de contrer une interprétation de la jurisprudence à partir d'un autre article du code qui, paradoxalement, a introduit la notion que, dans le fond, le recours au vote et d'autres moyens sur la mesure de la représentativité, le commissaire ne pouvait y avoir recours que s'il y avait des motifs juridiques d'y avoir recours. En d'autres termes, cela le confinait au comptage de cartes. Cela peut paraître paradoxal sur une base "idéologique" ou d'ouverture, mais probablement que, pour des raisons juridiques, que les savants juges ont identifiées avec précision, cet article, à toutes fins utiles, limitait beaucoup le rôle du commissaire dans le sens de prendre des moyens pour qu'il y ait la plus grande participation possible, la plus grande visibilité possible. Avec cet article-là, le commissaire ou l'agent va aller dans l'usine; il va compter les cartes, il va regarder quelle est l'unité et il va se faire une idée. S'il a un doute personnel quant à la représentativité des syndicats en présence, il va pouvoir déclencher un vote, alors que, auparavant il fallait que la nature de son doute soit justifiée sur le plan juridique. Je pense que notre objectif à l'égard du code et à l'égard de la syndicalisation, c'est, au contraire, la plus grande expression possible des personnes. Si le commissaire entre dans l'usine où on a le guichet unique et qu'il dit: Oui, j'ai des cartes jusqu'à 49, peut-être jusqu'à 52, mais je ne suis pas sûr des cartes, je ne veux pas accorder l'accréditation comme cela, je veux que les gens se prononcent, il faut lui donner une latitude pour le faire. C'est ce que visent ces dispositions, la notion de tout moyen...

M. Cusano: C'est cela qui est inquiétant.

M. Johnson (Anjou): D'abord, je ne suis pas sûr que ce soit une disposition complètement étrangère au code. Les juristes me disent que c'est la formulation, à partir de l'analyse qui a été faite de la jurisprudence, qui permettra au commissaire d'avoir recours au vote sans être obligé d'invoquer des motifs juridiques pour avoir recours au vote... lui donner cette latitude.

M. Ciaccia: Mais, vous avez déjà le droit, dans cet article, d'avoir recours à un vote au scrutin secret. Vous le spécifiez, alors, vous n'avez pas besoin d'ajouter "par tout moyen d'enquête" parce que vous allez au-delà. Si votre intention est d'autoriser le commissaire à tenir un vote, il l'a déjà.

M. Johnson (Anjou): On a déjà une formulation large et pourtant la jurisprudence a restreint la possibilité du commissaire d'avoir recours au vote. L'article 37 dit: Le commissaire du travail peut ordonner le vote au scrutin secret d'un groupe désigné de salariés chaque fois qu'il le juge opportun et, en particulier, lorsqu'il est d'avis qu'une contrainte a été exercée pour empêcher un certain nombre des dits salariés d'adhérer à une association, etc." Et, malgré ce texte relativement large, où il est dit: "Chaque fois qu'il juge que c'est opportun", il peut le faire, la jurisprudence l'a restreint dans sa possibilité d'avoir recours au vote. Et c'est pour cela qu'on retient une formulation qui est encore plus large.

M. Ciaccia: Mais, dans l'article no 32 que vous amendez...

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Ciaccia: ...est-ce qu'il avait le droit de tenir un vote dans la poursuite de son enquête? Je ne crois pas.

M. Johnson (Anjou): Non, on disait à l'article no 32, à l'origine: "Le commissaire du travail saisi de l'affaire doit décider, après enquête, du caractère représentatif de l'association requérante. Il doit aussi trancher, après enquête tenue en présence de toute association en cause et de l'employeur, toute question relative à l'unité de négociation et aux personnes qu'elle vise."

M. Ciaccia: Alors, d'après...

M. Johnson (Anjou): Et l'article no 37, que j'ai lu tout à l'heure, disait: "Le commissaire du travail peut ordonner le vote au scrutin secret d'un groupe désigné de salariés..."

M. Ciaccia: Mais, pour quelle raison, dans l'article 37... je ne l'ai pas devant moi.

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Ciaccia: Pour quelle raison, dans l'article no 37, il pouvait tenir une enquête sur le caractère représentatif? Est-ce que c'était pour une autre raison?

M. Johnson (Anjou): Dans l'article no 37: "Le commissaire du travail peut ordonner le vote au scrutin secret d'un groupe désigné de salariés chaque fois qu'il le juge opportun et, en particulier, lorsqu'il est d'avis qu'une

contrainte a été exercée pour empêcher"... les personnes, etc. Et, malgré cela, l'interprétation de la jurisprudence a été très restrictive quant à l'utilisation du vote par le commissaire du travail. Et c'est pour cela qu'on introduit une notion plus large, qui est de prendre tous les moyens, dont le vote. Alors, il n'y a plus personne qui va pouvoir mettre en doute le fait que le commissaire décide que les gens vont voter. Je pense qu'on ne peut pas être contre cela d'ailleurs. C'est une des occasions dans la vie syndicale qui est absolument à l'abri de toute critique le vote au scrutin secret devant un commissaire du travail. Je sais que des gens prétendent, et parfois avec raison, qu'il arrive que des syndicats tiennent des votes au scrutin pas secret, dans d'autres cas, ils le tiennent au scrutin secret et tout le monde ne peut pas entrer dans la salle, etc. Quand c'est le commissaire qui décide d'un vote, c'est l'expression libre et démocratique des gens, parce qu'il est là et il surveille. Ce qu'on veut c'est lui donner toute la latitude pour que l'expression de la volonté des travailleurs se fasse.

Je vous donne ici l'interprétation qu'en donne la doctrine plutôt que la jurisprudence. C'est le livre de droit administratif de Gagnon (Robert-P.) qui dit ceci à la page 75 de son traité de droit du travail no 9: "Même s'il jouit ainsi d'un large pouvoir d'appréciation pour décider si l'on devra recourir à un vote au scrutin secret, le commissaire du travail doit fonder toute ordonnance de vote sur des motifs juridiques pouvant le justifier et il ne saurait être question qu'une telle ordonnance soit purement arbitraire.

M. Ciaccia: Je comprends l'objectif que vous poursuivez, mais les mots que vous utilisez dans l'article pour donner au commissiaire le droit d'avoir recours à un vote en n'importe quel temps, même ces mots vont être interprétés par les tribunaux. Autrement dit, vous pouvez avoir les mêmes contraintes. En disant "par tout moyen d'enquête qu'il juge opportun", cela ne veut pas nécessairement dire arbitrairement. Quand vous donnez un pouvoir à un commissaire ou à un officier, il y a toujours eu une interprétation juridique à savoir que ce pouvoir ne peut pas être exercé de façon arbitraire.

Je ne le suggère pas, parce que cela serait presque impensable d'inclure dans un projet de loi que quelqu'un a un droit arbitraire; mais c'est vraiment la seule façon de contourner cette jurisprudence. Si vous dites seulement "par tout moyen d'enquête qu'il juge opportun", vous allez avoir les mêmes interprétations et les mêmes contraintes juridiques qui existent maintenant. Le tribunal pourra dire: Écoutez, c'est vrai, tous les moyens d'enquête que vous jugez opportuns, mais ce jugement ne doit pas être arbitraire et les moyens ne doivent pas être arbitraires.

Je comprends l'objectif que vous voulez atteindre, mais je ne pense pas qu'en ajoutant les mots "par tout moyen d'enquête" vous allez enlever le droit à un tribunal d'imposer la question de discrétion et d'arbitraire. De tout pouvoir qui est donné, que ce soit par tout moyen que vous jugez opportun, les tribunaux vont toujours dire: Ce pouvoir n'est pas donné pour des raisons... ne peut pas être exercé arbitrairement. Et si l'argument est établi que, même avec ces mots, le commissaire l'exerce arbitrairement, je pense que la jurisprudence ne changera pas son interprétation, les tribunaux ne changeront pas leur interprétation.

M. Johnson (Anjou): II y a deux choses dans ce que vient de dire le député. Effectivement, il touche à un domaine sur lequel la jurisprudence et les tribunaux de droit commun se penchent au nom de l'exercice des principes de justice naturelle. Ce sont des débats qui peuvent être très longs.

Notre objectif est très clair, il est de permettre au maximum l'élargissement de la base et de la participation démocratique à des votes pour les fins de calcul de la représentativité.

M. Ciaccia: Le danger, c'est que... (23 h 30)

M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, je suis conscient que l'expression "par tous les moyens" suscite des réactions chez le député de Mont-Royal, qui a déjà eu l'occasion d'entretenir le Parlement de ces questions à l'occasion de beaucoup d'autres projets de loi sur des personnes qui ont des immunités et des pouvoirs, leur façon de l'exercer à l'égard de la protection de ceux qui subissent les enquêtes, etc. On me dit cependant qu'il n'y a jamais eu de restriction à ces moyens, quant à l'agent d'accrédition, dans le code, avant même la loi 17, alors qu'il y avait, à toutes fins utiles, des limites qui ont été imposées par la jurisprudence au commissaire dont le rôle, paradoxalement, est beaucoup plus important en fin de compte. Mais l'agent d'accréditation, en vertu du code, peut entrer dans une usine et parler à tout le monde, il peut aller dans la salle de café et peut s'adresser à la secrétaire de l'employeur, etc.; personne n'a jamais mis cela en doute. Mais là, on dit: Ce qu'on veut, c'est favoriser des votes tenus par le commissaire. La jurisprudence a des interprétations restrictives et l'oblige à évoquer des motifs juridiques pour qu'il y ait une participation au vote. On a tendance à dire: Essayons d'élargir cela. Je ne pense pas qu'on l'élargisse de façon que cela ouvre un tel arbitraire. Il y a des protections contre

cela. Il y a le fait que l'agent profite déjà très largement de discrétion. À ma connaissance, on ne m'a pas rapporté d'abus particulièrement de ce côté. De plus, il y a toujours les principes dans le cas du commissaire. Dans la mesure où il exerce des fonctions quasi judiciaires, il est soumis au pouvoir des réviseurs de la Cour supérieure en vertu des règles de justice naturelle et du reste.

M. Ciaccia: Le seul point que je voulais soulever, c'était que, même en libellant l'article de la façon que vous le faites, cela n'empêchera pas les tribunaux de restreindre le droit de tenir un vote. Ils pourront imposer ces restrictions de la même façon. En ajoutant ces mots "par tout moyen d'enquête", vous n'arrivez pas à cet objectif, mais peut-être que vous ouvrez la porte à d'autres moyens d'enquête. Je ne sais pas quel autre moyen pourrait être utilisé. Je comprends votre objectif, mais je ne pense pas, avec ces mots-là, que vous allez changer l'approche des tribunaux qui vont toujours retenir le droit de regard et le droit de décider si le commissaire a exercé ce droit d'une façon arbitraire ou non.

Le Président (M. Desbiens): Alors, le nouvel article 17 est-il adopté? L'amendement, je veux dire.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, on n'est pas obligé de voter l'amendement. C'est un papillon. Il est considéré comme partie intégrante à la loi. Est-ce que l'article 17 est adopté tel qu'amendé par papillon?

M. Cusano: Sur division.

M. Johnson (Anjou): Adopté sur division?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. Article 18.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'article 18...

Le Président (M. Desbiens): Le projet de loi est retiré.

Une voix: Pas le projet de loi, l'article.

Le Président (M. Desbiens): L'article 18 du projet de loi.

Une voix: Vous avez dit: Le projet de loi!

Le Président (M. Desbiens): Ah bon! La fatigue commence à se faire sentir. C'est la fin.

Une voix: Sur division!

M. Johnson (Anjou): Alors, on retire l'article 18 du projet de loi. Dans le fond, on n'en discute pas. C'est ce que je disais tout à l'heure, on revient au statu quo sur la notion de parties intéressées.

Le Président (M. Desbiens): Adopté?

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): Adopté. M. Johnson (Anjou): Pas sur division!

Le Président (M. Desbiens): Pas sur division. Article 19.

M. Johnson (Anjou): L'article 19, M. le Président, a pour but d'assurer la confidentialité de l'appartenance. Cela va? Adopté?

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): L'article 19 est adopté. J'appelle l'article 20.

Scrutin secret

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'article 20, c'est le scrutin secret.

Le Président (M. Desbiens): L'article 20 est-il adopté?

M. Cusano: Non, non, non.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, expliquez-leur au plus tôt.

M. Johnson (Anjou): Alors, M. le Président, on dit qu'il y a vote au scrutin secret chaque fois qu'une association requérante groupe entre 35% et 50% des salariés qui ont fait une requête en accréditation. De plus, on dit que les seules personnes qui peuvent briguer les suffrages, c'est-à-dire être inscrites sur le bulletin de vote, ce sont les associations requérantes qui regroupent 35% des cartes, de l'unité visée et, évidemment, l'association accréditée qui est déjà là, s'il y en avait déjà une.

Vous allez me dire: Donc, il ne peut pas, par définition, y en avoir plus que deux associations requérantes, parce que, 3 fois 35%, cela fait plus de 100. Voilà! II y a des gens qui ont des cartes de plus d'un syndicat. On sait cela.

Je pense que je vais permettre à mon collègue de Prévost d'éclairer nos collègues sur certaines pratiques.

M. Dean: On a, dans le métier, ce qu'on appelle des "poignées de porte" ou des "pères Ovide". Ce sont des mots de notre langage. Lors d'une campagne de recrutement, quelqu'un, un jour, entend l'argument convaincant d'un recruteur syndical et il signe une carte d'adhésion au syndicat À. Le lendemain, un autre syndicat tient une campagne; il le convainc alors de signer une démission. J'ai vu des cas, il y a quelques années, où on était rendu à cinq, six ou sept changements d'idée de la même personne dans une même campagne. Sans parler de cas extrêmes, cela arrive fréquemment.

Une semaine, la CSN entreprend une campagne, le gars trouve que cela a du bon sens et il signe. La semaine suivante, la FTQ arrive. Le gars trouve que la FTQ a plus de bon sens que la CSN, il signe pour la FTQ. Deux syndicats peuvent avoir un employé. Il peut aussi y avoir un troisième syndicat, si la CSD embarque. Cela peut arriver qu'un gars soit particulièrement vulnérable devant les arguments des vendeurs d'idées comme les vendeurs des brosses Fuller, il signera alors trois cartes; quelquefois, c'est seulement pour se débarrasser de quelqu'un. Je vous parle franchement.

M. Cusano: C'est comme pour les partis politiques.

M. Johnson (Anjou): Non, c'est assez rare dans les partis politiques.

M. Dean: Non, mais les...

M. Johnson (Anjou): Mais, 35% de votre membership, ce n'est peut-être pas aussi stable que vous le pensez.

M. Bélanger: Je ferai savoir au ministre, M. le Président, que 95%, c'est très stable chez nous.

M. Johnson (Anjou): Ici, il s'agit d'un article de concordance avec l'article 37.1. Il n'y a pas là de principe nouveau.

M. Cusano: Un instant, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): C'était déjà contenu dans le code.

M. Cusano: Non...

M. Johnson (Anjou): Le vrai débat, c'est à l'article 21 que vous voudrez le faire.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: C'est que je voudrais bien comprendre cet... Je comprends le phénomène d'adhésion à plusieurs syndicats.

Je comprends cela, que ce soit par idéologie ou même quelquefois par tordage de bras ou autre chose, je comprends cela. Mais qu'est-ce qui se passerait dans le cas où il y en aurait trois? Que se passerait-il dans ce cas?

M. Johnson (Anjou): II peut y en avoir trois.

M. Cuasano: II ne peut pas y...

M. Johnson (Anjou): II peut y en avoir trois avec chacun 35%. C'est tout. Par exemple, si des gens... Est-ce que des cartes de membre, M. Dean, qui durent plus d'un an, c'est possible?

M. Dean: C'est-à-dire que le syndicat requérant, par exemple, peut envoyer des cartes dont une bonne partie sont expirées dans la tête de ceux qui les ont signées, mais ne le sont pas techniquement. Il a signé pour un an et il n'a pas envoyé de lettre de démission. Le syndicat envoie donc des cartes et il dit: J'en ai 35%. Pendant ce temps, l'individu a adhéré ailleurs. On peut en avoir trois comme cela. On peut même techniquement avoir cinq syndicats ayant chacun 35%. Il n'y a pas de limite à cela.

En pratique, cela se fait à deux ou trois. Il est assez rare que cela arrive à cinq. C'est déjà arrivé et, habituellement, cela dure longtemps, comme chez Simpsons. C'est cinq chez Simpsons? Ils sont rendus à cinq?

M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): L'article 20 est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 21.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai un papillon.

Le Président (M. Desbiens): L'article 21 du projet de loi est remplacé par le suivant, article 21: "Ce code est modifié par...

M. Cusano: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): Oui, M. le député de Viau.

M. Cusano: II semble y avoir beaucoup de difficulté à distribuer les papillons, parce qu'ils ne volent pas d'eux-mêmes.

M. Lachance: Cela dépend des couleurs du papillon.

Le Président (M. Desbiens): Article 21. Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 37, de l'article suivant: "37.1. Lorsqu'un vote au scrutin secret ordonné en vertu de la présente section met en présence plus de deux associations de salariés et qu'elles obtiennent ensemble la

majorité absolue des voix des salariés qui ont droit de vote sans que l'une d'elle n'obtienne la majorité absolue, le commissaire du travail doit ordonner la tenue d'un nouveau vote au scrutin secret sans la participation de celle qui a obtenu le plus petit nombre de voix. "Lorsqu'un vote au scrutin secret ordonné en vertu de la présente section met en présence deux associations de salariés, le commissaire du travail accrédite celle qui a obtenu le plus grand nombre de voix si les deux associations obtiennent ensemble la majorité absolue des voix des salariés qui ont droit de vote."

Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Johnson (Anjou): M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): L'article est-il adopté?

M. Ciaccia: Aviez-vous quelque chose à dire?

M. Johnson (Anjou): Oui, j'ai quelques commentaires. L'objet du papillon, M. le Président, c'est de préciser ce qu'était notre intention initiale, d'une part, et, deuxièmement, de répondre à ces demandes de précisions qui nous sont venues de la part des parties.

Ce que dirait l'article 37.1 du code, une fois modifié par le projet de loi 17 tel qu'amendé, c'est que, lorsqu'il y a, trois syndicats en liste, deux syndicats sont en requête le même jour plus le syndicat déjà là auparavant, il va y avoir un ballottage. Celui qui a le moins de votes sort. Le deuxième vote - dans le cas où personne n'a la majorité absolue, d'accord? - se fera entre deux syndicats. S'il y a 100 travailleurs visés par l'unité d'accréditation, il faut absolument que le total des votes obtenus par les deux syndicats qui restent soit équivalent à 51% des travailleurs visés par l'unité. En d'autres termes, si 52 travailleurs ont décidé de ne pas voter, il n'y aura pas de syndicat dans cette boîte. Il faut qu'au moins 50% des travailleurs plus un aient exprimé leur choix en faveur d'un ou l'autre des syndicats. Celui des deux qui a obtenu la majorité devient accrédité.

Ce qui veut dire qu'on éviterait des situations comme celle de Valcartier. À Valcartier, il y a deux syndicats en présence, qui ramassent chacun 47% des votes. Donc, environ 94% des travailleurs se sont exprimés en faveur d'un syndicat et il n'y a pas de syndicat là parce que le Code du travail exigeait qu'il y ait 51% des membres d'unités qui se soient prononcés pour un seul.

Pour briser cela, ce qu'on dit, c'est que, lorsqu'on additionne les votes donnés aux deux syndicats en liste et que cela donne plus que 51%, celui qui a le plus de voix obtient l'accréditation.

Avant de passer la parole à nos collègues - je suis sûr qu'ils auront quelques commentaires là-dessus - je dirai que, dans le cas de huit législations canadiennes sur dix, la règle de la majorité simple est encore plus large que la nôtre, au sens où on ne fixe pas un minimum de 51% de participation et d'expression du vote. On peut avoir techniquement des syndicats accrédités dans des entreprises dans huit provinces sur dix et au niveau canadien avec 20% du total des membres d'unités qui se sont prononcés pour un syndicat.

Dans la pire des hypothèses, en vertu de cela, supposons que, dans une usine de 100 personnes, 51 personnes ont voté pour un ou l'autre syndicat; le syndicat qui aurait obtenu 26% des votes, serait le syndicat choisi. Il y aurait donc un syndicat dans cette usine. C'est la "pire" des hypothèses de taux de participation le plus bas possible. Mais c'est très rare, à toutes fins utiles.

Encore une fois, dans la tenue d'un vote au scrutin secret - que mon collègue aura certes des choses à ajouter au débat - je suis convaincu que, lorsque le commissaire du travail tient un vote au scrutin secret sur l'adhésion syndicale, c'est un vote qui est habituellement et probablement le moment d'expression démocratique le plus important dans la formation d'un syndicat. (23 h 45)

Je suis convaincu que l'immense majorité des travailleurs, même ceux qui auraient subi des pressions, qui auraient peur, qui n'auraient pas aimé la tête d'un organisateur syndical, quand ils vont s'enfermer avec quelqu'un dans un local marqué "gouvernement du Québec, commissariat du travail", ils savent que ce qu'ils font, c'est secret et cela favorise la participation. Ce qu'on vise à faire, c'est d'empêcher des absurdités comme celles qu'on voit dans des usines où 90% des travailleurs ont exprimé leur volonté de se syndiquer et qu'il n'y a aucun syndicat qui en ressort. Par ailleurs, c'est aussi de s'assurer qu'il n'y aura pas de syndicat s'il n'y a pas une majorité de travailleurs qui se sont exprimés pour l'implantation d'un syndicat. Voilà pour la présentation.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, il y a une chose sur laquelle je voudrais qu'on m'informe. Si nous prenons l'industrie de la construction - je voudrais qu'on m'écoute -nous savons tous qu'à l'automne il y aura un maraudage.

M. Johnson (Anjou): Si on adopte la loi 27.

M. Bélanger: Si on adopte la loi 27. Est-ce que cela va s'appliquer à l'industrie de la construction?

M. Johnson (Anjou): Non.

M. Bélanger: Pourquoi pas? C'est ce que je voudrais savoir.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Parce que le régime d'accréditation dans le secteur de la construction relève d'une loi totalement distincte, il ne relève pas du Code du travail. C'est une loi spéciale, dont l'origine remonte à 1968-1969. Il y a, à toutes fins utiles, un Code du travail pour la construction et il y en a un pour le reste.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Est-ce que l'article 21 est adopté tel qu'amendé?

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. J'appelle l'article 22.

M. Johnson (Anjou): Un papillon, M. le Président.

Une voix: Oh!

M. Johnson (Anjou): C'est un détail, une coquille.

Le Président (M. Desbiens): Le projet de loi est modifié par l'insertion, après l'article 22...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, on va être obligé de faire une motion de renumérotation. Le secrétaire me fait signe que c'est à la fin. Pour fins de compréhension, il faut prendre l'article 22 du code, tel quel.

Le Président (M. Desbiens): C'est l'article 22. L'alinéa 39 de ce code est modifié par la suppression du deuxième alinéa. L'article 22 n'a pas d'amendement.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Une voix: Le nouvel article?

Le Président (M. Desbiens): Non, non, l'article 22 du projet de loi.

M. Johnson (Anjou): Oui, M. le Président. Ce que je vous ai présenté comme papillon...

Le Président (M. Desbiens): ...c'est un article supplémentaire.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

Le Président (M. Desbiens): C'est l'article 22 du projet de loi, pour l'instant, l'article 22.1.

M. Johnson (Anjou): C'est parce qu'on a anticipé les travaux de la commission et on a renuméroté. Comme on a éliminé l'article 18 tout à l'heure, je vous ai présenté un papillon à l'article 22 alors qu'il devrait s'écrire 23 en vertu de la renumérotation actuelle.

Le Président (M. Desbiens): On risque...

M. Johnson (Anjou): Après l'article 22, on introduit un nouvel article.

Le Président (M. Desbiens): C'est cela, mais on va commencer par disposer de l'article 22.

M. Johnson (Anjou): On verra quel est son numéro après.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 22 est adopté?

M. Cusano: Attendez.

Le Président (M. Desbiens): Je vous rappelle que l'article 22 dont on parle est l'article 22 du projet de loi. Ce n'est pas l'amendement qui vient d'être déposé. L'article 39 de ce code est modifié par la suppression du deuxième alinéa.

M. Cusano: Est-ce que ceci veut dire...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'article 22 du projet de loi no 17, qu'on a devant nous, supprime le deuxième paragraphe de l'article 39 du code essentiellement par concordance au pouvoir qu'on a donné tout à l'heure au commissaire général du travail. On a donné un pouvoir spécifique au commissaire général du travail, celui de pouvoir dépêcher un agent d'accréditation pour enquêter. Tout à l'heure, on a dit: II peut utiliser les moyens nécessaires, y compris envoyer un agent d'accréditation.

M. Ciaccia: Est-ce que le pouvoir d'enquêter incluait le pouvoir d'effectuer une

enquête sur un salarié, sur un membre de l'association? Est-ce que vous réduisez vraiment le pouvoir d'enquête? Est-ce que vous le limitez à certains cas?

M. Johnson (Anjou): On juge que l'article 39, deuxième paragraphe, du Code du travail n'est pas utilisé, à toutes fins utiles, par le commissaire. Deuxièmement, le commissaire général du travail nous dit qu'avec l'article spécifiant qu'on lui donne les moyens nécessaires - il peut utiliser tous les moyens - cela couvrait l'utilisation qu'il pouvait en faire.

M. Ciaccia: Tous les moyens d'enquête qu'il juge opportun, cela couvrirait les cas du deuxième alinéa.

M. Johnson (Anjou): Un moyen d'enquête, cela peut être de dépêcher l'agent d'accréditation qui est un subordonné du commissaire général.

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Il y a maintenant un amendement. On va appeler l'article 22.1, selon la numérotation habituelle. Après l'article 22, on insère l'article suivant: "22.1 L'article 40 de ce code est remplacé par le suivant: "40. Une requête en accréditation ne peut être renouvelée avant trois mois de son rejet par un commissaire du travail ou d'un désistement produit par une association requérante sauf s'il s'agit d'une requête irrecevable en vertu de l'article 27.1, d'un désistement produit à la suite d'une fusion de corporations municipales ou scolaires, d'une intégration de personnel dans une communauté urbaine ou de la création d'une commission de transport." Est-ce que le nouvel article est adopté?

M. Cusano: Est-ce qu'on pourrait l'expliquer?

M. Johnson (Anjou): On se souvient qu'on a introduit tout à l'heure ce qu'on appelait le guichet fermé. Or, on dit: Une fois qu'une association requérante a fermé le guichet, qu'on est allé dans l'usine et que les travailleurs ont rejeté l'implantation du syndicat, elle ne peut pas présenter une nouvelle requête avant trois mois. S'il y a deux associations requérantes, une qui a présenté la requête et qui a fermé le guichet et une autre qui en a présenté une le lendemain, on ne veut pas imposer à celle qui a présenté une requête le lendemain et qui n'a jamais fait l'objet d'un vote d'attendre trois mois après la décision des travailleurs. On veut lui permettre, à elle, de déposer une requête. C'est l'objet de cet article.

Le Président (M. Desbiens): Adopté? Le nouvel article 22.1 est adopté. J'appelle l'article...

M. Cusano: Un instant...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Je suis en train de regarder cela.

M. Bélanger: Le ministre nous a présenté l'hypothèse qu'une association avait fait une demande et avait donc fermé le guichet et qu'une deuxième l'avait fait le lendemain. Il a dit: On ne veut pas interdire à celle-ci de présenter une nouvelle requête. Or, si elle l'a déjà présentée, est-ce que sa demande ne deviendrait pas automatiquement la première demande légale ou, si vous voulez, admissible?

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Il y a la requête de A et la requête de B. A dépose la requête et cela ferme le guichet. Le commissaire part donc avec cela. Le commissaire qui reçoit cela ne part pas le jour même. B dépose sa requête le lendemain. Le commissaire prend le dossier et dit que c'est A qui a déposé, donc B n'est plus dans le portrait et sa requête est irrecevable en vertu de l'article 27.1. Il part avec la requête de A, va à l'usine et les travailleurs rejettent le syndicat. On dit que

A ne peut plus présenter de requête dans les trois mois qui viennent, mais on ne veut pas interdire à B, dont la requête a été jugée irrecevable pour le motif qu'il l'avait déposée le lendemain, de représenter une requête. On ne veut pas le faire attendre trois mois.

M. Bélanger: C'est bien.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 22.1 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): J'appelle l'article 23. Est-ce que l'article 23 est adopté?

M. Cusano: Un instant, M. le Président. M. Johnson (Anjou): M. le Président...

M. Cusano: II n'y a pas de papillon à celui-là, M. le Président?

Le Président (M. Desbiens): Oui.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je

dépose un papillon à l'article 23, qui est un amendement de concordance. Le papillon est un amendement de concordance également.

Le Président (M. Desbiens): L'article 23 du projet de loi est remplacé par le suivant: "L'article 41 de ce code est modifié: "1° par le remplacement, dans la première ligne du deuxième alinéa, des mots "Nonobstant le deuxième alinéa de l'article 32" par les mots "Malgré le troisième alinéa de l'article 32; "2° par le remplacement du troisième alinéa par le suivant: "Un agent d'accréditation chargé de vérifier le caractère représentatif de l'association envoie une copie de son rapport au requérant, à l'association et à l'employeur. Ceux-ci peuvent contester ce rapport en exposant par écrit leurs motifs au commissaire général du travail ou au commissaire du travail saisi de l'affaire le cas échéant, dans les dix jours de la réception du rapport, à défaut de quoi une décision peut être rendue sans convoquer les parties en audition."

Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Johnson (Anjou): Essentiellement, M. le Président, la formulation, sur le plan juridique, je l'avoue, est assez complexe. Cette partie-là du code, d'ailleurs, concernant les délais, a toujours été très complexe. Je dirai pour résumer le sens de l'article 23, que, d'une part, on le fait par concordance avec les articles antérieurs qu'on a adoptés sur l'accréditation et, deuxièmement, par concordance, on dépersonnalise le rôle du commissaire du travail. On a adopté un article, tout à l'heure, qui permet au commissaire général de dessaisir un commissaire d'un dossier. Or, les articles parlent toujours du commissaire qui avait le dossier, alors qu'au fond il faudrait se référer au fait qu'il y a un dossier au commissariat. Encore une fois, il ne s'agit que d'articles de concordance au niveau des délais et, deuxièmement, des conséquences du dessaisissement d'un dossier d'un commissaire, pour ne pas invalider une procédure du simple fait que ce n'est pas le même commissaire qui était là avant l'audition. J'ai l'impression qu'on va en discuter lundi.

M. Cusano: Pardon?

M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'on a le consentement pour continuer jusqu'à 3 heures?

Une voix: J'ai l'impression qu'on va en parler jusqu'à 6 heures.

M. Cusano: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: En réponse au ministre, je n'aime pas travailler avec des menaces et, par le fait qu'on nous impose la guillotine, cela nous met dans la position de ne pas pouvoir continuer. Vous nous avez fait très mal en ce sens, M. le Président. Comme vous le voyez, ce soir, on a passé à travers plusieurs articles et cela devient intéressant. Cela démontre notre souplesse.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que...

M. Cusano: On va adopter l'article 23.

Le Président (M. Desbiens): L'amendement à l'article 23 et l'article 23 sont-ils adoptés tels qu'amendés?

M. Cusano: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Alors, il est minuit. La commission élue permanente...

M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'on a le consentement pour continuer, M. le Président?

M. Bélanger: Même si on voulait donner notre consentement, l'ordre de l'Assemblée nationale veut qu'on termine nos travaux à minuit.

Le Président (M. Desbiens): Alors, la commission élue permanente du travail ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à minuit)

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