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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mercredi 3 mai 1989 - Vol. 30 N° 75

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions sur le projet de loi 230 - Loi modifiant la Loi constituant en corporation la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay


Étude détaillée du projet de loi 230 - Loi modifiant la Loi constituant en corporation la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay


Journal des débats

 

(Quinze heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Parent, Bertrand): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement et des équipements est maintenant ouverte. Je rappelle le mandat de la commission cet après-midi. Il s'agit d'entendre les intéressés et, par la suite, procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 230, Loi modifiant la Loi constituant en corporation la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Baril (Rouyn-Noranda) est remplacé par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata); Mme Juneau (Johnson) par Mme Blackburn (Chicoutimi) et M. Paré (Shefford) par M. Brassard (Lac-Saint-Jean).

Organisation des travaux

Le Président (M. Parent, Bertrand): Je vous remercie.

Une voix:...

Le Secrétaire: Vous êtes membre d'office en tant que parrain du projet de loi.

Une voix: ...objection au projet de loi.

M. Garon: Au contraire, celui qui présente le projet de loi n'a pas à être d'accord avec le projet de loi. Il ne fait que le présenter...

Le Président (M. Parent, Bertrand): S'il vous plaît! On va essayer de procéder dans l'ordre cet après-midi. Avant de commencer, je demanderais la collaboration de tout le monde, des députés de pan: et d'autre et aussi des intervenants. Un temps limité nous est alloué, c'est-à-dire jusqu'à 18 heures, pour tenter d'aller de l'avant, pour la consultation et l'étude détaillée du projet de loi article par article. Considérant qu'il y a une consultation à l'intérieur même de cette étude qui doit se faire, parce qu'il y a différents groupes d'intervenants, on devra essayer de composer avec le temps que nous avons.

M. Garon: M. le Président.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M. le député de Lévis.

M. Garon: Je dois dire que, habituellement, quand un projet vient devant une commission parlementaire, il n'y a pas d'opposition. C'est arrivé une fois où il y avait de l'opposition à la commission parlementaire à laquelle je participais, une opposition très faible. On voulait une modification a une clause, on a proposé, à ce moment, un changement à la clause et tout le monde avait été d'accord. C'est un cas particulier où il semble y avoir plusieurs opposants.

M. le Président, comme il s'agit d'un projet de loi d'intérêt privé, c'est un peu le rôle de la commission de bien comprendre de quoi il s'agit et de pouvoir avoir un éclairage complet par rapport au projet de loi. Souvent, quand le débat est bien fait en commission, les gens arrivent à s'entendre entre eux.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Je vous remercie, M. le député de Lévis. Effectivement, ce qu'on aura à vivre est un peu spécial. C'est pour ça que j'ai demandé la collaboration de tout le monde afin que ça se déroule très bien. Je pense qu'on va réussir à s'entendre.

D'abord, il y a, bien sûr, le parrain du projet de loi, le député de Dubuc, qui va faire sa présentation, nous faire valoir son point de vue. Suivront le ministre responsable, le ministre des Transports, de l'étude de ce projet de loi et le porte-parole de l'Opposition en cette matière, le député de Lévis. S'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir, Hs pourront le faire au tout début, lors de la présentation. Par la suite, nous entendrons le procureur du requérant, Me Guy Wells, pour une présentation.

Que ce soit le procureur ou les différents intervenants qui sont en quatre groupes, on vous demande de vous limiter, si possible, à une présentation maximale de 20 minutes, qui est, normalement, le temps de parole de chacun des parlementaires. Il y aura ensuite des questions de la part des députés. S'il n'y en a pas, on procédera avec le groupe suivant. Il faudrait s'entendre pour procéder à l'intérieur d'un bloc de 20 minutes pour chacune des présentations, qui est le droit de chacun des parlementaires ici.

Alors, après avoir entendu la présentation du procureur de la requérante, Me Wells, nous entendrons dans l'ordre suivant, pour leur présentation générale: M. Guy Gilbert; par la suite, le groupe de la Ferme Laterrière inc, M. Tremblay et M. Desforges composant ce groupe; un troisième groupe, la succession Chouinard-Brisson; ensuite, l'autre groupe formé de MM. Simard, Maltais, Grenon et Mme Gauthier, représenté par le procureur, Me Françoise Gauthier; finalement, un cinquième groupe, MM. Botvin et Gobeil.

Dans cet ordre-là et si tout le monde collabore, lorsqu'on aura fini d'entendre les différents groupes d'opposants dans le contexte assez spécial d'un projet de loi privé, nous pourrons immédiatement procéder, à l'intérieur du temps qui nous est dévolu à cette commission, c'est-à-dire jusqu'à 18 heures, à l'étude article

par article du projet de loi avec la réglementation habituelle. Dans ce sens et sans plus tarder, ]e vais Inviter le parrain du projet de loi d'intérêt privé 230, M. le député de Dubuc.

Remarques préliminaire*

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Vous me permettrez d'abord de saluer les représentants d'Alcan, de même que tous les représentants des groupes intéressés et désireux de présenter leurs opinions sur le projet de loi privé 230. La compagnie Alcan m'avait contacté il y a déjà quelques années pour présenter ce projet de loi. On sait l'importance de cette compagnie au Québec, mais particulièrement dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et plus spécifiquement dans le comté de Dubuc. J'étais, à un certain moment, député d'un comté où se retrouvaient deux usines d'Alcan. C'est à ce titre, évidemment, qu'il me fait plaisir de proposer ce projet de loi 230. Il est bien évident, comme l'a dit mon collègue, que c'est ainsi qu'on procède depuis toujours. Lorsqu'il s'agit d'un projet de loi d'Intérêt privé, il y a nécessité qu'il y ait un parrain qui soit un député, ministériel ou de l'Opposition, mais I est aussi entendu que le parrain de ce projet de loi n'est pas nécessairement et automatiquement en accord avec tout ce qui se trouve à l'intérieur de ce projet de loi. Il est très important pour la commission d'entendre toutes les parties afin que, particulièrement, les Intérêts économiques dans le cas d'Alcan soient accordés à la compagnie, comme il est aussi Important que les intérêts des citoyens mis en cause soient également satisfaits. Je pense que c'est à l'intérieur d'un processus prévu par notre règlement qui nous permet et qui assure aux deux parties de pouvoir faire valoir, devant les députés, les motifs qui viennent soutenir soit leur accord ou leur désaccord à un projet de loi. C'est ce que nous avons à faire cet après-midi.

Cela dit, en terminant, dans le cas présent, pour les députés qui sont moins familiers, la compagnie Alcan construit, au moment où on se parle, une usine de 800 000 000 $, à Latenière, d'une capacité de 200 000 tonnes métriques et, au point de vue économique, c'est inutile d'en dire davantage, comme vous pouvez le constater.

Donc, M. le Président, c'est avec plaisir que je propose aux membres de notre commission l'adoption du projet de loi 230.

Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le député de Dubuc, je vous remercie de votre collaboration. En tant que parrain du projet de loi, vous avez respecté le temps qui vous était dévolu. J'Inviterais maintenant le ministre à faire la même chose.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. L'introduction et ia conclusion du député de Dubuc traduisent bien son état d'esprit vis-à-vis de ce projet de loi, en étant le parrain et en concluant qu'y en proposait l'adoption. Mais ce n'est pas l'objet de mes propos; je ne voudrais pas embarrasser le député de Dubuc. Il y a des gens qu'on doit entendre afin de savoir la vérité. Et lorsqu'il parlait d'Alcan comme l'un des moteurs économiques du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il avait parfaitement raison. Tout le monde rêverait d'avoir une compagnie comme celle-là dans son comté. Ce n'est pas possible à Charlesbourg, y n'y a plus suffisamment de place.

Je veux tout simplement vous rappeler certains éléments indispensables à notre bonne compréhension de ce qui va se dérouler au cours des prochaines heures. Ce n'est pas un projet nouveau. Cela date de 1982-1983, au moment où Alcan avait l'intention de moderniser ses Installations à Laterrière et, en 1984, à l'époque de la crise économique, les prix de l'aluminium ont fait en sorte que le projet a été retardé. Dès 1982-1983, il y avait eu de la part des propriétaires l'autorisation d'arpenter les terrains sans donner les droits exigibles pour fins de passage; c'est une autre histoire sur le plan des coûts d'expropriation.

On se retrouve donc, en 1986, avec le projet de loi qui est relancé et la nécessité de relier, par sa filiale, la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay, sur une longueur de 14 kilomètres, son usine de Laterrière qui devenait extrêmement importante. Parallèlement à tout cela, Alcan a fait ce qu'elle devait faire sur le plan de ses démarches auprès de la CPTA et du BAPE, des démarches respectueuses des lois agricoles et des lois de l'environnement.

Cependant, l'histoire nous dit aussi qu'y y a effectivement de l'opposition de la part des propriétaires. On verra tantôt si elle est justifiée ou non. Chaque fois qu'on se fait prendre un morceau de terre, selon l'endroit où on le prend sur votre patrimoine, cela peut être passablement achalant. Cela peut faire en sorte qu'il ait plus de valeur ou moins de valeur. Règle générale, il y en a toujours un peu moins. C'est cette opposition qui fait qu'aujourd'hui on se retrouve en commission parlementaire pour entendre tous les Intervenants, y compris ceux de ia compagnie et les gens du milieu, qui veulent exprimer leur point de vue dans ce cas. Il faudra toujours garder à l'esprit que, concernant le projet de loi, quant à lui, si ce n'est pas du rail, ce sera du camion et que cela signifiera, sur le plan de la décision qu'on aura éventuellement à prendre, au-delà de 22 000 camions par année entre les deux usines, pas vides, ce qui est encore plus dommageable, mais chargés, sur le plan du transfert des marchandises, que ce soit d'un produit fini, que ce soit de la matière première à transformer ou des alliages. C'est cela qu'il faut garder à l'esprit et il devient extrêmement important d'avoir cela derrière la tête. C'est cela, l'exercice auquel on est conviés, dans un premier temps.

De la même manière, si c'était une

expropriation pour construire un chemin public, on devrait s'assurer, autant que possible, qu'il n'y ait pas de parties lésées. C'est pour ça qu'on va entendre, dans une deuxième partie, des intervenants qui vont venir nous dire ce en quoi ils sont lésés par les procédures de la compagnie, procédures qui ont été faites ou qui n'ont pas été faites. Je pense que c'est l'objectif que nous devons atteindre aujourd'hui en entendant les parties et en donnant la possibilité à la compagnie de nous expliquer un certain nombre de choses pour mieux éclairer les décisions qu'on aura à prendre, par la suite, comme commission, sur chacun des articles. Il n'est pas question de faire de politique avec ça. Il faut davantage reconnaître qu'il y a un besoin sur le plan du transport, un transport ferroviaire qui est beaucoup moins dommageable au réseau routier qu'un transport routier, et que, d'autre part, il y a des citoyens qui sont propriétaires de terres et qui ont des droits à faire valoir auprès de la compagnie. En cours de route, on pourra poser des questions pour savoir si la compagnie a fait tout ce qu'elle avait à faire sur le plan de ses responsabilités vis-à-vis des gens à être expropriés, en particulier depuis 1983. Au-delà de tout ça, la commission décidera ce qu'elle a à faire.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. le ministre des Transports. J'ajouterai tout simplement...

M. Garon: M. le Président.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, votre tour s'en vient, M. le député de Lévis, vous êtes le suivant sur la liste. J'ajouterai tout simplement qu'à titre de président de cette commission je veux faire réaliser non seulement aux parlementaires, qui en sont assez conscients, mats aux gens présents, que notre processus parlementaire et démocratique permet, finalement, à des gens de se faire entendre, de faire valoir leur point de vue. Même si le projet de loi 230 n'est pas un projet de loi qui comporte 300 articles - il n'en comporte que 3 - c'est un projet de loi qui a quand même beaucoup d'Importance. Dans ce sens-là, au cours de la période qui est dévolue, cet après-midi, pour prendre toutes les mesures nécessaires afin que les parlementaires qui auront à prendre des décisions puissent être éclairés, je pense que la consultation doit se faire et qu'elle est saine pour tout le monde.

Alors, sans autre commentaire, je demanderais maintenant au député de Lévis, le porte-parole officiel en matière de transport, de prendre la parole. M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, j'ai été heureux d'entendre le ministre adopter une position que j'ai adoptée à plusieurs reprises, c'est-à-dire que, lorsqu'il manque de chemins de fer, les routes écopent davantage. A la suite des coupures du gouvernement fédéral touchant les chemins de fer, c'est justement ce que je lui disais: quand on parle de couper 1000 kilomètres de chemins de fer au Québec, les routes vont écoper. La preuve, c'est que lorsqu'il s'agit de Terre-Neuve, pour à peu près le même nombre de kilomètres de chemins de fer, 1169 par rapport à 1000 kilomètres au Québec, le gouvernement fédéral a signé une entente de 800 000 000 $ par laquelle ce dernier mettra 700 000 000 $ pour réparer le réseau routier de Terre-Neuve. Je suis content de voir que le ministre admet maintenant cette position et qu'il dise, à ce moment-ià, que ce qui va sur les rails ne va pas sur les routes et que la route en économise autant. Maintenant, il faudrait que ce soit un principe général qui s'applique dans toutes les régions du Québec et dans tous les cas où les chemins de fer sont mis de côté.

Concernant le projet de loi, je pense bien qu'il n'y a personne qui soit en désaccord avec le projet d'investissement d'Alcan, mais il faut que les choses soient bien faites. On se rappelle, il y a un certain nombre d'années - c'était à refaire, par exemple - les barrages d'électricité. On n'est pas certains aujourd'hui si le lac Saint-Jean serait un lac qui connaîtrait la même configuration qu'il a connue lorsque les eaux ont été surélevées et ont détruit un grand nombre de terres sur tout le pourtour du lac il y a plusieurs années. Mais les connaissances du temps et la conscience des problèmes du temps ont fait en sorte qu'il y a des choses qui ont été faites qui n'auraient peut-être pas dû être faites. Et, aujourd'hui, parce qu'un projet est bon, il faut que les moyens pour le réaliser soient bons également.

Dans le projet de loi, il y a deux choses qui nous ont frappés. Il y a des autorisations qu'on demande qui sont normales, parce qu'il faut des autorisations pour faire certaines choses, la loi le prévoit, mais, dans certains autres cas, il s'agit de dérogations et, quand on demande à déroger aux stipulations publiques des lois, à ce moment-là, il faut bien voir à ce que des gens ne soient pas lésés par ces dérogations-là. Alors, c'est le but de notre commission parlementaire. Je vais vous dire que la plupart du temps on conseille aux gens de s'entendre avant de venir nous rencontrer, c'est toujours plus simple. Une commission parlementaire, surtout quand il s'agit d'un projet de loi privé, n'aime pas beaucoup, habituellement, s'ériger en arbitre, parce qu'il s'agit essentiellement de droits privés, même s'ils sont importants. À ce moment-ià, le mieux est souvent que les gens en arrivent à des ententes avant de venir nous rencontrer. Mais, comme on est dans la situation d'entendre les gens, comme cela arrive, c'est-à-dire ceux qui proposent le projet de loi, ceux qui veulent faire adopter le projet de loi et ceux qui s'y opposent, notre rôle va être, au fond, de faire la lumière sur toute cette question en souhaitant qu'il

puisse y avoir un consensus. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. le député de Lévis. Je vous ferai remarquer que tout le monde a respecté le temps qui lui était dévolu. Alors, on Inviterait maintenant Me Guy Wells, procureur de la requérante, la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay, une filiale d'Alcan aluminium Itée. Me Wells, bienvenue!

Auditions Compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay

M. Wells (Guy): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. membres de la commission, tout d'abord, il me fait plaisir de vous présenter les représentants de la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay qui m'accompagnent aujourd'hui pour la présentation de ce projet de loi. À ma gauche, M. Frank Farago, administrateur délégué à Alcan pour le projet de l'usine Laterrière, et, à ma droite, Me Pierre Cossette, conseiller juridique de la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay et d'Alcan aluminium Itée.

C'est avec plaisir que nous nous présentons devant vous aujourd'hui pour vous présenter notre projet de loi privé et vous expliquer le processus et les étapes qui ont été suivies par la requérante dans le cheminement de son projet de construction d'un embranchement de chemin de fer. La requérante, la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay, a été incorporée en vertu de la Loi sur les chemins de fer du Québec, le 24 mars 1911. Elle est une filiale à part entière d'Alcan aluminium itée et elle exploite un réseau de chemin de fer desservant ses usines d'Alma, de Jonquière, de La Baie et ses Installations portuaires de Port-Alfred. La plupart des matières premières nécessaires à la production de ses usines et les lingots produits sont transportés par le chemin de fer de la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay. Comme vous le savez, Alcan aluminium itée construit actuellement un nouveau complexe industriel, une nouvelle aluminerie à Chicoutimi, d'une capacité éventuelle de 200 000 tonnes métriques, au coût d'environ 750 000 000 $, et qui porte le nom d'usine Laterrière. Selon nos informations, c'est actuellement le plus gros chantier de construction au Québec. Il est prévu que cette usine entrera en activité en quatre phases, dont la première en décembre 1989, c'est-à-dire dans quelques mois. La troisième phase sera en activité en décembre 1990, et la capacité de production sera alors de 150 000 tonnes métriques. Selon l'échéancier de la compagnie, I est prévu que le transport ferroviaire devra débuter avec la mise en activité de cette troisième phase. Pour ce faire, la construction du chemin de fer devrait être entreprise au cours de l'année 1989. L'embran- chement que la compagnie demande à l'Assemblée nationale d'être autorisée à construire reliera l'usine Laterrière au réseau actuel du chemin de fer de la compagnie à La Baie. Cet embranchement d'environ quatorze kilomètres permettra l'approvisionnement de l'usine Laterrière en alumine et en fluorure en provenance des usines de Jonquière et l'acheminement de lingots d'aluminium de l'usine Laterrière aux clients de l'Alcan, le tout à raison d'environ 600 000 tonnes métriques par année. (16 heures)

Le projet de loi présentement à l'étude vise essentiellement à autoriser la construction de cet embranchement. En effet, la Loi sur les chemins de fer exige une modification à la charte de la compagnie de chemin de fer lorsque la longueur d'un embranchement à construire excède dix kilomètres. De plus, la Loi sur les chemins de fer permet d'exproprier une largeur normale de 30 mètres, pouvant atteindre jusqu'à 137 mètres en certaines circonstances. Accessoirement, la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay demande donc que ce pouvoir d'exproprier prévu à la loi soit modifié pour lui permettre de prendre toute la largeur qui lui est nécessaire car, à certains endroits, la largeur prévue à la Loi sur les chemins de fer est insuffisante en raison de contraintes d'ordre technique. D'autres modifications mineures sont apportées par le projet de loi et nous pourrons les expliquer, si nécessaire, à l'occasion de l'étude article par article du projet.

La construction du chemin de fer projeté requiert plusieurs autorisations. En effet, comme une bonne partie des terrains qui seront traversés par la ligne de chemin de fer font partie d'une zone protégée en vertu de la Loi sur la protection du territoire agricole, nous avons demandé une autorisation à la Commission de protection du territoire agricole que nous avons obtenue le 16 novembre 1988, sans opposition des propriétaires concernés et avec l'appui de l'Union des producteurs agricoles de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. L'autorisation du ministre des Transports est également nécessaire pour la construction du chemin de fer et la compagnie a obtenu cette autorisation le 22 décembre 1988.

Finalement, la construction d'un chemin de fer est soumise à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, procédure prévue à la Loi sur la qualité de l'environnement. Cette procédure comprend une période d'information et de consultations publiques et elle permet au ministre de demander au Bureau d'audiences publiques de tenir une enquête. Effectivement, le Bureau d'audiences publiques a reçu du ministre de l'Environnement, le 24 avril dernier, le mandat de tenir des audiences publiques, dont la première partie aura lieu les 23 et 24 mai prochain, à Laterrière, et la deuxième partie, vraisemblablement, durant la troisième semaine de juin. À ces occasions, toute personne intéressée pourra exprimer ses préoc-

cupations sur l'ensemble des aspects du projet tel que soumis au ministère de l'Environnement. C'est finalement le gouvernement qui, sur réception du rapport du Bureau d'audiences publiques, décidera d'émettre le certificat d'autorisation fixant le tracé du chemin de fer d'embranchement.

Étant donné l'échéancier très serré de la construction, il était nécessaire de poursuivre le processus d'autorisation législative, pour lequel on est devant vous aujourd'hui, parallèlement au déroulement de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. Afin d'assurer la cohérence entre ces deux démarches, le projet de loi prévoit qu'une fois la construction autorisée par l'Assemblée nationale le tracé définitif de la ligne sera celui prévu au certificat d'autorisation émis en vertu de l'article 31.5 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Il est également prévu que l'entrée en vigueur du projet de loi se fera à une date ultérieure fixée par le gouvernement. Le ministère de l'Environnement du Québec nous a signifié, par écrit, son accord avec cette façon de procéder. Ce projet est connu des propriétaires concernés depuis de nombreuses années, puisqu'il a fait l'objet de trois séances d'information publiques depuis 1984. La compagnie du chemin de fer Roberval-Sague-nay a actuellement pris des ententes sous forme d'option d'achat avec plus de la moitié des propriétaires privés dont les terrains seront traversés par l'embranchement projeté. Les négociations se poursuivent toujours avec les autres propriétaires.

En conclusion, M. le Président, les aspects de nature agricole et technique ont déjà reçu les autorisations du ministère des Transports et de la Commission de protection du territoire agricole. Les aspects environnementaux feront l'objet d'audiences publiques dans les prochaines semaines, conformément aux dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Toutes ces autorisations obtenues ou à obtenir sont sujettes à une modification de la charte de la compagnie du chemin de fer Rober-val-Saguenay pour qu'elle soit autorisée à construire un chemin de fer d'embranchement de plus de dix kilomètres. C'est cet aspect fondamental du projet qui est maintenant soumis à votre considération.

Nous tenons à vous remercier de nous avoir permis de présenter ce projet de loi.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Me Wells. À ce stade-ci, j'aimerais peut-être qu'on puisse entendre les différents groupes d'intervenants. Je vais demander au premier groupe, tel que convenu, de faire sa présentation. Il y aura échanges de vues ou questions, s'il y a lieu, avec les parlementaires.

Je demanderais à Me Guy Gilbert et à M. Jeannot Tremblay de s'approcher.

Pour la bonne compréhension de tout le monde, j'ai proposé qu'on entende les inter- venants. On va revenir avec Alcan avant de procéder à l'étude détaillée, article par article, du projet de loi.

M. Garon: ...peut-être quelques questions à poser, au début.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui.

Bien, écoutez, je n'ai pas d'objection. Si on veut immédiatement interroger Alcan, on passera aux intervenants après. Peut-être que ça peut apporter aussi de l'éclairage aux intervenants.

M. Garon: Oui.

Le Président (M. Parent, Bertrand): On peut permettre des interventions pendant que Me Wells est là, avec ses collaborateurs. Cela va peut-être permettre d'apporter des réponses aux questions qui se poseront tantôt. Est-ce qu'il y a des parlementaires, des membres de la commission qui veulent intervenir?

M. Côté (Charlesbourg): Je vais peut-être laisser la chance au parrain du projet de loi 230 d'ouvrir le débat, s'il le souhaite. Sinon...

M. Desbiens: Les questions que j'ai à poser sont d'ordre technique. S'il y a des questions d'ordre général, d'abord...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce qu'on a des questions? M. le député de Lévis, est-ce que vous avez une question?

M. Garon: J'aimerais poser une question immédiatement pour ne pas tourner autour du pot, mais plutôt y aller directement. Il y a des opposants qui vont parier, tout à l'heure. Comme vous allez avoir ia chance de revenir, eux ne reviendront sans doute pas après, à moins que la commission ne le juge nécessaire. J'aimerais savoir quels sont les points de désaccord qui font qu'actuellement des gens s'opposent à certaines parties, à votre point de vue - vous avez dû les rencontrer - de ce projet de loi.

M. Wells: La compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay est, évidemment, en négociation pour obtenir des ententes sous forme d'option d'achat pour le tracé du chemin de fer qui passe sur les terrains des opposants. Les négociations avec la majorité d'entre eux sont encore en cours, actuellement. Ce qu'on a appris de la part des médias d'information, au cours des derniers jours, c'est que, principalement, les opposants ont l'impression que ce que nous demandons avec le projet de loi, c'est d'avoir le droit d'exproprier alors que notre charte ne nous donnerait pas le droit d'exproprier.

Or, comme je l'ai dit tout à l'heure dans la présentation, la Loi sur les chemins de fer prévoit le droit d'exproprier pour l'entreprise. Ce qu'on demande, c'est qu'à cause de consi-

dérations d'ordre strictement technique à certains endroits... La largeur que la loi permet d'exproprier n'est pas suffisante et on a besoin, à quatre ou cinq endroits, d'avoir une largeur additionnelle pour permettre la construction du chemin de fer.

On pense qu'il y a peut-être une ambiguïté qui existait dans la présentation de notre projet de loi. Il est bien sûr qu'il y a différents problèmes d'ordre environnemental qui seront étudiés par le Bureau d'audiences publiques. On sait que certaines des personnes qui sont ici, aujourd'hui, pour intervenir sur notre projet de loi ont demandé la tenue d'audiences publiques, mais la tenue de ces audiences aura lieu dans les prochaines semaines. À ce moment-là, tous les aspects environnementaux du projet seront soumis à la considération de la commission. Toutes les personnes qui sont intéressées, directement ou indirectement, par notre projet auront l'occasion d'obtenir toutes les informations qu'elles veulent obtenir d'AIcan, si elles ne les ont pas déjà eues, parce qu'il faut se rappeler qu'il y a eu trois séances d'information avec tous les propriétaires concernés, à l'occasion desquelles on a eu l'occasion de répondre à toutes leurs interrogations. On aura encore l'occasion de le faire, lors des audiences publiques sur l'environnement.

M. Garon: Cela veut dire que la loi ne vous donne pas un pouvoir absolu d'exproprier. C'est le pouvoir avec l'autorisation du ministre.

M. Wells: Oui, d'accord. En fait, le pouvoir d'expropriation prévu à la loi est soumis aux mêmes règles que n'importe quel autre pouvoir dans les autres lois, c'est-à-dire qu'il est soumis à l'application de la Loi sur l'expropriation. Donc, ça prend un décret gouvernemental pour permettre l'exercice de ce droit. C'est bien clair qu'actuellement on ne demande pas de modification à ce droit d'expropriation qui est prévu dans la loi. Il est bien évident que la compagnie va suivre tout le processus régulier, normal dans les circonstances où une expropriation est prévue dans une loi et où l'expropriant doit s'adresser au gouvernement pour obtenir l'autorisation d'exproprier.

Il est bien clair que cette autorisation sera demandée, si nécessaire, parce qu'il faut bien se rendre compte qu'Alcan a construit, au cours des dernières années, le projet Grande Baie. Elle a construit également une ligne de transmission entre Jonquière et Latenière. En vertu de la Loi sur le régime des eaux, encore là, Alcan avait le droit d'exproprier, sous réserve d'autorisation du gouvernement. Finalement, cette construction s'est faite par l'acquisition, de gré à gré, de tous les terrains. Pour la construction de l'usine de Laterrière où il n'était pas prévu un pouvoir d'expropriation, Alcan s'est entendue avec tous les propriétaires concernés et a acquis, de gré à gré, tous les terrains dont elle avait besoin pour l'érection de cette usine.

C'est l'intention de la compagnie de prendre tous les moyens nécessaires pour tenter d'en arriver à une entente avec tous les propriétaires concernés. C'est pourquoi on dit que les négociations sont encore actuellement en cours. Les négociations avec la majorité de ces gens ne sont pas rompues. Elles sont en cours. Mais, évidemment, le projet de loi est nécessaire pour nous permettre d'avoir l'autorisation requise pour construire l'embranchement.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Me Wells. M. le député de Lévis.

M. Garon: En vertu de la loi, vous pouvez exproprier, avec l'autorisation du ministre, dans des limites restreintes.

M. Wells: Un corridor de 30 mètres.

M. Garon: Maintenant, vous demandez qu'il n'y ait plus de limite par rapport aux largeurs sur toute la distance de quatorze kilomètres.

M. Wells: Non, non. On demande que ce corridor de 30 mètres, à certains endroits bien spécifiques, soit élargi. C'est aux endroits où la configuration des lieux fait en sorte que le niveau des rails doit se trouver à plus de 152 centimètres au-dessus ou au-dessous de la surface des terrains adjacents. C'est seulement dans cette circonstance que la largeur pourrait être supérieure à 30 mètres et, selon les études que nous avons faites, ça se produit seulement à quatre endroits sur le tracé.

M. Garon: Je comprends, mais il y a un amendement à votre projet. Moi, j'ai eu un projet de modification au projet de loi 230. Cela m'apparaît aller plus loin que le projet de loi 230, au paragraphe 7.

M. Wells: Non. M. le député, ça va même un peu moins loin parce que là on prévoit uniquement sur la question de la largeur. On a apporté des précisions quant au pouvoir d'exproprier, quant à ce pouvoir. Avant ça, dans le projet de loi 230, on demandait 35 mètres. Finalement, après les études qu'on a faites, il s'avère que le corridor de 30 mètres est suffisant. C'est pour ça qu'on propose une modification au projet de loi 230, pour que ce ne soit pas nécessaire d'avoir 35 mètres pour le corridor. Les 30 mètres qui sont prévus à la loi sont suffisants, sauf à certains endroits - c'est ce qu'on disait dans le projet de loi 230 - là où le niveau des raiis doit se trouver à plus de 152 centimètres au-dessus ou au-dessous de la surface des terrains adjacents. À ce moment-là, uniquement dans cette circonstance qui se produit à quatre endroits, on demande que la largeur soit plus grande. Quant au reste du tracé, pour 90 % ou 95 % du tracé, le corridor qui est prévu dans la

loi est suffisant pour nos besoins.

M. Garon: Les points où vous ne vous entendez pas avec les intervenants, ce sont des points de localisation du tracé ou... Quels sont les points?

M. Wells: En principe, je pense qu'on peut répondre qu'il n'y a pas tellement de problèmes sur...

M. Garon: J'aime autant savoir votre point de vue. Après ça, quand les intervenants vont passer, on va savoir le leur.

M. Wells: Pour un groupe, le terrain est peut-être le plus important, il y a vraisemblablement une question de tracé. Mais nous, la perception qu'on a des choses, c'est que, pour l'ensemble des groupes, c'est une question de négociations quant à l'évaluation des dommages qui devraient être compensés par l'entente qui devrait être prise.

M. Garon: C'est avec quel groupe que la localisation...

M. Wells: C'est avec la succession Choui-nard-Gilbert que la localisation peut peut-être présenter un problème. Quant aux autres, la localisation cause certains inconvénients, mais la négociation va permettre de compenser ces inconvénients. Entre autres, II y a un des intervenants, aujourd'hui, dont une partie de sa terre est traversée par le chemin de fer. Cela cause évidemment des inconvénients, mais on est en négociation pour justement faire l'évaluation de cet inconvénient et le compenser en conséquence. En fait, il faut bien comprendre une chose, aussi. C'est que le tracé projeté va faire l'objet des audiences publiques sur l'environnement. À ce moment-là, le Bureau d'audiences publiques va avoir à se prononcer sur le tracé également, à la suite des interventions de toutes les personnes qui sont intéressées quant au tracé. (16 h 15)

M. Garon: Quand les gens s'entendent, ils peuvent trouver le tracé de moindre inconvénient. Par exemple, c'est toujours mieux quand ça passe au bout des terres plutôt que de passer dans le milieu. Je vous donne un exemple comme celui-là. Des fois, quand les gens s'entendent, ils s'entendent sur un tracé de moindre inconvénient plutôt que sur un tracé qui présente plus de problèmes.

M. Wells: Mais on peut vous dire, à cet égard, M. le député, que le tracé projeté a été conçu en fonction de causer le moins d'inconvénients possible, en tenant compte de toutes les caractéristiques de l'environnement et les caractéristiques techniques aussi pour la construction du chemin de fer. À notre point de vue, le tracé proposé est celui qui présente le moins d'inconvénients, sous tous les aspects qui ont été pris en considération. Évidemment, pour certains, ça peut causer un problème. C'est à cet égard qu'on tente d'évaluer la valeur économique de ce problème et d'établir une compensation, de gré à gré.

M. Garon: Est-ce qu'il y a eu plusieurs rencontres pour en arriver à des ententes avec les intervenants?

M. Wells: Oui, il y a eu un grand nombre de rencontres avec les intervenants pour négocier le droit de passage demandé par Alcan. Il faut dire aussi qu'au point de vue agricole le tracé a été accepté par 'a Commission de protection du territoire agricole, sans opposition des intervenants en ce qui a trait à la localisation du tracé, ainsi qu'avec l'accord de l'Union des producteurs agricoles qui a trouvé que le tracé proposé était celui qui représentait le moins d'inconvénients sur le plan agricole.

Le Président (M. Parent, Bertrand): D'autres questions, M. le député de Lévis?

M. Garon: Combien y a-t-il eu de rencontres avec chacun des intervenants, surtout ceux qui ne sont pas d'accord?

M. Wells: Je demanderais à Me Cossette de répondre.

M. Cossette (Pierre): J'ai participé personnellement à plusieurs rencontres. On peut dire que deux ou trois rencontres ont eu lieu. Actuellement, je peux vous dire qu'on a fait des offres à tous les propriétaires et on attend des réponses de leur part. Certains ont pris des évaluateurs...

Des voix:...

Le Président (M. Parent, Bertrand): S'y vous plaît, je demanderais la collaboration de tout le monde. Chacun aura son tour pour s'exprimer.

M. Cossette: Les gens se sont choisi des évaluateurs. Nous avons dit exactement où on logeait. On attend des gens... Évidemment, on ne peut pas connaître les dommages sans que les gens nous en parient. Alors, on attend actuellement, de leur part, une quantification de ces dommages pour pouvoir faire des contre-offres.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce que cela va, M. le député de Lévis? Y a-t-il d'autres questions? M. le député de Dubuc, vous avez des questions?

M. Desbiens: Je vais en poser une dans le même sens, en attendant. Vous parlez de négo-

ciations et de propositions. Est-ce que ce sont des propositions écrites que vous avez faites à chacun des citoyens en cause?

Une voix: Ce ne sont pas des propositions écrites.

M. Garon: Pourquoi?

M. Couette: Écoutez, on rencontre les gens et on discute. On ne veut pas "formaliser" la procédure plus qu'il ne le faut. Quand il sera temps de faire des écrits, on pourra toujours en faire.

M. Garon: Mais vous voulez faire "formaliser* vos droits.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Wells: En fait, M. le député, Alcan a une longue expérience dans l'acquisition de terrains pour la construction de ses usines, et c'est toujours de cette façon qu'on procède. Il y a des rencontres préliminaires pour connaître les objectifs que les gens poursuivent à l'égard de la négociation ainsi que les problèmes qui leur sont causés par le projet d'Alcan. Finalement, au fur et à mesure que les discussions progressent, il est possible de faire une proposition écrite lorsque les négociations sont rendues suffisamment proche. Actuellement, avec certains des intervenants, on n'a pas encore été en mesure d'avoir toutes les autorisations de leur part pour aller visiter les lieux, entre autres. Au fond, on attend d'avoir des rencontres ultérieures avec eux pour être en mesure de discuter de l'ensemble des problèmes que notre projet peut leur causer.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce qu'il y a d'autres Interventions? M. le ministre, vous avez des questions?

M. Côté (Charlesbourg): Oui. M. le Président.

Une voix:... alternance.

M. Côté (Charlesbourg): Ah! Respect du parrain! M. le parrain.

M. Dufour: Vous êtes parrain, vous aussi. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. On en a un.

M. Desbiens: Le parrain des parrains. M. le Président...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M. le député de Dubuc, le vrai parrain.

M. Desbiens: À ce stade-ci, j'aimerais demander à Alcan quelle est la méthode qu'elle privilégie. Est-ce que c'est l'entente de gré à gré ou si c'est l'expropriation?

M. Wells: On peut vous dire que, de façon certaine, M. le député, c'est l'entente de gré à gré. L'histoire des acquisitions d'Alcan dans la région le démontre. Pour la construction de l'usine de Grande Baie, toutes les acquisitions se sont faites de gré à gré. Pour la construction même de l'usine de Laterrière, les acquisitions se sont faites de gré à gré. Pour la construction de la ligne de transmission entre Jonquière et Laterrière, toutes les acquisitions se sont faites de gré à gré. C'est sûr que les négociations sont parfois difficiles, mais l'objectif qui est toujours poursuivi par Alcan et qui a toujours été poursuivi, c'est d'avoir des ententes de gré à gré pour que la population soit satisfaite, finalement, de la façon dont Alcan veut s'acquitter de ses obligations sociales.

La Président (M. Parent, Bertrand): Merci, monsieur. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'aurais peut-être deux questions de deux ordres différents concernant les échéances, parce qu'il y a quand même des échéances. Vous avez évoqué, tantôt, la phase 1, début de production, décembre 1989; décembre 1990, deuxième phase; et la troisième phase par la suite. Cela fait qu'il y a un besoin. Si ça ne se transporte pas sur une voie de chemin de fer, ça se transporte par camion, avec la possibilité de voir 22 000 camions par année ou à peu près sur les routes, chargés, dans ce secteur-là, ce qui m'apparaît un peu inconcevable, à ce moment-ci.

C'est l'échéance ultime, c'est ce que je dois comprendre, sur le plan du... Décembre 1990?

M. Wells: Comme on l'a expliqué tout à l'heure, la capacité de production totale de l'usine sera de 200 000 tonnes; dès la troisième phase, qui sera opérationnelle en décembre 1990, c'est-à-dire dans un an et quelques mois, il va y avoir 150 000 tonnes de produits à transporter. C'est à ce moment-là qu'on considère qu'il sera nécessaire d'avoir le chemin de fer en opération. On doit dire que, d'après notre échéancier, on est déjà en retard, au moment où on se parie, parce qu'on ne peut pas espérer avoir le certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement avant le mois de septembre ou d'octobre. Le Bureau d'audiences publiques a un délai de quatre mois entre le moment où U reçoit le mandat...

M. Côté (Charlesbourg): Au ministère des Transports, on connaît ça un peu. On est soumis à peu près aux mêmes procédures que vous autres, sur le plan des CAR, des CAC, tout ce

que ça comporte. Quel est le temps de construction d'un chemin de fer?

M. Wells: Dix-sept mois.

M. Côté (Charlesbourg): Dix-sept mois.

M. Cossette: Ingénierie et construction, dix-sept mois. C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Vous avez dit, dans vos propos de présentation, Me Wells, que vous aviez des ententes avec la moitié des propriétaires.

M. Wells: C'est exact.

M. Côté (Charlesbourg): Combien de personnes est-ce que ça vise?

M. Wells: Cela veut dire dix propriétaires sur dix-neuf.

M. Côté (Charlesbourg): Ce sont dix propriétaires sur dix-neuf.

M. Wells: En fait, au début des négociations, il y avait vingt propriétaires et on a obtenu... Ce sont vingt-deux propriétaires, si on calcule la ville de La Baie et le gouvernement du Québec.

Une voix: Le gouvernement du Québec.

M. Wells: Mais, des propriétaires privés, il y en avait vingt et, jusqu'à présent... Il y avait vingt propriétés et, jusqu'à présent, on a des ententes pour douze propriétés sur vingt. Mais il y a eu des acquisitions qui se sont faites entre les gens, ce qui fait qu'actuellement on a onze ou douze propriétaires sur dix-neuf.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. On se comprend bien, les principes qui sont demandés dans le projet de loi, ce sont des principes, en particulier, pour régler quatre problèmes pour ce qui est de la largeur pour construire les infrastructures nécessaires au support...

M. Wells: De la voie ferrée.

M. Côté (Charlesbourg): ...de la voie ferrée.

M. Wells: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'est ce que j'ai compris.

M. Wells: Premièrement, avoir l'autorisation de construire l'embranchement et, deuxièmement, avoir ces exceptions aux quatre endroits requis.

M. Côté (Charlesbourg): Et, avant même d'entendre les intervenants - parce qu'on va faire le tour un peu, ça va être l'autre côté de la médaille - vous nous affirmez, à ce moment-ci, que, jusqu'à maintenant, Alcan ou les mandataires d'Alcan ont fait ce qu'il y avait à faire sur le plan d'une bonne relation afin de tenter de régler chacun de ces dossiers.

M. Wells: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Avec les propriétaires, avec les huit qu'il reste...

M. Wells: Avec les propriétaires concernés.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. En tout cas, ce que je souhaiterais, M. le Président, c'est que, lorsqu'on aura entendu les intervenants, on puisse revenir avec les gens d'Alcan pour tenter d'avoir des réponses aux problèmes qui subsisteraient.

M. Wells: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le ministre. Le député de Jonquière a demandé la parole, ainsi que les députés de Lévis et d'Ungava. Alors, je demanderais à tout le monde de collaborer afin qu'on puisse avancer. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Comme il y en a un dont on sait qu'il est pour, il faut bien faire le tour du dossier comme tel par rapport à sa présentation. Vous avez dit, tout à l'heure, que le projet était connu, depuis 1984, des intervenants. J'ai cru comprendre, à un moment, que des piquetages ou des bornages se sont faits sur des terrains. Il semblerait que les propriétaires n'avaient pas donné leur accord. Pour autant que je me souvienne, il y a des gens qui ont semblé se plaindre qu'il y ait eu des piquetages de faits sur leur terrain sans qu'ils aient donné leur permission. Est-ce qu'un pouvoir quelconque vous permettait de le faire? Ma deuxième question qui va se relier à ça est la suivante: Est-ce que, vraiment, les intervenants pouvaient se plaindre de ce qui se passait ou de la ligne tracée puisqu'elle n'était pas connue officiellement au moment où ça se faisait?

M. Wells: Je vais laisser Me Cossette répondre à cette question.

M. Cossette: Écoutez, il est exact qu'on a fait de l'arpentage. La Loi sur les arpentages permet aux arpenteurs qui ont été engagés pour le projet d'aller sur les terrains pour arpenter, parce que, avant de proposer un tracé, K faut connaître un peu la topographie. Il est exact qu'on a fait de l'arpentage.

M. Dufour: Oui, mais est-ce que ça ne met pas en question votre affirmation, à savoir que les gens ne se sont pas opposés au tracé parce

qu'ils ne savaient pas nécessairement ce qui se passait? On aura peut-être l'occasion de leur demander. Mais, à votre connaissance, est-ce qu'il y a des gens...

M. Cossette: Je peux vous dire qu'il y a eu trois séances d'information déjà: le 15 mars 1984, à l'hôtel de vilIe de Laterrière; le 16 mars 1988, à La Baie et, le 2 mars 1989, encore à l'hôtel de vilIe de Laterrière, où le tracé a été expliqué en détail. Des plans ont été donnés à tous les propriétaires qui étaient présents.

M. Dufour: Avec les procédures qui sont engagées, est-ce que vous croyez que la présentation que vous nous faites actuellement doit avoir une réponse immédiate ou si vous croyez... Il y a un échéancier, on a jusqu'au 19 ou 18 juin pour accepter des projets de loi et, comme il ne semble pas y avoir d'élections ce printemps, on a tout le temps, un mois et demi au moins devant nous.

M. Wells: Bien sûr, M. le député, il est nécessaire pour nous d'avoir l'autorisation le plus rapidement possible parce que, d'après notre échéancier, nous sommes déjà en retard. Et plus ça va retarder, plus il va se faire du transport par camion, au fur et à mesure que la production de l'usine va augmenter jusqu'à sa capacité maximale.

Je voudrais apporter un complément à ce que Me Cossette a dit. Si je ne me trompe pas, le problème que vous avez soulevé quant à l'arpentage remonte à peu près à 1980, parce que cet arpentage-là a été fait au début pour permettre de présenter à la Commission de protection du territoire agricole la demande pour que les terrains visés puissent servir à des fins autres que l'agriculture, c'est-à-dire au transport ferroviaire. Effectivement, cette première demande qui a été faite à la Commission de protection du territoire agricole s'est faite en 1982. Dès 1982, tous les propriétaires concernés étalent déjà avisés du projet et savaient que le tracé du chemin de fer passerait sur leur propriété. Ils ont tous été convoqués devant la Commission de protection du territoire agricole en 1982. Finalement, la Commission de protection du territoire agricole a donné son accord au tracé projeté en 1982 et, par la suite, vers les années 1984-1985, à cause de certaines considérations d'ordre technique, le tracé a été modifié à certains endroits. La compagnie a dû faire une nouvelle demande à la Commission de protection du territoire agricole et cette demande-là a connu son aboutissement au mois de novembre dernier au moment où la Commission de protection du territoire agricole a donné son accord aux modifications proposées au tracé. On tient à souligner qu'à l'occasion de ces deux démarches devant la Commission de protection du territoire agricole, tant en 1982 qu'en 1988, il n'y a pas eu d'opposition de la part des exploitants agricoles concernés, et même l'UPA était favorable au projet. En 1988, elle était encore plus favorable parce que les modifications apportées en 1988 avaient encore moins d'impact sur l'agriculture que celles de 1982, même si, en 1982, l'UPA était aussi d'accord.

On peut dire, à notre avis, que les propriétaires concernés connaissent le projet depuis au moins 1982 et savent que le projet va traverser leur propriété.

M. Dufour: Peut-être une dernière question, M. le Président, concernant...

Le Président (M. Parent, Bertrand): J'aimerais juste, M. le député de Jonquière, faire prendre conscience aux membres de la commission, des deux côtés, et aussi aux intervenants qu'il est presque 16 h 30. Il nous reste 90 minutes avant 18 heures et il y a quatre groupes à intervenir. Alors, il faudrait au moins essayer d'accélérer de façon qu'on puisse au moins entendre tous les intervenants, si c'est possible. D'accord? Alors, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: J'ai l'impression, M. le Président, sans abuser du temps, que les autres intervenants vont aller à peu près dans le même sens. Donc, on devrait tenir pour acquis, comme Alcan présente le projet et que nous voulons avoir un peu plus d'information, qu'il y a un intervenant certainement favorable et que les autres devraient s'opposer. Cela dit, pour aider le ministre - je sais qu'il aime ça les commissions parlementaires - il s'agit de le tenir ici le plus longtemps possible.

Des voix: Ha, ha, ha! (16 h 30)

M. Dufour: Ma dernière question: Comment expliquez-vous le temps qui s'est écoulé entre le dépôt du projet de loi... C'est un projet de loi qui m'intéresse puisque cela concerne ma région. Je l'ai suivi depuis le début. Il a été déposé il y a au moins deux ans et ça a pris autant de temps à aboutir ici devant nous.

M. Wells: M. le député, quand nous avons déposé le projet en 1986, il fallait, à l'appui de notre projet, déposer le tracé définitif que la compagnie du chemin de fer proposait. A ce moment-là, I y avait encore des aspects techniques qu'il fallait considérer. Il faut bien se rendre compte qu'on n'a pas pu aller sur le terrain de certains propriétaires et cela pose des problèmes d'ordre technique dans la planification du tracé. En 1986, lorsqu'on a déposé le projet de loi, iI y avait un tracé qui, à ce moment-là, a été déposé également en même temps. Finalement, il a fallu faire des modifications à ce tracé et, en même temps - on se rappellera les conditions économiques qui prévalaient à ce moment - la compagnie Alcan a décidé de suspendre, en 1986, le projet de Laterrière et cette suspension a duré pendant

deux ans. A ce moment-là, il notait donc pas possible, vu que les travaux étaient suspendus, de terminer le tracé, et c'est la raison pour laquelle on a du suspendre le projet de loi également pendant deux ans jusqu'à ce que le projet de Laterrière redémarre vers la fin de 1987. Même actuellement, on a encore un problème. C'est pour cela qu'on prévoit dans le projet de loi que le tracé définitif sera celui qui sera déterminé à la suite des audiences publiques et à l'occasion de l'émission du certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement. Normalement, d'après les règles dont on nous a fait part, il aurait fallu attendre le certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement avant de se présenter devant vous. C'est pourquoi on prévoit, dans le projet de loi, que le tracé définitif sera celui qui sera accepté par le gouvernement en vertu des dispositions de cette loi. Le tracé comme tel posait un problème et c'est la raison pour laquelle, pendant une période de deux ans, il n'était pas possible de le déterminer à cause de la suspension du projet.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le député de Jonquière? M. le député de Lévis, vous aviez demandé la parole.

M. Garon: Quand vous dites que les gens ont été saisis en 1982, de quelle façon ont-ils été saisis individuellement que vous vouliez passer sur leur terrain à tel endroit précisément?

M. Wells: En fait, quand on fait une demande à la Commission de protection du territoire agricole pour être autorisé à faire un usage autre que l'agriculture sur un terrain donné, cette demande est signifiée à chacun des propriétaires concernés. Il y avait des documents qui ont été produits à la Commission de protection du territoire agricole qui démontraient quel était le tracé exact que proposait la compagnie à ce moment. Je ne sais pas si les gens ont reçu une signification du tracé lui-même, mais, à ce moment-là, les documents étaient disponibles à la Commission de protection du territoire agricole pour leur permettre de connaître exactement où se situait le chemin de fer sur leur propriété.

M. Garon: Quand les négociations effectives avec les personnes ou les groupes individuels ont-elles commencé?

M. Wells: Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a eu des rencontres d'information sur le projet à l'intention de tous les propriétaires concernés. Je peux vous donner les dates: en mars 1984, en mars 1988 et en mars 1989. Cependant, on me dit que c'est vers avril 1988, lors de la reprise du projet, que des négociations, véritablement, débutaient avec les propriétaires concernés.

M. Garon: Est-ce quils savaient avant 1988 où passait le tracé exactement?

M. Wells: Oui, ils savaient quel était le tracé projeté depuis... À toutes fins utiles, c'est depuis 1982 que le tracé projeté était disponible, parce que les modifications qui ont été apportées en cours de route, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'étaient des modifications d'ordre technique qui faisaient varier de quelques mètres le tracé, mais, fondamentalement, la situation du tracé, tel que projeté par Alcan, était disponible dès 1982.

M. Garon: Pourquoi n'avez-vous pas commencé à négocier avec les groupes ou les personnes individuelles avant 1988 alors que vous aviez indiqué à la Commission votre tracé en 1982? Vous les avez rencontrés Individuellement seulement en 1988.

M. Wells: En fait, dans le cadre du déroulement normal d'un projet de cette nature, les négociations commencent avec les propriétaires concernés lorsque les autorisations sont obtenues tant de la Commission de protection du territoire agricole qu'en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement. C'est uniquement en 1984, je pense, que les premiers documents ont été déposés au ministère de l'Environnement et, finalement, comme le temps pressait, on a commencé à les faire en 1988. Mais on aurait normalement dû attendre toutes les autorisations requises avant de commencer des négociations avec les propriétaires concernés parce que, si le tracé n'est pas définitif, on ne veut quand même pas s'engager à l'égard d'une chose dont on ne connaît pas toutes les données. C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on demande des options d'achat. On n'a pas encore d'autorisation définitive quant au tracé.

M. Garon: Cela dépend. Il y a d'autres façons de procéder. J'ai vu des cas où des gens étaient mis dans le coup au point de départ pour qu'on détermine le meilleur tracé avec eux et non pas leur indiquer, après, quel était le meilleur tracé. Je vais vous dire que, dans les endroits où on a passé le gazoduc, par exemple, on négociait avec les gens au fur et à mesure pour voir où était le meilleur tracé. Mais, là, vous dites que vous avez indiqué le meilleur tracé. Est-ce qu'ils ont été mis dans le coup au point de départ ou, s'ils n'ont pas été dans le coup, on leur a indiqué les tracés?

M. Wells: On peut dire, M. le député, qu'on a non seulement tenté, mais on les a mis dans le coup à partir du moment où on a commencé le processus d'information publique en 1984. À ce moment-là, on a rencontré les gens, le projet leur a été expliqué et le tracé proposé leur a été fourni. Dès 1984, les gens savaient. Ils le savaient depuis 1982, mais, tout au moins, à partir

de 1984, ils avaient toutes les informations sur l'ensemble du projet.

M. Garon: Chacun?

M. Wells: Chacun pouvait l'avoir.

M. Garon: Non, non. Est-ce que chacun l'avait?

M. Cossette: J'aimerais ajouter une petite chose.

M. Garon: Quand vous dites: On a fait des réunions d'information à l'hôtel de ville ou des choses semblables, c'est une affaire, ça.

M. Wells: On a la liste des gens qui étaient présents.

M. Garon: Mais est-ce qu'ils ont été avisés individuellement ou si c'était simplement une rencontre d'information générale à l'hôtel de ville, quelque chose comme ça?

M. Cossette: Non, non. Lors de l'audience de la Commission de protection du territoire agricole de 1982, chaque propriétaire a reçu un avis de la commission. D'autre part, lors de nos séances d'information, chaque propriétaire a reçu une convocation à cette commission et, lors de la commission, nous avions un dossier pour chaque propriétaire, on a remis à chacun des propriétaires présents le plan du tracé et une photographie aérienne et on a fait une présentation pour expliquer exactement le tracé.

Je voudrais ajouter une chose à ce que Me Wells dit. Il ne faut pas oublier que le projet Latenière a été suspendu en 1985. Il faut tenir compte du fait que, en raison du marché de l'aluminium, on a suspendu le projet et il a été repris en 1987. Cela explique également pourquoi le processus n'a pas été enclenché avant.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce que cela va, M. le député de Lévis?

M. Garon: Non. Je comprends, mais, quand on est en voie d'établir un tracé, les gens peuvent difficilement se positionner par rapport à un tracé en voie de discussion. C'est une chose de donner de l'information dans une rencontre publique et une autre de dire à quelqu'un: On va passer sur ton terrain ou sur ta terre et on veut passer à tel endroit; et on discute avec cette personne-là. Ce sont deux affaires différentes. Vous dites que les tracés changeaient, alors je suis un peu surpris que vous ne les ayez pas mis plus dans le coup que ça parce que, dans le fond, vous passiez chez eux.

M. Wells: M. le député, je pense que, depuis 1982, les gens sont au courant du projet; ils ont eu l'occasion, s'ils le voulaient, de discuter à maintes reprises avec les représentants d'Alcan. Personne n'a jamais refusé de les rencontrer s'ils avaient besoin d'information. D'après la perception qu'on en a, il n'y a pas eu un manque d'information dans ce dossier. Les gens ont toujours eu toute l'Information dont ils pouvaient avoir besoin au moment où ils ont voulu l'avoir.

Cependant, il est exact que les véritables négociations ont commencé en avril 1988, cela fait maintenant déjà un an, et, comme on vous l'a dit, on a actuellement des ententes avec plus de la moitié des propriétaires.

M. Garon: Pourriez-vous nous donner la liste des gens avec qui vous avez des ententes et la liste de ceux avec qui vous n'en avez pas?

Deuxièmement, vous dites que vous avez fait des photos en couleurs pour montrer le tracé. Est-ce qu'il serait possible d'avoir une de ces photos qui indiquent le tracé, indiquant les endroits où vous avez des ententes et ceux où vous n'en avez pas?

M. Wells: On peut vous dire le nom des propriétaires avec qui nous avons actuellement des ententes.

Une voix: Ce sont tous ceux qui ne sont pas dans la salle.

M. Wells: À peu près. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cossette: II y a M. Georges Rousseau, Mme Blanche-Irène Sergerie, M. Julien Simard, par l'intermédiaire de Gazon Savard, M. Marius Pedneault, par l'intermédiaire de J. -R. Théberge, Raynaid et Diane Pednault, Louis-Marie Riverin, par l'intermédiaire de Gazon Savard, Gisèle Gagnon, Louis-Joseph Potvin, Paysagistes Lemay et frères, Gazon Savard, Ferme Grand Brûlé - c'est la même entité, il y a eu une vente - Gertrude Collard, Henri Carrier et, évidemment, on parle de La Baie et du gouvernement du Québec, mais il n'y a pas de problème de ce côté.

M. Garon: Ce sont ceux avec qui vous avez des ententes.

M. Cossette: C'est ça.

M. Garon: Et ceux avec qui vous n'avez pas d'entente?

M. Cossette: Écoutez, j'ai également une moitié de la terre de M. Louis-Marie Riverin; j'ai également M. Paul-André Simard, Lucien Boivin excavation, Yvan Maltais, succession Chouinard et Brisson, Alain et Gaétan Gobeil, Antonelli Grenon, Ferme Laterrière et Marie-Paule Gagné.

M. Garon: II n'y a pas d'entente avec ceux-là.

M. Cossette: C'est ça.

M. Garon: Maintenant, la question que je vais vous poser concerne le paragraphe 4c dans la loi. Vous dites: "La compagnie, en plus des pouvoirs conférés par la présente loi, aura le pouvoir de passer des contrats pour aliéner en totalité ou en partie ses droits à toute personne ou corporation formée ou non en vertu de la Loi sur les chemins de fer, notamment son droit de construire, outiller et exploiter le chemin de fer mentionné à l'article 2.1 aux termes, conditions et pour les considérations qu'elle jugera convenables." Pourquoi demandez-vous ce pouvoir?

M. Wells: Actuellement, en vertu de la charte de la compagnie, la compagnie peut céder ses immobilisations à toute personne qui serait intéressée de les agréer.

Mais effectivement, ce qu'on demande là, c'est simplement une précision en ce qui a trait à l'ensemble de l'exploitation de Roberval-Saguenay. C'est pour permettre, si ça devient nécessaire, à la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay de faire partie d'une réorganisation administrative à l'intérieur du groupe Alcan.

Il arrive assez fréquemment que des filiales d'Alcan fusionnent avec la compagnie mère. On se rappellera qu'il y a quelques années la compagnie Transport d'énergie du Saguenay, la compagnie Forces motrices du Saguenay ont fusionné avec Aluminium du Canada limitée. Dans le fond, ce qu'on veut permettre avec l'article 4c, c'est la possibilité d'une réorganisation administrative à l'intérieur du groupe Alcan.

M. Garon: Techniquement, avec la clause telle que libellée vous pourriez vendre à n'importe qui.

M. Wells: Oui. Telle qu'elle est libellée...

M. Garon: Pour les fins de construction, ça pourrait même être l'entrepreneur à qui vous donneriez tous les droits. Telle que libellée, il n'y a aucune réserve. Cela peut être n'importe qui.

M. Wells: Oui. Nous n'aurions pas d'objection à le limiter strictement à la compagnie mère ou à une filiale de l'Alcan.

Techniquement, vous avez raison. On pourrait vendre la totalité ou une partie des droits de Roberval-Saguenay, selon le libellé de la clause à n'importe qui...

M. Garon: Merci.

M. Wells: ...qui serait intéressé à l'acquérir.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela complète vos questions, M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y a des commentaires ou autre chose avant qu'on passe aux intervenants?

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, une petite question qui me semble d'intérêt, puisque j'entends ça depuis tantôt. On est donc dans une situation où II y a des ententes avec une douzaine de propriétaires et où il n'y a pas d'entente avec huit propriétaires.

Une voix: C'est exact.

M. Côté (Charlesbourg): D'autre part, comme élément au problème, la loi est nécessaire pour régler quatre points sur les quatorze kilomètres où il n'y a pas l'espace suffisant par la loi pour être capables de faire passer le chemin de fer.

Une voix: C'est exact.

M. Côté (Charlesbourg): De ces quatre endroits, combien de propriétaires avec qui vous n'avez pas d'entente actuellement sont touchés? On parle peut-être pour rien, là.

M. Cossette: Vous voulez dire pour la largeur additionnelle?

M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est ça, le problème.

M. Cossette: D'accord. Cela touche...

M. Côté (Charlesbourg): Autrement dit, si vous aviez une entente avec tout le monde...

M. Cossette: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): ...par les lois régulières, il n'y aurait pas de problème, vous ne seriez pas ici.

M. Wells: il y a effectivement deux des intervenants aujourd'hui qui seraient touchés par cette disposition. Pour les 137 mètres, il y aurait fa succession Gilbert et le groupe Brisson; il y aurait également M. Paul-André Simard. Pour la succession Gilbert et le groupe Brisson, on a besoin de 150 mètres environ et pour M. Simard, on a besoin d'environ 50 mètres.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, c'est deux sur quatre.

M. Wells: Je ne pense pas qu'il y en ait d'autres parmi les intervenants aujourd'hui.

M. Côté (Charlesbourg): Cela va. D'accord.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va. Vous avez peut-être une dernière question, M. le

député de Lévis.

M. Garon: Bien, iI fallait que vous veniez quand même parce que votre embranchement dépasse dix kilomètres.

M. Wells: Oui, oui. Fondamentalement, le but du projet de loi est d'être autorisé à construire les quatorze kilomètres.

M. Garon: J'aimerais savoir les ententes par rapport aux non-ententes sur les quatorze kilomètres. Les ententes représentent combien de kilomètres et les parties où il n'y a pas entente en représentent combien? (16 h 45)

M. Wells: II faut dire que la succession Chouinard-Brisson a un terrain d'à peu près deux milles carrés. Comme on n'a pas d'entente avec eux, ça représente, quand même, une portion importante du tracé. Mais, actuellement, on peut dire qu'on a un peu plus de 50 % du tracé qui font l'objet d'ententes.

M. Garon: Je vous remercie.

La Président (M. Parent, Bertrand): On vous remercie, Me Wells. Je demanderais Immédiatement aux Intervenants de s'approcher pour qu'on puisse les entendre, il y a, d'abord, une présentation générale qui va être faite par Me Guy Gilbert et suivra immédiatement le premier groupe, la Ferme Laterrière. M. Guy Gilbert.

M. Garon: M'aviez-vous compris tout à l'heure quand je vous ai demandé si c'était possible d'avoir un tracé indiquant les bouts où il y avait des ententes? Je disais en couleur, mais pas nécessairement en couleur. J'ai cru comprendre que vous aviez dit que vous l'aviez en couleur.

M. Wells: On a un tracé, mais si vous me donnez dix minutes, on pourrait vous Indiquer en gros les endroits où on a des ententes. Ce n'est pas indiqué sur le plan que nous avons.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Afin de ne pas retarder les travaux, si vous pouvez faire ces choses et les remettre ou les faire circuler afin qu'on ait le maximum d'informations au cours des prochaines minutes.

M. Garon: C'est pour voir si les parties sur lesquelles iI y a des ententes, ce sont des territoires qui ne valent pas cher par rapport à ceux où I n'y a pas d'ententes. Est-ce que ça vaut plus cher ou moins cher? Des fois, c'est plus facile de s'entendre pour un territoire qui n'est pas vendable que pour un territoire qui est bon. On n'en a aucune idée.

M. Wells: Ce qui reste, c'est en partie des cas difficiles.

Le Président (M. Parent, Bertrand): M. Gilbert, vous allez faire une présentation générale pour les quatre groupes. Si vous voulez nous faire cela de la façon la plus succincte possible, on aimerait bien, à l'intérieur du temps qui nous est dévolu, avoir la chance de rencontrer tous les intervenants.

Présentation générale des opposants

M. Gilbert (Guy): M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire, je désire bien vous situer par rapport à la fonction qui m'incombe de présenter devant vous cette allocution. Mon nom est Guy Gilbert. Je suis l'époux de dame C. -E. Chouinard, propriétaire indivis du domaine du lac Gravel. Mme Marie-Luce Brassard-Brisson en est la copropriétaire. Son fils, Guy Brisson, assiste aux débats de cette commission, de même que mon épouse.

Notre propriété délimite les bornes de la ville de La Baie et de la municipalité de Laterrière. Vers la mi-novembre 1983, Me Jacques Fortin, à ce moment-là directeur du service immobilier d'Alcan à Jonquière, convoquait les propriétaires des terrains, devant lesquels on présentait les plans de la voie ferrée projetée par Roberval-Saguenay, reliant la ville de La Baie à l'usine de Laterrière. Ce tracé traverse notre propriété sur une longueur de 1, 6 kilomètre, l'assiette occupant une surface de 48 acres.

Les propriétaires du lac Gravel, tout comme les autres propriétaires, ont été convoqués plusieurs fois par Aican pour nous tenir au courant de la marche des travaux projetés pour la voie ferrée. La dernière de ces réunions tenue au restaurant Lucerne, de ville de La Baie, nous affirmait que l'entente avec les propriétaires se ferait vers la fin d'avril 1988. C'était le 16 mars 1988. Depuis ce temps, nous avons eu des rencontres au bureau de la direction du service immobilier d'Alcan. Ces entretiens ont toujours été futiles.

Je vous dispense de rénumération entière des nombreuses rencontres échelonnées sur plusieurs années, tenues avec M. André Chevalier, directeur du service immobilier d'Alcan à Jonquière, et M. Laurent Dubois, évaluateur pour ce même service. Toutefois, il faut que je révèle quelques propos plus flagrants les uns que les autres. J'ai fait l'étude des transactions faites entre la compagnie Alcan et les propriétaires de Laterrière pour l'acquisition des terrains devant servir pour la construction de l'usine. L'ensemble du territoire couvre 2358, 2 acres. Les enregistrements au greffe montrent 33 transactions, lesquelles se sont négociées dans un temps relativement rapide. Au fait, 18 ententes ont été signées en 1982, aucune en 1983, 7 en 1984, 3 en 1985, une seule en 1987 et une autre en 1988. La transaction de 1988 n'est pas due au fait que le propriétaire concerné était récalcitrant, mais au fait que la compagnie Alcan a décidé d'acquérir

sur le tard cette autre parcelle de terrain. Toutes ces transactions ont été conclues de gré à gré. C'est ce que M. Wells a dit tout à l'heure. Les négociateurs d'Alcan, tout gentils qu'ils sont, ont même accordé des droits d'habitation pour des périodes de cinq à dix ans, moyennant des loyers symboliques variant de 25 $ à 100 $ annuellement, il faut donc conclure de tout cela qu'il est assez facile de négocier avec les gens de Laterrière, à condition qu'il y ait un tant soit peu de bonne volonté de part et d'autre.

À la suite de cette étude, je demandai à M. Laurent Dubois pourquoi les négociations avec nous du lac Grave! ne se déroulaient pas aussi rondement et aussi rapidement que celles tenues lors des achats de terrains devant servir d'assiette pour la construction de l'usine. Il nous répondit que l'achat des terrains pour la ligne de chemin de fer, c'était différent, laissant sous-entendre que les négociations devraient se faire sous la couverture des droits d'expropriation contenus dans la charte de la compagnie Rober-val-Saguenay. Or, ce qu'il disait n'est pas exact. À preuve, on réclame aujourd'hui un amendement à la Loi constituant en corporation la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay de manière à y inclure un droit d'expropriation qu'elle ne possédait pas auparavant.

M. André Chevalier, pour sa part, nous disait que l'expropriation était l'ultime arme à laquelle Alcan devait recourir. Voilà un illogisme, car ils réclament du gouvernement du Québec de rendre la charte de Roberval-Saguenay conforme aux termes et aux conditions pour la construction d'un tronçon de chemin de fer, sachant bien que la loi leur octroierait un droit d'expropriation. L'attitude des négociateurs n'est pas sans me rappeler le fantasque Goliath disant à David: Mon petit, défends-toi. MM. Chevalier et Dubois semblent ignorer que les petits Davids réunis que nous sommes, les citoyens de ce pays et de cette province, sont généralement très écoutés par les gouvernements, tant fédéral, provincial que municipal. À preuve de ce que j'avance, les exemples qui suivent: en 1983, le gouvernement fédéral, par l'entremise du ministère de la Défense nationale, a voulu implanter un champ de tir au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Devant les nombreuses protestations des citoyens, le gouvernement fédéral s'allia le gouvernement provincial et forma une commission d'étude sur le projet présidée par Me Marc-André Bédard. Le rapport fut déposé en juin 1988. Il exigeait des concessions, tant des gouvernements que de la part des citoyens concernés par le projet. Malgré tout, le projet de champ de tir demeure inaccepté chez les Jeannois et c'est l'attentisme du côté gouvernemental. Défaite de Goliath contre les petits Davids.

Un autre exemple de l'influence et de la sagesse du voeu populaire: Hydro-Québec qui a dû tenir compte des protestations des résidents de la rive sud du Saint-Laurent opposés à l'aménagement d'un corridor électrique traversant le Saint-Laurent.

Un dernier exemple, au niveau municipal, cette fois: la MRC du Fjord, groupant notamment les villes de Chicoutimi et de Jonquière, voulait aménager un dépotoir intermunicipal dans la municipalité voisine qui est Saint-Honoré. L'objection des résidents de la petite municipalité s'est exprimée de diverses façons, notamment au moyen d'un référendum, tant et si bien qu'on a dû abandonner le projet. Voilà qui prouve que nos gouvernants savent écouter les citoyens et sont sensibles à leurs oppositions. Forts de ces réalités, nous sommes ici devant vous pour faire valoir et sauvegarder nos droits de négociation à titre de propriétaires.

Je vous rapportais plus haut ia réponse de M. Laurent Dubois, évaluateur attitré au service d'Alcan, à savoir qu'il y a une différence quand il s'agit de discuter de l'évaluation des terrains concernés par la construction du chemin de fer, compte tenu des supposés droits d'expropriation de Roberval-Saguenay. Pour nous, la seule différence qui importe vraiment pour l'évaluation est d'un tout autre ordre et c'est cette différence qui devrait guider le législateur lorsqu'il sera appelé à statuer sur la demande. Ainsi, lorsqu'un propriétaire a vendu son immeuble ou son fonds de terrain pour permettre la construction de l'usine de Laterrière, celui-ci en est quitte pour la vie et est satisfait de l'entente conclue avec Alcan. Mais lorsque la voie ferrée est construite sur votre ferme ou sur votre terrain, vous devez souffrir cet ennui quotidiennement, tant pour vous que pour vos descendants, sans compter que la présence d'un chemin de fer hypothèque sérieusement vos chances, à titre de propriétaire, de revendre à bon prix votre immeuble.

Les négociateurs de Roberval-Saguenay vous demandent un droit d'expropriation. À rencontre, nous vous demandons plutôt s'il est possible pour vous d'imposer à la compagnie Roberval-Saguenay de payer aux propriétaires concernés un droit de passage équivalent à un loyer mensuel ou annuel, échelonné sur plusieurs dizaines d'années. Votre réponse sera peut-être négative, invoquant la raison qu'il ne vous appartient pas de légiférer en ce sens, puisque toute négociation doit se faire selon les règles de l'offre et de la demande. Mais que faire? Les négociateurs d'Alcan soumettent peu d'offres écrites et celles qu'ils font sont bien loin d'une évaluation tant soit peu équitable. Plus que cela, ils demandent sans offrir.

Dernièrement, diverses transactions commerciales ont affecté la province sans que le gouvernement québécois se permette d'intervenir et ce, malgré l'indignation de plusieurs. Je pense, notamment, à la vente du groupe d'assurances Commerce à des intérêts hollandais, à la vente de la Consolidated-Bathurst à la firme américaine Stone Container et également à la fusion O'Keefe-Molson qui deviennent propriété des Australiens. Cela étant, pourquoi donc notre

gouvernement interviendrait-il dans les négociations avec les propriétaires fonciers de La Baie et de Laterrière en accordant à Alcan un droit d'expropriation?

Mes propos peuvent vous laisser croire que nous sommes anti-Alcan. Or, II n'en est rien. Au contraire, nous sommes conscients de l'apport économique de cette industrie au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Nous n'ignorons pas, non plus, qu'Alcan s'est montrée soucieuse de l'environnement en supprimant graduellement de ses installations polluantes les cuves de type Soderberg. Il y a quelques mois, les protecteurs de la faune aquatique ont accusé les usines Alcan de Jonquière d'avoir largement contribué à l'extinction de cette espèce de baleines que sont les bélugas en polluant les eaux de la rivière Saguenay. Sensible aux mouvements de pression, la multinationale a décidé d'investir un montant d'argent appréciable pour assurer la pérennité des baleines blanches. Nous vous demandons pourquoi, à l'instar de ces mesures de protection pour ces poissons, la compagnie Alcan ne se soucierait pas également des droits de propriété des individus.

Bref, nous, les propriétaires concernés par la construction de la voie ferrée, nous vous demandons instamment de refuser d'accorder à Roberval-Saguenay le pouvoir d'expropriation, tel que demandé par le projet de loi 230. Autrement dit, nous vous demandons de respecter nos droits de propriétaires et de laisser libre cours aux règles de négociation ordinaires qui sont celles de l'offre et de la demande. (17 heures)

Ces propos de mon exposé m'amènent à cette réflexion. Pourquoi donc, en 1989, à l'image des Amérindiens, nous impose-t-on de venir devant vous défendre nos droits légitimes de propriétaires? Serait-ce donc qu'encore de nos jours certains géants industriels entretiennent l'image de domination des découvreurs? Il faut pardonner leurs bévues aux colonisateurs, car, à cette époque primitive, le mot "partenariat" n'existait pas dans le sens qu'on lui connaît maintenant. Mais, fort heureusement pour nous, nos gouvernants emploient généralement leur autorité pour protéger les droits acquis des résidents de la province et nous ne voulons pas que ces droits acquis se transforment en droits conquis en vertu d'un droit d'expropriation qui, somme toute, ferait plus de mal que de bien.

Membres de la commission, je vous remercie de votre bonne attention.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Gilbert.

M. Gilbert: Un instant, M. le Président. Tout à l'heure, Me Wells a dit qu'il semblait être difficile pour Alcan de discuter avec les gens du lac Gravel. J'ai ici des reportages parus dans Le Quotidien contenant différentes opinions des gens de Laterrière. Est-ce que quelqu'un pourrait distribuer cela, s'il vous plaît?

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va pour votre présentation, M. Gilbert?

M. Gilbert: Merci.

Le Président (M. Parent, Bertrand): C'est moi qui vous remercie. Alors, c'était une présentation d'ordre général avant d'entendre les intervenants particuliers. Je pense qu'on devrait entendre immédiatement les premiers intervenants de la Ferme Laterrière, soit le procureur de celle-ci, Me Pierre Desforges, et M. Jeannot Tremblay.

Étant donné que c'était une présentation d'ordre général et que M. Guy Gilbert fait aussi partie du groupe qui va suivre, la succession Chouinard-Brisson, vous aurez la chance de lui poser des questions. Alors, je vous demanderais de vous présenter, Me Desforges et M. Tremblay.

Ferme Laterrière

M. Desforges (Pierre): Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, je ferai un bref tour d'horizon des éléments qui ont été évoqués devant vous jusqu'à présent. Je vais laisser M. Tremblay vous faire part de la situation critique des activités de ma cliente.

Essentiellement, ce qu'Alcan tente d'indiquer à la commission, c'est qu'elle requiert un pouvoir d'expropriation élargi, parce que la loi ne lui reconnaît un pouvoir d'expropriation que sur une longueur de dix kilomètres, alors qu'elle en a besoin de quatorze et aussi parce que les largeurs prévues en vertu de la loi se révèlent insuffisantes, compte tenu de certaines contraintes topographiques.

Notre propos n'est pas de dire à la commission que ces largeurs ne sont pas justifiées, que cette longueur de trajet n'est pas justifiée par des impératifs économiques - on reconnaît volontiers ceux-ci à Alcan - et par des considérations de saine gestion du patrimoine routier. Notre objectif est plutôt d'indiquer que, quant à nous et avec respect, il ne serait pas opportun, à ce stade-ci, de reconnaître un pouvoir accru à la requérante pour les fins de l'expropriation qu'elle envisage.

Essentiellement, notre préoccupation est la façon suivante: il est traditionnel de considérer le pouvoir d'expropriation comme étant un pouvoir extraordinaire, un pouvoir qui revient à la couronne et que la couronne peut remettre à certaines instances dans un but d'intérêt public. Dans les cas de chemins de fer, on a tous compris que dans le passé, l'intérêt public pouvait demander un pouvoir d'expropriation, parce qu'on avait à coeur un développement économique qui tenait compte des impératifs d'une compagnie de chemin de fer. Mais, ma lecture de la Loi sur les chemins de fer et ce que je retiens de ce qu'est le principe d'expropriation me convainquent que ce pouvoir

exceptionnel n'est concédé que dans la mesure où il s'impose de lui-même et il doit s'exercer dans le respect des impératifs à la fois de l'État et des citoyens eu égard à l'objectif poursuivi par celui qui veut ce pouvoir d'expropriation.

Nous pensons qu'il n'est pas opportun, aujourd'hui, de donner raison à Alcan quant à la demande qu'elle fait valoir devant vous pour les raisons suivantes. On a tenté avec beaucoup de succès, je pense, de vous convaincre que le geste que vous poseriez en allant de l'avant avec le projet qui est devant vous aurait, finalement, une portée relativement limitée, parce que beaucoup d'autres intervenants vont assurer, au bénéfice de la population en général et au bénéfice de ma cliente et des autres intervenants, la protection de tous les droits que les lois leur reconnaissent.

Alors, on a fait état assez longuement de l'assentiment qu'on a obtenu de la Commission de protection du territoire agricole du Québec, de l'assentiment qu'on a obtenu ou qu'on obtiendra éventuellement du ministre des Transports pour procéder aux expropriations, de l'assentiment qu'on obtiendra de l'Environnement après les enquêtes auxquelles il sera procédé incessamment. Tout cela de façon à vous guider - je le dis sans mesquinerie - ultimement vers un entonnoir où le geste que vous aurez à poser aujourd'hui sera d'une portée extrêmement limitée, parce qu'il y a plein d'autres personnes qui vont s'intéresser à la défense des Intérêts des gens qui sont vraiment pris avec ce problème-là.

Mettons de côté l'intervention de la CPTAQ, l'Intervention du Bureau des audiences publiques, l'intervention de tous ces gens qui font ou qui feront en sorte que, idéalement, dans le meilleur des mondes, il n'y ait pas de préjudice. Une chose ressort, cependant, c'est qu'à notre humble avis, actuellement, Alcan n'a pas pu vous convaincre qu'elle a besoin de ce pouvoir d'expropriation là. D'abord, elle en a déjà une partie et, ensuite, elle n'a pas fait, à notre avis, des efforts suffisants, des efforts caractérisés pour ne pas devoir se prévaloir d'un privilège que cette Assemblée lui donnerait ultimement, celui d'avoir des pouvoirs spéciaux au-delà de tous ceux auxquels elle pourrait autrement prétendre. Voilà ce qui est important pour nous: l'effet de donner des pouvoirs exceptionnels dans un contexte comme celui-ci est d'amener un déséquilibre dans la balance entre les intérêts d'Alcan et les intérêts des propriétaires.

Actuellement, Alcan ne vous a pas convaincus, pour des raisons qui seront évoquées plus longuement par M. Tremblay et par les autres intervenants, qu'elle a besoin de ce pouvoir d'expropriation au-delà de ce que la loi lui permet déjà. Ce qu'elle ne vous dit pas tout à fait, mais qu'il faut comprendre de son intervention et de sa demande qui est devant vous, c'est que, quant à elle, il serait tellement plus com- mode et tellement plus facile d'aller de l'avant avec son projet, dont on ne discute pas le fondement ici, si elle avait en poche un pouvoir d'expropriation qui lui donnerait les coudées franches sur toute la longueur et sur toutes les distances.

Nous n'en sommes pas, quant à ma cliente et quant aux autres intervenants, à ma connaissance et sans les lier, à discuter si l'emprise aura 15 mètres, 50 mètres ou 75 mètres. On n'en est pas rendu là. Assez curieusement, aujourd'hui, on nous dit que le temps presse, mais ma compréhension des événements est qu'on n'en est pas rendu là avec les propriétaires, à savoir où ça passera exactement et quelle largeur ça prendra. Cependant, la conclusion à laquelle il faut nécessairement en venir quand on examine de près la demande d'Alcan, enfin de la compagnie de chemin de fer, c'est qu'on veut disposer d'une arme supplémentaire et d'une arme contre laquelle les propriétaires riverains, qu'on a qualifiés de récalcitrants, mais je ne suis pas sûr qu'il y ait eu des efforts très soutenus pour les intéresser à cette question-là, ne pourront rien. On veut disposer d'une arme supplémentaire pour mater, entre guillemets, toute forme d'opposition qui pourrait survenir. On se réveille, entre guillemets - et je le dis avec tout le respect voulu pour les intervenants du côté d'Alcan - avec un projet qui doit aller de l'avant, une chronologie des événements qui est extrêmement serrée, alors qu'Alcan a recours à l'artifice commode d'obtenir des pouvoirs spéciaux pour atteindre cet objectif-là plus facilement et plus commodément.

Je pense qu'il n'y a pas besoin d'y réfléchir longuement pour se rendre compte, malgré qu'on ne vous ait pas fait la preuve que c'était nécessaire, qu'on vous a laissé entendre que ça serait tellement plus commode. Enfin, c'est là notre propos. Actuellement, si Alcan disposait de cette arme additionnelle là, on doit tous comprendre que les négociations seraient de très courte durée et qu'on traînerait pendant de très longues années des citoyens devant le Tribunal de l'expropration.

Alors, on a bien confiance en cette institution, U n'y a pas de doute sur cela, mais nous pensons que le recours à des pouvoirs particuliers, exorbitants du droit commun et exorbitants même de la Loi sur les chemins de fer, est un exutoire trop facile pour Alcan en vue de se mettre dans une position de contrôle et de pouvoir, dont on nous dit ne pas nécessairement avoir besoin, en fin de compte, lorsqu'on fait référence à l'expérience récente d'acquisition de terrains pour l'usine. Je tiens à vous souligner que, dans le cas de l'usine, on n'avait pas ces pouvoirs et on a réussi quand même à aller chercher tous les terrains dont on avait besoin et à y construire l'usine. Pourquoi en serait-il autrement maintenant, si ce n'est pour rendre la vie plus facile à ceux qui proposent des amendements à leur charte et mettre, finalement, à leur

merci - je le dis sans arrière-pensée - des citoyens qui ont des intérêts légitimes à faire valoir, intérêts qui ne vont pas jusqu'à empêcher la réalisation de ce projet? Je pense que le débat n'est pas à ce niveau.

Merci, je vais céder la parole à M. Tremblay, qui vous fera part de la situation.

Le Président (M. Parent, Bertrand): J'inviterais M. Tremblay à être très bref. Le problème est que plusieurs de vos concitoyens vont manquer de temps.

M. Tremblay (Jeannot): Je vais être très bref, M. le Président. MM. les membres de la commission, nous sommes très heureux de pouvoir exprimer devant les parlementaires les problèmes que l'on vit depuis plusieurs années.

Je représente la Ferme Laterrière, dont je suis le directeur général, et un groupe de 150 personnes, venant de la région, qui sont impliquées dans ce projet. La Ferme Laterrière est une ferme à caractère récréotouristique qui existe depuis 17 ans. Cette entreprise jouit d'un appui régional sans condition. Je pense que M. le député de Dubuc connaît très bien ce dont je parle.

Nous pensons que les intérêts de la compagnie Roberval-Saguenay et ceux d'Alcan sont intimement liés. Ces deux compagnies sont au sens de la loi des compagnies privées à caractère lucratif, bénéficiant et appartenant à leurs actionnaires. Nous pensons que ces compagnies ont la capacité financière de négocier l'acquisition des terres et des terrains nécessaires à leur développement. Nous pensons que la compagnie Roberval-Saguenay n'a pas obtenu l'autorisation formelle du ministère de l'Environnement pour le tracé du chemin de fer. Comme vous le savez, nous avons obtenu du ministre l'autorisation de nous présenter au Bureau d'audiences publiques et nous ferons nos devoirs à ce moment-là. Nous y exposerons la problématique du tracé. Cette compagnie n'a présenté aucune alternative, que je sache, au tracé définitif du chemin de fer. Donc, nous nous sommes trouvés devant un fait accompli en 1988. On nous a dit: Messieurs, voici le tracé.

La même chose s'est produite en 1984 - je fais une parenthèse - quand M. Fortin nous a annoncé en grande pompe le projet d'Alcan. Immédiatement après, je suis allé le voir et je lui ai dit: M. Fortin, c'est formidable pour Alcan, mais moi, ça ne m'intéresse pas. J'envisageais déjà les problèmes que cela amènerait. Il est impensable qu'en 1989, dans un contexte socio-économique et politique totalement différent de celui du début du siècle, de tels pouvoirs soient accordés à une entreprise privée, quelle que soit son importance. On a fait allusion à ses capitaux. C'est vrai, Alcan est une compagnie importante, mais c'est aussi une compagnie qui rapporte des dividendes à ses actionnaires. Il ne faut pas l'oublier.

Le projet de loi 230 est tout à fait antidémocratique, car il entend conférer à une compagnie privée des pouvoirs reconnus uniquement à l'État. Le projet de loi 230 enlève aux individus et aux corporations concernés par ce projet toute force de négociation vis-à-vis du requérant en annihilant les droits et privilèges reliés à la propriété privée. Les élus municipaux de Laterrière lors du conseil de lundi soir - j'ai une résolution en main - s'opposent formellement à ce que soit accordé à la compagnie le droit d'exproprier des terres ou parties de terres pour la construction d'un chemin de fer privé. (17 h 15)

Enfin, nous pensons que le devoir de nos élus, de nos gouvernants est de protéger l'équilibre, les droits fondamentaux des citoyens vis-à-vis d'autres citoyens ou d'entreprises privées telle Alcan. Voilà pourquoi, nous nous opposons au projet de loi 230 et demandons au Parlement, à la commission, soit de refuser ce droit extraordinaire, soit de dire à Alcan d'aller faire ses devoirs et d'attendre le résultat de la commission sur l'environnement. Cette résolution, évidemment, a été acceptée à l'unanimité au conseil d'administration de la Ferme Laterrière.

Une parenthèse, M. le Président. Quand on a fait allusion au fait qu'en 1984 il y a eu des négociations et qu'on nous a mis dans le coup, etc., je peux vous affirmer une chose, que M. Wells, je pense, a clairement soulignée. Ce n'est qu'en 1988, à la suite du dépôt du tracé final, qu'on a eu une rencontre aux bureaux d'Alcan à Arvida, une autre à la Ferme Laterrière et, ensuite, plus rien. Nous demandons donc au gouvernement cet équilibre nécessaire pour que ce dossier se termine d'une façon équitable et aussi d'une façon juste, parce que ce n'est pas le cas actuellement. Je n'ai pas autre chose à ajouter. Si on a des questions à me poser, il me fera plaisir d'y répondre.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci beaucoup.

M. Tremblay (Jeannot): M. le Président, j'aimerais déposer les deux résolutions auprès...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Du secrétaire de la commission.

M. Tremblay (Jeannot): ...du secrétaire de la commission.

Le Président (M. Parent, Bertrand): On va les faire distribuer. Je vous remercie beaucoup, M. Tremblay et M. Desforges. Est-ce que des parlementaires ont des questions à poser au groupe la Ferme Laterrière? M. le ministre d'abord, puis M. le député de Lévis.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, pour qu'on se comprenne bien, il ne faut pas donner au projet de loi des vertus qu'il n'a pas.

Je pense qu'il faut se resituer dans le contexte pour bien comprendre ce que le projet de loi fait.

L'autorisation de la loi actuelle permet dix kilomètres. À dix kilomètres, le chemin de fer va s'arrêter quelque part dans le champ. Il ne sera pas très utile, selon ce que j'ai compris. Cela prend donc quatorze kilomètres ou à peu près, peu importe le tracé qui sera retenu par l'autre instance qui doit le reconnaître. On est donc dans une situation où ce n'est pas un pouvoir exorbitant que de dire: Au moins, le chemin de fer ne finira pas dans le champ; il va finir quelque part où ce sera utile. Premièrement.

Deuxièmement, pour le compléter, selon ce que j'ai compris du tracé qui peut actuellement être reconnu, il y a quatre points sur le tracé qui ne correspondent pas aux largeurs nécessaires, vu l'escarpement ou d'autres situations topographiques qui font que cela prend davantage de remblai que la largeur dont on a besoin actuellement. C'est ce que fait le projet dans son essence. À partir de là, il ne faut pas lui donner d'autres vertus qui ne sont pas dans le projet de loi, ni d'autres intentions non plus.

Malgré tout ça, il est clair et net qu'Alcan a l'obligation de négocier de bonne foi avec les propriétaires et de ne jamais oublier qu'au lendemain du projet de loi cela prend juste un petit décret gouvernemental pour être capable de finaliser l'affaire. Le décret gouvernemental, si jamais on passait à travers le processus de la loi, ce n'est pas un automatisme s'il n'y a pas des négociations de bonne foi. Je pense que vos témoignages sont importants pour nous actuellement. Y a-t-il eu avec vous, oui ou non, des négociations de bonne foi de la part d'Alcan? Si oui, le dire et, sinon, le dire et Alcan fera sa job après.

M. Tremblay (Jeannot): M. le ministre, je crois que non. Je vous ai dit qu'il y en a eu deux et je dis non.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ce qu'il m'importe de savoir. Au moment où on aura, comme parlementaires, à prendre une décision sur le cheminement du projet de loi et sur ce qui en découle, si Alcan ne démontre pas qu'elle a fait une négociation de très bonne foi avec les intervenants, ce n'est pas sûr que c'est moi qui vais décider ce qu'on va faire après au plan de l'acquisition des terrains. Il faut qu'elle fasse sa job et des mécanismes sont en place. De la même manière que les citoyens sont protégés quant au tracé par le Bureau des audiences publiques, de (a même manière que les agriculteurs sont protégés par la CPTA, il y a un autre moyen, celui du Tribunal de l'expropriation, qui doit régler un certain nombre de choses. C'est la logique des choses. Cela m'apparaît être ça. On ne refera pas la terre. Le projet de loi vise deux choses: de dix à quatorze kilomètres et, deuxiè- mement, quatre points additionnels sur le réseau. Cela ne règle pas la négociation avec les propriétaires. Si, demain matin, elle achète votre ferme au prix que vous pensez qu'elle vaut, d'après ce que je comprends, il n'y aura pas de problème.

M. Tremblay (Jeannot): C'est toute une problématique. Cela fait 17 ans que je vis là, M. le ministre. La problématique, on va la souligner au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est très grave. Ce que je reproche à Alcan, c'est qu'elle n'est pas capable de voir la substance de ce chemin de fer par rapport à l'intervention qu'elle a à faire. À mon avis, c'est très grave.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, sur le plan environnemental, on ne peut pas présumer de la décision du BAPE...

M. Tremblay (Jeannot): Non. Je sais ça.

M. Côté (Charlesbourg): ...quand vous allez y faire votre intervention. Et ça ne veut pas dire que c'est le tracé qu'elle propose qui va être retenu. Le principe pour les routes au Québec, c'est d'y aller avec un tracé privilégié, mais avec des alternatives. C'est le BAPE qui décide, ce n'est pas le ministère des Transports.

M. Tremblay (Jeannot): Quand on se fait dire: Pourquoi ne vous en allez-vous pas ailleurs, lors d'une négociation, pourquoi ne changez-vous pas de place, vous autres? J'ai dit: Pourquoi ne passez-vous pas ailleurs? C'est ça que je leur ai répondu et c'est mon droit.

M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas Alcan qui va décider pour le BAPE. C'est le BAPE qui va décider de lui-même.

M. Tremblay (Jeannot): Je le sais bien, mais, M. le ministre, vous me demandez une précision. Je vous la donne.

M. Côté (Charlesbourg): Ah! Mais je pense que la question qu'on doit se poser, c'est: Y a-t-il véritablement eu des négociations de bonne foi? J'ai l'impression que, s'il y avait des négociations de bonne foi, il y aurait une série de problèmes qui pourraient s'éliminer en cours de route. Il y a des gens qui sont peut-être prêts finalement. Au-delà de tout ça, votre problème particulier de quelqu'un qui vit là depuis 17 ans, et de la qualité environnementale, c'est au BAPE que cela va se décider.

M. Tremblay (Jeannot): Exactement. C'est pour ça que je vous le dis.

M. Côté (Charlesbourg): Mais U n'est pas question de subordonner la décision du BAPE à ce qui se passe ici.

M. Tremblay (Jeannot): Non, non. On est clair là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): II faut bien cadrer ce qu'on fait. Ce qu'on nous demande de faire, c'est de dix à quatorze kilomètres et d'élargir à quatre points du réseau. Cela présume qu'il va y avoir des ententes avec les propriétaires.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. Tremblay. M. le député de Lévis et Mme la députée de Chicoutimi voudraient poser une question. M. le député de Lévis.

M. Garon: Je pense que le ministre soulève un bon point, à savoir comment ça fonctionne. Si on regarde la Loi sur les chemins de fer, on dit: Pour qu'il y ait expropriation, il faut qu'il y ait autorisation du ministre. La Loi sur l'expropriation dit autre chose, mais qu'est-ce qui s'applique dans le cas des chemins de fer? Dans le cas des chemins de fer, on dit: II peut y avoir expropriation à condition que le ministre donne son autorisation.

M. Côté (Charlesbourg): Le Conseil des ministres, M. le député. C'est le gouvernement.

M. Garon: Bien, ça dépend.

M. Côté (Charlesbourg): C'est la Loi sur l'expropriation.

M. Garon: Mais il y a un pouvoir particulier dans la Loi sur les chemins de fer. Il y en a une qui dit une chose et I y en a une autre qui dit autre chose. La Loi sur les chemins de fer...

M. Côté (Charlesbourg): C'est l'article 36 de la Loi sur l'expropriation.

M. Garon: Oui, mais il y a aussi une Loi sur les chemins de fer qui est spécifique aux chemins de fer. Qu'est-ce qu'elle dit? Elle dit: 'Avant d'exercer les pouvoirs prévus aux paragraphes 4°, 5°, 6°. 8°. 12°, 14°, 22° et 23°, une compagnie doit obtenir, dans chaque cas, l'autorisation du ministre des Transports. " Il faut bien voir de quoi il est question. La Loi sur l'expropriation, c'est une affaire; la Loi sur les chemins de fer, c'est une autre affaire.

À part la Loi sur les chemins de fer, est-ce qu'il y en a une qui s'applique? Est-ce que c'est la loi en général sur l'expropriation ou la Loi sur les chemins de fer qui s'applique? D'après votre contentieux, laquelle s'applique: la Loi sur les chemins de fer ou la Loi sur l'expropriation?

Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): Dans tous les cas, selon ce que me dit M. Harel qui est un vétéran du domaine au ministère, ça prend un décret gouvernemental. Donc, le décret, ce n'est pas le ministre; le décret, c'est le gouvernement.

M. Garon: M. Harel, qui est-ce?

M. Côté (Charlesbourg): C'est le directeur de l'expropriation au ministère.

M. Garon: Non, non. Je veux un avis du contentieux.

M. Côté (Charlesbourg): Ah!

M. Garon: Moi, des avis juridiques d'ingénieurs, c'est une affaire. Je recevais ça, des fois, des avis juridiques d'agronomes. Je préfère des avis juridiques d'un contentieux.

M. Côté (Charlesbourg): De toute façon, je peux vous dire juste une affaire...

M. Garon: Je n'ai pas une mauvaise opinion de M. Harel. Ce n'est pas ça.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non.

M. Garon: Mais là, c'est une opinion juridique.

M. Côté (Charlesbourg): J'ose espérer, parce que ça fait quand même quelques années qu'il est là et il peut probablement en montrer à bien des avocats de votre génération.

M. Garon: Je comprends, mais je ne lui demande pas du génie. En génie, pour faire des ponts, je ne suis pas un spécialiste là-dedans. Mais, en droit, il y a deux lois qui disent deux choses différentes. On n'est pas dans le génie juridique. On est dans le droit. Il y a une Loi sur les chemins de fer qui dit: autorisation du ministre des Transports. La Loi sur l'expropriation parle d'un décret. Qu'est-ce qui marche?

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, non. Je vais vous régler ça tout de suite, parce que je viens de consulter le contentieux. Vous allez avoir à la fois la réponse d'un ingénieur et d'un spécialiste en expropriation, en plus du contentieux qui nous réfère à l'article 35 de la Loi sur l'expropriation qui se lit comme suit: "Le présent titre régit toutes les expropriations permises par les lois du Québec et prévaut sur les dispositions inconciliables de toute loi générale ou spéciale. " Est-ce que ça va là? Parfait. Donc, c'est gouvernemental. L'ingénieur avait raison.

Une voix: C'est un ingénieur recyclé. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Vous devriez le demander à votre collègue. Quand il était au ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, il

avait demandé un avis à l'équipe qui était derrière lui, mais il a été obligé de revenir à l'opinion du député de Lévis et de faire son amendement dans les 48 heures à l'Assemblée nationale. Cela étant dit...

M. Côté (Charlesbourg): Vous avez derrière vous l'un des plus grands génies législatifs qui hantent le Parlement depuis le début des années soixante-dix. Vous n'avez qu'à lui demander conseil et je suis convaincu qu'il va vous donner un conseil très judicieux.

M. Garon: C'est justement lui qui me dit que...

Des voix: Ha, ha, ha! Il n'est pas d'accord. M. Côté (Charlesbourg): II vous dit quoi? M. Garon: Pardon? M. Côté (Charlesbourg): II vous dit quoi?

M. Garon: II dit qu'il y avait deux dispositions différentes dans chacune des lois.

M. Poulin: Quand il vous dit ça...

Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le député de Chauveau, s'il vous plaît! C'est déjà assez compliqué de démêler tout cela. M. le député de Lévis, allez-y de vos questions.

M. Garon: J'aimerais poser aux représentants que nous avons devant nous la question suivante: Quels sont les points sur lesquels vous ne vous entendez pas avec Alcan dans vos discussions? Elle a dit que vous en avez été saisis en 1982, lors d'un dépôt à la Commission de protection du territoire agricole, comme si tout le monde était au courant en 1982. C'est ce qu'elle a affirmé devant la commission. J'aimerais savoir à quel moment vous considérez en avoir été saisis, par rapport à ce qui a été dit et que vous avez entendu, puisque vous étiez présents ici.

M. Tremblay (Jeannot): M. Garon...

Le Président (M. Parent, Bertrand): M.

Tremblay.

M. Tremblay (Jeannot): M. le Président, excusez-moi, j'ai fait une faute. En 1984, Alcan a annoncé ses couleurs, c'est-à-dire qu'elle construirait... Elle a réuni les citoyens à la municipalité. Je pense que tantôt vous avez fait allusion à un processus qui est très vrai, c'est qu'on nous convoque à une assemblée générale et là on donne de l'information générale. À ce moment-là, il peut arriver que des citoyens ne soient pas présents. Mais, enfin, moi, j'y étais en 1984. Au sujet de l'installation de l'usine et de ses projets, c'était très clair.

En ce qui concerne les tracés, tout de suite on nous avait annoncé qu'éventuellement il y aurait un chemin de fer et qu'y y aurait certainement des gens qui seraient touchés, dont nous. Maintenant, comme vous le savez, il y a eu arrêt de ce processus à cause de la conjoncture économique. Alcan a tout arrêté, puis a repris ses démarches. Elle nous a convoqués en 1988 - c'est très récent - pour nous montrer les maquettes et le tracé final: le plus économique, le plus ci et le plus ça, et c'est ça. Prenez ça comme ça. Je leur ai encore dit: Vous vous mettez le doigt dans l'oeil. Nous ne sommes pas d'accord avec ça. On vous le dit. Devant une situation comme celle-là, M. le Président, il reste une chose. C'est de dire au promoteur: Écoutez, il y a deux choses: soit que je suis fou ou bien c'est vous autres qui êtes fous.

Moi, je vous dis que, quand quelqu'un veut passer quelque part, il rencontre les gens et leur demande ceci... Vous avez fait allusion à ça d'une façon très percutante tantôt, en disant: Est-ce qu'ils sont venus nous voir avant de déposer quoi que ce soit? Êtes-vous favorables à une démarche comme celle-là? Seriez-vous d'accord pour qu'on examine la problématique de ce chemin de fer? Cela n'a pas été fait, ce n'est pas vrai. Alors, la situation est la suivante: à la première rencontre qu'on a eue avec les représentants d'Alcan au bureau, on nous a fait part qu'on avait fait l'évaluation de la verdure, des arbres, des "crans" qu'il y avait là-dessus et c'était ça. Cela valait 3000 $. C'est ça qu'ils ont dit.

M. Garon: Maintenant, par rapport au tracé qui est proposé actuellement...

M. Tremblay (Jeannot): Oui.

M. Garon: ...quels sont les points que vous avez en désaccord avec Alcan? (17 h 30)

M. Tremblay (Jeannot): Écoutez, nous sommes une ferme - ce n'est pas une ferme laitière - à caractère récréotouristique. C'est évident que le chemin de fer dans notre environnement immédiat, dans notre fonctionnement, dans nos activités va nous pénaliser d'une façon extraordinaire. On l'a dit à Alcan. On lui a montré cet Impact. Ce n'est pas grave, qu'elle nous a dit. Autrement dit, on coupe, à partir du pied de la montagne, tout notre développement qui existe et qui sera. Vous avez vu, dans l'article qu'on en parle un peu.

On est une entreprise comme tout le monde. On veut vivre, on veut fonctionner, on veut évoluer et le chemin de fer, c'est un problème énorme pour nous. On l'a souligné à Alcan. On l'a dit à M. Chevalier. On a dit: Écoutez, M. Chevalier, on sait que vous avez une usine, que vous rapportez des millions, que c'est important pour la région, mais essayez donc de nous

comprendre aussi. Essayez donc de voir tout ce que ça peut comporter pour nous. C'est là qu'est un des problèmes majeurs. La problématique de l'entreprise que je représente, c'est la question qu'on s'est posée fondamentalement: Est-ce qu'on peut envisager dans l'avenir de continuer nos activités avec le chemin de fer? Comme M. Desforges l'a mentionné, lorsqu'on fait l'acquisition d'un terrain, après, c'est fini, mais le chemin de fer, ça n'a plus de fin. Je ne veux pas tomber là-dedans, mais, finalement, le chemin de fer est une béquille qui va rester là tout le temps. Je pense qu'il y a beaucoup d'intervenants qui ont peut-être signé des options d'achat et qui regrettent beaucoup cette décision et la municipalité aussi.

Alors, M. Garon, ce que je veux dire, finalement, c'est que, si Alcan avait compris la problématique de tous ces gens avec leur développement, ce qu'ils ont fait comme démarche et ce qu'ils sont comme personnes aussi, on ne serait probablement pas ici aujourd'hui. C'est ce qu'on dit à nos députés. C'est impensable. Il faut que vous disiez à Alcan de retourner faire ses devoirs et de comprendre ce qui se passe.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Mme la députée de Chicoutimi, vous aviez des questions, très brièvement.

M. Garon: Mais, je n'avais pas fini.

Le Président (M. Parent, Bertrand): On va revenir à vous. Madame.

Mme Blackburn: Très brièvement. Ce que je comprends du débat, c'est que vous dites: On va profiter de l'occasion qui oblige Alcan à demander une modification à la loi pour l'amener à négocier de façon un peu plus civilisée comme elle l'a fait dans le cas de l'expropriation pour l'usine. Si j'ai compris le ministre tout à l'heure, et c'est du ministre que je voudrais avoir la clarification, celui-ci a dit: Si vous êtes capables de me prouver qu'on n'a pas négocié de la même manière dans votre cas qu'on a négocié pour l'expropriation de l'usine, moi, j'attends. Je n'étais pas sûre d'avoir compris. C'est du ministre que je voudrais le savoir.

M. Côté (Charlesbourg): C'est davantage sur le plan des étapes.

Mme Blackburn: Oui, allez-y.

M. Côté (Charlesbourg): De ce que je comprends de la demande d'Alcan, il faut adopter la loi de façon qu'elle puisse à la fois construire le chemin de fer sur les quatorze kilomètres nécessaires et, à quatre points du réseau, avoir les largeurs additionnelles que ne permet pas la loi actuelle et, au-delà de tout ça, une négociation obligatoire. Je vais peut-être déposer une lettre, que j'ai expédiée à Alcan et que je viens de retrouver, qui l'assujettissait à la Loi sur l'expropriation. Donc, c'est le processus régulier sur le plan de l'expropriation qui oblige à une négociation très claire et, au-delà de tout ça, ça prend un décret gouvernemental. Donc, entre l'adoption de la loi et le décret, s'il n'y avait pas éventuellement négociation de bonne foi et démonstration faite à ce niveau, il resterait toujours au gouvernement à prendre ou non la décision de ne pas passer le décret. Donc, ce serait possible.

Mme Blackburn: Ce que je comprends des intervenants, c'est qu'ils sont en train de nous dire: L'épée de Damoclès au-dessus d'Alcan, c'est vraiment le fait qu'elle ne peut pas construire ça à cause de la loi et des problèmes techniques. J'avais cru comprendre, mais j'avais mal interprété que le ministre était en train de dire: Oui, on pourrait peut-être envisager cette épée de Damoclès. Je n'étais pas certaine.

M. Côté (Charlesbourg): Dans la situation, on verra lorsqu'on aura entendu tout le monde. On va, à tout le moins, donner la chance à Alcan de...

Mme Blackburn: Oui, de revenir.

M. Côté (Charlesbourg): ...revenir aussi. Les gens expriment des points de vue. Je pense que ceux de M. Tremblay portent sur le respect à la fois de la ferme et de la vocation de la ferme qui est une vocation très environnementaliste, selon ce que j'ai compris ou pu lire en diagonale dans l'article. Cela ne se marie pas très bien avec un chemin de fer.

Mme Blackburn: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): Je pense que c'est...

Mme Blackburn: C'est évident.

M. Côté (Charlesbourg): ...pas mal plus fondamental et pas mal plus philosophique en termes d'attitude des deux parties contre le besoin pour Alcan de transporter par chemin de fer des matières premières ou des lingots transformés. Je pense que c'est une bataille de l'industrialisation vis-à-vis de l'environnement. Ce n'est pas une bataille facile, mais il y a le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement qui va trancher, lui, l'autre question. Il y a donc des étapes à franchir. Ce que j'ai compris, c'est qu'aux mois de mai et de juin, le BAPE a des audiences sur le plan de sa partie et que le tracé ne sera reconnu que par le BAPE. Ce n'est pas le ministre des Transports qui va reconnaître le tracé. C'est le Bureau d'audiences publiques.

Mme Blackburn: Ce n'était pas ma question.

M. Côté (Charlesbourg): À partir de ça, il y

a encore passablement de chemin à faire.

Mme Blackburn: Est-ce qu'il faut absolument adopter ce projet de loi tout de suite?

M. Côté (Charlesbourg): Quant à nous, on doit continuer d'entendre les parties et la commission prendra ultimement les décisions qui s'imposent.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, Mme la députée de Chicoutimi. En tout cas, les brefs...

M. Desbiens: M. le Président...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, ce ne sera pas long. Les brefs commentaires que je peux faire sont les suivants. On se retrouve, de part et d'autre, ici en commission, dans une situation particulière. J'ai à présider une commission qui étudie un projet de loi privé. La consultation n'a pas été faite, elle se tient en même temps. Cela fait une circonstance où on voudrait tout passer en même temps et on ne le pourra pas. Il y a des étapes à franchir. Peut-être qu'on est en avant de notre temps ou que quelqu'un est en retard.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Parent, Bertrand): Une chose est sûre: ce n'est pas une situation normale que la commission se retrouve ici à étudier un projet de loi privé et, en même temps, qu'elle doive faire des consultations. On est en train de brimer tout le monde. On se bouscule, étant donné l'horaire. Il y a des gens qui ne passeront pas aujourd'hui, mais il faut prendre le temps d'entendre tout le monde.

En ce sens, est-ce qu'il y en a qui ont des questions à poser à M. Tremblay? Sinon, on va passer à d'autres groupes. Je voudrais bien que tout le monde comprenne la situation très particulière dans laquelle on se retrouve. Il ne s'agit pas de se mettre des bâtons dans les roues, sauf qu'on se ramasse dans une situation vraiment particulière. On a beau vouloir accélérer, mais quand les faits nous sont rapportés comme ils le sont aujourd'hui dans le cas de la Ferme Laterrière - et ce sera sûrement la même chose pour les autres cas - ce sont des situations assez particulières. Je pense que les audiences auraient dû être beaucoup plus longues que le temps qui nous a été dévolu. Mais, on va composer avec ce qui nous a été donné, du moins pour la convocation d'aujourd'hui.

MM. les députés de Dubuc et de Lévis n'avaient pas fini de poser des questions. On passera à d'autres groupes, si on a le temps. M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Le ministre a déposé une lettre...

M. Côté (Charlesbourg): Une lettre du 22 décembre 1988 à Alcan, qui parle de la Loi sur l'expropriation et de la Loi sur les chemin de fer.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le député de Dubuc. M. le député de Lévis, aviez-vous d'autres questions pour M. Tremblay ou Me Desforges?

M. Garon: Le ministre a dit que, selon lui, c'est un affrontement entre deux conceptions des choses.

M. Côté (Charlesbourg): Dans le cas de la ferme.

M. Garon: Oui, dans le cas de la ferme. Si j'ai bien compris, votre position n'est pas de discuter avec Alcan. Vous souhaitez qu'elle passe ailleurs ou qu'elle achète au complet. Par rapport à la ferme, je ne le sais pas, mais je veux comprendre. Je vous pose la question, parce que j'ai cru comprendre que c'était cela, le choix. D'abord, j'aimerais savoir si c'est cela. Deuxièmement, la ferme a quelle superficie? Où passe le chemin de fer par rapport à la ferme? On m'a dit que c'était une ferme pour l'équitation, mais j'aimerais en savoir davantage pour comprendre.

M. Tremblay (Jeannot): La Ferme Laterrière, comme je l'ai mentionné, a dix-sept ans d'existence. Elle a eu une évolution assez lente.

Le Président (M. Parent, Bertrand): S'il vous plaît, j'aimerais avoir la collaboration de tout le monde. On a de la difficulté à entendre. Les mini-caucus, s'il vous plaît! Excusez-moi, allez-y, M. Tremblay.

M. Tremblay (Jeannot): Donc, la vocation ultime de la Ferme Laterrière, l'essence même de son existence, je le répète, c'est d'être une entreprise à caractère récréotouristique axée sur l'équitation, pour situer M. Garon dans cette perspective. Actuellement, elle a une superficie de 250 acres, à peu près. Elle a des boisés. Elle cultive ses terres en partie. Il y a une partie consacrée à l'hébergement, en fait, à tout ce qui se passe comme activités.

Le tracé qui a été proposé, nous en avons souligné toute la problématique pour nous à tous les intervenants. Je pense que M. le ministre, tantôt, l'a très bien précisé: II est évident que ce chemin de fer, pour nous, c'est une calamité; c'est sûr et certain.

M. Côté (Charlesbourg): Je n'ai pas dit une calamité.

M. Tremblay (Jeannot): Vous n'avez pas dit cela dans ces mots, mais, pour nous, ce n'est vraiment pas réconfortant d'avoir ce chemin de

fer. Donc, vous me posiez la question: Qu'est-ce qu'on a dit à Aican? Écoutez, qu'est-ce qui nous reste comme alternative au fait d'avoir ce chemin de fer? Sur le plan de l'éthique, on ne peut pas vous empêcher de passer dans le sens de ce dont on pariait, sur le pian de l'ensemble régional, sur le plan économique, si vous voulez. Tout ce qu'on peut faire, c'est que les gens d'Alcan, en tant que promoteurs - c'est Alcan, ie promoteur, ce n'est pas moi, ce n'est pas la Ferme Laterrière - disent: Écoutez, nous sommes conscients de cette problématique pour vous. On est prêts à regarder toutes les avenues possibles. Ce n'est pas cela qui se passe.

M. Garon: Dans les discussions qu'il y a eu avec la compagnie, est-ce qu'il a été question de plusieurs tracés alternatifs ou d'un seul tracé? Est-ce que, selon vous, dans les discussions qu'il y a eu, il y avait possibilité d'avoir d'autres tracés ou si c'était le seul tracé possible?

M. Tremblay (Jeannot): Je le dis dans la résolution, c'est que, quand Alcan a déposé son dossier...

M. Garon: Je ne l'ai pas eue.

M. Tremblay (Jeannot): ...elle a dit ceci: C'est le seul tracé possible. La seule avenue possible, c'est ça, c'est ce tracé-ià. Après ça, Alcan a apporté des modifications, par exemple, dans certaines prairies pour le ministère de l'Agriculture, pour le zonage agricole, afin de corriger certaines anomalies du tracé qui prenait trop de terres arables, etc. Elle a corrigé ça.

M. Garon: Vous, êtes-vous dans la zone agricole?

M. Tremblay (Jeannot): Oui.

M. Garon: Quand il a été question du tracé, vous n'avez pas...

M. Tremblay (Jeannot): Je vous le répète, M. Garon: Nous avons tout de suite manifesté clairement à la municipalité et à Alcan - à ce moment-là, c'était M. Jacques Fortin qui était représentant d'Alcan - que nous étions contre ce tracé. À ce moment-là, c'est évident qu'ils nous disaient: Écoutez, nous sommes en prélimaires, vous allez voir, on vous tiendra au courant, il va y avoir des commissions, etc. Alors, qu'est-ce qu'on fait durant ce temps-là? On attend que les événements se produisent. Qu'est-ce qu'on pouvait faire de plus? Comme pour le Bureau d'audiences publiques, I a fallu faire des demandes au cours du mois de mars.

M. Garon: Quand vous dites qu'il va y avoir d'autres discussions avec Alcan, puisque c'était préliminaire, d'après vous, à quoi mèneraient ces discussions avec Alcan?

M. Tremblay (Jeannot): Ce que j'attends d'un promoteur, c'est de vraiment considérer la problématique de notre dossier, en ce qui nous concerne. Or, ce n'est pas le cas. M. Garon, je suis assez honnête pour vous dire que, si c'était autrement, je ne serais pas ici aujourd'hui. Finalement, qu'est-ce qu'on se dit? On se dit: Le chemin de fer, il va passer. C'est ça qui va arriver, le chemin de fer va passer. Alors, qu'est-ce qu'l nous reste? Il reste que le promoteur doit faire ses devoirs et analyser en profondeur quelle est la problématique de ce projet pour nous, parce que ce n'est pas moi qui suis le promoteur, c'est lui. S'il n'a pas eu de difficultés avec certains intervenants dans le dossier du chemin de fer, peut-être que ces gens-là n'avaient pas tellement de projets ou peut-être qu'ils voulaient vendre leur terre.

Aussi, si vous regardez la carte, M. Garon - vous avez été ministre de l'Agriculture - la problématique du chemin de fer, en ce qui nous concerne, c'est que les terres sont très profondes de La Baie jusqu'au rang Saint-Isidore, mais plus on monte vers Laterrière plus la montagne se rétrécit. Les terres arables par rapport à la montagne sont très rétrécies entre le chemin. Finalement, pour nous - je dis ça sous toute réserve - c'est à peu près à 2000 pieds des premiers bâtiments. C'est effrayant. Je peux vous dire une chose: Un des membres du BAPE est venu et il ne pensait pas que c'était si proche.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Vous pouvez peut-être proposer aux membres de la commission d'aller faire un tour...

M. Tremblay (Jeannot): Ah, ce serait merveilleux!

Le Président (M. Parent, Bertrand): ...à la Ferme Laterrière...

M. Tremblay (Jeannot): Ce serait extraordinaire.

Le Président (M. Parent, Bertrand): ...pour tenir des audiences sur place. Est-ce qu'il y a d'autres questions à poser à M. Tremblay avant qu'on passe à l'autre groupe? M. le député de Drummond.

M. Saint-Roch: Juste une question, M. Tremblay.

M. Tremblay (Jeannot): Oui.

M. Saint-Roch: Quelle est la valeur des investissements que vous avez faits, à l'heure actuelle, sur votre ferme?

M. Tremblay (Jeannot): Nous en avons, actuellement, pour à peu près 1 800 000 $. C'est

vraiment le chiffre et je ne compte pas le travail qu'on y a mis et tout ça. Alors, c'est quand même quelque chose. Ce n'est pas juste ça et je termine là-dessus, M. le Président. C'est que la Ferme Laterrière a un consensus très fort régionalement de toutes les instances gouvernementales, socio-économiques et autres. On soulignera ça d'une façon formelle au BAPE.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Tremblay et Me Desforges. J'inviterais immédiatement le groupe qui représente la succession Chouinard-Brisson à s'avancer et à nous faire une présentation. Je vous rappelle qu'à moins d'entente unanime entre les deux partis on ne pourra pas dépasser 18 heures. Sinon, je pense que tout le monde s'entend, à cause des obligations de certains, pour terminer à 18 heures. Alors, il nous reste quelque chose comme 16 minutes. Mme Françoise Chouinard-Drolet, c'est bien ça?

Mme Chouinard-Orolet (Françoise): C'est bien ça. Bonjour, monsieur.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce que l'autre personne pourrait se présenter? C'est monsieur Drolet?

M. Drolet (André): Oui, André Drolet, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors bienvenue. Allez-y, madame.

Succession Chouinard-Brisson

Mme Chouinard-Drolet: Bonjour, M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission. Mon époux André et moi ne sommes pas des gens de loi. Nous sommes, tout simplement, des citoyens propriétaires lésés dans nos droits. Voici qu'aujourd'hui nous nous présentons devant vous afin de défendre un droit légitime et absolu, notre droit de propriété. Nous sommes propriétaires - on en a parlé passablement depuis tout à l'heure - du domaine du lac Gravel depuis 42 ans.

Aujourd'hui, la commission de l'aménagement et des équipements qui étudie le projet de loi privé 230 entend les intervenants qui s'opposent. Alors, vous avez bien compris qu'on s'oppose à accorder à Alcan un droit d'expropriation de nos terrains. Voici pourquoi on s'oppose à ce qu'elle morcelle et viole notre domaine privé. (17 h 45)

J'aimerais d'abord vous définir quelques termes. En feuilletant mon petit Larousse, édition 1988 - il n'y a rien là d'original, sauf que, des fois, c'est important de le rappeler - le mot "exproprier" se définit comme suit: "Déposséder quelqu'un de sa propriété dans un but d'utilité générale, suivant des formes légales accompa- gnées d'indemnités." Le mot "privé", du latin privatus: "Qui n'appartient pas à la collectivité, mais à un particulier: propriété privée. Qui est strictement personnel et n'intéresse pas les autres" - je pense que Larousse a du cheminement à faire - et "où le public n'a généralement pas accès." Le mot "public": "Qui concerne tout un peuple, une collectivité."

Maintenant, passons à l'article 406 du Code civil qui définit le droit de propriété comme étant "le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou règlements." On peut donc faire ressortir les deux principaux aspects de la définition du Code civil. Premièrement, les aspects positifs du droit de propriété, c'est ce que nous avons le droit de faire. Il y a d'abord l'usus, c'est-à-dire le droit de se servir de la chose, il y a l'usufruc-tus, le droit de percevoir les fruits et revenus, et l'abusus, le droit de disposer en principe de manière absolue de la chose. Le deuxième aspect restrictif du droit de propriété découlant de la deuxième partie de l'article 406 du Code civil, c'est que le législateur, par voie de lois ou de règlements, est le seul à pouvoir restreindre le droit de propriété. Dans ce cas-ci, la restriction est caractérisée par le pouvoir d'expropriation.

Alors, jusqu'où peut aller ce pouvoir d'expropriation? J'ai un avis juridique que notre procureur m'a fourni et je le cite: "Le droit d'exproprier la propriété privée doit être basé sur un texte de loi qui l'accorde clairement Ce droit d'exproprier n'est jamais présumé ni implicite. Ce principe vient d'une règle d'interprétation à l'effet que, lorsqu'un texte de loi porte atteinte aux droits du sujet, il doit être l'objet d'une interprétation stricte. De plus, y existe un autre principe à l'effet qu'en matière d'expropriation les procédures sont de rigueur et doivent être suivies strictement à peine de nullité. Alors, partant de ce principe, une expropriation doit toujours être motivée pour des raisons d'intérêt public. Par conséquent, ce pouvoir est accordé presque exclusivement aux autorités publiques, de même qu'aux corps publics ou parapublics".

Maintenant, je vais vous relater une lettre que j'ai fait parvenir à différents ministères concernés par notre problématique, qui était datée du 7 avril 1988 et qui explique la problématique de notre territoire. Je situe, dans un premier temps, notre propriété qui compte au-delà d'un mille carré; je suis encore en milles, vous allez me pardonner. Ensuite, ladite compagnie a déjà sans autorisation de notre part - on en a parlé un peu tout à l'heure aussi - effectué un tracé arpenté et abattu - c'est peut-être un élément nouveau pour vous - des arbres sur toute la longueur du terrain sur une largeur entre 10 à 30 pieds sans, pour autant, à ce jour, avoir compensé de quelque façon que ce soit les propriétaires. Depuis plusieurs années déjà, la compagnie tente de nous intimider via

des rencontres, des lettres, des formules pro forma et j'en al une; c'est un bel exemple sur la présumée bonne foi d'Alcan. En plus, on nous laissait croire qu'un droit d'expropriation lui était acquis, mais on n'en avait jamais eu de preuve. Vous pouvez comprendre par cela nos vives Inquiétudes, d'autant plus que cette entreprise multinationale, antérieurement, n'a pas toujours été reconnue pour ses préoccupations écologiques. Dans le dernier tracé du chemin de fer connu, la compagnie Alcan veut une fois de plus procéder à du défrichage, à du coupage de bois dans le but d'effectuer des analyses de sol par forage. Ayant déjà été lésés dans le passé par la même compagnie, je pense que vous allez comprendre qu'aujourd'hui on vient défendre nos droits et, tant qu'Alcan n'aura pas versé de compensations, nous gardons certaines positions. On veut s'assurer que le projet qui va passer sur nos terrains va respecter l'environnement aquatique et faunique, somme toute, l'environnement total du territoire, ainsi que nos droits de propriété. il faut noter ici que, dans le dernier tracé proposé par Alcan, qui traverse notre domaine, un ruisseau qui fait possiblement résurgence et qui est la décharge naturelle de notre lac sera directement affecté par les travaux afférents. On nous Informe qu'un tel élément naturel est un phénomène rare et à sauvegarder. On est très inquiets aussi des grands désordres hydrogéologiques qui risquent de survenir des travaux et subséquemment des déblais et des terrassements. On a dit tout à l'heure qu'iIs voulaient prendre chez nous à peu près 500 pieds de largeur dans un certain endroit. Nous n'insisterons pas sur la préservation de la faune, de la flore et des lacs poissonneux ensemencés de truites.

Alcan nous a avertis que les matériaux suivants vont être transportes par son train, à raison de deux fois par jour, sept jours par semaine. C'est, apparemment, un minimum. Il y a de l'alumine, de la chlorite, du fluorure et des anodes. Il y a aussi des lingots, évidemment, leur matière finale. Quelle Influence de tels matériaux auront-Ils sur l'environnement? On ne parle même pas de la qualité de vie qui est diminuée, ni des propriétaires des deux résidences sises sur le domaine qui en souffriraient aussi.

Pour vous situer un petit peu, si vous prenez un carré, notre domaine est situé là-dedans et Alcan trace... Le chemin de fer passe environ... Il reste un tiers du territoire qui est une forôt boisée. Les lacs sont ici. C'est à peu près de cette façon qu'elle coupe notre territoire, donc, sur toute la diagonale en coupant le terrain d'un tiers, deux tiers. Les deux lacs sont fermés. Ces lacs ont été cadastrés comme terrains de ferme. C'est un vieux contrat qui date environ de 1840. Lorsque notre père et M. Brisson ont acheté le domaine, c'était à condition de conserver ces contrats. Nous sommes donc propriétaires des deux lacs. Je ne sais pas s'iI en existe d'autres dans la province de

Québec. En tout cas, chez nous, c'est comme ça. Le phénomène spécial, c'est que ce sont deux lacs fermés, alimentés par des sources d'eau souterraines, avec une emprise d'eau située au deuxième lac.

La veine d'eau principale qui alimente le lac, parce qu'une partie ne gèle pas l'hiver et on peut la voir, est située du côté de l'usine de Laterrière et la décharge naturelle est située du côté de la ville de La Baie. C'est ça, la problématique. L'endroit où le chemin de fer va monter dans la montagne, c'est vraiment là où est la décharge naturelle du lac. Est-ce qu'ils vont enlever le bouchon et que le lac va se vider? Est-ce qu'ils vont puiser de l'eau à la source naturelle ou à l'alimentation principale, de sorte que la source va se tarir et que le lac ne sera plus alimenté en eau? Voilà, en gros, nos inquiétudes face à la propriété.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. Mme Drolet. Est-ce que cela complète votre présentation?

Mme Chouinard-Drolet: M. le Président, j'aimerais prendre les devants. Je suis pas mal certaine que M. Garon qui a posé la même question aux autres va nous la poser aussi.

M. Garon: Oui, oui.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Vous présumez.

Mme Chouinard-Drolet: Je veux vous dire que j'ai, en ce moment, un document daté du 3 juin 1982. C'est le permis de dézonage qui avait été accordé par la CPTA.

Maintenant, 1 y a une liste de personnes citées. Tout à l'heure, nous avons entendu M. Wells, le procureur d'Alcan, qui a dit: la succession Chouinard et Brisson. Je vais corriger tout de suite quelque chose. La ville de La Baie avait comme habitude, comme politique ces dernières années d'envoyer un seul compte de taxes lorsqu'il y avait plusieurs propriétaires. Donc, 1s fonctionnaient par ordre alphabétique. Brisson vient avant Chouinard. Vous allez comprendre qu'à ce moment ce n'est pas nous qui avions le compte de taxes. On le payait quand même, mais ce n'est pas nous qui l'avions. Lorsque Alcan a sorti la liste des propriétaires, notre nom ne figurait pas, c'est bien sûr, parce que notre nom ne figure pas là-dedans. Cela ne fait pas longtemps qu'Alcan parie des successions Chouinard et Brisson. En fait, c'est depuis que je communique avec elle. Bien sûr, c'était un document qu'elle avait retiré de la ville de La Baie. Alors, elle pariait de M. Brisson et non pas de nous, ce qui veut dire que nous n'en avons pas été informés.

Ceux qui me connaissent ici, parce qu'il y en a quelques-uns qui me connaissent, savent que je me débats et que je travaille fort dans les

dossiers. Donc, au moment où nous avons été informés qu'il y avait un projet quelconque de la compagnie Alcan, c'était en 1983. J'avais fait une petite recherche. On m'a informée, à un moment donné, qu'il y aurait possiblement quelque chose qui passerait sur nos terrains. Je n'étais pas du tout au courant. J'ai été très intuitive, j'ai écrit un petit document interne pour le bénéfice de nos deux familles et qui est daté du 10 novembre 1983. J'aimerais vous en lire des passages. On est en 1989 et vous allez voir la pertinence qu'a encore ce dossier.

J'avais fait plusieurs interventions. Alors, je fais une mise en situation. "Dans une première démarche, les copropriétaires Chouinard-Brisson examinent d'un commun accord la possibilité de vendre le domaine dans sa totalité. Un courtier américain de Boston, un courtier international, à la demande des deux parties, se rend dans les limites de la paroisse de Bagotville où se situe le domaine afin de l'évaluer et de décrocher le contrat de vente." En passant, le monsieur ne prenait rien en bas de 500 000 $; il prend seulement de gros contrats. À ce moment-là, l'évaluation du courtier, se situe entre 700 000 $ et 800 000 $ en argent américain.

Voici la problématique. Dans une seconde démarche, une rencontre est demandée par les copropriétaires avec le directeur du service immobilier Alcan. Quelle ne fut pas la surprise d'apprendre qu'Alcan projette une ligne de chemin de fer qui traverse ledit domaine dans une ligne diagonale! Je ne pensais même pas vous parler, aujourd'hui, de ce document. Voici qu'il se trouve à être très pertinent.

Ensuite, nous avons fait différentes démarches pour obtenir de l'information auprès de la ville de La Baie. Je vous cite un autre paragraphe. La compagnie Alcan très avancée dans ce dossier va comprendre qu'on n'était pas au courant et là, tout à coup, on va pour s'informer parce que, enfin, on avait eu vent de quelque chose. Alors, on se rend compte qu'Alcan est très informée de ce dossier et que déjà, à notre insu, elle a fait une demande de dézonage d'un corridor de 70 mètres de large devant passer dans une ligne diagonale sur notre propriété. Son dossier est très précis et bien étoffé.

La rencontre avec la compagnie Alcan. Michel Brisson, de la famille Brisson, et moi avons rencontré M. Laurent Dubois, du service immobilier d'Alcan. Notre but était de faire préciser les intentions de la compagnie face au tracé de la ligne de chemin de fer. Nous avons aussi essayé de connaître l'échéancier. Son rôle s'est limité à tenter de nous sécuriser et de nous expliquer qu'Alcan nous contacterait le temps venu afin de conclure un marché d'expropriation, car les gens dans ce dossier sont des gens pariables, nous a-t-il dit.

Il nous a trouvés bien informés. Il nous a confirmé que le dossier en marche était avancé, bien qu'il parle toujours de projet de tracé de chemin de fer. C'est ça qui nous intéressait, évidemment. Mais, a-t-il dit, c'est à 90 % définitif, ce tracé. Il a dit ne rien connaître de l'échéancier, bien qu'il ait admis qu'il y en ait un. Alors, I n'y avait pas moyen qu'on sache grand-chose. (18 heures)

Le Président (M. Parent, Bertrand): Mme Chouinard-Drolet, est-ce que vous pouvez compléter? On a un problème, il est 18 heures.

Mme Chouinard-Drolet: Enfin, je cite M. Dubois qui nous dit que c'est un domaine presque unique en Amérique du Nord, ce dont on était conscients. Je lui ai laissé savoir qu'on avait... Je lui ait fait connaître à ce moment-là tout de suite nos préoccupations sur l'écologie, sur la valeur de la propriété, sur la quiétude et le reste. Évidemment, on aurait aimé qu'il nous explique la loi 125, mais il n'y a pas eu suffisamment d'informations.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Mme Chouinard-Drolet. Il est 18 heures. Cela prendrait l'accord unanime des deux côtés pour continuer, sinon nos règlements prévoient qu'on doit ajourner. M. le député de Lévis, rapidement.

M. Garon: M. le Président, je pense qu'on est d'accord pour ne pas continuer. Mais vous avez fait une proposition tout à l'heure et, si la commission était d'accord, je serais d'accord avec ça. C'est que c'est difficile de visualiser cela sans voir les lieux. Si la commission... Non, je dis que, quant à faire notre ouvrage, faisons-le comme il faut.

Une voix:...

M. Garon: C'est une grosse affaire. Il y a des gens, des individus, enfin, une grande entreprise et on me parle d'écologie, de fermes importantes. C'est très difficile à visualiser pour nous. Je pense que cela ne serait pas une mauvaise affaire, avant qu'on décide de siéger une autre journée, que la commission aille voir les lieux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Cela nous sensibiliserait à l'autoroute aussi.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, un dernier commentaire. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président. Je pense que, par délicatesse pour les gens qui, à tout le moins, sont à la table et ont commencé leur témoignage, on pourrait peut-être faire en sorte de passer une quinzaine de minutes pour leur poser des questions, pour les libérer. Libre à eux s'ils veulent venir lorsqu'on siégera de nouveau. Si cela devait se prolonger, on recommencera à la prochaine séance. Le

témoignage étant déjà entamé, je n'aurais pas d'objection à ce qu'on puisse prendre une quinzaine de minutes additionnelles pour terminer cette audition-ci, laissant les autres témoignages pour la reprise de nos travaux.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, il faudrait s'entendre sur un laps de temps; sinon, il y a toujours possibilité de poursuivre.

Une voix: Jusqu'à 18 h 15.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Pour 18 h 15, cela va des deux côtés?

M. Garon: Je serais d'accord pour 18 h 15, mais pas plus tard.

Le Président (M. Parent, Bertrand): D'accord.

M. Garon: J'ai d'autres rendez-vous.

Le Président (M. Parent, Bertrand): C'est 18 h 15.

M. Garon: Si on n'a pas fini, on continuera...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Voilà! Alors, la période d'échange de vues ou de questions est ouverte. Je vous avertis. On a jusqu'à 18 h 15 d'après l'entente des deux parties. Malheureusement, on est obligés de... Est-ce qu'il y a des questions de part et d'autre? M. le ministre, vous aviez des questions?

M. Côté (Charlesbourg): Je ne sais pas si... Il y avait peut-être un témoignage additionnel. Libre à vous de prendre le temps pour entendre un témoignage additionnel, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Les quinze minutes appartiennent à tout le monde. Si vous les prenez, on ne posera pas de questions.

M. Drolet: M. le Président...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M. Drolet.

M. Drolet:... M. le ministre, Mmes et MM. les députés et membres de la commission parlementaire, j'ai eu chaud. Je voyais l'horloge derrière vous et je me disais: Mon Dieu! J'ai passé proche. Merci de m'avoir alloué ces quinze minutes. Je serai très bref. Rassurez-vous, vous ne dormirez pas. Je ne vous parlerai pas de lois, je ne vous parierai pas d'expropriation, mais je vais répondre à plusieurs questions que vous vous posez. Ce que je vous propose, c'est que je vais reprendre depuis l'audition de cet après-midi chacun des intervenants, chacune des questions en y donnant des réponses qui, j'espère, seront claires, nettes et précises.

Dans un premier temps, je suis très heureux, M. le Président, d'entendre le parrain de cette loi qui nous dit dans une envolée qu'il ne faudrait pas non plus oublier l'apport économique d'Alcan, mais aussi les droits et privilèges des propriétaires. Merci. Cela nous rassure. D'un autre côté, il y a un ministre qui nous dit que le pouvoir économique est important, mais qu'aussi il ne faudrait pas mettre de côté les droits et privilèges des propriétaires. Cela nous rassure des deux côtés de la Chambre. Par la suite, on s'interroge et on écoute le procureur de la compagnie qui nous dit qu'effectivement il y a urgence au dossier. Mon épouse vous pariait tout à l'heure d'un dossier qu'elle a entamé avec Alcan en novembre 1983. Mesdames et messieurs, nous sommes le 3 mai 1989 et nous avons encore aujourd'hui à attendre, et je pèse mes mots, une lettre écrite par Alcan ou Roberval-Saguenay - je vous fais grâce des détails - faisant une offre qu'on pourrait qualifier même d'écrite. Est-ce assez fort? Si vous ne trouvez pas ça formidable, moi, cela me renverse. On nous parie de bonne foi, on nous dit qu'Alcan a fait des efforts inouïs, comment se fait-il que nous sommes ici? Nous n'avons pas encore eu une lettre écrite de cette même compagnie. Le dernier document émanant d'Alcan, adressé à ma belle-mère, demandait l'autorisation d'aller sur les lieux, et j'enchaîne avec ca, mesdames et messieurs, aller sur les lieux. A la suite d'une demande d'un député tout à l'heure, on a dit: Oui, c'est vrai, Alcan est allée faire du chaînage et a fait un petit corridor.

Vous comme mol, si je ne l'avais pas vu... Vous dites, écoutez, quand même, ne charriez pas, M. Drolet, ils sont allés voir sur les lieux, c'est normal. Saviez-vous que le corridor avait 30 pieds et qu'on a abattu des arbres de 8 pouces de diamètre? Comment réagiriez-vous si j'allais voir sur votre terrain à vous, supposément par droit d'arpentage, et que je coupais, non pas des aulnes, mais des arbres debout sur une largeur de 30 pieds? Je vous ferai remarquer que le terrain, avec deux routes pour les deux propriétaires, n'a que onze pieds pour préserver l'écologie du terrain, mais Alcan, sans autorisation, va sur le terrain, fait du chaînage et coupe pour 30 pieds. M. le ministre demandait tout à l'heure: Y a-t-il bonne foi? Je présume qu'il comprendra la réponse.

M. le Président, vous me pardonnerez de regarder toujours au-dessus de votre tête, ce n'est pas que je veuille vous snober, je regarde tout simplement l'horloge et j'aurais beaucoup plus à dire, sauf que l'on a convenu avec tous les membres ici de se restreindre. Je ne me permettrai qu'une couple de remarques.

Un député, je ne sais pas lequel, a demandé tout à l'heure: Y a-t-il possibilité d'ententes de gré à gré? Il n'y a pas de bonne foi. Je suis dans le domaine des relations du travail, je connais quelque chose dans la négociation et un

peu dans la bonne foi, mais je peux vous dire incontestablement qu'Alcan ne peut pas être de bonne foi s'il n'y a pas négociation. En date du 3 mai 1989 à 18 h 8, il n'y a pas encore de négociation formelle d'entreprise. Il n'y a même pas de lettre écrite. Je ne sais pas si cela vous rassure ou si cela répond aux questions appréhendées ou à venir, mais cela nous semblait important de vous dire ici ces réalités que l'on est capables de prouver n'importe quel temps. Donc, quand on entend les procureurs, de part et d'autre, vous dire qu'on fait pitié, qu'on est mal, il y a urgence... Le dossier, messieurs, est entamé depuis 1983 et nous sommes en 1989. Nous serions prêts à revenir devant cette digne Assemblée dans six ans pour en redébattre. Donnez-nous le même temps que vous avez donné à Aican. Merci.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Drolet. Pour les sept minutes qui restent, je vais permettre une intervention de chaque côté. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai cru comprendre, de l'analyse du dossier, qu'il y a eu des poursuites de ia part de la succession, je pense. N'y a-t-il pas des causes pendantes devant les tribunaux? Est-ce que c'est relatif au corridor, aux 30... Je vous le dis tout de suite, en entendant une chose comme ça, je pense qu'Alcan n'a pas de félicitations à recevoir de se servir d'une loi qui date de fort longtemps, des années mil huit cent, de se servir de cette Loi sur les chemins de fer pour en couper aussi large. Je n'ai pas de félicitations à faire à la compagnie Alcan, dans une situation comme celle-là, pour faire de l'arpentage; 30 pieds, je pense qu'il devait y en avoir un épais et un très large pour ne pas être capable de faire le tracé. Il n'y a certainement pas de félicitations à leur faire sur le plan de la qualité de l'environnement.

Est-ce qu'il y a toujours des poursuites, parce que j'ai cru voir dans les dossiers que c'était le cas?

Mme Chouinard-Drolet: M. le Président, je peux répondre à M. le ministre? M. le ministre, je vous réponds, le président est occupé.

M. Côté (Charlesbourg): Oui.

Mme Chouinard-Drolet: Effectivement, nous avions un avocat dans le dossier, M. le ministre, qui, en notre nom, avait fait une poursuite et nous avons changé d'avocat depuis ce temps. Donc, nous avons arrêté la poursuite, sauf que nous avons d'autres procureurs dans le dossier. Pour l'instant, il n'y a pas de poursuite réentamée, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y en n'aura pas non plus. C'est que nous, nous sommes de bonne foi, M. le ministre. Par contre, à un moment donné, notre patience a des limites aussi.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. Une dernière question parce que, évidemment, il y a toujours une question de temps. Si, demain matin, Alcan se présentait chez vous en disant: Oui, on s'assoit chez vous, on négocie avec vous et, en coupant du tiers ou des deux tiers, on est prêt à faire l'acquisition de la propriété, est-ce que vous seriez prêts à faire ça?

Mme Chouinard-Drolet: M. le ministre, comme nous sommes de bonne foi, on ne refuserait pas de négocier.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, M. le député de Lévis ou... Oui, M. Drolet.

M. Drolet: J'allais ajouter juste ceci...

Le Président (M. Parent, Bertrand): N'abusez pas, vous!

M. Drolet: ...à la réponse de mon épouse au ministre: Effectivement, il n'y a plus de poursuite, elle a été retirée. Par contre, en contrepartie, nous avons refusé à Alcan ou à Roberval-Saguenay, il y a quelque temps, d'accéder à nos terrains. Et la réponse, en toute bonne foi, même en retirant la poursuite, c'est qu'on s'est dit: S'ils vont faire des études et qu'ils passent dans un autre 30 pieds de "trail" qui n'est pas le même, bon Dieu, dans trois ans, messieurs, il n'y aura plus un arbre debout là-dessus. Cela vous fait rire, mais ça s'adonne que c'est ça.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. le député de...

M. Dufour: Je ne sais pas si mon collègue avait des questions à poser. Moi, je n'en ai pas, sauf peut-être une remarque-

Le Président (M. Parent, Bertrand): M. fe député de Jonquière.

M. Dufour: ...concernant le dossier. En entendant les témoignages des différents intervenants à la commission parlementaire, c'est évident que dans ce dossier, en tout cas jusqu'à maintenant, il semble manquer une certaine préparation ou encore certaines mises en garde n'ont pas été faites au moment où elles auraient dû se faire. C'est ce qui fait, à mon point de vue, qu'il serait difficilement acceptable qu'on puisse déterminer, hors de tout doute, que le projet de loi qu'on a devant nous devrait être accepté immédiatement et sans aucun changement. Il semblerait aussi - je pense que cela est clair - qu'il y a des démarches qui n'ont pas été enclenchées ou entreprises. On aurait tout intérêt, comme parlementaires, non seulement d'aller voir sur le terrain ce qui se passe, comme

cela a été proposé par mon collègue de Lévis, mais surtout de s'assurer qu'il y a un certain nombre d'intervenants qui sont d'accord avec ce projet de loi. Ce qu'on a vu jusqu'à maintenant, c'est qu'Alcan doit vivre, c'est une question économique; par contre, il n'y a pas, comme on dit, de danger dans la demeure, iI n'y a pas péril dans la demeure et iI y a peut-être une couple de mois... Je comprends aussi qu'Alcan, si elle veut accélérer le processus, possède ce qu'il faut pour le faire.

En tout cas, pour ma part, je considère qu'il serait peut-être bien de dire aux intervenants: Oui, c'est vrai que le projet de loi ne sera pas adopté aujourd'hui. Ce serait peut-être donner un message assez clair à Alcan, soit qu'il y a possibilité de négocier, qu'elle se dépêche de négocier et qu'on en arrive, comme parlementaires, à un mariage de raison, sinon d'amour.

Dans les projets de loi privés, savez-vous ce qui se produit? À mon point de vue, on a toujours trouvé le moyen d'en arriver à des consensus et d'amener les intervenants à se parler, à s'accepter et, en même temps, à trouver une façon de mieux-être et une façon de vivre. Nous...

Une voix: Un mariage arrangé.

M. Dufour: Bien, c'est vrai. Ce que je proposais tout à l'heure...

La Président (M. Parent, Bertrand): M. le député de Jonquière, je vous inviterais à conclure.

M. Dufour:... c'est que le député...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Notre temps est terminé.

M. Dufour: II n'est pas 18 h 15. Il est 18 h 14.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Notre temps est terminé. Un dernier commentaire, madame.

M. Dufour: Ce que je proposais tout à l'heure...

Le Président (M. Parent, Bertrand): Non, je pense qu'il faut s'arrêter quelque part. Je m'excuse, mais mon rôle de président, c'est de faire en sorte qu'on respecte les ententes. Alors, un dernier commentaire, madame.

Mme Chouinard-Drolet: Merci, M. le Président. Un dernier commentaire sur la présumée bonne foi d'Alcan. Dans un document qu'ils ont fait parvenir à ma mère dernièrement, iIs demandaient la permission d'aller faire des forages, ce que nous avons toujours refusé. Ils ont dit: On va répondre à vos inquiétudes hydrogéologiques; on va faire faire l'analyse du terrain pour les études hydrogéologiques; on va faire évaluer votre boisé et tout. Il y a un sous-sol avec de la gravière mais Is ne nous parlent pas de cela. On va vous faire ça, on va répondre à vos inquiétudes, mais donnez-nous la permission d'aller forer. Comme on ne leur a pas encore donné la permission, les études ne sont pas faites. Alors, c'est ça, la présumée bonne foi d'Alcan.

J'en profite et je suis fière aussi de vous inviter tous à notre domaine du lac Grave). On va vous recevoir amicalement, agréablement. Il y a une information qu'on ne vous a pas donnée, et les gens d'Alcan l'apprennent peut-être en même temps que vous. Dernièrement, nous avons constaté une baisse des eaux du lac de plusieurs pieds. Alors, la problématique que l'on vit est réelle et même visible en ce moment.

Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci beaucoup, Mme Chouinard-Drolet et M. Drolet.

En terminant, j'aimerais dire aux membres de cette commission ainsi qu'aux représentants de la requérante de même qu'aux intervenants que cette commission s'est déroulée aujourd'hui dans un cadre assez spécial. Je remercie tout le monde de sa collaboration. C'est bien sûr qu'l y aura une suite. On se doit d'ajourner les travaux de cette commission sine die. On devra se réunir pour voir ce qu'i adviendra, où, quand et comment. Si je peux faire une autre proposition qui pourra être utile aux deux parties, on peut mettre des salles à votre disposition pour que les intervenants et Alcan puissent se rencontrer et négocier ce soir.

Là-dessus, la commission de l'aménagement et des équipements ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 16)

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