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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 14 décembre 1983 - Vol. 27 N° 205

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen de l'administration et du fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail


Journal des débats

 

(Douze heures deux minutes)

Le Président (M. Blouin): La commission élue permanente du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de cette commission qui est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Aujourd'hui, nous allons entendre les membres du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail ainsi que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et l'Association des mines de métaux du Québec Inc.

Ce matin, c'est le conseil d'administration de la commission qui est devant nous et je demanderais aux représentants et membres du conseil d'administration de bien vouloir s'identifier pour les fins du journal des Débats et, par la suite, de procéder à la présentation qu'ils ont à nous livrer.

Conseil d'administration de la CSST

M. Sauvé (Robert): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, permettez-moi de vous présenter les membres du conseil d'administration. À l'extrême gauche, il y a la partie patronale au complet: M. Gaston Pellan, M. Gilles Lavallée, Mme Grimard, M. René Bédard, M. Claude Drouin, M. Sarto Paquin et M. Ghislain Dufour. À l'extrême droite, le Dr Michel Vézina, observateur pour le ministre des Affaires sociales au conseil, M. Étienne Giasson, de la Fédération des pâtes et papiers affiliée à la CSN, M. Claude Gingras, vice-président de la CSD, M. Jean Lavallée, MM. Claude Morrisseau et Louis Laberge, de la FTQ. Il y a deux absents: MM. Clément Godbout et Pierre Dupont, de la Fédération de la métallurgie (CSN) qui sont malheureusement pris sur la route entre Montréal et Québec.

Le Président (M. Blouin): M. Sauvé, avant que vous ne débutiez votre présentation, je vais identifier les membres de cette commission qui sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean (Prévost), Fréchette (Sherbrooke), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Lafrenière (Ungava), Lavigne (Beauharnois), Pagé (Portneuf), Baril (Arthabaska), Maltais (Saguenay), Champagne (Saint-Jacques) et Rochefort (Gouin). Les intervenants étant MM. Sirros (Laurier), Champagne (Mille-Îles), Côté (Charlesbourg), Leduc (Fabre), LeMay (Gaspé), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).

M. Fréchette: M. Champagne (Mille-Îles) serait membre en lieu et place de M. Rochefort.

Le Président (M. Blouin): M. Champagne (Mille-Îles) remplace M. Rochefort et il devient donc membre. Cela va. D'accord? Allez-y.

M. Sauvé: M. le Président, permettez-moi quelques minutes de présentation du fonctionnement du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je vais procéder par trois exemples en me servant du règlement de régie interne et de la loi. Je serai suivi de deux de mes collègues, M. Dufour et M. Laberge; ils voudraient également prendre quelques minutes du temps de la commission pour donner leur point de vue.

Le premier exemple dont je voudrais me servir, c'est pour vous expliquer... Vous avez devant vous le règlement de régie interne et, à l'article 2, vous avez les pouvoirs du conseil d'administration. Je n'ai pas l'intention de tout lire les différents pouvoirs du conseil d'administration, mais uniquement de vous souligner les quatre plus importants auxquels s'attache le conseil à chacune de ses réunions. Le conseil d'administration a le pouvoir d'étudier les règlements qu'il soumet au gouvernement pour approbation, les politiques, les programmes et le budget. Il est bien évident que nous ne sommes pas des experts dans toutes les matières et, dès le départ, le conseil d'administration a décidé des formules qu'il pouvait prendre. Je vous rappelle que le conseil a été nommé en mars 1980, qu'il a siégé le 30 mars 1980 pour la première fois et qu'il a établi un certain nombre de règles du jeu.

Par exemple, quand il s'agit d'étudier une question qui peut être assez complexe, le conseil détermine le nombre de membres de comités ad hoc. Un comité ad hoc est un comité qui siège, par exemple, sur la surdité professionnelle, qui siège sur la détermination des priorités, etc. Depuis le début du conseil, il y a eu 25 ou 26 comités ad hoc. À chaque

comité ad hoc, il y a un représentant du conseil de chacune des parties. À ce comité s'adjoignent des experts nommés par les parties. Ces comités sont composés de trois à cinq membres déterminés par le conseil d'administration dans chaque cas.

Le premier cas que je voudrais utiliser est celui des priorités de la loi. Vous savez qu'en vertu de l'article 167, premier paragraphe, la commission exerce notamment les fonctions suivantes: établir les priorités d'intervention en matière de santé et de sécurité des travailleurs. Dès le mois de mai 1980, la commission - la permanence, comme on l'appelle - a déposé au conseil d'administration des documents qui portaient sur la fréquence des accidents, la gravité des accidents, les études de NIOSH sur le sujet, NIOSH étant l'institut national américain en santé et sécurité du travail, et quelques connaissances que nous avions sur les problèmes de santé et de sécurité du travail.

Le conseil a immédiatement nommé un comité ad hoc qui était composé d'un représentant de la partie patronale, M. Paquin, et de deux experts, M. Duguay et M. Trépanier, du côté syndical. Le représentant du conseil d'administration dans le temps était M. Étienne Giasson. Depuis, c'est encore Étienne Giasson, Claude Gingras et Robert Bouchard. Ce comité a siégé à quelque 18 reprises. Ce comité a, après de longues réunions, de longues études, déterminé les six groupes. Vous savez que -ce n'est pas la commission qui l'a inventé, ce n'est pas le conseil d'administration - il y a 30 secteurs au Québec reconnus par le BSQ, le Bureau de la statistique du Québec. Avec les données en main, le comité, qui est toujours présidé par un vice-président selon la compétence du sujet, a déterminé les six groupes et par ordre alphabétique dans chacun des groupes, pour ne pas dire qui est le pire ou le moins pire.

Le premier groupe, je pense que vous l'avez. J'ai ici des tableaux et je me demande si quelqu'un de la commission parlementaire peut prendre ce tableau. Vous l'avez déjà sur une feuille de format 8 1/2x11, je pense. Madame, est-ce que quelqu'un pourrait le remettre parce que je pense que personne ne l'a?

Vous voyez que, dans le groupe 1, ce sont: Bâtiment et travaux publics, produits chimiques, forêts et scieries, mines et carrières, produits en métal. Les quatre sujets, bâtiments, forêts, mines et carrières et produits en métal sont là suivant les données de fréquence et de gravité; celui des produits chimiques est là pour des raisons de possibilité de maladie professionnelle, et ainsi de suite pour les groupes 2, 3, 4, 5 et 6.

Après un an et demi, le comité s'est réuni pour savoir s'il devait changer l'ordre dans les groupes. Le comité, en faisant rapport au conseil - le rapport avait été accepté par le conseil - avait gardé une porte ouverte en disant: On pourra regarder à l'avenir s'il y a des groupes qui pourraient changer. Effectivement, au cours des six mois qui ont suivi, il y a le secteur des affaires sociales qui a demandé à être devancé et le secteur des fonderies qui voulait aller dans le groupe 1 plutôt que dans le groupe 2. Le conseil a décidé de ne pas faire ces changements dans le cas des fonderies principalement parce que les groupes 1 et 2 sont suivis d'assez près pour leur proclamation. C'est ainsi que cela a été déterminé par les parties, après étude de toutes les données possibles. Les groupes 1 et 2 sont déjà des groupes proclamés. Ceci veut dire qu'ils ont un an pour soumettre les programmes de prévention entre autres choses et avoir des comités de santé et de sécurité, etc. C'est là que l'application de la loi entre en jeu. Pour le groupe 1, la date de la fin de la remise des programmes de prévention était le 3 juillet 1983. Pour le groupe 2, ce sera en mai 1984. Au cours de l'année prochaine, nous proclamerons, je pense - le conseil le décidera - le groupe 3. Vous comprendrez que les six groupes ne peuvent entrer en même temps en activité.

Voilà pour le premier exemple, la façon de fonctionner du conseil. C'est par voie d'un comité ad hoc. Cependant, nous avons utilisé d'autres méthodes également. Au cours du mois de mai de cette année, nous avons siégé en comité plénier pour étudier le mode de financement de la commission. C'est le cahier bleu que vous avez tous dans vos dossiers.

Ce mode de financement a été soumis aux membres du conseil d'administration et la partie patronale entre autres a demandé que trois experts actuaires puissent siéger en comité plénier pour étudier, poser des questions sur ce document et demander l'avis des actuaires de la commission et des actuaires-conseils. Toutes les discussions ont eu lieu. Je reviendrai demain sur le contenu de ce projet de financement. Quand même, cela vous indique qu'à la séance de juin le conseil a accepté ce mode de financement après avoir étudié le tout en comité plénier. L'autre exemple qui a été encore plus poussé, si vous me permettez, M. le Président, c'est celui de la physiothérapie. Il était bien connu que nous avions un problème avec la physiothérapie à la commission, qu'il s'agisse du traitement des accidentés pour avoir les meilleurs soins possible, et également une question de coût. (12 h 15)

Le comité a siégé en comité plénier. Là encore, la partie patronale était accompagnée de trois médecins, si mon souvenir est bon; mon collègue me corrigera. Il y avait le Dr Michel Lesage, le Dr Guillemette et le Dr Paquet qui étaient là. Il y avait évidemment le directeur des

services médicaux de la commission qui a siégé avec trois de ses collègues, trois orthopédistes et un physiatre. Là nous avons entendu d'abord le rapport du groupe Duranceau qui était composé de physiatres, orthopédistes, rhumatologues, épidémiologistes et physiothérapeutes qui avaient étudié la question et soumis un rapport.

Ils ont pu défendre leur point de vue, être interrogés par les médecins de toutes les parties et répondre aux questions. Ils ont été suivis dans l'après-midi par les représentants de l'Association des physiatres qui est venue donner son point de vue, a critiqué le rapport, fait des suggestions et, par la suite, nous avons eu le groupe des physiothérapeutes qui a sensiblement expliqué ce que vous avez reçu dans le document qui a été déposé devant la commission parlementaire. Les orthopédistes, eux, ont fait parvenir un document écrit. Ils ne se sont pas présentés.

C'était au mois de juin. Au mois d'août, la commission a entendu - en comité plénier toujours, avec les médecins de l'extérieur - les représentations des docteurs Lemieux, Guimont, Martineau et Brouillet, de la commission, sur la nouvelle politique, qui n'était pas incidemment basée sur le rapport Duranceau. Cette nouvelle politique se veut également souple; si vous la lisez attentivement on va dire "généralement, telle chose" et "il y a possibilité d'améliorer la situation". Quant aux problèmes qui sont soulevés en physiothérapie, je pense que demain, M. le Président, on aura l'occasion d'y revenir. Il s'agit de l'administration et des activités courantes. C'est dans les pouvoirs du P.-D.G. et du comité de direction.

Voilà trois exemples pour expliquer comment le conseil fonctionne, en plus d'avoir ses réunions mensuelles. Je pense que les gens ne s'imaginent pas à quel point les administrateurs externes de la commission ont beaucoup de travail à faire. Ils ne font pas que siéger au conseil; ils siègent à des comités ad hoc ou des comités pléniers. Cela a un excellent rôle d'informateur auprès des différentes associations. De cette façon, ces comités permettent à plusieurs personnes de faire valoir leur point de vue.

Je vous ai donné trois exemples. Si vous en voulez d'autres, j'y reviendrai. Je pense que mon collègue, Ghislain Dufour, voudrait d'abord faire une présentation et, par la suite, M. Laberge.

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Je pense que vous avez reçu ce matin, par le Secrétariat des commissions parlementaires, ce bref document de huit ou neuf pages. Je vais en faire la lecture. C'est douze ou quinze minutes au maximum.

La partie patronale au conseil d'administration de la CSST est, bien sûr, prête à répondre, selon les règles juridiques et d'éthique habituelles, à toutes lesquestions que les députés voudront bien lui poser relativement à sa participation à la gestion de cet organisme. Il s'agira de réponses relatives à la gestion générale de l'organisme selon le rôle qui nous est dévolu et sur lequel nous reviendrons longuement plus loin. Nous laisserons notamment au président-directeur général le soin de répondre aux questions qui concernent la gestion courante, selon d'ailleurs les articles 28 et 43 du règlement de régie interne de la commission dont on vous parlait tantôt et qui est un règlement qui a été accepté par le gouvernement.

Il nous semble cependant profitable de faire précéder ces discussions d'un bref rappel d'un certain nombre de paramètres qui pourront être utiles à la compréhension que vous pourriez avoir de certaines réactions à certaines préoccupations qui sont souvent exprimées à l'endroit de la CSST, peu importent les groupes. Ces paramètres sont d'ailleurs l'expression de nos principales préoccupations à l'égard de la CSST. Ils vous sont livrés, bien sûr, en vrac, sans ordre précis dans le but simplement d'encadrer, si vous nous le permettez, davantage la discussion. En effet, l'expérience de plusieurs d'entre nous dans des exercices du genre, exercices qui revêtent nécessairement un caractère politique, nous amène à penser qu'on est ainsi moins susceptibles de se perdre inutilement dans des détails, sinon de s'aventurer dans des interprétations qui sont souvent erronées.

Il n'est pas inutile au départ de préciser qu'au moment de la discussion du livre blanc sur la santé et la sécurité du travail et, subséquemment, au moment du débat sur la loi 17, le patronat souhaitait également atteindre les principaux objectifs du projet de loi, à savoir prévenir et réduire les accidents et les maladies professionnelles. Il signalait cependant que la loi était plus ou moins bien faite et qu'elle coûterait cher. Il exprimait son désaccord avec bon nombre de moyens suggérés pour y parvenir, notamment parce qu'ils étaient souvent tout à fait inédits en Amérique du Nord. Ce que suggérait alors le patronat, au lieu du régime de réglementation proposé, c'était de procéder en fixant des objectifs, ce qui, de son avis, aurait permis de mieux atteindre les buts poursuivis.

Le législateur de l'époque ne s'est pas engagé dans cette voie: à la gestion par objectif, il a préféré l'approche réglementaire, ce qui fait qu'aujourd'hui, il n'est pas surprenant que le patronat soit parfois ou opposé ou réticent aux règlements que la loi engendre et, bien sûr, aux coûts qu'ils comportent. Déjà, rappelons-le, cette

loi a suscité une vingtaine de nouveaux règlements. Avec les anciens règlements découlant de la Loi sur les accidents du travail, c'est plus de 50 règlements que la commission doit administrer. Et plusieurs autres sont encore à venir.

Il est utile également de rappeler que la loi 17 a innové au Québec, sinon en Amérique du Nord, en créant une commission dont le conseil d'administration est composé de représentants patronaux et syndicaux, sur une base paritaire de 7-7 et d'un P.-D.G. nommé, quant à lui, non pas par les parties, tout comme les vice-présidents d'ailleurs, mais par le gouvernement lui-même. C'était là une orientation tout à fait nouvelle dont on a beaucoup fait état au nom du paritarisme patronal-syndical.

Des précisions s'imposent cependant quand on parle de ce type de conseil d'administration. Il faudrait dire que, généralement, un conseil d'administration possède des pouvoirs qui sont bien connus. Il nomme son président-directeur général, il nomme ses principaux officiers exécutifs; il approuve l'organigramme interne; il est, sous réserve de l'assemblée générale des actionnaires, souverain dans la totalité de ses décisions, il regroupe finalement - et c'est important - des personnes qui partagent à peu près exclusivement non seulement les mêmes objectifs, mais les mêmes vues sur les moyens de les réaliser.

Contrairement à ce schéma, le législateur a prévu des modalités différentes dans la loi 17, dont je vais vous entretenir rapidement. Je voudrais dire qu'il ne s'agit nullement ici de passer un quelconque jugement sur les hommes en place actuellement ou ceux qui ont été là dans le passé, mais ce que nous voulons passer, c'est un jugement sur les structures.

Première modalité: le conseil d'administration ne nomme pas son président-directeur général, ni ses vice-présidents.

Deuxièmement, le président-directeur général possède, de par l'article 154 de la loi, des pouvoirs que l'entreprise privée en tout cas ne consent pas à son P.-D.G.

Troisièmement, sans tenir compte du conseil d'administration, le ministre responsable de la loi et le gouvernement peuvent faire ce qu'ils veulent en vertu de l'article 225 et ils ont déjà pris au moins deux décisions dont le conseil d'administration n'a pris connaissance qu'après coup, et on peut les identifier: le certificat de retrait de la travailleuse enceinte et le non-financement de l'inspection. Dans ce dernier cas, le gouvernement est revenu sur sa décision, notamment, à la suite des pressions du ministre du Travail et des pressions exercées, ce qui fait que le gouvernement a changé sa décision.

Contrairement au conseil d'admi- nistration de l'entreprise privée, celui de la CSST n'est pas neutre. Au-delà des objectifs communs, bien sûr, parce que les objectifs de santé et de sécurité sont communs, mais il représente des intérêts souvent convergents et parfois tout à fait opposés.

M. le Président, il faut vivre ce genre de situation pour la comprendre vraiment et comprendre également pourquoi il est toujours essentiel, et déjà certains l'ont fait, de faire la distinction entre la direction de la CSST et le conseil d'administration. Ce dernier, en effet, ne siège qu'un jour ou deux par mois, en dehors des nombreux comités auxquels le président s'est référé tout à l'heure, doit se taper des dossiers très complexes, techniques et volumineux dans des périodes qui ne peuvent, par définition, qu'être relativement courtes. Selon les paramètres établis par le ministre sur lesquels je vais revenir, il incombe donc à l'administration, à la permanence de voir à la gestion régulière des choses de la CSST.

Finalement, le ministre responsable, selon la loi, peut prendre des décisions politiques. Exemple: décider de proclamer tel ou tel article, lorsque tel est son désir, indépendamment du conseil d'administration. J'ai un exemple dans le texte ici. Je vais vous en donner plutôt un autre parce que vous l'avez vécu en commission parlementaire. Vous avez eu le groupe de l'AIFQ, l'Association des industries forestières, qui s'est présenté hier pour exposer le problème concret de trois associations patronales qui existent dans le champ au niveau de la prévention. Elles disparaissent tout simplement par proclamation d'un article de la loi 17. Le conseil d'administration, dans son ensemble, doit vivre les retombées qui vous ont été exposées hier, mais il n'a rien à voir avec la proclamation de l'article en question.

On est donc loin ici, je me résume sur cela, du conseil d'administration tradionnel et on ne saurait trop insister sur ces aspects particuliers du conseil d'administration de la CSST. Et là, il n'y a pas de possibilité de désaccord. Tout ce que je viens de vous dire est vérifiable à la lecture même de la loi.

Le Conseil du patronat, pour sa part, appréhendait du moins de façon théorique ces difficultés lorsqu'il a accepté de siéger au conseil d'administration de la CSST. Cependant, il n'a pas pour autant accepté de perdre sa marge de critique politique et publique en acceptant d'y siéger. En recommandant, en 1980 et en 1982, des représentants du CPQ pour siéger au conseil d'administration, Pierre Côté, qui était alors le président du CPQ, indiquait clairement au ministre qui, à ce moment, était M. Marois, que "cette collaboration ne devra en aucune façon nous empêcher, en tant qu'organisme, de continuer nos représentations, le cas

échéant, auprès du législateur ou de l'opinion publique."

C'est ce que nous venons d'ailleurs de faire en contestant en Cour supérieure le bureau de révision-inspection de la CSST pour la seule et unique raison qu'il ne permet pas de droit d'appel à l'extérieur de la CSST. C'est ce que nous ferons aussi bientôt en contestant également en Cour supérieure, non pas le règlement de santé et de sécurité de façon générale, mais un aspect précis de ce règlement qui nous apparaît discriminatoire à l'endroit des travailleurs non syndiqués.

Ces deux seuls exemples illustrent bien à quel point les administrateurs de la CSST doivent souvent porter plusieurs chapeaux, soit comme administrateurs, soit comme représentants de leur groupe, soit comme représentants du ministre, soit comme représentants des bénéficiaires. La loi est ainsi faite. Je le répète pour qu'il n'y ait pas de méprise. Rappelons que nous ne sommes pas ici comme représentants de nos organismes, mais bien comme membres du conseil d'administration. Il serait bien naïf de croire que les préoccupations de nos organismes ne sont pas aussi un peu les nôtres.

Au plan du travail réalisé, au cours des trois dernières années, par les administrateurs, il fut, à sa face même, énorme, compte tenu des contraintes du mandat. À cet égard, il suffirait simplement de prendre connaissance, et on en a, d'un seul ordre du jour d'une assemblée et de constater l'importance des questions qui sont en cause pour s'en convaincre. (12 h 30)

Dans ce contexte, il n'est pas inutile de rappeler ce que nous disions il y a un instant: Les administrateurs doivent s'en tenir aux grands problèmes, aux grandes orientations. C'est le sens, d'ailleurs, du mandat que nous avait donné, le 31 mars 1980, le ministre Pierre Marois lorsqu'il était venu rencontrer les membres du conseil et qu'il nous avait livré le texte suivant, et cela m'apparaît important à la poursuite des débats de lire un extrait de ce texte: "Une lecture attentive de la loi vous permettra de constater que les mots "commission" et "conseil d'administration" ne sont pas équivalents et ne sont pas employés à l'aveuglette. "La commission, c'est l'ensemble des structures et des personnes qui voient à l'application de la loi. Elle comprend des organes décisionnels comme des services opérationnels. En matière de décisions, on distingue deux niveaux: ceux du conseil d'administration et du P.-D.G. L'esprit de la loi veut que le conseil d'administration agisse comme tout conseil d'administration d'une grande corporation. Il est le plus haut niveau de décision parce qu'il fixe les grandes orientations et approuve les grandes politiques; mais il n'a pas d'action directe dans les opérations quoditiennes. Il joue un rôle de contrôleur général plutôt que celui de direction générale. C'est pourquoi la loi dit précisément, à l'article 154 - auquel je faisais référence tantôt - que le directeur général est responsable de l'administration et de la direction de la commission. Le législateur - et il termine là-dessus - a voulu que l'application des programmes aux clientèles et la conduite des opérations courantes relèvent d'abord du P.-D.G. et de ses assistants."

Or, c'est justement sur les grands problèmes, les grandes orientations que s'expriment les plus profonds désaccords. Le paritarisme, c'est beau, c'est noble, mais c'est une tâche extrêmement difficile, d'autant plus qu'on taille dans du neuf et que, dans le contexte économique difficile dans lequel fonctionnent nos entreprises québécoises, nous devons, comme représentants patronaux, incluant le gouvernement comme employeur responsable, freiner certaines demandes et exiger également des comptes de nos administrateurs internes.

Dans les circonstances et dans ce contexte difficile du paritarisme, il n'est pas étonnant que ce soit la loi 17, Loi sur la santé et la sécurité du travail, et non la Loi sur les accidents du travail, qui ait retenu davantage l'attention des administrateurs au cours des trois dernières années. Ceci s'explique pour deux raisons.

La première, c'est que le dossier de la réparation a toujours été, depuis qu'on est là, un peu mis en veilleuse à cause du fameux débat concernant l'article 38.4 et du recours collectif qu'il a suscité. Nous espérons que tous et chacun des membres sont bien au fait de ce dossier. C'est également parce que tout débat concernant des dossiers sur la réparation nous amenait presque invariablement au contenu de l'avant-projet de loi du gouvernement sur les accidents du travail et les maladies professionnelles qui est maintenant dans le décor depuis trois ans. Qu'il s'agisse des dossiers relatifs, par exemple, aux artisans, aux maladies professionnelles, au calcul du revenu net et combien d'autres, le problème que nous soulevions était invariablement dans la future réforme de la Loi sur les accidents du travail.

Ici, vous me permettrez un aparté, qui n'a rien à voir tel comme membre du conseil pour vous dire que les grands dossiers auxquels s'est opposée la délégation patronale au conseil d'administration de la CSST sont traités dans l'actuel projet de loi 42. Je voudrais dire qu'on n'y retrouve pas nécessairement les préoccupations et les recommandations patronales que nous avons débattues au conseil d'administration de la

CSST. Je veux simplement parler du problème des artisans, du problème des "miraculés" de l'amiantose et de la silicose sur lesquels, semble-t-il, on avait fait un certain consensus. Les objections patronales à l'égard du calcul du revenu net et d'un certain nombre de problèmes comme cela semblent trouver une réponse dans la loi 42, mais pas nécessairement la réponse à laquelle on se serait attendu quant à nous.

La deuxième raison, c'est que nous sommes arrivés au conseil d'administration de la CSST au moment de l'entrée en vigueur de la loi 17, et celle-ci a exigé que les administrateurs y consacrent à peu près toutes leurs énergies. On a débattu des dossiers extrêmement complexes, comme, par exemple, le nouveau système de tarification, la physiothérapie, l'éventualité de la construction d'un siège social, les placements à la Caisse de dépôt et combien d'autres. Mais une analyse du temps qui a été consacré à tous nos débats démontrerait que la priorité a été donnée au contenu de la loi 17: les priorités d'action dont on vous parlait tantôt, les représentants à la prévention, les associations sectorielles, les services de santé, les programmes de prévention, les comités de santé et de sécurité, etc., et, par le fait même, le budget annuel d'administration de la CSST. En somme, nous avons été impliqués, tel que vu par nous, dans la réglementation beaucoup plus que dans l'administration.

Inutile de dire que, pour la partie patronale, ces dossiers revêtaient et revêtent toujours une extrême importance puisqu'ils comportent les véritables coûts qu'auront à absorber les entreprises, les effets éventuels de la réglementation dans l'entreprise; c'est là que vraiment les coûts seront connus. C'est ainsi que nous avons passé de nombreuses heures pour convaincre une fraction de la représentation syndicale qu'il était impensable d'implanter, dans les six groupes prioritaires retenus par la CSST, des comités de santé et de sécurité et ce, dès la promulgation du règlement.

Quelques questions diverses en conclusion, M. le Président. Il faut constater que l'appareil de la CSST est gros - on peut différer de point de vue sur la grosseur, mais c'est gros - et qu'il devra se donner des politiques administratives plus rigides. Au même titre que nous nous sommes donné comme conseil, il y a trois ans, des politiques plus strictes d'achat, des politiques plus strictes de services professionnels, nous croyons qu'il faut absolument - et c'est un dossier que nous pilotons depuis plusieurs mois maintenant - créer un comité de vérification interne redevable au conseil d'administration. On a des problèmes là-dessus et j'espère qu'on y reviendra avec le Vérificateur général. Ce n'est pas son rôle qui est ici en cause, mais il nous paraît essentiel de se doter d'outils additionnels d'information des membres du conseil d'administration.

Deuxièmement, les coûts actuels de la CSST, ceux à venir et surtout ceux - je me répète - de la réforme dans les entreprises préoccupent énormément les entreprises qui nous en font part constamment, qui vous en font part également comme hommes politiques. On ne parle pas ici, bien sûr, de la loi 42. En tant qu'administrateurs, parce que c'est ce que nous sommes d'abord et, ensuite, comme membres de la délégation patronale, il s'agit, pour nous, d'une préoccupation constante et nous espérons que c'est également celle du législateur.

Troisièmement, nous faisons régulièrement, comme partie patronale, d'importantes remises en cause. C'est actuellement le cas du fameux système de mérite et de démérite de l'association paritaire de prévention de la santé et de la sécurité du travail. C'est le cas du dossier de l'inspection qui, soit dit en passant, a retenu beaucoup d'énergies du conseil d'administration il y a quelques mois, lorsque le gouvernement avait décidé d'en faire payer le coût par les employeurs. Il est revenu sur sa décision; on peut s'interroger à savoir pour combien de temps.

En conclusion, M. le Président, nous répétons que les représentants patronaux se présentent ici en tant que membres du conseil d'administration et non à titre de représentants du CPQ ou de leurs organismes respectifs. Le patronat aura, d'ailleurs, l'occasion, lors du débat sur le projet de loi 42, de s'exprimer sur toutes ces questions. La loi 42 - le ministre du Travail sera d'accord - est tellement vaste qu'elle permettra de reprendre bon nombre de débats et de discuter de certaines allégations qui ont pu être faites au cours des derniers jours et qui peuvent être vues de façon tout à fait différente par les entreprises.

Nous souhaitons, en terminant, que ce débat se déroule en toute objectivité. Pour notre part, nous sommes conscients de la multitude de problèmes qui peuvent être soulevés. Cela ne nous surprend absolument pas, tous ces problèmes qui sont soulevés autour de la CSST. Nous répondrons aux questions relatives à notre mandat. Nous signalons que nous sommes tout à fait favorables à cette réflexion, car nous la faisons constamment nous-mêmes au CPQ; l'analyse se poursuit régulièrement et même celle qui concerne notre propre présence au sein de l'organisme. Des amendements nous apparaissent essentiels à certains modes de fonctionnement actuels de la CSST. Nous avons hérité de certaines structures, de certains modes de fonctionnement qui provoquent de justes récriminations chez les entreprises. On ne saurait les ignorer et de nécessaires remises en cause s'imposent. Je

vous remercie.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour. Je présume que nous pourrons suspendre nos travaux vers 13 heures et qu'en 20 ou 25 minutes...

M. Cusano: À 13 heures.

Le Président (M. Blouin): Nous suspendrons à 13 heures. Donc, en 20 ou 25 minutes, M. Laberge devrait pouvoir présenter son exposé.

M. Laberge (Louis): Merci, M. le Président. Madame, messieurs les membres de la commission, lors de l'adoption de la loi 17, lors des discussions en commission parlementaire et, enfin, un peu partout, la FTQ n'a jamais caché qu'elle était en faveur de la loi 17. Les trois centrales syndicales représentées au conseil d'administration, la CSD, la CSN et la FTQ, étaient d'accord avec la formation et la création de cette Commission de la santé et de la sécurité du travail. On était pour une représentation paritaire pour administrer la loi 17. Il était bien évident que nous appréhendions que ceci voudrait dire beaucoup de temps. Il est bien évident que sept représentants venant de la partie patronale et sept représentants venant de la partie syndicale ne sont pas toujours d'accord. Évidemment, la commission est poignée un peu entre les deux. Nous, par exemple, de la partie syndicale, nous trouvons que les inspecteurs ne vont pas assez souvent faire de l'inspection, qu'ils sont trop mous, qu'ils sont bienveillants. Évidemment, la patrie patronale trouve que les inspecteurs y vont trop souvent, qu'ils sont "achalants" et qu'ils sont trop "tough". En fait, quand vient le temps d'adopter un règlement, c'est un peu comme ce qui se passe à l'Assemblée nationale. Cela irait beaucoup plus vite s'il n'y avait ici qu'une formation politique et si on avait un conseil d'administration avec du monde tout du même bord. Bien sûr! Sauf que je pense qu'on n'obtiendrait pas toujours les mêmes résultats. C'est bon qu'il y ait des choses, des problèmes de fond qui se discutent. Il est évident qu'on ne discute pas, au conseil d'administration, de cas individuels. Sauf, bien sûr, quand on entend dire que dans certains domaines les mêmes plaintes se répètent; là, nous amenons cela au conseil d'administration pour en discuter.

Nous étions d'accord avec cette formation-là. On dirait qu'il y a des gens qui ont la mémoire courte, qui oublient le fouillis indescriptible qui existait dans le cas des accidentés du travail il y a quelques années à peine, alors qu'il y avait cinq, six ou sept différents ministères qui avaient juridiction sur l'inspection. Parfois, on s'enfargeait dans les inspecteurs et parfois on n'en voyait pas durant une "mautadite secousse". On se disait: Cela prend un organisme pour diriger tout cela, pour coordonner ces efforts, et cela, dans le meilleur intérêt des travailleuses et des travailleurs.

Bien sûr que tout n'est pas encore fait. Il y a d'autres pays où de telles commissions existent. Par exemple, en Suède, en Allemagne, il y a un organisme, comme cela, paritaire et, d'après les informations que nous avons, cela a pris un minimum de cinq ans avant que tout soit vraiment mis en place, avant que cela soit rodé et que cela fonctionne. Bien, ici au Québec, nous aussi, on trouve cela long. Il y a des règlements, entre autres le règlement sur les comités de santé et de sécurité je ne pense pas dévoiler beaucoup de secrets - où il n'y avait pas accord parfait entre les représentants de la partie patronale et les représentants de la partie syndicale. On l'a négocié. Cela a pris du temps, trop de temps à notre avis, mais on est finalement arrivé à un projet de règlement pour les comités de santé et de sécurité. Vous voyez qu'il n'y a pas encore d'accord parfait, car dans la présentation de M. Dufour, le Conseil du patronat ou la partie patronale, nous informe-t-on, est prêt à le contester.

Il est évident que ce processus est plus long. Mais, nous sommes toujours du même avis. Nous sortons à peine d'un congrès, la semaine dernière: près de 1100 délégués, 392 observateurs, et pas un seul n'a remis en question la Commission de la santé et de la sécurité du travail; pas un seul n'a remis en question notre présence à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Mais nous avons, évidemment, beaucoup de militants et de militantes qui critiquent certains aspects et qui critiquent des cas. Grâce à notre système de formation syndicale - c'est vrai à la CSN et c'est vrai à la CSD - nous avons réussi à former des douzaines et des centaines de militants et de militantes qui, aujourd'hui, connaissent beaucoup mieux la Loi sur la santé et la sécurité du travail, connaissent beaucoup mieux les cas de réclamation, peuvent prendre un dossier et le mener à bonne fin. Mais il est bien évident que, lorsqu'on perd un cas, on n'est jamais content. Je n'ose pas dire que, lorsqu'on en gagne un, il y en a d'autres qui ne sont pas contents. II est bien évident qu'il est, pour nous, d'une extrême importance que la commission puisse agir vite, que les travailleurs et les travailleuses accidentés aient l'occasion de faire valoir leur point de vue en quelque part. (12 h 45)

Nous aurons l'occasion, nous aussi, M. le ministre, lors de la commission parlementaire sur la loi 42, de faire connaître nos points de vue. Là non plus il n'y aura pas entente parfaite entre la partie patronale et la partie syndicale. On croit que

le projet de loi 42 ne va pas assez loin. On ne soutiendra pas l'autre thèse, c'est évident.

Pour s'en tenir aux travaux de la commission parlementaire, le conseil d'administration de la CSST n'est pas là pour décider de cas particuliers. Cela se fait, bien sûr, par la permanence de la commission. Nous avons été là, dans bien des cas - et nous avons été heureux de l'être - pour corriger certaines mauvaises habitudes. Nous sommes toujours en faveur de la décentralisation de la commission. Auparavant, il n'y avait que les travailleurs et les travailleuses accidentés de Montréal et de Québec qui avaient vraiment l'occasion de se faire entendre. Dans les autres régions, il fallait que cela se fasse par écrit et par téléphone. Pour une travailleuse ou un travailleur, essayer de débattre un cas par écrit, c'est quelque chose qui commence à leur compliquer l'existence.

Alors, nous sommes toujours en faveur de la décentralisation. Nous sommes toujours en faveur qu'il y ait une commission pour coordonner les efforts de tout le monde. Nous sommes toujours d'accord que les travailleuses et les travailleurs, pour être protégés, doivent avoir un syndicat fort, militant, qui peut les représenter continuellement, s'occuper de leur cas, s'occuper de leurs dossiers et, bien sûr, faire les grandes réclamations avec des représentants de la commission, quand vient le temps de les faire.

M. Dufour l'a dit, c'est plus long, c'est difficile. Évidemment, sans être méchant, nous sommes plus habitués que la partie patronale à des débats de temps en temps virils. On a des assemblées constituantes depuis toujours. C'est un peu plus récent ailleurs. C'est évident que cela prend plus de temps. Encore une fois, on vient de passer ce congrès, la semaine dernière, et pas une seule seconde tout cela n'a été remis en question. Nous avons des centaines de cas que nous contestons et que nous continuerons de contester. Encore une fois, la permanence de la commission est poignée avec cela. Nous trouvons qu'elle ne va pas assez loin et d'autres trouvent qu'elle va trop loin, les inspecteurs et tout le reste. Nous continuerons à jouer notre rôle comme représentants de nos syndicats d'abord, ensuite, évidemment, comme administrateurs de la commission, bien sûr.

On sait qu'il y a des limites à ce qu'on peut faire en même temps. Le budget n'est pas illimité et, là non plus, on ne s'entend pas toujours. À un moment donné, il faut bien donner notre accord quelque part parce qu'il n'y aurait pas de budget. Mais il est bien évident que, pour nous, le budget est toujours trop petit et que, pour les employeurs, je ne dis pas cela pour critiquer - le budget est toujours trop gros.

Quand M. Dufour parle de mettre sur pied un comité pour s'assurer que tout est fait le mieux possible, on ne peut être en désaccord avec cela. Nous sommes aussi d'accord. Nous sommes d'accord avec les bureaux de révision, nous sommes d'accord avec l'inspection centrée et coordonnée, nous somme d'accord avec un tas de choses, ce qui ne nous empêchera jamais de critiquer des choses qui, croyons-nous, doivent être critiquées.

Le Président (M. Blouin): Est-ce qu'il y a d'autres membres du conseil d'administration qui désirent s'exprimer ou les porte-parole ont-ils bien rendu les questions que vous vouliez soulever? Cela va? Très bien. M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, bien sûr que mes premières remarques vont être pour remercier les membres du conseil d'administration qui se sont tous déplacés ce matin pour venir faire part de leur appréciation, sauf deux qui, me dit-on, sont pris dans des conditions de température absolument inévitables qui font en sorte qu'ils ne peuvent être ici.

Ce matin, aujourd'hui, et nous le ferons demain aussi, nous sommes en train de compléter le mandat que l'Assemblée nationale du Québec nous a donné récemment, c'est-à-dire de procéder à la tenue d'une commission parlementaire ayant essentiellement comme objectif et comme mandat d'examiner - et j'utilise les termes mêmes de la motion de l'Assemblée nationale - "l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail." Je suis d'avis qu'il s'agit là d'un exercice tout à fait normal dans les circonstances - M. Dufour l'a souligné, me semble-t-il, à juste titre - qui s'inscrit dans le cadre d'un double objectif: permettre, d'une part, aux élus ou aux membres de l'Assemblée nationale d'entendre des groupes, des organismes et des individus qui doivent traiter quotidiennement ou sur une période un peu plus longue avec cet organisme qu'est la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Il me semble également que l'exercice s'inscrit nettement dans l'esprit de ce qu'on est convenu d'appeler maintenant -et on en parle de plus en plus depuis quelque temps - l'imputabilité de personnes à qui des mandats sont donnés pour diriger ou pour administrer des organismes ou des sociétés publiques.

L'exercice que nous tenons ce matin avait été annoncé depuis un bon nombre de mois maintenant, plus d'une année, par mon prédécesseur, M. Marois. Il avait effectivement indiqué que, lorsque la Commission de la santé et de la sécurité du travail allait être mise sur pied, qu'elle aurait commencé à fonctionner, il allait sans doute s'imposer qu'après une certaine période

l'on doive procéder au genre d'évaluation qu'on est en train de faire. Il y a un peu plus de trois ans qu'elle est là maintenant et ces trois années nous ont permis de faire certains constats, de faire l'appréciation d'un certain nombre de choses. Il me semble évident - l'exercice que nous avons commencé depuis deux jours le démontre très clairement - qu'il y avait effectivement pertinence à la tenue de ces travaux.

Je signalerai également, en toute objectivité - je pense qu'il faut le dire - que l'Opposition à l'Assemblée nationale a réclamé depuis un bon moment que l'on fasse l'exercice qu'on est en train de faire. Non seulement les membres de l'Opposition l'ont-ils réclamé, mais également des députés ministériels, depuis un bon moment, souhaitent effectivement que l'occasion nous soit donnée de pouvoir faire le genre de travail qu'on est en train de faire.

Je le signalais il y a un instant, M. le Président, au fur et à mesure que nos travaux avancent, au fur et à mesure que nous avons l'occasion d'entendre des témoins, cette pertinence dont je parlais il y a un instant nous apparaît de plus en plus avoir été celle sur laquelle il fallait s'arrêter. Nous avons donc entendu des organismes et des individus, comme je le disais il y a un instant, qui doivent régulièrement, dans l'exercice de leur mandat et de leurs fonctions, faire affaires avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail qui se posent et qui se posaient des questions quant à son administration. Nous sommes en train d'atteindre l'objectif que cette commission parlementaire s'est fixé.

M. Laberge l'a souligné, me semble-t-il, avec beaucoup d'à-propos: Au conseil d'administration, à cause de la nature des choses, à cause des opinions qu'on défend et qu'on plaide de part et d'autre, il arrive que certaines décisions peuvent prendre un peu de temps à être acheminées et, très souvent, il y a des positions qui sont inconciliables. Cela m'apparaît être la normalité des choses en fonction de la vocation qu'on trouve à l'intérieur de cette loi. C'était essentiellement l'objectif que visait le législateur lorsqu'il a présenté et fait adopter cette loi.

M. Laberge a insisté sur cela, mais vous allez comprendre que déjà nous imaginions que ce devait être comme cela, d'une part. Deuxièmement, ces auditions auxquelles nous procédons depuis deux jours nous démontrent que non seulement au conseil d'administration il y a des divergences d'opinions profondes, des divergences d'opinions de base, mais on retrouve ce même phénomène chez ceux qui ont à faire affaires avec la commission en général. Là non plus - je pense que tout le monde va convenir de ce que je suis en train de dire - il n'y a pas à se surprendre.

Cependant - je le dis tout de suite, je dis ce que je pense comme je le pense sans, pour le moment, tirer les conclusions de la commission - il est peut-être utile de signaler dès maintenant qu'au-delà des divergences d'opinions, qu'au-delà des préoccupations différentes qui peuvent nous avoir été soumises par des groupes il y a quand même un certain nombre de choses sur lesquelles bon nombre de personnes et d'organismes s'entendent et qui, régulièrement dans la plupart des argumentations qui nous ont été soumises, nous sont revenues, nous ont été présentées comme préoccupations. Il me semble - je vous donne là une réflexion tout à fait spontanée qui est préliminaire, qui n'est à ce stade-ci ni une décision, ni une recommandation - clair que, lorsque des groupes qui souvent - et c'est leur vocation, d'ailleurs - ont des philosophies différentes, des façons différentes de voir les choses se rencontrent sur certaines choses, il y a lieu pour le législateur de réfléchir sérieusement sur ces points de rencontre qui nous sont soumis par les personnes que nous avons entendues jusqu'à maintenant.

C'était des remarques très générales et très préliminaires, M. le Président. Je sais que demain nous aurons l'occasion d'entrer dans des questions plus particulières, des questions plus spécifiques qui ont été soulevées par les différents témoins qui se sont présentés à la commission, mais je voudrais, très rapidement, poser une ou deux questions.

Le Président (M. Blouin): M. le ministre, je vous suggère de retenir vos questions et de les poser à 15 heures lorsque nous reprendrons nos travaux. Je précise tout de suite que nous reprendrons effectivement à 15 heures, mais dans la salle 91-A qui est située à l'étage inférieur.

M. Fréchette: À la salle 81, je pense.

Le Président (M. Blouin): À la salle 81, oui, la salle 91 est en réfection. On aura peut-être un petit problème d'espace, mais il s'agit de raisons hors de notre contrôle et nous devrons donc tenir nos débats à l'étage inférieur.

Sur ce, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise de la séance à 15 h 5)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente du travail reprend ses travaux. Au moment où nous nous sommes quittés, à 13 heures, la parole était au ministre et nous allions

commencer l'échange avec les membres du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. M. le ministre.

M. Sauvé: II y a des membres du conseil, M. le Président, qui ont de la difficulté à entrer. Est-ce qu'on peut attendre quelques minutes?

Le Président (M. Blouin): M. Sauvé, j'avais demandé qu'il y ait un nombre de chaises suffisant autour de la table pour que vous puissiez vous y installer.

M. Sauvé: Tout est là, mais c'est...

Le Président (M. Blouin): C'est l'engorgement. Compte tenu de l'exiguïté des locaux, j'ai permis que certains invités puissent venir s'asseoir dans les fauteuils qui longent le mur ici. S'il y en a qui n'ont pas de place, je les inviterais à venir s'asseoir ici. Si on manque encore un peu de place, on pourrait prendre quelques chaises derrière les députés, mais je demanderais qu'on en laisse dégagées car les députés ont souvent des recherchistes ou des membres de leurs services qui viennent s'asseoir derrière eux. S'il y a des gens qui n'ont pas de place, vous pouvez venir prendre place à l'avant. On va faire cela en famille. Puisque nous devons siéger jusqu'à 18 heures ce soir, nous allons tenter de compléter cet échange le plus rigoureusement possible dans les meilleurs délais et, ensuite, d'entendre les organismes qui étaient prévus, si possible, quoique j'en doute, mais enfin. M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, je terminais effectivement, lors de la suspension de nos travaux, mes remarques préliminaires. Je voudrais y ajouter un seul commentaire puisque, autant M. Dufour que M. Laberge ont fait référence au projet de loi 42 qui a été déposé en première lecture. Je suis bien conscient que ce n'est pas le mandat de l'actuelle commission d'étudier cette loi, mais ce que je voulais simplement signaler, pour l'information de toutes les personnes intéressées, c'est qu'effectivement, au mois de février prochain, à des dates qui ne sont pas encore fixées, nous allons convoquer une commission parlementaire avant la deuxième lecture - d'ailleurs, les procédures sont déjà engagées comme cela devant l'Assemblée nationale - pour procéder à l'étude du projet de loi 42.

J'ai deux questions d'ordre très général, une s'adressant, d'abord, à M. Dufour, à la suite de l'audition de votre mémoire, en regardant de près les commentaires que vous y faites et, plus particulièrement, les conclusions auxquelles vous arrivez. Je fais particulièrement référence à l'avant-dernier paragraphe de la page 9 du mémoire. Là, vous parlez du Conseil du patronat du Québec, en disant: "Nous sommes, d'ailleurs, tout à fait favorables à cette réflexion, car nous la faisons nous-mêmes et, au CPQ, l'analyse se poursuit régulièrement, même en ce qui concerne notre présence au sein de cet organisme." Ma question, M. Dufour, est la suivante: Est-ce que, à partir du contenu global de votre mémoire et de cette conclusion particulière à laquelle je viens de faire référence, c'est, finalement, la philosophie globale de la loi, c'est-à-dire cette orientation vers le paritarisme, que vous remettez en question, sur laquelle vous vous interrogez et réfléchissez au Conseil du patronat du Québec?

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour: M. le ministre, cet avant-dernier paragraphe du texte se veut une espèce de relation avec la commission parlementaire comme telle. C'est une façon pour nous de dire que nous sommes d'accord avec la tenue de cette commission parlementaire, comme vous l'avez, d'ailleurs, souligné avant le déjeuner. C'est une loi qui existe depuis trois ans. C'est la première fois, je pense, que les gens ont l'occasion de faire une réflexion plus en profondeur en dehors des dossiers courants. Dès le mois de juin, lorsque avait été débattue cette possibilité de commission parlementaire, nous nous étions prononcés pour qu'elle se tienne. Nous sommes donc favorables à la commission parlementaire et nous ajoutons que ce genre de réflexion, à l'intérieur de nos propres structures, nous la faisons régulièrement avec nos membres. Je peux vous dire qu'à l'ordre du jour de nos réunions mensuelles avec les membres il y a toujours la loi 17 qui est présente. Il y a régulièrement aussi au conseil d'administration une réflexion qui se poursuit concernant la loi 17.

Cela n'a rien à voir comme tel avec le paritarisme. Quand on s'est embarqué dans le schéma de la loi 17, nous avons contesté certains des moyens mis sur pied, mais nous n'avons jamais contesté le paritarisme. Nous sommes d'accord avec le paritarisme exprimé notamment par les comités paritaires de santé et de sécurité sous réserve d'un aspect, celui qu'on a mentionné ce matin, à savoir les travailleurs non syndiqués qui ne seraient pas toujours, selon nous, bien représentés dans les comités de santé et de sécurité. Nous sommes d'accord, en principe, avec les associations sectorielles lorsqu'elles sont libres, négociées par les parties. Nous avons toujours été contre l'association sectorielle qui a été imposée au secteur de la construction, mais c'est la loi. Tout cela pour dire que ce n'est pas le paritarisme; c'est beaucoup plus ce que nous avons essayé

de véhiculer comme conception ce matin, une participation à l'intérieur d'une structure qui devrait être davantage décisionnelle que consultative.

M. le ministre, si cela peut vous aider à comprendre le sens de la réflexion qu'on poursuit - on aura l'occasion de vous le dire lors de l'étude du projet de loi 42, parce qu'il est beaucoup question de la Commission de la santé et de la sécurité dans le projet de loi 42, quand on prend les pouvoirs qui sont donnés au ministre, au Vérificateur général, au ministère des Affaires sociales ou à d'autres; il y a 22 articles du projet de loi qui font référence à des pouvoirs qui n'ont rien à voir avec le conseil d'administration -est beaucoup plus autour de cela que du paritarisme.

M. Fréchette: Merci. Une dernière question quant à moi, M. le Président, que je poserai à M. Laberge. M. Laberge, nous avons tous entendu ce matin votre message, enfin vos remarques. Le député de Portneuf, depuis qu'on est autour de la table de la commission, non pas viva voce comme cela, mais à la suite de ses questions, m'en suggère une. Est-ce que vous êtes d'opinion que, depuis que cette loi 17 a été adoptée, proclamée, mise en vigueur, les objectifs qui y étaient prévus ont été atteints, partiellement ou en tout? Enfin, comment évaluez-vous l'état actuel de la situation par rapport à ce qui était inscrit comme objectifs dans la loi? (15 h 15)

Le Président (M. Blouin): M. Laberge.

M. Laberge: II est bien évident que les objectifs n'ont pas encore été atteints, mais je pense que, laborieusement, nous y arrivons. Ce qui s'est fait jusqu'à maintenant, d'après moi, ce n'est pas encore le plus important. De la réparation, il s'en faisait avant la loi 17. Il ne se faisait pas beaucoup de réadaptation. Il y a d'ailleurs un honorable tribunal qui l'a dit à l'ancienne CAT, mais il se faisait très peu de prévention et on s'occupait encore moins d'associer tous ceux qui sont directement responsables de la santé et de la sécurité dans les usines, les chantiers, les bureaux, enfin dans tous les endroits de travail, c'est-à-dire les travailleuses et les travailleurs et les employeurs. Il fallait commencer quelque part. On s'est rendu compte au cours des années que, dans certains endroits, des comités de santé et de sécurité fonctionnaient assez bien; là où il y avait un syndicat militant, bien en place, assez fort, un employeur un peu plus clairvoyant, ils réussissaient à s'entendre et il se faisait des choses, pour un certain nombre très limités de travailleuses et de travailleurs.

Ce qui s'en vient, d'après moi, c'est à peu près le plus important: la mise en place des comités de santé et de sécurité, le travail en commun pour essayer de mieux prévenir les accidents. C'est vrai qu'à ce jour la loi 17 et la Commission de la santé et de la sécurité du travail et cet organisme paritaire n'ont pas fait diminuer les accidents de façon mirobolante. C'est vrai, mais c'est parce que tout n'est pas en place. Le plus important est à venir. M. Dufour l'a dit ce matin. Je suis bien heureux que vous lui ayez posé la question, puisque, de la manière dont c'est écrit là - il ne faut pas toujours se fier aux écrits - cela pouvait vouloir dire qu'on remettait cela en cause, ce n'est pas cela. Tous les trois, le P.-D.G., M. Dufour et moi, avons dit: On trouve cela laborieux. Mais quelle est la formule pour remplacer ce travail laborieux où la démocratie s'exerce et où les gens représentent des gens ayant des intérêts différents, parfois opposés? Comment fait-on pour remplacer cela? C'est évidemment plus efficace avec une dictature. C'est un peu plus long et un peu plus laborieux, mais je pense que c'est la mise en place; de là l'importance de la loi 17. Ce n'est pas juste la réparation, c'est la prévention, c'est la santé.

M. Fréchette: J'ai terminé, quant à moi, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre.

M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Quelques remarques préliminaires avant de passer à des questions. J'ai été étonné des remarques préliminaires du ministre ce matin, où il dit que c'était très normal de se retrouver aujourd'hui à cette commission parlementaire. Il a même dit que, du côté ministériel, on souhaitait une telle chose. J'aimerais bien lui rappeler qu'il ne faut pas confondre la réforme parlementaire à laquelle je souscris et à laquelle mes collègues souscrivent et la demande de l'Opposition, faite depuis au-delà d'un an, de convoquer la commission du travail pour examiner l'administration et le fonctionnement de la CSST. Nous l'avons fait par l'entremise de l'étude des crédits; ceci n'étant pas suffisant, nous nous sommes servis de la période des questions pour essayer de savoir ce qui se passait à l'intérieur de la CSST. Ceci ne nous donnant pas des réponses suffisantes, nous avons même fait une question avec débat et ce n'est qu'à la reprise de cette session, après les vacances supplémentaires qu'on nous a accordées, qu'on se retrouve finalement ici.

Avant de passer à des questions, j'aimerais faire un court commentaire sur les quelques paroles prononcées par M. Laberge cet avant-midi, alors qu'il comparait la CSST

à l'Assemblée nationale et qu'il laissait entendre que cela irait peut-être plus vite ici, à l'Assemblée nationale, s'il y avait seulement un parti politique. Cela ne serait pas nécessairement mieux, mais peut-être plus vite. Ce qui me vient à l'esprit, M. le Président, c'est que nous vivons ici, à l'Assemblée nationale, ce qu'on appelle le "bulldozer". C'est le leader du gouvernement qui, à la fin de la session, impose des motions. J'y arrive, M. le Président, je veux faire une remarque avant.

Le Président (M. Blouin): Oui, je comprends, mais je vous demanderais de vous en tenir au mandat de la commission et de vous entretenir des sujets pertinents avec nos invités.

M. Cusano: Oui, M. le Président, c'est très pertinent, je parlais du "bulldozer" de l'Assemblée nationale. Je me demande si la CSST elle-même, son conseil d'administration, ne fait pas face à un "bulldozer" au sein de ses réunions. Il est sûr - je pense que tout le monde le comprend - que lorsque vous avez à une table le côté patronal et le côté syndical on est d'accord sur certaines choses, mais il y a certaines choses sur lesquelles on est en désaccord.

J'aimerais poser une question à M. Dufour concernant une lettre qu'il adressait, le 31 mars 1983, au président de la CSST, M. Sauvé. Cette lettre présente des inquiétudes. C'est une lettre de trois pages et je ne la lirai pas en entier, mais je vais en citer quelques paragraphes. Cette lettre a pour objet le budget de la CSST, pour 1983. "M. le Président, nonobstant les résolutions du conseil d'administration de février et de mars 1983 acceptant le budget de la CSST pour l'exercice financier 1983, je vous saurais gré, ainsi que je vous l'ai demandé verbalement le 17 mars, de remettre le budget 1983 à l'ordre du jour de la réunion d'avril pour révision et discussion".

Je saute un paragraphe. Vous continuez: "Résumons les faits. Après de multiples discussions concernant le budget 1983 lors des réunions relatives à la tarification et plus particulièrement en décembre 1982 et en janvier et février 1983, nous avons convenu, les 17 février et 17 mars, d'un budget de 827 000 000 $, représentant une hausse de 6% sur ce que la direction de la CSST nous disait devoir être les dépenses réelles de la CSST pour 1982. Il s'agissait alors des seuls chiffres disponibles que pouvait nous donner la direction et dont nous pouvions nous servir pour les fins de l'élaboration du budget 1983, les états financiers 1982 n'étant pas disponibles. Le budget 1983 prévoyait ainsi un excédent de 14 000 000 $ - c'est selon les chiffres que vous aviez - des revenus sur les dépenses même si, à maintes reprises, les administrateurs ont interrogé l'estimation de ces chiffres."

M. le Président, j'en saute un peu. "Cependant, à peine ce budget était-il approuvé définitivement qu'on nous remettait, toujours ce 17 mars, les états financiers pour 1982 non disponibles jusqu'à cette date. Et voilà où rien ne va plus. Les administrateurs sont, cette fois, informés qu'à cause d'une mauvaise estimation de la masse salariale" -j'en laisse passer quelque peu - le déficit pour cette année même sera de plus de 57 000 000 $."

M. Dufour, si je comprends bien le contenu de la lettre, on vous a présenté certains chiffres et on vous a demandé d'adopter un budget. En toute bonne foi, je présume, les membres du conseil d'administration ont regardé ces chiffres et vous avez adopté un budget. Vous dites qu'un peu plus tard - vous me corrigerez si j'ai tort, mais j'ai l'impression que c'était la même journée - on vous a donné des chiffres qui démontraient un déficit. Pouvez-vous donner des détails sur cette question?

Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. Dufour.

M. Dufour: M. Cusano, M. le Président, nous allons peut-être procéder en deux temps pour ce dossier. Au niveau du conseil d'administration, compte tenu des dossiers, on est obligé de se les diviser un peu. Le dossier finance, c'est M. René Bédard. René pourra ajouter à ce que je vais dire.

Le budget de la direction pour l'année 1983 a été déposé en décembre. Un budget des dépenses de l'ordre d'à peu près 834 000 000 $, si je me souviens bien. Nous avons pris en délibéré les propositions. Nous les avons regardées au conseil d'administration du mois de janvier et nous avons voulu en rester à des règles strictes d'augmentation. Nous avons été sur la base des 6%, c'étaient les 6% et 5% qui étaient dans le dossier à ce moment, ce qui a ramené le budget à 827 000 000 $. Cela veut dire pour l'exercice 1983, une possibilité d'un excédent de 14 000 000 $, les 14 000 000 $ auxquels vous faites référence.

Quand nous avons donné notre aval à ce budget, c'était en comparant, comme administrateurs, avec ce qui s'était passé en 1982. Or, en 1982, on prévoyait un déficit d'à peu près 4 000 000 $ à 5 000 000 $. Nous avions, quand même, la puce à l'oreille parce que, tout au cours de l'année 1982, nous avions - parce qu'il faudrait revenir en arrière et dire qu'on fait aussi un budget préliminaire au moment de la tarification, qui est six mois avant, donc au mois de juillet 1982 - toujours, mais vraiment, prévenu la direction de la CSST que son évaluation de la masse salariale était mal faite, qu'elle avait beaucoup trop estimé les

salaires pour l'année à venir. Comme les dépenses sont ajustées en fonction des revenus, on disait: Vous allez vous ramasser quelque part, cela n'a pas d'allure. On le sent dans le secteur privé, la construction ne fonctionne pas, les mines ferment. Il y a un problème. Mais il reste que nous n'avions pas d'autres données que celles qui nous avaient été fournies, qui étaient d'un budget 1982 déficitaire de 4 000 000 $, par rapport à un budget 1983, qui serait excédentaire de 14 000 000 $.

En bons administrateurs, nous avons accepté ce budget. Là, il y a une dimension qu'il faut ajouter. C'est qu'on fonctionne dans une entreprise paragouvernementale, où intervient ce à quoi nous ne sommes pas habitués et qui s'appelle le Vérificateur général. Dans l'entreprise privée, après que le budget est accepté, l'assemblée générale des actionnaires ratifie les états financiers, qui sont acceptés généralement par des firmes de comptables agréés. Ce n'est pas le cheminement à la CSST, parce que le Vérificateur général doit, de par la loi, être le seul vérificateur, même si nous ne sommes pas d'accord. Le Vérificateur doit être le seul qui examine les chiffres de la CSST.

Nous avons accepté le budget en début d'année parce que nous ne voulions pas, non plus, que la CSST fonctionne sans budget. Il faut, quand même, lui donner un budget. C'est ce cheminement qu'on a suivi jusqu'au moment où, en acceptant la résolution du 17 mars à laquelle vous faites référence, d'un budget excédentaire de 14 000 000 $ à partir d'un déficit escompté pour 1982 de 4 000 000 $, on nous a présenté le rapport du Vérificateur général qui, lui, estimait le déficit à 57 000 000 $. (15 h 30)

C'est bien évident qu'on a écrit au P.-D.G. en lui disant: Compte tenu de cela, nous ne voulons plus rien savoir du budget qu'on a approuvé, parce qu'on ne l'aurait pas approuvé si on avait su qu'on avait un déficit de 57 000 000 $ et non pas un déficit de 4 000 000 $. Cela a donné lieu à tout ce que vous connaissez sûrement, soit la création d'un comité du budget à la CSST, le fait aussi qu'à la réunion suivante, cette fois, la direction nous a présenté un budget déficitaire de 48 000 000 $. On a aussi un peu fait cela avec l'autre budget. C'est donc ce qui s'est passé, en quelques mots, pour ne pas aller vraiment plus loin dans les détails. C'est une acceptation de budget en l'absence de données, ces données nous ayant été fournies trop tard après l'acceptation du budget.

M. René Bédard, qui s'occupe du budget, pourrait ajouter quelque chose à cela.

M. Bédard (René): Oui. Vous avez déjà dit à peu près tout ce que j'aurais voulu dire, mais j'aimerais parler d'une autre facette de ce qui s'est passé exactement. D'abord, j'aimerais préciser que ce n'est pas le fait que la CSST ait terminé son année avec un déficit d'environ 57 000 000 $ plutôt qu'un déficit de 4 000 000 $ ou 5 000 000 $ ou 6 000 000 $. Il était difficile, pour presque tous les organismes de la province de Québec, du Canada et du monde entier, d'essayer de budgétiser de façon précise avec les difficultés financières que tout le monde a connues.

Ce que j'ai mis en cause personnellement quant au budget de 1983 -je ne veux pas mettre en cause l'avis des autres membres du conseil d'administration -est que ce budget n'a pas été accepté. Il n'a pas été adopté, du moins pas par moi. J'ai adopté un budget qui était basé sur des chiffres que l'on nous fournissait, soit les états financiers de 1982, dont on nous rappelait à plusieurs reprises qu'ils étaient les plus précis possible et les plus près de la vérité. À partir de cela, on a accepté un budget d'augmentation d'environ 6% pour l'année 1983. Mais, ce même jour où on nous disait que les états financiers réels n'étaient pas disponibles, on nous présente, après avoir adopté le budget, les états financiers réels. C'est donc là qu'on a réalisé qu'il ne s'agissait plus d'un déficit de 4 000 000 $ ou 5 000 000 $, mais plutôt d'un déficit de 57 000 000 $ pour l'année financière 1982.

Ce que je mets donc en cause, ce n'est pas le déficit, mais bien la procédure. Je ne dis pas que cela a été cuisiné, mais je pense qu'il s'est produit des événements ou des façons de faire les choses que je n'ai jamais compris. Si on m'avait présenté les vrais chiffres, les chiffres réels, je n'aurais certainement pas réagi de la façon dont j'ai réagi en adoptant le budget pour l'année 1983.

M. Cusano: Seulement une petite question. Lorsque vous vous rencontrez, vous avez un ordre du jour déjà établi. On présume que des deux côtés, soit du côté syndical et du côté patronal - je devrais plutôt dire des trois côtés - on doit soumettre des sujets à inclure dans l'ordre du jour. Je présume que c'est la procédure. Qui établit l'ordre du jour de la CSST et de son conseil d'administration?

M. Dufour: C'est peut-être une question qui s'adresse au président parce que c'est lui qui fait l'ordre du jour. Quand on arrive en assemblée, avec le consentement des parties, on peut modifier l'ordre du jour et faire une priorité des dossiers qu'on décide de débattre.

Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. Sauvé.

M. Sauvé: Je pense que M. Dufour a bien explicité ce qui se passe. Comme permanence, nous préparons l'ordre du jour et nous l'envoyons aux parties. Normalement, les réunions ont lieu le troisième jeudi du mois. Selon ce qui est convenu, les gens doivent recevoir leurs dossiers au plus tard le vendredi de la semaine précédente. Si, au comité administratif, on a voulu ajouter des sujets, on le fait pour la réunion du conseil. Au conseil, les gens peuvent aussi ajouter des sujets et dire qu'ils veulent avoir tel sujet en priorité. C'est ainsi que cela fonctionne.

Maintenant je pense que j'aurais quelques mots à dire sur ce qu'on vient d'expliquer au sujet du déficit. Ce qui est arrivé est très clair et très simple. Je l'ai déjà expliqué lors de l'étude des crédits. Nous avions surestimé la masse salariale. Je pense que tout le monde peut faire cette erreur, si erreur il y avait. Je pense que personne n'avait prévu que la crise serait aussi sévère. Les états financiers sont faits par le Vérificateur général et je dirais qu'il n'y a aucune entreprise privée qui a une vérification comme cela. Il y a dix vérificateurs qui passent six mois à la commission et ces gens remettent leur rapport, parce qu'il faut que l'année soit terminée. Vous savez que nous marchons sur l'année civile et non sur l'année fiscale. Ces gens-là exigent de nous que nous donnions tous les états financiers du 31 décembre précédent le 15 janvier au plus tard et là, ils complètent leur rapport qu'ils nous remettent vers le 15 ou le 20 février parce que nous avons une exigence très forte dans la loi qui veut que le rapport annuel soit déposé avant le 31 mars. Ceci nous paraît une chose à corriger pour l'avenir parce que c'est trop serré et nous sommes probablement un des rares organismes qui essaient de le produire dans les délais. Ces états financiers, vers la fin, sont discutés avec les gens des finances chez nous. Par exemple, le Vérificateur général disait cette année-là: Les provisions pour mauvaises créances avec toute la situation économique, etc., qui se produit, nous voudrions que ce soit - si mon souvenir est bon 14 000 000 $. Nous disions que c'était trop et c'est ce qui fait qu'on n'a pu avoir le résultat des états financiers que pour la séance. C'était tout simplement cela. Je ne voudrais pas que quelqu'un ait l'impression qu'il y a eu du tripotage là-dedans. C'était très clair et la surestimation de la masse salariale n'était que la cause. Les dépenses étaient moindres que les années précédentes.

Le Président (M. Champagne, Mille-

Îles): Une question sur le même sujet, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Une question additionnelle, sans enlever le droit de parole de mon collègue de Viau et de mes autres collègues, en assurant à tous les intervenants qu'on prendra, évidemment, tout le temps qui sera nécessaire pour les questions. Une question à M. Dufour: Le budget de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ce sont plusieurs centaines de millions de dollars. Je dois vous exprimer ma surprise de la réponse que vous avez donnée tout à l'heure, ainsi que votre collègue à la question formulée par mon collègue. Le budget de la commission doit être approuvé par le conseil d'administration après, je présume, une prise de connaissance du dossier, une explication du prochain budget ou le pourquoi des modifications à tel ou tel poste - des augmentations ou des diminutions - un échange qui, j'en suis persuadé, doit convier toutes les parties et tous les membres du conseil sur le bien-fondé de telle ou telle autre modification. C'est, je présume, une discussion normale qui entoure l'adoption d'un budget. Devons-nous comprendre de vos propos que le budget pour l'année en cours aurait été adopté en s'appuyant sur l'énoncé budgétaire et le budget de 1982 avec un énoncé du président-directeur général dans le sens que le budget serait augmenté d'un pourcentage de X%, que ce serait globalement cela et que le budget de la Commission de la santé et de la sécurité du travail qui est de plusieurs centaines de millions - je le répète - aurait été adopté, premièrement, sans qu'un véritable débat soit tenu sur les véritables chiffres et propositions budgétaires? Deuxièmement, devons-nous comprendre, de la réponse de votre collègue qui représente la partie patronale au conseil, qu'une fois que le budget aurait été adopté dans un délai assez bref, que j'aimerais voir préciser, les chiffres qui vous manquaient vous auraient été fournis?

M. Dufour: Quand vous parlez de débat de budget, comptez sur nous.

M. Laberge: J'en suis témoin.

M. Dufour: Non. Ce que j'ai exprimé, je pense, en termes de séquences, c'est qu'on se retrouve au mois de mars où, à ce moment-là, il y a sur la table le budget qu'on accepte, qui est de 827 000 000 $. On vient d'accepter la résolution, parce que l'acceptation du budget comme telle avait été faite en février; on ferme le dossier. L'ordre du jour amendé, dont M. Cusano parlait tout à l'heure, fait en sorte qu'ils ont les chiffres sur les états financiers. Là on fait entrer les gens de la comptabilité pour parler des chiffres nouveaux quant à nous, mais on vient d'adopter l'autre résolution. Il est bien évident qu'on a reçu ces documents purement et simplement disant que, à la

lumière de ces nouvelles données, on referait le débat. Il a tellement été fait, M. Pagé, que, s'il n'avait pas été fait, vous n'auriez pas en main cette lettre, dont parlait M. Cusano tout à l'heure, qui demande - si vous regardez les conclusions - qu'un nouveau budget qui tienne compte de la situation réelle, données connues etc., soit déposé lors de la réunion d'avril et que les nouveaux engagements, consécutifs à notre décision, soient suspendus. On avait accepté des choses, mais, avec un déficit de 47 000 000 $, on ne fait pas les mêmes dépenses qu'avec un surplus de 14 000 000 $. Alors, on a bloqué cela, ce qui a amené la permanence à nous présenter un budget révisé qui, cette fois, est de l'ordre de 48 000 000 $. Le débat s'est vraiment fait. Cela nous a amenés à toute une série de choses qui, tout en étant une expérience négative qu'on a vécue, ont eu les effets positifs suivants: création d'un comité du budget, justement pour regarder cela programme par programme, plus en profondeur qu'on ne peut le faire à l'occasion de la discussion d'un budget.

On a même été aussi loin, M. le député de Portneuf, que de refuser maintenant de signer les états financiers du Vérificateur général, alors que la loi nous impose l'inverse; on ne veut rien savoir. On ne se fera pas embarquer deux fois dans une procédure gouvernementale. On a l'habitude de fonctionner selon des schémas d'entreprise privée; on va essayer de fonctionner là-dedans et d'amener la commission à fonctionner là-dedans.

Au fur et à mesure la CSST s'était engagée à nous déposer des budgets amendés de façon à réduire toujours son déficit. Comme on était parti de 14 000 000 $ de surplus et qu'on s'était ramassé à 48 000 000 $ de déficit, alors on a drôlement surveillé les dépenses. Ceci a amené, par exemple, les fameuses sessions sur la physiothérapie dont on parlait ce matin. Dans notre comité, nous avions trouvé qu'on pouvait épargner probablement 50 000 000 $ sur la physiothérapie. C'est le cheminement global de la discussion d'un budget, si vous me permettez d'ajouter, dans le paritarisme.

M. Sauvé: J'ajouterais, M. le Président, une chose fort importante. On fait deux fois la discussion du budget. Je vais donner l'exemple: jeudi prochain, le 22 décembre, le conseil siège par exception le quatrième jeudi puisque nous sommes ici demain. Le budget a déjà été discuté une première fois à la séance du mois de juin parce que la commission, depuis 1979, annonce le 1er juillet à tous les employeurs leur taux pour l'année suivante. Pour pouvoir faire le taux, il faut donc faire les coûts des accidents, il faut estimer la masse salariale, il faut avoir un budget d'administration, etc. À la séance du mois de juin, on fait une discussion du budget. La discussion se finalise au mois de décembre. Nous avons encore plus de temps pour voir si les estimations sont justes. Nous avons énormément de contrôles sur nos budgets d'administration. Quant aux budgets des coûts d'accidents, il y a assez d'expérience actuarielle pour pouvoir faire des pourcentages valables. Le gros point de suspension, c'est toujours la masse salariale. Nous avons fait un budget pour les taux de 1984 en juin 1983. Nous allons déposer un budget en décembre et notre expérience des années passées nous dit qu'il sera probablement adopté en janvier ou en février. Mais tout le monde verra - parce que personne ne l'a reçu encore, nous avons terminé notre budget la semaine dernière -que les cotisations prévues pour 1984 seront moindres que celles qu'on avait prévues en juin 1983. Le budget est équilibré en conséquence et c'est tout à fait normal. Vous voyez qu'il y a deux grosses discussions sur le budget. Ce n'est pas fait à l'improviste et je pense que la partie patronale y voit très bien et sans problème. (15 h 45)

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour: Oui, M. le Président, pour répondre encore de façon plus précise à M. Pagé, tout ce cheminement dont M. Cusano parle, ma lettre, l'éventualité même d'un déficit de 80 000 000 $, tout cela était devenu sérieux pour nous, parce que, si on avait continué avec la même estimation de la masse salariale, on aurait été drôlement en déficit. Or, j'ai le document révisé ici des 48 000 000 $ de déficit qui a été déposé dès le mois de mars avec les précisions.

M. Paquin et M. Bédard veulent ajouter quelques mots à cela.

M. Paquin (Sarto): C'est peut-être une réponse à la deuxième partie de la question de M. Pagé, qui nous demande de nous situer un peu dans le temps. En résumé, cela se passe de la façon suivante: cela nous prend une résolution pour adopter le budget de 1983. On dit: D'accord, on accepte le budget de 1983, mais, en bons administrateurs, on dit: Ne pourrait-on pas avoir les chiffres réels de 1982? À cela, on nous dit: On ne les a pas maintenant. On va les avoir bientôt. Voici la question que l'on pose: Peut-on vous demander si ce que l'on prévoyait pour 1982, à savoir un déficit d'à peu près 4 000 000 $ ou 5 000 000 $, va se réaliser? On nous dit: Oui. On dit: D'accord, on accepte la résolution du budget de 1983. Le temps pris pour vous répondre, c'est le temps que cela a pris pour que quelqu'un entre pour nous dire: Non, ce n'est plus 4 000 000 $, c'est environ

50 000 000 $ de déficit qu'on a. C'est là qu'on a dit: La résolution qu'on vient d'adopter pour accepter le budget de 1983, vous allez comprendre qu'en fonction des chiffres réels, maintenant, on va en discuter à nouveau un peu. Dans le temps, c'est à peu près ce qui s'est passé.

M. Bédard (René): Je voudrais simplement ajouter qu'on va vivre exactement la même situation en 1984. M. Sauvé vient de nous dire qu'il va présenter au conseil d'administration les prévisions budgétaires de l'année 1984, mais les états financiers de l'année 1983 ne seront pas disponibles avant la fin de février ou le début de mars. On est pris dans une espèce de carcan où on doit adopter un budget pour une année en se basant sur des chiffres qui ne sont pas des chiffres réels.

M. Pagé: Non seulement je présume, mais je suis assuré que les représentants des travailleurs étaient dans la même position que vous. C'est donc dire que, si vous n'aviez pas été vigilants en exigeant les données exactes des résultats de l'exercice 1982, la direction aurait vu son budget adopté tel quel. Je dois à ce moment-ci exprimer ma surprise que, dans un laps de temps aussi bref...

M. Dufour: Non, M. Pagé, on l'aurait vu le mois suivant.

M. Pagé: Oui, mais, quand même, il faut se surprendre que les données de 1982 soient arrivées aussi rapidement. On aura l'occasion d'y revenir probablement demain, mais j'apprécie la réponse à nos questions, M, Dufour.

Le Président (M. Blouin): Oui, monsieur.

M. Laberge: Vous n'avez pas une copie de la lettre que j'ai envoyée au président là-dessus, M. Pagé?

M. Pagé: Non, vous ne me l'avez pas fait parvenir, M. Laberge.

M. Laberge: C'est probablement parce que je l'ai envoyée seulement au président.

M. Pagé: Vous auriez dû me la faire parvenir. Nos relations pourraient peut-être être plus étroites. Il n'en tient qu'à vous.

M. Laberge: Nous sommes là lors de la discussion des budgets. Bien sûr, on n'a pas exactement le même souci que le côté patronal, mais nous ne sommes pas des irresponsables, non plus. Je sais que vous n'avez pas voulu dire cela.

M. Pagé: Non, loin de nous de telles pensées, M. Laberge.

M. Laberge: Je suis heureux de vous l'entendre dire.

M. Pagé: On l'apprécie.

M. Laberge: Nous avons cru, nous aussi, que, dans l'estimation de la masse salariale, on avait été peut-être un peu généreux, mais l'erreur n'est pas pire que celles qui se font dans les finances du Québec, celles d'Ottawa et celles de partout ailleurs, à ce que j'ai pu voir. Sauf qu'il fallait regarder cela de plus près. Je pense que vous n'avez peut-être pas tout à fait bien saisi le problème. C'est que, par le truchement du Vérificateur de la province, les chiffres réels de l'année précédente nous arrivent deux ou trois mois après qu'on est obligé de voter le budget qui, lui, est basé sur un autre budget, mais qui n'est pas encore une réalisation. Quand le P.-D.G. vous disait tantôt qu'il faudrait peut-être regarder cela, la soumission du rapport de la CSST, c'est quelque chose qui pourrait possiblement nous éviter des situations un peu embarrassantes. Basée sur le budget 1982, la CSST, la permanence nous arrive avec un budget 1983, une augmentation de 6% à laquelle nous n'avons pas souscrit découlant du fédéral et tout. Nous avons protesté véhémentement contre les 6%, mais il reste que c'était basé sur les chiffres de 1982 tels que nous les connaissions dans le temps.

Après que tout est fait, on arrive avec des chiffres différents pour 1982 et, comme M. Bédard vient de le dire, la même chose va probablement se reproduire en 1984. C'est peut-être quelque chose que vous pourriez regarder de plus près pour nous permettre de nous baser sur quelque chose de plus réel qu'un budget basé sur un budget.

M. Sauvé: À titre d'exemple, le rapport des états financiers du Vérificateur général pour l'exercice terminé le 31 décembre 1982 est signé par M. Châtelain, le Vérificateur général, le 18 mars 1983.

M. Pagé: L'ensemble de cette question fait référence à tout l'aspect de la vérification interne de la commission et des services de vérification. À cet égard, mon collègue a des questions.

M. Cusano: Je m'étonne de deux choses. Je reviens sur la question. Si je comprends bien, on vous a fait adopter un budget et, tout de suite après, vous avez pris connaissance des chiffres réels. C'est bien cela? Bon. Est-ce que ces chiffres réels sont arrivés du ciel ou est-ce que le président-directeur général a eu l'occasion, avant qu'il les dépose, d'en prendre connaissance?

M. Dufour: Je vais répéter ce que j'ai dit tantôt. Le budget a été approuvé en février. D'accord? Sauf qu'il y a une espèce de règle d'or, c'est que, tant et aussi longtemps qu'on n'a pas vu le procès-verbal et le contenu d'une résolution, nous ne sanctionnons pas. Le procès-verbal, la résolution sont arrivés en mars. Pour nous, ce qui fait foi d'une décision, c'est la résolution, quand tu acceptes ton procès-verbal. Cela se situe en mars. C'est le même jour que nous arrivent les états financiers.

M. Sauvé: L'an prochain, ce sera pareil.

M. Laberge: Je dois vous dire que la partie syndicale a suggéré à la partie patronale qu'on grève. À notre grande surprise, ils n'ont pas accepté.

M. Dufour: Je ne sais pas si cela termine ou à peu près sur cette question, mais, pour nous, la partie patronale, il y a un problème majeur qui est soulevé: toute la question de la vérification interne et de l'information du conseil d'administration. Je dois dire à cette commission que nous avons soumis le problème à une firme de conseillers en gestion auprès de la CSST à deux occasions cette année pour se donner ces outils sans lesquels on ne peut pas fonctionner, en tout cas, à l'intérieur desquels on se sent très mal à l'aise pour fonctionner. On a demandé un comité de vérification interne auprès d'un conseil d'administration comme vous en retrouvez dans l'entreprise privée. Même dans certains organismes publics comme Hydro-Québec, il y a un comité de vérification interne auprès du conseil d'administration.

Le Vérificateur général, à ce jour, nous a toujours répondu quasiment de nous mêler de nos affaires. Cela nous fatigue un peu et c'est un débat qu'on va vraiment continuer à faire comme partie patronale. Qu'on le veuille ou qu'on le veuille pas, on pense que souvent ce ne sont que des cotisations patronales. On voudrait avoir plus d'information pour éviter le genre de problème que vous soulevez. Si les ministériels et les autres députés peuvent nous aider en proposant un petit amendement nécessaire à la loi, on aura fait oeuvre très utile.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour. M. le député de Viau.

M. Cusano: Sur cette question de vérification interne, il doit certainement y avoir, dans tous les départements, une espèce de compte rendu soumis régulièrement. Est-ce que cela a été fait, M. le président?

M. Sauvé: Ce que nous faisons, nous avons un service de vérification interne qui voit tous les services et toutes les directions à intervalles réguliers, c'est-à-dire que notre service de vérification interne, sur la base de quatre ans, voit tous les services. Nous recevons aux deux mois un rapport des états financiers selon l'estimation faite deux mois avant. Vous savez comment la comptabilité fonctionne; nous avons des indications, mais jamais de certitude. Cette année-là, il y avait beaucoup de problèmes. Vous savez, d'ailleurs, que la cotisation ne se termine qu'à la toute fin de l'année. Les employeurs ont jusqu'au 31 octobre pour réviser leur masse salariale de l'année en cours. Vous savez que l'expérience passée démontre qu'ils sous-estiment leur masse salariale d'environ 8%. Les chiffres arrivent à la toute dernière minute et c'est comme cela qu'on a parfois des surprises.

M. Cusano: M. le président, est-ce que vous avez, en termes de procédure, des rapports trimestriels? Si oui, sont-ils soumis au conseil d'administration?

M. Sauvé: Sauf erreur - mes collègues me corrigeront - quand on a des rapports -on nous l'a, d'ailleurs, demandé à la suite du dernier budget 1983 - nous soumettons les états financiers. Au mois de juin, nous avons soumis les prévisions. Il y en a eu en mars; il y en a eu en juin. Nous essayons au conseil d'administration - il s'agit de livres ouverts, puisque nous sommes une entreprise publique - que tout soit donné pour que les gens puissent prendre les décisions en toute connaissance de cause. Vous savez que, dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail, il y a deux grands principes: il y a l'élimination à la source, mais il y en a un autre qui est fort important, la prise en charge par les parties.

Pour qu'il y est une prise en charge par les parties, je pense qu'il faut qu'elles soient totalement informées. Nous essayons de donner tout ce que nous pouvons à tout notre monde au conseil d'administration. D'ailleurs, je les comprends, pendant un certain temps, on nous a reproché de les inonder de documents.

M. Laberge: Je ne vois pas pourquoi vous dites "pendant un certain temps".

M. Sauvé: II y a beaucoup de documents. Je pense qu'il faut qu'ils aient tout en main pour pouvoir en discuter et c'est comme cela qu'on forme des comités ad hoc, un comité spécial sur le budget. On voudrait former un comité de vérification interne avec des membres du conseil. Le Vérificateur général semble nous dire qu'on joue dans ses plates-bandes. Une des solutions est probablement de changer la date du rapport annuel ou de demander que

nous soyons comme 18 des 58 organismes existants. Je vous le cite de mémoire, je pourrais vous donner le chiffre exact demain. Je pense qu'il y a une cinquantaine d'organismes où le Vérificateur général, selon la loi, doit faire la vérification générale et nous sommes de ceux-là. Il y a 18 organismes où on peut faire faire cette vérification par des comptables privés. L'autre solution, c'est de changer pour que ce soit comme cela. C'est dans ce sens qu'on cherche des solutions. Je pense qu'on va y arriver. (16 heures)

M. Dufour: M. le Président, juste un bref commentaire. J'aimerais dire que c'est insuffisant, l'information que nous avons. La partie patronale en réclame. C'est vrai qu'il y a beaucoup de papiers, mais nous commençons à nous habituer. Ceux qui regardent les états financiers, nous allons les accepter en tout temps.

Lorsqu'on parle de la CCST, il faut aussi un peu parler de l'IRSST (l'Institut de recherche en santé et sécurité au travail), parce que nous sommes aussi le conseil d'administration de cet organisme. C'est nous qui acceptons les budgets de cet organisme. Je dois vous dire que là nous avons tout structuré sur la base de l'entreprise privée. Ce sont des vérificateurs externes; on peut même nommer la firme. L'institut est enregistré en vertu de la troisième partie de la Loi sur les compagnies. On vit de façon très différente des choses à l'IRSST et des choses à la CSST et on voudrait se donner le modèle IRSST quand on parle de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. M. le président Sauvé, je pense que jamais vous ne nous inonderez assez de documents financiers.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Cela va, M. le député de Viau? M. le député de Prévost.

M. Dean: M. le Président, la Loi sur la santé et la sécurité du travail a été adoptée en 1978, si je ne me trompe pas, à la suite d'une quinzaine d'années de revendications...

Une voix: Le 20 décembre 1979.

M. Dean: En 1979... de la part des centrales syndicales au nom des travailleurs et des travailleuses du Québec et à la suite de quelques années de débats, d'abord, autour d'un livre blanc et, finalement, autour du projet de loi 17 issu de ce livre blanc. Cette loi a créé la CSST dans le but de créer un organisme au Québec pour chapeauter tout ce qui regarde la santé et la sécurité des travailleurs quels que soient leurs secteurs industriels, quelles que soient leurs situations. Deuxièmement, fondée sur le principe de l'implication, à tous les paliers de la loi, des parties patronale et syndicale dans l'élimination des dangers, cette commission avait comme fonction, d'abord, de continuer à appliquer la Loi sur les accidents du travail, de regrouper en son sein des services d'inspection éparpillés à cette époque dans au moins cinq ministères qui se pilaient souvent sur les pieds, ce qui créait une confusion assez épouvantable dans le respect des conditions de travail concernant la santé et la sécurité des travailleurs et des travailleuses.

Ce qui semblait être la ligne de force de ce projet de loi c'était la prévention des accidents, le tout groupé autour d'un objectif principal qui se trouve à l'article 2 de la loi: "La présente loi a pour objet l'élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs. Elle établit les mécanismes de participation des travailleurs et de leurs associations, ainsi que des employeurs et de leurs associations à la réalisation de cet objet".

Mes questions vont surtout porter sur la réussite ou non ou la réussite partielle de cet objectif de l'article 2 de la loi. C'est sûr que cet objectif de fusion de services d'inspection, de regroupement de services déjà impressionnants du côté de l'ancienne Commission des accidents de travail, c'était tout un défi sur le plan administratif. Cela a donné qu'au moins on peut aujourd'hui avec une certaine justification dire que l'impression qu'on a, c'est que, depuis deux ans et demi ou trois ans que la loi est en vigueur et que la CSST existe, on a peut-être difficilement résisté aux dangers de "fonctionnarisation" de tout ce processus. On parle souvent de grilles, de politiques à outrance et on donne l'impression qu'on a très bien fait le côté fonctionnaire, mais on se pose des questions sur les réalisations dans les faits quant à l'implication des parties et à l'atteinte de l'objectif de l'article 2 de la loi.

Mes questions sont à quatre volets. Je les pose sans discrimination aucune tant à l'égard de M. Dufour, de M. Paquin et de leurs collègues qu'à l'égard de M. Laberge, M. Giasson et M. Gingras, du côté des travailleurs.

D'abord, comment se fait-il que les règlements relatifs aux comités de santé et de sécurité, et aux représentants à la prévention aient pris tant de temps à venir en rapport à des innovations technocratiques et "fonctionnariques", si vous me permettez d'inventer un mot?

Deuxièmement, malgré que ces comités, comme tels, viennent tout juste d'entrer dans nos moeurs par l'adoption du règlement, est-ce que cet objectif de la loi a pu influencer les employeurs et les syndicats dans le sens de créer, par négociation collective, des comités conjoints de santé en plus grand

nombre qu'auparavant et peut-être avec plus de pouvoirs qu'auparavant dans le but, justement d'éliminer à la source les dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs? Donc, quel est l'état de cette réforme dans les usines, dans les mines, dans les ateliers, dans les entrepôts et dans les bureaux du Québec? Ces deux questions concernent cet objectif de la loi.

Mes troisième et quatrième questions sont plutôt dans le sens du paritarisme, un autre beau mot qu'on a inventé. Quel est l'état du paritarisme? Quelle est l'évaluation, même préliminaire, de cette approche de l'implication des partenaires patronaux et syndicaux dans la protection de la santé, de la sécurité et de l'intégrité physique des travailleurs?

Finalement, autour de cette commission qui a un objectif assez précis, on constate qu'il y a au moins deux ou trois associations patronales autres que les représentants patronaux au conseil d'administration de la CSST et au moins deux personnes identifées au syndicalisme qui sont venues, avec d'autres chapeaux, mettre en doute ou en valeur, par leurs interventions, la validité du paritarisme et de l'efficacité des syndicats dans le processus de la Loi sur la santé et de la sécurité du travail. Est-ce que les deux parties au conseil d'administration sont, après deux ans d'expérience, satisfaites des canaux de communication qui existent dans leurs propres milieux, patronaux et syndicaux, pour véhiculer au conseil d'administration de la CSST les problèmes vécus, les difficultés et les critiques à l'égard de la loi?

Le Président (M. Blouin): Succinctement.

M. Laberge: Vous avez remarqué, jusqu'à maintenant, que c'était toujours M. Dufour qui prenait le micro et, par habitude, je le lui laissais.

M. Dufour: On va le laisser au président.

M. Laberge: Bon, très bien.

M. Sauvé: Vous posez la question, relativement au règlement sur la santé et la sécurité du travail: Comment se fait-il que cela ait pris tant de temps? Prenons les étapes suivantes: la loi a été adoptée le 20 décembre 1979. La commission a été nommée autour du 13 ou du 14 mars 1980; elle a tenu sa première séance le 31 mars 1980, c'était assez rapide. Il fallait, évidemment, préparer un certain nombre de projets, comme un règlement de régie interne, les choix de priorités et des documents de base pour pouvoir fonctionner. Tous les règlements de base, les gros règlements comme ceux des comités de santé et de sécurité, des services de santé, des représentants à la prévention et quelques autres, ont été déposés au conseil d'administration avant décembre 1980. Celui qui touche les comités de santé et de sécurité a été déposé le 25 septembre 1980.

On a, alors, formé un comité qui était composé, du côté patronal, de Sarto Paquin, Thomas Lavoie et Pierre Duguay; du côté syndical, de Louis Larberge, Clément Godbout, Étienne Giasson et Claude Morisseau. Dans ce temps-là, c'était probablement M. Émile Boudreau puisque M. Clément Godbout est venu remplacer... Je ne pourrais pas dire pour la FTQ, mais c'est un des nouveaux membres, parce qu'à la FTQ il y a deux personnes qui ont été remplacées, Émile Boudreau et Roger Laramée, les deux nouveaux membres étant Claude Morisseau et Clément Godbout.

Ces gens ont travaillé sur un projet de règlement qui a été, si mon souvenir est bon, adopté pour prépublication le 18 décembre 1980. Il a été publié à la Gazette officielle. Pour vous faire une longue histoire courte et vous empêcher d'avoir toutes les dates, après publication à la Gazette officielle à l'automne 1981, les gens disent: II faudrait qu'on annule la prépublication; on a réétudié toute la question et on s'aperçoit que ce n'est pas un bon projet de règlement.

Finalement, en février 1982, j'ai été obligé de voter pour qu'un nouveau règlement puisse être prépublié parce que la discussion avait été faite longuement, même à des conseils spéciaux de deux jours en novembre et en janvier. Finalement, je pense qu'il a été prépublié au cours du mois de mars - je voudrais vérifier les dates - 1982. Il est revenu au conseil et, finalement, nous l'avons adopté en décembre 1982 sur division, encore une fois. J'ai voté pour l'adoption du règlement qui avait changé de façon assez importante, je pense, entre la première version et la version finale qui garantissait toujours la majorité des membres d'un comité de santé et sécurité aux gens syndiqués. C'est là qu'il fait la division entre la partie patronale et la partie syndicale. Il est venu au gouvernement pour adoption. Il a, finalement, été publié le 12 octobre 1983 et, comme la coutume le veut, il entrait en vigueur dix jours après sa publication. Il est donc en vigueur depuis le 22 octobre.

C'est un règlement d'importance qui a été négocié, renégocié, comme vous pouvez le voir, repris par les parties. C'est la seule fois, si mon souvenir est bon, où, pour un règlement qui avait été prépublié, c'est le conseil qui a demandé qu'on annule la prépublication et qu'on recommence. C'est notre cas d'exception. C'est là l'histoire des comités de santé et de sécurité. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter sur

celui-là?

Le Président (M. Blouin): Est-ce qu'il y a des commentaires. Cela va, la version?

M. Laberge: Oui, probablement, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Oui, M. Laberge.

M. Laberge: Quand nous avons été nommés au conseil d'administration, première réunion en mars 1980 - je suis bien placé pour m'en souvenir - nous avons été inondés de paperasse. Il faut vous dire que la CAT, la Commission des accidents du travail, était quand même là depuis de nombreuses années et la CSST, toute nouvelle, nous arrivait tout de même avec un tas de règlements que la Commission des accidents du travail s'était déjà donnés et là il fallait soit réviser ces règlements, soit les renouveler, les adopter, etc. Nous avons été inondés par des tas de paperasse et je n'exagère absolument pas. (16 h 15)

Arrive ce règlement ou ce projet de règlement sur les comités de santé et de sécurité. Il est vrai qu'il y avait eu un premier projet d'adopté, soumis au gouvernement pour approbation. On voulait faire tellement vite, en tout cas de notre côté -je ne parlerai pas pour la partie patronale -que les consultations étaient loin d'être terminées. Alors, les consultations continuant, nous avons adopté une position et nous avons prévenu la CSST, la partie patronale, que nous ne nous voulions plus que le règlement, tel qu'il avait été proposé au gouvernement, soit adopté. Nous avons fait des démarches, M. Dufour vous l'a dit ce matin. Même si nous siégeons au conseil d'administration, en tant qu'organisme, nous nous gardons l'entière liberté de faire les représentations que nous jugeons nécessaires après en avoir informé le conseil d'administration. C'est ce que nous avons fait. Nous avons fait des démarches auprès du gouvernement et, finalement, le projet de règlement a été laissé sur les tablettes durant plusieurs mois. Pendant ce temps-là, les discussions ont repris à la Commission de la santé et de la sécurité. Nous avons vraiment fait tous les efforts pour essayer de négocier - et le mot est juste, je crois - un nouveau règlement.

Nous sommes venus à un cheveu près, je pense, de nous entendre, mais, finalement, et cela revient un peu à la question du leader de l'Opposition sur ce comité: Est-ce qu'il y a un bulldozer à la CSST? Oui, de temps à autre, le P.-D.G. agit un peu comme bulldozer, bulldozer dans le bon sens du terme. On peut se servir d'un bulldozer pour détruire, mais on se sert plus souvent d'un bulldozer pour construire. Je suis bien à l'aise pour en parler. Il fut un temps où les opérateurs de bulldozers étaient dans le conseil; maintenant, la majorité étant chez nous, nous sommes heureux d'en parler. Il reste que le P.-D.G. a été obligé de prendre position pour trancher ce projet de règlement qui est à la base même de l'application de la loi 17.

Quant à la question que me posait le député de Prévost sur les deux personnes qui sont venues hier et qui ont fait des interventions, je vais me limiter à l'une des deux personnes qui est membre d'un syndicat affilié à la FTQ. Il n'était même pas délégué au congrès; sa section locale 1123 l'était. Encore une fois, je le répète que pas un seul délégué n'a remis en question...

M. Chartrand (Michel): Parce qu'il n'y avait aucune résolution...

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

M. Laberge: Je ne parlais pas de la grande gueule qui n'est pas membre chez nous.

Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît, s'il vous plaît!

M. Chartrand: Dis toute la vérité, Laberge...

Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît, s'il vous plaît!

M. Laberge: Je ne parlais pas de la grande gueule, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Je vais suspendre les travaux pour quelques minutes.

M. Chartrand: Unanimité sur une question que vous n'avez pas soulevée! Dis toute la vérité, Laberge, ne conte pas de mensonges et ne dénigre pas Pétel, qui est le meilleur gars de la FTQ pour les accidentés du travail, à part Émile Boudreau, que tu as traité avec un coup de pied de l'âne.

M. Laberge: Alors, M. le Président, avant que la grande gueule se fasse entendre...

M. Chartrand: Qu'il ne me fasse pas chier, lui. Menteur!

Le Président (M. Blouin): Nos travaux sont suspendus.

M. Chartrand: Tu es un maudit menteur, Louis Laberge...

M. Laberge: Tu as toujours été fou... M. Chartrand: Cela n'a pas été discuté

au congrès, parce que vous n'avez pas amené les commissions, parce que tu n'as pas pris les résolutions. Tu as juste parlé de la loi 42; tu n'as même pas parlé de la commission présente. C'est une honte pour un mouvement syndical.

M. Laberge: Heureusement...

M. Chartrand: À part ça, tu accuses les gars qui s'occupent des accidentés.

M. Laberge: Heureusement...

M. Chartrand: Maintenant que tu es membre, tu dis: Je vais corriger mes affaires et, après cela...

M. Laberge: Heureusement que tu n'es pas chez nous...

M. Chartrand: Bon, très bien. Je vais me taire et je vais m'asseoir.

Une voix: Monsieur, c'est le président de la commission...

M. Laberge: Alors, M. le Président, si vous le permettez...

M. Chartrand: Je me rassois et je ne parle pas, M. le Président.

M. Laberge: ...je ne crois pas avoir dénigré qui que ce soit...

Une voix: Suspension.

M. Chartrand: ...Laberge, il est déjà venu avec des "bouncers" ici pour sortir toute la commission. Laberge a déjà fait cela avec des hommes de main, lui. Il a déjà sorti toute la commission, Laberge, et les députés n'ont rien dit.

(Suspension de la séance à 16 h 19).

(Reprise de la séance à 16 h 23).

Le Président (M. Blouin): Le mandat de cette commission est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Jusqu'à maintenant, nous avons permis à tous les organismes invités de s'exprimer librement et, dans beaucoup de cas, aussi longtemps qu'ils le désiraient sur tous les sujets pertinents. Vous comprendrez que c'est dans cette perspective que nous allons poursuivre nos travaux.

M. Laberge: M. le Président, si vous me le permettez, non seulement je ne dénigrais pas la personne membre d'un syndicat affilié à la FTQ, Claude Pétel, pour ne pas le nommer, maintenant que tout le monde sait de qui je parlais, mais il n'était pas délégué au congrès de la FTQ, tenu la semaine dernière. Ce n'est pas dénigrer quelqu'un; il n'y était pas, c'est un fait.

Le Président (M. Blouin): Est-ce que vous pourriez revenir au sujet plus directement?

M. Laberge: Oui, oui, mais je pense que c'est important, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Non, non.

M. Laberge: Si vous me le permettez, avec l'intervention intempestive...

Le Président (M. Blouin): M. Laberge...

M. Laberge: ...les journaux vont rapporter tout cela de travers.

Le Président (M. Blouin): M. Laberge, vous avez toujours le loisir de donner une conférence de presse après la tenue de cette commission. Je vous signale que, lorsque nous avons suspendu les travaux, ces interventions n'ont pas été enregistrées et consignées au journal des Débats. Nous sommes en commission parlementaire, nous avons reçu un mandat de l'Assemblée nationale et c'est sur ce mandat, et non sur autre chose, que nous allons poursuivre nos travaux.

M. Laberge: C'est de cela que je veux parler, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Alors, revenons au sujet très directement.

M. Laberge: Bien, je pense que c'est important de savoir comment la CSST a été perçue par les 1100 délégués qu'il y avait au congrès de la FTQ la semaine dernière. Je disais qu'au local 1123 des Travailleurs unis de l'automobile où M. Pétel représente les travailleurs syndiqués accidentés - il fait une bonne "job", je le reconnais tout de suite sans aucune hésitation - personne n'a remis en cause ni la CSST, ni notre participation à la CSST. Il y a des griefs, bien sûr, surtout en réparation, surtout vis-à-vis les médecins, enfin, un tas de choses dont on aura l'occasion de parler. Mais je pensais qu'il était important de prendre quelques secondes du temps de la commission pour exprimer cela très clairement.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Poursuivons, cela va. Oui, M. le député de Prévost.

M. Dean: Je ne veux pas empêcher, parce que j'ai évoqué la possibilité que d'autres personnes...

Le Président (M. Blouin): Je m'excuse,

M. le député de Prévost, M. Dufour avait une réponse à apporter sur cette même question.

M. Dufour: À moins que M. le député de Prévost ne veuille revenir sur les comités de santé et de sécurité. C'est parce que vous avez posé cinq questions.

M. Laberge: On a répondu à une.

M. Dean: D'accord. Il y a seulement cet élément, un peu l'état de la réforme. Même si le règlement sur les comités de santé et de sécurité a retardé, est-ce que la loi 17 a quand même eu une influence bénéfique sur les entreprises et les syndicats de façon qu'ils puissent plus rapidement négocier des meilleures clauses ou des meilleurs comités conjoints de santé et de sécurité, indépendamment de la loi? Finalement, est-ce que, même s'il n'y a que deux ans et demi d'expérience vécue, le côté élimination à la source de danger pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs a commencé à démontrer des effets positifs?

Une voix: D'accord, vas-y.

M. Laberge: Très brièvement, M. le Président, cela a eu des effets différents selon les compagnies. À certains endroits, les employeurs ont dit: On attend que le règlement soit adopté. Dans d'autres endroits, ils ont dit: On a une indication très claire où cela se dirige et cela a aidé. Ce n'est pas une application universelle.

M. Dufour: M. le Président, je pense qu'on pourrait parler du comité de santé et de sécurité longtemps. Je sais que nos collègues de l'AECQ et des mines de métaux attendent et que vous désirez terminer à 19 heures. Je voudrais donner un "feed-back" rapide sur les cinq questions du député de Prévost.

D'abord, sur la réglementation, c'est tout à fait normal que cela soit long. On taille carrément dans du neuf. Des comités de santé et de sécurité avec des pouvoirs décisionnels comme ceux qu'on a dans la loi, cela n'existe pas en Amérique du Nord. C'est tout à fait normal que cela prenne du temps. Le représentant à la prévention, cela s'applique de façon différente, par exemple, dans le secteur de la construction et dans l'industrie manufacturière. On est obligé de négocier le nombre d'heures qu'on va consentir pour ces représentants à la prévention. Alors, ce sont des choses où il y a des coûts énormes qui sont impliqués et c'est normal que ce soit long. De toute façon, Claude Drouin va parler un peu plus sur les règlements.

Sur l'influence sur les conventions collectives, je voudrais juste vous rappeler un colloque qu'on a eu conjointement avec la CSST, il y a à peine trois semaines ou un mois, où on a établi - qu'on n'a pas innové avec la loi 17 dans les comités de santé et de sécurité; cela existe déjà dans bon nombre de secteurs. Pour l'instant, c'est vrai qu'il y a une attitude d'attentisme. Les gens se disent: Qu'est-ce qui va se passer? Finalement, les groupes patronaux, vous en avez mentionné deux, sont en attente, bien sûr, parce que ce sont des problèmes très particuliers; la construction a une partie de la loi qui lui est particulière et, il y a aussi les mines qui sont souvent citées dans le problème de la prévention comme étant un secteur prioritaire. Alors, il n'est que normal, quant à nous, sans que cela ait quelque lien que ce soit avec les communications internes, que ces organismes-là puissent se faire entendre à l'occasion d'une telle commission, M. Dean.

Claude Drouin va enchaîner sur les règlements, rapidement.

Le Président (M. Blouin): M. Drouin.

M. Drouin (Claude): M. le Président, je n'en ai pas très long à dire, mais je crois tout de même que c'est important. J'ai siégé à je ne sais combien de comités de règlements - peut-être une dizaine - et je dois vous dire qu'une des barrières qui fait que nous discutons extrêmement longtemps sur les différents règlements, c'est que le style des règlements qui nous sont proposés fait appel à des mots choisis et à un contexte extrêmement précis. C'est la minutie, c'est la recherche du détail objectif. On veut toujours donner dans ces règlements des éléments précis et, semble-t-il, quand on parle avec les gens de la direction, on s'aperçoit que l'élément qu'on recherche, c'est la facilité de contrôler et d'appliquer le règlement, c'est-à-dire qu'on pense toujours à l'inspection quand on fait un règlement, et de quelle façon on va pouvoir appliquer cela avec une certaine rigueur.

La question de la rigueur des règlements exige de nous un temps considérable parce qu'on ne discute pas en fonction des principes; on discute en fonction de certains éléments qui sont difficilement pondérables. Prenons le règlement des premiers soins par exemple. Combien de temps avons-nous pris pour en décider? Une proposition avait été faite pour dire que la trousse de premiers soins devait être à trois minutes du travailleur. Bien, c'est quoi, trois minutes? C'est quoi, quatre minutes? C'est quoi, cinq minutes? Il n'y a pas de principe en arrière de ces choses-là et on est mal pris. Du côté pratique, c'est très difficile d'arriver à des solutions.

Je pense que, malheureusement,

souvent, on a l'impression - personnellement, j'ai cette impression - que le but des règlements, c'est beaucoup plus de faciliter l'acte d'inspection ou de faciliter le contrôle, c'est-à-dire que la clientèle elle-même vient parfois un peu trop en arrière du mécanisme qui va appliquer cela. Ce problème, on l'a vécu avec le règlement des premiers soins, on l'a vécu chez les représentants à la prévention. Combien de temps avons-nous passé à discuter d'instruments qu'on donnerait aux représentants? Par exemple, on avait là-dedans une "flashlight" pour mesurer la poussière. Quand on y pense un peu, il a fallu se battre je ne sais combien de temps, combien d'heures pour essayer de sortir un élément comme cela dans un règlement. C'est qu'il n'y a pas de logique là-dedans. À un moment donné, on est pris là-dedans. On a vécu cela avec une quantité de règlements, entre autres celui pour fixer les heures d'affectation du représentant. Tout cela, ce sont des détails, finalement. Une des choses qui nous bloquent, c'est que, malheureusement, souvent les règlements qu'on nous présente sont truffés de procédurite et de détails, et cela fait mal.

Je me mets dans les bottines de la direction. J'admets que, pour la direction, plus les règlements sont précis et détaillés, plus l'application devient facile pour elle. Mais, quand on se met du côté de la clientèle, ce n'est pas la même chose. Souvent, une des réponses que la direction nous fait, c'est: Oui, il y a beaucoup de détails, mais il y a une espèce de bureau de législation déléguée ou quelque bureau de législation ici qui exige tous ces détails. Mais tous ces détails nous font perdre un temps énorme et cela explique pourquoi les règlements sont souvent très lents à évoluer.

Le Président (M. Blouin): Merci.

M. Laberge: M. le Président, me permettriez-vous trente secondes sur ce point?

Le Président (M. Blouin): II y a trois autres intervenants à la table sur le même point. M. Giasson?

M. Giasson (Étienne): Je voudrais donner mon opinion, parce que mon nom revient souvent comme étant membre des comités ad hoc qui ont siégé sur les règlements. Étant représentant de la Fédération des travailleurs du papier, il est sûr que je croyais - et on le croit encore -qu'à l'intérieur de cette loi il y avait possibilité d'améliorer et de changer des choses à l'intérieur du secteur qui, évidemment, dans les secteurs prioritaires, était le premier, la forêt; par la suite, il y avait les scieries, les papeteries venant seulement en troisième lieu.

Nous sommes convaincus que les articles lus par le ministre en ce qui regarde l'élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique comprennent tout ce qu'il faut pour permettre d'améliorer bien des choses. Cependant, dans mon secteur, je ne peux pas dire qu'il y ait eu d'énormes améliorations. Ce qu'il faut, je pense - et c'est là une opinion bien personnelle - c'est que les parties qui sont là changent leur opinion en ce qui regarde la santé et la sécurité dans les années à venir.

J'ai sursauté hier et je suis bien aise d'en parler, puisque il y a une association dont les travailleurs sont de chez nous qui a présenté son document hier soir. Elle ne m'a rien démontré, elle m'a plutôt amené à prendre la position que les accidents de travail, en gravité et en nombre, n'ont pas diminué dans le secteur de la forêt, si ce n'est pendant une courte période durant laquelle il y a eu un énorme conflit au niveau de la façon de travailler à l'intérieur de ce secteur et aussi au sujet de la diminution des heures de travail et de la longueur des saisons de coupe qui existent actuellement dans la forêt.

Il ne faut pas penser que, parce qu'on va arriver avec du paritarisme et avec des comités, on va tout régler. Je pense qu'à la base il faut un changement au niveau de l'idée, de la mentalité qu'on a à propos de tout ce qui touche la santé et la sécurité. Nous, à l'intérieur de la Fédération des travailleurs du papier, nous avons passé par un long conflit pour essayer de faire comprendre aux employeurs qu'ils avaient tout intérêt à s'asseoir et à négocier une nouvelle méthode de travail. Cela a été en partie gagné. Vous allez me dire, à ce moment-là, que les travailleurs sont peut-être "flyés", qu'ils pensent peut-être à une solution irréaliste. Je vous ferai remarquer cependant que, dans un autre secteur où il y a eu une commission spéciale au niveau de la mine Belmoral, l'un des points importants était justement le travail au boni qu'il fallait changer ou modifier pour être capable d'améliorer la santé et de réduire les accidents de ce groupe.

Chez nous, il y a une méthode de travail au boni, à la pièce, qui pousse continuellement les travailleurs à travailler à une vitesse exagérée. Je pense que tant qu'on ne changera pas nos opinions sur ce point, qu'on ne changera pas notre façon de voir cela, on va avoir des difficultés.

Je vais vous donner des exemples pratiques parce que je pense qu'à cette commission, on doit échanger. Je suis quand même heureux qu'on soit ici pour exprimer -en tout cas, personnellement - nos idées sur cela. À l'intérieur de la fédération, même à l'extérieur de la Commission de la santé et de la sécurité du travail - cela n'avait rien

à voir avec ce qui se passe comme fonctionnement au niveau de la Commission de la santé et de la sécurité du travail - à la suite d'une étude faite par un comité très technique dans les usines et dans les forêts pour savoir quel était le point no 1, majeur à l'unanimité, les gens ont découvert que c'était le bruit. Nous avons, toujours dans l'idée de l'article 2, l'élimination à la source, présenté une opinion dans quatre unités où nous sommes représentés comme fédération du papier pour discussion localement avec l'employeur pour établir et travailler activement et sérieusement à l'élimination à la source du bruit, dont l'intensité dans les usines est très exagérée. À notre grande surprise, les quatre unités locales ont refusé notre idée et nous ont renvoyés au plan provincial. Je pense que c'était là un des moyens de pouvoir, à l'intérieur d'un secteur, appliquer l'article 2 où l'on pouvait, au départ, éliminer un problème énorme que nous avons à l'intérieur des papeteries et à l'intérieur de la forêt.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Il y avait aussi MM. Lavallée, Paquin et Laberge qui désiraient intervenir. Le plus succinctement possible, s'il vous plaît! M. Lavallée.

M. Lavallée (Jean): Mon nom est Jean Lavallée. À la question posée par le député de Prévost concernant notre évaluation après trois années d'existence de la Commission de la santé et de la sécurité du travail - je siège au conseil depuis le début de la Commission de la santé et de la sécurité du travail - nous sommes entièrement d'accord avec les objectifs de la loi 17. C'est vrai, comme le disait mon confrère, qu'il y a des mentalités qu'il va falloir changer. Moi, je constate, après trois ans, que le bulldozer dont M. Cusano parlait tout à l'heure, j'ai eu à y faire face, mais ce n'est pas le même bulldozer. C'est l'AECQ. Je n'ai pas pris connaissance du mémoire qu'elle va présenter. Nous avons eu plusieurs rencontres pour essayer de régler l'association sectorielle de la construction. C'est la seule obligatoire dans la loi. Il n'y a pas eu moyen de s'entendre. Même dans le cadre du pluralisme syndical où il est assez difficile de se comprendre, nous avons quand même réussi à nous comprendre concernant l'association sectorielle, mais l'AECQ n'a jamais voulu prendre entente avec nous, puis démarrer cette association sectorielle. La même chose au niveau du représentant à la prévention. Plusieurs rencontres ont eu lieu auxquelles les différentes centrales syndicales étaient présentes. Nous n'avons absolument pas pu régler la question du représentant à la prévention.

Il y a un chapitre dans la loi 17 qui traite de la construction. Je pense que cette partie-là, il va falloir que l'AECQ essaie de composer avec nous pour la mettre en application. Si, de part et d'autre, on ne réussit pas à se comprendre, c'est quasi impossible d'avoir une association sectorielle qui soit fonctionnelle.

Je peux vous assurer qu'on a eu pleine collaboration de la permanence de la commission. J'espère que l'AECQ, dans son mémoire, va prendre une position différente et nous dire si elle a réellement l'intention de fonctionner selon la loi 17 et faire en sorte que l'association sectorielle dans l'industrie de la construction démarre une fois pour toutes afin qu'on puisse, par la suite, mettre en application les autres règlements qui vont en découler.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Lavallée. M. Paquin.

M. Paquin: Merci, M. le Président. M. le député de Prévost, dans votre deuxième question - j'essaie de la formuler du mieux que je l'ai prise en note - vous dites: Les comités viennent juste d'entrer dans nos moeurs. Est-ce que cela a influencé les employeurs à négocier ou à créer des comités de santé et de sécurité? Il y a deux aspects dans cette question et brièvement, M. le Président, j'aimerais me prononcer là-dessus.

Sur la question d'influencer des employeurs à créer ou à négocier des comités de santé et de sécurité, je présume que vous faites référence à ce qui existait avant et à ce qui existe maintenant. Du fait, M. le député, qu'on a subi et que l'on continue à subir ce que j'appelle la théorie du "maroisisme", qui est, d'une part, de ne pas reconnaître ce que les employeurs ont fait auparavant et de conclure que ce qu'ils ont fait n'était pas bon et de le remplacer par quelque chose qui pourrait peut-être fonctionner, mais qui coûtera plus cher, vous allez comprendre que nous n'avons pas de statistiques sur ce qui existait avant et sur ce qu'il y a maintenant. Je sais, par contre, qu'auparavant il y avait des comités de santé et de sécurité qui fonctionnaient très bien. Mais, avec les nouveaux règlements et les nouveaux pouvoirs de décision, je dois vous dire, personnellement, que je ne suis pas très sûr que cela va aller mieux. Je l'espère, mais je n'en suis pas sûr.

Lorsque vous dites que les comités viennent juste d'entrer dans nos moeurs, la façon - je vais me permettre de le mentionner dès maintenant - dont on essaie de les faire entrer dans nos moeurs est inconcevable. Je m'explique. L'article 68 dit qu'un comité peut être formé et l'article 69 dit qu'un comité se forme quand une des deux parties le demande. On veut tellement faire entrer cela dans nos moeurs que, dernièrement - je vous parle de quelques

jours à peine et je n'en croyais pas mes oreilles quand on me l'a dit au téléphone, j'en ai demandé une copie - il y a une lettre qui a été envoyée aux chefs d'établissements dans l'île de Montréal. Je ne vous lirai que le deuxième paragraphe: "Or, depuis le 22 octobre 1983 - date où les comités sont maintenant légalement en vigueur - un comité devra être formé dans les établissements comme le vôtre de 21 travailleurs et plus et appartenant à une catégorie désignée par la CSST." Enfin, c'est le moins qu'on puisse dire, l'information que l'on donne n'est pas exacte. Ce n'est pas "devra", mais plutôt "une des deux parties qui le demande". J'aimerais vous dire que c'est une lettre signée par un "sous-sous-sous-sous adjoint" quelque part, mais tel n'est pas le cas.

Bien sûr que ce problème dont je viens de vous faire prendre connaissance va faire l'objet d'un débat lors de notre réunion au conseil la semaine prochaine, mais, ce que je veux dire, c'est qu'à titre de membre du conseil et, comme le disaient si bien M. Dufour et M. Laberge et le P.-D.G., on parle de grandes orientations, mais on nous arrive avec des cas semblables où on essaie de nous forcer indirectement, si vous voulez, à appliquer la loi d'une façon qui n'est pas tout à fait celle négociée ou proclamée soit par la loi ou par les règlements. Cela, c'est d'entrer dans les moeurs un peu raide. Merci.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci. M. Laberge.

M. Laberge: Trente secondes, M. le Président. Je pense qu'il faut que les membres de la commission soient conscients que - M. Dufour l'a dit, plusieurs l'ont dit et je l'ai dit aussi - cette commission paritaire prend un peu de temps, que c'est un peu lourd. C'est vrai, mais cela prendrait autant de temps, sinon plus, si cela n'existait pas, parce que les discussions qui se font avant d'adopter un projet de règlement se feraient après. Le ministre est fort conscient de cela. Lorsque le projet de règlement serait publié, les organismes tels la CSN, la CSD, la FTQ, le Conseil du patronat et tous les autres, demanderaient d'être entendus pour discuter du projet de règlement. Les discussions qui se font avant se font, quand même, d'une façon un peu plus rapide qu'elles peuvent se faire en commission parlementaire. Je pense que vous en êtes témoins.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Laberge. Rapidement, M. le député de Prévost, s'il vous plaît.

M. Dean: Oui, M. le Président. Seulement une petite clarification, car mes propos ont pu prêter à confusion surtout auprès de M. Paquin. Quand j'ai posé ma question, j'étais pleinement conscient qu'il existait des comités conjoints de santé et de sécurité négociés dans un certain nombre d'entreprises et même dans un nombre certain d'entreprises, et depuis longtemps. Je savais également que le fait que la loi soit adoptée a amené des syndicats et des employeurs à la table de négociations pour améliorer leurs conventions collectives quant à l'existence et aux pouvoirs de leurs comités conjoints de santé et de sécurité en fonction de ce que prévoyait la loi. (16 h 45)

Mon but était de savoir si, dans l'opinion des parties représentées au conseil d'administration, même si la commission fonctionne depuis seulement deux ans ou deux ans et demi, la loi a pu déjà commencer à amener des améliorations quant à cet objectif principal qui est l'élimination, à la source même, des dangers à la santé, à la sécurité et à l'intégrité physique des travailleurs. Je ne voulais pas faire le procès de qui que ce soit. J'étais très conscient de ce qui se passait dans le milieu. Mon opinion, c'est une chose. L'opinion de ceux qui vivent les problèmes, c'est une autre chose, mais, pour moi, c'est important. Merci.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aurais un bref commentaire et quelques questions à poser à nos distingués visiteurs qu'on apprécie de rencontrer aujourd'hui. Le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, formé à la suite de l'adoption de la loi 17, a des particularités très intéressantes en ce qu'il est composé de sept représentants du monde patronal et de sept représentants du monde syndical, des employés ou des travailleurs. Cela implique, évidemment, tout un défi à relever. Cela implique une adaptation qui n'a certainement pas été facile au début - on en convient et on le comprend - parce que vous avez à agir, jusqu'à une certaine limite, dans une solidarité par les décisions que vous prenez, tout au moins celles qui sont unanimes. Vous avez à représenter des secteurs particuliers qui vous sont propres sans être pour autant des délégués. Somme toute, comme M. Dufour l'indiquait ce matin dans le mémoire, vous avez, finalement, à porter plusieurs chapeaux, parce que vous êtes assis dans le fauteuil que vous occupez. La loi est adoptée. Vous avez peut-être, comme nous, des réserves à l'égard de cette loi, mais comme elle est adoptée majoritairement, elle doit être respectée et tout le monde doit vivre avec elle. Ses mécanismes doivent être fonctionnels. On a longuement abordé, depuis quelques jours, toute la trame de fond de cette loi qui est

le paritarisme.

Ma première question est une suite de la question posée par le député de Prévost. On comprend que, depuis 1980 - déjà trois ans - vous avez eu à consacrer vos efforts, très probablement dans les premiers mois, à la régie interne, au budget et à l'organisation. Vous avez déblayé le terrain pour commencer à travailler. Vous vous réunissez une fois par mois, sauf quelques exceptions. Vous avez le mandat de délibérer et de décider ce que je qualifierais de "grandes questions", les politiques de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, son budget, les services de sécurité, les services d'inspection, les règlements qui entourent tout cela, les budgets à consentir aux associations sectorielles qui en font la demande pour être reconnues et fonctionner, parce que c'est sur une base volontaire, sauf dans le monde de la construction. Vous êtes, somme toute, très près de la forêt. Vous avez la grande forêt devant vous et on dit souvent que, lorsqu'on est trop près de la forêt, on perd les arbres de vue. On a entendu depuis quelques jours des questions, des remarques, des interrogations et des inquiétudes très pertinentes et bien fondées. Ne craignez-vous pas ou ne croyez-vous pas plutôt - et là, j'adresse ma question plus particulièrement à M. Laberge et à M. Dufour - que votre conseil, étant convié à débattre et à discuter de grandes questions comme celles-là, s'éloigne peut-être de l'objectif? C'est, d'ailleurs, ce qui a été soulevé par quelques organismes qui ont comparu hier en disant que, pendant que le conseil s'occupe d'élaborer des programmes de prévention, des accidents malheureux se produisent chez les travailleurs et les travailleuses. J'aimerais connaître votre appréciation à cet égard. Je comprends que vous avez, d'une part, les grandes politiques. Vous avez tout ce que vous deviez faire, ce qui est en train de se faire encore tout récemment. Il y a des règlements qui ont été adoptés il y a seulement quelques mois. Quelle place prend, dans vos délibérations, l'aspect objectif d'éliminer à la source les risques d'accident de travail en regard des statistiques malheureuses qu'on retrouve encore aujourd'hui?

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour: C'est très vaste comme question, M. Pagé, parce que vous faites référence, d'abord, à tout le problème du paritarisme et c'est un problème majeur. Il ne se présente pas de la même façon selon que vous le viviez au conseil d'administration ou à l'intérieur des associations sectorielles dont certaines fonctionnent très bien. C'est le cas, par exemple, du textile. D'autres éléments ont été imposés par la loi. Le collègue Jean Lavallée peut attendre la réaction de l'AECQ, mais j'ai l'impression qu'il la connaît. Je ne pense pas qu'on puisse fonctionner dans un schéma d'obligation quand on parle de prévention et cela présente un problème tout à fait particulier quant au paritarisme.

Il y a, ensuite, les comités de santé et de sécurité au niveau de l'entreprise. Certains vont très bien parce que, dans certains cas, il y a des relations du travail qui sont bonnes et déjà cela fonctionne. C'est le comité qui fonctionne déjà paritairement qui va devenir celui de la loi 17. Je pense que, selon qu'on se situe à une strate ou à l'autre, on va avoir des réponses un peu différentes.

Mais à l'intérieur de tout cela, je pense que vous voulez parler du paritarisme conseil d'administration en fonction de la réparation. Je l'ai dit un peu ce matin. Cela n'a peut-être pas été assez clair. Le dossier de la réparation et même le budget de la réparation, à toutes fins utiles, le conseil d'administration y touche très peu parce que tout ce qui constitue le budget de réparation, les 600 000 000 $, c'est déjà ce qui est contenu à la Loi sur les accidents du travail. Ce sont déjà les indemnités prévues. C'est déjà tout ce que la Loi sur les accidents du travail prévoit. C'est ce que j'ai dit ce matin. Invariablement, quand on veut parler de la réparation, surtout des dossiers qui ont été soulevés devant vous, il y a toujours dans le tableau les deux grands dossiers, celui du 38.4 dont on a beaucoup parlé hier - ce dossier est majeur - et le dossier de la loi 42 de M. Fréchette, qui nous ramène invariablement à la solution possible de problèmes qu'on soulève dans le domaine de la réparation.

Par ailleurs, on a l'impression, comme employeurs, que si tous les efforts qu'on met actuellement dans la loi 17 pour les fins de la prévention ne devaient pas avoir un jour un effet sur les coûts de la réparation, on s'en irait demain matin. Quand on dit qu'on va investir 40 000 000 $, 50 000 000 $, par exemple, dans les DSC, il faut y croire. Je pense que l'évaluation sera à faire dans deux ou trois ans. Je dirais que, du côté patronal, la loi est là. Il y a des mécanismes. Il faut essayer de notre mieux, et ce n'est pas facile, de les faire fonctionner, mais je pense que, dans le fin fond de tout cela, c'est toujours le tableau réparation parce qu'il n'y a pas un homme d'affaires qui va investir de l'argent dans la prévention si, un jour, il n'y a pas de résultat. C'est ce qui inspire nos travaux.

Je ne sais pas ce que tu veux ajouter, Claude.

M. Drouin: Regarder la loi et dire que c'est l'outil qui réellement va nous donner les avantages qu'on attend en prévention, il y a peut-être un peu de rêverie dans tout

cela. Quand on regarde comment arrive l'accident de travail, à quelle place arrive un accident de travail, il arrive au travail. J'espère qu'il arrive là, parce qu'on serait censé payer seulement ceux-là. On en paie peut-être d'autres, mais on va parler de ceux-là pour le moment. L'accident de travail arrive avec deux intervenants. Les deux derniers intervenants avant l'accident, c'est le travailleur lui-même et son contremaître. C'est lui qui a été le dernier intervenant là-dedans. Tous les gens qui font partie du mécanisme que la loi a mis en place, par exemple, les comités de sécurité, le représentant à la prévention, l'association sectorielle, l'association patronale, les associations syndicales et tout ce que vous voulez, moi, j'appelle cela la grande congrégation de Notre-Dame-du-Bon-Conseil. Ce sont des gens qui ne sont pas capables d'intervenir immédiatement, spontanément et ponctuellement avec chaque travailleur au moment du travail. Le loi ne peut pas remplacer cette intervention. Le loi ne peut pas faire cela. La loi crée des structures et, ensuite, on peut fonctionner. La loi est un apport au point de vue de la prévention, mais je crois que la loi a ignoré un aspect important: le rôle que l'employeur doit jouer en tant qu'employeur. La loi ne prévoit pas d'organisme pour faire en sorte que l'employeur se prenne en charge. Elle a fixé le paritarisme plutôt qu'un aspect important. C'est un oubli, mais je ne m'attends pas à des miracles avec la loi.

En France, après trente ans d'efforts, la fréquence des accidents est une courbe horizontale. Aux États-Unis, après douze ans de police, ils ne sont pas heureux, non plus. C'est la même chose partout. Si on installe un système de police, un système parallèle plutôt qu'un système prévoyant l'intégration de l'action production et de l'action prévention en même temps, nous n'irons pas loin. Cela améliorera certaines choses à petite dose et non pas à grosse dose.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Drouin. M. Laberge.

M. Laberge: M. le Président, je vais me servir de la même image dont M. Pagé s'est servi, s'il me le permet. Il est vrai qu'à force de regarder toute la forêt on peut oublier un arbre, mais le contraire est aussi vrai. Si vous accordez toute votre attention à cet arbre, vous ignorez ce qui se passe dans la forêt. C'est un peu le dilemme dans lequel nous nous débattons: la réparation, la prévention.

Je pense que tous les efforts qu'on peut faire pour la prévention, même s'il ne faut pas s'attendre à des miracles, comme on aura sauvé le bras d'un travailleur, l'oeil d'une travailleuse, qu'on aura sauvé une vie, cela en vaut la peine. Cela peut se faire par la prévention. Il y a des organismes de prévention qui se targuent d'avoir fait beaucoup de prévention au cours des dernières années et, pourtant ce sont presque les pires dossiers. Je pourrais donner des noms, mais je serai plus délicat, je n'en nommerai pas.

Il y a une différence entre parler de prévention et faire de la prévention. La seule façon de faire de la véritable prévention, c'est de changer la mentalité des employeurs et des travailleurs, c'est de rendre tout le monde conscient que c'est ensemble qu'on va pouvoir faire de la véritable prévention.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Laberge. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: J'ai une deuxième question, celle-là est plus précise. Je veux aborder l'aspect du conseil d'administration, les quatorze représentants que vous êtes par rapport à la direction, en la personne du président-directeur général et de ses adjoints. Nous n'avons pas le privilège d'assister à vos délibérations quoique, parfois, on aimerait être un petit oiseau et y être, sur certains sujets en particulier. On n'est pas observateur, non plus. Je présume que vous établissez une programmation; je présume que vous procédez en fonction de documents, de rapports produits, d'ordres du jour.

On a parlé souvent autour de cette table, comme autour de la table qui a étudié le projet de loi 17, de l'obligation que tout le monde avait de se convier à une action particulière dans les secteurs prioritaires. À cet égard, l'action qui débouche sur les décisions du conseil d'administration, les politiques, les propositions, ce qui est décidé, est-ce que cela peut facilement être amorcé par les membres ou si c'est entrepris par la direction, par le président-directeur général?

Je pourrais, évidemment, aujourd'hui, poser plusieurs questions au représentant de la FIPOE, M. Lavallée, qui représente les employés. Je pourrais lui poser des questions bien spécifiques sur des cas qui ont été portés à notre attention. Je pourrais lui poser des questions sur la possibilité réelle ou non d'utiliser le droit de refus dans le secteur de la construction, quand on sait comment cela peut être délicat pour un travailleur de l'exercer. On en est conscient. Je ne crois pas que le mandat de votre conseil d'administration soit d'être formé de quatorze personnes déléguées; j'ai bien dit, au début, que nous n'étiez pas des délégués. Je ne crois pas que cette réunion soit pour convier quatorze personnes qui viennent faire des propositions au jour le jour. Quand même, vous êtes un conseil d'administration qui a à décider sur de grandes orientations. (17 heures)

Est-ce que vous pouvez proposer des

choses, des programmes, amorcer des questions particulières ou si vous êtes là pour attendre ce qui vous est proposé par la commission par l'entremise de son directeur général et, par la suite, le ratifier après modification ou non? Le plus bel exemple de cela, c'est peut-être ce qu'on évoquait tout à l'heure, tout ce qui a trait au. monde de la construction. M. Lavallée indiquait qu'il était peiné de constater que, malgré que l'association soit obligatoire, elle ne fonctionne pas avec les problèmes qu'il y a. C'est un aspect important. Est-ce que vous pouvez proposer quelque chose ou si vous êtes là pour ratifier?

M. Laberge: Est-ce qu'on peut proposer?

M. Pagé: Oui.

M. Laberge: Jamais personne n'a empêché qui que ce soit d'ajouter des articles à l'ordre du jour, que cela vienne d'Étienne Giasson pour le groupe des pâtes et papiers, des mines et de la métallurgie...

M. Pagé: M. Laberge, si vous me le permettez, je m'excuse, je veux bien qu'on se comprenne. Je ne parle pas d'inscrire des sujets à l'ordre du jour et d'en discuter.

M. Laberge: D'accord.

M. Pagé: Je parle de programmes, de méthodes, de moyens et d'objectifs, des choses comme cela.

M. Laberge: En fait, je peux vous dire que, personnellement, je suis en rapport avec la commission sur des cas précis au moins 20 fois plus souvent qu'avant parce que, siégeant à la commission, cela m'a donné l'occasion de connaître le responsable de tel aspect d'un dossier, etc. Je peux y aller directement. Des fois, cela fait gagner énormément de temps et, des fois, cela se règle plus rapidement, mais je l'ai dit ce matin, quand on perd un cas, on n'est jamais content.

M. Dufour: M. Pagé, la réponse est oui, on peut proposer quelque chose. Pour ne pas commencer un débat, je vais prendre, tout simplement, l'exemple de tout à l'heure. Nous avons, je pense, repris à chaque réunion du conseil, depuis six mois, cette demande d'avoir un comité de vérification interne auprès du conseil d'administration. C'est une initiative vraiment entreprise par les parties. Ne me demandez pas le résultat. Vous me demandez si on peut le faire. Dans certains cas, on a des résultats; dans d'autres cas, on attend. C'est peut-être le processus.

Il y a l'inverse aussi. J'ai mentionné, ce matin, qu'en vertu de l'article 154 le P.-

D.G. a des pouvoirs qui lui permettent d'entreprendre des choses. Cela peut être important. C'est l'autre volet. Cela nous amène souvent dans des champs d'action qui créent, au niveau du conseil d'administration, un certain nombre de débats. Votre question aussi pose tout l'autre problème de toujours distinguer entre les deux niveaux, le conseil d'administration et le comité de direction de la CSST. Je prends simplement un exemple donné dans un journal d'hier: Expro fait face à la poursuite de la CSST. Expro, qui est un de mes membres, me dit: Tu me poursuis. On ne poursuit pas, mais ce genre de problème est constant dans le champ; on se poursuit soi-même. On vient de prendre une poursuite en Cour supérieure et les métallos viennent de faire la même chose contre la CSST et contre nous. C'est la faiblesse de la loi à laquelle on faisait référence ce matin, ces pouvoirs diffus entre nous, le P.-D.G., ce qu'il a comme pouvoirs en vertu de l'article 154, ce que le ministre a comme pouvoirs. Je pense que vous campez, finalement, tout le fonctionnement du conseil d'administration. Je propose des choses, mais où est-ce que je me ramasse? Je ne le sais pas. Si le P.-D.G. propose quelque chose, il a peut-être plus de chances que moi de se rendre au bout.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour.

M. Sauvé: Les comités ad hoc sont formés des parties.

Le Président (M. Blouin): M. Giasson.

M. Giasson: Concernant ce que le président vient de dire, on a expliqué avant le fonctionnement: afin que les gens du conseil d'administration ne soient pas pris avec des dossiers à étudier très rapidement, on doit former des comités qui se penchent sur les dossiers. Depuis un certain temps, on peut dire qu'il y a peut-être plus de comités qu'il ne devrait y en avoir normalement, mais je pense qu'il est normal aussi que, quand il y a deux parties, on soit capable d'écouter, d'échanger et de se faire comprendre par l'autre partie.

Ces sous-comités sont présidés par les vice-présidents. J'en ai soutenu plusieurs. On a toute la liberté de lancer des projets et de faire des propositions, parce qu'en travaillant à l'intérieur de ces sous-comités il est évident que l'on se retire et on n'est pas spécialiste dans toutes les discussions. Je siège actuellement à un comité où on parle de produits toxiques. Je ne suis pas le spécialiste des produits toxiques, mais il y a des personnes au Québec qui peuvent nous conseiller entre les réunions de sous-comités, ce qui fait qu'on entreprend des propositions ou de la véritable négociation même à l'intérieur des sous-comités. De là, on

revient, évidemment, au conseil d'administration.

Le Président (M. Blouin): Cela va?

M. Pagé: Une dernière question, M. le Président, plus spécifiquement à M. Dufour. Dans votre mémoire, à la page 3 du document, vous dites - on doit constater que vous n'êtes pas les seuls à pouvoir proposer des choses, le ministre aussi - "Sans tenir compte du conseil d'administration, le ministre responsable de la loi et le gouvernement peuvent faire ce qu'ils veulent. Ils ont déjà pris au moins deux décisions dont le conseil d'administration n'a pris connaissance qu'après coup." C'est grave.

M. Dufour: Oui, c'est à l'article 2.25.

M. Pagé: Financement de l'inspection et certificat de retrait. Quels sont vos commentaires sur l'article 2.25? Je m'excuse si la question vous a été posée ce matin.

M. Dufour: Non, non.

M. Pagé: Je n'étais pas ici. Comment réagissez-vous face à ce pouvoir du ministre? J'aimerais aussi entendre M. Laberge sur cette question.

M. Dufour: C'est peut-être cela, le paritarisme. Il faut que quelqu'un décide quelque part. On le vit à l'intérieur de la loi 17. On a mis sur pied un certain nombre d'associations sectorielles; je pense à l'association paritaire sur la santé et la sécurité du travail notamment où on ne s'est pas donné une procédure de règlement des griefs. Il n'y a personne qui règle; alors, on ne règle jamais les problèmes.

Dans le schéma actuel, le législateur a prévu un certain nombre d'interventions: ou une solution par le P.-D.G. ou des solutions par le ministre responsable. Et l'article 225 est très clair: "À défaut par la commission d'adopter un règlement dans un délai que le gouvernement juge raisonnable, ce dernier peut lui-même adopter le règlement." Finalement, c'est se donner les pleins pouvoirs vis-à-vis de ceux d'un conseil d'administration. Je me répète peut-être, mais on peut noter 25 références dans la loi 17 à des pouvoirs ou du ministre ou du Vérificateur général ou du ministre des Affaires sociales etc. On est un peu cerné de tous bords et de tous côtés. Hier soir, on a eu l'exemple d'une proclamation d'un article qui crée des problèmes énormes au niveau du conseil d'administration, entre les parties syndicale et patronale et entre les parties dans le champ; c'est une petite proclamation, un arrêté en conseil quelque part un mercredi soir ou un mercredi midi, je ne sais plus, mais l'effet, dans le champ, est énorme.

M. Pagé: Sur les associations forestières...

M. Dufour: La proclamation d'un article de la loi 17 qui abroge l'article 115 de la Loi sur les accidents du travail et qui ne permet plus à notre commission de financer dans le champ des associations patronales de prévention qui existent depuis 50 ans. Imaginez-vous! Trois associations qui existent depuis 50 ans et qui, du jour au lendemain, par la proclamation d'un article n'existent plus. Comme conseil d'administration, on a un problème là-dessus. Il n'y a peut-être pas d'autre façon de s'en sortir - le ministre doit peut-être le proclamer - sauf qu'on se demande si c'était le bon moment. Pourquoi est-ce qu'on fait cela au mois d'octobre? On est à la merci de ce genre de situation.

Le Président (M. Blouin): Cela va. M. Laberge?

M. Laberge: Non.

Le Président (M. Blouin): Non. M. Giasson.

M. Giasson: Je voudrais dire que c'est une initiative qu'on a prise au niveau du conseil d'administration pour demander au ministre d'abroger cet article. J'en suis personnellement heureux, même s'il y a eu hier une intervention par un groupe qui parlait de montants d'argent qui leur étaient coupés. Il ne faut pas prendre les travailleurs qui sont dans ce secteur...

M. Dufour: Je m'excuse...

Le Président (M. Blouin): Après, M. Dufour.

M. Giasson: Cela existe depuis 50 ans. Je l'ai dit tout à l'heure, dans ma première intervention, il y a des mentalités à changer. Au même moment où on a dit: II faut abroger cet article, il n'y a rien qui empêche les parties - nous sommes prêts syndicalement - de se rencontrer rapidement et de mettre les trois associations sectorielles en vigueur. Il s'agirait simplement de pouvoir se parler un peu et d'avancer encore un peu. On ne peut pas continuer, et ne nous demandez pas de continuer - cela fait quand même cinq ans qu'on parle de cela - à subventionner une partie qui devrait normalement former une association sectorielle. Il n'y en aura jamais.

M. Dufour: Je ne veux pas qu'on fasse un débat sur le fond.

Le Président (M. Blouin): M. Dufour, je

crains bien qu'on ne se retrouve en plein conseil d'administration.

M. Dufour: Non, non.

M. Sauvé: II y a un comité ad hoc le 19 sur le sujet.

M. Giasson: Vous vouliez voir comment cela fonctionnait au CA.

M. Dufour: Au CA, le président me donnerait la parole.

Le Président (M. Blouin): Rapidement, M. Dufour.

M. Dufour: C'est bien sûr que M. Giasson peut faire auprès du ministre toutes les représentations qu'il veut. C'est entendu comme cela. Mais il ne peut quand même pas se prévaloir du fait que c'est le conseil d'administration qui a recommandé au ministre de mettre en vigueur l'article.

M. Giasson: Sur division.

M. Dufour: II faut être précis. On ne reproche pas au ministre de le faire. La loi est là, il est obligé de le faire. Sauf qu'on voudrait être consultés dans le temps et que ça arrive au bon moment. Si c'est en pleine période où on a, justement, les gants de boxe sur ces dossiers, ce n'est pas le temps. Merci.

Le Président (M. Blouin): Cela va, merci.

Je ne voudrais pas qu'on s'étende trop sur cette discussion qui est plutôt interne. Est-ce que cela va, M. le député de Portneuf?

M. Pagé: Pour moi, oui. Sauf, que monsieur veut répondre et veut ajouter quelque chose, je crois.

M. Drouin: M. Pagé, vous avez dit tout à l'heure que vous étiez tout de même surpris de voir l'article 225 et sa portée.

J'aimerais vous inviter à regarder la loi 42 aux articles 335 et 337; elle va encore plus loin que cela. Vous en tiendrez compte, j'espère.

Le Président (M. Blouin): On n'est pas tout à fait dans le sujet, mais enfin! Cela va?

Très bien.

Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Messieurs du conseil d'administration et madame, j'ai trois questions relatives à des politiques générales. J'ai fait bien attention -parce que je sais que demain on rencontre les permanents de la commission - pour appliquer la distinction que faisait M. Dufour dans son mémoire, à savoir de dissocier la gestion courante de la gestion dite générale. Il y a trois volets. Le premier concerne la politique générale à l'égard du retrait préventif. Particulièrement, je veux connaître l'interprétation que l'on fait à la commission de l'expression "conditions de travail" que l'on retrouve à l'article 40. Je pense que c'est là le coeur du litige. D'une part, la commission a décidé - je ne sais pas si cela fait partie de la gestion courante ou des politiques générales, on me le dira; si c'est de la gestion courante, j'y reviendrai demain - de confier l'ensemble de la gestion du dossier "retrait préventif" à la vice-présidence à la réparation. Antérieurement c'était à la fois à la prévention et à la réparation. On retrouve cela uniquement à la réparation maintenant. D'autre part, l'interprétation qui est faite de ce qu'on appelle les conditions...

M. Sauvé: Je m'excuse de vous interrompre. Il y a une question d'indemnisation importante.

Mme Harel: Une question d'indemnisation certainement, mais il y a aussi tous les autres aspects et on va y revenir. Le Protecteur du citoyen donne une interprétation large à la notion de conditions de travail. À la commission, vous avez décidé d'aller en appel devant la Commission des affaires sociales sur cette interprétation des conditions de travail. L'appel a eu lieu, la décision a été rendue. Je veux savoir quelle est l'interprétation que vous allez en faire actuellement, quelle est la réaction que vous allez avoir compte tenu de cette décision de la Commission des affaires sociales.

M. Laberge: Je tiens à vous dire, tout de suite au début, que ce n'est pas une décision du conseil d'administration. Nous n'avons jamais voté pour une chose comme celle-là.

M. Sauvé: Madame, je dois vous dire que je serais bien heureux que vous posiez la question demain. Je dois vous dire que ce n'est pas la commission qui va en appel, c'est la travailleuse. La commission n'est jamais allée en appel devant la Commission des affaires sociales depuis le 1er septembre 1977; elle n'a jamais comparu devant la Commission des affaires sociales. Et j'expliquerai demain également pourquoi.

Mme Harel: Très bien, M. Sauvé. Je vais reposer la question. La travailleuse est allée en appel. Dites-nous quelle est la position de la commission? La commission a-t-elle fait connaître ses positions?

Certainement, puisque la travailleuse est allée en appel d'une décision de la commission, laquelle décision se restreignait, je pense, seulement aux conditions de travail, et non pas à la situation personnelle. À ce moment, compte tenu de la décision de la Commission des affaires sociales... Est-ce de la gestion courante ou si cela concerne le conseil d'administration?

M. Sauvé: C'est cela, c'est de la gestion courante. Demain, nous allons pouvoir vous expliquer tout cela avec énormément de plaisir. (17 h 15)

Mme Harel: Et le conseil d'administration? La partie syndicale, par exemple, n'est pas concernée dans cela?

M. Laberge: II pourrait peut-être vous donner un bout de réponse, vu qu'on est ici.

Mme Harel: Oui. Cela va.

M. Sauvé: On va être ici demain aussi; alors, vous verrez. C'est parce que je pense à l'autre groupe.

Mme Harel: On y reviendra certainement parce qu'on ne peut pas, je pense - vous allez me comprendre, M. Sauvé - écarter cette question en disant: Nous ne sommes pas allés nous-mêmes en appel. Vous n'y êtes pas allés vous-mêmes, mais vous avez maintenu là une interprétation très restrictive. On y reviendra.

M. Sauvé: Nous sommes très intéressés.

Mme Harel: Sur la question de la transmission de l'information, si j'ai bien compris, il y a une évaluation des primes exigées des employeurs qui est faite à partir de bien des facteurs, mais parmi ceux qui me semblent être retenus, il y a la fréquence et la gravité des accidents. Donc, il y a des statistiques sur la gravité et sur la fréquence des accidents qui vous permettent d'évaluer les taux à exiger des employeurs, qui, évidemment, peuvent aussi être utilisées, j'imagine, pour le système de mérite et de démérite, pour évaluer si une entreprise dépasse ou non la gravité des accidents du groupe auquel elle appartient. C'est bien le cas? Donc, vous avez des statistiques, pour chacune des entreprises, sur la fréquence et la gravité des accidents. C'est bien cela? Qu'est-ce qui justifie que ces informations, ces statistiques ne soient pas transmises à la partie syndicale?

M. Sauvé: Je pense, madame, que c'est un vieux débat qui a été soulevé dans les premières réunions du conseil d'administration où l'une des parties avait, je pense, sans blaguer, demandé tout ce qui était dans l'ordinateur.

En vertu de l'article 174 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, le conseil a essayé de trouver une solution à la confidentialité des données. Je dois vous dire que, malheureusement, jusqu'à maintenant, tout le monde s'est renvoyé la balle et personne n'a trouvé la solution. Les parties sont partagées là-dessus. Nous sommes bien conscients, d'un côté, que toutes les données d'une entreprise ne doivent pas être données à tout le monde. Cependant, d'une façon pratique, vous savez que, s'il y une association sectorielle, forcément, les gens auront les données. Je pense qu'on se cache présentement un peu la tête dans le sable, mais on en viendra à aboutir sur cette question de l'échange des données. Il y a eu d'autres questions qui ont été jugées plus prioritaires. Quand je dis qu'on s'est renvoyé chacun la balle, c'est qu'au début on avait confié à un membre du conseil d'administration la tâche de trouver la solution à cela et, après un certain temps, il nous a dit: Je pense que c'est extrêmement difficile de trouver la solution, je retournerais la balle à la permanence. La permanence a regardé cela avec les textes de loi, etc., et elle n'a pas trouvé de solution pratique. Cela semble facile de dire cela, mais comment trouver la solution? On pense que cela prendra encore un certain temps avant de la trouver.

Mme Harel: Mais ces donnnées étaient disponibles antérieurement.

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour: Oui, mais j'aimerais quand même, parce que j'ai l'impression que le président oublie un élément d'information, vous référer en fait à l'article 174: "La commission assure le caractère confidentiel des renseignements et informations qu'elle obtient". La gravité et la fréquence auxquelles vous vous référez sont des documents confidentiels. Ils étaient antérieurement donnés à un certain nombre d'associations patronales, notamment dans le domaine dont on parlait plus tôt pour fins de prévention. C'est cela qui a été contesté. Mais les données, au lieu d'être transmises aux syndicats, ont été transmises aux membres du conseil d'administration. Alors, si les gars du conseil l'ont, il me semble que cela devrait se transmettre assez facilement.

Mme Harel: Les données par entreprise sont actuellement, en fait...

M. Dufour: Non, non, ce qui se donnait avant à la partie patronale se donne maintenant à la partie syndicale sauf que, au lieu d'être transmis directement, parce que la loi ne le permet pas, aux syndicats, c'est

donné aux administrateurs qui, eux, ont la possibilité de l'avoir.

M. Sauvé: On les donnait par secteur et on continue à les donner par secteur, mais pas par entreprise.

Mme Harel: Alors, il n'y a pas de profil d'une entreprise. Dans une entreprise plus mécréante qu'une autre, on a le cas par cas, mais on n'a pas le profil. D'autre part, peut-être qu'on reviendra sur la gestion, cela doit être de la gestion courante, la transmission aussi des décisions des inspecteurs puisque, dans les cas de refus, un inspecteur qui est appelé émet une décision et, que je sache, l'ensemble des décisions sont, cas par cas, remises aux travailleurs concernés, mais, là encore, il n'y a pas de possibilité de faire un profil dans une année d'une entreprise sur ces questions-là. Est-ce bien de la gestion courante, M. Sauvé? Très bien, on y reviendra demain.

La dernière question: En physiothérapie, j'ai vu sur la liste qu'il y a un médecin qui siège...

M. Laberge: Le Dr Vézina.

Mme Harel: Oui, le Dr Michel Vézina. Compte tenu du mémoire qui a été présenté en fin d'après-midi hier par l'Association des physiothérapeutes, je me posais des questions, puisqu'il y a eu un comité ad hoc qui a été mis sur pied. Le vice-président du Conseil du patronat a fait état d'une économie, qu'il chiffrait à 50 000 000 $, sur les soins, les traitements, les indemnisations. C'est bien le cas?

M. Sauvé: M. Dufour a été généreux dans ses économies, mais il y avait des économies substantielles, selon la thèse patronale.

Mme Harel: Je reviens donc à vous, Dr Vézina. Hier, cela nous a semblé, à certains de mes collègues et à moi-même, une espèce de mécanique implacable. Indépendamment du diagnostic du médecin traitant, indépendamment du diagnostic du médecin spécialiste, il est décidé, comme une espèce de mécanique un peu abusive, que tout cela ne commence pas avant le 21e jour. Je voulais vous demander si c'est courant en pratique médicale ou si c'est une pratique exclusive à la CSST. Est-ce que cela veut dire qu'on pourrait croire qu'il y a des traitements de second ordre qui sont donnés à des travailleurs qui n'ont pas accès à des services médicaux auxquels n'importe quel autre citoyen victime de la même blessure aurait accès dans les traitements qu'il recevrait des services de santé au Québec?

M. Vézina (Michel): Je ne veux pas faire la critique de la gestion de la CSST et de ses politiques de réparation. Tout ce que je peux dire, c'est qu'au niveau des services de santé offerts à la population chaque travailleur ou chaque personne, chaque citoyen du Québec a le choix de son médecin. Ce choix du médecin traitant pour réparer une blessure ou un accident du travail est respecté dans le cadre de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, dans le cas de la Loi sur les accidents du travail. Comme toute personne qui se présente chez un médecin, il est l'objet d'un questionnaire et d'un examen. À la suite de cette analyse, de ce processus du diagnostic, le médecin détermine un traitement. Habituellement, il établit le traitement en fonction de son expérience, de sa connaissance du cas, de sa spécialité, et c'est son jugement qui prévaut dans la relation de deux parties: le client qui demande un service et le médecin qui le donne.

Quand on mêle à cela des problèmes de financement, d'indemnisation, de durée d'incapacité, on entre dans le cadre d'une autre loi, dans le cadre de la gestion courante de la réparation, et c'est un autre organisme qui fixe des politiques administratives. Quand on regarde des situations très faciles, où il n'y a pas beaucoup de divergences d'opinions entre le diagnostic de deux médecins, il n'y a pas de problème. Mais, en médecine, surtout en physiothérapie, ou pour les pathologies locomotrices, il y a plusieurs divergences d'opinions tant au niveau du diagnostic que du traitement, de sorte qu'une même personne, se présentant avec la même histoire, le même cas, le même problème chez deux médecins, peut sortir de là avec deux prescriptions différentes, parce que la science médicale est limitée pour certaines pathologies. Quelle est l'opinion qui doit prévaloir? Est-ce celle du médecin que le travailleur a choisi ou celle de l'expert consultant? On entre là dans la gestion de la réparation.

Mais on ne peut en même temps faire le procès de la gestion de la réparation et aussi celui de la pratique médicale. Les médecins prennent des décisions en fonction des limites de leur science et, actuellement, plusieurs pathologies ne sont pas suffisamment connues, même que plusieurs conduites thérapeutiques ne s'appuient pas sur suffisamment de connaissances scientifiques valables pour entraîner l'unanimité de tout le monde.

Mme Harel: M. le Président, si vous me permettez, en fait, vous nous référez à des diagnostics qui peuvent être différents, selon le médecin que le client a choisi ou selon l'expert consultant. Je pense que c'est là certainement un aspect de la question. Par ailleurs, je pense que, dans le cadre de la

question que je vous ai posée, il ne s'agit pas de ce type de problème. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un traitement différent à la suite d'un diagnostic différent, puisqu'il s'agit, si j'ai bien compris d'une décision administrative qui est prise d'une façon mécanique de ne pas accorder de traitement avant 21 jours indépendamment du fait qu'il y ait concordance ou non dans le traitement de l'expert consultant ou du médecin choisi par le client. Est-ce que je me trompe?

M. Vézina: Non. Si on entre dans la situation concrète d'une politique administrative de la CSST...

Mme Harel: On y revient demain.

M. Sauvé: Généralement. Il faut faire attention. Ce n'est pas absolu.

M. Vézina: Mais non! Je ne veux pas revenir, non plus, sur le rapport Duranceau. C'est un comité d'experts qui s'est réuni, qui a émis une opinion qui est actuellement contestée, comme vous l'avez vu hier. Mais quand on n'a pas de recherche ou de connaissance scientifique de ces cliniques, comme on dit dans le jargon randomisées pour appuyer une conduite thérapeutique, la stratégie qu'on utilise en échographie pour la surveillance de la femme enceinte, qu'on utilise pour les écrans cathodiques et qu'on utilise pour les risques ergonomiques, c'est l'approche de consensus d'experts. On réunit des experts et on leur demande quelle est la meilleure des attitudes face à l'absence de données scientifiques sérieuses. C'est ce qui a été fait avec le rapport Duranceau.

M. Laberge: Si vous me le permettez, M. le Président, justement après avoir rencontré toutes ces associations et discuté assez longuement, nous nous sommes assurés que le projet d'énoncé de politique de la permanence là-dessus parlait, par exemple, non seulement des 21 jours, mais il disait ensuite qu'après 20 traitements cela cessait. On y a vu et la politique, maintenant, c'est que cela ne cesse pas au bout de 21 traitements, mais on revoit le dossier, ce qui est très différent.

Mme Harel: Dois-je comprendre, donc, que les 21 jours sont maintenus?

M. Laberge: Les 21 jours... Tous les experts disent que, s'il y a brisure quelque part, pendant les 21 premiers jours, ce sont les tissus qui se réparent et il serait dangereux, même pour le patient, de lui donner des traitements. Évidemment, je ne suis pas un expert là-dedans.

M. Sauvé: Mais, sur ordonnance médicale, cela peut être différent.

M. Laberge: Oui.

M. Sauvé: C'est pour cela que je dis que ce n'est pas absolu. Les gens qui parlent de l'absolutisme n'ont pas bien lu, je pense, la politique.

Mme Harel: La question on y reviendra demain au niveau de la gestion courante - est peut-être de savoir la différence entre la politique et la procédure, parce qu'on en a traité au niveau du retrait préventif. Il y a des procédures. On ne peut pas le nier, puisqu'il y a des personnes en chair et en os qui sont victimes de décisions, de procédures, malgré des politiques qui, elles, sont beaucoup plus générales et beaucoup plus ouvertes.

Le Président (M. Blouin): Cela va? Y a-t-il d'autres députés qui désirent intervenir? M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier les membres de la commission d'être ici pour qu'on puisse discuter, finalement, de l'administration de la CSST. On sait que, comme députés, dans nos bureaux de comté, on est appelé à se mêler, veux, veux pas, à toute la gestion et à l'administration de la CSST, surtout dans un comté comme Beauharnois où il y a énormément d'entreprises. Dieu merci, il y a quand même chez nous un fort taux de personnes syndiquées comparativement au reste du Québec. Ce sont, en général, de grandes entreprises, mais, malheureusement, il y a encore un taux trop élevé de travailleurs non syndiqués. C'est sûr qu'au départ la personne syndiquée a certains avantages par rapport à la personne non syndiquée. Elle a, bien sûr, le bureau de député où elle peut s'adresser pour avoir de l'information, mais elle a aussi son représentant syndical qui peut lui donner un fier coup de main occasionnellement. Donc, si je dis cela, c'est parce que le conseil d'administration de la CSST doit voir à ce qu'au niveau de la gestion courante on puisse accorder le même traitement à la personne syndiquée qu'à la personne non syndiquée. Il faudrait peut-être même, sans être paternaliste, faciliter l'approche ou la paperasse pour la personne non syndiquée, qui en général, est plus dépourvue. Elle n'a que ses propres moyens et on sait que, dans toute cette administration, même si tout le monde est de bonne foi, il y a encore beaucoup de formules et beaucoup de choses à comprendre. Même nous, qui sommes mêlés de près à toute cette question, par moments, on y perd un peu notre latin. Imaginez-vous que la personne qui travaille dans une petite boutique, un atelier de couture ou comme serveur ou serveuse dans un restaurant, qui est victime d'un accident de travail et qui

veut vérifier quels sont ses droits auprès de la CSST, quelles chinoiseries il y a pour elle ou pour lui à apprendre la réglementation et à connaître ses droits. C'est à ce niveau, je pense, qu'il faudrait que le conseil d'administration... (17 h 30)

C'est difficile de séparer ou de tirer une ligne entre les questions qu'on doit poser aujourd'hui aux membres du conseil d'administration et les questions qu'on aura à poser demain sur la question de la gestion courante. Cela est tellement relié de près. Il y a des zones grises où parfois on se pose à soi-même la question de savoir si c'est aujourd'hui ou demain. Cela a été le cas de ma collègue, la députée de Maisonneuve.

Je voudrais quand même, à la suite des mémoires que j'ai entendus hier, vous poser quelques questions, entre autres sur la publicité. Est-ce que vous avez une politique au conseil d'administration sur la publicité que vous devez faire sur la CSST, soit la publicité ou l'information qui sort dans le grand public? Est-ce que vous avez un budget sur cette question? Semble-t-il que la publicité - je le dis à partir d'un mémoire présenté hier, et vous me direz si les personnes qui ont soulevé cette question avaient tort ou raison - qui a été mise à la portée de l'ensemble des citoyens ne représentait pas tout à fait exactement les services auxquels les personnes pouvaient s'attendre après avoir lu cette publicité? Je dis qu'il est important de ne pas annoncer, de ne pas dire ou de ne pas publier des choses pour susciter des attentes quand, en fin de compte, on ne peut pas bénéficier des attentes contenues dans la publicité qui circule dans la population. C'est ma première question.

M. Sauvé: Oui, il y a un budget important pour la publicité, M. le député.

M. Laberge: Trop petit, comme nous le disons.

M. Sauvé: Oui. Mais il n'y a publication que dans les deux langues, en français et en anglais, pour le moment. Cela répond-il à votre première question? Je pense que les documents qui sont imprimés ne donnent pas de faux espoirs. Ils sont assez vérifiés pour ne pas faire des promesses qui ne peuvent pas être tenues. Il n'y a pas de promesses dans les documents. Vous avez vu, même hier soir, les gens au bas de l'échelle dire que les documents qui étaient faits sur la femme enceinte étaient simples, très clairs, très précis, non légalistes et très agréables. Je pense que c'est une politique interne à la commission de s'assurer de ne jamais promettre des choses que nous ne pouvons pas livrer et on a toujours fait cela depuis que la loi existe.

M. Lavigne: Seulement pour terminer, si vous permettez...

Le Président (M. Blouin): Oui.

M. Lavigne: Ils regrettaient par ailleurs qu'on ait retiré cette publicité.

M. Sauvé: Ce n'est pas retiré, c'est épuisé. C'est en réimpression. C'est ce qui arrive.

M. Lavigne: Cela n'a pas été volontaire, dans le sens de dire qu'on arrête cette publicité.

M. Sauvé: Non, non. Quand c'est trop populaire...

M. Lavigne: Oui, c'est cela.

Mme Harel: Si vous me permettez, M. Sauvé, sur ce sujet, j'aurais une question additionnelle. Cette publicité porte maintenant beaucoup plus sur la réaffectation que sur le retrait. Est-ce exact?

M. Sauvé: On va expliquer tout cela demain, madame.

Mme Harel: Bien.

M. Laberge: Vous allez avoir une grosse journée demain.

Mme Harel: C'est un rendez-vous. Le Président (M. Blouin): M. Bédard.

M. Bédard (René): Je ne vois pas le président, mais c'est mon tour. M. Lavigne, vous semblez insinuer que les seuls en position de faire de l'information auprès des travailleurs sont les syndicats.

M. Lavigne: Je n'ai pas dit cela.

M. Bédard (René): Vous dites cela. Vous dites qu'il y en a qui sont plus heureux parce qu'ils sont syndiqués.

M. Lavigne: Non, je n'ai pas dit qu'ils étaient les seuls. J'ai dit qu'ils étaient privilégiés par rapport à d'autres.

M. Bédard (René): Il y a des employeurs qui font de l'information et qui

font de l'excellente information aussi. Je voulais tout simplement vous dire cela.

M. Lavigne: Merci.

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour: Vous parlez d'un type d'information, d'un type de communication

comme les dépliants pour femmes enceintes. Il va en sortir aussi sur les comités de santé et de sécurité, puisque je viens d'en voir un. C'est un aspect des communications de la CSST. C'est l'aspect qui vous préoccupe et, avec raison. Il nous préoccupe aussi, mais il y a aussi tout l'aspect de l'information auprès des employeurs. Là, je ne suis pas sûr qu'on ait la plus belle des politiques de communication qu'on devrait se donner. Souvent, dans le champ, il y a des politiques qui sont émises, au niveau régional notamment, et qui n'ont pas nécessairement reçu l'autorisation du conseil d'administration. On a eu à vivre ce genre de problème, notamment avec le calcul du revenu net, dans la région de Montréal, dans le domaine de la réparation. Cela a créé d'énormes problèmes dans les entreprises. D'ailleurs, cela se pratique dans le champ d'après une décision régionale sans que le conseil d'administration ait de quelque façon accepté cette politique de communication.

Quant à moi, M. le député, je pense que vous soulevez un problème qui devra être débattu de nouveau au conseil d'administration et non pas purement sous l'angle de l'information aux travailleurs.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. Je pourrais poser une autre question, si vous le permettez. Je voudrais soulever cette question: les directives émises, les grandes orientations prises par votre conseil d'administration par rapport à la gestion courante à partir de la loi. C'est quand même vous autres qui allez dire à la gestion, par exemple... On a parlé du retrait préventif tout à l'heure. Il semblerait que, dans un premier temps - c'est la même loi -on a semblé interpréter la loi d'une façon un peu plus large; dans un deuxième temps, il semblerait qu'on aurait resserré l'interprétation de la loi. Je pense que c'est une directive qui doit venir du conseil d'administration. Ou est-ce que l'administration courante prend à son compte de resserrer ou de desserrer l'administration de la loi?

M. Sauvé: II faut faire attention dans "resserrer". C'est cela qu'on dit qu'on va expliquer demain matin.

M. Laberge: C'est une très bonne question quand même. Cela n'a rien à voir avec le conseil d'administration. C'est la permanence.

M. Sauvé: C'est cela.

M. Dufour: Je pense quand même que vous avez en partie raison. Je vais donner un exemple que soulevait comme dossier Au bas de l'échelle hier, en faisant référence notamment au Conseil du patronat: il y a une lettre qu'on a envoyée sur le retrait préventif de la femme enceinte. Peut-être que c'est à cela aussi que faisait référence Mme Harel. C'est sûr que nous, quand on a su que certains DSC appliquaient ce que le Protecteur du citoyen a donné comme définition de ce que devaient être les conditions ambiantes pour un retrait préventif, ce n'était pas notre compréhension de la loi. Cela ne l'est toujours pas. À ce moment, au niveau des membres du conseil, qu'on apporte cela au conseil et qu'on dise: Cela n'a pas d'allure. Quelle que soit la condition - qui n'a rien à voir avec le travail - on va permettre un retrait préventif payé par le fonds de la CSST: Oui, dans cette situation, en tout cas, nous, on va attirer l'attention de la direction comme membres du conseil d'administration. Dans ce sens, vous avez raison.

M. Sauvé: Et on va vous dire demain, avec chiffres à l'appui, qu'il y a plus de demandes acceptées que dans le passé. Vous allez avoir des surprises, je pense. On va tout vous dire cela demain.

M. Lavigne: D'accord. Je voudrais, en terminant, vous poser une question que je pense très pertinente. M. Laberge a dit, je pense, sans ambiguïté, très clairement, qu'il valait mieux vivre avec la loi 17, à la CSST, que de ne pas l'avoir. J'aimerais savoir si, du côté patronal, M. Dufour, vous êtes d'accord avec cela. Est-ce que la loi 17, en d'autres mots, est un bon outil de travail? Il s'agit de roder le conseil d'administration, la gestion courante de s'habituer à vivre avec le plus harmonieusement possible et aussi d'apprendre, je pense, non pas seulement aux membres de l'exécutif ou de la gestion courante, mais au commun des mortels, à la population en général, qu'elle a des droits et que, pour être indemnisée ou pour avoir accès à cette loi, elle peut le faire avec le moins de paperasse possible et dans la plus grande simplicité. J'aimerais savoir si c'est un bon outil, la loi 17 et si la CSST est aussi un bon outil. Est-ce qu'on devrait mettre la hache là-dedans et penser à une autre formule ou si on n'est pas mieux de garder tout cela et d'essayer de polir un peu l'outil qu'on a entre les mains?

Le Président (M. Blouin): M. Dufour.

M. Dufour! Je voudrais d'abord demander à M. Laberge si vous l'avez bien cité.

M. Laberge: Répondez.

M. Lavigne: Je m'excuse, M. Dufour, si j'ai mal interprété M. Laberge, mais je l'avais interprété comme cela.

M. Laberge: Si je l'avais cru, je serais intervenu. Si je ne suis pas intervenu, c'est parce que je suis d'accord avec ce que vous dites.

Le Président (M. Blouin): Cependant, je note, M. le député de Beauharnois, que votre question à l'égard de la loi 17 peut amener une réaction de la part des membres du conseil d'administration. Redemander aux membres du conseil d'administration d'évaluer la CSST, c'est reprendre tout le débat à zéro.

M. Dufour: C'est refaire le mémoire de ce matin.

Le Président (M. Blouin): Largement.

M. Dufour: Je pense qu'on a encore été très clair, et je vais le dire en deux phrases. On a été très clair au niveau des objectifs, le monde patronal veut réduire les accidents de travail, les maladies professionnelles, sauf que, sur un bon nombre de moyens, on s'interroge. D'ailleurs, la partie syndicale s'interroge sur bon nombre de moyens et on ne s'en cachera pas. Mais ce n'est pas facile à vivre et il y a des secteurs qui ont plus de difficultés que d'autres pour des raisons que vous connaissez et que vous allez apprendre à connaître si vous vous impliquez dans le dossier. Nous, ce qu'on dit souvent, c'est que, dans des comtés comme le vôtre, justement, se véhiculent peut-être plus des préoccupations de travailleurs que des préoccupations d'entreprises. Nous aussi, on a une espèce d'attente de votre part de faire une jonction de ces deux préoccupations, et cela aiderait à faire bien vivre davantage la loi 17.

M. Lavigne: C'est une préoccupation que j'ai à coeur, M. Dufour, de faire en sorte que, d'abord, tout cela soit basé sur le bipartisme. Il y a la partie syndicale et la partie patronale, et je pense que je serais très malvenu. C'est une loi qui est quand même issue de mon parti, de mon gouvernement. J'ai été témoin du débat sur la loi 17 et de la mise en place de la CSST, et je me sentirais très malvenu, comme député, dans mon comté, de ne pas jouer le jeu qu'il faut que je joue, soit de prendre tous les moyens qu'il faut pour rassembler les deux parties et de faire en sorte qu'elles puissent travailler le plus harmonieusement possible. Je pense que cela est mon devoir de le faire.

M. Laberge: Et d'essayer, s'il y a moyen, de bonifier tout cela.

M. Lavigne: Bien sûr!

M. Laberge: Évidemment, bien sûr.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Beauharnois. M. le député de Mille-Îles.

M. Champagne (Mille-Îles): Merci, M. le Président. Deux courtes questions au sujet du fonctionnement de la commission.

Dans votre déclaration d'ouverture, M. Dufour, vous avez dit, à la page 7, que le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail déplorait le fait que les membres du conseil d'administration étaient impliqués dans la réglementation beaucoup plus que dans l'administration. Est-ce inévitable, compte tenu du mandat de la commission, ou s'il faut le déplorer?

M. Dufour: Je ne l'ai pas déploré. J'ai juste dit, en somme, que nous avons été -c'est une constatation - impliqués dans la réglementation beaucoup plus que dans l'administration. Je n'ai pas porté de jugement; j'ai décrit des faits. Et c'est vrai.

M. Champagne (Mille-Îles): C'est vrai, mais vous aimeriez peut-être une amélioration dans le fonctionnement, administrer davantage et moins réglementer.

M. Dufour: Dans la question de l'administration, je pense aussi qu'on a lancé un certain nombre d'éléments-solutions à certains des problèmes tout au cours de la journée. Être impliqué davantage dans l'administration, non. S'il s'agit d'aller décider des cas du bureau de Longueuil, non. Il y a des grandes politiques générales dans lesquelles on veut être impliqué. Je vais vous donner un beau cas: on n'en a pas parlé et ce serait quasiment épouvantable qu'on n'en parle pas. Il vient de se faire, dans le champ, une fusion de l'inspection et de la prévention. Ce n'est pas encore décidé au conseil d'administration, il n'y a pas encore de chose officielle de terminée quant à ce dossier. Pour le P.-D.G., c'est une question d'administration. Sa vision de l'artile 154, c'est de l'administration courante, de la gestion. Pour la partie patronale, qui n'a jamais accepté que l'inspection soit transférée à la CSST, c'est bien évident qu'on ne peut pas être d'accord avec une telle fusion. Cela vous donne un élément de réponse. Être impliqué dans l'administration directe de l'inspection, bien non! Mais dans la structure, dans l'organigramme qui va décider cela, oui! Et cela, c'est de l'administration.

M. Champagne (Mille-Îles): Une dernière question. Dans votre conclusion, vous dites, à la pge 9: "Des amendements nous apparaissent essentiels à certains modes de fonctionnement actuels de la CSST. Nous avons hérité de certaines structures, de

certains modes de fonctionnement qui provoquent de justes récriminations chez les entreprises." Enfin, est-ce que vous pourriez dire quels sont les amendements que vous souhaitez voir se réaliser au comité?

M. Dufour: On les fera surtout à l'occasion de la loi 42, encore là pour donner une chance à l'association des mines et à l'AECQ. Quand on dit qu'on a hérité de strutures, on a hérité de la régionalisation, on ne s'est jamais posé la question à savoir si on était même d'accord avec cela. On a hérité d'un organigramme, d'un certain nombre de vice-présidences. On a hérité de systèmes. Ce sont des choses qu'on devrait, à tout le moins, remettre en cause; mais plus fondamentalement que cela, le rôle du Vérificateur général, les pouvoirs du ministre, l'article 154 en question. Les décisions dans le champ, dont on parlait tantôt: la réparation, la fusion, l'inspection, la prévention, ce sont des modes de fonctionnement que, actuellement, on voudrait débattre de nouveau et remettre en cause.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député. Sur ce, au nom de tous les membres de la commission, je remercie les membres du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail de leur très importante collaboration et de leurs témoignages. (17 h 45)

Nous avons maintenant, vous le réaliserez, un problème technique important. Il est 17 h 45, il y a deux autres organismes dont nous avions prévu l'audition aujourd'hui. Alors, la suggestion qui m'a été faite - s'il y a consentement de tous les membres de cette commission - ce serait que nous poursuivions au-delà de 18 heures, que nous entendions un des deux organismes invités et que nous reportions l'audition du deuxième organisme à demain. Est-ce que cette proposition est agréée par les membres de la commission?

M. Cusano: Seulement une clarification, M. le Président. Oui, on serait d'accord pour entendre un organisme ce soir et l'autre demain, mais on retient l'entente voulant que le conseil de direction de la CSST ait toute une journée devant cette commission.

M. Fréchette: M. le Président, il est bien évident qu'on est dans un cul-de-sac, devant un imbroglio. Par ailleurs, j'ai aussi l'impression très nette qu'on n'a pas perdu notre temps, on a assisté à ciel ouvert à une réunion du conseil d'administration. Je pense que cela a été fort utile pour tout le monde.

Je voudrais, comme première information, suggérer que les membres du conseil d'administration qui le désirent puissent être libérés dès ce soir, c'est-à-dire que la présence de personne ne sera requise à compter de maintenant, dès que les témoignages sont terminés. Par ailleurs, il est également important de souligner que, si des membres du conseil d'administration étaient intéressés à suivre la fin de nos travaux et voulaient, en dernière instance, revenir témoigner, il y a une entente dans ce sens-là pour que cela puisse être fait. Je ne sais pas si c'est suffisamment clair.

M. Laberge: Très clair. Nous y serons.

M. Fréchette: C'était la première annonce du prône.

Quant à l'autre problème devant lequel nous sommes, M. le Président, évidemment, on ne peut pas composer avec le temps, on est rendu dans cette situation. La suggestion que le député de Viau vient de faire m'agréerait quant à moi, c'est-à-dire que, si l'une ou l'autre des deux associations qui étaient sur le rôle pour aujourd'hui voulait se faire entendre ce soir et si elle nous disait que, d'ici à 19 heures, elle a suffisamment de temps pour soumettre son mémoire, nous procéderions à cette audition et remettrions l'autre à demain.

Quant à l'audition de la permanence de la commission, il faudra - je ne sais pas comment on va procéder - nous entendre pour une autre journée d'ici à la fin de la session. On n'a pas beaucoup d'options, sauf qu'on a vécu hier - et je le mets sur la table pour ce que cela vaut, vous en ferez ce que vous voudrez - une expérience concluante, intéressante, alors que deux organismes qui soumettaient des mémoires ont accepté de s'asseoir à la même table et de partager le temps. Cela nous a permis d'entendre deux mémoires à la fois.

Je vous réitère que cela n'est qu'une suggestion, on en fera ce qu'on voudra. Si elle est refusée, bien sûr, il va nous falloir encore une fois, comme je le disais il y a quelques instants, composer avec le temps. Si, par ailleurs, elle était acceptée, nous pourrions ce soir compléter l'agenda qui était prévu et libérer tout le monde demain soir. Cela, M. le Président, je le mets sur la table à titre de suggestion.

Le Président (M. Blouin): Est-ce que cette suggestion, si elle était acceptée, pourrait convenir aux membres de la commission?

M. Cusano: Oui.

Le Président (M. Blouin): Alors, nous allons suspendre une minute ou deux, en demandant aux représentants de l'Association des entrepreneurs en construction et de l'Association des mines de métaux du Québec de venir en avant pour que nous puissions

discuter de ces possibilités, s'il vous plaît. (Suspension de la séance à 17 h 49)

(Reprise de la séance à 17 h 56)

Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Après avoir discuté avec les organismes concernés, il a été entendu que nous allions écouter et ensuite procéder aux échanges avec ces deux organismes au cours de la journée de demain. Au cours d'une date ultérieure, d'ici à la fin de la session, l'administration de la CSST pourra être entendue. Sur ce, nous ajournons nos travaux sine die. Mais, comprenez que cela veut dire, demain, vers 11 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 57)

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