L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Sous-commission des institutions

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Sous-commission des institutions

Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 4 décembre 1991 - Vol. 31 N° 29

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 125, Code civil du Québec


Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Lafrance): J'aimerais vous demander, s'il vous plaît, de prendre place et, constatant que nous avons le quorum, déclarer cette vingt-septième séance de travail ouverte, en rappelant à tout le monde le mandat de notre commission qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 125, Code civil du Québec. Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a deux remplacements: Mme Bleau (Groulx) est remplacée par M. Khelfa (Richelieu) et M. Hamel (Sherbrooke) par M. Tremblay (Rimouski).

Le Président (M. Lafrance): Merci. Je vous rappelle l'horaire pour ce matin. Nous avons convenu de nous réunir jusqu'à 12 h 30.

De la preuve Des moyens de preuve

Nous en étions donc, hier soir, au livre septième, qui traite de la preuve, au titre deuxième, Des moyens de preuve, chapitre premier, De l'écrit, section V, Des autres écrits, soit la page 473 du manuel du projet de loi. Alors, s'il n'y a pas de remarques de début de séance, j'aimerais, en conséquence, appeler les articles qui sont contenus à cette section V, Des autres écrits, soit les articles 2818 à 2822 inclusivement.

De l'écrit (suite)

M. Rémillard: M. le Président, nous avons quatre amendements. Tout d'abord, l'article 2818 est modifié par la suppression du deuxième alinéa. Les deux alinéas, M. le Président, de l'article 2818 n'ont pas de lien intrinsèque entre eux. Par ailleurs, la règle du deuxième alinéa devrait être placée après le principe général énoncé à l'article 2819. Il est donc proposé de supprimer le deuxième alinéa de l'article 2818 et un autre amendement sera proposé pour l'insérer comme article 2819. 1. En raison de cet amendement, l'article 2818 se lirait comme suit: "L'écrit non signé, habituellement utilisé dans le cours des activités d'une entreprise pour constater un acte juridique, fait preuve de son contenu. "

L'article 2819 est remplacé par le suivant: "L'écrit, ni authentique ni semi-authentique qui rapporte un fait peut, sous réserve des règles contenues dans ce livre, est admis en preuve à titre de témoignage ou à titre d'aveu contre son auteur. "

Cette modification vise à apporter des précisions quant à la force probante de ces écrits à l'égard de l'auteur et des tiers, parce que l'effet diffère selon le cas. Il est nécessaire de limiter la force probante à l'égard des tiers aux seuls cas où l'écrit respecte les exigences prévues pour l'admissibilité de certaines déclarations (articles 2853 et suivants). En raison de cet amendement, l'article 2819 se lirait comme suit: "L'écrit, ni authentique ni semi-authentique, qui rapporte un fait peut, sous réserve des règles contenues dans ce livre, être admis en preuve à titre de témoignage ou à titre d'aveu contre son auteur. "

Le projet est modifié par l'insertion, après l'article 2819, du suivant: "2819. 1 Les papiers domestiques qui énoncent un paiement reçu ou qui contiennent la mention que la note supplée au défaut de titre en faveur de celui au profit duquel ils énoncent une obligation, font preuve contre leur auteur. "

L'amendement, M. le Président, déplace le second alinéa de l'article 2818. En raison de cet amendement, l'article 2819. 1 se lirait comme suit: "Les papiers domestiques qui énoncent un paiement reçu ou qui contiennent la mention que la note supplée au défaut de titre en faveur de celui au profit duquel ils énoncent une obligation, font preuve contre leur auteur. "

M. le Président, l'article 2822 est modifié par la suppression, à la fin, de ce qui suit: "et leur force probante est laissée à l'appréciation du tribunal. " M. le Président, l'amendement vise à éviter une contradiction apparente entre la partie de l'article que l'on propose de supprimer et les autres articles de cette section. La force probante est déterminée aux articles 2818, 2819, 2819. 1 et 2820. En raison de cet amendement, l'article 2822 se lirait comme suit: "Les écrits visés par la présente section peuvent être contredits par tous moyens. "

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 2818 à 2822 inclusivement? Oui, Mme la députée de Hochela-ga-Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, nous en sommes donc à la section qui traite des écrits, soit qu'ils soient instrumentaires ou non instrumentaires. Dans le mémoire de la Chambre des notaires, on fait apparaître clairement cette distinction en considérant que 2818 fait plus état de l'écrit non signé, tandis que 2819 porte sur l'écrit non instrumentaire. On fait la distinc-

don suivante: L'écrit non instrumentaire est un moyen par lequel une personne a exprimé sa connaissance d'un fait matériel ou d'un acte juridique déjà réalisé, à la différence de l'écrit instrumentaire qui a été l'instrument ou le moyen par lequel une ou des parties ont exprimé leur consentement à un acte juridique.

Si je comprends bien, les amendements, notamment à 2819, viendraient en grande partie satisfaire la recommandation contenue dans le mémoire de la Chambre des notaires à l'effet, et je cite: "II faut, en conséquence, suppléer au silence du projet sur ce point par l'interprétation et en tenant compte notamment des règles relatives à l'aveu et au témoignage. C'est pourquoi, selon nous, l'écrit non instrumentaire va pouvoir faire preuve contre son auteur s'il satisfait aux conditions de l'article 2836." C'est pourquoi la Chambre des notaires trouverait souhaitable que l'article 2819, au lieu d'énoncer un principe vague, exprime ce qui suit: L'écrit ni authentique ni semi-authentique qui rapporte un fait peut, sujet aux règles contenues dans ce livre, servir d'aveu contre son auteur ou être admis en preuve à titre de témoignage.

Alors, est-ce qu'il faut comprendre que c'est là l'objet de l'amendement à 2819? Est-ce que c'est bien le cas?

M. Rémillard: Oui, M. le Président. D'ailleurs, vous me permettrez de souligner la très grande collaboration de la Chambre des notaires pour l'ensemble du Code, bien sûr, comme celle du Barreau, en particulier en ce qui regarde ces sections concernant les actes authentiques, semi-authentiques, sous seing privé et en ce qui regarde les autres écrits, tous ces éléments de preuve. La Chambre des notaires a apporté une contribution tout à fait exceptionnelle. Dans le cas de 2819, comme vous venez de dire, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, c'est un amendement que nous proposons à la suite de commentaires reçus de la Chambre des notaires.

Mme Harel: Je crois que c'est une partie du mémoire de la Chambre des notaires qui a été préparée par le professeur Léo Ducharme. C'est bien le cas? Et par Me Talpis... Par un comité. Très bien.

M. Rémillard: Par un comité dont...

Mme Harel: Habituellement, on dit toujours que les comités... Comment dit-on? Des comités, il n'y a que des chameaux ou, enfin, un cheval devient un chameau. Tandis que, là, ce comité, il y a d'excellentes choses qui en ont résulté. Avez-vous déjà entendu cette expression?

M. Rémillard: Non. Ça doit être aux Indes qu'ils disent ça.

Mme Harel: Non.

M. Rémillard: Non? En Inde!

Mme Harel: C'est à Montréal...

M. Rémillard: C'est à Montréal? Ah bon!

Mme Harel: ...sur les comités du gouvernement.

M. Rémillard: Non, mais un chameau à Montréal!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Comprenant l'Opposition. Oui, d'accord. Tout ça pour dire que...

Mme Harel: Confiez un cheval à un comité, il en sortira un chameau.

M. Rémillard: Voilà!

Le Président (M. Lafrance): J'espère que ça ne s'applique pas aux travaux de cette commission.

M. Rémillard: Vous avez raison, M. le Président.

Mme Harel: Alors, à 2818 - plus sérieusement - faut-il comprendre que... Évidemment, le commentaire va être modifié en conséquence puisque l'amendement vient biffer le deuxième alinéa et le réintroduit à 2819.1. Donc, à 2818, c'est presque du droit nouveau parce que, si je comprends bien, le droit actuel limite les écrits ni authentiques ni signés aux papiers domestiques. Là, on ouvre la porte très large puisque ça va couvrir aussi les documents d'affaires ou d'entreprises. Est-ce qu'on s'est inspiré de dispositions en vigueur ailleurs?

M. Rémillard: Je ne saurais vous dire exactement quelle autre province ou quel autre pays a une disposition semblable, mais on me dit que c'est une disposition qu'on rencontre dans plusieurs autres systèmes juridiques. Entre autres, l'article 36 de l'Office de révision du Code civil avait proposé quelque chose de sensiblement pareil, si vous voulez. C'est donc en fonction de ça qu'on a pris cette décision.

Mme Harel: Alors, faut-il comprendre que le commentaire - étant donné que c'est du droit nouveau - est extrêmement important pour permettre de bien comprendre ce que le législateur entend proposer? On lit dans le commentaire: Le traitement privilégié accordé à ces documents se justifie par le caractère répétitif des activités et par leur inscription systématique et ordonnée dans un registre. Faut-il comprendre que c'est dans ce contexte-là que devra être interprété 2818, à savoir un écrit qui est sys-

tématiquement inscrlt dans un registre et qui a un caractère répétitif? Ce seront les balises qui permettront d'interpréter 2818?

M. Rémillard: Ce sont des balises, mais ce n'est pas restrictif comme tel. Ce sont des balises. Maintenant, il est évident que le commentaire, tous les commentaires d'ailleurs, je crois qu'on a déjà convenu, et je le répète, que tous les commentaires seront revus. C'est un travail auquel nos légistes, nos experts devront se mettre immédiatement après la fin de nos travaux, pendant les vacances des fêtes, la messe de minuit et après le Jour de l'an. On voit les commentaires...

Mme Harel: Avec le ministre certainement? Des voix: Ha, ha, ha! M. Rémillard: Sans doute.

Mme Harel: Alors, ça peut donc être plus large que la définition des documents qu'on retrouve au deuxième paragraphe des commentaires.

M. Rémillard: Oui. Ce ne sont pas des balises restrictives, ce sont des éléments de référence.

Mme Harel: À 2819, faut-il comprendre que, même amendé, le commentaire tient toujours, à savoir que 2819 vise les documents, par exemple, de la nature des procès-verbaux de réunions ou des articles de journaux?

M. Rémillard: Oui, toujours valable. On m'assure que c'est toujours valable, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 2818 est donc adopté tel qu'amendé. L'article 2819 est également adopté tel qu'amendé. Le nouvel article 2819.1 est adopté tel que proposé. Les articles 2820 et 2821 sont adoptés tels quels et l'article 2822 est adopté tel qu'amendé.

J'appelle maintenant les articles 2823, 2824 et 2825 qui touchent les questions des inscriptions informatisées.

M. Rémillard: M. le Président, il y aurait un article de suspendu, 2823, pour plus amples consultations et discussions, et nous aurions deux amendements. Tout d'abord, l'article 2824 est modifié: 1° par le remplacement, à la quatrième ligne, du mot "lacune" par le mot "lacunes" au pluriel; 2° par l'ajout, à la fin, de ce qui suit: "Une telle présomption existe en faveur des tiers du seul fait que l'inscription a été effectuée par une entreprise."

M. le Président, la première modification est formelle; la seconde a pour but d'éviter à l'individu qui transige avec une entreprise de devoir établir que le système informatique de celle-ci est sans lacunes et protégé contre les altérations. En raison de cet amendement, l'article 2824 se lirait comme suit: "L'inscription des données d'un acte juridique sur support informatique est présumée présenter des garanties suffisamment sérieuses pour qu'on puisse s'y fier lorsqu'elle est effectuée de façon systématique et sans lacunes, et que les données inscrites sont protégées contre les altérations. Une telle présomption existe en faveur des tiers du seul fait que l'inscription a été effectuée par une entreprise."

M. le Président, l'article 2825 est modifié par la suppression, à la fin, des mots "et sa force probante est laissée à l'appréciation du tribunal."

M. le Président, la partie de la disposition que l'amendement vise à supprimer parait contradictoire avec la règle de la force probante énoncée à l'article 2823. Lorsque le document respecte toutes les exigences des articles 2823 et 2824, il fait preuve de son contenu. La preuve contraire demeure toutefois possible par tous moyens. En raison de cet amendement, l'article 2825 se lirait comme suit: "Le document reproduisant les données d'un acte juridique inscrites sur support informatique peut être contredit par tous moyens."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant les articles 2824 tel qu'amendé et 2825 tel qu'amendé, étant donné qu'on a laissé 2823 en suspens? Oui, Me Masse. (10 h 30)

M. Masse (Claude): M. le Président, on peut se féliciter que le ministère de la Justice adapte, à cet égard, bon nombre de dispositions du Conseil de l'Europe. Il s'agit vraiment de droits nouveaux qui vont placer le Québec dans le peloton des pays qui reconnaissent ces nouveaux modes d'inscriptions informatisées.

Je pense qu'il est important de souligner, à l'article 2824, que le projet, tel que libellé, aurait obligé un simple utilisateur, par exemple, d'un guichet automatique à faire la preuve de la fiabilité du système, alors qu'il n'y connaît rien. Avec l'amendement, la présomption qui est là - qui est une présomption, bien sûr, renver-sable - le simple fait d'avoir reçu, par exemple, un reçu de caisse informatisé va permettre à l'utilisateur de se prévaloir de la présomption qui est là sans qu'il ait à faire une preuve qui serait vraiment trop onéreuse, quitte à ce que l'institution financière, qui lui oppose d'autres problèmes, puisse elle-même, avec une preuve complète, lui opposer cette situation. Donc, je pense qu'on ne peut que se féliciter des modifications

apportées. Il nous reste un certain nombre de problèmes techniques sur la délimitation de ce qu'on doit considérer comme des données d'un acte juridique, à l'article 2823, mais je pense bien que, dans les prochaines heures ou dans les prochains jours, on devrait régler la situation. Quant à moi, il me semble qu'après... Je me souviens qu'on discute, en droit, dans différents colloques, de ce problème des données informatisées depuis certainement 15 ans et je pense que le Québec, à ce moment-ci, met vraiment un pied dans des réalités qui n'étaient absolument pas visées par le Code actuel.

M. Holden: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Westmount.

M. Holden: ...ça a peut-être été expliqué entre les experts, mais est-ce qu'on peut m'expliquer le choix de "entreprise"? C'est vaste pas mal, une entreprise. Je ne sais pas pourquoi on a choisi "entreprise". On n'a pas défini plus que ça l'entreprise.

M. Rémillard: Le mot "entreprise" est défini. Je vais demander à Me Longtin de compléter.

Mme Longtin (Marie-José): Oui. M. le Président, le terme "entreprise" était défini indirectement à deux endroits dans le Code, mais, maintenant, il y a un amendement qui devrait être présenté, qui va cerner - à la demande, d'ailleurs, de plusieurs intervenants - de façon plus précise le concept d'entreprise dans le cadre de la théorie générale des obligations. Évidemment, ce terme-là se réfère à la définition qui est en gestation. La notion d'entreprise, évidemment, se trouve à élargir celle de commerce, recouvre certainement la réalité commerciale et recouvre également certaines autres organisations qui ont des activités de nature économique et qui sont organisées.

M. Holden: Avez-vous une idée du mot... Moi, je n'ai pas... Le texte anglais va être amendé aussi, mais est-ce que ça va être "enter-prise"? Savez-vous quel mot va traduire "entreprise" en anglais? Ce n'est pas dans le bloc actuel parce que c'est un amendement.

Mme Longtin: Non. Sauf que, comme je vous le mentionnais, c'est déjà quand même utilisé. À l'article 426, entre autres, dans la version anglaise, on a "enterprise".

M. Holden: "Enterprise". O.K. Merci.

Le Président (M. Lafrance): Ça va? Alors, merci, Me Longtin. S'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 2823 est laissé en suspens et les articles 2824 et 2825 sont donc adoptés tels qu'amendés. J'aimerais maintenant appeler les articles 2826, 2827 et 2828 qui touchent la question de la reproduction de certains documents.

M. Rémillard: II y a trois amendements, M. le Président. L'article 2826 est modifié par le remplacement: 1° à la première ligne du premier alinéa, du mot "qui" par les mots "dont la reproduction"; 2° à la troisième ligne du premier alinéa, du mot "est" par les mots "a été"; 3° au premier alinéa, des mots "se fait par le dépôt d'un extrait ou d'une copie de la reproduction" par les mots "peut se faire par le dépôt d'une copie de la reproduction ou d'un extrait suffisant pour en permettre l'identification".

M. le Président, les deux premières modifications ont pour but d'éviter qu'on interprète l'article comme nécessitant la conservation de l'original. La troisième a pour but de s'assurer de l'intégrité et de l'intégralité du document offert en preuve. En raison de cet amendement, l'article 2826 se lirait comme suit: "La preuve d'un document, dont la reproduction est en la possession de l'État ou d'une personne morale de droit public ou de droit privé et qui a été reproduit afin d'en garder une preuve permanente, peut se faire par le dépôt d'une copie de la reproduction ou d'un extrait suffisant pour en permettre l'identification et le dépôt d'une déclaration attestant que la reproduction respecte les règles prévues par la présente section. "Une copie ou un extrait certifié conforme de la déclaration peut être admis en preuve, au même titre que l'original."

L'article 2827 est modifié par le remplacement, au second alinéa, des mots "être faite* par les mots "avoir été faite" et des mots "à cette fin" par les mots "par la personne morale ou par le Conservateur des archives nationales du Québec."

L'amendement, outre d'apporter des modifications formelles, vient préciser qui est ta personne désignée pour assister à la reproduction et attester de la réalisation de l'opération. En raison de cet amendement, l'article 2827 se (trait comme suit: "Pour que la reproduction fasse preuve de la teneur du document, au même titre que l'original, elle doit reproduire fidèlement l'original, constituer une image indélébile de celui-ci et permettre de déterminer le lieu et la date de la reproduction. "En outre, la reproduction doit avoir été faite en présence d'une personne spécialement autorisée par la personne morale ou par le Conservateur des archives nationales du Québec."

L'article 2828 est modifié par le remplacement, à la quatrième ligne, du mot "qui" par le

mot "laquelle". C'est une modification strictement formelle. En raison de cet amendement, l'article 2828 se lirait comme suit: "La personne qui a été désignée pour assister à la reproduction d'un document doit, dans un délai raisonnable, attester la réalisation de cette opération dans une déclaration faite sous serment, laquelle doit porter mention de la nature du document et des lieu et date de la reproduction et certifier la fidélité de la reproduction."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles, 2826, 2827 et 2828, tels qu'amendés?

Mme Harel: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...à la section VII qui porte sur la reproduction de certains documents, je comprends que les dispositions qu'on y retrouve ouvrent de nouveaux champs d'application.

À 2827, on peut lire dans le commentaire, en fait, à la note additionnelle: "Le projet antérieur de réforme exigeait de plus que la reproduction indique l'ordre dans lequel elle avait été faite; cette condition, qui n'était pas absolument nécessaire pour assurer la fidélité de la reproduction, se serait avérée, selon les représentants des groupes visés par ces règles, fort difficile d'application."

Peut-on nous indiquer quelles sont les représentations qui ont été faites et, en fait, par quels groupes? Quand on lit, au deuxième alinéa de 2827, que "la reproduction doit être faite en présence d'une personne spécialement autorisée à cette fin", de qui parle-t-on? D'où viendra l'autorisation spéciale?

M. Rémillard: M. le Président, Me Longtin va nous donner ces précisions.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. Alors, évidemment, ces articles-là s'inspirent fortement des règles qu'on connaît actuellement dans la Loi sur la preuve photographique de documents, loi qui régit principalement, d'abord, tous les ministères et organismes publics, tous les organismes municipaux et scolaires et des personnes morales de droit privé. Les représentations sont venues principalement du Conservateur des archives nationales, des organismes municipaux et de plusieurs commissions scolaires.

Mme Harel: Mais, à 2827, au premier alinéa, on lit que la reproduction doit constituer une image indélébile. Je crois comprendre que cela écarterait, par exemple, les bélinos ou les fax, communément appelés, du fait que le papier en usage actuellement ne peut pas donner cette garantie dïndélébilité.

Mme Longtin: L'article ne vise pas vraiment les moyens de télécommunication. Ce qui est visé dans ces articles-là, c'est la reproduction de documents dont on a eu un original en main, qu'on a détruit, pour des fins de conservation. Disons, par exemple, les banques, les caisses populaires ne conservent pas nécessairement l'ensemble de tous les chèques qui circulent. Ils vont faire des microfilms. On va faire aussi, pour gérer la conservation des documents, beaucoup de reproductions donc de ce type-là. C'est ce qui est visé comme reproduction.

Mme Harel: Faut-il comprendre que, par exemple, le papier de fax ne satisferait pas la condition qu'on retrouve à l'article 2827?

Mme Longtin: Je ne crois pas que l'article et cette section-là visent ce type de document.

Mme Harel: Alors, cette section De la reproduction de certains documents viendrait simplement, dites-vous, codifier des règles de pratique actuellement en usage? C'est bien ça?

Mme Longtin: Oui. En fait, ça reprend, en simplifiant de beaucoup les formalités, les règles qu'on retrouve principalement à la Loi sur la preuve photographique de documents, de même qu'on s'est inspiré aussi de l'article 31 de la Loi sur la preuve au Canada qui prévoit la possibilité de déposer en preuve des reproductions de documents, dans la mesure où on peut avoir quelqu'un qui atteste que c'est une reproduction de qualité.

Mme Harel: Je comprends que ça ne reprend pas toutes les dispositions de la Loi sur la preuve photographique de documents parce que, dans le commentaire de 2827, on lit ceci, contrairement, justement, à la Loi sur la preuve photographique de documents: Le projet n'exige la présence que d'une seule personne, pas nécessairement un employé, pour assister à la reproduction et attester de l'accomplissement des conditions prescrites. Je reprends la question que je posais. Cette personne spécialement autorisée à cette fin de reproduction, qu'on retrouve au deuxième alinéa de l'article 2827, il s'agit de qui? De quelle personne parle-t-on?

Mme Longtin: Ça peut être une personne employée soit par la personne morale ou par l'organisme qui aura été spécialement désigné pour assister à ces opérations. Ça peut aussi - c'est pour ça qu'on fait référence au fait qu'on a enlevé l'obligation que ce soit un

employé - ça peut se faire aussi par le biais de contrat. Donc, ce serait une entreprise qui a ce mandat-là et une personne dans cette entreprise qui est autorisée à attester ou à signer que la reproduction a été correctement faite.

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Longtin. Les articles 2826, 2827 et 2828 sont donc adoptés tels qu'amendés.

Du témoignage

Nous en arrivons maintenant au chapitre deuxième qui touche la question du témoignage et qui regroupe les articles 2829 à 2831. Le texte d'introduction qui accompagne ce chapitre deuxième est le suivant.

Ce chapitre maintient les règles du droit actuel concernant la définition et la force probante du témoignage dont certaines étaient prévues au Code de procédure civile. Par ailleurs, toutes les règles contenues dans l'actuelle section consacrée à la preuve testimoniale constituent des règles de recevabilité et sont traitées au titre troisième du projet de réforme. Quant aux règles concernant les déclarations antérieures à l'instance et le ouï-dire, contrairement au projet de l'Office de révision du Code civil qui en traitait au titre Des moyens de preuve, elles sont plutôt présentées au titre troisième, De la recevabilité des éléments et des moyens de preuve. (10 h 45)

J'appelle donc les trois articles contenus à ce chapitre deuxième, soit les articles 2829, 2830 et 2831.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Aucun amendement. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles qui touchent la question du témoignage?

Mme Harel: Paut-il comprendre... Allez. Le Président (M. Lafrance): Oui. Me Masse.

M. Masse: M. le Président, la Chambre des notaires nous a fait la représentation, à l'article 2830, que la réglementation des cas où le témoignage d'un enfant devrait être recevable ou rejeté devrait relever du Code de procédure civile. Après réflexion, il a été jugé qu'il s'agit là d'une règle de recevabilité fondamentale qui avait sa place davantage dans le cadre du Code civil, de sorte que nous croyons que le témoignage de l'enfant devrait être réglementé par l'article 2830, deuxième alinéa, comme c'est le cas dans le projet.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse, pour ces précisions. S'il n'y a pas d'autres commentaires, ces articles 2829, 2830 et 2831 sont donc adoptés tels quels.

De la présomption

Nous en arrivons maintenant au chapitre troisième qui traite de la présomption et qui touche les articles 2832 à 2835 inclusivement. Le texte d'introduction qui accompagne ce chapitre troisième est le suivant.

Ce chapitre reprend substantiellement les règles actuelles du Code civil en y apportant certaines clarifications sur la portée des présomptions et en clarifiant notamment la terminologie utilisée en la matière. Ainsi, le projet de réforme introduit, à la suggestion de l'Office de révision du Code civil, une règle d'interprétation établissant que des faits "présumés" constituent une présomption simple et que des faits "réputés" constituent une présomption absolue, donc irréfragable.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre troisième, De la présomption, les articles 2832à 2835 Inclusivement.

M. Rémillard: II y a un amendement, M. le Président. L'article 2834 est modifié par le remplacement des mots "n'en" par les mots "ne s'en".

M. le Président, cette modification vise à mieux rendre compte du droit actuel, car ce sont les membres eux-mêmes qui peuvent s'exclure du groupe partie à un recours collectif pour éviter que le jugement leur soit applicable. En raison de cet amendement, l'article 2834 se lirait comme suit: "L'autorité de la chose jugée est une présomption absolue; elle n'a lieu qu'a l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, lorsque la demande est fondée sur la même cause et mue entre les mêmes parties, agissant dans les mêmes qualités, et que la chose demandée est la même. "Cependant, le jugement qui dispose d'un recours collectif a l'autorité de la chose jugée à l'égard des parties et des membres du groupe qui ne s'en sont pas exclus."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant les articles 2832 à 2835 inclusivement qui traitent de la présomption? Oui, Me Masse.

M. Masse: M. le Président, à l'article 2833, on doit signaler un virage de politique législative très important. Alors que le Code civil actuel n'est pas toujours très précis dans l'utilisation des expressions "réputé", ce qui est assez rare d'ailleurs, et "présumé", le nouveau Code civil établit une attitude claire à l'effet que, lorsqu'on est en présence du terme "réputé", c'est une présomption non renversable.

Suite aux inquiétudes de la Chambre des notaires, nous avons fait un examen attentif de tous les endroits, dans le projet de loi 125, où le terme "réputé" et le terme "présumé" apparaissent pour vraiment vérifier que, compte tenu de l'importance cruciale du sens qui est donné, à 2833, ce soit vraiment le sens qu'on voulait lui donner jusqu'à maintenant. Vérification faite, dans l'immense majorité des cas, c'est vraiment un emploi qui est justifié. Quand on emploie vraiment "réputé", on veut vraiment en faire une présomption non renversable. Donc, de ce côté-là, je crois qu'il était important de signaler les inquiétudes de la Chambre des notaires, qui craignait et qui craint encore, semble-t-il, qu'on emploie, par erreur, un terme plutôt que l'autre et que ça ait des répercussions graves, je pense que ça a été une préoccupation que nous avons eue.

La deuxième chose qu'on doit dire, c'est au sujet de l'article 2834, particulièrement le deuxième alinéa qui est modifié sur le recours collectif. M. le Président, s'il y a une chose qui n'est pas comprise au Québec de la part des justiciables, c'est le caractère d'autorité de chose jugée du recours collectif. Plusieurs justiciables, même l'immense majorité, pour des motifs de méconnaissance que l'on peut comprendre, croient qu'un recours collectif, c'est une possibilité d'obtenir, sans avoir à se déplacer ou sans faire d'effort, un jugement en leur faveur et qu'après ça, si ça ne fonctionne pas, on peut toujours intenter un recours personnel. Il n'y a rien de plus dangereux et rien de plus faux. Le recours collectif, pour les personnes qui ne se sont pas exclues du recours, et ça peut couvrir des choses aussi importantes que des dommages pour plusieurs centaines de milliers de dollars par famille... Si les personnes ne s'en retirent pas - dans leur intérêt, dans certains cas - elles vont être visées par l'autorité de la chose jugée. C'est le cas actuellement et ça va être encore le cas avec le Code civil. Donc, il était important de signaler que, pour ne pas être visés par l'autorité de la chose jugée, il fallait que les membres du groupe qui voulaient s'en retirer - c'est le droit "d'opting out" qui est prévu actuellement au Code de procédure - s'en excluent nommément. De ce côté-là, malgré le fait que le recours collectif soit une excellente mesure dans certains secteurs précis, je crois qu'il y a encore beaucoup d'éducation populaire à faire pour démystifier le caractère un peu magique et trop facile du recours collectif, alors que certains de ses aspects peuvent avoir des conséquences - j'en ai vécu certains aspects depuis 15 ans - dramatiques pour certaines personnes qui croyaient bénéficier des avantages d'un recours sans qu'il n'y ait d'inconvénient pour elles.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse. Oui, Mme la députée de Hochelaga-

Maisonneuve.

Mme Harel: Ah! M. le... M. Rémillard: Allez-y. Mme Harel: Allez-y, non. M. Rémillard: Complétez.

Mme Harel: D'accord. M. le Président, à 2832, il y a donc une innovation majeure puisque les deux sources de présomption vont maintenant être définies, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Je me demandais si on peut donner justement à la Chambre des notaires toute la sécurité ou les garanties qu'il faut pour satisfaire l'inquiétude qui est manifestée dans leur mémoire. En fait, c'est une inquiétude qui porte sur un certain nombre de dispositions du projet de loi 125, une inquiétude à laquelle on peut remédier assez facilement en regard de ces articles dont le mémoire traite. Mais il y a une inquiétude plus générale à laquelle je voudrais faire écho, à la page 48 de leur mémoire, où la Chambre dit: "II faudrait, de plus, mettre en oeuvre des mécanismes afin de s'assurer que dans toute loi future, ces mots ne soient jamais plus utilisés dans leur sens usuel. Or, à notre avis - ajoute la Chambre - il s'agit là d'une entreprise qui, au départ, est vouée à l'échec." La Chambre ajoutait: "Cela Implique que non seulement l'ensemble des dispositions du Code civil ont été vérifiées afin de s'assurer que les mots ayant reçu une acception particulière ont toujours été utilisés dans leur sens particulier et non dans leur sens usuel, mais qu'il en a été de même dans toutes et chacune des lois du Québec."

J'aimerais connaître le point de vue du ministre en regard de cette inquiétude exprimée dans le mémoire de la Chambre des notaires, d'une part. D'autre part, je me demandais si le projet de loi 125 avait été informatisé, de manière justement à pouvoir faire une recherche dans la mémoire et retrouver, par exemple, le mot "réputé" ou le mot "présumé" chaque fois qu'il est utilisé, de manière à pouvoir vérifier si, dans le projet de loi, le sens particulier qui en était maintenant donné à 2833 était bien ce que le législateur souhaitait pour chacun des articles du Code. La question reste ouverte sur l'ensemble des autres lois du Québec. Qu'en sera-t-il en termes d'interprétation?

M. Rémillard: M. le Président, l'article 2833, de fait, est un article important puisqu'il vient préciser la portée des mots "présumé" et "réputé" et, par le fait même, il apporte une grande contribution à clarifier notre droit. Il est évident que, comme la Chambre des notaires l'a mentionné, on doit maintenant porter une grande attention à toutes les autres lois, à tous les

autres règlements qui peuvent se référer au même concept de "réputé" et de "présumé". En ce sens-là, la loi d'application, à laquelle nous devrons travailler à partir du printemps prochain, nous permettra d'établir la règle très clairement aussi, mais de se référer à des lois qui doivent donc être, par le fait même, modifiées. M. le Président, oui, nous avons un système. Il faut bien comprendre comment une loi est faite. Une loi, techniquement, du ministère où elle origine, va ensuite au ministère de la Justice, au Bureau des lois; ensuite, il y a le secrétariat de la législation qui est là. Je préside le Comité de législation. Il y a aussi le Bureau des règlements qui est là. Tous ces organismes, avec des gens très compétents - j'en profite pour leur rendre hommage - sont là pour vérifier que les lois soient faites conformément à nos dispositions législatives, et ce sera donc vérifié. C'est une question de recherche de cohérence. Nous avons un système informatique qui nous permet, de fait, de déceler dans les différentes lois, règlements, l'utilisation de ces mots "présumé" et "réputé" et qui nous permet donc, par le fait même, d'apporter des correctifs.

Mme Harel: Étant donné que... Ce n'est pas la compétence des personnes qui est en cause, évidemment pas, mais, étant donné qu'il y a, malgré tout, plus de risques d'erreurs, si tant est qu'on élargisse, pour les générations futures des membres de tous ces comités, l'interprétation à donner en vertu de 2833, est-ce que les avantages qu'on retire maintenant de ces définitions qu'on introduit sont suffisants pour contrebalancer, par exemple, les difficultés que ça peut présenter? Est-ce que la suggestion contenue dans le mémoire des notaires, à l'effet de remplacer l'article 2833 par la règle suivante: Toute présomption est simple à moins que la loi n'ait prohibé expressément ou Implicitement la preuve contraire", est-ce que cette façon de faire aurait pu ou pourrait aussi satisfaire, par exemple, le même objectif, mais en étant peut-être d'application plus simple?

M. Rémillard: II faut qu'on puisse y aller le plus clairement possible. Vous avez une ambiguïté entre ces mots "présumé" et "réputé" et il faut qu'on puisse clarifier la signification de ces termes. On sait qu'en droit, les mots et les concepts ont beaucoup d'implication par l'Interprétation littérale, grammaticale d'un projet de loi, l'intention de la recherche du législateur en matière civile en particulier. Alors, ce que ça signifie, c'est qu'on doit être très sensible à toute interprétation qui peut venir en ce qui regarde certains mots. Nous avons la chance, en réformant notre Code civil, de préciser la signification de deux mots, "présumé" et "réputé". Il ne faut pas hésiter, à mon sens, à le faire. Les inconvénients, ce serait en fonction des autres lois, des autres règlements, mais nous allons le régler. On va le régler. Je crois que nous avons les moyens nécessaires pour le régler. (11 heures)

Donc, la Chambre des notaires s'interrogeait et a fait des commentaires à bon droit. Nous répondons: Nous avons les moyens quand même pour faire face à la situation. Donc, par conséquent, si nous faisons cette distinction à 2833, c'est que nous voulons clarifier le droit, nous voulons prendre l'occasion de cette réforme du Code civil pour clarifier un point qui est majeur en ce qui regarde la preuve et, ensuite, nous disons que nous avons donc les moyens pour mettre en application ce principe en fonction de toute la législation existante.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, donc les articles...

Mme Harel: C'est la présomption simple dans...

Le Président (M. Lafrance): Pardon? Oui. Mme Harel: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lafrance): Alors, les articles 2832 et 2833 sont donc adoptés tels quels. L'article 2834 est adopté tel qu'amendé. L'article 2835 est adopté tel quel.

De l'aveu

Nous en arrivons au chapitre quatrième, qui traite de l'aveu, et qui touche les articles 2836 à 2839 inclusivement. Le texte d'introduction à ce chapitre quatrième est le suivant. Ce chapitre reprend le droit actuel en y apportant quelques précisions concernant l'aveu et sa force probante. Ainsi, le projet de réforme codifie que l'aveu judiciaire peut être fait par le mandataire d'une partie à l'instance. Il simplifie, par ailleurs la règle de force probante de l'aveu extrajudiciaire en indiquant simplement qu'il est laissé à l'appréciation du tribunal au lieu de référer aux déclarations écrites recevables à titre de témoignage et aux témoignages eux-mêmes, puisque la force probante de ces preuves est laissée, en vertu d'autres dispositions du présent livre, à l'appréciation du tribunal.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre quatrième, De l'aveu, les articles 2836 à 2839 inclusivement.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, il n'y a pas d'amendements à ces articles. Est-ce qu'il y aurait des commentaires? Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, M. le Président, faut-il comprendre qu'à ce chapitre, on vient essentiellement codifier le droit actuel, à quelques exceptions près, ]e crois, à 2838? À 2838, deux précisions seraient apportées, la première étant que la règle de l'aveu du mandataire autorisé à cette fin lie une partie à un litige et l'autre porte - c'est ça - sur la force probante de l'aveu extrajudiciaire et le laisse à l'appréciation du tribunal. Alors, quoi qu'il en soit, peut-on nous indiquer ce qui est de droit nouveau dans ce chapitre de l'aveu?

M. Rémillard: Je vais demander à Mme Longtin, s'il vous plaît, M. le Président, de répondre à cette question.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. En fin de compte, il y a très peu de choses qui sont, comme telles, nouvelles dans ce chapitre. Comme on l'a mentionné, ce sont surtout soit des reprises des règles sur l'aveu que contient le Code actuel ou, enfin, des règles qui sont admises par la doctrine et la jurisprudence québécoises. Les précisions, comme vous l'avez mentionné, à l'article 2838, ne sont en fait que des précisions puisque ce sont des choses qui sont déjà de droit.

Mme Harel: Malgré que le deuxième alinéa de 2838, "La force probante de tout autre aveu est laissée à l'appréciation du tribunal", ce deuxième alinéa tranche une incertitude de la jurisprudence. C'est ça qu'il faut comprendre?

Mme Longtin: Oui. Je pense que ça tranche dans le sens de la jurisprudence dominante.

Mme Harel: Au premier alinéa de 2838, on lit: "II ne peut être révoqué, à moins qu'on ne prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait." Est-ce que c'est le droit actuel, cette révocation possible, s'il y a preuve de la suite d'une erreur défait?

Mme Longtin: On reprend effectivement le deuxième alinéa de l'article 1245 du droit actuel.

Mme Harel: Ça le reprend textuellement. C'est bien ça?

Mme Longtin: L'article 1245, je le cite: "L'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait. Il ne peut être révoqué à moins qu'on ne prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait."

Mme Harel: C'est au même effet.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me

Longtin. Donc, les articles 2836 à 2839 inclusivement sont adoptés tels quels.

De la présentation d'un élément matériel

Nous touchons maintenant le chapitre cinquième, qui traite de la présentation d'un élément matériel, qui regroupe les articles 2840 à 2842 inclusivement. Le texte d'introduction à ce chapitre cinquième se lit comme suit: Le Code de procédure civile prévoit déjà certaines règles concernant la présentation d'éléments matériels à l'instance et la possibilité pour le tribunal de se rendre sur les lieux pour constater directement certains faits. Ces dispositions ont une portée relativement limitée et ne tiennent pas compte des développements modernes des techniques de représentation sensorielle, principalement visuelle et sonore.

Devant le besoin d'utiliser ces nouvelles possibilités qu'a le juge de faire des constatations personnelles plutôt que de se limiter à la preuve telle que présentée par les parties, le projet de réforme intègre au Code civil un cinquième moyen de preuve: la présentation d'un élément matériel.

L'ajout de ce nouveau moyen de preuve, désigné "la preuve matérielle" par la doctrine et les projets législatifs canadiens, ne doit toutefois pas se faire au détriment de la sécurité juridique des parties; en conséquence, la partie qui présente un tel élément de preuve devra en établir l'authenticité par une preuve distincte, la force probante étant laissée à l'appréciation du tribunal.

J'appelle donc les trois articles contenus à ce chapitre cinquième, soit les articles 2840, 2841 et 2842.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): II n'y a aucun amendement. Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles?

Mme Harel: M. le Président, nous en avons parlé, je crois, au moment de l'examen de l'article 3040, notamment. Nous avions référé à 2840. 2841 et 2842 sont également de droit nouveau, alors j'aimerais qu'on nous en explique la portée, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.

M. Rémillard: Mme Longtin, M. le Président, va nous présenter ces deux articles.

Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. L'article

2840 établit donc que la présentation d'un élément matériel constitue un élément de preuve. C'est un développement, en fait, des articles 290 et 312 du Code de procédure civile, 290 prévoyant déjà que le tribunal peut se déplacer pour constater sur les lieux une situation. L'article 312 prévoit déjà que le juge peut ordonner à une partie de venir exhiber un objet qu'elfe a en sa possession. Ici, ça nous permettrait donc de faire une preuve à partir d'un enregistrement sonore ou visuel d'un fait. Cependant, les deux autres articles qui suivent, les articles 2841 et 2842, viennent quand même proposer un certain encadrement, tout au moins à l'article 2841. Le principe est de droit nouveau et on vise évidemment à préserver la sécurité juridique des parties de façon à ce que la présentation de l'élément matériel puisse avoir une force probante; ça devra donc au préalable faire l'objet d'une preuve distincte quant à son authenticité. Ce qui est visé, c'est qu'il y ait généralement, par témoignage, quelqu'un qui puisse assurer de la fidélité de la reproduction des circonstances dans lesquelles ça s'est fait et du fait que c'est suffisamment... Comme le vocabulaire à d'autres articles le précise ou l'indique, ça donne une certaine garantie de façon à ce que le tribunal puisse se fier à la preuve qui est présentée.

L'article 2842 vient donc indiquer ce que le tribunal peut tirer de cette preuve. En fait, c'est la conclusion qu'il estime raisonnable et compte tenu qu'il s'agit d'une perception directe de ce que le tribunal fait de quelque chose, c'est certain qu'il semble impossible d'établir un principe d'une force probante purement objective puisqu'on passe nécessairement par la subjectivité de celui qui constate le fait. Cependant, il demeure que la conclusion qu'il peut tirer de cette présentation doit toujours être raisonnable et donc être logique, compte tenu de ce qui a été mis en preuve.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Est-ce que vous avez terminé, Mme la députée de Hochela-ga-Maisonneuve? Oui. M. le député de Westmount.

M. Holden: M. le Président, on se réfère dans le commentaire au projet canadien. Est-ce que c'est la Commission de réforme du droit ou...

Mme Longtin: Ce sont deux projets. Le premier projet, qui est intitulé le Code de la preuve, avait été présenté par la Commission de réforme du droit du Canada, à la fin des années soixante-dix, au début des années quatre-vingt, et a servi quand même de document de doctrine. Et l'autre projet, c'est un projet qui avait été préparé par la Conférence sur l'uniformisation des lois au Canada et qui, donc, avait examiné et la doctrine et la jurisprudence à travers le Canada pour essayer d'établir une codification des principes en matière de preuve.

M. Holden: Et au criminel et au civil? Mme Longtin: Tant au civil qu'au criminel. M. Holden: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Longtin. Donc, les articles 2840, 2841 et 2842 sont adoptés tels quels. Nous en arrivons au titre troisième.

Mme Harel: Je demande un arrêt humanitaire.

Le Président (M. Lafrance): Oui, d'accord. Alors, nous allons suspendre dix minutes pour des raisons humanitaires.

(Suspension de la séance à 11 h 14)

(Reprise à 11 h 32)

Le Président (M. Lafrance): Je vous invite à prendre place, s'il vous plaît, nous allons reprendre nos travaux.

De la recevabilité des éléments et des moyens de preuve

Alors, nous en étions au titre troisième qui touche la question de la recevabilité des éléments et des moyens de preuve et qui touche les articles 2843 à 2858. Le texte d'introduction à ce titre troisième est le suivant: La réforme opère un regroupement en un même titre de toutes les règles de recevabilité des éléments et des moyens de preuve. Ce regroupement a pour but de faciliter l'application de ces règles. Les modifications de fond, par ailleurs, ont pour but d'améliorer l'équilibre entre les deux objectifs fondamentaux de tout régime de preuve: la recherche de la vérité et la préservation de la stabilité des relations juridiques entre les parties.

Ainsi, la réforme propose, entre autres, de libéraliser les règles de recevabilité des témoignages en étendant l'exception actuelle des matières commerciales aux actes juridiques faits dans le cours des activités d'une entreprise, même non commerciale, et en considérant certaines déclarations antérieures à l'instance ou de ouï-dire comme admissibles en preuve et pouvant être déposées par d'autres personnes que le déclarant. En revanche, pour assurer la sécurité juridique des parties, la réforme impose au tribunal le rejet de certains éléments de preuve obtenus illégalement.

Des éléments de preuve

Le chapitre premier à ce titre troisième

touche les éléments de preuve et regroupe les articles 2843 et 2844. Le texte qui accompagne l'introduction à ce chapitre premier est le suivant: Outre qu'il reprend le principe général du droit actuel permettant la preuve de tout fait pertinent par tout moyen, le présent chapitre introduit au Code civil, en la généralisant, la règle actuellement prévue dans la Charte canadienne des droits et libertés fondamentales, rendant irrecevables certains éléments de preuve pertinents lorsqu'ils sont obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits protégés par la Charte et que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice.

Le but de cette modification dépasse les objectifs spécifiques de la preuve et rejoint l'un des objectifs majeurs de toute la réforme: la protection des droits et libertés de la personne.

J'appelle les deux articles contenus à ce chapitre premier, soit les articles 2843 et 2844.

M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant les articles 2843 et 2844 qui parlent des éléments de preuve?

Mme Harel: M. le Président, étant donné l'importance de l'article 2844, j'aimerais demander au ministre qu'il nous indique, en fait, la portée, d'abord, de cet article 2844 et du deuxième alinéa, notamment.

M. Rémillard: Oui, alors, M. le Président, il s'agit de fait d'un article important. C'est un article qui généralise l'application de la règle de l'article 24 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Nous savons qu'il y a dans la Charte canadienne un article semblable en matière pénale, en matière criminelle. Alors, en vertu de ce principe, M. le Président, la preuve doit être obtenue légalement et une preuve qui est obtenue dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés fondamentaux, et dont l'utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice - les deux item doivent se retrouver - n'est pas acceptable.

Cependant, en ce qui regarde le secret professionnel et le dernier critère, déconsidérer l'administration de la justice, à ce moment-là, le tribunal n'est pas tenu de tenir compte de ce dernier critère. Et pour en saisir toute la signification, M. le Président, je vais demander à Mme Longtin d'apporter des précisions.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. Alors, comme on l'a mentionné, le 2844 reprend en fait les principes que l'on retrouve à l'article 24 de la Charte canadienne des droits et libertés et l'Interprétation jurisprudentielle qui en a été faite. Quant au deuxième alinéa, c'est qu'il vise évidemment à maintenir la protection qu'accorde l'article 9 de la Charte québécoise au secret professionnel.

Mme Harel: Ça veut dire que dans tous les cas de violation du secret professionnel, dans tous ces cas-là, ce sera présumé comme déconsidérant l'administration de la justice.

Mme Longtin: Non nécessairement. C'est que l'article 9 de la Charte des droits prévoit que le tribunal doit d'office assurer le respect du secret professionnel.

Mme Harel: Assurer. Mme Longtin: Oui. Mme Harel: D'accord.

Mme Longtin: C'est pour maintenir, donc, cette garantie qui est offerte par l'article 9 que l'on a considéré qu'il était opportun de prévoir un second alinéa.

Mme Harel: Alors, d'office, le tribunal doit protéger le secret professionnel. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Rémillard: C'est ça. Et ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à ce moment-là, le tribunal n'a pas à se poser la question à savoir si c'est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Il n'a pas besoin de se poser cette question-là.

Mme Harel: Parce qu'il n'a pas besoin de le faire étant donné qu'il a plutôt à protéger le secret professionnel.

M. Rémillard: C'est ça. C'est absolu.

Mme Harel: Mais, dans le deuxième paragraphe du commentaire, mon Dieu que ce n'est pas clairement exprimé, ça! On dit "...lorsqu'il s'agit d'une violation du droit au respect du secret professionnel, par concordance avec l'article 9 de la Charte québécoise des droits et libertés. Dans ce cas, la preuve est irrecevable, sans que le tribunal n'ait à prendre en considération le critère voulant que l'utilisation de telle preuve est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Autrement dit, dans le cas du secret professionnel, ce critère est présumé exister."

M. Rémillard: Est présumé exister. C'est ça, c'est que la preuve est irrecevable immédiate-

ment...

Mme Harel: Immédiatement.

M. Rémillard:... et le tribunal n'a pas à se dire: Est-ce que vraiment ça déconsidère l'administration de la justice?

Mme Harel: L'administration de la justice. D'accord.

M. Rémillard: Mais vous avez raison, on peut peut-être porter attention à ce commentaire...

Mme Harel: Peut-être pas. Non, ce n'est pas si mal vraiment, en le relisant à haute voix.

M. Rémillard:... peut-être l'ajuster. Non, il va falloir qu'ils soient tous revus, ces commentaires-là.

Mme Harel: Le "et" de 2844, premier alinéa, est-il un "et" conjonctif? Faut-il comprendre que ce sont là deux critères qui doivent être appréciés par le tribunal? C'est-à-dire pour porter atteinte à la vie privée et à la réputation, tel que prévu à l'article 35 du projet de code, si tant est que le tribunal a à apprécier un élément qui vient porter atteinte au respect de la réputation et de la vie privée, il doit prendre en considération, comme critère, d'abord le fait que cet élément de preuve a été obtenu dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés fondamentaux et le fait que cet élément est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. S'il y a juste un des deux critères, est-ce cela satisferait?

M. Rémillard: En ce qui regarde le secret professionnel?

Mme Harel: Article 2844. Non, sur... M. Rémillard: Généralement? Mme Harel: Oui, toute atteinte.

M. Rémillard: II faut qu'il y ait les deux. Il faut qu'il puisse en arriver à la conclusion que ça déconsidère l'administration de la justice. C'est te critère qui existe déjà; c'est comme ça que ça fonctionne.

Mme Harel: Est-ce que je comprends qu'il y a eu beaucoup de jurisprudence là-dessus?

M. Rémillard: II y a une jurisprudence en matière pénale, évidemment, oui. En ce qui regarde la matière civile, je vais vérifier.

Il y a une précision qu'on me souligne, M. le Président, et que je veux faire, c'est que le texte dit bien le tribunal doit". Donc, vous avez là une obligation quand les deux éléments sont là. Mais ça n'empêche pas le tribunal de mettre de côté un élément de preuve parce qu'il considère que ce n'est pas un élément de preuve probant. Il y a toujours une discrétion.

Mme Harel: Mais il peut admettre un élément de preuve obtenu par un procédé illégal?

M. Rémillard: II peut l'apprécier à sa discrétion. Il a sa discrétion pour l'apprécier. Mais il faut qu'en plus, ça déconsidère l'administration de la justice.

Vous avez des cas célèbres évidemment qu'on peut citer, tout le monde en a vu dans les journaux, du côté pénal ou criminel. Le dernier cas célèbre, c'est quand la Cour suprême a refusé dernièrement une preuve qui avait été obtenue dans une cellule où un codétenu avait un système d'enregistrement sur lui et a enregistré la confession de quelqu'un d'autre qui était avec lui dans la cellule. On a apporté cet enregistrement-là en preuve pour montrer la culpabilité de la personne. La Cour suprême a dit: Ça a été obtenu illégalement et c'est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. L'exemple classique que l'on donne évidemment, c'est celui qui entre dans une cellule et qui se dit aumônier et qui reçoit la confession. Aujourd'hui, c'est moins l'exemple éloquent par excellence.

Une voix: Ce n'est pas catholique. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: Oui. Est-ce que le secret de la confession est un secret professionnel?

Des voix: Oui.

M. Rémillard: Alors, on me dit oui, en plus. Alors, donc, l'exemple, maintenant, est à bannir.

Mme Harel: Mais, y a-t-il déjà eu de la jurisprudence en matière de droit civil ou commercial?

M. Rémillard: Mme Longtin va répondre, si vous le voulez.

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: II y a eu de la jurisprudence effectivement de la Cour suprême qui a interprété l'article 24, alinéa 2. Comme on l'a mentionné, évidemment, les droits et libertés qui sont protégés par cette charte-là sont principalement en matière criminelle, mais on sent quand même maintenant une extension sur la question des droits à la vie et à la sécurité.

Malheureusement, je ne l'ai pas avec moi, mais je pourrais faire apporter, faire venir le document. De mémoire, je ne pourrais pas... Je ne voudrais pas m'avancer trop sans avoir revu ce document-là.

Mme Harel: Et c'est en matière civile? M. Holden: M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Westmount.

M. Holden: Si jamais on donne un statut professionnel aux journalistes, ils vont être protégés par cet article.

M. Rémillard: Moi, personnellement, M. le Président, je dois dire que je suis contre. Reconnaître les journalistes au niveau du Code des professions, je suis contre ça, vraiment contre ça.

M. Holden: I am glad to hear that.

M. Rémillard: Ce n'est pas ma responsabilité, mais je me permets de le dire au nom de la liberté de la presse. Pour écrire, on n'a pas besoin d'être membre d'une corporation professionnelle. On n'a pas besoin d'être pris dans un tas de règlements ou quoi que ce soit. Ça a des inconvénients...

M. Holden: Mais ils essaient d'avoir un secret professionnel, les journalistes. Ça a déjà été testé plusieurs fois.

M. Rémillard: Là, c'est un grand débat. Celui-là, je ne l'aborderai pas d'une façon aussi catégorique. En ce qui regarde le Code des professions, je me permets juste de faire cette parenthèse-là.

M. Holden: J'en prends bien note.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il n'y a pas d'autres commentaires, ces articles... Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonheuve.

Mme Harel: Oui. Je souhaiterais qu'on puisse suspendre avec un petit "s" l'article 2844, le temps qu'on ait ces informations que Me Longtin va transmettre à la commission et qu'on puisse avoir un véritable portrait de l'application de ce qui est proposé.

M. Rémillard: Très bien, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. L'article 2843 est donc adopté tel quel et l'article 2844 est laissé en suspens. (11 h 45)

Des moyens de preuve

Nous arrivons au chapitre deuxième qui traite des moyens de preuve et qui touche les articles 2845 à 2852 inclusivement. Le texte d'introduction à ce chapitre deuxième se lit comme suit: Ce chapitre maintient les principes fondamentaux concernant les limites à la recevabilité de tout moyen de preuve pour établir tout fait pertinent au litige. Ainsi sont maintenues les règles relatives à la meilleure preuve, à l'impossibilité de prouver un acte juridique par témoignage et à celle de contredire par témoignage un écrit valablement fait.

Cependant, le projet de réforme apporte une certaine libéralisation à ces limites de preuve, principalement en permettant la preuve d'un acte juridique par témoignage, indépendamment de la valeur en litige, non seulement en matière commerciale, mais contre toute personne qui a passé un acte juridique dans le cours des activités de son entreprise. La nécessité d'agir avec célérité et le caractère répétitif et systématique des actes juridiques justifiaient cette exception en matière commerciale. Et les mêmes motifs sont valables pour toutes les entreprises, même non commerciales, qu'il s'agisse de coopératives, de professions libérales, artisanales, agricoles, etc.

Par ailleurs, le commencement de preuve, qui permet la preuve testimoniale d'un acte juridique, est élargi et comprend dorénavant la présentation d'un élément matériel de preuve, lorsque cet élément de preuve rend vraisemblable l'inexactitude des énonciations de l'acte.

J'appelle les articles contenus à ce chapitre deuxième, Des moyens de preuve, soit les articles 2845 à 2852 inclusivement.

M. Rémillard: M. le Président, nous avons cinq amendements. D'abord, l'article 2847 est modifié par le remplacement, à la première ligne, des mots Toutes les fois qu'il" par les mots "Lorsqu'il".

M. le Président, c'est une modification formelle. En raison de cet amendement, l'article 2847 se lirait comme suit: "Lorsqu'il n'a pas été possible à une partie, pour une raison valable, de se ménager la preuve écrite d'un acte juridique, la preuve de cet acte peut être faite par tous moyens."

L'article 2849 du projet est modifié par la suppression du deuxième alinéa. L'amendement vise à retirer de l'article 2849 la définition du commencement de preuve contenue au deuxième alinéa afin d'en faire une règle distincte et générale qui sera introduite comme article 2850.1. En raison de cet amendement, l'article 2849 se lirait comme suit: "Les parties à un acte juridique constaté par un écrit ne peuvent, par témoignage, le contredire ou en changer les termes, à moins qu'il n'y ait un commencement de preuve."

L'article 2850 est modifié par le remplacement, à la deuxième ligne, des mots "d'interpréter ou de compléter un écrit" par les mots "d'interpréter un écrit, de compléter un écrit manifestement Incomplet".

M. le Président, la jurisprudence permet déjà dans ces circonstances de compléter un écrit par témoignage. La modification proposée vise à maintenir le droit actuel mais à éviter, par ailleurs, que la preuve testimoniale soit recevable dans tous les cas afin de préserver la stabilité des contrats et la sécurité juridique des parties. En raison de cet amendement l'article 2850 se lirait comme suit: "La preuve par témoignage est admise lorsqu'il s'agit d'interpréter un écrit, de compléter un écrit manifestement incomplet ou d'attaquer la validité de l'acte juridique qu'il constate. "

M. le Président, le projet est modifié par l'insertion, après l'article 2850, du suivant: "2850. 1 Le commencement de preuve peut résulter d'un aveu ou d'un écrit émanant de la partie adverse, de son témoignage ou de la présentation d'un élément matériel lorsqu'un tel moyen rend vraisemblable le fait allégué. "

M. le Président, la règle du commencement de preuve est applicable en maintes circonstances. Aussi, paraît-il souhaitable d'en faire une règle distincte. Ainsi, dans le contexte du livre septième, la définition s'applique à la fois aux cas prévus aux articles 2848 et 2849. En raison de cet amendement, l'article 2850. 1 se lirait comme suit: "Le commencement de preuve peut résulter d'un aveu ou d'un écrit émanant de la partie adverse, de son témoignage ou de la présentation d'un élément matériel lorsqu'un tel moyen rend vraisemblable le fait allégué. "

M. le Président, le projet est modifié par l'insertion, après l'article 2852, de l'article suivant: "2852. 1 La preuve par la présentation d'un élément matériel est admise conformément aux règles de la recevabilité prévues pour prouver l'objet, le fait ou le lieu qu'il représente. "

M. le Président, cette modification vise à limiter la recevabilité de l'élément matériel de preuve des articles 2840 à 2842 de façon à respecter l'ensemble des autres règles de recevabilité prévues pour les autres moyens de preuve. Les règles devraient différer selon que l'enregistrement visuel et sonore, par exemple, représente un acte juridique ou un témoignage à propos d'un acte juridique ou d'un fait. En raison de cet amendement, l'article 2852. 1 se lirait comme suit: "2852. 1 La preuve par la présentation d'un élément matériel est admise conformément aux règles de recevabilité prévues pour prouver l'objet, le fait ou le lieu qu'il représente. "

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cette série d'articles 2845 à 2852 inclusivement, incluant les nouveaux articles 2850. 1 et 2852. 1?

Mme Harel: C'est là un chapitre important, M. le Président, ce chapitre sur les moyens de preuve, et je crois comprendre que, de 2645 à 2852, le ministre propose de codifier des règles actuelles, soit des règles émanant, en fait, de l'application des dispositions ou encore de la jurisprudence. Mais il y a du droit nouveau et j'aimerais d'abord que l'on nous indique la portée des règles qui introduisent du droit nouveau.

M. Rémillard: M. le Président, je demanderais à Me Longtin de nous faire cette présentation.

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: M. le Président, en fait, on retrouve ce qu'on ne retrouve pas dans le droit actuel parce qu'il n'y est pas exprimé formellement. Il y a l'article 2845 qui est une codification d'une règle acceptée par les tribunaux et la doctrine, et qui avait été également proposée par l'Office de révision et qui vise donc a indiquer que le tribunal ne peut suppléer d'office les moyens d'irrecevabilité qu'une partie a fait défaut d'invoquer.

Une autre disposition qui serait nouvelle serait principalement... Bah, en fait, ce n'est pas tout à fait... L'article 2849, donc, qui vient libéraliser le régime de la preuve et, à cet égard, on peut dire qu'il apporte quand même des modifications pour permettre, par témoignage, de compléter un écrit ou de le contredire, s'il y a commencement de preuve, il faut aussi, je pense, souligner l'article 2850 qui en est un complément où on permet la preuve par témoignage pour interpréter un écrit, compléter un écrit manifestement incomplet ou attaquer la validité de l'acte juridique. C'est principalement une codification jurisprudentielle, mais aussi une certaine libéralisation qu'on a d'ailleurs, par rapport au texte présenté, resserré dans l'amendement qui est proposé.

Le Présidant (M. Lafrance): Merci, Me Longtin. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Je remarque à 2849, d'abord, qu'on va devoir se familiariser avec l'expression "commencement de preuve" tout court plutôt que "commencement de preuve par écrit". C'était là une expression du vocabulaire couramment utilisée par les professionnels du droit et je comprends qu'au premier paragraphe, quand vous utilisez "commencement de preuve par écrit", il faudrait lire, à 2849, "commencement de preuve" tout court...

Mme Longtin: En fait, dans le commentaire...

Mme Harel: ...au premier paragraphe.

Mme Longtin: ...c'est un peu le passage du concept actuel au concept futur, effectivement.

Actuellement, ça se détermine comme commencement de preuve par écrit mais, dorénavant, on va enlever cette expression "par écrit" vu que, de toute façon, ça peut résulter d'un aveu ou d'un témoignage.

Mme Harel: Donc, est-ce que je comprends que le premier paragraphe va être modifié, à 2849, le premier paragraphe des commentaires, pour qu'on puisse lire "et la définition du commencement de preuve"? J'ai cru comprendre qu'il faudrait un soin constant pour ne pas répéter l'expression qui était utilisée dans le passé, mais qui ne le sera plus dorénavant. C'est bien, ça?

Mme Longtin: Oui, sauf qu'il faut, évidemment, aussi, dans les commentaires, indiquer le passage du droit actuel au droit nouveau. Alors, dans certains cas, c'est possible, je pense, quand ça ressort clairement.

M. Rémillard: II est possible de faire ça.

Mme Harel: À 2849 tel qu'amendé, on me fait remarquer qu'il y a un "e" à l'expression "constatée", au premier alinéa, et donc, comme on réfère à l'acte juridique au masculin, il faudrait simplement voir à biffer ce "e" qui n'est pas utile.

M. Rémillard: Un petit "e" égaré.

Mme Harel: Si on revient à 2848, au premier alinéa de 2848, on lit: "La preuve d'un acte juridique ne peut, entre les parties, se faire par témoignage lorsque la valeur du litige excède 1000 $." Il faut donc comprendre qu'on a remplacé... L'alinéa 2 de l'article 1233 du Code, qui stipule que dans toute matière où le principal de la somme ou la valeur demandée n'excède pas 1000 $, a été remplacé par la valeur du litige. Alors, c'est là un changement important. Il faut donc comprendre, par exemple, que même si un contrat est de plus de 1000 $, il pourrait y avoir application de 2848 si la somme demandée est inférieure à 1000 $. C'est donc ça qu'il faut comprendre?

M. Rémillard: Oui. (12 heures)

Mme Harel: Évidemment, c'est un changement majeur. Je ne sais pas si Me Longtin est d'accord avec moi. C'est un changement majeur, notamment en matière de petites créances. Je ne crois pas qu'on pouvait obtenir une preuve par témoin en portant devant la Cour des petites créances des contrats... Même si on réclamait une somme inférieure à 1000 $, on ne pouvait porter devant les petites créances cette réclamation si le contrat était supérieur à 1000 $. C'est quand même un changement important.

M. Rémillard: Ce n'est pas un changement important. Je ne crois pas que ce soit un changement important. Je pense que c'est déjà... Je vais demander à Mme Longtin de le préciser, mais il me semble que c'est une règle qui existe présentement.

Mme Longtin: En fait...

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Longtin.

Mme Longtin: L'article 1233 s'exprime en disant "où le principal de la somme ou la valeur demandée n'excède pas 1000 $." Dans d'autres circonstances, par exemple, à l'article 26 du Code de procédure, pour déterminer la compétence de certaines cours d'appel, on parle de la valeur de l'objet du litige qui est l'expression qui est utilisée ici. C'est une question finalement d'interprétation, de savoir si on parle... C'est ça, le litige, de toute façon, porte sur la valeur qui est demandée, sur la demande. Donc, c'est une expression qui est différente, mais qui devrait couvrir la même réalité.

Mme Harel: Alors, vous nous dites que ce serait exactement la même application au premier alinéa de 2848 qu'au deuxième alinéa de 1233 actuel.

M. Rémillard: C'est ça. C'est exactement le même objectif. La même chose.

Mme Harel: La Chambre des notaires faisait valoir dans son mémoire, aux pages 54 et suivantes, un point de vue absolument contraire. Je la cite: "Ce n'est plus la valeur de l'acte juridique approuvé qui sert de critère, mais la valeur du litige. Cela veut dire que, contrairement au droit actuel, ce n'est pas lors de la conclusion de l'acte qu'if faut se placer pour déterminer si la preuve testimoniale est admise ou non, mais lors du procès." C'est-à-dire que, contrairement à ce qu'énonce l'article 1236, qui se lit ainsi: "La preuve testimoniale ne peut être admise sur la demande d'une somme n'excédant pas 1000 $ si cette somme est le solde ou fait partie d'une créance en vertu d'un contrat qui ne peut être prouvé par témoin."

M. Rémillard: Nous n'arrivons pas à cette conclusion-là...

Mme Harel: Attendez...

M. Rémillard: Je pense que les experts non plus. Les légistes n'arrivent pas à cette conclusion-là. Nous arrivons à la conclusion que...

Mme Harel: Si vous me permettez, je vais juste poursuivre.

M. Rémillard: Je vous en prie.

Mme Harel: Donc, 1236 prévoit que la preuve testimoniale ne peut être admise sur la demande d'une somme n'excédant pas 1000 $ si cette somme est le solde ou fait partie d'une créance en vertu d'un contrat qui ne peut être prouvé par témoin. Ainsi, un bailleur va pouvoir prouver par témoin un bail verbal dont la valeur excède 1000 $ lorsqu'il réclame le paiement d'un loyer inférieur à cette somme. Il en sera de même de tout créancier en vertu d'un contrat à paiements différés. Il suffira que la réclamation en justice soit pour moins de 1000 $ pour qu'il y ait ouverture à la preuve testimoniale du contrat. S) le créancier obtient alors un jugement favorable, ce jugement jouira de l'autorité de la chose jugée quant à l'existence du contrat dans toute action future. De même, un créancier va pouvoir réduire ses créances à une somme inférieure à 1000 $ pour être admis à le prouver par témoin. Est-ce que vous rejetez cette interprétation de 1236 notamment?

M. Rémillard: Bien, tout d'abord, qu'on comprenne bien que notre rédaction est conforme à la rédaction actuelle. C'est la même signification. Je pense que là-dessus...

Mme Harel: Pas de 1236.

M. Rémillard: Non. De...

Mme Harel: 1233, deuxième alinéa.

M. Rémillard: Oui. 1233, deuxième alinéa.

Mme Harel: Et où retrouve-t-on 1236 dans le projet de loi 125?

M. Rémillard: Je vais demander à Me Longtin de le préciser, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Me Longtin.

Mme Longtin: L'article 1236, en fait, n'a pas été tel quel repris puisqu'il nous semblait suffisant à l'article 2848, et avec la notion qui est indiquée là, ça recouvrait donc la même réalité que 1236. Et cet article, finalement, n'apparaît pas utile puisque, de toute façon, il vient tout simplement préciser dans certaines circonstances que le solde peut constituer la valeur en demande, ou la valeur du litige, ou la valeur demandée, ou la valeur qui excède. C'est une série d'expressions qui est utilisée dans le Code actuel et qu'on résume avec celle qu'on retrouve actuellement au Code de procédure sur la notion de valeur de l'objet du litige, la valeur du litige.

Mme Harel: M. le Président, loin de moi la question de vouloir insister, mais je crois qu'il y a là un changement important, et puis il faut en être conscient pour pouvoir l'expliquer de façon à ce que le droit soit clairement compris. Et je ne voudrais pas faire tout le débat de ce que devrait être le plafond du seuil d'admissibilité à la Cour des petites créances. J'espère que ce débat se fera au moment du sommet de la justice. Je suis vraiment partisane qu'il y ait élévation à 3000 $, comme le recommande le rapport Macdonald. Ceci dit, actuellement, à la Cour des petites créances, dans la réalité quotidienne des choses, il y a des réclamations qui sont écartées du fait qu'elles font partie de contrats qui excèdent: par exemple, des contrats de voyage ou des choses comme ça. Alors, il vaudrait mieux peut-être suspendre 2848 le temps qu'il y ait un échange sur la portée réelle de 2848, et puis remarquez qu'on y reviendra.

M. Rémillard: Oui, d'accord pour suspendre, M. le Président, d'abord en ce qui regarde le 1000 $ qu'on doit quand même reconsidérer, je pense. Mais en fonction aussi du principe, il est vrai que nous changeons la portée définitivement puisque 1236 ne se retrouve pas. Donc, je pense qu'on ne peut pas mettre en doute le fait que pour un contrât supérieur à 1000 $, si la réclamation est de moins de 1000 $, il va donc y avoir changement à ce niveau-là. Pour ma part, je considère que ce n'est une mauvaise chose si on regarde toutes les perspectives, mais nous pourrons en discuter plus avant.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il n'y a pas d'autres commentaires touchant ces articles, ies articles 2845 et 2846 sont donc adoptés tels quels. L'article 2847 est adopté tel qu'amendé. L'article 2848 est laissé en suspens. Les articles 2849 et 2850 sont adoptés tels qu'amendés. Le nouvel article 2850.1 est adopté tel que proposé. Les articles 2851 et 2852 sont adoptés tels quels. Et le nouvel article 2852.1 est adopté tel que proposé.

De certaines déclarations

Nous en arrivons maintenant au chapitre troisième qui traite de certaines déclarations et qui touche les articles 2853 à 2858 inclusivement. Le texte d'introduction à ce chapitre troisième se lit comme suit: En principe, le droit actuel et le projet exigent, pour qu'une déclaration soit recevable en preuve, qu'elle soit faite à l'instance par une personne qui a une connaissance personnelle des faits à prouver; les autres

déclarations constituent du ouï-dire et ne sont pas recevables en preuve.

Malgré l'absence d'exceptions codifiées actuellement, les tribunaux acceptent certaines exceptions à l'interdiction du ouï-dire en s'ins-pirant des règles de la "common law", mais de façon limitée et pas toujours cohérente. Pour remédier à cette situation, le projet introduit une codification des déclarations de ouï-dire acceptables, établit les critères de recevabilité et la façon de mettre ces déclarations en preuve. Par ailleurs, bien qu'elles ne constituent pas à proprement parler des déclarations de ouï-dire, ce chapitre traite également des déclarations antérieures des personnes qui comparaissent comme témoins.

La réforme proposée à ce chapitre reprend à quelques nuances près la proposition de l'Office de révision du Code civil en ces matières.

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre troisième, De certaines déclarations, soient les articles 2853 à 2858 inclusivement.

M. Rémillard: M. le Président, nous avons deux amendements. L'article 2853 est modifié par le remplacement, aux deuxième et troisième lignes, des mots "peut être" par le mot "est" et, aux troisième et quatrième lignes, des mots "il en est de même de" par les mots "est aussi admise à titre de témoignage".

Les déclarations qui respectent les exigences et les conditions prévues par la loi doivent être admises en preuve, d'où le premier amendement. L'autre amendement vise à préciser que le consentement des parties n'est requis que dans les deux premiers cas. En raison de cet amendement, l'article 2853 se lirait comme suit: "La déclaration d'une personne qui ne témoigne pas à l'instance ou celle d'un témoin faite antérieurement à l'instance est admise à titre de témoignage si les parties y consentent; est aussi admise à titre de témoignage la déclaration qui respecte les exigences prévues par le présent chapitre ou par la loi."

L'article 2854 est modifié par le remplacement: 1° au premier alinéa, des mots "la demande en soit faite et qu'un avis ait été donné à la partie adverse" par les mots "sur demande et après qu'avis en ait été donné à la partie, le tribunal l'autorise"; 2° à la première ligne du deuxième alinéa, des mots "Le tribunal" par le mot "Celui-ci".

L'avis donné à la partie adverse vise à permettre à celle-ci de contester la demande et cette dernière doit être autorisée par le tribunal pour que la déclaration soit mise en preuve. En raison de cet amendement, l'article 2854 se lirait comme suit: "La déclaration faite par une personne qui ne comparaît pas comme témoin, sur des faits au sujet desquels elle aurait pu légalement déposer, peut être admise à titre de témoignage, pourvu que, sur demande et après qu'avis en ait été donné à la partie adverse, le tribunal l'autorise. "Celui-ci doit cependant s'assurer qu'il est impossible d'obtenir la comparution du déclarant comme témoin, ou déraisonnable de l'exiger et que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier. "Sont présumés présenter ces garanties, notamment, les documents élaborés dans le cours des activités d'une entreprise et les documents insérés dans un registre dont la tenue est exigée par la loi, de même que les déclarations spontanées et contemporaines de la survenance des faits."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 2853 à 2858 inclusivement? Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Avant de poser des questions plus précises sur certains articles, j'aimerais peut-être, si c'était possible, qu'on nous donne des informations à savoir s'il y a du droit nouveau dans ces dispositions.

M. Kehoe: Oui, Mme la députée. Je demanderais à Mme Longtin de présenter les changements de droit nouveau dans cette section.

Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: À dire vrai, M. le Président, tout ce chapitre est de droit nouveau dans la mesure où - sauf pour l'article 2853 - il n'y a pas de règles codifiées. Cependant, il demeure que la majorité des dispositions est une codification de règles que les tribunaux ont déjà admises ou de pratiques qui sont constantes devant les tribunaux, le principe de base étant celui de l'article 2853 qui pose l'interdiction du ouï-dire, sauf dans certaines circonstances qui sont prévues à cette disposition. (12 h 15)

L'article 2854, pour sa part, évidemment, vient déterminer les exigences que doit avoir une déclaration pour être admissible à titre de témoignage, lorsqu'elle est faite par une personne qui ne vient pas à l'instance. Et, comme on le mentionne, c'est conforme aux critères développés par la jurisprudence. Le troisième alinéa établit une présomption en faveur de documents qui sont susceptibles de présenter des garanties suffisamment sérieuses pour qu'on puisse s'y fier, et se trouve au fond à développer un peu l'article 294 du Code de procédure civile. C'est-à-dire qu'il s'inscrit dans la même ligne de pensée que l'article 294 du Code de procédure. Donc, c'est généralement la portée de ces articles-là.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Me Longtin. Oui, Mme la députée de Terrebon-ne.

Mme Caron: Plus particulièrement, j'aimerais aborder l'article 2854, article qui pose certaines interrogations. Et dans le mémoire de la Chambre des notaires, on retrouve toute une argumentation sur l'article 2854, argumentation que je me permettrai peut-être de présenter: "2854. Parmi les déclarations qui bénéficient d'une présomption de fiabilité, on retrouve les déclarations spontanées et contemporaines de la survenance des faits. Dans le droit actuel, il existe une exception: la prohibition du ouï-dire au profit de déclarations de ce genre. Mais, pour qu'une telle déclaration puisse se qualifier, elle doit satisfaire à des conditions qui en garantissent la fiabilité.1' Et là, je vous épargne le reste de l'argumentation. La conclusion: "La Chambre des notaires ne voit pas pourquoi on modifierait l'état du droit sur ce point. Elle estime que la présomption de fiabilité attribuée aux déclarations spontanées et contemporaines devrait être supprimée." Quels sont les arguments qui ont permis au législateur d'apporter ces changements?

M. Kehoe: Alors, Mme Longtin, pourriez-vous nous expliquer la raison pour laquelle la position de la Chambre des notaires n'a pas été retenue?

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: M. le Président, c'est que, en fait, suivant l'analyse que nous avons faite du mémoire de la Chambre des notaires et de ses représentations, il nous apparaît que le terme "spontanées" et l'élément de contemporanéité avec la survenance des faits suffisent pour que ça puisse offrir suffisamment de garanties qu'il n'y a pas de fabrication de preuve.

D'ailleurs, on voit bien que le troisième alinéa de cet article 2854 n'est toujours qu'une présomption et, donc, lorsque la déclaration est faite spontanément, c'est déjà en soi quelque chose qui s'oppose au fond à une analyse, à une réflexion élaborée, ou à une fabrication de preuve. Et ça nous semble donc pouvoir implicitement recouvrir la même réalité que la réalité actuelle.

Mme Caron: Par rapport au droit criminel et cMI, est-ce que vous pouvez nous donner les explications du deuxième paragraphe?

Mme Longtin: Par tradition, le civil et le pénal sont toujours traités distinctement. L'article, tel que présenté, n'aborde pas directement la question et on s'en remet donc, au fond, à la jurisprudence qui s'est établie au Québec sur cette question-là. C'est que la Cour d'appel a déjà accepté de considérer des déclarations par exemple qui ont été faites dans le cadre d'une enquête du coroner, ou dans une autre circonstance, ou pourrait aussi l'accepter dans le cadre d'un litige criminel. Cependant, ça doit, par ailleurs, pour être acceptable, répondre quand même à des critères.

Donc, il faut qu'il sort impossible d'obtenir la déclaration, c'est-à-dire de faire comparaître le déclarant comme témoin, ce qui peut effectivement survenir si la personne est décédée depuis le témoignage qui a été fait, ou encore qu'il soit déraisonnable de l'exiger. Alors, si, effectivement, de faire comparaître cette personne-là peut entraîner des frais qui sont disproportionnés, par exemple, à la vaJeur même du litige, le tribunal pourrait considérer cela déraisonnable. Il doit aussi apprécier que les circonstances qui ont entoure la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier.

Alors, évidemment, il devra, si on lui présente une déclaration qui aurait été faite dans une instance pénale, s'assurer de tous ces éléments-là avant de l'accepter. Et c'est certain que si toute la preuve qui est faite dans une instance pénale indique que personne ne pouvait avoir un intérêt très sérieux, disons, à trop nuancer son témoignage, que la déclaration pourrait ne pas être acceptable. Mais il n'y a pas d'interdiction comme telle.

Mme Caron: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: ...sur le même sujet, M. le Président, j'aimerais que Me Masse puisse ajouter.

Le Président (M. Lafrance): Certainement. Alors, Me Masse.

M. Masse: Je suis en général tout à fait d'accord avec notre collègue, Mme Longtin. Je ne suis pas certain que la Cour d'appel ait pris le virage aussi définitif qu'on le signale. Cependant, sur le fond de la règle, je pense qu'il était... Dans le cas de certaines instances, par exemple, on contestait un testament qui avait été forgé. C'était un faux et la personne qui avait fait le faux avait été poursuivie antérieurement dans une instance criminelle et un témoin clé qui avait témoigné dans l'instance criminelle était décédé en cours de route. Dans l'instance civile, tout ce qu'on avait, c'était la transcription du témoignage au criminel. Sauf que le problème légal majeur, et on le comprend bien, c'est le fait que les parties au procès civil n'avaient pu contre-interroger la personne à l'instance criminelle puisque, dans l'instance criminelle, il s'agit de la défenderesse comme telle avec son avocat et de la partie publique, et la personne

qui conteste le testament n'avait pas pu intervenir dans l'instance criminelle. Donc, pendant très longtemps, ce type de litiges s'est trouvé à un tir de barrage très important de la part des tribunaux qui ont refusé que l'on transpose dans l'instance civile les éléments de preuve matérielle ou autre d'une instance criminelle.

Et, quant à moi, je pense qu'avec les garanties qui sont présentées a 2854 il va falloir que les tribunaux soient extrêmement prudents. Je pense que l'indépendance de la procédure civile face à la procédure pénale est un principe qu'on doit respecter encore de façon extrêmement soigneuse mais, dans certains cas, tel que le disait Me Longtin, il faut permettre... Dans le cas de décès, par exemple, ou dans le cas où les affirmations sont suffisamment claires pour que le tribunal puisse s'y fier de façon raisonnable. Je doute, quant à moi, si on prétend entériner un courant jurisprudentiel, je considère quant à moi que ce courant-là n'est pas encore aussi évident et que, effectivement, on pourrait avoir encore pendant les prochaines années des tribunaux qui, à juste titre, refuseraient certaines preuves présentées dans une instance, par exemple, criminelle ou dans une enquête du coroner, notamment, au motif que les parties n'ont pas été contre-interrogées par toutes les parties dans l'instance civile. Mais, dans l'ensemble, donc, je pense qu'il s'agit là d'une ouverture. Elle doit être faite, mais elle doit être considérée comme une mesure exceptionnelle et reçue par les tribunaux avec beaucoup de prudence, bien sûr, et c'est une prudence qu'on leur reconnaît actuellement.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Me Masse, pour ces commentaires.

M. Kehoe: Avez-vous quelque chose à ajouter à cela, Mme Longtin?

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Chapleau. Me Longtin.

Mme Longtin: M. le Président, j'aimerais simplement faire une précision. Je ne voudrais pas avoir affirmé qu'il y ait eu une tendance très claire de la Cour d'appel là-dessus. Tout simplement pour indiquer que, dans certaines circonstances, on a accepté de franchir le mur entre le pénal et le civil. Maintenant, il n'y a pas, comme tel, ici, d'invitation nécessaire à le faire dans cet article-là.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci. S'il n'y a pas d'autres commentaires, donc, l'article 2853 est adopté tel qu'amendé. L'article 2854 est également adopté tel qu'amendé. Les articles 2855 à 2858 inclusivement sont donc adoptés tels quels. Ceci termine le livre septième, De la preuve.

Étant donné l'heure, je me propose de suspendre cette séance de travail. Est-ce qu'il y aurait des déclarations de fin de séance? Sinon, en principe, nous avons convenu de nous réunir cet après-midi encore, vers les 15 h 30, c'est-à-dire après les affaires courantes et sujet à confirmation en Chambre par le leader du gouvernement. Alors, s'il n'y a pas de commentaires... Non? Ça va. Alors, on devrait se réunir dans cette même salle, ici. Sur ce, je suspends donc nos travaux pour ce matin.

(Suspension de la séance à 12 h 25)

(Reprise à 15 h 48)

Le Président (M. Lafrance): Veuillez prendre place, nous allons reprendre nos travaux pour cet après-midi. J'aimerais déclarer cette séance de travail ouverte en demandant à Mme la secrétaire s'il y a des remplacements.

La Secrétaire: Oui. Pour cette partie de séance, M. le Président, Mme Bleau (Groulx) est remplacée par M. Lafrenière (Gatineau).

Le Président (M. Lafrance): Alors, bienvenue à M. le député de Gatineau, en vous rappelant que nous avons eu avis de la Chambre de siéger et de travailler ce soir jusqu'à 18 h 30, pour reprendre de 20 heures à minuit, ici même, dans cette salle, et demain, dans la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, de 10 heures jusqu'à 12 h 30.

De la prescription Du régime de la prescription

Nous avions donc terminé le Livre septième, De la preuve. Je pense que nous avons convenu d'amorcer le Livre huitième, De la prescription. J'aimerais vous lire les propos d'introduction à ce Livre huitième, De la prescription, qui touche les articles 2859 à 2917. Le texte d'introduction se lit comme suit: Suivant en cela l'ordre du Code civil actuel, le projet de loi groupe dans un même livre toutes les règles relatives aux prescriptions acquisitive et extinctive. Dans un souci de clarté, le projet propose toutefois une distribution nouvelle des articles de la prescription en ce qu'il les répartit en trois titres consacrés respectivement aux dispositions communes aux deux sortes de prescription - renonciation, interruption, suspension - aux matières propres à la prescription acquisitive, aux règles particulières à la prescription extinctive. Par ailleurs, le projet actualise et simplifie les règles de la prescription. C'est ainsi que les règles désuètes sont supprimées et que le nombre des délais est réduit.

Certes, il aurait été souhaitable de ne reconnaître, dans le domaine de la prescription,

qu'un ensemble de règles, celles du Code civil; cependant, même si la diversité des situations juridiques fait obstacle à la réalisation absolue de ce souhait, il demeure que certaines lois devront être modifiées afin de mieux harmoniser les délais de prescription qu'on y trouve avec ceux du projet.

La réforme propose que les prescriptions courent en faveur ou à l'encontre de tous: l'Église, l'État, les mineurs et majeurs sous curatelle ou sous tutelle, sauf, quant à ces derniers, à préserver les recours qu'ils peuvent avoir contre leurs représentants légaux ou des tiers pour les atteintes à l'intégrité physique de leur personne, et sous réserve encore, quant à l'État, des dispositions expresses de la loi. Enfin, une autre exception qui maintient, en le modifiant, le droit actuel, est prévue à cette règle: la prescription ne court point entre époux pendant la vie commune.

Contrairement au Code actuel, le projet distingue entre les délais de prescription et ceux de déchéance du recours. De plus, le délai de droit commun est raccourci de trente ans à dix ans, et il n'est plus distingué entre les recours contractuels et les recours déllctuels.

Le titre premier touche aux questions du régime de la prescription et comprend les articles 2859 à 2893 inclusivement. Le texte d'introduction qui l'accompagne se lit comme suit: Ce titre traite des règles communes aux prescriptions acquisitive et extinctive et se divise en quatre chapitres. Le premier concerne les dispositions générales, telles que la nature de la prescription, son domaine, son extension, la possibilité ou non pour le tribunal de suppléer le moyen résultant de la prescription, le mode de computation du délai et son point de départ, la possibilité d'invoquer la prescription en tout état de cause et, enfin, le sort de la prescription lorsque l'action directe est prescrite.

Le deuxième chapitre traite de la renonciation à la prescription, de la possibilité de convenir d'un délai de prescription autre que celui prévu par la loi, de la capacité requise pour pouvoir renoncer, de la manifestation de la renonciation et, lorsqu'une personne renonce, de ce qu'il advient des tiers intéressés.

Le troisième chapitre, qui traite de l'interruption de la prescription, ajoute à celles qui existent déjà des règles nouvelles qui assureront un meilleur fonctionnement de la prescription et qui accroîtront la protection des droits.

Le quatrième et dernier chapitre de ce titre premier ne retient comme cause de suspension de la prescription que l'impossibilité de fait d'agir. Il maintient cependant certaines règles favorables au mineur ou majeur sous curatelle ou sous tutelle, ou à la paix familiale entre époux. Enfin, il innove, en matière successorale, en ce que la prescription ne courra plus contre l'héritier à l'égard des créances qu'il a contre la succession.

Dispositions générales

Le chapitre premier, pour sa part, traite des dispositions générales et regroupe les articles 2859 à 2866. Le texte qui accompagne ce chapitre premier se lit comme suit: Le chapitre des dispositions générales est un chapitre fondamental applicable à toute prescription. Il a pour but d'énoncer les règles fondamentales du fonctionnement de la prescription et, de ce fait, fournit un cadre de référence aux diverses prescriptions qui existent dans les lois particulières. Certes, le projet, suivant en cela la recommandation de l'Office de révision du Code civil, propose que la prescription puisse courir en faveur ou à l'encontre de tous, même de l'État, mais, outre des modifications dans la terminologie utilisée, le projet innove sur trois points: la prescription devient opposable en tout état de cause, même en appel; lorsque le dernier jour du délai est un samedi ou un jour férié, la prescription n'est acquise qu'au premier jour ouvrable qui suit; le point de départ des prescriptions acquisitive et extinctive est clairement fixé.

Alors, j'aimerais appeler les articles contenus à ce chapitre premier, donc des dispositions générales, soit les articles 2859 à 2866 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a deux amendements: L'article 2862 est modifié par: 1° la suppression des mots ", à moins que la loi ne déclare la déchéance du recours. Celle-ci ne se présume pas; elle résulte d'un texte exprès"; 2° par l'ajout, après le premier alinéa, du suivant: "Toutefois, le tribunal doit déclarer d'office la déchéance du recours, lorsque la loi prévoit cette déchéance. Celle-ci ne se présume pas; elle résulte d'un texte exprès."

M. le Président, il s'agit d'une modification rédactionnelle visant à clarifier la disposition. En raison de cet amendement, l'article 2862 se lirait comme suit: "Le tribunal ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription.

Toutefois, le tribunal doit déclarer d'office la déchéance du recours lorsque la loi prévoit cette déchéance. Celle-ci ne se présume pas; elle résulte d'un texte exprès."

Le deuxième amendement est à l'article 2865 qui est modifié par: 1° le remplacement, au début de la dernière ligne, des mots "ne soit" par les mots "n'ait"; 2° le remplacement, à la fin de la même ligne, des mots "présumée y avoir renonce" par les mots "manifesté son intention d'y renoncer".

M. le Président, il s'agit d'une modification rédactionnelle visant à clarifier la disposition. En raison de cet amendement, l'article 2865 se lirait comme suit: "La prescription peut être opposée en tout

état de cause, même en appel, à moins que la partie qui n'aurait pas opposé le moyen n'ait, en raison des circonstances, manifesté son Intention d'y renoncer."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles du chapitre premier, les articles 2859 à 2866 inclusivement? Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, nous abordons le huitième livre qui touche la prescription, livre extrêmement important, puisque nous aurons à y travailler dans les heures qui suivent, et qui touche les délais, finalement.

Dans les dispositions générales de ce chapitre premier, on nous fait part, dans les commentaires, qu'il y a trois points sur lesquels le projet innove. Je me permets de les rappeler. La prescription devient opposable en tout état de cause, même en appel. Le deuxième point: lorsque le dernier jour du délai est un samedi ou un jour férié, la prescription n'est acquise qu'au premier jour ouvrable qui suit; et le point de départ des prescriptions acquisitive et extincttve est clairement fixé. Est-ce qu'on peut nous dire, surtout principalement pour le délai du dernier jour, lorsque c'est un samedi, ce qui se passe dans le droit actuel? Qu'est-ce qu'il y a comme changement?

M. Kehoe: M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Comme la députée l'a dit, nous commençons le huitième livre. C'est un livre sur lequel il y a eu beaucoup d'échanges entre les experts des deux côtés. Dans l'ensemble, il ne semble pas y avoir de problèmes majeurs. Surtout, les experts des deux côtés semblent du même avis pour la plupart des articles. Spécifiquement pour la question demandée par la députée, je demanderais à Mme Longtin de fournir la réponse.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, Me Longtin. (16 heures)

Mme Longtin: Oui, M. le Président. Sur la question qui est soulevée, eu égard à l'article 2863, le deuxième alinéa, effectivement, innove par rapport au droit actuel. L'article 2240 dit que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli. La première phrase du deuxième alinéa de 2863 reprend donc cette règle-là. Ce qu'on ajoute, c'est que si ce dernier jour tombe un samedi ou un jour férié, donc un dimanche ou un autre jour de fête, au sens de la loi d'interprétation du Code de procédure, on poursuit une espèce de petite suspension jusqu'au premier jour ouvrable qui suit, de manière à ce que la personne puisse, si elle veut exercer son droit, profiter de ce jour ouvrable.

Mme Caron: Est-ce que ce délai, dans la pratique, n'était pas déjà accordé? Peut-être si on se réfère, par exemple, à la Loi sur la protection du consommateur.

Mme Longtin: En matière de procédure civile, l'article 7 du Code de procédure, prévoyait - et prévoit encore, d'ailleurs - que si la date fixée pour faire une chose tombe un jour non juridique, la chose peut être valablement faite le premier jour juridique qui suit. Mais il demeure quand même que c'est une règle de procédure, alors que, dans le Code civil, c'est une règle de loi substantielle qui se trouve à être introduite.

Mme Caron: Toujours sur ce même article 2863, dans les commentaires que nous avons reçus du Barreau, on notait une certaine ambiguïté qui entourait cet alinéa et le deuxième alinéa de l'article 2864, notamment en ce qui concerne le point de départ de la prescription extinctive. En effet, la lecture conjointe de ces deux alinéas - donc l'alinéa de l'article 2863 et le deuxième alinéa de 2864 - tend à nous faire conclure que, dans le cas d'une obligation à terme, le jour où le droit d'action a pris naissance, c'est-à-dire le lendemain de l'arrivée du terme, n'est pas compté dans le calcul du délai. Or, en droit actuel, le lendemain du jour de l'échéance est un jour complet et doit être compté. Pour éviter cette ambiguïté, les mots "sauf s'il est complet" devraient être ajoutés à la fin du premier alinéa de l'article 2863. Est-ce que vous avez pris en considération ces remarques?

M. Kehoe: On va faire la consultation et on va vous donner la réponse.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: Nous avons effectivement discuté des représentations qui ont été faites par le Barreau. C'est toujours un petit peu complexe, ces questions de délais, mais enfin... Si on prend le cas d'une obligation à terme dont le terme serait le 2 décembre, le droit d'action prendrait naissance le 3. Donc, si on se reporte au droit actuel, on dit, à 2240: La prescription se compte par jours et non par heures. Bon! Le jour où elle a commencé n'est pas compté, donc le 3 décembre ne serait pas compté. On compterait à partir du 4. Je pense que l'article 2863 nous amène le même résultat. Ça fixe un point de départ, mais, si on lit les deux articles ensemble - ce qui doit être fait - le point de départ

serait le 3, mais le jour du point de départ comme tel n'est pas compté. Pour un jour complet, évidemment, il faudrait... Le jour complet commence à 0 heure 0 minute 1 seconde.

Mme Caron: Toujours dans les remarques du Barreau, à l'article 2864, on nous disait que le premier alinéa de cet article, c'est-à-dire "La dépossession fixe le point de départ du délai de la prescription acquisitive" n'est vrai qu'en matière mobilière et uniquement lorsque le possesseur est de bonne foi - on se référait à l'article 2903. Toutefois, dans les autres cas de prescription acquisitive, le principe veut que cette prescription constitue l'un des effets de la possession et qu'elle se fonde sur la possession conforme. C'est du moins ce que précisent les articles 929,2894 et 2895 du projet de loi.

En conséquence, on ne saurait trouver dans les dispositions générales relatives à la prescription un article qui dit le contraire et qui affirme que la dépossession fixe le point de départ du délai de la prescription acquisitive.

Est-ce qu'on a examiné également ces remarques du Barreau?

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. Il est difficile de voir, effectivement, où nous mène le commentaire du Barreau puisque, d'une part, il est certain... On dit: "La dépossession fixe le point de départ du délai de la prescription acquisitive". Donc, une personne qui est en possession d'un bien perd cette possession et celui qui l'acquiert commence à compter.

Mme Caron: C'est donc vrai uniquement en matière mobilière?

Mme Longtin: Non. Mme Caron: Non?

Mme Longtfn: La dépossession peut aussi exister en matière immobilière.

Mme Caron: Ce n'est pas ce que semble nous dire le texte du Barreau.

Mme Longtin: II y a des actions posses-soires et pétitoires actuellement, justement parce que, d'une part, on est troublé dans sa possession, ou encore parce qu'on est dépossédé. C'est certain que la dépossession ne se fait pas de la même façon qu'en matière mobilière, ce n'est peut-être pas aussi concret, mais la notion de possession, c'est se vouloir titulaire d'un droit réel dans un bien, que ce bien soit mobilier ou immobilier. Donc, dans la mesure où on peut être possesseur, on peut être dépossédé. Ça implique, évidemment, des circonstances légèrement différentes de la manifestation de la déposses- sion, en matière immobilière tout au moins.

Mme Caron: Mais on nous dit qu'au niveau des articles 929, 2894 et 2895, le projet affirmerait le contraire, finalement.

Mme Longtin: J'avoue que nous nous sommes interrogés là-dessus. Je ne vois pas en quoi les articles 2894 et 2895 constituent une affirmation contraire. L'article 929 nous dit: "La possession rend le possesseur titulaire du droit réel qu'il exerce s'il se conforme aux règles de la prescription."

Mme Caron: Aux règles de la prescription.

Mme Longtin: Alors, dès lors que l'un entre en possession, l'autre est dépossédé. Ça va fixer le point de départ du délai. Je ne vois pas de contradiction entre les deux textes. On porte justement l'attention en matière possessoi-re - cette expression encore peu fréquente mais très jolie - de l'action en réintégrande qui vise justement, je me permets de le lire, l'article 770 du Code de procédure: "Celui qui est en possession d'un héritage ou d'un droit réel immobilier depuis plus d'un an et à titre non précaire a, contre celui qui trouble sa possession, l'action en complainte pour faire cesser le trouble, et contre celui qui l'a dépossédé par violence, l'action en réintégrande pour être remis en possession."

Donc, je ne vois pas comment on peut affirmer qu'il ne peut pas y avoir dépossession en matière de droit réel immobilier.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup pour vos explications.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie Me Longtin. S'il n'y a pas d'autres commentaires touchant ces articles, les articles 2859, 2860 et 2861 sont donc adoptés tels quels; l'article 2862 est adopté tel qu'amendé; les articles 2863 et 2864 sont adoptés tels quels; l'article 2865 est adopté tel qu'amendé; l'article 2866 est adopté tel quel.

De la renonciation à la prescription

Nous en arrivons maintenant au chapitre deuxième qui traite de la renconciation à la prescription et qui regroupe les articles 2867 à 2872 inclusivement. Le texte d'introduction qui accompagne ce chapitre deuxième se lit comme suit: Le chapitre deuxième qui traite de la renonciation à la prescription énonce des règles d'application identiques à la prescription acquisitive et à la prescription extinctive. Le libellé de l'article 2871, qui reproduit l'article 2187 du Code crvH du Bas Canada, fournit une indication en ce sens puisqu'il y est question du débiteur ou du possesseur qui renonce. Quoique la prescription, moyen d'acquérir ou de se libérer, porte

en elle la diversité, des réponses identiques satisfont néanmoins les problèmes communs aux deux formes de prescription. Les articles 2867 à 2872 fixent la manière dont les effets de chaque prescription opèrent. Ils déterminent, en fait, le mode de fonctionnement de la prescription même si, paradoxalement, ce sont les termes "renoncer" et "renonciation" qui reviennent le plus dans cinq des six articles de ce chapitre deuxième du titre premier du projet.

Le chapitre deuxième reproduit la substance des articles 2184 à 2187 du Code civil du Bas Canada, mais innove sur deux points: il met fin, d'abord, à la discussion doctrinale sur la possibilité ou l'impossibilité de convenir d'un délai de prescription plus court que celui qui est prévu par les dispositions du Code civil. Il exige ensuite, en matière immobilière, que la renonciation soit publiée. La justification de la publication de la renonciation à la prescription acquise se trouve à l'article 2870 qui lie la renonciation à la capacité d'aliéner. J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre deuxième, De la renonciation à la prescription, soit les articles 2867 à 2872.

M. Kehoe: M. le Président, il y a deux amendements dans cette section. L'article 2867 est modifié: 1° par la fusion en un seul des deux premiers alinéas; 2° par le remplacement, dans l'alinéa nouveau, du mot ". Néanmoins" par le mot ", mais".

Il s'agit d'une simple modification d'ordre rédactionnel. En raison de cet amendement, l'article 2867 se lirait comme suit: "On ne peut pas renoncer d'avance à la prescription, mais on peut renoncer à la prescription acquise et au bénéfice du temps écoulé pour celle commencée."

L'article 2869 est modifié par l'insertion, au début de la deuxième ligne du premier alinéa, après le mot "tacite", des mots "; elle est tacite".

Il s'agit d'une modification rédactionnelle visant à améliorer le texte de manière à faciliter une meilleure compréhension de la disposition. En raison de cet amendement, l'article 2869 se lirait comme suit: "La renonciation à la prescription est soit expresse, soit tacite; elle est tacite lorsqu'elle résulte d'un fait qui suppose l'abandon du droit acquis. 'Toutefois, la renonciation à la prescription acquise de droits réels immobiliers doit être publiée au bureau de la publicité des droits."

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 2867 à 2872 inclusivement? Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Donc, à l'article 2867, on ne peut pas renoncer à l'avance, mais dès qu'elle commence à courir on peut renoncer pour la prescription qui est acquise et là elle recommence immédiatement à courir de nouveau. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Kehoe: C'est ça, d'accord.

Mme Harel: Puis à 2872, alors, peut-on nous dire... Je pense qu'il y a à la fois la reconduction du droit actuel, mais aussi une sorte d'élargissement. Peut-on nous donner la portée de 2872?

M. Kehoe: Mme Longtin.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. L'article 2872 se trouve à reprendre partiellement l'article 2264. Ce qui n'est pas repris, donc, c'est la référence à la question de la novation, qui est traitée dans 2264 et ne l'est pas dans 2872. Comme on l'explique, la novation éteint la créance antérieure et, dès lors, ne peut être traitée sous l'angle de la prescription. Ça ne change pas véritablement, de toute façon, le droit actuel. C'est une question de simplification des textes.

Mme Harel: Une fois qu'on y aurait renoncé quand elle a commencé à courir, ce que ça veut dire, 2872, c'est qu'elle recommence à courir pour le même laps de temps que la prescription en vertu de laquelle on aurait renoncé?

Mme Longtin: C'est ça. Alors, disons, par exemple, qu'on peut prescrire un meuble par trois ans. On pourrait, par exemple, renoncer à la prescription déjà acquise au bout d'une année, ce qui veut dire qu'on devra recommencer une possession pour trois autres années après avoir renoncé. On remet le compteur à zéro.

Mme Harel: Très bien. Ha, ha, ha! Qu'en termes élégants cette chose fut dite! Très bien. (16 h 15)

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, Me Longtin. Donc, l'article 2867 est adopté tel qu'amendé; l'article 2868 est adopté tel quel; l'article 2869 est adopté tel qu'amendé et les articles 2870, 2871 et 2872 sont donc adoptés tels quels.

De l'interruption de la prescription

Nous touchons maintenant le chapitre troisième qui traite de l'interruption de la prescription et qui regroupe les articles 2873 à 2887. Et le texte d'introduction qui accompagne ce chapitre troisième se lit comme suit: Les

articles 2873 à 2887 du chapitre troisième sont consacrés à une série de dispositions, pour l'essentiel communes à la prescription acquisitive et à la prescription extincttve. L'interruption suppose toujours que le délai aft commencé à courir, car elle n'agit que sur le passé: non seulement elle arrête la marche du délai, mais elle efface totalement le bénéfice du temps écoulé. Une nouvelle prescription peut reprendre, mais en commençant a zéro, sans possibilité de comptabiliser le délai précédemment couru. Semblablement à la suspension qui ne modifie en rien les conditions et délais de la prescription qu'elle affecte, l'interruption ne substitue jamais, contrairement à ce qu'on trouve en droit actuel (article 2255 du Code civil du Bas Canada), une prescription de durée plus longue que celle qui fut interrompue.

L'interruption a, sur le cours de la prescription, un effet radical en ce qu'elle en contredit les fondements mêmes. C'est pour souligner cette particularité de l'interruption que le projet, contrairement au projet de l'Office de révision du Code civil, la traite avant la suspension qui vise seulement certaines situations où le titulaire, étant dans l'impossibilité de défendre ses intérêts, ne peut interrompre la prescription par une contradiction des droits de celui qui prescrit.

Dans ses grandes lignes, le projet suit le Code civil actuel et le projet de l'Office de révision du Code civil. Il s'en écarte cependant sur certains aspects. Suivant en cela l'Office de révision du Code civil, le projet précise, ce que ne fait pas le Code actuel, ce qu'est l'interruption naturelle, tant en matière de prescription acquisitive qu'en matière de prescription extincttve. De même, alors que l'article 2224 du Code actuel édicté que la demande en justice doit être signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire, dans les soixante jours du dépôt au greffe, le projet retient, en la modifiant, la règle que proposait l'Office de révision du Code civil: si, à la date du jugement, le délai de prescription est expiré ou doit expirer dans moins de trois mois, le demandeur bénéficie d'un délai supplémentaire de trois mois, à compter de la signification du jugement, pour faire valoir son droit. Alors que le Code actuel, à son article 2226, traite le rejet de la demande en justice comme une absence d'interruption de la prescription, le projet, s'insplrant de l'Office de révision du Code civil, prolonge l'effet de l'interruption lorsque la demande est rejetée sans qu'une décision ait été rendue sur le fond. L'Office de révision du Code civil proposait un délai supplémentaire de six mois; le projet retient un délai de trois mois.

Alors, j'aimerais appeler les articles contenus à ce chapitre troisième, qui traite donc de l'interruption de la prescription, et j'appelle les articles 2873 à 2887 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a deux amendements. L'article 2876 est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant: "La demande reconventionnelle, l'intervention, la saisie et l'opposition sont considérées comme des demandes en justice. Il en est de même de l'avis d'intention d'une partie de soumettre un différend à l'arbitrage, pourvu que cet avis contienne un exposé de l'objet du différend qui y sera soumis et qu'il soit signifié suivant les règles et dans les délais applicables à la demande en justice."

M. le Président, il s'agit d'une modification rédactionnelle qui place la demande avant l'exécution-saisie, et qui comble une omission en ce qui concerne l'arbitrage. L'article 2879 qui étend le délai supplémentaire de trois mois à l'arbitrage exige le dernier ajout. En raison de cet amendement, l'article 2876 se lirait comme suit: "Le dépôt d'une demande en justice, avant l'expiration du délai de prescription, forme une interruption civile, pourvu que cette demande soit signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire, au plus tard dans les soixante jours qui suivent l'expiration du délai de prescription. "La demande reconventionnelle, l'intervention, la saisie et l'opposition sont considérées comme des demandes en justice. Il en est de même de l'avis d'intention d'une partie de soumettre un différend à l'arbitrage, pourvu que cet avis contienne un exposé de l'objet du différend qui y sera soumis et qu'il soit signifié suivant les règles et dans les délais applicables à la demande en justice."

L'article 2878 est modifié par ta suppression des mots "; elle n'a pas lieu non plus si aucun acte de procédure utile n'est fait pendant trois ans." M. le Président, la phrase retranchée était susceptible de soulever des difficultés d'application. Bien que la discontinuation des procédures soit distincte de la péremption, il paraît préférable, lorsque cette discontinuation survient, que la partie qui a intérêt à ce qu'il n'y ait pas interruption de prescription fasse déclarer la péremption de l'instance. En raison de cet amendement, l'article 2878 se lirait comme suit: "L'interruption n'a pas lieu s'il y a rejet de la demande, désistement ou péremption de l'instance."

Le Préaident (M. Lafrance): Alors, merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles du chapitre troisième, De l'interruption de la prescription, soit les articles 2873 à 2887 inclusivement? Oui, Me Masse.

M. Masse: M. le Président, au sujet de l'article 2876, il est clair que le dépôt d'une demande d'arbitrage, si on ne veut pas défavoriser complètement l'institution qu'est l'arbitrage et ce qu'on peut appeler la déjudiciarisation du

droit, devait interrompre la prescription. C'était la meilleure façon de favoriser le recours à cette institution. Cependant, le professeur François Heleine, au nom de la Chambre des notaires du Québec, ou du comité des notaires, a soulevé des doutes quant au caractère informel de cet avis qui était dans le projet de 2876 et des amendements subséquents, de sorte que, maintenant, avec l'amendement déposé à l'alinéa 2 de 2876, on va être sûr que la demande d'arbitrage va interrompre le délai de prescription, mais à la condition que l'avis contienne suffisamment de détails sur l'arbitrage pour que la partie adverse puisse savoir vraiment de quoi il est question, plutôt que de se servir de la demande d'arbitrage comme d'une simple mesure dilatoire pour éviter l'interruption de la prescription. Donc, l'objectif est respecté et je crois, quant à moi, que les conditions qui sont mentionnées aux trois dernières lignes du deuxième alinéa de l'article 2876 sont de nature à permettre qu'il n'y ait pas d'abus de cette possibilité d'interruption.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Me Masse, pour cette clarification.

Mme Harel: Si je comprends bien, M. le Président, l'amendement introduit à 2878 vient donner raison à la Commission des services juridiques qui craignait, en fait, le danger d'interruption de prescription si aucun acte de procédure utile n'était fait pendant trois ans et qui proposait qu'il y ait plutôt une requête en péremption pour aviser les parties et régulariser les dossiers. Alors, dois-je comprendre que l'amendement vient satisfaire la recommandation de la Commission des services juridiques?

M. Kehoe: C'est exact.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. S'il n'y a pas d'autres commentaires, donc, touchant ces articles, les articles 2873, 2874 et 2875 sont donc adoptés tels quels; l'article 2876 est adopté tel qu'amendé; l'article 2877 est adopté tel quel; l'article 2878 est adopté tel qu'amendé et les articles 2879 à 2887 sont donc adoptés tels quels.

De la suspension de la prescription

Nous en arrivons maintenant au chapitre quatrième qui touche la question De la suspension de la prescription et qui regroupe les articles 2888 à 2893 inclusivement.

Le texte d'introduction qui accompagne ce chapitre quatrième se lit comme suit: Les articles 2888 à 2893 du chapitre IV traitent de la suspension de la prescription. La suspension est un complément nécessaire de l'Interruption, mais son application est exceptionnelle, ainsi qu'en témoigne l'article 2861 du projet qui édicté que "La prescription s'accomplit en faveur ou à rencontre de tous, même de l'État, sous réserve des dispositions expresses de la loi." Au sens le plus rigoureux du terme, la suspension est une mesure d'équité qui consiste, par faveur pour certaines personnes menacées par la prescription mais hors d'état de l'interrompre, à arrêter provisoirement la marche du délai tant que subsiste l'obstacle qui les empêche d'agir. Elle suppose que le délai de prescription a commencé à courir, ou peut commencer à courir. La suspension de la prescription est une mesure réservée à certaines personnes seulement et dont les effets sont purement personnels au bénéficiaire. (16 h 30)

Dans ses grandes lignes, le projet suit le Code civil actuel et le projet de l'Office de révision du Code civil. Il s'en écarte cependant sur certains aspects. Le projet ne retient que l'impossibilité de fait comme cause de suspension de la prescription. Il maintient la suspension de la prescription en faveur de l'enfant à naître, du mineur ou du majeur sous curatelle ou sous tutelle à l'égard des créances qu'ils peuvent avoir contre leur représentant légal, mais limite la portée du deuxième alinéa de l'article 2232 du Code civil.

De même, le projet innove par son article 2889 qui étend la suspension aux recours que le mineur ou le majeur sous curatelle ou sous tutelle peut avoir contre son représentant ou contre la personne qui est responsable de sa garde.

La suspension de la prescription entre les époux est conservée, mais elle ne joue que durant la vie commune (article 2890 du projet). La suspension de la prescription dont bénéficie, en droit actuel, l'héritier bénéficiaire à l'égard des créances qu'il a contre la succession est étendue à tous les héritiers (article 2891).

J'appelle donc les articles contenus à ce chapitre quatrième, De la suspension de la prescription, soit les articles 2888 à 2893 inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a un amendement. L'article 2893 est remplacé par le suivant: "La suspension de la prescription des créances solidaires et des créances indivisibles produit ses effets à l'égard des créanciers ou débiteurs et de leurs héritiers suivant les règles applicables à l'interruption de la prescription de ces mêmes créances."

M. le Président, il s'agit d'une modification rédactionnelle visant à mieux exprimer le droit actuel qui est conservé. En raison de cet amendement, l'article 2893 se lirait comme suit: "La suspension de la prescription des créances solidaires et des créances indivisibles produit ses effets à l'égard des créanciers ou débiteurs et de leurs héritiers suivant les règles applicables à l'interruption de la prescription de ces mêmes créances."

Le Président (M. La trance): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces articles 2888 à 2893?

Mme Harel: Faut-il comprendre, M. le Président, à quelques réserves près, notamment à l'article 2889 à l'égard du mineur ou du majeur sous curatelle ou sous tutelle, ou encore à l'égard de l'héritier, qu'il y a des créances contre la succession et que, pour le reste, c'est la codification du droit actuel? Est-ce que c'est le cas?

M. Kehoe: Mme Longtin.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: De façon générale, oui. En fait, ces articles-là reprennent les principes du droit actuel. Maintenant, il y a plusieurs petits aménagements qui sont apportés, entre autres, comme vous le mentionniez, à l'article 2889. Il y a aussi l'article 2890 où on introduit la réserve de la vie commune pour la prescription entre époux. Il y a l'article 2891 qui se trouve à s'appliquer à l'ensemble des héritiers, mais, généralement, c'est le droit actuel qui est repris.

Mme Harel: Le droit actuel accorde cette suspension uniquement à l'héritier bénéficiaire de la succession. En fait, là, ça l'élargit à tout héritier.

Mme Longtin: Oui, mais c'est cohérent quand même avec des principes qui ont été introduits en droit successoral, notamment à l'article 625. Il y a des formalités qui sont prévues, de manière habituelle, pour la liquidation à la succession, ce qui fait que l'héritier recueille la succession. Cependant, son obligation, quant aux dettes de la succession, peut être limitée à ce qu'il recueille. Comme il s'agit, dans ce principe, des mêmes principes que ceux qu'on retrouve en droit actuel pour l'héritier bénéficiaire, il nous semble que la cohérence du projet rendait nécessaire que ce texte, l'article 2891, soit étendu à l'ensemble des héritiers.

Mme Harel: Actuellement, la prescription entre les époux jouait durant tout le mariage et pas seulement durant la vie commune. C'est ce qu'il faut comprendre de la modification qui est introduite à 2890?

M. Kehoe: C'est l'article 2233: la prescription ne court point entre les époux. C'est la loi actuelle.

Mme Harel: C'est-à-dire la loi actuelle que vous me lisez, c'est que la prescription ne court point entre les époux jusqu'à ce que le mariage soit...

M. Kehoe: Durant le mariage elle ne court pas.

Mme Harel: Tandis qu'avec 2890, il faut qu'ils vivent ensemble.

M. Kehoe: C'est ça.

Mme Harel: C'est pendant la vie commune seulement.

M. Kehoe: C'est ça la différence. C'est une clarification. C'est un changement et une clarification en même temps.

Le Président (M. Lafrance): Alors, les articles... Est-ce que vous aimeriez apporter des commentaires supplémentaires? Non? Alors, les articles 2888 à 2892 inclusivement sont adoptés tels quels et l'article 2893 est adopté tel qu'amendé.

De la prescription acquisitive

Nous en arrivons maintenant au titre deuxième, qui traite de la prescription acquisitive et qui touche les articles 2894 à 2904. Le texte d'introduction à ce titre deuxième se lit comme suit: Le titre deuxième traite des règles particulières à la prescription acquisitive. Il se divise en deux chapitres. Le premier concerne les conditions d'exercice de la prescription acquisitive, telles que son objet, la nature de la possession requise, la jonction ou la continuation de la possession, la précarité et l'interversion de titre, la possibilité de prescrire contre le titulaire du droit de propriété durant le démembrement ou la précarité, l'ouverture de la substitution comme condition d'exercice de la prescription acquisitive en faveur du grevé et de ses successeurs.

Le deuxième chapitre traite des délais de la prescription acquisitive. On y trouve le délai général de la prescription acquisitive, celui spécifique à la prescription acquisitive d'un meuble, ainsi qu'une règle qui précise le moment où doit exister la bonne foi du tiers-acquéreur.

Le chapitre premier, pour sa part, traite des conditions d'exercice de la prescription acquisitive et touche les articles 2894 à 2900. Ce chapitre premier est accompagné du texte d'introduction suivant: Les conditions d'exercice de la prescription acquisitive valent en matière immobilière comme en matière de meubles corporels, car cette forme de prescription est toujours un des effets de la dépossession (article 2864).

La dépossession s'entend comme étant une dépossession juridique et pas seulement une dépossession matérielle. Conséquemment, le moment de la dépossession du titulaire originaire

du droit est celui de la possession de la personne qui prescrit, puisqu'il ne peut pas y avoir de décalage entre les deux prescriptions. En effet, la possession ne peut commencer à produire des effets de prescription acquisitive qu'à partir du moment où le titulaire originaire du droit peut exercer un recours contre le possesseur.

Dans son ensemble, ce chapitre reproduit, le droit actuel tel que l'avait repris l'Office de révision du Code civil, mais diffère de la proposition de l'Office de révision du Code civil sur des aspects de sa rédaction.

Des conditions d'exercice de la prescription acquisitive

J'aimerais appeler les articles contenus à ce chapitre premier, qui touche les conditions d'exercice de la prescription acquisitive, soit les articles 2894 à 2900.

M. Kehoe: Dans cette section il n'y a pas d'amendements.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cette série d'articles 2894 à 2900?

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendements dans cette section.

Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le député de Chapleau. Donc, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cette série d'articles 2894 à 2900?

Mme Harel: Juste une petite seconde, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui.

Mme Harel: On dit, à 2899: "Les tiers peuvent prescrire contre le propriétaire durant le démembrement ou la précarité." On dit que cet article fournit une version simplifiée de l'article 2206 du Code civil. Alors, il faut comprendre que c'est la même règle reformulée? Est-ce que c'est le cas?

Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président, en fait l'article 2206 prévoit que les tiers peuvent prescrire contre le propriétaire durant le démembrement ou la précarité par trente ans avec ou sans titre. Donc, cette partie-là de l'article n'a pas été reprise. Évidemment, l'article 2206 contenait aussi une forme d'illustration de cette manière de prescrire qu'il n'a pas, elle non plus, été considéré utile de reprendre parce qu'en fait le texte du droit actuel est très descriptif. Un des exercices qu'avait fait l'Office et qui a été repris dans le projet était d'aller extraire les principes de prescription, sans nécessairement entraîner toutes les illustrations que contenait le Code actuel.

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Me Longtin. Donc, les articles 2894 à 2900 sont adoptés tels quels.

Des délais de la prescription acquisitive

Nous en arrivons maintenant au chapitre deuxième qui traite des délais de la prescription acquisitive et qui regroupe les articles 2901 à 2904 inclusivement. Le texte qui accompagne ce chapitre deuxième se lit comme suit: Ce chapitre ne s'occupe que des délais applicables à la prescription acquisitive; ce qui a trait à la prescription extinctive est inséré au titre consacré à cette dernière.

En matière de meubles, on retient le délai de trois ans de l'article 2268 du Code civil actuel. Le projet propose aussi, tenant compte des moyens accrus d'information, du besoin de sécurité dans les titres de propriété ou dans les relations juridiques, de ramener de trente à dix ans le délai de droit commun de l'article 2242 du Code civil.

Il est, cependant, un changement fondamental en matière immobilière: seule la propriété immobilière peut s'acquérir sans titre (article 2902); et seule la propriété mobilière peut s'acquérir par une dépossession de trois ans du propriétaire (article 2903).

Cette disposition ne couvre pas les cas de démembrement de la propriété, lesquels découlant d'un titre sont soumis au droit commun de la prescription visée à l'article 2901.

Alors, j'appelle les articles contenus à ce chapitre deuxième, Des délais de la prescription acquisitive, soit les articles 2901 à 2904 inclusivement. (16 h 45)

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a un amendement et il y a un article dont on demande la suspension, soit 2904, pour des échanges encore entre les légistes des deux côtés.

L'article 2902 est modifié par le remplacement, dans le deuxième alinéa, à son début, des mots "sous la même condition" par les mots "sous les mêmes conditions".

M. le Président, il s'agit d'une modification rédactionnelle visant à supprimer l'ambiguïté possible de l'expression "sous la même condition" eu égard au premier alinéa. En raison de cet amendement, l'article 2902 se lirait comme suit: "Celui qui, pendant dix ans, a possédé, à titre de propriétaire, un immeuble qui n'est pas immatriculé au registre foncier, ne peut en acquérir la propriété qu'à la suite d'une demande en justice.

"Le possesseur peut, sous les mêmes conditions, exercer le même droit à l'égard d'un JmmeuWe immatriculé, lorsque le registre foncier ne révèle pas qui en est le propriétaire; il en est de même, lorsque le propriétaire était décédé ou absent au début du délai de dix ans, ou s'il résulte du registre foncier que cet immeuble est devenu un bien sans maître."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces trois articles, puisque 2904 a été laissé en suspens?

Mme Harel: M. le Président, la grande nouveauté, ce sera l'obligation de publier. Je crois que c'est ce qu'on retrouve à 2902.

M. Kehoe: C'est une des modifications importantes dans cette section, Mme la députée. Ce n'est pas la seule.

Mme Harel: Voulez-vous nous donner les autres?

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: L'article 2901, comme on le mentionne, prévolt un délai de prescription acquisitive de dix ans, ce qui, par rapport au droit actuel, est un changement important, également, puisque le délai de prescription acquisitive actuellement est beaucoup plus long: trente ans. Il y en a quelques-uns de dix ans avec titres translatifs de propriété et bonne foi. L'article 2902 est, d'ailleurs, un développement de cette règle sur la prescription acquisitive de dix ans avec titres translatifs et bonne foi.

Ce qui est prévu, donc, c'est qu'on peut acquérir la propriété d'un immeuble dans la mesure où il n'est pas immatriculé et où on l'a possédé à titre de propriétaire pendant cette période de dix ans, ce qui signifie que les qualités que l'on reconnaît à la possession au livre Des biens se retrouve également dans cette possession. Ce qu'il est important de noter, c'est qu'il s'agit d'un immeuble non immatriculé qui n'est pas identifié par un numéro de lot distinct. Un autre point à mentionner, c'est que pour que le titre soit complété, il y aura nécessité de le faire reconnaître en justice par le biais d'une demande.

Le deuxième alinéa introduit une règle particulière dans les cas où l'immeuble est immatriculé et où on vient dire que pour pouvoir posséder de manière à acquérir un titre de propriété, il faut que le registre foncier ne révèle pas qui est le propriétaire ou que celui-ci soit absent ou décédé. C'est une règle qui est en concordance avec les articles qui sont prévus dans le droit de la publicité, où l'opposabilité du droit de propriété se trouve à être régie par cette publication, et où un droit, une fois publié, est présumé connu de celui qui consulte les registres.

C'est un alinéa qui vise à concilier le principe de confiance attaché au contenu du registre foncier avec la question de la prescription acquisitive et qui se développe sur les principes de la bonne foi. Le propriétaire qui est inscrit à ce registre n'a pas à craindre de perdre son droit de propriété si quelqu'un, à son insu, commence une détention sur son immeuble, puisque l'immatriculation a permis de délimiter et de qualifier l'assiette sur laquelle s'exerce son droit, et son titre est vraiment publié. Donc, un tiers ne peut pas venir prétendre qu'il ignorait ce droit de propriété. Comme on l'indique, le bénéficiaire du droit bénéficie d'une double présomption généralement: celle tirée de sa possession et celle tirée de la publication de son titre. Ces deux effets-là jouent à cet article 2902.

Quant à l'article 2903, il reprend essentiellement une règle du droit actuel qu'on connaît par le principe que la possession vaut titre. Le possesseur de bonne foi d'un meuble se trouve à en acquérir la propriété, trois ans à compter de la dépossession de ce transfert que l'on a vu, sous réserve toujours du droit de revendiquer.

Mme Harel: Alors, maintenant il serait plus utile de se demander si le possesseur était de bonne ou de mauvaise foi. En fait, la question n'aura plus tellement de pertinence, puisque la manière de prescrire acquisitivement ne se fera plus en fonction de ces critères-là. La manière de prescrire, ce sera d'être inscrit au registre foncier et d'avoir la possession pendant dix ans. C'est ça qu'il faut comprendre? Bonne ou mauvaise foi, c'est une question qui ne se posera même plus. C'est ça que je dois comprendre?

Mme Longtin: Pour ce qui concerne un immeuble immatriculé, ce qu'on vient dire c'est qu'on ne peut... Effectivement, il n'y a pas de bonne foi. La bonne foi n'a pas à être considérée, puisque le titre est publié et que celui qui possède ne peut pas ignorer cette publicité qui a été accordée au titre de propriété. Donc, il ne pourra, de toute manière, jamais invoquer la bonne foi d'aucune façon. Donc, on n'a pas à en parier. Pour ce qui est de...

Mme Harel: Mais le titre qui est publié... Il peut y avoir aussi un bien sans maître...

Mme Longtin: Oui, alors c'est... Mme Harel: ...ou un décès, ou...

Mme Longtin: C'est ça. Alors, ces hypothèses sont prévues d'un propriétaire décédé ou absent. Ce qui fait qu'à ce moment-là, il y a une prescription qui peut commencer à courir. Mais, dans ce cas-là, comme il n'y a pas de proprié-

taire et qu'il n'y a personne qui peut prétendre à ce droit de propriété, il est normal qu'un tiers puisse commencer une prescription acquisitive, dans la mesure où sa possession répond aux règles de l'article 921. Donc, elle est paisible, continue, publique et non équivoque.

Mme Harel: Dans le commentaire, à l'avant-dernier paragraphe, aux dernières lignes, on peut lire: "Pour prescrire acquisitivement au moyen du temps, il est deux moyens: posséder pendant dix ans un immeuble ou être pendant dix ans le bénéficiaire d'un droit publié." Je comprends que posséder pendant dix ans un immeuble n'est pas suffisant. On aura beau posséder pendant dix ans un immeuble, le propriétaire n'a pas à craindre de perdre son droit s'il est inscrit sur le registre. Alors, même si un tiers possède pendant dix ans un immeuble, son droit est protégé. Alors, ça ne serait pas un "ou", ce serait un "et" j'imagine, hein?

Mme Longtin: Je pense que c'est vraiment un "ou".

Mme Harel: Si c'est "un ou l'autre", ça vient en quelque part contredire ce que vous disiez tantôt, à savoir qu'un propriétaire inscrit n'a pas à craindre de perdre son droit même si son immeuble est possédé par quelqu'un d'autre pendant dix ans.

Mme Longtin: C'est ça.

Mme Harel: II n'a pas à craindre de le perdre s'il est inscrit au registre foncier.

Mme Longtin: II faut toujours se référer à la distinction entre l'immatriculé et le non-immatriculé. S'il est sur un immeuble immatriculé, il y a un titre et le cas de cette personne-là n'est pas tellement réglé par l'article 2902. Peut-être que par le droit de la publicité où on dit, en fait... Du moment qu'elle a un titre, qu'elle l'a fait inscrire, qu'elle l'a publié, au bout de dix ans, son inscription devient incontestable et donc, son titre, également, ne peut être contesté. Il n'y a personne qui peut prétendre venir empiéter sur sa propriété ou la posséder.

Mme Harel: La propriété lui vient de l'inscription et non pas... Je vous laisserai revoir le commentaire au mois de janvier. Étant donné qu'on n'adoptera pas le commentaire, à tête reposée je vous laisserai le revoir au mois de janvier. Mais on aura sûrement à revoir... Vous me faites penser, là. Les commentaires, avant qu'ils soient déposés, on va peut-être devoir les revoir ici en commission. Bien, on se posera cette question-là à un autre moment. Alors...

M. Kehoe: M. le ministre a toujours dit que ce sera déposé vers le mois de mars probable- ment, peut-être plus tard que le mois de mars, mais avant ce sera certainement soumis aux membres de la commission. Vous aurez l'occasion de les voir si...

Mme Harel: Je ne sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise nouvelle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kehoe: Au moins, les experts auront l'occasion de les voir, de les vérifier, de les étudier avec...

Mme Harel: Je pense qu'il va falloir sérieusement se demander quelle sorte de processus est le plus indiqué pour qu'il y ait un regard quand même parlementaire sur ces questions. On aura l'occasion d'en reparler.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Je m'excuse de m'immiscer dans vos savantes conversations, mais il y a quelque chose qui m'intrigue. Je vais vous poser bien humblement mon interrogation: Qu'est-ce qui arrive avec les "squatters" dans ce cas-là, ceux qui se sont construits illégalement? La loi des trois chaînes, qu'est-ce que ça pose comme problème? Les "squatters" se sont construits illégalement. Ils sont propriétaires, ils vont défendre leur propriété. Il y en a même qui ont vendu sans droit de propriété. Il y a des citoyens qui ont été pris au Québec avec ça. Qu'est-ce qui se passe par rapport à cet article-là? Moi, je ne sais pas. Ça me pose une interrogation.

Mme Harel: M. le député de Rimouski, les problèmes pratiques sont ceux que le Code civil est censé résoudre. Alors, vous faites très très bien de poser votre question.

M. Tremblay (Rimouski): Je la pose. Je n'ai pas de prétention en la posant. J'essaie de voir clair tout simplement.

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Je pense que Mme Longtin a trouvé la réponse à la question de M. le député de Rimouski.

Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Longtin. (17 heures)

Mme Longtin: M. le Président, je pense que c'est un élément de la réponse. On a, effectivement, indiqué au titre de la prescription que la prescription opérait contre l'État, mais sous

réserve de dispositions expresses de la loi. L'article 915 affirme qu'on ne peut s'approprier par occupation, prescription ou accession les biens de l'État, sauf ceux que l'État a acquis par succession, vacance ou confiscation, tant qu'ils n'ont pas été confondus avec ses autres biens. Donc, l'occupation ne peut permettre de fonder un titre légitime qui serait opposable d'une manière définitive.

M. Tremblay (Rimouski): Vous avez une réponse à tout. Dans le cas des trois chaînes, c'est le même...

Mme Longtin: La réserve des trois chaînes...

M. Tremblay (Rimouski): C'est parce qu'il y en a qui se sont construits sur la réserve des trois chaînes, à dos d'âne, sur deux lots, qui ne sont même pas propriétaires ni de l'un ni de l'autre. Qu'est-ce que ça pose par rapport à votre article? J'ai eu un cas dans mon comté il y a quelques années.

M. Kehoe: Je demanderais au notaire Cossette de nous donner son expertise.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Me Cossette.

M. Cossette (André): M. le Président, le problème de la réserve des trois chaînes est moins important aujourd'hui qu'il ne l'était il y a quelques années parce que la Cour suprême a eu l'occasion, justement, de se prononcer sur cette difficulté, je dirais. Celui qui a permis à la Cour suprême de se prononcer là-dessus, justement, vient du beau comté de Rimouski, comme vous le savez.

Alors, la Cour suprême a décidé, finalement, que la réserve des trois chaînes, c'est-à-dire l'étendue de terrain qui commence à l'eau jusqu'à une profondeur de trois chaînes, appartient à la couronne. Je sais, par ailleurs, que la Loi sur les forêts ou la Loi sur les pêcheries, une loi particulière, a été modifiée pour faire la dévolution de cette réserve des trois chaînes, qui appartient à la province en vertu du jugement de la Cour suprême, pour en faire la dévolution aux propriétaires riverains, de telle sorte que la situation de ceux qui n'étaient pas propriétaires, qui avaient vendu des propriétés à des gens pour des fins de villégiature ou autrement, s'est trouvée, par le fait même, régularisée.

La loi en question comporte, cependant, un certain nombre d'exceptions. Dans certains cantons, le long de certaines rivières ou de certains tacs, la réserve n'a pas été dévolue aux propriétaires riverains. Je ne saurais vous dire dans lesquels de ces cantons. De toute façon, l'annexe est très précise à ce sujet.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Me Masse.

M. Tremblay (Rimouski): Ce n'est pas clair comme de l'eau de roche, parce que des exceptions, ça m'intrigue et je sais que ça pose des petits problèmes. La balance, ça peut aller.

M. Cossette: Mais, en principe, la situation est réglée.

M. Tremblay (Rimouski): Oui, je sais. D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Cossette. Me Masse, sur cette même question.

M. Cossette: II faudrait ajouter que dans les cas où la couronne est propriétaire de la réserve des trois chaînes, évidemment, comme l'immeuble appartient à la couronne, on ne peut pas prescrire... Autrement dit, celui qui occupe la réserve des trois chaînes, dans les cas où elle appartient à la couronne, c'est un "squatter".

M. Tremblay (Rimouski): Vous me rassurez. Je vais mieux dormir.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Cossette. Oui, Me Masse.

M. Masse: M. le Président, j'en profite, je pense que je vais poser une question que tout le monde se pose. On va en profiter. Quelle est la longueur de ces mosus de chaînes?

M. Cossette: C'est 66 pieds. M. Masse: Chacune? M. Cossette: 198 pour les trois. M. Masse: 198 pieds?

M. Cossette: Oui. En mètres, je ne saurais convertir, mais c'est 198 pieds.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse. S'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 2901 est donc adopté tel quel. L'article 2902 est adopté tel qu'amendé. L'article 2903 est adopté tel quel. L'article 2904 est laissé en suspens.

De la prescription extinctive

Nous en arrivons au titre troisième qui parle de la prescription extinctive et qui regroupe les articles 2905 à 2917 inclusivement. Le texte d'introduction à ce titre troisième est le suivant: Le titre troisième du projet comprend les articles 2905 à 2917; il traite de la prescription extinctive. Comme le projet ne retient que trois délais en matière de prescription extinctive, il se trouve à supprimer les nombreuses enumerations d'actions soumises à divers délais de

prescription extinctive - trente ans, dix ans, cinq ans, trois ans, deux ans et un an - qu'on trouve au Code civil actuel.

En matière de prescription extinctive, le projet reconnaît trois catégories de délais: la prescription de droit commun de dix ans; la prescription de trois ans en matière de droits et de recours personnels; la prescription annale en ce qui concerne l'action qui vise à obtenir ou faire protéger la possession d'un immeuble, la demande du conjoint survivant pour faire établir la prestation qui lui est due en compensation de son apport, l'action fondée sur une atteinte à la réputation.

Dans un objectif de simplification, le projet abandonne aussi la distinction entre matière contractuelle et matière extracontractuelle.

J'appelle donc les articles contenus à ce titre troisième, De la prescription extinctive, soit les articles 2905 à 2917 Inclusivement.

M. Kehoe: M. le Président, dans cette section, il y a un amendement et nous demandons la suspension de l'article 2910 pour d'autres discussions.

L'article 2908 est remplacé par le suivant: "Le droit résultant d'un jugement se prescrit par dix ans s'il n'est pas exercé."

Le remplacement vise à limiter la disposition au jugement constitutif de droit, c'est-à-dire au droit qui puise sa source et son régime de prescription dans un jugement. En raison de cet amendement, l'article 2908 se lirait comme suit: "Le droit résultant d'un jugement se prescrit par dix ans s'il n'est pas exercé."

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le député de Chapleau. Est-ce là le seul amendement a ce...

M. Kehoe: C'est le seul amendement dans cette section, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): ...titre? Oui? Merci. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires sur cette série d'articles, 2905 à 2917 inclusivement, en vous rappelant que l'article 2910 a été laissé en suspens? Me Masse.

M. Masse: Trois commentaires, M. le Président. D'abord, je pense qu'on doit tous saluer la simplification des délais actuels qui sont devenus, par une sorte de sédimentation successive depuis 120 ans, quelque chose d'assez incroyable et d'assez compliqué. Effectivement, on se ramasse autour de trois délais principaux et c'est tout à fait excellent. On rend plus facile la compréhension des règles et je pense qu'on abandonne certaines règles de prescription trentenaire qui n'étaient plus réalistes dans un monde comme celui dans lequel on vit.

Deuxième chose, je pense qu'on doit signaler de façon extrêmement importante l'arti- cle 2914, qui permet, en matière de poursuite pour préjudice corporel, de mettre fin à certaines stratégies de corps municipaux ou publics qui, à toutes fins pratiques, faisaient en sorte que les droits d'action des citoyens tombaient si certains avis n'étaient pas donnés. Ça ne rend pas pour autant la preuve de ces droits-là ou de ces réclamations-là plus facile, mais à tout le moins, le Code civil reprend le pas sur certaines dispositions qui étaient littéralement de véritables cimetières pour les poursuites, notamment en matière de responsabilités municipales.

Troisième réflexion. Nous avions travaillé pendant un certain temps sur les règles concernant la prescription des actions contre les architectes et les ingénieurs dans les travaux de construction, notamment, et je crois que c'est avec plaisir qu'on doit signaler que notre conclusion, c'est de ramener ces délais-là aux règles générales, donc, de ne pas perturber la simplicité des règles. Il n'y avait pas de raison de porter cette prescription-là à cinq ans, et trois ans pouvaient être un délai adéquat.

Donc, je pense qu'on doit saluer quelque chose qui, pour les citoyens, actuellement, est d'une complexité absolument inouïe. Le Code civil actuel demandait, de façon urgente, à être modifié là-dessus. Dans l'ensemble, je pense qu'on peut percevoir le travail qui a été fait avec beaucoup d'espoir et je pense qu'on a réglé un certain nombre de problèmes extrêmement importants pour le quotidien de la vie des justiciables.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse, pour ces commentaires. Est-ce que d'autres membres désireraient apporter des commentaires supplémentaires?

Mme Harel: Peut-être juste renchérir, M. le Président, pour dire à quel point ces dispositions que l'on retrouve parfois dans le droit municipal viennent priver des personnes de leur droit d'obtenir réparation, suite à un préjudice corporel qui peut leur avoir été causé. Alors, là, la prescription sera de trois ans. Ce sera connu. Elle sera de trois ans et elle pourra même se compter à partir du jour où le préjudice se manifeste. Donc, ça aussi, ce sera important que ce soit connu.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: L'amendement vient satisfaire, je pense, la recommandation que faisait la Commission des services juridiques, à l'effet de biffer un jugement qui ordonne un paiement, du fait que le mot "paiement" que l'on retrouvait dans le texte initial pouvait recevoir une interprétation trop large. Alors, si je comprends bien, avec l'amendement on parle seulement de jugements - tous les jugements - y compris le juge-

ment d'injonction, par exemple, d'une obligation de ne pas faire.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Long-tin.

Mme Longtin: Oui, c'est un fait. Il y a eu des représentations qui nous ont demandé de biffer la notion de paiement, justement pour cette question, sauf que ce faisant, ça suscitait, d'après d'autres représentations qui nous ont aussi été acheminées, une autre difficulté puisqu'il y a, effectivement, des jugements qui ne sont pas constitutifs de droit, mais déclaratifs, et qui ne sont pas visés par ces règles de prescription.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Longtin, pour ces précisions. Donc, les articles 2905, 2906 et 2907 sont adoptés, tels quels. L'article 2908 est adopté tel qu'amendé. L'article 2909 est adopté tel quel. L'article 2910 est laissé en suspens et les articles 2911 à 2917 sont adoptés tels quels. Ceci termine donc le livre huitième, De la prescription.

M. Kehoe: Je suggérerais un arrêt pour raison de santé.

La Présidant (M. Lafrance): Oui. Alors, nous allons suspendre nos travaux pour 10 minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 14) (Reprise à 17 h 32)

La Président (M. Lafrance): Veuillez prendre vous places, s'il vous plaît. Nous allons reprendre nos travaux. Je déclare cette séance rouverte. Oui, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. le Président, compte tenu du fait qu'il y a un certain travail à faire entre les experts pour la préparation du travail de ce soir, je fais la proposition de suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

Le Président (M. Lafrance): Très bien. Effectivement, nous avons terminé les blocs de sujets ou d'articles qu'on avait suspendus et, à partir de maintenant, il va falloir revoir de façon très spécifique chacun des articles laissés en suspens. S'il y a consentement, nous allons suspendre jusqu'à 20 heures ce soir, dans cette même salle, ici. Les travaux sont donc suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 33) (Reprise à 20 h 18)

Le Président (M. Lafrance): Veuillez, s'il vous plaît, prendre place. Nous allons reprendre nos travaux. Je constate que nous avons le quorum et j'aimerais donc déclarer cette séance de travail ouverte. Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, pour cette partie de séance, Mme Bleau (Groulx) est remplacée par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata).

Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, nous avions donc, tel qu'annoncé cet après-midi, terminé l'étude des articles qui avaient été laissés en suspens en bloc. Nous en sommes maintenant à revoir les articles laissés en suspens article par article. Est-ce qu'il y aurait des commentaires d'ouverture de séance? Sinon je me...

Mme Harel: C'est simplement un état de fatigue, M. le Président, qui nous a empêchés cet après-midi de jubiler, n'est-ce pas, sur le fait que nous avions terminé l'examen du projet de loi 125 et que nous reprenions les articles suspendus. C'est bien le cas? C'est sûrement la fatigue...

Le Présidant (M. Lafrance): Sûrement.

Mme Harel:... n'est-ce pas? Sûrement pas d'autres raisons.

La Président (M. Lafrance): Probablement. M. Kehoe:... obligé de s'absenter, je pense.

Document déposé

Le Président (M. Lafrance): L'usure a eu raison de nos sentiments. J'aimerais accepter le dépôt d'un document qui nous vient du Réseau d'action et d'information pour les femmes, un document qui touche l'article 398. Ce document portera le code numérique 48D. Alors, s'y n'y a pas de commentaires additionnels, j'aimerais donc reprendre le projet de loi au tout début en appelant le premier article qui avait été laissé en suspens, soit l'article...

Articles en suspens

M. Kehoe: Juste une seconde, M. le Président. Peut-être que la meilleure façon de procéder... Dans chacun des livres, il y a des amendements techniques. Peut-être pas dans chacun, mais certainement dans le premier livre, Des personnes, il y a des amendements techniques, et on voudrait les lire pour commencer. Par la suite, si vous voulez, on pourra procéder avec les articles qui sont en suspens. Mais les premiers amendements, c'est des amendements techniques.

Le Président (M. Lafrance): Si je comprends bien, c'est une série d'articles qui ont été révisés au point de vue grammatical ou orthographique.

M. Kehoe: Oui, des mots et de la terminologie bien simple; c'est technique, tout simplement.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'on a une copie du document?

M. Kehoe: Je pense que ça va être distribué. Est-ce qu'ils ont été distribués déjà?

Le Président (M. Lafrance): Je pense qu'il vaudrait mieux que tout le monde ait ce document en main.

M. Kehoe: Oui. Bon. Au livre des personnes...

Mme Harel: Oui, pour la bonne raison que ce que nous avons, c'est un projet d'amendements techniques proposés.

M. Kehoe: C'est ça.

Mme Harel: Alors, II faut être bien sûr que la proposition est la même.

Le Président (M. Lafrance): Oui. M. Kehoe: Je pourrais le lire.

Le Président (M. Lafrance): Je pense que c'est mieux qu'on le lise, effectivement, puisque ça sera enregistré officiellement, à ce moment-là, au procès-verbal.

Mme Harel: Alors, M. le Président, puisqu'on aura à en faire l'adoption en bloc, à un moment donné... Là, il s'agit des amendements techniques seulement pour deux livres, je crois? Le livre premier seulement. Et il y aura comme ça des amendements similaires pour tous les autres livres. Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux faire le dépôt en bloc?

M. Kehoe: C'est comme vous voulez. On peut procéder de cette façon-là. On peut commencer.

Mme Harel: Ecoutez, si vous le voulez, ce soir, je ne sais pas s'il y aurait un volontaire... Après qu'on aura un peu progressé, s'il y avait un volontaire, M. le Président, vous-même qui allez devoir présider, et un volontaire pour pouvoir en faire la lecture.

M. Kehoe: Je ne pense pas qu'il y en ait tant que ça, des amendements techniques. Il y en a, mais pas tant que ça. Mais, de toute façon, si vous voulez, on peut commencer à procéder par ça. Le ministre devrait arriver d'ici une heure, entre parenthèses.

Mme Harel: On attend des réponses de vous, M. le député de Chapleau.

Des personnes

Le Président (M. Lafrance): On vous écoute, M. le député de Chapleau, pour nous lire ces amendements techniques proposés au livre premier, Des personnes.

M. Kehoe: Les amendements techniques proposés. Les amendements suivants, de nature technique, terminologique ou de concordance, sont apportés aux articles suivants du livre premier du projet.

Article 14. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement, au deuxième alinéa, du mot "requiert" par le mot "exige".

Article 63. Cet article est modifié par le remplacement, au premier alinéa, du mot "public" par "général".

Article 67. Cet article est modifié par le remplacement, à la fin du deuxième alinéa, du mot "public" par "général".

Article 101. Cet article est modifié par l'insertion, à la troisième ligne, après le mot "fruits", mais avant la virgule, des mots "et les revenus".

Article 116. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement à la fin des mots "le nom des père et mère" par "les noms des père et mère".

Article 130. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement, à la deuxième ligne, de la virgule qui suit le mot "personne" par le mot "ou".

Article 134. Cet article est modifié par le remplacement du mot "des" devant "mentions" par le mot "les".

Article 152. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement, au premier alinéa, du mot "État" par le mot "état".

Article 225. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement à la fin des mots "alliés et amis" par les mots "d'alliés ou d'amis".

Article 227. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement, au premier alinéa, des mots "alliés ou amis" par les mots "d'alliés ou d'amis".

Article 230. Cet article est modifié par l'ajout, à la troisième ligne, devant le mot "allié", du mot "un".

Article 232. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement des mots "alliés ou amis" par les mots "d'alliés ou d'amis".

Article 267.1. Cet article nouveau est modifié par le remplacement des mots "alliés ou

amis* par les mots "d'alliés ou d'amis".

Article 333. Cet article, tel qu'amendé, est de nouveau modifié par le remplacement, au début du deuxième alinéa, du mot "Elle" par le mot "Elles".

Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le député de Chapleau. Donc, cette série de 14 articles est donc rouverte pour y insérer ces amendements techniques. Et ces articles sont donc adoptés, avec cette série d'amendements techniques, tels que lus et tels que détaillés dans ce document, ici, imprimé le 3 décembre 1991, et déposé. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Ces amendements techniques, tels qu'ils sont proposés au livre premier, c'est bien le cas, ne concernent-ils que les articles que nous avons déjà adoptés? Qu'arrive-t-il, là, aux articles qui sont suspendus? Entendez-vous procéder à un examen de la même nature, donc un examen technique, ultérieurement?

M. Kehoe: On va réviser tous les articles qui sont suspendus. On a des amendements pour les articles suspendus.

Mme Harel: Des amendements techniques? M. Kehoe: Non, non. Pas des...

Mme Harel: Ma question, c'est plus concret, là. Ces amendements techniques que vous venez de lire, M. le député de Chapleau, ne portent, si je comprends bien, que sur des dispositions dont...

M. Kehoe: Adoptées. Mme Harel: Adoptées.

M. Kehoe: C'est ça. Elles sont déjà adoptées.

Mme Harel: Uniquement. Puis, vous allez devoir... Uniquement des dispositions adoptées? Je veux juste être bien certaine, là.

M. Kehoe: Oui. Oui, oui.

Le Président (M. Lafrance): Oui. Je suis en train de faire une vérification, puis, à date, je n'en ai pas vu qui ont été laissés en suspens...

M. Kehoe: Parmi ceux-là, il n'y en a pas.

Le Président (M. Lafrance):... parmi ceux que vous avez...

Mme Harel: C'est donc dire que la vérification technique va devoir se faire sur les articles qui sont actuellement suspendus.

M. Kehoe: Pour tenter d'avoir un Code le plus parfait possible. On vise tous le même objectif, hein?

Mme Harel: Qu'on ne peut pas atteindre.

Le Président (M. Lafrance): Bien, votre point de vue, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, est très pertinent. Les amendements techniques, tels que proposés, que nous venons de lire et d'adopter, ne touchent pas les articles qui ont été laissés en suspens et sur lesquels nous reviendrons. On va devoir, par contre, revoir ces articles laissés en suspens une fois qu'ils auront été adoptés, pour voir s'il n'y aurait pas des ajustements de concordance technique, aussi, à faire.

M. Kehoe: Je tiens à souligner, M. le Président, que les amendements techniques, ça va jusqu'à l'article 333. Il y a trois articles qui sont en suspens.

De la jouissance et de l'exercice des droits civils

Le Président (M. Lafrance): O. K. Donc, j'aimerais revenir au début et appeler l'article 7, qui avait été laissé en suspens. (20 h 30)

M. Kehoe: II y a un amendement, M. le Président. L'article 7 est modifié par le remplacement de tout ce qui suit l'expression "nuire à autrui" par ceci: "ou d'une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l'encontre des exigences de la bonne foi. "

M. le Président, l'amendement précise mieux que ne le faisait le texte original la portée de l'abus de droit et il permet de clarifier les deux axes de l'abus de droit, l'intention de nuire ou l'acte excessif et déraisonnable, en établissant, par ailleurs, la balise de la bonne foi. En raison de cet amendement, l'article 7 se lirait comme suit: "Aucun droit ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d'une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l'encontre des exigences de la bonne foi. "

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'P y aurait des commentaires sur cet article 7, tel qu'amendé?

Mme Harel: C'est un article charnière, M. le Président, et j'apprécierais qu'on puisse nous indiquer la portée de l'amendement qui y est introduit, qui permet de clarifier l'abus de droit.

M. Kehoe: Mme Longtin, s'il vous plaît. Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: M. le Président, l'article 7, tel qu'il était présenté, visait deux choses. D'une part, il affirmait qu'on ne peut exercer un droit en vue de nuire à autrui - ce qui demeure - ou, en l'absence d'un intérêt sérieux et légitime, de manière à lui porter préjudice. On a mis en cause le fait que cette seconde partie ne permettait pas d'affirmer si on visait ce qu'on appelle l'abus de droit. En fait, on pensait à la notion de faute - je pensais à autre chose - c'est-à-dire de considérer l'abus indépendamment de la faute est strictement sur le caractère de légitimité de la règle.

Dans le texte tel que proposé, on n'a pas quand même voulu non plus encadrer la notion d'abus de droit par la notion de faute, parce que, autrement, on pourrait se demander à quoi sert d'avoir un article sur l'abus de droit si, par ailleurs, c'est couvert par la notion de faute. La faute peut intervenir à un moment quelconque dans l'abus, mais ça peut être aussi une résultante de l'abus. Alors, il me semble que le texte qui est proposé fait quand même mieux ressortir le fait que l'abus est en fonction des gestes qui sont portés par la personne, et le fait que ce soit d'une manière excessive et déraisonnable, sans être qualifié de fait fautif, équivaut certainement à un fait abusif.

L'autre intérêt de la modification, je pense que c'est de lier l'abus de droit à la notion de bonne foi. L'article 6 affirme que 'Toute personne est tenue d'exercer ses droits civils selon les exigences de la bonne foi", et l'article 7 situe donc l'abus de droit par rapport à cette notion de bonne foi.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie Me Longtin.

Mme Harel: C'est la raison pour laquelle j'ai toujours hésité à faire du droit substantif en fin de session, quand on siège jusqu'à minuit, n'est-ce pas, et qu'on n'a pas le même état d'esprit, évidemment, que lorsqu'on siégeait au mois d'août, par de beaux après-midi ensoleillés.

Le Président (M. Lafrance): C'est parfois plus difficile de siéger durant de beaux après-midi ensoleillés.

Mme Harel: Que durant des soirées... Le Président (M. Lafrance): Froides.

Mme Harel: ...hivernales comme celle qu'il y a dehors.

Le Président (M. Lafrance): Oui, maintenant, sur le même article toujours, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, je voulais simplement rappeler à quel point cet article-là est important, parce qu'on a fait le lien aussi avec l'article 316, dans lequel on se réfère à l'abus de droit, et aussi avec l'article 1400, où on parle d'exercice abusif d'un droit. Alors, on a vu l'importance de cet article 7 pour les deux autres articles aussi.

Le Président (M. Lafrance): Merci. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. C'est le professeur Masse qui a revu cet article avec les légistes. Alors, peut-être que je l'inviterais à nous donner l'état de sa réflexion suite à l'amendement qui a résulté de l'échange.

Le Président (M. Lafrance): Me Masse.

M. Masse: M. le Président, j'avoue que je n'ai pas saisi toute l'intervention de notre collègue Longtin. Notre préoccupation, au départ, était que la formulation du projet de loi 125 à l'égard de l'article 7 sanctionnait, certes, l'abus de droit avec intention de nuire - ça, tout le monde est bien d'accord pour le sanctionner - mais la deuxième partie du dispositif semblait sanctionner un problème d'abus de droit sans faute. Or, vous savez qu'en matière de responsabilité civile - et cette commission a adopté les articles 1453 et 1454 dans ce sens - il n'y a pas de principe de responsabilité sans faute. Pourquoi? Parce que le dispositif de l'article 7 proposé disait "en l'absence d'un Intérêt sérieux et légitime - la notion d'intérêt ne qualifie pas nécessairement l'acte fautif - de manière à lui porter préjudice." On semblait s'intéresser plus au résultat qu'au comportement de la personne qui exerce un droit.

Dans la décision de la Cour suprême dans l'affaire Houle, il y a maintenant deux ans, Mme le juge L'Heureux-Dubé a fait un inventaire extrêmement exhaustif de l'évolution, au Québec et en France, de la notion d'abus de droit. Et le dispositif central du jugement, où on a reconnu l'abus de droit avec faute pour une des premières fois en Cour suprême, même la première fois dans notre histoire, tout ce dispositif tourne autour de la notion "de manière excessive et déraisonnable". Aux yeux de la Cour suprême, il est clair que ce sont des termes qui qualifient le comportement fautif. Par exemple, un créancier qui a le droit de saisir un débiteur, mais qui ne l'avertit pas suffisamment longtemps d'avance et qui, au lieu de lui donner 24 heures pour se retourner, le saisit et liquide ses biens en moins d'une heure, ça, c'est considéré comme un comportement excessif et déraisonnable, donc un comportement fautif, même s'il y avait un droit à la base.

Donc, la raison pour laquelle nous avons convenu, après une longue évolution, de la nouvelle formulation de l'article 7 - et si je fais

erreur, qu'on me corrige; je voudrais que ce soit vraiment clair... Le deuxième membre de l'article 7 qualifie, en matière d'abus de droit, un comportement qui, par le fait qu'il est excessif et déraisonnable et par le fait qu'il va à rencontre des exigences de la bonne foi, qualifie une conduite fautive. Donc, dans le nouveau Code civil, contrairement à ce qu'on pouvait penser à l'origine, dans le cadre de l'article 7, il n'y aurait pas un principe d'abus de droit sans faute. Si je fais erreur, qu'on me le dise. C'est vraiment maintenant, ce soir, qu'il faut s'entendre là-dessus.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie Me Masse. Est-ce qu'il y aurait une réplique ou un commentaire additionnel?

M. Kehoe: Je pense que c'est un sujet extrêmement Important et je demanderais à Mme Longtin de répondre.

Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.

Mme Longtin: Oui, M. le Président. Je pense que c'est une lecture qui peut être faite de l'article 7. Enfin! Je ne voudrais pas non plus reprendre une discussion sur la notion de faute, mais ce qu'on indiquait, donc, on nous soulignait que l'article 7 pouvait être interprété comme permettant de constituer un abus, même en l'absence de toute faute. C'est une interprétation. Je pense que le texte de l'amendement proposé vient clarifier cette question-là, puisqu'il est certain qu'une conduite qui est excessive et déraisonnable devient abusive et peut résulter en un cas fautif. Cependant, on ne peut pas faire, je pense, une adéquation absolue entre la notion d'abus de droit et la notion de faute. Ce sont des concepts qui cheminent et qui peuvent se recouper, et on peut avoir une faute qui peut constituer un abus, l'abus peut constituer une faute, mais je ne pense pas qu'on puisse faire une assimilation complète.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Longtin. Donc, s'il n'y a pas d'autres commentaires touchant cet article 7, il est adopté tel qu'amendé. Les prochains articles laissés en suspens sont les articles 17, 18, 21, 21. 1 et 25. Ces articles sont contenus au titre deuxième qui traite de certains droits de la personnalité, au chapitre premier, De l'intégrité de ta personne et, de façon plus spécifique, de la question des soins. J'aimerais donc appeler les deux premiers articles qui se suivent, les articles 17 et 18.

M. Kehoe: On laisse en suspens ces articles 17, 18, 21, 22.

Une voix: Non, non.

M. Kehoe: Ah! Excusez-moi. 21. 1 et 25.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, les articles 17, 18, 21, 21. 1 et 25 sont donc en suspens.

M. Kehoe: Le ministre...

Mme Harel: Ah! Jusqu'à l'arrivée du ministre? D'accord.

M. Kehoe: Oui, oui. Il devrait être ici d'ici une heure.

Mme Harel: Mais vous avez des amendements sur ces...

M. Kehoe: Non.

Mme Harel:... articles-là.

Le Président (M. Lafrance): Les articles 17 et 18 avaient déjà été amendés.

Mme Harel: Oui, mais suite à la suspension et à l'examen qui en a été fait...

M. Kehoe: On n'a pas d'amendements.

Mme Harel: Vous n'avez pas d'amendements? Ni pour 17, ni pour 18?

M. Kehoe: Non.

Mme Harel: C'est ce qu'il faut comprendre? Ni pour 21. C'est ça?

M. Kehoe: II y a eu beaucoup de... Mme Harel: Eh bien!

M. Kehoe: II y a eu beaucoup de discussions entre les juristes, mais il n'y a pas d'amendements de préparés présentement.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Nous allons donc laisser en suspens ces articles qui touchent la question des soins. Les prochains articles laissés en suspens sont les articles 38, 39, 40. Ils touchent le chapitre deuxième...

M. Kehoe: On va les laisser encore en suspens, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Vous les laissez encore en suspens. Alors, voulez-vous m'indiquer quel article vous voulez qu'on regarde? C'est pour sauver du temps.

M. Kehoe: 47.

Le Président (M. Lafrance): 47. D'accord.

M. Kehoe: II y a un amendement proposé à

l'article 47.

Du respect du corps après le décès

Le Président (M. Lafrance): Cet article - du chapitre quatrième - touche la question du respect du corps après le décès. J'appelle l'article 47.

M. Kehoe: L'article 47 du projet est remplacé par le suivant: "Le tribunal peut, si les circonstances le justifient, ordonner l'autopsie du défunt sur demande d'un médecin ou d'un intéressé; dans ce dernier cas, il peut restreindre partiellement la divulgation du rapport d'autopsie. "Le coroner peut également, dans les cas prévus par la loi, ordonner l'autopsie du défunt." (20 h 45)

M. le Président, dans l'intérêt des proches du défunt et de la mémoire de ce dernier, cette modification vise à assurer davantage le respect de la vie privée en permettant au tribunal d'indiquer quels renseignements contenus dans le rapport d'autopsie pourraient être ou non divulgués à la personne intéressée qui demande l'ordonnance d'autopsie. En raison de cet amendement, l'article 47 se lirait comme suit: "Le tribunal peut, si les circonstances le justifient, ordonner l'autopsie du défunt sur demande d'un médecin ou d'un intéressé; en ce dernier cas, il peut restreindre partiellement la divulgation du rapport d'autopsie. "Le coroner peut également, dans les cas prévus par la loi, ordonner l'autopsie du défunt."

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires, donc, touchant cet article 47 tel qu'amendé? Oui, Me Ouellette.

Mme Ouellette (Monique): M. le Président, l'amendement proposé correspond, je pense, exactement, ou répond, je devrais dire, aux préoccupations que l'on avait manifestées en rapport avec l'autopsie qui pouvait désormais être demandée par tout intéressé. Et, par conséquent, tout intéressé aurait eu droit au rapport d'autopsie, risquant ainsi de violer, comme le commentaire l'indique, la vie privée de la personne, même après sa mort.

Je pense que l'amendement proposé, avec le commentaire qui l'accompagne, nous rassure quant à la protection de la personne, et dans ce sens là, il m'apparatt tout à fait satisfaisant.

Le Président (M. Lafrance): Merci pour ces précisions. Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, cet article 47 est donc adopté tel qu'amendé. Est-ce qu'on désire laisser la question du domicile et de la résidence en suspens?

M. Kehoe: Oui. Il y a une discussion qui va intervenir.

Le Président (M. Lafrance): C'est bien. Alors, j'ai ici un amendement qui a été distribué pour l'article 312. Est-ce qu'on...

M. Kehoe: Mais il y a un autre article avant ça, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): II y a un article avant ça, oui. Le 160, peut-être?

M. Kehoe: Oui.

Le Président (M. Lafrance): L'article 160 avait été laissé en suspens.

M. Kehoe: Oui, l'article 160, si vous voulez l'appeler, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): D'accord, alors l'article...

M. Kehoe: II n'y aura pas d'amendement. De la capacité des personnes

Le Président (M. Lafrance): L'article 160 est contenu au titre quatrième qui touche la question de la capacité des personnes, chapitre premier, De la majorité et de la minorité, et de façon plus spécifique, touche la question de la minorité, à la section II. Alors, j'appelle l'article 160, qui n'avait pas été amendé.

M. Kehoe: II n'y a pas d'amendement proposé maintenant.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Ouellette.

Mme Ouellette: Je pense que l'article 160 avait été mis en suspens uniquement pour apporter une clarification. On voulait préciser que le mineur qui peut agir seul en justice avec l'autorisation du tribunal, sur un problème d'autorité parentale, puisse le faire avec ses propres parents, mais que le mineur parent puisse également le faire en rapport avec ses propres enfants. Et, je pense que la précision pourrait être apportée dans le commentaire. À ce moment-là, ça répondrait à notre préoccupation.

M. Kehoe: Tout le monde est d'accord maintenant, et puis le commentaire sera changé en conséquence.

Le Président (M. Lafrance): Merci pour ces précisions. Donc, l'article 160 est adopté tel quel.

Mme Harel: On pourrait revenir sur les articles 75 à 83.

Le Président (M. Lafrance): Moi, le prochain article que j'avais, c'est 200.

Mme Harel: M. le Président, on aimerait revenir sur les articles 75 à 83.

Le Président (M. Lafrance): Alors, il y a une proposition pour revenir aux articles qui touchent la question du domicile et de la résidence. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on revienne sur ces questions?

M. Kehoe: Oui.

Du domicile et de la résidence

Le Président (M. Lafrance): Oui. J'appelle donc les articles du chapitre deuxième, qui traite du domicile et de la résidence, les articles 75 à 83, qui avaient été laissés en suspens.

M. Kehoe: On va distribuer certains des amendements, M. le Président, si vous voulez attendre juste une seconde.

Il y a un amendement à l'article 77. Il sera distribué sous peu; il s'agit d'un amendement très simple, vous allez le voir à la lecture. La distribution va se faire dans quelques minutes. L'article 77 du projet est modifié par la suppression, dans la deuxième ligne, de ce qui suit: "effectivement,". M. le Président, la modification est formelle. Le terme "effectivement" est inutile. En raison de cet amendement, l'article 77 se lirait comme suit: "La résidence d'une personne est le lieu où elle demeure de façon habituelle; en cas de pluralité de résidences, on considère, pour l'établissement du domicile, celle qui a le caractère principal."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant les articles contenus dans ce chapitre deuxième? Oui, Me Ouellette.

Mme Ouellette: La difficulté que créait ce chapitre relevait d'une certaine mutiplicité de concepts ou de notions. Il y avait la notion de domicile, la notion de résidence habituelle et, dans d'autres chapitres du Code, on avait aussi la résidence familiale. Alors, on était sous l'impression - et on est toujours sous l'impression - qu'il y a beaucoup de concepts, mais après avoir analysé assez en détail le droit international privé, peut-être aussi dans un souci de stabilité de la famille, II semble qu'il soit préférable, finalement, de conserver le domicile, les résidences tel que c'est proposé dans les articles 75 et suivants. Je pense qu'à cet égard, finalement, il serait préférable de les adopter.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Ouellette, pour ces précisions. S'il n'y a pas d'autres commentaires, donc, les articles... Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: D'autant plus, M. le Président, que le choix que le législateur a déjà fait et auquel nous souscrivons toujours, c'est finalement le libre choix pour les époux eux-mêmes de leur domicile, puisqu'une disposition du Code vient consacrer le fait que les époux peuvent avoir un domicile distinct sans porter atteinte aux règles de leur vie commune. C'est encore là, évidemment, je vous dirais, un objectif de société auquel nous pensons qu'il faut continuer de souscrire.

M. Kehoe: C'est une réalité de nos jours aussi.

Mme Harel: Oui, aussi. Oui, voilà! Il faut s'ajuster, en fait.

M. Kehoe: Voilà! Nous sommes organisés.

Le Président (M. Lafrance): Alors, les articles 75 et 76 sont donc adoptés tels quels. L'article 77 est adopté tel qu'amendé et les articles 78 à 83 sont donc adoptés tels quels. Est-ce que vous voulez toucher l'article 200...

M. Kehoe: Ça ne sera pas long.

Le Président (M. Lafrance): ...qui avait été laissé en suspens? Moi, j'ai le 200 qui avait été laissé en suspens, et le 312.

M. Kehoe: On laisse suspendu, si vous voulez, M. le Président, le 200.

De la personnalité Juridique

Le Président (M. Lafrance): On va laisser en suspens l'article 200, d'accord. Alors, j'appelle l'article 312. Cet article est contenu au titre cinquième, et traite des personnes morales, en particulier de la personnalité juridique, et à la section II, des effets de la personnalité juridique.

M. Kehoe: Oui, M. le Président, il y a un amendement. L'article 312 du projet est modifié par le remplacement du mot "statuts" par "règlements". M. le Président, il s'agit d'une concordance avec l'article 309. Le texte de cet article constitue la codification d'une décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Senez. En raison de cet amendement, l'article 312 se lirait comme suit: "Les règlements de la personne morale établissent des rapports de nature contractuelle entre elle et ses membres."

Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, je remarque que cet amendement avait déjà été déposé, est daté du 29 août et avait été laissé

en suspens. Alors, la discussion est donc ouverte sur cet article 312 tel qu'amendé. Me Ouellette?

Mme Ouellette: Je pense qu'on l'avait suspendu, M. le Président, parce qu'on voulait faire peut-être une dernière vérification de cette décision de la Cour suprême, justement, et vérification faite, je pense que l'amendement répond à nos préoccupations.

Le Président (M. Lafrance): Très bien, merci. Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 312 est donc adopté tel qu'amendé. Le prochain article laissé en suspens est le 336.

M. Kehoe: L'article 336 demeure en suspens, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): 336 demeure en suspens. Merci. Je pense que ceci termine le livre premier. (21 heures)

M. Kehoe: Ça ne sera pas long, M. le Président, on fait des vérifications.

Le Président (M. Lafrance): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Si vous voulez appeler les articles 413 à 425 concernant le patrimoine familial.

De la famille Des effets du mariage

Le Président (M. Lafrance): Et suivants. D'accord. Alors, nous quittons donc le livre premier pour toucher au livre deuxième qui traite de la famille. Les premiers articles qui avaient été laissés en suspens sont une série d'articles qui traitent, au chapitre quatrième, des effets du mariage, à la section III, du patrimoine familial, soit les articles 413 à 425 inclusivement. Alors, j'appelle donc ces articles-là, 413 à 425 inclusivement.

M. Kehoe: II y a deux amendements, M. le Président. L'amendement proposé à la deuxième ligne du premier alinéa de l'article...

Le Président (M. Lafrance): Oui. M. Kehoe: ...420...

Le Président (M. Lafrance): Est-ce que c'est le même amendement qui a déjà été lu parce qu'il y a un amendement qui avait été déposé...

M. Kehoe: Le 4 décembre.

Le Président (M. Lafrance): ...à cet article 420? On m'informe que si c'est le même amendement...

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lafrance): Oui?

M. Kehoe: Mais on n'est pas sûr parce que... Avez-vous celui du 4 décembre? Il est identique? Ça fait déjà trois mois et on revient sur ça. On a couvert beaucoup de territoire entre temps. Peut-être que pour clarification, on va le lire.

Le Président (M. Lafrance): Comme vous voudrez. L'amendement a été déposé, il a été lu déjà.

M. Kehoe: Est-ce qu'il a été lu?

Le Président (M. Lafrance): Alors, si vous voulez les relire pour nous retremper dans la discussion. Vous en avez combien?

M. Kehoe: II y a seulement...

Le Président (M. Lafrance): ...deux amendements.

M. Kehoe: ...420 et 422.

Le Président (M. Lafrance): 420 et 422. D'accord, allez-y.

M. Kehoe: Mais ce n'est pas nécessaire si c'est identique, si ça a déjà été lu.

Le Président (M. Lafrance): C'est ce que je vous ai dit. Vous voulez... Vous avez insisté pour les relire, alors faites-le. Moi, ça m'est égal, vraiment.

M. Kehoe: Moi, aussi. C'est juste que je veux être sûr... Je vais les lire.

Le Président (M. Lafrance): Oui, je pense...

M. Kehoe: Pour être certains, on va les lire.

Le Président (M. Lafrance): Oui, oui, il y en a seulement deux. Alors, allez-y.

M. Kehoe: À la deuxième ligne du premier alinéa de l'article 420, entre les mots "aliéné" et "dans", insérer les mots "ou diverti" et, à la première ligne du deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots "ou diverti".

M. le Président, lors de l'adoption de cette disposition au CCQ (Lois de 1990, c. 18, art. 5), l'on entendait viser, au premier alinéa, tant les actes de divertissement que les actes d'aliénation. En effet, si l'on considère nécessaire, pour

éviter que l'un des conjoints ne diminue volontairement la valeur du patrimoine familial pour diminuer la part de son conjoint, de couvrir certains actes d'aliénation, il convient encore davantage de viser les actes de divertissement, étant donné que l'appauvrissement du patrimoine familial, entraîné par un acte de divertissement, peut être encore plus important que celui entraîné par un acte d'aliénation. Cet amendement vise uniquement à corriger une erreur, puisque l'on n'entendait pas modifier le droit actuel sur cette question. En raison de cet amendement, l'article 420 se lirait comme suit: "Lorsqu'un bien qui faisait partie du patrimoine familial a été aliéné ou diverti dans l'année précédant le décès de l'un des époux ou l'introduction de l'instance en séparation de corps, divorce ou annulation de mariage et que ce bien n'a pas été remplacé, le tribunal peut ordonner qu'un paiement compensatoire soit fait à l'époux à qui aurait profité l'inclusion de ce bien dans le patrimoine familial. "Il en est de même lorsque le bien a été aliéné plus d'un an avant le décès de l'un des époux ou l'introduction de l'Instance et que cette aliénation a été faite dans le but de diminuer la part de l'époux à qui aurait profité l'inclusion de ce bien dans le patrimoine familial."

Deuxième amendement. Remplacer la première phrase du troisième alinéa de l'article 422 par celle-ci: "La renonciation doit être inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers."

M. le Président, il s'agit d'une modification de concordance avec le livre sur la publicité des droits. L'article 422 est modifié pour soumettre à la publicité le jugement comportant une renonciation au partage du patrimoine familial. L'on a considéré que les tiers avalent intérêt à savoir s'il y avait eu ou non renonciation au partage du patrimoine familial à l'intérieur d'un litige et que cette modification devrait accroître la fiabilité du registre. En raison de cet amendement, l'article 422 se lirait comme suit: "Les époux ne peuvent renoncer, par leur contrat de mariage ou autrement, à leurs droits dans le patrimoine familial.

Toutefois, un époux peut, à compter du décès de son conjoint ou du jugement de divorce, de séparation de corps ou de nullité de mariage, y renoncer, en tout ou en partie, par acte notarié en minute; il peut aussi y renoncer, par une déclaration judiciaire dont il est donné acte, dans le cadre d'une instance en divorce, en séparation de corps ou en nullité de mariage. "La renonciation doit être inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers. À défaut d'inscription dans un délai d'un an à compter du jour de l'ouverture du droit au partage, l'époux renonçant est réputé avoir accepté."

Le Président (M. Lafrance): Je vous remer- cie, M. le député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des commentaires touchant cette série d'articles 413 à 425 inclusivement, incluant 420, 422 tels qu'amendés?

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Nous sommes dans la section III, Du patrimoine familial, et De la constitution du patrimoine. Je me demande si on n'aurait pas intérêt à profiter du fait qu'on a les mains dans la pâte pour remédier à la difficulté d'interprétation qui s'est posée au quatrième alinéa de l'article 414 qui se lit comme suit: "Sont également exclus du patrimoine familial, les biens échus à l'un des époux par succession ou donation avant ou pendant le mariage." Je sais que cela a été l'objet d'une décision de la Cour d'appel tout récemment. Mais, puisqu'on est dedans, comme on dit, pourquoi ne pas en profiter pour ajuster notre Code civil à l'évolution du droit? Pourquoi attendre - combien d'années déjà? - quand nous aurons à rouvrir sur cette question? Pourquoi ne pas le faire maintenant en précisant que ne sont toutefois pas exclus les biens que les époux se sont consentis par donation, étant donné que les biens que les époux se sont consentis par donation sont partageables?

M. Kehoe: Mme la députée. Mme Harel: Oui. M. Kehoe: Votre suggestion... Mme Harel: Est bonne.

M. Kehoe: Oui, sans doute. Elle est bonne, mais on n'est pas en mesure de donner une réponse immédiatement.

Mme Harel: Ce soir.

M. Kehoe: Ce soir. Mais, c'est pour ça, peut-être, qu'on peut laisser en suspens encore cet article, quitte à ce qu'on y revienne. Le ministre sera ici aussi. On va étudier avec les légistes, les experts, tous les...

Mme Harel: L'idée m'est venue, surtout que l'amendement que vous déposez à l'article 420, cet amendement me semble avoir été inspiré, en partie, par le mémoire du Conseil du statut de la femme. Ce mémoire qui avait été transmis aux légistes comme à l'Opposition, l'été dernier, disait ceci: "L'article 420 vise à éviter qu'un conjoint puisse soustraire un bien du patrimoine familial dans l'année qui précède le décès ou l'introduction de l'instance. L'article actuel ne

reprend pas le mot "diverti" au premier alinéa. Par ailleurs, il a été introduit au deuxième alinéa qui concerne les biens aliénés ou divertis plus d'un an avant le décès ou l'introduction de l'instance. Il y a donc lieu de réintroduire le mot "diverti" au premier alinéa." Alors, je comprends que vous venez satisfaire une des recommandations du Conseil du statut de la femme. Peut-être allez-vous dans le même sens, sans même avoir pris connaissance des recommandations du Conseil du statut de la femme, ce qui est possible. Ceci dit, le Conseil recommandait également qu'on profite du fait qu'on était à réexaminer, article par article, ce chapitre-là pour introduire à l'article 414, alinéa 4, une clarification qui va dans le sens de la décision de la Cour d'appel. (21 h 15)

M. Kehoe: C'est pour ça, Mme la députée, qu'on va laisser en suspens l'article 414. Mais je tiens à souligner, pour l'article 420, que l'amendement tel qu'apporté est tout simplement pour corriger une erreur.

Mme Harel: Oui, mais c'était une erreur qui était importante et que divers mémoires avaient pointée du doigt.

M. Kehoe: On ne modifie aucunement le droit actuel avec ça. C'est strictement pour corriger une erreur de rédaction. Il n'y a rien qui est modifié à la loi actuelle.

Mme Harel: Oui, je comprends. Qu'est-ce que vous voulez prouver, M. le député de Chapleau, en insistant là-dessus?

M. Kehoe: Bien, c'est juste pour expliquer. Je n'étais pas certain de votre demande. Je veux juste que ce soit clair, que ce soit tout simplement de corriger une erreur là, le but de l'amendement. Mais, pour votre demande pour 414, c'est sûr que ce sera pris en considération. D'ailleurs, on va suspendre l'article.

Le Président (M. Lafrance): Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires touchant...

Mme Harel: On suspend seulement 414.

Le Président (M. Lafrance): ...cette série d'articles...

M. Kehoe: Oui, c'est ça. On peut procéder à l'adoption des autres articles.

Mme Harel: On peut procéder avec les autres articles, puis suspendre 414.

Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 413 est adopté tel quel. L'article 414 est laissé en suspens. Les articles 415, 416, 417, 418 et 419 sont adoptés tels quels. L'article 420 est adopté tel qu'amendé. L'article 421 est adopté tel quel. L'article 422 est adopté tel qu'amendé. Les articles 423, 424 et 425 sont adoptés tels quels. Le prochain article qui avait été laissé en suspens est le 437.

M. Kehoe: Oui, M. le Président, il y a un amendement à proposer.

Des régimes matrimoniaux

Le Président (M. Lafrance): Alors, j'appelle cet article 437 qui est contenu au chapitre cinquième, Des régimes matrimoniaux, et qui touche les dispositions générales.

M. Kehoe: L'article 437 est modifié par la suppression, à la fin du deuxième alinéa, des mots "ou qu'il s'agisse de biens de peu de valeur ou de cadeaux d'usage." M. le Président, l'amendement vise à éviter que des incertitudes ne se soulèvent sur la portée des modifications qui peuvent être apportées au contrat de mariage. En raison de cet amendement, l'article 437 se lirait comme suit: "Les époux peuvent, pendant le mariage, modifier leur régime matrimonial, ainsi que toute stipulation de leur contrat de mariage, pourvu que ces modifications soient elles-mêmes faites par contrat de mariage. "Les donations portées au contrat de mariage, y compris celles qui sont faites à cause de mort, peuvent être modifiées, même si elles sont stipulées irrévocables, pourvu que soit obtenu le consentement de tous les intéressés. "Les créanciers, s'ils en subissent préjudice, peuvent, dans le délai d'un an à compter du jour où ils ont eu connaissance des modifications apportées au contrat de mariage, les faire déclarer inopposables à leur égard."

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 437, tel qu'amendé? Oui, Me Ouellette.

Mme Ouellette: M. le Président, le seul commentaire que je peux faire, c'est qu'on avait demandé ça pour éviter une incertitude. Je pense qu'on est tout à fait d'accord avec l'amendement.

Le Président (M. Lafrance): Très bien, merci. Alors, s'il n'y a pas d'autres commentaires, cet article 437 est adopté tel qu'amendé. Le prochain article qui avait été laissé en suspens est le 468, je pense, qui touche la question de 6 mois versus 1 an. Cet article 468 avait été amendé. Il y a un amendement qui avait été déposé.

M. Kehoe: Mais il y a un autre amendement, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, nous allons retirer le premier amendement qui avait été déposé et nous vous écoutons pour ce nouvel amendement.

M. Kehoe: L'amendement proposé à l'article 468. Aux première et deuxième lignes du deuxième alinéa de l'article 468, remplacer les mots laite par acte notarié doit être inscrite au registre des droits personnels" par les mots "doit être inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers"; et, à la deuxième ligne de cet alinéa, remplacer les mots "de six mois" par les mots "d'un an".

M. le Président, outre une modification de concordance avec le livre sur la publicité des droits, l'article 468 est modifié pour que soit soumise à la publicité la renonciation, faite par déclaration judiciaire, aux droits qu'un conjoint possède dans les acquêts de l'autre. L'on a considéré que les tiers avaient intérêt à connaître cette information qui devrait accroître la fiabilité du registre. La seconde modification est aussi de concordance avec le délai prévu à 422. En raison de cet amendement, l'article 468 se tirait comme suit: "La renonciation doit être faite par acte notarié en minute ou par une déclaration judiciaire dont il est donné acte. "La renonciation doit être inscrite au registre des droits personnels et réels mobiliers; à défaut d'inscription dans un délai d'un an à compter du jour de la dissolution, l'époux est réputé avoir accepté."

M. le Président, je devrai souligner que vous n'avez pas dans le commentaire, justement, une dernière ligne...

Le Président (M. Lafrance): C'est la référence à 422?

M. Kehoe: Oui. Ça va être dans le commentaire qui va sortir par la suite.

Mme Harel: Vous avez déjà adopté l'article 468, sous réserve, je pense?

Le Président (M. Lafrance): Non, peut-être qu'on en avait discuté. Mais, moi, je l'avais en suspens ici. La discussion avait tourné autour de cette question d'un an.

Mme Harel: Oui, tout à fait. D'ailleurs, je pense que c'est une nette amélioration qu'on ait maintenu le droit actuel d'un délai d'un an plutôt que le délai de six mois prévu au projet de loi. On a intérêt, de toute façon, à harmoniser... Vous voyez, c'est un an après le décès pour obtenir une prestation compensatoire. C'est un an... Il faut que les gens n'aient pas besoin d'aller voir dans le Code ou de consulter un professionnel du droit pour savoir que c'est la règle, un an. Il faut qu'ils puissent en parler au souper du samedi soir. C'est ça.

M. Kehoe: Les soupers de Mme Bertrand!

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Alors, l'article 468 est adopté tel qu'amendé. Nous en arrivons à l'article 473 qui avait également été laissé en suspens pour la question identique de la durée d'un an.

M. Kehoe: L'amendement, M. le Président, à 473. Aux deuxième et troisième lignes de l'article 473, les mots "de six mois" sont remplacés par les mots "d'un an". M. le Président, il a paru préférable de reprendre le délai d'un an accordé aux héritiers, en droit actuel, pour faire inscrire leur renonciation. En raison de cet amendement, l'article 473 se lirait comme suit: "Lorsqu'un époux décède alors qu'il était encore en droit de renonciation, ses héritiers ont, à compter du décès, un nouveau délai d'un an pour faire inscrire leur renonciation."

Le Président (M. Lafrance): Vous avez dit "renonciation" au lieu de...

M. Kehoe: De leur renonciation? Une voix: En droit de renoncer.

Le Président (M. Lafrance): Alors, je relis pour qu'il n'y ait pas d'erreur. "Lorsqu'un époux décède alors qu'il était encore en droit de renoncer, ses héritiers ont, à compter du décès, un nouveau délai d'un an pour faire inscrire leur renonciation." Est-ce qu'il y a des commentaires touchant cet article 473 tel qu'amendé?

Mme Harel: Moi, j'aurais un commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui.

Mme Harel: Mais il porte sur 472, en fait, qui est déjà adopté, je crois. Est-ce qu'on avait adopté 472?

Le Président (M. Lafrance): Oui.

Mme Harel: Je voudrais que ce soit inscrit simplement au Journal des débats que nous avons tenté d'examiner comment il serait possible de corriger un inconvénient majeur, en fait, qui résulte du fait que, pour bon nombre de couples, souvent des couples plus âgés qui ont déjà fait des testaments et qui, par ignorance, ignorent qu'ils doivent revoir leur testament à la lumière des nouvelles dispositions du patrimoine familial... Je vous en avais parlé, M. le Président, et j'en avais parlé aux membres de cette commission, au mois d'août dernier, du cas de ce monsieur de Québec qui, après le décès de sa femme, s'était

retrouvé à devoir partager sa résidence familiale avec sa belle-soeur religieuse qui était l'unique héritière testamentaire de sa femme. Alors, nous avons vraiment cherché à examiner la possibilité de remédier à des situations comme celles-là, lorsque l'attribution de la moitié du patrimoine familial aux héritiers peut entraîner une situation d'iniquité pour le conjoint survivant.

Le Conseil du statut de la femme, à cet effet, avait rencontré l'Opposition et, j'imagine, avait également rencontré, peut-être à plusieurs reprises, les légistes, les attachés politiques du ministre ou peut-être le ministre lui-même. En tout cas, il avait fait des recommandations également auprès d'autres ministres, y compris la ministre déléguée à la Condition féminine. Ce que le Conseil recommandait, c'était de s'inspirer des principes en matière de société d'acquêts pour permettre au conjoint survivant de renoncer à l'application des dispositions sur le patrimoine familial, s'il le désirait.

Alors, nous en avons parlé, il y a déjà plusieurs mois. Nous avons consulté. J'aimerais peut-être, M. le Président, pour les fins de l'examen de cette question, que le député de Chapleau, en fait, nous dise si, peut-être, des légistes de l'équipe du ministre peuvent nous indiquer les difficultés que cette suggestion du Conseil peut également poser et la situation de déséquilibre aussi qu'elle peut créer, pour conclure que nous n'avons pas vraiment encore trouvé la façon de corriger cette situation, compte tenu des difficultés que les solutions examinées pouvaient également engendrer.

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a des commentaires? M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Mme la députée, c'est un sujet d'une importance assez grande. C'est sûr et certain qu'on va discuter de l'affaire avec le ministre. On ne peut pas, ce soir, vous donner une réponse. Le ministre n'est pas ici, bien sûr... Mais c'est sûr que la question que vous avez soulevée, c'est d'une grande importance et on va en discuter avec le ministre. Si vous voulez qu'on suspende l'article ou qu'on aborde la question avec le ministre quand il va arriver...

Le Président (M. Lafrance): Je vous ferai remarquer que l'article a déjà été adopté. On parle bien de 472 là, hein? Mais, évidemment, s'il y a consentement, on peut rouvrir cet article-là. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Écoutez, M. le Président, si j'ai bien compris, si le consentement est réputé, il n'a pas besoin d'être présumé. N'est-ce pas? C'est une présomption absolue et non pas une présomption simple, le consentement pour rouvrir des articles. C'est bien ce qu'on nous a dit depuis le début?

M. Kehoe: II n'y a absolument pas de problème.

Mme Harel: On est au moment où on peut le vérifier. Mais, ceci dit, plus sérieusement... Non, il s'agit plutôt d'avoir un point de vue juridique sur cette question, qui pourrait être transmis justement au Conseil du statut et qui, simplement, va leur permettre de constater, comme nous, que ce n'est pas en toute simplicité qu'on peut travailler dans ces dispositions. Alors... Vous préférez attendre le ministre?

M. Kehoe: Bien, définitivement, pour...

Mme Harel: D'accord. Mais, il va falloir que je recommence, à ce moment-là, toute ma présentation. Très bien.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce que vous avez d'autres commentaires sur 473?

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Lafrance): Non? D'accord. Alors, l'article 473 est adopté tel qu'amendé.

Mme Harel: Est-ce qu'on peut suspendre avant que le ministre nous arrive frais et dispos, et qu'on se mette à vouloir suspendre au moment où lui veut travailler?

M. Kehoe: Madame, je me demande si on peut lire... Il y a des amendements techniques pour le livre II - ce sera assez court - juste avant la suspension.

Le Président (M. Lafrance): Oui. D'accord. Je viens d'avoir ça.

Mme Harel: Oui. Me Ouellette m'indique qu'elle les a vérifiés. Nous pouvons certainement procéder à leur examen.

M. Kehoe: O.K. Je vais les lire. On va suspendre. Livre deuxième, De la famille, amendements techniques proposés. Les amendements suivants, de nature technique, terminologique ou de concordance sont apportés aux articles suivants du livre deuxième du projet.

Article 365. Cet article, tel qu'amendé, est à nouveau modifié, au deuxième alinéa, pour ajouter le mot "les" devant le mot "cérémonies".

Article 418. Cet article est modifié par l'insertion, au deuxième alinéa, des mots "la propriété" entre les mots "transférer" et "d'autres biens".

Article 435. Cet article est modifié, à la troisième ligne du premier alinéa, par l'ajout des mots "de son" devant le mot "conseiller".

Article 445. Cet article est modifié par

l'ajout des mots "et revenus" après le mot "fruits".

Article 464. Cet article est modifié par l'ajout, à la première ligne du premier alinéa, du mot "la" devant le mot "société".

L'intitulé de la section I précédant l'article 492 est modifié de manière à ajouter le mot "la" devant le mot "séparation".

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Chapleau. Ces cinq articles sont donc rouverts pour insérer les amendements tels que lus et contenus ici dans cette série d'amendements techniques proposés. Les articles sont adoptés tels qu'amendés.

Sur ce, j'aimerais suspendre nos travaux pour 10 minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 35)

(Reprise à 21 h 54)

Le Président (M. Lafrance): Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît, nous allons reprendre. J'aimerais déclarer notre séance de travail ouverte. Oui, nous avions adopté les amendements techniques au livre II et le prochain article est le 577, qui avait été laissé en suspens.

M. Kehoe: Excusez-moi, M. le Président. Le Président (M. Lafrance): Oui. M. Kehoe: Quel article?

Le Président (M. Lafrance): L'article 577.

En fait, l'article 577 et, ensuite, au chapitre troisième, ce sont des articles... L'article 577, au chapitre deuxième, De l'adoption.

M. Kehoe: Suspendu, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, les articles...

M. Kehoe: Les articles 577 et 578 restent suspendus.

Le Président (M. Lafrance): L'article 578 avait été adopté.

M. Kehoe: Ah! Excusez-moi.

Le Président (M. Lafrance): Les prochains articles en suspens sont 579, 580, 581, 582, 583, qui sont contenus au chapitre troisième, et qui traitent de la procréation médicalement assistée.

M. Kehoe: C'est ça, Hs restent suspendus. Ça va être une discussion, au fond.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Le prochain article est le 602.

Mme Harel: Juste une seconde. L'article 577 est toujours suspendu, je crois?

Le Président (M. Lafrance): Oui. L'article 577, c'est exact.

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): De même que toute la série qui touche la question de la procréation médicalement assistée, soit les articles 579 à 583 inclusivement. Le prochain article qui avait été laissé en suspens est l'article 602, au titre quatrième, De l'autorité parentale.

M. Kehoe: Ça demeure suspendu.

Le Président (M. Lafrance): Vous le laissez suspendu. Merci. Nous en arrivons au livre III. On peut peut-être faire des lectures dans ça, si... Oui. Au livre III?

Mme Harel: Me Frenette n'est pas là, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Oui.

M. Kehoe: Même, juste pour la lecture... Justement, M. le Président, c'était pour mentionner que pour les livres III et IV on ne peut pas procéder parce que l'expert, qui est de l'Opposition, n'est pas présent. Mais pour la lecture, est-ce que vous avez...

Des successions De la fin de la liquidation

Le Président (M. Lafrance): Alors, un des textes qui n'ont pas été lus est celui qui touche le chapitre quatrième, De la fin de la liquidation, contenu à la page 311 du livre troisième. Ce texte d'introduction se lit comme suit.

Chapitre quatrième. De la fin de la liquidation, touchant les articles 832 à 835. La fin de la liquidation arrive nécessairement quand l'actif est épuisé ou lorsque tous les créanciers et les légataires particuliers connus ont été payés ou que le paiement de leurs dettes et legs est autrement réglé. Elle donne alors lieu à la présentation d'un compte final à l'amiable ou en justice et, le cas échéant, à une proposition de partage des biens qui restent.

Le projet de loi reprend cette démarche en apportant certaines précisions relatives au contenu du compte, notamment pour exiger qu'il indique les dettes et legs restants, ceux garantis par une sûreté, pris en charge par des héritiers ou légataires particuliers ou dont le paiement est autrement réglé et qu'il établisse, le cas

échéant, les provisions nécessaires pour acquitter les jugements éventuels.

Il précise aussi que le liquidateur est déchargé de son administration après l'acceptation du compte définitif, étant entendu que les droits, pouvoirs et obligations du liquidateur peuvent par ailleurs continuer à être exercés à un autre titre pour parfaire l'exécution des volontés du testateur, notamment pour assurer une délivrance postérieure des biens ou pour agir à titre de fiduciaire.

Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut lire? Est-ce que Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata serait en mesure de nous lire le texte du titre sixième, à la page 319, qui traite du partage de la succession, et celui du chapitre premier, à la page 320 qui suit, et qui traite du droit au partage?

Du droit au partage

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Titre sixième, Du partage de la succession, articles 836 à 898. Lorsque la liquidation se termine avec un surplus de biens et qu'il y a plusieurs héritiers, chacun d'eux peut alors en principe s'approprier les biens suivant ses droits. Mais cette appropriation ne peut avoir lieu sans qu'il soit d'abord mis fin à l'état d'indivision qui a existé entre les héritiers depuis l'ouverture de la succession. Cette opération visant à mettre fin à l'indivision successorale constitue le partage. À ce titre, le projet de loi traite du droit au partage, des modalités du partage, des rapports, des effets du partage et de la nullité du partage.

Chapitre premier, Du droit au partage, articles 836 à 848. En droit actuel, nul n'est tenu de demeurer dans l'indivision et le droit au partage est absolu. Cette situation peut toutefois, en certains cas, avoir des effets néfastes et entraîner un morcellement du patrimoine et un appauvrissement, même social. Aussi, le projet de loi permet-il non seulement au testateur de retarder le partage pour des motifs sérieux et légitimes, mais aussi, en certains cas, au tribunal de faire droit à la demande d'un héritier désirant maintenir l'état d'indivision. Le tribunal peut ainsi maintenir l'indivision, notamment à l'égard d'une entreprise à caractère familial lorsque son exploitation était assurée par le défunt ou à l'égard de l'immeuble servant de résidence principale de la famille ou des meubles affectés à l'usage du ménage. Il peut aussi maintenir l'indivision pour au plus cinq ans si la réalisation immédiate risque de diminuer la valeur des biens. Les héritiers peuvent par ailleurs désintéresser celui qui s'oppose au maintien de l'indivision, en lui attribuant sa part ou d'autres biens.

Le projet permet aussi au tribunal d'ordonner le partage des biens malgré l'indivision lorsque celle-ci s'avère périlleuse pour l'un des indivisaires. Hors ces cas, le partage peut avoir lieu à l'amiable, suivant la proposition du liquidateur ou de la manière que les héritiers jugent convenable. À défaut d'entente, le partage a lieu en justice, suivant certaines formalités.

Enfin, le projet accorde aux héritiers le droit d'écarter du partage une personne qui n'est pas héritière et à qui un héritier avait cédé ses droits, moyennant le remboursement de la valeur de ces droits à l'époque du retrait et des frais acquittés lors de la cession.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée. Alors, le prochain texte qui n'a pas été lu est celui du chapitre deuxième qui traite des modalités du partage. J'aimerais peut-être faire appel à mon collègue de Rimouski pour nous lire le texte d'introduction.

Des modalités du partage

M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Des modalités du partage, articles 849 à 866. Le partage consiste essentiellement à répartir les biens de façon juste et équitable pour chacun des héritiers en tenant compte de leur situation respective et des causes de préférence. Le partage fait ainsi l'objet de certaines modalités, dont la composition, la formation et le tirage au sort des lots, les attributions préférentielles et la remise des titres relatifs aux biens partagés. Concernant la composition, la formation et le tirage au sort des lots, les règles actuelles ne posent pas de difficultés et ont subi l'épreuve du temps. Aussi, le projet, à l'instar de l'ORCC, reconduit-il ces règles, sauf de nouvelles formulations et précisions.

Par ailleurs, le droit actuel ne prévoit pas de règles d'attributions préférentielles. Afin de compléter les règles du partage et de respecter la situation de fait ainsi que les droits de certains héritiers, le projet de loi instaure un mécanisme d'attributions préférentielles pour certaines causes et à l'égard de certaines personnes. Ainsi, le conjoint survivant pourra, par préférence à tout autre héritier, exiger que l'on place dans son lot la résidence familiale et les meubles affectés à l'usage du ménage, ainsi que tout autre bien à caractère familial, moyennant une soulte, s'il y a lieu. L'immeuble qui servait de résidence au défunt pourra être attribué par préférence à celui qui y résidait lui-même. L'entreprise ou les parts sociales ou valeurs mobilières liées à celle-ci pourront aussi être attribuées par préférence à l'héritier qui participait activement à l'exploitation de l'entreprise du défunt au temps du décès.

Le projet reprend aussi les dispositions actuelles relatives aux contestations qui surviennent entre les héritiers à l'occasion du partage ainsi que celles assurant la protection des droits des créanciers.

Quant aux règles actuelles relatives à la remise des titres, lesquelles assurent la conservation et la consultation des titres communs à

tout l'héritage, le projet les reconduit en les reformulant et en les précisant.

Des rapports

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le député de Rimouski. Permettez-moi de lire maintenant le texte du chapitre troisième, qui traite des rapports, et qui regroupe les articles 867 à 883. Alors, ce texte se lit comme suit.

Afin d'assurer la plus grande égalité possible entre les héritiers venant au partage et d'assurer la paix dans les familles, le droit actuel oblige, à certaines conditions, tout héritier à rapporter à la masse partageable les biens qui lui avaient été donnés ou légués par le défunt ainsi que les sommes dont il était tenu envers lui, sauf si l'héritier a été dispensé de ces rapports par le défunt.

Le projet de loi reprend sensiblement ces mêmes règles mais, en accord avec les usages actuels, il inverse ces règles afin de n'obliger l'héritier à rapporter à la masse que ce qu'il a reçu à charge expresse de rapport.

Le prochain texte, qui n'a pas été lu, est celui contenu à la page 383, le chapitre quatrième, qui traite des effets du partage. Je demanderais peut-être à Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata de nous lire le texte d'Introduction.

Des effets du partage

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Chapitre quatrième, Des effets du partage, articles 884 à 894. Le principal effet du partage des biens de la succession est qu'il est déclaratif de propriété. Cet effet signifie qu'il met fin rétroactivement à l'indivision ayant existé entre les héritiers. Conséquemment, chacun des héritiers est réputé avoir succédé seul et immédiatement à tous les biens qu'il reçoit, en avoir été propriétaire depuis le décès et n'avoir jamais été propriétaire des biens qui ne lui sont pas attribués.

Le partage emporte donc des conséquences importantes, notamment quant aux effets des actes accomplis par un héritier pendant l'indivision, tant à l'égard des tiers que des autres héritiers.

En cette matière, le projet de loi maintient essentiellement les règles actuelles relatives à la validité de ces actes et à leur opposabilité. Outre l'effet déclaratif du partage, ce dernier emporte deux autres effets, secondaires ceux-là. De ces effets secondaires, la garantie des copartageants intéresse le domaine des successions de même que le droit, pour les héritiers, de demander la nullité du partage. Les copartageants sont en effet respectivement garants, les uns envers les autres, des troubles et des évictions qui procèdent d'une cause antérieure au partage ainsi que de l'éviction causée par leur fait personnel. Conséquemment, Us sont tenus d'indemniser celui qui est évincé de la perte que lui a causée l'éviction.

Les quelques règles du droit actuel en cette matière sont reprises par le projet de loi qui ramène toutefois à 3 ans, au lieu de 30 ans, le délai de prescription de l'action en garantie afin d'assurer la stabilité des titres résulant d'un partage.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la députée. Le dernier texte qui n'a pas été lu est celui contenu à la page 397 du livre quatrième, Des biens. Je demanderais à mon collègue de Rimouski de bien vouloir nous lire ce texte.

De la nullité du partage

M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. De la nullité du partage, articles 895 à 898. Je ne sais pas si je dois lire ça... De toute manière... Le texte est le suivant.

S'inspirant largement des règles actuelles, le projet de loi édicté que le partage, même partiel, peut être annulé pour les mêmes cause que les contrats, y compris pour cause de lésion.

Lorsque le vice dont le partage est entaché ne suffit pas à entraîner la nullité, le projet prévoit qu'il n'y a lieu qu'à un partage supplémentaire ou rectificatif. S'il s'agit de la simple omission d'un bien indivis, il y a lieu à un supplément à l'acte de partage.

Le projet permet enfin au défendeur à une demande en nullité de partage d'en arrêter le cours ou d'empêcher un nouveau partage en offrant et fournissant au demandeur le supplément de sa part dans la succession, soit en numéraire, soit en nature.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le député de Rimouski. J'ai fait une erreur, c'est bien le texte du chapitre cinquième, qui traite de la nullité du partage, et non pas le livre quatrième. Alors, ceci termine les lectures qui avaient été omises du livre troisième. À ce stade-ci, étant donné la présence de M. le ministre, est-ce que vous désirez revenir en arrière sur certains articles laissés en suspens?

M. Rémillard: Qu'est-ce qui serait le mieux, M. le Président, à la convenance de la commission?

Mme Harel: C'est sûrement ça parce qu'on en est rendu aux livres de Me Frenette. Vous voyez?

M. Rémillard: De... Excusez-moi.

Mme Harel: Les livres III et suivants. Me Frenette n'est pas avec nous ce soir. Alors, pour profiter de la présence de Me Ouellette, il serait préférable que nous revenions sur les questions que le député de Chapleau a préféré

suspendre en attendant votre arrivée.

M. Rémillard: Je l'apprécie beaucoup et je m'excuse de mon absence.

Mme Harel: On s'est, malgré tout, en fait, trouvé à s'occuper.

Le Président (M. Lafrance): Alors, j'aimerais vous référer au livre premier, au titre deuxième de ce livre premier qui traite de certains droits de la personnalité, au chapitre premier qui touche la question de l'intégrité de la personne, à la section I qui touche la question des soins, et aux articles 17 et 18 qui avaient été amendés et laissés en suspens. J'appelle donc ces deux articles, 17 et 18. Il y a également 21, 21.1 et 25. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces deux articles, 17 et 18?

M. Rémillard: M. le Président, nous avons des amendements aux articles 17 et 18. Nous avons donc deux amendements. Est-ce qu'ils n'ont pas été distribués...

Le Président (M. Lafrance): II y a des amendements qui avaient été déposés déjà, lorsque nous avons vu ces articles, voilà quelques mois.

M. Rémillard: Non.

Le Président (M. Lafrance): Alors, vous les retirez?

M. Rémillard: Oui, si vous me permettez, M. le Président, je retirerais les autres articles, et je vous présenterais de nouveaux amendements.

Le Président (M. Lafrance): D'accord.

Mme Harel: M. le Président, je vais vous dire que j'aurais souhaité que nous les ayons avant.

M. Rémillard: Oui, définitivement. Mme Harel: Je le regrette. Vous savez... M. Rémillard: Oui, moi aussi, d'accord.

Mme Harel: ...vraiment. Tantôt, je l'avais demandé, d'ailleurs. On m'a dit qu'il n'y avait pas d'amendements. Ça aurait été, sans doute, finalement, plus "collaboratif'.

M. Rémillard: Oui, je suis d'accord avec le commentaire. On n'a pas pu, il n'y a pas de faute de la part... Mais on a été un peu coincé. Ou bien on prend quelques minutes pour en prendre connaissance, M. le Président. On peut faire ça. On peut prendre cinq minutes et simplement en parler entre nous, si vous permet- tez.

Mme Harel: Peut-être les déposer d'abord.

Le Président (M. Lafrance): Oui, je pense qu'on pourrait les déposer formellement, les lire peut-être, et, après ça, si...

M. Rémillard: Oui.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'il y a d'autres amendements touchant 21, 21.1 et 25?

M. Rémillard: M. le Président, avant de les déposer officiellement, si vous me permettez, j'aimerais qu'on puisse ajourner cinq minutes.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, nous allons donc suspendre nos travaux pour 5 à 10 minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 22 h 14)

(Reprise à 23 h 24)

Le Président (M. Lafrance): Nous allons reprendre nos travaux. Je déclare donc notre séance ouverte. Nous avions appelé les articles 17 et 18.

M. Rémillard: M. le Président, nous avons décidé de prendre quelque repos en réfléchissant à ces articles après la discussion que nous venons d'avoir. Je m'aperçois aussi, M. le Président, que sur d'autres articles qu'on devrait être capable d'étudier ce soir, on arrive à la même conclusion. Je me demande si, dans ce contexte-là, on ne devrait pas ajourner et se retrouver demain matin.

Le Président (M. Lafrance): D'accord. Les articles que j'avais appelés sont laissés en suspens, les articles 17 et 18 tels qu'amendés... Non, on n'a pas lu les deux amendements.

J'aimerais vous préciser que nous avons convenu de nous réunir demain, a compter de 10 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. S'il n'y a pas d'autres commentaires, nos travaux sont donc ajournés à demain, 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 23 h 25)

Document(s) associé(s) à la séance