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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le jeudi 13 juin 1985 - Vol. 28 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 20 - Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens


Journal des débats

 

(Quinze heures six minutes)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaîti La sous-commission des institutions se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui. M. Bédard (Chicoutimi) est remplacé par M. Blouin (Rousseau) et M. Johnson (Anjou) est remplacé par Mme Harel (Maisonneuve).

Livre troisième Des successions

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Lors de l'ajournement de nos travaux, hier soir, nous étions rendus à l'article 789. J'appelle donc l'article 789. Mme la députée de Maisonneuve.

Des testaments

Des dispositions testamentaires et des légataires (suite)

Mme Harel: L'article se lit comme suit: "Le légataire universel ou à titre universel est héritier dès l'ouverture de la succession, pour autant qu'il accepte le legs."

Le Président (M. Gagnon): Oes commentaires?

M. Cossette (André): Cet article sert à introduire les articles qui suivent en rappelant que le légataire universel ou à titre universel est héritier depuis l'ouverture de la succession, pour autant qu'il accepte le legs qui lui est fait.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des remarques ou d'autres commentaires? Non. L'article 789 est adopté. J'appelle l'article 790.

Mme Harel: Un amendement est introduit à l'effet de remplacer la première ligne du deuxième alinéa par la suivante: "II n'est pas tenu des obligations du défunt sur ces biens sauf si les autres". Je vais faire lecture de l'article amendé: "Le légataire particulier qui accepte le legs n'est pas héritier, mais il est néanmoins saisi comme héritier des biens légués, soit par le décès du défunt, soit par l'événement qui donne effet à son legs. "Il n'est pas tenu des obligations du défunt sur ces biens sauf si les autres biens de la succession ne suffisent pas à payer les dettes; en ce cas, il n'est tenu qu'à concurrence de la valeur des biens qu'il recueille."

Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement ne fait que reformuler le début de l'alinéa afin de mieux faire ressortir le caractère subsidiaire de la responsabilité du légataire particulier en regard des obligations du défunt.

Le Président (M. Gagnon): Commentaires sur l'article?

M. Cossette: Cet article est le premier d'une série qui vise à circonscrire la nature spécifique des droits et obligations du légataire particulier lequel, s'il s'apparente plutôt à un créancier de la succession, demeure néanmoins soumis à certains égards aux règles applicables aux héritiers ou autres successibles.

Le premier alinéa édicte, conformément au droit actuel énoncé à l'article 891 du Code civil du Bas-Canada, que le légataire particulier, s'il accepte son legs, n'est pas un héritier, mais qu'il a néanmoins la saisine des biens qui lui sont légués, comme un héritier. Cette saisine est donc limitée, en regard des obligations du défunt, à l'actif reçu. Elle est aussi sujette, de même, aux règles relatives à la liquidation de la succession où, pour le temps de celle-ci, le liquidateur exerce la saisine des héritiers et des légataires particuliers.

Le second alinéa confirme le caractère subsidiaire de la responsabilité du légataire particulier pour le paiement des dettes successorales en précisant qu'il n'est tenu, le cas échéant, qu'à concurrence de la valeur des biens qu'il recueille, conformément au principe désormais reconnu par le projet en matière de responsabilité pour les dettes de la succession.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Mme la

députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président, l'amendement apporté donne suite à la recommandation du Barreau, à la page 25.

M. Pineau (Jean): Oui, c'est cela, M. le Président. J'avais noté cette observation qu'avait faite le Barreau. Le Barreau propose que l'on remplace le deuxième aliéna par le suivant: "Si les autres biens de la succession ne suffisent pas à payer les dettes, il peut être tenu de remettre les biens légués ou d'en payer la valeur. En ce cas, il ne peut être tenu au-delà de la valeur de son legs." À vrai dire, je ne vois pas très bien la différence qu'il y a entre l'alinéa proposé par le Barreau et l'alinéa suggéré par le gouvernement. Effectivement, il est clair qu'il n'est pas tenu des obligations du défunt sur ces biens, sauf si cela ne suffit pas pour payer les dettes.

Mme Harel: L'amendement ne fait que reformuler...

M. Pineau: C'est cela.

Mme Harel: ...le second alinéa.

M. Cossette: Ce sont des mots différents pour exprimer la même chose.

M. Leduc (Saint-Laurent): Au premier alinéa, si je comprends bien, il y aurait double saisine du légataire particulier et, en vertu de l'article 830, une saisine du liquidateur.

M. Cossette: C'est-à-dire que le principe qui va prévaloir en liquidation, c'est que le liquidateur exerce la saisine qui appartient à un autre. De la même façon que le liquidateur aura la saisine des biens légués à titre universel, il aura aussi la saisine des biens légués à titre particulier parce que, si on veut réellement que le liquidateur puisse payer les dettes, il ne faut pas laisser partir quelqu'un avec les biens, sans cela le liquidateur ne pourra pas jouer pleinement son rôle de liquidateur de la succession.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ressemble à la situation qui existait avant le nouveau projet.

M. Cossette: Avant le nouveau projet, non. Le légataire particulier avait le droit de...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela. C'est nouveau.

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): En ce qui concerne les obligations du légataire, s'il se trouve une hypothèque sur le bien légué, est-ce que le légataire va être tenu de payer l'hypothèque?

M. Cossette: C'est une situation qu'on va régler dans des articles postérieurs dont j'oublie les numéros. Je crois que Me Charbonneau peut nous les...

Le Président (M. Gagnon): Les articles 864 et suivants...

M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne suis pas rendu là.

Le Président (M. Gagnon): Me Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Aux articles 864 et suivants, on règle le cas des légataires particuliers quant à leur responsabilité pour le paiement des dettes.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va, Me Pineau?

M. Pineau: Tout à l'heure, Me Cossette a dit que le liquidateur avait la saisine. Je crois qu'il faut préciser qu'il exerce la saisine.

M. Cossette: II exerce la saisine.

M. Pineau: II n'a pas la saisine, il exerce la saisine.

M. Cossette: C'est exact.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à l'article 790 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 790, tel qu'amendé, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 791? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "Le légataire particulier doit pour recevoir son legs avoir les mêmes qualités que celles requises pour succéder. "Il peut être inhabile à recevoir ou en être déclaré indigne comme on peut l'être pour succéder; il peut, comme un successible, demander au tribunal de déclarer l'indignité d'un héritier ou d'un colégataire particulier."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le

précédent. Le premier alinéa exige du légataire particulier qu'il présente les mêmes qualités pour recevoir son legs que celles qui sont requises d'un successible pour hériter.

Le second alinéa assujettit le légataire particulier aux mêmes causes d'inhabilité ou d'indignité vis-à-vis de son legs en lui conférant aussi, comme au successible, l'immunité en certains cas contre un recours possible en déclaration d'indignité ainsi que le droit de demander que soit déclarée l'indignité d'un héritier ou d'un colégataire particulier.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, cela va.

Le Président (M. Gagnon): L'article 791 est adopté. J'appelle l'article 792.

Mme Harel: "Le légataire particulier a droit, comme un successible, de délibérer et d'exercer son option à l'égard du legs qui lui est fait, avec les mêmes effets et suivant les mêmes règles."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article assujettit le légataire particulier aux règles normales de l'option telles qu'elles s'appliquent à tout successible.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 792...

M. Leduc (Saint-Laurent): La règle des six mois prévaudrait ici.

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 792 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adapté. J'appelle l'article 793. (15 h 15)

Mme Harel: "Les dispositions relatives aux droits et obligations respectifs de l'héritier apparent et de l'héritier véritable ainsi qu'à l'opposabilité des actes du premier à l'égard du second sont également applicables au légataire particulier, compte tenu des adaptations nécessaires. "Pour le surplus, il est assujetti aux dispositions du présent livre qui concernent les légataires."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète l'énoncé des règles qui déterminent la situation du légataire particulier. Le premier alinéa rend applicables, sous réserve des adaptations nécessaires, les dispositions qui régissent les relations des héritiers apparents et des héritiers véritables entre eux ou à l'égard des tiers en présence de situations similaires donnant ouverture à ces règles.

Le second alinéa énonce une règle de nature interprétative en édictant que le légataire particulier demeure, pour ce qui n'est pas réglé par les articles qui précèdent, assujetti aux dispositions qui le concernent spécifiquement ou qui concernent les légataires.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je pense qu'on fait référence aux articles 674 et suivants.

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 793 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 794?

Mme Harel: "Les fruits et revenus du bien légué profitent au légataire à compter de l'ouverture de la succession ou du moment où la disposition produit effet à son égard."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise le contenu des legs en prévoyant qu'ils donnent droit non seulement aux biens qui en font l'objet, mais aussi aux fruits et revenus qu'ils engendrent.

Il modifie le droit actuel énoncé à l'article 871 du Code civil du Bas-Canada en précisant que ces fruits et revenus non seulement courent au profit du légataire à compter du décès, mais peuvent aussi ne courir qu'à compter de l'ouverture postérieure de son droit, notamment s'il est appelé de substitution ou bénéficiaire en second ordre d'une fiducie.

À l'instar de l'Office de révision du Code civil, il modifie encore le droit actuel en ne subordonnant plus l'application de la règle à une déclaration expresse du testateur en ce sens. À cet égard, la règle proposée paraît plus équitable et moins formaliste en n'exigeant pas qu'à défaut d'une telle déclaration le légataire présente une demande en justice ou envoie une mise en demeure pour avoir droit aux fruits et

revenus.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ici, on parle d'ouverture de succession alors qu'à l'article 795 on dit à compter ou enfin du moment du décès. Est-ce que c'est la même chose?

M. Cossette: Oui, c'est exactement la même chose.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pourquoi ne pas avoir employé les mêmes termes?

M. Charbonneau (Pierre): C'est simplement une question de reformulation de la rédaction de l'article.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ouverture de succession, c'est sûrement le décès.

M. Charbonneau (Pierre): Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pourquoi ne pas dire le décès, à ce moment-là, vu qu'on l'emploie à l'article 795?

M. Charbonneau (Pierre): Parce que c'est déjà prévu à l'article 660 quand on dit: "La succession d'une personne s'ouvre par son décès..." Donc, quand on parle de l'ouverture de la succession, c'est le décès.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ne peut pas être autre chose. Ça va.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 794 est adopté. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, ça va, c'est correct.

Le Président (M. Gagnon): Article 795?

Mme Harel: "Le bien légué est délivré avec ses accessoires, dans l'état où il se trouve au décès du testateur. "Il en est de même, dans le cas du legs de valeurs mobilières, des droits qui leur sont attachés et n'ont pas encore été exercés."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise le contenu d'un legs en prévoyant qu'il donne droit au bien qui en est l'objet dans l'état où il se trouve au décès ainsi qu'à tous ses accessoires.

S'inspirant des propositions de l'Office de révision du Code civil et de l'article 891 du code actuel, l'article apporte une précision nouvelle lorsque les biens légués consistent en des valeurs mobilières, en édictant que le legs donne aussi au légataire l'exercice des droits rattachés à ces valeurs, tels les droits de vote, de souscription ou de conversion si ces droits n'ont pas encore été exercés au décès et s'ils peuvent toujours l'être.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): En fait, on fait un cas particulier des valeurs mobilières. Est-ce qu'on veut bien dire par là que cela s'appliquerait également - on parle ici surtout d'actions - aux obligations auxquelles des coupons pourraient être attachés?

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Le commentaire n'en parle pas; il parle simplement des droits de vote, de souscription et de conversion. Également, le cas serait-il le même pour les intérêts courus sur un prêt hypothécaire, enfin un prêt hypothécaire ou non, qui a été consenti, que ce soit sur billet ou autrement? C'est la même chose?

M. Cassette: Pour les intérêts dans le cas d'un prêt hypothécaire, c'est couvert par la règle des fruits et revenus dont on a parlé tantôt.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pas cela, non; je parle de l'intérêt couru, je ne parle pas depuis le décès, je parle de l'intérêt couru. Disons, un coupon attaché à une obligation portant des intérêts courus depuis deux ou trois mois avant le décès. Vous faites un cas particulier des valeurs mobilières.

M. Cossette: La question que vous avez posée touche des intérêts qui sont...

M. Leduc (Saint-Laurent): ...courus avant.

M. Cossette: ...courus avant.

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien sûr, qui sont encore attachés.

M. Cossette: Oui. Cela fait partie des biens de la succession et, à compter du moment du décès, ce qui vient après, c'est un fruit d'un bien compris dans la succession.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire...

M. Charbonneau (Pierre): À ce moment-là, les intérêts courus jusqu'à l'ouverture de la succession sont capitalisés, de sorte qu'ils font partie des biens de la succession.

M. Cossette: C'est cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que c'était la situation qui prévalait auparavant?

M. Cossette: En ce qui touche les intérêts, oui, on ne change pas le droit. La règle de l'article 795 que nous examinons est nouvelle cependant parce que le droit de 1866, sans méconnaître les choses mobilières, les ignorait, et en particulier les valeurs mobilières parce qu'elles n'existaient à peu près pas. D'autant plus que le vieil adage: Res mobilis, res vilis est encore...

M. Leduc (Saint-Laurent): Je dois vous dire qu'à la lecture de l'article 795 j'avais compris que cela comprenait ces intérêts-là. C'est pour cela que je posais la question. Ce n'est pas un accessoire, n'est-ce pas?

M. Cossette: Non, c'est un fruit.

M. Pineau: M. le Président, je crois que le deuxième alinéa de l'article 795 est tout simplement une illustration du premier alinéa. Effectivement, les droits qui sont attachés à une valeur mobilière, c'est un accessoire de la valeur mobilière; donc, ce n'est qu'une illustration, mais une illustration qu'il est bon de mettre dans le...

Mme Harel: ...contexte de 1985.

M. Cossette: ...qu'on n'aurait pas vu en 1866.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah! Si c'est cela que ça veut dire...

M. Pineau: Alors qu'on ne peut pas dire, M. le Président, qu'un intérêt c'est un accessoire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, peut-être pas.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 795 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 796.

Mme Harel: "Dans le cas du legs d'un immeuble, l'immeuble accessoire, contigu ou annexe qui a été acquis par le testateur depuis la signature du testament est présumé compris dans le legs, s'il compose un tout avec l'immeuble légué."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Excusez-moi, M. le Président. Cet article reprend l'article 888 du Code civil du Bas-Canada en le présentant sous une forme positive. Il énonce que l'immeuble accessoire, contigu ou annexe qui a été acquis par le testateur entre la signature de son testament par lequel il lègue l'immeuble principal et son décès est présumé faire partie du legs, s'il compose un tout avec l'immeuble légué. Par l'expression "immeuble accessoire, contigu ou annexe", l'article vise, par exemple, les acquisitions de terrains contigus ou annexes, telle celle d'une parcelle du terrain voisin ou plus éloigné, mais destinée à servir le terrain principal, ainsi que les constructions érigées ou faites sur le terrain légué, voire les extensions apportées à une bâtisse préexistante. La notion d'acquisition accessoire ou annexe est également employée en matière de régimes matrimoniaux, notamment à l'article 487 du Code civil du Québec.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires, Me Pineau?

M. Pineau: Non, M. le Président, si ce n'est qu'il s'agit d'une présomption simple, je suppose, susceptible d'être remplacée.

M. Cossette: L'emploi du mot "présumé" démontre qu'il s'agit d'une présomption simple, oui. Autrement, il aurait fallu employer le mot "réputé".

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que c'est la première fois que l'on parle de biens acquis postérieurement à la signature du testament? En fait, on a toujours reconnu qu'un testament cela devait se considérer au moment du décès parce que, bien sûr, n'ayant pas d'effet avant le décès, c'est un acte qu'on peut considérer comme n'ayant pas d'existence; il faut qu'il y ait le décès. Ici, vraiment, on dit qu'il faut tenir compte de la date du testament. C'est nouveau. Je me demande si... Évidemment, c'est un point.

Ensuite, quand vous parlez d'immeuble contigu, je me demande si ce n'est pas donner à cela beaucoup d'extension et si on ne pourrait pas avoir des cas qui pourraient prêter à procès assez facilement.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Je pense que c'est une règle qui va faciliter la solution de cas, dans les circonstances prévues ici. Je suppose que j'ai un terrain de 100 pieds sur 100 pieds et, au moment où j'ai fait mon testament, ce terrain a 100 pieds sur 100 pieds. Par la suite, j'achète une lisière de terrain additionnelle de 2 pieds et je n'ai pas

d'autre raison que de vouloir agrandir une unité, c'est-à-dire ma maison, ma propriété familiale, en somme. Si je n'avais pas une règle comme celle-là et si, par ailleurs, j'avais fait un legs particulier de ma propriété à À et un legs universel à B, je pense qu'on pourrait peut-être prétendre que la lisière de terrain est la propriété du légataire universel. Tandis qu'avec une règle comme celle-là la propriété, le tout sera dévolu à À, c'est-à-dire au légataire particulier.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ne s'appliquerait sûrement pas dans le cas où il s'agit de duplex jumelés. Vous en avez un et vous achèteriez l'autre. Il peut y avoir des cas où cela peut être des cours communes, accessoires; c'est le mot "accessoire" qui est bien important, pas simplement "contigu ou annexe".

M. Cossette: Oui, il ne faudrait pas que ce soit un autre tout, à ce moment-là.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Par exemple, c'est peut-être le qualificatif "contigu" qui peut prêter à interprétation parce que, jusqu'à présent, on parle, dans le code, effectivement, d'accessoire ou d'annexé, mais on n'y trouve pas "contigu". Qu'est-ce que c'est exactement un immeuble contigu?

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: S'il y avait une virgule entre "contigu ou annexe"?

M. Pineau: C'est la même chose. Mme Harel: C'est la même chose? M. Pineau: Oui.

Mme Harel: II faut d'abord que l'immeuble soit accessoire.

M. Pineau: Non.

Mme HareU Ce sont trois conditions?

M. Pineau: Non.

Mme Harel: Est-ce qu'il faut que l'immeuble soit accessoire?

M. Pineau: Ou accessoire, ou contigu ou annexe, c'est cela que... (15 h 30)

Mme Harel: Oui, mais, si on disait que, pour être contigu, il faut d'abord qu'il soit accessoire à l'immeuble.

M. Pineau: Ce que je ne sais pas, c'est ce qu'ajoute en définitive "contigu". Je crois qu'on pourrait très bien le supprimer et on resterait avec le concept d'accessoire et celui d'annexé.

M. Cossette: ...487.

M. Pineau: On ne s'interrogerait pas sur le concept de contiguïté.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je veux bien comprendre. Les trois conditions sent exigées. C'est cela?

M. Pineau: Non.

M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment-là, cela ne marche pas.

M. Pineau: D'accord. Il faut supprimer "contigu".

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous pouvez avoir le cas où c'est contigu et cela compose un tout. C'est très dangeureux.

M. Cossette: Oui, mais je pense que, dans les deux cas, il faut toujours que ce soit accessoire, il ne faut pas que ce soit principal.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne dis pas que c'est une condition exigée. On dit que cela peut être un des trois. À ce moment, il faut qu'accessoire soit également contigu ou annexe. C'est évident, sans cela...

Mme Hareh C'est pour cela que l'ajout d'une virgule ne vient-il pas, dans le fond, qualifier d'abord la première condition que cet immeuble doit être non pas principal, mais accessoire et, ensuite, qu'il soit contigu ou annexe? Par exemple, un duplex en rangée est contigu, mais c'est principal; il ne s'agit pas là d'un immeuble accessoire.

M. Pineau: Justement, que veut-on dire par un immeuble contigu?

M. Leduc (Saint-Laurent): Comme dirait l'autre, c'est dans les parages.

Mme Harel: À proximité de. Je pense qu'il faudrait plus sérieusement clarifier.

M. Leduc (Saint-Laurent): II faudrait circonscrire cela un peu.

Mme Harel: Oui.

M. Pineau: Est-ce qu'on peut suspendre la séance?

Mme Harel: On va suspendre, oui. ' Le Président (M. Gagnon): Suspendre? Mme Harel: Oui, de l'enregistrement.

Le Président (M. Gagnon): On va suspendre pour quelques minutes. Cela va.

(Suspension de la séance à 15 h 32)

(Reprise à 15 h 37)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Cossette: Est-ce qu'on pourrait le faire comme commentaire à l'amendement?

Mme Harel: Très bien.

M. Cossette: L'amendement va se préparer et puis...

Le Président (M. Gagnon): D'accord.

Mme Harel: L'amendement va consister...

Le Président (M. Gagnon): Je pense que vous vous êtes...

Mme Harel: C'est cela. ...à retirer le mot "contigu".

Le Président (M. Gagnon): ...entendus sur le terme. Alors, on va considérer qu'on a reçu l'amendement pour être capable d'adopter l'article, si vous êtes d'accord. L'amendement à l'article 796 est-il adopté?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 796, tel qu'amendé, est adopté. L'amendement va modifier...

Mme Harel: L'amendement consiste à biffer "contigu".

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est le seul amendement qu'il y a.

Le Président (M. Gagnon): C'est l'amendement sur lequel on s'est entendu. Article 797?

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'on maintient "accessoire ou annexe"? On enlève la virgule?

Mme Longtin (Marie-José): On enlève la virgule, on supprime "contigu". Alors, cela se lit: "immeuble accessoire ou annexe".

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée, je vous demanderais de relire l'article 796 tel qu'amendé.

Mme Harel: Oui, M. le Président. "Dans le cas du legs d'un immeuble, l'immeuble accessoire ou annexe qui a été acquis par le testateur depuis la signature du testament est présumé compris dans le legs, s'il compose un tout avec l'immeuble légué."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Leduc (Saint-Laurent): Très bien.

Le Président (M. Gagnon): Donc, l'article 796 est adopté tel qu'amendé. Article 797?

Mme Harel: On pourrait, en commentaire sur cet amendement, ajouter que cet amendement rend conforme l'article avec le texte de l'article 487.

Le Président (M. Gagnon): Article 797.

Mme Harel: "Le legs d'un fonds de commerce est présumé inclure les exploitations acquises ou créées depuis la signature du testament et qui composent, au décès, une unité économique avec le fonds légué."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article qui complète le précédent est nouveau et s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil. Il précise que le legs d'un fonds de commerce est présumé inclure les exploitations acquises ou créées depuis la signature du testament, lorsqu'elles forment au décès une unité économique avec le fonds légué. Les présomptions créées par cet article et le précédent peuvent évidemment être écartées lorsque l'immeuble ou l'exploitation ne constitue pas un tout avec l'objet original du legs. Elles le seront aussi lorsque le testateur aura manifesté une intention contraire, notamment s'il a légué séparément à une autre personne les immeubles accessoires, contigus ou annexes, ou les nouvelles exploitations.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez, on dit, en commentaire: Cet article qui complète le précédent est nouveau et s'inspire des propositions de l'ORCC. Il précise que le legs d'un fonds de commerce... Or, à l'article 311, il n'est pas question de fonds de commerce du tout.

Le Président (M. Gagnon): Mme

Longtin.

Mme Longtin: Je pense qu'on peut dire que c'est principalement une application. À l'article 796, évidemment, on dit qu'il compose un tout avec l'immeuble légué, alors qu'à l'article 797 cela peut être deux biens, sauf que cela forme...

M. Leduc (Saint-Laurent): II ne faudrait pas parler, à ce moment-là...

Mme Longtin: ...une unité économique.

Me Cossette: M. le Président, par ailleurs, je pense qu'au lieu de reproduire, à la page de gauche, l'article 311 de l'office, on aurait dû reproduire l'article 312 qui se lit comme suit, et je vais le lire. La proposition de l'office disait: Dans le cas de legs d'un fonds de commerce, la même présomption s'applique aux exploitations acquises ou créées depuis la rédaction du testament et qui composent au décès une unité économique avec le fonds légué. Alors, je pense que c'est l'article 312 qu'on aurait dû reproduire au lieu de l'article 311.

Le Président (M, Gagnon): Au niveau des commentaires.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article peut également...

Mme Harel: Non, M. le Président, c'est au niveau simplement de la publication des articles concordants.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, je le cherchais dans mon cahier. Évidemment, je n'avais pas l'article 312. Je me suis douté que c'était l'article suivant. Cela va.

M. Cossette: On a produit l'article 311 deux fois.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense que l'article 797 pourrait avoir beaucoup d'extension. Est-ce que cet article couvrirait l'acquisition d'un deuxième magasin, d'une chaîne de magasins? Enfin, un fonds de commerce... Sûrement.

M. Cossette: Supposons que j'aie une épicerie au coin de la rue Saint-Jean et de la côte Sainte-Geneviève. Au moment de faire mon testament, je dis: Je lègue mon commerce d'épicerie à mon fils Joseph. Après avoir fait mon testament, j'ai acquis une autre épicerie au coin de la rue Saint-Jean et de la rue Deligny. J'ai employé l'expression, par ailleurs, "je lègue mon commerce d'épicerie". Alors, je pense que mon fils Joseph aura mon commerce d'épicerie avec deux succursales, si on veut, c'est-à-dire celle de la rue Saint-Jean, à moins d'intentions contraires, évidemment, dans le testament.

M. Leduc (Saint-Laurent): Les exploitations acquises ou créées.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: Ce serait présumé être... M. Cossette: Présumé, c'est cela. M. Pineau: ...une unité économique.

M. Cossette: Oui. Excusez-moi. Je pense qu'à ce moment-là le testateur aura sans doute une seule et même administration, fera une seule commande, disons, de boîtes de Kleenex pour l'épicerie qui est au coin de la côte Sainte-Geneviève et l'autre. Alors, il y aura unité d'administration. Maintenant, si les deux commerces étaient exploités sous forme de personne morale, ce seraient deux unités distinctes.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, d'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 797 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 798.

Mme Harel: "Lorsque le paiement du legs est soumis à un terme, le légataire a néanmoins un droit acquis dès le décès du testateur et transmissible à ses propres héritiers ou légataires particuliers. "Son droit au legs fait sous condition est également transmissible, sauf si la condition a un caractère purement personnel."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article fixe la portée des droits du légataire lorsque l'exécution de son legs est soumise à un terme ou que son legs est conditionnel. Le premier alinéa est conforme au droit actuel énoncé à l'article 902 du Code civil du Bas-Canada. Il édicté que, lorsque le paiement du legs est soumis à un terme, le légataire a un droit acquis sur le bien légué dès le décès du testateur, droit qu'il peut transmettre à ses ayants droit. Le terme ne fait que suspendre l'exécution même du legs et n'affecte aucunement le droit au legs en soi.

Le second alinéa est nouveau, mais se déduit du deuxième alinéa de l'article 893 du

Code civil du Bas-Canada et est conforme au droit actuel en matière de condition. Il énonce que le droit d'un légataire à un legs conditionnel lui est en principe acquis et est conséquemment transmissible à ses héritiers ou légataires, sauf lorsque la condition est personnelle au légataire. Ainsi, s'il devait lui-même remplir la condition de son vivant et qu'il n'a pu le faire, le droit qui lui était propre ne peut être transmis. (15 h 45)

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.

M. Pineau: Je me suis demandé si c'était utile de le mettre parce que c'est l'application du terme, c'est l'application de la condition, mais peut-être est-ce opportun de l'indiquer, même si c'est l'application d'une règle évidente.

M. Cossette: D'une règle plus générale.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...si c'était nécessaire.

Le Président (M. Gagnon): L'article 798 est adopté. L'article 799?

Mme Harel: À l'article 799, l'amendement consiste à supprimer l'article.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

Mme Harel: Oui, je vais faire lecture du commentaire. Cet amendement fait disparaître textuellement la possibilité pour le testateur de créer directement dans le testament une hypothèque ou une autre sûreté pour garantir le paiement d'un legs. Cette possibilité n'est actuellement jamais utilisée et le testateur qui désire garantir le paiement d'un legs peut toujours le faire en imposant à l'héritier chargé d'assurer le paiement du legs, comme condition à son droit d'hériter, l'obligation de fournir une sûreté à cette fin.

La possibilité de constituer directement une hypothèque par testament subsistera d'ailleurs en vertu de l'article 2045 du Code civil du Bas-Canada dans l'éventualité où un testateur le désirerait. Il faut bien voir qu'il s'agit là d'une recommandation de la Chambre des notaires, à la page 15 de son mémoire sur le Livre des successions.

Je peux faire lecture du commentaire de cette recommandation de la Chambre. "Le comité recommande l'abrogation de l'article 799, puisque l'hypothèque testamentaire est un mécanisme qui est tombé en désuétude. Le comité considère par conséquent qu'il n'y a pas lieu de maintenir cette forme de sûreté et encore moins de l'étendre comme le suggère l'article 799. Le comité souligne, par ailleurs, que cette disposition est susceptible de poser des difficultés, compte tenu du fait que le droit des sûretés n'a pas encore été révisé pour préciser le sens à donner à l'expression "suffisamment identifié"."

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que c'est de droit public? Est-ce que le testateur ne pourrait pas quand même le stipuler dans son testament? Je pense. On ne peut pas empêcher quelqu'un de stipuler une condition comme celle-là. Je crains d'enlever l'article et qu'on dise que c'est de droit public.

Le Président (M. Gagnon): Me Charbon-neau.

M. Charbonneau (Pierre): Effectivement, un testateur pourrait toujours le stipuler comme condition. La simple disparition de l'article n'enlève pas cette possibilité. Cela pourrait devenir une charge du liquidateur de le faire, de s'assurer que la condition est remplie.

M. Cossette: Parce qu'il n'y a rien qui l'empêche de le faire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela n'ajoute rien.

M. Cossette: Cela n'ajoute rien? D'autre part, le comité des sûretés qui travaille en matière de sûretés a demandé aux registrateurs, à certains d'entre eux, pour savoir dans combien de cas on avait constaté que des testaments comportaient des hypothèques se rapportant à l'article 893; je pense que pas un de ceux que nous avons consultés n'en avait vu. Vous avez pratiqué pendant de nombreuses années. Je suis à peu près certain que vous n'avez jamais stipulé d'hypothèques dans un testament. Il est facile d'organiser une garantie au profit du bénéficiaire d'une autre façon.

M. Leduc (Saint-Laurent): Il peut le faire, de toute façon. Il n'y a pas d'objection...

M. Cossette: Oui, il peut le faire.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...à ce que l'article soit supprimé, je suis d'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 799 est adopté.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Donc, l'article 799 est supprimé. Article 800?

Mme Harel: L'article 800, M. le Président, nous allons en proposer la suspension pour terminer la rédaction d'un amendement qui doit être présenté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 800 est suspendu. L'article 801?

Mme Harel: "Le legs est caduc, sauf s'il y a lieu à représentation, lorsque le légataire n'a pas survécu au testateur. "Il est aussi caduc lorsque le légataire le refuse, est inhabile à le recueillir ou est déclaré indigne de le recevoir ou encore lorsqu'il décède avant l'accomplissement de la condition suspensive dont le legs est assorti si la condition a un caractère purement personnel."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est le premier d'une série qui traite de la caducité et de la nullité des legs. Ces concepts de caducité et de nullité présentent la caractéristique commune de priver un Iegs de tout effet à l'égard du légataire désigné. Il se distingue, toutefois, notamment en ce que, si la caducité d'un legs résulte d'une cause postérieure à la confection du testament, la nullité provient, elle, d'une cause qui lui est contemporaine. L'article proposé énumère certaines causes de caducité des legs que reconnaît le droit actuel aux articles 900, 901 et 904 du Code civil du Bas-Canada.

Le premier alinéa énonce la caducité du legs fait à celui qui n'a pas survécu au testateur, mais réserve le cas de la représentation qui peut permettre aux héritiers du légataire de recueillir le legs. Le second alinéa prévoit que la renonciation, l'inhabilité ou l'indignité du légataire rend le legs caduc de même que le décès du légataire qui survient avant l'accomplissement de la condition suspensive dont le legs est assorti, lorsque cette condition ne pouvait être accomplie que par le légataire.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): On dit que le legs est caduc, sauf s'il y a lieu à représentation. Cela me semble assez évident. Ensuite, au deuxième alinéa, on indique qu'il est aussi caduc lorsque le légataire le refuse, est inhabile à le recueillir ou est déclaré indigne de le recevoir. Lorsqu'il y a renonciation, il n'y a pas représentation, mais, dans le cas d'inhabilité ou d'indignité, il y a représentation. Est-ce que le legs est encore caduc?

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Dans la mesure où il y a la représentation, c'est le premier alinéa qui règle la situation et, à ce moment-là, le legs ne sera pas caduc. Mais s'il n'y a pas de représentation, dans des cas où la représentation aurait pu jouer, mais qu'elle ne peut jouer parce qu'il n'y a pas de descendant pour représenter, à ce moment-là, le legs serait caduc.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quand on parle de caducité dans le deuxième alinéa, il faut absolument retenir que...

M. Cossette: II n'y a pas de représentation.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...il n'y a pas de représentation. Cela ne me semble pas évident. En tout cas...

Le Président (M. Gagnon): D'accord, M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela me semble évident. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): D'accord. L'article 801 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 802?

Mme Harel: "Le legs est également caduc si le bien légué a totalement péri du vivant du testateur ou avant l'ouverture du legs fait sous condition suspensive. "Si la perte du bien survient au décès du testateur, à l'ouverture du legs ou postérieurement, l'indemnité d'assurance est substituée au bien détruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce une cause de caducité inhérente à l'objet même du legs. Le premier alinéa stipule que le legs est caduc lorsque le bien qui en fait l'objet a péri en entier du vivant du testateur ou avant l'ouverture du legs fait sous condition suspensive. Le bien qui a péri du vivant du testateur n'a jamais fait partie de la succession et n'a donc pu faire l'objet d'un legs. Le bien qui a péri avant l'ouverture du legs fait sous condition suspensive rend futile l'accomplissement de la condition faute d'objet.

Le second alinéa est nouveau. Il précise

que, si la perte du bien survient au décès du testateur, à l'ouverture du legs conditionnel ou même postérieurement, mais avant la délivrance, l'objet du legs se reporte, le cas échéant, sur l'indemnité d'assurance versée en vertu d'un contrat pris sur le bien qui a péri. Cet article reprend l'article 903 du Code civil du Bas-Canada et le complète.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Première remarque, qu'est-ce qu'on veut dire par les mots "au décès, à l'ouverture"? Est-ce que c'est au moment même où il décède?

M. Cossette: Cela pourrait arriver.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut dire d'une façon simultanée.

M. Cossette: Oui. C'est-à-dire qu'il y a trois temps de prévus: avant le décès, au décès et après le décès, je pense.

Mme Harel: Si le testateur est mort dans un incendie de sa propre demeure qu'il léguait...

M. Cossette: Oui, ou il est propriétaire d'un avion et il meurt en même temps que l'avion tombe ou...

M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, c'est au moment du décès et après.

M. Cassette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Maintenant, on parle ici...

M. Cossette: II peut arriver que les deux soient arrivés en même temps; ce sera soit avant, soit après, dans la plupart des cas.

M. Leduc (Saint-Laurent): Les comourants, c'est cela. On dit ici que le legs est caduc si le bien légué a totalement péri.

M. Pineau: S'il a partiellement péri, donc il n'est pas caduc.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela, s'il a partiellement péri, il ne serait pas caduc. Maintenant, si on a disposé du bien, si on l'a vendu...

M. Cossette: Cela vient un peu plus loin, je pense.

M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai regardé, cela doit être assez loin.

M. Cossette: C'est parce qu'à ce moment-là cela deviendrait le legs de la chose d'autrui, s'il l'a vendu. Je pense que c'est dans ce sens-là.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah non! Bien d'autrui, non. S'il en a disposé, s'il n'est plus là, pas nécessairement... On le considérerait comme le bien d'autrui?

Le Président (M. Gagnon): Me Charbon-neau.

M. Charbonneau (Pierre): Je crois qu'effectivement s'il en a disposé soit à titre gratuit par donation ou s'il l'a vendu, à ce moment-là, c'est autrui qui est propriétaire, c'est quelqu'un d'autre qui est propriétaire.

M. Cossette: Ce serait l'article 813 qui s'appliquerait, à ce moment-là.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il n'y aurait pas un article dans le Code civil du Bas-Canada à cet effet?

M. Pineau: Oui, 822. Ce n'est pas sur la caducité, mais sur la révocation.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, c'est cela.

Mme Harel: Est-ce que cela répond à vos questions?

M. Leduc (Saint-Laurent): Considéré comme le bien d'autrui... Il me semble qu'on aurait peut-être pu être un peu plus précis.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, peut-être avec l'article 822.

Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Pineau.

M. Pineau: On parle de l'ouverture du legs fait sous condition suspensive. Donc, le legs fait sous condition résolutoire ne serait pas caduc.

Le Président (M. Gagnon): Me Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Par l'effet rétroactif de la résolution, à ce moment-là, c'est comme si le bien n'avait jamais fait partie de la succession, n'avait jamais été dévolu.

M. Pineau: C'est cela, c'est normal.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 802 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 803?

Mme Harel: Alors, l'amendement consiste, à la première ligne du deuxième alinéa, à remplacer le mot "réputé" par le mot "présumé", et l'article se lit comme suit: "Lorsqu'un legs chargé d'un autre legs devient caduc pour une cause qui se rattache au légataire, le legs imposé comme charge n'en devient pas pour cela caduc, sauf le caractère purement personnel de la charge. "Il est alors présumé former une disposition distincte, à la charge de l'héritier ou du légataire particulier qui recueille ce qui faisait l'objet du legs atteint de caducité."

Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement remplace la présomption absolue que comporte l'alinéa par une présomption simple.

La modification apportée permet ainsi de repousser la présomption de l'article en présence d'une intention contraire expresse ou implicite du testateur, qui peut avoir voulu que la caducité du legs principal emporte plutôt la caducité du legs imposé comme charge. (16 heures)

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des commentaires à l'article?

M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais simplement qu'on me donne un exemple, peut-être, du caractère purement personnel de la charge. Est-ce que ce serait le cas où on imposerait au légataire de donner un immeuble ou un bien dont il est propriétaire?

Mme Harel: Peut-être faudrait-il, d'abord, faire lecture du commentaire...

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah oui! D'accord.

Mme Harel: ...de l'article 803.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire de l'article.

M. Cossette: Toujours sous réserve de l'amendement...

Le Président (M. Gagnon): Voilà.

M- Cassette: ...qui a été présenté. Cet article reprend l'article 865 du Code civil du Bas-Canada, sauf quelques modifications de forme. Il énonce que, lorsqu'un legs chargé d'un autre legs devient caduc pour une cause qui se rattache au légataire, comme son indignité ou sa renonciation, le legs imposé comme charge n'est pas caduc pour autant si la charge n'a pas un caractère purement personnel, mais devient à la charge de l'héritier ou du légataire particulier qui profite de la caducité.

Cependant, si le légataire principal pouvait seul remplir le legs accessoire imposé comme charge, ce legs devient caduc et suit ainsi le sort du legs principal. Sous cette réserve, l'article proposé reprend la règle de l'article 865 du Code civil du Bas-Canada, également reprise par l'Office de révision du Code civil.

M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, je voulais peut-être avoir un exemple de charge à caractère purement personnel. Est-ce que ce serait le cas que je mentionnais tantôt, à savoir celui d'un testateur qui imposerait à un légataire de remettre ou de donner un immeuble ou un bien qui lui appartient? Est-ce que c'est cela, à caractère personnel?

M. Cossette: La charge purement personnelle... J'ai un exemple qui me vient à l'esprit, je ne sais pas s'il va être bon. En supposant que je sois peintre, par exemple...

Mme Harel: En bâtiment?

M. Cossette: Non, non, peintre en tableaux, artiste...

Mme Harel: Artiste peintre.

M. Cossette: ...et que ma charge consiste à faire le tableau de mon confrère, alors qu'au moment du décès j'ai perdu mes deux bras, c'est une charge personnelle que je ne peux plus accomplir. C'est peut-être farfelu un peu, mais ce n'est pas mauvais.

M. Leduc (Saint-Laurent): Disons que, sauf le caractère... Si on lui imposait de remettre un immeuble qui appartient au légataire? Si on lui imposait de donner au légataire un immeuble dont le légataire est propriétaire? Là, il ne peut pas...

Mme Longtin; Ce serait l'hypothèse, par exemple, où on donne à À tel montant, à charge pour lui de remettre tel bien...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

Mme Longtin: ...à X.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

Mme Longtin: Je ne pense pas que ce soit une charge à caractère purement personnel, puisque c'est une charge qui...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est lui qui peut donner.

Mme Longtin: Ses héritiers le pourraient aussi.

M. Leduc (Saint-Laurent): Le testateur

donne à À, à charge de remettre à B un immeuble dont il est propriétaire. À ne reçoit pas, c'est-à-dire que le legs en faveur de À est caduc.

Mme Harel: Parce qu'il peut y avoir représentation dans l'exemple...

Mme Longtin: L'exemple est mauvais, je pense. Par exemple.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: Non, je passe pour l'instant. Le Président (M. Gagnon):Cela va. Mme Longtin: L'exemple n'est pas bon.

Mme Harel: Peut-être peut-on suspendre les travaux pour quelques minutes? J'aimerais quitter pour quelques minutes.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement, nous suspendons nos travaux pour cinq minutes, ce qui veut dire dix...

Mme Harel: Non...

Le Président (M. Gagnon): Non, cinq minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 5)

(Reprise à 16 h 18)

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 803? Vous avez trouvé la solution?

Mme Harel: M. le Président, peut-être un commentaire de Me Longtin...

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Harel: ...et nous allons par la suite suspendre l'article 803 pour permettre la rédaction d'un amendement que nous allons vous proposer.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Me Longtin.

Mme Longtin: Enfin, on se disait, pour éviter les difficultés, qu'il serait peut-être possible d'envisager une règle encore plus simple qui aurait pour effet de prévoir que le legs imposé comme charge devienne aussi caduc, à moins que les héritiers ou que les légataires qui recueillent ce legs ne soient en mesure de l'exécuter.

Une voix; C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Nous allons suspendre l'article...

Mme Harel: L'article 803.

Le Président (M. Gagnon): ...803. Donc, vous retirez votre amendement, Mme la députée.

Mme Harel: C'est cela. Nous le reprendrons.

Le Président (M. Gagnon): Nous le reprendrons. L'article 804?

Mme Harel: "Le legs fait au liquidateur en guise de rémunération est caduc si le liquidateur n'accepte pas la charge. "Il en est de même du legs rémunératoire en faveur de la personne que le testateur nomme tuteur à un enfant mineur ou qu'il a désignée pour agir à titre d'administrateur du bien d'autrui."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article traite de la caducité des legs ayant pour considération la rémunération d'administrateurs Désignés par le testateur. Le premier alinéa reproduit en substance le troisième alinéa de l'article 910 du code actuel en énonçant que le legs rémunératoire fait en faveur du liquidateur est caduc si le liquidateur n'accepte pas sa charge.

Le second alinéa, en corrélation avec les nouvelles dispositions du Livre des personnes en matière de tutelle dative et du Livre des biens, étend la règle du premier à la personne que le testateur nomme tuteur à un mineur ou qu'il désigne pour agir à titre d'administrateur du bien d'autrui. La caducité prévue par l'article n'a lieu que si le legs a pour cause principale la rémunération de l'administrateur. Autrement, l'administrateur peut renoncer à sa charge tout en conservant l'objet du legs.

M. Leduc (Saint-Laurent): II faut que cela soit explicite, bien sûr. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 804 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 805?

Mme Harel: "Le legs rémunératoire est résolu lorsque le liquidateur, le tuteur ou autre administrateur du bien d'autrui désigné par le testateur cesse d'occuper sa charge; dans ce cas, il a droit à une rémunération proportionnelle à la valeur du legs et au temps pendant lequel il a occupé la charge."

Le Président (M. Gagnon): Commentai-

re.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en prévoyant le sort du legs rémunératoire fait en faveur d'un administrateur désigné lorsque celui-ci, ayant accepté sa charge, cesse néanmoins de l'occuper en cours d'administration. Il édicté que le legs rémunératoire est alors résolu dès la cessation de la charge, mais que l'administrateur a toutefois droit à une rémunération proportionnelle à la valeur du legs et au temps pendant lequel il a occupé la charge. La règle de l'article est nouvelle et comble de façon équitable un vide du droit actuel.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, il n'y a pas de difficulté, je pense, si ce n'est qu'il faut comprendre qu'il s'agit de l'hypothèse où le testateur cesse, avant le temps, d'occuper sa charge.

M. Leduc (Saint-Laurent): Le légataire. Mme Harel: Le liquidateur.

M. Pineau: Excusez-moi, pas le testateur, le légataire, bien sûr. S'il cesse avant le temps d'occuper sa charge parce qu'il ne peut pas décider... Cela fait référence à la cessation de ses obligations, de sa charge. Ne serait-il pas souhaitable de préciser "cesse avant le temps"?

Mme Harel: La fin du terme, c'est cela?

M. Pineau: Avant la fin.

Mme Harel: Avant la fin du terme. Oui, nous allons suspendre...

Le Président (M. Gagnon): Vous n'avez pas besoin de suspendre la séance. Est-ce que vous êtes d'accord pour l'ajouter?

Mme Harel: Nous cherchons surtout une formulation.

Le Président (M. Gagnon): Voilà.

Mme Longtin: Est-ce que ce n'est pas déjà inclus, ce concept de cesser d'occuper une charge? Si j'arrive à terme, je n'ai pas besoin de cesser de l'occuper; c'est la fin de ma charge.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Je voulais seulement constater que cet appareil ne fonctionne pas à nouveau. Ce que je veux dire, c'est qu'il faudrait peut-être voir à le faire réparer parce qu'on n'entend pas.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce serait peut-être moins compliqué si vous vous approchiez, à ce moment-là, au lieu de le faire réparer.

Mme Harel: Ce sont des propositions en tout bien tout honneur.

M. Leduc (Saint-Laurent): La modification que vous proposez, c'est "cesse d'occuper sa charge avant le temps"?

M. Pineau: C'est ce qu'il faut comprendre, je pense.

M. Cossette: Vous cherchez peut-être les causes qui mettent fin à l'administration?

M. Pineau: Exactement, oui.

M. Cossette: Ce sont les articles 1408 et 1409.

M. Pineau: Les articles 1408 et 1409? M. Cossette: Oui.

M. Pineau: Oui, parce qu'on reprend pour le liquidateur les causes qui mettent fin à l'administration d'un administrateur d'un bien d'autrui.

M. Cossette: C'est cela.

M. Pineau: Les fonctions prennent fin ou cessent pour telle ou telle cause.

M. Cossette: Oui. Alors, "cesse d'occuper sa charge avec la fin".

M. Leduc (Saint-Laurent): Avant le temps? Avant la fin?

M. Pineau: Enfin, je ne le sais pas.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais dire que peut-être il cesse avant la fin ou...

M. Pineau: Je crois que, normalement, il cesse d'occuper sa charge...

M. Leduc (Saint-Laurent): Quand il a fini.

M. Pineau: ...lorsqu'il a fini son travail d'administrateur. Quand a-t-il fini son travail d'administrateur? Lorsqu'il a rempli les obligations que...

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah oui! Vous avez raison.

M. Pineau: ...lui impartissent les articles 829 et suivants.

M. Leduc (Saint-Laurent): En cours

d'exercice...

M. Pineau: Il cesse d'occuper sa charge d'administrateur lorsqu'il a rempli les conditions de l'article 829: reddition de comptes...

M. Cassette: Oui.

M. Pineau: ...et délivrance des biens.

M. Cossette: Pour autant que le verbe "cesser" ne veuille pas dire cesser en cours de route ou arrêter en cours de route, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): On pourrait peut-être dire autre chose.

Mme Longtin: Enfin, personnellement, je ne suis pas d'accord, mais cela ne me dérange pas si cela ne cause pas de problème.

M. Pineau: Laissons-le comme cela.

Mme Harel: Très bien.

M. Pineau: Laissons-le comme cela.

Mme Harel: Alors...

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

Mme Harel: ...nous allons le maintenir tel que rédigé.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 805 est adopté?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 806?

Mme Harel: "Il y a accroissement au profit des légataires particuliers lorsque le bien leur est légué conjointement et qu'il y a caducité à l'égard de l'un deux."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article pose le principe de l'accroissement qui permet au légataire particulier de profiter de la caducité du legs à l'égard de l'un d'entre eux lorsque le bien leur est légué conjointement. L'article retenu s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil. Il reprend en substance le premier alinéa de l'article 868 du Code civil du Bas-Canada, en le modifiant toutefois pour préciser que les règles d'accroissement, qui sont simplement des règles d'interprétation de la volonté du testateur, ne visent que les legs particuliers.

Pour les autres espèces de legs, l'accroissement découle, en effet, de la nature même de ces legs universels ou à titre universel, en raison de la vocation à recevoir qu'ils confèrent au légataire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ici, on voit...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...l'accroissement en matière de legs particuliers. Est-ce qu'on a réglé le cas des legs à titre universel ou universels?

M. Cossette: C'est-à-dire en matière de legs universels...

M. Leduc (Saint-Laurent): Pour l'accroissement. Je ne me rappelé pas...

M. Cossette: II ne s'agit pas d'accroissement, il s'agit de vocation à la totalité de la succession. C'est la vocation, comme c'est mentionné dans la deuxième partie du commentaire.

Une voix: "Pour les autres espèces..." M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui. "Pour les autres espèces de legs, l'accroissement découle, en effet, de la nature même de ces legs universels ou a titre universel, en raison de la vocation à recevoir..." Ah ouil

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Oui. L'article 806 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.

M. Cossette: C'est l'article 868 du Code civil actuel.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 806 est adopté. L'article 807?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, vous permettez...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...à l'article 868, on dit "au profit des légataires". On doit couvrir également les legs à titre universel et universels, alors qu'ici on ne parle que de legs à titre particulier.

M. Pineau: L'article 868 du Code civii du Bas-Canada est placé dans la section relative aux legs en général.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je me demande s'il n'y a pas lieu qu'on maintienne cela également pour le legs à titre universel.

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Je voudrais simplement préciser qu'actuellement l'article 868 est interprété comme ne s'appliquant qu'au legs particulier.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui? M. Charbonneau (Pierre): Oui.

Mme Harel: Alors, l'article rédigé vient se conformer un peu au droit actuel.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que, dans le Code du Bas-Canada, il était question d'accroissement pour les legs universels ou à titre universel? Il me semble...

M. Charbonneau (Pierre): Je ne crois pas. Pour le legs universel ou à titre universel, ce qui remplace l'accroissement, c'est la vocation qui est rattachée au legs.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 868 est dans le chapitre des legs en général, mais il serait seulement pour les legs à titre particulier.

M. Pineau: II n'y a pas sa place en définitive.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 807 est adopté.

Mme Harel: L'article 806 est adopté. M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 806.

Le Président (M. Gagnon): L'article 806 avait déjà été adopté.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non, on était à l'article 806.

Mme Harel: II avait déjà été adopté, mais nous avions repris...

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Mme Harel: ...nos discussions sur l'article.

Le Président (M. Gagnon): Je l'avais inscrit comme adopté.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 807?

Mme Harel: "Le legs particulier est présumé fait conjointement lorsqu'il est fait par une seule et même disposition et que le testateur n'a pas assigné la part de chacun des colégataires dans le bien légué ou qu'il leur a assigné des quotes-parts égales."

Le Président (M. Gagnon): Des commentaires.

M. Cossette: Cet article envisage deux cas où le legs est présumé être fait conjointement à plusieurs légataires particuliers, condition essentielle à l'application du principe d'accroissement. Il précise ainsi que le legs particulier est présumé fait conjointement lorsqu'il est fait par une seule et même disposition et que le testateur n'a pas assigné la part de chacun des colégataires dans le bien légué ou qu'il leur a assigné des quotes-parts égales dans le partage du bien. Constitue un legs conjoint celui par lequel le testateur laisse un immeuble, par exemple, à ses trois fils sans plus ou à ses trois fils chacun pour un tiers ou en parts égales.

L'article proposé reproduit pour l'essentiel l'article 868 du Code civil du Bas-Canada. La règle qu'il comporte demeure une présomption qui n'a rien d'impératif, le testateur pouvant écarter en tout temps son application comme il peut d'ailleurs le faire en regard des autres règles d'accroissement.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 807 est adopté.

Nous suspendons la séance pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 34)

(Reprise à 16 h 40)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

L'article 808, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "Le legs particulier est encore présumé fait conjointement lorsque tout le bien a été légué par le même acte à plusieurs personnes séparément."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article illustre un autre cas où le legs particulier est présumé être conjoint. Il édicte que le legs est aussi présumé fait conjointement lorsque tout le bien a été légué par le même testament à plusieurs personnes séparément. Il en est ainsi, par exemple, lorsque le testateur lègue un immeuble à son père dans l'une des clauses de son testament tout en léguant le

même immeuble à son fils par une autre clause du testament. L'article présume alors la volonté du testateur de léguer l'immeuble conjointement à son père et à son fils. La règle proposée ne distingue pas suivant que le bien légué est divisible ou indivisible, contrairement au droit actuel qui ne présume le legs conjoint que si le bien est indivisible. La position retenue est conforme aux propositions de l'Office de révision du Code civil et se rapproche de l'ancien droit où la situation visée par l'article emportait la présomption la plus forte qui soit que le legs avait été fait conjointement.

Le Président (M. Gagnon): D'accord? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est une règle nouvelle, enfin.

M. Cossette: Quant à la divisibilité et à l'indivisibilité.

M. Leduc (Saint-Laurent): En fait, il peut y avoir... On pourrait peut-être considérer cela comme une contradiction, un testament qui contiendrait deux clauses. Dans une première clause, il est dit: Je donne tel bien à X et, ensuite, je donne tel autre bien à Y. Je vous dis que c'est tout un tour de force que de dire: Cela voulait dire que je voulais les donner aux deux. Il doit être confus un peu, j'ai l'impression.

M. Cossette: Je pense bien qu'un bon notaire comme vous ne ferait pas cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Non. Des voix: Ha! Ha!

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ne doit pas se trouver dans les testaments notariés ou faits par un...

M. Cossette: C'est surtout dans les testaments olographes.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

M. Cossette: C'est une solution. On a choisi celle-là qui est dans le sens du respect de la volonté du testateur plutôt que de dire: Ce legs est caduc parce qu'il est contradictoire, en somme.

Le Président (M. Gagnon): L'article 808 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 809?

Mme Harel: "La condition impossible ou contraire à l'ordre public est réputée non écrite." Il y a un amendement qu'on fera plus tard.

Le Président (M. Gagnon): D'accord? Commentaire.

Mme Harel: M. le Président, à l'article 809, l'amendement consiste à ajouter un deuxième alinéa qui se lirait comme suit: "La disposition testamentaire limitant en cas de remariage les droits du conjoint survivant est réputée non écrite."

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve, votre amendement ajoute l'article 809.1, alors que vous en faites un deuxième alinéa. On va donc modifier l'amendement.

Mme Harel: Je vais d'abord vous donner le sens de cet amendement. L'article 13 de la Charte des droits et libertés de la personne permet actuellement de déclarer invalides les clauses de viduité, mais l'amendement vise à supprimer tout doute qui pourrait subsister à cet égard et présente l'avantage d'attirer l'attention directement, spécifiquement sur l'absence d'effet de ce genre de clause testamentaire.

Nous allons vous présenter une proposition d'amendement pour ajouter un deuxième alinéa à l'article 809, mais la proposition d'amendement n'est pas encore rédigée.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on doit suspendre l'article?

Mme Harel: Oui. Elle sera dans le sens de ce qui a déjà été déposé.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Au lieu d'un article additionnel, que ce soit 809.1 comme sur le document que vous avez en main, ce sera plutôt un alinéa additionnel à l'article 809. Est-ce bien cela?

Le Président (M. Gagnon): On peut modifier exactement votre amendement.

Mme Longtin: En fait, il s'agirait d'un deuxième alinéa parce que, finalement, c'est une clause qu'on pourrait considérer comme contraire à l'ordre public.

Mme Harel: Je fais donc lecture de l'amendement qui consiste à ajouter un deuxième alinéa à l'article 809 qui se lirait comme suit: "II en est ainsi de la disposition testamentaire limitant, dans le cas de remariage, les droits du conjoint survivant."

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que

cet amendement est adopté? Est-ce qu'il y a des commentaires? Oui.

Mme Harel: Je peux en faire lecture: "II en est ainsi de la disposition testamentaire limitant, dans le cas de remariage, les droits du conjoint survivant."

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des commentaires à ajouter sur l'article? Les commentaires sur l'amendement ont été lus, je crois.

Mme Harel: Le commentaire a été lu.

Le Président (M. Gagnon): II a été lu.

Maintenant, est-ce qu'il y a des commentaires à ajouter sur l'article?

M. Cossette: Sur l'article 809 tel qu'il apparaît dans le projet de loi 20. Cet article reprend une règle fondamentale énoncée à l'article 760 du Code civil du Bas-Canada et reprise à l'article 300 du projet de l'Office de révision du Code civil, une règle voulant que la condition impossible apposée à un legs ou qui est contraire à l'ordre public est réputée non écrite et donc sans effet sur le legs qui demeure valide.

Cette règle souffre toutefois des exceptions admises lorsque la condition a été la cause impulsive et déterminante du testateur ou que ce dernier a expressément surbordonné l'exécution du legs à l'accomplissement de la condition. On annulerait alors la disposition testamentaire tout entière.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, les bonnes moeurs, ça n'existe plus?

M. Cossette: C'est-à-dire que ce n'est pas contre les bonnes moeurs.

Mme Longtin: La question des bonnes moeurs étant considérée incluse dans celle d'ordre public.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah boni L'Office de révision proposait et indiquait, dans son article 300: la condition impossible ou contraire aux bonnes moeurs ou aux lois ou à l'ordre public. Il parlait de lois également. Est-ce compris dans l'ordre public, les lois?

Mme Longtin: II y a des lois qui sont d'ordre public et il y a des lois qui ne sont pas d'ordre public, qui sont supplétives de volontés ou indicatives de situations.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous n'avez pas jugé bon de l'insérer.

M. Pineau: Cela va de soi.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va de soi.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que c'est ajouté beaucoup? Je ne pense pas qu'on changerait beaucoup l'article en indiquant: "aux bonnes moeurs et aux lois".

Le Président (M. Gagnon): J'ai beaucoup de difficulté à vous comprendre. Je sais que les commentaires qui viennent de se faire, qui sont peut-être importants...

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela éviterait peut-être des interprétations et peut-être même des procès, des dicussions laborieuses, et cela ne surchargerait sûrement pas l'article si on ajoutait "impossible ou contraire aux bonnes moeurs et aux lois". On fait un code justement pour que ce soit explicite.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je pense qu'à partir du moment où on dit que la condition contraire à l'ordre public est réputée non écrite, il va de soi que la condition qui est contraire à une loi imperative ou à une loi d'ordre public va à l'encontre de l'ordre public. Donc, l'ordre public sans aucun doute va inclure la loi impérative.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je crois que madame indiquait tantôt que ce n'était pas nécessairement d'ordre public, les lois.

Mme Longtin: Elles ne sont pas d'ordre public. Mais une loi qui crée un devoir ou une loi qui interdit de faire tel type d'acte est d'ordre public. Une infraction... Si je fais un legs à la condition qu'on commette un vol, c'est contraire à l'ordre public.

M. Pineau: Une disposition limitant au cas de remariage les droits du conjoint survivant, cela va contre l'ordre public...

M. Cossette: Actuel. M. Pineau: ...actuel.

Mme Longtin: Mais le concept d'ordre public est plus large que le concept de loi impérative puisqu'il peut y avoir une série d'actes qui ne sont pas... On pense aux bonnes moeurs, entre autres, parce qu'il y a quand même certains actes contraires à la morale et non contraires à une loi et qui

pourraient être considérés comme contraires à l'ordre public.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'amendement à l'article 809 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 809 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 810?

Mme Harel: "810. La clause pénale ayant pour but d'empêcher l'héritier ou le légataire particulier de contester la validité de tout ou partie du testament est réputée non écrite. "Il en est de même de l'exhérédation prenant la forme d'une clause pénale visant le même but."

Le Président (M. Gagnon): Les commentaires, Me Cossette.

M. Cossette: Cet article est de droit nouveau. Il considère comme non écrites les clauses par lesquelles un testateur soumettait l'exécution d'un legs à la non-contestation du testament par le légataire.

En droit actuel, la clause pénale est considérée valide lorsqu'elle vise dans l'intention du testateur à empêcher des poursuites vexatoires ou futiles concernant la validité du testament. Lorsqu'on la considère nulle, c'est que le testateur a voulu par là assurer l'exécution d'un testament qu'il savait nul, mais c'est alors la nullité des dispositions testamentaires qui entraîne celle de la clause.

La solution retenue qui s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil a paru devoir s'imposer, considérant que le droit de contester judiciairement un testament constitue un droit fondamental et qu'il revient aux tribunaux de décider des dommages pouvant résulter de l'exercice abusif de ce droit.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 810 est adopté. Article 811?

Mme Harel: "811. Le legs fait au notaire qui reçoit le testament est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament. "Il en est de même du legs fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré."

Le Président (M. Gagnon): Les commentaires.

M. Cossette: D'ailleurs, cela n'arrive pas ces choses-là. Le commentaire à l'article 811 est le suivant: Cet article vise à éviter les situations de conflits d'intérêts dans lesquelles peut se trouver le notaire qui reçoit le testament. Le premier alinéa rend ainsi sans effet le legs qui lui est fait en laissant toutefois subsister les autres dispositions du testament. Le second alinéa étend la règle du premier alinéa au legs fait au conjoint du notaire ou à l'un de ses parents au premier degré.

L'article proposé reprend en substance des règles actuellement prévues à l'article 846 du Code civil du Bas-Canada et également proposées par l'Office de révision du Code civil à l'article 302 du projet.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je suis d'accord avec l'article, mais il y a des cas qui pourraient s'apparenter aux cas prévus à l'article 811 et qui ne sont pas couverts. C'est le cas du testament fait par un avocat. À ce moment-là, il peut s'avantager, il peut avantager son épouse, il peut avantager à peu près n'importe qui.

M. Pineau: Mais il ne reçoit pas le testament.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, il reçoit le testament. On sait comment cela se passe. C'est l'avocat, sûrement, qui prépare le testament. Je fais confiance à mes collègues les avocats et les avocates.

Mme Longtin: En fait, c'est parce que le testament qui serait fait par un avocat, n'étant pas authentique, devra nécessairement être vérifié. Il semblerait qu'à ce moment-là on puisse soulever qu'il y ait eu des influences indues et des captations pour faire...

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous pensez que c'est parce qu'il va être vérifié que cela va être meilleur?

M. Cossette: C'est-à-dire que c'est à l'occasion de la vérification que cela pourra être...

M. Leduc (Saint-Laurent): II faudrait que vous ayez d'autres arguments que celui-ci. Pardon?

M. Cossette: C'est à l'occasion de la vérification que le problème de la captation pourra être soulevé ou découvert.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, quand on vérifie un testament, c'est simplement pour pouvoir en délivrer des copies. On

constate s'il est conforme aux exigences quant à sa rédaction, non pas quant au fond et au contenu du testament, pas du tout. La vérification n'a pas cette fin-là du tout. En tout cas, je...

M. Cossette: La procédure de vérification permettra peut-être de découvrir l'influence indue qu'aura exercée la personne qui aura rédigé le testament pour le testateur.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y a une chose à considérer aujourd'hui, c'est que le Barreau a un registre des testaments. Je me demande si on aurait pas pu faire référence à ce registre au moins pour ces testaments qui font l'objet d'un enregistrement ou d'une inscription dans les registres. Évidemment, je ne dirais pas que c'est discriminatoire, pas du tout, parce que je suis d'accord avec la règle. Vous pouvez avoir des cas où cela pourrait certainement... L'article devrait peut-être couvrir les testaments faits par les avocats.

M. Cossette: Évidemment, vous faites allusion au testament devant deux témoins, qui n'a pas de caractère authentique et qui peut être écrit par...

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, c'est vrai.

M. Cossette: ...une personne autre qu'un avocat même.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est vrai, oui.

M. Cossette: Autrement dit, le testament devant témoins n'a pas d'auteur connu, en tout cas à sa face même, tandis que, pour le testament notarié, on sait qui l'a fait. Cela restera une question de preuve. Il y aura toujours une possibilité de démontrer qu'il y a eu captation dans un cas. Ce sont les règles habituelles qui s'appliqueront.

M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment-là, quelle serait la règle habituelle?

M. Cossette: L'influence indue exercée, la pression indue exercée sur un testateur pour obtenir un legs.

M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être que le notaire est plus près du curé que l'avocat, je ne sais pas, si on veut parler du curé.

Le Président (M. Gagnon): L'article 811 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 812?

Mme Harel: "Le legs fait au témoin, même en surnombre, est sans effet, mais laisse subsister les autres dispositions du testament. "Il en est de même, pour la partie qui excède sa rémunération, du legs fait en faveur du liquidateur ou d'un autre administrateur du bien d'autrui désigné au testament s'il agit comme témoin.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

M. Cossette: Cet article, comme le précédent, veut permettre d'éviter les situations de conflits d'intérêts tout en préservant l'expression des volontés du testateur.

Le premier alinéa annule le legs fait au témoin, même si la présence de tous n'était pas requise pour la validité du testament, en précisant toutefois que les autres dispositions du testament demeurent valides. Il ne reprend pas, suivant en cela les propositions de l'Office de révision du Code civil à l'article 302, la règle actuelle énoncée à l'article 846 du Code civil du Bas-Canada qui déclare nul le legs fait au conjoint d'un témoin ou à ses proches parents. Cette position se justifie, car le legs à ces personnes ne paraît pas en lui-même conflictuel et il peut être tout à fait conforme aux volontés du testateur.

Le second alinéa étend la règle du premier au legs fait au profit du liquidateur ou d'un autre administrateur désigné qui agit comme témoin pour la partie du legs qui excède sa rémunération.

Le Président (M. Gagnon): Y a-t-il d'autres commentaires?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, cela va.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va pour l'article 812. Il y a un amendement, un ajouté, 812.1.

Le Président (M. Gagnon): On ajoute...

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'on a l'amendement?

Mme Harel: Nous allons...

Le Président (M. Gagnon): L'article 812 est adopté.

Mme Harel: ...insérer, après l'article 812, l'article 812.1, qui se lit comme suit:

"Le legs fait à un propriétaire, à un administrateur ou à un employé d'établissement de santé ou de services sociaux qui n'est ni le conjoint, ni un proche parent du testateur est sans effet s'il a été fait à l'époque où le testateur y était hébergé ou pris en charge. "Il en est de même du legs fait aux membres de la famille d'accueil à l'époque où le testateur y était hébergé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

Mme Harel: Le commentaire sur l'amendement.

Le Président (M. Gagnon): Oui. (17 heures)

Mme Harel: Cet amendement rapatrie au Code civil, en la complétant, une règle qui se trouve actuellement énoncée à l'article 155 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

La règle proposée vise à éviter les risques évidents de captation que comportent les situations couvertes par l'article. Le légataire peut très bien en effet profiter de la vulnérabilité du testateur dans les circonstances pour soumettre la qualité des soins ou services qu'il lui doit à la condition que le testateur lui consente une libéralité.

Une exception est toutefois prévue à l'égard des legs faits au conjoint ou aux proches parents du testateur. L'intensité des liens affectifs qui unissent normalement le testateur aux membres de sa famille permet alors de présumer la libre expression de ses volontés et l'absence de captation.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): On dit: "ni le conjoint", cela me va, mais quand on dit: "ni un proche parent", cela va jusqu'où? Évidemment, c'est un commentaire de la Chambre des notaires. J'avais l'impression qu'ils avaient indiqué: "ou d'un proche parent", voulant dire que sans doute on pourrait mettre des balises pour le proche parent. Je ne pense pas que la Chambre des notaires ait voulu ce libellé dans l'article.

Mme Longtin: En fait, la notion de proche parent n'est certainement pas une notion précise. Cela n'indique pas nécessairement s'il faut être du troisième degré ou du quatrième degré ou à l'intérieur de ces degrés. C'est quand même une notion qui est utilisée dans d'autres parties du code, entre autres au Livre premier, lorsqu'on va demander le consentement aux soins. Cela laisse place, il est certain, à une certaine interprétation, parce que, évidemment, si vous êtes frère, soeur, enfant ou père ou mère, vous êtes nécessairement un proche parent. Si vous êtes un cousin germain, c'est déjà peut-être un peu plus éloigné, mais si vous êtes tous les deux dans la région de Chibougamau et que vous êtes les deux seuls membres de votre famille dans cette région, vous pouvez être un proche parent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, je suis contre cet article.

Mme Harel: L'article? En général?

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 812.1, je suis contre cela.

Mme Harel: Contre le principe?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui. Je me dis: En pratique, il va falloir faire un procès chaque fois. Ecoutez, est-ce qu'on va vérifier chaque fois qu'il y a un testament s'il n'était pas dans un établissement où il y avait des parents ou pas de parents? Cela vient que ça n'a pas de bon sens. Quand on va régler une succession et qu'on va se poser la question s'il y a un legs de fait, est-ce qu'on va aller vérifier s'il était dans un établissement de santé, s'il est décédé ou, lorsqu'il a fait son testament, s'il était dans un établissement de santé? Cela n'a pas de bon sens.

Mme Harel: M. le député de Saint-Laurent, c'est actuellement une disposition qui trouve application présentement, d'une part. Il faut, j'imagine, mettre en balance les inconvénients de supprimer une telle disposition, compte tenu peut-être des abus qui ont pu être constatés dans le passé, mais aussi compte tenu de ce qu'on sait du degré de dénuement des personnes seules qui se trouvent dans ce type d'établissements et qui sont à tous les points de vue, pas seulement physique, mais affectif, très dépendants des personnes qui leur rendent service.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il faut qu'il ait fait son testament lorsqu'il était là ou après? N'y aurait-il pas lieu ici de considérer le cas où il n'est plus là et où il a connu ces gens?

Mme Longtin: Le testament a été fait à l'époque où il y était hébergé ou pris en charge.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela a été fait à l'époque où... Il va falloir vérifier les dates, à savoir s'il était là.

M. Cossette: Actuellement, c'est ce qu'un bon notaire devrait faire, parce que

c'est le droit actuel.

M. Leduc (Saint-Laurent): Chaque fois qu'on va régler une succession, il faut aller voir s'il n'a pas été hébergé.

M. Cossette: Quand vous voyez "dont acte" à l'HÔtel-Dieu de Québec ou "dont acte" à l'Hôpital général de Québec, cela doit vous allumer une lumière rouge et vous devez vérifier. Je pense que c'est le droit actuel. Il s'agit d'une récupération du Code civil purement et simplement.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est une exception qui ouvre la porte. Je trouve que c'est aller assez loin. J'ai de fortes réticences, il me semble.

Mme Harel: Une exception qui ouvre la porte à quoi, M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): II y aurait peut-être lieu que, tantôt, on doive également mettre des restrictions pour les legs qu'on va pouvoir faire.

Mme Harel: Mais, c'est l'inverse qui peut ouvrir la porte à des abus.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire l'inverse. Là, on ne peut plus donner de legs à ces gens-là. Mais pourquoi pas? Écoutez donc. Si moi, je suis sain d'esprit et que j'ai quelqu'un qui a soin de moi, qui se dévoue pour moi, pourquoi ne lui donnerais-je pas quelque chose? C'est absolument logique et raisonnable.

Mme Harel: Nous allons...

M. Cossette: Vous pouvez le payer au fur et à mesure.

M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai vu des cas où on a fait des legs et où cela était absolument... J'ai eu des cas pratiques où je suis allé faire des testaments dans ces établissements et on a donné, je ne sais pas, 500 $, 1000 $, à des gens qui se dévouaient beaucoup. Je ne pense pas qu'ils le faisaient pour ces 500 $ ou ces 1000 $. Pas du tout.

M. Cossette: Mais pas après 1972, parce que les legs seraient nuls. Depuis 1972, c'est...

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense que c'était...

M. Cossette: Oui. Depuis 1972, c'est la règle. Il me semble que c'est cela, la date de l'adoption de la loi.

M. Leduc (Saint-Laurent): En 1972?

M. Cossette: II me semble que c'est 1972.

M. Leduc (Saint-Laurent): En tout cas, je pense qu'on en a fait. Ce n'était peut-être pas correct, mais... J'émets, en tout cas, une réserve. Je me dis: On empêche de faire des legs à des personnes qui, peut-être, méritent...

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...une certaine récompense. Vous dites: Peut-être qu'on devrait les payer au fur et à mesure. Il y en a des fois, vous savez, qui aiment mieux que ce soit leur légataire qui donne qu'eux-mêmes. Ils n'aiment pas se dépouiller. Alors...

M. Cassette: Je cherchais l'article correspondant...

M. Leduc (Saint-Laurent): ...est-ce que c'est mauvais? Est-ce qu'on peut considérer que c'est de la captation, que c'est de l'influence indue? Pas du tout. Je n'aime pas l'article, en tout cas.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

M. Leduc (Saint-Laurent): Dans quelle loi était-ce? Vous dites: C'était...

M. Cossette: Dans la Loi sur les...

Mme Harel: Services de santé...

M. Cossette: ...services de santé...

M. Leduc (Saint-Laurent): Les établissements de santé, je suppose?

M. Cossette: ...et les services sociaux.

Mme Harel: ...et les services sociaux.

M. Leduc (Saint-Laurent): Qui dit quoi?

Mme Harel: Pendant que Me Cossette recherche-Le Président (M. Gagnon): Oui, Mme la...

Mme Harel: ...le texte de cette...

M. Leduc (Saint-Laurent): Elle dit à peu près la même chose, quoi?

Mme Harel: ...disposition, je voudrais... Le Président (M. Gagnon): Excusez...

Mme Harel: ...simplement rappeler au

député de Saint-Laurent qu'il s'agit en général de personnes dont on dit qu'elles sont en perte d'autonomie. C'est maintenant l'expression qui leur est consacrée. Il pourrait se trouver que ces pratiques puissent devenir discriminatoires où servent mieux certaines personnes, en laissant entendre à certaines autres qu'elles pourraient obtenir un traitement équivalent si tant est qu'elles manifestaient la même générosité; il faut bien savoir que les employés qui sont en contact avec ces personnes ou les familles qui le sont obtiennent rémunération pour le service qui est rendu.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, oui.

Mme Harel: D'autre part, la relation personnelle ou affective qu'elles peuvent avoir avec ces personnes en perte d'autonomie ne doit certainement pas être entachée d'un souci de s'avantager. Lorsqu'on fait le partage des inconvénients dans un système comme le nôtre où maintenant l'institution reçoit de plus en plus la personne en perte d'autonomie, je pense qu'il était sage de la part du législateur, en 1972, de prévoir de telles dispositions.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée, est-ce que je pourrais vous poser...

M. Leduc (Saint-Laurent): Si on me parle de personnes en perte "d'autonomie, parfaitement. Mais vous avez des personnes qui ne sont pas en perte d'autonomie du tout dans ces établissements, qui ont toutes leurs facultés et qui veulent bien récompenser, d'une façon bien des fois marginale. Remarquez bien que, s'il s'agissait de donner tous ses biens et si c'était une fortune très importante, mais bien des fois, ils n'ont même pas d'enfant, ils n'ont même pas de parents proches. Alors, pourquoi ne leur permettrait-on pas de donner 500 $ ou 1000 $?

Mme Harel: Celles qui sont en pleine forme physique et mentale ne sont pas habituellement dans ce type d'établissements ou, en tout cas, n'y font pas un séjour dont la durée excède...

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non.

Mme Harel: ...les soins qui doivent leur être prodigués pour améliorer leur état de santé. Il faut bien voir qu'il ne s'agit pas d'atténuer les problèmes qui pourraient se présenter lorsqu'on fait un séjour de courte durée dans un établissement. Il faut bien voir que cette disposition trouve son application dans des séjours de longue durée et ceux-ci présupposent un état de dépendance, un état de dénuement physique ou mental.

M. Leduc (Saint-Laurent): Physique, d'accord; mental, c'est différent. À ce moment-là, elle n'est pas en mesure de faire son testament.

Mme Harel: Un état de dénuement physique, tout au moins, qui laisse la personne souvent plus soumise au bon vouloir des gens qui lui dispensent les soins.

M. Leduc (Saint-Laurent): De toute façon, on ne l'avait pas mis dans le code et je pense qu'on ne devrait pas le mettre. Maintenant, vous dites: C'est dans la Loi sur les services de santé...

Mme Harel: L'article 155 de 1971 se lit comme suit: "Le propriétaire, un membre du conseil d'administration..." Je trouve cela très sage, incidemment, parce que ces personnes peuvent avoir une décision à prendre quant à l'hébergement. Je poursuis la lecture de l'article: "...ou une personne employée dans un établissement ou un membre d'une famille d'accueil ne peut solliciter ni accepter un don ou un legs d'une personne hébergée dans cet établissement ou prise en charge par cette famille d'accueil."

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve, cela exclurait-il, par exemple, quelqu'un qui voudrait faire un don à une fondation? Je pense à un foyer, chez nous, qui a une fondation. Ce serait impossible, à ce moment-là?

M. Leduc (Saint-Laurent): Une fondation du foyer?

Le Président (M. Gagnon): Du foyer.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce serait possible.

M. Cossette: Oui, c'est une personne différente, ce n'est pas le propriétaire ou le...

Le Président (M. Gagnon): Alors, vous excluez l'individu, l'employé ou le propriétaire.

Mme Harel: Dans sa relation directe, mais ce ne serait pas exclu, par exemple, dans un centre d'accueil, qu'il puisse y avoir une fondation. Justement, cela tend à se développer présentement.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement.

Mme Harel: Des personnes qui sont seules pourraient léguer des biens pour le bénéfice, le bien-être et le mieux-être de leur...

Le Président (M. Gagnon): C'est peut-être là la volonté qui s'exprime, en tout cas pour les gens que je connais et que je côtoie, de donner des biens à la fondation, c'est-à-dire à l'établissement comme tel, plutôt qu'au propriétaire; c'est ce qu'il faut exclure.

M. Leduc (Saint-Laurent): On prend le cas hypothétique et peut-être réel aussi de quelqu'un qui pourrait sortir et faire son testament dans un bureau de notaire. À ce moment-là, on n'indiquerait pas où le testament est fait. En tout cas, vous avez toute une preuve à établir.

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: J'aimerais savoir si le député de Saint-Laurent a des objections sur le fond ou sur la forme, c'est-à-dire sur le fond de cette proposition ou si ces objections ne portent pas plus sur les difficultés d'application pour le notaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, les deux. Je pense que c'est surtout sur le fond. J'ai beaucoup de difficulté à accepter qu'on limite le droit de quelqu'un de disposer de ses biens comme il l'entend. Évidemment, on va en parler tantôt. Pour ces fins-là, j'essaie de comprendre pourquoi on empêcherait quelqu'un qui a ses facultés... Évidemment, si vous dites qu'il est en perte d'autonomie mentale, cela veut dire qu'il n'est pas en mesure de faire son testament, à ce moment-là; mais, s'il a toutes ses facultés, je pense que c'est le cas, non pas dans 50 % des cas, mais dans beaucoup de cas, je ne vois pas pourquoi on l'en empêcherait, s'il veut le faire. De toute façon, il pourrait le faire par un don. Pourquoi ne peut-il pas... Vous dites?

Mme Harel: Ni un don, ni un legs.

M. Leduc (Saint-Laurent): En tout cas, tantôt, Me Cossette disait: II pourrait le payer au fur et à mesure. Il ne le pourrait même pas.

Mme Harel: Ah non!

M. Cossette: Pour payer des services, il n'y a pas de problème, je pense.

Mme Harel: Ah non! C'est tout à fait interdit...

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien non, il ne peut pas.

Mme Harel: ...fort heureusement. Ni un don, ni un legs. Ces services sont déjà couverts, soit par l'État, soit par les charges qui sont à la personne. Préférez-vous que l'on attende la présence du député de Saint-Anne pour discuter de cette question?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, cela va.

Le Président (M. Gagnon): Cela va, est-ce que...

M. Leduc (Saint-Laurent): Je n'en fait pas un dogme.

Le Président (M. Gagnon): Le nouvel article 812.1 est-il adopté?

Mme Harel: Adopté.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 813?

Mme Harel: "Le legs du bien d'autrui est sans effet, sauf s'il apparaît que l'intention du testateur était d'obliger l'héritier à procurer le bien légué au légataire particulier."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. (17 h 15)

M. Cossette: Cet article énonce que le legs que prétendrait faire le testateur d'un bien qui ne lui appartient pas est sans effet, à moins qu'il ne ressorte que l'intention du testateur était d'obliger un héritier à procurer l'objet de ce legs au légataire désigné. Dans ce dernier cas, le legs est valide et charge l'héritier de procurer le bien ou d'en payer la valeur.

La règle proposée s'inspire de l'article 309 proposé par l'Office de Révision du Code civil. Il reprend en substance l'article 881 du Code civil du Bas-Canada, mais en en simplifiant la rédaction.

Le Président (M. Gagnon): D'autres commentaires?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, cela va.

Le Président (M. Gagnon): L'article 813 est adopté. Article 814?

Mme Harel: "Si l'exécution d'une charge devient trop onéreuse pour l'héritier ou pour le légataire particulier, le tribunal peut, après avoir entendu les intéressés, la modifier ou la révoquer, compte tenu de la valeur du legs, de l'intention du testateur et des circonstances."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

M. Cossette: Cet article est de droit nouveau. Il propose une solution équitable lorsque l'exécution d'une charge imposée à un héritier ou légataire particulier devient trop onéreuse pour lui. Il permet alors au tribunal de modifier ou de révoquer la charge en tenant compte de la valeur du legs, de l'intention du testateur et des circonstances après avoir entendu les intéressés.

L'article proposé permettra, dans bien des cas, d'éviter la procédure parfois longue et onéreuse de l'adoption de lois privées, ce qui est souvent la seule solution offerte pour régler des problèmes de charges désuètes ou indûment contraignantes.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai des réserves à cet article. Cela va prêter à toutes sortes d'interprétations. Prenons le cas d'un legs de 20 000 $ à la charge de faire chanter 15 000 $ de messes. Selon vous, est-ce une charge trop lourde?

M. Cossette: Non, il reste 5000 $.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si on regarde l'article, peut-être qu'on pourrait dire que c'est trop lourd. Nécessairement, si cela dépasse le legs, je pense que ce qu'il doit faire, c'est de renoncer au legs. À ce moment-là, si c'est simplement une question de quantum, comme vous le dites, si cela n'excède pas le montant du legs, pourquoi l'article 814? Laissez jouer les règles normales.

Je veux savoir ce que veut dire une charge trop onéreuse. D'abord, l'Office de révision n'a pas prévu d'article à cet effet. On ne retrouve aucun article actuellement dans le Code civil. C'est laissé à l'arbitraire du tribunal. Je n'aime pas m'en remettre toujours et à toutes les occasions au tribunal. Je pense qu'on doit avoir des règles avec lesquelles on pourrait se passer du tribunal. Imaginez-vous combien de fois on aura des causes où les gens vont dire: La charge est trop lourde...

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

M. Leduc (Saint-Laurent): ...je veux la faire diminuer par le tribunal.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

M. Pineau: M. le Président, cette disposition m'avait également frappé. C'est accorder au tribunal un pouvoir extrêmement important. Le seul critère qu'on lui donne, c'est compte tenu de la valeur du legs, de l'intention du testateur et des circonstances, et le tribunal va surtout tenir compte des circonstances qu'il voudra bien prendre en considération. C'est véritablement donner au juge un pouvoir de ministre d'équité et, dans un système de droit codifié, personnellement, j'hésiterais à donner de tels pouvoirs au juge; le juge est un diseur de droit avant d'être un ministre d'équité.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette?

M. Cossette: Vous auriez plus confiance à l'Assemblée nationale pour faire disparaître la charge?

M. Leduc (Saint-Laurent): Je vous dirais que non.

M. Cossette: Non?

M. Leduc (Saint-Laurent): Malheureusement, je dirais non, parce que j'assiste à des commissions parlementaires où on étudie les lois privées et cela m'inquiète beaucoup. Pourquoi? Parce que je pense que les parlementaires ne font peut-être pas leur travail adéquatement. Lorsqu'il s'agit de lois privées, je pense qu'on devrait les étudier au mérite, d'une façon très précise et très méticuleuse, peut-être autant qu'on le fait ici. Je ne vous cache pas qu'il n'y aurait pas beaucoup de projets de lois privés qui seraient adoptés.

Ce n'est pas parce que le Parlement ou les parlementaires ne font pas leur travail qu'on doit accepter l'article 814.

Mme Harel: Devons-nous ajouter qu'ils ne sont pas toujours dans les conditions pour faire ce travail...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est vrai.

Mme Harel: ...adéquatement.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est vrai.

Le Président (M. Gagnon): II ne faudrait peut-être pas généraliser, lorsqu'on dit que ce n'est pas parce que les...

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non, je le dis même sans aucune partisanerie...

Le Président (M. Gagnon): ...parlementaires ne font pas leur travail.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...d'aucune façon partisane. Cela se faisait auparavant...

Le Président (M. Gagnon): D'accord.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...même sous un autre gouvernement. Je ne cache pas que je n'ai pas trouvé le commentaire supplémentaire tellement éclairant.

Mme Longtin: II doit y avoir quand

même...

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: ...des cas assez nombreux où on a fait un legs assez souvent d'un terrain à charge d'y construire tel type d'institution. L'institution est prise en charge par un autre réseau. Le legs demeure. Il devient finalement quasi impossible de remplir cette charge. Et, en outre, comme il s'écoule généralement un certain temps, il devient aussi très difficile de trouver, en cas de caducité, à qui retournerait le bien. D'ailleurs, même les investissements qui ont été faits pour exécuter la charge, parce que la valeur du terrain est souvent très inférieure à la valeur des améliorations qui ont été apportées, créent une situation qui devient très difficile pour les légataires.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne dirais pas que cela change quoi que ce soit à la pertinence de l'article 814. Je pense que, si vous avez des cas particuliers, il faudrait vous adresser au gouvernement, à ce moment-là, peut-être essayer d'y remédier par une loi spéciale. On suppose que ce sont des lois spéciales pour des cas particuliers, alors qu'ici on en fait une règle générale.

Mme Harel: M. le Président, nous allons suspendre l'article 814 et examiner quelle serait la rédaction possible, peut-être pour en restreindre la portée, mais l'intention étant de diminuer le nombre de projets de loi privés qui ont à être réglés à l'Assemblée.

Le Président (M. Gagnon): Donc, l'article 814 est suspendu. L'article 815.

De la révocation du testament ou d'un legs

Mme Harel: "La révocation du testament ou d'un legs est expresse ou tacite."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est le premier d'une série qui traite de la révocation du testament ou d'un legs en édictant que celle-ci peut être expresse ou tacite. La révocation est expresse lorsqu'elle est exprimée formellement par le testateur. Elle est tacite lorsqu'elle découle de la manière d'agir du testateur, qui révèle ainsi son intention, réelle ou présumée, de révoquer son testament ou l'un des legs qui y est fait.

Le Président (M. Gagnon): Cela va pour l'article 815?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 816?

Mme Harel: Nous allons suspendre l'article 816, de façon à revoir cette disposition...

Le Président (M. Gagnon): L'article 816 est...

Mme Harel: ...dans la perspective possible d'une réserve qui pourrait venir et faire bénéficier les enfants ou la femme sans qu'il soit nécessaire de maintenir une telle disposition.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Alors, l'article 816 est suspendu. L'article 817?

Mme Harel: Le conjoint. Me Cossette a raison, il me rappelle que le conjoint peut être de sexe masculin ou féminin.

Le Président (M. Gagnon): L'article 817?

M. Leduc (Saint-Laurent): Sûrement.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "Le legs fait au conjoint antérieurement au divorce est révoque, à moins que le testateur n'ait manifesté l'intention d'avantager le conjoint malgré cette éventualité ou qu'il ne l'ait avantagé alors qu'il connaissait l'imminence du divorce."

M. le Président, ce que je viens de vous lire sera remplacé par l'amendement suivant dont je fais lecture: "Le legs fait au conjoint antérieurement au divorce est révoqué, à moins que le testateur n'ait, par des dispositions testamentaires, manifesté l'intention d'avantager le conjoint malgré cette éventualité."

Ajouter, à la fin de l'article, l'alinéa suivant, et je vais faire la lecture du deuxième alinéa: "La révocation du legs emporte celle de la désignation du conjoint comme liquidateur de la succession."

Ajouter, à la fin de cet article, l'alinéa suivant: "Les mêmes règles s'appliquent en cas de nullité du mariage prononcée du vivant des époux."

Voulez-vous que je reprenne?

Le Président (M. Gagnon): Non, cela va.

Mme Harel: Je vais faire la lecture du commentaire.

Le Président (M. Gagnon): La lecture du commentaire.

Mme Harel: La première modification apportée par cet amendement vise deux objectifs. D'abord, elle a pour but de préciser clairement que la manifestation de volonté du testateur ne peut être valable que si elle est faite dans une disposition testamentaire, puisque cette volonté concerne la transmission de ses biens à son décès. Ensuite, elle supprime l'exception prévue à la révocation du legs que constitue le fait, pour le testateur, d'avantager son conjoint alors qu'il connaissait l'imminence du divorce. Cette exception ne présente en effet aucune utilité, car elle est déjà couverte par la première: le testateur manifeste l'intention d'avantager son conjoint malgré l'éventualité prochaine du divorce.

La seconde modification apportée par l'amendement vise à combler un vide du projet, qui ne prévoit aucune règle quant aux effets de la nullité du mariage sur le legs fait antérieurement au conjoint.

Elle fait ainsi la concordance avec l'article 437 du Code civil du Québec, qui stipule que la nullité du mariage rend nulles les donations à cause de mort que les époux se sont consenties en considération du mariage. Vu le rapprochement qui existe entre le legs et la donation à cause de mort, la modification apportée a paru s'imposer dans les circonstances.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires, Me Cossette, sur l'article? Non.

M. Cossette: Je pense que le commentaire sur l'amendement remplit...

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Lorsqu'on dit "à moins que le testateur n'ait, par des dispositions testamentaires", ce seraient décidément des dispositions testamentaires antérieures au divorce.

Une voix: Oui, c'est cela.

M. Cossette: Antérieurement au divorce.

Mme Harel: C'est bien cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si c'était postérieur, cela n'aurait pas tellement de sens parce qu'on suppose, évidemment, qu'il est conscient.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Leduc (Saint-Laurent): II est divorcé à ce moment.

M. Pineau: M. le Président, dans le commentaire, on a ajouté un deuxième alinéa sur la nullité du mariage prononcé du vivant des époux et on fait état dans le commentaire, au dernier alinéa, de la concordance avec l'article 437. Est-ce que l'article du projet de loi 20 sur cette question de la donation à cause de mort et du droit de succéder n'a pas été suspendu?

Mme Longtin: L'article 671, on y est revenu et on l'a adopté.

M. Pineau: On y est revenu et on l'a adopté.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement.

Mme Longtin: Par rapport aux donations applicables dans le cas de nullité prononcée du vivant des époux, je pense que la règle est conforme à celle du Livre deuxième quant aux donations à cause de mort.

M. Pineau: Je ne sais plus comment il se lit.

M. Cossette: Quel article? M. Pineau: L'article 671.

Mme Longtin: L'article 671 se lit comme suit: "L'époux de bonne foi succède à son conjoint si la nullité du mariage est prononcée après le décès."

M. Pineau: Ah oui!

M. Leduc (Saint-Laurent): II faudrait donc que, dans ces dispositions testamentaires antérieures au divorce, le testateur indique qu'il entend maintenir le legs même si on est dans des procédures de divorce ou s'il entend divorcer. D'accord.

M. Pineau: Si le legs est fait au conjoint antérieurement au jugement de nullité du mariage...

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah ouil

M. Pineau: ...que se passe-t-il? Il est révoqué?

Mme Longtin: Par l'application de l'alinéa qui suit, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Antérieurement...

M. Pineau: Et s'il s'agit d'une succession ab intestat, elle est également...

Mme Longtin: Ici, on est du vivant des deux époux.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Mme Longtin: Alors, de toute façon, dès que la nullité est prononcée, le conjoint a perdu sa vocation successorale.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que...

Mme Longtin: Si la nullité est prononcée après le décès...

M. Pineau: Si la nullité est prononcée après le décès...

Mme Longtin: En vertu de 439 où on... M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 437.

Mme Longtin: ...traite, finalement, de la même situation...

M. Pineau: C'est la même situation.

Mme Longtin: ...des effets de l'union comme en matière de divorce...

M. Leduc (Saint-Laurent): À l'article 432, c'est sur les donations à cause de mort...

Mme Longtin: ...en faisant aussi, dans certaines circonstances, valoir les régimes matrimoniaux.

Mme Harel: Voulez-vous nous en faire lecture?

Le Président (M. Gagnon): Oui, s'il vous plaît.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, allez donc!

M. Cossette: Alors, c'est à propos d'un article qu'on a déjà adopté?

Le Président (M. Gagnon): Excusez. Alors...

Mme Harel: Voulez-vous quelques minutes de suspension?

Le Président (M. Gagnon): Oui, nous allons suspendre les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 32)

(Reprise à 17 h 42)

Le Président (M. Gagnon): La sous-commission des institutions reprend ses travaux. Nous en étions à l'article 187. Est-ce que l'amendement à l'article 187 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): 817. C'est à l'envers cela.

Le Président (M. Gagnon): Oui, effectivement, 817. Est-ce que l'amendement à l'article 817 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 817 tel qu'amendé est-il adapté?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 818?

M. Leduc (Saint-Laurent): On a sauté 816. On a adopté 817.

Le Président (M. Gagnon): L'article 818? Mme la député de Maisonneuve.

Mme Harel: "La révocation expresse est faite par testament postérieur portant explicitement déclaration du changement de volonté. "La révocation qui ne vise pas spécialement l'acte révoqué ne cesse pas d'être expresse."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

M. Cossette: Cet article, comme l'article 892 du Code civil du Bas-Canada, traite de la révocation expresse en édictant qu'elle se fait par un testament dans lequel le testateur déclare explicitement révoqués son ou ses testaments antérieurs, en tout ou en partie. Il précise que la révocation ne cesse pas d'être expresse, même si elle ne vise pas spécialement le testament révoqué. Ainsi, une clause qui dirait: "révoquer tout testament antérieur" constitue, malgré sa généralité, une révocation expresse. En exigeant que la révocation expresse soit faite par testament, l'article proposé modifie le droit actuel qui admet que la révocation puisse se faire au moyen de toute espèce d'écrit.

Cette modification s'impose considérant que la révocation constitue une manifestation de volonté quant à la dévolution des biens d'une personne, manifestation qui relève du domaine des testaments. Elle n'en porte d'ailleurs pas de conséquence énorme, compte tenu du peu de formalités qu'exigent certaines formes de testaments dont le testament olographe.

La précision en effet de reconnaître la valeur de révocation expresse à une clause révocatoire formulée d'une manière générale vise à empêcher que l'interprétation contraire donnée par une jurisprudence isolée ne soit généralisée. Cette précision s'inspire de l'article 279 du projet de l'Office de

révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'exigence est un peu plus forte. Maintenant, il faudra annuler ou révoquer un testament par un nouveau testament ou, en tout cas, un document qui a tous les attributs d'un testament. Les notaires ne s'en plaindront pas. C'est sûr qu'en fait on facilite un peu moins la révocation ou l'annulation de testaments. Quelle en était la raison principale? Un testament est un document important et, pour le révoquer, il faut y mettre l'effort.

Mme Longtin: Je pense que c'est cela. C'est de la même façon qu'on institue certaines formalités pour s'assurer que la volonté qui est dans l'écrit est bien celle du testateur lorsqu'il teste. De la même façon, on vise à s'assurer que c'est bien sa volonté lorsqu'il dit que son testament antérieur est nul.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, dans la mesure où le testament postérieur ne porterait pas explicitement déclaration du changement de volonté, est-ce qu'on pourrait néanmoins "valider" ce testament sur la base des articles 764 ou 765, que nous n'avons pas encore envisagés et qui ont été suspendus, mais dont il faudra parler?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, vous avez sûrement raison. Si vous me permettez, si on a un deuxième testament dans lequel on dispose de tous les biens, mais sans faire une déclaration expresse que cela annule les testaments antérieurs...

M. Cossette: II y a révocation.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...il y a révocation.

Mme Longtin: II teste par le biais de l'article 821.

M. Charbomeau (Pierre): Peut-être pourriez-vous répéter?

M. Pineau: Dans la mesure où le testament postérieur ne porterait pas explicitement une déclaration du changement de volonté, est-ce qu'on pourrait se dégager de la règle de l'article 818 qui veut que cette révocation porte cette indication? Est-ce qu'on pourrait valider ce testament postérieur par l'application de 764 ou 765, parce que c'est une formalité, en définitive, qui n'est pas respectée?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Je pense que l'article 764 ne trouverait application que s'il s'agit d'une formalité externe, finalement, de forme, enfin une formalité sur l'accomplissement et qu'on puisse quand même considérer que toutes les conditions sont requises pour que cela soit un autre testament. Maintenant, je pense que, pour la révocation qui ne porterait pas explicitement, donc cela veut dire que ce n'est pas suffisamment clair, il faudrait, s'il n'y a aucune autre disposition dans le testament... Enfin, s'il teste des biens d'une autre façon, on tombe sur la révocation tacite, mais, s'il n'en teste pas, à ce moment-là, il faudrait, si l'article 765 demeure, aller un petit peu plus loin pour vérifier l'intention réelle, parce que c'est un testament, et les mêmes formes, les mêmes conditions de validité s'appliqueraient.

M. Pineau: M. le Président, peut-être pourra-t-on reposer la même question lorsqu'on adoptera les articles 764 et 765?

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 818 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 819.

Mme Harel: "Le testament qui en révoque un autre peut être fait dans une forme différente de celle du testament révoqué. "La révocation contenue dans un testament nul pour inobservation de quelque formalité obligatoire est sans effet."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

M. Cossette: Cet article complète le précédent. Il précise que, si la révocation doit être faite par testament, comme l'exige désormais le projet, il importe peu cependant que la forme du testament révocatoire ne soit pas identique à celle du testament révoqué. Cette règle conforme au droit actuel, même si elle est nouvelle, permet ainsi au testateur de révoquer un testament notarié au moyen d'une clause stipulée postérieurement dans un testament olographe ou devant témoins.

L'article proposé reprend aussi la règle du deuxième alinéa de l'article 895 du Code civil du Bas-Canada en précisant que, si le testament révocatoire est nul pour défaut de forme, la révocation qui y est contenue est elle-même nulle.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il pour l'article 819? L'article 819 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 820.

Mme Harel: "La destruction, la lacération ou la rature du testament olographe ou devant témoins emporte révocation s'il est établi qu'elle a été faite délibérément par le testateur ou sur son ordre. De même, la rature d'une de leurs dispositions emporte révocation du legs qui y est fait. "La destruction ou la perte du testament connue du testateur alors qu'il était en mesure de le remplacer emporte aussi révocation."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article illustre un cas de révocation tacite. Le premier alinéa reprend le droit actuel énoncé à l'article 892 du Code civil du Bas-Canada en ce sens que la destruction, la lacération ou la rature du testament olographe ou devant témoins emporte révocation s'il est démontré qu'elle a été faite délibérément par le testateur ou suivant ses indications.

À défaut d'une telle preuve, on doit présumer que le testament a été mis en cet état par un tiers et non par le testateur.

L'alinéa précise aussi que la rature d'une des dispositions de ces testaments emporte de même révocation du legs qui y est fait, complétant ainsi le droit actuel.

Le second alinéa ajoute que le testament est également révoqué s'il a été perdu ou détruit par cas fortuit ou par le fait des tiers et que le testateur ayant eu connaissance de cette perte n'a pas remplacé le testament alors qu'il était en mesure de le faire.

Cette solution est raisonnable considérant que, si le testateur avait tenu aux dispositions du testament perdu ou détruit, il se serait empressé de le refaire, s'il le pouvait.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Aucun commentaire?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Il n'y a pas de commentaire.

Le Président (M. Gagnon): L'article 820 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

J'appelle l'article 821. Oui, Me Pineau.

M. Pineau: Peut-être serait-il utile de lire le commentaire supplémentaire?

M. Cossette: Oui. L'article ne traite que du testament olographe ou devant témoins. Le testament notarié n'est pas abordé car, si on en détruit la copie, la minute demeure chez le notaire.

Par ailleurs, l'article ne retient pas les propositions de l'Office de révision du Code civil à l'article 281 à l'effet de présumer a priori la révocation en cas de destruction, de rature ou de lacération et de n'écarter cette présomption que sur preuve qu'elle n'émanait pas du testateur.

Le maintien du droit actuel sur ce point a paru assurer une meilleure protection des volontés écrites du défunt considérant les risques élevés de destruction, rature ou lacération postérieure au décès.

M. Leduc (Saint-Laurent): Dans vos commentaires supplémentaires, vous faites référence au testament notarié. S'agirait-il de lacération ou de rature sur la copie?

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Autrement dit, celui qui a fait un testament notarié et qui rature sa copie...

M. Leduc (Saint-Laurent): Qui rature sa copie et y fait des modifications.

M. Cossette: ...et qui y fait des modifications. Évidemment, s'il indique en marge: "Je révoque cet article", qu'il raie l'article et qu'il appose sa signature, ça devient un testament olographe, qu'il faudra faire vérifier.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Ce commentaire était à l'article 820. Je le dis, parce qu'il était adopté. J'appelle l'article 821.

Mme Harel: "La révocation tacite résulte pareillement de toute disposition testamentaire nouvelle, dans la mesure où elle est incompatible avec une disposition antérieure. "Cette révocation conserve tout son effet quoique la disposition nouvelle devienne caduque ou soit révoquée."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent quant aux causes de révocation tacite d'un testament ou d'un legs.

II évoque le cas d'un testament qui, sans révoquer expressément un testament ou legs antérieur, le révoque néanmoins par la nature de ses dispositions lorsque celles-ci sont incompatibles avec le testament ou le legs précédent.

On présume alors que la volonté du testateur est celle qu'énonce le dernier testament. Ainsi, il y aura incompatibilité lorsque, dans un premier testament, le testateur lègue la pleine propriété au légataire, mais que, dans un testament subséquent, il ne lègue que l'usufruit au même légataire. Il y a encore incompatibilité si le testateur lègue successivement par deux testaments différents le même bien à deux légataires distincts. La révocation n'a lieu que dans le mesure de l'incompatibilité. Il pourra donc n'y avoir qu'une révocation partielle.

L'article précise enfin que la révocation demeure malgré la caducité ou la révocation de la nouvelle disposition, par exemple en raison du prédécès du nouveau légataire ou de sa renonciation. Le fait que le nouveau légataire ne puisse recevoir n'enlève rien à la volonté du testateur de révoquer le legs antérieur fait au profit d'un autre légataire dans l'exemple donné.

L'article proposé reprend ainsi les règles du droit actuel exprimées aux articles 892, 894 et 895 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Est-ce que l'article 821 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 822?

Mme Harel: "822. L'aliénation volontaire ou forcée du bien légué, même faite sous condition résolutoire ou par échange, emporte aussi révocation pour tout ce qui a été aliéné, sauf disposition contraire. "La révocation subsiste encore que le bien aliéné soit rentré dans le patrimoine du testateur, sauf preuve d'une intention contraire. "L'aliénation forcée du bien légué, si elle est annulée, n'emporte pas révocation."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article traite de l'aliénation du bien légué comme cause de révocation. Ainsi, il édicte que l'aliénation du bien légué, que celle-ci résulte d'une décision volontaire du testateur ou survienne par suite d'une décision judiciaire, emporte révocation pour tout ce qui a été aliéné, même si l'aliénation a été faite sous condition résolutoire ou par échange.

Il précise en outre que la révocation conserve tout son effet même si le bien aliéné est rentré dans le patrimoine du testateur avant son décès, à moins d'intention contraire du testateur.

Cette révocation est liée à l'intention que l'on peut déduire de la conduite du testateur. Cependant, et c'est le cas prévu au troisième alinéa, l'aliénation forcée du bien n'emporte pas révocation, considérant l'absence d'intention chez le testateur de révoquer ainsi son legs.

Tiré des propositions de l'Office de révision du Code civil, l'article reprend en substance les articles 892, paragraphe 4°, et 397 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Une simple observation, M. le Président. Au deuxième alinéa: "La révocation subsiste encore que le bien aliéné soit rentré dans le patrimoine du testateur", cela signifie entré à nouveau. Dans le Code civil du Bas-Canada, au dernier alinéa de l'article 897, on dit: "La révocation subsiste quoique la chose soit rentrée depuis." On veut dire: "...encore que le bien aliéné se retrouve dans le patrimoine du testateur". Ce serait peut-être plus clair.

Le Président (M. Gagnon): "se retrouve".

Mme Harel: Alors, "se retrouve"?

M. Pineau: "...encore que le bien aliéné se retrouve dans le patrimoine du testateur".

Le Président (M. Gagnon): Vous allez en faire la correction. Il va y avoir un amendement. Donc, l'amendement à 822... Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez, justement, au deuxième alinéa, on dit: "La révocation subsiste encore que le bien aliéné soit rentré - en tout cas, on va le modifier - dans le patrimoine du testateur, sauf preuve d'une intention contraire." C'est le cas où le bien est aliéné et ensuite racheté.

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment-là, la révocation subsiste. Cela veut dire que, lorsqu'il a fait son testament, le bien existait, il en dispose et ensuite, le bien est racheté, rentre ou revient dans le patrimoine du défunt, et vous dites que c'est une révocation. Je comprends difficilement.

M. Cossette: C'est le droit actuel.

M. Pineau: M. le Président, en aliénant ce bien, le testateur a manifesté sa volonté de ne pas en faire bénéficier celui qu'il avait désigné comme légataire. Il se trouve qu'il le récupère, il est présumé avoir l'intention de ne pas...

M. Cossette: ...avoir l'intention...

M. Pineau: C'est cela.

M. Cossette: À moins de l'exprimer...

M. Pineau: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est le droit actuel, n'est-ce pas?

M. Cossette: S'il veut remettre le bien au même légataire, il devra retourner voir le notaire pour faire un autre testament.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 822 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): J'étais rendu à l'article 823. Il est 18 heures.

Mme Harel: M. le Président, si nous pouvions terminer la section, il reste seulement l'article 823.

Le Président (M. Gagnon): C'est ce que j'allais vous suggérer.

Mme Harel: Très bien. Et nous pourrions tout de suite vous proposer une nouvelle formulation à l'article 803.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 822 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 822, tel qu'amendé, est-il adopté?

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Et l'amendement, je l'ai là. Article 823?

Mme Harel: "La révocation d'une révocation antérieure, expresse ou tacite, n'a pas pour effet de faire revivre la disposition primitive, à moins que le testateur n'ait manifesté une intention contraire ou que cette intention ne résulte des circonstances."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire?

M. Cossette: Cet article énonce une règle conforme au droit actuel, énoncée à l'article 893 du Code civil du Bas-Canada. Il prévoit que la révocation d'une disposition qui en révoquait elle-même une autre n'a pas pour effet de faire revivre cette disposition primitive, à moins que le testateur n'ait manifesté une intention contraire ou qu'une telle intention ne résulte des circonstances.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Article 8Z3.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, d'accord, adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Quel article?

Mme Harel: Article 803.

Le Président (M. Gagnon): Nous revenons à l'article 803. Voulez-vous faire la lecture de la nouvelle formulation, Mme la députée de Maisonneuve?

Mme Harel: Oui, M. le Président. Je vais faire lecture de l'article tel qu'amendé.

M. Leduc (Saint-Laurent): Article 803? Le Président (M. Gagnon): Article 803.

Mme Harel: "Lorsqu'un legs chargé d'un autre legs devient caduc pour une raison qui se rattache au légataire, le legs imposé comme charge devient lui-même caduc, à moins que l'héritier ou le légataire qui recueille ce qui faisait l'objet du legs atteint de caducité soit en mesure d'exécuter la charge."

L'amendement consiste à supprimer le second alinéa. Je peux en faire lecture, si vous le voulez: "Lorsqu'un legs chargé d'un autre legs devient caduc pour une cause qui se rattache au légataire, le legs imposé comme charge devient lui-même caduc, à moins que l'héritier ou le légataire qui recueille ce qui faisait l'objet du legs atteint de caducité soit en mesure d'exécuter la charge."

Le commentaire sur l'amendement: La première modification apportée par cet amendement vise à clarifier l'énoncé de l'alinéa afin d'éviter toute difficulté d'interprétation.

La deuxième modification est purement formelle, le deuxième alinéa étant rendu inutile en raison de la modification apportée au premier.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 803 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 803, tel qu'amendé...

M. Leduc (Saint-Laurent): ...est adopté.

Le Président (M. Gagnon): ...est adopté.

La sous-commission des institutions ajourne ses travaux à demain, après les affaires courantes.

(Fin de la séance à 18 h 5)

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