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Version finale

28e législature, 5e session
(24 février 1970 au 12 mars 1970)

Le mardi 3 mars 1970 - Vol. 9 N° 5

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures cinq minutes)

M. FRECHETTE (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieurs!

Démission de M. Claude Wagner

M. LE PRESIDENT: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que j'ai reçu aujourd'hui la lettre suivante;

Assemblée nationale du Québec, 606 Cathcart, suite 1010, Montréal 111, Québec.

Le 16 février 1970.

M. le Président de l'Assemblée nationale du Québec, Hôtel du Gouvernement, Québec, Province de Québec.

Monsieur,

Je soussigné, Claude Wagner, c.r., député de la circonscription électorale de Verdun à l'Assemblée nationale du Québec, donne par les présentes ma démission comme député de ladite circonscription électorale de Verdun, et ce en présence des soussignés.

Témoins de ma signature: MM. Laurier Baillargeon, député de la circonscription électorale de Napierville-Laprairie, et Fernand Picard, député de la circonscription électorale de Olier. Et j'ai signé, Claude Wagner, député de la circonscription électorale de Verdun.

Témoins: Laurier Baillargeon, député de la circonscription électorale de Napierville-Laprairie; Fernand Picard, député de la circonscription électorale de Olier.

M. BELLEMARE: Quel est le suivant? Who is the next?

UNE VOIX: De votre côté.

M. LAPORTE: Cela va être vous autres, tous ensemble!

M. BELLEMARE: Oui. Cela va bien. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de comités élus. Présentation de motions non annoncées. Présentation de bills...

L'honorable ministre des Finances.

Comité des voies et moyens

M. BEAULIEU: Que la Chambre à sa prochaine séance se forme en comité pour prendre en considération les voies et moyens de payer les subsides accordés à Sa Majesté.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. BEAULIEU: Que la Chambre à sa prochaine séance se forme en comité pour prendre en considération les subsides à accorder à Sa Majesté.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

Présentation de bills privés. Présentation de bills publics. Déclarations ministérielles.

L'honorable ministre du Travail.

Qualification de la main-d'oeuvre

M. BELLEMARE: M. le Président, je demanderais à la Chambre la permission d'inscrire cet arrêté en conseil dans le journal des Débats ainsi que la réglementation qui a été faite par le conseil des ministres au sujet de l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. Ce sont les règlements, M. le Président, qui concernent les licenciements dans les industries, (voir annexe A)

M. BERTRAND: C'est le bill 49.

M. BELLEMARE: Est-ce qu'il y a objection?

M. BERTRAND: Pas d'objection.

M. BELLEMARE: Que ce soit consigné dans le journal des Débats.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances.

Déclarations ministérielles

Emission d'obligations de l'Hydro-Québec

M. BEAULIEU: M. le Président, j'ai deux déclarations ministérielles à faire. La première

concerne la commission hydro-électrique de Québec.

La commission hydro-électrique annonce qu'elle vient de négocier aux Etats-Unis un emprunt de $60 millions dont le produit sera ajouté à ses fonds généraux et servira à financer son programme de construction. Les obligations portent intérêt à 9 1/4%, sont datées du 15 mars 1970, et viennent à échéance le 15 mars 1995. Elles sont offertes au prix de $98.50 pour chaque $100 d'obligation, et donnent un rendement annuel de 9.41 sans la commission aux courtiers. Les nouvelles obligations sont offertes au public par un syndicat que dirigent les maisons suivantes: The First Boston Corporation, Alsey Stewart & Co., A.E. Ames & Co. Incorporated, Solomon Brothers & Usler, et Merrill, Lynch, Pearce, Fenner & Smith Incorporated.

L'Hydro-Québec pourra racheter ces obligations par anticipation à compter du 15 mars 1985 en totalité mais non en partie, sur préavis d'au moins trente jours. La commission déposera chaque année dans un fonds d'amortissement, de 1976 à 1994, une somme égale à 2% des obligations, échéant en 1995, alors en cours. Ces obligations ne sont pas rachetables pour fins de fonds d'amortissement.

M. BOURASSA: Cela complète le programme d'emprunts de l'Hydro-Québec pour l'année fiscale?

M. BEAULIEU: Pour l'Hydro-Québec, oui. Cela dépasse le programme d'emprunts.

M. BOURASSA: De combien?

M. CADIEUX: Est-ce que le prêt a été consenti avant la fameuse déclaration du ministre?

M. BEAULIEU: Cela a été fait ce matin. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Subvention de $12 millions du fédéral

M. BEAULIEU: Au-dessus de 280 si j'additionne bien.

On a fait à Ottawa des déclarations, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elles sont fausses, concernant $12 millions que le Québec refuserait d'accepter. Je me dois d'informer cette Chambre de la situation dans ce domaine. Déjà, d'ailleurs, le ministre de l'Education a eu l'occasion de commenter cette déclaration fantaisiste du gouvernement fédéral.

M. BOURASSA: Donnez les faits.

M. BEAULIEU: Le ministre des Finances du Québec a toujours attaché beaucoup d'importance à l'accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec au sujet des immobilisations pour la formation technique et professionnelle. Non seulement n'avons-nous pas minimiser l'importance de cet accord, mais encore, nous l'avons fait imprimer et distribuer à nos frais en annexe au discours du budget de l'an dernier.

Il faut donc être vraiment de mauvaise foi pour prétendre que le Québec n'est pas intéressé à faire savoir que le gouvernement du Canada contribue aux dépenses en immobilisation pour la formation technique et professionnelle.

Cependant, une des raisons pour lesquelles nous tenions tant à faire connaître cet accord, c'est que le gouvernement fédéral ne le respecte pas. On se souviendra que, dans son discours du budget du 29 avril 1969, mon prédécesseur, l'honorable Paul Dozois, avait indiqué que nous avions inscrit $59 millions à recevoir en vertu de cet accord alors que le gouvernement fédéral nous avait écrit, disant que sa contribution se limitait à $34.6 millions. Rien dans l'entente n'autorisait le gouvernement fédéral à fixer ainsi un maximum annuel.

Le gouvernement fédéral nous refusait des sommes qui nous étaient dues en vertu de priorités que nous avions fixées et d'un accord que nous entendions, pour notre part, respecter intégralement. Pour ne pas provoquer de dépassement imprévu, nous avons dû demander au ministère de l'Education de retarder son programme de construction jusqu'à ce que nous ayons pu obtenir du gouvernement fédéral qu'il respecte les accords qu'il avait signés.

A ce sujet, je dois dire que j'ai eu des conversations utiles avec M, Benson, au début de l'automne. Il m'a alors assuré qu'il n'avait pas l'intention de maintenir le plafond suggéré plus tôt. Immédiatement, le ministère de l'Education a réactivé l'approbation de nouvelles constructions d'écoles secondaires éligibles à ce programme. Cependant, par suite des retards qui ont été causés par des décisions unilatérales du gouvernement fédéral, même modifiées ultérieurement par M. Benson, il semble bien que le Québec ne pourra réaliser tout le programme qu'il s'était fixé au début de l'année.

Ce programme est maintenant en cours et la récupération des sommes qui nous sont dues continue. Il y a quelques semaines, le gouvernement fédéral a entrepris de faire une nouvelle modification unilatérale des accords en proposant toutes sortes de conditions reliées à la publicité à faire autour des projets. Comme on le verra par la correspondance que je dépose, ces

suggestions nous paraissent plutôt farfelues. Elles ne peuvent, en aucun cas, être considérées comme une modification aux accords.

Si le gouvernement fédéral entend respecter les ententes qu'il a signées, il ne saurait sûrement imposer des conditions subséquentes aux autres signataires. Four nous, un contrat est un contrat, une entente est une entente. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait adopter la même attitude, plutôt que de faire du chantage et de propager des faussetés.

Si le gouvernement fédéral refuse de payer les sommes qu'il s'est engagé à verser, parce que nous ne voulons pas nous plier à ses ambitions publicitaires, qu'il n'ait pas, au moins, l'effronterie de dire que nous refusons de recevoir ce qui était dû.

M. BOURASSA: M. le Président, le ministre des Finances a parlé de toutes sortes de conditions nouvelles. Est-ce que le ministre pourrait expliciter? Il a dit que c'était dans la correspondance. Mais, pour l'information de la Chambre et de la presse, est-ce que le ministre pourrait expliciter brièvement ces conditions nouvelles?

M. BEAULIEU: Je crois que le ministre de l'Education se fera un plaisir d'expliquer ces conditions.

M. CARDINAL: M. le Président, le ministre des Finances pourra déposer lui-même la correspondance qu'un journal de Québec a qualifiée de drôle et de folle entre le ministre MacEachen et celui qui est responsable de l'éducation au Québec. Dans cette brève carrière qui a été la mienne, je n'ai jamais vu...

M. BOURASSA: Les faits, les faits!

M. CARDINAL: ... un ministre fédéral avoir le front de demander d'une façon aussi précise des règles de patronage dans la construction des écoles du Québec. Le fédéral...

M. LAPORTE: M. le Président...

M. CARDINAL: Je m'excuse, M. le Président, je pense que j'ai la parole.

M. LAPORTE: M. le Président, je veux simplement savoir « règles » de quoi? Nous n'avons pas compris ce que le ministre a dit.

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

UNE VOIX: Nous voulons savoir!

M. CARDINAL: M. le Président, pour ne pas faire de débat...

UNE VOIX: On n'a qu'à lire!

M. CARDINAL: ... pour que l'on ne croie pas qu'à partir de cet échange de correspondance je fais de la politicaillerie, il suffira au chef de l'Opposition, au leader de l'Opposition et aux députés de cette Chambre de lire la lettre que le député fédéral a eu le front d'écrire à un député provincial pour lui demander de faire des cérémonies magnifiques pour ouvrir des écoles dont le nom serait fixé par le gouvernement fédéral.

UNE VOIX: C'est faux!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chambly.

M. LAPORTE: Puis-je demander au ministre de l'Education pour quelle raison il a refusé, en des termes d'ailleurs assez humoristiques, je l'admets, au gouvernement fédéral des règles de publicité qui ont été acceptées par son collègue, le ministre des Affaires municipales, il y a quelques jours?

M. LUSSIER: Pardon?

M. CARDINAL: M. le Président, je ne comprends rien au ministre des Affaires municipales et je n'accepte pas — ne riez pas — je n'accepte pas cette comparaison. L'éducation est une des sphères qui appartiennent exclusivement au Québec. Les points d'impôt — et non pas des sommes qui nous sont données — qui nous sont remis, ne sont qu'une partie de ce qui nous est dû par convention, signée à deux reprises, avec le gouvernement fédéral; ils n'ont pas à être discutés à nouveau pour faire de la publicité au député d'un gouvernement qui nous prend pour des municipalités.

M. LAPORTE: M. le Président, je repose ma question au ministre. Dans le cas de l'éducation...

M. BERGERON: Laissez parler votre chef. M. LAPORTE: Dans le cas de l'éducation

— j'explique le sens de ma question — 11 s'agit de sommes d'argent que le gouvernement du Québec accepte. Le ministre refuse la publicité réclamée par le gouvernement fédéral. Dans le cas de la Société d'habitation du Québec, il s'agit de sommes d'argent fournies par le gouvernement fédéral; le Québec les accepte. Le ministre vient, par ses agents, d'accepter toutes les règles de publicité du gouvernement fédéral. Pourquoi, encore une fois, deux poids deux mesures dans le gouvernement qui est devant nous?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

Me sera-t-il permis de signaler que nous en sommes à l'article « déclarations ministérielles » et qu'en vertu des règlements sessionnels que tous ont adoptés il est permis, au chef de l'Opposition ou à son représentant, de faire un court commentaire après que la déclaration ministérielle a été faite. Après l'article « déclarations ministérielles », il y a un autre article du feuilleton qui s'appelle « questions des députés ». Alors, je pense qu'à cet article de notre feuilleton toutes les questions se rapportant aux déclarations ministérielles pourraient être posées à ce moment-là.

M. LUSSIER: M. le Président, pour faire une rectification, l'honorable leader de l'Opposition dit que, lors de l'entente au sujet des montants que la société centrale prêterait durant l'exercice financier que nous terminons, nous avons accepté toutes les conditions que le fédéral demandait que nous acceptions pour l'obtention de ces prêts. C'est faux, M. le Président. Tout ce qui a été accepté — et c'est complètement différent de ce qui était demandé au ministère de l'Education et au gouvernement — c'est que, lorsque nous émettions un communiqué, ce soit un communiqué conjoint, lorsque le gouvernement fédéral y participait par des prêts. De toute façon, nous avons accepté que le communiqué de presse soit conjoint.

Il n'était pas question de noms, ni de ceci ni de cela. La seule chose qui a été acceptée, c'est que, lorsqu'il y avait inauguration de ces bâtisses, les deux gouvernements puissent être représentés. C'est tout ce qui a été accepté.

M. LAPORTE: M. le Président, une question supplémentaire. Je demande au ministre si on n'a pas accepté également qu'il y ait des écriteaux qui indiquent au public qui a fourni l'argent et que le nom du gouvernement fédéral soit inscrit, comme celui de la province de Québec.

M. LUSSIER: Pour ce qui est des écriteaux, ça n'a pas été accepté; c'est un sujet de discussion,

M. LAPORTE: M. le Président, je pose maintenant une question au ministre de l'Education; c'est une question supplémentaire, il va sans dire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je m'excuse, nous n'en sommes pas encore aux questions des députés, mais nous y arrivons; nous en sommes aux déclarations ministérielles.

M. LAPORTE: M. le Président, c'est alors une demande d'explications à M. le ministre sur sa déclaration ministérielle. Le ministre des Affaires municipales ayant accepté que, dans les communiqués remis aux journaux, le gouvernement fédéral soit mentionné, puisqu'il paie; deuxièmement, qu'aux cérémonies d'inauguration des édifices construits par la Société d'habitation du Québec le gouvernement soit représenté, pourquoi — je le demande au premier ministre — alors qu'il y a actuellement des discussions pour que, même sur les écriteaux, le gouvernement fédéral soit mentionné, y a-t-il un tel scandale si on demande la même chose au ministère de l'Education? Cela vient d'être accepté par son gouvernement.

M. BOURASSA: Répondez. Il n'y a pas de réponse?

M. BERTRAND: Non.

M. CARDINAL: M. le Président, je m'excuse. Le député de Chambly sait fort bien qu'il y a une différence énorme, simplement sur ce point-là, c'est le seul que Je veuille souligner...

M. BOURASSA: C'est des écriteaux; c'est du ciment.

M. CARDINAL: ... entre une commission scolaire, qui est une instance locale, qui organise elle-même ses cérémonies, dans un domaine qui est exclusivement provincial, et la Société d'habitation du Québec. Nous ne pouvons absolument pas comparer cela. S'il fallait que je lise en Chambre ces paragraphes de M. MacEachen...

UNE VOIX: Lisez-les.

M. BOURASSA: Vous allez faire rire de vous.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: C'est de l'infantilisme.

M. CARDINAL: M. le Président, est-ce une demande de l'Assemblée qu'on lise la lettre?

M. LACROIX: Certainement. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président, puis-je demander au premier ministre des explications sur ce texte? Est-ce que la vérité ce n'est pas que chacun des ministres de ce gouvernement est libre de transiger avec le gouvernement fédéral, selon ses options, séparatiste, semi-séparatiste ou fédéraliste?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BERTRAND: Lisez donc les lettres. Quand vous aurez pris connaissance de la lettre... Le ministre vient de donner la raison. Qui organise l'inauguration des écoles? Ce sont les commissions scolaires. Cest tout.

M. LAPORTE: Le premier ministre sait fort bien que cela ne trompe personne.

M. BERTRAND: Bien, voyons donc!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Pour la troisième fois, je me dois de rappeler que nous ne sommes pas à la période des questions; nous sommes à l'article des déclarations ministérielles. S'il y a d'autres ministres qui ont des déclarations à faire, nous allons les entendre, sinon, nous allons passer à l'article dépôt de documents.

Questions et réponses Commission Gendron

M. BERTRAND: M. le Président, je dépose l'arrêté ministériel no 7 du 8 janvier 1969 et l'arrêté ministériel 3434 du 12 novembre 1969 en réponse à la demande formulée par le député de Chambly concernant la rémunération et les frais de séjour du président et des commissaires de la Commission d'enquête sur la situation de la langue française et sur les droits linguistiques au Québec Vous avez trois copies, M. le Président. Vous pourrez en remettre une au député de Chambly.

Je dépose également en quatre copies, puisqu'il en a formulé la demande, la liste de tous les ministres d'Etat depuis le 5 juillet 1960. Vous pourrez lui en remettre une. Il y a aussi la liste des adjoints parlementaires dont une copie pour le député de Chambly.

En vertu de l'article 423 de la Loi électorale, je dépose en trois copies, dont une pour l'Opposition, l'arrêté ministériel 1455 du 14 mai 1969 concernant le tarif des rémunérations et dépenses.

M. LE PRESIDENT: L'honorable Solliciteur général.

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport du ministère des Institutions financières, compagnies et coopératives pour l'année 1968-69.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre d'Etat aux Finances.

M. MATHIEU: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport du directeur général de la Régie des alcools du Québec pour l'exercice 1968-69.

M. LE PRESIDENT: Questions des députés. L'honorable chef de l'Opposition.

M. BOURASSA: J'aurais une question pour le ministre du Travail ou pour le ministre de l'Education. Le Soleil de ce matin parlait d'une grève possible...

M. BERTRAND: M. le Président, si on veut me le permettre, est-ce qu'on pose une question? J'ai encore des documents à présenter.

M. BOURASSA: D'accord.

M. BERTRAND: Je voudrais déposer l'arrêté ministériel 298, en date du 5 février 1969, concernant la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Ce sont les règlements.

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.

Employés de soutien des CEGEP

M. BOURASSA: Concernant la grève possible des employés de soutien dans quatorze CEGEP, est-ce que le gouvernement a pris des mesures pour prévenir cette grève? C'était dans le Soleil de ce matin.

M. CARDINAL: M. le Président, c'est une grève possible, mais il n'y a rien d'officiel encore.

M. LAPORTE: Rien de grave.

M. CARDINAL: Nous suivons, au ministère...

M. BOURASSA: On a voté à 82% en faveur de la grève.

M. BELLEMARE: Il y a des grèves qui ont été votées à 90% et qui n'ont jamais eu lieu non plus.

M. CARDINAL: M. le Président, quand est-ce...

M. LAPORTE: Il y a aussi des gouvernements élus à 42%.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CARDINAL: M. le Président, au niveau des CEGEP, divers syndicats négocient avec l'Etat et avec la Fonction publique pour établir les conditions de travail. Disons que, pour satisfaire le chef de l'Opposition, je prends avis de la question et que, demain ou dans les jours qui vont suivre, j'apporterai un rapport détaillé sur l'état de la négociation.

Institutions pour vieillards

M. BOURASSA: Ma question s'adresse au ministre de la Santé. Le même journal rapportait ce matin qu'il y avait une quarantaine d'institutions pour vieillards qui n'avaient pas de permis. Est-ce que le ministre aurait des précisions à donner? On voit dans les journaux de fin de semaine que des vieillards meurent en très grand nombre dans ces institutions. Est-ce que le ministre pourrait commenter l'article qui a paru ce matin sur 40 institutions pour vieillards qui n'ont pas de permis actuellement?

M. CLOUTER: J'ai mal saisi le chef de l'Opposition. Est-ce qu'il dit que les journaux de fin de semaine annoncent plusieurs mortalités dans les institutions?

M. BOURASSA: Bien, un journal en parlait dans la région de Sherbrooke, mais là, je réfère...

M. CLOUTER: On a porté à mon attention un article qui aurait paru dans un hebdomadaire de fin de semaine à l'effet qu'il y aurait eu des suicides de personnes âgées. Est-ce que c'est...

M. BOURASSA: Non, je réfère aux 40 institutions qui n'ont pas de permis.

M. CLOUTER: Non, mais l'autre affirmation du chef de l'Opposition à l'effet qu'il y aurait eu...

M. BOURASSA: Ah oui, vous pouvez commenter.

M. CLOUTER: J'ai demandé à mes collaborateurs de vérifier ces dires et un premier rapport qui me parvient mentionne que c'est complètement faux, cette histoire de suicides de personnes âgées dans certaines institutions. A tout événement, j'aurai plus tard dans le courant de la semaine un rapport plus complet sur cet article de journal.

En ce qui concerne le Soleil d'aujourd'hui et la déclaration sur les 40 institutions qui fonctionnent sans permis, on a mentionné un des fonctionnaires du ministère, M, Archambault, qui est le directeur des personnes âgées au ministère et qui a été questionné par le journaliste. Il a donné le nombre d'institutions pour toutes les régions et le nombre de personnes âgées dans ces institutions dont le permis est retenu actuellement à la suite de vérifications en attendant qu'elles se conforment à des normes ou à des exigences des deux ministères. La plupart de ces institutions, on l'aura constaté, sont dans la ville de Montréal et dans le Montréal métropolitain. On sait qu'actuellement dans Montréal, où nous avons commencé l'implantation de maisons pour personnes âgées avec la résidence Angelica, il y aura en construction ces mois-ci des locaux pouvant contenir 3,000 lits pour personnes âgées. Nous pensons qu'avec cette première phase d'implantation de ressources à Montréal et la deuxième qui suivra, nous serons en mesure de résoudre en grande partie le problème de l'hébergement des personnes âgées dans le Montréal métropolitain.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauharnois.

Déclaration de Georges Lapassade

M. CADEUX: J'ai une question à poser au ministre de l'Education. Est-ce qu'il entend intervenir dans le cas Georges Lapassade qui a été invité par l'Université du Québec et qui aurait déclaré: « Il faut détruire l'université et hâter son agonie ».

Un peu plus loin, les dirigeants de l'Université du Québec disent que la présence du professeur Georges Lapassade semble en train de créer une crise au sein de l'université.

M. CARDINAL: L'Université du Québec a

été créée par une loi adoptée par cette chambre. On sait fort bien qu'elle n'a que deux relations avec l'Etat: faire un rapport annuel devant l'Assemblée nationale, et le pouvoir, pour le ministre de l'Education, de recommander au lieutenant-gouverneur en conseil de désigner un certain nombre de principaux. Si le ministre devait intervenir dans le choix des invités de chacune des universités du Québec, il aurait, en plus des problèmes véritables, toute une série de petits problèmes. Il semblerait, d'après les échos que j'ai, que non pas l'Université du Québec mais le campus de Montréal, c'est-à-dire la succursale, la deuxième université de langue française à Montréal ait invité ce professeur. D'après ce que j'ai lu à plusieurs endroits, on se demande si ceci est sérieux, si c'est un canulard ou si ce n'est pas un problème que s'est posé elle-même cette succursale de Montréal de l'Université du Québec. En réponse au député de Beauharnois, je répondrai que je ne crois pas que la question soit suffisamment grave pour intervenir personnellement et que je ne puis pas le faire à moins qu'on me prouve que la sécurité de l'Etat ou des universités soit en jeu.

Pendant que je suis debout, est-ce que vous me permettriez de répondre à quatre questions qui ont été posées au cours de la semaine dernière.

Subventions scolaires

M. CARDINAL: A tout seigneur tout honneur, le mercredi 25 février 1970, l'honorable député de Mercier, maintenant chef de l'Opposition, posait une question concernant la commission scolaire Sainte-Catherine-d'Alexandrie, la commission scolaire d'Aguanish et la commission scolaire de Saint-Pacôme. Il me fait plaisir d'informer cette Chambre, et en particulier le député de Mercier, que depuis le début de l'année scolaire 1969-70 nous avons versé à la commission scolaire Sainte-Catherine d'Alexandrie, dans le comté de Napierville-Laprairie, ou à la commission scolaire régionale en son nom une somme de $229,737.13. De plus, le 14 janvier 1970, nous avons versé à la commission scolaire régionale Lignery, au nom de la commission scolaire Sainte-Catherine d'Alexandrie, une somme de $31,400. D'ici quelques jours, c'est-à-dire cette semaine, nous verserons à cette même commission scolaire une subvention d'équilibre budgétaire s'élevant à $28,600. Nous n'avons pas encore reçu de cette commission scolaire le rapport nous permettant d'effectuer le deuxième versement applicable à la rétroactivité du salaire des enseignants, et nous ne pouvons rien faire sans ce rapport.

Au sujet de la commission scolaire d'Aguanish, comté de Duplessis, nous avons versé, depuis le début de l'année scolaire en cours, à cette commission scolaire ou à la commission scolaire régionale en son nom, une somme de $14,540. Je dois ajouter qu'il y a 149 élèves de la 1ère à la 7e année dans cette commission scolaire. Nous devons encore verser $800 à la régionale du Golfe, et $1,675 comme deuxième versement applicable à la rétroactivité des salaires du personnel enseignant.

Quant à la commission scolaire de Saint-Pacôme, comté de Kamouraska, 295 élèves comprenant la maternelle et la 7e année, nous avons versé, depuis le début de la présente année scolaire à cette commission scolaire ou à la régionale en son nom, une somme de $125,414.07. De plus, le 12 janvier dernier, nous avons versé une subvention d'équilibre budgétaire de $12,400. Le 24 février 1970, la semaine dernière, nous avons versé à la régionale Pascal-Taché au nom de la commission scolaire de Saint-Pacôme la somme de $14,100.

Pour continuer dans le même sujet, le député de Beauharnois posait une question au sujet des contrats pour la construction d'écoles régionales. Je ne veux pas répéter cette question qui est assez longue.

La question que le député de Beauharnois a eu l'amabilité de me poser en Chambre, alors que j'étais absent pour des raisons que vous connaissez bien, jeudi dernier, est très confuse.

M. CÂDIEUX: On pose des questions quand il y a urgence; pas parce que vous êtes là ou que vous n'êtes pas là.

M. BELLEMARE: Et il a chanté.

M. CADIEUX: Il dit que j'ai eu l'habileté de poser ma question quand il n'était pas là. Je lui ai demandé d'en prendre préavis.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M.BERTRAND: Alors, pourquoi se choquer? M. CADIEUX: Il est stupide. M. BELLEMARE: Le congrès est fini.

M. BERTRAND: La bonne humeur, la bonne humeur.

M. CARDINAL: M. le Président... M. BERTRAND: La bonne humeur.

M. CARDINAL: ... je n'ai pas parlé d'habileté; J'ai parlé d'amabilité.

DES VOIX: Ah bon!

M. CADIEUX: Alors, si on veut être aimable, 11 faut poser nos questions quand vous n'êtes pas là.

M. BERTRAND: Ce n'est pas bon pour le coeur!

M. CARDINAL: Comment se fait-il qu'ils ne soient pas de bonne humeur de l'autre côté, alors que ça va si bien ici?

M. CADIEUX: C'est parce que vous êtes debout.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAPORTE: C'est parce que le gouvernement ne nous donne aucune raison d'être de bonne humeur.

M. CADIEUX: Ce n'est pas seulement nous; c'est toute la province qui est en maudit.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable ministre de l'Education.

M. CARDINAL: Merci, M. le Président.

Polyvalente à Valleyfield

M. CARDINAL: De toute façon, habileté ou amabilité mise i part, et bonne humeur aussi, la question que le député de Beauharnois a posée en Chambre, alors que j'étais absent pour les funérailles de Mme Lafontaine, est très confuse et comporte plusieurs points. Je l'ai relue et relue au journal des Débats.

M. BERTRAND: La question est confuse.

M. CADIEUX: Ne vous perdez pas dans les questions; répondez!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. CARDINAL: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai presque envie de me permettre de suggérer que l'on inscrive à l'ordre du jour de la prochaine réunion de la commission de l'Assemblée nationale un article qui nous permettrait de discuter de la possibilité d'établir dans nos règlements une façon de procéder comme on le fait actuellement.

Je me permets de faire appel à la bonne volonté de tous pour que nous puissions procéder normalement, surtout en tenant compte du fait que ces interventions sont évidemment comptées dans la période d'une demi-heure réservée aux questions.

M. CARDINAL: M. le Président, je suis bien d'accord avec vous, mais s'il y a une période d'une demi-heure pour les questions, il faut que nous ayons le temps d'y répondre aussi. L'Opposition devra avoir la patience, après qu'elle a posé des questions, d'entendre les réponses.

En réponse à la question du député de Beauharnois, je peux dire, premièrement, que les fonctionnaires de mon ministère n'ont aucun mandat d'arrêter la construction d'écoles polyvalentes. Au contraire — le ministre des Finances l'a mentionné tantôt — on en a lancé une trentaine dans les semaines qui viennent de s'écouler. Ils ont la responsabilité, cependant, de déterminer, pour tout le territoire du Québec, le programme de priorités de ces constructions. Si le projet de Beauharnois n'est pas encore en construction, ceci résulte du fait qu'a l'intérieur de la régionale d'Youville Il y a trois secteurs: le premier est celui de Valleyfield et là, l'école est déjà construite; le deuxième est celui de Beauharnois...

M. CADIEUX: Complètement faux. Valleyfield n'est pas à l'intérieur de la régionale d'Youville. Le ministre se trompe. C'est la régionale Salaberry, à Valleyfield.

M. CARDINAL: Je regrette, mais, d'après les cartes que j'ai au ministère, cette école qui a été construite à Valleyfield fait partie de la même régionale. Cependant, je vérifierai et...

M. CADIEUX: Prenez la parole du député de Beauharnois. Je suis plus au courant que vous. Valleyfield fait partie de la régionale Salaberry et non pas de la régionale d'Youville. Cela fait combien d'années que vous êtes ministre de l'Education?

UNE VOIX: A l'ordre!

M. CARDINAL: M. le Président, si le député de Beauharnois veut donner les réponses, Je vais l'écouter.

M. CADIEUX: Le ministre m'a invité à donner la réponse, la voici: C'est probablement parce que vous n'aimez pas l'entrepreneur qui

a été choisi pour construire l'école à la régionale d'Youville!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre de l'Education.

M. CARDINAL: M. le Président, la vérité est plus simple et Je vais réduire ma réponse au minimum pour ne pas faire perdre le temps de cette Chambre. La vérité, c'est que, la semaine dernière, les commissaires de la régionale sont venus rencontrer les fonctionnaires pour déterminer avec plus de précision les territoires de ces deux derniers secteurs — laissons celui de Valleyfield de côté — celui de Beauharnois et celui de Sainte-Martine, Saint-Chrysostome. Le ministère n'a reçu que la semaine dernière la décision de la régionale à ce sujet. C'est la régionale qui retient, depuis un an, les bons de garantie et le dépôt exigés lorsqu'une commission scolaire demande des appels d'offres.

Le ministère n'a jamais été informé avant la semaine dernière et avant la question du député de Beauharnois que cette commission scolaire avait agi de cette façon.

M. CADIEUX: Question de privilège, M. le Président. J'ai écrit au ministre au mois de septembre, l'an dernier, et je lui ai exposé tous les faits; une lettre personnelle et confidentielle.

M. CARDINAL: M. le Président, est-ce que le député de Beauharnois est commissaire d'école et représente la commission régionale?

M. CADIEUX: Je représente le comté de Beauharnois, M. le Président, et il me dit qu'il n'a jamais été mis au courant de la situation.

M. CARDINAL: M. le Président, ce que j'ai dit, c'est que la régionale n'a jamais communiqué avec le ministère à ce sujet, et je le répète de mon siège.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Deux- Montagnes. A l'ordre!

Régionale de Deux-Montagnes

M. BINETTE: M. le Président, est-ce que le ministre de l'Education pourrait confirmer ou infirmer une nouvelle à l'effet que la régionale de Deux-Montagnes a été saisie, par le ministère du Revenu national, pour des retenues d'impôt qui n'auraient pas été faites? Une sai- sie aurait été levée contre le ministère de l'Education, parce que la régionale de Deux- Montagnes n'a pas fait le paiement de ces retenues sur les salaires pour l'impôt fédéral, et cette saisie aurait été levée le 20 janvier 1970. Est-ce que le ministre est au courant?

UNE VOIX: C'est une tierce saisie.

M. BINETTE: C'est une tierce saisie.

M. CARDINAL: M. le Président, sur ce point, je réponds au député de Deux-Montagnes que je n'ai pas été mis au courant, mais, comme le député de ce comté, la semaine dernière, m'a posé une question, je vais lui répondre.

Le cas de la régionale de Deux-Montagnes, qui est pourtant le patelin de l'ex-ministre d'Etat à l'Education, si je ne me trompe, est un des plus difficiles que nous rencontrions actuellement au ministère.

M. BINETTE: C'est cela qu'ils nous disent depuis trois ans!

M. CARDINAL: Mes fonctionnaires ont mis des heures et des heures, jusqu'à ce jour, à tenter de résoudre ce problème, qui est d'envergure. Lorsque le député de Deux-Montagnes mentionne dans sa question que cette régionale a un emprunt de $200,000 à la banque, il est peu renseigné, puisque cette régionale a présentement des engagements de près de $2.5 millions à la banque. C'est un petit peu différent.

Les taxes des commissions scolaires locales comprises à l'intérieur du territoire de cette régionale ont été imposées pour faire face aux obligations des commissions scolaires, sans égard à la taxe spéciale pour couvrir les dépenses non subventionnées, qu'on appelle non admissibles, de la commission scolaire régionale de Deux-Montagnes.

On ne peut pas dire que ce territoire soit défavorisé, puisque l'évaluation totale de l'ensemble de ce territoire — M. le Président, à la suite de la question du député, j'ai vérifié les faits — s'élève, pour fins d'impôts fonciers, à plus de $200 millions.

Malgré cela, je suis informé que cette commission scolaire régionale fait face à des dépenses inadmissibles de l'ordre de $1 million par année. Je répète: des dépenses inadmissibles de l'ordre de $1 million par année. Et ce plaisir dure depuis trois ans, le député a raison. Les commissions scolaires locales veulent bien faire leur part...

M. BINETTE: Qu'est-ce que le ministre attend pour les aviser, pour les mettre au pas?

M. CARDINAL: Tiens, tiens, tiens!

M. BINETTE: Cela fait une année que la commission scolaire régionale de Deux-Montagnes demande des entrevues au ministère et elle a eu de la difficulté à les avoir, tout le temps. La seule fois qu'elle en a eu une, c'est le 4 février dernier; cela traînait depuis des mois, des mois et des années.

M. CARDINAL: Je n'accepte pas ceci, M. le Président. N'importe quel commissaire qui veut rencontrer le ministre ou ses représentants peut le faire, jour après jour. Et si on veut me donner des faits précis, des dates exactes, je vérifierai les faits et je corrigerai la situation. De toute façon, je continue l'explication.

Les commissions scolaires locales...

UNE VOIX: Ce ne sont pas les services...

M. CARDINAL: Qu'est-ce qui se passe, de l'autre côté, M. le Président? Ils ont été absents pendant trois mois, il n'y en avait pas dix. Hs posaient des questions et ils s'en allaient pour les réponses. Maintenant qu'on les donne...

M. LAPORTE: Le ministre va s'apercevoir que nous sommes revenus!

M. LACROIX: C'est du oui-dire, parce que le ministre de l'Education n'est jamais ici. Ce n'est pas lui qui peut savoir si nous y étions ou si nous n'y étions pas.

M. CARDINAL: Est-ce qu'onpeut relever les déclarations qu'ont faites les députés sur leurs présences?

M. LACROIX: Certainement, quant à moi, je suis prêt, à la première occasion, à mettre mes présences à côté de celles du ministre de l'Education.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!

C'est vraiment une incidente qui vient de se produire. Je demande à l'honorable ministre de l'Education de continuer la réponse.

M. CARDINAL: M. le Président, je vous remercie. De toute façon, les commissions scolaires locales veulent bien faire leur possible. Compte tenu de ce que je viens de dire, le ministère de l'Education est en train de recommander au ministre des Finances, malgré ce que je viens de dire, une subvention d'équilibre totalisant $1,400,000.

Cette subvention sera payée en trois tranches, dont une sera versée cette semaine ou la semaine prochaine. Le député de Deux-Montagnes mentionne, avec raison, que les enseignants ne sont pas payés. Il me fait plaisir, cet après-midi, de vous dire qu'à la suite d'arrangements entre le ministère de l'Education — pas la régionale, le ministère de l'Education — et le siège social de la banque de Montréal, une entente a été prise pour que les enseignants soient payés cette semaine.

M. LAPORTE: Vous passez par-dessus la tête de la régionale?

M. CARDINAL: M. le Président, on ne peut pas me demander d'intervenir et de ne pas intervenir, selon que cela fasse plaisir au député de Chambly. Cette commission scolaire...

M. LAPORTE: Vous êtes donc de mauvaise humeur!

M. CARDINAL: ... s'est payé des services que l'on ne retrouve nulle part, sauf peut-être dans le comté de Chambly. Les administrateurs ont outrepassé les normes établies par le ministère de l'Education. Le député, tantôt, l'a dit lui-même, il est temps qu'on les mette au pas, je suis heureux que ce soit lui qui l'ait mentionné.

M. BINETTE: Est-ce que le ministre de l'Education est au courant que la régionale Deux-Montagnes a été une des premières régionales à être formée dans le Québec et qu'il y a eu plusieurs expériences pilotes qui se sont faites là et que toutes ces dépenses inadmissibles aujourd'hui viennent probablement du fait qu'il y a eu des expériences pilotes qui ont été menées à la régionale Deux-Montagnes? Si le ministre était un peu plus au courant de l'administration de ces régionales, il saurait cela et il aurait répondu également à ma question concernant...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député de Saguenay.

M. MALTAIS (Saguenay): M. le Président...

M. BINETTE : J'aurais une question sur le même sujet au ministre. Le ministre a répondu, je le remercie, à ma question de la semaine dernière, mais, évidemment, il n'a pas répondu à ma question concernant la saisie. Est-ce qu'il y a eu réellement une saisie? Oui ou non par le ministère du Revenu national, au ministère de l'Education?

M. CARDINAL: La question du député, c'était: Est-ce que le ministre est au courant qu'il y avait une saisie? Le ministre comme tel, qui est à son bureau tous les jours, n'a pas eu cette saisie entre les mains. Je ne nie pas ou je n'affirme pas qu'il y en a une. Je réponds à la question. Je ne le sais pas.

M. BINETTE: Est-ce que le ministre pourrait s'enquérir s'il y a eu une saisie?

M. ROY: Quand il veut des informations sur l'aéroport, il appelle ses petits cousins à Ottawa!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. BINETTE: Est-ce que le ministre pourrait s'enquérir auprès de ses officiers s'il est exact qu'il y a eu une tierce-saisie entre les mains du ministère de l'Education pour des retenues d'impcts n'ayant pas été faites par la commission scolaire régionale Deux-Montagnes?

M. PAUL: M. le Président, il me semble que l'honorable député de Deux-Montagnes ignore que les procédures dont il est fait mention, si elles ont eu lieu, émanent non pas du ministère du Revenu, ni du ministère de l'Education, mais du ministère de la Justice. Je vais prendre les informations et je répondrai à mon honorable ami.

M. BINETTE: Je remercie le ministre de la Justice.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. MALTAIS (Saguenay): M. le Président, ma question s'adresse...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Chroniqueurs sportifs invités en France

M. MALTAIS (Saguenay): Ma question s'adresse au ministre des Communications. Je voudrais lui demander — s'il y avait moyen de renseigner cette Chambre — comment se fait la sélection des chroniqueurs sportifs qui sont invités par le gouvernement français à visiter certains centres de ski en France.

M. LEBEL: M. le Président, je comprends que c'est une question de grand intérêt, mais je n'en vois pas l'urgence.

M. MALTAIS (Saguenay): M. le Président, je ne sais pas si le ministre a vu l'urgence... Est-ce que le ministre est au courant — évidemment, il a toujours montré de la bonne volonté comme président; je présume qu'il n'a pas tellement été traumatisé par les questions de l'Opposition jusqu'à maintenant — et que l'Office d'information, à l'heure actuelle, ferait de petites manoeuvres, du petit patronage, et se servirait de ces invitations en faveur de certaines personnes qui n'ont rien du chroniqueur sportif, tant de langue anglaise que de langue française?

M. LEBEL: Pour l'information de l'honorable député de Saguenay, je dois dire que l'Office d'information et de publicité — et c'est une nouvelle pour l'honorable député — sera soumis désormais aux questions que pourront lui poser tous les parlementaires de cette Chambre, devant la commission des Communications.

M. MALTAIS (Saguenay): De toute façon, — ça ne pourrait pas nuire au ministre — je pourrais lui présenter peut-être, lui lire...

DES VOIX: A l'ordre!

M. MALTAIS (Saguenay): ... un article ou lui envoyer une copie d'un article qui a été écrit dans le Soleil du 28 février — cela a l'air d'énerver pas mal de monde —.

UNE VOIX: Une question.

M. MALTAIS (Saguenay): Le 28 février dernier, il y avait un article de M. Léonce Jacques qui se plaint que certaines irrégularités très graves sont commises...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député d'Argenteuil.

Mises à pied à Brownsburg

M. SAINDON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. Qu'entend faire le gouvernement pour faire respecter l'article 45 du bill 49 au sujet des mises à pied massives qui ont lieu à la CIL de Brownsburg? Le 27 février, 200 personnes ont été mises à pied à seulement une semaine d'avis.

M. BELLEMARE: M. le Président, le lendemain matin, le ministère du Travail a agi.

M. LACROIX: La pilule!

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Matane.

Incident Redel

M. BIENVENUE: Ma question, M. le Président, s'adresse à l'honorable ministre de la Justice à qui je demandais, la semaine dernière, s'il pourrait nous donner des nouvelles au sujet de l'incident Redel. Cela fera l'objet de ma deuxième question d'aujourd'hui, si l'on veut, à savoir s'il est prêt à nous donner des renseignements. Mais ma première question est la suivante: Le ministre a-t-il pris connaissance de cette dépêche, émanant de la Colombie-Britannique, suivant laquelle le procureur général de cette province, M. Lesley Peterson, a annoncé que le gouvernement de sa province intenterait des poursuites contre les intéressés à la suite de l'incident malheureux en question, et cela pour les raisons qu'il énonce. Le ministre de la Justice est-il au courant de cette dépêche? A-t-il des commentaires à faire? Si oui, nous aimerions, je pense, les membres de cette Chambre, représentants de contribuables, les entendre.

M. PAUL: M. le Président, je n'ai pas reçu officiellement le texte de la déclaration du ministre de la Justice de la Colombie. Il semblerait que M. Peterson ait fait une déclaration dans le sens que vient de rapporter l'honorable député de Matane, et qu'il aurait même ajouté que les informations que je lui ai transmises par ma lettre ne lui donnaient pas satisfaction.

L'honorable député avait posé, dans le cours de la semaine dernière, une question et j'avais une réponse, toute prête avec des documents à déposer aujourd'hui. Je constate que, par suite d'une erreur clérical, on aurait oublié d'annexer un document. Alors j'ai laissé passer la période des déclarations ministérielles pour retarder jusqu'à demain cette déclaration avec dépôt de certains documents qui pourront répondre à la question posée par l'honorable député de Matane.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chambly.

Projets fédéraux-provinciaux

M. LAPORTE: M. le Président, je voudrais poser une question au ministre des Affaires municipales. A-t-il bien affirmé tout à l'heure, le ministre des Affaires municipales, alors que je pouvais pas lui poser de question, que les enseignes ou écriteaux relativement aux projets fédéraux-provinciaux, sur lesquels la participation fédérale devait être reconnue, faisaient l'objet de négociations? Il a bien affirmé ça, le ministre?

M. LUSSIER: D'accord, M. le Président, parce que les sommes d'argent sont prêtées à des organismes, soit sans but lucratif, offices municipaux ou municipalités. Ce sont ces organismes-là qui bâtissent, avec ces prêts, et il nous faut évidemment connaître l'avis de ces gens-là avant de savoir de quelle façon ça peut se concrétiser.

M. LAPORTE: M. le Président, je voudrais souligner à cette Chambre que nous sommes en train de nous faire — est-ce que le mot tromper est parlementaire, M. le Président? Le onzième jour du mois d'août 1969, sous la signature d'un témoin qui s'appelait Robert Lussier, m.d., — j'imagine que c'est le député de l'Assomption — la Société d'habitation du Québec acceptait ce qui suit: « Les parties conviennent que: 1- Toute publicité faite par la Société du Québec ou la Société (d'Ottawa) ou pour elles, y compris les enseignes sur les emplacements de projets... »

M. GOSSELIN: Les emplacements.

M. LAPORTE: « ... pour l'un quelconque des projets à être entrepris en vertu de la présente convention devra comprendre un énoncé reconnaissant la participation de chaque société au projet. »

M. le Président, si jamais la Chambre a été placée face à une telle contradiction, je voudrais bien qu'on me le dise.

M. BELLEMARE: C'est faux. M. le Président, je ne voudrais pas ici, parce que ce n'est ni l'endroit ni le temps, soulever un débat.

M. BOURASSA: Des excuses}

M. BELLEMARE: Mais je crois que l'honorable leader de l'Opposition est injuste à l'endroit du ministre...

M. LAPORTE: C'est le document... M. BELLEMARE: Un instant! M. LAPORTE: ... qui est injuste... M. BELLEMARE: Un instant!

M. LAPORTE: ... à son endroit! En voulez-vous une copie?

M. BELLEMARE: Un instant! ... injuste à l'endroit du ministre des Affaires municipales qui a dit que puisque ce sont des institutions privées qui font des travaux avec l'argent qui est prêté par la Société d'habitation...

M. LAPORTE: Est-ce qu'on va citer autre chose?

M. BELLEMARE: ... il faut qu'il y ait des consultations préalables.

M. LAPORTE: Je n'ai pas d'objection...

M. BELLEMARE: Comme je connais l'honorable leader de l'Opposition comme un homme de justice et d'à-propos, je l'invite à relire cet après-midi la déclaration qu'a faite précédemment le ministre des Affaires municipales. Je suis sûr que le leader de l'Opposition va se reprendre et qu'il n'accusera pas le ministre d'avoir tronqué la Chambre. Ce n'est pas ce qu'a dit le ministre, pas du tout.

M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement. Je n'ai pas dit « tronquer », j'ai dit « tromper ».

M. BELLEMARE: Oui, mais « tronquer et tromper », je pense que c'est malhonnête présentement quant à la déclaration qu'a faite le ministre.

M. BERTRAND: C'est parlementaire.

M. BELLEMARE: Je pense que nous nous acheminons vers un long débat. Je ne pense pas que ce soit le moment.

M. LE PRESIDENT: D'ailleurs, je me dois de constater que la période de temps allouée pour les questions est maintenant terminée.

M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque mon privilège de député. Je viens d'être accusé de malhonnêteté et j'ai le droit de rétablir les faits.

M. BELLEMARE: Je n'ai pas dit que le député était malhonnête. J'ai dit que la déclaration qu'il a faite était malhonnête à l'endroit du ministre. Ce n'est pas la même chose. Pas du tout. Que le député soit malhonnête, non, mais que la déclaration qu'il a faite soit malhonnête, oui.

M. LAPORTE: M. le Président, étant donné que je prends la paternité de la déclaration, c'est donc moi qui est « malhonnête » et je vais me défendre.

Au cours d'un débat dont vous avez eu connaissance, je crois, M. le Président, j'ai demandé aux ministres des Affaires municipales et de l'Education pour quelles raisons, sur un problème exactement identique...

M. LUSSIER: Non, il n'est pas identique.

M. LAPORTE: ... deux ministres avaient des attitudes différentes. J'ai demandé au ministre...

M. LUSSIER: Le problème n'est pas identique.

M. LAPORTE: ... des Affaires municipales: Est-ce que dans vos relations avec la Société centrale d'hypothèques et de logement, vos mandataires n'ont pas accepté de faire de la publicité, dans les communiqués, et sur les sites? Le ministre s'est levé pour dire: Non, pas sur les sites, ceci fait actuellement l'objet de négociation.

M. le Président, à ce moment-là je n'avais pas devant moi le contrat qui a été signé au mois d'août. Je viens de l'envoyer chercher à mon bureau et je constate que « toute publicité faite par la Société d'habitation du Québec, y compris les enseignes sur les emplacements de projets, pour l'un quelconque des projets à être entrepris en vertu de la présente convention, devra comprendre un énoncé reconnaissant la participation de chaque société au projet. »

Quant à l'argumentation du ministre du Travail, elle ne tient pas. Il n'a manifestement pas lu le contrat, puisque tous les prêts consentis conjointement par la Société centrale d'hypothèques et de logement et la Société d'habitation du Québec font l'objet d'une entente particulière avec chaque groupe. Chaque groupe doit respecter tout le contrat.

Je redemande au premier ministre: Dans cette nouvelle tempête dans un verre d'eau contre le gouvernement fédéral, pourquoi permet-il deux attitudes différentes; celle du ministre de l'Education qui dit non et celle du ministre des Affaires municipales qui dit oui? Pourquoi?

M. BERTRAND: M. le Président, la période des questions est terminée. Le député s'est levé pour soulever une question de privilège.

M. LAPORTE: D'accord.

M. BERTRAND: La question est déplacée.

M. LAPORTE: Mais la période des réponses n'est peut-être pas terminée, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

Affaires du jour.

M. CADIEUX: M. le Président, une question de privilège. Le ministre de l'Education, répondant à une de mes questions tantôt, a déclaré de son siège n'avoir jamais été mis au courant de la situation de la régionale d'Youville. Or, le 13 mars 1969, il m'écrivait pour me dire que la construction de cette école débuterait en juillet 1969.

M. BERTRAND: C'est faux.

M. CADIEUX: J'ai de nouveau écrit au ministre, le 9 mai 1969, le 6 août 1969...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député de Beauharnois sait sûrement que, lorsqu'une question de privilège est invoquée, elle doit l'être dès qu'elle est suscitée en Chambre.

Affaires du jour.

Débat sur le discours inaugural

Amendement de M. Bourassa

M. LE PRESIDENT: Reprise du débat sur l'amendement de M. Bourassa à la motion de M. Bertrand, proposant une adresse en réponse au discours inaugural, lequel amendement se lit comme suit: « Que la motion en discussion soit amendée en y ajoutant les mots suivants : « Nous vous soumettons respectueusement que le gouvernement aurait dû proposer dans le discours inaugural les mesures nécessaires pour assurer le développement économique du Québec et pour combattre le chômage ».

L'honorable ministre des Richesses naturelles.

M. Paul Allard

M. ALLARD: M. le Président, vous me permettrez, au début de ces remarques, de vous offrir, à l'occasion de votre élection à la présidence de la Chambre, mes meilleurs voeux, ainsi que mes félicitations. Je souhaite que votre compétence n'ait d'égal que votre patience. Etant donné l'expérience acquise durant le débat sur le bill 63 où, avec votre prédécesseur, vous avez partagé les responsabilités de la Chambre, il n'y a aucun doute que vous afficherez cette impartialité que vous connaissez et que vous remplirez votre rôle avec toute la sérénité qu'on vous connaît.

Puisque la motion exprimée par le député de Mercier nous dirige vers l'étude de l'expansion économique au Québec, il m'est agréable, d'abord, de seconder le premier ministre pour la détermination dont il fit preuve, particulièrement lors de son discours inaugural, mardi dernier, à l'ouverture de la présente session. Ce discours, d'aucuns l'ont qualifié d'électoral, d'autres l'ont estimé partisan, mais tous les Québécois l'ont applaudi au fond d'eux-mêmes, parce qu'il s'inspirait des principes de fierté qui sont à l'origine même du parti comme du gouvernement de l'Union Nationale.

M. le Président, de l'autonomie à l'autodétermination, la distance est maintenant franchie et le Québec se dirige désormais vers la phase décisive de l'égalité ou de l'indépendance. Avec mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, j'invite le chef de l'Opposition à adresser au moins un exemplaire de son discours à son chef fédéral, M. Trudeau, et à ses collègues des Communes, en particulier à M. Benson.

S'il est tellement fédéraliste, économiste en surcroît, le chef de l'Opposition, devrait s'opposer à ce qu'Ottawa s'ingère dans l'éducation, la santé, le bien-être, autant de domaines strictement provinciaux, au lieu de se préoccuper de sa véritable mission constitutionnelle, c'est-à-dire les douanes, la monnaie, les exportations, les développements portuaires, les chantiers maritimes, la marine marchande, les importations et le dumping.

C'est précisément l'immobilisme d'Ottawa dans ces domaines qui nous plonge dans l'inflation et l'austérité, Quant à nous du Québec, et plus particulièrement du ministère des Richesses naturelles, nous ne cessons de dialoguer avec les hommes d'affaires pour attirer leurs capitaux au Québec, en investissements miniers surtout.

Or, je veux immédiatement retenir certaines mesures miracles du député de Mercier touchant les politiques qu'il souhaite comme relances économiques au Québec. Le chef de l'Opposition trouvera sans doute assez bizarre qu'on ne l'ait point informé des réalisations déjà acquises et des projets en gestation, des démarrages industriels, des projections minières qui impliquent pour le Québec, dans l'immédiat, des investissements de l'ordre d'environ $800 millions dans la présente année financière. N'est-ce pas là la formule la plus pratique, au ministère

des Richesses naturelles, pour combler les voeux du chef de l'Opposition, c'est-à-dire, augmentation de la productivité, création de nouveaux produits, augmentation des exportations et création de nouveaux emplois?

Mieux que les théories, c'est l'action qui doit à ce moment compter. En effet, au Québec, nous entrons dans une ère de plein développement de ces richesses naturelles. La valeur de la production minière est passée de $2.5 millions qu'elle était en 1900 à plus de $700 millions en 1969, et a ainsi et plus précisément doublé depuis 1955.

Le Québec est l'un des plus importants producteurs au monde d'amiante, de fer, de cuivre, de zinc et d'or. Le Québec est l'unique province au Canada à produire le columbium, le titanium, la dolomite. L'industrie minière emploie directement 35,000 personnes au Québec, mais est responsable, directement ou indirectement, d'au-delà de 200,000 autres emplois, masse salariale ouvrière et production minière qui constituent un impact économique de $1,300 millions. Il faut considérer encore que les produits de l'industrie minière sont exportés hors du Canada dans une proportion de 60% et contribuent, de cette manière, à au-delà de 30% de la valeur de toutes les exportations canadiennes. Mais, il faut également se rendre à l'évidence que, dans 20 ans, une grande partie de nos gisements miniers présentement au stade de l'exploitation seront dépréciés ou disparus tout simplement.

Actuellement, à peine 20% du territoire est exploré. C'est pourquoi j'insiste, pour ma part, sans relâche sur la nécessité d'établir de nouvelles normes ou politiques relativement à l'exploration et à la recherche de nouveaux gisements. Ces politiques font présentement l'objet d'une étude spéciale au sein du cabinet. L'établissement d'une nouvelle mine dans un secteur éloigné appelle automatiquement à la tâche les cerveaux les plus ingénieux car, en plus d'entreprendre l'exploitation minière, l'industrie devra, dans plusieurs cas, construire des routes d'accès, des chemins de fer, des pouvoirs hydroélectriques, des lignes de transmission, des quais en eau profonde et même des aéroports.

L'industrie devra encore aménager de nouvelles villes pour y loger ses employés et leurs familles, et les doter des services publics usuels tels que rues, aqueducs, égouts, églises, écoles, commerces, hôpitaux, centres récréatifs, tout autant de réalisations qui, automatiquement, contribuent à l'essor économique du Québec. Plusieurs nouvelles villes ont ainsi surgi au Québec; Val d'Or, Noranda, Chibougamau, Chapais, Matagami, Sept-Iles, Schefferville, Gagnon et Murdochville. C'est vers le nord, dans le territoire immense du Nouveau-Québec, que se dessine maintenant l'avenir minier. J'en profite, encore une fois, pour lancer un appel à la jeunesse des CEGEP et des universités afin qu'elle s'intéresse à ces développements et qu'elle y participe à titre de géologue, d'ingénieur ou de technicien.

La demande est là, les compagnies peuvent embaucher nombre de techniciens et d'ingénieurs miniers chaque année.

Malheureusement, les universités ne fournissent pas en quantité suffisante les ingénieurs et les techniciens dont l'industrie a présentement besoin. Dans les projections immédiates, celles qui peuvent peut-être tranquilliser le chef de l'Opposition, qui a fait un tableau des plus sombres de la situation économique, en oubliant de demander aux sources les informations qui auraient pu lui faire savoir que des développements sont commencés, que des développements se continuent et que l'année 1970 sera très prospère en développements miniers.

J'énumère, parmi ceux-ci, tout d'abord celui de New Quebec Raglan, qui est une filiale de Falconbridge, laquelle compagnie a consacré, dans l'année 1969-70, un montant de $6 millions pour explorer un gisement de nickel d'une capacité connue de 16 millions de tonnes à environ 30 milles de Wakeham sur le détroit d'Hudson.

Ce gisement, M. le Président, est actuellement un des plus riches en teneur en Amérique du Nord, sinon dans le monde entier, parce que les expériences nous démontrent que la teneur moyenne actuelle est de plus de 3 livres-tonne, alors que les gisements exploités présentement et les mieux connus sont de 1.5 livre. Cette compagnie projette, dès 1970, la construction d'un chemin de fer, la construction d'une route en 1971, depuis le gisement jusqu'à Douglas Harbour, c'est-à-dire une trentaine de milles vers la baie d'Ungava.

Cette mine projette aussi, dans l'immédiat, la construction d'un atelier de traitement d'une capacité de 2,000 tonnes par jour. Donc, les investissements dans les années qui vont suivre, les investissements qui ont déjà commencé à être faits sont de l'ordre de $150 millions à $200 millions. Il faudra aussi construire, en plus de ce que j'ai mentionné, des quais en eau profonde et peut-être même une ville minière à Douglas Harbour.

M. le Président, si un développement de cette nature n'apporte pas, seulement pour la construction, des emplois de l'ordre de 500 au minimum, en plus d'assurer, par la suite et pour des années, des emplois stables et rému-

nérateurs à plus de 200 de nos citoyens du Québec, eh bien, M. le Président, je crois que le chef de l'Opposition devrait prendre note de ces quelques remarques, et être en Chambre pour m'écouter, de telle sorte que, lorsqu'il aura à parler d'économie, il arrêtera d'en parler comme un théoricien qui n'a jamais eu l'expérience pratique, ni de la vie ni des ministères.

M. BELLEMARE: C'est ça! Très bien!

M. ALLARD: M. le Président, un deuxième développement, et je ne parle pas de projets, je parle de réalisations qui sont actuellement en marche: A quelque 20 milles au nord de Raglan dont je viens de parler, Asbestos Hill, dont le siège social est dans la région de Thet- ford, est en train... Ah, c'est votre microphone qui vous a rappelé en Chambre! Vous devriez l'avoir plus souvent!

M. BOURASSA: Ah!

M. ALLARD: Un gisement d'amiante d'au delà...

M. BOURASSA: De la romance.

M. ALLARD: Pardon? De la romance? S'il fallait qualifier les discours du Pinocchio de la politique provinciale, ce serait ridicule à dire en Chambre, M. le Président.

M. BOURASSA: C'est vous que l'on veut.

M. ALLARD: S'il y a un homme qui démontre qu'il est enfant, c'est celui qui, malheureusement, joue le rôle de chef de l'Opposition à l'heure actuelle.

M. BOURASSA: Calmez-vous!

M. TETLEY: Où se trouve votre premier ministre à l'heure actuelle?

M. ALLARD: M. le Président, ce gisement d'amiante de 20 millions de tonnes est actuellement en plein développement, puisqu'on a investi, à ce jour, au-delà de $26 millions. Or, ce n'est que le début des investissements que nous devrons réaliser dans l'immédiat. Je puis dire au chef de l'Opposition que le gouvernement a déjà accepté d'accorder une subvention d'au-delà de $2 millions pour la construction de routes nécessaires au développement de ce gisement.

M. BOURASSA: Quel ministère?

M. ALLARD: Cela créera des emplois pour faire vivre des gens qui actuellement mettent leur espoir dans les rêves en couleur du chef de l'Opposition.

M. BOURASSA: Si le ministre veut reprendre son calme et discuter sérieusement, la subvention de $2 millions, c'est à quel titre, à quel ministère?

M. ALLARD: La subvention de $2 millions viendra du ministère des Richesses naturelles qui, si le chef de l'Opposition ne le sait pas, a comme mission, comme rôle, entre autres choses, de promouvoir le développement minier au Québec. C'est ce que nous faisons, en réparant les erreurs, les bêtises du gouvernement libéral précédent, surtout celles qui ont été faites par celui qui, à ce moment-là, dirigeait le ministère des Richesses naturelles et qui a fait plus pour nuire à l'économie du Québec...

M. BOURASSA: D'accord, d'accord.

M. ALLARD: ... que le parti pourra en faire dans les années à venir.

M. BOURASSA: Répartie sur combien d'années, la subvention?

M. ALLARD: Sur une période de trois, quatre ou cinq ans, suivant les besoins.

M. BOURASSA: Ah oui. C'est beaucoup trop clair.

M. ALLARD: Ah, vous nous avez parlé de vos politiques en couleur pour les 25 années à venir! Vous n'avez rien de concret dans vos livres pour cette année ou pour l'an prochain. Ah mon Dieu, nous vous avons écouté à la télévision. Arrêtez donc! Les enfants vous prennent pour un collégien.

M. le Président, dans ce même secteur ouest de la baie de l'Ungava, d'importants gisements de fer ont été découverts, mais n'ont pas encore été mis en exploitation faute de moyens de transport adéquats. La grande concentration s'effectue actuellement autour de Schefferville, Wabush et Labrador City. On peut estimer à quelque 15 millions de tonnes le minerai de fer acheminé par train chaque année depuis ces mines jusqu'à Sept-Iles, d'où les cargos le transportent vers les Grands Lacs, la côte est des Etats-Unis ou encore en Europe.

Comme on le sait, des cargos géants d'au-delà de 150,000 tonnes viendront très prochainement, à la suite d'aménagements actuellement

en état de réalisation, à Sept-Iles et à Port-Cartier pour transporter du minerai de fer traité vers des actéries qui en feront la production. Quebec Cartier Mining est aussi, j'imagine, M. le Président, une compagnie assez connue pour que le chef de l'Opposition puisse, de temps en temps, y faire allusion.

M. BOURASSA: Je l'ai fait.

M. ALLARD: En effet, dès le mois de novembre dernier, le président de cette compagnie, M. Paterson, annonçait un investissement de l'ordre de $200 millions pour exploiter une nouvelle mine de fer au mont Wright, à une trentaine de milles de Wabush, étant donné que les gisements du lac Jeannine, à Gagnon, s'épuisaient rapidement.

Les travaux vont démarrer dès ce printemps et la construction d'une nouvelle ville minière semble très réalisable actuellement. Un prolongement de 190 milles du chemin de fer de Port-Cartier-Gagnon jusqu'au mont Wright et, de là, i Labrador City, semble possible. On veut transporter annuellement 8.5 millions de tonnes de fer traité vers Port-Cartier dont les quais, comme on le sait ou comme on devrait le savoir, seront doublés en capacité pour l'année 1969-70.

Parmi les autres endroits, M. le Président, je mentionne Great Whale Iron Mines, situé dans le bassin de labaied'Hudson, où des découvertes importantes de fer, près de Poste-de-la-Baleine, à Fort Georges, sur la baie James, où on estime la quantité de minerai enfoui sous terre à quelque deux milliards de tonnes.

Le problème du transport, évidemment, handicape présentement cette exploitation. Il va falloir envisager la construction d'autres quais en eau profonde pour relier les mines de la baie d'Hudson et d'une voie ferrée depuis cet endroit jusqu'à Schefferville. Si, il y a quelque trente ans, nous avons réussi à développer avec les moyens financiers et techniques du temps, à développer, dis-je, une route et un chemin de fer, ce qui, selon les gens pessimistes comme le chef de l'Opposition du temps, était une folie, on peut croire qu'avec les moyens d'aujourd'hui et avec les ingénieurs qui sont en mesure de produire de tels développements, d'Ici cinq ans ces réalisations seront chose faite et procureront au Québec un débouché pour nos jeunes qui veulent se procurer du travail.

M. TETLEY: Il y en a beaucoup... M. ALLARD: Pardon?

M. TETLEY: n y en a beaucoup de jeunes qui cherchent un emploi aujourd'hui.

M. ALLARD: Malheureusement, M. le Président, dans les mines, nous serions en mesure de leur offrir du travail...

M. BERTRAND: Et même dans l'Opposition...

M. ALLARD: ... et on ne semble guère s'intéresser à ce domaine, à tel point que nous avons décidé d'organiser dès cette année, dans deux écoles, à Thetford et à Rouyn-Noranda, des spécialités pour attirer des techniciens en mines afin de les préparer pour un travail où on a besoin de cette main-d'oeuvre qu'on doit aller chercher ailleurs présentement.

M. le Président, si on parle des développements futurs, on se base sur ce qui n'a pas été fait dans le passé. Or, ce qui a été rendu possible avec les moyens du temps est certainement facilement applicable pour l'avenir. On connaît la région de Chibougamau avec les compagnies Campbell Chibougamau, Icon Sulliven, Patino Mining. C'est un district des plus rentables au chapitre de l'exploitation minière, à cause de ses riches gisements de cuivre, d'or et d'argent, et l'on vient, tout dernièrement encore, d'y découvrir des gisements d'amiante et de fer. Depuis 1950, Chibougamau, avec une population actuelle d'au-delà de 5,000 âmes, est reliée à Saint-Félicien, au Lac Saint-Jean, par une route d'accès, un chemin de fer, etc.

La ville de Chapais, à quelque 40 milles à l'ouest de Chibougamau, connaît d'importants développements. Opemiska Copper doit, dès 1970, doubler la capacité d'un atelier de transformation, et l'on bâtira dès le printemps une soixantaine de maisons familiales pour héberger la nouvelle main-d'oeuvre dont on aura besoin, créant ainsi de l'emploi à ceux qui veulent s'y intéresser.

Dans la région du lac Mistassini et du lac Albanel, au nord de Chibougamau, se trouve la compagnie Iron Syndicate qui se propose d'y exploiter des gisements de cuivre et de plomb, tandis que Soquem, avec d'autres entreprises privées, poursuit des recherches sur des dépôts d'uranium.

Que dire de Quebec Iron Ore? C'est une des entreprises minières les plus importantes dans le Québec pour l'exploitation de gisements de fer. Elle se propose de faire des investissements de plusieurs centaines de millions dans de nouveaux procédés techniques pour utiliser le minerai de faible teneur, ce qui aura pour effet, évidemment, de prolonger la durée de l'exploitation minière dans toute la région de Schefferville.

Dans le district de Matagami-Joutel, les com-

pagnies Matagami, Lake Orchan, New-Hosco, Joutel Copper Mines et les Mines Poirier extraient déjà du zinc, du cuivre, de l'or et de l'argent. A l'est de Matagami, de nouveaux dépôts de fer d'une grande capacité viennent d'être découverts. H s'agit de futurs développements miniers importants, surtout si le projet de construire une route vers la baie James depuis cette région se réalise, projet sur lequel nous sommes actuellement en train de faire des études afin de trouver l'endroit qui conviendrait le mieux au développement minier, forestier, hydro-électrique, de telle sorte que toute cette région puisse servir au développement économique dont nous avons tellement besoin.

M. le Président, en Gaspésie, avec des investissements d'un montant de $12 millions, les mines Madeleine sont entrées en production l'automne dernier, soit plus précisément le 12 septembre 1969, et je ne cache pas que ce travail soit dû au chef de l'Opposition, mais bien à l'encouragement apporté depuis 1966 par le présent gouvernement à la construction d'une route de contour de 55 milles, autour du mont McGerrigle, qui a permis de faire cette découverte, et d'en avoir une deuxième à côté, Terra Nova, où, durant la construction des mines Madeleine, nous avons employé pour la période de la construction 500 Gaspésiens qui étaient en chômage, et nous avons assuré, pour au moins 25 ans à venir, de l'emploi à 140 personnes de la Gaspésie qui étaient en chômage.

Comme on le sait, pour chaque personne qui travaille dans les mines, nous procurons du travail à six personnes à côté. C'est ça l'impact pour la Gaspésie, dans ce seul cas. Gaspé Copper Mines, à Murdochville, est en train d'étudier un projet très sérieux qui peut amener, pour la région directe, immédiate de la Gaspésie, un impact économique extrêmement important. On sait que cette compagnie a les moyens de poursuivre les études qu'elle fait actuellement, et nous sommes convaincus d'avance qu'elle apportera des résultats. L'appui que le gouvernement pourra lui donner lui est assuré d'avance. C'est ce qui les encourage à continuer les études pour réaliser ce travail important qui bénéficiera à cette partie de la province qui en a peut-être plus besoin qu'ailleurs.

Le ministère des Richesses naturelles consacrera cette année un montant de près de $7 millions à la construction déjà commencée, comme je le disais tout à l'heure, d'une route d'accès de 56 milles autour du mont McGerrigle, dans ce parc de la Gaspésie, afin de susciter la recherche à la prospection et d'ouvrir de nouveaux territoires qui combattront efficacement le chômage.

On sait par expérience que lorsque l'on fait des routes d'accès aux mines, on intéresse les prospecteurs à s'y rendre, à faire des découvertes qui, par la suite, sont mises en opération et automatiquement produisent des emplois qui aident nos gens qui en ont besoin.

Dans le bout de l'Abitibi, au mois de novembre, nous avons inauguré une mine du nom de Delbridge, filiale de Falconbridge, une mine de cuivre à Noranda avec des investissements de l'ordre de $640,000; valeur du gisement estimée à un montant de$6 millions, nombre d'employés, une cinquantaine de personnes à l'année pour des années à venir.

Parmi d'autres projets, je peux vous en nommer dans le bout de Vimy Ridge, dans la région de Thetford, où des travaux de forage sont entrepris par Asbestos Corporation au coût de $2,500,000. Nous allons, avec ces millions, faire travailler des gens, et faire progresser un développement qui va orienter à nouveau l'industrie minière du secteur.

Des investissements anticipés au montant de $5 millions dans ce même secteur pour la production de la mine, une fois les travaux préliminaires terminés.

Autour de Mont-Laurier, on connaît le développement qui se fait à la suite de recherches d'uranium. On sait que plusieurs compagnies y sont intéressées, que des travaux sérieux s'y développent, on sait qu'il y existe des possibilités, on sait surtout que le jour où on mettra ces mines en opération — non pas lorsque le chef de l'Opposition aura pris le pouvoir, c'est trop lointain — mais dans les années à venir, en commençant par l'année 1970.

M. le Président, comme on le sait, nous avons pris en main une société du nom de Soquem, créée avant notre arrivée au pouvoir. Nous avons essayé de lui apporter toute l'aide dont elle avait besoin pour continuer à se développer. Cette année, à cause des nombreuses opérations qu'elle peut faire, mais étant donné les limites de son capital, il a fallu réduire le nombre de ses activités. Le gouvernement a toutefois décidé, dans le budget du mois d'avril, de lui accorder une augmentation d'au-delà de la moitié de ce qu'elle retire actuellement pour lui permettre de faire de nouveaux développements et de nouvelles recherches qui vont créer de l'emploi pour des centaines et des centaines de gens qui veulent y participer.

M. LE PRESIDENT (M. Théorêt): A l'ordre! Je dois informer l'honorable ministre des Richesses naturelles que son temps sera écoulé dans une minute, à moins d'obtenir le consentement unanime de la Chambre.

M. ALLARD: Je termine en disant que le gouvernement actuel a su, en moins de quatre ans, redonner pleine et entière confiance au monde financier canadien et américain en lui assurant des possibilités d'investissement au Québec. Il a fallu rebâtir un climat complètement détérioré par l'ancien gouvernement, par l'entremise de l'ancien ministre des Richesses naturelles, qui poussait les financiers à aller investir en dehors de la province de Québec. Nous les avons ramenés.

Dernièrement, le vice-président de Falconbridge déclarait publiquement ici, à Québec, que l'endroit le meilleur pour faire des investissements miniers était la province de Québec. C'est le travail de l'Union Nationale, et c'est pourquoi nous allons continuer à agir de cette manière.

M. LE PRESIDENT (M. Théorêt): L'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. William Tetley

M. TETLEY: M. le Vice-président, je voudrais tout d'abord vous féliciter de votre nomination, ainsi que le président lui-même. Vous l'avez très bien mérité. Je vous souhaite tout le jugement de Salomon pendant une période d'élection qui sera probablement très difficile.

Je voudrais aussi souligner avec plaisir l'élection de l'honorable député de Mercier au poste de chef du Parti libéral du Québec. Ce choix s'avère le commencement d'une ère nouvelle si nécessaire au Québec depuis longtemps. Ce sera une époque où le rôle du gouvernement sera celui d'un administrateur scientifique et moderne, d'un comptable qui sait compter, de parlementaires qui connaissent les chiffres et qui sont prêts à s'occuper efficacement de l'argent.

Je voudrais également attirer votre attention sur la manière dont l'honorable député de Louis-Hébert a occupé jusqu'au bout son poste de chef de l'Opposition. Il fut toujours présent en Chambre, toujours au courant de ce qui se passait et toujours fidèle à son devoir, à son parti et à sa province. Finalement, qu'il me soit permis de louer le dévouement du leader parlementaire, l'honorable député de Chambly, qui a accepté, avec dignité et courage, le résultat de la course à la chefferie et qui s'est rallié au nouveau chef et au parti avec une grandeur que chacun admire; sa province a besoin de ses services.

M. le Président, j'appuie fortement la motion de blâme du chef de l'Opposition, appuyée par le leader parlementaire de l'Opposition.

Cette motion se lit comme suit: «Que le gouvernement aurait dû proposer dans le discours inaugural les mesures nécessaires pour assurer le développement économique du Québec et pour combattre le chômage. » Un chômage dont le ministre des Richesses naturelles vient de parler pendant presque en tout son discours de trente minutes.

Il y en a du chômage. Malgré le chômage et l'état de l'économie, le discours inaugural du premier ministre et les récentes déclarations publiques du ministre des Finances et du ministre de l'Industrie et du Commerce nous montrent le manque de cohésion du gouvernement actuel. Au lieu de faire face aux véritables problèmes, celui-ci s'occupe de la constitution et d'une lutte stérile avec Ottawa.

Les problèmes du Québec sont tout d'abord d'ordre économique, surtout le chômage qui, à l'heure actuelle, est au niveau de 8%. Les chômeurs ne s'intéressent, ni a la constitution, ni aux nuances des droits, ni aux articles de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Hier, je suis allé dans trois comtés, Saint-Maurice, Maskinongé et Laviolette. Les gens parlaient tout simplement d'économie, pas de la constitution. Même le fils de l'honorable ministre de la Justice a parlé de l'économie, a posé une question au chef de l'Opposition qui a très bien répondu.

M. le Président, la semaine dernière j'ai envoyé 24,000 questionnaires à chaque famille de mon comté, dans lequel questionnaire je demandais quel était le problème numéro 1 au Québec, à l'heure actuelle. J'ai un exemplaire, ici, de la lettre et du questionnaire. J'avais donné neuf choix: éducation, chômage, langue, économie, pollution, coût de la vie, séparatisme, constitution, crime, autres. Je fus inondé de réponses, malgré la grève des postes à Montréal, soit par écrit, soit par téléphone.

A remarquer que 85% des réponses étaient signées. Quatre-vingts pour cent de gens ont placé, en premier lieu, pas la constitution, mais l'économie, le côut de la vie et le chômage. Ensuite, venaient l'éducation et la pollution.Les autres articles étaient loin en arrière. Je n'ai pas encore fait l'addition finale des réponses, mais moins de 2% des électeurs ont trouvé que la constitution était le problème no 1, moins de 2%. Si le premier ministre et le gouvernement actuel s'occupent uniquement de la constitution aux prochaines élections, le gouvernement n'aura, selon mon sondage, que le vote de ces 2%.

Le peuple est beaucoup plus préoccupé par le coût de la vie et le chômage. C'est pourquoi, face au discours inaugural et à la politique du gouvernement actuel, qui sont loin de la réalité, la motion de blâme de l'honorable chef de

l'Opposition doit être appuyée ici en Chambre.

Je voudrais faire remarquer en passant, pour le bénéfice du député de Laurier, que, sur les 150 réponses que j'ai additionnées jusqu'ici, personne n'a trouvé que le séparatisme était le problème no 1. La population ne s'occupe pas de ce problème constitutionnel. L'économie est à l'ordre du jour, et je donne avis au député de Laurier que lui aussi perdra ses élections, puisque son option n'est pas la question primordiale.

Ce n'est pas un grand souci à l'heure actuelle, apparemment, pour les anglophones; ce n'est pas non plus d'un grand intérêt pour les francophones. N'oubliez pas que, dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce, 25% des électeurs sont de langue française et 75% de langue anglaise.

Le ministre de l'Industrie et du Commerce a parlé vendredi des $200 millions, sans doute parce que son gouvernement a l'intention d'imposer de nouvelles taxes. Le ministre de l'Industrie et du Commerce voudrait nous convaincre que le gouvernement est incapable de s'occuper du peuple sans recevoir d'autres revenus; mais je crois que le problème n'est ni le manque de revenus, ni le manque de taxes, qui sont les plus élevées de toute l'histoire du Québec, mais bien les dépenses exorbitantes et le manque de planification dont fait preuve le gouvernement de l'Union Nationale.

Le budget de l'année dernière fut un budget record, suivi de quatre autres budgets supplémentaires, et on s'attend à un cinquième avant le 31 mars. Je crois en effet que le ministre des Finances a annoncé aujourd'hui ce cinquième budget supplémentaire. Pour faire face à ces dépenses élevées, il faut augmenter les revenus, mais, cette année étant une année électorale, le ministre des Finances est, de toute évidence, soumis à la contrainte et ne peut pas augmenter les impôts. Le gouvernement a-t-il choisi comme solution de couper les dépenses? Pas du tout. Le gouvernement a décidé d'attaquer le fédéral de la manière désuète employée par Duplessis et Mackenzie King, qui ont lutté l'un contre l'autre, Duplessis pour le Québec et Mackenzie King pour Ottawa. Taschereau, lorsqu'il était premier ministre du Québec a aussi fait le même jeu avec Mackenzie King. Mais, aujourd'hui, le peuple du Québec n'est pas prêt à accepter des luttes intestines, des luttes constitutionnelles. Je l'ai vu hier dans les trois comtés que je viens de mentionner.

Au lieu de parler de la constitution et des sommes que doit le fédéral, il existe pour le gouvernement un moyen légitime et depuis longtemps souhaitable: celui de réduire les dépenses. Bien que l'année 1969 ait été présentée comme une année d'austérité, le budget a accusé une augmentation de 12% sur celui de 1968, auquel il faut ajouter les quatre budgets supplémentaires, soit $140 millions ou 4.5% de plus. Pendant ce temps, le gouvernement de l'Ontario et le gouvernement fédéral ont su obtenir des résultats plus satisfaisants, grâce à une planification adéquate et à l'établissement de priorités. Il en résulte, pour l'Ontario, une augmentation de son budget de seulement 7.5%, et, pour le gouvernement fédéral, de 9.5%. A la lumière de ce qui précède, il apparaît que le gouvernement provincial doit ajourner quelques projets, en rogner d'autres et planifier intelligemment. Le gouvernement ontarien y a réussi, parce que son trésorier a insisté l'année dernière pour que chaque ministère établisse une planification financière quinquennale. Des priorités ont pu ainsi être établies, entraînant des réductions de dépenses dans certains ministères et des augmentations dans d'autres.

Québec doit faire la même chose, and Iwould like to say this in English: Quebec must start planning now.

Perhaps it is too late. It is ridiculous to think that the Education Department in Quebec has a budget of a billion dollars, $1,000,000,000, and it has no five year financial plan, this according to the admission of the Minister of Education.

What business...

M. BELLEMARE: Je voudrais simplement, M. le Président, si l'honorable député me le permet, faire remarquer que l'honorable député sort considérablement de l'article 276, deuxièmement. Mais je n'ai pas d'objection, M. le Président; qu'il continue. Lorsque j'interviendrai, je voudrais bien que la même justice distributive s'applique aux deux côtés de la Chambre. Je vous fais remarquer, M. le Président, qu'il est dit à l'article 276: « Quand l'amendement en discussion n'aurait pas pour effet, s'il a été adopté, d'écarter la question principale sur laquelle il est proposé, la discussion doit être restreinte cependant à cet amendement. »

Je pense, M. le Président, que l'on s'éloigne énormément, en ce moment, de la discussion, mais j'en prends note. C'est pour signaler à la Chambre et au Président, lorsque nous ferons une intervention, qu'à ce moment-là, nous ne soyons pas dérangés par ceux qui viendront nous dire que nous sortons de la motion.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais répondre à l'honorable ministre du Travail exactement par ce que le ministre de l'Industrie et Commerce a dit; « Nous avons besoin de nos $200 millions. »

M. BELLEMARE: Nous n'avons pas d'objection que vous répondiez, mais sur le discours inaugural et non pas sur l'amendement. L'amendement est bien spécifique, M. le Président, il dit en toute lettre: « ... pour assurer le développement économique du Québec et pour combattre le chômage. » En ce moment le député fait justement un discours sur le discours inaugural, et nous n'y avons pas d'objection. Le ministre de l'Industrie et du Commerce, lui, avait droit de parler sur l'économie et c'est ce qu'il a fait.

M. TETLEY: L'honorable ministre de l'Industrie...

M. LE PRESIDENT (M. Théorêt): Al'ordrel Je ferai remarquer aux honorables députés que le point d'ordre de l'honorable ministre du Travail a déjà été soulevé au cours de ce débat. Le président lui-même a accordé beaucoup de latitude aux opinants. Je crois que nous allons laisser continuer le député de Notre-Dame-de-Grâce dans la même veine que les autres opinants jusqu'à présent.

M. TETLEY: Je vous remercie, M. le Président.

M. BELLEMARE: Je prends bonne note, M. le Président, de cette nouvelle intervention.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais citer le ministre de l'Industrie et du Commerce qui parlait à la suite et au sujet de l'amendement du chef de l'Opposition. Je me reporte à la page 60 du journal des Débats, du vendredi 27 février, quatrième paragraphe: il a parlé des $200 millions durant le débat de la motion de blâme et je voudrais expliquer où trouver ces $200 millions et beaucoup plus: c'est dans la planification au Québec.

Je regrette que le ministre du Travail n'aime pas cette critique, cette observation et cette suggestion, mais je soumets respectueusement, M. le Président, que le gouvernement doit chercher, pas ailleurs, pas à Ottawa, pas par des boucs émissaires, mais chez lui, ces $200 millions ou $400 millions.

Mr. President, I find this lack of planning in my brief experience in this House, to be one of the most important problem facing Quebec today. Je cite encore la page 60, c'est que le gouvernement cherche à Ottawa et y cherche des excuses.

It is important that the Government start planning and planning now, like every other ordinary business. It is impossible to believe — and I repeat — that the Ministry of Education does not have a five year plan, a one year plan or a two year plan.

M. le Président, je reviens au discours du ministre de l'Industrie et du Commerce, à la page 60, sixième paragraphe. Il y dit que c'est le fédéral qui a presque tous les pouvoirs pour combattre l'inflation.

Mais voici ce que l'Ontario a fait, M. le Président, et je cite l'honorable Charles MacNaughton dans les Débats de la Législature d'Ontario — j'ai une copie ici — le 4 mars 1969, à la page 1805, lorsqu'il parlait de planification pour couper les dépenses du gouvernement. Je traduis, mais vous pouvez le trouver en anglais. « Cela représente une contribution positive par laquelle l'Ontario lutte contre la poussée inflationniste actuelle et soulage la pression sur le marché des capitaux. » Nous savons tous que l'Ontario se plaint d'Ottawa, mais nous savons tous que l'Ontario prend ses propres responsabilités.

M. le Président, les dépenses augmentent au Québec. Le budget augmente. Et les $200 millions, on peut les trouver ici. N'oubliezpas, il y a une autre réponse au ministre du Travail. Ces $200 millions sont l'argent du peuple. Cette année qui se termine le 31 mars 1970, le budget total, y compris les dépenses courantes, les dépenses en capital et le service de la dette, au Québec, sera à peu près $3,315,000,000. Une somme élevée, énorme. N'oubliez pas que le budget de l'an dernier était de$2,769,000,000. A la fin des années 1960-1966, la fin du gouvernement Lesage, le budget n'était que de $1,860,000,000.

Le ministre de l'Industrie et du Commerce et le ministre des Richesses naturelles ont parlé surtout des industries qu'on veut avoir au Québec. Ils ont parlé d'investissements au Québec. Je cite encore le ministre de l'Industrie et du Commerce, à la page 60 du journal des Débats du vendredi 27 février: « Le Québec n'a pas en main tous les éléments nécessaires à l'élaboration d'une politique économique.» Mais, si le Québec était séparé, les Etats-Unis et les autres provinces auraient une influence économique énorme. Nous n'aurions jamais la maîtrise de nous-mêmes.

Au moins, le ministre des Affaires culturelles, récemment, a admis — et je dois l'admirer — que la langue — que le Québec soit séparé ou non — se trouvera dans la même position. Et je crois que, si le Québec était séparé, on se trouverait dans une position bien pire qu'aujourd'hui.

M. le Président, j'ai deux articles de journaux, ici, très intéressants: Un se rapportant

à la fameuse déclaration de l'honorable ministre des Finances, première page de l'Action, Québec, le jeudi 26 février 1970, intitulé, en lettres majuscules: « L'UN fera l'indépendance du Québec en 1974 CBeaulieu) ». C'était une déclaration faite au moment de l'ouverture de notre Assemblée nationale. Voici un autre article, dans le Soleil, 25 février, au moment de l'ouverture de l'Assemblée législative d'Ontario. Voici la différence. On parle de l'indépendance et les autres veulent des investissements. Qu'est-ce qu'on dit? L'objectif en Ontario — c'est le titre — « Objectif en Ontario ». Quel est l'objectif, en Ontario? Voici: « Un climat aussi honnête que profitable pour le monde industriel et commercial. » Comment le ministre des Richesses naturelles espère-t-il trouver des investissements américains, d'Europe ou des autres provinces après les déclarations du ministre des Finances? Which « manchette » is going to help investment? We have been told investment must be doubled from $3.5 billions to $7 billions in the next five years.

J'aimerais que le ministre du Travail, le ministre des Richesses naturelles ou le ministre de l'Industrie et du Commerce réponde à cette question. Le ministre de l'Industrie et du Commerce a parlé d'investissements, de tout ce qu'ont fait le bill 23 et le bill 24 et de tout ce qu'on va faire. En quoi en première page de l'Action du 26 février 1970 la déclaration de M. Beaulieu aide-t-elle l'investissement au Québec? Je termine par deux...

Ah, le ministre des Affaires culturelles, au moins, m'a applaudi. Je le remercie. Je lui ai fait un compliment tantôt.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est parce que personne ne vous applaudit de l'autre côté. Comme ancien confrère, je vous applaudis.

M. TETLEY: Ils ont tous lu mon discours d'avance.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas un discours; ce sont des bouts de journaux.

M. TETLEY: Ah oui, mais vous n'aimez pas cela. Je viens de vous faire un compliment. Vous étiez absent, c'est dommage. Mais vous pourrez le lire, pas dans les journaux, parce que...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): De toute façon, je sais que vous m'approuvez à l'avance.

M. TETLEY: Très bien. Mais je termine avec deux remarques et trois questions. Le gouvernement blâme le fédéral et, par ce moyen, se trou- ve un bouc émissaire. C'est, à mon avis, une grande erreur. Deuxièmement, le gouvernement s'occupe de la constitution au lieu de l'économie. Comme on dit en anglais: « It is a red herring to draw across the path of the oncoming dogs which are chasing the fox. » Un vieux poisson qui sent mauvais. C'est ça, votre politique constitutionnelle. Tout ça pour forcer l'électorat à perdre la piste et à négliger le véritable état des choses.

J'ai trois questions à poser à qui que ce soit du gouvernement. Première question: Croyez-vous que la déclaration récente du ministre des Finances au sujet d'une séparation éventuelle du Québec en 1974 puisse aider les investissements au Québec de capitaux des autres provinces et de l'étranger? Croyez-vous que cela puisse doubler l'investissement dans cinq ans, afin d'éviter encore du chômage?

Deuxième question: Comment les investisseurs étrangers peuvent-ils être certains de leurs investissements au Québec, si le ministre des Finances est lui-même incertain au sujet du sort de la province?

Troisième question: Le ministre de l'Industrie et du Commerce est-il prêt à dénoncer ouvertement la déclaration du ministre des Finances au sujet de la séparation?

M. le Président, j'appuie la motion de blâme. Il faut s'occuper dès aujourd'hui de notre province et de son économie.

M. LE PRESIDENT (M. Théorét): L'honorable député de Maisonneuve.

M. André Léveillé

M. LEVEILLE: Permettez-moi, M. le Président, de vous féliciter d'avoir été choisi pour jouer le rôle de président de cette Assemblée. Je tiens à vous offrir mes meilleurs voeux au début de cette session et à vous féliciter des belles qualités de coeur et d'esprit dont vous avez fait preuve durant vos présences à ce poste, au cours de la dernière session. Tous ont été à même d'apprécier votre impartialité et votre compétence dans le domaine des règlements de l'Assemblée nationale. Vous me permettrez, M. le Président, de féliciter le nouveau chef de l'Opposition qui a accepté la lourde responsabilité d'être le chef d'un parti.

Sans aucun doute, un très long apprentissage comme chef de l'Opposition lui sera bénéfique.

Motion de blâme! Pourquoi? Pour qui? En vérité, je me pose moi-même la question. Motion de blâme alors même que le gouvernement de l'Union Nationale, le gouvernement

du peuple, peut non seulement affirmer, mais encore démontrer, prouver, étaler avec légitime fierté le fait qu'il a tenu ses promesses de 1966 et que, preuves concrètes en main, le gouvernement de l'Union Nationale a rempli, dans le seul domaine économique comme dans les autres domaines, la très grande majorité de ce même programme de 1966.

De 1966 jusqu'à aujourd'hui, l'Union Nationale a été le moteur, l'instigateur, le créateur de dizaines de programmes et de mesures destinés à extirper de la torpeur, où l'avaient conduite les libéraux, l'économie du Québec.

Non satisfait de ce sauvetage, le gouvernement de l'Union Nationale a doté le Québec de plusieurs organismes essentiels aux investissements nouveaux, comme l'Office du crédit industriel, le ministère des Institutions financières, compagnies et coopératives, laSociété d'habitation du Québec, la Société québécoise d'initiatives pétrolières, le Centre de recherches industrielles, l'Institut national de recherches et l'Office de planification et de développement de l'Est du Québec, sans omettre le Conseil général de l'industrie; bref, de quoi faire rougir de honte le plus carmin des libéraux.

Motion de blâme! Il est vrai que nous devrions être accoutumés à la quasi rituelle motion de blâme déposée par l'Opposition libérale. Il est également possible que là où nous manquons encore de pratique, c'est devant une motion aussi dénuée de fondement et de valeur que celle-ci.

En fait, je ne peux cacher plus longtemps mon étonnement devant la nature de cette motion d'amendement et surtout devant le choix du sujet sur lequel s'est fixé le nouveau chef de l'Opposition pour marquer, en Chambre, son accession à la direction du parti libéral du Québec.

Pourtant, nous connaissons le chef de l'Opposition comme étant un homme généralement de bon sens et au talent indiscutable. Il ne me reste plus qu'à supposer que les nouvelles responsabilités qui incombent au nouveau chef de l'Opposition sont bien lourdes ou que son équipe de conseillers est bien inexpérimentée pour qu'il n'ait pas su voir que l'exercice de style auquel il allait se livrer et qui lui est pourtant familier était non seulement une erreur, mais allait tourner au désavantage de son propre parti. Car ce qu'il y a d'invraisemblable et même d'Incongru, c'est que l'Opposition libérale propose une motion de blâma précisément dans le domaine où elle doit battre sa coulpe.

En effet, c'est une chose assurée que le Parti libéral du Québec, lorsqu'il était au pouvoir de 1960 à 1966, n'a certainement pas accompli de miracles en matière d'économie.

Sinon, pourquoi l'Union Nationale, en 1966, aurait-elle fait de la mise sur pied d'une véritable politique économique au Québec l'une de ses plus grandes priorités? On le sait, la vieille garde, les responsables de la faillite libérale de 1966 clament bien haut qu'ils ont été pillés, que ce sont eux qui ont conçu Sidbec, la Société générale de financement, leurs plus grands titres de gloire, s'il en est, en quatre ans.

Mais, grands dieux, que l'accouchement fut difficile! Que de cris, de remue-ménage, d'épuisements cérébraux! Tenez, on en parle encore. En réalité, quelle distance, quelle démesure entre la sidérurgie de papier de nos floconneux prédécesseurs et la vigoureuse Sidbec actuelle! Quelle différence entre les 5 petits millions investis péniblement dans la Société générale de financement par l'ancien gouvernement, lequel disposait alors d'un budget de $2 milliards, et les $50 millions dont l'entreprise dispose présentement! Grâce à qui? Grâce à l'Union Nationale, qui y a fait une mise triplée au départ.

Non, dans ce domaine majeur qu'est l'économie, comme dans d'autres domaines, tout aussi importants, le défunt gouvernement libéral s'est contenté de projeter, d'imaginer, de penser économie. Certainement. Economie d'action? Jamais. De fait, les rares embryons de projets que le gouvernement libéral de 1960 à 1966 s'est contenté de rêver dans le domaine économique, l'Union Nationale les a totalement remodelés, enrichis, programmés graduellement et réalisés.

J'admets que, comparées aux théories mirobolantes de l'Opposition, ces réalisations peuvent faire piètre figure. Elles ont cependant une vertu: celle d'exister, et surtout de ne pas pécher par excès de perfectionnisme. Une motion de blâme? Alors que le gouvernement de l'Union Nationale, non satisfait de mettre sur pied une politique économique tangible au Québec, non satisfait de combler le vide de six années d'incurie laissé dans ce domaine par des chasseurs de chimères, non satisfait d'augmenter de façon très substantielle les budgets des divers ministères à vocation économique, a ouvert des bureaux à New York, à Boston, à Chicago, à Los Angeles, à Düsseldorf, en Allemagne de l'ouest, sans oublier ceux de Paris et de Londres!

Et l'on vient nous parler d'incompétence administrative! Là encore, il s'agit d'un non-sens; bien plus, lorsqu'on ne veut pas entendre parler de démagogie ou lorsqu'on déclare y être indifférent, on n'en fait pas soi-même. On n'essaie pas, en matière d'économie, de don-

ner des leçons de fermeté, de responsabilité, de compétence à un gouvernement qui a fait ses preuves, lui, lorsque le parti que l'on dirige soi-même possède un si lourd passé de rêveries dangereuses et d'industries sur papier. Cette rage d'économie serait-elle le signe d'un repentir tardif, mais sincère? Qu'à cela ne tienne.

Je suis prêt à me ranger au côté du premier ministre et à chanter moi aussi les louanges de ceux de l'Opposition qui contribueraient de manière positive à une économie sans cesse florissante. Enfin, lorsqu'on se targue d'être un spécialiste en la matière, on n'escamote pas certaines données majeures du problème. Ainsi, il ne faut pas oublier de mentionner toutes les entraves que doit subir le gouvernement du Québec dans l'accomplissement de son action économique. On n'oublie pas de faire état des difficultés que rencontre le gouvernement d'une province dont l'économie dépend en grande partie d'Ottawa, lequel fournit le cadre général dans lequel se déroule l'activité économique. On n'omet pas de souligner que le Québec doit se plier à une politique monétaire qui relève entièrement d'Ottawa. On n'escamote pas le fait que le Québec s'est vu dernièrement spolier d'une somme de $200 millions.

Oh, ne croyez surtout pas, M. le Président, qu'il s'agisse là de mobile électorale. Non, le gouvernement de l'Union Nationale a mieux à faire que de bâtir sa campagne sur ce litige, comme se sont empressés d'affirmer certains esprits partiaux.

Mais il reste que le gouvernement du peuple, le gouvernement de l'Union Nationale, fera tout son possible pour récupérer cette somme, pour la simple raison qu'il estime que ce montant d'argent appartient aux Québécois...

M. BLANK: Oui, mais pas au gouvernement.

M. LEVEILLE: ... et que ces derniers ne doivent pas perdre leur chemise, après s'être fait enlever leur manteau et leurs chaussures par un gouvernement central uniquement soucieux d'augmenter ses surplus budgétaires.

M. LAPORTE: Pas des culottes.

M. LEVEILLE: Il ne faut pas oublier de mentionner, lorsqu'on est impartial, les dernières trouvailles d'Ottawa pour juguler l'inflation sur le dos des provinces présumées riches; augmentation des taux d'intérêt, restrictions monétaires, augmentation de l'impôt fédéral sur le revenu des particuliers, restrictions des investissements fédéraux, mise à pied d'employés du gouvernement fédéral. Quant à moi, M. le Président, j'estime qu'il faut avoir une politique économique puissamment étayée pour résister à un tel coup de boutoir. Et l'on dépose une motion de blâme à l'intention du gouvernement du Québec! Décidément, le non-sens règne en maître, car il reste encore le chômage. Motion de blâme, M. le Président, à l'Union Nationale, qui parvient à créer, en dépit du contexte actuel, 50,000 emplois par an au Québec! Motion de blâme pour le gouvernement de l'Union Nationale, qui a eu l'idée d'approuver 134 projets d'investissement de l'ordre de $136 millions, qui contribueront à créer, au grand courroux des libéraux, 4,000 nouveaux emplois directs! Motion de blâme, M. le Président, pour avoir agi en sorte que le Québec connaisse, au mois de janvier 1970, une diminution de 9,000 chômeurs par rapport à janvier 1969, soit une diminution de .4%, tandis que l'Ontario et le Canada connaissent des hausses respectives de chômage de .4% et .2%!

UNE VOIX: Peut-être!

M. LEVEILLE: Pour l'économie au Québec, diverses mesures ont été prises par le gouvernement du peuple, le gouvernement de l'Union Nationale, pour stimuler les investissements, faciliter l'intégration de nos jeunes diplômés au marché du travail et tonifier l'économie des régions les moins favorisées.

Mais, si nous renversions la question et si nous examinions d'un oeil critique les espérances que nous pouvons raisonnablement nourrir sur une action positive de l'Opposition, car si l'Opposition ne remplit pas le rôle positif que notre système parlementaire non seulement lui confère mais encore lui commande de tenir, il sera toujours difficile pour le gouvernement de compter sur l'Opposition pour le stimuler. L'Union Nationale travaille à l'édification d'un Québec fort et dynamique, d'un Québec dans l'avenir duquel chaque citoyen puisse garder une foi inaltérable. Hélas! malgré les souhaits exprimés par l'honorable premier ministre, je crains bien que, sous la houlette de son nouveau chef, l'Opposition ne soit déterminée à jouer le rôle de frein et non celui d'aiguillon.

Bien plus, tout rénové qu'il soit, il semble que le Parti libéral continuera de se laisser traîner comme un poids mort. Dans le cas présent, je me garderai de penser que le spectre d'une prochaine confrontation électorale pousse l'Opposition à confondre délibérément, c'est-

à-dire selon une tactique désuète, la contestation par des motions de blâme ou autres procédures parlementaires. Cependant, si tel était le cas, à quoi servirait-il de débarrasser le Parlement de ces nids à poussière et de son rituel anachronique si certains groupes politiques qui le composent ne se séparent pas, au prix d'un certain courage, des vieilles tactiques parlementaires aussi dépassées et aussi négatives que le rituel auquel je viens de faire allusion?

En terminant, pour le bien de tous les Québécois, incluant ceux qui siègent à votre gauche, je souhaite que le chef de l'Opposition retire sa motion de blâme, sinon il faut voter contre cette motion.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rimouski.

M. Maurice Tessier

M. TESSIER: Je désire appuyer la motion de blâme envers le gouvernement, proposée par le chef de l'Opposition. Mais avant de donner mes raisons à l'appui de cette motion, permettez-moi de vous offrir mes sincères félicitations à l'occasion de votre élection unanime à la présidence de cette assemblée, et vous souhaiter tout le succès possible dans vos nouvelles et délicates fonctions. Mes collègues de ce côté de cette Chambre qui m'ont précédé ont fait ressortir plusieurs points qui démontrent l'incompétence et l'inaptitude du gouvernement actuel à administrer la province, à ramener la prospérité dont le peuple du Québec jouissait de 1960 à 1966, et à relancer l'économie qui s'effondre de mois en mois depuis près de quatre ans.

Pour ma part, je voudrais tout particulièrement traiter de l'aspect municipal de la question. Les conseils municipaux, plus que tout autre gouvernement, ont des problèmes financiers sérieux que tout le monde connaît et admet; mais le gouvernement actuel ne fait rien pour les résoudre si ce n'est des déclarations de principes, des présumées études qui s'éternisent et, bien entendu, beaucoup de promesses, de temps à autre. On sait que le pouvoir de taxation des municipalités étant limité, le champ de l'impôt foncier saturé à cause de la taxe scolaire qui augmente à un rythme désordonné, les municipalités ont donc demandé au gouvernement, depuis l'automne 1966, de mettre en vigueur certaines recommandations du rapport Bélanger et ont en outre, suggéré plusieurs solutions qui ont fait l'objet d'études approfondies qui étaient contenues dans de nombreux mémoires soumis régulièrement au gouvernement.

La principale solution proposée au gouvernement, tant par l'Union des municipalités du Québec que par l'Union des conseils de comtés, est l'exclusion graduelle, du champ de l'impôt foncier, des commissions scolaires, sauf peut-être, quant à moi, pour les industries et les entreprises commerciales.

A l'occasion de l'étude du bill de la ville de Québec, le 9 mars 1967, une première promesse était faite par le chef d'alors de l'Union Nationale. Je me réfère au Soleil du 10 mars 1967: « Les commissions scolaires du Québec seront invitées, dans un proche avenir, à laisser complètement le champ de la taxe foncière aux municipalités. C'est du moins ce qu'a déclaré, hier, le premier ministre Daniel Johnson, au sortir de la réunion du comité des bills privés qui terminait l'étude des demandes de la ville de Québec. »

Moins d'un mois plus tard, le premier ministre répétait la même promesse à l'occasion de l'étude du bill de Montréal, et je me reporte à l'édition du Soleil du 7 avril 1967: « Les modifications au régime fiscal de la province seront initiées à compter du prochain budget 68/69 et viseront tout d'abord à écarter les commissions scolaires du champ de la taxation foncière. Le premier ministre, Daniel Johnson, a donné ces indications, hier, lors de l'étude du bill de Montréal. « Graduellement, la taxation immobilière sera réservée aux municipalités, et des experts se penchent avec nous sur la réorganisation de la fiscalité. » Ce sont les paroles du premier ministre d'alors rapportées textuellement.

Dans les quelques jours suivants, soit le 19 avril 1967, le chef de l'Union Nationale et le ministre des Finances et des Affaires municipales, qui, lui, ne parlait pas de la séparation du Québec, répétaient la même promesse pour la troisième fois à l'Union des conseils de comtés. Je cite le Soleil du 20 avril 1967: « Il est plus qu'improbable que l'abolition de la taxe foncière scolaire que se propose de décréter le gouvernement pour le prochain exercice financier soit compensée uniquement par une augmentation de l'impôt sur le revenu. C'est du moins ce qu'ont laissé entendre, hier avant-midi, le premier ministre Daniel Johnson et le ministre des Finances et des Affaires municipales, M. Paul Dozois, devant les dirigeants de l'Union des conseils de comtés de la province venus présenter leur mémoire annuel. « Par ailleurs, le ministre Dozois a signalé que les corrections à la répartition actuelle de la taxe de vente seront comprimées dans le réaménagement fiscal que le gouvernement

entend mettre de l'avant pour réserver exclusivement le champ de la taxe foncière aux municipalités. »

Deux mois plus tard, quatrième promesse semblable, et je me réfère cette fois à l'édition du 20 juin 1967 du journal l'Action. Ce compte rendu était donné par le journaliste d'alors, M. Lucien Bouchard, qui, je crois, est maintenant attaché de presse au ministre des Affaires municipales: « Pas plus que Québec, la ville de La Pocatière n'a été favorisée par les législateurs dans sa requête pour obtenir l'autorisation d'imposer certaines taxes municipales aux institutions religieuses d'enseignement et aux immeubles gouvernementaux de l'endroit. Le ministre des Affaires municipales, M. Paul Dozois, a informé le maire de La Pocatlère, le Dr Dallaire, que tout ce problème complexe des finances municipales, du partage de l'assiette fiscale et des immeubles non cotisés fait l'objet d'une étude sérieuse de la part du ministère des Affaires municipales et que des solutions seront apportées globalement. »

Deux jours après, cinquième promesse de la part du gouvernement de l'Union Nationale. Je cite l'édition du Soleil du 22 juin: « Le gouvernement du Québec espère annoncer dans sept ou huit mois quelle sera la formule choisie pour libérer le champ de l'impôt foncier aux municipalités, selon le ministre des Finances, M. Paul Dozois. Celui-ci répondait à des questions à ce sujet que lui posaient hier après-midi le chef de l'Opposition libérale, M. Jean Lesage, et le député libéral de Mercier, M. Robert Bourassa. »

Sixième promesse, en date du 25 septembre 1967. Je cite un article du Devoir publié le 26 septembre 1967, rapportant une dépêche provenant de Mont-Gabriel: « Nous devons permettre aux municipalités de se financer par elles-mêmes, a dit en fin de semaine le ministre Paul Dozois devant l'Institut canadien des affaires publiques. Une étude a été entreprise depuis quelques mois afin de libérer, pour les municipalités, le champ de la taxe foncière qui est actuellement envahi à 70% par les commissions scolaires », a dit M. Dozois. Et il poursuit: « Actuellement, la propriété foncière n'a aucune relation avec l'éducation. Aujourd'hui, la propriété foncière est surchargée et les municipalités ne peuvent accroître leurs revenus. » C'est le ministre qui prononçait ces paroles. « Le ministre a dit qu'il espère pouvoir annoncer très bientôt un programme gouvernemental visant à libérer le champ de l'impôt foncier. »

Quelques mois plus tard, le 21 décembre 1967, c'est au tour du ministre actuel des Af- faires municipales, à faire une déclaration comme nouveau titulaire de ce ministère. Je cite le Soleil du 22 décembre 1967: «Au cours d'une entrevue accordée au représentant du journal Le Soleil, M. Lussier a précisé que plusieurs politiciens reconnaissent que la propriété foncière n'a plus actuellement de relation directe avec l'éducation. Le nouveau ministre, nommé le 31 octobre dernier, a reconnu que le gouvernement doit songer, et qu'il songe effectivement, à une telle éventualité. Il a signalé que des comités d'étude scrutent toute cette question depuis environ un an afin d'établir un processus. L'opération se fera par étapes pour libérer complètement le champ de la taxation foncière en faveur des municipalités. Pourrait-on voir l'amorce d'une telle opération en 1968? A cette question, le ministre répond textuellement: Je ne peux évidemment pas me prononcera la place du ministre des Finances, M. Paul Dozois, mais je crois bien qu'il est permis d'avoir un espoir, un bon espoir. »

D'ailleurs, le premier ministre et chef de l'Union Nationale soutint alors son ministre des Affaires municipales, puisque, quelques mois plus tard, il a fait, au nom du gouvernement de l'Union Nationale, une promesse semblable et cela, pour la huitième fois. Nous la retrouvons dans le Nouvelliste du 15 février 1968: « Répondant au mémoire annuel présenté par 1'UCC au Parlement et aux observations du président de l'organisme rural, M. Lionel Sorel, le premier ministre, M. Daniel Johnson, a laissé entendre que, dans l'élaboration des nouvelles politiques fiscales, le gouvernement entrevoyait la possibilité de remettre aux municipalités tout le champ des impôts fonciers ».

M. le Président, j'en passe, car il me faudrait plus que le temps qui m'est accordé pour ce discours pour rappeler au gouvernement toutes les promesses faites et répétées aux municipalités, mais qui n'ont jamais été respectées. Pendant ce temps, la situation financière des municipalités se détériore et le gouvernement actuel de l'Union Nationale ne fait rien pour y remédier. On forme des commissions d'étude pour étudier les études faites par d'autres commissions d'étude. Et ainsi, quatre ans se sont presque écoulés sans que le gouvernement prenne aucune mesure concrète pour régler le problème primordial et urgent de la fiscalité municipale. N'est-ce pas là une autre preuve de l'inaptitude totale du gouvernement actuel à administrer la province?

Surtout, qu'on ne vienne pas me dire que cela dépend d'Ottawa et des $200 millions qu'on n'a pu récupérer! Le gouvernement de l'Union Nationale a gaspillé plus que cela en quatre ans,

en dépenses inutiles et frivoles, en dépenses de prestige et sous prétexte d'autonomie. Combien de dizaines de millions pour l'Office d'information et de publicité, pour les voyages des ministres et des hauts fonctionnaires partout à travers le monde, pour Radio-Québec qui n'est qu'une officine, de patronage, pour le Centre de main-d'oeuvre du Québec, dédoublement inutile de l'organisme fédéral, pour la Société d'habitation du Québec qui, pour les trois quarts, ne sert qu'à étudier des projets qui sont déjà financés à 100% par la Société centrale d'hypothèques et de logement, tout en se gardant bien de dévoiler publiquement la provenance des fonds? Combien de millions pour l'achat de tapis au parlement, l'achat de voitures et le salaire des conseillers spéciaux dans tous les ministères?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

Il ne fait aucun doute que, si l'honorable député était à discourir sur la motion principale, il pourrait le faire dans le sens qu'il le fait actuellement. Cependant, nous sommes sur une motion d'amendement, proposée par l'honorable chef de l'Opposition, amendement qui est dans des termes fort précis. Je crois qu'actuellement l'honorable député s'en éloigne. Je lui demanderais donc de porter une attention spéciale à cette remarque.

M. LAPORTE: M. le Président, jusqu'ici, quelques orateurs se sont exprimés. Je vous remercie d'intervenir pour rappeler aux députés le sujet de la motion. Puis-je vous demander pour les députés de la gauche, enfin, pour tous les députés, la même mesure, la même latitude qui a été accordée jusqu'ici? Il reste que ce que disait le député de Rimouski sur ce qu'il prétend être du gaspillage ou des nominations non justifiées peut directe ment être la cause de la situation économique que l'on déplore actuellement dans la province de Québec.

M. BERTRAND: C'est du patinage.

M. PAUL: C'est une invitation que le député de Chambly vous a présentée avec beaucoup de courtoisie, parce qu'il ne semblait pas trop, trop convaincu de ses arguments.

Je comprends, M. le Président, que vous avez démontré, jusqu'ici, une certaine libéralité qui est tout à votre honneur, mais lorsque l'honorable député de Rimouski se lance dans un sujet de discussion qui est, à notre point de vue et surtout au vôtre, M. le Président, carrément éloigné du fond de la motion, je crois que nous ne pouvons tolérer un tel écart.

Cependant, si l'honorable député a l'intention de revenir au coeur même de la motion de blâme présentée par son chef, nous l'écouterons avec beaucoup d'intérêt, et les règles de la procédure ne seront pas ainsi trop, trop escamotées.

M. BELLEMARE: On pourrait peut-être lui indiquer aussi ce que cela a coûté pour les cuisinettes des ministres à Ottawa. Dans une année d'austérité.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

Je pense qu'on aura remarqué que, depuis le début du débat sur cette motion d'amendement, nous avons fait preuve d'une certaine libéralité, pour répéter l'expression de l'honorable ministre de la Justice. Je serais enclin à faire preuve de cette même libéralité, si l'honorable député de Rimouski était sur le point de nous indiquer que les chiffres qu'il donne ont une incidence économique.

M. TESSIER: M. le Président, pour continuer 1'énumération des millions gaspillés, je dirai simplement: Et le reste, et le reste.

Si le gouvernement actuel...

M. BERTRAND: C'est la meilleure partie de votre discours.

M. TESSIER: ... est inapte à négocier, au nom des municipalités, auprès du gouvernement central, qu'on permette alors aux municipalités du Québec de négocier directement avec le gouvernement fédéral. Cela ne pourra sûrement être pire, et, pour ma part, je suis convaincu que les résultats seront sûrement meilleurs et plus expéditifs.

L'Union des municipalités du Québec et l'union des conseils de comtés ont présenté, depuis quatre ans, plusieurs mémoires suggérant au gouvernement actuel de nombreux autres moyens d'améliorer les finances municipales. Ce n'est pas mon intention de relire, même partiellement, ces mémoires, mais je tiens à souligner, en particulier au ministre des Affaires municipales, l'absence presque totale de dialogue entre lui-même et les représentants des municipalités. Je réitère donc, pour les municipalités du Québec, les demandes suivantes: La formation immédiate d'un comité permanent provincial-municipal qui devrait siéger régulièrement, à dates fixes; de même, la création d'une caisse de financement municipal; l'abolition complète de l'exemption d'impôt foncier sur certains immeubles, sauf ceux affectés exclusivement au culte; l'exemption d'impôt sur le revenu des particuliers pour l'intérêt reçu

des obligations municipales, comme la chose existe dans plusieurs Etats américains et où le résultat semble excellent, pour faciliter la vente à un taux normal des obligations municipales; la remise aux municipalités des amendes perçues en vertu du code de la route, du code criminel et autres lois et des frais considérables encourus par les municipalités devant les cours municipales, comme la chose existe, d'ailleurs, en Ontario depuis deux ans.

Voilà, M. le Président, ce que le gouvernement actuel aurait eu le temps de faire depuis quatre ans, s'il avait été compétent, alerte et désireux de régler les principaux problèmes municipaux et celui de la fiscalité en particulier.

Heureusement, les élections, qui s'annoncent pour les prochains mois, pourront corriger cette situation.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Baldwin.

M. Arthur-E. Séguin

M. SEGUIN: M. le Président, vous me permettrez sans doute de Joindre ma voix à celles de mes collègues pour vous féliciter de la confiance que vous avez su obtenir de cette Assemblée, laquelle s'est traduite par votre élection comme président de ce Parlement. Je ne reviendrai pas sur vos qualifications, ni sur votre compétence, ni sur vos qualités personnelles de bon Jugement et d'impartialité que nous connaissons tous, d'ailleurs. Je me contenterai de vous exprimer bien sincèrement mes meilleurs voeux de succès et de satisfaction personnelle que vous pourriez avoir dans l'accomplissement d'une tâche qui ne manquera certainement pas d'être difficile parfois, en cette session, présumément la session qui verra à faire élire un nouveau Parlement et un nouveau gouvernement pour notre province aux élections prochaines, pour ne pas dire immédiates.

Je profite aussi de l'occasion pour féliciter votre prédécesseur et ses collègues qui ont fait leur entrée au cabinet depuis la dernière session. Mon seul regret est bien de constater qu'ils n'auront pas le temps d'apporter leurs talents et leurs efforts à leurs ministères respectifs. Je les félicite quand même et bien sincèrement de la confiance qu'ils ont méritée de la part de leur chef, le premier ministre. Je regrette aussi la démission du député de Champlain comme leader parlementaire du gouvernement. Nous regretterons tous, sans doute, ses explosions d'indignation...

M. BERTRAND: Mais il reste ici encore; ne soyez pas inquiet.

M. SEGUIN: C'est entendu qu'il reste, mais puisqu'il n'est pas leader, nous ne craignons pas les explosions.

M. BERTRAND: Ah, vous allez voir cela!

M. SEGUIN: ... ses appels routiniers au règlement, ses colères et son style oratoire incomparé et incomparable. Nous regretterons peut-être l'absence du seul bleu, pas tellement en contraste avec le rouge, en ce qui concerne l'humanitarisme et la compréhension des droits humains. Je regrette le départ, momentanément peut-être,..

M. BERTRAND: Il reste.

M. SEGUIN: ... d'un excellent leader parlementaire.

M. BERTRAND: Il reste. M. PAUL: Il reste.

M. SEGUIN: Alors, il y a eu changement, M. le Président, depuis l'annonce de la démission, comme leader parlementaire...

M. BERTRAND: Non, non.

M. PAUL: Non.

M. SEGUIN: ... du député de Champlain.

M. PAUL: C'est mon conseiller.

M. SEGUIN: Alors, nous avons deux leaders parlementaires du côté du gouvernement.

M. BELLEMARE: Non, non. UNE VOIX: C'est plus fort.

M. SEGUIN: M. le Président, c'est en Juin 1966 que l'Union nationale est arrivée au pouvoir.

Cette expression s'est avérée quelque peu illusoire depuis. Car ce parti, ayant obtenu au scrutin la responsabilité de gouverner, a démontré depuis ce temps non seulement qu'il n'en avait pas le pouvoir au sens réel, mais qu'il n'avait pas la capacité de le faire.

Pour ceux de mes collègues qui connaissent l'exposé de la thèse du Dr Laurent J. Peter et

de M. Raymond Hull, le « Peter principle », il est bien évident que l'Union Nationale est la preuve vivante du principe qui s'énonce comme suit et qui s'explique. Pourquoi tout va mal? C'est que, dans une hiérarchie, chaque membre ou employé tend à atteindre son niveau d'incompétence. Or, l'Union Nationale l'ayant atteint déjà ou ayant déjà atteint ce niveau d'incompétence bien avant 1966, il va de soi que nous ne pouvions nous attendre a d'autres résultats de ce groupe que ce qui s'est produit depuis qu'il est à votre droite, M. le Président.

M. BERTRAND: Le député n'est pas gentil. Ce n'est pas gentil.

M. SEGUIN: M. le Président, je pense bien que le premier ministre aura toutes les occasions voulues pour ses interventions afin de répondre aux commentaires du député.

Il est tout de même fantastique de penser et d'apprendre que la seule défense, la seule excuse, le seul alibi que nous apporte le premier ministre devant la faillite de la province est la réclamation de quelque $200 millions d'Ottawa. Que ce soit à tort ou à raison, peu importe...

M. BERTRAND: Etes-vous pour ou contre ça?

M. SEGUIN: Peu importe, ce n'est pas là la thèse. Ce montant ne représente tout de même, M. le Président, qu'un faible pourcentage des frais du paternalisme de son parti. Je voudrais entendre le ministre du Commerce et de l'Industrie qui, malheureusement, à ce moment-ci n'est pas en Chambre...

M. BELLEMARE: On va le lui dire. Votre chef non plus.

M. SEGUIN: ... donner les explications voulues et nécessaires en ce qui concerne les faillites nombreuses, se produisant à un rythme 100% supérieur à notre plus proche voisin, l'Ontario. Voici, du Bureau national de la statistique, pour les années 1968/69, le bilan de nos affaires en ce domaine, pour autant que nous en possédions les chiffres. Pour les provinces maritimes, en 1968, il s'agissait de 34 faillites pour un montant de $1,738,000. En 1969, dans ces mêmes provinces maritimes, le nombre des faillites avait augmenté à 36, pour un montant global de $2,455,000. Le Québec, en 1968, avait le nombre imposant de 921 faillites pour un montant de $65,381,000.

En 1969, ne voulant rien concéder, mais avec ce grand désir de rester à la tête des faillites en autant que le Canada était concerné, nous voyons que la province a le chiffre magnifique de 1,020 faillites, pour un montant total et global de $80,462,000. L'Ontario, à ce moment, soit en 1968, en avait 690, donc pour $50,714,000, en 1969, toujours en comparaison de ce que nous trouvons au Québec, soit 1,020 faillites pour $80 millions, l'Ontario enregistre 633 faillites pour $36 millions.

Je pourrais aussi vous donner les chiffres pour le Manitoba, la Saskatchewan, l'Alberta, la Colombie-Britannique. Disons simplement ceci que, sur le total canadien, le total national en 1969, soit 1919 faillites représentant $147,268,000 — et négligeons les cents — la part de la province est tout de même, sur ces 1,900 faillites, de 1,020 faillites; sur les $147 millions, nous avons le droit de réclamer $80 millions. Ne serait-il pas logique de conclure que l'exemple prêché par le gouvernement dans l'administration des affaires de la province est reflété dans l'économie chancelante de celle-ci? Ces $80 millions et ces 1,020 entreprises qui ont disparu du bilan de notre assiette économique en 1969 ont contribué de plusieurs façons, semble-t-il, à neutraliser une bonne part des bonnes intentions énoncées par le ministre du Commerce et de l'Industrie la semaine dernière, et d stigmatiser la bonne foi et la sincérité du premier ministre. Et de quelle façon? Par le maintien du manque de confiance chez nous et à l'étranger, de cette confiance en la stabilité de notre économie; par la perte d'investissements importants — les chiffres déjà donnés le prouvent — ; par l'augmentation des noms sur la liste des sans-travail — je suis certain que le ministre du Travail est intéressé à ces chiffres —; par la perte de revenus importants pour la province.

Le ministre du Revenu n'étant pas ici, je suis convaincu d'avance qu'il s'en fait un problème, par les pertes que les fournisseurs essuient dans ces faillites, par les difficultés qu'éprouvent certaines familles à cause de ces échecs — c'est l'Union Nationale qui nous répète qu'elle est près du peuple — et par bien d'autres méfaits que je ne m'attarderai pas à énoncer.

Je prétends, M. le Président, que le présent gouvernement s'est prouvé impuissant à saisir le sérieux de la situation. Je prétends que le gouvernement, ne comprenant pas ce qui se passe, a perdu la confiance et du peuple et du monde des affaires, de l'employeur et de l'employé, du riche et du pauvre, du technicien, de l'ouvrier, du professionnel, des autres provinces canadiennes et du marché mondial des affaires. C'est pour cela qu'exprimant l'opinion publique de cette province, le chef de l'Oppo-

sition a présenté une motion de blâme après avoir détaillé, d'une façon savante, notre bilan économique. Le chef de l'Opposition a fait une dizaine de recommandations bien positives, et ces messieurs qui se déclarent à tout instant prêts à assumer ou à prendre leurs responsabilités, ces messieurs du gouvernement n'ont pu trouver mieux à faire que de sourire, d'un sourire quelque peu jaune peut-être et qui prouvait que tout ce qui venait d'être dit par le chef de l'Opposition, par le député de Mercier, dépassait leur compréhension.

Le nombre des faillites monte en flèche dans cette province. L'an dernier, ce fléau atteignait le chiffre imposant de $89 millions, soit le double de l'Ontario pour la même période. Il faut noter que l'augmentation de cette année, par rapport à 1968, atteint le magnifique chiffre de $25 millions.

Il serait donc normal, M, le Président, de conclure qu'à cause de l'inflation et de la pénurie des fonds 1970 nous apportera de nouveaux championnats en ce domaine.

Considérant ces faillites, ne serait-il pas bien à propos de se demander combien il y en a, sur ce nombre, qui sont frauduleuses ou, du moins, douteuses? Nous savons que, depuis 1966, une entente entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces définit bien clairement les responsabilités de chacun. Nous savons aussi que la Gendarmerie royale, la Sûreté provinciale, ainsi que le service de sécurité de la ville de Montréal, ont chacun des tâches à remplir en ce domaine.

Mettons de côté la responsabilité fédérale. Est-ce que le ministre de la Justice pourrait dire ce que son ministère et son gouvernement ont accompli, depuis quatre ans, pour diminuer et maîtriser, jusqu'à un certain point, ce fléau qui ronge l'économie de la province? Le juge en chef de la cour Supérieure, M. George S. Challies...

UNE VOIX: Le juge en chef adjoint.

M. SEGUIN: ...à l'occasion d'une entrevue donnée le 22 février 1970, rapportée dans le Montréal Star du 23 février de la même année, a dit: «Little has been done or is being done to combat fraudulent bankruptcies. In fact, nothing has been done. »

M. Benson, ministre des Finances du gouvernement fédéral, au chapitre des investissements de son livre blanc, nous rappelle que les dépenses globales des entreprises canadiennes, l'an dernier, ont augmenté de 6.5%. Nous constatons aussi que le Québec a fortement tiré de l'arrière pour cette même période, puisque la hausse des investissements dans notre province n'a été que de 2%.

Ce chiffre est reconnu, accepté et admis comme étant le maximum possible pour l'année en cours, pour notre province. Je ne reprendrai pas les arguments réalistes et logiques du chef de l'Opposition sur l'économie du Québec. Je ne répéterai pas, non plus, les recommandations et les mises au point que le député de Jeanne-Mance a faites dans son excellent discours en réplique au ministre de l'Industrie et du Commerce.

Je m'arrêterai plutôt quelques instants pour parcourir brièvement les conclusions du rapport de M. R. B. MacPherson, analyste et économiste bien connu, sur les objectifs économiques du Québec. Ces observations et évaluations ont été préparées pour le sous-comité de la technologie industrielle du Conseil supérieur de l'Education de cette province. L'économiste, dans son exposé, a produit plusieurs tableaux très réalistes couvrant les années 1968 à 1975. Je ne répéterai pas les données de ces tableaux, mais je serais en mesure de les produire pour le journal des Débats, si tel était le désir de cette Assemblée. De fait, M. le Président, je crois qu'à l'appui de ce que j'énoncerai il serait préférable de déposer ce tableau. (voir Annexe B)

M. MacPherson, se basant sur les résultats de ses recherches, nous dit et redit que le Québec doit offrir plus de possibilités d'emploi. Il reprend la thèse du chef de l'Opposition. Il reprend la thèse de tous ceux qui, en connaissance de cause, implorent le gouvernement actuel de faire en sorte que nos jeunes qui sortiront des écoles demain trouveront de l'emploi et s'intègrent à notre marché des affaires.

M. MacPherson nous dit que le Québec doit offrir toutes les possibilités d'emploi...

M. BERTRAND: Nous pourrions peut-être demander la suspension des travaux; il est six heures.

M. SEGUIN: Oui. Je remercie le premier ministre d'attirer mon attention sur ce fait et je demande la suspension du débat.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à 8 h 15.

Reprise de la séance à 20 h 18

M. FRECHETTE (président): A l'ordre, messieurs!

On me permettra peut-être de régulariser une situation. Au cours de son intervention, l'honorable député de Robert-Baldwin a manifesté le désir de déposer un tableau qui serait reproduit au journal des Débats, sauf qu'aucun consentement n'a été donné. Alors, est-ce que...

M. BERTRAND: En autant qu'il n'est pas trop volumineux.

M. LE PRESIDENT: Alors, du consentement unanime.

M. BERTRAND: Est-ce que la source est indiquée?

M. BELLEMARE: MacPherson. M. BERTRAND: MacPherson.

M. SEGUIN: M. le Président, la source de l'information est indiquée...

M. BERTRAND: Vous pourriez peut-être l'indiquer à l'encre, au bas, et on l'imprimera. D'accord.

M. BELLEMARE: C'est MacPherson? M. BERTRAND: Le rapport MacPherson. UNE VOIX: C'est ça.

M. BERTRAND: C'est commode quand on a la source.

M. SEGUIN: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: Du consentement unanime de la Chambre, ce rapport sera déposé au journal des Débats.

M. SEGUIN: D'ailleurs, M. le Président, il s'agissait simplement de déposer ces documents à l'appui des statistiques et des commentaires que je mentionnerai...

M. BERTRAND: Parfait.

M. SEGUIN: ... au cours de mon intervention.

Je vous remercie, M. le Président, d'avoir porté à mon attention cet oubli; j'ai attendu une décision au sujet du dépôt de ces documents.

Je disais donc, à l'occasion de l'ajournement, que M. MacPherson, se basant sur les résultats de ses recherches, nous disait et nous redisait que le Québec devrait offrir plus de possibilités d'emplois. Une condition sine qua non, il considère comme raisonnable un objectif immédiat de 4%, et je pense que ce chiffre est reconnu, non seulement d'une façon nationale, mais d'une façon internationale comme étant un niveau raisonnable au sujet du chômage, tout en tenant compte des problèmes qui pourraient exister autrement, en ce qui concerne l'inflation ou la surproduction. Ce chiffre de 4% que suggère M. MacPherson se compare à notre taux actuel de près de 8%, et je ne m'arrêterai pas ici pour discuter si c'est 7% ou 8%; employons ce chiffre qui est probablement majoré un peu à 8%.

Pour atteindre cet objectif, toujours d'après notre économiste, il faudrait créer, d'ici 1975, plus d'un demi-million d'emplois, soit 500,000 emplois nouveaux. Le ministre de l'Industrie et du Commerce parlait, à l'occasion de son intervention, des nouveaux emplois qui avaient été créés. Il mentionnait certains chiffres; je crois que c'était 55,000, si je ne me trompe pas.

Encore, que ces chiffres, de l'ordre de 55,000 pour l'année qui vient de s'écouler, ne tenaient pas compte des nouveaux arrivés sur le marché du travail. C'est dire que nous n'avions pas une explication de sa part qui pouvait rendre justice aux chiffres qu'il nous proposait. M. le Président, combien de temps me reste-t-il?

M. LE PRESIDENT: D'après notre minutage, il vous resterait encore huit minutes.

M. SEGUIN: Je vous remercie. Plus ou moins? M. BERTRAND: Non, disons que c'est cela. M. SEGUIN: Plus ou moins.

M. LAPORTE: Selon notre minutage, il lui en reste encore 15.

M. BERTRAND: Oui, mais si le député de Chambly...

M. LAPORTE: Nous pourrions faire un compromis.

M. BERTRAND: ... l'interrompt, cela lui fait une minute de moins.

M. SEGUIN: On a soin, naturellement, de déduire ce temps de la période qui me reste avant de terminer mon intervention. Pour parler

de l'économie de la province, vous savez, cela prend un peu plus qu'une demi-heure.

M. BERTRAND: Il vous reste encore huit minutes.

M. SEGUIN: Huit minutes. Donc, d'après l'économiste, il s'agirait de créer, d'ici 1975, 500,000 emplois nouveaux, tout en tenant compte de ce qui existe aujourd'hui et des nouveaux arrivés sur le marché du travail. L'augmentation actuelle du niveau de la vie est de 2% par année. Cette augmentation dans les nouveaux emplois suppose un taux de croissance économique de 5.8% par année, de 1968 à 1975.

C'est dire qu'en cette dernière année, soit 1975, le produit provincial brut se chiffrerait par quelque $25 milliards, tel que nous reconnaissons le dollar de 1968. Pour atteindre ce résultat, qui est un minimum, la province devra attirer les investissements s'élevant à plus de $6.2 milliards, soit à plus du double de ceux de 1969.

C'est tout de même assez alarmant en 1970, si on constate l'augmentation qu'il nous faut apporter à l'ordre de nos investissements, de comprendre et de réaliser le retard que nous avons. Je suis assuré d'avance que notre population ne saurait accepter de bonne grâce un niveau de vie inférieur à celui de l'Ontario. Pour atteindre ce niveau, la tâche est donc énorme. Le gouvernement actuel, n'ayant ni la compétence interne, ni la confiance du public ou du monde des affaires, serait bien avisé de laisser à d'autres le soin de remédier à cette faillite provinciale. C'est une faillite provinciale, puisque, depuis son arrivée au pouvoir, chaque année a apporté de nouvelles pertes.

Pour illustrer davantage l'ampleur du problème, disons que, pour que le Québec atteigne le niveau ontarien — ce n'est pas rêver en couleur; on vise le niveau du gouvernement de l'Ontario qui est tout de même une province soeur, une province de notre pays — en fixant un objectif, pour 1975, de parité avec l'Ontario et en conservant le taux de chômage à 4% près, il faudrait que le produit provincial brut augmente de 7.7% par année. Ce qui veut dire un chiffre global de près de $29 milliards en 1975.

Pour ce faire, il faudrait une croissance annuelle d'investissements de $4 milliards, de 1968 jusqu'en 1975. Ce n'est pas là rêver en couleur; c'est du réalisme. Ce n'est pas là de bonnes intentions; c'est la réalité. Ce n'est pas là la production de dépliants ou de grands discours ronflants; c'est la réalité froide de l'heure, pour simplement arriver au niveau...

M. LE VEILLE: C'est une réalité qui est rouge.

M. SEGUIN: ... de ce qui existe en Ontario, à ce moment-ci. Ajoutons à tout cela la majoration.

Si on pense que c'est un chiffre imposant, exagéré, ridicule, qu'on examine un peu les choses et qu'on ajoute à ce montant que je viens de mentionner une majoration de 25% à 40%. Vous allez l'admettre; c'est connu, c'est reconnu. Qu'on ajoute la majoration des prix et la hausse des frais de construction prévue pour les cinq prochaines années. Nos chiffres de partout nous indiquent que nous pouvons calculer et compter précisément sur une majoration de cette envergure. Donc, aux montants que j'ai mentionnés de $4 milliards d'augmentation chaque année, ajoutez cette majoration de 25% à 40% pour les frais. Pendant ce temps, le premier ministre est «enfargé» par une chicane avec le gouvernement fédéral, chicane qui n'aidera en rien, à mon avis, à atteindre un objectif économique normal et raisonnable, que toute la population réclame. Il ne s'agit pas comme remède ici d'un laxatif économique — ce n'est pas ça qu'il faut — mais bien d'une purgation assez violente pour parler en bon «canayen».

Le chef de l'Opposition, dans son exposé en réponse au discours inaugural, a énoncé certaines mesures d'urgence à prendre, le programme que notre parti proposera à la population et complétera à l'occasion de la prochaine élection. Pour le moment, disons que si nous ne voulons pas conserver le taux de chômage le plus élevé, il faudra prendre les grandes mesures, et cela bien au-delà du taux de croissance annuel de 5.5% fixé comme objectif national par le Conseil économique. Il en résulte quand même que cet objectif bien minime dépasse par près de $3 milliards nos investissements de 1969. C'est du réalisme. Ce sont des faits, ce sont des chiffres qui sont prouvés, qui existent. Certes, l'épargne du Québec ne saurait supporter ce fardeau, je le comprends et le concède. Donc, si nous, de nous-mêmes, ici de cette province, si nos entreprises ne peuvent supporter un fardeau tel que celui que je viens de mentionner, nous aurons à recourir à l'étranger sur le marché mondial, en concurrence avec les nations du monde et les autres régions de notre pays. Encore du réalisme.

Puisqu'il s'agit d'économie, et, ayant discuté d'investissements et de chômage, il est essentiel, M. le Président, je pense, à ce moment-ci, de relier à tout cela l'état de notre productivité.

Si on parle d'économie, il faut parler de chômage, il faut parler de la situation des banqueroutes qui existe présentement. Il faut aussi parler d'une productivité qui se relie directement à ce fait économique. Une amélioration ou une augmentation de 3% à 4% dans ce domaine — je parle toujours de productivité — serait en réalité une augmentation parallèle, sinon équivalente, de revenus réels.

En 1968, la production, par travailleur, était de 15% inférieure à celle de l'Ontario, soit de $8,165 et de $9,670 par travailleur pour la province voisine. Je crois qu'il serait juste de dire que la production d'une région économique dépend en grande partie, sinon directement, de la manière dont les ressources sont utilisées. Pour illustrer cet avancé, pensons à une région où le capital et la main-d'oeuvre sont utilisés ou attachés à des industries de faible productivité comme, par exemple, les industries dites de services, ou encore certains secteurs de l'industrie agricole. Nous trouvons dans ces secteurs la production unitaire plutôt faible par...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je regrette de devoir informer l'honorable député que le temps mis à sa disposition est maintenant écoulé.

M. LAPORTE: On pourrait lui donner encore cinq minutes.

M. BELLE MARE: Il y en a trois ou quatre de plus...

M. BERTRAND: Il y en a encore trois ou quatre qui vont parler ce soir.

M. SEGUIN: Je ne voudrais pas créer un débat autour du temps qui me serait alloué, M. le Président,...

M. LAPORTE: On s'entend pour cinq minutes?

M. SEGUIN: Je vais essayer... M. BERTRAND: Une minute.

M. BELLEMARE: Il a déjà dépassé son temps de sept minutes.

M. BERTRAND: Il l'a dépassé de sept minutes?

M. BELLEMARE: Sept minutes.

M. LE PRESIDENT: Je crois comprendre que le député obtient, de consentement unanime, pour terminer son exposé, une période de temps qui n'est pas déterminée...

M. LAPORTE: Deux minutes? UNE VOIX: Deux minutes alors.

M. SEGUIN: M. le Président, je vous assure — donnez-moi cinq minutes, je vais marchander — qu'il n'y aura pas de boniment à la fin.

M. BERTRAND: On vous donne cinq minutes.

M. SEGUIN: Je vais m'en tenir strictement à l'économie, sans boniment pour l'Union Nationale.

M. BERTRAND: Aucune attaque?

M. SEGUIN: Je vais enlever cette partie-là!

M. BERTRAND: D'accord. M. SEGUIN: Aucune attaque. M. LAPORTE: Je m'oppose.

M. BELLEMARE: Cela ne prendra sûrement pas cinq minutes!

M. BERTRAND: Cinq minutes.

M. BELLEMARE: Cela ne prendra pas cinq minutes.

M. SEGUIN: Je continue, M. le Président, si on me restreint aux minutes.

Je parlais de la production unitaire plutôt faible en ce qui concerne les industries de services ou certains secteurs de l'industrie agricole, secteurs de faible production par rapport aux moyens mis en oeuvre. Si, au contraire, une plus forte part des ressources était consacrée à des industries dites de haute production, telles que l'industrie manufacturière, les mines, certaines industries forestières, par exemple, dans ce cas, nous pourrions reconnaître une production par unité de moyenne mise en oeuvre plus élevée.

Je crois donc que le moyen d'augmenter la production sera bien de concentrer — et je m'adresse en particulier au ministre de l'Industrie et du Commerce — les efforts de déve-

loppement et de faire passer les ressources des industries à faible production du côté des industries à grande production. Je pense qu'il me comprend quand je fais ces commentaires. Je pense que c'est la base de ce problème qui existe chez nous. Ce n'est pas une chasse aux sorcières; c'est une déclaration de fait, encore, qu'il nous faut réaliser.

Le taux d'accroissement de la production annuelle en notre province n'est que de 2%, et cela s'explique par le fait que 11% seulement — plus ou moins — de la main-d'oeuvre est affecté à l'industrie dite de grande production. Il me semble que nous trouvons ici un secteur de notre économie où le gouvernement, s'il était le moindrement conscient — entre parenthèses, je m'excuse, parce que j'avais dit il y a quelques instants que je ne ferais pas de compliments désobligeants au gouvernement, donc, vous êtes conscients — aurait pu depuis longtemps pratiquer la transfusion nécessaire d'assistance, de ressources, d'encouragement à nos grandes entreprises productrices au lieu de se concentrer tout simplement sur une publicité plus ou moins valable, et de préparer des listes de demandes d'assistance ou de renseignements d'une foule de petites entreprises ayant peut-être quelque importance locale mais qui, de fait, ne contribueraient que d'une très faible manière à remédier à la situation économique de notre province. N'ignorons personne, de grâce, mais au moins commençons par le courrier de première classe puisqu'il s'agit d'urgence et du problème de l'heure.

Il n'était donc pas surprenant de constater, ces jours derniers, que le ministre de l'Industrie et du Commerce, dans cette panique qu'on semble avoir, annonce le territoire québécois comme propice au développement.

Il n'est donc pas surprenant de voir que ce ministère réclamait 114 milles carrés de territoire en dehors de la province comme étant propices au développement. Ce territoire appartenait à Terre-Neuve, et, malheureusement, on aurait publié une brochure qui aurait inclu tout ce secteur du Labrador dans le territoire provincial. Si l'on veut faire de la réclame pour la province, d'accord, mais, au moins, restreignons nos efforts à notre propre territoire au lieu de nous aventurer en dehors.

Mais revenons à la production. Ce qu'il y a de plus encourageant est bien de constater que, dans le secteur des industries à grande production, nous occupons les 11% que je mentionnais tout à l'heure. Dans ces 11% que nous occupons, si faible soit-il, notre rendement est supérieur à la moyenne nationale. C'est-à-dire que nous avons prouvé, nous, de la province, que nous pouvions soutenir, d'une façon efficace, ces industries. En ayant déjà fait la preuve, pourquoi ne pas élaborer en ce sens et promouvoir l'expansion de ces domaines, au lieu de courir de midi à quatorze heures sur toutes sortes de plans de développement?

La productivité est fonction du degré d'instruction, de l'utilisation des ressources et surtout du caractère de la production. Néanmoins, des recherches empiriques indiquent que la productivité est, au fond, fonction des investissements. La production par unité de moyens mis en oeuvre exprimés en dollars varie beaucoup d'une industrie à l'autre. Mais, les industries à grande productivité nécessitent des investissements intensifs, des capitaux beaucoup plus considérables que les secteurs exigeant surtout une abondante main-d'oeuvre. C'est ainsi que, pour porter de 2% à 4% l'accroissement annuel de la productivité avec l'imposante modification qui s'ensuivrait dans le caractère de la production, l'on aura besoin d'énormes investissements.

M. le Président, malgré que vous n'ayez pas mis fin à mon intervention — mon discours souffrirait à être morcelé — je dois reconnaître que déjà la décision a été prise selon laquelle mon temps est écoulé, et je me plie aux exigences du règlement.

Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Institutions financières.

M. Armand Maltais

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, je veux d'abord vous rendre hommage pour la dignité avec laquelle vous exercez vos importantes fonctions à la présidence de cette Assemblée, dans la meilleure tradition que nous ont léguée vos prédécesseurs, suivant le nouvel esprit qui inspire nos débats parlementaires et conformément aux aspirations démocratiques du peuple et de l'ensemble de ses représentants dans cette Chambre, c'est-à-dire un esprit soucieux d'objectivité et d'efficacité.

M. le Président, permettez-moi d'associer à ce témoignage le nom de l'honorable député de Papineau qui a été élu à la vice-présidence de la Chambre et à la présidence des comités pléniers.

J'en viens maintenant à la motion en discussion, sur le discours inaugural et aux prétentions exposées par le chef de l'Opposition concernant l'attitude du gouvernement actuel en matière économique.

Au cours de mes premières remarques, je

voudrais faire ressortir un aspect important de la question économique. Il convient, en effet, de noter que l'économie du Québec ne se développe pas en vase clos, et qu'à cet égard les attaques de l'Opposition, qui ne tiennent pas compte des implications de la conjoncture canadienne et même mondiale, sont non seulement injustes mais nuisent aux efforts conjugués du secteur public et du secteur privé en vue de promouvoir le progrès économique. Cela peut faire l'affaire d'un certain électoralisme à la petite semaine, conçu dans les officines d'un parti dénué de vision, mais cela ne peut pas servir les véritables intérêts de la population, ni tromper, d'ailleurs, des citoyens éclairés, conscients des réalités économiques de l'heure. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui a créé l'inflation. Les compétences et les connaisseurs sont tous d'accord pour reconnaître que le gouvernement fédéral s'est lancé, au cours des dernières années, dans des programmes extravagants de dépenses, sans se soucier des priorités qui s'imposaient dans d'autres champs de juridiction du secteur public, créant non seulement toute la kyrielle de malaises qu'engendre l'inflation, mais provoquant un déséquilibre général dans le partage des ressources par un usage discrétionnaire, irréfléchi et arbitraire de son pouvoir de dépenser.

Le gouvernement fédéral a donc à la fois aggravé les maux dont souffre l'économie générale nord-américaine, provoqué un désarroi dans le jeu des forces économiques, privé les autres ordres de gouvernement des revenus qui leur sont nécessaires pour répondre à leurs besoins essentiels et pour combattre les effets néfastes non seulement de la politique inflationniste mais aussi de la politique anti-inflationniste qui ne tient pas compte des disparités régionales.

Comme preuve de manque de clairvoyance, de mesure et de respect de l'équité fiscale dans l'emploi des fonds publics fédéraux, il suffit de mentionner les surplus budgétaires considérables accumulés par le gouvernement fédéral et son refus obstiné de remettre au gouvernement du Québec, qui doit déployer des énergies nouvelles pour accélérer la croissance économique, les $200 millions perçus dans cette province au titre de l'impôt de progrès social.

Le sujet que je viens de toucher n'a pas l'heur de plaire, je le sais bien, aux membres de l'Opposition, car il fait mal à leurs amis fédéraux. Aussi s'empressent-ils, lorsque nous l'abordons, de prendre la défense de leurs amis centralisateurs, en nous accusant de négocier avec de mauvais dossiers ou, comme ils le font pré- sentement, en nous adressant des motions de blâme sur notre administration, particulièrement en matière économique. Pour ma part, afin de tenir la discussion à un niveau objectif et de contribuer à la situer dans ses véritables perspectives, je citerai brièvement un éditorial de Claude Ryan, dans l'édition du Devoir d'aujourd'hui même, intitulé: « Où sont la vérité et la bonne foi? » « C'est un secret de polichinelle, dit-il, que cet impôt (dit de progrès social) fut institué en 1969 pour assurer le financement de l'assurance-maladie. Or, le Québec, ne devant participer qu'à compter du 1er juillet 1970 à ce programme inauguré depuis le 1er juillet 1968, est condamné à encaisser une perte sèche de $200 millions ».

M. Ryan ajoute: « Traitant de cette question vendredi, M. Trudeau a cherché à détourner l'attention du vrai problème en laissant croire que la demande du Québec... »

M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement. Je sais toute l'amabilité du ministre; je ne voudrais pas lui être désagréable, mais je voudrais lui rappeler que le vrai problème, ce n'est pas M. Trudeau, ce n'est pas M. Ryan. Le ministre, qui généralement se contente de violer un seul règlement à la fois, en viole deux. Il lui est, d'abord, interdit par le règlement de citer des extraits de journaux et, deuxièmement...

M. BERTRAND: Oh! Oh!

M. BELLEMARE: Oh! Oh! Vous en avez déjà fait un discours, vous.

M. BERTRAND: Oui.

M. LAPORTE: M. le Président, je m'excuse, mais tous ces regards et toutes ces voix scandalisées parce que j'invoque le règlement!

M. BERTRAND: C'est parce que vous nous parlez d'une vertu que vous ne pratiquez pas.

M. LAPORTE: M. le Président, Je ne cite jamais les journaux, sauf mes vieux articles et généralement c'est le ministre du Travail qui le fait en mon nom.

M. BELLEMARE: Certainement. Dans un discours de 4,000 mots, il y avait 2,700 citations des journaux.

M. LAPORTE: Qui?

M. BELLEMARE: Vous, dans votre premier discours.

M. LAPORTE: M. le Président, je regrette. Je pourrais dire, si c'était parlementaire, que c'est une grossière exagération. Deuxièmement, ce qui est beaucoup plus sérieux, c'est que nous sommes actuellement — le ministre ayant été absent, je l'excuse; je sais tout le travail qu'il a à faire — sur une motion d'amendement qui doit être strictement limitée à une discussion de la situation économique du Québec. En dépit de ce que peut penser le ministre, cela n'a rien à voir avec ce qu'il est à discuter.

M. PAUL: M. le Président, je vous ferai remarquer que l'honorable ministre des Institutions financières est tout à fait dans l'ordre. S'il veut discuter du problème économique qui existe actuellement au Québec, il a le droit de se référer à certaines lacunes monétaires que l'on rencontre chez nous, à certains dépouillements dont nous avons été victimes et à l'utilisation que l'on pourrait faire de ces $200 millions, s'ils nous étaient remis par Ottawa.

Je disais donc, M. le Président, que c'est en relation avec la motion de blâme que l'honorable ministre est en train de développer une thèse qui tout à l'heure pourra surprendre nos amis d'en face.

M. BELLEMARE: M. le Président, j'ajoute deux mots seulement. J'ai été très prudent dès le début de cette motion. J'ai fait deux interventions qui ont été très signalées pour faire remarquer que les honorables députés de l'Opposition manquaient à l'article 276 et vous avez rendu un jugement en disant: Ah, il faut être libéral, les laisser parler un peu. Le vice-président de la Chambre a aussi cet après-midi rendu une décision analogue à la vôtre en disant: Bien, écoutez, il faut laisser les grands débats, il'...

M. BERTRAND: Une grande liberté...

M. BELLEMARE: ... faut exercer une grande liberté dans la discussion. M. le Président, je pense que cela a été fait avec une grande stratégie. Nous avons pensé que ces honorables messieurs... Moi aussi, j'ai un discours à faire, ne l'oubliez pas, ça viendra.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que tous les membres de la Chambre ont remarqué que depuis le débat sur cette motion précise de l'honorable chef de l'Opposition, nous avons effectivement fait preuve d'une assez grande libéralité, particulièrement cet après-midi. Les députés ont eu le loisir de discuter d'à peu près toutes les questions. Deuxièmement, je dois signaler que lorsque nous avons examiné de près la motion de l'honorable chef de l'Opposition, nous avons convenu que pratiquement seul le problème constitutionnel ne pouvait pas être discuté à l'occasion de cette motion sauf, précisément, le problème dont discute actuellement l'honorable ministre.

Je pense donc que je dois malheureusement rejeter le point de règlement invoqué par l'honorable député de Chambly.

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, je vous remercie. J'ai l'impression que j'étais en train de frapper juste.

M. DE MERS: Cela fait tort aux clubs fermes.

M, MALTAIS (Limoilou): ... et je continue à citer M. Ryan: « Traitant de cette question vendredi, disait M. Ryan, M. Trudeau cherchait à détourner l'attention du vrai problème en laissant croire que la demande du Québec veut cacher, en fait, des difficultés économiques et budgétaires attribuables à l'incompétence du gouvernement québécois. Déjà, en soi, ajoute M. Ryan, ce type d'argument est perfide car il ne peut qu'aggraver le mal qu'il prétend dénoncer. » Et M. Ryan scrute par la suite le dossier de cette histoire des $200 millions pour constater que « la vérité et la bonne foi ne sont pas du côté que veut laisser croire M. Trudeau. »

Ceci étant dit, il s'agit de ramener la question du développement économique du Québec à ses vraies proportions. En ce qui concerne le gouvernement du Québec, il ne peut naturellement aller plus loin que ses ressources et ses priorités le lui permettent. Le gouvernement actuel consolide l'avenir économique des Québécois par ses vastes investissements dans le domaine de l'éducation. Il entraîne les jeunes générations à maîtriser les connaissances indispensables dans les disciplines et les rouages propres à la vie économique.

Récemment encore, il a pris de nouvelles initiatives pour développer l'enseignement des sciences commerciales dans les CEGEP. H est en train d'y instaurer l'enseignement du commerce des valeurs mobilières et il envisage également d'y implanter des cours sur le coopératisme.

En agissant ainsi, il prépare la jeunesse québécoise à prendre en mains sa destinée et à s'engager très tôt dans un mouvement de participa-

tion au pouvoir économique. Sur le plan économique proprement dit, le gouvernement actuel a fait sa marque non seulement en imprimant un élan de progrès, mais aussi en s'assurant que la phase de consolidation des oeuvres nouvelles ne soit pas escamotée comme en avait pris l'habitude l'ancien gouvernement.

Pour atteindre ces fins absolument indispensables au développement économique, le gouvernement actuel présente encore la meilleure garantie. Les assises du progrès reposent en effet sur le climat de confiance que peuvent fournir à la fois les institutions socio-économiques et l'équipe dirigeante du secteur public. Sous ce dernier rapport, il faut reconnaître que le gouvernement actuel va de l'avant sans brûler les étapes.

En ce qui concerne les grands instruments d'action de l'Etat, nous avons voulu roder, mettre vraiment à l'oeuvre ceux qui étaient déjà en place lors de l'avènement de l'Union Nationale au pouvoir, et nous avons voulu en créer de nouveaux graduellement, en leur assurant une emprise réelle sur l'économie. Le syndicalisme était établi dans la fonction publique, mais les nouvelles libertés jouaient dans le vide et avaient semé de la confusion, parce que le gouvernement du temps n'avait pas prévu les structures nécessaires dans l'appareil gouvernemental pour permettre à ces libertés de se donner libre cours dans un champ d'action ordonné.

Nous avons établi les mécanismes administratifs qui s'imposaient et nous avons imposé une politique salariale en ce qui concerne Sidbec, comme l'a mentionné l'honorable premier ministre dans son remarquable exposé. Nous avions une sidérurgie de papier, nous avons aujourd'hui une entreprise en pleine production. De même en ce qui a trait à la Société générale de financement; nous lui avons imprimé une solide impulsion et nous sommes assurés que cela n'est qu'un départ. Nous avons doté le Québec de nombreux autres leviers économiques puissants dont l'un des plus précieux est sans aucun doute le ministère que je dirige, celui des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

La loi constitutive du ministère des Institutions financières, sanctionnée le 12 août 1967 et mise en vigueur le 28 mai 1968, s'avère en effet en elle-même une des plus clairvoyantes et des plus marquantes réalisations du gouvernement de l'Union Nationale en matière économique. Le ministère a été conçu comme le centre nerveux du système financier et du développement économique. Par l'institution de ce ministère, le gouvernement de l'Union Nationale a pris les grands moyens pour asseoir notre vaste réseau d'institutions financières sur des bases solides, de façon à établir en permanence un climat de confiance et dans le public et dans l'entreprise privée, et à attirer davantage des investissements pour le développement économique du Québec.

Lors de l'ouverture de la présente session, les observateurs de l'activité parlementaire reconnaissaient que les pièces maîtresses de la législation appelée à être soumise à l'Assemblée nationale étaient inscrites au nom du ministre des Institutions financières, auquel on attribuait déjà huit projets de loi.

Il s'agit des mesures suivantes: Loi modifiant la loi des caisses d'épargne et de crédit; Loi modifiant la loi des associations coopératives; Loi visant à créer un office de la protection du consommateur; Loi modifiant la loi des valeurs mobilières; Loi modifiant la loi des assurances; Loi régissant les sociétés d'investissement; Loi modifiant la loi des compagnies; Loi modifiant la loi des sociétés coopératives agricoles.

Je ne voudrais pas, à ce moment-ci, entrer dans les détails de ces diverses mesures, mais je tiens à souligner qu'encore une fois nous sommes en train de roder un précieux outil de progrès économique. Sur le plan administratif, les oeuvres accomplies ont déjà eu une profonde influence jusqu'au coeur même des marchés financiers du monde de la coopération.

A la fondation du ministère, le milieu financier inspirait peu confiance. Certaines institutions financières songeaient sérieusement à quitter le Québec. La Bourse canadienne et celle de Montréal étaient menacées de fermer ou d'être absorbées par la Bourse de Toronto.

En 18 mois seulement et bien qu'il n'ait pas encore complété sa structuration, le ministère a grandement redressé la situation par des réalisations presque inespérées. Tout en assurant la continuité des services, de nouvelles structures ont été mises en place avec un souci de coordination et d'efficacité qui a fait disparaître les dédoublements et a permis un décloisonnement entre les différents secteurs administratifs.

Le ministère s'est pourvu de services généraux et professionnels pour le conseiller dans toutes ses activités: services administratifs, services actuariels, services juridiques, services de recherche. Un service autonome et polyvalent d'inspection, d'un genre unique au Canada, a été mis en place. Il comprend un service d'enquête, composé d'avocats, de comptables et d'autres spécialistes pour les situations urgentes.

On a créé un service des compagnies de fiducie, un service des compagnies de finance et

deux services généraux dans le secteur coopératif: le service des caisses d'épargne et de crédit et le service des associations coopératives.

Le 7 février 1970, le conseil des ministres a adopté les règlements généraux de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec et a fixé au premier juillet l'entrée en vigueur de l'assurance-dépôts au Québec. Son rôle est de garantir à toute personne qui fait un dépôt d'argent dans une institution inscrite ou dans une banque le paiement de ce dépôt à échéance en capital et intérêts jusqu'à concurrence de $20,000, au cas où l'institution serait dans l'impossibilité de rembourser ce dépôt à échéance.

Il y a eu la création d'un service unique pour les compagnies. Auparavant, le service des compagnies ne s'occupait que du secteur juridique. Il y avait autant de services différents pour les renseignements, les archives, la rédaction des lettres patentes et la révision. Aujourd'hui, le service des compagnies compte un directeur et deux adjoints: l'un pour les aspects juridiques, l'autre pour les aspects techniques, tels que les renseignements, les archives, la rédaction.

Il y a eu également un travail de refonte, qui se poursuit, de toutes les lois coopératives. Il y a des fonctionnaires qui travaillent actuellement à la mise en place d'un fichier central.

Actuellement est en préparation une campagne d'éducation populaire qui aura pour résultat d'accroître la participation du public au monde des affaires, tant du secteur coopératif que de celui des institutions financières.

Malgré que les structures du ministère soient encore incomplètes, ses efforts généraux ont produit déjà des résultats tangibles. Des maisons de courtage importantes ont décidé de venir s'établir à Montréal. Par l'entremise d'un comité consultatif créé par le ministère, une collaboration étroite s'est établie entre la Bourse de Montréal, la Bourse canadienne, la Commission des valeurs mobilières et le ministère. La Bourse canadienne et la Bourse de Montréal connaissent un regain de vie sans précédent dans leur histoire. Les chiffres suivants quant aux prix des sièges et au nombre des inscriptions nouvelles sont éloquents par eux-mêmes. La valeur des sièges à la Bourse de Montréal, au début de 1969, était de $15,000; en novembre 1969, cette valeur était montée à $30,000. A la Bourse canadienne, au début de 1969, la valeur d'un siège était de $5,000; en novembre 1969, cette valeur était montée à $13,000.

Les nouvelles inscriptions. A la Bourse de Montréal, en 1968, il y en avait sept et, en 1969, 22. A la Bourse canadienne, en 1968, il y en avait eu neuf; en 1969, il y en a eu 28.

Une initiative unique au Canada, une chambre de compensation a été créée à la Bourse canadienne et à la Bourse de Montréal pour les valeurs non inscrites. Le ministère a réussi à rétablir l'élément primordial du monde financier, la confiance dans les organismes publics et privés. Un comité est à l'oeuvre pour instaurer dans nos écoles un cours d'initiation aux marchés financiers et aux valeurs mobilières. C'est grâce à l'initiative du ministère, et ce comité comprend des représentants du ministère et des représentants des Bourses canadienne et de Montréal. Un représentant du ministère de l'Education préside le comité, un représentant de notre ministère agit comme secrétaire.

Ce bref résumé des activités du ministère permet de conclure que, par ses nombreux services, le ministère veille à la santé économique du Québec et assure l'efficacité des mesures prises par le gouvernement québécois au niveau des ministères à vocation économique, tels l'Industrie et le Commerce, les Richesses naturelles, l'Agriculture, les Terres et Forêts. Il ne m'appartient pas d'énumérer par le détail toutes les autres mesures favorisant le développement économique du Québec qui ont pris naissance et qui sont présentement en vigueur dans les divers ministères à caractère économique. Plusieurs de mes collègues ont déjà exposé devant vous, M. le Président, les réalisations et les programmes d'action de leur ministère respectif. D'autres le feront au cours des travaux de la présente session. Ainsi, le chef de l'Opposition, qui semble manquer de conviction à cet égard, pourra constater que, dans tous les domaines du secteur public, le gouvernement actuel du Québec est présent avec des initiatives et des efforts. Il met tout ce qu'il est possible de mettre en oeuvre, compte tenu des moyens et des pouvoirs qu'il possède, en vue du développement économique du Québec.

M. LE PRESIDENT (M. Théorêt): L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Alcide Courcy

M. COURCY: M. le Président, je vous demanderais de bien vouloir transmettre, à celui que vous remplacez, mes félicitations pour son accession à la présidence de la Chambre. Je ne veux pas répéter tout ce que ceux qui m'ont précédé ont dit à son endroit, mais, tout de même, c'est avec sincérité que je lui souhaite de passer d'agréables moments, comme président, à diriger les destinées de cette agréable Assemblée.

Je crois que je me dois de transmettre au député de Louis-Hébert mes sincères remerciements pour le magnifique travail qu'il a fait comme premier ministre et comme chef de l'Opposition. Je suis assuré que, tous, nous reconnaissons son grand talent et sa valeur de législateur.

J'aurais bien aimé aussi être capable de féliciter l'honorable premier ministre pour son discours. Mais, après l'avoir écouté avec beaucoup d'attention, M. le Président, j'ai été déçu. Je regrette infiniment que M. le premier ministre n'ait pas profité de cette belle occasion pour parler des véritables problèmes du Québec et nous dire quelles mesures lui et son cabinet prendraient pour tenter de les résoudre.

Non, M. le Président, au lieu de cela, le premier ministre est venu nous servir un discours réchauffé prononcé quelques jours auparavant devant un groupe de partisans de l'Union Nationale réunis à l'hôtel Reine Elizabeth.

Reprenant l'expression du chef de l'Opposition...

M. BERTRAND: Il y avait plus de monde au Reine Elizabeth.

M. COURCY: Oui, parce qu'au Reine Elizabeth on les y avait entraînés à coups de pression.

Reprenant, M. le Président, l'expression du chef de l'Opposition, je dirai qu'avant, pendant et après le discours du premier ministre les cultivateurs du Québec demeurent encore dans l'incertitude, quant à l'avenir de leur agriculture au Québec. Pas un seul mot, pas un seul mot de cette industrie de base, l'agriculture.

M. BERTRAND: Des actes, par exemple.

M. COURCY: Et pourtant, M. le Président, ce sont ces gens qui, de jour en jour, répètent leur amour de la classe agricole.

Souvenons-nous des promesses de fidélité amoureuse à l'endroit de notre classe rurale pendant la campagne électorale de 1966.

M. le Président, si, à propos du discours d'ouverture, il m'est permis de qualifier le premier ministre, je dirai qu'il appartient à un de ces genres de politiciens patineux qui tentent de jouer sur le sentiment de nos braves gens pour faire oublier l'inertie de son gouvernement dans le domaine économique, son inefficacité administrative et le gaspillage honteux des deniers publics.

Oui, quelle différence entre le discours prononcé par le premier ministre et celui prononcé par le chef de l'Opposition, M. Bourassa! Nous avons entendu le chef de l'Opposition à ses premières armes dans cette fonction. Il a fait un discours réaliste. Il a attiré l'attention du gouvernement sur la compétence réelle administrative et sur celle de façade des ministres actuels. Il nous a donc parlé du PPBS, formule administrative efficace. Il a parlé de la réforme parlementaire, de la question constitutionnelle, des relations fédérales-provinciales, des besoins financiers du Québec.

Il a lancé le cri d'alarme à tous ceux qui ont autorité en cette province, démontrant que la grande priorité chez nous, aujourd'hui, était le développement économique. Il a fait, dans ce domaine, une douzaine de suggestions constructives. J'ose espérer que le premier ministre et le ministre des Finances sauront en tirer profit.

Il a aussi attiré l'attention du ministre de l'Education sur les problèmes financiers des commissions scolaires, n a fait des suggestions constructives pour aider le ministre à sortir de ce fouillis dans lequel il conduit son ministère.

M. le Président, aucun pays au monde peut se vanter d'avoir une situation économique enviable, si son agriculture est dans le marasme. C'est pourquoi, comme ancien ministre de l'Agriculture, je me dois de remercier sincèrement mon chef de s'être penché sur le problème agricole et d'avoir, encore dans ce domaine, donné au premier ministre et au ministre actuel de l'Agriculture plusieurs points d'appui pour leur faire réaliser leurs responsabilités vis-à-vis de la classe agricole, n a fait plusieurs suggestions constructives que je ne répéterai pas, parce que je sais qu'elles tombent dans un sol aride.

Je me souviens et vous vous souvenez sans doute que, pendant la campagne électorale de 1966, l'Union Nationale a vendu un programme à la population du Québec. Vous reconnaissez et tous les membres de cette Chambre reconnaissent ce programme qui a été vendu à la population, programme dont le premier ministre et le ministre de la Voirie ont dernièrement dit qu'ils l'avaient réalisé à 90%.

M. BERTRAND: Un peu plus.

M. COURCY: ... 90% réalisé, le programme de l'Union Nationale vendu. Regardons, après avoir été payés pour la vente, ce qu'ils ont livré aux cultivateurs du Québec. Si vous le voulez, nous allons ensemble passer en revue, article par article, la marchandise qui a été vendue. Ecoutez parler le chef du parti et tous les candidats de l'Union Nationale en 1966, lors-

que, dans chacune de leurs assemblées, dans les comtés ruraux, nous entendions cette chanson: « Chaque année, disaient-Ils, un nombre toujours plus grand de cultivateurs quittent leur ferme parce qu'ils ne peuvent pas se faire un revenu comparable à celui des autres industriels ».

Lisons ensemble la mise en scène de l'Union Nationale dans le domaine agricole. Ils disaient: « Qui, de plus, Jean Lesage et Alcide Courcy, affirment que 30,000 autres cultivateurs devront abandonner leurs fermes».

D'abord, M. le Président, cette déclaration est fausse. Mais voici ce que nous avions eu le courage de dire: 30,000 fermes dans l'état actuel ne peuvent devenir rentables, à moins d'avoir des politiques de regroupement des fermes, à moins d'avoir des politiques de consolidation. D'ailleurs, les politiques établies par le gouvernement précédent ont prouvé notre sincérité, et les chiffres démontrent qu'il y a eu une amélioration marquée, de 1960 à 1966. Ce n'est que par esprit de petite politicaillerie que nos adversaires politiques, dans le temps, ont tenté d'ameuter nos cultivateurs. « Le régime Lesage, disaient-ils — c'est écrit dans le programme — n'a pris aucune mesure efficace pour remédier à la situation tragique de l'agriculture. » Et plus loin, on dit; « Il y a une crise d'incompatibilité entre les cultivateurs et un régime qui n'a jamais compris les problèmes agricoles. » En 1966, surtout le ministre de l'Agriculture actuel versait des larmes de crocodile en parlant de la désertion des campagnes, de l'abandon des fermes non rentables. Et pourtant, il y a seulement quelque temps, le même ministre, maintenant qu'il a la responsabilité de la direction du ministère, déclare — écoutez bien —: « Le secteur agricole est en constante perte de vitesse, si l'on considère sa valeur en relation avec les autres secteurs de l'économie nationale. De plus en plus, disait-il, les économistes s'accordent à dire que la prospérité d'un pays est inversement fonction de la proportion de sa population active engagée dans la production agricole. » Et le ministre continue: « Par conséquent, disait-il, au moment où la technique moderne permet ft une poignée d'agriculteurs de nourrir toute une population, libérant ainsi des travailleurs pour les autres industries créatrices de revenus, l'exode rural — écoutez bien — l'exode rural — c'est le ministre de l'Agriculture qui parle, en 1969 — l'exode rural s'identifie de plus en plus à un indice de progrès, et non pas, comme on l'a cru trop longtemps au Québec et au Canada, comme un signe de décadence. » En 1966, l'Union Nationale dans son ensemble cria au scandale à cause de la dé- sertion des campagnes, cria au scandale de voir des cultivateurs quitter leurs fermes qui étaient non rentables et, depuis qu'ils sont au pouvoir, ils croient que c'est un signe avant-coureur d'une économie qui s'améliore. Cela fait changement, M. le Président.

Voilà les deux visages du ministre. En période électorale lui et ses collègues pleuraient sur le sort des cultivateurs qui désertaient le sol, mais quand il a la responsabilité de l'administration, il trouve que cet exode rural est un indice de progrès.

Dans ce programme, l'évangile de l'Union Nationale, on dit que le gouvernement précédent n'a pris aucune mesure efficace pour remédier à la situation tragique de l'agriculture. Je pense encore aux déclarations du ministre actuel qui répétait partout dans la province que nos cultivateurs doivent être plus instruits, que nos cultivateurs doivent devenir des hommes d'affaires. Qui a agi, M. le Président, dans le domaine de l'enseignement agricole? Qui a réglé le problème de l'enseignement économique sur le campus de l'université? Qui a réglé le problème de l'enseignement technique agricole en créant de toutes pièces Sainte-Anne-de-la-Pocatière et l'Institut de Saint-Hyacinthe? Ceci suivant les recommandations de la commission Régis?

M. le Président, qui a maintenu, avant 1966, l'enseignement agricole dans la quinzaine d'écoles moyennes d'agriculture que nous avions? Qui? Le gouvernement précédent. Je le dis sans me vanter. Qu'a fait le ministre actuel dans ce domaine? Où en est rendu l'enseignement agricole dans les quinze écoles moyennes d'agriculture du Québec?

J'accuse le ministre de l'Agriculture d'avoir, sous son administration, laissé fermer les portes desdites écoles. Qu'a-t-il fait avec l'école d'agriculture de La Ferme en Abitibi? Qu'a-t-il fait avec l'école moyenne d'enseignement agricole de Ville-Marie au Témiscamingue? Les portes sont fermées. J'accuse le ministre de prêcher d'une façon et d'agir d'une autre, de manquer de sincérité, en particulier dans ce domaine.

Donc, dans le domaine de l'enseignement, ce que le ministre a à nous montrer, c'est la fermeture des écoles moyennes d'agriculture.

Le ministre de l'Agriculture et les membres de l'Union Nationale se souviennent-ils d'avoir, dans leur programme, à l'article 1, promis un véritable code de syndicalisme agricole? Où en sont-ils rendus? Que s'est-il fait dans ce domaine? Je dis: Encore rien. Le ministre de l'Agriculture se souvient-il d'avoir dit et répété l'article 2 du programme agricole de l'Union Nationale: l'établissement d'une chambre agri-

cole? Il en faisait, pendant sa campagne électorale, sa priorité. Où est-elle, cette chambre agricole? Encore rien dans ce domaine.

Plus que cela, le comité d'élaboration des politiques agricoles que nous avions établi et qui siégeait une fois par mois avec les représentants des cultivateurs organisés, les représentants du mouvement coopératif et les représentants du ministère ne siège pratiquement plus.

L'article 3 promettait un plan quinquennal de creusage et de redressement de cours d'eau, de drainage souterrain et superficiel, d'épier-rement, de nivellement, d'amélioration des terres, etc. etc. Où est-il, ce plan quinquennal? Où est-il?

M. BERTRAND: Cela fait trois ans ou quatre ans...

M. COURCY: L'adjoint parlementaire du ministre de l'Agriculture doit être au courant.

M. BERTRAND: C'est rendu à la quatrième année.

M. COURCY: Justement, rien de rien. A chaque année suffit sa peine. A chaque année des travaux sont exécutés, comme ils étaient exécutés dans le passé. De la poudre aux yeux, cet article 31 Le ministre n'est pas plus avancé. Sur cette question, je dis: Zéro.

Où sont-elles, ces constructions d'entrepôts et d'usines de transformation bâties par un système de subventions et de crédits pour la production agricole, objet de l'article 4? Où sont-elles dans la province? Encore là, rien de rien.

Où est-il, cet office des produits laitiers avec la participation des producteurs et des consommateurs pour aider l'industrie laitière?Dans ce domaine, depuis le 1er avril 1967, ce que le ministre de l'Agriculture a fait avec ses collègues du cabinet a été de faire perdre aux cultivateurs du Québec une somme moyenne de $0.25 les cent livres de lait industriel, environ $8 millions et demi par année. Encore dans ce domaine, rien.

Pour ce qui est de l'article 6 — je les mentionne les uns après les autres — encore rien n'a changé dans la province de Québec. A l'article 7, il était question d'un dépôt de garantie, le paiement devant être fourni par tout courtier ou tout acheteur en gros. Où en sommes-nous rendus? Est-ce que les cultivateurs sont mieux protégés aujourd'hui qu'ils ne l'étaient? Je dis non. Non. Dans aucun domaine. A l'exception du lait pour lequel ça existait déjà, les garanties aux producteurs de lait industriel, rien n'a été fait dans ce domaine, M. le Président.

Le ministre n'a même pas été capable de convaincre ses collègues de l'Exécutif pour qu'au moins dans sa campagne de publicité, « Québec sait faire », il y ait une part, une petite part de cette publicité qui aille aux produits agricoles du Québec.

Ah, il y a bien, si cela le satisfait, la chanson — je ne sais pas par qui elle est chantée — qui parle des pois, des « beans », des tourtières, puis des folies comme ça. Il y a bien ça, mais, si ça satisfait le ministre, ça ne satisfait pas les cultivateurs du Québec. A l'article 9, « expansion du crédit agricole », enfin, il y a eu un soubresaut, à un moment donné. Il y a eu une augmentation de $15,000 à $25,000, mais, sur ces $10,000 additionnels, le cultivateur est dans l'obligation de payer un intérêt de 8%, alors qu'il payait 2 1/2% sur les premiers $15,000 pendant que nous étions au pouvoir.

De l'article 10, il n'y a que 50% de réalisé. Qu'attend le ministre pour implanter l'assurance-bétail qu'il a promise en 1966? Je lis bien: « A être adoptée d'urgence ». Où est-elle, cette assurance-bétail, M. le Président? Zéro encore dans ce domaine. Non, 5/10 dans ce domaine, parce que pour l'assurance-récolte, la loi avait été préparée et toutes les études faites par le gouvernement précédent; ils n'ont eu qu'à la déposer. C'est la seule fois qu'ils ont déposé quelque chose, parce que c'était préparé à l'avance, M. le Président.

Où en sont-ils rendus avec l'article 11, « l'établissement d'un office de grains de provende de l'est? » Où est cet office de grains de provende prévu à l'article 11? Rien, encore là. Article 12, « des groupes de gestion de ferme ». Ce ne fut que la continuation de ce qui se faisait au ministère de l'Agriculture. Je me demande comment les gens de votre droite se présenteront devant les cultivateurs du Québec lors de la prochaine élection. Iront-ils tenter de leur dire qu'ils ont réalisé leur programme agricole à 90% ou à 100%? Si le ministre actuel de l'Agriculture n'est pas gêné et si les députés qui ont fait campagne avec lui et qui sont dans cette Chambre ne sont pas révoltés de cette inaction de leur ministre de l'Agriculture, je me dis qu'ils sont de connivence avec le ministre pour maintenir l'agriculture dans un état d'infériorité vis-à-vis des autres classes de la société.

Et ce n'est pas tout. Vous avez hâte, j'en suis assuré, que je trouve une réalisation. Je mentionne maintenant l'article 13, « l'aide aux cultivateurs qui laissent leur ferme ». C'est environ 4,000 à 5,000 cultivateurs par année qui quittent leur ferme. S'en trouve-t-il un seul dans la province, depuis l'avènement de l'Union Nationale, qui ait profité de l'article 13 du pro-

gramme du parti de l'Union Nationale? S'en trouve-t-il un seul qui ait touché une seule subvention de départ? Encore là, dans ce domaine, rien de rien. Je suis porté à dire, comme la Piaf: « Non, rien de rien». Rien encore, à l'article 13. Je me vois encore dans l'obligation de dire que, dans ce domaine, comme dans tous les articles qui ont précédé, rien n'a bougé.

Prenons l'article 14, « remboursement aux cultivateurs de la moitié de leur contribution au régime des rentes. Le gouvernement actuel, par le régime des rentes, retire cette rente du cultivateur, se finance pendant un an et, après un an et parfois plus, rembourse le cultivateur, mais il a profité, pendant un an, de la contribution au régime des rentes en ne la remboursant pas immédiatement ou en les exemptant. Quand le gouvernement actuel livrera-t-il la marchandise pour laquelle il a été payé à l'article 15? Oui, l'article 15 — ce n'est pas moi qui le dis — « à l'exemption de l'impôt foncier de la terre et des bâtiments de ferme ».

On a promis et juré aux cultivateurs du Québec qu'ils ne paieraient plus d'impôts, qu'ils ne paieraient plus de taxes scolaires sur les bâtiments de ferme et sur le fonds de terre, qu'ils ne paieraient plus de taxes municipales sur les bâtiments et sur leurs terres. C'est écrit dans le programme: Promesses de l'Union Nationale!

Où en sont-ils rendus, les cultivateurs, avec cette promesse de l'article 15? Ils ne reçoivent que les 35% décidés par le gouverne ment précédent en remboursement des taxes scolaires qu'ils paient. Tout ce qui s'est fait dans ce domaine, c'est ce que le gouvernement précédent avait décidé. Donc, à l'article 15, encore une fois, zéro. Aucune réalisation.

Pendant la campagne électorale, on a crié aux cultivateurs qui avaient de la difficulté à vendre leur bois à pâte que le gouvernement créerait une régie pour l'achat du bois à pâte des cultivateurs et des colons. C'est encore écrit dans le programme de l'Union Nationale. Où est-elle, cette régie qui achète le bois à pâte des cultivateurs et des colons à un prix raisonnable pour leur permettre de vivre comme on le leur promettait? Elle n'existe pas encore, après près de quatre ans d'administration de l'Union Nationale. Encore dans ce domaine, rien.

Où sont les villages forestiers où des familles pourront s'organiser en coopérative et qui devaient être créés en 1966? Elles sont là, dans le programme, pas ailleurs. Que dire maintenant des allocations scolaires qui devaient être portées à $25 par mois pour tous les enfants qui fréquenteraient les écoles? Et pourtant, c'est dans le programme; c'est resté là.

UNE VOIX: C'est collé.

M. COURCY: Face à tout ça, je vais démontrer au ministre de l'Agriculture où il a conduit l'agriculture depuis quatre ans. Le ministre peut-il nier que l'indice composé du coût de production à la ferme excluant la vie de famille était de $110 en 1961, pendant que nous étions au pouvoir, qu'il s'est rendu à $145 en 1967, et est monté à $153 en 1968? Quand je dis l'indice du coût de production, je veux dire l'achat des marchandises et des services utilisés par les agriculteurs. Mais, pour faire face à ces augmentations du coût de production, le cultivateur a comme possibilité la vente de ses produits agricoles. C'est dans la vente de ses produits qu'il a la possibilité d'aller chercher l'argent pour compenser ces augmentations de coût de production. Où en sont rendus les prix moyens payés aux agriculteurs du Québec pour leurs produits, à l'exception du beurre, dont le prix d'achat est garanti par le gouvernement fédéral? A l'exception du beurre, dont le prix de soutien est garanti par le gouvernement fédéral et pas par le gouvernement provincial? Les bêtes à cornes, des veaux et des moutons, des agneaux, ont accusé une certaine hausse. Pour le reste des productions agricoles, c'est là que le cultivateur prend ses revenus. Le porc abattu, dont le prix moyen était de $34.21 en 1966, est tombé à $33.50 en 1969. Le prix moyen du poulet, de 24¢ en 1966, quand nous avons quitté le pouvoir, est tombé à 23¢, en 1969. Le prix moyen de l'avoine était de $0.91 le boisseau à comparer à $0.84 en 1969, le maïs, grain de production que le gouvernement précédent avait commencé à implanter dans le Québec, est passé, de $1.48 le boisseau en 1966 à $1.68 en 1969.

La pomme de terre, M. le Président: Nous avons travaillé à implanter la production de la pomme de terre dans le Québec, légume qui nous venait des provinces extérieures et même de pays étrangers. La pomme de terre, en 1966, était payée, prix moyen, au cultivateur du Québec, $2.51; cela est tombé, et aujourd'hui, en 1969, au dernier chiffre que nous avons, le prix était de $2.17. Les navets, les betteraves, de $15.45 la tonne en 1966, c'est tombé à $14.64 en 1969. Le foin de trèfle, $27.55 la tonne en 1966; c'est tombé, M. le Président — grâce aux bons soins du ministre — à $17.38 en 1969. Le maïs fourragé, $12.32 en 1966; le prix de vente en 1969, $8.83. Les oeufs, prix moyen en 1966,

$0.52 la douzaine, pendant que le prix moyen, en 1969, est de $0.50. Comment voulez-vous, M. le Président, que, les coûts de production augmentant et les prix de vente des produits agricoles diminuant, le cultivateur...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COURCY: ... soit capable de subsister?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je rendrais probablement service à l'honorable député en lui signalant qu'il lui reste une minute.

UNE VOIX: C'est assez pour faire remonter les prix!

M. COURCY: N'est-il pas vrai — et qui peut le nier — que le dollar canadien, en plus des prix à la vente des produits agricoles qui ont baissé, ne vaut que $0.81, à comparer au dollar de 1958? Le chef de l'Opposition a fait des recommandations précises que je ne répéterai pas. Je demande au ministre de l'Agriculture de voir à prendre ses responsabilités, cela presse. En 1958, date qui a précédé mon entrée en politique comme ministre de l'Agriculture, $46 millions étaient dépensés pour les agriculteurs; au dernier budget libéral en 1965-66, le gouvernement a dépensé $91 millions pour les cultivateurs du Québec.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

L'honorable député de D'Arcy-McGee.

M. Victor-C. Goldbloom

M. GOLDBLOOM: M. le Président, permettez-moi, à l'instar de tous mes collègues des deux côtés de la Chambre, de vous offrir mes félicitations et mes meilleurs voeux. Je sais que vous saurez diriger nos travaux avec impartialité et doigté. C'est ainsi que vous avez toujours agi comma vice-président de la Chambre et comme président de notre comité plénier. Je dois dire que vous avez fait votre apprentissage sous un excellent président de la Chambre.

Je voudrais aussi féliciter celui qui est aujourd'hui chef de l'Opposition, le député de Mercier, celui qui, comme vous le savez, porte maintenant et bretelles et ceinture et garde dans la serviette de son chef de cabinet un deuxième pantalon.

M. BELLEMARE: J'espère que cela va se rendre!

M. GOLDBLOOM: Je sais, M. le Président, que lui aussi, dans la tradition qui a été établie par le député de Louis-Hébert, celui qui a si bien mérité du Québec, le député de Mercier saura diriger l'Opposition de façon intelligente et ferme, de façon à opérer, dans cette Chambre, un changement majeur au cours des prochains mois.

M. le Président, nous sommes à l'étude d'une motion, motion de blâme, motion de non-confiance à l'endroit du gouvernement. Cette motion blâme le gouvernement de ne pas avoir su soutenir l'économie de la province, de ne pas avoir su combattre le chômage. Il y a deux jours, le distingué chroniqueur du New York Times, M. James Reston, écrivait que la pauvreté en Amérique du Nord n'est pas seulement un embêtement dispendieux mais une menace à la sécurité de notre société. Il a cité George Bernard Shaw qui a appelé la pauvreté le pire des dangers, le pire des crimes.

La pauvreté, M. le Président, vit, en Amérique du Nord, côte à côte avec l'abondance. La pauvreté, chez nous, est illuminée par la merveilleuse promesse de la société que nous nous sommes promis de bâtir et dont les ressources naturelles, industrielles et humaines sont ici au Québec autour de nous. Et ce n'est malheureusement pas sous le règne du gouvernement actuel que la richesse a été répandue et la pauvreté diminuée.

Le gouvernement, diront ses membres, — c'est justemant l'honorable ministre des Institutions financières qui l'a dit tout à l'heure — est, dans une large mesure, la victime et le prisonnier de la conjoncture, et cette conjoncture n'est pas simplement québécoise, diront-ils, elle est canadienne, occidentale, mondiale. L'argument est séduisant, mais il est inacceptable. Avez-vous eu récemment l'occasion, M. le Président, de visiter l'Ontario, 1'Alberta, la Colombie-Britannique? Etes-vous allé en Allemagne de l'Ouest, peut-être pour y emprunter de l'argent? Avez-vous visité un supermarché à Peekskill, New York, où à Wellesley, Massachusetts, comme je l'ai fait, pour comparer ce que l'on trouve là avec ce que l'on peut trouver chez-nous? Avez-vous parlé récemment avec nos architectes, nos constructeurs, nos travailleurs du secteur du bâtiment? Avez-vous parlé avec ceux de Toronto ou de Vancouver, dont plusieurs sont déjà des Québécois errants?

Il a déjà été souligné, M. le Président, que la mise en chantier d'habitations au Québec a accusé une baisse de 6.6%, tandis que dans les provinces atlantiques, l'augmentation a été de 11,000 à presque 14,000 pour la même période.

Etes-vous allé, M. le Président, dans les

petits magasins de Montréal, comme je le fais assez régulièrement dans mon comté, pour entendre presque partout que le chiffre d'affaires est sensiblement plus bas que celui de l'an dernier, et que tous les commerçants connaissent un nombre accru de chômeurs dans leur quartier et se trouvent, à regret, obligés de leur refuser du crédit?

Non, M. le Président, nous nous trouvons dans un cercle vicieux dont l'Union Nationale a été incapable de nous sortir. Ce cercle vicieux est constitué comme suit: le pouvoir d'achat étant à la baisse, le public achète moins dans les magasins; le commerçant commande donc moins chez ses fournisseurs; le fournisseur commande moins chez les manufacturiers; faute de commandes, le manufacturier, au mieux, maintient son personnel sans augmentation, et au pire, le diminue. Le chômeur, je vous l'assure, n'achète pas beaucoup dans les magasins, et on continue de tourner dans le cercle vicieux.

J'ai devant moi des documents publiés par l'ACEF, Association coopérative d'économie familiale, qui soulignent que, dans la période de 1966 à 1969, le pouvoir d'achat réel du consommateur a augmenté au Québec d'approximativement 9.6%. Le crédit à la consommation a augmenté pour la même période de 23.4%, tandis que la consommation elle-même n'a marqué qu'une croissance de 4.2% et que le chômage, comme nous le savons tous, a augmenté. Cela veut dire que, le pouvoir réel d'achat étant moindre, nous sommes obligés d'avoir recours davantage aux emprunts, au crédit. C'est un phénomène qui est généralisé, mais, quand l'économie va mal, les gens à faible revenu s'endettent, se mettent dans une situation pénible et nous n'avons pas été là pour les protéger.

Avons-nous une loi sur les petits prêts? Avons-nous — nous l'avions apparemment, à un moment donné — une loi de la vente à tempérament? C'était une loi qui datait de 1949, qui régissait le crédit sur tous biens meubles jusqu'à concurrence de $800, qui fixait le dépôt initial versé le jour même de l'achat à 15% du prix de vente à tempérament. Or, nous voyons partout, autour de nous, des ventes qui sont faites sans dépôt initial, sans montant à verser. Cette loi établissait les normes des versements différés selon la période des versements, jusqu'à un maximum de $800.

On sait que des ventes à tempérament sont faites à des chiffres qui dépassent de beaucoup ce montant de $800. La loi fixait les intérêts à 3/4 de 1% par mois sur le solde dû. Nous connaissons les taux d'intérêt que nos citoyens, surtout les moins fortunés, sont appelés à payer aujourd'hui. Cette loi transférait à l'acheteur le droit de propriété de la chose vendue au moment de l'achat, si l'une des conditions précitées n'était pas respectée, et elle enlevait le droit à tout intérêt, si l'une des conditions précitées n'était pas respectée.

M. le Président, nous avons gravement besoin de lois de cette nature. Nous avons gravement besoin d'une loi sur les petits prêts. Nous avons besoin de plusieurs lois pour protéger le petit consommateur. Faute de ces lois, l'économie, surtout quant aux gens de faible revenu, est en mauvais état. J'ai parlé des chômeurs. Ce ne sont pas seulement les chômeurs qui sont sans travail. Nous avons beaucoup de citoyens qui sont inaptes au travail.

Nous luttons contre le chômage de plusieurs façons, en principe. Nous essayons de trouver du travail ou de compenser le manque de travail par des allocations sociales. Mais celui qui est inapte au travail qu'est-ce que nous faisons pour lui? Je souligne que, parmi les assistés sociaux, les inaptes au travail sont plus nombreux que les aptes au travail. Nous avons adopté, à la dernière session, une nouvelle loi de l'aide sociale. Des recommandations ont été faites, surtout par un organisme distingué qui s'appelle le Montreal Diet Dispensary. Des chiffres ont été établis pour démontrer quel est le minimum vital nécessaire non pas pour des divertissements mais seulement pour maintenir un niveau convenable de santé.

Le gouvernement n'a pas su atteindre ces niveaux recommandés par un organisme responsable pour un minimum vital pour les assistés sociaux inaptes au travail. Pour les aptes au travail, le gouvernement a prévu la possibilité d'augmenter les chiffres d'allocations sociales par des montants assez restreints qui pourraient être gagnés par celui qui peut trouver du travail. Mais, dans notre état actuel de chômage, c'est assez difficile, surtout pour l'assisté social, de trouver du travail.

Nous parlons depuis assez longtemps du problème des médicaments pour les assistés sociaux. Les assistés sociaux se posent la question: Préférez-vous mourir malade ou mourir de faim? Vous avez le choix.

On aurait pu payer une quantité impressionnante d'ordonnances médicales avec le coût des missions au Gabon, de la réfection luxueuse de la salle du conseil des ministres ou de l'exploitation abusive de l'Office d'information et de publicité. Ou bien on aurait pu instaurer, il y a longtemps, un régime d'assurance-maladie avec tous ses bénéfices pour l'économie du Québec et ainsi obtenir les $200 millions qui ne nous servent présentement que comme cheval

de bataille sur lequel l'Union Nationale est perchée précairement à califourchon.

La pauvreté au sein de l'abondance, c'est ce qui existe en Amérique du Nord, mais avec l'Union Nationale nous n'avons pas l'abondance. Les ministériels peuvent citer des exemples, ici et là de progrès isolés, mais un fait demeure: le portrait du Québec a évolué au cours des quatre dernières années et pour le pire. Le Québec le sait, parce qu'il l'a vécu. De 1960 à 1966, ça allait bien: depuis 1966, ça va mal.

La pauvreté et le chômage massif ne sont pas inévitables.

Ils sont intolérables et inacceptables. Je cite ce que George Bernard Shaw a dit, il y a plus de quarante ans; « Modern poverty is not the poverty that was blest in the Sermon on the Mount. The objection to it is not that it makes people unhappy but that it degrades them. And the fact that they can be quite as happy in their degradation as the betters are in their exultation, makes it worse. Such poverty as we have today in our great cities... »

J'ouvre une parenthèse pour souligner que la pauvreté rurale est tout à fait aussi grave que la pauvreté urbaine. « ... degrades the poor and infects with its degradation the whole neighbourhood in which they live. And whatever can degrade a neighbourhood can degrade a country and a continent and finally the whole civilized world which is only a large neighbourhood. Its bad effects cannot be escaped by the rich. When poverty produces outbreaks of virulent infectious disease, as it always does sooner or later, the rich catch the disease and see their children die of it. « When it produces crime and violence, the rich go in fear of both. When it produces bad manners and bad language, the children of the rich pick them up, no matter how carefully they are secluded. The saying that we are members one of another is not a mere pious formula to be repeated in church without any meaning. It is a literal truth for, though the rich end of the town can avoid living with the poor, it cannot avoid dying with the poor. People will be able to keep themselves to themselves as much as they pleased when they have made an end of poverty. « But until then they will not be able to shut out the sights and sounds and smells of poverty from their daily walks nor to feel sure from day to day that its most violent and fatal evils will not reach them through their strongest police guards. »

M. le Président, j'ai dit que la pauvreté et le chômage massif ne sont pas inévitables, ils sont intolérables et inacceptables. Puisqu'ils sont In- tolérables et inacceptables, ils font la honte du Québec et nécessairement, donc, ils font la honte de l'Union Nationale.

M. BERNATCHEZ: Je propose l'ajournement du débat.

M. BERTRAND: Il va répondre à Alcide. M. LAPORTE: Qui répondra à Alcide? M. BERTRAND: C'est M. Bernatchez.

M. BERNATCHEZ: Je propose l'ajournement du débat, M. le Président.

M. LAPORTE: Comment l'ajournement du débat? n n'est pas dix heures, M. le Président.

M. BELLEMARE: Il y a une réception chez le président.

M. BERTRAND: Il y a une réception chez le président.

M. LAPORTE : M. le Président, il n'est pas dix heures.

M. BERTRAND: Ah! D'accord. M. LAPORTE: Qu'il réponde. UNE VOIX: Vous allez le regretter. M. René Bernatchez

M. BERNATCHEZ: M. le Président, nous avons entendu ce soir le député d'Abitibi-Ouest faire ses commentaires sur la situation agricole dans la province de Québec. Le discours qu'il nous a présenté ce soir est la répétition des nombreux discours qu'il récite dans toute la province de Québec.

M. COURCY: Oui, et tant que le programme ne sera pas réalisé.

M. BERNATCHEZ: Il se garde bien de faire de véritables comparaisons entre la situation d'aujourd'hui et celle qu'il a créée alors qu'il présidait aux destinées de l'agriculture dans la province de Québec.

M. COURCY: Il se répète.

M. BERNATCHEZ: ... M. le Président, l'Union Nationale a présenté tout un programme de rénovation agricole dans la province en

1966; ce programme est un programme réfléchi, ce programme est en voie de réalisation, et j'aurai certainement l'occasion, lors de la reprise du débat, de relever certaines affirmations gratuites du député d'Abitibi-Ouest alors qu'il accuse le gouvernement actuel d'avoir fermé les écoles moyennes d'agriculture. Le député d'Abitibi-Ouest se rappellera que c'est sous son administration qu'on a procédé, graduellement, discrètement, au transfert des écoles d'agriculture au ministère de l'Education.

Je pourrai, à la reprise du débat, apporter la preuve écrite de ce que j'avance, M. le Président. Le député d'Abitibi-Ouest a parlé d'un plan quinquennal que nous avons préconisé pour le drainage et l'amélioration des fermes. Nous avons préconisé l'établissement d'une telle politique alors que l'Union Nationale siégeait dans l'Opposition. Nous l'avons inscrit...

M. COURCY: Cinq ans, c'est un peu trop.

M. BERNATCHEZ: ...dans notre programme politique et nous sommes en train de le réaliser.

L'honorable ministre de l'Agriculture a donné toute une impulsion nouvelle au drainage des sols de la province de Ouébec, non seulement le drainage pour l'amélioration des gros cours d'eau, mais également en mettant l'accent sur l'augmentation de nos efforts pour le drainage souterrain. Nous avons non seulement commencé à réaliser ce plan quinquennal d'amélioration du drainage des fermes, mais nous avons également, grâce aux subventions qui ont été votées par le gouvernement en faveur de la classe agricole, nous avons augmenté je dirais presque de 100% les crédits destinés à l'amélioration des fermes à l'aide d'outillage et de ce qu'on appelle les tracteurs-bulldozers.

Il y a quantité de facteurs qui contribuent au succès, à l'avancement de l'agriculture dans la province de Québec. Il y a, certes, ces améliorations du fonds de terre, telles que les amendements calcaires, l'utilisation d'engrais chimiques, le drainage, l'amélioration des fermes, mais il y a également l'amélioration de la voirie rurale. Le député d'Abitibi-Ouest doit se rappeler qu'alors que nous siégions dans l'Opposition, nous reprochions à son gouvernement de sacrifier la voirie rurale en consentant tous les crédits du ministère de la Voirie aux grandes constructions. Depuis 1966, vous avez vu des a-m éliorations très palpables dans tous les milieux ruraux afin de permettre le transport des produits agricoles, afin de faciliter les échanges commerciaux avec les grands centres.

DES VOIX: Encore! C'est bon!

M. BERNATCHEZ: Le député d'Abitibi-Ouest félicite le chef de l'Opposition d'avoir, dans son discours en réponse au discours inaugural, parlé d'agriculture. Mais si vous avez lu son manifeste électoral alors qu'il sollicitait la confiance de tous les militants libéraux, dans tout son manifeste, il a dit un mot de l'agriculture, et il était entre parenthèses.

M. COURCY: Il est aussi bon que le ministre du Travail.

M. LAPORTE: Est-ce que vous auriez aimé mieux une accolade?

M. BERNATCHEZ: M. le Président, le député d'Abitibi-Ouest essaie aujourd'hui d'attribuer à l'Union Nationale toutes les difficultés que connaît la classe agricole. Mais, il a été au pouvoir. Il a été responsable de l'administration des politiques agricoles pendant six ans. Nous avons hérité des problèmes multiples qu'il a laissés en suspens.

M. BERTRAND: Epouvantable!

M. COURCY: Oui 3.5% de chômage; $92 millions pour l'agriculture du Québec...

M. LE PRESIDENT: A l'ordrel

M. COURCY: ... à comparé à $77 millions aujourd'hui.

M. PROULX: Lâchez-le.

M. BERNATCHEZ: Le député d'Abitibi-Ouest prétend que nous n'avons pas réalisé notre programme. Il a essayé de faire accroire à la population, et aux membres de cette Assemblée que c'était son gouvernement qui avait réalisé l'assurance-récolte.

M. COURCY: Déposez les rapports!

M. BERNATCHEZ: Son gouvernement a parlé d'assurance-récolte, comme il a toujours parlé des problèmes agricoles, mais il n'en a pas réglé un seul.

Nous avons trouvé au ministère de l'Agriculture des rapports et des études sur l'assurance-récolte, mais rien de défini, rien de concret. Cest le ministre actuel de l'Agriculture qui a passé des soirées entières avec ses collègues pour préparer la législation qui aujourd'hui rend service à la classe agricole.

Le député d'Abitibi-Ouest a déjà participé à l'élaboration de programmes politiques. Cest

lui qui devait bâtir un abattoir dans le Nord-Ouest québécois.

M. COURCY: Que le député lise l'article du programme de son parti où il est mentionné qu'un abattoir sera construit en Abitibi-Ouest.

M. BERNATCHEZ: Le député d'Abitibi-Ouest a commencé à parler d'abattoir dans le Nord-Ouest québécois en 1952 lorsqu'il s'est présenté pour la première fois. Il s'est fait battre, il ne m'a pas cru. Il s'est représenté en 1956, a été élu et en 1960, son parti a pris le pouvoir. Il a été nommé ministre de l'Agriculture. Il avait toutes les facilités possibles de réaliser cette grande promesse qu'il faisait depuis huit ans dans le Nord-Ouest québécois.

M. COURCY: Les sommes avaient été votées et...

M. BERNATCHEZ: C'est le spécialiste des grandes rumeurs.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! DES VOIX: Encore, encore!

M. COURCY: Encore!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. PAUL: M. le Président, demain laChambre se réunira à trois heures et après la période des questions, elle ajournera ses travaux pour permettre à la commission de l'Education de continuer l'étude de l'avant-projet de loi no 62. Cette commission pourra se réunir vers quatre heures.

M. BERTRAND: M. le Président, est-ce que je pourrais rappeler aux députés que demain matin, il y a un petit déjeuner de la faim organisé par le Mouvement catholique canadien pour le développement et la paix. Demain matin à huit heures trente. La contribution est de $5 ou plus et elle sera recueillie à l'entrée. Tous les députés sont bienvenus. C'est au café du Parlement.

M. LE PRESIDENT: LaChambre ajourne ses travaux à demain après-midi, trois heures.

(Fin de la séance: 22 h 3)

ANNEXE A

ARRETE EN CONSEIL CHAMBRE DU CONSEIL EXECUTIF

Numéro 717 24 FEVRIER 1970

CONCERNANT l'adoption du règlement général relatif à l'avis de licenciement collectif aux fins de l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

ATTENDU QUE l'article 45, relatif au licenciement collectif, de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre (bill 49, chapitre 37, 1969) a été décrété en vigueur par l'arrêté en conseil numéro 2160 du 23 juillet 1969, à compter du 2 août 1969, date de la publication de la proclamation dans la Gazette officielle du Québec;

ATTENDU QUE l'alinéa 1 ) de l'article 30 relatif aux règlements à adopter en vertu de cette loi a été décrété en vigueur par l'arrêté en conseil numéro 123 du 14 janvier 1970, à compter du 3 février 1970, et qu'une proclamation à cet effet a été publiée dans la Gazette officielle du Québec du 31 janvier 1970;

ATTENDU QUE l'article 45 de cette loi, prévoit, aux conditions et dans les délais minimaux qu'il édicte, que tout employeur doit donner avis au ministre des licenciements collectifs qu'il envisage;

ATTENDU QU'il y a lieu en vertu de l'alinéa 1) de l'article 30 de cette loi d'adopter un règlement général aux fins d'établir les modalités d'application de l'article 45 relatif à l'avis de congédiement collectif et d'en assurer l'efficacité,

IL EST ORDONNE, en conséquence, sur la proposition du ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre:

QUE, sous l'autorité de l'alinéa 1) de l'article 30 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, le règlement général relatif à l'avis de licenciement collectif aux fins de l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelle de la main-d'oeuvre dont copie est ci-jointe, soit adopté et prenne effet à compter de son approbation par le Lieutenant-gouverneur en Conseil.

LE GREFFIER DU CONSEIL EXECUTIF (Signé) Julien Chouinard

Ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre

REGLEMENT GENERAL

RELATIF A L'AVIS DE LICENCIEMENT COLLECTIF

AUX FINS DE L'ARTICLE 45 DE LA LOI SUR LA FORMATION ET

LA QUALIFICATION PROFESSIONNELLES DE LA MAIN-D'OEUVRE

SECTION I Dispositions introductives

Article 1. Le présent règlement peut être cité sous le titre de Règlement général relatif à l'avis de licenciement collectif aux fins de l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Article 2. Dans le présent règlement, les expressions suivantes signifient: a) "employeur": quiconque fait exécuter un travail par un salarié, sauf celui dont l'activité principale est la construction au sens de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction (chapitre 45, 1968); b) "salarié": une personne qui travaille pour un employeur moyennant rémunération; cependant, ce mot ne comprend pas: lo un administrateur ou officier de corporation; 2o un salarié saisonnier ou intermittent ; c) "entreprise": la réalisation de projets; d) "raison technologique": tout aménagement nouveau des moyens de production;

e) "raison économique": tout motif provenant de manque de matières premières, d'une modification des conditions du marché, de l'arrêt ou d'une réduction des commandes, du changement des produits, réduction des frais généraux, d'une réorganisation administrative, d'une suppression de certains services ou tout motif analogue; f) "licenciement": toute cessation de travail d'un salarié du fait de l'employeur; g) "licenciement collectif": tout licenciement qui touche au moins dix (10) salariés au cours d'une période de deux (2) mois consécutifs.

SECTION Il Application

Article 3. Le présent règlement s'applique à tout employeur qui licencie tous ses salariés ou une partie des salariés de l'un ou de plusieurs de ses établissements, dans une région donnée.

Le présent règlement ne s'applique pas à l'employeur qui 1- licencie des salariés affectés à une entreprise saisonnière ou intermittente, ou 2- licencie des salariés pour une durée indéterminée mais effectivement inférieure à six mois.

Le présent règlement ne s'applique pas également aux établissements affectés par une grève ou un lock-out au sens du Code du travail.

SECTION III Procédure

Article 4. L'employeur visé à l'article 2 du règlement est tenu de donner avis conforme à l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Article 5. L'avis est transmis par la poste à la Direction générale de la main-d'oeuvre et doit contenir : lo le nom et l'adresse de l'employeur ou de l'établissement visé; 2o la nature du produit ou service principal; 3o le nom et l'adresse des associations de salariés; 4o les raisons du licenciement collectif; 5o la date prévue du licenciement collectif; 6o le nom des salariés possiblement affectés par le licenciement collectif.

L'avis prend effet à compter de la date de sa mise à la poste.

Article 6. Au cas de force majeure ou d'événement imprévu, il incombe à l'employeur de faire la preuve de l'impossibilité de prévoir un licenciement collectif.

En ce cas, le ministre du travail et de la main-d'oeuvre peut fixer le délai à respecter pour procéder au licenciement collectif, après consultation de l'employeur.

Article 7. Durant le délai d'avis, l'employeur ne peut procéder à un licenciement collectif.

SECTION IV Comité de reclassement

Article 8. La Direction générale de la main-d'oeuvre prend charge de la constitution et de la bonne marche du comité de reclassement prévu à l'article 45 de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d 'oeuvre.

SECTION V Entrée en vigueur

Article 9. Le présent règlement prend effet le jour de sa publication dans la Gazette officielle du Québec.

Direction générale de la main-d'oeuvre 2875 boul. Laurier, Québec 10 10 février 1970.

ANNEXE Référer à la version PDF page 124

ANNEXE Référer à la version PDF page 125

ANNEXE Référer à la version PDF page 126

ANNEXE Référer à la version PDF page 127

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