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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mardi 7 décembre 2004 - Vol. 38 N° 115

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Table des matières

Présence de l'ambassadeur et du consul général, à Montréal, de la République
hellénique, MM. Yannis Mourikis et Georgios Zacharioudakis

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures six minutes)

Le Président: Alors, bon matin, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de l'ambassadeur et du consul général,
à Montréal, de la République hellénique,
MM. Yannis Mourikis et Georgios Zacharioudakis

Chers collègues, j'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes de l'ambassadeur de la République hellénique, Son Excellence M. Yannis Mourikis. M. l'ambassadeur est accompagné du consul général à Montréal, M. Georgios Zacharioudakis.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: J'apprécierais que vous nous référiez à l'article c du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 222

Le Président: À l'article c du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 222, Loi concernant «Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et sa version Sherbrooke Geriatric University Institute». Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le député de Richmond propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi d'intérêt privé n° 222, Loi concernant «Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et sa version Sherbrooke Geriatric University Institute».

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des affaires sociales

M. Dupuis: Alors, je fais donc motion, M. le Président, pour que le projet de loi soit déféré à la Commission des affaires sociales et que le ministre de la Santé et des Services sociaux en soit membre.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: M. le Président, j'apprécierais que vous appeliez l'article d du feuilleton.

Projet de loi n° 223

Le Président: À l'article d du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 223, Loi concernant la Ville de Baie-Comeau. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le député de René-Lévesque propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi d'intérêt privé n° 223, Loi concernant la Ville de Baie-Comeau.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission
de l'aménagement du territoire

M. Dupuis: Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'aménagement du territoire, M. le Président, et pour que le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir en soit membre.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Avis de classement du pont Perreault,
à Notre-Dame-des-Pins

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer un avis de classement de la Commission des biens culturels du Québec concernant le pont Perreault de Notre-Dame-des-Pins.

Le Président: Ce document est déposé. Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Rapport annuel de la Commission
de protection du territoire agricole
accompagné d'un document complémentaire

Mme Gauthier: M. le Président, j'ai honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2003-2004 de la Commission de la protection du territoire agricole du Québec accompagné d'un document complémentaire.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le ministre du Travail.

Rapport annuel de la Corporation
des maîtres électriciens

M. Després: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de la Corporation des maîtres électriciens du Québec.

n (10 h 10) n

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs.

Avis du comité aviseur concernant le dossier
du parc national du Mont-Orford

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Je dépose les cinq avis des membres du comité aviseur sur le dossier du parc national du Mont-Orford.

Dépôt de rapports de commissions

Le Président: Ces documents sont déposés. Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la Commission des affaires sociales et député de Notre-Dame-de-Grâce.

Étude détaillée du projet de loi n° 56

M. Copeman: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la Commission des affaires sociales qui a siégé le 26 novembre 2004 ainsi que les 1er et 2 décembre 2004 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées et d'autres dispositions législatives, Bill 56, An Act to amend the Act to secure the handicapped in the exercise of their rights and other legislative provisions. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président: ...est déposé. Merci, M. le député.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député d'Argenteuil.

M. Whissell: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Consentement. M. le député d'Argenteuil.

Implanter un centre de radiothérapie
à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme

M. Whissell: Alors, M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 38 776 pétitionnaires. La désignation est la suivante: citoyennes et citoyens de la région des Laurentides et des environs.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Nous, de la région des Laurentides et des environs, croyons que l'implantation d'un centre de radiothérapie à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme s'impose comme un choix juste, équitable et rationnel pour une population qui s'est étalée sur un très vaste territoire, qui présente le plus fort taux de croissance de nouveaux cas de cancer de la province et à qui la Direction générale des affaires médicales et universitaires du ministère de la Santé et des Services sociaux a reconnu la nécessité du besoin;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«En conséquence de quoi nous signons pour que l'implantation de ce centre débute en 2005, comme le voulaient les 25 000 personnes signataires d'une pétition déposée à l'Assemblée nationale, au début de l'an 2000.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, M. le député. Cette pétition est déposée.

M. Whissell: M. le Président, vous me permettrez également de souligner la présence dans nos gradins des représentants de la TRARA et de leur présidente, Mme Thérèse Racine.

Le Président: Cette pétition est déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Aide du gouvernement fédéral
aux producteurs de vaches de réforme

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, la semaine dernière, la ministre de l'Agriculture nous a déclaré qu'elle avait reçu l'assurance du ministre fédéral Jean Lapierre qu'Ottawa ferait sa part dans le dossier de la vache de réforme. Elle donnait même des détails, elle nous disait, ainsi qu'aux agriculteurs, que le coût du programme de compensation nécessaire pour le prix plancher serait assumé à 60 % par le gouvernement fédéral. C'était donc assez précis.

Hier, à la Chambre des communes, on a appris une autre histoire. Jean Lapierre a dit ceci: «...la conversation avec la ministre de l'Agriculture a duré exactement une minute et demie.» C'était déjà court pour conclure. Mais il a rajouté: «...il n'y a aucun engagement formel. [...]on ne peut pas négocier 18 millions de dollars quand on ne connaît même pas le prix d'acquisition de l'abattoir ? et, ajoutait-il avec un certain mépris ? franchement.» Bien, franchement, là, il y a une contradiction majeure. On nous dit qu'on a une assurance, Ottawa dit qu'il n'y en a pas. Je comprends que, dans cette nouvelle ère de coopération entre le Parti libéral du Québec et celui du Canada, il faut s'attendre à tout, mais il y a des limites.

Est-ce que la ministre de l'Agriculture peut nous dire pourquoi elle a décidé de nous dire et de dire aux agriculteurs qu'elle avait obtenu l'assurance de la contribution du gouvernement fédéral dans ce dossier et qu'aujourd'hui le porte-parole du gouvernement fédéral dit qu'il n'y a aucun engagement formel?

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, peut-être que le chef de l'opposition aurait intérêt à relire les galées et pourrait y lire ce qui suit. M. Lapierre a répondu hier: «Ce que la ministre de l'Agriculture a entendu de ma bouche, c'est le fait que nous étions prêts à collaborer avec eux.» Ce que M. le ministre a aussi dit, M. le Président, c'est que «le député saura bien que le sens à donner, c'est que le gouvernement fédéral est prêt à [tout faire] ce qu'il faudra pour en arriver à une meilleure situation pour l'ensemble du dossier de la vache folle».

M. le Président, je rajouterais aussi qu'hier soir nous avons eu une...

Des voix: ...

Le Président: Je vous demanderais votre collaboration. La question a été faite dans le décorum, et la réponse également. Mme la ministre.

Mme Gauthier: Ce que je voulais aussi ajouter, M. le Président, c'est qu'hier soir nous avons eu une rencontre avec le ministre fédéral de l'Agriculture, M. Mitchell, ici même, dans les murs du parlement du Québec, et nous avons convenu effectivement que, mercredi, demain, il y a des rencontres qui se feraient avec ses fonctionnaires, les miens et les gens de l'UPA pour effectivement en arriver avec un montage financier. Je le sais, que ça ne fait pas leur affaire qu'on ait réglé ce dossier-là, M. le Président, mais c'est le constat qu'on doit faire.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Est-ce que la ministre se rend compte que, si elle nous avait dit ça franchement lors de notre première question, il n'y aurait pas eu la question de ce matin? Mais là elle complique son dossier. Elle confirme donc que Jean Lapierre a raison et qu'il n'y a pas d'entente formelle. Et comment peut-elle avoir, dans des circonstances aussi dramatiques pour les agriculteurs, dans une crise sans précédent, fait miroiter qu'il y avait une entente, donné le chiffre de 60 %, alors qu'il n'y avait aucune entente? C'est ça qui est grave.

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, en tout temps dans cette crise, le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec se sont parlé. Nous en sommes venus à des ententes. Le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec ont injecté...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration, chers collègues. S'il vous plaît! Mme la ministre.

Mme Gauthier: Le gouvernement canadien et le gouvernement du Québec, c'est 160 millions de dollars qui ont été versés aux producteurs du Québec, M. le Président. C'est parce que, nous, de ce côté-ci de la Chambre, on parle avec le gouvernement canadien et on arrive à des ententes. Et, dans ce dossier-ci, dans ce dossier-ci, M. le Président, en concert avec les représentants des producteurs agricoles, nous en sommes arrivés à une entente négociée. C'est ça, le véritable résultat, M. le Président, une entente gagnante pour les producteurs du Québec.

Le Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la...

M. Arseneau: En question complémentaire, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire. Votre question.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, est-ce que la ministre réalise justement qu'il n'y en a pas, d'entente, et que les annonces qu'elle fait ont des incidences sur ce qui se passe maintenant? Alors, est-ce que la ministre sait qu'hier, par exemple, à l'encan, les producteurs ont obtenu 0,26 $ pour leurs vaches de réforme et non 0,42 $? Donc, ma question est simple: Qui va verser les 0,16 $ de différence et quand les producteurs vont-ils l'obtenir? Qui va...

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, ce qu'on a convenu ensemble avec les producteurs, c'est que les producteurs recevraient 0,42 $. Ce qu'on a aussi convenu, M. le Président, c'est que, sur une période qui durerait huit mois, il y aurait un programme fédéral-provincial pour combler la différence de ce programme. Nous, on s'est engagés, on s'est engagés à trouver une solution durable pour les producteurs du Québec, et c'est ce que nous faisons, M. le Président.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Est-ce que la ministre est en train de donner raison aux producteurs agricoles qui, au moment du congrès, exigeaient une entente écrite, un engagement écrit du premier ministre du Québec? Et est-ce que la ministre peut nous dire? Si jamais la discussion avec le fédéral échoue, est-ce qu'elle s'engage à compenser totalement la différence entre le 0,26 $ et le 0,42 $, à savoir 0,16 $ la livre? Est-ce que le gouvernement s'engage à compenser pleinement les producteurs agricoles à compter...

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, vous conviendrez avec moi que c'est franchement incroyable, hein? On arrive à une situation... on arrive à un règlement négocié avec les représentants des producteurs. M. le Président, juste vous rappeler, juste vous rappeler que ça fait des mois que les producteurs agricoles essaient d'arriver à une entente avec la compagnie Levinoff, d'acquérir l'abattoir. Nous, on a fait en sorte que cela arrive. Notre gouvernement, on a toujours été présents pour les producteurs agricoles du Québec et on le sera toujours, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Entente avec le gouvernement fédéral
sur une compensation offerte
aux producteurs de vaches de réforme

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Comment la ministre peut-elle prétendre qu'il y a un accord, ou qu'il y a un deal, ou qu'il y a quelque chose de solide pour les agriculteurs? M. le Président, on a encore à négocier jusqu'au 20 décembre la vente de l'abattoir. Il n'y a rien, aucun document qu'elle peut déposer ou présenter dans cette Chambre pour dire qu'il y a un engagement du fédéral de verser la compensation entre le 0,26 $ et le 0,42 $. M. le Président, il est où, l'accord? Elle est où, l'entente? Oui, ça fait 18 mois que les producteurs attendent. Qu'attend la ministre pour donner quelque chose de concret, M. le Président?

n(10 h 20)n

Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Je comprends des fois, M. le Président, que, là où ils ont échoué, ils sont un peu mal à l'aise, parce que, nous, on réussit. Peut-être qu'en fin de semaine le député des Îles-de-la-Madeleine aurait dû un peu écouter les émissions d'intérêt public tant à la télé qu'à la radio, lire les journaux, il aurait vu, il aurait constaté effectivement que les producteurs agricoles, les producteurs laitiers, les producteurs bovins qualifient cette entente-là d'entente historique. Et je rappellerais, M. le Président, juste vous rappeler que cette entente-là est intervenue entre des représentants des producteurs agricoles et Levinoff. C'est ça, une entente négociée.

Le Président: En question principale, M. le député du Lac-Saint-Jean.

Partenariats public-privé
en matière d'eau potable

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. À plusieurs reprises, la présidente du Conseil du trésor a fait part de sa volonté de faire participer le privé, notamment en matière d'infrastructures et de gestion de l'eau. On se rappelle plusieurs articles, Le Devoir, 10 septembre: Eau: vers un partenariat public-privé; La Presse, 16 février: Québec signera bientôt des partenariats [public-privé]. Et pendant ce temps le ministre de l'Environnement reste vague quant aux intentions du gouvernement.

Or, hier, se tenait, à Montréal, une rencontre de la Coalition Eau Secours! pour discuter de leur inquiétude face aux partenariats public-privé en matière d'eau. Cette rencontre a fait ressortir plusieurs inquiétudes.

Donc, je pose au gouvernement, aujourd'hui... Est-ce que le gouvernement peut reculer et dire clairement en cette Chambre qu'il n'y aura pas de PPP dans le domaine de l'eau?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: M. le Président, je pense que la meilleure personne à citer, c'est William Cosgrove, le nouveau président du Bureau d'audiences publiques en environnement, qui rappelle les responsabilités de fiduciaire de la ressource commune d'eau d'abord et avant tout. Le premier ministre du Québec, le 12 septembre 2003, lors d'un congrès à Laval, a très clairement affirmé qu'il n'était pas question pour notre gouvernement de privatiser l'eau ni sa gestion. Oui, si c'est faisable pour les infrastructures de partager le risque, on va le faire, mais c'est loin d'être évident parce qu'il y a un gros problème, l'état lamentable de nos infrastructures en eau. Pourquoi? Parce qu'on n'a jamais donné une valeur à l'eau. Alors, je pense que la question doit retourner aux gens qui veulent que les choses restent exactement comme elles sont.

Est-ce que vous voulez vraiment que Montréal demeure un des pires exemples, sur la planète terre, de gaspillage d'eau? Si oui, continuez à tout critiquer et à dire que rien ne doit changer. Si vous voulez vous joindre à nous pour une nouvelle gestion de l'eau respectueuse de l'environnement et de la pérennité de la ressource, on va trouver des nouvelles façons de faire en respectant le droit du public d'avoir de l'eau propre de qualité. Eh oui, la pérennité de la ressource est la gestion de ce bien commun, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Donc, M. le Président, est-ce que le ministre de l'Environnement est en train de nous dire que les inquiétudes de la population sont non fondées, que des propos, hier, tels que Louise Vandelac, qui a reçu le Phénix de l'environnement remis par le ministre de l'Environnement... a tort d'avoir peur qu'il y ait des PPP dans le domaine de l'eau? Donc, si c'est si clair que ça, est-ce que le ministre de l'Environnement peut convaincre sa collègue du Conseil du trésor de changer son projet de loi afin d'exclure tout PPP dans le domaine de l'eau?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Je comprends très bien ce qui inquiète mon collègue du Lac-Saint-Jean et Mme Vandelac que j'ai non seulement vue lorsque je lui ai remis un Phénix, mais je la revois à l'occasion dans d'autres organismes et à l'Université du Québec à Montréal où elle fait un travail prodigieux. Mais, je tiens à rassurer les gens, le premier ministre du Québec lui-même a déjà dit qu'il n'en était pas question. Nous, on ne va pas commencer à dire «on», «off» pour telle sorte de projet ou telle sorte de projet. C'est un principe, cette loi des partenariats public-privé, mais on vous dit et on dit aux groupes qui s'inquiètent qu'il n'est pas et qu'il n'a jamais été question de privatiser l'eau au sein de notre gouvernement. La question n'a jamais été évoquée, et le premier ministre a très clairement fermé la porte là-dessus le 12 septembre 2003, lors de notre congrès à Laval.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Oui. M. le Président, est-ce que je peux comprendre du ministre, hein, que, malgré ses belles paroles, les intentions sont là? Il refuse de dire clairement qu'il n'y aura pas de partenariat public-privé dans le domaine de la gestion de l'eau. On ne parle pas nécessairement de privatisation mais de partenariat public-privé. C'est la question, hier, qui a été traitée. Est-ce qu'il peut prendre l'engagement ferme qu'il n'y en aura pas et que ces gens ont tort d'avoir des craintes?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Je ne dirai jamais que des gens qui bénévolement donnent de leur temps parce qu'ils sont préoccupés par un sujet ont tort, un point c'est tout. Mais je vais répondre à l'invitation de mon collègue le député du Lac-Saint-Jean. Je le répète pour la troisième fois, tel que le premier ministre l'a stipulé, il n'est pas question de partenariat public-privé dans la gestion de l'eau. Est-ce que c'est clair, maintenant?

Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu.

M. Simard: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: Bien. Dernière question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Alors, puisque nous avons entendu le ministre de l'Environnement, est-ce que la présidente du Conseil du trésor peut s'engager dans cette Chambre, pour satisfaire son collègue, à exclure nommément l'eau des partenariats public-privé comme toute la population du Québec le souhaite?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre de l'Environnement.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Je réfère mon collègue à la question qui a été posée au premier ministre le 12 septembre 2003. Il était question de privatiser l'eau, et on a fait les distinctions qui s'imposent entre l'eau propriété de l'ensemble de la collectivité, l'eau gestion et l'eau infrastructures. On a toujours fait la distinction. Et, oui, il est fort probable que, si on pouvait partager le risque, parce que c'est l'essence même d'un partenariat public-privé... Pour les infrastructures, c'est une chose, mais pas pour la gestion de l'eau et pas pour la propriété de l'eau, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le leader adjoint de l'opposition officielle et député de Chicoutimi.

Traitement par les ministères
des demandes d'accès à l'information

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: M. le Président, à une question posée à la ministre responsable de la loi d'accès à l'information hier, elle nous a répondu qu'elle avait communiqué avec ma collègue de Prévost pour l'informer d'un délai supplémentaire de 10 jours dans une demande d'accès à l'information. Du même souffle, elle affirmait que son geste en était un de politesse. Or, la demande d'accès, M. le Président, n'a pas été signée par la députée mais bien par une conseillère politique de notre Service de recherche, et je demande le consentement pour déposer la lettre de Me Stéphanie Gareau.

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Le document est déposé.

M. Bédard: Est-ce que la ministre peut nous expliquer, M. le Président, aujourd'hui comment se fait-il que cette demande d'accès s'est retrouvée sur son bureau? Et qui la lui a transmise?

Le Président: Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, j'aimerais répéter, encore aujourd'hui, au député de Chicoutimi, de même qu'à cette Assemblée, que je n'ai pas reçu la demande d'accès sur mon bureau. Le ministère m'a informée qu'il y aurait un délai de 10 jours pour répondre à la demande, dixit, de la députée. Je n'ai jamais vu ce papier sur mon bureau. M. le Président, la députée de Prévost et moi-même avons souvent échangé sur le dossier de la francisation au Québec, notamment en commission parlementaire. Nous partageons toutes les deux des préoccupations et toutes les deux reconnaissons l'importance de ce dossier de la francisation.

En aucun temps ou en aucun cas je ne suis intervenue dans la demande d'accès, M. le Président. J'ai simplement informé que, parce que nous voulions, au nom de la transparence... Et, croyez-moi, je suis extrêmement sincère quand je dis ça. Au nom de la transparence, je souhaitais que la députée ou celui ou celle qui a fait la demande, puisque je ne l'ai jamais vue, ait toute l'information, notamment sur les listes d'attente depuis quatre ans, au sein du ministère, en francisation. Et voilà, mon seul souhait et objectif, c'est de pouvoir donner à quiconque toute l'information pertinente demandée à mon ministère, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: M. le Président, l'application de la loi ne relève pas de la gentillesse. Elle-même doit s'assurer du respect de cette loi. Elle en est même, elle, la ministre titulaire. Donc, j'aimerais simplement savoir qui l'a effectivement informée du contenu de cette demande dans son ministère.

Le Président: Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je pense aussi qu'il faut apporter une autre clarification, parce que ça n'existe pas uniquement depuis le mois d'avril 2004, ça existait aussi, selon les dires de mon ministère, avec le précédent gouvernement. Il n'est absolument pas illégal, d'aucune façon, et ça ne peut être interprété comme étant une intervention, d'aucune façon, que les ministres soient informés, je dis bien «informés», des demandes d'accès à l'information à leur ministère. Je suis absolument convaincue que tous les ministres ici, en cette Chambre, sont informés des demandes d'accès, comme vous l'étiez en votre temps, M. le Président, comme vous l'étiez, informé, des demandes d'accès dans les différents ministères.

n(10 h 30)n

Le Président: En dernière question complémentaire, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Est-ce que la ministre connaît l'article 47 de la loi dont elle a la responsabilité, c'est-à-dire que seul le responsable de l'accès à l'information a le devoir de recevoir et de traiter une demande d'accès à l'information?

Le Président: Madame...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je réitère que seuls les responsables de l'accès à l'information peuvent recevoir et traiter les demandes et je répète que c'est ce qui a été fait. Recevoir et traiter les demandes ne veut pas dire que les ministres ne peuvent pas être informés qu'il existe une demande d'accès à l'information. Et voilà, M. le Président, ce qui a été fait.

Permettez-moi de vous dire que les journalistes disent effectivement que beaucoup des tendances actuelles de fermeture étaient déjà en place ou en gestation sous le précédent gouvernement, même si leur forme pouvait varier, M. le Président. Alors, je vous en prie, hein, ce matin, je pense qu'on doit admettre que les choses se font tout à fait en règle avec cette loi d'accès à l'information et que nous continuerons de la défendre, M. le Président.

Le Président: Merci. En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Garantie de complémentarité
des services entre les deux futurs
hôpitaux universitaires de Montréal

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Le président-directeur général de la Fondation du Centre universitaire de santé McGill transmettait par écrit, il y a quelques jours, l'état d'avancement du futur hôpital anglophone. Je vous en lis quelques extraits: «Je suis heureux de vous annoncer que le projet respecte le calendrier. Le ministre de la Santé et le premier ministre réaffirmaient, à la mi-octobre, leur détermination et leur empressement à la mise en oeuvre du projet du CUSM pour le compléter sans retard. De plus, la revue Perspectives santé, de McGill, nous apprend qu'un rapport des huit groupes de travail qui ont mis au point les plans de redéploiement a été transmis au gouvernement du Québec le 30 octobre dernier.»

Alors, la question, M. le Président: Le ministre de la Santé et des Services sociaux peut-il nous indiquer si les conditions qu'il a posées à McGill pour donner son accord à la réalisation du futur hôpital ont été réalisées? Est-ce qu'il a reçu, comme il l'exigeait avant d'autoriser les travaux dans une lettre adressée à M. David Culver le 23 juin dernier, le plan de complémentarité pour les services cliniques, diagnostiques et thérapeutiques, les services administratifs...

Le Président: En conclusion, Mme la ministre.

Mme Harel: ...et de soutien et les missions de formation et de recherche?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: D'abord, M. le gouvernement, je... M. le Président, pardon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Couillard: J'ai présumé, M. le Président, je m'excuse.

Je ne voudrais pas et je m'objecterais à ce qu'on introduise dans le dossier le contexte d'un clivage linguistique. Je trouve que c'est très destructeur de le faire, et ça ne correspond pas à la réalité étant donné qu'il s'agit de deux grandes institutions québécoises qui, dans les deux cas, servent beaucoup de patients francophones et anglophones. Alors, je pense...

Alors, effectivement, M. le Président, les travaux de planification, du côté de l'hôpital de McGill, progressent très bien, incluant des progrès majeurs dans le dossier de la complémentarité et qui n'auraient pas été crus possibles il y a quelques mois ou même quelques années. Ceci progresse à notre satisfaction. Il faut noter que, dans le dossier de l'Université de Montréal, on a un retard qui tient au choix définitif du site. Mais les mêmes critères sont appliqués des deux côtés, et les deux institutions travaillent de façon très positive et très constructive actuellement à la nécessaire complémentarité de leurs services.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, pourquoi est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux fait-il diversion sur le clivage linguistique? Je l'interroge sur la complémentarité entre les deux futurs hôpitaux universitaires à Montréal. Alors, est-ce qu'il s'engage à ne pas autoriser les travaux de construction de l'un ou de l'autre avant que la complémentarité, qu'il jugeait essentielle, dans les services entre les deux futurs hôpitaux ne soit garantie?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Si j'ai introduit la question linguistique, M. le Président, c'est que, comme elle le fait fréquemment, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, dans la prémisse de cette question, l'a introduite. Et c'est une technique qu'elle pratique souvent, d'introduire d'autres questions dans une prémisse que, si on laisse passer, on se trouve à entériner facilement, et je ne ferais jamais ça. Chaque fois qu'il y aura une erreur...

D'autre part, il n'y a eu aucune autorisation actuellement de commencer la construction. Tout ce qu'il y a, c'est les appels d'offres pour la décontamination du site Glen. Les travaux, comme je l'indique, progressent rapidement sur le plan de la complémentarité, de l'organisation des plans de pratique dans les deux cas, et, dans les deux cas, les mêmes critères s'appliquent, M. le Président.

Le Président: Dernière question complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le ministre... M. le ministre! M. le Président. C'est la journée...

Des voix: ...

Le Président: ...des choses qui arrivent des fois. En question complémentaire.

Mme Harel: Alors, M. le Président, le ministre a en tête certainement cette question linguistique, puisqu'elle n'était ni dans la prémisse ni dans la question. Et je lui repose la question: S'engage-t-il, comme il l'a fait en juin dernier, s'engage-t-il maintenant à ne pas autoriser la construction de l'un ou l'autre des deux futurs hôpitaux universitaires avant que ne soit garantie la complémentarité des services?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, je viens de répondre à la question, mais elle recommence encore avec la prémisse linguistique. Alors, moi, je vais continuer à corriger les choses. Il s'agit de deux...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! J'ai une question de règlement. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: 35, M. le Président. Pourriez-vous rappeler au ministre qu'il ne peut pas refuser d'accepter la parole de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve? Elle lui a dit trois fois que l'enjeu n'était pas ça, mais bien la complémentarité. Est-ce qu'il pourrait accepter sa parole?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Couillard: M. le Président, non seulement je ne refuse pas d'accepter sa parole, je la reçois et je l'accepte puisque je la discute. Lorsqu'elle dit qu'il s'agit d'hôpitaux anglophones ou francophones, je m'objecte à cette façon de scinder le Québec, M. le Président.

Le Président: En dernière question complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, pourquoi le ministre parle-t-il de d'autre chose que ce sur quoi je l'interroge? Je lui demande: Est-ce qu'il s'engage à ne pas autoriser les travaux de construction de l'un ou l'autre des deux futurs hôpitaux universitaires avant que ne soit garantie la nécessaire complémentarité qu'il exigeait en juin dernier?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député! M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, j'ai répondu et je le refais: Les mêmes critères s'appliquent. Les autorisations finales seront données lorsque les ententes seront terminées, notamment sur la complémentarité, notamment sur le plan de pratique, notamment sur le concept qui mène à l'élaboration des hôpitaux. Nous n'avons pas changé d'opinion, ça a toujours été les mêmes critères, et ils s'appliquent.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Intégration d'une faculté des sciences
de la santé au projet du Centre
hospitalier universitaire de Montréal

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. C'est tellement plus simple de répondre, hein, à la question posée.

Le Président: Question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je me souviens de la députée de Taillon au pouvoir. C'est le plus mauvais exemple de ce qu'elle vient de dire.

Le Président: Alors, ce n'était pas une question de règlement. Question principale, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. L'Université de Montréal souhaite inclure dans le projet du CHUM, s'il était construit à Outremont, une faculté des sciences de la santé qui regrouperait notamment la médecine, les sciences infirmières et la médecine dentaire. La présidente du Conseil du trésor affirmait hier en cette Chambre que le gouvernement est actuellement en train d'évaluer les coûts engendrés par cette proposition. Or, il semble qu'une telle proposition ferait gonfler considérablement la facture du futur CHUM.

Est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous indiquer si des discussions ont eu lieu, soit entre lui-même ou son cabinet et l'Université de Montréal, concernant le projet de faculté des sciences de la santé sur le futur site du CHUM?

n(10 h 40)n

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Deux hypothèses sont actuellement à l'étude, M. le Président. La question du développement stratégique des sciences de la santé et de l'économie du savoir pour l'Université de Montréal est au centre de la réflexion. Et, dans la proposition acheminée par l'Université de Montréal, on retrouve l'idée de greffer les facultés à l'hôpital, ce qui est également possible d'ailleurs dans le site du 1000 Saint-Denis. Alors, il y a un comité interministériel qui travaille sur la question actuellement, notamment sur la question des coûts. Ces travaux progressent bien et ils feront partie intégrante, M. le Président, des éléments qui mèneront à la décision du gouvernement, dans un délai le plus rapide possible, délai qui sera certainement plus rapide que celui qu'a utilisé l'ancien gouvernement, qui n'a pas été capable de se décider entre 1995 et 2003.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Est-ce que je comprends que le ministre de l'Éducation a décidé qu'il n'était plus de sa responsabilité de faire la planification des investissements au niveau universitaire, M. le Président? Est-ce que je peux entendre le ministre de l'Éducation, qui a toujours la responsabilité de son portefeuille, sur ce projet, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, le ministère de l'Éducation participe aux discussions, dans le cadre d'un comité interministériel, sur toute cette question de choix du site du CHUM.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: À ce moment-là, M. le Président, comment le ministre de l'Éducation peut-il expliquer que, dans un document de présentation qui date du 24 novembre, l'Université de Montréal souligne ? et elle le fait de façon catégorique ? que la partie universitaire du projet du CHUM sera financée par le ministère de l'Éducation? «Le financement est assuré», peut-on lire dans le document.

Le ministre a-t-il donné une telle assurance, le ministre de l'Éducation qui est jusqu'à ce jour le responsable des plans d'investissement dans le réseau universitaire, M. le Président?

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, M. le député! M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, comment la députée peut-elle citer des passages du document que les promoteurs du projet ont fait parvenir pour en faire la position du ministre de l'Éducation ou du gouvernement? C'est insensé. Cette proposition est actuellement étudiée, notamment sur l'aspect des coûts, sur le coût des immobilisations, non seulement en santé et en éducation, et entre dans la comparaison des deux hypothèses qui sont devant nous. Mais vous ne pouvez pas... on ne peut pas, M. le Président, citer un document qui origine de gens qui font la promotion d'un site pour en faire la position du gouvernement, c'est tout à fait inapproprié.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Mesures d'aide à l'école publique
pour le maintien de ses clientèles

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Oui, M. le Président, ce sera une question principale. Mais il reste que, dans un document qui a été présenté par les responsables de l'Université de Montréal, on présume que le financement sera assuré par le MEQ. Alors, je cite essentiellement ce document. Pour affirmer cela, j'imagine qu'ils ont eu quelques discussions avec le ministère de l'Éducation. Bon.

Alors, M. le Président, sur un autre sujet, qui est celui des écoles...

Des voix: ...

Mme Marois: Mais, non, on n'a pas eu de réponse, hein, vous aurez remarqué. Celui des écoles...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! En question principale, Mme la députée de Taillon. Je vous rappelle que vous devez poser votre question rapidement.

Mme Marois: Bien sûr, M. le Président. Alors, selon des chiffres du ministère de l'Éducation, les écoles privées connaissent une hausse de 14 % du nombre de leurs élèves depuis cinq ans tandis qu'au même moment les écoles publiques ont connu une baisse de fréquentation de l'ordre de 4 %. Puisque la subvention gouvernementale versée aux écoles... est versée, pardon... puisque cette subvention est versée en fonction du nombre d'élèves, évidemment le réseau privé bénéficie d'une hausse substantielle de son financement, plus du double en fait par rapport au public.

Le Président: ...

Mme Marois: Oui, M. le Président, j'y arrive. Le résultat, c'est que plusieurs commissions scolaires éprouvent des difficultés financières ou encore voient leurs écoles se vider. Comme on le sait, certaines doivent même carrément envisager des fermetures d'écoles.

Qu'est-ce que le ministre de l'Éducation entend faire concrètement, M. le Président, rapidement, pour stopper l'érosion du nombre d'élèves à l'école publique au profit de l'école privée?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, le Québec a une richesse extraordinaire en éducation en ce sens qu'il a deux réseaux à offrir à ses enfants, au niveau scolaire, et deux réseaux de qualité. Évidemment, ma mission première comme ministre de l'Éducation, c'est de m'assurer que nous ayons un réseau public de très haute qualité qui réponde aux besoins de tous les enfants du Québec. Mais nous avons aussi, dans cette richesse, un deuxième réseau qui est un réseau privé, que nous avons toujours, gouvernement après gouvernement, conservé et protégé.

En 1996, les états généraux avaient suggéré d'augmenter la contribution des parents au régime... à l'enseignement privé, non pas de l'abolir, d'augmenter la contribution des parents, ce que le gouvernement d'alors, qui avait pour ministre de l'Éducation la députée de Taillon, n'avait pas fait, et on avait décidé de conserver effectivement la qualité de ce réseau privé à côté d'un réseau public de très grande qualité. Nous n'avons pas non plus l'intention d'augmenter la contribution des parents et nous n'avons pas l'intention de détruire le réseau privé, c'est une richesse du Québec.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vais répéter ma question, M. le Président, puisque, comme à son habitude, le ministre n'a pas répondu: Qu'est-ce que le ministre de l'Éducation entend faire concrètement pour soutenir l'école publique et stopper l'érosion du nombre d'élèves au profit de l'école privée, et en particulier d'ailleurs, M. le Président, en ce qui concerne l'école secondaire? Que compte-t-il faire concrètement, M. le Président? Il me semble que c'est simple.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, nous avons bien sûr continué d'appliquer un certain nombre de mesures qui avaient été commencées par le gouvernement précédent. On pense à des mesures, par exemple, que nous avons reprises à notre compte et pour lesquelles nous avons ajouté des sommes d'argent. On pense aux mesures, par exemple, d'écoles... de dernière école de village, on pense à des mesures qui représentent des sommes importantes et qui sont le... relier entre elles toutes les écoles par une ligne Internet à haute vitesse.

Mais surtout, mais surtout, M. le Président, nous avons fait la promotion et nous avons donné des outils pour que les commissions scolaires et toutes les écoles du Québec fassent mieux connaître ce qu'elles offrent comme richesse à nos enfants et aux parents qui prennent avec leurs enfants des décisions quant au choix de l'école. Nous avons eu l'occasion d'en parler, les progrès ont été considérables au Québec...

Des voix: ...

M. Reid: M. le Président...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Reid: Les progrès ont été considérables au Québec et les parents disposent maintenant, quand vient le temps de faire le choix d'une école, d'une information qui est répandue d'un système central Internet qui donne une information générale sur les données du Québec, mais qui permet aussi à chaque école de faire connaître ce qui fait battre le coeur des élèves dans cette école-là. M. le Président, c'est de cette façon-là qu'on renforcit l'école publique au Québec.

Le Président: En dernière question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Est-ce que le ministre réalise qu'en supprimant un programme majeur comme Ça bouge après l'école et en ne consacrant que des sommes minimes pour l'Aide aux devoirs, il a au contraire raté une belle occasion de soutenir l'école publique, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, on avait arrêté d'entendre cet argument concernant Ça bouge après l'école, et ça revient depuis quelque temps. Faut-il rappeler, M. le Président, que ce programme-là n'a pas existé? Ce programme-là avait été annoncé dans un budget dans lequel il y avait de l'argent de Monopoly.

Et nous l'avons dit et répété, en ce qui nous concerne, M. le Président, on a pris des mesures très claires. Par exemple, Écoles en forme et en santé, c'est un programme pour lequel nous avons mis vraiment un 5 millions de dollars, du vrai argent, M. le Président. Nous avons également d'autres mesures, par exemple des campagnes de promotion. L'Aide aux devoirs, c'est une façon d'aider l'école effectivement à offrir aux enfants la meilleure qualité possible. Toutes ces mesures que nous faisons depuis que nous sommes en place visent à renforcer l'école québécoise, et c'est ce qui se passe actuellement. Nous allons en avoir les résultats. D'ailleurs, M. le Président...

Le Président: Merci, M. le ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! En question principale, M. le député de Rousseau.

Intentions quant à la privatisation
des hippodromes

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, après plusieurs mois de tergiversation dans le dossier des hippodromes, à la fin octobre le gouvernement a finalement décidé de faire un appel de candidatures pour décider qui va se porter acquéreur des quatre hippodromes du Québec.

M. le Président, deux entreprises sont en lice: Remstar, une entreprise québécoise qui veut investir 125 millions pour relancer les hippodromes, puis, de l'autre côté, Magna Entertainment, une entreprise ontarienne détenue par le conservateur Frank Stronach, où on retrouve sur le conseil d'administration un dénommé Brian Mulroney.

M. le Président, on sait que l'enjeu principal de ce dossier, c'est le transfert de 2 000 appareils vidéopokers pour faire des hippodromes des salons de jeu. M. le Président, est-ce que le premier ministre peut nous confirmer que des représentants de la firme Magna Entertainment font ou ont fait du lobby auprès de lui ou des membres de son cabinet dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Juste me permettre gentiment de corriger l'information que donne le député de Rousseau dans sa question. Il n'y a pas eu de décision prise par le gouvernement concernant l'appel d'offres qui sera fait éventuellement, mais il n'y a pas encore de décision, M. le Président.

La décision que nous avons prise, c'est de retirer à peu près 30 % des sites où se trouvent des appareils vidéopokers, et ça, je pense que le public a salué cette prise de décision. C'est la première fois qu'un gouvernement en Amérique du Nord réduit l'offre de jeu, 30 % des sites ont été réduits.

n(10 h 50)n

Des voix: ...

Le Président: Il y a juste une personne qui a la parole, Mme la députée. M. le ministre des Finances.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Séguin: Oui. Je dirais que la députée... la députée de Taillon, qui m'a précédé au ministère des Finances, sait à quel point ce dossier est toujours difficile, et je suis très fier, comme ministre des Finances et avec mon gouvernement, d'avoir pris cette décision, même si ça pouvait entraîner une perte de revenus, parce que je pense qu'il est d'intérêt public que l'on réduise l'offre de jeu.

Je reçois à chaque semaine des lettres de contribuables qui disent vivre des situations très difficiles avec les conséquences sociales très néfastes des appareils vidéopokers, et, en temps et lieu, on poursuivra l'examen du dossier, et la décision sera prise concernant les autres aspects du dossier.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, est-ce que le ministre des Finances, à qui pour une fois le premier ministre laisse la chance de répondre à une question, est-ce qu'il peut nous confirmer ? c'était ça, ma question ? que des représentants de la firme Magna Entertainment font ou ont fait du lobby auprès du premier ministre ou de son bureau dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Mon collègue et estimé député de Richelieu, hier, a vanté les mérites du ministère des Finances, sujet sur lequel, je suis convaincu, le chef de l'opposition admettra que la qualité et l'intégrité du ministère des Finances ont toujours été au-delà de toute, toute, toute... tout soupçon. Alors, je peux assurer que tout ce qui sera fait dans ce dossier, comme jusqu'à maintenant cette première décision de retirer les appareils de vidéopoker, va suivre dans le même sens lorsqu'il sera question de rechercher un partenaire, s'il y a lieu et si c'est dans ce sens-là que la décision se prend.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, la question est pourtant simple: Est-ce que, oui ou non, la firme Magna Entertainment a fait ou fait actuellement du lobby auprès du bureau du premier ministre ou du bureau du ministre des Finances? Question simple. Est-ce qu'on pourrait avoir une réponse, M. le Président?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Alors, M. le Président, je peux assurer que tout ce que nous faisons au ministère des Finances se fait avec la plus grande qualité, la plus grande transparence, et à chaque fois nous rendons publique la décision et en toute intégralité. Et je peux dire que nous ferons les autres décisions toujours avec le même souci de défendre l'intérêt public.

Le Président: En question principale, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Non, complémentaire.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Rousseau.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, peut-être pour aider le premier ministre, est-ce que le premier ministre est au courant qu'au registre des lobbyistes un certain dénommé Fred Doucet figure comme faisant du lobby auprès du cabinet du premier ministre pour la firme Magna Entertainment? Et je dépose le document.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement?

Des voix: ...

Document déposé

Le Président: S'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Le document est déposé.

M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Alors, tout ce que je peux répondre, M. le Président, c'est que je ne connais pas les circonstances alléguées par le député de Rousseau. Je ne peux que répéter que le ministère des Finances procède à l'examen de l'ensemble du dossier avec un grand souci de transparence et de qualité dans l'examen de l'information.

La première décision que nous avons prise, de retirer 30 % des sites où se trouvaient des appareils de vidéopoker, a été faite avec une parfaite transparence, le public en était informé à chaque moment. Et nous allons continuer de la même façon.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée. Votre question.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Le ministre des Finances peut-il nous dire comment il va concilier sa décision de transférer les hippodromes à une entreprise privée avec les appareils de vidéopoker, alors que Loto-Québec, dans son plan de développement 2004-2007, recommande fortement de ne pas concentrer ces appareils dans les hippodromes actuels?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Oui, M. le Président. Je pense que la question écrite a été écrite avant que je puisse répondre, aujourd'hui, parce que je viens de répondre à la question en disant qu'il n'y a pas eu de décision encore.

Alors, je ne connais pas l'information que possède la députée, alors tout ce que je peux dire, c'est que le gouvernement n'a pas pris de décision, il la prendra en temps et lieu. On fera connaître la décision.

Le Président: Alors, une dernière question complémentaire, Mme la députée de Rimouski.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): À ce moment-là, est-ce que le ministre des Finances peut nous confirmer, hein, que la vente des hippodromes à une entreprise privée se fera avec le transfert des appareils de vidéopoker? Oui ou non, est-ce que le transfert des appareils va être avec la vente des hippodromes?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Bien, je n'ai pas décelé si la députée, dans sa question, manifestait son accord ou son désaccord. Ce que je peux vous dire, M. le Président, c'est que, tant que la décision n'est pas prise, toute suggestion et opinion exprimée sera prise en compte. Et j'ai bien pris celle qu'exprime dans sa question la députée.

Le Président: En question principale, M. le député de René-Lévesque.

Conflit de travail à la Société
des alcools du Québec

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, les employés de la Société des alcools sont sans contrat de travail depuis maintenant un an. Jusqu'à présent, les efforts de conciliation et médiation n'ont pas donné les résultats escomptés.

Ma question: Est-ce que le ministre des Finances peut donner une indication claire à sa société d'État sur l'importance de la conciliation travail-famille et sur la multiplication de la sous-traitance via les agences privées, qui entre carrément dans le moule des partenariats public-privé que les travailleuses et les travailleurs dénoncent vivement?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je remercie le député de poser sa question, parce que c'est un conflit qui est fort important, que le gouvernement suit de très près, M. le Président. Ce que je peux lui dire, et le député le sait sûrement: La partie patronale a déposé une offre sur la table, dont les travailleurs vont se prononcer aujourd'hui, M. le Président, mardi et mercredi, pour faire connaître s'ils sont satisfaits de l'entente qui est proposée, M. le Président. Donc, nous allons laisser, je pourrais dire, les travailleurs décider s'ils acceptent l'offre qui est sur la table.

Et je peux lui dire, M. le Président, en terminant, qu'une des priorités du gouvernement, c'est bien la conciliation travail-famille, dont mon collègue de l'Emploi s'occupe et fera une consultation au printemps prochain.

Le Président: Ceci met fin à la période des questions et réponses orales.

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Mme la députée de Lotbinière.

Motions sans préavis

Souligner la première Conférence
internationale francophone
sur le syndrome d'alcoolisation foetale

Mme Roy: M. le Président, je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre conjointement d'une motion... avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, de la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la tenue dans la Capitale-Nationale de la première Conférence internationale francophone sur le syndrome d'alcoolisation foetale les 9 et 10 décembre prochains.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Alors, M. le Président, il me fait plaisir de présenter conjointement avec le ministre...

Des voix: ...

Le Président: Je demanderais votre collaboration! S'il y a des députés qui ont d'autres occupations, veuillez le faire dans le silence.

Des voix: ...

Le Président: Je demande votre collaboration! Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Lotbinière.

Mme Roy: Alors, merci, M. le Président. Il me fait plaisir de présenter conjointement avec le ministre de la Santé et ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve cette motion qui souligne la tenue dans la Capitale-Nationale, les 9 et 10 décembre prochains, de la première Conférence francophone sur le syndrome d'alcoolisation foetale.

n(11 heures)n

Ce syndrome touche 10 enfants sur 1 000 dans les pays industrialisés, et ce, à divers degrés. Ce syndrome est connu comme étant la première cause chimique de retard intellectuel. Et les risques associés à la consommation d'alcool pendant la grossesse sont craints depuis l'Antiquité, mais le conséquences de l'alcoolisation foetale n'ont été identifiées comme entité clinique qu'en 1968, par le pédiatre français Paul Lemoyne. Depuis, la recherche s'est développée en Amérique et en Europe, et des interventions cliniques ont été adaptées aux diverses clientèles concernées.

L'alcoolisation foetale et ses impacts constituent un problème de santé publique majeur pratiquement partout dans la communauté internationale, fléau que l'on pourrait prévenir sinon du moins alléger.

M. le Président, cette conférence internationale qui se tiendra chez nous dans quelques jours est organisée par l'organisme SAFERA. Elle aidera à démystifier et à faire connaître les différents aspects de ce syndrome. Elle s'adresse à toute personne affectée ou vivant avec un enfant, ou un adolescent, ou encore un adulte qui a été affecté par l'alcoolisation foetale ainsi qu'aux intervenants de diverses disciplines travaillant avec eux, leurs familles, de même qu'à ceux oeuvrant auprès des futures mères et des femmes qui risquent de consommer de l'alcool pendant qu'elles sont enceintes.

SAFERA, M. le Président, intervient, malgré ses moyens restreints, ses moyens financiers restreints, auprès des CLSC, les centres jeunesse, les centres de santé, les sociétés de protection de l'enfance, les écoles et les commissions scolaires, les centres de réadaptation physique ou intellectuelle. Ils interviennent également auprès des intervenants en toxicomanie, les sages-femmes et les éducateurs spécialisés. Ajoutons à cette liste déjà impressionnante les psychologues, les neuropsychologues, les ergothérapeutes, les pédiatres, les pédopsychiatres, les médecins en médecine familiale, les juges, les avocats, les travailleurs de rue.

Par cette motion, je souhaite souligner l'excellent travail qu'ils font. Je souhaite également que l'Assemblée nationale soit informée de ce problème qui a des coûts énormes autant au point de vue humain, pour les personnes qui en sont atteintes, la famille, mais aussi au niveau des budgets du ministère de la Santé. Je souhaite que nous puissions prendre conscience de cet important problème et que l'ensemble de notre société s'en trouve grandi suite à l'information, la sensibilisation et par la suite l'intervention. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Lotbinière. Je reconnais maintenant le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier la députée de Lotbinière de nous proposer de débattre aujourd'hui de cette question importante qu'est le syndrome de l'alcoolisme foetal, parce que, comme parlementaires, il est important que nous saisissions toutes les occasions de parler d'une seule voix pour mettre en lumière d'importants problèmes sociaux et de santé.

Sur ce thème précis, M. le Président, il faut noter cependant que nous avions l'intention, de ce côté-ci de la Chambre, d'aborder la question dans le cadre du débat sur une motion que j'ai présentée le 16 novembre dernier, à l'occasion de la Semaine de prévention de la toxicomanie. Malheureusement, on s'en souvient, le débat n'a pu avoir lieu, à la grande déception d'ailleurs des groupes qui s'étaient déplacés pour entendre les allocutions des parlementaires.

Cela dit, l'une des manifestations les plus dramatiques de la consommation abusive d'alcool est effectivement le syndrome d'alcoolisme foetal. On sait que l'alcoolisme induit fréquemment des effets néfastes dans l'entourage, que ce soit l'appauvrissement de l'unité familiale, les difficultés d'adaptation sociale des enfants ou du conjoint ou parfois même la présence de comportements violents au sein de la famille. Mais, ce qui est particulièrement dramatique dans le cas de ce syndrome, c'est qu'on peut observer chez l'enfant des conséquences physiques ou sociales qui ont souvent un caractère permanent.

D'ailleurs, le syndrome de l'alcoolisme foetal est considéré comme l'une des principales causes d'anomalie congénitale et de retard de développement évitable chez l'enfant. Et, comme on le sait, il se rencontre habituellement chez les enfants nés de mères qui ont consommé de l'alcool durant leurs grossesses de façon régulière, pas nécessairement en grande quantité, mais de façon régulière ou en assez grande quantité par moments distincts.

Le syndrome se caractérise surtout par un retard de croissance prénatal ou postnatal ainsi que par différents troubles du système nerveux central. À mesure que l'enfant grandit, on pourra remarquer des problèmes de motricité, un apprentissage plus laborieux, des difficultés à saisir les notions abstraites, un manque de concentration, des pertes de mémoire. S'y ajoutent parfois certaines malformations physiques, notamment du coeur ou du palais. Et en somme il s'agit d'un ensemble de manifestations dont la gravité ne fait aucun doute.

En juin 2004, en réponse à une demande que je lui avais formulée, l'Institut national de santé publique du Québec a publié un document intitulé L'état de situation sur le syndrome d'alcoolisation foetale au Québec. Ce document, que j'engage tous les parlementaires et les gens intéressés dans le public à consulter, brosse un excellent tableau de la question et des interventions réalisées au Québec.

L'institut formule aussi un certain nombre de recommandations dont les principales sont les suivantes: l'information du public; le perfectionnement des pratiques professionnelles; l'organisation des soins et services; l'amélioration des connaissances ? et il faut également favoriser la recherche à cet effet; et finalement la coordination des actions des différents partenaires.

Nous allons, M. le Président, poursuivre notre action en tenant compte de ces recommandations, et évidemment il s'agit d'un champ d'intervention où les gestes préventifs présentent un formidable potentiel.

Le travail que nous effectuons déjà auprès des futures mères de milieux vulnérables est déjà remarquable, avec des programmes de CLSC, également les programmes tels qu'OLO, qui s'adressent spécifiquement aux mères surtout défavorisées qui ont des habitudes alimentaires ou d'autres habitudes à corriger dans le but d'assurer la meilleure santé possible à leur enfant.

Les programmes intégrés de prévention en périnatalité comprennent notamment des visites prénatales et postnatales à domicile, un soutien nutritionnel ainsi qu'un soutien dans les modifications des habitudes de vie, notamment pour ce qui est de la consommation de drogue et d'alcool. En période postnatale, des services supplémentaires sont prévus si on constate que l'enfant est atteint d'une malformation congénitale. Par ailleurs, M. le Président, les femmes constituent l'une des clientèles cibles de notre plan d'action interministériel de lutte contre la toxicomanie, et nous sommes résolus de renforcer la prévention auprès des femmes enceintes.

En terminant, j'aimerais rappeler brièvement quelques statistiques. Environ 14 % des femmes enceintes consomment de l'alcool au moins une fois par semaine et une sur 20 prendrait trois consommations ou plus par semaine. Puisque nous ne connaissons pas avec certitude le seuil de consommation sécuritaire pour une femme enceinte, le choix le plus sûr consiste donc à s'abstenir de boire complètement pendant la grossesse, et c'est d'ailleurs ce que recommande la Société canadienne de pédiatrie. S'il doit y avoir consommation, cela ne doit se faire que de façon très occasionnelle et surtout très modérée.

En terminant, M. le Président, je joins ma voix à celle des autres parlementaires pour témoigner de notre solidarité envers les familles au sein desquelles un enfant présente le syndrome d'alcoolisme foetal. J'aimerais aussi souligner le travail de l'organisme SAFERA, dont l'équipe fait d'énormes efforts du côté de la vulgarisation et de la sensibilisation à l'importance de ce syndrome. Le congrès international qui se tient cette semaine, à Québec, du 8 au 10 décembre, sous l'égide de cet organisme et du Conseil de la santé et des services sociaux des premières nations du Québec et du Labrador, permettra sans aucun doute de faire avancer la réflexion et les connaissances sur cette question de premier intérêt. D'ailleurs, M. Pierre Marsan, mon adjoint parlementaire, sera présent à ce congrès, et j'aurai certainement des échos de cette rencontre.

Soyez assurés que notre travail dans ce dossier important se poursuivra en partenariat avec les différents organismes. Et là-dessus je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je suis maintenant prêt à reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de Rimouski.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. En tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, il me fait grand plaisir d'appuyer cette motion sur le syndrome d'alcoolisation foetale.

Le syndrome d'alcoolisation foetale est relativement méconnu du grand public. Ses conséquences sont pourtant dévastatrices pour les enfants qui en sont atteints. Le syndrome d'alcoolisation foetale est un diagnostic médical qui renvoie à un ensemble précis d'anomalies liées à la consommation d'alcool pendant la grossesse. Et les trois traits essentiels du syndrome d'alcoolisation sont la restriction de la croissance prénatale et postnatale, un faciès caractéristique et une atteinte du système nerveux central, ce qui se traduit par des anomalies neurologiques, un retard de développement, un dysfonctionnement comportemental et des troubles d'apprentissage importants. Le cerveau de l'enfant est endommagé par l'alcool, ce qui l'empêche de traiter l'information qu'il reçoit de la même façon qu'un autre enfant. Le comportement de cet enfant en sera affecté tout au long de sa vie.

La consommation d'alcool pendant la grossesse peut avoir de graves effets à long terme sur le foetus et l'enfant. On estime que l'incidence du syndrome d'alcoolisation foetale oscille entre un et deux pour 1 000 naissances. Chaque jour, au Canada, au moins un enfant naît avec le syndrome d'alcoolisme foetal, qui peut mener à une variété d'incapacités permanentes. Comme l'a si bien dit le ministre précédemment, le syndrome d'alcoolisation foetale est considéré comme l'une des principales causes d'anomalie congénitale et de retard de développement évitables chez les enfants. Donc, ça se prévient, M. le Président. Et on peut prévenir le syndrome d'alcoolisation foetale. Le choix logique pour des femmes qui sont enceintes ou qui peuvent le devenir, qui sont en âge de procréer, est de s'abstenir de consommer de l'alcool.

Pour diverses raisons, plusieurs femmes ignorent ou sous-estiment les risques pour l'enfant de consommer de l'alcool pendant une grossesse. À cet égard, en termes d'information et de prévention, l'État a un rôle important à jouer dans la lutte contre le syndrome d'alcoolisation foetale. Il est particulièrement important d'unifier le message des différentes instances afin d'envoyer un message unique, un message clair aux femmes enceintes, qui doivent être informées des risques liés à la consommation d'alcool pendant la grossesse.

En juin 2004, un rapport intitulé État de situation sur le syndrome d'alcoolisation foetale au Québec était déposé par l'Institut national de santé publique du Québec. On insistait, dans ce rapport, sur le manque d'uniformité du message véhiculé par l'État, et je cite: «Alors que les autorités québécoises acceptent de véhiculer un message de consommation modérée d'alcool, pour la majorité des organismes canadiens, une telle notion de modération n'existe pas pour les femmes enceintes et toute consommation d'alcool est jugée à risque. De plus, le terme "modéré" n'est pas précisé dans les guides québécois à l'intention des femmes enceintes et ceci est probablement source de confusion. Les femmes doivent définir pour elles-mêmes ce que "modéré" signifie ou s'en remettre aux conseils de professionnels de la santé qui n'ont pas reçu de directives claires à ce sujet.»

n(11 h 10)n

En conclusion, le rapport y allait de recommandations très importantes, et, tout comme le ministre, je reviens sur ce qui m'apparaît les plus pertinentes, et les plus importantes, et les plus urgentes, c'est-à-dire de formuler un message clair, uniforme, concernant la consommation d'alcool pendant la grossesse; fournir aux professionnels de la santé et des services sociaux des outils et de la formation concernant la consommation abusive d'alcool; développer des approches adaptées à la situation des femmes alcooliques et toxicomanes à l'intérieur des services prénataux existants; améliorer surtout, M. le Président, les connaissances et favoriser la recherche, en plus de coordonner les actions des diverses instances. Nous ne pouvons qu'appuyer ces recommandations et nous espérons que le gouvernement en fera autant non seulement en paroles, mais également en actions.

Au Québec, SAFERA, un organisme fondé en 1998, se dédie spécifiquement à la prévention du syndrome d'alcoolisation foetale et des autres troubles causés par l'alcoolisation foetale. Fondé par des parents adoptifs d'un enfant atteint du syndrome et par une institutrice, c'est un organisme sans but lucratif. Leurs principales activités sont des conférences, de la formation et de l'information dans le grand public. En plus d'être dans de nombreuses régions du Québec, ils sont aussi présents dans plusieurs provinces canadiennes. SAFERA a des contacts avec des chercheurs internationaux en plus de publier un bulletin trimestriel et de faire de nombreuses démarches auprès des instances politiques, gouvernementales pour la reconnaissance de la problématique du syndrome d'alcoolisation foetale.

Des responsables de l'organisme prévoient aussi organiser des groupes de soutien pour les parents d'enfants atteints, et ce, dès cette année. SAFERA conçoit des projets de formation, car il considère que les intervenants, les intervenantes manquent de connaissances sur la problématique. D'ailleurs, ils ont organisé une importante conférence internationale qui se tiendra sur cette importante question, ici même, à Québec, les 9 et 10 décembre prochains. Ce sera l'occasion pour toutes et tous des partenaires touchés par cette question de poursuivre la réflexion et surtout d'améliorer les solutions proposées afin qu'il y ait de moins en moins d'enfants québécois affectés par le syndrome d'alcoolisation foetale.

En terminant, M. le Président, l'opposition officielle réitère son appui à la motion présentée, et nous souhaitons aux participantes, aux participants du colloque des discussions enrichissantes et productives. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Rimouski.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adoptée.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Cusano): Adoptée. Alors, maintenant, nous passons aux avis touchant les travaux des commissions. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, permettez-moi de communiquer l'avis suivant touchant les travaux en commission.

M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission des finances publiques, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, entende le Vérificateur général du Québec après les affaires courantes, pour une période de 60 minutes réparties de la façon suivante: que la durée maximale de l'exposé soit de 20 minutes et que l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition; qu'au terme de cette audition la commission entreprenne l'étude détaillée de ce même projet de loi jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

La Commission de l'éducation poursuivra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 73, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 16 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

La Commission des institutions, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur la police, procédera à des consultations particulières après les affaires courantes jusqu'à 12 h 30, de 15 heures à 17 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Cette même commission entreprendra l'étude détaillée dudit projet de loi de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la Commission de l'économie et du travail se réunira aujourd'hui, mardi 7 décembre, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin d'étudier le rapport sur l'application des dispositions de la Loi sur les normes du travail concernant les disparités de traitement, conformément au deuxième alinéa de l'article 4 de la Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, est-ce qu'il y a des questions? Alors, la période...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Mme la leader de l'opposition.

Mme Lemieux: Oui. Au sujet des travaux de l'Assemblée, alors je note que, depuis le début de la session intensive, c'est-à-dire depuis jeudi le 25 novembre, la CFP n'a pas siégé les 25, 26, 29 novembre, donc trois journées complètes, et il y a eu plusieurs plages qui étaient disponibles qui n'ont pas été utilisées les 1er, 2 et 3 décembre, par exemple. Le projet de loi n° 61 portant sur l'Agence des PPP a passé seulement 13 heures en commission. Alors, est-ce que le leader du gouvernement peut nous garantir que le projet de loi sera appelé dès demain pour que les parlementaires puissent faire leur travail?

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Si la leader de l'opposition est assez aimable pour s'engager, en cette Chambre, à ce que le projet de loi n° 61 sorte de commission parlementaire le plus rapidement possible, ça va me faire plaisir. Mais je veux signaler tout de même, pour que les gens qui souhaiteraient nous écouter aient le portrait complet de la situation, que, de ces 13 heures que le projet de loi a passé en commission, on n'est pas encore rendus, encore, à l'article 1. Alors, si l'opposition officielle faisait preuve de diligence, ça aiderait beaucoup, beaucoup à prendre des décisions à ce sujet-là.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le leader du gouvernement. Une deuxième question, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: ...à ce qu'il y ait des discussions en ce sens-là, et, oui, les parlementaires vont faire leur travail.

Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Je vous réfère à l'article 25 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 44

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 25, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Environnement, la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis, en vertu de l'article 252 du règlement, par M. le ministre de l'Environnement. Ces amendements sont déclarés recevables. Alors, y a-t-il des interventions? M. le ministre de l'Environnement.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Tout en disposant d'un temps de parole de 30 minutes, je vais être beaucoup plus bref que ça. Je tiens, dans un premier temps, à remercier le député de Masson pour sa collaboration. Mais, vu que, lui et moi, on a déjà échangé beaucoup plus que 30 minutes en commission parlementaire là-dessus, je pense que ça ne vaut pas la peine de tout réitérer.

Disons juste ceci: le projet de loi n° 44 vise à importer ici, au Québec, dans l'application de nos lois et d'une manière plus étendue, la notion de pollueur-payeur, notamment. Ça veut dire quoi, ça, en clair? Ça veut dire que, si quelqu'un qui est un client régulier du ministère nous coûte beaucoup plus cher ou à cause d'infractions ou à cause de la nature de ses opérations, on aura le droit, en toute équité, de lui refiler une facture plus forte. Quand on a des accidents à répétition, on peut refiler la facture. Quand on a des choses qui requièrent une attention accrue, il peut y avoir aussi une facture. Je trouve que, si on regarde les différentes manières de recueillir des fonds publics, c'est plus juste. Si toutes les autres compagnies qui sont plus respectueuses n'ont pas autant d'infractions, ce n'est pas normal qu'elles aient un fardeau fiscal additionnel, pas plus que l'ensemble des contribuables. Donc, c'est pour ça qu'on apporte ces précisions-là.

Il était question de la création d'un fonds vert. Le député de l'opposition, les députés s'inquiétaient beaucoup, ils se disaient: Vous aller cueillir de l'argent, vous le voulez dans un fonds vert qui va être annoncé dans votre plan de développement durable, mais on ne l'a pas encore devant nous. Ce qui nous a aidés beaucoup à avancer, c'est quand on a pu déposer, ici, en Chambre, notre avant-projet de loi sur le développement durable. C'était très clairement inscrit là-dedans. On a fait un certain nombre d'amendements, il y a eu des changements qui ont été faits en commission parlementaire.

Donc, outre l'arrivée de l'avant-projet de loi sur le développement durable, je peux citer le fait que, moi, j'avais mentionné à plusieurs reprises... Tout en respectant le fait que ce sont les membres d'une commission parlementaire qui décident si et quand ils vont avoir un mandat d'initiative, j'avais exprimé une ouverture de faire un mandat d'initiative, c'est-à-dire d'amener la première version, la version initiale du règlement, adoptée en vertu d'un des articles clés, de l'amener en commission parlementaire pour que les députés puissent le voir, et j'ai acquiescé à la demande du député de Masson de l'inscrire dans la loi. D'ailleurs, c'est là-dessus qu'il y a un petit amendement technique proposé par le Comité de législation. La seule qu'on a devant nous, aujourd'hui, c'est une question de dire: une première version d'un règlement plutôt qu'un règlement, parce que le règlement, c'est ce qui sort au bout du tuyau, et il fallait juste utiliser une technique légèrement différente. Je crois savoir que les services en question ont contacté le député de Masson pour lui en toucher un mot.

n(11 h 20)n

Il y a aussi une partie importante, il y a eu beaucoup question de Murdochville dernièrement, dans les nouvelles, d'une autre usine, où on connaissait des problèmes de qualité de l'atmosphère. On va accroître notre capacité d'aller chercher de l'information sur les émanations des usines, pas dans le but... Cette fois-ci, ce n'est pas dans le but de poursuites, c'est vraiment pour connaître ce qui sort et connaître l'état de l'atmosphère. C'est très important pour le public et pour sa santé.

Donc, pollueur-payeur, augmentation de ce qu'on est capable d'aller chercher, référence directe au Fonds vert, je l'ai dit, quand on a fini, vendredi soir, à mon collègue le député de Masson, que, loin de trouver ça problématique, le fait qu'on fasse référence spécifiquement au Fonds vert, j'étais très content de voir les deux cheminer ensemble, et c'est effectivement le cas.

Alors, voilà, M. le Président, c'est un projet de loi qui est bon pour l'environnement, qui est bon pour le Québec. Je me réjouis de la bonne collaboration qu'on a eue finalement avec l'opposition là-dessus, une fois que toutes les réponses ont pu être données, et j'espère maintenant que ça va pouvoir cheminer correctement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre de l'Environnement. Je reconnais maintenant le député de Masson.

M. Luc Thériault

M. Thériault: Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de l'Environnement afin de préciser le pouvoir du ministre de l'Environnement eu égard à la communication des renseignements dont il dispose.

En vue d'assurer une surveillance continue de l'état de l'environnement ou d'assurer, en matière de protection de l'environnement, le respect d'un engagement international ou la mise en oeuvre d'une entente intergouvernementale canadienne, ce projet de loi modifie la Loi sur la qualité de l'environnement afin de conférer au ministre de l'Environnement le pouvoir de déterminer par règlement les renseignements qu'une personne ou une municipalité est tenue de lui fournir au regard d'une entreprise, d'une installation ou d'un établissement qu'elle exploite.

Ce projet de loi modifie l'article 31 de la Loi sur la qualité de l'environnement aux fins de permettre au gouvernement d'établir des frais exigibles destinés à couvrir les coûts engendrés par les mesures de contrôle et de surveillance des titulaires d'autorisation, d'approbation, de certificat, de permis, d'attestation ou de permission, en fonction de la nature de leurs activités, des caractéristiques de leurs installations ou du nombre d'infractions à une disposition de la Loi sur la qualité de l'environnement ou de l'un de ses règlements d'application pour lesquelles ils ont été déclarés coupables, ainsi que de la nature ou de la gravité de ces infractions.

Ce projet de loi modifie l'article 31.0.1 de la Loi sur la qualité de l'environnement aux fins de permettre son application non seulement aux attestations d'assainissement, mais également à toute autre attestation prévue par la loi ou par un règlement pris pour son application. Il modifie aussi cet article aux fins de permettre au ministre de fixer les intérêts exigibles en cas de non-paiement.

Enfin, ce projet vient apporter des modifications à la version anglaise de certains articles de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel et de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Je rappelle, M. le Président, que nous avons eu des consultations, que plusieurs groupes que nous avons reçus en consultation ont énoncé des craintes quant au libellé de certains articles. Ces craintes étaient assurément fondées, M. le Président, puisque le ministre lui-même a déposé des amendements pour clarifier son texte. Toutefois, les amendements du ministre ne répondaient pas à toutes les craintes exprimées et aux commentaires de l'opposition officielle.

Je rappellerai aussi que nous avons été deux semaines sans que le gouvernement appelle la commission afin de siéger pour terminer l'étude article par article de ce projet de loi. Néanmoins, nous sommes aujourd'hui à l'étape de la prise en considération. En effet, nous avons terminé l'étude du projet de loi vendredi soir, autour de minuit, et nous avons bien failli ne pas pouvoir le faire, puisque le ministre a tenté de suspendre les travaux vers 22 heures, ce que nous avons refusé de faire, car, depuis le début, nous souhaitions adopter ce projet de loi mais avec des modifications, et ce, pour une meilleure protection de l'environnement, M. le Président.

Et la protection de l'environnement, j'ai eu l'occasion de le soulever lors de nos travaux, à plusieurs reprises, passe, lorsque c'est possible, par l'établissement de consensus, M. le Président. Parce que ces consensus, une fois établis, ont le mérite de faire émerger le volontarisme nécessaire à la promotion et au respect de l'environnement. Ce que le ministre voulait faire, c'était inévitablement, lors de nos travaux, faire reporter l'odieux du report de l'adoption du projet de loi à l'opposition officielle. Mais, M. le Président, nous avons fait appel à la rationalité et nous avons pu terminer cette étude article par article, comme je l'ai dit tout à l'heure, autour de minuit.

Voici donc les modifications adoptées par l'opposition et finalement acceptées par le ministre de l'Environnement. L'article 3. Cet article, M. le Président, proposait d'élargir le pouvoir du ministre quant au fait de communiquer les renseignements. Toutefois, nous avons jugé que le libellé ne garantissait certainement pas à la population d'avoir un meilleur accès à l'information. C'est pourquoi nous avons exigé deux amendements. D'abord, nous avons fait ajouter les mots «publier et diffuser», c'est-à-dire que le ministre pourra notamment, et je cite: «compiler, analyser, communiquer, publier et diffuser les renseignements dont il dispose». Il est essentiel effectivement de communiquer, M. le Président, l'information, mais, communiquer, cela exige aussi de pouvoir publier et de diffuser. Le terme «communiquer» nous apparaissait restrictif, alors que «la publication et la diffusion» nous paraissaient être des termes beaucoup plus précis et bonifiant cette intention, en matière de protection de l'environnement, à ce que les informations soient à la portée de tous les milieux, M. le Président. Je vous rappellerai, entre autres, que des groupes nous ont fait la démonstration qu'il était très, très important pour que les milieux puissent faire valoir leurs droits en matière d'un environnement sain et de qualité, c'était très important pour eux de pouvoir avoir accès à toutes les informations. Nous avons de plus supprimé les mots «de la façon qu'il estime indiquée», beaucoup trop discrétionnaires, discrétion d'ailleurs dénoncée par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec.

L'article 4, M. le Président. Nous trouvions que le troisième alinéa introduit par cet article n'était pas bien rédigé, c'est pourquoi nous avons déposé un amendement qui a été adopté. Cet alinéa se lit maintenant comme suit: «Les seuls renseignements qu'une personne ou une municipalité visée par un règlement pris en application du premier alinéa est tenue de fournir sont ceux dont elle dispose, dont elle peut raisonnablement disposer ou dont elle peut disposer en faisant un traitement de données approprié.»

Autre amendement: nous avons exigé que la publication du règlement fasse l'objet d'une publication à la Gazette officielle du Québec pour une consultation de 60 jours au lieu de 45 jours, tel que le prévoyait le projet de loi. Or, le secrétariat du Comité de législation me faisait parvenir l'indication d'une modification mineure à l'article 4 et à l'article 8.5 qui nous satisfait, M. le Président, et qui ferait en sorte que désormais cet amendement se lirait ainsi: «Tout règlement pris en application du présent article est précédé de la publication d'un projet de règlement à la Gazette officielle du Québec pour une consultation de 60 jours.» Il s'agit là, M. le Président, encore une fois, d'un autre gain.

n(11 h 30)n

L'article 5. Cet article, hors de tout doute, était au coeur de ce projet de loi, et tous les groupes que nous avons rencontrés en étaient tout à fait conscients. Plusieurs ont fait part de leurs craintes quant à son application et surtout concernant le pouvoir du ministre. En effet, cet article permet au ministre d'adopter par règlement les secteurs qui seront visés par la tarification quant au contrôle et à la surveillance. D'abord, de l'autre côté, on a tenté de faire de la petite politique en voulant faire croire que l'opposition officielle faisait de l'obstruction, voire même que l'opposition reniait une des orientations au fondement de l'application de la Politique nationale de l'eau, à savoir le volet pollueur-utilisateur-payeur. Mais, M. le Président, poser des questions pour connaître la position de groupes qui se déplacent pour nous transmettre leurs inquiétudes, questionner le ministre sur l'interprétation qu'il fait de l'application du principe pollueur-payeur, alors que le fardeau de la preuve lui revient dans le contexte d'une élection gagnée en promettant de geler le reste des ministères, à part la Santé et l'Éducation, ce n'est pas renier nos principes, c'est faire notre devoir d'opposition, M. le Président.

En fait, le ministre s'est appliqué à faire croire, surtout auprès des groupes environnementaux, que son gouvernement était parfait et voulait faire porter l'odieux des coupures en matière de protection de l'environnement sur le dos de l'opposition. Je rappellerai à ce gouvernement que c'est lui et lui seul qui a coupé de 13 millions le budget du ministère et coupé le financement des groupes environnementaux.

Pour faire passer cette pilule dans le contexte de la réingénierie de l'État, dans le contexte d'un cadre financier électoraliste qui ne tenait pas la route, en promettant des baisses d'impôts de 1 milliard de dollars par année pendant cinq ans, en tenant un discours antitaxes, ce gouvernement, ce gouvernement, pour employer une expression chère au ministre, a soufflé froid et chaud en même temps en ne respectant pas ses promesses électorales et en tarifant l'ensemble des contribuables à outrance. À maintes reprises, pendant les auditions et l'étude article par article, il a voulu faire croire aux groupes environnementaux que ce projet de loi était leur assurance de financement et que, si le projet de loi n° 44 n'était pas adopté, ce serait la faute de l'opposition officielle s'ils ne pouvaient bénéficier de subventions.

Le moins qu'on puisse dire, M. le Président, le moins que l'on puisse dire, c'est que cette façon de faire relève de la partisanerie. La preuve que nous souhaitions adopter ce projet de loi, c'est que nous avons fait travailler le ministre malgré lui jusqu'à minuit, vendredi, soit... alors qu'il voulait ajourner les travaux à 22 heures, parce que, nous, nous voulions terminer l'étude de ce projet de loi.

L'opposition donc, M. le Président, est fière, fière de ce travail, de son travail, puisque, notamment à l'article 2, deux amendements majeurs ont été adoptés. D'abord, nous avons exigé, comme on l'a fait depuis le début, que le règlement qui décidera qui sera couvert par la tarification fasse l'objet d'une étude en commission parlementaire. Eh oui, il est prévu dans le projet de loi que le premier règlement fera l'objet d'une étude en commission parlementaire, avant son adoption par le gouvernement. Il s'agit là d'une victoire pour l'opposition officielle, mais surtout, M. le Président, une victoire pour l'équilibre des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif et aussi une victoire pour l'ensemble des intervenants dans la protection de l'environnement.

L'autre amendement fondamental, amendement appuyé par tous les groupes environnementaux et qui a fait l'objet, de la part de l'opposition officielle, d'un questionnement systématique, était de s'assurer que l'argent amassé par cette tarification reste à l'environnement. C'est pourquoi nous avons exigé du ministre qu'il y ait la trace, dans ce projet de loi, d'un fonds dédié, et ce, même si son avant-projet de loi sur le développement durable prévoit un fonds vert. Ainsi, il pourra, fort de ce consensus, rappeler à ses collègues des Finances et du Conseil du trésor que ces argents seront désormais dédiés à la protection de l'environnement plutôt qu'au fonds consolidé.

Ainsi, il est prévu, quant à l'argent amassé par cette tarification, que ces frais soient versés dans un fonds créé à cet effet. Pourquoi avons-nous exigé cela, M. le Président? Parce que les écrits restent et les paroles s'envolent. Les ministres passent et les lois restent. C'est une victoire pour l'opposition officielle mais surtout une victoire importante pour l'environnement. Nous y tenions, car il s'agissait pour nous d'une assurance, compte tenu de la tendance de ce gouvernement et du Conseil du trésor de faire des compressions, et nous voulions nous assurer que l'argent reste au ministère de l'Environnement et surtout éviter qu'il serve à autre chose que la protection de l'environnement.

En conclusion, nous sommes fiers du travail que nous avons accompli. Maintenant, nous pouvons dire que les sceptiques seront confondus, car nous avons prouvé, hors de tout doute, que nous avions une seule intention, celle d'améliorer ce projet de loi. Mais, M. le Président, nous laisserons la population et les groupes juger et constater eux-mêmes le travail que nous avons fait dans le but d'améliorer le projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Masson. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix des amendements du ministre

Alors, les amendements proposés par M. le ministre de l'Environnement sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la Commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Environnement, la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Je vous réfère à l'article 5 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 74

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, à l'article 5, Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor propose l'adoption du principe du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, j'ai le plaisir, aujourd'hui, M. le Président, de proposer l'adoption du principe d'un projet de loi qui simplifiera la vie professionnelle de nombreux employés du secteur public québécois et qui, du même coup, facilitera la tâche de leurs employeurs.

En effet, ce projet de loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives vise à régler certaines questions liées à la gestion des régimes de retraite des employés concernés. Il facilitera notamment la mobilité de ces employés en régularisant les transferts de service en ce qui a trait à leur participation au régime de retraite visé par leur emploi.

Pour bien comprendre le projet de loi, M. le Président, il faut le remettre dans son contexte historique. Le Régime de retraite des agents de la paix des services correctionnels a été mis en place en 1988 spécifiquement à l'intention des agents de la paix en services correctionnels. Depuis 1992, le régime a été élargi à quelques reprises pour inclure le personnel d'encadrement des services correctionnels et certaines catégories de personnel de l'Institut Philippe Pinel. Depuis sa mise en place, le régime rencontre toutefois des difficultés d'application, notamment dans des cas où un employé occupe simultanément deux emplois, l'un étant visé par le Régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et l'autre par la Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le RREGOP, ou, depuis 2001, par le Régime de retraite du personnel d'encadrement, le RRPE.

En avril 2001, une entente est toutefois survenue entre le gouvernement du Québec et le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels dans le but de régulariser l'application du régime de retraite des agents de la paix avec le RREGOP et le RRPE. Un comité de suivi a été constitué afin notamment de revoir les dispositions du Régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels relatives à cette problématique d'harmonisation des régimes. Le présent projet de loi vient donc concrétiser les résultats du travail du comité de suivi. Son adoption permettra donc de résoudre une problématique que le gouvernement et le syndicat concerné ont tous deux reconnue et qui a fait l'objet d'un travail considérable au cours des trois dernières années.

Les mesures proposées répondent notamment à deux objectifs majeurs des parties concernées. Premièrement, elles visent le maintien de la participation au Régime de retraite des agents de la paix des services correctionnels, en particulier pour les employés en fin de carrière ou pour ceux qui se voient dans l'impossibilité d'occuper de telles fonctions suite à une invalidité. Cette mesure vise à favoriser la mobilité d'employés qui pouvaient notamment être réticents à changer d'emploi pour des raisons liées à leur sécurité financière à long terme.

n(11 h 40)n

Deuxièmement, elles visent l'établissement d'une période de qualification de 10 ans de cotisation au Régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels avant qu'un employé puisse voir sa participation au régime garantie, même s'il occupe par la suite un emploi lié au RREGOP ou au RRPE. Il est à noter que cette approche, destinée à encourager la rétention du personnel, correspond à une façon de faire qui existe déjà au sein du Service correctionnel du Canada, donc pour des types d'emploi largement comparables.

Dans l'ensemble, le projet de loi vise à préciser les modalités de participation simultanée ou successive aux différents régimes de retraite concernés et à établir des bases claires pour le transfert d'années de service, à savoir des bases d'équivalences actuarielles entre les régimes. Les modalités actuellement en place sont fortement sujettes à interprétation, ce qui peut avantager ou désavantager indûment et de façon plutôt imprévisible un employé par rapport à un autre. En clarifiant la situation, le projet de loi permettra à tous les employés concernés de prendre des décisions relatives à leurs carrières sur des bases claires et uniformes.

Je souligne que le projet de loi comporte aussi quelques mesures de concordance qui harmoniseront le régime des agents de la paix avec le RREGOP et le RRPE pour diverses dispositions liées au rachat d'années de service et à la fiscalité. Les lois relatives à l'ensemble des régimes concernés s'en trouvent donc modifiées.

Quelques autres mesures relatives à d'autres régimes de retraite, donnant suite à des recommandations du Comité de retraite du RREGOP et du Comité de retraite du RRPE et acceptées également par le Comité de suivi du RRAPSC sont également incluses au projet de loi.

M. le Président, de telles mesures sont évidemment, dans leurs détails, assez complexes. Le projet de loi comporte quelque 290 articles, ce qui souligne bien cette complexité du travail accompli, depuis 2001, pour remédier à la problématique actuelle. Nous aurons l'occasion d'explorer l'ensemble des mesures proposées à l'étude détaillée du projet de loi afin de faire le tour complet de la question. D'ici là, je crois que tous peuvent s'entendre sur le principe louable de ce projet de loi et sur ses effets bénéfiques sur les employés concernés. Il me fait donc plaisir de recommander à mes collègues de cette Chambre l'adoption du principe du projet de loi n° 74. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la présidente du Conseil du trésor. Alors, nous continuons le débat sur le principe du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives. Alors, je suis prêt maintenant à reconnaître le député de Richelieu et président de la Commission des institutions.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir à cette étape de l'adoption de principe du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives. Je vous annonce tout de suite, ce ne sera une surprise pour personne, que ma formation politique votera en faveur de l'adoption de ce principe.

Je vais vous rappeler, M. le Président, pour ceux qui ne s'en souviendraient peut-être pas, d'où proviennent ces changements. J'aperçois ici le député de Verdun, qui est quelqu'un avec qui j'ai toujours beaucoup de plaisir à discuter de ces modifications aux régimes de retraite, qui est, je peux bien l'admettre bien humblement, sans doute celui d'entre nous qui les connaît le mieux. Nous y avons travaillé des soirs et des soirs, des journées et des journées avec beaucoup de plaisir.

M. le Président, ces régimes de retraite sont évidemment un aspect très important dans ce que l'on appelle le salaire différé de nos employés. C'est une façon de s'assurer des meilleures conditions de travail à la suite de la cessation d'emploi à la fin d'une carrière.

Vous vous rappellerez peut-être qu'en décembre 1998 les 1 800 gardiens de prison du Québec étaient sans contrat de travail et qu'en avril 2001 ils ont déclenché, pendant quelques heures, ce qu'il est convenu pudiquement d'appeler une journée d'étude. Et, à la suite de négociations intensives, nous avons convenu avec eux d'une entente qui améliorait sensiblement leurs conditions et prévoyait également des changements à leur régime de retraite.

Quand je dis «changer sensiblement leurs conditions», il faut se rappeler du contexte de l'époque. Les agents correctionnels voulaient que l'on prenne en compte, dans leur rémunération, l'aspect... le danger, la dangerosité, c'est-à-dire le risque qu'il y avait à exercer ce métier. Nous sommes dans un contexte, rappelez-vous ces années-là, M. le Président, où des gardiens de prison ont payé de leur vie le travail qu'ils faisaient. On se souvient notamment de gardiens de prison qui ont été exécutés à la suite de contrats portés contre eux par des membres du crime organisé. C'était une situation extrêmement difficile pour ces agents de la paix. Mais, je dois le dire, j'ai été... à ce moment-là, j'étais à la présidence du Conseil du trésor, nous avons été très heureux, avec un syndicat très responsable, après évidemment un rapport de force qui devait s'établir, d'en venir à une entente dans, je pense, le meilleur climat possible et surtout de nous mettre au travail afin d'améliorer sensiblement le régime de retraite. Et, aujourd'hui, ce que nous avons devant nous, c'est le résultat... la loi n° 74, c'est le résultat de ce travail.

Je vous souligne, M. le Président, que c'est un travail long, c'est un travail délicat. Lorsque l'on touche à un régime de retraite qui affecte un groupe d'employés, très souvent nous sommes obligés de modifier ? il y a un effet cascade ? de modifier les régimes de retraite d'autres catégories d'employés, parce que nos employés, et c'est normal, très souvent, au cours de leur carrière, sont passés d'un groupe dans la fonction publique à un autre groupe, donc protégés par un régime de retraite plutôt que par un autre, et il faut nous assurer qu'aucun ? et, vous savez, c'est un défi considérable ? aucun cas n'échappe à la loi, c'est-à-dire à la protection des régimes de retraite. Et je vois que le travail, ici... les équipes spécialisées du Conseil du trésor et de la CARRA, qui gère les régimes de retraite, ont très bien travaillé, puisque ce projet de loi me semble en tous points conforme, en tout cas à première vue... le travail évidemment d'étude article par article, le travail de précision se fera. Je n'ai nul doute que nos collègues parlementaires qui devront faire ce travail le feront correctement.

Mais il est évident ici que l'on a cherché à atteindre les buts visés. J'en veux pour preuve un certain nombre d'articles majeurs de ce projet de loi que je veux souligner rapidement. Si vous allez à la page 8 du projet de loi, M. le Président, vous allez trouver des changements majeurs, et c'est dans tous les régimes de retraite. Ceux qui ont travaillé les régimes de retraite vous diront que ce sont des articles extrêmement délicats. Ce sont des articles de qualification. Comment se qualifie-t-on pour pouvoir bénéficier d'un régime de retraite? Et vous avez, à la page 8, ces changements aux qualifications, et, à l'article 8.1... Je peux vous le citer, simplement pour vous donner le degré de précision:

«L'employé se qualifie au présent régime le jour où il cumule 10 années de service ? ce qui est la règle habituelle des régimes de retraite.

«Sont prises en compte aux fins de la qualification les années et parties d'année de service ? donc, ce n'est pas nécessairement continu, c'est l'accumulation:

«1° [ces années sont] créditées dans une fonction visée au premier alinéa de l'article 6 ? je vous ferai grâce d'y référer;

«2° créditées dans une fonction visée au premier alinéa[...];

«3° créditées en vertu de l'article 143...»

Vous voyez, il y a une très, très grande précision nécessaire dans la qualification. C'est ce qui détermine si vous avez, oui ou non, droit aux prestations d'un régime, et c'est toujours... La qualification, c'est toujours, dans un régime de retraite, la base, l'élément fondamental.

Vous avez ensuite des règles très importantes qu'on retrouve autant dans le régime des enseignants que dans le RREGOP, que dans le nouveau régime pour le personnel d'encadrement. Vous savez, c'est un nouveau régime que nous avons mis sur pied, il y a quelques années, extrêmement important pour le personnel d'encadrement. Eh bien, vous avez toujours des mesures pour permettre à ceux qui n'ont pas accumulé ces années de façon continue de pouvoir être reconnus, voir leurs années reconnues. Il y a des conditions, évidemment. Il y a des conditions qui se rattachent à cette qualification.

n(11 h 50)n

Vous avez également, dans ces règles de rachat, c'est à la page... Je vous réfère aux pages 10 et 11, le rachat. C'est pour permettre à des gens, dans des conditions précises... Vous ne pouvez pas racheter 10 années, vous ne pouvez pas racheter dans n'importe quelles conditions, mais souvent il manque une petite partie d'un ensemble d'années exercées où l'employé a été à l'emploi ou a cessé d'être à l'emploi pour différentes raisons. Nous verrons tout à l'heure que ces raisons peuvent être variées: à la suite de maladie, à la suite de promotion à l'extérieur, par la suite de congé de maternité. Il y a toutes sortes de... il y a toutes sortes de conditions qui font qu'il y a eu parfois cessation de paiement des prestations visant à la retraite, et la possibilité existe pour l'employé, dans ce régime comme dans la plupart des grands régimes de retraite, de pouvoir racheter des années de service.

L'article 14 de cette loi, qui existait, est donc amélioré en modifiant, par le remplacement de certains paragraphes, certains alinéas... mais je veux juste vous citer un petit peu quelques précisions qui sont apportées: «le traitement admissible de chacune des fonctions dont le service est crédité en totalité; le traitement admissible de la fonction dont le service est crédité en partie, multiplié par le service crédité pour cette fonction sur le service accompli dans celle-ci. Les cotisations afférentes à la fonction visée [...] au deuxième alinéa sont ajustées pour tenir compte du traitement admissible ainsi déterminé.»

Et vous avez ensuite d'autres précisions qui sont apportées, tout ça pour encadrer le rachat d'années de service qui auraient pu être perdues. Le syndicat avait beaucoup insisté sur cet aspect-là des choses, et nous le comprenons très bien.

Nous avons aussi de nouvelles règles, j'y faisais allusion tout à l'heure, de nouvelles règles dans ce projet de loi pour faciliter les transferts de service entre le régime des agents de la paix en services correctionnels et le Régime de retraite des employés du gouvernement, le RRE, que vous connaissez bien, l'ancêtre du RREGOP, des employés du gouvernement et des organismes publics ? c'est le RREGOP ? et le Régime de retraite du personnel d'encadrement, le nouveau régime qui a été créé il y a quelques années.

Alors là, ce sont toutes les passerelles possibles entre ces régimes qui sont déterminées ici. C'est absolument nécessaire parce que, vous le savez bien, il arrive, pour de nombreux membres du personnel de l'État, de passer de gardien dans un palais de justice dépendant d'un ministère à... dans les services correctionnels, de la Sûreté du Québec, même parfois, vers les services correctionnels, et inversement. Il y a... Heureusement d'ailleurs, parce que ce serait évidemment dommageable qu'il n'y ait aucune possibilité, pour un membre d'un syndicat ou pour un employé de l'État, de pouvoir poser sa candidature à un poste dans un autre service. Mais, une fois que ces changements sont faits, il faut nous assurer que les rachats, que les transferts entre les différents régimes puissent se faire.

Et vous comprenez que c'est extrêmement complexe, hein, extrêmement complexe, puisque les règles qui s'appliquent à chacun de ces régimes sont différentes, et il faut une pondération extrêmement fine pour nous assurer que justice est rendue à tous ces employés, y compris à l'ensemble des employés. Vous ne pouvez pas déséquilibrer un régime, vous ne pouvez pas... Parfois, on nous demande de créer des régimes, et je sais qu'il y a des contentieux majeurs là-dessus, sur la question notamment des professionnels. Il faut savoir... on a créé un régime du personnel d'encadrement. Il faut savoir que ce sont des questions très complexes, c'est un équilibre. Si nous pouvons assurer des prestations à des milliers d'employés, c'est parce que les niveaux de contribution permettent de nous assurer, pour les années à venir, que ces prestations pourront être versées. Donc, il y a une très, très grande attention qui est portée, par les actuaires notamment mais aussi par les gestionnaires de régimes de retraite, pour s'assurer qu'il n'y ait aucune faille et que l'équilibre soit toujours maintenu.

Par ailleurs, le projet modifie certains régimes de retraite du secteur public afin de se conformer aux exigences fiscales et de déterminer les périodes d'application des différents taux d'intérêt. C'est extrêmement technique, M. le Président, mais qui dit régime de retraite implique nécessairement le ministère du Revenu, des règles fiscales, et la comptabilisation de ces règles fiscales d'un régime à l'autre doit être précisée. Et, lorsqu'il y a transfert et qu'il y a donc modification... Prenons un exemple très simple: si vous augmentez vos prestations de retraite parce que vous recevez d'un autre régime un montant, il est bien certain que votre catégorie fiscale, par exemple, sera modifiée. Et tout cela doit être pris en compte dans l'établissement d'un projet de... dans un projet de loi établissant un régime de retraite... modifiant un régime de retraite comme celui-ci.

Enfin, et c'est extrêmement intéressant d'en parler, M. le Président, j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure, enfin, dans les modifications qui sont apportées à ce projet de loi, il y a, et c'est tout à fait sain qu'il en soit ainsi, l'ajout, hein, le projet de loi prévoit l'ajout d'un vice-président à la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances. L'ajout d'un vice-président, parce que, si vous avez un régime, si vous voulez donner à ces fonctionnaires, à ces agents de la paix, à ces gardiens, à ce personnel de nos services correctionnels...

Ce sont plus que des gardiens ou des agents, hein? Ce sont des gens maintenant qui doivent faire de la réhabilitation, de l'encadrement, qui sont pris tous les jours avec des problèmes humains et des problèmes extrêmement complexes. Vous savez que c'est un métier difficile. On le sait, que les conditions psychologiques dans lesquelles s'exerce ce métier sont toujours complexes. Combien de cas de difficultés psychologiques ont été vécus, dans ce milieu qui, par définition, n'est pas un milieu habituel. Ce n'est pas l'Assemblée nationale, que voulez-vous que je vous dise, même si parfois nous avons des mots un peu forts les uns envers les autres, même si nous argumentons, même si nous discutons fortement. Il est évident que ce n'est pas le milieu carcéral. Ce n'est pas le milieu du commerce, ce n'est pas le milieu de la vie normale. Vivre huit heures, 10 heures par jour dans un milieu carcéral, à la limite, que vous soyez emprisonné ou que vous soyez gardien, c'est un milieu difficile. Et les conditions d'exercice de ce métier sont difficiles.

Et c'est pour ça que nous avons jugé valable que le gouvernement du Québec, dans sa continuité ? c'est ça, la continuité de l'État ? a jugé nécessaire de permettre un plan de carrière qui tienne compte de ces réalités difficiles, qui tienne compte de retraites qui peuvent se prendre de façon... de façon... Je n'arrive pas à lire les signaux que l'on me fait. J'imagine qu'on souhaite que je fasse encore...

Alors, M. le Président, je vais tout d'abord m'assurer que nous sommes ici suffisamment nombreux pour poursuivre cette discussion. Est-ce que vous pouvez vérifier si le quorum est parmi nous?

Le Vice-Président (M. Cusano): Effectivement, il n'y a pas quorum. Alors, qu'on appelle les députés.

n(11 h 58 ? 12 h 1)n

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, nous avons quorum. M. le député de Richelieu, vous pouvez continuer votre intervention.

M. Simard: Merci. Je suis convaincu que le député de Châteauguay va maintenir le quorum mais en restant à sa place. M. le Président, j'en étais à expliquer, à poursuivre mes explications sur la valeur des travaux qui ont conduit à ces modifications au régime de retraite. Je vous rappelle que nous sommes à l'étude du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives. Et je rappelais que, s'il nous avait fallu bonifier, améliorer ce régime de retraite, à la demande d'ailleurs des employés, c'est que nous avons été persuadés qu'il était nécessaire de permettre une évolution de carrière plus respectueuse des conditions difficiles dans lesquelles ce métier s'exerce.

Évidemment, lorsque vous modifiez un tel régime de retraite, notamment lorsque vous définissez la reconnaissance... C'est très long, vous savez, ça occupe de très nombreux articles, simplement la reconnaissance des années de service, parce que vous avez un personnel qui provient de différents groupes à l'intérieur de la fonction publique ou à l'extérieur et auquel il faut rendre justice dans la reconnaissance des années de service.

Évidemment, il y a des articles qui sont des articles de base, comme l'article 15: «Une année ou partie d'année de service est créditée, pour chaque année civile ? cela va de soi ? à l'employé pour le service qu'il accomplit si ? évidemment, c'est en fonction de sa contribution ? les cotisations ont été versées et n'ont pas été remboursées [ou] pour le service qui lui est autrement crédité en vertu [d'une disposition] de la présente loi.»

Alors ça, ce sont des conditions de base qui permettent d'établir quel est le service. Quand on parle du service, c'est le service reconnu. Comment, lorsqu'un employé, par exemple, dans l'année qui précède ou au cours de sa carrière, lorsqu'il veut savoir à quel moment il pourra prendre sa retraite, dans quelles conditions, c'est-à-dire quelles seront ses conditions financières, comment le régime pourra permettre de lui verser une retraite convenable, eh bien, lorsqu'il veut établir le montant qu'il peut attendre, il faut qu'il fasse établir quel est son service, quel aura été son service pendant ces années. Alors, les années de service, évidemment les conditions de base, je viens de les énumérer, mais le service, la loi le précise, est crédité selon le nombre de jours ou parties de jours pour lesquels l'employé a été cotisé ou exonéré et les jours ou parties de jours... Vous savez, c'est très précis, les parties de jours. 722 jours et demi, ce n'est pas la même chose que 723 ou... C'est extrêmement précis, les calculs qui sont faits pour la reconnaissance du service, dans un régime de retraite.

Un jour ou l'autre, nous arriverons nous aussi à ce moment, et nous irons à la CARRA, comme membres de l'Assemblée nationale, et nous aurons, le plus tard possible... Je ne le souhaite à personne en tout cas, je ne me le souhaite pas, M. le Président, vous comprendrez bien, c'est un métier passionnant, au service du public. Mais, un jour ou l'autre, il faudra bien passer à la CARRA pour faire évaluer notre service dans notre régime de retraite.

J'en profite d'ailleurs, s'il y a quelqu'un qui nous écoute, pour rappeler aux gens que notre régime de retraite, il est tout à fait modeste, très simple. Nous cotisons et, selon le nombre d'années où nous avons cotisé, nous recevons un montant. Il n'y a pas du tout... À l'âge de la retraite, hein, ce n'est pas avant. Si on le fait avant, on le fait avec des pertes actuarielles. Les gens ont gardé à l'esprit, et il faut sans cesse le rappeler, d'anciens régimes de retraite ou des régimes de retraite qui ont encore cours dans d'autres juridictions, dans d'autres gouvernements.

Ici, au gouvernement du Québec, certains peuvent le regretter, d'autres trouver cela plutôt normal, mais notre régime de retraite est extrêmement modeste. Il est, en gros, là, avec une contribution plus concentrée, parce que le nombre d'années... Il est rare que quelqu'un fasse 35 ou 40 ans ici, quand même. On le souhaiterait bien, mais enfin il faudrait arriver assez tôt. Il est rare qu'on entre à 18 ans pour sortir à 62 ans. Donc, il y a une certaine concentration des contributions. Mais il est exactement basé sur les mêmes règles de reconnaissance de service que ce régime de retraite que nous étudions à l'occasion de la loi n° 74 sur les agents de la paix, c'est-à-dire que nous contribuons, l'Assemblée nationale contribue, et, à la fin de notre service, nous recevrons, pour les années reconnues de service, rien de plus, rien de moins, simplement pour les années... Si vous avez fait sept ans, si vous avez fait 18 ans ou 21 ans, vous avez contribué pendant tant d'années et vous avez donc droit à la retraite au moment de l'âge de la retraite.

Les gens pensent que... Vous entendez tous, hein, n'est-ce pas: Une telle ou un tel a perdu ses élections, ce n'est pas grave, il a sa pension de député. Il y a à peu près 90 % de la population qui pense que ça existe, une pension de député. Non, nous sommes comme des employés de l'État, comme des serviteurs de l'État, nous sommes couverts par un régime de retraite, un régime de retraite à cotisation plus concentrée, pour les raisons que j'ai exprimées, mais qui fonctionne exactement de la même façon que les autres régimes de retraite et qui ne permet pas de prendre sa retraite pleine et entière avant l'âge de 60 ans. Si vous la prenez avant, c'est très simple, vous avez, comme dans tous les régimes, une pénalité actuarielle, vous êtes pénalisé et vous recevez moins. C'est donc dire que tous les régimes de retraite doivent calculer avec très grande précision, permettre à l'employé de savoir quel est son service reconnu, et les règles sont toutes précisées dans ces règles sur les années de service.

Il y a des règles très complexes qui concernent ceux qui peuvent occuper deux fonctions simultanément, dont chacune peut apporter une contribution différente au régime de retraite. Vous voyez les subtilités: «Si l'employé occupe simultanément plus d'une fonction visée par le présent régime, le service qu'il accomplit est crédité jusqu'à concurrence d'une année de service en commençant par celui afférent à la fonction dont le traitement de base annuel, qui lui est versé ou lui aurait été versé suivant les conditions de travail applicables le dernier jour de l'année, est le plus élevé.» Alors, vous voyez, si vous occupez une partie de fonction, vous êtes responsable d'une allée, d'un corridor dans un centre de détention, mais aussi, certains jours par semaine, vous faites partie du personnel d'encadrement, eh bien le régime de retraite prévoit que c'est celui qui vous donne... c'est la partie du travail que vous cumulez qui vous donne le revenu le plus élevé qui est prise en compte pour établir votre service, donc les années reconnues. Alors, vous voyez que c'est relativement complexe, ces programmes.

Vous avez d'autres modifications qui sont apportées. Je vous le souligne, c'est un travail... Certains peuvent s'étonner parfois que cela ait pris presque trois ans à établir ce projet de loi. Mais, lorsqu'on voit l'extraordinaire précision des détails... Et tout cela est négocié. Notre régime de base, dans tout ce qui concerne les retraites au Québec, pour le gouvernement du Québec, c'est sur la base de négociations. C'est un régime qui est géré de façon paritaire. La commission administrative qui gère les retraites, c'est un conseil d'administration où les retraités sont présents, où les syndicats représentant les travailleurs sont présents. Et c'est de l'entente très précise après une négociation que naissent des textes de projets de loi tels que celui que nous avons, aujourd'hui, devant nous. Ce n'est pas l'employeur qui dicte unilatéralement les conditions d'un régime de retraite. Un régime de retraite, c'est établi après discussion et négociation, et, dans le cas présent, à la satisfaction de toutes les parties, puisque le gouvernement nous dépose ce projet de loi et que les syndicats affectés par ce régime de retraite nous disent qu'ils sont satisfaits du résultat.

Alors, voilà comment on doit travailler. C'est comme cela que l'on avance. Si le gouvernement avançait comme cela dans tous les projets de loi et sur tous les projets qu'il met en place actuellement au Québec, il aurait sans doute moins de difficultés. C'est une façon très québécoise d'avancer dans la concertation et la collaboration, et ça fonctionne très bien. Nos régimes de retraite fonctionnent sur cette base, M. le Président.

n(12 h 10)n

Je ne m'étendrai pas davantage sur les précisions quant aux différents aspects de ce régime de retraite, sauf pour souligner qu'il modifie divers autres régimes: le Régime de retraite de certains enseignants; la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels; la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, c'est le RREGOP; la Loi sur le régime de retraite des enseignants, le RRE; la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires; et la Loi sur le régime de retraite du personnel d'encadrement, le nouveau régime dont j'ai parlé tout à l'heure.

Mais, en terminant, je voudrais faire part des inquiétudes du personnel des agents de la paix travaillant en milieu carcéral. Ils nous ont fait savoir dernièrement, à plusieurs reprises, et ils vont continuer à le faire, leurs inquiétudes, leurs inquiétudes pour l'avenir. Ils ont appris par les médias que le Québec s'apprêtait ? et c'est le ministre de la Sécurité publique qui a lancé la bombe il y a quelques mois, dans le public ? s'apprêtait à mettre sur pied des prisons privées gérées par le privé, c'est donc dire échappant évidemment à toutes ces règles ici, à cet article 74, à ces régimes de retraite, échappant aux conditions de travail négociées de la fonction publique.

On sait, et ça s'est passé en Ontario pour quelques prisons, sous le régime Harris, on sait que ces prisons privées gérées par le privé sont en général gérées par des grandes sociétés qui ont une expérience dans le domaine, ce sont les société américaines. Et on sait, parce qu'elles ne se gênent par pour le dire, que, si elles sont présentes dans ce secteur, ce n'est pas pour construire des prisons, c'est pour gérer des prisons, c'est parce qu'elles arrivent à gérer une prison avec un personnel moins important. Là où il fallait 500 employés, 500 membres du personnel pour s'occuper des prisonniers, bien il n'en faut plus que 350. Là où il y avait un personnel spécialisé chargé de la réhabilitation, de l'aide à la réhabilitation, eh bien, on coupe les angles, on diminue le service. Et c'est ce qui inquiète énormément actuellement les agents correctionnels.

Ils sont dévoués, ce sont des gens qui vivent souvent des conditions difficiles mais qui font un très bon travail, il faut le reconnaître. Et la perspective de voir les prisons du Québec dorénavant privatisées à la suite notamment du projet de loi n° 61, qui serait, si la partie ministérielle ne change pas d'avis, si la majorité impose sa loi, qui serait adopté, la possibilité de créer ces prisons privées inquiète au plus haut point ceux qui ont la charge quotidienne non seulement de maintenir à l'intérieur des murs, ce qui est la première fonction évidemment des agents de la paix en milieu correctionnel, mais surtout qui ont à entreprendre avec ces personnes qui leur sont confiées des programmes de réadaptation, des programmes qui leur permettent de préparer leur réinsertion dans la société.

Ces prisons privées, comme celle qu'on veut nous imposer en Montérégie, ces prisons privées ne sont bien accueillies par personne. Les associations qui travaillent un peu partout, les associations professionnelles et aussi les associations de bénévoles, les associations de personnes qui se consacrent à la réhabilitation des personnes détenues sont toutes unanimes à dénoncer vigoureusement le projet de loi n° 61 et les conséquences qu'il pourrait avoir sur la réhabilitation des prisonniers au Québec. Nous avons ici une façon différente de faire qu'aux États-Unis. Ici, nous croyons à la réhabilitation. D'ailleurs, vous le savez, puisque vous avez vous-même, M. le Président, été intéressé. C'est la même chose pour les mineurs, nous avons une loi, nous avons une façon de faire... Enfin, nous avions, avant que le gouvernement fédéral se mette à uniformiser les règles, nous avions notre propre façon de réintégrer les mineurs en dehors ou le plus loin possible des judiciarisations classiques, simplement des peines punitives. Nous avions développé, au Québec, des formules originales et qui fonctionnent. Eh bien, de la même façon, notre société croit profondément qu'il y a, pour la majorité de ceux qui doivent payer leur peine à la société, la possibilité d'être réhabilités. Et c'est dans ce climat moins violent, moins caricatural de la prison classique, M. le Président, que nous avons fait évoluer le système carcéral au Québec.

Je vous réfère, et on n'a pas besoin de citer de nombreux titres là-dessus, je vous réfère aux dizaines de films américains que vous avez pu voir, ces dernières années, de ces prisons inhumaines, surchargées, ces prisons où le seul objectif est de séparer les gens, de les isoler, et ces prisons qui sont, il faut bien le dire, des écoles du crime, des prisons qui exacerbent, chez les gens qui y sont en contention pendant des années, qui exacerbent des goûts de violence et de vengeance. Nous avons, nous, tout fait, dans notre société, pour éviter ce type de mise en contexte, de conditionnement qui a mené, ailleurs, à des sociétés beaucoup plus violentes. Lorsque vous avez les pourcentages, d'ailleurs, de gens incarcérés, comme dans des pays voisins, vous pouvez constater que le système a échoué. Lorsque les gens reviennent systématiquement, à la fin de leur condamnation, parce qu'ils ont commis de nouveaux crimes, c'est que le système échoue. Je ne dis pas que notre système réussit à tout coup, mais au moins il vise et prend les moyens nécessaires pour améliorer la situation.

Donc, les agents correctionnels, qui ont bien reçu le projet de loi n° 74, avec lesquels nous nous sommes entendus en 2001 pour une nouvelle convention collective de travail qui leur a donné de meilleures conditions, eh bien, ces agents correctionnels aujourd'hui disent au gouvernement: Attention, le projet de loi n° 61 est pour nous un mauvais projet de loi, un projet de loi qui menace cette qualité des services que la société québécoise a toujours voulu entretenir dans ses maisons carcérales, dans ses prisons.

M. le Président, j'en appelle aux députés d'en face. Le projet de loi qui crée les partenariats public-privé, ce n'est pas une abstraction. Ce sont des hôpitaux, des prisons, des écoles, ce sont des services publics qui seront transférés à la gestion privée, et ce qui, lorsqu'on le regarde comme il faut... on l'a vu ce matin encore dans le débat sur l'eau, lorsqu'on regarde attentivement, c'est toujours au détriment de la qualité des services, c'est toujours au détriment d'une vision que nous avons toujours entretenue ici, d'une société soucieuse de la qualité du service rendu au citoyen plutôt qu'une simple économie faite d'ailleurs essentiellement par l'entreprise privée. Vous savez, ces formules reviennent toujours à une formule très simple: quand il y a des risques, il n'y a pas de privé. On socialise les risques, c'est l'État qui prend tous les mauvais cas, et, quand il y a des profits, évidemment c'est l'entreprise privée qui peut en faire de juteux.

Il n'y a, pour le citoyen, qu'il soit contribuable, ou payeur, ou celui qui doit payer des tarifs qui ne cessent de se multiplier et d'être en hausse, M. le Président, il n'y a aucun avantage pour le contribuable, pour le citoyen à ces formules de partenariat public-privé, en tout cas certainement pas dans le cas des prisons. Dans le cas des prisons, là, je vous invite à faire une analyse en profondeur de cette question, à consulter des personnes qui travaillent dans ce secteur, à vous interroger sur les finalités du régime carcéral, et vous verrez que ce qui s'est fait au Canada en général et au Québec en particulier est très nettement supérieur à ce qui se fait dans les pays où on a développé des prisons privées.

n(12 h 20)n

Alors, si j'en parle, M. le Président, à la fin de mon allocution, de mon intervention sur le projet de loi n° 74, c'est que je voulais saluer l'excellent travail des agents de la paix, féliciter ceux qui, au Conseil du trésor et à la Commission administrative des régimes de retraite, ceux qui... aux syndicats d'ailleurs, les représentants syndicaux qui ont travaillé en collaboration avec nos fonctionnaires à préparer ce projet de loi, pour les féliciter pour un travail en général bien fait. Il reste à voir, en commission parlementaire, si tous les détails sont parfaitement impeccables. Il se glisse toujours, dans des lois d'une telle précision, il se glisse toujours des erreurs, il se glisse toujours des imprécisions. Le travail des parlementaires, c'est de prendre le temps nécessaire sérieusement. Il ne s'agit pas de faire perdre le temps à personne, il s'agit de travailler à améliorer constamment la qualité de ces projets de loi.

Mais je peux d'ores et déjà dire, M. le Président, que nous avons entre les mains un projet de loi de qualité, qui est à la hauteur des autres projets de loi, des autres lois qui régissent les régimes de retraite au Québec. Et je ne peux que souhaiter que nous continuions, dans notre société, au gouvernement du Québec, avec nos fonctionnaires, d'agir de façon toujours aussi responsable, en coopération, en concertation, afin d'en arriver à l'amélioration des conditions de travail des employés du Québec. Je vous remercie, M. le Président, de m'avoir écouté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Richelieu. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 74?

Mise aux voix

Alors, est-ce que le principe du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels et d'autres dispositions législatives... est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la Commission des finances publiques

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques pour étude détaillée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Cusano): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Je vous réfère à l'article 2 de notre feuilleton. Article 2, M. le Président. Merci.

Projet de loi n° 57

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'article 2, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 décembre 2004 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Berthier.

M. Alexandre Bourdeau

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. M. le Président, sûrement, comme moi, dimanche passé, vous avez écouté Radio-Canada, Tout le monde en parle, une émission très populaire au Québec, qui nous fait voir les facettes de différentes personnalités, d'autres facettes qu'on connaît moins. On a appris justement, ce dimanche-ci, que la conscience sociale du gouvernement était rendue le ministre de l'Environnement.

Dans une grande allocution, le ministre de l'Environnement s'est targué d'être celui défenseur de la gauche à l'intérieur de son parti, en expliquant que, bon, dans les différents partis, étant donné que la Chambre n'était pas divisée entre gauche et droite mais plutôt entre souverainistes et fédéralistes, ça faisait en sorte que, dans les partis, on trouvait des gens un peu à la gauche, d'autres plus à la droite. Et il se targuait d'être la conscience sociale. Je comprends, M. le Président, pourquoi, aujourd'hui, je suis obligé d'intervenir sur un projet de loi n° 57 si la conscience sociale du gouvernement c'est le ministre de l'Environnement. Je comprends pourquoi maintenant les groupes ont décrié autant ce projet de loi qui est un recul social clair pour les personnes qui en ont le plus besoin.

Je pense que c'était clair que la majorité des groupes demandaient le retrait du projet de loi. Nous-mêmes, à l'opposition officielle, on demande ce retrait, simplement. Et on a fait une motion de report, hier, justement pour laisser la chance au gouvernement de retravailler ce projet de loi là, qu'il soit réellement un projet de loi qui va lutter contre la pauvreté et qui va aider. Puis, particulièrement dans mon cas, je pourrais vous dire, M. le Président, ce qui m'intéresse, c'est d'aider beaucoup plus les jeunes à pouvoir à la fois réinsérer le marché de l'emploi mais peut-être aussi à retourner au niveau de l'éducation, au système d'éducation pour trouver une formation adéquate pour qu'ils puissent, à plus long terme, réinsérer le marché de l'emploi et participer plus activement à la société.

Il faut comprendre, M. le Président, qu'une des premières choses sur lesquelles j'aimerais venir aujourd'hui, c'est, malheureusement... Lorsqu'on fait des discours qui nous tentent ? un peu comme j'expliquais à la blague, là, au début de mon intervention, sur le ministre de l'Environnement ? lorsqu'on fait des interventions et on se targue d'un sujet, il faudrait que les actions qui viennent soient dans la même lignée que les paroles que l'on fait. Malheureusement, le ministre de la Solidarité sociale, depuis l'arrivée en poste, et le gouvernement aussi, il n'y a pas cette logique-là. Au contraire, il y a des contradictions entre les paroles et les gestes.

La première, je pense, M. le Président, plusieurs de mes collègues en ont parlé en cette Chambre, mais je crois qu'il est important de revenir là-dessus parce qu'il ne s'agit pas simplement d'une parole qui, suite à une question soit d'un journaliste ou d'une intervention, peut être mal interprétée, il s'agit d'un texte, d'un texte qui est écrit, qui a été tapé, qui a été relu, je suis certain, plusieurs fois par le premier ministre, anciennement chef de l'opposition officielle lorsqu'il a envoyé ce texte lors de la dernière campagne électorale. C'est un texte qui a été, j'en suis sûr, revu et corrigé. Et, dans ce texte, on voyait ce que le gouvernement promettait de faire, ce que le gouvernement allait faire si le Parti libéral était élu.

Et je lis, M. le Président. M. le premier ministre, chef de l'opposition, dans le temps, nous disait que «nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes». Hein, on parle de l'urgence. Il faut comprendre que, pour le gouvernement, l'urgence n'est peut-être pas la même que la nôtre. Lorsqu'on parle d'urgence, il me semble que c'est rapide. Juste le projet de loi... Juste le plan d'action, plutôt, pour lutter contre la pauvreté, au lieu d'être rendu public en mai 2003 comme ça aurait été supposé ? ils étaient au pouvoir, là, ça faisait plus d'un mois ? au lieu d'adopter et de faire le plan d'action, il n'a été fait qu'en avril 2004. On s'entend que le sentiment d'urgence du gouvernement, on le voit, il est très, très flexible et très, très, très laxatif.

Des voix: ...

M. Bourdeau: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir un peu de décorum en cette Chambre?

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député, je comprends qu'il faut qu'il y ait du décorum, mais j'aimerais bien qu'on fasse bien attention aux paroles qu'on emploie ici, dans cette Assemblée. Alors, je demande la collaboration de tout le monde, et à ma droite et à ma gauche.

M. Bourdeau: Quelles paroles, M. le Président, ai-je tenues en cette Chambre?

Le Vice-Président (M. Cusano): Je ne répéterai pas. Je vous demande votre collaboration, vous pouvez poursuivre.

M. Bourdeau: On a été laxiste sur le principe de l'urgence. Il est clair qu'on a attendu plus d'un an avant de déposer un plan d'action qui était demandé, qui aurait dû être adopté en mai 2003 mais que le gouvernement a décidé de reporter. Mais ce n'est pas là-dessus que je veux en venir, M. le Président, je continue ma citation. Lorsqu'on prévoit «déjà l'adoption de certaines mesures urgentes dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu et les personnes assistées sociales», à ce jour encore, M. le Président, ça n'a pas été rendu.

On parle aussi, et là c'est plus qu'une promesse, ça a été un cheval de bataille pour le gouvernement lorsqu'il était à l'opposition officielle, on parle de «l'indexation des prestations de dernier recours, l'établissement d'un seuil minimal de prestation, barème plancher». Quand on parle d'indexation, je me souviens, M. le Président, lorsque j'étais ailleurs et non en cette Chambre, écoutant les débats de l'Assemblée nationale ? parce que j'aime beaucoup, comme plusieurs gens de chez nous le font aussi, écouter ces débats à l'Assemblée nationale ? je me souviens souvent avoir entendu l'opposition officielle demander qu'il y ait une pleine indexation. Ils arrivent au gouvernement, et là tout d'un coup ils se disent: Bien, là, on ne le fera pas. On recule.

Mais pourtant, pendant la campagne électorale, ils ont décidé de dire: Oui, nous allons le faire, nous allons indexer les prestations. Et malheureusement ça n'a pas été fait. Et, lorsqu'on parle d'augmentation du cynisme dans la population, justement des propos qu'on tient comme ceux-là, en disant: Nous allons faire ceci, mais qu'au bout de la ligne on ne le fait pas, comment voulez-vous que la population ait confiance par après? Je pense que le taux d'insatisfaction, qui est assez constant, du gouvernement actuel, je pense que c'est évident que ce taux d'insatisfaction là vient, entre autres, à cause de décisions qui ne tiennent pas compte des paroles et des engagements qu'ils ont pris lors de la dernière campagne électorale.

Et c'est la question que je me pose, M. le Président, c'est simplement une question que je me pose, et j'espère que ce n'est pas ça, j'espère réellement, M. le Président, que ce n'est pas le cas. Mais j'espère que le gouvernement du Parti libéral n'a pas fait de la politique sur le dos des gens qui en ont vraiment besoin. Parce que, si c'est vrai, M. le Président, c'est totalement inacceptable dans une société que des gens, des représentants de parti politique décident, dans le but de ramasser le plus de votes possible, de faire des promesses qu'ils ne tiendront jamais, surtout sur le dos de ceux qui en ont le plus besoin. J'espère que ce n'est pas ça. J'espère réellement que ce n'est pas le cas. Mais actuellement, avec le projet de loi n° 57 et avec ce qui s'est passé depuis que le gouvernement est en place pour lutter contre la pauvreté, je m'excuse, mais j'ai bien de la difficulté de dire aux gens: Non, non, ils n'ont pas fait de politique avec ça.

n(12 h 30)n

Et je prends un exemple qui touche plus directement les jeunes, qui a été la coupe dans les prêts et bourses. C'est les jeunes les plus démunis qui ont été coupés, ceux qui avaient plus besoin de cet argent-là, on a décidé de couper 103 millions pour eux. On a un projet de loi n° 57 antisocial. C'est difficile de dire que le gouvernement... lors des élections, le Parti libéral n'a pas fait de politique là-dessus, mais je le souhaite, je souhaite qu'ils n'ont pas fait cette démarche-là simplement dans le but de ramasser des votes.

Quand je vous parlais des paroles qui ne vont pas avec les gestes... ou du moins est-ce que le ministre de la Solidarité sociale a assez de poids au sein du Conseil des ministres pour que ses paroles puissent devenir des gestes du gouvernement? On a appris qu'il y a eu aussi une coupure de 57 millions dans les budgets d'Emploi-Québec, ce qui fait en sorte que, même si le ministre veut réellement, a réellement l'intention d'aider ceux qui en ont le plus besoin, est-ce que l'argent est au rendez-vous? Non.

Et la plus belle preuve là-dessus... et je vous reviens là-dessus parce que je parlais du plan d'action pour lutter contre la pauvreté, je parlais de ça tout à l'heure, M. le Président. Ce qui me dérange aussi là-dedans, et je reviens un peu au fait que je me pose des questions sur la réelle volonté du gouvernement et non la politicaillerie du gouvernement sur les questions de pauvreté, ce que je me pose comme question, M. le Président: Pourquoi que le projet de plan d'action du gouvernement, qui a été déposé en grande pompe en disant que le ministre allait annoncer un investissement de 2,5 milliards sur cinq ans pour lutter contre la pauvreté, quand on analyse ce plan-là, ce qu'on se rend compte, c'est que, comme les chèques aux familles, ça va être autofinancé, hein? On va aller chercher dans la poche de quelqu'un pour pouvoir financer ça puis financer ces projets-là, comme les chèques aux familles où on va aller chercher dans les poches de tous les Québécois et qu'on va remettre des chèques par après, comme le bon père Noël ou les frigidaires dans le temps de Duplessis.

Si je regarde l'autofinancement du plan d'action pour lutter contre la pauvreté, on parle d'augmentation, par exemple des tarifs de services de garde, hein? Ça fait 170 millions de plus pour cinq ans, ce qui amène une augmentation de 850 millions. Je parle de l'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles: 203 millions par année encore là fois cinq ans, on arrive à 1 015 000 000 $; une augmentation des tarifs d'hydroélectricité, 623 pour cinq ans, 3,1 milliards d'augmentation; augmentation des primes d'assurance médicaments, 62 millions par année par cinq ans encore une fois, 310 millions d'augmentation. Et ce n'est pas terminé, M. le Président: indexation des tables d'impôt de 2 % plutôt que l'IPC, 140 millions par année pendant cinq ans, ça donne 700 millions; l'indexation des prestations d'aide sociale à 2 % plutôt que l'IPC, 29,3 millions par année fois cinq ans, ça fait 146,5 millions ? je commence à manquer de salive, M. le Président; hausse des tarifs de transport en commun, 56 millions par année fois cinq ans, ça fait 280 millions; et là je termine avec la clause Tanguy...

Une voix: ...

M. Bourdeau: Quel article?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Aïe! Un instant, là! Un instant, M. le député!

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le député. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: On a un président qui est en mesure d'apprécier les règlements.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre! Un instant! Mme la leader adjointe du gouvernement, je vous reconnais.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais rappeler à l'attention de notre collègue l'article 239 de notre règlement qui porte sur le débat qui nous occupe présentement et qui dit que celui-ci doit porter «exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins». Je sais que la jurisprudence permet un débat assez large, mais minimalement le débat doit se limiter aux principes fondamentaux du projet de loi n° 57, qui est la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

Le Vice-Président (M. Cusano): Mme la leader adjointe du gouvernement, l'interprétation de cet article, dans le passé, a été très large, et j'invite tout le monde et j'invite le député de s'en tenir le plus possible sur le coeur du projet de loi. M. le député.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Je parle exactement de ce sujet-là, je parle des familles, je parle de ce que le gouvernement a fait, et je parle surtout de démontrer que les paroles du ministre et les actions du ministre ne sont pas les bonnes, ce qui fait en sorte... qui justifie le fait que le projet de loi n° 57 doit être retiré. Je pense que c'est assez clair, de ce côté-ci de la Chambre. J'espère que le gouvernement continuera de m'écouter et essaiera de comprendre mon intervention.

Je termine, M. le Président, avec les coupures, plutôt l'autofinancement du plan action. Là, on parle de la clause Tanguy. La clause Tanguy, j'y reviendrai tout à l'heure, M. le Président, une clause tout à fait inutile et stupide. Mais ça, je reviendrai tout à l'heure, M. le Président. On parle de 44 millions par année par cinq ans, 220 millions de dollars. Total sur cinq années, c'est 6,6 milliards de dollars qu'on va chercher. Vive l'autofinancement! Le gouvernement devient de plus en plus... prend cette vilaine habitude d'aller chercher l'argent ailleurs pour l'investir... pas directement dans les besoins prioritaires.

Je parlais, M. le Président, de la clause Tanguy, cette clause qui va contre tout principe de solidarité intergénérationnelle, de solidarité familiale. Je vous donne un exemple, M. le Président, et c'est un exemple concret de chez nous. Il y a une dame que je connais qui doit aider sa mère gravement malade, qui est tombée gravement malade dernièrement, qui malheureusement doit abandonner... qui doit justement avoir le soutien du gouvernement. Et là ce qu'on lui dit, c'est: Étant donné que tu vas être avec quelqu'un d'autre que tu dois soutenir, à cause de ça, bien on va te couper 100 $.

M. le Président, quand on parle d'équité entre les générations ? puis je sais que le gouvernement en parle souvent, O.K., mais malheureusement, comme je l'explique, ses gestes ne vont pas avec ses paroles ? lorsqu'on parle d'équité entre les générations, c'est justement un exemple concret que, lorsqu'on fait de telles clauses dans un projet de loi, ça fait en sorte que des gens vont être pénalisés. De plus, M. le Président, lorsqu'on est plus jeune, par exemple, et que malheureusement on a ? excusez-moi l'expression ? une mauvaise passe et qu'on a besoin d'être chez nos parents, je ne pense pas qu'en se faisant couper 100 $ sur notre chèque, ça va nous permettre justement de mieux se relancer dans la vie. Au contraire, je pense que des programmes tel Solidarité jeunesse ont fait leurs preuves justement pour permettre aux jeunes de se réintégrer.

M. le Président, il faut comprendre aussi que ce projet de loi là n'a pas été simplement décrié par l'opposition, il a été décrié par de nombreux groupes, dont certaines personnes... qu'on parle d'un projet de loi sur l'insécurité sociale et non sur la sécurité sociale. Et je vous cite M. Réjean Parent, président de la CSQ, qui, lors des consultations du 3 novembre 2004... «Je plains un peu le ministre dans le fond parce que [...] j'ai toujours le sentiment qu'il a les mauvais projets de loi dans les mains. Il est ministre de la Solidarité sociale alors qu'on a un projet de loi qui fait plus dans l'insécurité sociale.»

Il y a un communiqué de la CSN aussi qui est sorti en octobre dernier qui nous disait que «le projet de loi ne comporte aucune mesure concrète visant à améliorer ou même à stabiliser la situation des plus pauvres parmi les pauvres. La CSN déplore également l'absence de mesures de protection visant les salarié-es à statut précaire, dont le nombre est en augmentation constante, et qui se retrouvent trop souvent à cause de cette précarité en situation de pauvreté.»

Et là j'interpelle le premier ministre directement et le ministre de la Jeunesse, qu'il puisse parler à son ministre. Il est quand même premier ministre, il doit parler, de temps en temps, d'après moi, avec son ministre de la Solidarité sociale. Puis il serait peut-être intéressant que le premier ministre et le ministre de la Jeunesse s'occupe un peu du dossier de la jeunesse, qu'il arrête de le tabletter, qu'il s'en occupe, qu'il dise à son ministre que justement ce qu'il est en train de faire, c'est de créer encore plus de précarité chez les jeunes et de causer encore plus de difficultés.

n(12 h 40)n

Et je vais revenir sur... dans le projet de loi, il y a une partie qui s'appelle Alternative jeunesse. Le premier ministre, au Forum des générations, nous a affirmé à tous et à tous les groupes jeunes qui étaient là qu'il allait consulter les groupe jeunes pour justement les inviter à participer à l'élaboration de la nouvelle Stratégie action jeunesse du gouvernement, étant donné que le Plan d'action jeunesse va être à échéance en 2005. Le problème là-dedans, M. le Président, c'est qu'une bonne partie du Plan d'action jeunesse se retrouve actuellement dans le projet de loi du ministre de la Sécurité sociale. Et, lorsque deux groupes jeunes sont venus en commission parlementaire intervenir sur le projet de loi n° 57, aucun représentant de la jeunesse n'était présent à la commission parlementaire, ce qui a été décrié à la fois par les groupes, par l'opposition officielle, en disant: Ça n'a pas de bon sens parce que, si on adopte le projet de loi n° 57, le coeur de la politique jeunesse va déjà avoir été adopté sans qu'il y ait eu de réelles consultations de tous les organismes jeunesse qui s'occupent justement du bien-être tant au niveau de l'éducation, de l'emploi que des jeunes en difficulté. Et malheureusement on va faire cette erreur-là. Et encore une fois le premier ministre, qui est supposé être ministre de la Jeunesse, nous dit qu'il va consulter, mais du même côté laisse passer un projet de loi qui va directement toucher la nouvelle stratégie jeunesse.

Et on comprend que, dans le régime dans lequel on vit, l'opposition officielle ne renversera pas du jour au lendemain un gouvernement par le vote. Le ministre s'entête toujours à vouloir garder son projet de loi, même si la majorité des groupes est contre et demande le retrait, le ministre décide de continuer dans sa ligne. Nous, ce que nous demandons, et je le répète, plusieurs de mes collègues ont fait part au ministre de nos demandes, je redemande encore les mêmes choses pour que le ministre puisse réellement comprendre et faire les modifications qui seraient acceptables.

On parle de l'indexation annuelle automatique à 100 % pour tous les prestataires; on parle de l'introduction du principe de couverture des besoins essentiels; on parle d'inclure un véritable barème plancher; de développer une vision relativement à la prime à la participation; retirer des modifications réglementaires du 22 septembre dernier, incluant la fameuse clause Tanguy; exempter les pensions alimentaires du calcul de la prestation d'aide sociale; préciser ses intentions relativement au rehaussement des actifs dans le calcul de la prestation; assurer la disponibilité des mesures d'insertion en emploi; faire un réel débat public avec les principaux intéressés sur un document qui assurera une réelle couverture des besoins essentiels et qui fait preuve d'une véritable volonté d'améliorer le sort des personnes démunies, tel que le Québec s'y est engagé avec l'adoption à l'unanimité de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Et, moi, j'ai une autre demande plus personnelle aussi, c'est au niveau stratégie jeunesse. Est-ce qu'on pourrait rendre public ce serait quoi exactement, la structure, la façon de faire, les programmes inclus, pas simplement les programmes qui existent déjà mais la façon que ça va fonctionner? On a des organismes jeunes, au Québec, qui sont forts, qui sont solides et qui sont là justement... qui pourraient donner un bon avis au gouvernement sur la nouvelle Stratégie d'action jeunesse, qui pourraient influencer justement ce projet de loi qu'on a actuellement à l'étude. Mais malheureusement le premier ministre, pour différentes raisons, ne veut pas les consulter. Entre autres, les fédérations étudiantes, on attend encore l'appel, les fédérations attendent encore l'appel du premier ministre pour être consultées. Ce serait important de le faire, M. le Président, parce que, si on adopte un projet de loi qui va toucher directement les plus jeunes, les jeunes en difficulté, sans vraiment avoir fait de consultation auprès des groupes jeunes intéressés, moi, je trouve que c'est inacceptable pour un gouvernement qui se dit transparent.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Berthier. Alors, je suis prêt maintenant à reconnaître la prochaine intervenante qui est Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, encore faut-il se rappeler les engagements du gouvernement libéral à l'égard des personnes appauvries de notre société, et je voudrais, ici, rappeler la lettre que signait l'actuel premier ministre, à l'époque chef du Parti libéral du Québec, le 7 avril 2003, à six jours de l'élection qui a porté le gouvernement au pouvoir, et qui écrivait au mouvement ATD Quart Monde qui, depuis deux décennies, s'occupe très activement des personnes qui vivent en situation d'exclusion dans notre société, et lettre qui, à plusieurs copies d'ailleurs, a été envoyée à de nombreux organismes, où on retrouve les engagements du Parti libéral.

Et ces engagements se lisent ainsi: «C'est d'ailleurs pour cette raison que le Parti libéral du Québec a appuyé la démarche du collectif. Nous sommes fiers de notre participation aux travaux. Nous sommes fiers des améliorations significatives que nous avons proposées au projet de loi déposé en juin 2002 ? loi pour lutter contre la pauvreté, M. le Président ? notamment de l'ajout d'une clause d'impact et du principe d'un barème plancher.» Donc, un engagement ferme sur une clause d'impact, impact des décisions gouvernementales sur l'appauvrissement des personnes dans notre société. Donc, d'une part, clause d'impact et principe d'un barème plancher.

Alors, le premier ministre écrivait encore: «Le chemin à parcourir est maintenant tracé par la loi.» Donc, on voit très bien qu'il souscrivait d'une manière inconditionnelle et qu'il s'engageait à appliquer cette loi, donc à y réaliser la clause d'impact chaque fois qu'il y aurait des décisions gouvernementales qui seraient prises à l'égard des personnes démunies, et également à maintenir le principe d'un barème plancher.

Il ajoutait également: «Nos engagements prévoient l'adoption de mesures urgentes dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu et les personnes assistées sociales, l'indexation des prestations de dernier recours ? qui sont les prestations de sécurité du revenu ? l'établissement d'un seuil minimal de prestation ? barème plancher ? en deçà duquel aucune pénalité ne sera imposée, sauf en cas de fraude ? ajoutait-il. De plus, le cadre financier de notre programme prévoit un investissement de 850 millions au chapitre de la valorisation du travail et du soutien du revenu.»

Je pense qu'il nous faut nous rappeler ces événements, qui sont quand même récents ? c'est il y a 18 mois de cela ? pour comprendre mieux la colère qui anime les milieux associatifs, les intervenants et intervenantes qui travaillent auprès des personnes pauvres, des personnes qui sont démunies dans notre société, pour comprendre le rassemblement de 10 000 personnes du réseau de vigilance le 20 novembre dernier, pour comprendre les 2 000 appuis individuels et de groupes qu'a reçus la campagne d'appui menée par le Collectif pour un Québec sans pauvreté cet automne, et en fait pour comprendre, je pense, l'immense sentiment d'avoir été trompés qui anime ces milieux qui travaillent, vivent auprès des personnes pauvres.

Et je voudrais simplement citer un extrait très court de la chronique de Michel David, journaliste au journal Le Devoir...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. M. le député de LaFontaine.

M. Tomassi: ...inviter le député de Chicoutimi à ne pas utiliser son téléphone cellulaire pendant que sa collègue fait son intervention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, vous invoquez le décorum. M. le député de Chicoutimi, vous êtes bien au courant que l'utilisation du cellulaire, en cette Chambre, est interdite. Alors, Mme la députée, vous pouvez continuer.

Mme Harel: Donc, M. le Président, je citais Le Devoir du 13 novembre dernier ? il y a maintenant à peine quelques semaines ? où on pouvait lire ceci: «Promettre d'établir un barème plancher pour mieux l'abaisser, quelle sinistre farce! Les stratèges libéraux doivent encore se bidonner au souvenir de cette époque où le Parti libéral du Québec avait entrepris de profiter du mécontentement provoqué par la course au déficit zéro pour doubler le PQ sur sa gauche.»

Alors, M. le Président, c'est cela qui est certainement le plus décourageant pour les citoyens qui ont cru aux engagements du premier ministre actuel, c'est que ses engagements se sont volatilisés, finalement n'étaient que de sinistres promesses électorales qui ont été... en fait, ils ont le sentiment d'avoir été trompés.

Et je voudrais, M. le Président, rappeler ce que disait le Collectif pour un Québec sans pauvreté, lors de la rencontre qui s'est tenue ici même, à l'Assemblée nationale, il y a quelque jours de cela, et je les cite: «Le projet de loi n° 57, déposé en juin 2004 pour remplacer la présente Loi sur l'aide sociale, augmenterait la pauvreté et l'insécurité. Plusieurs infractions à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale ? y sont incluses ? et défaut de se conformer à ses exigences sur une prestation minimum protégée de toute réduction, sur la protection des biens et de l'épargne, sur la pension alimentaire.»

n(12 h 50)n

Alors, on y ajoute, M. le Président: «Disparition complète du fondement sur les droits et les besoins.» On dira même que ce projet de loi n° 57 ramène le Québec à l'arbitraire des régimes particuliers d'avant la première Loi sur l'aide sociale en 1969, dont j'ai ici quelques extraits d'ailleurs. Alors: «Disparition complète ? donc ? du fondement sur les droits et les besoins. Aucune disposition pour garantir et hausser les prestations. Remplacement du régime actuel par une série de programmes particuliers dont plusieurs seront sans droit de recours. Renforcement de la division entre "bons" et "mauvais" pauvres. Usage fallacieux des préjugés et de la doctrine de l'incitation au travail ? tout en ayant aboli le Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail qui a donné des résultats spectaculaires au Québec entre 1997 et 2003, ils l'ont aboli, M. le Président, mais enfin ? pour diminuer les conditions faites aux prestataires sans contraintes à  l'emploi alors que 30 % ont des revenus de travail. Perte de la garantie dans la loi de l'allocation pour contraintes temporaires à l'emploi pour les 55 ans et plus.» Et contrairement à l'engagement du premier ministre: «Aucune analyse des impacts appauvrissants, tel que la loi pourtant le prescrivait.»

Et on concluait, le collectif concluait: «...c'est un projet de "réingénierie" néolibérale qui ouvre la porte au retrait de l'État de ses responsabilités vers des partenariats qui renverront les problèmes à la société ou à de nouvelles formes de sécurité du revenu privée.»

M. le Président, ce sont des reculs extrêmement importants, qui ont amené l'ensemble du milieu associatif à réclamer le retrait du projet de loi n° 57, entre autres parce que ce projet de loi contrevient à la loi adoptée ici même à l'unanimité en juin 2003. Alors... C'est-à-dire en décembre plutôt... en juin 2002, excusez-moi.

M. le Président, je m'en voudrais... À ce moment-ci des travaux de l'Assemblée, je sais que peu de temps m'est imparti pour signaler un problème très grave qui va se présenter dans les mois qui viennent. J'en prends à témoin les collègues parlementaires qui sont ici présents aujourd'hui. J'ai eu l'occasion, hier, de rencontrer, dans l'est de Montréal, les intervenants qui constituent des organisations communautaires qui travaillent auprès des familles. Alors, ce sont des organisateurs communautaires qui sont directement en contact avec les familles démunies et qui me disent leurs très, très vives inquiétudes, leurs très, très vives préoccupations à l'égard d'un chèque de trois mois et demi qui va être envoyé aux familles dans quelques jours.

Moi, je mets au défi, M. le Président, n'importe quel d'entre nous, moi la première, sans doute vous et sans doute tous les membres de cette Assemblée, de pouvoir gérer à trois mois d'une prestation, alors qu'ils auront ce chèque dans quelques jours, qu'ils devront étirer jusqu'au 1er avril. Ils reçoivent le chèque avant Noël, ils doivent vivre avec ce chèque jusqu'après Pâques. Je vous le dis honnêtement, M. le Président, si nos rémunérations n'arrivaient pas à tous les 15 jours, plusieurs d'entre nous trouveraient difficile d'administrer leur budget mensuellement. Très difficile. Il faut avoir beaucoup le sens de l'organisation pour administrer un budget mensuel. Mais imaginez-vous que ce budget va être trois mois et demi, et c'est certain qu'il faut être déconnecté pour penser que les problèmes ne vont pas surgir dès le mois de février prochain.

Il est évident qu'en situation de privation, en situation de dénuement l'arrivée d'un chèque comme celui qui sera transmis par le gouvernement, l'arrivée d'un chèque comble des besoins qui ont été longtemps différés. Mais quelles seront le conséquences de cela fin janvier, fin février, fin mars, M. le Président? Alors, on voit déjà les shylocks s'approcher des quartiers des familles en difficulté, des familles démunies. Et je ne veux pas être prophète de malheur, mais je veux mettre en garde chacune des personnes ici présentes, parce que nous aurons certainement malheureusement l'occasion, en mars prochain, à la rentrée parlementaire, de parler de cet effet foudroyant qu'aura l'attitude du gouvernement sur les familles au printemps prochain. M. le Président, imaginez-vous ça, là, si un chèque nous arrivait puis qu'on avait besoin de gérer l'essentiel en payant... Parce que ça servait à payer le loyer, ça servait à payer l'essentiel de la vie, ça ne paie pas du plus, si vous voulez, tous ces revenus qui sont reçus par des familles en situation de privation.

Et, M. le Président, je veux rappeler que, contrairement à ce que dit le ministre, qui joue à l'apprenti-sorcier avec des effets de laboratoire où ses éprouvettes vont sauter dans le visage des familles, contrairement à ce que dit le ministre, ce n'est pas de l'argent de plus qui est envoyé aux familles.

Faisons le décompte, M. le Président. Est-ce que vous êtes au courant qu'au 1er janvier qui vient les travailleurs à faibles revenus qui informaient leurs employeurs de tout de suite déduire, des charges imposées, la déduction pour enfants à charge et qui se trouvaient donc semaine après semaine à pouvoir avoir à leur disposition un revenu plus important, puisque la déduction pour enfants à charge était tout de suite soustraite des charges d'impôts à payer ? alors ils avaient tout de suite ce montant-là à leur disposition ? bien le 1er janvier, c'est terminé et c'est 203 millions de dollars qui vont être retirés du revenu des travailleurs et travailleuses à faibles revenus ou sur le marché du travail avec enfants? C'est 203 millions de dollars qui ne seront plus à leur disposition annuellement. Savez-vous que c'est 1 milliard, ça, sur cinq ans? Quand le ministre dit qu'il va dépenser 2,5 milliards, tout de suite il en a retenu 1 milliard simplement en abolissant la déduction pour enfants à charge.

Puis encore, M. le Président, faut-il additionner tous les montants que le gouvernement est allé chercher soit en coupant une prestation comme celle qui était versée annuellement, à la rentrée scolaire, pour pouvoir aider les familles à équiper les enfants en effets scolaires nécessaires pour leur réussite... C'est, au départ, M. le Président, un autre 50 millions, ça, sur cinq ans. Puis faut-il ajouter à cela la coupure de 100 $ pour l'enfant qui est abrité par un parent, quel que soit l'âge qu'il a? Savez-vous, M. le Président, que c'est un autre 200 millions, ça: 44 par année multiplié par cinq? Et ainsi de suite, M. le Président.

Alors, il faut comprendre que le ministre a fait de la prestidigitation, mais c'est assez enfantin d'imaginer qu'on ne se rendra pas compte de cette hausse de tarifs de transport en commun, de cette augmentation des primes d'assurance médicaments, de cette augmentation des tarifs d'hydroélectricité, de cette augmentation des tarifs des services de garde qui s'ajoutent à l'abolition des déductions fiscales pour les familles ? je parlais donc du 203 millions qui va s'appliquer annuellement à partir du 1er janvier.

Également, faut-il le rappeler, l'indexation... la moitié de l'indexation. M. le Président, rappelons que le gouvernement précédent a indexé les personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi, y compris durant l'atteinte du déficit zéro, où nous nous sommes sortis, si vous voulez, de là où nous étions plongés par les déficits précédents. Eh bien, à partir de là nous avons pleinement indexé les prestations, alors que ce qui est introduit, c'est cette idée de n'indexer qu'à moitié. Mais ça vient d'où, cette idée de n'indexer qu'à moitié? Le coût de la vie, il n'est pas à moitié. Le coût de la vie, quand on paie le chauffage, l'électricité, ou qu'on paie les primes d'assurance médicaments ou le transport en commun, c'est toujours, M. le Président, le coût plus l'indexation dans les hausses, et ce serait la moitié de l'indexation pour le chèque d'aide sociale.

Vous voyez bien que ça augmente la pauvreté. C'est absolument clair, M. le Président, que, malgré l'impression qu'en a laissée le ministre de l'Emploi, de la Solidarité et de la Famille, malgré l'impression qu'il en laisse, quand on regarde les chiffres, et les familles le vivront dans les semaines et les mois qui viennent, ils se rendront compte que leur marge de manoeuvre aura finalement diminué, compte tenu des coûts, des dépenses qu'ils auront à rencontrer et compte tenu également de la diminution des revenus qu'ils verront en fait... se verront réaliser.

Alors, M. le Président, est-ce que je poursuis?

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, effectivement, dans quelques secondes, il sera 13 heures, Mme la députée. Mais, compte tenu qu'on est si proche de 13 heures, je vais suspendre les travaux à 14 heures...

Des voix: 15 heures.

Le Vice-Président (M. Cusano): ...excusez-moi, à 15 heures.

(Suspension de la séance à 15 heures)

(Reprise à 15 h 11)

La Vice-Présidente: Bon après-midi, Mmes, MM. les députés. Cet après-midi, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, et, au moment de la suspension, il restait 3 min 36 s à l'intervention de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.

Vous pouvez vous asseoir...

Mme Harel: Mme la Présidente, ce sera donc la conclusion, la conclusion étant d'abord que les familles du Québec vont recevoir avant Noël une allocation qui va couvrir les trois prochains mois et demi de l'année. C'est donc dire qu'entre Noël et Pâques il est certain que ce sera une période si longue que le carême va s'allonger. Imaginez-vous la situation qui va prévaloir aux mois de février-mars, quand on sait les situations de privation dans lesquelles sont ces familles et les difficultés qu'elles auront à administrer sur trois mois. Je mettais au défi ce matin les membres de cette Assemblée de gérer leurs propres budgets. Vous-même, Mme la Présidente, sans doute allez-vous acquiescer à l'idée qu'administrer son propre budget sur trois mois, c'est presque chose impossible, et c'est ce qu'on va demander aux personnes les plus démunies de notre société.

Et je voudrais donc, en terminant, vous faire lecture de la déclaration qui nous a été remise à l'occasion de la quatrième rencontre entre des personnes en situation de pauvreté et des membres de l'Assemblée nationale du Québec, dans le cadre de la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, il y a un mois de cela, et la conclusion sur le projet de loi qui est à l'étude était la suivante: «Malgré tous nos efforts, malgré la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale votée il y a deux ans, le gouvernement est en train de programmer de graves reculs pour les personnes à l'aide sociale.» Et on ajoute: «Le projet de loi n° 57, qui [vient] remplacer la loi actuelle sur l'aide sociale, nous retournerait 40 ans en arrière. Et le projet de modification au règlement de l'aide sociale actuelle [vient] chercher 44 M$ par année dans les revenus des personnes qui sont déjà les plus pauvres au Québec.»

D'où ce sentiment profond d'avoir été dupés, d'avoir été trompés par le gouvernement actuel et par le premier ministre lui-même, qui écrivait, en tant que chef du Parti libéral du Québec, la semaine avant l'élection, qu'il était fier des améliorations significatives apportées par le projet de loi de lutte à la pauvreté et, ajoutait-il, «notamment l'ajout d'une clause d'impact et du principe d'un barème plancher». Ce qui signifie qu'avec le projet de loi qui est devant nous, Mme la Présidente, le gouvernement contrevient à l'engagement de l'actuel premier ministre, alors chef du Parti libéral, auprès des personnes exclues ou des personnes en situation de pauvreté.

Alors, pour toutes ces raisons, il était justifié que le retrait du projet de loi soit demandé, que des motions de report aient été présentées par l'opposition et que ces motions de report se justifient, Mme la Présidente, en l'occurrence. Alors, pour toutes ces raisons, je conclus donc que nous allons voter contre le projet de loi. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Alors, comme prochain intervenant, je reconnais le député d'Ungava. À vous la parole, M. le député.

M. Michel Létourneau

M. Létourneau: Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de joindre ma voix à celles de mes collègues, à cette étape-ci du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, présenté par le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

Alors, Mme la Présidente, l'idée générale du projet de loi n° 57 doit être considérée dans un ensemble d'actions posées par le gouvernement libéral depuis son arrivée en poste en avril 2003. Tout d'abord, le plan d'action, qui devait être rendu public en mai 2003, ne l'a été qu'en avril 2004. Il contient certaines mesures qui ont été décriées par les groupes de défense des droits des personnes assistées sociales, notamment l'indexation partielle de la prestation pour les personnes aptes. Également, lorsqu'il a rendu public son plan d'action, le ministre a annoncé un investissement de 2,5 milliards de dollars sur cinq ans dans la lutte à la pauvreté. Après analyse, on constate que, depuis l'arrivée en poste des libéraux, plusieurs modifications apportées au régime fiscal ainsi que des augmentations de tarifs de toutes sortes démontrent que le plan de lutte sera autofinancé à même les coupes faites par le gouvernement.

Je vous donne un exemple. J'ai ici un tableau, je vous donne les items: augmentation des tarifs des services de garde, abolition de certaines déductions fiscales pour les familles, augmentation des tarifs d'hydroélectricité, augmentation des primes d'assurance médicaments, indexation des tables d'impôt de 2 %, plutôt que l'IPC, indexation des prestations d'aide sociale à 2 %, même chose, plutôt que l'IPC, hausse des tarifs de transport en commun, et ce qu'on appelle la clause Tanguy. Si on reporte ces nouvelles augmentations là sur une période de cinq ans, on trouve le compte, Mme la Présidente, de 6,6 milliards de dollars. Alors, on peut même dire que le gouvernement va faire de l'argent en faisant ce type d'intervention.

Alors, s'il y a différentes façons d'analyser évidemment un projet de loi, vous le savez, vous avez été longtemps de ce côté-ci de la Chambre, Mme la Présidente, une des façons, c'est évidemment de regarder ce que les différentes clientèles, ce que les groupes, ce que les analystes de la scène politique peuvent penser de la volonté du gouvernement d'amener à terme certains projets.

Et, pris individuellement, je dirais que le projet de loi n° 57 est plutôt un projet de loi sur l'insécurité sociale, et j'en prends à témoin M. Réjean Parent, président de la CSQ, qui, dans une consultation du 3 novembre 2004, disait ceci: «Je plains un peu le ministre dans le fond, parce que [...] j'ai toujours le sentiment qu'il a les mauvais projets de loi dans les mains. Il est ministre de la Solidarité sociale alors qu'on a un projet qui fait plus dans l'insécurité sociale.» Un communiqué de presse de la CSN, le 28 octobre 2004, disait à peu près ceci: «...le projet de loi ne comporte aucune mesure concrète visant à améliorer ou même à stabiliser la situation des plus pauvres parmi les pauvres. La CSN déplore également l'absence de mesures de protection visant les salarié-es à statut précaire, dont le nombre est en augmentation constante, et qui se retrouvent trop souvent, à cause de cette précarité, en situation de pauvreté.»

Alors, vous savez qu'il y a une commission parlementaire qui a entendu beaucoup de groupes, et je vous souligne, pour votre bénéfice, le bénéfice des collègues, des fois que ça créerait l'étincelle qui ferait en sorte que les gens puissent se joindre à notre vision des choses: 61 groupes ont été entendus en commission parlementaire et plus de la moitié réclament le retrait du projet de loi n° 57. Ce n'est pas rien.

La pauvreté est un problème réel, Mme la Présidente, qui a des conséquences graves pour les personnes qui vivent cette situation, mais également pour l'ensemble de la société québécoise. Le revenu est un critère, vous le savez, déterminant pour la santé. L'Union des consommateurs disait, par exemple: «Un grand nombre d'études démontrent que la santé s'améliore en proportion du revenu et de l'ascension dans la hiérarchie sociale.» La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse abondait dans le même sens. Je cite M. Pierre Marois, le président de cette commission, le 26 octobre 2004: «Non seulement les personnes bénéficiant de l'aide sociale sont les plus pauvres, mais leur situation fait peser sur leurs enfants tous les risques de marginalisation socioculturelle qui composent le cercle vicieux de la misère. Une société qui se réclame d'un idéal d'égalité ne peut accepter de tels constats sans réagir.»

n(15 h 20)n

Au niveau de l'entretien des préjugés, parce que je pense qu'on peut dire que le projet de loi n° 57 entretient une série de préjugés, la CSN nous disait, le 28 octobre dernier: «Ce projet de loi contribue [...] à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail. On ouvre ainsi plus grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels, quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.» M. Pierre Marois continuait en disant: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales de chômage, de coût élevé du logement et des frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la "responsabilité première" des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.»

Un autre intervenant, du Barreau du Québec celui-là, M. Jean-Guy Ouellet, au cours de la consultation, disait que «toutes ces mesures qui semblent indiquer que les personnes assistées sociales sont en partie responsables de leur propre situation véhiculent des préjugés, des stéréotypes».

Alors, globalement, la philosophie du projet de loi, bien je pense que le ministre en a parlé lors de la consultation du 12 octobre dernier. Je vous cite, je cite ce qu'il disait: «Il y a un point sur lequel par contre il n'y aura pas de changement, c'est sur la philosophie qui est à la base du projet de loi n° 57, sur le plan de lutte à la pauvreté...» Vous conviendrez avec moi, Mme la Présidente, que cette philosophie représente la négation de l'approche universelle fondée sur les droits, une approche incitative plutôt que coercitive, rendre le travail plutôt attractif que l'inaction.

Et le ministre confond sécurité du revenu et programme ou mesure d'intégration sociale ou d'intégration en emploi. Il est important de distinguer les deux logiques: d'une part, un programme de sécurité du revenu universel et une loi spécifique sur la question et, d'autre part, une stratégie d'insertion sociale et d'insertion en emploi qui s'appuie sur des programmes et des mesures distincts. Certains groupes demandent au ministre de formuler une loi sur la sécurité du revenu fondée sur le respect des droits fondamentaux des personnes à la dignité et à la sécurité économique, prescrits par les instruments internationaux et la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Par la suite, il pourra, dans une autre loi, s'il le veut, prévoir des mécanismes d'insertion en emploi et de valorisation du travail.

Il apparaît pour tout le monde que le projet de loi n° 57, Mme la Présidente, est la continuité de la loi n° 112 et du plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Le ministre allègue depuis le début de la commission que le projet de loi n° 57 est la continuité de la philosophie mise en place avec la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale ? ce que je vous disais, la loi n° 112 ? et le plan d'action déposé en avril 2004. Malheureusement, je pense, Mme la Présidente, et vous en conviendrez peut-être, que le ministre est le seul à le croire.

L'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec considère que le projet de loi n° 57 s'inscrit à contre-courant de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et de l'article 45 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. «Nous demandons donc, disaient-ils au ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, de le retirer.» L'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec disait à son tour: «Ce projet de loi ne permettra pas au gouvernement du Québec de réaliser une réforme de l'aide sociale conforme aux requêtes que nous formulons depuis plusieurs années, lesquelles sont en lien direct avec les attentes et les besoins des personnes vulnérables sur le plan socioéconomique que les travailleurs sociaux côtoient au quotidien sur le terrain.»

M. Roy, Louis Roy, vice-président de la CSN, à son tour, le 28 octobre 2004, disait: «Ce projet est mal ficelé. Il est surtout incohérent, mal articulé au regard des prescriptions de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, votée en décembre 2002, qui découlait des travaux et de la mobilisation du Collectif pour un Québec sans pauvreté, auxquels la CSN avait activement participé.»

Il y a près de 400 000 adultes au Québec, Mme la Présidente ? ce n'est pas rien ? qui dépendent de l'aide sociale et de dernier recours pour leur survie et celle de leur famille. Probablement que chacun des députés, ici, en a dans son comté et peuvent témoigner de cette situation-là à chaque fois qu'ils font du bureau de comté.

Je poursuis en disant ce que M. Roy nous signifiait: «On ne peut se permettre de bâcler la révision de l'ensemble des dispositions législatives définissant les droits et les modalités de cette aide.» Peut-être que ce n'est pas assez? J'ajouterais. Le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec, le 22 octobre, disait: «Le Regroupement des groupes populaires rejette en bloc le projet de loi sur l'aide sociale, le considérant contraire aux exigences de la loi visant à lutter pour améliorer le sort des personnes dans le besoin et menace d'ériger l'arbitraire en une norme décisionnelle.»

Lors d'un échange avec le Barreau du Québec, il est ressorti que le projet de loi n° 57 pourrait contrevenir à l'article 9 de la loi n° 112. Mon collègue porte-parole en cette matière, mon collège le député de Vachon, qui fait un travail remarquable pour faire valoir le point de vue de tous ces organismes-là et la position de l'opposition officielle, posait une question et disait ? il s'adressait au Barreau du Québec: «Est-ce que ça peut vouloir dire que, selon l'interprétation légale qu'on pourrait faire du projet de loi n° 57, étant donné l'article 9, paragraphe 1°, de 112, est-ce que ça peut vouloir dire que 57 contrevient à 112?» Le porte-parole du Barreau du Québec, M. Ouellet, Jean-Guy Ouellet, répondait: «Lorsqu'un client se présente dans nos bureaux, on peut dire que vous avez éventuellement une perspective juridique qui permet d'envisager une interprétation dans le sens que M. le... ? je dirais, plutôt que de nommer son nom parce que c'est interdit ici ?  [le député de Vachon] permet d'envisager ce que je viens de dire. Éventuellement, on ne peut pas vous l'assurer», disait-il.

Le député de Vachon requestionnait en disant: «On peut comprendre que, dans un bureau d'avocats, on ne peut pas nous assurer le résultat final, mais ce que je peux comprendre aussi, c'est que la cause serait suffisamment intéressante et pertinente et gagnable pour vous.» Or, le représentant du Barreau du Québec, M. Jean-Guy Ouellet a répondu: «Vous pourriez être un client intéressant, oui.» Or, voilà, je pense que c'est clair quand le Barreau du Québec se prononce avec une telle gravité sur un projet de loi comme ça, il faut en prendre... il faut respecter cet argument-là.

Au niveau de la commission parlementaire, tout au long de la commission parlementaire, Mme la Présidente, le ministre a tenté de justifier sa décision d'indexer à 50 % les prestations des personnes aptes en alléguant que le précédent gouvernement n'a pas indexé pendant plusieurs années.

Cet argument est totalement illogique, car, si c'était l'absurde de ne pas l'indexer, il est d'autant plus important d'inclure le principe d'indexation annuelle automatique dans le projet de loi n° 57 pour éviter que de telles situations ne se répètent.

Or, le Plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale prévoit que, et je cite le plan d'action à la page 22: «Afin de maintenir le pouvoir d'achat des prestataires avec contraintes sévères à l'emploi du programme d'assistance-emploi, la prestation de ces derniers sera indexée au coût de la vie le 1er janvier de chaque année, et ce, à compter de janvier 2005. Le taux d'indexation appliqué sera le même que celui utilisé pour l'indexation du régime d'imposition des particuliers.

«Dans le cas des personnes aptes au travail, cette indexation sera partielle ? Mme la Présidente, et je sens que ça vous renverse ? en ce qui a trait à l'aide financière de base. Toutefois, l'aide financière liée aux efforts d'insertion en emploi sera augmentée. Une prime à la participation s'y ajoutera. Elle se traduira par une majoration graduelle de l'allocation d'aide à l'emploi. Le gouvernement veut ainsi valoriser les efforts des prestataires pour améliorer leur situation.»

Il est clair, Mme la Présidente, qu'à la lecture du plan d'action et du projet de loi n° 57 le ministre compte sur des mesures comme la Prime au travail et la prime à la participation pour compenser l'indexation partielle de la prestation pour les personnes aptes au travail. Une telle indexation aura pour résultat de diminuer le pouvoir d'achat des prestataires; le ministre remplira son objectif de valorisation des efforts en affamant davantage les prestataires de l'aide sociale.

72 % des groupes dans les 60 et quelques qui ont participé en commission parlementaire sont venus dire que la demi-indexation de la prestation aura des impacts sur le revenu et sur la motivation des gens. J'ai beaucoup de respect pour le ministre, mais, quand, à côté, des soixantaines de groupes et autant d'intervenants sérieux viennent dire le contraire, peut-être que le ministre devrait écouter un petit peu plus.

n(15 h 30)n

Le mémoire de la Protectrice du citoyen, page 5, disait ceci: «En terminant sur cette problématique de l'indexation, je pose la question suivante: Est-il indispensable de faire marche arrière et d'instaurer une inégalité de traitement pour des catégories de personnes qui, somme toute, connaissent les mêmes difficultés financières? En d'autres termes, l'indexation ne devrait-elle pas être accordée à tous les prestataires, sans égard à leur statut, puisque le marché, lui, ne crée pas de distinction?» Avouez que c'est une question troublante, Mme la Présidente.

Le 30 novembre, par contre, le ministre annonçait que, lorsque les ressources financières du gouvernement le permettront, les prestations des personnes sans contraintes à l'emploi pourront être indexées à un taux supérieur que celui prévu dans le Plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Encore une fois, le ministre fait la démonstration qu'il ne comprend rien à la réalité des personnes sur l'aide sociale. Combien d'entre elles se seront appauvries avant que le ministre des Finances décide qu'elles seront indexées?

L'article 44 du projet de loi tant qu'à lui, le projet de loi n° 57, c'est-à-dire l'article 44 ne reprend pas la garantie d'allocation pour contraintes temporaires pour les personnes de 55 ans et plus incluses à l'article 24 de la loi actuelle. On nous indique du côté ministériel que l'âge sera fixé par règlement pour des motifs de cohérence législative, puisque la pension alimentaire est dans le règlement.

Le ministre disait à cet égard-là: «Ils ne se retrouvent pas dans la loi, ils vont se retrouver dans le règlement. Mais ils ne se feront pas couper», disait-il. Cette modification, vous en conviendrez, est perçue comme un recul par les nombreux groupes, puisqu'il s'agit de la perte d'une prestation. De plus, la raison invoquée par le ministre ne nous semble pas recevable. Je vous dis pourquoi. Les modifications qu'il a apportées au règlement, qui coupent de 100 $ les prestations des personnes qui habitent chez leurs parents, ne laissent rien présager de bon pour les personnes de 55 ans et plus, puisque l'allocation est de 111 $. Par ailleurs, les interventions du ministre sur la pénurie de main-d'oeuvre et sa volonté d'assurer une participation plus longue des personnes de 55 ans et plus au marché du travail nous font craindre un rehaussement de l'âge prévu au règlement pour l'admissibilité à cette prestation additionnelle. Le transfert de l'âge de la loi vers le règlement rendra toute modification d'autant plus facile.

Alors, Mme la Présidente, le temps file, et vous savez comment, de ce côté-ci, on est vigoureux et on veut permettre à chacun de nos collègues évidemment d'intervenir sur ces projets de loi là. Et je ne vous ai résumé qu'une seule partie des interventions de tous les groupes et tous les observateurs de la scène politique à l'égard du projet du ministre.

Je conclurais en vous citant un communiqué du Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales du Québec pour vous dire qu'on partage entièrement leur énoncé: «Forts de la position majoritaire qui s'est exprimée en commission parlementaire, le Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales du Québec demandent au ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille et à son gouvernement de retirer à cette étape son projet de loi 57 sur l'aide sociale et de ne pas le soumettre à l'adoption de principe tel que prévu plus tard cette semaine. Ils lui demandent d'assurer la couverture des besoins de l'ensemble des prestataires sur une base de droits, sans distinction reliée à l'aptitude au travail, et de conformer la loi actuelle sur l'aide sociale à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. [...] Le ministre n'a pas ? Mme la Présidente ? suite aux auditions faites par la commission, la légitimité nécessaire pour procéder à la réforme de l'aide sociale qu'il propose[...]. Persister dans son projet serait hautement antidémocratique, disaient-ils. Sa réforme est une réforme toxique, alimentée par les préjugés, qui appauvrirait davantage les prestataires.»

Ceci était le communiqué de presse du Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales du Québec, le 30 novembre dernier, et ça résume bien, Mme la Présidente, ce pourquoi nous allons, de ce côté-ci de la Chambre, nous objecter et voter contre ce projet. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Labelle et porte-parole de l'opposition officielle en matière de sport et loisir, à vous la parole.

M. Sylvain Pagé

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Je félicite mon collègue pour son intervention et tous les autres qui le font parce que c'est un projet de loi qui est important, Mme la Présidente, le projet de loi n° 57. Et, à chaque fois qu'on parle d'un projet de loi, moi, j'aime bien, dans un premier temps, aller voir les notes explicatives bien sûr et, dans un deuxième temps, aller voir un peu ce que l'opinion publique, les groupes sociaux, les lettres ouvertes, ce que les différents analystes ont pu dire dans les journaux à l'égard d'un projet de loi. Et ce qu'on constate, dans le projet de loi n° 57, c'est que c'est la suite du projet de loi n° 112. Et je vais vous lire le début des notes explicatives. Comme je vous disais tantôt, moi, j'aime bien, dans un premier temps, toujours aller voir ce que les notes disent. Donc, ça nous présente de quoi on va parler dans le projet de loi.

Donc, ça commence comme suit... Bon, évidemment le titre, c'est Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Donc, on s'attendrait à ce qu'on aide les personnes et les familles. Alors, dans les notes: «Dans le cadre des principes et orientations énoncés au plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale ? donc lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, donc, Mme la Présidente, on sait bien, là, qu'on fait suite, on fait référence à la loi n° 112, votée en décembre 2002 ? ce projet de loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles.»

Jusqu'ici, ça va, Mme la Présidente. Mais, quand on regarde la réaction dans les journaux, quand on regarde les divers groupes sociaux, les différents analystes, les fonctionnaires même qui ont analysé le projet de loi, je vais vous dire que c'est peu reluisant, comme commentaires. Et, avant de regarder ce que les gens nous ont dit par l'intermédiaire des différents médias, je vais vous dire, Mme la Présidente, que je participe, moi aussi... et je vous ai vue d'ailleurs, lors des déjeuners que l'on fait, à chaque année, avec les membres du collectif, ces gens qui sont regroupés pour venir nous parler de leurs conditions, conditions extrêmement difficiles.

Quand on parle de pauvreté au Québec, moi, ça m'impressionne toujours parce que je me dis: Ça n'a pas de sens, dans un endroit comme le Québec, un des endroits... j'allais dire le pays, mais on n'est pas encore un pays ? un jour, on le sera, mais pour l'instant on n'en est pas encore un ? mais, dans un endroit comme le Québec, qu'il y ait encore tant de pauvreté, qu'il y ait encore tant de gens à qui on n'offre pas ce barème plancher, ce minimum pour vivre correctement, convenablement.

Et, quand on a fait un exercice avec les gens du collectif, le mois dernier, un petit déjeuner tout simple, où les gens sont venus nous parler de leurs conditions... Puis je sais qu'il y a certains collègues qui sont ici, en Chambre, et qui étaient présents. On a fait... On était regroupés par un groupe de 12. On a fait un petit exercice. Je vois le député de l'Abitibi, qui était présent avec nous, il était là effectivement. Quelques-uns... Le ministre par contre n'était pas là, hein, malheureusement. J'aurais aimé ça qu'il soit présent et qu'il entende les gens. Et, quand on fait l'exercice, on parle de quelques centaines de dollars par mois, 500 quelques dollars par mois, moi, c'est ce qu'on m'avait donné, on me dit: Bien, un, tu paies le loyer. Première chose. Il te reste combien? Il ne te reste pas grand-chose une fois que tu as payé le loyer. Ensuite, bien évidemment, il y a différentes tuiles qui nous tombent sur la tête, entre autres le frigidaire qui saute.

Parce que souvent les gens qui sont sur la sécurité du revenu, ce n'est pas les gens qui sont les plus riches, Mme la Présidente, vous le savez comme moi. Ce n'est pas des gens qui ont des voitures de l'année. Ce n'est pas des gens souvent qui ont un réfrigérateur, une cuisinière en bon état, alors c'est des gens qui sont plus démunis et ces gens-là souvent vont se retrouver dans des situations de crise. Alors, on a beau leur dire: Bien, allez voir votre Saint-Vincent-de-Paul, allez voir les organismes qui vont pouvoir vous supporter, mais ce n'est pas évident. Juste de prendre un véhicule pour pouvoir se rendre dans ces organismes-là de temps à autre, c'est presque impossible pour eux. Alors, ils vivent vraiment des situations de crise où pourtant, nous, on fait quand même un salaire qui est correct, qui est convenable. Et, quand il arrive... Moi, quand il y a un de mes enfants qui me dit: Bien, les souliers sont rendus trop petits, ou bien que ma conjointe me dit: Il faudrait remplacer tel ou tel article dans la maison, bien on y va puis on achète. Mais, pour ces gens-là, ce n'est pas ça, ce n'est pas ça. C'est des situations de crise à chaque fois qu'un événement arrive pour eux.

n(15 h 40)n

Et, à chaque année, lorsqu'on déjeune avec ces gens-là et qu'on se rend compte de la situation extrêmement précaire qu'ils vivent, je me dis: Comment il se fait qu'au Québec, dans une des sociétés les plus modernes, les plus riches au monde, on ait encore des gens qui vivent aussi pauvrement, qu'on ait encore des gens qui vont... des enfants qui vont à l'école le matin et qui n'ont même pas mangé, qui n'ont pas déjeuné? Est-ce que c'est normal? Est-ce que c'est normal? Pour moi, non; moi, ce n'est pas normal.

Et, je vais vous dire, un des moments forts... pour moi, ça fait plus de trois ans que je suis à l'Assemblée nationale, et un des moments forts pour moi dans l'histoire de l'Assemblée nationale, ça a été l'adoption du projet de loi n° 112, où unanimement on s'est levés, les 125 députés, pour dire oui à la lutte et à l'exclusion sociale... à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Moi, j'ai senti, je vais vous dire honnêtement puis je vais vous le dire... et j'ai beaucoup d'émotions lorsque j'en parle parce que, pour moi, c'est un fléau qu'il faut combattre, la pauvreté. Et, quand j'ai vu, en décembre 2002, 13 décembre exactement, que tous les parlementaires se levaient pour dire d'une seule voix: On veut lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, je me disais: Wow! Ça ne fait que quelques mois que je suis à l'Assemblée nationale et on vote des lois importantes pour le Québec, importantes pour les gens qui sont plus démunis et on fait preuve d'une grande solidarité.

Alors, il fallait ensuite passer aux actes. Décembre 2002. Élections: mars 2003, déclenchement d'élections. 14 avril: le Parti libéral est élu, c'est correct, c'est fait démocratiquement. Jusqu'ici j'en conviens. Le premier ministre, chef de l'opposition à l'époque, il avait dit quoi? Il avait dit: Nous allons donner suite rapidement, très rapidement au projet de loi n° 112. Parce qu'ils étaient partie prenante du projet de loi n° 112, tout comme l'Action démocratique du Québec, d'ailleurs.

n(15 h 50)n

Donc, on nous présente le projet de loi n° 57, le projet de loi n° 57 qui donne suite au projet de loi n° 112, qui doit concrétiser tout ça, et les choses qui devaient se passer très rapidement, donc en mai 2003, on aurait attendu quelque chose lorsqu'on est entrés en Chambre, mais non, le projet de loi n'est arrivé qu'en juin 2004. En juin 2004, pourquoi? Parce qu'on savait qu'entre juin et la fin de la session on n'avait pas le temps d'adopter grand-chose, donc on pouvait reporter encore jusqu'à l'automne.

On se reporte à cet automne. On nous dépose le projet de loi, et qu'est-ce que l'on constate? Bien, ce qu'on constate, Mme la Présidente, je vais vous en faire la lecture, vous allez voir que c'est peu réjouissant comme commentaires. Quand je regarde les découpures de presse qu'on nous a données, Mme la Présidente, je n'en ai sélectionnées que quelques-unes ici, et j'aurais pu me rendre beaucoup plus loin: Le projet de loi sur l'aide sociale est très contesté. Voici ce qu'on en dit dans le Journal de Québec, le 12 juin 2004, lorsque le ministre a déposé son projet de loi n° 57. On y dit: «Le projet de loi sur l'aide sociale, déposé vendredi, comporte de nombreuses lacunes et est d'une telle complexité qu'il serait difficile d'évaluer sa portée réelle, déplore des groupes de la défense des plus démunis.»

Et là j'ouvre les guillemets: «"Une chatte n'y retrouverait pas ses chatons", a résumé la porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, Vivian Labrie ? que tout le monde connaît ici ? lors d'un point de presse quelques heures après le dépôt du projet de loi. "C'est d'une complexité inextricable".»

On va aller un peu plus loin. Le projet de loi du ministre [...] reçoit un accueil plutôt tiède, 12 juin 2004 encore, et en grands caractères ? et ça, c'est dans La Presse de juin 2004, du 12 juin. En gros caractères, on y lit ce qui suit: «On n'y trouve pas le principe [de] prestation minimale ? pourtant, on s'y était engagé. Les sanctions disparaissent, mais les pauvres vont être aussi pauvres.» Est-ce que c'est ça qu'on souhaite? Je pose la question aux parlementaires: Est-ce que c'est ce qu'on souhaite? Est-ce que c'est ce qu'on veut pour le Québec, que les pauvres demeurent aussi pauvres? Il me semble que poser la question, c'est y répondre, et c'est totalement à l'encontre des principes que nous avions adoptés avec le projet de loi n° 112.

LASTUSE «déplore que le ministre fesse sur les assistés sociaux». C'est un peu plus long, mais je veux vous en faire la lecture parce que ça explique bien. «Le groupe populaire LASTUSE a vivement réagi hier au projet de loi du ministre de soustraire 100 $ du chèque mensuel des quelque 20 000 assistés sociaux de 16 à 24 ans.» Ça, Mme la Présidente, ça m'a complètement dépassé. 100 $ qu'on coupe aux jeunes 16-24 ans, qui sont pourtant dans des situations tellement difficiles dès le départ. «Le coordonnateur, Sylvain Bergeron, du Lieu d'action et de service travaillant dans l'unité avec les sans-emploi ? donc LASTUSE ? a déclaré que le ministre a fait un virage à 180 degrés par rapport à son affirmation, le printemps dernier, que le temps de la méthode du bâton était révolu. La mesure annoncée par le ministre vise à économiser 20 millions et fait partie d'un plan d'ensemble pour aller chercher 24 millions ? économiser sur le dos des plus pauvres ? principalement chez les jeunes assistés sociaux. Selon Sylvain Bergeron, cette mesure contrevient directement à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale sous la gouverne du Parti québécois.» Mais adoptée à l'unanimité, il faut le dire. Moi, ce n'est pas une histoire de partis politiques, cette histoire-là; tous les partis ont bonifié le projet de loi n° 112, y ont participé, et ça, je pense qu'il faut le dire.

«À son avis, le Parti libéral vient de démontrer clairement son caractère antisocial et donne l'impression de revenir avant la réforme de 1989, où la discrimination envers les jeunes était érigée en système dans lequel ils recevaient moins de la moitié des prestations des assistés sociaux de 30 ans et plus.» Ça vous donne encore une idée, Mme la Présidente.

«Le spécialiste Alain Noël fait ressortir que le plan d'action est tout entier centré sur deux choses ? deux choses: l'incitation au travail [...] et le soutien au revenu des jeunes familles ? jusque-là ça va. Mais le gouvernement laisse de côté d'autres aspects essentiels de la lutte contre la pauvreté.» Allons voir plus loin: «Si on veut inciter à retourner au travail, on ne prévoit aucune ressource supplémentaire, écrit-il, à cet égard. Il y a pourtant pénurie au Québec de mesures d'insertion, selon l'expert. Le plan ne compense nullement le coût grandissant de l'assurance-médicaments ? ah bon! il ne comble que très partiellement les besoins en logement ? pourtant tellement criants au Québec. Il ne s'encombre pas non plus de créer, comme le prévoyait la Loi visant [...] contre la pauvreté ? le projet de loi n° 112 ? un comité consultatif ou un observatoire de la pauvreté qui nous permettrait de savoir si le Québec progresse ou régresse à cet égard.»

Et je vais aller un petit peu plus loin, parce que ça aussi, c'est important. «Le gouvernement s'en tient ? donc le Parti libéral s'en tient ? globalement à des réaménagements budgétaires qui lui permettent d'équilibrer ses comptes cette année.» Est-ce qu'on va équilibrer nos états financiers... les états financiers du gouvernement du Québec sur le dos des plus pauvres? Est-ce qu'on en est rendus là, Mme la Présidente? J'espère que non. Mais pourtant c'est ce qu'un expert vient me dire. Est-ce qu'on peut encore être d'accord avec ça aujourd'hui? Moi, je ne suis pas d'accord avec ça. Et il conclut en disant: «La philosophie innovatrice qui sous-tendait la Loi visant [la lutte] contre la pauvreté et l'exclusion sociale est littéralement balayée sous la langue de bois et les préjugés ? les préjugés encore une fois, malheureusement. Plus ça change, plus c'est pareil. Aucune volonté d'adaptation aux réalités nouvelles.» Très triste, Mme la Présidente.

Le ministre rate la cible. Qui nous dit ça? C'est l'Ordre des professionnels des travailleurs sociaux du Québec. Un recul de 40 ans, avec la loi 57. Qui nous dit ça? Encore le même Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec, par l'intermédiaire de son président, M. Claude Leblond. Les fonctionnaires dénoncent le projet de loi du ministre. Donc, ici: «Les fonctionnaires [du ministre] ? parce qu'on ne peut pas nommer le nom, Mme la Présidente ? joignent leurs voix aux démunis, qui réclament le retrait pur et simple ? le retrait pur et simple, et là c'est les fonctionnaires qui parlent à son ministre ? du projet de loi découlant du plan de lutte contre la pauvreté.»Le froid s'intensifie entre le ministre et les plus démunis. Les pauvres ont trop d'appétit, selon [le ministre]. Les pauvres ont trop d'appétit, selon le ministre! Mais de grâce! De grâce! Pas besoin de passer de commentaire. Mobilisation contre un projet de loi monarchique et illégal. Sonia Côté. Qui est Sonia Côté? C'est la coordonnatrice de Loge m'entraide, et elle dénonce le projet de loi, évidemment, n° 57, elle aussi. L'opposition à la réforme de l'aide sociale s'élargit. Bon. Bien, comme vous voyez, Mme la Présidente, ça s'élargit de tous bords tous côtés: Le projet de loi brime les droits sociaux, Un projet de loi inacceptable, et ainsi de suite. Et ça, c'est une lettre ouverte qui est parue, dans La Tribune, le 18 novembre dernier.

Donc, Mme la Présidente, on constate ce que les groupes sociaux, ce que les gens, ce que des spécialistes, ce que des fonctionnaires sont venus dire au ministre. Et ce qu'ils sont venus dire, c'est que le projet de loi est un recul par rapport à la loi n° 112, que pourtant nous avions votée unanimement à l'Assemblée nationale. Le projet de loi ne reconnaît pas, premièrement, ne reconnaît pas le droit à la sécurité du revenu, parce qu'il fait disparaître de la loi cette notion de droit à la sécurité du revenu. Encore une fois, on l'a vu tantôt dans les textes que je vous ai lus dans les découpures de journaux, le projet de loi encore nourrit les préjugés. Et le projet de loi nous fait la démonstration qu'il y a vraiment contradiction entre la parole et l'acte.

Et, pour vous en faire preuve, regardez, Mme la Présidente, dans une lettre signée par notre premier ministre ? notre premier ministre ? lorsqu'il était chef de l'opposition, quelques... bien, en fait, une semaine avant de devenir premier ministre, le 7 avril 2003, une lettre que le premier ministre, chef de l'opposition de l'époque, envoyait à Mme Monique Morval, présidente du Mouvement ATD... Voici ce qu'il disait: «Nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes, dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément de revenu et les personnes assistées sociales, l'indexation des prestations de dernier recours, l'établissement d'un seuil ? pardon, l'établissement d'un seuil ? minimal de prestation, barème plancher ? est-ce qu'on parle de ça? On n'en parle pas du tout ? en deçà duquel aucune pénalité ne sera imposée, sauf en cas de fraude ? bien sûr. De plus, le cadre financier de notre programme prévoit des investissements de 850 millions sur cinq ans au chapitre de la valorisation du travail et du soutien au revenu.»

Quand on lit ça, ça semblait beau une semaine avant l'élection. Quand on voit ce qu'on a conclu, ce qu'on nous a présenté dans le projet de loi n° 57, ce n'est pas du tout ce qu'on nous a présenté, et c'est ce qui fait que les gens demandent de retirer le projet de loi n° 57.

Et le plus drôle dans tout ça, Mme la Présidente, c'est quand je constate de quelle façon on investit, selon le ministre, jusqu'à 2,5 milliards sur cinq ans. Supposément, on investit 2,5 milliards sur cinq ans. Bien, allons voir, Mme la Présidente, où on va chercher cet argent-là. On va chercher, dès le départ, par l'augmentation des tarifs en frais de garde, 40 %. On dit souvent: Les tarifs de frais de garde sont passés de 5 $ à 7 $. Ce n'est pas grand-chose, 2 $, mais 2 $, c'est 40 %. Dans un budget de parents... Moi, j'ai quatre enfants, Mme la Présidente, et j'en ai une encore... je viens d'en avoir un quatrième, j'en ai une encore qui ira à la garderie à partir de l'année prochaine. En ce qui me concerne, je peux absorber le 40 %, mais, pour de nombreuses familles, c'est beaucoup, 40 %. Pour plusieurs familles, c'est souvent des vacances qu'ils ne pourront pas prendre ou bien il faut couper à certains endroits, parce que plusieurs personnes ont de la difficulté à équilibrer leurs budgets. Donc, 40 % d'augmentation des services de garde, on vient d'économiser, sur cinq ans, 850 millions, qu'on vient de facturer.

1 015 000 000 $ également, que l'on va chercher où? Avec l'abolition de certaines déductions fiscales pour les familles. Ça, les gens l'ont oublié. Les gens l'ont oublié, et ils ne le disent pas. J'aimerais ça que le ministre se lève, moi, pour dire: J'ai aboli certaines déductions fiscales pour les familles. Ah non! Ça, il n'en parle pas. Je vais envoyer un chèque. Mais il n'envoie pas un chèque... Ce n'est pas gratuit, ce chèque-là, ce n'est pas des nouveaux argents. C'est de l'argent qu'il va chercher où? Qu'il va chercher dans les garderies, donc les jeunes familles; qu'il va chercher avec l'abolition de certaines déductions fiscales aux familles; qu'il va chercher également, évidemment, avec les tarifs d'hydroélectricité ? 3 milliards que l'on va chercher évidemment avec trois augmentations consécutives; l'augmentation des primes d'assurance médicaments; l'indexation des tables d'impôt à 2 % plutôt qu'à l'IPC. Donc, ça n'a l'air de rien, ça, ça n'a l'air de rien, mais c'est 140 millions qu'ils viennent de sauver par année, que le gouvernement vient de sauver, mais qu'il vient de sauver sur le dos de qui? Sur le dos des gens qui paient de l'impôt. La même chose également avec l'indexation, les hausses... les hausses de tarifs de transport en commun, et j'en passe.

Donc, quand on voit tout ça... puis sans compter aussi le fameux 100 $ que je vous disais tantôt, que l'on vient... que l'on a déjà coupé aux gens qui sont les plus démunis, les jeunes de 18-24 ans qui sont prestataires d'aide sociale vivant chez leurs parents. Alors, quand on fait le total de tout ça: 6,6 milliards qu'on va économiser et qu'on va facturer aux familles québécoises. Pourquoi? Pour nous faire accroire qu'on vient de donner 2,5 milliards aux familles. Alors, je le déplore, je dis que c'est un net recul. Il faut retirer le projet de loi n° 57 parce que ça ne respecte pas l'esprit de la loi n° 112. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, comme prochaine intervenante, je vais reconnaître la députée de Lotbinière. À vous la parole, madame.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Mme la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi parce qu'il est majeur. Je crois que le problème de la pauvreté est un problème éminemment important ici, au Québec. Ça me surprend toujours de côtoyer des personnes qui travaillent au niveau de la pauvreté depuis aussi longtemps puis qui ne cessent de me dire que la demande augmente. J'ai tellement l'impression que ce qu'on discute ici, au Parlement, et ce qui se vit sur le plancher, c'est tellement deux mondes, Mme la Présidente.

Je rencontre régulièrement des organismes communautaires. À chaque fois, dans ce temps-ci même, c'est le temps des paniers de Noël, ils me disent toujours que la demande est croissante. Donc, la pauvreté augmente. Je pense qu'on ne peut pas conclure, là, que ça va bien dans ce domaine-là. Et puis je profite de l'occasion pour dire que c'est bien, les paniers de Noël, mais ce serait bien qu'on puisse aider nos familles de façon durable, de prendre nos responsabilités en tant qu'État et qu'à longueur d'année chaque famille ait de quoi manger, pas juste à Noël, mais à longueur d'année.

Mme la Présidente, quand je suis arrivée ici, le premier exercice en tant que parlementaire à lequel j'ai été le plus étroitement liée, c'était l'étude des crédits. M. Béchard... M. le ministre de la Solidarité et de l'Emploi est venu nous indiquer qu'il avait une clé, une façon, là, de régler le problème de l'aide sociale, puis sa vision des choses, c'était qu'il se créerait plusieurs emplois et que les personnes qui vivent de l'assistance sociale pouvaient... ils pourraient occuper ces emplois-là. En ce qui me concerne, sans étude, sans consultations publiques, sans expérience de spécialistes en cette matière, j'étais déjà sceptique.

Vous savez, nous vivons dans une région... Chaudière-Appalaches, une partie pour mon comté, l'autre partie, Centre-du-Québec. Dans mon comté, on vit une pénurie de main-d'oeuvre, et ce n'est pas une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée, c'est une pénurie de main-d'oeuvre de base, en agriculture, en travail du bois, dans les travaux manufacturiers. On a un problème de main-d'oeuvre, mais on a aussi des personnes qui vivent de l'assurance-emploi, on a aussi des personnes qui vivent de l'assistance sociale. C'est donc dire qu'il n'y a pas une adéquation, que ça ne se fait pas... Un plus un comme ça, ce n'est pas aussi simple, ça ne se fait pas comme ça, ce n'est pas... Je pense que les prémisses de base de M. le ministre étaient faussées.

Sa phrase préférée pour aborder ce problème-là, puis je peux la redire, puis on va pouvoir en discuter, c'est qu'il favorise une approche incitative: «Nous prenons donc le pari de l'emploi, et notre objectif est de rendre le travail toujours plus attractif que l'inaction. Nous voulons valoriser et nous assurer qu'il sera, au Québec, toujours plus avantageux d'être actif que d'être inactif. Voici notre philosophie, voici ce qu'il y a dans le plan de lutte à la pauvreté, voici ce qu'étaient nos engagements électoraux et voici aussi ce qui se retrouve aujourd'hui dans le projet de loi n° 57.»

Permettez-moi, Mme la Présidente, de ne pas être d'accord. Premièrement, il y a, tout en filigrane, en trame de cette assertion-là, beaucoup de préjugés. Je pense que tout le monde ici, là, peuvent s'entendre que ceux qui vivent de l'aide sociale, ce n'est pas par choix. Il n'y a personne qui désire se retrouver à cette dernière extrémité là. Et, s'ils en sont arrivés à cette dernière ressource, c'est parce qu'il y a eu des drames qui se sont passés dans leur vie, il y a eu des événements qu'ils n'ont pas pu contrôler et puis ils en sont là.

Quand on dit: «Nous prenons donc le pari de l'emploi, et notre objectif est de rendre le travail toujours plus attractif», c'est comme de dire que les personnes qui vivent de l'aide sociale ne sont pas attirées par le travail. Vous voyez tout le préjugé qu'il y a à travers cette assertion-là. C'est aussi dire que ces personnes préfèrent l'action... a contrario préfèrent l'inaction à l'action. C'est encore encourager des préjugés, Mme la Présidente. C'est de dire qu'il est plus avantageux pour une personne de vivre avec 553 $ par mois que d'être actif. Il me semble, là, que c'est presque aberrant de soutenir que quelqu'un peut penser que c'est avantageux de vivre avec un chèque de 553 $ par mois, Mme la Présidente.

n(16 heures)n

Face à ces préjugés, je pense qu'on doit intervenir. C'est bien sûr que notre aile parlementaire favoriserait un système de reconnaissance des compétences et c'est vrai aussi que nous sommes d'accord à valoriser le travail et l'apprentissage des prestataires d'aide sociale. Nous sommes d'accord, mais il ne faut pas dire que cette responsabilité-là repose uniquement sur le dos des prestataires d'aide sociale. Je pense que le gouvernement a sa place, sa responsabilité, et toute l'économie de ce projet de loi là est basée sur les obligations que les personnes à l'assistance sociale ont. Il ne comprend pas les obligations, les objectifs et les devoirs que le ministre devrait lui aussi s'engager de façon ferme afin d'arriver à un Québec sans pauvreté.

Qu'est-ce que le ministre nous dit quand il est question de ses obligations, quand il est question de ce qu'il devrait remplir comme prestation pour nous amener à un Québec sans pauvreté? «J'espère que vous me faites confiance.» Parce que, vous voyez, dans ce projet de loi là, tout se trouve dans les règlements, et, les règlements, nous ne les avons pas. Beaucoup de pouvoirs discrétionnaires sont octroyés au ministre, beaucoup de pouvoirs... de projets, on parle d'une certaine souplesse, d'éviter le mur-à-mur... donc ça laisse beaucoup de latitude au ministre, qui nous empêche un peu de commenter cette partie-là du programme et qui par contre nous inquiète parce que le... comme si le passé est garant de l'avenir, Mme la Présidente, ça devient inquiétant.

Depuis que le ministre est à... le ministre de l'Emploi, à la Solidarité sociale et à la Famille est en place, Mme la Présidente, 30 millions ont été coupés à son budget, 30 millions. Là, on lui dit... On nous dit, d'un côté: On va faire des nouveaux projets, on va vous aider à retrouver un emploi que vous n'avez pas, vous allez être concurrentiels face aux salariés qui déjà se recherchent un emploi sur le marché du travail. Par contre, on va couper 30 millions dans le ministère. Ce n'est pas de nature à créer la confiance des personnes qui ne savent pas où ils s'en vont parce qu'ils n'ont pas les textes réglementaires devant eux, Mme la Présidente.

Le Collectif pour un Québec sans pauvreté prévoit que moins de 20 000 places, dans ces programmes de formation là, vont être disponibles. On a 166 000 prestataires, c'est donc dire que la grande majorité n'auront pas accès à ces programmes-là. Si ces personnes-là n'ont même pas accès à ces programmes-là, ils vont être obligés de demeurer à la prestation de base, se sentir coupables parce qu'ils n'ont pas pu accéder à ce programme-là, ne pas... ils n'auront pas non plus les primes, ils vont continuer de vivre avec un minimum d'argent vraiment indécent, Mme la Présidente. C'est donc dire que la confiance, ça se gagne, et ce n'est pas avec des chiffres comme ça qu'on peut gagner la confiance des personnes qui vivent avec moins que la décence permet.

Quand on voit que le ministre, dans une des actions qu'il a prises, c'est de couper 100 $ aux personnes vivant avec leur famille, on peut aussi penser que la façon qu'il a d'envisager la lutte à la pauvreté est un petit peu différente de celle des groupes communautaires, des groupes qui se sont présentés en commission. Ce n'est pas de nature à gagner la confiance des intervenants, Mme la Présidente.

Quand on voit qu'on parle d'une demi-indexation au chèque ? on ne parle même pas d'indexation ? ... puis, lorsqu'on parle de ne pas indexer, c'est couper. Parlez-en à tous ceux qui travaillent: lorsqu'ils n'ont pas l'indexation, ils régressent au niveau de leur pourvoir d'achat. Quand on parle de ne pas indexer la prestation des personnes vivant d'aide sociale, je pense qu'ici on ne parle pas non plus d'acquérir la confiance de ces personnes-là.

Mme la ministre, afin de rétablir la confiance... Madame... M. le ministre, afin de rétablir la confiance, a décidé d'envoyer un chèque juste avant Noël, un chèque qu'il va compenser pour le reste de l'année. Il va se repayer dans la poche de toutes ces personnes-là, il va donner la fausse illusion d'avoir de l'argent au mois de décembre, alors que la pression à la consommation est la plus forte. Et puis par la suite, bien ces familles-là vont être... elles ne seront pas mieux nanties qu'elles étaient auparavant.

Donc, je pense que les... tous les groupes qu'on a reçus, tous les groupes qui s'inquiétaient du fait qu'il y avait beaucoup de pouvoirs discrétionnaires au ministre, que les programmes n'étaient pas définis, qu'il aurait fallu avoir les règlements pour en discuter adéquatement, du projet, je pense qu'il y a beaucoup de fondements dans les agissements du ministre, et puis ils sont justifiés de croire dans cette façon-là.

Mme la Présidente, il y a un point sur lequel je voudrais m'attarder, c'est au niveau des chefs de famille monoparentale. Il y a un point que mes collègues ont moins discuté, puis je voudrais en discuter tout de suite pour être certaine d'avoir le temps de faire le tour de la question. Les chefs de famille monoparentale n'ont plus de garantie pour une allocation de contraintes temporaires. Ils se soumettent aussi à la discrétion du ministre, puis ça, c'est très inquiétant. Vous savez qu'avoir un enfant, l'élever, je pense que, dans le contexte du Québec actuel, c'est... il faut aider ces femmes-là.

Mais encore plus: la pension alimentaire. Vous savez, depuis l'arrêt de Mme Théberge... Suzanne Roberge, lorsqu'une femme demandait une pension alimentaire à un conjoint, cette pension alimentaire là auparavant était additionnée sur son revenu d'emploi et elle était imposée sur la totalité du revenu, soit la pension alimentaire plus son revenu. Suite à cet arrêt-là de la Cour suprême, on a dégagé le revenu des enfants, et il devient non imposable. Parce que ce revenu-là est pour les enfants, et le conjoint le donne afin que les enfants aient un meilleur train de vie, que ce soient eux qui en bénéficient.

Mais, dans le cas de l'aide sociale, ce n'est pas le cas, Mme la Présidente. Si un ancien conjoint donne une pension alimentaire pour ses enfants qui vivent avec une mère qui est prestataire de l'aide sociale, la pension va être coupée, la pension va être réduite du chèque d'aide sociale. C'est donc dire que ce père qui voudrait aider ses enfants va voir son aide bifurquer vers l'État, et il ne sera pas en mesure de les aider financièrement à la hauteur de ses revenus, à la hauteur que ses revenus pourraient permettre.

Lorsqu'on s'est penché sur les enfants qui vivaient en situation... une situation de séparation, de divorce, de famille monoparentale ou séparation légale, on a convenu que c'était une des causes qui altéraient de beaucoup la qualité de vie des enfants au niveau financier. Dans le but d'éviter tous les inconvénients reliés à la séparation des parents, on a pensé faire des tables de pension pour établir les revenus ou les besoins que les familles... que les enfants avaient besoin pour vivre. Ces revenus-là, quand on les établissait, on se demandait ce que les enfants avaient besoin pour se nourrir, pour se loger et pour se vêtir adéquatement. On a établi ces barèmes-là lors de la dernière législation.

On va faire un exercice simple. Prenons une personne qui vit de prestations d'aide sociale, une mère qui vit de prestations d'aide sociale. Elle reçoit environ 8 000 $ par année, environ 8 000 $, par année, d'allocations. Prenons un père qui atteint le seuil de pauvreté. Le seuil de pauvreté a été établi par le Conseil national du bien-être, au printemps 2004, comme étant 19 705 $. Ça va faire un revenu familial, Mme la Présidente, d'environ 28 000 $, revenus du père et de la mère. Il n'y a personne qui s'entend ici que c'est excessif.

Pour deux enfants, selon le barème, Mme la Présidente, pour deux enfants, au minimum, qui n'ont pas d'autres besoins que le minimum, on établit à 346 $ par mois les simples besoins des enfants. La prestation actuelle est nettement insuffisante. Ce simple calcul là, quand on s'occupe d'établir des besoins pour les enfants en matière de pensions alimentaires, devrait s'appliquer quand on s'occupe d'établir une prestation de base pour des assistés, du monde qui ont besoin d'assistance. Je pense que c'est une démonstration éloquente, Mme la Présidente, que nos enfants au Québec vivent une situation de pauvreté, surtout quand on sait qu'à Montréal 42 % des enfants qui se présentent à l'école vivent en dessous du seuil de la pauvreté.

n(16 h 10)n

Moi, j'appelle le gouvernement à plus de cohérence. Quand je vois des programmes comme Vas-y, fais-le pour toi!, ce programme qui vise prioritairement à sensibiliser les familles et les jeunes aux bienfaits de l'activité physique et d'une saine alimentation au quotidien, je me demande, Mme la Présidente, quand il nous reste 125 $ par mois pour trois personnes, comment une épicerie peut comporter de saines habitudes alimentaires, comment une famille peut profiter des bienfaits de l'activité physique, comment on peut croire atteindre ces objectifs visés par cette campagne sans aider nos familles les plus pauvres.

Il est clair que les familles vivant aux prises avec ces difficiles réalités ont d'autres priorités que l'activité physique et qu'elles ne peuvent pas respecter le Guide alimentaire canadien. Quand on lance des programmes comme ça, on ne devrait pas plutôt regarder le mal à la source ? la pauvreté est la source, la pauvreté est une déterminante importante au niveau de la maladie, ça, tout le monde le sait ? puis s'appliquer à régler les questions à la source, plutôt que de toujours remettre des programmes qui justifient le gouvernement, qui donnent une belle image au gouvernement mais qui ne règlent pas le vrai problème qui est le problème de la pauvreté, qui est le problème de ne pas couvrir les besoins essentiels avec une prestation qui est trop basse?

Dans un autre ordre d'idées, Mme la Présidente, je demanderais aussi au gouvernement qu'il établisse clairement des cibles à atteindre. Pour ce faire, il doit mettre en oeuvre son observatoire; qu'il surveille les progrès réalisés et puis qu'il nous rende des comptes, qu'on sache vraiment où en est la pauvreté et où on s'en va. Parce que, là, avec un projet comme ça qui est arrivé à la dernière minute, sans plus de consultations, sans faire connaître les règlements, on ne s'y retrouve pas, Mme la Présidente, on ne s'y retrouve pas, dans le suivi de la loi n° 112. Parce que la loi n° 112, c'étaient des belles intentions, tout le monde, il était d'accord. Tout le monde était pour la vertu, maintenant il est temps de passer aux bonnes actions.

Pour passer aux bonnes actions, il faut poser un bon diagnostic, il faut que les intervenants et le milieu soient d'accord avec nous. Tout le monde est pour la lutte à la pauvreté, ça, l'Assemblée était unanime, mais il faut créer un consensus social et il faut ensuite, après avoir posé un vrai diagnostic, poser les bonnes actions et non faire comme ce qu'on a fait à la sauvette, un projet de loi qui maintient les préjugés et qui maintient aussi les inégalités.

Je viens de vous faire le portrait d'une inégalité, celle des femmes ayant une pension alimentaire. Par contre, la saisie des salaires... la saisie des prestations était aussi une inégalité, là. C'était tellement criant, Mme la Présidente, que je ne peux pas croire que ce projet-là n'a pas été fait à la sauvette. Pour écrire ça, là... Vous savez que l'article 553 du Code de procédure empêche la saisie d'un salaire d'une personne, admettons, qui vivrait... quelqu'un qui aurait un salaire minimum, on ne peut pas lui saisir les 120 premiers dollars de son chèque par semaine, fois 4,3 ? parce qu'il y a 4,3 semaines dans un mois, ça équivaut à la prestation des personnes qui vivent de l'aide sociale.

On a considéré que, pour les personnes qui travaillent, on doit leur maintenir des droits fondamentaux pour qu'ils puissent subvenir à leurs besoins de base, et, pour les assistés sociaux, on n'avait pas un tel droit. Vous voyez comme ce raisonnement-là ne tient pas, Mme la Présidente. C'est donc la raison pour laquelle je ne peux pas m'empêcher de croire que ce projet de loi là a été fait à la sauvette.

Ce que je voudrais, Mme la Présidente, c'est qu'on parle maintenant de droit à l'aide sociale pour les personnes sans se demander quelle est la cause de leurs besoins, comme on l'avait décidé en 1969. Quand on parle de contraintes à l'emploi, quand on parle de contraintes sévères à l'emploi, quand on insère toutes ces... ces classes-là dans le cadre d'une prestation de base qui est insuffisante, je pense qu'on renie les principes qu'on avait mis à la base en 1969 et puis qu'on avait bonifiés avec le projet de loi n° 112. On recule avec le projet de loi n° 57.

Le droit à la famille de recevoir, là, une aide minimum pour être capable de survivre, c'est un droit, ce n'est pas une charité. En tant que peuple, peuple québécois, je pense qu'on est tous conscients que la solidarité qui nous unit nous oblige, nous oblige à donner le minimum à ces personnes-là, Mme la Présidente, et surtout à penser aux enfants qui, eux, en subissent les conséquences. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée de Lotbinière. Alors, comme prochain intervenant, je reconnais le député de Drummond. À vous la parole, M. le député.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Oui. Merci, Mme la Présidente. J'interviens aujourd'hui relativement au projet de loi n° 57 présenté par le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. J'interviens contre ce projet de loi, Mme la Présidente, et je demande au ministre de le retirer, ce projet de loi, et cela, pour plusieurs raisons.

La première raison, c'est qu'il ne s'agit pas, Mme la Présidente, d'un pas en avant dans la lutte à la pauvreté. Il s'agit plutôt d'un recul, et il est certain que c'est un net recul par rapport à la loi n° 112, là, la Loi visant à lutter contre la pauvreté. Il ne s'agit pas d'un projet de loi qui va améliorer le sort des plus démunis dans notre société. Au contraire, Mme la Présidente, selon moi, il s'agit d'un projet de loi qui va empirer la situation de ces gens-là.

Alors, je suis contre le projet de loi pour plusieurs raisons. Une première raison, une première raison, Mme la Présidente, c'est qu'encore une fois il s'agit d'un engagement de pris par les libéraux lors de la dernière campagne électorale, en 2003, et c'est un autre engagement qui encore une fois ne sera pas respecté.

Vous allez me dire: Ah! un de plus, un de moins, les engagements pris par les libéraux lors de la dernière campagne et non respectés sont légion, et pourquoi pas un de plus ou un de moins? Moi, Mme la Présidente, ce que je dis à cela: Quand un parti politique prend un engagement au cours d'une campagne électorale, il se doit de le respecter lorsque le mandat lui en est confié. Parce que, Mme la Présidente, beaucoup de gens ont voté en fonction de ces engagements qui ont été pris, et ça veut dire que, lorsque ces engagements ne sont pas respectés, bien ça veut dire que, Mme la Présidente, ces gens ont été trompés. Et, après, bien on s'étonne de voir autant de cynisme dans la population à l'endroit des politiciens. Je pense qu'une telle façon d'agir, Mme la Présidente, ne peut qu'alimenter le cynisme qu'on retrouve dans la population à l'endroit des politiciens.

Et c'est d'autant moins excusable dans le cas présent, parce que vous allez vous rappeler que le slogan des libéraux lors de la dernière campagne, c'était: Nous sommes prêts. Alors, ça voulait donc dire qu'ils étaient prêts à agir, ils étaient en possession de leurs moyens, ils étaient en possession, là, de ce qu'ils devaient savoir pour gouverner, et on voit qu'au contraire ils n'étaient... ils n'étaient pas prêts, bien au contraire, Mme la Présidente.

Je veux vous référer à une lettre, qui est signée à l'époque par le chef de l'opposition, chef du Parti libéral, maintenant premier ministre, le député de Sherbrooke, qui disait, le 7 avril 2003... la campagne électorale bat son plein, et je vous cite seulement quelques extraits de cette lettre: «Je peux vous assurer que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale sera respectée.» Et je vous démontrerai, Mme la Présidente, dans mon allocution qu'au contraire ce projet de loi, le projet de loi n° 57, fait en sorte que la loi n° 112 n'est pas respectée.

Et plus particulièrement, Mme la Présidente, je vous réfère au paragraphe suivant, que je lis: «Nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes, dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu ? ce n'est pas respecté ? et les personnes assistées sociales.» Ce n'est pas respecté.

«L'indexation des prestations de dernier recours». Vous avez vu que le projet de loi n'accorde pas l'indexation, il va y avoir une demi-indexation seulement.

«L'établissement d'un seuil minimal de prestations», ce qu'on appelait le barème plancher. Ça aussi, Mme la Présidente, comme engagement, ce n'est pas respecté. «Barème plancher [donc] en deçà duquel aucune pénalité ne sera imposée, sauf en cas de fraude.»

Alors, c'était signé du chef du Parti libéral du Québec, le 7 avril 2003. C'est un engagement qui est pris par le chef, Mme la Présidente, et qui n'est pas respecté d'aucune façon par le projet de loi n° 57. La première raison.

n(16 h 20)n

La deuxième raison, Mme la Présidente, c'est que, je me rappelle, j'étais dans cette Chambre, de l'autre côté, lorsque nous avons adopté la loi n° 112, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et je me rappelle très bien les débats que nous avons eus sur cette loi, je me rappelle très bien d'avoir vu les libéraux, alors qu'ils étaient dans l'opposition, dire qu'avec ce projet de loi ? bien, la loi n° 112, là, qui était un projet de loi à l'époque: Nous n'allions pas assez loin, qu'il nous fallait faire plus, qu'il fallait qu'il y ait un barème plancher. En tout cas, on a entendu tous les arguments, Mme la Présidente, de la part des libéraux alors qu'ils étaient dans l'opposition à l'effet que nous n'allions pas assez loin et qu'il fallait faire beaucoup plus.

De sorte que, Mme la Présidente, logiquement on devait s'attendre à ce que les libéraux, avec leur projet de loi n° 57, répondent vraiment, là, à ce qu'ils avaient exprimé lorsqu'ils étaient dans l'opposition. Mais... Et je me rappelle de les avoir vus voter l'un après l'autre, là, après avoir dit qu'il fallait un barème plancher, il fallait faire plus pour la lutte à la pauvreté, je me rappelle les avoir vus voter l'un après l'autre. Et, après avoir vu ça, Mme la Présidente, et voir ce qu'il y a dans le projet de loi n° 57, bien je considère que c'est vraiment une situation inacceptable et que ceux qui se sont fiés sur les dires des libéraux lorsqu'ils étaient dans l'opposition, bien vraiment, Mme la Présidente, là, ils auront été trompés.

Troisièmement, Mme la Présidente, je suis contre ce projet de loi là parce qu'il ne respecte pas l'esprit de la Loi visant à lutter contre la pauvreté. Non seulement il ne respecte pas l'esprit, mais il ne respecte même pas la lettre de cette loi-là. D'abord fondamentalement parce que le projet de loi n° 57 ne vise même pas à couvrir les besoins essentiels de toute personne. Toute personne, Mme la Présidente, a le droit de vivre dans la dignité, a le droit de vivre dans le respect et d'avoir un minimum de sécurité qui lui est assuré. Et, quand on parle des besoins essentiels auxquels il faut répondre, on parle, entre autres, de la nourriture, on parle du vêtement, on parle du logement, transport, les loisirs, ce qui fait en sorte qu'une personne, de façon, et je répète le mot, de façon minimale, là ? mais, même, il faut viser plus que ça ? ait droit à une vie qui est digne de ce nom. Et le projet de loi ne couvre même pas les besoins essentiels.

À cela, le ministre dit: Oui, mais, écoutez, dans la loi n° 112, il n'y avait pas de couverture quant aux besoins essentiels. Mme la Présidente, cela est faux. Je veux vous référer, entre autres, à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté, qui se lisait ainsi: «Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à:

«1° rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.»

Alors, ça veut dire, Mme la Présidente que, dans la loi n° 112, on disait qu'il y avait une obligation, là, de couvrir les besoins essentiels. Et, quand je dis donc que le nouveau projet de loi est un recul par rapport à la loi n° 112, bien on en a le premier exemple. Ça veut dire qu'on a un ministre de la Solidarité sociale, responsable de la sécurité du revenu, qui n'est même pas capable, Mme la Présidente, de prendre un engagement, de garantir aux plus démunis dans notre société que leurs besoins essentiels seront dorénavant garantis.

Un autre élément, Mme la Présidente, qui fait que je suis contre ce projet de loi, c'est le fait qu'on n'y retrouve pas l'indexation des prestations. Et encore là je me rappelle du discours des libéraux lorsqu'ils étaient dans l'opposition, quand ils déchiraient leurs chemises, Mme la Présidente, à l'effet qu'il fallait que les prestations soient indexées. Et là on se retrouve, Mme la Présidente, avec une demi-indexation, comme si, par rapport à l'inflation, les prestataires de la sécurité du revenu, eux, l'inflation ne s'appliquait dans leur cas que pour un demi du taux d'inflation. On sait pertinemment, Mme la Présidente, que ce n'est pas comme ça que ça se passe.

Et, quand on voit, en plus, tout ce que les libéraux sont en train de rajouter comme augmentations de tarifs, là, pour les citoyens du Québec... Je pense à l'augmentation des frais de garderie, qui était de 40 %, l'augmentation des frais d'électricité qui n'arrête plus, une augmentation après l'autre, on est en train de vivre la troisième augmentation en l'espace de 18 mois, l'augmentation des frais du transport en commun, l'augmentation des frais ? une augmentation qui va être substantielle, qui va être imposée prochainement par la Société d'assurance automobile du Québec ? relativement aux permis de conduire, relativement à l'assurance pour conduire une automobile ? quand on regarde ça ? et je me rappelle les libéraux, encore là, quand ils étaient dans l'opposition et qu'ils nous reprochaient d'être les plus taxés, bien eux, ce qu'ils sont en train de rajouter à cela, Mme la Présidente, c'est que nous allons devenir les plus tarifés. Alors, que l'on n'indexe pas ces prestations-là, Mme la Présidente, ça constitue un autre motif pourquoi je suis contre ce projet de loi.

Une autre raison pourquoi je suis contre ce projet de loi, c'est que ce projet de loi, Mme la Présidente, véhicule et entretient les vieux préjugés, là, à l'effet que les personnes qui sont à la sécurité du revenu, c'est parce qu'elles le veulent et, si ces gens-là n'arrivent pas à sortir de la sécurité du revenu, c'est parce qu'ils ne s'aident pas suffisamment puis ils ne font pas preuve de suffisamment d'énergie, là, pour se sortir de cette situation-là. C'est une attitude, Mme la Présidente, que je considère comme étant méprisante, c'est une attitude aussi qui est passéiste, qui correspond à des préjugés que j'aurais espéré, de la part d'un ministre de la Solidarité sociale, qu'il ne soit pas habité par de tels préjugés. Mais force est de constater malheureusement, Mme la Présidente, qu'il est habité par ces préjugés.

Et, à ce chapitre, je veux vous citer des intervenants qui sont venus devant la Commission des affaires sociales pour dénoncer ce projet de loi. Entre autres, je vous réfère au communiqué de la CSN, en date du mois d'octobre, là, dernier, qui disait: Ce projet de loi continue à entretenir les préjugés à l'endroit des prestataires aptes au travail. «On ouvre [aussi] plus grande la porte à des différences de traitement selon les catégories de prestataires plutôt que de viser la couverture des besoins essentiels, quelle que soit la condition des personnes, ce que devrait assurer l'aide de dernier recours.»

Je vous réfère aussi... le Barreau du Québec, Jean-Guy Ouellet qui disait: «Toutes ces mesures qui semblent indiquer que les personnes assistées sociales sont en partie responsables de leur propre situation véhiculent des préjugés, des stéréotypes.» Et enfin Pierre Marois, de la Commission des droits de la personne, qui disait: «La pauvreté s'accompagne de multiples entraves à l'exercice des droits, des entraves qui s'ajoutent, pour les personnes pauvres, aux contraintes sociales de chômage, de coût élevé du logement et des frais d'éducation et de santé, par exemple. Dans ces conditions, mettre l'accent principal, comme le fait le projet de loi, sur la "responsabilité première" des personnes pauvres dans la modification de leur situation, c'est méconnaître, voire nier la dynamique réelle de la pauvreté.» Et je pense qu'effectivement, Mme la Présidente, c'est ça que ça traduit, ça traduit une méconnaissance de ce qu'est vraiment la pauvreté, et quelles en sont les causes, et la difficulté que ça représente pour ces gens-là.

Je veux aussi, Mme la Présidente, dire que je suis contre ce projet de loi parce qu'on n'y retrouve pas de barème plancher. Je vous faisais référence tantôt au discours que tenaient les libéraux lorsqu'ils étaient dans l'opposition, à savoir qu'il s'agissait là d'une question fondamentale. Et, dans le nouveau projet de loi, le projet de loi n° 57, on ne retrouve pas de barème plancher, bien qu'il y avait eu un engagement de la part des libéraux dans ce sens-là.

Et, entre autres, on ne retrouve pas de barème plancher parce que, bon, en raison, entre autres, de la demi-indexation. Et, la demi-indexation, Mme la Présidente, je vais y revenir, sur un élément. Quand je vous disais que ça m'apparaissait inacceptable qu'il y ait seulement une demi-indexation, alors qu'on s'occupe, de par cette loi, des personnes les plus démunies, les plus pauvres dans notre société, mais on leur dit: Non seulement vous êtes les plus pauvres et les plus démunies, mais vous allez le rester, parce que les prestations que vous allez recevoir ne suivront même pas le coût de la vie, ils vont le suivre... les prestations vont suivre à moitié. Alors donc, vous êtes les plus pauvres et vous allez rester les plus pauvres, vous allez rester les plus démunies, vous allez être les personnes qui avez les conditions les plus difficiles de vie dans notre société, et ça va rester comme ça. Et même, et même, Mme la Présidente, ça va empirer, parce que ces gens-là ne peuvent même pas suivre par l'indexation, là, l'augmentation du coût de la vie.

Je reviens, par contre, à l'exemple que je vous donnais du barème plancher, disant qu'on ne retrouve pas ce barème plancher, entre autres, à partir de la demi-indexation que l'on retrouve dans la loi, entre autres aussi avec ce qu'on appelle la clause Tanguy, à savoir la personne... comme le jeune, là, qui s'en va demeurer chez ses parents et qui aura une coupure parce que, bon, il demeure chez ses parents.

n(16 h 30)n

Mais il y a aussi, Mme la Présidente... et ça, je veux vous référer au mémoire de la Protectrice du citoyen. Parce que le ministre dit: On répond à cette question-là, et ce n'est pas exact, Mme la Présidente, et je veux vous référer au mémoire de la Protectrice du citoyen, qui disait: Toutefois, l'article 49, là, qu'on invoque pour dire que, oui, il y a un barème plancher... on dit donc... elle dit donc: «[Cet article] ne contient aucune disposition permettant de limiter la réduction des prestations lorsque le prestataire doit rembourser une dette. [...] Considérant que les personnes aptes au travail ont souvent recours à l'aide sociale de façon épisodique et temporaire, n'y aurait-il pas lieu de commencer les mesures de perception une fois leur autonomie [relevée]? Par ailleurs, si le mécanisme de la compensation est maintenu, ne serait-il pas judicieux d'en revoir la portée, à tout le moins en ce qui concerne la réduction de 224 $, qui représente tout de même 42 % de l'aide financière de base?» Alors, c'était même, Mme la Présidente, la Protectrice du citoyen qui disait: Ce n'est pas vrai, il n'y en a pas, de barème plancher, dans ce projet de loi là.

Une autre raison des multiples raisons, Mme la Présidente, qui me font dire que ce projet de loi est inacceptable, c'est lorsque le ministre nous dit: Ah! oui, mais il y a des programmes d'accessibilité à des mesures d'emploi. Ça, là, Mme la Présidente, je me demande s'il ne vaut pas mieux être sourd que d'entendre ça. Quand on regarde ce qui se passe à Emploi-Québec depuis que le gouvernement libéral est en place, je crois que c'est plus de 700 postes qui ont été coupés à travers le Québec. Les mesures d'emploi, là, d'insertion en emploi, d'accessibilité à l'emploi ont été coupées, de sorte que, moi, à tout moment, à mon bureau de comté à Drummondville, Mme la Présidente, je reçois des jeunes puis des gens de tous âges qui se présentent à Emploi-Québec, qui auparavant auraient été acceptés, là, dans une mesure d'employabilité ou dans une mesure d'insertion à l'emploi ou d'accessibilité à l'emploi, et ces gens-là maintenant sont pratiquement toujours refusés, de sorte que l'esprit que nous avions voulu donner à Emploi-Québec, bien cet esprit-là n'est plus là. Et autant nous avons voulu, par les principes de formation, aider des gens à s'en sortir ? parce qu'on le sait, qu'un des meilleurs moyens de lutter contre la pauvreté, c'est la formation puis c'est l'éducation ? mais ces mesures-là sont de moins en moins disponibles, Mme la Présidente, pour les plus démunis dans notre société. Alors, pour toutes ces raisons-là...

Et il y a plusieurs autres éléments qui font que ce projet de loi est inacceptable. À l'instar de la majorité des groupes qui sont allés, Mme la Présidente, devant la Commission des affaires sociales, je demande au ministre de retirer ce projet de loi là parce qu'il ne vient pas au secours des plus démunis; au contraire, il empire leur situation.

Dans mon comté, Mme la Présidente, dans le comté de Drummond, les groupes communautaires citent souvent, là, un M. Paulhus, Lucien Paulhus qui avait travaillé pour la Corporation de développement communautaire chez nous, là, puis qui avait travaillé au profit des démunis mais qui était, lui aussi, malheureusement, là, une personne prestataire de la sécurité du revenu et qui avait, lui, mis beaucoup d'espoir dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté. Et ce qu'il disait, ce qu'il disait, lui, à propos de cette loi-là, et je le cite, il disait: «Je suis une feuille à côté de l'arbre; après la loi, je serai dans l'arbre.» Alors, ça voulait donc dire qu'il se considérait, comme bien des gens qui sont à la sécurité du revenu, il se considérait comme étant une personne exclue, comme une personne en dehors, là, de la société, et il mettait donc, comme je le disais, beaucoup d'espoir dans cette loi-là.

Mais cette loi-là devait être suivie, M. le Président, de mesures qui allaient permettre effectivement une amélioration du sort des pauvres dans notre société, des prestataires de la sécurité du revenu, et malheureusement force est de constater que ce projet de loi n° 57 ne répond pas du tout aux besoins de la lutte à la pauvreté, n'améliore pas le sort des démunis. Et je suis convaincu que M. Paulhus, qui est souvent cité par les groupes communautaires chez nous, s'il vivait encore, je suis convaincu qu'il dirait, comme ses compagnons de travail le diraient aussi: Bien, je suis une feuille à côté de l'arbre, mais, avec le projet de loi n° 57, je reste une feuille à côté de l'arbre. Il n'y a pas d'amélioration de mon sort, ça continue de la même façon.

Et même, je le dis, je le dis parce que j'en suis profondément convaincu, M. le Président, non seulement il ne s'agit pas d'une amélioration du sort des plus démunis dans notre société, au contraire ils vont continuer à s'enliser. Et ce ne sont pas des mesures, dans ce projet de loi là, qui luttent contre la pauvreté; au contraire, je le répète, c'est un recul par rapport à ce que nous avons fait quand nous avons adopté cette loi-là. Nous voulions vraiment, de façon déterminée, venir en aide à ces gens pour diminuer la pauvreté dans notre société, mais avec les libéraux on s'aperçoit que c'est un recul et c'est le contraire qui se passe. Donc, je demande le retrait du projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, M. le député de Drummondville, pour votre intervention. Et, pour la poursuite...

Une voix: Quorum.

Le Vice-Président (M. Gendron): Quorum? Alors, on demande le quorum, et je constate effectivement qu'il n'y a pas quorum. Alors, que l'on appelle les députés.

n(16 h 35 ? 16 h 36)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. Veuillez vous asseoir.

Je constate que nous avons maintenant quorum, donc nous pourrons poursuivre le débat sur le projet de loi n° 57, et je reconnais, pour son intervention, M. le leader adjoint de l'opposition officielle. M. le leader adjoint, à vous pour votre intervention.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir et de vous entretenir du projet de loi n° 57, comme plusieurs de mes collègues l'ont fait avant moi. Hier soir, j'ai eu l'occasion, à deux reprises d'ailleurs, de le faire aussi à vous ou à ceux ou à celle qui étaient à votre siège. Donc, vous m'excuserez, M. le Président, s'il peut arriver que je me répète par certains moments. Je vais tenter d'être le plus original possible, autant que pourrait l'être mon collègue que j'ai écouté à de nombreuses reprises, mon collègue le député de Vachon, qui, vous le savez, est un expert en la matière, en plus d'être critique de l'opposition sur cette question.

Donc, je vais reprendre un peu les éléments que j'ai identifiés hier, mais tout en les traitant de façon beaucoup plus rapide et en allant directement à ceux... à celles plutôt que... aux éléments, plutôt, à ceux que je n'ai pas eu le temps d'apporter donc sur le projet de loi n° 57, comme vous le savez, qui est un projet de loi important, peut-être le plus important de la présente session en termes d'impact auprès de nos concitoyens et concitoyennes, et plus particulièrement auprès des plus démunis, d'où notre souci, M. le Président, de mener ce combat qui est juste, je pense, et de nous assurer que différents éléments se retrouvent au projet de loi. Mais je vous dirais aussi que même certaines promesses qui avaient été faites par le gouvernement actuel alors qu'il était dans l'opposition, et plus particulièrement par le chef de l'opposition qui s'était engagé auprès de certains groupes à réaliser des éléments qui se retrouvaient dans la plateforme libérale ou qui ont même fait l'objet de promesses spécifiques durant la campagne et avant la campagne et qui malheureusement, par le biais du projet de loi n° 57, se trouvent trahies aujourd'hui, M. le Président...

Donc, hier, j'ai eu l'occasion devant vous de faire état des différents groupes qui sont venus en commission parlementaire pendant plusieurs semaines, qui sont venus demander différentes choses au ministre responsable de la Solidarité sociale. Plusieurs des groupes... Et j'ai commencé avec ça. C'est peut-être le chiffre le plus parlant, qui dit avec le plus d'éloquence l'insatisfaction qui a été créée par le dépôt du projet de loi n° 57, et la statistique, c'est simplement que la plupart des groupes, la majorité des groupes qui sont venus en commission ont demandé purement et simplement, M. le Président, le retrait du projet de loi n° 57. Et c'est peut-être un des signaux les plus durs à l'égard du ministre, qui aurait dû d'ailleurs prendre acte de ces demandes de retrait et ne pas faire comme il a fait par la suite, simplement déposer certains amendements plus cosmétiques que d'autre chose, M. le Président, et éviter de refaire le travail qu'il aurait dû faire ou même de revenir ici, à l'Assemblée, avec un nouveau projet de loi ou des nouveaux projets de loi, parce que je suis convaincu que les différentes mesures qui sont apportées dans le projet de loi auraient pu faire l'objet de législations différentes et permettre aux membres de cette Assemblée de creuser différents aspects qui auraient été soulevés par ces projets de loi.

n(16 h 40)n

Le ministre a préféré s'entêter, dans son acharnement, je vous dirais, à accabler davantage ceux et celles qui sollicitent plutôt, de sa part et de la part de tous les Québécois, un peu plus de solidarité. Et un de ces beaux exemples qui aussi démontrent à quel point en politique on peut faire l'objet d'un peu de cynisme, M. le Président... Et j'ai eu la chance de bénéficier, hier soir, de la présence du ministre de la Solidarité sociale, à qui je faisais état, entre autres, que 78 % des groupes en commission ont demandé le retrait de l'article 53 sur la saisie des chèques pour le non-paiement du loyer. Alors là, les gens, en choeur, de l'autre côté... le ministre: Justement, nous l'enlevons, nous l'enlevons. Ça a créé un petit brouhaha, puis on était quand même assez tard le soir, hier soir, M. le Président, peut-être autour de 10 h 30, et tout simplement eux me mentionnaient, oui, que cet article avait été retiré.

Mais que propose maintenant le ministre? Et c'est là qu'on voit toute la subtilité de son raisonnement, c'est celui de proposer une fiducie, autrement dit d'y aller: Oui, nous, nous sommes pour les mesures volontaires, donc on ne veut pas ostraciser ou accabler davantage les gens sur la sécurité du revenu, donc nous allons créer une forme de fiducie de grand-papa qui va s'assurer de mieux gérer les fonds, le chèque d'aide sociale, pour ceux et celles qui en feront la demande sur une base volontaire. Évidemment, qui va faire cette demande, M. le Président?

C'est évident que, si on instaure une telle mesure, les propriétaires qui peuvent bénéficier de ces mesures, les propriétaires immobiliers, je vous parle, qui vont louer leurs logements à ceux qui sont sur l'aide sociale vont réclamer et même imposer d'une façon intelligente... Évidemment, ils ne le feront pas en contravention de la loi, mais on sait ce qui se passe dans la vraie vie, M. le Président. Donc, il est évident que ce qui peut être présenté comme exceptionnel ou non obligatoire va finalement se transformer comme la norme, la norme qui va être imposée à ceux et celles qui sont sur la sécurité du revenu, M. le Président. Et je ne pense pas que ce soit là une bonne mesure. Et finalement, je pense, c'est de contourner la règle et la demande qui avait été faite, où 78 % des groupes demandaient purement et simplement le retrait, le retrait de cette disposition.

Alors, souvent, on dit, en droit, M. le Président: On ne peut pas faire indirectement ce qu'on n'a pas le droit de faire directement. Le ministre aurait eu avantage à bénéficier... ou plutôt à appliquer cette règle sur son projet de loi et à purement et simplement retirer une disposition qui, vous le savez, n'est sûrement pas à l'avantage des bénéficiaires d'aide sociale. Alors, je trouve un peu cynique qu'on retrouve une telle disposition dans le projet de loi. On sait même qu'auparavant certaines dispositions existaient par rapport à cette réalité mais n'avaient jamais été mises en vigueur parce que nous considérions effectivement qu'une telle mesure aurait un côté discriminatoire, moi, je pense, et un peu méprisant à l'égard des gens sur l'aide sociale et relèverait beaucoup plus d'une autre époque, un peu paternaliste, de l'État du Québec.

Malheureusement, le ministre, un peu par cynisme, je le pense, a décidé finalement de revenir avec cette disposition et, comme je vous le disais tantôt, de la présenter sous une base de volontarisme, mais malheureusement elle ne fera qu'accabler davantage ceux et celles qui sont sur l'aide sociale et va devenir la norme en cette matière, M. le Président.

Pour continuer cette litanie sur les demandes qui ont été faites par les groupes, 38 % ont demandé le maintien du Bureau des renseignements et plaintes. J'aurai l'occasion d'y revenir, le ministre y a apporté des modifications. 50 % des groupes et des gens qui se sont présentés en commission ont demandé le maintien de l'aide additionnelle aux personnes de 55 ans et plus. Là, le ministre, hier, nous disait: Je ne l'ai pas enlevée, je ne l'ai pas enlevée, M. le Président. Je me garde plutôt la faculté de pouvoir justement donner ou... donner, oui, de l'aide additionnelle, mais dans des circonstances qui seront déterminées par règlement. Nous en avons conclu effectivement que cette disposition aurait pour effet de pénaliser les groupes. Pourquoi? Et c'est la représentation que j'ai faite hier, M. le Président, à celle qui était là avant vous, c'est que, si le ministre change cette disposition, ce n'est sûrement pas pour augmenter, amplifier son application, parce que, si c'était le cas, il l'aurait fait à l'intérieur du projet de loi, de façon beaucoup plus précise. Pourquoi? Parce que ça aurait été, à travers, je vous dirais, le déluge de mauvaises nouvelles que contient le projet de loi, peut-être un baume pour un groupe d'âge qui, vous le savez, est fort vulnérable, les 55 ans et plus.

S'il avait voulu abaisser ce niveau, au lieu de 55 ans, mais le ramener à 50 ans, eh bien, je pense que cette mesure aurait fait l'objet en elle-même d'une conférence de presse, même individuelle, de la part du ministre, pour dire: Regardez, j'ai de la considération pour mes aînés, pour les gens plus âgés qui sont aux prises avec des difficultés particulières lorsqu'ils perdent leur travail à des âges où, sans être vieux...

Vous le savez, à 50 ans, 55 ans, on est dans la fleur de l'âge. Souvent, même en politique, les gens rentrent souvent à 55 ans, M. le Président, et c'est normal, on a une grande expérience, une sagesse qui fait en sorte que, du moins dans notre travail, cette sagesse est sollicitée. Même chose, je vous dirais, dans l'ensemble de notre société. On a tendance, nous, personnellement, à se tourner vers ceux et celles qui sont plus âgés parce qu'ils ont eu à affronter différents événements qui leur permettent justement d'avoir un jugement beaucoup plus... avec finalement un jugement beaucoup plus, je vous dirais, ouvert et qui, en considérant leur vaste expérience, leur permet souvent de faire référence à des événements qui leur sont déjà arrivés, et c'est pourquoi cette sagesse est sollicitée.

Par contre, elle amène des difficultés pour quelqu'un qui voudrait, à ce moment-là, se trouver un emploi, parfois même changer de carrière. Il arrive que quelqu'un, dans un domaine technique, va avoir travaillé toute sa vie pour une usine en particulier. Dans nos coins, vous le savez, ça arrive souvent, M. le Président. Malheureusement, par la fermeture de l'usine, il peut difficilement, dans la même région, dans la même ville, se trouver un emploi, dû à ses compétences qui sont maintenant moins recherchées dans un domaine industriel qui a évolué. Donc, ces gens, rendus à cet âge, c'est beaucoup plus difficile pour eux, c'est beaucoup plus difficile, M. le Président, pour eux de se trouver un emploi. Donc, je pense que cette solidarité qu'aurait dû faire preuve le ministre responsable, si elle avait été réelle, aurait été annoncée publiquement. On aurait clairement fait état, M. le Président, que ce programme aurait fait l'objet d'une plus grande couverture. On a plutôt préféré tout simplement enlever la disposition parce que les gens...

n(16 h 50)n

Vous savez, ils ne sont pas fous, les groupes. Ils voient bien que, lorsqu'un ministre... ou, dans un projet de loi, on retire un tel type de disposition, bien c'est parce que normalement on souhaite diminuer son application. Alors, les gens ont dit: Écoutez, vous allez nous la ramener ou vous allez déposer vos règlements avant. Nous allons regarder vraiment quelles sont vos réelles intentions par rapport à ce type de mesures, puis nous jugerons. Alors, le gouvernement, et le ministre, n'a fait ni l'un ni l'autre et a plutôt maintenu cette discrétion qui lui permet finalement de restreindre l'accès à une telle mesure qui, vous le savez, actuellement touche les 55 ans et plus. Donc, on peut présumer, de la part du ministre, qu'il souhaite effectivement ramener mais vers le haut l'application d'une telle mesure, donc peut-être toucher les 60 ans et plus. On sait que le gouvernement regarde la possibilité de faire travailler les gens plus longtemps, donc peut-être qu'il souhaite, à ce moment-là, accabler davantage les gens de 55 ans et plus, M. le Président. Et encore là je pense que c'est un combat qui est fort légitime de notre part et de la part de notre formation politique pour accorder le soutien nécessaire à ces gens.

Et là je continue la litanie, M. le Président. 24 % des gens ont demandé la publication de l'étude d'impact requise par l'article 20 de la loi n° 112, la loi n° 112, nous l'attendons encore. 69 %, l'assurance que les droits et recours seront garantis pour les prestataires qui seront inscrits dans les programmes Alternative jeunesse et les programmes spécifiques, et 77 % ont demandé purement et simplement, M. le Président, l'élimination par catégories et par programmes.

On ne retrouve pas, malheureusement, tant dans le projet de loi que dans les amendements du ministre, des dispositions qui rencontreraient la vaste majorité des représentations qui avaient été faites par les groupes. C'est bien malheureux. Il me semble qu'à une certaine époque, lorsqu'on était de l'autre côté, on avait un discours on ne peut plus compréhensif, M. le Président. Il semble maintenant que ce discours, depuis le 14 avril 2003, a été mis à la poubelle, et on y trouve des accents qui jadis étaient décriés, mais de la part d'une autre formation... plutôt sur une autre formation. Vous le savez, en campagne électorale, comme on a entendu les gens des deux côtés, même en plein débat, dire à quel point un des partis qui étaient à l'époque en campagne électorale, l'ADQ, dont nous avons des représentants qui sont indépendants ici, à l'Assemblée, mais qui ont été élus sous cette bannière, ont fait l'objet, de la part du Parti québécois mais des groupes sociaux et l'ensemble presque de la société, ont dénoncé l'attitude de ce groupe en élection, et même le Parti libéral l'a fait. La seule différence, c'est que, lui, le Parti libéral, bien il a appliqué une bonne partie de son programme. Alors, en termes de cynisme, on est presque au paroxysme, M. le Président.

Et d'ailleurs c'est pour ça qu'on a eu, après le 14 avril... Souvenez-vous, en Chambre on entendait tout le temps: Il y a eu une élection le 14 avril; on était prêts; élection le 14 avril; on a été élus le 14 avril. On a même passé toute une période des questions à dire: Avez-vous été élus pour faire telle et telle chose? Et on n'est pas les seuls à s'être sentis floués par cette élection, M. le Président. Il y a eu même un groupe, tout un groupe qui s'est manifesté et qui s'appelait On n'a pas voté pour ça, je pense, et qui démontrait... et qui plutôt disait au gouvernement que, le 14 avril... Autrement dit, si la plateforme électorale avait été si claire par rapport aux aspects qui sont mentionnés, si la campagne avait porté sur les sujets et sur les interventions législatives qui ont été apportées par le gouvernement depuis qu'ils sont élus, eh bien, ils n'auraient pas été élus, autrement dit. Et c'est pour ça qu'on se retrouve avec un taux d'insatisfaction à un niveau record depuis le début, le début que les gens ont été élus, M. le Président.

Et c'est rare, là, au niveau d'un nouveau gouvernement... Lors d'une réélection, il peut arriver des fois que, comme un vieux couple, hein, on se réveille, le lendemain matin... Les gens, bon, ne sont pas toujours contents de se retrouver avec la même personne qu'ils avaient depuis, bon, deux, trois, quatre mandats, donc les vieilles rancoeurs apparaissent plus rapidement, il n'y a pas d'effet de nouveauté. Mais, quand arrive un nouveau gouvernement, normalement il y a une belle lune de miel qui dure parfois un an, un an et demi, deux ans, et c'est au fur et à mesure de certaines mesures qu'il peut se créer certaines animosités. Dans le cas du Parti libéral, cette rancoeur a été foudroyante, instantanée, directe. En quelques mois, je vous dirais, en trois mois, le taux de satisfaction a chuté... ou plutôt le taux de satisfaction a chuté et le taux d'insatisfaction, lui, a augmenté jusqu'à atteindre tout près de 68 %, 69 %, ce qui fait qu'à l'heure où on se parle je pense que le gouvernement n'a jamais été si bien desservi... servi plutôt par sa cote de popularité, qui est autour de 62 %, 63 % d'insatisfaction.

C'est quand même un bon signal d'alarme, M. le Président, hein? Si vous étiez responsable de l'administration de peu importe la compagnie, peu importent les responsabilités que vous auriez, ou dans votre comté, M. le Président, et vous auriez un sondage qui vous disait: Vous avez un taux d'insatisfaction de 63 %, eh bien, je pense que vous vous poseriez des questions et vous commenceriez à vous promener dans différentes municipalités pour démontrer que vous n'êtes pas aussi incompétent que vous paraissez l'être. Eh bien, dans votre cas, je sais que ce n'est pas le cas, ça fait 30 ans que vous êtes élu. Eh bien, le gouvernement actuel, lui, a cette impopularité après quelques mois.

Motion de scission

À l'étape où on se parle, M. le Président, et pour démontrer notre détermination à bien étudier ce projet de loi, je ferais la motion suivante en vertu de l'article 241. Donc:

«Que, en vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, soit scindé en deux projets de loi: un premier intitulé Loi sur le soutien du revenu et favorisant la sécurité sociale, comprenant les articles 19 à 35, 38 à 58, 61 à 65, 75 à 119 (2), (3), (5), (6), (7), (9), (10), (12), (13), (14), 120 à 124, 127 à 150, 152 à 159, 162 à 164, 166 à 168, 170 à 181 et 183 à 185; et un second intitulé Loi favorisant l'insertion en emploi des prestataires de l'aide sociale, comprenant les articles 1 à 18, 36, 37, 59, 60, 66 à 74, 119 (1), (4), (8), (11), 125, 126, 151, 160, 161, 165, 169 et 182, 184 et 185.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député du Lac-Saint-Jean, et je reconnais que votre...

Une voix: Chicoutimi.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je me suis trompé, je n'ai même pas regardé. Je le sais, c'est Chicoutimi. Et ça mettait fin à votre intervention sur le principe.

Débat sur la recevabilité

Vous avez fini avec la présentation d'une motion de scission. Je serais prêt à entendre, là, des représentations de circonstance pour statuer sur la recevabilité de la motion de scission que bien sûr que je prendrai probablement, là, quelques minutes pour en délibérer. Mais il est de coutume que les parlementaires puissent profiter de l'expérience des leaders de part et d'autre pour éclairer la lanterne du président quant à la décision qu'il devra prendre. Alors, je vois que Mme la leader de l'opposition officielle voudrait m'aider avec un argumentaire. Alors, à vous la parole.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, j'insiste pour vous aider, M. le Président. Alors, M. le Président, effectivement nous déposons cette motion qui vise... Et, vous avez vu, dans la formulation nous avons pris soin de repérer les articles de ce projet de loi qui ont trait à l'aspect du soutien du revenu, la sécurité sociale, l'aide de dernier recours. Donc, nous avons bien repéré les articles qui faisaient appel à cette dimension du projet de loi et nous avons fait la même chose en ce qui a trait à l'aspect de l'insertion à l'emploi.

Alors, M. le Président, effectivement, d'abord, je vous rappellerai quelques éléments de jurisprudence. Dans une décision 241/5 qui a été rendue par Roger Lefebvre, 3 décembre 1992, il dit, et je cite... Dans ce cas-ci, il a jugé une motion recevable et il dit: «...le projet de loi contient plusieurs principes. Chacun des principes énumérés dans la motion elle-même pourrait constituer la base d'un projet de loi complet en soi et cohérent. De plus, chaque partie du projet de loi dont la scission est proposée constitue plus qu'une modalité. En effet, ce n'est pas parce que les principes propres à chacun des projets de loi qui résulteraient de la scission pourraient être regroupés sous un même thème, en l'occurrence[...] ? dans ce cas-ci, il s'agissait du financement municipal; alors, nous, dans le cas qui nous préoccupe, il s'agit de l'aide de dernier recours et des mesures d'insertion à l'emploi ? qu'on peut les ramener au niveau de simples modalités.»

Alors, c'est notre prétention, M. le Président, qu'effectivement ce projet de loi comporte plusieurs principes et que la scission ferait en sorte que ces deux projets de loi distincts donneraient comme résultat deux projets de loi complets en soi et cohérents. Pourquoi, M. le Président? Parce que, comme je le disais, les articles de loi sont clairement identifiables à un des volets, l'aide de dernier recours et un autre des volets, l'insertion en emploi.

n(17 heures)n

Deuxième élément et indice qui nous indique que nous sommes justifiés de présenter cette motion, c'est, par exemple, le ministère. Le ministère de l'Emploi s'appelle bel et bien le ministère de l'Emploi, de la Solidarité et de la Famille. D'ailleurs, au sein du ministère, il y a deux sous-ministres. Un affecté à la sécurité du revenu et un autre qui est en charge des mesures d'insertion en emploi via Emploi-Québec. Alors, l'organisation même des ministères est faite en sorte que les séries de mesures, de programmes et, éventuellement, d'interventions législatives sont clairement découpées en fonction de l'objectif de l'aide de dernier recours et en fonction de l'objectif de l'insertion en emploi.

En d'autres mots, M. le Président, l'Assemblée nationale pourrait être en faveur des dispositions qui concernent l'aide de dernier recours et être contre les mesures qui concernent l'insertion en emploi, et vice versa. Et, dans ce cas-ci, il y a eu beaucoup de remarques, je crois, et de la part des intervenants et surtout de la part des parlementaires du côté de l'opposition. Dans ce cas-ci, il y aurait plus de chances que nous soyons moins confortables, à la limite contre certains éléments ou plusieurs éléments qui concernent l'aide de dernier recours et plus favorables aux mesures qui sont proposées dans le projet de loi sur l'insertion en emploi. Donc, pour moi, c'est là aussi une indication qu'on fait donc face à deux éléments distincts qui, s'ils étaient séparés, auraient comme résultat deux projets de loi en soi cohérents.

Je rappellerai également que, à l'occasion des consultations générales sur le projet de loi n° 57, plusieurs groupes ont signifié, ont suggéré effectivement de séparer la fonction couverture des besoins essentiels de la fonction de l'insertion et de l'intégration à l'emploi. Et ça a été d'ailleurs une suggestion qui a été portée par le porte-parole de l'opposition. Donc, on n'a pas sorti cette idée de traiter différemment, dans des véhicules législatifs distincts, on n'a pas sorti ça d'un chapeau, là. C'est une idée qui est assez présente dans le débat public depuis un certain moment.

Alors, je termine simplement en vous rappelant une dernière décision qui a été rendue, la décision 241/11 rendue par Claude Pinard, juin 1998, où, dans ce cas-ci, il a jugé qu'une motion de scission était irrecevable. Mais écoutons bien les motifs. Il est indiqué dans cette décision: «Le fait, pour un projet de loi, de comporter plus d'un principe ne signifie pas forcément qu'il peut être scindé. Pour ce faire, d'autres conditions ont été établies au fil du temps dans des décisions de la présidence. Parmi ces conditions, il y a notamment les suivantes: chaque partie du projet de loi scindé doit pouvoir être considérée distinctement; chaque partie du projet de loi scindé doit constituer plus qu'une modalité; les projets de loi qui résulteraient de la scission devraient constituer des projets de loi cohérents en eux-mêmes.» Alors, je prétends, M. le Président, et je soumets ces éléments à votre attention, que nous rencontrons cette jurisprudence.

Et peut-être une dernière remarque sur une des conditions qui a été établie par cette jurisprudence. Effectivement, les dispositions que nous avons repérées ne sont pas que de simples modalités. Il y a là-dedans, par exemple en matière d'insertion en emploi, de nouveaux programmes qui sont prévus de manière législative. Alors, il ne suffit pas d'agencer. Ce n'est pas un projet de loi qui ne fait qu'agencer des modalités, mais qui comporte des dispositions qui sont beaucoup plus lourdes de conséquences.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, nous espérons que vous accueillerez favorablement notre motion et notre mission.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, Mme la leader de l'opposition officielle. Je reconnais maintenant M. le leader, toujours avec la même remarque, là.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Comme c'est souvent le cas, M. le Président, dans ce genre de motion, je pense qu'on ne se chicanera pas longtemps avec l'opposition officielle sur les buts de la motion de scission et pourquoi elle devrait être recevable.

Il est clair, il est clair, M. le Président, que vous devez vous poser la question de savoir: Est-ce que le projet de loi contient un seul principe et est-ce que plutôt le projet de loi contient un certain nombre de dispositions qui sont des modalités?

Si vous en veniez à la conclusion qu'effectivement le projet de loi contient un seul principe, vous devez rejeter la motion de scission. Si vous y trouvez, dans le projet de loi, plusieurs principes, vous devez accorder la motion de scission.

Comment vous réglez cette question-là? C'est clair que vous devez vous poser la question de savoir: Si je devais accorder la demande que me fait l'opposition officielle, il faudrait que la résultante de cette décision-là, c'est que je décide que chacun des projets de loi qui résulterait ? j'emploie évidemment le conditionnel à escient ? que chacun des projets de loi qui en résulterait pourrait survivre par lui-même comme un tout. Autrement dit, est-ce que le projet de loi qui est sous étude, qui est sous étude, le projet de loi n° 57, en essence, et dans son essence même, constitue un tout?

Regardons-le de façon un petit peu plus attentive, M. le Président, et j'en veux pour preuve le premier paragraphe des notes explicatives. Et le premier paragraphe des notes explicatives va donner la réponse à la question que vous devez vous poser, c'est clair: «Dans le cadre des principes et orientations énoncés au plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, ce projet de loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services ? et c'est là qu'il est important, M. le Président ? afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles.»

Au fond, M. le Président, qu'est-ce que ça dit? Ça dit qu'il y a un seul principe au projet de loi n° 57, c'est celui de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles. Ça, là, c'est le principe, c'est l'objectif, c'est ce pour quoi le projet de loi n° 57 existe. Il existe pour favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles. C'est ça, le principe du projet de loi. Le reste, M. le Président, et je relis le paragraphe: «Il vise également à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation sociale. Il vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services.» Mais tout ça, M. le Président, ce sont des modalités pour en arriver à l'objectif ultime, au principe qui est contenu dans le projet de loi n° 57, qui est celui de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles.

Non seulement est-ce, non seulement est-ce, M. le Président, la lecture qu'on doit faire du projet de loi n° 57, mais c'est également une logique qui est absolument implacable en ce qui concerne le principe du projet de loi n° 57. C'est clair que, pour assurer l'autonomie économique d'une personne, cette personne-là doit l'assurer, par un certain nombre de mesures, par un certain nombre de programmes, par un certain nombre de provisions qui sont prévus dans le projet de loi, toujours avec l'objectif ultime, le principe ultime, d'assurer l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles. C'est clair, M. le Président. C'est clair que permettre leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation sociale par des mesures, ça favorise cette autonomie. Donc, ce sont des modalités.

Dans les circonstances, M. le Président, je vous invite à conclure que, clairement, dans le projet de loi n° 57, et si vous deviez séparer les deux, si vous deviez, M. le Président, faire un projet de loi qui favoriserait d'une part l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles, il ne contiendrait, ce projet de loi, aucune modalité si vous deviez scinder tel que vous le suggère l'opposition officielle. Vous auriez un projet de loi qui tiendrait en l'air, qui émettrait un voeu d'autonomie économique et sociale des personnes sans avoir les modalités, parce que les modalités existeraient dans un autre projet de loi. Vous auriez deux projets de loi qui tomberaient automatiquement à terre quand on les tient dans chacune des deux mains, parce que l'un contiendrait un principe sans modalité puis l'autre contiendrait seulement des modalités. C'est ça qui n'est pas permis de faire. et c'est clair.

Alors, je vous suggère respectueusement, M. le Président, que le projet de loi n° 57 ne contient qu'un seul principe, celui de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles, qu'il contient cependant un certain nombre de modalités qui l'accompagnent, qui sont les mesures, les programmes favorisant la participation sociale et que, dans les circonstances, vous devez rejeter, malgré les efforts méritoires de l'opposition officielle, et je reconnais ces efforts méritoires, malheureusement, M. le Président, ils ne peuvent pas réussir dans la motion de scission qu'ils vous ont déposée.

n(17 h 10)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je tiens à remercier les leaders de leur éclairage. Je suis prêt à recevoir l'éclairage à nouveau. Je veux juste indiquer qu'il faudrait par contre que ce soit vraiment des aspects nouveaux qui semblent selon vous ne pas avoir été traités par vous, et la même chose par le leader du gouvernement. Alors, allez, Mme la leader.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, et ce sera très court. Si je reprends l'élément central de l'argumentation du leader du gouvernement, c'est les notes explicatives. Alors, je vais me permettre, M. le Président, de vous les soumettre: «Dans le cadre des principes et orientations énoncés au plan d'action pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, ce projet de loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles. Il vise également à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur réinsertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation sociale.»

Alors, M. le Président, les notes explicatives témoignent du fait qu'il y a des principes et témoignent du fait qu'il y a deux objectifs distincts. Et je veux juste revenir sur l'élément du leader du gouvernement, qui dit: Si on scindait le projet de loi, il y a une partie qui ne tiendrait pas en l'air, pour reprendre son expression. M. le Président, je vous rappelle que les dispositions que nous avons identifiées comme étant dans l'esprit de la sécurité du revenu et du soutien du revenu, ce sont des dispositions qui concernent des personnes qui sont en situation de dénuement, qui peuvent faire appel au Programme d'aide sociale, des personnes donc qui sont sans contraintes à l'emploi ou qui ont des contraintes temporaires, ou alors des personnes qui ont des contraintes sévères. Alors, ça vit en soi. On peut avoir des programmes d'aide et des mesures législatives en termes de dernier recours. À la limite, un gouvernement pourrait décider qu'il n'y a aucune mesure d'insertion à l'emploi, et ça ne poserait pas de problème. Et l'inverse est aussi vrai.

Alors, je pense, avec respect pour le leader du gouvernement, que, un, les notes explicatives sont claires, il y a deux objectifs, et que, deux, ces deux fonctions sont tout à fait cohérentes et peuvent vivre en soi.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie parce qu'il s'agit d'un éclairage additionnel, et c'est évident que plus la présidence reçoit de l'éclairage, plus ça devrait faciliter l'analyse qu'il en fera. Est-ce que, M. le leader du gouvernement, vous avez autre chose à ajouter que vous n'auriez pas eu le temps de faire tantôt?

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: M. le Président, oui, bien, vous, vous aurez compris, M. le Président, que je ne veux pas et que je ne cherche pas à ce que vous basiez votre décision sur les notes explicatives du projet de loi; c'est clair que vous ne pouvez pas faire ça. Ce que vous pouvez faire, c'est regarder le projet de loi et décider si, dans le projet de loi, effectivement, la motion de scission peut avoir une pertinence. Vous aurez compris ça. Je pense que je n'ai pas besoin de revenir là-dessus.

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui.

M. Dupuis: Très bien. Alors, c'est sur le projet de loi que vous vous prononcez, ce n'est pas sur les notes explicatives. Je ne voulais vous parler des notes explicatives que pour vous permettre de mieux comprendre ce qui se trouve dans le projet de loi.

D'autre part, M. le Président, l'insertion sociale, le soutien du revenu sont toutes des mesures qui s'imbriquent dans une seule idée, je la répète: c'est l'autonomie des personnes dont il est question.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je veux remercier les collègues parlementaires. Vous comprendrez qu'on va apprécier ça le plus rapidement possible. Mais, dans les circonstances, compte tenu qu'on vient de présenter la motion de scission, je vais suspendre les travaux pour aller apprécier et vos arguments et la jurisprudence pour prendre la meilleure des décisions possible. Suspension des travaux.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

 

(Reprise à 17 h 41)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, veuillez prendre place, chers collègues, veuillez vous asseoir. Alors, je vais... S'il vous plaît.

Décision de la présidence

Je vais maintenant rendre ma décision sur la recevabilité de la motion de scission présentée par le leader adjoint de l'opposition officielle.

Après l'avoir analysée, je la déclare irrecevable et je m'explique. Le règlement prévoit que, lorsqu'un projet de loi contient plusieurs principes, il peut faire, oui, l'objet d'une motion de scission. Par contre, pour être recevable, une telle motion doit donner lieu à des projets de loi cohérents, complets et qui peuvent vivre indépendamment les uns des autres. Dans le présent cas qui est le nôtre, les deux projets de loi qui résulteraient de la motion de scission ne satisferaient pas à ces critères, et je vais vous donner quelques exemples pour l'illustrer.

Premièrement, l'article 36 qui se trouve dans le projet de loi, dans le deuxième projet de loi, fait référence au Programme d'aide sociale qui est défini à l'article 35 qui, lui, se retrouve dans le premier projet de loi.

Deuxièmement, l'article 59 qui se retrouverait dans le deuxième projet de loi fait référence aux objectifs du Programme de solidarité sociale, lequel programme est défini à l'article 58 qui figurerait dans le premier projet de loi.

Troisièmement, l'article 96 qu'on propose d'inclure dans le premier projet de loi fait un renvoi aux chapitres III et IV du titre II du projet de loi, soit les articles 66 à 74. Or, ces articles seraient inclus dans le deuxième projet de loi.

Et on pourrait donner d'autres exemples. Et je veux juste indiquer, et le mot est important, ces considérations techniques que je viens de faire ? je répète, ces considérations d'ordre technique ? sont suffisantes pour déclarer la motion de scission irrecevable. C'est pourquoi je n'ai pas eu à disposer de la question de savoir si le projet de loi contient plus d'un principe. Alors, voilà ma décision.

Et, pour la poursuite, puisque la décision est rendue, est-ce qu'il reste d'autres intervenants sur le principe du projet de loi?

Mme Lemieux: M. le Président, question d'éclaircissement.

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, Mme la leader.

Mme Lemieux: J'ai bien entendu votre décision, je veux juste bien comprendre. Vous avez donné l'exemple de l'article 36. Or, l'article 36 est un article extrêmement technique. Est-ce que c'est suffisant pour ne pas considérer qu'il y a quand même deux blocs, même s'il y a des articles très descriptifs, là, qui n'apportent pas d'éléments nouveaux et qui ne font que de décrire un grand objectif? Ça vous apparaît un élément suffisant? C'est ce que je dois en conclure?

Le Vice-Président (M. Gendron): Votre question est claire, je vais tenter de donner une réponse claire. Oui, la réponse, c'est suffisant parce qu'on a toujours à regarder, dans la perspective où on répondrait oui à ce qui est proposé à cette Chambre, c'est-à-dire la scission, est-ce que l'un et l'autre des projets de loi, dans leur quintessence, pourraient porter l'ensemble de l'économie du projet de loi. Et, si la réponse est oui, bien, à ce moment-là, ça signifie qu'il n'y a qu'un seul principe. Et rapidement, dès qu'il y a des considérations d'ordre technique qui ne nous permettent pas d'aller plus loin sur l'évaluation des principes, toute la jurisprudence qu'on a regardée rapidement est... mais ça paraissait clair pour tout le monde. Et en conséquence c'est pourquoi j'ai rendu cette décision d'irrecevabilité.

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, moi, je ne sais pas... Je reconnais le député de Richelieu comme prochain intervenant sur le principe du projet de loi n° 57. À vous la parole.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Je sais que je ne suis pas le premier à intervenir sur ce projet de loi et qu'une bonne partie des arguments des aspects de ce projet de loi ont été longuement exposés avec beaucoup plus de talent que je ne saurais le faire, mais il n'est jamais trop tard pour tenter de convaincre la majorité ministérielle de revenir sur ces points de vue pour changer de vision, et c'est ce que je vais tenter de faire au cours des prochaines minutes, M. le Président.

Dans le fond, je résumerais un petit peu la question qui doit nous guider dans l'appréciation du projet de loi n° 57, nous poser une question et tenter d'y répondre le plus sincèrement possible: Est-ce que ? et c'est ça, la question qui se pose ? est-ce que les pauvres du Québec s'en tireront mieux après ce projet de loi? Seront-ils mieux traités? Auront-ils une meilleure situation quotidienne dans leur vie qu'avant le projet de loi? Je pense que c'est ça, la question. Lorsqu'on traite de pauvreté, là, ce n'est pas des abstractions, ce n'est pas des programmes d'abord, ce n'est pas des normes, des règles, c'est d'abord des individus, et ces individus, il faut se le demander, auront-ils une meilleure situation après qu'avant?

M. le Président, ce projet de loi n° 57, il doit être considéré dans un ensemble de projets de loi, dans un ensemble d'attitudes et de politiques que le gouvernement libéral conservateur du premier ministre actuel a fait adopter ou a présentées au cours des deux dernières années, enfin depuis leur arrivée au pouvoir, depuis un an et demi. Tout d'abord, le plan d'action qui devait être rendu public en mai 2003 ne l'a été qu'en avril 2004, contrairement évidemment à toutes les promesses électorales qui avaient été faites. Il contient certaines mesures qui ont été décriées par les groupes de défense des droits des personnes, des assistées sociales, notamment l'indexation partielle de la prestation pour les personnes aptes. De plus, il est à noter que le gouvernement a procédé à de nombreuses hausses de tarifs qui ont affecté...

Lorsqu'on se demande: Est-ce que les gens vont mieux après qu'avant, ce n'est pas dans un monde où il n'y a que la loi, que le projet de loi qui intervient et qui peut modifier la vie des gens. Vous savez, pour des raisons qu'il serait trop long d'expliquer ici, le comté que je représente comme député, le comté de Richelieu, a connu, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, une restructuration industrielle majeure. Traduit en termes clairs, des milliers et des milliers d'emplois industriels ont été perdus. Les chantiers de Marine Industries que vous avez connus, M. le Président, qui ont fait la fierté du Québec pendant des générations, qui ont employé jusqu'à 7 000, 8 000 employés, ont carrément fermé leurs portes. Des aciéries ont disparu. Des entreprises qui fonctionnaient avec une productivité moyenne sont devenues extrêmement productives, avec une très grande productivité, c'est-à-dire que, pour une production supérieure, ils fonctionnent maintenant avec un nombre d'employés bien inférieur.

Le résultat est très simple, je peux vous le dire et je n'ai pas honte de le dire, c'est la vérité: il y a, dans le comté de Richelieu, 3 600 familles. Une famille, c'est toutes sortes de réalités, mais 3 600 familles qui sont à l'aide sociale. Vous savez depuis combien de temps, M. le Président, qu'elles sont à l'aide sociale? Ça ne semble pas beaucoup intéresser les députés de l'opposition.

D'ailleurs, est-ce que je pourrais vous demander, M. le Président, d'appliquer une règle très simple, que chacun doit être à sa place, ici? Il y a un article de notre règlement...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, on fait appel à l'article concernant le décorum, où chaque parlementaire doit être à son siège, lorsqu'un parlementaire souhaite poursuivre son intervention, et c'est ce que je viens d'entendre.

Alors, chaque parlementaire doit occuper son siège. Et je cède à nouveau la parole au député de Richelieu, puisque tous les collègues sont à leur siège maintenant. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Vous avez compris, M. le Président, que je n'ai fait cette demande que pour pouvoir intervenir dans climat de sérénité minimal.

n(17 h 50)n

M. le Président, vous savez combien il y a de familles qui sont depuis 80 mois... Vous savez, pas 70 mois, pas 60 mois. Il y a 3 500 familles du comté de Richelieu qui, depuis plus de 80 mois, sont à l'aide sociale, c'est-à-dire un noyau dur de gens qui ont été laissés pour compte à un certain moment par le développement économique, par le développement industriel. Les personnes qui évidemment, lorsque c'est arrivé, très souvent n'avaient pas de formation dans une situation, dans une région où les salaires étaient très élevés, l'emploi, abondant. De génération en génération, le pattern était simple, les enfants entraient sur le marché du travail, allaient rejoindre leur père à l'usine ou sur le chantier à 17 ans, avec des études très secondaires, c'est le moins qu'on puisse dire. Ce qui fait que, à 16, 17 ans, vous savez, le bagage de ces gens-là, lorsque la restructuration industrielle est arrivée, lorsque les fermetures d'usine ont commencé, ces gens-là se sont trouvés désemparés et n'ont jamais pu réinsérer la vie sociale, là où on retrouve en général la possibilité de se développer comme individu, comme famille, c'est-à-dire par le travail. Ces gens-là ne sont, à toutes fins pratiques, jamais retournés au travail.

Quand je dis ces gens-là, malheureusement il faut ajouter les enfants de ces personnes qui avaient perdu leur emploi et qui s'étaient retrouvés incapables de trouver un emploi. Il y a, il faut bien l'admettre, une culture, un cycle de pauvreté qui s'empare des gens après un certain nombre d'années à l'aide sociale, et ces gens ont désespéré, leurs enfants n'ont pas pris les moyens et n'ont pas pu recevoir de la société les coups de pouce nécessaires à l'époque qui leur auraient permis de sortir de cette difficulté fondamentale.

Moi, quand je parle de pauvreté, M. le Président, je n'en parle pas de façon abstraite, je parle des gens qui habitent en face de mon bureau de comté, derrière mon bureau de comté, que je croise partout, que je verrai d'ailleurs dans 10 jours, à Sorel, lorsque nous ferons, pour la 11e année de suite, le grand repas de Noël que j'organise chaque année pour ces familles. Ce n'est pas une abstraction, ce sont des enfants au regard parfois désespéré, ce sont des familles où l'espoir a souvent quitté la place qu'il aurait dû occuper dans une société qu'on dit abondante. On vit au Québec, en Amérique du Nord, en 2004, on a l'impression que... Et c'est vrai que nous sommes une société riche, mais nous ne devons pas oublier qu'il y a, à côté de nous, des gens qui ont des contraintes plus que sévères à l'emploi dans certains cas. Ce n'est pas uniquement physique, ils ont vécu, depuis trop longtemps, dans un univers où la possibilité de s'en sortir n'existe pas.

Et la question que l'on est en droit de se poser: Est-ce que le projet de loi répond à leurs besoins et est-ce que, eux-mêmes, leurs enfants et malheureusement je dois dire dans certains cas leurs petits-enfants, vont continuer à s'enliser dans cette situation de marginalité sans pouvoir véritablement espérer trouver un poste, une situation, un emploi qui leur permette de s'épanouir. Parce que, de l'emploi, nous en avons créé, M. le Président. Grâce à une aide gouvernementale généreuse, nous avons lancé un plan, nous avons démarré un plan de relance d'une remarquable efficacité. Nous avons doté notre région d'un parc industriel maintenant reconnu à travers tout le Québec qui se développe de plus en plus. Nous avons réussi à orienter notre développement économique autour de véritables pôles de développement modernes, notamment dans toutes les industries environnementales. De spécialistes de la pollution que notre région était à cause de ses aciéries, de ses usines, nous avons ? parce qu'il a fallu trouver des solutions à cette situation de pollution ? nous avons développé petit à petit de formidables entreprises de haute technologie de la dépollution qui maintenant vendent leurs services partout ? j'allais dire au Québec, mais également partout à travers le monde. Il y a une, par exemple, une entreprise chez nous qui est présente dans toutes les grandes aciéries du monde et qui est responsable du dépoussiérage, de s'occuper du traitement de tous les produits secondaires de l'acier.

Vous avez donc une communauté qui s'est prise en main, qui est en train de restaurer, de rénover tout son centre-ville; la ville de Sorel-Tracy devient une ville extrêmement agréable, ouverte sur le fleuve. Vous savez, nous sommes dans un endroit absolument extraordinaire, à l'embouchure du Richelieu.

Mais il reste parmi nous ce remords constant. Il n'y a pas un mois qui se passe où je n'essaie pas de vérifier avec les responsables de l'aide sociale s'il y a... quels sont ceux... combien ont réussi à se remettre dans un circuit d'emploi. Toutes les initiatives que nous avons prises au cours des dernières années visaient toujours à rendre la possibilité, à donner la possibilité, surtout aux jeunes, d'insérer un parcours d'emploi. Je pense à Solidarité jeunesse, qui a été une initiative absolument remarquable, qui est maintenue, je l'espère, qui a été tellement efficace. Je pense à nos carrefours jeunesse-emploi, qui constituent des milieux où les jeunes peuvent recevoir des conseils, de l'aide afin de compléter leur formation, de devenir aptes à l'emploi, dans un milieu qui n'est pas celui des adultes, un milieu qui tient compte de leurs particularités.

Et je dois vous dire que les mesures qui ont été mises en oeuvre ont permis, surtout chez les jeunes, au cours des dernières années, de faire des gains, d'avancer. J'espère que le gouvernement du Québec ne remettra pas en question ces acquis sociaux, ces espoirs, ces lumières qui se sont allumées, notamment pour les jeunes du comté de Richelieu qui ont pu ainsi, grâce à toutes ces initiatives au cours des dernières années, reprendre le chemin du travail.

Parce qu'il faut bien vous le dire, mon comté est vieillissant. Les jeunes l'ont quitté. Bien oui. Certains ici viennent de régions éloignées et savent de quoi je parle; moi, je ne suis pas d'une région éloignée. Non, mais à 80 km de Montréal, ce n'est pas une région éloignée, pas comme chez vous, M. le Président, mais la réalité est la même. La moyenne d'âge est certainement l'un des deux ou trois comtés, les deux, trois circonscriptions plus élevées du Québec.

Nous avons 15 ans d'avance sur le Québec quant au vieillissement de la population, ce qui amène évidemment, vous vous en doutez bien, toutes sortes de problèmes, notamment les coûts de santé beaucoup plus élevés. C'est beaucoup plus exigeant sur nos réseaux de santé, une situation de vieillissement de population. Pourquoi? Parce que nos jeunes, pendant des années, des dizaines d'années, ont quitté la région pour trouver de l'emploi là où il y avait de l'emploi, ont quitté la région.

Comment insuffler un nouveau dynamisme dans une région que les jeunes ont quittée? Ça, c'est un vrai défi. Je me souviens que c'est le défi personnel que je m'étais donné en arrivant dans cette circonscription et je sais à quel point, à l'époque, j'ai investi de mon temps pour convaincre mes collègues qu'il fallait, par exemple, investir dans la formation professionnelle. Si nous voulions relancer l'économie, il fallait que les structures de formation soient là, il fallait que les jeunes puissent rester à l'école, puissent recevoir à l'école la formation dont ils avaient besoin.

M. le Président, force est de constater que rien, dans ce projet de loi, ne me permettra de dire aux familles dont je vous ai parlé tout à l'heure que leur sort sera amélioré. Je l'ai regardé, ce projet de loi. Malheureusement, ce parti, lorsqu'il est arrivé au pouvoir, avait fait des promesses, avait fait miroiter des barèmes planchers que l'on ne retrouve pas, avait fait miroiter des améliorations dans la situation de ceux qui souffrent de cette situation de pauvreté. Malheureusement, le projet de loi n° 57 de toute évidence ne répond pas à ces exigences.

Lorsque j'irai, le 17 ? c'est bien ça? le 17, peut-être le 18 ? lorsque j'irai rencontrer les démunis du comté de Richelieu qui, par centaines, seront là pour partager avec nous un Noël très chaleureux, je ne pourrai pas leur dire qu'à partir de maintenant leur sort s'est amélioré malheureusement si le gouvernement ne change pas d'orientation avec le projet de loi n° 57. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui. C'est ça, M. le député. Est-ce à dire, M. le député, juste pour qu'on se comprenne bien, que vous avez terminé votre intervention? Parce qu'il vous restait cinq minutes à votre droit de parole. Vous n'êtes pas obligé de le prendre, mais, moi, c'était compte tenu de l'heure. J'étais obligé de me lever pour dire qu'à 6 heures on doit suspendre les travaux. Mais est-ce que vous avez terminé votre intervention?

M. Simard: J'ai terminé mon intervention...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, mais c'est important de savoir que l'intervention était terminée. Mais, compte tenu de l'heure, les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Cusano): Veuillez vous asseoir. L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Je suis prêt maintenant à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: C'était vrai il y a quelques années, M. le Président. C'est Borduas.

Le Vice-Président (M. Cusano): Excusez-moi! Je m'excuse énormément. M. le député de Borduas.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: J'ai toujours été fier d'être le député de Verchères. Et d'ailleurs, le comté de Borduas, à une exception près pour une des six municipalités, était partie intégrante du Verchères de jadis.

Alors, bien, écoutez, M. le Président, j'ai choisi moi aussi d'intervenir à cette étape-ci du projet parce que, bon, notre façon de fonctionner au plan parlementaire fait en sorte que parfois il faille tenter à plusieurs reprises de répéter et de répéter pour que peut-être un message de bon sens se comprenne.

C'est dommage finalement qu'on ait un projet de loi devant nous qui n'est pas le projet de loi qui était attendu par les citoyens et citoyennes du Québec. Dans le fond, quand on est allés en élection, les gens se disaient: Bon, bien, finalement, les partis nous promettent de bonifier la situation et ils se sont tous entendus pour voter à l'unanimité un projet de loi contre la pauvreté. Et, dans ça, dans ce projet de loi là, il y avait finalement l'essentiel d'un grand consensus social autant que politique dans notre société à l'égard de la façon dont on devait traiter la problématique de la pauvreté. Et fondamentalement c'est de ça dont on parle.

Quand on parle de l'aide sociale, on parle de l'aide à des gens qui sont en difficulté. C'est un filet de sécurité sociale pour les plus faibles dans notre société, les plus démunis, ceux qui sont en panne, soit parce que leur réalité physique ou personnelle les empêche d'envisager de pouvoir, à un moment donné, travailler dans le marché du travail régulier ou encore parce qu'ils sont en panne dans ce marché-là et que, au fil des années, on a mis en place des règles qui ont amené des gens à passer de l'assurance chômage ou l'assurance-emploi à finalement une aide de dernier recours.

Et justement, quand on veut bonifier une situation, la façon d'évaluer au mérite un projet de loi, c'est de dire: Est-ce qu'il vise les bons objectifs? Et, quand on regarde le projet de loi qui est devant nous, on se rend compte que dans le fond on confond deux approches. Il y a une intention plus ou moins claire de soutenir le revenu et de favoriser dans le fond la sécurité sociale, dans le fond d'aider des gens qui sont des démunis et qui ont besoin finalement du filet de sécurité sociale que collectivement on leur offre pour pouvoir fonctionner, pour pouvoir vivre et subvenir à leurs besoins essentiels. Puis il y a également une volonté, qui est distincte, de favoriser la réinsertion à l'emploi de gens qui ont des difficultés plus ou moins temporaires à se trouver ou à s'insérer dans le marché du travail.

Et, quand on regarde le projet de loi, une des principales critiques qui a été faite par beaucoup d'organismes qui sont venus témoigner en commission parlementaire, c'est que ce projet de loi là ne vise pas la chose la plus importante, c'est-à-dire ne vise pas à s'attaquer au problème de la pauvreté dans son essence même. Quand on est pauvre, pour vivre ou subvenir à ses besoins... c'est-à-dire, il y a un certain nombre de besoins indispensables, ce qu'on appelle les besoins essentiels, et ce qu'on a besoin comme aide, c'est une aide qui nous permet de faire face à ces besoins essentiels là. Et la façon d'évaluer l'efficacité d'une action gouvernementale, quel que soit le parti politique qui assume la responsabilité de gouverner l'État et de diriger l'État, c'est de voir: Est-ce qu'en bout de piste on prend en considération les besoins essentiels? Est-ce qu'on s'entend collectivement sur les besoins essentiels, ce que ça signifie? Et est-ce qu'on s'entend pour dire qu'il faut que la situation des gens au total soit améliorée, c'est-à-dire soit améliorée dans le sens que les gens aient une plus grande capacité à faire face à ces besoins-là? Et beaucoup d'organismes sont venus dire finalement qu'on a raté cet objectif-là, dans le projet de loi, parce qu'on ne reconnaît pas ça comme objectif.

n(20 h 10)n

C'est un projet de loi où, à bien des égards, on vise plus à essayer d'intégrer des gens sur le marché du travail, on vise à essayer de bonifier un peu l'aide aux plus démunis, c'est-à-dire ceux qui sont en... on appelait à l'époque inaptes au travail, par une ponction additionnelle chez ceux qui sont démunis mais qui pourraient éventuellement trouver un travail. Alors, on se retrouve dans une drôle de situation où on fait payer par une des catégories les plus faibles dans notre société un ajout d'argent qu'on accepte de consentir à ceux qui sont un peu plus faibles, c'est-à-dire ceux qui n'ont même pas les moyens de se trouver un travail. Alors, on se dit: Bon, bien, eux, on va un peu améliorer leur situation, tout en ne reconnaissant pas la valeur même des besoins essentiels, puis on va le faire en puisant non pas chez les plus riches, mais en puisant dans l'autre catégorie de pauvres, un peu moins pauvres dans la mesure où ils ont au moins la possibilité, n'est-ce pas, de dire: Un jour, je vais m'en sortir parce que j'ai l'intelligence et les capacités physiques pour le faire. Mais globalement, dans les faits, la réalité, c'est qu'on ne va pas puiser dans la poche des plus riches, on ne vient pas puiser dans la classe sociale ou dans les revenus de travail qui font en sorte que ceux qui ont les moyens de contribuer puissent le faire.

Alors, il y a comme une drôle de conception de la solidarité dans une société comme la nôtre. Quand on veut aider les plus démunis... Je veux dire, on fait tous des discours, là, on a tous été, ou à peu près, au salon du président pour faire nos voeux de Noël. Et la plupart de nos collègues, sinon tous les députés ici ont évoqué, à un moment donné ou l'autre, d'une façon ou d'une autre le problème de la pauvreté pour dire que, dans le temps des fêtes, on devrait être plus sensibles aux plus démunis dans notre société. Des gens vont s'associer ou se sont déjà associés dans leur comté aux guignolées. Il y a la guignolée des médias qui va avoir lieu dans deux jours. Il y a toutes sortes d'activités depuis quelques temps qui vont s'accélérer au cours du prochain mois puis qui vont s'intensifier, qui visent dans le fond à envoyer un message aux gens dans notre société, à l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes: Écoutez, n'oublions pas que, dans notre société, il y a du monde malheureux, n'oublions pas qu'il y a des pauvres, n'oublions pas qu'il y a des gens qui sont mal pris avec la vie et qui ont besoin de ressources additionnelles.

Le problème, c'est qu'on se serait attendu à un projet de loi qui aurait consacré la volonté non pas du gouvernement, mais de l'Assemblée nationale. C'est l'ensemble de l'Assemblée nationale du Québec, dans la législature précédente, qui avait voté le projet de loi contre la pauvreté. Et donc, comme je le disais au début, ce qu'il aurait fallu faire et ce que les gens s'attendaient à faire, dans la logique même de ce geste important qui a été obtenu de haute lutte par des organisations qui étaient sensibles à la pauvreté, c'est de partir de là pour améliorer la situation.

Et dans les faits, quand on regarde le résultat à la fois du projet de loi et des conséquences qu'il va avoir sur un certain nombre de mesures et aussi des autres éléments de la politique, c'est-à-dire de la politique gouvernementale, d'autres mesures administratives ou même législatives dans certains cas, la conséquence de tout ça, un de mes collègues qui est critique dans le domaine justement des finances publiques l'a bien démontré il y a quelques jours: si au total l'aide gouvernementale aux plus démunis se solde à la fin de l'année avec moins d'argent dans les poches des familles qui sont plus en difficulté ou des gens qui sont pauvres, je veux dire, on n'a rien fait pour améliorer dans le fond la situation de la pauvreté, on n'a pas agi en fonction de la loi qu'on avait votée à l'unanimité puis du consensus social qui s'est développé au cours des dernières années. Et on continue donc à envoyer une espèce de message équivoque en disant: Oui, on aide, mais en même temps on n'aide pas tant que ça. Et par ailleurs on n'est pas sûrs qu'on devrait aider les autres plus pauvres s'ils ne s'aident pas eux-mêmes. Alors, aide-toi et le ciel t'aidera, en oubliant que...

Écoutez, on était de l'autre côté de la Chambre puis maintenant de ce côté-ci, la problématique a toujours été la même. Puis, avant que, nous, on se retrouve de l'autre côté, on était à nouveau de ce côté-ci. Ça fait des années que les deux partis principaux à l'Assemblée nationale se retrouvent confrontés avec le même problème. C'est qu'il y a un nombre considérable de personnes qu'on qualifiait à l'époque d'aptes au travail, de gens qui sont en mesure de travailler puis qui se retrouvent malheureusement sur l'aide sociale. Il y en a beaucoup, beaucoup trop. Et il n'y a pas la capacité des programmes gouvernementaux, il n'y a jamais eu, et il n'y a pas encore, et ce n'est pas dans ce qui est annoncé qu'on peut voir la lumière au bout du tunnel, il n'y a pas la possibilité d'aider tout ce monde-là à réintégrer le marché du travail rapidement.

Ce n'est pas vrai que les programmes gouvernementaux qui existaient auparavant, puis qui existent maintenant, puis qui s'apprêtent à être modifiés dans certains cas vont faire en sorte que rapidement, par exemple, 116 000 personnes qu'on pourrait dire qui sont aptes au travail demain matin vont se retrouver en capacité de réintégrer le marché du travail parce qu'on va les avoir amenés dans un programme. Le gouvernement, l'État, pour toutes sortes de bonnes et de mauvaises raisons, n'est pas prêt, ne veut pas investir ce qu'il faudrait pour que ces programmes-là soient efficaces et qu'ils touchent l'ensemble des personnes visées.

Alors, comment vous voulez développer une logique qui fait que, si on n'est pas capable, comme gouvernement, de garantir à tous ceux qui sont dans une situation particulière la possibilité de s'en sortir rapidement et de bénéficier tous d'une aide gouvernementale à travers des programmes de réinsertion, comment, à ce moment-là, logiquement, vous pouvez pénaliser une bonne partie d'entre eux parce qu'ils sont dans une situation où ils ne peuvent pas rapidement intégrer le marché du travail?

Je pourrais comprendre à la limite qu'on dise, qu'on envoie le message à des gens: Écoutez, tout le monde a la possibilité d'utiliser un programme de réinsertion, et, dans ce contexte-là, si vous ne le faites pas, là, la société a la responsabilité de vous mettre une pression particulière pour que vous acceptiez quelque chose qui est possible. Le problème, c'est que ce n'est pas vrai que c'est possible pour tout le monde. Ça ne l'était pas, ça ne l'est pas maintenant puis, ce qu'ils nous annoncent, ça ne le sera pas non plus. Il faudrait mettre des sommes considérables pour que ce soit possible.

Alors, reconnaissons au moins le fait que, si on n'est pas capables de faire en sorte que tout le monde bénéficie d'une façon égale, ceux qui sont dans la classe des gens qui sont aptes au travail, bon, bien, si on n'est pas capables de tous les aider correctement, rapidement, sur un pied d'égalité, alors acceptons, à ce moment-là, la conséquence. C'est que la conséquence, c'est qu'ils devraient être traités comme les autres et ne pas voir, par exemple, leur indexation coupée de moitié, d'autant plus que ce n'est pas l'indexation à l'indice du coût de la vie, c'est une indexation dans le fond tronquée un peu.

Alors, déjà il y a un problème, c'est qu'on n'indexe pas l'ensemble des gens qui sont pauvres comme on devrait les indexer, mais en plus on pénalise une partie d'entre eux parce qu'ils sont aptes au travail, alors qu'on n'est pas... en leur exigeant, en leur disant: Écoutez, vous être pénalisés parce que vous êtes aptes au travail puis on vous fournit des programmes, mais les programmes ne sont pas suffisants puis on ne met pas assez d'argent dans ça. Alors, il y a quelque chose d'incohérent et d'inacceptable au plan humain et plan même de la logique. Et c'est pour ça qu'il y a beaucoup d'organismes qui sont venus en commission parlementaire pour dire: Écoutez, ça, ça n'a pas de bon sens, ça n'a pas de bon sens que vous ajoutiez des pénalités ou que vous soyez plus sévères.

Parce que dans le fond pourquoi les gouvernements, quels qu'ils soient, ajoutent des conditions ou enlèvent des conditions? C'est parce que souvent ils ont une marge de manoeuvre plus ou moins grande. Alors, quand tu as moins d'argent, tu mets plus de conditions pour t'assurer que finalement tu réduises le bassin de personnes qui vont avoir accès au pot, au montant d'argent que tu as de disponible pour venir en aide. Mais la réalité actuellement, c'est qu'on considère que l'État québécois est dans une situation financière précoce, alors on dit: On va serrer la vis, on va mettre des conditions, on va ajouter des conditions qu'on avait combattues à une autre époque ? maintenant qu'on est de l'autre côté, on peut le faire ? et finalement on va réduire dans les faits l'aide qu'on apportait.

Alors, dans les faits, il y a des gens qui étaient favorisés auparavant qui vont l'être moins avec à la fois le projet de loi et les politiques gouvernementales. Il y a quelque chose là qui ne fonctionne pas. Et c'est ça qui a été dénoncé beaucoup en commission parlementaire, tout comme a été dénoncé le fait que le... on dit le focus, l'accent, la cible principale n'est pas de tenir compte des besoins essentiels des plus démunis. Tu sais, si on se dit: Il y a un consensus dans notre société à l'effet qu'on vienne en aide aux plus pauvres, puis un consensus qui n'est pas juste la veille de Noël mais qui est un consensus permanent, alors on doit reconnaître que, quand on veut aider les plus pauvres, l'obligation qu'on a, ce n'est pas de leur en enlever dans leurs poches, c'est de leur en mettre plus, plus un petit peu si on en a beaucoup puis peut-être moins si on en a moins.

n(20 h 20)n

Mais, là, la réalité aussi, c'est que: Pourquoi l'État québécois en a moins actuellement, hein? Pourquoi l'État québécois a actuellement moins de disponibilités financières qu'il devrait en avoir et qu'il devrait en accorder aux plus pauvres? C'est parce qu'on est dans un système politique à deux niveaux de gouvernement. On paie la moitié de nos taxes à un niveau, en fait deux tiers à un niveau puis l'autre tiers ici, à Québec. Les gens disent: Bon, bien, le déséquilibre fiscal, on est d'accord. Le premier ministre, le ministre des Finances ont fait des grandes conférences ces derniers temps, des grands discours pour dire qu'ils sont d'accord. Sauf que la conséquence de ne pas avoir un équilibre fiscal, c'est que l'État québécois a moins d'argent à sa disposition et que, de deux choses l'une: où on fait le combat vraiment, solidement, franchement pour aller chercher cet argent-là et rééquilibrer la situation fiscale au niveau des capacités des deux États, fédéral et provincial, ou bien, si on ne veut pas faire ce combat-là, si on n'a pas l'audace politique, la fermeté et la volonté politique d'aller au bout de cette logique-là, alors il faut être, à cet égard-là, franc, c'est-à-dire: On n'a pas les moyens financiers parce qu'on ne veut pas faire le combat sur le déséquilibre fiscal au bout de sa logique.

Mais, à ce moment-là, est-ce qu'on va rester au moins fidèle à une loi qu'on a votée tous ensemble? C'est-à-dire, si on se dit que la pauvreté dans notre société c'est important, c'est une situation grave, alors qu'est-ce qu'on fait pour mettre plus d'argent dans la pauvreté? Si la conséquence de l'action gouvernementale c'est qu'on en a moins pour les pauvres, on a un problème. On a un problème. C'est qu'on se retrouve en déficit par rapport à ce qu'on avait dit qu'on ferait et on se retrouve en déficit moral par rapport à ce que les citoyens s'attendent d'avoir d'un État qui est un État de solidarité.

En démocratie, une des bases du fonctionnement dans la démocratie, c'est la solidarité entre les citoyens. Tout le monde ne naît pas avec le même niveau de richesse, d'intelligence, de capacité, et on reconnaît ça, et on accepte malgré tout que tout le monde soient égaux en regard de la loi. Et en plus d'être égaux en regard de la loi, on se dit: On va collectivement accepter de supporter les plus faibles. Mais encore une fois ce support aux plus faibles, il doit se faire d'une façon correcte. On doit avoir la franchise, quand on regarde le bilan et la portée des décisions à la fois législatives ? parce que là on parle d'un projet de loi ? et administratives, c'est-à-dire les mesures administratives, financières, budgétaires qu'on met à la disposition... c'est l'ensemble de ça qu'on doit évaluer et c'est l'ensemble de ça qu'on doit regarder en termes d'impact sur la situation des pauvres dans notre société.

Et là, bien, tout le monde est venu dire au gouvernement, tout le monde est venu dire aux députés de l'Assemblée nationale: Écoutez, il y a un problème, là, ce n'est pas cohérent, ce n'est pas ça qu'on devrait faire, on appauvrit dans certains cas et on ne traite pas les gens correctement, on discrimine une partie des plus démunis par rapport aux autres, alors qu'on n'est même pas en mesure de les traiter tous sur un même pied d'égalité.

Alors, dans ce sens-là, est-ce que l'exercice de participation publique, de consultation des citoyens et des citoyennes était un exercice comme trop souvent on en retrouve dans les Parlements contemporains, un exercice où finalement on laisse les gens s'exprimer, mais on a déjà son idée de faite puis on n'est surtout pas prêt à faire des changements, et à tenir compte de l'opinion des citoyens et des citoyennes, puis à la limite à participer, c'est-à-dire à leur donner la capacité de participer au processus de décision?

Motion de scission

Alors, M. le Président, je me retrouve dans une situation où, par rapport à ce que j'ai dit au début, je vais présenter une motion de scission, une motion de scission qui dans le fond vise à faire en sorte que ce projet de loi là soit scindé en deux projets de loi: un qui va viser l'objectif de l'aide aux plus démunis et un autre qui va viser la responsabilité de l'État d'aider ceux qui sont en capacité éventuellement de travailler de le faire, à condition aussi qu'on le fasse correctement.

Alors, la motion, M. le Président, que je présente est la suivante:

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, soit scindé en deux projets de loi: un premier intitulé Loi sur le soutien du revenu et favorisant la sécurité sociale, comprenant les articles 14, 16 et 17, 19 à 65, 75 à 124, 126 à 168, 170 à 181 et 183 à 185; et un second intitulé Loi favorisant l'insertion en emploi des prestataires de l'aide sociale, comprenant les articles 1 à 18 [du projet de loi présenté devant nous], 25, 29, 33 à 37, 59 à 76, 96 à 108, 110, 119, 125, 142, 144, 148 à 150, 169, 179 et 182 à 185.» M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, j'aimerais bien prendre connaissance de la forme écrite de la motion. À ce moment-ci, j'aimerais entendre les arguments. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: Ah, certainement.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants, le temps qu'on ait la copie de la motion qui vient d'être déposée.

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui, certainement. Je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 26)

 

(Reprise à 20 h 31)

Le Vice-Président (M. Cusano): Veuillez vous asseoir.

Débat sur la recevabilité

Alors, je suis prêt à entendre des arguments sur la recevabilité de la motion de scission présentée par le député de Borduas. Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je voudrais d'abord clarifier un premier élément. Effectivement, nous venons de déposer, le député de Borduas vient de déposer une motion de scission. Et, même si nous avons eu une motion similaire qui a été débattue et jugée à la fin de la journée, je voudrais tout de même rappeler, vous rappeler, M. le Président, qu'une décision du 27 mai 2004 est à l'effet que nous avons tout à fait le droit de représenter une nouvelle motion de scission.

Et je me permets de citer une décision du président à ce moment-là, à l'occasion de cette décision donc du 27 mai 2004: «Quand le leader de l'opposition prétend qu'un autre parlementaire pourrait à nouveau rédiger une nouvelle motion de scission puis la présenter différemment, il en a tout à fait le droit, et vous [en] avez tout à fait le pouvoir.» Fin de la citation, même si je l'ai un petit peu escamotée en lisant.

Donc, je crois que nous sommes justifiés de présenter une nouvelle motion et qu'elle soit faite dans des termes différents, mais qu'elle ait le même sens, parce que, M. le Président, vous avez décidé donc, à la fin de la journée, de rejeter, de déclarer irrecevable la première motion de scission que nous avons présentée, et je cite votre décision à ce moment-là: «...ces considérations d'ordre technique sont suffisantes pour déclarer la motion de scission irrecevable. C'est pourquoi je n'ai pas à disposer [sur] la question de savoir si le projet de loi contient plus d'un principe.»

Alors, je m'appuie donc, à la lumière de votre décision, sur le fait que vous nous avez indiqué que ce sont pour des motifs d'ordre technique que vous avez jugé la motion irrecevable. Et je maintiens donc qu'il y a deux principes dans le projet de loi n° 57: un élément, une composante qui réunit des dispositions relatives à l'aide de dernier recours, et un autre élément de ce projet de loi n° 57 qui concerne des mesures d'aide à la réinsertion à l'emploi.

Vous nous avez signifié, M. le Président, au moment de cette décision d'aujourd'hui, que, pour donc des motifs techniques, il n'était pas possible d'accepter cette motion, et vous nous avez donné des exemples d'articles, et particulièrement l'article 36, 57 et 96, où vous nous avez signifié qu'il y avait un problème de cohérence, à savoir si un article se retrouvait dans le projet de loi n° 1, que nous avons intitulé n° 1, ou le projet de loi n° 2.

Alors, M. le Président, la motion que vous avez sous les yeux est donc le résultat d'un travail assez simple, encore là, que nous avons fait, où nous avons effectivement essayé de repérer les éléments, les articles qui se retrouveraient possiblement, sans problème de compatibilité, dans le projet de loi n° 1 et dans le projet de loi n° 2. Et je vous indique que la jurisprudence nous permet de faire cette motion, puisque la jurisprudence est assez claire et qu'elle établit que, si des articles se retrouveraient dans deux projets de loi qui seraient l'objet du résultat d'une motion de scission, dans la mesure où ces articles concernent des modalités qui sont compatibles avec les deux principes, eh bien, ça rendrait cette motion tout à fait acceptable.

Et c'est ce que nous avons fait en préparant cette nouvelle motion ? que je cherche pendant que je vous parle, on est toujours un peu inondé de papier, mais enfin. C'est donc ce que nous avons fait. Nous prétendons donc que notre motion fait en sorte que les articles que nous retrouvons... Parce que vous remarquerez qu'il y a quelques articles effectivement qui se retrouveraient dans le projet de loi n° 1, également qui se retrouvaient dans le projet de loi n° 2. Alors, nous prétendons que ces articles conservent des modalités compatibles avec les deux principes qui se retrouvent au coeur de ce projet de loi qui pourrait potentiellement être scindé. Et je me permettrai de vous donner un exemple, M. le Président: l'article 17.

Alors, selon notre motion, l'article 17 se retrouverait dans le projet de loi n° 1, c'est-à-dire dans la Loi sur le soutien du revenu et favorisant la sécurité sociale, mais l'article 17 se retrouverait également dans la loi favorisant l'insertion en emploi des prestataires de l'aide sociale.

Alors, l'article 17 se lit comme suit: «Le ministre peut également verser une prime à la participation, sous forme d'allocation de participation, à un adulte admissible au Programme d'aide sociale ou au Programme de solidarité sociale qui exerce des activités favorisant son implication sociale et communautaire, notamment dans le cadre de projets-pilotes.»

Alors, M. le Président, voici un exemple où cet article pourrait, sans qu'il y ait un problème de cohérence et de compatibilité, se retrouver dans les deux projets de loi et faisant en sorte que ces deux projets de loi soient des touts cohérents.

Alors, voilà les éléments pour lesquels nous avons présenté cette motion et qui, je l'espère, vous éclaireront dans votre décision.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la leader de l'opposition officielle. Je reconnais maintenant le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, en réplique au plaidoyer de la leader de l'opposition officielle, simplement pour vous rappeler quelques-uns des éléments. D'abord, indiquer que je crois sincèrement que, du côté de l'opposition, en tout respect, M. le Président, on revient avec les mêmes arguments, la même tentative déjà tentée plus tôt. Je pense que sincèrement c'est parce que les gens d'en face n'ont plus rien à utiliser, n'ont plus rien à dire en ce qui a trait au projet de loi n° 57. Parce que le projet de loi n° 57, tel qu'il est présenté, M. le Président, c'est un projet de loi avec un régime de base qui est le même.

On nous propose de le diviser selon les personnes, selon les catégories. D'abord, il faut se rendre compte que le projet de loi n° 57 est en ligne avec le projet de loi de lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale parce qu'on parle, dans cette loi-là, de la valorisation du travail. Et l'aide financière, l'aide à l'emploi sont des modalités qui permettent de mettre en oeuvre le principe du projet de loi n° 57. Et ça, on peut le revoir dans le projet de loi n° 112, qui a précédé, qui propose une approche globale.

Écoutez, les gens d'en face sont eux-mêmes, aujourd'hui, à être contre une approche qu'ils nous ont présentée en commission parlementaire, qu'ils nous ont présentée quand ils étaient au gouvernement et qu'ils ont amené le projet de loi n° 112, c'est-à-dire d'avoir une approche globale pour lutter contre la pauvreté. Et, aujourd'hui, ces gens-là viennent nous dire qu'on devrait diviser le projet de loi. C'est un petit peu dur à suivre, M. le Président, surtout qu'en commission parlementaire il y a seulement six groupes sur les 72 que nous avons entendus qui nous ont demandé justement de diviser le programme et le projet de loi. Et, à ce moment-là, notre crainte de ce côté-ci, M. le Président, si effectivement il y avait une division du projet de loi, il y a des problèmes au niveau, entre autres, des perceptions que les gens pourraient avoir, il y a des catégorisations qui se feraient, et ça va à l'encontre de ce qui a été plaidé en commission parlementaire.

n(20 h 40)n

L'autre élément, la façon dont c'est amené aujourd'hui et ce qui nous est présenté par l'opposition officielle, c'est que, dans les éléments qu'on nous propose, le projet de loi n° 57 propose un régime de sécurité du revenu de base qui est le même pour tout le monde, qui est le même pour les jeunes, qui est le même pour les aptes, qui est le même pour les inaptes.

La différence se situe dans les modalités. On a le même régime de base. Pour les jeunes, on offre le régime de base, le barème plancher, plus un certain nombre de programmes avec Alternative jeunesse. Pour les personnes qui sont sans contraintes à l'emploi, on offre encore le régime de base plus prime à la participation, plus d'autres programmes qui viennent aider les gens. Pour les gens qui sont dans le programme Solidarité sociale, on offre toujours le régime de base, bonifié parce qu'ils ont des contraintes sévères à l'emploi, plus le fait que nous voulons pour ces gens-là assouplir les règles, assouplir les contrôles, leur rendre la vie plus facile.

Donc, M. le Président, il s'agit du même régime de base avec des modalités d'application différentes sur le principe. Et dans le fond, M. le Président, ce qu'on se rend compte aujourd'hui, quand j'entends la leader de l'opposition, ça me rappelle ce jour de décembre, il y a quelques années, quand notre collègue Christos Sirros a présenté un amendement. Et l'amendement avait été présenté et se lisait comme suit. On voulait, M. le Président, garantir le barème plancher, et la députée avait voté contre.

Le Vice-Président (M. Cusano): ...à la recevabilité.

M. Béchard: Merci, M. le Président. Ce qu'on essaie de faire de l'autre côté, M. le Président... On n'a plus d'arguments. On n'a plus d'autre solution. Tout le monde a parlé. Là, on veut retarder le débat. On a présenté hier soir une motion d'ajournement...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Oui, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: ...au député et ministre qu'il ne peut pas prêter des intentions. Nous avons le droit de présenter cette motion. Ce droit-là a été consacré par de nombreuses décisions, et le ministre nous prête des intentions. Et je ne pense pas que ce soit acceptable.

Le Vice-Président (M. Cusano): J'aimerais rappeler à tous qu'à ce moment-ci et à tout moment depuis que je siège ici, à l'Assemblée nationale, on ne peut pas prêter des intentions à qui que ce soit.

Et, deuxièmement, M. le ministre, je vous écoute sur la recevabilité de la motion.

M. Béchard: M. le Président, je ne plaide pas... Je ne prône pas d'intention... Je ne prête pas d'intention à l'opposition officielle. Tout ce que je rappelle, c'est que je rappelle des faits. Hier soir, on a présenté une motion d'ajournement, une motion de report. On a été battu; il y avait seulement 17 personnes de l'autre côté pour voter.

Mme Lemieux: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Mme la leader de l'opposition, vous avez la parole.

Mme Lemieux: Je voudrais que vous fassiez respecter votre décision. Les arguments à ce moment-ci concernent la recevabilité. Si le ministre veut que je plaide sur le fond, je vais le faire. J'ai joué les règles du jeu. On est sur la recevabilité. On vous présente des arguments à ce sujet-là, que le ministre en fasse autant.

Le Vice-Président (M. Cusano): M. le ministre, je vous demanderais de vous en tenir à la recevabilité, s'il vous plaît.

M. Béchard: Oui, mais qu'elle me laisse terminer. Qu'elle me laisse terminer, et on va voir. Elle jugera après.

M. le Président, il y a eu, hier, une présentation d'une motion d'ajournement, motion de report. Aujourd'hui, il y a eu une motion de scission et il y en a une autre présentement. On revient avec les mêmes arguments qui n'ont pas fonctionné hier, qui n'ont pas fonctionné avant l'ajournement de 18 heures.

Et on vient nous dire que le projet de loi n'est pas... On devrait scinder. On ne peut pas scinder ce projet de loi là. Si on scinde ce projet de loi là, on crée des régimes différents. Eux-mêmes ont plaidé, pendant des années, contre la création de régimes différents.

Le projet de loi n° 57 est très clair et très limpide. Il prévoit un régime de base avec des ajouts selon les caractéristiques des personnes. Donc, on ne vient pas créer de différenciations, on ne vient pas créer de distinctions à la baisse. Il y a un barème plancher. Le régime est de base, et on le bonifie dans chacun des cas.

Et donc, M. le Président, je ne veux pas plaider plus longtemps, parce que dans le fond notre argument est clair. Le projet de loi n° 57 a un principe: lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et les éléments d'Alternative jeunesse, de solidarité sociale et d'aide sociale sont des modalités pour nous assurer que nous lutterons contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres arguments avant que je suspende? Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'espère que vous serez assez sage pour ne pas refuser cette motion et, j'en suis sûre, M. le Président, pour ne pas refuser cette motion pour les motifs invoqués par le ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Qu'est-ce qu'il nous dit, au fond? Il nous dit qu'il est agacé, qu'il est un peu tanné, c'est notre troisième motion. Ce n'est pas une raison, M. le Président. Vous devez considérer...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Un instant! Un instant! Oui, M. le ministre.

M. Béchard: Je crois sincèrement, M. le Président, et en toute amitié pour la leader de l'opposition, qu'elle me prête des intentions. Je suis parfaitement de bonne humeur. Je...

Le Vice-Président (M. Cusano): Je demande la collaboration de tous. On est sur une motion. À ce moment-ci, j'aurai à suspendre dans quelques instants. Sur la recevabilité. Est-ce qu'on pourrait s'en tenir à la recevabilité, s'il vous plaît?

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, je vous rappellerai tout de même que le ministre a indiqué que, si nous déposions une motion de scission... c'était la troisième. Donc, pour moi, implicitement, je m'excuse, il invoque donc ce motif pour rejeter la motion, qui n'est pas un motif acceptable, et je crois que nous nous comprenons.

Deuxièmement, il semble nous indiquer qu'il n'y a qu'un seul principe dans ce projet de loi, puisque les programmes sont bâtis à partir des catégories de personnes. C'est un peu ce qu'il a développé. Alors, M. le Président, en toute humilité, je vous soumets que cette information n'est pas juste. Et la preuve de ça, M. le Président, c'est que, par exemple, les montants qui sont attribués aux personnes en fonction ? non, mais je reprends ses arguments, je vais exposer ses arguments, il me semble important que vous entendiez la contrepartie ? les montants attribués aux personnes dépendent justement s'ils sont dans des programmes d'aide de dernier recours ou s'ils sont dans des programmes de réinsertion à l'emploi.

Et, M. le Président, le leader du gouvernement, tout à l'heure, au moment d'une première motion, a fait référence aux notes explicatives. Je conviens tout à fait que les notes explicatives n'ont pas une valeur juridique blindée, mais qu'elles témoignent tout de même de l'esprit. Et, dans le premier paragraphe des notes explicatives, on parle bien «des principes» et on parle bien de deux objectifs qui sont visés par ce projet de loi.

Et je vous rappelle, M. le Président, que ce que nous avons invoqué un peu plus tôt et que je réitère à votre attention est le fait que, si les deux projets de loi sont scindés, la preuve de la pertinence de scinder les projets de loi est que l'Assemblée nationale pourrait voter pour le projet de loi 1 et contre le projet de loi 2, et inversement, et... bon, les combinaisons ne sont pas à l'infini.

Alors, pour ces raisons, je vous demande d'accueillir la motion, vous rappelant que les articles communs sont compatibles avec les deux projets de loi que nous croyons qu'il nous faudrait scinder.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, brièvement, M. le ministre.

M. Béchard: Très, très brièvement, M. le Président. Très, très humblement, je vous dirais que, dans ce qui a été amené par la leader de l'opposition, il n'y a aucun nouvel argument. Et il y a un principe très simple en droit: chose jugée, chose jugée. Alors, la cause a déjà été entendue, elle a déjà été jugée, il n'y a pas de nouveaux arguments, alors on attend le même jugement.

Le Vice-Président (M. Cusano): Je...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Je...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Un instant! Un instant! Je vais vous reconnaître, Mme la leader de l'opposition. Allez-y.

Mme Lemieux: ...la cause n'a pas été jugée. La cause n'a pas été jugée, puisque la décision précédente de la présidence est à l'effet que la motion n'a pas été jugée recevable pour des considérations d'ordre technique. Et je crois sincèrement que, dans la formulation que nous présentons actuellement, les éléments d'ordre technique ont été corrigés.

n(20 h 50)n

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci. Je reconnais maintenant la leader adjointe du gouvernement.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. le Président, la leader de l'opposition officielle reprend, dans son argumentation, des éléments qui se rapportent à la formulation qui a été choisie en ce qui a trait à la deuxième motion de scission. Elle a principalement parlé de compatibilité. J'aimerais rappeler que ce n'est pas un argument de compatibilité qui doit être considéré ou reçu, mais plutôt un argument de cohérence. Et les conditions suivantes ont été établies par la jurisprudence parlementaire, et permettez-moi, bien que je sais que vous les connaissez, de vous les rappeler: «Chaque partie du projet de loi scindé doit pouvoir être considérée distinctement; chaque partie du projet de loi scindé doit constituer plus qu'une modalité; les projets de loi qui résulteraient de la scission doivent constituer des projets de loi cohérents en eux-mêmes.»

Alors, on parle donc de cohérence et non pas de compatibilité, pour reprendre les termes qui ont été utilisés par la leader de l'opposition officielle au niveau de la formulation et pour expliquer la formulation de la deuxième motion de scission que vous avez à considérer.

Deux, j'aimerais vous rappeler qu'il a également été établi par la jurisprudence des distinctions extrêmement importantes entre les modalités et les principes. Et la jurisprudence a également retenu que, même si le projet de loi contient plusieurs modalités, il ne faut pas nécessairement en conclure qu'il existe plusieurs principes, et vous l'aurez compris, M. le Président. Et je vois que vous avez saisi qu'il y a une distinction claire et nette à établir entre ce qui constitue un principe du projet de loi et une simple modalité.

Et, en dernier lieu, j'aimerais également évoquer une autre jurisprudence qui a rappelé l'ensemble des éléments que je viens de soumettre, et permettez-moi de citer: «Toutefois le fait qu'un projet de loi comporte plus d'un principe ne signifie pas qu'il [puisse] être scindé. Les conditions suivantes ont aussi été élaborées par la jurisprudence ? et je les rappelle, parce qu'elles sont essentielles: chaque partie du projet de loi scindé doit pouvoir être considérée distinctement; chaque partie du projet de loi scindé doit constituer plus d'une modalité; les projets de loi qui résulteraient de la scission doivent constituer des projets de loi cohérents en eux-mêmes» et non pas compatibles, et la motion de la députée... ou de l'opposition officielle ne semble pas réunir des conditions qui ont été retenues par la jurisprudence.

Tel que le ministre vient de le dire, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, le projet de loi n° 57, le projet de loi sur l'aide aux personnes et aux familles constitue un tout. Il ne contient qu'un seul principe, un principe de base, c'est un régime de base, bien sûr avec des modalités. Mais, grosso modo, le principe qui est sous-entendu, qui est indissociable, c'est la lutte à la pauvreté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lemieux: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Est-ce que vous avez des événements nouveaux? Parce que j'estime que j'ai été suffisamment éclairé. Brièvement, Mme la leader de l'opposition.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Sur un élément, sur un élément, M. le Président, puisque la leader adjointe du gouvernement a indiqué qu'elle croyait injustifié que j'utilise l'argument de la compatibilité. Alors, je voudrais vous signifier que je crois qu'elle a tort et que je crois que j'ai raison évidemment, et surtout vous indiquer la décision... vous référer à la décision 241/13, Raymond Brouillet, novembre 2000, où il est clairement indiqué que, lorsque des projets de loi distincts sont proposés et qu'il y a des articles ? je le reprends en substance ? qui peuvent se retrouver dans les deux projets de loi, c'est possible, dans le cas... à la condition qu'ils concernent des modalités compatibles avec les deux principes qui se retrouvent dans chacune des parties scindées.

Alors, c'est la raison pour laquelle j'ai utilisé cet argument, et je crois qu'il était justifié que je puisse le faire, d'autant plus que c'est le fondement de votre décision que vous avez rendue il y a quelques heures.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci. Alors, je crois que je suis...

Mme Lamquin-Éthier: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Brièvement, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Soyez-en assuré, M. le Président. De surcroît, sans reprendre les arguments qui vous ont été servis précédemment par le leader adjoint, la motion qui est déposée présentement est également irrecevable pour les mêmes raisons que la motion précédemment déposée. Techniquement, pour les mêmes raisons et les mêmes arguments, la motion devrait être jugée irrecevable parce qu'elle ne rencontre pas les conditions qui ont été explicitées, et ce, à de nombreuses occasions par la jurisprudence.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci. Alors, à ce moment-ci, je vais suspendre et je reviendrai avec une décision.

(Suspension de la séance à 20 h 54)

 

(Reprise à 21 h 35)

Décision de la présidence

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre! Veuillez vous asseoir.

Je vais maintenant rendre ma décision sur la recevabilité de la motion de scission présentée par le député de Borduas. Après l'avoir analysée, je la déclare irrecevable, et ce, pour les mêmes motifs que ceux contenus dans la décision rendue cet après-midi par mon collègue.

Comme ce dernier le mentionnait, le règlement prévoit que, lorsqu'un projet de loi contient plusieurs principes, il peut faire l'objet d'une motion de scission. Par contre, il rappelait que, pour être recevable, une telle motion doit donner lieu à des projets de loi cohérents en eux-mêmes, complets et qui peuvent vivre indépendamment les uns des autres. Or, en l'espèce, les deux projets de loi qui résulteraient de la motion de scission présentée par le député de Borduas ne satisferaient pas à ces critères.

Tout d'abord, l'article 96, qui se retrouverait dans les deux projets de loi, fait référence à l'article 40 qui, lui, ne figure que dans le premier projet de loi. Ce même article 96 réfère également aux chapitres III et IV du titre II, soit les articles 66 à 74 qui, eux, sont uniquement dans le deuxième projet de loi.

Ensuite, l'article 59, qui se retrouverait dans les deux projets de loi, fait référence aux objectifs du Programme de solidarité sociale, lequel est défini à l'article 58 qui figurerait uniquement dans le premier projet de loi.

De même, l'article 38, qui serait compris dans le premier projet de loi, fait référence au programme Alternative jeunesse. Or, ce programme est mis en oeuvre par les articles 76 à 71 qui se retrouvent uniquement dans le deuxième projet de loi.

En somme, même s'il est possible qu'un même article se retrouve dans les deux projets de loi, encore faut-il que les projets de loi qui résulteraient de la scission soient cohérents ? je répète, il faut qu'ils soient cohérents ? complets et puissent vivre indépendamment les uns des autres, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, je reconnais maintenant le ministre de la Solidarité sociale pour son droit de réplique.

M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: Merci, M. le Président. M. le Président, merci. C'est avec beaucoup de plaisir que, simplement en quelques mots, vous souligner qu'on vient de voir différentes tentatives de l'opposition officielle pour tenter de poursuivre le débat. Je pense qu'ils n'avaient pas grand-chose de nouveau à dire avec le passé qu'ils ont. Je veux simplement remercier mes collègues qui ont travaillé très fort et qui ont parlé pendant l'adoption de ce principe, et leur dire que finalement leurs témoignages, leurs propos étaient très opportuns dans le débat à l'adoption de principe, et que c'est avec beaucoup de plaisir que nous nous retrouverons en commission parlementaire pour discuter de la suite du projet de loi n° 57. Merci.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, M. le ministre. Le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lemieux: M. le Président, un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, il y a une demande pour un vote par appel nominal. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Vote reporté

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote à la période des affaires courantes du mercredi 8 décembre 2004.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, le vote est reporté à demain, après la période des affaires courantes. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Ajournement

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mercredi 8 novembre 2004, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Cusano): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cusano): Adopté. Alors, nous nous retrouverons ici, demain, à la période des questions, à 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 39)