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Commission permanente de l'agriculture
Etude du projet de loi no 39
Séance du mercredi 18 juin 1975
(Dix heures quarante minutes)
M. Cornellier (président de la commission de
l'agriculture): A l'ordre, messieurs! La commission de l'agriculture
reprend ses travaux ce matin pour l'étude, article par article, du
projet de loi no 39. M. Houde (Fabre) remplace M. Fraser (Huntingdon); M. Caron
(Verdun) remplace M. Giasson (Montmagny-L'Islet). Le rapporteur de la
commission, qui devrait se joindre à nous dans quelques minutes, est
toujours M. Omer Dionne, député de Mégantic-Compton.
La parole est à l'honorable député de Saguenay.
M. Lessard: M. le Président, avant d'analyser le projet de
loi no 39 article par article, j'aurais trois ou quatre questions à
poser au ministre sans engager de débat. Je voudrais avoir des
réponses aussi précises que possible. Est-ce que le ministre
pourrait me dire s'il est exact qu'il n'existerait actuellement que deux
inspecteurs gouvernementaux chargés à plein temps de la
surveillance du commerce d'animaux morts et malades au Québec?
M. Toupin: Tout ce qui a été dit jusqu'à
maintenant, c'est qu'il y a quatre inspecteurs affectés à ces
fonctions dans la province de Québec.
M. Lessard: Ce sont quatre inspecteurs qui sont responsables de
cette fonction.
M. Toupin: Qui sont affectés à ces
tâches.
M. Lessard: Le ministre pourrait-il me dire si on l'avait
informé ou s'il connaissait les rapports qui ont été
présentés par deux, en tout cas, de ces inspecteurs à
temps plein parce qu'on parle, dans l'article, des deux seuls
inspecteurs à temps plein, mais le ministre me parle de quatre
soit M. Roland Brind'Amour et M. Jacques Boulet, l'un en date du 25 mai 1973 et
l'autre en date du 22 juin 1973?
M. Toupin: Si le député de Saguenay a suivi un peu
le déroulement des travaux de la Commission d'enquête sur le crime
organisé, il aurait trouvé sa réponse. Ces rapports ont
été présentés au responsable des inspecteurs du
ministère de l'Agriculture du Québec et ce dernier dit les avoir
soumis aux sous-ministres adjoints, MM. Camille Julien et Lucien Bissonnette.
Ces mémoires, effectivement, n'ont jamais été mis sur mon
bureau. De façon régulière, cela se fait ainsi. Les
fonctionnaires subalternes remettent aux hauts fonctionnaires des documents de
travail et non pas seulement ceux-là, mais bon nombre de documents de
travail. Ces derniers, par la suite, formulent des poli- tiques ou des
programmes qui sont soumis à mon attention et, après, on met en
place la programmation s'il y a lieu.
M. Lessard: Mais le ministre nous assure que, personnellement, de
quelque façon que ce soit, il n'aurait pas été
informé des deux rapports, l'un du 25 mai 1973 et l'autre du 22 juin. Je
voudrais citer simplement un passage de celui du 22 juin où les deux
inspecteurs en chef, M. Roland Brind'Amour et M. Jacques Boulet, affirment:
"Nous souhaitons ardemment que des mesures très énergiques soient
prises, car le ministère, en émettant ces permis, devient,
consciemment ou inconsciemment, complice de ces gens connus sous le nom de
pègre des viandes."
Est-ce que le ministre peut m'assurer que, personnellement, il n'a
jamais pris connaissance de ces rapports et qu'il n'en a jamais
été informé?
M. Toupin: J'ai donné la réponse tantôt
à cette question. Ces rapports ont été remis aux hauts
fonctionnaires du ministère et ils n'ont jamais été
acheminés jusqu'à mon bureau. Les fonctionnaires du
ministère, à la suite d'études faites de ces documents,
n'ont pas, dans ces mémoires, trouvé autre chose que des
recommandations vagues, à ce qu'on m'a dit en tout cas, et aucune preuve
à l'appui des affirmations qui ont pu être faites ou qui pourront
être faites à l'avenir; aucune preuve claire et nette ne
démontrait que de tels réseaux de vente de viande avariée
existaient.
Les inspecteurs recommandaient au ministère... Ce ne sont pas les
seuls, le Dr L'Heureux aussi, je pense, a fait des recommandations. Mme
Valentine a crié sur la place publique, elle aussi, qu'elle avait vu et
qu'elle avait entendu ces choses. Mais jamais ces dames et ces messieurs n'ont
donné de preuve évidente comme quoi un tel réseau
existait. Que ces mémoires aient été
expédiés aux responsables du ministère, oui, c'est un
fait.
Le sous-ministre Julien l'a dit clairement hier à la
commission.
M. Lessard: Et non au ministre de l'Agriculture.
M. Toupin: Les deux fonctionnaires, les deux inspecteurs ont dit
clairement que ce mémoire avait été soumis au
sous-ministre adjoint, non pas au ministre de l'Agriculture.
M. Lessard: Oui, mais le sous-ministre adjoint doit faire rapport
au ministre de l'Agriculture de temps en temps, lui.
M. Toupin: M. le Président, la question du
député de Saguenay n'était pas si des rapports
étaient faits ou non. Il me demandait si ces documents étaient
parvenus sur mon bureau. J'ai dit que non, ils n'étaient pas parvenus
sur mon bureau.
M. Lessard: J'ai demandé si vous aviez eu
connaissance de quelque façon que ce soit de ces deux rapports et
si le sous-ministre adjoint, M. Julien, ou un autre sous-ministre adjoint vous
avait informé verbalement ou autrement de ces deux rapports.
M. Toupin: M. Julien, le sous-ministre adjoint, l'a dit, hier,
à la commission. Ces rapports et d'autres lui sont parvenus, ces
rapports ont semé dans son esprit des doutes, ces rapports ne donnaient
aucune preuve évidente qu'il pût exister un tel réseau. Par
la suite, le Dr Julien a soutenu, et avec raison, que des démarches
immédiates ont été entreprises au niveau du service
administratif pour préparer une nouvelle réglementation.
M. Lessard: A la suite de la réponse du ministre, puis-je
citer un autre passage de ce rapport du 22 juin où on dit: "En
résumé, d'après les constatations faites sur les lieux,
nous croyons que le fait d'accorder des permis de récupération et
d'équar-risseur d'animaux morts ou malades à des personnes sans
scrupule, qui se servent de oesdits permis pour frauder et mettre en danger la
vie des consommateurs, constitue à notre avis une disgrâce et
n'est pas à l'honneur du ministère de l'Agriculture du
Québec." Ce que je veux souligner, M. le Président, en citant ce
passage, c'est qu'il semble bien que ces inspecteurs avaient fait des
constatations précises. En l'occurrence, je voudrais demander
étant donné les réponses du ministre de l'Agriculture
si celui-ci accepterait de déposer, premièrement, le
rapport du 25 mai 1973, de MM. Roland Brind'Amour et Jacques Boulet, le rapport
du 22 juin 1973, par les mêmes personnes, ainsi que le mémo de M.
Claude Bergeron à MM. Lucien Bissonnette et Camille Julien dans lequel,
justement, on parle de situations très désastreuses en citant
particulièrement la région du Lac-Saint-Jean. Est-ce que le
ministre accepterait de déposer ces rapports?
M. Toupin: M. le Président, je n'ai pas d'objection
à déposer ces rapports. Je vais me rendre au ministère,
avant la séance de cet après-midi, et j'espère que le
député de Saguenay va y être...
M. Lessard: Je ne pourrai pas être là.
M. Toupin: S'il n'y est pas, je pourrai les déposer
demain, pour qu'il soit présent. Je vais réunir ces documents. Si
j'ai ces documents mentionnés à la commission d'enquête, je
n'ai absolument aucune objection à les déposer.
M. Roy: M. le Président, sur le même sujet, est-ce
que le ministre...
M. Lessard: M. le Président, je m'excuse. Est-ce que le
ministre accepterait de déposer aussi le rapport de 1968 qui a
été préparé par trois vétérinaires du
ministère de l'Agriculture et dont l'ex-ministre de l'Agriculture a
parlé passablement? Est-ce que le ministre sait de quel rapport je
parle?
M. Toupin: Oui, c'est le rapport L'Heureux. M. Lessard: Le
rapport L'Heureux. D'accord.
M. Roy: J'aimerais savoir, à ce moment-ci, si le ministre
a demandé l'an dernier aux personnes responsables un rapport sur
l'état de la situation qui prévalait dans le domaine du commerce
de la viande.
M. Toupin: M. le Président, je vais rapidement, pour
éclaircir...
M. Roy: J'aurais une deuxième partie, à ma question
avant que le ministre donne une réponse.
M. Toupin: D'accord.
M. Roy: Est-ce qu'à la suite de la publication de ces deux
rapports, un officier de votre ministère vous a informé
vous avez répondu que vous n'aviez pas eu le rapport sur votre bureau
de la présence de ces deux rapports dans les bureaux du
ministère et leur contenu? Est-ce que vous avez été mis au
courant de la situation? Cela est une partie de la question. Avez-vous
été mis au courant de la situation et est-ce que vous avez
demandé personnellement qu'on vous fasse un rapport?
M. Toupin: Je vais faire, grosso modo, l'historique de ce qui
s'est passé, mis à part ces témoignages qui ont
été faits, ces déclarations qui ont été
faites.
Il est si facile, évidemment, dans des commissions
d'enquête, de reporter le problème sur le dos des autres. Ce n'est
pas compliqué, cela ne prend pas de temps à faire ça.
M. Lessard: Et vos fonctionnaires?
M. Toupin: Ceux-là comme les autres. Qu'on soit
fonctionnaire ou pas, on est tous des humains et on...
M. Lessard: Une question de règlement, M. le
Président.
M. Toupin: ... essaie toujours de faire porter le...
M. Lessard: II ne faudrait pas que le ministre, qui a la
responsabilité de l'administration de son ministère, reporte ses
responsabilités sur ses fonctionnaires.
M. Toupin: M. le Président, ce n'est pas dans mes
habitudes. Quand j'ai déclaré, au début de cette
enquête, que la CUM était aussi responsable que nous et que le
gouvernement fédéral était aussi responsable que nous, on
m'a dit que je remettais mes responsabilités sur le dos des autres.
Regardez ce que la commission d'enquête a retrouvé. Je n'ai pas
mis la responsabilité sur le dos des autres. J'ai voulu expliquer les
faits et la situa-
tion. Cela s'est avéré ainsi à la commission
d'enquête.
Ce n'est pas dans mes habitudes de faire porter mes
responsabilités par les autres.
M. Roy: Qui a la responsabilité de la loi 31?
M. Toupin: La responsabilité de la loi 31, c'est moi qui
l'avais.
M. Roy: Bon.
M. Toupin: Je vais vous dire comment cela s'est
déroulé et je n'ai pas peur de vous le dire. Je vais vous le
dire...
M. Lessard: L'ancienne loi sur les produits agricoles et les
aliments...
M. Toupin: Exactement la même chose. Je vais vous dire
comment cela s'est déroulé. C'était au ministère de
la Santé. Cela a été transféré au
ministère de l'Agriculture en 1969 ou en 1970. Les dates exactes, je ne
les connais pas, mais c'est à ce moment-là, 1969 ou 1970.
Les règlements qui existaient à ce moment-là
n'étaient pas des règlements assez forts, des règlements
assez détaillés pour nous permettre de poser les gestes et
d'amorcer les programmes qu'on aurait voulu amorcer.
Qu'est-ce qu'on a fait? On a créé un comité
où étaient représentés deux ministères,
celui de l'Agriculture et celui des Affaires sociales. Nous en sommes venus
à la conclusion qu'il fallait refaire les règlements.
Un rapport m'a été remis, je ne me rappelle pas exactement
à quelle date. Quand le rapport m'a été remis, je l'ai
examiné avec le conseil d'administration. On n'était pas
satisfait du rapport parce que ce n'était pas complet. J'ai
demandé à la direction du ministère de refaire une
étude de cette question, étude qui a été refaite en
1972. Le rapport me fut soumis. Des amendements à la loi 31 ont
été apportés à l'Assemblée nationale. La loi
31 a été amendée en 1973.
Par la suite, des règlements ont été
rédigés. Un comité a été mis en place
immédiatement après l'adoption de la loi 31 pour que des
règlements nouveaux soient rédigés. Nous avons
profité de l'occasion pour toucher non seulement aux viandes
avariées mais à tous les secteurs alimentaires du
ministère de l'Agriculture du Québec. Vous connaissez, vous avez
vu le document qu'on vous a remis. C'est le résultat du
comité.
Cela est venu d'où, cette question? Comment se fait-il que le
ministère, à un moment donné, se soit rendu compte qu'il
fallait refaire tout ça? C'est venu de mémoires qui nous
parvenaient d'inspecteurs. C'est venu de saisies que les inspecteurs faisaient
dans certaines régions, nous disant: Ecoutez, il y a certains
éléments de la situation qui nous échappent. On n'est pas
capables, actuellement, de dépister tous les réseaux, et ainsi de
suite. Nous avons amorcé cette programmation et ce travail pour
déboucher sur les Commission d'enquête sur le crime
organisé qui, elle, nous a dit exactement comment le réseau
était organisé. C'est ça la situation, c'est comme
ça qu'elle s'est déroulée.
A l'intérieur de ça, il y a des gens, bien sûr, qui
nous ont envoyé des rapports, des lettres. Depuis l'enquête sur le
crime organisé, je reçois 50 ou 60 lettres par semaine de gens
qui me disent: Je savais que cela se passait comme ça. Je savais, moi,
que ça se passait comme ça. J'étais au courant de la
situation. Mais jamais on m'a donné une preuve auparavant de l'existence
de réseaux. Jamais on ne m'en a donné une preuve. Ces
mémoires ont été soumis à la direction du
ministère...
M. Roy: Je suis obligé d'invoquer le règlement un
peu.
M. Toupin: Est-ce que je peux terminer, M. le Président?
Ces mémoires ont été soumis à la direction du
ministère. Le Dr Julien, sous-ministre, hier, a été net
là-dessus, il a été clair. Il a dit: Nous avons
amorcé des études par la suite, mis en place des comités
et rédigé de nouveaux règlements.
C'est comme ça que cela s'est déroulé et c'est
simplement une question de rétablir des faits. Les documents que ces
gens vous ont fait parvenir, je ne vois pas d'inconvénients à les
déposer. Je peux les rendre publics n'importe quand. Ceux qui les ont
écrits et qui ont fait des recommandations prendront la
responsabilité de les expliquer, si, toutefois, cela demande des
explications.
M. Roy: M. le Président, je m'excuse auprès de mon
collègue, mais j'ai posé une question bien précise au
ministre. A la suite des deux rapports qu'il vient de mentionner, rapports dont
fait état le journal Le Devoir ce matin, est-ce que les officiers du
ministère ont mis le ministre de l'Agriculture au courant?
M. Toupin: M. le Président, j'étais au courant de
cette question de refaire les règlements du ministère à
compter de 1971...
M. Roy: Ce n'est pas une question de refaire les
règlements. Je veux savoir si le contenu de ces deux
mémoires...
M. Toupin: Laissez-moi terminer.
M. Roy: ... si quelqu'un a communiqué avec vous, au
ministère, si on vous a mis au courant de l'existence de ces deux
mémoires, dont un est du 25 mai et l'autre du 22 juin.
Je parle de ces deux documents particulièrement.
M. Toupin: Est-ce que je puis terminer? En 1970/71, il fallait
regarder à nouveau toute la réglementation et des mémoires
nous sont parvenus de personnes telles que celles qui furent appelées
à comparaître devant la commission. Ces mémoires ont
été portés à l'attention des sous-ministres et les
sous-ministres s'en sont servis, bien sûr, pour me dire et me recommander
qu'il fallait refaire les règlements. D'ailleurs, c'est à compter
de
mémoires comme ceux-là que le ministère de
l'Agriculture a cru bon de refaire le travail que le comité ad hoc avait
amorcé en 1971.
Alors, ce ne sont pas des rapports verbaux. Pour répondre de
façon claire au député de Beauce-Sud, le sous-ministre
adjoint, ou M. Julien, ou M. Bissonnette ne sont pas venus à mon bureau,
le document dans les mains pour me dire: M. le ministre, regardez ce qu'il y a
là-dedans. Il y a telle chose, il y a telle chose, il y a telle chose.
Ces gens n'ont pas écrit, non plus, de petits mémos, pour me
dire: J'ai reçu un rapport de M. Boulet ou de M. L'Heureux, ou je ne
sais pas trop qui, me disant qu'en 1968 existait telle chose. Non, je n'ai pas
eu de rapports comme ceux-là. Mais les sous-ministres me disaient qu'il
était nécessaire que nous refassions la
réglementation.
M. Lessard: Si, à la suite de ces informations, de ces
rapports, il a été quand même, au minimum, tant soit peu
informé puisqu'il travaillait à une modification de la
réglementation, c'est parce que le ministre était quand
même conscient, comme le disait le sous-ministre, M. Julien, de
l'existence de ce commerce et le ministre soupçonnait l'existence de ce
commerce. Est-ce que le ministre, à la suite de ces informations, a
demandé à son collègue de la Justice de faire
enquête?
M. Toupin: M. le Président, le ministre de la Justice a
tous les pouvoirs de faire enquête n'importe où, n'importe
quand.
M. Lessard: Non, non. Je demande si le ministre de l'Agriculture
a demandé, de façon explicite, de faire enquête sur le
mandat de la viande impropre à la consommation humaine, qu'il
soupçonnait?
M. Toupin: Est-ce que je peux répondre, M. le
Président? Non. Le ministre de la Justice peut, en tout temps, faire des
enquêtes sur un tas de choses tant qu'il a des preuves. Moi, on ne m'a
pas donné de preuves, au ministère, pas plus dans les
mémoires que dans les déclarations publiques qui ont
été faites par quiconque, qu'il existait X, Y, Z qui mettaient en
marché des viandes impropres à la consommation. On ne m'a pas
donné de noms ni d'établissements, ni de personnes qui pouvaient
être mêlés à un commerce de viande impropre à
la consommation.
J'ai discuté avec mon collègue de la Justice très
souvent; non seulement de ces problèmes mais de plusieurs autres
problèmes. Au ministère de l'Agriculture, lorsque nous
découvrons qu'il y a fraude soit au niveau du personnel, soit au niveau
de l'application des programmes, soit au niveau de l'application de la
réglementation, nous n'avons jamais eu de problèmes avec le
ministère de la Justice à la condition qu'on lui donne des
preuves pour lui permettre d'agir. C'est ainsi que cela se produit.
M. Lessard: Le ministre pourrait-il, en même temps qu'il
déposera demain les documents que je lui ai demandés, nous
présenter, depuis 1968 et peut-être avant, mais depuis, disons,
l'Expo de 1967, une ventilation de toutes les poursuites qui ont eu lieu et les
raisons de ces poursuites, en vertu de la Loi des produits agricoles et des
aliments?
M. Toupin: Oui, je peux regarder cela avec le... Actuellement,
toute cette documentation est rendue à la commission d'enquête. On
a envoyé tous nos documents authentiques. On n'a même pas
gardé une photocopie de ces documents.
M. Lessard: S'il y a eu poursuite, à un moment
donné, et s'il y a eu poursuite dans des cas précis de viande
avariée ou de viande impropre à la consommation, le ministre
devait avoir des preuves, il y a eu condamnation, parce que, pour Federal
Packing, il y a eu condamnation.
M. Toupin: II y a eu des saisies de viandes de faites à
bien des endroits, il y a eu des gens qui ont eu à payer des
amendes.
M. Roy: Ce ne sont pas des preuves, cela?
M. Toupin: Oui, ce sont des preuves, mais les gens sur lesquels
on avait des preuves, on a saisi les viandes, on les a arrêtés et
on leur a imposé des pénalités. C'est ce qu'on a fait.
M. Lessard: Qu'avez-vous fait après? Ils ont rouvert et,
après cela, quelle sorte de surveillance avez-vous appliquée?
M. Toupin: La loi prévoit cela. La loi ne prévoyait
pas de fermer ces établissements. D'ailleurs, aucune loi ne
prévoit cela, absolument aucune loi ne prévoit cela. Ces gens
n'étaient pas susceptibles d'aller en prison.
M. Roy: Mais le ministère aurait dû redoubler de
prudence.
M. Toupin: Si, c'est ce qu'on a fait. Dans les endroits où
on a fait des saisies, très rares ont été, par la suite,
des ventes semblables dans les semaines ou les mois qui ont suivi.
Il a fallu les suivre de plus près, mais, là, on n'est pas
en face d'un gars qui a mis de la viande en marché. J'espère que
vous comprenez cela. On n'est pas en face d'un gars, à Rouyn, qui a
essayé de passer 250,000 livres de viande à l'Expo. On n'est pas
en face de cela. On est en face d'un réseau organisé de vente de
viande impropre à la consommation. C'est cela.
M. Lessard: Bien plus fort que le ministre.
M. Toupin: C'est cela que l'on vit actuellement. Il fallait une
commission d'enquête pour regarder comment le problème se posait.
La commission d'enquête est là et elle travaille. On espère
qu'elle va trouver les vrais coupables. C'est cela qu'on espère et c'est
pour cela qu'on a créé cette commission.
M. Roy: Le ministre nous dit qu'il avait besoin de preuves, qu'il
avait besoin de noms. Le ministre dit lui-même qu'il y avait un
réseau. On sait très bien qu'il n'y a personne je dis bien
personne qui, de son propre chef, va porter une plainte contre tel ou
tel commerce, en écrivant son nom au ministère de l'Agriculture
pour, ensuite être cité comme témoin, parce que vous savez
quels sont les risques que cette personne court. Le ministre sait cela.
M. Toupin: C'est cela.
M. Roy: II y a d'abord des risques épouvantables pour sa
personne, premièrement, puisqu'on a affaire à un réseau.
Deuxièmement, des risques de poursuite en
dommages-intérêts, au cas où la preuve n'aurait pas
été suffisante. Mais, à la suite de tous ces rapports,
à la suite des saisies que le ministère de l'Agriculture a
effectuées, ce que j'ai dit hier soir, c'est qu'on a appris par les
journaux que de la viande avariée s'était vendue dans la
région de la baie James. On l'a appris par les journaux; tout le monde a
appris cela dans le Québec. J'aimerais savoir du ministre ce matin,
puisqu'il nous dit qu'il n'avait pas de preuves, si, au moins, le ministre de
l'Agriculture a porté plainte au ministère de la Justice. Est-ce
qu'il a demandé au ministère de la Justice d'aller faire des
perquisitions à certains endroits?
M. Toupin: C'est automatique, M. le Président.
M. Lessard: J'ajouterais ceci, M. le Président, à
la suite de la question du député de Beauce-Sud. Est-ce que le
ministre, par l'entremise de ses fonctionnaires puisque le ministre nous
affirme qu'il n'avait pas de preuves; alors, c'est lui qui a jugé qu'il
n'avait pas de preuves a transmis ses rapports au ministre de la Justice
pour être étudiés?
M. Toupin: M. le Président, les règlements du
ministère de l'Agriculture en matière de viandes impropres
à la consommation sont administrés par le ministère. Quand
le ministère dépistait des gens, des personnes, des
établissements où il se fabriquait des viandes impropres à
la consommation, où se transportaient des viandes impropres à la
consommation, quand le ministère était capable de préciser
les personnes qui en étaient les auteurs, de les toucher pour donner
véritablement la preuve, il a procédé à ses
saisies.
Mais ce que la commission d'enquête est en train de
découvrir actuellement, ce sont précisément ceux qu'on n'a
pas été capable de découvrir, ce sont
précisément ceux pour lesquels on n'avait pas de preuve et qu'on
a essayé, par mille et un moyens, avec les moyens que nous avions, de
prendre sans pouvoir le faire. C'est pour cela qu'on a mis sur pied une
commission d'enquête.
M. Lessard: C'est facile, cela.
M. Toupin: Ce n'est pas facile. Pensez-vous que je n'aurais pas
préféré, moi, ne pas mettre de commission d'enquête
sur pied et éviter le problème qu'on discute ce matin?
Pensez-vous que je n'aurais préféré, comme bien des gens
auraient fait à ma place, dire: Ne touchez pas à cela, c'est
dangereux politiquement? Non, non, non. Je me suis dit: La santé du
public est en danger et nous, on arrive pas, avec les services qu'on a,
à dépister tout le réseau. Ce qui est important, c'est de
le connaître, ce réseau, et j'espère qu'on va nous le faire
connaître. C'est pour cela qu'il y a une commission d'enquête.
M. Lessard: II y a pas mal de ministres qui ont mis cette
enquête sur pied.
M. Toupin: Actuellement, c'est le secteur de la viande qui est
impliqué, qui est touché.
M. Lessard: Maintenant, est-ce que le ministre pourrait nous
dire, concernant ses inspecteurs, s'il a reçu à son
ministère des rapports selon lesquels certains inspecteurs auraient
été menacés? Même un inspecteur, en particulier, se
serait fait attaquer par des fiers-à-bras, tel que nous l'a
précisé ou nous l'a dit son attaché de presse, M.
Biron.
M. Toupin: M. le Président, je n'ai pas de preuve que
quiconque au ministère, au titre d'inspecteur, ait été ou
menacé ou influencé sous quelque forme que ce soit. Je ne crois
pas que cela ait été dit encore à la commission
d'enquête...
M. Lessard: Que?
M. Toupin: ... qu'il y a des inspecteurs qui ont
été intimidés, qui ont été malmenés,
qui ont été battus.
Je ne crois pas qu'on ait fait encore la preuve de cela.
M. Lessard: C'est sorti du bureau du ministre.
M. Toupin: A moins qu'elle se soit faite à huis clos.
M. Lessard: A moins qu'elle ne se soit faite à huis
clos?
M. Toupin: Oui.
M. Lessard: Le ministre a-t-il un observateur?
M. Toupin: Oui, j'ai un observateur.
M. Lessard: Cet observateur l'informe-t-il tous les jours?
M. Toupin: J'en ai plus d'un. J'ai trois observateurs. Ce sont
des gens nommés par le ministère. Je connais leurs noms, mais
vous ne les connaîtrez pas, parce que ces gens ne se feront pas charrier
par tout le monde.
M. Lessard: Je parle d'un observateur aux séances à
huis clos.
M. Toupin: J'ai des rapports des séances à huis
clos.
M. Lessard: Combien avez-vous d'observateurs?
M. Toupin: J'ai trois observateurs. M. Roy: Aux
séances à huis clos?
M. Toupin: J'en ai deux à huis clos et un aux
séances publiques. Je l'ai dit en Chambre, l'autre jour, et je le
répète. Mais je ne vous donnerai pas les noms, parce que ces gens
ne se feront pas charrier.
M. Roy: Nous ne vous demandons pas les noms.
M. Toupin: Ils sont là parce qu'ils ont une
responsabilité que je leur ai personnellement confiée.
M. le Président, je dis ceci: On n'a pas de preuve de cela. Mon
attaché de presse, qui est ici ce matin, M. Biron, a rectifié ce
qui fut dit dans les journaux; par la suite, cela s'est éteint.
M. Lessard: Cela ne s'est pas éteint. Le lendemain, M.
Leblanc confirmait que, sur l'enregistrement, c'était très bien
précisé qu'un rapport était entre les mains de
l'attaché de presse du ministre, M. Biron. Cela n'a pas
été démenti par la suite.
M. Toupin: Mon attaché de presse a dit clairement, le
lendemain, qu'il n'avait pas déclaré officiellement qu'il
existait un rapport officiel sur le fait que des inspecteurs aient
été battus. Je n'ai pas entendu l'enregistrement et, normalement,
je n'ai pas le droit de l'entendre, parce que je ne suis pas certain que cela
ait été enregistré légalement, mais nous ne
toucherons pas à cet aspect, cela ne me regarde pas, cela regarde mon
attaché de presse et il réglera ses problèmes, de ce
côté, avec ceux avec qui il doit les régler. Ce n'est pas
mon problème.
M. Lessard: C'était une interview?
M. Toupin: Vous connaissez les lois sur l'écoute
électronique. Si vous les connaissez, étudiez-les comme il
faut.
M. Lessard: Est-ce que c'était une interview au
téléphone?
M. Toupin: M. le Président, nous n'avons aucune preuve
là-dessus. Si la commission d'enquête démontre qu'il y a
des preuves là-dessus, si mon attaché de presse a des rapports
officiels là-dessus, il les rendra publics. C'est comme cela que le
problème va se poser. Il ne se posera pas autrement.
M. Lessard: Quelles sont les exigences? Et si cela existe, s'il y
a des normes et des critères, j'aimerais savoir, du ministre quelles
sont les exigences pour rengagement de ces inspecteurs.
M. Toupin: M. le Président, je l'ai dit en Chambre
à deux reprises. Cela ne servirait à rien de le
répéter ici ce matin. Que le député de Sa-quenay
relise le journal des Débats et il va trouver les normes.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Kamouraska-Témiscouata.
M. Pelletier: M. le Président, je m'attaque
précisément aux députés de l'Opposition. Pour une
fois, nous avons un ministre qui prend ses responsabilités dans le
secteur agricole...
M. Lessard: Ah! Faites-nous pleurer!
M. Pelletier: Un instant, M. le Président, j'ai la parole.
Nous avons un ministre qui a su prendre ses responsabilités. Le commerce
de cette viande avariée dure depuis nombre d'années. Le ministre
de l'Agriculture est là depuis 1970, il a eu l'audace de prendre ses
responsabilités dans le secteur, et on essaie de le salir! C'est
cela!
M. Lessard: Quand a-t-il pris ses responsabilités?
M. Pelletier: Une minute, j'ai la parole. Le ministre de
l'Agriculture vient d'expliquer qu'il a fait des recherches en 1972, qu'il a
des documents. Petit à petit, le ministre de la Justice a eu des
renseignements à ce sujet et, aujourd'hui, il y a une commission
d'enquête. Qu'on attende donc le rapport de la commission
d'enquête, au lieu de charrier sur une commission parlementaire, et
d'essayer de salir le ministre...
M. Lessard: Entre-temps, mangeons de la charogne!
M. Pelletier: ... à un tel point que nous perdons notre
temps à la commission parlementaire aujourd'hui.
M. Lessard: M. le Président, je regrette! Nous perdons
notre temps! Nous étudions justement...
M. Pelletier: Un instant, j'ai la parole, M. le Président,
et j'ai le droit de parler.
M. Lessard: D'accord.
M. Pelletier: Je pense que nous perdons réellement notre
temps, parce que la commission d'enquête va déterminer exactement
quelles sont les causes de tout cela. A ce moment, le ministre saura prendre
ses responsabilités, comme il l'a toujours fait dans le
passé.
M. Roy: Comme il l'a toujours fait dans le passé, je
retiens ces mots, M. le Président.
M. Pelletier: Oui, sûrement.
M. Roy: C'est un gage de sécurité.
M. Toupin: Nous pourrions terminer ce débat, si les deux
députés sont d'accord. Je sais qu'hier le député de
Beauce-Sud a fait certaines affirmations que le député de
Laviolette a voulu relever. Ce matin, le député de Beauce-Sud
essaie de justifier ses assertions d'hier et le député de
Saguenay profite d'une déclaration faite par un témoin à
la commission d'enquête pour dire qu'il avait raison de dire qu'il
pouvait y avoir complicité dans cette affaire.
M. Lessard: C'est le fonctionnaire qui dit: Vous êtes
complice!
M. Toupin: Vous venez de trouver un autre petit
élément pour essayer de cacher votre incapacité
d'être un "gentleman" à cette table. C'est ce que vous essayez de
faire.
M. Roy: Non.
M. Toupin: Vous essayez de justifier vos gestes politiques, qui
sont très bas, parfois, très, très, très bas! Vous
essaierez, dans le temps, si vous êtes capable, de faire la preuve, si le
ministre de l'Agriculture du Québec a été complice, sous
quelque forme que ce soit.
M. Lessard: Attaquez-moi et nous verrons!
M. Toupin: N'ayez pas peur, je ne vous courrai pas
là-dessus. Il n'est pas dans mes habitudes d'essayer de traîner
les autres devant les tribunaux pour essayer de prouver telle ou telle
chose.
M. Lessard: C'est ce que vous deviez faire.
M. Toupin: Je compte beaucoup plus sur la conscience des gens que
cela.
Si vous n'avez pas d'objection, moi, je serais porté à
examiner le projet de loi, article par article. Je devais être au conseil
des ministres, à dix heures et demie; j'aimerais qu'on puisse terminer
avant onze heures et demie. Le député de Saguenay m'avait dit, au
départ, qu'il était disposé à terminer pour onze
heures. Si les députés sont d'accord, je reprendrais article par
article le projet de loi.
M. Lessard: M. le Président, je voudrais tout simplement
répéter une autre fois au ministre de l'Agriculture que ce que
j'ai dit est confirmé maintenant par un rapport qui provient de son
ministère. On dit, dans le rapport du 22 juin de MM. Roland Brind'Amour
et Jacques Boulet: "Nous souhaitons ardemment que des mesures très
énergiques soient prises, car le ministère, en émettant
ces permis pour moi, le ministère, c'est le ministre, parce que
c'est le ministre qui est responsable de son ministère devient
consciemment ou inconsciemment complice de ces gens connus sous le nom de
pègre des viandes". C'est encore bien plus fort que ce que j'ai dit.
J'ai dit que le ministre était complice de la situation, a
été complice du système, mais là on dit bien plus,
M. le Président. On dit que le ministère de l'Agriculture est
devenu complice de ces gens connus sous le nom de pègre des viandes. Je
dis, M. le Président, contrairement à ce que nous a laissé
entendre tout à l'heure le député de
Kamouraska-Témiscouata, que nous ne perdons pas notre temps ici,
à cette commission parlementaire.
Nous voulons être assurés qu'il va y avoir des mesures
concrètes pour appliquer la loi 39, parce qu'on sait que, dans le
passé, toutes les lois qui ont été adoptées
à l'Assemblée nationale pour protéger le public contre la
viande avariée et contre la viande impropre à la consommation
n'ont pas été respectées et n'ont pas été
appliquées, par suite de la négligence du ministre de
l'Agriculture et de ce gouvernement.
M. le Président, jamais le ministre ne fera croire à la
population du Québec, comme à nous, que, malgré tous ces
rapports importants qui ont été déposés, il
n'était pas conscient du problème.
M. Toupin: M. le Président, le député de
Saguenay affirmera...
M. Lessard: C'est cela, il a dormi tout le temps.
M. Toupin: Le député de Saguenay affirmera...
Le Président (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Toupin: ... les choses qu'il voudra; j'attends le rapport de
la commission d'enquête sur le crime organisé.
M. Lessard: Entre-temps, M. le Président...
M. Roy: M. le Président, étant donné que le
ministre dit qu'il veut partir, que mon collègue de Saguenay veut partir
et que je veux partir également, si on me le permet, il y a un point sur
lequel j'insiste pour l'étude de ce projet de loi, article par article.
C'est qu'à l'article 6 de la loi, on dit: "Les articles suivants sont
ajoutés après l'article 39 de ladite loi: Quiconque enfreint
l'article "a) ou les dispositions des règlements relatives aux viandes
impropres à la consommation humaine est passible, sur poursuite
sommaire, en outre des frais, a) pour une première infraction, d'une
amende d'au moins $1,000 et d'au plus $5,000 et, à défaut de
paiement de l'amende et des frais: b) pour toute récidive dans les deux
ans, d'une amende d'au moins $3,000 et d'au plus $10,000." M. le
Président, je trouve que ce n'est pas suffisant, pour ce qui a trait au
paragraphe b); il faut qu'il y ait de la prison prévue.
M. Toupin: Lisez le projet de loi, vous allez en trouver de la
prison.
M. Roy: A quel endroit trouvez-vous la prison?
M. Toupin: A l'article 6, 39b), après b). L'article 43 ne
s'applique pas... Un instant.
M. Roy: "L'article 39a) s'applique mutatis mutandis, à une
corporation, sauf que les amendes doivent être d'au moins $5,000 et d'au
plus $10,000 pour une première infraction, et pour toute récidive
dans les deux ans, d'au moins $10,000 et d'au plus $20,000. Le tribunal
peut...
M. Toupin: Elle ne s'applique pas à ces infractions,
mais...
M. Roy: ... ordonner que, si l'amende et les frais ne sont pas
payés par la corporation, ils le soient par tels administrateurs,
officiers, employés ou agents de la corporation qu'il désigne, et
dans la proportion qu'il indique. "Lorsqu'une corporation commet une infraction
à l'article 4a) ou aux dispositions des règlements relatives aux
viandes impropres à la consommation humaine, tout officier,
administrateur, employé ou agent de cette corporation, qui a prescrit ou
autorisé l'accomplissement de l'infraction ou qui y a consenti,
acquiescé ou participé, est réputé être
partie de l'infraction et est passible de peines prévues par l'article
39a), que la corporation ait été ou non poursuivie ou
déclarée coupable". Il n'est pas question de prison.
M. Toupin: Allez donc chercher vos conseillers juridiques, ils
vont vous le dire. C'est écrit à l'article 39, l'article 6, la 3e
page, le paragraphe b) le paragraphe a) et l'article 43 par la suite.
M. Lessard: Et à défaut de paiement de
l'amende.
M. Toupin: Je vais les lire, voulez-vous? M. Lessard: Oui.
Allez-y.
M. Toupin: Article 39a): "Quiconque enfreint l'article 4 a) ou la
disposition des règlements relatives aux viandes impropres à la
consommation humaine est passible, sur poursuite sommaire, en outre des frais,
pour une première infraction, d'une amende d'au moins $1,000 et d'au
plus $5,000". Il faut enlever la dernière phrase. "b) pour toute
récidive dans les deux ans, d'une amende d'au moins $3,000 et d'au plus
$10,000. L'article 43 ne s'applique pas à ces infractions, mais la
deuxième partie de la Loi des poursuites sommaires s'y applique. C'est
l'emprisonnement.
M. Roy: La deuxième partie de la Loi des poursuites
sommaires...
M. Toupin: C'est l'emprisonnement.
M. Roy: ...dit qu'à défaut de payer l'amende...
M. Toupin: C'est exact.
M. Roy: ...il y a prison. Ce n'est pas cela qu'on veut, on veut
que la prison soit obligatoire sans option d'amende. C'est cela qu'on demande.
Je dis au ministre tout de suite que nous exigeons qu'en cas de
récidive...
Une Voix: Oh!
M. Roy: Ce sont des criminels et aux grands maux, les grands
remèdes. En cas de récidive, qu'il y ait une amende qui s'y
rattache et que la prison soit incluse dans la loi. Qu'à cette prison ne
puisse pas être substituée une amende supplémentaire. C'est
ce qu'on demande et c'est ce qu'il faut parce qu'il s'agit d'une chose qui met
en danger la vie des citoyens et la santé des gens. On ne peut pas se
permettre le luxe de laisser des gens qui ont réalisé des profits
de $100,000 s'en tirer avec $10,000 d'amendes.
M. Toupin: S'il s'agit d'actes criminels, il existe des lois au
Québec qui pénalisent immédiatement ces gens. Il n'est pas
nécessaire de le mettre dans cette loi. S'il s'agit d'un acte criminel,
ils sont poursuivis immédiatement par le ministère de la Justice
et mis en prison, s'il s'agit d'un acte criminel. S'il s'agit d'une
dérogation à des règlements, il ne s'agit pas d'un acte
criminel, il s'agit d'une dérogation à des règlements. Si
le ministère de la Justice juge que ces gestes sont des gestes
criminels, il les poursuivra pour crime.
M. Roy: Si le ministre de l'Agriculture a
décidé...
M. Toupin: Je n'ai rien décidé.
M. Roy: ...dans les amendements de sa loi, de faire inclure deux
paragraphes concernant les amendes, je dis que le ministre de l'Agriculture
doit aller plus loin, s'il est sincère dans ses intentions
d'empêcher qu'on essaie, encore une fois, de s'en sortir en payant des
amendes alors que les amendes ont été réalisées
à même les profits. Il faut qu'il y ait prison obligatoire
directement dans la loi, pour que cela ne devienne pas des questions de
procédure légale devant les tribunaux. Que la loi soit claire,
très claire à ce niveau. Ces gens-là je ne parle
pas des petits mais de ceux qui font partie du réseau trouveront
encore plus payant de continuer le commerce et de payer l'amende. L'amende, ce
n'est jamais eux qui la paieront, c'est le consommateur qui paie l'amende, en
définitive, puisque c'est le consommateur qui achète ces
produits.
Il doit y avoir prison obligatoire par la loi. Dans le cas des
corporations, que les dirigeants de ces corporations soient personnellement
responsables de la situation. Qu'on les mette non seulement à l'amende,
comme c'est dit dans l'article 39 b) qui modifie l'article 39 a), mais qu'ils
soient également, eux, passibles de prison en cas de récidive
dans les deux ans. Je dis que c'est là et là seulement que le
gouvernement aura l'outil né-
cessaire pour sévir avec toute la vigueur possible et de mettre
un terme définitif à ce sujet.
M. Toupin: J'apporte un exemple, M. le Président, pour
vous démontrer jusqu'où le député de Beauce-Sud
n'est pas capable de faire la distinction entre un acte criminel, d'une part,
et le non-respect des règlements, de l'autre. Il faut prouver qu'il y a
criminalité là-dedans. Je ne peux pas, tout d'un coup, dans une
loi, déclarer que Jos. est criminel. Je ne peux pas faire cela. Il y a
des lois qui existent au Québec pour cela et vous les connaissez.
J'apporte un exemple. Il y a un petit abattoir dans la région de
Beauce-Sud, dont le propriétaire est de bonne foi. Il a un de ses amis
qui, lui aussi, est de bonne foi, mais qui va lui passer un petit morceau de
viande avariée et il ne s'en rend pas compte. On le prend, nous autres;
on va le mettre en prison, ce gars-là?
M. Roy: J'aurais une question à poser à l'honorable
ministre. Dans le même cas...
M. Toupin: Si l'autre, celui qui lui a vendu la viande, si le
gars est criminel, la justice le poursuivra.
M. Roy: ...dans le même exemple que le ministre vient de
donner, est-ce que ce même gars va être passible d'une amende d'au
moins $3,000?
M. Toupin: Oui. C'est évident.
M. Roy: II sera passible d'une amende de $3,000 pour avoir eu un
petit morceau de viande?
M. Toupin: Oui.
M. Roy: Pour quelle raison...
M. Toupin: Qu'il ne serait pas emprisonné.
M. Roy: ...n'y aurait-il pas de prison qui s'y rattache? Pour
quelle raison?
M. Lessard: Les inspecteurs font leur travail, eux.
M. Toupin: La raison, c'est que ce n'est pas certain qu'on ait
prouvé qu'il s'agit là d'un acte criminel.
M. Roy: Mais si on lui fait payer $3,000.
M. Toupin: Oui, mais c'est pour le respect des règlements.
On va bien plus loin que cela, là-dedans.
M. Roy: Les règlements sont là pour empêcher
de mettre de la viande avariée sur le marché. Ce n'est pas la
même chose.
M. Toupin: C'est exact. On va bien plus loin que cela,
là-dedans. Si on prend le gars, dans les règlements, le
ministère peut lui retirer son permis n'importe quand. C'est ce qui va
se produire, d'ailleurs. Le gars va payer son amende, une première
amende, et il n'exploitera plus son abattoir parce qu'on va lui retirer son
permis.
Le Président (M. Cornel lier): L'honorable
député de Fabre.
M. Roy: M. le Président, je dis encore une fois au
ministre...
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Fabre.
M. Roy: M. le Président, je n'avais pas terminé;
c'est le ministre qui a fait une intervention. Je dis encore une fois au
ministre...
M. Toupin: Je ne suis pas juriste, M. le Président, mais
il y en a de la prison.
M. Roy: M. le Président, j'attire l'attention du ministre
sur le fait que, s'il n'y a pas de prison prévue dans cette loi, on
prendra encore les moyens nécessaires et on se retrouvera dans une
situation à peu près identique, mais de forme différente,
dans six mois, dans un an, dans deux ans. Ces gens trouveront plus payant,
parce que jamais incriminés personnellement, de payer les amendes
requises, parce que ces amendes, ils pourront les récupérer dans
un temps relativement court.
Moi, je fais un amendement, à ce moment-ci; je ne l'ai pas
rédigé, je m'excuse.
Le Président (M. Cornellier): Avant de passer à
l'amendement, puisqu'on est à l'article 6, est-ce que les articles 1, 2,
3, 4 et 5 sont adoptés?
M. Lessard: Non, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): II faudrait procéder
dans l'ordre.
M. Lessard: Voici, M. le Président...
Le Président (M. Cornellier): Précédemment,
le député de Fabre avait demandé la parole.
M. Houde (Fabre): Oui, sur le même sujet, je voulais
demander au ministre de l'Agriculture s'il ne pourrait pas faire
vérifier cela; je peux bien essayer de le faire cet après-midi,
mais, il y a quelques années, il me semble que, sur la Loi de la faune,
il y avait eu un assez long débat à l'Assemblée nationale
concernant, entre autres, un article qui disait: Si quelqu'un est pris à
déplacer je me souviens de l'expression des oeufs
d'oiseaux dans un nid, il sera passible d'une amende et de prison. Il y avait
eu un débat sur le mot "et" plutôt que le mot "ou". De
mémoire, je le dis sous toute réserve, c'était M. Loubier
qui était ministre, et je pense, en tout cas, que, finalement, le mot
"et" avait été accepté. Je ne suis pas un expert en
agriculture; loin de là, je suis un gars d'asphalte,
comme disent mes collègues. Si un gars, pour avoir
déplacé des nids d'oiseaux en forêt ou, même pas le
nid au complet, mais des oeufs d'un nid à l'autre, si ce gars, parce
qu'il a pris des oeufs, peu importe l'oiseau, les déplace ou les apporte
chez lui, une fois pris et reconnu coupable, n'a même pas le choix, que
c'est amende et prison, je ne vois pas pourquoi on hésiterait à
faire la même chose pour le gars qui iva nous faire manger...
M. Toupin: C'est l'amende et la prison.
M. Houde (Fabre): ...de la viande qui a remplacé l'autre
expression que vous connaissez. Je ne vois pas pourquoi on hésiterait.
C'est cela que je me dis: Si on fait un parallèle, si on est pour avoir
des lois, peut-être que quelqu'un à l'Agriculture pourrait le
vérifier avec cette Loi de la faune.
M. Toupin: M. le Président, remarquez bien que moi, je
n'ai absolument rien à défendre. Si la commission parlementaire
est d'accord pour que nous mettions en prison un gars qui est victime,
très souvent, d'un réseau qu'il ne connaît même pas,
qu'il n'est même pas capable lui-même d'identifier; si on
considère que ce bonhomme-là...
M. Lessard: L'inspecteur du gouvernement.
M. Toupin: ...parce qu'il a acheté de la viande et qu'il a
été pris, par la suite, par les inspecteurs, est un criminel,
qu'on le mette dedans. Moi, je ne suis pas certain que ce soit un geste
criminel.
M. Roy: M. le Président...
M. Toupin: Mais celui qui fraude le consommateur, par exemple,
intentionnellement, qui fait partie d'un réseau, c'est de la fraude,
cela. Si la fraude est considérée comme criminelle, c'est le
ministère de la Justice qui poursuivra ces personnes. C'est cela qui se
fait.
M. Lessard: M. le Président, comme le ministre de
l'Agriculture doit être...
M. Toupin: Moi, je ne suis pas capable de dire dans ma loi que
ces gestes sont criminels, à moins que le ministre de la Justice ne me
dise: Oui, c'est criminel.
M. Lessard: Comme le ministre de l'Agriculture doit être au
conseil des ministres, est-ce que je pourrais proposer l'ajournement?
M. Toupin: M. le Président, je préférerais
même prendre encore vingt minutes pour passer à travers le projet
de loi.
M. Roy: M. le Président, je n'ai pas d'objection à
ce qu'on prenne vingt minutes; j'avais un rendez-vous extrêmement
important également, à onze heures quinze ce matin. Etant
donné l'impor- tance de la question, je serais porté à
abonder dans le sens du député de Saguenay, non seulement pour
permettre au ministre d'être au conseil des ministres, mais pour faire
les consultations qui s'imposent. Même si la commission parlementaire ne
siégeait à nouveau que pendant une demi-heure, qu'on prenne donc
le temps d'examiner cette question en toute objectivité. Prenons des
informations auprès des conseillers juridiques; vérifions,
autrement dit, dans la Loi des poursuites sommaires. Mais il faut absolument
que nous insistions pour qu'il y ait des peines d'emprisonnement prévues
dans la loi. Si le ministre a certaines réserves pour éviter
qu'il n'y ait abus, on peut retenir les réserves du ministre, mais
prenons le temps d'examiner tout cela.
Quand bien même la commission siégerait de nouveau pour une
demi-heure, ce soir ou demain, en ce qui me concerne, je n'aurais pas
d'objection par la suite à ce que le rapport soit adopté la
journée même à l'Assemblée nationale. Je n'aurai
même pas d'objection pour faire adopter le projet de loi au plus vite,
à ce que la troisième lecture ait lieu subséquemment.
Je suis prêt à offrir, en échange, au ministre de
l'Agriculture ma collaboration pour qu'on puisse procéder à
l'adoption du rapport et à l'adoption de la troisième lecture au
cours d'une même séance, pourvu qu'on prenne le temps de
l'examiner.
M. Lessard: M. le Président, je reviens sur ce point. Un
amendement très important vient d'être présenté par
le député de Beauce-Sud. A première vue, j'aurais
l'intention d'appuyer cet amendement. Mais, n'étant pas juriste et
considérant les remarques qui sont faites par le ministre de
l'Agriculture, il me semble qu'on pourrait prendre le temps de
l'étudier. Je suis assuré qu'on ne reviendra pas, je pense, sur
certaines discussions qu'on a faites.
J'avais deux questions, une à l'article 1 et une à
l'article 2. On pourrait laisser... Je serais même d'accord pour qu'on
accepte tous les articles et qu'on suspende l'article 6, de telle façon
qu'on revienne, à ce moment-là, pour ne discuter que de l'article
6. Je pense bien que cela ne prendrait pas énormément de temps
pour adopter le projet de loi, quitte je suis bien d'accord pour
accepter la suggestion du député de Beauce-Sud à
accepter le rapport et adopter la troisième lecture la même
journée.
M. Toupin: On peut faire un amendement en troisième
lecture.
M. Lessard: Bon.
M. Toupin: Est-ce que les deux députés seraient
d'accord?
M. Lessard: D'accord.
M. Toupin: On accepte tous les articles, à l'exclusion de
celui-là. Moi, j'ai déjà consulté.
M. Roy: A l'exclusion de celui-là.
M. Toupin: Oui. J'ai déjà consulté des
conseillers juridiques. J'ai consulté le comité de
législation là-dessus. Il y a des juristes compétents au
comité de législation. Je l'avais mis dans mon projet de loi. Je
le dis, je l'avais mis, avant, dans mon projet de loi, l'emprisonnement. Ils
m'ont dit: Cela ne peut pas marcher comme ça.
Je vais donc vérifier à nouveau; il n'y a pas
d'inconvénient à revérifier.
M. Lessard: D'accord.
M. Toupin: Ils m'ont donné la réponse que je vous
ai donnée tantôt. Est-ce qu'on peut mettre en prison une victime
qui est dans un réseau qu'elle ne connaît pas, qu'elle ne peut pas
identifier, quand cela prend une commission d'enquête pour le
dépister? Est-ce qu'on peut mettre ce gars en prison? Est-ce qu'on peut
aller jusque là vis-à-vis des êtres humains?
M. Lessard: Ou qu'on donne cette possibilité au juge,
selon le cas, C'est-à-dire qu'eux...
M. Toupin: Le ministère de la Justice pourra regarder si
c'est possible de laisser autant de discrétion à un juge. Mais,
habituellement, les juges interprètent la loi.
M. Lessard: Oui.
M. Toupin: Alors, si vous voulez, on va adopter les...
M. Lessard: J'accepterais, M. le Président, la suggestion
du ministre. Il est vrai que, en vertu du règlement, il est possible de
proposer un amendement au rapport...
M. Toupin: Je ne vois pas d'inconvénient à ce
moment-là.
M. Lessard: ...c'est-à-dire qu'il s'agit de proposer notre
amendement un certain temps avant que le rapport...
M. Toupin: Je l'avais mis dans le projet de loi original. C'est
le comité de législation qui m'a conseillé de ne pas
mettre ça au projet de loi.
M. Roy: Bon. Alors, l'article 6 est suspendu.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Saguenay avait un commentaire sur l'article 1.
M. Lessard: Non, pas un commentaire, M. le Président. Je
constate que, à l'article 1.4 b): "Le lieutenant-gouverneur en conseil
peut approuver l'estampille qui peut être apposée sur un produit,
son étiquette ou son emballage, prescrire les conditions d'utilisation
de cette estampille, en prohiber la fabrication, la reproduction, la
détention ou l'usage, sauf dans les cas qu'il détermine."
Je trouve que, encore là, L'obligation n'est pas très
forte. C'est une obligation morale. Pourquoi ne mettrait-on pas "doit approuver
l'estampille"? Je trouve curieuse quand même la fin de cet article
où on dit: "Sauf dans les cas qu'il détermine". Sauf dans les cas
que le lieutenant-gouverneur détermine, est-ce que cela ne laisse pas
une porte ouverte à un moment donné? J'aimerais avoir des
explications.
M. Toupin: Oui, cela laisse une porte ouverte et c'est justement
moi qui me la suis gardée ouverte, cette fois-ci, cette porte. Je me la
suis gardée et je vais la garder à part ça. Je vais vous
dire pourquoi je vais la garder.
C'est que si vous mettez "doit", chaque fois qu'une entreprise va me
demander de lui donner une estampille, ja vais être obligé de la
lui donner, alors que là je me garde la latitude de lui dire: Je ne te
donne pas ton estampille parce qu'il y a telle chose qui fait défaut
dans ton affaire. Tant que tu ne réorganiseras pas ton affaire, non
seulement tu n'auras pas l'estampille, mais on va te retirer ton permis.
C'est pour ça que j'ai mis "peut". Je ne veux pas me lier
vis-à-vis d'une entreprise. Vous avez le cas de Reggio Food qui est
évident, en soi.
M. Lessard: Mais, à ce moment-là, est-ce que tous
les produits qui sont commercialisés au Québec ne devraient pas
avoir l'estampille? C'est-à-dire que tous les produits qui sont propres
à la consommation devraient avoir l'estampille. Est-ce que tous les
produits qui sont considérés par le ministre de l'Agriculture
comme étant propres à la consommation, pour la protection du
public, ne devraient pas avoir...
M. Toupin: Oui.
M. Lessard: ...nécessairement l'estampille? Quant aux
autres...
M. Toupin: C'est pour ça qu'il faut que je mette
"peut".
Une Voix: C'est vrai, c'est vrai.
M. Toupin: C'est pour ça qu'il faut que je mette "peut"
dans la loi, pour que je la donne à ceux qu'on considère, nous,
comme faisant de la viande propre à la consommation et non pas à
ceux qui font de la viande impropre à la consommation, sous de faux noms
et sont reliés à un réseau qu'on ne connaît pas et
qu'on n'arrive pas à dépister.
M. Lessard: Et sauf dans les cas qu'il détermine, cela
veut dire quoi?
M. Toupin: C'est cela. Je peux dire, par exemple... Je prends
l'exemple de Reggio Food, qui est fermée maintenant.
M. Lessard: Non, non, voici, qu'on lise bien l'article: "En
prohiber la fabrication, la reproduc-
tion, la détention ou l'usage, sauf dans les cas qu'il
détermine".
M. Toupin: Oui, évidemment, il faut bien que je me
détermine des cas. Je dis que je l'interdis à tout le monde, sauf
dans les cas que je détermine. Je vais déterminer un cas qu'on va
fabriquer et c'est comme cela qu'on va fabriquer.
M. Lessard: J'ai des réserves. Article I, M. le
Président.
Le Président (M. Cornellier): Article I,
adopté.
M. Lessard: A l'article 2, on ajoute à l'ancien projet de
loi no 31: "Aucun permis ne peut être délivré à
moins que, de l'avis du ministre, l'opération projetée par la
personne qui sollicite le permis ne soit désirable dans
l'intérêt public". L'ancien projet de loi, M. le Président,
ne comprenait pas cet article puisqu'on disait, à l'article 7: "Toute
personne qui sollicite un permis doit transmettre sa demande au ministre. Le
ministre délivre le permis si le requérant remplit les conditions
déterminées et verse les droits fixés par
règlement". On ajoute cet article. Est-ce que ce n'est pas un article
qui laisse place à l'arbitraire?
M. Toupin: Si une entreprise me fait une demande de permis que,
après étude, l'entreprise fonctionne bien, l'équipement
est correct, les normes d'hygiène sont parfaites que, tout à
coup, je fouille dans le conseil d'administration et que j'apprends qu'il y a
trois gars de la pègre qui sont là-dedans, qu'est-ce que je vais
faire?
M. Lessard: Si c'est indiqué dans votre
règlement.
Voici l'inquiétude que j'ai, M. le Président. C'est
l'inquiétude du patronage. C'est-à-dire que cela va être le
ministre qui va décider de lui-même si c'est
d'intérêt public ou non.
M. Toupin: Ecoutez, si je ne le mets pas dans la loi et si je
suis obligé de donner un permis à un gars qui n'est pas
désirable sur le plan public, si vous le savez, cela, qu'est-ce que vous
allez me dire? Vous allez encore dire que je suis complice?
M. Lessard: En tout cas, on verra de quelle façon ce sera
appliqué, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): Article 2, adopté.
Article 3?
M. Lessard: Adopté.
Le Président (M. Comellier): Adopté. Article 4?
M. Lessard: Adopté.
Le Président (M. Cornellier): Article 5?
M. Lessard: Adopté.
Le Président (M. Cornellier): Adopté. Article
6?
M. Lessard: Suspendu.
Le Président (M. Cornellier): Suspendu. Article 7?
M. Lessard: Concordance. Adopté. Le Président
(M. Cornelller): Adopté.
M. Lessard: Avant d'adopter l'article 8, M. le Président,
je voudrais demander au ministre si, dans ses règlements pour l'avenir,
qui seront en relation avec ce projet de loi, il a l'intention d'avoir un
certain contrôle sur des boîtes.
M. Toupin: Vous avez lu l'article 2, tantôt, qui dit que le
ministre se réserve l'utilisation de son estampille sur les
boîtes, c'est cela qui va arriver. Je pourrai n'importe quand dire
à telle entreprise: Je vous interdis d'utiliser l'estampille pour tel
type de boîtes ou je pourrais dire: Vous allez les utiliser seulement
pour ces boîtes-là. Je pourrai aussi dire: Vous allez les utiliser
en telle quantité et vous allez me donner le nom de l'imprimerie, en
plus de cela, qui fabrique vos boîtes.
M. Lessard: Vous me dites à quel article c'est inclus?
M. Toupin: Celui dont on a discuté tantôt.
M. Lessard: Pas l'article 4.
M. Toupin: Avant l'estampille.
M. Lessard: D'accord, article I, 4, b).
M. Toupin: C'est cela le contrôle de l'estampille. C'est ce
qu'il y a de plus fort actuellement.
M. Lessard: Est-ce que le ministre a l'intention de conserver les
mêmes règlements, tels que rédigés et soumis en
commission parlementaire, ou s'il a des modifications à apporter?
M. Toupin: Les mêmes règlements, sauf qu'on a
ajouté quelques petits points techniques concernant certaines
précisions de normes, par exemple, pour les bactéries dans le
lait, les bactéries dans certains produits mais, essentiellement, c'est
la même chose, à 99% près.
M. Lessard: M. le Président, adopté, en tenant
compte que l'article 6 est suspendu.
Le Président (M. Cornellier): Le député
d'Iberville.
M. Toupin: II pourra être amendé en troisième
lecture. Je proposerai des amendements en troisième lecture; si vous
n'êtes pas d'accord, vous pourrez les ...
Le Président (M. Cornellier): Nous allons adopter le
projet de loi après que j'aurai donné la parole au
député d'Iberville, avec la mention que le projet de loi est
adopté sous réserve qu'un ou des amendements pourraient
être apportés à l'article 6 lors du dépôt du
rapport de la commission avant la troisième lecture.
Le député d'Iberville.
M. Tremblay: M. le Président, le ministre pourrait
peut-être m'éclairer sur le retrait du permis dans le contexte de
l'article 6. Je ne vois cela nulle part.
M. Toupin: L'article 6 dit que quiconque enfreint l'article 4 des
dispositions du règlement relatives, etc. Dans le cas de l'article 6,
vous dites?
M. Tremblay: Oui. Bien, ce qui s'en vient en troisième
lecture, il va probablement y avoir une discussion qui va s'engager à
l'article 6; or, dans les articles, je ne vois pas qu'il soit question du
retrait du permis.
M. Toupin: C'est la loi 31 qui me permet cela. Cela, ce sont des
amendements à la loi 31.
M. Tremblay: Alors, comment est-ce couvert?
M. Toupin: La loi 31 me permet de retirer le permis quand je le
veux. D'ailleurs, c'est ce qui m'a permis de retirer l'estampille
à...
M. Tremblay: A l'article 39 b), par exemple, en récidive,
est-ce que c'est automatique?
M. Toupin: Cela peut être...
Une Voix: La loi 31, l'article 12.
M. Tremblay: C'est parce que je ne l'ai pas.
M. Toupin: Le ministre peut suspendre, annuler ou refuser de
renouveler le permis de tout détenteur qui a commis une infraction
à la présente loi ou aux règlements, ne remplit pas les
conditions requises pour obtenir son permis.
M. Tremblay: Mais cela ne rend pas automatique le retrait du
permis en cas de récidive.
M. Toupin: Dans l'année même, oui. Le gars a un
permis pour un an. Il commet une infraction. On ne lui renouvelle pas son
permis et on lui retire l'estampille.
M. Tremblay: C'est sine qua non. Très bien.
M. Lessard: Non, ce n'est pas sine qua non. Le ministre peut, en
vertu de l'article 12...
M. Toupin: Oui, mais, évidemment, si on veut mettre les
entreprises à terre au Québec, c'est une autre affaire, on peut
le faire.
Le Président (M. Cornellier): Le projet de loi no 39 est
adopté, sous réserve d'un amendement possible lors du
dépôt du rapport avant la troisième lecture, amendement qui
pourrait être apporté à l'article 6.
La commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 11 h 37)