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(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
maintenant ses travaux pour poursuivre sa consultation particulière sur
le document intitulé "Politique d'utilisation des pesticides en milieu
forestier".
M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements ce
matin?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme
Trépanier (Dorion) est remplacée par M. Vallières
(Richmond).
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
secrétaire. Je demanderais maintenant à la Faculté de
foresterie et de géodésie de l'Université Laval de bien
vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Pendant que nos gens prennent place, permettez-moi de souhaiter la
bienvenue ce matin au porte-parole gouvernemental à l'Environnement, M.
le député de Chauveau.
Alors, messieurs de la faculté, permettez-moi dans un premier
temps de vous souhaiter la bienvenue aux travaux de cette commission. Je
demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier, et identifier aussi
la personne qui l'accompagne, pour le bénéfice des membres de
cette commission.
Auditions
Faculté de foresterie et de
géodésie de l'Université Laval
M. Lortie (Marcel): M. le Président, je suis Marcel
Lortie, doyen, on dit par intérim - intérim qui risque
d'être long - de la Faculté de foresterie et de
géodésie. Je suis accompagné par le professeur de
sylviculture, le Dr Paul-Émile Vézina.
M. le Président, nous apprécions beaucoup l'occasion qui
nous est donnée de nous présenter devant cette commission et de
vous parler un peu des scénarios qui ont été
proposés dans le document qui nous est parvenu.
M. le Président, nous avons déposé un
mémoire qui constitue la base de notre attitude, à la
Faculté de foresterie et de géodésie. C'est un
mémoire d'ordre plutôt général et ce matin,
plutôt que de lire ce mémoire, je vais vous parler plus
précisément sur le document qui nous est parvenu, de sorte que
vous pourrez voir une suite entre les deux documents, non seulement une suite,
mais assez souvent un recoupement. Vous me permettrez d'abord de vous situer la
Faculté de foresterie et de géodésie. À part le
ministre délégué aux Forêts, qui est un ancien de
chez nous, les autres, je pense que vous avez passé devant, notre
faculté sans vous en rendre compte.
La Faculté de foresterie et de géodésie a
fêté son 75e anniversaire de fondation il y a trois ans. Elle est
une parmi sept au Canada et nous comptons 550 étudiants de premier
cycle, 160 étudiants au niveau de la maîtrise et du doctorat, une
cinquantaine de professeurs et autant d'employés. La graduation annuelle
des finissants avec un baccalauréat en sciences forestières, donc
qui se dirigent vers la pratique du génie forestier, se situe
annuellement autour de 75 à 80. Si, certaines années, ce nombre a
été plus que suffisant, alors que l'emploi était rare, il
y a présentement pénurie de candidats, probablement en raison des
implications prévues dans le nouveau régime forestier du
Québec.
D'après une étude du profil de l'étudiant en
génie forestier, étude qui a été
préparée par un professeur de sociologie, nous avons appris que
l'étudiant en génie forestier ou en sciences forestières
vient chez nous, surtout pour jouer un rôle dans la protection de
l'environnement et pour participer à une activité
économique de première importance au Québec. Il veut avoir
la possibilité d'influencer le cours du développement des
forêts tout en se préoccupant de cette qualité de
l'environnement et de l'usage polyvalent des ressources forestières.
Notre enseignement à l'université reflète autant que
possible ces volontés. Des changements aux divers programmes se sont
produits au cours des années et se produisent
régulièrement en vue d'adapter ces considérations dans les
divers cours. Cet enseignement vise le maintien d'écosystèmes
forestiers stables et diversifiés comme un objectif essentiel de
l'aménagement forestier. Pour cela, notre enseignement et notre
recherche ont développé des méthodes sylvicoles propres
à assurer ce maintien d'écosystèmes forestiers et a
diminué la dépendance vis-à-vis des pesticides.
Au point de vue social et culturel, les forêts jouent un
rôle de plus en plus important pour les observateurs de la nature, pour
les amateurs d'activités de plein air, les utilisateurs des ressources
fauniques, mais ces activités ont sans doute d'importantes
retombées. C'est encore l'utilisation industrielle de la matière
ligneuse des arbres qui confère au milieu forestier une aussi grande
place dans l'économie du Québec et un nombre élevé
de nos étudiants s'orientent vers l'aménagement forestier.
Un mot rapide pour rappeler les activités comprises dans ce que
l'on appelle l'aménagement forestier ou l'aménagement de la
matière ligneuse qui constitue l'essentiel des préoccupations des
étudiants. L'aménagement de la matière ligneuse, c'est la
planification des coupes; c'est la déter-
mination de l'usage du bois que l'on va couper; c'est la sylviculture, y
compris la récolte de la forêt et c'est la protection de cette
forêt. Ce sont les quatre tâches principales de
l'aménagement forestier.
Étant donné l'intensification actuelle de
l'aménagement de la matière ligneuse, sa protection contre le
feu, contre les insectes et les maladies est de plus en plus nécessaire.
Si celle-ci ne doit pas entraîner la pollution de l'environnement et la
détérioration de la santé humaine, il reste qu'il y a des
rentabilisations d'investissements dans le reboisement qui doivent être
protégées. Dans le domaine de la protection forestière
contre le feu, il y a encore lieu de poursuivre l'amélioration des
méthodes de détection. Pour la protection des arbres contre les
insectes et les maladies, il n'y a pas encore un nombre suffisant de
méthodes sylvicoles de prévention contre les
épidémies. Au Québec, on veut une production accrue de
matières ligneuses et, d'autre part, on veut limiter à quelques
traitements souvent peu efficaces les moyens que l'on pourrait appliquer pour
arriver aux objectifs poursuivis.
Il y a beaucoup de frustration dans la profession et j'imagine que
l'Ordre des ingénieurs forestiers a dû vous en parler. Cette
frustration, on la retrouve chez les jeunes professionnels qui viennent
d'être diplômés de la faculté, qui se voient
mandatés de l'exécution de certains travaux et qui se voient
limités dans les moyens que l'on pourrait utiliser pour exécuter
ces travaux. Du côté des étudiants, ces
éléments qui sont connus soulèvent un paquet de questions
dans leurs entretiens, puisque, disent-ils, comment voulez-vous que l'on fasse
un travail si on n'a pas les moyens de le faire?
Nous osons croire que ces préoccupations sont en partie
responsables de la tenue de cette commission. Le ministère propose deux
scénarios pour l'usage des pesticides. Il y a lieu de faire des
distinctions dans le mot "pesticides". En conséquence, ces
scénarios peuvent ne pas s'appliquer de façon comparable. Ainsi,
par exemple, il est sans doute possible de prévoir quatre à cinq
ans d'avance les territoires qu'il faudra traiter pour pouvoir y faire des
plantations. Dans ce cas, on peut imaginer qu'il est possible que le
mécanisme de l'évaluation des impacts sur l'environnement et la
santé humaine puisse s'appliquer.
Nous ne pourrions en dire autant des pesticides du type insecticide.
Présentement, nous avons trop à la mémoire
l'épidémie de tordeuses des bourgeons de l'épinette. Mais
on nous sensibilise régulièrement sur la présence d'autres
insectes qui pourraient devenir aussi importants, et qui le sont
déjà dans certains milieux. J'attire votre attention sur la
publication Insectes et maladies des arbres publiée conjointement
par l'organisme provincial et l'organisme fédéral qui s'en
occupent. Cette publication annuelle porte sur les épidémies
d'insectes, les maladies et les autres problèmes qui sont apparus au
cours de l'année qui se termine. Une épidémie d'insectes
est le plus souvent imprévisible. Les conditions
météorologiques, les conditions de peuplement, de présence
d'insectes; adultes ignorés, font que chaque fois une
épidémie d'insectes apparaît souvent comme quelque chose de
nouveau.
Si l'on se fie aux épidémies passées, et
d'après mon expérience, la première réaction
lorsqu'on voit un nouvel insecte se pointer le museau quelque part, c'est de
dire 'Tiens, un nouvel insecte, on va le rapporter", et on va attendre
l'année suivante pour savoir s'il va réapparaître.
L'année suivante, supposons que cela se continue, alors on rentre dans
le cycle financier, budgétaire, gouvernemental qui est de deux ans et la
troisième année on prévoit des sommes d'argent qu'on va
dépenser la quatrième année. Ajoutons maintenant à
cela des audiences qui vont prendre... J'ai vu un projet qui a duré
déjà plusieurs mois, et on se réveille au bout de cinq ans
avec une épidémie sur les bras, une épidémie dont
on n'a plus le contrôle. Il ne reste plus qu'à sauver les meubles,
c'est-à-dire à se dépêcher à
récupérer le plus de matériel encore
récupérable. Dans le cas de la tordeuse des bourgeons de
l'épinette, la récupération a d'ailleurs laissé des
traces, puisqu'en forêt privée nous savons, dans certaines
régions du Québec, à la suite d'inventaires
récents, qu'il y a une possibilité moins grande en bois de
conifère que celle qui était escomptée.
L'épidémie était tellement grande qu'il a fallu
récupérer rapide ment du bois. On se retrouve aujourd'hui devant
un problème économique d'envergure, au moment où le
gouvernement parle de rendement soutenu dans son régime forestier, et
que, pour y parvenir, il faut mobiliser le bois de la forêt
privée. Cette forêt privée n'est plus en mesure de fournir
le bois qu'elle devait fournir.
S'il est possible de prévoir l'élaboration du programme
d'intervention avec des herbicides en milieu forestier sur une certaine base,
le tout peut être soumis à des mécanismes
d'évaluation des impacts sur l'environnement et la santé humaine.
L'intervention avec des insecticides n'est guère planifiable de la
même façon, à moins de donner des cours aux insectes pour
les inciter à respecter des mécanismes de cinq ans qui pourraient
prévoir des règlements. Vous ne pouvez pas empêcher un
professeur de parler d'enseignement, même à des insectes.
Le second scénario vise une modification au règlement de
l'évaluation, je pense que c'est plutôt le premier, le second,
oui. Le second scénario vise une modification au règlement sur
l'évaluation d'impact, pour permettre l'utilisation en milieu forestier
de deux pesticides homologués actuellement en usage, le bacillus
thuringiensis et le glyphosate. Dans le cas du B.t., on va se parler comme
cela, dans le cas du B.t., j'ai participé d'une certaine façon
à presque toutes les étapes qui ont conduit à sa mise au
point dans la lutte contre la tordeuse des bourgeons de
l'épinette. Il s'agit d'un insecticide biologique, et il
n'attaque que les lépidoptères, c'est-à-dire les insectes
dont le stade parfait est un papillon. Le Québec a fait preuve
d'innovation, heureuse je pense, en appuyant les travaux exécutés
au Centre de foresterie des Laurentides, et je ne vois pas de
nécessité d'études d'impact sur l'application du B. t.,
dans des formules telles que développées et appliquées
depuis quelques années au Québec. Je recommande aussi
l'application du glyphosate sans étude d'impact puisque là
encore, ce produit a démontré, après son homologation,
qu'il pouvait être utilisé sans effet néfaste. Cependant,
si on y tient vraiment, on pourra toujours, dans le cas de cet herbicide,
produire des études d'impact puisqu'il sera possible de prévoir
les étapes que l'on veut franchir au cours des plans quinquennaux. (11 h
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Malheureusement, de nombreux insectes ne sont pas des insectes
vulnérables au B. t. Dans ce cas, une épidémie suivie
d'une étude d'impact risque de requérir suffisamment de temps
pour générer des dégâts assez importants avant
qu'une intervention ne se fasse. Certaines gens prétendent que, puisque
nous avons le B. t., nous avons la solution à tout. C'est faux. C'est
utopique. S'il est possible de ramasser les insectes qui attaquent le feuillage
des pommes de terre dans son jardinet, en arrière de la maison, et de
les jeter au feu pour éviter que les pommes de terre ne soient
contaminées, on ne peut pas en dire autant d'un immense champ. La
main-d'oeuvre nécessaire pour le ratissage serait inouïe. Il y a
donc des échelles de grandeur qu'il faut respecter.
Notre enseignement comporte plusieurs moyens qui malheureusement n'en
sont qu'au stade de la recherche, voire souvent de l'imagination. L'usage des
phéromones est à ses débuts. Les méthodes
sylvicoles, incluant l'amélioration génétique, n'en est
qu'à ses balbutiements. Il y a des insectes pour lesquels il faudra
trouver une approche où des produits chimiques devront être
employés. Parmi les solutions préconisées, nous parlons
à nos étudiants de lutte intégrée où,
à l'aide d'un insecticide appliqué à faible concentration,
on rabaisse le niveau de la population d'insectes à un niveau
contrôlable par des agents naturels par la suite. Je pense à la
mouche à scie du pin gris où avec un épandage d'une
quantité infinitésimale d'un produit chimique, on est capable de
réduire la population pour qu'ensuite les oiseaux et les petits rongeurs
puissent tenir cette population en échec.
Dans certains cas, il y a peut-être lieu de penser à des
interventions massives mais locales qui seraient préférables pour
tuer dans l'oeuf une épidémie qui, autrement, pourrait
s'éterniser. En somme, la technique d'intervention rapide, avec
équipes de choc, comme dans la lutte contre le feu, pourrait ainsi
être appliquée dans la lutte contre certaines
épidémies d'insectes.
Du côté des herbicides, je voudrais mentionner les travaux
de recherche qui visent l'utilisation de mycoherbicides, de la
résistance enzymatique et de la sélection de partenaires
symbiotiques. Certains de ces travaux se poursuivent à notre
faculté, dans la lutte contre le framboisier et contre la maladie
hollandaise de l'orme. Dans le cas de la maladie hollandaise de l'orme,
certains travaux nous permettent de croire qu'il y a des possibilités de
sauver jusqu'à 80 % des arbres si les conditions de partenaires de
croissance sont satisfaites.
Des herbicides à partir de champignons qui,
généralement, s'attaquent au framboisier pourraient
éventuellement être utilisés pour réduire la
compétition que doivent subir les jeunes plants lors des plantations.
Dans les deux cas, il s'agit de travaux de recherche qui ont besoin de plus en
plus d'évidence. À ce point de vue, je note l'espace
réduit de la recherche de moyens alternatifs aux pesticides chimiques.
Les délais sont longs. Je sais que la recherche pour l'usage du B. t.
sur la tordeuse du bourgeon de l'épinette a requis entre 15 et 20 ans.
Les chercheurs sont peu nombreux parce que ce n'est pas payant de faire de la
recherche. C'est beaucoup plus payant d'abandonner ses études
après un baccalauréat, même si on a des qualités
pour aller plus loin, pour aller travailler immédiatement. Ce qui est
davantage important, c'est que la recherche coûte cher et, quand il y a
des coupures de budget, bien, ordinairement, la recherche y goûte parmi
les premiers sujets à être touchés.
Sans doute y aura-t-il des solutions de plus en plus abondantes à
l'avenir où des pesticides de nature biologique et capables de
s'attaquer à des ennemis spécifiques seront de plus en plus
disponibles. Pour le moment, la situation n'est pas encore à ce niveau
et je ne crois pas qu'on puisse espérer qu'une foresterie intensive au
Québec, pour le moment, ne puisse faire appel à des
pesticides.
M. le Président, voilà le message que la Faculté de
foresterie et de géodésie voulait vous transmettre.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Lortie.
Je vais maintenant entendre M. le ministre délégué aux
Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le
Président. Bonjour, messieurs les membres de la commission, messieurs de
la faculté. Mon voisin, le député de Matapédia, a
suivi également des cours à la faculté sans
être...
M. Lortie: Ah oui?
M. Côté (Rivière-du-Loup):... sans être
remarqué, tout de même.
M. Lortie: Ah bon! Une voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Matapédia): Nous sommes au moins deux qui
avons passé chez vous.
M. Lortie: Bien, c'est un bon début. Ha, ha, ha!
M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous remercie
de votre présentation. Mais, vous savez, je connais votre longue
expérience du côté de la recherche, du côté
forestier, du côté de la forêt privée
également, partout au Québec. Vous avez montré un rapport
annuel qui est fait en collaboration entre le fédéral et le
provincial sur le dépistage, sur les insectes nouveaux, un peu un compte
rendu, mais croyez-vous que le dépistage qu'on fait actuellement au
Québec est suffisant ou qu'il pourrait être suffisant pour
permettre de déceler un foyer d'infestation et d'intervenir rapidement
pour éviter, supposons, d'épandre des masses et des masses, des
volumes d'insecticides ou de phytocides?
M. Lortie: À l'heure actuelle, je pense qu'on s'oriente
vers cela, mais on n'est pas encore rendus là. On s'oriente vers ce
dépistage seulement pour quelques insectes. Voyez-vous, le
problème c'est que chaque insecte a sa période d'apparition, il
se produit à un certain moment, il n'est pas du tout dans les
mêmes conditions. La tordeuse, c'est au printemps, d'autres insectes,
c'est plus tard, à l'automne. La variété des peuplements
qui sont impliqués demanderait, en tout cas, des équipes beaucoup
plus importantes que celles qu'on a.
D'autre part, il nous faudrait - avec la tordeuse on commence
déjà à le savoir - il nous faudrait savoir où
regarder pour le début de ces épidémies. On ne peut pas
couvrir la superficie totale du Québec avec des techniciens. On va
être obligés de placer un technicien par kilomètre
carré, j'imagine. Il y a des pièges à phéromones
qui peuvent servir. On sait que ces pièges marchent, nous indiquent
à l'heure actuelle, pour certains insectes en tout cas, qu'il y a
apparition, à un moment donné, d'épidémies. Il va
falloir s'en aller vers cela, vers l'usage de ces pièges mais encore
plus sophistiqués. Le travail de cette recherche s'est surtout fait au
Québec. Il y a déjà des choses intéressantes, mais
il va falloir aussi des gens qui vont relever ces pièges, de
façon fréquente. Pour moi, la détection rapide est aussi
importante que la détection rapide du feu dans le système actuel
de protection des forêts contre le feu.
M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est ce que
certains organismes ont décelé aussi. On voudrait avoir une
opération aussi efficace que la protection des forêts contre le
feu, détection, protection et intervention, de façon à
éviter les désastres qu'on a déjà connus dans le
passé, du côté des incendies forestiers. Évidemment,
comme vous le dites, cela prend... Mais est-ce qu'il va nous falloir des
pièges pour attirer, ou des pièges pour chacun des insectes,
à différentes périodes de l'année?
M. Lortie: J'ai l'impression qu'on a affaire... Le feu, c'est une
chose. Il brûle de la même façon, il peut être plus
chaud, moins chaud, mais c'est une chose; c'est un phénomène.
Tandis que chez les insectes, chacun a son individualité, chaque
espèce a ses caractéristiques et ne se comporte pas de la
même façon qu'une autre espèce. Il n'est pas sûr que
des pièges à phéromones, par exemple, puissent pouvoir
travailler pour un insecte alors qu'ils travailleront pour un autre. Moi, je
suis presque certain qu'il y a des différences hormonales entre les
attraits sexuels des insectes femelles de la même façon que vous
ne trouvez pas un cheval attiré par une vache. Il y a autant de
différences entre deux insectes qu'il peut y en avoir entre deux
animaux.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Dans un autre
ordre d'idées, croyez-vous qu'en favorisant la
régénération naturelle sur, mettons, 70 % de nos
opérations forestières on fera en sorte que les essences qui vont
être là par la suite vont protéger
l'écosystème et qu'elles vont faire partie de
l'écosystème? Est-ce que le ministère va atteindre les
objectifs que vous préconisez dans votre mémoire, en faisant
cela?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vézina.
M. Vézina (Paul-Émile): Au point de vue de la
régénération naturelle, je pense qu'au départ
l'idée du ministère de faire en sorte que la majorité des
superficies qui ont été coupées ou qui ont
brûlé se régénèrent naturellement est une
bonne idée, ne serait-ce que du point de vue économique. Le
reboisement, on le sait, coûte toujours plus cher si on calcule toute la
séquence des opérations de reboisement depuis la récolte
des semences, en passant par le traitement des semences, la plantation des
arbres, le dégagement, l'entretien des plantations, etc. C'est sûr
que cela va coûter plus cher. La préférence doit être
accordée, je pense, à la régénération
naturelle.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Du point de vue
écologique également.
M. Vézina: Oui, du point de vue économique, c'est
cela.
M. Côté (Rivière-du-Loup):
Écologique.
M. Vézina: Et du point de vue économique, je
dirais, et du point de vue écologique. Mais encore là il faut
faire attention. On a parlé dans notre rapport de préservation
d'écosystèmes stables et diversifiés. On sait tout de
même qu'après la coupe, dans un peuplement d'épinettes par
exemple, c'est le sapin qui va être favorisé
au détriment de l'épinette. Autrement dit, on a un
peuplement, une forêt d'épinettes ou d'épinet-tes-sapins,
on coupe cette forêt, on l'exploite et, ensuite, très souvent,
qu'est-ce qu'on a? C'est une forêt de sapins hautement vulnérable
à la tordeuse. Alors, tout cela, c'est une question, aussi, je dirais,
de traitement sylvicole par la suite de dégager les essences et de
favoriser celles qui sont le plus écologiquement adaptées au site
tout en étant des essences, évidemment, qui sont
économiquement valables.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous
arrête là, docteur, parce que si l'épinette est
présente à la suite d'une coupe, c'est le sapin qui
s'installe.
M. Vézina: Souvent.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Si on prenait
comme décision, sans tenir compte du point de vue économique, de
tout raser puis de reboiser en épinettes de même espèce que
celles qui étaient présentes dans le temps, est-ce que, à
votre avis, on respecte l'écologie, l'écosystème?
M. Vézina: Pas nécessairement dans tous les cas.
Tout dépend. Nos peuplements forestiers ont plusieurs origines, certains
sont issus d'incendies, d'autres sont issus de coupes. On dit souvent qu'en
foresterie chaque cas est particulier. Il faut analyser chaque situation en
particulier puis déterminer, en fonction du lieu où on est, du
climat, du sol, quelle est la meilleure essence, l'essence qui est la plus
adaptée aux conditions de milieu, aux conditions du site, quoi.
M. Lortie: Si vous le permettez, je voudrais ajouter cet aspect.
La tordeuse des bourgeons de l'épinette dont on dit qu'elle s'attaque
surtout aux sapins ne porte pas le nom de tordeuse des bourgeons de
l'épinette pour rien, c'est que fort probablement... Si j'avais un
entomologiste à côté de moi, il vous dirait que, quand il
n'y a pas d'épidémie, mais qu'il y a quand même de la
tordeuse quelque part, on la retrouve dans des peuplements d'épinettes.
Alors, cela veut donc dire qu'il y a toujours de la place pour la tordeuse, que
vous plantiez de l'épinette ou qu'elle pousse à l'état
naturel. La tordeuse est un insecte naturel. Elle fait partie de
l'écologie chez nous. (12 heures)
M. Côté (Rivière-du-Loup): Chez nous. Mais
cela ne veut pas dire que le scientifique ne s'est pas trompé quand il a
désigné d'épinette.
M. Lortie: Non, non, mais il a de grosses chances que...
M. Côté (Rivière-du-Loup): II on a
trouvé là la première fois.
M. Lortie: ...ce soit vrai d'après les travaux d'Yvan
Hardy.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Ce n'empêche
pas qu'elle continue à faire des ravages. Ha, ha, ha!
Aux pages 10 et 11 de votre rapport, vous indiquez: "On ne surmonte pas
une crise" - en se référant à la tordeuse des bourgeons de
l'épinette - "en camouflant ses causes et ses efforts ou en lui
attribuant une fausse origine. Ce comportement malhonnête ne
contribuerait qu'à accentuer et à prolonger la crise."
Pourrriez-vous être plus explicite sur ce passage? Notamment en ce qui
concerne les notions de fausse origine, de comportement malhonnête parce
que c'est facile de dire: Les autres ont été malhonnêtes.
Ils ont peut-être été de bonne foi, ils se sont
peut-être trompés et, parce qu'il y a eu une erreur, cela ne veut
pas dire d'arrêter, de ne rien faire, d'attendre le Messie, d'attendre
qu'il revienne une deuxième fois. Je voudrais que vous nous expliquiez
cela parce que ce sont des mots qui sont assez raides et assez durs.
M. Vézina: Je ne crois pas que les mots soient durs. Ce
qu'on veut dire par là, en fait, c'est que toute la question des
épidémies de la tordeuse, tout cela, comme mon collègue
l'a mentionné tantôt... c'est vrai que l'insecte est
indigène au Québec. Il s'attaque de préférence aux
sapins, mais les travaux, en particulier ceux du Dr Blais du Service canadien
des forêts ont quand même montré qu'autrefois, les
épidémies de la tordeuse étaient localisées. Il y
avait des épidémies qui venaient, mais c'était au niveau
local. Les deux dernières épidémies, contrairement
à ce qui se passait autrefois, ont eu une ampleur qui a affecté
pratiquement toute la forêt de sapins de l'Est de l'Amérique du
Nord, y compris certains États américains qui bordent le
Québec et dans pratiquement toutes les provinces de l'Est canadien. Cela
signifie quand même que notre forêt, depuis qu'on fait des
exploitations à grande échelle, depuis les années
1920-1930, a été chambardée, si on veut, que l'aire du
sapin a été considérablement agrandie, qu'on a des
forêts de sapins qui ne sont pas dans leurs bons milieux, et qui sont les
plus vulnérables à la tordeuse. Dans notre rapport, on prend
position en faveur de l'utilisation des insecticides et des phytocides,
clairement, mais on dit que c'est une solution de dernier recours parce
qu'à long terme l'utilisation des pesticides seuls ne change pas la
forêt, ne modifie pas les conditions de la forêt. Si on veut faire
en sorte qu'à l'avenir les épidémies de tordeuses, par
exemple, parce qu'il va y en avoir d'autres, il va y en avoir encore, diminuent
d'ampleur, fassent moins de dommages, je pense qu'il faut réagir et, en
liaison avec les pesticides, il faut intensifier notre aménagement
forestier. Au besoin aussi, il faut modifier les pratiques de gestion. À
mon avis, si on mettait trop l'accent sur les insecticides, on se trouverait
simplement à combattre un symptôme plus que la cause.
M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est de là
que viennent les fausses origines de camoufler la cause.
M. Vézina: Oui, c'est cela.
M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est cela.
D'accord.
M. Vézina: On combattrait non pas la cause des
épidémies, mais un symptôme.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, d'accord.
Deux petites questions rapides avant de passer la parole à mon
collègue représentant de l'Environnement.
Le processus d'étude d'impact et d'audience publique, vous l'avez
mentionné, docteur, permet-il de déceler des erreurs
potentielles, des erreurs possibles qui auraient été
éventuellement commises lors du processus d'homologation - vous savez,
vous avez déjà travaillé pour le fédéral,
vous avez bonne réputation - qui est faite chez vous, est-ce que tout ce
processus permettrait de déceler des erreurs ou des oublis dans le
processus d'homologation?
M. Lortie: Pour déceler des erreurs ou des oublis dans le
processus d'homologation, j'ai d'abord, en premier lieu, plus confiance
à ceux qui travaillent sur le terrain, qui appliquent et constatent que
cela ne remplit pas ou ne prévoit pas certains effets qu'on aurait
dû avoir. Les audiences publiques peuvent aider, si elles sont conduites
pour inclure des gens qui ont travaillé avec ces substances ou qui sont
en mesure de faire référence à des travaux, qui ont eu
lieu ailleurs et de façon sérieuse. Cependant, j'ai
présidé des audiences publiques et je peux vous dire ceci:
Souvent, les audiences publiques sont des parades de démonstration de la
part de groupes pour ou contre certains projets qui se manifestent de cette
façon. Cela ne fait que braquer les opinions. Ma première
réaction, c'est: Quelque chose qui est homologué n'est pas
nécessairement à l'abri de toute critique et de tout retrait
éventuel. Ce sont ceux qui travaillent avec cela qui sont les premiers
impressionnés par ce qui se passe.
M. Côté (Rivière-du-Loup): D'où
l'importance d'un suivi même si un produit a été
homologué.
M. Lortie: L'importance d'un suivi est absolument essentiel.
M. Côté (Rivière-du-Loup): D'accord. Une
dernière question, rapidement. En ce qui concerne les deux
scénarios proposés, est-ce que la faculté a une
préférence ou verrait-elle plutôt un scénario
modifié, amélioré, parce que j'en ai quasiment un en
tête, un troisième scénario? Je ne sais pas si vous en avez
un troisième, vous?
M. Lortie: Moi, je peux vous dire que les scénarios, tels
qu'ils sont proposés, ne font pas de distinction entre les
différents pesticides et du même coup, cela me laisse perplexe. On
ne peut pas traiter les insecticides de la même façon que les
herbicides, par exemple. Pour moi, je n'irai pas jusqu'à dire: Prenez
tout ce qui est homologué et appliquez-le. Cela n'est pas pour moi la
solution.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Ce n'est pas dans
les scénarios, non plus.
M. Lortie: Mon, ce n'est pas dans les scénarios. Dans les
deux scénarios, je suis porté à croire que quand on a un
lépidoptère - et là je fais les distinctions - quand on a
affaire à un insecte lépidoptère, le B. t. peut
s'employer, et on n'a pas besoin d'audience publique. J'ai assez vu Smirnoff
prendre un verre de B. t. et le boire devant tout le monde pour savoir qu'il
n'y a pas grand conséquences. Il est encore là, le bonhomme et il
est retourné au travail dans sa retraite. J'ajouterais ceci concernant
le B. t., seulement pour finir avant de laisser la parole à mon ami. Il
y a une seule fois où Smirnoff s'est senti mal à l'aise à
la suite de la consommation de B. t. comme cela, c'est quand, voyez-vous, il a
bu dans le verre où il y avait déjà un mélange avec
de l'huile et, là, il s'est dépêché de courir aux
toilettes, parce que cela pressait.
M. Vézina: Je suis d'accord aussi avec ce que mon
collègue vient de dire. Il me semble qu'à tout prix on devrait
éviter la confrontation et malheureusement les audiences publiques au
BAPE, Bureau des audiences publiques sur l'environnement amènent
à de la confrontation. Je me dis que ce serait peut-être mieux,
pour les promoteurs, que ce soient les industriels ou encore le
ministère de l'Énergie et des Ressources. Est-ce qu'il ne serait
pas mieux que les promoteurs consultent le public en général ou
les chefs de file sur le plan local, parce que les pulvérisations
aériennes se font toujours sur le plan local, au pis aller, sur le plan
régional? Il y a des chefs de file dans ces secteurs-là, il y a
le public, des gens qui vont en forêt, des clubs etc. Si ces gens
étaient consultés dès le départ, si les promoteurs
amenaient les gens, leur montraient exactement ce qu'ils entendent faire, ce
qu'ils veulent faire, et mettaient les gens dans le coup dès le
départ, il me semble qu'on diminuerait énormément la
confrontation qu'on a quand on tient le tout secret et qu'on attend à la
dernière minute. Là, on a, comme disait mon confrère, des
pour et des contre, et il n'y a personne au milieu.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Actuellement c'est
ce que le ministère fait: II avertit et informe la population de
façon assez spectaculai
re et adéquate. Évidemment, je suis d'avis qu'il faut
ensemble trouver les solutions les plus sécuritaires qui
protègent l'environnement, l'écologie et la santé. C'est
sûr, c'est primordial, on commence par cela. Vous, vous dites:
Référer cela au ministère des Forêts; moi, je fais
confiance au ministère de l'Environnement, pour contrôler, parce
que c'est sa responsabilité. Des experts, évidemment, il y en
aura dans les deux ministères, il y en aura dans l'industrie, il y en
aura dans d'autres domaines. Ce sont ceux-là qui devraient se rencontrer
et faire part au public exactement de ce qui va arriver et de toutes les
conséquences possibles et imaginables, s'il y en a. C'est ainsi que je
vois cela.
M. Vézina: Oui, je pense qu'il faut non seulement informer
le public qu'il y aura des arrosages à tel endroit, à tel jour et
ainsi de suite, mais je parlais de mettre le public...
M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, oui.
M. Vêzina: ...ou les chefs de file dans le coup dès
le départ.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Encore faut-il que
les chefs de file consultent les personnes compétentes.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre
délégué aux Forêts. M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, j'espère que le
ministre a pris bonne note de certaines des réponses qui vont
peut-être l'aider, lui ainsi que son collègue, à
bâtir le troisième scénario. Bon! je vais faire un certain
nombre de commentaires. J'espère qu'il n'est pas écrit, parce que
dans ce cas-là j'aurais des doutes.
Il y a des choses que vous dites, qui ont été dites par
d'autres intervenants hier, et qui, finalement, nous amènent à
cerner un peu mieux la situation. Au fond, par ce que vous venez de dire par
exemple sur le processus d'audience publique ou d'études d'impact, vous
ne voulez pas dire que vous êtes contre. Ce que vous dites, c'est que le
fonctionnement actuel amène à un niveau de confrontation ou
à des situations de confrontation inutiles. Si je vous comprends bien,
vous ne seriez pas contre le fait qu'on maintienne ce mécanisme, cet
acquis des citoyens d'avoir la possibilité d'intervenir à travers
un mécanisme d'étude d'impact et d'évaluation publique,
dans la mesure où, dans le processus, il y aurait des étapes
préliminaires auxquelles ils seraient associés. Quand on parte de
chefs de file, on peut dire des groupes d'intérêts dans les
milieux concernés qui ont une expertise ou un intérêt
particulier à se renseigner, ainsi que des experts. Il y a des groupes
comme le vôtre ou d'autres groupes qui sont venus témoigner hier
devant nous, je pense au groupe du Dr
Lajoie et au groupe de recherche sur les pesticides, au groupe de
travail sur les pesticides, des gens qui peuvent être associés au
départ à des travaux d'évaluation des impacts, qui vont
nous amener éventuellement à l'étape publique, avec un
niveau d'émotivité et d'information dans un cas plus grand et
dans l'autre cas plus faible, et qui vont faire que le processus non seulement
va continuer de porter ses fruits, mais peut-être va même
être plus efficace. Je vous comprends bien quand je dis cela.
M. Lortie: Oui, c'est à peu près cela. Je voudrais
cependant être bien compris. Le processus actuel a besoin d'être
amélioré, aussi bien le processus fédéral que
provincial. Je les connais passablement tous les deux. C'est une chose, mais
attention d'alourdir, de rendre plus long le processus parce que, pendant ce
temps-là - on parle d'insectes à ce moment-ci -
l'épidémie se construit.
M. Charbonneau: D'accord. Pour répondre à ce
problème, est-ce que vous trouveriez intéressant ou utile d'avoir
une procédure selon laquelle, dans la solution qui serait retenue par le
gouvernement, on aurait une phase transitoire de sorte qu'entre maintenant et
le moment où les études seraient faites, des autorisations
spéciales pour des luttes ponctuelles, pour des interventions-chocs
puissent être autorisées selon un mécanisme distinct de
celui qui serait en place une fois que l'étape des études
d'impact et des évaluations publiques auraient été faites?
Autrement dit, quand ce processus va être en place et qu'il aura
donné son aval, il y a un intervale à partir de maintenant
jusqu'à ce moment-là. (12 h 15)
M. Lortie: II est certain que, lorsqu'on a affaire à une
épidémie naissante, si on pouvait avoir le moyen d'intervenir
rapidement avec les connaissances qu'on a à ce moment-là... J'ai
donné l'exemple de la mouche à scie du pin gris. On sait que
l'insecticide phosphamidon ou fénitrothion utilisé dans des
proportions infinitésimales, un millième de ce qu'on appliquerait
pour la tordeuse, peut réduire l'épidémie à un
niveau, pas la tuer, mais la réduire à niveau tel que les
musaraignes ou les oiseaux vont prendre le contrôle par la suite et
qu'ils vont vous tenir cela. Je pense qu'il faudrait être capables d'agir
avant qu'on ait, je ne sais pas, 100, 200, 300 kilomètres
carrés...
M. Charbonneau: Si vous aviez à faire une recommandation
au gouvernement en termes de priorité d'intervention, est-ce que vous
seriez d'accord pour recommander que la première priorité
budgétaire dans un programme ou une politique d'utilisation des
pesticides, de gestion des forêts, serait d'investir suffisamment pour se
doter d'un système de détection et de dépistage?
M. Lortie: Ah oui!
M. Charbonneau: Est-ce que vous considérez que c'est la
première priorité?
M. Lortie: C'est une priorité et c'est comme cela qu'on a
pris le haut du pavé sur le feu au Québec.
M. Charbonneau: Mais, à votre avis, avec un système
plus sophistiqué que celui que vous connaissez maintenant?
M. Lortie: Celui qu'on a connu jusqu'à récemment,
c'est un système où on s'en va avec une hache, on frappe un arbre
avec le côté plat et on fait tomber tout ce qu'il y a d'insectes
et on compte cela. Ou encore, on coupe des branches de 18 pouces de longueur et
on regarde combien il y a d'insectes là-dessus. Je ne sais pas si vous
le savez, cela commence à être...
M. Charbonneau: Archaïque.
M. Lortie: ...un processus onéreux. Vous avez une
trentaine de techniciens qui font cela dans toute la province. Voyons donc! Ce
n'est pas sérieux. Ce n'est pas de la détection. Cela permet de
sortir un rapport un an après et de dire: Voici la situation telle
qu'elle était l'an passé et si vous êtes intelligents, vous
allez voir qu'elle va être pire cette année dans tel ou tel
secteur. C'est tout ce que cela nous permet. Il nous faut un système de
détection rapide, non seulement un système de détection
rapide, mais un système d'intervention quand on est au début
d'une épidémie, un système d'intervention rapide, de la
même façon qu'on a appris que, si on pouvait envoyer des
équipes de choc combattre un feu en 20 minutes, on n'aurait pas à
l'arroser pendant une semaine après.
M. Charbonneau: Je vous rejoins totalement parce que j'ai
l'impression qu'une bonne partie du problème des études d'impact,
de leur pertinence ou la problématique de l'utilisation de produits
chimiques quelconques serait passablement réduite si on pouvait disposer
d'un arsenal de détection suffisamment efficace qui ferait qu'au lieu
d'arroser de grandes étendues, on aurait... Les gens seraient
probablement moins réticents à utiliser certains produits s'ils
savaient qu'on les utilise rapidement dans des zones limitées
plutôt que de les utiliser sur des étendues considérables
qui affectent...
M. Lortie: Je vais vous donner l'exemple de la tordeuse. La
première fois qu'on l'a rapportée d'une façon
significative, c'est en 1967. La première intervention qu'on a faite est
en 1971. À partir de ce moment-là, il n'y avait plus moyen.
M. Charbonneau: Est-ce que vous êtes en mesure de... Je le
sais bien, on est d'accord.
Mais il va falloir que le président du Conseil du trésor
et le ministre des Finances vous donnent les moyens d'avoir une
véritable équipe de détection. C'est cela, le
problème. Si vous n'avez pas les moyens en période de vaches
grasses, ce ne sera pas en période de crise économique que vous
allez dégager un système de détection suffisant. C'est le
problème, le vrai problème de toute cette commission.
M. Lortie: Dans les moyens de détection, on parle beaucoup
des pièges à phéromones qui ont été mis au
point par un chercheur du Québec, Luc Jobin, pour lequel il a
gagné le Prix J.Armand Bombardier Voilà un élément
intéressant. Je ne pense pas que ce soit la solution, comme le B.t.
n'est pas plus la solution. C'est une solution, en vous rappelant que chaque
insecte, c'est une espèce différente.
M. Charbonneau: Est-ce que vous considérez que dans le
ministère, à la faculté chez vous, dans les entreprises et
dans les organismes qui sont venus témoigner devant nous, certains avec
beaucoup de sérieux, on dispose actuellement ou on serait en mesure de
créer une équipe, un "task force", une espèce de
comité de travail qui pourrait proposer rapidement au ministère
un système sophistiqué de détection et serait capable
aussi de le chiffrer, c'est-à-dire... Bon, le système de
détection, on peut en parler longtemps, sauf qu'à un moment
donné, si des gens nous disaient: Écoutez, on vous donne trois
mois ou six mois pour produire un rapport et une recommandation ou une
série de recommandations qui feraient qu'on devrait passer de 30
analystes à 200 ou 300 analystes et d'un budget annuel, je ne sais pas,
de 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ à 1f> 000 000 $ annuellement, cela
implanté dans un délai de temps, on aurait déjà
un...
M. Lortie: Je pense qu'il y a moyen, effectivement, de
pirévoir, si on s'entend sur les cibles, les insectes cibles. Vous
savez, quelqu'un pourrait dire: Bien, tous les insectes susceptibles
d'être un jour à l'état épidémique devraient
être inventoriés. Bien, là, je ne serais peut-être
pas d'accord. Si on s'entend sur les cibles qu'on doit viser, à ce
moment-là, il y a moyen de chiffrer le coût d'un système de
détection relativement facilement dans des délais
convenables.
M. Charbonneau: À votre avis, dans que! délai
pourrart-on...
M. Lortie: Je pense de trois à six mois, même... Je
ne dis pas de trois à six mois pour tout le monde...
M. Charbonneau: Non, non.
M. Lortie: En ayant une équipe de quelques travailleurs
à plein temps, un économiste, un
entomologiste ou quelque chose comme cela, en les mettant ensemble et en
les faisant se rapporter à un groupe qui est en mesure d'évaluer
les conséquences, on pourrait facilement dans une période de
trois à six mois arriver à chiffrer le coût d'un
système de détection.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vézina.
M. Vézina: En fait, le problème de
l'épidémie de tordeuses des bourgeons de l'épinette
déborde les frontières du Québec. C'est tout l'Est de
l'Amérique du Nord qui est impliqué dans cela.
M. Charbonneau: On pourrait même associer autrement dit des
partenaires...
M. Vézina: C'est cela, c'est un coût...
Déjà, il y a de bonnes relations entre gestionnaires et
chercheurs du MER et ceux des autres provinces et des États qui bordent
le Québec. Il faut associer... C'est tout ce monde qui doit collaborer,
qui doit travailler en équipe ou en un groupe de recherche dont vous
parlez. Les coûts doivent être partagés aussi par tout ce
monde.
M. Charbonneau: Cela pourrait être un "task force"
international ou entre États. C'est intéressant parce que
finalement, si on mettait cela en place, on aurait une utilisation beaucoup
plus restreinte par la suite des produits chimiques qu'on craint tant.
M. Lortie: Si, effectivement, à la suite de la
détection, on se donne tes moyens d'intervenir. On a un système
de détection contre le feu qui est excellent. À la seconde
où un coup de foudre frappe au Québec, on sait où il est
tombé, il est enregistré. En moins de six heures, vous envoyez un
avion qui va survoler la région et qui va vous dire s'il y a un feu ou
non. Tout cela, c'est bien bon. Mais si, après cela, il n'y a pas
d'équipe de choc, des pompiers qui partent en hélicoptère
pour éteindre un feu, s'il n'y a pas de CL-215 qui partent à la
suite de cela pour aller arroser, cela ne sert à rien. Alors, de la
même façon, quand même on aurait une équipe de choc,
une équipe de détection rapide, s'il n'y a pas les moyens
d'intervention rapide par la suite, on revient au processus qu'on connaît
avec ses lenteurs.
M. Charbonneau: Je pense qu'on s'entend. Ce qu'on a dit depuis
deux jours, en fait trois jours maintenant, c'est que de notre
côté on pense qu'il y a moyen dans des situations d'urgence, si on
balise cela, d'avoir des autorisations d'utiliser certains produits dans la
mesure où on n'a pas d'alternative en termes d'efficacité. Par
ailleurs, cela n'empêche pas le fait que, sur une période plus
longue, on puisse être en mesure de fournir, distinctement pour les
insecticides et les phytocides, des données de prévi- sion
d'utilisation et de prévision d'infestation qui nous permettraient de
faire une évaluation des impacts environnementaux. Je pense qu'il faut
faire la distinction entre une utilisation rapide et limitée dans des
situations d'urgence... Quand le feu est à la maison, il ne faut pas
faire une étude d'impact. Mais, en même temps, on peut en faire
avant pour savoir comment on va réagir si le feu se déclare dans
le quartier, quel type d'intervention on va faire. Compte tenu de la nature
particulière de ce quartier, si on utilise tel type d'outil d'attaque,
on risque de créer des dommages inutiles à bien des gens. On va
éteindre le feu, mais on va arroser tout le monde et on va
détruire la moitié des maison pour rien.
M. Lortie: Remarquez, M. le député, que tout cela
est dit de façon idéale.
M. Charbonneau: Oui, oui, c'est évident.
M. Lortie: J'ai participé, avec des gens qui ont
travaillé près de moi dans d'autres milieux et qui sont
peut-être ici, j'ai travaillé à mettre au point des
processus d'intervention s'il y avait déversement d'huile en face de
Québec, et tout le monde a appris énormément. Quand il en
est arrivé un, bien...
M. Charbonneau: Oui.
M. Lortie: Alors, cela veut dire qu'il y a continuellement des
choses à apprendre.
M. Charbonneau: Oui, oui. Vous avez dit une autre chose
importante à mon avis et qui milite en faveur de trouver ou de
maintenir, en tout cas, un processus d'étude d'impact et
d'évaluation publique, même si on le modifie, pour le rendre moins
inutilement conflictuel, surtout si on a des étapes préliminaires
où les gens sont plus à même de participer et de
connaître. Vous avez franchement dit que le processus d'homologation
n'est pas à l'abri de toute critique d'une part et que vous n'iriez pas
jusqu'à vous ranger derrière un certain nombre d'entreprises qui
sont venues nous dire: Écoutez, une fois que c'est homologué, on
devrait l'utiliser. Il y a des gens qui sont venus carrément nous dire:
Pour tout ce qui est homologué, vous devriez nous donner carte
blanche.
M. Lortie: C'est leur privilège de le dire.
M. Charbonneau: C'est votre privilège de ne pas être
d'accord.
M. Lortie: Moi, personnellement, je ne suis pas d'accord. Il y a
des produits homologués qui, sans aucun doute, ont fait leurs preuves et
il n'y a pas de conséquence. Je pense en particulier au B.t.. Pour moi,
qui ai été associé... Je ne le prends pas
émotivement, mais je le prends de
près par exemple, parce que j'ai vu tous les travaux qu'on a
faits là-dessus et j'ai participé à ces travaux. Je peux
vous dire: Écoutez, on est assez près d'une réalité
pour savoir qu'un produit biologique de cette nature peut être
employé sans qu'on soit obligé de faire des études
d'impact chaque fois. Cela ne veut pas dire que tous les produits
homologués... D'ailleurs, il a été utilisé avant
qu'il soit homologué, à l'état expérimental. On
savait déjà qu'il n'y avait pas de danger.
M. Charbonneau: D'ailleurs, dans ce cas, je pense qu'il y a eu
une étude d'impact.
M. Lortie: Par la suite, oui.
M. Charbonneau: Je le sais, mais je veux dire que, dans ce cas,
il y a eu une étude d'impact.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Peu importe la
superficie, M. Lortie?
M. Lortie: Dans le cas du B. t. ? M. Côté
(Rivière-du-Loup): Oui.
M. Lortie: Moi, je ne vois pas de problème dans le cas de
la superficie, si ce n'est un problème financier.
M. Charbonneau: Vous avez dit - je ne sais pas lequel des deux
l'a fait - qu'il faudrait aussi penser sérieusement à modifier
les pratiques de gestion et notre type d'aménagement forestier. Est-ce
que vous pourriez développer un peu plus?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vézina.
M. Vézina: Oui, oui, en effet. Je veux tout simplement
dire par là qu'on ne doit pas se contenter d'utiliser seulement les
pesticides ni mettre l'accent, je dirais, sur les pesticides. Il faut que les
pesticides deviennent un outil, disons un peu comme les autres outils, les
instruments, les techniques sylvicoles qui sont employés. Alors, les
pesticides doivent s'Intégrer à l'intérieur des autres
techniques d'aménagement: la plantation, l'éclaircie, le
dégagement, le nettoyage. Enfin, on peut en nommer plusieurs. C'est tout
cela. On recommande ceci: Plus on utilise les pesticides, plus on doit
intensifier les techniques d'aménagement.
M. Lortie: Les deux vont de pair.
M. Vézina: Les deux vont de pair, exactement.
M. Charbonneau: Cela va.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Verchères. M. le député de
Chauveau.
M. Poulin: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
excuser le ministre, qui est pris ce matin d'urgence à Montréal
pour une conférence de presse, et remercier aussi de leur
présence MM. Lortie et Vézina de la Faculté de foresterie
et de géodésie. Je vais être très court, parce que
le ministre délégué aux Forêts a pris beaucoup de
temps. On s'échange cela, apparemment. Le député de
Verchères a posé aussi quelques questions. (12 h 30)
Dans votre document, on trouve intéressante l'ouverture d'esprit
quand vous dites que les pesticides doivent être utilisés comme
dernier recours. Vous donnez des exemples: les risques à la santé
et à l'environnement, puis les dangers de simplification
écologique par l'uniformisation des écosystèmes.
Ma première question s'adressera à M. Vézina qui,
je pense, est un spécialiste en sylviculture. Il y a eu une
étude...
Une voix: Moi aussi...
M. Poulin: Vous aussi? Vous répondrez après.
Donc, Borman et Likens ont mené une importante étude sur
l'écologie forestière après perturbation dans les peuples
forestiers du New Hampshire. Cette étude avait porté sur quinze
ans. Les auteurs montrent, entre autres, que le framboisier et d'autres plantes
pionnières ont comme rôle écologique de retenir les
éléments nutritifs dans l'écosystème forestier
après perturbation. Est-il possible que l'usage de phytocides en
forêt, détruisant la majeure partie de cette
végétation considérée concurrente, conduise
à un problème de fertilité des sols forestiers?
M. Vézina: Là, on va parler des phytocides pour
bien distinguer, pas des insecticides, mais des phytocides. Encore là,
si on veut être honnête, il faut toujours considérer les
deux côtés de la pièce de monnaie ou les deux
côtés de la médaille. On peut dire que, d'une façon
générale, les plants qui poussent bien, pour utiliser une
vérité de La Palice, les plants forestiers, les plants qu'on a
plantés, les épinet-tes ou les pins qu'on a plantés, s'ils
sont en bonne santé, seront à l'abri, ils ne seront pas, malades.
Je veux dire par là que, si on a des organismes - je ferais un
parallèle avec les humains aussi - forts et en bonne santé, on
est un peu à l'abri des maladies et, au contraire, quand on est affaibli
pour différentes raisons, c'est là que les maladies nous
assaillent et, dans le cas des arbres, c'est là en fait que les insectes
et les maladies viennent, si vous me permettez l'expressiion, achever la "job",
terminer le travail, quoi. C'est pour cela qu'on les appelle des organismes
secondaires. Ce ne sont pas eux qui commencent le travail, mais quand un
organisme est affaibli, ce sont eux qui viennent
terminer le travail et accélérer la mortalité.
Or, pour en revenir à nos plants, c'est bien sûr que, d'un
côté, trop de compétition, trop de framboisiers, cela va
nuire à nos plants, cela va les affaiblir et les rendre plus sensibles
aux insectes et aux maladies, mais, d'un autre côté aussi,
l'inverse est aussi vrai, à savoir que des plants complètement
libres de toute compétition sont en danger aussi. Ce sont d'autres
facteurs, la sécheresse ou des choses comme ça, qui vont leur
nuire. Or, il faut un certain degré de compétition. Chez les
humains aussi, on a besoin d'avoir un peu de compétition. Les plants
aussi. Il y a un juste milieu.
Les phytocides sont là; on doit les employer quand on a une
situation où la compétition est trop sévère,
qu'elle risque de nuire aux plants. Tout cela pour dire que chaque situation
doit être analysée, chaque plantation doit être
analysée par un aménagiste forestier qui doit décider quel
degré de compétition on a, quel degré de
compétition les plants peuvent endurer. Dans certains cas, ce sera
nécessaire d'utiliser les phytocides pour éliminer, si on veut,
le surplus de compétition et, dans d'autres cas, les plants vont se
dégager d'eux-mêmes, il n'y a pas de règle fixe
là-dedans.
M. Lortie: Si vous me le permettez, j'ajouterais une information
à votre question. En l'absence de la végétation, ce qui
s'installe, les framboisiers par exemple, c'est certain que cela va accumuler
des éléments minéraux, mais dans ce processus il n'y a pas
de gain ou de perte, c'est-à-dire que les éléments
minéraux n'apparaissent pas spontanément parce qu'il y a des
framboisiers, ils sont là dans le sol, ils peuvent être plus ou
moins assimilables selon le pH du sol ou tout cela. Cela, c'est une chose.
Ce que je veux dire, c'est que le fait d'avoir du framboisier puis de le
supprimer par la suite ne réduira pas pour autant la capacité de
production d'un sol. En fait, la foresterie tropicale repose sur le fait que
les éléments minéraux sont dans la tête des arbres.
Il n'y a rien dans le sol. Quand on veut faire de l'agriculture qu'on appelle
itinérante, on abat les arbres pour retourner au sol les
éléments minéraux qui sont dans la tête des
arbres.
Alors, c'est à peu près la même chose concernant le
fait que les framboisiers ou d'autres plantes peuvent accumuler les
éléments minéraux; si on les retourne au sol, on ne perd
pas de productivité; on garde à peu près la même
chose.
M. Poulin: J'ai une autre question; il me reste deux questions.
Cela va être court. Dans votre mémoire, vous traitez des
simplifications écologiques et de leurs conséquences. Dans votre
exposé, M. Lortie, vous n'avez pas tellement présenté ce
thème.
M. Lortie: De?
M. Poulin: Quand vous parlez de simplification écologique
et des conséquences...
M. Lortie: Dans...
M. Poulin: ...dans votre exposé.
M. Lortie: Je vous ai dit que le mémoire
déposé, c'était notre position et que moi, j'ajoutais...
Là-dessus, si vous voulez, on peut y retourner à ce
mémoire.
Je ne suis pas un sylviculteur, mais je peux vous dire que les
peuplements simples sont généralement plus
vénérables à un tas de choses. Encore que la forêt
boréale, c'est une forêt relativement simple en composition parce
qu'il y a à peu près quatre espèces dedans, et elle en
couvre grand. Mais je crois, personnellement, qu'une plantation est plus
sensible à des insectes, à des maladies, qu'une forêt
naturelle.
M. Poulin: Une dernière question. Vous avez parlé
du bénéfice d'une meilleure compréhension de notre part,
en page 8. Qu'est-ce que vous entendez par le déséquilibre
occasionné par une simplification écologique? Aussi, vous parlez
de conséquences funestes. Alors, j'aimerais que vous nous parliez de ces
deux points et que vous les expliquiez plus en profondeur.
M. Vézina: Oui, je fais allusion à ce que j'ai dit
tantôt, c'est-à-dire au fait que le sapin, depuis 50 à 70
ans, a largement remplacé des anciennes forêts d'épinette.
On peut penser que l'une des causes, peut-être la principale cause, non
pas du fait qu'on ait des épidémies de tordeuses, mais de
l'ampleur qu'ont pris récemment les épidémies de tordeuses
des bourgeons de l'épinette, provient de l'extension du sapin. On
pourrait faire un parallèle aussi avec une autre essence, une essence
d'ombre, c'est-à-dire qui se régénère sous les
vieux arbres comme le sapin, l'érable à sucre. Avec le
dépérissement, c'est la même chose. Votre érable
à sucre est envahissant: il envahit des terrains où on avait
d'autres types de forêts autrefois. Alors, l'érable à sucre
n'est pas toujours dans une situation convenable au point de vue
écologique et, évidemment, toutes les manifestations qui s'en
suivent, eh bien, c'est le phénomène des épidémies
de tordeuses ou encore du dépérissement. Je pense que ce sont des
choses qu'on peut corriger en aménageant la forêt de façon
plus intensive, par la plantation, lorsqu'on plante la bonne essence dans le
bon sol, dans le bon climat, au bon endroit et au bon moment.
M. Poulin: Est-ce que c'est un symbole, quand on parle de
simplification écologique, que de planter juste une espèce?
M. Vézina: Pardon?
M. Poulin: Quand on parle de ne planter qu'une seule
espèce, est-ce que ce n'est pas parier de simplification
écologique?
M. Vézina: Vous voulez dire quand on parle de monoculture,
quoi; dans un endroit donné lorsqu'on plante une seule espèce.
Non, à mon point de vue, la question des monocultures, je ne trouve pas
que c'est là le problème. Justement, mon confrère faisait
allusion tantôt au fait que la forêt boréale est
composée de vraiment peu d'espèces. Le problème, c'est
plutôt, je viens de le mentionner, de planter la bonne espèce, au
bon endroit, de la bonne façon. Si on regarde notre forêt
d'épinettes noires, plus au nord, elle est composée très
majoritairement d'épinettes noires et on n'a pas de problème. Si
on s'en allait dans des pays comme le Zaïre ou le Brésil,
évidemment, et qu'on plantait une seule espèce, bien là,
cela pourrait causer des problèmes parce que la forêt naturelle
est constituée, peut-être, d'une centaine d'espèces. Dans
le sud du Québec aussi, au Québec méridional, il faudrait
faire attention. C'est toujours la question du choix de l'espèce.
M. Poulin: Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Chauveau. J'aurais quelques questions à M.
Lortie et à M. Vézina.
M. Poulin:...
Le Président (M. Saint-Roch): J'apprécie le
privilège, M. le député de Chauveau. Il y a une chose qui
m'apparait depuis mardi que nous écoutons des intervenants. On nous a
dit que c'était 10 000 000 000 $ de contribution à
l'économie québécoise, tous les produits que
génère notre forêt; on a parié de 250 000 emplois.
Ce qui m'étonne, ce matin, c'est que je me serais attendu - vous l'avez
un peu effleuré M. Lortie - à ce que vous auriez fait une sortie
un peu plus vigoureuse en ce qui concerne la recherche. Mon collègue de
Verchères a parié de détection, et vous avez dit: Oui, on
en a, mais cela ne couvre probablement pas tous les insectes; il y aurait
peut-être d'autres recherches à faire là. D'autres
intervenants sont venus nous dire la même chose pour les pesticides,
qu'ils soient chimiques ou biologiques.
Quand je regarde l'ensemble de ce secteur, on dit qu'on a
dépensé à peu près grosso modo 21 000 000 $ en
1985-86, le Québec à peu près 1 000 000 $, et on parle
d'aller à 4 000 000 $. J'aimerais que vous nous disiez, en tant
qu'experts puis gens de faculté, quel serait, d'après vous, le
montant idéal de recherche si on veut soutenir la croissance et le
développement de cette industrie.
M. Lortie: Tout d'abord pour commencer M. le Président, on
ne fera pas de recherche si on n'a pas de chercheurs. Déjà, on a
énormément de difficultés à garder les sujets les
plus prometteurs à faire de la recherche. La compétition pour les
emplois est telle qu'être chercheur, au moins pour le début de sa
carrière, c'est faire oeuvre de pauvreté. Et là je parle
d'étudiants diplômés au niveau de la maîtrise et du
doctorat qui gagnent 11 000 $, 12 000 $ ou 13 000 $ par année, et il y
en a qui gagnent moins que cela. Alors, vous comprenez que, si on n'a pas de
chercheurs, on n'a pas de recherche. De ce côté, on a un absolu
besoin de former des chercheurs, et pas seulement au Québec. On peut les
envoyer ailleurs pour prendre d'autres expériences et recevoir des gens
d'ailleurs qui viennent chez nous pour prendre nos expériences, etc.,
mais il y a une faiblesse de ce côté qui est incroyable.
Non seulement la faiblesse en argent est incroyable, mais j'ai eu
récemment, il y a à peu près un an et demi, l'occasion de
passer un certain temps dans un hôpital où j'ai rencontré
un spécialiste en endocrinologie qui venait jaser avec moi tous )es
midis et qui, pariant de recherche, me disait: J'ai abandonné la
recherche. C'était un chercheur qui allait tous les ans - il avait son
salaire assuré par l'université - chercher 30 000 $, 40 000 $ ou
50 000 $ pour lui permettre de faire de la recherche. Donc, c'était un
chercheur qui avait un statut moyen en médecine; relativement bien
connu, il se déplaçait. Il m'a dit et m'a confirmé ce que
je savais déjà, qu'il fallait passer des semaines entières
à rédiger des demandes de toutes sortes, de toutes longueurs,
à répéter continuellement pourquoi il faut faire ci,
pourquoi il faut faire ça, à qui il fault s'adresser, ce qu'on
espère trouver. Les formules s'accumulent. Ce sont des formules -
excusez, je vais nommer des si-gles - du CRSNG, du FCAR, et de tous les
organismes subventionnaires puis, au bout de cela, vous attendez la
charité, s'il vous plaît, pour faire vivre l'étudiant qui
attend après cela pour vivre, et on vous dit une bonne année:
Bien, cette année, on n'a pas beaucoup d'argent, on ne peut pas vous
donner un sou. Faites-en des chercheurs! Mettez... Je suis prêt à
prendre 500 000 $, 2 000 000 $ si vous voulez, mais je peux vous dire une
chose: Je vais peut-être avoir de la misère à les
dépenser parce que je n'aurai peut-être pas ass&z de
chercheurs pour faire le| travail qu'il faut.
Le Président (M. Saint-Roch): Je ne voudrais pas abuser du
temps des questions, mais j'aimerais vérifier quelque chose avec vous,
M. Lortie. On parle de création d'une agence spatiale à
Montréal. On vient d'annoncer 110 000 000 $ avec la création d'un
groupe de 44 chercheurs pour prendre soin de la dépollution et de
l'assainissement du Saint-Laurent. Est-ce que ce ne serait pas cela la
solution, soit la création quelque part au Québec d'une
unité spécialisée en recherche où il y aurait des
budgets bien connus
avec un parrainage de l'industrie et du gouvernement?
M. Lortie: Si vous voulez. C'est une possibilité, mais les
structures pour moi, c'est secondaire. On peut arriver à faire faire des
travaux où on veut si on donne les moyens pour les faire. Cela peut
être dans une université, un consortium d'universités, un
institut indépendant, un institut gouvernemental, sauf que je sais,
comme universitaire, que je ne pourrai pas faire ma "job", et mon
collègue ici ne pourra pas faire non plus son travail proprement dit de
professeur, si on n'a pas les moyens de faire faire certains travaux de
recherche dans notre spécialité par ceux qui sont là. Les
structures ne me fatiguent pas. Ce qui me fatigue, c'est l'argent
assuré. Et à l'heure actuelle, c'est loin d'être
assuré. À chaque année, c'est une bataille. Je suis doyen
depuis un mois. Depuis un mois, les professeurs entrent dans mon bureau: As-tu
eu des nouvelles de...? As-tu eu des nouvelles de...? As-tu eu des nouvelles
de...? Pendant ce temps-là, on a engagé de l'argent pour des
étudiants qui sont déjà sur le terrain et houp! tout d'un
coup, on apprend que oui, l'un a de l'argent, mais l'autre, non, il n'en a pas.
On ne sait pas comment on va faire pour le financer.
Le Président (M. Saint-Roch): Or, le programme de
recherche CRSNG serait un atout.
M. Lortie: Ah oui!
Le Président (M. Saint-Roch): Je remercie les gens de la
Faculté de foresterie et de géodésie de
l'Université Laval pour leur apport aux travaux de cette commission.
M. Lortie: Cela nous a fait plaisir, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Je demanderais maintenant
aux représentants de la Fédération
québécoise de la faune de bien vouloir prendre place, s'il vous
plaît.
Dans un premier temps, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à
la Fédération québécoise de la faune. Je
demanderais, s'il vous plaît, à son porte-parole de bien vouloir
s'identifier et d'identifier aussi les gens qui l'accompagnent pour les
bénéfices des membres de la commission.
Fédération québécoise de
la faune
M. Jean (Yves): M. le Président, mon nom est Yves Jean. Je
suis vice-président de la Fédération
québécoise de la faune. Mon collègue de gauche, Claude
Marcouillier, est directeur général de la
fédération et mon collègue de droite, Daniel Vanier, est
biologiste à la fédération.
M. le Président, vous avez sans doute de même que vos
collègues le mémoire devant vous.
Alors, je ne le lirai pas au complet. Je vais plutôt vous en lire
des extraits de la façon la plus logique que possible,
évidemment, dans le temps qui nous est donné.
La Fédération québécoise de la faune est
heureuse de vous présenter son mémoire concernant la politique
d'utilisation des pesticides en milieu forestier. La FQF estime qu'il n'y a
aucune opposition, même soi-disant apparente, entre l'objectif
d'atteindre ou de maintenir le rendement soutenu des forêts et celui de
réduire l'usage de pesticides en milieu forestier. Lors de ces
interventions précédentes dans ce dossier, la FQF a toujours
demandé au gouvernement de mettre l'accent sur des techniques
d'aménagement visant la prévention et sur les méthodes
alternatives à l'utilisation des pesticides. Le but visé par la
FQF est donc de réduire au maximum l'utilisation des pesticides et leurs
impacts sur l'environnement et la santé humaine.
En étudiant le document de support concernant la politique
d'utilisation des pesticides en milieu forestier, la FQF trouve
déplorable que le gouvernement du Québec considère
essentiellement la forêt comme un immense champ de matières
ligneuses à des fins de production industrielle. La FQF...
M. Charbonneau: Excusez-moi, M. le Président, je pense que
le mémoire s'adresse, entre autres, au ministre
délégué aux Forêts. Je suggérerais qu'on
suspende quelques minutes et qu'on attende que le ministre revienne. Ce serait
plus poli pour les gens. /
Une voix: Merci, M. le député.
Le Président (M. Saint-Roch): Nous allons suspendre nos
travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 51)
(Reprise à 13 heures)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Est-ce que les représentants de la Fédération
québécoise de la faune voudraient bien prendre place, s'il vous
plaît?
La commission reprend maintenant ses travaux. M. Jean.
M. Jean: La FQF estime qu'il n'y a aucune opposition, même
soi-disant apparente, entre l'objectif d'atteindre ou de maintenir le rendement
soutenu des forêts et celui de réduire l'usage de pesticides en
milieu forestier. Lors de ses interventions précédentes dans ce
dossier, la FQF a toujours demandé au gouvernement de mettre l'accent
sur des techniques d'aménagement visant la prévention et sur des
méthodes alternatives à l'utilisation des pesticides. Le
but visé par la FQF est de réduire au maximum l'utilisa-
tion des pesticides et leurs impacts sur l'environnement et la
santé humaine.
En étudiant le document de support concernant la politique
d'utilisation des pesticides en milieu forestier, la FQF trouve
déplorable que le gouvernement du Québec considère
essentiellement la forêt comme un immense champ de matières
ligneuses, à des fins de production industrielle. La FQF
considère qu'une politique-cadre d'aménagement de la forêt,
qui comprend entre autres une politique de prévention et de lutte contre
les insectes nuisibles et la végétation compétitive, doit
respecter l'intégrité de l'écosystème forestier et
de l'ensemble de ses ressources dans le cadre d'une stratégie de
développement durable de ce milieu.
Je vais à la partie 2, qui est un bref rappel des propositions de
la FQF à la commission parlementaire sur le projet de loi sur les
pesticides. À la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi sur
les pesticides en 1987, la FQF avait formulé plusieurs recommandations
et suggestions afin de mieux répondre à l'objectif du
gouvernement de réduire et de rationaliser l'usage des pesticides.
Une des recommandations les plus importantes du mémoire de la
FQF, et aussi de plusieurs autres groupes gouvernementaux, était
d'exiger que la loi sur les pesticides s'applique aux activités
sylvicoles et agricoles. Le gouvernement donna raison à ces organismes
en modifiant l'avant-projet de loi de manière à obliger les
aménagistes forestiers à obtenir un certificat de
compétence et à se conformer au code de gestion pour
l'utilisation des pesticides en forêt.
Le mémoire de la FQF insistait beaucoup sur le
développement d'une nouvelle approche pour la lutte contre les
organismes nuisibles. La FQF favorisait les moyens préventifs ou de
remplacement à l'utilisation des pesticides. J'insiste là-dessus
parce que cela revient régulièrement. Pour nous, c'est
évidemment une question, non pas uniquement de philosophie, mais de
politique de gestion de fonds.
D'autres propositions furent amenées par la FQF à cette
commission parlementaire. Il s'agissait de propositions concernant la
possibilité de prohiber l'utilisation de certains pesticides et leur
vente, la mise en place de cours de formation, de favoriser l'accès
à l'information, la création d'un conseil consultatif sur les
pesticides, l'imposition d'une taxe sur les pesticides afin de financer, entre
autres, la recherche. Les commentaires et les propositions que nous formulons
dans le cadre de cette commission parlementaire s'inspirent grandement de la
philosophie et des orientations prises dans le mémoire de notre
fédération sur l'avant-projet de loi sur les pesticides.
À la partie 3, nous avons émis un certain nombre de
commentaires sur les principes directeurs de cette politique qui nous est
présentée. La FQF trouve important que le gouvernement se base
sur des principes directeurs...
M. Vanier (Daniel): M. le Président, on aimerait que le
ministre nous écoute.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean, si vous voulez
poursuivre, s'il vous plaît.
M. Jean: C'est à cela que servent des collègues,
entre autres. La FQF trouve important...
M. Camden: Je voudrais rappeler à nos invités de
s'adresser au Président, et de ne pas faire les invitations directement
à aucun membre de la commission, mais de s'adresser toujours au
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean, si vous voulez
poursuivre, s'il vous plaît.
M. Jean: La FQF...
M. Charbonnesiu: Juste une seconde. Je veux juste expliquer
à mon collègue qu'il est peut-être urgent... Je n'ai pas
fait de crise tantôt, mais je voudrais qu'on comprenne que c'est un des
mémoires importants. Ce n'est pas parce qu'il en reste seulement deux
à la fin, qu'on doit être moins attentifs. Ce que je disais au
ministre, c'est qu'il était bien chanceux que je ne lui aie pas
payé une traite pendant dix minutes pour dénoncer l'attitude
qu'il a eue tantôt, parce que c'est inacceptable. Je n'ai pas envie de
faire un grand plat avec cela, mais je pense, compte tenu de l'importance de
cette politique, on a été attentifs par rappori: au point de vue
de toute l'industrie. Là, on a un point de vue qui est un peu l'envers
de la médaille. On en a eu quelques-uns. On n'en a pais eu des tonnes,
assez, peut-être, à notre point de vue. Je pense qu'il faut qu'on
fasse en sorte que les gens soient...
M. Côté (Rivière-du-Loup): Si vous me le
permettez.
Le Président (M. Saint-Roch): Très
brièvement, M. le ministre.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, si vous me permettez de me donner l'occasion de m'excuser, ce
n'était pas fait intentionnellement, cela a été
peut-être interprété de même. Je ne savais pas que
cela ferait cela. J'avais un téléphone à faire et je
devais revenir; c'est ce que j'ai fait. Tout simplement, je m'excuse.
M. Charbonneau: Bien, oui, mais je veux . dire, c'était
une question de réflexe, M. le \ ministre. Vous n'aviez pas pensé
que...
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Verchères!
M. Côté (Rivière-du-Loup): Je ne savais
pas.
Je n'ai pas votre expérience.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Verchères, M. le ministre, ces clarifications étant
apportées, je vais maintenant reconnaître M. Jean pour continuer,
s'il vous plaît, la déposition de son mémoire.
M. Jean: Donc, la FQF trouve important que le gouvernement se
base sur des principes directeurs, oui, mais émet des craintes
justifiées quant à l'application des principes. Le premier
principe directeur touche les risques pour la santé humaine et
l'environnement. Ainsi, le gouvernement stipule, et je cite: "L'utilisation de
pesticides en milieu forestier, contre les maladies et les insectes ou pour des
fins d'aménagement forestier, ne doit pas nuire à la santé
humaine ni aux écosystèmes."
La FQF propose les modifications suivantes à ce principe
directeur. Le nouvel énoncé se lirait comme suit: "Étant
donné les risques pour la santé humaine et l'environnement de
l'utilisation des pesticides, leurs usages devraient être
envisagés par le gouvernement et les titulaires de contrat
d'approvisionnement et d'aménagement forestier comme un dernier recours
et seulement dans les cas d'épidémies très graves et
lorsqu'on aurait utilisé tous les moyens de remplacement. Advenant la
nécessité de leurs utilisations, les pesticides ne doivent pas
nuire à la santé humaine et aux écosystèmes."
Cette modification permettrait au gouvernement de respecter la
volonté du ministère de l'Environnement de réduire au
minimum l'usage des pesticides au Québec. L'énoncé
proposé par la FQF demeure plus explicite et donne un encadrement plus
restreint à l'utilisation des pesticides en milieu forestier.
Le deuxième principe directeur énoncé par le
gouvernement touche à la consultation de la population. Il se lit comme
suit: "La population doit être informée et doit pouvoir se faire
entendre sur l'utilisation des pesticides en milieu forestier."
La deuxième solution, donc le deuxième scénario
envisagé par le gouvernement dans le document de support qui consiste
à modifier le règlement sur l'évaluation et l'examen des
impacts sur l'environnement, pour permettre l'utilisation en milieu forestier
de deux pesticides, le B.t. et le glyphosate, est en complète
contradiction avec le deuxième principe directeur. Cette proposition
gouvernementale est pour nous inacceptable. Le règlement sur
l'évaluation et sur l'examen des impacts sur l'environnement, tel que
formulé actuellement, demeure un droit acquis selon la FQF. À
notre avis toujours, le gouvernement veut éviter tout débat
concernant la gestion forestière.
Le gouvernement ne peut établir un programme d'arrosage de
pesticides en milieu forestier sans qu'il y ait un débat de fond sur sa
politique forestière.
Les justifications de l'existence d'un programme d'arrosage de
pesticides sont partie intégrante de sa politique d'aménagement
et de gestion de nos forêts. Il s'avère impossible et
incohérent de séparer ces deux aspects surtout lorsque le
gouvernement affirme sa volonté de réduire au minimum l'usage des
pesticides en milieu forestier.
La FQF propose les modifications suivantes au deuxième principe
directeur. Il se lirait comme suit: "Afin que la population soit
informée et puisse être consultée sur l'utilisation des
pesticides en milieu forestier, tout programme d'arrosage de pesticides doit
suivre les modalités comprises dans le règlement actuel sur
l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. Toute
politique gouvernementale d'information concernant l'utilisation des pesticides
en milieu forestier devrait tenir compte non seulement des aspects
environnementaux et de la santé humaine, mais aussi et prioritairement
des moyens préventifs et/ou de remplacement."
Le troisième principe directeur de cette politique nous donne un
aperçu de la vision gouvernementale concernant l'utilisation des
pesticides en milieu forestier. Alors, le principe est le suivant: "La
forêt publique constitue une ressource collective renouvelable à
protéger et à mettre en valeur; les pesticides homologués
font partie des outils utilisés à cette fin."
La FQF considère l'utilisation des pesticides en milieu forestier
comme un dernier recours après qu'on a épuisé tous les
moyens préventifs et de remplacement. Ainsi, selon la
fédération, la politique d'utilisation des pesticides en milieu
forestier devrait plutôt s'appeler politique de prévention et de
lutte contre les ravageurs et la végétation compétitive en
milieu forestier. Cette politique serait établie en fonction de quatre
axes. Premier axe: programme de recherche scientifique afin d'acquérir
les connaissances de base sur l'écologie et la dynamique des populations
de certains ravageurs, de leurs impacts sur la végétation
forestière, etc. Deuxième axe: prévention.
Troisième axe: moyens de lutte autres que les pesticides.
Quatrième axe: utilisation des pesticides homologués comme un
dernier recours et dans les cas d'épidémies très
graves.
La politique de prévention et de lutte, présentée
par la fédération, devrait donc être intégrée
dans ce troisième principe directeur. La FQF souligne que cette
politique respecte le principe défendu par le ministère de
l'Environnement de toujours réduire au minimum l'usage des
pesticides.
Pour accélérer un peu ces quatrième,
cinquième et sixième principes directeurs, je conclus cette
partie en vous lisant l'énoncé global de la politique
proposée par la FQF. L'énoncé est le suivant: Politique de
prévention et de lutte contre les ravageurs et la
végétation compétitive en milieu forestier, à la
page 18.
Pour répondre aux objectifs d'un développement durable des
différentes ressources du
milieu forestier, le gouvernement devra mettre sur pied une politique de
prévention et de lutte contre les ravageurs et la
végétation compétitive. Cette politique devrait favoriser
un programme de recherche visant l'acquisition de connaissances de base. Pour
ce qui est des interventions, elle devrait favoriser toute mesure de
prévention réduisant la vulnérabilité en premier
lieu des peuplements forestiers face aux ravageurs et l'émergence de la
végétation compétitive. Par la suite, si les mesures de
prévention ne sont pas suffisantes, le gouvernement devrait favoriser
des moyens de rechange pour réprimer les épidémies et
contrôler la végétation compétitive. L'utilisation
des pesticides demeure le dernier recours de cette politique gouvernementale,
après avoir épuisé toutes les autres mesures et seulement
dans les cas d'épidémies très graves. Tout programme
d'arrosage de pesticides en milieu forestier dort suivre les modalités
comprises dans le règlement sur l'évaluation et l'examen d'impact
sur l'environnement. L'utilisation de pesticides homologués doit se
faire sans nuire à la santé humaine et aux
écosystèmes. Donc, c'est évidemment un
résumé très synthétique de toute cette section.
À la quatrième partie, nous vous donnons nos commentaires
sur les deux scénarios qui nous ont été
présentés. Avant d'aborder plus explicitement chacun des deux
scénarios, la FQF tient à faire remarquer au gouvernement que les
solutions envisagées par celui-ci ne correspondent pas aux principes
directeurs de la politique développée dans les sections
précédentes du document de support. Premièrement, la FQF
rejette les solutions envisagées par le gouvernement dans le cadre de
cette commission parlementaire. Deuxièmement, il s'agit pour nous de
deux pièges. La FQF exige donc le statu quo pour le règlement sur
l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement.
Troisièmement, nous proposons donc certaines modifications pour
renforcer certains aspects du règlement que je viens de mentionner.
En ce qui concerne le premier scénario, programme de cinq ans
d'utilisation des pesticides, cette proposition vise à regrouper tous
les programmes d'arrosage de pesticides en milieu forestier couvrant une
période de cinq ans et conforme à la réglementation
actuelle. L'étude d'impact serait étudiée et
analysée lors d'une seule audience publique. La FQF trouve inacceptable
cette solution, car nous considérons qu'elle est pratiquement
irréalisable sur le plan technique. De plus, l'étude et l'analyse
de plusieurs programmes d'arrosage ayant des caractéristiques distinctes
sur plusieurs aspects deviendraient rapidement un véritable
casse-tête pour les participants aux audiences publiques et
contreviendraient à un des principes de base du processus de
consultation, c'est-à-dire une information claire et vulgarisée
permettant une meilleure compréhension et participation des citoyens
à l'examen des études d'impact. La FQF considère cette
tciche comme irréalisable et préfère le statu quo du
processus actuel. D'autre part, afin d'éviter des procédures
répétitives pour des projets semblables avec des produits
identiques, la FQF est d'accord qu'il n'y ait qu'une seule audience publique
concernant le programme de pulvérisation des phytocides en milieu
forestier d'une durée de cinq ans, regroupant l'ensemble des promoteurs
et des intervenants dans ce dossier. Voilà pour les commentaires sur le
premier scénario.
Deuxième scénario: l'utilisation du B.t. et du glyphosate
sans étude d'impact. Afin d'éviter tout débat public
concernant la gestion de nos forêts par le ministère de
l'Énergie et des Ressources et l'industrie forestière, le
gouvernement veut tout simplement soustraire de la procédure d'impact
les deux principaux pesticides qui sont ou seront utilisés clans nos
forêts. La FQF trouve inadmissible et inacceptable ce scénario
présenté par le gouvernement. ^ s'agit, à notre avis, d'un
dangereux précédent. Pour la FQF, il n'est aucunement question de
donner un chèque en blanc à l'industrie forestière et au
ministère de l'Énergie et des; Ressources pour pratiquer
l'arrosage de ces deux pesticides. (13 h 15)
Le règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur
l'environnement et la procédure d'audiences publiques ont permis
à de nombreux groupes et citoyens de se prononcer dans le dossier
controversé des arrosages de pesticides en milieu forestier. Les
audiences publiques du BAPE et la participation de plusieurs groupes
environnementaux ont provoqué une conscientisa-tion de la population
face à l'état de dégradation de nos forêts.
Même si le B.t. et le glyphosate sont homologués au niveau
fédéral, la FQF considère qu'ils doivent quand même
suivre le processus d'évaluation et dexamen des impacts sur
l'environnement, car celui-ci permet de juger de la pertinence et de la
nécessité de tout programme d'arrosage. Alors, il faut voir une
chose bien claire là-dedans pour nous, c'est que, dans un processus
d'étude et d'évaluation des impacts, les promoteurs en question
devraient présenter des plans de prévention et des plans
d'aménagement forestier autres que l'utilisation de pesticides,
d'où l'importance donc de conserver ce processus,
d'évaluation.
En conclusion pour cette section, la FQF exige que le gouvernement
maintienne le règlement actuel sur l'évaluation et l'examen des
impacts sur l'environnement et rejette les deux solutions
envisagées.
Nous avons à la partie 5 d'autres suggestions, donc, quelques
recommandations concernant le processus d'évaluation en question. Je
saute par-dessus, étant convaincu que, s'il y a des
ambiguïtés, il y aura des questions.
En conclusion, il est évident que le gouvernement évite
tout débat de fond concernant sa politique d'aménagement et de
gestion de la
forêt. Pourtant, la FQF considère ce débat
nécessaire si le gouvernement veut vraiment appliquer sa loi sur les
pesticides et réduire au minimum l'utilisation des pesticides dans le
milieu forestier. Non seulement cette commission parlementaire évite ce
sujet, mais elle démontre les intentions fermes du gouvernement de
sabrer dans le règlement d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement. La FQF s'oppose systématiquement à toute mesure
gouvernementale visant à réduire l'importance de ce
règlement. Enfin, est-ce que le gouvernement a déjà
oublié son virage écologique? La FQF doute
énormément que les politiques du gouvernement répondent
aux objectifs d'un développement durable des différentes
ressources de la forêt et qu'elles soient en accord avec les principes de
la stratégie mondiale de conservation, à laquelle d'ailleurs le
gouvernement du Québec a déjà adhéré.
La FQF, forte de ses 252 associations et de ses 200 000 membres,
continuera à être très vigilante pour protéger notre
patrimoine faunique et forestier vis-à-vis des différentes
activités sylvicoles liées à l'exploitation de nos
forêts.
Alors, même si ce n'est pas écrit explicitement dans notre
document, on a voulu quand même être assez concis dans ce
mémoire, malgré qu'il ait une trentaine de pages. Il va de soi
que toute cette discussion de fond pour nous implique que la forêt est
une ressource collective d'abord, évidemment, mais aussi un bien
collectif. Évidemment, dans notre cas, on parle d'habitats fauniques.
Pour nous, en discutant d'une politique d'utilisation des pesticides, c'est
évident que l'on ne retrouve évidemment jamais cet aspect
d'habitat faunique; primo, on retrouve très peu le type d'impact que
pourrait avoir l'utilisation de ces produits sur le reste de la faune. Quand je
dis le reste de la faune, ce ne sont pas les insectes qui sont visés. Il
y a effectivement des études qui existent et d'après nos
connaissances, en tous les cas, d'après notre documentation, il ne
semble pas y avoir terriblement d'études. À toutes fins utiles,
c'est nul sur les autres espèces fauniques qui vivent dans ce grand
habitat qu'est la forêt du Québec. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Jean.
Je vais maintenant reconnaître M. le ministre
délégué aux Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Excusez. Je suis
un peu bouleversé, mais en tout cas. J'ai participé à
quelques reprises au congrès de la protection de la faune et vous
connaissez ma position. Je l'ai dit à votre président et dans mon
comté dernièrement à Rivière-du-Loup. Il reste que,
lorsqu'on parle d'habitats fauniques, c'est sûr que dans la Loi sur les
forêts on a eu des discussions. La Loi sur les forêts n'est pas
née du jour au lendemain. Cela n'a pas été
instantané. Il y a eu des débats, en plus des commissions
parlementaires, qui ont eu lieu, à la suite surtout de
l'épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette qui
a détruit quelque 235 000 000 de mètres cubes, quasiment 300 000
000 de mètres cubes au Québec. Dans ce secteur, on a
essayé d'en récupérer un peu. Le Dr Lortie était
ici ce matin, le doyen de la faculté. Quand on a décelé le
début de l'épidémie, c'était en 1967 et on a pu
intervenir en 1971, alors que c'était rendu au stade
épidémi-que, alors qu'il était trop tard. C'est la
conséquence de tout cela qui est arrivé après. Le Dr
Lortie disait: Si on a un bon système de dépistage, qu'on le fait
correctement et qu'on a les budgets pour le faire - chose qu'on n'a pas
actuellement, on a tendance à l'améliorer - il y aura beaucoup
moins de conséquences en intervenant rapidement avec les moyens qu'on
connaît. Evidemment, il a bu du B. t. comme bien d'autres, lui aussi, du
glyphosate aussi; certains ont bu du glyphosate; ils sont encore en vie. Il
dit: Si on intervient rapidement avec les moyens qu'on connaît puis
même, dans certains cas, avec des produits chimiques, on contrôlera
immédiatement le début, le départ, et - il le disait
également - les musaraignes ou les rongeurs ou les oiseaux pourront
continuer à contrôler naturellement, supposons, ces insectes. Je
pense qu'aujourd'hui on est obligés de faire cela, d'intervenir.
Vous, vous dites dans votre mémoire qu'il faut attendre que
l'épidémie soit très grave. Mais quand
l'épidémie est très grave, à mon avis, il est trop
tard. Il est trop tard puis on connaît les désastres qu'on
connaît aujourd'hui. Hier, les propriétaires des forêts
privées nous disaient qu'ils ont perdu 22 000 000 de mètres cubes
de bois sur leurs lots, à cause de l'épidémie. Mais cela
provient de quelque part; il y a quelqu'un qui a des responsabilités
là-dedans. Mais laisser porter jusqu'à ce point-là, moi,
je ne suis pas capable de recommander cela, M. Jean.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: II faut voir une chose très importante,
là. Il faut nuancer d'abord. Ce que la fédération dit, ce
n'est pas de ne rien faire jusqu'à ce qu'il y ait des
épidémies très graves et, au niveau de
l'épidémie très grave, donc, d'utiliser le dernier recours
que sont les pesticides. Ce n'est pas ce qu'on dit. Le type de planification
forestière que l'on connaît depuis très longtemps, depuis
plusieurs décennies au Québec, fait en sorte qu'on a des plans
d'aménagement forestier. Si je ne me trompe pas, il y a 80 % des coupes
qui sont des coupes à blanc sur de grandes superficies. C'est un type de
gestion forestière. Puis il y a d'autres types de gestion
forestière qui sont, par exemple, les coupes par bandes, par
trouées, par damiers, bon, etc. Cela, c'est un autre type de gestion
forestière. Donc, ce qu'on dit, c'est: Oui, il faut faire quelque chose
dès le début, il faut faire quelque chose, évidemment,
constamment. Mais ce qu'il faut, à
notre avis, faire, c'est modifier notre gestion forestière au
Québec, modifier notre gestion forestière en fonction de
l'ensemble des ressources qui sont là. Cela inclut, évidemment,
toutes sortes de méthodes dirrérentes de remplacement, comme on
le mentionne. Cela inclut, évidemment, des modes différents de
plantation. Cela inclut, finalement, toute une foule de détails
techniques qui font foi d'une politique différente de ce qu'on
connaît actuellement. Et si le gouvernement s'aligne sur ce genre de
politique, déjà, en partant, nous sommes convaincus que, sans
nécessairement enrayer les grands fléaux écologiques qui
puissent se produire - c'est peut-être possible, il faudrait voir dans
l'histoire future - mais, sans les enrayer, peut-être qu'on va
atténuer de beaucoup ce qu'on a connu actuellement.
Ce n'est pas pour rien qu'on a des épidémies très
graves. Quand on a des peuplements à peu près homogènes
partout, c'est évident que cela se répand assez rapidement. Quand
les peuplements sont moins homogènes, cela commence à être
plus difficile de se produire au point de vue écologique Alors, c'est
cela qu'on dit. Donc, c'est modifier cette politique forestière. Et en
passant, évidemment, en modifiant cela, vous allez, dans le domaine de
la faune, favoriser tout un type d'habitat très favorable à la
faune. Automatiquement, la ressource va en profiter. Si on fait cela, on
s'aligne donc sur des résultats qui risquent d'être
différents et si, effectivement, on se retrouve avec une menace
très sérieuse, une épidémie très grave, en
dernier recours, effectivement, on n'est pas pour rester les bras
croisés à attendre là-dessus. Mais c'est en dernier
recours, c'est différent comme politique que de prendre ces produits
comme premier recours parce que c'est plus facile, parce que c'est moins
onéreux, bon, etc., etc. Peut-être que c'est le cas, sauf que
c'est malheureux, mais dans cette forêt-là il n'y a pas que la
ressource ligneuse.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Non, c'est
sûr, c'est certain cela; je suis entièrement d'accord et c'est
pourquoi l'on prévoit l'utilisation polyvalente de la forêt et
c'est pourquoi on a instauré, il y a un an et demi, un guide des
modalités d'intervention en forêt pour essayer de protéger
et pour que tous les utilisateurs en forêt se respectent. Cela a
été fait en collaboration avec le ministre de l'Environnement et
le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour protéger
les cours d'eau, pour protéger les habitats fauniques,
c'est-à-dire les ravages de cerfs et d'orignaux. On fait cela, mais
c'est un début. Si cela ne s'est pas fait dans le passé, je suis
entièrement de votre avis, nous sommes collectivement responsables de
tout cela, puis il faut tenter de corriger, ces erreurs. C'est ce qu'on essaie
de faire. Aujourd'hui, on fait une commission parlementaire sur un des moyens
d'aménagement, un des moyens - ce n'est pas le meil- leur - un des
moyens d'aménagement de la forêt. Vous parlez de coupe
spéciale, de coupe jardinatoire, d'éclaircie
précommerciale, de coupe de protection de
régénération, de coupe par bandes, et j'en suis. Mais les
erreurs sont là aujourd'hui; on fait face à tout cela. Il y a eu
des épidémies dans le passé, même avant que je sois
au monde. Il y avait des grands peuplements de mélèzes, il n'y en
a plus aujourd'hui. Ce n'est pas dans les années 1910 qu'on a
ravagé les forêts, comme on le prétend, avec des coupes
excessives ou autres. La forêt du Nord est essentiellement
composée de résineux et la forêt du Grand Nord, c'est 90 %
d'épinettes noires. Quand on parle de forêt homogène, c'est
une forêt homogène. Il n'y a pas tellement de problèmes
là. Il y a des problèmes de régénération ou
de temps de croissance, de rotation, de possibilités forestières,
à la suite des opérations forestières parce que cela va
être plus long, c'est sûr. Cela me va, tout cela. On est
obligés, aujourd'hui, de corriger ce que j'appelle les erreurs du
passé, on est obligés collectivement de le faire parce qu'on est
responsables de tout cela. Il reste, je pense, qu'il faut respecter les autres
utilisations de la forêt. C'est ce que je tente de faire avec les appuis
que je peux trouver.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Marcouillier.
M. Marcouillier (Claude): Ma question, M. le Président,
s'adress; e au ministre. Est-ce qu'à l'avenir, comme il le mentionnait,
s'il veut favoriser... mais est-ce que le soustraire à
l'évaluation, à l'examen des impacts sur l'environnement,
à la procédure d'études d'impact, est-ce que, M. le
ministre, vous croyez que c'est une façon d'y arriver?
M. Côté (Rivière-du-Loup): Non, je suis pour
les études d'impact. Vous avez une étude d'impact qui a
été faite sur le B. t., sur le féni-trothion et sur la
matacil. Elle est là, elle a été faite. Cette étude
d'impact est passée à travers une audience publique. Cela a
coûté au ministère seulement, 3 000 000 $ et je suis encore
pour qu'on fasse des études d'impact environnemental. C'est bien
sûr, je suis pour cela. Qu'on fasse des études d'impact, mais il
faut qu'on développe des moyens qui ne seront pas au détriment de
la santé, de l'écologie, de l'environnement, etc. Pour commencer,
c'est cela: Qu'on développe des moyens efficaces d'aménagement.
Cela, ce n'est qu'un moyen; c'en est un parmi d'autres, ce n'est pas le
meilleur, cest comme le reboisement. Mais qu'on développe des moyens
sûrs et efficaces d'intervenir pour faire des choses. Et qu'on fasse des
études d'impact, d'accord, mais qu'on ne se mette pas dans la situation
qu'on a vécue avec la tordeuse des bourgeons de l'épinette, qu'on
évite cela. C'est la recommandation du doyen de la faculté.
Quand on parle d'aménagement, généralement dans le
grand public, on parle de reboisement, mais, pour moi, le reboisement
artificiel c'est ce qu'il y a de plus dispendieux et c'est le pire moyen.
Encore là, il faut faire attention, il faut reboiser les bonnes
essences, aux bons endroits, dans le bon temps, correctement et il faut planter
des arbres, faire de la recherche pour avoir des arbres
génétiquement forts pour qu'ils puissent ainsi combattre au
début la végétation concurrente et résister aux
maladies. Là, vous aurez ce qu'il faut, mais ce n'est pas
instantané, tout cela. Je comprends vos interventions, et tout cela. Il
y a eu des erreurs commises dans le passé, d'accord.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vanier.
M. Vanier: M. le ministre, je voudrais répondre à
une partie de votre première question de tantôt. C'est au niveau
du réseau de dépistage. Premièrement, je voudrais vous
souligner... Je m'excuse, M. le Président. M. le ministre?
M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, mais je n'ai
plus de temps. (13 h 30)
M. Vanier: M. le ministre, sur la question du réseau du
dépistage par piège à phéromones, etc., le
réseau qui est actuel, c'est aller de l'avant... C'est sûr que
cela fait partie de nos préoccupations à la
Fédération québécoise de la faune. On est
très d'accord que s'installe un réseau plus perfectionné
pour permettre de dépister à la base. Cela fait partie des moyens
de prévention aussi. Autre chose, s'il y a des foyers d'infestation
vraiment localisés, mais vraiment sur de très faibles
superficies, vous avez quand même, par le règlement sur
l'évaluation et l'examen des impacts, le droit d'intervenir aussi sur
des superficies de moins de 600 hectares.
Actuellement, dans un article du Devoir de cette semaine,
mercredi, on voit qu'il y a même une stratégie de certains
intervenants forestiers, de certaines industries forestières qui
profitent de ce fait pour passer quand même en dessous d'une étude
d'impact. Elles utilisent ce moyen. Autre question importante, vous pariiez du
guide des modalités d'intervention forestière. Il y a le projet
de règlement qui va avec cela. À la Fédération
québécoise de la faune, on a déjà
présenté nos positions là-dessus, soit en commission
parlementaire sur la Loi sur les forêts sur certains points, mais on dit
aussi que le guide ne va pas assez loin dans certains domaines. C'est
très clair de notre part et ce n'est pas juste la
Fédération québécoise de la faune qui vous dit
cela. Au dernier sommet sur la faune, M. Paillé, le sous-ministre,
était là, et il peut en témoigner, l'ensemble des
organismes nationaux reconnus de la faune étaient à la table de
concertation. Il y a eu un consensus complet pour dire que ce guide n'allait
pas assez loin pour la protection des habitats fauniques. Donc, il y a un
travail important à faire la-dessus. À la suite du sommet, il a
été décidé aussi - on verra par le comité de
suivi - qu'il y ait la formation d'un groupe de concertation pour avoir un
début de dialogue entre l'industrie forestière et les organismes
nationaux reconnus de la faune, dont le nôtre. C'est un point
important.
Le Président (M. Saint-Roch): En conclusion, s'il vous
plaît, M. Vanier.
M. Vanier: En conclusion, rapidement, M. le Président, les
3 000 000 $ que coûte une étude d'impact... M. le ministre, je
tiens à vous faire remarquer que la dernière étude
d'impact a coûté peut-être ce montant et peut-être
même un peu plus, mais il y a eu peut-être 1 500 000 $ qui sont
allés dans les poches d'un certain consultant qui s'appelle André
Marsan, une firme associée à M. Lavalin. Dans une des conclusions
du rapport du bureau d'audiences, l'auteur lui-même du modèle
d'étude d'impact, M. Holling qui est un grand scientifique de Colombie
britannique disait que M. Marsan avait mal utilisé, à certains
moments, le modèle et qu'on ne pouvait pas l'utiliser ainsi. Donc, il y
a eu une erreur là-dessus. Je pense qu'il y a moyen de faire des
études d'impact peut-être moins volumineuses, mais qui auraient
autant de données, mais de manière à ce qu'elles
coûtent moins cher. Je pense que...
Le Président (M. Saint-Roch): Si vous voulez conclure, M.
Vanier.
M. Vanier: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci. Je ne veux pas vous
enlever le droit de parole, mais je voudrais aussi qu'il reste quand même
un peu de temps parce que le temps de parole que vous utilisez est
compté à la formation et M. le représentant de
l'Environnement a beaucoup de questions aussi pour vous.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je voudrais
revenir sur un point que le ministre a abordé. Je pense qu'on commence
à se rendre compte, avec les trois jours, que le point clé - je
voudrais savoir si vous êtes d'accord avec cela parce qu'on en a un peu
parlé tantôt - que le point crucial dans toute la politique... Je
pense que les suggestions que vous avez faites à l'égard de la
réécriture des principes directeurs et de leur reformulation sont
intéressantes parce qu'elles sont plus pertinentes et plus à
propos. Mais, à cet égard, j'ai l'impression que le coeur de
cette politique qu'on appellerait moins politique d'utilisation des pesticides,
mais politique de lutte contre les ravageurs, c'est vraiment un système
de détection dans la mesure où on a deux problèmes. On a
le problème de la
végétation concurrente, qui est un problème
relié à l'exploitation qu'on veut avoir ou des essences qu'on
veut avoir. C'est une chose. Mais le véritable problème qu'on
rencontre est celui qui affecte la forêt. Au fond, Vautre affecte
l'industrie parce que les essences qui poussent ne sont pas celles qu'elle
veut. Mais ce qui détruit la forêt, la faune et les
écosystèmes, ce sont les ravages faits par les
épidémies. Si cette politique était fondée sur un
système sophistiqué de détection qui n'existe pas
actuellement, de l'aveu du ministre - je pense qu'on doit reconnaître sa
franchise - un système basé sur des ressources humaines et
financières adéquates pour être vraiment en mesure, comme
on l'a fait dans la problématique des incendies de forêt,
d'identifier... Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est cela, le coeur et que
cela devrait être le fondement d'une politique de lutte? D'autant plus
que, si on arrive à avoir un bon système de détection,
comme vous venez de le signaler, on n'aura peut-être même pas
besoin de modifier le règlement sur les études d'impact,
étant donné qu'on peut déjà intervenir sans
étude d'impact pour des superficies de moins de 600 hectares. Donc, si
on peut avoir un système qui nous permet de connaître les foyers
d'infestation rapidement, avant que cela atteigne 600 hectares - ce n'est pas
rien, non plus, 600 hectares, cela fait une grande cour d'école,
n'est-ce pas? - donc, il y a moyen de faire des interventions dans des
superficies plus petites, qui nous permettraient justement d'éviter
d'utiliser quelque type de produit que ce soit, que ce soient des produits
chimiques ou même biologiques. Si on peut éviter d'en utiliser de
toute façon sur des grandes superficies, je pense que c'est
l'idéal.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean?
M. Jean: Alors, que l'on inclue dans une politique un
système sophistiqué de dépistage, la FQF est
entièrement d'accord avec cela. Que ce soit le coeur de la politique ou
du type de gestion que l'on veuille faire, non. Et pourquoi? J'en ai
parlé tantôt. Si c'est toujours la politique de restauration, la
politique de réparer les pots cassés, c'est-à-dire que si
on a une politique sophistiquée, c'est-à-dire un système
sophistiqué de dépistage, on est d'accord, je le disais, parce
qu'effectivement on est pris avec un problème qu'on n'enrayera pas du
jour au lendemain. Mais si l'on ne base une politique que là-dessus,
cela veut dire que l'on accepte, peu importe le type d'aménagement
forestier que l'on fera, entre autres qui peut favoriser la
répétition de ce genre d'épidémie, on accepte donc
d'avoir périodiquement ces épidémies, graves, très
graves, moins graves, etc.. et plutôt que de réparer
l'épidémie, bien, on aura ajouté un morceau plus
sophistiqué à l'arsenal, c'est-à-dire qu'on le
dépistera avant. Cela évitera peut-être de se rendre
jusque-là, mais c'est un élément du...
M. Charbonneau: D'accord, mais..
M. Jean: ...débat. Donc, c'est pour cela que pour nous, la
FQF, ce n'est pas le coeur de la politique. Le coeur de la politique, c'est une
politique de prévention. Et la politique de prévention, cela veut
dire comment on aménage nos forêts. Si on continue à faire
des coupes qui favorisent une régénération massive de
sapins, on aura toujours des épidémies en question. Si on fait
des coupes autrement, qui favorisent d'autres essences à planter selon
le sol, le climat, etc., oui, c'est de l'ouvrage, mais c'est cela, l'ouvrage et
la responsabilité d'un ministère voué à cette
vocation et donc d'un gouvernement qui doit gérer, non seulement cette
matière, mais cet élément comme habitat faunique et donc
toutes sortes d'autres ressources.
M. Charbonneau: D'accord. Remarquez que formulé ou
recentré comme vous venez de le faire, je suis d'accord avec votre point
de vue. C'est-à-dire qu'il faut distinguer entre la prévention et
un système rapide de détection. Quand on est obligé de
détecter, c'est parce qu'il y a déjà une maladie, cela
veut dire que la prévention n'a pas été efficace ou qu'il
n'y en a pas eu.
Une voix: Exactement.
M. Charbonneau: C'est comme dans la maladie, c'est comme dans la
criminalité. La prévention c'est qu'il n'y en a pas de
criminalité ou il y en a moins. Quand les problèmes surviennent,
quand des maladies surviennent ou quand des actes criminels! surviennent, c'est
parce qu'on n'a pas fait assez de prévention ou qu'on n'a pas fait une
prévention suffisamment adéquate. Donc, on se retrouve avec des
problèmes. Néanmoins, un bon système, c'est à la
fois une politique basée sur la prévention, mais aussi, parce que
la prévention n'est |3as parfaite, il faut avoir un système de
détection. Ce qui nous préoccupe aussi, pour ce qui est de cette
commission, c'est l'usage des pesticides. Et l'objectif, disons officiel, de
tout le monde c'est qu'on veut réduire au maximum l'utilisation de ces
produits. Bon, une fois qu'on sait qu'on ne peut pas avoir un système de
prévention parfait, il faut néanmoins avoir le système de
détection le plus parfait possible, le plus sophistiqué possible,
le plus efficace possible, pour qu'on puisse au moins éviter, quand on a
des maladies ou des infestations, d'attendre qu'elles se propagent trop. Je
pense qu'on se comprend à cet égard.
Vous avez critiqué un peu le premier scénario, en disant
qu'il y a un problème de faisabilité. On a juste à
regarder la pile que le ministre nous a indiquée en arrière de
lui pour comprendre que cela, c'est une étude de faisabilité sur
un produit, une étude d'impact sur un produit, pour cinq ans et pour une
affaire. Alors, s'il faut avoir une super étude d'impact sur
l'ensemble des maladies et des problématiques dont on a
parlé, les végétations concurrentes et tout ce que cela
veut dire, l'ensemble des maladies qui existent et l'ensemble des produits qui
existent, cela va prendre une bibliothèque. Dans ce sens, les
industriels ont raison de craindre que le processus soit lourd et que
finalement il n'y ait moyen d'intervenir d'aucune façon avant qu'on
puisse avoir fini tout ce processus. Mais vous suggérez deux choses au
fond, si je comprends bien. Vous dites, premièrement il faudrait
distinguer des audiences ou un processus d'audiences et l'étude d'impact
à l'égard des phytocides; donc, pour la lutte contre la
végétation concurrente et ce qui doit être fait à
l'égard des insectes et des maladies. Vous dites: II pourrait y avoir
une seule étude parce qu'il y a moyen de planifier pour les phytocides,
mais à l'égard de la problématique des maladies, si je
vous comprends bien, vous suggérez qu'on en ait plus d'une, enfin, qu'on
conserve le système actuel. Est-ce que vous seriez d'accord pour
modifier le système actuel pour faire en sorte qu'on puisse fonctionner
sur une base régionale ou par écosystème? Il y a des
organismes qui sont venus nous parler des écorégions hier. Si on
pouvait avoir des études d'impact sur la problématique des
insectes ou des maladies, non pas une super étude - à l'autre
extrême, c'est 350, si on calcule le nombre de contrats
d'aménagement qui existe - mais entre les deux, si on s'alignait sur des
écorégions qui existent et qu'on pouvait aussi produire des
études en fonction de ces écorégions sur une base de cinq
ans avec une programmation, est-ce que vous trouveriez qu'il y aurait quelque
chose là qui serait un compromis ou une amélioration
satisfaisante?
Une voix: Les deux types d'études?
M. Charbonneau: Ah oui! les deux types d'études, c'est
évident.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vanier.
M. Vanier: Oui, rapidement. Cela dépend de
l'épidémie d'insectes. Comme on l'a dit, chaque insecte doit
être étudié parce qu'il a des caractéristiques
différentes, comme M. Lortie nous le disait tantôt, il a des
comportements différents. Ils n'attaquent pas, tous, les mêmes
espèces et on a vu, par la grosseur de l'étude d'impact qu'on a
eu à travailler à un moment donné sur la tordeuse des
bourgeons de l'épinette, que cela deviendrait une bibliothèque
comme vous l'avez dit. Le petit problème, c'est que cela dépend
de la grosseur de l'épidémie. Comme la tordeuse des bourgeons de
l'épinette touche plusieurs régions à la fois, cela fait
en sorte que c'est peut-être mieux qu'il y ait une étude
d'impact... Mais si l'épidémie était très
localisée pour cet insecte, c'est-à-dire si elle était
dans une région spécifique, dans un type
d'écosystème particulier, à ce moment-là, il y
aurait possibilité que cela se fasse. Mais il faudrait quand même,
et cela est un point précis, que les gens consultés ne soient
seulement ceux de la région, mais des gens aussi sur le plan national,
entre autres la Faculté de foresterie et de géodésie et
notre fédération parce que nous, les chasseurs et pêcheurs,
on va pêcher et chasser un peu partout. On vient de plusieurs
régions. On va chasser dans une autre région, nous autres. Moi,
je viens de la région de Montréal. Je vais pêcher dans la
région de Québec. Donc, on est concernés un peu partout.
Donc, ce serait important que cela garde le caractère national en ce qui
concerne la consultation.
M. Charbonneau: D'accord. La seule chose qu'il faut qu'on
comprenne, c'est que l'idée de ce processus par écorégion
ou par région écologique et sur une programmation, c'est
d'éviter aussi d'avoir à subir la contrainte du règlement
actuel qui ferait que si on avait un problème étendu à
plus de 600 hectares, parce que au fond, c'est cela... Si on le détecte
rapidement, à moins de 600, on peut déjà utiliser sans
étude d'impact et avec un bon système de détection... Mais
si cela dépasse ça, l'objectif, au fond, d'avoir une
programmation de cinq ans, c'est de ne pas être pris non plus à
faire une étude d'impact et à laisser la maladie se propager.
C'est d'avoir déjà en main un arsenal qu'on peut utiliser parce
qu'on l'aura déjà soumis à une étude d'impact et on
pourra déjà à ce moment-là...
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vanier.
M. Vanier: Moi, j'irais plus loin dans votre idée,
beaucoup plus loin parce que nous, on parle de prévention. Ce serait
peut-être dans les régions, peut-être par région
administrative ou par écorégion, on verra la procédure.
C'est une suggestion que je fais comme cela. Que ce soit une politique
d'aménagement et de gestion des forêts qui soit soumise aux cinq
ans dans une écorégion ou dans une région administrative
pour que les gens puissent... Nous autres, à ce moment-là, cela
nous permettrait d'agir non seulement en ce qui concerne les politiques de
coupe, mais aussi pour la protection des habitats fauniques en même
temps. En même temps, on verrait - cela serait une des sections de
l'étude - tout le côté qui touche la prévention des
épidémies, les mécanismes de lutte ou les méthodes
de lutte. Ce pourrait être intégré dans un autre genre de
processus. Ce pourrait être les MRC qui s'en occupent, on ne le sait pas.
Là, vous nous lancez une idée qu'on n'a pas eue sur papier. C'est
un peu difficile d'y répondre. Mais cela demeure une idée qu'on
pourrait étudier plus en profondeur prochainement si le gouvernement y
donne suite.
M. Charbonneau: Bien, écoutez, j'espère seulement
que les travaux de la commission
parlementaire vont être évalués au mérite par
les deux ministères en question. Est-ce que vous avez une opinion
particulière sur le processus d'homologation pour plusieurs et le nec
plus ultra, la garantie suprême qui permet d'avoir le chèque en
blanc, l'utilisation d'à peu près tout? (13 h 45)
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: L'intervenant qui nous a précédés a
bien répondu, en tout cas à mon avis, là-dessus. Ce n'est
pas parce que c'est le nec plus ultra que c'est sans défaut, que c'est
sans danger. Alors, et c'est une raison, entre autres, qui fait... J'entendais
tantôt quelqu'un dire: Oui, mais le B. t. a été
étudié, on sait qu'il n'y a pas de danger, bon, etc., etc. Il y a
un principe de base là-dedans aussi. C'est sûr que dans ce cas
c'est biologique; donc, pour les gens c'est souvent moins frémissant.
Mais ce n'est pas parce que c'est biologique que cela devrait
nécessairement l'être, je dis bien nécessairement
l'être. Actuellement, on pense peut-être à jouer sur la
génétique de ces bacilles, et jusqu'où on va aller? Donc,
notre idée, finalement au fond, c'est de dire, et j'en reviens aux
produits homologués: Oui, on comprend bien qu'il y a un processus qui
protège et qui nous donne certaines garanties, mais ce n'est pas tout.
Donc, à ce moment-là, c'est important pour nous que la population
soit consultée régulièrement.
Évidemment, on est conscients, et on n'est pas fous non plus, on
est conscients qu'effectivement des études de 3 000 000 $ tous les deux
mois, bon, etc., etc.. il faut à un certain niveau opérer; donc,
il y a une espèce d'équilibre qu'il faut atteindre quelque part.
Dans l'exemple des phytocides, c'est un peu ce que l'on dit. Mais il y a un
autre niveau, où on ne peut plus descendre en bas d'un seuil minimum
sans qu'il y ait un danger sérieux. Et c'est pour cela que même si
c'est homologué, ce devrait être resoumis à des
études d'impact. Dix ans après, les conditions de terrain ont
changé. Qui sait, en ce qui concerne la ressource faunique comme telle,
ce qu! a pu changer aussi. Donc, c'est important ces études d'impact. Et
il y a tout l'aspect d'Information populaire, de conscientisation des gens, de
gens conscientisés qui, après dix ans, quinze ans, ou
après une période de temps, voient peut-être les choses
autrement selon ce qui s'est passé dans les écosystèmes
pendant cette période de temps. Donc, cela nous apparaît
très important, cet aspect d'audiences publiques, et de suivre la
procédure qui est déjà proposée.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vanier?
M. Vanier: Un petit ajout rapide. Il faut dire que le Bureau
d'audiences publiques sur l'environnement, si je ne me trompe pas, existe
depuis huit ans. Ses procédures sont très bien connues. Les
règles de procédure sont très démocratiques, la
manière d'agir du BAPE, la période d'information, la
période de dépôt des mémoires, c'est connu, c'est
intégré dans la pratique des groupes environnementaux et des
organismes reconnus nationaux de la faune, et aussi auprès de certains
promoteurs à qui cela ne semble pas poser de problème de passer
devant ces audiences-là. C'est sûr qu'il y a un coût
associé à cela, mais cela demeure un acquis important, qu'on a
obtenu en 1978, et un acquis même de prévention, parce que, au
départ, on disait que cela permettrait de faire en sorte que certains
projets ne puissent pas détériorer l'environnement, ou qu'on
puisse y apporter des mesures, des médications. Il y a eu des
idées quand même intéressantes lors de ces audiences
publiques, qui ont été amenées et
développées, soit par des groupes de citoyens ou par des experts,
et qui ont fait changer toutes les questions environnementales, qui nous ont
fait évoluer. Et c'est drôlement important.
C'est important aussi dans le cadre d'une stratégie mondiale de
conservation et d'un développement durable des ressources à
laquelle le ministre de l'Environnement, M. Clifford Lincoln, s'est
associé fortement. C'est important aussi que cela entre dans ce cadre.
Cela va jouer un rôle de plus en plus important dans le cadre d'un
développement durable des ressources. Donc, c'est important de maintenir
ce processus.
M. Charbonneau: II y a une remarque additionnelle que vous avez
faite à la fin, sur laquelle vous êtes passé rapidement
parce que vous disiez que si on avait des questions on y reviendrait. Je pense
qu'il y en a une d'importance, qui est dans la logique du mécanisme des
audiences publiques, c'est le financement des organismes. Si on veut que les
citoyens participent efficacement, et que justement on évite que les
audiences publiques ne dégénèrent en affrontements
inutiles, en espèces de bordels passionnels, excusez l'expression, mais
c'est un peu cela finalement, une espèce de cacophonie ou les gens se
tirent des accusations de part et d'autre, II faut que finalement les groupes,
et peut-être en particulier les groupes nationaux aient les moyens et les
ressources pour faire un travail sérieux. Autrement dit, les groupes
communautaires ou les organismes de défense d'intérêts
comme le vôtre doivent être en capacité...
Est-ce que cela veut dire à votre point de vue que la politique
qui existe actuellement, concernant le financement des organismes sans but
lucratif dans le secteur de l'environnement, au sens large, pas; uniquement par
le ministère de l'Environnement, mais par le ministère de
l'Énergie et des Ressources, n'est pas adéquate?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: Je pense que le point important de votre intervention
à retenir, sans parler de
chiffres, c'est effectivement que tous nos groupes, il y en a
suffisamment au Québec, soient très bien supportés. Alors
je pense que cela c'est un principe de base que le gouvernement doit
entériner. Si on parlait de chiffres, on pourrait en parler longtemps,
on pourrait parler de toutes sortes de pourcentages et beaucoup de gens
s'obstineraient. Mais le principe de base est là. Entre autres, à
la commission parlementaire sur la Loi sur les pesticides, on avait
suggéré une idée de taxe en fonction des pesticides et
même de niveau de taxation selon la toxicité des produits. C'est
un exemple. Dans le milieu de la faune, vous savez sans doute tous
qu'actuellement il y a des sous qui sont investis de toutes sortes de
façons. On est rendus avec des fondations de tout bord et tout
côté. Donc, il y a des choses qui se font aussi et il va falloir
continuer à trouver des idées ingénieuses pour impliquer
non seulement les organismes, mais les citoyens. Dans le domaine de la
forêt, on dirait que ce genre de chose est plus difficile,
peut-être parce que l'industrie, d'un point de vue financier, est
très forte, beaucoup plus forte. En tout cas, l'élément
est là. Pour en revenir aux notions d'audiences publiques, il y a une
chose qui me faisait un peu rire tantôt quand j'ai entendu... et c'est
vrai. Remarquez que cela donne toujours lieu à une certaine
confrontation, entre guillemets, d'idées ou de braquage d'idées.
Mais écoutez, c'est cela la démocratie. À ce compte, je me
demande ce que le Parlement fait.
M. Charbonneau: Le Parlement, je vais vous dire, de temps en
temps, c'est un beau bordel aussi. Mais il y a une idée qui me vient
à l'esprit. Je regarde ce qui se fait dans le secteur des affaires
culturelles où, depuis quelques années, le milieu culturel s'est
orchestré, ou en fait a orchestré une revendication qui
était le 1 %. Finalement, on a une espèce de barème
où on peut évaluer l'intérêt et le sérieux de
quelque gouvernement que ce soit à l'égard de l'aide au monde
culturel. Est-ce qu'il ne serait pas temps, pour les organismes sans but
lucratif dans le secteur de l'environnement et peut-être dans l'ensemble
des secteurs, qu'on établisse un niveau par rapport à l'ensemble
du budget gouvernemental en disant: 1 %, 0,5 % ou 2 %? Cela peut être
plus, mais l'idée est d'être capable d'identifier un niveau
acceptable pour faire en sorte que des organismes sans but lucratif dans notre
société puissent être en mesure de donner des services. En
fait, vous donnez des services qui nous coûtent bien moins cher, au fond,
que s'il fallait avoir des services publics pour faire la même chose.
Est-ce que vous seriez prêts à acheter une suggestion ou une
idée comme cela? Le problème, c'est que chaque fois qu'on
parle... je le sais parce qu'avant d'être critique à
l'environnement, j'étais critique dans un autre domaine qui est plus
dans le secteur social et quand j'étais de l'autre côté
j'ai fait des revendications dans le dossier jeunesse. On avait autant de
misère, quand on était au gouvernement, à se faire
comprendre quand on parlait d'aide et d'appui aux organismes
bénévoles. Le problème, c'est qu'il n'y a jamais une
référence. De la même façon tantôt, on a fait
dire aux gens de la faculté qu'il serait possible d'avoir rapidement une
étude qui pourrait dire au gouvernement: Écoutez, un vrai
système de détection veut dire cela et il coûte cela. Tant
qu'on n'a pas cela comme réponse, on n'a jamais de critère de
référence. On en parle, on en parle et finalement on n'a jamais
d'efficacité en ce qui concerne la revendication. Est-ce qu'il ne serait
pas temps que des organismes sans but lucratif s'associent ou se concertent
pour dire: Voici, pour fonctionner au Québec, maintenant, dans le
secteur social, dans le secteur environnemental, dans les secteurs où,
finalement, les organismes communautaires oeuvrent, cela nous prend cela du
"pot" commun ou du Trésor public? La portion qu'on devrait avoir, c'est
cela.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: C'est une idée très intéressante.
Je la retiens. Mais on vous coûte tellement peu qu'on est
bénévoles et même qu'on dépense pour faire ce qu'on
fait là. On prend des journées ouvrables, entre autres, pour
venir ici. Mais il faut le reconnaître et je pense que c'est clair dans
la tête de tous et chacun, l'importance des organismes sans but lucratif
n'est plus à démontrer. Les lobbys, et je le dis très
positivement, qu'ont les organismes, les organismes nationaux en particulier,
sont très importants. Il y a eu tellement de suggestions, de dossiers
travaillés par nos organismes, qui ont vraiment fait avancer les
dossiers et qui ont fait avancer plusieurs ministres, de quelque gouvernement
que ce soit. Il n'y a rien à ajouter là-dessus.
M. Charbonneau: D'accord.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Verchères. M. le député de
Chauveau.
M. Poulin: Merci, M. le Président. Cela me fait plaisir de
voir que la Fédération québécoise de la faune
participe à cette consultation et qu'elle a déposé un
mémoire. On a certaines affinités. Tantôt, je jasais avec
M. Yves Jean. On voit l'importance que la Fédération
québécoise de la faune dépose un mémoire, quand on
regarde l'impact que cela peut avoir autant avec ses 200 000 membres que ses
250 organisations. Ses membres ne sont pas juste des pêcheurs ni juste
des chasseurs, parce qu'on en retrouve aussi comme travailleurs dans le milieu
forestier, comme utilisateurs de la forêt, par exemple, en
randonnées de ski. Ces gens-là comprennent et sont un peu
partout. Ce sont 200 000 membres qui peuvent donner une certaine opinion. Je
pense que la fédération est assez ouverte vis-à-
vis de ses membres quand c'est le temps de faire des colloques. J'ai
participé à certains colloques, qui étaient un moyen
d'expression intéressant. Je peux vous dire qu'en tant qu'utilisateur de
la faune je suis fier de voir que vous avez déposé un
rapport.
Cela dit, il y a un nombre de questions que vous avez posées au
ministre dans votre mémoire. Je vais lui laisser le privilège de
faire ses démarches pour vous les transmettre.
Ma première question va dans le même sens que celle du
député de Verchères. On voit l'ensemble du mémoire
qui démontre que vous désirez étendre la portée de
la politique au-delà même de l'utilisation des pesticides en
forêt. Vous mentionnez, à la page 20, que la politique
présente les modalités de consultation plutôt que le
contenu de ce que vous attendez d'une stratégie d'intervention pour la
répression des ravageurs et de la végétation
compétitive en milieu forestier. Pouvez-vous expliquer davantage les
motifs qui vous amènent à vouloir étendre l'objet de la
politique? En d'autres mots, en quoi, d'après vous, le présent
projet de politique est incomplet et quels seraient les effets, au niveau
environnemental, d'étendre l'objet de la présente politique
à l'ensemble de la stratégie d'intervention en forêt?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vanier.
M. Vanier: Cela nous a surpris un peu quand on a reçu le
document de support à une politique d'utilisation des pesticides. On
s'attendait à ce qu'on parle de principes directeurs, bien sûr,
mais on s'attendait aussi à ce qu'on nous présente, d'une
manière plus détaillée que dans le document de support,
tout un programme d'intervention incluant ce qu'est la politique
d'aménagement, ce que sera la politique des coupes forestières,
comment on va rendre une forêt moins vulnérable à telle
épidémie d'insectes, etc. Ce que le gouvernement nous
présente actuellement comme solution, c'est la manière
d'être consultés. Voici la façon dont on voit cela. Vous me
le direz si je vois cela de travers. Nous, on est au centre, mais aux deux
extrémités on n'est plus là. On sait qu'il est en train de
se faire une élaboration d'un manuel d'aménagement forestier et
c'est une consultation privée avec l'industrie forestière et
certains experts au ministère des Forêts. Ils sont en train
d'élaborer un manuel qui va être rendu public, je ne sais pas
quand, peut-être la prochaine année. Là-dessus, les groupes
et les organismes reconnus de la faune, on n'a aucun mot à dire. On ne
nous laisse pas la chance de dire notre mot là-dessus et nous autres, on
trouverait important qu'on ait notre mot à dire parce qu'on pourrait
intervenir concernant la prévention des épidémies
d'insectes, mais aussi pour favoriser la protection des habitats fauniques. On
aimerait avoir notre mot à dire là-dessus. On est en amont.
Là, on n'a pas le droit d'être consultés. Au centre, on
nous consulte à cette commission parlementaire et, après, en
aval, vous avez le code de gestion dont on nous disait clairement, dans le
document de support, que ce serait avec les utilisateurs de pesticides qu'il y
aurait une consultation. Le code de gestion, c'est vraiment, comme on l'a
compris, ce qui sera le programme détaillé d'intervention, les
recommandations et les suggestions qui vont être faites aux utilisateurs
de pesticides. Nous autres, on trouvait aussi important d'agir là-dessus
pour faire en sorte qu'il y ait toute une stratégie de
prévention. J'ai su dernièrement que ce fameux manuel, le code de
gestion, on est en train de l'écrire. On n'a pas fini de le
rédiger. Cela va peut-être prendre un an ou deux ans. On est
prêts à attendre jusque-là. Mais on aimerait être
consultés et la fédération aimerait être
consultée sur ce code de gestion pour qu'on puisse intervenir pour
éviter certains impacts désastreux sur la faune.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Chauveau.
M. Poulin: Vous parlez du code de gestion. Le code de gestion, ce
sera un règlement. Donc, il va être déposé et vous
pourrez le consulter pendant 45 jours, ainsi que tout le processus...
M. Vanier: D'accord.
M. Poulin: Je n'ai pas besoin de vous faire de dessin. J'ai une
deuxième question. À la page 5 de votre mémoire, vous
mentionnez que le document de support passe sous silence l'état de
dégradation des autres ressources du milieu forestier. Vous ne semblez
pas d'accord avec l'approche plus industrielle de la gestion forestière
et de la politique d'utilisation des pesticides en forêt. Quels sont les
aspects de l'utilisation de la forêt qui devraient, d'après vous,
être considérés?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: C'est une intervention sur l'autre point. Alors, je vais
laisser la parole à Daniel.
M. Vanier: Actuellement, tout le document de support était
vraiment très fortement orienté vers la production industrielle.
On nous parlait des pénuries de bois, mais on n'a pas mentionné
les problèmes que la forêt vit en tant que telle, la question de
la détérioration des cours d'eau à la suite des coupes
forestières abusives, la destruction de ravages qu'il y a eu.
L'année dernière, dans la réserve des Laurentides, pour
vous donner un exemple, il y a eu la destruction d'une frayère
importante d'ombles de fontaine par une coupe forestière abusive. On ne
nommera pas les coupables qui ont fait cela. Mais on le sait très bien
à la fédération; on a rapporté cela dans notre
revue Faune Québec. Donc, il se passe encore des problèmes
à ce sujet. Sur ce
point, toute la philosophie que sous-tend le document quand on le lit
comme il faut, c'est seulement en fonction de la matière ligneuse. Une
forêt ce n'est pas seulement des arbres, des mètres cubes, c'est
un écosystème avec toute la complexité qu'il y a.
On a des problèmes avec le discours gouvernemental qui dit que la
forêt est un jardin. Une forêt c'est un écosystème.
Ce n'est pas seulement un jardin, cela va plus loin que cela. C'est plus
difficile d'intervenir là-dessus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Jean.
M. Jean: Je vais juste souligner un commentaire très court
qui est plus philosophique. Dans ce que vient de dire Daniel, le jardin, entre
autres, n'est pas un écosystème naturel habituellement, c'est de
l'horticulture.
Ce que je voulais mentionner c'est simplement ceci. C'est toujours la
même chose. Il y a la Gazette officielle. Dans le domaine des
forêts, les autres utilisateurs sont historiquement et encore
actuellement, je ne dirais pas écartés du revers de la main, mais
presque systématiquement en dehors du débat. Qu'est-ce qui se
produit? On arrive en bout de piste pour discuter des documents, des politiques
en question. Qu'est-ce qui se passe? On pourrait même aller plus loin et
dire: On comprend les industriels de vouloir faire de l'industrie et de
l'argent. On comprend les forestiers de ne penser qu'aux matières
ligneuses. Ils ont été formés pour cela, c'est leur
domaine en question, etc. Ce qu'on comprend moins et ce qu'on n'accepte pas mal
moins, c'est qu'à ce moment-là il y a un monopole de gens qui
pensent d'une façon. Donc, c'est toujours une réaction
après coup, a posteriori qu'on doit faire comme autres utilisateurs.
S'il y avait un processus d'intégration dès le départ -
c'est cela que Daniel souligne - et de discussions entre les différents
utilisateurs... Le plan de gestion, donc, est fait en fonction de richesses
collectives et non plus en fonction d'un type de richesse.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Jean.
Dernière question, M. le député de Chau-veau.
M. Poulin: Non, pour ce qui est de nos questions, c'est
terminé.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Chauveau. J'aurais une question pour les membres de la
Fédération québécoise de la faune. Hier, des
intervenants sont venus clairement nous dire que ce qui faisait peur lorsqu'on
avait les audiences publiques, c'était cet esprit de confrontation qui
existait entre les pour et les contre. Il y a eu des organismes qui nous ont
suggéré d'introduire une comité "aviseur" qui
représenterait tous les utilisateurs, à partir du grand public.
Cela pourrait être des biologistes, toute la gamme des intervenants
possibles qui se chargeraient de donner de l'information avant la tenue
d'audiences publiques dans le but de minimiser cet esprit de confrontation.
J'aimerais entendre vos réactions sur cette proposition qu'on nous a
faite hier.
M. Jean: Je vais vous dire ceci: La notion d'un comité
"aviseur", de table de concertation, c'est quelque chose d'intéressant
quand c'est très bien utilisé. Quand c'est pour de la frime,
c'est quelque chose qui est pas mal moins intéressant. Si des tables de
concertation ou des comités "aviseurs" sont bien utilisés et que
ce soit sous forme de consultation pour un ministre ou pour un ensemble
d'individus d'un ministère ou encore pour de l'information à
l'ensemble des citoyens, il n'y a pas de problème. C'est excellent. Si
ce sont des comités fantômes ou des tables fantômes
composés de bénévoles qui travaillent comme des
nègres, strictement pour rien, je peux vous dire que c'est une
façon de procéder où on va faire fausse route. On
n'avancera en rien l'efficacité de la procédure d'audiences
publiques.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Jean.
Je tiens à remercier la Fédération
québécoise de la faune pour son apport aux travaux de cette
commission. M. le député de Chauveau.
M. Poulin: M. le Président. C'est juste pour prendre cinq
minutes entre les deux pour faire ce qu'on a à faire et on
reviendra.
Le Président (M. Saint-Roch): Je n'ai appelé
personne.
M. Poulin: C'est parce que tantôt...
Le Président (M. Saint-Roch): La commission suspend ses
travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 14 h 5)
(Reprise à 14 h 18)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je demanderais maintenant aux représentants de l'Institut
forestier du Canada de bien vouloir prendre place. Permettez-moi dans un
premier temps de vous souhaiter la bienvenue aux travaux de cette
commission.
Je demanderais maintenant au porte-parole de bien vouloir s'identifier,
ainsi que les gens qui l'accompagnent.
Institut forestier du Canada
M. Godbout (Claude): Merci, M. le Président. Mon nom est
Claude Godbout. Je suis le premier vice-président de l'Institut
forestier du
Canada. Malheureusement, notre président ne peut pas être
ici aujourd'hui. Il est à l'extérieur du pays; donc, je le
remplace. Je suis accompagné de trois autres membres de l'Institut
forestier du Canada. À ma gauche immédiate, M. Yves Ouellette,
vice-président de la section Orléans, c'est-à-dire de la
section de la région de Québec; à ma droite, Mme Denise
Gérin, trésorière et secrétaire de la section
Orléans; à l'extrémité gauche, M. Léo-Paul
Dion, un des exprésidents de la section Orléans.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
président. Vous avez maintenant 20 minutes pour déposer votre
mémoire.
M. Godbout: D'accord. À ce moment-là, je vais
demander à M. Ouellette de lire le mémoire et, s'il y a des
questions, on pourra les accepter après.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Ouellette.
M. Ouellette (Yves): M. le Président, M. le ministre, MM.
les membres de la commission, alors que dans l'ensemble du Canada, et
particulièrement au Québec, on accentue de façon
significative depuis quelques années les programmes d'aménagement
forestier, la question de la protection des forêts contre les insectes et
les maladies ainsi que contre la végétation compétitive a
pris une nouvelle importance. En effet, en même temps que les
gouvernements et l'industrie dépensent de fortes sommes dans le but
d'accentuer l'aménagement forestier par des traitements sylvicoles dont
le reboisement, afin d'augmenter la production des forêts canadiennes, il
est apparu important à l'ensemble de la communauté
forestière de se préoccuper de minimiser les pertes de production
attribuables à des phénomènes tels que les insectes, les
maladies, ainsi que la végétation compétitive. C'est dans
ce contexte que la question des pesticides surgit.
En effet, lorsque la nécessité de protéger les
investissements n'était pas aussi aiguë qu'actuellement, cette
question pouvait être plus accessoire en matière
forestière. Ce n'est plus le cas et comme les pesticides ont
constitué dans le passé et constituent encore des
éléments importants de l'arsenal qu'a Paménagiste
forestier pour protéger la forêt, la question de l'utilisation des
pesticides est revenue sur le tapis avec d'autant plus d'acuité dans une
société de plus en plus préoccupée par la
qualité de l'environnement. En effet, cette question prend une
importance nouvelle non seulement à cause du resserrement des
approvisionnements et de l'ampleur des programmes d'aménagement, mais
aussi parce que la société dans son ensemble a
évolué et que ce qui pouvait apparaître comme une conduite
tout à fait acceptable il y a quelques années est maintenant
remis en question. On se soucie beaucoup plus de l'impact global sur
l'environne- ment de pratiques humaines ainsi que de l'utilisation de divers
produits.
Dans ce contexte, l'initiative du gouvernement du Québec de se
doter d'une politique d'utilisation des pesticides en milieu forestier,
politique visant à harmoniser les impératifs aussi bien
forestiers qu'environnementaux, apparaît des plus louables. Si une telle
initiative débouche sur un consensus vraiment large des principaux
intervenants, le Québec sera, à juste titre, à
l'avant-garde des provinces canadiennes.
Qu'est-ce que l'Institut forestier du Canada? Avant d'aller plus loin,
il est apparu important de rappeler quel est le rôle et quels sont les
membres de l'Institut forestier du Canada. L'Institut forestier du Canada est
une association sans but lucratif de personnes impliquées en foresterie
partout au Canada. L'Institut forestier du Canada est aussi la seule
association nationale de professionnels actifs en foresterie. Il comprend
près de 240(3 membres, aussi bien aména-gistes forestiers que
scientifiques forestiers, enseignants, techniciens forestiers et autres
professionnels ayant un intérêt dans la foresterie. Nos membres
travaillent pour les gouvernements, dans l'industrie, dans l'enseignement et
dans la pratique privée. L'Institut forestier n'a qu'un seul but:
encourager un aménagement plus intensif d'une ressource importante et
vitale pour le bien-être de tous les Canadiens, soit la forêt. De
plus, l'Institut forestier du Canada est membre de la Fédération
des associations de forestiers professionnels du Canada, une association qui,
en plus de l'Institut forestier du Canada, comprend cinq associations
provinciales de forestiers professionnels, soit celle de la Colombie
britannique, de l'Alberta, de l'Ontario, du Québec et du
Nouveau-Brunswick. Colllective-ment, cette fédération
représente plus de 5000 forestiers au Canada. Parce que l'Institut
forestier du Canada est une organisation nationale, elle se préoccupe
essentiellement des aspects nationaux de la foresterie au Canada.
Ce mémoire va donc se concentrer surtout à faire valoir
les points de vue généraux de l'Institut forestier du Canada, sur
la question de l'utilisation des pesticides en milieu forestier, et ne
commentera pas en détail le document remis. Nous reconnaissons que ce
sont surtout aux associations professionnelles provinciales, lorsqu'elles
existent dans une province, de se préoccuper davantage des questions
locales.
Importance de la ressource forestière. La forêt constitue
la richesse naturelle la plus importante au Canada. Elle contribue, plus que
toute autre ressource renouvelable, au développement
socio-économique et au bien-être de la population et renferme un
potentiel d'avantages I encore plus marqués pour les
générations futures. Alors que la superficie des terres
forestières est, au Canada, de 4 400 000 de kilomètres
carrés, la forêt productive couvre environ 2 600 000 de
kilomètres carrés, soit 38 % de la superficie des terres au
Canada. On a récolté environ
150 000 000 de mètres cubes de bois annuellement de cette
forêt productive depuis 1981. La valeur totale des biens produits par le
secteur forestier au Canada a été de plus de 33 000 000 000 $ en
1984, dont 14 000 000 000 $ pour l'exportation, ce qui contribue plus à
la balance des paiements que l'agriculture, les mines et les pêcheries
réunies. En 1984, l'industrie forestière employait 270 000
Canadiens et fournissait 600 000 emplois indirects et ceci, sans compter
l'activité économique générée par la faune
et la récréation en forêt. En effet, cette même
ressource contribue à soutenir une industrie récréative et
touristique de 3 600 000 000 $. Elle purifie et ravive l'air que nous
respirons; elle sert à régulariser le cours des eaux et la nappe
phréatique, tout en fournissant un habitat vital pour la faune et le
poisson. On peut donc affirmer qu'un Canadien sur dix vit de la
forêt.
Avantages futurs et problèmes actuels. En 1980, le Conseil
canadien des ministres des ressources et de l'environnement se fixait comme
objectif, pour l'an 2000, une récolte annuelle au Canada de 210 000 000
de mètres cubes, soit une augmentation de 35 % par rapport à la
récolte de 1980. On assumait que ceci fournirait 75 000 à 100 000
emplois de plus dans l'industrie forestière canadienne, augmenterait les
ventes de bois d'oeuvre et de pâtes et papiers de 22 000 000 000 $ et les
revenus de l'État de 1 000 000 000 $.
Pour atteindre cet objectif, on a réalisé qu'il fallait
mettre sur pied au Canada des programmes d'aménagement intensif et de
grande envergure. Parmi les nombreux problèmes qui retiennent
l'attention, il y en a deux qui doivent être réglés
immédiatement. Il faut d'abord assurer le reboisement adéquat de
25 000 000 d'hectares en terrains forestiers mal
régénérés ou recouverts seulement d'essences
herbacées et voir à enrayer cet envahissement.
Deuxièmement, il faut ramener à des niveaux acceptables les
pertes causées par les insectes forestiers, les maladies et la
végétation compétitive qui peuvent réduire la
récolte annuelle d'à peu près 100 000 000 de mètres
cubes.
Chaque année, le Canada dépense près de 500 000 000
$ en grande partie des fonds publics pour régénérer et
appliquer des traitements sylvicoles sur plus de 400 000 hectares de terres
forestières. Si la santé des forêts canadiennes n'est pas
protégée, ces investissements seront perdus et les emplois, les
salaires et les revenus des gouvernements seront remis en question par suite de
la menace constante appliquée par les insectes, les essences
indésirables et les maladies sur les forêts et les
bénéfices qu'elles génèrent.
Il existe présentement des techniques pour traiter les deux
problèmes majeurs mentionnés ci-haut, mais comme elles supposent
souvent l'usage de produits chimiques, phytocides et insecticides, leur
utilisation est fortement contrecarrée sur le plan politique par des
interven- tions énergiques de groupes associés à
l'environnement.
Certains produits biologiques tels que B.t. ou certaines actions
préventives sont de plus en plus mis de l'avant et les chercheurs
continuent leur travail en vue de trouver d'éventuels moyens alternatifs
efficaces. Dans bien des cas, les aménagistes forestiers devront, en
attendant, se servir de produits chimiques homologués pour atteindre
plusieurs des objectifs qu'ils se sont fixés en aménagement
forestier. Sans eux, il est certain qu'on ne pourra pas atteindre les
quantités projetées pour l'an 2000. Il faudra réduire la
possibilité annuelle et la compétitivité de l'industrie
forestière s'en trouvera fortement réduite. Il s'ensuit que
l'industrie forestière ne pourra maintenir ou augmenter son apport aux
besoins socio-économiques du pays au détriment des
générations futures de Canadiens.
Nous devons garder en perspective l'utilisation de pesticides
forestiers. Moins de 5 % des pesticides utilisés chaque année au
Canada servent à traiter les forêts. Seulement près de 0,1
% de terres forestières du Canada sont traitées avec des
pesticides au cours d'une même année. L'utilisation des pesticides
dans les forêts canadiennes est strictement réglementée.
Tous les pesticides utilisés sont homologués par Agriculture
Canada selon un processus qui comprend une révision complète de
toutes les données de santé et relatives à l'environnement
par Santé et Bien-être Canada, Environnement Canada et
Pêches et Océans Canada.
Le processus d'homologation du Canada est perçu
internationalement comme l'un des plus exigeants au monde. De plus, chaque
arrosage des forêts au moyen de pesticides doit être habituellement
approuvé auparavant par un ministère provincial de
l'Environnement. Ce système a bien servi le public canadien. Les
statistiques démontrent que l'utilisation des pesticides en forêt
au cours des 20 dernières années n'a eu aucun impact
négatif sur la santé humaine ou l'environnement forestier.
Ce qu'il faut faire. L'Institut forestier du Canada s'inquiète
beaucoup de cette perte anticipée de productivité de la
forêt et recommande la politique suivante concernant l'usage des
pesticides forestiers. Cette position a été adoptée en
1983 et révisée en mars 1986 par le comité exécutif
de l'Institut forestier du Canada. L'Institut forestier du Canada souscrit
à l'objectif d'une récolte de 210 000 000 de mètres cubes
pour l'an 2000, tel que préconisé par le CCMRE et, par
conséquent, encourage la mise sur pied de programmes
d'aménagements intensifs au Canada dans le but d'atteindre cet
objectif.
L'Institut forestier du Canada est conscient que les insectes, les
maladies et la végétation compétitive peuvent
réduire sensiblement la productivité de nos forêts et avoir
des effets désastreux pour d'autres valeurs telles que
l'esthétique. L'institut est conscient que la gestion des agents
nuisibles fait partie intégrante
et essentielle de l'aménagement intensif de la forêt et,
par conséquent, favorise l'emploi des techniques sylvicoles
éprouvées en tenant compte de la protection de l'environnement
lorsque c'est nécessaire pour atteindre la productivité
visée.
L'Institut forestier du Canada convient que certains pesticides
chimiques et biologiques sont les principaux moyens disponibles aujourd'hui
pour réduire de façon efficace et économique les pertes
causées par les agents nuisibles. Par conséquent, il recommande
un usage judicieux des pesticides homologués pour la forêt.
L'Institut se déclare nettement en faveur d'un contrôle
continu et attentif de l'usage des pesticides en foresterie pour déceler
et évaluer tout effet nuisible à l'environnement et à la
santé qui pourrait se manifester.
L'Institut forestier du Canada se dit très favorable à la
poursuite énergique de la recherche sur l'usage de pesticides en
foresterie pour expérimenter des pesticides plus efficaces et moins
dommageables à l'environnement et pour une technologie qui diminuerait,
lors de leur usage, les risques d'effets nuisibles à l'environnement et
à la santé du public.
L'Institut forestier du Canada est très favorable à toute
recherche visant au contrôle sylvicole et biologique des agents nuisibles
de la forêt pour diminuer la dépendance actuelle des produits
chimiques.
L'Institut forestier du Canada endosse les règlements actuels
restreignant l'utilisation des pesticides aux agents autorisés
seulement. L'institut appuie toute initiative destinée à mieux
renseigner le public sur l'usage des pesticides en foresterie et toute
intervention du public pour mieux planifier l'utilisation des pesticides en
foresterie. Étant donné que le contrôle des agents
nuisibles fait partie intégrante de l'aménagement intensif de la
forêt, l'Institut forestier du Canada encourage les facultés de
foresterie et les collèges d'études techniques du Canada à
intensifier l'enseignement sur la gestion des agents nuisibles. (14 h 30)
Qu'a fait concrètement l'Institut forestier du Canada à
l'égard de cette question? Après avoir énoncé des
principes, il faut voir quelle a été notre action pour appuyer
ces principes. Nous avons publié, en 1983, une brochure qui
résume notre position sur cette question et nous avons aussi fait
parvenir aux députés fédéraux une lettre
d'information appelée "Dialogue forestier" sur cette question. Nous
avons aussi écrit à tous les ministres responsables des
forêts au Canada, les encourageant à intégrer plus
complètement la gestion des agents nuisibles dans la planification et
les opérations d'aménagement forestier et aussi leur demandant de
supporter en public le rôle des pesticides dans l'aménagement
forestier. Nous avons aussi écrit à tous les gouvernements au
Canada, exprimant notre préoccupation quant aux restrictions non
justifiées et quant à l'homologation des pesticides chimiques.
Nous avons, d'une façon répétée, promu l'usage
judicieux des pesticides homologués et le développement
d'alternatives. À cet égard, nous avons participé, avec
plusieurs autres groupes, tels que les représentants des gouvernements,
de l'industrie, des milieux syndicaux et des milieux de l'environnement, aux
forums nationaux forestiers qui se sont tenus en 1985 et en 1986, au
congrès forestier national qui s'est tenu en 1986, ainsi qu'au
développement de la stratégie forestière pouir le
Canada.
Par exemple, rappelons que le forum de Winnipeg, tenu en 1986 et
où participaient des industriels, des aménagistes et des
responsables de groupes environnementaux, a fait la recommandation suivante:
Que le conseil reconnaisse que les pesticides constituent un moyen
légitime et essentiel pour la gestion efficace des forêts dans
certaines régions, que des lois rigoureuses doivent en régir
l'eimploi et que ces lois doivent prévoir la participation de la
population régionale à la prise de décision sur l'emploi
de pesticides.
En outre, le conseil est prié d'encourager la mise au point et
l'utilisation de méthodes efficaces pour l'élimination des
insectes nuisibles, d'appuyer la recherche sur les effets environnementaux des
méthodes d'élimination des insectes nuisibles, de s'assurer que
l'homologation des pesticides utilisés en forêt est
économique et soumise à l'examen du public. Par ailleurs, la
stratégie nationale pour le secteur forestier canadien,
élaborée par les représentants de plus de 40 associations
l'an dernier, à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, et formellement
adoptée par le Conseil des ministres des Forêts, reprend la
recommandation suivante: II est recommandé que tous les intervenants du
secteur forestier reconnaissent que les pesticides sont des outils
légitimes de la gestion des ressources forestières dans certaines
régions et que leur utilisation soit réglementée; que l'on
s'assure que toutes les opérations de lutte contre les ravageurs soient
justifiées du point de vue écologique et économique; que
l'on favorise la mise au point de l'utilisation des méthodes de
remplacement pour lutter contre les ravageurs, y compris la gestion
intégrée des ravageurs; que l'on accélère la
recherche portant sur les effets des pesticides sur l'environnement; que l'on
s'assure que le processus d'enregistrement des pesticides utilisés en
milieu forestier ne soit pas exagérément coûteux et que le
public ait accès aux dossiers.
L'an dernier, nous avons écrit à tous les doyens des
écoles forestières du Canada, leur demandant de mettre l'accent
approprié sur la gestion des agents nuisibles dans leurs programmes de
cours. De plus, l'Institut forestier du Canada est le seul représentant
du milieu forestier qui participe au comité d'homologation du bureau
"aviseur" sur les agents nuisibles, comité qui est
préoccupé par le processus d'homologation des pesticides.
Propositions pour le secteur forestier. Après avoir
énoncé ce que nous avons fait, nous
pensons qu'il serait approprié, avant de conclure, de voir les
suggestions qui pourraient être avancées. Selon nous, il y a deux
grandes conclusions qui devraient être retenues. Nous devons essayer de
bâtir sur le présent consensus développé lors de la
stratégie forestière nationale, afin d'obtenir dès
maintenant une protection adéquate de la récolte
forestière et de continuer les discussions avec tous ceux qui sont
concernés, aussi bien l'industrie, les gouvernements, les groupes
environnementaux que le public. En fait, alors que des consensus avaient
été obtenus dans certains forums, tels que celui de Winnipeg, ou
dans la stratégie nationale, jusqu'à quel point avons-nous
utilisé ce consensus pour sensibiliser les preneurs de décision
quant aux besoins et à l'aspect raisonnable d'une action minimale pour
protéger la forêt maintenant, pendant que nous continuons
activement et d'une façon positive à discuter avec le public et
à chercher des alternatives?
L'inaction en cette matière va probablement coûter plus que
l'action, même si elle est partielle. Mais, en même temps, nous
devons nous assurer que nous n'utilisons pas cette permission pour
relâcher nos efforts vers un usage plus complet de l'aménagement
intégré des agents nuisibles en forêt et vers un effort
accru de recherche et de développement pour développer des
alternatives aux pesticides chimiques, ainsi que pour améliorer nos
techniques d'aménagement intégré en mettant l'accent sur
la prévention des problèmes.
Nous devons aussi être sûrs que nous pouvons construire une
crédibilité avec nos partenaires, soit du public, soit des
groupes environnementaux, ainsi que les membres de la communauté
forestière qui ont supporté les consensus mentionnés
ci-dessus, en livrant vraiment la marchandise promise. Le public regarde et
écoute le secteur forestier, et nous voulons le convaincre de notre
bonne foi. Mais le public ne fait pas que nous écouter, il regarde aussi
nos actions et est constamment en train de nous évaluer. Nous avons,
à cet égard, besoin plus que des mots.
Nous devons nous assurer et faire connaître que nous utilisons les
pesticides dans des endroits très spécifiques où c'est
économiquement et écologiquement justifié. Nous avons
aussi besoin de l'action par l'industrie et les gouvernements, pour augmenter
les efforts de recherche et de développement sur l'impact des
pesticides, sur les techniques pour assurer leur usage minimal, et
spécialement sur les alternatives à l'usage des pesticides
chimiques en milieu forestier.
De plus nous devons aussi nous assurer qu'effectivement
l'aménagement forestier intégré, en tenant compte des
agents nuisibles, est mis en pratique sur le terrain et à travers des
plans d'aménagement où le public est impliqué et
informé. Toutes ces actions, qui sont nécessaires après
beaucoup de mots, signifient des engage- ments aussi bien par les
gouvernements, l'industrie que la profession forestière.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie. M. le
ministre déléqué aux Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le
Président. Il me fait plaisir de vous saluer, parce que la
dernière fois que j'ai rencontré votre vice-président,
c'était lors de la journée Frédéric Back au Jardin
botanique, et pour souligner aussi en même temps ce scénario d'une
rare richesse de générosité, "L'Homme qui plantait des
arbres", de Giono. Quand il a fait cela, il a fait beaucoup de foresterie, il a
fait beaucoup d'environnement, et c'est ce qu'on tente un peu de faire en
utilisant tous les moyens à notre disposition. Les phytocides, c'est un
des moyens d'aménagement, ce n'est pas le seul, il y a d'autres moyens.
Le reboisement, ce n'est pas le seul non plus. Il y a des coupes
d'éclaircies, des coupes par trouées, des coupes jardinatoires,
des coupes par bandes, et tout cela. Et c'est un des moyens que
Frédéric Back nous a transmis. Disons qu'il a pris une partie de
pays qui était désertique et où ensuite la
végétation s'est installée, les arbres se sont
installés; il a planté des bouleaux aux endroits
appropriés, des chênes aux endroits appropriés; il s'est
servi un peu de son jugement et de la nature. C'est ce qu'on essaie de faire.
Quand on parle de phytocides, d'insecticides ou de pesticides, c'est un des
moyens qu'on veut privilégier, pas privilégier, au contraire,
c'est un des moyens qu'on veut utiliser pour atteindre cet objectif.
Et si on en parle, ce n'est pas parce qu'on met l'accent
là-dessus. On pourrait faire une commission parlementaire sur les coupes
jardinatoires, on pourrait faire une commission parlementaire sur le
reboisement, tout simplement. C'est un des moyens, et aujourd'hui on parle de
cela. Ce n'est pas une emphase, ce n'est pas un moyen privilégié,
mais c'est un des moyens pour atteindre les objectifs qu'on s'est
fixés.
Il faut également aussi respecter tous les utilisateurs de la
forêt, qu'ils soient des chasseurs, des pêcheurs, des amateurs de
plein air, de randonnée, et également pour protéger les
emplois que nous avons en forêt, de façon à protéger
notre qualité de vie. C'est ce qu'on tente de faire en proposant ce
moyen, parce que c'est un moyen qui a été contesté, mais
il est arrivé des grands désastres forestiers bien avant qu'on
utilise des produits de ce genre, des pesticides, bien avant cela. Aujourd'hui,
on essaie de réparer les erreurs du passé. On essaie de
réparer cela, et pour réparer cela, évidemment, cela prend
de la collaboration et cela prend aussi beaucoup d'effort, beaucoup d'argent,
beaucoup d'appuis. Ce que je veux vous dire, c'est que ces moyens
évidemment sont examinés, sont contestés, sont
appuyés; il se passe de tout là-dedans.
Est-ce que le processus d'homologation, parce qu'on l'a contesté
beaucoup, ne nous donne pas une certaine assurance d'utiliser certains
produits. Jusqu'à ce que, par exemple, avec un suivi rigoureux et
rigide, jusqu'à ce que s'il y a des modifications à apporter on
puisse le faire, en tenant compte du suivi? Le suivi est absolument
nécessaire. On ne demande pas un chèque en blanc, on ne demande
pas d'éliminer les audiences publiques, on dit: Bien, on veut avoir des
moyens efficaces de faire des choses sécuritaires, des choses qui ont du
sens. On conteste beaucoup ces chiffres, qui ont été
préparés par des scientifiques. Les scientifiques ne sont pas
tous d'accord, ils ne sont pas tous du même avis. Les médecins ne
sont pas tous du même avis, pourtant ils continuent à soigner le
monde. Les économistes c'est pareil, pourtant ils continuent à
faire des affaires. Est-ce que vous pensez qu'on est assez prudents? Vous ne
vous prononcez sur aucun scénario. Vous dites: II faut l'utiliser quand
même. Ce qu'on essaye de faire aujourd'hui, c'est d'élaborer,
à la lumière de la commission, une politique d'utilisation des
pesticides. Il faut se prononcer quelque part. Il ne faut pas dire: Faites-le
et ne le faites pas. Vous ne vous prononcez pas tellement là-dessus. Je
voudrais avoir votre réaction, s'il vous plaît.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Godbout.
M. Godbout: Je vais essayer d'amorcer une réponse et mes
collègues pourront compléter au besoin. Je vais essayer de
répondre à la deuxième partie de la question avant la
première. On dit: On ne se prononce sur aucun des scénarios. On
l'a indiqué dans notre mémoire, on veut rester au niveau
national, au niveau des grands principes et en respectant la structure du pays
qui veut que la gestion des forêts se fasse au niveau des provinces. On
voit comme beaucoup plus spécifique l'intervention des associations
professionnelles comme la nôtre au niveau des provinces. Nous
défendons ces principes, ces positions, dans l'ensemble du pays, aussi
bien sur la côte ouest que sur la côte est, aussi bien
vis-à-vis des groupes qui représentent l'industrie que les
groupes qui défendent les aspects plus environnementaux. C'est une
raison pour laquelle on ne s'est pas prononcés sur un scénario
plutôt que sur l'autre. C'est à cause de la structure du pays et
à cause du rôle de l'institut. Il y a des ententes qu'on a avec
les associations provinciales. Par contre, à travers les
différents principes il y a peut-être certaines lignes qui peuvent
indiquer certaines tendances ou certaines orientations.
Au sujet de la question de l'homologation, est-ce qu'on la croit
sécuritaire ou pas? Il y a beaucoup de choses qui pourraient être
dites au sujet de l'homologation. Il y a eu plusieurs rapports écrits,
plusieurs examens qui ont été faits dans le temps par le Conseil
canadien des ministres des Ressources et de l'Environnement, peut-être
plus récemment par le Conseil des ministres des Forêts du Canada,
dans le but d'examiner plus avant ce processus, quelles étaient les
faiblesses, quels étaient les points à améliorer. Je suis
sûr que les gens qui sont plus familiers avec ces domaines peuvent
consulter ces rapports. Essentiellement, la position de l'institut pourrait se
résumer ainsi: Au niveau de l'homologation, nous pensons que le
processus est assez sécuritaire. Il n'est pas parfait. Si on attendait
un processus parfait, on pourrait attendre un bout de temps. Des processus
parfaits, il n'y en a pas. C'est pour cela que la recommandation n° 4 qu'on
fait se situe dans ce contexte. Tout en prônant l'usage des pesticides
homologués, selon un processus relativement sévère, et que
nous disons l'un des plus sévères au monde, cela ne veut pas dire
qu'il faut qu'on relâche cette surveillance.
Au contraire, il faut s'assurer d'avoir un suivi continu et attentif de
leur usage, de leurs effets sur le milieu, sur la santé humaine. S'il y
a le moindre problème, on va être bons pour le déceler
à ce moment-là. Ce n'est pas une raison pour ne pas utiliser un
produit homologué, parce qu'il pourrait y avoir une chance sur un
million, une chance sur mille ou une chance sur cent qu'il pourrait y avoir un
problème. Dans une dynamique où il faut faire quelque chose et
non pas dire qu'on ne fait rien, on est mieux de faire quelque chose avec
toutes les garanties possibles, quitte à assurer un suivi. Cela
résume un peu la position de l'institut dans ce domaine, qui est reprise
au point 4, à la page 8. On est conscients qu'il peut y avoir des
problèmes, certaines faiblesses. Il n'y a pas de processus parfait. Mais
il est relativement fiable pour qu'on puisse s'en servir. Ne pas s'en servir,
ce n'est pas mieux non plus. On fait mieux de s'en servir tout en
exerçant un suivi, un contrôle de ce qui se passe. Cela
résume la position de l'institut. (14 h 45)
M. Côté (Rivière-du-Loup): Au
ministère, on fait le suivi directement. On fait un rapport annuel.
C'est présidé par le ministère de l'Environnement qui a
cette responsabilité. On fait plus que cela. On analyse les produits
qu'on utilise. L'an passé, on a découvert - ce sont nos
employés qui l'ont fait cette découverte et je les
félicite - ils ont découvert que le B. t. qu'on a
accrédité "at large" parce que c'est biologique et que cela ne
fait pas trop peur - moi, cela me fait aussi peur que du chimique, en tout cas
- on a découvert une contamination, une contamination qu'on a fait
évaluer pour voir si réellement il y avait de quoi. Mais on prend
des précautions même avant, ce qui fait que le suivi, cela ne nous
fatigue pas tellement parce que c'est dans la logique des choses de le bien
faire.
Mais quand on me dit: Attendez d'avoir une épidémie grave
avant d'intervenir, j'ai de la difficulté à accepter cela. Avant
d'utiliser des produits homologués, sur de grandes superficies ou de
petites superficies, cela dépend... le
Québec c'est grand. Est-ce que 600 hectares, c'est une petite
superficie ou une grande superficie dans l'ensemble du Québec?
Le Président (M. Saint-Roch): M.Godbout.
M. Godbout: Je pense qu'il y a peut-être un lien entre
cette question et la question précédente au sujet de
l'homologation. Prendre prétexte de risques au niveau de l'homologation
pour ne pas utiliser un produit qui a été dûment
homologué, c'est vouloir peut-être plus jouer le rôle de
l'autruche, se mettre la tête dans le sable. Peut-être qu'une des
suggestions qui pourrait être faite et qui a déjà
été faite par l'Institut forestier du Canada, c'est que, si ce
processus d'homologation suscite des inquiétudes ou des
appréhensions, il serait peut-être souhaitable qu'à ce
processus, essentiellement mené par des agences fédérales,
des agences provinciales et éventuellement certaines personnes du public
puissent soit être associées, soit en être informées.
Cela contribuerait beaucoup, je pense, à faire d'une pierre deux coups
dans le sens de régler à ce niveau toutes les questions qui ont
trait à la toxicité, au danger pour la santé humaine ou
l'environnement, et de ne pas reprendre deux fois les mêmes analyses, les
mêmes examens.
Si on pouvait imaginer un processus par lequel les agences provinciales,
les ministères provinciaux, en fait, pourraient participer avec les
agences fédérales lors de l'homologation des produits, voir les
données, voir les questions qui peuvent se soulever, se satisfaire elles
aussi, je pense qu'on aurait un processus beaucoup plus harmonieux et on
éviterait de reprendre deux fois les mêmes études, les
mêmes analyses. D'autant plus que les analyses initiales faites dans le
processus d'homologation ne sont pas toutes, en fait, même une grande
partie, dévoilées au public. Il est question de secret commercial
là-dedans et ainsi de suite. Je pense que si on pouvait éviter de
reprendre deux fois les mêmes choses qui impliquent, non seulement des
coûts pour les gouvernements, mais aussi des coûts pour le
manufacturier qui doit soumettre son produit à plusieurs contrôles
ou examens, à différents niveaux, et aussi des délais. On
pourrait tout régler dans un seul cas. C'est une idée qui a
été émise par l'institut il y a quelques années. Je
la lance comme cela ici, mais je pense que c'est une des avenues qui pourrait
être examinée pour enlever cette espèce de crainte, si on
veut, quant au processus d'homologation. Si on permet aux agences, aux
ministères provinciaux de participer à ce processus, je pense que
tous vont pouvoir être satisfaits et je pense aussi qu'on pourrait,
éventuellement, comme on dit dans le mémoire ou comme on dit dans
la stratégie forestière canadienne, rendre accessibles au public
certaines données, et à ce moment-là régler la
question dès l'origine du débat, là où il se
produit, lors du processus d'homologation.
M. Côté (Rivière-du-Loup): J'apprécie
votre respect de l'autonomie provinciale parce que lors de l'élaboration
de ia stratégie nationale du secteur forestier, j'ai défendu
cette position également. Croyez-vous que les audiences publiques,
mettons s'il y avait une collaboration fédérale-provinciale lors
de l'homologation, pourraient ajouter quelque chose à cela?
M. Godbout: Peut-être que je vais prendre la question d'une
autre façon si vous le permettez. Dans les audiences publiques, il y a,
à ma connaissance, deux grands thèmes, deux grands pôles
qui se développent. Il y a le pôle du danger quant au produit
lui-même, la toxicité pour la santé humaine, le danger pour
l'environnement, pour le milieu, la faune. L'autre pôle, c'est la
justification même de l'intervention. Est-ce que c'est justifié?
Est-ce que l'aménagement de la forêt justifie vraiment une telle
intervention ou non? Et c'est beaucoup plus lié à la question de
stratégie d'aménagement ou plan d'aménagement. Si on part
de cette notion, je ne dis pas qu'il y a seulement cela, mais
généralement ce sont ces deux grands pôles qui sont
présents dans des audiences publiques, on pourrait imaginer - on n'a pas
toutes les solutions, on est un organisme avec des moyens très
limités et on ne peut pas non plus prétendre avoir toutes les
réponses, mais je pense qu'on est là, par contre, pour
émettre des idées et des opinions - je me dis que si, au niveau
de la toxicité des produits, ce processus était fait dès
l'homologation, pourquoi on relerait deux fois, à la fois lors du
processus d'homologation et lors des audiences publiques, le même
procès du même produit. Si on pouvait le faire une fois pour
toutes au départ, mais en impliquant tout le monde par exemple, donc, en
impliquant les agences provinciales à ce niveau et aussi en divulguant
davantage au public certaines données qui ont justifié ou non
l'homologation, je pense que cette question pourrait être relativement
bien traitée à ce niveau et ne pas devoir être reprise
à tous les coups. Je pense que ce serait une première chose.
Il est bien sûr que, lorsque le manufacturier demande que son
produit soit homologué, il doit déposer toute une batterie de
tests et toute une batterie d'études qui coûtent une petite
fortune et cela implique un délai aussi pour être
homologué, un délai qui est assez long. Si, à cause
même des secrets commerciaux impliqués, et ainsi de suite, il faut
repartir de zéro et reprendre tout cela ou à peu près lors
d'une audience publique et remettre encore la chose sur le tapis, je pense que
cela n'est pas tellement productif. Je pense qu'il faut s'assurer qu'on utilise
les ressources de tout le monde à bon escient. Si on pouvait faire que
tous les gens concernés participent au même processus et voient
les mêmes données une fois pour toutes, je pense
que cela pourrait aider. À mon avis, cela règle un
volet.
Le deuxième volet, c'est comment cette intervention de pesticides
est justifiée dans un contexte d'aménagement forestier. C'est la
deuxième grande question, si on veut, qui revient souvent lors des
audiences publiques. On le dit un peu dans notre mémoire et cela a
été aussi repris dans la stratégie forestière
nationale, on verrait peut-être plus un processus avec
l'aménagement des forêts ou les plans d'aménagement
forestier sur une base régionale ou locale parce qu'il n'y a pas de plan
d'aménagement provincial ou national. C'est vraiment sur une base ad
hoc. On pourrait associer, informer et impliquer davantage le public
concerné de façon à ce qu'il ne voit pas uniquement la
question, parce qu'il y a toujours une question très polarisée
à ce moment-là, la question pesticide ou pas, intervention ou
pas, mais qu'on puisse lui présenter l'ensemble de la stratégie
d'aménagement d'une région. C'est un peu ce qui est dit dans
certains endroits du mémoire.
Disons que récemment, il y a quelques mois, j'ai eu connaissance
que dans la province voisine, en Ontario, dans le cadre d'un plan
d'aménagement fait par une compagnie forestière, les plans
d'aménagement, une fois élaborés dans un premier jet, dans
une première version, étaient soumis, par la compagnie
forestière conjointement avec le ministère des Ressources
naturelles de l'Ontario dans les localités touchées, à un
examen du public. Les livres étaient ouverts, venez voir les chiffres,
vene2 voir si cela a du sens, faites-nous des commentaires. C'était une
initiative du ministère ontarien des Ressources naturelles et de la
compagnie qui était la détentrice du FMA, comme on dit
là-bas, du contrat d'aménagement. Je pense, qu'à ce
moment-là cela les situe sur un plan beaucoup concret, beaucoup plus
local qu'uniquement une grande étude sur l'aménagement forestier
dans une région ou une province. Cela a l'avantage de cerner assez les
gens impliqués.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie,
monsieur.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Juste une petite
question. Même si vous ne vous êtes pas prononcé sur les
deux scénarios, pensez-vous que l'un ou l'autre des scénarios
correspond à une carte blanche pour nous permettre de tout faire?
M. Godbout: Je pense que le secteur forestier et le gouvernement,
d'une façon plus large, mais le secteur forestier dans un premier temps,
parce qu'on est quand même des représentants du secteur forestier,
ferait une grande erreur de se fier sur une première permission comme on
dit dans le livre, peu importe la forme que cela pourrait prendre, pour
considérer que, maintenant, ils ont carte blanche et qu'il n'a plus de
problème. Je pense qu'il y a une phase de responsabilisation à
voir dans tout le processus. Il faut s'assurer que, peu importe la
réponse à la démarche qui va être faite, cela va
sûrement résulter en des obligations de la part du secteur
forestier à respecter. Il va falloir que le secteur forestier, aussi
bien comme on le dit, l'industrie, les gouvernements et la profession
s'assurent que ces obligations sont effectivement satisfaites parce que,
là, les gens auraient bien raison de nous dire qu'ils ont entendu bien
des mots, mais qu'ils n'ont pas vu beaucoup d'action. Je pense que le fardeau
va être sur les aménagistes.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Godbout. M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: Je vais reprendre là où vous
laissez votre réponse pour vous demander si vous ne reconnaissez pas que
le mécanisme de, gestion des problèmes environnementaux, que le
Québec s'est donné ces dernières années avec la Loi
sur la qualité de l'environnement et son règlement sur les
études d'impact et les audiences publiques, ne donne pas les garanties
suffisantes pour que la phase de responsabilisation dont vous parlez se fasse.
Est-ce que vous seriez d'accord avec le Dr Lajoie du groupe de travail sur les
pesticides, qui nous a dit hier que le mécanisme que le Québec a
mis en place ces dernières années doit être maintenu parce
qu'il assure, d'une part, la révision des connaissances, et assure,
d'autre part, que des recherches sur les solutions alttsrnatives vont se faire?
En effet, si on a des autorisations, qu'on n'a pas d'obligation et qu'on ne
sent pas une pression, on prend la solution de la facilité et on ne se
force pas tellement pour chercher des solutions alternatives. On ne sent pas
l'obligation de considérer les pesticides comme un outil à
utiliser en dernier recours et à utiliser de moins en moins si possible.
Il présentait, un troisième argument en disant que c'est un
mécanisme qui assure la mise en place de meilleurs contrôles. Dans
la mesure où vous vous dites favorables dans ce qu'il faut faire au fait
que le public soit informé, est-ce que vous reconnaissez que le
mécanisme que nous avons mis en place au Québec doit être
maintenu parce qu'il nous apporte ces garanties, et que les expériences
du passé dans le domaine environnemental font en sorte qu'on n'est plus
à l'ère où on va prendre! des risques dans
l'environnement? On veut bien qu'on nous dise qu'il y a une phase de
responsabilisation qu'il faut prendre, mais on va prendre les moyens pour
s'assurer qu'elle va être prise.
M. Godbout: II y a une chose: II faut peut-être distinquer.
Vous dites que le processus actuel d'audiences publiques pourrait amener,
d'après le Dr Lajoie, certains avantages. Je pense qu'en effet cela a
certains avantages dans le sens que cela a forcé certaines choses. Mais
est-ce que c'est la seule façon d'amener ces avanta-
ges? C'est peut-être la question qu'il faut se poser. Je n'ai rien
contre le processus même d'étude d'impact, mais il faut
peut-être le situer dans un contexte où on s'assure qu'il remplit
bien son rôle et qu'il mène à des solutions constructives
pour l'ensemble de la société. C'est d'ailleurs une partie de la
problématique, c'est que la lourdeur même du processus, tout en
amenant certains avantages, comme vous dites, a amené aussi certains
inconvénients. Je n'ai pas participé à toutes les
audiences de la commission, mais je pense que le consensus était que
cela amène certains inconvénients en termes de délai, de
lourdeur, de coût, et ainsi de suite. Peut-être qu'on pourrait
viser à avoir ces mêmes avantages en allégeant certains
éléments du processus. Je n'ai pas la réponse
nécessairement cet après-midi, mais il est important de
considérer la chose. C'est pour cela que la suggestion de l'institut,
que l'on a déjà faite en 1986, sur l'homologation, pourrait
peut-être une façon de délester le processus
tranquillement.
M. Charbonneau: Par ailleurs, il y a d'autres recommandations
différentes qui nous ont été faites, mais qui visent aussi
à alléger ou à améliorer le processus, notamment
pour faire en sorte que dans le processus d'étude d'impact, dès
le départ, les organismes qui ne sont pas associés à
l'étude le soient pour que, quand on arrive aux audiences publiques,
ceux qui y participent aient déjà été pas mal
parties prenantes au processus d'évaluation.
M. Godbout: Oui. La question qu'on se trouvait à poser et
qu'on se trouve à poser dans le mémoire à la toute fin,
c'est de proposer davantage d'associer le public, les différents groupes
au plan d'aménagement forestier, et non pas uniquement de se concentrer
sur une phase qui serait la protection contre des insectes ou la protection
contre la végétation, mais d'associer le public à
l'ensemble de la phase d'aménagement. On pense que c'est beaucoup plus
sur une base locale que cela doit se faire. C'est peut-être une meilleure
route à suivre de procéder de cette façon, d'être
plus près de la réalité du concret local. Les plans
d'aménagement sont locaux finalement. (15 heures)
M. Charbonneau: Justement, l'idée un peu au point de vue
environnemental, c'est d'ajouter aux plans d'aménagement des plans
d'intervention pour les ravageurs et la végétation concurrente.
Autrement dit, c'est qu'on intègre dans les plans d'aménagement
les dimensions de lutte contre les ravageurs et la végétation
concurrente.
M. Godbout: J'aime mieux votre deuxième formulation, en ce
sens que je ne voudrais pas qu'on imagine un plan d'aménagement d'un
côté et un plan d'intervention de l'autre côté.
M. Charbonneau: Non, non. Je pense que c'est
intégré.
Ml. Godbout: L'aménagement forestier intègre toutes
ces dimensions, je pense. C'est ce qu'on propose, que ces dimensions soient
intégrées dans le contexte du plan d'aménagement.
M. Charbonneau: Nous, ce qu'on dit, c'est que tout cela devrait
être soumis à une discussion publique. Ce sont des ressources
publiques, d'une part. C'est de l'environnement aussi et pas uniquement en
fonction de la ressource forestière non plus, le milieu naturel. Je
regarde dans votre mémoire, et il y a une partie qui s'intitule "ce
qu'il faut faire". Je constate que vous avez passé passablement sous
silence, en fait totalement sous silence, un problème qu'on a
commencé à mieux cerner depuis hier qui, à mon avis, est
le problème fondamental à l'égard de l'usage des produits
chimiques ou biologiques, en tout cas, des produits non naturels pour la lutte
contre les ravageurs et la végétation concurrente, toute la
problématique de la détection. En particulier, la
détection contre les insectes et les infestations par les insectes.
Cette critique, en fait, cette constatation, on pourrait l'adresser
également à l'industrie qui nous en a parlé un peu, mais
qui remettait la responsabilité au gouvernement en disant: C'est votre
responsabilité. Sauf qu'il n'y a même pas eu un minimum de constat
de fait sur le problème du système actuel de détection. Je
me demande si ce n'est pas là une des voies importantes à
envisager. De la même façon qu'on a réussi à avoir
au Québec un des meilleurs systèmes, sinon le meilleur
système au monde de lutte contre les incendies de forêt, en fait
du problème des incendies de forêt, on pourrait rapidement, si on
se donnait la même approche, une approche de détection et par la
suite une approche d'intervention à la fois efficace et rapide,
solutionner une bonne partie des problèmes dont on parle. Au lieu de
mettre l'accent ou faire beaucoup de débats sur les produits à
utiliser ou à ne pas utiliser, on pourrait circonscrire rapidement la
problématique. D'autant plus que, dans la Loi même sur la
qualité de l'environnement et par le règlement sur les audiences
publiques, on a déjà délimité qu'en
deçà d'une certaine superficie on peut sans ce mécanisme
d'audiences publiques, sans étude d'impact, intervenir efficacement et
rapidement. Donc, le vrai problème au fond, c'est: Est-ce qu'on se donne
les moyens de détecter ou non?
M. Godbout: Je peux répondre assez rapidement. Bien
sûr, on n'est pas contre une meilleure détection. En fait, dans
notre esprit, c'était inclus dans le mémoire et je vais vous
indiquer où. On dit, par exemple, au point 5 à la page 8, que
l'institut se dit favorable à la poursuite énergique de la
recherche sur l'usage des pesticides aussi bien biologiques que chimiques, et
on parle alors des pesticides en général, pour
expérimenter des pesticides plus efficaces et
moins dommageables à l'environnement et pour une technologie qui
diminuerait, lors de leur usage - si on peut diminuer leur usage, tant mieux -
les risques d'effets nuisibles à l'environnement et à la
santé. Et plus loin, si vous me le permettez, à la page 14, il y
a d'autres notions un peu partout, incluant la stratégie
forestière nationale, et on parle là aussi de développer
des alternatives aux pesticides chimiques et d'améliorer nos techniques
d'aménagement intégré en mettant l'accent sur la
prévention des problèmes. En fait, dans notre esprit, la
détection, c'est la première phase à la prévention:
Si on veut prévenir un problème, c'est une façon
d'empêcher que le problème soit plus gros. On peut le
prévenir aussi en agissant sur l'aménagement de la forêt,
c'est une façon, à plus long terme. À plus court terme, si
on veut empêcher qu'un problème émergeant devienne plus
gros, bien sûr, une meilleure détection peut être utile.
Mais aussi il faut avoir la capacité d'intervenir. Il ne faut pas
s'imaginer que toute détection va permettre de circonscrire une
épidémie ou un problème à une échelle
toujours inférieure à 600 hectares.
M. Charbonneau: Non.
M. Godbout: Si on détecte, il faut s'assurer qu'on est
organisé pour intervenir parce que détecter et ne pas
soigner...
M. Charbonneau: Très bien.
M. Godbout: ...ce n'est pas le diable. Vous allez chez le
médecin et il vous dit: Vous êtes malade, monsieur, mais je ne
peux pas vous soigner...
M. Charbonneau: Mais là, on dit... M. Godbout:
...c'est pire qu'avant.
M. Charbonneau: ...qu'on a des produits homologués.
M. Godbout: Oui, c'est cela.
M. Charbonneau: En fait, l'industrie dit: Nous, ce que nous
craignons, c'est que nous ne puissions pas les utiliser parce que vous allez
nous embarquer dans des processus trop compliqués; il va falloir que
nous nous expliquions un peu partout et cela va prendre bien du temps. Sauf
qu'ils n'auront pas besoin de s'expliquer, de demander des tonnes
d'autorisations et de faire des études d'impact si on a en place des
mécanismes de détection rapides. Les outils, on peut
considérer qu'on les a et qu'on va les améliorer dans la mesure
où les produits vont se développer avec les années, leur
efficacité également.
Écoutez, les incendies de forêt, on les a
réglés de la seule façon... Je me rappelle les
présentations audiovisuelles qui nous ont été faites
avant-hier par l'industrie. Les deux grands problèmes, c'étaient
les incendies de forêt et les insectes. Il y avait une case où on
montrait les deux. Les dommages des uns et des autres s'équivalaient,
d'une certaine façon.
Si on a réglé le problème no 1, les incendies de
forêt, par un bon système de détection et, par la suite,
par un système de contre-attaque efficace, peut-être que l'autre
problème passe par la même approche, c'est-à-dire d'abord
un système sophistiqué de détection et, par la suite, une
utilisation efficace et rapide des outils qu'on peut avoir à notre
disposition.
M. Godbout: Aucun problème. En fait, si le raisonnement
est qu il y a des pesticides homologués et si on peut détecter
les phénomènes - là, on parle de détection et ce
sont peut-être plus des épidémies qu'autre chose...
M. Charbonneau: Oui, oui.
M. Godbout: ...en tout cas, il y a quand même d'autres
problèmes dans la forêt. Si vous dites: On a des pesticides
homologués, d'une part, et des moyens de détection, d'autre part,
et lorsqu'on détecte, on agit, on n'a pas de problème avec cela,
nous.
M. Charbonnoau: Je considère que, finalement, là
où le gouvernement devrait mettre ses ressources, d'abord, c'est dans
son système de détection. Un investissement additionnel de fonds
publics à faire au-delà de la recherche - je pense que sur la
recherche on s'entend - c'est dans un système sophistiqué de
détection; autrement, on n'arrivera jamais. On va se retrouver avec des
produits chimiques - on va avoir des audiences publiques ou on n'en aura pas -
qu'on va être obligés d'utiliser quand les dommages vont
être considérables. Que voulez-vous? On va attendre que les
épidémies soient...
M. Godbout: Vous avez raison dans la mesure... C'est tout
à fait légitime et louable, je n'ai rien, au contraire, contre
l'idée d'investir dans une meilleure détection des
problèmes. Il ne faut pas seulement se limiter aux insectes, en tout
cas, investir dans une meilleure détection, à condition qu'on
sache d'avance qu'on va avoir les moyens d'agir. C'est cela que je vous disais
auparavant.
M. Charbonneau: D'accord. Mais cela...
M. Godbout: Si à l'avance on dit: Une fois qu'on a
détecté le problème, il y a un processus relativement
lourd, comme cela est apparu dans le passé, à ce
moment-là, tout l'effort et l'avantage mis dans \a détection sont
perdus par une certaine lourdeur du processus.
M. Charbonneau: C'est cela.
M. Godbout: Si, à l'avance, on s'entend qu'il y a un
processus d'homologation beaucoup plus ouvert, beaucoup plus connu, devrais-je
dire, des différents intervenants et si, d'autre part, il y a un
système de détection plus efficace, tant mieux. Il faut aussi
s'assurer qu'on ait les moyens d'agir. Vouloir convaincre des gens de mieux
détecter si on sait, à l'avance, que les moyens d'agir vont
être relativement limités, parce que les pesticides
homologués vont être très peu nombreux ou parce qu'il va y
avoir des délais, etc., ce n'est pas un incitatif tellement grand pour
agir. Mais dans le contexte que vous soulevez, c'est correct, il n'y a pas de
problème.
M. Charbonneau: On s'entend...
M. Godbout: En fait, c'est ce qu'on dit.
M. Charbonneau: C'est cela.
M. Godbout: Par contre, il ne faut pas toujours s'imaginer -
c'est peut-être cela le danger du raisonnement - que cela va toujours
être des superficies inférieures à 600 hectares.
M. Charbonneau: Très bien. Sauf qu'on s'entend sur
l'objectif: Plus le système de détection est bon, plus il est
sophistiqué, plus on va être en mesure de détecter avant
que cela atteigne des superficies trop grandes.
M. Godbout: Oui.
M. Charbonneau: Dans le fond...
M. Godbout: En supposant que les traitements puissent
contrôler le phénomène.
M. Charbonneau: Oui, oui.
M. Godbout: Ce n'est pas toujours le cas, il faut faire
attention.
M. Charbonneau: Je fais la distinction entre la détection
et, après cela, l'utilisation des produits.
M. Godbout: C'est parce qu'il peut y avoir des
phénomènes d'épidémie, si on veut - on parle des
insectes, je pense bien, en pratique - mais qui peuvent être relativement
envahissants et qui font que même une lutte ne pourra pas
nécessairement les arrêter. C'est vrai, c'est tout à fait
louable de faire comme pour les incendies de forêt; c'est correct.
Parfois, il y en a un qui s'échappe parce que c'est bien sec, il y a du
vent et de la boucane, etc., mais, sur le lot, c'est correct, je pense que
c'est logique. En fait, cela va d'emblée, je pense, dans le sens du
mémoire. Il y a des produits homologués et il faut pouvoir
intervenir. On poursuit la recherche pour améliorer les méthodes;
il ne faut pas s'asseoir sur notre derrière et attendre, mais utilisons,
pour l'instant, ce qui est reconnu, ce qui est accepté par tout le monde
pour intervenir le plus vite possible.
M. Charbonneau: C'est cela, mais j'ai fait cette constatation
avec d'autres aujourd'hui et hier parce que je considère que c'est une
des failles les plus importantes dans le document actuellement en discussion,
dans la proposition qui est perfectible. D'ailleurs, c'est pour cela qu'on fait
la commission parlementaire. Si c'était final, on n'aurait pas à
en parler, mais dans la mesure où on n'a pas insisté sur cela,
où on n'a pas fait une analyse critique de notre système de
détection actuel et où l'on ne propose rien pour le corriger,
pour l'améliorer, je me dis: II y a quelque chose qui est comme l'abc
qu'on n'a pas encore abordé.
M. Godbout: En fait, quand on parle d'actions préventives,
de recherche et de développement dans les actions préventives,
cela veut dire sur la forêt et sur les méthodes pour
prévenir les épidémies, c'est tout cela ensemble. C'est un
ensemble de stratégies toujours pour diminuer l'ampleur du
problème, donc diminuer le besoin de moyens correctifs. Tant mieux.
M. Charbonneau: D'accord.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Verchères.
M. le député de Chauveau.
M. Poulin: Oui. Vu qu'il ne me reste qu'une minute, j'aurai juste
une question. En page 7 de votre document, vous prétendez que les
pesticides en forêt n'ont eu aucun impact négatif au cours des 20
dernières années sur la santé humaine ou l'environnement.
Pouvez-vous nous dire aujourd'hui pourquoi on a retiré l'homologation
pour le DDT et le phosphamidon? On se souviendra que le ministre l'a
mentionné lors de la première journée de l'audition: Le
fénitrothion qui a été retiré avait
été retrouvé dans des moules à 50 kilomètres
dans les Maritimes. Donc, à la page 7, vous pariez du DDT, dont
l'homologation a été retirée et vous dites que dans les 20
dernières années il n'y a eu aucun impact négatif sur la
santé humaine.
M. Godbout: Ce que l'on dit - je ne suis pas un
spécialiste, mais à ma connaissance et peut-être qu'on se
trompe - c'est qu'il n'y a eu aucun impact négatif significatif sur
l'environnement. Peut-être qu'on se trompe, il y a peut-être des
cas, mais dans l'ensemble des interventions qui ont pu être faites, je ne
pense pas que l'on puisse dire qu'il y a eu des impacts majeurs sur la
santé humaine en forêt.
M. Poulin: Mais on peut tout de même dire que l'homogation
n'est pas parfaite non plus.
M. Godbout: C'est ce que j'ai dit au départ, elle n'est
pas parfaite, mais si on attend d'avoir un processus parfait, on peut attendre
un bon bout de temps. C'est pour cela que c'est important dans un processus
réaliste d'activité humaine de ne pas viser toujours la
perfection, mais de viser ce qui est faisable pour l'instant, ce qui est
disponible, mais de mettre en place en parallèle un processus de suivi
pour s'assurer que... Peut-être dans dix ans on va trouver qu'un produit
pourrait avoir des problèmes, parce qu'évidemment le suivi sera
un peu plus sévère que ce qu'on utilise en général.
À ce moment-là, cela permettra qu'on ajuste les
stratégies, les produits et, en parallèle aussi, il y a d'autres
méthodes alternatives qui pourront être mises en place et
développées. Il faut le voir dans une phase de
continuité.
Ce que l'on propose dans l'ensemble du document, c'est: Partons avec ce
que l'on a, qui est relativement sécuritaire, faisons un suivi pour
être bien sûrs qu'il n'y a pas de problème en cours de
route, mais en même temps organisons-nous pour développer des
alternatives, des moyens de prévention.
Remarques finales
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Chauveau.
Je tiens à remercier l'Institut forestier du Canada pour son
apport aux travaux de cette commission. Nous en sommes maintenant rendus
à la période de conclusion et je vais reconnaître dans un
premier temps M. le ministre pour de brèves remarques de conclusion.
M. Albert Côté
M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le
Président. Je regrette bien l'absence de mon collègue, le
ministre de l'Environnement, ici aujourd'hui, mais en guise de conclusion il me
paraît important de résumer brièvement l'origine de cette
commission.
En fait, le document de consultation que nous avons
préparé conjointement provient d'un constat. Les règles du
jeu qui ont présidé à la formulation de la Loi sur la
qualité de l'environnement depuis dix ans ont grandement changé.
En effet, nous avons maintenant au Québec un nouveau régime
forestier qui définit des règles de gestion strictes et qui
impose à l'industrie forestière les objectifs de respect et de
polyvalence de la forêt. De plus, nous disposons désormais de la
Loi sur les pesticides, un moyen efficace de contrôle tant sur les
produits que sur leur utilisation et sur les utilisateurs. Enfin, nous sommes
en train de préparer conjointement des codes de gestion qui
définiront les circonstances où les pesticides peuvent être
utilisés, les moyens privilégiés, les règles et les
processus de suivi et de contrôle environnemental nécessaire.
(15 h 15)
Le scénario 2 s'inscrit dans ce contexte puisque, d'une part,
l'industrie est tenue de présenter sa programmation quinquennale en
termes d'aménagement et que, d'autre part, les produits visés
sont connus, sécuritaires et déjà utilisés, tant en
forêt qu'en milieu agricole. J'aimerais vous expliquer ce qu'est, en
somme, ce scénario proposé, qui a fait l'objet d'une large
approbation par les intervenants de cette commission, qu'ils soient de
l'industrie, du milieu de la recherche, de l'enseignement ou, tout simplement,
liés au secteur forestier ou de la conservation.
Ce que nous proposons, en fait, c'est: la possibilité, là
où cela sera nécessaire, d'utiliser le B.t. et le glyphosate sans
étude d'impact, parce que déjà faite dans le cas du B.t.
et recommandée; le respect des codes de gestion qui en balisent
l'utilisation; un processus de planification conforme aux exigences de la
forêt et qui implique la préparation, par l'industrie, de plans
d'aménagement d'un an, cinq ans et vingt-cinq ans, et qui feront
état de toutes les interventions et de tous les traitements; un
processus permanent et rigide de suivi et de révision des deux produits,
dirigé par un comité interministériel, afin de
réévaluer les connaissances relatives à la
toxicité; une étude d'impact obligatoire pour tout autre produit
qui serait requis, afin de faire face à de nouvelles situations et un
processus très strict d'information de la population réellement
concernée par l'utilisation des produits.
M. le Président, vous conviendrez avec moi que ce n'est pas une
carte blanche à l'industrie, en fait, que nous proposons, mais un moyen
sûr, efficace et contrôlé de disposer d'un outil essentiel
à la restauration de la forêt du Québec. Ce moyen contient
également ses propres contraintes et la majorité des gens qui se
sont présentés devant nous au cours des trois derniers jours se
sont engagés à s'y soumettre. Le processus d'homologation a
été l'objet d'interrogations à plusieurs reprises, au
cours des travaux de cette commission. Cependant, jusqu'à preuve du
contraire, c'est encore le meilleur processus que nous connaissons chez nous
et, même, sur le plan mondial. Qu'il y ait lieu de l'améliorer,
nous en sommes tous et toujours. Qui peut prétendre à la
perfection?
Personne, lors de cette commission, pas plus qu'avant d'ailleurs, n'a pu
démontrer que les audiences publiques que nous connaissons peuvent, de
quelque manière que ce soit, modifier ou apporter des
éléments supplémentaires puisque - et je tiens à le
préciser - ce sont les mêmes données techniques et
scientifiques, découlant du processus d'homologation, qui servent de
base aux discussions souvent trop émotives des audiences publiques. Par
contre, ce qui est proposé dans le scénario 2, c'est justement un
mécanisime de suivi et de révision de ces données
techniques, de façon à valider d'une manière continue et
permanente la sécurité de
ces produits qui sont, je vous le précise, pas plus dommageables
dans certains cas que le sel de table.
Les audiences publiques sur les pesticides, compte tenu de
l'émotivité que le sujet suscite, n'ont pas réussi
à clarifier la situation, mais bien au contraire à
accroître la résistance, la crainte ou le traumatisme
déjà manifesté. J'aimerais vous rappeler, à ce
propos, que les tondeuses à gazon et même la bicyclette sont dans
les faits, selon l'échelle de risques sur la santé humaine, plus
dangereux que les pesticides. Nous ne faisons pas d'audiences publiques et
d'étude d'impact sur des sujets aussi dangereux pour la santé
humaine et animale. Cependant, M. le Président, je suis conscient que
l'information de la population constitue une nécessité, un devoir
et un droit. C'est pourquoi nous devons identifier les meilleurs moyens pour le
faire et donner à la population directement concernée la
possibilité de participer à la prise de décision. C'est
pourquoi je peux vous assurer que ma recommandation au conseil des ministres,
après les travaux de cette commission, ira dans le sens d'une
amélioration du scénario 2, de façon à permettre
cette information et cette participation de la population et ceci doit
évidemment toujours se faire de façon expéditive,
efficace, et non au détriment de la santé, de l'écologie
et de l'environnement.
En terminant, je tiens à vous remercier, vous, M. le
Président, et tous les membres de cette commission ainsi que tous les
intervenants externes qui ont, par leur contribution, manifesté leur
intérêt de façon concrète. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre
délégué aux Forêts. M. le député de
Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: M. le Président, je suis un petit peu
déçu de la façon dont le ministre
délégué aux Forêts termine nos travaux de trois
jours. J'aurais souhaité que le ministre fasse un constat plus ouvert
des opinions qui ont été émises au cours de ces trois
derniers jours et qu'au lieu d'utiliser ces quelques minutes pour tenter,
encore une fois, de nous vendre son approche et son scénario qui va
à rencontre, d'ailleurs, du scénario que son collègue a
présenté... On l'a vu à plusieurs reprises, cela a
été une des révélations de cette commission, il y
avait un conflit entre les deux ministres. Ils ont eu au moins la franchise de
le mettre sur la place publique et de le soumettre à la discussion
publique, ce qui est louable, sauf que cela ne règle pas le conflit.
C'est un conflit fondamental et, à notre point de vue, les travaux de la
commission doivent viser, non pas à améliorer votre
scénario et à laisser tomber l'autre, mais ils doivent viser
à trouver un troisième scénario. Un scénario qui va
faire en sorte qu'on puisse lutter efficacement contre les infestations, qu'on
puisse détecter rapidement ces infestations, faire en sorte qu'on soit
vraiment arrimés aux principes directeurs que vous avez formulés
et qui devraient être reformulés, d'ailleurs, en fonction des
recommandations qu'on a faites. Principes fondamentaux directeurs qui sont
tous, au fond, reliés à la Loi sur les pesticides qui propose
qu'on fasse un usage, non seulement modéré, mais réduit de
plus en plus de ces instruments efficaces, peut-être, mais dangereux
aussi et délicats, tout au moins. Et ceci en conservant un acquis
important qu'on a développé au Québec au cours des
dernières années, c'est l'acquis que la gestion des
problèmes environnementaux ou des questions environnementales se fait
par la contribution du public, des citoyens, des gens qui sont concernés
par leur milieu de vie.
Dans ce sens, je vous le dis tout de suite et on l'a dit au
départ, mais, on est plus derrière, à cet égard, la
position qui a été défendue par le ministre de
l'Environnement que la vôtre, sauf que ce n'est pas une religion ni dans
un cas ni dans l'autre. On t'a dit dès le départ, le
scénario 1 présente, à notre avis, des problèmes
aussi de faisabilité qui doivent être pris en considération
et il ne tient peut-être pas suffisamment compte de la
problématique des dangers qui doivent appeler une intervention rapide et
efficace. Tout le monde convient de cela. Je pense qu'il n'y a personne ici qui
peut dire qu'il y a des certitudes. À la suite des travaux des trois
derniers jours, je crois que, maintenant, le défi du gouvernement va
être le suivant. Cela va être le défi, entre autres, du
ministre délégué aux Forêts qui est plus un ministre
à vocation économique, et ce n'est pas un reproche qu'on lui
fait, c'est une constatation. Est-ce que le virage environnemental, cela va
vouloir dire quelque chose pour le gouvernement dans son ensemble, pour le
Conseil des ministres qui aura éventuellement à approuver ou
à arbitrer éventuellement votre conflit entre vous et le ministre
de l'Environnement? Et un virage environnemental qui ne se traduirait pas dans
les faits par le respect des processus qui font en sorte que les citoyens
peuvent intervenir et doivent intervenir pour des raisons qu'on a bien
clarifiées avec un certain nombre d'intervenants à l'occasion de
cette commission dans la gestion des questions environnementales, dans la
gestion de leurs ressources, de leur propriété, de leur milieu de
vie, de leur milieu naturel, ce serait un virage environnemental qui ne
voudrait pas dire grand chose.
Un virage environnemental, cela veut dire que, oui, il faut changer des
pratiques, des habitudes et des mentalités qui se font dans le domaine
économique et qui se sont faites depuis longtemps. Autrement, il n'y en
a pas de virage environnemental. Il y a des gens qui ptacotent sur le virage
environnemental, mais quand cela vient le temps de passer aux actes ils
n'arrivent pas à intégrer les dimensions, les
préoccupations
et les enjeux environnementaux dans la façon dont on se comporte
pour développer l'économie et pour la faire rouler. Il n'y a
personne qui, de notre côté, met en cause le fait que la
forêt est la base d'une industrie importante au Québec, en fait,
l'une de nos principales industries, sinon la plus importante et à la
base aussi de la qualité de vie, de la vie tout court de milliers de
Québécois et de Québécoises, de milliers de
familles, de dizaines de milliers de familles. Cela aussi, cela doit tous nous
préoccuper et cela nous préoccupe, mais il y a moyen et je pense
qu'on a identifié toutes les pistes nécessaires durant ces trois
jours pour permettre aux deux ministres de régler leurs problèmes
et de nous revenir avec un troisième scénario qui fasse en sorte
qu'on ait une véritable politique de lutte contre les ravageurs et la
végétation concurrente intégrée dans un nouveau cap
environnemental et intégrée dans une nouvelle politique
d'aménagement de notre richesse naturelle ou de l'utilisation
économique de notre richesse naturelle que constitue la forêt.
Ce qu'on peut souhaiter, en terminant, M. le Président, c'est que
le gouvernement aille au bout de sa démarche publique,
c'est-à-dire qu'il nous revienne avec un rapport de travail. Une fois
que les deux ministères et les deux ministres auront fait leurs devoirs,
ce qui serait important, c'est qu'ici à la commission, non pas qu'on
fasse un exercice de consultation aussi étendu qu'on l'a fait, mais
qu'on ait un rapport et qu'on puisse en discuter avec les deux ministres et
peut-être éventuellement, avec un certain nombre de personnes
choisies pour voir à quoi aura servi l'exercice qu'on a fait au cours
des trois derniers jours. J'ai l'humble impression, M. le Président,
d'avoir été utile aux travaux de cette commission et
j'espère que notre contribution sera prise en considération par
le ministre délégué aux Forêts et par le ministre de
l'Environnement.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Verchères. Je vais maintenant reconnaître
pour les remarques finales, M. le député de Chauveau.
M. Rémy Poulin
M. Poulin: Merci, M. le Président. Je m'excuse au nom du
ministre qui n'est pas ici. Je suis convaincu qu'il aurait aimé
participer à la conclusion de ces trois jours. Je vais essayer de le
faire le mieux possible.
Si on replace un peu le contexte de la commission, on a eu à se
référer souvent à la loi 150, la loi 27, les
règlements sur les pesticides et les règlements sur
l'évaluation et l'examen des impacts d'environnement. Au niveau
fédéral et ce, malgré ce que dit l'industrie
forestière concernant l'excellence du processus d'homologation, le
ministre de l'Agriculture a créé le comité "aviseur" sur
la lutte antiparasitaire afin de corriger les lacunes importantes du
système actuel. On peut mentionner le rôle important des provinces
dans ce processus, car ce sont elles qui mettent la pression sur le
gouvernement fédéral, puisqu'elles doivent vivre avec les
pesticides sur le terrain, dans les champs et dans les forêts. Ce
comité se penche sur des problèmes tels que les mises à
jour de l'homologation, la publication des données, le retrait des vieux
produits, les normes de protection de la santé, l'intégration de
l'environnement, de la santé et des besoins économiques.
M. le Président, tous ces développements nous
mènent à cette commission parlementaire sur l'usage des
pesticides en forêt. Le ministre de l'Environnement, comme gérant
du domaine des pesticides au Québec, doit voir à la mise en
application des objectifs de la Loi sur les pesticides, c'est-à-dire la
réduction et la rationalisation de l'usage des pesticides. Le ministre
doit coordonner, stimuler, accentuer la recherche, sensibiliser, éduquer
et former le public et les utilisateurs des pesticides. Viennent s'ajouter
à ces responsabilités celles concernant les études
d'impacts environnementaux. Le ministre de l'Environnement est le chien de
garde d'un important mécanisme de consultations publiques.
Depuis trois jours, nous faisons un débat. Nous
réfléchissons sur des mémoires présentés par
différents organismes concernant l'utilisation des pesticides en
forêt. Il est sûr que chaque groupe défend ses
intérêts tout en reconnaissant l'intérêt plus grand
de la société. Cependant, cet intérêt plus grand de
la société est défini de différentes façons
selon l'orientation du groupe qui présente son mémoire.
Cependant, certains mémoires et certaines présentations se
distinguent des autres, prenons, par exemple, le Regroupement pour un
Québec vert, pour la passion de ses nombres, la Fédération
québécoise de la faune qui a présenté un
mémoire réfléchi, élaboré et qui s'adressait
à tous les points soulevés par le document de support. Il y a eu
le Groupe de travail sur les pesticides qui véhicule le point de vue
raisonné d'un groupe d'experts sans pareil au Québec, le Centre
d'enseignement et de recherche en foresterie de Sainte-Foy qui a reconnu en
toute franchise l'importance des études d'impact pour faire avancer nos
connaissances, l'Association des biologistes du Québec qui a fait
ressortir l'importance de la nécessité d'un suivi
environnemental.
Nous avons aussi et ce, surtout le premier jour, entendu l'industrie
forestière. Cette industrie argumente avec vigueur pour la
nécessité d'une plus grande utilisation des pesticides. Face aux
deux hypothèses du travail présentées, l'option du plan
quinquennal avec étude d'impact et l'option B.t. et le glyphosate sans
étude d'impact, l'industrie se prononce d'une seule voix en faveur de la
deuxième option, certains de ses membres ajoutant que d'autres produits
devraient être retirés de l'emprise de ces études
d'impact.
Il semble être clair que le processus d'étude
d'impact peut être bonifié. D'une part, certains promoteurs
y échappent sous le prétexte d'arrosages expérimentaux.
D'autres font une multiplicité d'arrosages sur des superficies
légèrement inférieures à 600 hectares. De l'autre
côté de la médaille, il semble acquis par les membres de
cette commission que, si 200 ou 300 CAAF sont signés par l'industrie
forestière, il est illusoire de croire que le BAPE pourra tenir le
même nombre d'audiences publiques. Pour ces raisons, le ministre de
l'Environnement propose l'option d'une programmation de cinq ans. Il est clair
que cette option doit prévoir des mécanismes pour répondre
aux urgences, qui peuvent être définies dans l'étude
d'impact.
Mais le point fondamental est que cette option permet de conserver un
acquis important pour la population, celui de l'audience publique. D'ailleurs,
je dois constater, à la lecture de plusieurs mémoires, que
l'étude d'impact accompagnée d'audiences publiques, si elle a
été souvent pénible pour l'industrie, joue un rôle
important pour faire évoluer nos connaissances dans ce domaine. À
la fin des années quatre-vingt, le public est sensibilisé
à l'environnement comme il ne l'a jamais été.
L'intégration des principes environnementaux avec ceux qui sont
économiques revêt une importance primordiale. Si l'utilisation des
pesticides en forêt n'est contrôlée que par l'homologation
fédérale, il est peu probable que cette intégration se
fasse. L'étude d'impact est un acquis important, un outil qui nous
permet de juger de la nécessité et de la pertinence de l'usage
des produits qui, ne l'oublions pas, sont toxiques. Sans une certaine remise en
question des choses, sans un mécanisme de débat public, il est
probable que la question de l'utilisation des pesticides tombe dans
l'oubli.
Je remercie tous les participants pour la qualité de leur
présentation et surtout les représentants du mouvement
environnemental qui nous obligent à toujours réfléchir,
à remettre en question, à repenser le rôle de l'être
humain dans le monde. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Chauveau. En guise de conlusion, permettez-moi de vous
remercier, M. le député de Verchères, de même que M.
le ministre de l'Environnement et M. le ministre délégué
aux Forêts, de même que tous les collègues et tous les
intervenants pour m'avoir facilité la présidence durant ces trois
journées. J'ose espérer qu'à partir de tous les
discussions que nous avons eues ici autour de cette table, finalement, nous
pourrons produire un document de travail, une politique qui satisfera
pleinement ce qui est le plus important, l'ensemble de tous nos concitoyens et
concitoyennes.
La commission de l'aménagement et des équipements, ayant
maintenant complété son mandat, soit de poursuivre des
consultations particulières sur le document intitulé "Politique
d'utilisation des pesticides en milieu forestier", ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 15 h 34)