L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Sous-commission des institutions

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Sous-commission des institutions

Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mardi 2 juillet 1985 - Vol. 28 N° 18

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 20 - Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président {M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! La sous-commission des institutions se réunit avec le mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Oui. M. Johnson (Anjou) est remplacé par Mme Harel (Maisonneuve).

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Lors de la suspension de nos travaux, vendredi, nous en étions à l'article 1145. L'article 1144 avait été suspendu. Mme la députée de Maisonneuve. Est-ce qu'on revient immédiatement sur des articles suspendus ou si on continue?

Mme Harel: On va poursuivre, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): On va poursuivre.

Mme Harel: Oui, de façon qu'on puisse revenir sur l'ensemble des articles suspendus. Il y a encore deux ou trois rédactions à compléter.

De l'assemblée des copropriétaires (suite)

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Article 1145.

M. Cossette (André): On sautait à l'article...

Le Président (M. Gagnon): 1145.

M. Cossette: ...1147, à ce moment-là?

Le Président (M. Gagnon): 1147? Oui?

Mme Harel: On avait fait l'étude des articles 1145, 1146, concurremment...

Le Président (M. Gagnon): Oui. Il y avait les articles 1145, 1146 et 1147 qu'on était prêt à adopter, je crois. L'étude en avait été faite.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Le Président (M. Gagnon): Non?

M. Leduc (Saint-Laurent): On en était àl'article 1145, si je me rappelle bien.

Mme Harel: Oui.. On avait fait la lecture des articles 1146 et 1147 et je crois qu'on a fait la lecture du commentaire.

Le Président (M. Gagnon): Voilà, oui. Alors...

M. Cossette: Je pense que Me Pineau avait donné un exemple aussi?

M. Leduc (Saint-Laurent): J'avais posé une question à Me Berrouard, au sujet de l'article 1145, deuxième paragraphe. Dans le cas d'une copropriété avec deux fractions, je voulais savoir si la personne qui possédait une des deux fractions et qui n'habitait pas la copropriété ne détenait que 10 %...

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard (Yves): C'est bien cela, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que vous pouvez avoir le cas de deux fractions, l'une a un pourcentage de voix de 60 % et l'autre, 40 %. Si l'une des deux unités est occupée par le fils d'un copropriétaire, cela veut dire que l'autre va avoir 40 % et va détenir la majorité. Cela me semble très antidémocratique. Je trouve cette règle inacceptable. Je regarde ce qui a été proposé par le Barreau, la Chambre des notaires et l'Office de révision du Code civil et en aucun cas on n'a suggéré la formule de l'article 1145, pas plus, d'ailleurs, que la formule de l'article 1146. Je préférerais de beaucoup la règle établie par la loi française. Si nous prenons le cas d'une copropriété assez importante où vous auriez peut-être, disons, 100 fractions, que vous auriez un copropriétaire qui aurait 10 % ou Il % et l'autre, 89 %, c'est celui qui a Il % qui mène le tout. Je dois vous dire que c'est certainement antidémocratique d'autant plus que, lorsqu'il s'agit de contribuer aux dépenses, c'est la règle de la proportion. Je pense qu'on va très loin. Je le répète, le Barreau n'était pas d'accord, la

Chambre des notaires n'était pas d'accord et l'Office de révision du Code civil n'a pas proposé ces règles. Je suis difficilement capable d'accepter ces règles qui me semblent exorbitantes.

Si on regarde l'article 1146, prenons le cas, Me Berrouard, d'un bonhomme qui a construit un duplex; il y a deux fractions. Il a construit et il habite. Qu'est-ce qui se produit?

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment, au bout de quatre ans, il aura 25 %. C'est absolument inacceptable. Pourquoi en aurait-il moins que l'autre parce qu'il a bâti et qu'il a cédé une des deux fractions à quelqu'un d'autre? C'est un occupant, c'est un résident, ce n'est pas un promoteur du tout, mais avec votre définition vous arrivez à cela et vous allez arriver à d'autres cas qui...

Mme Harel: Reprendriez-vous votre exemple, M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous êtes propriétaire d'une bâtisse que vous avez construite vous-même, dont vous êtes promoteur. Vous possédez le tout. Disons, pour simplifier, que vous avez deux fractions. Vous en occupez une comme tout propriétaire et vous vendez l'autre à votre fils ou à n'importe qui, quelqu'un, un copropriétaire et, au bout de quatre ans, ce pauvre homme va détenir seulement 25 %.

M. Berrouard: Je pense qu'il ne faut pas oublier une chose...

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien oui, c'est ce que cela dit.

M. Berrouard: ...c'est que le promoteur qui a construit un duplex en copropriété, c'est d'abord et avant tout dans l'intention de vendre le duplex. Je ne crois pas qu'il ait l'idée première de demeurer dans cette copropriété. Ensuite, le promoteur c'est celui qui contrôle l'assemblée des copropriétaires, c'est celui qui peut dicter ses volontés, au départ. Alors, dans le cas d'un duplex, il est bien sûr, ou on peut le supposer à tout le moins, que ce promoteur va s'accorder un nombre de voix plus important pour sa fraction et à ce moment-là imposer à l'autre copropriétaire sa volonté pour la durée de la copropriété. (10 h 15)

M. Leduc (Saint-Laurent): Je n'ai pas le droit de bâtir pour moi et de vendre? Mais, madame, vous allez écouter. Quand vous parlez, je vous laisse parler. Laissez-moi parler, madame. Je soulève des questions qui...

Mme Harel: Vous dites que vous ne comprenez pas.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...sont très pertinentes.

Mme Harel: Mais alors?

Le Président (M. Gagnon): Un instant!

Mme Harel: Est-ce que Me Berrouard a terminé?

Le Président (M. Gagnon): Je reviendrai à vous, Mme la députée de Maisonneuve, après. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je soulève la question de quelqu'un qui bâtit deux fractions. Vous dites: Ce sera pour revendre. Mais, je m'excuse. Pourquoi dites-vous cela? J'ai bien le droit de bâtir et de résider dans une des deux fractions et de vendre l'autre. À ce moment-là, l'article 1146 va s'appliquer. Je veux savoir si cela s'applique.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pas de Saint-Laurent.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve, je m'excuse.

Mme Harel: Merci, M. le député de Champlain.

Une voix: II vous change de comté.

Mme Harel: C'est peut-être possible autour d'une table, mais cela ne l'est pas dans la réalité.

M. le député de Saint-Laurent, on a en tête avec votre exemple une copropriété de deux logements: un occupé par le propriétaire-bâtisseur qui, pour les fins de l'article 1147, serait le promoteur, mais, si on se réfère à l'article 1145, il va nécessairement détenir la majorité au sein de cette copropriété de deux unités de logement: ses voix plus 10% de celles des autres. C'est-à-dire que, puisqu'ils sont deux, chaque copropriétaire ne peut à l'assemblée disposer de plus de 10% de l'ensembe des voix des copropriétaires, en plus des voix rattachées à la fraction qui lui sert de résidence. En admettant qu'il détient, à titre de fraction qui lui sert de résidence, 50%, à ce moment-là il ajoute 10%.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non. Il vend l'autre.

Mme Harel: II vend nécessairement l'autre à ce moment-là avec une fraction qui sera moindre.

M. Pineau (Jean): C'est 60 %-40 %. Mme Harel: C'est 60 %-40 %. M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

M. Pineau: Sur un total de 100 %, cela signifie qu'il est promoteur.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

M. Pineau: Et c'est réduit à 25 % à la troisième année. Au lieu d'avoir 60 voix, il en aura 25, tandis que l'autre en aura 40.

Mme Harel: Comme promoteur, il n'est quand même pas résident.

M. Pineau: Bien oui.

Mme Harel: C'est-à-dire qu'il faut distinguer le promoteur du résident.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais, madame, est-ce que je suis un promoteur si je bâtis pour me loger? Je construis un duplex - je l'ai fait, madame, et n'importe qui peut le faire - pour me loger et je vends la deuxième fraction, l'autre fraction. Je ne suis pas un promoteur, je ne suis pas le vrai spéculateur, le type qui va faire de l'argent, c'est pour me loger.

Avec l'article 1147, je suis obligé d'accepter la règle de l'article 1146. Je pense qu'il faut corriger; ce n'est pas acceptable.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Oui. À l'article 1145, si je comprends bien, si le promoteur, le bâtisseur, construit un duplex et qu'il vend une maison et garde l'autre, s'il la garde comme copropriétaire pour habiter là, il va avoir 50 % comme l'autre, mais, s'il la garde comme promoteur pour revendre la maison, il ne peut pas être promoteur et copropriétaire en même temps. Mais, s'il devient copropriétaire d'un duplex, il aura 50 % comme l'autre personne. Je ne vois pas de problème.

M. Leduc (Saint-Laurent): Lisez l'article 1147.

M. Marx: À l'article 1147, le promoteur d'une copropriété ne peut disposer...

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, non, l'article 1147.

M. Pineau: Celui qui au moment de l'enregistrement est propriétaire d'au moins la moitié est considéré comme promoteur. Par exemple, trois propriétaires: l'un a 60 %, le second a 20 % et le troisième, 20 %. Au bout de la troisième année, le promoteur n'aura plus 60 voix, il en aura 25. Mais faudra-t-il ramener les deux autres à 10 chacun?

M. Marx: J'aimerais qu'on m'explique cela. Je n'ai pas terminé ma question.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'aimerais qu'on m'explique. Supposons que le promoteur construit un duplex, qu'il vend la moitié à quelqu'un -donc une maison - et qu'il garde l'autre partie pour lui-même comme copropriétaire, pas comme promoteur. Ne peut-il pas...

M. Berrouard: Étant donné que les deux copropriétaires disposeraient chacun de la moitié de l'ensemble des fractions, je ne crois pas que l'article 1147 pourrait s'appliquer. Il faudrait qu'au niveau des fractions il y ait une différence au départ. L'article dit: "Est considéré comme promoteur celui qui, au moment de l'enregistrement de la déclaration de copropriété, est propriétaire d'au moins la moitié de l'ensemble des fractions ou ses successeurs...". Si les deux sont propriétaires de la moitié de l'ensemble des fractions, à ce moment, les voix sont réduites pour les deux. Alors, il n'y a pas de problème.

M. Pineau: J'aurais tendance à croire, en effet, que, s'il y a au départ 50-50, on devra réduire les deux, selon 1147, puisqu'ils pourront être considérés comme promoteurs tous les deux. Il faudra réduire à 60 pour la première année, 40 pour la deuxième et 25 pour la troisième. Donc ils seront toujours à égalité. Je pense que ce n'est pas à ce niveau qu'il pourrait y avoir un problème. C'est dès qu'il y en a un qui a plus de 50 %, où qu'il y en a un qui a 52 % et l'autre 48 %. On peut très bien imaginer cela dans un duplex où il y a un appartement qui est un peu plus grand que l'autre. À ce moment, qu'est-ce qui se passe? Pour celui qui détient 52 %, cela signifie qu'au bout de trois ans il n'aura plus que 25 voix, mais celui qui a 48 voix, est-ce qu'on le ramènera à 10 %, selon l'article 1145, alinéa 2? Si on le ramène à 10 %, cela fonctionne. Le majoritaire demeure majoritaire. Mais, si on ne le ramène pas à 10 %, là cela ne fonctionne plus. C'est un minoritaire qui devient majoritaire.

Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.

M. Berrouard: Là encore, je pense qu'au niveau de la question des voix, cela ne jouera pas parce que l'article parle de la moitié de l'ensemble des fractions et non pas des voix. Donc, s'il y en a un qui a 52 % et que l'autre en a 48 %, l'article 1147 va s'appliquer et, à ce moment, pour les deux. Il va y avoir une réduction, mais les deux vont être au même niveau. Il y en a un qui va toujours rester minoritaire.

M. Pineau: Bon, je comprends ça. Prenons un autre exemple. Trois fractions. Un a 60 %, le no 2 a 20 % et le no 3 a 20 %. Donc, très nettement, le no 1 est promoteur, n'est-ce pas, il est considéré comme promoteur. Au bout de la troisième année, à supposer que nous ayons 60 fractions, 20 fractions, 20 fractions, cela signifie que le no 1 aura 25 voix, le no 2 aura 10 voix et le no 3 aura 10 voix. Est-ce que c'est cela?

M. Berrouard: 10 %. Outre les voix qui sont rattachées, dans le cas des copropriétaires, à la résidence.

M. Pineau: À ce moment, cela signifie que le majoritaire demeure majoritaire.

Le Président (M. Gagnon): Nous allons suspendre pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 26)

(Reprise à 10 h 48)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! Les articles 45, 46 et 47...

M. Marx: 1145...

Le Président (M. Gagnon): Oui, effectivement. Les articles 1145, 1146 et 1147 sont suspendus. Article 1148, Mme la députée de Maisonneuve?

Mme Harel: "Le syndicat peut, lorsqu'un copropriétaire n'acquitte pas sa quote-part des charges communes ou sa contribution au fonds de prévoyance, obtenir du tribunal une ordonnance le privant de l'exercice de son droit de vote."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il vise à donner au syndicat un outil supplémentaire à l'hypothèque légale pour assurer le paiement des charges communes.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1148 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1149?

Mme Harel: "Lorsque le nombre de voix dont dispose un copropriétaire ou un promoteur est réduit en application de la présente section..."

Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement.

Mme Harel: Oui, il y a un amendement. Je vais lire l'amendement. Déplacer l'article 1149 après l'article 1153, le renuméroter 1153.1 et remplacer, à la troisième ligne, les mots "qui peuvent être exprimées pour prendre une décision"... Je vais faire la lecture de l'article amendé.

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Harel: "Lorsque le nombre de voix dont dispose un copropriétaire ou un promoteur est réduit en application de la présente section, le total des voix de tous les copropriétaires qui peuvent être exprimées pour prendre une décision exigeant la majorité en nombre et en voix est réduit d'autant."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

Mme Harel: De l'amendement?

Le Président (M. Gagnon): De l'amendement, oui.

Mme Harel: De l'amendement. L'amendement proposé a pour but de préciser dans quels cas s'applique cet article, soit lorsqu'une décision exigeant la majorité en nombre et en voix doit être prise. C'est donc dire que le total des voix de tous les copropriétaires qui peuvent être exprimées sera réduit lorsqu'une décision devra être prise, en vertu de l'article 1152, 1153 ou 1162. Des précisions ont été également apportées à l'article pour faciliter sa compréhension.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'article?

M. Cossette: Le commentaire principal, sous réserve de l'amendement. Cet article nouveau complète les précédents. Il précise que, lorsque le nombre de voix dont peut disposer un copropriétaire ou un promoteur est réduit en vertu de cette section, le total des voix qui peuvent être exprimées pour prendre une décision est réduit d'autant.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1149 est-il adopté? Oui. Article

1150?

Mme Harel: "La cession des droits de vote d'un copropriétaire doit être notifiée par écrit au syndicat pour lui être opposable."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article de droit nouveau vise à ne pas rendre opposable au syndicat la cession des droits de vote qui ne lui est pas notifiée par écrit. Il assure un meilleur contrôle des personnes habilitées à voter aux assemblées des copropriétaires et aussi une transmission valable des avis de convocation à ces assemblées.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? L'article 1150 est adopté. Je m'excuse, tantôt, j'ai oublié de poser la question à savoir si l'amendement à l'article 1149 était adopté et si l'article était adopté, tel qu'amendé. Est-ce que cela va?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté, tel qu'amendé. Article 1151?

Mme (Harel: "Les décisions du syndicat sont prises à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l'assemblée, y compris celles visant à corriger une erreur d'écriture dans la déclaration de copropriété."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article reprend le principe contenu à l'article 442e du Code civil du Bas-Canada, soit que les décisions de l'assemblée sont prises à la majorité des voix. Il précise aussi que les erreurs d'écriture dans la déclaration peuvent être corrigées à la même majorité, ce qui n'est pas le cas actuellement. Lu avec l'article 1152, paragraphe 3°, cet article permettra de modifier le règlement de copropriété à la majorité des voix, ce qui n'est pas le cas actuellement puisque les règles de fonctionnement de la copropriété font partie de la déclaration et que celle-ci, pour être modifiée, doit l'être à la double majorité prévue à l'actuel article 442f.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau? M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je n'ai pas compris ce que l'on veut dire par les erreurs d'écriture dans la déclaration.

Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.

M. Berrouard: Dans le fond, ce sont des erreurs très simples. Imaginons le cas où le promoteur a voulu parler des balcons et qu'il se serait trompé et aurait parlé d'autre chose. Ce sont des erreurs, des mots qui ne sont pas corrects ou des choses comme cela. Dans certaines déclarations actuellement, on prévoit même qu'il ne faut pas toucher à la déclaration de copropriété à moins d'obtenir le consentement de 100 % des copropriétaires en nombre et en voix, ce qui ne permet même pas de corriger une erreur d'écriture.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Où on aurait parlé, par exemple, de balcons au lieu de parler de terrasses.

M. Berrouard: Voilà.

M. Leduc (Saint-Laurent); Oui, c'est bien.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1151 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1152?

Mme Harel: "Sont prises à la majorité des copropriétaires, représentant les trois quarts des voix de tous les copropriétaires, les décisions qui concernent: "1° Les actes d'acquisition ou d'aliénation immobilière par le syndicat; "2° Les travaux de transformation, d'agrandissement ou d'amélioration des parties communes, ainsi que la répartition du coût de ces travaux; "3° La modification de l'acte de copropriété ou de l'état descriptif des fractions."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 442f du Code civil du Bas-Canada qui traite du pourcentage de voix requis pour prendre certaines décisions qui concernent des actes d'aliénation ou des dépenses importantes. Tel que mentionné à l'article précédent, la double majorité qui y est prévue ne sera nécessaire pour modifier la déclaration de copropriété qu'à l'égard de deux de ses parties, l'acte de copropriété et l'état descriptif des fractions.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Dans le troisième paragraphe, est-ce qu'on a dit: la modification de l'acte constitutif de copropriété?

NI. Cossette: C'est de l'état descriptif.

M. Pineau: Non, "la modification de l'acte de copropriété". À-t-on dit...

Une voix: Pas à...

M. Berrouard: Qu'on l'ait dit à un endroit, on n'a pas jugé opportun de le mentionner ailleurs parce que, sinon, on aurait été obligé d'apporter cinq ou six a-mendements. Finalement, "constitutif", une fois qu'on l'a dit, je pense qu'il en découle qu'il est là à chaque fois.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1152 reproduit l'ancien article 442f, je pense. Maintenant, je me demandais si on ne serait pas mieux d'adopter la règle de 90 % lorsqu'il s'agit d'actes d'acquisition ou de transformation ou d'agrandissement très importants. Je veux dire qu'on pourra obliger l'ensemble, les 25 % qui ne seraient pas d'accord, à investir des sommes très importantes, par exemple qu'il s'agisse d'acquérir un terrain sur lequel on pourrait bâtir un pavillon récréatif qui occasionnerait des dépenses très importantes. Je sais qu'il y a eu des problèmes dans certaines copropriétés.

Mme Harel: À ce moment, vous aimeriez qu'on parle de travaux majeurs?

M. Leduc (Saint-Laurent): Je préférerais qu'on adopte la règle de 90 %. S'il ne reste plus que 10 % pour les actes d'acquisition... S'il s'agit d'aliéner, bien sûr, que cela peut être important. À ce moment c'est sûr qu'il ne s'agit pas de débourser pour les copropriétaires. Mais, lorsqu'il s'agit d'actes d'acquisition, de transformation ou d'agrandissement, cela peut occasionner des dépenses très importantes. J'ai l'impression qu'il y en aurait parmi les copropriétaires qui n'auraient pas les moyens.

M. Cossette: Dans une compagnie, généralement, quand il s'agit de faire un emprunt, c'est un pourcentage à peu près identique à celui-là qui est exigé.

Le Président (M. Gagnon): La suggestion serait que, au lieu de 75 %, ce soit 90 %?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'était surtout un point que je voulais amener à la réflexion des gens autour de la table. Bien sûr que, s'il s'agit d'acquisitions nécessaires, la règle du 90 % pourrait être embêtante.

M. Berrouard: II y a quand même une protection importante. II faut que la décision soit prise à la majorité des copropriétaires représentant les trois quarts des voix de tous les copropriétaires. C'est quand même une double majorité et, si on va jusqu'à 90 % des voix, s'il y a des absences chez les copropriétaires ou un certain désintéressement d'une minorité, à ce moment, on bloque la volonté de 75 % des gens en voix. On bloque le voeu de la majorité des copropriétaires représenté à 75 % des voix.

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Harel: Est-ce que je crois comprendre que c'est la reconduction du droit actuel?

M. Berrouard: Oui.

Mme Longtin (Marie-José): Est-ce que cela a posé des difficultés qui ont été portées à votre attention?

M. Berrouard: À notre connaissance, cela n'a pas posé de difficulté.

M. Pineau: C'est déjà difficile d'obtenir une double majorité à 75 %.

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1152 est adopté? Adopté. J'appelle l'article 1153.

Mme Harel: L'article se lit comme suit: "Sont prises à la majorité des copropriétaires, représentant 90 % des voix de tous les copropriétaires, les décisions: "1° Qui changent la destination de l'immeuble; "2° Qui autorisent l'aliénation des parties communes dont la conservation est nécessaire au maintien de la destination de l'immeuble; "3° Qui autorisent la construction des bâtiments pour créer de nouvelles fractions; "4° Qui modifient la déclaration de copropriété pour permettre la détention d'une fraction par plusieurs personnes ayant un droit de jouissance périodique et successif."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel énoncé à l'article 442h du Code civil du Bas-Canada à deux

exceptions près. D'abord, il assouplit la règle de l'unanimité pour éviter toute forme de chantage ou d'abus en permettant que les décisions visées à cet article soient prises non plus à l'unanimité mais par la majorité des copropriétaires représentant 90 % des voix. Ensuite, il ajoute deux décisions à celles qui doivent être prises par la majorité des copropriétaires représentant 90 % des voix, celle visant à autoriser la construction de bâtiments aux fins de créer de nouvelles fractions et celle visant à modifier la déclaration de copropriété pour permettre qu'une fraction soit détenue en multipropriété. En effet, ces décisions risquent de modifier considérablement le projet de copropriété.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, le Barreau avait suggéré de maintenir la règle de l'unanimité. Personnellement, la règle de l'unanimité ne me dérangerait pas. Il s'agit quand même de modifications plus que majeures. Changer la destination de l'immeuble, aliéner les parties communes nécessaires au maintien de la destination de l'immeuble, créer de nouvelles fractions, c'est bouleverser la copropriété.

Quant à modifier aussi la déclaration de copropriété pour permettre la jouissance périodique et successive, c'est tout un programme! Je ne voudrais pas être dans cette copropriété.

Mme Harel: Vous disiez tantôt qu'il était difficile, même à l'occasion, d'obtenir trois quarts des voix simplement pour procéder à des transformations ou à des agrandissements. L'obtention de 90 % des voix pose déjà une contrainte. Faut-il qu'il y ait unanimité pour préserver les droits de la minorité?

M. Cossette: Je crains beaucoup le chantage. Le dernier qui reste pour obtenir l'unanimité est un personnage dangereux.

M. Berrouard: Si vous me permettez...

Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Berrouard.

M. Berrouard: ...il ne faut pas oublier qu'il pourrait suffire qu'un copropriétaire soit absent et que personne ne sache où il est pendant un an ou deux pour que le projet de tous les autres copropriétaires soit bloqué. C'est considérable.

Mme Longtin: Ou qu'il refuse tout simplement.

M. Berrouard: Ou qu'il refuse.

M. Pineau: Il est certain que 90 %, c'est énorme.

M. Cossette: D'autant plus qu'il s'agit d'un projet un peu collectif. C'est l'affaire de beaucoup de gens, ce n'est pas l'affaire d'une seule personne.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1153 est adopté? Oui. J'appelle l'article 1154. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer les trois dernières lignes du premier alinéa. Donc, le premier alinéa se lirait comme suit: "Les copropriétaires de parties exclusives contiguës peuvent modifier les limites de leur partie exclusive sans l'accord de l'assemblée, à condition d'obtenir le consentement de leur créancier hypothécaire ou privilégié et du syndicat. La modification ne peut augmenter ou diminuer la valeur relative de l'ensemble des parties exclusives modifiées ou l'ensemble des droits de vote qui y sont rattachés."

Au deuxième alinéa, l'amendement consiste à supprimer, à la première ligne, "par son conseil d'administration", et à insérer, à la deuxième ligne du deuxième alinéa, après les mots "de copropriété", les mots "et le plan cadastral".

Alors, le deuxième alinéa se lirait comme suit: "Le syndicat modifie la déclaration de copropriété et le plan cadastral aux frais de ces copropriétaires; l'acte de modification doit être accompagne des consentements des créanciers, des copropriétaires et du syndicat."

Commentaire: Outre des modifications de nature formelle, l'amendement proposé vise à éliminer toute confusion sur les pouvoirs du syndicat et du conseil d'administration. Il précise également que la modification des limites des parties exclusives contiguës ne peut avoir pour effet non seulement de diminuer la valeur relative de ces parties ou l'ensemble des droits de vote qui y sont rattachés, mais également de les augmenter. Enfin, il précise que non seulement la déclaration de copropriété, mais également le plan cadastral doivent être modifiés à l'occasion d'une modification des dimensions des parties exclusives contiguës.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1154 est-il adopté? L'article 1154, tel qu'amendé, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Mme Harel: Est-ce qu'on peut prendre quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): Oui, nous allons suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à Il h 5)

(Reprise à Il h 13)

Le Président (M. Gagnon): Nous reprenons. Article 1155?

Mme Harel: "Est réputée non écrite toute stipulation de la déclaration de copropriété qui modifie le nombre de voix requis pour prendre une décision prévue par le présent chapitre."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est de droit nouveau. Il rend nulle toute stipulation de la déclaration qui modifie le nombre de voix requis pour prendre une décision prévue par le présent chapitre. Il a pour but de contrer une certaine pratique, soit d'insérer dans la déclaration une clause haussant à l'unanimité le pourcentage de voix requis pour prendre certaines décisions, alors même que la loi prévoit un pourcentage moindre. Cette pratique a souvent pour effet d'empêcher les copropriétaires de contrôler efficacement la copropriété.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. Article 1156?

Mme Harel: "Est sans effet toute décision du syndicat qui, à ['encontre de la déclaration de copropriété, impose au copropriétaire une modification à la valeur relative de sa fraction, à la destination de sa partie exclusive ou à l'usage qu'il peut en faire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit énoncé à l'article 442g du Code civil du Bas-Canada. Il rend sans effet toute décision de l'assemblée qui impose à un copropriétaire, à l'encontre de la déclaration de copropriété, une modification à la valeur relative de sa fraction, à la destination de sa partie exclusive ou à l'usage qu'il peut en faire.

Dans le cas de la valeur relative de la fraction d'un copropriétaire, il faut noter que l'article 1123 du projet crée une exception puisqu'un copropriétaire peut, à certaines conditions précises, la faire modifier.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1156 est adopté. Article 1157?

Mme Harel: L'amendement consiste, à la fin du premier alinéa, à insérer les mots "ou encore si une erreur s'est produite dans le calcul des voix". Alors, l'article se lit comme suit: "Tout copropriétaire peut demander au tribunal d'annuler une décision si elle est partiale, si elle a été prise dans l'intention de nuire ou au mépris des droits des copropriétaires, ou encore si une erreur s'est produite dans le calcul des voix. "L'action doit, sous peine de déchéance, être intentée dans les trente jours de l'assemblée. "Le tribunal peut, si l'action est futile ou vexatoire, condamner le demandeur à des dommages-intérêts."

Le commentaire. Par suite de la réduction du nombre de voix du promoteur ou d'un copropriétaire, il pourrait arriver que certaines erreurs se produisent dans le calcul des voix. Pour éviter qu'une décision soit contestée tardivement pour ce motif, l'amendement proposé oblige les copropriétaires à faire diligence et à contester cette décision dans les trente jours de l'assemblée.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur l'article?

M. Cossette: Sous réserve de l'amendement, cet article permet à un copropriétaire de demander l'annulation d'une décision de l'assemblée si elle est partiale, si elle a été prise dans l'intention de nuire ou au mépris des droits des copropriétaires.

L'action doit toutefois, sous peine de déchéance, être intentée dans les trente jours de l'assemblée. Le tribunal peut, par ailleurs, si l'action est futile ou vexatoire, condamner le demandeur à des dommages et intérêts.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je me suis demandé si cette disposition était véritablement utile, compte tenu du fait qu'il s'agit, en définitive, de l'application de la théorie de l'abus de droit. Le commentaire supplémentaire, d'ailleurs, le dit très clairement. Puisque nous avons déjà dans le code l'expression de cette théorie, je me demande s'il est souhaitable d'ajouter l'article 1157, car on va se demander ce que l'article 1157 ajoute à l'application de la théorie de l'abus de droit.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais ajouter là-dessus. Il me fait peur cet article, parce que je crains que beaucoup de gens aient l'impression que cet article va régler tous leurs problèmes quand ils ne seront pas satisfaits. Ils vont avoir recours constamment à l'article 1157; j'entends la minorité, ceux qui n'auront pas voté pour la décision qui aura été prise. Je trouve l'article dangereux.

Si vraiment l'abus de droit s'applique, qu'on laisse appliquer cette règle.

Mme Harel: Évidemment, il y a aussi l'ajout qui consiste à pouvoir demander au tribunal d'annuler une décision s'il y a eu erreur dans le calcul des voix, et il y a le délai de trente jours également.

M. Pineau: Eh bien, qu'on maintienne cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être qu'on pourrait le maintenir.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Si vous me permettez, concernant les dangers de procédure, cela ne m'inquiète pas tellement qu'il y ait un nombre d'actions important parce que, d'abord, il faut que les copropriétaires prennent un avocat. On sait, au départ, que les gens n'aiment pas tellement avoir recours aux avocats ou ils ne le font que dans les cas où c'est vraiment obligatoire. Deuxièmement, le tribunal peut toujours, si l'action est futile ou vexatoire, condamner le demandeur à des dommages et intérêts. Alors, on indique quand même des balises au sujet des actions.

Par ailleurs, ce qui est peut-être un peu embêtant en ce qui concerne l'abus de droit, c'est: Qu'arrive-t-il dans le cas où une décision est prise, qu'elle soit partiale et que l'action soit intentée trois ou quatre ans après? On pourrait risquer de mettre les copropriétaires dans une situation vraiment embarrassante, alors que, là, on donne un cadre très particulier, on doit le faire dans les trente jours de la décision si on veut contester celle qui a été prise.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je me rends compte que le Barreau a suggéré que l'article 1157 ne s'applique que dans les cas où la décision aurait été prise dans le contexte de l'article 1153, c'est-à-dire les décisions prises à 90 % des voix.

M. Berrouard: On pourrait se poser la question, à ce moment, à savoir si l'abus de droit serait possible dans les autres cas et on peut toujours se demander s'il serait équitable qu'on permette une contestation sur une décision pour abus de droit, dans le cas de l'article 1153, et qu'on ne le permette pas dans les autres cas. S'il y a abus de droit, il y a abus de droit.

M. Pineau: II est certain que le réflexe doit être rapide puisque l'action doit, sous peine de déchéance, être intentée dans les trente jours de l'assemblée.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je préférerais qu'on supprime l'article. Si vraiment l'abus de droit s'applique dans ces cas-là, qu'on laisse jouer cette règle. S'il y a lieu d'ajouter ou d'indiquer une règle au cas où il y aurait erreur dans le calcul des voix, qu'on le fasse. Je pense qu'il faut, en copropriété, éviter autant que possible les litiges ou toute zizanie. Je me demande si cela ne prête pas à la zizanie.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Je ne crois pas que ce soit nécessairement le litige qu'on puisse supprimer. Ce qu'on peut souhaiter, c'est de trouver les moyens pour en permettre une manifestation ordonnée. Au troisième alinéa de l'article, il y a un frein à l'usage répété d'une telle action.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Je voulais seulement indiquer qu'outre les deux freins celui de trente jours me paraît important dans la mesure où on veut assurer une certaine valeur, surtout par rapport aux tiers, aux décisions qui auraient été prises par le syndicat. Si la décision peut faire l'objet d'un recours pendant trois ans, cela risque toujours de mettre une certaine incertitude dans ce type de relation.

Autre chose: ici, c'est un peu le même problème qu'on retrouve dans le cas des actions. Est-ce qu'il existe un droit réel d'action d'un actionnaire contre la compagnie si ce droit n'est pas exprimé? Puisque le copropriétaire fait partie de la collectivité des copropriétaires et est donc membre de la personne morale, il va agir ici, évidemment, contre la personne morale et non contre des copropriétaires en particulier. Cette question aussi pourrait susciter débat. Je pense que l'article met un terme à cette question d'interprétation.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si on avait simplement mentionné qu'en cas d'abus de droit il sera toujours possible de s'adresser au tribunal, à la condition de le faire dans les trente jours et que ce ne soit pas une action futile ou vexatoire...

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: C'est toujours le danger de formuler de façon générale une telle règle. À ce moment-là, cela pourrait s'appliquer non seulement aux décisions, mais à certains comportements ou à certains règlements qui auraient été adoptés. S'il est question des heures d'ouverture et de fermeture de la piscine, par exemple, ou de l'accessibilité de la piscine, il peut y avoir abus de droit sur cette question. Je ne pense pas que, dans ces cas, on doive réduire le délai à trente jours. Il vaut mieux, je pense, l'encadrer en ce qui concerne les décisions et laisser l'abus de droit pour les autres cas possibles.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1157 est-il adopté? Adopté. L'article 1157, tel qu'amendé, est-il adopté? Adopté. Article 1158?

Ou transfert du contrôle du syndicat

Mme Harel: "Dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de celui où le promoteur d'une copropriété ne détient plus la majorité des voix à l'assemblée des copropriétaires, le conseil d'administration doit convoquer une assemblée extraordinaire des copropriétaires pour l'élection d'un nouveau conseil d'administration. "Si l'assemblée n'est pas convoquée dans les quatre-vingt-dix jours, tout copropriétaire peut le faire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article de droit nouveau vise à transférer le contrôle du syndicat du promoteur aux copropriétaires dans les trois mois du jour où le promoteur ne détient plus la majorité des voix à l'assemblée des copropriétaires. Pour ce faire, une assemblée extraordinaire des copropriétaires doit être convoquée pour procéder à l'élection du nouveau conseil d'administration.

Cet article est une suite logique de l'article 1146 du projet qui limite le nombre de voix dont peut disposer un promoteur. Il permet d'éviter qu'un promoteur ne se nomme administrateur pour une longue période de temps et ne contrôle ainsi le syndicat, même après qu'il ne détienne plus la majorité des voix en assemblée.

Le Président (M. Gagnon]: Me Pineau.

M. Pineau: Cela signifie, M. le Président, qu'au plus tard au début de la troisième année on doit convoquer la première assemblée.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Exactement, oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1158 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.

Le Président (M. Gagnon): Oui. Article 1159?

Mme Harel: "Le promoteur..."

Le Président (M. Gagnon): Vous avez l'amendement?

Mme Harel: Oui. Il consiste justement à remplacer les mots "Le promoteur" par les mots "Le conseil d'administration", au premier alinéa; à remplacer la première phrase du deuxième alinéa par la suivante, dont je vous ferai lecture; et à ajouter, à la fin, l'alinéa dont je ferai lecture également.

Alors: "Le conseil d'administration, lors de cette assemblée, rend compte de son administration. "Il produit des états financiers, lesquels doivent être accompagnés de commentaires d'un comptable, membre de l'une des corporations professionnelles de comptables, sur la situation financière du syndicat. Le comptable doit, dans son rapport aux copropriétaires, indiquer toute irrégularité qu'il constate."

L'alinéa suivant est ajouté: "Les états financiers doivent être vérifiés sur demande des copropriétaires représentant 40 p. 100 des voix de tous les copropriétaires. Cette demande peut être faite en tout temps, même avant l'assemblée."

Le commentaire sur l'amendement. Le premier amendement proposé précise que c'est le conseil d'administration et non le promoteur qui doit rendre compte de son administration, afin de couvrir le cas où le promoteur aurait nommé une personne autre que lui-même comme administrateur. Le deuxième amendement est de nature formelle. Il vise à corriger une certaine incongruité dans le texte. Le troisième amendement, enfin, propose que les états financiers que doit produire le conseil d'administration ne soient pas vérifiés tout en permettant aux copropriétaires représentant 40 p. 100 des voix de tous les copropriétaires d'exiger, en tout temps, même avant la tenue de l'assemblée, que les états financiers produits par le promoteur soient vérifiés.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur l'article?

M. Cossette: Sous réserve de l'amendement fait, cet article de droit nouveau

impose au promoteur de rendre compte de son administration lors du transfert du contrôle du syndicat et, plus particulièrement, à l'occasion de l'élection des nouveaux administrateurs. Lors de cette assemblée, le promoteur devra produire des états financiers préparés par un comptable, lesquels pourront être accompagnés de commentaires, le cas échéant, sur la situation financière du syndicat. De plus, le comptable, dans son rapport, devra indiquer toute irrégularité qu'il constate.

Cet article poursuit deux buts: d'abord, il permet aux copropriétaires d'obtenir une information adéquate et éclairée sur la situation financière du syndicat; ensuite, il permet aux copropriétaires d'exercer un certain contrôle sur la gestion du promoteur.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y a eu des représentations de faites par, je pense, la corporation des comptables agréés qui s'opposait au libellé du deuxième paragraphe. Je me demande si c'est tellement approprié de vouloir régler le contentieux existant entre les trois corporations de comptables à l'occasion de la réforme du Code civil. Je pense que la corporation des comptables agréés proposait d'enlever le texte où il était fait mention de "membre de l'une des corporations professionnelles de comptables". On sait qu'il y a un contentieux entre les trois corporations de comptables, à savoir si le fait d'émettre des commentaires doit être considéré comme de la vérification et, à ce moment-là, si cela relève strictement des CA ou si cela ne doit pas être considéré comme un exercice de vérification et, donc, que tous les membres des trois corporations peuvent y procéder.

Je pense qu'on devrait éviter de toucher à ce contentieux et, je ne sais pas, on pourrait indiquer strictement l'obligation de produire des états financiers qui soient accompagnés de commentaires d'un expert-comptable sur la situation financière du syndicat, quitte à ce que les professions comptables règlent leurs problèmes, leur contentieux entre elles. (Il h 30)

Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.

M. Berrouard: Si on ne précise pas par qui peuvent être faits ces commentaires, ce sont les copropriétaires qui vont devoir aller devant les tribunaux et faire régler la situation. Cela veut dire qu'on peut paralyser facilement tout cet article dans un rien de temps. On conteste, on dit que ce doit être fait par un comptable agréé et non pas par un autre type de comptable. Ce seront les copropriétaires qui vont être aux prises avec le problème, si on ne le précise pas dans le texte.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que vous entendez à ce moment-ci, par l'article 1159, régler le contentieux entre les comptables, entre les différents...?

M. Berrouard: En ce qui concerne la copropriété, je pense qu'on se prononce sur le fait que cela peut être un comptable membre de l'une des trois corporations professionnelles.

M. Leduc (Saint-Laurent): N'importe quel membre de ces trois corporations pourrait, à ce moment, produire des états vérifiés.

M. Berrouard: Oui. D'ailleurs, cela existe dans d'autres lois. Il faut bien se dire aussi...

M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne suis pas d'accord. Je vais demander un vote là-dessus.

M. Berrouard: ...par exemple, dans le domaine des municipalités, que ces comptables peuvent faire des commentaires également en matière d'assurances, etc. Si ces gens sont capables d'émettre des commentaires pour les municipalités, je ne vois pas pourquoi ils ne seraient pas capables d'en émettre pour les copropriétés.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous soulevez tout le problème du contentieux des trois corporations professionnelles. Vous dites: S'ils peuvent émettre des commentaires pour les municipalités, ils peuvent le faire également pour les commissions scolaires, ils peuvent le faire également pour les coopératives. C'était strictement dans ces champs. Non, je dois dire que, si vous voulez régler le contentieux au moyen de l'article 1159, je n'adhère pas à ce procédé, pas du tout. Si vraiment il y a lieu de le régler, qu'on le règlel D'ailleurs, je dois vous dire, pour votre information, que l'Office des professions doit produire, d'ici le 15 juillet, un rapport sur le contentieux existant entre les trois corporations professionnelles de comptables. Je ne suis pas capable d'accepter qu'on règle ce problème à l'occasion de l'article 1159. Je ne crois pas que ce soit raisonnable.

D'ailleurs, je dois vous dire qu'il en avait été question - j'en avais discuté avec le ministre de la Justice - lorsqu'ils avaient proposé un papillon qui aurait permis aux CGA ou aux RIA de produire des états vérifiés dans le cas d'un organisme, je ne me rappelle pas lequel. Le ministre avait reconnu qu'il fallait d'abord régler le problème entre les trois corporations et,

ensuite, qu'il y aurait lieu d'y revenir éventuellement. C'était dans le cas de l'office de garde, lorsque ces offices doivent produire un état vérifié. On voulait permettre aux CGA ou aux RIA de produire cet état. Le ministre s'était opposé, invoquant qu'il s'agissait d'un contentieux, qu'il fallait d'abord régler le problème à ce niveau. La question est exactement la même ici.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Si on reprend l'amendement proposé à l'article 1159, je ne pense pas qu'on puisse dire qu'on règle le problème du contentieux entre les différentes corporations de comptables. Dans le deuxième alinéa on dit que les états financiers doivent être préparés par un comptable qui est membre de l'une des corporations. Cela peut être un comptable qui fait partie de l'une des trois, s'il y en a trois, ou des deux, s'il y en a deux.

Maintenant, en dernière analyse, au troisième alinéa on vient préciser que, si les copropriétaires dans une proportion de 40 % le demandent, ils pourront exiger des états financiers vérifiés, mais sans qu'on précise par qui devront être préparés ces états financiers vérifiés. Je ne pense pas qu'on tranche là le débat des comptables. Dans un premier temps on dit: Vous allez produire des états financiers préparés par un comptable. On ne dit pas lequel, sauf qu'on ne précise que ceci: II est nécessaire que ce comptable fasse partie de l'une des corporations professionnelles de comptables.

Dans le dernier alinéa on vient dire que, si 40 % des membres l'exigent, on peut demander des états financiers vérifiés.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez, lorsque vous mentionnez que ces états financiers doivent être accompagnés de commentaires d'un comptable, à ce moment-là on réfère certainement à la vérification. Madame, tout le problème vient de là. C'est quoi, des commentaires? Vous pouvez en parler aux comptables agréés, je pense qu'eux disent: Oui, dès que vous émettez des commentaires, c'est de la vérification. Bien sûr qu'on ne commencera pas à discuter, je ne suis pas un expert en cette matière, on ne peut pas commencer à discuter, à savoir si les commentaires équivalent aux vérifications ou non. Tout le problème est là. On en a discuté de nombreuses fois. Si, disons, tout le monde était d'accord pour dire que des commentaires, cela n'équivaut pas à de la vérification, là, je serais d'accord. Le problème, c'est là qu'il se situe. Dire qu'on ne touche pas à ce contentieux-là, qu'on ne veut pas permettre aux CGA ou aux RIA de produire des états financiers vérifiés, moi, je pense qu'il y a un pas qui peut être vite parcouru.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'arcy McGee.

M. Marx: Si on n'exige pas une vérification...

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: D'abord, je pense qu'il y a trois types de rapports qui sont reconnus par les comptables: il y a le rapport au lecteur, il y a les commentaires et il y a la vérification. Je pense qu'ici on ne touche vraiment pas la vérification parce qu'on dit dans un premier temps qu'il s'agit de commentaires, et, dans un troisième alinéa, on précise qu'ils pourraient être vérifiés. Je pense qu'on fait une distinction.

Maintenant, en ce qui concerne tout le contentieux, je pense qu'on ne règle que le problème des copropriétés. Il s'agit, je pense - la question est là, elle est fondamentale -de déterminer si toute la question du contentieux va être réglée par les copropriétaires, si ce sont eux qui vont devoir s'adresser aux tribunaux pour régler cette question ou si on règle le cas des copropriétés, mais seulement celui-là.

M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, pour avoir discuté souventefois avec des comptables, on m'a toujours indiqué que, dès qu'il était question de commentaires, cela pouvait être considéré comme de la vérification. Si tout le monde s'entend pour dire que des commentaires, cela n'équivaut pas à de la vérification, je suis parfaitement d'accord. Mais, je le répète, le problème il est là. Les CA disent: S'il est question de commentaires, on peut considérer cela comme de la vérification.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le député de Saint-Laurent, je ne pense pas qu'on puisse attendre qu'il y ait consensus ou unanimité dans l'interprétation que les uns et les autres chez les comptables font de ces notions. Puisqu'on utilise ici dans le deuxième alinéa un terme différent du troisième alinéa, c'est parce que l'intention est donc de distinguer ce qui est attendu lorsqu'il y a présentation des états financiers et ce qui est demandé lorsque des copropriétaires représentés à 40 % des voix exigent autre chose.

Pour les fins, si vous voulez, de l'article 1159, il va falloir se satisfaire de cette formulation-là parce qu'on ne peut quand même pas laisser cela en suspens jusqu'à ce que les diverses corporations de comptables nous aient indiqué quel était le

lexique définitif qu'elles utilisaient. On peut simplement, en tout cas, s'entendre sur le fait que les états financiers qui sont accompagnés de commentaires sont moins coûteux pour les copropriétaires que ceux qui sont vérifiés. Si les copropriétaires demandent une vérification, ils en assumeront à ce moment-là collectivement les frais.

Le Président (M. Gagnon]: L'amendement à l'article 1159 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, je ne suis pas d'accord.

Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me permettez.

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais revenir sur l'article 1159. Je pense que, pour que ce soit compris et qu'il n'y ait pas de discussion lors des assemblées des copropriétaires qui n'auraient peut-être pas les connaissances suffisantes pour aller voir l'article 379, je pense, il y aurait lieu de bien indiquer qu'il y a obligation de rendre compte et de produire des états financiers, alors qu'ici, a l'article 1159, on semble référer à l'obligation pour le promoteur de rendre compte, lors de la remise de son administration. J'ai l'impression que, souventefois, on va s'opposer, on va dire: Où est-ce inséré? On ne voyait pas d'article à cet effet.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Nous sommes à la section du transfert du contrôle du syndicat.

M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être pas là, mais ailleurs.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Je voudrais indiquer que c'est déjà compris, finalement, sauf pour la question de la reddition de comptes qui est, évidemment, implicite et toute la gestion des conseils. Pour la question des états, l'article 1142 prévoit quand même que l'avis de convocation à l'assemblée annuelle doit être accompagné, outre le bilan, de l'état des résultats de l'exercice écoulé et de l'état des dettes et créances du budget prévisionnel, etc. Donc, il me semble que c'est couvert à cet endroit.

M. Leduc (Saint-Laurent): À quel article?

Mme Longtin: À l'article 1142.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, cela va. (Il h 45)

Le Président (M. Gagnon): Article 1160?

Mme Harel: "Le comptable a accès à tout moment aux livres, comptes et pièces justificatives qui concernent la copropriété. "Il peut exiger du promoteur ou d'un administrateur les informations et explications qu'il estime nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article de droit nouveau donne au comptable à tout moment accès aux livres, comptes et pièces justificatives qui concernent la copropriété. Il lui donne aussi le droit d'exiger du promoteur ou d'un administrateur les informations et explications qu'il estime nécessaires pour accomplir ses fonctions.

Cet article s'inspire de l'article 35 du Condominium Act de l'Ontario et complète l'article précédent. Il donne aussi suite à la proposition du groupe de travail sur la copropriété.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1160 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1161?

Mme Harel: "Le nouveau conseil d'administration peut, dans les soixante jours de l'élection, mettre fin sans pénalité aux contrats conclus par le promoteur pour l'entretien ou d'autres services, si le syndicat en souffre préjudice."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau permet aux nouveaux administrateurs, dans les 60 jours de leur élection, de mettre fin sans pénalité à certains contrats conclus par le promoteur, si le syndicat en souffre préjudice. En fait, cet article vise à contrer certaines pratiques de promoteurs qui, pendant la période où ils

contrôlent les destinées de la copropriété, accordent à des personnes liées des contrats d'entretien ou de services pour une longue période, à des prix souvent exorbitants.

Cet article s'inspire d'une recommandation formulée par un groupe de travail sur la copropriété en Ontario, ainsi que par la législation de l'État de la Virginie et de celui de la Floride en matière de copropriété.

Il donne suite en substance à la proposition du groupe de travail québécois sur la copropriété.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais je me demande s'il n'aurait pas été préférable de mettre une limite d'un an. L'article dit qu'à ce moment-là on pourrait mettre fin à tout contrat. Je préférerais et je pense qu'il serait plus approprié d'indiquer une limite si, par exemple, les contrats n'ont pas été signés pour une période d'au-delà d'un an. Sans cela, on sera tenté de discuter tous les contrats qui auront été signés. Je pense que c'est assez inacceptable pour le tiers.

M. Cossette: S'il n'y a pas de préjudice, il n'y a pas de problème. C'est pour permettre au nouveau copropriétaire de bien connaître la situation et d'évaluer chacun des contrats qui lient la copropriété.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y aura peut-être eu des soumissions. La personne aura soumissionné et aura obtenu le contrat et on pourra lui enlever le contrat simplement parce qu'on pourra prétendre qu'il y a préjudice.

M. Cassette: S'il n'y en a pas, il y a un recours.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense qu'on va très loin. Cela me semble aller très loin. S'il y a un contrat, je suis parfaitement d'accord que c'est absolument inacceptable que la copropriété soit liée avec des contrats de dix ou quinze ans. Cela se faisait et je pense que c'était absolument inacceptable. Or, je suis parfaitement d'accord qu'on limite, mais si on parle d'un an ou d'un maximum de deux ans, vous savez, un contrat d'entretien d'ascenseur, vous n'avez pas cela pour trois mois. C'est sûr qu'il sera toujours possible de trouver un autre entrepreneur ou un autre soumissionnaire ou, enfin, une autre compagnie d'entretien qui serait peut-être prête à le faire à un prix inférieur. Cela me semble aller très loin. J'aurais préféré un délai.

Je ne pense pas qu'un an soit tellement long. Je ne pense pas que la copropriété subirait un gros préjudice d'être obligée de respecter un contrat pour une période d'une année.

M. Cossette: Mais si, par exemple, le promoteur, avant de perdre le contrôle, a un bon ami qui est ingénieur et lui confie la surveillance de la copropriété pour une période d'un an, moyennant des honoraires de 50 000 $, je pense que les nouveaux administrateurs ont intérêt à examiner ce contrat et à en demander la nullité, parce que c'est nettement inacceptable, puis, ce sont des choses qui se produisent.

Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.

M. Berrouard: Par ailleurs, j'imagine mal le conseil d'administration qui, après le délai de 60 jours ou à la fin du délai, déciderait de demander la résiliation de ce contrat pour une période de dix mois qui resterait à courir. Il faut quand même qu'il y ait préjudice.

Par ailleurs, il pourrait arriver, comme le souligne Me Cossette, finalement, que le contrat 3'étende sur une période relativement courte, mais qu'il y ait vraiment un préjudice énorme.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous changez toutes les règles des contrats. Le contrat qui a été signé ne vaut plus et on pourrait l'annuler unilatéralement. Qu'on le fasse au bout d'une période d'une durée limitée, je suis parfaitement d'accord. Là, au moins, on connaît les règles du jeu. Cela veut dire que celui qui contracte avec une copropriété sait au départ que son contrat ne peut excéder une durée d'un an. Je suis parfaitement d'accord, mais qu'on respecte le contrat qui a été signé! Sinon, je le répète, on bousille tout le chapitre des contrats.

M. Marx: Je pense que c'est le cas qui nous est donné dans le cahier. En Ontario, si ce n'est pas ratifié par le conseil, le contrat est nul.

M. Pineau: II faut l'enlever...

M. Marx: II faut que ce soit ratifié.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...18 mois...

M. Marx: Le contrat ne pourrait être pour plus de 18 mois, mais il faudrait qu'il soit ratifié.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

M. Marx: S'il n'est pas ratifié, cela peut être après un mois.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

Des voix: Non, non!

M. Marx: II y a une limite de 18 mois.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bien. On va mettre douze mois.

M. Marx: Que veut dire dans l'article "si le syndicat en souffre préjudice"?

M. Pineau: C'est ma question.

M. Marx: Si c'est le cas que Me Cossette a cité, où il s'agit d'un contrat de services exorbitant, j'imagine que le syndicat en souffre préjudice, si cela veut dire quelque chose.

M. Pineau: J'aimerais préciser...

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, j'aimerais préciser la question qui vient d'être posée. J'imagine que, lorsqu'on a écrit "si le syndicat en souffre préjudice", on a songé à la règle de la lésion, qui est un principe non reconnu actuellement dans le droit. Si l'article 1161, une fois encore, devait être mis en vigueur avant les règles sur les obligations, il y aura là incontestablement une difficulté d'interprétation.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Oui, mais, M. le Président, je ne vois pas comment on peut mettre en vigueur l'article 1161, qui fait référence à la lésion sans adopter l'article sur la lésion. Il se peut, lorsque le gouvernement présentera les articles concernant la lésion, que la sous-commission ou la commission qui siégerait ou l'Assemblée nationale ne soient pas d'accord. C'est bien possible.

M. Pineau: Ce n'est pas impossible.

M. Marx: Ce n'est pas impossible, pour ne pas dire que c'est possible, d'accord.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Marx: On tient beaucoup pour acquis...

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Berrouard: Je pense qu'on avait le choix, quand on a écrit cet article, entre faire appel à deux critères: d'abord, donner au syndicat la possibilité d'agir pour faire annuler un contrat avec certaines conditions: délai de 60 jours et préjudice; l'autre possibilité était de dire: tous les contrats conclus d'une période de plus de douze mois pourraient être annulés. Le problème qui se posait dans ce cas, c'est qu'il me semble un peu incongru de permettre au nouveau conseil d'administration d'annuler n'importe quel contrat s'il n'y a pas préjudice. Ce ne sont pas tous les contrats, par ailleurs...

M. Marx: Oui, mais supposons que cet article entre en vigueur à la fin de l'année 1986 et que le chapitre sur les obligations ne soit pas encore adopté...

M. Cossette: Sûrement qu'il ne sera pas adopté.

M. Marx: ...sûrement qu'il ne sera pas adopté, donc, qu'est-ce qu'on a? Un vide législatif. On fait référence à quelque chose qui n'existe pas.

M. Cossette: Non. On aura le principe général de la lésion qui sera exprimé au Livre des obligations et on aura une disposition particulière qui visera ces contrats d'entretien et de services qui pourront être annulés.

M. Marx: Oui, mais comme Me Pineau l'a dit, "en souffre préjudice" veut en effet se référer à la lésion, si j'ai bien compris. Oui?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin?

M. Marx: Donc, c'est cela, ce ne sera pas en vigueur, et on aura un article 1161 qui fait référence à une notion qui n'est pas encore en vigueur. Ce sera difficile de l'appliquer.

Mme Longtin: Je ne suis pas certaine que le problème soit insurmontable. L'article 1001, actuellement, nous dit: "La lésion n'est cause de nullité des contrats que dans certains cas et à l'égard de certaines personnes tel qu'indiqué dans cette section." Maintenant, déjà cette section a quand même subi certaines atteintes puisque la lésion a été admise dans tout le domaine de la consommation. Il suffit, je pense, d'une nuance à apporter à l'article 1001 dans la loi de l'application pour que cela ne cause pas vraiment de difficultés, car le concept de lésion existe et, on sait ce qu'est la lésion.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le concept de lésion existe, mais vous savez qu'il y a plusieurs façons de concevoir la lésion - subjective, objective -et Dieu sait s'il y en a des ouvrages et des thèses de doctorat sur le concept de lésion. Il va y en avoir d'autres si le législateur ne nous dit pas véritablement ce qu'est la lésion, car, s'agissant du droit commun, je

n'irai pas chercher le concept de lésion dans la Loi sur la protection du consommateur pour savoir ce qu'est la lésion.

Mme Longtin: On va être obligés de recourir à la doctrine.

M. Marx: Le législateur ne veut pas cela non plus.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Je dis qu'on va être obligés de recourir, évidemment, à la doctrine puisque la lésion, actuellement, n'est pas définie dans le Code civil du Bas-Canada. Le problème, s'il en est un, existe déjà parce que, finalement, les discussions qu'on a à savoir s'il s'agit de lésion objective ou subjective, existent à cause du silence du code actuel.

M. Pineau: Oui. C'est pourquoi on ajoute encore à l'ambiguïté...

Mme Longtin: Un autre cas où on est obligé d'aller tirer des ressources ailleurs que dans le code.

M. Marx: Cela pose des problèmes, mais, pour l'article 1161, même si le contrat est pour dix ans et qu'il n'y a pas de préjudice, cela reste en vigueur. Il n'est pas nécessaire que ce soit ratifié ou quoi que ce soit. Pardon?

M. Berrouard: II y a une ratification implicite. Si les administrateurs n'ont pas agi dans les 60 jours.

M. Marx: Dans les 60 jours, ils doivent prouver qu'il ont souffert préjudice. Cela prouve qu'ils ont souffert préjudice et c'est un litige. Quoique si on met une limite, comme cela a été proposé par le député de Saint-Laurent, je pense que c'est plus clair.

M. Berrouard: Si on met une limite de temps, le problème qui arrive au niveau des contrats, c'est qu'il n'y a pas nécessairement préjudice. Cela peut être des contrats fort valables. On permet au nouveau conseil d'administration d'annuler n'importe quel contrat.

M. Marx: C'est cela. Sauf s'ils veulent ratifier le contrat.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ils peuvent le renouveler.

M. Marx: Renouveler ou annuler.

M. Pineau: Je pense que je préférerais cela parce que si on en revient à 1161 tel que proposé, pour mettre fin à ce contrat, il faudra prouver tout au moins un déséquilibre des prestations. D'une part, ce n'est pas facile. Or, il pourrait y avoir un contrat très onéreux pour les copropriétaires, mais qui ne serait pas pour autant lésionnaire. Celui-ci pourrait durer pendant dix, quinze ans. La durée est déterminée par le contrat. Alors, je me demande s'il ne serait pas plus sage d'apporter une mesure semblable à celle que nous voyons en Ontario, c'est-à-dire mettre une limite dans le temps à ce contrat passé sous réserve, bien sûr, toujours d'une possible ratification.

M. Marx: Peut-être aussi, M. le Président...

M. Berrouard: Sans égard au fait qu'il est lésionnaire ou non.

M. Marx: C'est ça.

M. Pineau: Sans égard au fait qu'il soit lésionnaire.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Si on met cela dans l'article 1161, il serait clair que toute personne qui veut offrir des services ou signer un contrat avec un promoteur, il saurait... C'est ça. Après un an, ils peuvent annuler. Donc, il va agir en conséquence.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Nous allons suspendre cet article et nous y reviendrons ultérieurement.

Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons l'article 1161. À l'article 1162, vous avez un amendement. (12 heures)

De la fin de la copropriété

Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à remplacer le deuxième alinéa. Le premier se lit comme suit: "II peut être mis fin à la copropriété par décision des deux tiers des copropriétaires représentant 90 % des voix de tous les copropriétaires. "La décision de mettre fin à la copropriété doit être constatée dans un écrit signé par le syndicat et les personnes détenant des privilèges ou des hypothèques sur tout ou partie de l'immeuble. L'écrit doit être enregistré par dépôt et inscrit à l'index des immeubles. "En cas d'emphytéose ou de propriété superficiaire, le propriétaire de l'immeuble et l'emphytéote ou le superficiaire doivent aussi

signer l'écrit."

Commentaire. Outre une modification de concordance, l'amendement proposé apporte une précision au sujet des personnes qui doivent signer l'écrit mettant fin à la copropriété.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire sur l'article.

M. Cossette: Cet article prévoit qu'il peut être mis fin à la copropriété d'un immeuble sauf qu'au lieu d'exiger, comme le fait le droit actuel à l'article 442o du Code civil du Bas-Canada, portant sur l'unanimité des copropriétaires, on exige que les deux tiers des copropriétaires représentant 90 % des voix y consentent. Cet assouplissement de la règle actuelle a pour but d'éviter toute forme de chantage et d'empêcher que l'entêtement d'un seul individu, par exemple, ne force les autres à demeurer dans un état dont ils ne veulent plus.

L'article prévoit aussi que la décision de mettre fin à la copropriété doit être constatée dans un écrit signé par le syndicat et les personnes détenant des privilèges ou des hypothèques sur tout ou partie de l'immeuble ainsi que par l'emphytéote ou le superficiaire, le cas échéant.

Cet avis devra être enregistré par dépôt inscrit à l'index des immeubles et déposé au registre des associations et entreprises.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1162 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé est adopté. Article 1163?

Mme Harel: "Le syndicat est liquidé suivant les règles applicables aux personnes morales. "Le liquidateur du syndicat est chargé de liquider la copropriété et, à cette fin, il est saisi, en outre des biens du syndicat, de l'immeuble et de tous les droits et obligations des copropriétaires dans l'immeuble."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article indique que le syndicat est liquidé selon les règles applicables à la liquidation des personnes morales. Le liquidateur du syndicat est chargé de liquider la copropriété et, à cette fin, il est saisi des biens du syndicat, de l'immeuble et de tous les droits et obligations des copropriétaires dans l'immeuble.

Actuellement, les règles relatives au partage et à la licitation en justice de biens communs s'appliquent à la liquidation des droits de copropriété. Mais, étant donné que, désormais, la copropriété a la personnalité juridique, il a paru plus opportun d'appliquer les règles relatives à la liquidation des personnes morales prévues aux articles 390 à 399 du projet.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. M. Marx: Adopté.

De la propriété superficiaire

Le Président (M. Gagnon): Article 1164? M. Cossette: Le droit de superficie, oui.

M. Marx: C'est de la propriété superficiaire.

Le Président (M. Gagnon): Chapitre quatrième. De la propriété superficiaire. Section 1. De la nature de la propriété superficiaire. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "La propriété superficiaire est un droit réel immobilier qui permet à une personne, appelée superficiaire, d'être propriétaire de constructions, ouvrages ou plantations situés sur ou dans un immeuble appartenant à une autre personne, appelée tréfoncier. "Elle résulte de la division de l'objet du droit de propriété, de la cession du droit d'accession ou de la renonciation au bénéfice de l'accession."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article et les suivants proposent des dispositions nouvelles régissant la propriété superficiaire ou le droit de superficie, droit qui a été développé par la doctrine et la pratique à partir des articles 414 et 415 du Code civil du Bas-Canada. L'article proposé définit la propriété superficiaire comme un droit réel immobilier qui permet à une personne, appelée superficiaire, d'être propriétaire des constructions, ouvrages ou plantations situés dans ou sur un immeuble appartenant à une autre personne, appelée tréfoncier.

Il indique aussi comment s'établit ce droit, que ce soit par la division de l'objet même du droit de propriété, par la cession du droit d'accession ou par la renonciation au bénéfice de l'accession.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1164 est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1165? Vous avez un amendement.

Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à remplacer, à la première ligne, les mots "le droit de" par les mots "l'acte constitutif du droit de". Alors, l'article amendé se lit comme suit: "Pour être opposable aux tiers, l'acte constitutif du droit de propriété superficiaire doit être enregistré par dépôt." C'est un amendement de nature purement formelle.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article précise, comme dans le cas de tous les droits réels, que le droit de propriété superficaire doit être enregistré pour être opposable aux tiers.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1166?

Mme Harel: "Le droit du propriétaire superficiaire à l'usage du tréfonds est réglé par la convention. À défaut, le tréfonds est grevé des servitudes nécessaires à l'exercice de ce droit; elles s'éteignent lorsqu'il prend fin."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de l'office, sauf qu'on précise que les droits du propriétaire superficiaire à l'usage du tréfonds sont d'abord réglés par la convention. À défaut, le tréfonds est grevé des servitudes nécessaires à l'exercice de la propriété superficiaire.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Est-ce à dire, M. le Président, que si ce n'est pas réglé par la convention, on applique tout simplement les règles de servitude? Donc, on le confond avec les servitudes.

M. Cossette: Les servitudes nécessaires à l'exercice du droit. Donnons un exemple, si on veut...

M. Pineau: M. le Président, si vous me le permettez, je complète. Ce qui m'a frappé, c'est que, si on fait du droit de superficie une modalité du droit de propriété, c'est distinct de la servitude et de l'usufruit, n'est-ce pas? Or, l'article 1166 vient dire que, s'il n'y a pas de convention, on applique la servitude.

M. Cossette: C'est-à-dire que, s'il n'y a pas de convention relative à ces servitudes, le droit de propriété superficiaire s'accompagne des servitudes légales...

M. Pineau: Des servitudes légales.

M. Cossette: ...nécessaires pour l'exercice de ce droit de superficie.

M. Pineau: D'accord. M. Cossette: Cela va? M. Pineau: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1166 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1167?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer les mots "de leur droit de propriété respectif" par les mots "de leurs droits de propriété respectifs". C'est un amendement purement formel. "Le superficiaire et le tréfoncier supportent les charges grevant ce qui fait l'objet de leurs droits de propriété respectifs".

M. Cossette: Le pluriel au lieu du singulier.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce une règle supplétive à savoir que le superficiaire et le tréfoncier supportent les charges grevant ce qui fait l'objet de leurs droits de propriété respectifs. Cet article s'inspire de la proposition de l'office contenue à l'article 273 de son projet. Toutefois, à la différence de l'office, l'application de la règle est généralisée alors que l'office ne l'appliquait qu'en matière de bail à construction.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1167 est adopté et l'article 1167 tel qu'amendé est adopté. Article 1168?

Mme Harel: "La propriété superficiaire établie au moyen d'un bail à construction permet au locataire d'y élever, avec la permission du locateur, des constructions, ouvrages ou plantations et de s'en faire reconnaître la propriété. "Le superficiaire peut céder ou sous-louer des droits lui résultant du bail. Il peut aussi grever seul l'immeubie loué de

servitudes utiles, même en faveur des tiers; elles s'éteignent lorsque le droit prend fin."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance deux propositions de l'office. D'abord, il définit le bail à construction comme un bail qui permet au locataire de l'immeuble d'y élever, avec la permission du locateur, des constructions, ouvrages ou plantations et de s'en faire reconnaître la propriété. Ensuite, il précise, par dérogation à l'article 1619 du Code civil du Bas-Canada, que le locataire peut céder ses droits lui résultant du bail sans devoir obtenir le consentement du locateur et qu'il peut grever seul l'immeuble des servitudes utiles, même en faveur des tiers. Ces servitudes sont temporaires et elles s'éteignent lorsque le droit du superficiaire prend fin.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, je soulève tout simplement le point qui a été présenté par le Barreau à la page 29, qui avait suggéré de remplacer "et de s'en faire reconnaître la propriété" par "et d'en être le propriétaire" j'imagine.

M. Cossette: J'aime presque autant le texte actuel.

M. Pineau: Je ne sais pas trop. Je ne fais pas de commentaire.

Mme Longtin: En fait, je pense que l'expression "de s'en faire reconnaître" doit se lire aussi en fonction des droits d'accession. C'est qu'on vient faire échec, ici, aux droits d'accession du propriétaire du fonds sur les constructions qui sont édifiées sur son fonds. Il me semble évident que celui qui édifie les constructions en vertu d'un bail et qui lui permet d'être propriétaire est propriétaire, mais la reconnaissance de cette propriété par rapport aux tiers se fait dans le bail.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1168 est adopté. Article 1169?

Mme Harel: "La propriété superficiaire peut être perpétuelle; celle établie par bail à construction ne peut excéder cent ans, même si le bail prévoit une durée plus longue. "Le bail ne peut être prolongé par tacite reconduction au-delà de ce terme."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article précise que la propriété superficiaire peut être perpétuelle. Toutefois, comme elle peut résulter d'un bail à construction, l'article précise que, dans un tel cas, elle ne peut excéder 100 ans.

À des fins d'uniformisation des délais en matière de modalités ou de démembrement du droit de propriété, la durée maximale du contrat a été portée à 100 ans. On était plutôt habitués au terme de 99 ans, mais cela fait un plus beau chiffre, 100 ans.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Je veux tout simplement demander pourquoi on limitait à 100 ans le bail à construction alors que la propriété superficiaire peut être perpétuelle et alors que, en définitive, j'ai cru comprendre que le bail à construction, c'était le principal exemple de l'exercice d'un droit superficiaire? Ma question est de pure curiosité.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette. Me Berrouard.

M. Berrouard: En matière de propriété superficiaire, finalement, on peut passer par nombre de véhicules. Il arrive souvent qu'on utilise deux véhicules pour créer le droit de propriété superficiaire. Si on passe par le véhicule du bail, à ce moment-là, on a choisi de limiter à 100 ans. Si on passe par un autre véhicule, à ce moment-là, cela va être les règles de ce véhicule qui vont s'appliquer. Si on choisit la renonciation au droit d'accession - je pense qu'il arrive souvent également que le droit de propriété superficiaire se crée par renonciation au droit d'accession - à ce moment-là, il n'y aura pas de problème, ce sera perpétuel. Il est vrai que la propriété superficiaire a une vocation à être perpétuelle, mais dépendant du véhicule utilisé également.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1169 est adopté. Article 1170?

Mme Harel: L'amendement consiste à déplacer l'article 1170 après l'article 1171, à le renuméroter 1171.1 et à remplacer l'article en l'inversant, en fait, dans sa rédaction actuelle. Il se lit comme suit: "La perte totale des constructions, ouvrages ou plantations, de même que leur expropriation ou celle du tréfonds ne met pas fin à la propriété superficiaire."

Le commentaire. En cas d'expropriation totale des constructions, ouvrages ou plantations, l'expropriant donne une indemnité au tréfoncier et au superficiaire. L'expropriant devient alors propriétaire, tant du tréfonds que des superficies. Dès lors, comme il y a réunion des qualités de tréfoncier et de superficiaire dans une même

personne, le premier alinéa de l'article 1171 prévoit que la propriété superficiaire prend fin.

L'amendement proposé a donc pour but d'éviter cette redondance, tout en prévoyant ce qui arrive en cas d'expropriation partielle.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Le commentaire de l'amendement vaut pour lecommentaire de l'article.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1170 est adopté. L'article, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1171?

Mme Harel: L'article 1170 qui est renuméroté 1171.1. C'est bien cela.

Le Président (M. Gagnon): Effectivement, cela fait partie de l'amendement.

Mme Harel: D'accord. À l'article 1171, l'amendement consiste à supprimer, à la première ligne, le mot "aussi". L'article se lit comme suit: "La propriété superficiaire prend fin: "1° Par la réunion des qualités de tréfoncier et de superficiaire dans une même personne, sans préjudice toutefois des droits des tiers; "2° Par l'avènement d'une condition résolutoire; "3° Par l'arrivée du terme, le cas échéant."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en énumérant les causes qui mettent fin à ta propriété superficiaire, telles la réunion des qualités de tréfoncier et de superficiaire dans une même personne, l'avènement d'une condition résolutoire ou l'arrivée du terme prévu dans l'acte juridique qui a créé ce mode de propriété.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1171 est adopté. L'article, tel qu'amendé, est adopté. Article 1172? (12 h 15)

Mme Harel: "À l'expiration de la propriété superficiaire, le tréfoncier acquiert la propriété des constructions, ouvrages ou plantations en en payant la valeur au superficiaire, si leur valeur est inférieure à celle du tréfonds. "Si la valeur est égale ou supérieure à celle du tréfonds, le superficiaire a droit d'acquérir la propriété du tréfonds en en payant la valeur au tréfoncier, à moins qu'il ne préfère, à ses frais, enlever les constructions, ouvrages et plantations qu'il a faits et remettre le tréfonds dans son état antérieur."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article règle le sort des constructions, ouvrages ou plantations à l'expiration de la propriété superficiaire. Ceux-ci sont acquis par le tréfoncier si leur valeur est inférieure à celle du tréfonds. Si leur valeur est égale ou supérieure à celle du tréfonds, le superficiaire a droit d'acquérir la propriété du tréfonds en en payant la valeur au tréfoncier, à moins qu'il ne préfère les enlever et remettre l'immeuble dans son état antérieur.

Cet article implique, par ailleurs, l'abrogation de la Loi sur les constituts, puisque l'essence de cette loi était de permettre à un locataire, qui avait construit sur un terrain avec la permission du propriétaire, une maison dont la valeur était égale ou supérieure à celle du terrain, d'acquérir ce terrain en en payant la valeur au propriétaire.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article...

M. Marx: Est-ce que...

Le Président (M. Gagnon): M. le député D'Arcy McGee.

M. Marx: Je veux clarifier cela pour moi-même. Est-ce que cet article fait la distinction entre cette institution et le bail emphytéotique? C'est cela l'essentiel.

M. Cossette: Oui. En vertu de la loi à laquelle on réfère ici, la Loi sur les constituts, je pense que cette dernière ne vise absolument pas les baux emphytéotiques. Je pense que c'est clair.

M. Leduc (Saint-Laurent): Dans ce cas-ci, il y a compensation, alors que dans l'emphytéote, il perd tout.

M. Marx: II perd tout, oui. M. Cossette: Oui.

M. Marx: L'essentiel entre les deux régimes, c'est l'article 1172.

M. Cossette: Désormais, puisqu'il faut employer le mot, parce que la Loi sur les constituts sera abrogée, je pense...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.

M. Cassette: ...que c'est l'article 1172 qui va faire que le régime est différent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, c'est cela.

M. Cossette: Oui, oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1173.

M. Cassette: Ce qui fera peut-être préférer le droit de superficie pour l'établissement d'une copropriété, éventuellement, au droit d'emphytéose.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1173. Mme la députée de Maisonneuve.

M. Cossette: Oui, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): On ne s'en servira pas souvent, j'ai l'impression.

M. Cossette: Mais cela, on le verra à l'usage.

Mme Harel: "À défaut par le superficiaire d'exercer son droit d'acquérir la propriété du tréfonds dans les quatre-vingt-dix jours suivant la fin de la propriété superficiaire, le tréfoncier devient propriétaire par accession des constructions, ouvrages et plantations."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent pour éviter de prolonger indûment l'incertitude quant à l'option du superficiaire à la fin du droit de se porter acquéreur du tréfonds. L'article décrète un délai de 90 jours dans lequel le superficiaire doit exercer son droit. S'il ne l'exerce pas dans ce délai, le tréfoncier devient propriétaire des constructions, ouvrages ou plantations par accession.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y aurait, à ce moment-ci, contrepartie. Il devient propriétaire, par accession, des constructions, ouvrages et plantations, moyennant compensation, oui?

Mme Longtin: À ce moment-là... M. Cossette: Non.

Mme Longtin: ...comme on renvoie aux règles de l'accession, on renvoie aux règles de compensation entre possesseur de bonne foi et possesseur de mauvaise foi et propriétaire du fonds. Généralement, les personnes qui détiennent en vertu d'un titre et qui font des améliorations sont assimilées à un possesseur de mauvaise foi, je pense que c'est l'article 1021.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.

M. Pineau: Est-ce que ce tréfoncier pourrait être de bonne foi? Je vais inverser ma question.

Mme Longtin: Le tréfoncier serait assimilé au propriétaire; alors, pour lui, la question ne se poserait pas. La question se poserait par rapport au superficiaire...

M. Pineau: Au superficiaire.

Mme Longtin: ...qui, à ce moment-là, serait traité comme un détenteur, je pense, comme...

Mme Harel: II va y avoir un amendement qui va être introduit à l'article 1173.1. Est-ce que je pourrais en faire la lecture immédiatement, M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): Cela va. Mme Harel: Parce qu'on a, je pense... Le Président (M. Gagnon):Oui, oui. Mme Harel: ...intérêt à faire l'étude...

Le Président (M. Gagnon): C'est un nouvel article.

Mme Harel: Oui... de ce nouvel article en regard de l'article 1173. Cela se lirait comme suit: "Le tréfoncier et le superficiaire qui ne s'entendent pas sur le prix et les autres conditions d'acquisition du tréfonds ou des constructions, ouvrages ou plantations peuvent demander au tribunal de fixer le prix et les conditions d'acquisition. Le jugement équivaut alors à titre et en a tous les effets. "Ils peuvent aussi, en cas de désaccord sur les conditions d'enlèvement de ces objets, demander au tribunal de les fixer."

Le commentaire sur l'amendement. L'amendement proposé a pour but de préciser le mode d'exercice du recours du tréfoncier ou du superficiaire pour acquérir, selon le cas, le tréfonds ou les superficies, de même que l'exercice du droit pour le superficiaire d'enlever les superficies.

L'amendement indique également que le jugement qui fixe le prix d'acquisition du tréfonds ou des superficies équivaut à titre et en a tous les effets.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1173 est adopté, c'est-à-dire que l'amendement forme un nouvel article, c'est l'article 1173.1.

Mme Harel: L'article 1173 est également maintenu. Très bien, nous allons procéder.

Le Président (M. Gagnon): Je suis d'accord, mais il faut que je commence par faire adopter l'amendement...

Mme Harel: Parfait.

Le Président (M. Gagnon): ...et après, l'article tel qu'amendé. Cela va? L'article 1173 est adopté tel qu'amendé?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1174?

M. Marx: C'est un autre titre des démembrements du droit de propriété.

Le Président (M. Gagnon): Voilà! Titrequatrième.

M. Cossette: C'est l'avant-dernier best-seller.

M. Leduc (Saint-Laurent): J'étais certain qu'on ne se rendrait pas là... i

Des démembrements du droit de propriété

Le Président (M. Gagnon): Article 1174?

Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à supprimer le deuxième alinéa et le premier se lit comme suit: "L'usufruit, l'usage, la servitude et l'emphytéose sont des démembrements du droit de propriété et constituent des droits réels".

L'amendement qui consiste à supprimer le deuxième alinéa vise à éliminer toute confusion sur les droits réels en ne permettant plus expressément la création d'autres démembrements du droit de propriété que ceux connus traditionnellement.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire sur l'article. Cela va?

M. Cossette: Je n'ai pas de commentaire à faire, parce que les commentaires antérieurs deviennent inutiles, caducs.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1174 est adopté?

M. Marx: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article telqu'amendé est donc adopté. Article 1175?

De l'usufruit

Mme Harel: L'amendement consiste à biffer, à la fin, les mots "et d'en respecter la destination". L'article se lit comme suit: "L'usufruit est le droit d'user et de jouir, pendant un certain temps, d'un bien dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à charge d'en conserver la substance".

L'amendement proposé vise à ne pas consacrer expressément, à l'instar du droit actuel, l'obligation de l'usufruitier de respecter la destination du bien, cette obligation étant généralement comprise dans celle de respecter la substance du bien mais pouvant, exceptionnellement, faire l'objet de certaines distinctions.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des commentaires à l'article?

M. Cossette: Oui, un commentaire restreint. Cet article, qui reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 443 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office, définit l'usufruit comme étant le droit d'user et de jouir pendant un certain temps d'un bien dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à charge d'en conserver la substance. Un point.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1176?

M. Cossette: Une belle question d'examen!

Mme Harel: "L'usufruit s'établit par contrat, par testament ou par la loi; il peut aussi être établi par jugement dans les cas prévus par la loi."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend la proposition de l'office en énumérant les modes de création de l'usufruit. Toutefois, on ne précise pas que la prescription est un mode de création de ce droit, la prescription étant un effet de la loi. Par contre, on indique que l'usufruit peut aussi être établi par jugement dans les cas prévus par la loi, tenant compte ainsi des nouvelles dispositions

du droit de la famille et, notamment, des articles 459, 533 et 559 du Code civil du Québec qui permettent au juge d'accorder à l'un des conjoints un droit de propriété ou d'usage.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, tout simplement, l'usufruit établi par jugement, en définitive, cela se borne au droits d'usage. On fait référence au droit d'usage et au droit d'habitation.

M. Berrouard: Je pense qu'un amendement sera apporté dans la loi d'application concernant les articles 459, 533 et 559 pour préciser également que cela pourrait être un droit d'usufruit.

M. Pineau: Ah bon! Et à l'usufruit établi par la loi, à part la prescription acquisitive, est-ce qu'il y a d'autres cas? Quelles seraient les autres possibilités? L'usufruit du conjoint n'existe plus?

M. Cossette: Non.

M. Pineau: II n'existera plus, c'est cela. L'usufruit de la communauté n'existe plus puisque la communauté a disparu, et les parents n'ont pas l'usufruit sur les biens de leurs enfants mineurs?

M. Cossette: Non.

M. Pineau: Alors, est-ce que cela existe?

M. Cossette: L'usufruit établi par la loi?

M. Pineau: Oui. Par la prescription? Une voix: II n'y a pas d'autres cas.

M. Cossette: Dans le droit actuel, non. Éventuellement, il pourra peut-être y en avoir d'autres, mais, actuellement, non.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1176 est-il adopté?

Une voix: Oui.

M. Marx: L'usufruit qui existait en vertu du Code civil actuel?

M. Pineau: II va être supprimé.

M. Cossette: Oui. L'usufruit légal du conjoint survivant, il est prévu qu'il sera supprimé évidemment et qu'il sera remplacé par...

M. Marx: Autre chose.

M. Cossette: ...les fameuses dispositions contenues aux articles 703 et suivants du projet actuel. Il faut déjà les qualifier de fameuses.

M. Marx: Quelqu'un qui bénéficie tout de suite après l'adoption de ce projet de loi d'un usufruit prévu par la loi actuelle continuerait de bénéficier de cet usufruit.

M. Cossette: Ah oui!

M. Marx: Donc, c'est un usufruit prévu par la loi et cela couvre tous les cas d'usufruit qui existeront...

M. Pineau: C'est une survie de la loi ancienne.

M. Marx: C'est cela. Sur la vie... D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1176 est adopté. J'appelle l'article 1177.

Mme Harel: 1177.

Le Président (M. Gagnon): Avant que vous ne commenciez, comme il est 12 h 30, on peut peut-être aller manger et revenir à 14 heures?

Mme Harel: Est-ce que nous revenons dans cette salle?

Le Président (M. Gagnon): Non, au salon rouge. Cela va? La séance est suspendue jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 14 h 15)

Le Président (M. Gagnon): La sous-commission des institutions se réunit avec le mandat de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens.

Lors de la suspension de nos travaux, nous étions à l'article 1177. Il y a un amendement. Est-ce que l'article a été lu?

Mme Harel: Non, pas encore.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, aux premier et deuxième alinéas, le mot "bénéficiaires" par le mot "usufruitiers". C'est un amendement purement formel.

L'article se lit comme suit: "L'usufruit peut être établi pour un seul ou plusieurs

usufruitiers, conjointement ou successivement. "Les usufruitiers doivent exister lors de l'ouverture de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Le terme "bénéficiaires" voulant dire usufruitiers, je fais le commentaire.

Cet article est nouveau. Il reprend en substance les articles 97 et 98 du projet de l'office. Il précise, d'une part, que l'usufruit peut être établi pour l'avantage d'un seul ou deplusieurs bénéficiaires, conjointement ou successivement, et, d'autre part, que les bénéficiaires doivent exister lors de l'ouverture de l'usufruit. Cette dernière exigence vise à éviter la confusion entre l'usufruit et la substitution et le démembrement d'une propriété de manière conditionnelle.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que l'amendement à l'article 1177 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1178.

Mme Harel: L'amendement consiste à ajouter, à la fin du premier alinéa, les mots "ou constitue un usufruit successif".

L'article se lit comme suit: "La durée de l'usufruit ne peut excéder cent ans, même si l'acte qui l'accorde prévoit une durée plus longue ou constitue un usufruit successif. "L'usufruit accordé sans terme est viager ou, dans le cas d'une personne morale, trentenaire."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise que la durée maximale de l'usufruit est de cent ans. Dans le cas où l'usufruit est accordé sans terme, il est présumé viager ou, dans le cas d'une personne morale, trentenaire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1178 est adopté. J'appelle l'article 1179.

Mme Harel: "L'usufruitier a l'usage et la jouissance..." Il y a un amendement au titre.

Le Président (M. Gagnon): Sur le titre?

Mme Harel: Oui. Il s'agit de remplacer l'intitulé du paragraphe 1 qui précède l'article 1179 par celui-ci: De l'étendue de l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1179. C'est un amendement à l'intitulé.

Mme Harel: À l'intitulé.

Des droits de l'usufruitier

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1179.

Mme Harel: L'article se lit comme suit: "L'usufruitier a l'usage et la jouissance du bien sur lequel porte l'usufruit; il prend le bien dans l'état où il le trouve. "L'usufruit porte sur tous les accessoires, de même que sur tout ce qui s'unit ou s'incorpore naturellement à l'immeuble par voie d'accession."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, qui s'inspire des articles 100, 102 et 120 proposés par l'office donne une description générale des droits de l'usufruitier. Il reprend en substance les dispositions du droit actuel contenues aux articles 443, 447, 458 et 463 du Code civil du Bas-Canada.

En raison de cet article, l'usufruitier a l'usage et la jouissance du bien sur lequel porte l'usufruit; il prend le bien dans l'état où il le trouve. Il ne peut donc exiger du nu-propriétaire qu'il lui remette le bien en bon état.

De plus, l'article précise que son usufruit porte sur tous les accessoires, de même que sur tout ce qui s'unit ou s'incorpore naturellement à l'immeuble par voie d'accession, reprenant ainsi dans une formulation plus générale la règle de l'article 458 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1179 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1180.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer le deuxième alinéa. Je vais faire lecture du premier: "L'usufruitier peut exiger du nu-propriétaire la cessation de tout acte

qui l'empêche d'exercer pleinement son droit. "L'aliénation que le nu-propriétaire fait de son droit ne porte pas atteinte au droit de l'usufruitier."

L'amendement proposé est purement formel.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez des commentaires sur l'article?

M. Cossette: Oui. Cet article reprend en des termes différents les articles 462 et 483 du Code civil du Bas-Canada et l'article 101 proposé par l'Office de révision du Code civil.

Ainsi, il précise, d'une part, que l'usufruitier peut exiger du nu-propriétaire la cessation de tout acte qui l'empêche d'exercer pleinement son droit et, d'autre part, que l'aliénation du droit du nu-propriétaire n'affecte pas le droit de l'usufruitier.

Le Président (M. Gagnon): L'article est-il adopté tel qu'amendé?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1181.

Mme Harel: "L'usufruitier est propriétaire des fruits et revenus que produit le bien."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 106 proposé par l'Office de révision du Code civil. Contrairement au droit actuel, il prévoit que l'usufruitier acquiert la propriété des fruits et revenus produits par le bien, alors que l'article 447 du Code civil du Bas-Canada ne fait qu'indiquer son droit d'en jouir sans lui donner la qualité de propriétaire des fruits et revenus.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Une simple question de terminologie. Propriétaire des revenus, point d'interrogation? L'usufruitier fait sien les fruits et revenus, par exemple.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que cet amendement sera adopté? Adopté.

M. Cossette: C'est-à-dire...

Le Président (M. Gagnon): On va recevoir l'amendement. Est-ce que l'article tel qu'amendé est adopté?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1182?

Mme Harel: "L'usufruitier est propriétaire des biens compris dans l'usufruit dont on ne peut faire usage sans les consommer, à charge d'en rendre de semblables en pareille quantité et qualité à la fin de l'usufruit. "S'il ne peut en rendre de semblables, il doit en payer la valeur en numéraire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance la règle de l'article 452 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'Office de révision du Code civil. Il prévoit que l'usufruitier a le droit de disposer du bien compris dans l'usufruit dont on ne peut faire usage sans le consommer. Il prévoit aussi en contrepartie que l'usufruitier doit rendre un bien semblable en pareille quantité et qualité à la fin de l'usufruit. S'il ne peut en rendre un semblable, il doit en payer la valeur en numéraire.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau se plaint de ce que le moment de l'évaluation ne soit pas indiqué et suggère...

M. Cossette: Qu'on ne précise pas que c'est à la fin de l'usufruit.

M. Pineau: Pardon!

M. Cossette: II se plaint qu'on ne précise pas que c'est à la fin de l'usufruit.

Je pense que c'est cela la remarque du Barreau.

M. Pineau: "Estimée à la fin de l'usufruit." C'est cela.

M. Cossette: Au deuxième alinéa parce qu'au premier...

M. Pineau: Deuxième alinéa.

Mme Longtin: En fait, c'est que nous considérions que c'était inutile de le dire puisque la reddition se fait en pareille quantité et qualité à la fin de l'usufruit. Cela nous semblait suffisamment clair du premier alinéa que les estimations se faisaient à la fin de l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): Cela va!

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous permettez...

M. Cassette: Vous comprenez que l'expression s'y trouve au premier alinéa; elle ne se retrouve pas au second alors que le second complète le premier. Je pense que par interprétation...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent); Cela va, c'est correct. Cela répond...

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1182 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1183?

Mme Harel: "L'usufruitier peut disposer, comme un administrateur prudent et raisonnable, du bien qui, sans être consomptible, se détériore rapidement par l'usage. "Il doit, en ce cas, rendre à la fin de l'usufruit la valeur de ce bien au moment où il en a disposé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance la proposition de l'office. On y prévoit que l'usufruitier a le droit de disposer du bien qui, sans être consomptible, se détériore rapidement par l'usage, mais aussi que ce droit n'est pas absolu. D'une part, l'usufruitier doit agir en administrateur prudent et raisonnable lorsqu'il exerce ce droit et, d'autre part, il doit rendre à la fin de l'usufruit la valeur du bien au moment où il en a disposé. Cet article s'inspire aussi de l'article 568 du Code civil de la Louisiane.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Avez-vous un exemple du bien dont il est fait état à l'article 1183?

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: L'automobile. C'est peut-être le meilleur exemple. Une tondeuse à gazon.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord. Le Président (M. Gagnon): Cela va! M. Leduc (Saint-Laurent): Merci.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1183 est adopté. J'appelle l'article 1184, et vous avez un amendement.

Mme Harel: Oui, qui consiste à supprimer, à la première ligne du premier alinéa, le mot "naturels".

L'article se lit comme suit: "L'usufruitier perçoit les fruits attachés au bien au début de l'usufruit. Il n'a aucun droit sur ceux qui sont encore attachés au bien au moment de sa cessation. "Une indemnité est due par le nu-propriétaire ou par l'usufruitier, selon le cas, à celui qui a fait les travaux ou les dépenses nécessaires à la production de ces fruits."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article règle le sort des fruits naturels - je devrais exclure le mot "naturels" du commentaire - attachés au bien, tant au début qu'à la fin de l'usufruit. Au début, ils appartiennent à l'usufruitier, mais il n'a aucun droit sur ceux qui sont encore attachés au bien au moment de la cessation de l'usufruit. À cet égard, l'article proposé est conforme aux droits actuels et à la proposition de l'office. Il s'en différencie en accordant une indemnité au nu-propriétaire ou à l'usufruitier, selon le cas, pour les travaux effectués pour la production de ces fruits.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.

M. Pineau: Au premier alinéa, à la fin: "au moment de sa cessation". Sur le plan de la langue, je pense que quelque chose ne fonctionne pas. C'est au moment de la cessation de l'usufruit. Il n'a aucun droit sur ceux qui, lors de la cessation de l'usufruit, sont encore attachés au bien.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Cossette: Êtes-vous d'accord sur la proposition d'amendement?

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on peut tout simplement corriger cet amendement-ci?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): On pourrait l'ajouter.

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'amendement à l'article 1184 est-il adopté?

Mme Harel: II se lit comme suit: "II

n'a aucun droit sur ceux qui, lors de la cessation de l'usufruit, sont encore attachés au bien." C'est cela?

M. Pineau: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1184, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Mme Harel: II y avait un commentaire du Barreau, lors de la présentation de son mémoire.

M. Pineau: Aucune indemnité...

Le Président (M. Gagnon): Voulez-vous faire le commentaire?

Mme Harel: Me Longtin avait préparé un commentaire supplémentaire fort volumineux et intéressant.

Mme Longtin: La question avait déjà été discutée. Il est certain que la règle actuelle supprime tous les comptes épineux entre les parties, mais elle me semblait quand même pouvoir conduire à des résultats injustes dans la mesure où l'usufruitier pouvait gagner, au début, les fruits d'une récolte sans les perdre et sans compensation entre le travail effectué et le revenu retiré. Dans ce sens, la règle proposée paraît plus équitable. Cependant, il faut également mentionner qu'on peut toujours convenir du contraire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? J'appelle l'article 1185.

Mme Harel: "Les revenus se comptent, entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, jour par jour. Ils appartiennent à l'usufruitier du jour où son droit commence jusqu'à celui où il prend fin, quel que soit le moment où ils sont exigibles ou versés, sauf les dividendes qui n'appartiennent à l'usufruitier que s'ils sont déclarés pendant l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de l'Office de révision du Code civil ainsi que la règle du droit actuel exprimée à l'article 451 du Code civil du Bas-Canada. Il précise que les revenus se comptent, entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, jour par jour et qu'ils appartiennent à l'usufruitier du jour où son droit commence jusqu'à celui où il prend fin, quel que soit le moment où ils sont exigibles ou versés. Une exception est prévue à cette règle, soit celle relative à l'acquisition des dividendes. Ceux-ci appartiendront soit à l'usufruitier, soit au nu-propriétaire, selon qu'ils seront déclarés pendant, avant ou après l'usufruit. À cet égard, l'article codifie le droit actuel.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1185 est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 1186.

Mme Harel: "Les paiements exceptionnels qui peuvent dériver du bien sur lequel porte l'usufruit, telles les primes attribuées à l'occasion du rachat d'une valeur mobilière, sont versés à l'usufruitier, qui en doit compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance la proposition de l'office. Il établit que les paiements exceptionnels qui peuvent dériver du bien sur lequel porte l'usufruit sont versés à l'usufruitier. Comme ils sont assimilés à des versements de capital, l'usufruitier en a la jouissance pendant la durée de l'usufruit, mais il en devra compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit. (14 h 30)

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau.

M. Pineau: Je me demandais quelle était l'utilité de cette disposition. Est-ce qu'il ne s'agirait pas d'un accessoire tout simplement, donc qui suit le principal?

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Pineau: Est-ce que c'est utile? Ne s'agit-il pas tout simplement d'un accessoire qui suit le principal?

M. Cassette: Oui. Aujourd'hui, il faut raisonner en faisant un peu d'analogie avec les règles qui existent en matière immobilière. Comme l'analogie n'est pas toujours faite, même en doctrine, je pense qu'il a été jugé préférable d'exprimer la règle.

M. Pineau: D'accord. M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1186 est adopté. J'appelle l'article 1187.

Mme Harel: "Si la créance sur laquelle porte l'usufruit vient à échéance au cours de l'usufruit, le prix en est payé à l'usufruitier, qui en donne quittance. "L'usufruitier en doit compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau précise que si la créance sur laquelle porte un usufruit vient à échéance au cours de l'usufruit, le prix en est payé à l'usufruitier qui en donne quittance. L'usufruitier en doit cependant compte au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit, puisqu'il s'agit de capital. Cet article reprend en substance une proposition de l'office et fournit une règle expresse relativement à l'usufruit des créances, règle souhaitée d'ailleurs par certains juristes.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1187 est adopté. J'appelle l'article 1188.

Mme Harel: "Le droit d'augmenter le capital sujet à l'usufruit, comme celui de souscription préférentielle à des actions, appartient au nu-propriétaire, mais le droit de l'usufruitier s'étend à cette augmentation. "Si le nu-propriétaire choisit d'aliéner son droit, le produit de l'aliénation est remis à l'usufruitier qui en est comptable à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend en substance une proposition de l'office traitant du droit d'augmenter le capital sujet à usufruit comme celui de souscription préférentielle à des actions. L'article établit que ce droit appartient exclusivement au propriétaire puisqu'il s'agit, encore ici, d'un droit qui affecte le capital sujet à usufruit, mais il établit également que le droit de l'usufruitier s'étend à cette augmentation. L'usufruitier a donc la jouissance et il a droit, en cas de vente du droit, de jouir du produit de la vente sauf à rembourser à la fin de l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): D'autres commentaires? Cela va. L'article 1188 est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1189.

Mme Harel: L'amendement consiste a remplacer, au début du premier alinéa, les mots "Entre eux, le" par le mot "Le". L'amendement se lirait ainsi: "Le droit de vote rattaché à une action ou à une autre valeur mobilière, à une part indivise, à une fraction de copropriété ou à tout autre bien appartient à l'usufruitier. "Toutefois, appartient au nu-propriétaire le vote qui a pour effet de modifier la substance du bien principal, comme le capital social ou le bien détenu en copropriété, ou de changer la destination de ce bien ou de mettre fin à la personne morale, au groupement ou à l'entreprise."

L'amendement consiste à ajouter, à la fin, l'alinéa suivant: "La répartition de l'exercice des droits de vote n'est pas opposable aux tiers; elle ne se discute qu'entre l'usufruitier et le nu-propriétaire."

Le commentaire est le suivant: les a-mendements proposés ont pour but de faire ressortir clairement que la répartition de l'exercice des droits de vote rattachés à un bien, action, valeur, part ou fraction, ne se discute qu'entre l'usufruitier et le nu-propriétaire et qu'il n'est pas opposable au tiers.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur cet article?

M. Cossette: Oui, cet article de droit nouveau reprend en substance une proposition de l'Office de révision du Code civil. Il met fin à l'incertitude qui existe, en l'absence de convention, sur le partage des droits de vote rattachés à une valeur mobilière ou à un autre bien. Ce droit appartient à l'usufruitier. Mais, lorsque le vote a pour effet de modifier la substance même du bien principal, d'en changer la destination ou de mettre fin à la personne morale, au groupement ou à l'entreprise, le droit de vote appartient au nu-propriétaire.

La règle de l'article proposé n'a pas pour effet de nier l'applicabilité de règles différentes en droit des sociétés. Comme il prévoit s'appliquer entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, il n'empêche pas une personne morale de prévoir que seul le titulaire des actions au registre de l'entreprise a le droit de vote. Dans ce cas, il appartiendra à l'usufruitier et au nu-propriétaire de départager entre eux les droits de vote et de prévoir les procurations ou les mandats nécessaires.

Le Président (M. Gagnon): Ça val L'amendement à l'article 1189 est adopté. Me Pineau?

M. Pineau: M. le Président, si je comprends bien ce que l'on ajoute à la fin du deuxième alinéa, cela équivaut en quelque sorte à "entre eux" au premier alinéa, qui voulait dire: En fait dans les relations entre le nu-propriétaire et l'usufruitier.

M. Cossette: Cela n'avait pas été compris semble-t-il; alors, on supprime "entre eux" pour le remplacer par le deuxième alinéa qui paraît plus explicite en tout cas.

M. Pineau: Sauf que le deuxième alinéa...

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

M. Pineau: ...tout simplement je comprends mieux cette phrase: Dans les relations entre le nu-propriétaire et l'usufruitier, etc., le droit de vote. Dans une même phrase, c'est court, cela n'implique pas un troisième alinéa. J'ai compris quand même. En définitive, cela revient au même.

Mme Harel: On peut l'adopter tel quel.

M. Pineau: Pardon?

Mme Harel: On peut l'adopter.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté tel qu'amendé. Article 1190?

Mme Harel: "1190. L'usufruitier peut céder son droit ou louer un bien compris dans l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article consacre le droit de l'usufruitier de céder son droit ou de louer un bien compris dans l'usufruit. Il reprend en substance l'article 457 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office.

Le Président (M. Gagnon): Ça va!

L'article 1190 est adopté. Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, il n'y a aucune limite quant à ce droit de location de sorte qu'un nu-propriétaire pourrait se trouver complètement démuni à la fin de l'usufruit si le bail est renouvelable unilatéralement par le locataire. Est-ce que cela ne devient pas un acte de disposition de la part de l'usufruitier?

M. Cossette: Voulez-vous dire que l'usufruitier...

M. Pineau: II n'y a aucune limite dans ce droit de location, n'est-ce pas? De sorte qu'avec les maintiens dans les lieux, une législation ou un bail qui permet au locataire de renouveler de façon unilatérale, cela pourrait être quasiment à perpétuité.

Mme Harel: Sauf évidemment le droit d'éviction du propriétaire.

M. Pineau: Sauf...

Mme Harel: Le droit d'éviction.

M. Pineau: Sauf le droit d'éviction, mais c'est ça. À ce moment-là, l'usufruitier fait plus que faire un acte d'administration, il fait un véritable acte de disposition, me semble-t-il. Cela va très loin. Le nu-propriétaire peut rester avec rien.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous voulez la parole, Me Longtin?

Mme Longtin: En fait, actuellement, dans les règles du bail, la fin d'un usufruit ne met pas fin de plein droit au bail à durée fixe en vertu de l'article 1646. S'il n'est pas enregistré, évidemment, on peut ne pas le renouveler. Il reste la question de droit au maintien dans les lieux. À ce moment, le nu-propriétaire est dans la même situation que tout autre propriétaire qui aurait finalement signé un bail, c'est-à-dire qu'il peut reprendre le logement si lui-même ou quelqu'un, l'un de ses proches, peut le faire, en vertu de l'article 1659.

M. Pineau: II est vrai, M. le Président, que le nu-propriétaire se trouve dans la situation dans laquelle il se serait trouvé s'il avait été le propriétaire, sauf que ce n'est pas lui qui a consenti le bail; c'est l'usufruitier. Je sais que ce problème que je soulève, c'est un problème qui est bien connu en droit français, en tout cas.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1190 est adopté?

Mme Harel: Adopté. M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1191.

Mme Harel: "Le créancier de l'usufruitier peut faire saisir et vendre les droits de celui-ci, sous réserve des droits du nu-propriétaire. "Le créancier du nu-propriétaire peut également faire saisir et vendre les droits de celui-ci sous réserve des droits de l'usufruitier."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau et il précise les droits du créancier de l'usufruitier ou du nu-propriétaire de faire saisir et vendre les droits de ceux-ci.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Oui. L'article 1191 est adopté?

Mme Harel: Adopté. M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1192?

Mme Harel: "Les impenses nécessaires faites par l'usufruitier sont traitées, par rapport au propriétaire, comme celles faites par un possesseur de bonne foi. Il est en est de même des impenses utiles."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article modifie la règle actuelle et celle proposée par l'office relativement aux améliorations apportées par l'usufruitier. Actuellement, l'article 462 du Code civil du Bas-Canada prévoit que l'usufruitier est traité comme un possesseur de mauvaise foi et qu'il ne peut réclamer aucune indemnité pour les améliorations faites. Cette situation ne favorise toutefois pas l'amélioration du bien sujet à usufruit. Celui, par exemple, qui a l'usufruit d'un commerce ne sera guère intéressé à accroître l'exploitation du commerce si la seule compensation financière qu'il en obtient est le droit d'enlever les améliorations.

Afin de favoriser une amélioration du bien sujet à usufruit, on a jugé opportun de traiter les impenses nécessaires et utiles apportées par l'usufruitier comme celles faites par un possesseur de bonne foi. C'est donc dire que les règles établies aux articles 1011 à 1021 s'appliqueront à l'usufruitier."

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Dans les dispositions précédentes, M. le Président, on a toujours parlé du nu-propriétaire et, dans l'article 1192, on ne parle que du propriétaire. C'est une fausse pudeur, j'imagine. On a oublié le "nu": (14 h 45)

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est le Bureau de la censure!

Le Président (M. Gagnon): On va faire la correction.

Mme Harel: II faut faire la correction.

Le Président (M. Gagnon): Alors, la correction sera faite dans ce sens-là et ce sera un amendement. Cet amendement est adopté. L'article 1192, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté. .

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1193?

Mme Harel: "L'usufruitier ne peut abattre les arbres qui croissent sur le fonds soumis à l'usufruit, sauf pour les réparations, l'entretien et l'exploitation du fonds. Il peut cependant disposer de ceux qui sont renversés ou qui meurent naturellement. "Il remplace ceux qui sont détruits en suivant l'usage des lieux ou la coutume des propriétaires. Il remplace aussi les arbres des vergers et érablières, à moins qu'en grande partie ils n'aient été détruits."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article conforme à la proposition de l'office reprend en substance, mais en les simplifiant, les règles contenues aux articles 455 et 456 du Code civil du Bas-Canada et relatives au droit de l'usufruitier sur les arbres qui croissent sur le fonds soumis à l'usufruit. Cependant, alors que l'article 456 n'obligeait à remplacer que les arbres fruitiers, nous avons modifié cette obligation par celle de remplacer les arbres des vergers et érablières, ces arbres représentant une valeur certaine.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?

M. Pineau: Cela va, oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1193 est adopté. L'article 1194?

Mme Harel: "L'usufruitier peut commencer une exploitation agricole ou sylvicole si le fonds soumis à l'usufruit s'y prête. "L'usufruitier qui commence une exploitation ou la continue doit veiller à ne pas épuiser le sol ni à enrayer la reproduction de la forêt. Dans le cas d'une exploitation sylvicole, il doit en outre, avant le début de son exploitation, faire approuver le plan d'exploitation par le nu-propriétaire. À défaut d'obtenir cette approbation, l'usufruitier peut faire approuver le plan par le tribunal."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'article diffère quelque peu du droit actuel et de la proposition de l'office. Actuellement, un usufruitier peut continuer une exploitation sylvicole à la condition de ne pas enrayer la reproduction de la forêt et après avoir fait approuver son plan d'exploitation par des experts et l'avoir fait ratifier par un juge de la Cour supérieure. Désormais cependant, il pourra commencer ou continuer une exploitation sylvicole si le fonds soumis à usufruit s'y prête.

Par ailleurs, des interprétations strictes des expressions "conserver la substance du bien et n'en pas changer la destination" faisaient qu'il était même douteux qu'un usufruitier puisse commencer une exploitation

agricole. L'article met fin à cette situation.

L'usufruitier pourra donc commencer une exploitation. Il devra cependant le faire de façon à ne pas épuiser le sol ou enrayer la reproduction de la forêt. En outre, il devra, dans le cas d'une exploitation sylvicole, faire approuver son plan d'exploitation par le nu-propriétaire avant le début de l'exploitation. S'il n'obtient pas son approbation, il pourra alors faire approuver le plan par le tribunal.

Cet article s'inscrit dans la ligne de pensée poursuivie dans le projet en matière d'usufruit, soit pour favoriser la conservation et l'amélioration du bien sujet à usufruit. Il présente l'avantage par ailleurs de simplifier la procédure d'approbation du plan d'exploitation sylvicole.

Cette disposition ne permet pas à l'usufruitier d'entamer sous quelque forme que ce soit le capital du bien, respectant ainsi les buts de l'institution, mais il prévoit une interprétation libérale de l'obligation de conserver la substance du bien qui tienne compte de l'évolution des usages et de la situation économique.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1194 est adopté?

Une voix: Libérale, c'est dans le bon sens du mot.

Une voix: Oui.

M. Marx: II n'y a que le bon sens du mot.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1195?

Mme Harel: "L'usufruitier ne peut extraire les minéraux compris dans le fonds soumis à l'usufruit, sauf pour les réparations et l'entretien de ce fonds. Si, toutefois, l'extraction de ces minéraux constituait, avant l'ouverture de l'usufruit, une source de revenus pour le propriétaire, l'usufruitier peut en continuer l'extraction de la même manière qu'elle a été commencée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, conforme à la proposition de l'office, reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 460 du Code civil du Bas-Canada, à savoir que l'usufruitier ne peut extraire les minéraux compris dans le fonds soumis à l'usufruit, sauf pour les réparations et l'entretien de ce fonds et sauf dans le cas où il continue l'exploitation entreprise par le propriétaire.

La règle de cet article diffère de celle de l'article 1194 car l'exploitation agricole ou sylvicole permet de mettre le bien en valeur sans modifier sa valeur capitale puisque les fruits retirés du sol se reproduisent alors que toute extraction de minéraux appauvrit le capital sujet à usufruit.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1195 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1196?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer à la troisième ligne du premier alinéa les mots "biens sujets à" par les mots "biens soumis à". L'article se lit comme suit: "Sauf si le constituant le fait lui-même ou l'en dispense, l'usufruitier fait dresser, comme s'il était administrateur du bien d'autrui, un inventaire des biens soumis à son droit. Il le fait à ses frais et en fournit copie au nu-propriétaire. "La dispense ne peut être accordée si l'usufruit est successif."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article maintient l'obligation de faire inventaire imposée par l'article 463 du Code civil du Bas-Canada et reprise par l'office. S'il maintient l'exception du droit actuel à savoir que le constituant peut en dispenser l'usufruitier, il prévoit cependant que le propriétaire ne peut accorder une dispense lorsque l'usufruit est successif. Dans ce cas, l'obligation de faire inventaire s'avère nécessaire pour permettre aux usufruitiers successifs d'exercer pleinement leur droit d'identifier les biens soumis à l'usufruit et leur état initial.

L'article fait par ailleurs référence aux règles contenues au titre sur l'administration du bien d'autrui pour la confection de l'inventaire.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Constituant, est-ce un terme consacré? Les constituants, ce sont les auteurs d'une constitution.

Mme Harel: Nous allons faire les vérifications.

M. Cossette: Je pense que c'est...

M. Pineau: Je crois qu'on a supprimé l'usage du verbe "faire dresser" un inventaire ou "dresser" un inventaire dans les dispositions antérieures. Je crois qu'on a changé cela par "faire".

Mme Harel: II faudrait remplacer le mot "dresser" par "faire" de façon qu'on y

lise: "L'usufruitier fait inventaire, comme s'il était administrateur du bien d'autrui, des biens soumis à son droit."

M. Pineau: À moins qu'il n'en soit dispensé par l'acte constitutif de l'usufruit. À la place de "si le constituant"...

Mme Longtin: Après des vérifications, c'est un néologisme doctrinal que nous...

Mme Harel: Ha! Ha! Ha!

M. Pineau: Ah! C'est ce qu'a dit M. Capitant, probablement.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que...

Mme Harel: Alors, on doit le suspendre pour rédaction.

Des obligations de l'usufruitier

Le Président (M. Gagnon): Alors, on va vous remettre l'amendement pour le corriger. L'article 1196 est suspendu. Article 1197?

Mme Harel: "L'usufruitier ne peut contraindre le constituant à lui livrer le bien - on remplace le mot "constituant" par le nu-propriétaire - tant qu'il n'a pas fait dresser l'inventaire des biens."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce la sanction qu'entraîne le défaut ou le retard de l'usufruitier à faire inventaire, soit celle de l'empêcher de contraindre le propriétaire à lui livrer le bien. Cet article, conforme à la proposition de l'office, est complété par l'article 1200 du projet.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que...

Mme Harel: L'amendement va consister à remplacer le mot "constituant" par le mot "nu-propriétaire".

Le Président (M. Gagnon): Par le nu-propriétaire. Alors, nous allons recevoir cet amendement. Cet amendement est adopté et l'article 1197 tel qu'amendé est adopté? Adopté. Article 1198?

Mme Harel: "Sauf le cas du vendeur ou du donateur sous réserve d'usufruit, l'usufruitier doit, dans les 60 jours de l'ouverture de l'usufruit, souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou fournir au nu-propriétaire une autre sûreté garantissant l'exécution de ses obligations. Il doit fournir une sûreté additionnelle si ses obligations viennent à augmenter pendant la durée de l'usufruit. "Il est dispensé de ses obligations s'il ne peut les exécuter ou si le nu-propriétaire le prévoit."

On remplace encore ici "le constituant" par "le nu-propriétaire".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance la proposition de l'office et la règle de l'article 464 du Code civil du Bas-Canada. Il oblige l'usufruitier à fournir au nu-propriétaire, dans un délai de 60 jours depuis l'ouverture de l'usufruit, une sûreté pour garantir l'exécution de ses obligations. L'usufruit n'est pas soumis à cette obligation s'il en a été dispensé, s'il ne peut l'exécuter ou s'il est vendeur ou donateur sous réserve d'usufruit. Cet article oblige aussi l'usufruitier à fournir une sûreté additionnelle dans le cas où ses obligations viennent à augmenter pendant la durée de l'usufruit, ce qui n'est pas le cas actuellement. La souscription d'une assurance couvrant la responsabilité est considérée au présent article et ailleurs au projet comme étant une sûreté suffisante.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quand on parle ici de souscrire une assurance couvrant sa responsabilité, est-ce que c'est la solvabilité? Je présume. Ce n'est pas la responsabilité civile.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Me Cossette.

M. Cossette: Je pense que c'est pour couvrir l'ensemble de ses obligations.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quand vous parlez de responsabilité, ce n'est pas ça. C'est l'assurance solvabilité, c'est de s'assurer qu'il va pouvoir rendre le bien, qu'il est solvable et que le bien va pouvoir être rendu. Est-ce que ce serait un "bond"? Est-ce qu'il va être obligé de fournir un "bond"?

M. Pineau: C'est destiné à remplacer cette sûreté qui garantirait l'exécution de ses obligations. Votre assurance responsabilité, est-ce que cela couvre ça? Je pense que le député de Saint-Laurent a raison de dire que ce ne serait qu'une assurance solvabilité.

Mme Longtin: En fait, je pense que l'expression "la responsabilité" était justement sa responsabilité d'exécuter ses obligations et non pas une responsabilité contre les actes fautifs, ou une question de couvrir sa simple solvabilité. C'est qu'on dit: II doit fournir une sûreté pour garantir l'exécution de ses obligations. Pour éviter qu'il s'agisse de cautionnement ou

d'hypothèque ou autre chose, on procédait par le biais de l'assurance responsabilité, qui est une espèce de titre général en matière d'assurance.

M. Pineau: Dans plusieurs dispositions, on va retrouver cette obligation d'assurance. On s'assure beaucoup ou on va être obligé de s'assurer énormément et très souvent.

Mme Longtin: Est-ce que je peux juste ajouter?

M. Leduc (Saint-Laurent): On doit obtenir une garantie, je suis bien d'accord. Mais j'ai toujours compris qu'une assurance responsabilité ce n'était pas une assurance solvabilité.

Mme Longtin: Je pense que c'est à lire avec les articles 2600 et suivants. On dit que les assurances de responsabilité couvrent la responsabilité civile, contractuelle ou extracontractuelle, indiquent les relations entre personnes et choses et les faits qui peuvent entraîner la responsabilité, montant et exclusion de couverture, caractère obligatoire ou facultatif et bénéficiaire direct ou indirect. Je pense que c'est à cela qu'on réfère. (15 heures)

M. Leduc Saint-Laurent): L'article 2600?

Mme Longtin: 2600.

M. Leduc (Saint-Laurent): II faut se réveiller un peu.

M. Pineau: Ce n'est pas une assurance-solvabilité.

M. Leduc Saint-Laurent): Pas du tout.

M. Pineau: Responsabilité civile, c'est au cas de faute. Responsabilité contractuelle ou extracontractuelle, l'inexécution fautive d'un contrat...

Mme Longtin: La garantie de l'exécution de ses obligations peut être couverte par ce type d'assurance.

M. Pineau: L'inexécution... Oui.

Mme Longtin: Remarquez qu'on ne dirait pas "couvrant sa responsabilité" que ce serait une assurance pour qui... En fait, sur le plan formel, une assurance garantissant l'exécution de ses obligations, cela se fait mal.

M. Pineau: Cela serait couvert par l'article 2600. Est-ce qu'on peut penser à la perte du bien sur lequel la personne a l'usufruit et qui, donc, ne serait pas en mesure de le restituer au moment de la fin de l'usufruit? Mais je comprends qu'on puisse s'assurer pour sa faute, mais si la chose périt par cas fortuit, vous obligez l'usufruitier d'assurer - enfin, on ne l'oblige pas...

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me le permettez, est-il question, dans le Code civil actuel, d'assurance-solvabilité ou utilise-t-on seulement le terme "assurance-responsabilité", à l'article 2600?

M. Cassette: À l'article 2600, je pense, quand on parle d'assurance-responsabilité, que c'est une expression qui couvre généralement tout ce qu'on peut imaginer comme responsabilité.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, au Code civil actuel, il n'est pas question d'assurance-solvabilité?

M. Cossette: Solvabilité?

M. Leduc (Saint-Laurent): L'assurance "bond". Il me semble avoir vu cela quelque part.

M. Cossette: À ma connaissance, non.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mme Longtin, vous ne connaissez pas cet article?

M. Cossette: Je viens d'avoir une consultation avec une experte en assurance...

Mme Harel: Une consultation non verbale.

M. Cossette: ...qui me dit que l'expression ne se retrouve pas dans le Code civil actuel.

M. Pineau: Et cela fait partie de l'assurance responsabilité? Adjugé.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vendu.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1198 est adopté?

Mme Harel: II y a un problème, M. le Président, me dit-on, avec cette correction que nous avons faite à l'article 1198 pour remplacer "constituant" par "nu-propriétaire". Le concept de "constituant" couvrirait plus largement que celui de "nu-propriétaire" pouvant inclure le testateur.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: En fait, celui qui constitue l'usufruit peut se départir de son bien au moment même où il constitue cet usufruit. Donc, il donne la nu-propriété à

l'un et l'usufruit à l'autre. Mais il pourrait lui-même, dans l'acte qui constitue l'usufruit, dispenser d'inventaire ou avoir fait faire inventaire des biens. Cela pourrait être, par exemple, dans le cas d'un testament, où on constitue usufruit entre deux personnes et où on prévoit ce régime. Donc, je pense qu'il faudrait que le mot "constituant" ne se traduise pas nécessairement par "nu-propriétaire", mais par un concept un peu plus large.

M. Pineau: Le testateur remet la nu-propriété à l'un et l'usufruit à l'autre, ah oui!

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais là, il n'est pas nu-propriétaire.

Mme Harel: Par quoi pourrions-nous remplacer ce néologisme doctrinal? Par "lui-même"?

Mme Longtin: On peut toujours dire "celui qui constitue".

M. Pineau: On crée des substantifs.

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il adopté?

Mme Harel: On remplace ici "le constituant" par "celui qui constitue l'usufruit".

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): S'il devenait impossible d'obtenir l'assurance-responsabilité? C'est bien possible qu'on considère la personne comme non solvable ou insuffisamment responsable, que va-t-il se passer, à ce moment-là, s'il n'y en a pas? Il peut y avoir des cas où la personne n'est pas en mesure du tout de fournir une garantie, une sûreté. À ce moment-là, cela va quasiment de soi, il va être très difficile pour cette personne d'obtenir une assurance-responsabilité.

M. Cossette: C'est l'un ou l'autre, soit d'obtenir une assurance, soit de fournir une sûreté pour garantir l'exécution de ses obligations. À défaut de cela, c'est la mise sous séquestre des biens. Je pense que...

Mme Harel: C'est l'article suivant, l'article 1199.

M. Cossette: Oui, c'est dans l'article suivant.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: M. le Président, si, dans un testament, le testateur laisse l'usufruit d'une certaine partie de ses biens, par exemple, à son conjoint survivant et que ce conjoint, par ailleurs, n'a pas de biens, va-t-on le priver de cet usufruit, sous prétexte qu'il ne peut pas fournir une sûreté parce qu'il ne peut pas payer des primes d'assurance?

Mme Harel: C'est le deuxième alinéa de l'article 1198.

M. Pineau: Excusez-moi. C'est exact.

Mme Harel: À ce moment-là, il est dispensé de cette obligation.

M. Pineau: Excusez-moi.

Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Cossette.

M. Cassette: Je voudrais peut-être faire un rappel de l'article 266 aussi, où on avait employé des expressions à peu près semblables lorsqu'il s'agissait de la sûreté à fournir par un tuteur qui administrait les biens d'un mineur. On parlait, à ce moment-là, de souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou de fournir une sûreté garantissant son administration. Alors, c'est une alternative comme celle qu'on retrouve à l'article 1198.

M. Pineau: Oui, c'est vrai qu'on en avait déjà discuté.

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement à venir à l'article 1198.

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): On s'était entendus sur cet amendement. L'amendement est-il adopté?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article, tel qu'amendé, est adopté. Nous attendons deux amendements aux articles 1197 et 1198. Article 1199?

Mme Harel: "À défaut par l'usufruitier de fournir une sûreté dans le délai prévu, le nu-propriétaire peut obtenir la mise sous séquestre des biens. "Le séquestre place, comme un administrateur du bien d'autrui chargé de la simple administration, les sommes comprises dans l'usufruit et celles qui proviennent de la vente des objets de nature périssable. Il place de même les sommes provenant du paiement des créances soumises à l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 465 et 466 du Code civil du Bas-Canada, en les simplifiant. Il est aussi conforme à la proposition de l'office. Il traite du droit du nu-propriétaire d'obtenir la mise sous séquestre du bien sujet à usufruit dans le cas où l'usufruitier ne fournit pas de sûreté dans lé délai prévu.

L'article précise les droits et obligations du séquestre par renvoi aux dispositions sur la simple administration du bien d'autrui. Ces dispositions complètent les articles déjà prévus au Code de procédure civile.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1199 est adopté. Article 1200?

Mme Harel: "Le retard de l'usufruitier à dresser un inventaire des biens ou à fournir une sûreté le prive de son droit aux fruits et revenus à compter de l'ouverture de l'usufruit jusqu'à l'exécution de son obligation."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce la sanction qu'entraîne le retard de l'usufruitier à dresser un inventaire ou à fournir une sûreté. Il est privé de son droit aux fruits et revenus, à compter de l'ouverture de l'usufruit, jusqu'à l'exécution de son obligation.

Cet article diffère de l'article 467 du Code civil du Bas-Canada et de la proposition de l'office. Il apparaît nécessaire, pour assurer une sanction efficace aux obligations imposées à l'usufruitier. Le droit actuel ne prévoit aucune sanction, sauf que l'usufruitier ne dispose d'aucune preuve quant à l'état des biens. Le code n'incite donc pas l'usufruitier à exécuter son obligation, ce qui paraît inadéquat, surtout en en matière d'usufruit successif.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau, M. le Président, à la page 29, considère la sanction trop lourde. Il se contenterait d'une sanction qui serait dans le style de celle que l'on trouve dans l'article 1288, qui se lit ainsi: "L'appelé peut, si le grevé refuse ou néglige de faire dresser l'inventaire des biens dans le délai requis, y procéder aux frais du grevé. Il convoque alors le grevé et les autres intéressés."

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Mme Longtin: Oui. Je pense qu'on avait quelques notes. En regardant cela, c'est qu'on considérait, au moment où on a opté pour cette sanction, que le droit actuel ne prévoyait aucune sanction réelle pour le défaut d'exécution, puisque... Finalement, on considérait que la sanction était proportionnée au défaut lui-même. Ensuite, je pense qu'il faut considérer que, pour l'usufruitier, en raison des articles 1223 et suivants, il était quand même prévu certains droits à son bénéfice, qu'il n'a pas dans le droit actuel, et qui reposent un peu sur la constitution d'inventaire. Finalement, je pense que le dernier argument était tiré de l'actuel article 946...

M. Cossette: Le deuxième alinéa.

Mme Longtin: ...au deuxième alinéa, c'est-à-dire au troisième alinéa, où on dit: "Faute par le grevé d'avoir fait procéder à l'inventaire, il doit être privé des fruits jusqu'à ce qu'il ait satisfait à cette obligation."

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Cossette: D'autant plus aussi, comme on le mentionne, que l'inventaire est rendu facile, d'une certaine façon. Alors, pourquoi...

M. Pineau: Ne le ferait-il pas?

M. Cossette: D'autant plus que c'est un document nécessaire dans le cas d'usufruit successif.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1200...

Mme Harel: II faut faire la correction, M. le Président, pour remplacer "dresser" par "faire" l'inventaire.

Le Président (M. Gagnon): Ah oui! Alors, cela me prend un...

Mme Harel: Un amendement.

Le Président (M. Gagnon): ...amendement. Cet amendement est adopté? L'article tel qu'amendé est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...je voudrais revenir à l'article 1198, deuxième alinéa. Quand on dit: "II est dispensé de ses obligations s'il ne peut les exécuter ou si le constituant le prévoit". Si le constituant le prévoit, cela va très bien; mais s'il ne peut les rencontrer, qui va décider qu'il doit être

dispensé? Est-ce le tribunal?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Bien, en fait, on peut présumer que s'il est dans l'impossibilité de l'exécuter, disons parce que cela lui est impossible, soit qu'il n'ait peut-être pas de biens sur lesquels faire mettre une sûreté, soit qu'il n'y ait aucun assureur qui veut de lui, je pense qu'il va en aviser le nu-propriétaire. Cet avis devrait être suffisant. À moins que le nu-propriétaire veuille contester, là, ce sera à sa charge.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1200 est adopté. L'amendement est adopté. L'article est adopté, tel qu'amendé. L'article 1201.

Mme Harel: "L'usufruitier peut demander au tribunal que des meubles sous séquestre nécessaires à son usage lui soient laissés à la seule charge de les rendre à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est conforme à l'article 466 du Code civil du Bas-Canada et à la proposition de l'office. Il traite du droit de l'usufruitier de demander au tribunal qu'une partie des meubles sous séquestre nécessaires à son usage lui soient laissés à la seule condition de s'engager à les rendre à la fin de l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?

M. Pineau: L'assurance contre le vol ou l'incendie serait à la charge de l'usufruitier. Personnellement, je ne vois pas vraiment pourquoi. S'il facilite le vol, je comprends qu'il soit responsable. S'il met le feu, je comprends qu'il soit responsable. Mais si le bien périt par incendie ou s'il disparaît par vol, l'usufruitier n'en est pas nécessairement responsable et on l'oblige à s'assurer.

Mme Harel: Là, vous êtes, par exemple, à l'article 1202 et nous disposons actuellement de l'article 1201.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

M. Pineau: Ahl Excusez-moi, alors, je vais...

Mme Harel: Mais vos commentaires vaudront.

M. Pineau: ...trop vite.

M. Cossette: Vous nous devancez.

M. Pineau: Je devance.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous allez trop vite, vous.

Le Président (M. Gagnon): Alors, l'article 1201 est adopté. Il n'y a pas d'amendement à cet article.

M. Cassette: Non.

Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons nos travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 15)

(Reprise à 15 h 32)

Mme Harel: Si vous voulez, M. le Président, ou pourrait adopter les articles 1196 et 1197 qui étaient suspendus. Ils ont déjà été adoptés? C'est une question de formulation.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1197 a été adopté, mais sous condition de l'amendement qui va venir, je pense. Est-ce que c'est cela?

Mme Harel: Je vais en faire la lecture. L'amendement consiste à remplacer l'article 1197 par le suivant: "L'usufruitier ne peut contraindre celui qui constitue l'usufruit ou le nu-propriétaire à lui livrer le bien tant qu'il n'a pas fait un inventaire des biens."

Le Président (M. Gagnon): C'est cela. Il a été adopté, mais on n'avait pas la formulation.

M. Cossette: Vous n'aviez pas le texte.

Le Président (M. Gagnon): On n'avait pas le texte.

Mme Harel: Alors, je veux tout simplement vous signaler que l'article va se lire comme suit: "L'usufruitier ne peut contraindre celui qui constitue l'usufruit ou le nu-propriétaire à lui livrer le bien, tant qu'il n'a pas fait un inventaire."

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Cet amendement était adopté et l'article aussi, tel qu'amendé. L'article 1196 a été suspendu.

Mme Harel: L'article 1196 se lirait comme suit: Remplacer l'article 1196 par le suivant: "L'usufruitier fait l'inventaire des biens soumis à son droit comme s'il était administrateur du bien d'autrui, à moins que celui qui a constitué l'usufruit n'ait lui-même

fait l'inventaire ou n'ait dispensé l'usufruitier de le faire. La dispense ne peut être accordée si l'usufruit est successif. L'usufruitier fait l'inventaire à ses frais et en fournit copie au nu-propriétaire."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1196 est adopté. L'article 1196, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1202.

Mme Harel: "L'usufruitier est tenu d'assurer le bien contre les risques usuels, tels le vol et l'incendie, et de payer pendant la durée de l'usufruit les primes de cette assurance. Il est néanmoins dispensé de cette obligation si la prime d'assurance est trop élevée par rapport aux risques."

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. Non, cela va? Le commentaire, je m'excuse.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau s'inspire de la proposition de l'office visant à obliger l'usufruitier à assurer le bien contre les risques usuels. Il s'inscrit dans la philosophie préconisée par le projet de loi qui veut favoriser non seulement l'amélioration du bien sujet à usufruit, mais aussi sa conservation. Cet article est, cependant, plus souple que celui proposé par l'office, car il dispense l'usufruitier de son obligation dans le cas où la prime est trop élevée par rapport aux risques. Des dispositions analogues se retrouvent dans le Code civil allemand et au Code civil suisse.

M. Pineau: M. le Président, j'avais fait un commentaire un peu précoce. L'obligation d'assurer le bien contre les risques usuels tels le vol ou l'incendie, la question est de savoir qui doit l'assumer, si c'est l'usufruitier plutôt que le nu-propriétaire. On propose que ce soit l'usufruitier. Là, il s'agit d'une obligation d'assurance. La question est celle-ci: Est-ce qu'il appartient à l'usufruitier de payer les primes d'une assurance qui est destinée à couvrir le vol et l'incendie, qui peuvent être des cas de force majeure? Le nu-propriétaire est ainsi sûr de retrouver son bien et c'est aux frais de l'usufruitier.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: La philosophie qui a été poursuivie dans cet article était de dire: Étant donné que c'est l'usufruitier qui bénéficie des fruits et revenus, il est normal que ce soit lui qui paie la prime d'assurance, car il ne faut pas oublier qu'il pourrait arriver que le nu-propriétaire actuel ne retrouve pas le bien de son vivant. Ce qu'on s'est dit, c'est que c'est à celui qui bénéficie des fruits et revenus, normalement de payer la prime.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 1202 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1203.

Mme Harel: "En cas de perte, l'indemnité est payée à l'usufruitier qui en donne quittance à l'assureur. "L'usufruitier est tenu d'employer l'indemnité à la réparation du bien, sauf en cas de perte totale, où il peut jouir de l'indemnité."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau, complète le précédent et est conforme à la proposition de l'office. Il traite du paiement et de l'utilisation de l'indemnité. En cas de perte du bien soumis à usufruit, l'indemnité est payée à l'usufruitier qui en donne quittance à l'assureur. L'usufruitier est alors tenu d'employer l'indemnité à la réparation du bien, mais si celui-ci est une perte totale, il peut jouir de l'indemnité comme d'une somme capitale.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? Est-ce que l'article 1203 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1204.

Mme Harel: "L'usufruitier ou le nu-propriétaire peuvent contracter, pour leur compte, une assurance garantissant leur droit. "L'indemnité leur appartient respectivement."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, aussi de droit nouveau, reprend en substance les propositions de l'office tout en les simplifiant. Il traite du droit de l'usufruitier ou du nu-propriétaire de contracter, pour leur compte, une assurance garantissant leur droit.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? Est-ce que l'article 1204 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1205.

Mme Harel: "L'entretien du bien est à la charge de..."

Le Président (M. Gagnon); Je m'excuse. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, en vertu de l'article 1204, l'usufruitier et le nu-propriétaire ont un intérêt assurable. L'usufruitier, qui est obligé d'assurer, doit remettre éventuellement l'indemnité, le produit au nu-propriétaire et le nu-propriétaire pourrait s'assurer lui-même et retirer une indemnité?

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Si vous me le permettez, M. le Président, je vais lire le commentaire supplémentaire d'abord, quitte à fournir une réponse par la suite. Telles que formulées par l'office, les propositions suggérées laissaient entendre que l'usufruitier et le nu-propriétaire ne pouvaient contracter une assurance couvrant leur droit que dans le cas où l'usufruitier était dispensé d'assurer le bien. Même s'il est dispensé d'assurer le bien, l'usufruitier comme le nu-propriétaire a l'intérêt suffisant pour assurer le bien.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ils sont tous les deux assurables. C'est bien sûr qu'ils ne pourraient pas retirer tous les deux une indemnité.

M. Cossette: Prenons un exemple où moi, comme usufruitier, j'ai été dispensé d'assurer le bien, ce que permet l'article, je pense. En ma qualité d'usufruitier, j'assure mon droit à l'usufruit de cette propriété. Je pense que je trouverais facilement un assureur pour assurer mon droit de telle sorte qu'advenant la destruction de la propriété je serai indemnisé pour avoir perdu cet usufruit affectant telle propriété.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce qui veut dire que le nu-propriétaire pourrait assurer seulement dans le cas où l'usufruitier n'assurerait pas, n'aurait pas les moyens ou serait dégagé de cette obligation.

M. Cossette: Le nu-propriétaire a également son intérêt assurable.

Mme Harel: En cas de perte totale, notamment. S'il y a perte totale, c'est l'usufruitier qui empoche l'indemnité.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quitte à la rendre.

Mme Harel: En cas de perte totale, il jouit de l'indemnité. C'est le deuxième alinéa de l'article 1203.

M. Leduc (Saint-Laurent): II doit la rendre.

M. Cossette: II doit la rendre, mais c'est quelque chose de différent dont on parle.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce n'est pas dit, mais...

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Je pense que c'est bien sûr que, dans le cas où l'usufruitier a assuré le bien, le nu-propriétaire n'a pas un intérêt pécuniaire à assurer le bien, parce qu'il est déjà assuré. Dans le cas de dispense, je pense qu'il a intérêt. De plus, je ne pense pas qu'on doive interdire au nu-propriétaire son droit d'assurer le bien; s'il veut avoir une double assurance, ce sera son droit, sa volonté.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, l'article 1204 dit bien "l'usufruitier ou le nu-propriétaire." Ce n'est pas l'un et l'autre. Il ne peut pas y avoir un même intérêt assurable pour l'un et pour l'autre. J'imagine que, si l'usufruitier d'un immeuble contracte une assurance-incendie et garde cet immeuble, le nu-propriétaire n'aura pas d'intérêt assurable à ce moment et vice versa. Si le nu-propriétaire assure, l'usufruitier n'aura pas d'intérêt assurable.

M. Berrouard: Pas nécessairement.

M. Pineau: Ou bien l'intérêt assurable porte-t-il sur le droit d'usufruit ou sur le droit du nu-propriétaire?

M. Leduc (Saint-Laurent): Une question surgit: Qu'est-ce qui va se produire si l'usufruitier n'assure pas en ayant l'obligation d'assurer et que le nu-propriétaire assure et perçoit l'indemnité? Va-t-il être obligé de mettre cette indemnité à la disposition de l'usufruitier ou si l'usufruit aura cessé par le fait de la perte du bien qui faisait l'objet de l'usufruit?

M. Pineau: La perte totale du bien. C'est à 1217.

Mme Harel: La perte totale du bien.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord, mais cela ne solutionne pas ce problème-ci. Dans le cas où le nu-propriétaire n'est pas obligé d'assurer, mais assure et empoche

l'indemnité, est-ce que cette indemnité sera sujette à l'usufruit? Je ne le croirais pas.

M. Cassette: Voulez-vous recommencer l'exemple? Je l'ai perdu.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous avez le cas où l'usufruitier ne prend pas d'assurance.

Mme Harel: II est dispensé.

M. Leduc (Saint-Laurent ): II est dispensé. Le nu-propriétaire en prend une, il y a perte, il encaisse l'indemnité, est-ce que cette indemnité sera sujette à l'usufruit?

M. Cossette: Le nu-propriétaire ne peut qu'assurer sa nue-propriété. Il ne peut pas assurer l'usufruit, ce n'est pas lui. Il n'a pas d'intérêt assurable sauf pour sa nue-propriété. (15 h 45)

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais il va assurer le bien.

M. Cossette: II n'assurera pas le bien, il va assurer sa nue-propriété dans le bien comme l'usufruitier va assurer son usufruit sur tel bien. Il ne peut pas assurer la totalité du bien, il n'en a que l'usufruit.

M. Leduc (Saint-Laurent): À ce moment-là, l'indemnité appartiendrait au nu-propriétaire et l'obligation de mettre ce bien-là à l'usage ou à l'usufruit est terminée.

M. Cossette: Oui, ce qui serait différent dans le cas où l'usufruitier est tenu d'assurer et qu'il assure. Bien, à ce moment-là...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, j'aimerais poser une question à Me Cossette.

Le Président (M. Gagnon): À Me

Cossette.

M. Marx: Supposons qu'il y a un immeuble qui vaut 100 000 $ et que le nu-propriétaire assure l'immeuble. En cas de perte, il va avoir 100 000 $ sur la valeur...

M. Cossette: Si l'usufruitier a l'obligation de l'assurer.

M. Marx: Non, mais s'il n'a pas l'obligation d'assurer, le nu-propriétaire va avoir 100 000 $. D'accord? Comme vous l'avez expliqué, si c'est détruit complètement, ce sera la fin de l'usufruit.

M. Cossette: Si le bien est détruit, oui.

M. Marx: Mais supposons que, sur le même immeuble, il y a l'assurance du nu-propriétaire et l'assurance de l'usufruitier et que c'est détruit complètement. Le nu-propriétaire va avoir ses 100 000 $ et l'usufruitier va avoir un certain montant, parce qu'il en a perdu la jouissance. C'est ça?

M. Cossette: C'est ça, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense que l'obligation pour l'usufruitier d'assurer le bien est très importante pour lui. On règle l'ancien vide qu'on connaissait auparavant. Si le bien était détruit, à ce moment-là, l'usufruit cessait et, même si plusieurs prétendaient que l'usufruitier avait un intérêt assurable, il était absolument impossible pour l'usufruitier d'assurer le bien. Je pense qu'avec cet article-ci on règle ce problème.

M. Cossette: C'est ça.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que, maintenant, l'usufruitier est en mesure de protéger ses droits.

M. Pineau: La compagnie d'assurances ne peut plus le refuser.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est ça. Les compagnies d'assurances ne pourront plus refuser maintenant d'assurer l'usufruitier, ce qu'elles faisaient d'une façon systématique auparavant. Elles disaient: Le seul qui a un intérêt assurable, c'est le nu-propriétaire. Or, je pense que c'est très bien. Évidemment, si l'usufruitier ne prend pas d'assurance, qu'il ne se protège pas, libre à lui. À ce moment-là, l'indemnité appartiendra au nu-propriétaire, si le nu-propriétaire a pris l'assurance.

M. Cossette: C'est bien cela.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1205 est adopté.

Des voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1206.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la première ligne le mot "affectent" par les mots "portent sur".

L'article se lit comme suit: "1206. Les réparations majeures sont celles qui portent sur une partie importante du bien et nécessitent une dépense exceptionnelle, comme celles relatives aux poutres et aux murs portants, au remplacement des couvertures, aux murs de soutènement, aux systèmes de chauffage, d'électricité, de plomberie ou d'électronique et, à l'égard d'un meuble, aux pièces motrices ou à l'enveloppe

du bien."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en définissant la notion de réparations majeures. La définition tient compte des circonstances actuelles et également du fait que l'usufruit peut porter non seulement sur un immeuble, mais aussi sur un meuble.

Il s'inspire de la proposition de l'office et reprend substantiellement le droit actuel énoncé à l'article 469 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à l'article 1206 est adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Et l'article 1206 tel qu'amendé est adopté. Article 1207?

Mme Harel: "1207. L'usufruitier doit aviser le nu-propriétaire de la nécessité de réparations majeures. "Le nu-propriétaire n'est pas tenu de les faire. S'il y procède, l'usufruitier supporte les inconvénients qui en résultent. Dans le cas contraire, l'usufruitier peut procéder et s'en faire rembourser le coût à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article de droit nouveau reproduit en substance, dans un seul article, les articles 134 et 135 du projet de l'office. Cet article s'inscrit dans la philosophie véhiculée en matière d'usufruit visant à favoriser la conservation du bien sujet à usufruit. À cet égard, il impose à l'usufruitier l'obligation d'aviser le nu-propriétaire lorsque des réparations majeures doivent être apportées aux biens. Cependant, l'article n'impose ni à l'un, ni à l'autre l'obligation d'effectuer ces réparations. Néanmoins, à la différence du droit actuel, il permet à l'usufruitier de les faire, si le nu-propriétaire ne les fait pas, et de s'en faire rembourser le coût à la fin de l'usufruit.

Cet article s'inspire de l'article 579 du Code civil de la Louisiane.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté, l'article 1207? Me Pineau? M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, M. le Président, Me Pineau avait une question.

M. Pineau: Mais l'article 1206 a été adopté, M. le Président?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Marx: Oui, mais on peut aborder la question quand même.

M. Pineau: J'ai une question à poser pour mon information. À quoi fait-on allusion en disant: "à l'égard d'un meuble, aux pièces motrices ou à l'enveloppe du bien"? C'est étrange, "à l'égard d'un meuble, aux pièces motrices et à l'enveloppe du bien". Le législateur a des idées derrière la tête, mais elle n'apparaissent pas nécessairement dans le texte.

M. Cossette: Le commentaire dit que... Évidemment, on a toujours reproché au Code civil actuel d'avoir parlé d'usufruit en matière d'immeubles seulement et de ne jamais avoir envisagé le cas des biens meubles.

M. Pineau: Oui.

M. Cossette: Alors, cet article, justement, est dans la veine suggérée, à savoir que l'article 1206 s'applique à la fois aux biens immeubles et aux biens meubles, mais, plus particulièrement, la fin de l'article 1206 s'applique aux biens meubles.

M. Pineau: Aux biens meubles, oui. Alors, les pièces motrices d'un bien meuble, s'il s'agit d'une automobile, c'est le moteur. L'enveloppe du bien, c'est l'emballage.

M. Cossette: L'enveloppe du bien, c'est la carrosserie.

M. Pineau: Le "hood".

M. Cossette: C'est l'expression générale pour...

Le Président (M. Gagnon): Et à l'article 1207, M. le député de Saint-Laurent.

M. Marx: On est à l'article 1206.

M. Leduc (Saint-Laurent): À l'article 1207, si vous le permettez, on indique que le nu-propriétaire n'est pas tenu de faire les réparations majeures. C'est donc un changement très important par rapport à l'ancien code qui l'obligeait...

M. Cossette: On est dans la situation où ni le propriétaire, ni le nu-propriétaire, ni l'usufruitier ne sont tenus de faire ces réparations. Évidemment, l'usufruitier n'était pas encouragé à les faire parce qu'il ne pouvait pas en être remboursé. Alors, aujourd'hui, on pense que l'article 1207, tel que rédigé, va encourager l'usufruitier à les faire parce qu'il pourra s'en faire rembourser le coût à la fin de l'usufruit.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais l'article 468 indiquait que les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire.

M. Cassette: Oui, mais il n'était pas tenu de les faire.

M. Leduc (Saint-Laurent): En vertu de quel article? C'est drôle, je pensais qu'il y était tenu, moi.

M. Berrouard: Le nu-propriétaire n'était jamais tenu de faire les grosses réparations, ne serait-ce que pour le simple fait qu'en pratique il pouvait ne pas avoir le bien de son vivant à la fin de l'usufruit. Alors, il n'a jamais été tenu de faire les grosses réparations.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quel article, cela? C'est drôle, je n'ai pas compris cela.

M. Pineau: II n'y a rien dans le droit actuel. En droit français, j'ai pu lire que le nu-propriétaire a à sa charge les réparations majeures, mais on me dit qu'il ne peut pas y être contraint.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pas le Code civil?

M. Pineau: Mais c'est la même chose ici.

M. Cossette: Je pense que cela va vous rappeler des souvenirs. La seule obligation du nu-propriétaire, c'est de laisser jouir l'usufruitier; il n'en a pas d'autre. Alors, n'ayant que cette obligation, il n'a pas l'obligation de faire les réparations majeures. La doctrine est constante la-dessus.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 468 ne disait pas ce que cela doit dire, même si on dit que les grosses demeurent à la charge du propriétaire, ce n'est pas vrai.

M. Berrouard: C'est-à-dire qu'elles sont à sa charge à lui, mais il n'est pas tenu de les faire. On a donné la même interprétation qu'en droit français.

M. Pineau: C'est cela; c'est le droit français actuel.

M. Berrouard: C'est exact.

M. Pineau: Mais j'ai toujours trouvé cela drôle qu'on soit tenu d'une obligation et qu'on ne puisse pas être contraint. C'est vraiment contraire à tous les principes du droit civil et on maintient cette bizarrerie.

M. Leduc (Saint-Laurent): II trouve cela drôle.

M. Pineau: Pardon?

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire que c'est vrai qu'il y a un gros changement. Auparavant, le nu-propriétaire n'était pas obligé, tandis que, là, il va être obligé de rembourser si elles ont été faites. Alors, l'obligation devient très importante.

M. Cossette: C'est-à-dire qu'il faut quand même lire au deuxième paragraphe de l'article 1207: "Le nu-propriétaire n'est pas tenu de les faire." Alors, il n'est pas tenu de les faire. "S'il y procède, l'usufruitier supporte les inconvénients qui en résultent. Dans le cas contraire, l'usufruitier peut y procéder et s'en faire rembourser le coût à la fin..."

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela fait qu'il est obligé.

M. Pineau: Cela signifie, M. le Président, que, s'il n'est pas tenu de les faire, le bien pourra tomber en ruine et l'usufruitier n'en jouira plus. Le nu-propriétaire récupérera une ruine. Pour la conservation du patrimoine, c'est épatant, ça.

M. Cossette: C'est exact.

Le Président (M. Gagnon): Cela va, M. le député de Saint-Laurent? L'article 1207 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est donc dire que l'article 1207 permet au nu-propriétaire de faire ses grosses réparations et qu'il pourrait décider de les faire. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1207 est adopté. L'article 1208?

Mme Harel: "L'usufruitier est tenu, en proportion de la durée de l'usufruit, des charges ordinaires grevant le bien soumis à son droit et des autres charges normalement payées avec les revenus. "Il est pareillement tenu des charges extraordinaires, comme les impôts spéciaux, lorsqu'elles sont payables par versements périodiques échelonnés sur plusieurs années."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office, règle la répartition des charges. Ainsi, l'usufruitier est tenu, en proportion de la durée de son droit, des charges ordinaires grevant le bien et des autres charges qui sont normalement payées à même les revenus. Il est pareillement tenu des charges extraordinaires, comme les impôts spéciaux, lorsque celles-ci sont

payables par versements périodiques échelonnés sur plusieurs années.

Cet article modifie, cependant, le droit actuel énoncé à l'article 471 du Code civil du Bas-Canada en obligeant l'usufruitier, pour les charges extraordinaires, à payer les versements qui viennent à échéance pendant la durée de son droit, peu importe que la charge ait été imposée avant ou pendant l'usufruit. Actuellement, l'usufruitier n'est tenu de payer des versements périodiques qu'à l'égard des contributions imposées depuis l'ouverture de l'usufruit. Mais, comme le mentionne l'office, cette mesure est plus équitable, car c'est l'usufruitier qui profite des revenus. Le nu-propriétaire n'en ayant aucun, il semblerait lourd de lui imposer cette charge.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1208 est adopté. L'article 1209?

Mme Harel: "L'usufruitier à titre particulier n'est pas tenu au paiement des dettes de la succession. "S'il est forcé, pour conserver l'objet de son droit, de payer une dette, il peut en exiger le remboursement du débiteur immédiatement ou l'exiger du nu-propriétaire à la fin de l'usufruit." (16 heures)

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel tel qu'exprimé à l'article 473 du Code civil du Bas-Canada en édictant que "l'usufruitier à titre particulier n'est pas tenu au paiement des dettes de la succession". Il tient compte, également, des précisions apportées par la doctrine relativement au moment où l'usufruitier à titre particulier peut exiger le remboursement d'une dette qu'il a payée.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: L'article 1209 est une dérogation, si j'ai bien compris, à la règle relative au légataire particulier qui, dans certains cas, peut être tenu... Ne devrait-on pas dire que l'usufruitier à titre particulier n'est aucunement tenu ou n'est tenu en aucun cas, à partir du moment où c'est une dérogation.

Mme Harel: On va le suspendre pour vérification et on y reviendra.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1209 est suspendu. Article 1210?

Mme Harel: "L'usufruitier à titre universel et le nu-propriétaire sont tenus au paiement des dettes de la succession en proportion de leur part dans la succession. "Le nu-propriétaire est tenu du capital et l'usufruitier des intérêts."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel indiqué à l'article 474 du Code civil du Bas-Canada et s'inspire de la proposition de l'office. Il énonce que "l'usufruitier à titre universel ainsi que le nu-propriétaire sont tenus au paiement des dettes de la succession en proportion de leur part dans la succession. Le nu-propriétaire est tenu du capital et l'usufruitier des intérêts."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1210 est adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1211? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "L'usufruitier à titre universel peut payer les dettes de la succession; le nu-propriétaire lui en doit compte à la fin de l'usufruit. "Si l'usufruitier choisit de ne pas les payer, le nu-propriétaire peut faire vendre, jusqu'à concurrence du montant des dettes, les biens soumis à l'usufruit ou les payer lui-même; en ce cas, l'usufruitier lui verse, pendant la durée de l'usufruit, des intérêts sur la somme payée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, qui s'inspire également de la proposition de l'office, reprend en substance le droit actuel. Il complète l'article précédent en édictant que l'usufruitier à titre universel peut payer les dettes de la succession, auquel cas le nu-propriétaire lui en doit compte à la fin de l'usufruit. S'il ne les paie pas, le nu-propriétaire peut faire vendre jusqu'à concurrence du montant des dettes les biens soumis au droit de l'usufruit ou payer lui-même la dette. En ce cas, l'usufruitier lui verse des intérêts sur la somme payée pendant la durée de son droit.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1211 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Article 1212?

Mme Harel: "L'usufruitier est tenu, le cas échéant, des dépens de toute demande en justice se rapportant à son droit d'usufruit. "Si l'action concerne à la fois les droits du nu-propriétaire et ceux de l'usufruitier, les règles relatives au paiement des dettes de la succession entre l'usufruitier à titre universel et le nu-propriétaire s'appliquent à moins que le jugement ne mette fin à l'usufruit. En ce cas, les frais sont partagés également entre l'usufruitier et le nu-propriétaire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, qui s'inspire de celui proposé par l'office, reprend partiellement l'article 475 du Code civil du Bas-Canada relatif au paiement des dépens des demandes en justice qui concernent l'usufruit. Il complète, cependant, les règles actuelles en prévoyant le partage des dépens dans les cas où l'action intéresse à la fois les droits de l'usufruitier et ceux du nu-propriétaire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1212 est adopté. Article 1213?

Mme Harel: "L'usufruitier doit prévenir le nu-propriétaire de toute usurpation commise par un tiers sur le bien ou de toute autre atteinte aux droits du nu-propriétaire, faute de quoi il est responsable de tous les dommages qui peuvent en résulter, comme il le serait de dégradations commises par lui-même.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, qui oblige l'usufruitier à prévenir le nu-propriétaire de toute usurpation ou atteinte aux droits de ce dernier, est conforme au droit actuel, repris d'ailleurs par l'office.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1214?

Mme Harel: "Ni le nu-propriétaire ni l'usufruitier ne sont tenus de remplacer ce qui est tombé de vétusté. "L'usufruitier dispensé d'assurer le bien n'est pas tenu de remplacer ou de payer la valeur du bien qui périt par cas fortuit."

Le Président (M. Gagnon): Commentai- re.

M. Cossette: Cet article reprend le droit actuel exprimé à l'article 470 du Code civil du Bas-Canada en n'obligeant ni le nu-propriétaire, ni l'usufruitier à remplacer ce qui est tombé de vétusté. Il tient compte des nouvelles dispositions relatives aux assurances en prévoyant que l'usufruitier dispensé d'assurer le bien n'est pas tenu de remplacer ou de payer la valeur du bien qui périt par cas fortuit. Dans le cas contraire, les nouvelles dispositions de l'article 1203 relatives aux assurances s'appliquent.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1214 est-il adopté? Me Pineau.

M. Marx: Commentaire du Barreau.

M. Pineau: Je lis le commentaire du Barreau, M. le Président, concernant le deuxième alinéa. La rédaction de cet alinéa laisse supposer que l'usufruitier qui assure le bien est tenu de le remplacer ou d'en payer la valeur. Or, le deuxième alinéa de l'article 1203 énonce qu'en cas de perte totale l'usufruitier peut jouir de l'indemnité; il n'est donc pas tenu de remplacer le bien. Le deuxième alinéa du présent article aurait donc avantage à être précisé.

Mme Harel: Mais il faut qu'il en rende compte à la fin de l'usufruit. C'est comme si le commentaire du Barreau laissait entendre, comme je l'avais fait remarquer précédemment, qu'il pouvait jouir de l'indemnité sans avoir à en rendre compte à la fin de l'usufruit.

M. Pineau: Remarquez que je ne comprends pas très bien le commentaire du Barreau.

Mme Longtin: Je pense que ce sont deux situations distinctes. L'article 1203 traite de l'indemnité qui est versée en remplacement du bien par l'assureur, laquelle doit être utilisée pour réparer ou remplacer, alors que l'article 1214 traite du cas où il est dispensé d'assurer le bien.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

Mme Longtin: II me semble que ce sont deux choses.

M. Pineau: Je n'ai pas très bien saisi le commentaire du Barreau, en effet. Je pense qu'il s'agit de deux questions tout à fait distinctes. Et, de toute façon, on ne peut pas, par un raisonnement a contrario d'une disposition antérieure, tirer une règle autre que celle qui est exprimée clairement ailleurs.

M. Cassette: Oui. Il faut lire les deux pour savoir quel est...

M. Pineau: C'est cela, pour adjuger.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1214 est adopté. L'article 1215?

Mme Harel: II se lit comme suit: "Si l'usufruit porte sur un troupeau qui périt entièrement par cas fortuit, l'usufruitier dispensé d'assurer le bien est tenu de rendre compte au nu-propriétaire des cuirs ou de leur valeur. "Si le troupeau ne périt pas entièrement, l'usufruitier est tenu de remplacer, à concurrence du croît, les animaux qui ont péri."

M. Cossette: Cela, c'est du beau droit.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article traite, comme les articles 477 et 478 du Code civil du Bas-Canada, de la perte de l'objet de l'usufruit lorsque celui-ci porte sur un troupeau. Il tient compte des nouvelles dispositions relatives aux assurances.

M. Pineau: C'est le droit de l'an 2000, M. le Président?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bucolique.

Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article 1215? M. le député D'Arcy McGee.

M. Cossette: C'est du droit romain.

M. Marx: C'est du droit romain que l'on veut garder en vigueur encore.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

M. Marx: Je veux juste poser une question, M. le Président. Est-ce que les cuirs ont encore une valeur substantielle, un troupeau de vaches à lait?

M. Leduc (Saint-Laurent): Certain!

M. Cossette: Vous pouvez vous faire un beau manteau avec cela!

Mme Harel: C'est comme preuve. M. Marx: Cela vaut combien?

M. Leduc (Saint-Laurent): Peut-être que cela risque aussi d'avoir brûlé.

M. Cossette: Cela coûte plus cher pour traiter la peau que...

Le Président (M. Gagnon): Que la valeur.

M. Cossette: ...d'acheter la peau elle-même.

M. Marx: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1216?

De la fin de l'usufruit

Mme Harel: II se lit comme suit: "L'usufruit prend fin: "1° Par l'arrivée du terme; "2° Par le décès de l'usufruitier ou par la dissolution de la personne morale; "3° Par la réunion des qualités d'usufruitier et de nu-propriétaire dans la même personne, sans préjudice du droit des tiers; "4° Par la déchéance du droit, son abandon ou sa conversion en rente; "5° Par le non-usage pendant trente ans."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énumère les causes qui mettent fin à l'usufruit, outre les causes traditionnelles telles la mort de l'usufruitier: la réunion des qualités d'usufruitier et de nu-propriétaire, l'arrivée du terme ou le non-usage pendant 30 ans. L'article considère l'abandon du droit ou sa conversion en rente comme de nouvelles causes qui mettent fin à l'usufruit. Ces causes sont traitées spécifiquement aux articles 1223, 1224 et 1225 du projet. Cet article est complété par les articles 1217 à 1220 du projet.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1216 est adopté. J'appelle l'article 1217.

Mme Harel: "L'usufruit prend fin également par la perte totale du bien sur lequel il est établi, sauf si le bien est assuré. "En cas de destruction partielle du bien, l'usufruit subsiste sur le reste."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office, reprend en susbtance le droit actuel. Il complète aussi l'article précédent en édictant que la perte totale du

bien met fin à l'usufruit, mais que la destruction partielle laisse subsister l'usufruit sur le reste.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Mme Harel: Je crois qu'à l'article 1217 il pourrait y avoir un amendement qui clarifierait, qui peut en ce cas assurer le bien. On y dit: "Sauf si le bien est assuré." On ajouterait: "par l'usufruitier".

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez l'amendement?

Mme Harel: L'amendement consiste à ajouter à la fin du premier alinéa les mots "par l'usufruitier".

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1218.

Mme Harel: Un instant! Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article est adopté tel qu'amendé. J'appelle l'article 1218.

Mme Harel: "L'usufruit ne prend pas fin par l'expropriation du bien sur lequel il est établi. L'indemnité est remise à l'usufruitier à charge d'en rendre compte à la fin de l'usufruit."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau précise ce qui arrive s'il y a expropriation du bien sur lequel l'usufruit est établi. En ce cas, l'indemnité est remise à l'usufruitier à charge d'en rendre compte à la fin de l'usufruit. L'indemnité d'expropriation est un bien de nature capitale et l'usufruitier peut jouir des revenus produits.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 1218 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1219.

Mme Harel: "L'usufruit accordé jusqu'à ce qu'un tiers ait atteint un âge déterminé dure jusqu'à cette date, encore que le tiers soit mort avant l'âge fixé."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré également de celui de l'office, complète les articles précédents. Il reprend l'article 482 du Code civil du Bas-Canada en édictant que l'usufruit accordé jusqu'à ce qu'un tiers ait atteint un âge déterminé dure jusqu'à cette date même si celui-ci est mort avant.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1220.

Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la deuxième ligne du premier alinéa, le mot "survivant". "L'article 1220 se lit comme suit: "L'usufruit créé au bénéfice de plusieurs usufruitiers successivement prend fin avec le décès du dernier usufruitier ou avec la dissolution de la dernière personne morale. "S'il est conjoint, l'extinction de l'usufruit à l'égard de l'un des usufruitiers profite au nu-propriétaire."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. Excusez-moi.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau complète aussi les articles précédents. Il s'inspire de l'article 144 proposé par l'office. Il établit que l'usufruit créé au bénéfice de plusieurs usufruitiers successivement prend fin avec le décès du dernier usufruitier ou avec la dissolution de la dernière personne morale. Il établit, de plus, qu'en cas d'usufruit conjoint l'extinction de l'usufruit à l'égard de l'un des usufruitiers profite au nu-propriétaire.

Cette proposition est contraire à celle de l'office qui faisait profiter le cousufruitier de l'extinction, mais elle vise à mieux respecter la nature de l'usufruit. Celui-ci est un démembrement de la propriété essentiellement partiel et temporaire, mais la propriété complète demeure la meilleure forme de propriété qu'il paraît préférable de favoriser plutôt que de maintenir un démembrement. (16 h 15)

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, le Barreau, à la page 31, a soulevé le problème des cent années au maximum. L'usufruit prend fin au bout de cent ans même si le dernier usufruitier décède après que l'usufruit a existé cent ans. C'est ce que le Barreau vaudrait, je pense.

M. Berrouard: On a corrigé la situation à l'article 1178 pour préciser "et même s'il est successif".

M.Pineau: L'article 1178.

Mme Longtin: Au premier alinéa.

M. Berrouard: On a apporté un amendement en ce sens.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'amendement est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1221.

Mme Harel: "À la fin de l'usufruit, l'usufruitier rend au nu-propriétaire, dans l'état où il se trouve, le bien sur lequel porte son usufruit. "Il répond de la perte ou de la détérioration survenue par sa faute ou ne résultant pas de l'usage normal du bien."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau reprend l'article 142 proposé par l'office. Il traite de l'obligation de l'usufruitier de rendre au nu-propriétaire à la fin de l'usufruit le bien sur lequel porte son usufruit. Celui-ci le rend dans l'état où il se trouve, mais il répond de sa perte ou de sa détérioration sauf si elle est survenue sans sa faute ou résulte de l'usage normal du bien.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1222.

Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la troisième ligne du premier alinéa, le mot "déclaré".

L'article se lit donc comme suit: "L'usufruitier qui abuse de sa jouissance, qui commet des dégradations sur le bien ou le laisse dépérir ou qui, de toute autre façon, met en danger les droits du nu-propriétaire, peut être déchu de son droit. "Le tribunal peut, suivant la gravité des circonstances, prononcer l'extinction absolue de l'usufruit, avec indemnité payable immédiatement ou par versements au nu-propriétaire ou sans indemnité. Il peut aussi prononcer la déchéance des droits de l'usufruitier en faveur d'un usufruitier conjoint ou successif, ou encore imposer des conditions pour la continuation de l'usufruit. "Les créanciers de l'usufruitier peuvent intervenir à la demande pour la conservation de leurs droits; ils peuvent offrir la réparation des dégradations commises et des garanties pour l'avenir."

Le Président (M. Gagnon); Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de celui de l'office, reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 480 du Code civil du Bas-Canada. Il traite de la possibilité pour l'usufruitier d'être déchu de son droit s'il abuse de sa jouissance. Il élargit, cependant, les pouvoirs du tribunal en lui permettant, en outre de prononcer l'extinction de l'usufruit avec ou sans indemnité, de prononcer la déchéance des droits de l'usufruitier en faveur d'un usufruitier conjoint ou successif ou encore d'imposer des conditions pour la continuation de l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1223.

Mme Harel: "Un usufruitier peut abandonner tout ou partie de son droit. "En cas d'abandon partiel, le tribunal, à défaut d'entente, fixe les nouvelles obligations de l'usufruitier en tenant compte notamment de l'étendue du droit, de sa durée ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau constitue une autre mesure préconisée dans le projet pour favoriser la conservation du bien sujet à usufruit. Dans certains cas, en effet, les charges de l'usufruitier peuvent être trop lourdes pour lui. C'est notamment le cas des personnes âgées qui ne peuvent plus, en raison de leur âge, entretenir le bien. Au lieu dès lors d'attendre que les manquements de l'usufruitier à ses obligations constituent un abus de jouissance et que le nu-propriétaire

demande la cessation de l'usufruit, nous avons cru opportun de permettre à l'usufruitier d'abandonner son droit partiellement ou totalement. Si l'abandon est partiel, le tribunal fixera les nouvelles obligations de l'usufruitier en tenant compte notamment de l'étendue du droit, de sa durée, ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés.

Comme commentaire supplémentaire, il faudrait ajouter que cet article s'inspire du droit civil de la Louisiane.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: N'y a-t-il pas eu un amendement au deuxième alinéa en cas d'abandon partiel et à défaut d'entente? Non? J'ai cru.

Le Président (M. Gagnon): À l'article 1222?

M. Cossette: À l'article 1222? M. Pineau: À l'article 1223?

Le Président (M. Gagnon): À l'article 1223.

M. Pineau: À l'article 1223, au deuxième alinéa. J'ai cru lire cela quelque part.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin. Adopté?

Mme Longtin: Non, non. C'est juste, peut-être, une question de forme, de formulation plus élégante.

M. Pineau: C'est probablement moi qui avais fait l'amendement sur mon texte. J'ai cru l'avoir vu quelque part.

Mme Harel: Alors, ce serait quoi, la correction?

Mme Longtin: Cela pourrait être: "En cas d'abandon partiel et à défaut d'entente, le tribunal fixe..." ce qui éviterait de hacher...

Le Président (M. Gagnon): Nous allons le formaliser. Alors, vous ajoutez "et...

Mme Harel: "Et, à défaut d'entente, le tribunal fixe..."

Le Président (M. Gagnon): Bon, alors, c'est un amendement qui va nous être livré. Cet amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. L'article 1224?

Mme Harel: "1224. L'abandon total est opposable au nu-propriétaire à compter du jour de sa signification; l'abandon partiel est opposable à compter de la demande en justice ou de l'entente entre les parties".

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau, complète le précédent. Il règle le sort des obligations de l'usufruitier en précisant à partir de quel moment l'abandon est opposable au nu-propriétaire. Dans le cas d'un abandon total, il lui sera opposable à compter du jour de sa signification et, dans le cas d'un abandon partiel, à compter de la demande en justice ou de l'entente entre les parties.

Le Président (M. Gagnon): Ça va.

L'article 1224 est adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): À l'article 1225 il y a un amendement.

Mme Harel: Oui, qui consiste à insérer, à la deuxième ligne du premier alinéa, avant le mot "droit", le mot "le" de façon que l'article se lise comme suit: "1225. L'usufruitier qui éprouve des difficultés sérieuses à remplir ses obligations a le droit d'exiger du nu-propriétaire ou de l'usufruitier conjoint ou successif la conversion de son droit en rente. "À défaut d'entente, le tribunal, s'il constate le droit de l'usufruitier, fixe la rente en tenant compte, notamment, de l'étendue du droit, de sa durée ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés".

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M- Cossette: Cet article de droit nouveau constitue une autre mesure qui vise à favoriser la conservation du bien sujet à usufruit. Il permet à l'usufruitier qui éprouve des difficultés sérieuses à remplir ses obligations d'exiger du nu-propriétaire ou de l'usufruitier conjoint ou successif la conversion de son droit en rente viagère. Si les parties ne s'entendent pas le tribunal, après avoir constaté le droit de l'usufruitier, fixera la rente en tenant compte notamment de l'étendue du droit, de sa durée ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que ce n'est pas une exigence importante si le nu-propriétaire préférait ne pas payer cette rente? Pourquoi pourrait-on l'obliger? Il n'a pas le choix, si je comprends bien. Il peut

avoir de très bonnes raisons de ne pas vouloir convertir l'usufruit en rente.

M. Cossette: C'est-à-dire qu'on lui en faitune obligation. À ce moment-là, il va récupérer la totalité de la propriété, si on peut dire. Il va joindre à sa nue-propriété l'usufruit, de telle sorte que, s'il a un montant mensuel à fournir à une personne, il pourra le faire.

M. Leduc (Saint-Laurent); Je comprends, mais on change drôlement les règles du jeu. Il y a une stipulation, il y a un bien qui est donné en usufruit et, là, on change les règles du jeu sans le consentement du constituant. On décide que maintenant ce sera une rente plutôt que l'exercice de l'usufruit sur un bien. Je trouve que cela va très loin. Où s'est-on inspiré pour établir une règle comme celle-ci? L'office de révision ne l'a pas suggérée et il n'y avait rien auparavant au Code civil.

M. Berrouard: Je pense que nous nous sommes inspirés de M. Carbonnier. Je pense qu'il faut bien préciser, cependant, qu'il y a certaines conditions à remplir pour qu'on puisse demander la conversion. Il faut quand même que l'usufruitier éprouve des difficultés sérieuses à remplir ses obligations et à partir de ce moment-là le droit même du nu-propriétaire est en danger. Si on redonne le droit complet au nu-propriétaire et si on fixe la rente en tenant compte de l'étendue du droit, de sa durée, ainsi que des fruits et revenus qui en sont tirés, je pense que le nu-propriétaire ne peut pas être lésé. Je pense qu'il y va même de son intérêt, parce qu'il retrouve son droit complet sur le bien.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est ce que vous dites. Je ne sais pas si le nu-propriétaire serait tellement intéressé, dans certains cas, à convertir l'usufruit en rente. Encore, ici, on a le bon et le mauvais, la règle du bon et du mauvais. Le bon, c'est l'usufruitier et le mauvais, c'est le nu-propriétaire. Alors, l'usufruitier, lui, a le droit, à un moment donné, s'il est mal pris, de convertir. Mais, si le nu-propriétaire est mal pris, lui, il n'a pas le droit de faire quoi que ce soit. Il est obligé de maintenir la règle qui a été établie au départ, donc, le maintien du bien en usufruit. Cela me semble une règle exorbitante.

M. Berrouard: Je ne crois pas que la philosophie qui a été poursuivie dans cet article est de dire qu'il y en a un bon et l'autre mauvais. Je pense qu'on a privilégié, dans tout le domaine de l'usufruit, une communauté d'intérêts entre l'usufruitier et le nu-propriétaire plutôt qu'un antagonisme d'intérêts et on a voulu favoriser la conservation du bien. C'est une des conséquences de cette philosophie que l'on retrouve en matière d'usufruit, une nouvelle philosophie. Mais je pense qu'il y va de l'intérêt des deux parties.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous le permettez...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent); ...simplement pour dire que, si le constituant avait voulu cette conversion, je pense qu'il l'aurait prévue. Je le répète, on change les règles du jeu durant la partie. Cela me semble exorbitant.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Juste sur le plan du sens commun, si l'usufruitier obtient, finalement, la jouissance d'un bien qui devient une charge financière excessive, pour lui - je pense, par exemple, à l'usufruit d'une maison à Mont-Royal ou plutôt à Saint-Laurent, dans le comté de Saint-Laurent -...

M. Leduc (Saint-Laurent): Mont-Royal!

Mme Harel: ...qui nécessite des dépenses qui excèdent de loin ses revenus, alors, il y a là matière à aller devant le tribunal pour obtenir une juste compensation, parce que cela excède de loin les possibilités de la personne de remplir ses obligations. En quoi cela pénalise-t-il le nu-propriétaire? En quoi une règle comme celle-là pénalise-t-elle le nu-propriétaire? Il n'a pas, de toute façon, la jouissance du bien tant que dure l'usufruit.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais s'il préfère, lui, maintenir l'usufruit plutôt que de payer une rente, j'en suis là-dessus. Il pourrait avoir de très bonnes raisons pour dire: Écoutez, je préfère le statu quo. Mais, là, on ne lui permet pas de maintenir le statu quo. Il va être obligé d'accepter cette conversion. Évidemment, si vous me parlez d'une belle propriété à Mont-Royal dont la personne ne veut plus avoir la jouissance, ni l'usage, bien sûr que je n'aurais pas d'objection personnellement. Mais ce ne serait certainement pas dans ces cas. À ce moment, ils vont certainement s'entendre. La personne, disons, est trop âgée ou a perdu toute autonomie et elle veut aller demeurer ailleurs, il y a toujours la possibilité, d'ailleurs, dans ce cas, que l'usufruit cesse.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. M. Pineau: M. le Président, le Barreau

voudrait que le tribunal ait toute discrétion. Donc, il va tout à fait à l'encontre de ce que vient de dire le député de Saint-Laurent. Or, je voudrais quand même attirer l'attention sur le point suivant: le tribunal doit statuer sur le caractère sérieux des difficultés. Donc, c'est un critère. je crois que, contrairement à l'avis du Barreau, il est bon qu'il y ait un tel critère pour qu'effectivement le tribunal n'ait pas de limite à son pouvoir d'appréciation.

Je crois que cela restreint quelque peu les craintes du député de Saint-Laurent, car il faudra établir le caractère sérieux des difficultés à remplir les obligations.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette. (16 h 30)

M. Cossette: On a donné des exemples avec des propriétés dans la ville de Saint-Laurent et dans la ville de Mont-Royal. Ce n'est peut-être pas le meilleur endroit ou le meilleur exemple à donner. Je pense, par exemple, à deux personnes âgées qui ont l'usufruit d'une terre agricole. Ces personnes sont devenues, à toutes fins utiles, impotentes. Elles ne peuvent plus cultiver et, à ce moment, elles laisseront sans doute la terre aller en friche, si l'on veut. Pourquoi le nu-propriétaire ne la récupérerait-il pas immédiatement quitte à continuer, lui, à l'exploiter et à la cultiver convenablement? Autrement, la terre va devenir en friche et au moment où il la reprendra, au décès des usufruitiers, cela va lui coûter plus cher pour la reprendre que de payer une rente raisonnable parce que, quand il s'agit de personnes âgées, la rente sera calculée en fonction de la possibilité de vie de ces personnes.

M. Leduc (Saint-Laurent): À supposer que votre bonhomme soit paresseux et qu'il ne veuille pas la terre.

M. Cossette: Le tribunal appréciera. Si c'est de la paresse, c'est une autre affaire. Il n'y a pas de raison sérieuse. Il n'y a pas de difficulté sérieuse. Le fainéant, je ne pense pas qu'il soit bien accueilli par le tribunal s'il vient dire: Cela me tanne de jouir de mon usufruit.

M. Leduc (Saint-Laurent): II peut dire: Moi, je préfère maintenir l'usufruit plutôt que de payer une rente. Tout de même, il s'agit de débourser.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela ne va pas trop, mais en tout cas!

M. Marx: Étant donné que le député de Saint-Laurent est d'accord...

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à l'article 1225 est adopté?

M. Cossette: S'il s'agit de percevoir des loyers à Mont-Royal ou à Saint-Laurent, je pense que ce serait difficile d'invoquer des difficultés sérieuses à ce moment.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1225 est adopté tel qu'amendé?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1226?

De l'usage

Mme Harel: "L'usage est le droit de se servir temporairement du bien d'autrui et d'en percevoir les fruits et revenus, - l'amendement consiste à supprimer le mot "les" devant le mot "revenus" - mais jusqu'à concurrence des besoins de l'usager et, le cas échéant, des personnes qui habitent avec lui ou sont à sa charge."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article définit le droit d'usage comme "le droit de se servir temporairement du bien et d'en percevoir les fruits et revenus, mais jusqu'à concurrence des besoins de l'usager et, le cas échéant, des personnes qui habitent avec lui ou sont à sa charge." Il reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 487 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office à deux exceptions près. D'abord, il ne retient plus la notion de droit d'habitation. Actuellement, le droit d'usage prend le nom d'habitation quand il est applicable à une maison. Cette notion, toutefois, est plus ou moins correcte et restrictive car le droit peut autant porter sur une maison que sur un immeuble commercial, par exemple. Ensuite, la notion de famille n'a pas été reprise. Nous avons préféré utiliser une expression plus large et plus compréhensive.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1226 est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. L'article 1227?

Mme Harel: "Le droit d'usage est incessible et insaisissable, à moins que la convention des parties ne prévoie le contraire ou que le tribunal ne l'autorise dans l'intérêt de l'usager après avoir constaté que le propriétaire ne subit aucun préjudice."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article modifie le droit actuel exprimé aux articles 494 et 497, ainsi que la proposition de l'office. Ainsi, tout en réaffirmant le principe que le droit d'usage est incessible, il précise qu'il est aussi insaisissable et prévoit, contrairement au droit actuel et à l'office, qu'une convention peut stipuler le contraire et que le tribunal peut autoriser la cession du droit dans l'intérêt, de l'usager ou sa saisie après avoir constaté que le propriétaire ne subit aucun préjudice.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

L'article 1227 est adopté. M. le député de

D'Arcy McGee. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce l'article 1227?

M. Pineau: C'est un pouvoir très large accordé au tribunal, le droit de céder, le droit d'usage restreint.

M. Leduc (Saint-Laurent): Encore l'intrusion du tribunal dans les conventions. Moi, j'avais une question ici: Pourquoi permettre au tribunal de l'autoriser? Cela veut dire que les conventions qu'on signe maintenant, cela ne vaut pas cher.

M. Cossette: De la même façon que, lorsque vous dites dans une convention que tel bien est insaisissable, le tribunal peut venir dire: Dans les circonstances, ce ne l'est pas. Je pense que le Code de procédure civile va jusque-là.

M. Leduc (Saint-Laurent): Aujourd'hui on ne sait plus si les contrats doivent être respectés ou non. On a vu, d'ailleurs, ce qui s'est passé avec la loi 70 et d'autres. On peut briser n'importe quel contrat aujourd'hui; alors, on fait exactement la même chose ici.

Mme Harel: Est-ce un commentaire pertinent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Très. Mme Harel: Sur l'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): On va revenir à l'interprétation.

Mme Harel: C'est une question d'interprétation.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Quelqu'un a-t-il une réponse à donner à Me Pineau et au député de Saint-Laurent qui ont mentionné que c'était un droit très large donné au tribunal? Non? Pas Me Pineau. M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Pour quelle raison donne-t-on ce pouvoir?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Le droit d'usage pouvant, entre autres, être accordé par le tribunal, peut-être qu'en matière matrimoniale où il y aurait un droit d'usage sur l'habitation ou les meubles, ce droit serait incessible; mais, en créant le droit, il serait toujours possible pour le tribunal de voir qu'il n'y a vraiment aucun préjudice subi. Si, par exemple, le conjoint se trouve absent pour une longue période, qu'il est propriétaire de l'immeuble et que, par ailleurs, celui qui bénéficie du droit d'usage est placé dans des circonstances où il ne peut plus en bénéficier, il y aurait possibilité d'une cession avec autorisation du tribunal pour cette période. Il n'y a pas eu de convention ici. Ce serait un des cas possibles.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela n'irait-il pas à l'encontre des conventions des parties? Si l'usage est personnel - c'est ce qu'on comprend - les droits d'usage et d'habitation étant des droits personnels, cela veut donc dire que, si la personne n'est plus en mesure d'exercer ce droit, le droit d'usage ou d'habitation se terminerait. Il finirait à ce moment et il est bien sûr que le nu-propriétaire pourrait avoir la jouissance du bien. Si on permet de céder ce droit, c'est donc qu'on permettrait au tribunal de continuer ce droit d'usage ou d'habitation. Cela me semble aller à l'encontre des conventions des parties, si je comprends bien l'article. Est-ce bien ce qu'il veut dire?

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: D'abord, il faut que ce soit dans l'intérêt de l'usager et, en second lieu, il faut aussi que le propriétaire ne subisse aucun préjudice. Je pense que l'exemple de Mme Longtin est intéressant. Prenons comme exemple le cas d'une personne âgée qui a un droit d'usage. Elle est rendue à 76 ans et n'est plus autonome. Évidemment, ce droit d'usage pourrait lui avoir été concédé sur la propriété pour lui éviter d'avoir à payer un loyer ailleurs. À ce moment, n'étant plus autonome et ayant à payer un loyer pour être logée ailleurs et obtenir les soins requis par son état, je pense que le tribunal serait bienvenu d'autoriser cette personne à céder son droit d'usage, moyennant considérations.

M. Leduc (Saint-Laurent): Auparavant, est-ce que le nu-propriétaire n'aurait pas pu ravoir l'usage de ce bien? Puisqu'on stipule

qu'il sera personnel, c'est donc qu'on entend le mettre à la disposition de cette personne. Si cette personne, par perte d'autonomie ou pour d'autres raisons, est incapable d'en jouir, on peut supposer qu'à ce moment le droit cesse. C'est ce que j'ai toujours compris du droit d'habitation ou du droit d'usage. C'est attaché à la personne.

Si la personne n'est plus en mesure d'en jouir, je pense que le droit cesse et je suppose que le nu-propriétaire ou le constituant a bien voulu que cela soit strictement pour la période où la personne pouvait en jouir.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Le droit d'usage n'est pas un droit personnel, mais un droit réel. Par ailleurs, on peut parler de convention, mais il est bien sûr qu'en matière de droit réel, même si on crée un droit réel par convention et qu'on l'enregistre, ce droit est saisissable dans tous les cas. Si on n'a pas voulu qu'il soit insaisissable dans le cas de l'usage, c'est que dans certaines circonstances on peut comprendre qu'il ne soit pas saisissable. Si, par exemple, mon père m'a laissé une maison à la charge d'un droit d'usage parce qu'il veut demeurer dans une chambre chez moi, on comprend très bien à ce moment-là que ce droit est insaisissable. On verrait très mal de faire vendre ce droit-là et qu'un étranger vienne habiter la maison. Par contre, si l'usage porte sur un immeuble commercial, par exemple, et qu'on en tire des revenus et des fruits, je pense qu'on pourrait, dans ce cas-là, saisir ce droit; sinon, on pourrait priver les créanciers d'une partie importante de leurs droits, de leurs garanties.

M. Leduc (Saint-Laurent): Évidemment, si on obtient une garantie sur un bien qui fait l'objet d'un droit d'usage ou d'habitation, on sait à quoi s'attendre. Si c'est antérieur, cela ne s'applique pas. Si c'est postérieur, on connaît les règles du jeu. Si je prête sur un bien qui fait l'objet d'un droit d'usage ou d'habitation, je sais à quoi m'attendre. Il ne faudrait pas parler de garantie dans ce cas-là. Sûrement pas.

M. Berrouard: Une garantie personnelle.

M. Leduc (Saint-Laurent): II connaît les règles du jeu, il savait à quoi s'attendre. Alors, je ne pense pas qu'il puisse s'en plaindre.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Dans le droit d'usage, on comprend le droit d'habitation, n'est-ce pas? Lorsqu'on consent un droit d'habitation, je comprends bien qu'il s'agit d'un droit réel, mais bien souvent cela peut être un droit réel consenti intuitu personae. Cette personne aurait la possibilité à ce moment-là - ou le tribunal pourrait l'y autoriser - de céder son droit d'habitation à une tierce personne.

Mme Harel: Compte tenu des circonstances.

M. Pineau: Justement, c'est cela. On accorde un pouvoir au tribunal, mais aucune balise. Le tribunal peut faire ce qu'il veut. C'est un peu cela que l'on retrouve un peu partout. Aucune balise.

Mme Harel: II y en a deux, en fait. C'est l'intérêt de l'usager et l'absence de préjudice pour le propriétaire. S'il y a encore des enfants ou des personnes à charge et que l'usufruitier doit faire un séjour prolongé dans un établissement de soins psychiatriques ou autres...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1227 dit bien que "le droit d'usage est incessible et insaisissable à moins que la convention des parties ne prévoie le contraire ou que le tribunal ne l'autorise." Donc, si les parties ont convenu que c'était incessible, cela demeure incessible. D'accord?

M. Pineau: Si elles ont convenu que c'était cessible, il n'y a pas de problème.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, si elles ont convenu que c'était incessible, c'est incessible.

M. Pineau: Ah non! À moins que le tribunal ne l'autorise.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah. D'accord.

M. Berrouard: On présente comme principe le fait que le droit d'usage est incessible et insaisissable à deux exceptions près: à moins que la convention des parties ne prévoie le contraire, ce qui va de soi, et à moins que le tribunal ne l'autorise dans l'intérêt de l'usager et s'il n'y a pas de préjudice pour le propriétaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): II ne sera donc plus possible aux parties de rédiger une convention dans laquelle il sera dit que c'est un droit réel - entendons-le comme on veut, mais comme le disait Me Pineau, c'est sûr que c'est attaché à une personne - qui est absolument relié ou rattaché à cette personne. Si vous me dites cela, je ne peux pas être d'accord avec cela.

Mme Harel: À ce moment-là, Me Longtin, peut-être pourrions-nous introduire que cela soit à défaut d'une convention entre les parties. À défaut de convention, le tribunal pourrait l'autoriser.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous comprendrez que le droit d'usage ne veut plus rien dire ici, c'est pratiquement de l'usufruit. Je veux tout de même qu'il y ait une différence entre les deux.

Mme Harel: S'il y a une convention au contraire, le tribunal ne pourrait pas l'autoriser. Mais, à défaut de convention, le tribunal pourrait l'autoriser. (16 h 45)

Le Président (M. Gagnon): Cela irait dans ce sens? M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Peut-on suspendre et attendre l'amendement?

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites que vous suggéreriez que cela demeure...

Mme Harel: À défaut de convention, que le tribunal puisse l'autoriser.

M. Pineau: S'il y a une convention disant que c'est incessible, le tribunal ne peut pas intervenir. S'il n'y a pas de convention disant que c'est incessible, le tribunal peut intervenir. C'est le texte actuel.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela. Le Président (M. Gagnon): D'accord?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire qu'il serait possible de stipuler l'incessibilité.

M. Cossette: C'est cela. Mme Harel: C'est cela.

M. Leduc (Saint-Laurent); Parfait. Je suis d'accord avec cela.

Mme Longtin: C'est-à-dire que le droit étant incessible, la convention peut le prévoir cessible. Ce qui serait ajouté, c'est qu'elle pourrait exclure, finalement, la possibilité de recourir au tribunal.

M. Leduc (Saint-Laurent); D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que nous suspendons l'article pour attendre l'amendement?

Des voix: D'accord.

Mme Harel: Moi, M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Nous suspendons nos travaux pour cinq minutes?

La sous-commission des institutions suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 16 h 48)

(Reprise à 19 h 38)

Le Président (M. Gagnon): La sous-commission des institutions se réunit pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens. Lors de la suspension de nos travaux, nous en étions à l'article 1027.

Une voix: 1227.

Le Président (M. Gagnon): 1227. Je suis perdu dans mes chiffres. Est-ce qu'il était suspendu? L'article 1227 était suspendu. Est-ce qu'on est prêt maintenant? Non. Article 1228?

Mme Harel: "L'usager dont le droit porte sur une partie seulement d'un immeuble peut utiliser les installations destinées à l'usage commun."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassettes Cet article de droit nouveau reprend en substance l'article 156 proposé par l'office. Il précise le droit de l'usager de se servir des installations communes lorsque son droit d'usage porte sur une partie seulement d'un immeuble. Comme le note l'office, l'article apporte une précision de nature à prévenir certains litiges qui pourraient naître à l'occasion des rapports entre le nu-propriétaire et l'usager. Cet article s'inspire de l'article 777 du Code civil suisse.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article 1229?

Mme Harel: "L'usager qui retire tous les fruits et revenus du bien ou qui occupe la totalité de l'immeuble est tenu pour le tout aux frais de production, aux réparations d'entretien et au paiement des charges, de la même manière que l'usufruitier. "S'il ne prend qu'une partie des fruits et revenus ou s'il n'occupe qu'une partie de l'immeuble, il contribue en proportion de ce dont il fait usage."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article reprend en substance le droit actuel et la proposition de l'office. Il traite des charges relatives au bien soumis au droit d'usage.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Les frais de production, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): On a déjà corrigé cela?

M. Cossette: Oui, oui.

Le Président (M. Gagnon): Cela prendrait un amendement de concordance.

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): C'est cela?

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cet amendement est adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1230?

Mme Harel: "Les dispositions relatives à l'usufruit sont, pour le surplus, applicables au droit d'usage, compte tenu des adaptations nécessaires."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau reproduit en substance l'article 153 du projet de l'office. Il rend applicables à l'usage les règles relatives au droit d'usufruit.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article 1231?

M. Marx: L'article 1231, c'est les servitudes.

Des servitudes

Le Président (M. Gagnon): Voilà: Chapitre troisième, Des servitudes.

M. Marx: On commence le chapitre. M. Pineau: Le droit d'usage, cela use. Mme Harel: "La servitude est une charge imposée sur un immeuble, appelé le fonds servant, en faveur d'un autre immeuble, appelé le fonds dominant, et qui appartient à un propriétaire différent. "Cette charge oblige le propriétaire du fonds servant à supporter, de la part du propriétaire du fonds dominant, certains actes d'usage ou à s'abstenir lui-même d'exercer certains droits inhérents à la propriété. "La servitude s'étend à tout ce qui est nécessaire à son exercice."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article s'inspire des articles 158 et 167 proposés par l'office. Il reprend de façon plus explicite la définition de la servitude contenue à l'article 499 du Code civil du Bas-Canada. Il décrit la nature de la charge imposée au propriétaire du fonds servant. En outre, il reprend en substance le premier alinéa de l'article 552 du Code civil du Bas-Canada en édictant que la servitude s'étend à tout ce qui est nécessaire à son exercice.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Oui? Adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1231.1? C'est cela?

M. Cossette: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que c'est un amendement à l'article 1231?

M. Cossette: Un ajout.

Le Président (M. Gagnon): Oui, voila!

Mme Harel: Oui, l'amendement consiste à ajouter, après l'article 1231, l'article 1231.1 qui se lit comme suit: "Une obligation de faire peut être rattachée à une servitude et imposée au propriétaire du fonds servant. Cette obligation crée un droit réel accessoire à la servitude et ne peut être stipulée que pour le service et l'exploitation de l'immeuble."

Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement a pour but de permettre, comme le propose d'ailleurs l'office, qu'une obligation de faire puisse être rattachée à une servitude et imposée au propriétaire du fonds servant. Ainsi, il serait possible de constituer en droit réel et non en droit personnel l'obligation pour le propriétaire d'un immeuble, par exemple, d'assurer le chauffage d'un autre immeuble qui est contigu, comme cela se produit quelquefois.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si on parle d'obligation de faire, il faudrait peut-être qu'on parle également d'obligation de ne pas faire. Si je m'engage à ne pas construire...

M. Marx: Oui, mais, ici, on parle seulement de l'obligation de faire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui mais je me demande si... Justement, j'en ai fait une il n'y a pas longtemps.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si je dis, par exemple: Ne pourra être utilisé qu'à certaines fins, je m'enlève le droit de faire certaines choses. On voit cela assez fréquemment.

M. Cossette: Oui. C'est déjà suffisamment clair, je pense, dans l'article 1231, au deuxième alinéa, quand on dit: "Cette charge oblige le propriétaire du fonds servant à supporter, de la part du propriétaire du fonds dominant, certains actes d'usage ou à s'abstenir lui-même d'exercer certains droits inhérents à la propriété." Je pense qu'avec cela...

Le Président (M. Gagnon); Me Pineau.

M. Pineau: Je voudrais signaler le rapport du Barreau qui suggère de retrancher l'article 1231.1: "La sous-commission s'est d'abord interrogée sur ce que visait ce nouvel article par rapport aux articles 1237 et 1238 du projet de loi. L'obligation visée constitue une charge réelle qui, de l'avis de la sous-commission, peut être assimilée à un ouvrage nécessaire pour l'usage et la conservation de la servitude déjà prévue à l'article 1238."

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard? Me Cossette.

M. Cossette: C'est dans le rapport du Barreau?

M. Pineau: Oui, à la page 33 du deuxième rapport, enfin, du dernier rapport.

Mme Harel: Page 33, Me Cossette.

M. Cossette: Évidemment, le Barreau parle d'un ouvrage nécessaire pour l'usage et la conservation de la servitude. D'accord?

M. Pineau: Oui, oui.

M. Cossette: Tandis que, dans l'amen- dement, on dit: "Une obligation de faire peut être rattachée à une servitude et imposée au propriétaire du fonds servant." Le cas visé serait précisément celui-ci. Je vous donne un exemple absolument théorique. Je prends la Place Desjardins et l'édifice voisin, la Place Dupuis. Je suppose que tout le système de chauffage est dans la Place Desjardins et que la Place Dupuis n'a pas de système de chauffage. On convient d'installer des tuyaux à partir de la Place Desjardins jusqu'à la Place Dupuis. On fait une nouvelle servitude de passage, mais on voudrait en même temps s'assurer que le chauffage puisse se continuer dans la Place Dupuis tant et aussi longtemps qu'il sera nécessaire, au Québec, de chauffer les propriétés pendant l'hiver. On crée donc à la fois une servitude de passage et une autre servitude au profit de la Place Dupuis, à partir de la Place Desjardins. L'obligation de faire, pour ne pas qu'elle cesse, est devenue une servitude qui va se transmettre avec l'héritage.

M. Pineau: II ne s'agit absolument pas d'un ouvrage nécessaire pour l'usage et la conservation de la servitude. Cela n'a rien à voir avec cela.

M. Cossette: C'est cela. C'est une obligation de faire, de fournir un chauffage. Ce serait, évidemment, très inconvenant que, advenant le changement de propriétaire de Place Desjardins, le propriétaire suivant dise: Je ne suis pas tenu de fournir le chauffage à Place Dupuis.

M. Pineau: II s'agit véritablement d'un droit réel, accessoire à la servitude.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1231.1 est-il adopté?

M. Cossette: C'était, d'ailleurs, proposé par l'office.

Mme Harel: Est-ce qu'on a répondu à la question du député de Saint-Laurent?

M. Cossette: Oui, je pense.

Mme Harel: Sa question était différente. Il s'agissait de savoir si on ne devait pas introduire l'obligation de ne pas faire.

Le Président (M. Gagnon): On y a répondu par le deuxième alinéa de l'article 1231.

M. Cossette: Le deuxième alinéa de l'article 1231.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va, M. le député de Saint-Laurent?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1232?

Mme Harel: II se lit comme suit: "Les servitudes sont continues ou discontinues. "La servitude continue est celle dont l'exercice ne requiert pas le fait actuel de son titulaire, comme la servitude de vue ou de non-construction. "La servitude discontinue est celle dont l'exercice requiert le fait actuel de son titulaire, comme la servitude de passage à pied ou en voiture."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article définit la servitude continue et celle qui est discontinue. Il reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 547 du Code civil du Bas-Canada et la proposition de l'office.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1233?

Mme Harel: "Les servitudes sont apparentes ou non apparentes. "La servitude est apparente lorsqu'elle se manifeste par un signe extérieur; autrement elle est non apparente."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article donne une définition de la servitude apparente et non apparente. Il s'inspire de l'article 162 proposé par l'office, lequel reprend en substance l'article 548 du Code civil du Bas-Canada et du droit actuel, mais en le simplifiant.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1233 est adopté. Article 1234?

Mme Harel: "La servitude s'établit par contrat, par testament, par destination du propriétaire ou par l'effet de la loi. "La servitude continue et apparente peut aussi s'établir par prescription acquisitive mais, en aucun cas, la servitude discontinue ou non apparente ne peut s'acquérir sans titre."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énumère les divers modes d'établissement de la servitude. Contrairement à l'article 549 du Code civil du Bas-Canada et du droit actuel, il reconnaît la possibilité d'acquérir une servitude par prescription. À cet égard, cependant, le projet de loi est plus restrictif que la proposition de l'office en ne permettant pas l'acquisition par prescription des servitudes discontinues ou non apparentes. Il permet, cependant, l'acquisition par prescription des servitudes continues et apparentes.

Cette modification à la proposition de l'office se justifie par le fait que, si le propriétaire du fonds servant peut contrôler l'exercice des actes susceptibles d'établir par prescription une servitude continue et apparente, il ne peut le faire à l'égard d'actes qui s'exercent de manière sporadique ou qui ne sont pas apparents. D'ailleurs, ces actes sont la plupart du temps considérés comme des actes de tolérance où de pure faculté. La proposition de l'office pourrait donc entraîner une détérioration des relations de voisinage, car les propriétaires ne toléreraient plus certains actes comme celui de laisser passer des personnes sur leur terre de crainte de permettre ainsi l'acquisition d'une servitude de passage par prescription. En France, l'acquisition par prescription des servitudes est limitée à celles qui sont continues et apparentes.

Le Président (M. Gagnon): L'article est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1235. Il y a un amendement.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer le premier alinéa par le suivant: "Les mutations de propriété du fonds servant ou dominant ne portent pas atteinte à la servitude"; à remplacer, au deuxième alinéa, les mots: "Elle suit ces" par les mots "Celle-ci suit les".

Je Ils le deuxième alinéa: "Celle-ci suit les immeubles en quelques mains qu'ils passent, sous réserve des dispositions relatives à l'enregistrement des droits réels."

L'amendement consiste également à joindre le deuxième alinéa au premier. Il s'agit d'un amendement purement formel.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il reprend l'article 160 proposé par l'office. Il précise en susbtance que la servitude n'est pas affectée par les mutations de propriété des fonds servant ou dominant.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je croyais que cela allait de soi. Est-ce qu'il y a une raison particulière pour laquelle on l'a ajouté? Auparavant, on n'avait pas un tel article et je suis convaincu que cette règle s'appliquait.

M. Berrouard: C'est peut-être effectivement un peu didactique, mais on a jugé opportun de le préciser spécifiquement dans le chapitre relatif à la servitude.

M. Leduc (Saint-Laurent): II n'y a pas de raison particulière?

M. Berrouard: II n'y a pas de raison particulière, c'est à des fins de précision.

M. Pineau: Puisque c'est un droit réel, cela va de soi.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau. Cela va? L'amendement à l'article 1235 est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?

M. Cossette: L'office l'avait dit, c'est un peu... Cela évitera aux professeurs de le redire à l'occasion de l'étude du chapitre Des servitudes.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1235 est adopté tel qu'amendé. Article 1236?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la deuxième ligne du premier alinéa, les mots "au moyen d'un écrit donné par le" par les mots "par un écrit du".

Alors, l'article se lit comme suit: "La servitude par destination du propriétaire est constatée par un écrit du propriétaire du fonds qui, prévoyant son morcellement éventuel, établit immédiatement les charges qui seront imposées sur une partie du fonds en faveur d'autres parties. "Elle peut aussi être constatée par un écrit du propriétaire du fonds servant qui établit que les deux fonds actuellement divisés ont antérieurement appartenu à un même propriétaire et que celui-ci a établi ou maintenu entre ces deux fonds l'arrangement matériel constituant la servitude."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article détermine comment se constitue une servitude par destination du propriétaire. II s'inspire à la fois de l'article 551 du Code civil du Bas-Canada et de l'article 164 proposé par l'office. Cependant, il en diffère en prévoyant que cette servitude anciennement appelée "servitude par destination du père de famille" peut être établie avant le morcellement d'un fonds ou après celui-ci si, dans les deux cas, le propriétaire, soit du fonds qui sera morcelé, soit du fonds servant, le reconnaît dans un écrit.

Il diffère, en outre, de la proposition de l'office en ce qu'il ne limite pas la constitution de servitudes par destination du propriétaire à celles qui sont apparentes. Aucun motif ne justifie plus cette limitation, car cette servitude devra désormais être enregistrée pour être opposable aux tiers.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Au premier alinéa, je suppose que ce n'est pas le propriétaire qui prévoit son morcellement, c'est le morcellement du fonds. Je suppose qu'il faut dire: La servitude par destination du propriétaire...

Le Président (M. Gagnon): Je présume qu'il y aura un amendement.

M. Pineau: ...est constatée par un écrit du propriétaire qui, prévoyant le morcellement éventuel de son fonds, établit immédiatement...

Le Président (M. Gagnon): Ça va, Mme la députée?

Mme Harel: Oui, très bien, certainement.

Le Président (M. Gagnon):! L'amendement est adopté. Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il serait encore possible d'établir une servitude par destination dans le cas de dépôt de plans montrant des rues? Je suppose.

M. Cossette: C'est-à-dire que la servitude par destination du père de famille, dans ce cas-là, n'existait que parce que la cour en avait ainsi décidé, mais, là, il faudra respecter toutes les conditions pour que cela en soit une réellement.

M. Leduc (Saint-Laurent): On impose l'obligation que ce soit pas écrit. À ce moment-là, est-ce qu'on ne pourrait pas considérer que le dépôt de plans équivaut à un écrit? Parce que l'article 551 était pratiquement au même effet.

M. Cossette: Oui, je pense qu'un plan pourrait être considéré comme un écrit.

M. Leduc (Saint-Laurent): Comme une destination.

M. Cossette: Oui, je pense qu'effectivement un plan, c'est un écrit.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Dans la mesure où c'est très clair, quand même.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1236 tel qu'amendé... Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau suggère, à lapage 34, qu'on prévoie dans cette disposition l'enregistrement. je suppose qu'il en sera vraisemblablement traité ailleurs.

M. Berrouard: Effectivement, dans la loi d'application, cela va être prévu.

M. Cossette: Pour l'enregistrement, oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1236 tel qu'amendé est-il adopté?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1237?

Mme Harel: Il se lit comme suit: "1237. Le propriétaire du fonds dominant peut, à ses frais, prendre les mesures ou faire tous les ouvrages nécessaires pour user de la servitude et pour la conserver, sauf stipulation contraire de l'acte constitutif de la servitude. "À la fin de la servitude, il doit, à la demande du propriétaire du fonds servant, remettre les lieux dans leur état antérieur."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est conforme en son premier alinéa aux articles 553 et 554 du Code civil du Bas-Canada et à la proposition de l'office. Il précise le droit du propriétaire du fonds dominant de prendre les mesures nécessaires ou de faire tous les ouvrages nécessaires pour user de la servitude et la conserver.

Le second alinéa est nouveau et vise à régler le sort de ces ouvrages. Comme ils ont été subis par le fonds servant, c'est au propriétaire de ce fonds de décider s'il les conserve ou s'il veut que les lieux soient remis dans leur état antérieur.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'article 1237 est adopté. Article 1238?

Mme Harel: "1238. Le propriétaire du fonds servant, chargé par le titre de faire les ouvrages nécessaires pour l'usage et la conservation de la servitude, peut s'affranchir de cette charge en abandonnant au propriétaire du fonds dominant soit la totalité du fonds servant, soit une portion du fonds suffisante pour l'exercice de la servitude."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend l'article 555 du Code civil du Bas-Canada, mais il le précise en donnant la possibilité au propriétaire du fonds servant, chargé par le titre de faire les ouvrages nécessaires pour l'usage et la conservation de la servitude, de s'affranchir de cette charge non seulement en abandonnant au propriétaire du fonds dominant la totalité du fonds, mais aussi en n'abandonnant qu'une portion suffisante pour l'exercice de la servitude.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1238 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1239?

Mme Harel: "1239. Le propriétaire du fonds dominant ne peut faire de changements qui aggravent la situation du fonds servant. "Le propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui tende à diminuer l'exercice de la servitude ou à le rendre moins commode. "Toutefois, s'il a un intérêt pour le faire, il peut déplacer, à ses frais, l'assiette de la servitude dans un autre endroit où son exercice est aussi commode pour le propriétaire du fonds dominant."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 557 et 558 du Code civil du Bas-Canada. Ainsi, il reprend l'obligation imposée au propriétaire du fonds servant de ne rien faire qui tende à diminuer l'exercice de la servitude ou à le rendre moins commode. (20 heures)

II consacre aussi le droit pour le propriétaire du fonds servant de déplacer l'assiette de la servitude dans un autre endroit où son exercice est aussi commode pour le propriétaire du fonds dominant, s'il a un intérêt à le faire. En outre, il précise l'obligation du fonds dominant de ne pas faire de changements qui aggravent la situation du fonds servant.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau, au troisième alinéa, suggère qu'on ajoute: "Toutefois, si l'assignation primitive devient plus onéreuse au propriétaire du fonds servant, ou si elle l'empêche d'y faire des améliorations

avantageuses, il peut offrir..." Donc, il suggère qu'on reprenne la formulation du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Me Berrouard.

M. Berrouard: Je pense que l'article proposé, l'article 1239, édicte quand même que le propriétaire doit démontrer un intérêt et, deuxièmement, que le déplacement devra se faire à ses frais. Donc, il y a quand même un intérêt valable et je crois que la notion d'intérêt couvre mieux la situation que la notion de préjudice.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1239 est-il adopté? Article 1240? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "Si le fonds dominant vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, mais la condition du fonds servant ne doit pas en être aggravée. "Ainsi, dans le cas d'un droit de passage, tous les propriétaires des lots provenant de la division du fonds dominant doivent l'exercer par le même endroit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel exprimé à l'article 556 du Code civil du Bas-Canada. Il règle le sort de la servitude dans le cas où le fonds dominant vient à être divisé. En ce cas, la servitude reste due pour chaque portion sans, néanmoins, que la condition du fonds servant soit aggravée.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1240 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1241? Il y a un amendement.

Mme Harel: Oui, l'amendement consiste à remplacer les mots "cette division n'affecte pas les" par les mots "cette division ne porte pas atteinte aux".

L'article se lit comme suit: "Si le fonds servant vient à être divisé, cette division ne porte pas atteinte aux droits du propriétaire du fonds dominant." C'est un amendement purement formel.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article nouveau reproduit celui de l'office. Il est le corollaire de l'article précédent, car il précise que, si le fonds servant vient à être divisé, la division n'affecte pas les droits du propriétaire du fonds dominant.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1241 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1242?

Mme Harel: "Sauf en cas d'enclave, la servitude peut être rachetée lorsque son utilité pour le fonds dominant est hors de proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle entraîne pour le fonds servant. "À défaut d'entente, le tribunal, s'il accorde le droit au rachat, fixe le prix en tenant compte notamment de l'ancienneté de la servitude et du changement de valeur que la servitude entraîne tant au profit du fonds servant qu'au détriment du fonds dominant."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article est de droit nouveau. Il vise à permettre le rachat d'une servitude, sauf en cas d'enclave, lorsque son utilité pour le fonds dominant est hors de proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle entraîne pour le fonds servant. Il précise les éléments que le tribunal doit prendre en considération lorsqu'il fixe le prix de rachat de la servitude.

Trois motifs justifient l'introduction dans notre droit de cette nouvelle mesure: d'abord, la servitude étant une charge perpétuelle, sa fixité présente un inconvénient, car les circonstances économiques en fonction desquelles elle a été aménagée peuvent avoir changé; ensuite, cette fixité peut mettre en péril l'entretien même de la servitude. C'est le cas souvent rencontré où le titre constitutif met les travaux d'entretien de la servitude à la charge du propriétaire du fonds servant moyennant une redevance, laquelle, suffisante à l'origine pour payer des travaux, tend, avec la dépréciation monétaire, à devenir insignifiante et à mettre en péril l'exercice de la servitude. Enfin, actuellement, l'absence d'une telle mesure oblige les personnes qui désirent annuler l'effet d'une servitude à présenter un projet de loi privé devant l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y a la mention du Barreau qui s'oppose à cet article et qui demande de le retrancher. Moi-même, j'ai certaines réticences. Est-ce que cela ne pourrait pas prêter à des décisions discrétionnaires de la part du tribunal? Si on a établi une servitude, à mon sens, on peut la racheter ou y mettre fin avec l'entente des deux parties. Ici encore le

tribunal peut décider. Quand on voit les jugements rendus, je me demande si c'est la bonne formule.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Je suis convaincu que c'est la bonne.

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien sûr, on parle de "hors de proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle entraîne pour le fonds servant", mais qui va établir encore cet "hors de proportion"? Le tribunal?

M. Cossette: Oui, c'est le tribunal qui va juger. On dit: "Le tribunal, s'il accorde le droit au rachat." Le tribunal devra constater, en premier lieu, je pense, que l'utilité pour le fonds dominant est hors de proportion avec la gêne ou la dépréciation qu'elle entraîne pour le fonds servant. Un exemple patent de cela, ce serait le suivant. Je pense que cela va peut-être aider. Je suppose que vous êtes propriétaire de deux terrains qui sont divisés par un beau droit de passage, mais vos deux terrains sont en même temps entourés de rues et le droit de passage que vous devez subir est au profit d'un immeuble qui est situé, disons, au nord de votre propre propriété. Cela vous empêche de réunir ces deux immeubles et de construire un bel édifice en hauteur parce que vous avez à tolérer cela.

Cela est un bel exemple d'une servitude qui ne sert absolument pas parce que moi, j'ai un droit de passage dans cette lisière de terrain, mais, par contre, j'ai aussi quatre rues qui entourent ces terrains. Je pourrais fort bien, comme tout le monde, utiliser les rues, mais le droit de passage vous empêcherait d'utiliser complètement votre propriété. Ce serait un cas d'application où on serait obligé de venir devant l'Assemblée nationale pour obtenir la disparition de cette servitude.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que l'article 1239 ne répond pas à cette problématique?

M. Cossette: À ce moment, c'est un déplacement à un autre endroit sur le fonds servant. Cela ne vous arrangerait pas.

M. Leduc (Saint-Laurent): Votre cas est très bien, mais j'ai peur qu'on élargisse cette définition de l'expression "hors de proportion" et que, par la suite, on puisse peut-être annuler ou qu'on puisse permettre au fonds servant de racheter la servitude.

M. Cossette: On a souvent l'exemple de servitudes qui ne servent pas, à toutes fins utiles, mais qui sont des encombrements pour le propriétaire du fonds qui doit les subir.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne vous dis pas que ce n'est pas possible, mais je dois vous dire qu'en 25 ans de pratique je n'en ai pas vu souvent.

M. Cossette: Je pourrais vous donner un beau cas, mais ce serait trop long de vous raconter cela. Cela serait en même temps un peu folklorique.

Mme Harel: L'Assemblée nationale a dû, il me semble, disposer de certaines lois privées à cet effet?

M. Cossette: Oui, dans plusieurs cas.

Mme Harel: Régulièrement. À tout prendre entre, les fins de session où on dispose de ces lois privées et le jugement du tribunal, on peut penser que le jugement du tribunal va équivaloir.

M. Cossette: II va être aussi bon.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'il y a un droit d'appel là-dessus?

M. Cossette: Oui. D'autant plus que c'est un rachat. C'est une indemnisation. Il y aura indemnisation.

M. Leduc (Saint-Laurent): Encore là, qui va déterminer l'indemnité?

M. Cossette: C'est le tribunal. M. Leduc (Saint-Laurent): Salomon.

M. Cossette: À défaut d'entente entre les parties.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1242 est-il adopté? Article 1243?

Mme Harel: "Les parties peuvent, par écrit, exclure la faculté de racheter une servitude pour une période n'excédant pas trente ans."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, également de droit nouveau, complète le précédent. Il permet aux parties d'exclure, par écrit, la faculté de racheter une servitude n'excédant pas trente ans. Cette période est d'application courante en droit immobilier, qu'il s'agisse de prescrire ou de renouveler les sûretés immobilières.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1243 est adopté. Article 1244?

Mme Harel: "La servitude prend fin: 1 Par la réunion dans une même personne de

la qualité de propriétaire des fonds servant et dominant; 2° Par la renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant; 3° Par l'arrivée du terme pour lequel elle a été constituée; 4° Par le rachat; 5° Par le non-usage pendant trente ans."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance dans un môme article les articles 175, 176 et 177 proposés par l'office relatifs aux causes qui mettent fin à la servitude, à deux exceptions près: d'abord, il ajoute que le rachat de la servitude met fin à celle-ci, tenant compte ainsi des nouvelles dispositions préconisées sur le rachat des servitudes; ensuite, il maintient le droit actuel pour le délai de prescription des servitudes, alors que l'office préconisait un délai de dix ans.

Cet article est conforme en substance au droit actuel énoncé aux articles 561 et 562 du Code civil du Bas-Canada. Il apporte, toutefois, une nouveauté qui complète la réglementation sur les servitudes en précisant que la renonciation expresse du propriétaire du fonds dominant et l'arrivée du terme mettent fin à la servitude.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1244 est adopté. J'appelle l'article 1245.

Mme Harel: "La prescription commence à courir, pour les servitudes discontinues, du jour où le propriétaire du fonds dominant cesse d'exercer la servitude et, pour les servitudes continues, du jour où il est fait un acte contraire à leur exercice."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reproduit en substance la proposition de l'office et l'article 563 du Code civil du Bas-Canada. Il traite du point de départ de la prescription des servitudes discontinues et continues.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1245 est adopté. J'appelle l'article 1246.

Mme Harel: "Le mode d'exercice de la servitude se prescrit comme la servitude elle-même et de la même manière."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est conforme au droit actuel et à la proposition de l'office. II précise que le mode d'exercice de la servitude se prescrit comme la servitude et de la même manière.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1246 est adopté. J'appelle l'article 1247.

Mme Harel: "La prescription court même lorsque le fonds dominant ou le fonds servant subit un changement de nature à rendre impossible l'exercice de la servitude."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reproduit l'article 180 proposé par l'office. II modifie le droit actuel qui dit que la prescription ne court pas lorsque l'exercice de la servitude est impossible. Comme le mentionne l'office, la règle actuelle des articles 559 et 560 du Code civil du Bas-Canada maintient un élément d'incertitude dans les titres. Il est plus logique d'adopter la solution proposée, étant donné la possibilité d'une interruption prolongée d'une durée indéfinie en raison de l'état des choses.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1247 est adopté. J'appelle l'article 1248.

De l'emphythéose

Mme Harel: "L'emphytéose est un droit résultant d'un contrat par lequel une personne acquiert, pendant un certain temps, toute l'utilité d'un immeuble appartenant à autrui, à condition de ne pas en compromettre l'existence et à charge d'y faire des constructions, ouvrages ou plantations qui augmentent sa valeur ou qui le mettent en valeur."

Le Président (M. Gagnon): L'article 1248 fait partie du chapitre quatrième De l'emphytéose. Commentaire.

M. Cossette: Cet article propose une nouvelle définition de l'emphytéose de façon à aplanir les difficultés que pose le droit actuel dans ce domaine et à dépouiller ce contrat de certains éléments vétustés. Ainsi, la définition proposée ne fait plus de la redevance un élément essentiel du contrat d'emphytéose. D'ailleurs, il arrive souvent que la redevance prévue au contrat est minime et, à toutes fins utiles, inexistante. Son but, qui était de reconnaître le domaine supérieur du propriétaire, peut être atteint par la nature même de la convention.

Ensuite, la définition proposée maintient, du droit actuel, l'obligation imposée à l'emphytéote d'apporter des améliorations à l'immeuble. Elle précise, cependant, la portée de cette obligation. Actuellement, certains auteurs considèrent que, si le contrat ne comporte pas l'obligation de faire des constructions ou si les améliorations se rapportent à un

immeuble existant ou déjà amélioré, la validité du contrat peut être mise en cause. Désormais, il sera clair que l'obligation de l'emphytéote quant aux améliorations est de faire des constructions, des ouvrages ou plantations qui augmentent la valeur du bien ou qui mettent le bien en valeur.

La définition proposée précise aussi la nature du droit de l'emphytéote. Celui-ci n'acquiert pas un droit de propriété temporaire, mais bien un démembrement du droit de propriété qui lui donne toute l'utilité de l'immeuble à la condition, notamment, de ne pas en compromettre l'existence. (20 h 15)

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: La lecture du commentaire supplémentaire.

M. Cossette: Oui, c'est vrai, le commentaire supplémentaire. Sur la question de la nature du droit d'emphytéose, deux écoles s'affrontent. L'une considère que l'emphytéose emporte aliénation et que l'emphytéote est un propriétaire temporaire. L'autre ne considère pas l'emphytéote comme un véritable propriétaire et ne lui reconnaît pas le droit de modifier son titre comme s'il était véritablement propriétaire, rendant ainsi le droit moins attrayant.

L'office, sur cette question, s'est prononcé en accordant à l'emphytéote un droit de propriété temporaire à l'article 250 de son projet. Toutefois, comme l'emphytéote ne peut jouir d'un des éléments essentiels du droit de propriété, celui de disposer du bien de façon absolue, il n'apparaissait pas souhaitable de retenir la proposition de l'office. L'emphytéose est donc clairement considérée au projet comme un démembrement du droit de propriété.

Par contre, cette proposition n'implique pas que l'emphytéote ne puisse modifier son titre afin de donner au propriétaire de l'immeuble les garanties qu'il peut exiger pour s'assurer de recevoir à la fin du contrat un immeuble amélioré et bien entretenu. Le propriétaire doit pouvoir restreindre le droit de l'emphytéote de disposer de l'immeuble. Ce droit est essentiel pour que l'emphytéose soit utilisée et il est consacré un peu plus loin dans le projet, précisément à l'article 1252.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, on présente l'article 1248 comme donnant une définition de l'emphytéose. C'est une définition peut-être pas tout à fait complète. Ce contrat peut être à titre gratuit aussi bien qu'à titre onéreux. Peut-être, dans une définition, ne serait-il pas mauvais de le dire puisqu'on change vraiment le caractère de ce contrat. Je pose la question. Il n'y a rien sur la reprise de l'immeuble dans la définition.

M. Cossette: Le commentaire présente l'article 1248 comme étant une définition. C'est une partie de la définition.

M. Pineau: Oui, c'est cela. C'est une définition incomplète.

M. Cossette: Oui, parce que tout le problème de la redevance vient plus loin. Je suis d'accord que c'est une définition incomplète.

M. Pineau: II y a un autre point, l'utilisation du terme "utilité", "l'utilité d'un immeuble". Je pense que ce sont les possibilités d'utilisation que l'on vise. Je crois que cela serait préférable d'utiliser...

Mme Harel: La remarque m'en avait déjà été préalablement faite parce qu'on a déjà corrigé dans des dispositions antérieures le mot "utilité" par "utilisation". On le fera chaque fois qu'il se présentera.

M. Pineau: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Alors, il y aura un amendement. Cet amendement-là est-il adopté?

Mme Harel: Pour l'élégance de la phrase, Me Longtin considère qu'il faut le suspendre, car il ne s'agit pas simplement de remplacer "utilité" par "utilisation".

Mme Longtin: Cela ferait bizarre, toute l'utilisation.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1248 est donc suspendu.

Mme Harel: Suspendu.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1249.

Mme Harel: "L'emphytéose doit avoir une durée prévue au contrat d'au moins dix ans et d'au plus cent ans. Si elle excède cent ans, elle est réduite à cette durée."

Le Président (M. Gagnon): Y a-t-il un commentaire?

M. Cossette: Cet article établit la durée minimale et maximale du contrat d'emphytéose. Il reprend en substance le droit actuel et la proposition de l'office, sauf qu'il porte à dix et cent ans la durée minimale et maximale du contrat d'emphytéose, laquelle est présentement respectivement de 9 et 99 ans.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'article 1249 est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1250.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer l'article 1250 par le suivant: "Le renouvellement d'une emphytéose portant sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété peut, quel que soit son terme, avoir lieu sans que l'emphytéote ait besoin de faire des constructions, ouvrages ou plantations qui mettent l'immeuble en valeur ou augmentent la valeur de celui-ci." C'est un amendement de nature purement formelle.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a des commentaires additionnels?

M. Cossette: Oui. Cet article est nouveau. Il vise à permettre le renouvellement du contrat d'emphytéose établi sur un immeuble détenu en copropriété sans qu'on ait besoin d'y faire à nouveau des constructions, ouvrages ou plantations qui mettent l'immeuble en valeur ou augmentent celle-ci.

Cet article s'inscrit dans les mesures préconisées dans le projet pour atténuer les inconvénients de l'emphytéose en matière de copropriété.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela veut donc dire, s'il ne s'agit pas d'une copropriété, qu'on ne pourrait pas renouveler le bail emphytéotique sans qu'il y ait des ouvrages, constructions ou plantations.

M. Cossette: Ce serait considéré à ce moment-là comme un nouveau contrat. Il est de l'essence du contrat qu'il y ait des améliorations à faire.

M. Leduc (Saint-Laurent); Si on le permet pour la copropriété, pourquoi ne le permet-on pas également pour d'autres sortes de constructions?

M. Berrouard: Dans le cas de la copropriété, je pense que c'est bien particulier. On a souligné à la sous-commission les problèmes que pouvait causer la compatibilité de l'emphytéose et de la copropriété. Pour atténuer les problèmes que peut causer cette situation, une des mesures qui ont été préconisées, justement, a été le renouvellement de l'emphytéose sans qu'on ait besoin d'apporter des améliorations à l'immeuble.

Dans les autres cas, il n'y a aucun motif qui justifie qu'on puisse faire un accroc aux éléments essentiels de l'emphytéose.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je peux vous dire que cela ne me convient pas beaucoup, mais en tout cas. Je pense que, dans d'autres cas, cela pourrait être important. Il pourrait s'agir de bâtisses résidentielles. En tout cas, je n'en ferai pas une bataille rangée.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1250 est adopté. L'amendement à l'article 1250 est-il adopté? Me Pineau.

M. Pineau: On a l'impression qu'il s'agit d'un bail emphytéotique conclu sur un condominium alors qu'en réalité c'est l'inverse. Non? "Le renouvellement d'une emphytéose portant sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété." Donc, on a un terrain et un bail emphytéotique et on construit un condominium dessus, alors qu'on a l'impression qu'il s'agit d'un condominium sur lequel on flanque un bail emphytéotique. C'est le libellé. "Le renouvellement d'une emphytéose portant sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété." Donc, on a un immeuble qui a fait l'objet d'une déclaration de copropriété et on renouvelle une emphytéose qui porte là-dessus.

M. Cossette: Votre premier réflexe, c'est que "immeuble" semble vouloir dire "bâtisse". Est-ce que le mot "terrain" serait...

M. Pineau: On veut dire que, lorsque l'emphytéose porte sur un immeuble qui a par la suite fait l'objet d'une déclaration de copropriété...

Mme Harel: Pourquoi pas "sur lequel est établie une déclaration de copropriété"?

M. Pineau: L'emphytéose porte sur un immeuble. Qu'avez-vous dit?

Mme Harel: Me Longtin?

M. Cossette: Sur lequel est établie ou est enregistrée...

Mme Longtin: Le renouvellement d'une emphytéose portant sur un immeuble sur lequel est établie une copropriété divise.

Mme Harel: Suspendu. M. Marx: Suspendu pour que ce soit... M. Berrouard: Pour une amélioration. Mme Harel: Ce soir, ce qu'on peut

faire de mieux, c'est peut-être adopter les articles qui ne le sont pas parce que les rédacteurs sont quand même, après plusieurs heures, dans un état de fatigue relatif qui ne leur permet pas d'être aussi rapides sur la rédaction.

M. Cossette: On fait cela durant la nuit.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1250 est suspendu. Vous retirez l'amendement, Mme la députée de Maisonneuve. On apportera un nouvel amendement.

Mme Harel: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Article 1251?

Mme Harel: "Le créancier de l'emphytéote peut faire saisir et vendre les droits de celui-ci, sous réserve des droits du propriétaire de l'immeuble. "Le créancier du propriétaire peut également faire saisir et vendre les droits de celui-ci, sous réserve des droits de l'emphytéote."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article reprend la règle du droit actuel à savoir que le créancier de l'emphytéote peut faire saisir et vendre les droits de celui-ci. Le deuxième alinéa, inspiré de l'article 251 de l'office, établit la même règle pour le créancier du propriétaire.

Cette règle est nouvelle, mais elle est compatible avec le régime de l'emphytéose et complémentaire à la règle énoncée au premier alinéa.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1251 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1252.

Mme Harel: "L'emphytéote exerce à l'égard de l'immeuble tous les droits du propriétaire, sauf les limitations contenues dans ce chapitre ou dans le contrat d'emphytéose.

Il aurait fallu, à la deuxième ligne du premier alinéa, remplacer le mot "ou" par le mot "et". Je vais le relire. "L'emphytéote exerce à l'égard de l'immeuble tous les droits du propriétaire, sauf les limitations contenues dans ce chapitre et dans le contrat d'emphytéose. "Le contrat peut limiter les droits des parties, entre autres pour accorder au propriétaire des droits ou des garanties qui protègent la valeur du bien, assurent sa conservation, son rendement ou son utilité ou qui autrement préservent les droits du propriétaire ou de l'emphytéote ou règlent l'exécution du contrat."

En commentaire: L'amendement proposé veut marquer le caractère non disjonctif des éléments mentionnés.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en susbtance les articles 569, 569.1 et 570 du Code civil du Bas-Canada en précisant les droits de l'emphytéote sur l'immeuble. Celui-ci exerce à l'égard de l'immeuble les droits du propriétaire, dont les droits prévus aux articles 1004 à 1010, sauf les restrictions qu'on retrouve dans ce chapitre ou qu'on pouvait prévoir dans le contrat.

Ainsi, parmi ces limites, on peut considérer que le droit de disposer du bien ne comprend pas celui de le détruire puisque la nature de l'emphytéose exige la conservation et la mise en valeur du bien. Cependant, le droit de disposer comprend celui d'aliéner le bien ou de le grever d'une sûreté.

Quant au deuxième alinéa de cet article, il reprend le nouvel article 569.1 du Code civil du Bas-Canada ajouté au Code civil en 1984 pour mettre fin à une interprétation restrictive de l'emphytéose. Cette interprétation sanctionnée par la Cour d'appel avait pour effet d'empêcher de stipuler au contrat certaines clauses, par ailleurs, usuelles qui limitaient les droits de l'emphytéote.

L'article proposé permettra donc de limiter les droits des parties au contrat lorsque ces limitations ont pour objet de protéger la valeur du bien, d'assurer son rendement, son utilité ou sa conservation ou encore de régler l'exécution du contrat. Cette disposition devrait donc enlever tout doute sur la validité des clauses de cession des indemnités d'assurance ou d'expropriation ou sur les droits de vérification que se réserve le propriétaire.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, le Barreau souhaite que l'on retranche le deuxième alinéa. Il relève ce qu'il appelle le caractère dangereux de ce contrat dont on ne saura pas véritablement ce qu'il est.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Je voudrais juste indiquer qu'avant l'adoption en 1984 d'une disposition semblable à l'article 1252, au deuxième alinéa, il y avait un problème majeur. C'est à la demande de toutes les personnes qui ont

pu faire de l'emphytéose depuis ces dernières années que certaines dispositions ont été adoptées. Il est certain que l'article ne vise pas les exceptions; certains auraient souhaité qu'il dise que les clauses d'assurance sont valides ou les clauses de paiement de taxes sont valides. L'article donne quand même des critères qui peuvent être suffisants pour en arriver à développer des contrats acceptables.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1252 est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1253.

Mme Harel: "L'emphytéote fait dresser à ses frais..."

Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement.

Mme Harel: II y a un amendement qui consiste à remplacer, à la deuxième ligne, les mots "sujets à" par les mots "soumis à".

L'article se lit comme suit: L'emphytéote fait dresser à ses frais, en y appelant le propriétaire, un état des immeubles soumis à son droit, à moins que le propriétaire ne l'en ait dispensé."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. (20 h 30)

M. Cossette: Cet article nouveau est de droit supplétif. Il l'oblige l'emphytéote à faire dresser un état des immeubles sujets à son droit, sauf s'il en est dispensé. L'état des immeubles peut, notamment, servir pour établir les améliorations à apporter à l'immeuble et il est presque indispensable vu la longue durée possible de l'emphytéose.

Le Président (M. Gagnon): Ça va. L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1254?

Mme Harel: L'article 1254 se lit comme suit: "La perte partielle de l'immeuble est à la charge de l'emphytéote; il ne peut en ce cas demander la remise ou la diminution du prix stipulé au contrat, le cas échéant."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de l'article 255 de l'office, reprend en termes plus généraux l'article 575 du Code civil du Bas-Canada. Alors que la perte totale du bien met fin à l'emphytéose, la perte partielle n'a pas cet effet. Cette perte est assumée par l'emphytéote qui n'a pas droit à une remise ou à une diminution du prix stipulé, s'il en est un.

Le Président (M. Gagnon): Ça va. L'article 1254 est adopté. Article 1255?

Mme Harel: II se lit comme suit: "1255. L'emphytéote est tenu aux réparations, même majeures, qui se rapportent à l'immeuble ou aux constructions, ouvrages ou plantations qu'il a faits en exécution de son obligation."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, conforme au droit actuel et à la proposition de l'office précise, l'obligation de l'emphytéote de maintenir non seulement l'immeuble, mais aussi les améliorations en bon état de réparation.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1255, non, ça va.

Le Président (M. Gagnon): Ça va.

Adopté. Article 1256?

Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer, à la cinquième ligne du deuxième alinéa, le mot "additionnelles".

L'article se lit comme suit: "1256. Si l'emphytéote commet des dégradations sur l'immeuble ou le laisse dépérir ou, de toute autre façon, met en danger les droits du propriétaire, il peut être déchu de son droit. "Le tribunal peut, suivant la gravité des circonstances, résilier le contrat, avec indemnité payable immédiatement ou par versements au propriétaire ou sans indemnité, ou encore obliger l'emphytéote à fournir d'autres sûretés ou lui imposer toutes autres obligations ou conditions. "Les créanciers de l'emphytéote peuvent intervenir à la demande pour la conservation de leurs droits; ils peuvent offrir la réparation des dégradations et des garanties pour l'avenir."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, comme l'article 1222 du projet le prévoit en matière d'usufruit, établit les sanctions auxquelles s'expose l'emphytéote qui abuse de ses droits, soit qu'il commette des dégradations sur l'immeuble ou le laisse dépérir, soit qu'il mette autrement en danger les droits du propriétaire.

Contrairement à la proposition de

l'office et au droit actuel exprimé à l'article 578 du Code civil du Bas-Canada, l'article laisse un large pouvoir d'appréciation au tribunal pour que celui-ci prononce une sanction proportionnelle à la gravité de l'acte reproché.

Le Président (M. Gagnon): Ça va. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, à la limite, cela voudrait dire que l'emphytéote pourrait ne pas maintenir d'assurance contre l'incendie sur les immeubles faisant l'objet de l'emphytéose.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Sûrement que la loi ne l'autoriserait pas à faire cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article 1262 dit qu'il "doit remettre en bon état l'immeuble avec les constructions, ouvrages ou plantations prévus au contrat, à moins qu'ils n'aient péri par cas fortuit". Si cela a passé au feu, est-ce que c'est un cas fortuit?

M. Cossette: II est obligé d'assurer. Il aura une indemnité d'assurance.

M. Leduc (Saint-Laurent): II est obligé même si ce n'est pas indiqué.

M. Cossette: C'est son obligation d'assurer.

M. Leduc (Saint-Laurent): On oblige tout de même l'usufruitier à le faire.

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Si vous me le permettez, je pense que les droits d'usufruit et d'emphytéose sont vraiment différents. Je pense que l'obligation d'assurance en matière d'usufruit se justifie pleinement pour différents motifs comme ceux qu'on a vus. Je ne pense pas qu'on ait besoin de s'étendre là-dessus; mais en matière d'emphytéose comme telle, je pense qu'on va retrouver l'obligation d'assurance dans le contrat même. Si l'emphytéote, alors que, dans le contrat, on prévoit qu'il y a une obligation d'assurance, ne prend pas une police d'assurance, je pense qu'il pourra mettre en danger les droits du propriétaire et le propriétaire pourrait intervenir; à tout le moins, il pourrait intervenir pour faire respecter la clause qui apparaîtrait dans le contrat.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Est-ce que mon confrère voulait dire: Malgré une stipulation au contrat?

M. Leduc (Saint-Laurent): Comment vous dites cela? Malgré...

M. Cossette: Est-ce que votre question était dans le sens que quelqu'un violait une des conditions du contrat, à savoir son obligation d'assurer?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bien sûr que le contrat d'emphytéose va contenir cette obligation de maintenir l'assurance. Mais si ce n'était pas stipulé... Bien sûr, ici on parle de droit supplétif. Dans le contrat d'usufruit, c'est la même chose. Je pense bien qu'on va stipuler maintenant l'obligation d'assurer. Mais on en a parlé au code. Vous allez me dire que ce n'est pas la même chose, mais il y a tout de même un bien qui doit être rendu, qui doit être conservé, à mon sens. Je ne comprends pas pourquoi on le prévoit dans un cas et on ne le prévoit dans l'autre.

Évidemment, vous allez me dire: Peut-être quand on va rendre ces immeubles après 90 ans, ils vont être foutus, mais, tout de même, l'emphytéose, c'est cela, c'est de rendre les constructions, ouvrages et plantations. Tout de même, il y a une obligation de rendre des constructions.

M. Pineau: Oui, mais est-ce que, généralement, on ne construit pas pour la durée de l'emphytéose et, lorsque vient le moment de restituer, on restitue l'immeuble dans l'état où il se trouve, c'est-à-dire, en général, en mauvais état?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais...

M. Cossette: Oui, mais, par contre, il ne faut pas oublier l'obligation d'entretien de l'emphytéote.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ah oui, cela va même loin.

M. Pineau: Oui, l'entretien.

M. Cassette: II ne faut pas oublier, non plus, que les droits de l'emphytéote sont vraiment près de celui du propriétaire également et qu'il a tout intérêt lui-même à assurer le bien.

M. Berrouard: II y aurait peut-être un autre élément, finalement, c'est qu'à tous les endroits où on a prévu dans le code l'obligation d'assurance, on s'est toujours interrogé sur la nécessité d'aller aussi loin avec l'obligation d'assurance. En matière

d'emphytéose, je pense que c'est, justement, un des cas où on n'a pas besoin de se rendre là.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article à 1256 est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. Article 1257?

Mme Harel: "L'amendement consiste à remplacer les mots "est tenu d'acquitter1' par le mot "acquitte". Alors, l'article se lit comme suit: "L'emphytéote acquitte les charges foncières dont l'immeuble est grevé".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

Mme Harel: C'est un amendement qui consiste à marquer le caractère indicatif de la règle.

M. Cossette: Cet article, un peu inspiré de l'article 256 de l'office et de l'article 576 du Code civil du Bas-Canada, traite de l'obligation de l'emphytéote d'acquitter les charges foncières dont l'immeuble est grevé.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté. Article 1258?

Mme Harel: "Le propriétaire est tenu, à l'égard de l'emphytéote, des mêmes obligations que le vendeur".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance le droit actuel et la proposition de l'office relativement aux obligations du propriétaire de l'immeuble envers l'emphytéote. Il établit que ses obligations sont les mêmes que celles du vendeur, ce qui inclut que le propriétaire doit délivrer le bien et offrir les mêmes garanties que le vendeur contre l'éviction et les vices cachés.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: N'est-il pas obligé de reprendre l'immeuble, de décharger l'emphytéote, comme le précise l'alinéa 2 de l'article 573 du Code civil du Bas-Canada?

M. Cossette: Vous faites référence à 1258?

M. Pineau: On est à 1258, n'est-ce pas? M. Cossette: On est à l'article 1258.

M. Pineau: Pardon. Article 573 du Code civil du Bas-Canada, alinéa 2.

M. Cossette: D'accord.

M. Berrouard: À 573, deuxième alinéa, on dit: "II est également obligé de reprendre cet immeuble et de décharger l'emphytéote de la rente ou redevance stipulée au cas où ce dernier veut déguerpir, à moins qu'il n'y ait convention contraire." Dans le projet de loi, on dit à l'article 1261: "À la fin de l'emphytéose, le propriétaire reprend l'immeuble, etc." La question du déguerpissement, on va la retrouver à l'article 1263.

M. Pineau: Oui, justement, comment se fait-il que ce soit dans la section relative à la fin de l'emphytéose, alors que c'est une obligation, en définitive, du propriétaire?

M. Berrouard: C'est parce que si c'est le cas de déguerpissement, la situation se situe, finalement, au niveau de la fin de l'emphytéose.

M. Pineau: Simplement, la section III traite de la fin de l'emphytéose. Donc, cela devrait traiter, me semble-t-il, des causes de ce qui met fin à l'emphytéose et non pas des obligations ou des droits du propriétaire de l'emphytéose. C'était l'objet de ma question puisqu'il est question des droits et obligations de l'emphytéote et du propriétaire dans la section II, aux articles 1252 et suivants.

M. Berrouard: C'est toujours une question d'appréciation, finalement, où on mettait tel ou tel article. Considérant qu'on se plaçait à la fin de l'emphytéose, on a jugé préférable d'indiquer que c'était dans la section III, au niveau de la fin de l'emphytéose.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1258 est adopté. Article 1259? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: L'amendement à 1259 consiste à remplacer à la dernière ligne le mot "à" par les mots "de demander". Le premier alinéa se lit comme suit: "Si un prix, payable globalement ou par versements, est prévu au contrat et que l'emphytéote laisse s'écouler trois années sans le payer, le propriétaire a droit, après un avis d'au moins 90 jours, de demander la résiliation du contrat".

L'amendement consiste également à ajouter à la fin l'alinéa suivant. "Ce droit ne peut être exercé lorsqu'une copropriété divise est établie sur l'immeuble qui fait l'objet d'une emphytéose".

Le commentaire sur l'amendement. L'amendement proposé a d'abord pour but d'indiquer que le propriétaire de l'immeuble n'a pas un droit automatique à la résiliation du contrat, mais doit la demander. L'amendement a également pour but de ne pas

permettre la résiliation du contrat lorsque l'emphytéose est établie sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété. Plusieurs motifs justifient cela. D'abord, le paiement du prix devrait être considéré comme une obligation divisible pour les copropriétaires. Conséquemment, si seulement quelques-uns d'entre eux étaient en défaut, le propriétaire de l'immeuble n'aurait droit qu'à une résiliation partielle du contrat. On pourrait donc se retrouver devant la situation où certaines fractions dans un même immeuble seraient détenues en pleine propriété alors que d'autres ne le seraient pas. (20 h 45)

Ensuite, à moins d'obliger le propriétaire de l'immeuble à dénoncer à chacun des copropriétaires ledéfaut, il n'apparaît guère possible de considérer l'obligation de payer le prix comme une charge commune à être assumée par le syndicat ou comme une obligation indivisible. Or, pour le propriétaire de l'immeuble, l'obligation d'aviser tous les copropriétaires peut constituer une charge onéreuse et inutile, surtout que, dans les contrats d'emphytéose, la rente est souvent symbolique.

Cet amendement n'enlève pas au propriétaire ses autres recours.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau, vous aviez une remarque à faire.

Mme Harel: Peut-être la remarque du Barreau?

M. Pineau: Le propriétaire peut la demander. C'est cela. Vous répondez à la question du Barreau en ajoutant "de demander" la résiliation.

Le Président (M. Gagnon): C'était "a droit".

M. Pineau: Le propriétaire "a droit". Oui.

M. Cossette: Pour compléter, nous allons ajouter, dans l'amendement proposé, "le" dans la troisième ligne, avant le mot "droit", de telle sorte que cela se lira: "Le propriétaire a le droit..."

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Dans le commentaire, au deuxième paragraphe: "L'amendement a pour but de ne pas permettre la résiliation du contrat lorsque l'emphytéose est établie sur un immeuble qui fait l'objet d'une déclaration de copropriété" on retrouve la même ambiguïté que précédemment. Voyez-vous? Lorsqu'un immeuble qui a fait l'objet d'une déclaration de copropriété a été construit sur... Lorsqu'un condominium a été greffé sur un bail emphytéotique: c'est cela que vous voulez dire.

M. Cossette: Oui.

Mme Longtin: II me semble que, contrairement à l'article qu'on a vu précédemment, l'ambiguïté ne m'apparaît pas, puisque c'est l'immeuble qui fait l'objet d'une emphytéose; disons que c'est le fonds qui fait l'objet d'une emphytéose et c'est sur ce fonds qu'une copropriété divise est établie.

M. Pineau: Mais oui, c'est cela. Parce que l'emphytéose est sur un immeuble.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va?

M. Pineau: C'est un commentaire, de toute façon.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement II l'article 1259 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Est-ce que l'article 1259 tel qu'amendé est adopté? J'appelle l'article 1260.

Mme Harel: "L'emphytéose prend fin: 1° Par l'expiration du temps prévu au contrat; 2° Par la perte ou l'expropriation totale de l'immeuble; 3° Par la résiliation du contrat". Il y a un amendement à 4 pour supprimer ce qui suit: "sans préjudice du droit des tiers".

Alors: "4° Par la réunion des qualités de propriétaire et d'emphytéote dans une même personne".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire. Excusez-moi.

Mme Harel: C'est tout?

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez le commentaire sur l'amendement?

Mme Harel: "5° Par le non-usage pendant 30 ans".

Le Président (M. Gagnon): Un commentaire sur l'article?

Mme Harel: Le commentaire sur l'amendement. C'est, en fait, un amendement purement formel, l'exception énoncée au 4° étant reprise à l'article suivant.

M. Cossette: À l'article 1261.

Mme Harel: À l'article 1261.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette, le commentaire sur l'article.

M. Cossette: Cet article énumère les causes qui mettent fin à l'emphytéose. Il s'inspire de l'article 579 du Code civil du Bas-Canada et de l'article 261 proposé par l'office, à la différence qu'il inclut l'expropriation comme une cause mettant fin à l'emphytéose et qu'il précise que le non-usage pendant trente ans met aussi fin au contrat.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? L'amendement est-il adopté? L'article tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1261.

Mme Harel: L'amendement à l'article 1261 consiste à ajouter, à la fin, les mots "ou de la réunion des qualités de propriétaire et d'emphytéote dans une même personne." Et l'article se lit comme suit: "À la fin de l'emphytéose, le propriétaire reprend l'immeuble libre de tous droits et charges consentis par l'emphytéote, sauf si la fin de l'emphytéose résulte de la résiliation à l'amiable du contrat ou de la réunion des qualités de propriétaire et d'emphytéote dans une même personne." C'est un amendement de concordance.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de l'article 250 de l'office, précise le droit du propriétaire de reprendre son immeuble libre de tous droits et charges nés pendant l'emphytéose, sauf si la fin de l'emphytéose résulte de la résiliation à l'amiable du contrat. Cette exception a pour but de protéger les droits des tiers, le tout sous réserve, évidemment, de l'amendement déjà fait.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1261 est adopté et l'article 1261 tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1262.

Mme Harel: II faut voir à l'article 1261 qu'il s'agissait d'une recommandation contenue dans le mémoire du Barreau.

Article 1262. "À la fin de l'emphytéose, l'emphytéote doit remettre en bon état l'immeuble avec les constructions, ouvrages ou plantations prévus au contrat, à moins qu'ils n'aient péri par cas fortuit. "Ceux qu'il a faits sans y être tenu sont traités comme les impenses faites par un possesseur de mauvaise foi.".

Le Président (M. Gagnon): Commentai- re.

M. Cossette: Cet article, dans un premier temps, reprend l'obligation prévue par l'article 561 du Code civil du Bas-Canada et l'article 262 de l'office visant à obliger l'emphytéote, à la fin du contrat, à remettre en bon état l'immeuble avec les améliorations qu'il s'est engagé à faire, sauf s'ils ont péri par cas fortuit.

Dans un deuxième temps, il reprend le droit actuel exprimé à l'article 582 du Code civil du Bas-Canada en déclarant que les améliorations apportées par ['emphytéote sans qu'il y soit tenu sont traitées comme les impenses faites par un possesseur de mauvaise foi.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1262 est adopté. J'appelle l'article 1263.

Mme Harel: "Sauf renonciation de l'emphytéote à son droit, l'emphytéose peut aussi prendre fin par l'abandon, qui ne peut avoir lieu que si l'emphytéote a satisfait pour le passé à toutes ses obligations et laisse l'immeuble libre de toutes charges.".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article maintient le droit actuel en précisant que l'abandon met fin à l'emphytéose à la condition que l'emphytéote ait satisfait pour le passé à ses obligations. À cet égard, l'office propose de supprimer l'abandon comme cause d'extinction de l'emphytéose, mais sans s'en expliquer. Cependant, comme l'abandon permet de mettre fin à un démembrement de propriété sans que le propriétaire ne subisse d'autres préjudices que de devoir reprendre son bien avant terme, la règle du droit actuel paraît opportune.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, pourquoi "sauf renonciation de l'emphytéote à son droit"? À quel droit?

Le Président (M. Gagnon): Me

Berrouard.

M. Berrouard: Celui de déguerpir. M. Pineau: Celui d'abandonner?

M. Berrouard: II n'était pas clair finalement si, en droit actuel, le droit de déguerpir était accordé à l'emphytéote ou non. On l'a précisé dans cette version-ci du projet, parce que dans le projet de loi 58 nous n'avions pas cette précision. On a jugé utile de le faire ici.

M. Pineau: Cela signifie que l'emphy-téote peut renoncer à son droit de déguerpir.

M. Berrouard: C'est cela.

M. Pineau: Et, dans ce cas, l'article 1263 ne s'appliquera pas.

M. Berrouard: Exactement.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1263 est adopté.

M. Berrouard: D'ailleurs, tout est sur la recommandation de la Chambre des notaires.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que cela va? Oui. Nous suspendons nos travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 54)

(Reprise à 21 h 7)

Des restrictions à la libre disposition de certains biens

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaîtl La sous-commission des institutions reprend ses travaux. Nous entreprenons le titre cinquième: Des restrictions à la libre disposition de certains biens. Chapitre premier: Des stipulations d'inaliénabilité. J'appelle l'article 1264.

Des stipulations d'inaliénabilité

Mme Harel: "Tout acte à titre gratuit peut restreindre l'exercice du droit de disposer d'un bien. La stipulation est faite par écrit, à l'occasion du transfert du bien à une personne qui devient soit propriétaire de ce bien, soit titulaire d'un démembrement du droit de propriété sur celui-ci, ou à l'occasion du transfert du bien à une fiducie. "La stipulation d'inaliénabilité n'est valide que si elle est temporaire et justifiée par un intérêt sérieux et légitime. Néanmoins, dans le cas d'une substitution ou d'une fiducie, elle peut valoir pour leur durée.".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit de nouvelles limites au droit pour une personne de restreindre, au moyen d'une stipulation d'inaliénabilité, l'exercice par un tiers du droit de disposer d'un bien qu'elle lui transfère. Désormais, une telle stipulation ne sera valide que si elle est temporaire et justifiée par un intérêt sérieux et légitime.

L'article modifie ainsi le droit actuel énoncé aux articles 968 et suivants du code. Actuellement, ces stipulations sont permises sans limitation de durée et elles peuvent être faites sans aucun motif. Il reprend, cependant, le droit actuel en permettant de telles stipulations dans les actes à titre gratuit. Combiné avec les autres dispositions du chapitre, notamment avec celle qui permet à l'acquéreur d'obtenir judiciairement l'autorisation de disposer du bien, malgré la stipulation, en justifiant d'un intérêt supérieur, l'article proposé reflète mieux les besoins tout en supprimant les raisons qui pouvaient laisser paraître ces stipulations comme contraires à l'intérêt public.

Conséquemment, la proposition de l'office, exprimée aux articles 361 et 362 du livre Des successions, de considérer sans effet les stipulations d'inaliénabilité autres que celles qui peuvent valoir comme substitution ou qui concernent la donation ou le legs d'un immeuble grevé d'un droit d'usufruit ou d'usage n'est pas retenue. L'exception préconisée n'est qu'une illustration d'un cas où la stipulation d'inaliénabilité est justifiée par un intérêt sérieux et légitime du disposant.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Premier alinéa de l'article 1264: "soit titulaire d'un démembrement du droit de propriété". Je ne pense pas qu'on soit titulaire d'un démembrement. On est titulaire d'un droit de propriété démembré.

Mme Harel: L'amendement est prêt, M. le Président.

M. Pineau: Dans le troisième alinéa du commentaire, on a l'impression qu'il y a une contradiction. L'article "modifie le droit actuel énoncé aux articles 968 et suivants du code. Actuellement, ces stipulations sont permises sans limitation de durée et elles peuvent être faites sans aucun motif. Il reprend, cependant, le droit actuel en permettant de telles stipulations dans les actes à titre gratuit", à condition que ce soit temporaire et justifié.

M. Cossette: Oui. Je pense que le fait de le dire corrige le commentaire.

M. Pineau: C'est cela. M. Cossette: Cela va.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est donc dire qu'avec le nouvel article 1264 il ne serait plus possible de stipuler une inaliénabilité pour une période donnée. On indique que ce doit être temporaire. On

pourra toujours y déroger dans le cas d'un intérêt sérieux et légitime. Je ne vous cache pas que cela m'ennuie un peu. Je pense qu'il y a sûrement des cas où il pourrait être absolument justifié de maintenir la prohibition d'aliéner pour protéger certaines personnes.

M. Cossette: Elle est permise, pour autant qu'il y ait un intérêt sérieux et légitime.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais encore là on peut y déroger. Il me semble que, si on a mis une période de temps - on dit que c'est temporaire - on aurait pu s'arrêter là, sans ajouter "un intérêt sérieux et légitime". D'abord, qu'est-ce qu'un intérêt sérieux et légitime?

M. Cossette: On a toute la jurisprudence française pour le déterminer. Vous avez la référence à 900.1 je pense. C'est déjà beaucoup.

M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai vu des cas où il y avait prohibition d'aliéner. On est venu ici à Québec pour obtenir un projet de loi privé et c'est la plus mauvaise chose qui ait pu arriver.

M. Cassette: Pour effacer la prohibition?

M. Leduc (Saint-Laurent): Il y avait une prohibition d'aliéner stipulée en faveur d'un enfant qui s'est révélé prodigue. On a permis la disposition d'un morceau de terre. Je pense que cela s'était fait pour 100 000 $, et deux ou trois ans après cela valait 1 000 000 $. Il a dilapidé cela dans l'espace d'un an ou un an et demi, alors que si on avait respecté l'obligation du testateur il aurait eu toute la protection et, au lieu d'avoir 100 000 $, il aurait eu 1 000 000 $. C'est un cas. J'en ai vu d'autres également.

M. Cassette: C'est un cas très exceptionnel.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non. Pourquoi ne pourrait-on pas stipuler "pour une période donnée" si on a des raisons? Je donne mon bien à mon fils. Je sais que peut-être pour une période donnée il y aurait avantage à ne pas vendre l'immeuble, à ce qu'il ne puisse pas l'hypothéquer. Je me demande si on ne devrait pas le permettre dans ces cas-là.

Mme Harel: Est-ce que vous ne pourriez pas le faire en créant une fiducie ou une substitution? À ce moment-là, cela vaudrait pour la durée de la fiducie.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

M. Cossette: Oui. Par contre, si vous stipulez 30 ans ou 20 ans, c'est temporaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais on pourrait y déroger s'il y a un intérêt sérieux et légitime, comme dans le cas que j'ai mentionné tantôt où on a pensé que c'était peut-être une bonne chose qu'il puisse disposer de l'immeuble pour 100 000 $. C'était peut-être beaucoup d'argent, mais on n'a pas pensé qu'il pouvait, d'abord, dilapider cela et également que cela pouvait prendre de la valeur. Je dois reconnaître que c'est le testateur qui avait raison et non pas le législateur.

Mme Longtin: Le motif sérieux et légitime ne vient ici jouer que pour déterminer si la stipulation est valable ou pas, puisqu'il s'agit, évidemment, d'une restriction importante au droit de propriété. C'est à l'article 1265, finalement, que sont établis les critères permettant de mettre fin à cette stipulation. Il faut que l'intérêt qui avait justifié la stipulation ait disparu ou qu'il y ait un intérêt plus important qui l'exige.

M. Cossette: Je pense que vous nous avez devancés d'un article. Est-ce que je me trompe?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, d'accord, mais c'est exactement cela. En fait, le tribunal pourra le permettre.

Mme Harel: Mais, dorénavant, ce sera le tribunal et non plus l'Assemblée nationale.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est peut-être mieux, c'est peut-être une amélioration. Je reviens à cette prohibition d'aliéner. À mon sens, il devrait être possible de stipuler la prohibition d'aliéner pour une période donnée sans qu'on ajoute qu'on puisse y déroger. Auparavant, on pouvait stipuler la prohibition d'aliéner sans limite de temps. Maintenant, on a mis une limite. Je crois que c'est important. Vous dites non?

M. Cossette: On n'a pas de limite. Mme Longtin: Si c'est temporaire.

M. Cassette: On dit: Si c'est temporaire.

M. Pineau: Si elle est temporaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): II y a une limite, quand même. Auparavant, il n'y avait pas ce "temporaire".

Mme Longtin: Elle ne peut pas être perpétuelle lorsqu'on dit temporaire, mais elle peut valoir pour 30, 40 ou 50 ans,

suivant les circonstances, selon le bien qui fait l'objet de la stipulation et selon les personnes qui en sont bénéficiaires.

M. Leduc (Saint-Laurent): Dans certains cas, on devrait respecter les conventions des parties. Il me semble que c'est aller très loin qu'encore là le tribunal puisse intervenir pour enlever cette convention qui peut protéger, appelons-le le donateur ou le légataire, ou appelez-le comme vous voulez. Peut-être qu'on ne pourra pas le protéger de façon aussi importante. Maintenant, il ne sera plus possible, d'aucune façon, de mettre une limite, c'est-à-dire de prohiber l'aliénation pour une période donnée.

M. Pineau: Vous le pourrez.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire qu'on pourra toujours y déroger. Si je stipule une prohibition d'aliéner pour une période de quinze ans, parce que j'ai une raison majeure de le faire - je suis un donateur et je crois que j'ai le droit de donner et que je devrais avoir le droit de stipuler certaines conditions - à ce moment, en vertu surtout de l'article 1265, on pourrait déroger à ma convention.

M. Cassette: L'intérêt sérieux et légitime demeure. Je ne le pense pas. Par contre, si vous avez dit: Je prohibe la vente de cet immeuble parce que - c'est farfelu ce que je vais dire - mon enfant est un prodigue, mais qu'on a la preuve qu'il ne l'est plus, pourquoi ne pas lui permettre de le vendre en s'adressant au tribunal parce que l'intérêt que vous aviez et qui avait justifié cette stipulation est complètement disparu et votre enfant est devenu complètement normal?

M. Leduc (Saint-Laurent): Prenez le cas que je vous ai mentionné tantôt: est-ce qu'il y avait un intérêt supérieur?

M. Cossette: Là, c'est l'Assemblée nationale qui a permis cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, tout de même, ce sont des cas qu'on voit assez régulièrement. Oui, je pense que, devant la sagesse des gens, bien des fois, on permet d'y déroger. J'en suis surtout sur le fait qu'on ne pourra plus stipuler, d'aucune façon, d'une façon absolue.

M. Cossette: C'est-à-dire que vous allez pouvoir le faire, sauf que le tribunal pourra venir dire que l'intérêt qui avait justifié la stipulation n'existe plus et que, conséquem-ment, il autorise l'aliénation.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau, vous m'aviez demandé la parole.

M. Pineau: Je ne sais plus trop si j'ai demandé la parole, M. le Président. Ce sont deux dispositions distinctes, les articles 1264 et 1265. À l'article 1264, alinéa 2, on indique deux conditions de validité de la stipulation d'inaliénabilité. Il faut qu'elle soit limitée dans le temps, il faut qu'elle soit justifiée par un intérêt sérieux et légitime. Cela est une première chose.

La deuxième chose est que, dans la mesure ou elle était temporaire et justifiée, si elle n'est plus justifiée, alors, il y a une possibilité d'intervention du tribunal. Ce sont deux étapes distinctes.

M. Cossette: Exactement.

Mme Harel: Me Longtin, peut-être pouvez-vous apporter l'exemple que vous me donniez?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: En fait, je pense que c'est un cas, justement, où, plutôt que de venir par une législation privée, il y aurait eu intérêt à avoir l'article 1265. Si on considère qu'un testateur indique une prohibition d'aliéner sur un immeuble résidentiel au bénéfice d'un de ses enfants qui est un majeur incapable, mais, à l'époque, suffisamment apte à se débrouiller lui-même relativement à ses propres soins et qu'au fil des ans, la solitude aidant, cette personne devient complètement inapte pour différents motifs et que la maison est dans un état de dégradation tel qu'elle a perdu déjà les trois quarts de sa valeur, il est possible qu'à ce moment-là les autres cohéritiers puissent demander justement - il y a un intérêt plus important qui l'exige - non seulement la conservation du bien, mais aussi la protection même de cette personne qui est dans une situation qui était imprévisible au moment où le testateur a stipulé.

M. Leduc (Saint-Laurent): Avec le libellé de l'article au deuxième alinéa, il n'est même plus certain que ma stipulation d'inaliénabilité sera valable. On pourra la mettre en cause, on pourra dire: Écoutez, ce n'était pas justifié par un intérêt sérieux et légitime.

Mme Longtin: Si je prohibais l'aliénation d'un bien pour une période qui aurait pour effet de pousser une personne à ne pas se marier ou à renoncer à l'exercice de certains droits fondamentaux, ce ne serait certainement pas un intérêt sérieux et légitime ou cela pourrait ne pas être considéré comme tel. S'il s'agit de protéger, pour un testateur, un de ses enfants et de lui assurer une vie confortable, je pense qu'il n'y a personne qui va dénier cet intérêt.

M. Leduc (Saint-Laurent): II faut vous dire que dans la pratique on nous demande souvent de mettre des réserves, de mettre des restrictions. Les gens, bien des fois, veulent donner, mais veulent mettre des restrictions, des prohibitions d'aliéner. Je ne vous cache pas que maintenant ce ne sera plus facile. Je me demande si on ne va pas un peu loin. En tout cas, c'est mon impression. Je comprends bien qu'on ne doit pas, autant que possible, geler un bien, mais est-ce qu'on ne peut pas permettre à des gens de stipuler d'une façon libérale?

Mme Harel: Libérale ou conservatrice?

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, libérale, libérale! C'est libéral de permettre à quelqu'un de disposer de ses biens d'une façon intelligente, d'une façon, je dirais, qui protège celui qui les reçoit. Moi, je ne vois rien de conservateur là-dedans, au contraire.

Mme Harel: Si vous voulez, on va poursuivre le chapitre sur l'inaliénabilité et on va suspendre cet article-là, quitte à y revenir par la suite.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement dont on n'a pas fait lecture, que vous m'avez remis, on va le retirer? Non?

Mme Harel: En fait, c'est une correction.

Le Président (M. Gagnon): On peut en faire lecture tout de suite.

Mme Harel: Oui, très bien.

Le Président (M. Gagnon): À la quatrième ligne du premier alinéa, remplacer les mots "d'un démembrement du droit de propriété" par les mots "d'un droit de propriété démembré". C'est ça?

M. Cossette: Oui.

Mme Harel: C'est bien cela.

Une voix: On va le retirer pour le moment, mais on va le garder.

Le Président (M. Gagnon): Alors, on va le retirer pour le moment. L'article 1264 est suspendu. Article 1265?

Mme Harel: C'est au même effet. "1265. Celui dont le bien est inaliénable peut être autorisé par le tribunal à disposer du bien si l'intérêt qui avait justifié la stipulation d'inaliénabilité a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige." C'est au même effet que l'article 1264.

M. Cossette: Cet article qui s'inspire du droit français est de droit nouveau. Il vise à permettre à l'acquéreur d'un bien affecté par une stipulation d'inaliénabilité d'obtenir judiciairement l'autorisation d'y obvier lorsqu'il démontre que l'intérêt qui avait justifié la stipulation est disparu ou qu'un intérêt supérieur l'exige.

L'article proposé permettra ainsi d'éviter la procédure parfois longue et onéreuse de l'adoption de lois privées qui est la solution actuelle au problème des stipulations d'inaliénabilité désuètes ou indûment contraignantes.

Le Président (M. Gagnon): Cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est la même chose que l'autre. C'est sur division, si on veut l'accepter.

Le Président (M. Gagnon): Article 1265, adopté sur division.

M. Cossette: L'article 1264 aussi?

Le Président (M. Gagnon): Et l'article 1264?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, bien sûr, l'article 1264, oui.

M. Cossette: Bon, avec l'amendement pour l'article 1264?

Le Président (M. Gagnon): L'amendement dont j'ai fait la lecture est-il adopté, lui? Adopté, et l'article est adopté sur division. C'est cela? L'amendement à l'article 1264 est adopté et l'article 1264, tel qu'amendé, est adopté sur division. Article 1266?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, aux première et quatrième lignes, le mot "affecte" par les mots "porte sur".

Alors, l'article se lit comme suit: "La stipulation d'inaliénabilité qui porte sur un immeuble n'est opposable aux tiers que si l'acte qui la contient est enregistré par dépôt et un avis transmis au registrateur pour qu'il en fasse mention à l'index des immeubles. Celle qui porte sur un meuble n'est opposable aux tiers que s'ils en connaissent l'existence."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce les conditions d'opposabilité aux tiers de la stipulation d'inaliénabilité. Il reprend la règle de l'article 981 du Code civil du Bas-Canada selon laquelle la stipulation qui affecte un immeuble doit, pour être opposable aux tiers, être enregistrée. Il y ajoute, cependant, en

prévoyant qu'un avis doit être transmis au registrateur pour qu'il en fasse mention à l'index des immeubles. Cet ajout devrait permettre aux tiers de s'informer plus facilement de l'existence de telle stipulation.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1266 est adopté et l'article est adopté tel qu'amendé. L'article 1267?

Mme Harel: L'amendement consiste à insérer, à la fin, les mots "sous réserve notamment des dispositions contenues au Code de procédure civile".

L'article se lit comme suit: "La stipulation d'inaliénabilité d'un bien entraîne son insaisissabilité à raison de toute dette contractée avant ou pendant la période d'inaliénabilité par la personne qui reçoit le bien, sous réserve notamment des dispositions contenues au Code de procédure civile."

L'amendement proposé n'a d'autre objet que d'indiquer au lecteur que le Code de procédure civile énonce certaines exceptions à la règle édictée, particulièrement à l'article 553, et que d'autres lois pourraient également faire exception à cette insaisissabilité.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article énonce la règle selon laquelle l'inaliénabilité d'un bien a pour corollaire son insaisissabilité. Une telle règle s'avère nécessaire, car la saisie conduit à la vente, alors que la vente du bien est prohibée. De plus, permettre la saisie et la vente par les créanciers d'un bien inaliénable serait donner au titulaire du bien un moyen facile de contourner l'inaliénabilité. Il lui suffirait de se faire prêter une somme équivalente à la valeur du bien, d'en refuser le remboursement et de laisser saisir le bien par le prétendu prêteur qui serait, en réalité, un acheteur. La règle proposée n'affecte évidemment pas les recours des créanciers du disposant qui aurait transféré frauduleusement un bien en en stipulant l'inaliénabilité.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): L'article dit que la stipulation d'inaliénabilité d'un bien "entraîne son insaisissabilité à raison de toute dette contractée avant." Est-ce que c'est correct "avant"? On dit: Si c'est "contracté avant ou pendant la période d'inaliénabilité par la personne qui reçoit le bien." Est-ce que c'est possible que ce soit insaisissable, même si la dette a été contractée avant?

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Oui, effectivement, c'est ce que le texte stipule: Si la dette a été contractée avant. Mais, évidemment, cela réserve les recours des créanciers pour les transferts qui auraient été faits frauduleusement.

M. Pineau: Cela réserve...

M. Charbonneau (Pierre): Les créanciers conservent toujours leur recours en cas de fraude. On ne peut pas stipuler l'insaisissabilité ou l'inaliénabilité d'un bien frauduleusement, de façon à frauder les créanciers.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Mais cela réduit le gage des créanciers?

M. Charbonneau (Pierre): Oui. M. Pineau: Mais oui!

M. Charbonneau (Pierre): Mais, s'ils n'en souffrent aucun préjudice, il n'y a pas de problème.

M. Pineau: Mais ils peuvent, justement, en souffrir préjudice. (21 h 30)

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien oui! Écoutez, vous avez une dette qui est contractée avant. Vous avez un créancier et, à ce moment-là, on dit que cela pourrait affecter sa créance.

M. Charbonneau (Pierre): Si cela affecte sa créance, c'est parce qu'il est en état d'insolvabilité face à ses dettes. À ce moment-là, il est question de fraude. Si les biens sont suffisants pour satisfaire tous ses créanciers, le fait qu'un de ces biens soit stipulé insaisissable n'affecte pas les créanciers.

M. Pineau: II n'y aura fraude que dans la mesure où il y aura une insolvabilité de fait constatée par le tribunal.

M. Charbonneau (Pierre): Mais si, par la stipulation d'insaisissabilité, on écarte un bien de sorte que, finalement, le débiteur devient insolvable et ne peut plus remplir ses obligations, je pense que la question de fraude va jouer. Les créanciers vont conserver leur recours.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ils conservent le même recours que s'il n'y avait pas eu cette stipulation.

M. Charbonneau (Pierre): C'est cela.

M. Pineau: II y a une modification apportée à l'article 553, au paragraphe 3, du Code civil du Bas-Canada. Non?

M. Charbonneau (Pierre): On fait la réserve, ici à l'article 1267, des dispositions prévues au Code de procédure civile. Cette réserve-là demeure, évidemment.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: II y a une chose sur le plan de la phraséologie: entraîne l'insaisissabilité de celui-ci. Ce n'est pas l'insaisissabilité de la stipulation.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on peut l'inclure dans l'amendement qui est déjà proposé?

Mme Harel: Oui. On va faire la correction.

M. Charbonneau (Pierre): L'insaisissabilité.

Le Président (M. Gagnon): Alors, la correction à l'amendement sera faite en conséquence. C'est cela? Est-ce que cet amendement à l'article 1267 est adopté? Adopté. Et est-ce que l'article tel qu'amendé est adopté?

Des voix: Oui. Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1268.

Mme Harel: "La clause tendant à empêcher celui dont le bien est inaliénable de contester la validité de la stipulation d'inaliénabilité ou de demander l'autorisation de l'aliéner est réputée non écrite. "Il en est de même de la clause pénale au même effet."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à rendre sans effet les clauses ayant pour but d'empêcher l'acquéreur de contester la validité de la stipulation ou de demander l'autorisation judiciaire d'y obvier, ainsi que celles dont l'objet vise à l'en pénaliser.

Les dispositions de cet article qui s'inspire en partie du droit français s'avèrent nécessaires afin de ne pas rendre illusoire le droit de l'acquéreur.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.

M. Pineau: L'article 1268, pour moi, ça va. Mais, M. le Président, à l'article 1267, je me demande s'il y a quelque chose. Je ne suis pas sûr que cela fonctionne normalement.

M. Cossette: Préférez-vous qu'on le suspende pour y réfléchir davantage?

M. Pineau: Peut-être, oui.

M. Marx: D'accord, si on veut le suspendre.

M. Leduc (Saint-Laurent): À la lecture de l'article, on comprend qu'on dérogerait à la règle générale. Je comprends que, évidemment, vous dites seulement s'il y avait insolvabilité. Je veux bien. Je comprends cela, c'est la règle générale. Mais, ici, on semblerait, en vertu de l'article 1267, déroger à cette règle générale.

Le Président (M. Gagnon): Pour les fins du Journal des débats, si vous me le permettez, je vous donnerai la parole tout de suite après. Compte tenu que l'article a été adopté tel qu'amendé, on demande la permission de rouvrir l'article pour qu'on puisse le réétudier. Voilà.

M. Cossette: Alors, on y reviendra plus tard?

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on le suspend et on y reviendra plus tard?

Mme Harel: On peut y revenir immédiatement.

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Harel: Parce qu'on reporte seulement le débat à demain.

Le Président (M. Gagnon): Voilà.

Mme Harel: On ne peut pas? On peut y revenir immédiatement.

Le Président (M. Gagnon): Je suis à votre disposition. Je veux savoir ce qu'on fait avec l'article. On a accepté de le réouvrir pour le rediscuter. Me Pineau.

Mme Harel: Me Longtin.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: La question, c'est si on pouvait avoir un concentré de la difficulté.

Le Président (M. Gagnon): C'est un peu ce que je cherche, moi aussi.

M. Pineau: On veut dire que cette stipulation d'inaliénabilité entraîne l'insai-

sissabilité du bien pour toute dette contractée avant ou pendant la période d'inaliénabilité.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais, pour autant que cela ne porte pas préjudice aux créanciers.

M. Pineau: On me demandait tout à l'heure pourquoi cela a entraîné l'insaisissabilité, même dans l'hypothèse où la dette avait été contractée avant. Il semblerait qu'on nous réponde à cela que, dans la mesure où le débiteur a des biens suffisants, cela ne porte pas préjudice à ses créanciers antérieurs à la stipulation. Et, s'il est insolvable, il est considéré comme étant de mauvaise foi. Est-ce cela? Est-ce que ce serait le recours paulien?

M. Cossette: C'est le recours paulien qui s'applique à ce moment-là. Il ne peut pas frauder ses créanciers de cette façon-là.

M. Pineau: C'est ce qu'on disait. Peut-être que dans l'amendement on pourrait dire: "entraîne l'insaisissabilité de celui-ci pour toute dette contractée." Ce n'est pas "en raison de toute dette", c'est "pour la dette". Non?

Mme Longtin: Oui. Cela ne cause pas de difficulté.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement va être corrigé en conséquence. C'est cela?

Mme Longtin: Oui.

Le Président (M. Gagnon): On aura un nouvel amendement parce que le premier a déjà été adopté.

M. Marx: L'article 1267 est adopté avec l'amendement.

Le Président (M. Gagnon): Avec l'amendement. M. le député de Saint-Laurent, avec l'amendement tel que proposé par Me Pineau, est-ce que cela va?

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va.

Le Président (M. Gagnon): Donc, l'article 1267 est... Comment inscrit-on cela, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: II est ouvert.

M. Marx: Tel que revu et corrigé.

Le Président (M. Gagnon): Tel qu'amendé. Est-ce que le nouvel amendement est adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1267 tel que réamendé est adopté. C'est cela?

Je crois que j'avais demandé si l'article 1268 était adopté. Il a été adopté. L'article 1269?

Mme Harel: "La nullité de l'aliénation faite malgré une stipulation d'inaliénabilité et sans autorisation du tribunal ne peut être invoquée que par celui qui a stipulé l'inaliénabilité et ses ayants droit ou par celui au bénéfice duquel elle a été stipulée."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article indique quelles sont les personnes qui pourront invoquer la nullité de l'aliénation faite malgré la stipulation et sans autorisation judiciaire. L'article précise que seul le stipulant, c'est-à-dire celui qui a transféré le bien affecté, et ses ayants droit, ainsi que celui au bénéfice duquel la stipulation a été faite, stipulant acquéreur ou tiers pourront demander la nullité de l'aliénation.

Il s'agit donc d'une nullité relative et sujette, conséquemment, à une ratification expresse ou tacite de ceux qui peuvent l'invoquer.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1269 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1270?

De la substitution

Mme Harel: C'est la section "De la nature et de l'étendue de la substitution."

Le Président (M. Gagnon): Voilà!

Mme Harel: "II y a substitution lorsqu'une personne reçoit des biens par libéralité avec l'obligation de les rendre après un certain temps à un tiers. "La substitution s'établit par donation ou par testament. Elle doit être constatée dans un écrit et enregistrée par dépôt."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article remplace l'article 925 du Code civil du Bas-Canada. Il ne définit que la substitution fidéicommissaire du droit actuel en en reprenant les éléments essentiels, soit un acte à titre gratuit comportant deux libéralités successives, la première au grevé,

la seconde à l'appelé et le trait du temps.

Le deuxième alinéa énonce généralement la règle actuelle qui établit que l'on peut substituer par donation dans un contrat ordinaire ou dans un contrat de mariage et par testament. Il remplace l'article 929 du Code civil du Bas-Canada.

Il n'a pas paru nécessaire de reprendre ici les précisions actuelles relatives à la capacité requise et à la possibilité que la disposition qui substitue puisse être conditionnelle, celle-ci relevant de l'application normale des autres règles du code.

L'exigence que la substitution soit constatée dans un écrit est nouvelle mais est conforme à la doctrine et à la jurisprudence ainsi qu'aux recommandations de l'office. Elle découle de ce que toute substitution doit nécessairement être enregistrée et écarte donc ainsi tout doute sur la possibilité de procéder par don manuel. Contrairement à la proposition de l'office, l'article ne précise pas la sanction du défaut de remplir l'exigence d'un écrit puisque ce défaut emporte nécessairement absence de substitution.

Enfin, l'alinéa précise que la substitution doit, conformément au droit actuel et aux propositions de l'office, être enregistrée. L'exigence de l'enregistrement demeure nécessaire car si le grevé a normalement le pouvoir d'aliéner à titre onéreux les biens substitués et que les tiers acquéreurs ont un droit définitif au bien transmis il en va autrement des aliénations à titre gratuit qui ne sont ouvertes au grevé que sur permission expresse du disposant. Or, comme ces aliénations, lorsque non permises, sont sujettes à une demande en nullité par les appelés, il demeure impérieux que les tiers soient avertis de cette possibilité, ce que l'enregistrement de la substitution permet de faire.

Le Président (M. Gagnon): Le deuxième chapitre du commentaire. Cela va-t-il? L'article 1270 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1271.

Mme Harel: "La personne qui a l'obligation de rendre se nomme le grevé; celle qui a droit de recueillir postérieurement se nomme l'appelé. "L'appelé qui recueille avec l'obligation de rendre devient à son tour grevé par rapport à l'appelé subséquent."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 356 du projet de l'office et l'article 927 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'article est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1272.

Mme Harel: "La défense de tester des biens, faite au donataire ou légataire sans autre indication, emporte substitution en faveur de ses héritiers ab intestat quant aux biens donnés ou légués qui restent à son décès."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 360 du projet de l'office et l'article 976 du Code civil du Bas-Canada. La défense de tester constitue une substitution de residuo qui se distingue de celle prévue à l'article 1284 puisque ici le droit de l'appelé est moins aléatoire. En effet, il recueille nécessairement les biens si le grevé ne les a pas aliénés de son vivant. Dans les autres cas, le disposant a pu permettre au grevé d'aliéner même par testament et la substitution n'aura lieu alors que si le grevé n'a pas testé des biens.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Lorsqu'on dit que la défense de tester constitue une substitution de residuo est-ce qu'il s'agit d'une défense de tester totale ou est-ce que cela pourrait également s'appliquer dans le cas de défense de tester partielle?

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je comprendrais parfaitement dans le cas d'une défense de tester totale, mais partielle... Si je donne un immeuble à quelqu'un et que je dis que ce quelqu'un ne pourra pas en disposer par testament, à ce moment, est-ce une substitution de residuo?

M. Charbonneau (Pierre): Cela pourrait être le cas aussi lorsque c'est une prohibition de tester partielle quant aux biens dont on ne peut disposer par testament.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce nouveau, cela?

M. Charbonneau (Pierre): Non, c'est le

droit actuel. Évidemment, quand on parle de substitution de residuo on vise souvent le cas de la prohibition totale mais cela vise aussi les prohibitions partielles.

M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, si je donne un immeuble et que je dis que la personne qui reçoit ne pourra pas en disposer par testament, cela veut dire qu'à ce moment il y aura substitution de residuo.

M. Charbonneau (Pierre): C'est cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je dois vous dire que je n'ai jamais compris la substitution de residuo de cette façon. J'ai dû mal la comprendre. (21 h 45)

M. Marx: On peut contester.

M. Cassette: C'est l'enseignement de la doctrine la plus traditionnelle.

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui?

Le Président (M. Gagnon): L'article 1272 est adopté. Me Charbonneau, quand vous reprendrez la parole, je vais vous demander d'approcher de votre micro.

M. Charbonneau (Pierre): Ah! ceux-là s'approchent !

Le Président (M. Gagnon): L'article 1273.

Mme Harel: "1273. Aucune substitution ne peut s'étendre à plus de deux ordres successifs de personnes, outre celui du grevé initial; autrement, elle est sans effet pour les ordres subséquents.

Les transmissions qui ont lieu entre cogrevés au décè3 de l'un d'eux, lorsqu'il est stipulé que sa part passe aux grevés survivants, ne sont pas considérées comme étant faites à un ordre subséquent."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article reprend la règle des articles 363 du projet de l'office et 982 du Code civil du Bas-Canada. Il ajoute, à l'instar de l'office et conformément à la doctrine actuelle, que la substitution qui comporte plus de deux ordres d'appelés, outre celui du grevé, n'est pas nulle mais est simplement sans effet pour les ordres subséquents.

Le deuxième alinéa est de droit nouveau et reprend en partie l'article 365 du projet de l'office. Il clarifie le droit actuel et évite toute ambiguïté sur la transmission entre cogrevés. Considérer celle-ci comme étant faite à un nouvel ordre comporterait le risque de voir l'ouverture survenir avant que les appelés désignés par les disposants n'aient reçu les biens, ce qui serait contraire à la nature même de la substitution.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1273 est-il adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1274? Il y a un amendement à l'article 1274.

Mme Harel: Oui, à l'article 1274, l'amendement consiste à remplacer, aux troisième et quatrième lignes, les mots "au moment de l'ouverture et après qu'elle a eu lieu" par les mots "à compter de l'ouverture".

L'article se lit comme suit: "1274. Compte tenu des adaptations nécessaires, les règles des successions, notamment celles relatives au droit d'opter ou aux dispositions testamentaires, s'appliquent à la substitution à compter de l'ouverture, qu'elle soit établie par donation ou par testament."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance la règle de l'article 366 du projet de l'office de même que celle prévue aux premier et deuxième alinéas de l'article 933 du Code civil du Bas-Canada en en simplifiant la rédaction.

Cette règle ne s'applique qu'au moment de l'ouverture et après qu'elle a eu lieu. Elle n'empêche pas l'application des règles propres à la donation ou au testament relatives à la capacité des parties, la formation du contrat, la forme de l'acte ni de celles qui sont propres au contrat de mariage. Les règles des successions seront donc applicables. Parmi celles susceptibles de l'être, on peut mentionner, outre les règles concernant le droit d'opter et les dispositions testamentaires, celles relatives au lieu de l'ouverture des successions, à la présomption des comourants, à la saisine, à la liquidation ou au partage. Cependant, comme le suggère l'office, l'article 1304 précise que la représentation n'a pas lieu à l'égard d'un grevé.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1274 est adopté et l'article 1274 tel qu'amendé est adopté. Article 1275?

Mme Harel: "1275. Avant l'ouverture, le grevé est propriétaire des biens substitués; ces biens forment, au sein de son patrimoine personnel, un patrimoine distinct destiné à l'appelé."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cassette: La première partie de cet article reprend en substance les articles 372 du projet de l'office et 944 du Code civil du Bas-Canada, mais en spécifiant clairement que le grevé est propriétaire plutôt que de dire qu'il est possesseur à titre de propriétaire. La qualité de propriétaire est généralement reconnue en doctrine même si le droit de propriété est restreint dans le temps puisque le grevé doit rendre éventuellement les biens reçus et dans son étendue puisque le grevé doit agir de façon à ne pas mettre en péril les droits de l'appelé sur les biens substitués ou leur emploi.

La seconde partie de l'article est nouvelle. Elle aura pour effet d'obliger les créanciers personnels du grevé à poursuivre le paiement de leurs créances, d'abord sur le patrimoine personnel du grevé et, ensuite seulement, sur les biens faisant l'objet de la substitution, qui constitue un patrimoine distinct au sein de son patrimoine général. Il s'agit aussi d'un cas où la division du patrimoine d'une personne est permise.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1275 est adopté. Article 1276?

Mme Harel: "1276. Le grevé doit, de la même manière qu'un administrateur du bien d'autrui, faire dresser à ses frais, dans les deux mois de la donation ou de l'acceptation du legs et en y convoquant l'appelé, un inventaire des biens."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. Excusez!

Mme Harel: Faire inventaire - On va remplacer le mot "dresser" - faire inventaire des biens, "faire à ses frais l'inventaire des biens dans les deux mois de la donation ou de l'acceptation du legs et en y convoquant l'appelé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire. Oui, on va faire un amendement.

M. Cossette: Article 1276, le commentaire. Cet article énonce le premier devoir du grevé, qui est d'ailleurs celui de tous ceux qui ont l'obligation de rendre des biens, celui de faire un inventaire des biens. Il ne retient pas les exceptions proposées aux articles 374 du projet de l'office et 946 du Code civil du Bas-Canada. La nécessité de procéder à l'inventaire des biens se justifie, tant dans l'intérêt du grevé que dans celui de l'appelé. Ainsi, le grevé y a un intérêt non seulement parce qu'il doit connaître l'étendue des biens dont il pourra jouir, mais aussi parce qu'il doit rendre les biens à la fin de son droit, tout en étant responsable de leur perte ou détérioration.

Il a aussi droit au remboursement des impenses utiles ou d'agrément qu'il a faites, ce qui implique qu'il puisse prouver la nature et l'état des biens reçus. L'appelé y a un intérêt en ce qu'il a un droit éventuel aux biens substitués et qu'il peut être en mesure d'exercer une réclamation contre le grevé. Il peut aussi avoir intérêt à pouvoir juger en tout temps de l'évolution du patrimoine substitué, afin de s'assurer que le grevé ne dilapide pas les biens ou fait les remplois adéquats.

Quant à la suppression des exceptions à l'obligation d'inventorier les biens, elle se justifie par le souci de protéger les parties. En effet, l'acte créant la substitution pourrait avoir été fait bien avant qu'il ne prenne effet et l'inventaire ne plus être adéquat ou, encore, pourrait avoir été fait hors la présence des principaux intéressés, le grevé et l'appelé.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1276 est adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté. Nous allons recevoir l'amendement à l'article 1277.

Mme Harel: "Dans l'exercice de ses droits et dans l'exécution de ses obligations, le grevé doit agir avec prudence et diligence, eu égard aux droits de l'appelé".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article qui reprend en substance l'article 381 du projet de l'office est nouveau. Il est néanmoins conforme au droit actuel où la doctrine enseigne qu'il n'est pas permis au grevé de poser quelque acte qui rendrait impossible la restitution des biens à l'ouverture et qu'il ne peut rien faire qui soit préjudiciable aux droits de l'appelé. Cette obligation d'agir avec prudence et diligence découle de l'obligation de rendre du grevé et constitue, avec l'obligation de faire remploi, le contrepoids aux dispositions nouvelles qui permettent au grevé d'aliéner définitivement les biens reçus et, conséquemment, d'anéantir le droit de l'appelé à la chose elle-même laissée par le disposant. Elle contraint ainsi le grevé à rechercher un juste prix pour les aliénations qu'il consent.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1277 est adopté. Article 1278?

Mme Harel: "L'amendement à l'article 1278 consiste à remplacer, à la fin, les mots "s'y rapportent" par les mots "se rapportent aux biens substitués". L'article se lit comme

suit: "Le grevé doit faire les actes nécessaires à l'entretien et à la conservation des biens. "Il paie les charges et dettes qui deviennent exigibles avant l'ouverture, quelle que soit leur nature; il perçoit les créances, en donne quittance et exerce en justice les actions qui se rapportent aux biens substitués."

L'amendement proposé vise à préciser le texte et à indiquer que le droit d'action du grevé s'étend non seulement aux créances, mais également aux biens substitués.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance les articles 376 et 377 du projet de l'office et l'article 947 du Code civil du Bas-Canada, omission faite des dispositions relatives aux remboursements, qui sont traités à la section réservée à la substitution après l'ouverture. Il vise à obliger le grevé à poser certains actes nécessaires à la protection des droits de l'appelé. Ainsi, le grevé devra faire les actes nécessaires à l'entretien et à la conservation des biens et payer les charges et dettes qui deviennent exigibles avant l'ouverture, quelle que soit leur nature.

Ces obligations découlent de sa qualité de propriétaire et de son obligation de rendre les biens. L'article proposé maintient aussi le droit du grevé de percevoir les créances et d'exercer en justice les droits qui s'y rapportent, mais en supprimant l'obligation d'obtenir le consentement préalable du curateur ou du tribunal. Cette plus grande autonomie accordée au grevé tient compte de sa qualité de propriétaire et de ses droits accrus.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1278 est adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté. Article 1279?

Mme Harel: "Le grevé doit assurer les biens contre les risques usuels, tels le vol et l'incendie. Il est néanmoins dispensé de cette obligation, si la prime d'assurance est trop élevée par rapport aux risques. "L'indemnité d'assurance devient un bien substitué."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend en substance l'article 383 du projet de l'office. Il oblige le grevé à assurer les biens contre les risques usuels, tels l'incendie et le vol, en ajoutant que le grevé est dispensé d'assurer les biens si la prime d'assurance est trop élevée par rapport aux risques. Cette dispense est nécessaire pour couvrir les situations où la prime d'assurance pourrait être exorbitante, par exemple lorsque le grevé est propriétaire d'un bien situé dans un lieu où les services d'incendie sont inexistants. Il prévoit aussi qu'en cas de perte du bien assuré, la substitution se poursuit sur l'indemnité de l'assurance qui est subrogée au bien initial.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me Pineau.

M. Pineau: Le rapport du Barreau, à la page 41, l'article 1290, dit: "Il est préférable de laisser la discrétion au tribunal du rapport sur la..." Excusez-moi. L'article 1279. "Tout comme à l'article 1202, l'emploi des mots "par rapport aux risques" n'est pas judicieux." Les primes d'assurance contre le vol et l'incendie sont fixées par le marché.

Mme Longtin: Mais le marché fixe ses primes par rapport aux risques!

M. Pineau: Oui. Bon!

Le Président (M. Gagnon): L'article 1279 est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1280.

Mme Harel: "Le grevé est soumis aux règles de l'usufruit quant à son droit de commencer ou de continuer sur un fonds substitué une exploitation agricole, sylvicole ou minière."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'article vise à assurer la protection, en faveur de l'appelé, du capital que constitue le fonds substitué en soumettant le grevé aux règles de l'usufruit quant à son droit d'y commencer ou d'y continuer une exploitation agricole, sylvicole ou minière. L'article proposé reprend en substance l'article 378 du projet de l'office de même que l'article 949a du Code civil du Bas-Canada, qu'il remplace.

Le Président (M. Gagnon): Cet article est-il adopté? J'appelle l'article 1281.

Mme Harel: "Le grevé peut aliéner à titre onéreux les biens substitués ou les louer. Il peut aussi les grever d'une sûreté si cela s'impose pour l'entretien et la conservation du bien ou pour faire un placement au nom de la substitution. "Les droits de l'acquéreur, du créancier

ou du locataire ne sont pas affectés par les droits de l'appelé à l'ouverture de la substitution."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article est essentiellement de droit nouveau et s'inspire des propositions de l'office à l'article 379. Il modifie profondément le droit actuel puisqu'il confère au grevé tous les pouvoirs d'aliénation à titre onéreux et ce, sans nécessiter d'autorisation préalable. De plus, les droits des tiers qui contractent avec le grevé ne seront plus désormais affectés par celui des appelés à l'ouverture contrairement au droit actuel où leurs droits étaient alors, en principe, résolus de plein droit en faveur des appelés.

L'article proposé vise à répondre à l'objection principale qu'on adresse à la substitution et qui est celle d'entraver la libre circulation des biens et de nuire au crédit.

Cette nouvelle autonomie conférée au grevé, qui tient compte davantage du fait qu'il est propriétaire véritable, demeure toutefois contrebalancée de mécanismes destinés à assurer une protection efficace des droits des appelés. Telles sont l'obligation du grevé de faire remploi du prix de l'aliénation conformément aux dispositions relatives au placement présumé sûr, l'obligation du grevé d'agir en toute chose avec prudence et diligence eu égard aux droits de l'appelé, l'obligation du grevé d'informer annuellement l'appelé de toute modification à l'inventaire des biens ainsi que du remploi qu'il a fait des biens substitués et des recours conservatoires de l'appelé contre le grevé qui n'exécute pas ses obligations ou agit de façon à mettre en péril les droits de l'appelé.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1281 est-il adopté? J'appelle l'article 1282.

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent); En vertu du nouvel article 1281, on ne pourra plus dorénavant stipuler que le grevé doit rendre le bien.

M. Cassette: II aura le droit de vendre, alors, vous pouvez quand même le stipuler, mais la loi lui donne quand même le droit de vendre.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est d'ordre public. On ne pourrait pas stipuler "au contraire".

M. Cossette: Oui. Sauf si vous avez un intérêt sérieux et légitime à le prohiber pour une certaine période de temps, à la stipuler temporairement.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est une stipulation de la loi.

M. Cassette: On se réfère à ce moment-là à la règle précédente qu'on a vue.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1281 est adopté. J'appelle l'article 1282. (22 heures)

Mme Harel: "Le grevé est tenu de faire remploi, au nom de la substitution, du prix de toute aliénation de biens substitués et des capitaux qui lui sont payés avant l'ouverture ou qu'il a reçus du disposant, conformément aux dispositions relatives aux placements présumés sûrs."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, qui reprend partiellement les articles 380 et 381 du projet de l'office, constitue le contrepoids aux pouvoirs d'aliénation étendus qui sont désormais conférés au grevé. Il oblige le grevé à faire remploi, au nom de la substitution, de tout capital perçu provenant des biens substitués ou reçus du disposant et ce conformément aux règles relatives aux placements présumés sûrs. Aucun délai n'est imposé au grevé pour faire les remplois, mais son obligation d'agir avec prudence et diligence lui dicte de les faire dans un délai raisonnable sous peine d'inexécution de ses obligations. D'ailleurs, le grevé a intérêt à agir avec célérité car c'est lui qui profitera des revenus engendrés par le placement du capital.

Contrairement à la position de l'Office de révision du Code civil, l'exigence tirée du droit actuel, notamment du dernier alinéa de l'article 931 du Code civil du Bas-Canada voulant que leur remploi soit fait au nom de la substitution est apparu une mesure indispensable pour avertir les tiers que le placement est un lien substitué. Enfin, une protection efficace des intérêts de l'appelé sous-tend le maintien du droit actuel qui exige que les remplois fassent l'objet de placements sécuritaires et non susceptibles d'entraîner la perte du capital qui doit revenir à l'appelé en vertu de son droit éventuel. Le vaste éventail de ces placements ne saurait d'ailleurs nuire indûment à l'autonomie du grevé.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1282 est adopté. Article 1283?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer aux deuxième et troisième lignes les mots "qu'il a subie", par les mots "à la masse des biens". L'article se lit comme suit: "Le grevé doit, à chaque anniversaire de la date de l'inventaire des biens informer l'appelé de toute modification à la masse des biens; il doit l'informer aussi du remploi qu'il a fait du prix des biens aliénés."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau et reprend en substance l'article 375 du projet de l'office. Il oblige le grevé à informer l'appelé des modifications à l'inventaire des biens ou encore de leur remploi. Il est nécessaire, afin d'assurer une protection efficace des droits de l'appelé et de lui permettre au besoin d'exercer utilement ces recours conservatoires.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à 1283 est adopté. L'article 1283 est adopté tel qu'amendé. Juste avant de continuer, je dois avoir votre permission pour continuer, car il est passé 22 heures.

M. Marx: II n'y a pas de problème, M. le Président. On peut continuer jusqu'à l'épuisement de ce cahier.

Le Président (M. Gagnon): Article 1284?

Mme Harel: "Le grevé peut, si l'acte constitutif de la substitution le prévoit, disposer gratuitement des biens substitués ou ne pas faire remploi du prix de leur aliénation. Il ne peut en tester sans que l'acte ne le permette expressément. "La substitution n'a alors d'effet qu'à l'égard des biens dont le grevé n'a pas disposé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article permet au grevé de disposer gratuitement des biens substitués ou de ne pas faire remploi du prix de leur aliénation a condition qu'ils soient autorisés par l'acte constitutif. S'il n'est pas autorisé, les aliénations faites seront annulables à la demande de l'appelé ou de son représentant, curateur ou autre, sous réserve des règles de la prescrition ou d'une ratification par l'appelé.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1284 est adopté. Article 1285?

Mme Harel: "Les créanciers qui détiennent une sûreté sur les bière substitués peuvent les faire saisir et vendre en justice. "Les autres créanciers peuvent aussi le faire, après discussion du patrimoine personnel du grevé. L'appelé peut faire opposition à la saisie et demander que la saisie et la vente soient limitées aux droits conférés au grevé par la substitution. À défaut d'opposition, la vente est valide; l'adjudicataire a un titre définitif et le recours de l'appelé ne peut être exercé que contre le grevé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article indique que les créanciers qui détiennent une sûreté sur les biens substitués peuvent les faire saisir et vendre en justice alors que les autres créanciers doivent, avant de procéder ainsi, faire discuter le patrimoine personnel du grevé. Il modifie le droit actuel en reconnaissant, comme pour les aliénations faites par le grevé, le principe du caractère définitif de la vente en justice effectuée par les créanciers. Il a toutefois paru opportun de réserver, à l'instar de l'office, le droit de l'appelé de s'opposer à la saisie des biens de façon qu'elle soit limitée au seul droit du grevé dans la substitution. Cette réserve s'explique de ce que le droit éventuel de l'appelé ne pourra ici se reporter sur le prix de vente, qui ne peut évidemment faire l'objet d'un remploi.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Me Pineau?

M. Pineau: Pas de problème.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1285 est adopté. Article 1286?

Mme Harel: "Le grevé peut, avant l'ouverture, renoncer à ses droits au profit de l'appelé et lui rendre par anticipation les biens substitués. "Cette renonciation ne peut nuire au droit de ses créanciers non plus qu'au droit de l'appelé éventuel."

Le Président (M- Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend, en substance, l'article 960 du Code civil du Bas-Canada en le complétant conformément à la doctrine actuelle. La renonciation par le grevé à ses droits et la remise des biens qui l'accompagnent sont évidemment sujettes aux dispositions de l'acte constitutionnel de la substitution, qui peuvent stipuler le contraire. Le grevé ne peut, par ailleurs, y procéder dans le but de frustrer ses créanciers de leur recours contre les biens substitués. Enfin, cette renonciation ainsi que la remise demeurent sujettes à l'existence des appelés

en faveur de qui elles sont faites à l'époque de l'ouverture et sous réserve de la survenance d'autres appelés entre l'époque de la renonciation et de la remise et celle de l'ouverture.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Article 1286, adopté. Article 1287?

Mme Harel: "Avant l'ouverture, l'appelé a un droit éventuel aux biens substitués. Il peut en disposer ou y renoncer et faire tous les actes conservatoires utiles à la protection de son droit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'article établit la nature du droit de l'appelé aux biens substitués ainsi que les actes qu'il peut poser à leur égard. Il précise ainsi qu'avant l'ouverture l'appelé n'a qu'un droit éventuel aux biens faisant l'objet de la substitution en ajoutant que l'appelé peut disposer de son droit ou y renoncer et faire tous les actes conservatoires utiles à sa protection. L'article proposé reprend en substance le deuxième alinéa de l'article 385 et l'article 388 du projet de l'office, de même que l'article 956 du Code civil du Bas-Canada en y ajoutant toutefois expressément la possibilité pour l'appelé de renoncer à son droit éventuel.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1287 est adopté. L'article 1288?

Mme Harel: "L'appelé peut, si le grevé refuse ou néglige de faire inventaire des biens dans le délai requis, y procéder aux frais du grevé. Il convoque alors le grevé et les autres intéressés."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article permet à l'appelé de faire l'inventaire des biens si le grevé refuse ou néglige de le faire. Il reprend, à cet égard, la règle des articles 374 du projet de l'office et 946 du Code civil du Bas-Canada.

Mme Harel: II faudrait un amendement pour remplacer "dresser" par "faire inventaire".

Le Président (M. Gagnon): Vous avez parfaitement raison. Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé est-il adopté? Adopté. Article 1289?

Mme Harel: "1289. Le grevé doit, si le tribunal l'ordonne à la demande de l'appelé ou d'un intéressé qui établit la nécessité d'une telle mesure, souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou fournir une autre sûreté garantissant ses obligations. Il doit de même fournir une sûreté additionnelle si ces obligations viennent à augmenter avant l'ouverture.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'article énonce de façon plus élaborée l'obligation de fournir une sûreté ou de donner caution que comportent les articles 385 du projet de l'office et 955 du Code civil du Bas-Canada. Considérant le caractère essentiellement préventif rattaché aux sûretés, il a paru opportun de dégager cette mesure des sanctions prévues à l'article 1290. Celles-ci présupposent en effet la preuve d'un manquement réalisé ou plus imminent de la part du grevé alors que celles de la nécessité de fournir une sûreté peut être beaucoup plus circonstanciée et mettre en cause le comportement habituel du grevé: son aptitude générale à remplir les obligations de la nature de celles qui lui sont imposées, l'importance des biens substitués par rapport à son actif personnel ou toute autre circonstance jugée suffisante par le tribunal.

L'imposition de cette obligation, qui n'est généralement que peu onéreuse pour le grevé, permet d'assurer une protection efficace des droits de l'appelé tout en ayant un effet temporisateur parfois non négligeable sur la conduite du grevé.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Je vous rappellerai que nous avions un amendement semblable à l'article 1276. On n'a pas reçu l'amendement à l'article 1276. Adopté tel qu'amendé. Article 1290?

Mme Harel: Vous avez parlé de l'article 1276, voulez-vous qu'on en dispose immédiatement?

Le Président (M. Gagnon): On l'a adopté. Il s'agit juste de recevoir l'amendement.

Mme Harel: Très bien. Je ne vous en fais pas lecture?

Le Président (M. Gagnon): Non. Mme Harel: Non.

Le Président (M. Gagnon): Ce n'est pas nécessaire, c'est le même amendement. Pour l'article 1288 aussi, nous avons adopté un

amendement qu'on doit recevoir.

M. Cassette: Pour le mot "dresser".

Le Président (M. Gagnon): Voilà, cela doit arriver. Article 1290?

Mme Harel: "1290. Si le grevé n'exécute pas ses obligations ou agit de façon à mettre en péril les droits de l'appelé, le tribunal peut, suivant la gravité des circonstances, priver le grevé des revenus, l'obliger à rétablir le capital, prononcer la déchéance de ses droits en faveur de l'appelé ou nommer un séquestre choisi de préférence parmi les appelés."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article prévoit les sanctions qui peuvent être prises à l'égard du grevé qui n'exécute pas ses obligations ou met en péril les droits de l'appelé. U reprend en substance le premier alinéa de l'article 385 du projet de l'office en en simplifiant la rédaction.

Il regroupe désormais dans une seule disposition les principales sanctions prévues aux articles 942, 945, 946 et 955 du Code civil du Bas-Canada en accordant au tribunal le pouvoir de fixer la sanction qui soit la plus appropriée dans les circonstances propres à chaque cas.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que ça va? L'article 1290 est-il adopté? Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau estime préférable de laisser la discrétion au tribunal sur la nomination du séquestre.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Me Longtin.

Mme Longtin: Le texte dit: "choisi de préférence parmi les appelés". C'est une discrétion dirigée.

M. Cassette: Je pense que c'est l'intérêt premier de l'appelé d'être le séquestre.

Le Président (M. Gagnon): J'ai fait une erreur à l'article 1289. Je l'ai fait adopter tel qu'amendé, alors qu'il n'y avait pas d'amendement à 1289.

M. Cossette: C'était à l'article 1288.

Le Président (M. Gagnon): C'était à l'article 1288, alors, je veux rectifier cette erreur.

M. Marx: Vous êtes pardonné, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Ça va.

Article 1291?

Mme Harel: "1291. Les droits de l'appelé qui n'est pas conçu sont exercés par la personne désignée par le disposant pour agir comme curateur à la substitution et qui accepte cette charge ou, à défaut, par celle que nomme le tribunal, à la demande du grevé ou de tout intéressé. "Le curateur public peut être désigné pour agir".

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à assurer aux appelés non conçus une protection efficace de leurs droits en prévoyant la possibilité par le disposant ou le tribunal de désigner un curateur chargé d'agir pour eux.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1291 est adopté. Article 1292?

Mme Harel: "1292. À moins qu'une époque antérieure n'ait été fixée par le disposant, l'ouverture de la substitution a lieu au décès du grevé. "Si le grevé est une personne morale, l'ouverture de la substitution ne peut avoir lieu plus de trente ans après la donation ou l'ouverture de la succession ou du jour où son droit s'est ouvert".

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise le moment où a lieu l'ouverture de la substitution. Le premier alinéa de l'article, qui reprend en substance la proposition de l'article 389 du projet de l'office, modifie le droit actuel énoncé aux articles 961 et 963 du Code civil du Bas-Canada, car il ne permet plus au disposant de reporter après le décès du grevé l'ouverture de la substitution. Ces articles permettaient en effet de prolonger indûment la substitution surtout que l'on considérait que la transmission qui s'opérait alors du grevé à ses héritiers pour la période précédant l'ouverture n'était pas considérée comme étant faite à un nouvel ordre de substitution.

Le second alinéa est nouveau et couvre le cas où le grevé est une personne morale. Il fixe alors une période limite de trente ans pour l'ouverture de la substitution.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1292 est adopté? Adopté. Article 1293?

Mme Harel: "1293. Lorsqu'il est stipulé que la part d'un grevé passe, à son décès,

aux grevés du même ordre qui lui survivent, l'ouverture de la substitution n'a lieu qu'au décès du dernier grevé. "Toutefois, l'ouverture ainsi différée ne peut nuire aux droits de l'appelé qui aurait reçu au décès d'un grevé, en l'absence d'une telle stipulation; le droit de recevoir lui est acquis, mais il ne peut être exercé avant l'ouverture."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire. (22 h 15)

M. Cassette: Cet article indique le moment de l'ouverture dela substitution lorsqu'on est en présence de plusieurs grevés. II reprend en substance la deuxième partie de l'article 365 du projet de l'office. Le premier alinéa complète l'énoncé de l'article 1273 en précisant que l'ouverture n'a lieu qu'au décès du dernier grevé. Le second alinéa propose une solution équitable envers l'appelé qui décède après un des grevés, mais avant le décès du dernier grevé. La part qu'il aurait recueillie de son vivant au décès d'un grevé, n'eut été de l'ouverture différée, lui demeurera désormais acquise et donc transmissible à ses héritiers, mais le droit de la recevoir ne pourra être exercé qu'au décès du dernier grevé.

Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article 1293. Article 1294?

Mme Harel: "L'appelé doit avoir les qualités requises pour recevoir par donation ou par testament à l'ouverture de la substitution. "S'il y a plusieurs appelés du même ordre, il suffit que l'un d'eux ait les qualités requises pour recevoir à l'ouverture de son droit pour que soit préservé le droit de tous les autres appelés à recevoir, s'ils acceptent la substitution par la suite."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Commentaire. Cet article énonce que l'appelé doit avoir les qualités requises pour recevoir par donation ou testament à l'ouverture de la substitution. Il n'est donc pas exigé de lui qu'il ait qualité à la date de la création de la substitution. Il reprend en substance l'article 359 du projet de l'office, ainsi que le droit actuel exprimé à l'article 929 du Code civil du Bas-Canada.

La règle qu'il pose est d'ailleurs conforme à celle qu'énonce l'article 838 du Code civil du Bas-Canada en matière de succession et que reprend l'article 664 du nouveau livre des successions. L'article prévoit aussi, s'inspirant de l'article 616 du projet de l'office relatif au bénéficiaire d'une fiducie que si un seul des appelés d'un même ordre constitué, par exemple, des enfants à naître d'un tiers, a les qualités requises pour recevoir à l'ouverture, sa présence assure l'ouverture du droit aux biens substitués pour les autres enfants à naître, s'ils en acceptent, par la suite, le bénéfice.

En vertu de cette règle, celui qui a la qualité requise sera donc tenu, sur la part qu'il recueille à l'ouverture, de rendre aux autres enfants à naître, au fur et à mesure de leur naissance. De droit nouveau, la règle proposée constitue un prolongement de la règle énoncée notamment à l'article 790 du Code civil du Bas-Canada voulant que dans les donations aux enfants nés et à naître, l'acceptation par ceux qui sont nés ou pour eux par une personne capable d'accepter vaut pour ceux qui ne sont pas nés, s'ils s'en prévalent.

Le Président (M. Gagnon): Cela va, l'article 1294? Me Pineau.

M. Pineau: La Chambre des notaires, page 3334, prétend qu'il y a un défaut de concordance avec l'article 664. Je ne me souviens plus si l'article 664 a été amendé.

M. Cossette: On a modifié l'article 664.

M. Pineau: L'article 664 a été amendé, me semble-t-il, parce qu'il y avait un problème aussi avec l'article 1294.

M. Marx: L'article 664 a été adopté sur division.

M. Cassette: Oui.

Mme Longtin: En fait, la Chambre des notaires nous dit et considère comme un problème ce qui ne me semble être qu'une précision applicable à certains cas particuliers dont la substitution. Alors, c'est une application dans un cas particulier; c'est un développement, finalement, de 664. C'est qu'à l'article 664, on dit que pour "succéder, en cas de substitution... les personnes qui ont les qualités requises lorsque la disposition produit effet à leur égard". Ici, finalement, on ajoute que cet effet peut résulter de la seule existence d'un appelé du même ordre.

M. Pineau: C'est cela, en d'autres termes, l'article 1294 précise l'article 664.

Mme Longtin: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Adopté, l'article 1294?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1295?

Mme Harel: "L'appelé, s'il accepte la substitution, reçoit les biens directement du disposant. Il est, par l'ouverture, saisi de la propriété des biens."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce que l'appelé qui accepte la substitution reçoit les biens directement du disposant et est saisi, dès l'ouverture, de la propriété des biens. Il reprend en substance les articles 393 de l'Office de révision du Code civil et 962 du Code civil du Bas-Canada."

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau fait observer qu'on est saisi du droit de propriété et non point de la propriété. Maintenant, l'article 962, alinéa 2, du Code civil du Bas-Canada, disait exactement la même chose. Le législateur parle par ellipse.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1295 est-il adopté? Adopté. Article 1296?

Mme Harel: "Le grevé doit, à l'ouverture, rendre compte à l'appelé et lui remettre les biens substitués. "Si le bien substitué ne se trouve plus en nature, il rend ce qui a été acquis à remploi ou, à défaut, le montant équivalent à la valeur du bien au temps de l'aliénation."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit l'obligation du grevé de rendre compte et de remettre soit le bien substitué, soit le remploi de ce bien ou, à défaut, la valeur du bien au moment de l'aliénation. Il reprend en substance les articles 965 du Code civil du Bas-Canada et 390 du projet de l'office.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Article 1296. Adopté. Article 1297?

Mme Harel: "Le grevé rend les biens substitués dans l'état où ils se trouvent lors de l'ouverture. "Il répond de leur perte ou de leur détérioration survenue par sa faute ou ne résultant pas de l'usage normal."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent quant à la portée de l'obligation du grevé de rendre compte et de remettre les biens. Il établit que le grevé rend les biens dans l'état où ils se trouvent lors de l'ouverture et qu'il ne répond pas de la perte ou de la détérioration du bien qui résulte de son usage normal. Cet article rejoint dans une formulation différente la proposition de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1297 est-il adopté? Adopté. Article 1298?

Mme Harel: Lorsque la substitution ne porte que sur le résidu des biens donnés ou légués, le grevé n'aura que les biens qui restent ainsi que le solde dû de ceux qui ont été aliénés.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit que lorsque la substitution ne porte que sur le résidu des biens, le grevé ne rend que ce qui reste des biens substitués ou le solde qui demeure dû pour le prix des biens aliénés. Cet article complète donc les articles 1272 et 1284 du projet. Il est en accord avec le droit actuel exprimé à l'article 952 du Code civil du Bas-Canada. La permission de disposer gratuitement des biens implique corrélativement le retrait chez l'appelé du droit de réclamer ceux dont le grevé a pu ainsi disposer. La permission d'aliéner les biens sans devoir en faire remploi emporte de même le retrait chez l'appelé du droit de réclamer ce que le grevé a pu acquérir avec le produit de l'aliénation.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1298 est-il adopté? Adopté. Article 1299?

Mme Harel: L'amendement consiste à insérer, à la première ligne du premier alinéa, avant le mot "droit" le mot "le" et, à la première ligne du deuxième alinéa, avant le mot "droit" le mot "le".

L'article se lit comme suit: "Le grevé a le droit d'être remboursé, avec les intérêts courus depuis l'ouverture, des dettes en capital qu'il a payées sans en avoir été chargé et des dépenses généralement débitées au capital qu'il a faites en raison de la substitution. "Il a aussi le droit d'être remboursé, en proportion de la durée de son droit, des dépenses généralement débitées au revenu et dont l'objet excède cette durée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise a accorder au grevé le droit d'être remboursé avec intérêts depuis l'ouverture des dettes en capital qu'il a payées sans en avoir été chargé par le disposant ainsi que les dépenses généralement débitées au capital qu'il a faites. Il permet aussi au grevé d'être exceptionnellement remboursé en proportion

de la durée de son droit des dépenses généralement imputées au revenu qu'il a fait lorsque, échues de son temps, elles excédaient toutefois cette durée. Refuser, par exemple, au grevé le remboursement d'une partie du paiement d'une taxe spéciale imposée de son temps pour des ouvrages dont la durée excède celle du droit du grevé sur les biens eut été favoriser indûment l'appelé qui aurait profité des services payés sans avoir effectué aucun déboursé à leur égard.

L'article s'inspire des articles 947 du Code civil du Bas-Canada et 376, 396 et 397 de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1299 est-il adopté? Adopté. L'article tel qu'amendé est-il adopté? Adopté. Article 1300?

Mme Harel: L'amendement consiste à insérer, à la première ligne, avant le mot "droit" le mot "le".

L'article se lit comme suit. "Le grevé a le droit d'être remboursé des impenses utiles qu'il a faites, suivant les règles applicables au possesseur de bonne foi."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article prévoit que le grevé a droit d'être remboursé comme un possesseur de bonne foi des impenses utiles qu'il a faites. En proposant d'assimiler le grevé au possesseur de bonne foi quant aux impenses utiles, le projet modifie, a l'instar de l'office, le régime actuel des remboursements dus au grevé pour les améliorations qu'il a faites aux biens substitués. Ce régime prévu par les articles 581 et 582 du code actuel en matière d'emphytéose et auquel renvoie l'article 968 du Code civil du Bas-Canada est peu favorable au grevé et le dissuade conséquemment d'améliorer les biens substitués au détriment des appelés. La solution retenue devrait bonifier la position du grevé par rapport au droit actuel.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1300 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1301?

Mme Harel: "1301. L'ouverture de la substitution fait revivre les créances et les dettes qui existaient entre le grevé et le disposant; elle met fin à la confusion dans la personne du grevé des qualités de créancier et de débiteur, sauf pour les intérêts courus jusqu'à l'ouverture."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce certains effets de l'ouverture de la substitution en précisant qu'elle fait revivre les créances et les dettes qui existaient entre le grevé et le disposant et qu'elle met un terme à la confusion dans la personne du grevé des qualités de créancier et de débiteur sauf à la laisser subsister en regard des intérêts courus jusqu'à l'ouverture.

L'article proposé reprend en substance le droit actuel et la proposition de l'office.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1301 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1302?

Mme Harel: "1302. Le grevé peut retenir les biens substitués jusqu'au paiement de ce qui lui est dû."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article confère au grevé un droit de rétention sur les biens substitués, droit déjà prévu à l'article 966 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1302 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1303?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la deuxième ligne du premier alinéa, les mots "et d'exercer" par les mots "et ils exercent".

L'article se lit comme suit: "1303. Les héritiers du grevé sont tenus d'exécuter les obligations que les dispositions de la présente section imposent au grevé et ils exercent les droits qu'elles lui confèrent. "Ils sont tenus de continuer ce qui est la suite nécessaire des actes du grevé ou ce qui ne peut être différé sans risque de perte."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à déterminer le sort des droits et obligations du grevé à l'ouverture lorsque celle-ci résulte de son décès. Il énonce ainsi que les droits conférés au grevé peuvent être exercés par ses héritiers, lesquels sont, par ailleurs, non seulement tenus de ses obligations, mais aussi de continuer ce qui est la suite nécessaire des actes du grevé ou ce qui ne peut être différé sans risque de

perte. L'article proposé reprend, en les • reformulant, les prescriptions de l'article 392 du projet de l'office et s'inspire des dispositions actuelles de l'article 1709 du

Code civil du Bas-Canada en matière de mandat.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1303 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté.

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Article 1304?

Mme Harel: "1304. La caducité d'une substitution testamentaire à l'égard d'un grevé se produit sans qu'il y ait lieu à représentation; elle profite à ses cogrevés ou, à défaut, à l'appelé. "La caducité à l'égard d'un appelé profite à ses coappelés, s'il en est; sinon, elle profite au grevé".

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cassette: Cet article prévoit les effets de la caducité d'une substitution. D'une part, il énonce que la caducité d'une substitution testamentaire à l'égard d'un grevé a lieu sans représentation et profite à ses cogrevés ou, à défaut, à l'appelé. D'autre part, il édicte que la caducité du droit de l'appelé à une substitution établie par testament ou par donation profite à ses coappelés ou, à défaut, au grevé.

L'absence du jeu de la représentation à l'égard du grevé constitue une exception au principe nouveau proposé en matière de disposition testamentaire, à savoir que la représentation a lieu dans les successions testamentaires de la même manière que dans les successions ab intestat, principe qui inverse la règle de l'article 937 du Code civil du Bas-Canada. Cette exception quant au grevé vise à empêcher que l'ouverture puisse être ainsi considérablement retardée.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1304 est adopté. Article 1305?

Mme Harel: "1305. Le donateur peut révoquer la substitution quant à l'appelé, jusqu'à l'ouverture, tant qu'il n'y a pas eu acceptation par l'appelé ou pour lui. Cependant, à l'égard du donateur, l'appelé est réputé avoir accepté lorsqu'il est l'enfant du grevé ou lorsque l'un des coappelés a accepté la substitution."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cassette: Cet article vise à circonscrire le droit du donateur de révoquer la substitution quant à l'appelé. Il établit que le donateur peut le faire jusqu'à l'ouverture de la substitution tant qu'il n'y a pas eu acceptation par l'appelé ou pour lui. L'article précise toutefois qu'à l'égard du donateur l'appelé est réputé avoir accepté lorsqu'il est l'enfant du grevé ou lorsque l'un des coappelés a accepté la substitution. L'article proposé reprend en substance le droit actuel énoncé à l'article 930 du Code civil du Bas-Canada ainsi que les propositions de l'office en ajoutant que l'appelé est réputé avoir accepté lorsque l'un de ses coappelés a accepté le bénéfice conféré par la substitution.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1305 est-il adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1306.

Mme Harel: "La révocation de la substitution quant au grevé profite au cogrevé s'il en est, sinon à l'appelé. La révocation quant à l'appelé profite au coappelé s'il en est, sinon au grevé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce les effets de la révocation de la substitution en précisant qu'à l'égard du grevé celle-ci profite au grevé ou, à défaut, à l'appelé et qu'à l'égard d'un appelé la révocation profite au coappelé ou, à défaut, au grevé.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau, M. le Président, à la page 43, demande que l'on supprime la première phrase car, si la substitution est faite par donation, cette donation est irrévocable et, si elle est faite par testament, nous dit-on, on applique les règles de révocation des legs. Cependant, je me demande si, dans le cas d'une donation, il peut y avoir révocation. Par exemple, l'article 823 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau?

M. Charbonneau (Pierre): Non, cela va. Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. Charbonneau (Pierre): Oui, cela va. M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on a adopté l'article 1306?

M. Marx: Non, on l'adopte.

Le Président (M. Gagnon): On l'adopte. L'article 1306 est adopté. J'appelle l'article 1307.

Mme Harel: "Le disposant peut se réserver la faculté de déterminer la part des appelés ou conférer cette faculté au grevé. "L'exercice de cette faculté par le donateur ne constitue pas une révocation de la substitution, même si cela a pour effet d'exclure complètement un appelé du bénéfice de la substitution.".

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce, conformément à la règle prévue à l'article 935 du Code civil du Bas-Canada, le droit du disposant de se réserver la faculté de répartir, parmi les appelés, les biens de la substitution, mais étend cette règle pour lui permettre de conférer cette faculté au grevé. Il précise, dans le sens d'une interprétation actuellement reconnue de la faculté de répartition, que l'exercice de cette faculté par le donateur peut même aller jusqu'à lui permettre d'exclure un appelé.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

L'article 1307 est adopté. Est-ce que nous suspendons... L'Opposition est-elle prête à procéder? Non?

Une voix: On pourrait reprendre les amendements.

Le Président (M. Gagnon): Nous ajournons nos travaux à demain, 9 h 30, ici, au salon rouge.

(Fin de la séance à 22 h 33)

Document(s) associé(s) à la séance