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Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le vendredi 6 avril 1973 - Vol. 13 N° 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Transports


Journal des débats

 

Commission permanente

des transports, des travaux publics

et de l'approvisionnement

Etude des crédits du ministère des Transports

Séance du vendredi 6 avril 1973

(Dix heures cinquante-cinq minutes)

M. GIASSON (président de la commission permanente des transports, des travaux publics et de l'approvisionnement): A l'ordre, messieurs !

Avant d'ouvrir le débat, je voudrais signaler aux membres de la commission que, il s'agit d'une chose que nous avons omise hier, le rapporteur de la commission qui avait été choisi était M. Gallienne, député de Duplessis. Est-ce accepté?

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce débat-table?

LE PRESIDENT (M. Giasson): Toute motion est débattable.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons vous mettre à l'épreuve.

UNE VOIX: C'est une épreuve de force.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est $100,000.

LE PRESIDENT (M. Giasson): On m'informe qu'au moment de l'ajournement, hier soir, le député d'Abitibi-Ouest avait posé une question. Je demande au ministre des Transports s'il est prêt à répondre au député d'Abitibi-Ouest ce matin.

M. AUDET: J'aurais une analyse...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si le député d'Abitibi-Ouest me le permet, je suis bien prêt à laisser passer cette question mais je pense qu'à l'avenir nous devrons nous en tenir aux questions se rapportant directement aux programmes. Sans cela nous allons nous perdre complètement, et étant donné que les heures sont limitées pour discuter des crédits, je pense que nous ne pourrons pas réellement passer à travers.

M. AUDET: Croyez-vous, M. le Président, que ce n'est pas le temps choisi pour poser ma question?

LE PRESIDENT (M. Giasson): Hier soir, nous étions en train de travailler sur le document de la mission économique. Avions-nous terminé?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On avait commencé.

Inventaire et recherche (suite)

Recherches et analyses sur le réseau routier

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, ici, à programme 1, vous avez 1 : Inventaire du réseau routier; 2: Rehcerches et analyses sur le réseau routier. Est-ce le temps de poser des questions sur les recherches et les analyses du ministère sur le réseau routier?

LE PRESIDENT (M. Giasson): Hier soir, on avait abordé l'étude des crédits proprement dits. La période des questions très générales des plus grandes politiques du ministère était complétée. Nous sommes au programme 1, page 21-3. Selon la coutume, il est permis de connaître la politique du contenu du programme 1, soit inventaire et recherche, quitte, après ça, à passer aux éléments proprements dits pour l'adoption.

M. AUDET: M. le Président, je crois que...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Oui, je pense que vous êtes d'accord.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Sur les recherches, j'ai une question à poser au ministre. Est-ce que les recherches et les analyses qu'on fait actuellement déboucheront nécessairement sur la construction de meilleures routes au Québec, surtout les routes régionales?

On sait que les autoroutes sont très bien construites, et résistent longtemps à la circulation lourde. Dans le Nord-Ouest, nous savons que nous avons maintenant de la circulation lourde vu l'aménagement du territoire dans la baie James. Je voyais justement dans un hebdo de ma région, en fin de semaine, que de très fortes pressions sont dirigées vers le gouvernement actuellement en vue de demander la reconstruction de la route du parc de La Vérendrye. Je me demande si réellement on envisage la construction de meilleures routes pour une prolongation de la durée...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Je ne sais pas si je comprends bien les programmes, mais je suis porté à croire — on me corrigera— qu'au programme 1, cela touche surtout les politiques de transport comme telles, beaucoup moins que la question de la recherche qui peut s'établir du côté des réseaux routiers.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un autre programme.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Le programme 3.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Comme votre question touche le réseau routier proprement dit, vous pourrez la poser à un autre programme, soit le programme 3, sauf erreur. Parce qu'ici, nous parlons plutôt de transport dans le contexte de l'ancien ministère des Transports tel qu'on pouvait le concevoir alors.

M. PINARD: Maintenant que la question est posée, il serait peut-être un peu disgracieux de ne pas y répondre avec l'entente, cependant, que nous procéderons par ordre dorénavant. Je suis prêt à répondre immédiatement à la question du député d'Abitibi-Est...

M. AUDET: ... Ouest...

M. PINARD: ... en disant qu'effectivement, au ministère, nous avons fait des recherches et des analyses sur le réseau routier quant à la capacité portante du réseau routier, quant à ses caractéristiques géométriques, topographiques et quant à la capacité aussi d'absorption de la circulation des véhicules ordinaires ou des véhicules lourds. Cet inventaire des caractéristiques du réseau routier sur environ 15,000 milles à l'heure actuelle, nous a permis de déceler quelles sont les anomalies sur le plan de la construction d'abord, sur le plan de la capacité portante des ces routes, de leur géométrie, de leur topographie, des courbes très accentuées, dangereuses et des montées aussi qui devraient être aplanies de façon à accroître la sécurité routière. C'est une recherche et une analyse qui étaient absolument essentielles pour être en mesure aussi de faire la catégorisation du réseau routier par ordre d'importance.

C'est ainsi que nous avons maintenant une catégorie de routes qui est classée 1, 2, 3, 4 ou 5 selon le cas et nous avons également réussi, grâce à ces travaux de recherche et d'inventaire à numéroter d'une façon différente le réseau routier par ordre d'importance et compte tenu de ses caractéristiques et aussi des régions que ce réseau routier dessert.

Les analyses et recherches ont été faites par les services du ministère, mais nous avons dû confier une partie du travail à une société d'ingénierie spécialisée dans ce domaine, la Société Jean-Claude Vezeau et associés qui, à l'aide du "Benkelman test" — une méthode américaine qui nous permet d'analyser la capacité portante des routes — nous a permis, au ministère, de décréter quelles doivent être les routes qui vont être soumises à des restrictions durant les périodes de dégel, par exemple, périodes plus ou moins prolongées, selon la capacité portante plus ou moins grande de la route, selon aussi l'affluence de la circulation et selon le degré plus ou moins grand de la circulation lourde qui se fait sur ce réseau routier.

Je ne suis pas un technicien suffisamment spécialisé pour vous donner tous les éléments de ce système, de cette politique de recherche et d'analyse du réseau routier. Mais je pense qu'essentiellement, globalement, ce sont les grands objectifs qui ont été poursuivis et j'ai dit aussi essentiellement quels ont été les résultats obtenus. Il va falloir poursuivre cette recherche et cette analyse du réseau routier pour être en mesure, comme l'a souligné tantôt le député d'Abitibi-Ouest, de savoir si dans le Nord-Ouest québécois par exemple, le réseau routier qui a été construit est maintenant capable d'absorber toute la circulation actuelle et future et si le réseau routier doit être corrigé pour être en mesure de mieux accepter, mieux tolérer la circulation de plus en plus lourde qui se fera dans ce secteur compte tenu de l'aménagement du territoire de la baie James. Alors, c'est dans cette optique que le ministère de la Voirie et des Transports a travaillé. Je pense que ces recherches nous ont ouvert des horizons nouveaux et nous ont permis de mieux cerner la complexité des problèmes et de mieux préparer la planification dans les domaines de la construction et de l'entretien.

M. AUDET: M. le Président, je note que le ministre a mentionné des catégories de route: 1, 2, 3, 4 et 5. Ce sont probablement les routes que nous avons au Québec actuellement, d'après l'analyse que nous en faisons. Est-ce que le ministère continuera à catégoriser ces routes de la même façon lorsque les décisions seront prises en vue des améliorations possibles? C'est-à-dire, est-ce que vous continuerez à considérer les régions selon l'affluence et toutes les choses que le ministre a mentionnées tout à l'heure, à avoir une catégorie aussi échelonnée que ça pour l'amélioration des routes lorsqu'on aura procédé à une meilleure construction des routes? Est-ce qu'on continuera à catégoriser les routes autant que ça?

M. PINARD: Avec votre permission, M. le Président, je vais demander à un de mes collaborateurs, qui est beaucoup plus spécialisé dans ce domaine, de répondre à la question du député d'Abitibi-Ouest.

Actuellement, le réseau routier est catégorisé suivant la construction de la route et le rôle que l'on entend lui faire jouer. On va reconnaître l'autoroute vis-à-vis de la route essentiellement provinciale, vis-à-vis de la route à fonction régionale et vis-à-vis de la route locale ou à accès à la ville, dégagement de la ville ou accès à la ville. Pour la route elle-même, on cherche justement à faire cette relation très intime qui doit exister — vous l'avez souligné — entre les normes de construction de la route et le rôle qu'on entend lui faire jouer. Cela ne veut pas dire, par exemple, qu'une route locale serait moins bien construite qu'une autoroute. Parce qu'il peut arriver qu'une route locale, en milieu urbain, porte plus de circulation, par heure, qu'une autoroute. C'est cette relation entre les normes de construction et la fonction routière. C'est justement à la suite de la recherche qu'on

est en train de faire par l'identification des différents itinéraires, des différentes fonctions du réseau routier, qu'on va en arriver à catégoriser la route versus les standards minimaux de construction.

M. AUDET: J'apportais cette précision parce que c'est entendu qu'il ne faut pas se rapporter à ce qui a été fait dans le passé, parce qu'il y aura nette amélioration dans la façon de construire les routes.

Mais maintenant, en 1973, on sait qu'en milieu rural ou en milieu urbain, il y a des véhicules lourds qui circulent. Je crois bien que les analystes pourront déceler ces choses et agir en conséquences. Je connais, par exemple, dans mon comté, une route qui a été asphaltée il y a une vingtaine d'années, elle a été refaite six fois, et elle est encore défaite. Je me demande si réellement ces analyses déboucheront sur une idée précise afin que ces constructions tiennent. Faire des routes, même en Abitibi, peut-être, dit-on qu'il y a moins de monde à cet endroit, mais en 1973, il y a autant de circulation lourde qu'en ville.

M. PINARD: Le problème fondamental, quand le réseau routier se met à lâcher, comme on le dit communément, et devient incapable de supporter la charge qui y circule, c'est probablement un problème de "compaction" qui a été mal fait ou qui n'a pas été fait du tout.

M. AUDET : C'est trop en surface.

M. PINARD: ... parce que ce n'était pas dans les normes de construction de l'époque ou parce qu'il y a aussi peut-être un mauvais drainage souterrain latéral et vertical, ou qu'il n'y a pas eu un contrôle sévère de la qualité des agrégats routiers qui ont permis la construction de l'infrastructure. Ce qui fait que le béton bitumineux qui est posé en surface reçoit tous les contrecoups de la vibration de cette route et, à ce moment-là, il fendille. Parfois, l'asphalte...

M. AUDET: Même si on ajoute du goudron par-dessus, c'est en dessous qu'il faudrait la réparer, non par-dessus.

M. PINARD: C'est absolument vrai.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Shefford.

M. RUSSELL : M. le Président, je demande au ministre s'il est conscient, dans ses recherches, que l'Ontario a fait des essais sur l'isolement des routes avec un isolant plastique, je crois, dans la région de Sudbury. S'il est au courant des résultats, est-ce que nous avons fait la même chose, est-ce qu'on a l'intention de faire la même chose?

M. PINARD: Je vais demander à mon colla- borateur qui est spécialisé dans cette matière, de répondre à la question du député de Shefford.

En fait, le ministère a aussi été contacté par ces compagnies qui manufacturent le polystyrène aéré, connu habituellement sous le nom de "styrofoam". Un essai a été fait, ici, à Sainte-Foy, je crois, sous la surveillance des gens de l'université Laval en collaboration avec le service des sols et matériaux du ministère de la Voirie.

Cela a été pour une application dans le milieu urbain et pour une quantité assez restreinte de matériel. On s'est aperçu naturellement qu'il y avait une certaine économie à faire en milieu urbain du moins et on n'a pas réussi, jusqu'à maintenant en tout cas, à faire une expérience valable à grande échelle sur le réseau québécois.

Cependant, dernièrement lors d'un contrat avec des représentants de la Commission des transports du Maine, des agents de cette commission nous ont assurés qu'à la suite d'un essai assez intensif sur la route de Lévis-Jack man, ce que j'appellerais Portland et Old Orchand, une route très fréquentée par les Québécois, à la frontière du Québec, on a utilisé un pouce de "Styrofoam" et cela a permis d'épargner une assez grande quantité d'argent parce que les matériaux granulaires étaient assez rares dans le secteur.

Il semblerait donc que l'économie de l'utilisation du "Styrofoam" proviendrait de l'accessibilité ou de la non-accessibilité de matériel granulaire aux environs du contrat routier. Alors, c'est avec cette approche que l'on va considérer un essai au Québec.

M. RUSSELL: Est-ce que nous avons les résultats obtenus en Ontario? Parce que l'Ontario a fait des essais, il y a déjà cinq ou six ans, je crois. Les essais ont commencé dans la région de — j'avance un nom sous réserve — Sudbury, je crois.

M. PINARD: Je pense que vous avez certainement raison. Certains essais ont été portés à l'attention de notre service des sols et c'est justement ce qui avait provoqué l'intérêt de notre service pour l'essai de Sainte-Foy. Maintenant, je sais qu'à la suite d'une visite de bonne entente que nous avons effectuée au Maine il y a deux semaines, où nous avons eu trois hauts fonctionnaires du Québec en résidence pour quatre jours, il y a eu des échanges d'informations et, en particulier, un échange très intéressant sur cet aspect et sur la construction d'une route qui serait, à notre avis, assez pertinente pour les problèmes routiers québécois parce que c'est aux frontières du Québec.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Au sujet des recherches et analyses, j'ai tout simplement une

question à poser. Est-ce que le ministère a fait des recherches sur l'utilisation comparée de l'asphalte et du béton sur les grandes routes, par exemple? On sait qu'une route en béton coûte plus cher mais on prétend que l'usure est moindre, qu'elle dure plus longtemps. Est-ce qu'il se fait des recherches là-dessus?

M. PINARD: C'est un problème de technique des sols. Cela dépend de la capacité portante du sol dans lequel on fait l'excavation. Si c'est dans un terrain marécageux, on procède par remblai et ce n'est pas nécessaire de mettre un revêtement de béton; on peut le faire en asphalte. Vous connaissez l'expérience bien concluante qui a été faite dans le territoire du comté de Bagot et dans la région de Saint-Hyacinthe aussi.

Vous avez remarqué que, de Québec à Drummondville, jusqu'aux limites du comté de Bagot, vous avez un revêtement de pavage bitumineux et, à partir des limites de Bagot jusque dans la région du Richelieu et jusqu'à Montréal effectivement, vous avez un pavage qui est en béton de ciment. Je vais demander à mon collaborateur immédiat de vous dire pour quelle raison il y a eu deux sortes de pavages qui ont été posés, compte tenu des conditions de sol que nous avons connues au moment de la construction de la route transcanadienne.

Tel que vient de le souligner le ministre, c'était surtout en considération du sous-sol ou de la capacité portante du sous-sol qu'on peut décider si on va utiliser un revêtement supérieur de béton bitumineux ou de béton de ciment. Vous avez dit juste lorsque vous avez dit que l'un est plus coûteux à la capitalisation et peut-être moins dispendieux à l'entretien. Il est certain que, si vous réussissez à construire le revêtement de béton de ciment en longueurs assez raisonnables pour avoir moins de différences de déplacement d'une chaussée à l'autre, vous avez un roulement qui est assuré à ce moment-là. Ce que nous avons remarqué à l'utilisation, par exemple, des crampons durant l'hiver, qui diminue un peu au Québec, c'est qu'il se produisait des ornières plus accentuées dans le béton de ciment à la suite du passage des crampons et l'utilisation des pneus d'hiver au Québec. Il reste aussi que la chaussée de béton est très sensible à la qualité de ce sous-sol ou de la qualité structurale du sous-sol, et que si vous avez à commencer à corriger ces chaussées de béton par la suite, ça devient plus dispendieux qu'une chaussée flexible. Si vous vous attendez à des soulèvements ou à des différences de température dus à la gelée de l'hiver, il vaut mieux aller au revêtement flexible, qui va s'accommoder de certains gonglements assez facilement et reprendre sa place au printemps. Dans le cas de béton de ciment, vous pouvez avoir des phénomènes dits de pompage aux joints des différentes chaussées, et vous avez alors de l'évidement souterrain, de l'infiltration d'eau, des gonflements encore plus considérables à la prochaine gelée et vous avez alors des problèmes, vous avez de l'écaillement et toutes sortes de choses.

M. RUSSELL: On a parlé de crampons, est-ce que le ministre a l'intention de restreindre l'usage des crampons durant les mois d'hiver?

M. PINARD: C'est déjà fait. Le 15 avril est la date fatidique pour l'utilisation des pneus à crampons. Cela signifie que la loi et les règlements obligent les automobilistes à enlever leurs pneus à crampons pour les remplacer par des pneus qui n'en porteront pas ou que ce sera le temps d'utiliser les pneus d'été. L'an prochain, compte tenu de l'expérience que nous aurons vécue, durant une année complète, après l'analyse des résultats, nous verrons si nous devons accorder encore un moratoire ou si nous devons passer carrément à l'abolition pure et simple de l'utilisation des pneus à crampons.

M. RUSSELL: Les provinces canadiennes les ont abolis.

M. PINARD: Je ne déclare pas ce matin que je suis prêt à prendre cette décision mais, compte tenu de l'expérience vécue au Québec, compte tenu des résultats des expériences qui ont été faites dans les autres provinces canadiennes, nous allons chercher à nous entendre et à normaliser nos politiques en cette matière.

Nous avons reçu l'accord des provinces d'Atlantique et des provinces de l'Ouest sur la politique préconisée par le ministère de la Voirie et des Transports du Québec. Seule la province d'Ontario n'a pas voulu se soumettre à cette politique, prétendument pour des motifs différents, pour des conditions de climat ou de circulation différentes de celles qui prévalent dans notre province.

Je ne veux pas prêter d'intention à personne, je ne veux pas non plus qualifier les motifs qui ont poussé le gouvernement d'Ontario à ne pas normaliser ses politiques en fonction des nôtres. Dans un avenir rapproché, nous en arriverons à une politique conjointe et normalisée en cette matière.

M. RUSSELL: Ce qui veut dire que les crampons seront peut-être enlevés complètement en tout temps. On ne pourra pas les utiliser, ils seront prohibés. Il y a une possibilité.

M. PINARD: L'expérience que nous avons vécue au Québec, les statistiques sont très révélatrices, c'est qu'il y a eu une diminution très considérable de la vente des pneus à crampons. La preuve est maintenant faite que l'utilisation du pneu à crampons, dans la majorité des conditions qui nous sont faites, devient un faux facteur de sécurité. C'est beaucoup plus un facteur de sécurité au plan psychologique qu'au plan réel et au plan technique.

Les études du Conseil canadien de la sécurité, les études de laboratoire de nos services de recherche l'indiquent de façon indubitable. Cela devient un problème d'appréciation au plan humain et un problème d'habitude qu'il faut accentuer ou diminuer. C'est là que se situe le problème et c'est pourquoi l'Ontario hésite encore à normaliser ses politiques en fonction des nôtres.

M. RUSSELL: Est-ce que le ministre a pensé à poser à celui qui utilise les crampons l'obligation de porter une enseigne sur son auto avec une vitesse réduite et à indiquer la vitesse maximale à laquelle il pourrait aller? Ne serait-ce pas une façon d'imposer un frein à plusieurs utilisateurs?

M. PINARD: Je vais demander à mon collaborateur qui est un spécialiste en la matière, qui a bien suivi toutes ces recherches et toutes ces discussions faites entre les provinces, de répondre plus précisément à cette question.

Nous avons différentes réglementations qui impliquent l'utilisateur des crampons de par le monde. En fait, en Scandinavie et en Suisse, on va exiger de celui qui veut utiliser des crampons d'en poser sur les quatre roues. En Allemagne, justement, on limite l'utilisateur à une certaine vitesse.

Ici au Québec, jusqu'à maintenant, à partir d'un pourcentage d'utilisateurs de 50 p.c, nous sommes descendus à 25 p.c. peut-être, cet hiver. Il faut dire que les dommages causés à la chaussée, habituellement, sont référés à deux conditions.

C'est à la condition d'un taux d'usure qu'on a pu remarquer et à la condition d'une certaine circulation qu'on peut observer sur des routes. L'Ontario, qui en est venue à la prohibition pure et simple, en est venue à cette conclusion en établissant que l'usure moyenne par 100,000 passages de roue sur un revêtement de l'Ontario équivalait à 2/10 de pouce. Par des expériences faites ici, au Québec, en l'occurrence par des agents de l'Université de Montréal, de la ville de Montréal et de l'Office des autoroutes, on n'a pas corroboré cette usure au Québec. On a trouvé plutôt que l'usure pour nous se situait en moyenne à 1/10 de pouce par 100,000 passages. On avait aussi établi en Ontario que l'usure était tout à fait remarquable lorsqu'on avait des circulations moyennes journalières de 8,000 véhicules et plus. Il est bien entendu qu'on trouve plus de ces tronçons dans le sud de l'Ontario où on a plus d'agglomérations d'importance qu'il s'en trouve au Québec.

C'est dire que dans l'équation que l'on avait faite en Ontario et la somme des dommages projetés sur dix ans — on parlait peut-être de dizaines et de centaines de millions à ce moment — lorsqu'on en fait la correspondance au Québec, on n'arrive pas du tout à la même conclusion. C'est ce qui nous avait porté plutôt à restreindre l'utilisation des crampons à certai- nes périodes de l'hiver, à encourager les gens à ne pas utiliser les crampons en milieu urbain où, à notre avis, ils sont presque inutiles. De ce fait, on a vu les utilisateurs passer de 50 p.c. l'hiver à 25 p.c. et, probablement, que cela continuera à diminuer. Ceux qui utilisent vraiment les crampons au Québec sont peut-être ceux qui, psychologiquement parlant, prétendent en avoir le plus besoin, dans des régions, peut-être, où le degré de jour est moins élevé qu'ailleurs et dans le Nord-Ouest, ou encore, en pays montagneux où les gens prétendent que la charrue ne passe jamais assez de bonne heure, le matin, et où les routes ne sont jamais assez dégagées. Ces gens peuvent continuer à utiliser des crampons au Québec sans causer les dommages que nous avons constatés en milieu urbain, parce qu'il circulent sur des routes où réellement la circulation est raisonnable et où nous pouvons avoir 1,000 véhicules par jour ou moins.

M. AUDET: II y a des endroits au Québec où le ministère de la Voirie utilise le sel pour déglacer les routes en hiver. Dans nos régions, c'est assez froid, la glace dure longtemps. Si on n'utilise pas du sel régulièrement, on a des routes glacées. Je vous le dis, les crampons — peu importent l'analyse que vous pouvez en avoir faite et les résultats que cela peut avoir donné — chez nous, en Abitibi, sont très utilisés et considérés comme une mesure de sécurité pour la circulation.

M. PINARD: C'est-à-dire que notre réglementation permet justement l'utilisation des pneus à crampons dans les régions où les conditions climatiques sont très sévères et où, dans une période prolongée de l'hiver, il n'y a pas de gel et de dégel consécutifs, là où la chaussée reste gelée et glacée. Cela a été une expérience qui a été faite en Scandinavie. Je me souviens qu'il y a un certain nombre d'années, au lieu de déglacer les routes en Scandinavie, dans la partie rurale pour le moins, on faisait le "tapage" de la neige et on glaçait les routes pour ne pas avoir à les entretenir d'une autre façon, pour ne pas avoir à les déglacer avec des sels fondants, mais à ce moment, on permettait l'utilisation des crampons sur les quatre roues et, parfois, les crampons étaient passablement longs de façon qu'ils aient une bonne adhérence sur la chaussée glacée.

Est-ce que cette pratique se fait encore en pays Scandinaves, en Suède notamment? Maintenant, je pense que la population s'est montrée plus exigeante et a demandé, elle aussi le déglaçage des routes, le déneigement des routes. ILs sont alors obligés d'adopter d'autres techniques de déneigement pendant les périodes d'hiver et ils sont obligés, eux aussi, de protéger leur réseau routier de la façon qu'on le fait maintenant en Amérique du Nord et au Canada. Vous voyez que les techniques évoluent selon les conditions du temps et selon aussi les besoins réclamés par la population.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Shefford.

M. RUSSELL: J'aurais une question à la catégorie 6. Je vois que vous avez une augmentation de $26 millions à $29 millions pour la location de locaux, loyers.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si le député de Shefford me le permet, il semble bien que, dans sa question, nous nous en allons dans la ventilation des crédits. Donc, les questions qui devaient se poser sur les politiques générales du programme 1 : Inventaire et recherche seraient closes, seraient complétées? A partir de ce moment-là, je dois appeler les éléments.

M. RUSSELL : Je crois bien que ces éléments font partie quand même des dépenses qui vont se faire dans l'inventaire.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Oui. Vous avez deux éléments. L'élément 1, c'est l'inventaire du réseau routier. Si vous allez dans la verticale, l'inventaire du réseau routier, l'élément no 2 c'est: Recherches et analyses sur le réseau routier. Là encore, il faut que vous le preniez à la verticale dans la ventilation.

M. AUDET: M. le Président, ce que vous voulez dire, c'est que nos premières questions ont rapport à la section horizontale, la donnée no 1, qui est la donnée générale des éléments. Ensuite, on revient aux éléments en détail.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si vous prenez le programme 1, vous vous retrouvez à la page de droite et c'est cette page-là sur laquelle on fera l'adoption des crédits. Vous y avez deux éléments qui sont définis. L'élément 1: Inventaire du réseau routier, et l'élément 2 : Recherches et analyses du réseau routier. Lorsqu'on va vers la ventilation, il faudrait garder le même ordre de procédure. Si nous prenons l'élément 1, vous avez les catégories qui sont: Traitement, communications, services, entretien, loyers, fournitures et autres dépenses, mais c'est toujours à l'intérieur de l'élément 1 que vous posez vos questions. Lorsqu'on passera à l'élément 2, ce sera la colonne verticale 2 et les questions se référant aux catégories devront se poser uniquement sur cette colonne-là, autrement cela va être un "free for all". Nous allons chevaucher d'un élément à l'autre.

M. PINARD : Si vous regardez les chiffres qui apparaissent à la page de gauche, la page 21-2, à la catégorie 6: Loyers, il n'y a pas d'augmentation sensible, comme le prétend le député de Shefford.

M. RUSSELL: Les chiffres semblent démontrer ici qu'il y a $26,700 en 72/73; c'est $29,900 en 73/74.

M. PINARD: Des millions. C'est $26 millions.

M. RUSSELL: Non. Ce sont des milliers de dollars.

M. PINARD: $26,000 par rapport à $29,900.

M. RUSSELL: Pour une augmentation de $3,000. Pourquoi? Est-ce que c'est de l'espace additionnel?

M. PINARD: C'est-à-dire de la location de machinerie.

M. RUSSELL: Ce n'est pas de la location de locaux.

M. PINARD: Partout où c'est marqué "loyers", il faut faire attention, chaque année cela revient, partout où on verra "loyers", c'est le loyer d'outillage, de la location et ces choses-là. Les loyers en fait sont payés par le ministère des Travaux publics.

M. RUSSELL: Ils sont quand même impliqués au ministère, non?

M. PINARD: Non. Cela va revenir régulièrement, d'ailleurs.

M. RUSSELL: Alors, il n'y a plus d'imputation. M. le Président, à la catégorie 7, on parle de fournitures. Est-ce qu'il s'agit de fournitures pour l'équipement, d'essence pour l'équipement ou d'ameublement pour des bureaux? Encore là, l'ameublement est-il fait par le ministère des Tavaux publics et imputé au ministère des Travaux publics?

M. PINARD: Non. C'est payé par le ministère des Travaux publics.

M. RUSSELL: Pas d'imputation au ministère des Transports? Donc, il s'agirait simplement, si je comprends bien, d'essence ou autres choses?

M. PINARD : II peut y avoir aussi des machines à écrire, de ces choses-là.

A la question précise du député de Shefford quant à la catégorie 7, fournitures, je demande à mon collaborateur de donner la réponse exacte pour justifier la réponse.

Nous pouvons constater une diminution au niveau de la catégorie $160,900 en 72/73 à $80,200 en 73/74. Durant l'année 72/73 il a été acheté des habits pour les hommes qui oeuvrent sur les routes pour les enquêtes d'origine, de destination et cette dépense n'a pas à être répétée.

Il en est de même au niveau d'articles de premiers soins et d'imprimés, de livres, de fournitures de bureau.

M. RUSSELL: Est-ce qu'il y a eu des crédits périmés à cette catégorie?

M. PINARD: Je crois qu'on avait mentionné hier qu'il y avait $60,000 de crédits périmés au niveau du programme 1.

M. RUSSELL: Maintenant je remarque "autres dépenses". L'an dernier, il y avait un crédit de $700 et cette année, vous demandez $61,000. Vous ne trouvez pas que c'est exagéré?

M. PINARD: Devant la diminution de la catégorie 7, entre autres, on a mis une réserve à la catégorie 11, principalement à cause du démarrage du service d'études en planification des transports. On a un montant de $50,000 qui n'est affecté à rien, c'est pour parer aux imprévus.

M. RUSSELL: Est-ce qu'on pourrait recommander au ministère des Finances de voir à lui démontrer que c'est du "padding" fait normalement par les ministères pour déjouer, que c'est une façon d'avoir des crédits qu'on peut utiliser pour d'autres fins, sans indiquer précisément pourquoi on les utilise?

M. PINARD: Cela a été fait en accord avec le Conseil du trésor à cause du service d'études de planification des transports qui est une nouvelle orientation du ministère.

M. AUDET: Je remarque, lorsqu'on voit la ventilation, pour 72/73, que, lorsque les élément 1 et 2 sont totalisés en 72/73, on ne peut pas faire la différence avec 1974? En quelles proportions, l'année passée, par exemple, étaient divisés les différents éléments? On ne peut pas faire une comparaison directe?

M. PINARD : C'est la première année que nous avons une nouvelle présentation budgétaire sous forme de budget programmes. Alors, ce sera l'année expérimentale, si on me permet l'expression. Mais l'année prochaine, nous serons en mesure de faire des comparaisons, comme nous pouvions le faire autrefois lors de la présentation budgétaire qui se faisait de façon traditionnelle. Qu'est-ce que vous voulez?. Je ne peux rien changer. C'est un nouveau départ dans la façon de faire la programmation des dépenses gouvernementales et dans la présentation des cahiers budgétaires. Nous devrons quand même vivre avec le système pendant un an et, l'année prochaine, lorsque nous arriverons de nouveau en commission parlementaire des crédits, les membres de la commission pourront faire les comparaisons à l'intérieur du nouveau système de budgétisation.

M. RUSSELL: C'était simplement pour vous faire remarquer que l'augmentation en pourcentage à la catégorie "autres dépenses" est com- plètement exagérée, hors de proportion, inacceptable. Je pense bien qu'on devrait faire rapport au ministre des Finances et indiquer que c'est la façon que prennent les fonctionnaires pour rapiécer leur budget, et cela commence par de petits montants. Vous allez voir tout à l'heure. On vous en montrera d'autres. On fera les pourcentages à la fin de l'étude qui vous démontreront le rapiéçage qui se fait par les fonctionnaires. Je pense bien que le ministre des Transports, qui fait certainement partie du conseil du trésor est conscient de ce malaise qui est créé à 1 intérieur du budget par les fonctionnaires et qu'il verra lui-même à suggérer à son collègue de repenser "autres dépenses".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il a donné des détails?

M. RUSSELL: II n'y a pas de détails, ce sont des imprévus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que mon collègue, le député de Shefford, a parfaitement raison. Un coussin qui passe de 0.7 à 61.2, c'est un drôle de coussin.

M. PINARD : Ce n'est pas dans les millions mais dans les milliers de dollars. Sur un budget de $683 millions, ce n'est pas un coussin scandaleux. Il faut quand même s'entendre. Quand nous offrons de nouveaux services à la population, nous le faisons en partant de prévisions qui sont faites, de prévisions de dépenses, qui ne seront pas nécessairement des prévisions exactes à la fin de l'exercice financier, en ce sens que 100 p.c. des crédits demandés n'auront peut-être pas été dépensés. H peut arriver aussi qu'il y ait un dépassement, si le service a été plus grand que celui prévu par les fonctionnaires. Je pense que, dans les circonstances, il faudrait quand même mettre un minimum de budget pour être en mesure de donner les services que les clients requièrent du ministère.

Je demande à mon collaborateur de donner des explications plus précises, dans la mesure du possible, sur les motifs qui nous ont poussés à demander cette somme de $61,200 à la catégorie II intitulée : Autres dépenses.

Durant l'année 72/73, au début de l'exercice 72/73, à la catégorie "Autres dépenses", il apparaissait $40,000 en début d'exercice. Il y a eu des virements de faits en cours d'exercice qui amènent la comparative 1972/73 à 0.7 et la dépense a été faite à d'autres catégories de dépenses. Cette année, le ministère a le droit d'effectuer le virement entre les catégories de dépenses sans avoir l'autorisation du Conseil du trésor. Il y a seulement les virements entre les supercatégories qui sont les supercatégories de fonctionnement et capital qui devront être autorisées par le Conseil du trésor. Donc, le fait qu'on ait mis 61.2 par rapport à 40 initialement l'an passé...

D'ailleurs, à la catégorie II, on doit payer, selon les catégories, des oeuvres d'art et les pièces de collection, les cours itinérants, les dépenses électorales — cela ne s'applique pas à nous — les repas à temps supplémentaire, c'est une catégorie qui peut servir à un autre ministère que le nôtre, l'intérêt pour paiements en retard et comptes à découvert, c'est le ministère des Finances, l'intérêt sur remboursement de taxes et impôt... enfin, je vous donne toutes les catégories de dépenses qui peuvent servir à des ministères particuliers.

Quant au ministère des Transports, la seule partie qui peut s'appliquer à nous, ce sont des transactions entre les ministères et des indemnités diverses pour le personnel aux études. Donc, pour l'étude de la planification des transports, le programme n'est pas établi d'une façon définitive, mais il faut prévoir un montant pour permettre des frais de scolarité pour les fonctionnaires dans la recherche.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si on tient compte de ce que vous nous avez dit, ce que le ministre nous a dit hier soir, par votre voix, vous avez quand même une augmentation de personnel, vous vous proposeriez aux fins d'utiliser ce coussin de "Autres dépenses" de payer les frais de scolarité, etc., de fonctionnaires que vous avez spécialisés... vous allez retourner aux études. C'est, à mon avis, une façon de procéder qui — on verra l'an prochain ce que cela va donner — permet un jeu d'utilisation des fonds qui laisse très peu de chance au responsable de l'administration, c'est-à-dire au surveillant de l'administration ou au législateur de voir si le ministère utilise à bon escient les crédits que nous entendons lui voter. La différence que signalait tout à l'heure le député de Shefford à la catégorie "Autres dépenses" est quand même énorme. C'est un genre de coussin.

Je ne comprends pas qu'on se donne des coussins aussi importants, parce qu'on va en trouver d'autres, des coussins, dans le budget, il va y en avoir d'autres, et importants. Le nouveau système qui veut qu'on puisse procéder à l'intérieur d'un certain nombre de catégories à des virements sans autorisation du Conseil du trésor rend extrêmement facile la manipulation des fonds à l'intérieur d'une catégorie et le contrôle devient de plus en plus difficile pour les législateurs qui ont à voter ces fonds.

Ce qui nous intéresse, et ce pourquoi nous insistons sur cet aspect de la question, c'est que le gouvernement propose un budget qui est bâti à partir des revenus et d'une estimation des dépenses. Il y a les revenus et ensuite, il y a les emprunts. Ce qui se traduit, en termes de dollars et de cents, par un fardeau fiscal. Si le gouvernement demande plus d'argent qu'il n'en a besoin, ce sont les contribuables qui portent un fardeau qu'ils ne devraient pas porter. Si tel ministère demande plus qu'il n'en a besoin, c'est tel autre ministère qui en est privé. On verra d'ailleurs — le ministre ne sera pas là — quand on va étudier le budget du ministère des Affaires culturelles, que simplement avec les coussins du ministre des Transports on pourra faire fonctionner à peu près un quart du ministère des Affaires culturelles.

M. PINARD: M. le Président, j'aimerais quand même que ...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Remarquez que ce n'est pas une critique que je fais au ministre et ce n'est pas une accusation. C'est simplement un jugement que je porte sur ce nouveau système qui va rendre de plus en plus difficile l'appréciation de la pratique administrative à l'intérieur de tel ou de tel ministère. Le même problème, on va le retrouver dans tous les ministères.

M. PINARD: M. le Président, si on me permet de répondre; on ne peut quand même pas partir d'un cas précis, spécifique pour généraliser, comme le fait le député de Chicoutimi, comme l'a fait tantôt le député de Shefford, une pratique de budgétisation.

Que le montant de $60,000 apparaisse aux députés d'Opposition, membres de la commission parlementaire, comme étant un rapiéçage ou une prévision budgétaire grossièrement exagérée par rapport aux besoins qui sont prévus, c'est un cas que je suis prêt à discuter et nous avons de bonnes explications à donner là-dessus. Mais qu'avec un cas comme celui-là, on prétende, comme vous venez de le faire, comme on vient de le faire, que le ministère de la Voirie aura fait à la fin de l'année des prévisions budgétaires qui dépasseront de beaucoup les besoins réels pour lesquels il faudrait effectivement dépenser les crédits, je ne suis pas prêt à accepter cela tout de suite. Il faudra que l'on en fasse la preuve indubitable et bien circonstanciée tout au long de la discussion des crédits devant cette commission parlementaire. On part d'un fait bien particulier pour en arriver à des généralités. Alors, M. le Président, je ne pense pas que, à l'aide de l'exemple ...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non.

M. PINARD:... qui nous est fourni ce matin, cela permette de — je le dis de façon bien objective à deux députés de l'Opposition — prévoir déjà qu'il y a eu un rapiéçage très considérable dans le budget demandé par le ministère de la Voirie et que cela défavorise les autres ministères qui auraient pu avantageusement se servir des crédits demandés inutilement par le ministère de la Voirie et qui, effectivement, d'après les mêmes députés de l'Opposition, ne seraient pas dépensés. Je ne suis pas prêt à acheter cela ce matin, cette critique, à moins que l'on n'en ait la preuve formelle et que l'on ne soit en mesure de bien l'étayer devant la commission parlementaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, moi, je suis prêt à accepter les propos du ministre mais je suis inquiet depuis hier soir, parce que l'on n'est pas capable de nous dire exactement quels ont été à ce jour les crédits périmés du ministère de la Voirie, ce qui nous permettrait d'apprécier le moelleux du coussin que vous avez.

M. PINARD: On y a répondu hier soir. Les crédits périmés à l'article ...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant. Le coussin que vous vous donnez est drôlement moelleux. Il est épais, moelleux, confortable et il est à mon avis disproportionné. Si on retrouve le même genre de coussin, cela va finir par faire un divan confortable sur lequel le ministre va pouvoir dormir tandis que des ministères qui ont des vocations aussi importantes vont se coucher sur des grabats. Ce matin, je n'attaque pas le ministre mais je lui dis que c'est un système d'administration dont nous verrons l'an prochain exactement où il nous conduit.

M. PINARD: La difficulté d'interprétation provient peut-être du fait qu'il y a eu difficulté pour le Conseil du trésor et pour les fonctionnaires qui sont responsables de la budgétisation du ministère des Transports de placer à certains endroits certaines catégories de dépenses. Cela, je pense que c'est facilement compréhensible lorsque l'on fait un nouveau départ dans une nouvelle technique de présentation budgétaire. Je pense que mon collaborateur spécialement chargé de la confection du budget du ministère des Transports, est en mesure d'expliquer quelle sera la nature des dépenses prévues et quels seront aussi les services qui devraient normalement être dispensés à même le montant de $61,200 demandé à la catégorie 7.

Alors, je demande à mon collaborateur de donner les précisions immédiatement s'il est en mesure de le faire ce matin.

Pour répéter, en 72/73 on avait $40,000 au démarrage et en fin d'exercice on montre $7,000 de crédit à la catégorie 11, aux dépenses et pour un service qui est à l'état de démarrage, il faut absolument mettre un montant non attribué à une catégorie de dépenses pour parer aux éventualités. Si vous allez dans des programmes qui sont bien rodés au niveau du ministère, comme le programme 4, l'entretien des routes, vous constaterez que les autres dépenses on tend même à les annuler.

Au programme 4: Conservation du réseau routier, de $42,900 qu'ils étaient en 72/73 sur un budget de l'ordre de $96 millions, cette année ces crédits sont de $9,000. L'entretien du réseau dure depuis des années à la voirie. Les prévisions sont plus précises au niveau de nos districts; maintenant, au niveau d'un service en voie d'expansion, il faut avoir un montant à prévoir non rattaché à des catégories de dépenses.

M. RUSSELL: M. le Président, je suis bien prêt à me plier aux explications que nous donne le ministre, mais vu l'importance en pourcentage de cette catégorie, étant donné l'utilisation qu'on peut faire de ces fonds, parce qu'on peut même les utiliser pour fins électorales, comme on l'a dit tout à l'heure, je suis obligé, pour ne pas retarder le débat, pour accélérer les travaux, de l'adopter sur division et nous allons procéder à une autre catégorie quant à moi.

M. PINARD: M. le Président, je voudrais que dans le journal des Débats le sourire dont s'est servi le député de Shefford pour faire ses remarques de la fin soit bien inscrit et qualifié. Cela prouve qu'il était plutôt taquin dans ses remarques que sérieux, dans la façon...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas le député de Chicoutimi. Il n'enregistre pas de sourire.

M. PINARD: Je voudrais que le journal des Débats enregistre que le député de Chicoutimi ne sourit pas quand il fait ses remarques.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, parce que c'est sérieux, ce sont les fonds publics.

M. RUSSELL: Je m'oppose aux remarques du ministre, parce que s'il fallait que j'augmente en pourcentage les impôts qu'il paye comme il le fait à cette catégorie, je pense qu'il ne pourrait même pas assumer ses obligations. Je pense que c'est réellement sérieux, grave et important et qu'on doit... De toute façon, je ne veux pas prolonger le débat, je vais simplement l'accepter sur division quant à moi.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Est-ce qu'il y a d'autres questions à la supercatégorie "fonctionnement"?

M. AUDET: A supposer que le ministère de la Voirie se serve de son budget pour se faire une réserve pour fins électorales, il y aurait... Le ministre disait justement hier que lorsque les ministères se sont présentés chez le ministre des finances pour établir les budgets, vous avez eu à subir certaines diminutions à la première présentation de vos crédits. Dans quelle proportion le ministère des Transports a-t-il eu à accepter des diminutions dans la première présentation de son budget, lors de la rencontre avec les ministres?

M. PINARD: Je tiendrais à le répéter. Si l'on fait la somme des besoins qui nous sont exprimés par les régions et par les comtés et que l'on globalise ces sommes, c'est entendu que ça dépasse de beaucoup la capacité financière du gouvernement du Québec de pouvoir permettre la réalisation de tous les travaux demandés dans un exercice financier donné ou sur une période à court terme. Chaque fois que cela nous est demandé par le ministre des Finances, nous lui

transmettons tous les programmes de construction routière, de reconstruction et les programmes d'entretien selon les besoins réels qui nous sont exprimés et selon l'analyse assez scientifique des besoins qui sont faits. Cela ne signifie pas que nous avons l'impression ou la certitude que le ministre des Finances va nous accorder du premier jet tous les crédits que nous lui demandons. Il faut faire des coupures et une période de négociation est entreprise au niveau des régions et au niveau des comtés, et une planification plus serrée des priorités est faite. Tout le monde est donc obligé de vivre à l'intérieur d'une enveloppe globale qui, finalement, nous est accordée par le ministère des Finances. C'est notre responsabilité à nous, par la suite, de redistribuer ces crédits disponibles en faveur des régions, compte tenu des priorités qui ont été placées dans le programme au niveau de la construction, de la reconstruction et de l'entretien. Je pense qu'on a expliqué tantôt de façon quand même assez scientifique comment on procède à cette planification.

Cela m'apparait plus technique qu'autrefois, mais c'est peut-être la meilleure façon d'arriver à une meilleure redistribution des dépenses budgétaires au niveau des régions plutôt que ça se fasse un peu comme ça se faisait autrefois, au gré des caprices des administrateurs, selon leur influence, selon leur façon plus ou moins habile de convaincre les autorités en place qu'il fallait dépenser tant d'argent à tel endroit pour telle fin alors que, bien des fois, ce n'étaient pas du tout les dépenses qui auraient dû être faites.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je voudrais simplement avertir le ministre que, si une partie de cet argent va à la caisse électorale, le ministre sera obligé de souscrire à la caisse électorale du Ralliement créditiste ou de vous expliquer devant le chef du Ralliement créditiste.

M. AUDET: Au moins, nous ne nous cachons pas.

M. PINARD: J'ai bien compris, M. le Président, que le député de Sainte-Marie faisait également une farce sur les problèmes de la caisse électorale et qu'il n'entend pas demander de souscription au ministère des Transports pour son propre parti.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Enregistrons un sourire général.

M. PINARD: De toute façon, ce serait...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voulez-vous prendre une photo pour le journal des Débats?

M. PINARD: Ce serait un refus immédiat de la part du ministre. Vous pouvez peut-être en demander une de façon personnelle, mais...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous devrez vous expliquer devant votre chef.

LE PRESIDENT (M. Giasson): L'élément 1 serait adopté?

M. RUSSELL: II reste la catégorie 8: Equipement. Il y a une augmentation assez marquée. Je voudrais savoir si le ministre peut nous expliquer l'utilisation de ces crédits qu'il demande? Est-ce pour l'achat d'automobiles ou...

M. PINARD: C'est pour l'achat d'équipement scientifique pour le service des sols et matériaux, $100,000, pour le service de circulation, pour la photo inventaire, $155,000 et le service de la géographie, $31,000, au niveau de machines à dessiner les cartes, ce qui forme les $286,000.

Services aux usagers Information contrôle et sécurité

LE PRESIDENT (M. Giasson): Adopté. Les éléments 1 et 2 du programme 1 sont adoptés. Programme 2, élément 1: Information, contrôle et sécurité, supercatégorie fonctionnement, catégories 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 11.

M. RUSSELL: Si je comprends bien, M. le Président, vous avez surtout ici du transport routier. Il s'agit de l'émission des permis.

M. PINARD: Au niveau des définitions, le programme vise à fournir au public les services d'information et de sécurité et à émettre et contrôler les permis de conduire, d'immatriculation et de transport. Au niveau de l'information, du contrôle et de la sécurité, il s'agit d'éléments qui regroupent des activités d'information publique, de contrôle de la circulation et de surveillance de l'application des mesures sécuritaires.

Au niveau des informations routières, il s'agit de l'information du public sur l'état des routes en fonction des variations climatologi-ques ou des informations générales sur les transports ainsi que de la production de cartes routières comme service aux usagers du réseau routier.

Au niveau des contrôles routiers proprement dits, il s'agit d'activités qui permettent d'effectuer des contrôles ou une surveillance routière pour faciliter un meilleur écoulement de la circulation ou pour contrôler les charges routières de certains utilisateurs ou différents contrôles de normes ou de réglementation reliés à la circulation routière.

Au niveau de l'élément de la sécurité routière proprement dit, il s'agit d'une activité qui permet aux usagers du réseau routier de bénéfi-

cier de la meilleure sécurité possible dans les circonstances. Et à l'élément 2, intitulé: Emission de permis de conduire et immatriculation des véhicules, il s'agit d'un élément de programme qui vise à délivrer aux usagers du réseau routier les permis de conduire les autorisant à utiliser leur véhicule ainsi que les plaques d'immatriculation les enregistrant au ministère.

L'infrastructure de cet élément de programme n'est pas encore terminée. A l'élément 3 du programme 2 intitulé: Délivrance de permis de transport, il s'agit d'un élément visant à délivrer des permis de transport par l'entremise de la Commission des transports nouvellement formée et mise en place, délivrance de permis de transport à des entreprises diverses suivant une réglementation établie par la Commission des transports.

Alors, les activités de la Commission des transports sont les suivantes: Elaboration des règlements, c'est-à-dire une activité qui visera à mettre en place les réglementations et les tarifs. Au chapitre de l'émission et des renouvellements de permis, il s'agira d'une activité regroupant les opérations d'émission et de renouvellement des permis de transport. Au chapitre des inspections et du contrôle, il s'agira d'une activité concernant l'inspection des véhicules des transporteurs pour vérifier s'ils sont en règle avec les lois et avec les réglementations quant au contrôle des tarifs. Au chapitre de la suspension de permis et du contentieux, il s'agira d'une activité concernant le retrait des permis de transport et tout le contentieux des cas traités devant la cour.

M. RUSSELL: M. le Président, je remarque qu'à l'élément 1: Information, contrôle et sécurité, on demande des crédits additionnels de plus de $1,100,000. J'aimerais savoir du ministre quel est le progrès qui se fait actuellement dans le domaine d'uniformisation de la signalisation et des règlements routiers entre le Québec et les autres provinces canadiennes.

M. PINARD: Au niveau de la signalisation routière proprement dite, des panneaux de signalisation, il y a eu normalisation sur tout le territoire québécois de sorte que nous avons donné des directives aux municipalités, qui les ont acceptées, de normaliser leurs panneaux rout'iers en fonction des caractéristiques de la signalisation routière édictées par le règlement.

Dans certains cas, les municipalités demanderont au ministère des Transports de fournir les panneaux de signalisation requis à l'intérieur des territoires municipaux. Dans d'autres cas, les municipalités voudront les faire fabriquer à leur propre frais selon les normes édictées par le ministère. C'est une procédure qui est actuellement en vigueur et qui donne d'excellents résultats. Je pense que les citoyens du Québec, le public voyageur, les automobilistes, en particulier, auront un meilleur service et comprendront beaucoup plus facilement si la signalisa- tion est normalisée partout dans le territoire québécois.

M. RUSSELL: M. le Président, je...

M. PINARD: Je voudrais ajouter aussi que la signalisation routière devient de plus en plus symbolique, comme on l'a remarqué dans la province de Québec et que le gouvernement du Québec a vraiment innové en la matière. De plus en plus, cet exemple est suivi par les autres provinces du Canada et ce sont ces mêmes formules qui seront utilisées de plus en plus dans les Etats du pays voisin.

M. RUSSELL: Est-ce le Québec qui suit l'exemple des autres provinces ou si ce sont les autres provinces qui suivent l'exemple du Québec?

M. PINARD: C'est ce que je viens de dire. Nous avons fait appel à la technique de signalisation routière en vigueur en Europe, parce que nous croyons que le langage de la signalisation routière en Europe est beaucoup plus facilement compréhensible et lisible que la multiplicité de formules de signalisation routière qui prévalaient jusqu'à il y a quelques années sur le continent nord-américain.

Nous avons, nous, au Québec, décidé de procéder par messages symboliques et, de plus en plus, cette formule de signalisation routière est utilisée non seulement au Québec mais dans les autres provinces du Canada.

M. RUSSELL: II y a une réunion des ministres des Transports des provinces canadiennes à laquelle le ministre a présenté un livre blanc sur l'uniformisation et la réglementation des normes de sécurité routière au Québec. Est-ce qu'il n'y a pas eu à ce moment-là une entente ou une tentative d'entente entre les ministres pour uniformiser, dans tout le Canada, la signalisation et la réglementation en ce qui concerne la circulation routière dans tout le Canada?

M. PINARD : A titre de président de l'Association canadienne des routes et des transports, je me suis fait fort de préconiser la normalisation de la signalisation routière dans tout le pays. De plus en plus, les ministres des Transports des autres provinces ou les ministres de la Voirie, selon l'appellation des ministères, ont consenti à ajuster leur politique de signalisation routière sur cette politique de normalisation qui prévaut en ce moment au Québec. Nous avons eu des conférences au niveau des ministres de toutes les provinces. Il y a eu aussi des séances, des rencontres d'information, au plan technique, des hauts fonctionnaires des différents ministères impliqués dans ce domaine à travers le Canada. Je demanderais à mon collaborateur, qui est spécialisé dans ce domaine, de bien vouloir préciser plus en détail ces politiques dont il a été question et qui ont fait l'objet d'un

protocole d'accord ou d'entente entre les différentes provinces du Canada.

En fait, disons que le Québec, du côté de la signalisation routière, a fait oeuvre de pionnier. Dès 1962 ou 1963, on développait au Québec un système hybride — il faut le dire — de signalisation routière, qui allait à la source européenne et aussi à la source américaine, dans le but d'atteindre le plus haut niveau d'efficacité au point de vue de la signalisation routière. Le Québec, à ce moment-là, a fait cavalier seul. Cela a pris quelques années au Conseil canadien de l'étude des procédés de signalisation ou d'information routière, qu'on appelle Canadian Council Of Uniform Traffic Control Devices, pour se pencher sur la proposition du Québec qui allait à l'encontre de tout le système nord-américain à cette époque. Le Québec l'ayant adoptée, le Canada est venu, à la suite de cinq ou six réunions annuelles à adopter l'essence de tout le système québécois couvrant presque 90 p.c. des principaux panneaux du Québec.

Aujourd'hui, on peut voir que l'évolution du système canadien va dans le sens de la symbolisation et que le fait de l'adoption par le Canada de cette symbolisation a aussi créé un engouement aux Etats-Unis. Déjà, les Etats-Unis sont en train de transformer leur propre système. Il faut dire qu'au niveau nord-américain, le Québec a certainement fait oeuvre de pionnier de ce côté-là. Le point de rencontre interprovincial sur cette question est l'Association des routes et du transport du Canada.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre pourrait nous dire si...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, sur une question de procédure. Je ne veux pas déplaire au député de Chicoutimi, mais est-ce qu'il ne serait pas dans l'ordre que, lorsqu'on discute d'une catégorie, comme cela, de passer aux questions des représentants de chacun des partis au lieu de donner la parole à deux députés du même parti? Nous avons des questions à poser, nous aussi, de temps en temps.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, sur ce rappel aux règlements, je suis bien d'accord avec le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne veux pas faire de "procédurite".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est simplement, sur ce chapitre, pour demander au ministre une question précise, s'il a l'intention de prendre des dispositions afin que les municipalités, à l'intérieur des villes, grandes ou petites, villages, etc., acceptent le système de signalisation par symboles que le ministère est en train d'instaurer partout. Je parle des municipalités, grandes ou petites. Est-ce que le gouvernement a l'intention de leur demander d'accepter le système de signalisation par symboles, ce qui simplifierait énormément le passage de la grande voie à la voie d'entrée dans une ville? Parce que la signalisation n'est pas la même lorsqu'on entre dans un village que celle qu'on trouve quand on est sur la grand-route.

M. PINARD : Nous avons procédé par l'adoption d'un arrêté en conseil qui a permis au 'ministre de la Voirie de l'époque, le ministre des Transports d'aujourd'hui, de procéder par étapes dans l'adoption progressive du nouveau code de signalisation routière de façon symbolique. Alors, nous avons distribué en très grande quantité le manuel de signalisation routière, nouvellement adopté par le Québec.

Je me souviens que le moratoire qui avait été accordé à l'époque par le Conseil exécutif était de cinq ans. Ce moratoire se termine à la fin de 1973 ou au tout début de 1974. Déjà mon collaborateur a indiqué que, dans 90 p.c. des cas, le code de signalisation symbolique était en vigueur et qu'il était, à toutes fins pratiques, adopté dans tout le territoire québécois.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Le député d'Abitibi-Ouest sera suivi du député de Sainte-Marie. Si vous me permettez, j'ai pris bonne note des remarques formulées par le député de Sainte-Marie. J'ai peut-être négligé d'enregistrer les demandes de droit de parole, je serai davantage aux aguets à l'avenir. Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: Au sujet de la signalisation, je crois que le ministère de la Voirie n'a peut-être pas tellement à dire lorsqu'il s'agit de l'intérieur des municipalités et des villes. Mais est-ce que vous prétendez qu'à l'avenir il y aura possibilité de faire des ententes avec certaines villes, peut-être toutes les villes, sur un mode de standardisation de la signalisation des rues? Parce que souvent, nous entrons dans les villes, nous cherchons une rue à Montréal, on arrive au coin de la rue et c'est nullement éclairé, et souvent avec des caractères beaucoup trop petits. D faut pratiquement descendre de l'auto pour aller voir si c'est vraiment cette rue4à.

M. RUSSELL: C'est à votre ville de le faire.

M. AUDET: Cela dépend de la signalisation de la lumière.

LE PRESIDENT (M. Giasson): C'est une question d'acuité de la vision.

M. AUDET: Est-ce que, vis-à-vis du ministère et des municipalités, il y a une entente qui s'en vient à l'effet de faire une telle normalisation?

M. PINARD: Des conférences techniques sont tenues chaque année entre les fonctionnaires du ministère des Transports et les fonc-

tionnaires qui sont à l'emploi des services de signalisation des grandes agglomérations urbaines comme Montréal, Québec et même des autres municipalités. Je ne dis pas que, parce que le système fonctionne à 100 p.c. pour le cas précis que soulève le député d'Abitibi-Ouest, quand il s'agit de procéder à la signalisation pour avoir une bonne nomenclature des rues, etc., c'est une responsabilité beaucoup plus à caractère municipal qu'à caractère provincial. Mais s'il y a quand même un intérêt marqué pour en arriver à une normalisation de la procédure de signalisation même dans ce domaine, je pense qu'il faudrait en arriver éventuellement à détecter une signalisation standardisée comme le souhaite le député d'Abitibi-Ouest et qu'il faudra conclure des protocoles d'entente avec les municipalités. Encore une fois, il faut bien faire la séparation des pouvoirs, c'est-à-dire qu'il y a des responsabilités qui reviennent au pouvoir municipal et on ne peut pas les lui enlever, parce qu'il a quand même un mandat des citoyens au moment des élections municipales. Il ne faut quand même pas que ce soit l'intrusion constante du pouvoir provincial dans le pouvoir municipal. Il faut faire une distinction bien nette entre les champs de juridiction et les responsabilités, de façon à ne pas être accusé non plus d'être constamment tracassier à l'égard des municipalités.

M. AUDET: Quand même, M. le Président, nous devons voir dans cette signalisation à l'intérieur des villes une responsabilité du ministère des Transports. Cela s'attache aux Transports. Je crois que, si le ministère des Transports faisait des lois en conséquece, afin d'inciter les villes à standardiser leur mode de signalisation, je me demande s'il n'y aurait pas de grands avantages de ce côté.

M'. PINARD: Je pense que, pour le service qui doit être rendu à l'automobiliste, quel qu'il soit, il y a peut-être un intérêt plus marqué qu'on ne l'avait cru jusqu'ici pour avoir cette standardisation de l'affichage du nom de la rue dans une municipalité...

M. AUDET: Ce serait rentable.

M. PINARD: ... de façon qu'il n'y ait pas toutes sortes d'affiches ou d'enseignes qui indiquent le nom des rues et qui pourraient être faites de façon bien artisanale dans certains cas, de façon plus industrielle dans d'autres, mais avec des variantes dans la forme de l'affiche de signalisation pour donner le nom de la rue.

M. AUDET: Pour indiquer le nom de la rue. M. PINARD: Je pense que...

M. AUDET: Pour préciser davantage, je dirais que dans ma région, aussi bien que celle du comté de Chicoutimi, il y a des gens qui viennent à Montréal, qui ne connaissent pas toutes les rues, qui ont à s'orienter souvent à des heures tardives pour reconnaître leur adresse. C'est très dificile parfois d'aller où nous voulons et de nous orienter.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils veillent trop tard.

M. PINARD: Je prends bonne note des remarques du député et je demande aux fonctionnaires de bien vouloir étudier les solutions qui peuvent être apportées...

M. AUDET: On part de bonne heure le matin pour arriver tard le soir.

M. PINARD: ...à cette situation.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, à l'élément "contrôle et sécurité", je voudrais poser une question au ministre sur le système de points de démérite. Cela entre dans le cadre de la discussion. Le système, en soi, est louable, mais on prétend que son application est déficiente. D'ailleurs, mon collègue, le député de Maisonneuve avait soulevé un mini débat à l'Assemblée nationale, le ministre s'en souvient. Dans ce débat, le député de Maisonneuve mentionnait le fait qu'il y a des gens qui vont faire 2,000 à 3,000 milles par année et d'autres qui sont continuellement sur la route. Il suggérait au ministre de rajuster le système de points suivant l'usage qu'un automobiliste fait de son véhicule.

Est-ce que le ministre a réfléchi à ces suggestions? Est-ce qu'il a l'intention de réviser les règlements afin de rendre le système plus accessible aux gens qui sont continuellement sur la route, dont c'est le métier, qui font du transport ou du taxi? Ils peuvent faire 50,000 ou 75,000 milles par année, par exemple. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

M. PINARD: J'ai bien étudié les suggestions du député de Maisonneuve et d'autres députés de l'Assemblée nationale. Il m'apparaît bien difficile, au tout départ de l'application d'un nouveau système de démérite, de permettre tout de suite des exceptions, de rendre cela permissif, si le terme est français, à certaines catégories de conducteurs ou d'utilisateurs de la route, en jugeant la façon dont ils devraient se comporter.

C'est d'abord et avant tout un système qui va accroître la sécurité routière.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.

M. PINARD: Cela est fondamental. Nous avons pensé que le seul moyen pour accroître cette sécurité routière était d'implanter au

Québec, comme c'est déjà en vigueur dans la plupart des autres provinces et des Etats voisins, un système de démérite qui va accroître le sens des responsabilités du chauffeur ou du conducteur, pour sa propre sécurité à lui et pour la sécurité des autres. Je ne vois pas la logique de l'argumentation de ceux qui nous suggèrent d'être plus généreux en faveur de certaines catégories de conducteurs qui invoquent le fait qu'ils occupent plus de temps sur la route que d'autres. Il s'agit précisément de ceux qui gagnent leur vie en conduisant des autobus, des camions lourds, des voitures personnelles, il s'agit de voyageurs de commerce. Pourquoi ces gens qui gagnent leur vie avec l'automobile auraient-ils plus de droits que d'autres? Je dis que plus ils vont circuler sur les routes, plus ils devront être respectueux des lois et des règlements. Cela multiplie les risques d'accidents et c'est à eux de bien se discipliner, de bien planifier l'emploi de leur temps, de prendre de temps en temps des périodes de repos pour ne pas encourir des risques inutiles et parfois dangereux, mettant leur propre vie en danger et celle des autres. Je ne vois pas pourquoi nous serions plus généreux en faveur de ceux qui sont les plus susceptibles de causer des accidents.

En réponse à ce genre d'argumentation qui me parait tout à fait illogique, je vais prendre le cas des routiers professionnels, des camionneurs qui sont au service des compagnies de transport, qui sont à toute heure du jour ou de la nuit sur les routes, sur les grandes routes du Québec, qui ont des charges très lourdes à transporter, des cargaisons précieuses de marchandises et qui, eux, ont le meilleur dossier...

UNE VOIX: Vous ne parlez pas de la Brink's?

M. PINARD: Non... sur le plan de la sécurité routière, qui sont les conducteurs et chauffeurs les plus respectueux des lois et des règlements. Et ce sont eux qui, précisément, sont le plus souvent sur la route en toute condition de température. Alors, je ne vois pas pourquoi on demanderait des privilèges spéciaux en faveur de ces gens. Ce ne sont pas ces gens qui nous demandent ces privilèges, dont parle le député de Sainte-Marie. Alors, de qui s'agit-il? Est-ce qu'il s'agit des chauffeurs de taxi? Je dis que les chauffeurs de taxi, parce qu'ils ont à véhiculer des clients ont plus de responsabilités que d'autres; d'abord, parce qu'ils gagnent leur vie avec le taxi, en conduisant un véhicule qui leur appartient ou non, mais ce n'est pas une raison, parce que le client est pressé, pour que le chauffeur de taxi puisse brûler cinq feux rouges dans la même journée pour conduire plus vite son client à destination.

Au contraire, c'est sa responsabilité d'être plus prudent que n'importe quel autre conducteur pour assurer sa propre survivance et pour accroître la sécurité de ses clients. Alors, je ne vois pas la logique de votre intervention du tout. Je suis bien placé pour répondre de cette façon-là, parce que tous les organismes de sécurité routière du Québec et du Canada, y compris le Club automobile de Québec qui vient de faire une prise de position bien précise à ce sujet, demandent au ministre des Transports et au gouvernement du Québec de ne pas accorder de régime d'exepception au moment où on est en train de mettre en application un système de démérite qui n'a pas donné tous les résultats anticipés, parce que la période d'essai n'a pas encore été assez longue. Vous ne pouvez donc pas ménager la chèvre et le chou en même temps, ou faire plaisir à tout le monde. Vous demandez constamment au gouvernement de prendre les mesures appropriées pour faire diminuer le nombre d'accidents mortels sur les routes du Québec. J'ai donné des statistiques hier: 1,735 morts en 1971 sur les routes du Québec; 45,000 accidents qui ont causé des blessures plus ou moins graves à des personnes, à des passagers; $800,000,000 de dommages matériels. Nous avons le taux le plus élevé des primes d'assurance parmi les provinces canadiennes et sur le continent nord-américain fort probablement.

Comment voulez-vous que le gouvernement puisse prendre des mesures appropriées pour accroître la sécurité routière, pour faire baisser les tarifs d'assurance, pour empêcher que des accidents aussi nombreux et souvent mortels ne se produissent sur les routes du Québec dans une année, alors que du même coup, les mêmes députés de l'Assemblée nationale, certains d'entre eux, pas tous, demandent en même temps au gouvernement d'être généreux dans l'application de ses lois ou de ses nouveaux règlements?

Alors, je ne peux pas servir deux maîtres à la fois, et ne me demandez pas de lâcher dans ce domaine immédiatement, tant et aussi longtemps que le système n'aura pas été rodé durant une période suffisamment longue pour nous permettre d'apprécier s'il faut, oui ou non, modifier le système de démérite pour donner des droits peut-être préférentiels à certaines catégories de conducteurs. Pour le moment, je ne suis pas en mesure de répondre affirmativement à la demande du député de Sainte-Marie, pas plus qu'à d'autres qui ont formulé cette demande. Nous verrons, à l'épreuve de l'application du système, ce que nous pourrons faire en temps opportun.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre, lorsque vous dites que l'argumentation ou la demande que l'on fait est illogique, vous ne vous attendez pas que je vous dise que vous avez raison. Ce n'est pas illogique; je ne me souviens pas de l'Etat américain où un tel système existe, mais je pourrais vous le donner, par exemple.

M. PINARD: Pensez-vous que c'est logique?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, en tout cas, cela ne veut pas dire que c'est logique, mais cela veut dire que ce système s'applique quelque part. Cela ne veut pas dire que c'est illogique non plus. Lorsqu'on impose des peines à la suite d'infractions, par exemple, on tient compte du millage. Vous donniez, comme exemple le chauffeur de taxi, il y en a dans la ville de Montréal qui font 75,000 milles et 80,000 milles par année. Ce type-là peut être un très bon chauffeur, même meilleur que celui qui fait 3,000 milles par année et qui n'accumule aucun point de démérite.

Le type qui fait 75,000 milles par année peut accumuler ses douze points de démérite facilement, parce qu'il est constamment dans la circulation, il est souvent aux feux de circulation, ainsi de suite. Lorsque vous en venez à la décision à savoir si vous devez enlever le permis de conduire à quelqu'un qui gagne sa vie avec une automobile, que ce soit un chauffeur de taxi, un camionneur ou une autre personne, je pense qu'il y aurait moyen de graduer davantage les peines sur les différentes infractions, en tenant compte du millage que l'individu doit faire pour gagner sa vie, parce que ce qui va arriver, c'est que, ceux qui vont perdre leur permis de conduire sont justement ceux qui font beaucoup de millage et qui gagnent leur vie avec un véhicule.

M. PINARD: Prenons un cas précis.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne pense pas que ce soit illogique. Mais j'ai bien dit au début que le plan est louable et que nous sommes contents que le ministre l'ait appliqué dans le Québec. Il s'agit peut-être d'essayer de trouver le joint, d'ajuster ça pour que ça rende justice à tout le monde.

M. PINARD: Pour permettre de bien expliquer votre point de vue, nous allons procéder par un exemple. Pourquoi le chauffeur de taxi de la ville de Montréal aurait-il moins de points de démérite s'il brûle un feu rouge que s'il s'agit du député de Maisonneuve qui brûle un feu rouge en conduisant sa propre voiture? Je vous prends au mot. Pourquoi le régime serait-il différent en faveur du chauffeur de taxi par rapport au régime qui vous serait fait à vous, comme député de votre comté, si vous brûlez un feu rouge à une intersection?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, il peut avoir les mêmes points de démérite, excepté que vous pourriez faire un classement, par exemple, que ça lui en prendrait beaucoup plus pour perdre son permis de conduire, étant donné que... vous donniez comme exemple le député de Maisonneuve. Si lui fait, dans la ville de Montréal, 10,000 milles par année tandis que le chauffeur de taxi fait 75,000 milles —le député de Maisonneuve ou de Sainte-Marie — si je perds mon permis de conduire, ça ne m'em- pêche pas de faire mon travail, tandis que le chauffeur de taxi, lui, est sans travail. Il est constamment sur la route. Le député de Sainte-Marie ou de Maisonneuve peut traverser aux feux de circulation dix fois par jour, quand il est à Montréal, tandis que le chauffeur de taxi, pendant douze heures, peut traverser 200 ou 300 feux de circulation, et peut-être plus. Donc, il est plus sujet à faire des oublis, à faire des infractions. Je ne vois rien d'illogique là-dedans. Peut-être que c'est difficile à appliquer de la part du ministre, mais, lorsque vous dites que c'est illogique, je ne suis pas d'accord.

M. PINARD: Je ne comprends pas l'argument du député de Maisonneuve. Si le chauffeur de taxi dont il est question respecte les lois et les règlements de la circulation dans la ville de Montréal et qu'il ne brûle pas de feu rouge, il n'aura pas de système de démérite qui va s'appliquer dans son cas. Il ne perdra pas de points. Au contraire, il va avoir un meilleur dossier.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pourquoi y a-t-il des points de démérite pour quelqu'un qui brûle un feu rouge? C'est parce qu'il y a des gens qui brûlent des feux rouges. Si vous êtes à des feux de circulation 400 fois par jour, vous avez plus de risques de brûler un feu rouge que si vous passez dix fois.

M. BERTHIAUME: Se faire tuer par un chauffeur de taxi ou se faire tuer par un autre conducteur, ça fait aussi mal. C'est ça qui est le principe.

LE PRESIDENT (M. Giasson): L'honorable député de Shefford.

M. RUSSELL: Jusqu'à un certain point, je partage l'opinion du ministre et en même temps celle du député de Sainte-Marie. Je suis satisfait de l'application de la réglementation qu'il a imposée et je partage aussi les représentations du député de Sainte-Marie en ce qui concerne l'application de la réglementation. C'est là qu'est le mal. Je vais vous donner une série d'exemples. Je pourrais commencer par la suspension des permis de conduire pour les accidentés actuellement. C'est une chose que nous avons vécue. La façon de procéder pour l'émission d'un billet de circulation est encore une chose qu'on a vécue à plusieurs reprises et qui, à mon sens, est injuste. Mais lorsqu'on fait des représentations dans ce domaine, pour démontrer que c'est injuste, on fait la sourde oreille et on est obligé d'aller devant la cour et de dépenser des montants assez imposants pour se faire acquitter d'un billet de circulation. On a toléré, au ministère de la Justice, ou chez les responsables de la circulation à la Sûreté du Québec, qu'un policier émette un billet de circulation sans arrêter le chauffeur du camion ou de l'automobile. C'est-à-dire que, à peu près

six ou huit mois après, le camionneur ou le chauffeur de l'automobile recevait un avis disant qu'à un moment donné il avait tourné à droite ou à gauche sans donner un signal. On a fait des représentations. Le chauffeur peut dire : C'est possible, ce n'est pas dans mes habitudes, mais mon passé est là. Je suis un chauffeur assez prudent. Mais aucune représentation n'est acceptable. C'est un billet de $21.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est ça.

M. RUSSELL: Si on va devant la cour, ça coûte $150, $180. J'en ai fait plaider et on les a tous gagnés. Imaginez-vous l'ouvrier ou même le chauffeur de camion qui, plutôt que de payer $21, se place dans une situation où ça va coûter tout près de $200 pour se faire acquitter. Il va être obligé de se faire acquitter parce qu'il va perdre des points. Voyez-vous l'exploitation qu'on va faire de certains individus?

Je vais pousser plus loin mon argument, je vais vous donner un autre exemple. Imaginez-vous un coin comme Saint-Michel-des-Saints; il y a environ quinze camionneurs par jour qui partent sur cette petite route avec des camions-remorques d'en moyenne 75 pieds de longueur sur une route de troisième classe, mais raisonnablement courbée.

Le policier suit en arrière et lorsque le chauffeur, pour faire sa courbe raisonnablement est obligé de sortir, il l'arrête et il lui dit: Mon gars, tu as violé le règlement parce que tu n'as pas le droit de dépasser la ligne blanche comme ça. Le chauffeur va lui dire: Ecoute, mon garçon, essaye donc de faire la courbe sans dépasser la ligne blanche. Ces gens-là les font à la journée.

Il a encore droit à un billet de circulation, mais tout ça relève de quoi? Ce sont des disputes qui ont eu lieu à la taverne le soir lorsque le monsieur n'a pas son kaki sur le dos et qu'il dit au type: Je vais t'avoir. Mais ça se traduit par quoi? Par la vengeance. Ce gars n'a aucune chance et, comme le dit le député de Sainte-Marie, c'est son gagne-pain.

Est-ce que je suis obligé moi...? Le propriétaire de l'industrie, le propriétaire de la compagnie de transport sera-t-il obligé de suivre lui-même ses chauffeurs pour savoir lequel a raison et lequel a tort ou si on va demander aux policiers d'appliquer un peu plus de logique?

Pour répondre à l'argument du ministre qui semble très logique, qu'est-ce qu'on appelle brûler un feu rouge? Quelle interprétation? Je peux dire que celui qui vous parle a eu des billets de circulation parce qu'on a prétendu qu'il avait brûlé un feu rouge. Et j'ai fait comme les autres. Plutôt que de m'obstiner et d'aller en cour, je les ai payés $11.

C'est quoi? Est-ce que c'est le feu jaune? Est-ce que c'est la façon dont je la vois ou si c'est celle dont le policier l'interprète? Quand j'arrive à un feu jaune et que j'ai commencé à traverser, j'ai le droit de traverser. C'est comme ça que je l'interprète. Mais le policier n'a peut-être pas la même interprétation. C'est un argument.

Est-ce qu'on reçoit un billet au bout de trois ou quatre mois? On dit: Vous avez, dans la ville de Montréal, brûlé un feu rouge à telle date, telle heure. Le gars dit: C'est bien vrai que j'étais à Montréal ce jour-là mais, à telle heure, je n'étais pas là. C'est son numéro d'immatriculation et ça coûte $21. C'est un homme d'affaires.

Que fait-il? Dans le passé, il payait les $21. Aujourd'hui, il va être obligé de plaider. Cela va coûter combien? C'est de l'interprétation. Je suis prêt à être très respectueux des lois. Je suis très respectueux du système qui vient d'être imposé ici dans le Québec comme il l'est en Ontario, en Colombie-Britannique et dans d'autres provinces.

Mais je dis qu'on doit être un peu plus scrupuleux à l'application des lois et l'interprétation qu'on fait est de donner, à mon sens, la chance au coureur. C'est ce qu'on ne fait pas actuellement dans bien des cas. Je vais vous donner un autre exemple et je pourrais vous en donner plusieurs.

J'ai l'exemple d'un monsieur qui a laissé son auto à une station d'essence près de l'aéroport durant son absence de deux jours. Lorsqu'il est revenu, il a pris son auto et s'en est allé chez lui. Au bout de trois mois, il reçoit une annulation de son enregistrement parce que son auto a été impliquée dans un accident pour un montant et qu'il n'y a pas eu de preuve comme quoi il était assuré.

Si le ministre savait le chichi que c'a causé pour démontrer aux officiers que ce monsieur avait laissé son auto. On est venu à bout de découvrir que c'était l'ouvrier de la station d'essence qui avait reculé son auto et qui avait frappé un taxi. Pour démontrer ça, ç'a été un tiraillage qui a duré environ trois semaines, un paquet de correspondance et d'interprétations. On est venu à prouver que l'homme était assuré; on avait sa police d'assurance.

La police provinciale voulait avoir son permis de conduire. Il est assuré. Non, j'ai une loi à appliquer. Donnez-moi les enregistrements et qu'il s'arrange, dit-il. J'ai dit: On ne donnera pas l'enregistrement. Je suis intervenu et c'est là que j'ai fait du patronage. J'ai dit: Vous allez...

M. PINARD: Oui?

M. RUSSELL: Oui, du bon patronage. J'ai dit au policier provincial: Premièrement, tu ne peux pas avoir le permis, il ne l'a pas sur lui. Il sera obligé de le trouver, il l'a perdu.

H a perdu son enregistrement. C'est aussi simple que cela. Fais ton rapport comme quoi il l'a perdu. D ne l'a pas sur lui. C'est aussi simple que cela. Et on va plaider après. Cela a tiraillé. Mettez-vous à la place de celui qui n'est pas au fait, qui n'est pas placé pour argumenter, pour faire face à l'agent de la Sûreté du Québec qui lui

réclame son enregistrement. Imaginez-vous quelle opinion cela peut créer, quelles difficultés cela peut créer pour un homme d'affaires ou même un camionneur ou un chauffeur de taxi lorsque réellement on veut exploiter la loi.

Je pense qu'il devrait y avoir un petit peu plus de compréhension de la part de certains officiers qui ont à appliquer certaines lois. On devrait demander aux policiers, s'ils n'aiment pas quelqu'un, que cela soit un propriétaire d'industrie, que cela soit un chauffeur de camion ou une autre personne, d'appliquer leur vengeance quand ils ne portent plus leur uniforme kaki, en civil. Quand ils ont à faire appliquer la loi, qu'ils fassent respecter la loi comme ils le font avec tous les autres. Pas de cas spéciaux. Je connais l'industrie. Le ministre doit être conscient de cela. Il y a seulement un chemin à traverser. On doit transporter des billes de bois d'un côté, d'une cour à bois à la scierie. On ne fait que traverser le chemin qui est dans le fond. Ce n'est même pas un chemin, parce que c'est un chemin qui ne débouche pas. Il débouche dans le bois. Je ne sais pas s'il y a trop d'agents de la Sûreté du Québec qui n'ont rien à faire dans ce coin, mais ils se placent là pour regarder à quelle heure passe le tracteur avec les billes pour savoir s'il a une plaque. Ils se tiennent là. Ce sont des gens qui appliquent la loi raisonnablement, honnêtement, sincèrement. Je ne sais pas s'ils n'aiment pas le chauffeur du monte-charge ou le chauffeur du camion ou le propriétaire ou s'ils ont des ordres de faire cela. Je suis certain qu'ils n'ont pas d'ordre du ministre des Transports. Je suis encore aussi certain qu'ils n'ont pas d'ordre du ministre de la Justice, mais ils ont peut-être une petite vengeance à exercer sur quelqu'un. Je ne le sais pas. Je ne les accuse pas, mais je déplore la situation, dans ce cas comme dans bien d'autres cas. Quant à moi, je fais fi de ces gens et je leur dis: Prenez l'action et on plaidera après comme je l'ai fait dans différents cas dans le domaine des permis de transport auquel nous pourrons revenir tout à l'heure. Je pense bien que ce n'était pas cet élément. Nous pourrons parler de cela à l'élément 2: Emission de permis de conduire, ou je peux donner l'exemple immédiatement au ministre de certaines lois. Nous pourrons peut-être y revenir tout à l'heure.

M. PINARD : Je voudrais être plus clair dans mes affirmations.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, mais j'aimerais...

M. PINARD: J'ai répondu tantôt aux remarques du député de Maisonneuve...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... de Sainte-Marie...

M. PINARD: ... de Sainte-Marie. Il ne peut pas y avoir de...

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous ne pouvez pas nous battre aux prochaines élections. Vous ne savez même pas ce que nous sommes dans le comté.

M. PINARD: C'est que vous reprenez l'argumentation faite par le député de Maisonneuve. C'est pour cela que je me trompe. Je réponds aux remarques du député de Sainte-Marie en lui disant qu'il n'est pas possible dans les circonstances actuelles de modifier le système de démérite pour les raisons que j'ai indiquées tantôt, sauf que le député de Shefford a raison de prétendre que c'est dans l'application qu'il peut y avoir du harcèlement, de la tracasserie administrative, policière et même judiciaire. Il y a quand même des mécanismes de grief et d'appel qui sont prévus au niveau du directeur du bureau des véhicules-automobiles.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela coûte combien pour faire fonctionner tout cela?

M. PINARD : Cela ne coûte rien pour celui qui fait un grief et qui vient prouver au directeur du bureau des véhicules-automobiles qu'il n'est pas impliqué dans la commission de telle infraction qui lui est reprochée, qu'il n'était pas à la conduite du véhicule au moment où l'infraction a été commise. Il y a une foule de façons de faire les griefs et d'obtenir justice. Je sais que cela devient tracassier et difficile pour le citoyen qui est aux prises avec le problème d'avoir à se défendre avantageusement et d'obtenir gain de cause. Mais nous avons vu tout de suite les difficultés que pouvait soulever l'application d'un pareil système. C'est pourquoi nous avons rencontré le ministre de la Justice et lui avons demandé de donner des directives bien précises aux officiers de police pour qu'il ne se fasse pas une application tracassière du nouveau système de démérite actuellement en vigueur. C'est sûr que si le policier qui est assis dans sa voiture et qui décide que le député de Chicoutimi vient de passer à côté à 90 milles à l'heure...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): II n'a pas le temps de me voir.

M. PINARD: ... n'a pas de système de radar, à ce moment, sans vérifier l'identité et sans dire exactement quelle est la nature de l'infraction qu'il entend reprocher au conducteur de l'automobile, cela peut donner lieu à de la tracasserie. Les directives qui ont été données...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous faites des blagues à mon sujet, enregistrez-les...

M. PINARD: ... Quand un officier de police constate une infraction au code de la route et que, cette infraction étant constatée, la personne qui s'en est rendue coupable n'a pas de bonnes explications à donner pour se disculper, à ce moment, le système de démérite s'applique et il y a perte de points.

Les directives sont à l'effet que l'officier de police qui constatera une infraction devra voir le coupable de l'infraction, lui dire en quoi il s'est rendu coupable. Il devra lui dire qu'il est passible d'avoir une perte de points, en vertu du système de démérite ou est susceptible de recevoir un billet d'infraction, parce qu'il a contrevenu aux dispositions du code de la route ou, dans certains cas, aux dispositions du code criminel, de façon que ne soit pas anonyme la distribution des billets d'infraction, sans trop savoir pourquoi et à quel moment cette infraction aurait présumément été commise et dans quelles circonstances, de façon que le régime policier ne devienne pas un régime de tracasseries et de harcèlement, pour différentes raisons qu'expliquait tantôt le député de Shefford.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, il est bien évident qu'en ce qui nous concerne, tout le monde l'a dit, nous sommes d'accord sur le système. Il reste à voir de quelle façon il va être appliqué. Ce que disait tout à l'heure le député de Sainte-Marie est loin d'être illogique. Même si une personne utilise son véhicule constamment dix ou douze heures par jour, il est bien évident que cette personne-là court plus de risques d'encourir des peines, de commettre des infractions qu'une personne qui ne fait que 3,000 ou 4,000 milles par année. Ce que disait le député de Sainte-Marie tout à l'heure, à mon avis, est logique. Je ne demande pas qu'à partir d'aujourd'hui, on rende plus large, plus souple l'application de la nouvelle règle de sécurité. Mais, est-ce que ce n'est pas logique de penser, comme le député de Sainte-Marie l'a dit tout à l'heure, que l'on tienne compte du nombre de milles que, par année, peut faire un conducteur de véhicule qui se sert de ce véhicule pour gagner sa vie, dans l'appréciation des peines, des infractions? Il est évident que, si je fais 80,000 milles par année, même en étant très prudent, il peut m'arriver d'avoir des ennuis. Seulement, si on examine tout le parcours que j'ai fait dans une année, j'ai couru plus de risques que celui qui n'en a fait que 3,000 ou 4,000. Là, il y aurait, à mon avis, une possibilité d'ajuster le système des points, en tenant compte du nombre d'infractions, parce qu'il paraît y avoir un danger de préjudice. M. le Président, je reprends un peu ce que disait mon collègue de Shefford, il y a la question de la surveillance. Je vais donner moi aussi des exemples. Il y a quelque temps, dans le parc des Laurentides — qui est dans un état lamentable, répétons-le — il y a des autos-patrouilles. Moi, je suis dans la voiture d'un monsieur qui me conduit à Chicoutimi. Alors, tout à coup, il y a une voiture, une auto-patrouille qui passe à toute vitesse, comme cela. Alors, évidemment le conducteur voit filer le policier, il dit: II s'en va sur les lieux d'un accident ou quoi que ce soit. Le policier stoppe presque instantanément et puis, il vient coller son billet d'infraction au monsieur qui me conduisait, parce qu'il n'avait pas baissé ses feux tout de suite. Cela, c'est de la tracasserie et de la mauvaise foi. C'est une façon d'irriter les citoyens.

Il y a quelques mois, ici, dans la région de Québec, on m'arrête, parce que, disait-on, j'avais brûlé un feu rouge. Le policier s'amène, il me dit: Monsieur, vous avez brûlé un feu rouge. J'ai dit: Oui, monsieur. Je l'ai brûlé et volontairement. Il dit: Alors, je vais vous dresser une contravention. J'ai dit: Un instant, faites attention, mon petit garçon. Je vais vous donner une petite leçon de logique et de bon sens. Voici, je m'en viens. Il y a un feu qui est jaune et qui va devenir rouge, il y a deux voitures de chaque côté et, je ne sais pas si j'ai le temps de passer sur le feu jaune, parce que, quand nous sommes dans la circulation dense, il est difficile d'apprécier les distances. Je dis: Est-ce qu'il n'est pas plus intelligent de ma part, comme nous étions trois voitures qui ayons passé en même temps sur le feu rouge de toute façon, est-ce qu'il n'est pas plus logique de passer que de stopper, de déporter d'un côté ou de l'autre et de causer un accident?

Bien, il dit: Oui, ç'a du bon sens, mais je suis obligé de vous dresser une contravention. J'ai dit: Faites votre devoir, mon cher ami, et je vais aller devant le juge municipal. Je suis allé devant le juge municipal. Evidemment, il a compris. J'ai dit, en plus de ça: M. le juge, comme vous m'avez disculpé, je vais poser une autre question au policier. Est-ce qu'il peut me dire qui des trois, puisque nous étions trois voitures qui passions en même temps, a brûlé le premier le feu? Et les deux autres, pourquoi ne les avez-vous pas arrêtés? Il a eu cette logique admirable de me dire: Votre voiture étant plus grosse, je l'ai vue mieux.

Il n'avait peut-être pas vu le chauffeur mais il avait vu la voiture. C'est un petit exemple personnel. Mais je suis allé plaider moi-même, ça ne m'a pas dérangé. J'aurais payé le montant de l'infraction de toute façon si j'avais eu à le payer.

J'ai eu un autre cas récemment à Chicoutimi. Un conducteur d'autobus d'écoliers avait fait sa course, il rentrait au garage et, au moment d'entrer au garage, évidemment, il oblique, donne un signal avec la main. Le policier l'arrête: Vos feux, votre clignotant ne fonctionne pas, infraction. Le chauffeur dit : J'arrête justement là parce que je me suis rendu compte que mon clignotant ne fonctionnait pas. Pourquoi ne vous en êtes-vous pas rendu compte avant? Ecoutez, c'est à se demander pourquoi vous n'avez pas fait d'enfant avant telle année, vous? C'est aussi stupide que ça?

M. PINARD: Vous ne pouvez pas répondre à ça, vous?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est pour ça que je vous pose la question, à vous? On ne peut pas faire des reproches à quelqu'un tant qu'il n'a pas commencé.

M. le Président, ce sont des exemples qui

montrent que, sans porter de jugement désagréable sur les responsables du service de sécurité et d'ordre, il faut quand même, à certains moments, que des instructions soient données pour que les policiers manifestent une certaine souplesse quand il s'agit de cas assez patents comme ceux-là.

Mais je reviens à la proposition du député de Sainte-Marie, la question de l'appréciation du nombre d'infractions en fonction des amendes ou des points de démérite, compte tenu du grand nombre de milles qu'un voiturier peut faire dans l'année par rapport à moi qui en fais, je ne sais pas combien. Ce que je fais, ça compte en double parce que le parc est mauvais...

M. PINARD: M. le Président, j'ai toujours admiré la logique du député de Chicoutimi. Par contre, j'aimerais l'admirer jusqu'au bout et le plus longtemps possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je sais que vous m'admirez de toute façon.

M. PINARD : La question que je me pose après l'avoir entendu, à la suite des remarques faites par le député de Sainte-Marie, est celle-ci: Est-ce que la gravité d'une infraction diminue en fonction du nombre?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, ce n'est pas ça que je veux dire. Le ministre a mal compris. Ce n'est pas la question de la gravité de l'infraction, mais il y a le problème de l'appréciation du nombre d'infractions en fonction du nombre de milles que vous parcourez pendant l'année. C'est évident que chaque fois que vous commettez une infraction, que ce soient des infractions mineures, ça comporte toujours le même degré de gravité. Mais comme il y a des peines attachées à ces infractions, je pense qu'en toute logique, c'est un principe d'équité, on pourrait adopter un système de peines qui soit peut-être moins rigoureux dans le cas des voituriers qui accomplissent de longs parcours chaque année qu'à ceux qui circulent beaucoup moins sur les routes.

Tout à l'heure, le député de Laprairie disait une chose qui a du bon sens. Le député de Laprairie disait: Evidemment, se faire tuer par quelqu'un qui fait 3,000 milles ou par quelqu'un qui en fait 100,000 milles, on se fait tuer quand même. Mais il y a quand même des délits mineurs là-dedans.

M. BERTHIAUME : Est-ce que vous me permettrez juste une remarque sur ce sujet?

M. TREBMLAY (Chicoutimi): Si c'est une infraction, évidemment, il y en a une très grande quantité. Brûler un feu, moi, vous savez, je trouve que c'est grave.

M. BERTHIAUME: Je pense qu'il y a une prémisse qui est fausse dans l'argumentation du député de Chicoutimi. Si on me le permet. L'argumentation qui a été présentée par le député de Sainte-Marie aussi bien que par le député de Shefford et celui de Chicoutimi est basée sur la prémisse voulant que le système de démérite et les points qu'on attribue à chacune des infractions ont été basés sur une espèce de moyenne, peut-être 5,000 à 6,000 milles par année alors que ce n'est pas cela! Parce que ce n'est pas lui qui...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non. C'est justement...

M. BERTHIAUME: Laissez-moi terminer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous me le permettez, c'est justement parce qu'il n'y a pas de prémisse dans le système que vous prétendez que celle que j'utilise est fausse.

M. BERTHIAUME : Si vous me laissez terminer, vous allez voir. Je pense bien que, quand on a institué ce système, on s'est bien rendu compte que celui qui causait des problèmes dans notre société au point de vue de sa façon de conduire, ce n'est justement pas celui qui fait 3,000 ou 5,000 ou même 10,000 milles par année. Ce n'est pas lui qui cause le problème. Le système de démérite est institué pour enlever 2 p.c. ou 1 p.c. des chauffeurs —je ne sais pas combien cela peut représenter — qui sont vraiment une menace. Cest basé sur la prémisse qui veut que celui qui nous cause des problèmes est justement celui qui est fréquemment sur la route par rapport à celui qui fait 3,000 ou 7,000 milles.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est là que la prémisse est fausse.

M. BERTHIAUME: Quand on a calibré le nombre de points pour chacune des infractions, cela a été basé justement sur un grand nombre de milles et non un petit nombre de milles. Alors, quand vous faites la comparaison entre celui qui fait 3,000 milles et celui qui en fait 60,000 milles, vous présumez à ce moment-là que celui qui fait 3,000 milles peut être dangereux.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non. Voici, M. le Président, je crois que là, justement, le député s'est fourvoyé. Cette prémisse qu'il prétend sous-tendre le système, elle ne vaut absolument rien.

M. BERTHIAUME: Vous faites une appréciation relative entre deux genres de chauffeurs alors que le système, lui, ne fait pas cette distinction entre deux genres de chauffeurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est justement ce que nous demandons, c'est que le système fasse cette distinction. Un conducteur

de voiture qui ne fait que 3,000 à 4,000 milles par année ou moins, parce qu'il n'a pas l'expérience de la route et qu'il n'a pas les automatismes du conducteur qui circule constamment, est souvent précisément celui qui est le plus dangereux. Moi, j'en ai un exemple tous les dimanches ou les lundis et le samedi et le vendredi dans le parc des Laurentides. Les chauffeurs les plus dangereux sont précisément les promeneurs qui ne savent pas conduire les voitures. Les grands voituriers — évidemment, ces gars-là vont trop vite parfois, il y en a des dangereux là-dedans — de façon générale, utilisent leur véhicule avec beaucoup plus de prudence parce que, justement, ils sont constamment sur la route et savent qu'il faut manifester beaucoup de prudence pour leur propre sécurité.

Alors, si on parle de prémisse, je ne crois pas du tout que l'on soit sur la bonne voie. Le problème est de savoir si le système qui est bon in se peut enfin être assoupli dans le sens que l'indiquait le député de Sainte-Marie, compte tenu du type d'infraction qui est commise et du nombre d'infractions qui sont commises, du nombre de milles que le conducteur parcourt chaque année en fonction, en regard des amendes, en termes de points de démérite, qui peuvent lui être imposées. Cela, il me semble que c'est très simple et que c'est très logique. Cela peut paraître un peu subjectif mais on est dans un domaine d'appréciation quand même morale, là-dedans. C'est de l'équité.

M. PINARD: M. le Président, si vous me le permettez, nous allons nous abstenir, nous les membres de la commission parlementaire en tant que législateurs, de discuter ce problème pour écouter un technicien qui va nous expliquer comment a été élaboré le système de démérite, en vertu de quel système scientifique de pondération ou d'établissement des moyennes. Après cela, nous ferons une discussion objective pour voir si vraiment il y a possibilité dans le temps, après une période de rodage suffisante du système, d'améliorer le système et peut-être de le modifier. Je demanderais donc à mon collaborateur immédiat, technicien, de nous expliquer comment a été établi le système et en vertu de quel critère scientifique.

M. RUSSELL: Avant qu'il commence, j'aimerais qu'il fasse une distinction ou un exposé, qu'il nous démontre si le chauffeur qui perd dix ou douze points dans 100,000 milles n'est pas moins dangereux que celui qui va perdre dix ou douze points dans 3,000 milles.

M. PINARD: Précisément, cette réponse vous sera donnée.

Je pense que le côté que l'on peut discuter, c'est justement l'approche philosophique à un système comme cela. Je pense que la population québécoise des chauffeurs comme tels est peut-être une population particulière dont il faudrait reconnaître les caractéristiques et en connaître les caractéristiques d'avance. Si c'était possible d'avoir identifié les caractéristiques exactes de population québécoise des chauffeurs, on pourrait justement faire des pondérations comme vous le demandez.

Je m'imagine que la population des chauffeurs du Québec est une population normale. C'est une population qui correspond, par exemple, à la courbe de Gauss, une distribution qui se fait par rapport à une moyenne, une distribution qui s'écarte de la moyenne autant du côté inférieur que du côté supérieur.

Ce que nous ne savons pas actuellement, c'est si cette population est à ce point étalée de la moyenne que cette courbe deviendrait quasiment couchée par rapport à l'horizontale ou si cette population ne se retrouve pas très serrée par rapport à une moyenne et, à ce moment-là, la courbe devient très élevée et les écarts par rapport à la moyenne québécoise au point de vue du comportement du chauffeur sont absolument minimes.

Le règlement, naturellement comme toute réglementation qui se veut intelligente dans un cas comme cela, s'adresse à la moyenne parce que c'est dans la moyenne que l'on retrouve le plus grand nombre de candidats qui vont s'incorporer sous la cloche de Gauss ou la courbe. On appréhende des faits actuellement. On dit: II est certain ou presque certain que le type qui conduit rarement sur les routes est dangereux. Oui, il peut l'être. Le type qui conduit de façon régulière sur la route, avec beaucoup de millage, est-il dangereux comme tel? Dans ses actions quotidiennes et journalières, on va dire qu'il est moins dangereux parce que c'est un professionnel de la route et là on dit que c'est probablement la somme ou le cumul de ses gestes à travers l'année qui va faire que ce type va atteindre facilement le plafond.

Il va atteindre le plafond de douze points et il va perdre son permis. Je dis au départ que c'est une situation qu'on peut peut-être appréhender, mais il faudrait peut-être attendre que nous connaissions exactement le résultat d'un tel régime à la suite d'une année ou de quelques mois pour savoir si réellement le type qui est un chauffeur professionnel, qui conduit sur la route... Je comprends qu'il est plus exposé en fonction du nombre de milles, mais si on prend l'autre côté du problème et qu'on s'interroge sur la gravité de chacun des gestes posés, ce n'est pas moins grave parce que c'est fait ou posé par un chauffeur professionnel. Il reste que le type peut tuer quelqu'un à un feu rouge comme l'autre peut en tuer. Les gestes, l'un après l'autre, sont aussi graves l'un que l'autre. Je ne suis pas sûr, moi, que le comportement du chauffeur professionnel, qu'il s'appelle chauffeur de taxi, commis-voyageur, chauffeur de fardier, soit à ce point en écart par rapport à la moyenne sur laquelle est basé le règlement qu'on puisse appréhender d'ores et déjà avant, que cela va se produire. Mais ça peut arriver. On connaîtra

alors mieux les caractéristiques de population des chauffeurs québécois et on pourra peut-être parler d'une autre forme de pondération que la seule forme qui existe actuellement, celle d'avoir basé la réglementation sur la moyenne. Il faut donner le temps au système de se roder et puis voir comment il se comporte.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pense, M. le Président, que les explications que nous donne le spécialiste sont des explications convaincantes. Elles sont très intéressantes et ça nous éclaire sur la nature de la réglementation. Le problème reste quand même là. Il y a une expérience à faire. Moi, j'entends bien qu'on assure le maximum de sécurité à tous ceux qui circulent sur les routes, mais, à l'expérience, on pourra voir, comme vient de le dire le spécialiste, quelle est la psychologie et quel est le comportement des chauffeurs ordinaires par rapport aux voituriers professionnels. Là, peut-être sera-t-il possible de repenser, comme on vient de le dire, un autre système de pondération. Mais on admettra que le problème que nous avons posé est un problème d'importance et qui inquiète les citoyens. Personne n'a refusé la réglementation. Les citoyens eux-mêmes ont accepté cela. Ils en sont heureux. Mais il y a des gens qui s'inquiètent. Je reviens sur ce qu'on a dit antérieusement.

Il faut que cette réglementation qui n'est en fait qu'une chose théorique soit assortie d'un système de contrôle exercé par des gens qui se sentent responsables de la sécurité, mais qui savent aussi se servir, le cas échéant, du jugement dont se sert la personne qui doit juger selon l'équité, selon l'esprit et non pas uniquement selon la lettre.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si vous permettez, il y a déjà un bon moment que le député d'Abitibi-Est m'a donné avis qu'il a une question à poser. Nous allons l'entendre et je vous donnerai la parole immédiatement après.

M. AUDET: Je crois, M. le Président, que l'argumentation du député de Sainte-Marie est logique. D'un autre côté, le système de démérite a été accepté par la majorité de la population, parce qu'on croit réellement qu'il y a quelque chose de bon là-dedans. Mais comme monsieur disait tout à l'heure, il faudra quand même savoir ce que ça va donner au bout.

Même si on dit que les chauffeurs de taxi sont plus susceptibles de commettre des infractions, ils auront aussi l'occasion de s'en sauver plus souvent. Cela ne veut pas dire qu'à chaque infraction qu'ils feront, ils vont se faire prendre. Souvent, on fait une infraction et on ne se fait pas prendre.

Souvent on dit: Ce n'est pas défendu de le faire, mais c'est défendu de se faire prendre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Moi, j'arrête et je dis tout de suite: J'ai commis une infraction.

M. AUDET: Tout de même, je crois que le système...

M. PINARD: La moyenne peut devenir favorable à celui qui va commettre le plus grand nombre d'infractions, compte tenu du nombre de milles qu'il fait dans une année.

M. AUDET: Oui, c'est ça.

M. PINARD: Le système de points dont on parlait tantôt.

M. AUDET: Je crois quand même que le système de points de démérite, comme j'ai dit à l'Assemblée nationale déjà, est un système négatif. Ce serait difficile de le rendre positif. J'ai déjà vécu à Vancouver pendant deux ans et si je vous disais...

M. PINARD: Vous vous êtes rapproché des sources.

M. AUDET: Oui. Si je vous disais...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends pourquoi le gouvernement a été battu.

M. AUDET: Mais ça ne fait pas longtemps. Si je vous disais que, lorsque les piétons arrivent sur le bord d'une rue et font mine de vouloir traverser la chaussée, les automobiles arrêtent et font signe aux piétons de traverser, ce qu'on ne voit pas au Québec. C'est presque généralisé à Vancouver et dans les provinces de l'Ouest.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, M. Audet, vous n'avez pas d'expérience. Ici, dès qu'on voit une personne, si c'est une jolie fille, non seulement on arrête quand il le faut, mais on la suit jusqu'à ce qu'elle arrête.

M. AUDET: Vous allez me dire M. le député de Chicoutimi que si ce n'est pas une belle fille, si c'est un vieillard, par exemple, s'il avance...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si c'est un gars de votre âge, j'avance la même chose.

M. AUDET: Si c'est un type comme vous, qu'on ne voit pas tellement sur la route, c'est très dangereux de s'aventurer trop sur la rue.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne marche pas à pied.

M. AUDET: Un chauffeur m'a dit: Si quelqu'un au Québec n'a pas le temps de traverser quand le feu est vert et n'a pas fini de traverser, j'ai le droit d'aller le chercher. Imaginez-vous que c'est très dangereux! Je crois que si le système de points de démérite était rendu plus positif lorsqu'un chauffeur faisait des actes de civisme à l'ocasion, on appliquerait un système de points de mérite pour regagner, reprendre des points...

M. PINARD: II faudrait lui accorder la Croix de Victoria.

M. AUDET: Si un chauffeur fait un acte de civisme quelconque, on lui remettrait des points. C'est l'argument que je voulais servir. Si au cours de vos études sur le bon fonctionnement ou le mérite de votre système, vous en veniez à désirer de le rendre plus positif, peut-être qu'on pourrait le faire.

M. PINARD: Après une aussi bonne discussion du programme 2, je pense que je pourrais suggérer qu'on en fasse l'adoption immédiatement.

M. RUSSELL: Je serais bien prêt à adopter le programme 2, quitte, s'il y a quelques questions à poser à l'ouverture de la séance mardi, que mon collègue ou les autres puissent poser des questions qui resteraient en suspens, je parle de celui qui me remplacera, parce que je ne serai pas ici.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Je pense que la suggestion du député de Shefford est acceptable étant donné...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Nous continuerons sur...

LE PRESIDENT (M. Giasson): ... à l'intérieur...

M. RUSSELL: ... des questions qui vont quand même être posées.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les autres seront moins longues. Nous ajournons?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous ajournons.

LE PRESIDENT (M. Giasson): La commission ajourne ses travaux à mardi, 10 heures.

(Fin de la séance à 12 h 58)

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