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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 13 décembre 1996 - Vol. 35 N° 69

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Président: À l'ordre, mesdames, messieurs! Nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons débuter les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, article a de notre feuilleton.


Projet de loi n° 87

Le Président: À l'article a du feuilleton, Mme la ministre de l'Éducation présente le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Mme la ministre.

M. Paradis: M. le Président, strictement une demande d'information.

Le Président: Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, le leader du gouvernement vient d'appeler l'article a du feuilleton comme tel, et habituellement le feuilleton est distribué avant la période de questions. Est-ce qu'il y a un problème?

(Consultation)

Le Président: On me signale que le feuilleton était disponible à 8 heures ce matin sur Internet, mais qu'il y a eu effectivement des problèmes de distribution sur le support papier par la suite. Mais il était disponible sur le...

Je ne dis pas que vous êtes virtuels, mais je vous donne l'information et je vous indique... Mais vous devez savoir ou vous allez apprendre maintenant que, à partir du moment où vous êtes branchés, chacun peut le faire imprimer à partir de son bureau, une fois que c'est disponible sur Internet. Ça va?

Alors, Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Ce projet de loi vise à obliger la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques de Montréal à conclure une entente permettant à la Commission des écoles catholiques de Montréal d'établir une école dans un immeuble qui appartient à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Cette entente doit être approuvée par le ministre de l'Éducation.

Si les parties ne peuvent s'entendre, au plus tard le 20 janvier 1997, le ministre de l'Éducation peut déterminer les conditions d'utilisation, pour fins scolaires, des immeubles décrits en annexe.

Le projet de loi contient également d'autres dispositions visant à assurer son application.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, à moins d'être mal informé, M. le Président, la ministre aurait entre les mains un rapport de médiation dans ce dossier. Est-ce que le gouvernement peut rendre ce rapport de médiation disponible aux membres de l'Assemblée nationale et est-ce qu'il est de l'intention du leader du gouvernement ou du gouvernement d'entendre en commission parlementaire les parties intéressées, notamment les deux commissions scolaires, avant de procéder plus avant dans l'étude de ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je ne suis pas en mesure de répondre à la question demandée par le leader de l'opposition.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, oui, certainement, je suis prête à rendre disponible le rapport de médiation. Je ne l'ai pas avec moi maintenant, mais je vais m'assurer que, pendant la période de questions, on me le fasse parvenir et je le rendrai disponible pour l'ensemble des membres de l'Assemblée.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Quant à la deuxième partie de la question concernant les audiences des commissions scolaires et du médiateur avant que l'on procède, comme tel, à un projet de loi qui touche plusieurs aspects, il y a des commissions scolaires, il y a des éléments constitutionnels, il y a des éléments linguistiques, pour qu'on ait le maximum d'éclairage avant de se prononcer sur le principe du projet de loi, est-ce qu'on peut entendre, au moins, les principales parties intéressées à ce dossier?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, moi, ce que je peux peut-être proposer au leader, c'est qu'on pourrait peut-être se rencontrer, après la période de questions, regarder toutes les possibilités, mais, à ce moment-ci, M. le Président, je ne suis pas en mesure de donner, là, une réponse formelle à cette question.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article b de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 250

Le Président: À l'article b du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 250, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Charlevoix-Est et la Municipalité de la rivière Malbaie. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé, et je dépose donc ce rapport.

M. le député de Charlevoix présente le projet de loi d'intérêt privé n° 250, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Charlevoix-Est et la Municipalité de la rivière Malbaie.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre de l'Éducation.


Rapport annuel de l'Université du Québec et des établissements du réseau

Mme Marois: Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de l'Université du Québec et des établissements du réseau.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre des Transports.


Rapport annuel du ministère des Transports

M. Brassard: Oui. C'est le rapport annuel, M. le Président, 1995-1996 du ministère des Transports.

(10 h 10)

Le Président: Alors, le document est déposé également. M. le leader du gouvernement.


Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je dépose la réponse à la question 15 inscrite au feuilleton du 6 novembre 1996 par le député de Châteauguay.

Le Président: Alors, cette réponse est déposée.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission du budget et de l'administration et député d'Arthabaska. Alors, M. le vice-président, le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que ça fera quand même si c'est le député de Westmount–Saint-Louis?

Le Président: Bien sûr, le vice-président est habilité également.


Consultations particulières sur le projet de loi n° 69

M. Chagnon: Je vous remercie. Alors, M. le Président, je dépose le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 12 décembre 1996 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. M. le Président.

Une voix: Bravo, Jacques!


Étude détaillée du projet de loi n° 3

M. Chagnon: M. le Président, c'est dans l'enthousiasme aussi, comme vous pouvez le constater, que je veux déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 26, 27 novembre, 10 et 12 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés. M. le député de Roberval, au nom du président de la commission de l'économie et du travail.


Étude détaillée du projet de loi n° 74

M. Laprise: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 5 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, le rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Robert-Baldwin.


Mettre fin aux compressions budgétaires dans le réseau de la santé et des services sociaux

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 414 pétitionnaires, travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux de l'Ouest-de-l'Île de Montréal. Et je me permets, M. le Président, de saluer le président du syndicat CSN de l'Hôpital général du Lakeshore.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec veut mettre en péril notre réseau de la santé et des services sociaux;

«Attendu que les nouvelles coupures ajoutées à celles déjà en cours auront un impact négatif sur les services de santé offerts à la population de l'Ouest-de-l'Île de Montréal;

«Attendu que la région de l'Ouest-de-l'Île de Montréal a été touchée par la fermeture de l'Hôpital général de Lachine, au niveau des services à la population;

«Attendu que les employés de nos institutions n'en peuvent plus d'absorber de nouvelles coupures ayant des conséquences directes aux services offerts aux résidents et résidentes et à la population de notre région;

«Attendu que des employés de nos établissements songent à démissionner ou démissionnent du réseau à cause de la situation qui, à leurs yeux, est immorale;

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux pour qu'il arrête les compressions qui remettent en question notre droit à des services de qualité à la santé et aux services sociaux.»

And in english it reads:

«Whereas the Government of Québec is jeopardizing our health and social services network;

«Whereas the new cutbacks added to those already carried out will have a negative impact on the health and social services offered to the population of the West Island of Montréal;

«Whereas the West Island of Montréal has been affected by the closure of the Lachine General Hospital, in terms of services offered on the West Island;

«Whereas the employees of our institutions can no longer properly function with more cutbacks directly affecting the services offered to the residents and population of our region;

«Whereas the employees of our institutions are considering resigning or are resigning from the health and social services network due to the situation they view as being immoral;

«We, the undersigned, ask the National Assembly to prevail on the Minister of Health and Social Services to put a stop to cutbacks that are compromising the West Islanders' right to quality health and social services.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas, aujourd'hui, d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales seront tenus les votes reportés sur le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, et sur les amendements du ministre de la Justice et du député de Chomedey.

Je vous avise également qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion du député d'Orford, proposant de reporter l'adoption du principe du projet de loi n° 40.


Questions et réponses orales

Alors, nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. M. le député de Westmount–Saint-Louis, en principale.


Accueil par les syndicats de la contre-proposition du gouvernement concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique

M. Chagnon: Merci, M. le Président. De toutes les instances syndicales, M. le Président, la plus importante est la Fédération des affaires sociales. Il y a à peine une demi-heure, la Fédération des affaires sociales a annoncé publiquement qu'elle recommandera à ses instances le rejet de la contre-proposition gouvernementale.

M. le Président, expérimenté comme l'est le premier ministre négociateur en chef, je ne crois pas une seconde qu'il puisse douter que les instances de la FAS rejettent la proposition de la Fédération des affaires sociales. Dans ce cas, M. le Président, quel impact le rejet par la FAS de la proposition du premier ministre négociateur en chef aura-t-il, quel impact cette décision de la FAS aura-t-elle sur l'ensemble de la proposition offerte par le premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, à l'heure où on se parle, les instances centrales de la FTQ, de la CSN, de la CEQ, du Syndicat des professionnels, du Syndicat des infirmiers et infirmières, du Syndicat des fonctionnaires du gouvernement ont recommandé l'approbation de la proposition gouvernementale et toutes les fédérations de ces instances ont toutes accepté de la recommander également à leurs membres qui seront réunis en assemblée générale. La seule fédération qui se soit dissociée de cette acceptation commune, c'est celle de la Fédération des affaires sociales, qui est une des composantes de la CSN, la CSN ayant elle-même, de façon générale, approuvé la contre-proposition. De sorte que, maintenant, les assemblées générales seront consultées, recevront les rapports de recommandation de toutes les instances syndicales, sauf que l'assemblée générale des employés de la Fédération des affaires sociales recevra un rapport négatif. Mais les décisions sont entre les mains des membres, M. le Président, qui seront réunis au cours des prochaines heures et, je crois, des prochaines journées, en fin de semaine certainement.

Alors, je crois qu'il faut attendre de voir la décision qui sera prise par les membres, et nous aviserons ensuite de la suite des choses. Le gouvernement devra aviser, mais les centrales syndicales aussi devront aviser, et certainement la CSN, si jamais il y avait une division au sein de la CSN.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, peut-être que le premier ministre a eu l'appui tacite du président de la CSN, mais est-ce que le premier ministre peut donner le nom des autres fédérations, en dehors de la Fédération des affaires sociales qui est la plus importante avec ses 95 000 membres, qui soumettront l'appui à la proposition gouvernementale? Je pense à la FEESP, la FNEEQ, la FPPSCQ et le SPTM qui soumettront à leurs instances des modifications à la proposition soumise par le premier ministre, M. le Président.

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Oui. M. le Président, nous avons reçu à l'instant une dépêche qui nous confirme que la Fédération nationale des enseignants du Québec, la Fédération des professionnels salariés et cadres du Québec, le Secteur professionnel des technologies médicales, la Fédération des employés des services publics recommanderont à leurs instances l'acceptation de la contre-proposition gouvernementale.

En ce qui concerne la Fédération des employés des services publics, cette recommandation est assortie d'une exigence de signer des conventions collectives des syndicats de la Société des traversiers et de l'aide juridique qui, malgré l'entente intervenue entre la CSN et le gouvernement du Québec à l'été 1995, n'ont toujours pas réussi à signer leurs conventions collectives avec leurs employeurs.

À l'été 1995, ces deux syndicats n'avaient pas été partie aux négociations à l'époque et depuis ce temps les conventions collectives ne sont pas signées. Ce sont des conventions dont les négociations ne sont pas terminées, mais je dois dire qu'il faut bien noter que toutes ces fédérations recommandent, cependant, à leurs membres d'accepter la contre-proposition gouvernementale. Alors il reste, comme l'a dit le premier ministre, la FAS.

Le Président: M. le député.

(10 h 20)

M. Chagnon: M. le Président, le ministre ne convient-il pas qu'il y a à peu près 15 000 à 20 000 membres de la CSN qui ont proposé une acceptation de la proposition gouvernementale mais qu'il y en a 95 000 à 100 000 qui l'ont refusée?

Des voix: Eh oui!

Une voix: Ils ne l'ont pas refusée.

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, le député de Westmount–Saint-Louis doit convenir que ce n'est pas encore refusé, qu'il y a des assemblées générales des membres, c'est là que l'acceptation se fera ou le rejet se fera. Ceci étant dit, de notre côté, nous souhaitons toujours un accord négocié et nous allons faire tous les efforts pour y parvenir. Je pense que, pour le bien commun de tous, du gouvernement, de la population du Québec, ce serait beaucoup mieux que nous arrivions à un accord négocié.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Avenir de l'Institut de la technologie du magnésium

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Tous les intervenants économiques de la région de Québec sont unanimes: il faut protéger les acquis du Parc technologique et consolider les centres de recherche afin d'éviter l'exode de nos cerveaux.

Nous venons d'apprendre que l'Institut de la technologie du magnésium, fleuron du Parc technologique, dont la réputation internationale fait la fierté du Québec, se retrouve en situation financière précaire. Une rencontre avec la ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie afin de la sensibiliser à la situation financière de l'Institut n'a trouvé aucune compréhension de sa part.

Ma question, M. le Président, s'adresse au ministre de tutelle de la ministre responsable de la technologie: Peut-il nous expliquer...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, la députée de Jean-Talon sait qu'on doit désigner les membres de l'Assemblée nationale par leur titre correctement. Si elle ne le connaît pas, elle peut vérifier à ce moment-là dans les publications gouvernementales.

Le Président: Alors, Mme la députée de Jean-Talon, je vous prie de formuler votre question en respectant les usages de l'Assemblée, ici.

Mme Delisle: Le ministre des Finances peut-il nous expliquer le refus de la ministre responsable de la technologie, donc son refus d'accorder quelque aide que ce soit à l'Institut de la technologie du magnésium?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Je ne veux pas être trop sévère pour la question, mais, en plus de violer le règlement, la question insinue, en l'absence de la ministre déléguée, que la ministre déléguée n'a rien compris...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Simplement pour rappeler au ministre des Finances qu'en vertu de notre règlement c'est le président qui a fonction de veiller au respect du règlement, ce qu'il a fait dans ce cas-là.

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Notre règlement me permet parfaitement de répondre à une question. Et, quand une question est défectueuse à ce point, la réponse doit le refléter. Et je n'avais souligné qu'une partie des défauts de la question, parce que, en plus de dire que la ministre n'a pas compris, on affirme qu'elle a refusé. Les deux choses sont contradictoires, premièrement, et fausses. Et, dès la fin de cette période de questions, je vérifierai moi-même avec la ministre, et ses efforts conjugués aux miens devraient aller au fond de la question, pas essayer d'en faire une bataille partisane comme l'a fait la députée.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Comment le ministre ultimement responsable de l'Industrie et du Commerce peut-il dire que les faits allégués sont faux s'il vient de confesser qu'il n'est pas au courant?

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): J'ai simplement souligné des propos contradictoires de la députée dans sa propre question et je réitère que nous sommes animés du désir de voir notre capitale nationale être un centre technologique de haut niveau, et ce n'est pas des considérations partisanes mineures et des allusions mesquines qui vont nous faire dévier de cet objectif.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le ministre responsable de la région de Québec peut-il nous dire quelle démarche il a fait auprès de sa collègue, la ministre responsable de la technologie, afin de conserver 35 emplois en haute technologie ici, dans la capitale?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, la députée de Jean-Talon sait très bien qu'au mois de septembre, lors du forum des priorités pour la région de Québec et la région de la capitale, un des 12 projets qui a été retenu visait justement la consolidation des acquis en ce qui regarde les centres de recherche de la région de Québec et que, depuis ce temps-là, avec, entre autres, le partenaire qui est le Parc technologique, on a commencé à développer un plan assez précis pour s'assurer que cette consolidation, au cours des prochains mois et de la prochaine année, va pouvoir se faire.

Alors, je peux assurer la députée et cette Chambre que le ministre responsable de la région travaille en étroite collaboration avec sa collègue de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie et avec le ministre des Finances pour qu'on s'assure que cette consolidation des acquis, dans le domaine...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent. M. le ministre, en conclusion.

M. Rochon: Alors, je terminais en rappelant que, comme tout le domaine technologique est un des principaux axes de développement de la région, tout va être mis en oeuvre pour consolider les acquis de façon générale et singulièrement en ce qui regarde l'institut du magnésium.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, puis-je recommander au ministre responsable de la région de Québec de rencontrer le ministre des Finances ainsi que la ministre responsable de la technologie, et peuvent-ils s'engager ici, en cette Chambre, à rencontrer l'Institut de la technologie du magnésium dans les plus brefs délais, parce que ça va très mal, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, les engagements qu'on prend comme gouvernement, on les prend sur des résultats qu'on vise. J'ai rappelé qu'on a déjà pris un engagement de consolider les acquis dans le domaine de la recherche et de la technologie au Québec, et je pense que la députée de Jean-Talon peut nous laisser le choix des moyens. Nous prendrons les moyens que nous jugerons efficaces pour rencontrer nos engagements, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le ministre responsable de la région de Québec peut-il s'engager aujourd'hui, en cette Chambre, à puiser les fonds nécessaires à la survie de l'Institut de la technologie du magnésium dans le budget de la Société Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches, comme l'a fait son collègue le ministre responsable de la Métropole?

Des voix: ...

Le Président: Je comprends que tout le monde est de bonne humeur, mais je vous rappelle qu'à chaque fois que le président est debout, et les deux leaders me l'ont souligné hier, c'est du temps qui est en moins pour la période de questions et de réponses. Alors, M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je rappelle tout simplement que nos engagements sont des engagements quant aux résultats, ils sont fermes; et quant aux moyens, je vais prendre tous les moyens qui vont s'avérer efficaces pour rencontrer ces engagements-là. Et je vais sûrement profiter de tous les bons avis et conseils que pourra me donner mon collègue de la Métropole, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Montmagny-L'Islet.


Modernisation de la papetière Gaspésia à Chandler

M. Gauvin: En principale, M. le Président. Lors de son passage en Gaspésie, avant la tenue du sommet socioéconomique, le premier ministre a créé beaucoup d'espoir en s'engageant personnellement à régler plusieurs dossiers dont celui de la modernisation de la papetière Gaspésia à Chandler. Or, M. le Président, on apprend ce matin que Cedrico, industriel bien connu dans la région, aspirant partenaire dans la réorganisation de l'entreprise, abandonne son projet d'association.

Qu'entend faire le premier ministre, M. le Président, pour sauvegarder au-delà de 800 emplois, en usine et en forêt, dans la région, où le taux de chômage se situe à 18 %, le taux le plus haut de toutes les régions au Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement et moi-même, puisque j'ai été personnellement associé à ce dossier lors de mes déplacements dans cette région, avons la détermination de faire en sorte que non seulement cette usine reste ouverte, mais qu'elle puisse se moderniser et prendre sa place dans le grand réseau des papetières québécoises qui exportent avec grand succès sur les marchés internationaux.

(10 h 30)

Cependant, il faut des investissements considérables en termes de modernisation, et Abitibi-Price, qui est maintenant propriétaire de l'usine, après avoir perdu, comme partenaire, le New York Times , a décidé de s'associer avec un autre partenaire. Elle en a trouvé un, M. Bérubé, de Cedrico, une entreprise florissante de la région. J'ai rencontré M. Bérubé, moi-même. Et il y a des discussions qui se poursuivent en parallèle, d'une part entre Abitibi-Price et Cedrico et d'autre part avec des prêteurs, pour permettre la modernisation et le financement du partenariat entre Cedrico et Abitibi-Price.

Il se trouve que, entre les deux partenaires éventuels, Cedrico et Abitibi-Price, il y a présentement un blocage dans les négociations, puisque les conditions ont changé à la suite de la baisse des prix du papier à l'étranger, qui a changé un peu les conditions du financement. Ce que je sais, c'est que, il n'est pas définitif, ce retrait de Cedrico, que Cedrico souhaite renégocier les termes de l'association avec Abitibi-Price et qu'en deuxième lieu, Abitibi-Price, si ça ne fonctionne pas avec Cedrico, va se trouver un autre partenaire.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Gauvin: M. le Président, le premier ministre ne reconnaît-il pas qu'au-delà des faux espoirs qu'il a créés dans cette région, et il nous parle aujourd'hui que la négociation se continue, la population est en droit d'exiger de son gouvernement des actions concrètes pour maintenir cette activité économique? Qu'entend-il faire pour que ces communautés qui nous écoutent aient un peu d'espoir?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement n'a pas attendu la question du député pour agir. Il agit, depuis plusieurs semaines, de façon intensive. Il est au coeur des négociations pour permettre le financement de toutes les opérations. M. André Marcil, qui est mon représentant de l'exécutif pour les fins de ce genre d'investissement, travaille avec le ministère du MIC, travaille avec REXFOR, avec le Fonds de solidarité et avec un grand nombre de personnes, et avec Abitibi-Price en direct. Moi-même, j'ai discuté du dossier avec M. Oberlander, président d'Abitibi-Price, et je peux rassurer la population que le gouvernement surveille ce dossier avec vigilance, s'implique de façon concrète et va faire en sorte d'agir comme catalyseur pour le règlement à la meilleure satisfaction de tous.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte que, dans tellement de dossiers où il nous dit ou que ses collègues nous disent qu'il y a quelques fils à attacher, il s'agit plus de cordes à linge ou même de câbles d'acier qui sont en cause et que, dans le dossier des éoliennes promises par le premier ministre, le dossier dont on parle ce matin, le dossier de la cimenterie de Port-Daniel et le dossier de Newport, en Gaspésie, le premier ministre n'a fait que manipuler des faux espoirs, que sa moyenne au bâton, c'est zéro sur quatre et 60 000 emplois de perdus au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition s'acharne à mentionner quelques dossiers qui sont toujours en voie de réalisation, alors que, depuis plusieurs mois, on annonce tous les jours ou presque des investissements qui fonctionnent, où les fils ont été attachés. Alors, il y a toujours des dossiers qui sont sur la planche, qui remplacent des dossiers qui sont réalisés et d'autres qui viennent. Dans le cas de Newport, par exemple, il y a une transaction qui est sur le point de se conclure...

Une voix: ...

M. Bouchard: Pardon? Nous avons accepté les termes de l'entente qui va permettre la réouverture de Newport, au Conseil des ministres mercredi de cette semaine. Il reste des garanties, qui ont été exigées, qui doivent venir en exécution de l'engagement du contrat. Donc, les choses se font correctement, et elles se font de façon efficace, pour permettre, en effet, que l'emploi soit créé.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Richmond, en principale.


Perspectives de développement économique régional

M. Vallières: Oui, M. le Président. Le groupe de travail sur les villages prospères, présidé par M. Jacques Proulx, rendait public son rapport lors du Sommet sur l'économie et l'emploi. Malgré l'existence d'un ministre responsable des régions et d'un comité des affaires territoriales et régionales présidé par le premier ministre lui-même, le groupe de travail conclut qu'aucun organisme ou ministère ne se préoccupe spécifiquement du développement rural, tout se faisant sur une base sectorielle, sans que la préoccupation rurale ne soit véritablement prise en compte.

Considérant, M. le Président, que M. Proulx déclarait, 48 heures après le Sommet, et je le cite: «Le ver a mangé le poisson», ou, en termes encore plus directs, «la machine a "foqué" notre rapport», expression d'ailleurs consacrée maintenant en cette Chambre par le ministre de la Justice...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Vallières: ...est-ce que, M. le Président, le gouvernement a l'intention de donner suite à une des principales recommandations du comité, qui consiste en la mise sur pied d'une nouvelle structure gouvernementale chargée de la question rurale, soit la nomination d'un ministre de la ruralité dont la responsabilité serait le développement rural, de même que la création d'un conseil de la ruralité?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, j'ai rencontré M. Proulx il y a trois ou quatre jours. Nous avons précisément décidé de voir la place des villages prospères ou de la ruralité à l'intérieur de la simplification des structures qu'on est en train de faire. Il n'est pas question de recréer des réseaux. Il y a des rôles à jouer, concrets, il y a des aides à apporter à ce secteur dynamique, et M. Proulx, d'ailleurs, incarne très bien ce dynamisme rural, et nous avons convenu que, d'ici la fin janvier, nous aurons des propositions, des scénarios et que nous pourrons, très clairement, identifier même des enveloppes particulières pour permettre à ce secteur de se développer.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, est-ce que le ministre du Développement des régions ou, encore, le premier ministre partage le point de vue qui a été émis lors du Sommet par le ministre des Finances, par voie de communiqué, et je cite: «M. Landry accueille favorablement les propositions du rapport et entend y donner suite rapidement»? Et, le même jour, Solidarité rurale émettait un communiqué de presse qui faisait mention de la nomination, d'une proposition pour nommer un ministre responsable de la ruralité et un Conseil de la ruralité?

Est-ce que les deux ministres, qui sont voisins, peuvent nous indiquer s'ils partageaient, à ce moment-là, le même point de vue et si le ministre des Finances maintient ce qu'il a dit lors du Sommet?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, les recommandations de M. Proulx et de son groupe de travail, et c'était M. Proulx, mais c'était beaucoup d'autres personnes, sont extraordinaires de vision et de fraîcheur quant au développement de l'activité humaine dans les zones rurales, et nous avons l'intention de prendre tout ce qu'il y a de mieux dans ce rapport pour en inspirer nos politiques, et c'est déjà commencé, et mon collègue le ministre des Régions les a rencontrés, si je comprends bien, il y a deux jours.

Cela dit, ce n'est pas faire injure à la pertinence de ce rapport que de dire qu'on n'avait pas requis un rapport sur les structures, et ils nous ont fait une suggestion structurelle. On peut la regarder, mais ce qui nous intéresse, nous, ici, c'est plus le fond des choses que les structures.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, est-ce que le premier ministre partage le point de vue de son ministre et est-ce que le premier ministre est d'accord pour créer, comme ça, des attentes un peu partout, y incluant au Sommet, et tenir immédiatement, quelques jours après, un double langage, le contraire de ce qui a été dit par voie de communiqué de presse?

Est-ce que, M. le Président, le premier ministre ne reconnaît pas que son ministre responsable du Développement des régions a failli à sa tâche et qu'il n'a pas réussi à mettre en place une véritable politique, une stratégie de développement des régions et, donc, du monde rural, comme le démontre le rapport Proulx, M. le Président, comme le démontre le taux de chômage en région qui se situe à près de 13 %, comme le démontre l'exode des jeunes des régions, comme le démontre le taux de chômage chez les moins de 24 ans dans la région du premier ministre lui-même, qui se situe à près de 28 %, comme le démontre la fuite de nos entreprises?

Le Président: M. le ministre.

(10 h 40)

M. Chevrette: Oui, M. le Président, de toute évidence, le député manque de conviction, parce que, quand il essaie de rappeler certains faits isolés de ce qui se passe en région, je pourrais lui en énumérer pendant cinq minutes, des choses positives qui se passent en région, mais surtout ce désir de se prendre en main dans une simplification des structures et de faire de la place à l'ensemble des partenaires du milieu pour qu'ils puissent gérer véritablement leurs projets à partir d'enveloppes budgétaires, et non plus dans le cafouillis de programmes qu'ils ont mis sur pied.

Ceci dit, M. le Président, les régions du Québec, je pense à la Gaspésie, par exemple, avec la nouvelle politique énergétique dans l'éolien qui aura sa place, très claire, puis ça prenait des assises dans la politique, c'est fait; quand on pense à la Côte-Nord avec des projets de valeur ajoutée en matière forestière, ça va être fait puis ça va être annoncé très prochainement. Et, encore là, vous trouvez le moyen de trouver, probablement, un petit projet où il reste quelques fils qui pendent. M. le Président, j'aime autant une avanlanche de projets avec les fils qui pendent, il y a au moins de l'espoir de les raccrocher, alors que, vous autres, vous avez laissé fermer des institutions, des industries dans les milieux et que vous n'avez même pas eu le courage politique de faire quoi que ce soit pour les rouvrir, et vous nous reprochez, maintenant, M. le Président, quand on annonce...

Une voix: ...

M. Chevrette: Il veut dire quoi là.

Le Président: Alors, M. le ministre, pour répondre à votre question, et pour vous rappeler, à vous et à vos collègues, que la présidence peut vous interrompre ou simplement vous faire signe d'atterrir et de conclure. Alors, c'est une demande de conclure.

M. Chevrette: Bien, M. le Président, c'est parce que je ne vous ai pas vu faire ça à l'énumération du député de Richmond, j'ai été surpris.

Le Président: M. le ministre, j'ai l'impression que vous étiez pas mal absorbé par la question parce que j'ai fait la même chose. Alors, allez-y, pour la réponse. M. le député.

M. Vallières: Oui, M. le Président, même si le ministre manque d'énergie... Est-ce que le premier ministre, M. le Président, est conscient que son ministre responsable du Développement des régions continue de parler, continue de faire de la «parlotte»? Est-ce que le premier ministre a l'intention de demander à son ministre responsable du Développement des régions d'immédiatement mettre en place des mesures qui visent à colmater les 200 jobs par jour qui se perdent au Québec depuis l'arrivée, dans ce siège, de celui qui occupe le poste de premier ministre du Québec? À quand des mesures précises? À quand la fin de la «parlotte»? Ça fait près de trois ans que vous le faites, il n'y a pas de résultat. Vous créez des attentes en région, vous nous...

Le Président: M. le ministre responsable du Développement des régions.

M. Chevrette: M. le Président, je m'aperçois que le député de Richmond trouve le temps long de l'autre bord – trois ans. Ceci dit, M. le Président, je voudrais l'inviter moi, le brillant député de Richmond, à m'accompagner dans la tournée à travers les régions. Je vais l'inviter, je vais lui laisser la parole le premier, à part ça, pour exposer la brillante alternative qu'ils offrent. Moi, je vous dis, M. le Président, que l'objectif fondamental de ce gouvernement, ce n'est pas d'imprimer les dollars puis de faire miroiter qu'il y a des milliards et des millions de dollars de disponibles, mais c'est de faire le maximum avec les argents disponibles, c'est d'éviter le cafouillis des structures, le cafouillis des programmes, de se dégager des marges de manoeuvre, de permettre aux citoyens de participer et puis de se responsabiliser, et le jour où les citoyens seront véritablement conscients que ce sont eux les premiers responsables de leur développement, le Québec sera sur une maudite bonne voie de la souveraineté politique du Québec.

Le Président: En principale, Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: En complémentaire.

Le Président: En complémentaire.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Est-ce que le ministre, M. le Président, est au courant que, dans le Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, février-mai, on a fermé des entreprises, il y a 577 emplois qui ont été perdus, qu'en Chaudière-Appalaches c'est presque 150, que l'Estrie a perdu 250 emplois, Lanaudière 100 et quelques emplois, Laurentides près de 64 emplois, et, M. le Président, Montérégie Ouest et l'ouest de Montréal, c'est presque 2 710 emplois? Est-ce que le ministre est au courant, M. le Président, de toutes ces pertes d'emplois dans les régions du Québec?

Le Président: M. le ministre responsable du Développement des régions.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que la députée de Saint-François sait que, dans les Laurentides, où il s'est perdus 64 emplois, il s'en est créé 322? Est-ce qu'elle sait que dans Lanaudière, où il y a eu 140 emplois perdus, il s'en est créé 327? Est-ce qu'elle sait, M. le Président, que dans l'Estrie il s'est perdu quelques dizaines d'emplois mais qu'il s'en est créé 200, 300? Est-ce qu'elle sait qu'en Gaspésie le président du CRD m'a supplié de continuer à réaliser la régionalisation et la décentralisation du Québec pour qu'ils puissent se prendre en main et gérer les enveloppes de développement économique par mission, et qu'ils réussiront? Est-ce qu'elle sait tout cela, M. le Président?

C'est vrai, M. le Président, que, ici et là – et ça, c'est l'histoire du monde dans le domaine économique – il se perd des emplois et il s'en crée. Mais l'objectif de ce gouvernement-là, c'est d'avoir permis aux forces vives du Québec, que ce soient les patrons, les syndicats, le monde de l'institutionnel, le monde financier, de faire en sorte qu'ensemble on conjugue nos efforts pour se sortir de la période difficile que l'on traverse. Et ça, M. le Président, ça se fait ensemble, solidairement, et non pas avec des éteignoirs comme on en a en face de nous autres.

Le Président: Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, comment le ministre peut-il m'expliquer que le Québec a perdu 60 000 emplois depuis l'assermentation du premier ministre, c'est-à-dire 200 emplois par jour?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, comment ça se fait qu'on a 11 000 nouveaux emplois au Québec depuis novembre dernier? C'est parce qu'il s'en est perdu et il s'en est créé également, M. le Président. Et je demanderais à la députée de Saint-François d'appeler le président de la Table Québec-Régions, M. Henri Lemay, qui a déjà été membre dans cette Chambre, qui va lui dire comment on chemine très bien dans le développement économique régional.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Est-ce que le ministre d'État à la Métropole sait qu'il y a 131 000 chômeurs à Montréal, que le taux de chômage est à un niveau record à Montréal, que la ministre de la Solidarité dit qu'il y a un problème majeur à Montréal, et est-ce que les Montréalais doivent s'adresser à Jean-Roch Boivin pour avoir une oreille un peu plus attentive?

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Oui, M. le Président, le ministre d'État à la Métropole sait tout ça, et c'est pourquoi il travaille d'arrache-pied et il ne cessera pas de travailler tant que le taux de chômage ne sera pas au niveau des Américains.

Nous sommes dans des économies en transformation. Nous perdons des emplois, nous en gagnons d'autres. Nous perdons des emplois dans les choses traditionnelles, mais, Dieu merci, nous en gagnons dans les domaines de haute technologie. Nous avons perdu des emplois, c'est vrai, dans des usines comme Maple Leaf et des choses comme celles-là, mais nous en gagnons dans la biotechnologie, nous en gagnons dans les nouvelles technologies de l'information, et c'est pourquoi le travail que nous faisons actuellement, c'est de réorienter l'économie de Montréal vers l'économie du futur.

Mais remarquez que, quand vous nous dites ça: Qu'est-ce que vous faites, qu'est-ce que vous faites?, vous voudriez qu'on dépense plus d'argent. Bien, si nous avions une situation financière où nous pourrions dépenser plus d'argent, nous le ferions. Mais, comme nous payons 6 000 000 000 $ d'intérêts sur la dette par année, et que le déficit est de 3 200 000 000 $, et que vous avez doublé la dette pendant les six dernières années, si nous n'avions pas ce 3 000 000 000 $ à payer, nous pourrions baisser les taxes ou développer des programmes. La première priorité, c'est celle que nous partageons, de régler le problème du déficit.

Le Président: En principale, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Perception automatique des pensions alimentaires

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. La semaine dernière, les journaux titraient: «Pensions alimentaires: des ratés dans la perception»; «Pensions alimentaires: une balloune politique dont les femmes font les frais»; «Pensions alimentaires: plus difficiles à toucher». Malgré ça, M. le Président, le bienheureux ministre du Revenu continue de soutenir avec fierté que tout est sous contrôle.

M. le Président, le ministre est peut-être au courant qu'un fonds a été créé, fonds dans lequel le ministère du Revenu doit déposer les sommes qu'il perçoit des débiteurs alimentaires. Comment le ministre du Revenu peut-il accepter et peut-il expliquer que le Fonds des pensions alimentaires est déficitaire de plusieurs millions de dollars?

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

(10 h 50)

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je remercie Mme la députée, porte-parole de l'opposition officielle déléguée en matière de revenu, pour sa question. J'aimerais simplement réaffirmer, M. le Président, que nous en sommes à compléter la phase d'implantation de ce nouveau régime, qui à plusieurs égards nous permet de conclure à la pertinence de la mesure législative qui a été adoptée, puisque je vais donner l'exemple des nouvelles ordonnances, pour lesquelles moins de 10 % des cas que nous avons à traiter posent des problèmes de perception, comparativement à la situation antérieure, où la donnée était supérieure à 50 %.

Alors, je rappelle, M. le Président, que j'ai demandé à ce que, après un an d'implantation du régime et au moment de compléter cette implantation-là, soit préparé un bilan de l'implantation, autant dans ses aspects positifs que dans les aspects qui pourraient nécessiter quelque ajustement, que ce bilan sera rendu disponible dès la mi-janvier. Il sera examiné par un comité qui a été formé de différents représentants d'instances concernées et intéressées par ces questions, autant des représentants des débiteurs, débitrices que des représentants des créanciers et créancières, et nous verrons à ce moment-là, éventuellement, à ajuster les choses qui doivent l'être.

Mme Loiselle: M. le Président, le ministre vient de nous confirmer qu'il n'est même pas au courant que son fonds est déficitaire...

Le Président: Question.

Mme Loiselle: Le ministre reconnaît-il que son système est tellement lourd et embourbé, M. le Président, que ses fonctionnaires ne sont même pas capables de percevoir les chèques auprès des débiteurs alimentaires? Et, de ce fait, la conséquence de ça, bien, ce sont les contribuables québécois qui alimentent le Fonds des pensions alimentaires à même leurs taxes puis à même leurs impôts. Et j'en informe le ministre parce qu'il n'est même pas au courant, M. le Président.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, encore les gros mots et les accusations gratuites. Il est évident que nous avons comme responsabilité de récupérer les montants qui sont dus, d'abord, aux créancières et, deuxièmement, qui sont dus également à un moment donné au ministère du Revenu, parce que le ministère du Revenu, selon les dispositions, doit suppléer dans certaines circonstances, ce que nous faisons tel qu'il est prévu dans le mandat que nous avons, M. le Président.

Mme Loiselle: Est-il vrai ou faux que votre Fonds des pensions alimentaires est déficitaire d'environ 5 000 000 $? Vrai ou faux?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je viens d'indiquer à la députée que le bilan de l'ensemble de l'opération est à être constitué actuellement et que toutes les données seront disponibles en temps et lieu, M. le Président.

Le Président: M. le député de Verdun, en principale.


Frais spéciaux imposés aux étudiants ayant échoué plus d'un cours au cégep

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Dans le projet de loi n° 85 qui a été déposé la semaine dernière par le gouvernement et que le gouvernement essaie de faire adopter à toute vapeur, la ministre propose qu'à partir de 1997-1998 les étudiants de cégep qui auront échoué plus d'un cours soient soumis à des droits spéciaux de 2 $ par heure de cours.

Alors, ma question à la ministre est la suivante: Est-ce qu'elle est consciente que sa mesure est profondément discriminatoire envers les étudiants du secteur technique et professionnel? Est-elle consciente que, dans le secteur technique et professionnel, les cours comprennent beaucoup plus d'heures de cours que dans le secteur général? Ce qui veut dire qu'un étudiant du secteur technique et professionnel qui aura échoué un cours aura une taxe, un droit spécial à payer beaucoup plus important que son confrère du secteur général qui aura échoué un cours. Et pourtant est-elle consciente qu'elle continue à prétendre qu'elle favorise le secteur technique et professionnel?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, je remercie le député de Verdun de sa question, M. le Président. Je pense qu'il est tout à fait d'accord avec moi pour reconnaître que, si l'on veut créer une culture de la réussite, il faut d'abord détruire celle de l'échec, et c'est ce que nous tentons de faire avec cette mesure, M. le Président.

Effectivement, nous avons prévu qu'il y ait des frais de 2 $ l'heure de cours liés à la reprise du cours qu'on aura raté. Évidemment, on se rappellera toujours qu'il est possible d'avoir un échec sans que cette mesure ne s'applique pour la reprise du semestre qui suit, M. le Président.

Évidemment, s'il y avait des problèmes comme ceux que soulève le député de Verdun – et je crois que c'est pertinent de le soulever – je crois qu'il doit y avoir des correctifs apportés de telle sorte que les élèves du professionnel et du technique ne soient pas pénalisés.

D'ailleurs, je rappellerai, M. le Président, aux membres de cette Assemblée que le régime de prêts et bourses, soit le régime d'aide financière, sera, lui, adapté à cette réalité, puisqu'il tiendra compte, pour les élèves évidemment qui bénéficient de ce régime, de cette somme qui pourra être incluse au niveau de l'évaluation des besoins, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Gautrin: M. le Président, la ministre, simplement pour qu'on puisse débattre clairement, pourrait-elle donc déposer le nombre d'étudiants du secteur professionnel qui auraient été touchés par cette mesure? Combien ils auraient eu à payer dans le secteur professionnel actuellement et combien des étudiants du secteur général auraient été touchés et combien ils auraient eu à payer? Je comprends qu'elle va prendre avis de ma question supplémentaire, mais je pense que ce serait important qu'elle puisse déposer ça en Chambre avant l'ajournement et l'adoption du projet de loi n° 85, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je suis heureuse d'entendre le député parce qu'il doit bien comprendre que je n'ai pas avec moi ces données. Je prends donc avis et je m'engage à déposer cette information le plus rapidement possible, M. le Président.

Le Président: M. le député de LaFontaine, en principale.


Négociations avec les employés des centres de distribution et de l'usine d'embouteillage de la SAQ

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, la semaine dernière, en cette Chambre, le ministre du Travail se gargarisait ou se vantait qu'il permettrait aux Québécois de pouvoir avoir accès à la consommation de produits alcoolisés en ayant réglé le conflit qui perdurait à la SAQ. Or, M. le Président, nous apprenons qu'il n'en est malheureusement rien, car, en effet, encore une fois, cette institution est au bord d'une grève ou d'un conflit de travail et le problème que le ministre disait avoir réglé existe encore.

Est-ce que le ministre pourrait nous dire, en cette Chambre, pourquoi il s'est vanté ici d'avoir réglé quelque chose qui ne l'est pas? Et qu'est-ce qu'il entend faire pour effectivement le régler et permettre au Québécois d'avoir accès à des services de la SAQ normalement dans le temps des fêtes?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, la semaine dernière, ce qui était en cause, c'était les travailleurs de magasins et les travailleurs et travailleuses de bureaux de la SAQ qui étaient en négociations. Ce que nous avons réglé, c'est qu'ils ont obtempéré, quant à la grève pendant la période des fêtes, et la négociation a été reportée à un comité où il se fait une négociation raisonnée pour régler le reste du dossier.

La question soulevée par le député, ça me permet de préciser une chose, ce sont les travailleurs d'entrepôts et qui font la distribution qui actuellement menacent de faire la grève. La raison est la suivante: ils ont négocié un contrat de travail de longue durée avec leur employeur, jusqu'à l'an 2000. Dans leur contrat de travail, il y a une clause de réouverture pour renégocier les salaires. Alors, ce que demande le syndicat, c'est que la SAQ vienne s'asseoir avec eux pour renégocier les salaires, comme ils ont le droit de le faire, c'est tout à fait légal et c'est prévu à la convention, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Gobé: Alors, M. le Président, la semaine dernière... Est-ce que le ministre... M. le Président, alors pourquoi le ministre, la semaine dernière, nous a-t-il indiqué en cette Chambre que les Québécois et les Québécoises auraient libre accès, vu qu'il n'y aurait pas de grève, aux magasins de la SAQ? Est-ce qu'il n'était pas au courant qu'il y avait d'autres syndicats, d'autres employés qui, eux, étaient aussi en négociations et qu'il pouvait y avoir des problèmes? Est-ce qu'il pourrait aller au fond de ses dossiers, se renseigner sur la situation au complet avant de se lever en cette Chambre, de se pavaner et de faire des annonces qui n'ont pas d'allure et qui ne correspondent pas à la vraie réalité?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, le député de LaFontaine mêle les genres un peu. Je viens de lui expliquer que c'est une autre organisation syndicale qui est en cause. Deuxièmement, sa question me permet de dire cependant aux membres de cette Assemblée qu'on est prêt, et je suis prêt à faire la même chose avec les travailleurs d'entrepôts que ce j'ai fait avec les travailleurs et travailleuses de magasins, et on va tout faire, M. le Président, avec nos services, pour essayer de faire en sorte que les Québécois aient les services de la Société des alcools du Québec pendant la période des fêtes.

(11 heures)

Le Président: En principale, une seule question, Mme la députée.


Promotion des arts et de la culture à l'étranger

Mme Houda-Pepin: M. le Président, dans un article paru dans Le Devoir aujourd'hui et intitulé «Le Québec culturel en France: la cabane au Canada, c'est fini!», Stéphane Venne, ex-directeur du Service culturel de la Délégation du Québec à Paris et militant indépendantiste de longue date écrit ceci, et je cite: «J'ai souvent lu la surprise, voire la déception sur le visage d'artistes québécois apprenant que notre service culturel à Paris dépend de notre ministère des Relations internationales et non de la Culture. On peut s'en désoler, mais ce service ne saurait prolonger en France la sorte de prise en charge par l'État dont nombre d'artistes québécois bénéficient en sol québécois. Ce n'est ni un agent d'artistes, ni un imprésario, ni un éditeur, ni un promoteur pour quiconque débarque à Paris.»

M. le Président, après que de nombreux observateurs ainsi que des fonctionnaires du ministère des Relations internationales ont reconnu que ce ministère est devenu une coquille vide avec un ministre de trop, que répond la ministre de la Culture au constat sévère fait par Stéphane Venne et qu'est-ce qu'elle entend faire, au-delà des solutions temporaires, pour soutenir véritablement la promotion et la diffusion des arts et de la culture québécois en France et en Europe?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales.

M. Simard: M. le Président, dans un article qui est paru en effet ce matin dans Le Devoir , celui qui a été le représentant du ministère à Paris au sein de la Délégation générale pour les questions culturelles fait une analyse du fonctionnement de différents États dans ce domaine et conclut que, pour permettre à nos artistes et à la culture québécoise d'être diffusés à travers le monde et particulièrement en France, il ne fallait justement pas que les artistes s'imaginent que les délégations étaient des agents d'artistes, des établissements publicitaires. Et il soulignait, entre autres, l'exemple suivant: «Jamais les artistes américains n'ont compté sur leur ambassade pour faire leur promotion individuelle, pas plus que les artistes français ne se fient sur l'Ambassade de France à Ottawa pour être reconnus au Québec et aux États-Unis.»

Alors, ce que l'attaché culturel nous propose et propose aux Québécois, c'est d'avoir une activité de plus en plus intense au niveau diplomatique en France de façon à avoir une vitrine efficace de la culture québécoise et de l'ensemble des activités culturelles québécoises en France, ce que nous nous attardons à faire et que nous faisons, dit-il dans son article, avec beaucoup d'efficacité.

Le Président: Alors, cet échange met fin à la période des questions et des réponses orales.


Votes reportés


Rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 130

Il n'y a pas de réponses différées aujourd'hui, mais il y a plusieurs votes reportés. Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, et les amendements du ministre de la Justice et du député de Chomedey.


Amendements du ministre

Je mets d'abord aux voix les amendements de M. le ministre de la Justice aux articles 1, 4, 5, 6, 6.1, 7, 92, 100, 109, 110, 113, 121, 121.4, 126.1, 130.1, 153.1 à 153.6, 187.1 et aux annexes I à V de la version française du projet de loi, ainsi que les amendements aux articles 21, 33, 49, 56, 70, 81, 103, 117, 118, 120, 136, 137, 141, 144, 146, 148, 149, 152, 166, 181, ainsi qu'un amendement s'appliquant aux articles 20...

Alors, je reprends. Ainsi qu'un amendement s'appliquant aux articles 20, 22, 24, 26, 28, 34 de la version anglaise du projet de loi et un amendement à la version anglaise de l'article 17, auquel il a été apporté une correction de forme. Alors, ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Président: Alors, que les député en faveur de ces amendements veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre ces amendements veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Thérien (Bertrand), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:57

Contre:33

Abstentions:0

Le Président: Alors, les amendements sont adoptés.


Amendement du député de Chomedey à l'article 39

Je mets maintenant aux voix l'amendement proposé par M. le député de Chomedey à l'article 39 du projet de loi. Cet amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté? Adopté.


Autres amendements du député de Chomedey

Alors, je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Chomedey aux articles 52, 64, français et anglais, 116 et 53. Ces amendements sont-ils adoptés?

Une voix: Vote nominal.

(11 h 10)

Le Président: Vote enregistré. Alors, on appelle les députés.

Que les députés qui sont en faveur de ces amendements veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Thérien (Bertrand), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau).

Le Président: Que les députés contre ces amendements veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:58

Abstentions:0

Le Président: Les amendements sont rejetés. Je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 130 ainsi que les annexes du projet de loi amendés par les votes précédents. Ces articles et annexes amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, pour qu'on se comprenne bien, M. le Président, là, il y a eu un premier vote d'appelé où les amendements du ministre ont été proposés, tel que convenu. Il y a eu un deuxième vote d'appelé où il y a eu un vote unanime sur une modification ou un amendement du député de Chomedey. Il y a eu un autre vote d'appelé sur les amendements du député de Chomedey. Nous avons voté en sens inverse, dépendamment, de ce côté-ci de la Chambre, s'il s'agissait des amendements suggérés par le ministre ou par le député de Chomedey et, je le souligne au leader du gouvernement, il va avoir le même problème que moi, parce que, lui aussi, a voté, incidemment, en sens inverse.

Maintenant, vous appelez tous ces articles-là et vous nous demandez de voter l'ensemble. Étant donné qu'on n'a pas voté de la même façon, comment peut-on s'exprimer clairement?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avoue que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Je ne sais pas si on peut dire que la nuit porte conseil. Ha, ha, ha! Je suis un peu étonné, là, de la remarque du député de Brome-Missisquoi. Je pense qu'on a toujours procédé ainsi. On commence par les amendements, puis après ça les articles et annexes tels qu'ils ont été amendés. On peut comprendre qu'il y a eu des votes d'un côté ou de l'autre, là, il a pu y avoir des changements. On a toujours procédé comme ça. Alors, j'ai de la difficulté maintenant à comprendre l'argumentation de mon collègue.

Le Président: Moi aussi, M. le leader.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: Oui? M. le Président, ce n'est pas tellement compliqué, j'aurais pensé que vous comprendriez du premier coup. À partir du moment où nous avons voté contre les amendements du ministre et en faveur des amendements apportés par le député de Chomedey, et que le leader du gouvernement a fait exactement l'inverse, comme parlementaire, au moment où vous rappelez tous les articles et les annexes que l'on vient d'amender, je n'ai qu'un seul vote à porter à ce moment-là. Par mon vote, je peux défaire mon vote positif ou mon vote négatif. Vous me placez dans une situation, comme parlementaire, qui est intenable.

Ma question est: Avez-vous absolument besoin de ce vote-là, qui ferait en sorte que ça contredirait les votes que nous avons déjà portés?

Le Président: La question: Est-ce qu'on a absolument besoin? Je vais vous dire bien franchement, n'ayant pas... Je ne pense pas, quand vous avez procédé à mon élection, le 12 mars, que vous m'avez choisi parce que j'étais le spécialiste de ce genre de question là. Alors, on m'indique que...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Oui, d'une certaine façon, oui. Alors, on m'indique que c'est la façon de procéder. Je pense que, à ce moment-ci, il faudrait... Je pense que la question est claire. Je répète, dans le fond, l'intervention, c'est que je mets au vote maintenant tous les articles du projet de loi n° 130 ainsi que les annexes du projet de loi amendés par les votes précédents.

Dans le fond... Dans la mesure où les votes ont été enregistrés, je ne pense pas qu'un vote à ce moment-ci pris pour confirmer, dans le fond, d'une certaine façon, et adopter les votes précédents ferait en sorte que ça nous amènerait, par exemple, à nier un vote que vous avez enregistré précédemment. Je ne pense pas que qui que ce soit aurait le pouvoir et le droit d'interpréter de cette façon-là le sens du vote qui serait à prendre maintenant.

M. Paradis: Est-ce que je peux comprendre, M. le Président, de ce que vous venez de dire, qu'en fonction de l'amendement apporté par le député de Chomedey nous avons voté pour ces amendements? À ce moment-ci, vu que ce que vous nous proposez contient à la fois les amendements du député de Chomedey, pour lesquels nous avons voté en faveur, et les amendements du ministre, contre lesquels nous avons voté, à ce moment-ci, nous votons sur l'ensemble...

Une voix: Oui.

M. Paradis: ...et, à ce moment-là, nous, en pratique, ce qu'on fait, c'est qu'on défait le vote qu'on a pris sur les amendements apportés par le député de Chomedey?

Le Président: Ce n'est pas mon interprétation. Je pense qu'à ce moment-ci on pose un geste... À ce moment-ci, on pose un geste législatif qui entérine, et qui légalise, et qui fait en sorte que ces amendements deviennent – éventuellement, quand on aura adopté le reste également – un texte de loi. Je pense que, comme je l'ai dit précédemment, les votes qui ont été pris, enregistrés, en plus, précédemment, ne seront, d'une part, non pas niés par le vote qui serait pris à ce moment-ci, ils ont été enregistrés, et, légalement parlant, ce que nous faisons, c'est que nous entérinons l'ensemble de ce que nous venons de faire jusqu'à maintenant. Il ne s'agit pas là de nous amener dans une problématique où on se dédirait en faisant un vote actuellement, alors que ce n'est pas le cas.


Articles et annexes amendés

Alors, à ce moment-ci, est-ce qu'on procède au vote par appel nominal ou si on y va par consensus? Alors, vote inversé. Très bien. Alors, les articles et annexes amendés par les votes précédents sont adoptés.


Articles non adoptés par la commission

Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 130 que la commission des institutions n'a pas adoptés ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi. Ces articles ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Très bien. Alors, les articles... Ça va?

Des voix: ...

(11 h 20)

Le Président: Alors, je me fie à l'indication des deux leaders? Très bien. Les articles que la commission des institutions n'a pas adoptés ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont donc adoptés.

Je mets maintenant aux voix la motion de renumérotation du projet de loi n° 130 proposée par le ministre de la Justice. Cette motion est-elle adoptée? Alors, la motion est adoptée. J'apprécierais que ça se fasse dans le silence et le décorum, parce que ce n'est pas si simple que ça de procéder à tous ces votes-là et de ne pas faire d'erreur au plan législatif.


Rapport amendé

Je mets maintenant aux voix le rapport tel qu'amendé de la commission des institutions sur le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions sur le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, est-il adopté? Vote par appel nominal.

Alors, que les députés en faveur de ce rapport veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre ce rapport veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Thérien (Bertrand), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:58

Contre:33

Abstentions:0

Le Président: Alors, le rapport, tel qu'amendé, est adopté.


Motion de report de l'adoption du principe du projet de loi n° 40

Nous allons procéder maintenant à un second vote reporté, sur la motion de report du député d'Orford proposant que la motion en discussion portant sur l'adoption du principe du projet de loi n° 40, Loi modifiant la Charte de la langue française, soit amendée en remplaçant les mots «soit maintenant adopté» par les mots «soit adopté dans six mois».

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Thérien (Bertrand), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:60

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est rejetée.

Nous avons complété les votes reportés pour aujourd'hui et nous en arrivons maintenant à l'étape des motions sans préavis. Alors, je demanderais aux collègues qui doivent quitter l'Assemblée pour aller travailler à l'extérieur de le faire.

Donc, aux motions sans préavis, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, comme vous le savez, la commission de la culture s'est donné un mandat d'initiative sur les enjeux du développement de l'inforoute québécoise. Nous avons tenu plusieurs audiences publiques au cours du mois d'octobre et nous avions l'intention de déposer notre rapport final avant la fin de la session, avant Noël. Cela s'avère malheureusement impossible parce qu'il y a des réunions qui n'ont pas pu être tenues à cause des projets de loi et que nous aurons besoin de quelques séances de travail additionnelles au début de l'hiver pour compléter notre rapport.

Les membres de la commission souhaiteraient publier ce rapport dès qu'il sera prêt, compte tenu du fait que la ministre de la Culture et des Communications doit publier la politique gouvernementale sur l'inforoute au cours du mois de mars et que nous souhaitons bien sûr que nos recommandations soient prises en considération dans la préparation de cette politique. C'est pour cette raison que les membres de la commission demandent à cette Chambre le consentement pour déroger aux articles du règlement qui stipulent que les rapports des commissions soient déposés en premier lieu à l'Assemblée nationale et qu'ils soient publics à partir de ce dépôt. Il s'agit des articles 174 et 177 du règlement et 16 des règles de fonctionnement.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, juste par mesure de précaution, la députée de Marguerite-Bourgeoys m'en avait glissé un mot. Maintenant, je veux reprendre le libellé comme tel pour m'assurer qu'on atteint vraiment les objectifs qui sont recherchés. Il pourrait y avoir consentement pour qu'on puisse revenir un petit peu plus tard au cours de la journée de façon à finaliser la motion présentée par le député de Lévis.

(11 h 30)

Le Président: Le député de Lévis me faisant signe qu'il est d'accord avec la proposition, et le leader du gouvernement également, c'est ce que nous allons faire. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

À ce moment-ci, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'aménagement et des équipements procédera aux consultations particulières sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 41, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant les contrats d'assurance de responsabilité de certains établissements, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Président: Alors, ça complète les avis touchant les travaux des commissions.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader du gouvernement.


Document déposé

M. Bélanger: M. le Président, pour faire suite à la demande du leader de l'opposition, j'aimerais déposer, au nom de la ministre de l'Éducation, le rapport relativement au besoin de places-élèves pour les élèves francophones du primaire relevant de la Commission des écoles catholiques de Montréal dans le quartier Côte-des-Neiges, rapport remis à la ministre de l'Éducation du Québec par M. Thomas J. Boudreau.

Le Président: Ça va. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Strictement pour vérifier auprès du leader du gouvernement, dans le même dossier, s'il a eu le temps de vérifier quant aux consultations qui pourraient avoir lieu.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Pour répondre à la question du leader, non, je n'ai pas eu encore la réponse définitive.


Affaires du jour

Le Président: Très bien. Alors, nous passons maintenant aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 39 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 130


Adoption

Le Président: À l'article 39, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative. M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Alors, je me réjouis aujourd'hui de recommander à cette Assemblée l'adoption du projet de loi n° 130 sur la justice administrative. Cette législation constitue un document majeur en matière de justice, qui vient consacrer dans notre législation des principes juridiques fondamentaux pour mieux régler les rapports qui doivent exister entre l'administration publique et les citoyens.

Ces principes sont voulus et reconnus tant par nos tribunaux que par notre société. Ils ont noms: devoir de l'administration d'agir équitablement, qualité de la décision, humanisme dans la communication avec le citoyen, accessibilité à la justice, indépendance du tribunal, impartialité du décideur, loyauté dans les débats, cohérence dans les décisions.

Notre société, dans sa recherche de justice, a développé au cours des ans des législations, des politiques, des programmes pour réduire les inégalités sociales, pour favoriser les activités économiques, préciser les modalités de leur exercice, réduire les déséquilibres entre producteurs et consommateurs, patrons et travailleurs, pour assurer la sécurité des citoyens et les protéger des conséquences dommageables de certains risques inhérents à la vie en société ou encore pour protéger l'environnement et le territoire, la faune et la flore.

Toutes ces interventions ont multiplié les rapports entre les citoyens et l'administration publique, créé des attentes importantes chez les uns, favorisé le développement de systèmes importants chez d'autres et accru les points de friction. Ces interventions ont aussi connu un développement quelque peu anarchique, selon les besoins, les circonstances, les valeurs du moment.

Déjà, en 1966, le juge Beetz de la Cour suprême, alors professeur, y voyait une extraordinaire bigarrure. Il ne faut donc pas s'étonner que, depuis 25 ans, des études et des rapports nombreux ont discuté, souhaité, réclamé une réforme de la justice administrative. Malgré les difficultés soulevées en quelque sorte par la variété des modèles proposés et possibles...

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Président suppléant (M. Lefebvre): Oui, M. le leader.

M. Paradis: Compte tenu de l'importance du projet de loi, est-ce que vous auriez l'obligation de vérifier le quorum, s'il vous plaît?

Le Président suppléant (M. Lefebvre): Alors, il y a tout juste quorum. Allez-y.

M. Bégin: Ces interventions ont aussi connu un développement quelque peu anarchique, selon les besoins, selon les circonstances, selon les valeurs du moment. Déjà, en 1966, le juge Beetz de la Cour suprême, alors professeur, y voyait une extraordinaire bigarrure. Il ne faut donc pas s'étonner que, depuis 25 ans, des études et des rapports nombreux ont discuté, souhaité, réclamé une réforme de la justice administrative.

Malgré les difficultés soulevées, en quelque sorte, par la variété des modèles proposés et possibles et les critiques des tenants du statu quo ou de quelque chose d'autre toujours meilleur, je suis de ceux qui ont considéré que le but à atteindre était non seulement accessible, mais réalisable. Aussi, dès ma nomination, j'ai entrepris de mener à terme cette réforme des tribunaux administratifs et de la justice administrative que plusieurs souhaitaient depuis de trop nombreuses années. Il m'apparaissait urgent que le lien de confiance entre le citoyen et la justice, base du système démocratique dans un véritable État de droit, soit rétabli. Or, ce projet de loi n° 130 sur la justice administrative me semble un excellent moyen pour atteindre ce but.

J'ai cependant un regret, M. le Président: c'est de ne pas avoir eu la chance qu'ont eue mes prédécesseurs lorsqu'ils ont présenté à cette Assemblée des réformes majeures en matière de justice d'obtenir, du début à la fin d'importants projets, la coopération essentielle de l'opposition officielle. J'ai toujours cru, M. le Président, que la justice était une valeur si noble, si élevée dans notre société qu'elle transcendait les lignes de partis, qu'elle appelait, au-delà des légitimes divergences, à la coopération dans la recherche de la meilleure norme et de la meilleure expression de la règle de droit. Je le regrette d'autant plus, M. le Président, que cette réforme s'inscrit en droite ligne dans la tendance des travaux entrepris par mes prédécesseurs depuis 1986. En effet, M. le Président, le projet de loi qui est devant vous, et dont je recommande l'adoption, est le fruit de réflexions nombreuses et de multiples efforts. Et, sans trop remonter dans le temps, qu'il me suffise de rappeler les faits suivants.

Dans une décision du 13 août 1986, le gouvernement avait constitué un groupe de travail sur les tribunaux administratifs, sous la présidence du professeur Yves Ouellette, et il a reçu de ce groupe, le 10 août 1987, un important rapport qui a inspiré la réforme à maints égards, notamment quant au statut des membres.

Mon prédécesseur, après de nombreuses discussions au sein du gouvernement, avait réussi à présenter le premier projet de loi sur la justice administrative le 18 juin 1993, et cette Assemblée en adoptait le principe le 17 novembre 1993.

Parallèlement à la présentation du projet, le gouvernement acceptait le principe de la mise sur pied d'un groupe de travail pour, entre autres, analyser le pouvoir décisionnel des organismes administratifs et leur lien avec l'administration publique, de même que pour analyser leur organisation sur le plan des structures et l'accès aux citoyens. Le rapport de ce groupe, présidé par le professeur Garant et intitulé «Une justice administrative pour le citoyen», m'a été remis peu de temps après ma nomination comme ministre de la Justice, le 7 octobre 1994. Ce rapport et les travaux subséquents ont voulu répondre à l'un des reproches que l'on avait pu faire au premier projet de loi sur la justice administrative, auquel on reprochait son caractère essentiellement administratif. La réforme alors envisagée ne touchait d'aucune façon les rapports entre l'État et les citoyens, ce à quoi le projet de loi n° 130 a remédié.

La future loi sur la justice administrative, de même que la législation d'application envisagée, est également le fruit de plusieurs consultations. M. le Président, j'annonce déjà que, après l'adoption du projet de loi n° 130, je déposerai le projet de loi sur la loi d'application de cette loi et qu'il y aura des consultations qui seront faites au cours du printemps, ou à la fin de l'hiver ou au début du printemps, sur la nouvelle législation.

(11 h 40)

Alors, déjà, le projet de loi que j'ai présenté le 15 décembre 1995, soit il y a près d'un an, avait pris en considération les commentaires qui avaient été exprimés par 18 groupements et organismes sur le projet de loi 105 entre la présentation de juin 1993 et l'adoption du principe en novembre 1993, de même qu'il prenait en considération les travaux de mars et mai 1995 de la commission des institutions de l'Assemblée nationale. Rappelons en effet que cette commission a tenu une consultation publique au cours de laquelle les représentants du monde syndical, patronal, universitaire, municipal et agricole ainsi que des groupes communautaires, des ordres professionnels, des présidents et des membres des organisme visés ont été entendus sur les principes de la réforme exprimée dans le projet de loi 105 et le rapport d'octobre 1994. Trente et un mémoires avaient alors été présentés. Rappelons également qu'une deuxième consultation générale a eu lieu en février 1996 sur le projet de loi n° 130 et que la commission des institutions a alors reçu 49 mémoires. Il en est résulté plusieurs amendements que j'ai présentés en juin 1996 et redéposés en septembre 1996.

Enfin, j'avais rendu public, en juin 1996, un avant-projet de loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative afin que tous puissent constater comment s'est effectuée l'insertion de la réforme dans notre ensemble législatif. Ce dépôt a donné lieu à une troisième consultation générale, qui s'est tenue en septembre 1996. Vingt-deux mémoires ont été présentés à cette occasion, et il en sera tenu compte dans le projet de loi d'application que j'entends présenter à cette Assemblée après l'adoption du projet de loi.

Il faut compter, en plus de ces consultations publiques, les nombreuses consultations faites au sein de l'administration publique. Ainsi, en février 1995, par l'entremise d'un comité interne, une consultation fut faite auprès d'une quarantaine d'organismes visés par la réforme, et une autre consultation fut entreprise auprès de tous les ministères et organismes gouvernementaux pour vérifier l'applicabilité de la réforme et établir le contenu du projet de loi d'application.

Si je me permets de faire ce long historique, M. le Président, c'est pour bien indiquer que, si nous n'avons pu atteindre des consensus dans nos travaux, ce n'est pas faute d'avoir manqué d'écoute. Je reconnais que l'on puisse diverger d'opinions sur certains choix retenus dans ce projet, on peut certes avoir une vision différente sur les moyens à prendre pour déjudiciariser l'administration publique, sur la réunification en un seul de plusieurs tribunaux administratifs, sur les moyens les plus aptes à assurer l'indépendance des membres du futur Tribunal administratif ou sur l'ampleur qu'il faut donner au droit d'appel – les opinions sur ces sujets sont nombreuses et diversifiées – mais légiférer, c'est choisir entre tous les modèles possibles un seul d'entre eux.

Mais, avant de choisir, il faut aussi écouter; c'est ce que nous avons fait. Nous avons écouté les commentaires et les critiques et nous en avons tenu compte dans l'élaboration et la rédaction de la législation présentée et dans les amendements que nous y avons proposés, et cela, tout en maintenant les lignes de force de la réforme que sont la déjudiciarisation des décisions administratives, l'institution d'un organisme juridictionnel, la mise en place d'un statut pour les membres de cet organisme et l'institution d'un conseil de la justice administrative.

De plus, j'ai entrepris de mener à bien cette réforme. J'ai voulu qu'elle s'oriente autour de ces quatre axes et qu'elle serve d'abord le citoyen. C'est pourquoi le premier axe de la réforme me semble essentiel et prioritaire. Il indique la volonté de cette Assemblée de déjudiciariser les processus menant à la prise de décisions par l'administration dans l'exercice d'une fonction administrative. Il vise à favoriser la qualité des décisions de première ligne, comme il vise également à assurer un traitement équitable des personnes et un rapport fondé entre l'administration et les citoyens sur le respect et la reconnaissance des attentes légitimes des citoyens.

Les trois autres axes ont une perspective plus administrative, quoique encore il faille bien voir que la réforme institutionnelle a pour but essentiel de favoriser le lien de confiance nécessaire entre l'administration publique et le citoyen. C'est ainsi que l'institution d'un tribunal unifié, impartial et indépendant, l'établissement de règles de preuve et de procédure de base uniformes connues et accessibles, l'octroi d'un statut visant à mieux assurer l'indépendance et l'impartialité des membres de ce Tribunal et l'institution d'un conseil de la justice administrative qui soit le gardien de l'éthique du Tribunal et de ses membres sont des éléments institutionnels d'importance pour mieux établir le lien de confiance.

Avant de poursuivre dans cette voie, je voudrais, M. le Président, indiquer que j'ai lu avec beaucoup d'attention le jugement rendu par la Cour suprême du Canada, le 21 novembre dernier, dans la cause Procureur général du Québec et la Régie des alcools, des courses et des jeux contre l'entreprise 2747-3174 Québec inc., mieux connue sous bistro-bar-restaurant La Petite Maison. Il est certain que cette décision présente un intérêt réel au regard du projet de loi sur la justice administrative, mais, des quatre axes autour desquels la réforme a été articulée et que j'ai déjà mentionnés, seuls le statut des membres et la déjudiciarisation sont visés par ce jugement.

Sur la question du statut des membres, la Cour suprême considère que le statut des membres de la Régie des alcools, des courses et des jeux, un organisme dont les décisions sont finales et sans appel et protégées de surcroît par une clause privative, répond adéquatement aux exigences posées par cette Cour dans l'arrêt Valente en tenant compte bien sûr de la souplesse et de la flexibilité permises dans cet arrêt en se fondant sur la nature du Tribunal. On y lit sous la plume du juge Gonthier, et je cite: «Les conditions d'emploi des régisseurs se conforment aux exigences minimales d'indépendance. Celles-ci ne requièrent pas que tous les juges administratifs occupent, à l'instar des juges des tribunaux judiciaires, leur fonction à titre inamovible. Les mandats à durée déterminée, fréquents, sont acceptables. Il importe toutefois que la destitution des juges administratifs ne soit pas laissée au bon plaisir de l'Exécutif.» Fin de la citation, M. le Président.

Quant à l'indépendance de l'institution, le juge écrit qu'il n'a pas été démontré en quoi le ministre pouvait influencer le processus décisionnel et que le contrôle quotidien des activités de la Régie et de ses divers employés ainsi que la confection des rôles sont du ressort du président. Ainsi, cette décision reconnaît qu'il est tout à fait acceptable pour un juge administratif d'être nommé pour un mandat déterminé et renouvelable et donc de n'être pas nommé sa vie durant. Il est nécessaire, cependant, pour bien assurer l'indépendance de ces juges, que la destitution du juge administratif ne soit pas laissée au bon plaisir de l'Exécutif. À cet égard, le projet de loi non seulement satisfait à ces conditions, mais prévoit des règles susceptibles de mieux assurer l'indépendance et l'impartialité des membres du Tribunal administratif du Québec et de l'institution elle-même.

Il encadre en effet le processus de sélection et de nomination de même que le processus de renouvellement des mandats. Il prévoit que la destitution ne peut avoir lieu que sur la recommandation du Conseil de la justice administrative après une enquête tenue à la suite d'une plainte et que le gouvernement ne peut démettre un membre que s'il a perdu une qualité requise par la loi pour exercer ses fonctions ou que son incapacité permanente est établie par le Conseil de la justice administrative. Toutes ces dispositions se retrouvent aux articles 39 à 77 du projet de loi devant vous. De plus, eu égard au statut de l'institution, les règles sur la direction du Tribunal, ses séances et ses ressources, qui se retrouvent pour leur part aux articles 78 à 101, permettent d'assurer l'indépendance du Tribunal.

En ce qui concerne l'aspect de la déjudiciarisation des processus administratifs, je retiens de ce jugement que le juge Gonthier reprend essentiellement les critères élaborés par la Cour suprême dans l'arrêt Coopers & Lybrand, rendu en 1979 et qui nous était connu. Il qualifie de quasi judiciaire la révocation de permis faite par la Régie sur la base d'une atteinte à la tranquillité publique et applique conséquemment les articles 56 et 23 de la Charte québécoise. Ces critères sont: l'atteinte aux droits, le processus retenu pour prendre la décision, le caractère contradictoire de ce processus et l'application des règles de fond à plusieurs cas. La Cour précise ensuite que, et je cite, «la question de savoir si la décision ou ordonnance est finale est importante, mais le fait que des droits soient touchés n'entraîne pas nécessairement l'obligation d'agir judiciairement». Fin de la citation.

À cet égard, la récente décision de la Cour suprême est sans incidence sur le projet de loi n° 130 dès lors qu'elle analyse le quasi-judiciaire comme ne portant pas uniquement sur le fond même de la décision mais sur un ensemble de facteurs liés principalement au processus. Considérer quasi judiciaires toutes les décisions touchant aux droits des personnes ferait que la très grande majorité des décisions de l'administration serait de cette nature, puisque presque toutes et chacune des décisions rendues par des ministres, des fonctionnaires ou des organismes administratifs touchent les droits et les obligations des citoyens.

En déjudiciarisant les processus et en reportant devant le Tribunal administratif la contestation, le projet de réforme réduit le caractère quasi judiciaire. La contestation devant le Tribunal administratif envisagé offre un débat formel et loyal aux parties et toutes les garanties nécessaires d'indépendance et d'impartialité. La décision peut cependant avoir des incidences sur le projet de loi d'application de la Loi sur la justice administrative, puisqu'elle peut rendre nécessaire une plus grande déjudiciarisation de certains processus et une division plus claire entre la décision administrative et son exécution ou sa contestation.

(11 h 50)

Ayant qualifié la décision de quasi judiciaire, le juge Gonthier procède ensuite à l'examen du processus décisionnel mis en place par la Régie et décrit dans son rapport annuel, pour vérifier s'il est impartial. Il conclut à une crainte raisonnable de partialité institutionnelle, compte tenu de la confusion des rôles et de la promiscuité des employés que le cumul des fonctions de l'organisme suscite. Or, ce cumul s'avère intimement lié à la réalisation de la mission de régulation, de surveillance et de contrôle confiée à ce type d'organisme et à des ministres. À cet égard, la décision vient appuyer la nécessité de poursuivre la réforme, puisque les risques de partialité institutionnelle que l'on peut craindre de retrouver dans des organismes administratifs dits multifonctionnels ne devraient plus exister dans le modèle proposé, en raison de la déjudiciarisation des processus administratifs et de la division des fonctions administratives et juridictionnelles.

Le projet, en prévoyant que l'administration agissant par ces ministères ou par des organismes administratifs est tenue de devoir agir équitablement mais dans le cadre de processus administratifs simples et souples, tout en étant respectueux des droits des personnes, fait le pari qu'il n'est pas nécessaire que le citoyen soit toujours représenté par un tiers, procède suivant des processus apparentés au judiciaires et engage des sommes importantes pour obtenir justice de l'administration. En divisant la fonction administrative d'élaboration de politiques, de délivrance de permis ou d'enquête sur l'opportunité du maintien du permis, de la fonction de décider d'un litige après enquête et débat contradictoire, le projet renforce la division des fonctions. L'organisme ne peut être partial, puisque son rôle n'est pas de trancher mais d'enquêter et de décider, et le tribunal ne peut être partial, puisqu'il n'a pas participé à l'administration ou à l'enquête.

Cette décision me convainc donc, M. le Président, de la nécessité de poursuivre l'action que nous avons entreprise de déjudiciariser les processus administratifs et de diviser les fonctions administratives des fonctions juridictionnelles, d'instituer un tribunal qui offre des garanties d'indépendance et d'impartialité et de prévoir un statut pour ses membres, qui offre aussi ces garanties.

Je souhaiterais également, M. le Président, dire un mot sur une question qui a fait l'objet de multiples discussions lors des travaux de la commission des institutions ou à l'extérieur. Il s'agit du droit d'appel à l'encontre des décisions du Tribunal administratif proposé. Lors des consultations préalables à la présentation du projet de loi n° 130, j'ai posé à tous les intervenants la question de savoir s'ils jugeaient souhaitable qu'un tel appel soit institué. La moitié d'entre eux ont répondu par l'affirmative, l'autre moitié par la négative. Le projet de loi n° 130 ne retenait pas l'appel. Il nous semblait suffisant qu'existe la possibilité de s'adresser à la Cour supérieure pour permettre l'exercice du pouvoir de surveillance et de contrôle.

J'ai depuis continué ma réflexion et j'en suis venu à la conclusion qu'il pouvait être opportun de maintenir un certain statu quo et de laisser la possibilité d'un appel là où elle existait, à savoir en matière d'expropriation, d'évaluation ou de territoire agricole. Certains se diront choqués que la peine ne soit prévue que dans les cas où l'on traite d'intérêts économiques. Cela peut sembler paradoxal, mais il convient de considérer qu'actuellement le droit d'appel n'existe pas dans les matières traitées par la Commission des affaires sociales ou le Bureau de révision en immigration et que bien peu d'intervenants réclament un tel appel.

Il faut peut-être ici délaisser la pure théorie juridique pour considérer l'intérêt général des administrés. Ceux-ci souhaitent une justice de qualité, rapide et rendue à un coût raisonnable. Ils ne souhaitent pas éterniser les débats et engager des sommes importantes pour obtenir un gain limité. Au contraire, en ces matières, l'intérêt de l'appel existe vraiment pour l'administration, qui, elle, peut souhaiter faire établir une jurisprudence qui guidera son action pour un ensemble de dossiers. Pour le faire, est-il vraiment nécessaire qu'elle entraîne alors le citoyen dans un débat qui l'intéresse seule? Ceci ne m'apparaît pas souhaitable. En matière de biens, la situation est différente, puisque ce sont les intérêts économiques en jeu qui, eux-mêmes, en quelque sorte, financent l'appel.

Je souhaiterais revenir à nouveau, une dernière fois avant l'adoption de la loi, M. le Président, sur les traits essentiels du projet de loi que je recommande à cette Assemblée d'adopter. Comme je vous l'indiquais, il compte quatre axes: la déjudiciarisation des processus, l'institution d'un tribunal, l'octroi d'un statut aux membres, l'institution du Tribunal de la justice administrative.

Regardons d'abord la déjudiciarisation des processus. La loi nouvelle viendra déjudiciariser le processus menant à la prise d'une décision de première ligne dans l'exercice d'une fonction administrative, c'est-à-dire d'application et de gestion des lois. Cette caractéristique est fondamentale. Les décisions qui sont considérées sont le plus souvent des décisions qui ordonnent de faire ou de ne pas faire quelque chose, octroient des prestations ou des indemnités, des permis ou des autorisations. Il s'agit donc de décisions prises dans l'exécution de normes ou l'application de politiques sociales ou économiques. Cette déjudiciarisation des processus constitue une orientation dont les incidences seront majeures et les conséquences fort avantageuses non seulement pour l'administration, mais surtout et avant toute chose pour le citoyen.

La déjudiciarisation des processus n'a pas pour objet de modifier les fonctions des ministères et des organismes administratifs, mais elle changera leur manière d'agir. Il ne s'agit pas là d'une justice à rabais, fondée sur l'absence de processus. En effet, un processus souple et adaptable ne signifie pas qu'il y a absence de règles. Même si un agent de l'administration n'agit pas à titre judiciaire ou quasi judiciaire, il doit quand même accorder au citoyen l'occasion de le convaincre de l'existence de certains éléments. Il n'est pas nécessaire, selon notre expérience, d'agir ou d'être obligé d'agir à titre judiciaire ou de suivre des modèles décisionnels apparentés au judiciaire pour agir correctement et équitablement envers un citoyen et pour respecter ses droits. Il suffit d'être tenu, comme administration ou comme organisme délégué de l'administration, d'agir équitablement et de traiter le citoyen avec considération en lui donnant l'opportunité de communiquer avec l'agent de l'administration, de communiquer des renseignements additionnels ou de lui présenter ses observations.

Cette approche favorisera l'accessibilité des citoyens, la souplesse, l'efficacité et la célérité du processus décisionnel de l'administration gouvernementale. Elle libérera les décideurs de première ligne du formalisme d'une procédure judiciarisante, favorisant ainsi une action administrative plus rapide, flexible et moins coûteuse, et probablement plus respectueuse des personnes.

J'ai en outre bon espoir que la déjudiciarisation contribuera à la diminution du nombre sans cesse croissant des recours exercés à l'encontre des décisions de l'administration. En effet, une plus grande ouverture de l'administration pour être à l'écoute du citoyen contribuera certainement à rapprocher le citoyen de l'administration et à lui faire comprendre une décision, même défavorable.

Le sentiment d'injustice ressenti à l'occasion par certains citoyens est parfois suffisant, à lui seul, pour l'inciter à contester une décision de l'administration. Ce sentiment pourra alors être estompé et peut-être même remplacé par celui d'avoir été traité avec égard et compréhension par un décideur attentif et réceptif à son point de vue. Les articles 2 à 7 amendés prévoient que les procédures suivies par les ministères et organismes pour prendre une telle décision seront conduites dans le respect du devoir d'agir équitablement et identifient certaines procédures que ces ministères et organismes doivent respecter lorsqu'ils s'apprêtent à prendre une décision défavorable.

J'aborde maintenant l'institution du Tribunal administratif du Québec. Outre d'établir les règles générales qui régiront les organismes juridictionnels, dont les organismes chargés de trancher des litiges entre les administrés et les autorités administratives ou décentralisées, la loi instituera un organisme juridictionnel, le Tribunal administratif du Québec. Ce Tribunal intégrera la majorité des tribunaux administratifs actuels, qu'il s'agisse de la Commission des affaires sociales, du Bureau de révision en matière d'immigration, de la Commission d'examen des personnes atteintes de maladies mentales, du Bureau de révision de l'évaluation foncière et du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole, de même qu'il intégrera certaines compétences jusqu'à présent exercées par la Commission municipale ou par la Cour du Québec, notamment, quant à cette dernière, en matière de permis ou d'expropriation.

(12 heures)

Le Tribunal offrira ainsi un guichet unifié pour l'exercice des recours contre l'administration. La loi prendra soin cependant, par l'institution de sections, de respecter la spécialisation de la matière, qui est l'un des fondements de la justice administrative, et la composition du Tribunal sera multidisciplinaire. Certains considèrent que ce regroupement rendra le Tribunal plus vulnérable à la contestation constitutionnelle fondée sur l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867. Je ne crois pas cependant que ce risque soit élevé, compte tenu des compétences du Tribunal administratif, de son organisation et de sa finalité.

Le Tribunal administratif du Québec sera le premier forum chargé d'entendre et de trancher, à la manière d'un tribunal, le litige opposant le citoyen à l'administration, puisque la décision initiale qui fait l'objet de contestation est celle de l'administration agissant par un ministre, un ministère ou un organisme administratif. Elle sera prise, elle, de manière administrative. Aussi le Tribunal pourra-t-il faire l'examen des questions de droit et des questions de fait.

Le Tribunal administratif du Québec devra suivre, dans l'exercice de ses fonctions, les règles de preuve et de procédure prévues par la loi. Certains nous reprocheront d'avoir inscrit ces règles dans la loi, mais cela facilite grandement leur accessibilité et, par le fait même, leur connaissance. Cette inscription n'empêche pas que ces règles demeurent souples et qu'elles puissent affirmer vraiment la spécificité de la justice administrative, puisqu'elles s'inscrivent dans la recherche des objectifs de qualité, de célérité et d'accessibilité. En d'autres termes, elles visent à favoriser l'accès à la justice et à assurer le déroulement rapide et simple des audiences dans le respect des droits fondamentaux des parties. D'autres règles de fonctionnement et de financement de l'organisme viennent appuyer la nécessaire recherche d'indépendance et d'impartialité du Tribunal.

L'intégration au sein du Tribunal des recours contestant les décisions portant sur l'indemnisation des travailleurs victimes d'une lésion professionnelle a cependant été fortement remise en question. Certains, alléguant que cette indemnisation participe des relations de travail, s'y opposaient et préconisaient de plus l'introduction du paritarisme au sein d'un forum juridictionnel pour décider d'une telle question. D'autres, favorisant le maintien des règles du projet, s'opposaient à l'introduction du paritarisme parce que, selon eux, cette façon de procéder générerait des coûts plus élevés, des délais additionnels et un nombre accru de membres. J'ai convenu qu'il était plus sage à ce stade-ci que les recours en matière de lésions professionnelles ne soient pas intégrés au Tribunal.

J'aborde maintenant le statut des membres du Tribunal administratif du Québec. La nomination des membres d'un tribunal, leur recrutement et leur sélection ainsi que la durée et le renouvellement de leur mandat sont des questions majeures lorsqu'il s'agit d'apprécier l'indépendance et l'impartialité d'un décideur. Il était donc nécessaire que la future Loi sur la justice administrative établisse des règles sur ces points. Aussi, il est prévu que seules les personnes qui possèdent une expérience d'au moins 10 ans et pertinente à l'exercice des fonctions du Tribunal pourront être nommées membres du Tribunal administratif. Deux critères s'imposeront donc: un nombre minimum d'années d'expérience requise et un lien entre cette expérience et les fonctions du Tribunal.

De façon quasi unanime, tous reconnaissent, à l'instar de ce qui prévaut pour les tribunaux de l'ordre judiciaire, que la nomination et le renouvellement du mandat des membres relèvent de la prérogative de l'exécutif. Tous considèrent cependant qu'un processus de sélection doit être institué pour permettre d'assurer la transparence de la nomination et d'offrir au citoyen des garanties que les membres ont la compétence et l'intégrité nécessaires à l'exercice de leurs fonctions. La loi prévoira donc la mise en place d'une procédure transparente de recrutement, de sélection et de nomination des membres. Cette procédure permettra au gouvernement de mieux exercer sa responsabilité finale de nomination. Cette procédure prévoira la publication d'un avis de concours et la formation d'un comité de sélection chargé d'évaluer l'aptitude des candidats en se fondant sur des critères d'appréciation. Le nom des personnes déclarées aptes sera consigné dans un registre au ministère du Conseil exécutif, et une déclaration d'aptitudes sera valide pour une période de 18 mois.

Si nul ne conteste réellement le processus de sélection, la question de la durée et du renouvellement des mandats a fait l'objet de nombreuses discussions, discussions que la récente décision de la Cour suprême devrait atténuer. Par comparaison avec ce qui prévaut actuellement, puisqu'il faut bien se rappeler que cette réforme vient là-dessus changer considérablement la pratique, la loi prévoira, afin de mieux assurer l'indépendance et l'impartialité des membres du Tribunal, que la durée du mandat d'un membre sera de cinq ans et que le renouvellement de ce mandat sera examiné suivant la procédure établie par règlement du gouvernement. Cette procédure, comme pour la sélection, prévoira la formation d'un comité chargé de faire cet examen et les critères d'appréciation.

Le processus prévoira aussi que le mandat d'un membre sera renouvelé par le gouvernement pour cinq ans, sauf avis contraire notifié par écrit au membre au moins trois mois avant l'expiration de son mandat. En d'autres termes, contrairement à la situation actuelle, on ne retrouvera plus de membres incertains de leur futur en raison de l'absence de décision quant à la reconduction de leur mandat, puisque les règles quant à la durée et au renouvellement des mandats seront prévues expressément dans la loi, et particulièrement que l'obligation sera faite au gouvernement d'informer un membre, au moins trois mois avant la fin de son mandat, de son non-renouvellement, à défaut de quoi ce mandat sera automatiquement renouvelé. Il s'agit là, M. le Président, de changements majeurs. La loi prévoira en outre que le mandat du membre ne pourra, et je cite, «prendre fin avant terme que par son admission à la retraite ou sa démission ou s'il est destitué» – fin de citation – après enquête du Conseil de la justice administrative. Ces mesures devraient mieux assurer l'inamovibilité du membre pendant la durée de son mandat.

La loi établira également un régime portant sur la rémunération et les autres conditions de travail des membres du Tribunal administratif. À cet effet, elle donnera au gouvernement mandat de prendre un règlement sur la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail d'un membre. Il sera aussi établi que, une fois fixée, la rémunération ne pourra être réduite.

Enfin, M. le Président, le quatrième axe, le Conseil de la justice administrative. Enfin, la loi prévoira l'institution d'un organisme d'encadrement désigné sous le nom de Conseil de la justice administrative. Le Conseil sera formé de personnes représentant la communauté juridique, le public et les membres du Tribunal administratif. Le Conseil sera principalement chargé d'édicter un code de déontologie applicable aux membres, de recevoir et d'examiner toute plainte formulée contre un membre et de faire enquête en vue de déterminer si un membre est atteint d'une incapacité permanente. Le Conseil aura également pour mandat de donner son avis au président du Tribunal sur l'efficacité des règles d'application adoptées par le Tribunal en matière de procédures et sur l'harmonisation de celles applicables devant chaque section. Il fera aussi rapport au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet et fera des recommandations sur l'administration de la justice administrative et l'utilisation efficace des ressources mises à la disposition du Tribunal.

Toute personne pourra porter plainte au Conseil contre un membre du Tribunal pour un manquement au code de déontologie, à un devoir imposé par la loi ou aux prescriptions relatives aux conflits d'intérêts ou aux fonctions incompatibles, et le plaignant pourra obtenir copie du rapport d'enquête et des conclusions du comité. Il s'agit donc là d'une garantie de transparence importante.

En terminant, j'aimerais souligner qu'un des amendements apportés au projet de loi n° 130 fait en sorte que cette loi pourra être revue par les membres de cette Assemblée d'ici l'an 2003. Cet ajout veut souligner le fait qu'après quelques années de mise en oeuvre il sera peut-être utile de faire une première évaluation des dispositions de cette loi.

Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas souligner tout le travail intellectuel qu'a suscité cette réforme; je pense aux organismes, aux ordres professionnels ou aux individus qui ont présenté des observations sur ce projet de réforme de la justice administrative. Je ne voudrais pas oublier les nombreux auteurs des rapports rédigés depuis 25 ans et les différents fonctionnaires qui se sont succédé pour se pencher sur cette réforme, même ceux qui auraient souhaité que cette réforme prenne une autre direction et que certaines dispositions du projet de loi soient retirées ou bonifiées à leur satisfaction.

Je veux souligner aussi le travail des membres de la commission des institutions. Je n'ai qu'un seul mot pour toutes ces personnes: merci. Vous avez contribué à bâtir une réforme qui, je le crois sincèrement, sera marquante dans le domaine de la justice au Québec. Plus particulièrement, je tiens à mentionner tout le travail des experts du ministère de la Justice ainsi que du personnel clérical qui ont passé de très, très longues heures, depuis plusieurs années, sur ce dossier. Je pense notamment à Me Marie-José Longtin, directrice de la législation, à Me Robert Desroches et à Me Gaston Pelletier, qui ont été des piliers pour cette réforme.

En conclusion, je suis convaincu que cette réforme majeure en matière de justice administrative modifiera pour le mieux les rapports entre les citoyens et l'État et qu'elle permettra la mise en place d'institutions qui seront pour notre société un lieu pour débattre loyalement, de manière indépendante et impartiale des litiges entre les citoyens et l'administration. C'est pourquoi je recommande à cette Assemblée de bien vouloir adopter le projet de loi n° 130 sur la justice administrative. Merci, M. le Président.

(12 h 10)

Le Président: Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Chomedey.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je tiens à remercier mon collègue le ministre de la Justice de nous avoir fait lecture de la position de son ministère dans ce dossier. C'est toujours un plaisir pour nous de connaître dans le détail sa position. Mais, vu le discours qu'il vient de nous lire, je pense que c'est important pour le monde de savoir aussi que, lorsqu'on a fait la défense des crédits avec le ministre, on a appris que ses discours pouvaient coûter jusqu'à 10 000 $. Alors, j'espère que le public croit qu'il vient d'en avoir pour son argent avec ce ministre de la Justice.

M. le Président, le mot commun entre le titre du ministre qui vient de nous parler et sa loi, c'est le mot «justice»; c'est une loi sur la justice administrative. C'est un mot qui n'est pas revenu trop souvent dans le discours du ministre. Le ministre nous a surtout parlé – il vient de les remercier – de tous les auteurs qui parlent de ce sujet-là depuis des années; il a remercié, avec raison, les officiers du ministère. Mais un peu laissé pour compte dans toute son analyse, c'est l'effet réel de sa réforme et comment ça va affecter le public.

Quand on parle de justice, M. le Président, on a souvent l'image de Thémis, la statue, que l'on voit assez souvent, de cette déesse qui tient une balance et qui a les yeux bandés pour ne pas prendre un côté ou un autre et juste laisser peser dans la balance le pour et le contre, les deux côtés dans une dispute devant un tribunal, objectivement, d'une manière neutre, sans parti pris, sans préjudice. En matière criminelle, par exemple, il arrive que des avocats criminalistes, avec raison vu leur expérience, deviennent des juges, et d'excellents juges. Mais jamais ils ne se permettront d'entendre une cause qui concerne un de leurs ex-clients, par exemple. Ça, ça fausserait la balance. Le procureur de la couronne qui est de l'autre côté se dirait avec raison: Mais c'est quoi, les chances que le public ait confiance dans notre système s'il entend une cause concernant son ex-client? En matière civile, si vous arrivez devant un juge et que vous avez vous-même une cause qui concerne ce juge-là, vous direz: Mais la balance, elle penche d'un côté; ce n'est pas égal, ce n'est pas impartial.

En matière administrative, c'est un autre secteur du droit, c'est tout aussi important que les gens qui arrivent devant un tribunal aient la confiance, la conviction qu'ils vont être traités correctement, qu'il n'y aura pas de parti pris, qu'ils ne vont pas favoriser un côté ou un autre. C'est un mot, M. le Président, que peut-être pas beaucoup de gens comprennent lorsqu'on parle de «justice administrative». Droit criminel, tout le monde sait à quoi on fait référence. Une cause civile, il peut se dire: Oui, les contrats, des choses comme ça. Mais «justice administrative», c'est quoi, cette bebelle-là? Le ministre nous a parlé tantôt, il a utilisé souvent des mots comme «juridictionnel», «multidisciplinaire». Je ne suis pas sûr que, même si les gens qui regardent les travaux de ce Parlement comprennent bien souvent les sujets des lois, ce sont des mots qui sont appréciés de l'ensemble de la population.

Alors, je vais me permettre d'essayer, par le biais d'exemples concrets, de montrer de quoi on est en train de parler et d'expliquer pourquoi ça aurait été très important que le ministre de la Justice écoute tous les intervenants, les experts, le Barreau du Québec, qui lui disent: Ça ne marche pas, ce qu'il est en train de proposer là, qu'il les écoute et qu'il change sa loi. Il a refusé de les écouter, M. le Président. Le Barreau, notamment, qui est un organisme qui est créé par la loi pour veiller à la protection du public dans ce domaine-là, qui représente les intérêts du public dans le domaine de l'application des lois et qui vient souvent ici pour regarder et porter un oeil critique sur les lois, est foncièrement, fondamentalement opposé à la réforme qui est proposée ici par le ministre de la Justice.

Alors, le ministre peut nous regarder et dire qu'il a un regret que l'opposition ne soit pas d'accord avec son projet de loi. Il sait par contre, M. le Président, à quel point le Barreau a utilisé les termes les plus sévères pour blâmer non seulement le projet de loi, mais son attitude dans l'adoption du projet de loi. Puis on va avoir l'occasion ce matin de commencer à démontrer clairement c'était où, les problèmes, et pourquoi le ministre de la Justice a effectivement si tort d'agir de cette manière dans ce dossier-là.

Le Barreau reproche notamment deux choses au projet de loi: le fait qu'on nomme des décideurs, des juges, dans ce nouveau Tribunal administratif du Québec qui ne soient pas autonomes et indépendants; il reproche aussi qu'on enlève au public des droits d'appel. Dès le premier jour d'audience en commission parlementaire avec le ministre de la Justice sur cet important sujet, on a offert, M. le Président, notre collaboration. Il l'a eue: 80 % du projet de loi a été adopté ensemble, par l'opposition et le gouvernement ensemble, avec des amendements de part et d'autre. Mais, sur ces deux importantes questions là, le ministre s'est montré tout à fait inflexible, tout à fait insensible aux arguments et de l'opposition et du Barreau.

Depuis le premier jour, M. le Président, on a dit au ministre de la Justice qu'on seconderait sa réforme si ça visait à accroître les services à la population, si ça servait à augmenter les droits de la population, à améliorer la qualité de la justice administrative. On l'a aussi mis en garde dès le premier jour en commission parlementaire contre l'adoption d'une réforme qui risquerait d'être invalidée, c'est-à-dire cassée, rejetée par les tribunaux supérieurs si ça ne rencontrait pas les garanties d'autonomie et d'indépendance lorsqu'il s'agirait de nommer les juges. Malheureusement, le ministre ne l'a pas compris, ni du Barreau, ni de l'opposition, ni de l'ensemble des experts qui se sont réunis notamment le 18 octobre à l'Université de Montréal.

Et le ministre procède aujourd'hui en utilisant le bâillon. C'est la majorité du gouvernement. On est sur une motion de clôture des débats. Il a fermé les travaux en commission parlementaire; il refuse de laisser jouer les règles normales dans une démocratie, il utilise la majorité gouvernementale pour bâillonner la commission parlementaire et amener la présente motion de clôture. Et il le fait parce qu'il refuse de changer un des éléments les plus troublants de sa loi, c'est le fait que lorsque le citoyen va être face au gouvernement...

Parce que c'est ça, la justice administrative, c'est une personne qui a une cause qui concerne la machine, l'appareil du gouvernement. C'est pour ça qu'on appelle ça de la justice administrative, c'est l'administration et les administrés, vous et moi, les citoyens, les gens qui nous écoutent, les membres du gouvernement. Alors, qu'il s'agisse d'une indemnité – par exemple suite à un accident de la route – qu'il s'agisse d'un prestataire d'aide sociale sous une forme ou une autre qui veut aller contester une décision, peu importe le domaine, que ce soient des entreprises dans le domaine des permis d'alcool, que ce soit quelque chose d'environnemental, on est en train – et le ministre l'a dit tantôt, c'est une des seules choses qu'il a dites qui était correcte – de créer un organisme dont la mission est juridictionnelle dans le domaine de la justice administrative. Ça veut dire que c'est comme les tribunaux en matière criminelle, c'est comme les tribunaux en matière civile, il crée un tribunal qui émule la structure des tribunaux de droit commun, des tribunaux ordinaires en matière administrative.

Ce qui veut donc dire quoi, M. le Président? Ce qui veut donc dire que, de la même manière qu'en matière criminelle et civile, le citoyen qui arrive devant le juge administratif a le droit, a le droit strict... Et c'est le ministre de la Justice qui devrait être en train de préserver, et de conserver, et de lutter pour le respect de ce droit au lieu de le bafouer. Le ministre de la Justice est en train de dire: Ce n'est pas important. Peu importe ce que vous dites, peu importe ce que le Barreau dit, moi, j'ai une priorité politique. J'ai une priorité de mettre mon monde en place. J'ai une priorité de mettre en place des gens qui sont de mon parti politique, même si ça veut dire que je vais enlever les bons décideurs compétents, expérimentés, qui font déjà ce travail-là.

(12 h 20)

C'est pour ça, M. le Président, que ces gens-là ne seront pas autonomes, ils ne seront pas indépendants, parce que lorsque viendra le temps, tous les cinq ans, de renouveler le mandat, c'est-à-dire de décider si le juge garde sa job ou pas, c'est quelqu'un du gouvernement qui va décider si le juge garde sa job. Et vu que c'est le citoyen contre le gouvernement, dans le cas de la justice administrative, c'est normal, le citoyen ordinaire qui va arriver là-dedans va dire: Minute, là. Là, on a un ministre qui fait partie d'un gouvernement, qui donne des directives, des ordres à ses fonctionnaires sur comment agir. Les fonctionnaires m'ont coupé illégalement ma prestation ou ont réduit illégalement la somme à laquelle j'avais droit, puis vous êtes en train de dire que la personne qui va décider ça... C'est le gouvernement qui va décider s'il va continuer à avoir un chèque de paie? Il y a quelque chose qui ne marche pas, là, quelque chose qui ne tourne pas rond. Je ne suis pas face à quelqu'un d'indépendant, je ne suis pas face à quelqu'un d'objectif. Il y a un parti pris là-dedans. Il est du bord du gouvernement en partant parce qu'il ne veut pas aller à l'encontre du gouvernement.

C'est précisément ce que la Cour suprême nous a dit dans la cause que le ministre a citée tantôt. La Cour suprême a dit justement que, lorsqu'on dit que le public a droit, en vertu de notre Charte québécoise des droits et libertés de la personne, d'être entendu par un juge autonome et indépendant, ça s'applique aussi en matière administrative. Le ministre trouve moyen, à l'encontre de toute logique et de toute analyse faite par les experts, dans ce jugement-là, de se réconforter malgré le fait que, notamment, le juge Gonthier, dans sa décision, dit très clairement que lorsqu'on détermine le niveau d'autonomie et d'indépendance il faut regarder la structure en question, ce que ça fait, son importance, est-ce qu'il y a des appels. Mme la juge L'Heureux opine dans le même sens: on a le droit de déterminer la nécessité d'avoir l'inamovibilité en fonction du fait qu'il y a ou non un appel.

Ici, le ministre rate sur les deux chefs. Il diminue les droits des citoyens, il enlève une trentaine d'appels et, en même temps, dans ce nouveau tribunal de nature juridictionnelle, il est en train de baisser la barre, il est en train de dire: On n'a pas besoin de mettre des vrais juges, le public n'a pas autant le droit à un juge autonome et indépendant en matière administrative qu'il a le droit en matière criminelle ou en matière civile. C'est faux, M. le Président. Le ministre se trompe lorsqu'il dit ça. Mais il ne trompe pas les experts qui ont eu l'occasion de regarder le projet de loi, il ne trompe pas le Barreau, qui a pu prendre connaissance et du projet de loi, et de l'opinion du ministre, et du jugement de la Cour suprême. Le Barreau maintient, en date de cette semaine... Aussi récemment qu'hier le Barreau écrivait encore au ministre pour dire: Arrête, tu t'en vas sur un mauvais chemin, tu te trompes, ne fais pas ça, le public va subir les conséquences négatives des gestes que vous êtes en train de poser.

Depuis des semaines, l'opposition questionne le gouvernement sur ce projet de loi là. On leur demande: C'est quoi, votre vrai but là-dedans? J'ai déjà été en position d'expliquer très clairement que le ministre de la Justice n'a pas été capable de donner d'autres explications en réponse à cette question que le fait que le gouvernement veut conserver une machine qui est sous son contrôle et dans laquelle il peut mettre son monde, nommer ses amis, les amis du Parti québécois, le parti au pouvoir. C'est ça, le but inavoué.

Il y a un autre élément que l'on soupçonnait, mais on a eu juste la confirmation de ça hier, lorsque le député de Laval-des-Rapides, le ministre de la Métropole, a parlé ici, dans cette Chambre. Il a fait un aveu très intéressant, et ça confirmait quelque chose que mon collègue le député de Frontenac, lui-même un ancien ministre de la Justice, avait déjà eu l'occasion de dire en cette Chambre. Le gouvernement n'est pas en train de procéder à une réforme administrative qui avantage le citoyen. Non, M. le Président. Ce que le député de Laval-des-Rapides a confirmé ici, dans cette Chambre hier, c'est que le vrai objectif du gouvernement, c'est de sauver de l'argent. Alors, il y a deux manières par lesquelles ils vont sauver de l'argent avec cette loi-là. D'abord, ils enlèvent des droits aux citoyens, des droits d'appel, et, ensuite, ils mettent en place une structure où le monde va être moins porté à aller en appel, et ça va alléger le gouvernement, ça va lui donner l'occasion de se donner raison vis-à-vis du citoyen de plus en plus souvent. Il n'y a pas d'appel, M. le Président. Ce qu'il est très intéressant de constater, c'est que non seulement cela va à l'encontre de tout ce que les intervenants dans ce dossier ont déjà dit au gouvernement, mais ça va à l'encontre même du programme sur lequel le Parti québécois s'est fait élire en 1994. Lisons un seul paragraphe de leur programme électoral et comparons ça à ce qu'on vient d'entendre ici, dans cette Chambre, et de la part du ministre et dans notre analyse.

Le Parti québécois, en 1994, avait promis la chose suivante, et c'est le député de Laval-des-Rapides qui était le président de la commission de la justice qui a écrit ça: «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes et personnes exerçant des fonctions quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial et indépendant.» Et la Cour suprême, et le Barreau, et les experts, et l'opposition disent la même chose au ministre: Il est à côté de la «track» avec sa loi; il ne rencontre pas cette première qualité là. En plus – et ça, c'est beaucoup plus facile – il n'y a pas de débat là-dessus: «Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel.» M. le Président, ce n'est pas nous qui l'avons promis. C'est le Parti québécois, en 1994, qui a promis aux citoyens qu'il y aurait un appel des décisions rendues par ces organismes ou personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.

M. le Président, dans la loi que le ministre est en train de forcer ici, à l'Assemblée aujourd'hui, dans la loi dont l'adoption va être l'objet d'un bâillon, dans cette loi importante dans le domaine de la justice, le ministre de la Justice est en train d'enlever des droits aux citoyens. Le ministre de la Justice est en train d'enlever des appels dans une trentaine de domaines où l'appel existe déjà. Il y a seulement trois domaines où le ministre de la Justice va conserver l'appel: en matière d'évaluation foncière, en matière d'expropriation et en matière de territoire agricole. Le virage à droite de ce gouvernement-là, sans mandat populaire, le virage à droite dicté par le premier ministre désigné, le virage à droite du gouvernement du Parti québécois vient d'avoir son aboutissement dans une décision, un projet de loi qui brime les droits des citoyens et donne des droits d'appel exclusivement aux mieux nantis de la société. Ce ne sont que les gens, M. le Président, qui ont un problème dans ces trois domaines-là: l'expropriation, l'évaluation foncière et les territoires agricoles, qui vont jouir d'un droit d'appel vers la Cour du Québec. Fascinant, ça!

Le gouvernement du Parti québécois donne des droits d'appel, des droits qu'il a promis à tout le monde dans son programme de 1994, seulement aux plus riches, ceux qui ont une maison dont l'évaluation est en dispute, ceux qui sont propriétaires d'une usine dont un bout risque d'être exproprié, ceux qui sont propriétaires d'un terrain agricole dont une partie veut être utilisée pour une autre fin. Ce sont les gens, M. le Président, qui, avec la bénédiction du premier ministre du Québec, premier ministre désigné... Parce qu'il n'a aucun mandat populaire pour faire le virage à droite en question, et ses membres commencent à être de plus en plus gênés par ça parce qu'ils le savent aussi. Il est en train, dans ce projet de loi n° 130, de démontrer clairement qu'il a un parti pris favorable, un préjugé non pas en faveur de la population, en faveur du monde qui va venir devant ce Tribunal-là, mais en faveur des personnes qui sont assez riches. Parce que, elles, elles vont avoir un droit d'appel, c'est elles qui auront le droit d'aller voir un vrai juge, un juge qui offre des garanties d'autonomie et d'indépendance pour résoudre leur cause.

(12 h 30)

J'ai de la difficulté à comprendre comment des gens qui se sont tous, sans doute, fait élire avec une conscience sociale, avec des idéaux et avec un programme électoral peuvent maintenant se lever dans cette Chambre et voter une loi qui fait exactement le contraire de leur conscience sociale, de leurs idéaux et de ce qui est écrit noir sur blanc dans le programme électoral qu'ils ont présenté à la population et sur lequel ils ont été élus. Ça, pour nous, c'est extrêmement difficile de comprendre comment ces gens-là peuvent se regarder dans le miroir le matin. Il y en a juste un, de leur côté, qui dit que, lui, il peut se regarder dans le miroir, et c'est quand il est en train de faire le contraire de ce que voulait faire une bonne partie de ses militants.

M. le Président, ce projet de loi brime des droits des citoyens, enlève des droits, le Barreau du Québec le dit, l'opposition le dit. Le ministre a eu la témérité, tantôt, de se lever, il a eu le culot de se lever ici, dans cette Chambre, et de dire, avec sa petite voix de dulcinée, en lisant le papier qui lui a été préparé par son ministère au coût de – on a eu d'autres exemples – jusqu'à 10 000 $ pour le contribuable: On a essayé; méchante opposition nous a empêchés de faire notre loi.

M. le Président, il y a eu à peine 12 jours au cours desquels cette loi-là a été regardée en commission parlementaire. On a été capable d'adopter environ 150 articles et au moins autant de modifications, ça allait bien, et ça, malgré le très mauvais début de ce projet de loi et de son analyse en commission parlementaire. Je peux me permettre de vous dire jusqu'à quel point le ministre était pressé d'adopter cette loi-là sans tenir compte des observations, des analyses, voire même des critiques des observateurs externes.

La première séance de la commission des institutions s'est tenue, sur ce projet de loi, le jeudi 30 mai 1996. L'opposition a fait une motion pour entendre le Barreau du Québec. Résultat du vote sur le projet de loi n° 130: Pour, le député de l'Acadie, le député de Chomedey – moi-même – et le député de Marquette, les trois députés libéraux, pour entendre le Barreau; contre, la députée de Vanier, le député de Louis-Hébert – le ministre de la Justice, contre le fait d'entendre le Barreau du Québec – le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, le député de Fabre, le député de Saint-Jean et le député de Vachon. Ça, c'est le premier jour d'audience. La journée s'est soldée avec une tentative par le ministre d'introduire une autre motion où il attachait des conditions si on voulait entendre le Barreau. Et le président de la commission a jugé la motion du ministre de la Justice irrecevable. C'est beau, ça, hein, M. le Président! Ça, c'est la première journée sur les 12. C'est comme ça que ça s'est passé.

Prochaine séance, le ministre revient sur sa décision, il accepte maintenant qu'on entende le Barreau tel que, nous, on l'avait proposé. Finalement, c'est adopté.

Là, on est rendu à une autre séance, la troisième, le lundi 10 juin 1996. On entend le Barreau du Québec, qui arrive et qui dit au ministre de la Justice: Ça ne va pas, non? Vous nous avez promis, au mois de février, qu'on allait avoir des mois pour étudier le projet de loi n° 130 et la loi d'application. M. le Président, j'ai en main l'avant-projet de loi d'application. Ça comporte 652 articles. Le ministre a à peine accordé une couple de jours au Barreau avant de vouloir les entendre sur 130 et sa loi d'application. Avec le règlement qu'il a préparé sur les nominations, c'était tout près de 1 000 articles. Le Barreau est arrivé effectivement en commission parlementaire, au mois de juin, et a dit: Mais c'est complètement irréaliste, on ne peut pas travailler de cette manière-là.

Finalement, à cause du travail acharné de l'opposition dans le dossier, on a eu l'été, au cours duquel le Barreau a pu se pencher, avec des ressources externes appliquées dans ce dossier-là, regarder, commencer à regarder les tenants et aboutissants de la réforme. Parce que jamais, M. le Président, jamais, de mémoire de qui que ce soit au Barreau ou au gouvernement, on n'a vu un gouvernement utiliser le bâillon pour un projet de loi important dans le domaine de la justice.

J'ai entendu le leader du gouvernement, l'autre jour, se lever: Ah! mais, en 1992, vous avez passé beaucoup de lois avec le bâillon. Oui, oui, trois lignes dans la loi sur les podiatres, quelque chose dans la Loi sur la pharmacie, une ligne ou deux dans la Loi sur les dentistes. Mais jamais, M. le Président, jamais, jamais, jamais, le parti politique dont je fais partie, lorsqu'on était au pouvoir... Jamais une loi, une réforme de cette envergure-là n'a été forcée par un bâillon, n'a été forcée malgré et à l'encontre de l'avis et des critiques très clairs du Barreau du Québec. Jamais, parce qu'on a un trop grand respect pour les institutions dans notre société, pour l'importance de la justice, l'importance d'assurer au public ses droits. Le monde qui nous écoute, tous les citoyens du Québec, on a des droits. Et, lorsqu'on est face au gouvernement, lorsqu'on est face à l'État, on a le devoir d'assurer que le monde a plutôt plus de droits que pas assez.

C'est exactement le contraire que le gouvernement est en train de faire ici. Le gouvernement est en train d'enlever des droits aux citoyens face à l'État. Le gouvernement est en train de construire une nouvelle machine pour dire non au public. Les gens qui ont vraiment réfléchi sur la question de la justice administrative, M. le Président, ont tous été très étonnés, lors du forum de l'Université de Montréal, de constater l'absence totale de vision chez le ministre de la Justice du Québec, l'absence totale d'un plan de match dans le domaine de la justice administrative. Ça avait l'air de se faire d'une manière vraiment précipitée puis sans but précis. Il n'y a jamais eu de document du gouvernement, un livre vert ou un livre blanc, expliquant: Bon, voici un peu nos orientations là-dedans; venez commenter ça avec nous, on va en discuter.

Non, M. le Président. Ceux qui ont le plus d'expérience et d'expertise là-dedans – et je prends l'exemple de Rod Macdonald, l'ancien doyen de la Faculté de droit de l'Université McGill, qui était là, ou encore de Daniel Jacoby, le Protecteur du citoyen, qui, plus que quiconque, connaît les problèmes réels; là où il y a des difficultés entre le citoyen et l'État, le monde et le gouvernement, là, c'est Daniel Jacoby, le Protecteur du citoyen, qui connaît ça – ils sont tous venus nous dire: C'est important peut-être de réformer les structures. C'est correct. On peut toujours construire une meilleure machine. Mais le vrai bobo, le vrai problème pour le citoyen, en matière de justice administrative, c'est la décision initiale, parce que tout ce dont on est en train de parler aujourd'hui, les appels, le recours, le droit d'être entendu, tout ça, ça entre en jeu seulement quand quelqu'un est insatisfait d'une décision ou qu'il y a une mauvaise décision de prise.

Pour illustrer l'importance de considérer la décision initiale dans notre analyse, je veux me permettre, M. le Président, de donner deux exemples réels, deux cas vécus. Une journée dans la vie d'un commissaire à la Commission des affaires sociales du Québec. Ça s'est passé assez récemment. Des causes doivent être entendues à Rimouski. Donc, le commissaire en question, les fonctionnaires, les équipes, tout le monde se déplace, aux grands frais du contribuable, pour aller à Rimouski entendre les causes en question. Les deux causes, entendues le même jour, étaient les suivantes.

Dans le premier cas, une personne qui était sur un programme qui vise à sortir les gens de l'aide sociale avait suivi un cours pour devenir préposée aux bénéficiaires. On peut se demander à quoi ça va servir aujourd'hui, avec les 15 000 coupures dans le gouvernement. Ça va probablement, malheureusement, être un des premiers à perdre son emploi. Mais, quand on se souciait de la création d'emplois, on formait des gens pour qu'ils aient une job dans la société. Et, parce que la personne était sur l'aide sociale, n'avait pas d'autre moyen que le minimum de base pour vivre, suivait un cours, avait réussi le cours... La personne avait besoin d'un uniforme, et, en vertu des programmes du gouvernement, une personne a le droit d'avoir une certaine somme d'argent pour se procurer un uniforme.

(12 h 40)

Le préposé aux bénéficiaires en question est allé s'enquérir, a été informé, a reçu l'information suivante: C'est un pantalon blanc et des chaussures blanches qu'il vous faut pour occuper votre fonction. Le préposé est allé se chercher des chaussures blanches. Il y a un fonctionnaire, au ministère, qui a dit: Ce n'est écrit nulle part que vous avez le droit à des chaussures blanches. Et lui avait trouvé qu'il y avait des chaussures brunes à un prix moindre. On est rendu devant la Commission des affaires sociales là-dessus, M. le Président.

Les décideurs sont partis, aux frais des contribuables, le monde a pris l'avion pour s'en aller à Rimouski. On a déplacé les fonctionnaires, on a réservé des locaux, on avait les sténographes, tout était en place pour savoir si, en vertu des directives, des normes et des règles, il avait le droit d'utiliser l'argent pour acheter des chaussures blanches ou s'il fallait qu'il achète des chaussures brunes. Une chance qu'on a des gens, à la Commission des affaires sociales, qui ont rendu la bonne décision. Il avait le droit à ses chaussures brunes. Mais les deux décideurs de la Commission des affaires sociales, M. le Président, ils gagnent entre 85 000 $ et 90 000 $ par année chacun pour aller à Rimouski entendre ça.

Est-ce que le projet de loi du ministre de la Justice change quoi que ce soit à l'égard de la bêtise d'une telle décision à la base? Absolument pas. Il ne fait rien avec ça, il ne s'en occupe pas. Lui, c'est un ministre de la Justice qui nous arrive, il dit: Ça fait 25 ans que les gens disent qu'on a besoin d'une réforme de la justice administrative, je vais en faire une, réforme. Mais aucune pensée, aucune philosophie, aucun regard sur les réels problèmes qui font en sorte que ça coûte cher et que c'est jammé plus haut, dans les paliers d'appel. Le problème numéro un que Daniel Jacoby et que les autres experts nous disent qu'il faut régler, c'est le problème de la décision initiale.

Je vous ai dit que je vous donnerais deux exemples. C'est le même jour, ce sont les mêmes commissaires de la Commission des affaires sociales, on est toujours à Rimouski. La deuxième cause concernait une femme qui avait été séquestrée, maintenue contre sa volonté. C'était une histoire d'horreur, M. le Président. Il y avait des rapports de police comme ça pour tout expliquer ça. Le fonctionnaire à l'aide sociale lui a coupé son aide sociale parce qu'elle faisait vie commune avec quelqu'un. C'est arrivé devant la Commission des affaires sociales encore une fois. Effectivement, des gens qui sont capables de regarder, ils ont lu les rapports de police, ils ont regardé les faits, ils ont dit: Mais ça ne va pas, non? Ils ont évidemment renversé la décision de couper son aide sociale.

C'est ça, une grande partie du problème, M. le Président, mais le ministre ne le comprend pas. Il ne s'occupe pas de cas comme ça, il n'a jamais fait ça de sa vie, il n'a jamais rencontré ce monde-là, ce n'est pas des choses qui l'intéressent, lui. Non. Lui, il veut jouer dans les structures, faire une belle machine. Le monde parle de ça depuis 25 ans? Envoie, on en fait une, réforme. Mais elle sert à quoi, cette réforme-là?

Dans le cas qui nous occupe, la seule chose que fait cette réforme, c'est d'enlever des droits aux citoyens. C'est ça que le Parti québécois est en train de faire: retirer des droits aux citoyens. Ils vont les mettre devant des décideurs, sans droit d'appel – pas le droit d'aller plus loin après ça – qui vont malheureusement avoir un parti pris favorable au gouvernement. Pourquoi? Parce que eux-mêmes dépendent du gouvernement, parce que c'est le gouvernement, à tous les cinq ans, qui va décider si, oui ou non, ils continuent à payer leur hypothèque. C'est ça, la vraie vie. C'est pour ça qu'ils ne sont pas indépendants. C'est pour ça qu'un juge à la cour criminelle ou à la cour civile, une fois nommé, n'a plus à se soucier de ça. Ils ont besoin de leur autonomie et de leur indépendance parce qu'ils entendent parfois des causes où le gouvernement est dedans ou est impliqué. Puis, de toute façon, il faut que le public ait droit à ça, dans la justice, c'est fondamental.

On parle d'un ministre de la Justice qui propose une loi dans le domaine de la justice administrative. Il faut que la justice soit autonome, indépendante de toute influence extérieure. Le ministre ne comprend pas ça, M. le Président. Le ministre propose une loi qui va à l'encontre de l'analyse du Barreau du Québec, de l'analyse de tous les experts qui ont regardé le problème et qui enlève des droits aux citoyens.

Hier, on a entendu le député de Laval-des-Rapides avouer que, une des vraies raisons de la réforme, c'était pour sauver de l'argent. Et on a aussi entendu le député de Laval-des-Rapides dire que le ministre de la Justice était déchiré parce que, malgré la promesse claire, dans le programme du Parti québécois, il était en train de briser la parole donnée par le gouvernement pour se faire élire. Mais il dit: Il faut le prendre en pitié, le ministre de la Justice, il est déchiré. Pas besoin de se déchirer, on a un système qui est perfectible mais qui est là, qui assure des droits. Il vaudrait beaucoup mieux maintenir ce qu'on a, pour l'instant, que de se «pitcher» avec sa réforme qui, de toute façon, va être infirmée, va être cassée, va être rejetée par les tribunaux.

Cette loi-là ne va pas durer, devant les tribunaux. Les gens, les associations de prestataires de ci ou de bénéficiaires de l'autre, un regroupement quelconque va amener cette loi-là devant les tribunaux un jour, et la loi va être cassée, la loi va être rejetée, on va dire que ce n'est pas une bonne loi, qu'elle n'a pas le droit d'être appliquée parce qu'elle ne rencontre pas les exigences strictes édictées par la Cour suprême, édictées par la Charte québécoise des droits de la personne. Ça, c'est sûr. Il n'y a pas juste l'opposition qui dit ça, entendons-nous bien là-dessus. C'est le Barreau du Québec qui le dit, c'est un ensemble d'experts qui a eu l'occasion de regarder la loi qui le dit: La loi n'a aucune chance d'être maintenue par les tribunaux.

Alors, même si le but de la loi est de sauver de l'argent, il est très intéressant de constater que ça ne coûte pas une cenne de plus au gouvernement pour assurer que les gens qui sont là – parce qu'ils vont être du même nombre – ont l'autonomie et l'indépendance nécessaires. Ça ne coûte pas une cenne de plus, et il refuse même de faire ça. Même si on acceptait... Puis on n'accepte pas, mais, pour les fins du débat d'aujourd'hui, présumons qu'on pourrait accepter l'argument du ministre que le jugement de la Cour suprême lui donne raison, admettons ça pour les fins de cette partie de notre discussion. Il dit: C'est légal, ce que je fais, c'est légal, d'avoir ce mode de nomination et de renouvellement. Peut-être. Pour les fins de la discussion, admettons-le. Même si c'est légal, est-ce que c'est la meilleure manière d'assurer la justice au monde qui va venir devant ce Tribunal administratif du Québec? Est-ce qu'un ministre de la Justice doit se contenter juste de passer en-dessous de la barre qu'il aurait placée le plus bas possible? Est-ce que c'est vraiment ça, l'objectif de la justice? C'est vraiment le dénominateur commun le plus bas, c'est vraiment ça qu'on cherche à obtenir en matière de justice? Je ne le crois pas, M. le Président.

Et c'est pour ça que l'on dit que le ministre de la Justice se trompe avec son projet de loi. Parce que la Cour suprême a été extrêmement claire. À deux reprises, dans la décision, ça revient d'une manière très claire: il faut regarder la nature et la structure de l'organisme pour déterminer si on applique ou non les règles dans la cause Valente. Ça veut dire les règles qui déterminent le niveau d'autonomie qu'on doit avoir. Ici, ce n'est pas une régie de ci, ce n'est pas la commission de l'autre, ce n'est pas le petit tribunal de ça, c'est le Tribunal administratif du Québec, le ministre l'a dit tantôt. C'est en train de créer une masse telle – c'est juridictionnel, c'est le ministre qui l'a aussi dit – que ça va nécessairement avoir la gravité pour attirer l'application des règles édictées par la Cour suprême dans l'arrêt Valente. Encore une fois, M. le Président, tous les experts qui ont regardé cette question-là sont d'accord là-dessus.

(12 h 50)

Mais soyons ouverts. Admettons qu'il est possible que le ministre ait raison. Lui, il est certain qu'il a raison. Il s'est réjoui de la décision de la Cour suprême, malgré le fait qu'il y ait eu une révocation contre la décision de la Régie. On ne comprend toujours pas de quoi il s'est réjoui. Puis, hier soir, alors, c'était l'extase. À la fin des débats, hier soir: Ah! tout essoufflé, en tournant les pages vite, vite, il y avait une autre décision dans laquelle il venait de gagner encore, sur le projet de loi n° 130.

Ni l'une ni l'autre de ces décisions-là évidemment ne parlait du projet de loi n° 130. Ça parlait d'une régie en particulier à la Cour suprême et d'une commission en particulier à la Cour d'appel. Jamais, cette nouvelle structure, avec cette masse critique, n'a été étudiée. Et c'est, au contraire du plus bas dénominateur commun, le plus haut standard – et c'est ça que la Cour suprême dit, dans la cause récente – qui doit s'appliquer dans un cas comme celui-ci parce que c'est l'ensemble des fonctions qui feront maintenant partie des attributions de la juridiction de ce nouveau Tribunal administratif du Québec.

C'est le plus haut niveau d'indépendance et d'autonomie qu'il faut viser, M. le Président. Il ne faut pas se contenter de se convaincre qu'on peut passer en dessous d'une barre qu'on a déjà placée tellement basse parce qu'on a enlevé les droits d'appel. Mme la juge L'Heureux-Dubé fait cet important point dans sa décision, qui est dissidente sur d'autres aspects, mais elle est très claire là-dessus: Un des autres aspects objectifs externes – et c'est notre thèse depuis le début – est que tu dois déterminer le niveau d'indépendance en fonction de l'ensemble de l'organisme, ce que ça fait, et des autres recours disponibles.

On parle d'une trentaine d'appels, à la Cour du Québec, qu'on est en train d'enlever. On n'a plus d'appel quand on va au Tribunal administratif du Québec. Donc, ça devient... Et c'est logique, ce n'est même pas juste une question juridique, c'est une question de gros bon sens. Moins tu as de recours vers d'autres personnes, plus ceux et celles qui décident doivent être autonomes et indépendants. Tout le monde est capable de comprendre ça, sauf le ministre de la Justice. Mais je disais tantôt que, si on acceptait que le ministre ait raison... Il est absolument sûr d'avoir raison, que ça passerait le test du temps, cette loi-là, bien content avec ça.

Soit, acceptons ça. Pour les fins maintenant de notre analyse, disons qu'il a raison. La loi n'entre pas en vigueur avant 1998. Il est sûr que sa loi est bonne, qu'elle ne va pas être infirmée par les tribunaux, qu'elle ne va pas être cassée. Il y a une procédure très simple, il y a un renvoi. On peut référer une cause. Le gouvernement détermine la question. Ça peut être: soumettre le projet de loi, probablement la loi d'application aussi puis certainement son projet de règlement sur les règles de nomination et de reconduction des membres des tribunaux administratifs. Alors, qu'il soumette une question qui couvre ces éléments-là, l'autonomie et l'indépendance, et l'appel, à la Cour d'appel. Si le ministre acceptait de faire ça, nous, on serait prêts à voter sa loi tout de suite. Nous, on est persuadés du résultat. Si la Cour d'appel nous donne tort dans nos préoccupations, tant mieux. La loi a été adoptée, le ministre a raison, elle peut être appliquée. Mais le ministre refuse.

Nous avons déjà invité le ministre à référer la légalité de sa loi au plus haut tribunal du Québec pour valider, pour vérifier sa légalité. Il refuse. Le Barreau du Québec souhaite également que le ministre fasse preuve de courage à l'égard de ses convictions et ils disent: Bien, si vous êtes tellement convaincu que la loi est bonne, référez-là avec une bonne question à la Cour d'appel, puis on va voir. Le ministre refuse la demande de l'opposition et l'invitation du Barreau. Pourquoi est-ce que le ministre fait ça? Pourquoi est-ce que le ministre de la Justice est si convaincu que sa loi va être maintenue par la Cour d'appel? Pourquoi est-ce qu'il refuse de le faire, alors qu'on est en train de parler d'une institution qui va gérer des milliards de dollars en prestations et en compensations, qui va coûter plus cher que la Cour du Québec? C'est plus grand que la Cour du Québec, ce qu'on est en train de créer là, M. le Président. Et le ministre, avec une témérité qui frôle l'insouciance, ne prend même pas la peine...

Parce qu'il a le temps de le faire, ce n'est même pas une question de temps. Et ce n'est certainement pas une question d'argent. Ça coûte très peu pour aller argumenter un renvoi devant la Cour d'appel. Ça ne coûte rien, comparé à ce que ça va coûter le jour où sa loi sera cassée par les tribunaux. Le ministre refuse.

Alors, là, M. le Président, on sait qu'il y a effectivement des raisons autres qui motivent ce gouvernement pour «bulldozer» cette loi-là, pour forcer son adoption en utilisant le bâillon, la guillotine. Comment est-ce que des membres du Parti québécois peuvent rester là, muets, à entendre leur ministre de la Justice défendre sa loi qui bafoue des droits, qui enlève des recours et qui, en plus, symbolise au plus haut point le virage à droite non autorisé par la population, car il n'y a jamais eu un mandat populaire là-dessus?

Le virage à droite est tellement symbolisé dans cette loi-là parce qu'ils sont en train de dire: Si vous êtes un richissime propriétaire de terres ou de logements ou de bâtiments, c'est vrai, c'est important, ce qui est en cause, on va vous donner un droit d'appel vers des juges de la Cour du Québec. Par contre, si c'est juste pour savoir si l'indemnité que vous recevez suite à votre accident d'auto et qui vous permet de vivre... si c'est juste ça qui est en cause, venez voir un de nos simili-juges. C'est tous nos chums de toute façon, ça va bien se passer. On connaît le résultat, on leur a donné des directives. On va même les publier dorénavant, les directives – c'est ce que le ministre s'est engagé à faire – et ne soyez pas surpris si, par malheur, la version de la bureaucratie est tout le temps maintenue, à l'endroit du citoyen, parce que ce ne seront pas des décideurs autonomes et indépendants.

À l'heure actuelle, il y a une soixantaine de personnes qui rendent des décisions dans des causes qui concernent des citoyens, tous les jours de la semaine, ici, au Québec, M. le Président, et qui sont en statut précaire. Leur mandat n'a jamais été renouvelé. Ils sont suspendus par un fil par ce gouvernement-là. Et, dès que le ministre de la Justice aura eu son bâillon, il va commencer à enlever des droits aux citoyens, et il va commencer à enlever des jobs aux décideurs compétents qui sont là, les gens qui sont déjà en place, et il va commencer à mettre son monde en place. C'est ça qu'il veut avec son projet de loi. C'est la seule et unique raison qui puisse justifier pourquoi il refuse ou de faire un renvoi à la Cour d'appel ou de modifier sa loi pour tenir compte des critiques acerbes qui ont été formulées par le Barreau du Québec et par l'ensemble des experts.

On aura amplement l'occasion de revenir là-dessus cet après-midi, M. le Président, mais permettez-nous juste de souligner deux choses en terminant. Dans un premier temps, dans une lettre datée du 11 décembre 1996, avant-hier, le Barreau a dit, à propos du ministre de la Justice du Québec dans ce dossier-là: «De tels propos démagogiques et indélicats tenus, par surcroît, par un ministre de la Justice jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions.» Ce n'est pas nous qui le disons; le Barreau du Québec, le Barreau dont le ministre fait partie.

Autre fait absolument incroyable dans ce dossier-là, c'est qu'en commission parlementaire le ministre a accepté un amendement proposé par l'opposition, qui visait à garantir le respect des droits des citoyens. Le ministre l'a accepté; c'est dans les transcriptions de la commission parlementaire. C'est lui qui a voté pour avec nous autres. En catimini, à l'intérieur de sa pile de modifications qui ont été déposées à la dernière minute, lorsqu'ils ont commencé à imposer le bâillon, on ressort une page et on découvre, à notre étonnement, que le ministre de la Justice non seulement il renie la parole donnée par son programme et son parti politique, mais il renie sa propre parole, M. le Président.

En commission parlementaire, le ministre de la Justice du Québec avait accepté cet amendement à l'article 5, qui visait à préserver les droits des citoyens. Il était pour; c'est difficile d'être contre. Il arrive en Chambre, il prétend qu'il a fait une étude détaillée et que garder les droits des citoyens allait coûter – ce n'est pas nous qui l'inventons; c'est lui – 100 000 000 $. Mes collègues se lèvent, ils disent: Bon, le ministre vient de citer son étude détaillée, est-ce qu'il peut la déposer en vertu de notre règlement? Là, il dit: Bien, j'ai cité une étude détaillée, mais en fait je n'ai jamais dit qu'il y avait un document. C'est le même, là. Alors, on voit ce que ça vaut, la parole de ce ministre de la Justice.

(13 heures)

Et je somme mes collègues d'en face de bien regarder ce qui est en cause ici, aujourd'hui, parce qu'ils vont avoir à répondre, tous les jours de la semaine, dans leur bureau de comté, à des citoyens insatisfaits qui vont soulever le problème de leur réforme qui enlève la justice en matière administrative, M. le Président.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Chomedey. Il est 13 h 1, nous allons donc suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi. Je vous rappelle les dispositions du règlement. Je pense que les députés doivent rester à leur place.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir.

Alors, nous allons poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative. M. le député de Chomedey.

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je pense que vous savez ce à quoi je vais faire référence. On n'a même pas quorum pour entreprendre nos travaux. Il faut être au moins 13, M. le Président, et on est neuf.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que l'on appelle les députés.

(15 h 11 – 15 h 12)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Assoyez-vous, s'il vous plaît. Alors, nous reprenons nos travaux avec quorum. Je vais céder la parole à M. le député de Chomedey. Il lui reste, à son intervention, un temps de 9 min 41 s. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, dans les quelques minutes qu'il nous reste dans notre intervention sur le projet de loi n° 130, on n'aura évidemment pas le temps de reprendre l'ensemble de l'analyse détaillée qu'on a faite, mais on peut quand même toucher les bases de certains des points principaux.

Rappelons que c'est la première fois qu'un gouvernement utilise sa majorité pour imposer le bâillon pour l'adoption d'une loi aussi importante dans le domaine de la justice. C'est du jamais vu, M. le Président, et, lorsqu'on sait que la justice est une des fonctions les plus importantes dans un État, dans un gouvernement, on a énormément de difficultés à comprendre.

On sait aussi, M. le Président, que le projet de loi ne permet pas d'assurer que les juges de ce nouveau Tribunal administratif du Québec soient autonomes et indépendants. Ce n'est pas juste nous qui le disons: le Barreau du Québec le dit, les experts qui ont regardé le projet de loi le disent, l'ensemble des intervenants au forum tenu à l'Université de Montréal sont d'accord là-dessus.

Par ailleurs, M. le Président, et ça, c'est une des choses les plus importantes à rappeler à nos amis d'en face, parce que je suis certain que quelques-uns parmi eux vont avoir l'occasion de parler sur le projet de loi n° 130... Ah, il y a quelques avocats là-dedans, je suis convaincu qu'il y en a quelques-uns qui vont parler là-dessus pour tenter de donner un second souffle au ministre là-dedans.

C'est le Parti québécois, M. le Président, qui, dans son programme électoral, en vue des élections de 1994, a dit ceci – ça c'est une promesse faite par le Parti québécois à la population: «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes ou personnes exerçant des fonctions quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés – c'est-à-dire les citoyens, vous et moi – des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial et indépendant – première promesse dans le domaine du droit administratif, première promesse non tenue par le gouvernement du Parti québécois.» Il continue: «Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel.»

Ça, c'est un des aspects les plus choquants pour le Barreau du Québec, et je suis sûr aussi choquants pour plusieurs membres du gouvernement qui sont allés rencontrer l'électorat en septembre 1994 en ayant fait cette promesse-là. Dans les faits, M. le Président, on enlève le droit d'appel existant à une trentaine de reprises. On réduit, M. le Président, les droits des citoyens. On leur dit qu'ils n'ont plus les mêmes droits qu'avant, ils en ont moins. Et, M. le Président, on considère que c'est tout à fait inadmissible pour un parti politique d'agir de la sorte. Hier, on a eu l'aveu du député de Laval-des-Rapides que c'était purement pour des questions d'argent, cette réforme-là. On a eu aussi le ministre qui est venu confirmer que la loi telle qu'elle est écrite ne rencontre pas ce que nous considérons être les normes minimales d'autonomie et d'indépendance.

Les seuls trois endroits où le gouvernement du Parti québécois est prêt à accorder un droit d'appel à la population, c'est lorsqu'ils sont des propriétaires de terrain; c'est en matière d'expropriation, d'évaluation foncière et finalement en matière de protection des territoires agricoles. C'est donc aux mieux nantis de la société que le Parti québécois offre sa sollicitude, dorénavant. Les moins bien nantis, les plus démunis de notre société reçoivent les foudres du Parti québécois, sous forme de coupures à l'aide sociale et maintenant sous forme de coupure de leurs droits, parce que, lorsqu'on a un appel d'une décision d'un fonctionnaire, que ce soit en matière d'aide sociale ou une autre, ça va tout se ramasser ici.

La raison pour laquelle le citoyen aura moins de droits, moins de recours, c'est que le décideur, au lieu d'être un parti neutre et impartial, va dépendre, pour son gagne-pain, son travail de juge au tribunal administratif, d'une décision du gouvernement en matière de droit administratif. C'est le citoyen contre le gouvernement. Le gouvernement va avoir un contrôle direct sur les décideurs.

En créant ce nouveau Tribunal administratif du Québec, le gouvernement se devait de mettre la barre très haute. Le ministre de la Justice, quand il nous en parle, dit: J'ai quelques fonctionnaires qui ont fait une interprétation des décisions de la Cour suprême. Moi, j'ai réussi à me convaincre que, si je mets la barre très, très basse, ça peut encore tenir.

M. le Président, le 4 septembre 1996, le bâtonnier du Québec, le président du Barreau, a écrit au gouvernement, au premier ministre, et lui a dit: «Où est l'urgence d'adopter avant les Fêtes le projet de loi n° 130? Compte tenu des interactions très étroites avec l'avant-projet de loi d'application, il conviendrait d'attendre.» C'est ça que le Barreau a dit. Face au fait que le gouvernement refusait de les écouter, il a dû écrire de nouveau parce que le ministre de la Justice a imputé des motifs très graves au Barreau. Il disait qu'ils avaient des motifs inavoués en combattant le projet de loi n° 130.

Voici ce que le bâtonnier du Québec, au nom du Barreau, a eu à dire au ministre de la Justice: «De tels propos démagogiques et indélicats tenus par surcroît par un ministre de la Justice jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions.» Autre intervention du Barreau du Québec à l'endroit du ministre de la Justice.

Nous disons, M. le Président, que le gouvernement a effectivement l'intention de mettre son monde en place. Le ministre m'a déjà dit qu'il voulait conserver la prérogative ministérielle quant à la nomination et le renouvellement. Il a aussi dit que ça permet à l'opposition de monter aux barricades lors de nominations partisanes, et c'est correct que le système marche comme ça. C'est comme ça que le ministre de la Justice parle lorsqu'on est avec lui et qu'on parle de ces choses-là.

Autre aveu très intéressant par un autre brillant et talentueux membre de ce gouvernement: le ministre du Développement des régions. Le ministre du Développement des régions, en parlant d'une régie établie aux termes de la loi, a dit ceci: «Si la régie a un comportement politique, dites-le nous et on va changer les régisseurs». C'est ça, M. le Président, le problème avec le projet de loi n° 130. Et, pour ceux et celles que ça intéresse, c'est dans le journal La Terre de chez nous , la semaine du 12 au 18 septembre 1996. C'est ça, un comportement partisan. C'est ça, ne pas comprendre que les décideurs, que ce soit dans le domaine agricole ou dans un autre domaine, doivent être libres de toute interférence; que, lorsque les citoyens arrivent face à l'État, il y a déjà, en partant, une inégalité puis, si on doit avoir un parti pris, ce serait plutôt en faveur du citoyen qu'en faveur du gouvernement.

Mais loin de ce gouvernement et, en particulier, loin de ce ministre de la Justice l'idée de faire plus en faveur de la justice. Au contraire. Comme dans beaucoup d'autres interventions du gouvernement du Parti québécois, on favorise les machines, les structures, la bureaucratie, toujours aux dépens du citoyen qui est en droit de recevoir des services et, en l'occurrence, des services en matière de justice. C'est ça que le monde veut, M. le Président. C'est ça que le monde est en droit de recevoir de la part de son gouvernement. C'est ça, malheureusement, qui ne vient jamais. Et déjà, quand ça ne vient pas, c'est une chose, mais ici, c'est le contraire: on est en train de réduire, d'amenuiser, d'enlever des droits aux citoyens. Et c'est pour ça qu'on dit, tout comme le Barreau: Arrêtez ça, ça n'a pas de bon sens d'agir de la sorte!

(15 h 20)

Un des autres exemples que l'on peut donner de la manière de traiter le Parlement de la part de ce ministre de la Justice, M. le Président, concerne un amendement qui a été proposé par l'opposition en commission parlementaire. Comme vous le savez – mais peut-être que ceux et celles qui nous écoutent ne sont pas tous au courant – le Parlement délègue une importante partie de son travail d'analyse des lois à des commissions. Ici, le ministre de la Justice a accepté, en commission, un amendement qui visait à protéger les droits des citoyens. Il a voté en faveur; c'est dans les transcriptions de la commission parlementaire. Arrivé ici, en imposant le bâillon pour couper le droit des parlementaires, il glisse une petite modification qui vient enlever sa parole donnée, enlever ce que le gouvernement a déjà accepté.

M. le Président, l'opposition officielle, le Barreau du Québec et plusieurs autres intervenants disent la même chose: Si le ministre de la Justice est si convaincu que ça que sa loi rencontre les exigences de la Cour suprême, les exigences d'autonomie et d'indépendance, pourquoi est-ce qu'il ne fait pas une seule et simple chose avant son entrée en vigueur en 1998? Pourquoi est-ce qu'il ne fait pas un renvoi à la Cour d'appel pour demander l'avis de la Cour d'appel là-dessus? Ça éviterait toute équivoque, les droits des citoyens seraient préservés, la certitude juridique existerait quant aux décisions de ce tribunal. Le ministre refuse. On doit conclure que c'est comme hier soir, il refuse même de répondre à une seule question en Chambre de l'opposition, il sait qu'il ne peut pas défendre son projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Encore une fois, je voudrais féliciter mon collègue de Chomedey, le porte-parole de la justice pour le Parti libéral du Québec.

M. le Président, nous sommes à la dernière étape d'un bâillon sur le projet de loi n° 130, et je voudrais expliquer comment je vois la situation de ce gouvernement. Nous avons vu une avalanche d'augmentation de taxes; nous avons vu, journée après journée, une baisse de services, des coupures dans les services, une augmentation de taxes, une baisse de services; et maintenant, avec le projet de loi, le bâillon, nous sommes en train d'enlever les droits des parlementaires et, pire, M. le Président, nous sommes en train de brimer les droits des citoyens avec le projet de loi n° 130.

Je voudrais utiliser, M. le Président, les quelques minutes qui restent avant que je sois bâillonné, encore une fois, par ce gouvernement, pour montrer de la façon la plus claire combien de personnes vont être affectées par ce projet de loi, combien de personnes vont perdre leurs droits, combien de personnes vont perdre un droit d'appel qu'ils ont eu jusqu'à maintenant ou jusqu'à ce soir, qui, bientôt, n'auront aucun droit d'appel. Je vais essayer de faire ça le plus tôt possible, mais la liste est tellement longue, M. le Président.

L'agence de voyages, pour la suspension, annulation, révocation de permis par le ministre: aucun droit d'appel. Si vous êtes un travailleur dans l'assurance et s'il y a un refus, suspension ou annulation d'un permis d'un assureur par l'Inspecteur général des institutions financières: aucun droit d'appel. Dans le Code de la sécurité routière, les décisions de la SAAQ concernant un permis de conduire, un permis pour une école de conduite, un permis de vendeur automobile ou des points d'inaptitude, si vous avez une différence d'opinion: aucun droit d'appel, M. le Président. La loi qui touche la Communauté urbaine de l'Outaouais, la question des indemnités pour l'expropriation par la Société de transport de l'Outaouais d'une entreprise de transport en commun: aucun droit d'appel. Pour la loi qui touche les établissements touristiques, un sujet qui touche la suspension ou annulation par le ministre d'un permis pour exploiter un établissement touristique, encore une fois, après une présentation, une décision: aucun droit d'appel.

Dans la loi qui touche les intermédiaires de marché dans le cas d'annulation ou suspension par l'Inspecteur général des institutions financières d'un certificat de planification financière: aucun droit d'appel, M. le Président. Dans la loi qui touche les porcheries et l'aquiculture commerciale, la suspension, annulation ou refus par le ministre d'un permis d'aquiculture ou d'une concession: aucun droit d'appel, M. le Président. Un autre que je voudrais juste souligner que je trouve tellement grave – les autres sont graves aussi – la loi qui touche la protection de la jeunesse. Suspension ou révocation par le ministre d'un agrément accordé à un organisme ayant pour mission de défendre les droits des enfants et... pour l'adoptant des démarches d'adoption, M. le Président, pas de droit d'appel là. Il me semble, M. le Président, que, dans des cas aussi délicats que ça, il me semble qu'il est simple, qu'il est minimal pour la justice d'avoir un droit d'appel.

M. le Président, pour la loi qui touche la protection des consommateurs, dans les questions de refus, de suspension ou d'annulation, par l'OPC, d'un permis à un commerçant ou pour... qui a été nommé par l'administrateur provisoire, encore une fois, M. le Président: aucun droit d'appel. La loi sur la protection du territoire agricole, les questions qui touchent l'appel d'une décision d'un tribunal d'appel en matière de protection de territoire agricole: aucun droit d'appel après que la loi n° 130 sera passée. Dans la loi qui touche le recouvrement de certaines créances, refus, suspension ou annulation par l'OPC d'un permis d'agence de recouvrement... Vous êtes un agent, il y a un problème, il y a une décision rendue: vous avez perdu votre droit d'appel encore une fois, M. le Président.

La sécurité dans les sports, refus, suspension ou annulation par la Régie d'un permis en vue de l'organisation d'une manifestation sportive ou pour confiscation d'un cautionnement par la Régie: aucun droit d'appel, M. le Président. La Société des alcools, la loi qui touche la Société des alcools, suspension ou révocation d'un permis par la Régie en vue de fabriquer ou de distribuer: aucun droit d'appel, M. le Président. Transformation des produits marins, décision du ministre concernant un permis pour exploiter, acquérir ou vendre au détail des produits marins: aucun droit d'appel.

Dans le transport, décision de la Commission pour les délivrances de permis, transport des élèves, tarifs, enquêtes, inspection, camionnage: aucun droit d'appel. Utilisation des produits pétroliers, refus, annulation, suspension ou révocation par le ministre d'un permis aux fins d'exploiter ou faire le commerce des produits pétroliers: aucun droit d'appel, M. le Président. Dans la loi qui touche les valeurs mobilières, décision de la Commission des valeurs mobilières, les enquêtes intentées, les poursuites, ordonnances de blocage, nomination d'un administrateur provisoire, liquidation des biens: aucun droit d'appel, M. le Président.

M. le Président, voilà quelques exemples – et je peux continuer – d'un gouvernement qui est en train de brimer les droits des citoyens du Québec. C'est un gouvernement qui, dans mon opinion, a trahi la confiance que la population lui a donnée.

The Minister of Justice has betrayed the confidence the people of Québec has put in his hands. Mr. Speaker, I've been very clear, and I have not used provocative language. It is by these facts that you see that the rights of people are being denied by Bill 130.

Il y a une autre question dans ce projet de loi. Mon collègue a parlé que c'est une machine pour dire non. Il a raison, comme d'habitude, mais c'est aussi... Je vois que le leader du gouvernement est d'accord avec moi. M. le Président, il a raison, je pense que c'est unanime ici, dans cette Chambre, que c'est une machine à dire non.

Mais aussi il y a un autre aspect très troublant: c'est une machine à dire oui. C'est une machine à dire oui aux amis du Parti québécois, c'est une machine à dire oui aux amis du ministre, c'est une machine pour laisser toutes les nominations qui ne sont pas nécessairement basées sur la compétence...

It is very clear, Mr. Speaker, that it is a machine to say yes to patronage appointments. Mr. Speaker, I find it scandalous that the patronage Minister of the Parti québécois is the Minister of Justice. No wonder there is so much anger, so much frustration, and there is no wonder there is such a clear lobby to try to replace him as soon as possible.

(15 h 30)

Moi, j'ai juste mentionné que ce n'est pas surprenant, M. le Président, qu'il y ait déjà une campagne dans les rangs du Parti québécois pour le remplacer. J'ai déjà entendu souvent que le leader du gouvernement lui-même cherche à le remplacer. C'est ça que j'ai entendu, M. le Président, et, jusqu'à date, je n'ai pas entendu le contraire. Avec ça, ce n'est pas surprenant, M. le Président, que, dans les rangs du Parti québécois, déjà on essaie, comme on dit, de contrôler les dommages.

C'est clair, M. le Président, avec le Barreau qui dit que c'est prématuré, que c'est incorrect de passer ce projet de loi, qu'il y a une raison cachée en arrière de ce projet de loi. Le gouvernement veut nommer ses amis. Et il n'y a aucune raison de mettre toute l'autonomie et l'indépendance de nos tribunaux en doute. Juste nommer les amis du Parti québécois... J'espère, M. le Président, que vous allez essayer, en privé, de convaincre le gouvernement qu'il est en train de mettre tout le système de la justice en péril. Si nous avons une loi... et je suis convaincu qu'avec le passage de cette loi nous allons perdre la confiance dans le système judiciaire.

Un des principes fondamentaux pour qu'un système judiciaire marche: la population doit avoir confiance. On doit s'assurer qu'il y a indépendance, autonomie de décision, mais ce gouvernement, avec le projet de loi n° 130, veut garder des liens directs avec les décisions, des liens directs avec les juges. Et, s'il n'est pas d'accord avec leurs décisions, il va prendre ça... il va tirer ça. Il veut avoir les juges de nos tribunaux comme des marionnettes.

M. le Président, on doit être complètement contre un projet de loi qui rend nos juges sous la pression de ce gouvernement. On doit s'assurer que nos juges sont indépendants, autonomes et capables de respecter d'abord et avant tout la justice, le simple citoyen et la démocratie. Cette loi est une loi anti-démocrate. On doit arrêter ça tout de suite. On doit améliorer ce projet de loi. Et, s'ils arrivent avec un projet amélioré, à ce moment-là, au printemps, on pourra améliorer ce projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Beauce-Nord. M. le député.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. J'avouerai, M. le Président, qu'il est pour moi étrange que l'Assemblée nationale adopte aujourd'hui le projet de loi n° 130 portant sur la justice administrative, alors que cette étude a été bâillonnée par la volonté du gouvernement et des députés ministériels pour y mettre fin prématurément.

M. le Président, j'insisterai sur une question fondamentale pour moi, qui est celle du droit d'appel, que ce soit en matière de lésion professionnelle, que ce soit en matière d'expropriation, que ce soit en matière de renouvellement ou de refus d'émettre un permis en quelconque matière. En fait, les sujets sont extrêmement nombreux. Ils touchent les citoyens et citoyennes dans leur vie, leurs moyens de subsistance et leur gagne-pain.

M. le Président, l'un de mes premiers réflexes, quand je fais face aux doléances de la part des citoyens et citoyennes de mon comté, est de vérifier de quelle façon ces personnes peuvent en appeler de la décision rendue par le gouvernement en cette matière. M. le Président, mon réflexe est de vérifier quel est le droit d'appel pour le citoyen, comment il peut loger son appel d'une décision de l'administration dans ce contexte.

M. le Président, quelle ne fut pas ma surprise, pour ne pas dire quelle ne fut pas ma stupéfaction, pour reprendre l'expression du bâtonnier du Québec lui-même dans ses lettres que le ministre a reçues le 4 et le 11 décembre, de constater qu'il élimine à toutes fins pratiques tout droit d'appel concernant les décisions rendues par le Tribunal administratif du Québec.

Je veux vous faire part, M. le Président, d'une lettre qui a été adressée au ministre de la Justice, en provenance de M. Jean-Paul L'Allier, le maire de la ville de Québec, dans laquelle il demandait au ministre de modifier l'article 116. Or, aujourd'hui, à la lumière des amendements que le ministre propose, on ne retrouve pas d'amendement donnant suite à cette demande. Cependant, cette demande a fait partie des amendements proposés par l'opposition officielle dans le cadre de la prise en considération du rapport. Je vous fais part de la lettre de M. L'Allier, adressée au ministre Bégin, le 8 octobre: «Nous avons récemment pris connaissance du projet de loi n° 130, intitulé Loi sur la justice administrative, que vous avez déposé à l'Assemblée nationale. Nous souscrivons d'emblée aux objectifs que vous poursuivez par ce projet de loi, mais nous aimerions attirer votre attention sur deux sujets qui sont d'après nous des irritants majeurs pour le milieu municipal et en particulier pour la Communauté urbaine de Québec, organisme responsable de l'évaluation foncière.

«Tout d'abord, à l'article 116, il est fait obligation à la municipalité locale de transmettre au plaignant et au Tribunal une copie des documents pertinents. Cette disposition, dont l'intention est très louable, trouve difficilement son application dans le contexte de la contestation de la valeur inscrite au rôle pour plusieurs raisons.

«Premièrement, la notion de document pertinent est beaucoup trop vague et devrait être précisée. Deuxièmement, cette obligation entraînera des frais additionnels pour notre service d'évaluation, qui doit, dans la période de compressions budgétaires que nous traversons, réduire ses coûts d'opération au maximum. Troisièmement, et c'est là notre objection majeure, le citoyen plaignant sera très mal servi par les documents dont il recevra éventuellement copie. En effet, ces documents ont servi à faire une évaluation de masse. Ils ne sont donc d'aucune pertinence, selon la jurisprudence, dans le cadre d'une contestation d'une évaluation particulière. Or, le plaignant, s'appuyant sur les documents transmis pour construire sa preuve, développera rapidement un sentiment de frustration envers le Tribunal et refusera ses arguments basés sur ses documents en lui réclamant sa propre expertise. Il est certain que ce sentiment de frustration rejaillira sur l'évaluateur et sur la municipalité.

«Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d'exclure les municipalités des dispositions de l'article 116.

«Un autre objet d'inquiétude est pour nous l'absence du droit d'appel à un tribunal supérieur. Nous croyons, en effet, que le pouvoir de révision d'un tribunal supérieur constitue un moyen de contrôle efficace, qui a toujours sa place dans notre système judiciaire. L'expérience, dans le monde municipal, d'un système d'arbitrage sans droit d'appel en matière de litige entre les villes ou leurs corps de police ou de pompiers est, à cet égard, éloquent. Il a en effet été largement démontré l'effet sur les finances municipales d'une foule de décisions dont l'effet pris individuellement était négligeable, mais dont l'effet cumulatif pouvait s'avérer dommageable pour les contribuables.

«Pour ces raisons, nous vous demandons de rétablir le droit d'appel des décisions de la section de l'évaluation du futur Tribunal administratif du Québec devant la Cour d'appel.» Et c'est signé: M. L'Allier.

L'opposition officielle a demandé au ministre que le projet de loi n° 130 soit modifié par le remplacement du deuxième alinéa de l'article 116 pour que les municipalités ainsi que les communautés urbaines ne soient pas soumises à cette obligation. Malheureusement, M. le Président, le ministre n'a pas voulu amender sa loi et ne se soucie pas des conséquences que subiront les contribuables et les dirigeants municipaux.

Permettez-moi, M. le Président, aussi de vous faire part de quelques recours pour lesquels les citoyens perdent un droit d'appel devant les juges de la Cour du Québec, dont les conditions garantissent l'impartialité et l'indépendance, au profit d'un juge du Tribunal administratif du Québec, dont les conditions ne garantissent pas l'impartialité et l'indépendance.

Entre autres, l'aménagement et l'urbanisme, la valeur du terrain exproprié par les municipalités: on ne pourra avoir aucun droit d'appel. La Loi sur l'assurance-récolte, décision de la Régie concernant l'assurance-récolte: encore là aucun droit d'appel. La Loi sur les compagnies, la décision de l'Inspecteur général des institutions financières relativement à une compagnie, un certificat d'incorporation de fusion: encore là, aucun droit d'appel. La Loi du développement des entreprises québécoises dans le domaine du livre, l'annulation ou la suspension par le ministre d'un agrément pour un éditeur, distributeur ou un libraire; la Loi sur la fiscalité municipale, l'évaluation foncière: encore là, aucun droit d'appel.

La Loi sur les pesticides, annulation, suspension, révocation, refus ou modification par le ministre d'un permis ou d'un certificat en vue de vendre ou d'utiliser des pesticides; la Loi sur la protection du consommateur, M. le Président, refus, suspension ou annulation, par l'Office de la protection du consommateur, d'un permis à un commerçant ou pour qui a été nommé un administrateur provisoire; la Loi sur la protection du territoire agricole, un appel d'une décision du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole; la Loi sur le recours collectif, le refus d'une demande d'aide financière par des fonds d'aide au recours collectif. Et il y en a encore plusieurs autres, M. le Président.

(15 h 40)

De plus, M. le Président, ce projet de loi va permettre aux ministres, par leur pouvoir discrétionnaire, de procéder à des nominations partisanes. Je n'hésiterai pas à me joindre à mon collègue de Chomedey et tous mes autres collègues pour voter contre ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Beauce-Nord.

M. Lefebvre: Question de directive.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, j'ai eu l'occasion de le rappeler à votre collègue hier: Est-ce qu'on ne devrait pas indiquer aux députés ministériels que le bâillon ne les empêche plus de parler? La règle de l'alternance normalement c'est un contre, un pour. Est-ce qu'on aura droit à l'opinion des ministériels, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez, la façon de répondre des ministériels, c'est de se lever quand le temps vient, et, comme ils ne se lèvent pas, c'est qu'ils ont... c'est une façon de répondre aussi. Alors, je n'ai pas, moi, à interpréter les façons de répondre, de part et d'autre. C'est la liberté des parties d'intervenir ou non. Alors, je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Je tenais à intervenir à cette dernière étape du projet de loi n° 120, l'adoption forcée du projet de loi n° 130, excusez-moi – ça a réveillé le ministre, hein – sur la justice administrative.

D'entrée de jeu, je dois dire que je ne peux pas comprendre comment le ministre de la Justice peut démontrer aussi peu d'ouverture et autant de fermeture devant un projet de loi qui est finalement contesté par à peu près tout le monde. Par les ministériels, on ne le sait pas; peut-être qu'au sein de leur caucus il est contesté, mais disons qu'ici en cette Chambre on ne le sait pas parce que c'est le silence de la solidarité. Certains disaient, hier, silence des agneaux, d'autres, silence de la trahison, mais disons que, par ce vendredi après-midi, j'irai par le silence de la solidarité. Ça fait plaisir? Merci.

Il me semble, M. le Président, que, quand tous les partenaires du ministre de la Justice, quand, surtout, le Barreau du Québec, quand le Conseil de la justice administrative et l'opposition officielle disent au ministre que sa réforme de la justice administrative, elle est mal faite, elle est bâclée, elle est précipitée, elle est prématurée, et le point le plus important, c'est qu'elle pénalise les citoyens et qu'elle ne répond pas aux intérêts premiers des citoyens du Québec, il me semble que le ministre de la Justice, devant de telles inquiétudes, au lieu de rester fermé comme une huître, devrait démontrer un peu plus d'humilité et devrait accepter de retourner à sa table de travail.

Depuis plusieurs jours, les membres, les députés de l'opposition officielle ont dit au ministre qu'ils étaient prêts à retourner en commission parlementaire pour améliorer le projet de loi n° 130. Mon collègue de Chomedey, pendant des jours, et je dirais même pendant des semaines, en commission parlementaire, a démontré, de façon brillante et de façon honnête que, lui, il était prêt à travailler avec le ministre à proposer des amendements qui bonifieraient le projet de loi n° 130 et qui répondraient finalement aux inquiétudes, aux inquiétudes du Barreau du Québec, aux inquiétudes du Conseil de la justice administrative, et ce, afin de donner aux citoyens du Québec les services auxquels ils ont droit.

M. le Président, les députés de l'opposition officielle ont travaillé avec acharnement depuis le début du dépôt de ce projet de loi. Il s'est fait un travail considérable en commission parlementaire. Le député de Chomedey avec ses collègues à la commission des institutions ont travaillé afin d'adopter plus de 146 articles du projet de loi qui en contient 188. C'est presque 80 % du projet de loi qui présentement, au moment où on se parle, est adopté. Quelle est la réponse du ministre, finalement, à une démonstration constructive de l'opposition officielle de faire avancer ce projet de loi là? Il nous bâillonne. Il nous bâillonne pourquoi, il nous retire notre droit de parole pourquoi? Pour des fins partisanes, M. le Président. Et c'est ça qui est honteux de cette attitude du ministre de la Justice.

Ce qui est encore, je dirais, plus honteux, c'est que le ministre de la Justice, avec son projet de loi n° 130, jette aux poubelles une partie importante du programme du Parti québécois, dans lequel, vous vous souviendrez, M. le Président... Parce que, même vous, en tant que député du Parti québécois, et vos collègues candidats, vous aviez un programme en poche et, pendant votre campagne électorale, vous avez cru, j'imagine, comme tous les autres militants du Parti québécois, que ce que contenait le programme du Parti québécois, c'était vraiment ce qui était pour arriver si le gouvernement devenait un gouvernement gouverné par le Parti québécois. Et ce qu'on retrouvait dans «Des idées pour mon pays», programme du Parti québécois, on nous promettait, en campagne électorale, en ce qui concerne la modernisation de nos structures judiciaires, on promettait au peuple du Québec que le gouvernement du Parti québécois mettrait en place une réforme de la justice administrative.

Permettez-moi de vous lire un article important du programme du Parti québécois, qui, tout récemment, lors du dépôt du projet de loi n° 130, a été jeté aux poubelles: «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes ou personnes exerçant des fonctions quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial et indépendant.» La réforme, c'est tout à fait le contraire, M. le Président. «Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel des décisions rendues par ces organismes ou personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.» La réforme: tout à fait le contraire. Alors, ce qu'a fait le ministre de la Justice, M. le Président: il a mis aux poubelles, devant les militants du Parti québécois, une partie importante de leur programme, dans lequel ces gens-là, je suis certaine, les militants et les militantes du Parti québécois, croient toujours.

Hier, M. le Président, je vous ai lu et je vous ai mentionné qu'il n'y avait aucun consensus qui entourait la réforme de la justice administrative qui nous est proposée. Je vous ai mentionné que les experts, des experts reconnus et réputés comme le professeur Donald Macdonald ainsi que le professeur Yves Ouellette, le Barreau du Québec, le Conseil de la justice administrative, finalement le Protecteur du citoyen... Je faisais l'omission du Protecteur du citoyen, mais le Protecteur du citoyen, j'invite les députés ministériels à lire le dernier rapport du Protecteur du citoyen, puis ils vont être gênés d'avoir été aussi muets pendant tout le processus de ce bâillon.

M. le Président, ce que nous disaient ces gens-là finalement, c'est qu'il y avait des conséquences fâcheuses, des conséquences vraiment difficiles pour les citoyens du Québec si le projet de loi n° 130 tel que proposé était adopté. Et ce que nous disaient ces gens, c'est que finalement, au Québec, toutes les citoyennes et tous les citoyens du Québec, quand ils se présentent devant un tribunal, ils ont droit d'avoir une décision qui est juste, qui est honnête, mais surtout qui est impartiale.

Alors, M. le Président, permettez-moi – parce que, je pense, je n'ai pas eu la chance hier parce que le temps me manquait malheureusement – de vous lire quelques passages d'éditoriaux – finalement ce n'est pas l'opposition officielle ici, là, ce sont des journalistes reconnus et respectés, je pense, par le ministre de la Justice, au moins j'ose l'espérer – des passages importants, où les journalistes, les éditorialistes expriment les mêmes inquiétudes qu'environ tout le monde au Québec en ce qui concerne... excepté le ministre de la Justice, il va de soi: lui a raison, mais tout le monde a tort.

Alors, M. le Président, je commencerai par l'éditorial qui s'intitule «Les faiblesses d'une certaine justice». C'est par M. Jean Martel, du Soleil . Quand on revient aux nominations partisanes – que le ministre veut faire, j'imagine, d'ici le début janvier, parce qu'il a besoin d'avoir en poche son projet de loi n° 130 pour faire ses cadeaux de Noël – le favoritisme entache les tribunaux administratifs.

Ce que dit M. Martel: «La réforme des tribunaux administratifs devra donc prévoir un mode de nomination non partisan et devra faire l'objet de concours publics et prévoir une procédure d'appel dans le cas de non-renouvellement de mandat.» Il va de soi que, ça, on ne le retrouve pas dans le projet de loi du ministre de la Justice. «Rien de plus décourageant, continue M. Martel, pour un citoyen de soupçonner que le juge qui tranchera son litige sera plus préoccupé de plaire au pouvoir politique que de rendre justice. Les nominations partisanes ne donnent pas le gage d'indépendance vis-à-vis l'autorité politique auquel les contribuables doivent s'attendre. La réforme de la justice – écoutez bien ça, M. le Président – administrative pourrait-elle voir le jour après 25 ans? Le fouillis, l'incohérence, le manque d'uniformité, l'arbitraire qui la caractérisent sont autant d'obstacles à une vie collective démocratique de plus en plus complète. Ils constituent aussi autant d'écrans à une justice de plus en plus transparente.»

(15 h 50)

M. le Président, j'espère que le ministre a écouté et qu'il va réfléchir à ce que le journaliste, M. Jean Martel, lui dit au niveau de sa réforme bâclée et sa réforme injuste. Mon temps est déjà presque terminé. J'avais tellement d'autres éditoriaux à vous lire, quand ils vous parlent ici des renouvellements de mandats qui sont en attente, une cinquantaine, et que... Finalement, moi, je voulais tendre la main au ministre de la Justice et lui dire: Si vraiment ce n'est pas votre intention de faire des nominations partisanes, d'ici la fin de la session, prouvez-le et annoncez des renouvellements de mandats, il y a 50 juges administratifs qui attendent. Alors, si vraiment ce n'est pas ça, M. le Président... Il me reste 10 minutes?

Une voix: Dix secondes.

Mme Loiselle: Dix secondes.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Loiselle: Alors, M. le Président, étant donné qu'il me reste juste 10 secondes et que c'est la dernière fois que je pourrai parler sur ce projet de loi n° 130, je termine en disant que, finalement, le temps va prouver au ministre de la Justice que tout le monde qui a parlé contre son projet de loi avait raison, que lui avait tort et que lui, le ministre de la Justice, devra vivre avec son héritage honteux.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Châteauguay. M. le député.

M. Fournier: Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pour 10 minutes, hein, M. le député, 10 minutes.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, merci, M. le Président. Dix minutes que vous me concédez, M. le Président, pour ajouter ma voix à celles de mes collègues. Ce n'est pas le premier 10 minutes que je vais prendre à l'égard du projet de loi n° 130 pour essayer de raisonner le ministre. On a tenté à beaucoup de reprises de lui faire voir ce qui se passait à l'extérieur de ces murs, à l'extérieur de la bulle de son petit cabinet feutré où il semble s'être enlisé.

Je vais profiter de ces 10 dernières minutes que vous me laissez pour d'abord faire une présentation... Je sais que, de l'autre côté, M. le Président, dès que l'opposition se lève, ils ont toujours l'impression que nous sommes les seuls à penser ce que nous présentons en cette Chambre. J'imagine qu'ils vont commencer à comprendre que nous sommes l'écho de ce que les gens, nos concitoyens, disent à l'extérieur de ces murs. Ils doivent commencer à le comprendre, à l'entendre, et j'espère qu'ils vont commencer à le respecter. Parce que, après tout, telle est l'essence de la démocratie. Et, s'ils veulent encore se présenter comme des démocrates, il faudrait au moins qu'ils écoutent quand on parle. C'est déjà ça, que, nous, lorsqu'on parle, on puisse être entendus, écoutés, qu'on écoute la voix du peuple qui s'exprime. On est sûrs qu'ils ne parlent pas; ça, on le constate, il n'y a personne qui se lève, M. le Président, de l'autre côté. Maintenant, en plus, on a l'impression qu'ils n'écoutent pas ce que nous disons. Pourtant, c'est très important, ce qu'on dit.

Je voudrais ici, dans la foulée de ma collègue de Saint-Henri–Sainte-Anne, revenir sur ce que certains spécialistes ont pu dire de ce projet de loi. On comprendra, et le ministre de la Justice au premier titre comprendra, que je parle ici en me faisant l'écho de gens qu'il doit respecter, j'imagine. Le 18 octobre dernier... «J'imagine»: je vais retirer ces propos, M. le Président; je sais qu'il ne les respecte pas. Le 18 octobre dernier, il y avait donc un colloque du Barreau. À ce colloque, le professeur Macdonald disait ceci à propos du projet de loi n° 130: «La réforme se préoccupe plus de structures et de procédures que du citoyen.» Il me semble qu'on l'a déjà dit souvent. Je veux ici préciser au leader, qui m'écoute sans cesse peut-être, aux autres du parti ministériel, que ce que nous disons depuis le début, nous ne sommes pas les seuls. Le professeur Macdonald dit: Ce n'est pas une réforme pour les citoyens. Le professeur Mockle dit ceci: «Le TAQ – le Tribunal administratif, M. le Président – est une mégastructure...»

Là, j'arrête juste ici pour vous rappeler ce que dit depuis quelques jours le ministre délégué aux Régions, responsable de l'Énergie, qui nous parle qu'il ne s'agit pas de créer une nouvelle structure et que le gouvernement essaie d'offrir des services. Ce qui est tout le contraire évidemment dans la réalité. Ça, c'est des beaux discours. Dans la réalité, une mégastructure où sont confondus première instance et appel, et ce, uniquement pour des considérations budgétaires. Il préférerait, comme le rapport Ouellet le recommandait, des structures de taille moyenne avec au-dessus une ou des instances d'appel.

Yves Ouellet – s'il en est un qui est un spécialiste dans le domaine – disait ceci: «Le TAQ est une superstructure qui n'est pas nécessaire pour régler le seul et véritable problème que vit la justice administrative, soit la nomination et le renouvellement des membres.» Le seul et véritable problème, notait M. Ouellet avant nos débats, avant le bâillon, le seul et véritable problème que vit la justice administrative, soit la nomination et le renouvellement des membres. Il s'est trompé, M. le Président. Ce n'était pas le seul problème. Il y en a un autre, il est devant moi: c'est le ministre de la Justice qui est le problème de la justice au Québec, M. le Président.

Un colloque rendu par des spécialistes qui sont venus dire que le projet de loi n° 130 ne réglait pas les difficultés, et pourquoi, M. le Président? Parce que, lorsqu'on regarde ce projet de loi et qu'on se demande qui y perd et qui y gagne, ça saute aux yeux. Celui qui gagne c'est le ministre, avec ses cadeaux de Noël dont parlait ma collègue, M. le Président; mais ceux qui perdent, ce sont ceux qui nous ont envoyés ici, ceux qui nous ont demandé de venir siéger pour les représenter, pas pour représenter la machine, M. le Président, pour représenter les citoyens, ceux qui ont le droit de ne pas se faire taper sur la tête constamment, ceux qui ont le droit d'avoir des recours, pas qu'on leur enlève ces recours.

On enlève des recours à nos concitoyens. On leur enlève la garantie d'impartialité et d'indépendance. Le Barreau, M. le Président, le Barreau du Québec – pas n'importe qui, là, hein – la première organisation qui doit veiller à l'intérêt de la population en matière de justice, le Barreau du Québec, le 11 décembre, il y a deux jours, on en a abondamment parlé ici... Je crois que c'est banalisé de l'autre côté, M. le Président.

Évidemment, on voit l'entier respect qu'il y a pour les institutions. On le sait, le gouvernement du Parti québécois n'a qu'une idée en tête, et peu importe le prix, peu importent les institutions, peu importe la tradition: ce qui compte, M. le Président, c'est briser le système. C'est ça qui compte pour eux. Mais il y en a des institutions et il faut les respecter. Lorsqu'on se dit et qu'on veut se dire fiers de ce que nous sommes, on devrait aussi être fiers de ce que nous avons, de ce que nous avons bâti, de notre héritage, de nos traditions, pas tout mettre de côté pour la seule idée, M. le Président, la seule idée de ce gouvernement: casser le système, mettre à bas les institutions.

Le Barreau du Québec disait ceci: «Les citoyens perdraient une trentaine de recours en appel devant les juges de la Cour du Québec, qui offrent des garanties d'indépendance et d'impartialité supérieures à celles prévues pour les membres du tribunal administratif proposé.» Voilà l'avis des spécialistes. Et que disait donc l'engagement électoral de ce gouvernement à la dernière élection, M. le Président? Il disait le contraire. On disait ceci, et je lis, M. le Président, le passage: «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes ou personnes exerçant des fonctions quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial et indépendant.» On fait le contraire, le Barreau le dit.

Cette loi... Et je continue de lire le programme qui a permis à ces gens de se faire élire sous des fausses représentations dont nous avons aujourd'hui la preuve. Ce programme, M. le Président, dit ceci: «Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel des décisions rendues par ces organismes ou personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.» Le contraire de ce qui est fait dans ce projet de loi, M. le Président, où on retire des droits, on retire des recours, on enlève la garantie d'impartialité et d'indépendance. On fait le contraire du programme. C'est une honte, M. le Président! C'est un abus de démocratie, un détournement de mandat, M. le Président. Et jamais nous ne le dirons assez.

Des voix: Bravo!

(16 heures)

M. Fournier: M. le Président, j'étais en commission des institutions, où mon collègue de Chomedey a travaillé tant et tant de temps, avec tant d'énergie, nous nous sommes battus pour présenter des amendements. Il y en a qui ont été acceptés, M. le Président. Nous avons plaidé, présenté notre cause et, à un moment donné, le ministre a commencé à voir la lumière et la commission a produit des amendements. Nous avons adopté beaucoup d'articles. Le travail a été constructif. Qu'est-ce qu'on constate, cependant? Lorsque le ministre retourne dans son cabinet, lorsqu'il est dans son petit entourage, dont on ne sait vraiment qui sont là, mais certes pas les élus qui étaient en commission des institutions et qui ont plaidé leur cause et qui ont fait amender, le ministre nous revient et il revient sur ces amendements, il revient sur la parole donnée. L'exécutif bâillonne, déchire ce que le législatif avait dit.

Lorsque le Barreau accuse le ministre de ne pas respecter les institutions, j'ajoute, M. le Président, qu'il joue le jeu d'un exécutif qui ne respecte pas le législatif, qui prend plus de place, qui prend toute la place, qui veut essayer de tyranniser cette démocratie que nous avons. C'est de la dictature à laquelle nous assistons lorsque ce qui est convenu devant les commissions est complètement changé dans le confort sombre, dans l'obscurité du cabinet du ministre seul, entouré de conseillers dont on ne sait vraiment quelle est l'idée qu'ils ont en tête. Pourquoi est-ce qu'on fait ça, M. le Président?

Je peux simplement vous dire une chose. Le ministre de la Justice, qui nous avait confié que sa réforme visait à régler les trop nombreux cas devant l'administration, M. le Président – c'est ce qu'il a dit – je lui dis que sa réforme n'est pas une réforme de la justice administrative, c'est de la déformation de la justice et c'est simplement tenir en compte l'administration sur le dos des citoyens que nous représentons, et jamais nous ne nous tairons là-dessus. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Alors, je m'en vais céder la parole à M. le député de Viau. M. le député.


M. William Cusano

M. Cusano: Oui, merci, M. le Président. Il est très évident, lorsqu'on regarde le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, que c'est un projet de loi de structures et de procédures et non un projet de loi qui répond aux besoins des citoyens.

M. le Président, j'aurais envie de vous déposer, mais vous le savez plus que moi... Les gens qui sont à la table devant vous tiennent un registre des intervenants. Je ne peux pas le déposer tel quel ou particulièrement y faire référence parce qu'on indique le nom de l'intervenant, pas son comté, et l'appartenance du parti. Ce qui est frappant dans ce projet de loi, par ces gens de l'autre côté qui sont tellement concernés par la réforme parlementaire, c'est que, sur un projet de loi d'une telle envergure, il n'y a presque personne de l'autre côté, sauf le ministre puis le leader. Je comprends, le leader parle tout le temps. Des fois, il ne sait pas ce qu'il dit, mais il parle quand même. Oui, M. le député. Oui. Un total de trois ministériels qui ont parlé sur ce projet de loi.

On se pose la question, vous vous posez certainement la question autant que moi, M. le Président, vous avez beaucoup d'expérience dans cette Assemblée: Pourquoi un ministériel qui regarde un projet de loi comme celui-ci décide de ne pas intervenir? Alors, on cherche les raisons. Et je comprends aussi que, avec tout le travail que les parlementaires ont à faire, des fois il est impossible de parler sur un projet de loi parce qu'il est étudié en différentes commissions parlementaires. Mais, au moins sur un tel projet de loi, je me serais attendu à ce que les membres ministériels de la commission parlementaire qui a fait l'étude de ce projet de loi article par article viennent ici, à l'Assemblée, vous expliquer pourquoi ils sont en faveur de ce projet de loi.

M. le Président, le député de Bonaventure est membre de cette commission, pas un seul mot; le député de Marguerite-D'Youville non plus; le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, lui qui s'attarde toujours sur les droits de ses citoyens, ici, dans un projet de loi où on retire à un grand nombre de citoyens, presque à l'ensemble de nos citoyens, où on retire le droit d'appel, M. le Président, pas un sacré mot, M. le Président, du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Et il en va aussi du député de Fabre. Est-ce que vous l'avez entendu, M. le Président? Je ne l'ai pas entendu. C'est la même chose avec le député de Drummond; la grande vedette, la députée de La Prairie, les députés de Gaspé, Deux-Montagnes, L'Assomption et Blainville, M. le Président. Pas un mot sur le projet de loi!

Qu'ils viennent nous dire, M. le Président, qu'au moins ils sont d'accord avec les décisions du leader et du ministre d'imposer un bâillon, M. le Président, qu'ils nous disent pourquoi. Normalement, un député est ici, M. le Président, pour dire à l'ensemble: Il y a un problème dans mon comté, il faut le régler par des lois, M. le Président. Ces gens-là, et je les mets au défi de se lever et de venir nous dire combien de citoyens se sont rendus dans leur bureau de comté pour dire: Ça nous prend absolument le projet de loi n° 130. Combien se sont rendus à leur bureau? Est-ce que vous en avez reçu, vous, M. le Président? Je sais que vous ne pouvez pas me répondre, mais est-ce que vous avez reçu des représentations dans votre comté, qui vous ont dit: Il nous faut absolument, comme citoyens du Québec, le projet de loi n° 130? Vous n'en avez pas reçu. Le député d'Anjou non plus; ce n'est pas trop loin de chez nous, le comté d'Anjou, du comté de Viau. Vous n'en avez pas reçu et puis il me fait signe qu'il n'en a pas reçu non plus. Est-ce qu'ils ont reçu des appels, M. le Président, des appels? Rien. Qu'on vienne nous dire ça, M. le Président.

C'est un projet de loi, M. le Président, qui est répugnant, car, dans une démocratie, que ça soit en Amérique du Nord ou que ça soit ailleurs, M. le Président, les personnes qui ont le dernier mot, normalement, ces personnes-là, M. le Président... Et je vais essayer d'expliquer le plus simplement possible pourquoi ces personnes qui ont le dernier mot, les juges, à titre d'exemple, M. le Président, pourquoi sont-ils nommés à vie. Pourquoi sont-ils nommés à vie? Comme dans d'autres pays, les juges sont élus par la population. Pourquoi? C'est pour, justement, garder une indépendance du politique et de la justice, M. le Président. C'est pour ça. Ce n'est pas parce que ces juges-là... En fin du compte, on les nomme à vie, oui, mais c'est justement pour s'assurer... Parce que, comme on dit en anglais, il y a un dicton en anglais qui dit, M. le Président: «He who pays the fiddler calls the tune». On traduit ça en français, M. le député de...

Une voix: Portneuf.

M. Cusano: ...Portneuf, traduire ça pour lui, M. le Président. C'est: Celui qui paie le chansonnier, normalement, a le droit à des chansons.

Une voix: On «call les shots».

M. Cusano: On «call les shots», comme on dit en bon québécois. Et c'est ça que le ministre de la Justice, M. le Président, est en train de faire avec cela, puis ce n'est pas la première fois que ce gouvernement péquiste ou des gouvernements antécédents péquistes tombent dans cette question de structure, M. le Président.

Je voudrais seulement vous rappeler – vous étiez ici en 1984, n'est-ce pas? – à ce moment-là, le gouvernement péquiste, qui était assis de ce côté-là, est arrivé avec la loi 42 sur les accidents de travail et les maladies professionnelles. Et ils ont essayé de convaincre tout le monde – le député de Lévis s'en souvient – comment, pour régler le problème d'attente, de délais au niveau des accidentés de travail, pour éliminer les délais, il fallait justement créer une autre Commission, la CALP, la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, M. le Président. On a essayé, à ce moment-là, de leur dire: Écoutez, ce n'est pas une autre structure que ça prend, ce n'est pas ça que ça prend, parce que la solution au problème n'est pas dans la création d'une autre structure. On avait dit tout simplement: Prenez la Commission des affaires sociales, vous pouvez élargir le nombre de commissaires, et c'est comme ça que vous allez réduire le temps d'attente. Ces gens-là qui possèdent la vérité aujourd'hui, qui la possédaient à ce moment-là, ils ont dit: Non, M. le député de Viau, vous avez complètement tort. C'est qu'on s'aperçoit aujourd'hui, M. le Président, que les délais devant la CALP sont d'aussi longue durée, sinon plus, qu'ils étaient avec la Commission des affaires sociales, M. le Président.

(16 h 10)

Et je reviens à la question de l'impartialité. Comment peut-on accepter dans une démocratie que le gouvernement soit juge et partie en même temps? En anglais, on dit «judge and jury». C'est inacceptable, dans une société de demain, que ce gouvernement veuille imposer une telle structure. Et, comme l'a mentionné ma collègue de Saint-Henri–Sainte-Anne, c'est justement que le ministre, par ce projet de loi, se donne la possibilité de nommer ses petits amis, ses petits amis.

Une voix: Les copains.

M. Cusano: Oui, les copains. On n'a seulement qu'à penser, par exemple, aux récentes nominations à la CALP, M. le Président, à la CALP, lorsqu'il y a des commissaires compétents dont on n'a pas renouvelé le mandat, pour nommer M. Richard Holden. Vous l'avez connu? Je l'ai connu, M. le Président.

Une voix: Ancien député péquiste.

M. Cusano: Oui, ancien député péquiste qui s'était fait élire sous la bannière d'Equality Party, mais c'était bien plus profitable pour lui de s'en aller du côté péquiste, puis on voit aujourd'hui comment on le récompense, M. le Président.

En terminant, il y a même plus que ça qui est en cause, M. le Président, c'est la question de la crédibilité des parlementaires. Vous, comme moi et tout le monde, on déplore le fait que, dans la population, on est à 4 % de crédibilité. Ce n'est pas beaucoup, hein? Mais savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce que ces gens-là, dans leur programme – ce n'étaient pas des mots – par écrit, en parlant justement des tribunaux administratifs, ils nous disaient qu'il fallait justement faire une réforme où on allait s'assurer qu'un organisme serait indépendant et impartial. C'est dans le programme du Parti québécois. Et on continue en disant: Cette loi prévoira des règles de procédure permettant l'appel. Où est l'appel, M. le Président, dans le projet de loi? Au contraire, il n'y en a pas. Alors, si, la semaine prochaine, on voit dans les sondages que la crédibilité des députés a baissé à 2 %, c'est le ministre de la Justice qui en est la cause principale. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viau. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys... Excusez, Mme la députée, il y a un député de... Alors, M. le député de Gaspé, je dois vous céder la parole.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président.

Des voix: ...

M. Lelièvre: Quand ils auront terminé, M. le Président, j'espère que les minutes, que les secondes vont commencer à compter.

Une voix: Consentement, M. le Président.


M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Depuis ce matin et depuis quelque, peut-être, 24 heures, j'entends mes collègues de l'opposition parler du projet de réforme de la justice administrative. C'est très facile de prendre un exemple et de le monter en épingle, comme le député de Chomedey a fait ce matin. Pour illustrer sa très large connaissance du projet de loi, le député de Chomedey nous a parlé de deux cas relevant de l'administration de l'aide sociale. L'un, dans le passé, M. le Président, dont on ignore la date de la décision, faisait en sorte qu'un fonctionnaire, à la suite d'une demande faite par un bénéficiaire d'obtenir le paiement d'une paire de souliers et d'un pantalon à la suite d'une formation qu'il avait obtenue, le fonctionnaire avait décidé que ce n'était pas de la bonne couleur. Le député de Chomedey nous disait que, heureusement, ce dossier-là avait été devant la Commission des affaires sociales, qu'une décision avait été rendue et qu'on avait donné gain de cause. Un autre cas également, d'une madame qui aurait été victime de blessures graves et dont on ne voulait pas reconnaître son invalidité.

M. le Président, il y a une distinction entre la justice administrative, une justice proche du citoyen, et un tribunal criminel, de nature pénale. Lorsqu'on est accusé au criminel, on fait face à l'une des sanctions les plus sévères, hein, la réprimande sociale, l'opprobre social; et recevoir une accusation, c'est extrêmement grave dans notre société, ça implique qu'on a commis un délit. On garantit que, dans toutes les procédures initiales qui font en sorte qu'une accusation est portée, toutes les règles sont respectées, c'est-à-dire le droit à un avocat, le droit au silence, avoir fait une déclaration libre et volontaire, s'assurer qu'il y a eu effectivement commission d'une infraction.

Alors, ça, c'est le droit criminel, M. le Président. Un jury peut en décider. Ce n'est pas nécessairement la valeur du crime. Quelqu'un va être accusé par acte criminel d'avoir volé un document quelconque, il va être accusé au criminel. Il va avoir droit à un procès devant jury, dépendamment de la nature de l'accusation, M. le Président.

Lorsqu'on parle de justice administrative, on traite de relations du citoyen avec l'État. J'ai eu l'occasion, avant l'élection de 1994, de pratiquer pendant 15 ans, particulièrement au niveau administratif dans des dossiers d'aide sociale, des dossiers d'assurance automobile, etc., des dossiers de la Régie du logement, dans différents contextes, à Montréal, en Gaspésie, même ici, à l'occasion, à Québec. Il y a une distinction profonde entre le recours à un agent d'indemnisation, dont faisait état le député de Chomedey ce matin, puis une demande de révision. À écouter le député de Chomedey, il mélange décision initiale de tout fonctionnaire, M. le Président, avec le projet de justice administrative. Le projet ne vise pas à réglementer l'ensemble des décisions émises quotidiennement par l'appareil administratif. Le député de Chomedey tente de faire accroire à la population que c'est ça, le but du projet de loi. Ce n'est pas ça, M. le Président. Le projet de loi prévoit des règles de contestation de la décision initiale, de réviser la décision d'un agent d'indemnisation qui n'aurait pas agi équitablement, qui n'aurait pas pris en compte toute l'information qu'on lui a donnée pour décider en toute connaissance de cause d'une demande. Mais non, on entend l'opposition nous dire: Ah, on viole les grands principes de justice naturelle. Et je n'ai encore entendu personne en énumérer un seul, M. le Président, pas un seul.

On vous parle de l'appel. Dans le projet de loi, c'est prévu spécifiquement, toutes les divisions vont y être. La Commission des affaires sociales, elle devient, en fin de compte, un autre... Elle fait partie du tribunal d'appel. Elle va entendre les décisions rendues en matière d'assurance automobile, en matière de Régie des rentes, etc., tout ce qui relève de sa juridiction.

Ce matin, le député de Chomedey, il a oublié de mentionner également que les deux décisions rendues par l'administration de l'aide sociale étaient peut-être sous la direction de son ancien collègue le député de Laporte, M. le Président, qui a été ministre de la Sécurité du revenu. En toute connaissance de cause, je peux vous dire que la Commission des affaires sociales rendait des décisions, et les commissaires, indépendamment de la couleur politique, ordonnaient au gouvernement de payer des prestations en fonction de la loi en vigueur. Le ministre libéral de l'époque émettait des directives de ne pas respecter les décisions de la Commission des affaires sociales. Et c'est documenté. Oui. On le faisait de façon continue. Parce que ça avait une incidence financière, on brimait systématiquement les droits des citoyens.

Aujourd'hui, on en arrive avec des moyens de faire en sorte qu'on va accélérer le processus de décision, de révision. Un fonctionnaire ne pouvait pas réviser sa propre décision, parce qu'elle avait déjà été rendue, puis, si on apportait une preuve nouvelle, il fallait recommencer à faire une nouvelle demande, produire l'ensemble des documents. Alors, c'est ça que l'opposition nous demande de faire, de faire en sorte qu'on continue leur gestion qu'ils ont improvisée ou dont ils ne se sont pas occupés pendant neuf ans. C'est ça qui est arrivé, M. le Président.

Alors, qu'est-ce qu'on va faire avec le projet de loi, M. le Président? On va voter en sa faveur. En commission parlementaire, on oublie peut-être de le mentionner – d'ailleurs, je pense que c'est un oubli ou une omission volontaire – 125 heures de travaux devant la commission des institutions, 125 heures en plus du travail ici, à l'Assemblée, 125 heures de travail, M. le Président, à étudier à un projet de loi. D'ailleurs, le député de Chomedey lui-même l'a admis, le député de Châteauguay également l'a admis, ils ont adopté presque la quasi-totalité des articles d'un commun accord. Ils étaient en désaccord sur trois articles. Ils prétendent que le ministre de la Justice aurait changé un article, l'appel et la nomination. Eux, combien ont-ils fait de nominations pendant qu'ils étaient au pouvoir, de 1985 à 1994? Combien en ont-ils fait, M. le Président, dans les différents tribunaux administratifs, alors qu'il n'y avait aucune règle qui précisait la façon de les nommer si ce n'est l'allégeance politique, M. le Président? Et c'est ça qu'on a vu dans le passé.

(16 h 20)

Là, on propose un système amélioré, et ils jouent aux vierges offensées. On propose d'avoir un comité qui va être formé, qui va faire des recommandations au ministre, comme on le fait devant les tribunaux ordinaires pour la Cour du Québec. Mais non, ce n'est pas suffisant, on veut absolument que ces nominations-là relèvent d'un autre organisme.

Alors, M. le Président, la justice administrative, il faut qu'on ait aussi une capacité de faire en sorte que ces gens-là soient amovibles. On nous propose de les nommer à vie, sans aucune évaluation. D'ailleurs, les tribunaux viennent de confirmer que ce mode de nomination, la durée de la nomination, la procédure de nomination qui est en vigueur, non pas celle que le ministre propose, puis elle est améliorée, mais l'ancienne, c'est-à-dire le pouvoir discrétionnaire de tous ceux et celles qu'ils ont nommés dans le passé, est valable. Il y a une décision qui a été rendue par la Cour suprême, ça a été considéré valable, M. le Président. La Cour d'appel du Québec vient de les considérer valables également, les nominations que le gouvernement libéral de l'époque avait faites.

Et aujourd'hui, on s'élève en Chambre et on va faire durer le débat peut-être encore de nombreuses heures. On reproche aux députés du gouvernement de ne pas prendre la parole, eux qui, depuis le début, relisent des textes qu'on a entendus depuis hier sur le même sujet mais à différentes étapes. Alors, M. le Président, s'ils avaient des éléments constructifs, positifs à apporter, ils auraient pu le faire. Et j'étais en commission également et j'ai écouté également.

Alors, M. le Président, lorsqu'on nous dit, par exemple, qu'on va faire un droit d'appel pour les mieux nantis, c'est inexact, M. le Président. Le député de Chomedey disait ce matin: L'appel va être réservé à trois secteurs. Ça a toujours été réservé à trois secteurs avant, pendant qu'ils étaient au pouvoir; ils n'ont pas bougé du tout et, aujourd'hui, ils nous accusent de vouloir bouger. Bien, j'espère, M. le Président, qu'agir ce n'est pas un crime, parce qu'on deviendrait des statues, on deviendrait peut-être l'opposition officielle si on agissait comme eux, M. le Président. Mais, nous, on va être jugés sur ce qu'on aura fait. Et il y a seulement ceux qui ne font rien qui ne se trompent pas. Ça, vous l'avez vu, hein.

Alors, M. le Président, lorsqu'on veut faire en sorte de faire des représentations sur un projet de loi, et non seulement qu'on veut faire des représentations sur le projet de loi, mais qu'on vise le ministre et non pas le projet de loi, je m'inscris en faux devant ce procédé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Gaspé.

M. Mulcair: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Chomedey, question de règlement?

M. Mulcair: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Quel point, s'il vous plaît?

M. Mulcair: En vertu des articles 212 et 213. En vertu de 212, on aimerait faire des brèves explications pour des propos qui ont, de toute évidence, été mal compris et, ensuite, on aimerait savoir si le député de Gaspé accepterait, en vertu de l'article 213, de répondre à une question de notre part.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pour ce qui est de 212, ce seraient des propos que le ministre vous aurait attribués et que vous voudriez rectifier...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pas le ministre, excusez, le député de Gaspé. Alors, ça doit se faire, ça, dans de brèves explications, que ça n'engendre pas un nouveau débat, simplement sur le point en question. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui, très brièvement, M. le Président. Le député semble avoir compris que, dans la décision concernant la femme qui a vu ses prestations diminuées, on disait que ça concernait une invalidité, une blessure. Ce n'était pas ça. C'est une femme qui avait été séquestrée, il y avait un rapport de police et, malgré tout, on avait réduit ses prestations parce qu'on disait qu'elle vivait avec quelqu'un. C'est une décision qui n'avait aucun bon sens. Et c'est pour ça que le Protecteur du citoyen dit qu'il faut s'attaquer à la décision de base.

C'est faux, M. le Président, de dire que l'opposition exige que les gens soient nommés à vie comme juges. Au terme de notre présentation, on a été très clair, et nous et le Barreau disons que les règles doivent être plus claires.

Et, finalement, c'est aussi une erreur de dire que le projet de loi maintient les appels existants. Le projet de loi enlève des droits aux citoyens, on perd 30 appels à la Cour du Québec qui existent à l'heure actuelle. Donc, il y a une erreur à cet égard aussi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Maintenant, vous avez fait allusion à 213. Est-ce que vous voudriez poser une question au député de Gaspé? Est-ce que, M. le député, vous acceptez la question?

Des voix: Non.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il n'y aura pas de question. Alors, il n'y a pas de question. Alors, je m'en vais céder la parole au prochain intervenant. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, je vous cède la parole.

Mme Frulla: Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. En réponse au député de Gaspé, qui dit qu'il n'y a rien de nouveau qui a été apporté ici durant le débat... Moi, je m'excuse, là, je ne prendrai probablement pas tout mon temps parce que je suis en commission parlementaire en bas, à la salle Papineau, sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives.

Alors, M. le Président, il y a une chose, 47 heures de débats plus tard. J'ai dit hier, en parlant sur ce même projet de loi, qu'il fallait que le gros bon sens prévale, hein, sur toutes les discussions légales, et, bon, les virgules légales, ou enfin, il fallait que le gros bon sens prévale. Alors, croyez-le, ne le croyez pas, nous sommes en bas, en commission parlementaire sur le projet de loi n° 67, et on se fait dire que la main gauche ne sait pas ce que la main droite fait, parce que le projet de loi n° 130 fait en sorte que l'objectif du projet de loi n° 67, c'est-à-dire au niveau de l'évaluation, de faire du sur mesure, est complètement, je dirais, annulé par, justement, le projet de loi n° 130. Pourquoi? Parce que le projet de loi n° 130, au niveau de l'évaluation foncière, des procédures de greffe, d'évaluation, etc., fait en sorte que l'on apporte une espèce de carcan global et commun, quand le projet de loi n° 67 amené par le ministre des Affaires municipales, lui, fait appel à du sur mesure.

Alors, c'est pour vous prouver que, 47 heures plus tard, ils ne se parlent pas, là, en face. C'est pour ça, un comité ministériel ou, enfin, un Conseil des ministres, c'est pour que le monde se parle. Et, c'est assez incroyable, on est en train d'adopter un projet de loi qui annule l'effet d'un autre projet de loi qui va nous être soumis pour adoption la semaine prochaine. Il faut le faire, M. le Président, il faut le faire! Et là ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas été avertis. Le maire de Québec, M. L'Allier... Et puis je vais la relire, la lettre, parce qu'il n'y a personne qui y a répondu, mais je vous le dis, à 11 h 30 ce matin, il y avait entre autres des évaluateurs agréés, des membres du Barreau qui nous disaient: Faites attention avec ce projet de loi là, parce que M. le ministre des Affaires municipales défait ce que vous voulez faire. Alors, M. L'Allier disait ceci, au niveau de l'article 116 du projet de loi n° 130: «...que cette disposition, dont l'intention est très louable, trouve difficilement son application dans le contexte de la contestation de la valeur inscrite au rôle, pour plusieurs raisons». Et là je les rappelle au ministre, parce que, quelque part, quand ce projet de loi là va être appelé pour adoption, on ne pourra pas dire: On ne le savait pas. Puis on ne pourra pas dire aux députés et ministres d'en face, qui vont voter pour le projet de loi, qu'eux non plus ne le savaient pas. Mais le ministre des Affaires municipales, lui aussi, a été averti à 11 h 30 ce matin.

Le maire L'Allier, qui résumait finalement l'ensemble de la position des maires... Parce que, après ça, l'Union des municipalités est venue, et là, présentement, la commission continue... Allo?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pardon, M. le député de...

M. Paquin: Question de directive sur la pertinence.

Le Vice-Président (M. Brouillet): De directive ou question de règlement?

M. Paquin: C'est une question de règlement et une question de directive. Le règlement, c'est 211, sur la pertinence, et la directive, c'est la suivante: dans Beauchesne, on dit qu'il est interdit de faire allusion, pendant un débat, aux délibérations d'un comité tant que son rapport n'a pas été déposé. Actuellement, la députée fait allusion à ce qui se passe dans une commission et qui n'a pas encore été déposé en cette Chambre. Est-ce que c'est pertinent au débat et est-ce que, sur le fond, le sujet qui est abordé par la députée est pertinent au débat que nous tenons?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, sur la première question, je ne crois pas que ce ne soit pas pertinent, puisqu'on montre le lien très étroit qu'il y a entre les deux projets de loi. Deuxièmement, quant au fait de ne pas parler, il est bien dit dans le règlement que c'est quand une commission siège à huis clos. Alors, je crois que votre commission ne siège pas à huis clos. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Une voix: Très bon, président. Bravo!

Une voix: La décision est rendue. La décision est rendue, Roger. Assieds-toi, là.

Une voix: Bonne décision.

M. Paquin: M. le Président...

Une voix: Ne conteste pas...

M. Paquin: M. le Président, sur une autre question...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pardon?

M. Paquin: Au niveau de la pertinence, M. le Président. Dans Beauchesne, on nous indique que...

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

M. Paquin: ...outre les restrictions prévues à l'article 18...

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

(16 h 30)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. S'il vous plaît, là, s'il vous plaît, M. le député de Saint-Jean. Moi, je fais affaire avec le règlement de l'Assemblée nationale adopté. On se réfère à Beauchesne pour nous aider à interpréter quand le règlement n'est pas assez clair ou qu'il est plus ou moins muet. Sur les deux points que vous venez de mentionner tantôt, le règlement de l'Assemblée nationale, je juge qu'il est très clair, et je me suis appuyé sur ce document-là. On n'est pas en train de faire l'histoire du droit et des procédures ici. Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Des voix: Bravo!

M. Paquin: M. le Président, c'est le 211. Question de règlement sur 211, M. le Président, sur un autre point.

M. Lefebvre: Tu peux le soulever...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Question de règlement, ça, je dois vous permettre, encore une fois, sur un point de règlement... Je vais entendre son point de vue. Alors, s'il vous plaît, je dois l'entendre si c'est un nouveau point de règlement et non pas les points sur lesquels je viens de statuer.

M. Lefebvre: C'est là-dessus, M. le Président, que je veux intervenir.

M. Paquin: Toujours sur 211, mais sur un nouveau point.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, je veux entendre, pour voir ce sur quoi il veut...

M. Lefebvre: M. le Président, je m'excuse, on ne peut pas... Écoutez, on n'a pas droit à deux chances ici, là.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint, si c'est un nouveau point de règlement et non pas les deux points sur lesquels je viens de statuer...

M. Paquin: C'est exact, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Un nouveau point?

M. Paquin: Un nouveau point.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Allez.

M. Paquin: C'est toujours sur la pertinence, mais sur un autre aspect du discours qui est tenu: Est-ce qu'il est pertinent d'anticiper sur la discussion d'une motion qui devra être étudiée dans cette Chambre plus tard?

Le Vice-Président (M. Brouillet): On ne fait que cela dans nos discours la plupart du temps. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Là, c'est typique, ce qu'on vient de vivre ici.

Une voix: Oui.

Mme Frulla: On a le député de Saint-Jean qui essaie de dire ou de m'arrêter dans mon discours parce que j'avertis l'ensemble de la députation et les ministres que présentement, au moment où on se parle, il y a un débat, en bas, public, qui dit: Attention, parce que la main droite défait ce que la main gauche fait. Et je le dis ici en Chambre parce que je vous avertis tous, ça peut arriver, M. le Président, qu'à un moment donné...

Une voix: Une mise en garde. Une mise en garde.

Mme Frulla: ...dans l'ensemble des lois qu'on a à étudier chacun, comme on n'est pas experts en tout, qu'on ne soit pas avertis. Ça peut arriver. Ça peut arriver et c'est correct. Excepté que, quand quelqu'un, par bonne volonté, fait une mise en garde parce que malheureusement il y a un problème qui va être créé par ce projet de loi pour un autre projet de loi et pour un ministre, en quelque part, laissons cette personne-là s'exprimer et qu'on prenne justement cette mise en garde à bon escient pour dire au ministre: Peut-être qu'il y a quelque chose que vous n'aviez pas vu.

Par contre, M. le Président, ce qui est surprenant qu'il n'ait pas vu, en fait, le ministre de la Justice... C'est que je reviens à la lettre. En bas, c'est un débat; là, j'ai une lettre tangible dans les mains, en papier, du maire L'Allier qui résume l'ensemble des positions des autres maires, ceci par rapport à l'article 116 du projet de loi: «Premièrement, la notion de documents pertinents est beaucoup trop vague et devrait être précisée. Deuxièmement, cette obligation entraînera des frais additionnels pour notre service d'évaluation, qui doit, dans la période de compressions budgétaires que nous traversons, réduire ses coûts d'opération au maximum. Troisièmement, et c'est là notre objection majeure – et c'est ce qui se discutait aussi en bas – le citoyen plaignant sera très mal servi par les documents dont il recevra éventuellement copie. En effet, ces documents ont servi à faire une évaluation de masse et ne sont donc d'aucune pertinence selon la jurisprudence dans le cadre d'une contestation d'une évaluation particulière. Or, le plaignant, s'appuyant sur les documents transmis pour construire sa preuve, développera rapidement un sentiment de frustration envers le Tribunal, qui refusera ses arguments basés sur ces documents en lui réclamant sa propre expertise. Il est certain que ce sentiment de frustration rejaillira sur l'évaluateur et sur la municipalité.» Et, moi, M. le Président, je veux ajouter: Chez les députés dans leurs bureaux de comté, dont celui du député de Saint-Jean aussi.

Ensuite, M. le Président, M. L'Allier disait, représentant l'ensemble des maires: «Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d'exclure les municipalités des dispositions de l'article 116 – ce qui n'a pas été fait.

«Un autre objet, aussi, d'inquiétude est pour nous l'absence du droit d'appel – le député de Gaspé parlait tantôt du droit d'appel, dans ce cas-ci il y en a un, problème, l'absence du droit d'appel à un tribunal supérieur. Nous croyons en effet que le pouvoir de révision d'un tribunal supérieur constitue un moyen de contrôle efficace qui a toujours sa place dans notre système judiciaire. L'expérience dans le monde municipal d'un système d'arbitrage sans droit d'appel en matière de litige entre les villes et leurs corps de police ou de pompiers est, à cet égard, éloquente. Il a en effet été largement démontré l'effet sur les finances municipales d'une foule de décisions dont l'effet pris individuellement était négligeable, mais dont l'effet cumulatif pouvait s'avérer dommageable pour les contribuables.

«Pour ces raisons, nous vous demandons de rétablir le droit d'appel des décisions de la section de l'évaluation du futur Tribunal administratif du Québec devant la Cour d'appel.» M. le Président, devant la Cour d'appel.

Ça, ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que, si les maires, les municipalités et les citoyens des municipalités ne sont pas de bonne humeur à cause des procédures les forçant, d'abord, à ne pas avoir de droit d'appel, d'une part, et, deuxièmement, forçant les municipalités à débourser plus dans un contexte où on leur a même envoyé, en plus de leurs responsabilités, jusqu'à ce jour, 260 000 000 $ de frais supplémentaires, M. le Président, vous pouvez me croire que les députés dans leur comté vont se le faire dire. C'est pour ça que je tenais à avertir tout le monde: le député de Gaspé, le député de Saint-Jean et l'ensemble de la députation du gouvernement d'en face. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lelièvre: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Gaspé, l'article 213?

M. Lelièvre: Article 213, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Article 212?

M. Lelièvre: Est-ce que la députée de Marguerite-Bourgeoys accepterait une question?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une question? Mme la députée, acceptez-vous une question du député de Gaspé?

M. Lelièvre: Alors, j'aimerais savoir, M. le Président, de la députée, si...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...dans l'éventualité qu'un pouvoir de révision...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une petite minute. Je vais demander à Mme la députée, d'abord, si elle accepte une question de la part de... Oui? Alors, très bien. Alors, M. le député de Gaspé, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys accepte votre question.

M. Lelièvre: Oui, M. le Président, je vous remercie. Je remercie également ma collègue de Marguerite-Bourgeoys. J'aimerais savoir d'elle: Si la Cour supérieure avait un pouvoir de révision, comme il existe en matière d'évocation, est-ce que ça pourrait la satisfaire comme mécanisme de surveillance des décisions prises par un tribunal inférieur?

Mme Frulla: M. le Président, je vais répondre à cette question. D'abord, ça me fait plaisir de répondre, puisque lui-même n'a pas voulu répondre à une question comme membre du Barreau.

Des voix: Bravo!

Mme Frulla: Deuxièmement, comme membre du Barreau, on lui aurait demandé comment ça se fait qu'il acceptait ça, puisque tous ses confrères ne l'acceptaient pas. Et, troisièmement, M. le Président, nous serons satisfaits s'il y a appel et nous serons aussi satisfaits quand le maire et les maires seront satisfaits, enfin, et réconfortés, si on veut, du fait que ce projet de loi, le projet de loi n° 130, ne défait pas ce que le projet de loi n° 67 veut faire. Le jour où les maires nous diront: Nous sommes satisfaits et confortables, nous serons confortables, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Lelièvre: Je veux juste...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. Pardon. Pardon. S'il vous plaît, M. le député de Gaspé, quand le président est debout... Vous pourrez voir, à 212 et 213, ça doit être très bref et ne pas susciter de nouveaux débats. On ne peut pas enclencher comme ça, là, une discussion bilatérale à deux députés.

Alors, je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, et je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant. M. le député d'Orford?

M. Benoit: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous cède la parole, M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Très bien, M. le Président. Nous sommes à la dernière étape d'un projet de loi que nous avons et que nous allons continuer, jusqu'à la dernière minute, peu importe ce que dira le gouvernement, peu importent les insultes qu'ils pourront nous faire, peu importent les temps de la nuit auxquels ils nous feront siéger, M. le Président... Nous avons siégé toute la nuit, nous avons siégé jusqu'à 7 h 10 ce matin, M. le Président, et ils essaient de passer ces affaires-là en cachette, M. le Président, en cachette. Nous avons siégé toute la nuit et nous avons constamment... nous nous sommes opposés à ce projet de loi là – ce que nous appelons dans le métier un «filibuster» – et nous allons continuer à le faire jusqu'à la dernière limite qui nous est permise, M. le Président.

(16 h 40)

Pourquoi, M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons décidé... Parce que nous voulons parler au nom du peuple. Nous voulons parler au nom des jeunes avocats et avocates qui étaient ici mercredi. Des jeunes qui commencent leur carrière, qui sortent de l'université, qui ont étudié les fondements les plus grands de notre démocratie, mais surtout de la justice. Ils étaient des centaines à l'Assemblée nationale. Vous auriez dû les voir au moment où le premier ministre et le ministre de la Justice essayaient de les remplir comme des valises – pour prendre leurs expressions, M. le Président. Ces jeunes-là faisaient signe au premier ministre de s'en aller, d'autres faisaient des beaux gestes de violon, M. le Président. Des grandes phrases, des grands huit sur la glace, M. le Président.

Nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'on est ici pour parler au nom de ces jeunes avocats et avocates. Nous sommes ici aussi pour parler au nom du président du Barreau, M. le Président. Moi qui n'ai pas une formation légale, il y a quelque chose que je réalise depuis que je suis ici, depuis sept ans, c'est que, quand le Barreau parle, on devrait écouter très attentivement, M. le Président. Il y a comme des niveaux de crédibilité dans la société. Il y a des gens, quand ils donnent des opinions, qu'on doit écouter peut-être un peu plus que d'autres. Quand monseigneur parle dans la ville de Québec et dans la ville de Montréal, on doit écouter ça avec une autre oreille que quand c'est le dernier des joueurs pee wee d'un club de hockey quelque part, M. le Président. Alors, on ne semble ni écouter les monseigneurs au Québec ni écouter le Barreau, M. le Président, et «never mind» le peuple et les représentants du peuple qui sont ici aujourd'hui.

Alors, qu'est-ce qu'on fait? Même après avoir étudié 78 % du projet de loi avec l'opposition – nous avons collaboré, 78 % du projet de loi avait été étudié – le ministre, qui a de la misère à gérer son ministère, c'est bien évident, qui dit des grossièretés sur les ondes, qui a mis d'une façon partisane toutes sortes de monde un peu partout...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Là, je pense que le député d'Orford aurait peut-être besoin d'une meilleure technique de ventilation, parce que, quand on... Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député d'Orford, vous savez très bien que, en vertu de l'article 35, vous ne pouvez pas donner des propos qui peuvent soulever tout un débat. Alors, je vous demanderais de rester dans le cadre de notre règlement, et nous allons suivre votre allocution d'une façon assidue et très intensément. M. le député.

M. Benoit: M. le Président, je n'ai pas le courage, je vous le dis franchement, de répéter les propos du ministre de la Justice qu'il a tenus sur les ondes. Je m'excuse. Vous n'aurez pas de problème à ce que je ne les dise pas, je ne les dirai pas. C'était tellement grossier, M. le Président, que je ne dirai pas des propos comme ça en cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, le député d'Orford, qu'il se contente donc de parler sur le projet de loi. M. le Président, on ne peut pas attaquer la conduite d'un député. Alors, c'est tout simplement ça. M. le Président, que le député d'Orford continue, mais sur le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui, alors, M. le Président, ce même ministre, qui a de la misère à gérer son ministère, et on s'aperçoit... deux bâillons depuis qu'il est là: il faut le faire! On n'a pas siégé, depuis deux ans. Ce gouvernement ne nous a pas fait siéger, ils ont «référendé». On le sait tous, ça, M. le Président. Ils ont référendé, et on n'était pas sitôt sorti d'un débat référendaire qu'ils se sont embarqués dans un débat linguistique. On a très peu siégé ici depuis deux ans. Mais, même à ça, ce même ministre de la Justice a trouvé le moyen – écoutez-moi bien – d'arriver avec deux bâillons. C'est du jamais vu dans l'histoire de la démocratie du Québec, un même ministre, alors qu'on ne siège pas, qui arrive avec deux bâillons.

M. le Président, je veux parler au nom de ces jeunes avocats et avocates qui sont venus ici, qui sont venus nous dire... Mais, M. le Président, ils ne sont pas seuls à être venus nous voir. Sur la colline parlementaire, depuis des semaines, c'est aussi du jamais vu. Nous n'avons jamais vu tant de manifestants. Pourquoi tant de manifestants, M. le Président? Parce que ces gens-là ont la même impression que nous avons, que le peuple a, que ces jeunes avocats et avocates qui étaient ici avec nous mercredi ont, c'est de ne pas être écoutés, c'est de ne pas être entendus. Et, vous savez, il y a des journées à Québec où il y a plus de manifestants qu'il y a de touristes. C'est du jamais vu.

Pour ceux qui n'écoutent pas les nouvelles, mais qui nous écoutent en ce moment, je voudrais leur donner le dernier hit-parade des gens qui sont venus manifester depuis une semaine, M. le Président. Avez-vous déjà vu, à Québec, dans l'histoire de la démocratie, des maires en gang venir manifester avec leurs camions dans la ville de Québec? On n'a jamais vu ça. Ça, c'est ces maires à qui on avait dit, au moment de l'élection, le distingué député de Joliette: Inquiétez-vous pas, on ne vous enverra rien dans vos cours, MM. les maires. Bien là, ils viennent de se réveiller puis ils s'aperçoivent que ça rentre à plein camion, les taxes, de tous bords et de tous côtés.

Alors, on a eu les agriculteurs, M. le Président. Eux autres, il y a ceux qui voulaient venir, il y a ceux qui sont venus et il y a ceux qui disent qu'ils vont venir, M. le Président, parce qu'il y a trois temps. Il y a ceux qui devaient venir en octobre: le premier ministre leur a fait des courbettes, ils ne sont pas venus. Il y a ceux de l'UPA, qui sont venus au congrès, qui ne sont pas de bonne humeur pantoute, qui sont venus à Québec. Puis il y a ceux qui disent: On va venir manifester prochainement, de nouveau. Il y a les environnementalistes, qui sont venus il y a quelques jours, la CSN, la CEQ, la FTQ, qui étaient ici en manifestation, les professeurs, les gardes-malades, puis là il y a les docteurs qui nous annoncent peut-être bien qu'ils s'en viennent. C'est du jamais vu. Il n'y a pas une journée qu'on ne regarde pas par nos fenêtres, puis qu'ils n'ont pas mis les barricades en avant parce qu'il y a un groupe de manifestants qui s'en vient. Il y a plus de manifestants à Québec, de gens qui, à travers le Québec, disent: Ces gens-là ne nous écoutent pas, ne nous ont pas entendus. Et puis, nous, l'opposition, bien, on dit: Il faut parler au nom de ce monde-là. C'est pour ça qu'on a été élus puis c'est pour ça qu'on a été assermentés.

M. le Président, c'est une sombre journée dans l'histoire de la démocratie. Je l'ai dit avant aujourd'hui et je le redis. Il y a des choses qu'on peut faire, en démocratie. On peut d'abord se regrouper. Les gens peuvent se regrouper, les gens peuvent se réunir, les gens peuvent manifester, en démocratie, les gens peuvent pétitionner, les gens peuvent écrire des lettres ouvertes, les gens peuvent élire des députés en espérant qu'un certain nombre seront dans l'opposition pour faire valoir les points les plus faibles d'une législation du gouvernement. Alors, ça, c'est la démocratie.

Et là, ce dont on s'aperçoit, c'est que ces gens-là, dans un moment d'euphorie, je pense, sont après passer sur les fondements les plus élémentaires de la démocratie et empêcher l'opposition de bien représenter les avocats et les avocates, de bien représenter le Barreau du Québec, de bien représenter tous ces citoyens qui sont pris dans une superstructure. Et vous me faites signe que mon temps est fini. Oui, parce que ce qu'on est après faire, on est après envoyer des citoyens dans une autre grosse maudite patente de structure dans laquelle les citoyens ne se retrouvent jamais. Et, s'il y a un parti qui pense que, quand il y a un problème, c'est de créer une structure, c'est bien le parti social-démocrate du PQ que nous avons en place. Alors, nous, on vous dit: Si vous pensez que vous réglez des problèmes quand vous réglez des structures, ce n'est pas le cas.

Regardez la ville de Montréal, ce qui est après se passer avec les structures que vous avez mises en place. Regardez votre programme électoral avec 273 patentes, organismes, commissions, structures que vous avez proposés. Eh bien, on a 200 chômeurs de plus par jour, au Québec, avec toutes ces patentes-là. Les citoyens, ils veulent des opérations simples et efficaces. Ce n'est pas ça qu'on leur propose ici, c'est une grosse structure. Structure qui va être plus importante que les cours municipales et la Cour du Québec. Avez-vous une idée comment ça va être gros, cette superstructure qu'on est après mettre en place?

Vous me dites que mon temps est terminé. Bien, j'ai l'impression d'avoir fait mon job de parlementaire de l'opposition et d'avoir défendu, encore une fois, les avocats, le Barreau, le peuple et les idées les plus profondes de la démocratie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je voudrais intervenir à cette étape-ci de l'adoption de l'importante réforme de la justice administrative. Quelques mots seulement parce que je ne voudrais pas interrompre le concert de l'opposition officielle dans la répétition de leur cassette. Mais ce qui m'a frappé surtout dans l'intervention du député d'Orford et qui m'a incité à intervenir dans le débat, c'est, d'entrée de jeu, qu'il dit: Je veux représenter le Barreau et les jeunes avocats. Je suis membre du Barreau, je suis fier d'être membre du Barreau. Mais, quand je m'adresse en cette Chambre, je représente les citoyens qui m'ont élu, je ne représente pas des intérêts d'une corporation professionnelle ni les intérêts d'un membre d'une corporation professionnelle. Alors, ça, je pense que c'est important. Et je ne prête pas, ici, d'intention au député d'Orford; je suis certain qu'il a dû mal s'exprimer quand il a dit cela, je suis certain que, lui aussi, quand il se lève en cette Chambre, c'est les intérêts de la population qu'il a en jeu et non pas les intérêts d'une corporation professionnelle.

J'ai le plus grand respect pour le Barreau. J'ai été porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, et il est arrivé souvent, très souvent que des remarques faites par le Barreau du Québec permettent de bonifier des projets de loi. Mais il y a aussi des remarques faites par le Barreau du Québec qui n'étaient pas retenues par les ministres de la Justice de l'époque; c'est arrivé. Le Barreau représente les intérêts de la justice, représente les intérêts, aussi, de la population. Mais je crois que, à chaque fois qu'un député, ici, en cette Chambre, doit se lever, ce ne sont pas les intérêts du Barreau qu'on doit prendre en considération ni les intérêts des avocats, mais les intérêts de la population.

(16 h 50)

Je pense que c'est important, quand on entend les débats, de garder ça à l'esprit. Et, moi, je trouverais ça dommage que, tout à coup, des députés se lèvent et disent: Moi, je représente les intérêts d'un tel, moi, je représente les intérêts d'un tel. Ça, je pense que ça serait dangereux, M. le Président. Et j'espère que le député d'Orford n'a pas voulu ainsi laisser croire cette chose.

Quand il dit «du jamais vu», encore là, la mémoire... Je constate que la mémoire peut parfois faire défaut. Je me souviens – oui, c'est une faculté qui oublie, la mémoire – en 1994, quand j'étais dans l'opposition, des manifestations. Il fallait quasiment prendre un billet pour pouvoir passer entre les différentes manifestations qui venaient manifester contre le gouvernement libéral qui avait été ici pendant neuf ans. Alors, ça, si on commence à compter les manifestations, je crois qu'à ce moment-là le décompte pourrait des fois ne pas avantager la personne qui les soulève.

Donc, je crois que la réforme telle que proposée par le ministre de la Justice, surtout suite aux arrêts de la Cour d'appel et à l'arrêt de la Cour suprême qui a déjà été mentionné par le ministre de la Justice, fait en sorte qu'on a des garanties, je crois, raisonnables, très raisonnables, voire même sérieuses que les critères qui sont retenus dans le projet de loi tel que présenté par le ministre de la Justice vont vraiment être considérés comme valables, comme respectueux des règles d'intégrité, des règles d'impartialité qui doivent, à ce moment-là, être dévolues à des tribunaux administratifs. L'indépendance, c'est ça, le critère.

Et j'ai aussi beaucoup apprécié l'intervention du député de Gaspé, qui soulignait à juste titre que la Cour supérieure a toujours un pouvoir de surveillance des organismes quasi judiciaires. On peut aller en évocation si les règles de justice naturelle n'ont pas été respectées relativement à une enquête ou à une audition. Donc, il y a certains paramètres qui existent. Gardons ça à l'esprit. Et ce à quoi j'invite mes collègues des deux côtés de cette Chambre dans leurs interventions, c'est d'éviter la démagogie. Évitons la démagogie. Évitons de faire des...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, vous avez très bien compris que le leader du gouvernement demande à l'opposition d'éviter la démagogie. Ça ne peut pas s'appliquer à eux parce qu'ils n'ont pas parlé à date, sauf lui. Il n'y a pas eu de démagogie de ce côté-ci. Je vous demanderais d'inviter le leader à retirer ses dernières accusations adressées à l'opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Frontenac, j'ai entendu qu'il invitait les parlementaires... Le leader du gouvernement, selon ce que j'ai bien entendu, n'a pas invité l'opposition, il a invité les parlementaires en cette Chambre. Donc, à ce moment-ci, je vous inviterais à être prudent, M. le leader du gouvernement, et à continuer votre allocution.

M. Bélanger: M. le Président, je vais suivre vos recommandations. Je suis un peu surpris que le député de Frontenac se soit senti visé, mais je ne le visais pas du tout. Je ne visais pas l'ancien ministre de la Justice, qui, je le sais, est bien trop respectueux des règles en cette Chambre. Mais ceux que j'invitais tout simplement, c'est les collègues qui vont s'adresser – et le député de Laurier-Dorion me fait signe que oui – à faire attention d'éviter la démagogie. C'est tout simplement un rappel, je crois, qui est bon pour tous les membres en cette Chambre, des deux côtés de cette Chambre. Des fois, on peut s'emporter. Vous savez, dans certaines envolées oratoires, qu'ils ont de la difficulté à atterrir, mais c'est ça qu'il faut, je pense, garder à l'esprit.

Ceci étant dit, oui, j'approuve et je vais voter en faveur de la réforme administrative qui est attendue, je crois, depuis longtemps par l'ensemble des justiciables. Ce n'est pas une réforme parfaite, il n'y a jamais de réforme parfaite. Mais je crois, M. le Président... Il n'y a jamais de réforme parfaite, je n'en ai jamais connu. Même le Code civil, qui a été fait d'une façon consensuelle entre l'opposition et le parti ministériel, n'est pas parfait. On le voit, il y a des choses qu'on ne pouvait pas prévoir qu'on se doit d'ajuster. Mais il était temps qu'on en ait une. Je l'ai réclamée quand j'étais porte-parole de l'opposition en matière de justice. J'ai dénoncé le brouillon qui avait été présenté à l'époque par Gil Rémillard, qui était tout à fait parcellaire, qui ne touchait que quelques organismes et qui ne réglait en rien aucun des problèmes qui étaient adressés par les différents rapports qui disaient l'urgence de réformer notre système des tribunaux quasi judiciaires.

Donc, pour cette raison, je vais voter en faveur de l'adoption de cet important projet de loi et je crois que nous pouvons faire un débat sur ce projet de loi tout en restant sur le fond de ce projet de loi et en ayant des arguments qui, vraiment, vont tout simplement toucher la raison d'être d'une telle réforme. Évitons de viser des individus. Je crois que ça n'a pas sa place dans un tel débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement.

M. Lefebvre: L'article 213.

Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 213, monsieur... Est-ce que vous accepteriez une question, M. le leader du gouvernement?

M. Bélanger: Ça me fait plaisir, de l'ancien ministre de la Justice.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, je voudrais savoir du leader du gouvernement et membre du Barreau du Québec s'il est d'accord avec la déclaration qui a été faite par le ministre de la Justice ici, en Chambre, déclaration que je veux lui répéter: «Le Barreau n'est pas prêt à cette réforme parce qu'elle a peut-être pour lui – en parlant du Barreau – des implications au niveau de ses membres, au niveau des mandats qu'ils peuvent avoir, et je pense que c'est beaucoup plus ça qui le motive que des questions de fond du projet.» Est-ce que le leader du gouvernement endosse cette déclaration qui a été faite par le ministre de la Justice, qui a été vivement dénoncée par le Barreau du Québec?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, il est toujours dangereux de commenter des propos qui sont pris hors contexte et qui sont uniquement cités comme ça, M. le Président. Le Barreau a à la fois une responsabilité de représenter notre système, on pourrait dire, judiciaire, mais il représente aussi ses membres. Donc, il est évident, M. le Président, que, dans ces considérations, le Barreau des fois peut faire des représentations qui, à la fois, touchent des fois le droit de certains de ses membres, mais aussi l'intérêt de la justice. Donc, je ne sais pas exactement quelle a été à ce moment-là l'intervention du Barreau, mais je crois qu'à ce moment-ci il ne m'appartient pas de commenter du tout, M. le Président, les propos tenus par le ministre de la Justice.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement, M. le député de Frontenac. Alors, nous allons reconnaître, nous cédons la parole au député de Lévis. M. le député.

M. Garon: M. le Président, ce qu'on m'a dit, c'est que... on vient de m'informer...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Non, le député de Lévis a une motion sans préavis à nous... Alors, M. le député de Lévis, nous vous écoutons.

M. Garon: Bien, c'est parce qu'on vient de m'informer, M. le Président, que, suite aux rencontres qu'il y a eu entre les différents partis, je pourrais faire la motion sans préavis qui correspond vraiment à ce que j'ai présenté ce matin: Que, avant qu'il ne soit déposé à l'Assemblée nationale, la commission de la culture soit autorisée à publier son rapport final portant sur le mandat d'initiative qu'elle s'est donné sur les enjeux du développement de l'inforoute québécoise, au cours duquel mandat elle a tenu des audiences publiques en octobre 1996. Et on me dit que, actuellement, toutes les consultations ont été faites et que...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger... M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: J'ai tout à l'heure indiqué à M. le secrétaire, qui m'avait soumis cette question-là, qu'il fallait que je vérifie avec Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. J'ai vérifié partiellement cette question-là, puis je me dois maintenant de vérifier avec du personnel du leader de l'opposition, de sorte que, si on veut me donner une quinzaine de minutes, je vais revenir. Et, avant d'indiquer au député de Lévis si je suis d'accord ou pas, il faut que je fasse cette dernière vérification là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Alors, M. le député de Lévis, je vous invite à revenir nous voir vers 17 h 30. Alors, vous pouvez retourner en commission parlementaire et revenir vers 17 h 30. À ce moment-là, l'opposition, ainsi que le parti ministériel, sera en mesure de vous donner possiblement son accord.

(17 heures)

Alors, à ce stade-ci, nous continuons nos débats sur l'adoption du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, et nous cédons la parole au député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, le leader parlementaire du gouvernement, qui m'a précédé sur cette loi, parlait de démagogie, invitait les parlementaires à éviter la démagogie. Pourtant, il en faisait. Parce que ça dépend un peu de la définition de la démagogie. Si «démagogie» peut être aussi d'affirmer des choses qui ne correspondent pas à la réalité ou d'éviter de répondre clairement à des questions, ça aussi, c'est de la démagogie, M. le Président. Et, quand mon collègue le leader adjoint de l'opposition lui a demandé s'il était d'accord avec l'affirmation du ministre de la Justice qui a été vivement dénoncée comme étant démagogique par les membres de sa profession, M. le Président, le leader parlementaire a évité de répondre clairement à ça, prétextant que les paroles du pauvre ministre de la Justice ont été prises hors contexte, probablement.

Par contre, les avocats sont reconnus comme étant des gens qui font attention à ce que les gens disent, essayent d'analyser la portée des paroles qu'ils ont tenues. Et le Barreau, en l'occurrence, à deux reprises, a semoncé le ministre de la Justice. Du jamais vu, finalement, M. le Président. Et le leader parlementaire, qui a été à ce point incapable d'organiser les travaux correctement de cette Assemblée, hier, il nous a fait siéger jusqu'à 7 h 30 du matin pour une raison complètement inutile. Parce que, finalement, le moindrement de prévoyance, de capacité de préparation correcte et de respect des collègues aurait amené le leader parlementaire à avoir eu depuis le début de la session plusieurs opportunités de nous faire discuter sur le projet de loi n° 40, sur lequel on parlait jusqu'à 7 h 30 du matin pendant que le ministre jouissait à nous regarder essayer de rester les yeux ouverts. C'est dans ce sens-là que je trouvais ce cafouillage total tout à fait en accord avec le cafouillage intellectuel que le ministre démontrait tantôt en essayant d'éviter de répondre clairement à une question de mon collègue le leader adjoint de l'opposition sur la portée des propos démagogiques du ministre de la Justice.

On est en train d'étudier pour une dernière fois le projet de loi n° 130, M. le Président, un projet de loi sur la réforme des tribunaux administratifs. Une réforme qui a été dénoncée dans les termes les plus évidents, les plus virulents par ceux qui doivent s'y connaître un petit peu dans cette affaire-là: les membres du Barreau, les avocats, qui, finalement, oeuvrent auprès des citoyens pour protéger leurs droits.

Vous me permettrez, à ce moment-là, de rappeler les propos tenus par le Barreau vis-à-vis du ministre de la Justice. Le même ministre de la Justice qui faisait fi, et fait toujours fi, de l'institution parlementaire, plus particulièrement par rapport à ce projet de loi et au processus qui l'a amené à annuler sa parole et son engagement comme ministre devant une commission parlementaire où il a sciemment donné son accord à un amendement que l'opposition avait présenté, pour l'annuler par la suite par la porte en arrière avec la complicité du leader parlementaire du gouvernement qui, lui, a préparé la voie en mettant fin aux travaux de la commission parlementaire avec la motion qu'il a amenée ici, une motion de bâillon pour terminer les travaux, ce qui a permis au ministre de renier sa parole.

Ça aussi, c'est de la démagogie, en un certain sens. Quand on dit quelque chose, on serait normalement... qu'on puisse légitimement s'attendre à ce qu'un ministre, de surcroît un ministre de la Justice, à part de ça, tienne parole. On a été surpris de voir que, même si le ministre de la Justice avait dit qu'il était d'accord avec un amendement de l'opposition... Qui visait quoi, M. le Président? À protéger les droits des justiciables. Il avait donné son accord, il a voté pour l'amendement, il a par la suite tourné sa chemise de bord, changé la réalité des choses en amenant un amendement, dans les amendements en liasse qui ont été déposés, pour annuler la parole qu'il avait donnée. Et c'est très indicatif de la façon dont ce gouvernement fonctionne. Peu importe ce qu'ils disent, ils vont toujours essayer d'atteindre leurs fins en utilisant n'importe quel moyen. Ça a été de la même façon qu'ils ont abordé le dossier du référendum: dire n'importe quoi, n'importe comment pour essayer tout simplement d'atteindre l'objectif visé, peu importe si les moyens utilisés correspondaient le moindrement au processus de transparence et d'honnêteté intellectuelle auquel on est en droit de s'attendre comme citoyens et, de surcroît, comme parlementaires.

Et c'est peut-être pour cette raison que le Barreau, lui... Et c'est du jamais vu, ça aussi, parce que, en 15 ans ici, jamais je ne me rappelle du Barreau qui semonce un ministre de la Justice aussi vertement. Et permettez-moi, parce que je pense que ça vaut la peine de prendre le temps de lire dans son ensemble la lettre qui a été envoyée au premier ministre. Parce que, la première fois, les membres du Barreau avaient écrit au ministre en essayant de l'amener à comprendre les objections qu'ils avaient par rapport au projet de loi que nous sommes en train d'étudier. Le ministre a par la suite réagi, mais réagi d'une façon cavalière, démagogique telle que le Barreau a décidé que les ponts étaient coupés. Ils n'avaient plus rien à dire au ministre de la Justice si ce n'était que de demander au premier ministre de le rappeler à l'ordre.

Et, étrangement, le premier ministre, lui, ma foi, il a affirmé sa confiance illimitée, M. le Président, à un ministre qui renie sa parole, à un ministre qui dit des grossièretés sur les ondes d'une radio. Et si le leader du gouvernement voulait que je les répète, je vais le faire...

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, le député de Laurier-Dorion va constater avec moi qu'il vient d'enfreindre un article du règlement: il ne peut pas dire qu'un membre en cette Chambre dit des grossièretés.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, mon collègue fait une affirmation. Si le ministre n'est pas d'accord, il aura à se lever et la contredire ou la faire contredire par un collègue. Mon collègue n'a même pas répété ce qui n'est pas répétable, effectivement: la grossièreté du ministre de la Justice. Mais il est en droit de dire ce qu'il a dit.

M. Bélanger: On impute des motifs indignes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 35.6°, le député qui a la parole ne peut imputer des motifs indignes à un député ou encore se servir d'un langage blessant à l'endroit d'un collègue, à 35.7°.

Alors, M. le député de Laurier-Dorion, moi, je vous inviterais tout simplement à poursuivre en faisant attention quand même pour respecter l'éthique qui doit régner en cette enceinte. Alors, M. le député, s'il vous plaît.

M. Sirros: M. le Président, je vais poursuivre en disant que le ministre de la Justice, sur les ondes d'une radio publique, a dit des choses qui ont été qualifiées par plusieurs personnes comme étant des propos grossiers, inacceptables. Et si je ne peux pas ici dire ce que le ministre a dit, parce que le leader parlementaire va se lever pour essayer de camoufler et de protéger l'improtégeable et parce qu'il n'a rien d'autre à faire que de penser comment organiser les travaux de cette Assemblée d'une façon un peu plus cohérente et démontrer qu'il a au moins la capacité de mener à bien le travail qu'il a à mener... Il se lève pour de petites affaires qui ne correspondent pas à ce que les gens comprennent, qui sont des affaires qu'ils ont qualifiées de grossières.

Alors, première lettre du Barreau, réaction du ministre, contre-réaction du Barreau, sans référer à cet autre événement qui était survenu sur les ondes d'une radio publique et qui, je pense, a été repris ici. Dans une minute, tout ce que je veux faire, M. le Président, c'est de vous dire que le Barreau accuse le ministre de la Justice de tenir, et je cite: «...des propos démagogiques et indélicats, tenus par surcroît par le ministre de la Justice, qui jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et – c'est ça qui est important – trahissent un sens peu développé des institutions.» C'est le même sens qui est repris par le leader parlementaire, qui est chaque fois souligné par le ministre de la Justice par le reniement de sa propre parole devant la commission parlementaire, par les propos complètement en dehors de tout ce qui est acceptable par un personnage public... de dire sur les ondes de radio, et par les comportements quotidiens qu'on voit en cette Chambre, qui sont malheureusement appuyés par la confiance illimitée du premier ministre. Où allons-nous, M. le Président? Je me le demande.

(17 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Nous allons céder maintenant la parole au député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Comme le disait le député d'Orford tout à l'heure, c'est une journée noire pour la démocratie aujourd'hui, comme elle l'a été hier aussi. On est en face d'un bâillon sur le projet de loi n° 130. Ce projet de loi que nous avons devant nous a été décrié par la totalité des intervenants qui se sont présentés devant cette commission. Le côté ministériel ne peut pas dire que l'opposition a fait de l'obstruction systématique sur ce projet de loi là. En 47 heures en commission parlementaire, on a adopté 78 % du projet de loi que nous avons devant nous. Ce n'est absolument pas de l'obstruction, parce que, autrement, vous savez très bien que, dans un cas où l'opposition veut absolument faire de l'obstruction sur un projet de loi, elle ne commence même pas le premier article du projet de loi. Il y a eu 78 % du projet de loi qui a été adopté en commission.

M. le Président, il y a eu des amendements qui ont été apportés par l'opposition, des amendements sérieux, des amendements qui allaient dans l'intérêt du citoyen, des amendements par lesquels on voulait absolument que la population puisse avoir un droit de recours à la Cour du Québec. Et, pour vous démontrer que l'opposition a fait un travail vraiment sérieux en commission parlementaire, un amendement que l'opposition a apporté à l'article 13 du projet de loi, même un député du côté ministériel a voté en faveur de cet amendement. Et le leader du gouvernement, il devrait se rappeler de ça: il y a eu le député de Marguerite-D'Youville qui a voté avec l'opposition sur l'amendement qui a été proposé à l'article 13 du projet de loi. Quand un député du côté ministériel, quand un député du gouvernement vote avec l'opposition, ça veut dire que l'amendement apporté par l'opposition, c'était un amendement juste, équitable et sérieux.

Et c'est malheureux, comme je le disais l'autre jour, qu'on n'ait pas eu l'occasion d'entendre ici, dans cette Chambre, le député de Marguerite-D'Youville dire ce que, lui, il pensait du projet de loi n° 130, M. le Président. Est-ce que – c'est la question qu'on doit se poser – il a été bâillonné, lui aussi? Parce que, lui, il s'est permis de voter avec l'opposition, en faveur de l'amendement proposé à l'article 13. Est-ce que le gouvernement, il ne bâillonne pas seulement l'opposition, mais il bâillonne aussi ses députés et particulièrement le député de Marguerite-D'Youville parce qu'il s'est permis de voter avec l'opposition officielle?

M. le Président, quand le leader du gouvernement, tout à l'heure, disait: Ce n'est pas les structures qu'il faut défendre ici ou les institutions – et il s'adressait au Barreau, parce qu'il disait que le député d'Orford, il défendait les intérêts, probablement, du Barreau du Québec – c'est complètement en dehors de la réalité, l'affirmation faite par le leader du gouvernement, parce que le député d'Orford, il a défendu les jeunes avocats qui font partie du Barreau. Les jeunes avocats qui font partie du Barreau sont des citoyens et des citoyennes du Québec. Il faut les défendre, ces jeunes-là. Et pourquoi on les défendait? Parce que, sur ce projet de loi là, justement, il y a eu deux lettres de la part du Barreau pour dire au gouvernement: Faites attention, n'allez pas de l'avant avec ce projet de loi, parce que ce projet de loi, il ne correspond pas à ce que sont les intérêts de la population du Québec.

M. le Président, dans la première lettre du Barreau, du 4 décembre 1996 – ça fait seulement une dizaine de jours – le Barreau, il disait quoi au premier ministre? Il s'adressait au premier ministre et lui disait: «C'est avec stupéfaction que nous apprenions le dépôt à l'Assemblée nationale, le 28 novembre dernier, d'une motion de clôture concernant les travaux de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 130 portant sur la justice administrative.» Et il continuait, le Barreau: «Le Barreau du Québec juge inconcevable que le gouvernement force l'adoption d'une telle pièce législative qui constitue une réforme majeure de certaines de nos institutions. En l'absence d'un consensus des milieux intéressés sur des éléments fondamentaux de la réforme proposée, nous considérons prématurée et inappropriée l'adoption de cette réforme.» C'était ça, une partie de la lettre qu'avait envoyée le Barreau du Québec le 4 décembre, et c'est à ça qu'il se référait, le député d'Orford, pour dire qu'il défendait les jeunes avocats qui font partie du Barreau du Québec et que, par conséquent, M. le Président, ils font partie des citoyens et citoyennes du Québec.

M. le Président, comme je le disais tout à l'heure, et quelqu'un l'a dit même avant moi, il y a même eu en commission parlementaire un amendement qui avait été proposé par l'opposition et adopté par le ministre de la Justice – avait été proposé, et adopté par le ministre de la Justice. Quand on a eu droit au bâillon de la part du gouvernement, M. le Président, il a eu le courage, pour ne pas dire le culot, de retirer cet amendement et de ne plus le déposer avec le projet de loi en question, M. le Président. Imaginez-vous où on est rendu ici, M. le Président, qu'on a même le courage de retirer des amendements qui ont été proposés et adoptés à l'unanimité en commission parlementaire, les retirer à la motion de clôture, le bâillon, devant cette Assemblée.

M. le Président, il faut se poser beaucoup de questions sur l'intention du gouvernement. M. le Président, quand il y a des organismes, des institutions comme le Barreau du Québec qui s'opposent, quand il y a des maires de municipalités, comme le maire de la ville de Québec qui dit: Faites attention, n'acceptez pas le projet de loi n° 130 de la façon qu'il est fait actuellement, M. le Président, je pense qu'un gouvernement responsable, un gouvernement honnête, il ferait attention puis il dirait: Oh! regardons, essayons de voir quelles sont les alternatives, qu'est-ce qui ne va pas bien à l'intérieur de ce projet de loi, essayons de le corriger. À ce moment-là, c'est sûr que la population, elle va être d'accord avec le projet de loi et c'est, à ce moment-là, dans l'intérêt de tout le monde.

M. le Président, ce n'est pas ça qu'il fait, le gouvernement. Ça fait longtemps que ce gouvernement... depuis qu'il est là, il essaie toujours de passer sur tout le monde, et toujours au détriment de la population, des citoyens et citoyennes du Québec, M. le Président. On ne peut pas continuer comme ça. Il y a des projets de loi qui sont déposés ici, d'une certaine importance, et je pense que c'est très important à ce moment-là que ce consensus sur des projets de loi aussi majeurs, comme celui-là que nous avons devant nous, c'est essentiel pour que cette pièce maîtresse de Législature, M. le Président, puisse être bien acceptée à l'intérieur, par la population du Québec.

M. le Président, ce n'est pas le cas. Ce gouvernement est renfermé sur lui-même. Il a perdu complètement le contact avec la population du Québec. Mais, M. le Président, très bientôt... Ils sont dans leur troisième année de pouvoir, M. le Président; très bientôt, la population du Québec va juger ce gouvernement et va s'en débarrasser le plus tôt possible. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Viger. Nous céderons maintenant la parole au leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Comme les parlementaires des deux côtés de la Chambre en sont à la dernière étape de ce projet de loi sur lequel le gouvernement a cru bon de passer un bâillon, c'est la dernière chance que l'on a de convaincre le ministre de la Justice d'apporter des modifications, de bonifier son projet de loi, de convaincre les députés ministériels. C'est facile pour ceux et celles qui sont parmi nous; au moins, ils font acte de présence, M. le Président. Il y a les autres qui sont en commission parlementaire, et nous sommes confiants qu'ils vont relire les «transcripts». Mais j'aurais souhaité que le ministre de la Justice ait le courage, M. le Président, minimum d'assister aux derniers débats.

Moi, j'ai occupé la fonction ministérielle pendant neuf ans et demi et, quand les parlementaires en cette Chambre réussissaient à enrichir les projets de loi que je déposais de leur expérience personnelle, j'en prenais toujours une bonne note. Je n'amendais pas toujours, M. le Président, mais j'en prenais toujours une bonne note pour m'assurer que les erreurs ou les lacunes les plus majeures qui pouvaient créer des injustices envers les citoyens soient corrigées.

(17 h 20)

Dans le cas qui nous concerne, on parle d'un projet de loi qui va toucher une justice qui s'applique aux citoyens qui ne sont pas nécessairement les plus fortunés dans notre société. Lorsqu'on parle de tribunaux administratifs, M. le Président, on parle de la justice de la classe moyenne et on parle de la justice des pauvres. Ce n'est pas parce qu'on parle de la justice de la classe moyenne ou qu'on parle de la justice des pauvres qu'il faut, comme parlementaires ou comme législateurs, leur présenter une pauvre justice, une justice qui va faire en sorte qu'ils ne seront pas entendus par des personnes qui sont complètement indépendantes de tout contact politique, une justice qui va faire en sorte que ces personnes-là n'auront pas le droit de conserver espoir d'en appeler devant un tribunal de droit commun, M. le Président. Quand un gouvernement en est rendu à traiter la classe moyenne et les plus démunis de la société comme des citoyens, sur le plan de la justice, qui n'auront accès qu'à une justice de deuxième classe, on est en droit de se poser de très sérieuses questions.

Je souligne, M. le Président, la présence – on n'a pas le droit de souligner une absence, mais la présence – parmi nous du ministre de la Justice. Je ne le fais pas comme membre du Barreau, je ne le fais pas comme leader de l'opposition, je ne le fais même pas comme député, je le fais pour les gens qui, à chaque semaine, rencontrent les députés dans les bureaux de comté; je le fais pour les gens qui sont des accidentés du travail, des accidentés de l'automobile, des gens qui ont des problèmes de zonage agricole, des gens qui viennent nous voir et dont on est la dernière ressource. Jusqu'au jour où ce projet de loi entrera en vigueur, on pouvait quand même dire à ces gens: Ça ne sera pas facile, le gouvernement, c'est lourd, ce n'est pas facile à faire bouger, ça peut vous paraître écrasant, mais, en bout de ligne, si vous avez la persévérance et la détermination, si vous croyez en la justice et si vous avez une juste cause, on peut vous garantir que vous allez être entendus par un système judiciaire libre, indépendant et impartial. C'est ça qu'on pouvait garantir jusqu'au moment où ce projet de loi entrera en vigueur.

Qu'est-ce qu'on pourra dire, M. le Président, si le ministre de la Justice – je ne lui demande pas de perdre la face, de retraiter, ça n'a rien à voir – ne se met pas dans les bottes, dans les chaussures de ces gens qui viennent nous voir dans nos bureaux de comté, s'il ne prend pas la peine de s'accorder un dernier moment de réflexion? On va être obligés de leur dire: Écoutez, là, vous allez être entendus par les petits amis du ministre de la Justice, on vous souhaite bonne chance, on espère qu'ils sont compétents. Puis, si jamais les petits amis du ministre de la Justice ne vous rendent pas justice, bien, le petit ministre s'est assuré que vous n'auriez pas le droit d'en appeler devant un tribunal libre et indépendant. Mais, M. le Président, comment ces gens-là vont réagir, cas par cas, des milliers de cas à chaque semaine au Québec, puis pas simplement dans les bureaux de députés libéraux, là, dans les bureaux de députés péquistes? Nous, on va avoir la mince consolation – et je leur dis bien, ce n'est même pas une consolation – de leur dire qu'on aura mis en garde le ministre de la Justice et le gouvernement. De l'autre côté, bien, ils diront qu'ils se sont fait un petit peu embarquer sans trop le savoir puis qu'à la prochaine occasion ils vont corriger ça. Le député va continuer à être député, mais la personne qui a besoin de ce règlement, de cette décision impartiale et correcte pour sa cause va perdre espoir dans le système.

Mais, M. le Président, on ne peut pas être complices, complices silencieux comme trop de députés l'ont été de l'autre côté de la Chambre, des complices silencieux de cette manoeuvre du ministre de la Justice qui est inspirée par je ne sais quoi. Si au moins je pouvais comprendre. Créer des jobs? Il s'en est perdu 60 000 depuis que le nouveau premier ministre est en fonction. Depuis 10 mois, il s'en perd 200 par jour. Je peux concevoir que la pression est forte chez les petits amis du parti de se trouver une job partisane, mais, s'il vous plaît, pas dans les officines quasi judiciaires, M. le Président! Qu'on les engage comme attachés politiques, qu'on les place dans les cabinets, qu'on trouve de quoi ailleurs, mais pas dans le système judiciaire, système qui va affecter quotidiennement les droits des citoyens. Ça n'a pas de saint bon sens, M. le Président!

Moi, quand tu perds 200 jobs par jour puis que la pression sociale augmente, c'est encore plus de pression sur le bureau de comté de chacun des députés, M. le Président, c'est encore plus de désespoir, et c'est encore plus important qu'on ait des tribunaux administratifs qui soient dotés d'un personnel libre, efficace, compétent, libre des pressions politiques.

Si j'étais le seul à le dire, je me dirais: Peut-être que, après une quinzaine d'années en politique, on en vient à exagérer. Regardez le dernier rapport du Protecteur du citoyen. Le Protecteur du citoyen, il est nommé par l'ensemble de l'Assemblée nationale. Vous l'avez nommé, on l'a nommé. Qu'est-ce qu'il nous dit, le Protecteur du citoyen? C'est que, dans ce contexte à la fois de pertes d'emplois, de ralentissement économique, d'augmentation de l'aide sociale, d'augmentation de chômeurs au Québec, de diminution des services, les pressions sont encore plus fortes de la part des citoyens qui n'ont plus rien, qui sont des victimes du système, de l'appareil gouvernemental. Et la moindre des choses que l'on puisse faire, c'est, comme législateurs, comme parlementaires, d'appuyer le Protecteur du citoyen dans ses revendications. La moindre des choses qu'on puisse faire et qui ne coûte rien, M. le Président, c'est de s'assurer que les gens qui ont à faire face à l'appareil gouvernemental ne sentent pas une oppression tellement gigantesque, tellement lourde, tellement pesante qu'à priori ils renoncent à leurs recours. Ou, lorsqu'en désespoir de cause ils y ont recours, ils n'y ont pas confiance parce qu'ils savent que c'est le petit ami du ministre qui a été nommé puis qu'il n'aura pas le droit d'en appeler de la décision du petit ami du ministre du gros gouvernement. C'est comme ça que le monde voit sa situation, M. le Président.

Moi, à ce moment-ci – vous m'indiquez qu'il me reste à peine deux minutes – je suis membre du Barreau. J'ai repris, à l'occasion d'autres interventions, les propos du Barreau. Ça m'a frappé. Le Barreau de Québec m'a particulièrement frappé par ses propos lourds de conséquences pour l'actuel ministre de la Justice. Quand vous appartenez à une section du Barreau, une espèce de confrérie – M. le Président, vous êtes notaire, là, vous comprenez un petit peu ce dont je parle – quand vous allez plaider, vous êtes dans la même chambre des joueurs avant, vous mettez votre toge, etc. Les propos qu'a tenus le Barreau de Québec à l'endroit du ministre de la Justice font en sorte que, s'il ne modifie pas ça, il ne pourra pas retourner décemment, la tête en haut, pratiquer le droit, parce que les gens ont parlé de leur collègue, dont ils étaient tellement fiers au moment de sa nomination, il y a un peu plus de deux ans, comme ministre de la Justice – il y avait une fierté – ils en ont parlé comme un renégat, quelqu'un qu'ils ne veulent plus voir, quelqu'un en qui ils n'ont plus confiance. Ils ont parlé de l'injustice..

M. Bélanger: M. le Président. M. le Président. M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. Je pense que mon bon ami le leader de l'opposition s'est un peu emporté. Il sait très bien qu'on ne peut désigner en cette Chambre un membre de l'Assemblée comme étant un renégat. Je crois que c'est quand même antiparlementaire.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, je vous inviterais maintenant à conclure.

M. Paradis: Oui, je vais retirer le terme. Moi, là, je n'ai pas... Je sais que ce n'est pas listé dans la liste des propos antiparlementaires, mais ce n'est pas moi qui le disais, ce sont les collègues qui l'ont bien connu et qui ne veulent plus le revoir et qui ne veulent plus le revoir dans leur Barreau comme tel.

Ce n'est pas compliqué, au moment où on se parle, on a encore le temps ensemble d'oublier toutes les invectives qu'on s'est dites de part et d'autre, de penser à ceux et à celles qui doivent être les bénéficiaires d'un système judiciaire libre, indépendant et impartial, d'avoir tellement confiance aux gens qu'on y nomme qu'on reconnaît un droit d'appel devant les tribunaux de droit commun. Et, si on fait tout ça ensemble, ce débat-là n'aura pas été inutile. Mais, si on ne le fait pas, on aura compris pourquoi, en plus d'être inutile, on a choisi de se réfugier derrière un bâillon pour interdire à ceux qui voulaient dire la vérité de parler. Merci.

Une voix: Bravo!

(17 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition. Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci bien, M. le Président. C'est la troisième fois que nous allons de nouveau essayer de convaincre le ministre de la Justice du bien-fondé de l'argumentation non seulement de l'opposition officielle, mais des gens qui forment le grand réseau de la justice au Québec.

Le bâtonnier du Québec, qui est-il? Le bâtonnier est celui qui représente 17 000 avocats, qui a pour mandat de protéger la population. Le bâtonnier est élu par les représentants des 17 000 avocats. C'est donc quelqu'un qui a beaucoup de crédibilité. Si je faisais une comparaison dans le domaine de la santé, M. le Président, eh bien, on va penser au président du Collège des médecins. Alors, ces gens-là représentent la population.

Nous apprenions récemment, dans une lettre du bâtonnier, que ce dernier émettait de nombreuses réserves et qualifiait aussi le ministre de la Justice de plusieurs façons. J'aimerais vous rappeler, M. le Président, qu'hier, dans cette Chambre, il y avait plusieurs représentants du Barreau du Québec et que la majorité d'entre eux, c'étaient des jeunes avocats. Au moment où le premier ministre a dit appuyer sans réserve le ministre de la Justice, eh bien, on les voyait bien, ils étaient devant nous, ces jeunes avocats, l'avenir de la justice au Québec, ils signifiaient leur réprobation par rapport au support que le premier ministre donnait au ministre de la Justice.

En même temps, M. le Président, lorsque le député de Chomedey se levait avec des questions extrêmement pertinentes, eh bien, ces jeunes avocats supportaient le député de Chomedey de brillante façon; ils le signifiaient très, très clairement. Si vous demandez aux jeunes avocats, à l'ensemble de la profession, qui ils devraient supporter, le ministre actuel ou l'argumentation du député de Chomedey, bien, c'est clair qu'ils vont vous répondre: C'est l'argumentation du député de Chomedey. Si vous demandez à la population qui, entre le ministre de la Justice et le député de Chomedey, elle va supporter, eh bien, encore une fois, c'est de plus en plus clair que la population va supporter l'excellent député de Chomedey.

Enfin, si vous demandez au bâtonnier ce qu'il pense du ministre de la Justice, eh bien, voici ce qu'il nous dit, M. le Président... Tantôt, le leader parlementaire voulait mettre en garde l'opposition contre des propos démagogiques. M. le Président, ce n'est pas l'opposition qui parle, c'est le bâtonnier, cet homme crédible qui représente la population et la justice au Québec. Il dit que le ministre de la Justice tient des propos démagogiques et indélicats. C'est écrit, c'est en date du 11 décembre: «De tels propos démagogiques et indélicats, tenus par surcroît par un ministre de la Justice, jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions.»

M. le Président, quel message le ministre de la Justice est-il en train d'envoyer aux jeunes avocats, l'avenir de la justice au Québec? M. le Président, je ne sais pas si le leader parlementaire avait l'intention de mettre en garde le bâtonnier plutôt que l'opposition contre des propos écrits, des propos démagogiques à l'endroit du ministre de la Justice. Je rappelle aussi ce que le Barreau nous disait dans sa lettre du 11 décembre. Il demandait de réviser trois points bien précis: l'atteinte aux droits fondamentaux prévus à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, le processus de renouvellement du mandat des membres du Tribunal – maintenant, c'est de plus en plus clair qu'on veut procéder à des nominations partisanes, un peu comme le leader parlementaire de l'opposition le mentionnait, on n'est pas capables de créer des emplois, eh bien, les amis du régime n'ont pas d'emploi, on essaie de leur trouver une niche dans ce gouvernement – et, enfin, le bâtonnier du Québec mentionne le manque d'appel de décisions du Tribunal. Alors, décision de nouveaux juges partisans au Tribunal administratif et aucun droit d'appel pour les citoyens, M. le Président.

Toujours dans la même lettre, M. le Président, je réfère aussi à ce message que le ministre de la Justice est en train d'adresser aux jeunes, c'est toujours le bâtonnier qui parle: «S'il est vrai que de très nombreuses heures ont été consacrées en commission parlementaire à la réforme de la justice, il est aussi vrai que les intervenants ont été appelés à se prononcer sur une cible mouvante – il parle de la loi comme d'une cible mouvante, du projet de loi – sur des parties de réforme, sans vision d'ensemble.» C'est ça que les jeunes avocats ont vu hier par le projet de loi du ministre de la Justice. «Cette approche législative compartimentée, pour le moins peu transparente – ça, c'est le bâtonnier, encore une fois, qui parle, ce n'est pas l'opposition – permettrait difficilement à l'ensemble des intervenants de se faire une idée claire et précise du projet gouvernemental.» Et il terminait, M. le Président, en disant: «Si nous nous adressons à vous, M. le premier ministre, c'est que nous connaissons votre sens des institutions et votre respect des divers intervenants, ce qui, malheureusement, ne semble pas être le cas pour le ministre de la Justice.»

Quel message le ministre de la Justice est en train d'envoyer aux jeunes avocats? L'État, maintenant, ne fait plus, ou à peu près plus, d'aide juridique. Que réserve l'avenir à ces jeunes? Le message qui est envoyé, c'est un message d'exclusion. Je pourrais vous faire un long parallèle dans le domaine de la santé, avec les jeunes, ceux qui n'avaient pas la sécurité d'emploi, les jeunes femmes particulièrement, les jeunes infirmières qui perdent leur emploi et qui n'auront droit à aucune indemnité.

Pourquoi tant d'acharnement à passer un projet de loi? Quelles sont les vraies raisons? Est-ce qu'on peut se poser la question: Où est-ce qu'elle est, l'urgence là-dedans? Le projet a été déposé au mois de décembre 1995; ça fait plus d'un an. On aurait pu siéger au début de l'année, dans l'intersession, à la fin de la session, au début de l'été, fin de l'été et encore pendant le Sommet. Au lieu d'assister au spectacle, on aurait pu travailler sérieusement sur des projets de loi, M. le Président. Où est-ce qu'elle est, l'urgence? Tantôt, le député de Gaspé disait: Agir, ce n'est pas un crime; on deviendrait des statues. Bien, les députés ministériels agissent comme des statues: ils ne réagissent pas aux projets de loi, ils ne prennent jamais la parole.

Et, j'aimerais rappeler – et je me fais un devoir de le faire à chaque fois que j'ai l'occasion de prendre la parole en cette Chambre – qu'en plus du ministre de la Justice, son collègue le ministre de la Santé, lui, a imposé un bâillon sur la loi n° 33, assurance-médicaments, qui a été votée à 5 heures du matin, avec 120 pages d'amendements; sur la loi n° 116, bâillon, monument aux régies régionales; et la loi n° 83, sur les fermetures d'hôpitaux, en pleine nuit également. C'est un parti qui est en train d'avoir le championnat des bâillons, le championnat des taxes aussi.

Le député de Saint-Jean, lui, voulait empêcher la députée de Marguerite-Bourgeoys de dire la vérité, de parler de ce qu'elle avait entendu et de nous le transmettre en commission parlementaire. Eh bien, M. le Président, je pense qu'il faudrait que le député de Saint-Jean arrête de jouer au leader parlementaire. De plus, une lettre du maire de la ville de Québec, qui venait supporter un amendement du député de Chomedey, de l'opposition, une lettre de deux pages, récemment, qui supporte avantageusement cet amendement où la municipalité ainsi que la Communauté urbaine ne seraient pas soumises à l'obligation, eh bien là aussi le ministre de la Justice a changé la parole qu'il avait donnée. Il n'écoute pas ceux qui ont été, jusqu'à maintenant, ses partenaires de la cause, et je pense qu'on est en train d'assister à un gouvernement qui, après un peu plus de deux ans, donne déjà des signes de vieillissement évidents, où on ne peut s'attendre maintenant à ce que la population puisse être vraiment écoutée.

Et, en terminant – vous me faites signe que le temps est écoulé – seulement rappeler quel message le ministre de la Justice envoie aux jeunes avocats, envoie à l'avenir de la justice au Québec: c'est déprimant, M. le Président. Merci beaucoup.

Une voix: Bravo!

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole au député de Sauvé. M. le député.


M. Marcel Parent

M. Parent: Merci, M. le Président. Depuis une semaine, on entend parler de la loi n° 130, Loi sur la justice administrative au Québec, un projet de loi que le gouvernement nous a amené en 1995, et nous sommes rendus à la fin de l'année 1996, et on parle encore de ce projet de loi. Est-ce qu'on s'est demandé pourquoi ce projet de loi traîne depuis si longtemps et qu'on nous l'amène en fin de session? M. le Président, lorsqu'un projet de loi prend tant de temps à passer les étapes de notre régime parlementaire, c'est que ce projet de loi porte à suspicion. C'est que c'est un projet de loi qui est incomplet. C'est que c'est un projet de loi qui est loin de faire l'unanimité. C'est que c'est un projet de loi qui ne semble pas être désiré par personne. C'est un projet de loi qui a été amené comme ça, sans y avoir pensé et sans avoir été mandaté pour faire un tel projet de loi.

On parle de remaniement de la Loi sur la justice administrative depuis x nombre d'années que je suis ici. Tous les gouvernements en ont parlé: ce gouvernement-là en a parlé, notre gouvernement en a parlé et on en parle encore. C'est une nécessité. On n'avait pas le choix. Il fallait absolument revoir l'ensemble de cette Loi sur la justice administrative. Mais le problème, ce n'est pas de refaire la loi, ce n'est pas de l'actualiser, c'est la façon dont on amène ce projet de loi là, qui ne fait pas l'unanimité, qui est dénoncé par tout le monde. Il est tellement dénoncé par tout le monde que le ministre a eu peur à un certain moment et qu'il l'a bâillonné. Il a arrêté l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire, alors qu'on l'avait étudié à peine pendant 47 heures.

M. le Président, quand le Barreau du Québec, à deux reprises, fait appel au premier ministre pour dénoncer ce projet de loi et le mettre en garde, surtout, contre ce projet de loi là, contre certains articles du projet de loi – l'article, en particulier, touchant au renouvellement du mandat des juges, qui fait en sorte que certains organismes perdront leur droit d'appel face aux décisions gouvernementales – il faut faire attention. Lorsqu'on est ministre de la Justice, on a la responsabilité de faire en sorte que les lois passées par son gouvernement soient des lois justes. Et, quand on est ministre de la Justice, sa loi – la loi du ministre de la Justice – elle ne doit pas prêter à confusion. Elle doit être claire, elle doit être nette, elle doit être une loi plus juste que les autres, puisqu'elle est amenée par le superministre de la Justice. Mais ce n'est pas le cas. Tout le monde la craint, cette loi-là. Tout le monde nous met en garde contre cette loi-là.

Et ce n'est pas seulement l'opposition qui est contre cette loi-là. J'ai nommé le maire de Québec tout à l'heure. J'ai nommé le Barreau, qui, à deux reprises, l'a dénoncée. La Communauté urbaine de Montréal l'a dénoncée. Tout le monde dénonce cette loi-là. Les citoyens, dans leur ensemble, disent: M. le ministre, on vous remercie d'avoir pensé d'actualiser la Loi sur la justice administrative, mais, s'il vous plaît, les «breaks», hein? Arrêtez! Pas trop loin. Pensez-y. Pensez-y, M. le ministre.

On a passé 47 heures en commission parlementaire. Ce n'est pas ça, un «filibuster», M. le Président. Ce sont les députés des deux formations politiques qui, ensemble, ont étudié ce projet de loi de 188 articles. Au bout d'environ 47 heures, 47 heures et demie, on avait approuvé pratiquement 80 % du projet de loi, dont des amendements que le ministre avait amenés et des amendements – et ça, c'est grave – que le ministre a fait disparaître. Après qu'ils eurent été votés en commission parlementaire, le ministre les a fait disparaître. À l'encontre de toute la tradition parlementaire, lorsque ce projet de loi est venu ici pour la prise en considération, les amendements qui avaient été votés par les deux côtés de l'Assemblée nationale, par les députés du Parti québécois, par les députés du Parti libéral, n'apparaissaient plus dans le projet de loi. Si j'étais ministre de la Justice, ça m'inquiéterait beaucoup d'avoir posé un tel geste.

Les députés, ensemble, dans le but de bonifier la loi, dans le but de l'améliorer, y ont travaillé, je disais, durant 47 heures et demie. Un projet de loi, M. le Président... Les gouvernements ne passent pas de projets de loi, les gouvernements soumettent des projets de loi. Et qui accepte des projets de loi? Qui accorde les projets de loi? Ce sont les députés à l'Assemblée nationale. Et ça, les gens ne le savent pas. Les gens disent: Le gouvernement a amené un projet de loi. Mais non, ces projets de loi là sont discutés, analysés en commission parlementaire. Ils viennent ici en premier, à l'Assemblée nationale, où on adopte – en principe, toujours, à moins d'exception – le principe d'un projet de loi.

Parce qu'un projet de loi n'est jamais mauvais en soi, c'est très rare qu'un projet de loi est mauvais. Le principe du projet de loi, on peut difficilement être contre, mais l'important, c'est l'application du projet de loi, c'est les items à l'intérieur du projet de loi. Et c'est ça que l'on étudie tous ensemble en commission parlementaire, sous notre serment de député, sous notre serment de représentant du peuple de tâcher de faire en sorte que ces projets de loi là, soumis par le gouvernement, répondent à l'ensemble de la population et rendent réellement justice à la population et à ceux qui vont être régis par ces lois-là.

On était d'accord, nous autres aussi, quand on a parlé de réforme des tribunaux administratifs. En commission parlementaire, on l'a étudié ensemble, et on avait des réserves, et on a dit: Peut-être qu'on ne le comprend pas, peut-être qu'on a pris notre rôle d'opposition comme opposants systématiques. Mais ce n'est pas ça qui s'est avéré, M. le Président. Nous ne sommes pas des opposants systématiques. Sans le savoir, nous étions l'écho d'organismes publics qui s'inquiétaient à juste titre d'un tel projet de loi.

Et devant ça et après l'avoir étudié durant 47 heures, comme je le disais, le ministre a jugé bon de bâillonner le pouvoir législatif, la base du système parlementaire britannique, le système parlementaire qui régit nos institutions. Nous, les députés des deux côtés, on a la responsabilité de forcer le ministre à répondre et à rendre compte de ses gestes et à répondre des articles de son projet de loi, et il a passé outre. Il a passé outre, ce ministre de la Justice, M. le Président, après à peine 47 heures d'étude sur un projet de 188 articles, lequel normalement aurait pu prendre une centaine d'heures, sans avoir exagéré l'étude de ce projet de loi là. Il a bâillonné l'Assemblée nationale. Il a bâillonné l'Assemblée nationale dans son prolongement en commission parlementaire, M. le Président. Et ça, on peut difficilement l'accepter. Pas un petit ministre qui s'occupe, là, des travaux publics, un petit ministre qui s'occupe, je ne sais pas, moi, de quelques projets de loi, un ministre junior. Mais le ministre de la Justice du Québec – le Québec, M. le Président, que ce ministre-là voudrait voir à l'état de pays – eh bien, il s'est foutu, il a passé outre aux principes les plus élémentaires du droit parlementaire en mettant le bâillon à ce projet de loi.

Comment voulez-vous que l'on vote pour ce projet de loi, M. le Président, lorsque le ministre ne nous a même pas donné la chance, pas seulement à nous de l'opposition, mais aux députés ministériels, de pousser à fond l'étude de ce projet de loi là? Eh bien, M. le Président, le parti de l'opposition n'a aucune alternative, et nous voterons certainement contre ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sauvé. Nous allons maintenant céder la parole au député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, je me fais malheureusement un devoir d'intervenir à cette dernière étape du projet de loi pour réitérer toute la déception qu'on a, encore une fois, à la façon dont le ministre de la Justice a fait progresser le projet de loi n° 130. Il s'agit d'un projet de loi extrêmement important parce que c'est un projet de loi qui touche aux institutions fondamentales de toute société démocratique comme c'est le cas pour le Québec. On touche aux fondements mêmes de notre système de justice.

Après plus de 130 heures où un travail a été fait, où un travail admirable a été fait d'ailleurs par le député de Chomedey, en commission parlementaire, on a approuvé une grande partie de ce projet de loi, mais il restait des points majeurs qui accrochaient encore, et c'est sur ces points-là que, malheureusement, on doit constater que le ministre n'a apporté aucune modification majeure ou sérieuse, aux deux points fondamentaux qui étaient en litige dans le projet de loi n° 130.

(17 h 50)

L'objectif de l'opposition, M. le Président, quand on aborde n'importe quel projet de loi, c'est de regarder, surtout dans le domaine de la justice, la qualité des services que les concitoyens vont recevoir suite à l'adoption de ce projet de loi. L'accessibilité à la justice, c'est fondamental pour une société démocratique. Les citoyens doivent avoir un accès à la justice et doivent avoir la certitude que le système judiciaire leur a rendu justice, même si la décision ne leur a pas été favorable. Et enfin, M. le Président, on doit également s'assurer que le tout se fait dans le respect le plus fondamental des droits individuels.

Dans le cas du projet de loi n° 130, on parle des relations entre l'État et le citoyen, et on sait combien les citoyens se sentent petits face à des décisions administratives. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle on a créé un poste comme le Protecteur du citoyen. C'est peut-être un défaut du système, mais les citoyens se sentent impuissants. Et, dans ce cas-là, ici, on touche à un aspect fondamental, qui est celui des droits d'appel.

Alors, la position du Parti québécois, M. le Président, était tout à fait semblable, au moment de la dernière élection, aux objectifs que cherchait à atteindre l'opposition officielle. Dans le programme du Parti québécois – que le ministre de la Justice lui-même a défendu au moment de la campagne électorale – on parlait d'avoir des organismes qui rendraient des décisions en matière quasi judiciaire, des organismes ou des personnes impartiales et indépendantes. On n'a pas de problème avec ça, M. le Président. Mais on parlait, dans un deuxième temps, de la loi qui prévoira des règles de procédure permettant un appel des décisions rendues par ces organismes ou ces personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec ou de la Cour supérieure.

Alors, voilà, M. le Président, des éléments avec lesquels nous étions d'accord. Malheureusement, l'opposition continue, elle, à défendre les mêmes objectifs, mais le gouvernement a oublié son programme politique et agit de façon tout à fait contraire.

Vous savez, M. le Président, la question des tribunaux administratifs, ça touche la vie de tous les citoyens québécois, d'une façon très quotidienne, dans des secteurs de vie particulièrement importants. Et je voudrais tout simplement énumérer les décisions qui seront prises par les tribunaux administratifs: dans le domaine de la sécurité du revenu et de l'aide aux allocations familiales, protection des personnes atteintes de maladies mentales, services de santé et services sociaux, régime de rentes, indemnisation, immigration.

Or, M. le Président, dans tous ces secteurs-là, ce sera ce Tribunal-là qui tranchera les litiges qui existent entre le citoyen et l'État; ça sera ce Tribunal-là qui devra rendre, comme le fait un juge, une décision. Actuellement, les citoyens avaient un droit d'appel de ces décisions, et ce que le ministre de la Justice a décidé, c'est que le seul droit d'appel qui existera dorénavant sera la Cour supérieure. Quand on connaît, M. le Président, la complexité et les coûts que ça peut représenter pour un simple citoyen d'aller à la Cour supérieure pour défendre une décision administrative qu'il jugerait injuste, c'est à toutes fins pratiques, M. le Président, nier de façon définitive le droit d'appel des citoyens en matière de décision administrative.

Et ça a été quelque chose de très clair; le Barreau l'a très clairement expliqué il y a déjà un bon bout de temps, et il n'y a eu aucun changement important, sérieux, qui répond à la position du Barreau. Et je cite, M. le Président: «Il n'y a aucun motif valable pour interdire ou entraver le droit d'appel en matière de justice administrative, bien au contraire.» Un peu plus loin, on nous dit: «Le recours en appel permettrait non seulement de corriger des erreurs de fait et de droit, mais il permettrait d'harmoniser également des décisions divergentes qui seront prises par les nombreux bancs des sections du Tribunal administratif.» Alors, M. le Président, c'est très clair ici que le Barreau a émis un avis très négatif par rapport au projet de loi n° 130 sur cet aspect.

Il y a également une autre dimension qui est importante – et c'est là le deuxième point qui posait problème dans le projet de loi n° 130 – c'est l'indépendance des juges qui auront à prendre ces décisions. Encore là, M. le Président, on doit revoir quelle était la position du Barreau. Et, sur ce point, je tiens à préciser qu'il n'y a eu également aucune modification, aucune réponse aux craintes émises par le Barreau. Le Barreau disait: «Il a toujours été d'avis que la pierre angulaire de toute réforme en matière de justice administrative doit reposer sur l'indépendance des personnes exerçant des pouvoirs judiciaires. C'est d'autant plus important que ces décideurs doivent trancher, par définition, des litiges qui se retrouvent dans les relations entre les justiciables et leur gouvernement et que c'est ce même gouvernement qui les nomme et qui les renouvellera.» Alors, voilà un problème majeur auquel le ministre n'a pas daigné apporter de réponse.

La perception qui circule par rapport à ce problème-là, je pense que M. Mario Cloutier y a fait référence dans le journal Le Devoir , le 12 novembre 1996, et je veux citer tout le problème de la subjectivité et des risques de nominations partisanes qui peuvent survenir dans le processus comme celui qui est prévu à la nomination des juges. M. Cloutier nous dit: «La loi n° 130 renvoie en effet à des critères subjectifs dans le cas du renouvellement des mandats des juges administratifs. Les comités de renouvellement nommés par Québec devront, notamment, tenir compte de critères comme les besoins du Tribunal administratif et l'opportunité de favoriser la présence de nouveaux membres... En outre, il est permis de penser que le non-renouvellement des mandats des 21 commissaires de la CALP et des 20 régisseurs de la Régie du logement cadre présentement avec une remise en question complète du rôle des juges administratifs...» Et M. Cloutier fait référence, plus loin dans son article, à des risques bien évidents de nominations politiques.

Malheureusement, M. le Président, on a déjà des démonstrations évidentes de ce type de décision là au moment où on a mis de côté une personne à la Régie du logement qui avait rendu des services estimés très bons et qui avait été évaluée; on a mis cette personne-là de côté pour nommer l'ancien député péquiste, M. Richard Holden. Alors, c'est ce genre de crainte là auquel le Barreau fait référence. Et, quand on n'est pas capable de garantir aux citoyens que les gens qui seront là seront indépendants et qu'ils pourront prendre des décisions en toute liberté sans penser qu'à un moment donné on pourra ne pas renouveler leur mandat parce que les décisions n'ont pas plu au gouvernement, je pense qu'on a un problème, et ce problème est d'autant plus important que les individus qui auraient l'impression, en toute conscience, d'avoir été mal évalués, mal jugés n'ont même plus la possibilité d'aller en appel. Et on ne parle pas de décisions banales, on parle de décisions qui souvent affectent les groupes de citoyens les plus démunis: les malades mentaux, des gens qui ont besoin de la sécurité du revenu, qui ont besoin de leur rente pour vivre.

Alors, c'est des décisions importantes, et malheureusement le ministre a décidé qu'il passait par-dessus les avis du Barreau, les avis de l'opposition, et l'opposition représente, dans ce sens-là, les intérêts des citoyens du Québec. Malheureusement, on doit conclure que le ministre est le seul qui croit avoir le pas, et tous les autres autour de lui, le Barreau, les experts, les citoyens, eux sont dans l'erreur. Alors, voilà une décision inadmissible, un comportement inadmissible de la part du ministre de la Justice et du gouvernement actuel, et il aura à vivre éventuellement avec les conséquences désastreuses de cette réforme, qui est faite à coups de bâillon, dans des institutions aussi fondamentales que le système judiciaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de l'Acadie. Comme nous arrivons maintenant à 18 heures, nous suspendons les travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 2)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons poursuivre les affaires du jour. Nous en étions à l'article 39 de notre feuilleton. Est-ce qu'on pourrait fermer les haut-parleurs?

Alors, nous en étions à l'article 39 de notre feuilleton. M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative. Alors, le dernier intervenant a été le député de l'Acadie. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du projet de loi n° 130? M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: C'est ça. Merci, M. le Président. Alors, en effet, il me fait plaisir d'intervenir ce soir sur le projet de loi n° 130 pour les raisons suivantes. C'est que, comme j'ai eu l'occasion de le dire lors du débat qui a eu lieu déjà sur ce projet de loi, un certain nombre de principes nous semblent ne pas correspondre, ne pas être en accord avec l'organisation ou la philosophie que nous avons au Québec en matière de justice, en matière d'équité, en matière de représentation des citoyens lorsqu'ils sont insatisfaits, ou mécontents, ou victimes de ce qu'ils pensent être des abus de la part de la société ou de l'administration gouvernementale.

Certes, M. le Président, le ministre a voulu faire une réforme, réforme ambitieuse, une réforme qui, disait-il, permettrait d'apporter des remèdes, les solutions à ce que certains d'entre nous et les citoyens pouvaient penser être des barrières ou des complications quant à l'obtention de la justice ou la défense de leurs droits en ce qui concerne leurs démêlées avec l'administration publique. Sauf que, comme le disait le chef de l'opposition, lorsqu'on voit un projet de loi, c'est en regardant dans les détails, et dans les articles, et dans les paragraphes que le diable surgit bien souvent. En effet, je ne pense pas qu'en ce Parlement les députés ou les ministres aient des idées préconçues de passer des projets de loi, sauf, bien sûr, le ministre des Finances qui n'a de cesse de taxer. Et je pense que les autres ministres à vocation sociale, ou de justice, ou de démocratie n'ont pas cette pratique des financiers et que, au contraire, ils pensent toujours, généralement, permettre aux citoyens d'améliorer leur condition et d'avoir de meilleurs recours pour être mieux représentés. Sauf que, depuis quelques années, particulièrement un an et demi, on se rend compte que ce gouvernement, qui est à la recherche de fonds publics, qui est à la recherche d'économies, ne légifère plus en fonction des droits ou des besoins des citoyens mais en fonction d'économies possibles et réalisables.

Alors, nous sommes en train de voir, M. le Président, que ce gouvernement revoit les institutions que nous nous sommes données, que le Québec s'est données depuis 20 ans ou 25 ans et, sous prétexte de modernisation ou de meilleur accès du public à ses services, est en train de couper et de sabrer dans tous ces acquis que nous avons créés au fur et à mesure des décennies ici, au Québec, et ce qui fait de nous une société particulière. Car, en effet, nous pouvons dire que nous avons fait école en Amérique du Nord en ce qui concerne la défense des gens qui sont parmi les plus démunis, parmi les plus brimés et parmi ceux qui sont bien souvent dans les situations les plus difficiles.

Et là nous avons le projet de loi n° 130 qui devrait faire en sorte que nos amis, nos concitoyens, nos compatriotes québécois, de notre pays, puissent, lorsqu'ils ont un problème avec la machine, cette machine, cette organisation gouvernementale qui est gérée par des hommes et des femmes qui, croyant des fois bien faire, appliquent des lois et des règlements passés au fur et à mesure des années, les appliquent avec rigueur, eh bien, lorsque ces gens ne sont pas satisfaits, puissent faire appel, puissent se plaindre, puissent demander un arbitrage, eh bien, le ministre, en voulant, peut-être de bonne foi, changer cela et améliorer ça, a créé ou est en train de créer quelque chose qui va être pire.

En effet, M. le Président, la réforme des tribunaux administratifs ne pourra pas fonctionner, ne pourra pas fonctionner, pour deux raisons, mais une raison fondamentale, c'est parce qu'on ne peut pas, au Québec... Et là je parle aux Québécois en général et plus particulièrement aux gens du Parti québécois. On sait que, les partis politiques, nous nous faisons élire sur des programmes. Alors, le Parti libéral a un programme et le Parti québécois a un programme. Le programme du Parti québécois s'appelait, à la dernière élection, «Des idées pour mon pays», je l'ai ici. Et qu'y avait-il en ce qui concernait les tribunaux? Alors, on sait qu'un programme, c'est ce que nous présentons aux électeurs lorsque nous leur demandons de nous élire, de nous porter au sommet de l'administration ou des directions du gouvernement. On dit: Voilà ce que nous voulons faire, élisez-nous et nous le ferons.

Alors, il y avait dans ce parti, dans ce programme: «Moderniser nos structures judiciaires en favorisant leur intégration et leur autonomie.» C'était là le programme du Parti québécois, c'est ce qu'ils ont vendu sur toutes les tribunes dans les circonscriptions. Et nous prenons, à l'article 1.4 du programme du Parti québécois qui a été la base de l'argumentation des ténors de ce parti pour se faire élire au pouvoir à la dernière élection, ils disaient, en matière de justice – non seulement ils le disaient, mais c'était écrit, c'était leur programme: «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes ou personnes exerçant des fonctions quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial ou indépendant.» Voilà ce qui a été dit. «Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel des décisions rendues par ces organismes ou personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.» Et c'est là, M. le Président, le programme du Parti québécois. Je le montre pour que nos téléspectateurs et nos députés, nos collègues d'en face puissent s'en souvenir, car je pense que chacun d'entre eux, lorsqu'il a fait campagne, a dû présenter ce programme-là à ses électeurs.

(20 h 10)

M. le Président, sauf qu'aujourd'hui nous nous retrouvons devant un projet de loi qui est en totale contradiction avec ce qui était leur programme politique. Peut-être que certains personnes sourient, mais je pense que c'est là de la fausse représentation, car le projet de loi du ministre ne prévoit aucune structure, aucune possibilité d'appel lorsque les décisions ont été rendues par ces tribunaux. Et c'est là un des problèmes fondamentaux de ce projet de loi là. Parce qu'on ne peut pas se faire élire ici, au Québec, en ce pays, sur un principe, sur des raisons, avec des idées, avec des projets et, un an après, faire le contraire et faire la différence sans au moins que la population le sache. Il faut tenir un discours qui fait en sorte que la population nous croie, donner la confiance, et ce n'est pas le cas. Et j'invite, M. le Président, tous les militants et tous les Québécois et les Québécoises du Parti québécois qui ont lu et qui ont cru à ce programme, «Des idées pour mon pays», programme du Parti québécois pour l'élection de 1994, à lire ce programme, à la page 13, et à regarder l'article 1.4. Et voilà, M. le Président, ça, c'est un des problèmes principaux.

L'autre problème, M. le Président, c'est que non seulement on fait ça, il n'y a pas d'appel, mais l'on va maintenant nommer les juges pour cinq ans. On sait qu'au Québec et au Canada, et ailleurs dans le monde, les juges ont la sécurité d'emploi. Pourquoi, M. le Président? Parce que ça permet d'avoir l'indépendance de la justice, ça permet aux gens de ne pas être tributaires de décisions politiques quant à leur avenir; et, lorsqu'on n'a pas crainte de son avenir, M. le Président, on peut avoir une sérénité pour rendre des décisions. Et ce qui ne sera pas le cas, parce que, à chaque cinq années, les commissaires ou les juges qui seront sur les tribunaux administratifs créés par le ministre, qui non seulement n'ont pas droit d'appel, mais ces commissaires, ces juges seront sujets à nomination partisane. Aussi, M. le Président, il y a lieu de s'y inquiéter, et le Barreau du Québec s'en inquiète. Car, en effet, comment peut-on rendre justice lorsqu'on n'est pas sûr de l'indépendance des gens qui la rendent?

Alors, M. le Président, c'est là deux vices fondamentaux. Tout d'abord, il n'y a pas d'appel, un procédé qui est un principe fondamental ici, au Québec, et en Amérique du Nord, et dans la loi britannique, et dans la loi française aussi, M. le Président, le code Napoléon, et dans toutes nos traditions de justice. Et aussi, bien sûr, M. le Président, la nomination des juges se doit d'être impartiale à tous les niveaux que ce soit. On a vu nos amis d'en face dire: La Cour suprême, qui est nommée par le fédéral, les juges, ils penchent toujours du même bord parce qu'ils sont nommés par le fédéral. On a entendu ça, dire ça. Mais, moi, je vais dire que, lorsque les juges ou les commissaires des tribunaux administratifs seront nommés par les ministres du gouvernement, on peut se poser la même question: Pencheront-ils toujours du même sens, du gouvernement?

Une voix: Oui...

M. Gobé: Le ministre de l'Environnement dit oui. Bien, voilà, M. le Président, la réponse, et c'est pour ça que nous sommes contre, M. le Président, parce que nous ne pouvons l'accepter dans le meilleur intérêt des Québécois. Et, quand même en rirait-il, c'est là une réalité, et je trouve ça insultant pour les citoyens du Québec, parce que c'est ça, la vraie réalité du projet de loi du ministre. M. le Président, ce n'est pas à l'honneur des gens d'en face qu'ils passent un projet de loi comme celui-là. Puis ils ne défendent pas vraiment les intérêts du Québec. Voilà, M. le Président, pourquoi nous sommes contre et pourquoi, ce soir, je vais voter contre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Nous allons céder maintenant la parole au député de Marquette. Alors, M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il est étonnant que des parlementaires se retrouvent devant un projet de loi en matière de justice sur lequel et les juges et les avocats se sont prononcés contre, pour la raison que la justice serait niée aux contribuables. M. le Président, quand un projet de loi est contesté non pas devant la Cour du Québec, mais par la Cour du Québec, alors que le juge en chef de la Cour du Québec et la juge adjointe se présentent devant une commission parlementaire pour dire au ministre de la Justice qu'ils sont contre le projet de loi parce qu'il prive les citoyens et les citoyennes d'un droit d'appel, un droit fondamental dans notre société démocratique, il y a un problème sérieux.

Je vais reprendre les propos qui ont été cités dans le journal La Presse , où on disait ceci, le 14 février dernier: «Dans une très rare comparution devant une commission parlementaire – on le constate, M. le Président, ce n'est qu'exceptionnellement que les juges se présentent devant une commission parlementaire pour dire au ministre de la Justice que lui et son gouvernement s'apprêtent à commettre une grave erreur, eh bien, les juges de la Cour du Québec ont décidé de le faire, et c'était par le biais, par la voix du juge en chef de la Cour du Québec, et le paragraphe disait ceci – la Cour du Québec, par la voix du juge en chef Louis-Charles Fournier, conteste vivement la partie du projet de loi n° 130 sur la réforme de la justice administrative qui prévoit l'abolition pure et simple de la plupart des appels qu'elle entend en matière de justice administrative. La Cour du Québec recommande plutôt de permettre aux justiciables d'en appeler devant elle de toutes les décisions du Tribunal administratif.» Objection formelle de la part de la magistrature.

Objection formelle aussi de la part des avocats par le biais du Barreau du Québec, par le biais du Barreau de Québec, par le biais des bâtonniers, qui ont tenu des propos extrêmement durs, extrêmement sévères à l'endroit de l'actuel ministre de la Justice. Et des propos que j'ai répétés. Ça fait déjà deux fois, M. le Président, que je prends la parole sur ce projet de loi. Ce soir, je n'ai pas l'intention de répéter les propos durs et sévères qui ont été tenus à l'égard du ministre de la Justice, parce que je me suis interrogé à savoir comment il se fait que le ministre de la Justice semble être indifférent à ces attaques et comment il se fait que le premier ministre de la province semble être sourd aux appels qui proviennent de la magistrature, qui proviennent des avocats.

Et on connaît l'historique, le passage du député de Louis-Hébert à la Justice: projets de loi où il a dû reculer par le passé. On est nettement sous l'impression que c'est devenu une question personnelle pour lui que de faire passer ce projet de loi là indépendamment des critiques que le projet de loi subit et des foudres que font subir au ministre de la Justice ses partenaires, les gardiens du judiciaire, nommément les juges et les avocats.

M. le Président, le ministre a apporté une correction sur trois, d'après ce que j'ai compris. Son projet de loi venait à l'encontre de la Charte des droits et libertés. Le ministre a apporté une correction. Et, je me souviens, c'était le député de Chomedey qui s'était levé en Chambre pour indiquer au ministre de la Justice que la loi qu'il voulait faire adopter au printemps dernier allait à l'encontre des dispositions de la Charte. Le premier ministre a été saisi, il a été un peu surpris de cela et il a dit: Nous allons faire des vérifications et nous aviserons. Ils ont fait des vérifications, ils ont bel et bien vu que le ministre de la Justice avait mal fait ses devoirs et, par conséquent, ils ont décidé de modifier ce volet-là.

Mais il reste qu'il y a deux autres critiques importantes au projet de loi, et le ministre de la Justice en est très au courant. C'est tout le processus de nomination des juges sur le Tribunal administratif. Ce qui est craint de tout le monde et ce qu'on était censé corriger, c'étaient les nominations partisanes effectuées par le gouvernement. Et ça, M. le Président, malheureusement, ce vice important n'a pas été corrigé, et la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne posait la question aujourd'hui au ministre de la Justice: Pourquoi n'avez-vous pas renouvelé les mandats de 40 personnes qui sont juges sur les tribunaux administratifs actuels, qui attendent de voir leurs mandats renouvelés, qui sont compétents, qui font un excellent travail? Mais le ministre a décidé d'attendre que le projet de loi n° 130 soit adopté pour, par la suite, faire ce que nous craignons qu'il va faire, c'est-à-dire nommer les amis du Parti québécois à la magistrature.

(20 h 20)

M. le Président, c'est extrêmement grave, ce qui se passe avec le projet de loi n° 130. On prive les citoyens et les citoyennes de leur droit d'en appeler lorsqu'un tribunal administratif se trompe. Et il arrive qu'un tribunal administratif se trompe. L'erreur est humaine, ce sont des êtres humains qui sont juges et ils peuvent se tromper. Mais, lorsque les citoyens et les citoyennes feront face à une décision qui aura été rendue, où ils auront des indications claires que le juge s'est trompé, ils n'auront aucune possibilité d'en appeler à un tribunal supérieur, en l'occurrence la Cour du Québec. Ils n'auront aucune possibilité pour venir corriger l'erreur qui aura été commise. Et non seulement ça, M. le Président, ce qui est encore plus grave, c'est qu'on n'a aucune garantie que les juges qu'entend nommer l'actuel ministre de la Justice seront impartiaux et seront indépendants.

Et c'est ça, M. le Président, les raisons pour lesquelles et l'opposition, et les juges, et les avocats se prononcent contre le projet de loi du ministre de la Justice; c'est pour cela qu'ils ont décidé de faire appel au premier ministre directement; c'est pour cela qu'ils ont tenu des propos extrêmement durs, extrêmement sévères à l'endroit de la personne du ministre de la Justice. Et nous le savons tous dans cette Chambre, il ne survivra pas au prochain remaniement ministériel. Avec de telles gaffes, M. le Président, c'est inconcevable qu'il puisse conserver son siège. Inconcevable. Pourtant, l'occasion lui a été fournie d'apporter des correctifs, d'apporter des corrections. Et ce n'est pas juste l'opposition. L'opposition, nous l'avons dit, M. le Président, le travail constructif qui a été fait par l'opposition. Sur 188 articles que contient le projet de loi, 146 articles ont été adoptés. Pourtant, il y a des lacunes majeures. Je n'ai jamais vu de telles protestations de la part des juges, juges de la Cour du Québec qui décident de se présenter devant une commission parlementaire pour dire au ministre de la Justice: Il y a des vices fondamentaux dans votre loi et vous devez y apporter des corrections importantes. Ça n'a pas de bon sens, ce que vous voulez faire. Et non seulement les juges, mais le Barreau, l'ensemble des avocats de cette province qui s'opposent à la réforme du ministre de la Justice.

Le ministre de la Justice qui entraîne également l'ensemble des partenaires de l'autre côté de la Chambre dans l'adoption de ce projet de loi vicié, de ce que certains ont appelé «un affreux gâchis». Or, M. le Président, on sait que, de l'autre côté, ils sont plus nombreux que nous. Nous serons écrasés à cause de leur majorité. Le poids du nombre, M. le Président. Mais plusieurs personnes observent ce que le gouvernement fait et les gens vont s'en rappeler lors de la prochaine campagne électorale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Nous cédons maintenant la parole au député d'Outremont.

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, j'ai suggéré, et à vous et à votre collègue, d'autant plus qu'on en est à la dernière étape de l'adoption d'un projet d'une extrême importance, qu'on rappelle aux collègues d'en face, aux députés ministériels que l'alternance leur donne le droit de parler, même s'il y a eu un bâillon, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition, je me rappelle, cette nuit, avoir eu une plaidoirie de la sorte. M. le député d'Outremont.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: M. le Président, je sens que je vais réveiller un certain nombre de mes amis d'en face.

M. le Président, mes collègues de l'opposition ont dit beaucoup de choses sur les faiblesses du projet de loi n° 130, sur ses faiblesses graves. Pour ma part, M. le Président, j'aimerais répondre à la question qui est au coeur de ce débat, du débat qu'on a ici ce soir dans cette Assemblée et qu'on a eu toute la nuit dans cette Assemblée. La question, c'est la suivante, M. le Président, ce n'est pas une question compliquée, c'est une question très simple: Pourquoi ce gouvernement n'écoute pas? Le premier ministre n'écoute pas, ses ministres n'écoutent pas, le ministre de la Justice n'écoute pas et les parlementaires, les députés n'écoutent pas non plus. Je ne dis pas, M. le Président: Pourquoi ce gouvernement n'écoute-t-il pas l'opposition officielle? Je dis: Pourquoi ce gouvernement n'écoute-t-il personne? Le projet de loi n° 130 est un gros exemple de cette bonne pratique de ce gouvernement, mais il y en a d'autres: le projet de loi n° 40, les projets de loi n° 72, 82, 30, 76. Les gens d'en face n'écoutent pas. Ils n'écoutent pas le Barreau, ils n'écoutent pas les juges, ils n'écoutent pas les maires, ils n'écoutent pas le Protecteur du citoyen, ils n'écoutent personne.

Le premier ministre a-t-il écouté Mgr Couture? Mgr Couture a parlé d'apartheid social, il n'a pas parlé d'apartheid légal, il a parlé d'exclusion. Et il ne faut pas se promener longtemps sur les rues à Montréal ou sur les rues à Québec pour la sentir, l'exclusion, la voir, l'exclusion sociale; elle nous colle à la peau. L'archevêque de Québec a voulu la dénoncer, le premier ministre lui a fait la leçon. On n'écoute pas. Au référendum, est-ce que nos gens d'en face ont écouté la voix du peuple? Le peuple a voté majoritairement non, et c'est depuis ce temps-là qu'ils se comportent comme s'il avait voté oui. Ils n'écoutent pas.

M. Lefebvre: M. le Président, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je pense que vous avez compris ce que je voulais soulever comme question de règlement, là. Dans un premier temps, il y a deux ou trois députés, au moins, qui ne sont pas à leur banquette, M. le député de Johnson, qui se promène d'un caucus à l'autre, là, puis qui dérange tout le monde, surtout celui qui parle.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, Mmes, MM. les députés, je vous prierais, ceux qui ne sont pas à leur banquette, de bien vouloir vous rendre à votre banquette et, d'autre part, j'inviterais également M. le député d'Outremont à revenir à la pertinence du sujet que nous traitons actuellement. S'il vous plaît, M. le député de Johnson. Alors, M. le député d'Outremont, je vous invite à poursuivre, tout en essayant de maintenir le plus de pertinence possible avec le sujet que nous traitons. M. le député.

M. Laporte: M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, j'affirme que ce dont je parle est pertinent, la question est au coeur de nos débats. Si ce dont je parle n'était pas pertinent, nous ne serions pas là, le gouvernement écouterait et le projet aurait été retiré. Et, ensuite, j'ajoute une chose aussi, c'est que, des fois, ils nous donnent l'impression d'écouter, mais il ne faut pas être dupes: lorsqu'ils nous donnent l'impression d'écouter, ils n'entendent rien.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député d'Outremont, je m'excuse, j'inviterais le député d'Orford à bien vouloir reprendre...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon, messieurs, nous sommes rendus à la dernière journée de la semaine, une semaine qui a été très éprouvante pour tous et chacun. Alors, je vous prierais maintenant d'écouter religieusement M. le député d'Outremont.

(20 h 30)

M. Laporte: Alors, M. le Président, j'espère que tout ça, ça ne m'enlève pas mon temps. Eh bien, pourquoi ils n'écoutent pas? Parce qu'ils sont pressés, parce qu'il y a une urgence, parce qu'il y a eu un consensus, parce qu'ils veulent faire des économies. C'est des prétextes, ça, c'est des excuses, c'est des faux-fuyants. La vraie raison pour laquelle ils n'écoutent pas, c'est que ce gouvernement agit sur la conviction qu'il en sait plus que tout le monde, qu'il possède le monopole de la vérité et que, de toute façon, rien ne sert d'écouter, parce qu'autrui est un mineur et que, s'il n'est pas de notre avis maintenant, il entendra fatalement raison plus tard.

M. le Président, le paternalisme, c'est ça. Je dois dire que ce n'est pas entièrement étonnant qu'on en soit rendu là où on en est rendu avec le gouvernement. M. le Président, c'est de la façon que ça se passe lorsque le chef est un saint, lorsqu'on est gouverné par un saint.

Des voix: Bravo!

M. Laporte: M. le Président, j'ai dit «un saint», mais je n'ai pas dit «un vrai saint». Je n'ai pas dit «un saint», j'ai dit «un saint laïc», M. le Président. Je n'ai pas dit «Mère Thérésa», parce que, elle, elle écoute, n'est-ce pas? Mais les saints, les laïcs, les démagogues, les saints biologiques, eux autres, ils n'écoutent pas. Et, quand on est dirigé par un saint et que le charisme de ce saint s'étend sur tout son entourage, eh bien, on se retrouve avec du monde d'en face qui n'écoute pas tout simplement parce qu'ils ont le monopole de la vérité.

Les gens qui n'écoutent pas, vous voyez comment ça réagit, M. le Président! C'est clair. C'est grave, ne pas écouter, d'abord parce que ça crée du mécontentement, mais ça crée aussi beaucoup d'apathie. Les gens, finalement, décrochent. Donc, ne pas écouter, c'est la meilleure façon de, pernicieusement, lentement, graduellement mettre la hache dans la démocratie. Et c'est ça que nos collègues d'en face sont en train de faire, M. le Président. C'est pour ça que nous, l'opposition, on consent à subir le refus d'écouter des gens d'en face et on consent à passer nos journées et à subir ce refus jour après jour et, faut-il l'ajouter, nuit après nuit.

C'est triste, M. le Président, qu'on en soit là. C'est triste qu'on en arrive là. C'est vrai, comme mes collègues l'ont dit, qu'il y a dans ce projet des tas de choses qui devraient être changées pour le bonifier, mais ce que, moi, j'ai voulu dire, M. le Président, ce n'est pas me substituer à ce qu'ils ont dit, ce n'est pas répéter ce qu'ils ont dit, mais c'est d'essayer de répondre à la question pertinente, parce que c'est pour cette question-là qu'on est là. La question, c'est: Pourquoi les gens d'en face n'écoutent pas? Et je pense, M. le Président, que j'ai donné de bonnes raisons d'explication qui vont faire comprendre à tout le monde la réponse à cette question. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Outremont. Nous céderons maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je pense, comme le mentionnait mon collègue qui vient de prendre la parole, le député d'Outremont, qu'il aurait été souhaitable pour toute la population du Québec que les députés d'en face, comme on le dit si bien, les députés ministériels et, le premier en tête, le ministre de la Justice écoutent un peu les revendications de la très grande majorité des Québécois et des Québécoises de chacune de nos régions qui s'inquiètent justement de l'application du projet de loi n° 130.

Qui aurait cru que les députés seraient encore ici en ce vendredi, vendredi 13, pour à nouveau tenter de convaincre le ministre de la Justice qu'une très grande majorité, comme je le mentionnais, des gens s'inquiètent des mesures qui vont toucher tous les citoyens de chacune de nos régions dans des domaines aussi diversifiés que je saurais, M. le Président... que je prends quelques minutes pour vous rappeler. Une région comme celle que je représente, celles que plusieurs d'entre nous représentent... Et on peut facilement se permettre de dire que toutes les régions du Québec vont être touchées, dans un domaine ou dans un autre, au sujet des tribunaux administratifs.

La liste des recours pour lesquels les citoyens perdent un droit d'appel devant les juges de la Cour du Québec, dont les conditions garantissent l'impartialité et l'indépendance... au profit d'un juge d'un tribunal administratif du Québec dont les conditions ne garantissent pas l'impartialité et l'indépendance. Vous avez comme exemple, M. le Président, les agents de voyages. À l'occasion d'une suspension, annulation ou révocation du permis par le ministre, ils n'ont pas droit de recours. Ça, ça touche une région comme la mienne. Ça touche probablement une région comme la vôtre. Et je regarde tous les députés, ici, qui sont présents dans cette Chambre, et on peut dire sans trop se tromper que les régions que ces députés représentent seront touchées par une mesure de ce genre-là, soit au niveau des agences de voyages. Donc, on ne peut pas nier que c'est un projet de loi qui aura un impact important pour tous nous autres et les gens qu'on représente, comme je le mentionnais.

En aménagement et urbanisme: valeur d'un terrain exproprié par une municipalité, par exemple. C'est une situation qui se présente fréquemment, qui crée beaucoup, je pense, d'anxiété chez certaines personnes qui ne sont pas habituées à négocier ou, du moins, à avoir à vivre des dossiers comme ceux-là: une partie de leur propriété qui va devoir être expropriée pour le besoin de la communauté. Je pense que c'est une raison valable. Mais, quand ils auront à faire valoir leurs droits pour s'assurer que la juste valeur de leur terrain va leur être remboursée et qu'ils n'auront pas satisfaction en première instance, ils n'auront pas droit à l'appel. Imaginez si une famille perd une partie du terrain à proximité de sa résidence – parce que c'est plus souvent que pas, à l'occasion du passage des routes ou l'amélioration du réseau routier – cette famille devra accepter ce qui lui est offert par une première négociation par les instances appropriées.

Au niveau de l'assurance-récolte, M. le Président, je peux facilement me permettre de dire qu'une région comme la mienne aura un jour ou l'autre à subir, justement, les effets de la loi n° 130. Je vois justement le ministre de l'Agriculture qui est ici et qui a sûrement eu la chance d'évaluer les conséquences dans ce domaine donné. Et, encore une fois, l'assurance-récolte a été sujette dans le passé à des revendications, à des appels pour déterminer la valeur des pertes qui ne répondait pas à la juste valeur, d'après le propriétaire ou le producteur agricole. Pas de droit d'appel.

Assurances. Dans le domaine de l'assurance: refus, suspension ou annulation du permis d'un assureur par l'Inspecteur général des institutions financières. C'est des professionnels spécialistes dans la vente de l'assurance, dans le domaine des services à la population. Ces gens-là n'ont pas non plus droit à l'appel.

Vous avez, au sujet du Code de la sécurité routière... On a été plusieurs jours, plusieurs heures en commission parlementaire avec le ministre des Transports, et c'est des sujets qu'on a traités. Évidemment, on n'a pas abordé cette partie parce que cette partie du projet de loi n° 130 se trouve sous la responsabilité du ministre de la Justice, mais je suis certain qu'on aurait pu sensibiliser le ministre des Transports aux conséquences du projet de loi de son collègue, parce que les décisions de la Société de l'assurance automobile concernant un permis pour une école de conduite, c'est un sujet qu'on a traité en commission parlementaire avec le ministre des Transports dans le projet de loi – si je ne me trompe pas – n° 43.

Permis du vendeur d'automobiles et des points d'inaptitude, c'est un autre domaine où les gens n'auront pas droit d'appel même s'ils ont de bons arguments. M. le Président, c'est inquiétant. Malheureusement, c'est d'autant plus inquiétant, parce que nous avons tous, les députés de l'opposition, ici, tenté à plusieurs reprises de convaincre le gouvernement et le ministre, justement, que la population ne serait pas mieux servie, serait mal servie par des mesures inéquitables par rapport à d'autres secteurs de notre économie.

(20 h 40)

Les établissements touristiques, M. le Président: suspension, annulation par le ministre d'un permis pour exploiter un établissement touristique. Pas de droit d'appel. Vous avez une belle petite auberge dans votre région, un restaurateur qui donne de très bons services au public, qui, pour une raison ou pour une autre, parce qu'il a été dénoncé ou suite à une inspection... Et le propriétaire, étant de bonne foi, réalise qu'il a probablement contrevenu à certains articles de certaines lois: suspension d'un permis. Et, si jamais ça ne tourne pas comme il souhaitait, que son permis est suspendu, pas de droit d'appel. Son principal outil, pour ce propriétaire d'auberge ou de restaurant, son établissement dans son ensemble, qui lui permet de servir l'ensemble de sa clientèle... pas de droit d'appel à l'occasion de la suspension de son permis.

Expropriation – et ça, c'est des points sur lesquels on doit retenir – indemnité suite à expropriation par l'administration publique. J'y ai fait allusion tantôt justement, M. le Président, et je n'y reviendrai pas, mais c'est probablement là où les citoyens et citoyennes auront à subir le plus de préjudices à cause de la perte de leur droit à l'appel. On a vu des débats qui ont duré des mois et des mois à la suite de dossiers comme ça. Ils sont allés en appel et ils ont eu gain de cause. Ça ne sera plus la même situation. Ils devront vivre avec la première décision. Je prends encore, pour une région comme la mienne et la vôtre, M. le Président, l'exemple des mesureurs de bois, et pêcheries et aquaculture commerciale, c'est un secteur où ma région pourrait être touchée.

M. le Président, j'aimerais vous rappeler que même le Barreau du Québec, qui représente l'ensemble... qui sont des professionnels, plusieurs d'entre nous y sont revenus, j'y reviens juste pour une partie d'un article, M. le Président. Le Barreau qui tente auprès des députés, de l'ensemble des députés, de convaincre... de demander de convaincre le ministre: «Le Barreau croit de son devoir d'intervenir lorsque la situation de la justice l'impose ou lorsque les droits fondamentaux des citoyens et des citoyennes doivent être protégés.» Donc, vous allez comprendre que ce n'est pas de trop, la démonstration que je vous ai faite tantôt, dans plusieurs situations où les droits des citoyens pourraient ne pas être protégés par la présentation du projet de loi n° 130 et son adoption probablement dans les heures ou les jours qui viennent.

C'est déplorable, M. le Président, et je reprends ce que j'avais dit au tout début, ce sera probablement un des vendredis 13 de l'année 1996 qui aura été des plus tristes pour tous ceux et celles, dans le domaine de la justice, pour tous ceux et celles qui viennent de perdre des droits. Donc, M. le Président, c'est à regret que nous allons devoir voter contre ce projet de loi, et le faire au nom des citoyens et citoyennes des régions qu'on représente. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Nous céderons maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, avant de me lever, j'ai hésité un tout petit peu pour assurer le respect de notre règle d'alternance, règle fondamentale, comme l'a souligné souvent le leader adjoint de l'opposition, le député de Frontenac. Mais, apparemment, un bâillon qui a été appliqué au niveau de l'étude détaillée en commission parlementaire s'applique chez les ministériels également ce soir.

Une voix: Cet après-midi également.

M. Copeman: Et cet après-midi, d'ailleurs. Et on peut le déplorer, M. le Président. Je remarque une certaine discrétion chez les ministériels – c'est leur droit, M. le Président, vous l'avez souligné à beaucoup de reprises, mais, nous, de ce côté, on ne peut que le déplorer – sur un projet de loi de cette envergure, qui touche de façon assez fondamentale une réforme sur la justice administrative au Québec.

M. le Président, beaucoup de mes collègues de ce côté de la Chambre, de l'opposition officielle, qui m'ont précédé ont fait référence aux interventions du Barreau dans le dossier. M. le Président, je dois vous avouer que, moi aussi, il faut que je me fie beaucoup à l'expertise du Barreau en ce qui concerne le projet de loi n° 130. Vous le savez, M. le Président, je ne suis pas avocat.

Je ne sais pas si je dérange les ministériels dans le coin, M. le Président, avec mon discours...

Une voix: Oui.

M. Copeman: ...M. le Président, comme vous le savez, je ne suis pas avocat...

Une voix: Ah non?

M. Copeman: ...et je n'ai pas une profonde connaissance de nos mécanismes de justice administrative au Québec. Et, dans ce cas-là, un législateur comme moi a plusieurs choix: on peut évidemment se fier aux indications, aux paroles, aux propositions du ministre de la Justice. Dans mon cas à moi, M. le Président, malgré le fait que, si j'avais besoin d'autres raisons de ne pas me fier au ministre de la Justice, si j'avais besoin d'autres raisons que simplement le fait que je suis de ce côté de la Chambre, le ministre a amplement, quant à moi, depuis un certain temps, démontré à quel point je ne devrais pas me fier à lui pour me donner une indication comment m'y prendre dans le dossier de la loi n° 130.

L'autre aspect, M. le Président, c'est de nous fier un tout petit peu aux intervenants dans le domaine. Et, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je pense qu'un des intervenants les plus importants dans le dossier de la justice administrative, c'est le Barreau du Québec. Ça a un certain sens, c'est du gros bon sens.

M. le Président, j'écoutais attentivement le leader du gouvernement cet après-midi quand il a dit: Oui, mais, vous savez, le Barreau représente ses membres, ils ont peut-être un intérêt particulier dans le dossier et, nous, comme législateurs, on n'est pas là pour défendre l'intérêt du Barreau. Je suis parfaitement d'accord – ça arrive très rarement, et je dois vous dire que, quand ça arrive, je ne me vante pas trop – avec le leader du gouvernement: on n'est pas ici, comme législateurs, pour défendre l'intérêt du Barreau. Mais, par contre, le Barreau, qui regroupe des professionnels, selon le Code des professions, le fondement même du Barreau est de protéger le public. Ça, c'est la première raison d'être du Barreau du Québec. J'ai entendu de la bouche du ministre de la Justice, à d'autres moments, que la raison d'être des regroupements de professionnels, c'est de protéger le public. Le Barreau du Québec est là pour protéger le public. Ça, c'est son objectif principal.

Alors, que le leader du gouvernement vienne me dire, ou que le ministre de la Justice lui-même se contredise en disant: Mais, vous savez, le Barreau a peut-être d'autres intérêts, il faut qu'il veille à l'intérêt de ses membres. M. le ministre de la Justice a donné en cette Chambre certaines paroles qui laissaient entendre que, peut-être, les membres du Barreau avaient un intérêt pécuniaire dans le dossier et qu'une partie de leur opposition venait de cet effet-là. Je rappelle simplement que le Barreau a réagi en indiquant que: «De tels propos – il parle du ministre de la Justice, évidemment – démagogiques et indélicats, tenus par surcroît par un ministre de la Justice, jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions.» C'est un constat, quant à moi, assez grave.

(20 h 50)

Et tout me laisse croire que ce projet de loi est bâclé, ne fonctionnera pas, n'atteindrait pas les buts énumérés par le ministre, et, même, on a certaines indications que ce projet de loi permettra au ministre de faire une série de nominations partisanes pour récompenser ses amis et les amis du régime en place, M. le Président. On a certaines indications que le projet de loi lui permettra de le faire et on a beaucoup d'indications que c'est son intention de le faire.

M. le Président, on s'oppose à ce projet de loi. Pour cette raison, on s'oppose au projet de loi sur son fond, à cause du fait qu'avec plusieurs instances il n'y aura pas d'appel. Il n'y aura pas d'appel suite à une décision du Tribunal administratif du Québec; et il est clair, quant à nous, que le projet de loi ne mérite pas d'être adopté. Et le fait que le gouvernement ait décidé de bâillonner, d'arrêter le travail de la commission des institutions, commission parlementaire qui étudiait article par article... La décision même du gouvernement de mettre fin prématurément à ces travaux, quant à moi, est une indication qu'il y a quelque chose en arrière de tout ça.

Mr. Speaker, the bill that is before this House, Bill 130 on Administrative Justice, gives us every indication that there are mysterious forces at work. The study of the bill section by section in parliamentary committee was prematurely ended by this Government, a situation which was deplored by the Québec Bar Association in very, very strong terms. The head of the Québec Bar, the «bâtonnier» himself, found it necessary to write to the Premier and indicated that it was with stupefaction that the Bar learned that the parliamentary commission that was studying this bill would not be allowed to continue its work, and indicated that this motion of closure was inconceivable, in the mind of the Québec Bar. And we know that the principle of the objective of the Québec Bar, as set out in the Professional Code of Québec, is to protect the public.

Mr. Speaker, there is some evidence that this bill will allow the Minister of Justice to proceed with political appointments. There is some evidence to suggest that's exactly what he intends to do, and for all those reasons, I find myself under the obligation to vote against this bill at all stages of its passage here, in the National Assembly. Thank you, Mr. Speaker.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, puisqu'il n'y a plus d'intervenant, nous cédons maintenant la parole au député d'Argenteuil. M. le député.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. La nuit dernière, on a eu une nuit écourtée et, malgré cette nuit écourtée, j'ai eu le temps de récupérer quelques heures. Et, pendant ces quelques heures, j'ai eu un rêve, un rêve qui me fait penser à ce qu'Eleanor Roosevelt nous avait dit il y a déjà des dizaines et des dizaines d'années: L'avenir appartient à ceux et à celles qui croient en la beauté de leurs rêves. Mais, imaginez-vous, M. le Président, que, dans mon rêve, j'ai eu l'innocence, l'innocence de voir le ministre de la Justice qui revenait sur sa décision.

Ce soir, nous sommes ici, M. le Président, pour essayer une dernière fois – une dernière fois; on est à l'étape ultime – de convaincre le ministre de la Justice du bien-fondé des arguments que nous essayons de lui transmettre; et, à cette fin, j'aimerais citer à nouveau la lettre du bâtonnier. Comme je lui rappelais hier, et j'aimerais lui rappeler encore ce soir, je crois toujours en mon rêve, dans la beauté de mon rêve. Et, si nos rêves sont un prélude à l'avenir et à la beauté de l'avenir, il est grand temps que le ministre de la Justice revienne sur sa décision.

Le Barreau faisait parvenir au premier ministre, le 4 décembre, une lettre dans laquelle il lui disait qu'il jugeait inconcevable que le gouvernement force l'adoption d'une telle pièce législative qui constitue une réforme majeure de certaines de nos institutions. Imaginez que, dans mon rêve, j'avais vu la beauté de l'avenir, et, malgré ce rêve ce soir, je réalise que le ministre de la Justice s'obstine à continuer dans le chemin qu'il a entrepris, c'est-à-dire de nous amener à la dernière étape sur son projet de loi.

Encore une fois, M. le Président, la justice sera bafouée parce que les élus n'auront pas la possibilité de faire valoir leurs droits. Nous n'avons pas été capables de poursuivre en commission; nous ne sommes pas capables de convaincre le ministre du bien-fondé de notre démarche. Non pas que les arguments ne sont pas fondés, non pas que les arguments n'ont pas de valeur, c'est qu'il n'écoute pas; il entend, mais il n'écoute pas. Et nos droits démocratiques les plus simples ne pourront s'exercer à cause de son attitude cavalière.

Les tribunaux administratifs, M. le Président, se verront dans une position où les nommés auront une position partisane. Et c'est encore une partie de mon rêve de voir que la justice s'exercera d'une façon non partisane, équitable pour tous. Mais, M. le Président, force m'est de réaliser ce soir que, malgré ce beau rêve que j'ai eu la nuit dernière dans les quelques heures de sommeil, je dois quasiment me rendre à l'évidence que, dans les quelques heures qu'il nous reste pour essayer de convaincre le ministre, il va falloir qu'on fasse d'arrache-pied pour arriver à lui faire concevoir des arguments qui sont tellement évidents à toute la communauté des avocats et des avocates du Québec. Le Barreau, il n'y a pas d'instance plus haute, plus élevée au Barreau que le bâtonnier, et, pourtant, le ministre de la Justice, qui est un des élèves, ne peut pas comprendre ce que le bâtonnier lui dit. On a un problème majeur. Et je ne vois pas comment, autre que les arguments que nous lui avons présentés, le ministre va se soumettre au bon sens.

Le bon sens, M. le Président, ça a encore sa raison d'être. Et quand on dit «le bon sens», ce n'est pas juste pour les simples gens, le bon sens, ça existe aussi pour les avocats, ça existe pour le ministre de la Justice. Qu'il comprenne donc qu'il y a des choses de bon sens qu'il devrait mettre en application dès ce soir. On ne lui en voudra pas s'il retire son projet de justice. Je vous le promets, je vous le garantis, on ne lui en voudra pas. On va même lui faciliter la tâche jusqu'au bout pour qu'il le retire. On ne peut pas accepter que, dans une démocratie comme celle du Québec, les droits démocratiques ne s'exercent qu'une fois aux quatre ou cinq ans, que c'est simplement le moment où on va mettre notre vote dans l'urne. Le droit démocratique s'exerce dans cette Assemblée, et on ne peut pas accepter de nous amener à un point tel où on ne peut plus exercer nos droits démocratiques. Et les citoyens que nous représentons s'en rappelleront, M. le Président, ils s'en rappelleront.

Dans la vie, M. le Président, il n'y a pas de solutions, il y a des forces en marche. Il faut les créer et les solutions viendront. Je me rends compte qu'on a mis les forces en marche et que, malheureusement, même si on essaie de les créer, le ministre nous en empêche. Il est évident qu'il ne verra jamais les solutions. Et le moyen pour lui de nous aider à les créer, c'est de nous laisser poursuivre le processus démocratique où on sera capables de faire valoir nos droits comme élus et comme représentants des gens dans nos comtés.

Encore une fois, je dois déplorer que, du côté ministériel, on soit silencieux. Est-ce que là aussi on a mis le bâillon, M. le Président?

Une voix: Oui.

M. Beaudet: On leur a mis le bâillon?

Une voix: Oui.

(21 heures)

M. Beaudet: Ah bien! Ça ne me surprend M. le député. Ça ne me surprend pas de voir que, du côté ministériel, on leur a mis le bâillon. Personne ne se lève pour le défendre, le ministre. Peut-être qu'il y a un problème.

Une voix: Un remaniement ministériel.

M. Beaudet: Il devrait s'en rendre compte, il devrait le réaliser. Qu'il accepte donc qu'il y a un problème. Qu'il retire son projet de loi. On va l'étudier en commission parlementaire, on va continuer le processus démocratique, puis à ce moment-là on sera capable de faire valoir les arguments qui ont été mis de l'avant.

Le Barreau nous dit clairement: Où est l'urgence d'adopter avant les Fêtes le projet de loi n° 130? Qu'est-ce qui le pousse à nous bâillonner, à nous enlever nos droits démocratiques pour une loi qui n'a aucune nécessité d'urgence? C'est quoi, le mécanisme qu'il veut mettre de l'avant? Qu'est-ce qu'il essaie de prouver? Qu'il est bon? S'il veut nous prouver qu'il est bon, que c'est un bon ministre de la Justice, qu'il fasse le chemin inverse. L'humilité, ça n'a jamais fait de tort à personne, et les erreurs, on peut tous en faire. Et, s'il en a faite une, qu'il le retire, son projet de loi, puis il va accélérer le processus, parce que, nous, on va travailler de concert avec lui, avec le côté ministériel, à bonifier ce projet de loi, à l'améliorer. Et, quand le ministre nous représentera en troisième lecture son projet de loi, on sera capables de voter avec lui et de le supporter, mais une fois qu'on l'aura amélioré pour que son projet de loi puisse servir à bien la population.

Et vous allez comprendre, M. le Président, que, comme le ministre s'oppose et fait tout pour nous nuire pour qu'on puisse créer des situations qui vont amener des solutions, bien, nous, on n'a pas d'autre choix que de s'opposer à une telle démarche. Elle va s'opposer par un non clair et fort lors du vote parce que c'est inconcevable que, dans une société démocratique, on nous empêche d'exercer nos droits les plus fondamentaux, les droits de faire valoir les points, les arguments de la population.

Et c'est rire de la population, rire de la démocratie que de nous bâillonner. Qu'on bâillonne les députés du côté ministériel, bien, je comprends la solidarité ministérielle, je comprends ça, mais, qu'on en soit rendu à bâillonner l'opposition, qui joue son rôle d'opposition, qui joue son rôle démocratique de faire valoir les arguments de la population, je pense que c'est inacceptable, et soyez assuré que, le moment venu, nous allons nous opposer avec force à ce projet de loi. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Argenteuil. Nous céderons maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee. M. le député.

Une voix: Bravo!


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis malheureux que nous soyons réunis ici aujourd'hui, malheureux parce que, en commission parlementaire...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député. Excusez-moi. Bon. J'inviterais les députés à prendre leur place et à maintenir le haut niveau dont nous bénéficions ce soir. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Comme je disais, c'est malheureux parce que, en commission parlementaire, on avait notre droit d'exprimer librement et ouvertement, conformément aux règles de procédure de cette Assemblée nationale du Québec... Malheureux aussi parce que le gouvernement du Parti québécois a suspendu nos règles de démocratie, le droit de s'exprimer sur le projet de loi article par article, malheureux parce que le gouvernement du Parti québécois va nous forcer à voter sur un projet de loi sans qu'on ait complété une discussion article par article en commission parlementaire.

Mr. Speaker, the vote on Bill 130 shall be incomplete and shall be contaminated. From an ethical point of view, because of the commission stage of this bill, the separatist PQ Government imposed a closure on our deliberations, preventing a free and open discussion, article by article, of the bill which we shall vote upon this evening.

It's important to note that the closure was imposed precisely when the Official Opposition discussed the apprehension of the «bâtonnier» of the Bar of Québec on the question of impartiality of the members of the administrative tribunals, and the law as it is now structured. Mr. Speaker, we must recall that this is the «bâtonnier» of the Bar of Québec, an impartial observer.

M. le Président, au moins deux députés de l'aile parlementaire du PQ, s'ils ont le courage de leurs convictions, devraient voter contre le projet de loi n° 130 ce soir, puisque le bâillon nous a été imposé en commission parlementaire et qu'ils ont déclaré, et je cite: «Dois-je vous rappeler à vous, M. le Président, dont la fonction justement est de sauvegarder, de préserver les droits de l'opposition, que, dans un vrai Parlement, il existe une opposition et ce qu'on appelle les droits de l'opposition? Là, où ça n'existe pas, ça cesse d'être un vrai Parlement et ça cesse d'être une vraie démocratie.» La citation continue, et je cite: «Sinon, on est un régime autoritaire ou un régime totalitaire, mais non pas un régime démocratique.» Je viens de vous citer les mots du député du Lac-Saint-Jean, prononcés dans cette Assemblée nationale, le 22 juin 1992.

Permettez-moi de vous citer une autre citation, en référence à la motion de clôture, et je cite: «C'est la négation même de ce qu'est un Parlement que d'agir de la sorte, d'imposer le bâillon.» Fin de citation: le député de Joliette, dans cette Assemblée, le 22 juin 1992.

Mr. Speaker, the Opposition fears that the PQ Government wishes to quietly place all of its friends in position of authority in this province, this being to the detriment and prejudice of all Quebeckers. And I cite you the examples which we have cited, time and time again, in this National Assembly. Yes, the naming, by the Minister of Justice, of the wife of the Vice-Premier as a judge in the Court of Québec, the Penal Division, a woman who had never pleaded a case before a court of law, a woman who was not even a member of a law society or a law firm. The trend continued when the Minister of Justice named his personal friend, Louis-Charles Fournier, as the Chief Justice of the Court of Québec, another friend of the «péquistes» in a position of authority.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois a continué d'annoncer des nominations à des positions de haut calibre qui sont plus que questionnables en ce qui a trait à la compétence, aux qualifications, au code d'éthique et aux valeurs morales de ces personnes. Pensons seulement à la nomination du sous-ministre associé aux Affaires criminelles et pénales; les Québécoises et les Québécois ont été horrifiés d'apprendre que celui qui décide d'intenter ou non des poursuites criminelles au Québec, et ce, tant à l'égard des bandes de motards que d'autres, n'est nul autre que l'ex-avocat des Hell's Angels. Et maintenant l'histoire se répète et se répète avec la nomination, au poste de juge de la Cour du Québec, d'un ex-felquiste et ami des péquistes.

(21 h 10)

But, Mr. Speaker, the sham continued with the appointment to high-ranking positions of persons with disputable moral qualifications.

M. le Président, dans la situation économique difficile que nous connaissons actuellement, avec un taux inquiétant et désastreux de chômage créé par les politiques du gouvernement péquiste, on voit qu'épouses, frères et amis du régime au pouvoir ont tous des emplois qui sont garantis, alors que la Québécoise et le Québécois moyens vivent dans l'insécurité ne sachant pas si demain ils auront un emploi. M. le Président, c'est une situation qui est très grave.

Aussi, je vous cite qu'en commission parlementaire le ministre avait accepté d'adopter un amendement présenté par l'opposition officielle relativement à l'article 5 du projet de loi n° 130, mais, à l'étape de l'adoption de ce projet de loi, le ministre a présenté un amendement qui a abrogé l'amendement qu'il avait accepté relativement à l'article 5. On a aussi beaucoup d'autres exemples où le ministre a convenu avec l'opposition, mais n'a pas tenu sa parole.

Aussi, vous conviendrez avec moi que la lettre qu'adressait M. Claude Masse, bâtonnier du Québec, le 11 décembre 1996, au premier ministre du Québec était tellement importante et sérieuse que le bâtonnier, en son bon jugement, cet homme de droit bien connu et respecté, ce grand juriste, a cru bon d'envoyer une copie de ses commentaires à vous-même, M. le Président, à vous-même, le président de l'Assemblée nationale, au chef de l'opposition et au ministre de la Justice. Le bâtonnier, dans sa lettre du 11 décembre 1996, écrit, et je cite: «De tels propos démagogiques et indélicats, tenus par surcroît par le ministre de la Justice, jettent le discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions.»

M. le Président, je vous dis que le premier ministre de cette province n'a aucun autre choix que de demander la démission du ministre de la Justice. Et, moi, je joindrai ma voix à mes collègues de l'aile parlementaire libérale pour voter contre le projet de loi n° 130. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous cédons maintenant la parole au leader adjoint de l'opposition et député de Frontenac. Alors, M. le leader.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, dans une société démocratique comme la nôtre, il y a trois grands pouvoirs qui permettent à notre société de bien fonctionner. On le sait, il y a le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Le pouvoir législatif, ce sont les parlementaires avec, évidemment, la surveillance des règles par la présidence. L'exécutif, bien, c'est le premier ministre avec les ministres. C'est ça, l'exécutif; c'est ça, le pouvoir exécutif. Le pouvoir judiciaire, c'est, quant à moi, peut-être celui qui est le plus important parce que c'est celui où il y a une continuité. Le pouvoir législatif, on le sait, on est ici pour un certain temps, pour certains plus longtemps que pour d'autres. Les élus passent; les hauts fonctionnaires, les mandarins de l'État restent. On sait ça, M. le Président. Tout comme les juges. Les juges de nos tribunaux de droit commun sont nommés à vie et ne peuvent être destitués que pour cause.

M. le Président, le pouvoir judiciaire est la sauvegarde des droits d'une société démocratique, de ses citoyens et de ses citoyennes. On dit qu'il y a un quatrième pouvoir, mais vous me permettrez de passer assez vite là-dessus, on parle du pouvoir de la presse. On badine un petit peu lorsqu'on parle du pouvoir de la presse, mais on ne badine pas, M. le Président, lorsqu'on parle du pouvoir judiciaire. Le pouvoir judiciaire, il est, quant à nous de l'opposition, important et primordial de le protéger lorsque ce pouvoir judiciaire touche les droits des personnes, les droits personnels, et c'est le cas lorsqu'on parle de justice administrative.

La justice administrative que le projet de loi n° 130, sous la responsabilité du ministre de la Justice... La justice administrative qu'on cherche à regrouper, M. le Président, ça touche quelles activités de nos concitoyens et de nos concitoyennes? C'est, on le sait, pour chacun et chacune d'entre nous qui ont la responsabilité de protéger les droits de nos concitoyens et de nos concitoyennes, l'aide sociale, c'est la Commission de la santé et de la sécurité au travail, c'est la Régie de l'assurance automobile.

On ne parle pas ici, M. le Président, là, d'un projet de loi qui veut remettre en question les structures de nos tribunaux de droit commun. Ce n'est pas la Cour du Québec qui est visée ici, M. le Président. Ce n'est pas la Cour supérieure. On ne veut pas repenser évidemment la structure de la Cour suprême, M. le Président. On parle du droit qui touche les plus démunis de notre société et, dans ce sens-là, M. le Président, il est fondamental et essentiel que le premier gardien des droits de nos concitoyens les plus faibles, le premier gardien, qui est le ministre de la Justice, fasse son travail. Dieu sait que ce n'est pas le cas, M. le Président, avec cette législation, le projet de loi n° 130, que l'on «bulldoze», M. le Président, à l'encontre, évidemment, des voeux de l'opposition officielle, de la volonté de l'opposition officielle.

Et d'autres de mes collègues ont dit: Bien, l'opposition officielle... c'est la force du nombre, c'est ça, les règles du Parlement, M. le Président, on finira par avoir raison de l'opposition officielle. Mais on n'aura pas eu raison du Barreau du Québec, du Protecteur du citoyen, des centaines de milliers de citoyens, M. le Président, qui se sont exprimés par plein de porte-parole qui ont dit: Où est l'urgence? Le ministre de la Justice – parce qu'il est à peu près le seul qui a parlé sur son projet de loi, M. le Président, mais si peu, si peu ici au salon bleu – va me répondre: Ça fait 25 ans qu'on attend. Si on a attendu depuis 25 ans, M. le Président, on peut patienter encore quelques mois. Où est l'urgence?

La question qui est revenue systématiquement dans la bouche de tous mes collègues aujourd'hui: Pourquoi, M. le Président... Quand le Barreau du Québec a essentiellement comme responsabilité de protéger les droits des citoyens et des citoyennes du Québec, quand le Barreau du Québec attaque avec autant de virulence non seulement l'attitude du ministre de la Justice, mais également le projet de loi lui-même, quand le Barreau du Québec dit: M. le ministre de la Justice, pourquoi avoir fait disparaître ce qu'il y a de plus fondamental en justice administrative, le droit d'appel?, pas de réponse. Quand le Barreau du Québec dit au ministre de la Justice: Vous tentez de faire croire et aux avocats et avocates du Québec, et à la population du Québec, et à l'opposition officielle, qui n'est pas dupe, que vous modifiez le processus de nomination des membres des tribunaux administratifs du Québec, c'est faux. Le Barreau du Québec, M. le Président – c'est un observateur objectif – dit au ministre de la Justice qu'il ne dit pas la vérité, M. le Président.

Et le ministre s'entête, avec la complicité du leader du gouvernement, en passant ce qu'il y a de plus agressif à l'intérieur d'un parlement: le bâillon. La motion de suspension, M. le Président, c'est une première... Je ne me souviens pas, moi, en 11 ans, et j'ai vérifié avec d'autres collègues, M. le Président, qui ont plus d'expérience que moi... Un projet de loi qui touche la justice, M. le Président, imposé par une procédure aussi exceptionnelle que le bâillon, c'est du jamais vu.

Moi, M. le Président, en toute objectivité, je questionne le cheminement du ministre de la Justice et je n'ai pas trouvé de réponse. Demain, M. le Président, demain, si le projet de loi n° 130 est adopté, on n'aura rien changé dans le quotidien des Québécois et des Québécoises, alors que, M. le Président, à court et moyen terme cependant, plein de Québécois et de Québécoises réaliseront dans quatre mois, dans cinq mois – pas la semaine prochaine – qu'ils ont perdu des droits, qu'ils ont perdu des droits!

Et c'est le ministre de la Justice, M. le Président, qui monte aux barricades, qui tasse l'opposition, qui ne tient pas compte de l'opinion du Protecteur du citoyen, M. le Président, le Protecteur du citoyen! Le ministre de la Justice tasse tout ça du revers de la main et «bulldoze» l'Assemblée nationale, comme je l'ai dit, monte aux barricades. Pourquoi? Pour supprimer des droits à ceux et celles qu'il a la responsabilité de protéger, M. le Président.

(21 h 20)

Moi, je ne comprends pas qu'un ministre de la Justice se prête à une telle démarche. Et il y a des projets de loi où on a compris la stratégie du gouvernement. À titre d'exemple, le projet de loi n° 77, qui, de façon hypocrite, parle de réorganisation policière, mais qui, essentiellement, n'est rien qu'un pompage de 48 000 000 $ de la poche des contribuables. Mais, dans ce projet de loi n° 130, c'est ça qui est inquiétant puis c'est ça qui est préoccupant, M. le Président, on ne comprend pas où veut en venir le ministre, sinon que, essentiellement, l'urgence, c'est de permettre au ministre de la Justice...

Vous savez, lorsqu'on avance des choses semblables, c'est extrêmement grave. Ce sont des accusations graves que l'on porte, mais on n'a pas de réponse. Essentiellement, il y a des gens à protéger à l'intérieur du système. C'est pour ça qu'il y a urgence. C'est pour ça que le ministre de la Justice, avec la complicité du leader et du premier ministre, qui ne pourra pas plaider l'ignorance... Il a reçu des avertissements extrêmement sévères et, à plusieurs reprises, du Barreau du Québec. On lui a dit: Vous faites fausse route sur le projet de loi comme tel, et votre ministre de la Justice se comporte de façon indigne, puis ça n'a rien changé. Alors, la seule raison, M. le Président, qui nous permet de comprendre, là, la seule explication, c'est que... je ne sais pas, il y a des explications cachées. Il y a des raisons cachées, puis ça, c'est inacceptable. Inavouable.

M. le Président, il nous reste, du côté de l'opposition, puisqu'on en est à la dernière étape, on est à l'étape de l'adoption... Puis je ne suis pas certain que les collègues d'en face, qui se sont très peu exprimés... À l'occasion, il y en a eu un ou une qui a fait un cinq minutes sur le bout des pieds, timidement, en lisant des notes qu'on lui avait préparées. En commission parlementaire... Le ministre du Revenu trouve ça drôle. Je ne l'ai pas entendu, le bienheureux ministre du Revenu, M. le Président, hein? Je suis convaincu qu'il ne sait même pas le titre du projet de loi dont on parle ce soir, le ministre du Revenu.

M. le Président, il nous reste, du côté de l'opposition, une seule carte à jouer pour permettre aux ministériels... Au ministre de la Justice, on y renonce. Peut-être que, lorsqu'il aura fini ses négociations – qu'il en viendra à bout, là, des 450 000 fonctionnaires de la fonction publique du Québec – le premier ministre aura quelques heures pour réfléchir, pour ramener son ministre de la Justice à la raison. La seule carte qu'il nous reste à jouer, c'est l'article 100 du règlement ou de nos règlements: l'ajournement du débat.


Motion d'ajournement du débat

Alors, M. le président, je fais donc motion pour qu'on ajourne le débat sur le projet de loi n° 130 pour permettre au ministre du Revenu, à titre d'exemple, de lire le projet de loi puis de se le faire expliquer, de réfléchir sur la conséquence de l'adoption d'un projet de loi que je n'hésite pas à qualifier d'infâme pour les plus démunis, les plus faibles de la société québécoise. Je donne une dernière chance au ministre et aux ministériels de réfléchir quelques heures. Et Dieu sait, M. le Président, on se reverra peut-être en mars avec une meilleure compréhension du rôle qui appartient au ministre de la Justice: protéger les citoyens et non pas les écraser, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Frontenac. Nous allons cesser les interventions sur l'adoption du projet de loi n° 130 et, en vertu de l'article 100 de notre règlement, nous allons maintenant débuter le débat sur la motion d'ajournement qui nous est proposée par le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition.

Les règles sont les suivantes, je vous les rappelle: l'auteur de la motion a un droit de parole de 10 minutes; les deux groupes parlementaires ont chacun 10 minutes; et enfin nous terminons avec la réplique du député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition.

M. Cusano: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Viau, sur une question de règlement?

M. Cusano: Question de directive, d'information.

Le Vice-Président (M. Pinard): Question de directive. Je vous écoute, monsieur.

M. Cusano: Est-ce qu'il y a un nouveau plan de banquettes qui a été déposé à l'Assemblée nationale aujourd'hui, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): À ce que je sache, nous n'avons pas déposé de nouveau diagramme.

M. Cusano: Dans ce cas-là, M. le Président, je vous demanderais d'appliquer l'article 32.

Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 32. Alors, je demanderais aux députés qui ne sont pas à leur banquette de bien vouloir la prendre tout simplement. Alors, j'inviterais la députée de Rimouski à bien vouloir prendre sa banquette. Mme la députée de Rimouski, s'il vous plaît, on me demande de vous signaler que vous n'êtes point à votre place, en vertu de l'article 32.

Merci, messieurs dames. Alors, nous allons poursuivre nos débats sur la motion d'ajournement. Nous vous écoutons, M. le député de Frontenac.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, j'ai complété mon intervention, ma très courte intervention de 10 minutes sur la dernière étape de l'adoption d'un projet de loi, puis ce qui reste à notre disposition, c'est un court 10 minutes, pour ceux et celles qui veulent l'utiliser, hein. Du côté des ministériels, on n'a rien à dire, on s'est écrasé devant le ministre, devant le premier ministre, les conseillers du premier ministre qui leur ont dit: Le projet de loi n° 130, c'est bon pour tout le monde; faites-vous-en pas, même si, dans vos comtés respectifs, on vous dit: Vous nous écoeurez pas à peu près, ça ne fait rien! On croit ce qu'on veut croire du côté des ministériels, puis on a honte de défendre le ministre de la Justice. On ne se lève pas, ou si peu.

Le dernier argument qui est à la disposition de l'opposition, c'est l'ajournement. Pourquoi un ajournement? Mardi qui vient, le Barreau du Québec va rencontrer – puis c'est du jamais vu, ça, à ma connaissance – le Barreau du Québec a demandé de rencontrer le premier ministre en compagnie du ministre de la Justice pour discuter de tout ce qui ne va pas à l'intérieur du ministère de la Justice, de tout ce qui ne va pas chez le ministre de la Justice. Alors, si on veut être de bonne foi du côté des ministériels, si le ministre de la Justice veut démontrer un minimum de respect des droits des citoyens et des citoyennes...

Une voix: Moins fort!

M. Lefebvre: ...est-ce qu'il ne devrait pas dire: D'accord, on va retarder l'adoption du projet de loi n° 130 jusqu'à ce que le premier ministre ait écouté le bâtonnier du Québec, le Barreau du Québec?

Si le ministre de la Justice, dès le moment où j'ai déposé ma motion d'ajournement, lui le sachant – parce que c'est public, d'autant plus que c'est public – qu'il va rencontrer le bâtonnier du Québec en compagnie de son premier ministre, pourquoi le ministre de la Justice ne pose-t-il pas un geste rationnel, respectueux de l'opinion d'autrui? Protecteur du citoyen, Barreau du Québec, opposition officielle qui s'expriment au nom de millions de Québécois et Québécoises. C'est ça que je demande au ministre de la Justice, à ceux et celles qui l'entourent, pour que le ministre de la Justice puisse répondre en compagnie de son premier ministre au bâtonnier du Québec, qui l'a accusé d'avoir tenu «des propos démagogiques, indélicats, tenus par surcroît par un ministre de la Justice», dixit. C'est ce que dit le bâtonnier du Québec. C'est questionnable, de la part d'un ministre qui se respecte, de lire une lettre qui a été publiée dans tous les médias du Québec?

Quand le bâtonnier du Québec dit au ministre de la Justice ou parle du ministre de la Justice de cette façon: «Le ministre de la Justice, M. le premier ministre, a tenu des propos démagogiques, indélicats qui, tenus par surcroît par un ministre de la Justice, jettent du discrédit sur l'institution du Barreau et trahissent un sens peu développé des institutions»...

Une voix: Moins fort!

(21 h 30)

M. Lefebvre: ...ça ne le fait pas sourciller? Ça ne l'inquiète pas? Il va dormir tranquille, lui. Le député de Chomedey, lui, il va bien dormir parce que, à la tête de l'opposition, depuis des mois, il se bat pour protéger les plus démunis de notre société contre un gouvernement supposément social-démocrate.

M. le Président, j'ai honte de tenir des propos semblables, je suis mal à l'aise, mais je suis obligé de les dire. Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques fait des «hi» puis des «ha» muets, M. le Président.

M. Boulerice: C'est à cause que tu cries.

M. Lefebvre: Alors, je demande au ministre de la Justice de se ressaisir, d'attendre au moins jusqu'à mardi qui vient, d'écouter le bâtonnier du Québec, qui disait dans une lettre du 4 décembre à son premier ministre... Oui, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, à un moment donné il faut crier, il faut crier parce que c'est le dernier argument qui nous reste. On a essayé l'argument rationnel en commission parlementaire, on l'a essayé ici au salon bleu, on hausse le ton lorsqu'on est rendu le dos au mur.

Comment le premier ministre va-t-il recevoir les commentaires qui seront faits dans son bureau, non pas par écrit: «M. le premier ministre, c'est avec stupéfaction que nous apprenions le dépôt à l'Assemblée nationale, le 28 novembre dernier, d'une motion de clôture»? Pourquoi le bâtonnier parle comme ça, M. le Président? C'est du jamais vu. C'est du jamais vu, un projet de loi qui va modifier de fond en comble les habitudes des justiciables au Québec, pas les habitudes des millionnaires qui s'adressent aux tribunaux que sont la Cour supérieure, la Cour d'appel, la Cour suprême, avec tout ce qu'il y a d'avocats pour les représenter.

M. le Président, le ministre de la Justice, avec son projet de loi n° 130, va transformer de A à Z, de fond en comble, toutes les habitudes des justiciables qui ont à se défendre face à la machine de la CSST, face à la machine des fonctionnaires, qui font leur travail de façon correcte, à la Régie des rentes... Transformer de fond en comble. Et le Barreau du Québec, le Protecteur du citoyen lancent un cri d'alarme au ministre de la Justice et au premier ministre: Il faut, M. le premier ministre, que vous arrêtiez ce processus infâme. On l'a dit: un gâchis incroyable.

M. le Président, on ne parle pas du ministre des Transports qui s'est trompé entre deux ou trois kilomètres sur un bout de route, on parle de justice, on parle de droits fondamentaux, on parle de ce qui va rester demain, dans cinq ans et dans 10 ans, après que vous ne serez plus là, M. le Président, comme parlementaire, après que le ministre de la Justice – puis, lui, ça viendra probablement plus tôt que tard – sera passé, après que, moi, je serai sorti d'ici, M. le Président. C'est de ça qu'on parle. Et je suis convaincu que le ministre regrette, j'en suis certain, certaines décisions qu'il a prises au niveau de l'aide juridique. Il ne le reconnaîtra jamais.

M. le Président, on fait fausse route, on va trop vite. L'intention au départ était bonne, mais, en cours de route, ça s'est gâté. Et le ministre, là, on a l'impression qu'il s'entête, qu'il braque tous ceux et celles qui sont contre, alors qu'on parle de devoir, de justice, de protéger les plus démunis, de protéger ceux et celles qui n'ont comme seuls défenseurs souvent que les avocats de l'aide juridique, ou encore, s'ils ne sont pas admissibles à l'aide juridique, il leur reste les députés de leurs circonscriptions respectives.

Si l'opposition insiste, se bat avec autant d'acharnement, je l'ai dit tout à l'heure, bien dirigée par le député de Chomedey, c'est qu'on a réfléchi, on a compris que le ministre faisait fausse route. C'est tellement vrai, qu'un nombre considérable d'amendements ont modifié le projet de loi, mais pas sur l'essentiel, pas sur le droit d'appel, pas sur le processus de nomination – et c'est ce à quoi le ministre tient le plus, M. le Président, avez-vous remarqué, le processus de nomination.

Une voix: Très important.

M. Lefebvre: Le processus de nomination, ça, pour lui, c'est important; ça, pour le premier ministre, c'est important. Une bonne façon de contrôler le système, M. le Président, pas d'autre conclusion que celle-là. Le reste, les amendements sur des choses moins importantes pour le Parti québécois, moins importantes pour le gouvernement péquiste, ça, on a fait des concessions, mais, sur ce qu'il y a de plus fondamental – le droit d'appel, le droit pour un citoyen d'aller vérifier une décision de première instance – ça, on n'a pas cassé; ça, on n'a pas bougé.

Sur le processus de nomination non plus, M. le Président. Pourquoi? Parce qu'on a probablement, au cours des prochaines semaines, comme d'autres de mes collègues l'ont dit, des cadeaux de Noël à distribuer. Et on verra, M. le Président, si on se trompe du côté de l'opposition. Je mets le ministre au défi: une motion d'ajournement jusqu'à mercredi matin. Je vais le prendre au mot, là... Qu'il nous prenne au mot, M. le Président; on va faire l'inverse. Qu'il entende les représentations verbales à l'occasion de la rencontre de mardi – Barreau du Québec, premier ministre, ministre de la Justice – et après ça on se reparlera le lendemain, M. le Président. Et, si on a fait fausse route, si on s'est trompé, si le bâtonnier du Québec, suite à cette rencontre, dit: Vous savez, messieurs et mesdames de l'opposition officielle, le projet de loi n° 130, ce n'est pas si mal, on a été éclairés, on a eu des explications du ministre de la Justice et du premier ministre et on réajuste notre évaluation, bien, nous aussi, M. le Président, on verra à discuter avec le bâtonnier du Québec.

Je demande au ministre de la Justice – et je m'arrête là-dessus, M. le Président – de poser un geste intelligent, correct, objectif, rationnel, un geste de générosité pour la population du Québec, pour les citoyens et citoyennes du Québec, pas pour le Parti québécois. Et ceux et celles qui, à l'intérieur du PQ, seront déçus en réalisant que peut-être leur nomination est en danger, on s'arrangera avec eux autres, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors...

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...sur la motion d'ajournement...

M. Bégin: M. le Président, c'est pour une question de directive, là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le ministre.

M. Bégin: Vous avez dit que celui qui faisait la motion avait le droit de parler 10 minutes, et après ça les deux...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, voici. L'auteur de la motion a un droit de parole de 10 minutes; ensuite de ça, les deux groupes parlementaires ont également un droit de parole de 10 minutes. Alors... Et, si un des groupes parlementaires n'utilise pas son 10 minutes, il n'est pas cumulé à l'autre groupe parlementaire. Donc, à ce stade-ci, je serais prêt à reconnaître quelqu'un, au niveau de l'alternance. Est-ce que vous êtes prêt, M. le ministre? Alors, M. le ministre de la Justice et député de Louis-Hébert.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, j'ai fait quelques interventions, mais j'aimerais en faire une autre avant qu'on termine l'étude de ce projet. Je dois vous dire que jamais je n'aurais cru devoir, pour faire adopter un projet de loi, entendre, subir autant de paroles blessantes, méchantes, mesquines et s'attaquant à l'homme et non au projet de loi. Jamais je n'aurais cru devoir écouter, entendre 90 fois des discours basés sur les ouï-dire, les demi-vérités, les procès d'intention, les jugements téméraires, et j'en passe. Jamais je n'aurais cru entendre des interventions qui ignorent sciemment et volontairement des choses connues depuis le début des travaux, par exemple affirmer qu'il n'y a plus aucun appel, alors que ce sera... que c'est réellement le statu quo.

Et, pour ne pas me faire accuser de dire des choses qui ne sont pas exactes, je vais référer à l'intervention du député Bordeleau, à 17 h 50 aujourd'hui, qui dit ceci: «Et actuellement, les citoyens avaient un droit d'appel de ces décisions, et ce que le ministre de la Justice a décidé, c'est que le seul droit d'appel qui existera dorénavant sera la Cour supérieure.» Il réfère au bref d'évocation. M. le Président, M. le député de l'Acadie était membre de la commission des institutions, il a parlé à peu près le 80e, 85e intervenant, c'est sa troisième intervention, et il a dit sciemment et volontairement ce qu'il savait ne pas être la réalité des choses.

(21 h 40)

M. le Président, on a également dit le temps de travail en commission pour le projet de loi n'avait pas été suffisamment utilisé. Je vous réfère à une page portant les notes 13-12-96, 17 h 45, où on lit, du député de Sauvé: «Et il a passé outre, ce ministre de la Justice, M. le Président, après à peine 47 heures d'étude sur un projet de 148 articles...» À la même page, le député de l'Acadie dit ceci: «Après plus de 130 heures où un travail a été fait, un travail admirable a été fait – et là il avait perdu un peu ce qu'il disait, pour faire un compliment, il s'est enlisé – d'ailleurs par le député de Chomedey en commission parlementaire...» M. le Président, si le député de Chomedey a fait 130 heures, j'ai fait 130 heures et nous avons fait 130 heures. Je dis qu'on savait très bien la réalité et qu'on ne l'a pas fait. On n'a pas dit exactement ce qu'il en était.

Mais je voudrais maintenant référer à quelque chose qui s'est passé le 21 novembre 1996, et là je pense qu'on va voir tout ce qu'est l'opposition, toute son opposition qu'elle exprime depuis 90 interventions – je peux me tromper dans le nombre, mais c'est dans l'ordre des choses. M. Mulcair disait, à 10 h 9, en commission parlementaire, ceci...

Des voix: M. le député de Chomedey.

M. Bégin: Ah! excusez! Excusez, c'est parce que je voyais «Mulcair». Alors, M. le député de Chomedey: «Mais j'aimerais bien faire une motion pour qu'on attende la poursuite des travaux, ici, parce qu'il y a un important jugement dans la Cour suprême qui doit être rendu dans les heures qui suivent – et écoutez bien ceci, M. le Président – qui va affecter directement les travaux. Et, si la décision de la Cour d'appel est confirmée, je suis sûr que ça va affecter l'opinion du ministre; si elle est infirmée, ça va affecter notre position dans ce dossier.» M. le Président, la décision dont il parlait était la décision dans bar-bistro Petite Maison, cette décision concernant la Régie des alcools, des courses et des jeux.

Je lis, à la page 1 du jugement, ceci: «En appel de la Cour d'appel du Québec.» À la page 2: «Appel: Le pourvoi est accueilli.» M. le Président, ceci veut dire que la décision de la Cour d'appel a été renversée. Alors, je lis ceci: «Et, si la décision de la Cour d'appel est confirmée, je suis sûr que ça va affecter l'opinion du ministre; si elle est infirmée – et elle a été infirmée – ceci va affecter notre position dans ce dossier. Alors, il me semble que ça peut être utile...»

Alors, je cite maintenant moi-même, M. le Président: «...compte tenu de l'état d'avancement de nos travaux, c'est-à-dire que nous piétinons depuis une douzaine d'heures sur un article, je soumets que nous devons continuer à travailler nos travaux, parce qu'il n'y a aucune espèce de collaboration quelconque qui a été apportée pour faire avancer ce dossier-là.»

Et nous retournons maintenant au député de Chomedey: «La raison pour laquelle on piétine, comme dit le ministre, c'est qu'on n'est pas capable d'avoir une assurance concernant l'impartialité et l'indépendance, et c'est notre interprétation qui est basée sur la décision de la Cour suprême de l'affaire La Petite Maison. Alors, dans les heures qui suivent, on va avoir la réponse de la plus haute instance au Canada sur cette question-là.» Un peu plus loin: «On dit depuis le début et depuis les 12 heures que le ministre évoque: C'est ça, c'est ça, le problème, c'est l'impartialité et l'indépendance. On ne pense pas qu'on peut procéder...» Et là ça continue: «Ça se peut que le jugement de la Cour suprême donne raison au ministre. Si la Cour suprême donne raison aux arguments du ministre, ça va changer notre position, je le dis, là, publiquement. Ça va avoir un effet positif en faveur du ministre sur notre position.»

Bien, M. le Président, la Cour suprême a donné raison à la position que nous avions adoptée dans ce projet de loi. Ils savent ces choses-là depuis le début des travaux. Ils ont joué à la tartufferie. Ils font semblant de ne pas être d'accord, mais ce sont des vraies attaques personnelles qu'ils dirigent contre l'individu et non contre le projet de loi parce qu'ils savent fort bien que ce projet de loi est parfaitement fondé. Et, s'il y avait un doute concernant cette question... Et ils le savent, ils ne l'ont pas dit, depuis hier qu'ils ont ce jugement de la Cour d'appel du Québec qui parle sur cette question-là.

Et, à la page 28 des notes du juge Thérèse Rousseau-Houle, on peut lire ceci: «Le système en place à la CALP ne garantit pas l'inamovibilité idéale, mais il offre, à mon avis, des garanties objectives suffisantes d'indépendance et d'impartialité.» M. le Président, ceci confirme que non seulement ce qui se faisait avant, le mode de nomination purement et simplement discrétionnaire de l'Exécutif, était valide, bien, je dis que, quand on offre un processus de sélection semblable à celui qui existe pour les juges, on a bonifié substantiellement le mode de nomination. Et je trouve ça tout à fait incorrect que, pendant 90 interventions, ils aient laissé entendre que ce mode de nomination était fait pour nommer des amis. Ce mode de nomination est pour empêcher justement que des nominations se fassent de manière purement discrétionnaire, pour qu'elles se fassent avec un mode correct de sélection des juges. M. le Président, je trouve ça effrayant!

Je le redis, M. le Président, je le redis, le député de Chomedey a dit: «Les travaux de notre commission vont avancer rapidement si la Cour suprême vous donne raison, parce qu'elle portera ce jugement sur un des motifs de notre opposition, de notre travail d'opposition.» Soit, M. le Président. Mais, maintenant qu'ils ont eu la décision, après qu'ils ont eu la décision, ils ont continué, en commission, à s'objecter, à faire semblant qu'il n'y avait pas eu de décision, et ici, en Chambre, les uns après les autres, trois fois pour la plupart d'entre eux, ils se sont levés et ils ont fait semblant qu'ils n'avaient pas entendu ces paroles.

M. le Président, je trouve ça tout à fait incorrect. Ne pas partager l'opinion d'un autre, c'est parfait; l'exprimer, c'est encore mieux; mais faire semblant de dire ce que l'on ne croit pas, M. le Président, j'appelle ça autrement. Je laisse les gens dire comment ça s'appelle, faire une chose semblable. Mais ce n'est certainement pas exercer son droit démocratique. C'est faire autre chose, c'est faire de l'obstruction systématique, c'est empêcher ce Parlement de voter des lois qui sont faites en faveur des citoyens du Québec, pour éviter que les délais soient trop longs, pour éviter que les coûts soient trop élevés, pour qu'on ait confiance dans le système judiciaire.

M. le Président, je pense que nous avons eu raison de présenter, après un an... 96 groupes qui se sont exprimés, 120 heures de travaux, je pense que c'est donner le temps à l'opposition de s'exprimer. Mais, après un certain temps, il est temps qu'on décide, surtout après que la Cour suprême du Canada a rendu une décision qui entérine ce que nous avons fait; après que la Cour d'appel, il y a deux jours, a confirmé ce que nous avons fait. M. le Président, je pense qu'après ça ils sont disqualifiés de parler.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Justice et député de Louis-Hébert. Le groupe parlementaire formant l'opposition a maintenant un droit de 10 minutes. Alors, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, juste à voir la manière dont le ministre vient de s'exprimer, l'énervement dont il fait preuve, ça nous convainc que la motion d'ajournement qui est présentée par le leader adjoint du gouvernement est nécessaire, car, en effet, M. le Président, à cette heure, 21 h 50, force est de constater que le ministre ne possède plus son contrôle. Et je pense que les téléspectateurs qui ont pu suivre son intervention peuvent certainement être du même avis que moi qui suis de ce côté-ci de l'Assemblée nationale, et, même si je ne suis pas devant l'écran de télévision. Nous pouvons constater que son rythme et sa manière un peu échevelée de défendre un dossier qui est dénoncé et critiqué par une grande partie des gens, des citoyens, des organisations qui vont devoir vivre avec sa réforme, cette manière de répondre et de le dénoncer nous démontre sans aucun doute qu'il a perdu sa sérénité.

M. le Président, en matière de justice, n'en déplaise à certains, ce qui est important, c'est la sérénité. Parce que la justice, elle est là pour juger et rendre justice aux citoyens du Québec, quelle que soit la cause ou le cas dans lequel ils sont. Et, lorsque les lois sont passées, en matière de justice, sans sérénité, on peut se poser la question quant à la facilité de leur application.

M. le Président, ce n'est pas l'opposition toute seule qui s'oppose à ce projet de loi. M. le Président, qui va devoir administrer ces projets de loi là? Qui va devoir administrer cette réforme? Premièrement, les cours de justice, et on sait qu'au niveau des cours de justice le juge en chef est venu s'exprimer ici. On sait que les gens qui vont devoir fonctionner avec, soit les avocats représentés par le Barreau du Québec, ont fait non seulement des représentations verbales, mais par écrit aussi. Ils s'opposent et se questionnent lourdement quant au processus qui est enclenché par le ministre. Ce n'est pas l'opposition.

Quand même le ministre s'énerverait après l'opposition, l'accuserait de tous les méfaits et de tous les problèmes qu'il subit, M. le Président, c'est parce que nous avons des gens qui nous disent: Attention, ce n'est pas bon, ce n'est pas ça que nous voulons, ce n'est pas dans le meilleur intérêt de la justice et des contribuables et des citoyens. Sinon, comme opposition, que ferions-nous? M. le Président, nous n'aurions aucun argument valable et nous ne serions pas, à cette heure-ci, en train d'essayer de convaincre le ministre de prendre le temps de réfléchir.

(21 h 50)

M. le Président, je lirai simplement une partie d'une lettre qui a été envoyée par le Barreau du Québec. Le Barreau du Québec, pour les gens qui ne le savent pas, c'est l'organisme qui représente l'ensemble des avocats. Et un ancien ministre du gouvernement, ministre d'État à la Métropole maintenant, a été bâtonnier du Québec. Donc, il était le représentant de cette organisation en particulier. M. le Président, ils disent quoi? «Où est l'urgence d'adopter avant les Fêtes le projet de loi n° 130? En tenant compte des interactions très étroites entre la loi n° 130 et l'avant-projet de loi d'application, il conviendrait d'attendre d'avoir une idée plus précise de la loi d'application avant d'adopter la loi-cadre.» M. le Président, on pourrait en sortir, des lettres, de nombreuses lettres qui nous mettent en garde contre ça.

Le ministre s'énerve, il va adopter à la pression. Il veut nous faire accroire qu'il y a urgence. Mais, M. le Président, il n'y a pas urgence. En matière de justice, on doit faire preuve de sérénité, de calme, de discussion, de concertation, parce que sans cela on fait des projets de loi qui ne sont pas applicables ou qui fonctionnent mal et qui ne sont pas dans le meilleur intérêt des justiciables.

En plus de ça, ce gouvernement est en train de renier son propre programme. On lui demande de réfléchir, de consulter ses membres, sa base, pour savoir s'ils sont d'accord avec ce projet-là. M. le Président, le programme du Parti québécois «Des idées pour mon pays», programme du Parti québécois qui a été déposé... qui a été la bible de ces gens-là pour la dernière élection, qu'y a-t-il d'écrit en matière de justice? «Il est également indispensable que le Québec consacre l'indépendance des pouvoirs judiciaires et quasi judiciaires tant dans le mode de nomination des juges quand dans l'autonomie financière et administrative des cours de justice. Pour ce faire, un gouvernement du Parti québécois proposera les mesures suivantes...» Ce n'est pas mon programme. Ce n'est pas notre direction. C'est ce que nous pensons, mais, eux, c'est ce qu'ils disaient, c'est ce qu'ils ont écrit. Et que disent-ils? «En matière administrative, une loi-cadre couvrant l'ensemble des organismes ou personnes exerçant des fonctions – et là on parle du projet de loi – quasi judiciaires sera adoptée pour assurer aux administrés des décisions rendues par une personne ou un organisme impartial et indépendant. Cette loi prévoira des règles de procédure permettant un appel des décisions rendues par ces organismes ou personnes devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure.»

M. le Président, le ministre fait des demi-vérités lorsqu'il dit qu'il y a encore appel, car, en effet, c'est vrai qu'il y aura encore appel, mais seulement dans trois cas particuliers: en matière foncière, d'expropriation, d'évaluation de territoire agricole. C'est seulement là, les trois domaines administratifs dans lesquels on pourra faire appel avec sa réforme. Est-ce que c'est là une mesure qui va toucher les petits citoyens, les petits contribuables, les Québécois qui ont affaire et qui ont à regretter des décisions, ou qui ont à se plaindre de ou à contester des décisions des administrations québécoises? Non, M. le Président. On retrouve là-dedans des gens qui bien souvent, ayant des terrains ou ayant des propriétés, ont le pouvoir de se défendre. Mais il n'y a rien, au contraire, en ce qui concerne les petits citoyens. Il n'y a plus d'appel, sauf dans ces trois domaines-là. Le ministre induit donc les gens dans une fausse impression lorsqu'il dit que ce n'est pas vrai qu'il n'y aura pas appel.

M. le Président, on ne peut pas accepter deux choses dans ce projet de loi là. Et c'est pour ça que le ministre doit réfléchir. Son programme du Parti québécois dit le contraire... Ils se sont fait élire avec une vision, un programme contraire à ce qu'il dit. Parce qu'il y a deux choses. Tout d'abord, M. le Président, il y a le droit d'appel qui est fondamental dans la justice à travers le monde, dans le monde démocratique, en Europe, aux États-Unis, dans les autres provinces canadiennes. Première des choses, l'appel, c'est fondamental, c'est primordial.

Mais l'autre principe, c'est l'indépendance des juges, l'indépendance de ceux qui vont rendre les décisions et la confiance que le peuple peut avoir dans leurs décisions parce qu'il sait qu'ils sont indépendants. Et on ne retrouve pas ça dans ce projet de loi là. M. le Président, comment penser, lorsque l'on nomme des juges ou des commissaires pour cinq ans, lorsqu'on les nomme pour cinq ans et qu'ils sont tributaires, pour le renouvellement de leur mandat, de l'agrément ou de la complaisance du monde en place au gouvernement, comment penser sérieusement qu'ils peuvent être totalement indépendants lorsqu'ils ont à juger des citoyens et des citoyennes, des Québécois et des Québécoises qui se plaignent contre le même gouvernement? M. le Président, c'est là un principe fondamental. Et c'est pour cela que l'opposition s'oppose à ça. C'est pour ça que l'opposition n'est pas d'accord. C'est pour ça que le Barreau du Québec n'est pas d'accord. C'est pour ça que les juges ne sont pas d'accord avec ça.

Et pourquoi le font-ils? Pour des raisons d'économie financière. On est en train de refaire, M. le Président, au Québec, de nouvelles normes de démocratie basées sur le pognon, sur l'économie que ce gouvernement veut réaliser sur le dos des citoyens et des institutions qui ont été créées ici, il y a 20, 25 ans pour les défendre et pour les protéger. Le prochain qu'on va couper, c'est le Protecteur du citoyen, peut-être? C'est quoi qu'on va couper la prochaine fois? On veut faire en sorte que les Québécois et les Québécoises ne puissent plus faire valoir leurs droits. On veut museler les citoyens.

Et ça, nous ne pouvons l'accepter parce que nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons été à l'origine, comme Parti libéral, de la création de ces grands instruments de démocratie et de justice qu'il y a au Québec. C'est le Parti libéral du Québec, dans les années soixante, soixante-dix, qui a créé ces institutions-là pour défendre et protéger les Québécois et les Québécoises. Et aujourd'hui on voit que ceux qui les démantèlent sont ceux qui justement se targuent de vouloir les défendre, alors que c'est le contraire. Et ça, nous ne pouvons pas l'accepter. On remet en question ce qui a fait la philosophie et la distinction du Québec dans la société nord-américaine depuis 25, 30 ans. Les Québécois et les Québécoises ne peuvent l'accepter. Et, par notre voix, ils vous le disent. Ils ne l'acceptent pas, et nous ne l'acceptons pas. Et, si vous l'acceptez, si vous le passez, vous le passerez par la force, par la force du règlement, par la force du nombre et non avec la complaisance, et non plus avec l'implication et la participation de l'ensemble des forces vives québécoises, du Barreau, des juges et des citoyens du Québec.

Et, un jour, vous serez jugés pour ça et vous aurez à le regretter. Vous marchez sur les Québécois et, un jour, vous le payerez. Et voilà pourquoi, M. le Président, on leur demande de réfléchir, d'y penser à deux fois avant de déstabiliser la société, et de faire en sorte de revenir, peut-être lundi prochain, avec des amendements, et de respecter la volonté populaire, et la démocratie au Québec, et la justice au Québec en particulier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Maintenant, M. le député de Frontenac, vous avez un droit de réplique de cinq minutes. Alors, M. le député.


M. Roger Lefebvre (réplique)

M. Lefebvre: M. le Président, je vais tenter, en cinq minutes, de répondre aux arguments du ministre de la Justice qu'il nous a servis tout à l'heure. En commission parlementaire, il s'est fait un travail positif – je l'ai mentionné tout à l'heure, M. le Président – sauf que ça a pris un virage inattendu à un moment donné. Et la preuve de ce que je suis en train de dire – puis ça, c'est du jamais vu, ça, du jamais vu: des amendements ont été adoptés et proposés par l'opposition en commission parlementaire, puis le ministre, alors qu'on se retrouve à une autre étape ici, au salon bleu, les a fait disparaître. Incroyable, M. le Président! Incroyable!

Quand le bâtonnier du Québec va savoir ça, M. le Président, ça va s'ajouter à d'autres questions qu'il posera au premier ministre mardi prochain. Puis les collègues du ministre de la Justice, là, est-ce qu'ils saisissent bien ce qu'on vient de dire? Les amendements adoptés en commission parlementaire... puis le ministre, avec son seul et unique pouvoir d'Exécutif, là... C'est l'Exécutif qui a tassé le législatif. C'est grave, ça. C'est très grave. C'est le ministre de la Justice qui a fait ça, là. Le 11 décembre, c'est il y a deux jours, ça, le Barreau a dit au premier ministre: On veut rencontrer le ministre de la Justice pour trois raisons: le projet de loi n° 130, atteinte aux droits fondamentaux prévus à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne – ça, c'est l'appel, ça touche à l'appel, mais spécifiquement on en parle de l'appel un peu plus loin – processus de renouvellement du mandat des membres du tribunal.

(22 heures)

M. le Président, le Barreau a déjà indiqué publiquement qu'il croyait que le processus allait favoriser – ce n'est pas l'opposition qui dit ça – la nomination de nouveaux membres plutôt que la reconduction des membres compétents. Ça s'appelle du favoritisme. Le Barreau du Québec dit: Le projet n° 130 va permettre au ministre de la Justice de faire du favoritisme dans ses nominations. Ce n'est pas l'opposition qui dit ça. Il y a un autre mot pour ça, c'est le patronage. Puis c'est ça que le Barreau dit au ministre de la Justice: Attention, M. le premier ministre! C'est ce que le ministre de la Justice s'apprête à faire si on ne modifie pas le projet de loi n° 130.

M. le Président, le ministre de la Justice le sait très bien qu'il a considérablement diminué le droit d'appel. On a gardé l'appel pour le droit immobilier, pour le droit des bien nantis. Je vois Mme la députée de Sherbrooke qui baisse les yeux quand je dis ça, M. le Président. Le droit des petites gens: aide sociale, CSST, Régie des rentes, assurance automobile, est-ce que la députée de Sherbrooke sait qu'il n'y aura plus d'appel, M. le Président? On a gardé le droit d'appel pour les bien nantis, mais les petites gens, un gouvernement social-démocrate, M. le Président... Mensonge, purement et simplement, pas de la part du ministre: le projet de loi trahit la population du Québec, qui a fait confiance au premier ministre et à ceux et celles qui l'entourent. Je répète la demande que je fais au ministre de la Justice et à ses collègues, au premier ministre, et je me base encore une fois, M. le Président...

Vous me dites qu'il me reste à peine deux minutes, alors c'est le temps de lire deux ou trois phrases du Barreau du Québec. Le Barreau du Québec, en matière de justice, là, ce ne sont pas les maraîchers du Québec; ils ont des choses à dire, ils sont crédibles. Est-ce que le ministre de la Justice et le leader du gouvernement, député d'Anjou, tous les deux, là – ça semble être l'idée du leader – considèrent que le Barreau du Québec ne sont là que pour protéger leurs piastres? C'est grave de penser ça du Barreau du Québec. Le Barreau du Québec dit au premier ministre: «Nous jugeons inconcevable que le gouvernement force l'adoption d'une telle pièce législative qui constitue une réforme majeure de certaines de nos institutions.» Les institutions, ça «veut-u» dire quelque chose pour les gens d'en face? Le ministre de l'Environnement, là, dont les oncles et père sont d'éminents juristes dans la Beauce, qui ont toujours eu le respect des institutions, et de l'institution numéro un qu'est la justice, le ministre de l'Environnement, qui n'a pas dit un seul mot sur le projet de loi n° 130, ça ne lui dit rien, ça, les institutions?

Le Barreau du Québec – ça coïncide exactement avec la demande de l'opposition: «Où est l'urgence à adopter avant les Fêtes le projet de loi n° 130?» Motion d'ajournement du débat: qu'on permette au ministre d'aller réfléchir sur ses devoirs devant ce gouvernement qui en est un de protection des plus démunis; pas protéger ceux qui ont les poches bourrées d'argent, protéger les petites gens. J'espère, M. le Président, que, dans les quelques minutes qui vont venir avant le vote, le gouvernement va pouvoir réfléchir puis que le ministre de la Justice dira: J'ai compris, j'attends, puis je réfléchirai avec le Barreau du Québec et le premier ministre du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Le débat sur la motion d'ajournement étant complété, est-ce que la motion d'ajournement est adoptée?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur vote nominal. Voulez-vous appeler les députés? Nous allons suspendre quelques instants.

(22 h 4 – 22 h 8)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous reprenons nos travaux.


Mise aux voix

Alors, nous allons maintenant nous prononcer sur la motion d'ajournement qui nous a été déposée par le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition.

Que les députés qui sont en faveur de la motion d'ajournement du député de Frontenac veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Gautrin (Verdun), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Beaudet (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Laporte (Outremont).

Le Vice-Président (M. Pinard): Maintenant, que les députés qui sont contre la motion d'ajournement du député de Frontenac veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), M. Cliche (Vimont), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

(22 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui s'abstiennent? Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:11

Contre:30

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion d'ajournement du député de Frontenac est donc rejetée.


Reprise du débat sur l'adoption

Alors, l'Assemblée va maintenant reprendre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative. Alors, M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. J'ai écouté avec intérêt l'intervention du député de Louis-Hébert lorsqu'il répondait et je me posais une question: Qu'est-ce qu'il a pu faire à son leader pour qu'on le soumette à ce genre de torture? Qu'est-ce qu'il a pu faire à son leader pour être obligé de présenter ce projet de loi? Je ne le sais pas. Il devrait peut-être se poser des questions. Son leader a peut-être une dent particulière contre lui, il est un peu le bouc émissaire de ce gouvernement. Toujours est-il, M. le Président, que nous compatissons avec le problème qu'il a à vivre et la honte qu'il peut avoir de devoir présenter ce projet de loi.

Je vais intervenir sur un seul point: sur l'article 153. L'article 153 du projet de loi supprimait les appels pour l'ensemble des tribunaux administratifs. Nous avons néanmoins voté ce matin l'article 153.1. L'article 153.1... Et je comprends que le ministre avait, après l'ensemble des remarques que l'opposition avait faites, été plus ouvert à étendre un petit peu les mécanismes d'appel. Bien légèrement, mais il y avait déjà un petit pas, très petit, qui a été fait dans une modification à l'article 153 par l'amendement qui a été voté ce matin, où on permettait les appels dans des matières traitées par la section des affaires immobilières de même que celles rendues en matière de protection du territoire agricole.

Alors, M. le Président, quelqu'un qui ne connaîtrait pas bien le projet de loi pourrait se poser la question et dire: Est-ce que ça couvre beaucoup? Alors, je vous réfère, comme tout le monde, aux annexes. Alors, vous regardez les annexes, c'est très instructif, parce que, les annexes, ça vous donne l'ensemble des sujets couverts par le projet de loi.

Alors, tout ce qui est de la partie I – la partie I, c'est tout ce qui touche les affaires sociales – c'est non soumis à appel. Ce n'est pas rien, hein, ce n'est pas rien. Je vais vous le dire: Tout ce qui touche les affaires sociales, ça touche, comme le rappelait le député de Frontenac, en général les gens les plus pauvres et les plus démunis.

Les recours en matière de décisions concernant le droit à une allocation – ça, c'est l'allocation d'aide aux familles – ce n'est pas appelable; les recours formés en fonction de l'exercice des droits des personnes handicapées, pas de mécanisme d'appel. On continue. Les recours formés en vertu de la Loi sur la sécurité du revenu, ce n'est pas appelable. Tout ce qui touche les lois sociales, mais plus que ça, M. le Président, les recours de la protection des personnes atteintes de maladies mentales, ce n'est pas appelable. Les sous-sections sur les recours formés pour les fabricants et les grossistes en médicaments, ce n'est pas appelable. Les recours contre les décisions de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la RAMQ, ça touche tous les gens qui ont affaire avec la RAMQ, ce n'est pas appelable. Les recours formés en vertu de la loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, ce n'est pas appelable. Les recours de la loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en fonction de l'article 30, ce n'est toujours pas appelable.

Et on continue. C'est important que vous le sachiez, à quel point il manque réellement des possibilités d'appels. Les recours formés par des médecins, des dentistes ou des pharmaciens en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, ce n'est pas appelable. Et je peux continuer comme ça. Les sous-sections sur la Régie des rentes – et vous savez à quel point vous pouvez avoir des contestations à l'intérieur des prestations qui sont données aux gens – alors, la sous-section du Régime de rentes, ça, ce n'est pas appelable non plus. Les recours contre les décisions rendues lors d'une révision faite par le Régime des rentes, ce n'est pas appelable. Les recours contre les décisions concernant le taux de diminution de la capacité de travail – ça, c'est tout ce qui touche la CSST, des gens qui sont réellement en difficulté – ce n'est toujours pas appelable.

Et on continue, M. le Président. Le recours contre les décisions concernant le droit à une compensation concernant la Loi sur les accidents du travail – encore quelque chose qui va vous toucher, vous, chacun d'entre vous dans vos propres comtés – ce n'est pas appelable. Le recours contre les décisions concernant l'indemnisation des victimes d'immunisation, formé en vertu de l'article 16.5 de la Loi sur la protection de la santé publique, ce n'est pas appelable. Les recours contre les décisions en révision concernant les droits du réclamant à une prestation où le montant de celle-ci est formé en vertu de l'article 138 de la Loi sur l'aide et l'indemnisation, ce n'est toujours pas appelable. Tout ce qui touche la sous-section sur l'immigration, ce n'est toujours pas appelable. La sous-section de l'immigration contre les recours des décisions du ministre de l'Emploi et de l'Immigration: ce n'est toujours pas appelable.

En ce qui touche les lésions professionnelles, c'est encore intéressant de voir ça, c'est l'article 2, les lésions professionnelle; ça, c'est tous les gens qui, dans vos bureaux, vont venir lorsqu'ils n'auront pas d'accord avec une décision de la CSST... Absolument, M. le député de Frontenac. Les recours formés en vertu des articles 37.3 et 193 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, ce n'est toujours pas appelable. Par contre, je reconnais qu'il y a eu un petit pas fait par le ministre qui, malheureusement, doit évidemment continuer ce débat-là, la section sur l'évaluation foncière maintenant est soumise à la possibilité d'appel devant un tribunal, et il y a dans l'amendement un petit pas.

Je me demande, M. le Président, je me redemande pourquoi on ne permet pas l'appel dans tout ce qui touche les décisions des tribunaux administratifs. Ç'aurait été tellement simple, ç'aurait été tellement simple de supprimer l'article 153. Ç'aurait permis au Barreau d'être plus d'accord avec le projet de loi, ç'aurait permis à l'ensemble de nos concitoyens qui vont être touchés directement – et je vous en ai fait la liste tout à l'heure – par des décisions très concrètes des tribunaux administratifs, de pouvoir faire un appel.

Alors, permettez-moi de vous dire pourquoi, nous, on a l'air de se battre tellement ici autour des appels, je vais vous expliquer pourquoi. Parce qu'il y a une différence entre un commissaire dans un tribunal administratif, qui peut être, en général, un avocat, mais qui peut être aussi... Il y a un certain nombre de tribunaux administratifs où, sur le banc, on voit siéger des médecins, des travailleurs sociaux, des psychologues, des personnes qui sont autres que des juristes et qui vont avoir à rendre une décision. La différence qu'il y a dans un mécanisme d'appel, c'est qu'on fait appel devant un juge, et il y a une formation particulière, un mécanisme de sélection, une forme d'indépendance, une forme de permanence qu'il y a dans un juge, qu'on ne trouve pas nécessairement à l'intérieur des commissaires.

Je pourrais, M. le Président, si j'avais le temps, voir comment chacun des bancs... J'ai pris la peine de reprendre le projet de loi et de le regarder, partie par partie, comment les bancs sont formés. Vous remarquez que, dans la plupart des cas, les bancs... Par «bancs», j'entends le groupe de personnes qui doivent rendre jugement dans les tribunaux administratifs. Dans la plupart des cas, il y a un avocat ou un notaire, c'est-à-dire quelqu'un qui a une formation juridique; mais ces bancs, dans la majeure partie des cas, sont formés de trois personnes, avec d'autres personnes qui n'ont pas nécessairement une formation juridique. C'est là la clé essentiellement de nos inquiétudes, M. le Président.

(22 h 20)

Ça a l'air de dire qu'on parle, depuis un certain temps, qu'on reparle toujours sur le même point. On essaie de rentrer la même question: le principe des droits d'appel. Ce n'est quand même pas la fin du monde, bon Dieu! de parler...

Une voix: Les nominations.

M. Gautrin: Les nominations, je suis d'accord avec vous, M. le député de Frontenac. Mais les droits d'appel, c'était quelque chose d'extrêmement important. Le ministre a fait un petit pas. Et je comprends qu'on a fait un petit pas et je le reconnais. Dans les amendements qu'on a déposés aujourd'hui, il y a eu un petit pas pour un certain nombre de tribunaux, c'est-à-dire de sections des tribunaux administratifs, en ce qui touche l'évaluation foncière et en ce qui touche aussi la protection du territoire agricole.

Mais on ne touche pas la majeure partie, M. le Président, comprenez-moi bien, là, des sections des tribunaux administratifs qui vont avoir un rôle direct avec les petites gens, avec les plus démunis, avec ceux qui vont être en contestation de leurs prestations d'assurance-chômage, de leurs prestations de la sécurité du revenu, avec ceux qui vont être en contestation parce qu'ils ne seront pas d'accord avec le montant qui leur sera versé par la Régie des rentes du Québec, avec ceux qui ne seront pas d'accord parce que, par exemple, la CSST ne leur a pas donné les compensations auxquelles ils pensent avoir droit.

M. le Président, il y a absolument, de la part de ce gouvernement, un manque total de compassion envers les personnes les plus démunies, envers les petites gens, envers celles qui sont prises avec les tribunaux administratifs. Et je n'arrive pas à comprendre. Très honnêtement, M. le Président, je n'arrive pas à comprendre pourquoi ce gouvernement, ce ministre veut absolument maintenir, avec obstination, cet article 153. Je ne comprends pas. Je ne comprends pas, M. le Président. L'article 153 – et je vais résumer parce que vous me dites que mon temps est fini – est celui qui, pour moi, comme parlementaire, me pose le plus grand problème.

Et je termine là-dessus, M. le Président: un peu de compassion, un beau geste, M. le ministre; réglez donc le problème; permettez donc l'appel des décisions des tribunaux administratifs sur l'ensemble des décisions et non pas seulement sur quelques sections des tribunaux administratifs. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Alors, y a-t-il d'autres intervenants? Il n'y a pas d'autres intervenants. Alors, le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote nominal. Alors, que nous appelions les députés.

Une voix: Non, non.

Des voix: Non, non.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, non, mais... Arrêtez, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, j'aurais dû dire: Est-ce que votre droit de réplique... Je demandais les intervenants. Habituellement, quand il n'y a pas d'intervenants, je m'adresse au ministre pour sa réplique, je m'excuse. M. le ministre, si vous voulez prendre quelques minutes pour votre réplique.


M. Paul Bégin (réplique)

M. Bégin: Très bref, M. le Président. En fait, ce que j'aurais dit normalement en réplique, je l'ai dit tout à l'heure. Alors, je vais compléter avec ce que je voulais également mentionner, c'est-à-dire un grand merci à ceux et celles qui ont travaillé en commission parlementaire pour adopter ce projet de loi, de même que mes collègues qui ont patiemment assisté pendant des heures et des heures à des interventions du type que j'ai qualifié tout à l'heure et sur lesquelles je ne veux pas revenir. Je les remercie infiniment de leur collaboration, de leur patience et je leur dis un gros merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Là, je repose la question: Le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, est-il adopté?

Une voix: Vote nominal.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote nominal. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Je vous demanderais de reporter ce vote à lundi, à la période des affaires courantes.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le vote est reporté à lundi, dans le cadre des affaires courantes. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 46 du feuilleton.


Projet de loi n° 73


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 46, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor propose l'adoption du projet de loi n° 73, Loi concernant la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances et modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite. Y a-t-il des interventions? Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. Alors, j'ai le plaisir de vous informer que la commission a fait son travail et complété ses travaux sur le projet de loi n° 73 qui concerne la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, qu'on appelle la CARRA. En effet, la commission s'est réunie à plusieurs reprises, du 28 novembre au 4 décembre 1996, pour faire l'étude détaillée d'un projet de loi qui est particulièrement technique.

J'aimerais rappeler que ce projet de loi comporte trois volets. Il a pour objet de donner suite aux négociations intervenues entre le gouvernement et ses principaux partenaires syndicaux concernant le financement de la CARRA. Il a également pour objet de donner suite à certaines demandes formulées par des employés de niveau non syndicable, soit principalement le personnel d'encadrement des trois réseaux publics qui participent au Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, qu'on appelle le RREGOP. Enfin, il concerne certaines modifications à la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels afin d'harmoniser quelques dispositions de ce régime avec les règles qui découlent de la réforme de l'aide fiscale à la retraite.

En ce qui concerne le premier volet, la loi sur le RREGOP sera modifiée afin d'y préciser que les frais administratifs encourus par la CARRA seront dorénavant inclus dans le financement général des régimes de retraite qu'elle administre. Ainsi, pour l'année 1996-1997, sur un budget d'environ 27 400 000 $ attribué à l'administration des régimes de retraite, près de 10 000 000 $ seront, à compter du 1er avril 1996, à la charge des participants du RREGOP, le reste étant à la charge du gouvernement et des employeurs autonomes. Compte tenu des nouvelles modalités de financement de la CARRA, le projet de loi apporte certaines modifications à la structure de la CARRA, à ses pouvoirs et à ceux du comité de retraite et des autres comités.

Le second volet du projet de loi concerne les modifications qui donnent suite aux demandes formulées par les employés de niveau non syndicable qui participent au RREGOP. À ce sujet, il propose des modifications à la loi sur le RREGOP pour permettre au gouvernement de prévoir, par règlement, à l'égard de ses employés des dispositions particulières en matière de retraite. Pour concrétiser les distinctions qui existent actuellement dans la loi sur le RREGOP entre les deux groupes d'employés participant à ce régime, le projet de loi propose la constitution, au sein de la CARRA, d'un nouveau comité de retraite pour représenter les employés de niveau non syndicable participant au RREGOP. Ce nouveau comité de retraite bénéficiera des mêmes pouvoirs et devoirs que ceux du comité de retraite actuel, de même que des nouveaux pouvoirs et devoirs qui sont accordés à ce dernier en vertu du présent projet de loi.

Le dernier volet concerne des modifications à la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels afin d'harmoniser certaines de ses dispositions avec les règles qui découlent de la réforme fédérale de l'aide fiscale à l'épargne-retraite. Il s'agit notamment d'ajuster la formule pour établir la cotisation requise en vertu de ce régime et de prévoir une nouvelle formule de calcul de la rente de retraite.

Je voudrais souligner que le député de Verdun a manifesté, au cours des travaux de la commission du budget et de l'administration, son inquiétude quant à l'utilisation par le gouvernement d'une partie de la provision actuarielle de la caisse de retraite des employés participant au RREGOP à cet égard. Comme il a pu le réaliser lors des travaux, ce projet de loi n'a aucune incidence en ces matières.

(22 h 30)

Au cours des travaux de la commission, j'ai pu constater le souci du député de Verdun de s'assurer que les dispositions du projet de loi reflètent bien l'entente intervenue avec nos principaux partenaires syndicaux. Ces vérifications lui ont permis de se rendre compte de la conformité des dispositions du projet de loi avec celles de l'entente.


Amendement déposé

Par ailleurs, au cours de l'étude détaillée du projet de loi, plus particulièrement à l'étude de l'article 28 du projet, des craintes ont été formulées concernant la possibilité pour la CARRA d'engager tous les fonds dont elle dispose dans des titres ou autres véhicules de placement plus ou moins sûrs, et ainsi risquer de mettre en péril des sommes provenant des fonds des participants. Je propose donc aujourd'hui des modifications à cet article, modifications qui ont pour but de clarifier deux points: premièrement, la CARRA ne peut disposer que des sommes qui lui sont confiées pour sa propre administration; deuxièmement, la CARRA est limitée dans toutes ses actions à des placements de moins de un an. Ces placements peuvent être uniquement des dépôts à la Caisse de dépôt et placement du Québec, à une banque ou à une caisse d'épargne et de crédit ou des titres émis ou garantis par le gouvernement du Québec ou du Canada.

Pour terminer, M. le Président, je désire souligner que la plupart des modifications proposées par le présent projet de loi ont fait l'objet de négociations et d'ententes avec nos principaux partenaires syndicaux de même qu'avec les associations les plus représentatives du personnel d'encadrement, et c'est pourquoi il me fait plaisir d'en recommander l'adoption. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des amendements? Peut-être que vous pourriez, M. le leader adjoint du gouvernement, nous indiquer la suite.

M. Brassard: Oui. Bien, conformément à l'article 257, je fais motion pour envoyer le projet de loi n° 73 en commission plénière pour étude d'un amendement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Brassard: L'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée. Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour se constituer en commission plénière et étudier rapidement l'amendement qui est soumis par M. le ministre. Nous suspendons quelques minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 32)

(Reprise à 22 h 36)


Commission plénière


Étude de l'amendement du ministre

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier l'amendement soumis par M. le ministre. Alors, on vient de me remettre l'amendement et je le juge recevable. Si vous voulez, je m'en vais en faire la lecture et puis, après ça, vous pourrez faire quelques commentaires, de part et d'autre.

Alors, l'amendement se lit comme suit: À l'article 28, remplacer l'article 158.11, inséré par l'article 28 de ce projet, par le suivant:

«158.11 La Commission peut placer les sommes dont elle dispose pour son administration en vertu de la présente section:

«1° dans des dépôts à demande ou à échéance de moins de un an auprès de la Caisse de dépôt et placement du Québec, d'une banque ou d'une caisse d'épargne et de crédit;

«2° dans des titres à échéance de moins de un an émis ou garantis par le gouvernement du Québec ou du Canada.»

Alors, c'est l'amendement. Alors, M. le ministre, si vous avez quelques commentaires.

M. Léonard: Oui, M. le Président. Nous avons discuté de cet article en commission parlementaire. Notamment, sur ce plan, c'est le député de Crémazie qui a soulevé le point à l'effet de resserrer les pouvoirs de la CARRA en ce qui concerne la disposition ou le placement de sommes d'argent dont elle disposerait.

Il y avait deux considérations. L'une, que la CARRA disposait de fonds, qui provenaient d'employeurs, qui pouvaient être considérables et qu'il s'agissait, donc, de faire une distinction très nette avec les fonds qui lui provenaient des cotisants aux régimes de pension, aux différents régimes de pension, notamment le RREGOP qui est le plus important, mais les autres aussi, de sorte que la CARRA devait les placer à la Caisse de dépôt et placement qui est l'agent de la CARRA pour placer les sommes des cotisants aux régimes de pension. Alors, il fallait ne laisser aucune ambiguïté à l'effet que ces sommes devaient aller directement à la Caisse de dépôt et placement.

Deuxièmement, le député de Crémazie a aussi soulevé le point que les sommes dont la CARRA disposait pour son administration propre, interne devaient être placées dans des banques ou des institutions de toute sécurité, qu'elle pouvait récupérer ces sommes le plus facilement possible, qu'il s'agissait donc vraiment de sommes à court terme. Donc, de limiter le nombre des institutions, de bien spécifier la qualité des institutions dans lesquelles la CARRA pouvait placer ces fonds, puis, encore une fois, les fonds dont il s'agit, ce sont les fonds pour sa gestion interne.

Alors, cela explique l'amendement qu'il y a. C'est les quelques données que je voulais faire présentement.

Le Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, cet amendement résout un des problèmes, comme l'a rappelé le ministre d'ailleurs, qui avaient été soulevés par notre collègue le député de Crémazie qui s'inquiétait surtout sur le libellé. Dans l'ancien libellé, on parlait d'une institution financière inscrite à la Régie de l'assurance-dépôts du Québec et, pour lui, ce terme «institution financière» pouvait être tellement large que ça pouvait englober des institutions qui étaient, dans son esprit, des institutions à risque et que la protection de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec était éminemment valable pour les dépôts faits par les individus, mais non valable pour les montants qui étaient déposés par une institution comme la CARRA.

(22 h 40)

Le député de Crémazie, dont, je pense, on doit saluer la contribution importante, a insisté pour que ces points-là soient retirés des endroits où la CARRA pouvait déposer les fonds. Il nous a cité les exemples malheureux où certaines institutions garanties par l'assurance-dépôt avaient été amenées à devoir faire faillite, ce qui avait entraîné, disons, des pertes pour certains ministères ou institutions gouvernementales. Alors, dans ce sens-là, moi, je suis en faveur de l'amendement qui est déposé actuellement par le ministre. Ça permet de resserrer un peu les institutions dans lesquelles la CARRA peut déposer des fonds. Mais je tiens à préciser néanmoins que, ni de la part du ministre ni de la part de l'opposition, il n'y avait aucun doute sur la manière dont la CARRA aurait géré ces fonds, mais ça permet d'avoir à l'intérieur du projet de loi un resserrement quant à l'écriture. Et, dans ce cadre-là, M. le Président, nous allons nous proposer en faveur de l'amendement.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Alors, l'amendement présenté par le ministre est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, la commission a accompli son mandat et met fin à ses travaux. Et, pour permettre à la commission de se transformer en Assemblée et permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je remercie toutes les personnes qui ont participé, et celles qui ont à quitter, je les inviterais à le faire immédiatement. Alors, merci.

(Suspension de la séance à 22 h 42)

(Reprise à 22 h 43)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, j'inviterais Mme la députée de Sherbrooke à faire rapport de la commission plénière.

Mme Malavoy (présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié l'amendement proposé au projet de loi n° 73, Loi concernant la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances et modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous allons poursuivre le débat sur le projet de loi. M. le député de Verdun, je vous cède la parole.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, en effet, on a devant nous un projet de loi qui correspond au résultat d'une négociation entre les parties, et le travail de l'opposition en commission parlementaire a surtout été de s'assurer que le contenu du projet de loi correspondait bien à l'entente qui avait été négociée par les parties, ce qui, je crois, correspond au résultat de l'entente.

En effet, je dois dire que, dans le projet de loi, il n'y a pas les mécanismes qui permettent l'utilisation abusive des provisions actuarielles à l'intérieur du RREGOP. Je me permets quand même de faire une remarque: que, si jamais un projet de loi arrivait quant à l'utilisation abusive des provisions actuarielles du RREGOP, nous aurions des discussions qui seraient plus longues et un peu plus corsées que celles qu'on a actuellement dans l'adoption du projet de loi n° 73.

Je résumerais, comme le rappelait le ministre brièvement, que le projet de loi permet une harmonisation avec la loi fédérale pour le Régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, un certain nombre d'articles d'harmonisation. Deux autres éléments importants: d'une part, les frais administratifs, qui jusqu'à maintenant étaient assumés par le fonds consolidé, vont dorénavant être assumés – les frais administratifs de gestion du RREGOP – par les fonds de pension, ce qui va permettre une certaine économie au gouvernement; deuxième élément, on sépare réellement ce qu'on va appeler dans un langage courant les deux RREGOP. D'un côté, il y aura le RREGOP des employés syndiqués; de l'autre côté, le RREGOP des employés non syndiqués; et les mêmes mécanismes en termes de comité de retraite sont prévus à l'intérieur des deux régimes de rentes.

Alors, déjà, il y avait deux évaluations actuarielles à l'intérieur du RREGOP par rapport aux deux régimes de rentes. On a réellement, par le biais du projet de loi, concrétisé la séparation entre les deux régimes quant au mécanisme d'appel, quant au mécanisme de gestion des provisions actuarielles, quant à ce qu'on appelle les comités de retraite qui seront instaurés maintenant dans chacun des deux régimes de retraite.

M. le Président, brièvement, c'est le résultat d'une négociation. Ça entérine en quelque sorte, disons, la division entre les deux régimes de rentes et ça facilite, disons, la gestion des frais administratifs, l'imputation des frais administratifs du régime de pensions à l'heure actuelle, du RREGOP, et de la gestion de la CARRA. Alors, M. le Président, nous sommes en faveur du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le ministre, pour une réplique, s'il vous plaît. M. le ministre.


M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: M. le Président, quelques mots pour remercier nos partenaires syndicaux, avec lesquels nous avons négocié le contenu de ce projet de loi qui fait en sorte, comme on vient de le dire, que les frais administratifs sont partagés maintenant entre l'employeur, qui est le gouvernement, et les cotisants aux régimes, les bénéficiaires. Je veux remercier aussi mes fonctionnaires qui ont travaillé à ce projet de loi et certains de mes fonctionnaires qui ont mené aussi la négociation avec les partenaires syndicaux. Je remercie les membres de la commission et de l'opposition qui, je pense, je crois comprendre, va voter... Donc, c'est un projet de loi que nous allons adopter unanimement et qui permet au gouvernement de récupérer des sommes importantes, de l'ordre de près de 10 000 000 $ par année. Alors, merci beaucoup, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Le projet de loi n° 73, Loi concernant la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances et modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 8.


Projet de loi n° 82


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 8, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 82, Loi reportant l'élection générale de 1996 à la Ville de La Baie. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi bien simple, son titre est presque aussi long que les articles du projet lui-même, puisqu'il s'agit tout simplement de prendre les dispositions pour que l'élection générale prévue en novembre 1996 puisse se tenir en novembre 1997 à la ville de La Baie.

M. le Président, on se souviendra donc des pluies diluviennes des 19, 20 et 21 juillet dans la région du Saguenay. Cela avait eu des effets assez désastreux sur la ville de La Baie en particulier. Comme un certain nombre de quartiers ont été déstructurés, cela a amené le greffier et directeur des élections, le président des élections de la ville de La Baie à prendre contact avec le Directeur général des élections du Québec et le ministère des Affaires municipales. Sur la recommandation du Directeur général des élections, après avoir constaté qu'il était impossible, techniquement, de dresser des listes compte tenu de la configuration – nous devrions dire «la configuration défigurée» – d'un certain nombre de quartiers dans la ville de La Baie, M. le Président, il a été convenu avec les autorités municipales, sur demande formelle du conseil municipal, de reporter de un an la tenue d'élections générales pour un terme régulier à la ville de La Baie.

(22 h 50)

Alors, les cinq articles de ce projet de loi, M. le Président, visent tout simplement à prendre la décision et, dans ce contexte, à amender la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités pour que l'élection générale à la ville de La Baie, pour tous les membres du conseil à la mairie, se tiennent le 4 novembre, en novembre 1997, au moment où nous aurons rassemblé en quelque sorte toutes les conditions pour que puissent être redessinés les quartiers et redessinées aussi les listes des électeurs par quartier. Nous nous retrouverons dans une situation plus normale pour tenir cette élection. Voilà, M. le Président, ce qu'il en retourne de ce projet de loi n° 82.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Tous se rappelleront avec beaucoup d'émotion les images, évidemment, qu'on aura vues l'été dernier concernant le déluge qui s'est abattu sur le Saguenay surtout – le Lac-Saint-Jean aussi, mais surtout le Saguenay – et les nombreux dégâts, évidemment, qu'on a pu constater. J'ai eu – je ne peux pas dire que ça a été un plaisir – l'occasion d'aller sur place et de constater l'état dans lequel s'est retrouvée plus particulièrement la ville de La Baie.

Je vous signale que, lorsqu'il y a eu une proposition de reporter l'élection générale de la ville de La Baie de 1996 à 1997, on ne pouvait pas s'opposer à ça. Il y a, je pense, un tiers de la ville qui n'existe plus. Je n'avais jamais eu l'occasion d'aller à ville de La Baie, donc je ne pouvais pas m'identifier dans cette ville-là, mais, lorsqu'on circulait, le peu d'endroits où c'était possible de le faire dans la semaine du 19 juillet, c'était très clair, là, que c'était absolument impossible d'aller de l'avant avec cette élection-là.

Donc, M. le Président, nous donnons notre approbation à ce projet de loi et toute notre collaboration pour l'adopter le plus rapidement possible et concrétiser d'ailleurs après le fait, parce que l'élection aurait dû avoir lieu en novembre, souhaiter au maire Richard... peut-être se reportera-t-il candidat, on n'en sait rien, mais certainement féliciter toute son équipe. J'en profite pour le dire ici, parce que ça n'a pas été une mince tâche de reconstituer les quartiers, de gérer les centaines, si ce n'est les milliers de dossiers qu'ils ont eu à gérer depuis ce temps-là, la patience du conseil municipal, des employés municipaux, le temps que ces gens-là ont mis à la disposition des gens, gratuitement, là. Quand on est maire et conseiller d'une municipalité, on s'attend à donner du temps, mais ils ne s'attendaient certainement pas, le 18 juillet au soir, à passer matin, midi et soir, jusqu'à maintenant, là, à travailler d'arrache-pied pour leurs concitoyens. M. le Président, nous sommes d'accord avec ce projet de loi et nous voterons en conséquence.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. M. le ministre, ça va? Le principe du projet de loi n° 82, Loi reportant l'élection générale de 1996 à la Ville de La Baie, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Brassard: M. le Président, je ferais motion pour déférer ce projet de loi à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Je vous demanderais d'appeler l'article 9.


Projet de loi n° 83


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 9, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, le projet de loi n° 83, modifiant donc la Loi sur les cités et villes puis le Code municipal, vise à donner suite aux différents comités de travail que nous avons avec les Unions municipales depuis quelques années en vue d'en arriver à un certain nombre d'allégements pour faciliter la tâche aux municipalités.

Alors, nous avons donc un comité de travail – c'est une entente que nous avons avec les Unions municipales – et nous leur avons demandé, il y a bientôt deux ans, de nous dresser toute la liste des allégements ou des contrôles qu'ils souhaitaient voir diminués pour responsabiliser davantage les municipalités, leur donner de l'oxygène, un maximum de marge de manoeuvre pour un certain nombre de gestes qui peuvent apparaître, dans le contexte de 1996, un peu bureaucratiques et qui ne permettent pas d'exercer la pleine responsabilité au niveau du gouvernement local, du gouvernement municipal.

Alors, c'est un ensemble, donc, d'allégements que nous présentons à l'intérieur de ce projet de loi n° 83. Ce projet de loi, M. le Président, va nous permettre également d'apporter un certain nombre de modifications aux lois municipales, tout comme nous allons aussi être appelés, M. le Président, à donner, pour les communautés urbaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais, les suites du projet de loi n° 24, qui est devenu la loi n° 24 que nous avons adoptée en juin dernier, un certain nombre d'allégements qu'on va aussi, donc, transporter en quelque sorte dans les communautés urbaines du Québec dans quelques minutes, je le souhaite vivement.

M. le Président, tous ces allégements présentés dans le projet de loi n° 83 visent d'abord la procédure référendaire, à alléger, changer les règles relatives à cette procédure quant aux délais à l'intérieur desquels certains actes doivent être faits. Nous voulons simplifier également la procédure de publication de certains avis ou règlements. Nous avions déjà abordé, M. le Président, les modifications, en juin dernier, pour permettre que les règlements de zonage, les règlements d'urbanisme puissent se faire, que les modifications puissent se réaliser avec un minimum de dépenses, un maximum d'information et un maximum de simplicité dans les municipalités.

Il avait été convenu avec l'opposition et les Unions municipales, au moment de l'adoption du projet de loi n° 22, au mois de juin dernier, que nous entreprendrions, que nous réaliserions une tournée d'échanges à travers le Québec avec ceux et celles qui appliquent ces règlements à l'égard de l'urbanisme et des modifications. Suite à cette tournée d'information que nous avons recueillie, il nous est apparu qu'il y avait deux petits irritants, en termes de délais, qu'il nous fallait peut-être, encore une fois, modifier pour nous assurer que, vraiment, nous étions en termes d'allégement et non pas de complexification d'un processus déjà, je dois le dire, assez compliqué pour le citoyen ordinaire lorsqu'on a à modifier un règlement d'urbanisme et que nous devons, à l'intérieur de ces règlements-là, par exemple, faire appel à cette procédure, à une procédure référendaire. Et nous voulons alléger cette procédure.

Nous voulons également modifier la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités pour permettre l'essai de nouveaux mécanismes de votation. En particulier, nous voulons faire l'essai d'un nouveau mécanisme de votation, tel que ça a été fait à l'élection générale de novembre 1995, à la ville de Hull. Lors de cette élection, M. le Président, les citoyens ont exercé leur droit de vote en utilisant des appareils informatisés, appelés des urnes électroniques. Conformément à la loi, le président de cette élection a transmis au ministre, ainsi qu'au Directeur général des élections, un rapport d'évaluation très favorable. Alors, le projet de loi n° 83 inclut des dispositions permettant à toute municipalité de conclure une entente avec le ministre des Affaires municipales et le Directeur général des élections afin de faire l'essai de nouveaux mécanismes de votation.

Alors, le processus qui a été utilisé à Hull, ça a été très fructueux, on a eu un rapport très positif de l'utilisation de ces urnes électroniques. On est à la veille de tourner... de changer de millénaire, M. le Président; peut-être qu'on pourrait aussi adapter nos modes de votation, sortir du papier un peu et «internatiser» un peu notre mode de votation. Alors, comme ça a été un succès après expérimentation, on pourra le faire, mais par entente avec le ministre des Affaires municipales et le Directeur général des élections.

(23 heures)

Une autre modification qui est apportée en termes d'allégement, M. le Président, c'est à l'égard de l'inspection des aliments. Nous avons, le 11 octobre 1995, signé une entente avec les Unions municipales à l'égard d'un certain nombre d'objets, de programmes que nous souhaitions pouvoir décentraliser au Québec, après entente, après examen et entente avec les Unions municipales. Or, nous avons examiné toutes ces questions, ces programmes et, à l'égard de l'inspection des aliments, nous avions prévu, donc, la possibilité que nous puissions déléguer aux municipalités l'inspection des aliments. Il s'est avéré que, dans un très grand nombre de cas, on ne pouvait permettre de réaliser cela pour les municipalités, compte tenu du faible volume de ces municipalités. On permettra donc aux municipalités, qui ont déjà de tels services, de les extensionner; ça va leur coûter moins cher, compte tenu qu'elles ont déjà ce service-là, et ça va permettre de le rendre, ce service, moins cher pour le gouvernement du Québec et pour les autres municipalités.

On modifie également, M. le Président, la Loi sur la Société d'habitation du Québec. On a des programmes de revitalisation de vieux quartiers et les municipalités sont appelées à fournir une partie des argents pour la rénovation des vieux quartiers. Elles n'ont pas les pouvoirs habilitants, les municipalités, on va les leur donner par des modifications à ce projet de loi.

On va également modifier la loi pour modifier certaines dispositions de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour encore faciliter les modifications aux règlements de zonage et aux règlements municipaux d'urbanisme. On va également en profiter pour régulariser un certain nombre de situations relatives aux membres des conseils des villages nordiques et du conseil d'administration régional Kativik et apporter des ajustements pour régulariser la situation en termes de rémunération pour le président de l'Administration régionale Kativik.

M. le Président, le projet de loi, finalement, va abolir deux lois, va abroger deux lois: la Loi sur les concessions municipales et la Loi sur la contribution municipale à la construction de chemins. On va étudier tout cela dans un très grand détail en commission parlementaire. Nous allons pouvoir rendre la vie plus facile aux municipalités et nous souhaitons que nous puissions le faire encore davantage au cours des prochaines semaines et des prochains mois par d'autres allégements que nous pourrions apporter, puisque nous pensons qu'au niveau de l'administration locale on peut faire bien davantage au niveau des responsabilités, mais nous devons aussi leur faciliter la tâche, parce que nous pensons que les municipalités peuvent en assumer davantage dans un cadre normatif acceptable. Voilà l'objet du projet de loi n° 83, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et de nombreuses autres dispositions législatives.

M. le Président, en principe, ce projet de loi, qui amène de nombreux allégements de contrôles ministériels, on est d'accord avec. Je pense que quand on considère que ça fait déjà plusieurs lois qui amènent ces allégements-là de contrôles ministériels... d'ailleurs, c'est sous le Parti libéral du Québec qu'on avait commencé, par le projet de loi 29, je pense; on a continué par la suite avec 68 et 24.

Je vous dirais, par contre, mon étonnement de voir arriver ce projet-là sur la table un peu à minuit moins cinq. Vous savez comme moi, M. le Président, que, quand je dis «minuit moins cinq», je ne fais pas référence à l'heure de ce soir, mais dans le temps, quand on sait que les projets de loi, normalement, doivent être déposés avant le 15 novembre, si le gouvernement souhaite les voir adopter par l'Assemblée nationale.

C'est un projet de loi qui comporte, comme je l'ai dit tout à l'heure, de nombreux articles, 82, mais il y en a là-dedans qui sont de concordance avec la Loi sur les cités et villes, le Code municipal et d'autres dispositions.

M. le Président, j'aimerais vous ramener au mois de juin dernier, lorsque le gouvernement a déposé son projet de loi n° 22, dans lequel on retrouvait l'article 55. Je ne ferai pas toute l'argumentation et un long discours là-dessus, mais on avait dû voter contre le projet de loi n° 22, qui amendait la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, parce que se retrouvait dans cette loi-là un article, qui était l'article 55, qui modifiait de fond en comble toute la mécanique de consultation publique pour les amendements aux règlements de zonage. J'ai reconnu en cette Chambre que le ministre nous avait permis de faire un long débat et un débat qui nous avait permis de parler de transparence et de démocratie, mais il y avait beaucoup de questionnement sur cet article-là, et même, à l'occasion, j'ai relu certaines notes que j'avais prises à l'époque sur le libellé de certains articles.

Le ministre s'était engagé, puisqu'il y avait quand même un changement majeur dans cette procédure de consultation publique en ce qui regardait les amendements aux règlements de zonage, à ce que les municipalités puissent être bien informées de cette procédure-là et s'était aussi engagé à ce que cet article-là spécifiquement n'entre pas en vigueur avant le 1er novembre 1996. C'est ce qui s'est passé, parole respectée.

Or, on retrouve, M. le Président, dans les premiers articles, déjà, un mois à peine après l'entrée en vigueur de cet article-là, des amendements à certains articles. Ce qui m'amène à vous faire les commentaires suivants. Je sais que les lois ne sont pas faites... ne doivent pas être lues nécessairement par du monde ordinaire comme moi. C'est censé être interprété par des avocats, par les juristes, ils sont censés bien comprendre les articles de loi et, évidemment, leur application. Mais ces articles-là étaient tellement compliqués, prêtaient tellement à confusion et à interprétation différente qu'on a jugé opportun, et c'est de l'avis de nombreuses personnes qui gagnent leur vie, si vous voulez, avec les lois municipales, qui ont porté, évidemment, à l'attention du ministre et du ministère cette problématique qui fait en sorte que les sept ou huit premiers articles concernent justement des amendements...

Des voix: ...

Mme Delisle: Je ne sais pas si le ministre responsable de la région de Québec est intéressé par les amendements au règlement de zonage, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, excusez, Mme la députée de Jean-Talon. Je vous invite, s'il vous plaît, à... Je comprends qu'il peut y avoir des conversations à voix basse, mais, quand on vous entend du fauteuil, ça commence à être un peu trop haut. Alors, je vous céderais la parole, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, une mise en garde surtout à l'égard de la rédaction de ces lois-là. Est-ce que c'est parce qu'elles sont faites, elles sont rédigées rapidement? Mais on dirait que plus ça va, plus il est difficile de les interpréter. Et quand ça vient de gens dont c'est le métier de faire ça, en dehors du ministère, bien, moi, je pense qu'il faut commencer à se poser de sérieuses questions là-dessus. Alors, on n'est pas contre les amendements qui sont proposés évidemment, puisqu'ils clarifient la démarche. Donc, on sera d'accord avec ces articles-là même si on était contre la démarche à l'époque.

Certains articles, M. le Président, permettent aux municipalités de céder ou louer leur expertise et leur savoir-faire dans des domaines de leur compétence ainsi que tout matériel permettant d'exploiter ce savoir-faire ou des données concernant le territoire. Une application concrète d'un de ces articles, à titre d'exemple, est le projet de géomatique pour les villes de Longueuil et de Sherbrooke.

Certains autres articles habilitent les municipalités et les communautés urbaines à conclure une entente en matière d'inspection des aliments avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et avec une autre municipalité. Mon seul commentaire à ce moment-ci: je sais que c'était une disposition qui se retrouvait dans l'entente qui avait été signée par le ministre qui a précédé l'actuel ministre des Affaires municipales, donc le député de Joliette. C'est une entente qui avait été signée entre le ministre des Affaires municipales et les unions municipales le 11 octobre 1995. Je constate que le ministre des Affaires municipales donne donc suite à cette promesse, à cet engagement auquel il s'était lié par le biais de cette entente-là. Je me questionne simplement non pas sur la pertinence de décentraliser mais davantage sur le fait suivant: Y aura-t-il la ressource financière qui accompagnera cette décentralisation ou bien est-ce qu'on ne fait que donner le pouvoir habilitant à ces organismes municipaux ou à ces municipalités sans même leur transférer les fonds nécessaires avec cette nouvelle responsabilité que serait l'inspection d'aliments?

D'autres articles, M. le Président, retiendront notre attention. Je n'ai pas l'intention de reprendre le projet de loi article par article. La seule chose que je dirais, c'est qu'il y a effectivement... Le ministre a mentionné qu'il y avait de nombreuses demandes qui avaient été faites par les deux unions municipales à la Table Québec-municipalités et que ce projet de loi là faisait suite à ces nombreuses demandes. Je suis obligée de vous dire, M. le Président, que toutes les demandes ne sont pas là. Il y en a même qui sont là qui n'ont pas été demandées. Il faudra s'informer auprès des unions, voir si elles sont d'accord avec certaines dispositions qu'on retrouve dans le projet de loi. Mais je vous dirais qu'en général, à moins qu'il y ait des informations qui nous arrivent ou des précisions qui contrediraient ce que je viens de vous dire ce soir, en principe, M. le Président, nous sommes d'accord avec le projet de loi n° 83.

(23 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Y a-t-il d'autres intervenants? Il y a possibilité de réplique du ministre si... Non? Vous n'en avez pas aucune? Alors, pas de réplique, c'est la belle unanimité.


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Brassard: M. le Président, je voudrais faire motion pour déférer le projet de loi n° 83 à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Oui. Alors, je vous demanderais d'appeler l'article 45. Ça va?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, monsieur...

M. Brassard: On peut suspendre quelques minutes pour...

M. Lefebvre: Non. M. le Président...

M. Brassard: Non? Ça va?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader...

M. Lefebvre: ...on aura peut-être besoin de quelques minutes après l'intervention du ministre. Mais, pour le moment...

M. Brassard: Alors, l'article...

M. Lefebvre: ...si la motion est appelée, ça va, de notre côté, pour le moment, M. le Président.

M. Brassard: L'article 45.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. L'article 45, vous avez bien dit? L'article 45.


Projet de loi n° 72


Adoption

À l'article 45, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi n° 72, Loi modifiant les lois constitutives des communautés urbaines et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, donc, nous en serions à la dernière étape avant l'adoption du projet de loi n° 72 modifiant les lois constitutives des communautés urbaines du Québec, la Communauté urbaine de Québec, la Communauté urbaine de Montréal et la Communauté urbaine de l'Outaouais.

Bon, M. le Président, on ne peut pas répéter 12 fois la même chose puisque les objets de discussion ont fondamentalement, dans ce projet de loi, d'abord été adoptés en juin dernier pour modifier la loi des cités et villes et le Code municipal pour s'appliquer à l'ensemble des municipalités du Québec. Ce pas étant fait, maintenant on franchit l'autre pas. On va rendre ces dispositions et ces allégements possibles pour la Communauté urbaine de l'Outaouais, la Communauté urbaine de Montréal et la Communauté urbaine de Québec et on va en profiter, bien sûr, pour alléger un certain nombre de dispositions supplémentaires que nous n'avions point besoin de toucher pour les municipalités, puisqu'il s'agit de dispositions qui sont propres aux communautés urbaines.

On va même en profiter, M. le Président, pour en faire un petit peu plus, un petit coup supplémentaire pour la Communauté urbaine de Québec. Certaines dispositions sont d'ordre technique et administratif, mais nous allons surtout permettre à la Communauté urbaine de Québec de disposer de nouveaux pouvoirs, en fait, pour promulguer des règlements, adopter un règlement pour mettre en oeuvre un programme de protection de l'environnement et de conservation des ressources. On va également autoriser la Communauté urbaine de Québec à exploiter un établissement de mise en valeur des matières résiduelles et établir des catégories de telles matières parmi lesquelles la Communauté pourra déterminer celles qui peuvent être mises en valeur ou éliminées. Ça va nous permettre de franchir de nouveaux pas non seulement au niveau de la récupération, mais du recyclage.

Finalement, on va permettre à la Communauté de Québec et à celle de Montréal également et de l'Outaouais non seulement d'avoir la possibilité de faire des pistes cyclables, mais également des bandes cyclables, M. le Président. C'est une distinction bien fine, mais ça va améliorer sensiblement les responsabilités des communautés urbaines.

On va surtout, aussi, rendre possible pour les communautés urbaines et les sociétés qui dépendent de ces communautés... la possibilité d'utiliser aussi les dispositions législatives en vue d'en arriver à la dématérialisation des titres financiers. C'est une opération, M. le Président, qui va s'opérationaliser au cours des prochaines années avec l'adoption d'un règlement. Tout l'appareil législatif, tout l'appareillage législatif des dispositions habilitantes va maintenant être possible pour les communautés urbaines, les sociétés de transport et autres types de sociétés.

Il nous restera à adopter le règlement pour faire en sorte que les transactions à l'égard des obligations et des titres financiers des municipalités puissent se faire de façon complètement électronique. Cette dématérialisation des titres municipaux, ça va amener des économies d'au-delà de 10 000 000 $, M. le Président, pour l'ensemble des municipalités du Québec et, nous pensons, aussi une augmentation de l'efficacité pour l'émission des titres financiers des municipalités.

M. le Président, à cette étape-ci, je crois, de notre processus, quant à moi, on pourrait conclure et nous serions prêts à l'adoption du principe du projet de loi n° 72. Cependant, à cette étape-ci, nous pensons que nous pourrions déposer des amendements au projet de loi qui a été proposé. Je déposerais trois amendements au projet de loi n° 72, des amendements qui visent, dans le cadre de la Communauté urbaine de Montréal, à modifier la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal et à modifier également la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport. Ces modifications, ces amendements visent tout simplement à régulariser une situation pour que la Communauté urbaine de Montréal puisse avoir les dispositions habilitantes pour verser à l'Agence métropolitaine de transport les quotes-parts payées par les municipalités via la Communauté urbaine de Montréal, ce qui est impossible actuellement et qui simplifierait de beaucoup la tâche, puisque ces pouvoirs habilitants existent déjà à la Communauté urbaine pour payer des quotes-parts à la STCUM.


Amendements déposés

Maintenant, on voudrait que, en vertu de la loi qui a été adoptée, elle puisse le faire directement à l'Agence métropolitaine de transport, et c'est pourquoi, à cette étape-ci de l'adoption du projet de loi, je déposerais ces amendements. Et, s'il agrée à l'opposition, nous pourrions nous transformer en comité plénier, si telle est la procédure, et que nous adoptions ces amendements avant de procéder à l'adoption finale du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, nous devons nous... Alors, M. le leader adjoint...

M. Brassard: ...suspendre quelques minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...du gouvernement.

M. Brassard: Je vous demanderais de suspendre quelques minutes, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint...

M. Lefebvre: Ça va, là?

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. M. le leader adjoint du gouvernement allait demander à ce que l'Assemblée se transforme en commission, tel que le suggérait le ministre des Affaires municipales. On est prêt à y aller, dans ce processus-là, de notre côté. On n'a pas besoin du temps que j'avais envie de...

M. Brassard: Ah bon!

M. Lefebvre: ...vous demander il y a quelques minutes.

M. Brassard: Ah bon! Très bien. Alors, dans ce cas-là, M. le Président, je ferais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): D'abord, vous référez...

M. Brassard: Oui, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...à la commission plénière? Oui?

M. Brassard: Oui. Bien sûr. Bien sûr.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée?

Une voix: La première motion est adoptée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Et la deuxième?

M. Brassard: Et la deuxième, que l'Assemblée se transforme en comité plénier.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, je suspends quelques minutes. Nous allons nous transformer en commission plénière pour étudier les amendements de M. le ministre.

(Suspension de la séance à 23 h 18)

(Reprise à 23 h 21)


Commission plénière


Étude des amendements du ministre

M. Brouillet (président de la commission plénière): Alors, conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier les amendements proposés par M. le ministre des Affaires municipales au projet de loi n° 72. Alors, je m'en vais vous lire le premier amendement et, après, vous pourrez procéder aux commentaires, de part et d'autre, et nous procéderons ainsi pour les autres amendements.

Alors, le premier amendement. Le projet de loi n° 72 est amendé par l'insertion, après l'article 34, du suivant:

34.1 L'article 306 de cette loi, modifié par l'article 545 du chapitre II des lois de 1996, est de nouveau modifié par l'addition, à la fin, de l'alinéa suivant:

«Il en est de même pour la dépense qu'effectue la Communauté, en payant la somme prévue à l'article 73.1 de la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport et modifiant diverses dispositions législatives (1995, chapitre 65). La répartition de cette dépense est assimilée à celle du déficit d'exploitation de la société.» Fin de l'amendement.

Alors, M. le ministre, vos quelques commentaires.

M. Trudel: Bon, alors, M. le Président, l'amendement est assez simple. Donc, tout l'objet des trois amendements que nous allons déposer, ça vise, là, simplement, à permettre à la Communauté urbaine de Montréal de recevoir et de verser les quote-parts des municipalités pour les fins de financement de l'Agence métropolitaine de transport. Alors, ce qu'on fait, c'est que déjà la Communauté urbaine est habilitée à un certain nombre de pouvoirs qui lui sont conférés, en particulier, en vertu de l'article 306 de sa loi constitutive, ce qui lui permet, donc, au niveau du paiement des déficits d'exploitation de la Société, la STCUM par exemple, de payer et de répartir les charges suivant le potentiel fiscal qui est alors considéré, et tel que c'est fixé à l'article 261.7.

Alors, considérant donc cette situation au niveau du potentiel fiscal, ce que nous allons permettre, c'est de prendre la même base de calcul de financement pour chacune des municipalités; ça va permettre d'établir la quote-part. Tout cela parviendra donc à la Communauté urbaine de Montréal et, ce faisant, la Communauté urbaine pourra, je dirais, enfin, verser, avec cette technicalité, le financement nécessaire pour les opérations et tout le travail prévu à la loi constitutive de la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport, et elle pourra opérer régulièrement. Alors, voilà les explications les plus simples que je peux donner sur cet article 34.1, qui va modifier l'article 306 de la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal, M. le Président, et qui va s'ajouter, donc, aux autres articles que nous avons modifiés par le projet de loi n° 72.

Le Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Bon, merci, M. le Président. Question de sémantique un peu: Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle on utilise le mot «dépense» plutôt que le mot «paiement»? On retrouve le mot «paiement», souvent, dans certains articles de loi. Il me semble que le mot «dépense», c'est un mot qu'on voit moins souvent. Je veux juste savoir s'il y a une différence entre les deux ou pas.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

Mme Delisle: Est-ce qu'il y a une distinction à faire ou c'est juste l'utilisation de ce terme-là plus qu'un autre?

M. Trudel: Écoutez, il n'y a pas de particularité, sauf que, comme c'est déjà prévu dans le premier élément de 306 de la loi actuelle – je pense que c'est «dépense», 306 – et dans la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport... Non, mais, dans la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport, on va parler de dépenses...

Le Président (M. Brouillet): ...pour payer...

Mme Delisle: Parfait.

M. Trudel: ...de dépenses d'immobilisation ou de dotation d'un fonds d'immobilisation. Alors, pour ces dépenses-là, on accumule le fonds ou on reçoit les argents et on les transmet à l'Agence métropolitaine de transport pour ses dépenses.

Mme Delisle: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Alors, cet amendement est adopté?

Mme Delisle: Adopté, oui.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le deuxième amendement présenté par M. le ministre se lit comme suit: Le projet de loi n° 72 est amendé par l'insertion, après l'article 101, de ce qui suit:

Loi sur l'Agence métropolitaine de transport et modifiant diverses dispositions législatives.

101.1. La Loi sur l'Agence métropolitaine de transport et modifiant diverses dispositions législatives (1995, ch. 65) est modifiée par l'insertion, après l'article 73, du suivant:

«73.1 Les municipalités dont le territoire est compris dans celui de la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal sont dispensées de verser les sommes prévues aux articles 70 et 73. Cette Communauté doit, selon les modalités de versement prescrites, le cas échéant, en vertu du deuxième alinéa de l'article 70, payer à l'Agence une somme égale au total de celles que ces municipalités sont dispensées de verser.» Fin de l'amendement. M. le ministre.

M. Trudel: Vous voyez, M. le Président, l'amendement est assez simple. Puisque c'est la Communauté urbaine de Montréal qui fera le paiement à l'Agence métropolitaine de transport, bien, il faut soustraire cette obligation, évidemment, pour la municipalité participante. Alors, la négative et ensuite la positive, pour en arriver à ce que le geste soit posé.

Le Président (M. Brouillet): Alors, cet amendement est adopté?

Mme Delisle: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le troisième amendement présenté par M. le ministre se lit comme suit:

Le projet de loi n° 72 est amendé par l'insertion, après l'article 102, du suivant:

«102.1 La Communauté urbaine de Montréal peut, pour financer tout ou partie de la somme qu'elle doit verser pour l'exercice financier municipal de 1996, en vertu de l'article 73.1 de la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport et modifiant diverses dispositions législatives édicté par l'article 101.1 de la présente loi, utiliser tout surplus visé à l'article 217 de la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal. Seule la partie de la dépense de la Communauté qui n'est pas financée au moyen d'un surplus, le cas échéant, est alors visée par le deuxième alinéa de l'article 306 de la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal édicté par l'article 34.1 de la présente loi.» Fin de l'amendement. M. le ministre.

M. Trudel: Alors, l'amendement parle de lui-même, M. le Président. C'est pour le paiement à l'Agence métropolitaine de Transport. On pourra aussi utiliser les surplus de l'année 1996 pour l'exercice financier 1996 pour payer, donc, le montant qui est dû à l'Agence métropolitaine de transport. On comprendra que c'était l'ajustement, en termes financiers, par rapport au flux financier, mais que, quand il y a des surplus, on puisse les utiliser, puisque la Communauté urbaine, évidemment, ne tire ses revenus que des municipalités participantes et que, si, pour les dépenses suite aux quote-parts ou aux différentes parts établies pour tel motif précis, il y a des résidus, il y a des surplus, bien, évidemment, on peut les utiliser pour d'autres paiements qui impliquent des municipalités ou les quote-parts des municipalités. Alors, c'est tout simplement pour leur permettre d'utiliser, tel qu'ils l'ont demandé, les surplus de l'exercice financier 1996 pour payer, donc, les différentes parts à l'Agence métropolitaine de transport.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

(23 h 30)

Mme Delisle: M. le Président, j'aimerais qu'on m'explique comment est-ce qu'on peut permettre – et je ne suis pas contre du tout cet article-là – à la Communauté urbaine d'utiliser une partie de son surplus pour payer sa quote-part à l'Agence métropolitaine de transport, alors qu'on refuse à la Communauté urbaine de Québec d'utiliser une partie de son surplus pour l'affecter au fonds de roulement. M. le Président, c'est un débat qu'on a eu en commission parlementaire. Vous serez sans doute intéressé à savoir qu'il y avait une demande qui avait été faite par la Communauté urbaine de Québec qui a le droit, en vertu de sa charte, de créer un fonds de roulement, ce qui a été fait, mais qui, pour y contribuer, doit emprunter plutôt que d'y affecter une partie de son surplus.

Alors, ce n'est pas en boutade que je fais ça, M. le ministre, mais le lien, la petite lumière s'est allumée dans ma tête, puis je me demandais pourquoi ça pouvait se faire dans ce cas-ci. Je comprends qu'on ne parle pas d'un fonds de roulement, mais on parle quand même d'utiliser une partie du surplus assez facilement. D'ailleurs, on ne fait pas référence non plus à par résolution ou par règlement; est-ce que ça va de soi, ça?

M. Trudel: Bon, bien, c'est selon...

Mme Delisle: Ça va se faire de quelle façon? J'ai deux questions.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Trudel: Alors, M. le Président, c'est selon les autres dispositions législatives de la loi constitutive de la Communauté urbaine que va s'opérationaliser cette possibilité d'utiliser les surplus.

Oui, M. le Président, nous avons eu une discussion assez longue, à l'intérieur du projet de loi n° 72, puisqu'il nous est arrivé sur la table, pendant la discussion que nous avions, la possibilité pour la Communauté urbaine de Québec d'amender sa loi pour qu'elle utilise ses surplus pour financer son fonds de roulement. Alors, finalement, après discussion, nous avons convenu – nous avons, en tout cas, posé la possibilité de le faire – que nous allions étudier cette possibilité à la prochaine session parce que nous sommes à regarder l'ensemble de la constitution et de l'utilisation des fonds de roulement dans les municipalités et les organismes municipaux au Québec.

Par exemple, il est une demande qui revient assez souvent devant l'Assemblée nationale, au ministère des Affaires municipales, c'est des municipalités – et on va en citer deux: la ville de Québec et la ville de Laval – qui demandent qu'on puisse utiliser, par exemple, des règlements d'emprunt pour financer le fonds de roulement de la municipalité, pour obtenir... Enfin, il y a un certain nombre d'arguments comme, par exemple, obtenir des meilleurs taux, puisqu'on serait sur le long terme; ça permettrait davantage de flexibilité. Ce n'est pas directement le cas qui nous intéresse ici, mais la différence, c'est qu'ici évidemment on finance des opérations prévues et décidées par les municipalités au sein de l'organisme, tandis qu'à la Communauté urbaine de Québec ce qu'on nous demandait, c'était de prendre les surplus pour financer le fonds de roulement.

Alors, nous, on pense qu'il faut regarder ça dans son ensemble, qu'on n'adoptera pas ça à la pièce. On n'a pas une résistance à toute épreuve sur cette question, puisqu'il y a de très nets avantages. Il y a même, en apparence, une contradiction assez évidente; c'est que l'organisme, la Communauté urbaine de Québec, paie probablement plus cher le financement à court terme qu'elle obtient de son institution financière par rapport à ce qu'elle pourrait obtenir de ses propres fonds en affectant ses surplus. Sauf que nous voudrions étudier toute cette question dans son ensemble non seulement pour les surplus à être utilisés au fonds de roulement, mais également pour les autres mécaniques.

Tandis qu'ici ce qui est demandé par la Communauté urbaine, c'est pour des opérations que l'on a décidé en termes d'objet, c'est-à-dire du transport en commun, puis, comme on a déjà versé des quotes-parts et qu'il peut y avoir des surplus compte tenu des opérations – parce qu'on n'est pas sur des petits volumes; on est dans plusieurs millions de dollars – eh bien, ici, on pense qu'on peut le permettre. Mais, dans le cas des surplus pour financer les fonds de roulement, on change, comme on pourrait dire, de catégorie de questions, et nous voulons nous en tenir à cela. Pour la Communauté urbaine de Montréal, on y reviendra, pour l'utilisation des surplus pour les fonds de roulement.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la députée de Jean-Talon, ça va?

Mme Delisle: Oui, merci. La deuxième partie de ma question, c'était: De quelle façon la Communauté urbaine va faire ce transfert? Vous avez fait référence, M. le ministre, à des dispositions législatives. Je veux juste savoir, là... Est-ce qu'on le sait par coeur? Est-ce que ça va être par voie de règlement, par voie de résolution? Ça se transfère comment, ça? Par chèque?

M. Trudel: Bien, c'est une décision qui est prise.

Mme Delisle: Ça ne prend pas une résolution. Mais ça doit prendre une résolution ou un règlement, là?

M. Trudel: Non, c'est par résolution; on ne passe pas un règlement. Les quotes-parts seront fixées autrement, mais, pour le versement, c'est tout simplement une résolution qui, compte tenu du volume des opérations, permet de faire le paiement.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. L'amendement est adopté?

M. Trudel: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Il reste un quatrième amendement proposé par le ministre, et je vous le lis: Le projet de loi n° 72 est amendé par l'insertion, après l'article 103, du suivant:

«103.1. Les articles 34.1, 101.1 et 102.1 ont effet depuis le 1er janvier 1996.»

M. le ministre, vos commentaires.

M. Trudel: M. le Président, les objets, aux articles 34.1, 101.1, 101.2 que l'on vient d'adopter, devront avoir effet à compter du 1er janvier 1996 pour qu'enfin on puisse verser à l'Agence métropolitaine de transport le fric perçu et le fric qui a été donc récolté par la Communauté urbaine de Montréal. Comme l'Agence métropolitaine de transport a sa vie utile qui a débuté le 1er janvier 1996, pour la période correspondante, on va autoriser la rétroactivité de l'application de l'amendement 34.1 qu'on vient d'adopter, 101.1 et 101.2 du projet de loi n° 72 pour permettre de régulariser toutes ces choses, M. le Président, auprès de l'Agence métropolitaine de transport par la Communauté urbaine de Montréal.

Le Président (M. Brouillet): Ça va?

Mme Delisle: Ça va, M. le Président, adopté.

Le Président (M. Brouillet): Cet amendement est adopté. Adopté.

La commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à ses travaux. Avant, est-ce que vous avez un mot à dire, à ajouter, M. le ministre?

M. Trudel: Je voudrais remercier Me Gaétan Côté, du ministère de la Métropole, qui était avec nous aujourd'hui pour travailler; Me Blanchet et Me Verge qui étaient avec nous également pour permettre d'adopter ces amendements tardifs peut-être au niveau de l'heure, mais qui vont permettre de régulariser bien des choses. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Je remercie toutes les personnes qui ont participé et j'invite celles qui doivent quitter à le faire immédiatement pour que nous pussions poursuivre nos travaux à l'Assemblée. Merci bien.

(Suspension de la séance à 23 h 38)

(Reprise à 23 h 39)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Assoyez-vous, s'il vous plaît. J'invite M. le député de La Peltrie à faire rapport de la commission plénière. M. le député.

M. Côté (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié les amendements proposés au projet de loi n° 72, Loi modifiant les lois constitutives des communautés urbaines et d'autres dispositions législatives, et qu'elle les a adoptés.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Nous allons revenir à l'adoption du projet de loi. M. le ministre avait terminé son intervention. Alors, je vais céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: M. le Président, nous sommes rendus à l'étape finale de ce projet de loi là, c'est-à-dire le projet de loi n° 72, Loi modifiant les lois constitutives des communautés urbaines et d'autres dispositions législatives.

(23 h 40)

Je serai très brève, puisque j'ai eu l'occasion d'intervenir à l'étape de l'adoption de principe, en commission parlementaire la semaine dernière, lors de la troisième étape, là, entre les deux, la prise en considération du rapport, et ce soir. Qu'il me suffise de dire, bon, que les amendements qui sont proposés dans ce projet de loi là, en ce qui regarde les communautés urbaines et d'autres organismes, nous sommes d'accord avec ces propositions-là. On a reçu du ministre et des fonctionnaires du ministère les informations qui nous amènent à croire que c'est un bon projet de loi.

Cependant, j'aimerais peut-être juste signaler quelques éléments qui vont changer un petit peu la mécanique de gestion, si vous voulez, au niveau des communautés urbaines, et ça se recoupe pour la concordance en ce qui regarde la Communauté urbaine de l'Outaouais, la Communauté urbaine de Québec et celle de Montréal. Entre autres, il y a des allégements dans ce projet de loi là. Je pense, entre autres, à la suppression de la publication d'avis public, en début d'année, de l'ensemble des réunions. Je suis parfaitement d'accord avec le ministre et le ministère pour dire qu'il ne doit pas y avoir grand monde qui découpe cet avis-là avec l'ensemble des réunions et qui met ça sur son réfrigérateur. Il y a d'autres avis publics qui sont publiés par la suite.

On va aussi donner aux communautés urbaines la possibilité de convoquer des assemblées extraordinaires par télécopieur. Dans les circonstances évidemment qui sont exceptionnelles, il y aura aussi la possibilité de tenir une réunion par voie de téléphone dans la mesure où il y aura toujours, en présence du président ou du vice-président, le secrétaire de la communauté urbaine pour assurer une transparence, pour s'assurer également qu'il y a sur place des gens qui peuvent décider.

Il y a aussi la possibilité pour les communautés urbaines de contribuer à des SOLIDE. On l'avait donnée aux MRC en juin, vous vous rappellerez, M. le Président. Donc, tout le monde sera traité sur le même pied. Il y a aussi délégation au directeur général ou à tout fonctionnaire qu'il désignera de la possibilité d'engager du personnel. La dématérialisation des titres obligataires, le ministre en a parlé tout à l'heure.

Je voudrais souligner l'intervention que j'ai faite à la fois à l'adoption de principe et aussi en commission parlementaire, et j'y ai fait référence tout à l'heure, c'est cette référence à la demande de la Communauté urbaine de Québec qui est sur la table non pas depuis mon intervention lors de la commission parlementaire, mais quand même depuis plusieurs mois. Je vous rappelle les faits. La Communauté urbaine de Québec souhaitait pouvoir contribuer à son fonds de roulement non seulement par règlement d'emprunt, comme c'est le cas actuellement en vertu de sa charte, mais aussi de pouvoir le faire en y affectant, à ce fonds de roulement, une partie de son surplus.

Elle souhaitait également que la Société de transport de la Communauté urbaine de Québec puisse, elle aussi, avoir le droit de se constituer un fonds de roulement, ce qu'elle ne peut pas faire actuellement, et d'y contribuer aussi par le biais de l'affectation d'une partie du surplus. Le ministre, après une bonne discussion, s'est engagé à ce que ce débat-là se fasse d'ici le printemps et qu'on puisse revoir l'ensemble des fonds de roulement. Alors, je vais m'assurer qu'il tient parole et je reviendrai à la charge en temps et lieu.

M. le Président, c'est l'essentiel des remarques que je voulais passer. Ça fait suite à d'autres projets de loi qui touchent les allégements des contrôles ministériels. Et je vous dirai bien honnêtement que, quand c'est demandé par le monde municipal et que ça n'enfreint aucun principe de démocratie et de transparence, je pense qu'on ne peut pas être contre un projet de loi comme celui-là. Alors, nous sommes d'accord avec le projet de loi n° 72.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Est-ce que M. le ministre aurait le mot de la fin ou si nous passons au projet... Le mot de la fin, M. le ministre?


M. Rémy Trudel (réplique)

M. Trudel: Merci, M. le Président, mais je veux aussi remercier la députée de Jean-Talon de sa collaboration pour l'étude de ce projet de loi, une étude vraiment détaillée, M. le Président. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Le projet de loi n° 72, Loi modifiant les lois constitutives des communautés urbaines et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Je souhaiterais et je ferais motion pour qu'on se donne rendez-vous le lundi 16 décembre 1996, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons ajourner nos travaux au jeudi...

Des voix: Lundi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...au lundi, excusez – la date, là – ...

Des voix: Le 16.

Une voix: Le 16 décembre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...16 décembre, à 10 heures. Et cette motion, c'est bien entendu, elle est adoptée.

Des voix: Adopté.

(Fin de la séance à 23 h 46)