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(Dix heures huit minutes)
Le Président {M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît! La sous-commission des institutions se réunit avec le
mandat de procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du
droit des personnes, des successions et des biens. M. le secrétaire,
est-ce qu'il y a des remplacements, ce matin?
Le Secrétaire: Oui. M. Johnson (Anjou) est remplacé
par Mme Harel (Maisonneuve).
Le Président (M. Gagnon): Voilà. Lors de la
suspension de nos travaux, vendredi, nous en étions à l'article
1145. L'article 1144 avait été suspendu. Mme la
députée de Maisonneuve. Est-ce qu'on revient immédiatement
sur des articles suspendus ou si on continue?
Mme Harel: On va poursuivre, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): On va poursuivre.
Mme Harel: Oui, de façon qu'on puisse revenir sur
l'ensemble des articles suspendus. Il y a encore deux ou trois
rédactions à compléter.
De l'assemblée des copropriétaires
(suite)
Le Président (M. Gagnon): Voilà. Article 1145.
M. Cossette (André): On sautait à l'article...
Le Président (M. Gagnon): 1145.
M. Cossette: ...1147, à ce moment-là?
Le Président (M. Gagnon): 1147? Oui?
Mme Harel: On avait fait l'étude des articles 1145, 1146,
concurremment...
Le Président (M. Gagnon): Oui. Il y avait les articles
1145, 1146 et 1147 qu'on était prêt à adopter, je crois.
L'étude en avait été faite.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Le Président (M.
Gagnon): Non?
M. Leduc (Saint-Laurent): On en était àl'article 1145, si je me rappelle bien.
Mme Harel: Oui.. On avait fait la lecture des articles 1146 et
1147 et je crois qu'on a fait la lecture du commentaire.
Le Président (M. Gagnon): Voilà, oui. Alors...
M. Cossette: Je pense que Me Pineau avait donné un exemple
aussi?
M. Leduc (Saint-Laurent): J'avais posé une question
à Me Berrouard, au sujet de l'article 1145, deuxième paragraphe.
Dans le cas d'une copropriété avec deux fractions, je voulais
savoir si la personne qui possédait une des deux fractions et qui
n'habitait pas la copropriété ne détenait que 10 %...
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard (Yves): C'est bien cela, oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que vous pouvez
avoir le cas de deux fractions, l'une a un pourcentage de voix de 60 % et
l'autre, 40 %. Si l'une des deux unités est occupée par le fils
d'un copropriétaire, cela veut dire que l'autre va avoir 40 % et va
détenir la majorité. Cela me semble très
antidémocratique. Je trouve cette règle inacceptable. Je regarde
ce qui a été proposé par le Barreau, la Chambre des
notaires et l'Office de révision du Code civil et en aucun cas on n'a
suggéré la formule de l'article 1145, pas plus, d'ailleurs, que
la formule de l'article 1146. Je préférerais de beaucoup la
règle établie par la loi française. Si nous prenons le cas
d'une copropriété assez importante où vous auriez
peut-être, disons, 100 fractions, que vous auriez un
copropriétaire qui aurait 10 % ou Il % et l'autre, 89 %, c'est celui qui
a Il % qui mène le tout. Je dois vous dire que c'est certainement
antidémocratique d'autant plus que, lorsqu'il s'agit de contribuer aux
dépenses, c'est la règle de la proportion. Je pense qu'on va
très loin. Je le répète, le Barreau n'était pas
d'accord, la
Chambre des notaires n'était pas d'accord et l'Office de
révision du Code civil n'a pas proposé ces règles. Je suis
difficilement capable d'accepter ces règles qui me semblent
exorbitantes.
Si on regarde l'article 1146, prenons le cas, Me Berrouard, d'un
bonhomme qui a construit un duplex; il y a deux fractions. Il a construit et il
habite. Qu'est-ce qui se produit?
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment, au bout de quatre
ans, il aura 25 %. C'est absolument inacceptable. Pourquoi en aurait-il moins
que l'autre parce qu'il a bâti et qu'il a cédé une des deux
fractions à quelqu'un d'autre? C'est un occupant, c'est un
résident, ce n'est pas un promoteur du tout, mais avec votre
définition vous arrivez à cela et vous allez arriver à
d'autres cas qui...
Mme Harel: Reprendriez-vous votre exemple, M. le
député de Saint-Laurent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous êtes propriétaire
d'une bâtisse que vous avez construite vous-même, dont vous
êtes promoteur. Vous possédez le tout. Disons, pour simplifier,
que vous avez deux fractions. Vous en occupez une comme tout
propriétaire et vous vendez l'autre à votre fils ou à
n'importe qui, quelqu'un, un copropriétaire et, au bout de quatre ans,
ce pauvre homme va détenir seulement 25 %.
M. Berrouard: Je pense qu'il ne faut pas oublier une chose...
M. Leduc (Saint-Laurent): Bien oui, c'est ce que cela dit.
M. Berrouard: ...c'est que le promoteur qui a construit un duplex
en copropriété, c'est d'abord et avant tout dans l'intention de
vendre le duplex. Je ne crois pas qu'il ait l'idée première de
demeurer dans cette copropriété. Ensuite, le promoteur c'est
celui qui contrôle l'assemblée des copropriétaires, c'est
celui qui peut dicter ses volontés, au départ. Alors, dans le cas
d'un duplex, il est bien sûr, ou on peut le supposer à tout le
moins, que ce promoteur va s'accorder un nombre de voix plus important pour sa
fraction et à ce moment-là imposer à l'autre
copropriétaire sa volonté pour la durée de la
copropriété. (10 h 15)
M. Leduc (Saint-Laurent): Je n'ai pas le droit de bâtir
pour moi et de vendre? Mais, madame, vous allez écouter. Quand vous
parlez, je vous laisse parler. Laissez-moi parler, madame. Je soulève
des questions qui...
Mme Harel: Vous dites que vous ne comprenez pas.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...sont très pertinentes.
Mme Harel: Mais alors?
Le Président (M. Gagnon): Un instant!
Mme Harel: Est-ce que Me Berrouard a terminé?
Le Président (M. Gagnon): Je reviendrai à vous, Mme
la députée de Maisonneuve, après. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je soulève la question de
quelqu'un qui bâtit deux fractions. Vous dites: Ce sera pour revendre.
Mais, je m'excuse. Pourquoi dites-vous cela? J'ai bien le droit de bâtir
et de résider dans une des deux fractions et de vendre l'autre. À
ce moment-là, l'article 1146 va s'appliquer. Je veux savoir si cela
s'applique.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Pas de Saint-Laurent.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve, je m'excuse.
Mme Harel: Merci, M. le député de Champlain.
Une voix: II vous change de comté.
Mme Harel: C'est peut-être possible autour d'une table,
mais cela ne l'est pas dans la réalité.
M. le député de Saint-Laurent, on a en tête avec
votre exemple une copropriété de deux logements: un occupé
par le propriétaire-bâtisseur qui, pour les fins de l'article
1147, serait le promoteur, mais, si on se réfère à
l'article 1145, il va nécessairement détenir la majorité
au sein de cette copropriété de deux unités de logement:
ses voix plus 10% de celles des autres. C'est-à-dire que, puisqu'ils
sont deux, chaque copropriétaire ne peut à l'assemblée
disposer de plus de 10% de l'ensembe des voix des copropriétaires, en
plus des voix rattachées à la fraction qui lui sert de
résidence. En admettant qu'il détient, à titre de fraction
qui lui sert de résidence, 50%, à ce moment-là il ajoute
10%.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non. Il vend l'autre.
Mme Harel: II vend nécessairement l'autre à ce
moment-là avec une fraction qui sera moindre.
M. Pineau (Jean): C'est 60 %-40 %. Mme Harel: C'est 60
%-40 %. M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
M. Pineau: Sur un total de 100 %, cela signifie qu'il est
promoteur.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.
M. Pineau: Et c'est réduit à 25 % à la
troisième année. Au lieu d'avoir 60 voix, il en aura 25, tandis
que l'autre en aura 40.
Mme Harel: Comme promoteur, il n'est quand même pas
résident.
M. Pineau: Bien oui.
Mme Harel: C'est-à-dire qu'il faut distinguer le promoteur
du résident.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais, madame, est-ce que je suis
un promoteur si je bâtis pour me loger? Je construis un duplex - je l'ai
fait, madame, et n'importe qui peut le faire - pour me loger et je vends la
deuxième fraction, l'autre fraction. Je ne suis pas un promoteur, je ne
suis pas le vrai spéculateur, le type qui va faire de l'argent, c'est
pour me loger.
Avec l'article 1147, je suis obligé d'accepter la règle de
l'article 1146. Je pense qu'il faut corriger; ce n'est pas acceptable.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Oui. À l'article 1145, si je comprends bien, si
le promoteur, le bâtisseur, construit un duplex et qu'il vend une maison
et garde l'autre, s'il la garde comme copropriétaire pour habiter
là, il va avoir 50 % comme l'autre, mais, s'il la garde comme promoteur
pour revendre la maison, il ne peut pas être promoteur et
copropriétaire en même temps. Mais, s'il devient
copropriétaire d'un duplex, il aura 50 % comme l'autre personne. Je ne
vois pas de problème.
M. Leduc (Saint-Laurent): Lisez l'article 1147.
M. Marx: À l'article 1147, le promoteur d'une
copropriété ne peut disposer...
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non, l'article 1147.
M. Pineau: Celui qui au moment de l'enregistrement est
propriétaire d'au moins la moitié est considéré
comme promoteur. Par exemple, trois propriétaires: l'un a 60 %, le
second a 20 % et le troisième, 20 %. Au bout de la troisième
année, le promoteur n'aura plus 60 voix, il en aura 25. Mais faudra-t-il
ramener les deux autres à 10 chacun?
M. Marx: J'aimerais qu'on m'explique cela. Je n'ai pas
terminé ma question.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: J'aimerais qu'on m'explique. Supposons que le promoteur
construit un duplex, qu'il vend la moitié à quelqu'un -donc une
maison - et qu'il garde l'autre partie pour lui-même comme
copropriétaire, pas comme promoteur. Ne peut-il pas...
M. Berrouard: Étant donné que les deux
copropriétaires disposeraient chacun de la moitié de l'ensemble
des fractions, je ne crois pas que l'article 1147 pourrait s'appliquer. Il
faudrait qu'au niveau des fractions il y ait une différence au
départ. L'article dit: "Est considéré comme promoteur
celui qui, au moment de l'enregistrement de la déclaration de
copropriété, est propriétaire d'au moins la moitié
de l'ensemble des fractions ou ses successeurs...". Si les deux sont
propriétaires de la moitié de l'ensemble des fractions, à
ce moment, les voix sont réduites pour les deux. Alors, il n'y a pas de
problème.
M. Pineau: J'aurais tendance à croire, en effet, que, s'il
y a au départ 50-50, on devra réduire les deux, selon 1147,
puisqu'ils pourront être considérés comme promoteurs tous
les deux. Il faudra réduire à 60 pour la première
année, 40 pour la deuxième et 25 pour la troisième. Donc
ils seront toujours à égalité. Je pense que ce n'est pas
à ce niveau qu'il pourrait y avoir un problème. C'est dès
qu'il y en a un qui a plus de 50 %, où qu'il y en a un qui a 52 % et
l'autre 48 %. On peut très bien imaginer cela dans un duplex où
il y a un appartement qui est un peu plus grand que l'autre. À ce
moment, qu'est-ce qui se passe? Pour celui qui détient 52 %, cela
signifie qu'au bout de trois ans il n'aura plus que 25 voix, mais celui qui a
48 voix, est-ce qu'on le ramènera à 10 %, selon l'article 1145,
alinéa 2? Si on le ramène à 10 %, cela fonctionne. Le
majoritaire demeure majoritaire. Mais, si on ne le ramène pas à
10 %, là cela ne fonctionne plus. C'est un minoritaire qui devient
majoritaire.
Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.
M. Berrouard: Là encore, je pense qu'au niveau de la
question des voix, cela ne jouera pas parce que l'article parle de la
moitié de l'ensemble des fractions et non pas des voix. Donc, s'il y en
a un qui a 52 % et que l'autre en a 48 %, l'article 1147 va s'appliquer et,
à ce moment, pour les deux. Il va y avoir une réduction, mais les
deux vont être au même niveau. Il y en a un qui va toujours rester
minoritaire.
M. Pineau: Bon, je comprends ça. Prenons un autre exemple.
Trois fractions. Un a 60 %, le no 2 a 20 % et le no 3 a 20 %. Donc, très
nettement, le no 1 est promoteur, n'est-ce pas, il est considéré
comme promoteur. Au bout de la troisième année, à supposer
que nous ayons 60 fractions, 20 fractions, 20 fractions, cela signifie que le
no 1 aura 25 voix, le no 2 aura 10 voix et le no 3 aura 10 voix. Est-ce que
c'est cela?
M. Berrouard: 10 %. Outre les voix qui sont rattachées,
dans le cas des copropriétaires, à la résidence.
M. Pineau: À ce moment, cela signifie que le majoritaire
demeure majoritaire.
Le Président (M. Gagnon): Nous allons suspendre pour deux
minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 26)
(Reprise à 10 h 48)
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît! Les articles 45, 46 et 47...
M. Marx: 1145...
Le Président (M. Gagnon): Oui, effectivement. Les articles
1145, 1146 et 1147 sont suspendus. Article 1148, Mme la députée
de Maisonneuve?
Mme Harel: "Le syndicat peut, lorsqu'un copropriétaire
n'acquitte pas sa quote-part des charges communes ou sa contribution au fonds
de prévoyance, obtenir du tribunal une ordonnance le privant de
l'exercice de son droit de vote."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est nouveau. Il vise à donner au
syndicat un outil supplémentaire à l'hypothèque
légale pour assurer le paiement des charges communes.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1148 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1149?
Mme Harel: "Lorsque le nombre de voix dont dispose un
copropriétaire ou un promoteur est réduit en application de la
présente section..."
Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement.
Mme Harel: Oui, il y a un amendement. Je vais lire l'amendement.
Déplacer l'article 1149 après l'article 1153, le
renuméroter 1153.1 et remplacer, à la troisième ligne, les
mots "qui peuvent être exprimées pour prendre une
décision"... Je vais faire la lecture de l'article amendé.
Le Président (M. Gagnon): Oui.
Mme Harel: "Lorsque le nombre de voix dont dispose un
copropriétaire ou un promoteur est réduit en application de la
présente section, le total des voix de tous les copropriétaires
qui peuvent être exprimées pour prendre une décision
exigeant la majorité en nombre et en voix est réduit
d'autant."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
Mme Harel: De l'amendement?
Le Président (M. Gagnon): De l'amendement, oui.
Mme Harel: De l'amendement. L'amendement proposé a pour
but de préciser dans quels cas s'applique cet article, soit lorsqu'une
décision exigeant la majorité en nombre et en voix doit
être prise. C'est donc dire que le total des voix de tous les
copropriétaires qui peuvent être exprimées sera
réduit lorsqu'une décision devra être prise, en vertu de
l'article 1152, 1153 ou 1162. Des précisions ont été
également apportées à l'article pour faciliter sa
compréhension.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires sur l'article?
M. Cossette: Le commentaire principal, sous réserve de
l'amendement. Cet article nouveau complète les précédents.
Il précise que, lorsque le nombre de voix dont peut disposer un
copropriétaire ou un promoteur est réduit en vertu de cette
section, le total des voix qui peuvent être exprimées pour prendre
une décision est réduit d'autant.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1149 est-il
adopté? Oui. Article
1150?
Mme Harel: "La cession des droits de vote d'un
copropriétaire doit être notifiée par écrit au
syndicat pour lui être opposable."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article de droit nouveau vise à ne pas
rendre opposable au syndicat la cession des droits de vote qui ne lui est pas
notifiée par écrit. Il assure un meilleur contrôle des
personnes habilitées à voter aux assemblées des
copropriétaires et aussi une transmission valable des avis de
convocation à ces assemblées.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? L'article
1150 est adopté. Je m'excuse, tantôt, j'ai oublié de poser
la question à savoir si l'amendement à l'article 1149
était adopté et si l'article était adopté, tel
qu'amendé. Est-ce que cela va?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté, tel
qu'amendé. Article 1151?
Mme (Harel: "Les décisions du syndicat sont prises
à la majorité des voix des copropriétaires présents
ou représentés à l'assemblée, y compris celles
visant à corriger une erreur d'écriture dans la
déclaration de copropriété."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article reprend le principe contenu à
l'article 442e du Code civil du Bas-Canada, soit que les décisions de
l'assemblée sont prises à la majorité des voix. Il
précise aussi que les erreurs d'écriture dans la
déclaration peuvent être corrigées à la même
majorité, ce qui n'est pas le cas actuellement. Lu avec l'article 1152,
paragraphe 3°, cet article permettra de modifier le règlement de
copropriété à la majorité des voix, ce qui n'est
pas le cas actuellement puisque les règles de fonctionnement de la
copropriété font partie de la déclaration et que celle-ci,
pour être modifiée, doit l'être à la double
majorité prévue à l'actuel article 442f.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau? M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Je n'ai pas compris ce que l'on veut dire par les
erreurs d'écriture dans la déclaration.
Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.
M. Berrouard: Dans le fond, ce sont des erreurs très simples.
Imaginons le cas où le promoteur a voulu parler des balcons et qu'il se
serait trompé et aurait parlé d'autre chose. Ce sont des erreurs,
des mots qui ne sont pas corrects ou des choses comme cela. Dans certaines
déclarations actuellement, on prévoit même qu'il ne faut
pas toucher à la déclaration de copropriété
à moins d'obtenir le consentement de 100 % des copropriétaires en
nombre et en voix, ce qui ne permet même pas de corriger une erreur
d'écriture.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Où on aurait parlé, par exemple, de
balcons au lieu de parler de terrasses.
M. Berrouard: Voilà.
M. Leduc (Saint-Laurent); Oui, c'est bien.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Leduc
(Saint-Laurent): D'accord.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1151 est-il
adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1152?
Mme Harel: "Sont prises à la majorité des
copropriétaires, représentant les trois quarts des voix de tous
les copropriétaires, les décisions qui concernent: "1° Les
actes d'acquisition ou d'aliénation immobilière par le syndicat;
"2° Les travaux de transformation, d'agrandissement ou
d'amélioration des parties communes, ainsi que la répartition du
coût de ces travaux; "3° La modification de l'acte de
copropriété ou de l'état descriptif des fractions."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 442f du
Code civil du Bas-Canada qui traite du pourcentage de voix requis pour prendre
certaines décisions qui concernent des actes d'aliénation ou des
dépenses importantes. Tel que mentionné à l'article
précédent, la double majorité qui y est prévue ne
sera nécessaire pour modifier la déclaration de
copropriété qu'à l'égard de deux de ses parties,
l'acte de copropriété et l'état descriptif des
fractions.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Dans le troisième paragraphe, est-ce qu'on a
dit: la modification de l'acte constitutif de copropriété?
NI. Cossette: C'est de l'état descriptif.
M. Pineau: Non, "la modification de l'acte de
copropriété". À-t-on dit...
Une voix: Pas à...
M. Berrouard: Qu'on l'ait dit à un endroit, on n'a pas
jugé opportun de le mentionner ailleurs parce que, sinon, on aurait
été obligé d'apporter cinq ou six a-mendements.
Finalement, "constitutif", une fois qu'on l'a dit, je pense qu'il en
découle qu'il est là à chaque fois.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1152 reproduit l'ancien
article 442f, je pense. Maintenant, je me demandais si on ne serait pas mieux
d'adopter la règle de 90 % lorsqu'il s'agit d'actes d'acquisition ou de
transformation ou d'agrandissement très importants. Je veux dire qu'on
pourra obliger l'ensemble, les 25 % qui ne seraient pas d'accord, à
investir des sommes très importantes, par exemple qu'il s'agisse
d'acquérir un terrain sur lequel on pourrait bâtir un pavillon
récréatif qui occasionnerait des dépenses très
importantes. Je sais qu'il y a eu des problèmes dans certaines
copropriétés.
Mme Harel: À ce moment, vous aimeriez qu'on parle de
travaux majeurs?
M. Leduc (Saint-Laurent): Je préférerais qu'on
adopte la règle de 90 %. S'il ne reste plus que 10 % pour les actes
d'acquisition... S'il s'agit d'aliéner, bien sûr, que cela peut
être important. À ce moment c'est sûr qu'il ne s'agit pas de
débourser pour les copropriétaires. Mais, lorsqu'il s'agit
d'actes d'acquisition, de transformation ou d'agrandissement, cela peut
occasionner des dépenses très importantes. J'ai l'impression
qu'il y en aurait parmi les copropriétaires qui n'auraient pas les
moyens.
M. Cossette: Dans une compagnie, généralement,
quand il s'agit de faire un emprunt, c'est un pourcentage à peu
près identique à celui-là qui est exigé.
Le Président (M. Gagnon): La suggestion serait que, au
lieu de 75 %, ce soit 90 %?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'était surtout un point que je
voulais amener à la réflexion des gens autour de la table. Bien
sûr que, s'il s'agit d'acquisitions nécessaires, la règle
du 90 % pourrait être embêtante.
M. Berrouard: II y a quand même une protection importante.
II faut que la décision soit prise à la majorité des
copropriétaires représentant les trois quarts des voix de tous
les copropriétaires. C'est quand même une double majorité
et, si on va jusqu'à 90 % des voix, s'il y a des absences chez les
copropriétaires ou un certain désintéressement d'une
minorité, à ce moment, on bloque la volonté de 75 % des
gens en voix. On bloque le voeu de la majorité des
copropriétaires représenté à 75 % des voix.
Le Président (M. Gagnon): Oui.
Mme Harel: Est-ce que je crois comprendre que c'est la
reconduction du droit actuel?
M. Berrouard: Oui.
Mme Longtin (Marie-José): Est-ce que cela a posé
des difficultés qui ont été portées à votre
attention?
M. Berrouard: À notre connaissance, cela n'a pas
posé de difficulté.
M. Pineau: C'est déjà difficile d'obtenir une
double majorité à 75 %.
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1152 est
adopté? Adopté. J'appelle l'article 1153.
Mme Harel: L'article se lit comme suit: "Sont prises à la
majorité des copropriétaires, représentant 90 % des voix
de tous les copropriétaires, les décisions: "1° Qui changent
la destination de l'immeuble; "2° Qui autorisent l'aliénation des
parties communes dont la conservation est nécessaire au maintien de la
destination de l'immeuble; "3° Qui autorisent la construction des
bâtiments pour créer de nouvelles fractions; "4° Qui modifient
la déclaration de copropriété pour permettre la
détention d'une fraction par plusieurs personnes ayant un droit de
jouissance périodique et successif."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel
énoncé à l'article 442h du Code civil du Bas-Canada
à deux
exceptions près. D'abord, il assouplit la règle de
l'unanimité pour éviter toute forme de chantage ou d'abus en
permettant que les décisions visées à cet article soient
prises non plus à l'unanimité mais par la majorité des
copropriétaires représentant 90 % des voix. Ensuite, il ajoute
deux décisions à celles qui doivent être prises par la
majorité des copropriétaires représentant 90 % des voix,
celle visant à autoriser la construction de bâtiments aux fins de
créer de nouvelles fractions et celle visant à modifier la
déclaration de copropriété pour permettre qu'une fraction
soit détenue en multipropriété. En effet, ces
décisions risquent de modifier considérablement le projet de
copropriété.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, le Barreau avait
suggéré de maintenir la règle de l'unanimité.
Personnellement, la règle de l'unanimité ne me dérangerait
pas. Il s'agit quand même de modifications plus que majeures. Changer la
destination de l'immeuble, aliéner les parties communes
nécessaires au maintien de la destination de l'immeuble, créer de
nouvelles fractions, c'est bouleverser la copropriété.
Quant à modifier aussi la déclaration de
copropriété pour permettre la jouissance périodique et
successive, c'est tout un programme! Je ne voudrais pas être dans cette
copropriété.
Mme Harel: Vous disiez tantôt qu'il était difficile,
même à l'occasion, d'obtenir trois quarts des voix simplement pour
procéder à des transformations ou à des agrandissements.
L'obtention de 90 % des voix pose déjà une contrainte. Faut-il
qu'il y ait unanimité pour préserver les droits de la
minorité?
M. Cossette: Je crains beaucoup le chantage. Le dernier qui reste
pour obtenir l'unanimité est un personnage dangereux.
M. Berrouard: Si vous me permettez...
Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Berrouard.
M. Berrouard: ...il ne faut pas oublier qu'il pourrait suffire
qu'un copropriétaire soit absent et que personne ne sache où il
est pendant un an ou deux pour que le projet de tous les autres
copropriétaires soit bloqué. C'est considérable.
Mme Longtin: Ou qu'il refuse tout simplement.
M. Berrouard: Ou qu'il refuse.
M. Pineau: Il est certain que 90 %, c'est énorme.
M. Cossette: D'autant plus qu'il s'agit d'un projet un peu
collectif. C'est l'affaire de beaucoup de gens, ce n'est pas l'affaire d'une
seule personne.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1153 est
adopté? Oui. J'appelle l'article 1154. Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer les trois
dernières lignes du premier alinéa. Donc, le premier
alinéa se lirait comme suit: "Les copropriétaires de parties
exclusives contiguës peuvent modifier les limites de leur partie exclusive
sans l'accord de l'assemblée, à condition d'obtenir le
consentement de leur créancier hypothécaire ou
privilégié et du syndicat. La modification ne peut augmenter ou
diminuer la valeur relative de l'ensemble des parties exclusives
modifiées ou l'ensemble des droits de vote qui y sont
rattachés."
Au deuxième alinéa, l'amendement consiste à
supprimer, à la première ligne, "par son conseil
d'administration", et à insérer, à la deuxième
ligne du deuxième alinéa, après les mots "de
copropriété", les mots "et le plan cadastral".
Alors, le deuxième alinéa se lirait comme suit: "Le
syndicat modifie la déclaration de copropriété et le plan
cadastral aux frais de ces copropriétaires; l'acte de modification doit
être accompagne des consentements des créanciers, des
copropriétaires et du syndicat."
Commentaire: Outre des modifications de nature formelle, l'amendement
proposé vise à éliminer toute confusion sur les pouvoirs
du syndicat et du conseil d'administration. Il précise également
que la modification des limites des parties exclusives contiguës ne peut
avoir pour effet non seulement de diminuer la valeur relative de ces parties ou
l'ensemble des droits de vote qui y sont rattachés, mais
également de les augmenter. Enfin, il précise que non seulement
la déclaration de copropriété, mais également le
plan cadastral doivent être modifiés à l'occasion d'une
modification des dimensions des parties exclusives contiguës.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1154 est-il adopté? L'article 1154, tel qu'amendé, est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Mme Harel: Est-ce qu'on peut prendre quelques minutes, M. le
Président?
Le Président (M. Gagnon): Oui, nous allons suspendre
quelques minutes.
(Suspension de la séance à Il h 5)
(Reprise à Il h 13)
Le Président (M. Gagnon): Nous reprenons. Article
1155?
Mme Harel: "Est réputée non écrite toute
stipulation de la déclaration de copropriété qui modifie
le nombre de voix requis pour prendre une décision prévue par le
présent chapitre."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est de droit nouveau. Il rend nulle
toute stipulation de la déclaration qui modifie le nombre de voix requis
pour prendre une décision prévue par le présent chapitre.
Il a pour but de contrer une certaine pratique, soit d'insérer dans la
déclaration une clause haussant à l'unanimité le
pourcentage de voix requis pour prendre certaines décisions, alors
même que la loi prévoit un pourcentage moindre. Cette pratique a
souvent pour effet d'empêcher les copropriétaires de
contrôler efficacement la copropriété.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté.
Article 1156?
Mme Harel: "Est sans effet toute décision du syndicat qui,
à ['encontre de la déclaration de copropriété,
impose au copropriétaire une modification à la valeur relative de
sa fraction, à la destination de sa partie exclusive ou à l'usage
qu'il peut en faire."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit
énoncé à l'article 442g du Code civil du Bas-Canada. Il
rend sans effet toute décision de l'assemblée qui impose à
un copropriétaire, à l'encontre de la déclaration de
copropriété, une modification à la valeur relative de sa
fraction, à la destination de sa partie exclusive ou à l'usage
qu'il peut en faire.
Dans le cas de la valeur relative de la fraction d'un
copropriétaire, il faut noter que l'article 1123 du projet crée
une exception puisqu'un copropriétaire peut, à certaines
conditions précises, la faire modifier.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1156 est
adopté. Article 1157?
Mme Harel: L'amendement consiste, à la fin du premier
alinéa, à insérer les mots "ou encore si une erreur s'est
produite dans le calcul des voix". Alors, l'article se lit comme suit: "Tout
copropriétaire peut demander au tribunal d'annuler une décision
si elle est partiale, si elle a été prise dans l'intention de
nuire ou au mépris des droits des copropriétaires, ou encore si
une erreur s'est produite dans le calcul des voix. "L'action doit, sous peine
de déchéance, être intentée dans les trente jours de
l'assemblée. "Le tribunal peut, si l'action est futile ou vexatoire,
condamner le demandeur à des dommages-intérêts."
Le commentaire. Par suite de la réduction du nombre de voix du
promoteur ou d'un copropriétaire, il pourrait arriver que certaines
erreurs se produisent dans le calcul des voix. Pour éviter qu'une
décision soit contestée tardivement pour ce motif, l'amendement
proposé oblige les copropriétaires à faire diligence et
à contester cette décision dans les trente jours de
l'assemblée.
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur
l'article?
M. Cossette: Sous réserve de l'amendement, cet article
permet à un copropriétaire de demander l'annulation d'une
décision de l'assemblée si elle est partiale, si elle a
été prise dans l'intention de nuire ou au mépris des
droits des copropriétaires.
L'action doit toutefois, sous peine de déchéance,
être intentée dans les trente jours de l'assemblée. Le
tribunal peut, par ailleurs, si l'action est futile ou vexatoire, condamner le
demandeur à des dommages et intérêts.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, je me suis demandé si
cette disposition était véritablement utile, compte tenu du fait
qu'il s'agit, en définitive, de l'application de la théorie de
l'abus de droit. Le commentaire supplémentaire, d'ailleurs, le dit
très clairement. Puisque nous avons déjà dans le code
l'expression de cette théorie, je me demande s'il est souhaitable
d'ajouter l'article 1157, car on va se demander ce que l'article 1157 ajoute
à l'application de la théorie de l'abus de droit.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais ajouter là-dessus.
Il me fait peur cet article, parce que je crains que beaucoup de gens aient
l'impression que cet article va régler tous leurs problèmes quand
ils ne seront pas satisfaits. Ils vont avoir recours constamment à
l'article 1157; j'entends la minorité, ceux qui n'auront pas voté
pour la décision qui aura été prise. Je trouve l'article
dangereux.
Si vraiment l'abus de droit s'applique, qu'on laisse appliquer cette
règle.
Mme Harel: Évidemment, il y a aussi l'ajout qui consiste
à pouvoir demander au tribunal d'annuler une décision s'il y a eu
erreur dans le calcul des voix, et il y a le délai de trente jours
également.
M. Pineau: Eh bien, qu'on maintienne cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être qu'on pourrait le
maintenir.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Si vous me permettez, concernant les dangers de
procédure, cela ne m'inquiète pas tellement qu'il y ait un nombre
d'actions important parce que, d'abord, il faut que les copropriétaires
prennent un avocat. On sait, au départ, que les gens n'aiment pas
tellement avoir recours aux avocats ou ils ne le font que dans les cas
où c'est vraiment obligatoire. Deuxièmement, le tribunal peut
toujours, si l'action est futile ou vexatoire, condamner le demandeur à
des dommages et intérêts. Alors, on indique quand même des
balises au sujet des actions.
Par ailleurs, ce qui est peut-être un peu embêtant en ce qui
concerne l'abus de droit, c'est: Qu'arrive-t-il dans le cas où une
décision est prise, qu'elle soit partiale et que l'action soit
intentée trois ou quatre ans après? On pourrait risquer de mettre
les copropriétaires dans une situation vraiment embarrassante, alors
que, là, on donne un cadre très particulier, on doit le faire
dans les trente jours de la décision si on veut contester celle qui a
été prise.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, je me rends compte que le
Barreau a suggéré que l'article 1157 ne s'applique que dans les
cas où la décision aurait été prise dans le
contexte de l'article 1153, c'est-à-dire les décisions prises
à 90 % des voix.
M. Berrouard: On pourrait se poser la question, à ce
moment, à savoir si l'abus de droit serait possible dans les autres cas
et on peut toujours se demander s'il serait équitable qu'on permette une
contestation sur une décision pour abus de droit, dans le cas de
l'article 1153, et qu'on ne le permette pas dans les autres cas. S'il y a abus
de droit, il y a abus de droit.
M. Pineau: II est certain que le réflexe doit être
rapide puisque l'action doit, sous peine de déchéance, être
intentée dans les trente jours de l'assemblée.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je préférerais qu'on
supprime l'article. Si vraiment l'abus de droit s'applique dans ces
cas-là, qu'on laisse jouer cette règle. S'il y a lieu d'ajouter
ou d'indiquer une règle au cas où il y aurait erreur dans le
calcul des voix, qu'on le fasse. Je pense qu'il faut, en
copropriété, éviter autant que possible les litiges ou
toute zizanie. Je me demande si cela ne prête pas à la
zizanie.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Je ne crois pas que ce soit nécessairement le
litige qu'on puisse supprimer. Ce qu'on peut souhaiter, c'est de trouver les
moyens pour en permettre une manifestation ordonnée. Au troisième
alinéa de l'article, il y a un frein à l'usage
répété d'une telle action.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Je voulais seulement indiquer qu'outre les deux
freins celui de trente jours me paraît important dans la mesure où
on veut assurer une certaine valeur, surtout par rapport aux tiers, aux
décisions qui auraient été prises par le syndicat. Si la
décision peut faire l'objet d'un recours pendant trois ans, cela risque
toujours de mettre une certaine incertitude dans ce type de relation.
Autre chose: ici, c'est un peu le même problème qu'on
retrouve dans le cas des actions. Est-ce qu'il existe un droit réel
d'action d'un actionnaire contre la compagnie si ce droit n'est pas
exprimé? Puisque le copropriétaire fait partie de la
collectivité des copropriétaires et est donc membre de la
personne morale, il va agir ici, évidemment, contre la personne morale
et non contre des copropriétaires en particulier. Cette question aussi
pourrait susciter débat. Je pense que l'article met un terme à
cette question d'interprétation.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si on avait simplement mentionné
qu'en cas d'abus de droit il sera toujours possible de s'adresser au tribunal,
à la condition de le faire dans les trente jours et que ce ne soit pas
une action futile ou vexatoire...
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: C'est toujours le danger de formuler de
façon générale une telle règle. À ce
moment-là, cela pourrait s'appliquer non seulement aux décisions,
mais à certains comportements ou à certains règlements qui
auraient été adoptés. S'il est question des heures
d'ouverture et de fermeture de la piscine, par exemple, ou de
l'accessibilité de la piscine, il peut y avoir abus de droit sur cette
question. Je ne pense pas que, dans ces cas, on doive réduire le
délai à trente jours. Il vaut mieux, je pense, l'encadrer en ce
qui concerne les décisions et laisser l'abus de droit pour les autres
cas possibles.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1157 est-il adopté? Adopté. L'article 1157, tel qu'amendé,
est-il adopté? Adopté. Article 1158?
Ou transfert du contrôle du syndicat
Mme Harel: "Dans le délai de quatre-vingt-dix jours
à compter de celui où le promoteur d'une
copropriété ne détient plus la majorité des voix
à l'assemblée des copropriétaires, le conseil
d'administration doit convoquer une assemblée extraordinaire des
copropriétaires pour l'élection d'un nouveau conseil
d'administration. "Si l'assemblée n'est pas convoquée dans les
quatre-vingt-dix jours, tout copropriétaire peut le faire."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article de droit nouveau vise à
transférer le contrôle du syndicat du promoteur aux
copropriétaires dans les trois mois du jour où le promoteur ne
détient plus la majorité des voix à l'assemblée des
copropriétaires. Pour ce faire, une assemblée extraordinaire des
copropriétaires doit être convoquée pour procéder
à l'élection du nouveau conseil d'administration.
Cet article est une suite logique de l'article 1146 du projet qui limite
le nombre de voix dont peut disposer un promoteur. Il permet d'éviter
qu'un promoteur ne se nomme administrateur pour une longue période de
temps et ne contrôle ainsi le syndicat, même après qu'il ne
détienne plus la majorité des voix en assemblée.
Le Président (M. Gagnon]: Me Pineau.
M. Pineau: Cela signifie, M. le Président, qu'au plus tard
au début de la troisième année on doit convoquer la
première assemblée.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Exactement, oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1158 est-il
adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.
Le Président (M. Gagnon): Oui. Article 1159?
Mme Harel: "Le promoteur..."
Le Président (M. Gagnon): Vous avez l'amendement?
Mme Harel: Oui. Il consiste justement à remplacer les mots
"Le promoteur" par les mots "Le conseil d'administration", au premier
alinéa; à remplacer la première phrase du deuxième
alinéa par la suivante, dont je vous ferai lecture; et à ajouter,
à la fin, l'alinéa dont je ferai lecture également.
Alors: "Le conseil d'administration, lors de cette assemblée,
rend compte de son administration. "Il produit des états financiers,
lesquels doivent être accompagnés de commentaires d'un comptable,
membre de l'une des corporations professionnelles de comptables, sur la
situation financière du syndicat. Le comptable doit, dans son rapport
aux copropriétaires, indiquer toute irrégularité qu'il
constate."
L'alinéa suivant est ajouté: "Les états financiers
doivent être vérifiés sur demande des
copropriétaires représentant 40 p. 100 des voix de tous les
copropriétaires. Cette demande peut être faite en tout temps,
même avant l'assemblée."
Le commentaire sur l'amendement. Le premier amendement proposé
précise que c'est le conseil d'administration et non le promoteur qui
doit rendre compte de son administration, afin de couvrir le cas où le
promoteur aurait nommé une personne autre que lui-même comme
administrateur. Le deuxième amendement est de nature formelle. Il vise
à corriger une certaine incongruité dans le texte. Le
troisième amendement, enfin, propose que les états financiers que
doit produire le conseil d'administration ne soient pas vérifiés
tout en permettant aux copropriétaires représentant 40 p. 100 des
voix de tous les copropriétaires d'exiger, en tout temps, même
avant la tenue de l'assemblée, que les états financiers produits
par le promoteur soient vérifiés.
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur
l'article?
M. Cossette: Sous réserve de l'amendement fait, cet
article de droit nouveau
impose au promoteur de rendre compte de son administration lors du
transfert du contrôle du syndicat et, plus particulièrement,
à l'occasion de l'élection des nouveaux administrateurs. Lors de
cette assemblée, le promoteur devra produire des états financiers
préparés par un comptable, lesquels pourront être
accompagnés de commentaires, le cas échéant, sur la
situation financière du syndicat. De plus, le comptable, dans son
rapport, devra indiquer toute irrégularité qu'il constate.
Cet article poursuit deux buts: d'abord, il permet aux
copropriétaires d'obtenir une information adéquate et
éclairée sur la situation financière du syndicat; ensuite,
il permet aux copropriétaires d'exercer un certain contrôle sur la
gestion du promoteur.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): II y a eu des représentations de
faites par, je pense, la corporation des comptables agréés qui
s'opposait au libellé du deuxième paragraphe. Je me demande si
c'est tellement approprié de vouloir régler le contentieux
existant entre les trois corporations de comptables à l'occasion de la
réforme du Code civil. Je pense que la corporation des comptables
agréés proposait d'enlever le texte où il était
fait mention de "membre de l'une des corporations professionnelles de
comptables". On sait qu'il y a un contentieux entre les trois corporations de
comptables, à savoir si le fait d'émettre des commentaires doit
être considéré comme de la vérification et, à
ce moment-là, si cela relève strictement des CA ou si cela ne
doit pas être considéré comme un exercice de
vérification et, donc, que tous les membres des trois corporations
peuvent y procéder.
Je pense qu'on devrait éviter de toucher à ce contentieux
et, je ne sais pas, on pourrait indiquer strictement l'obligation de produire
des états financiers qui soient accompagnés de commentaires d'un
expert-comptable sur la situation financière du syndicat, quitte
à ce que les professions comptables règlent leurs
problèmes, leur contentieux entre elles. (Il h 30)
Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.
M. Berrouard: Si on ne précise pas par qui peuvent
être faits ces commentaires, ce sont les copropriétaires qui vont
devoir aller devant les tribunaux et faire régler la situation. Cela
veut dire qu'on peut paralyser facilement tout cet article dans un rien de
temps. On conteste, on dit que ce doit être fait par un comptable
agréé et non pas par un autre type de comptable. Ce seront les
copropriétaires qui vont être aux prises avec le problème,
si on ne le précise pas dans le texte.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que vous entendez à ce
moment-ci, par l'article 1159, régler le contentieux entre les
comptables, entre les différents...?
M. Berrouard: En ce qui concerne la copropriété, je
pense qu'on se prononce sur le fait que cela peut être un comptable
membre de l'une des trois corporations professionnelles.
M. Leduc (Saint-Laurent): N'importe quel membre de ces trois
corporations pourrait, à ce moment, produire des états
vérifiés.
M. Berrouard: Oui. D'ailleurs, cela existe dans d'autres lois. Il
faut bien se dire aussi...
M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne suis pas d'accord. Je vais
demander un vote là-dessus.
M. Berrouard: ...par exemple, dans le domaine des
municipalités, que ces comptables peuvent faire des commentaires
également en matière d'assurances, etc. Si ces gens sont capables
d'émettre des commentaires pour les municipalités, je ne vois pas
pourquoi ils ne seraient pas capables d'en émettre pour les
copropriétés.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous soulevez tout le problème
du contentieux des trois corporations professionnelles. Vous dites: S'ils
peuvent émettre des commentaires pour les municipalités, ils
peuvent le faire également pour les commissions scolaires, ils peuvent
le faire également pour les coopératives. C'était
strictement dans ces champs. Non, je dois dire que, si vous voulez
régler le contentieux au moyen de l'article 1159, je n'adhère pas
à ce procédé, pas du tout. Si vraiment il y a lieu de le
régler, qu'on le règlel D'ailleurs, je dois vous dire, pour votre
information, que l'Office des professions doit produire, d'ici le 15 juillet,
un rapport sur le contentieux existant entre les trois corporations
professionnelles de comptables. Je ne suis pas capable d'accepter qu'on
règle ce problème à l'occasion de l'article 1159. Je ne
crois pas que ce soit raisonnable.
D'ailleurs, je dois vous dire qu'il en avait été question
- j'en avais discuté avec le ministre de la Justice - lorsqu'ils avaient
proposé un papillon qui aurait permis aux CGA ou aux RIA de produire des
états vérifiés dans le cas d'un organisme, je ne me
rappelle pas lequel. Le ministre avait reconnu qu'il fallait d'abord
régler le problème entre les trois corporations et,
ensuite, qu'il y aurait lieu d'y revenir éventuellement.
C'était dans le cas de l'office de garde, lorsque ces offices doivent
produire un état vérifié. On voulait permettre aux CGA ou
aux RIA de produire cet état. Le ministre s'était opposé,
invoquant qu'il s'agissait d'un contentieux, qu'il fallait d'abord
régler le problème à ce niveau. La question est exactement
la même ici.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: Si on reprend l'amendement proposé à
l'article 1159, je ne pense pas qu'on puisse dire qu'on règle le
problème du contentieux entre les différentes corporations de
comptables. Dans le deuxième alinéa on dit que les états
financiers doivent être préparés par un comptable qui est
membre de l'une des corporations. Cela peut être un comptable qui fait
partie de l'une des trois, s'il y en a trois, ou des deux, s'il y en a
deux.
Maintenant, en dernière analyse, au troisième
alinéa on vient préciser que, si les copropriétaires dans
une proportion de 40 % le demandent, ils pourront exiger des états
financiers vérifiés, mais sans qu'on précise par qui
devront être préparés ces états financiers
vérifiés. Je ne pense pas qu'on tranche là le débat
des comptables. Dans un premier temps on dit: Vous allez produire des
états financiers préparés par un comptable. On ne dit pas
lequel, sauf qu'on ne précise que ceci: II est nécessaire que ce
comptable fasse partie de l'une des corporations professionnelles de
comptables.
Dans le dernier alinéa on vient dire que, si 40 % des membres
l'exigent, on peut demander des états financiers
vérifiés.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez, lorsque vous
mentionnez que ces états financiers doivent être
accompagnés de commentaires d'un comptable, à ce moment-là
on réfère certainement à la vérification. Madame,
tout le problème vient de là. C'est quoi, des commentaires? Vous
pouvez en parler aux comptables agréés, je pense qu'eux disent:
Oui, dès que vous émettez des commentaires, c'est de la
vérification. Bien sûr qu'on ne commencera pas à discuter,
je ne suis pas un expert en cette matière, on ne peut pas commencer
à discuter, à savoir si les commentaires équivalent aux
vérifications ou non. Tout le problème est là. On en a
discuté de nombreuses fois. Si, disons, tout le monde était
d'accord pour dire que des commentaires, cela n'équivaut pas à de
la vérification, là, je serais d'accord. Le problème,
c'est là qu'il se situe. Dire qu'on ne touche pas à ce
contentieux-là, qu'on ne veut pas permettre aux CGA ou aux RIA de
produire des états financiers vérifiés, moi, je pense
qu'il y a un pas qui peut être vite parcouru.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'arcy McGee.
M. Marx: Si on n'exige pas une vérification...
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: D'abord, je pense qu'il y a trois types de rapports
qui sont reconnus par les comptables: il y a le rapport au lecteur, il y a les
commentaires et il y a la vérification. Je pense qu'ici on ne touche
vraiment pas la vérification parce qu'on dit dans un premier temps qu'il
s'agit de commentaires, et, dans un troisième alinéa, on
précise qu'ils pourraient être vérifiés. Je pense
qu'on fait une distinction.
Maintenant, en ce qui concerne tout le contentieux, je pense qu'on ne
règle que le problème des copropriétés. Il s'agit,
je pense - la question est là, elle est fondamentale -de
déterminer si toute la question du contentieux va être
réglée par les copropriétaires, si ce sont eux qui vont
devoir s'adresser aux tribunaux pour régler cette question ou si on
règle le cas des copropriétés, mais seulement
celui-là.
M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, pour avoir discuté
souventefois avec des comptables, on m'a toujours indiqué que,
dès qu'il était question de commentaires, cela pouvait être
considéré comme de la vérification. Si tout le monde
s'entend pour dire que des commentaires, cela n'équivaut pas à de
la vérification, je suis parfaitement d'accord. Mais, je le
répète, le problème il est là. Les CA disent: S'il
est question de commentaires, on peut considérer cela comme de la
vérification.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: M. le député de Saint-Laurent, je ne
pense pas qu'on puisse attendre qu'il y ait consensus ou unanimité dans
l'interprétation que les uns et les autres chez les comptables font de
ces notions. Puisqu'on utilise ici dans le deuxième alinéa un
terme différent du troisième alinéa, c'est parce que
l'intention est donc de distinguer ce qui est attendu lorsqu'il y a
présentation des états financiers et ce qui est demandé
lorsque des copropriétaires représentés à 40 % des
voix exigent autre chose.
Pour les fins, si vous voulez, de l'article 1159, il va falloir se
satisfaire de cette formulation-là parce qu'on ne peut quand même
pas laisser cela en suspens jusqu'à ce que les diverses corporations de
comptables nous aient indiqué quel était le
lexique définitif qu'elles utilisaient. On peut simplement, en
tout cas, s'entendre sur le fait que les états financiers qui sont
accompagnés de commentaires sont moins coûteux pour les
copropriétaires que ceux qui sont vérifiés. Si les
copropriétaires demandent une vérification, ils en assumeront
à ce moment-là collectivement les frais.
Le Président (M. Gagnon]: L'amendement à l'article
1159 est-il adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, je ne suis pas d'accord.
Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me permettez.
Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député
de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais revenir sur l'article 1159.
Je pense que, pour que ce soit compris et qu'il n'y ait pas de discussion lors
des assemblées des copropriétaires qui n'auraient peut-être
pas les connaissances suffisantes pour aller voir l'article 379, je pense, il y
aurait lieu de bien indiquer qu'il y a obligation de rendre compte et de
produire des états financiers, alors qu'ici, a l'article 1159, on semble
référer à l'obligation pour le promoteur de rendre compte,
lors de la remise de son administration. J'ai l'impression que, souventefois,
on va s'opposer, on va dire: Où est-ce inséré? On ne
voyait pas d'article à cet effet.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Nous sommes à la section du transfert du
contrôle du syndicat.
M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être pas là, mais
ailleurs.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Je voudrais indiquer que c'est déjà
compris, finalement, sauf pour la question de la reddition de comptes qui est,
évidemment, implicite et toute la gestion des conseils. Pour la question
des états, l'article 1142 prévoit quand même que l'avis de
convocation à l'assemblée annuelle doit être
accompagné, outre le bilan, de l'état des résultats de
l'exercice écoulé et de l'état des dettes et
créances du budget prévisionnel, etc. Donc, il me semble que
c'est couvert à cet endroit.
M. Leduc (Saint-Laurent): À quel article?
Mme Longtin: À l'article 1142.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, cela va. (Il h 45)
Le Président (M. Gagnon): Article 1160?
Mme Harel: "Le comptable a accès à tout moment aux
livres, comptes et pièces justificatives qui concernent la
copropriété. "Il peut exiger du promoteur ou d'un administrateur
les informations et explications qu'il estime nécessaires à
l'accomplissement de ses fonctions."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article de droit nouveau donne au comptable
à tout moment accès aux livres, comptes et pièces
justificatives qui concernent la copropriété. Il lui donne aussi
le droit d'exiger du promoteur ou d'un administrateur les informations et
explications qu'il estime nécessaires pour accomplir ses fonctions.
Cet article s'inspire de l'article 35 du Condominium Act de l'Ontario et
complète l'article précédent. Il donne aussi suite
à la proposition du groupe de travail sur la
copropriété.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1160 est-il
adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article
1161?
Mme Harel: "Le nouveau conseil d'administration peut, dans les
soixante jours de l'élection, mettre fin sans pénalité aux
contrats conclus par le promoteur pour l'entretien ou d'autres services, si le
syndicat en souffre préjudice."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau permet aux nouveaux
administrateurs, dans les 60 jours de leur élection, de mettre fin sans
pénalité à certains contrats conclus par le promoteur, si
le syndicat en souffre préjudice. En fait, cet article vise à
contrer certaines pratiques de promoteurs qui, pendant la période
où ils
contrôlent les destinées de la copropriété,
accordent à des personnes liées des contrats d'entretien ou de
services pour une longue période, à des prix souvent
exorbitants.
Cet article s'inspire d'une recommandation formulée par un groupe
de travail sur la copropriété en Ontario, ainsi que par la
législation de l'État de la Virginie et de celui de la Floride en
matière de copropriété.
Il donne suite en substance à la proposition du groupe de travail
québécois sur la copropriété.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais je me demande s'il n'aurait pas
été préférable de mettre une limite d'un an.
L'article dit qu'à ce moment-là on pourrait mettre fin à
tout contrat. Je préférerais et je pense qu'il serait plus
approprié d'indiquer une limite si, par exemple, les contrats n'ont pas
été signés pour une période d'au-delà d'un
an. Sans cela, on sera tenté de discuter tous les contrats qui auront
été signés. Je pense que c'est assez inacceptable pour le
tiers.
M. Cossette: S'il n'y a pas de préjudice, il n'y a pas de
problème. C'est pour permettre au nouveau copropriétaire de bien
connaître la situation et d'évaluer chacun des contrats qui lient
la copropriété.
M. Leduc (Saint-Laurent): II y aura peut-être eu des
soumissions. La personne aura soumissionné et aura obtenu le contrat et
on pourra lui enlever le contrat simplement parce qu'on pourra prétendre
qu'il y a préjudice.
M. Cassette: S'il n'y en a pas, il y a un recours.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense qu'on va très loin.
Cela me semble aller très loin. S'il y a un contrat, je suis
parfaitement d'accord que c'est absolument inacceptable que la
copropriété soit liée avec des contrats de dix ou quinze
ans. Cela se faisait et je pense que c'était absolument inacceptable.
Or, je suis parfaitement d'accord qu'on limite, mais si on parle d'un an ou
d'un maximum de deux ans, vous savez, un contrat d'entretien d'ascenseur, vous
n'avez pas cela pour trois mois. C'est sûr qu'il sera toujours possible
de trouver un autre entrepreneur ou un autre soumissionnaire ou, enfin, une
autre compagnie d'entretien qui serait peut-être prête à le
faire à un prix inférieur. Cela me semble aller très loin.
J'aurais préféré un délai.
Je ne pense pas qu'un an soit tellement long. Je ne pense pas que la
copropriété subirait un gros préjudice d'être
obligée de respecter un contrat pour une période d'une
année.
M. Cossette: Mais si, par exemple, le promoteur, avant de perdre
le contrôle, a un bon ami qui est ingénieur et lui confie la
surveillance de la copropriété pour une période d'un an,
moyennant des honoraires de 50 000 $, je pense que les nouveaux administrateurs
ont intérêt à examiner ce contrat et à en demander
la nullité, parce que c'est nettement inacceptable, puis, ce sont des
choses qui se produisent.
Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.
M. Berrouard: Par ailleurs, j'imagine mal le conseil
d'administration qui, après le délai de 60 jours ou à la
fin du délai, déciderait de demander la résiliation de ce
contrat pour une période de dix mois qui resterait à courir. Il
faut quand même qu'il y ait préjudice.
Par ailleurs, il pourrait arriver, comme le souligne Me Cossette,
finalement, que le contrat 3'étende sur une période relativement
courte, mais qu'il y ait vraiment un préjudice énorme.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous changez toutes les règles
des contrats. Le contrat qui a été signé ne vaut plus et
on pourrait l'annuler unilatéralement. Qu'on le fasse au bout d'une
période d'une durée limitée, je suis parfaitement
d'accord. Là, au moins, on connaît les règles du jeu. Cela
veut dire que celui qui contracte avec une copropriété sait au
départ que son contrat ne peut excéder une durée d'un an.
Je suis parfaitement d'accord, mais qu'on respecte le contrat qui a
été signé! Sinon, je le répète, on bousille
tout le chapitre des contrats.
M. Marx: Je pense que c'est le cas qui nous est donné dans
le cahier. En Ontario, si ce n'est pas ratifié par le conseil, le
contrat est nul.
M. Pineau: II faut l'enlever...
M. Marx: II faut que ce soit ratifié.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...18 mois...
M. Marx: Le contrat ne pourrait être pour plus de 18 mois,
mais il faudrait qu'il soit ratifié.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.
M. Marx: S'il n'est pas ratifié, cela peut être
après un mois.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?
Des voix: Non, non!
M. Marx: II y a une limite de 18 mois.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bien. On va mettre douze
mois.
M. Marx: Que veut dire dans l'article "si le syndicat en souffre
préjudice"?
M. Pineau: C'est ma question.
M. Marx: Si c'est le cas que Me Cossette a cité, où
il s'agit d'un contrat de services exorbitant, j'imagine que le syndicat en
souffre préjudice, si cela veut dire quelque chose.
M. Pineau: J'aimerais préciser...
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, j'aimerais préciser la
question qui vient d'être posée. J'imagine que, lorsqu'on a
écrit "si le syndicat en souffre préjudice", on a songé
à la règle de la lésion, qui est un principe non reconnu
actuellement dans le droit. Si l'article 1161, une fois encore, devait
être mis en vigueur avant les règles sur les obligations, il y
aura là incontestablement une difficulté
d'interprétation.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Oui, mais, M. le Président, je ne vois pas
comment on peut mettre en vigueur l'article 1161, qui fait
référence à la lésion sans adopter l'article sur la
lésion. Il se peut, lorsque le gouvernement présentera les
articles concernant la lésion, que la sous-commission ou la commission
qui siégerait ou l'Assemblée nationale ne soient pas d'accord.
C'est bien possible.
M. Pineau: Ce n'est pas impossible.
M. Marx: Ce n'est pas impossible, pour ne pas dire que c'est
possible, d'accord.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Marx: On tient beaucoup pour acquis...
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Berrouard: Je pense qu'on avait le choix, quand on a
écrit cet article, entre faire appel à deux critères:
d'abord, donner au syndicat la possibilité d'agir pour faire annuler un
contrat avec certaines conditions: délai de 60 jours et
préjudice; l'autre possibilité était de dire: tous les
contrats conclus d'une période de plus de douze mois pourraient
être annulés. Le problème qui se posait dans ce cas, c'est
qu'il me semble un peu incongru de permettre au nouveau conseil
d'administration d'annuler n'importe quel contrat s'il n'y a pas
préjudice. Ce ne sont pas tous les contrats, par ailleurs...
M. Marx: Oui, mais supposons que cet article entre en vigueur
à la fin de l'année 1986 et que le chapitre sur les obligations
ne soit pas encore adopté...
M. Cossette: Sûrement qu'il ne sera pas adopté.
M. Marx: ...sûrement qu'il ne sera pas adopté, donc,
qu'est-ce qu'on a? Un vide législatif. On fait référence
à quelque chose qui n'existe pas.
M. Cossette: Non. On aura le principe général de la
lésion qui sera exprimé au Livre des obligations et on aura une
disposition particulière qui visera ces contrats d'entretien et de
services qui pourront être annulés.
M. Marx: Oui, mais comme Me Pineau l'a dit, "en souffre
préjudice" veut en effet se référer à la
lésion, si j'ai bien compris. Oui?
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin?
M. Marx: Donc, c'est cela, ce ne sera pas en vigueur, et on aura
un article 1161 qui fait référence à une notion qui n'est
pas encore en vigueur. Ce sera difficile de l'appliquer.
Mme Longtin: Je ne suis pas certaine que le problème soit
insurmontable. L'article 1001, actuellement, nous dit: "La lésion n'est
cause de nullité des contrats que dans certains cas et à
l'égard de certaines personnes tel qu'indiqué dans cette
section." Maintenant, déjà cette section a quand même subi
certaines atteintes puisque la lésion a été admise dans
tout le domaine de la consommation. Il suffit, je pense, d'une nuance à
apporter à l'article 1001 dans la loi de l'application pour que cela ne
cause pas vraiment de difficultés, car le concept de lésion
existe et, on sait ce qu'est la lésion.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le concept de lésion existe, mais vous savez
qu'il y a plusieurs façons de concevoir la lésion - subjective,
objective -et Dieu sait s'il y en a des ouvrages et des thèses de
doctorat sur le concept de lésion. Il va y en avoir d'autres si le
législateur ne nous dit pas véritablement ce qu'est la
lésion, car, s'agissant du droit commun, je
n'irai pas chercher le concept de lésion dans la Loi sur la
protection du consommateur pour savoir ce qu'est la lésion.
Mme Longtin: On va être obligés de recourir à
la doctrine.
M. Marx: Le législateur ne veut pas cela non plus.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Je dis qu'on va être obligés de
recourir, évidemment, à la doctrine puisque la lésion,
actuellement, n'est pas définie dans le Code civil du Bas-Canada. Le
problème, s'il en est un, existe déjà parce que,
finalement, les discussions qu'on a à savoir s'il s'agit de
lésion objective ou subjective, existent à cause du silence du
code actuel.
M. Pineau: Oui. C'est pourquoi on ajoute encore à
l'ambiguïté...
Mme Longtin: Un autre cas où on est obligé d'aller
tirer des ressources ailleurs que dans le code.
M. Marx: Cela pose des problèmes, mais, pour l'article
1161, même si le contrat est pour dix ans et qu'il n'y a pas de
préjudice, cela reste en vigueur. Il n'est pas nécessaire que ce
soit ratifié ou quoi que ce soit. Pardon?
M. Berrouard: II y a une ratification implicite. Si les
administrateurs n'ont pas agi dans les 60 jours.
M. Marx: Dans les 60 jours, ils doivent prouver qu'il ont
souffert préjudice. Cela prouve qu'ils ont souffert préjudice et
c'est un litige. Quoique si on met une limite, comme cela a été
proposé par le député de Saint-Laurent, je pense que c'est
plus clair.
M. Berrouard: Si on met une limite de temps, le problème
qui arrive au niveau des contrats, c'est qu'il n'y a pas nécessairement
préjudice. Cela peut être des contrats fort valables. On permet au
nouveau conseil d'administration d'annuler n'importe quel contrat.
M. Marx: C'est cela. Sauf s'ils veulent ratifier le contrat.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ils peuvent le renouveler.
M. Marx: Renouveler ou annuler.
M. Pineau: Je pense que je préférerais cela parce
que si on en revient à 1161 tel que proposé, pour mettre fin
à ce contrat, il faudra prouver tout au moins un
déséquilibre des prestations. D'une part, ce n'est pas facile.
Or, il pourrait y avoir un contrat très onéreux pour les
copropriétaires, mais qui ne serait pas pour autant lésionnaire.
Celui-ci pourrait durer pendant dix, quinze ans. La durée est
déterminée par le contrat. Alors, je me demande s'il ne serait
pas plus sage d'apporter une mesure semblable à celle que nous voyons en
Ontario, c'est-à-dire mettre une limite dans le temps à ce
contrat passé sous réserve, bien sûr, toujours d'une
possible ratification.
M. Marx: Peut-être aussi, M. le Président...
M. Berrouard: Sans égard au fait qu'il est
lésionnaire ou non.
M. Marx: C'est ça.
M. Pineau: Sans égard au fait qu'il soit
lésionnaire.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Si on met cela dans l'article 1161, il serait clair que
toute personne qui veut offrir des services ou signer un contrat avec un
promoteur, il saurait... C'est ça. Après un an, ils peuvent
annuler. Donc, il va agir en conséquence.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Nous allons suspendre cet article et nous y
reviendrons ultérieurement.
Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons l'article 1161.
À l'article 1162, vous avez un amendement. (12 heures)
De la fin de la copropriété
Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à remplacer le
deuxième alinéa. Le premier se lit comme suit: "II peut
être mis fin à la copropriété par décision
des deux tiers des copropriétaires représentant 90 % des voix de
tous les copropriétaires. "La décision de mettre fin à la
copropriété doit être constatée dans un écrit
signé par le syndicat et les personnes détenant des
privilèges ou des hypothèques sur tout ou partie de l'immeuble.
L'écrit doit être enregistré par dépôt et
inscrit à l'index des immeubles. "En cas d'emphytéose ou de
propriété superficiaire, le propriétaire de l'immeuble et
l'emphytéote ou le superficiaire doivent aussi
signer l'écrit."
Commentaire. Outre une modification de concordance, l'amendement
proposé apporte une précision au sujet des personnes qui doivent
signer l'écrit mettant fin à la copropriété.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire sur l'article.
M. Cossette: Cet article prévoit qu'il peut être mis
fin à la copropriété d'un immeuble sauf qu'au lieu
d'exiger, comme le fait le droit actuel à l'article 442o du Code
civil du Bas-Canada, portant sur l'unanimité des
copropriétaires, on exige que les deux tiers des copropriétaires
représentant 90 % des voix y consentent. Cet assouplissement de la
règle actuelle a pour but d'éviter toute forme de chantage et
d'empêcher que l'entêtement d'un seul individu, par exemple, ne
force les autres à demeurer dans un état dont ils ne veulent
plus.
L'article prévoit aussi que la décision de mettre fin
à la copropriété doit être constatée dans un
écrit signé par le syndicat et les personnes détenant des
privilèges ou des hypothèques sur tout ou partie de l'immeuble
ainsi que par l'emphytéote ou le superficiaire, le cas
échéant.
Cet avis devra être enregistré par dépôt
inscrit à l'index des immeubles et déposé au registre des
associations et entreprises.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1162 est-il adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé
est adopté. Article 1163?
Mme Harel: "Le syndicat est liquidé suivant les
règles applicables aux personnes morales. "Le liquidateur du syndicat
est chargé de liquider la copropriété et, à cette
fin, il est saisi, en outre des biens du syndicat, de l'immeuble et de tous les
droits et obligations des copropriétaires dans l'immeuble."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article indique que le syndicat est
liquidé selon les règles applicables à la liquidation des
personnes morales. Le liquidateur du syndicat est chargé de liquider la
copropriété et, à cette fin, il est saisi des biens du
syndicat, de l'immeuble et de tous les droits et obligations des
copropriétaires dans l'immeuble.
Actuellement, les règles relatives au partage et à la
licitation en justice de biens communs s'appliquent à la liquidation des
droits de copropriété. Mais, étant donné que,
désormais, la copropriété a la personnalité
juridique, il a paru plus opportun d'appliquer les règles relatives
à la liquidation des personnes morales prévues aux articles 390
à 399 du projet.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. M. Marx:
Adopté.
De la propriété superficiaire
Le Président (M. Gagnon): Article 1164? M. Cossette:
Le droit de superficie, oui.
M. Marx: C'est de la propriété superficiaire.
Le Président (M. Gagnon): Chapitre quatrième. De la
propriété superficiaire. Section 1. De la nature de la
propriété superficiaire. Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: "La propriété superficiaire est un droit
réel immobilier qui permet à une personne, appelée
superficiaire, d'être propriétaire de constructions, ouvrages ou
plantations situés sur ou dans un immeuble appartenant à une
autre personne, appelée tréfoncier. "Elle résulte de la
division de l'objet du droit de propriété, de la cession du droit
d'accession ou de la renonciation au bénéfice de
l'accession."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article et les suivants proposent des
dispositions nouvelles régissant la propriété
superficiaire ou le droit de superficie, droit qui a été
développé par la doctrine et la pratique à partir des
articles 414 et 415 du Code civil du Bas-Canada. L'article proposé
définit la propriété superficiaire comme un droit
réel immobilier qui permet à une personne, appelée
superficiaire, d'être propriétaire des constructions, ouvrages ou
plantations situés dans ou sur un immeuble appartenant à une
autre personne, appelée tréfoncier.
Il indique aussi comment s'établit ce droit, que ce soit par la
division de l'objet même du droit de propriété, par la
cession du droit d'accession ou par la renonciation au bénéfice
de l'accession.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1164 est-il
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1165?
Vous avez un amendement.
Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à remplacer,
à la première ligne, les mots "le droit de" par les mots "l'acte
constitutif du droit de". Alors, l'article amendé se lit comme suit:
"Pour être opposable aux tiers, l'acte constitutif du droit de
propriété superficiaire doit être enregistré par
dépôt." C'est un amendement de nature purement formelle.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article précise, comme dans le cas de
tous les droits réels, que le droit de propriété
superficaire doit être enregistré pour être opposable aux
tiers.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Une voix:
Oui.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté
et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1166?
Mme Harel: "Le droit du propriétaire superficiaire
à l'usage du tréfonds est réglé par la convention.
À défaut, le tréfonds est grevé des servitudes
nécessaires à l'exercice de ce droit; elles s'éteignent
lorsqu'il prend fin."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de
l'office, sauf qu'on précise que les droits du propriétaire
superficiaire à l'usage du tréfonds sont d'abord
réglés par la convention. À défaut, le
tréfonds est grevé des servitudes nécessaires à
l'exercice de la propriété superficiaire.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Est-ce à dire, M. le Président, que si
ce n'est pas réglé par la convention, on applique tout simplement
les règles de servitude? Donc, on le confond avec les servitudes.
M. Cossette: Les servitudes nécessaires à
l'exercice du droit. Donnons un exemple, si on veut...
M. Pineau: M. le Président, si vous me le permettez, je
complète. Ce qui m'a frappé, c'est que, si on fait du droit de
superficie une modalité du droit de propriété, c'est
distinct de la servitude et de l'usufruit, n'est-ce pas? Or, l'article 1166
vient dire que, s'il n'y a pas de convention, on applique la servitude.
M. Cossette: C'est-à-dire que, s'il n'y a pas de
convention relative à ces servitudes, le droit de
propriété superficiaire s'accompagne des servitudes
légales...
M. Pineau: Des servitudes légales.
M. Cossette: ...nécessaires pour l'exercice de ce droit de
superficie.
M. Pineau: D'accord. M. Cossette: Cela va? M. Pineau:
D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1166 est-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1167?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer les mots "de
leur droit de propriété respectif" par les mots "de leurs droits
de propriété respectifs". C'est un amendement purement formel.
"Le superficiaire et le tréfoncier supportent les charges grevant ce qui
fait l'objet de leurs droits de propriété respectifs".
M. Cossette: Le pluriel au lieu du singulier.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce une règle
supplétive à savoir que le superficiaire et le tréfoncier
supportent les charges grevant ce qui fait l'objet de leurs droits de
propriété respectifs. Cet article s'inspire de la proposition de
l'office contenue à l'article 273 de son projet. Toutefois, à la
différence de l'office, l'application de la règle est
généralisée alors que l'office ne l'appliquait qu'en
matière de bail à construction.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1167 est adopté et l'article 1167 tel qu'amendé est
adopté. Article 1168?
Mme Harel: "La propriété superficiaire
établie au moyen d'un bail à construction permet au locataire d'y
élever, avec la permission du locateur, des constructions, ouvrages ou
plantations et de s'en faire reconnaître la propriété. "Le
superficiaire peut céder ou sous-louer des droits lui résultant
du bail. Il peut aussi grever seul l'immeubie loué de
servitudes utiles, même en faveur des tiers; elles
s'éteignent lorsque le droit prend fin."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance deux propositions
de l'office. D'abord, il définit le bail à construction comme un
bail qui permet au locataire de l'immeuble d'y élever, avec la
permission du locateur, des constructions, ouvrages ou plantations et de s'en
faire reconnaître la propriété. Ensuite, il précise,
par dérogation à l'article 1619 du Code civil du Bas-Canada, que
le locataire peut céder ses droits lui résultant du bail sans
devoir obtenir le consentement du locateur et qu'il peut grever seul l'immeuble
des servitudes utiles, même en faveur des tiers. Ces servitudes sont
temporaires et elles s'éteignent lorsque le droit du superficiaire prend
fin.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, je soulève tout
simplement le point qui a été présenté par le
Barreau à la page 29, qui avait suggéré de remplacer "et
de s'en faire reconnaître la propriété" par "et d'en
être le propriétaire" j'imagine.
M. Cossette: J'aime presque autant le texte actuel.
M. Pineau: Je ne sais pas trop. Je ne fais pas de
commentaire.
Mme Longtin: En fait, je pense que l'expression "de s'en faire
reconnaître" doit se lire aussi en fonction des droits d'accession. C'est
qu'on vient faire échec, ici, aux droits d'accession du
propriétaire du fonds sur les constructions qui sont
édifiées sur son fonds. Il me semble évident que celui qui
édifie les constructions en vertu d'un bail et qui lui permet
d'être propriétaire est propriétaire, mais la
reconnaissance de cette propriété par rapport aux tiers se fait
dans le bail.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1168 est
adopté. Article 1169?
Mme Harel: "La propriété superficiaire peut
être perpétuelle; celle établie par bail à
construction ne peut excéder cent ans, même si le bail
prévoit une durée plus longue. "Le bail ne peut être
prolongé par tacite reconduction au-delà de ce terme."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article précise que la
propriété superficiaire peut être perpétuelle.
Toutefois, comme elle peut résulter d'un bail à construction,
l'article précise que, dans un tel cas, elle ne peut excéder 100
ans.
À des fins d'uniformisation des délais en matière
de modalités ou de démembrement du droit de
propriété, la durée maximale du contrat a
été portée à 100 ans. On était plutôt
habitués au terme de 99 ans, mais cela fait un plus beau chiffre, 100
ans.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Je veux tout simplement demander pourquoi on limitait
à 100 ans le bail à construction alors que la
propriété superficiaire peut être perpétuelle et
alors que, en définitive, j'ai cru comprendre que le bail à
construction, c'était le principal exemple de l'exercice d'un droit
superficiaire? Ma question est de pure curiosité.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette. Me Berrouard.
M. Berrouard: En matière de propriété
superficiaire, finalement, on peut passer par nombre de véhicules. Il
arrive souvent qu'on utilise deux véhicules pour créer le droit
de propriété superficiaire. Si on passe par le véhicule du
bail, à ce moment-là, on a choisi de limiter à 100 ans. Si
on passe par un autre véhicule, à ce moment-là, cela va
être les règles de ce véhicule qui vont s'appliquer. Si on
choisit la renonciation au droit d'accession - je pense qu'il arrive souvent
également que le droit de propriété superficiaire se
crée par renonciation au droit d'accession - à ce
moment-là, il n'y aura pas de problème, ce sera perpétuel.
Il est vrai que la propriété superficiaire a une vocation
à être perpétuelle, mais dépendant du
véhicule utilisé également.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1169 est
adopté. Article 1170?
Mme Harel: L'amendement consiste à déplacer
l'article 1170 après l'article 1171, à le renuméroter
1171.1 et à remplacer l'article en l'inversant, en fait, dans sa
rédaction actuelle. Il se lit comme suit: "La perte totale des
constructions, ouvrages ou plantations, de même que leur expropriation ou
celle du tréfonds ne met pas fin à la propriété
superficiaire."
Le commentaire. En cas d'expropriation totale des constructions,
ouvrages ou plantations, l'expropriant donne une indemnité au
tréfoncier et au superficiaire. L'expropriant devient alors
propriétaire, tant du tréfonds que des superficies. Dès
lors, comme il y a réunion des qualités de tréfoncier et
de superficiaire dans une même
personne, le premier alinéa de l'article 1171 prévoit que
la propriété superficiaire prend fin.
L'amendement proposé a donc pour but d'éviter cette
redondance, tout en prévoyant ce qui arrive en cas d'expropriation
partielle.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Le commentaire de l'amendement vaut pour lecommentaire de l'article.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1170 est adopté. L'article, tel qu'amendé,
est-il adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1171?
Mme Harel: L'article 1170 qui est renuméroté
1171.1. C'est bien cela.
Le Président (M. Gagnon): Effectivement, cela fait partie
de l'amendement.
Mme Harel: D'accord. À l'article 1171, l'amendement
consiste à supprimer, à la première ligne, le mot "aussi".
L'article se lit comme suit: "La propriété superficiaire prend
fin: "1° Par la réunion des qualités de tréfoncier et
de superficiaire dans une même personne, sans préjudice toutefois
des droits des tiers; "2° Par l'avènement d'une condition
résolutoire; "3° Par l'arrivée du terme, le cas
échéant."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article complète le
précédent en énumérant les causes qui mettent fin
à ta propriété superficiaire, telles la réunion des
qualités de tréfoncier et de superficiaire dans une même
personne, l'avènement d'une condition résolutoire ou
l'arrivée du terme prévu dans l'acte juridique qui a
créé ce mode de propriété.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1171 est adopté. L'article, tel qu'amendé, est adopté.
Article 1172? (12 h 15)
Mme Harel: "À l'expiration de la propriété
superficiaire, le tréfoncier acquiert la propriété des
constructions, ouvrages ou plantations en en payant la valeur au superficiaire,
si leur valeur est inférieure à celle du tréfonds. "Si la
valeur est égale ou supérieure à celle du tréfonds,
le superficiaire a droit d'acquérir la propriété du
tréfonds en en payant la valeur au tréfoncier, à moins
qu'il ne préfère, à ses frais, enlever les constructions,
ouvrages et plantations qu'il a faits et remettre le tréfonds dans son
état antérieur."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article règle le sort des constructions,
ouvrages ou plantations à l'expiration de la propriété
superficiaire. Ceux-ci sont acquis par le tréfoncier si leur valeur est
inférieure à celle du tréfonds. Si leur valeur est
égale ou supérieure à celle du tréfonds, le
superficiaire a droit d'acquérir la propriété du
tréfonds en en payant la valeur au tréfoncier, à moins
qu'il ne préfère les enlever et remettre l'immeuble dans son
état antérieur.
Cet article implique, par ailleurs, l'abrogation de la Loi sur les
constituts, puisque l'essence de cette loi était de permettre à
un locataire, qui avait construit sur un terrain avec la permission du
propriétaire, une maison dont la valeur était égale ou
supérieure à celle du terrain, d'acquérir ce terrain en en
payant la valeur au propriétaire.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article...
M. Marx: Est-ce que...
Le Président (M. Gagnon): M. le député
D'Arcy McGee.
M. Marx: Je veux clarifier cela pour moi-même. Est-ce que
cet article fait la distinction entre cette institution et le bail
emphytéotique? C'est cela l'essentiel.
M. Cossette: Oui. En vertu de la loi à laquelle on
réfère ici, la Loi sur les constituts, je pense que cette
dernière ne vise absolument pas les baux emphytéotiques. Je pense
que c'est clair.
M. Leduc (Saint-Laurent): Dans ce cas-ci, il y a compensation,
alors que dans l'emphytéote, il perd tout.
M. Marx: II perd tout, oui. M. Cossette: Oui.
M. Marx: L'essentiel entre les deux régimes, c'est
l'article 1172.
M. Cossette: Désormais, puisqu'il faut employer le mot,
parce que la Loi sur les constituts sera abrogée, je pense...
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.
M. Cassette: ...que c'est l'article 1172 qui va faire que le
régime est différent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, c'est cela.
M. Cossette: Oui, oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1173.
M. Cassette: Ce qui fera peut-être préférer
le droit de superficie pour l'établissement d'une
copropriété, éventuellement, au droit
d'emphytéose.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1173. Mme la
députée de Maisonneuve.
M. Cossette: Oui, oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): On ne s'en servira pas souvent, j'ai
l'impression.
M. Cossette: Mais cela, on le verra à l'usage.
Mme Harel: "À défaut par le superficiaire d'exercer
son droit d'acquérir la propriété du tréfonds dans
les quatre-vingt-dix jours suivant la fin de la propriété
superficiaire, le tréfoncier devient propriétaire par accession
des constructions, ouvrages et plantations."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article complète le
précédent pour éviter de prolonger indûment
l'incertitude quant à l'option du superficiaire à la fin du droit
de se porter acquéreur du tréfonds. L'article
décrète un délai de 90 jours dans lequel le superficiaire
doit exercer son droit. S'il ne l'exerce pas dans ce délai, le
tréfoncier devient propriétaire des constructions, ouvrages ou
plantations par accession.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): II y aurait, à ce moment-ci,
contrepartie. Il devient propriétaire, par accession, des constructions,
ouvrages et plantations, moyennant compensation, oui?
Mme Longtin: À ce moment-là... M. Cossette:
Non.
Mme Longtin: ...comme on renvoie aux règles de
l'accession, on renvoie aux règles de compensation entre possesseur de
bonne foi et possesseur de mauvaise foi et propriétaire du fonds.
Généralement, les personnes qui détiennent en vertu d'un
titre et qui font des améliorations sont assimilées à un
possesseur de mauvaise foi, je pense que c'est l'article 1021.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.
M. Pineau: Est-ce que ce tréfoncier pourrait être de
bonne foi? Je vais inverser ma question.
Mme Longtin: Le tréfoncier serait assimilé au
propriétaire; alors, pour lui, la question ne se poserait pas. La
question se poserait par rapport au superficiaire...
M. Pineau: Au superficiaire.
Mme Longtin: ...qui, à ce moment-là, serait
traité comme un détenteur, je pense, comme...
Mme Harel: II va y avoir un amendement qui va être
introduit à l'article 1173.1. Est-ce que je pourrais en faire la lecture
immédiatement, M. le Président?
Le Président (M. Gagnon): Cela va. Mme Harel: Parce
qu'on a, je pense... Le Président (M. Gagnon):Oui, oui.
Mme Harel: ...intérêt à faire l'étude...
Le Président (M. Gagnon): C'est un nouvel article.
Mme Harel: Oui... de ce nouvel article en regard de l'article
1173. Cela se lirait comme suit: "Le tréfoncier et le superficiaire qui
ne s'entendent pas sur le prix et les autres conditions d'acquisition du
tréfonds ou des constructions, ouvrages ou plantations peuvent demander
au tribunal de fixer le prix et les conditions d'acquisition. Le jugement
équivaut alors à titre et en a tous les effets. "Ils peuvent
aussi, en cas de désaccord sur les conditions d'enlèvement de ces
objets, demander au tribunal de les fixer."
Le commentaire sur l'amendement. L'amendement proposé a pour but
de préciser le mode d'exercice du recours du tréfoncier ou du
superficiaire pour acquérir, selon le cas, le tréfonds ou les
superficies, de même que l'exercice du droit pour le superficiaire
d'enlever les superficies.
L'amendement indique également que le jugement qui fixe le prix
d'acquisition du tréfonds ou des superficies équivaut à
titre et en a tous les effets.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1173 est adopté, c'est-à-dire que l'amendement forme un
nouvel article, c'est l'article 1173.1.
Mme Harel: L'article 1173 est également maintenu.
Très bien, nous allons procéder.
Le Président (M. Gagnon): Je suis d'accord, mais il faut
que je commence par faire adopter l'amendement...
Mme Harel: Parfait.
Le Président (M. Gagnon): ...et après, l'article
tel qu'amendé. Cela va? L'article 1173 est adopté tel
qu'amendé?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1174?
M. Marx: C'est un autre titre des démembrements du droit
de propriété.
Le Président (M. Gagnon): Voilà! Titrequatrième.
M. Cossette: C'est l'avant-dernier best-seller.
M. Leduc (Saint-Laurent): J'étais certain qu'on ne se
rendrait pas là... i
Des démembrements du droit de
propriété
Le Président (M. Gagnon): Article 1174?
Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à supprimer le
deuxième alinéa et le premier se lit comme suit: "L'usufruit,
l'usage, la servitude et l'emphytéose sont des démembrements du
droit de propriété et constituent des droits réels".
L'amendement qui consiste à supprimer le deuxième
alinéa vise à éliminer toute confusion sur les droits
réels en ne permettant plus expressément la création
d'autres démembrements du droit de propriété que ceux
connus traditionnellement.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire sur l'article. Cela
va?
M. Cossette: Je n'ai pas de commentaire à faire, parce que
les commentaires antérieurs deviennent inutiles, caducs.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1174 est adopté?
M. Marx: Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article telqu'amendé est donc adopté. Article 1175?
De l'usufruit
Mme Harel: L'amendement consiste à biffer, à la
fin, les mots "et d'en respecter la destination". L'article se lit comme suit:
"L'usufruit est le droit d'user et de jouir, pendant un certain temps, d'un
bien dont un autre a la propriété, comme le propriétaire
lui-même, mais à charge d'en conserver la substance".
L'amendement proposé vise à ne pas consacrer
expressément, à l'instar du droit actuel, l'obligation de
l'usufruitier de respecter la destination du bien, cette obligation
étant généralement comprise dans celle de respecter la
substance du bien mais pouvant, exceptionnellement, faire l'objet de certaines
distinctions.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des
commentaires à l'article?
M. Cossette: Oui, un commentaire restreint. Cet article, qui
reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 443 du
Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office, définit
l'usufruit comme étant le droit d'user et de jouir pendant un certain
temps d'un bien dont un autre a la propriété, comme le
propriétaire lui-même, mais à charge d'en conserver la
substance. Un point.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté
et l'article tel qu'amendé est adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1176?
M. Cossette: Une belle question d'examen!
Mme Harel: "L'usufruit s'établit par contrat, par
testament ou par la loi; il peut aussi être établi par jugement
dans les cas prévus par la loi."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend la proposition de l'office en
énumérant les modes de création de l'usufruit. Toutefois,
on ne précise pas que la prescription est un mode de création de
ce droit, la prescription étant un effet de la loi. Par contre, on
indique que l'usufruit peut aussi être établi par jugement dans
les cas prévus par la loi, tenant compte ainsi des nouvelles
dispositions
du droit de la famille et, notamment, des articles 459, 533 et 559 du
Code civil du Québec qui permettent au juge d'accorder à l'un des
conjoints un droit de propriété ou d'usage.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, tout simplement, l'usufruit
établi par jugement, en définitive, cela se borne au droits
d'usage. On fait référence au droit d'usage et au droit
d'habitation.
M. Berrouard: Je pense qu'un amendement sera apporté dans
la loi d'application concernant les articles 459, 533 et 559 pour
préciser également que cela pourrait être un droit
d'usufruit.
M. Pineau: Ah bon! Et à l'usufruit établi par la
loi, à part la prescription acquisitive, est-ce qu'il y a d'autres cas?
Quelles seraient les autres possibilités? L'usufruit du conjoint
n'existe plus?
M. Cossette: Non.
M. Pineau: II n'existera plus, c'est cela. L'usufruit de la
communauté n'existe plus puisque la communauté a disparu, et les
parents n'ont pas l'usufruit sur les biens de leurs enfants mineurs?
M. Cossette: Non.
M. Pineau: Alors, est-ce que cela existe?
M. Cossette: L'usufruit établi par la loi?
M. Pineau: Oui. Par la prescription? Une voix: II n'y a
pas d'autres cas.
M. Cossette: Dans le droit actuel, non. Éventuellement, il
pourra peut-être y en avoir d'autres, mais, actuellement, non.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1176 est-il
adopté?
Une voix: Oui.
M. Marx: L'usufruit qui existait en vertu du Code civil
actuel?
M. Pineau: II va être supprimé.
M. Cossette: Oui. L'usufruit légal du conjoint survivant,
il est prévu qu'il sera supprimé évidemment et qu'il sera
remplacé par...
M. Marx: Autre chose.
M. Cossette: ...les fameuses dispositions contenues aux articles
703 et suivants du projet actuel. Il faut déjà les qualifier de
fameuses.
M. Marx: Quelqu'un qui bénéficie tout de suite
après l'adoption de ce projet de loi d'un usufruit prévu par la
loi actuelle continuerait de bénéficier de cet usufruit.
M. Cossette: Ah oui!
M. Marx: Donc, c'est un usufruit prévu par la loi et cela
couvre tous les cas d'usufruit qui existeront...
M. Pineau: C'est une survie de la loi ancienne.
M. Marx: C'est cela. Sur la vie... D'accord.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1176 est
adopté. J'appelle l'article 1177.
Mme Harel: 1177.
Le Président (M. Gagnon): Avant que vous ne commenciez,
comme il est 12 h 30, on peut peut-être aller manger et revenir à
14 heures?
Mme Harel: Est-ce que nous revenons dans cette salle?
Le Président (M. Gagnon): Non, au salon rouge. Cela va? La
séance est suspendue jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise à 14 h 15)
Le Président (M. Gagnon): La sous-commission des
institutions se réunit avec le mandat de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant
réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des
successions et des biens.
Lors de la suspension de nos travaux, nous étions à
l'article 1177. Il y a un amendement. Est-ce que l'article a été
lu?
Mme Harel: Non, pas encore.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, aux premier
et deuxième alinéas, le mot "bénéficiaires" par le
mot "usufruitiers". C'est un amendement purement formel.
L'article se lit comme suit: "L'usufruit peut être établi
pour un seul ou plusieurs
usufruitiers, conjointement ou successivement. "Les usufruitiers doivent
exister lors de l'ouverture de l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Le terme "bénéficiaires" voulant dire
usufruitiers, je fais le commentaire.
Cet article est nouveau. Il reprend en substance les articles 97 et 98
du projet de l'office. Il précise, d'une part, que l'usufruit peut
être établi pour l'avantage d'un seul ou deplusieurs
bénéficiaires, conjointement ou successivement, et, d'autre part,
que les bénéficiaires doivent exister lors de l'ouverture de
l'usufruit. Cette dernière exigence vise à éviter la
confusion entre l'usufruit et la substitution et le démembrement d'une
propriété de manière conditionnelle.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que
l'amendement à l'article 1177 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article tel
qu'amendé est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1178.
Mme Harel: L'amendement consiste à ajouter, à la
fin du premier alinéa, les mots "ou constitue un usufruit
successif".
L'article se lit comme suit: "La durée de l'usufruit ne peut
excéder cent ans, même si l'acte qui l'accorde prévoit une
durée plus longue ou constitue un usufruit successif. "L'usufruit
accordé sans terme est viager ou, dans le cas d'une personne morale,
trentenaire."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article précise que la durée
maximale de l'usufruit est de cent ans. Dans le cas où l'usufruit est
accordé sans terme, il est présumé viager ou, dans le cas
d'une personne morale, trentenaire.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1178 est
adopté. J'appelle l'article 1179.
Mme Harel: "L'usufruitier a l'usage et la jouissance..." Il y a
un amendement au titre.
Le Président (M. Gagnon): Sur le titre?
Mme Harel: Oui. Il s'agit de remplacer l'intitulé du
paragraphe 1 qui précède l'article 1179 par celui-ci: De
l'étendue de l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1179. C'est un amendement à l'intitulé.
Mme Harel: À l'intitulé.
Des droits de l'usufruitier
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1179.
Mme Harel: L'article se lit comme suit: "L'usufruitier a l'usage
et la jouissance du bien sur lequel porte l'usufruit; il prend le bien dans
l'état où il le trouve. "L'usufruit porte sur tous les
accessoires, de même que sur tout ce qui s'unit ou s'incorpore
naturellement à l'immeuble par voie d'accession."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, qui s'inspire des articles 100, 102 et
120 proposés par l'office donne une description générale
des droits de l'usufruitier. Il reprend en substance les dispositions du droit
actuel contenues aux articles 443, 447, 458 et 463 du Code civil du
Bas-Canada.
En raison de cet article, l'usufruitier a l'usage et la jouissance du
bien sur lequel porte l'usufruit; il prend le bien dans l'état où
il le trouve. Il ne peut donc exiger du nu-propriétaire qu'il lui
remette le bien en bon état.
De plus, l'article précise que son usufruit porte sur tous les
accessoires, de même que sur tout ce qui s'unit ou s'incorpore
naturellement à l'immeuble par voie d'accession, reprenant ainsi dans
une formulation plus générale la règle de l'article 458 du
Code civil du Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1179 est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1180.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer le
deuxième alinéa. Je vais faire lecture du premier: "L'usufruitier
peut exiger du nu-propriétaire la cessation de tout acte
qui l'empêche d'exercer pleinement son droit. "L'aliénation
que le nu-propriétaire fait de son droit ne porte pas atteinte au droit
de l'usufruitier."
L'amendement proposé est purement formel.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez des
commentaires sur l'article?
M. Cossette: Oui. Cet article reprend en des termes
différents les articles 462 et 483 du Code civil du Bas-Canada et
l'article 101 proposé par l'Office de révision du Code civil.
Ainsi, il précise, d'une part, que l'usufruitier peut exiger du
nu-propriétaire la cessation de tout acte qui l'empêche d'exercer
pleinement son droit et, d'autre part, que l'aliénation du droit du
nu-propriétaire n'affecte pas le droit de l'usufruitier.
Le Président (M. Gagnon): L'article est-il adopté
tel qu'amendé?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1181.
Mme Harel: "L'usufruitier est propriétaire des fruits et
revenus que produit le bien."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 106
proposé par l'Office de révision du Code civil. Contrairement au
droit actuel, il prévoit que l'usufruitier acquiert la
propriété des fruits et revenus produits par le bien, alors que
l'article 447 du Code civil du Bas-Canada ne fait qu'indiquer son droit d'en
jouir sans lui donner la qualité de propriétaire des fruits et
revenus.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Une simple question de terminologie.
Propriétaire des revenus, point d'interrogation? L'usufruitier fait sien
les fruits et revenus, par exemple.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que cet
amendement sera adopté? Adopté.
M. Cossette: C'est-à-dire...
Le Président (M. Gagnon): On va recevoir l'amendement.
Est-ce que l'article tel qu'amendé est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1182?
Mme Harel: "L'usufruitier est propriétaire des biens
compris dans l'usufruit dont on ne peut faire usage sans les consommer,
à charge d'en rendre de semblables en pareille quantité et
qualité à la fin de l'usufruit. "S'il ne peut en rendre de
semblables, il doit en payer la valeur en numéraire."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance la règle de
l'article 452 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'Office de
révision du Code civil. Il prévoit que l'usufruitier a le droit
de disposer du bien compris dans l'usufruit dont on ne peut faire usage sans le
consommer. Il prévoit aussi en contrepartie que l'usufruitier doit
rendre un bien semblable en pareille quantité et qualité à
la fin de l'usufruit. S'il ne peut en rendre un semblable, il doit en payer la
valeur en numéraire.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau se plaint de ce que le moment de
l'évaluation ne soit pas indiqué et suggère...
M. Cossette: Qu'on ne précise pas que c'est à la
fin de l'usufruit.
M. Pineau: Pardon!
M. Cossette: II se plaint qu'on ne précise pas que c'est
à la fin de l'usufruit.
Je pense que c'est cela la remarque du Barreau.
M. Pineau: "Estimée à la fin de l'usufruit." C'est
cela.
M. Cossette: Au deuxième alinéa parce qu'au
premier...
M. Pineau: Deuxième alinéa.
Mme Longtin: En fait, c'est que nous considérions que
c'était inutile de le dire puisque la reddition se fait en pareille
quantité et qualité à la fin de l'usufruit. Cela nous
semblait suffisamment clair du premier alinéa que les estimations se
faisaient à la fin de l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): Cela va!
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez...
M. Cassette: Vous comprenez que l'expression s'y trouve au
premier alinéa; elle ne se retrouve pas au second alors que le second
complète le premier. Je pense que par interprétation...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent); Cela va, c'est correct. Cela
répond...
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1182 est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1183?
Mme Harel: "L'usufruitier peut disposer, comme un administrateur
prudent et raisonnable, du bien qui, sans être consomptible, se
détériore rapidement par l'usage. "Il doit, en ce cas, rendre
à la fin de l'usufruit la valeur de ce bien au moment où il en a
disposé."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance la
proposition de l'office. On y prévoit que l'usufruitier a le droit de
disposer du bien qui, sans être consomptible, se détériore
rapidement par l'usage, mais aussi que ce droit n'est pas absolu. D'une part,
l'usufruitier doit agir en administrateur prudent et raisonnable lorsqu'il
exerce ce droit et, d'autre part, il doit rendre à la fin de l'usufruit
la valeur du bien au moment où il en a disposé. Cet article
s'inspire aussi de l'article 568 du Code civil de la Louisiane.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Avez-vous un exemple du bien dont il
est fait état à l'article 1183?
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: L'automobile. C'est peut-être le meilleur
exemple. Une tondeuse à gazon.
M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord. Le Président (M.
Gagnon): Cela va! M. Leduc (Saint-Laurent): Merci.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1183 est
adopté. J'appelle l'article 1184, et vous avez un amendement.
Mme Harel: Oui, qui consiste à supprimer, à la
première ligne du premier alinéa, le mot "naturels".
L'article se lit comme suit: "L'usufruitier perçoit les fruits
attachés au bien au début de l'usufruit. Il n'a aucun droit sur
ceux qui sont encore attachés au bien au moment de sa cessation. "Une
indemnité est due par le nu-propriétaire ou par
l'usufruitier, selon le cas, à celui qui a fait les travaux ou les
dépenses nécessaires à la production de ces fruits."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article règle le sort des fruits naturels
- je devrais exclure le mot "naturels" du commentaire - attachés au
bien, tant au début qu'à la fin de l'usufruit. Au début,
ils appartiennent à l'usufruitier, mais il n'a aucun droit sur ceux qui
sont encore attachés au bien au moment de la cessation de l'usufruit.
À cet égard, l'article proposé est conforme aux droits
actuels et à la proposition de l'office. Il s'en différencie en
accordant une indemnité au nu-propriétaire ou à
l'usufruitier, selon le cas, pour les travaux effectués pour la
production de ces fruits.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.
M. Pineau: Au premier alinéa, à la fin: "au moment
de sa cessation". Sur le plan de la langue, je pense que quelque chose ne
fonctionne pas. C'est au moment de la cessation de l'usufruit. Il n'a aucun
droit sur ceux qui, lors de la cessation de l'usufruit, sont encore
attachés au bien.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Cossette: Êtes-vous d'accord sur la proposition
d'amendement?
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on peut tout
simplement corriger cet amendement-ci?
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gagnon): On pourrait l'ajouter.
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Alors, l'amendement à
l'article 1184 est-il adopté?
Mme Harel: II se lit comme suit: "II
n'a aucun droit sur ceux qui, lors de la cessation de l'usufruit, sont
encore attachés au bien." C'est cela?
M. Pineau: C'est cela.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1184, tel
qu'amendé, est-il adopté?
M. Marx: Adopté.
Mme Harel: II y avait un commentaire du Barreau, lors de la
présentation de son mémoire.
M. Pineau: Aucune indemnité...
Le Président (M. Gagnon): Voulez-vous faire le
commentaire?
Mme Harel: Me Longtin avait préparé un commentaire
supplémentaire fort volumineux et intéressant.
Mme Longtin: La question avait déjà
été discutée. Il est certain que la règle actuelle
supprime tous les comptes épineux entre les parties, mais elle me
semblait quand même pouvoir conduire à des résultats
injustes dans la mesure où l'usufruitier pouvait gagner, au
début, les fruits d'une récolte sans les perdre et sans
compensation entre le travail effectué et le revenu retiré. Dans
ce sens, la règle proposée paraît plus équitable.
Cependant, il faut également mentionner qu'on peut toujours convenir du
contraire.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? J'appelle l'article
1185.
Mme Harel: "Les revenus se comptent, entre l'usufruitier et le
nu-propriétaire, jour par jour. Ils appartiennent à l'usufruitier
du jour où son droit commence jusqu'à celui où il prend
fin, quel que soit le moment où ils sont exigibles ou versés,
sauf les dividendes qui n'appartiennent à l'usufruitier que s'ils sont
déclarés pendant l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de
l'Office de révision du Code civil ainsi que la règle du droit
actuel exprimée à l'article 451 du Code civil du Bas-Canada. Il
précise que les revenus se comptent, entre l'usufruitier et le
nu-propriétaire, jour par jour et qu'ils appartiennent à
l'usufruitier du jour où son droit commence jusqu'à celui
où il prend fin, quel que soit le moment où ils sont exigibles ou
versés. Une exception est prévue à cette règle,
soit celle relative à l'acquisition des dividendes. Ceux-ci
appartiendront soit à l'usufruitier, soit au nu-propriétaire,
selon qu'ils seront déclarés pendant, avant ou après
l'usufruit. À cet égard, l'article codifie le droit actuel.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1185 est-il
adopté? Adopté. J'appelle l'article 1186.
Mme Harel: "Les paiements exceptionnels qui peuvent
dériver du bien sur lequel porte l'usufruit, telles les primes
attribuées à l'occasion du rachat d'une valeur mobilière,
sont versés à l'usufruitier, qui en doit compte au
nu-propriétaire à la fin de l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance la
proposition de l'office. Il établit que les paiements exceptionnels qui
peuvent dériver du bien sur lequel porte l'usufruit sont versés
à l'usufruitier. Comme ils sont assimilés à des versements
de capital, l'usufruitier en a la jouissance pendant la durée de
l'usufruit, mais il en devra compte au nu-propriétaire à la fin
de l'usufruit. (14 h 30)
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.
M. Pineau: Je me demandais quelle était l'utilité
de cette disposition. Est-ce qu'il ne s'agirait pas d'un accessoire tout
simplement, donc qui suit le principal?
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Pineau: Est-ce que c'est utile? Ne s'agit-il pas tout
simplement d'un accessoire qui suit le principal?
M. Cassette: Oui. Aujourd'hui, il faut raisonner en faisant un
peu d'analogie avec les règles qui existent en matière
immobilière. Comme l'analogie n'est pas toujours faite, même en
doctrine, je pense qu'il a été jugé
préférable d'exprimer la règle.
M. Pineau: D'accord. M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1186 est
adopté. J'appelle l'article 1187.
Mme Harel: "Si la créance sur laquelle porte l'usufruit
vient à échéance au cours de l'usufruit, le prix en est
payé à l'usufruitier, qui en donne quittance. "L'usufruitier en
doit compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau précise que si
la créance sur laquelle porte un usufruit vient à
échéance au cours de l'usufruit, le prix en est payé
à l'usufruitier qui en donne quittance. L'usufruitier en doit cependant
compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit, puisqu'il
s'agit de capital. Cet article reprend en substance une proposition de l'office
et fournit une règle expresse relativement à l'usufruit des
créances, règle souhaitée d'ailleurs par certains
juristes.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1187 est
adopté. J'appelle l'article 1188.
Mme Harel: "Le droit d'augmenter le capital sujet à
l'usufruit, comme celui de souscription préférentielle à
des actions, appartient au nu-propriétaire, mais le droit de
l'usufruitier s'étend à cette augmentation. "Si le
nu-propriétaire choisit d'aliéner son droit, le produit de
l'aliénation est remis à l'usufruitier qui en est comptable
à la fin de l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance
une proposition de l'office traitant du droit d'augmenter le capital sujet
à usufruit comme celui de souscription préférentielle
à des actions. L'article établit que ce droit appartient
exclusivement au propriétaire puisqu'il s'agit, encore ici, d'un droit
qui affecte le capital sujet à usufruit, mais il établit
également que le droit de l'usufruitier s'étend à cette
augmentation. L'usufruitier a donc la jouissance et il a droit, en cas de vente
du droit, de jouir du produit de la vente sauf à rembourser à la
fin de l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): D'autres commentaires? Cela va.
L'article 1188 est-il adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1189.
Mme Harel: L'amendement consiste a remplacer, au début du
premier alinéa, les mots "Entre eux, le" par le mot "Le". L'amendement
se lirait ainsi: "Le droit de vote rattaché à une action ou
à une autre valeur mobilière, à une part indivise,
à une fraction de copropriété ou à tout autre bien
appartient à l'usufruitier. "Toutefois, appartient au
nu-propriétaire le vote qui a pour effet de modifier la substance du
bien principal, comme le capital social ou le bien détenu en
copropriété, ou de changer la destination de ce bien ou de mettre
fin à la personne morale, au groupement ou à l'entreprise."
L'amendement consiste à ajouter, à la fin, l'alinéa
suivant: "La répartition de l'exercice des droits de vote n'est pas
opposable aux tiers; elle ne se discute qu'entre l'usufruitier et le
nu-propriétaire."
Le commentaire est le suivant: les a-mendements proposés ont pour
but de faire ressortir clairement que la répartition de l'exercice des
droits de vote rattachés à un bien, action, valeur, part ou
fraction, ne se discute qu'entre l'usufruitier et le nu-propriétaire et
qu'il n'est pas opposable au tiers.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires sur cet article?
M. Cossette: Oui, cet article de droit nouveau reprend en
substance une proposition de l'Office de révision du Code civil. Il met
fin à l'incertitude qui existe, en l'absence de convention, sur le
partage des droits de vote rattachés à une valeur
mobilière ou à un autre bien. Ce droit appartient à
l'usufruitier. Mais, lorsque le vote a pour effet de modifier la substance
même du bien principal, d'en changer la destination ou de mettre fin
à la personne morale, au groupement ou à l'entreprise, le droit
de vote appartient au nu-propriétaire.
La règle de l'article proposé n'a pas pour effet de nier
l'applicabilité de règles différentes en droit des
sociétés. Comme il prévoit s'appliquer entre l'usufruitier
et le nu-propriétaire, il n'empêche pas une personne morale de
prévoir que seul le titulaire des actions au registre de l'entreprise a
le droit de vote. Dans ce cas, il appartiendra à l'usufruitier et au
nu-propriétaire de départager entre eux les droits de vote et de
prévoir les procurations ou les mandats nécessaires.
Le Président (M. Gagnon): Ça val L'amendement
à l'article 1189 est adopté. Me Pineau?
M. Pineau: M. le Président, si je comprends bien ce que
l'on ajoute à la fin du deuxième alinéa, cela
équivaut en quelque sorte à "entre eux" au premier alinéa,
qui voulait dire: En fait dans les relations entre le nu-propriétaire et
l'usufruitier.
M. Cossette: Cela n'avait pas été compris
semble-t-il; alors, on supprime "entre eux" pour le remplacer par le
deuxième alinéa qui paraît plus explicite en tout cas.
M. Pineau: Sauf que le deuxième alinéa...
Le Président (M. Gagnon): Ça va?
M. Pineau: ...tout simplement je comprends mieux cette phrase:
Dans les relations entre le nu-propriétaire et l'usufruitier, etc., le
droit de vote. Dans une même phrase, c'est court, cela n'implique pas un
troisième alinéa. J'ai compris quand même. En
définitive, cela revient au même.
Mme Harel: On peut l'adopter tel quel.
M. Pineau: Pardon?
Mme Harel: On peut l'adopter.
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté tel
qu'amendé. Article 1190?
Mme Harel: "1190. L'usufruitier peut céder son droit ou
louer un bien compris dans l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article consacre le droit de l'usufruitier de
céder son droit ou de louer un bien compris dans l'usufruit. Il reprend
en substance l'article 457 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de
l'office.
Le Président (M. Gagnon): Ça va!
L'article 1190 est adopté. Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, il n'y a aucune limite quant
à ce droit de location de sorte qu'un nu-propriétaire pourrait se
trouver complètement démuni à la fin de l'usufruit si le
bail est renouvelable unilatéralement par le locataire. Est-ce que cela
ne devient pas un acte de disposition de la part de l'usufruitier?
M. Cossette: Voulez-vous dire que l'usufruitier...
M. Pineau: II n'y a aucune limite dans ce droit de location,
n'est-ce pas? De sorte qu'avec les maintiens dans les lieux, une
législation ou un bail qui permet au locataire de renouveler de
façon unilatérale, cela pourrait être quasiment à
perpétuité.
Mme Harel: Sauf évidemment le droit d'éviction du
propriétaire.
M. Pineau: Sauf...
Mme Harel: Le droit d'éviction.
M. Pineau: Sauf le droit d'éviction, mais c'est ça.
À ce moment-là, l'usufruitier fait plus que faire un acte
d'administration, il fait un véritable acte de disposition, me
semble-t-il. Cela va très loin. Le nu-propriétaire peut rester
avec rien.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous voulez la
parole, Me Longtin?
Mme Longtin: En fait, actuellement, dans les règles du
bail, la fin d'un usufruit ne met pas fin de plein droit au bail à
durée fixe en vertu de l'article 1646. S'il n'est pas enregistré,
évidemment, on peut ne pas le renouveler. Il reste la question de droit
au maintien dans les lieux. À ce moment, le nu-propriétaire est
dans la même situation que tout autre propriétaire qui aurait
finalement signé un bail, c'est-à-dire qu'il peut reprendre le
logement si lui-même ou quelqu'un, l'un de ses proches, peut le faire, en
vertu de l'article 1659.
M. Pineau: II est vrai, M. le Président, que le
nu-propriétaire se trouve dans la situation dans laquelle il se serait
trouvé s'il avait été le propriétaire, sauf que ce
n'est pas lui qui a consenti le bail; c'est l'usufruitier. Je sais que ce
problème que je soulève, c'est un problème qui est bien
connu en droit français, en tout cas.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1190 est
adopté?
Mme Harel: Adopté. M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1191.
Mme Harel: "Le créancier de l'usufruitier peut faire
saisir et vendre les droits de celui-ci, sous réserve des droits du
nu-propriétaire. "Le créancier du nu-propriétaire peut
également faire saisir et vendre les droits de celui-ci sous
réserve des droits de l'usufruitier."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est nouveau et il précise les
droits du créancier de l'usufruitier ou du nu-propriétaire de
faire saisir et vendre les droits de ceux-ci.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Oui. L'article 1191 est
adopté?
Mme Harel: Adopté. M. Marx: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1192?
Mme Harel: "Les impenses nécessaires faites par
l'usufruitier sont traitées, par rapport au propriétaire, comme
celles faites par un possesseur de bonne foi. Il est en est de même des
impenses utiles."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article modifie la règle actuelle et
celle proposée par l'office relativement aux améliorations
apportées par l'usufruitier. Actuellement, l'article 462 du Code civil
du Bas-Canada prévoit que l'usufruitier est traité comme un
possesseur de mauvaise foi et qu'il ne peut réclamer aucune
indemnité pour les améliorations faites. Cette situation ne
favorise toutefois pas l'amélioration du bien sujet à usufruit.
Celui, par exemple, qui a l'usufruit d'un commerce ne sera guère
intéressé à accroître l'exploitation du commerce si
la seule compensation financière qu'il en obtient est le droit d'enlever
les améliorations.
Afin de favoriser une amélioration du bien sujet à
usufruit, on a jugé opportun de traiter les impenses nécessaires
et utiles apportées par l'usufruitier comme celles faites par un
possesseur de bonne foi. C'est donc dire que les règles établies
aux articles 1011 à 1021 s'appliqueront à l'usufruitier."
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Dans les dispositions précédentes, M. le
Président, on a toujours parlé du nu-propriétaire et, dans
l'article 1192, on ne parle que du propriétaire. C'est une fausse
pudeur, j'imagine. On a oublié le "nu": (14 h 45)
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est le Bureau de la censure!
Le Président (M. Gagnon): On va faire la correction.
Mme Harel: II faut faire la correction.
Le Président (M. Gagnon): Alors, la correction sera faite
dans ce sens-là et ce sera un amendement. Cet amendement est
adopté. L'article 1192, tel qu'amendé, est-il adopté?
Des voix: Adopté. .
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article
1193?
Mme Harel: "L'usufruitier ne peut abattre les arbres qui
croissent sur le fonds soumis à l'usufruit, sauf pour les
réparations, l'entretien et l'exploitation du fonds. Il peut cependant
disposer de ceux qui sont renversés ou qui meurent naturellement. "Il
remplace ceux qui sont détruits en suivant l'usage des lieux ou la
coutume des propriétaires. Il remplace aussi les arbres des vergers et
érablières, à moins qu'en grande partie ils n'aient
été détruits."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article conforme à la proposition de l'office
reprend en substance, mais en les simplifiant, les règles contenues aux
articles 455 et 456 du Code civil du Bas-Canada et relatives au droit de
l'usufruitier sur les arbres qui croissent sur le fonds soumis à
l'usufruit. Cependant, alors que l'article 456 n'obligeait à remplacer
que les arbres fruitiers, nous avons modifié cette obligation par celle
de remplacer les arbres des vergers et érablières, ces arbres
représentant une valeur certaine.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?
M. Pineau: Cela va, oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1193 est
adopté. L'article 1194?
Mme Harel: "L'usufruitier peut commencer une exploitation
agricole ou sylvicole si le fonds soumis à l'usufruit s'y prête.
"L'usufruitier qui commence une exploitation ou la continue doit veiller
à ne pas épuiser le sol ni à enrayer la reproduction de la
forêt. Dans le cas d'une exploitation sylvicole, il doit en outre, avant
le début de son exploitation, faire approuver le plan d'exploitation par
le nu-propriétaire. À défaut d'obtenir cette approbation,
l'usufruitier peut faire approuver le plan par le tribunal."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: L'article diffère quelque peu du droit actuel
et de la proposition de l'office. Actuellement, un usufruitier peut continuer
une exploitation sylvicole à la condition de ne pas enrayer la
reproduction de la forêt et après avoir fait approuver son plan
d'exploitation par des experts et l'avoir fait ratifier par un juge de la Cour
supérieure. Désormais cependant, il pourra commencer ou continuer
une exploitation sylvicole si le fonds soumis à usufruit s'y
prête.
Par ailleurs, des interprétations strictes des expressions
"conserver la substance du bien et n'en pas changer la destination" faisaient
qu'il était même douteux qu'un usufruitier puisse commencer une
exploitation
agricole. L'article met fin à cette situation.
L'usufruitier pourra donc commencer une exploitation. Il devra cependant
le faire de façon à ne pas épuiser le sol ou enrayer la
reproduction de la forêt. En outre, il devra, dans le cas d'une
exploitation sylvicole, faire approuver son plan d'exploitation par le
nu-propriétaire avant le début de l'exploitation. S'il n'obtient
pas son approbation, il pourra alors faire approuver le plan par le
tribunal.
Cet article s'inscrit dans la ligne de pensée poursuivie dans le
projet en matière d'usufruit, soit pour favoriser la conservation et
l'amélioration du bien sujet à usufruit. Il présente
l'avantage par ailleurs de simplifier la procédure d'approbation du plan
d'exploitation sylvicole.
Cette disposition ne permet pas à l'usufruitier d'entamer sous
quelque forme que ce soit le capital du bien, respectant ainsi les buts de
l'institution, mais il prévoit une interprétation libérale
de l'obligation de conserver la substance du bien qui tienne compte de
l'évolution des usages et de la situation économique.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1194 est
adopté?
Une voix: Libérale, c'est dans le bon sens du mot.
Une voix: Oui.
M. Marx: II n'y a que le bon sens du mot.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1195?
Mme Harel: "L'usufruitier ne peut extraire les minéraux
compris dans le fonds soumis à l'usufruit, sauf pour les
réparations et l'entretien de ce fonds. Si, toutefois, l'extraction de
ces minéraux constituait, avant l'ouverture de l'usufruit, une source de
revenus pour le propriétaire, l'usufruitier peut en continuer
l'extraction de la même manière qu'elle a été
commencée."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, conforme à la proposition de
l'office, reprend en substance le droit actuel exprimé à
l'article 460 du Code civil du Bas-Canada, à savoir que l'usufruitier ne
peut extraire les minéraux compris dans le fonds soumis à
l'usufruit, sauf pour les réparations et l'entretien de ce fonds et sauf
dans le cas où il continue l'exploitation entreprise par le
propriétaire.
La règle de cet article diffère de celle de l'article 1194
car l'exploitation agricole ou sylvicole permet de mettre le bien en valeur
sans modifier sa valeur capitale puisque les fruits retirés du sol se
reproduisent alors que toute extraction de minéraux appauvrit le capital
sujet à usufruit.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1195 est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1196?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer à la
troisième ligne du premier alinéa les mots "biens sujets
à" par les mots "biens soumis à". L'article se lit comme suit:
"Sauf si le constituant le fait lui-même ou l'en dispense, l'usufruitier
fait dresser, comme s'il était administrateur du bien d'autrui, un
inventaire des biens soumis à son droit. Il le fait à ses frais
et en fournit copie au nu-propriétaire. "La dispense ne peut être
accordée si l'usufruit est successif."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article maintient l'obligation de faire
inventaire imposée par l'article 463 du Code civil du Bas-Canada et
reprise par l'office. S'il maintient l'exception du droit actuel à
savoir que le constituant peut en dispenser l'usufruitier, il prévoit
cependant que le propriétaire ne peut accorder une dispense lorsque
l'usufruit est successif. Dans ce cas, l'obligation de faire inventaire
s'avère nécessaire pour permettre aux usufruitiers successifs
d'exercer pleinement leur droit d'identifier les biens soumis à
l'usufruit et leur état initial.
L'article fait par ailleurs référence aux règles
contenues au titre sur l'administration du bien d'autrui pour la confection de
l'inventaire.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Constituant, est-ce un terme consacré? Les
constituants, ce sont les auteurs d'une constitution.
Mme Harel: Nous allons faire les vérifications.
M. Cossette: Je pense que c'est...
M. Pineau: Je crois qu'on a supprimé l'usage du verbe
"faire dresser" un inventaire ou "dresser" un inventaire dans les dispositions
antérieures. Je crois qu'on a changé cela par "faire".
Mme Harel: II faudrait remplacer le mot "dresser" par "faire" de
façon qu'on y
lise: "L'usufruitier fait inventaire, comme s'il était
administrateur du bien d'autrui, des biens soumis à son droit."
M. Pineau: À moins qu'il n'en soit dispensé par
l'acte constitutif de l'usufruit. À la place de "si le
constituant"...
Mme Longtin: Après des vérifications, c'est un
néologisme doctrinal que nous...
Mme Harel: Ha! Ha! Ha!
M. Pineau: Ah! C'est ce qu'a dit M. Capitant, probablement.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que...
Mme Harel: Alors, on doit le suspendre pour rédaction.
Des obligations de l'usufruitier
Le Président (M. Gagnon): Alors, on va vous remettre
l'amendement pour le corriger. L'article 1196 est suspendu. Article 1197?
Mme Harel: "L'usufruitier ne peut contraindre le constituant
à lui livrer le bien - on remplace le mot "constituant" par le
nu-propriétaire - tant qu'il n'a pas fait dresser l'inventaire des
biens."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce la sanction
qu'entraîne le défaut ou le retard de l'usufruitier à faire
inventaire, soit celle de l'empêcher de contraindre le
propriétaire à lui livrer le bien. Cet article, conforme à
la proposition de l'office, est complété par l'article 1200 du
projet.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que...
Mme Harel: L'amendement va consister à remplacer le mot
"constituant" par le mot "nu-propriétaire".
Le Président (M. Gagnon): Par le nu-propriétaire.
Alors, nous allons recevoir cet amendement. Cet amendement est adopté et
l'article 1197 tel qu'amendé est adopté? Adopté. Article
1198?
Mme Harel: "Sauf le cas du vendeur ou du donateur sous
réserve d'usufruit, l'usufruitier doit, dans les 60 jours de l'ouverture
de l'usufruit, souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou
fournir au nu-propriétaire une autre sûreté garantissant
l'exécution de ses obligations. Il doit fournir une sûreté
additionnelle si ses obligations viennent à augmenter pendant la
durée de l'usufruit. "Il est dispensé de ses obligations s'il ne
peut les exécuter ou si le nu-propriétaire le
prévoit."
On remplace encore ici "le constituant" par "le
nu-propriétaire".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de
l'office et la règle de l'article 464 du Code civil du Bas-Canada. Il
oblige l'usufruitier à fournir au nu-propriétaire, dans un
délai de 60 jours depuis l'ouverture de l'usufruit, une
sûreté pour garantir l'exécution de ses obligations.
L'usufruit n'est pas soumis à cette obligation s'il en a
été dispensé, s'il ne peut l'exécuter ou s'il est
vendeur ou donateur sous réserve d'usufruit. Cet article oblige aussi
l'usufruitier à fournir une sûreté additionnelle dans le
cas où ses obligations viennent à augmenter pendant la
durée de l'usufruit, ce qui n'est pas le cas actuellement. La
souscription d'une assurance couvrant la responsabilité est
considérée au présent article et ailleurs au projet comme
étant une sûreté suffisante.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quand on parle ici de souscrire une
assurance couvrant sa responsabilité, est-ce que c'est la
solvabilité? Je présume. Ce n'est pas la responsabilité
civile.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Me Cossette.
M. Cossette: Je pense que c'est pour couvrir l'ensemble de ses
obligations.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quand vous parlez de
responsabilité, ce n'est pas ça. C'est l'assurance
solvabilité, c'est de s'assurer qu'il va pouvoir rendre le bien, qu'il
est solvable et que le bien va pouvoir être rendu. Est-ce que ce serait
un "bond"? Est-ce qu'il va être obligé de fournir un "bond"?
M. Pineau: C'est destiné à remplacer cette
sûreté qui garantirait l'exécution de ses obligations.
Votre assurance responsabilité, est-ce que cela couvre ça? Je
pense que le député de Saint-Laurent a raison de dire que ce ne
serait qu'une assurance solvabilité.
Mme Longtin: En fait, je pense que l'expression "la
responsabilité" était justement sa responsabilité
d'exécuter ses obligations et non pas une responsabilité contre
les actes fautifs, ou une question de couvrir sa simple solvabilité.
C'est qu'on dit: II doit fournir une sûreté pour garantir
l'exécution de ses obligations. Pour éviter qu'il s'agisse de
cautionnement ou
d'hypothèque ou autre chose, on procédait par le biais de
l'assurance responsabilité, qui est une espèce de titre
général en matière d'assurance.
M. Pineau: Dans plusieurs dispositions, on va retrouver cette
obligation d'assurance. On s'assure beaucoup ou on va être obligé
de s'assurer énormément et très souvent.
Mme Longtin: Est-ce que je peux juste ajouter?
M. Leduc (Saint-Laurent): On doit obtenir une garantie, je suis
bien d'accord. Mais j'ai toujours compris qu'une assurance
responsabilité ce n'était pas une assurance
solvabilité.
Mme Longtin: Je pense que c'est à lire avec les articles
2600 et suivants. On dit que les assurances de responsabilité couvrent
la responsabilité civile, contractuelle ou extracontractuelle, indiquent
les relations entre personnes et choses et les faits qui peuvent
entraîner la responsabilité, montant et exclusion de couverture,
caractère obligatoire ou facultatif et bénéficiaire direct
ou indirect. Je pense que c'est à cela qu'on réfère. (15
heures)
M. Leduc Saint-Laurent): L'article 2600?
Mme Longtin: 2600.
M. Leduc (Saint-Laurent): II faut se réveiller un peu.
M. Pineau: Ce n'est pas une assurance-solvabilité.
M. Leduc Saint-Laurent): Pas du tout.
M. Pineau: Responsabilité civile, c'est au cas de faute.
Responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, l'inexécution
fautive d'un contrat...
Mme Longtin: La garantie de l'exécution de ses obligations
peut être couverte par ce type d'assurance.
M. Pineau: L'inexécution... Oui.
Mme Longtin: Remarquez qu'on ne dirait pas "couvrant sa
responsabilité" que ce serait une assurance pour qui... En fait, sur le
plan formel, une assurance garantissant l'exécution de ses obligations,
cela se fait mal.
M. Pineau: Cela serait couvert par l'article 2600. Est-ce qu'on
peut penser à la perte du bien sur lequel la personne a l'usufruit et
qui, donc, ne serait pas en mesure de le restituer au moment de la fin de
l'usufruit? Mais je comprends qu'on puisse s'assurer pour sa faute, mais si la
chose périt par cas fortuit, vous obligez l'usufruitier d'assurer -
enfin, on ne l'oblige pas...
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me le permettez, est-il
question, dans le Code civil actuel, d'assurance-solvabilité ou
utilise-t-on seulement le terme "assurance-responsabilité", à
l'article 2600?
M. Cassette: À l'article 2600, je pense, quand on parle
d'assurance-responsabilité, que c'est une expression qui couvre
généralement tout ce qu'on peut imaginer comme
responsabilité.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, au Code civil actuel, il n'est
pas question d'assurance-solvabilité?
M. Cossette: Solvabilité?
M. Leduc (Saint-Laurent): L'assurance "bond". Il me semble avoir
vu cela quelque part.
M. Cossette: À ma connaissance, non.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mme Longtin, vous ne connaissez pas cet
article?
M. Cossette: Je viens d'avoir une consultation avec une experte
en assurance...
Mme Harel: Une consultation non verbale.
M. Cossette: ...qui me dit que l'expression ne se retrouve pas
dans le Code civil actuel.
M. Pineau: Et cela fait partie de l'assurance
responsabilité? Adjugé.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vendu.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1198 est
adopté?
Mme Harel: II y a un problème, M. le Président, me
dit-on, avec cette correction que nous avons faite à l'article 1198 pour
remplacer "constituant" par "nu-propriétaire". Le concept de
"constituant" couvrirait plus largement que celui de "nu-propriétaire"
pouvant inclure le testateur.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: En fait, celui qui constitue l'usufruit peut se
départir de son bien au moment même où il constitue cet
usufruit. Donc, il donne la nu-propriété à
l'un et l'usufruit à l'autre. Mais il pourrait lui-même,
dans l'acte qui constitue l'usufruit, dispenser d'inventaire ou avoir fait
faire inventaire des biens. Cela pourrait être, par exemple, dans le cas
d'un testament, où on constitue usufruit entre deux personnes et
où on prévoit ce régime. Donc, je pense qu'il faudrait que
le mot "constituant" ne se traduise pas nécessairement par
"nu-propriétaire", mais par un concept un peu plus large.
M. Pineau: Le testateur remet la nu-propriété
à l'un et l'usufruit à l'autre, ah oui!
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais là, il n'est pas
nu-propriétaire.
Mme Harel: Par quoi pourrions-nous remplacer ce néologisme
doctrinal? Par "lui-même"?
Mme Longtin: On peut toujours dire "celui qui constitue".
M. Pineau: On crée des substantifs.
Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il
adopté?
Mme Harel: On remplace ici "le constituant" par "celui qui
constitue l'usufruit".
Le Président (M. Gagnon): Voilà. Oui, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): S'il devenait impossible d'obtenir
l'assurance-responsabilité? C'est bien possible qu'on considère
la personne comme non solvable ou insuffisamment responsable, que va-t-il se
passer, à ce moment-là, s'il n'y en a pas? Il peut y avoir des
cas où la personne n'est pas en mesure du tout de fournir une garantie,
une sûreté. À ce moment-là, cela va quasiment de
soi, il va être très difficile pour cette personne d'obtenir une
assurance-responsabilité.
M. Cossette: C'est l'un ou l'autre, soit d'obtenir une
assurance, soit de fournir une sûreté pour garantir
l'exécution de ses obligations. À défaut de cela, c'est la
mise sous séquestre des biens. Je pense que...
Mme Harel: C'est l'article suivant, l'article 1199.
M. Cossette: Oui, c'est dans l'article suivant.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: M.
le Président, si, dans un testament, le testateur laisse l'usufruit
d'une certaine partie de ses biens, par exemple, à son conjoint
survivant et que ce conjoint, par ailleurs, n'a pas de biens, va-t-on le priver
de cet usufruit, sous prétexte qu'il ne peut pas fournir une
sûreté parce qu'il ne peut pas payer des primes d'assurance?
Mme Harel: C'est le deuxième alinéa de l'article
1198.
M. Pineau: Excusez-moi. C'est exact.
Mme Harel: À ce moment-là, il est dispensé
de cette obligation.
M. Pineau: Excusez-moi.
Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Cossette.
M. Cassette: Je voudrais peut-être faire un rappel de
l'article 266 aussi, où on avait employé des expressions à
peu près semblables lorsqu'il s'agissait de la sûreté
à fournir par un tuteur qui administrait les biens d'un mineur. On
parlait, à ce moment-là, de souscrire une assurance couvrant sa
responsabilité ou de fournir une sûreté garantissant son
administration. Alors, c'est une alternative comme celle qu'on retrouve
à l'article 1198.
M. Pineau: Oui, c'est vrai qu'on en avait déjà
discuté.
M. Cossette: Oui.
Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement à
venir à l'article 1198.
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gagnon): On s'était entendus sur
cet amendement. L'amendement est-il adopté?
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article, tel qu'amendé,
est adopté. Nous attendons deux amendements aux articles 1197 et 1198.
Article 1199?
Mme Harel: "À défaut par l'usufruitier de fournir
une sûreté dans le délai prévu, le
nu-propriétaire peut obtenir la mise sous séquestre des biens.
"Le séquestre place, comme un administrateur du bien d'autrui
chargé de la simple administration, les sommes comprises dans l'usufruit
et celles qui proviennent de la vente des objets de nature périssable.
Il place de même les sommes provenant du paiement des créances
soumises à l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 465 et
466 du Code civil du Bas-Canada, en les simplifiant. Il est aussi conforme
à la proposition de l'office. Il traite du droit du
nu-propriétaire d'obtenir la mise sous séquestre du bien sujet
à usufruit dans le cas où l'usufruitier ne fournit pas de
sûreté dans lé délai prévu.
L'article précise les droits et obligations du séquestre
par renvoi aux dispositions sur la simple administration du bien d'autrui. Ces
dispositions complètent les articles déjà prévus au
Code de procédure civile.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1199 est
adopté. Article 1200?
Mme Harel: "Le retard de l'usufruitier à dresser un
inventaire des biens ou à fournir une sûreté le prive de
son droit aux fruits et revenus à compter de l'ouverture de l'usufruit
jusqu'à l'exécution de son obligation."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce la sanction
qu'entraîne le retard de l'usufruitier à dresser un inventaire ou
à fournir une sûreté. Il est privé de son droit aux
fruits et revenus, à compter de l'ouverture de l'usufruit,
jusqu'à l'exécution de son obligation.
Cet article diffère de l'article 467 du Code civil du Bas-Canada
et de la proposition de l'office. Il apparaît nécessaire, pour
assurer une sanction efficace aux obligations imposées à
l'usufruitier. Le droit actuel ne prévoit aucune sanction, sauf que
l'usufruitier ne dispose d'aucune preuve quant à l'état des
biens. Le code n'incite donc pas l'usufruitier à exécuter son
obligation, ce qui paraît inadéquat, surtout en en matière
d'usufruit successif.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau, M. le Président, à la page
29, considère la sanction trop lourde. Il se contenterait d'une sanction
qui serait dans le style de celle que l'on trouve dans l'article 1288, qui se
lit ainsi: "L'appelé peut, si le grevé refuse ou néglige
de faire dresser l'inventaire des biens dans le délai requis, y
procéder aux frais du grevé. Il convoque alors le grevé et
les autres intéressés."
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Mme Longtin:
Oui. Je pense qu'on avait quelques notes. En regardant cela, c'est qu'on
considérait, au moment où on a opté pour cette sanction,
que le droit actuel ne prévoyait aucune sanction réelle pour le
défaut d'exécution, puisque... Finalement, on considérait
que la sanction était proportionnée au défaut
lui-même. Ensuite, je pense qu'il faut considérer que, pour
l'usufruitier, en raison des articles 1223 et suivants, il était quand
même prévu certains droits à son bénéfice,
qu'il n'a pas dans le droit actuel, et qui reposent un peu sur la constitution
d'inventaire. Finalement, je pense que le dernier argument était
tiré de l'actuel article 946...
M. Cossette: Le deuxième alinéa.
Mme Longtin: ...au deuxième alinéa,
c'est-à-dire au troisième alinéa, où on dit: "Faute
par le grevé d'avoir fait procéder à l'inventaire, il doit
être privé des fruits jusqu'à ce qu'il ait satisfait
à cette obligation."
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Cossette: D'autant plus aussi, comme on le mentionne, que
l'inventaire est rendu facile, d'une certaine façon. Alors,
pourquoi...
M. Pineau: Ne le ferait-il pas?
M. Cossette: D'autant plus que c'est un document
nécessaire dans le cas d'usufruit successif.
Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1200...
Mme Harel: II faut faire la correction, M. le Président,
pour remplacer "dresser" par "faire" l'inventaire.
Le Président (M. Gagnon): Ah oui! Alors, cela me prend
un...
Mme Harel: Un amendement.
Le Président (M. Gagnon): ...amendement. Cet amendement
est adopté? L'article tel qu'amendé est adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me permettez, M. le
Président...
Le Président (M. Gagnon): Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...je voudrais revenir à
l'article 1198, deuxième alinéa. Quand on dit: "II est
dispensé de ses obligations s'il ne peut les exécuter ou si le
constituant le prévoit". Si le constituant le prévoit, cela va
très bien; mais s'il ne peut les rencontrer, qui va décider qu'il
doit être
dispensé? Est-ce le tribunal?
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Bien, en fait, on peut présumer que s'il est
dans l'impossibilité de l'exécuter, disons parce que cela lui est
impossible, soit qu'il n'ait peut-être pas de biens sur lesquels faire
mettre une sûreté, soit qu'il n'y ait aucun assureur qui veut de
lui, je pense qu'il va en aviser le nu-propriétaire. Cet avis devrait
être suffisant. À moins que le nu-propriétaire veuille
contester, là, ce sera à sa charge.
Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1200 est
adopté. L'amendement est adopté. L'article est adopté, tel
qu'amendé. L'article 1201.
Mme Harel: "L'usufruitier peut demander au tribunal que des
meubles sous séquestre nécessaires à son usage lui soient
laissés à la seule charge de les rendre à la fin de
l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est conforme à l'article 466 du
Code civil du Bas-Canada et à la proposition de l'office. Il traite du
droit de l'usufruitier de demander au tribunal qu'une partie des meubles sous
séquestre nécessaires à son usage lui soient
laissés à la seule condition de s'engager à les rendre
à la fin de l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?
M. Pineau: L'assurance contre le vol ou l'incendie serait
à la charge de l'usufruitier. Personnellement, je ne vois pas vraiment
pourquoi. S'il facilite le vol, je comprends qu'il soit responsable. S'il met
le feu, je comprends qu'il soit responsable. Mais si le bien périt par
incendie ou s'il disparaît par vol, l'usufruitier n'en est pas
nécessairement responsable et on l'oblige à s'assurer.
Mme Harel: Là, vous êtes, par exemple, à
l'article 1202 et nous disposons actuellement de l'article 1201.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
M. Pineau: Ahl Excusez-moi, alors, je vais...
Mme Harel: Mais vos commentaires vaudront.
M. Pineau: ...trop vite.
M. Cossette: Vous nous devancez.
M. Pineau: Je devance.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous allez trop vite, vous.
Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1201 est
adopté. Il n'y a pas d'amendement à cet article.
M. Cassette: Non.
Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons nos travaux pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 15 h 15)
(Reprise à 15 h 32)
Mme Harel: Si vous voulez, M. le Président, ou pourrait
adopter les articles 1196 et 1197 qui étaient suspendus. Ils ont
déjà été adoptés? C'est une question de
formulation.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1197 a
été adopté, mais sous condition de l'amendement qui va
venir, je pense. Est-ce que c'est cela?
Mme Harel: Je vais en faire la lecture. L'amendement consiste
à remplacer l'article 1197 par le suivant: "L'usufruitier ne peut
contraindre celui qui constitue l'usufruit ou le nu-propriétaire
à lui livrer le bien tant qu'il n'a pas fait un inventaire des
biens."
Le Président (M. Gagnon): C'est cela. Il a
été adopté, mais on n'avait pas la formulation.
M. Cossette: Vous n'aviez pas le texte.
Le Président (M. Gagnon): On n'avait pas le texte.
Mme Harel: Alors, je veux tout simplement vous signaler que
l'article va se lire comme suit: "L'usufruitier ne peut contraindre celui qui
constitue l'usufruit ou le nu-propriétaire à lui livrer le bien,
tant qu'il n'a pas fait un inventaire."
Le Président (M. Gagnon): Voilà. Cet amendement
était adopté et l'article aussi, tel qu'amendé. L'article
1196 a été suspendu.
Mme Harel: L'article 1196 se lirait comme suit: Remplacer
l'article 1196 par le suivant: "L'usufruitier fait l'inventaire des biens
soumis à son droit comme s'il était administrateur du bien
d'autrui, à moins que celui qui a constitué l'usufruit n'ait
lui-même
fait l'inventaire ou n'ait dispensé l'usufruitier de le faire. La
dispense ne peut être accordée si l'usufruit est successif.
L'usufruitier fait l'inventaire à ses frais et en fournit copie au
nu-propriétaire."
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1196 est adopté. L'article 1196, tel qu'amendé, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1202.
Mme Harel: "L'usufruitier est tenu d'assurer le bien contre les
risques usuels, tels le vol et l'incendie, et de payer pendant la durée
de l'usufruit les primes de cette assurance. Il est néanmoins
dispensé de cette obligation si la prime d'assurance est trop
élevée par rapport aux risques."
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. Non, cela va? Le
commentaire, je m'excuse.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau s'inspire de la
proposition de l'office visant à obliger l'usufruitier à assurer
le bien contre les risques usuels. Il s'inscrit dans la philosophie
préconisée par le projet de loi qui veut favoriser non seulement
l'amélioration du bien sujet à usufruit, mais aussi sa
conservation. Cet article est, cependant, plus souple que celui proposé
par l'office, car il dispense l'usufruitier de son obligation dans le cas
où la prime est trop élevée par rapport aux risques. Des
dispositions analogues se retrouvent dans le Code civil allemand et au Code
civil suisse.
M. Pineau: M. le Président, j'avais fait un commentaire un
peu précoce. L'obligation d'assurer le bien contre les risques usuels
tels le vol ou l'incendie, la question est de savoir qui doit l'assumer, si
c'est l'usufruitier plutôt que le nu-propriétaire. On propose que
ce soit l'usufruitier. Là, il s'agit d'une obligation d'assurance. La
question est celle-ci: Est-ce qu'il appartient à l'usufruitier de payer
les primes d'une assurance qui est destinée à couvrir le vol et
l'incendie, qui peuvent être des cas de force majeure? Le
nu-propriétaire est ainsi sûr de retrouver son bien et c'est aux
frais de l'usufruitier.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: La philosophie qui a été poursuivie
dans cet article était de dire: Étant donné que c'est
l'usufruitier qui bénéficie des fruits et revenus, il est normal
que ce soit lui qui paie la prime d'assurance, car il ne faut pas oublier qu'il
pourrait arriver que le nu-propriétaire actuel ne retrouve pas le bien
de son vivant. Ce qu'on s'est dit, c'est que c'est à celui qui
bénéficie des fruits et revenus, normalement de payer la
prime.
Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 1202
est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1203.
Mme Harel: "En cas de perte, l'indemnité est payée
à l'usufruitier qui en donne quittance à l'assureur.
"L'usufruitier est tenu d'employer l'indemnité à la
réparation du bien, sauf en cas de perte totale, où il peut jouir
de l'indemnité."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau,
complète le précédent et est conforme à la
proposition de l'office. Il traite du paiement et de l'utilisation de
l'indemnité. En cas de perte du bien soumis à usufruit,
l'indemnité est payée à l'usufruitier qui en donne
quittance à l'assureur. L'usufruitier est alors tenu d'employer
l'indemnité à la réparation du bien, mais si celui-ci est
une perte totale, il peut jouir de l'indemnité comme d'une somme
capitale.
Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? Est-ce que
l'article 1203 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1204.
Mme Harel: "L'usufruitier ou le nu-propriétaire peuvent
contracter, pour leur compte, une assurance garantissant leur droit.
"L'indemnité leur appartient respectivement."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, aussi de droit nouveau, reprend en
substance les propositions de l'office tout en les simplifiant. Il traite du
droit de l'usufruitier ou du nu-propriétaire de contracter, pour leur
compte, une assurance garantissant leur droit.
Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? Est-ce que
l'article 1204 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1205.
Mme Harel: "L'entretien du bien est à la charge de..."
Le Président (M. Gagnon); Je m'excuse. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, en vertu de
l'article 1204, l'usufruitier et le nu-propriétaire ont un
intérêt assurable. L'usufruitier, qui est obligé d'assurer,
doit remettre éventuellement l'indemnité, le produit au
nu-propriétaire et le nu-propriétaire pourrait s'assurer
lui-même et retirer une indemnité?
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: Si vous me le permettez, M. le Président, je
vais lire le commentaire supplémentaire d'abord, quitte à fournir
une réponse par la suite. Telles que formulées par l'office, les
propositions suggérées laissaient entendre que l'usufruitier et
le nu-propriétaire ne pouvaient contracter une assurance couvrant leur
droit que dans le cas où l'usufruitier était dispensé
d'assurer le bien. Même s'il est dispensé d'assurer le bien,
l'usufruitier comme le nu-propriétaire a l'intérêt
suffisant pour assurer le bien.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ils sont tous les deux assurables.
C'est bien sûr qu'ils ne pourraient pas retirer tous les deux une
indemnité.
M. Cossette: Prenons un exemple où moi, comme usufruitier,
j'ai été dispensé d'assurer le bien, ce que permet
l'article, je pense. En ma qualité d'usufruitier, j'assure mon droit
à l'usufruit de cette propriété. Je pense que je
trouverais facilement un assureur pour assurer mon droit de telle sorte
qu'advenant la destruction de la propriété je serai
indemnisé pour avoir perdu cet usufruit affectant telle
propriété.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ce qui veut dire que le
nu-propriétaire pourrait assurer seulement dans le cas où
l'usufruitier n'assurerait pas, n'aurait pas les moyens ou serait
dégagé de cette obligation.
M. Cossette: Le nu-propriétaire a également son
intérêt assurable.
Mme Harel: En cas de perte totale, notamment. S'il y a perte
totale, c'est l'usufruitier qui empoche l'indemnité.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quitte à la rendre.
Mme Harel: En cas de perte totale, il jouit de
l'indemnité. C'est le deuxième alinéa de l'article
1203.
M. Leduc (Saint-Laurent): II doit la rendre.
M. Cossette: II doit la rendre, mais c'est quelque chose de
différent dont on parle.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ce n'est pas dit, mais...
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Je pense que c'est bien sûr que, dans le cas
où l'usufruitier a assuré le bien, le nu-propriétaire n'a
pas un intérêt pécuniaire à assurer le bien, parce
qu'il est déjà assuré. Dans le cas de dispense, je pense
qu'il a intérêt. De plus, je ne pense pas qu'on doive interdire au
nu-propriétaire son droit d'assurer le bien; s'il veut avoir une double
assurance, ce sera son droit, sa volonté.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, l'article 1204 dit bien
"l'usufruitier ou le nu-propriétaire." Ce n'est pas l'un et l'autre. Il
ne peut pas y avoir un même intérêt assurable pour l'un et
pour l'autre. J'imagine que, si l'usufruitier d'un immeuble contracte une
assurance-incendie et garde cet immeuble, le nu-propriétaire n'aura pas
d'intérêt assurable à ce moment et vice versa. Si le
nu-propriétaire assure, l'usufruitier n'aura pas d'intérêt
assurable.
M. Berrouard: Pas nécessairement.
M. Pineau: Ou bien l'intérêt assurable porte-t-il
sur le droit d'usufruit ou sur le droit du nu-propriétaire?
M. Leduc (Saint-Laurent): Une question surgit: Qu'est-ce qui va
se produire si l'usufruitier n'assure pas en ayant l'obligation d'assurer et
que le nu-propriétaire assure et perçoit l'indemnité?
Va-t-il être obligé de mettre cette indemnité à la
disposition de l'usufruitier ou si l'usufruit aura cessé par le fait de
la perte du bien qui faisait l'objet de l'usufruit?
M. Pineau: La perte totale du bien. C'est à 1217.
Mme Harel: La perte totale du bien.
M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord, mais cela ne solutionne pas
ce problème-ci. Dans le cas où le nu-propriétaire n'est
pas obligé d'assurer, mais assure et empoche
l'indemnité, est-ce que cette indemnité sera sujette
à l'usufruit? Je ne le croirais pas.
M. Cassette: Voulez-vous recommencer l'exemple? Je l'ai
perdu.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous avez le cas où
l'usufruitier ne prend pas d'assurance.
Mme Harel: II est dispensé.
M. Leduc (Saint-Laurent ): II est dispensé. Le
nu-propriétaire en prend une, il y a perte, il encaisse
l'indemnité, est-ce que cette indemnité sera sujette à
l'usufruit?
M. Cossette: Le nu-propriétaire ne peut qu'assurer sa
nue-propriété. Il ne peut pas assurer l'usufruit, ce n'est pas
lui. Il n'a pas d'intérêt assurable sauf pour sa
nue-propriété. (15 h 45)
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais il va assurer le bien.
M. Cossette: II n'assurera pas le bien, il va assurer sa
nue-propriété dans le bien comme l'usufruitier va assurer son
usufruit sur tel bien. Il ne peut pas assurer la totalité du bien, il
n'en a que l'usufruit.
M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment-là,
l'indemnité appartiendrait au nu-propriétaire et l'obligation de
mettre ce bien-là à l'usage ou à l'usufruit est
terminée.
M. Cossette: Oui, ce qui serait différent dans le cas
où l'usufruitier est tenu d'assurer et qu'il assure. Bien, à ce
moment-là...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: M. le Président, j'aimerais poser une question
à Me Cossette.
Le Président (M. Gagnon): À Me
Cossette.
M. Marx: Supposons qu'il y a un immeuble qui vaut 100 000 $ et
que le nu-propriétaire assure l'immeuble. En cas de perte, il va avoir
100 000 $ sur la valeur...
M. Cossette: Si l'usufruitier a l'obligation de l'assurer.
M. Marx: Non, mais s'il n'a pas l'obligation d'assurer, le
nu-propriétaire va avoir 100 000 $. D'accord? Comme vous l'avez
expliqué, si c'est détruit complètement, ce sera la fin de
l'usufruit.
M. Cossette: Si le bien est détruit, oui.
M. Marx: Mais supposons que, sur le même immeuble, il y a
l'assurance du nu-propriétaire et l'assurance de l'usufruitier et que
c'est détruit complètement. Le nu-propriétaire va avoir
ses 100 000 $ et l'usufruitier va avoir un certain montant, parce qu'il en a
perdu la jouissance. C'est ça?
M. Cossette: C'est ça, oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense que l'obligation pour
l'usufruitier d'assurer le bien est très importante pour lui. On
règle l'ancien vide qu'on connaissait auparavant. Si le bien
était détruit, à ce moment-là, l'usufruit cessait
et, même si plusieurs prétendaient que l'usufruitier avait un
intérêt assurable, il était absolument impossible pour
l'usufruitier d'assurer le bien. Je pense qu'avec cet article-ci on
règle ce problème.
M. Cossette: C'est ça.
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que, maintenant,
l'usufruitier est en mesure de protéger ses droits.
M. Pineau: La compagnie d'assurances ne peut plus le refuser.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est ça. Les compagnies
d'assurances ne pourront plus refuser maintenant d'assurer l'usufruitier, ce
qu'elles faisaient d'une façon systématique auparavant. Elles
disaient: Le seul qui a un intérêt assurable, c'est le
nu-propriétaire. Or, je pense que c'est très bien.
Évidemment, si l'usufruitier ne prend pas d'assurance, qu'il ne se
protège pas, libre à lui. À ce moment-là,
l'indemnité appartiendra au nu-propriétaire, si le
nu-propriétaire a pris l'assurance.
M. Cossette: C'est bien cela.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1205 est
adopté.
Des voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1206.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la
première ligne le mot "affectent" par les mots "portent sur".
L'article se lit comme suit: "1206. Les réparations majeures sont
celles qui portent sur une partie importante du bien et nécessitent une
dépense exceptionnelle, comme celles relatives aux poutres et aux murs
portants, au remplacement des couvertures, aux murs de soutènement, aux
systèmes de chauffage, d'électricité, de plomberie ou
d'électronique et, à l'égard d'un meuble, aux
pièces motrices ou à l'enveloppe
du bien."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article complète le
précédent en définissant la notion de réparations
majeures. La définition tient compte des circonstances actuelles et
également du fait que l'usufruit peut porter non seulement sur un
immeuble, mais aussi sur un meuble.
Il s'inspire de la proposition de l'office et reprend substantiellement
le droit actuel énoncé à l'article 469 du Code civil du
Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à
l'article 1206 est adopté?
M. Marx: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Et l'article 1206 tel
qu'amendé est adopté. Article 1207?
Mme Harel: "1207. L'usufruitier doit aviser le
nu-propriétaire de la nécessité de réparations
majeures. "Le nu-propriétaire n'est pas tenu de les faire. S'il y
procède, l'usufruitier supporte les inconvénients qui en
résultent. Dans le cas contraire, l'usufruitier peut procéder et
s'en faire rembourser le coût à la fin de l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article de droit nouveau reproduit en substance,
dans un seul article, les articles 134 et 135 du projet de l'office. Cet
article s'inscrit dans la philosophie véhiculée en matière
d'usufruit visant à favoriser la conservation du bien sujet à
usufruit. À cet égard, il impose à l'usufruitier
l'obligation d'aviser le nu-propriétaire lorsque des réparations
majeures doivent être apportées aux biens. Cependant, l'article
n'impose ni à l'un, ni à l'autre l'obligation d'effectuer ces
réparations. Néanmoins, à la différence du droit
actuel, il permet à l'usufruitier de les faire, si le
nu-propriétaire ne les fait pas, et de s'en faire rembourser le
coût à la fin de l'usufruit.
Cet article s'inspire de l'article 579 du Code civil de la
Louisiane.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté,
l'article 1207? Me Pineau? M. le député de Saint-Laurent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, M. le Président, Me Pineau
avait une question.
M. Pineau: Mais l'article 1206 a été adopté,
M. le Président?
Le Président (M. Gagnon): Oui.
M. Marx: Oui, mais on peut aborder la question quand
même.
M. Pineau: J'ai une question à poser pour mon information.
À quoi fait-on allusion en disant: "à l'égard d'un meuble,
aux pièces motrices ou à l'enveloppe du bien"? C'est
étrange, "à l'égard d'un meuble, aux pièces
motrices et à l'enveloppe du bien". Le législateur a des
idées derrière la tête, mais elle n'apparaissent pas
nécessairement dans le texte.
M. Cossette: Le commentaire dit que... Évidemment, on a
toujours reproché au Code civil actuel d'avoir parlé d'usufruit
en matière d'immeubles seulement et de ne jamais avoir envisagé
le cas des biens meubles.
M. Pineau: Oui.
M. Cossette: Alors, cet article, justement, est dans la veine
suggérée, à savoir que l'article 1206 s'applique à
la fois aux biens immeubles et aux biens meubles, mais, plus
particulièrement, la fin de l'article 1206 s'applique aux biens
meubles.
M. Pineau: Aux biens meubles, oui. Alors, les pièces
motrices d'un bien meuble, s'il s'agit d'une automobile, c'est le moteur.
L'enveloppe du bien, c'est l'emballage.
M. Cossette: L'enveloppe du bien, c'est la carrosserie.
M. Pineau: Le "hood".
M. Cossette: C'est l'expression générale
pour...
Le Président (M. Gagnon): Et à l'article 1207, M.
le député de Saint-Laurent.
M. Marx: On est à l'article 1206.
M. Leduc (Saint-Laurent): À l'article 1207, si vous le
permettez, on indique que le nu-propriétaire n'est pas tenu de faire les
réparations majeures. C'est donc un changement très important par
rapport à l'ancien code qui l'obligeait...
M. Cossette: On est dans la situation où ni le
propriétaire, ni le nu-propriétaire, ni l'usufruitier ne sont
tenus de faire ces réparations. Évidemment, l'usufruitier
n'était pas encouragé à les faire parce qu'il ne pouvait
pas en être remboursé. Alors, aujourd'hui, on pense que l'article
1207, tel que rédigé, va encourager l'usufruitier à les
faire parce qu'il pourra s'en faire rembourser le coût à la fin de
l'usufruit.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais l'article 468 indiquait que les
grosses réparations demeurent à la charge du
propriétaire.
M. Cassette: Oui, mais il n'était pas tenu de les
faire.
M. Leduc (Saint-Laurent): En vertu de quel article? C'est
drôle, je pensais qu'il y était tenu, moi.
M. Berrouard: Le nu-propriétaire n'était jamais
tenu de faire les grosses réparations, ne serait-ce que pour le simple
fait qu'en pratique il pouvait ne pas avoir le bien de son vivant à la
fin de l'usufruit. Alors, il n'a jamais été tenu de faire les
grosses réparations.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quel article, cela? C'est drôle,
je n'ai pas compris cela.
M. Pineau: II n'y a rien dans le droit actuel. En droit
français, j'ai pu lire que le nu-propriétaire a à sa
charge les réparations majeures, mais on me dit qu'il ne peut pas y
être contraint.
M. Leduc (Saint-Laurent): Pas le Code civil?
M. Pineau: Mais c'est la même chose ici.
M. Cossette: Je pense que cela va vous rappeler des souvenirs. La
seule obligation du nu-propriétaire, c'est de laisser jouir
l'usufruitier; il n'en a pas d'autre. Alors, n'ayant que cette obligation, il
n'a pas l'obligation de faire les réparations majeures. La doctrine est
constante la-dessus.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 468 ne disait pas ce que cela
doit dire, même si on dit que les grosses demeurent à la charge du
propriétaire, ce n'est pas vrai.
M. Berrouard: C'est-à-dire qu'elles sont à sa
charge à lui, mais il n'est pas tenu de les faire. On a donné la
même interprétation qu'en droit français.
M. Pineau: C'est cela; c'est le droit français actuel.
M. Berrouard: C'est exact.
M. Pineau: Mais j'ai toujours trouvé cela drôle
qu'on soit tenu d'une obligation et qu'on ne puisse pas être contraint.
C'est vraiment contraire à tous les principes du droit civil et on
maintient cette bizarrerie.
M. Leduc (Saint-Laurent): II trouve cela drôle.
M. Pineau: Pardon?
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que c'est vrai
qu'il y a un gros changement. Auparavant, le nu-propriétaire
n'était pas obligé, tandis que, là, il va être
obligé de rembourser si elles ont été faites. Alors,
l'obligation devient très importante.
M. Cossette: C'est-à-dire qu'il faut quand même lire
au deuxième paragraphe de l'article 1207: "Le nu-propriétaire
n'est pas tenu de les faire." Alors, il n'est pas tenu de les faire. "S'il y
procède, l'usufruitier supporte les inconvénients qui en
résultent. Dans le cas contraire, l'usufruitier peut y procéder
et s'en faire rembourser le coût à la fin..."
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela fait qu'il est obligé.
M. Pineau: Cela signifie, M. le Président, que, s'il n'est
pas tenu de les faire, le bien pourra tomber en ruine et l'usufruitier n'en
jouira plus. Le nu-propriétaire récupérera une ruine. Pour
la conservation du patrimoine, c'est épatant, ça.
M. Cossette: C'est exact.
Le Président (M. Gagnon): Cela va, M. le
député de Saint-Laurent? L'article 1207 est-il adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est donc dire que l'article 1207
permet au nu-propriétaire de faire ses grosses réparations et
qu'il pourrait décider de les faire. D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1207 est
adopté. L'article 1208?
Mme Harel: "L'usufruitier est tenu, en proportion de la
durée de l'usufruit, des charges ordinaires grevant le bien soumis
à son droit et des autres charges normalement payées avec les
revenus. "Il est pareillement tenu des charges extraordinaires, comme les
impôts spéciaux, lorsqu'elles sont payables par versements
périodiques échelonnés sur plusieurs années."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office,
règle la répartition des charges. Ainsi, l'usufruitier est tenu,
en proportion de la durée de son droit, des charges ordinaires grevant
le bien et des autres charges qui sont normalement payées à
même les revenus. Il est pareillement tenu des charges extraordinaires,
comme les impôts spéciaux, lorsque celles-ci sont
payables par versements périodiques échelonnés sur
plusieurs années.
Cet article modifie, cependant, le droit actuel énoncé
à l'article 471 du Code civil du Bas-Canada en obligeant l'usufruitier,
pour les charges extraordinaires, à payer les versements qui viennent
à échéance pendant la durée de son droit, peu
importe que la charge ait été imposée avant ou pendant
l'usufruit. Actuellement, l'usufruitier n'est tenu de payer des versements
périodiques qu'à l'égard des contributions imposées
depuis l'ouverture de l'usufruit. Mais, comme le mentionne l'office, cette
mesure est plus équitable, car c'est l'usufruitier qui profite des
revenus. Le nu-propriétaire n'en ayant aucun, il semblerait lourd de lui
imposer cette charge.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1208 est
adopté. L'article 1209?
Mme Harel: "L'usufruitier à titre particulier n'est pas
tenu au paiement des dettes de la succession. "S'il est forcé, pour
conserver l'objet de son droit, de payer une dette, il peut en exiger le
remboursement du débiteur immédiatement ou l'exiger du
nu-propriétaire à la fin de l'usufruit." (16 heures)
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel tel
qu'exprimé à l'article 473 du Code civil du Bas-Canada en
édictant que "l'usufruitier à titre particulier n'est pas tenu au
paiement des dettes de la succession". Il tient compte, également, des
précisions apportées par la doctrine relativement au moment
où l'usufruitier à titre particulier peut exiger le remboursement
d'une dette qu'il a payée.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: L'article 1209 est une dérogation, si j'ai bien
compris, à la règle relative au légataire particulier qui,
dans certains cas, peut être tenu... Ne devrait-on pas dire que
l'usufruitier à titre particulier n'est aucunement tenu ou n'est tenu en
aucun cas, à partir du moment où c'est une dérogation.
Mme Harel: On va le suspendre pour vérification et on y
reviendra.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1209 est suspendu.
Article 1210?
Mme Harel: "L'usufruitier à titre universel et le
nu-propriétaire sont tenus au paiement des dettes de la succession en
proportion de leur part dans la succession. "Le nu-propriétaire est tenu
du capital et l'usufruitier des intérêts."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel
indiqué à l'article 474 du Code civil du Bas-Canada et s'inspire
de la proposition de l'office. Il énonce que "l'usufruitier à
titre universel ainsi que le nu-propriétaire sont tenus au paiement des
dettes de la succession en proportion de leur part dans la succession. Le
nu-propriétaire est tenu du capital et l'usufruitier des
intérêts."
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1210 est
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1211? Mme
la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: "L'usufruitier à titre universel peut payer les
dettes de la succession; le nu-propriétaire lui en doit compte à
la fin de l'usufruit. "Si l'usufruitier choisit de ne pas les payer, le
nu-propriétaire peut faire vendre, jusqu'à concurrence du montant
des dettes, les biens soumis à l'usufruit ou les payer lui-même;
en ce cas, l'usufruitier lui verse, pendant la durée de l'usufruit, des
intérêts sur la somme payée."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, qui s'inspire également de la
proposition de l'office, reprend en substance le droit actuel. Il
complète l'article précédent en édictant que
l'usufruitier à titre universel peut payer les dettes de la succession,
auquel cas le nu-propriétaire lui en doit compte à la fin de
l'usufruit. S'il ne les paie pas, le nu-propriétaire peut faire vendre
jusqu'à concurrence du montant des dettes les biens soumis au droit de
l'usufruit ou payer lui-même la dette. En ce cas, l'usufruitier lui verse
des intérêts sur la somme payée pendant la durée de
son droit.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1211 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté.
Article 1212?
Mme Harel: "L'usufruitier est tenu, le cas échéant,
des dépens de toute demande en justice se rapportant à son droit
d'usufruit. "Si l'action concerne à la fois les droits du
nu-propriétaire et ceux de l'usufruitier, les règles relatives au
paiement des dettes de la succession entre l'usufruitier à titre
universel et le nu-propriétaire s'appliquent à moins que le
jugement ne mette fin à l'usufruit. En ce cas, les frais sont
partagés également entre l'usufruitier et le
nu-propriétaire."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, qui s'inspire de celui proposé
par l'office, reprend partiellement l'article 475 du Code civil du Bas-Canada
relatif au paiement des dépens des demandes en justice qui concernent
l'usufruit. Il complète, cependant, les règles actuelles en
prévoyant le partage des dépens dans les cas où l'action
intéresse à la fois les droits de l'usufruitier et ceux du
nu-propriétaire.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1212 est
adopté. Article 1213?
Mme Harel: "L'usufruitier doit prévenir le
nu-propriétaire de toute usurpation commise par un tiers sur le bien ou
de toute autre atteinte aux droits du nu-propriétaire, faute de quoi il
est responsable de tous les dommages qui peuvent en résulter, comme il
le serait de dégradations commises par lui-même.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, qui oblige l'usufruitier à
prévenir le nu-propriétaire de toute usurpation ou atteinte aux
droits de ce dernier, est conforme au droit actuel, repris d'ailleurs par
l'office.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article
1214?
Mme Harel: "Ni le nu-propriétaire ni l'usufruitier ne sont
tenus de remplacer ce qui est tombé de vétusté.
"L'usufruitier dispensé d'assurer le bien n'est pas tenu de remplacer ou
de payer la valeur du bien qui périt par cas fortuit."
Le Président (M. Gagnon): Commentai- re.
M. Cossette: Cet article reprend le droit actuel exprimé
à l'article 470 du Code civil du Bas-Canada en n'obligeant ni le
nu-propriétaire, ni l'usufruitier à remplacer ce qui est
tombé de vétusté. Il tient compte des nouvelles
dispositions relatives aux assurances en prévoyant que l'usufruitier
dispensé d'assurer le bien n'est pas tenu de remplacer ou de payer la
valeur du bien qui périt par cas fortuit. Dans le cas contraire, les
nouvelles dispositions de l'article 1203 relatives aux assurances
s'appliquent.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1214 est-il
adopté? Me Pineau.
M. Marx: Commentaire du Barreau.
M. Pineau: Je lis le commentaire du Barreau, M. le
Président, concernant le deuxième alinéa. La
rédaction de cet alinéa laisse supposer que l'usufruitier qui
assure le bien est tenu de le remplacer ou d'en payer la valeur. Or, le
deuxième alinéa de l'article 1203 énonce qu'en cas de
perte totale l'usufruitier peut jouir de l'indemnité; il n'est donc pas
tenu de remplacer le bien. Le deuxième alinéa du présent
article aurait donc avantage à être précisé.
Mme Harel: Mais il faut qu'il en rende compte à la fin de
l'usufruit. C'est comme si le commentaire du Barreau laissait entendre, comme
je l'avais fait remarquer précédemment, qu'il pouvait jouir de
l'indemnité sans avoir à en rendre compte à la fin de
l'usufruit.
M. Pineau: Remarquez que je ne comprends pas très bien le
commentaire du Barreau.
Mme Longtin: Je pense que ce sont deux situations distinctes.
L'article 1203 traite de l'indemnité qui est versée en
remplacement du bien par l'assureur, laquelle doit être utilisée
pour réparer ou remplacer, alors que l'article 1214 traite du cas
où il est dispensé d'assurer le bien.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
Mme Longtin: II me semble que ce sont deux choses.
M. Pineau: Je n'ai pas très bien saisi le commentaire du
Barreau, en effet. Je pense qu'il s'agit de deux questions tout à fait
distinctes. Et, de toute façon, on ne peut pas, par un raisonnement a
contrario d'une disposition antérieure, tirer une règle autre que
celle qui est exprimée clairement ailleurs.
M. Cassette: Oui. Il faut lire les deux pour savoir quel
est...
M. Pineau: C'est cela, pour adjuger.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1214 est
adopté. L'article 1215?
Mme Harel: II se lit comme suit: "Si l'usufruit porte sur un
troupeau qui périt entièrement par cas fortuit, l'usufruitier
dispensé d'assurer le bien est tenu de rendre compte au
nu-propriétaire des cuirs ou de leur valeur. "Si le troupeau ne
périt pas entièrement, l'usufruitier est tenu de remplacer,
à concurrence du croît, les animaux qui ont péri."
M. Cossette: Cela, c'est du beau droit.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article traite, comme les articles 477 et 478 du
Code civil du Bas-Canada, de la perte de l'objet de l'usufruit lorsque celui-ci
porte sur un troupeau. Il tient compte des nouvelles dispositions relatives aux
assurances.
M. Pineau: C'est le droit de l'an 2000, M. le
Président?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bucolique.
Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article 1215?
M. le député D'Arcy McGee.
M. Cossette: C'est du droit romain.
M. Marx: C'est du droit romain que l'on veut garder en vigueur
encore.
Le Président (M. Gagnon): Adopté?
M. Marx: Je veux juste poser une question, M. le
Président. Est-ce que les cuirs ont encore une valeur substantielle, un
troupeau de vaches à lait?
M. Leduc (Saint-Laurent): Certain!
M. Cossette: Vous pouvez vous faire un beau manteau avec
cela!
Mme Harel: C'est comme preuve. M. Marx: Cela vaut
combien?
M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être que cela risque aussi
d'avoir brûlé.
M. Cossette: Cela coûte plus cher pour traiter la peau
que...
Le Président (M. Gagnon): Que la valeur.
M. Cossette: ...d'acheter la peau elle-même.
M. Marx: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1216?
De la fin de l'usufruit
Mme Harel: II se lit comme suit: "L'usufruit prend fin: "1°
Par l'arrivée du terme; "2° Par le décès de
l'usufruitier ou par la dissolution de la personne morale; "3° Par la
réunion des qualités d'usufruitier et de nu-propriétaire
dans la même personne, sans préjudice du droit des tiers; "4°
Par la déchéance du droit, son abandon ou sa conversion en rente;
"5° Par le non-usage pendant trente ans."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énumère les causes qui
mettent fin à l'usufruit, outre les causes traditionnelles telles la
mort de l'usufruitier: la réunion des qualités d'usufruitier et
de nu-propriétaire, l'arrivée du terme ou le non-usage pendant 30
ans. L'article considère l'abandon du droit ou sa conversion en rente
comme de nouvelles causes qui mettent fin à l'usufruit. Ces causes sont
traitées spécifiquement aux articles 1223, 1224 et 1225 du
projet. Cet article est complété par les articles 1217 à
1220 du projet.
Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? M. Leduc
(Saint-Laurent): Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1216
est adopté. J'appelle l'article 1217.
Mme Harel: "L'usufruit prend fin également par la perte
totale du bien sur lequel il est établi, sauf si le bien est
assuré. "En cas de destruction partielle du bien, l'usufruit subsiste
sur le reste."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office,
reprend en susbtance le droit actuel. Il complète aussi l'article
précédent en édictant que la perte totale du
bien met fin à l'usufruit, mais que la destruction partielle
laisse subsister l'usufruit sur le reste.
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté.
Mme Harel: Je crois qu'à l'article 1217 il pourrait y
avoir un amendement qui clarifierait, qui peut en ce cas assurer le bien. On y
dit: "Sauf si le bien est assuré." On ajouterait: "par
l'usufruitier".
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez
l'amendement?
Mme Harel: L'amendement consiste à ajouter à la fin
du premier alinéa les mots "par l'usufruitier".
Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé
est-il adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1218.
Mme Harel: Un instant! Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article est adopté tel
qu'amendé. J'appelle l'article 1218.
Mme Harel: "L'usufruit ne prend pas fin par l'expropriation du
bien sur lequel il est établi. L'indemnité est remise à
l'usufruitier à charge d'en rendre compte à la fin de
l'usufruit."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau précise ce qui
arrive s'il y a expropriation du bien sur lequel l'usufruit est établi.
En ce cas, l'indemnité est remise à l'usufruitier à charge
d'en rendre compte à la fin de l'usufruit. L'indemnité
d'expropriation est un bien de nature capitale et l'usufruitier peut jouir des
revenus produits.
Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 1218
est-il adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1219.
Mme Harel: "L'usufruit accordé jusqu'à ce qu'un
tiers ait atteint un âge déterminé dure jusqu'à
cette date, encore que le tiers soit mort avant l'âge fixé."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré également de
celui de l'office, complète les articles précédents. Il
reprend l'article 482 du Code civil du Bas-Canada en édictant que
l'usufruit accordé jusqu'à ce qu'un tiers ait atteint un
âge déterminé dure jusqu'à cette date même si
celui-ci est mort avant.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1220.
Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la
deuxième ligne du premier alinéa, le mot "survivant". "L'article
1220 se lit comme suit: "L'usufruit créé au
bénéfice de plusieurs usufruitiers successivement prend fin avec
le décès du dernier usufruitier ou avec la dissolution de la
dernière personne morale. "S'il est conjoint, l'extinction de l'usufruit
à l'égard de l'un des usufruitiers profite au
nu-propriétaire."
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. Excusez-moi.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau complète aussi
les articles précédents. Il s'inspire de l'article 144
proposé par l'office. Il établit que l'usufruit
créé au bénéfice de plusieurs usufruitiers
successivement prend fin avec le décès du dernier usufruitier ou
avec la dissolution de la dernière personne morale. Il établit,
de plus, qu'en cas d'usufruit conjoint l'extinction de l'usufruit à
l'égard de l'un des usufruitiers profite au nu-propriétaire.
Cette proposition est contraire à celle de l'office qui faisait
profiter le cousufruitier de l'extinction, mais elle vise à mieux
respecter la nature de l'usufruit. Celui-ci est un démembrement de la
propriété essentiellement partiel et temporaire, mais la
propriété complète demeure la meilleure forme de
propriété qu'il paraît préférable de
favoriser plutôt que de maintenir un démembrement. (16 h 15)
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, le Barreau, à la page
31, a soulevé le problème des cent années au maximum.
L'usufruit prend fin au bout de cent ans même si le dernier usufruitier
décède après que l'usufruit a existé cent ans.
C'est ce que le Barreau vaudrait, je pense.
M. Berrouard: On a corrigé la situation à l'article
1178 pour préciser "et même s'il est successif".
M.Pineau: L'article 1178.
Mme Longtin: Au premier alinéa.
M. Berrouard: On a apporté un amendement en ce sens.
Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'amendement est-il
adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1221.
Mme Harel: "À la fin de l'usufruit, l'usufruitier rend au
nu-propriétaire, dans l'état où il se trouve, le bien sur
lequel porte son usufruit. "Il répond de la perte ou de la
détérioration survenue par sa faute ou ne résultant pas de
l'usage normal du bien."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend l'article 142
proposé par l'office. Il traite de l'obligation de l'usufruitier de
rendre au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit le bien sur
lequel porte son usufruit. Celui-ci le rend dans l'état où il se
trouve, mais il répond de sa perte ou de sa détérioration
sauf si elle est survenue sans sa faute ou résulte de l'usage normal du
bien.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle
l'article 1222.
Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la
troisième ligne du premier alinéa, le mot
"déclaré".
L'article se lit donc comme suit: "L'usufruitier qui abuse de sa
jouissance, qui commet des dégradations sur le bien ou le laisse
dépérir ou qui, de toute autre façon, met en danger les
droits du nu-propriétaire, peut être déchu de son droit.
"Le tribunal peut, suivant la gravité des circonstances, prononcer
l'extinction absolue de l'usufruit, avec indemnité payable
immédiatement ou par versements au nu-propriétaire ou sans
indemnité. Il peut aussi prononcer la déchéance des droits
de l'usufruitier en faveur d'un usufruitier conjoint ou successif, ou encore
imposer des conditions pour la continuation de l'usufruit. "Les
créanciers de l'usufruitier peuvent intervenir à la demande pour
la conservation de leurs droits; ils peuvent offrir la réparation des
dégradations commises et des garanties pour l'avenir."
Le Président (M. Gagnon); Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office,
reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 480 du
Code civil du Bas-Canada. Il traite de la possibilité pour l'usufruitier
d'être déchu de son droit s'il abuse de sa jouissance. Il
élargit, cependant, les pouvoirs du tribunal en lui permettant, en outre
de prononcer l'extinction de l'usufruit avec ou sans indemnité, de
prononcer la déchéance des droits de l'usufruitier en faveur d'un
usufruitier conjoint ou successif ou encore d'imposer des conditions pour la
continuation de l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement est-il
adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1223.
Mme Harel: "Un usufruitier peut abandonner tout ou partie de son
droit. "En cas d'abandon partiel, le tribunal, à défaut
d'entente, fixe les nouvelles obligations de l'usufruitier en tenant compte
notamment de l'étendue du droit, de sa durée ainsi que des fruits
et revenus qui en sont tirés."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau constitue une autre
mesure préconisée dans le projet pour favoriser la conservation
du bien sujet à usufruit. Dans certains cas, en effet, les charges de
l'usufruitier peuvent être trop lourdes pour lui. C'est notamment le cas
des personnes âgées qui ne peuvent plus, en raison de leur
âge, entretenir le bien. Au lieu dès lors d'attendre que les
manquements de l'usufruitier à ses obligations constituent un abus de
jouissance et que le nu-propriétaire
demande la cessation de l'usufruit, nous avons cru opportun de permettre
à l'usufruitier d'abandonner son droit partiellement ou totalement. Si
l'abandon est partiel, le tribunal fixera les nouvelles obligations de
l'usufruitier en tenant compte notamment de l'étendue du droit, de sa
durée, ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés.
Comme commentaire supplémentaire, il faudrait ajouter que cet
article s'inspire du droit civil de la Louisiane.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: N'y a-t-il pas eu un amendement au deuxième
alinéa en cas d'abandon partiel et à défaut d'entente?
Non? J'ai cru.
Le Président (M. Gagnon): À l'article 1222?
M. Cossette: À l'article 1222? M. Pineau: À
l'article 1223?
Le Président (M. Gagnon): À l'article 1223.
M. Pineau: À l'article 1223, au deuxième
alinéa. J'ai cru lire cela quelque part.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Adopté?
Mme Longtin: Non, non. C'est juste, peut-être, une question
de forme, de formulation plus élégante.
M. Pineau: C'est probablement moi qui avais fait l'amendement sur
mon texte. J'ai cru l'avoir vu quelque part.
Mme Harel: Alors, ce serait quoi, la correction?
Mme Longtin: Cela pourrait être: "En cas d'abandon partiel
et à défaut d'entente, le tribunal fixe..." ce qui
éviterait de hacher...
Le Président (M. Gagnon): Nous allons le formaliser.
Alors, vous ajoutez "et...
Mme Harel: "Et, à défaut d'entente, le tribunal
fixe..."
Le Président (M. Gagnon): Bon, alors, c'est un amendement
qui va nous être livré. Cet amendement est adopté et
l'article tel qu'amendé est adopté. L'article 1224?
Mme Harel: "1224. L'abandon total est opposable au
nu-propriétaire à compter du jour de sa signification; l'abandon
partiel est opposable à compter de la demande en justice ou de l'entente
entre les parties".
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau,
complète le précédent. Il règle le sort des
obligations de l'usufruitier en précisant à partir de quel moment
l'abandon est opposable au nu-propriétaire. Dans le cas d'un abandon
total, il lui sera opposable à compter du jour de sa signification et,
dans le cas d'un abandon partiel, à compter de la demande en justice ou
de l'entente entre les parties.
Le Président (M. Gagnon): Ça va.
L'article 1224 est adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): À l'article 1225 il y a
un amendement.
Mme Harel: Oui, qui consiste à insérer, à la
deuxième ligne du premier alinéa, avant le mot "droit", le mot
"le" de façon que l'article se lise comme suit: "1225. L'usufruitier qui
éprouve des difficultés sérieuses à remplir ses
obligations a le droit d'exiger du nu-propriétaire ou de l'usufruitier
conjoint ou successif la conversion de son droit en rente. "À
défaut d'entente, le tribunal, s'il constate le droit de l'usufruitier,
fixe la rente en tenant compte, notamment, de l'étendue du droit, de sa
durée ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés".
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M- Cossette: Cet article de droit nouveau constitue une autre
mesure qui vise à favoriser la conservation du bien sujet à
usufruit. Il permet à l'usufruitier qui éprouve des
difficultés sérieuses à remplir ses obligations d'exiger
du nu-propriétaire ou de l'usufruitier conjoint ou successif la
conversion de son droit en rente viagère. Si les parties ne s'entendent
pas le tribunal, après avoir constaté le droit de l'usufruitier,
fixera la rente en tenant compte notamment de l'étendue du droit, de sa
durée ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que ce n'est pas une exigence
importante si le nu-propriétaire préférait ne pas payer
cette rente? Pourquoi pourrait-on l'obliger? Il n'a pas le choix, si je
comprends bien. Il peut
avoir de très bonnes raisons de ne pas vouloir convertir
l'usufruit en rente.
M. Cossette: C'est-à-dire qu'on lui en faitune
obligation. À ce moment-là, il va récupérer la
totalité de la propriété, si on peut dire. Il va joindre
à sa nue-propriété l'usufruit, de telle sorte que, s'il a
un montant mensuel à fournir à une personne, il pourra le
faire.
M. Leduc (Saint-Laurent); Je comprends, mais on change
drôlement les règles du jeu. Il y a une stipulation, il y a un
bien qui est donné en usufruit et, là, on change les
règles du jeu sans le consentement du constituant. On décide que
maintenant ce sera une rente plutôt que l'exercice de l'usufruit sur un
bien. Je trouve que cela va très loin. Où s'est-on inspiré
pour établir une règle comme celle-ci? L'office de
révision ne l'a pas suggérée et il n'y avait rien
auparavant au Code civil.
M. Berrouard: Je pense que nous nous sommes inspirés de M.
Carbonnier. Je pense qu'il faut bien préciser, cependant, qu'il y a
certaines conditions à remplir pour qu'on puisse demander la conversion.
Il faut quand même que l'usufruitier éprouve des
difficultés sérieuses à remplir ses obligations et
à partir de ce moment-là le droit même du
nu-propriétaire est en danger. Si on redonne le droit complet au
nu-propriétaire et si on fixe la rente en tenant compte de
l'étendue du droit, de sa durée, ainsi que des fruits et revenus
qui en sont tirés, je pense que le nu-propriétaire ne peut pas
être lésé. Je pense qu'il y va même de son
intérêt, parce qu'il retrouve son droit complet sur le bien.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est ce que vous dites. Je ne sais pas
si le nu-propriétaire serait tellement intéressé, dans
certains cas, à convertir l'usufruit en rente. Encore, ici, on a le bon
et le mauvais, la règle du bon et du mauvais. Le bon, c'est
l'usufruitier et le mauvais, c'est le nu-propriétaire. Alors,
l'usufruitier, lui, a le droit, à un moment donné, s'il est mal
pris, de convertir. Mais, si le nu-propriétaire est mal pris, lui, il
n'a pas le droit de faire quoi que ce soit. Il est obligé de maintenir
la règle qui a été établie au départ, donc,
le maintien du bien en usufruit. Cela me semble une règle
exorbitante.
M. Berrouard: Je ne crois pas que la philosophie qui a
été poursuivie dans cet article est de dire qu'il y en a un bon
et l'autre mauvais. Je pense qu'on a privilégié, dans tout le
domaine de l'usufruit, une communauté d'intérêts entre
l'usufruitier et le nu-propriétaire plutôt qu'un antagonisme
d'intérêts et on a voulu favoriser la conservation du bien. C'est
une des conséquences de cette philosophie que l'on retrouve en
matière d'usufruit, une nouvelle philosophie. Mais je pense qu'il y va
de l'intérêt des deux parties.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous le permettez...
Le Président (M. Gagnon): Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent); ...simplement pour dire que, si le
constituant avait voulu cette conversion, je pense qu'il l'aurait
prévue. Je le répète, on change les règles du jeu
durant la partie. Cela me semble exorbitant.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Juste sur le plan du sens commun, si l'usufruitier
obtient, finalement, la jouissance d'un bien qui devient une charge
financière excessive, pour lui - je pense, par exemple, à
l'usufruit d'une maison à Mont-Royal ou plutôt à
Saint-Laurent, dans le comté de Saint-Laurent -...
M. Leduc (Saint-Laurent): Mont-Royal!
Mme Harel: ...qui nécessite des dépenses qui
excèdent de loin ses revenus, alors, il y a là matière
à aller devant le tribunal pour obtenir une juste compensation, parce
que cela excède de loin les possibilités de la personne de
remplir ses obligations. En quoi cela pénalise-t-il le
nu-propriétaire? En quoi une règle comme celle-là
pénalise-t-elle le nu-propriétaire? Il n'a pas, de toute
façon, la jouissance du bien tant que dure l'usufruit.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais s'il préfère, lui,
maintenir l'usufruit plutôt que de payer une rente, j'en suis
là-dessus. Il pourrait avoir de très bonnes raisons pour dire:
Écoutez, je préfère le statu quo. Mais, là, on ne
lui permet pas de maintenir le statu quo. Il va être obligé
d'accepter cette conversion. Évidemment, si vous me parlez d'une belle
propriété à Mont-Royal dont la personne ne veut plus avoir
la jouissance, ni l'usage, bien sûr que je n'aurais pas d'objection
personnellement. Mais ce ne serait certainement pas dans ces cas. À ce
moment, ils vont certainement s'entendre. La personne, disons, est trop
âgée ou a perdu toute autonomie et elle veut aller demeurer
ailleurs, il y a toujours la possibilité, d'ailleurs, dans ce cas, que
l'usufruit cesse.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: M.
le Président, le Barreau
voudrait que le tribunal ait toute discrétion. Donc, il va tout
à fait à l'encontre de ce que vient de dire le
député de Saint-Laurent. Or, je voudrais quand même attirer
l'attention sur le point suivant: le tribunal doit statuer sur le
caractère sérieux des difficultés. Donc, c'est un
critère. je crois que, contrairement à l'avis du Barreau, il est
bon qu'il y ait un tel critère pour qu'effectivement le tribunal n'ait
pas de limite à son pouvoir d'appréciation.
Je crois que cela restreint quelque peu les craintes du
député de Saint-Laurent, car il faudra établir le
caractère sérieux des difficultés à remplir les
obligations.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette. (16 h 30)
M. Cossette: On a donné des exemples avec des
propriétés dans la ville de Saint-Laurent et dans la ville de
Mont-Royal. Ce n'est peut-être pas le meilleur endroit ou le meilleur
exemple à donner. Je pense, par exemple, à deux personnes
âgées qui ont l'usufruit d'une terre agricole. Ces personnes sont
devenues, à toutes fins utiles, impotentes. Elles ne peuvent plus
cultiver et, à ce moment, elles laisseront sans doute la terre aller en
friche, si l'on veut. Pourquoi le nu-propriétaire ne la
récupérerait-il pas immédiatement quitte à
continuer, lui, à l'exploiter et à la cultiver convenablement?
Autrement, la terre va devenir en friche et au moment où il la
reprendra, au décès des usufruitiers, cela va lui coûter
plus cher pour la reprendre que de payer une rente raisonnable parce que, quand
il s'agit de personnes âgées, la rente sera calculée en
fonction de la possibilité de vie de ces personnes.
M. Leduc (Saint-Laurent): À supposer que votre bonhomme
soit paresseux et qu'il ne veuille pas la terre.
M. Cossette: Le tribunal appréciera. Si c'est de la
paresse, c'est une autre affaire. Il n'y a pas de raison sérieuse. Il
n'y a pas de difficulté sérieuse. Le fainéant, je ne pense
pas qu'il soit bien accueilli par le tribunal s'il vient dire: Cela me tanne de
jouir de mon usufruit.
M. Leduc (Saint-Laurent): II peut dire: Moi, je
préfère maintenir l'usufruit plutôt que de payer une rente.
Tout de même, il s'agit de débourser.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ne va pas trop, mais en tout
cas!
M. Marx: Étant donné que le député de
Saint-Laurent est d'accord...
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à
l'article 1225 est adopté?
M. Cossette: S'il s'agit de percevoir des loyers à
Mont-Royal ou à Saint-Laurent, je pense que ce serait difficile
d'invoquer des difficultés sérieuses à ce moment.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1225 est
adopté tel qu'amendé?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1226?
De l'usage
Mme Harel: "L'usage est le droit de se servir temporairement du
bien d'autrui et d'en percevoir les fruits et revenus, - l'amendement consiste
à supprimer le mot "les" devant le mot "revenus" - mais jusqu'à
concurrence des besoins de l'usager et, le cas échéant, des
personnes qui habitent avec lui ou sont à sa charge."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article définit le droit d'usage comme
"le droit de se servir temporairement du bien et d'en percevoir les fruits et
revenus, mais jusqu'à concurrence des besoins de l'usager et, le cas
échéant, des personnes qui habitent avec lui ou sont à sa
charge." Il reprend en substance le droit actuel exprimé à
l'article 487 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office
à deux exceptions près. D'abord, il ne retient plus la notion de
droit d'habitation. Actuellement, le droit d'usage prend le nom d'habitation
quand il est applicable à une maison. Cette notion, toutefois, est plus
ou moins correcte et restrictive car le droit peut autant porter sur une maison
que sur un immeuble commercial, par exemple. Ensuite, la notion de famille n'a
pas été reprise. Nous avons préféré utiliser
une expression plus large et plus compréhensive.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1226 est adopté. L'article tel qu'amendé est
adopté. L'article 1227?
Mme Harel: "Le droit d'usage est incessible et insaisissable,
à moins que la convention des parties ne prévoie le contraire ou
que le tribunal ne l'autorise dans l'intérêt de l'usager
après avoir constaté que le propriétaire ne subit aucun
préjudice."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article modifie le droit actuel exprimé
aux articles 494 et 497, ainsi que la proposition de l'office. Ainsi, tout en
réaffirmant le principe que le droit d'usage est incessible, il
précise qu'il est aussi insaisissable et prévoit, contrairement
au droit actuel et à l'office, qu'une convention peut stipuler le
contraire et que le tribunal peut autoriser la cession du droit dans
l'intérêt, de l'usager ou sa saisie après avoir
constaté que le propriétaire ne subit aucun préjudice.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
L'article 1227 est adopté. M. le député de
D'Arcy McGee. M. le député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce l'article 1227?
M. Pineau: C'est un pouvoir très large accordé au
tribunal, le droit de céder, le droit d'usage restreint.
M. Leduc (Saint-Laurent): Encore l'intrusion du tribunal dans les
conventions. Moi, j'avais une question ici: Pourquoi permettre au tribunal de
l'autoriser? Cela veut dire que les conventions qu'on signe maintenant, cela ne
vaut pas cher.
M. Cossette: De la même façon que, lorsque vous
dites dans une convention que tel bien est insaisissable, le tribunal peut
venir dire: Dans les circonstances, ce ne l'est pas. Je pense que le Code de
procédure civile va jusque-là.
M. Leduc (Saint-Laurent): Aujourd'hui on ne sait plus si les
contrats doivent être respectés ou non. On a vu, d'ailleurs, ce
qui s'est passé avec la loi 70 et d'autres. On peut briser n'importe
quel contrat aujourd'hui; alors, on fait exactement la même chose
ici.
Mme Harel: Est-ce un commentaire pertinent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Très. Mme Harel: Sur
l'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): On va revenir à
l'interprétation.
Mme Harel: C'est une question d'interprétation.
Le Président (M. Gagnon): Voilà. Quelqu'un a-t-il
une réponse à donner à Me Pineau et au
député de Saint-Laurent qui ont mentionné que
c'était un droit très large donné au tribunal? Non? Pas Me
Pineau. M. le député de Saint-Laurent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Pour quelle raison donne-t-on ce
pouvoir?
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Le droit d'usage pouvant, entre autres, être
accordé par le tribunal, peut-être qu'en matière
matrimoniale où il y aurait un droit d'usage sur l'habitation ou les
meubles, ce droit serait incessible; mais, en créant le droit, il serait
toujours possible pour le tribunal de voir qu'il n'y a vraiment aucun
préjudice subi. Si, par exemple, le conjoint se trouve absent pour une
longue période, qu'il est propriétaire de l'immeuble et que, par
ailleurs, celui qui bénéficie du droit d'usage est placé
dans des circonstances où il ne peut plus en bénéficier,
il y aurait possibilité d'une cession avec autorisation du tribunal pour
cette période. Il n'y a pas eu de convention ici. Ce serait un des cas
possibles.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela n'irait-il pas à l'encontre
des conventions des parties? Si l'usage est personnel - c'est ce qu'on comprend
- les droits d'usage et d'habitation étant des droits personnels, cela
veut donc dire que, si la personne n'est plus en mesure d'exercer ce droit, le
droit d'usage ou d'habitation se terminerait. Il finirait à ce moment et
il est bien sûr que le nu-propriétaire pourrait avoir la
jouissance du bien. Si on permet de céder ce droit, c'est donc qu'on
permettrait au tribunal de continuer ce droit d'usage ou d'habitation. Cela me
semble aller à l'encontre des conventions des parties, si je comprends
bien l'article. Est-ce bien ce qu'il veut dire?
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: D'abord, il faut que ce soit dans
l'intérêt de l'usager et, en second lieu, il faut aussi que le
propriétaire ne subisse aucun préjudice. Je pense que l'exemple
de Mme Longtin est intéressant. Prenons comme exemple le cas d'une
personne âgée qui a un droit d'usage. Elle est rendue à 76
ans et n'est plus autonome. Évidemment, ce droit d'usage pourrait lui
avoir été concédé sur la propriété
pour lui éviter d'avoir à payer un loyer ailleurs. À ce
moment, n'étant plus autonome et ayant à payer un loyer pour
être logée ailleurs et obtenir les soins requis par son
état, je pense que le tribunal serait bienvenu d'autoriser cette
personne à céder son droit d'usage, moyennant
considérations.
M. Leduc (Saint-Laurent): Auparavant, est-ce que le
nu-propriétaire n'aurait pas pu ravoir l'usage de ce bien? Puisqu'on
stipule
qu'il sera personnel, c'est donc qu'on entend le mettre à la
disposition de cette personne. Si cette personne, par perte d'autonomie ou pour
d'autres raisons, est incapable d'en jouir, on peut supposer qu'à ce
moment le droit cesse. C'est ce que j'ai toujours compris du droit d'habitation
ou du droit d'usage. C'est attaché à la personne.
Si la personne n'est plus en mesure d'en jouir, je pense que le droit
cesse et je suppose que le nu-propriétaire ou le constituant a bien
voulu que cela soit strictement pour la période où la personne
pouvait en jouir.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Le droit d'usage n'est pas un droit personnel, mais
un droit réel. Par ailleurs, on peut parler de convention, mais il est
bien sûr qu'en matière de droit réel, même si on
crée un droit réel par convention et qu'on l'enregistre, ce droit
est saisissable dans tous les cas. Si on n'a pas voulu qu'il soit insaisissable
dans le cas de l'usage, c'est que dans certaines circonstances on peut
comprendre qu'il ne soit pas saisissable. Si, par exemple, mon père m'a
laissé une maison à la charge d'un droit d'usage parce qu'il veut
demeurer dans une chambre chez moi, on comprend très bien à ce
moment-là que ce droit est insaisissable. On verrait très mal de
faire vendre ce droit-là et qu'un étranger vienne habiter la
maison. Par contre, si l'usage porte sur un immeuble commercial, par exemple,
et qu'on en tire des revenus et des fruits, je pense qu'on pourrait, dans ce
cas-là, saisir ce droit; sinon, on pourrait priver les créanciers
d'une partie importante de leurs droits, de leurs garanties.
M. Leduc (Saint-Laurent): Évidemment, si on obtient une
garantie sur un bien qui fait l'objet d'un droit d'usage ou d'habitation, on
sait à quoi s'attendre. Si c'est antérieur, cela ne s'applique
pas. Si c'est postérieur, on connaît les règles du jeu. Si
je prête sur un bien qui fait l'objet d'un droit d'usage ou d'habitation,
je sais à quoi m'attendre. Il ne faudrait pas parler de garantie dans ce
cas-là. Sûrement pas.
M. Berrouard: Une garantie personnelle.
M. Leduc (Saint-Laurent): II connaît les règles du
jeu, il savait à quoi s'attendre. Alors, je ne pense pas qu'il puisse
s'en plaindre.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Dans le droit d'usage, on comprend le droit
d'habitation, n'est-ce pas? Lorsqu'on consent un droit d'habitation, je
comprends bien qu'il s'agit d'un droit réel, mais bien souvent cela peut
être un droit réel consenti intuitu personae. Cette personne
aurait la possibilité à ce moment-là - ou le tribunal
pourrait l'y autoriser - de céder son droit d'habitation à une
tierce personne.
Mme Harel: Compte tenu des circonstances.
M. Pineau: Justement, c'est cela. On accorde un pouvoir au
tribunal, mais aucune balise. Le tribunal peut faire ce qu'il veut. C'est un
peu cela que l'on retrouve un peu partout. Aucune balise.
Mme Harel: II y en a deux, en fait. C'est l'intérêt
de l'usager et l'absence de préjudice pour le propriétaire. S'il
y a encore des enfants ou des personnes à charge et que l'usufruitier
doit faire un séjour prolongé dans un établissement de
soins psychiatriques ou autres...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1227 dit bien que "le droit
d'usage est incessible et insaisissable à moins que la convention des
parties ne prévoie le contraire ou que le tribunal ne l'autorise." Donc,
si les parties ont convenu que c'était incessible, cela demeure
incessible. D'accord?
M. Pineau: Si elles ont convenu que c'était cessible, il
n'y a pas de problème.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, si elles ont convenu que
c'était incessible, c'est incessible.
M. Pineau: Ah non! À moins que le tribunal ne
l'autorise.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ah. D'accord.
M. Berrouard: On présente comme principe le fait que le
droit d'usage est incessible et insaisissable à deux exceptions
près: à moins que la convention des parties ne prévoie le
contraire, ce qui va de soi, et à moins que le tribunal ne l'autorise
dans l'intérêt de l'usager et s'il n'y a pas de préjudice
pour le propriétaire.
M. Leduc (Saint-Laurent): II ne sera donc plus possible aux
parties de rédiger une convention dans laquelle il sera dit que c'est un
droit réel - entendons-le comme on veut, mais comme le disait Me Pineau,
c'est sûr que c'est attaché à une personne - qui est
absolument relié ou rattaché à cette personne. Si vous me
dites cela, je ne peux pas être d'accord avec cela.
Mme Harel: À ce moment-là, Me Longtin,
peut-être pourrions-nous introduire que cela soit à défaut
d'une convention entre les parties. À défaut de convention, le
tribunal pourrait l'autoriser.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous comprendrez que le droit d'usage
ne veut plus rien dire ici, c'est pratiquement de l'usufruit. Je veux tout de
même qu'il y ait une différence entre les deux.
Mme Harel: S'il y a une convention au contraire, le tribunal ne
pourrait pas l'autoriser. Mais, à défaut de convention, le
tribunal pourrait l'autoriser. (16 h 45)
Le Président (M. Gagnon): Cela irait dans ce sens? M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Peut-on suspendre et attendre l'amendement?
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites que vous suggéreriez
que cela demeure...
Mme Harel: À défaut de convention, que le tribunal
puisse l'autoriser.
M. Pineau: S'il y a une convention disant que c'est incessible,
le tribunal ne peut pas intervenir. S'il n'y a pas de convention disant que
c'est incessible, le tribunal peut intervenir. C'est le texte actuel.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela. Le Président (M.
Gagnon): D'accord?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire qu'il serait
possible de stipuler l'incessibilité.
M. Cossette: C'est cela. Mme Harel: C'est cela.
M. Leduc (Saint-Laurent); Parfait. Je suis d'accord avec
cela.
Mme Longtin: C'est-à-dire que le droit étant
incessible, la convention peut le prévoir cessible. Ce qui serait
ajouté, c'est qu'elle pourrait exclure, finalement, la
possibilité de recourir au tribunal.
M. Leduc (Saint-Laurent); D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que nous suspendons
l'article pour attendre l'amendement?
Des voix: D'accord.
Mme Harel: Moi, M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons nos travaux pour
cinq minutes?
La sous-commission des institutions suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30.
(Suspension de la séance à 16 h 48)
(Reprise à 19 h 38)
Le Président (M. Gagnon): La sous-commission des
institutions se réunit pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code
civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens.
Lors de la suspension de nos travaux, nous en étions à l'article
1027.
Une voix: 1227.
Le Président (M. Gagnon): 1227. Je suis perdu dans mes
chiffres. Est-ce qu'il était suspendu? L'article 1227 était
suspendu. Est-ce qu'on est prêt maintenant? Non. Article 1228?
Mme Harel: "L'usager dont le droit porte sur une partie seulement
d'un immeuble peut utiliser les installations destinées à l'usage
commun."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassettes Cet article de droit nouveau reprend en substance l'article
156 proposé par l'office. Il précise le droit de l'usager de se
servir des installations communes lorsque son droit d'usage porte sur une
partie seulement d'un immeuble. Comme le note l'office, l'article apporte une
précision de nature à prévenir certains litiges qui
pourraient naître à l'occasion des rapports entre le
nu-propriétaire et l'usager. Cet article s'inspire de l'article 777 du
Code civil suisse.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article
1229?
Mme Harel: "L'usager qui retire tous les fruits et revenus du
bien ou qui occupe la totalité de l'immeuble est tenu pour le tout aux
frais de production, aux réparations d'entretien et au paiement des
charges, de la même manière que l'usufruitier. "S'il ne prend
qu'une partie des fruits et revenus ou s'il n'occupe qu'une partie de
l'immeuble, il contribue en proportion de ce dont il fait usage."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article reprend en substance le droit actuel et
la proposition de l'office. Il traite des charges relatives au bien soumis au
droit d'usage.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Les frais de production, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): On a déjà
corrigé cela?
M. Cossette: Oui, oui.
Le Président (M. Gagnon): Cela prendrait un amendement de
concordance.
M. Cossette: Oui.
Le Président (M. Gagnon): C'est cela?
M. Cossette: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cet amendement est
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé
est-il adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1230?
Mme Harel: "Les dispositions relatives à l'usufruit sont,
pour le surplus, applicables au droit d'usage, compte tenu des adaptations
nécessaires."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article de droit nouveau reproduit en substance
l'article 153 du projet de l'office. Il rend applicables à l'usage les
règles relatives au droit d'usufruit.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article
1231?
M. Marx: L'article 1231, c'est les servitudes.
Des servitudes
Le Président (M. Gagnon): Voilà: Chapitre
troisième, Des servitudes.
M. Marx: On commence le chapitre. M. Pineau: Le droit d'usage,
cela use. Mme Harel: "La servitude est une charge imposée sur un
immeuble, appelé le fonds servant, en faveur d'un autre immeuble,
appelé le fonds dominant, et qui appartient à un
propriétaire différent. "Cette charge oblige le
propriétaire du fonds servant à supporter, de la part du
propriétaire du fonds dominant, certains actes d'usage ou à
s'abstenir lui-même d'exercer certains droits inhérents à
la propriété. "La servitude s'étend à tout ce qui
est nécessaire à son exercice."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article s'inspire des articles 158 et 167
proposés par l'office. Il reprend de façon plus explicite la
définition de la servitude contenue à l'article 499 du Code civil
du Bas-Canada. Il décrit la nature de la charge imposée au
propriétaire du fonds servant. En outre, il reprend en substance le
premier alinéa de l'article 552 du Code civil du Bas-Canada en
édictant que la servitude s'étend à tout ce qui est
nécessaire à son exercice.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Oui?
Adopté?
M. Marx: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1231.1? C'est cela?
M. Cossette: C'est cela.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que c'est un amendement
à l'article 1231?
M. Cossette: Un ajout.
Le Président (M. Gagnon): Oui, voila!
Mme Harel: Oui, l'amendement consiste à ajouter,
après l'article 1231, l'article 1231.1 qui se lit comme suit: "Une
obligation de faire peut être rattachée à une servitude et
imposée au propriétaire du fonds servant. Cette obligation
crée un droit réel accessoire à la servitude et ne peut
être stipulée que pour le service et l'exploitation de
l'immeuble."
Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement a pour but de permettre,
comme le propose d'ailleurs l'office, qu'une obligation de faire puisse
être rattachée à une servitude et imposée au
propriétaire du fonds servant. Ainsi, il serait possible de constituer
en droit réel et non en droit personnel l'obligation pour le
propriétaire d'un immeuble, par exemple, d'assurer le chauffage d'un
autre immeuble qui est contigu, comme cela se produit quelquefois.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si on parle d'obligation de faire, il
faudrait peut-être qu'on parle également d'obligation de ne pas
faire. Si je m'engage à ne pas construire...
M. Marx: Oui, mais, ici, on parle seulement de l'obligation de
faire.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui mais je me demande si... Justement,
j'en ai fait une il n'y a pas longtemps.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si je dis, par exemple: Ne pourra
être utilisé qu'à certaines fins, je m'enlève le
droit de faire certaines choses. On voit cela assez fréquemment.
M. Cossette: Oui. C'est déjà suffisamment clair, je
pense, dans l'article 1231, au deuxième alinéa, quand on dit:
"Cette charge oblige le propriétaire du fonds servant à
supporter, de la part du propriétaire du fonds dominant, certains actes
d'usage ou à s'abstenir lui-même d'exercer certains droits
inhérents à la propriété." Je pense qu'avec
cela...
Le Président (M. Gagnon); Me Pineau.
M. Pineau: Je voudrais signaler le rapport du Barreau qui
suggère de retrancher l'article 1231.1: "La sous-commission s'est
d'abord interrogée sur ce que visait ce nouvel article par rapport aux
articles 1237 et 1238 du projet de loi. L'obligation visée constitue une
charge réelle qui, de l'avis de la sous-commission, peut être
assimilée à un ouvrage nécessaire pour l'usage et la
conservation de la servitude déjà prévue à
l'article 1238."
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard? Me Cossette.
M. Cossette: C'est dans le rapport du Barreau?
M. Pineau: Oui, à la page 33 du deuxième rapport,
enfin, du dernier rapport.
Mme Harel: Page 33, Me Cossette.
M. Cossette: Évidemment, le Barreau parle d'un ouvrage
nécessaire pour l'usage et la conservation de la servitude.
D'accord?
M. Pineau: Oui, oui.
M. Cossette: Tandis que, dans l'amen- dement, on dit: "Une
obligation de faire peut être rattachée à une servitude et
imposée au propriétaire du fonds servant." Le cas visé
serait précisément celui-ci. Je vous donne un exemple absolument
théorique. Je prends la Place Desjardins et l'édifice voisin, la
Place Dupuis. Je suppose que tout le système de chauffage est dans la
Place Desjardins et que la Place Dupuis n'a pas de système de chauffage.
On convient d'installer des tuyaux à partir de la Place Desjardins
jusqu'à la Place Dupuis. On fait une nouvelle servitude de passage, mais
on voudrait en même temps s'assurer que le chauffage puisse se continuer
dans la Place Dupuis tant et aussi longtemps qu'il sera nécessaire, au
Québec, de chauffer les propriétés pendant l'hiver. On
crée donc à la fois une servitude de passage et une autre
servitude au profit de la Place Dupuis, à partir de la Place Desjardins.
L'obligation de faire, pour ne pas qu'elle cesse, est devenue une servitude qui
va se transmettre avec l'héritage.
M. Pineau: II ne s'agit absolument pas d'un ouvrage
nécessaire pour l'usage et la conservation de la servitude. Cela n'a
rien à voir avec cela.
M. Cossette: C'est cela. C'est une obligation de faire, de
fournir un chauffage. Ce serait, évidemment, très inconvenant
que, advenant le changement de propriétaire de Place Desjardins, le
propriétaire suivant dise: Je ne suis pas tenu de fournir le chauffage
à Place Dupuis.
M. Pineau: II s'agit véritablement d'un droit réel,
accessoire à la servitude.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1231.1 est-il
adopté?
M. Cossette: C'était, d'ailleurs, proposé par
l'office.
Mme Harel: Est-ce qu'on a répondu à la question du
député de Saint-Laurent?
M. Cossette: Oui, je pense.
Mme Harel: Sa question était différente. Il
s'agissait de savoir si on ne devait pas introduire l'obligation de ne pas
faire.
Le Président (M. Gagnon): On y a répondu par le
deuxième alinéa de l'article 1231.
M. Cossette: Le deuxième alinéa de l'article
1231.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va, M. le
député de Saint-Laurent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1232?
Mme Harel: II se lit comme suit: "Les servitudes sont continues
ou discontinues. "La servitude continue est celle dont l'exercice ne requiert
pas le fait actuel de son titulaire, comme la servitude de vue ou de
non-construction. "La servitude discontinue est celle dont l'exercice requiert
le fait actuel de son titulaire, comme la servitude de passage à pied ou
en voiture."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article définit la servitude continue et
celle qui est discontinue. Il reprend en substance le droit actuel
exprimé à l'article 547 du Code civil du Bas-Canada et la
proposition de l'office.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1233?
Mme Harel: "Les servitudes sont apparentes ou non apparentes. "La
servitude est apparente lorsqu'elle se manifeste par un signe extérieur;
autrement elle est non apparente."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article donne une définition de la
servitude apparente et non apparente. Il s'inspire de l'article 162
proposé par l'office, lequel reprend en substance l'article 548 du Code
civil du Bas-Canada et du droit actuel, mais en le simplifiant.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1233 est
adopté. Article 1234?
Mme Harel: "La servitude s'établit par contrat, par
testament, par destination du propriétaire ou par l'effet de la loi. "La
servitude continue et apparente peut aussi s'établir par prescription
acquisitive mais, en aucun cas, la servitude discontinue ou non apparente ne
peut s'acquérir sans titre."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énumère les divers modes
d'établissement de la servitude. Contrairement à l'article 549 du
Code civil du Bas-Canada et du droit actuel, il reconnaît la
possibilité d'acquérir une servitude par prescription. À
cet égard, cependant, le projet de loi est plus restrictif que la
proposition de l'office en ne permettant pas l'acquisition par prescription des
servitudes discontinues ou non apparentes. Il permet, cependant, l'acquisition
par prescription des servitudes continues et apparentes.
Cette modification à la proposition de l'office se justifie par
le fait que, si le propriétaire du fonds servant peut contrôler
l'exercice des actes susceptibles d'établir par prescription une
servitude continue et apparente, il ne peut le faire à l'égard
d'actes qui s'exercent de manière sporadique ou qui ne sont pas
apparents. D'ailleurs, ces actes sont la plupart du temps
considérés comme des actes de tolérance où de pure
faculté. La proposition de l'office pourrait donc entraîner une
détérioration des relations de voisinage, car les
propriétaires ne toléreraient plus certains actes comme celui de
laisser passer des personnes sur leur terre de crainte de permettre ainsi
l'acquisition d'une servitude de passage par prescription. En France,
l'acquisition par prescription des servitudes est limitée à
celles qui sont continues et apparentes.
Le Président (M. Gagnon): L'article est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1235. Il y a
un amendement.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer le premier
alinéa par le suivant: "Les mutations de propriété du
fonds servant ou dominant ne portent pas atteinte à la servitude";
à remplacer, au deuxième alinéa, les mots: "Elle suit ces"
par les mots "Celle-ci suit les".
Je Ils le deuxième alinéa: "Celle-ci suit les immeubles en
quelques mains qu'ils passent, sous réserve des dispositions relatives
à l'enregistrement des droits réels."
L'amendement consiste également à joindre le
deuxième alinéa au premier. Il s'agit d'un amendement purement
formel.
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article est nouveau. Il reprend l'article 160
proposé par l'office. Il précise en susbtance que la servitude
n'est pas affectée par les mutations de propriété des
fonds servant ou dominant.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je croyais que cela allait de soi.
Est-ce qu'il y a une raison particulière pour laquelle on l'a
ajouté? Auparavant, on n'avait pas un tel article et je suis convaincu
que cette règle s'appliquait.
M. Berrouard: C'est peut-être effectivement un peu
didactique, mais on a jugé opportun de le préciser
spécifiquement dans le chapitre relatif à la servitude.
M. Leduc (Saint-Laurent): II n'y a pas de raison
particulière?
M. Berrouard: II n'y a pas de raison particulière, c'est
à des fins de précision.
M. Pineau: Puisque c'est un droit réel, cela va de
soi.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. Cela va? L'amendement
à l'article 1235 est-il adopté? L'article tel qu'amendé
est-il adopté?
M. Cossette: L'office l'avait dit, c'est un peu... Cela
évitera aux professeurs de le redire à l'occasion de
l'étude du chapitre Des servitudes.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1235 est adopté
tel qu'amendé. Article 1236?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la
deuxième ligne du premier alinéa, les mots "au moyen d'un
écrit donné par le" par les mots "par un écrit du".
Alors, l'article se lit comme suit: "La servitude par destination du
propriétaire est constatée par un écrit du
propriétaire du fonds qui, prévoyant son morcellement
éventuel, établit immédiatement les charges qui seront
imposées sur une partie du fonds en faveur d'autres parties. "Elle peut
aussi être constatée par un écrit du propriétaire du
fonds servant qui établit que les deux fonds actuellement divisés
ont antérieurement appartenu à un même propriétaire
et que celui-ci a établi ou maintenu entre ces deux fonds l'arrangement
matériel constituant la servitude."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article détermine comment se constitue
une servitude par destination du propriétaire. II s'inspire à la
fois de l'article 551 du Code civil du Bas-Canada et de l'article 164
proposé par l'office. Cependant, il en diffère en
prévoyant que cette servitude anciennement appelée "servitude par
destination du père de famille" peut être établie avant le
morcellement d'un fonds ou après celui-ci si, dans les deux cas, le
propriétaire, soit du fonds qui sera morcelé, soit du fonds
servant, le reconnaît dans un écrit.
Il diffère, en outre, de la proposition de l'office en ce qu'il
ne limite pas la constitution de servitudes par destination du
propriétaire à celles qui sont apparentes. Aucun motif ne
justifie plus cette limitation, car cette servitude devra désormais
être enregistrée pour être opposable aux tiers.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Au premier alinéa, je suppose que ce n'est pas
le propriétaire qui prévoit son morcellement, c'est le
morcellement du fonds. Je suppose qu'il faut dire: La servitude par destination
du propriétaire...
Le Président (M. Gagnon): Je présume qu'il y aura
un amendement.
M. Pineau: ...est constatée par un écrit du
propriétaire qui, prévoyant le morcellement éventuel de
son fonds, établit immédiatement...
Le Président (M. Gagnon): Ça va, Mme la
députée?
Mme Harel: Oui, très bien, certainement.
Le Président (M. Gagnon):! L'amendement est adopté.
Oui, M. le député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il serait encore possible
d'établir une servitude par destination dans le cas de
dépôt de plans montrant des rues? Je suppose.
M. Cossette: C'est-à-dire que la servitude par destination
du père de famille, dans ce cas-là, n'existait que parce que la
cour en avait ainsi décidé, mais, là, il faudra respecter
toutes les conditions pour que cela en soit une réellement.
M. Leduc (Saint-Laurent): On impose l'obligation que ce soit pas
écrit. À ce moment-là, est-ce qu'on ne pourrait pas
considérer que le dépôt de plans équivaut à
un écrit? Parce que l'article 551 était pratiquement au
même effet.
M. Cossette: Oui, je pense qu'un plan pourrait être
considéré comme un écrit.
M. Leduc (Saint-Laurent): Comme une destination.
M. Cossette: Oui, je pense qu'effectivement un plan, c'est un
écrit.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Dans la mesure où c'est très clair,
quand même.
Le Président (M. Gagnon): Ça va?
L'article 1236 tel qu'amendé... Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau suggère, à lapage 34,
qu'on prévoie dans cette disposition l'enregistrement. je suppose qu'il
en sera vraisemblablement traité ailleurs.
M. Berrouard: Effectivement, dans la loi d'application, cela va
être prévu.
M. Cossette: Pour l'enregistrement, oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1236 tel
qu'amendé est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1237?
Mme Harel: Il se lit comme suit: "1237. Le propriétaire du
fonds dominant peut, à ses frais, prendre les mesures ou faire tous les
ouvrages nécessaires pour user de la servitude et pour la conserver,
sauf stipulation contraire de l'acte constitutif de la servitude. "À la
fin de la servitude, il doit, à la demande du propriétaire du
fonds servant, remettre les lieux dans leur état antérieur."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article est conforme en son premier
alinéa aux articles 553 et 554 du Code civil du Bas-Canada et à
la proposition de l'office. Il précise le droit du propriétaire
du fonds dominant de prendre les mesures nécessaires ou de faire tous
les ouvrages nécessaires pour user de la servitude et la conserver.
Le second alinéa est nouveau et vise à régler le
sort de ces ouvrages. Comme ils ont été subis par le fonds
servant, c'est au propriétaire de ce fonds de décider s'il les
conserve ou s'il veut que les lieux soient remis dans leur état
antérieur.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'article 1237 est
adopté. Article 1238?
Mme Harel: "1238. Le propriétaire du fonds servant,
chargé par le titre de faire les ouvrages nécessaires pour
l'usage et la conservation de la servitude, peut s'affranchir de cette charge
en abandonnant au propriétaire du fonds dominant soit la totalité
du fonds servant, soit une portion du fonds suffisante pour l'exercice de la
servitude."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend l'article 555 du Code civil du
Bas-Canada, mais il le précise en donnant la possibilité au
propriétaire du fonds servant, chargé par le titre de faire les
ouvrages nécessaires pour l'usage et la conservation de la servitude, de
s'affranchir de cette charge non seulement en abandonnant au
propriétaire du fonds dominant la totalité du fonds, mais aussi
en n'abandonnant qu'une portion suffisante pour l'exercice de la servitude.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1238 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1239?
Mme Harel: "1239. Le propriétaire du fonds dominant ne
peut faire de changements qui aggravent la situation du fonds servant. "Le
propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui tende à
diminuer l'exercice de la servitude ou à le rendre moins commode.
"Toutefois, s'il a un intérêt pour le faire, il peut
déplacer, à ses frais, l'assiette de la servitude dans un autre
endroit où son exercice est aussi commode pour le propriétaire du
fonds dominant."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 557 et
558 du Code civil du Bas-Canada. Ainsi, il reprend l'obligation imposée
au propriétaire du fonds servant de ne rien faire qui tende à
diminuer l'exercice de la servitude ou à le rendre moins commode. (20
heures)
II consacre aussi le droit pour le propriétaire du fonds servant
de déplacer l'assiette de la servitude dans un autre endroit où
son exercice est aussi commode pour le propriétaire du fonds dominant,
s'il a un intérêt à le faire. En outre, il précise
l'obligation du fonds dominant de ne pas faire de changements qui aggravent la
situation du fonds servant.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau, au troisième alinéa,
suggère qu'on ajoute: "Toutefois, si l'assignation primitive devient
plus onéreuse au propriétaire du fonds servant, ou si elle
l'empêche d'y faire des améliorations
avantageuses, il peut offrir..." Donc, il suggère qu'on reprenne
la formulation du Code civil du Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.
M. Berrouard: Je pense que l'article proposé, l'article
1239, édicte quand même que le propriétaire doit
démontrer un intérêt et, deuxièmement, que le
déplacement devra se faire à ses frais. Donc, il y a quand
même un intérêt valable et je crois que la notion
d'intérêt couvre mieux la situation que la notion de
préjudice.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1239 est-il
adopté? Article 1240? Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: "Si le fonds dominant vient à être
divisé, la servitude reste due pour chaque portion, mais la condition du
fonds servant ne doit pas en être aggravée. "Ainsi, dans le cas
d'un droit de passage, tous les propriétaires des lots provenant de la
division du fonds dominant doivent l'exercer par le même endroit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel
exprimé à l'article 556 du Code civil du Bas-Canada. Il
règle le sort de la servitude dans le cas où le fonds dominant
vient à être divisé. En ce cas, la servitude reste due pour
chaque portion sans, néanmoins, que la condition du fonds servant soit
aggravée.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1240 est-il
adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1241? Il
y a un amendement.
Mme Harel: Oui, l'amendement consiste à remplacer les mots
"cette division n'affecte pas les" par les mots "cette division ne porte pas
atteinte aux".
L'article se lit comme suit: "Si le fonds servant vient à
être divisé, cette division ne porte pas atteinte aux droits du
propriétaire du fonds dominant." C'est un amendement purement
formel.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article nouveau reproduit celui de l'office. Il
est le corollaire de l'article précédent, car il précise
que, si le fonds servant vient à être divisé, la division
n'affecte pas les droits du propriétaire du fonds dominant.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1241 est adopté et l'article tel qu'amendé est
adopté. Article 1242?
Mme Harel: "Sauf en cas d'enclave, la servitude peut être
rachetée lorsque son utilité pour le fonds dominant est hors de
proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle
entraîne pour le fonds servant. "À défaut d'entente, le
tribunal, s'il accorde le droit au rachat, fixe le prix en tenant compte
notamment de l'ancienneté de la servitude et du changement de valeur que
la servitude entraîne tant au profit du fonds servant qu'au
détriment du fonds dominant."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article est de droit nouveau. Il vise à
permettre le rachat d'une servitude, sauf en cas d'enclave, lorsque son
utilité pour le fonds dominant est hors de proportion avec la gêne
ou la dépréciation qu'elle entraîne pour le fonds servant.
Il précise les éléments que le tribunal doit prendre en
considération lorsqu'il fixe le prix de rachat de la servitude.
Trois motifs justifient l'introduction dans notre droit de cette
nouvelle mesure: d'abord, la servitude étant une charge
perpétuelle, sa fixité présente un inconvénient,
car les circonstances économiques en fonction desquelles elle a
été aménagée peuvent avoir changé; ensuite,
cette fixité peut mettre en péril l'entretien même de la
servitude. C'est le cas souvent rencontré où le titre constitutif
met les travaux d'entretien de la servitude à la charge du
propriétaire du fonds servant moyennant une redevance, laquelle,
suffisante à l'origine pour payer des travaux, tend, avec la
dépréciation monétaire, à devenir insignifiante et
à mettre en péril l'exercice de la servitude. Enfin,
actuellement, l'absence d'une telle mesure oblige les personnes qui
désirent annuler l'effet d'une servitude à présenter un
projet de loi privé devant l'Assemblée nationale du
Québec.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): II y a la mention du Barreau qui
s'oppose à cet article et qui demande de le retrancher. Moi-même,
j'ai certaines réticences. Est-ce que cela ne pourrait pas prêter
à des décisions discrétionnaires de la part du tribunal?
Si on a établi une servitude, à mon sens, on peut la racheter ou
y mettre fin avec l'entente des deux parties. Ici encore le
tribunal peut décider. Quand on voit les jugements rendus, je me
demande si c'est la bonne formule.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: Je suis convaincu que c'est la bonne.
M. Leduc (Saint-Laurent): Bien sûr, on parle de "hors de
proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle
entraîne pour le fonds servant", mais qui va établir encore cet
"hors de proportion"? Le tribunal?
M. Cossette: Oui, c'est le tribunal qui va juger. On dit: "Le
tribunal, s'il accorde le droit au rachat." Le tribunal devra constater, en
premier lieu, je pense, que l'utilité pour le fonds dominant est hors de
proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle
entraîne pour le fonds servant. Un exemple patent de cela, ce serait le
suivant. Je pense que cela va peut-être aider. Je suppose que vous
êtes propriétaire de deux terrains qui sont divisés par un
beau droit de passage, mais vos deux terrains sont en même temps
entourés de rues et le droit de passage que vous devez subir est au
profit d'un immeuble qui est situé, disons, au nord de votre propre
propriété. Cela vous empêche de réunir ces deux
immeubles et de construire un bel édifice en hauteur parce que vous avez
à tolérer cela.
Cela est un bel exemple d'une servitude qui ne sert absolument pas parce
que moi, j'ai un droit de passage dans cette lisière de terrain, mais,
par contre, j'ai aussi quatre rues qui entourent ces terrains. Je pourrais fort
bien, comme tout le monde, utiliser les rues, mais le droit de passage vous
empêcherait d'utiliser complètement votre propriété.
Ce serait un cas d'application où on serait obligé de venir
devant l'Assemblée nationale pour obtenir la disparition de cette
servitude.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que l'article 1239 ne
répond pas à cette problématique?
M. Cossette: À ce moment, c'est un déplacement
à un autre endroit sur le fonds servant. Cela ne vous arrangerait
pas.
M. Leduc (Saint-Laurent): Votre cas est très bien, mais
j'ai peur qu'on élargisse cette définition de l'expression "hors
de proportion" et que, par la suite, on puisse peut-être annuler ou qu'on
puisse permettre au fonds servant de racheter la servitude.
M. Cossette: On a souvent l'exemple de servitudes qui ne servent
pas, à toutes fins utiles, mais qui sont des encombrements pour le
propriétaire du fonds qui doit les subir.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne vous dis pas que ce n'est pas
possible, mais je dois vous dire qu'en 25 ans de pratique je n'en ai pas vu
souvent.
M. Cossette: Je pourrais vous donner un beau cas, mais ce serait
trop long de vous raconter cela. Cela serait en même temps un peu
folklorique.
Mme Harel: L'Assemblée nationale a dû, il me semble,
disposer de certaines lois privées à cet effet?
M. Cossette: Oui, dans plusieurs cas.
Mme Harel: Régulièrement. À tout prendre
entre, les fins de session où on dispose de ces lois privées et
le jugement du tribunal, on peut penser que le jugement du tribunal va
équivaloir.
M. Cossette: II va être aussi bon.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il y a un droit d'appel
là-dessus?
M. Cossette: Oui. D'autant plus que c'est un rachat. C'est une
indemnisation. Il y aura indemnisation.
M. Leduc (Saint-Laurent): Encore là, qui va
déterminer l'indemnité?
M. Cossette: C'est le tribunal. M. Leduc (Saint-Laurent):
Salomon.
M. Cossette: À défaut d'entente entre les
parties.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1242 est-il
adopté? Article 1243?
Mme Harel: "Les parties peuvent, par écrit, exclure la
faculté de racheter une servitude pour une période
n'excédant pas trente ans."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau,
complète le précédent. Il permet aux parties d'exclure,
par écrit, la faculté de racheter une servitude n'excédant
pas trente ans. Cette période est d'application courante en droit
immobilier, qu'il s'agisse de prescrire ou de renouveler les
sûretés immobilières.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1243 est
adopté. Article 1244?
Mme Harel: "La servitude prend fin: 1 Par la réunion dans
une même personne de
la qualité de propriétaire des fonds servant et dominant;
2° Par la renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant;
3° Par l'arrivée du terme pour lequel elle a été
constituée; 4° Par le rachat; 5° Par le non-usage pendant trente
ans."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance dans un môme
article les articles 175, 176 et 177 proposés par l'office relatifs aux
causes qui mettent fin à la servitude, à deux exceptions
près: d'abord, il ajoute que le rachat de la servitude met fin à
celle-ci, tenant compte ainsi des nouvelles dispositions
préconisées sur le rachat des servitudes; ensuite, il maintient
le droit actuel pour le délai de prescription des servitudes, alors que
l'office préconisait un délai de dix ans.
Cet article est conforme en substance au droit actuel
énoncé aux articles 561 et 562 du Code civil du Bas-Canada. Il
apporte, toutefois, une nouveauté qui complète la
réglementation sur les servitudes en précisant que la
renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant et
l'arrivée du terme mettent fin à la servitude.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1244 est
adopté. J'appelle l'article 1245.
Mme Harel: "La prescription commence à courir, pour les
servitudes discontinues, du jour où le propriétaire du fonds
dominant cesse d'exercer la servitude et, pour les servitudes continues, du
jour où il est fait un acte contraire à leur exercice."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reproduit en substance la proposition de
l'office et l'article 563 du Code civil du Bas-Canada. Il traite du point de
départ de la prescription des servitudes discontinues et continues.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1245 est
adopté. J'appelle l'article 1246.
Mme Harel: "Le mode d'exercice de la servitude se prescrit comme
la servitude elle-même et de la même manière."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est conforme au droit actuel et à
la proposition de l'office. II précise que le mode d'exercice de la
servitude se prescrit comme la servitude et de la même
manière.
Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1246 est
adopté. J'appelle l'article 1247.
Mme Harel: "La prescription court même lorsque le fonds
dominant ou le fonds servant subit un changement de nature à rendre
impossible l'exercice de la servitude."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reproduit l'article 180 proposé
par l'office. II modifie le droit actuel qui dit que la prescription ne court
pas lorsque l'exercice de la servitude est impossible. Comme le mentionne
l'office, la règle actuelle des articles 559 et 560 du Code civil du
Bas-Canada maintient un élément d'incertitude dans les titres. Il
est plus logique d'adopter la solution proposée, étant
donné la possibilité d'une interruption prolongée d'une
durée indéfinie en raison de l'état des choses.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1247 est
adopté. J'appelle l'article 1248.
De l'emphythéose
Mme Harel: "L'emphytéose est un droit résultant
d'un contrat par lequel une personne acquiert, pendant un certain temps, toute
l'utilité d'un immeuble appartenant à autrui, à condition
de ne pas en compromettre l'existence et à charge d'y faire des
constructions, ouvrages ou plantations qui augmentent sa valeur ou qui le
mettent en valeur."
Le Président (M. Gagnon): L'article 1248 fait partie du
chapitre quatrième De l'emphytéose. Commentaire.
M. Cossette: Cet article propose une nouvelle définition
de l'emphytéose de façon à aplanir les difficultés
que pose le droit actuel dans ce domaine et à dépouiller ce
contrat de certains éléments vétustés. Ainsi, la
définition proposée ne fait plus de la redevance un
élément essentiel du contrat d'emphytéose. D'ailleurs, il
arrive souvent que la redevance prévue au contrat est minime et,
à toutes fins utiles, inexistante. Son but, qui était de
reconnaître le domaine supérieur du propriétaire, peut
être atteint par la nature même de la convention.
Ensuite, la définition proposée maintient, du droit
actuel, l'obligation imposée à l'emphytéote d'apporter des
améliorations à l'immeuble. Elle précise, cependant, la
portée de cette obligation. Actuellement, certains auteurs
considèrent que, si le contrat ne comporte pas l'obligation de faire des
constructions ou si les améliorations se rapportent à un
immeuble existant ou déjà amélioré, la
validité du contrat peut être mise en cause. Désormais, il
sera clair que l'obligation de l'emphytéote quant aux
améliorations est de faire des constructions, des ouvrages ou
plantations qui augmentent la valeur du bien ou qui mettent le bien en
valeur.
La définition proposée précise aussi la nature du
droit de l'emphytéote. Celui-ci n'acquiert pas un droit de
propriété temporaire, mais bien un démembrement du droit
de propriété qui lui donne toute l'utilité de l'immeuble
à la condition, notamment, de ne pas en compromettre l'existence. (20 h
15)
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: La lecture du commentaire supplémentaire.
M. Cossette: Oui, c'est vrai, le commentaire
supplémentaire. Sur la question de la nature du droit
d'emphytéose, deux écoles s'affrontent. L'une considère
que l'emphytéose emporte aliénation et que l'emphytéote
est un propriétaire temporaire. L'autre ne considère pas
l'emphytéote comme un véritable propriétaire et ne lui
reconnaît pas le droit de modifier son titre comme s'il était
véritablement propriétaire, rendant ainsi le droit moins
attrayant.
L'office, sur cette question, s'est prononcé en accordant
à l'emphytéote un droit de propriété temporaire
à l'article 250 de son projet. Toutefois, comme l'emphytéote ne
peut jouir d'un des éléments essentiels du droit de
propriété, celui de disposer du bien de façon absolue, il
n'apparaissait pas souhaitable de retenir la proposition de l'office.
L'emphytéose est donc clairement considérée au projet
comme un démembrement du droit de propriété.
Par contre, cette proposition n'implique pas que l'emphytéote ne
puisse modifier son titre afin de donner au propriétaire de l'immeuble
les garanties qu'il peut exiger pour s'assurer de recevoir à la fin du
contrat un immeuble amélioré et bien entretenu. Le
propriétaire doit pouvoir restreindre le droit de l'emphytéote de
disposer de l'immeuble. Ce droit est essentiel pour que l'emphytéose
soit utilisée et il est consacré un peu plus loin dans le projet,
précisément à l'article 1252.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, on présente l'article
1248 comme donnant une définition de l'emphytéose. C'est une
définition peut-être pas tout à fait complète. Ce
contrat peut être à titre gratuit aussi bien qu'à titre
onéreux. Peut-être, dans une définition, ne serait-il pas
mauvais de le dire puisqu'on change vraiment le caractère de ce contrat.
Je pose la question. Il n'y a rien sur la reprise de l'immeuble dans la
définition.
M. Cossette: Le commentaire présente l'article 1248 comme
étant une définition. C'est une partie de la
définition.
M. Pineau: Oui, c'est cela. C'est une définition
incomplète.
M. Cossette: Oui, parce que tout le problème de la
redevance vient plus loin. Je suis d'accord que c'est une définition
incomplète.
M. Pineau: II y a un autre point, l'utilisation du terme
"utilité", "l'utilité d'un immeuble". Je pense que ce sont les
possibilités d'utilisation que l'on vise. Je crois que cela serait
préférable d'utiliser...
Mme Harel: La remarque m'en avait déjà
été préalablement faite parce qu'on a déjà
corrigé dans des dispositions antérieures le mot "utilité"
par "utilisation". On le fera chaque fois qu'il se présentera.
M. Pineau: D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Alors, il y aura un amendement.
Cet amendement-là est-il adopté?
Mme Harel: Pour l'élégance de la phrase, Me Longtin
considère qu'il faut le suspendre, car il ne s'agit pas simplement de
remplacer "utilité" par "utilisation".
Mme Longtin: Cela ferait bizarre, toute l'utilisation.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1248 est donc
suspendu.
Mme Harel: Suspendu.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1249.
Mme Harel: "L'emphytéose doit avoir une durée
prévue au contrat d'au moins dix ans et d'au plus cent ans. Si elle
excède cent ans, elle est réduite à cette
durée."
Le Président (M. Gagnon): Y a-t-il un commentaire?
M. Cossette: Cet article établit la durée minimale
et maximale du contrat d'emphytéose. Il reprend en substance le droit
actuel et la proposition de l'office, sauf qu'il porte à dix et cent ans
la durée minimale et maximale du contrat d'emphytéose, laquelle
est présentement respectivement de 9 et 99 ans.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'article 1249
est-il adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1250.
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer l'article
1250 par le suivant: "Le renouvellement d'une emphytéose portant sur un
immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété
peut, quel que soit son terme, avoir lieu sans que l'emphytéote ait
besoin de faire des constructions, ouvrages ou plantations qui mettent
l'immeuble en valeur ou augmentent la valeur de celui-ci." C'est un amendement
de nature purement formelle.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des
commentaires additionnels?
M. Cossette: Oui. Cet article est nouveau. Il vise à
permettre le renouvellement du contrat d'emphytéose établi sur un
immeuble détenu en copropriété sans qu'on ait besoin d'y
faire à nouveau des constructions, ouvrages ou plantations qui mettent
l'immeuble en valeur ou augmentent celle-ci.
Cet article s'inscrit dans les mesures préconisées dans le
projet pour atténuer les inconvénients de l'emphytéose en
matière de copropriété.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire, s'il ne s'agit pas
d'une copropriété, qu'on ne pourrait pas renouveler le bail
emphytéotique sans qu'il y ait des ouvrages, constructions ou
plantations.
M. Cossette: Ce serait considéré à ce
moment-là comme un nouveau contrat. Il est de l'essence du contrat qu'il
y ait des améliorations à faire.
M. Leduc (Saint-Laurent); Si on le permet pour la
copropriété, pourquoi ne le permet-on pas également pour
d'autres sortes de constructions?
M. Berrouard: Dans le cas de la copropriété, je
pense que c'est bien particulier. On a souligné à la
sous-commission les problèmes que pouvait causer la compatibilité
de l'emphytéose et de la copropriété. Pour atténuer
les problèmes que peut causer cette situation, une des mesures qui ont
été préconisées, justement, a été le
renouvellement de l'emphytéose sans qu'on ait besoin d'apporter des
améliorations à l'immeuble.
Dans les autres cas, il n'y a aucun motif qui justifie qu'on puisse
faire un accroc aux éléments essentiels de
l'emphytéose.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je peux vous dire que cela ne me
convient pas beaucoup, mais en tout cas. Je pense que, dans d'autres cas, cela
pourrait être important. Il pourrait s'agir de bâtisses
résidentielles. En tout cas, je n'en ferai pas une bataille
rangée.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1250 est
adopté. L'amendement à l'article 1250 est-il adopté? Me
Pineau.
M. Pineau: On a l'impression qu'il s'agit d'un bail
emphytéotique conclu sur un condominium alors qu'en
réalité c'est l'inverse. Non? "Le renouvellement d'une
emphytéose portant sur un immeuble qui fait l'objet d'une
déclaration de copropriété." Donc, on a un terrain et un
bail emphytéotique et on construit un condominium dessus, alors qu'on a
l'impression qu'il s'agit d'un condominium sur lequel on flanque un bail
emphytéotique. C'est le libellé. "Le renouvellement d'une
emphytéose portant sur un immeuble qui fait l'objet d'une
déclaration de copropriété." Donc, on a un immeuble qui a
fait l'objet d'une déclaration de copropriété et on
renouvelle une emphytéose qui porte là-dessus.
M. Cossette: Votre premier réflexe, c'est que "immeuble"
semble vouloir dire "bâtisse". Est-ce que le mot "terrain" serait...
M. Pineau: On veut dire que, lorsque l'emphytéose porte
sur un immeuble qui a par la suite fait l'objet d'une déclaration de
copropriété...
Mme Harel: Pourquoi pas "sur lequel est établie une
déclaration de copropriété"?
M. Pineau: L'emphytéose porte sur un immeuble.
Qu'avez-vous dit?
Mme Harel: Me Longtin?
M. Cossette: Sur lequel est établie ou est
enregistrée...
Mme Longtin: Le renouvellement d'une emphytéose portant
sur un immeuble sur lequel est établie une copropriété
divise.
Mme Harel: Suspendu. M. Marx: Suspendu pour que ce soit...
M. Berrouard: Pour une amélioration. Mme Harel: Ce soir,
ce qu'on peut
faire de mieux, c'est peut-être adopter les articles qui ne le
sont pas parce que les rédacteurs sont quand même, après
plusieurs heures, dans un état de fatigue relatif qui ne leur permet pas
d'être aussi rapides sur la rédaction.
M. Cossette: On fait cela durant la nuit.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1250 est suspendu.
Vous retirez l'amendement, Mme la députée de Maisonneuve. On
apportera un nouvel amendement.
Mme Harel: C'est cela.
Le Président (M. Gagnon): Article 1251?
Mme Harel: "Le créancier de l'emphytéote peut faire
saisir et vendre les droits de celui-ci, sous réserve des droits du
propriétaire de l'immeuble. "Le créancier du propriétaire
peut également faire saisir et vendre les droits de celui-ci, sous
réserve des droits de l'emphytéote."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Le premier alinéa de cet article reprend la
règle du droit actuel à savoir que le créancier de
l'emphytéote peut faire saisir et vendre les droits de celui-ci. Le
deuxième alinéa, inspiré de l'article 251 de l'office,
établit la même règle pour le créancier du
propriétaire.
Cette règle est nouvelle, mais elle est compatible avec le
régime de l'emphytéose et complémentaire à la
règle énoncée au premier alinéa.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1251 est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1252.
Mme Harel: "L'emphytéote exerce à l'égard de
l'immeuble tous les droits du propriétaire, sauf les limitations
contenues dans ce chapitre ou dans le contrat d'emphytéose.
Il aurait fallu, à la deuxième ligne du premier
alinéa, remplacer le mot "ou" par le mot "et". Je vais le relire.
"L'emphytéote exerce à l'égard de l'immeuble tous les
droits du propriétaire, sauf les limitations contenues dans ce chapitre
et dans le contrat d'emphytéose. "Le contrat peut limiter les droits des
parties, entre autres pour accorder au propriétaire des droits ou des
garanties qui protègent la valeur du bien, assurent sa conservation, son
rendement ou son utilité ou qui autrement préservent les droits
du propriétaire ou de l'emphytéote ou règlent
l'exécution du contrat."
En commentaire: L'amendement proposé veut marquer le
caractère non disjonctif des éléments
mentionnés.
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en susbtance les articles 569,
569.1 et 570 du Code civil du Bas-Canada en précisant les droits de
l'emphytéote sur l'immeuble. Celui-ci exerce à l'égard de
l'immeuble les droits du propriétaire, dont les droits prévus aux
articles 1004 à 1010, sauf les restrictions qu'on retrouve dans ce
chapitre ou qu'on pouvait prévoir dans le contrat.
Ainsi, parmi ces limites, on peut considérer que le droit de
disposer du bien ne comprend pas celui de le détruire puisque la nature
de l'emphytéose exige la conservation et la mise en valeur du bien.
Cependant, le droit de disposer comprend celui d'aliéner le bien ou de
le grever d'une sûreté.
Quant au deuxième alinéa de cet article, il reprend le
nouvel article 569.1 du Code civil du Bas-Canada ajouté au Code civil en
1984 pour mettre fin à une interprétation restrictive de
l'emphytéose. Cette interprétation sanctionnée par la Cour
d'appel avait pour effet d'empêcher de stipuler au contrat certaines
clauses, par ailleurs, usuelles qui limitaient les droits de
l'emphytéote.
L'article proposé permettra donc de limiter les droits des
parties au contrat lorsque ces limitations ont pour objet de protéger la
valeur du bien, d'assurer son rendement, son utilité ou sa conservation
ou encore de régler l'exécution du contrat. Cette disposition
devrait donc enlever tout doute sur la validité des clauses de cession
des indemnités d'assurance ou d'expropriation ou sur les droits de
vérification que se réserve le propriétaire.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, le Barreau souhaite que l'on
retranche le deuxième alinéa. Il relève ce qu'il appelle
le caractère dangereux de ce contrat dont on ne saura pas
véritablement ce qu'il est.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: Je voudrais juste indiquer qu'avant l'adoption en
1984 d'une disposition semblable à l'article 1252, au deuxième
alinéa, il y avait un problème majeur. C'est à la demande
de toutes les personnes qui ont
pu faire de l'emphytéose depuis ces dernières
années que certaines dispositions ont été adoptées.
Il est certain que l'article ne vise pas les exceptions; certains auraient
souhaité qu'il dise que les clauses d'assurance sont valides ou les
clauses de paiement de taxes sont valides. L'article donne quand même des
critères qui peuvent être suffisants pour en arriver à
développer des contrats acceptables.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1252 est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1253.
Mme Harel: "L'emphytéote fait dresser à ses
frais..."
Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement.
Mme Harel: II y a un amendement qui consiste à remplacer,
à la deuxième ligne, les mots "sujets à" par les mots
"soumis à".
L'article se lit comme suit: L'emphytéote fait dresser à
ses frais, en y appelant le propriétaire, un état des immeubles
soumis à son droit, à moins que le propriétaire ne l'en
ait dispensé."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. (20 h 30)
M. Cossette: Cet article nouveau est de droit supplétif.
Il l'oblige l'emphytéote à faire dresser un état des
immeubles sujets à son droit, sauf s'il en est dispensé.
L'état des immeubles peut, notamment, servir pour établir les
améliorations à apporter à l'immeuble et il est presque
indispensable vu la longue durée possible de l'emphytéose.
Le Président (M. Gagnon): Ça va. L'amendement est
adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article
1254?
Mme Harel: L'article 1254 se lit comme suit: "La perte partielle
de l'immeuble est à la charge de l'emphytéote; il ne peut en ce
cas demander la remise ou la diminution du prix stipulé au contrat, le
cas échéant."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré de l'article 255 de
l'office, reprend en termes plus généraux l'article 575 du Code
civil du Bas-Canada. Alors que la perte totale du bien met fin à
l'emphytéose, la perte partielle n'a pas cet effet. Cette perte est
assumée par l'emphytéote qui n'a pas droit à une remise ou
à une diminution du prix stipulé, s'il en est un.
Le Président (M. Gagnon): Ça va. L'article 1254 est
adopté. Article 1255?
Mme Harel: II se lit comme suit: "1255. L'emphytéote est
tenu aux réparations, même majeures, qui se rapportent à
l'immeuble ou aux constructions, ouvrages ou plantations qu'il a faits en
exécution de son obligation."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, conforme au droit actuel et à la
proposition de l'office précise, l'obligation de l'emphytéote de
maintenir non seulement l'immeuble, mais aussi les améliorations en bon
état de réparation.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1255, non, ça va.
Le Président (M. Gagnon): Ça va.
Adopté. Article 1256?
Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la
cinquième ligne du deuxième alinéa, le mot
"additionnelles".
L'article se lit comme suit: "1256. Si l'emphytéote commet des
dégradations sur l'immeuble ou le laisse dépérir ou, de
toute autre façon, met en danger les droits du propriétaire, il
peut être déchu de son droit. "Le tribunal peut, suivant la
gravité des circonstances, résilier le contrat, avec
indemnité payable immédiatement ou par versements au
propriétaire ou sans indemnité, ou encore obliger
l'emphytéote à fournir d'autres sûretés ou lui
imposer toutes autres obligations ou conditions. "Les créanciers de
l'emphytéote peuvent intervenir à la demande pour la conservation
de leurs droits; ils peuvent offrir la réparation des
dégradations et des garanties pour l'avenir."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article, comme l'article 1222 du projet le
prévoit en matière d'usufruit, établit les sanctions
auxquelles s'expose l'emphytéote qui abuse de ses droits, soit qu'il
commette des dégradations sur l'immeuble ou le laisse
dépérir, soit qu'il mette autrement en danger les droits du
propriétaire.
Contrairement à la proposition de
l'office et au droit actuel exprimé à l'article 578 du
Code civil du Bas-Canada, l'article laisse un large pouvoir
d'appréciation au tribunal pour que celui-ci prononce une sanction
proportionnelle à la gravité de l'acte reproché.
Le Président (M. Gagnon): Ça va. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, à la
limite, cela voudrait dire que l'emphytéote pourrait ne pas maintenir
d'assurance contre l'incendie sur les immeubles faisant l'objet de
l'emphytéose.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: Sûrement que la loi ne l'autoriserait pas
à faire cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1262 dit qu'il "doit remettre
en bon état l'immeuble avec les constructions, ouvrages ou plantations
prévus au contrat, à moins qu'ils n'aient péri par cas
fortuit". Si cela a passé au feu, est-ce que c'est un cas fortuit?
M. Cossette: II est obligé d'assurer. Il aura une
indemnité d'assurance.
M. Leduc (Saint-Laurent): II est obligé même si ce
n'est pas indiqué.
M. Cossette: C'est son obligation d'assurer.
M. Leduc (Saint-Laurent): On oblige tout de même
l'usufruitier à le faire.
M. Cossette: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Si vous me le permettez, je pense que les droits
d'usufruit et d'emphytéose sont vraiment différents. Je pense que
l'obligation d'assurance en matière d'usufruit se justifie pleinement
pour différents motifs comme ceux qu'on a vus. Je ne pense pas qu'on ait
besoin de s'étendre là-dessus; mais en matière
d'emphytéose comme telle, je pense qu'on va retrouver l'obligation
d'assurance dans le contrat même. Si l'emphytéote, alors que, dans
le contrat, on prévoit qu'il y a une obligation d'assurance, ne prend
pas une police d'assurance, je pense qu'il pourra mettre en danger les droits
du propriétaire et le propriétaire pourrait intervenir; à
tout le moins, il pourrait intervenir pour faire respecter la clause qui
apparaîtrait dans le contrat.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.
M. Cossette: Est-ce que mon confrère voulait dire:
Malgré une stipulation au contrat?
M. Leduc (Saint-Laurent): Comment vous dites cela?
Malgré...
M. Cossette: Est-ce que votre question était dans le sens
que quelqu'un violait une des conditions du contrat, à savoir son
obligation d'assurer?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bien sûr que le contrat
d'emphytéose va contenir cette obligation de maintenir l'assurance. Mais
si ce n'était pas stipulé... Bien sûr, ici on parle de
droit supplétif. Dans le contrat d'usufruit, c'est la même chose.
Je pense bien qu'on va stipuler maintenant l'obligation d'assurer. Mais on en a
parlé au code. Vous allez me dire que ce n'est pas la même chose,
mais il y a tout de même un bien qui doit être rendu, qui doit
être conservé, à mon sens. Je ne comprends pas pourquoi on
le prévoit dans un cas et on ne le prévoit dans l'autre.
Évidemment, vous allez me dire: Peut-être quand on va
rendre ces immeubles après 90 ans, ils vont être foutus, mais,
tout de même, l'emphytéose, c'est cela, c'est de rendre les
constructions, ouvrages et plantations. Tout de même, il y a une
obligation de rendre des constructions.
M. Pineau: Oui, mais est-ce que, généralement, on
ne construit pas pour la durée de l'emphytéose et, lorsque vient
le moment de restituer, on restitue l'immeuble dans l'état où il
se trouve, c'est-à-dire, en général, en mauvais
état?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais...
M. Cossette: Oui, mais, par contre, il ne faut pas oublier
l'obligation d'entretien de l'emphytéote.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ah oui, cela va même loin.
M. Pineau: Oui, l'entretien.
M. Cassette: II ne faut pas oublier, non plus, que les droits de
l'emphytéote sont vraiment près de celui du propriétaire
également et qu'il a tout intérêt lui-même à
assurer le bien.
M. Berrouard: II y aurait peut-être un autre
élément, finalement, c'est qu'à tous les endroits
où on a prévu dans le code l'obligation d'assurance, on s'est
toujours interrogé sur la nécessité d'aller aussi loin
avec l'obligation d'assurance. En matière
d'emphytéose, je pense que c'est, justement, un des cas où
on n'a pas besoin de se rendre là.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
à 1256 est adopté. L'article tel qu'amendé est
adopté. Article 1257?
Mme Harel: "L'amendement consiste à remplacer les mots
"est tenu d'acquitter1' par le mot "acquitte". Alors, l'article se
lit comme suit: "L'emphytéote acquitte les charges foncières dont
l'immeuble est grevé".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
Mme Harel: C'est un amendement qui consiste à marquer le
caractère indicatif de la règle.
M. Cossette: Cet article, un peu inspiré de l'article 256
de l'office et de l'article 576 du Code civil du Bas-Canada, traite de
l'obligation de l'emphytéote d'acquitter les charges foncières
dont l'immeuble est grevé.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est
adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté. Article
1258?
Mme Harel: "Le propriétaire est tenu, à
l'égard de l'emphytéote, des mêmes obligations que le
vendeur".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel et
la proposition de l'office relativement aux obligations du propriétaire
de l'immeuble envers l'emphytéote. Il établit que ses obligations
sont les mêmes que celles du vendeur, ce qui inclut que le
propriétaire doit délivrer le bien et offrir les mêmes
garanties que le vendeur contre l'éviction et les vices
cachés.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: N'est-il pas obligé de reprendre l'immeuble, de
décharger l'emphytéote, comme le précise l'alinéa 2
de l'article 573 du Code civil du Bas-Canada?
M. Cossette: Vous faites référence à
1258?
M. Pineau: On est à 1258, n'est-ce pas? M. Cossette:
On est à l'article 1258.
M. Pineau: Pardon. Article 573 du Code civil du Bas-Canada,
alinéa 2.
M. Cossette: D'accord.
M. Berrouard: À 573, deuxième alinéa, on
dit: "II est également obligé de reprendre cet immeuble et de
décharger l'emphytéote de la rente ou redevance stipulée
au cas où ce dernier veut déguerpir, à moins qu'il n'y ait
convention contraire." Dans le projet de loi, on dit à l'article 1261:
"À la fin de l'emphytéose, le propriétaire reprend
l'immeuble, etc." La question du déguerpissement, on va la retrouver
à l'article 1263.
M. Pineau: Oui, justement, comment se fait-il que ce soit dans la
section relative à la fin de l'emphytéose, alors que c'est une
obligation, en définitive, du propriétaire?
M. Berrouard: C'est parce que si c'est le cas de
déguerpissement, la situation se situe, finalement, au niveau de la fin
de l'emphytéose.
M. Pineau: Simplement, la section III traite de la fin de
l'emphytéose. Donc, cela devrait traiter, me semble-t-il, des causes de
ce qui met fin à l'emphytéose et non pas des obligations ou des
droits du propriétaire de l'emphytéose. C'était l'objet de
ma question puisqu'il est question des droits et obligations de
l'emphytéote et du propriétaire dans la section II, aux articles
1252 et suivants.
M. Berrouard: C'est toujours une question d'appréciation,
finalement, où on mettait tel ou tel article. Considérant qu'on
se plaçait à la fin de l'emphytéose, on a jugé
préférable d'indiquer que c'était dans la section III, au
niveau de la fin de l'emphytéose.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1258 est
adopté. Article 1259? Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: L'amendement à 1259 consiste à remplacer
à la dernière ligne le mot "à" par les mots "de demander".
Le premier alinéa se lit comme suit: "Si un prix, payable globalement ou
par versements, est prévu au contrat et que l'emphytéote laisse
s'écouler trois années sans le payer, le propriétaire a
droit, après un avis d'au moins 90 jours, de demander la
résiliation du contrat".
L'amendement consiste également à ajouter à la fin
l'alinéa suivant. "Ce droit ne peut être exercé lorsqu'une
copropriété divise est établie sur l'immeuble qui fait
l'objet d'une emphytéose".
Le commentaire sur l'amendement. L'amendement proposé a d'abord
pour but d'indiquer que le propriétaire de l'immeuble n'a pas un droit
automatique à la résiliation du contrat, mais doit la demander.
L'amendement a également pour but de ne pas
permettre la résiliation du contrat lorsque l'emphytéose
est établie sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de
copropriété. Plusieurs motifs justifient cela. D'abord, le
paiement du prix devrait être considéré comme une
obligation divisible pour les copropriétaires. Conséquemment, si
seulement quelques-uns d'entre eux étaient en défaut, le
propriétaire de l'immeuble n'aurait droit qu'à une
résiliation partielle du contrat. On pourrait donc se retrouver devant
la situation où certaines fractions dans un même immeuble seraient
détenues en pleine propriété alors que d'autres ne le
seraient pas. (20 h 45)
Ensuite, à moins d'obliger le propriétaire de l'immeuble
à dénoncer à chacun des copropriétaires ledéfaut, il n'apparaît guère possible de
considérer l'obligation de payer le prix comme une charge commune
à être assumée par le syndicat ou comme une obligation
indivisible. Or, pour le propriétaire de l'immeuble, l'obligation
d'aviser tous les copropriétaires peut constituer une charge
onéreuse et inutile, surtout que, dans les contrats d'emphytéose,
la rente est souvent symbolique.
Cet amendement n'enlève pas au propriétaire ses autres
recours.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau, vous
aviez une remarque à faire.
Mme Harel: Peut-être la remarque du Barreau?
M. Pineau: Le propriétaire peut la demander. C'est cela.
Vous répondez à la question du Barreau en ajoutant "de demander"
la résiliation.
Le Président (M. Gagnon): C'était "a droit".
M. Pineau: Le propriétaire "a droit". Oui.
M. Cossette: Pour compléter, nous allons ajouter, dans
l'amendement proposé, "le" dans la troisième ligne, avant le mot
"droit", de telle sorte que cela se lira: "Le propriétaire a le
droit..."
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Dans le commentaire, au deuxième paragraphe:
"L'amendement a pour but de ne pas permettre la résiliation du contrat
lorsque l'emphytéose est établie sur un immeuble qui fait l'objet
d'une déclaration de copropriété" on retrouve la
même ambiguïté que précédemment. Voyez-vous?
Lorsqu'un immeuble qui a fait l'objet d'une déclaration de
copropriété a été construit sur... Lorsqu'un
condominium a été greffé sur un bail emphytéotique:
c'est cela que vous voulez dire.
M. Cossette: Oui.
Mme Longtin: II me semble que, contrairement à l'article
qu'on a vu précédemment, l'ambiguïté ne
m'apparaît pas, puisque c'est l'immeuble qui fait l'objet d'une
emphytéose; disons que c'est le fonds qui fait l'objet d'une
emphytéose et c'est sur ce fonds qu'une copropriété divise
est établie.
M. Pineau: Mais oui, c'est cela. Parce que l'emphytéose
est sur un immeuble.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va?
M. Pineau: C'est un commentaire, de toute façon.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement II
l'article 1259 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Est-ce que
l'article 1259 tel qu'amendé est adopté? J'appelle l'article
1260.
Mme Harel: "L'emphytéose prend fin: 1° Par
l'expiration du temps prévu au contrat; 2° Par la perte ou
l'expropriation totale de l'immeuble; 3° Par la résiliation du
contrat". Il y a un amendement à 4 pour supprimer ce qui suit: "sans
préjudice du droit des tiers".
Alors: "4° Par la réunion des qualités de
propriétaire et d'emphytéote dans une même personne".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire. Excusez-moi.
Mme Harel: C'est tout?
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez le
commentaire sur l'amendement?
Mme Harel: "5° Par le non-usage pendant 30 ans".
Le Président (M. Gagnon): Un commentaire sur
l'article?
Mme Harel: Le commentaire sur l'amendement. C'est, en fait, un
amendement purement formel, l'exception énoncée au 4°
étant reprise à l'article suivant.
M. Cossette: À l'article 1261.
Mme Harel: À l'article 1261.
Le Président (M. Gagnon): Me Cossette, le commentaire sur
l'article.
M. Cossette: Cet article énumère les causes qui
mettent fin à l'emphytéose. Il s'inspire de l'article 579 du Code
civil du Bas-Canada et de l'article 261 proposé par l'office, à
la différence qu'il inclut l'expropriation comme une cause mettant fin
à l'emphytéose et qu'il précise que le non-usage pendant
trente ans met aussi fin au contrat.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'amendement
est-il adopté? L'article tel qu'amendé est adopté.
J'appelle l'article 1261.
Mme Harel: L'amendement à l'article 1261 consiste à
ajouter, à la fin, les mots "ou de la réunion des qualités
de propriétaire et d'emphytéote dans une même personne." Et
l'article se lit comme suit: "À la fin de l'emphytéose, le
propriétaire reprend l'immeuble libre de tous droits et charges
consentis par l'emphytéote, sauf si la fin de l'emphytéose
résulte de la résiliation à l'amiable du contrat ou de la
réunion des qualités de propriétaire et
d'emphytéote dans une même personne." C'est un amendement de
concordance.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, inspiré de l'article 250 de
l'office, précise le droit du propriétaire de reprendre son
immeuble libre de tous droits et charges nés pendant
l'emphytéose, sauf si la fin de l'emphytéose résulte de la
résiliation à l'amiable du contrat. Cette exception a pour but de
protéger les droits des tiers, le tout sous réserve,
évidemment, de l'amendement déjà fait.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1261 est adopté et l'article 1261 tel qu'amendé est
adopté. J'appelle l'article 1262.
Mme Harel: II faut voir à l'article 1261 qu'il s'agissait
d'une recommandation contenue dans le mémoire du Barreau.
Article 1262. "À la fin de l'emphytéose,
l'emphytéote doit remettre en bon état l'immeuble avec les
constructions, ouvrages ou plantations prévus au contrat, à moins
qu'ils n'aient péri par cas fortuit. "Ceux qu'il a faits sans y
être tenu sont traités comme les impenses faites par un possesseur
de mauvaise foi.".
Le Président (M. Gagnon): Commentai- re.
M. Cossette: Cet article, dans un premier temps, reprend
l'obligation prévue par l'article 561 du Code civil du Bas-Canada et
l'article 262 de l'office visant à obliger l'emphytéote, à
la fin du contrat, à remettre en bon état l'immeuble avec les
améliorations qu'il s'est engagé à faire, sauf s'ils ont
péri par cas fortuit.
Dans un deuxième temps, il reprend le droit actuel exprimé
à l'article 582 du Code civil du Bas-Canada en déclarant que les
améliorations apportées par ['emphytéote sans qu'il y soit
tenu sont traitées comme les impenses faites par un possesseur de
mauvaise foi.
Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1262 est
adopté. J'appelle l'article 1263.
Mme Harel: "Sauf renonciation de l'emphytéote à son
droit, l'emphytéose peut aussi prendre fin par l'abandon, qui ne peut
avoir lieu que si l'emphytéote a satisfait pour le passé à
toutes ses obligations et laisse l'immeuble libre de toutes charges.".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article maintient le droit actuel en
précisant que l'abandon met fin à l'emphytéose à la
condition que l'emphytéote ait satisfait pour le passé à
ses obligations. À cet égard, l'office propose de supprimer
l'abandon comme cause d'extinction de l'emphytéose, mais sans s'en
expliquer. Cependant, comme l'abandon permet de mettre fin à un
démembrement de propriété sans que le propriétaire
ne subisse d'autres préjudices que de devoir reprendre son bien avant
terme, la règle du droit actuel paraît opportune.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, pourquoi "sauf renonciation de
l'emphytéote à son droit"? À quel droit?
Le Président (M. Gagnon): Me
Berrouard.
M. Berrouard: Celui de déguerpir. M. Pineau: Celui
d'abandonner?
M. Berrouard: II n'était pas clair finalement si, en droit
actuel, le droit de déguerpir était accordé à
l'emphytéote ou non. On l'a précisé dans cette version-ci
du projet, parce que dans le projet de loi 58 nous n'avions pas cette
précision. On a jugé utile de le faire ici.
M. Pineau: Cela signifie que l'emphy-téote peut renoncer
à son droit de déguerpir.
M. Berrouard: C'est cela.
M. Pineau: Et, dans ce cas, l'article 1263 ne s'appliquera
pas.
M. Berrouard: Exactement.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1263 est
adopté.
M. Berrouard: D'ailleurs, tout est sur la recommandation de la
Chambre des notaires.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Oui. Nous
suspendons nos travaux pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 20 h 54)
(Reprise à 21 h 7)
Des restrictions à la libre disposition de
certains biens
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaîtl La sous-commission des institutions reprend ses travaux. Nous
entreprenons le titre cinquième: Des restrictions à la libre
disposition de certains biens. Chapitre premier: Des stipulations
d'inaliénabilité. J'appelle l'article 1264.
Des stipulations
d'inaliénabilité
Mme Harel: "Tout acte à titre gratuit peut restreindre
l'exercice du droit de disposer d'un bien. La stipulation est faite par
écrit, à l'occasion du transfert du bien à une personne
qui devient soit propriétaire de ce bien, soit titulaire d'un
démembrement du droit de propriété sur celui-ci, ou
à l'occasion du transfert du bien à une fiducie. "La stipulation
d'inaliénabilité n'est valide que si elle est temporaire et
justifiée par un intérêt sérieux et légitime.
Néanmoins, dans le cas d'une substitution ou d'une fiducie, elle peut
valoir pour leur durée.".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article établit de nouvelles limites au
droit pour une personne de restreindre, au moyen d'une stipulation
d'inaliénabilité, l'exercice par un tiers du droit de disposer
d'un bien qu'elle lui transfère. Désormais, une telle stipulation
ne sera valide que si elle est temporaire et justifiée par un
intérêt sérieux et légitime.
L'article modifie ainsi le droit actuel énoncé aux
articles 968 et suivants du code. Actuellement, ces stipulations sont permises
sans limitation de durée et elles peuvent être faites sans aucun
motif. Il reprend, cependant, le droit actuel en permettant de telles
stipulations dans les actes à titre gratuit. Combiné avec les
autres dispositions du chapitre, notamment avec celle qui permet à
l'acquéreur d'obtenir judiciairement l'autorisation de disposer du bien,
malgré la stipulation, en justifiant d'un intérêt
supérieur, l'article proposé reflète mieux les besoins
tout en supprimant les raisons qui pouvaient laisser paraître ces
stipulations comme contraires à l'intérêt public.
Conséquemment, la proposition de l'office, exprimée aux
articles 361 et 362 du livre Des successions, de considérer sans effet
les stipulations d'inaliénabilité autres que celles qui peuvent
valoir comme substitution ou qui concernent la donation ou le legs d'un
immeuble grevé d'un droit d'usufruit ou d'usage n'est pas retenue.
L'exception préconisée n'est qu'une illustration d'un cas
où la stipulation d'inaliénabilité est justifiée
par un intérêt sérieux et légitime du disposant.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Premier alinéa de l'article 1264: "soit
titulaire d'un démembrement du droit de propriété". Je ne
pense pas qu'on soit titulaire d'un démembrement. On est titulaire d'un
droit de propriété démembré.
Mme Harel: L'amendement est prêt, M. le
Président.
M. Pineau: Dans le troisième alinéa du commentaire,
on a l'impression qu'il y a une contradiction. L'article "modifie le droit
actuel énoncé aux articles 968 et suivants du code. Actuellement,
ces stipulations sont permises sans limitation de durée et elles peuvent
être faites sans aucun motif. Il reprend, cependant, le droit actuel en
permettant de telles stipulations dans les actes à titre gratuit",
à condition que ce soit temporaire et justifié.
M. Cossette: Oui. Je pense que le fait de le dire corrige le
commentaire.
M. Pineau: C'est cela. M. Cossette: Cela va.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est donc dire qu'avec le nouvel
article 1264 il ne serait plus possible de stipuler une
inaliénabilité pour une période donnée. On indique
que ce doit être temporaire. On
pourra toujours y déroger dans le cas d'un intérêt
sérieux et légitime. Je ne vous cache pas que cela m'ennuie un
peu. Je pense qu'il y a sûrement des cas où il pourrait être
absolument justifié de maintenir la prohibition d'aliéner pour
protéger certaines personnes.
M. Cossette: Elle est permise, pour autant qu'il y ait un
intérêt sérieux et légitime.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais encore là on peut y
déroger. Il me semble que, si on a mis une période de temps - on
dit que c'est temporaire - on aurait pu s'arrêter là, sans ajouter
"un intérêt sérieux et légitime". D'abord, qu'est-ce
qu'un intérêt sérieux et légitime?
M. Cossette: On a toute la jurisprudence française pour le
déterminer. Vous avez la référence à 900.1 je
pense. C'est déjà beaucoup.
M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai vu des cas où il y avait
prohibition d'aliéner. On est venu ici à Québec pour
obtenir un projet de loi privé et c'est la plus mauvaise chose qui ait
pu arriver.
M. Cassette: Pour effacer la prohibition?
M. Leduc (Saint-Laurent): Il y avait une prohibition
d'aliéner stipulée en faveur d'un enfant qui s'est
révélé prodigue. On a permis la disposition d'un morceau
de terre. Je pense que cela s'était fait pour 100 000 $, et deux ou
trois ans après cela valait 1 000 000 $. Il a dilapidé cela dans
l'espace d'un an ou un an et demi, alors que si on avait respecté
l'obligation du testateur il aurait eu toute la protection et, au lieu d'avoir
100 000 $, il aurait eu 1 000 000 $. C'est un cas. J'en ai vu d'autres
également.
M. Cassette: C'est un cas très exceptionnel.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Pourquoi ne pourrait-on pas
stipuler "pour une période donnée" si on a des raisons? Je donne
mon bien à mon fils. Je sais que peut-être pour une période
donnée il y aurait avantage à ne pas vendre l'immeuble, à
ce qu'il ne puisse pas l'hypothéquer. Je me demande si on ne devrait pas
le permettre dans ces cas-là.
Mme Harel: Est-ce que vous ne pourriez pas le faire en
créant une fiducie ou une substitution? À ce moment-là,
cela vaudrait pour la durée de la fiducie.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
M. Cossette: Oui. Par contre, si vous stipulez 30 ans ou 20 ans,
c'est temporaire.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais on pourrait y déroger
s'il y a un intérêt sérieux et légitime, comme dans
le cas que j'ai mentionné tantôt où on a pensé que
c'était peut-être une bonne chose qu'il puisse disposer de
l'immeuble pour 100 000 $. C'était peut-être beaucoup d'argent,
mais on n'a pas pensé qu'il pouvait, d'abord, dilapider cela et
également que cela pouvait prendre de la valeur. Je dois
reconnaître que c'est le testateur qui avait raison et non pas le
législateur.
Mme Longtin: Le motif sérieux et légitime ne vient
ici jouer que pour déterminer si la stipulation est valable ou pas,
puisqu'il s'agit, évidemment, d'une restriction importante au droit de
propriété. C'est à l'article 1265, finalement, que sont
établis les critères permettant de mettre fin à cette
stipulation. Il faut que l'intérêt qui avait justifié la
stipulation ait disparu ou qu'il y ait un intérêt plus important
qui l'exige.
M. Cossette: Je pense que vous nous avez devancés d'un
article. Est-ce que je me trompe?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, d'accord, mais c'est exactement
cela. En fait, le tribunal pourra le permettre.
Mme Harel: Mais, dorénavant, ce sera le tribunal et non
plus l'Assemblée nationale.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est peut-être mieux, c'est
peut-être une amélioration. Je reviens à cette prohibition
d'aliéner. À mon sens, il devrait être possible de stipuler
la prohibition d'aliéner pour une période donnée sans
qu'on ajoute qu'on puisse y déroger. Auparavant, on pouvait stipuler la
prohibition d'aliéner sans limite de temps. Maintenant, on a mis une
limite. Je crois que c'est important. Vous dites non?
M. Cossette: On n'a pas de limite. Mme Longtin: Si c'est
temporaire.
M. Cassette: On dit: Si c'est temporaire.
M. Pineau: Si elle est temporaire.
M. Leduc (Saint-Laurent): II y a une limite, quand même.
Auparavant, il n'y avait pas ce "temporaire".
Mme Longtin: Elle ne peut pas être perpétuelle
lorsqu'on dit temporaire, mais elle peut valoir pour 30, 40 ou 50 ans,
suivant les circonstances, selon le bien qui fait l'objet de la
stipulation et selon les personnes qui en sont bénéficiaires.
M. Leduc (Saint-Laurent): Dans certains cas, on devrait respecter
les conventions des parties. Il me semble que c'est aller très loin
qu'encore là le tribunal puisse intervenir pour enlever cette convention
qui peut protéger, appelons-le le donateur ou le légataire, ou
appelez-le comme vous voulez. Peut-être qu'on ne pourra pas le
protéger de façon aussi importante. Maintenant, il ne sera plus
possible, d'aucune façon, de mettre une limite, c'est-à-dire de
prohiber l'aliénation pour une période donnée.
M. Pineau: Vous le pourrez.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire qu'on pourra
toujours y déroger. Si je stipule une prohibition d'aliéner pour
une période de quinze ans, parce que j'ai une raison majeure de le faire
- je suis un donateur et je crois que j'ai le droit de donner et que je devrais
avoir le droit de stipuler certaines conditions - à ce moment, en vertu
surtout de l'article 1265, on pourrait déroger à ma
convention.
M. Cassette: L'intérêt sérieux et
légitime demeure. Je ne le pense pas. Par contre, si vous avez dit: Je
prohibe la vente de cet immeuble parce que - c'est farfelu ce que je vais dire
- mon enfant est un prodigue, mais qu'on a la preuve qu'il ne l'est plus,
pourquoi ne pas lui permettre de le vendre en s'adressant au tribunal parce que
l'intérêt que vous aviez et qui avait justifié cette
stipulation est complètement disparu et votre enfant est devenu
complètement normal?
M. Leduc (Saint-Laurent): Prenez le cas que je vous ai
mentionné tantôt: est-ce qu'il y avait un intérêt
supérieur?
M. Cossette: Là, c'est l'Assemblée nationale qui a
permis cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, tout de même, ce sont des
cas qu'on voit assez régulièrement. Oui, je pense que, devant la
sagesse des gens, bien des fois, on permet d'y déroger. J'en suis
surtout sur le fait qu'on ne pourra plus stipuler, d'aucune façon, d'une
façon absolue.
M. Cossette: C'est-à-dire que vous allez pouvoir le faire,
sauf que le tribunal pourra venir dire que l'intérêt qui avait
justifié la stipulation n'existe plus et que, conséquem-ment, il
autorise l'aliénation.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau, vous m'aviez
demandé la parole.
M. Pineau: Je ne sais plus trop si j'ai demandé la parole,
M. le Président. Ce sont deux dispositions distinctes, les articles 1264
et 1265. À l'article 1264, alinéa 2, on indique deux conditions
de validité de la stipulation d'inaliénabilité. Il faut
qu'elle soit limitée dans le temps, il faut qu'elle soit
justifiée par un intérêt sérieux et légitime.
Cela est une première chose.
La deuxième chose est que, dans la mesure ou elle était
temporaire et justifiée, si elle n'est plus justifiée, alors, il
y a une possibilité d'intervention du tribunal. Ce sont deux
étapes distinctes.
M. Cossette: Exactement.
Mme Harel: Me Longtin, peut-être pouvez-vous apporter
l'exemple que vous me donniez?
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: En fait, je pense que c'est un cas, justement,
où, plutôt que de venir par une législation privée,
il y aurait eu intérêt à avoir l'article 1265. Si on
considère qu'un testateur indique une prohibition d'aliéner sur
un immeuble résidentiel au bénéfice d'un de ses enfants
qui est un majeur incapable, mais, à l'époque, suffisamment apte
à se débrouiller lui-même relativement à ses propres
soins et qu'au fil des ans, la solitude aidant, cette personne devient
complètement inapte pour différents motifs et que la maison est
dans un état de dégradation tel qu'elle a perdu
déjà les trois quarts de sa valeur, il est possible qu'à
ce moment-là les autres cohéritiers puissent demander justement -
il y a un intérêt plus important qui l'exige - non seulement la
conservation du bien, mais aussi la protection même de cette personne qui
est dans une situation qui était imprévisible au moment où
le testateur a stipulé.
M. Leduc (Saint-Laurent): Avec le libellé de l'article au
deuxième alinéa, il n'est même plus certain que ma
stipulation d'inaliénabilité sera valable. On pourra la mettre en
cause, on pourra dire: Écoutez, ce n'était pas justifié
par un intérêt sérieux et légitime.
Mme Longtin: Si je prohibais l'aliénation d'un bien pour
une période qui aurait pour effet de pousser une personne à ne
pas se marier ou à renoncer à l'exercice de certains droits
fondamentaux, ce ne serait certainement pas un intérêt
sérieux et légitime ou cela pourrait ne pas être
considéré comme tel. S'il s'agit de protéger, pour un
testateur, un de ses enfants et de lui assurer une vie confortable, je pense
qu'il n'y a personne qui va dénier cet intérêt.
M. Leduc (Saint-Laurent): II faut vous dire que dans la pratique
on nous demande souvent de mettre des réserves, de mettre des
restrictions. Les gens, bien des fois, veulent donner, mais veulent mettre des
restrictions, des prohibitions d'aliéner. Je ne vous cache pas que
maintenant ce ne sera plus facile. Je me demande si on ne va pas un peu loin.
En tout cas, c'est mon impression. Je comprends bien qu'on ne doit pas, autant
que possible, geler un bien, mais est-ce qu'on ne peut pas permettre à
des gens de stipuler d'une façon libérale?
Mme Harel: Libérale ou conservatrice?
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, libérale, libérale!
C'est libéral de permettre à quelqu'un de disposer de ses biens
d'une façon intelligente, d'une façon, je dirais, qui
protège celui qui les reçoit. Moi, je ne vois rien de
conservateur là-dedans, au contraire.
Mme Harel: Si vous voulez, on va poursuivre le chapitre sur
l'inaliénabilité et on va suspendre cet article-là, quitte
à y revenir par la suite.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement dont on
n'a pas fait lecture, que vous m'avez remis, on va le retirer? Non?
Mme Harel: En fait, c'est une correction.
Le Président (M. Gagnon): On peut en faire lecture tout de
suite.
Mme Harel: Oui, très bien.
Le Président (M. Gagnon): À la quatrième
ligne du premier alinéa, remplacer les mots "d'un démembrement du
droit de propriété" par les mots "d'un droit de
propriété démembré". C'est ça?
M. Cossette: Oui.
Mme Harel: C'est bien cela.
Une voix: On va le retirer pour le moment, mais on va le
garder.
Le Président (M. Gagnon): Alors, on va le retirer pour le
moment. L'article 1264 est suspendu. Article 1265?
Mme Harel: C'est au même effet. "1265. Celui dont le bien
est inaliénable peut être autorisé par le tribunal à
disposer du bien si l'intérêt qui avait justifié la
stipulation d'inaliénabilité a disparu ou s'il advient qu'un
intérêt plus important l'exige." C'est au même effet que
l'article 1264.
M. Cossette: Cet article qui s'inspire du droit français
est de droit nouveau. Il vise à permettre à l'acquéreur
d'un bien affecté par une stipulation d'inaliénabilité
d'obtenir judiciairement l'autorisation d'y obvier lorsqu'il démontre
que l'intérêt qui avait justifié la stipulation est disparu
ou qu'un intérêt supérieur l'exige.
L'article proposé permettra ainsi d'éviter la
procédure parfois longue et onéreuse de l'adoption de lois
privées qui est la solution actuelle au problème des stipulations
d'inaliénabilité désuètes ou indûment
contraignantes.
Le Président (M. Gagnon): Cela va?
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est la même chose que l'autre.
C'est sur division, si on veut l'accepter.
Le Président (M. Gagnon): Article 1265, adopté sur
division.
M. Cossette: L'article 1264 aussi?
Le Président (M. Gagnon): Et l'article 1264?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, bien sûr, l'article 1264,
oui.
M. Cossette: Bon, avec l'amendement pour l'article 1264?
Le Président (M. Gagnon): L'amendement dont j'ai fait la
lecture est-il adopté, lui? Adopté, et l'article est
adopté sur division. C'est cela? L'amendement à l'article 1264
est adopté et l'article 1264, tel qu'amendé, est adopté
sur division. Article 1266?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, aux
première et quatrième lignes, le mot "affecte" par les mots
"porte sur".
Alors, l'article se lit comme suit: "La stipulation
d'inaliénabilité qui porte sur un immeuble n'est opposable aux
tiers que si l'acte qui la contient est enregistré par
dépôt et un avis transmis au registrateur pour qu'il en fasse
mention à l'index des immeubles. Celle qui porte sur un meuble n'est
opposable aux tiers que s'ils en connaissent l'existence."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce les conditions
d'opposabilité aux tiers de la stipulation
d'inaliénabilité. Il reprend la règle de l'article 981 du
Code civil du Bas-Canada selon laquelle la stipulation qui affecte un immeuble
doit, pour être opposable aux tiers, être enregistrée. Il y
ajoute, cependant, en
prévoyant qu'un avis doit être transmis au registrateur
pour qu'il en fasse mention à l'index des immeubles. Cet ajout devrait
permettre aux tiers de s'informer plus facilement de l'existence de telle
stipulation.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1266 est adopté et l'article est adopté tel
qu'amendé. L'article 1267?
Mme Harel: L'amendement consiste à insérer,
à la fin, les mots "sous réserve notamment des dispositions
contenues au Code de procédure civile".
L'article se lit comme suit: "La stipulation
d'inaliénabilité d'un bien entraîne son
insaisissabilité à raison de toute dette contractée avant
ou pendant la période d'inaliénabilité par la personne qui
reçoit le bien, sous réserve notamment des dispositions contenues
au Code de procédure civile."
L'amendement proposé n'a d'autre objet que d'indiquer au lecteur
que le Code de procédure civile énonce certaines exceptions
à la règle édictée, particulièrement
à l'article 553, et que d'autres lois pourraient également faire
exception à cette insaisissabilité.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article énonce la règle selon
laquelle l'inaliénabilité d'un bien a pour corollaire son
insaisissabilité. Une telle règle s'avère
nécessaire, car la saisie conduit à la vente, alors que la vente
du bien est prohibée. De plus, permettre la saisie et la vente par les
créanciers d'un bien inaliénable serait donner au titulaire du
bien un moyen facile de contourner l'inaliénabilité. Il lui
suffirait de se faire prêter une somme équivalente à la
valeur du bien, d'en refuser le remboursement et de laisser saisir le bien par
le prétendu prêteur qui serait, en réalité, un
acheteur. La règle proposée n'affecte évidemment pas les
recours des créanciers du disposant qui aurait transféré
frauduleusement un bien en en stipulant l'inaliénabilité.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): L'article dit que la stipulation
d'inaliénabilité d'un bien "entraîne son
insaisissabilité à raison de toute dette contractée
avant." Est-ce que c'est correct "avant"? On dit: Si c'est "contracté
avant ou pendant la période d'inaliénabilité par la
personne qui reçoit le bien." Est-ce que c'est possible que ce soit
insaisissable, même si la dette a été contractée
avant?
Le Président (M. Gagnon): Me
Charbonneau.
M. Charbonneau (Pierre): Oui, effectivement, c'est ce que le
texte stipule: Si la dette a été contractée avant. Mais,
évidemment, cela réserve les recours des créanciers pour
les transferts qui auraient été faits frauduleusement.
M. Pineau: Cela réserve...
M. Charbonneau (Pierre): Les créanciers conservent
toujours leur recours en cas de fraude. On ne peut pas stipuler
l'insaisissabilité ou l'inaliénabilité d'un bien
frauduleusement, de façon à frauder les créanciers.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Mais cela réduit le gage des
créanciers?
M. Charbonneau (Pierre): Oui. M. Pineau: Mais oui!
M. Charbonneau (Pierre): Mais, s'ils n'en souffrent aucun
préjudice, il n'y a pas de problème.
M. Pineau: Mais ils peuvent, justement, en souffrir
préjudice. (21 h 30)
M. Leduc (Saint-Laurent): Bien oui! Écoutez, vous avez une
dette qui est contractée avant. Vous avez un créancier et,
à ce moment-là, on dit que cela pourrait affecter sa
créance.
M. Charbonneau (Pierre): Si cela affecte sa créance, c'est
parce qu'il est en état d'insolvabilité face à ses dettes.
À ce moment-là, il est question de fraude. Si les biens sont
suffisants pour satisfaire tous ses créanciers, le fait qu'un de ces
biens soit stipulé insaisissable n'affecte pas les
créanciers.
M. Pineau: II n'y aura fraude que dans la mesure où il y
aura une insolvabilité de fait constatée par le tribunal.
M. Charbonneau (Pierre): Mais si, par la stipulation
d'insaisissabilité, on écarte un bien de sorte que, finalement,
le débiteur devient insolvable et ne peut plus remplir ses obligations,
je pense que la question de fraude va jouer. Les créanciers vont
conserver leur recours.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ils conservent le même recours
que s'il n'y avait pas eu cette stipulation.
M. Charbonneau (Pierre): C'est cela.
M. Pineau: II y a une modification apportée à
l'article 553, au paragraphe 3, du Code civil du Bas-Canada. Non?
M. Charbonneau (Pierre): On fait la réserve, ici à
l'article 1267, des dispositions prévues au Code de procédure
civile. Cette réserve-là demeure, évidemment.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: II y a une chose sur le plan de la
phraséologie: entraîne l'insaisissabilité de celui-ci. Ce
n'est pas l'insaisissabilité de la stipulation.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on peut l'inclure dans
l'amendement qui est déjà proposé?
Mme Harel: Oui. On va faire la correction.
M. Charbonneau (Pierre): L'insaisissabilité.
Le Président (M. Gagnon): Alors, la correction à
l'amendement sera faite en conséquence. C'est cela? Est-ce que cet
amendement à l'article 1267 est adopté? Adopté. Et est-ce
que l'article tel qu'amendé est adopté?
Des voix: Oui. Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1268.
Mme Harel: "La clause tendant à empêcher celui dont
le bien est inaliénable de contester la validité de la
stipulation d'inaliénabilité ou de demander l'autorisation de
l'aliéner est réputée non écrite. "Il en est de
même de la clause pénale au même effet."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article vise à rendre sans effet les
clauses ayant pour but d'empêcher l'acquéreur de contester la
validité de la stipulation ou de demander l'autorisation judiciaire d'y
obvier, ainsi que celles dont l'objet vise à l'en pénaliser.
Les dispositions de cet article qui s'inspire en partie du droit
français s'avèrent nécessaires afin de ne pas rendre
illusoire le droit de l'acquéreur.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.
M. Pineau: L'article 1268, pour moi, ça va. Mais, M. le
Président, à l'article 1267, je me demande s'il y a quelque
chose. Je ne suis pas sûr que cela fonctionne normalement.
M. Cossette: Préférez-vous qu'on le suspende pour y
réfléchir davantage?
M. Pineau: Peut-être, oui.
M. Marx: D'accord, si on veut le suspendre.
M. Leduc (Saint-Laurent): À la lecture de l'article, on
comprend qu'on dérogerait à la règle
générale. Je comprends que, évidemment, vous dites
seulement s'il y avait insolvabilité. Je veux bien. Je comprends cela,
c'est la règle générale. Mais, ici, on semblerait, en
vertu de l'article 1267, déroger à cette règle
générale.
Le Président (M. Gagnon): Pour les fins du Journal des
débats, si vous me le permettez, je vous donnerai la parole tout de
suite après. Compte tenu que l'article a été adopté
tel qu'amendé, on demande la permission de rouvrir l'article pour qu'on
puisse le réétudier. Voilà.
M. Cossette: Alors, on y reviendra plus tard?
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on le suspend et on y
reviendra plus tard?
Mme Harel: On peut y revenir immédiatement.
Le Président (M. Gagnon): Oui.
Mme Harel: Parce qu'on reporte seulement le débat à
demain.
Le Président (M. Gagnon): Voilà.
Mme Harel: On ne peut pas? On peut y revenir
immédiatement.
Le Président (M. Gagnon): Je suis à votre
disposition. Je veux savoir ce qu'on fait avec l'article. On a accepté
de le réouvrir pour le rediscuter. Me Pineau.
Mme Harel: Me Longtin.
Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.
Mme Longtin: La question, c'est si on pouvait avoir un
concentré de la difficulté.
Le Président (M. Gagnon): C'est un peu ce que je cherche,
moi aussi.
M. Pineau: On veut dire que cette stipulation
d'inaliénabilité entraîne l'insai-
sissabilité du bien pour toute dette contractée avant ou
pendant la période d'inaliénabilité.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, pour autant que cela ne porte pas
préjudice aux créanciers.
M. Pineau: On me demandait tout à l'heure pourquoi cela a
entraîné l'insaisissabilité, même dans
l'hypothèse où la dette avait été contractée
avant. Il semblerait qu'on nous réponde à cela que, dans la
mesure où le débiteur a des biens suffisants, cela ne porte pas
préjudice à ses créanciers antérieurs à la
stipulation. Et, s'il est insolvable, il est considéré comme
étant de mauvaise foi. Est-ce cela? Est-ce que ce serait le recours
paulien?
M. Cossette: C'est le recours paulien qui s'applique à ce
moment-là. Il ne peut pas frauder ses créanciers de cette
façon-là.
M. Pineau: C'est ce qu'on disait. Peut-être que dans
l'amendement on pourrait dire: "entraîne l'insaisissabilité de
celui-ci pour toute dette contractée." Ce n'est pas "en raison de toute
dette", c'est "pour la dette". Non?
Mme Longtin: Oui. Cela ne cause pas de difficulté.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement va être
corrigé en conséquence. C'est cela?
Mme Longtin: Oui.
Le Président (M. Gagnon): On aura un nouvel amendement
parce que le premier a déjà été adopté.
M. Marx: L'article 1267 est adopté avec l'amendement.
Le Président (M. Gagnon): Avec l'amendement. M. le
député de Saint-Laurent, avec l'amendement tel que proposé
par Me Pineau, est-ce que cela va?
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va.
Le Président (M. Gagnon): Donc, l'article 1267 est...
Comment inscrit-on cela, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: II est ouvert.
M. Marx: Tel que revu et corrigé.
Le Président (M. Gagnon): Tel qu'amendé. Est-ce que
le nouvel amendement est adopté?
M. Marx: Oui.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1267 tel que
réamendé est adopté. C'est cela?
Je crois que j'avais demandé si l'article 1268 était
adopté. Il a été adopté. L'article 1269?
Mme Harel: "La nullité de l'aliénation faite
malgré une stipulation d'inaliénabilité et sans
autorisation du tribunal ne peut être invoquée que par celui qui a
stipulé l'inaliénabilité et ses ayants droit ou par celui
au bénéfice duquel elle a été stipulée."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article indique quelles sont les personnes qui
pourront invoquer la nullité de l'aliénation faite malgré
la stipulation et sans autorisation judiciaire. L'article précise que
seul le stipulant, c'est-à-dire celui qui a transféré le
bien affecté, et ses ayants droit, ainsi que celui au
bénéfice duquel la stipulation a été faite,
stipulant acquéreur ou tiers pourront demander la nullité de
l'aliénation.
Il s'agit donc d'une nullité relative et sujette,
conséquemment, à une ratification expresse ou tacite de ceux qui
peuvent l'invoquer.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1269 est-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1270?
De la substitution
Mme Harel: C'est la section "De la nature et de l'étendue
de la substitution."
Le Président (M. Gagnon): Voilà!
Mme Harel: "II y a substitution lorsqu'une personne reçoit
des biens par libéralité avec l'obligation de les rendre
après un certain temps à un tiers. "La substitution
s'établit par donation ou par testament. Elle doit être
constatée dans un écrit et enregistrée par
dépôt."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Le premier alinéa de cet article remplace
l'article 925 du Code civil du Bas-Canada. Il ne définit que la
substitution fidéicommissaire du droit actuel en en reprenant les
éléments essentiels, soit un acte à titre gratuit
comportant deux libéralités successives, la première au
grevé,
la seconde à l'appelé et le trait du temps.
Le deuxième alinéa énonce
généralement la règle actuelle qui établit que l'on
peut substituer par donation dans un contrat ordinaire ou dans un contrat de
mariage et par testament. Il remplace l'article 929 du Code civil du
Bas-Canada.
Il n'a pas paru nécessaire de reprendre ici les précisions
actuelles relatives à la capacité requise et à la
possibilité que la disposition qui substitue puisse être
conditionnelle, celle-ci relevant de l'application normale des autres
règles du code.
L'exigence que la substitution soit constatée dans un
écrit est nouvelle mais est conforme à la doctrine et à la
jurisprudence ainsi qu'aux recommandations de l'office. Elle découle de
ce que toute substitution doit nécessairement être
enregistrée et écarte donc ainsi tout doute sur la
possibilité de procéder par don manuel. Contrairement à la
proposition de l'office, l'article ne précise pas la sanction du
défaut de remplir l'exigence d'un écrit puisque ce défaut
emporte nécessairement absence de substitution.
Enfin, l'alinéa précise que la substitution doit,
conformément au droit actuel et aux propositions de l'office, être
enregistrée. L'exigence de l'enregistrement demeure nécessaire
car si le grevé a normalement le pouvoir d'aliéner à titre
onéreux les biens substitués et que les tiers acquéreurs
ont un droit définitif au bien transmis il en va autrement des
aliénations à titre gratuit qui ne sont ouvertes au grevé
que sur permission expresse du disposant. Or, comme ces aliénations,
lorsque non permises, sont sujettes à une demande en nullité par
les appelés, il demeure impérieux que les tiers soient avertis de
cette possibilité, ce que l'enregistrement de la substitution permet de
faire.
Le Président (M. Gagnon): Le deuxième chapitre du
commentaire. Cela va-t-il? L'article 1270 est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1271.
Mme Harel: "La personne qui a l'obligation de rendre se nomme le
grevé; celle qui a droit de recueillir postérieurement se nomme
l'appelé. "L'appelé qui recueille avec l'obligation de rendre
devient à son tour grevé par rapport à l'appelé
subséquent."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 356 du
projet de l'office et l'article 927 du Code civil du Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): L'article est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1272.
Mme Harel: "La défense de tester des biens, faite au
donataire ou légataire sans autre indication, emporte substitution en
faveur de ses héritiers ab intestat quant aux biens donnés ou
légués qui restent à son décès."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 360 du
projet de l'office et l'article 976 du Code civil du Bas-Canada. La
défense de tester constitue une substitution de residuo qui se distingue
de celle prévue à l'article 1284 puisque ici le droit de
l'appelé est moins aléatoire. En effet, il recueille
nécessairement les biens si le grevé ne les a pas
aliénés de son vivant. Dans les autres cas, le disposant a pu
permettre au grevé d'aliéner même par testament et la
substitution n'aura lieu alors que si le grevé n'a pas testé des
biens.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Lorsqu'on dit que la défense de
tester constitue une substitution de residuo est-ce qu'il s'agit d'une
défense de tester totale ou est-ce que cela pourrait également
s'appliquer dans le cas de défense de tester partielle?
Le Président (M. Gagnon): Me
Charbonneau.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je comprendrais parfaitement dans le
cas d'une défense de tester totale, mais partielle... Si je donne un
immeuble à quelqu'un et que je dis que ce quelqu'un ne pourra pas en
disposer par testament, à ce moment, est-ce une substitution de
residuo?
M. Charbonneau (Pierre): Cela pourrait être le cas aussi
lorsque c'est une prohibition de tester partielle quant aux biens dont on ne
peut disposer par testament.
M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce nouveau, cela?
M. Charbonneau (Pierre): Non, c'est le
droit actuel. Évidemment, quand on parle de substitution de
residuo on vise souvent le cas de la prohibition totale mais cela vise aussi
les prohibitions partielles.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, si je donne un immeuble et que je
dis que la personne qui reçoit ne pourra pas en disposer par testament,
cela veut dire qu'à ce moment il y aura substitution de residuo.
M. Charbonneau (Pierre): C'est cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je dois vous dire que je n'ai jamais
compris la substitution de residuo de cette façon. J'ai dû mal la
comprendre. (21 h 45)
M. Marx: On peut contester.
M. Cassette: C'est l'enseignement de la doctrine la plus
traditionnelle.
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui?
Le Président (M. Gagnon): L'article 1272 est
adopté. Me Charbonneau, quand vous reprendrez la parole, je vais vous
demander d'approcher de votre micro.
M. Charbonneau (Pierre): Ah! ceux-là s'approchent !
Le Président (M. Gagnon): L'article 1273.
Mme Harel: "1273. Aucune substitution ne peut s'étendre
à plus de deux ordres successifs de personnes, outre celui du
grevé initial; autrement, elle est sans effet pour les ordres
subséquents.
Les transmissions qui ont lieu entre cogrevés au
décè3 de l'un d'eux, lorsqu'il est stipulé que sa part
passe aux grevés survivants, ne sont pas considérées comme
étant faites à un ordre subséquent."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Le premier alinéa de cet article reprend la
règle des articles 363 du projet de l'office et 982 du Code civil du
Bas-Canada. Il ajoute, à l'instar de l'office et conformément
à la doctrine actuelle, que la substitution qui comporte plus de deux
ordres d'appelés, outre celui du grevé, n'est pas nulle mais est
simplement sans effet pour les ordres subséquents.
Le deuxième alinéa est de droit nouveau et reprend en
partie l'article 365 du projet de l'office. Il clarifie le droit actuel et
évite toute ambiguïté sur la transmission entre
cogrevés. Considérer celle-ci comme étant faite à
un nouvel ordre comporterait le risque de voir l'ouverture survenir avant que
les appelés désignés par les disposants n'aient
reçu les biens, ce qui serait contraire à la nature même de
la substitution.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1273 est-il
adopté?
M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1274? Il y a un
amendement à l'article 1274.
Mme Harel: Oui, à l'article 1274, l'amendement consiste
à remplacer, aux troisième et quatrième lignes, les mots
"au moment de l'ouverture et après qu'elle a eu lieu" par les mots
"à compter de l'ouverture".
L'article se lit comme suit: "1274. Compte tenu des adaptations
nécessaires, les règles des successions, notamment celles
relatives au droit d'opter ou aux dispositions testamentaires, s'appliquent
à la substitution à compter de l'ouverture, qu'elle soit
établie par donation ou par testament."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance la règle de
l'article 366 du projet de l'office de même que celle prévue aux
premier et deuxième alinéas de l'article 933 du Code civil du
Bas-Canada en en simplifiant la rédaction.
Cette règle ne s'applique qu'au moment de l'ouverture et
après qu'elle a eu lieu. Elle n'empêche pas l'application des
règles propres à la donation ou au testament relatives à
la capacité des parties, la formation du contrat, la forme de l'acte ni
de celles qui sont propres au contrat de mariage. Les règles des
successions seront donc applicables. Parmi celles susceptibles de l'être,
on peut mentionner, outre les règles concernant le droit d'opter et les
dispositions testamentaires, celles relatives au lieu de l'ouverture des
successions, à la présomption des comourants, à la
saisine, à la liquidation ou au partage. Cependant, comme le
suggère l'office, l'article 1304 précise que la
représentation n'a pas lieu à l'égard d'un
grevé.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1274 est adopté et l'article 1274 tel qu'amendé est
adopté. Article 1275?
Mme Harel: "1275. Avant l'ouverture, le grevé est
propriétaire des biens substitués; ces biens forment, au sein de
son patrimoine personnel, un patrimoine distinct destiné à
l'appelé."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cassette: La première partie de cet article reprend en
substance les articles 372 du projet de l'office et 944 du Code civil du
Bas-Canada, mais en spécifiant clairement que le grevé est
propriétaire plutôt que de dire qu'il est possesseur à
titre de propriétaire. La qualité de propriétaire est
généralement reconnue en doctrine même si le droit de
propriété est restreint dans le temps puisque le grevé
doit rendre éventuellement les biens reçus et dans son
étendue puisque le grevé doit agir de façon à ne
pas mettre en péril les droits de l'appelé sur les biens
substitués ou leur emploi.
La seconde partie de l'article est nouvelle. Elle aura pour effet
d'obliger les créanciers personnels du grevé à poursuivre
le paiement de leurs créances, d'abord sur le patrimoine personnel du
grevé et, ensuite seulement, sur les biens faisant l'objet de la
substitution, qui constitue un patrimoine distinct au sein de son patrimoine
général. Il s'agit aussi d'un cas où la division du
patrimoine d'une personne est permise.
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1275 est
adopté. Article 1276?
Mme Harel: "1276. Le grevé doit, de la même
manière qu'un administrateur du bien d'autrui, faire dresser à
ses frais, dans les deux mois de la donation ou de l'acceptation du legs et en
y convoquant l'appelé, un inventaire des biens."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. Excusez!
Mme Harel: Faire inventaire - On va remplacer le mot "dresser" -
faire inventaire des biens, "faire à ses frais l'inventaire des biens
dans les deux mois de la donation ou de l'acceptation du legs et en y
convoquant l'appelé."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire. Oui, on va faire un
amendement.
M. Cossette: Article 1276, le commentaire. Cet article
énonce le premier devoir du grevé, qui est d'ailleurs celui de
tous ceux qui ont l'obligation de rendre des biens, celui de faire un
inventaire des biens. Il ne retient pas les exceptions proposées aux
articles 374 du projet de l'office et 946 du Code civil du Bas-Canada. La
nécessité de procéder à l'inventaire des biens se
justifie, tant dans l'intérêt du grevé que dans celui de
l'appelé. Ainsi, le grevé y a un intérêt non
seulement parce qu'il doit connaître l'étendue des biens dont il
pourra jouir, mais aussi parce qu'il doit rendre les biens à la fin de
son droit, tout en étant responsable de leur perte ou
détérioration.
Il a aussi droit au remboursement des impenses utiles ou
d'agrément qu'il a faites, ce qui implique qu'il puisse prouver la
nature et l'état des biens reçus. L'appelé y a un
intérêt en ce qu'il a un droit éventuel aux biens
substitués et qu'il peut être en mesure d'exercer une
réclamation contre le grevé. Il peut aussi avoir
intérêt à pouvoir juger en tout temps de l'évolution
du patrimoine substitué, afin de s'assurer que le grevé ne
dilapide pas les biens ou fait les remplois adéquats.
Quant à la suppression des exceptions à l'obligation
d'inventorier les biens, elle se justifie par le souci de protéger les
parties. En effet, l'acte créant la substitution pourrait avoir
été fait bien avant qu'il ne prenne effet et l'inventaire ne plus
être adéquat ou, encore, pourrait avoir été fait
hors la présence des principaux intéressés, le
grevé et l'appelé.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
l'article 1276 est adopté et l'article, tel qu'amendé, est
adopté. Nous allons recevoir l'amendement à l'article 1277.
Mme Harel: "Dans l'exercice de ses droits et dans
l'exécution de ses obligations, le grevé doit agir avec prudence
et diligence, eu égard aux droits de l'appelé".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article qui reprend en substance l'article 381
du projet de l'office est nouveau. Il est néanmoins conforme au droit
actuel où la doctrine enseigne qu'il n'est pas permis au grevé de
poser quelque acte qui rendrait impossible la restitution des biens à
l'ouverture et qu'il ne peut rien faire qui soit préjudiciable aux
droits de l'appelé. Cette obligation d'agir avec prudence et diligence
découle de l'obligation de rendre du grevé et constitue, avec
l'obligation de faire remploi, le contrepoids aux dispositions nouvelles qui
permettent au grevé d'aliéner définitivement les biens
reçus et, conséquemment, d'anéantir le droit de
l'appelé à la chose elle-même laissée par le
disposant. Elle contraint ainsi le grevé à rechercher un juste
prix pour les aliénations qu'il consent.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1277 est
adopté. Article 1278?
Mme Harel: "L'amendement à l'article 1278 consiste
à remplacer, à la fin, les mots "s'y rapportent" par les mots "se
rapportent aux biens substitués". L'article se lit comme
suit: "Le grevé doit faire les actes nécessaires à
l'entretien et à la conservation des biens. "Il paie les charges et
dettes qui deviennent exigibles avant l'ouverture, quelle que soit leur nature;
il perçoit les créances, en donne quittance et exerce en justice
les actions qui se rapportent aux biens substitués."
L'amendement proposé vise à préciser le texte et
à indiquer que le droit d'action du grevé s'étend non
seulement aux créances, mais également aux biens
substitués.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 376 et
377 du projet de l'office et l'article 947 du Code civil du Bas-Canada,
omission faite des dispositions relatives aux remboursements, qui sont
traités à la section réservée à la
substitution après l'ouverture. Il vise à obliger le grevé
à poser certains actes nécessaires à la protection des
droits de l'appelé. Ainsi, le grevé devra faire les actes
nécessaires à l'entretien et à la conservation des biens
et payer les charges et dettes qui deviennent exigibles avant l'ouverture,
quelle que soit leur nature.
Ces obligations découlent de sa qualité de
propriétaire et de son obligation de rendre les biens. L'article
proposé maintient aussi le droit du grevé de percevoir les
créances et d'exercer en justice les droits qui s'y rapportent, mais en
supprimant l'obligation d'obtenir le consentement préalable du curateur
ou du tribunal. Cette plus grande autonomie accordée au grevé
tient compte de sa qualité de propriétaire et de ses droits
accrus.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1278 est adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté.
Article 1279?
Mme Harel: "Le grevé doit assurer les biens contre les
risques usuels, tels le vol et l'incendie. Il est néanmoins
dispensé de cette obligation, si la prime d'assurance est trop
élevée par rapport aux risques. "L'indemnité d'assurance
devient un bien substitué."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 383 du
projet de l'office. Il oblige le grevé à assurer les biens contre
les risques usuels, tels l'incendie et le vol, en ajoutant que le grevé
est dispensé d'assurer les biens si la prime d'assurance est trop
élevée par rapport aux risques. Cette dispense est
nécessaire pour couvrir les situations où la prime d'assurance
pourrait être exorbitante, par exemple lorsque le grevé est
propriétaire d'un bien situé dans un lieu où les services
d'incendie sont inexistants. Il prévoit aussi qu'en cas de perte du bien
assuré, la substitution se poursuit sur l'indemnité de
l'assurance qui est subrogée au bien initial.
Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.
M. Pineau: Le rapport du Barreau, à la page 41, l'article
1290, dit: "Il est préférable de laisser la discrétion au
tribunal du rapport sur la..." Excusez-moi. L'article 1279. "Tout comme
à l'article 1202, l'emploi des mots "par rapport aux risques" n'est pas
judicieux." Les primes d'assurance contre le vol et l'incendie sont
fixées par le marché.
Mme Longtin: Mais le marché fixe ses primes par rapport
aux risques!
M. Pineau: Oui. Bon!
Le Président (M. Gagnon): L'article 1279 est-il
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1280.
Mme Harel: "Le grevé est soumis aux règles de
l'usufruit quant à son droit de commencer ou de continuer sur un fonds
substitué une exploitation agricole, sylvicole ou
minière."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: L'article vise à assurer la protection, en
faveur de l'appelé, du capital que constitue le fonds substitué
en soumettant le grevé aux règles de l'usufruit quant à
son droit d'y commencer ou d'y continuer une exploitation agricole, sylvicole
ou minière. L'article proposé reprend en substance l'article 378
du projet de l'office de même que l'article 949a du Code civil du
Bas-Canada, qu'il remplace.
Le Président (M. Gagnon): Cet article est-il
adopté? J'appelle l'article 1281.
Mme Harel: "Le grevé peut aliéner à titre
onéreux les biens substitués ou les louer. Il peut aussi les
grever d'une sûreté si cela s'impose pour l'entretien et la
conservation du bien ou pour faire un placement au nom de la substitution. "Les
droits de l'acquéreur, du créancier
ou du locataire ne sont pas affectés par les droits de
l'appelé à l'ouverture de la substitution."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cassette: Cet article est essentiellement de droit nouveau et
s'inspire des propositions de l'office à l'article 379. Il modifie
profondément le droit actuel puisqu'il confère au grevé
tous les pouvoirs d'aliénation à titre onéreux et ce, sans
nécessiter d'autorisation préalable. De plus, les droits des
tiers qui contractent avec le grevé ne seront plus désormais
affectés par celui des appelés à l'ouverture contrairement
au droit actuel où leurs droits étaient alors, en principe,
résolus de plein droit en faveur des appelés.
L'article proposé vise à répondre à
l'objection principale qu'on adresse à la substitution et qui est celle
d'entraver la libre circulation des biens et de nuire au crédit.
Cette nouvelle autonomie conférée au grevé, qui
tient compte davantage du fait qu'il est propriétaire véritable,
demeure toutefois contrebalancée de mécanismes destinés
à assurer une protection efficace des droits des appelés. Telles
sont l'obligation du grevé de faire remploi du prix de
l'aliénation conformément aux dispositions relatives au placement
présumé sûr, l'obligation du grevé d'agir en toute
chose avec prudence et diligence eu égard aux droits de l'appelé,
l'obligation du grevé d'informer annuellement l'appelé de toute
modification à l'inventaire des biens ainsi que du remploi qu'il a fait
des biens substitués et des recours conservatoires de l'appelé
contre le grevé qui n'exécute pas ses obligations ou agit de
façon à mettre en péril les droits de l'appelé.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1281 est-il
adopté? J'appelle l'article 1282.
M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député
de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent); En vertu du nouvel article 1281, on ne
pourra plus dorénavant stipuler que le grevé doit rendre le
bien.
M. Cassette: II aura le droit de vendre, alors, vous pouvez quand
même le stipuler, mais la loi lui donne quand même le droit de
vendre.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est d'ordre public. On ne pourrait
pas stipuler "au contraire".
M. Cossette: Oui. Sauf si vous avez un intérêt
sérieux et légitime à le prohiber pour une certaine
période de temps, à la stipuler temporairement.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est une stipulation de la loi.
M. Cassette: On se réfère à ce
moment-là à la règle précédente qu'on a
vue.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1281 est
adopté. J'appelle l'article 1282. (22 heures)
Mme Harel: "Le grevé est tenu de faire remploi, au nom de
la substitution, du prix de toute aliénation de biens substitués
et des capitaux qui lui sont payés avant l'ouverture ou qu'il a
reçus du disposant, conformément aux dispositions relatives aux
placements présumés sûrs."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article, qui reprend partiellement les articles
380 et 381 du projet de l'office, constitue le contrepoids aux pouvoirs
d'aliénation étendus qui sont désormais
conférés au grevé. Il oblige le grevé à
faire remploi, au nom de la substitution, de tout capital perçu
provenant des biens substitués ou reçus du disposant et ce
conformément aux règles relatives aux placements
présumés sûrs. Aucun délai n'est imposé au
grevé pour faire les remplois, mais son obligation d'agir avec prudence
et diligence lui dicte de les faire dans un délai raisonnable sous peine
d'inexécution de ses obligations. D'ailleurs, le grevé a
intérêt à agir avec célérité car c'est
lui qui profitera des revenus engendrés par le placement du capital.
Contrairement à la position de l'Office de révision du
Code civil, l'exigence tirée du droit actuel, notamment du dernier
alinéa de l'article 931 du Code civil du Bas-Canada voulant que leur
remploi soit fait au nom de la substitution est apparu une mesure indispensable
pour avertir les tiers que le placement est un lien substitué. Enfin,
une protection efficace des intérêts de l'appelé sous-tend
le maintien du droit actuel qui exige que les remplois fassent l'objet de
placements sécuritaires et non susceptibles d'entraîner la perte
du capital qui doit revenir à l'appelé en vertu de son droit
éventuel. Le vaste éventail de ces placements ne saurait
d'ailleurs nuire indûment à l'autonomie du grevé.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1282 est
adopté. Article 1283?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer aux
deuxième et troisième lignes les mots "qu'il a subie", par les
mots "à la masse des biens". L'article se lit comme suit: "Le
grevé doit, à chaque anniversaire de la date de l'inventaire des
biens informer l'appelé de toute modification à la masse des
biens; il doit l'informer aussi du remploi qu'il a fait du prix des biens
aliénés."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article est nouveau et reprend en substance
l'article 375 du projet de l'office. Il oblige le grevé à
informer l'appelé des modifications à l'inventaire des biens ou
encore de leur remploi. Il est nécessaire, afin d'assurer une protection
efficace des droits de l'appelé et de lui permettre au besoin d'exercer
utilement ces recours conservatoires.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à
1283 est adopté. L'article 1283 est adopté tel qu'amendé.
Juste avant de continuer, je dois avoir votre permission pour continuer, car il
est passé 22 heures.
M. Marx: II n'y a pas de problème, M. le Président.
On peut continuer jusqu'à l'épuisement de ce cahier.
Le Président (M. Gagnon): Article 1284?
Mme Harel: "Le grevé peut, si l'acte constitutif de la
substitution le prévoit, disposer gratuitement des biens
substitués ou ne pas faire remploi du prix de leur aliénation. Il
ne peut en tester sans que l'acte ne le permette expressément. "La
substitution n'a alors d'effet qu'à l'égard des biens dont le
grevé n'a pas disposé."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article permet au grevé de disposer
gratuitement des biens substitués ou de ne pas faire remploi du prix de
leur aliénation a condition qu'ils soient autorisés par l'acte
constitutif. S'il n'est pas autorisé, les aliénations faites
seront annulables à la demande de l'appelé ou de son
représentant, curateur ou autre, sous réserve des règles
de la prescrition ou d'une ratification par l'appelé.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1284 est
adopté. Article 1285?
Mme Harel: "Les créanciers qui détiennent une
sûreté sur les bière substitués peuvent les faire
saisir et vendre en justice. "Les autres créanciers peuvent aussi le
faire, après discussion du patrimoine personnel du grevé.
L'appelé peut faire opposition à la saisie et demander que la
saisie et la vente soient limitées aux droits conférés au
grevé par la substitution. À défaut d'opposition, la vente
est valide; l'adjudicataire a un titre définitif et le recours de
l'appelé ne peut être exercé que contre le
grevé."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article indique que les créanciers qui
détiennent une sûreté sur les biens substitués
peuvent les faire saisir et vendre en justice alors que les autres
créanciers doivent, avant de procéder ainsi, faire discuter le
patrimoine personnel du grevé. Il modifie le droit actuel en
reconnaissant, comme pour les aliénations faites par le grevé, le
principe du caractère définitif de la vente en justice
effectuée par les créanciers. Il a toutefois paru opportun de
réserver, à l'instar de l'office, le droit de l'appelé de
s'opposer à la saisie des biens de façon qu'elle soit
limitée au seul droit du grevé dans la substitution. Cette
réserve s'explique de ce que le droit éventuel de l'appelé
ne pourra ici se reporter sur le prix de vente, qui ne peut évidemment
faire l'objet d'un remploi.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?
M. Pineau: Pas de problème.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1285 est
adopté. Article 1286?
Mme Harel: "Le grevé peut, avant l'ouverture, renoncer
à ses droits au profit de l'appelé et lui rendre par anticipation
les biens substitués. "Cette renonciation ne peut nuire au droit de ses
créanciers non plus qu'au droit de l'appelé éventuel."
Le Président (M- Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article reprend, en substance, l'article 960 du
Code civil du Bas-Canada en le complétant conformément à
la doctrine actuelle. La renonciation par le grevé à ses droits
et la remise des biens qui l'accompagnent sont évidemment sujettes aux
dispositions de l'acte constitutionnel de la substitution, qui peuvent stipuler
le contraire. Le grevé ne peut, par ailleurs, y procéder dans le
but de frustrer ses créanciers de leur recours contre les biens
substitués. Enfin, cette renonciation ainsi que la remise demeurent
sujettes à l'existence des appelés
en faveur de qui elles sont faites à l'époque de
l'ouverture et sous réserve de la survenance d'autres appelés
entre l'époque de la renonciation et de la remise et celle de
l'ouverture.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? Article 1286,
adopté. Article 1287?
Mme Harel: "Avant l'ouverture, l'appelé a un droit
éventuel aux biens substitués. Il peut en disposer ou y renoncer
et faire tous les actes conservatoires utiles à la protection de son
droit."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: L'article établit la nature du droit de
l'appelé aux biens substitués ainsi que les actes qu'il peut
poser à leur égard. Il précise ainsi qu'avant l'ouverture
l'appelé n'a qu'un droit éventuel aux biens faisant l'objet de la
substitution en ajoutant que l'appelé peut disposer de son droit ou y
renoncer et faire tous les actes conservatoires utiles à sa protection.
L'article proposé reprend en substance le deuxième alinéa
de l'article 385 et l'article 388 du projet de l'office, de même que
l'article 956 du Code civil du Bas-Canada en y ajoutant toutefois
expressément la possibilité pour l'appelé de renoncer
à son droit éventuel.
Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1287 est
adopté. L'article 1288?
Mme Harel: "L'appelé peut, si le grevé refuse ou
néglige de faire inventaire des biens dans le délai requis, y
procéder aux frais du grevé. Il convoque alors le grevé et
les autres intéressés."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article permet à l'appelé de faire
l'inventaire des biens si le grevé refuse ou néglige de le faire.
Il reprend, à cet égard, la règle des articles 374 du
projet de l'office et 946 du Code civil du Bas-Canada.
Mme Harel: II faudrait un amendement pour remplacer "dresser" par
"faire inventaire".
Le Président (M. Gagnon): Vous avez parfaitement raison.
Cet amendement est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé
est-il adopté? Adopté. Article 1289?
Mme Harel: "1289. Le grevé doit, si le tribunal l'ordonne
à la demande de l'appelé ou d'un intéressé qui
établit la nécessité d'une telle mesure, souscrire une
assurance couvrant sa responsabilité ou fournir une autre
sûreté garantissant ses obligations. Il doit de même fournir
une sûreté additionnelle si ces obligations viennent à
augmenter avant l'ouverture.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: L'article énonce de façon plus
élaborée l'obligation de fournir une sûreté ou de
donner caution que comportent les articles 385 du projet de l'office et 955 du
Code civil du Bas-Canada. Considérant le caractère
essentiellement préventif rattaché aux sûretés, il a
paru opportun de dégager cette mesure des sanctions prévues
à l'article 1290. Celles-ci présupposent en effet la preuve d'un
manquement réalisé ou plus imminent de la part du grevé
alors que celles de la nécessité de fournir une
sûreté peut être beaucoup plus circonstanciée et
mettre en cause le comportement habituel du grevé: son aptitude
générale à remplir les obligations de la nature de celles
qui lui sont imposées, l'importance des biens substitués par
rapport à son actif personnel ou toute autre circonstance jugée
suffisante par le tribunal.
L'imposition de cette obligation, qui n'est généralement
que peu onéreuse pour le grevé, permet d'assurer une protection
efficace des droits de l'appelé tout en ayant un effet temporisateur
parfois non négligeable sur la conduite du grevé.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? Je vous
rappellerai que nous avions un amendement semblable à l'article 1276. On
n'a pas reçu l'amendement à l'article 1276. Adopté tel
qu'amendé. Article 1290?
Mme Harel: Vous avez parlé de l'article 1276, voulez-vous
qu'on en dispose immédiatement?
Le Président (M. Gagnon): On l'a adopté. Il s'agit
juste de recevoir l'amendement.
Mme Harel: Très bien. Je ne vous en fais pas lecture?
Le Président (M. Gagnon): Non. Mme Harel: Non.
Le Président (M. Gagnon): Ce n'est pas nécessaire,
c'est le même amendement. Pour l'article 1288 aussi, nous avons
adopté un
amendement qu'on doit recevoir.
M. Cassette: Pour le mot "dresser".
Le Président (M. Gagnon): Voilà, cela doit arriver.
Article 1290?
Mme Harel: "1290. Si le grevé n'exécute pas ses
obligations ou agit de façon à mettre en péril les droits
de l'appelé, le tribunal peut, suivant la gravité des
circonstances, priver le grevé des revenus, l'obliger à
rétablir le capital, prononcer la déchéance de ses droits
en faveur de l'appelé ou nommer un séquestre choisi de
préférence parmi les appelés."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article prévoit les sanctions qui peuvent
être prises à l'égard du grevé qui n'exécute
pas ses obligations ou met en péril les droits de l'appelé. U
reprend en substance le premier alinéa de l'article 385 du projet de
l'office en en simplifiant la rédaction.
Il regroupe désormais dans une seule disposition les principales
sanctions prévues aux articles 942, 945, 946 et 955 du Code civil du
Bas-Canada en accordant au tribunal le pouvoir de fixer la sanction qui soit la
plus appropriée dans les circonstances propres à chaque cas.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que ça va?
L'article 1290 est-il adopté? Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau estime préférable de laisser
la discrétion au tribunal sur la nomination du séquestre.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires? Me Longtin.
Mme Longtin: Le texte dit: "choisi de préférence
parmi les appelés". C'est une discrétion dirigée.
M. Cassette: Je pense que c'est l'intérêt premier de
l'appelé d'être le séquestre.
Le Président (M. Gagnon): J'ai fait une erreur à
l'article 1289. Je l'ai fait adopter tel qu'amendé, alors qu'il n'y
avait pas d'amendement à 1289.
M. Cossette: C'était à l'article 1288.
Le Président (M. Gagnon): C'était à
l'article 1288, alors, je veux rectifier cette erreur.
M. Marx: Vous êtes pardonné, M. le
Président.
Le Président (M. Gagnon): Ça va.
Article 1291?
Mme Harel: "1291. Les droits de l'appelé qui n'est pas
conçu sont exercés par la personne désignée par le
disposant pour agir comme curateur à la substitution et qui accepte
cette charge ou, à défaut, par celle que nomme le tribunal,
à la demande du grevé ou de tout intéressé. "Le
curateur public peut être désigné pour agir".
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article vise à assurer aux appelés
non conçus une protection efficace de leurs droits en prévoyant
la possibilité par le disposant ou le tribunal de désigner un
curateur chargé d'agir pour eux.
Le Président (M. Gagnon): Ça va?
L'article 1291 est adopté. Article 1292?
Mme Harel: "1292. À moins qu'une époque
antérieure n'ait été fixée par le disposant,
l'ouverture de la substitution a lieu au décès du grevé.
"Si le grevé est une personne morale, l'ouverture de la substitution ne
peut avoir lieu plus de trente ans après la donation ou l'ouverture de
la succession ou du jour où son droit s'est ouvert".
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article précise le moment où a
lieu l'ouverture de la substitution. Le premier alinéa de l'article, qui
reprend en substance la proposition de l'article 389 du projet de l'office,
modifie le droit actuel énoncé aux articles 961 et 963 du Code
civil du Bas-Canada, car il ne permet plus au disposant de reporter
après le décès du grevé l'ouverture de la
substitution. Ces articles permettaient en effet de prolonger indûment la
substitution surtout que l'on considérait que la transmission qui
s'opérait alors du grevé à ses héritiers pour la
période précédant l'ouverture n'était pas
considérée comme étant faite à un nouvel ordre de
substitution.
Le second alinéa est nouveau et couvre le cas où le
grevé est une personne morale. Il fixe alors une période limite
de trente ans pour l'ouverture de la substitution.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1292 est
adopté? Adopté. Article 1293?
Mme Harel: "1293. Lorsqu'il est stipulé que la part d'un
grevé passe, à son décès,
aux grevés du même ordre qui lui survivent, l'ouverture de
la substitution n'a lieu qu'au décès du dernier grevé.
"Toutefois, l'ouverture ainsi différée ne peut nuire aux droits
de l'appelé qui aurait reçu au décès d'un
grevé, en l'absence d'une telle stipulation; le droit de recevoir lui
est acquis, mais il ne peut être exercé avant l'ouverture."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. (22 h 15)
M. Cassette: Cet article indique le moment de l'ouverture dela substitution lorsqu'on est en présence de plusieurs
grevés. II reprend en substance la deuxième partie de l'article
365 du projet de l'office. Le premier alinéa complète
l'énoncé de l'article 1273 en précisant que l'ouverture
n'a lieu qu'au décès du dernier grevé. Le second
alinéa propose une solution équitable envers l'appelé qui
décède après un des grevés, mais avant le
décès du dernier grevé. La part qu'il aurait recueillie de
son vivant au décès d'un grevé, n'eut été de
l'ouverture différée, lui demeurera désormais acquise et
donc transmissible à ses héritiers, mais le droit de la recevoir
ne pourra être exercé qu'au décès du dernier
grevé.
Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article 1293.
Article 1294?
Mme Harel: "L'appelé doit avoir les qualités
requises pour recevoir par donation ou par testament à l'ouverture de la
substitution. "S'il y a plusieurs appelés du même ordre, il suffit
que l'un d'eux ait les qualités requises pour recevoir à
l'ouverture de son droit pour que soit préservé le droit de tous
les autres appelés à recevoir, s'ils acceptent la substitution
par la suite."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Commentaire. Cet article énonce que
l'appelé doit avoir les qualités requises pour recevoir par
donation ou testament à l'ouverture de la substitution. Il n'est donc
pas exigé de lui qu'il ait qualité à la date de la
création de la substitution. Il reprend en substance l'article 359 du
projet de l'office, ainsi que le droit actuel exprimé à l'article
929 du Code civil du Bas-Canada.
La règle qu'il pose est d'ailleurs conforme à celle
qu'énonce l'article 838 du Code civil du Bas-Canada en matière de
succession et que reprend l'article 664 du nouveau livre des successions.
L'article prévoit aussi, s'inspirant de l'article 616 du projet de
l'office relatif au bénéficiaire d'une fiducie que si un seul des
appelés d'un même ordre constitué, par exemple, des enfants
à naître d'un tiers, a les qualités requises pour recevoir
à l'ouverture, sa présence assure l'ouverture du droit aux biens
substitués pour les autres enfants à naître, s'ils en
acceptent, par la suite, le bénéfice.
En vertu de cette règle, celui qui a la qualité requise
sera donc tenu, sur la part qu'il recueille à l'ouverture, de rendre aux
autres enfants à naître, au fur et à mesure de leur
naissance. De droit nouveau, la règle proposée constitue un
prolongement de la règle énoncée notamment à
l'article 790 du Code civil du Bas-Canada voulant que dans les donations aux
enfants nés et à naître, l'acceptation par ceux qui sont
nés ou pour eux par une personne capable d'accepter vaut pour ceux qui
ne sont pas nés, s'ils s'en prévalent.
Le Président (M. Gagnon): Cela va, l'article 1294? Me
Pineau.
M. Pineau: La Chambre des notaires, page 3334, prétend
qu'il y a un défaut de concordance avec l'article 664. Je ne me souviens
plus si l'article 664 a été amendé.
M. Cossette: On a modifié l'article 664.
M. Pineau: L'article 664 a été amendé, me
semble-t-il, parce qu'il y avait un problème aussi avec l'article
1294.
M. Marx: L'article 664 a été adopté sur
division.
M. Cassette: Oui.
Mme Longtin: En fait, la Chambre des notaires nous dit et
considère comme un problème ce qui ne me semble être qu'une
précision applicable à certains cas particuliers dont la
substitution. Alors, c'est une application dans un cas particulier; c'est un
développement, finalement, de 664. C'est qu'à l'article 664, on
dit que pour "succéder, en cas de substitution... les personnes qui ont
les qualités requises lorsque la disposition produit effet à leur
égard". Ici, finalement, on ajoute que cet effet peut résulter de
la seule existence d'un appelé du même ordre.
M. Pineau: C'est cela, en d'autres termes, l'article 1294
précise l'article 664.
Mme Longtin: C'est cela.
Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article
1294?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1295?
Mme Harel: "L'appelé, s'il accepte la substitution,
reçoit les biens directement du disposant. Il est, par l'ouverture,
saisi de la propriété des biens."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce que l'appelé qui
accepte la substitution reçoit les biens directement du disposant et est
saisi, dès l'ouverture, de la propriété des biens. Il
reprend en substance les articles 393 de l'Office de révision du Code
civil et 962 du Code civil du Bas-Canada."
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau fait observer qu'on est saisi du droit de
propriété et non point de la propriété. Maintenant,
l'article 962, alinéa 2, du Code civil du Bas-Canada, disait exactement
la même chose. Le législateur parle par ellipse.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1295 est-il
adopté? Adopté. Article 1296?
Mme Harel: "Le grevé doit, à l'ouverture, rendre
compte à l'appelé et lui remettre les biens substitués.
"Si le bien substitué ne se trouve plus en nature, il rend ce qui a
été acquis à remploi ou, à défaut, le
montant équivalent à la valeur du bien au temps de
l'aliénation."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article établit l'obligation du
grevé de rendre compte et de remettre soit le bien substitué,
soit le remploi de ce bien ou, à défaut, la valeur du bien au
moment de l'aliénation. Il reprend en substance les articles 965 du Code
civil du Bas-Canada et 390 du projet de l'office.
Le Président (M. Gagnon): Adopté? Article 1296.
Adopté. Article 1297?
Mme Harel: "Le grevé rend les biens substitués dans
l'état où ils se trouvent lors de l'ouverture. "Il répond
de leur perte ou de leur détérioration survenue par sa faute ou
ne résultant pas de l'usage normal."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article complète le
précédent quant à la portée de l'obligation du
grevé de rendre compte et de remettre les biens. Il établit que
le grevé rend les biens dans l'état où ils se trouvent
lors de l'ouverture et qu'il ne répond pas de la perte ou de la
détérioration du bien qui résulte de son usage normal. Cet
article rejoint dans une formulation différente la proposition de
l'Office de révision du Code civil.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1297 est-il
adopté? Adopté. Article 1298?
Mme Harel: Lorsque la substitution ne porte que sur le
résidu des biens donnés ou légués, le grevé
n'aura que les biens qui restent ainsi que le solde dû de ceux qui ont
été aliénés.
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article établit que lorsque la
substitution ne porte que sur le résidu des biens, le grevé ne
rend que ce qui reste des biens substitués ou le solde qui demeure
dû pour le prix des biens aliénés. Cet article
complète donc les articles 1272 et 1284 du projet. Il est en accord avec
le droit actuel exprimé à l'article 952 du Code civil du
Bas-Canada. La permission de disposer gratuitement des biens implique
corrélativement le retrait chez l'appelé du droit de
réclamer ceux dont le grevé a pu ainsi disposer. La permission
d'aliéner les biens sans devoir en faire remploi emporte de même
le retrait chez l'appelé du droit de réclamer ce que le
grevé a pu acquérir avec le produit de l'aliénation.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1298 est-il
adopté? Adopté. Article 1299?
Mme Harel: L'amendement consiste à insérer,
à la première ligne du premier alinéa, avant le mot
"droit" le mot "le" et, à la première ligne du deuxième
alinéa, avant le mot "droit" le mot "le".
L'article se lit comme suit: "Le grevé a le droit d'être
remboursé, avec les intérêts courus depuis l'ouverture, des
dettes en capital qu'il a payées sans en avoir été
chargé et des dépenses généralement
débitées au capital qu'il a faites en raison de la substitution.
"Il a aussi le droit d'être remboursé, en proportion de la
durée de son droit, des dépenses généralement
débitées au revenu et dont l'objet excède cette
durée."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article vise a accorder au grevé le droit
d'être remboursé avec intérêts depuis l'ouverture des
dettes en capital qu'il a payées sans en avoir été
chargé par le disposant ainsi que les dépenses
généralement débitées au capital qu'il a faites. Il
permet aussi au grevé d'être exceptionnellement remboursé
en proportion
de la durée de son droit des dépenses
généralement imputées au revenu qu'il a fait lorsque,
échues de son temps, elles excédaient toutefois cette
durée. Refuser, par exemple, au grevé le remboursement d'une
partie du paiement d'une taxe spéciale imposée de son temps pour
des ouvrages dont la durée excède celle du droit du grevé
sur les biens eut été favoriser indûment l'appelé
qui aurait profité des services payés sans avoir effectué
aucun déboursé à leur égard.
L'article s'inspire des articles 947 du Code civil du Bas-Canada et 376,
396 et 397 de l'Office de révision du Code civil.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1299 est-il adopté? Adopté. L'article tel qu'amendé est-il
adopté? Adopté. Article 1300?
Mme Harel: L'amendement consiste à insérer,
à la première ligne, avant le mot "droit" le mot "le".
L'article se lit comme suit. "Le grevé a le droit d'être
remboursé des impenses utiles qu'il a faites, suivant les règles
applicables au possesseur de bonne foi."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article prévoit que le grevé a
droit d'être remboursé comme un possesseur de bonne foi des
impenses utiles qu'il a faites. En proposant d'assimiler le grevé au
possesseur de bonne foi quant aux impenses utiles, le projet modifie, a
l'instar de l'office, le régime actuel des remboursements dus au
grevé pour les améliorations qu'il a faites aux biens
substitués. Ce régime prévu par les articles 581 et 582 du
code actuel en matière d'emphytéose et auquel renvoie l'article
968 du Code civil du Bas-Canada est peu favorable au grevé et le
dissuade conséquemment d'améliorer les biens substitués au
détriment des appelés. La solution retenue devrait bonifier la
position du grevé par rapport au droit actuel.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1300 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté.
Article 1301?
Mme Harel: "1301. L'ouverture de la substitution fait revivre les
créances et les dettes qui existaient entre le grevé et le
disposant; elle met fin à la confusion dans la personne du grevé
des qualités de créancier et de débiteur, sauf pour les
intérêts courus jusqu'à l'ouverture."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce certains effets de
l'ouverture de la substitution en précisant qu'elle fait revivre les
créances et les dettes qui existaient entre le grevé et le
disposant et qu'elle met un terme à la confusion dans la personne du
grevé des qualités de créancier et de débiteur sauf
à la laisser subsister en regard des intérêts courus
jusqu'à l'ouverture.
L'article proposé reprend en substance le droit actuel et la
proposition de l'office.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1301 est-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Article 1302?
Mme Harel: "1302. Le grevé peut retenir les biens
substitués jusqu'au paiement de ce qui lui est dû."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article confère au grevé un droit
de rétention sur les biens substitués, droit déjà
prévu à l'article 966 du Code civil du Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1302 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1303?
Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la
deuxième ligne du premier alinéa, les mots "et d'exercer" par les
mots "et ils exercent".
L'article se lit comme suit: "1303. Les héritiers du grevé
sont tenus d'exécuter les obligations que les dispositions de la
présente section imposent au grevé et ils exercent les droits
qu'elles lui confèrent. "Ils sont tenus de continuer ce qui est la suite
nécessaire des actes du grevé ou ce qui ne peut être
différé sans risque de perte."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cossette: Cet article vise à déterminer le sort
des droits et obligations du grevé à l'ouverture lorsque celle-ci
résulte de son décès. Il énonce ainsi que les
droits conférés au grevé peuvent être exercés
par ses héritiers, lesquels sont, par ailleurs, non seulement tenus de
ses obligations, mais aussi de continuer ce qui est la suite nécessaire
des actes du grevé ou ce qui ne peut être différé
sans risque de
perte. L'article proposé reprend, en les reformulant, les
prescriptions de l'article 392 du projet de l'office et s'inspire des
dispositions actuelles de l'article 1709 du
Code civil du Bas-Canada en matière de mandat.
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article
1303 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté.
M. Marx: Oui.
Le Président (M. Gagnon): Article 1304?
Mme Harel: "1304. La caducité d'une substitution
testamentaire à l'égard d'un grevé se produit sans qu'il y
ait lieu à représentation; elle profite à ses
cogrevés ou, à défaut, à l'appelé. "La
caducité à l'égard d'un appelé profite à ses
coappelés, s'il en est; sinon, elle profite au grevé".
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cassette: Cet article prévoit les effets de la
caducité d'une substitution. D'une part, il énonce que la
caducité d'une substitution testamentaire à l'égard d'un
grevé a lieu sans représentation et profite à ses
cogrevés ou, à défaut, à l'appelé. D'autre
part, il édicte que la caducité du droit de l'appelé
à une substitution établie par testament ou par donation profite
à ses coappelés ou, à défaut, au grevé.
L'absence du jeu de la représentation à l'égard du
grevé constitue une exception au principe nouveau proposé en
matière de disposition testamentaire, à savoir que la
représentation a lieu dans les successions testamentaires de la
même manière que dans les successions ab intestat, principe qui
inverse la règle de l'article 937 du Code civil du Bas-Canada. Cette
exception quant au grevé vise à empêcher que l'ouverture
puisse être ainsi considérablement retardée.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1304 est
adopté. Article 1305?
Mme Harel: "1305. Le donateur peut révoquer la
substitution quant à l'appelé, jusqu'à l'ouverture, tant
qu'il n'y a pas eu acceptation par l'appelé ou pour lui. Cependant,
à l'égard du donateur, l'appelé est réputé
avoir accepté lorsqu'il est l'enfant du grevé ou lorsque l'un des
coappelés a accepté la substitution."
Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.
M. Cassette: Cet article vise à circonscrire le droit du
donateur de révoquer la substitution quant à l'appelé. Il
établit que le donateur peut le faire jusqu'à l'ouverture de la
substitution tant qu'il n'y a pas eu acceptation par l'appelé ou pour
lui. L'article précise toutefois qu'à l'égard du donateur
l'appelé est réputé avoir accepté lorsqu'il est
l'enfant du grevé ou lorsque l'un des coappelés a accepté
la substitution. L'article proposé reprend en substance le droit actuel
énoncé à l'article 930 du Code civil du Bas-Canada ainsi
que les propositions de l'office en ajoutant que l'appelé est
réputé avoir accepté lorsque l'un de ses coappelés
a accepté le bénéfice conféré par la
substitution.
Le Président (M. Gagnon): L'article 1305 est-il
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1306.
Mme Harel: "La révocation de la substitution quant au
grevé profite au cogrevé s'il en est, sinon à
l'appelé. La révocation quant à l'appelé profite au
coappelé s'il en est, sinon au grevé."
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce les effets de la
révocation de la substitution en précisant qu'à
l'égard du grevé celle-ci profite au grevé ou, à
défaut, à l'appelé et qu'à l'égard d'un
appelé la révocation profite au coappelé ou, à
défaut, au grevé.
Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.
M. Pineau: Le Barreau, M. le Président, à la page
43, demande que l'on supprime la première phrase car, si la substitution
est faite par donation, cette donation est irrévocable et, si elle est
faite par testament, nous dit-on, on applique les règles de
révocation des legs. Cependant, je me demande si, dans le cas d'une
donation, il peut y avoir révocation. Par exemple, l'article 823 du Code
civil du Bas-Canada.
Le Président (M. Gagnon): Me
Charbonneau?
M. Charbonneau (Pierre): Non, cela va. Le Président (M.
Gagnon): Cela va? M. Charbonneau (Pierre): Oui, cela va. M. Marx:
Adopté.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on a adopté
l'article 1306?
M. Marx: Non, on l'adopte.
Le Président (M. Gagnon): On l'adopte. L'article 1306 est
adopté. J'appelle l'article 1307.
Mme Harel: "Le disposant peut se réserver la
faculté de déterminer la part des appelés ou
conférer cette faculté au grevé. "L'exercice de cette
faculté par le donateur ne constitue pas une révocation de la
substitution, même si cela a pour effet d'exclure complètement un
appelé du bénéfice de la substitution.".
Le Président (M. Gagnon): Commentaire.
M. Cossette: Cet article énonce, conformément
à la règle prévue à l'article 935 du Code civil du
Bas-Canada, le droit du disposant de se réserver la faculté de
répartir, parmi les appelés, les biens de la substitution, mais
étend cette règle pour lui permettre de conférer cette
faculté au grevé. Il précise, dans le sens d'une
interprétation actuellement reconnue de la faculté de
répartition, que l'exercice de cette faculté par le donateur peut
même aller jusqu'à lui permettre d'exclure un appelé.
Le Président (M. Gagnon): Adopté?
L'article 1307 est adopté. Est-ce que nous suspendons...
L'Opposition est-elle prête à procéder? Non?
Une voix: On pourrait reprendre les amendements.
Le Président (M. Gagnon): Nous ajournons nos travaux
à demain, 9 h 30, ici, au salon rouge.
(Fin de la séance à 22 h 33)