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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mercredi 3 juillet 1985 - Vol. 28 N° 19

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 20 - Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-six minutes)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

La sous-commission des institutions se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des successions et des biens.

M. le secrétaire, il y a un remplacement.

Le Secrétaire: M. Johnson (Anjou) est remplacé par Mme Harel (Maisonneuve).

Le Président (M. Gagnon): À l'ajournement de nos travaux, nous en étions à l'article 1308. Est-ce que c'est cela?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Titre sixième.

De certains patrimoines d'affectation

Mme Harel: C'est bien cela.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

De la fondation

Mme Harel: "La fondation résulte d'un acte par lequel une personne affecte, d'une façon irrévocable, tout ou partie de ses biens à la réalisation durable d'une fin d'utilité sociale. "La fondation ne peut avoir pour objet essentiel la réalisation d'un bénéfice ni l'exploitation d'une entreprise."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette (André): Cet article définit de façon distincte le concept de fondation en y intégrant ses éléments essentiels, soit une affectation irrévocable faite par une personne de tout ou de partie de ses biens à la réalisation durable d'une fin d'utilité sociale. La définition proposée s'inspire de la doctrine et de la jurisprudence, parfois étrangère, et permet, par sa généralité, de recouvrir des manifestations diverses de ce concept au Code civil et en droit statutaire actuel.

En proposant de définir la fondation, le projet innove par rapport au droit actuel où le concept de fondation bien qu'utilisé n'est jamais défini avec précision. Le Code civil n'en traite, d'ailleurs, que partiellement, sans même que l'on y trouve le mot "fondation", à l'article 869. En proposant de définir la fondation comme un concept distinct des véhicules employés pour le réaliser, le projet aborde la fondation sous un angle qui permet d'englober les diverses formes de fondations tout en laissant intactes les dispositions propres à chacune des formes.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau (Jean): Le Barreau, à la page 43, suggère de retrancher le chapitre sous le prétexte que cela réfère à la fiducie ou aux personnes morales. Mais je pense que ce sont des déclarations de principe qu'il est bon de mettre dans le titre consacré précisément aux patrimoines d'affectation.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1308 est adopté? L'article 1309?

Mme Harel: "Les biens de la fondation constituent soit un patrimoine autonome et distinct de celui du disposant et de toute autre personne, soit le patrimoine d'une personne morale. "Dans le premier cas, la fondation est régie par les dispositions du présent titre relatives à la fiducie d'utilité sociale, sous réserve des dispositions de la loi; dans le second cas, elle est régie par les lois applicables aux personnes morales de son espèce."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit par renvoi le régime des règles applicables à la fondation sur la base de ses manifestations législatives où la fondation se présente tantôt comme un patrimoine autonome et distinct, tantôt comme le patrimoine d'une personne morale. Dans le premier cas, la technique employée était celle de la fiducie; ce sont conséquemment les règles de celle-ci qui vont s'appliquer. Dans le second cas, la fondation se réalise sous le couvert d'une personne morale, une personne morale

préexistante ou à être formée à cette fin, constituée en vertu de la loi générale sur les personnes morales à but non lucratif ou de lois particulières. La fondation sera alors régie par les lois applicables aux personnes morales de son espèce.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1309 est adopté. L'article 1310?

Mme Harel: "La fondation créée par fiducie est établie par donation ou par testament suivant les règles gouvernant ces actes."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article indique que la fondation créée par fiducie s'établit par donation ou testament suivant les règles de forme et de fond gouvernant ces actes. Il est conforme au droit actuel où l'intention libérale est de l'essence même de la fondation et où il est admis que celle-ci peut non seulement résulter d'un testament, mais aussi d'une donation fiduciaire.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est très libéral.

Le Président (M. Gagnon): Article 1311?

M. Pineau: Tout ce qui est donation est libéral.

Le Président (M. Gagnon): J'ai vu le sourire du député de Saint-Laurent. Je m'attendais à ce qu'il prenne la parole.

Mme Harel: "Sauf stipulation contraire de l'acte constitutif de la fondation, les biens qui forment le patrimoine initial de la fondation créée par fiducie ou les biens qui leur sont subrogés ou adjoints doivent être conservés et permettre d'atteindre la fin poursuivie soit par la distribution des seuls revenus qui en proviennent, soit par un usage qui ne modifie pas sensiblement la consistance du patrimoine."

Le Président CM. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce, pour la fondation fiduciaire, le principe du caractère intangible des liens formant initialement le patrimoine de la fondation et son capital. Ce principe, lui-même conforme à la règle de l'article 1308 du projet, exige une affectation de biens à la réalisation durable de la fin poursuivie. On considère, en effet, qu'il est de l'essence de la fondation fiduciaire que celle-ci puisse fonctionner de façon autonome grâce à un capital ou à une dotation de base qui, parce que non susceptible d'être entamé ou amoindri, est un gage de la survie de la fondation et de l'accomplissement permanent de la fin poursuivie.

La fondation se réalisera donc à même les fruits et revenus engendrés par le capital ou par l'utilisation de ce capital qui n'en affecte pas sensiblement la consistance, par exemple, lorsque ce capital comporte un terrain destiné à servir de parc aux résidents d'une localité. L'article proposé ne concerne que les fondations fiduciaires. Les fondations qui se réalisent sous le couvert de personnes morales demeurent, sous l'aspect considéré, régies par les lois qui les gouvernent plus spécifiquement.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? M. Leduc (Saint-Laurent): Oui. Le Président (M. Gagnon):Article 1312? De la fiducie

Mme Harel: II se lit comme suit: "La fiducie résulte d'un acte par lequel une personne, appelée le constituant, transfère de son patrimoine à un autre patrimoine qu'il constitue, des biens qu'il affecte à une fin particulière et qu'un fiduciaire s'oblige, par le fait de son acceptation, à détenir et à administrer."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article définit la fiducie en incorporant les éléments reconnus comme étant essentiels à sa constitution, soit une affectation de biens à une fin s'effectuant par le transfert du patrimoine du constituant à un nouveau patrimoine et l'acceptation de ce transfert par un fiduciaire qui s'oblige à détenir et à administrer ce nouveau patrimoine. En proposant de définir la fiducie, le projet, qui s'inspire de l'Office de révision du Code civil, innove par rapport au droit actuel, où le Code civil, aux articles 981a et 981b notamment, ne fait que décrire la fiducie dans son fonctionnement externe.

La définition proposée tient compte de l'approche nouvelle du projet à l'égard de la fiducie qui est désormais envisagée comme un patrimoine d'affectation autonome et distincte de celui du fiduciaire.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, le Barreau suggère d'ajouter "résulte d'un acte constaté par écrit". Cependant, je me demande si on veut en faire un acte solennel: dans l'article

1315, on affirme la règle du "consensualisme", de la même façon dans l'article 1316.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin (Marie-José): Je pense que, comme dans tout contrat, l'écrit est peut-être préférable pour des questions de preuve. Cependant, il reste qu'il est fort possible qu'on prenne un téléphone et qu'on appelle une société de fiducie, et qu'on constitue une fiducie pour fins d'étude ou qu'on fasse transporter des biens en fiducie et que, par la suite, on formalise la chose dans un écrit. Mais la convention verbale demeure possible. C'est assez fréquent dans les fiducies de placement où on va procéder par l'intermédiaire d'un courtier.

M. Pineau: Oui, l'écrit est un simple moyen de preuve. C'est clair. Par conséquent, on n'a pas à l'imposer.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1312 est adopté? Non?

M. Cossette: Non, je voulais ajouter tout simplement qu'à la suite d'un téléphone on pourrait transmettre un chèque constituant...

M. Pineau: Un commencement d'écrit.

M. Marx: Ou on peut enregistrer l'appel.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1313?

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous le permettez...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...est-ce qu'il ne devrait pas y avoir une virgule après "constitue", "constitue, des biens"?

M. Pineau: Après "constitue", non?

M. Leduc (Saint-Laurent): Après "constitue".

Le Président (M. Gagnon): À la troisième ligne; au début de la troisième ligne.

Mme Harel: Ah oui.

M. Cossette: "Transfère de son patrimoine à un autre patrimoine qu'il constitue."

Mme, Longtin: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): II y a un amendement pour la virgule?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est-il adopté? Adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. Article 1313?

Mme Harel: "Le patrimoine fiduciaire, formé des biens transférés en fiducie, constitue un patrimoine d'affectation autonome et distinct de celui du constituant, du fiduciaire ou du bénéficiaire, sur lequel aucun d'entre eux n'a de droit réel."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à mettre fin à la controverse doctrinale et jurisprudentielle qui subsiste toujours quant au sort du droit de propriété des biens transférés en fiducie pendant sa durée. Il tranche définitivement le débat en énonçant que les biens transférés en fiducie constituent pendant sa durée "un patrimoine d'affectation autonome et distinct de celui du constituant, du fiduciaire ou du bénéficiaire, sur lequel aucun d'entre eux n'a de droit réel." La solution adoptée par le projet, qui s'inspire des recommandations de l'Office de révision du Code civil, s'est avérée, après examen des diverses solutions possibles, la seule qui puisse refléter adéquatement la véritable nature de la fiducie.

Susceptible d'une intégration aisée en droit civil, elle a d'ailleurs le mérite de ne pas modifier les rapports qui existent en droit actuel entre les diverses parties en cause ni les pouvoirs de chacun sur les biens de la fiducie.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1313 est-il adopté? Adopté. Article 1314?

Mme Harel: "La fiducie est établie par contrat, à titre onéreux ou gratuit, par testament ou, dans certains cas, par la loi."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce que la fiducie peut non seulement être établie par donation ou testament, comme le précise l'article 981a du Code civil du Bas-Canada, mais aussi par contrat à titre onéreux, en ajoutant que la fiducie peut encore dans certains cas être établie par la loi. L'ouverture en faveur de l'établissement de la fiducie par contrat à titre onéreux, qui rejoint les propositions de l'Office de révision du Code civil, est nouvelle dans le

Code civil. Visant à fournir aux résidents du Québec des techniques efficaces utilisées chez leurs voisins de "common law", notamment dans les domaines du commerce et des affaires ou en matière d'investissements, cette ouverture n'est, d'ailleurs, que la consécration au Code civil de ce que le droit statutaire permet déjà.

On n'a qu'à penser, en effet, à la fiducie pour obligataires, prévue par la Loi sur les pouvoirs spéciaux des corporations, ou aux diverses fiducies abordées par la Loi sur les impôts, telles les fiducies d'investissements à participation unitaire, les fiducies de fonds mutuels ou les fiducies constituées en vertu d'un régime enregistré d'épargne-retraite, d'épargne-études ou autres du même genre, pour constater que les fiducies établies par contrat à titre onéreux existent dans notre droit. Par l'ouverture proposée, le projet tient compte désormais de l'évolution du concept de fiducie en droit statutaire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1314 est adopté. L'article 1315?

Mme Harel: "La fiducie est constituée, dès l'acceptation du fiduciaire ou, s'ils sont plusieurs, de l'un d'eux. "Lorsque la fiducie est établie par testament, les effets de l'acceptation rétroagissent au jour du décès."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article précise, conformément à la proposition de l'Office de révision du Code civil, le moment de la constitution de la fiducie. Le premier alinéa indique que la fiducie est constituée dès l'acceptation par le fiduciaire du transfert des biens, et conséquemment dès son enregistrement, de les détenir et de les administrer aux fins voulues. Cette acceptation est essentielle et, tant qu'elle n'a pas eu lieu, il n'y a pas fiducie. Cet alinéa précise en outre qu'il suffit, pour que la fiducie soit constituée, qu'un seul fiduciaire accepte, réglant ainsi la difficulté qui peut se poser lorsque plusieurs fiduciaires ont été désignés par l'acte constitutif mais qu'un seul d'entre eux accepte.

Le second alinéa précise qu'en cas de fiducie testamentaire les effets de l'acceptation du fiduciaire rétroagissent au décès du constituant afin de couvrir le laps de temps qui peut alors s'écouler entre ces deux événements. Sauf en matière de fiducie testamentaire, le transfert des biens par le constituant et l'acceptation par le fiduciaire ont lieu, suivant la règle du consensualisme, en même temps.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Article 1316?

Mme Harel: "L'acceptation de la fiducie dessaisit le constituant des biens, charge le fiduciaire de veiller à leur affectation et à l'administration du patrimoine fiduciaire et suffit pour rendre certain le droit du bénéficiaire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire. (10 heures)

M. Cossette: Cet article énonce les effets de l'acceptation de la fiducie en précisant qu'elle dessaisit le constituant des biens transférés, charge le fiduciaire de veiller à leur affectation et à l'administration et suffit pour rendre irrévocable le droit du bénéficiaire aux avantages que lui confère la fiducie. Il est conforme aux principes du droit actuel.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau suggère de remplacer "suffit pour rendre certain" par "suffit pour préserver le droit du bénéficiaire". Je pense qu'on a voulu dire "pour rendre irrévocable".

Mme Longtin: C'est ça effectivement, puisque c'est à ce moment-là qu'est créé le droit du bénéficiaire. Il est certain que ce droit peut être conditionnel si le bénéficiaire n'est pas né encore au moment de la création de la fiducie, mais il y a quand même un droit qui existe et il suffit que la condition se réalise pour que son droit soit certain. Ce n'est pas vraiment préserver un droit, c'est le constituer.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: À moins de dire "pour rendre irrévocable"? Il est clair, M. le Président, que c'est la même chose.

Mme Longtin: Si la fiducie était créée par donation et que le bénéficiaire avait une cause d'ingratitude, il pourrait y avoir révocation, je pense.

M. Pineau: C'est préférable de maintenir "certain".

M. Cossette: C'est préférable de ne pas employer "irrévocable".

M. Pineau: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1316 est-il adopté?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

Article 1317?

Mme Harel: "Les fiducies sont constituées pour des fins personnelles, d'utilité privée ou sociale."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cassette: Cet article introduit au Code civil une nouvelle classification des espèces de fiducies que reconnaît désormais le projet, classification qui s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil. Il édicte ainsi que les fiducies sont constituées soit pour des fins personnelles, soit pour des fins d'utilité privée ou d'utilité sociale.

Le Président (M. Gagnon): Ça va.

L'article 1317 est adopté. Article 1318? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: "La fiducie personnelle est constituée à titre gratuit dans le but de procurer un avantage à une personne déterminée ou qui peut l'être."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article définit la fiducie personnelle en reprenant les caractéristiques de la fiducie prévue aux articles 981a et suivants du code actuel. C'est une fiducie qui est constituée à titre gratuit dans le but de procurer un avantage à une personne déterminée ou qui peut l'être.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Mon commentaire général: Le Barreau demande que les articles 1318 et suivants soient précisés. Je ne suis pas sûr...

Mme Longtin: Ce qu'il voudrait c'est que, à chaque fois qu'on dit qu'une fiducie est constituée, on répète finalement le mode de constitution qui a été indiqué à l'article 1314, de telle sorte qu'on devrait dire: "La fiducie personnelle est constituée à titre gratuit par donation", ainsi de suite... Je pense que ce n'est pas la façon dans le code. Une fois qu'on a établi de quelle façon tel type d'institution s'établit, cela vaut pour tout.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Quand on dit que la fiducie personnelle est constituée à titre gratuit, cela veut dire à ce moment-là qu'il ne peut y avoir aucune charge.

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Oui, il pourrait y avoir des charges dans la mesure où cela n'affecte pas finalement l'aspect de gratuité, la gratuité générale de l'acte qui est constitué. Évidemment, si la charge dépasse la libéralité, à ce moment-là la question va se poser: Est-ce que c'est véritablement une libéralité ou est-ce que ce n'est pas finalement à titre onéreux?

M. Leduc (Saint-Laurent)! L'essence, c'est gratuit, d'accord.

Le Président (M. Gagnon): Article 1318, adopté. Article 1319?

Mme Harel: "La fiducie d'utilité privée est celle qui a pour objet l'érection, l'entretien ou la conservation d'une chose corporelle ou l'utilisation d'un bien affecté à un usage déterminé soit à l'avantage indirect d'une personne ou à sa mémoire, soit pour l'accomplissement d'un autre but de nature privée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article définit la fiducie d'utilité privée en précisant qu'elle a pour objet l'érection, l'entretien ou la conservation d'une chose corporelle ou la mise en disponibilité d'un bien affecté à un usage déterminé, soit pour l'avantage direct d'une personne ou pour sa mémoire, soit pour l'accomplissement d'un autre but de nature privée.

Il vise plusieurs situations. Il permet d'abord d'englober les fiducies constituées même à titre onéreux où aucune personne physique ou morale n'est vraiment bénéficiaire, mais dont le but revêt un caractère purement privé. C'est le cas, par exemple, de la fiducie constituée dans le but d'ériger et d'entretenir un monument funéraire à la mémoire du défunt ou des membres de sa famille, ou encore d'assurer la survie des animaux préférés du défunt. Il permet aussi d'englober les fiducies constituées dans le but de procurer un avantage indirect à une personne ou à un groupe en lui permettant d'utiliser un bien affecté à un usage déterminé, par exemple, une somme destinée à l'achat de médicaments, d'appareils médicaux, chaises roulantes, etc., ou un immeuble destiné à servir de lieu de villégiature pour les employés d'une entreprise.

L'article proposé s'inspire des propositions de l'office. Il innove sur le Code civil actuel où l'article 869 qui vise les fiducies d'utilité publique ne semble pas permettre de recouvrir, sous l'expression "ou

autres fins permises", des fins de nature purement privée.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1319 est adopté. Article 1320?

Mme Harel: "Est aussi d'utilité privée la fiducie constituée à titre onéreux dans le but notamment de permettre la réalisation d'un profit au moyen de placements ou d'investissements, de pourvoir à une retraite ou de procurer un autre avantage au constituant ou aux personnes qu'il désigne, aux membres d'une société ou d'une association, à des employés ou à des porteurs de titre."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article qui s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil est de droit nouveau. Il vise à étendre l'usage de la fiducie à un domaine où le Code civil actuel ne permet pas de l'utiliser en englobant désormais, sous le concept de fiducie d'utilité privée, les fiducies qui sont constituées autrement que par donation ou testament et dont le droit statutaire comporte des illustrations.

L'article proposé recouvre ainsi les fiducies constitués à l'occasion d'une émission d'obligations, les fiducies d'investissement en matière immobilière ou relatives à des valeurs mobilières, les fiducies établissant des fonds de retraite et autres fiducies à titre onéreux.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1320 est-il adopté? Article 1321?

Mme Harel: "La fiducie d'utilité sociale est celle qui est constituée pour l'accomplissement d'une fin d'intérêt public ou général, notamment à caractère culturel, éducatif, philanthropique, religieux ou scientifique. "Elle n'a pas pour objet essentiel de réaliser un bénéfice ni d'exploiter une entreprise."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article définit la fiducie d'utilité sociale qui est celle dont traitent partiellement les articles 869 et 964 du code actuel en énonçant qu'elle est constituée pour l'accomplissement d'une fin d'intérêt public ou général, notamment à caractère philanthropique, éducatif, scientifique ou culturel. Il précise aussi qu'elle n'a pas pour objet principal de réaliser un bénéfice, ni d'exploiter une entreprise.

Généralement conforme au droit actuel et aux propositions de l'office, la définition proposée permet de recouvrir deux notions voisines, soit celle du legs de bienfaisance qui implique une distribution organisée du capital et du revenu, jusqu'à épuisement, en faveur du but recherché, et celle de la fondation dont elle sert de véhicule et qui implique la conservation du capital et la seule distribution des revenus qui en proviennent.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1321 est-il adopté? Adopté. Article 1322?

Mme Harel: "La fiducie personnelle constituée au bénéfice de plusieurs personnes successivement ne peut comprendre plus de deux ordres de bénéficiaires des fruits et revenus, outre celui du bénéficiaire du capital; elle est sans effet à l'égard des ordres subséquents qui y seraient visés. "Les transmissions entre les cobénéficiaires des fruits et revenus d'un même ordre ont lieu de la même façon qu'entre cogrevés du même ordre en matière de substitution."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: Cet article élabore avec l'article qui suit les règles relatives à la durée de la fiducie personnelle constituée pour le bénéfice de plusieurs personnes successivement. Ces règles, qui s'inspirent des propositions de l'office, sont conformes à la solution retenue par la jurisprudence qui applique à la fiducie les règles de durée propres à la substitution. Le premier alinéa établit ainsi la durée maximale de la fiducie personnelle en édictant qu'elle ne peut comprendre plus de deux ordres de bénéfificaires des fruits et revenus outre celui du bénéficiaire du capital. Le second alinéa rend, par ailleurs, applicable à la fiducie, en y faisant renvoi, les dispositions des articles 1273 et 1293 du chapitre de la substitution instauré au présent projet.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 1322 est adopté. Article 1323?

Mme Harel: "Le droit du bénéficiaire du premier ordre s'ouvre au plus tard à l'expiration des cent ans qui suivent la constitution de la fiducie, même si un terme plus long a été stipulé. Celui des bénéficiaires des ordres subséquents peut s'ouvrir postérieurement, mais au profit des seuls bénéficiaires qui ont la qualité requise pour recevoir à l'expiration des cent ans qui suivent la constitution de la fiducie. "Les personnes morales ne peuvent jamais être bénéficiaires pour une période

excédant cent ans, même si un terme plus long a été stipulé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en prévoyant d'autres règles de durée de la fiducie personnelle constituée au bénéfice de plusieurs personnes successivement. En premier lieu, il édicte que les bénéficiaires du premier ordre, par exemple, des enfants ou des enfants à naître, doivent commencer à jouir de leur droit dans une période maximale de 100 ans depuis la constitution de la fiducie. En deuxième lieu, il précise que la qualité requise pour recevoir les bénéficiaires des ordres subséquents, y compris ceux du dernier ordre, doit pouvoir être déterminée à l'expiration des 100 ans de la constitution de la fiducie et que seuls ceux qui ont alors les qualités requises, c'est-à-dire qui existent à cette époque, pourront ultérieurement recevoir. L'effet combiné de ces deux règles limite la durée maximale de la fiducie personnelle à environ 2OO ans. Cette durée accorde suffisamment de flexibilité pour que, dans les circonstances ordinaires - fiducie en faveur du conjoint puis des enfants puis des petits-enfants - les bénéficiaires puissent être déterminés sans difficulté.

Le deuxième alinéa énonce que les personnes morales ne peuvent jamais être des bénéficiaires pour une période excédant 100 ans, même si un terme plus long a été stipulé. Cette règle s'avère nécessaire car le jeu normal de la durée de vie d'une personne, sur la base duquel les règles du premier alinéa ont été établies, est faussé en présence d'une personne morale dont l'existence peut être perpétuelle. La règle prévue permet dans ce cas d'éviter de prolonger indûment la durée de cette fiducie. L'article proposé est nouveau et s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau suggère que, dans le deuxième alinéa, on précise que les personnes morales ne peuvent jamais être bénéficiaires du revenu pour une période excédant 100 ans, de sorte que les personnes morales pourraient être bénéficiaires du capital en permanence.

Le Président (M. Gagnon): Me Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Je crois que cela va de soi, car, si la personne morale est bénéficiaire du capital, elle en est propriétaire finalement. Il n'y a pas de problème à ce moment-là. C'est à la fin de la fiducie, normalement, que le capital est distribué. Si le capital est distribué de façon régulière - une portion du capital - la règle des 100 ans devrait jouer, mais, si la personne morale est désignée en tant que bénéficiaire du capital ultime à la fin de la fiducie, il n'y a aucun problème à ce moment.

M. Pineau: II n'y a aucun problème en ce sens qu'elle pourrait bénéficier du capital en permanence?

M. Charbonneau (Pierre): Si elle est le dernier bénéficiaire du capital à la fin de la fiducie... Il n'y a plus de fiducie à ce moment.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1323 est adopté. Article 1324?

Mme Harel: "La fiducie d'utilité privée ou sociale peut être perpétuelle."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire. (10 h 15)

M. Cossette: Cet article édicte, conformément aux propositions de l'office, que la fiducie d'utilité privée ou sociale peut être perpétuelle. En regard des fiducies d'utilité privée, qui comprennent les fiducies à titre onéreux, la règle proposée recouvre le seul critère proprement applicable, soit le temps nécessaire à l'accomplissement de la fin poursuivie, lequel peut ne pas pouvoir être déterminé. On n'a qu'à penser, en effet, aux fiducies constituées, par exemple, pour l'entretien d'un monument funéraire pour le constater. Quant aux fiducies d'utilité publique, la règle proposée est conforme à l'interprétation actuelle de l'article 869 du Code civil du Bas-Canada relatif aux legs de bienfaisance et à la fondation et est la seule qui soit en accord avec le concept de fondation véhiculé par cette fiducie, concept dont l'essence même implique une affectation perpétuelle ou permanente.

La règle de perpétuité retenue par cette disposition est par ailleurs tempérée par l'article 1345 du projet, qui permet au tribunal de mettre fin à la fiducie qui a cessé de répondre à la volonté première du constituant, notamment si elle est devenue impossible à accomplir, ainsi que par l'article 1347, qui prévoit entre autres que la fiducie se termine par l'accomplissement de la fin poursuivie ou par l'impossibilité constatée par le tribunal de l'accomplir.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1324 est adopté. Article 1325?

De l'administration de la fiducie

Mme Harel: II y a un amendement à

l'article 1325 qui consiste à remplacer, à la première ligne, les mots "Le majeur capable" par les mots "La personne physique pleinement capable". L'article se lit comme suit: "La personne physique pleinement capable de l'exercice des droits civils peut être fiduciaire, de même que la personne morale autorisée par la loi."

L'amendement proposé indique mieux le caractère juridique de la capacité requise et couvre indubitablement le mineur pleinement émancipé.

Le Président (M. Gagnon); Le commentaire.

M. Cossette: Sous réserve de l'amendement proposé, cet article édicte que le majeur capable de l'exercice des droits civils de même que la personne morale autorisée par la loi peuvent être fiduciaires.

Nouveau, cet article est néanmoins conforme au droit actuel où il est admis qu'il faille pouvoir s'obliger pour être fiduciaire. Enfin, l'incapacité des personnes morales d'agir comme fiduciaires, sauf autorisation législative, est conforme au droit actuel et aux dispositions du livre des personnes.

Actuellement, les personnes morales autorisées par la loi à agir comme fiduciaires le sont généralement en vertu de la Loi sur les compagnies de fidéicommis que l'on retrouve au chapitre 41 des Lois refondues du Québec.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

Adopté. Article 1326?

Mme Harel: "1326. Le constituant ou le bénéficiaire...

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Excusez-moi, madame, je vous redonne la parole.

Mme Harel: "1326. Le constituant ou le bénéficiaire peut être fiduciaire, mais il doit agir conjointement avec un fiduciaire qui n'est ni constituant, ni bénéficiaire."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à permettre au constituant ou au bénéficiaire d'agir comme fiduciaire pourvu qu'il agisse conjointement avec un fiduciaire qui ne soit ni constituant, ni bénéficiaire.

L'ouverture en faveur du constituant répond à une interrogation en droit actuel où on estime, vu la formulation de l'article 981a du Code civil, que le donateur ne peut être fiduciaire. Celle en faveur du bénéficiaire est nouvelle, mais conforme au droit actuel et à la pratique. Cette ouverture est demeurée tempérée cependant par l'exigence de la présence d'un fiduciaire impartial, exigence propre à assurer une administration objective et à tempérer les conflits d'intérêts possibles.

L'article proposé, qui s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil, pourrait permettre au constituant de participer au fonctionnement de la fiducie à laquelle il a donné l'élan premier et au bénéficiaire d'exercer un certain droit de regard dans la prise de décisions qui le concernent, tout en assurant à la gestion fiduciaire un minimum d'objectivité.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1326 est adopté? Adopté. Article 1327.

Mme Harel: "1327. Le constituant peut désigner un ou plusieurs fiduciaires ou pourvoir au mode de leur désignation ou de leur remplacement."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article permet au constituant de désigner un ou plusieurs fiduciaires ou de pourvoir au mode de leur désignation ou de leur remplacement. Conforme au droit actuel et aux propositions de l'office, l'article permet donc au constituant de désigner personnellement les fiduciaires et leurs remplaçants ou de laisser à d'autres, tels ses héritiers, le soin de le faire.

Il lui permet aussi de pourvoir de toute autre façon au mode de leur désignation ou de leur remplacement. Il pourrait, par exemple, décréter que le choix de fiduciaires additionnels ou de nouveaux fiduciaires relèvera de l'entière discrétion des fiduciaires en place.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1327 est adopté.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous permettez!

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): On dit que le constituant peut être fiduciaire, mais il ne peut pas être seul. Est-ce qu'à ce moment-là il ne pourrait pas contrôler la fiducie?

M. Charbonneau (Pierre): II pourrait se réserver un certain pouvoir de contrôle, sauf qu'il ne doit pas agir seul. La présence d'un autre fiduciaire permettra de tempérer, finalement, les conflits d'intérêts qui pourraient exister, puisque l'autre fiduciaire demeurera quand même responsable de

l'administration.

M. Pineau: Solidairement.

M. Charbonneau (Pierre): Solidairement, oui, comme tout administrateur du bien d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1327 est adopté. Article 1328?

Mme Harel: "Le tribunal peut, à la demande d'un intéressé et après avis donné aux personnes qu'il indique, désigner un fiduciaire lorsque le constituant, ayant manifesté son intention de le faire, a cependant omis de le désigner ou qu'il est impossible de pourvoir à la désignation ou au remplacement d'un fiduciaire. "Il peut, de même, désigner un ou plusieurs fiduciaires additionnels lorsque les conditions de l'administration l'exigent."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à permettre au tribunal de désigner, conformément au droit actuel et aux propositions de l'office, un fiduciaire lorsqu'il est impossible, d'après les dispositions de l'acte constitutif, de pourvoir à la désignation ou au remplacement d'un fiduciaire. Il innove, toutefois, en permettant aussi au tribunal de désigner un fiduciaire lorsque le constituant a omis de le faire, ce qui peut se produire notamment en cas de fiducie constituée par testament olographe.

On a jugé qu'il n'y avait pas lieu de distinguer cette situation de celle où le seul fiduciaire désigné par le testateur n'accepte pas d'agir à ce titre et où on permet pourtant au tribunal de lui nommer un remplaçant. Il innove également en permettant au tribunal de désigner un fiduciaire additionnel lorsque les conditions de l'administration l'exigent, par exemple lorsque celle-ci devient trop lourde à exercer pour le fiduciaire en place.

En droit actuel, une telle désignation exige, en l'absence d'indication, dans l'acte constitutif, l'adoption d'une loi privée à cet effet, ce qui constitue une procédure inutilement lourde et onéreuse.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Article 1329?

Mme Harel: "Le fiduciaire a la maîtrise et l'administration exclusive du patrimoine fiduciaire; il exerce tous les droits du patrimoine et peut prendre toute mesure propre à en assurer l'affectation. "Il agit a titre d'administrateur du bien d'autrui chargé de la pleine administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire. Me Cossette.

M. Cossette: Cet article vise à accorder au fiduciaire les pouvoirs les plus étendus à l'égard du patrimoine fiduciaire. Il est conforme aux règles du droit actuel, telles qu'exprimées à l'article 981j du Code civil du Bas-Canada et aux propositions de l'office. En précisant que le fiduciaire a la maîtrise exclusive du patrimoine fiduciaire, l'article permet d'empêcher que l'on puisse considérer les biens qui le composent comme étant des biens sans maître et, donc, susceptibles d'appropriation par simple occupation.

Il permet, en outre, au fiduciaire de revendiquer les biens transmis, même contre les bénéficiaires. En accordant, par ailleurs, au fiduciaire l'administration exclusive du patrimoine, il indique clairement que les bénéficiaires sont exclus de cette administration, sauf, évidemment, dans la mesure des recours conservatoires que leur reconnaît le projet.

Enfin, en conférant au fiduciaire le pouvoir d'exercer tous les droits du patrimoine et de prendre toute mesure propre à en assurer l'affectation, l'article propose une formulation suffisamment large pour permettre au fiduciaire d'exercer tous les droits qu'un propriétaire pourrait exercer pour protéger ses biens et pour en assurer la conservation ou le développement et d'exercer aussi tout recours contre les agissements d'un tiers susceptible de nuire à l'accomplissement de la fin poursuivie, y compris des recours en injonction, en diffamation ou pour publicité mensongère.

Par ailleurs, le renvoi fait à cet article aux règles de l'administration du bien d'autrui a pour effet, d'une part, de conférer au fiduciaire le pouvoir de faire pratiquement tous les actes se rapportant aux biens gérés, dans la mesure où il l'estime nécessaire ou utile dans l'intérêt de la fiducie ou des bénéficiaires, et, d'autre part, de le soumettre parallèlement à une série de dispositions destinées à garantir en tout temps son intégrité et la qualité de son administration.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Article... Me Pineau.

M. Pineau: "II exerce tous les droits du patrimoine". Ne serait-il pas plus exact de dire "tous les droits afférents au patrimoine" ou quelque chose comme cela?

M. Charbonneau (Pierre): Oui, cela pourrait aller.

Mme Harel: Oui, alors, on va introduire l'amendement.

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement sera adopté et l'article, tel qu'amendé, est adopté? Article 1330. Cela va?

Mme Harel: "Le bénéficiaire d'une fiducie constituée à titre gratuit doit avoir les qualités requises pour recevoir par donation ou par testament à l'ouverture de son droit. "S'il y a plusieurs bénéficiaires du même ordre, il suffit que l'un d'eux ait les qualités requises pour recevoir à l'ouverture du droit pour préserver le droit des autres bénéficiaires, s'ils s'en prévalent."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit les conditions requises pour recevoir d'une fiducie en s'inspirant de règles semblables en matière de substitution. Le premier alinéa vise à permettre au bénéficiaire d'une fiducie établie par donation ou par testament de n'avoir les qualités requises pour recevoir en vertu de ces actes qu'au moment où leur droit s'ouvre et non pas au moment de la constitution de la fiducie. S'inspirant de l'article 838 du Code civil actuel et des propositions de l'office, la règle proposée est d'ailleurs conforme à la jurisprudence la plus récente en cette matière et vise plus particulièrement les cas de fiducies constituées en faveur d'enfants à naître. Le second alinéa est de droit nouveau et est tiré des propositions de l'office. Il prévoit que, si un seul des bénéficiaires du même ordre, par exemple l'ordre des enfants à naître, a les qualités requises pour recevoir, sa présence assurera l'ouverture du droit pour tous les bénéficiaires de l'ordre qui viendront après lui, s'ils désirent s'en prévaloir.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: La Chambre des notaires a fait sous 1330 un commentaire semblable à celui qu'elle a fait sous 1294 en ce qui concerne la concordance avec 664. Comme précédemment, je pense qu'on peut dire que 1330 complète 664.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1330 est-il adopté? Adopté. Article 1331?

Mme Harel: "Le bénéficiaire d'une fiducie doit, pour recevoir, remplir les conditions requises par l'acte constitutif."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce que le bénéficiaire doit, pour recevoir, remplir les conditions exigées par l'acte constitutif, en outre de remplir, le cas échéant, les qualités requises pour recevoir par donation ou testament. Ces conditions peuvent être diverses quant à leur nature, mais elles devraient, pour être applicables, être conformes à l'ordre public. De telles conditions, qu'elles concernent par exemple l'âge du bénéficiaire, son appartenance à un groupe ou sa situation financière, sont particulièrement fréquentes en matière de fiducie et d'utilité sociale car elles servent alors de critère d'identification des' bénéficiaires. Mais elles peuvent aussi se rencontrer dans les autres espèces de fiducies, y compris celles constituées à titre onéreux car l'acte constitutif peut établir que le bénéficiaire ne pourra recevoir qu'après sa retraite, par exemple.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1331 est-il adopté? Article 1332?

Mme Harel: "Le constituant peut se réserver le droit de recevoir les fruits et revenus ou éventuellement le capital d'une fiducie, même constituée à titre gratuit, ou de participer aux avantages qu'elle procure."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reconnaît que le constituant d'une fiducie constituée même à titre onéreux puisse en être bénéficiaire en se réservant le droit de recevoir les fruits et revenus ou éventuellement le capital de la fiducie ou de participer autrement aux avantages qu'elle procure. La règle proposée qui s'impose en cas de fiducie à titre onéreux est nouvelle en matière de fiducie à titre gratuit. Elle s'inspire de l'article 777, alinéa 3, du code actuel et des propositions de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1333?

Mme Harel: "Le constituant peut se réserver ou conférer au fiduciaire ou à un tiers la faculté d'élire les bénéficiaires ou de déterminer leur part. "En cas de fiducie d'utilité sociale, la faculté du fiduciaire d'élire les bénéficiaires et de déterminer leur part se présume. En cas de fiducie personnelle ou d'utilité privée, la faculté d'élire ne peut être exercée par le fiduciaire ou le tiers que si la catégorie de personnes parmi lesquelles ils doivent choisir le bénéficiaire est suffisamment déterminée à l'acte constitutif."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, de même que le suivant, établit les règles relatives aux modalités d'exercice de la faculté d'élire les bénéficiaires ou de la faculté de déterminer leur part. Ainsi, il permet au constituant de se réserver l'exercice de ses facultés ou de les conférer au fiduciaire ou à un tiers. Il édicte aussi que l'exercice de ces facultés dites d'élire et de répartition se présume en cas de fiducie d'utilité sociale. Cette règle nouvelle s'explique du fait que les bénéficiaires de cette fiducie sont, par la nature même de celle-ci, indéterminés lors de sa constitution. Il prévoit en outre que la faculté d'élire les bénéficiaires d'une fiducie personnelle ou d'utilité privée ne peut être exercée que si la catégorie de personnes parmi lesquelles le bénéficiaire doit être choisi est elle-même suffisamment déterminée à l'acte constitutif. Cette règle est conforme au droit actuel. (10 h 30)

L'article proposé s'inspire de l'article 619 proposé par l'office et de l'article 935 du Code civil du Bas-Canada applicable en matière de substitution.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que l'article 1333 est adopté? Adopté. J'appelle l'article 1334.

Mme Harel: "La faculté d'élire les bénéficiaires ou de déterminer leur part relève de la discrétion de celui qui l'exerce; ce dernier peut modifier ou révoquer sa décision pour les besoins de l'accomplissement de la fiducie. "Celui qui exerce la faculté ne peut le faire à son propre avantage."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau et complète le précédent. Il vise d'abord à accorder à la personne chargée d'exercer les facultés d'élire et de répartition l'assurance d'une indépendance et d'une marge de manoeuvre suffisamment larges pour lui permettre de modifier ou de révoquer sa décision lorsqu'il y va de l'accomplissement de la fin poursuivie. Il permet ainsi de modifier une décision qui aurait attribué, par exemple, une bourse d'études permettant à un étudiant méritant de poursuivre ses études universitaires sur preuve que l'étudiant choisi a cessé par la suite ses études pour employer telle bourse à une autre fin.

En outre, l'article précise que les facultés d'élire et de répartition ne peuvent être volontairement exercées à l'avantage de celui à qui elles ont été conférées. Agir autrement constituerait pour celui-ci un manquement à ses obligations.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

J'appelle l'article 1335.

Mme Harel: "Pendant la durée de la fiducie, le bénéficiaire a droit d'exiger, suivant l'acte constitutif, soit la prestation d'un avantage qui lui est accordé, soit le paiement des fruits et revenus et du capital ou de l'un d'eux seulement."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce généralement les droits du bénéficiaire pendant la fiducie en stipulant qu'il a le droit d'exiger la prestation des avantages que lui accorde l'acte constitutif, notamment le paiement des fruits et revenus et du capital ou de l'un d'eux seulement.

Bien qu'il n'ait pas d'équivalent au Code civil, l'article proposé est néanmoins conforme au droit actuel et aux propositions de l'office et complète l'article 1313 du projet qui précise que le bénéficiaire n'a aucun droit réel sur les biens transférés en fiducie pendant la durée de celle-ci.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1335 est adopté?

M. Leduc (Saint-Laurent): Adopté.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle l'article 1336.

Mme Harel: "L'amendement consiste, à l'article 1336, à ajouter, à la fin du deuxième alinéa, un membre de phrase dont je ferai lecture. Je vais tout de suite vous lire le premier alinéa. "Le bénéficiaire d'une fiducie constituée à titre gratuit est présumé avoir accepté le droit qui lui est accordé et il peut en disposer. "Il peut aussi y renoncer à tout moment. Il doit alors le faire par acte notarié portant minute s'il est bénéficiaire d'une fiducie personnelle ou d'utilité privée."

Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement a pour but d'obliger que la renonciation d'un bénéficiaire d'une fiducie personnelle ou d'utilité privée soit faite par acte notarié portant minute, compte tenu de l'importance du geste posé. L'intervention du notaire à cet acte et le formalisme devraient permettre au bénéficiaire d'être mieux informé des conséquences de sa décision et de la mieux penser.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Cossette: L'article proposé établit en faveur du bénéficiaire une présomption d'acceptation du droit que lui confère la fiducie constituée à titre gratuit et énonce

qu'il a le droit de disposer de son droit ou d'y renoncer.

Tirée de l'article 620 proposé par l'office, la présomption d'acceptation est conforme au principe du droit actuel où l'acceptation du fiduciaire suffit pour dessaisir irrévocablement le constituant. Or, comme l'acceptation du bénéficiaire n'est pas nécessaire à la constitution de la fiducie et que le transfert des biens n'est pas fait au bénéficiaire, il devient possible de poser une règle qui présume l'acceptation du bénéficiaire, d'autant que celui-ci ne subit aucun préjudice de ce fait.

Le bénéficiaire étant présumé avoir accepté, il acquiert dès lors un droit de recevoir et il peut dès lors disposer de son droit comme de tout autre bien, sous réserve toutefois des formalités qui pourraient être requises par l'acte constitutif qui peut prévoir, par exemple, un droit de préemption en faveur des autres bénéficiaires où le droit du bénéficiaire peut encore être restreint au moyen d'une stipulation d'inaliénabiiité validement stipulée.

Quant à la renonciation du bénéficiaire, celle-ci peut survenir en tout temps, même après son acceptation présumée ou effective du bénéfice que lui confère la fiducie. Cette renonciation s'apparente à une résiliation dont elle suit les règles ordinaires et n'a donc d'effet que pour l'avenir.

Le Président (M. Gagnon): Voilà. L'amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'article tel qu'amendé est adopté. L'article 1337?

Mme Harel: "Si le bénéficiaire renonce à son droit ou que ce dernier devient sans effet, son droit passe, en proportion des parts de chacun, à ses cobénéficiaires des fruits et revenus ou du capital selon que lui-même est bénéficiaire des fruits et revenus ou du capital. "S'il est seul bénéficiaire des fruits et revenus dans son ordre, son droit passe, en proportion des parts de chacun, aux bénéficiaires des fruits et revenus de second ordre ou, à défaut, aux bénéficiaires du capital."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article élabore des règles supplétives de dévolution du droit d'un bénéficiaire qui renonce ou dont le droit devient sans effet. Nouveau, il est conforme aux propositions de l'office et vise à combler une lacune du droit actuel. Il s'inspire de règles semblables applicables en matière de substitution.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le droit passe "aux" cobénéficiaires et non "à ses" cobénéficiaires.

M. Charbonneau (Pierre): ...l'emploi du singulier.

Mme Harel: C'est "aux", au pluriel.

M. Pineau: Oui, au pluriel. On n'a pas besoin de dire "à ses". Il s'agit nécessairement de "ses".

M. Charbonneau (Pierre): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Harel: De toute façon, au deuxième alinéa, déjà on voyait "aux bénéficiaires des fruits et revenus".

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté.

Une voix: Une prémonition.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on suspend nos travaux pour deux ou trois minutes?

Mme Harel: Si vous voulez. Le Président (M. Gagnon): D'accord. (Suspension de la séance à 10 h 38)

(Reprise à 10 h 47)

Le Président (M. Gagnon): Oui. L'article 138?

Mme Harel: L'article 1338...

Le Président (M. Gagnon): 1338, oui.

Mme Harel: ...se lit comme suit: "L'administration de la fiducie est soumise à la surveillance du constituant ou de ses héritiers, s'il est décédé, et du bénéficiaire, même éventuel. "En outre, dans les cas prévus par la loi, l'administration des fiducies d'utilité privée ou sociale est soumise, suivant leurs objet et fin, à la surveillance des personnes et organismes désignés par la loi."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il confère au constituant et au bénéficiaire le rôle de contrôler et de surveiller

l'administration du fiduciaire, consacrant ainsi le droit actuel. Il soumet également l'administration des fiducies d'utilité privée ou sociale au contrôle et à la surveillance de personnes et organismes désignés par la loi et qui pourraient être, suivant la fiducie, des personnes ou organismes comme la Commission des valeurs mobilières, le Curateur public, l'Inspecteur général des institutions financières ou la Régie des rentes du Québec.

En matière de fiducie d'utilité sociale, l'article comble donc une lacune du droit actuel qui ne prévoit aucun régime de surveillance de l'exécution de ces fiducies. La règle proposée s'étend aussi aux fiducies d'utilité privée constituées à titre gratuit et aux fiducies d'utilité privée qui sont constituées à titre onéreux.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1338 est adopté. 1339?

Mme Harel: "Dès la constitution de la fiducie d'utilité privée ou sociale soumise à la surveillance d'une personne ou d'un organisme désigné par la loi, le fiduciaire doit déposer auprès de la personne ou de l'organisme une déclaration indiquant notamment la nature et l'objet de la fiducie, sa durée ainsi que les nom et adresse du fiduciaire. "Il doit, à la demande de la personne ou de l'organisme, permettre l'inspection des dossiers de la fiducie et fournir tout compte, rapport ou information qui lui est demandé."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il complète le précédent en prévoyant que, si une fiducie d'utilité privée ou sociale est soumise à la surveillance d'une personne ou d'un organisme, le fiduciaire a l'obligation de déposer auprès de la personne ou de l'organisme habilité une déclaration indiquant notamment la nature et l'objet de la fiducie, sa durée ainsi que les nom et adresse du fiduciaire.

Cette mesure est complétée par l'obligation du fiduciaire de permettre sur demande l'inspection des dossiers de la fiducie et de fournir tout compte, rapport ou information qui lui est demandé. Pour avoir effet cependant, cet article devra être complété par d'autres dans les lois particulières qui habiliteront une personne ou un organisme pour exercer cette surveillance.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1340?

Mme Harel: "1340. Les droits du bénéficiaire d'une fiducie personnelle sont exercés, s'il n'est pas encore conçu, par la personne désignée par le constituant pour agir comme curateur et qui accepte cette charge ou, à défaut, par celle que nomme le tribunal à la demande du fiduciaire ou de tout intéressé. Le Curateur public peut être désigné pour agir. "En cas de fiducie d'utilité privée dont aucune personne, même déterminable ou éventuelle, ne peut être bénéficiaire, les droits que le présent paragraphe accorde au bénéficiaire peuvent être exercés par le Curateur public."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau et vise à déterminer dans certaines situations spéciales qui sera habilité à agir en l'absence de bénéficiaire ou au cas de bénéficiaire non conçu.

Le premier alinéa, qui s'inspire d'une disposition semblable en matière de substitution, prévoit qu'en cas de fiducie personnelle les droits d'un bénéficiaire non encore conçu seront exercés par un curateur désigné par le constituant ou, à défaut, nommé par le tribunal.

Le second alinéa prévoit qu'en matière de fiducie d'utilité privée dont aucune personne n'est bénéficiaire, par exemple s'il s'agit d'une fiducie pour l'entretien d'un monument funéraire, le Curateur public pourra exercer les droits conférés au bénéficiaire par le présent paragraphe relatif aux mesures de surveillance et de contrôle.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1341?

Mme Harel: "1341. Le constituant, le bénéficiaire ou, le cas échéant, un autre intéressé peut, malgré toute stipulation contraire, agir contre le fiduciaire pour le contraindre à exécuter ses obligations ou à faire un acte nécessaire à la fiducie, pour lui enjoindre de s'abstenir de tout acte dommageable à la fiducie ou pour obtenir sa destitution. "Il peut aussi attaquer les actes faits par le fiduciaire en fraude du patrimoine fiduciaire ou des droits du bénéficiaire."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: L'article proposé, dont les règles s'inspirent des propositions de l'office, clarifie le droit actuel quant aux recours que le bénéficiaire peut exercer contre le fiduciaire pour assurer l'accomplissement de la fin poursuivie. Il étend ces recours au constituant en raison de l'intérêt moral qu'il a à la bonne exécution de la fiducie ainsi qu'à tout intéressé lorsqu'il n'y a ni bénéficiaire, ni constituant pour les exercer,

par exemple en cas de fondation testamentaire. On prévoit ainsi la possibilité de contraindre le fiduciaire à exécuter ses obligations ou à faire un acte nécessaire à la fiducie, de lui enjoindre de s'abstenir de tout acte dommageable à la fiducie, notamment au moyen d'une injonction, ou même d'obtenir sa destitution.

On reconnaît également la possibilité d'agir contre les actes frauduleux du fiduciaire par le biais d'une action de même nature que l'action paulienne.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1341 est adopté. Article 1342?

Mme Harel: "1342. Le tribunal peut autoriser le constituant, le bénéficiaire ou, le cas échéant, un autre intéressé à agir en justice à la place du fiduciaire, lorsque celui-ci refuse, sans motif suffisant, d'agir, néglige de le faire ou en est empêché."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: L'article proposé confère au tribunal le pouvoir d'autoriser le constituant, le bénéficiaire ou tout intéressé à agir en justice aux lieu et place du fiduciaire qui refuse d'agir sans motif suffisant, néglige d'agir ou en est empêché.

Nouveau, cet article s'inspire de l'article 627 proposé par l'office.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1342 est adopté. Article 1343?

Mme Harel: "1343. Le fiduciaire, le constituant et le bénéficiaire sont solidairement responsables des actes exécutés en fraude des droits des créanciers du constituant ou du patrimoine fiduciaire."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article établit la responsabilité solidaire du fiduciaire, du constituant et du bénéficiaire qui agissent en fraude des droits des créanciers du constituant ou du patrimoine fiduciaire. Il a ainsi pour effet de soumettre le constituant ou le bénéficiaire qui s'immisce dans les affaires de la fiducie à la même responsabilité qu'un fiduciaire.

De droit nouveau, cet article s'inspire de l'article 625 des propositions de l'office qu'il complète en prévoyant la participation possible du constituant à la fraude.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1343 est adopté. Article 1344?

Mme Harel: "1344. Toute personne peut augmenter le patrimoine fiduciaire en lui transférant des biens par contrat ou par testament et en suivant, pour ces augmentations, les règles propres à la constitution d'une fiducie. Elle n'acquiert pas, de ce fait, les droits d'un constituant. "Les biens transférés se confondent dans le patrimoine fiduciaire et sont administrés conformément aux dispositions de l'acte constitutif."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'article proposé ici vise à permettre expressément au constituant ou à un tiers d'augmenter le capital de la fiducie pendant sa durée en effectuant de nouveaux transferts à titre gratuit ou onéreux de biens, possibilité particulièrement utile en matière de fiducie d'utilité sociale servant de véhicule a une fondation. Il précise que celui qui augmente le patrimoine fiduciaire n'acquiert pas, de ce seul fait, les droits d'un constituant. On ne saurait, en effet, conférer à celui qui fournit une simple contribution à une fiducie d'utilité sociale, par exemple, tous les droits et recours ouverts au constituant par le projet. Il indique également que le nouveau transfert de biens ne constitue pas une nouvelle fiducie soumise à un régime distinct, mais que ces biens se confondent plutôt dans le patrimoine fiduciaire et sont administrés conformément aux dispositions de l'acte constitutif.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

M. Pineau: Le Barreau indique, à l'article 1344, que cet article confirme que l'article 663 vise plutôt le legs qui est destiné à augmenter le capital de la fiducie et qu'il y aurait lieu de reformuler le deuxième alinéa de cet article 665 en fonction de la présente disposition. L'article 665, alinéa 2, se lit ainsi - cela n'a pas été amendé, je ne pense pas: "Le fiduciaire peut, pour la fiducie, recevoir le legs destiné au bénéficiaire ou celui qui sert à l'accomplissement de la fin de la fiducie." J'ai l'impression que l'alinéa 2 de l'article 665 - ça n'a pas été amendé? - vise d'une façon générale le pouvoir qu'a le fiduciaire de recevoir un legs pour la fiducie, tandis que l'article 1344 vise la faculté que toute personne a d'augmenter un patrimoine fiduciaire déjà existant. Donc, ce sont deux questions totalement distinctes. Non?

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1344 est adopté. Article 1345?

Mme Harel: L'amendement à l'article 1345 vise à insérer, à la troisième ligne du premier alinéa, après les mots "qui rendent impossible", les mots "ou trop onéreux".

Alors, l'article se lit comme suit: "Lorsqu'une fiducie a cessé de répondre à la volonté première du constituant, notamment par suite de circonstances inconnues de lui ou imprévisibles qui rendent impossible ou trop onéreux l'accomplissement de la fiducie, le tribunal peut, à la demande d'un intéressé, mettre fin à la fiducie; il peut aussi, dans le cas d'une fiducie d'utilité sociale, lui substituer une fin qui se rapproche le plus possible de la fin originale. "Si la fiducie répond toujours à la volonté du constituant, mais que de nouvelles mesures permettraient de mieux respecter sa volonté ou favoriseraient l'accomplissement de la fiducie, le tribunal peut modifier les dispositions de l'acte constitutif et notamment prolonger la durée de la fiducie."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est de droit nouveau. Il formule des règles destinées à remédier aux divers lacunes ou obstacles qui peuvent, au cours de la fiducie, nuire à l'accomplissement de la fin poursuivie ou la rendre impossible. Le premier alinéa confère ainsi au tribunal le pouvoir de mettre fin à la fiducie qui a cessé de répondre à la volonté première du constituant ou dont la fin est devenue impossible à réaliser. Il lui confère aussi le pouvoir, lorsqu'il s'agit d'une fiducie d'utilité sociale devenue impossible à réaliser, de lui substituer une fin qui se rapproche le plus possible de la fin originale.

Le second alinéa confère en outre au tribunal le pouvoir de modifier les dispositions de l'acte constitutif, notamment pour prolonger la durée de la fiducie, lorsque ces mesures permettraient de mieux respecter la volonté du constituant ou favoriseraient l'accomplissement de la fiducie. Ces modifications pourraient notamment avoir trait au nombre de fiduciaires, à l'étendue de leurs pouvoirs ou à tout autre aspect de leur administration.

Cet article s'inspire de l'article 636 proposé par l'office. Cependant, il en précise les circonstances d'application afin de mieux encadrer la discrétion du tribunal. Cet article devrait permettre, à l'avenir, d'éviter la procédure parfois longue et onéreuse de l'adoption de lois privées qui constituent la solution actuelle aux fiducies désuètes devenues difficiles ou impossibles à réaliser ou dont les conditions d'administration sont déficientes.

(Il heures)

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

M. Pineau: Cet amendement vient répondre à l'observation du Barreau et permet ainsi d'aller à l'encontre de la solution apportée par la Cour suprême dans l'arrêt Tucker. Je m'étais d'ailleurs demandé si 1347, alinéa 2, n'était pas une réponse à l'arrêt Tucker. La fiducie prend fin "par l'accomplissement de la fiducie ou par l'impossibilité, constatée par le tribunal, de l'accomplir."

Une voix: Est-ce qu'on a un autre amendement à 1347?

Mme Harel: Non. C'est au premier alinéa de 1347. Il y aura un amendement à 1347, mais au premier alinéa et non pas au deuxième.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1347 est-il adopté?

M. Pineau: C'est la même chose? Mme Harel: On en est à 1345.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est adopté. L'article 1345 tel qu'amendé est-il adopté? Adopté. Article 1346?

Mme Harel: "II doit être donné avis de la demande au constituant et au fiduciaire et, le cas échéant, au bénéficiaire, au liquidateur de la succession du constituant ou aux héritiers et à toute autre personne ou organisme désigné par la loi, si la fiducie est soumise à leur surveillance."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent. Il vise à assurer que tout intéressé a été avisé d'une demande qui a pour objet de mettre fin à la fiducie, d'en changer la fin, d'en prolonger la durée ou d'en modifier les conditions d'administration en prévoyant qu'avis de toute requête présentée à cette fin leur soit adressé.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1346 est-il adopté? Adopté. Article 1347?

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer le premier alinéa par le suivant: La fiducie prend fin par la renonciation ou la caducité du droit de tous les bénéficiaires tant du capital que des fruits et revenus. "Elle prend fin aussi par l'arrivée du terme ou l'avènement de la condition, par l'accomplissement de la fiducie ou par l'impossibilité, constatée par le tribunal de l'accomplir."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce les causes mettant fin à la fiducie. Il s'inspire des propositions de l'office et du droit

actuel. Il tient aussi compte des articles précédents.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Oui? L'amendement à l'article 1347 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1348?

Mme Harel: "Le fiduciaire doit, à la fin de la fiducie, remettre les biens à ceux qui y ont droit. "À défaut de bénéficiaire, les biens qui restent à la fin de la fiducie sont dévolus au constituant ou à ses héritiers."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce l'obligation du fiduciaire de remettre à l'expiration de la fiducie les biens à ceux qui y ont droit. Il propose aussi une règle supplétive pour déterminer le sort des biens en précisant qu'à défaut d'un bénéficiaire les biens sont dévolus au constituant ou à ses héritiers. Cette règle est conforme au droit actuel et aux propositions de l'office. L'effet de cet article est cependant limité par celui qui suit.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1348 est-il adopté? Adopté. Article 1349?

Mme Harel: L'amendement à 1349 consiste à remplacer, à la fin, les mots "par le fiduciaire ou, à défaut, par le tribunal", par ce qui suit: "par le tribunal sur la recommandation du fiduciaire. Le tribunal prend aussi l'avis de la personne ou de l'organisme désigné par la loi, si la fiducie était soumise à leur surveillance."

L'article se lit comme suit: "Les biens de la fiducie d'utilité sociale qui prend fin par suite de l'impossibilité de l'accomplir sont dévolus à une fiducie, à une personne morale ou à tout autre groupement de personnes ayant une vocation se rapprochant le plus possible de celle de la fiducie. La désignation en est faite par le tribunal sur la recommandation du fiduciaire. Le tribunal prend aussi l'avis de la personne ou de l'organisme désigné par la loi, si la fiducie était soumise à leur surveillance."

Le commentaire. Cet amendement a pour but de mieux assurer la dévolution des biens à une autre fiducie en donnant au tribunal la responsabilité de désigner la fiducie ou la personne qui recevra les biens. Le tribunal devra cependant agir sur la recommandation du fiduciaire qui demeure la personne la plus apte pour déterminer la similitude des vocations entre la fiducie qu'il administrait et une autre. Il est prévu, également, que le tribunal devra prendre l'avis de la personne ou de l'organisme qui surveillait la fiducie, le cas échéant.

Le Président (M. Gagnon): Y a-t-il un commentaire sur l'article?

M. Cossette: Sous réserve de l'amendement proposé, l'article 1349 complète le précédent. Il crée une exception dans le cas d'une fiducie d'utilité sociale qui se termine par suite de l'impossibilité d'en accomplir la fin. Il édicte que les biens sont alors dévolus, en l'absence de dispositions différentes de l'acte constitutif, à une fiducie, à une personne morale ou à tout autre groupement de personnes ayant une vocation se rapprochant le plus possible de celle de la fiducie dont la désignation est faite par le fiduciaire ou, à défaut, par le tribunal. La règle proposée, qui est nouvelle, a paru correspondre davantage à la volonté présumée du constituant qui n'a pu prévoir l'impossibilité de réaliser la fiducie qu'il créait.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Je voudrais souligner ici, M. le Président, qu'on accepte la suggestion du Barreau.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à l'article 1349 est adopté? Oui? L'article tel qu'amendé est aussi adopté. Le titre septième, "De l'administration du bien d'autrui", chapitre premier, "Dispositions générales". J'appelle l'article 1350.

De l'administration du bien d'autrui

Mme Harel: L'amendement à cet article consiste à supprimer, à la première ligne, les mots, "en vertu de la loi ou d'un acte juridique", et à ajouter, à la fin, ce que je lirai en faisant lecture de l'article: "Toute personne qui est chargée d'administrer un bien ou un patrimoine qui n'est pas le sien assume la charge d'administrateur du bien d'autrui si la loi ou l'acte juridique constitutif de son administration le prévoit ou si la loi ou l'acte n'indique aucun autre régime d'administration."

Alors, le commentaire sur l'amendement. Cet amendement a pour but de circonscrire davantage les cas où une personne assume la charge d'administrateur du bien d'autrui et d'exclure de ce régime, par voie de conséquence, les situations où la loi ou l'acte prévoit un autre régime. Ce sera le cas, notamment, pour l'administrateur d'une personne morale; la loi le qualifiant de mandataire, il n'est pas administrateur du bien d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Le commentaire.

M. Cassette: Cet article est formulé en termes généraux. Il vise à rendre les règles du titre proposé applicables à toute personne qui est chargée de la simple administration ou de la pleine administration à l'égard d'un bien ou d'un patrimoine qui n'est pas le sien si ces actes sont accomplis en vertu de la loi ou d'un acte juridique.

Ainsi, les règles sur l'administration devraient s'appliquer au tuteur, au curateur, au liquidateur d'une succession, au gérant de biens indivis ou d'une copropriété ou au fiduciaire puisqu'ils sont chargés, en vertu des articles 224, 305, 309, 856, 1086, 1140 et 1329 du projet, soit de la simple administration du bien d'autrui, soit de la pleine administration. Elles ne s'appliqueraient pas à l'emphytéote ou au grevé de substitution puisque, même s'ils sont tenus de rendre le bien, ils sont d'abord titulaires d'un droit réel et elles ne s'appliqueraient pas non plus à l'administrateur de la personne morale puisqu'il est, en vertu de la loi, un mandataire de la personne morale. Ceci est d'ailleurs exprimé à l'article 354 du projet.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'amendement est adopté et l'article 1350 tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1351.

Mme Harel: "Sauf si l'administration est gratuite en vertu de la loi, de l'acte ou des circonstances, l'administrateur a droit à une rémunération fixée par l'acte ou la loi ou, à défaut, selon la valeur des services rendus ou l'usage. "Celui qui agit sans droit ou sans y être autorisé n'a droit à aucune rémunération."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cassette: L'article établit en faveur de l'administrateur le principe du droit à une rémunération et en précise le mode de fixation. Le droit actuel énonce tantôt le principe de la gratuité de l'administration, comme en matière d'exécution testamentaire ou de fiducie, tantôt le principe de son caractère rémunéré, comme en matière d'administration de copropriété. En optant, à l'instar de l'office, pour le principe général du droit à une rémunération, l'article proposé a paru mieux refléter la pratique actuelle tout en évitant un désintéressement pour la fonction d'administrateur qu'aurait pu entraîner l'adoption du principe inverse. L'article réserve, par ailleurs, les cas où la gratuité de l'administration ressort de la loi, de l'acte ou des circonstances lui ayant donné lieu. La formulation proposée est ici assez large pour permettre de déduire le caractère gratuit de l'administration, même en l'absence d'une disposition expresse à cet effet.

Le deuxième alinéa énonce que celui qui agit sans droit ou sans y être autorisé n'a droit a aucune rémunération. Il vise à empêcher l'immixtion douteuse de personnes qui auraient pu, à cause du principe de la rémunération, être tentées de s'immiscer indûment dans la gestion des biens d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Me Pineau.

M. Pineau: Une question, M. le Président. L'administrateur a droit à une rémunération. À supposer, dans le cas d'une copropriété divise, que l'assemblée générale désigne trois ou cinq personnes comme administrateurs, non rémunérées, l'une de ces cinq pourrait dire: Je veux une rémunération.

M. Cossette: Dans le cas de la copropriété, la copropriété étant une personne morale, cela ne s'appliquerait pas parce que l'administrateur est administrateur d'une personne morale et, à ce moment-là, devient un mandataire.

Par contre, le gérant nommé par le conseil d'administration pour administrer la copropriété deviendrait un administrateur du bien d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1351 est adopté? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1351 est adopté. Article 1352?

Des formes de l'administration

Mme Harel: "Celui qui est chargé de la simple administration doit faire tous les actes nécessaires à la conservation du bien ou ceux qui sont utiles pour maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce les obligations générales applicables à la simple administration du bien d'autrui en précisant qu'elles obligent celui qui en est chargé à faire, outre les actes nécessaires à la conservation du bien, ceux qui sont utiles pour maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné; visant les administrateurs tels que le tuteur, le curateur ou le liquidateur, la simple administration implique donc non seulement l'idée des actes nécessaires à la conservation du bien qui sont le propre de la garde mais

aussi celle des actes nécessaires ou utiles à sa conservation en bon état d'utilisation ou de fonctionnement. Conforme aux propositions de l'office, cet article est complété ou explicité par les autres règles de la section.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1352 est adopté. Article 1353?

Mme Harel: "L'administrateur chargé de la simple administration est tenu de percevoir les fruits et revenus du bien qu'il administre et d'exercer les droits qui lui sont attachés. "Il perçoit les créances qui sont soumises à son administration et en donne valablement quittance. Il exerce les droits attachés aux valeurs mobilières qu'il administre, tels les droits de vote, de conversion ou de rachat."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article oblige l'administrateur à percevoir les fruits et revenus du bien géré et à exercer les droits qui lui sont attachés. Il précise aussi que l'administrateur perçoit ainsi les créances et en donne valablement quittance et qu'il exerce les droits attachés aux valeurs mobilières qu'il gère comme les droits de vote, de conversion, d'option ou de rachat. Conforme aux propositions de l'office, l'article l'est aussi au droit actuel où la perception des fruits et revenus, y compris celle des créances, constitue un acte de pure administration ou à l'attribution d'un pouvoir où l'imposition d'une obligation emporte l'accomplissement des actes nécessaires ou requis à cette fin.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1353 est adopté. Article 1354?

Mme Harel: "L'administrateur doit continuer l'utilisation du bien qui porte des fruits et revenus, sans en changer la destination, sauf autorisation du bénéficiaire ou, en cas d'empêchement, du tribunal."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce l'obligation pour l'administrateur de continuer l'utilisation à laquelle le bien producteur de fruits et revenus est affecté sans en changer la destination.

Cette obligation, qui s'inspire des propositions de l'office, découle de l'obligation générale du simple administrateur de faire tout acte utile pour maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné.

Elle oblige ainsi l'administrateur à continuer le commerce ou l'entreprise faisant partie du patrimoine géré, à poursuivre la culture des terres y comprises ou à maintenir l'utilisation, à des fins locatives, des immeubles administrés, par exemple. Elle permet conséquemment à l'administrateur de poser tous les actes requis à ces fins comme le renouvellement des baux ou la passation d'autres contrats. (Il h 15)

L'article proposé permet, par ailleurs, à l'administrateur d'obtenir l'autorisation du bénéficiaire ou du tribunal pour mettre fin à l'exploitation ou pour en modifier la forme. Ceci est conforme à son obligation d'agir dans le meilleur intérêt du bénéficiaire. Ce peut être le cas, par exemple, lorsque l'exploitation s'avère d'un coût trop élevé par rapport aux fruits et revenus engendrés ou lorsqu'elle est devenue désuète.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président. "L'administrateur doit continuer l'utilisation du bien qui produit des fruits et revenus, sans en changer la destination, sauf autorisation du bénéficiaire..." Autorisation du bénéficiaire pour continuer ou pour changer de destination? La phrase n'est pas très claire.

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Je crois que cela s'applique aux deux situations.

M. Pineau: On doit continuer l'utilisation sans en changer la destination avec l'autorisation...

M. Charbonneau (Pierre): C'est-à-dire qu'en principe il continue l'utilisation du bien sans en changer la destination, à moins qu'il n'obtienne le consentement, soit pour cesser l'utilisation du bien qui produit des fruits ou des revenus ou, s'il désire en changer la destination, à ce moment il faudrait l'autorisation du bénéficiaire également.

M. Pineau: Je pense qu'il serait peut-être préférable de dire qu'il doit continuer l'utilisation du bien sans en changer la destination, à moins d'y être autorisé par le bénéficiaire ou en cas d'empêchement par le tribunal.

M. Charbonneau (Pierre): Oui, c'est une formulation qui reviendrait...

M. Pineau: Oui, d'accord, je pense que cette seconde formulation serait plus claire.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que

ce sera un amendement? Mme Harel: Oui. Le Président (M. Gagnon): Oui. Mme Harel: Vous allez le préparer?

Le Président (M. Gagnon): Cet amendement est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1355.

Mme Harel: "L'administrateur est tenu de placer les sommes d'argent qu'il administre conformément aux règles du présent titre relatives aux placements présumés sûrs. Il peut modifier les placements faits avant son entrée en fonctions ou ceux qu'il a faits."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article qui s'inspire des propositions de l'office oblige l'administrateur à placer les sommes d'argent qu'il administre conformément aux règles relatives aux placements présumés sûrs établis aux articles 1392 et suivants du projet.

Il précise aussi que l'administrateur a le pouvoir de modifier les placements qui avaient été faits ou ceux qu'il a faits.

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? L'article 1355 est adopté. J'appelle l'article 1356.

Mme Harel: "L'administrateur peut, avec l'autorisation du bénéficiaire ou, en cas d'empêchement de celui-ci, du tribunal, aliéner le bien à titre onéreux ou le grever d'une sûreté, lorsque cela est nécessaire pour payer les dettes, maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné ou en conserver la valeur. "Il peut, toutefois, aliéner seul un bien de nature périssable ou susceptible de se déprécier rapidement."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: L'article proposé reconnaît au simple administrateur le droit d'aliéner les biens dans certaines circonstances.

Le premier alinéa de cet article permet à l'administrateur d'aliéner à titre onéreux ou de grever d'une sûreté un bien qui lui est confié, lorsque cela s'avère nécessaire pour payer les dettes, pour maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné ou en conserver la valeur.

Il exige, cependant, pour ce faire, l'autorisation préalable du bénéficiaire ou, en cas d'empêchement, du tribunal. Muni de l'autorisation requise, l'administrateur peut ainsi vendre un bien pour payer les dettes ou pour maintenir l'usage auquel le bien est normalement destiné. Il peut aussi emprunter sur hypothèque afin de s'acquitter de ses obligations. Il peut même vendre un bien dont la valeur est susceptible de diminuer, par exemple, par suite des effets prévisibles d'un règlement de zonage ou des conditions du marché.

Le second alinéa crée une exception au premier en permettant à l'administrateur, conformément au droit actuel et à celui proposé par l'office, d'aliéner seul un bien de nature périssable ou susceptible de se déprécier rapidement. Outre le fait que son devoir de prudence et de diligence lui dicterait bien souvent de l'exercer, ce pouvoir a par ailleurs paru s'imposer ici, vu le caractère urgent de la situation envisagée.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Dans le commentaire, au premier paragraphe: L'article proposé reconnaît au simple administrateur le pouvoir d'aliéner, non point le droit d'aliéner. L'administrateur n'a aucun droit, il n'a que des pouvoirs.

Le Président (M. Gagnon): Ce sera corrigé?

M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1356 est-il adopté?

M. Cossette: C'est une correction au commentaire.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1356 est adopté? Article 1357. Mme la députée.

Mme Harel: "1357. Celui qui est chargé de la pleine administration doit conserver et faire fructifier le bien, accroître le patrimoine ou en réaliser l'affectation, lorsque l'intérêt du bénéficiaire ou l'accomplissement de la fin l'exigent."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce en termes fort généraux les principales obligations de l'administrateur chargé de la pleine administration en précisant que celui qui en est chargé doit conserver et faire fructifier le bien, accroître le patrimoine ou en réaliser l'affectation, lorsqu'il y va de l'intérêt du bénéficiaire ou de l'accomplissement de la fin poursuivie.

Alors que la simple administration est un mode d'administration actif mais doublé d'un souci de protection, la pleine administration apparaît comme un genre d'administration actif et normalement axé vers la rentabilité. La nature assez large des obligations imposées au plein administrateur s'explique en raison des pouvoirs étendus qui lui sont conférés par l'article suivant, pouvoirs qu'exige la nature même des fonctions de ceux qui sont appelés à agir à ce titre, tels les fiduciaires.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau suggère une modification: "doit prendre toutes les mesures requises pour le faire fructifier", une obligation de moyen et non pas une obligation de résultat. Je pense que l'article 1360 indique que l'administrateur doit agir avec prudence, diligence et compétence; ça, c'est une obligation de moyen.

M. Charbonneau (Pierre): Obligation de moyen, tout simplement.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1357 est adopté. Article 1358?

Mme Harel: "1358. L'administrateur peut, pour exécuter ses obligations, aliéner le bien à titre onéreux, le grever de charges ou d'un droit réel ou en changer la destination et faire tout autre acte nécessaire ou utile, y compris toutes espèces de placements."

M. Cassette: Cet article complète le précédent en conférant au plein administrateur le pouvoir de faire pratiquement tous les actes se rapportant aux biens gérés dans la mesure où ces actes sont utiles ou nécessaires à l'exécution de ses obligations. Il accorde ainsi le pouvoir d'aliéner les biens à titre onéreux, de les grever de charges ou d'un droit réel, d'en changer la destination, de même que le pouvoir de faire tout autre acte nécessaire ou utile, y compris toutes espèces de placements.

L'exercice de ces vastes pouvoirs est toutefois assujetti aux autres règles du projet, notamment à celles qui obligent l'administrateur à agir avec prudence et diligence dans le meilleur intérêt du bénéficiaire ou de la fin recherchée.

L'article proposé, de même que le précédent, s'inspire des propositions de l'office et est conforme aux règles du droit actuel applicables aux fiduciaires.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, à quelles charges pense-t-on qui ne seraient pas un droit réel? Quelles charges personnelles?

Mme Harel: C'est une bonne question.

M. Pineau: Ils ne passeront pas l'examen.

M. Cassette: On va y penser.

Mme Harel: On va le suspendre. C'est intéressant, en fait, cela pourrait être une question d'examen à laquelle personne ne pourrait répondre.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1358 est suspendu?

Mme Harel: Oui, suspendu, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): À l'article 1359, vous avez un amendement.

Des règles de l'administration

Des obligations de l'administration envers le bénéficiaire

Mme Harel: Oui, qui consiste à supprimer, à la fin du premier alinéa, les mots "et suivant leur finalité" et à remplacer, à la première ligne du deuxième alinéa, le mot "survenu" par le mot "survenue" au féminin.

L'article se lit comme suit: "1359. L'administrateur du bien d'autrui doit, dans l'exercice de ses fonctions, respecter les obligations que la loi et l'acte constitutif lui imposent; il doit agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés. "Il ne répond pas de la perte ou de la détérioration du bien survenue par suite d'un cas fortuit ou résultant de sa vétusté, de sa nature périssable ou de l'usage normal et autorisé du bien."

Le commentaire. Ce premier amendement vise à éviter une répétition puisque la finalité de pouvoir est inhérente à leur expression. Le second amendement est formel.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est le premier d'une suite d'articles qui énoncent les obligations et devoirs fondamentaux propres à tout administrateur, quel que soit le genre d'administration qui lui est confié. Il précise que l'administrateur doit agir conformément à la loi et à l'acte constitutif dans la limite des pouvoirs qui lui sont conférés et suivant leur finalité.

Nouveau, le premier paragraphe de cet article s'inspire des propositions de l'office et est conforme aux principes du droit actuel qui impose à l'administrateur le devoir d'agir légalement et intra vires de ses pouvoirs.

Quant au deuxième alinéa, il reprend, en s'inspirant des propositions de l'office, des règles du droit commun. Il précise ainsi que l'administrateur du bien d'autrui n'est pas responsable de la perte ou de la détérioration du bien survenue par suite d'un cas fortuit ou résultant de sa vétusté, de sa nature périssable ou de l'usage normal et autorisé du bien.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1359 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1360?

Mme Harel: "L'administrateur doit agir avec prudence, diligence et compétence comme le ferait en pareilles circonstances une personne raisonnable"

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce une règle de conduite constamment réaffirmée au Code civil et dans d'autres lois, à savoir que l'administrateur doit agir avec prudence, diligence et compétence, comme le ferait en pareilles circonstances une personne raisonnable. Il reprend ainsi sous une formulation nouvelle, mais dont le contenu demeure conforme au droit actuel, la norme de conduite objective et abstraite du bon père de famille. L'article proposé est aussi conforme à l'article 513 proposé par l'Office de révision du Code civil.

Mme Harel: Et la personne prudente et raisonnable, la bonne mère de famille, qu'en faites-vous?

Le Président (M. Gagnon): L'article 1360 est-il adopté? L'article 1361?

Mme Harel: "L'administrateur doit agir avec honnêteté et loyauté, dans le meilleur intérêt du bénéficiaire et de la fin poursuivie."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article impose à l'administrateur un devoir général d'honnêteté et de loyauté envers le bénéficiaire ou l'accomplissement de la fin poursuivie dans leur meilleur intérêt. L'article exige ainsi non seulement une entière fidélité aux engagements assumés ou imposés par la loi, mais aussi le respect des règles de l'honneur et de la probité et une prise en charge des intérêts du bénéficiaire ou de la fin. Il obligerait l'administrateur, par exemple, à instruire le bénéficiaire de tout renseignement utile pouvant influer sur sa volonté de maintenir l'administration, la modifier ou y mettre fin ou, en l'absence du bénéficiaire, à prendre sur soi la décision de s'adresser au tribunal à ces fins.

Cet article, qui s'inspire des propositions de l'office, est conforme au droit actuel où le devoir de loyauté, sans être imposé expressément par les textes, se déduit néanmoins de l'obligation faite à plusieurs administrateurs de ne pas se placer dans une situation de conflit d'intérêts et d'agir, non pas en bon père de famille, mais comme une personne raisonnable.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1361 est adopté. Article 1362?

Mme Harel: "L'administrateur ne peut exercer ses pouvoirs dans son propre intérêt ni dans celui d'un tiers; il ne peut non plus se placer dans une situation de conflit entre son intérêt personnel et ses obligations d'administrateur. "S'il est lui-même bénéficiaire, il doit exercer ses pouvoirs dans l'intérêt commun en considérant son intérêt au même titre que celui des autres bénéficiaires."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article, de même que ceux qui suivent, énonce des règles qui découlent du devoir général de loyauté imposé à l'administrateur. Il édicte ainsi que l'administrateur ne peut exercer les pouvoirs qui lui sont conférés dans son propre intérêt, ni dans celui d'un tiers. Il ne peut non plus se placer dans une situation mettant en conflit son intérêt personnel et ses obligations d'administrateur.

Le second alinéa précise ce que l'administrateur doit faire dans les cas où il est lui-même bénéficiaire. Dans ce cas, il doit exercer ses pouvoirs dans l'intérêt commun en considérant son intérêt au même titre que celui des autres bénéficiaires. Nouveau, l'article proposé est conforme à certaines règles du droit actuel et s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil. (Il h 30)

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1362 est adopté. C'est cela, il n'y a pas d'amendement. Article 1363? Il y a un amendement.

Mme Harel: Oui. Il consiste à remplacer, à la quatrième ligne du premier alinéa, les mots "a contre lui" par les mots "qu'il peut faire valoir contre lui" et à insérer, à la cinquième ligne de ce même alinéa, avant les mots "la valeur de ces droits", les mots "la nature et". L'article se lit comme suit: "L'administrateur doit, sans délai, notifier par écrit au bénéficiaire tout intérêt qu'il a dans une entreprise et qui est

susceptible de le placer en situation de conflit d'intérêts, ainsi que les droits qu'il peut faire valoir contre lui ou dans les biens administrés en indiquant, le cas échéant, la nature et la valeur de ces droits. Il n'est pas tenu de notifier l'intérêt ou les droits qui résultent de l'acte ayant donné lieu à l'administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

Mme Harel: II y a un autre alinéa, M. le Président: "Sont notifiés à la personne ou à l'organisme désigné par la loi l'intérêt ou les droits portant sur les biens d'une fiducie soumise à leur surveillance."

Le Président (M. Gagnon): Voilà! Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète les précédents relatifs à l'obligation de loyauté et à l'obligation d'éviter les conflits d'intérêts. Il oblige l'administrateur à notifier au bénéficiaire l'intérêt qu'il peut avoir dans une entreprise susceptible de le placer dans une situation de conflit d'intérêts ainsi que les droits qu'il a contre lui ou dans les biens administrés. Cette notification vise à informer adéquatement et dès le départ le bénéficiaire, ses représentants ou les personnes chargées de surveiller l'administration de situations pouvant influer sur le maintien ou non de l'administrateur dans ses fonctions, sur son aptitude à participer à certaines décisions, voire sur l'opportunité de la nomination d'un administrateur ad hoc, en certaines circonstances. La notification n'est évidemment pas nécessaire lorsque les situations conflictuelles résultent de l'acte même qui a donné lieu à l'administration car alors les parties intéressées en seront par là avisées.

Le deuxième alinéa prévoit, en cas de fiducie, une notification particulière à la personne ou à l'organisme chargé par la loi de surveiller la fiducie.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est-il adopté? L'article tel qu'amendé est-il adopté? Adopté. Article 1364? Il y a un autre amendement.

Mme Harel: Oui. L'amendement consiste à remplacer, à la deuxième ligne du premier alinéa, le mot "affectant" par les mots "qui touche". L'article se lit comme suit: "L'administrateur ne peut, pendant son administration, se porter partie à un contrat qui touche les biens administrés, ni acquérir autrement que par succession des droits sur ces biens ou contre le bénéficiaire. "Il peut néanmoins y être expressément autorisé par le bénéficiaire ou par le tribunal, en cas d'empêchement ou à défaut d'un bénéficiaire déterminé."

C'est un amendement de nature purement formelle.

Le Président (M. Gagnon): Y a-t-il des commentaires sur l'article?

M. Cossette: Sous réserve de l'amendement, cet article, comme les précédents, précise certaines règles de conduite pour l'administrateur. Il édicte que l'administrateur ne peut pendant son administration se porter partie à un contrat touchant les biens administrés ni acquérir, sauf par succession, des droits sur ces biens ou contre le bénéficiaire à moins d'obtenir l'autorisation expresse de ce dernier ou, à défaut, du tribunal. Il vise à éviter que l'administreur ne se place volontairement et sans autorisation dans une position où il aurait à choisir entre son intérêt personnel et celui du bénéficiaire et ne soit conséquemment tenté de sacrifier à son intérêt personnel son devoir d'agir dans le meilleur intérêt du bénéficiaire. L'article proposé, qui s'inspire en partie des propositions de l'office, est conforme à plusieurs dispositions du droit actuel applicables aux administrateurs du bien d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. Article 1365?

Mme Harel: "L'administrateur ne doit pas confondre les biens administrés avec ses propres biens."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article interdit à l'administrateur de confondre les biens administrés avec ses propres biens. Conforme aux propositions de l'office et aux principes du droit actuel, l'article proposé ne fait qu'énoncer une règle illustrant le principe de l'élimination des conflits d'intérêts. Il oblige l'administrateur à gérer de façon distincte et séparée les biens confiés.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1365 est adopté? Adopté. Article 1366?

Mme Harel: "L'administrateur ne peut utiliser à son profit le bien qu'il administre ou l'information qu'il obtient en raison même de son administration, à moins que le bénéficiaire n'ait consenti à un tel usage ou qu'il ne résulte de la loi ou de l'acte constitutif de l'administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article interdit en principe à l'administrateur de tirer profit des biens qu'il administre ou de toute possibilité de gains qui pourrait s'offrir à lui dans le cours de l'administration ou à son occasion, y compris à la suite d'informations obtenues en raison même de son administration. Il permet toutefois à l'administrateur de le faire lorsqu'il y est autorisé par le bénéficiaire ou que la loi ou l'acte constitutif lui accorde ce droit.

Conforme aux propositions de l'office, la règle proposée constitue une application de l'obligation de loyauté. Elle s'inspire du droit des personnes morales et de certaines dispositions du Code civil actuel en matière de dépôt.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. 1367?

Mme Harel: "Sauf s'il est de la nature de son administration de pouvoir le faire, l'administrateur ne peut disposer à titre gratuit des biens qui lui sont confiés; il le peut néanmoins s'il s'agit de biens de valeur modique et que la disposition est faite dans l'intérêt du bénéficiaire ou de la fin poursuivie. "Il ne peut, sans contrepartie valable, renoncer à un droit qui appartient au bénéficiaire ou qui fait partie du patrimoine administré."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article établit l'interdiction pour l'administrateur de disposer à titre gratuit des biens qui lui sont confiés, à moins qu'il ne s'agisse de biens de valeur modique donnés dans l'intérêt du bénéficiaire ou de la fin poursuivie. Il réserve toutefois les cas où le pouvoir de disposer à titre gratuit résulte de la nature même des fonctions de l'administrateur, par exemple s'il est fiduciaire d'une fiducie d'utilité sociale ou administrateur d'une fondation.

Le second alinéa complète cette règle en précisant que l'administrateur ne peut renoncer sans considération valable à un droit qui appartient au bénéficiaire ou qui fait partie du patrimoine administré. Ainsi, il ne pourrait renoncer à une distribution de dividendes ou à la prescription extinctive d'une créance contre le bénéficiaire ou le patrimoine. L'article proposé s'inspire de l'article 528 proposé par l'office et du droit actuel, notamment de l'article 763 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. 1368?

Mme Harel: "L'administrateur peut ester en justice pour tout ce qui touche son administration; il peut aussi intervenir dans toute action concernant les biens administrés."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article permet à l'administrateur d'ester en justice pour tout ce qui touche son administration. Il lui permet aussi d'intervenir dans toute action concernant les biens administrés. Il constitue une exception à la règle de l'article 59 du Code de procédure, à savoir que nul ne peut plaider au nom d'autrui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. 1369?

Mme Harel: "S'il y a plusieurs bénéficiaires de l'administration, simultanément ou successivement, l'administrateur est tenu d'agir avec impartialité à leur égard, compte tenu de leurs droits respectifs."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article oblige l'administrateur à agir avec impartialité à l'égard des bénéficiaires simultanés ou successifs de l'administration, compte tenu de leurs droits respectifs. Conforme aux recommandations de l'office, la règle proposée s'applique, qu'il y ait plusieurs bénéficiaires simultanés en parts égales ou inégales, ou plusieurs bénéficiaires successifs, ou plusieurs bénéficiaires dont certains ont droit aux revenus et d'autres au capital.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. 1370?

Mme Harel: "Lorsqu'il apprécie la responsabilité d'un administrateur, le tribunal peut tenir compte du fait que la personne agit gratuitement, qu'elle est mineure ou majeure sous un régime de protection, ou qu'elle a été désignée en raison de sa compétence professionnelle."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: L'administrateur est, dans l'exercice de ses fonctions et l'exécution de ses obligations fondamentales, notamment celles d'agir avec prudence et diligence, responsable envers le bénéficiaire ou le patrimoine du préjudice qui résulte de sa faute conformément aux règles du droit commun. L'article proposé établit que le tribunal peut, dans l'appréciation de la responsabilité de l'administrateur, tenir

compte du fait qu'il a agi gratuitement, qu'il est mineur ou majeur sous un régime de projection, ou qu'il a été désigné en raison de sa compétence professionnelle.

Cet article, qui s'inspire en partie des propositions de l'office, est généralement conforme au droit actuel. La règle qui permet au tribunal de tenir compte du caractère gratuit de l'administration dans l'appréciation de la responsabilité existe en matière de mandat. Celle qui lui permet de tenir compte du fait que l'administrateur a été désigné en raison de sa compétence professionnelle résulte de l'application normale du critère objectif et abstrait de la personne raisonnable placée dans des circonstances comparables. Enfin, le droit actuel permet à la personne protégée d'invoquer son incapacité dans certains cas, en réduction de sa responsabilité contractuelle. Il ne le permet pas cependant en matière de responsabilité extracontractuelle, ce qui est repris à l'article 178 du projet. Les fonctions de l'administrateur n'étant pas de nature extracontractuelle, l'article vise donc à permettre au tribunal de tenir compte de l'état de minorité ou d'incapacité pour apprécier la responsabilité de l'administrateur.

Cette approche a été retenue plutôt que celle proposée par l'article 510 du projet de l'Office de révision du Code civil. Je dois souligner que l'expression "bon père de famille" dans le texte est entre guillemets, ce qui veut dire que cela veut dire une personne raisonnable.

M. Pineau: C'est une expression du passé.

M. Charbonneau (Pierre): II fait également référence au droit actuel qui, lui, parle de bon père de famille.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: M. le Président, la proposition "lorsqu'il apprécie la responsabilité d'un administrateur" est ambiguë. On ne sait pas s'il s'agit d'une exception à la règle de l'appréciation in abstracto ou s'il s'agit d'une exception à la règle de la réparation intégrale. C'est la même ambiguïté que nous retrouvons dans les articles 1710, deuxième alinéa, du Code civil du Bas-Canada et 1045, deuxième alinéa, du Code civil du Bas-Canada concernant le quasi-contrat, 1710 et 1045, aux deuxièmes alinéas.

Il s'agit de savoir si vous voulez déroger au principe de l'appréciation in abstracto ou au principe de la réparation intégrale. Que permettez-vous au tribunal de faire?

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Je pense que l'article constitue surtout une exception au principe de la réparation intégrale.

M. Pineau: Bon, il faut alors le dire clairement.

M. Charbonneau (Pierre): Finalement, quant à l'autre aspect que vous mentionniez, pourriez-vous répéter le premier aspect?

M. Pineau: L'appréciation in abstracto ou in concreto du comportement de l'administrateur ou la réparation intégrale ou la réparation partielle.

M. Charbonneau (Pierre): Dans le comportement in abstracto, je crois que l'on tient compte de ces éléments lorsqu'on apprécie la responsabilité de l'administrateur, le caractère gratuit peut entrer en considération, par exemple.

M. Pineau: Mais je m'explique autrement, je pose ma question autrement. Lorsque le tribunal va vouloir apprécier la responsabilité, qu'est-ce qu'il va devoir faire? Va-t-il devoir se demander si l'administrateur s'est comporté comme un homme normalement prudent et raisonnable l'aurait fait en semblables circonstances ou va-t-il devoir prendre en considération les circonstances, la personnalité de l'administrateur, etc., l'appréciation in concreto?

M. Leduc (Saint-Laurent): Intégrale.

Le Président (M. Gagnon): Me

Charbonneau.

M. Charbonneau (Pierre): Les deux, sauf qu'à l'article 1370, ici, c'est surtout in concreto dont on parle, c'est surtout de sa responsabilité in concreto.

M. Pineau: À partir du moment où le tribunal considère que l'administrateur a eu un comportement fautif, est-ce qu'il va devoir indemniser intégralement?

M. Charbonneau (Pierre): L'article 1370 vient lui donner les éléments lui permettant de réduire sa responsabilité ou d'en tenir compte pour évaluer l'étendue de sa responsabilité.

M. Pineau: II pourrait donc ne pas être condamné à indemniser intégralement?

M. Charbonneau (Pierre): Oui, c'est cela.

M. Pineau: Alors, c'est une dérogation aux deux aspects du principe de responsabilité, l'appréciation in concreto et la réparation éventuellement partielle et non intégrale.

M. Charbonneau (Pierre): Cela peut jouer aux deux niveaux, effectivement.

M. Pineau: Alors, ce n'est pas clair.

M. Charbonneau (Pierre): Finalement, lorsqu'il apprécie généralement la responsabilité d'un administrateur, soit à l'égard de la faute qu'il a commise, soit pour déterminer l'étendue de la responsabilité...

Le Président (M. Gagnon): Nous allons suspendre...

Mme Harel: Et l'article également.

Le Président (M. Gagnon): ...et l'article également. Nous allons suspendre nos travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à Il h 45)

(Reprise à Il h 59)

Mme Harel: L'article 1370 se lit comme suit...

M. Cossette: Non, il est suspendu.

Mme Harel: II est suspendu. Est-ce qu'on le rouvre immédiatement?

M. Charbonneau (Pierre): Je crois qu'on va le suspendre. On va proposer une rédaction. On s'est un peu entendu sur les modalités. Ce sera dans le sens d'une clarification.

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1370 demeure suspendu. Article 1371?

Des obligations de l'administrateur et du bénéficiaire envers les tiers

Mme Harel: "L'administrateur qui, dans les limites de ses pouvoirs, s'oblige au nom du bénéficiaire ou pour le patrimoine fiduciaire n'est pas personnellement responsable envers les tiers avec qui il contracte. "Il est responsble envers eux s'il s'oblige en son propre nom, sauf leurs droits contre le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire, le cas échéant."

Le Président (M. Gagnon): Commentai- re.

M. Cassette: Cet article est le premier de plusieurs articles du projet qui établissent les obligations de l'administrateur et du bénéficiaire ou du patrimoine envers les tiers, obligations s'exprimant essentiellement en termes de responsabilités. Il est tiré des règles du mandat telles qu'exprimées aux articles 1715 et 1716 du Code civil du Bas-Canada et des articles 570 et 571 du projet de l'office.

Le premier alinéa dégage l'administrateur de toute responsabilité envers les tiers avec qui il contracte lorsqu'il s'oblige, dans les limites de ses pouvoirs, au nom du bénéficiaire ou pour le patrimoine fiduciaire. Cette règle a pour effet de rendre le bénéficiaire ou le patrimoine seul responsable envers les tiers des obligations contractées en son nom.

Le second alinéa rend par ailleurs l'administrateur responsable envers les tiers avec qui il contracte en son nom personnel. Il réserve toutefois le recours des tiers contre le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire lorsque l'administrateur a effectivement contracté pour leur bénéfice sans toutefois avoir dévoilé leurs noms.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1371 est adopté. J'appelle l'article 1372.

Mme Harel: "L'administrateur qui excède ses pouvoirs est responsable envers les tiers avec qui il contracte, à moins qu'il ne leur en ait donné une connaissance suffisante ou que le bénéficiaire n'ait ratifié, expressément ou tacitement, les obligations contractées."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit le principe de la responsabilité de l'administrateur envers les tiers avec qui il contracte en excès de ses pouvoirs. II prévoit toutefois deux exceptions à ce principe: l'administrateur sera d'abord exempté de toute responsabilité envers les tiers lorsque ceux-ci connaissaient l'étendue des pouvoirs limités de l'administrateur et ont, malgré cette connaissance que leur avait donnée l'administrateur, accepté de contracter avec lui. Dans ce cas, ni l'administrateur, ni le bénéficiaire ou le patrimoine ne seront responsables envers les tiers.

L'administrateur sera encore exempté de responsabilité lorsque les obligations ainsi contractées auront été ratifiées par le bénéficiaire. Cette ratification rend le bénéficiaire seul responsable envers les tiers comme si l'administrateur avait agi dans les limites des pouvoirs qui lui avaient été

conférés. Cet article s'inspire du droit actuel en matière de mandat exprimé aux articles 1717 et 1727 du Code civil du Bas-Canada. La similarité des règles juridiques dans les rapports entre les administrateurs, bénéficiaires et tiers et les mandataires, mandants et tiers s'explique par la similarité des situations factuelles.

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. 1373.

Mme Harel: "L'administrateur qui exerce seul des pouvoirs qu'il est chargé d'exercer avec un autre est réputé avoir excédé ses pouvoirs. "N'est pas réputé les avoir excédés celui qui les exerce d'une manière plus avantageuse que celle qui lui était imposée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article qui est tiré d'une règle actuelle énoncée à l'article 1719 du Code civil du Bas-Canada en matière de mandat illustre la notion d'excès de pouvoirs au moyen d'un exemple évident, celui où l'administrateur exerce seul des pouvoirs qu'il est chargé d'exercer avec un autre. Le second alinéa, également tiré d'une règle du mandat exprimée à l'article 1718 du Code civil du Bas-Canada, énonce que l'administrateur est réputé ne pas avoir agi en excès de ses pouvoirs s'il les exerce de manière plus avantageuse que celle qui lui était imposée.

On a jugé qu'il serait inacceptable que le bénéficiaire soit dégagé de toute responsabilité pour des actes qui se sont avérés lui être manifestement avantageux.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. 1374?

Mme Harel: "Le bénéficiaire ne répond envers les tiers du préjudice causé par la faute de l'administrateur dans l'exercice de ses fonctions qu'à concurrence des avantages qu'il en a retirés. En cas de fiducie, ces obligations retombent sur le patrimoine fiduciaire."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article précise l'étendue de la responsabilité du bénéficiaire. Celui-ci ne répond envers les tiers du préjudice causé par la faute de l'administrateur dans l'exercice de ses fonctions qu'à concurrence des avantages qu'il en a retirés. En cas de fiducie, ces obligations retombent sur le patrimoine fiduciaire.

L'article proposé édicte une règle différente de celle qui prévaut en matière de mandat et qui est exprimée à l'article 1731 du Code civil du Bas-Canada. Si une telle règle était retenue, le bénéficiaire répondrait envers les tiers du préjudice causé par la faute de l'administrateur dans l'exercice de ses fonctions. Cependant, une telle règle ne tiendrait pas compte du fait que, contrairement au mandat, le bénéficiaire ne peut pas toujours contrôler l'administration et ne peut pas toujours décider de mettre fin à une administration fautive.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: "Jusqu'à concurrence des avantages qu'il en a retirés". Qu'il a retirés de quoi? Ou préjudice qu'il a causé?

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: Les avantages qu'il a retirés de cette partie de l'administration qui est considérée comme fautive.

M. Pineau: Des actes qu'il a passés? Mme Longtin: Oui.

Mme Harel: Vous proposez une formulation qui clarifie?

M. Pineau: Oui. Il ne peut pas avoir retiré des avantages du préjudice. Ce sont des avantages des actes juridiques qu'il a passés.

M. Marx: Qu'on le suspende.

Le Président (M. Gagnon): On suspend l'article 1374?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): On s'est bien entendu? Oui? Vous avez un amendement à l'article 1375?

Mme Harel: Qui consiste à insérer, à la première ligne, avant le mot "capable", le mot "pleinement".

L'article se lit comme suit: "Celui qui, pleinement capable de l'exercice des droits civils, a donné à croire qu'une personne était administrateur de ses biens est responsable, comme s'il y avait eu administration, envers les tiers qui ont contracté de bonne foi avec cette personne."

L'amendement proposé marque le caractère juridique de la capacité requise.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à rendre responsable la personne qui a donné des motifs raisonnables de croire qu'une autre était administrateur de ses biens, comme s'il y avait eu administration, envers les tiers qui ont contracté de bonne foi avec cette autre personne.

Conforme aux propositions de l'Office de révision du Code civil, ainsi qu'à celles de l'article 1730 du code actuel en matière de mandat, la règle instaurée a pour effet de rendre celui qui a laissé croire qu'une personne administrait ses biens tout aussi responsable que cette dernière envers des tiers de bonne foi.

Afin de protéger une personne incapable, l'article précise cependant que cette responsabilité ne vaut que si la personne était capable de l'exercice des droits civils.

M. Pineau: "Donné à croire", est-ce correct? Celui qui, capable de l'exercice de ses droits civils, a fait croire ou a donné des motifs raisonnables de croire... "À donné à croire"...

Mme Harel: On va introduire cette clarification: a donné des motifs raisonnables de croire qu'une personne était administrateur.

Le Président (M. Gagnon): On va l'inclure dans l'amendement.

M. Cossette: On va vérifier...

Mme Harel: On va faire la vérification pour voir si cette expression ne serait pas consacrée dans le Petit Robert ou dans le Grand Robert, dans le dictionnaire.

M. Marx: On va le suspendre.

Le Président (M. Gagnon): On le suspend? On retire l'amendement que nous avions en main. Je présume qu'il sera corrigé ou qu'on ramènera le même amendement.

M. Cossette: Pour faire les deux sur le même.

Le Président (M. Gagnon): Voilà! Article 1376?

De l'inventaire, des sûretés et des assurances

Mme Harel: "L'administrateur n'est pas tenu de faire inventaire, de souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou de fournir une autre sûreté à moins d'y être obligé par la loi ou l'acte ou encore par le tribunal, à la demande du bénéficiaire ou de tout intéressé. "Dans le cas où c'est l'acte qui lui crée ces obligations, il peut, si les circonstances le justifient, demander d'en être dispensé."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Commentaire. Me Cossette.

M. Cossette: Cet article énonce le principe que l'administrateur n'est pas tenu de faire l'inventaire des biens, de souscrire une assurance couvrant sa responsabilité ou de fournir une autre sûreté, à moins d'y être obligé par la loi ou l'acte ou encore par le tribunal, à la demande du bénéficiaire ou d'un intéressé. Il permet aussi à l'administrateur qui est tenu à ces obligations en vertu de l'acte constitutif d'en être dispensé par le tribunal si les circonstances le justifient.

Nouveau, l'article proposé s'inspire des recommandations de l'Office de révision du Code civil. Il a pour but d'assouplir le régime d'administration quant à ces mesures en permettant au bénéficiaire, par exemple, de les faire imposer en tout temps, lorsqu'elles s'avèrent nécessaires à la protection de ses intérêts, ou à l'administrateur d'en être dispensé si elles lui avaient été imposées inutilement par l'acte constitutif.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1377?

Mme Harel: "Le tribunal saisi d'une demande tient compte dans sa décision de la valeur des biens administrés, de la situation des parties et des autres circonstances. "Il ne peut faire droit à la demande si cela a pour effet de remettre en cause les termes d'une convention à laquelle l'administrateur et le bénéficiaire étaient initialement parties."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent. Il indique d'abord les éléments que doit prendre en considération le tribunal pour imposer ou dispenser de ces mesures, telles la valeur des biens administrés, la situation des parties et les autres circonstances pertinentes.

Il énonce ensuite que le tribunal ne peut toutefois imposer ces mesures ou en dispenser l'administrateur lorsque, ce faisant, le jugement aurait pour effet de réviser une convention à laquelle l'administrateur et le bénéficiaire étaient initialement parties.

L'article proposé réserve donc le jeu normal des règles du consensualisme en ne permettant pas aux parties d'obtenir la révision judiciaire d'une convention valide. La révision judiciaire sera possible dans les autres cas comme dans les actes unilatéraux,

tel le testament.

Le Président (M. Gagnon): Cela va. L'article 1377 est adopté. J'appelle l'article 1378.

Mme Harel: "L'inventaire auquel peut être tenu l'administrateur doit comprendre l'énumération fidèle et exacte de tous les biens qu'il est chargé d'administrer ou qui forment le patrimoine administré. "Il comprend notamment: "1 La désignation des immeubles et la description des meubles, avec indication de leur juste valeur; "2° La désignation des espèces en numéraire et des autres valeurs; "3° L'énumération des documents de valeur. "L'inventaire fait aussi état des dettes et se termine par une récapitulation de l'actif et du passif."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Les articles 1378 et 1383 traitent de l'inventaire. Ces dispositions sont d'application générale. Elles s'appliquent à l'administrateur du bien d'autrui chargé de faire inventaire ainsi qu'à toute autre personne chargée par la loi de faire inventaire lorsque la loi le prévoit. C'est le cas, par exemple, de l'usufruitier par application de l'article 1196 du projet.

L'article 1378 indique le contenu de l'inventaire. Celui-ci comprendra une énumération fidèle et exacte de tous les biens administrés ou de ceux qui forment le patrimoine administré. Cet article s'inspire de l'article 120 du livre IV du projet de l'office. Avec les articles 1379 et 1380, il reprend en substance les articles 913 et 917 du Code de procédure civile, mais il simplifie la procédure.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Lorsqu'on parle, à l'aliéna 1, de l'indication de la juste valeur, est-ce qu'on parle d'une valeur déterminée ou établie par celui qui dresse ou fait l'inventaire, ou bien si on se réfère à une expertise? Je sais qu'on a déjà soulevé cette question. Il y aurait sûrement lieu qu'on soit fixé sur cette juste valeur indiquée.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

Mme Longtin: En fait, l'objectif poursuivi ici n'était pas nécessairement d'avoir une évaluation exacte d'un expert, puisque cela serait évidemment extrêmement onéreux s'il fallait faire évaluer tous et chacun des biens, mais de donner la valeur la plus exacte possible qu'on peut retirer d'un examen...

M. Leduc (Saint-Laurent): Suivant le jugement...

Mme Longtin: De celui qui fait l'inventaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est exactement ce que cela veut dire. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Adopté?

Mme Longtin: C'est ce qui veut être dit.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1378 est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 1379. Il y a un amendement.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer l'article 1379 par le suivant: "L'inventaire est dressé par un notaire en forme notariée portant minute. !1 peut aussi être dressé sous seing privé en présence de deux témoins. Dans ce cas, son auteur et les témoins le signent et y indiquent la date et le lieu où il est fait."

L'amendement proposé a pour but de préciser que l'inventaire est dressé par le notaire lui-même et, par conséquent, qu'il ne s'agit pas d'une simple déclaration faite devant notaire par l'auteur de l'inventaire.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur l'article.

M. Cossette: Oui, le commentaire sur l'amendement vaut pour l'article.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): La Chambre des notaires a proposé à l'article 1379 un deuxième alinéa dans lequel il serait dit: Lorsque parmi les bénéficiaires se trouvent des mineurs ou des personnes protégées, l'inventaire doit être en forme notariée portant minute. Je serais tenté de dire que ce serait une mesure sage s'il y a des mineurs ou des personnes protégées, de façon à être bien certain de retrouver cet inventaire. La meilleure façon de le retrouver, c'est que cela soit fait devant notaire; autrement dit, qu'on soit assuré de la conservation de l'inventaire. Évidemment, on pourrait en avoir besoin plusieurs années après la confection. (12 h 15)

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Me permettez-vous de

retrouver quelque chose? Je pense que la protection que vous recherchez, nous la retrouvons en particulier à l'article 688 du projet. En fait, le mineur ou le majeur protégé ne peut jamais être tenu au paiement des dettes de la succession au-delà de la valeur des biens qu'il recueille.

M. Leduc (Saint-Laurent): Qu'est-ce que cela change? Est-ce qu'il ne serait pas sage de bien s'assurer que cet inventaire pourra être retrouvé facilement, qu'on soit assuré de sa conservation? Dans le cas où on a affaire à des mineurs ou à des personnes protégées, l'article 688 dit: "Le mineur ou le majeur protégé ne peut jamais être tenu au paiement des dettes de la succession au-delà de la valeur des biens qu'il recueille."

M. Cossette: Mais, si vous recherchez l'inventaire notarié pour la protection du mineur, je dis que ce n'est pas la forme qui va faire que le mineur sera plus ou moins responsable, c'est le deuxième alinéa de l'article 688 qui fait que le mineur n'est jamais tenu au-delà de ce qu'il recueille.

Mme Harel: M. le Président, Me Longtin...

Le Président (M. Gagnon): Oui, Me Longtin.

Mme Longtin: Je voulais indiquer ceci, c'est l'aspect pour le droit des successions. Si on va maintenant au droit des personnes, le tuteur à un majeur protégé ou à un mineur, au-delà de 7000 $, avec la proposition de la Chambre des notaires, devrait être tenu de faire dresser un inventaire notarié dans tous les cas. Évidemment, ici, il y a les questions de coût. Il y a aussi quand même une certaine protection qui est assurée par la surveillance soit des conseils de tutelle, soit du Curateur public. Je dois dire qu'actuellement, pour les personnes qui sont sous curatelle publique, l'inventaire est fait sous seing privé et c'est dans les règlements adoptés sous cette loi-là qu'on a tiré un peu la règle de l'article 1379.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je suis bien d'accord avec ce que vous dites. Si c'est le Curateur public, cela va bien, mais dans les autres cas je pense que la protection des mineurs et des personnes protégées est bien mieux assurée par un inventaire fait devant notaire; on s'assure surtout de la conservation de cet inventaire. Est-ce qu'il sera possible de retrouver facilement cet inventaire-là? C'est la question que je pose.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette. M. Cossette: Celui qui aura l'obligation de faire l'inventaire, c'est généralement un administrateur du bien d'autrui qui a des obligations, qui doit se conduire comme un homme prudent, comme un homme loyal, comme un homme compétent. Si, dans son esprit, il vaut la peine ou cela s'impose de faire un inventaire notarié, il le fera. Maintenant, on ne l'obligera pas, même dans le cas où il y a des mineurs, à recourir à cette forme-là parce que, dans certains cas, cela va imposer des coûts trop importants par rapport à la valeur des biens à inventorier, par exemple. C'est une question qu'on laisse à la discrétion de l'administrateur du bien d'autrui, du liquidateur de la succession, du tuteur ou du curateur, suivant les circonstances.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'amendement à l'article 1379 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1380?

Mme Harel: "1380. Lorsqu'il se trouve dans le patrimoine administré des effets personnels du titulaire du patrimoine ou, le cas échéant, du défunt, il suffit de les mentionner généralement à l'inventaire et de n'énumérer ou ne décrire que les vêtements, papiers personnels, bijoux ou objets d'usage courant dont la valeur excède pour chacun 100 $."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article, inspiré de l'article 120 du livre III du projet de l'Office de révision du Code civil, précise que, lorsqu'il se trouve dans le patrimoine administré des effets personnels du titulaire du patrimoine ou, le cas échéant, du défunt, il suffit de les mentionner généralement à l'inventaire et de n'énumérer ou d'écrire que les vêtements, papiers personnels, bijoux ou objets d'usage courant dont la valeur excède pour chacun 100 $.

Cette disposition vise à faciliter la confection de l'inventaire et à ne pas rendre le recours à l'inventaire trop onéreux.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1381?

Mme Harel: "Les universalités, tels les entreprises ou les fonds de commerce ainsi que leurs accessoires, sont valablement décrits à l'inventaire si la mention qu'on en fait est suffisante pour une vente en bloc, pourvu toutefois que chacun des immeubles soit désigné individuellement."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Complémentaire au

précédent, cet article précise que les universalités, tels les entreprises ou les fonds de commerce ainsi que leurs accessoires, sont valablement décrits à l'inventaire si la mention qu'on en fait est suffisante pour une vente en bloc, pourvu toutefois que chacun des immeubles soit indiqué individuellement. Cet article s'inspire de la proposition de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article 1182?

Mme Harel: L'amendement ' consiste à remplacer, à la fin, les mots "du contraire" par les mots "le contraire", et l'article se lit comme suit: "Les biens désignés à l'inventaire sont présumés en bon état à la date de la confection de l'inventaire, à moins que l'administrateur n'y joigne un document attestant le contraire."

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté.

M. Cossette: Le commentaire.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article de droit nouveau édicte une présomption, à savoir que les biens désignés à l'inventaire sont présumés être en bon état à la date de la confection de l'inventaire, sauf si l'administrateur y joint un document attestant le contraire.

Le Président (M. Gagnon): Adopté tel qu'amendé. Article 1383?

Mme Harel: "L'administrateur doit fournir copie de l'inventaire à celui qui l'a chargé de l'administration et au bénéficiaire de celle-ci, ainsi qu'à toute personne dont l'intérêt lui est connu. Il doit aussi, lorsque la loi le prévoit, déposer au lieu indiqué l'inventaire ou un avis de clôture de celui-ci précisant le lieu où l'inventaire peut être consulté. "Tout intéressé peut contester l'inventaire ou l'une de ses inscriptions; il peut aussi demander qu'il soit procédé à un nouvel inventaire."

Le Président (M- Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article oblige l'administrateur à fournir une copie de l'inventaire à la personne qui l'a chargé de l'administration et au bénéficiaire de celle-ci, ainsi qu'à toute personne dont l'intérêt lui est connu. Il devra aussi, lorsque la loi le prévoit, comme c'est le cas en matière de succession, déposer au lieu indiqué l'inventaire ou un avis de clôture de celui-ci précisant le lieu où l'inventaire peut être consulté.

Tout intéressé pourra contester l'inventaire ou l'une de ses inscriptions et même demander qu'il soit procédé à un nouvel inventaire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1383 est adopté. Article 1384?

Mme Harel: "L'administrateur peut, aux frais du bénéficiaire ou de la fiducie, assurer les biens qui lui sont confiés contre les risques usuels, tels le vol et l'incendie. "Il peut aussi, à leurs frais, souscrire une assurance couvrant sa responsabilité."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Le premier alinéa de cet article permet à l'administrateur d'assurer les biens confiés contre les risques usuels, tels l'incendie ou le vol, aux frais du bénéficiaire ou de la fiducie. Il n'a pas pour but d'imposer à l'administrateur l'obligation de faire assurer les biens, contrairement à la proposition de l'office. Il a paru préférable, en effet, de laisser à l'administrateur le soin de juger dans chaque cas de l'opportunité de faire assurer les biens, conformément à son obligation d'agir avec prudence, diligence et compétence dans le meilleur intérêt du bénéficiaire ou de la fin poursuivie.

Les biens peuvent avoir été déjà assurés par le bénéficiaire. Ils peuvent encore ne pas être assurables ou ne l'être qu'à un coût exorbitant par rapport aux risques encourus. Il reviendra à l'administrateur d'apprécier, suivant les circonstances propres à chaque cas. Le second alinéa permet à l'administrateur de souscrire une assurance couvrant sa propre responsabilité aux frais du bénéficiaire de la fiducie. Cette règle, qui s'inspire des propositions de l'office, vise à alléger le fardeau de la responsabilité de l'administrateur, notamment de celui qui agit gratuitement.

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau?

M. Pineau: L'administrateur peut, aux frais du bénéficiaire ou de la fiducie, souscrire une assurance couvrant sa propre responsabilité. Or, cet administrateur, en principe, est rémunéré. Qu'il assure lui-même sa propre responsabilité, s'il veut être assuré. Pourquoi mettre cela à la charge du bénéficiaire ou de la fiducie?

M- Leduc (Saint-Laurent): Pour protéger le bénéficiaire. S'il est insolvable...

Mme Harel: II faudrait faire la distinction lorsque l'administrateur est ou n'est pas rémunéré.

M. Pineau: Oui, mais "il peut".

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, "il peut". Je serais tenté de dire "il doit". S'il peut seulement, pourquoi prendrait-il une assurance-responsabilité? Autrement dit, il aurait peur d'être voleur.

M. Pineau: Aux frais de l'autre, il peut toujours s'assurer.

M. Leduc (Saint-Laurent): S'il s'agit de protéger le bénéficiaire, je suis bien d'accord.

Mme Harel: À ce moment, il s'agirait de biffer: "à leurs frais", de façon qu'on y lise: II peut aussi souscrire une assurance couvrant sa responsabilité.

M. Marx: S'il n'est pas rémunéré, je pense que ce serait injuste de ne pas lui permettre de souscrire une assurance aux frais de l'administration.

M. Cossette: Cela mérite réflexion, je pense.

M. Marx: Suspendu. M. Cossette: Suspendu?

M. Leduc (Saint-Laurent): On ne faisait pas état de cette question.

M. Pineau: L'administrateur est tenu d'assurer, aux frais du bénéficiaire...

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui, mais seulement pour l'incendie et le vol, les risques ordinaires.

M. Pineau: Oui, le premier alinéa, c'est juste.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1384 est suspendu. L'article 1385?

De l'administration collective et de la délégation

Mme Harel: "Lorsque plusieurs administrateurs sont chargés de l'administration, Ils peuvent agir à la majorité d'entre eux, à moins que l'acte ou la loi ne prévoie qu'ils agissent de concert ou suivant une autre proportion."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit la règle de la majorité lorsque plusieurs personnes sont conjointement chargées de l'administration du bien d'autrui. Il a pour but de faciliter la prise de décision en cas d'administration collective. Il écarte, toutefois, l'application de la règle de la majorité lorsque l'acte ou la loi exige que les administrateurs agissent de concert ou suivant une autre proportion.

L'article proposé s'inspire des propositions de l'office. Il reprend la solution du droit actuel en matière de fiducie exprimée à l'article 981f du Code civil du Bas-Canada, mais modifie celle énoncée en matière d'exécution testamentaire.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1385 est adopté. Article 1386?

Mme Harel: "Si, en cas d'empêchement ou par suite de l'opposition systématique de certains d'entre eux, les administrateurs ne peuvent agir à la majorité ou selon la proportion prévue, les autres peuvent agir seuls pour les actes conservatoires; ils peuvent aussi agir seuls pour des actes qui demandent célérité, s'ils y sont autorisés par le tribunal. "Lorsque la situation perdure et que l'administration s'en trouve sérieusement entravée, le tribunal peut, à la demande d'un intéressé, dispenser les administrateurs d'agir suivant la proportion prévue, diviser leurs fonctions, donner voix prépondérante à l'un d'eux ou rendre toute ordonnance qu'il estime appropriée dans les circonstances."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à éviter que l'administration ne soit paralysée indûment lorsque ta proportion d'administrateurs requise pour la prise de décision ne peut être atteinte, soit en raison de l'absence ou autre cause d'empêchement de certains d'entre eux, soit en raison de leur obstruction systématique. Le premier alinéa permet alors aux autres administrateurs d'agir seuls pour les actes conservatoires demandant célérité ou non. Il leur permet aussi d'agir seuls pour des actes autres que simplement conservatoires qui demandent célérité, comme l'acceptation d'une offre de contracter limitée dans le temps, s'ils y sont autorisés par le tribunal.

Alors que le premier alinéa propose une solution à une situation essentiellement temporaire, le second alinéa est destiné à s'appliquer lorsque cette situation perdure et que l'administration s'en trouve sérieusement entravée. On permet alors à tout intéressé de s'adresser au tribunal pour mettre fin à l'impasse. Le tribunal peut, à cette fin, dispenser les administrateurs d'agir suivant la proportion prévue, diviser leurs fonctions,

accorder une voix prépondérante à l'un d'eux ou rendre toute ordonnance qu'il estime appropriée suivant les circonstances. Ces larges pouvoirs permettraient même au tribunal d'exclure un administrateur.

L'article proposé est de droit nouveau et s'inspire des articles 568 et 569 du projet de l'office.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je trouve que cela va passablement loin. Un testateur pourrait nommer des liquidateurs et le tribunal pourrait enlever l'obligation d'agir à la majorité ou à l'unanimité.

Le Président (M. Gagnon): II est midi trente minutes. Nous allons dîner en réfléchissant à ce problème et nous reprendrons a 14 heures. La sous-commission suspend ses travaux.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise è 15 heures)

Le Président (M. Gagnon): Nous en étions à l'article 13B6. Si je me souviens bien, la discussion était engagée, l'article a été lu. Le député de Saint-Laurent n'y est pas.

M. Marx: II revient dans cinq minutes.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'article 1386 est adopté? Je sais que le député de Saint-Laurent avait des questions. Voulez-vous qu'on le suspende jusqu'à ce qu'il revienne?

M. Cossette: On en était à 1386.

Le Président (M. Gagnon): Le député de Saint-Laurent avait des questions sur cet article. Nous allons le suspendre pour le reprendre tantôt, aussitôt qu'il arrivera. Article 1387?

Mme Harel: "Les administrateurs sont solidairement responsables de leur administration. "Toutefois, lorsque leurs fonctions ont été divisées par la loi, l'acte ou le tribunal et que cette division a été respectée, chacun n'est responsable que de sa propre administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article établit le régime de responsabilité applicable en cas d'administration collective.

Le premier alinéa énonce le principe de la responsabilité solidaire des administrateurs. Le second alinéa prévoit une exception évidente à ce principe lorsque les fonctions des administrateurs ont été divisées par la loi, par l'acte ou par le tribunal et que cette division a été respectée dans les faits. Il précise que chacun des administrateurs n'est alors responsable que de sa propre administration, que des actes posés dans l'exercice de ses fonctions distinctes.

L'article proposé s'inspire des propositions de l'office à l'article 566 et est conforme au droit actuel en matière de fiducie et de mandat tel qu'exprimé aux articles 981m et 1712 du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1387 est adopté. Nous reprenons l'article 1386. M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pardon?

Le Président (M. Gagnon): Lorsque nous avons suspendu nos travaux, nous étions à la discussion de l'article 1386. On était supposé y réfléchir à l'heure du dîner.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous avez sans doute réfléchi.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous avez des questions à l'article 1386?

M. Leduc (Saint-Laurent): J'évoquais la possibilité pour le tribunal de modifier les règles établies dans le testament qui pouvaient requérir une majorité ou l'unanimité des liquidateurs.

M. Cossette: Au moment où nos travaux ont cessé, j'en étais à attirer l'attention de mon confrère sur le deuxième alinéa en particulier qui exige que le tribunal n'intervienne que lorsqu'une situation perdure et qu'une administration s'en trouve évidemment sérieusement entravée, ce que le tribunal appréciera avant d'appliquer le deuxième alinéa. Autrement dit, on est dans un "dead-lock", il n'y a pas moyen d'en sortir et le tribunal intervient pour qu'on en arrive à une solution.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cette règle n'existait pas auparavant. Est-ce que cela créait beaucoup de problèmes? Est-ce qu'il y a eu beaucoup de litiges?

M. Cossette: Oui, parce que, autrefois, il n'y avait pas de moyen d'en sortir. Aujourd'hui, il y en a un. Je pense que cela va permettre de régler beaucoup de cas.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1386 est adopté. Article 1388?

Mme Harel: "L'administrateur est présumé avoir approuvé toute décision prise par ses coadministrateurs. Il en est responsable avec eux, à moins qu'il ne manifeste immédiatement sa dissidence à ses coadministrateurs et en avise le bénéficiaire dans un délai raisonnable. "L'administrateur qui justifie de motifs sérieux pour n'avoir pu faire connaître au bénéficiaire sa dissidence en temps utile peut néanmoins s'exonérer de sa responsabilité."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau et s'inspire des propositions de l'office ainsi que du droit sur les personnes morales actuel tel qu'énoncé par l'article 123.85 de la Loi sur les compagnies. Il introduit, en matière d'administration collective, un droit de dissidence permettant à un administrateur de s'exonérer de la responsabilité normalement solidaire pouvant lui incomber en raison d'une décision de ses pairs.

Le premier alinéa édicte tout d'abord que l'administrateur est réputé avoir approuvé toute décision prise par ses coadministrateurs en sa présence et en être responsable avec eux conformément à la règle de la collégialité.

Il permet toutefois ensuite à un administrateur dissident d'écarter l'application de cette règle pourvu qu'il manifeste sur-le-champ sa dissidence à ses coadministrateurs et en avise le bénéficiaire dans un délai raisonnable. Ce n'est qu'à ces conditions que l'administrateur pourra s'exonérer de la responsabilité découlant de la décision de ses coadministrateurs.

Le deuxième alinéa apporte un tempérament aux conditions exigées en permettant à l'administrateur qui n'a pas fait connaître sa dissidence en temps utile d'être néanmoins exonéré de sa responsabilité s'il justifie de motifs sérieux de n'avoir pu le faire, par exemple, si on lui avait caché des faits dont la connaissance aurait modifié sa décision ou s'il était physiquement dans l'incapacité de le faire.

L'article proposé vise à empêcher la majorité décisionnelle d'imposer indûment ses vues et la responsabilité qui en découle à un administrateur qui manifeste clairement sa dissidence réelle. Le mécanisme prévu permet, d'ailleurs, d'aviser le bénéficiaire par là même d'une divergence importante quant à l'opportunité de la décision.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce la fin du commentaire?

M. Cossette: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle 1389.

Mme Harel: "L'administrateur est présumé avoir approuvé une décision prise en son absence, è moins qu'il ne manifeste sa dissidence aux autres administrateurs et au bénéficiaire dans un délai raisonnable après en avoir pris connaissance."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en édictant que l'administrateur est présumé avoir approuvé une décision prise en son absence, à moins qu'il ne manifeste sa dissidence aux autres administrateurs et au bénéficiaire dans un délai raisonnable après en avoir pris connaissance.

Le Président (M. Gagnon): Cela va, adopté. J'appelle l'article 1390.

Mme Harel: "L'administrateur peut déléguer ses fonctions ou se faire représenter par un tiers pour un acte déterminé; toutefois, il ne peut déléguer généralement la conduite de l'administration ou l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire, sauf à ses coadministrateurs. "Il répond de la personne qu'il mandate, entre autres s'il connaissait ou devait connaître son incompétence ou s'il n'était pas autorisé à confier un mandat."

L'amendement - vous l'aurez compris -consiste à insérer, à la première ligne du deuxième alinéa, après les mots "qu'il mandate", les mots ", entre autres".

Cet amendement a pour but d'indiquer que les cas où l'administrateur répond de la personne qu'il mandate ne sont pas exhaustifs.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement est adopté? Le commentaire.

M. Cossette: Cet article établit les règles relatives à la possibilité pour l'administrateur de déléguer ses fonctions ou de se faire représenter ainsi qu'à la responsabilité en découlant.

Le premier alinéa permet ainsi à l'administrateur de déléguer ses fonctions ou de se faire représenter par un tiers pour tout acte déterminé. Il lui permet aussi de déléguer généralement la conduite de l'administration ou l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire mais en faveur de ses seuls coadministrateurs. Le pouvoir de déléguer ses fonctions à un tiers ou de se faire représenter par lui pour un acte déterminé est non seulement utile mais bien souvent nécessaire à une bonne gestion. Il n'affecte aucunement la fonction de l'administrateur qui conserve alors la conduite de l'administration et la direction des opérations. Tout autre est le pouvoir de

l'administrateur de déléguer généralement la conduite de l'administration ou l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire et lui permettre de le faire en faveur d'un tiers serait lui accorder la possibilité de se dérober à la première de ses obligations qui est celle d'administrer. La seule exception permise l'est en faveur de ses coadministrateurs.

Le deuxième alinéa établit le régime de responsabilités applicables en cas de délégation ou de représentation.

L'administrateur peut être autorisé à confier ses mandats ou ne pas l'être. S'il y était autorisé, même généralement, l'administrateur ne sera responsable des actes de la personne mandatée que s'il en connaissait ou devait en connaître l'incompétence. S'il n'y était pas autorisé, l'administrateur sera en tout temps responsable des actes de la personne mandatée. L'article proposé qui s'inspire des propositions de l'Office est conforme au droit actuel en matière de mandat exprimé à l'article 17111 du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté. Me Pineau.

M. Pineau: Le deuxième alinéa: "II répond de la personne qu'il mandate s'il connaissait ou devait connaître son incompétence." Ce n'est pas son incompétence, c'est l'incompétence de la personne qu'il mandate. Il répond de la personne qu'il mandate s'il en connaissait ou devait en connaître l'incompétence, je suppose.

Le Président (M. Gagnon): II y aura amendement, une correction. Est-ce que ce serait possible de le faire pour ne pas avoir deux amendements sur le même...

M. Cossette: Sur le même document?

Le Président (M. Gagnon): ...sur le même document.

M. Cossette: On va le faire là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): Oui. Alors, l'amendement à l'article 1390 est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1391?

Mme Harel: "1391. Le bénéficiaire qui subit un préjudice peut répudier l'administration de la personne mandatée par l'administrateur en violation de l'acte ou des usages. "Il peut aussi, même si l'administrateur pouvait valablement confier le mandat, exercer ses recours contre la personne mandatée."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent. Il permet au bénéficiaire de répudier, dans certains cas, les actes qui lut sont préjudiciables posés par la personne mandatée par l'administrateur et d'exercer en tout temps ses recours directement contre cette personne.

L'article est conforme aux propositions de l'office ainsi qu'aux règles de l'article 1711 du code actuel en matière de mandat.

Le Président (M. Gagnon): Ça va? Me

Pineau.

M. Pineau: "Le bénéficiaire peut répudier l'administration..." Ce n'est pas tant l'administration qu'il peut répudier que les actes juridiques, comme le dit d'ailleurs le commentaire. Les actes juridiques passés en violation, les actes posés par la personne mandatée par l'administrateur en violation... Là, il y a un arrangement à faire parce qu'on ne répudie pas l'administration.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que la correction sera faite?

M. Leduc (Saint-Laurent): L'ORCC parlait de répudier les actes.

Mme Harel: Les actes?

M. Cossette: Oui, d'y substituer...

M. Pineau: Là encore, s'il en a subi le préjudice...

M. Leduc (Saint-Laurent): Non, mais en tout cas, il peut répudier les actes.

M. Cossette: On peut suspendre celui-là et on le reprendra.

Le Président (M. Gagnon): On suspend l'article 1391. Article 1392?

De3 placements présumés sûrs

Mme Harel: Je vais lire les amendements au fur et à mesure que je ferai lecture des alinéas qui les concernent. "1392. Sont présumés sûrs les placements faits dans les biens suivants: "1° Les immeubles corporels situés au Québec; "2 Les obligations ou autres titres d'emprunt émis ou garantis par le Québec, le Canada ou une province canadienne, les États-Unis d'Amérique ou l'un des États membres, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, une municipalité ou une commission scolaire au Canada ou une fabrique au Québec; "3° Les obligations ou autres titres

d'emprunt émis par une personne morale exploitant un service public au Canada et investie du droit de fixer un tarif pour ce service; "4° Les obligations ou autres titres d'emprunt garantis par l'engagement, pris envers un fiduciaire, du Québec, du Canada ou d'une province canadienne, de verser des subventions suffisantes pour acquitter les intérêts et le capital à leurs échéances respectives; "5° Les obligations ou autres titres d'emprunt d'une société dans les cas suivants..." L'amendement consiste au cinquièmement, paragraphe a, à insérer les mots "par un privilège ou" après le mot "garantis". Le cinquièmement, paragraphe a se lit comme suit: "a) Ils sont garantis par un privilège ou une hypothèque de premier rang sur un immeuble corporel ou par le nantissement de titres présumés sûrs;"

À cinquièmement, paragraphe b, l'amendement consiste à remplacer les mots "le service de ses autres emprunts" par les mots "le service des intérêts sur ses emprunts". Le cinquièmement, paragraphe b se lit comme suit: "b) Ils sont garantis par un nantissement de premier rang sur des équipements et la société a régulièrement assuré le service des intérêts sur ses emprunts au cours des dix derniers exercices;" (15 h 15)

L'amendement consiste au cinquièmement, paragraphe c, à insérer les mots "ou privilégiées" après les mots "actions ordinaires". Le paragraphe c de cinquièmement se lit comme suit: "Ils sont émis par une société dont les actions ordinaires ou privilégiées constituent des placements présumés sûrs;" "6° Les obligations ou autres titres d'emprunt émis par une société de prêts constituée par une loi du Québec ou autorisée à exercer son activité au Québec en vertu de la Loi sur les sociétés de prêts et de placements (L.R.Q., chapitre S-30), à condition que cette société ait été spécialement agréée par le gouvernement et que son activité habituelle au Québec consiste à faire soit des prêts aux municipalités ou aux commissions scolaires et aux fabriques, soit des prêts garantis par une hypothèque de premier rang sur des immeubles situés au Québec; "7 Les créances garanties par hypothèque sur des immeubles situés au Québec: "a) Si le paiement du capital et des intérêts est garanti ou assuré par le Québec, le Canada ou une province canadienne; "b) Si le montant de la créance n'est pas supérieur à 75 % de la valeur de l'immeuble qui en garantit le paiement, déduction faite des autres créances garanties par le même immeuble et ayant le même rang que la créance ou un rang antérieur;"

Au paragraphe c de septièmement, l'amendement consiste à remplacer le mot "émise" par le mot "délivrée", à la septième ligne. Le paragraphe c de septièmement se lit comme suit: "Si le montant de la créance qui excède 75 % de la valeur de l'immeuble qui en garantit le paiement, déduction faite des autres créances garanties par le même immeuble et ayant le même rang que la créance ou un rang antérieur, est garanti ou assuré par le Québec, le Canada, une province canadienne, la Société canadienne d'hypothèques et de logements, la Société d'habitation du Québec ou par une police d'assurance hypothécaire délivrée par une société titulaire d'un permis en vertu de la Loi sur les assurances;"

À huitièmement, l'amendement consiste à supprimer, dans les troisième et quatrième lignes, le membre de phrase "en le prélevant sur le bénéfice de l'exercice", et ajouter, après les mots "le dividende stipulé", les mots "sur toutes les actions privilégiées". Huitièmement se lit comme suit: "Les actions privilégiées libérées, émises par une société dont les actions ordinaires constituent des placements présumés sûrs et qui, au cours des cinq derniers exercices, a distribué le dividende stipulé sur toutes les actions privilégiées."

À neuvièmement, l'amendement consiste à supprimer, dans la première ligne du neuvièmement, le mot "libérées", et le neuvièmement se lit ainsi: "Les actions ordinaires, émises par une société qui satisfait depuis trois ans aux obligations d'information continue définies par la Loi sur les valeur mobilières, dans la mesure où elles sont inscrites à la cote d'une bourse reconnue à cette fin par décret du gouvernement, adopté sur recommandation de la Commission des valeurs mobilières, et où la capitalisation boursière, compte non tenu des actions privilégiées et des blocs d'actions de 10 % et plus, excède la somme fixée par ce décret;"

À dixièmement, l'amendement consiste a remplacer, dans la deuxième ligne les mots "de placements" par les mots "de placements ou", et le dixièmement se lit comme suit: "Les actions d'une société d'investissement à capital variable et les parts d'un fonds commun de placements ou d'une fiducie d'utilité privée, à condition que 60 % de leur portefeuille soit composé de placements présumés sûrs dans les cas suivants: "a) Les actions ou les parts remplissent les exigences prévues au sous-paragraphe a) du paragraphe Il de l'article 3 de la Loi sur les valeurs mobilières;"

Au dixièmement, paragraphe b, l'amendement consiste à remplacer les mots "ou le fonds" par les mots "le fonds ou la

fiducie", et le paragraphe b de dixièmement se lit comme suit: "La société, le fonds ou la fiducie satisfait depuis trois ans aux obligations d'information continue définies par cette loi."

Le commentaire sur les amendements. Les amendements proposés sont de concordance, à l'exception de ceux apportés au septièmement et au neuvièmement qui sont d'ordre formel. Avec les modifications apportées récemment à la Loi sur les valeurs mobilières et le règlement sur les valeurs mobilières, plus précisément, le septièmement, paragraphe a, est ajouté, parmi les sûretés admissibles, le privilège sur un immeuble.

Au cinquièmement, paragraphe b, une norme moins sévère que celle qui y est prévue, mais similaire à celle établie dans les textes correspondants, est préconisée en prévoyant que les obligations ou autres types d'emprunt d'une société sont des placements présumés sûrs dans le cas où ils sont garantis par un nantissement de premier rang sur les équipements et que la société a régulièrement assuré le service, non pas comme le texte actuel le prévoit "de ses autres emprunts au cours des dix derniers exercices", mais plutôt "des intérêts sur ses emprunts au cours des dix derniers exercices".

Au cinquièmement, paragraphe c est ajouté aux actions ordinaires les actions privilégiées. Au huitièmement, compte tenu d'abord que les conditions qui y sont prévues sont exigées cumulativement, alors que les textes correspondants ne posent ces conditions qu'alternativement et sont donc moins restrictifs, on a rétabli l'alternative en prévoyant que les actions privilégiées, émises par une société dont les actions ordinaires constituent des placements présumés sûrs ou qui, au cours des cinq derniers exercices, a distribué le dividende stipulé, sont des placements présumés sûrs.

Ensuite, comme l'article exige que le dividende distribué soit prélevé sur le bénéfice de l'exercice et que cette exigence ne se retrouve pas dans les textes correspondants parce que trop rigoureuse, il suffirait, en effet, d'une mauvaise année qui ne compromet d'aucune façon la situation de la société pour que les actions privilégiées ne soient plus acceptées comme placements présumés sûrs pour une période de cinq ans, nous avons simplement exigé que soit distribué le dividende stipulé sur toutes les actions privilégiées.

Enfin, au dixièmement, des modifications sont apportées afin de ne pas limiter indûment à la fiducie la possibilité de proposer au public les parts d'un fonds commun de placement.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire sur l'article.

M. Cossette: Cet article énumère les placements sécuritaires qui peuvent être considérés comme relevant d'une bonne administration destinée à faciliter la tâche des administrateurs. L'énumération proposée est conforme généralement aux propositions de l'office et reprend essentiellement les dispositions de l'article 980 du Code civil actuel en modernisant la terminologie. Cependant, certains correctifs ou certaines précisions ont été apportées aux règles actuelles pour tenir compte des lois récentes en matière de valeur mobilière et pour permettre d'assurer davantage la sécurité des placements et leur liquidité et aussi pour simplifier le texte tout en le rajeunissant. Ainsi, le projet de loi ne considère plus suffisant d'exiger, dans le cas d'obligations ou autres titres d'emprunt, que la personne morale soit constituée au Canada, mais exige plutôt que la société émettrice satisfasse aux obligations d'information continue définie par la Loi sur les valeurs mobilières. De cette façon, bien que l'on admette quelques sociétés non constituées au Canada, on se trouve à ne retenir des sociétés constituées au Canada que celles qui, depuis au moins trois ans, fournissent aux épargnants québécois l'information prévue par la Loi sur les valeurs mobilières et exigée pour toute décision éclairée de placement.

Le projet de loi ne se contente plus également d'exiger dans le cas des actions ordinaires qu'elles soient inscrites à la Bourse canadienne pour qu'un placement soit présumé sûr. Les Bourses étant plus ou moins strictes quant à leurs critères d'admission, il importe en conséquence de refuser certaines Bourses à la cote desquelles sont inscrits des titres comportant trop de risques. Le nouveau projet de loi reconnaît donc au gouvernement, sur la recommandation de la Commission des valeurs mobilières, le pouvoir de reconnaître les Bourses et de fixer la capitalisation boursière minimale.

Le critère de rendement proposé dans le texte actuel, dans le cas des actions ordinaires, est aussi substitué au critère de liquidité du marché parce que rien ne garantit, même si une société a réalisé un bénéfice constant au cours des cinq derniers exercices, qu'on pourra liquider dans des conditions intéressantes un paquet d'actions le moindrement important. Le nouveau projet reconnaît également les actions de sociétés d'investissements à capital variable et les parts de fonds commun de placement.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'amendement à l'article 1392 est-il adopté? L'article, tel qu'amendé, est-il adopté? Adopté. Article 1393?

Mme Harel: II s'agit de tous les amendements, évidemment. "L'administrateur décide des placements

à faire en fonction du rendement et de la plus-value espérée; dans la mesure du possible, il tend à composer un portefeuille diversifié, assurant dans une proportion établie en fonction de la conjoncture, des revenus fixes et des revenus variables. "Il ne peut cependant acquérir plus de 5 % des actions d'une même société, ni acquérir des actions, obligations ou autres titres d'emprunt d'une personne morale qui a omis de payer les dividendes prescrits sur ses actions ou les intérêts sur ses obligations ou autres titres, ni consentir un prêt à ladite personne morale.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article indique la politique que doit suivre un administrateur en matière de placements. Il reprend la règle actuelle à savoir qu'un administrateur ne peut acquérir plus de 5 % des actions d'une même société ni acquérir les actions, obligations ou autres titres d'emprunt d'une personne morale qui est en défaut de payer les dividendes prescrits sur ses actions ou les intérêts sur ses obligations ou autres titres, ni consentir un prêt à une telle personne morale. Cependant, l'exigence pour un administrateur de n'investir en actions pas plus de 30 % de la valeur globale des biens dont il a l'administration est abolie; mais, lui est imposée, par contre, l'obligation de diversifier, dans la mesure du possible, ses placements en fonction de la conjoncture.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1393 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1394.

Mme Harel: "L'administrateur peut déposer les sommes d'argent dont il est saisi dans une banque, une banque d'épargne, une société de fiducie ou une société d'entraide économique ou une caisse d'épargne et de crédit, si le dépôt est remboursable à vue ou sur un avis d'au plus trente jours. "Il peut les déposer pour un terme plus long, avec l'autorisation du tribunal et aux conditions fixées par ce dernier."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article reprend sensiblement la règle de l'article 981r du Code civil du Bas-Canada, elle-même reprise par l'article 555 du projet de l'office, en s'inspirant cependant de l'article 296a du Code civil actuel, et y est ajoutée la possibilité pour l'administrateur de pouvoir déposer les sommes d'argent dont il est saisi pour un terme plus long que trente jours, avec l'autorisation d'un tribunal et aux conditions fixées par ce dernier.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense gu'on devrait modifier l'article 1394. Evidemment, il est identique à l'article 981r, mais il faut dire qu'il crée de gros problèmes. Est-ce qu'il y a en principe un placement plus sûr qu'un certificat de dépôt à terme auprès d'une institution bancaire comme la Banque Royale, qui détient tout près de 100 000 000 000 $ d'actifs, ou les autres banques, ou avec les caisses populaires ou les fiducies? À ce moment-là, il faut chercher l'autorisation du tribunal. Je pense que ce n'est pas du tout approprié.

Les gens qui administrent souvent n'entendent pas faire des placements très sophistiqués. Ils veulent bien s'assurer d'un rendement raisonnable. Il faut dire que les certificats de dépôt donnent des rendements assez intéressants et ils ne créent pas trop de problèmes à l'administrateur. Autrement dit, il n'a pas de grand choix à faire. Or, je pense qu'on devrait lui donner le droit d'investir auprès de ces institutions sans que cela ne soit remboursable à vue ou sur un avis de trente jours. Cela veut dire que les placements dans ces institutions deviennent absolument impossibles.

Je dois vous dire que cela nous a causé beaucoup de problèmes. Cela m'en a causé beaucoup également. Les gens voulaient placer leur argent auprès de ces institutions et ils n'étaient pas en mesure de le faire. Alors, ils le plaçaient de toute façon.

Je ne comprends pas tellement pourquoi on met cette restriction à l'article 1394 pour les placements auprès de ces institutions. Ils sont peut-être dans des cas drôlement plus sûrs et plus judicieux que des placements qu'on pourrait effectuer en vertu de l'article 980, maintenant l'article 1392.

Le Président (M. Gagnon): Me Cossette.

M. Cossette: Nous allons suspendre l'article. Il y a dans cette disposition un problème de liquidité et le problème de l'administrateur qui ne doit pas laisser traîner son argent à la banque quand il lui est possible de le placer ailleurs. Mais, nous allons le réserver pour y réfléchir et ensuite y revenir.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous comprendrez que je ne parle pas de laisser l'argent dans un compte d'épargne ou dans un compte courant sans intérêts. Je parle de placements à terme, de dépôts à terme...

M. Cossette: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): ...ce qui se fait d'une façon journalière et qui est très rentable. De toute façon, dans plusieurs cas on va faire ces placements en vertu de l'article 1392. Qu'on s'enlève le droit de le faire auprès de ces institutions, je pense que c'est se créer un handicap.

Le Président (M. Gagnon): Me Longtin.

M. Cossette: Nous le suspendons pour le moment.

Mme Longtin: Je voudrais juste poser une question. Finalement, est-ce que, dans la plupart des cas, ils ne sont pas remboursables sur avis d'au plus trente jours? (15 h 30)

M. Leduc (Saint-Laurent): Auprès des fiducies c'est un terme fixe. Elles n'acceptent pas que vous encaissiez par anticipation. Les autres institutions ont toutes sortes de dépôts à terme. Il y en a qui sont à terme fixe. Vous devez respecter le terme.

M. Pineau: Les taux d'intérêt sont décroissants si on les retire avant l'échéance.

M. Cossette: II y a une pénalité indirecte.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1394 est suspendu. Article 1395?

Mme Harel: "L'administrateur peut maintenir les placements existants lors de son entrée en fonctions, même s'ils ne sont pas présumés sûrs. "Il peut aussi détenir les titres qui, par suite de la réorganisation, de la liquidation ou de la fusion d'une personne morale, remplacent ceux qu'il détenait."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article sur le maintien de placements existants énonce des règles prévues aux articles 981p et 981s du Code civil actuel et proposées également par l'office aux articles 554 et 556 du projet.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? Adopté. Article 1396?

Mme Harel: "L'administrateur qui agit conformément aux dispositions de la présente section est présumé agir prudemment. "L'administrateur qui effectue un placement qu'il n'est pas autorisé à faire est, par ce seul fait et sans autre preuve de faute, responsable des pertes qui en résultent."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce le régime de responsabilité applicable en matière de placements. Le premier alinéa établit une présomption de bonne gestion en faveur de l'administrateur qui effectue un placement ou agit conformément aux dispositions de la présente section. Il n'a pas toutefois pour effet d'exonérer l'administrateur de toute responsabilité à l'égard des actes posés en conformité de ces règles.

L'administrateur doit toujours agir avec prudence et diligence dans le meilleur intérêt du bénéficiaire ou de la fin recherchée. Il peut être démontré que, dans les circonstances de l'administration, les placements effectués n'étaient pas de ceux qu'une personne raisonnablement prudente aurait faits ou n'étaient pas dans le meilleur intérêt du bénéficiaire ou de la fin, engageant ainsi la responsabilité de l'administrateur fautif.

Le second alinéa rend, par ailleurs, l'administrateur responsable des pertes qui résultent d'un placement effectué alors qu'il n'était pas autorisé à le faire par l'acte ou la loi de ce fait et sans autre preuve de faute.

Cet alinéa vise par exemple le cas où l'acte constitutif interdit certains genres de placements, n'autorise que certains d'entre eux ou énumère expressément les placements permis. Il ne vise pas le cas où l'acte constitutif est muet sur ces points et où les dispositions relatives au placement présumé sûr s'appliquent à titre supplétif ou en vertu d'une disposition législative alors applicable. Dans ce cas la responsabilité de l'administrateur s'établit conformément au premier alinéa.

L'article proposé s'inspire des propositions de l'office et des articles 981u, 981k et 981t du Code civil actuel.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1396 est adopté. Article 1397?

Mme Harel: "Les placements effectués au cours de l'administration doivent l'être au nom de l'administrateur agissant en sa qualité."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il vise à contrer une pratique dénoncée fréquemment en droit actuel où l'administrateur effectue les placements en son nom personnel, contrairement à son obligation de ne pas confondre les biens administrés avec les siens. L'article énonce

donc, à titre de rappel, que les placements effectués doivent l'être au nom de l'administrateur agissant ès-qualité.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1397 est adopté. Article 1398?

De la répartition des bénéfices et des dépenses

Mme Harel: "La répartition des bénéfices et des dépenses entre le bénéficiaire des fruits et revenus et celui du capital se fait conformément aux dispositions de l'acte constitutif et suivant l'intention qui y est manifestée. "À défaut d'indication suffisante dans l'acte, cette répartition se fait le plus équitablement possible en tenant compte de l'objet de l'administration, des circonstances qui y ont donné lieu ainsi que des usages comptables généralement reconnus."

M. Cossette: Cet article est nouveau. Il énonce les principes généraux devant guider l'administrateur dans la répartition des bénéfices et des dépenses de l'administration entre le bénéficiaire des fruits et revenus et celui du capital.

Le premier alinéa édicte ainsi que cette répartition se fait conformément aux dispositions de l'acte constitutif suivant l'intention qui s'y trouve manifestée.

Le second alinéa établit qu'à défaut d'indication suffisante dans l'acte permettant d'effectuer cette répartition, celle-ci doit être faite le plus équitablement possible en tenant compte de l'objet de l'administration, des circonstances ayant entouré sa création ainsi que des pratiques comptables généralement acceptées.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Laurent. Non, cela va?? Adopté. J'appelle l'article 1399.

Mme Harel: "Le compte du revenu est généralement débité des dépenses suivantes et autres de même nature: "1° Les primes d'asurance, le coût des réparations mineures et les autres dépenses ordinaires de l'administration; "2° La moitié de la rémunération de l'administrateur et des dépenses raisonnables qu'il a faites dans l'administration conjointe du capital et des fruits et revenus; "3° Les impôts payables sur les biens administrés; "4° Sauf si le tribunal en ordonne autrement, les frais acquittés pour protéger les droits du bénéficiaire des fruits et revenus et la moitié des frais de la reddition de compte en justice; "5° L'amortissement des biens, sauf ceux utilisés à des fins personnelles par le bénéficiaire. "L'administrateur peut, pour régulariser le revenu, répartir les dépenses considérables sur une période de temps raisonnable."

Le Président (M. Gagnon): Cela va-t-il? Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est le premier d'une série de dispositions qui visent à fournir à l'administrateur un guide supplétif lui permettant de régler les difficultés de l'administration courante.

Le premier alinéa énumère les dépenses qui, de manière générale, sont débitées au compte du revenu, telles les primes d'assurance, le coût des réparations mineures et les autres dépenses ordinaires de l'administration mentionnées à l'alinéa.

Le second alinéa permet à l'administrateur d'échelonner les dépenses importantes sur plusieurs années afin de régulariser le revenu. L'article proposé est nouveau. S'inspirant des propositions de l'office, il reflète essentiellement des usages comptables généralement reconnus.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Me Pineau.

M. Pineau: Deuxièmement, "la moitié de la rémunération de l'administration" sur le compte du revenu... Je me suis demandé pourquoi la moitié, mais j'imagine que c'est un usage comptable reconnu; l'autre moitié va sur le compte du capital, j'imagine?

M. Cossette: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): J'appelle 1400.

Mme Harel: L'amendement consiste à supprimer au deuxième alinéa le membre de phrase suivant: "ainsi que les impôts sur les successions affectant les biens administrés, lors même que le bénéficiaire des fruits et revenus a aussi des droits dans le capital".

C'est un amendement de concordance avec la proposition d'abolir l'impôt sur les successions.

Le Président (M. Gagnon): Et l'article...

Mme Harel: L'article se lit comme suit: "Le compte du capital est généralement débité des dépenses qui ne sont pas débitées au revenu, y compris celles qui sont afférentes au placement du capital, à l'aliénation des biens, à la protection des droits du bénéficiaire du capital ou du droit de propriété des biens administrés. "Sont aussi généralement débités au compte du capital les impôts sur les gains ou les autres montants attribuables au capital, lors même que la loi qui régit ces impôts les considère comme impôts sur le revenu."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article est le pendant de l'article précédent quant aux dépenses généralement débitées au compte du capital. Comme lui, il s'inspire des propositions de l'Office et énonce des règles conformes aux usages comptables généralement reconnus.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. J'appelle 1401.

Mme Harel: "Le bénéficiaire des fruits et revenus a droit au revenu net des biens administrés à compter de la date déterminée à l'acte donnant lieu à l'administration ou, à défaut, de la date du début de l'administration ou de celle du décès.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise la portée du droit du bénéficiaire aux revenus des biens administrés de même que l'époque à laquelle il y a droit. Il indique ainsi que le bénéficiaire des fruits et revenus n'a droit qu'aux revenus nets et ce, à compter de la date prévue par l'acte constitutif de l'administration ou, à défaut, de la date du début de l'administration ou de celle du décès lorsque celle-ci résulte d'un testament. L'article proposé, qui est nouveau s'inspire des propositions de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. J'appelle l'article 1402.

Mme Harel: "Les fruits et revenus payables périodiquement sont comptés jour par jour. "Les dividendes et distributions d'une personne morale sont dus depuis la date indiquée à la déclaration de distribution ou, à défaut, depuis la date de cette déclaration."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce des règles de computation des revenus en s'inspirant des propositions de l'office et du droit actuel.

Le premier alinéa reprend la règle du droit commun exprimée notamment par l'article 451 du code actuel voulant que les fruits et revenus payables périodiquement soient comptés jour par jour.

Le second alinéa propose une règle inspirée du droit des compagnies en édictant que les dividendes et distributions d'une personne morale sont dus depuis la date indiquée à la déclaration de distribution ou, à défaut, depuis la date de sa déclaration.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1402 est adopté. Article 1403?

Mme Harel: "1403. Lorsque son droit prend fin, le bénéficiaire des fruits et revenus a droit aux fruits et revenus qui ne lui ont pas été versés et à la portion gagnée mais non encore perçue par l'administrateur. "Cependant, il n'a pas droit aux dividendes d'une personne morale qui n'ont pas été déclarés durant la période d'existence de son droit."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article établit la portée du droit du bénéficiaire aux revenus des biens administrés lorsque son droit prend fin par suite de son décès, d'une cession ou autrement.

Le premier alinéa énonce que le bénéficiaire des fruits et revenus a droit à ceux qui lui sont dus mais qui ne lui ont pas été versés, ainsi qu'à la portion gagnée mais non encore perçue par l'administrateur, de ses fruits et revenus.

Le second alinéa propose une solution à un problème qui se pose fréquemment en droit des compagnies, en édictant que le bénéficiaire n'a pas droit aux dividendes d'une personne morale, dividendes qui n'ont pas été déclarés durant la période d'existence de son droit, même s'ils sont tirés de profits accumulés durant cette période.

L'article s'inspire des règles proposées par l'office aux articles 546 et 547.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1403 est adopté. Article 1404?

Mme Harel: "1404. L'administrateur rend un compte sommaire de sa gestion au bénéficiaire au moins une fois l'an."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce l'obligation de l'administrateur de rendre compte de sa gestion au bénéficiaire au moins une fois l'an. On évite, cependant, le formalisme en prévoyant que ce compte est sommaire. Cette obligation est nécessaire pour permettre au bénéficiaire ou à ses représentants d'exercer un contrôle et une surveillance efficaces de l'administration.

La règle proposée est conforme aux propositions de l'office ainsi qu'au droit actuel, où le compte de gestion est exigé de plusieurs administrateurs tels le tuteur, l'administrateur de copropriété ou de

l'exécuteur testamentaire dans une certaine mesure. Sa formulation laisse par ailleurs ouverte la possibilité de prévoir plus d'une reddition de compte durant l'année.

Le Président (M. Gagnon): Ça va?

L'article 1404 est adopté. Article 14057

Mme Harel: "1405. Le compte doit être suffisamment détaillé pour qu'on puisse en vérifier l'exactitude. "Tout intéressé peut, à l'occasion de la reddition de compte, demander au tribunal d'en ordonner la vérification par un expert."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent et s'inspire des propositions de l'office. Le premier alinéa oblige l'administrateur à fournir un compte suffisamment détaillé pour permettre aux intéressés d'en vérifier l'exactitude et d'apprécier la qualité de la gestion de l'administrateur.

Le second alinéa accorde à tout intéressé la possibilité de demander au tribunal d'ordonner la vérification du compte par un expert, demande qui se fera conformément au Code de procédure civile.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1406?

Mme Harel: "1406. S'il y a plusieurs administrateurs, ils doivent rendre un seul et même compte, sauf si leurs fonctions ont été divisées par la loi, l'acte ou le tribunal et que cette division a été respectée."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce la règle à suivre en cas d'administration collective pour exécuter l'obligation de rendre un compte annuel de gestion. La démarche suivie est semblable à celle adoptée à l'article 1387 du projet. Il édicte ainsi que, s'il y a plusieurs administrateurs, ceux-ci doivent rendre un seul et même compte à moins que leurs fonctions n'aient été divisées et que cette division ait été respectée, auquel cas chacun rend séparément un compte distinct de son administration.

La règle proposée est conforme aux propositions de l'office à l'article 588 ainsi qu'au droit actuel en matière d'exécution testamentaire et de fiducie, tel que l'énoncent les articles 913 et 981n du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1407?

Mme Harel: L'administrateur doit, à tout moment, permettre au bénéficiaire d'examiner les livres et pièces justificatives se rapportant à l'administration."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article accorde au bénéficiaire le droit d'exiger, en tout temps, que l'administrateur lui donne accès aux livres et aux pièces justificatives se rapportant à l'administration.

La règle proposée élargit la portée des propositions de l'office qui limitait ce droit du bénéficiaire qu'en cas de contestation du compte annuel et qui exigeait en outre l'autorisation préalable du tribunal. Cet élargissement a paru essentiel à un contrôle et à une surveillance efficace de la gestion de l'administrateur. Il se justifie d'ailleurs du fait que l'examen des livres et pièces justificatives apparaît comme une étape qui devrait normalement précéder toute demande de vérification par expert du compte et susceptible bien souvent d'en dispenser. (15 h 45)

Le Président (M. Gagnon): Me Pineau.

M. Pineau: Le Barreau, à la page 50 de son rapport, soulève l'objection suivante: Cette obligation pour les administrateurs risque de paralyser l'administrateur dans sa gestion. Le Barreau suggère que celui-ci devrait pouvoir choisir le moment de l'examen.

M. Cossette: C'est une interprétation de la lettre de l'article.

Mme Longtin: Évidemment, lorsqu'on dit "à tout moment", c'est un moment opportun et non à contretemps.

M. Cossette: Pas à minuit, la nuit.

Mme Longtin: Si c'est la nuit, le bénéficiaire fut certainement de l'abus de droit.

De la fin de l'administration

Le Président (M. Gagnon): Nous entreprenons maintenant le chapitre quatrième: De la fin de l'administration. Section I: Des causes mettant fin à l'administration. L'article 1407 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1408?

Mme Harel: "Les fonctions d'administrateur prennent fin par son décès, sa démission ou son remplacement, par sa

faillite ou par l'ouverture à son égard d'un régime de protection. "Elles prennent fin aussi par la faillite du bénéficiaire ou par l'ouverture à son égard d'un régime de protection, si cela a un effet sur les biens administrés."

L'amendement consiste ici à remplacer, à la deuxième ligne du deuxième alinéa, les mots "affecte" par les mots "a un effet sur". C'est un amendement purement formel.

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énumère certaines causes par lesquelles les fonctions de l'administrateur prennent fin. Le premier alinéa énonce des causes inhérentes à l'administrateur, tels son décès, sa démission ou son remplacement, de même que sa faillite ou l'ouverture à son égard d'un régime de protection.

Le second alinéa prévoit des causes inhérentes au bénéficiaire en précisant que les fonctions de l'administrateur prennent fin aussi par la faillite du bénéficiaire ou l'ouverture à son égard d'un régime de protection lorsque ces causes affectent les biens administrés. Ainsi, la faillite du bénéficiaire provoque normalement la nomination d'un liquidateur ayant pouvoir de saisir et d'administrer ces biens pour les fins de la liquidation. Aussi, lorsque le bénéficiaire est propriétaire des biens, l'administrateur en perdra-t-il le contrôle et la gestion aux mains du liquidateur. Il en va autrement, toutefois, lorsque le bénéficiaire n'est pas propriétaire des biens, comme en matière de fiducie, et où sa faillite n'affectera aucunement la gestion du fiduciaire.

La même situation peut se présenter en cas d'ouverture d'un régime de protection en faveur du bénéficiaire lorsque le régime ne concerne que sa personne et non ses biens.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1409?

Mme Harel: "L'administration prend fin: "1° Par la cessation du droit du bénéficiaire sur les biens administrés; "2° Par l'arrivée du terme ou l'avènement de la condition apposée à l'acte donnant lieu à l'administration; "3° Par l'accomplissement de l'objet de l'administration ou la disparition de la cause qui y a donné lieu."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en énumérant les causes usuelles par lesquelles l'administration même et non simplement les fonctions de l'administrateur se terminent. Il prévoit que l'administration prend fin par la cessation du droit du bénéficiaire sur les biens administrés à la suite d'une vente, par exemple, par l'arrivée du terme ou l'avènement de la condition prévue par l'acte constitutif, par l'accomplissement de l'objet de l'administration ou la disparition de la cause qui y a donné lieu.

L'article s'inspire des propositions de l'office ainsi que des causes actuelles d'extinction des obligations et des règles propres au contrat nommé, qu'il n'épuise d'ailleurs pas.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? L'article 1409 est adopté. Article 1410?

Mme Harel: "L'administrateur peut, à tout moment, renoncer à ses fonctions en avisant par écrit le bénéficiaire et, le cas échéant, ses coadministrateurs ou la personne qui peut lui nommer un remplaçant. S'il ne se trouve aucune de ces personnes ou s'il est impossible de leur donner l'avis, celui-ci est donné au curateur public qui, au besoin, assume provisoirement l'administration des biens et fait procéder au remplacement de l'administrateur. "L'administrateur d'une fiducie d'utilité privée ou sociale doit aussi aviser de sa démission la personne ou l'organisme désigné par la loi pour surveiller son administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article introduit le droit pour l'administrateur de renoncer unilatéralement et sans justification à ses fonctions. Ce droit de démission demeure toutefois assujetti à l'exigence d'un avis écrit à cet effet, avis destiné à permettre aux intéressés de procéder au remplacement de l'administrateur et même d'assurer provisoirement la gestion des biens.

L'article oblige ainsi l'administrateur à aviser par écrit le bénéficiaire et, le cas échéant, ses coadministrateurs ou la personne qui peut lui nommer un remplaçant. À défaut de pouvoir aviser ces personnes, l'avis doit être donné au Curateur public qui, au besoin, assume provisoirement la gestion des biens et fait procéder au remplacement de l'administrateur.

L'article précise enfin qu'en cas de fiducie d'utilité privée ou sociale, l'administrateur doit aussi aviser de sa démission les personnes ou organismes désignés par la loi pour surveiller son administration. Ce droit de démission unilatéral s'inspire des propositions de l'office faites à l'article 574 et de l'article 1759 du code actuel en matière de mandat. Son exercice peut engager la responsabilité

de l'administrateur pour les dommages causés au bénéficiaire et au patrimoine, si la démission est faite sans motif valable ou à contretemps, ou si elle équivaut à un manquement aux obligations de l'administrateur. Elle peut d'ailleurs donner lieu à l'application des règles normales de responsabilité pour bris de contrat ou inexécution d'obligations.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1411?

Mme Harel: "La démission de l'administrateur prend effet à la date de la réception de l'avis ou à une date postérieure qui y est indiquée."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent en précisant que la démission de l'administrateur prend effet à la date de la réception de l'avis ou à une date postérieure qui y est indiquée. L'article modifie quelque peu les propositions de l'office qui permettaient que la démission prenne effet à la date d'envoi de l'avis. La règle retenue a paru préférable, vu les délais parfois assez longs pouvant s'écouler entre la date d'envoi et celle de réception.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1412.

Mme Harel: L'amendement consiste à remplacer, à la deuxième ligne, le mot "faite" par le mot "donnée". L'article 1412 amendé se lit comme suit: "L'administrateur répond du préjudice causé par sa démission si elle est donnée sans motif valable et à contretemps ou si elle équivaut à un manquement à ses devoirs."

Le Président CM. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article sert de contrepoids au droit de démission unilatéral de l'administrateur en le rendant responsable du préjudice causé par sa démission, donnée sans motif valable et à contretemps ou qui équivaut à un manquement à ses devoirs. Tiré des propositions de l'office, l'article s'inspire en partie de l'article 1759 du code actuel en matière de mandat.

La démission peut être considérée faite à contretemps lorsque, par exemple, des difficultés sérieuses s'annoncent pour la gestion du bien. Elle peut constituer un manquement aux devoirs de l'administrateur, tel celui d'agir en toute loyauté dans l'intérêt du bénéficiaire ou de la fin, lorsqu'elle a lieu à un moment que l'administrateur sait favoriser la manoeuvre d'un tiers. L'article proposé n'affecte par ailleurs aucunement l'application usuelle des règles de responsabilité pour bris de contrat ou inexécution d'obligations.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement e3t adopté et l'article 1412 tel qu'amendé est adopté. Article 1413?

Mme Harel: "Le bénéficiaire qui a confié à autrui l'administration d'un bien peut remplacer l'administrateur ou mettre fin à l'administration, notamment en exerçant son droit d'exiger sur demande la remise du bien. "Tout intéressé peut demander le remplacement de l'administrateur qui ne peut exercer sa charge ou qui ne respecte pas ses obligations."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article prévoit deux manières de mettre fin à l'administration. Le premier alinéa édicte une règle d'application normale permettant au bénéficiaire qui a confié à autrui l'administration d'un bien de remplacer l'administrateur ou de mettre fin a l'administration.

Le second alinéa propose une règle essentielle à un contrôle et une surveillance efficace de l'administration en permettant à tout intéressé de demander judiciairement le remplacement de l'administrateur qui ne peut exercer sa charge ou qui ne respecte pas ses obligations.

Il s'inspire des propositions de l'office aux article 581 et 582 et est conforme à certaines règles du droit actuel exprimées aux article 917, 981d et 1756 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1413 est adopté. Article 1414.

Mme Harel: "Au décès de l'administrateur, le liquidateur de sa succession qui est au courant de l'administration est tenu d'aviser du décès le bénéficiaire et, le cas échéant, les coadministrateurs ou, s'il s'agit d'une fiducie d'utilité privée ou sociale, la personne ou l'organisme désigné par la loi pour surveiller l'administration. "Le liquidateur est également tenu de faire, dans les affaires commencées, tout ce qui est inexactement nécessaire pour prévenir une perte; il doit aussi rendre compte et remettre les biens à ceux qui y ont droit."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce des règles applicables en cas de décès de

l'administrateur, règles destinées à permettre aux intéressés de prendre les mesures qui s'imposent alors, notamment le remplacement de l'administrateur, et d'assurer la sauvegarde des biens administrés.

Le premier alinéa oblige le liquidateur de sa succession qui connaît l'administration à aviser du décès le bénéficiaire et les administrateurs ainsi que, le cas échéant, les personnes et organismes désignés par la loi pour surveiller l'administration en cas de fiducie d'utilité privée ou sociale.

Le second alinéa oblige en outre le liquidateur à faire dans les affaires commencées tout ce qui est immédiatement nécessaire pour prévenir une perte et, par la suite, à rendre compte et à remettre les biens à ceux qui y ont droit.

L'article proposé s'inspire des recommandations de l'office exprimées aux articles 585 et 586 et des articles 266, 4411, 920, 981a, et 1761 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1414 est adopté. Article 1415?

Mme Harel: "Les obligations contractées envers les tiers de bonne foi par l'administrateur dans l'ignorance du terme de son administration sont valides et obligent le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire; il en est de même des obligations contractées après la fin de l'administration ou la suite nécessaire requise pour prévenir une perte."

L'amendement consiste à insérer, au deuxième alinéa, après les mots "le patrimoine" le mot "fiduciaire". Je fais lecture du deuxième alinéa: "Le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire est aussi tenu des obligations contractées envers les tiers qui ignoraient la fin de l'administration."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article détermine le sort des actes posés par l'administrateur après que l'administration a cessé. Le premier alinéa consacre d'abord la validité et le caractère obligatoire vis-à-vis du bénéficiaire ou du patrimoine fiduciaire des obligations contractées envers les tiers de bonne foi par l'administrateur qui ignorait que son administration avait cessé par suite du décès du bénéficiaire par exemple.

Cette règle ne s'applique toutefois que si les tiers contractants étaient de bonne foi. S'ils connaissaient la fin de l'administration, ils ne pourraient opposer la validité de ces obligations. Elle a pour effet, par ailleurs, de dégager l'administrateur de toute responsabilité pour ses obligations. L'alinéa consacre également la validité et le caractère obligatoire des obligations contractées après que l'administration a cessé lorsqu'elles sont une suite nécessaire de l'administration ou sont requises pour prévenir une perte.

Cette règle s'applique peu importe que l'administrateur ait connu ou non la fin de son administration et malgré la connaissance qu'en avaient les tiers contractants. La nature même des actes posés suffit à elle seule pour lier le bénéficiaire au patrimoine.

Le second alinéa énonce enfin que le bénéficiaire ou le patrimoine est aussi tenu des obligations contractées envers les tiers qui ignoraient la fin de l'administration. La règle proposée ici se distingue de celle qu'énonce la première partie du premier alinéa en ce qu'elle présuppose que l'administrateur connaissait la fin de son administration. Ses effets sont les mêmes vis-à-vis des tiers, mais le bénéficiaire ou le patrimoine conserve ses recours contre l'administrateur.

L'article proposé s'inspire des recommandations de l'office et est conforme au droit actuel en matière de mandat tel qu'exprimé aux articles 1721, 1728, 1729, 1760 et 1761 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. Article 1416?

Mme Harel: "L'administrateur doit, à la fin de son administration, rendre un compte définitif au bénéficiaire et, le cas échéant, à l'administrateur qui le remplace ou à ses coadministrateurs. S'il y a plusieurs administrateurs et que leur charge prend fin simultanément, ils doivent rendre un seul et même compte, sauf division de leurs fonctions. "Le compte doit être suffisamment détaillé pour permettre d'en vérifier l'exactitude; les livres et les autres pièces justificatives se rapportant à l'administration peuvent être consultées par les intéressés. "L'acceptation du compte par le bénéficiaire opère clôture de celui-ci."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce les modalités du compte définitif que doit rendre tout administrateur du bien d'autrui. Le premier alinéa indique d'abord les personnes à qui le compte doit être rendu, en précisant qu'il doit l'être au bénéficiaire et, le cas échéant, à l'administrateur qui le remplace ou à ses coadministrateurs. Il prévoit aussi que s'il y a plusieurs administrateurs et que leurs fonctions se terminent simultanément, ceux-ci doivent, sauf division, rendre un seul et même compte. Lorsque les fonctions des administrateurs ne se terminent pas simultanément, par exemple si un seul d'entre eux démissionne, la reddition de

compte est séparée. (16 heures)

Le second alinéa reprend des règles semblables à celles que prévoit le projet pour la reddition de compte annuelle, en exigeant que le compte soit suffisamment détaillé pour permettre d'en vérifier l'exactitude et en accordant aux intéressés le droit de consulter les livres et autres pièces justificatives se rapportant à l'administration.

Enfin, le troisième alinéa prévoit que l'acceptation du compte par le bénéficiaire opère clôture de celui-ci. L'article s'inspire des propositions de l'office aux articles 587 et 588 du projet et de plusieurs dispositions du droit actuel, telles celles des articles 441t, 918, 9811 981m, 1712 et 1713 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Des voix: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1417?

Mme Harel: "L'administrateur peut, à tout moment et avec l'agrément de tous les bénéficiaires, rendre compte à l'amiable. "Si le compte ne peut être rendu à l'amiable, la reddition de compte a lieu en justice."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète le précédent. Il permet aux parties de s'entendre entre elles sur la forme du compte. Ce n'est qu'à défaut d'entente entre les parties que la reddition de compte a lieu en justice conformément aux articles 532 et suivants du Code de procédure civile.

Le Président (M. Gagnon): L'article 1417 est adopté. Article 1418?

Mme Harel: "L'administrateur doit remettre le bien administré au lieu convenu ou, à défaut, au lieu où il se trouve."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énonce l'obligation commune à tout administrateur du bien d'autrui de remettre le bien administré à la fin de l'administration en précisant que cette remise se fait au lieu convenu ou à défaut, au lieu où se trouve alors le bien. Il est conforme au droit actuel énoncé par l'article 1809 du Code civil du Bas-Canada en matière de dépôt.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. Article 1419?

Mme Harel: L'amendement consiste à insérer à la deuxième ligne du deuxième alinéa après le mot "patrimoine" le mot "fiduciaire" et l'article 1419 se lit comme suit: "L'administrateur doit remettre tout ce qu'il a reçu dans l'exécution de ses fonctions, même si ce qu'il a reçu n'était pas dû au bénéficiaire ou au patrimoine fiduciaire; il est aussi comptable de tout profit ou avantage personnel qu'il a réalisé en utilisant sans y être autorisé l'information qu'il détenait en raison de son administration.

L'administrateur qui a utilisé un bien sans y être autorisé est tenu d'indemniser le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire pour son usage en payant à compter de l'usage soit un loyer approprié, soit l'intérêt de l'argent."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article complète les précédents en explicitant la portée de l'obligation de rendre compte imposée à l'administrateur. Le premier alinéa oblige ainsi l'administrateur à remettre tout ce qu'il a reçu dans l'exécution de ses fonctions, même si ce qu'il a reçu n'est pas dû au bénéficiaire ou au patrimoine, comme des créances perçues erronément, des cadeaux ou des commissions. Il le rend aussi comptable de tout profit ou avantage personnel qu'il a réalisé par suite de l'utilisation non autorisée de l'information qu'il détenait en raison de son administration comme, par exemple, s'il s'est prévalu personnellement d'une offre intéressante de contracter destinée au bénéficiaire et en a tiré profit.

Le second alinéa oblige de plus l'administrateur à indemniser le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire pour l'usage non autorisé qu'il a fait des biens gérés en payant à compter de l'usage soit un loyer approprié pour la chose utilisée, soit l'intérêt de l'argent employé.

Les règles proposées par l'article s'appliquent indépendamment du fait que le bénéficiaire ou le patrimoine ait ou non subi un préjudice de cette utilisation. Ces règles, qui sont le pendant de celles édictées par les articles 1389 et suivants du projet, découlent de l'obligation de loyauté imposée à l'administrateur. Cette règle est conforme aux propositions de l'office énoncées aux articles 561, 592 et 595 du projet ainsi qu'à l'interprétation actuelle des règles du mandat énoncées aux articles 1713 et 1714 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement est adopté et l'article tel qu'amendé est adopté. Article 1420? Il y a un amendement.

Mme Harel: L'amendement consiste à ajouter, à la fin du premier alinéa, le mot "fiduciaire" et 1420 se lit comme suit: "Les dépenses de l'administration, y compris les frais de la reddition de compte et de remise, sont à la charge du bénéficiaire ou du patrimoine fiduciaire.

La démission ou le remplacement de l'administrateur oblige le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire à lui payer, outre les dépenses de l'administration, la part acquise de sa rémunération."

Le Président (M. Gagnon): Commentaire.

M. Cossette: Cet article énumère les paiements, frais ou autres dépenses que le bénéficiaire ou le patrimoine peut être appelé à assumer à la fin de l'administration.

Le premier alinéa met ainsi à la charge du bénéficiaire ou du patrimoine les dépenses de l'administration y compris les frais de la reddition de compte et de la remise.

Le second alinéa oblige par ailleurs le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire à payer à l'administrateur qui démissionne ou qui est remplacé, outre les dépenses de l'administration, la part acquise de sa rémunération.

Cet article s'inspire de certaines dispositions du droit actuel, telles celles des articles 914, et 981g, 1713 et 1812 du Code civil du Bas-Canada ainsi que des articles 580, 583 et 590 du projet de l'Office de révision du Code civil.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1420 est adopté. L'article 1420 tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1421.

Mme Harel: "L'administrateur doit des intérêts sur le reliquat à compter de la clôture du compte définitif ou de la mise en demeure de le produire; le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire n'en doit qu'à compter de la mise en demeure."

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article précise l'étendue des obligations respectives de l'administrateur et du bénéficiaire ou patrimoine fiduciaire quant au paiement des intérêts sur les sommes qu'ils peuvent se devoir mutuellement. Il édicte que l'administrateur doit des intérêts sur le reliquat du compte définitif à compter de sa clôture ou, s'il tarde à produire le compte, à compter de la mise en demeure de le faire.

Cette règle, qui prévoit que les intérêts sont dus à compter de la clôture du compte, est conforme à l'article 313 du code actuel en matière de tutelle. Elle modifie toutefois le droit actuel énoncé en matière de mandat à l'article 1714 de même que la proposition de l'Office de révision du Code civil au même effet, qui prévoient tous deux que les intérêts ne sont dus qu'à compter de la mise en demeure.

La règle retenue a paru devoir s'imposer, considérant que rien ne justifie de retarder la computation des intérêts après la clôture du compte. La règle qui édicte que les intérêts peuvent aussi être dus à compter de la mise en demeure de produire le compte est nouvelle et vise à éviter que l'administrateur ne retarde indûment la production du compte définitif.

Quant au bénéficiaire ou au patrimoine, l'article énonce qu'il ne doit des intérêts qu'à compter de la mise en demeure. Cette règle est conforme aux propositions de l'office de même qu'aux dispositions du droit actuel en matière de tutelle.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté. J'appelle l'article 1422.

Mme Harel: L'amendement à l'article 1422 consiste à ajouter à la première ligne du premier alinéa, avant le mot "doit", le mot "le" et, à la deuxième ligne de ce même alinéa, après le mot "patrimoine", le mot "fiduciaire".

L'article 1422 se lit comme suit: "L'administrateur a le droit de déduire des sommes qu'il doit remettre ce que le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire lui doit en raison de l'administration. "Il peut retenir le bien administré jusqu'au paiement de ce qui lui est dû.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article vise à faciliter à l'administrateur le remboursement des sommes qui peuvent lui être dues par le bénéficiaire ou le patrimoine fiduciaire en raison de l'administration.

Le premier alinéa lui accorde ainsi le droit de déduire des sommes qu'il doit remettre ce que le bénéficiaire ou le patrimoine lui doit en raison de l'administration.

Cette règle simple et d'une utilité certaine est conforme aux recommandations de l'office ainsi qu'à la règle de l'article 1713 du Code civil actuel.

Le second alinéa lui accorde en outre un droit de rétention sur les biens administrés jusqu'au paiement de ce qui lui est dû. Cette règle, qui vise à assurer à l'administrateur un moyen efficace d'obtenir le paiement rapide de sa créance est conforme aux propositions de l'office et étend à tout administrateur la règle des articles 1723 et 1812 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 1422 est adopté. L'article tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 1423.

Mme Harel: C'est le dernier article du projet de loi 20. "S'il y a plusieurs bénéficiaires, leur obligation envers l'administrateur est solidaire."

M. Cossette: Le dernier commentaire.

Le Président (M. Gagnon): Le commentaire.

M. Cossette: Cet article établit la solidarité des bénéficiaires à l'égard des obligations dont ils peuvent être tenus envers l'administrateur. Conforme aux propositions de l'Office de révision du Code civil, l'article étend au bénéficiaire de toute administration une règle du droit actuel applicable en cas de pluralité de mandants, règle énoncée à l'article 1726 du Code civil du Bas-Canada.

Le Président (M. Gagnon): Adopté? Adopté.

Avant d'entreprendre les articles qui ont été suspendus.

Mme Harel: II y a les articles 3 et 4 également du projet de loi, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): On peut suspendre les travaux pour cinq minutes?

Mme Harel: Très bien. On n'a terminé ni l'article 1 ni l'article 2.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on le fait tout de suite?

M. Leduc (Saint-Laurent): On est aussi bien de le faire tout de suite.

Mme Harel: Est-ce qu'on peut suspendre pour quelques minutes?

Le Président (M. Gagnon): C'est ce que j'allais vous suggérer. Nous pouvons suspendre nos travaux cinq minutes et nous les reprendrons aux articles laissés en suspens. Voilà.

(Suspension de la séance à 16 h 11)

(Reprise à 16 h 31)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! La sous-commission des institutions reprend ses travaux. J'appelle l'article 36.

Articles en suspens

Ou respect de la réputation et de la vie privée

M. Marx: M. le Président, j'aurais une question à poser...

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: ...en ce qui concerne l'article 36 et surtout en ce qui a trait à ce chapitre troisième. L'Opposition a reçu un mémoire de la Ligue des droits et libertés, et je pense que le gouvernement en a reçu une copie. J'aimerais, demander au gouvernement quelles conclusions il a tirées de ce mémoire.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. À la suite de la réception de ce mémoire, l'analyse en a été faite dans les services concernés du ministère de la Justice et un document a été préparé. J'ai adressé une lettre au responsable, le coordonnateur du programme à la Ligue des droits et libertés, qui reprenait l'essentiel de l'analyse qui était faite de leur mémoire.

Si le député de D'Arcy McGee est intéressé, je pourrais lui transmettre copie de cette lettre. Je peux lui faire part immédiatement des grandes lignes retenues.

M. Marx: Oui, quelles étaient les grandes lignes?

Mme Harel: Essentiellement, que plusieurs des recommandations de la Ligue des droits et libertés auraient plus de mérite à être intégrées à un projet de loi particulier, notamment en reprenant la recommandation pour établir la gratuité de l'accès d'une personne à son dossier, le droit de faire supprimer des informations périmées, le droit de formuler des commentaires et de les verser au dossier. Certaines de ces recommandations sont retenues par le Code civil, mais l'essentiel c'est qu'il y a une étude qui se poursuit présentement par le Groupe de recherche en informatique et en droit de l'Université du Québec à Montréal, une étude complète sur toute cette question, sur les pratiques en usage, sur les effets prévisibles d'une loi qui pourrait être complète dans ce secteur privé; on peut la souhaiter aussi complète qu'elle l'est pour le secteur public avec la loi sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels.

De plus, le groupe de recherche poursuit aussi une enquête sociologique sur les banques privées de données a caractère personne! dans le secteur du commerce, de

la consommation, de l'emploi et du traitement de l'information. Ce groupe a aussi le mandat d'analyser les problèmes juridiques et organisationnels que soulève le développement des banques privées de données personnelles de même que les diverses lois québécoises, canadiennes et étrangères en la matière et, finalement, de formuler et d'évaluer les différentes solutions juridiques et techniques possibles, y compris les solutions législatives et réglementaires.

Comme cette étude doit être complétée d'ici à la fin de l'année 1985, elle devrait alimenter la réflexion d'un groupe de travail autre qui est actuellement constitué de représentants du ministère de la Justice, du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie et du ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Ce groupe de travail devrait s'adjoindre incessamment des représentants de la Commission d'accès à l'information et de la Commission des droits de la personne. Ce groupe de travail est actuellement constitué et il devrait s'alimenter de cette réflexion poursuivie par le Groupe de recherche en informatique de l'Université du Québec à Montréal.

Il faut souhaiter que les travaux de ce groupe de recherche et, par la suite, ceux du groupe de travail, conduisent incessamment à un projet de loi particulier sur les banques privées de données personnelles. Il nous semble, malgré tout, que le chapitre du projet de loi 20 relatif au respect de la réputation et de la vie privée conserve quand même sa pertinence. C'est l'essentiel de ce qui a été transmis à la ligue.

M. Marx: M. le Président, si je me rappelle bien, c'est la même réponse qu'on a donnée à la Ligue des droits et libertés quand la ligue a présenté son mémoire lors de l'étude du projet de loi 106, qui est maintenant incorporé dans le projet de loi 20. Je pense qu'on a dit à Ligue, à cette époque, je pense que c'était aussi l'avis de l'Opposition, que pour les détails, en ce qui concerne cette question de la vie privée des personnes, il faut prévoir une loi spéciale, le cas échéant. Il ne serait pas souhaitable d'intégrer les dispositions particulières et détaillées dans le Code civil. Je pense que c'est ça le résumé.

Mme Harel: Lorsque la Ligue des droits et libertés de la personne est venue présenter son mémoire, je pense que le gouvernement s'est engagé à faire effectuer une recherche qui est celle, dont je vous parlais précédemment, qui est conduite par le groupe de recherche de l'Université du Québec à Montréal. Il reste que les dispositions du projet de loi 20 sont quand même adéquates pour permettre un cadre général de référence que pourra venir compléter une loi particulière.

Le Président (M. Gagnon): Ça va, M. le député de D'Arcy McGee?

M. Marx: Parfait.

Le Président (M. Gagnon): L'article 36.

Mme Harel: L'amendement se lit comme suit: À la première ligne, en début d'article, remplacer le mot "sont" par les mots "peuvent être"; à la deuxième ligne, supprimer ce qui suit: "s'ils sont faits sans son consentement"; et au premièrement, remplacer le mot "et" par le mot "ou".

L'article 36 amendé se lirait comme suit: "36. Peuvent être notamment considérés comme des atteintes à la vie privée d'une personne les actes suivants: "1° Pénétrer chez elle ou y prendre quoi que ce soit; "2° Intercepter ou utiliser volontairement une communication privée; "3° Capter ou utiliser son image ou sa voix lorsqu'elle se trouve dans des lieux privés; "4 Surveiller sa vie privée par quelque moyen que ce soit; "5 Utiliser son nom, son image, sa ressemblance ou sa voix à toute autre fin que l'information légitime du public; "6° Utiliser sa correspondance, ses manuscrits ou ses autres documents personnels."

Le commentaire sur l'amendement. Le premier amendement vise à clarifier le fait que les actes énumérés, outre qu'ils ne sont pas exhaustifs de ce qui peut constituer une atteinte à la vie privée, ne sont pas nécessairement considérés comme des atteintes à la vie privée. En effet, ses actes pourront, suivant les circonstances, constituer ou non des atteintes.

Le deuxième amendement vise a éviter une difficulté d'interprétation, vu que l'article 35 traite déjà du consentement.

Le troisième amendement indique que l'un ou l'autre des actes mentionnés en premièrement peut constituer une atteinte: l'exigence de la conjonction des deux actes ne sera plus requise.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que ça va? M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Non, juste un moment. Je veux juste prendre connaissance de cela pour quelques minutes parce que c'est la première fois qu'on voit cet amendement. Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 36 est adopté et l'article 36 tel qu'amendé est adopté. Article 38?

Mme Harel: L'amendement à l'article 38 consiste à remplacer l'article 38 par le suivant: "38. Toute personne peut, gratuitement, consulter et faire rectifier un dossier qui la concerne et qu'une personne a constitué ou détient sur elle ou le faire reproduire à ses frais à moins d'une disposition contraire de la loi. "Elle peut faire corriger une information inexacte, incomplète ou équivoque, faire supprimer une information périmée ou non pertinente par rapport à l'objet du dossier, ou formuler par écrit des commentaires et les verser au dossier. La rectification doit être notifiée à toute personne qui a reçu l'information dans les six mois précédents. Il en est de même de la demande de rectification, si elle est contestée."

Commentaire. L'amendement proposé reprend pour l'essentiel l'article 38 proposé. Cependant, plutôt que d'indiquer que cet article s'applique sous réserve de la seule loi relative à l'accès aux documents des organismes publics et à la protection des renseignements personnels, l'amendement réserve toute autre disposition d'une loi particulière, notamment de celle qui pourrait intervenir pour régir la question de l'information dans des secteurs d'activités particulières. Il prévoit aussi qu'un motif sérieux ou légitime pourrait toutefois justifier le contraire.

L'amendement précise également certains éléments de l'article initial. Ainsi, il prévoit que la consultation du dossier est gratuite et qu'elle s'étend à tout dossier, même s'il n'est pas constitué dans le but d'informer un tiers. En effet, la gratuité de la consultation mérite d'être affirmée puisque la personne est elle-même objet du dossier et son droit de le consulter doit aussi être établi quel que soit le motif initial de la constitution.

L'amendement précise que le droit de rectification s'étend à la suppression de l'information périmée; cette notion pouvait être comprise dans la notion de non-pertinence, mais il paraissait opportun de clarifier le point. Il prévoit aussi que le droit de rectification s'étend à toute information non pertinente à l'objet du dossier sans égard au caractère préjudiciable de l'information, puisque ce préjudice ne peut être facilement évalué. Enfin, ce droit inclut aussi - l'article le précise - le droit de formuler des commentaires et de les verser au dossier afin de permettre à la personne concernée de nuancer certains aspects du dossier.

Enfin, l'article prévoit que la rectification du dossier doit être communiquée aux personnes qui ont reçu de l'information à partir du dossier dans les six mois qui précèdent la correction. En effet, il pourrait être commun que la demande de rectification suive une décision prise par un tiers qui se sera fondée sur le dossier dont on demande la rectification, et il paraît opportun que ce tiers soit avisé.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que l'amendement à l'article 38 est adopté?

Mme Harel: On peut prendre le temps...

Le Président (M. Gagnon): Non, on m'a dit que ça allait.

M. Marx: Supposons qu'une agence d'investigation a constitué un dossier sur monsieur X. Si monsieur X est au courant de ce dossier, il peut exiger que ce dossier soit rectifié. Supposons que j'aie un dossier... cela peut vouloir dire que j'ai des lettres, des documents concernant une personne. Cette personne peut exiger que ces dossiers soient corrigés, le cas échéant. Si j'ai un dossier sur le président de notre commission, il peut demander d'avoir l'opportunité de faire des corrections, le cas échéant.

Le Président (M. Gagnon): Je ne le demanderais pas, parce que je sais que ce serait conforme.

M. Marx: Ce serait conforme, oui. Je me demande ce que le premier alinéa couvre exactement: "Toute personne peut gratuitement consulter et faire rectifier un dossier qui le concerne et qu'une personne a constituée ou détient sur elle ou le faire reproduire à ses frais, à moins d'une disposition contraire de la loi." Donc, peut-être que la seule disposition contraire dans la loi, c'est quelque part dans la loi sur l'accès à l'information ou la Loi sur les secrets officiels du Canada, j'imagine. (16 h 45)

Mme Harel: ...sur les services sociaux, sur les services de santé.

M. Marx: Oui, les services de santé. Supposons que...

Mme Harel: Les éléments nouveaux. En fait, il y a le qualificatif "périmée": une information non seulement non pertinente, mais périmée. C'est une recommandation qu'on retrouvait dans le mémoire de la Ligue des droits et libertés.

M. Marx: Oui, mais on veut savoir ce que cela couvre. Car cela peut avoir une étendue assez large. J'aimerais essayer d'évaluer les effets du premier alinéa.

Mme Longtin: Cela couvre évidemment plus que l'article 38 initial faisait, puisque le 38 prévoyait "dans le but d'informer un tiers"; donc, c'était nécessairement une information qui était recueillie et qui visait

à être transmise à quelqu'un d'autre. Cette question avait été discutée; l'article initial semblait limitatif puisqu'il fallait pratiquement savoir le but poursuivi par celui qui constitue le dossier au moment où il le fait. C'est évident ■ que la proposition nouvelle est plus large puisqu'elle peut viser finalement tout dossier constitué sur autrui par une personne.

M. Marx: Tout le monde a un dossier sur tout le monde. Dans les affaires, j'imagine que chaque compagnie a un dossier sur chacun de ses clients. Est-ce que les clients peuvent dire: j'aimerais examiner les dossiers pour vraiment rectifier les faits, le cas échéant, parce que vous m'avez re fusé un certain crédit, ou que vous ne voulez pas m'expédier la marchandise parce que vous pensez que... et ainsi de suite.

J'aimerais vous demander de cerner la portée de cet alinéa. Cela peut être une intrusion dans la vie privée, pas dans la vie privée des autres, mais dans une certaine information privée. Je pense que j'ai le droit d'avoir un dossier sur quelqu'un et de l'utiliser pour mes fins.

Mme Harel: Évidemment, ce qui cause un problème, c'est que si ce dossier... il faut faire la preuve que ce dossier, au moment où il est constitué ou détenu, l'est dans le but d'informer un tiers.

M. Marx: Une agence de crédit, je comprends cela. Il y a une agence de crédit qui prépare des dossiers, qui monte des dossiers sur des milliers de personnes, et qui vend cette information aux tierces personnes, là je comprends. Si c'est Dunn & Bradstreet ou d'autres compagnies qui font le même travail, cela c'est une autre chose.

Mme Harel: Mais comme ce n'est pas réglementé tout ce secteur, il y a des dossiers qui sont constitués et qui ne le sont pas à l'origine dans le but d'informer un tiers, mais qui, une fois qu'ils l'ont été, sont utilisés à des fins d'information d'un tiers.

M. Marx: Oui, mais... C'est cela, le tiers a été supprimé.

Mme Harel: C'est cela. Si on reprend évidemment l'économie générale de cette disposition, toute personne peut retenir de l'information sur une autre personne et c'est maintenu, en fait. Mais une personne qui se sent concernée peut faire rectifier au besoin cette information qui est ainsi détenue sur elle.

M. Marx: Oui, mais supposons que... Nous avons comme députés des dossiers dans nos bureaux.

Mme Harel: Moi, personnellement, j'en ai un sur le chef du Parti libéral.

M. Marx: Vous en avez un sur le chef du Parti libéral?

Mme Harel: Oui, mais ce sont des coupures de presse.

M. Marx: C'est le livre de Lévesque. Donc, nous avons décidé qu'il n'y a rien là à corriger. Cela n'en vaut pas la peine.

Mme Harel: C'était l'ancien...

M. Marx: Les dossiers que nous avons dans nos bureaux sur des électeurs et des électrices, est-ce que ceux-ci peuvent demander qu'il y ait des rectifications? Supposons que quelqu'un nous demande d'acheminer une demande de subvention à un certain ministère et par la suite c'est refusé à la personne. Est-ce qu'ils peuvent demander de vérifier leur dossier pour voir si ce qu'on a dit dans nos lettres était vrai?

Mme Harel: M. le député de D'Arcy McGee, encore une fois, si on relit la disposition, il reste que cette... Non, en fait, je pense que ce dossier doit être constitué pour un intérêt sérieux et légitime, parce que "toute personne - vous voyez, il faut faire référence à l'article 37 - qui constitue un dossier sur une autre personne doit avoir un intérêt sérieux et légitime à le faire". Si cet intérêt sérieux et légitime n'existe pas, c'est la constitution du dossier qui est mise en cause. Mais à partir du moment où il y a un intérêt sérieux et légitime à constituer un dossier, le droit corollaire c'est que la personne dont il est fait mention dans ce dossier peut le consulter.

M. Marx: Oui, mais on a toujours un intérêt sérieux et légitime... J'ai besoin d'une certaine information. Je vais recueillir cette information. Ce sera dans un dossier. Je vais demander des lettres de recommandation des personnes. Pour notre dossier d'activités de comté, on peut demander des lettres de recommandation des divers groupes dans le comté. On peut demander à l'association qui demande la subvention de nous fournir un bilan de ses activités et ainsi de suite. On se constitue un dossier. Est-ce que ces dossiers sont sujets à être rectifiés? Et si cela va pour le député, est-ce que cela va pour tout le monde, toute personne physique ou morale au Québec? Car la loi sur l'accès à l'information, quand même, c'est l'information qui est détenue par des organismes publics.

Mme Longtin: Mais dans la mesure où l'on considère - je peux peut-être ajouter

certains autres éléments - que les personnes ont aussi certains droits fondamentaux à leur honneur, à leur dignité, à leur réputation et à leur vie privée, lesquels sont exprimés dans la Charte des droits, et dans la mesure aussi où ces personnes dans leurs contacts avec autrui je révèlent, n'ont-elles pas aussi le droit de voir à ce que les documents qu'on fait sur elles soient corrects? C'est, comme Mme la députée le disait, un corollaire du droit de constituer ce dossier.

M. Marx: II n'y a pas de limite à cela. Ce sera possible pour chaque locataire de demander à son locateur de voir son dossier, le cas échéant - tout le monde doit avoir un dossier ou quelque chose - est-ce qu'il a téléphoné au locataire précédent? Est-ce qu'il a pris des notes qu'il a confiées au dossier? Le problème avec cet article, c'est qu'on ne connaît pas la portée et l'étendue de ce qu'on va toucher. Je ne dis pas que je suis contre l'idée ou la politique qu'on trouve dans l'article mais avant de l'approuver, j'aimerais savoir quelles en seront la portée et l'étendue. Je pense que par la rédaction de cet article, on va toucher des choses qu'on ne veut pas vraiment toucher.

Mme Harel: M. le Président, si vous me permettez, il est difficile de connaître la portée tant d'une disposition qui contiendrait, par exemple, le membre de phrase qu'on retrouvait dans l'article original "dans le but d'informer un tiers". Il est difficile tout en autant d'en connaître la portée. Il est difficile actuellement, compte tenu de l'état des travaux, de connaître la portée de ce que sera le respect de la réputation de la vie privée entre toute cette question d'information avec l'introduction des nouvelles technologies et de l'informatique. Cela reste très difficile.

M. Marx: Dans le but d'informer un tiers, c'est clair ce que cela veut dire. Cela veut dire les agences de crédit, cela veut dire les gens qui font...

Mme Harel: L'exemple que vous donnez en est précisément un bon: le locateur qui, pour ses fins propres, constitue un dossier sur chacun de ses locataires. À l'origine, cela peut être certainement pour ses fins propres, mais ses dossiers étant constitués, ce locateur se trouve à devenir membre d'une association - comme celle qui se développe actuellement - de propriétaires qui mettent en commun les différents dossiers déjà constitués. Ce n'est donc qu'au moment où il y a mise en commun de ces dossiers, mais cette mise en commun n'est pas connue par la personne concernée par un dossier qui aurait été constitué sur elle.

M. Marx: Si ce n'est pas dans le but d'informer une tierce personne, cela touche tous les dossiers que tout le monde a sur tout le monde et ce sont des dossiers assez innocents. Supposons qu'en tant que professeur j'ai fait une recommandation pour quelqu'un. Je me suis informé de quel genre d'étudiant il s'agissait. J'ai un dossier. Est-ce que l'étudiant a le droit de me demander de rectifier ce dossier? Je n'ai pas constitué le dossier dans le but d'informer une tierce personne mais si un autre professeur me téléphone et me demande ce que je pense d'un tel parce qu'il m'a demandé d'écrire une lettre. Je dis: Cela ne vaut pas la peine de faire une lettre de recommandation pour l'université Yale parce que ce n'est pas un bon étudiant. Je fais alors une note dans le dossier. Est-ce que ce dossier est sujet à être corrigé et rectifié, etc.? La réponse est peut-être oui, comme M. Pineau m'a suggéré.

Le Président (M. Gagnon): Si je comprends bien, l'article étant large, on a de la difficulté à saisir ce qu'on veut couvrir.

M. Marx: Le danger est que cela couvre des choses qu'on ne veut pas vraiment couvrir.

Mme Harel: Dans l'état actuel de la recherche devant conduire à une loi particulière, cette loi particulière pourrait venir restreindre la portée de dispositions semblables.

M. Marx: Jusque-là. (17 heures)

Mme Harel: Le contraire est vrai aussi. La loi particulière pourrait venir élargir l'application de cette disposition si tant est qu'on l'y maintient "dans le but d'informer un tiers". La loi particulière pourrait, à ce moment, venir élargir l'application de cette disposition en spécifiant dans quelles circonstances et avec quels motifs.

M. Marx: On ne peut légiférer aujourd'hui en fonction de ce qu'on pourra faire un jour, le cas échéant. Peut-on suspendre?

Mme Harel: Si vous voulez, on va suspendre jusqu'à demain matin.

Le Président (M. Gagnon): Je suspends les travaux pour deux minutes... Quelle était votre question, M. le député de D'Arcy McGee?

M. Marx: On va repenser cet article. Au deuxième alinéa, qu'est-ce que cela ajoute qu'on puisse corriger... Dans le premier alinéa, on parle de rectifier. Chaque correction sera une rectification.

Mme Longtin: Au premier alinéa, on

parle en général de rectification du dossier. Au second alinéa, on dit: Corriger l'information inexacte ou incomplète qui est au fond la forme ou la suppression. Donc la rectification se fait par le biais d'une correction ou par une suppression.

M. Marx: C'est cela. On explique davantage le premier alinéa. D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Nous allons retirer l'amendement. On y reviendra demain, si je comprends bien. Je suspends les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 2)

(Reprise à 17 h 4)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!. La sous-commission des institutions reprend ses travaux. Nous allons entreprendre l'étude de l'article 78.

Mme Harel: L'amendement a été distribué, je crois.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement vise à supprimer l'article 78. Est-ce cela?

Mme Harel: Oui, il s'agit de supprimer l'article 78. Le commentaire sur l'amendement. Cet amendement vise à supprimer la présomption à savoir que l'établissement d'une résidence fait présumer l'établissement du domicile, afin d'éviter les difficultés de preuve qui pourraient en résulter pour les personnes qui, temporairement ou pour exercer leurs fonctions, établissent une résidence, ce qui est le cas, entre autres, pour les époux.

Ces difficultés pouvaient être accrues en raison du retrait du deuxième alinéa de l'article 80 proposé. Par ailleurs, la présomption de l'article 79 que nous proposons de renforcer devrait suffire pour faciliter la preuve de l'établissement du domicile au lieu de la résidence lorsque le domicile ne peut être établi avec certitude.

M. Marx: Cela va? Pas de problème?

Le Président (M. Gagnon): Êtes-vous d'accord?

M. Marx: II faudrait peut-être voir l'article 79 avant.

Le Président (M. Gagnon): Si vous êtes d'accord, nous allons rouvrir l'article 79 parce qu'il était adopté.

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Nous allons voir l'amendement à l'article 79. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Cet amendement consiste, à la deuxième ligne...

M. Marx: On n'a pas reçu l'amendement à l'article 79.

Mme Harel: Vous n'avez pas reçu 79?

M. Marx: Oui? Ah, d'accord. Un instant.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Bon, à la deuxième ligne du premier alinéa, ainsi qu'à la première ligne du deuxième alinéa, l'amendement consiste à remplacer le mot "présumée" par le mot "réputée". L'article 79 amendé se lit comme suit: "La personne dont on ne peut établir le domicile avec certitude est réputée domiciliée au lieu de sa résidence. "À défaut de résidence, elle est réputée domiciliée au lieu où elle se trouve ou, s'il est inconnu, au lieu de son dernier domicile connu."

Cet amendement vise à renforcer la présomption prévue dans les cas où la preuve de l'établissement du domicile ne peut être établie avec certitude. Si les articles précédents ne sont pas appliqués, cela suppose que la preuve de l'intention n'a pu être suffisante.

M. Marx: Peut-on nous relire les articles 76 et 77?

Le Président (M. Gagnon): 76 et 77? M. Marx: Oui.

Mme Harel: Oui, on va en faire lecture.

Le Président (M. Gagnon): L'article 77 a été amendé.

M. Marx: L'article 76 aussi, je pense.

Une voix: Tel qu'amendé.

M. Marx: Pouvez-nous lire ces articles?

M. Cossette: Je ne pense pas les avoir ici.

M. Marx: Peut-être pouvons-nous demander au secrétaire de nous lire ces amendements.

M. Cossette: Je pense que ce serait plus certain.

Mme Harel: Vous pouvez en faire lecture, parce que j'ai, en fait, les amendements, mais je crois qu'il est préférable...

Le Secrétaire: De lire les amendements?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Gagnon): M. le secrétaire.

Le Secrétaire: À l'article 76, ajouter l'alinéa suivant: "La preuve de l'intention résulte des déclarations de la personne et des circonstances."

M. Cossette: Je pense que c'est dans le Code civil actuel.

Le Président (M. Gagnon): Cela va pour l'article 76? Et 77.

Le Secrétaire: À l'article 77, l'amendement consiste à remplacer la dernière ligne par ce qui suit: "On considère, pour l'établissement du domicile, celle qui a le caractère principal."

Mme Harel: L'article 77 tel qu'amendé se lit donc: "La résidence d'une personne est le lieu où elle demeure effectivement de façon habituelle; en cas de pluralité de résidences, on considère celle qui a le caractère principal."

Le Président (M. Gagnon): L'article 78 est supprimé par l'amendement à l'article 78.

M. Marx: Je pense que c'est l'article 78 qui nous a donné le plus de difficultés l'autre jour.

Le Président (M. Gagnon): Oui, parce que les autres étaient adoptés.

M. Marx: Oui, c'est cela. C'est cet article qui a causé des problèmes.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 78 est adopté. Donc, l'article est supprimé. C'est cela?

Mme Harel: Me Longtin, oui?

Mme Longtin: Avec la suppression de l'article 78, cela se trouve à être, sauf pour la notion de résidence, le maintien du droit actuel quant à la preuve et à l'établissement du domicile, sauf que l'article 79 vient créer une présomption résiduaire; donc, si on n'a pas pu l'établir autrement, c'est la résidence.

M. Marx: C'est cela. Cela peut être assez difficile. D'accord. Parfait.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 78 est adopté. L'article 78 est supprimé, l'amendement à l'article 79 est-il adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): L'article 79 tel qu'amendé est adopté. Est-ce cela?

Mme Harel: C'est bien cela.

Le Président (M. Gagnon): Nous ne pouvons adopter l'article 1 parce que l'article 36 est encore en suspens.

Une voix: C'est cela, l'article 38. Le Président (M. Gagnon): 38.

Mme Harel: Maintenant, nous pourrions disposer de l'article 193.

Le Président (M. Gagnon): Article 193? Mme Longtin: Il s'agirait de le rouvrir.

Le Président (M. Gagnon): De le rouvrir, parce qu'on ne l'a pas dans la liste.

Mme Harel: De le rouvrir.

Le Président (M. Gagnon): La sous-commission est-elle d'accord pour rouvrir l'article 193? Oui?

Mme Harel: L'amendement consiste, à la première ligne, à remplacer les mots "tout majeur" par "toute personne physique", et l'article se lit comme suit: "La tutelle est une charge personnelle, accessible à toute personne physique capable du plein exercice des droits civils et apte à exercer la charge."

Le commentaire. Cet amendement vise à éviter tout doute sur l'aptitude du mineur pleinement émancipé à agir comme tuteur. Ce dernier est réputé capable comme tout majeur des actes de la vie civile, mais une difficulté d'interprétation pourrait être soulevée lorsqu'on semble poser la majorité comme une condition pour agir.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Gagnon): L'amendement à l'article 193 est adopté. L'article 193 qu'on a rouvert tantôt est réadopté tel qu'amendé.

M. Marx: C'est cela.

Le Président (M. Gagnon): Cela va? On se comprend bien? Là, on le referme.

Mme Harel: On devrait maintenant

procéder à l'étude de l'article 298.1.

Le Président (M. Gagnon): L'article 298.1. C'est un nouvel article qu'on avait adopté.

Mme Harel: Oui. M. Cossette: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous acceptez de rouvrir cet article pour le réétudier?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Oui? J'appelle l'article 298.1.

Mme Harel: L'amendement consiste à faire un article du troisième alinéa de l'article 298.1 et à numéroter ce troisième alinéa, devenu 298.1, 298.2.

Le Président (M. Gagnon): Vous scindez l'amendement qu'on avait adopté qui faisait l'article 298.1. Vous prenez le troisième alinéa et vous en faites l'article 298.2.

Mme Harel: Peut-être, M. le secrétaire, pourriez-vous faire la lecture de l'article 298.1.

M. Marx: Qu'est-ce au juste?

Mme Harel: C'est une règle de compensation.

Mme Longtin: C'est une règle de compensation.

M. Marx: Une règle de?

Mme Longtin: De compensation.

M. Marx: C'est une question de renumérotation.

Mme Longtin: Découlant de la suppression de l'article 78.

M. Marx: D'accord. J'ai compris.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez compris.

M. Pineau: II y a un amendement à l'article 298.2.

Mme Harel: Oui, une fois numéroté 298.2, l'amendement consiste, au troisième alinéa, qui est devenu 298.2, à remplacer au début les mots: "S'il y a lieu d'agir en dehors de ces cas" par "Hors les cas du mandat ou de la gestion d'affaires, s'il y a lieu d'agir". Quand le secrétaire aura retrouvé le troisième alinéa, il nous fera lecture de l'article 298.1.

Le Président (M. Gagnon): Cela devient 298.2.

Mme Longtin: Est-ce que vous avez le texte?

Le Secrétaire: Oui. Il y a un changement de texte.

Mme Harel: C'est cela. Voulez-vous nous faire lecture de l'article 298.1?

Le Secrétaire: Le premier amendement? Le Président (M. Gagnon): Oui.

Le Secrétaire: D'accord. Le premier amendement à l'article 298.1. "L'acte par lequel le majeur a déjà chargé une autre personne de l'administration de ses biens continue de recevoir exécution malgré l'instance, à moins que, pour un motif sérieux, cet acte ne soit révoqué par le tribunal. "En l'absence d'un mandat donné par le majeur ou par le tribunal en vertu de l'article 476, on suit les règles de la gestion d'affaires et le Curateur public ainsi que toute autre personne qui a qualité pour demander l'ouverture du régime peut faire, en cas d'urgence, les actes nécessaires à la conservation du patrimoine. "S'il y a lieu d'agir en dehors de ces cas pour éviter un préjudice sérieux, le tribunal peut désigner provisoirement le Curateur public ou une autre personne soit pour accomplir un acte déterminé, soit pour administrer les biens du majeur dans les limites de la simple administration."

Mme Harel: C'est ce dernier alinéa qui vient d'être lu qui serait modifié par l'amendement qui consiste à remplacer les mots: "S'il y a lieu d'agir en dehors de ces cas" par "Hors les cas du mandat ou de la gestion d'affaires, s'il y a lieu d'agir".

Le Président (M. Gagnon): Voilà. Est-ce que...

M. Marx: Oui, adopté.

Le Président (M. Gagnon): ...l'amendement à l'article 298.1 est adopté?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gagnon): Adopté.

M. Marx: Est-ce que le président peut nous assurer que le livre premier comportera 399 articles après la renumérotation?

Mme Harel: Je ne sais pas si le président peut l'assurer, mais les experts le peuvent.

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Nous allons suspendre pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise à 17 h 20)

La réserve successorale

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre'. M. le ministre de la Justice, je vous laisse la parole.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je vous remercie et je remercie les membres de la commission de bien vouloir me laisser quelques minutes pour parler d'un sujet qui intéresse au plus haut point tous les membres de la commission, je le sais, soit la réserve dans le chapitre Des successions.

Avant d'évoquer ici la démarche que je me réserve de vous proposer, je voudrais, d'une part, remercier la députée de Maisonneuve pour le travail de leader du Code civil, si je peux m'exprimer ainsi, qu'elle a assumé depuis toutes ces semaines, et, évidemment, tous les gens de l'équipe qui l'ont appuyée. Je voudrais aussi faire mes remerciements au député de D'Arcy McGee en particulier et à ses deux collègues de Sainte-Anne et de Saint-Laurent. Je sais que vous avez abattu un travail considérable. Je vous dirai qu'il m'est arrivé de parcourir la transcription de vos débats; il m'est arrivé aussi à l'occasion d'écouter vos débats par le perroquet que nous avons dans nos bureaux. Je sais que tous les membres de la commission, de part et d'autre autour de la table, avec le soutien, entre autres, du professeur Pineau du côté de l'Opposition, et vous-même, M. le Président, avec votre patience sur de ces choses arides, mais néanmoins fascinantes, aurez contribué à faire avancer de façon remarquable la réforme du Code civil. Je vous le dis tout à fait modestement étant donné que je considère que ma contribution aura été celle de préparer le projet de loi 20 avec mes fonctionnaires, mais je suis conscient que le gros du travail aura été fait par les membres de l'Assemblée nationale qui siègent ici.

Sur la réserve et la distribution des actifs à la suite de l'ouverture d'une succession et les droits du conjoint survivant ou des enfants, je crois qu'on peut dire que le problème a été cerné de la façon suivante: nous partons d'une situation de liberté de tester et d'option. Il est de l'avis du gouvernement, et je crois aussi que cela semble être un consensus des membres de la commission, que nous pouvons intervenir dans cette notion de liberté de tester, et ce, à la lumière non seulement d'un certain nombre d'objectifs sociaux qu'on s'est donnés au Québec pour que notre Code civil, dans cette partie de son droit, reflète l'évolution de notre société depuis une vingtaine d'années, mais également à la lumière du droit étranger et, notamment, du droit d'inspiration civiliste qu'on retrouve à l'étranger.

Les hypothèses qui se présentaient devant nous étaient donc celle de la créance de nature alimentaire, celle de la réserve en usufruit ou non, et la notion possible de partage, je sais, qui a été évoquée quant à la copropriété, par exemple, de la maison, des meubles et de l'automobile. Les avantages et les inconvénients à la fois au niveau des principes de conciliation dans notre droit civil, de clarté pour les justiciables de savoir à quoi ils s'attendent, de recherche d'une certaine efficacité et d'une judiciarisation qui ne serait pas excessive, je crois, nous ont amenés à considérer, encore une fois majoritairement auprès des membres de la commission, que la réserve est sans doute une approche plus adéquate que la créance alimentaire. Il reste cependant qu'à l'intérieur de cette notion, puisque nous parlons de limitation de la liberté de tester, on répond, je crois, à un certain nombre de questions et j'ai cru m'en rendre compte en relisant la transcription de vos travaux autour de ces questions, en étant présent aussi à une séance - comment dites-vous? - informelle, à une séance de travail de la commission. De toute évidence, le cumul des avantages entre le régime matrimonial et les conséquences d'un testament avec réserve pour le conjoint survivant, les dimensions de planification fiscale, l'identification des bénéficiaires: le conjoint et/ou les enfants - les enfants, est-ce les mineurs ou non, est-ce les adultes, mais à charge? - la notion de paiement différé, qu'a, d'ailleurs, soulevée, à sa façon, le député de Saint-Laurent en cours de route, en nous donnant quelques exemples qui, en cela, reprenaient, d'ailleurs, les considérations que m'avaient livrées d'autres députés de l'Assemblée nationale qui, sans participer à vos travaux, de part et d'autre de la Chambre s'étaient intéressés à ces questions, la notion de quote-part et de plafond constituent des choses qu'il faut "très bien identifier; je crois qu'elles sont bien identifiables. Le droit comparé, notamment quant à l'application simultanée de dispositions en matière de liquidation de la communauté ou des biens en communauté, s'il s'agit du régime des acquêts; la question

de l'harmonisation des dispositions en matière de droit successoral versus le partage de ce qui fait l'objet de la communauté dans le régime d'application générale, c'est-à-dire la communauté d'acquêts, ou encore dans le régime de la communauté de biens, soulèvent toute la question de comment se vit ce droit comparé.

Je crois qu'il est normal que les collègues de l'Assemblée soient intéressés à en connaître un peu plus long sur ces questions. En effet, on peut remarquer - si je me souviens bien, c'est dans le cas du droit espagnol - qu'il y a une sorte d'étanchéité entre les deux régimes où il y a carrément, dans certains cas, l'impossibilité pour le conjoint d'accéder à la succession s'il bénéficie d'un partage de la communauté de biens.

Il faut donc, à partir des orientations que nous avons privilégiées autour de la réserve héréditaire, en tenant compte des commentaires venant des organismes, tels le Barreau et la Chambre des notaires, en arriver à répondre à ces préoccupations et à ce questionnement des députés et, deuxièmement, en arriver à établir une hypothèse pouvant faire l'objet d'un consensus. Nous pourrions simplement dire: Oui, le gouvernement n'a qu'à trancher, une fois pour toutes, dans la réserve, nous proposer une formule et on sera pour ou contre.

Il faut être bien conscient que, quand on touche au Code civil, on y touche pour un petit bout de temps. Cela m'étonnerait qu'on rouvre la question de la réserve, éventuellement, d'ici cinq, dix, quinze ou même cinquante ans. Il va falloir vivre un certain temps avec ce que nous adopterons. Je souhaiterais donc que le régime avec lequel nous considérons que le Québec peut vivre et doit vivre dans ce domaine, un domaine d'une très grande sensibilité, soit choisi avec une approche qui soit la plus approfondie et la plus réfléchie possible, et où nous savons que nous avons répondu à chacune des questions. Il ne s'agit pas d'y aller avec une orientation idéologique. Je crois qu'il faut pouvoir répondre à toutes les questions légitimes que peuvent se poser les membres de l'Assemblée nationale autour de ces limites que nous introduisons à la liberté de tester.

Dans les circonstances, je me propose donc de fournir aux membres de la commission, d'ici à la fin du mois de juillet, un document qui répondra aux différents aspects que je viens d'évoquer, en précisant quelles étaient les hypothèses, quels sont les problèmes qui ont été soulevés à l'égard de la réserve, les différents mécanismes possibles, le tout avec des éléments de droit comparé, notamment quant à la concomitance de l'application du régime de droit matrimonial et des successions.

J'ai une intuition de l'endroit où on pourrait déboucher. Je me suis fait, après plusieurs lectures et plusieurs discussions, une idée de ce que sera le résultat, que je me suis permis de partager avec une seule personne, mais j'ai l'impression que je sais où cela va aboutir. Néanmoins, je pense qu'il faut cheminer. Si je me trompe, je me trompe et, si j'ai raison; j'ai raison et c'est tout, mais je pense qu'il faut cheminer très précisément. II faut, au moment où nous passerons à l'adoption en troisième lecture de ce projet de loi 20, compte tenu de l'énorme travail accompli par les membres de la commission, que nous soyons certains d'avoir bien honnêtement et bien sincèrement pesé et soupesé tous les aspects de la technique de réserve que nous serions appelés à adopter et que nous pouvons tous vivre avec ce choix, le mieux possible, en ayant fait valoir nos points de vue réciproques.

M. le Président, je m'engage à faire parvenir aux membres de la commission, par votre entremise ou celle du secrétariat, un document, d'ici à une, quinzaine de jours environ, qui fera une synthèse de tous ces éléments, y compris les hypothèses que nous pourrions retenir. Je souhaite, par le fait même, que votre commission, qui doit se réunir au mois d'août pour un mandat d'initiative concernant la Commission de police, puisse, à ce moment ou dans les jours qui précéderaient, une fois que tout le matériel aura été digéré et partagé, se prononcer sur la technique qui sera proposée.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, je dois admettre qu'à ce moment je suis un peu surpris que le ministre nous arrive avec une proposition de réétudier un chapitre du projet de loi 20 sans l'adopter avant la fin de cette semaine. Nous sommes ici depuis le mois de mai. L'Opposition était d'accord pour siéger tout de suite après la fermeture de l'Assemblée nationale, et cette semaine aussi, pour permettre l'adoption de ce projet de loi et permettre aux légistes qui ont travaillé depuis des années sur ce projet de loi d'aller en vacances, après avoir adopté ce Code civil. Cela a l'air qu'ils seront bien déçus, avec beaucoup d'autres personnes, et moi aussi, parce que, si ce n'était pas pour adopter le projet de loi 20 au complet, je ne sais pas pourquoi on a siégé au début de juillet. On aurait pu faire cela, comme le ministre vient de le suggérer, vers la fin d'août ou au début de septembre, en octobre ou après les prochaines élections, je ne sais pas quand.

Je pense que c'est pressant d'adopter ce projet de loi 20. Sinon, toute l'adoption

du Code civil, serait, comme on dit, entre guillemets, "stallée" encore des mois, si ce n'est des années. Ce n'est pas un projet de loi prioritaire pour un gouvernement. Je ne veux pas porter préjudice au travail de ce gouvernement sur le Code civil, mais, en général, ce n'est pas un projet de loi prioritaire. On a d'autres choses à faire où il y a plus de pression pour agir vite.

En ce qui concerne le fond du problème, la sous-commission a bien rejeté la possibilité d'adopter un régime de créance alimentaire parce que nos députés praticiens nous ont dit que cela ne fonctionnerait pas, que ce serait nid à procès et que cela allait causer beaucoup de problèmes. C'est pourquoi cela a été rejeté.

En ce qui concerne d'autres régimes possibles, il y a un document au ministère de la Justice sur au moins une vingtaine de pays, si ce n'est pas plus. On a le régime matrimonial, les successions, la protection légale et les remarques. Donc, le ministère a déjà fait l'étude de toutes les possibilités.

Maintenant, on nous dit qu'on va nous fournir un autre document pour encore examiner les possibilités. Je pense que la raison pour laquelle le ministre n'est pas prêt à adopter quoi que ce soit dans ce chapitre, c'est que le gouvernement n'a pas pris position, qu'on ne sait pas ce qu'on veut faire.

Peut-être puis-je poser une question facile: Est-ce qu'entre les régimes... Premièrement, je pense que tout le monde est prêt à dire qu'on va limiter la liberté de tester d'une façon ou d'une autre. Le ministre dit qu'il est d'accord. Deuxièmement, on a rejeté la créance alimentaire. Le ministre fait signe que c'est vrai aussi. Troisièmement, je pense que le ministre favorise la réserve successorale. II me fait signe... Donc, je veux que les signes soient enregistrés.

Une voix: Ce n'est pas télévisé.

M. Marx: Ce n'est pas télévisé. Donc, si je comprends bien, le ministre veut avoir le temps de se pencher sur la plomberie d'un tel régime. C'est cela?

M. Johnson (Anjou): Si vous me permettez d'intervenir.

M. Marx: Oui.

M. Johnson (Anjou): Je pense que jusqu'à maintenant le député a bien suivi le cheminement. Dans le fond, quand on arrive dans la technique de la réserve héréditaire, c'est quand même significatif. Par exemple, j'ai vu un de nos collègues, ici, autour de cette table, à l'occasion d'une réunion, alors que nous discutions de la technique de la réserve héréditaire, reposer la question de la liberté de tester. Je comprends que les choses ont évolué depuis ce temps, et tant mieux, mais à chaque élément de la réserve héréditaire il y aura beaucoup de questions qui seront posées. Il faut, pour nous, répondre à certaines choses qui sont soulevées par les députés. Le rôle des députés, dans un projet de loi comme celui-ci, en tout cas, M. le Président, m'apparaît évident, c'est d'être d'authentiques législateurs pour éclairer les décisions que nous allons prendre. Il ne s'agit pas d'une loi de nature purement technique; il s'agit d'une loi qui régit les rapports privés de tous les citoyens. Il y a là des conceptions philosophiques, des priorités sociales, une appréciation qu'on fait de la judiciarisation ou non, de l'équilibre qui doit exister entre les mineurs, les personnes à charge, le conjoint survivant et l'importance du régime matrimonial, qui sont toutes des questions très importantes.

Je vous dis encore une fois que j'ai une très bonne idée de l'endroit où on pourrait aboutir, mais je ne voudrais pas que, sur une chose aussi importante dans notre Code civil, l'on soit dans une situation où le débat se prolonge jusqu'en troisième lecture de façon telle que la commission n'ait pas fouillé vraiment cet aspect, ne serait-ce que pour y consacrer une journée et demie. Une fois que tout le monde aura lu les documents et les hypothèses formulées, il faut vraiment que ce soit avec une grande satisfaction sur le plan intellectuel, sur le plan de l'esprit et de notre compréhension, que nous proposions à l'Assemblée nationale d'adopter la troisième lecture en ce qui concerne cet aspect en particulier.

Le cheminement que je vous propose, s'il est vrai que nous avons l'essentiel de ce qu'il faut pour arriver à la décision, une fois qu'on aura établi ce qu'est l'hypothèse, il faudra, pour chacune des questions que les membres de la commission posent, que nous ayons les réponses et non pas que nous disions: Bien, on ne le sait pas. Enfin, il faudra au moins savoir qu'on n'a pas les réponses.

Je vous donne un exemple tout récent qui est arrivé. On a soulevé toute cette question: Oui, mais qu'est-ce qui arrive dans le cas de la communauté? Est-ce que cela ne fait pas que le conjoint a 75 % de la succession, à toutes fins utiles? Est-ce qu'on vient de limiter la liberté de tester ou si on vient, finalement, de faire un autre type de choix? Il y a des réponses à cela. Il y a des techniques qui nous permettent aussi de modifier le projet de loi de telle sorte qu'on atteigne les objectifs qu'on considère être ceux qu'on vise. Pour l'essentiel, ce que nous visons dans la technique de la réserve, en plus de la notion d'efficacité, c'est essentiellement de nous assurer qu'un conjoint survivant, des enfants mineurs et

des enfants à charge ne soient pas laissés sur le carreau. On se comprend bien pour ce qui est de l'objectif.

À partir de là, il faut s'assurer que la mécanique qu'on va utiliser dans le Code civil nous permette d'atteindre cet objectif sans créer des effets pervers, d'une part, et, d'autre part, de répondre avec beaucoup de précision à ce que soulevait, par exemple, le député de Saint-Laurent; c'est également l'opinion, je crois, du leader de l'Opposition avec qui j'ai eu l'occasion d'en discuter, comme cela, privément, M. Gérard D. Levesque, le député de Bonaventure. Quand on arrive à l'application de la réserve à l'égard des mineurs, est-ce que des dons différés, par exemple, ne devraient pas être pris en compte? Est-ce qu'on devrait établir un régime d'option qui soit différent de celui que nous avons à l'égard du conjoint, en fonction de la part de la succession qui est divisible, par opposition à la part qui serait, par exemple, non divisible, mais faisant partie du patrimoine successoral?

Il faut pouvoir répondre à chacune de ces questions dans notre hypothèse. C'est ce que je m'engage, au nom du ministère, à vous faire produire d'ici à une quinzaine de jours à partir d'une hypothèse qui tentera de répondre à chacune de ces questions qui ont été soulevées lors de la discussion en commission.

M. Marx: Si je comprends bien, le gouvernement est favorable et s'engage à déposer un projet en ce qui concerne la réserve successorale.

M. Johnson (Anjou): C'est le projet que j'ai effectivement. Mais j'aurai, à l'égard de certaines questions, le même type d'interrogation de la part des collègues du Conseil des ministres sur l'application de la réserve que j'ai eue de la part des membres de la commission.

M. Marx: Est-ce que c'est le projet du ministre ou si c'est le projet du gouvernement?

M. Johnson (Anjou): Je crois que ça finira par être le projet de la commission parlementaire.

M. Marx: Non. Maintenant, est-ce que...

M. Johnson (Anjou): C'est du droit civil, c'est là pour longtemps. C'est un projet du Parlement.

M. Marx: Comme le ministre explique cela, la réserve successorale, ce n'est pas encore la position du gouvernement du Québec. Cela commence là. Si le ministre veut me dire que c'est moi en tant que parlementaire, parce que c'est l'Assemblée nationale qui va adopter la loi 20, qui pourrait déposer son projet sur la réserve successorale, je vais m'empresser de le faire.

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, je n'ai pas entendu. Vaut peut-être mieux pas. Je relirai la transcription.

M. Marx: Non, il n'y a rien là. C'est parce que le ministre parle d'un projet qui sera adopté par l'Assemblée nationale où tous les députés sont égaux et ainsi de suite. Si le ministre veut que ce soit moi qui dépose ce projet sur la réserve successorale, je pourrais tenter de faire un brouillon de projet.

M. Johnson (Anjou): Peut-être que, dans une séance de travail, ce serait intéressant que la députée de Maisonneuve, avec le député de D'Arcy McGee, nous rédige quelque chose. Cela serait magnifique.

M. Marx: Oui. J'aimerais savoir quelle est la position du gouvernement, c'est-à-dire est-ce que le gouvernement est pour la réserve successorale? Je pense que c'est une question assez simple.

M. Johnson (Anjou): Le gouvernement est favorable au principe de la limitation de la liberté de tester à partir de l'objectif que je décrivais tout à l'heure: ne laisser personne sur le carreau. Par ailleurs, au gouvernement, les mêmes questions se posent quant à la technique qui sera utilisée dans la réserve successorale et ses effets sur les régimes matrimoniaux, ses effets sur la planification fiscale, ses effets quant au paiement différé dans le cas des mineurs. Je pense que le député comprendra que ce type de discussion se tiendra au Comité de législation et que la commission nous a éclairés beaucoup sur un certain nombre de questions.

M. Marx: Donc, si je comprends bien, le gouvernement n'est pas prêt à se prononcer, à ce moment-ci, sur la réserve successorale. Cela peut être la créance alimentaire modifiée par rapport au projet qu'on trouve dans le projet de loi 20, et ainsi de suite. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Johnson (Anjou): Vous avez bien compris que la décision du Conseil des ministres était de limiter la liberté de tester en fonction des objectifs que j'évoquais, que le gouvernement a publié dans le projet de loi 20 une approche qui était celle de la créance alimentaire, donc, qu'il n'a pas débattu, au moment où il a présenté ce projet, de la notion de réserve héréditaire dans les détails. Les deux hypothèses ont été présentées aux fins de discussion en commission parlementaire et c'est ainsi,

d'ailleurs, que le libellé de la décision du Comité de développement social, je crois, était rédigé, puisque j'ai participé à la fois au Comité de législation, au Comité de développement social, à celui de la condition féminine et au Conseil des ministres sur cette question. Nous avions retenu la créance alimentaire pour les fins du dépôt du projet de loi 20, avec la compréhension que la notion de réserve serait soulevée lors de la commission et que je devrais retourner par la suite... Pardon?

M. Marx: Ce serait soulevé par qui?

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'elle a été soulevée par des intervenants. Elle a été soulevée...

M. Marx: Par l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): Elle a été soulevée par des membres...

M. Marx: Vous avez compté sur l'Opposition pour soulever cette question.

M. Johnson (Anjou): Nous avons compté sur les efforts de tous les députés.

M. Marx: Le ministre est sage.

M. Johnson (Anjou): De temps en temps.

M. Marx: Bon, c'est pour que ce soit clair pour tout le monde, parce que le ministre parlait d'une façon elliptique. (17 h 45)

M. Johnson (Anjou): II faut bien comprendre aussi, si vous me permettez juste d'ajouter ceci, M. le Président, que, dans la mesure où le projet de loi 20 contenait la notion de créance alimentaire, nous ayons interrogé certains des intervenants en leur disant: Parlez-nous donc de la réserve un peu. Dans le fond, la conclusion, l'espèce de consensus, c'est qu'on se dirige vers la réserve. Il faut être bien conscient que, si on adopte et si je vous dépose l'hypothèse que je vois comme celle qui serait l'aboutissement à peu près logique de tout cela, on va le faire dans un contexte où peut-être ce ne sera pas ventilé suffisamment, parce que les gens ont travaillé au projet de loi 20. Ils n'ont pas travaillé à l'hypothèse dont on parle. Il faut maintenant permettre aux gens de travailler à l'hypothèse et de répondre à l'ensemble des questions et des préoccupations.

M. Marx: Maintenant, qu'est-ce que le ministre va faire? Est-ce qu'il va nous expliquer les démarches?

M. Johnson (Anjou): Disons que, d'ici une quinzaine de jours, je ferai parvenir aux membres de la commission... On comprendra que j'aurais bien aimé le faire avant; cependant, nos experts de ces questions étaient retenus par vos travaux. Je pense qu'ils pourront se libérer à travers le soleil d'été dans la région de Québec pour nous aider à confectionner un document qui va ramasser toute cette question, les tenants et les aboutissants, l'hypothèse que nous formulons pour répondre aux préoccupations qui ont été soulevées par la commission. À partir de ce document, nous pourrions élaborer une proposition de réserve.

M. Marx: C'est qui, "nous"?

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, c'était peut-être un... Je pourrais ou, enfin, mon adjoint parlementaire, le cas échéant, pourrait déposer à la commission un projet.

M. Marx: Mais j'ai un document de trois pages ici qui explique pas mal les successions ou la réserve successorale et d'autres possibilités. Je pense que je peux vous envoyer une copie de ce document. Cela va...

M. Johnson (Anjou): II y a des hypothèses auxquelles on travaille au ministère, vous savez.

M. Marx: C'est cela, mais ici on...

M. Johnson (Anjou): On travaille tout le temps au ministère.

M. Marx: ...a résumé les hypothèses. On peut vous donner cela; donc, le premier document est prêt. Maintenant, dans quinze jours, ce sera prêt, on va nous donner...

M. Johnson (Anjou): Un document plus exhaustif, plus définitif, plus précis.

Mme Harel: Sur les modalités.

M. Marx: Sur les modalités, mais dans quinze jours on n'aurait pas les articles?

M. Johnson (Anjou): Oui, ce qu'on aurait, c'est qu'on vous proposerait l'état de la question, le droit actuel, l'hypothèse de la réserve avec les problèmes que cela soulève, le droit comparé et l'orientation qu'on privilégie à partir de cela.

M. Marx: Mais, est-ce que ce sera en forme d'un chapitre quatrième pour remplacer le chapitre quatrième qui se trouve aux articles 703 à 716? C'est ce qu'on veut.

M. Johnson (Anjou): Ce sont effectivement les seize ou dix-sept articles

du chapitre quatrième, 703 à 716 inclusivement.

M. Marx: Donc, dans quinze jours, on aura le document. Quand va-t-on avoir l'ensemble de ces articles?

M. Johnson (Anjou): Dès que le document est prêt, on vous le fait parvenir et on peut tenir pour acquis qu'on ne demandera pas à la commission de se réunir sans discuter sur des textes qui sont au chapitre quatrième.

M. Marx: Mais, est-ce que la commission va discuter sur le document ou sur l'ensemble des articles? Il y a une différence; on ne peut pas les rédiger à quinze.

M. Johnson (Anjou): Je pense que la commission devrait discuter sur les articles, mais je veux m'assurer que nous avons les documents d'appoint, que le travail a été fait de part et d'autre et qu'on ne se sent pas obligés de réinviter l'allumette dans tous les cas. S'il y a des considérations qui nous sont fournies par les collègues et qui ne sont pas présentes dans notre document, encore une fois, on les écoutera. Mais on pense qu'à travers le débat qu'il y a eu ici, à la fois en séance de travail et en commission, comme à travers les discussions que j'ai pu avoir avec quelques collègues autrement ou, enfin, dans les couloirs privément durant la session, je pense que le document qu'on va produire devrait répondre a l'ensemble des questions qui ont été soulevées.

M. Marx: Donc, le document sera prêt dans quinze jours ou vers la fin du mois de juillet.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

M. Marx: D'accord. Quand est-ce que le ministre entend déposer les articles?

M. Johnson (Anjou): On pourrait peut-être faire cela quelque part au début du mois d'août.

M. Marx: Oui, au début du mois d'août. Mais je ne veux pas poser de questions qui touchent au fonctionnement du gouvernement. De toute façon, le ministre...

M. Johnson (Anjou): Cela fonctionne, le gouvernement, douze mois par année.

M. Marx: ...ne répondra pas s'il ne le veut pas. Est-ce qu'on va avoir des articles qui ont déjà été adoptés par le Comité de législation, par le Conseil des ministres et par tout le monde pour qu'on ne discute pas pour rien?

M. Johnson (Anjou): Le Conseil des ministres est prêt à donner un mandat aux ministres participant au Comité de législation pour approuver un texte définitif.

M. Marx: Donc, les articles qu'on va recevoir seront des articles déjà approuvés par le gouvernement.

M. Johnson (Anjou): Effectivement.

M. Marx: Donc, cela resterait à la commission de faire des modifications mineures ou majeures, le cas échéant, comme toujours.

M. Johnson (Anjou): C'est ça. Puisque le député me posait des questions, il me permettra de lui en poser. Comme je ne peux pas lui en poser à lui du côté de l'Assemblée nationale, je peux peut-être lui en poser au moment où on est au salon rouge. Alors est-ce que je comprends bien que, si nous avions un projet qui consacre le principe de la réserve par opposition à la créance alimentaire, nous aurions un consentement de l'Opposition sur cette approche? Est-ce que j'ai bien compris l'objet des débats?

M. Marx: L'Opposition ne légifère pas, l'Opposition réagit aux documents et aux lois déposés par le gouvernement. Si on veut changer les rôles, l'Opposition est prête.

M. Johnson (Anjou): Mais ça, on va essayer d'y voir.

M. Marx: On aimerait légiférer avec le ministre, mais il ne nous donne pas cette occasion.

M. Johnson (Anjou): Justement, M. le Président, c'est ce que j'offre aux membres de la commission. Mais, est-ce que je dois bien comprendre.,.

M. Marx: Mais, comme réponse, le ministre a, bien sûr, lu le Journal des débats du 14 juin qui fait état de la discussion en sous-commission et des positions qui ont été prises par les quatre députés qui étaient ici.

M. Johnson (Anjou): Oui, voilà. J'aimerais bien cela, M. le Président; c'est juste une question de savoir, parce qu'après tout c'est le Code civil et on ne veut pas jouer à la politique avec le Code civil.

M. Marx: C'est ça.

M. Johnson (Anjou): C'est trop fondamental pour s'adonner à des exercices qui nous amèneraient trop facilement sur la pente savonneuse de la démagogie. Je suis conscient que la réserve héréditaire et la

limitation de la liberté de tester, c'est une liane graissée pour quelqu'un qui se promène d'arbre en arbre. Je voudrais quand même essayer de dégager de ces discussions ce qui me semble être un consensus et je voudrais que le député me corrige si je me trompe. J'ai cru comprendre qu'il y a un consensus quant à la notion de liberté de tester qui peut être limitée en fonction des objectifs qu'on a évoqués tout à l'heure. Je ne me trompe pas là-dessus?

M. Marx: Le ministre peut lire le Journal des débats, il va tout comprendre. Il y a un certain nombre d'articles que le gouvernement a insisté pour qu'on adopte malgré l'opposition de l'Opposition et il y a un certain nombre d'articles qu'on a adoptés sur division. J'imagine que, si le ministre a une politique qui est approuvée par le Conseil des ministres, approuvée par le Comité de législation, ce sera l'Opposition qui va l'empêcher d'adopter cette politique.

M. Johnson (Anjou): Je comprends, M. le Président, que le député de D'Arcy McGee excelle dans ces choses et qu'il fait une pirouette que je ne lui reproche pas. J'essaie juste de comprendre parce que j'ai effectivement lu la transcription du Journal des débats. J'y ai trouvé des choses qui semblaient un peu incompatibles avec une séance de travail. Je comprends qu'il est toujours plus facile pour l'Opposition d'expliquer que oui, mais le caucus ne s'est pas prononcé. J'aimerais savoir si le député parle au nom de l'Opposition quand il nous dit que: Oui, on accepte la limitation à la liberté de tester.

M. Marx: Je trouve la question assez curieuse parce que le ministre, quand il dépose des projets de loi, des articles ou des modifications, n'a jamais demandé à l'Opposition ou aux députés indépendants s'ils les approuvent au s'ils ne les approuvent pas. Ce serait une drôle de façon de légiférer.

M. Johnson (Anjou): Je comprends...

M. Marx: Si le ministre veut que ses projets de loi soient élaborés avec la collaboration de l'Opposition et que l'Opposition forme un comité de législation, c'est une possibilité. Mais que je sache, jusqu'à ce moment-ci, cela a toujours été à l'initiative du gouvernement. L'Opposition ne légifère pas, en ce sens que nous n'avons pas l'initiative. Mais si vous voulez nous donner l'initiative et renverser les rôles, nous sommes prêts.

M. Johnson (Anjou): On n'a qu'à faire trois élections partielles. Bon.

M. Marx: Mais il ne faut pas...

Le Président (M. Gagnon): À ce moment-ci, je voudrais résumer pour savoir si j'ai bien compris.

M. Johnson (Anjou): Juste avant, M. le Président, si vous le permettez, tout simplement pour que cela soit bien clair entre nous. Encore une fois, le Code civil n'est pas exactement un projet de loi comme les autres. Cela nous a pris cent ans avant de le refaire et nous sommes au stade où on est en train de le refaire. Je comprends très bien la dynamique que décrit le député de D'Arcy McGee sur la responsabilité gouvernementale de la majorité parlementaire. Je croyais que nous avions fait, cependant, pendant l'étude de ce projet de loi, un effort particulier d'aller juste au-delà des lignes de parti pour essayer de doter le Québec d'un instrument qui soit le meilleur possible et auquel le législateur ne touchera pas pour un certain nombre d'années.

Je me refuse de voir dans les propos du député une tentative de se garder en réserve pour ensuite dénoncer ce que serait la proposition gouvernementale. Je trouverais cela d'un cynisme dont il n'est pas capable. Mais je comprends aussi, M. le Président, que le député a dit ici et répété à plusieurs reprises qu'il était en faveur de la limitation de la liberté de tester. Je crois que certains de ses collègues ont affirmé cela, mais je sais aussi que beaucoup de ses collègues ne partagent pas son opinion et qu'ils ont probablement la même réaction que j'ai eue le jour où, comme ministre de la Justice, mes fonctionnaires m'ont présenté ce projet de loi en disant: Mon Dieul Qu'est-ce que c'est cela? On va limiter la liberté de tester. Cela n'a pas de sens. Alors, on s'y remet, on lit un peu et on se rend compte que ce n'est pas la révolution et qu'à toutes fins utiles on fait ce qui se fait dans la plupart des sociétés civilisées. On n'est pas en train de créer des précédents et on n'est surtout pas en train de dire au monde qu'on est en train de limiter leur liberté en tant que citoyens, d'une façon indéfendable et absolument caractéristique de ce gouvernement oppresseur des personnes.

En pratique, on en arrive à un choix entre la créance et la réserve. L'approche en général de "common law", c'est la créance. L'approche en général civiliste, c'est la réserve. Il s'agit pour nous de savoir si on choisit la réserve ou la créance. J'ai cru déceler chez, notamment, le député de Sainte-Anne et le député de D'Arcy McGee une préférence pour la réserve. Moi aussi, j'ai cette même préférence pour la réserve et je pense que ma collègue a également la même opinion. Or, je me dis: Voilà des gens qui ont cheminé...

M. Marx: Dans le Journal des débats...

M. Johnson (Anjou): ...qui ont cheminé... Pardon?

M. Marx: ...le député de Saint-Laurent était plutôt favorable. Dans le Journal des débats, c'est cela.

M. Johnson (Anjou): À la réserve? M. Marx: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): Oui, mais cela était avant la séance de travail.

M. Marx: C'était dans le Journal des débats.

M. Johnson (Anjou): Oui, je sais. M. Marx: Oui, je ne peux pas...

M. Johnson (Anjou): J'aime cela voir des gens bien dans leur peau. Je ne voudrais pas que vos collègues de l'Opposition soient mal dans leur peau. Alors, il faut vivre pas seulement avec ce qu'on dit, mais avec ce qu'on pense aussi.

M. Marx: On veut que nos épouses soient bien dans leur peau aussi.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Une voix: Ha! Ha! Ha!

M. Johnson (Anjou): On veut que tout le monde soit bien dans sa peau. J'en arrive à la conclusion, M. le Président, que, parce qu'il ne m'a pas donné des réponses claires, le député de D'Arcy McGee se garde une certaine réserve que j'appellerais de dénonciation plutôt qu'une réserve héréditaire qui, dans son cas, n'est pas nécessairement héréditaire. Il se garde une réserve de dénonciation alors que j'aimerais le voir et j'aimerais voir les membres de la commission, dans un esprit beaucoup plus constructif, essayer d'élaborer des solutions raisonnables à cette question. On ne peut pas dire qu'on est en faveur d'un principe et déchirer sa chemise sur la plomberie en mettant en cause le principe.

M. Marx: On va voir ce que le ministre dépose. Le ministre veut que l'Opposition soit d'accord avec tout le projet de loi 20, mais je dois vous dire que l'article 3, nous allons voter contre, par exemple. L'article 3. "La présente loi a effet indépendamment des dispositions des articles 2 et 7 à 15 de la Loi constitutionnelle" et tout cela. Je ne pense pas que le ministre va retrancher cet article parce que l'Opposition n'est pas en faveur. Je pense que c'est la politique du gouvernement de mettre un tel article dans la loi. Mais l'Opposition n'a pas l'initiative, elle a seulement la possibilité de réagir, d'examiner la législation déposée par le gouvernement. Même dans cette sous-commission, ce n'est pas nous qui pouvons vraiment mener l'affaire parce que le gouvernement a la prépondérance des votes. Si on n'est pas satisfait, on dit: Sur division. On a adopté un certain nombre d'articles sur division et je pense que dans notre système on fonctionne de cette façon. Si le ministre veut que cela fonctionne d'une autre façon, nous sommes prêts à prendre l'initiative pas seulement dans ce dossier du projet de loi 20, mais dans l'élaboration d'une politique en matière carcérale, en matière de police. Juste pour terminer...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Marx: On vous donne la permission de continuer après 18 heures.

Le Président (M. Gagnon): Oui.

J'aimerais avoir la permission de dire aussi quelques mots avant que le ministre nous quitte.

M. Marx: Juste en terminant, M. le ministre. Moi-même, modestement, j'ai rendu public un document, intitulé "L'avenir de la justice au Québec". Si le ministre veut qu'on mette en vigueur les politiques énoncées dans ce document, s'il nous donne la permission de le faire, on va le faire tout de suite, il n'y a pas de doute. Je vois qu'il n'est pas tellement heureux de proposer un tel renversement de rôles.

Le Président (M. Gagnon): Je vous remercie. J'ai la permission de dépasser 18 heures. On ne dépassera pas tellement 18 heures parce que je pense que Mme la députée de Maisonneuve, entre autres, doit nous quitter.

Si j'ai bien compris, M. le ministre, pour tous les articles qui touchent à la réserve, vous allez déposer à la commission un document qui va expliquer la position du gouvernement et les modifications aux articles concernés viendront lors de l'étude article par article. Ceci veut dire que dans quinze jours la commission aurait ce document.

(Fin de la séance à 18 h 5)

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