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(Quinze heures trente-neuf minutes)
Le Président (M. Parent, Bertrand): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements est
maintenant ouverte. Je rappelle le mandat de la commission cet
après-midi. Il s'agit d'entendre les intéressés et, par la
suite, procéder à l'étude détaillée du
projet de loi d'intérêt privé 230, Loi modifiant la Loi
constituant en corporation la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay.
M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Baril
(Rouyn-Noranda) est remplacé par Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata); Mme Juneau (Johnson) par Mme Blackburn
(Chicoutimi) et M. Paré (Shefford) par M. Brassard (Lac-Saint-Jean).
Organisation des travaux
Le Président (M. Parent, Bertrand): Je vous remercie.
Une voix:...
Le Secrétaire: Vous êtes membre d'office en tant que
parrain du projet de loi.
Une voix: ...objection au projet de loi.
M. Garon: Au contraire, celui qui présente le projet de
loi n'a pas à être d'accord avec le projet de loi. Il ne fait que
le présenter...
Le Président (M. Parent, Bertrand): S'il vous plaît!
On va essayer de procéder dans l'ordre cet après-midi. Avant de
commencer, je demanderais la collaboration de tout le monde, des
députés de pan: et d'autre et aussi des intervenants. Un temps
limité nous est alloué, c'est-à-dire jusqu'à 18
heures, pour tenter d'aller de l'avant, pour la consultation et l'étude
détaillée du projet de loi article par article.
Considérant qu'il y a une consultation à l'intérieur
même de cette étude qui doit se faire, parce qu'il y a
différents groupes d'intervenants, on devra essayer de composer avec le
temps que nous avons.
M. Garon: M. le Président.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Je dois dire que, habituellement, quand un projet vient
devant une commission parlementaire, il n'y a pas d'opposition. C'est
arrivé une fois où il y avait de l'opposition à la
commission parlementaire à laquelle je participais, une opposition
très faible. On voulait une modification a une clause, on a
proposé, à ce moment, un changement à la clause et tout le
monde avait été d'accord. C'est un cas particulier où il
semble y avoir plusieurs opposants.
M. le Président, comme il s'agit d'un projet de loi
d'intérêt privé, c'est un peu le rôle de la
commission de bien comprendre de quoi il s'agit et de pouvoir avoir un
éclairage complet par rapport au projet de loi. Souvent, quand le
débat est bien fait en commission, les gens arrivent à s'entendre
entre eux.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Je vous remercie, M.
le député de Lévis. Effectivement, ce qu'on aura à
vivre est un peu spécial. C'est pour ça que j'ai demandé
la collaboration de tout le monde afin que ça se déroule
très bien. Je pense qu'on va réussir à s'entendre.
D'abord, il y a, bien sûr, le parrain du projet de loi, le
député de Dubuc, qui va faire sa présentation, nous faire
valoir son point de vue. Suivront le ministre responsable, le ministre des
Transports, de l'étude de ce projet de loi et le porte-parole de
l'Opposition en cette matière, le député de Lévis.
S'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir, Hs pourront
le faire au tout début, lors de la présentation. Par la suite,
nous entendrons le procureur du requérant, Me Guy Wells, pour une
présentation.
Que ce soit le procureur ou les différents intervenants qui sont
en quatre groupes, on vous demande de vous limiter, si possible, à une
présentation maximale de 20 minutes, qui est, normalement, le temps de
parole de chacun des parlementaires. Il y aura ensuite des questions de la part
des députés. S'il n'y en a pas, on procédera avec le
groupe suivant. Il faudrait s'entendre pour procéder à
l'intérieur d'un bloc de 20 minutes pour chacune des
présentations, qui est le droit de chacun des parlementaires ici.
Alors, après avoir entendu la présentation du procureur de
la requérante, Me Wells, nous entendrons dans l'ordre suivant, pour leur
présentation générale: M. Guy Gilbert; par la suite, le
groupe de la Ferme Laterrière inc, M. Tremblay et M. Desforges composant
ce groupe; un troisième groupe, la succession Chouinard-Brisson;
ensuite, l'autre groupe formé de MM. Simard, Maltais, Grenon et Mme
Gauthier, représenté par le procureur, Me Françoise
Gauthier; finalement, un cinquième groupe, MM. Botvin et Gobeil.
Dans cet ordre-là et si tout le monde collabore, lorsqu'on aura
fini d'entendre les différents groupes d'opposants dans le contexte
assez spécial d'un projet de loi privé, nous pourrons
immédiatement procéder, à l'intérieur du temps qui
nous est dévolu à cette commission, c'est-à-dire
jusqu'à 18 heures, à l'étude article
par article du projet de loi avec la réglementation habituelle.
Dans ce sens et sans plus tarder, ]e vais Inviter le parrain du projet de loi
d'intérêt privé 230, M. le député de
Dubuc.
Remarques préliminaire*
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Vous me permettrez
d'abord de saluer les représentants d'Alcan, de même que tous les
représentants des groupes intéressés et désireux de
présenter leurs opinions sur le projet de loi privé 230. La
compagnie Alcan m'avait contacté il y a déjà quelques
années pour présenter ce projet de loi. On sait l'importance de
cette compagnie au Québec, mais particulièrement dans la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et plus spécifiquement dans le
comté de Dubuc. J'étais, à un certain moment,
député d'un comté où se retrouvaient deux usines
d'Alcan. C'est à ce titre, évidemment, qu'il me fait plaisir de
proposer ce projet de loi 230. Il est bien évident, comme l'a dit mon
collègue, que c'est ainsi qu'on procède depuis toujours.
Lorsqu'il s'agit d'un projet de loi d'Intérêt privé, il y a
nécessité qu'il y ait un parrain qui soit un
député, ministériel ou de l'Opposition, mais I est aussi
entendu que le parrain de ce projet de loi n'est pas nécessairement et
automatiquement en accord avec tout ce qui se trouve à
l'intérieur de ce projet de loi. Il est très important pour la
commission d'entendre toutes les parties afin que, particulièrement, les
Intérêts économiques dans le cas d'Alcan soient
accordés à la compagnie, comme il est aussi Important que les
intérêts des citoyens mis en cause soient également
satisfaits. Je pense que c'est à l'intérieur d'un processus
prévu par notre règlement qui nous permet et qui assure aux deux
parties de pouvoir faire valoir, devant les députés, les motifs
qui viennent soutenir soit leur accord ou leur désaccord à un
projet de loi. C'est ce que nous avons à faire cet
après-midi.
Cela dit, en terminant, dans le cas présent, pour les
députés qui sont moins familiers, la compagnie Alcan construit,
au moment où on se parle, une usine de 800 000 000 $, à
Latenière, d'une capacité de 200 000 tonnes métriques et,
au point de vue économique, c'est inutile d'en dire davantage, comme
vous pouvez le constater.
Donc, M. le Président, c'est avec plaisir que je propose aux
membres de notre commission l'adoption du projet de loi 230.
Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le
député de Dubuc, je vous remercie de votre collaboration. En tant
que parrain du projet de loi, vous avez respecté le temps qui vous
était dévolu. J'Inviterais maintenant le ministre à faire
la même chose.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. L'introduction et ia conclusion du député de
Dubuc traduisent bien son état d'esprit vis-à-vis de ce projet de
loi, en étant le parrain et en concluant qu'y en proposait l'adoption.
Mais ce n'est pas l'objet de mes propos; je ne voudrais pas embarrasser le
député de Dubuc. Il y a des gens qu'on doit entendre afin de
savoir la vérité. Et lorsqu'il parlait d'Alcan comme l'un des
moteurs économiques du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il avait parfaitement
raison. Tout le monde rêverait d'avoir une compagnie comme
celle-là dans son comté. Ce n'est pas possible à
Charlesbourg, y n'y a plus suffisamment de place.
Je veux tout simplement vous rappeler certains éléments
indispensables à notre bonne compréhension de ce qui va se
dérouler au cours des prochaines heures. Ce n'est pas un projet nouveau.
Cela date de 1982-1983, au moment où Alcan avait l'intention de
moderniser ses Installations à Laterrière et, en 1984, à
l'époque de la crise économique, les prix de l'aluminium ont fait
en sorte que le projet a été retardé. Dès
1982-1983, il y avait eu de la part des propriétaires l'autorisation
d'arpenter les terrains sans donner les droits exigibles pour fins de passage;
c'est une autre histoire sur le plan des coûts d'expropriation.
On se retrouve donc, en 1986, avec le projet de loi qui est
relancé et la nécessité de relier, par sa filiale, la
compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay, sur une longueur de 14
kilomètres, son usine de Laterrière qui devenait
extrêmement importante. Parallèlement à tout cela, Alcan a
fait ce qu'elle devait faire sur le plan de ses démarches auprès
de la CPTA et du BAPE, des démarches respectueuses des lois agricoles et
des lois de l'environnement.
Cependant, l'histoire nous dit aussi qu'y y a effectivement de
l'opposition de la part des propriétaires. On verra tantôt si elle
est justifiée ou non. Chaque fois qu'on se fait prendre un morceau de
terre, selon l'endroit où on le prend sur votre patrimoine, cela peut
être passablement achalant. Cela peut faire en sorte qu'il ait plus de
valeur ou moins de valeur. Règle générale, il y en a
toujours un peu moins. C'est cette opposition qui fait qu'aujourd'hui on se
retrouve en commission parlementaire pour entendre tous les Intervenants, y
compris ceux de ia compagnie et les gens du milieu, qui veulent exprimer leur
point de vue dans ce cas. Il faudra toujours garder à l'esprit que,
concernant le projet de loi, quant à lui, si ce n'est pas du rail, ce
sera du camion et que cela signifiera, sur le plan de la décision qu'on
aura éventuellement à prendre, au-delà de 22 000 camions
par année entre les deux usines, pas vides, ce qui est encore plus
dommageable, mais chargés, sur le plan du transfert des marchandises,
que ce soit d'un produit fini, que ce soit de la matière première
à transformer ou des alliages. C'est cela qu'il faut garder à
l'esprit et il devient extrêmement important d'avoir cela derrière
la tête. C'est cela, l'exercice auquel on est conviés, dans un
premier temps.
De la même manière, si c'était une
expropriation pour construire un chemin public, on devrait s'assurer,
autant que possible, qu'il n'y ait pas de parties lésées. C'est
pour ça qu'on va entendre, dans une deuxième partie, des
intervenants qui vont venir nous dire ce en quoi ils sont lésés
par les procédures de la compagnie, procédures qui ont
été faites ou qui n'ont pas été faites. Je pense
que c'est l'objectif que nous devons atteindre aujourd'hui en entendant les
parties et en donnant la possibilité à la compagnie de nous
expliquer un certain nombre de choses pour mieux éclairer les
décisions qu'on aura à prendre, par la suite, comme commission,
sur chacun des articles. Il n'est pas question de faire de politique avec
ça. Il faut davantage reconnaître qu'il y a un besoin sur le plan
du transport, un transport ferroviaire qui est beaucoup moins dommageable au
réseau routier qu'un transport routier, et que, d'autre part, il y a des
citoyens qui sont propriétaires de terres et qui ont des droits à
faire valoir auprès de la compagnie. En cours de route, on pourra poser
des questions pour savoir si la compagnie a fait tout ce qu'elle avait à
faire sur le plan de ses responsabilités vis-à-vis des gens
à être expropriés, en particulier depuis 1983.
Au-delà de tout ça, la commission décidera ce qu'elle a
à faire.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. le ministre
des Transports. J'ajouterai tout simplement...
M. Garon: M. le Président.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, votre tour s'en
vient, M. le député de Lévis, vous êtes le suivant
sur la liste. J'ajouterai tout simplement qu'à titre de président
de cette commission je veux faire réaliser non seulement aux
parlementaires, qui en sont assez conscients, mats aux gens présents,
que notre processus parlementaire et démocratique permet, finalement,
à des gens de se faire entendre, de faire valoir leur point de vue.
Même si le projet de loi 230 n'est pas un projet de loi qui comporte 300
articles - il n'en comporte que 3 - c'est un projet de loi qui a quand
même beaucoup d'Importance. Dans ce sens-là, au cours de la
période qui est dévolue, cet après-midi, pour prendre
toutes les mesures nécessaires afin que les parlementaires qui auront
à prendre des décisions puissent être
éclairés, je pense que la consultation doit se faire et qu'elle
est saine pour tout le monde.
Alors, sans autre commentaire, je demanderais maintenant au
député de Lévis, le porte-parole officiel en
matière de transport, de prendre la parole. M. le député
de Lévis.
M. Garon: M. le Président, j'ai été heureux
d'entendre le ministre adopter une position que j'ai adoptée à
plusieurs reprises, c'est-à-dire que, lorsqu'il manque de chemins de
fer, les routes écopent davantage. A la suite des coupures du
gouvernement fédéral touchant les chemins de fer, c'est
justement ce que je lui disais: quand on parle de couper 1000
kilomètres de chemins de fer au Québec, les routes vont
écoper. La preuve, c'est que lorsqu'il s'agit de Terre-Neuve, pour
à peu près le même nombre de kilomètres de chemins
de fer, 1169 par rapport à 1000 kilomètres au Québec, le
gouvernement fédéral a signé une entente de 800 000 000 $
par laquelle ce dernier mettra 700 000 000 $ pour réparer le
réseau routier de Terre-Neuve. Je suis content de voir que le ministre
admet maintenant cette position et qu'il dise, à ce moment-ià,
que ce qui va sur les rails ne va pas sur les routes et que la route en
économise autant. Maintenant, il faudrait que ce soit un principe
général qui s'applique dans toutes les régions du
Québec et dans tous les cas où les chemins de fer sont mis de
côté.
Concernant le projet de loi, je pense bien qu'il n'y a personne qui soit
en désaccord avec le projet d'investissement d'Alcan, mais il faut que
les choses soient bien faites. On se rappelle, il y a un certain nombre
d'années - c'était à refaire, par exemple - les barrages
d'électricité. On n'est pas certains aujourd'hui si le lac
Saint-Jean serait un lac qui connaîtrait la même configuration
qu'il a connue lorsque les eaux ont été surélevées
et ont détruit un grand nombre de terres sur tout le pourtour du lac il
y a plusieurs années. Mais les connaissances du temps et la conscience
des problèmes du temps ont fait en sorte qu'il y a des choses qui ont
été faites qui n'auraient peut-être pas dû être
faites. Et, aujourd'hui, parce qu'un projet est bon, il faut que les moyens
pour le réaliser soient bons également.
Dans le projet de loi, il y a deux choses qui nous ont frappés.
Il y a des autorisations qu'on demande qui sont normales, parce qu'il faut des
autorisations pour faire certaines choses, la loi le prévoit, mais, dans
certains autres cas, il s'agit de dérogations et, quand on demande
à déroger aux stipulations publiques des lois, à ce
moment-là, il faut bien voir à ce que des gens ne soient pas
lésés par ces dérogations-là. Alors, c'est le but
de notre commission parlementaire. Je vais vous dire que la plupart du temps on
conseille aux gens de s'entendre avant de venir nous rencontrer, c'est toujours
plus simple. Une commission parlementaire, surtout quand il s'agit d'un projet
de loi privé, n'aime pas beaucoup, habituellement, s'ériger en
arbitre, parce qu'il s'agit essentiellement de droits privés, même
s'ils sont importants. À ce moment-ià, le mieux est souvent que
les gens en arrivent à des ententes avant de venir nous rencontrer.
Mais, comme on est dans la situation d'entendre les gens, comme cela arrive,
c'est-à-dire ceux qui proposent le projet de loi, ceux qui veulent faire
adopter le projet de loi et ceux qui s'y opposent, notre rôle va
être, au fond, de faire la lumière sur toute cette question en
souhaitant qu'il
puisse y avoir un consensus. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. le
député de Lévis. Je vous ferai remarquer que tout le monde
a respecté le temps qui lui était dévolu. Alors, on
Inviterait maintenant Me Guy Wells, procureur de la requérante, la
compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay, une filiale d'Alcan aluminium
Itée. Me Wells, bienvenue!
Auditions Compagnie du chemin de fer
Roberval-Saguenay
M. Wells (Guy): M. le Président, M. le ministre, Mmes et
MM. membres de la commission, tout d'abord, il me fait plaisir de vous
présenter les représentants de la compagnie du chemin de fer
Roberval-Saguenay qui m'accompagnent aujourd'hui pour la présentation de
ce projet de loi. À ma gauche, M. Frank Farago, administrateur
délégué à Alcan pour le projet de l'usine
Laterrière, et, à ma droite, Me Pierre Cossette, conseiller
juridique de la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay et d'Alcan
aluminium Itée.
C'est avec plaisir que nous nous présentons devant vous
aujourd'hui pour vous présenter notre projet de loi privé et vous
expliquer le processus et les étapes qui ont été suivies
par la requérante dans le cheminement de son projet de construction d'un
embranchement de chemin de fer. La requérante, la compagnie du chemin de
fer Roberval-Saguenay, a été incorporée en vertu de la Loi
sur les chemins de fer du Québec, le 24 mars 1911. Elle est une filiale
à part entière d'Alcan aluminium itée et elle exploite un
réseau de chemin de fer desservant ses usines d'Alma, de
Jonquière, de La Baie et ses Installations portuaires de Port-Alfred. La
plupart des matières premières nécessaires à la
production de ses usines et les lingots produits sont transportés par le
chemin de fer de la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay. Comme vous le
savez, Alcan aluminium itée construit actuellement un nouveau complexe
industriel, une nouvelle aluminerie à Chicoutimi, d'une capacité
éventuelle de 200 000 tonnes métriques, au coût d'environ
750 000 000 $, et qui porte le nom d'usine Laterrière. Selon nos
informations, c'est actuellement le plus gros chantier de construction au
Québec. Il est prévu que cette usine entrera en activité
en quatre phases, dont la première en décembre 1989,
c'est-à-dire dans quelques mois. La troisième phase sera en
activité en décembre 1990, et la capacité de production
sera alors de 150 000 tonnes métriques. Selon l'échéancier
de la compagnie, I est prévu que le transport ferroviaire devra
débuter avec la mise en activité de cette troisième phase.
Pour ce faire, la construction du chemin de fer devrait être entreprise
au cours de l'année 1989. L'embran- chement que la compagnie demande
à l'Assemblée nationale d'être autorisée à
construire reliera l'usine Laterrière au réseau actuel du chemin
de fer de la compagnie à La Baie. Cet embranchement d'environ quatorze
kilomètres permettra l'approvisionnement de l'usine Laterrière en
alumine et en fluorure en provenance des usines de Jonquière et
l'acheminement de lingots d'aluminium de l'usine Laterrière aux clients
de l'Alcan, le tout à raison d'environ 600 000 tonnes métriques
par année. (16 heures)
Le projet de loi présentement à l'étude vise
essentiellement à autoriser la construction de cet embranchement. En
effet, la Loi sur les chemins de fer exige une modification à la charte
de la compagnie de chemin de fer lorsque la longueur d'un embranchement
à construire excède dix kilomètres. De plus, la Loi sur
les chemins de fer permet d'exproprier une largeur normale de 30 mètres,
pouvant atteindre jusqu'à 137 mètres en certaines circonstances.
Accessoirement, la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay demande donc
que ce pouvoir d'exproprier prévu à la loi soit modifié
pour lui permettre de prendre toute la largeur qui lui est nécessaire
car, à certains endroits, la largeur prévue à la Loi sur
les chemins de fer est insuffisante en raison de contraintes d'ordre technique.
D'autres modifications mineures sont apportées par le projet de loi et
nous pourrons les expliquer, si nécessaire, à l'occasion de
l'étude article par article du projet.
La construction du chemin de fer projeté requiert plusieurs
autorisations. En effet, comme une bonne partie des terrains qui seront
traversés par la ligne de chemin de fer font partie d'une zone
protégée en vertu de la Loi sur la protection du territoire
agricole, nous avons demandé une autorisation à la Commission de
protection du territoire agricole que nous avons obtenue le 16 novembre 1988,
sans opposition des propriétaires concernés et avec l'appui de
l'Union des producteurs agricoles de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. L'autorisation du ministre des Transports est
également nécessaire pour la construction du chemin de fer et la
compagnie a obtenu cette autorisation le 22 décembre 1988.
Finalement, la construction d'un chemin de fer est soumise à la
procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement, procédure prévue à la Loi sur la
qualité de l'environnement. Cette procédure comprend une
période d'information et de consultations publiques et elle permet au
ministre de demander au Bureau d'audiences publiques de tenir une
enquête. Effectivement, le Bureau d'audiences publiques a reçu du
ministre de l'Environnement, le 24 avril dernier, le mandat de tenir des
audiences publiques, dont la première partie aura lieu les 23 et 24 mai
prochain, à Laterrière, et la deuxième partie,
vraisemblablement, durant la troisième semaine de juin. À ces
occasions, toute personne intéressée pourra exprimer ses
préoc-
cupations sur l'ensemble des aspects du projet tel que soumis au
ministère de l'Environnement. C'est finalement le gouvernement qui, sur
réception du rapport du Bureau d'audiences publiques, décidera
d'émettre le certificat d'autorisation fixant le tracé du chemin
de fer d'embranchement.
Étant donné l'échéancier très
serré de la construction, il était nécessaire de
poursuivre le processus d'autorisation législative, pour lequel on est
devant vous aujourd'hui, parallèlement au déroulement de la
procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement. Afin d'assurer la cohérence entre ces deux
démarches, le projet de loi prévoit qu'une fois la construction
autorisée par l'Assemblée nationale le tracé
définitif de la ligne sera celui prévu au certificat
d'autorisation émis en vertu de l'article 31.5 de la Loi sur la
qualité de l'environnement. Il est également prévu que
l'entrée en vigueur du projet de loi se fera à une date
ultérieure fixée par le gouvernement. Le ministère de
l'Environnement du Québec nous a signifié, par écrit, son
accord avec cette façon de procéder. Ce projet est connu des
propriétaires concernés depuis de nombreuses années,
puisqu'il a fait l'objet de trois séances d'information publiques depuis
1984. La compagnie du chemin de fer Roberval-Sague-nay a actuellement pris des
ententes sous forme d'option d'achat avec plus de la moitié des
propriétaires privés dont les terrains seront traversés
par l'embranchement projeté. Les négociations se poursuivent
toujours avec les autres propriétaires.
En conclusion, M. le Président, les aspects de nature agricole et
technique ont déjà reçu les autorisations du
ministère des Transports et de la Commission de protection du territoire
agricole. Les aspects environnementaux feront l'objet d'audiences publiques
dans les prochaines semaines, conformément aux dispositions de la Loi
sur la qualité de l'environnement.
Toutes ces autorisations obtenues ou à obtenir sont sujettes
à une modification de la charte de la compagnie du chemin de fer
Rober-val-Saguenay pour qu'elle soit autorisée à construire un
chemin de fer d'embranchement de plus de dix kilomètres. C'est cet
aspect fondamental du projet qui est maintenant soumis à votre
considération.
Nous tenons à vous remercier de nous avoir permis de
présenter ce projet de loi.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Me Wells.
À ce stade-ci, j'aimerais peut-être qu'on puisse entendre les
différents groupes d'intervenants. Je vais demander au premier groupe,
tel que convenu, de faire sa présentation. Il y aura échanges de
vues ou questions, s'il y a lieu, avec les parlementaires.
Je demanderais à Me Guy Gilbert et à M. Jeannot Tremblay
de s'approcher.
Pour la bonne compréhension de tout le monde, j'ai proposé
qu'on entende les inter- venants. On va revenir avec Alcan avant de
procéder à l'étude détaillée, article par
article, du projet de loi.
M. Garon: ...peut-être quelques questions à poser,
au début.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui.
Bien, écoutez, je n'ai pas d'objection. Si on veut
immédiatement interroger Alcan, on passera aux intervenants
après. Peut-être que ça peut apporter aussi de
l'éclairage aux intervenants.
M. Garon: Oui.
Le Président (M. Parent, Bertrand): On peut permettre des
interventions pendant que Me Wells est là, avec ses collaborateurs. Cela
va peut-être permettre d'apporter des réponses aux questions qui
se poseront tantôt. Est-ce qu'il y a des parlementaires, des membres de
la commission qui veulent intervenir?
M. Côté (Charlesbourg): Je vais peut-être
laisser la chance au parrain du projet de loi 230 d'ouvrir le débat,
s'il le souhaite. Sinon...
M. Desbiens: Les questions que j'ai à poser sont d'ordre
technique. S'il y a des questions d'ordre général, d'abord...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce qu'on a des
questions? M. le député de Lévis, est-ce que vous avez une
question?
M. Garon: J'aimerais poser une question immédiatement pour
ne pas tourner autour du pot, mais plutôt y aller directement. Il y a des
opposants qui vont parier, tout à l'heure. Comme vous allez avoir ia
chance de revenir, eux ne reviendront sans doute pas après, à
moins que la commission ne le juge nécessaire. J'aimerais savoir quels
sont les points de désaccord qui font qu'actuellement des gens
s'opposent à certaines parties, à votre point de vue - vous avez
dû les rencontrer - de ce projet de loi.
M. Wells: La compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay est,
évidemment, en négociation pour obtenir des ententes sous forme
d'option d'achat pour le tracé du chemin de fer qui passe sur les
terrains des opposants. Les négociations avec la majorité d'entre
eux sont encore en cours, actuellement. Ce qu'on a appris de la part des
médias d'information, au cours des derniers jours, c'est que,
principalement, les opposants ont l'impression que ce que nous demandons avec
le projet de loi, c'est d'avoir le droit d'exproprier alors que notre charte ne
nous donnerait pas le droit d'exproprier.
Or, comme je l'ai dit tout à l'heure dans la présentation,
la Loi sur les chemins de fer prévoit le droit d'exproprier pour
l'entreprise. Ce qu'on demande, c'est qu'à cause de consi-
dérations d'ordre strictement technique à certains
endroits... La largeur que la loi permet d'exproprier n'est pas suffisante et
on a besoin, à quatre ou cinq endroits, d'avoir une largeur
additionnelle pour permettre la construction du chemin de fer.
On pense qu'il y a peut-être une ambiguïté qui
existait dans la présentation de notre projet de loi. Il est bien
sûr qu'il y a différents problèmes d'ordre environnemental
qui seront étudiés par le Bureau d'audiences publiques. On sait
que certaines des personnes qui sont ici, aujourd'hui, pour intervenir sur
notre projet de loi ont demandé la tenue d'audiences publiques, mais la
tenue de ces audiences aura lieu dans les prochaines semaines. À ce
moment-là, tous les aspects environnementaux du projet seront soumis
à la considération de la commission. Toutes les personnes qui
sont intéressées, directement ou indirectement, par notre projet
auront l'occasion d'obtenir toutes les informations qu'elles veulent obtenir
d'AIcan, si elles ne les ont pas déjà eues, parce qu'il faut se
rappeler qu'il y a eu trois séances d'information avec tous les
propriétaires concernés, à l'occasion desquelles on a eu
l'occasion de répondre à toutes leurs interrogations. On aura
encore l'occasion de le faire, lors des audiences publiques sur
l'environnement.
M. Garon: Cela veut dire que la loi ne vous donne pas un pouvoir
absolu d'exproprier. C'est le pouvoir avec l'autorisation du ministre.
M. Wells: Oui, d'accord. En fait, le pouvoir d'expropriation
prévu à la loi est soumis aux mêmes règles que
n'importe quel autre pouvoir dans les autres lois, c'est-à-dire qu'il
est soumis à l'application de la Loi sur l'expropriation. Donc,
ça prend un décret gouvernemental pour permettre l'exercice de ce
droit. C'est bien clair qu'actuellement on ne demande pas de modification
à ce droit d'expropriation qui est prévu dans la loi. Il est bien
évident que la compagnie va suivre tout le processus régulier,
normal dans les circonstances où une expropriation est prévue
dans une loi et où l'expropriant doit s'adresser au gouvernement pour
obtenir l'autorisation d'exproprier.
Il est bien clair que cette autorisation sera demandée, si
nécessaire, parce qu'il faut bien se rendre compte qu'Alcan a construit,
au cours des dernières années, le projet Grande Baie. Elle a
construit également une ligne de transmission entre Jonquière et
Latenière. En vertu de la Loi sur le régime des eaux, encore
là, Alcan avait le droit d'exproprier, sous réserve
d'autorisation du gouvernement. Finalement, cette construction s'est faite par
l'acquisition, de gré à gré, de tous les terrains. Pour la
construction de l'usine de Laterrière où il n'était pas
prévu un pouvoir d'expropriation, Alcan s'est entendue avec tous les
propriétaires concernés et a acquis, de gré à
gré, tous les terrains dont elle avait besoin pour l'érection de
cette usine.
C'est l'intention de la compagnie de prendre tous les moyens
nécessaires pour tenter d'en arriver à une entente avec tous les
propriétaires concernés. C'est pourquoi on dit que les
négociations sont encore actuellement en cours. Les négociations
avec la majorité de ces gens ne sont pas rompues. Elles sont en cours.
Mais, évidemment, le projet de loi est nécessaire pour nous
permettre d'avoir l'autorisation requise pour construire l'embranchement.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Me Wells. M. le
député de Lévis.
M. Garon: En vertu de la loi, vous pouvez exproprier, avec
l'autorisation du ministre, dans des limites restreintes.
M. Wells: Un corridor de 30 mètres.
M. Garon: Maintenant, vous demandez qu'il n'y ait plus de limite
par rapport aux largeurs sur toute la distance de quatorze
kilomètres.
M. Wells: Non, non. On demande que ce corridor de 30
mètres, à certains endroits bien spécifiques, soit
élargi. C'est aux endroits où la configuration des lieux fait en
sorte que le niveau des rails doit se trouver à plus de 152
centimètres au-dessus ou au-dessous de la surface des terrains
adjacents. C'est seulement dans cette circonstance que la largeur pourrait
être supérieure à 30 mètres et, selon les
études que nous avons faites, ça se produit seulement à
quatre endroits sur le tracé.
M. Garon: Je comprends, mais il y a un amendement à votre
projet. Moi, j'ai eu un projet de modification au projet de loi 230. Cela
m'apparaît aller plus loin que le projet de loi 230, au paragraphe 7.
M. Wells: Non. M. le député, ça va
même un peu moins loin parce que là on prévoit uniquement
sur la question de la largeur. On a apporté des précisions quant
au pouvoir d'exproprier, quant à ce pouvoir. Avant ça, dans le
projet de loi 230, on demandait 35 mètres. Finalement, après les
études qu'on a faites, il s'avère que le corridor de 30
mètres est suffisant. C'est pour ça qu'on propose une
modification au projet de loi 230, pour que ce ne soit pas nécessaire
d'avoir 35 mètres pour le corridor. Les 30 mètres qui sont
prévus à la loi sont suffisants, sauf à certains endroits
- c'est ce qu'on disait dans le projet de loi 230 - là où le
niveau des raiis doit se trouver à plus de 152 centimètres
au-dessus ou au-dessous de la surface des terrains adjacents. À ce
moment-là, uniquement dans cette circonstance qui se produit à
quatre endroits, on demande que la largeur soit plus grande. Quant au reste du
tracé, pour 90 % ou 95 % du tracé, le corridor qui est
prévu dans la
loi est suffisant pour nos besoins.
M. Garon: Les points où vous ne vous entendez pas avec les
intervenants, ce sont des points de localisation du tracé ou... Quels
sont les points?
M. Wells: En principe, je pense qu'on peut répondre qu'il
n'y a pas tellement de problèmes sur...
M. Garon: J'aime autant savoir votre point de vue. Après
ça, quand les intervenants vont passer, on va savoir le leur.
M. Wells: Pour un groupe, le terrain est peut-être le plus
important, il y a vraisemblablement une question de tracé. Mais nous, la
perception qu'on a des choses, c'est que, pour l'ensemble des groupes, c'est
une question de négociations quant à l'évaluation des
dommages qui devraient être compensés par l'entente qui devrait
être prise.
M. Garon: C'est avec quel groupe que la localisation...
M. Wells: C'est avec la succession Choui-nard-Gilbert que la
localisation peut peut-être présenter un problème. Quant
aux autres, la localisation cause certains inconvénients, mais la
négociation va permettre de compenser ces inconvénients. Entre
autres, II y a un des intervenants, aujourd'hui, dont une partie de sa terre
est traversée par le chemin de fer. Cela cause évidemment des
inconvénients, mais on est en négociation pour justement faire
l'évaluation de cet inconvénient et le compenser en
conséquence. En fait, il faut bien comprendre une chose, aussi. C'est
que le tracé projeté va faire l'objet des audiences publiques sur
l'environnement. À ce moment-là, le Bureau d'audiences publiques
va avoir à se prononcer sur le tracé également, à
la suite des interventions de toutes les personnes qui sont
intéressées quant au tracé. (16 h 15)
M. Garon: Quand les gens s'entendent, ils peuvent trouver le
tracé de moindre inconvénient. Par exemple, c'est toujours mieux
quand ça passe au bout des terres plutôt que de passer dans le
milieu. Je vous donne un exemple comme celui-là. Des fois, quand les
gens s'entendent, ils s'entendent sur un tracé de moindre
inconvénient plutôt que sur un tracé qui présente
plus de problèmes.
M. Wells: Mais on peut vous dire, à cet égard, M.
le député, que le tracé projeté a été
conçu en fonction de causer le moins d'inconvénients possible, en
tenant compte de toutes les caractéristiques de l'environnement et les
caractéristiques techniques aussi pour la construction du chemin de fer.
À notre point de vue, le tracé proposé est celui qui
présente le moins d'inconvénients, sous tous les aspects qui ont
été pris en considération. Évidemment, pour
certains, ça peut causer un problème. C'est à cet
égard qu'on tente d'évaluer la valeur économique de ce
problème et d'établir une compensation, de gré à
gré.
M. Garon: Est-ce qu'il y a eu plusieurs rencontres pour en
arriver à des ententes avec les intervenants?
M. Wells: Oui, il y a eu un grand nombre de rencontres avec les
intervenants pour négocier le droit de passage demandé par Alcan.
Il faut dire aussi qu'au point de vue agricole le tracé a
été accepté par 'a Commission de protection du territoire
agricole, sans opposition des intervenants en ce qui a trait à la
localisation du tracé, ainsi qu'avec l'accord de l'Union des producteurs
agricoles qui a trouvé que le tracé proposé était
celui qui représentait le moins d'inconvénients sur le plan
agricole.
Le Président (M. Parent, Bertrand): D'autres questions, M. le
député de Lévis?
M. Garon: Combien y a-t-il eu de rencontres avec chacun des
intervenants, surtout ceux qui ne sont pas d'accord?
M. Wells: Je demanderais à Me Cossette de
répondre.
M. Cossette (Pierre): J'ai participé personnellement
à plusieurs rencontres. On peut dire que deux ou trois rencontres ont eu
lieu. Actuellement, je peux vous dire qu'on a fait des offres à tous les
propriétaires et on attend des réponses de leur part. Certains
ont pris des évaluateurs...
Des voix:...
Le Président (M. Parent,
Bertrand): S'y vous
plaît, je demanderais la collaboration de tout le monde. Chacun aura son
tour pour s'exprimer.
M. Cossette: Les gens se sont choisi des évaluateurs. Nous
avons dit exactement où on logeait. On attend des gens...
Évidemment, on ne peut pas connaître les dommages sans que les
gens nous en parient. Alors, on attend actuellement, de leur part, une
quantification de ces dommages pour pouvoir faire des contre-offres.
Le Président
(M. Parent, Bertrand): Est-ce que cela
va, M. le député de Lévis? Y a-t-il d'autres questions? M.
le député de Dubuc, vous avez des questions?
M. Desbiens: Je vais en poser une dans le même sens, en
attendant. Vous parlez de négo-
ciations et de propositions. Est-ce que ce sont des propositions
écrites que vous avez faites à chacun des citoyens en cause?
Une voix: Ce ne sont pas des propositions écrites.
M. Garon: Pourquoi?
M. Couette: Écoutez, on rencontre les gens et on discute.
On ne veut pas "formaliser" la procédure plus qu'il ne le faut. Quand il
sera temps de faire des écrits, on pourra toujours en faire.
M. Garon: Mais vous voulez faire "formaliser* vos droits.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Wells: En fait, M. le député, Alcan a une longue
expérience dans l'acquisition de terrains pour la construction de ses
usines, et c'est toujours de cette façon qu'on procède. Il y a
des rencontres préliminaires pour connaître les objectifs que les
gens poursuivent à l'égard de la négociation ainsi que les
problèmes qui leur sont causés par le projet d'Alcan. Finalement,
au fur et à mesure que les discussions progressent, il est possible de
faire une proposition écrite lorsque les négociations sont
rendues suffisamment proche. Actuellement, avec certains des intervenants, on
n'a pas encore été en mesure d'avoir toutes les autorisations de
leur part pour aller visiter les lieux, entre autres. Au fond, on attend
d'avoir des rencontres ultérieures avec eux pour être en mesure de
discuter de l'ensemble des problèmes que notre projet peut leur
causer.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce qu'il y a
d'autres Interventions? M. le ministre, vous avez des questions?
M. Côté (Charlesbourg): Oui. M. le
Président.
Une voix:... alternance.
M. Côté (Charlesbourg): Ah! Respect du parrain! M.
le parrain.
M. Dufour: Vous êtes parrain, vous aussi. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Non, non. On en a un.
M. Desbiens: Le parrain des parrains. M. le
Président...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M. le
député de Dubuc, le vrai parrain.
M. Desbiens: À ce stade-ci, j'aimerais demander à
Alcan quelle est la méthode qu'elle privilégie. Est-ce que c'est
l'entente de gré à gré ou si c'est l'expropriation?
M. Wells: On peut vous dire que, de façon certaine, M. le
député, c'est l'entente de gré à gré.
L'histoire des acquisitions d'Alcan dans la région le démontre.
Pour la construction de l'usine de Grande Baie, toutes les acquisitions se sont
faites de gré à gré. Pour la construction même de
l'usine de Laterrière, les acquisitions se sont faites de gré
à gré. Pour la construction de la ligne de transmission entre
Jonquière et Laterrière, toutes les acquisitions se sont faites
de gré à gré. C'est sûr que les négociations
sont parfois difficiles, mais l'objectif qui est toujours poursuivi par Alcan
et qui a toujours été poursuivi, c'est d'avoir des ententes de
gré à gré pour que la population soit satisfaite,
finalement, de la façon dont Alcan veut s'acquitter de ses obligations
sociales.
La Président (M. Parent, Bertrand): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
j'aurais peut-être deux questions de deux ordres différents
concernant les échéances, parce qu'il y a quand même des
échéances. Vous avez évoqué, tantôt, la phase
1, début de production, décembre 1989; décembre 1990,
deuxième phase; et la troisième phase par la suite. Cela fait
qu'il y a un besoin. Si ça ne se transporte pas sur une voie de chemin
de fer, ça se transporte par camion, avec la possibilité de voir
22 000 camions par année ou à peu près sur les routes,
chargés, dans ce secteur-là, ce qui m'apparaît un peu
inconcevable, à ce moment-ci.
C'est l'échéance ultime, c'est ce que je dois comprendre,
sur le plan du... Décembre 1990?
M. Wells: Comme on l'a expliqué tout à l'heure, la
capacité de production totale de l'usine sera de 200 000 tonnes;
dès la troisième phase, qui sera opérationnelle en
décembre 1990, c'est-à-dire dans un an et quelques mois, il va y
avoir 150 000 tonnes de produits à transporter. C'est à ce
moment-là qu'on considère qu'il sera nécessaire d'avoir le
chemin de fer en opération. On doit dire que, d'après notre
échéancier, on est déjà en retard, au moment
où on se parie, parce qu'on ne peut pas espérer avoir le
certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de
l'environnement avant le mois de septembre ou d'octobre. Le Bureau d'audiences
publiques a un délai de quatre mois entre le moment où U
reçoit le mandat...
M. Côté (Charlesbourg): Au ministère des
Transports, on connaît ça un peu. On est soumis à peu
près aux mêmes procédures que vous autres, sur le plan des
CAR, des CAC, tout ce
que ça comporte. Quel est le temps de construction d'un chemin de
fer?
M. Wells: Dix-sept mois.
M. Côté (Charlesbourg): Dix-sept mois.
M. Cossette: Ingénierie et construction, dix-sept mois.
C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Vous avez dit,
dans vos propos de présentation, Me Wells, que vous aviez des ententes
avec la moitié des propriétaires.
M. Wells: C'est exact.
M. Côté (Charlesbourg): Combien de personnes est-ce
que ça vise?
M. Wells: Cela veut dire dix propriétaires sur
dix-neuf.
M. Côté (Charlesbourg): Ce sont dix
propriétaires sur dix-neuf.
M. Wells: En fait, au début des négociations, il y
avait vingt propriétaires et on a obtenu... Ce sont vingt-deux
propriétaires, si on calcule la ville de La Baie et le gouvernement du
Québec.
Une voix: Le gouvernement du Québec.
M. Wells: Mais, des propriétaires privés, il y en
avait vingt et, jusqu'à présent... Il y avait vingt
propriétés et, jusqu'à présent, on a des ententes
pour douze propriétés sur vingt. Mais il y a eu des acquisitions
qui se sont faites entre les gens, ce qui fait qu'actuellement on a onze ou
douze propriétaires sur dix-neuf.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. On se comprend
bien, les principes qui sont demandés dans le projet de loi, ce sont des
principes, en particulier, pour régler quatre problèmes pour ce
qui est de la largeur pour construire les infrastructures nécessaires au
support...
M. Wells: De la voie ferrée.
M. Côté (Charlesbourg): ...de la voie
ferrée.
M. Wells: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, c'est ce que
j'ai compris.
M. Wells: Premièrement, avoir l'autorisation de construire
l'embranchement et, deuxièmement, avoir ces exceptions aux quatre
endroits requis.
M. Côté (Charlesbourg): Et, avant même
d'entendre les intervenants - parce qu'on va faire le tour un peu, ça va
être l'autre côté de la médaille - vous nous
affirmez, à ce moment-ci, que, jusqu'à maintenant, Alcan ou les
mandataires d'Alcan ont fait ce qu'il y avait à faire sur le plan d'une
bonne relation afin de tenter de régler chacun de ces dossiers.
M. Wells: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Avec les
propriétaires, avec les huit qu'il reste...
M. Wells: Avec les propriétaires concernés.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. En tout cas, ce
que je souhaiterais, M. le Président, c'est que, lorsqu'on aura entendu
les intervenants, on puisse revenir avec les gens d'Alcan pour tenter d'avoir
des réponses aux problèmes qui subsisteraient.
M. Wells: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le
ministre. Le député de Jonquière a demandé la
parole, ainsi que les députés de Lévis et d'Ungava. Alors,
je demanderais à tout le monde de collaborer afin qu'on puisse avancer.
M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Comme il y en a un dont on sait qu'il est pour, il
faut bien faire le tour du dossier comme tel par rapport à sa
présentation. Vous avez dit, tout à l'heure, que le projet
était connu, depuis 1984, des intervenants. J'ai cru comprendre,
à un moment, que des piquetages ou des bornages se sont faits sur des
terrains. Il semblerait que les propriétaires n'avaient pas donné
leur accord. Pour autant que je me souvienne, il y a des gens qui ont
semblé se plaindre qu'il y ait eu des piquetages de faits sur leur
terrain sans qu'ils aient donné leur permission. Est-ce qu'un pouvoir
quelconque vous permettait de le faire? Ma deuxième question qui va se
relier à ça est la suivante: Est-ce que, vraiment, les
intervenants pouvaient se plaindre de ce qui se passait ou de la ligne
tracée puisqu'elle n'était pas connue officiellement au moment
où ça se faisait?
M. Wells: Je vais laisser Me Cossette répondre à
cette question.
M. Cossette: Écoutez, il est exact qu'on a fait de
l'arpentage. La Loi sur les arpentages permet aux arpenteurs qui ont
été engagés pour le projet d'aller sur les terrains pour
arpenter, parce que, avant de proposer un tracé, K faut connaître
un peu la topographie. Il est exact qu'on a fait de l'arpentage.
M. Dufour: Oui, mais est-ce que ça ne met pas en question
votre affirmation, à savoir que les gens ne se sont pas opposés
au tracé parce
qu'ils ne savaient pas nécessairement ce qui se passait? On aura
peut-être l'occasion de leur demander. Mais, à votre connaissance,
est-ce qu'il y a des gens...
M. Cossette: Je peux vous dire qu'il y a eu trois séances
d'information déjà: le 15 mars 1984, à l'hôtel de
vilIe de Laterrière; le 16 mars 1988, à La Baie et, le 2 mars
1989, encore à l'hôtel de vilIe de Laterrière, où le
tracé a été expliqué en détail. Des plans
ont été donnés à tous les propriétaires qui
étaient présents.
M. Dufour: Avec les procédures qui sont engagées,
est-ce que vous croyez que la présentation que vous nous faites
actuellement doit avoir une réponse immédiate ou si vous
croyez... Il y a un échéancier, on a jusqu'au 19 ou 18 juin pour
accepter des projets de loi et, comme il ne semble pas y avoir
d'élections ce printemps, on a tout le temps, un mois et demi au moins
devant nous.
M. Wells: Bien sûr, M. le député, il est
nécessaire pour nous d'avoir l'autorisation le plus rapidement possible
parce que, d'après notre échéancier, nous sommes
déjà en retard. Et plus ça va retarder, plus il va se
faire du transport par camion, au fur et à mesure que la production de
l'usine va augmenter jusqu'à sa capacité maximale.
Je voudrais apporter un complément à ce que Me Cossette a
dit. Si je ne me trompe pas, le problème que vous avez soulevé
quant à l'arpentage remonte à peu près à 1980,
parce que cet arpentage-là a été fait au début pour
permettre de présenter à la Commission de protection du
territoire agricole la demande pour que les terrains visés puissent
servir à des fins autres que l'agriculture, c'est-à-dire au
transport ferroviaire. Effectivement, cette première demande qui a
été faite à la Commission de protection du territoire
agricole s'est faite en 1982. Dès 1982, tous les propriétaires
concernés étalent déjà avisés du projet et
savaient que le tracé du chemin de fer passerait sur leur
propriété. Ils ont tous été convoqués devant
la Commission de protection du territoire agricole en 1982. Finalement, la
Commission de protection du territoire agricole a donné son accord au
tracé projeté en 1982 et, par la suite, vers les années
1984-1985, à cause de certaines considérations d'ordre technique,
le tracé a été modifié à certains endroits.
La compagnie a dû faire une nouvelle demande à la Commission de
protection du territoire agricole et cette demande-là a connu son
aboutissement au mois de novembre dernier au moment où la Commission de
protection du territoire agricole a donné son accord aux modifications
proposées au tracé. On tient à souligner qu'à
l'occasion de ces deux démarches devant la Commission de protection du
territoire agricole, tant en 1982 qu'en 1988, il n'y a pas eu d'opposition de
la part des exploitants agricoles concernés, et même l'UPA
était favorable au projet. En 1988, elle était encore plus
favorable parce que les modifications apportées en 1988 avaient encore
moins d'impact sur l'agriculture que celles de 1982, même si, en 1982,
l'UPA était aussi d'accord.
On peut dire, à notre avis, que les propriétaires
concernés connaissent le projet depuis au moins 1982 et savent que le
projet va traverser leur propriété.
M. Dufour: Peut-être une dernière question, M. le
Président, concernant...
Le Président (M. Parent, Bertrand): J'aimerais juste, M.
le député de Jonquière, faire prendre conscience aux
membres de la commission, des deux côtés, et aussi aux
intervenants qu'il est presque 16 h 30. Il nous reste 90 minutes avant 18
heures et il y a quatre groupes à intervenir. Alors, il faudrait au
moins essayer d'accélérer de façon qu'on puisse au moins
entendre tous les intervenants, si c'est possible. D'accord? Alors, M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: J'ai l'impression, M. le Président, sans abuser
du temps, que les autres intervenants vont aller à peu près dans
le même sens. Donc, on devrait tenir pour acquis, comme Alcan
présente le projet et que nous voulons avoir un peu plus d'information,
qu'il y a un intervenant certainement favorable et que les autres devraient
s'opposer. Cela dit, pour aider le ministre - je sais qu'il aime ça les
commissions parlementaires - il s'agit de le tenir ici le plus longtemps
possible.
Des voix: Ha, ha, ha! (16 h 30)
M. Dufour: Ma dernière question: Comment expliquez-vous le
temps qui s'est écoulé entre le dépôt du projet de
loi... C'est un projet de loi qui m'intéresse puisque cela concerne ma
région. Je l'ai suivi depuis le début. Il a été
déposé il y a au moins deux ans et ça a pris autant de
temps à aboutir ici devant nous.
M. Wells: M. le député, quand nous avons
déposé le projet en 1986, il fallait, à l'appui de notre
projet, déposer le tracé définitif que la compagnie du
chemin de fer proposait. A ce moment-là, I y avait encore des aspects
techniques qu'il fallait considérer. Il faut bien se rendre compte qu'on
n'a pas pu aller sur le terrain de certains propriétaires et cela pose
des problèmes d'ordre technique dans la planification du tracé.
En 1986, lorsqu'on a déposé le projet de loi, iI y avait un
tracé qui, à ce moment-là, a été
déposé également en même temps. Finalement, il a
fallu faire des modifications à ce tracé et, en même temps
- on se rappellera les conditions économiques qui prévalaient
à ce moment - la compagnie Alcan a décidé de suspendre, en
1986, le projet de Laterrière et cette suspension a duré
pendant
deux ans. A ce moment-là, il notait donc pas possible, vu que les
travaux étaient suspendus, de terminer le tracé, et c'est la
raison pour laquelle on a du suspendre le projet de loi également
pendant deux ans jusqu'à ce que le projet de Laterrière
redémarre vers la fin de 1987. Même actuellement, on a encore un
problème. C'est pour cela qu'on prévoit dans le projet de loi que
le tracé définitif sera celui qui sera déterminé
à la suite des audiences publiques et à l'occasion de
l'émission du certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la
qualité de l'environnement. Normalement, d'après les
règles dont on nous a fait part, il aurait fallu attendre le certificat
d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement
avant de se présenter devant vous. C'est pourquoi on prévoit,
dans le projet de loi, que le tracé définitif sera celui qui sera
accepté par le gouvernement en vertu des dispositions de cette loi. Le
tracé comme tel posait un problème et c'est la raison pour
laquelle, pendant une période de deux ans, il n'était pas
possible de le déterminer à cause de la suspension du projet.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le
député de Jonquière? M. le député de
Lévis, vous aviez demandé la parole.
M. Garon: Quand vous dites que les gens ont été
saisis en 1982, de quelle façon ont-ils été saisis
individuellement que vous vouliez passer sur leur terrain à tel endroit
précisément?
M. Wells: En fait, quand on fait une demande à la
Commission de protection du territoire agricole pour être autorisé
à faire un usage autre que l'agriculture sur un terrain donné,
cette demande est signifiée à chacun des propriétaires
concernés. Il y avait des documents qui ont été produits
à la Commission de protection du territoire agricole qui
démontraient quel était le tracé exact que proposait la
compagnie à ce moment. Je ne sais pas si les gens ont reçu une
signification du tracé lui-même, mais, à ce
moment-là, les documents étaient disponibles à la
Commission de protection du territoire agricole pour leur permettre de
connaître exactement où se situait le chemin de fer sur leur
propriété.
M. Garon: Quand les négociations effectives avec les
personnes ou les groupes individuels ont-elles commencé?
M. Wells: Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a eu des
rencontres d'information sur le projet à l'intention de tous les
propriétaires concernés. Je peux vous donner les dates: en mars
1984, en mars 1988 et en mars 1989. Cependant, on me dit que c'est vers avril
1988, lors de la reprise du projet, que des négociations,
véritablement, débutaient avec les propriétaires
concernés.
M. Garon: Est-ce quils savaient avant 1988 où passait le
tracé exactement?
M. Wells: Oui, ils savaient quel était le tracé
projeté depuis... À toutes fins utiles, c'est depuis 1982 que le
tracé projeté était disponible, parce que les
modifications qui ont été apportées en cours de route,
comme je l'ai dit tout à l'heure, c'étaient des modifications
d'ordre technique qui faisaient varier de quelques mètres le
tracé, mais, fondamentalement, la situation du tracé, tel que
projeté par Alcan, était disponible dès 1982.
M. Garon: Pourquoi n'avez-vous pas commencé à
négocier avec les groupes ou les personnes individuelles avant 1988
alors que vous aviez indiqué à la Commission votre tracé
en 1982? Vous les avez rencontrés Individuellement seulement en
1988.
M. Wells: En fait, dans le cadre du déroulement normal
d'un projet de cette nature, les négociations commencent avec les
propriétaires concernés lorsque les autorisations sont obtenues
tant de la Commission de protection du territoire agricole qu'en vertu de la
Loi sur la qualité de l'environnement. C'est uniquement en 1984, je
pense, que les premiers documents ont été déposés
au ministère de l'Environnement et, finalement, comme le temps pressait,
on a commencé à les faire en 1988. Mais on aurait normalement
dû attendre toutes les autorisations requises avant de commencer des
négociations avec les propriétaires concernés parce que,
si le tracé n'est pas définitif, on ne veut quand même pas
s'engager à l'égard d'une chose dont on ne connaît pas
toutes les données. C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on demande des
options d'achat. On n'a pas encore d'autorisation définitive quant au
tracé.
M. Garon: Cela dépend. Il y a d'autres façons de
procéder. J'ai vu des cas où des gens étaient mis dans le
coup au point de départ pour qu'on détermine le meilleur
tracé avec eux et non pas leur indiquer, après, quel était
le meilleur tracé. Je vais vous dire que, dans les endroits où on
a passé le gazoduc, par exemple, on négociait avec les gens au
fur et à mesure pour voir où était le meilleur
tracé. Mais, là, vous dites que vous avez indiqué le
meilleur tracé. Est-ce qu'ils ont été mis dans le coup au
point de départ ou, s'ils n'ont pas été dans le coup, on
leur a indiqué les tracés?
M. Wells: On peut dire, M. le député, qu'on a non
seulement tenté, mais on les a mis dans le coup à partir du
moment où on a commencé le processus d'information publique en
1984. À ce moment-là, on a rencontré les gens, le projet
leur a été expliqué et le tracé proposé leur
a été fourni. Dès 1984, les gens savaient. Ils le savaient
depuis 1982, mais, tout au moins, à partir
de 1984, ils avaient toutes les informations sur l'ensemble du
projet.
M. Garon: Chacun?
M. Wells: Chacun pouvait l'avoir.
M. Garon: Non, non. Est-ce que chacun l'avait?
M. Cossette: J'aimerais ajouter une petite chose.
M. Garon: Quand vous dites: On a fait des réunions
d'information à l'hôtel de ville ou des choses semblables, c'est
une affaire, ça.
M. Wells: On a la liste des gens qui étaient
présents.
M. Garon: Mais est-ce qu'ils ont été avisés
individuellement ou si c'était simplement une rencontre d'information
générale à l'hôtel de ville, quelque chose comme
ça?
M. Cossette: Non, non. Lors de l'audience de la Commission de
protection du territoire agricole de 1982, chaque propriétaire a
reçu un avis de la commission. D'autre part, lors de nos séances
d'information, chaque propriétaire a reçu une convocation
à cette commission et, lors de la commission, nous avions un dossier
pour chaque propriétaire, on a remis à chacun des
propriétaires présents le plan du tracé et une
photographie aérienne et on a fait une présentation pour
expliquer exactement le tracé.
Je voudrais ajouter une chose à ce que Me Wells dit. Il ne faut
pas oublier que le projet Latenière a été suspendu en
1985. Il faut tenir compte du fait que, en raison du marché de
l'aluminium, on a suspendu le projet et il a été repris en 1987.
Cela explique également pourquoi le processus n'a pas été
enclenché avant.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce que cela va, M.
le député de Lévis?
M. Garon: Non. Je comprends, mais, quand on est en voie
d'établir un tracé, les gens peuvent difficilement se positionner
par rapport à un tracé en voie de discussion. C'est une chose de
donner de l'information dans une rencontre publique et une autre de dire
à quelqu'un: On va passer sur ton terrain ou sur ta terre et on veut
passer à tel endroit; et on discute avec cette personne-là. Ce
sont deux affaires différentes. Vous dites que les tracés
changeaient, alors je suis un peu surpris que vous ne les ayez pas mis plus
dans le coup que ça parce que, dans le fond, vous passiez chez eux.
M. Wells: M. le député, je pense que, depuis 1982,
les gens sont au courant du projet; ils ont eu l'occasion, s'ils le voulaient,
de discuter à maintes reprises avec les représentants d'Alcan.
Personne n'a jamais refusé de les rencontrer s'ils avaient besoin
d'information. D'après la perception qu'on en a, il n'y a pas eu un
manque d'information dans ce dossier. Les gens ont toujours eu toute
l'Information dont ils pouvaient avoir besoin au moment où ils ont voulu
l'avoir.
Cependant, il est exact que les véritables négociations
ont commencé en avril 1988, cela fait maintenant déjà un
an, et, comme on vous l'a dit, on a actuellement des ententes avec plus de la
moitié des propriétaires.
M. Garon: Pourriez-vous nous donner la liste des gens avec qui
vous avez des ententes et la liste de ceux avec qui vous n'en avez pas?
Deuxièmement, vous dites que vous avez fait des photos en
couleurs pour montrer le tracé. Est-ce qu'il serait possible d'avoir une
de ces photos qui indiquent le tracé, indiquant les endroits où
vous avez des ententes et ceux où vous n'en avez pas?
M. Wells: On peut vous dire le nom des propriétaires avec
qui nous avons actuellement des ententes.
Une voix: Ce sont tous ceux qui ne sont pas dans la salle.
M. Wells: À peu près. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Cossette: II y a M. Georges Rousseau, Mme Blanche-Irène
Sergerie, M. Julien Simard, par l'intermédiaire de Gazon Savard, M.
Marius Pedneault, par l'intermédiaire de J. -R. Théberge, Raynaid
et Diane Pednault, Louis-Marie Riverin, par l'intermédiaire de Gazon
Savard, Gisèle Gagnon, Louis-Joseph Potvin, Paysagistes Lemay et
frères, Gazon Savard, Ferme Grand Brûlé - c'est la
même entité, il y a eu une vente - Gertrude Collard, Henri Carrier
et, évidemment, on parle de La Baie et du gouvernement du Québec,
mais il n'y a pas de problème de ce côté.
M. Garon: Ce sont ceux avec qui vous avez des ententes.
M. Cossette: C'est ça.
M. Garon: Et ceux avec qui vous n'avez pas d'entente?
M. Cossette: Écoutez, j'ai également une
moitié de la terre de M. Louis-Marie Riverin; j'ai également M.
Paul-André Simard, Lucien Boivin excavation, Yvan Maltais, succession
Chouinard et Brisson, Alain et Gaétan Gobeil, Antonelli Grenon, Ferme
Laterrière et Marie-Paule Gagné.
M. Garon: II n'y a pas d'entente avec ceux-là.
M. Cossette: C'est ça.
M. Garon: Maintenant, la question que je vais vous poser concerne
le paragraphe 4c dans la loi. Vous dites: "La compagnie, en plus des pouvoirs
conférés par la présente loi, aura le pouvoir de passer
des contrats pour aliéner en totalité ou en partie ses droits
à toute personne ou corporation formée ou non en vertu de la Loi
sur les chemins de fer, notamment son droit de construire, outiller et
exploiter le chemin de fer mentionné à l'article 2.1 aux termes,
conditions et pour les considérations qu'elle jugera convenables."
Pourquoi demandez-vous ce pouvoir?
M. Wells: Actuellement, en vertu de la charte de la compagnie, la
compagnie peut céder ses immobilisations à toute personne qui
serait intéressée de les agréer.
Mais effectivement, ce qu'on demande là, c'est simplement une
précision en ce qui a trait à l'ensemble de l'exploitation de
Roberval-Saguenay. C'est pour permettre, si ça devient
nécessaire, à la compagnie du chemin de fer Roberval-Saguenay de
faire partie d'une réorganisation administrative à
l'intérieur du groupe Alcan.
Il arrive assez fréquemment que des filiales d'Alcan fusionnent
avec la compagnie mère. On se rappellera qu'il y a quelques
années la compagnie Transport d'énergie du Saguenay, la compagnie
Forces motrices du Saguenay ont fusionné avec Aluminium du Canada
limitée. Dans le fond, ce qu'on veut permettre avec l'article 4c, c'est
la possibilité d'une réorganisation administrative à
l'intérieur du groupe Alcan.
M. Garon: Techniquement, avec la clause telle que libellée
vous pourriez vendre à n'importe qui.
M. Wells: Oui. Telle qu'elle est libellée...
M. Garon: Pour les fins de construction, ça pourrait
même être l'entrepreneur à qui vous donneriez tous les
droits. Telle que libellée, il n'y a aucune réserve. Cela peut
être n'importe qui.
M. Wells: Oui. Nous n'aurions pas d'objection à le limiter
strictement à la compagnie mère ou à une filiale de
l'Alcan.
Techniquement, vous avez raison. On pourrait vendre la totalité
ou une partie des droits de Roberval-Saguenay, selon le libellé de la
clause à n'importe qui...
M. Garon: Merci.
M. Wells: ...qui serait intéressé à
l'acquérir.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela complète
vos questions, M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y a des
commentaires ou autre chose avant qu'on passe aux intervenants?
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, une
petite question qui me semble d'intérêt, puisque j'entends
ça depuis tantôt. On est donc dans une situation où II y a
des ententes avec une douzaine de propriétaires et où il n'y a
pas d'entente avec huit propriétaires.
Une voix: C'est exact.
M. Côté (Charlesbourg): D'autre part, comme
élément au problème, la loi est nécessaire pour
régler quatre points sur les quatorze kilomètres où il n'y
a pas l'espace suffisant par la loi pour être capables de faire passer le
chemin de fer.
Une voix: C'est exact.
M. Côté (Charlesbourg): De ces quatre endroits,
combien de propriétaires avec qui vous n'avez pas d'entente actuellement
sont touchés? On parle peut-être pour rien, là.
M. Cossette: Vous voulez dire pour la largeur additionnelle?
M. Côté (Charlesbourg): Oui. C'est ça, le
problème.
M. Cossette: D'accord. Cela touche...
M. Côté (Charlesbourg): Autrement dit, si vous aviez
une entente avec tout le monde...
M. Cossette: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): ...par les lois
régulières, il n'y aurait pas de problème, vous ne seriez
pas ici.
M. Wells: il y a effectivement deux des intervenants aujourd'hui
qui seraient touchés par cette disposition. Pour les 137 mètres,
il y aurait fa succession Gilbert et le groupe Brisson; il y aurait
également M. Paul-André Simard. Pour la succession Gilbert et le
groupe Brisson, on a besoin de 150 mètres environ et pour M. Simard, on
a besoin d'environ 50 mètres.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, c'est deux sur
quatre.
M. Wells: Je ne pense pas qu'il y en ait d'autres parmi les
intervenants aujourd'hui.
M. Côté (Charlesbourg): Cela va. D'accord.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va. Vous avez
peut-être une dernière question, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Bien, iI fallait que vous veniez quand
même parce que votre embranchement dépasse dix
kilomètres.
M. Wells: Oui, oui. Fondamentalement, le but du
projet de loi est d'être autorisé à construire les quatorze
kilomètres.
M. Garon: J'aimerais savoir les ententes par rapport aux
non-ententes sur les quatorze kilomètres. Les ententes
représentent combien de kilomètres et les parties où il
n'y a pas entente en représentent combien? (16 h 45)
M. Wells: II faut dire que la succession Chouinard-Brisson a un
terrain d'à peu près deux milles carrés. Comme on n'a pas
d'entente avec eux, ça représente, quand même, une portion
importante du tracé. Mais, actuellement, on peut dire qu'on a un peu
plus de 50 % du tracé qui font l'objet d'ententes.
M. Garon: Je vous remercie.
La Président (M. Parent, Bertrand): On vous remercie, Me
Wells. Je demanderais Immédiatement aux Intervenants de s'approcher pour
qu'on puisse les entendre, il y a, d'abord, une présentation
générale qui va être faite par Me Guy Gilbert et suivra
immédiatement le premier groupe, la Ferme Laterrière. M. Guy
Gilbert.
M. Garon: M'aviez-vous compris tout à l'heure quand je
vous ai demandé si c'était possible d'avoir un tracé
indiquant les bouts où il y avait des ententes? Je disais en couleur,
mais pas nécessairement en couleur. J'ai cru comprendre que vous aviez
dit que vous l'aviez en couleur.
M. Wells: On a un tracé, mais si vous me donnez dix
minutes, on pourrait vous Indiquer en gros les endroits où on a des
ententes. Ce n'est pas indiqué sur le plan que nous avons.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Afin de ne pas
retarder les travaux, si vous pouvez faire ces choses et les remettre ou les
faire circuler afin qu'on ait le maximum d'informations au cours des prochaines
minutes.
M. Garon: C'est pour voir si les parties sur lesquelles iI y a
des ententes, ce sont des territoires qui ne valent pas cher par rapport
à ceux où I n'y a pas d'ententes. Est-ce que ça vaut plus
cher ou moins cher? Des fois, c'est plus facile de s'entendre pour un
territoire qui n'est pas vendable que pour un territoire qui est bon. On n'en a
aucune idée.
M. Wells: Ce qui reste, c'est en partie des cas difficiles.
Le Président (M. Parent, Bertrand): M. Gilbert, vous allez
faire une présentation générale pour les quatre groupes.
Si vous voulez nous faire cela de la façon la plus succincte possible,
on aimerait bien, à l'intérieur du temps qui nous est
dévolu, avoir la chance de rencontrer tous les intervenants.
Présentation générale des
opposants
M. Gilbert (Guy): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire, je
désire bien vous situer par rapport à la fonction qui m'incombe
de présenter devant vous cette allocution. Mon nom est Guy Gilbert. Je
suis l'époux de dame C. -E. Chouinard, propriétaire indivis du
domaine du lac Gravel. Mme Marie-Luce Brassard-Brisson en est la
copropriétaire. Son fils, Guy Brisson, assiste aux débats de
cette commission, de même que mon épouse.
Notre propriété délimite les bornes de
la ville de La Baie et de la municipalité de Laterrière. Vers la
mi-novembre 1983, Me Jacques Fortin, à ce moment-là directeur du
service immobilier d'Alcan à Jonquière, convoquait les
propriétaires des terrains, devant lesquels on présentait les
plans de la voie ferrée projetée par Roberval-Saguenay, reliant
la ville de La Baie à l'usine de Laterrière. Ce tracé
traverse notre propriété sur une longueur de 1, 6
kilomètre, l'assiette occupant une surface de 48 acres.
Les propriétaires du lac Gravel, tout comme les
autres propriétaires, ont été convoqués plusieurs
fois par Aican pour nous tenir au courant de la marche des travaux
projetés pour la voie ferrée. La dernière de ces
réunions tenue au restaurant Lucerne, de ville de La Baie, nous
affirmait que l'entente avec les propriétaires se ferait vers la fin
d'avril 1988. C'était le 16 mars 1988. Depuis ce temps, nous avons eu
des rencontres au bureau de la direction du service immobilier d'Alcan. Ces
entretiens ont toujours été futiles.
Je vous dispense de rénumération
entière des nombreuses rencontres échelonnées sur
plusieurs années, tenues avec M. André Chevalier, directeur du
service immobilier d'Alcan à Jonquière, et M. Laurent Dubois,
évaluateur pour ce même service. Toutefois, il faut que je
révèle quelques propos plus flagrants les uns que les autres.
J'ai fait l'étude des transactions faites entre la compagnie Alcan et
les propriétaires de Laterrière pour l'acquisition des terrains
devant servir pour la construction de l'usine. L'ensemble du territoire couvre
2358, 2 acres. Les enregistrements au greffe montrent 33 transactions,
lesquelles se sont négociées dans un temps relativement rapide.
Au fait, 18 ententes ont été signées en 1982, aucune en
1983, 7 en 1984, 3 en 1985, une seule en 1987 et une autre en 1988. La
transaction de 1988 n'est pas due au fait que le propriétaire
concerné était récalcitrant, mais au fait que la compagnie
Alcan a décidé d'acquérir
sur le tard cette autre parcelle de terrain. Toutes ces transactions ont
été conclues de gré à gré. C'est ce que M.
Wells a dit tout à l'heure. Les négociateurs d'Alcan, tout
gentils qu'ils sont, ont même accordé des droits d'habitation pour
des périodes de cinq à dix ans, moyennant des loyers symboliques
variant de 25 $ à 100 $ annuellement, il faut donc conclure de tout cela
qu'il est assez facile de négocier avec les gens de Laterrière,
à condition qu'il y ait un tant soit peu de bonne volonté de part
et d'autre.
À la suite de cette étude, je demandai à M. Laurent
Dubois pourquoi les négociations avec nous du lac Grave! ne se
déroulaient pas aussi rondement et aussi rapidement que celles tenues
lors des achats de terrains devant servir d'assiette pour la construction de
l'usine. Il nous répondit que l'achat des terrains pour la ligne de
chemin de fer, c'était différent, laissant sous-entendre que les
négociations devraient se faire sous la couverture des droits
d'expropriation contenus dans la charte de la compagnie Rober-val-Saguenay. Or,
ce qu'il disait n'est pas exact. À preuve, on réclame aujourd'hui
un amendement à la Loi constituant en corporation la compagnie du chemin
de fer Roberval-Saguenay de manière à y inclure un droit
d'expropriation qu'elle ne possédait pas auparavant.
M. André Chevalier, pour sa part, nous disait que l'expropriation
était l'ultime arme à laquelle Alcan devait recourir.
Voilà un illogisme, car ils réclament du gouvernement du
Québec de rendre la charte de Roberval-Saguenay conforme aux termes et
aux conditions pour la construction d'un tronçon de chemin de fer,
sachant bien que la loi leur octroierait un droit d'expropriation. L'attitude
des négociateurs n'est pas sans me rappeler le fantasque Goliath disant
à David: Mon petit, défends-toi. MM. Chevalier et Dubois semblent
ignorer que les petits Davids réunis que nous sommes, les citoyens de ce
pays et de cette province, sont généralement très
écoutés par les gouvernements, tant fédéral,
provincial que municipal. À preuve de ce que j'avance, les exemples qui
suivent: en 1983, le gouvernement fédéral, par l'entremise du
ministère de la Défense nationale, a voulu implanter un champ de
tir au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Devant les nombreuses protestations des
citoyens, le gouvernement fédéral s'allia le gouvernement
provincial et forma une commission d'étude sur le projet
présidée par Me Marc-André Bédard. Le rapport fut
déposé en juin 1988. Il exigeait des concessions, tant des
gouvernements que de la part des citoyens concernés par le projet.
Malgré tout, le projet de champ de tir demeure inaccepté chez les
Jeannois et c'est l'attentisme du côté gouvernemental.
Défaite de Goliath contre les petits Davids.
Un autre exemple de l'influence et de la sagesse du voeu populaire:
Hydro-Québec qui a dû tenir compte des protestations des
résidents de la rive sud du Saint-Laurent opposés à
l'aménagement d'un corridor électrique traversant le
Saint-Laurent.
Un dernier exemple, au niveau municipal, cette fois: la MRC du Fjord,
groupant notamment les villes de Chicoutimi et de Jonquière, voulait
aménager un dépotoir intermunicipal dans la municipalité
voisine qui est Saint-Honoré. L'objection des résidents de la
petite municipalité s'est exprimée de diverses façons,
notamment au moyen d'un référendum, tant et si bien qu'on a
dû abandonner le projet. Voilà qui prouve que nos gouvernants
savent écouter les citoyens et sont sensibles à leurs
oppositions. Forts de ces réalités, nous sommes ici devant vous
pour faire valoir et sauvegarder nos droits de négociation à
titre de propriétaires.
Je vous rapportais plus haut ia réponse de M. Laurent Dubois,
évaluateur attitré au service d'Alcan, à savoir qu'il y a
une différence quand il s'agit de discuter de l'évaluation des
terrains concernés par la construction du chemin de fer, compte tenu des
supposés droits d'expropriation de Roberval-Saguenay. Pour nous, la
seule différence qui importe vraiment pour l'évaluation est d'un
tout autre ordre et c'est cette différence qui devrait guider le
législateur lorsqu'il sera appelé à statuer sur la
demande. Ainsi, lorsqu'un propriétaire a vendu son immeuble ou son fonds
de terrain pour permettre la construction de l'usine de Laterrière,
celui-ci en est quitte pour la vie et est satisfait de l'entente conclue avec
Alcan. Mais lorsque la voie ferrée est construite sur votre ferme ou sur
votre terrain, vous devez souffrir cet ennui quotidiennement, tant pour vous
que pour vos descendants, sans compter que la présence d'un chemin de
fer hypothèque sérieusement vos chances, à titre de
propriétaire, de revendre à bon prix votre immeuble.
Les négociateurs de Roberval-Saguenay vous demandent un droit
d'expropriation. À rencontre, nous vous demandons plutôt s'il est
possible pour vous d'imposer à la compagnie Roberval-Saguenay de payer
aux propriétaires concernés un droit de passage équivalent
à un loyer mensuel ou annuel, échelonné sur plusieurs
dizaines d'années. Votre réponse sera peut-être
négative, invoquant la raison qu'il ne vous appartient pas de
légiférer en ce sens, puisque toute négociation doit se
faire selon les règles de l'offre et de la demande. Mais que faire? Les
négociateurs d'Alcan soumettent peu d'offres écrites et celles
qu'ils font sont bien loin d'une évaluation tant soit peu
équitable. Plus que cela, ils demandent sans offrir.
Dernièrement, diverses transactions commerciales ont
affecté la province sans que le gouvernement québécois se
permette d'intervenir et ce, malgré l'indignation de plusieurs. Je
pense, notamment, à la vente du groupe d'assurances Commerce à
des intérêts hollandais, à la vente de la
Consolidated-Bathurst à la firme américaine Stone Container et
également à la fusion O'Keefe-Molson qui deviennent
propriété des Australiens. Cela étant, pourquoi donc
notre
gouvernement interviendrait-il dans les négociations avec les
propriétaires fonciers de La Baie et de Laterrière en accordant
à Alcan un droit d'expropriation?
Mes propos peuvent vous laisser croire que nous sommes anti-Alcan. Or,
II n'en est rien. Au contraire, nous sommes conscients de l'apport
économique de cette industrie au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Nous
n'ignorons pas, non plus, qu'Alcan s'est montrée soucieuse de
l'environnement en supprimant graduellement de ses installations polluantes les
cuves de type Soderberg. Il y a quelques mois, les protecteurs de la faune
aquatique ont accusé les usines Alcan de Jonquière d'avoir
largement contribué à l'extinction de cette espèce de
baleines que sont les bélugas en polluant les eaux de la rivière
Saguenay. Sensible aux mouvements de pression, la multinationale a
décidé d'investir un montant d'argent appréciable pour
assurer la pérennité des baleines blanches. Nous vous demandons
pourquoi, à l'instar de ces mesures de protection pour ces poissons, la
compagnie Alcan ne se soucierait pas également des droits de
propriété des individus.
Bref, nous, les propriétaires concernés par la
construction de la voie ferrée, nous vous demandons instamment de
refuser d'accorder à Roberval-Saguenay le pouvoir d'expropriation, tel
que demandé par le projet de loi 230. Autrement dit, nous vous demandons
de respecter nos droits de propriétaires et de laisser libre cours aux
règles de négociation ordinaires qui sont celles de l'offre et de
la demande. (17 heures)
Ces propos de mon exposé m'amènent à cette
réflexion. Pourquoi donc, en 1989, à l'image des
Amérindiens, nous impose-t-on de venir devant vous défendre nos
droits légitimes de propriétaires? Serait-ce donc qu'encore de
nos jours certains géants industriels entretiennent l'image de
domination des découvreurs? Il faut pardonner leurs bévues aux
colonisateurs, car, à cette époque primitive, le mot
"partenariat" n'existait pas dans le sens qu'on lui connaît maintenant.
Mais, fort heureusement pour nous, nos gouvernants emploient
généralement leur autorité pour protéger les droits
acquis des résidents de la province et nous ne voulons pas que ces
droits acquis se transforment en droits conquis en vertu d'un droit
d'expropriation qui, somme toute, ferait plus de mal que de bien.
Membres de la commission, je vous remercie de votre bonne attention.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Gilbert.
M. Gilbert: Un instant, M. le Président. Tout à
l'heure, Me Wells a dit qu'il semblait être difficile pour Alcan de
discuter avec les gens du lac Gravel. J'ai ici des reportages parus dans Le
Quotidien contenant différentes opinions des gens de
Laterrière. Est-ce que quelqu'un pourrait distribuer cela, s'il vous
plaît?
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va pour votre
présentation, M. Gilbert?
M. Gilbert: Merci.
Le Président (M. Parent, Bertrand): C'est moi qui vous
remercie. Alors, c'était une présentation d'ordre
général avant d'entendre les intervenants particuliers. Je pense
qu'on devrait entendre immédiatement les premiers intervenants de la
Ferme Laterrière, soit le procureur de celle-ci, Me Pierre Desforges, et
M. Jeannot Tremblay.
Étant donné que c'était une présentation
d'ordre général et que M. Guy Gilbert fait aussi partie du groupe
qui va suivre, la succession Chouinard-Brisson, vous aurez la chance de lui
poser des questions. Alors, je vous demanderais de vous présenter, Me
Desforges et M. Tremblay.
Ferme Laterrière
M. Desforges (Pierre): Merci, M. le Président. M. le
Président, M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, je
ferai un bref tour d'horizon des éléments qui ont
été évoqués devant vous jusqu'à
présent. Je vais laisser M. Tremblay vous faire part de la situation
critique des activités de ma cliente.
Essentiellement, ce qu'Alcan tente d'indiquer à la commission,
c'est qu'elle requiert un pouvoir d'expropriation élargi, parce que la
loi ne lui reconnaît un pouvoir d'expropriation que sur une longueur de
dix kilomètres, alors qu'elle en a besoin de quatorze et aussi parce que
les largeurs prévues en vertu de la loi se révèlent
insuffisantes, compte tenu de certaines contraintes topographiques.
Notre propos n'est pas de dire à la commission que ces largeurs
ne sont pas justifiées, que cette longueur de trajet n'est pas
justifiée par des impératifs économiques - on
reconnaît volontiers ceux-ci à Alcan - et par des
considérations de saine gestion du patrimoine routier. Notre objectif
est plutôt d'indiquer que, quant à nous et avec respect, il ne
serait pas opportun, à ce stade-ci, de reconnaître un pouvoir
accru à la requérante pour les fins de l'expropriation qu'elle
envisage.
Essentiellement, notre préoccupation est la façon
suivante: il est traditionnel de considérer le pouvoir d'expropriation
comme étant un pouvoir extraordinaire, un pouvoir qui revient à
la couronne et que la couronne peut remettre à certaines instances dans
un but d'intérêt public. Dans les cas de chemins de fer, on a tous
compris que dans le passé, l'intérêt public pouvait
demander un pouvoir d'expropriation, parce qu'on avait à coeur un
développement économique qui tenait compte des impératifs
d'une compagnie de chemin de fer. Mais, ma lecture de la Loi sur les chemins de
fer et ce que je retiens de ce qu'est le principe d'expropriation me
convainquent que ce pouvoir
exceptionnel n'est concédé que dans la mesure où il
s'impose de lui-même et il doit s'exercer dans le respect des
impératifs à la fois de l'État et des citoyens eu
égard à l'objectif poursuivi par celui qui veut ce pouvoir
d'expropriation.
Nous pensons qu'il n'est pas opportun, aujourd'hui, de donner raison
à Alcan quant à la demande qu'elle fait valoir devant vous pour
les raisons suivantes. On a tenté avec beaucoup de succès, je
pense, de vous convaincre que le geste que vous poseriez en allant de l'avant
avec le projet qui est devant vous aurait, finalement, une portée
relativement limitée, parce que beaucoup d'autres intervenants vont
assurer, au bénéfice de la population en général et
au bénéfice de ma cliente et des autres intervenants, la
protection de tous les droits que les lois leur reconnaissent.
Alors, on a fait état assez longuement de l'assentiment qu'on a
obtenu de la Commission de protection du territoire agricole du Québec,
de l'assentiment qu'on a obtenu ou qu'on obtiendra éventuellement du
ministre des Transports pour procéder aux expropriations, de
l'assentiment qu'on obtiendra de l'Environnement après les
enquêtes auxquelles il sera procédé incessamment. Tout cela
de façon à vous guider - je le dis sans mesquinerie - ultimement
vers un entonnoir où le geste que vous aurez à poser aujourd'hui
sera d'une portée extrêmement limitée, parce qu'il y a
plein d'autres personnes qui vont s'intéresser à la
défense des Intérêts des gens qui sont vraiment pris avec
ce problème-là.
Mettons de côté l'intervention de la CPTAQ, l'Intervention
du Bureau des audiences publiques, l'intervention de tous ces gens qui font ou
qui feront en sorte que, idéalement, dans le meilleur des mondes, il n'y
ait pas de préjudice. Une chose ressort, cependant, c'est qu'à
notre humble avis, actuellement, Alcan n'a pas pu vous convaincre qu'elle a
besoin de ce pouvoir d'expropriation là. D'abord, elle en a
déjà une partie et, ensuite, elle n'a pas fait, à notre
avis, des efforts suffisants, des efforts caractérisés pour ne
pas devoir se prévaloir d'un privilège que cette Assemblée
lui donnerait ultimement, celui d'avoir des pouvoirs spéciaux
au-delà de tous ceux auxquels elle pourrait autrement prétendre.
Voilà ce qui est important pour nous: l'effet de donner des pouvoirs
exceptionnels dans un contexte comme celui-ci est d'amener un
déséquilibre dans la balance entre les intérêts
d'Alcan et les intérêts des propriétaires.
Actuellement, Alcan ne vous a pas convaincus, pour des raisons qui
seront évoquées plus longuement par M. Tremblay et par les autres
intervenants, qu'elle a besoin de ce pouvoir d'expropriation au-delà de
ce que la loi lui permet déjà. Ce qu'elle ne vous dit pas tout
à fait, mais qu'il faut comprendre de son intervention et de sa demande
qui est devant vous, c'est que, quant à elle, il serait tellement plus
com- mode et tellement plus facile d'aller de l'avant avec son projet, dont on
ne discute pas le fondement ici, si elle avait en poche un pouvoir
d'expropriation qui lui donnerait les coudées franches sur toute la
longueur et sur toutes les distances.
Nous n'en sommes pas, quant à ma cliente et quant aux autres
intervenants, à ma connaissance et sans les lier, à discuter si
l'emprise aura 15 mètres, 50 mètres ou 75 mètres. On n'en
est pas rendu là. Assez curieusement, aujourd'hui, on nous dit que le
temps presse, mais ma compréhension des événements est
qu'on n'en est pas rendu là avec les propriétaires, à
savoir où ça passera exactement et quelle largeur ça
prendra. Cependant, la conclusion à laquelle il faut
nécessairement en venir quand on examine de près la demande
d'Alcan, enfin de la compagnie de chemin de fer, c'est qu'on veut disposer
d'une arme supplémentaire et d'une arme contre laquelle les
propriétaires riverains, qu'on a qualifiés de
récalcitrants, mais je ne suis pas sûr qu'il y ait eu des efforts
très soutenus pour les intéresser à cette
question-là, ne pourront rien. On veut disposer d'une arme
supplémentaire pour mater, entre guillemets, toute forme d'opposition
qui pourrait survenir. On se réveille, entre guillemets - et je le dis
avec tout le respect voulu pour les intervenants du côté d'Alcan -
avec un projet qui doit aller de l'avant, une chronologie des
événements qui est extrêmement serrée, alors
qu'Alcan a recours à l'artifice commode d'obtenir des pouvoirs
spéciaux pour atteindre cet objectif-là plus facilement et plus
commodément.
Je pense qu'il n'y a pas besoin d'y réfléchir longuement
pour se rendre compte, malgré qu'on ne vous ait pas fait la preuve que
c'était nécessaire, qu'on vous a laissé entendre que
ça serait tellement plus commode. Enfin, c'est là notre propos.
Actuellement, si Alcan disposait de cette arme additionnelle là, on doit
tous comprendre que les négociations seraient de très courte
durée et qu'on traînerait pendant de très longues
années des citoyens devant le Tribunal de l'expropration.
Alors, on a bien confiance en cette institution, U n'y a pas de doute
sur cela, mais nous pensons que le recours à des pouvoirs particuliers,
exorbitants du droit commun et exorbitants même de la Loi sur les chemins
de fer, est un exutoire trop facile pour Alcan en vue de se mettre dans une
position de contrôle et de pouvoir, dont on nous dit ne pas
nécessairement avoir besoin, en fin de compte, lorsqu'on fait
référence à l'expérience récente
d'acquisition de terrains pour l'usine. Je tiens à vous souligner que,
dans le cas de l'usine, on n'avait pas ces pouvoirs et on a réussi quand
même à aller chercher tous les terrains dont on avait besoin et
à y construire l'usine. Pourquoi en serait-il autrement maintenant, si
ce n'est pour rendre la vie plus facile à ceux qui proposent des
amendements à leur charte et mettre, finalement, à leur
merci - je le dis sans arrière-pensée - des citoyens qui
ont des intérêts légitimes à faire valoir,
intérêts qui ne vont pas jusqu'à empêcher la
réalisation de ce projet? Je pense que le débat n'est pas
à ce niveau.
Merci, je vais céder la parole à M. Tremblay, qui vous
fera part de la situation.
Le Président (M. Parent,
Bertrand): J'inviterais M.
Tremblay à être très bref. Le problème est que
plusieurs de vos concitoyens vont manquer de temps.
M. Tremblay (Jeannot): Je vais être très bref, M. le
Président. MM. les membres de la commission, nous sommes très
heureux de pouvoir exprimer devant les parlementaires les problèmes que
l'on vit depuis plusieurs années.
Je représente la Ferme Laterrière, dont je suis le
directeur général, et un groupe de 150 personnes, venant de la
région, qui sont impliquées dans ce projet. La Ferme
Laterrière est une ferme à caractère
récréotouristique qui existe depuis 17 ans. Cette entreprise
jouit d'un appui régional sans condition. Je pense que M. le
député de Dubuc connaît très bien ce dont je
parle.
Nous pensons que les intérêts de la compagnie
Roberval-Saguenay et ceux d'Alcan sont intimement liés. Ces deux
compagnies sont au sens de la loi des compagnies privées à
caractère lucratif, bénéficiant et appartenant à
leurs actionnaires. Nous pensons que ces compagnies ont la capacité
financière de négocier l'acquisition des terres et des terrains
nécessaires à leur développement. Nous pensons que la
compagnie Roberval-Saguenay n'a pas obtenu l'autorisation formelle du
ministère de l'Environnement pour le tracé du chemin de fer.
Comme vous le savez, nous avons obtenu du ministre l'autorisation de nous
présenter au Bureau d'audiences publiques et nous ferons nos devoirs
à ce moment-là. Nous y exposerons la problématique du
tracé. Cette compagnie n'a présenté aucune alternative,
que je sache, au tracé définitif du chemin de fer. Donc, nous
nous sommes trouvés devant un fait accompli en 1988. On nous a dit:
Messieurs, voici le tracé.
La même chose s'est produite en 1984 - je fais une
parenthèse - quand M. Fortin nous a annoncé en grande pompe le
projet d'Alcan. Immédiatement après, je suis allé le voir
et je lui ai dit: M. Fortin, c'est formidable pour Alcan, mais moi, ça
ne m'intéresse pas. J'envisageais déjà les
problèmes que cela amènerait. Il est impensable qu'en 1989, dans
un contexte socio-économique et politique totalement différent de
celui du début du siècle, de tels pouvoirs soient accordés
à une entreprise privée, quelle que soit son importance. On a
fait allusion à ses capitaux. C'est vrai, Alcan est une compagnie
importante, mais c'est aussi une compagnie qui rapporte des dividendes à
ses actionnaires. Il ne faut pas l'oublier.
Le projet de loi 230 est tout à fait antidémocratique, car
il entend conférer à une compagnie privée des pouvoirs
reconnus uniquement à l'État. Le projet de loi 230 enlève
aux individus et aux corporations concernés par ce projet toute force de
négociation vis-à-vis du requérant en annihilant les
droits et privilèges reliés à la propriété
privée. Les élus municipaux de Laterrière lors du conseil
de lundi soir - j'ai une résolution en main - s'opposent formellement
à ce que soit accordé à la compagnie le droit d'exproprier
des terres ou parties de terres pour la construction d'un chemin de fer
privé. (17 h 15)
Enfin, nous pensons que le devoir de nos élus, de nos gouvernants
est de protéger l'équilibre, les droits fondamentaux des citoyens
vis-à-vis d'autres citoyens ou d'entreprises privées telle Alcan.
Voilà pourquoi, nous nous opposons au projet de loi 230 et demandons au
Parlement, à la commission, soit de refuser ce droit extraordinaire,
soit de dire à Alcan d'aller faire ses devoirs et d'attendre le
résultat de la commission sur l'environnement. Cette résolution,
évidemment, a été acceptée à
l'unanimité au conseil d'administration de la Ferme
Laterrière.
Une parenthèse, M. le Président. Quand on a fait allusion
au fait qu'en 1984 il y a eu des négociations et qu'on nous a mis dans
le coup, etc., je peux vous affirmer une chose, que M. Wells, je pense, a
clairement soulignée. Ce n'est qu'en 1988, à la suite du
dépôt du tracé final, qu'on a eu une rencontre aux bureaux
d'Alcan à Arvida, une autre à la Ferme Laterrière et,
ensuite, plus rien. Nous demandons donc au gouvernement cet équilibre
nécessaire pour que ce dossier se termine d'une façon
équitable et aussi d'une façon juste, parce que ce n'est pas le
cas actuellement. Je n'ai pas autre chose à ajouter. Si on a des
questions à me poser, il me fera plaisir d'y répondre.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci beaucoup.
M. Tremblay (Jeannot): M. le Président, j'aimerais
déposer les deux résolutions auprès...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Du secrétaire de la
commission.
M. Tremblay (Jeannot): ...du secrétaire de la
commission.
Le Président (M. Parent, Bertrand): On va les faire distribuer.
Je vous remercie beaucoup, M. Tremblay et M. Desforges. Est-ce que des
parlementaires ont des questions à poser au groupe la Ferme
Laterrière? M. le ministre d'abord, puis M. le député de
Lévis.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, pour
qu'on se comprenne bien, il ne faut pas donner au projet de loi des vertus
qu'il n'a pas.
Je pense qu'il faut se resituer dans le contexte pour bien comprendre ce
que le projet de loi fait.
L'autorisation de la loi actuelle permet dix kilomètres. À
dix kilomètres, le chemin de fer va s'arrêter quelque part dans le
champ. Il ne sera pas très utile, selon ce que j'ai compris. Cela prend
donc quatorze kilomètres ou à peu près, peu importe le
tracé qui sera retenu par l'autre instance qui doit le
reconnaître. On est donc dans une situation où ce n'est pas un
pouvoir exorbitant que de dire: Au moins, le chemin de fer ne finira pas dans
le champ; il va finir quelque part où ce sera utile.
Premièrement.
Deuxièmement, pour le compléter, selon ce que j'ai compris
du tracé qui peut actuellement être reconnu, il y a quatre points
sur le tracé qui ne correspondent pas aux largeurs nécessaires,
vu l'escarpement ou d'autres situations topographiques qui font que cela prend
davantage de remblai que la largeur dont on a besoin actuellement. C'est ce que
fait le projet dans son essence. À partir de là, il ne faut pas
lui donner d'autres vertus qui ne sont pas dans le projet de loi, ni d'autres
intentions non plus.
Malgré tout ça, il est clair et net qu'Alcan a
l'obligation de négocier de bonne foi avec les propriétaires et
de ne jamais oublier qu'au lendemain du projet de loi cela prend juste un petit
décret gouvernemental pour être capable de finaliser l'affaire. Le
décret gouvernemental, si jamais on passait à travers le
processus de la loi, ce n'est pas un automatisme s'il n'y a pas des
négociations de bonne foi. Je pense que vos témoignages sont
importants pour nous actuellement. Y a-t-il eu avec vous, oui ou non, des
négociations de bonne foi de la part d'Alcan? Si oui, le dire et, sinon,
le dire et Alcan fera sa job après.
M. Tremblay (Jeannot): M. le ministre, je crois que non. Je vous
ai dit qu'il y en a eu deux et je dis non.
M. Côté (Charlesbourg): C'est ce qu'il m'importe de
savoir. Au moment où on aura, comme parlementaires, à prendre une
décision sur le cheminement du projet de loi et sur ce qui en
découle, si Alcan ne démontre pas qu'elle a fait une
négociation de très bonne foi avec les intervenants, ce n'est pas
sûr que c'est moi qui vais décider ce qu'on va faire après
au plan de l'acquisition des terrains. Il faut qu'elle fasse sa job et des
mécanismes sont en place. De la même manière que les
citoyens sont protégés quant au tracé par le Bureau des
audiences publiques, de (a même manière que les agriculteurs sont
protégés par la CPTA, il y a un autre moyen, celui du Tribunal de
l'expropriation, qui doit régler un certain nombre de choses. C'est la
logique des choses. Cela m'apparaît être ça. On ne refera
pas la terre. Le projet de loi vise deux choses: de dix à quatorze
kilomètres et, deuxiè- mement, quatre points additionnels sur le
réseau. Cela ne règle pas la négociation avec les
propriétaires. Si, demain matin, elle achète votre ferme au prix
que vous pensez qu'elle vaut, d'après ce que je comprends, il n'y
aura pas de problème.
M. Tremblay (Jeannot): C'est toute une problématique. Cela
fait 17 ans que je vis là, M. le ministre. La problématique, on
va la souligner au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est
très grave. Ce que je reproche à Alcan, c'est qu'elle n'est pas
capable de voir la substance de ce chemin de fer par rapport à
l'intervention qu'elle a à faire. À mon avis, c'est très
grave.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, sur le plan
environnemental, on ne peut pas présumer de la décision du
BAPE...
M. Tremblay (Jeannot): Non. Je sais ça.
M. Côté (Charlesbourg): ...quand vous allez y faire
votre intervention. Et ça ne veut pas dire que c'est le tracé
qu'elle propose qui va être retenu. Le principe pour les routes au
Québec, c'est d'y aller avec un tracé privilégié,
mais avec des alternatives. C'est le BAPE qui décide, ce n'est pas le
ministère des Transports.
M. Tremblay (Jeannot): Quand on se fait dire: Pourquoi ne vous en
allez-vous pas ailleurs, lors d'une négociation, pourquoi ne
changez-vous pas de place, vous autres? J'ai dit: Pourquoi ne passez-vous pas
ailleurs? C'est ça que je leur ai répondu et c'est mon droit.
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas Alcan qui va
décider pour le BAPE. C'est le BAPE qui va décider de
lui-même.
M. Tremblay (Jeannot): Je le sais bien, mais, M. le ministre,
vous me demandez une précision. Je vous la donne.
M. Côté (Charlesbourg): Ah! Mais je pense que la
question qu'on doit se poser, c'est: Y a-t-il véritablement eu des
négociations de bonne foi? J'ai l'impression que, s'il y avait des
négociations de bonne foi, il y aurait une série de
problèmes qui pourraient s'éliminer en cours de route. Il y a des
gens qui sont peut-être prêts finalement. Au-delà de tout
ça, votre problème particulier de quelqu'un qui vit là
depuis 17 ans, et de la qualité environnementale, c'est au BAPE que cela
va se décider.
M. Tremblay (Jeannot): Exactement. C'est pour ça que je
vous le dis.
M. Côté (Charlesbourg): Mais U n'est pas question de
subordonner la décision du BAPE à ce qui se passe ici.
M. Tremblay (Jeannot): Non, non. On est clair
là-dessus.
M. Côté (Charlesbourg): II faut bien cadrer ce qu'on
fait. Ce qu'on nous demande de faire, c'est de dix à quatorze
kilomètres et d'élargir à quatre points du réseau.
Cela présume qu'il va y avoir des ententes avec les
propriétaires.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. Tremblay. M.
le député de Lévis et Mme la députée de
Chicoutimi voudraient poser une question. M. le député de
Lévis.
M. Garon: Je pense que le ministre soulève un bon point,
à savoir comment ça fonctionne. Si on regarde la Loi sur les
chemins de fer, on dit: Pour qu'il y ait expropriation, il faut qu'il y ait
autorisation du ministre. La Loi sur l'expropriation dit autre chose, mais
qu'est-ce qui s'applique dans le cas des chemins de fer? Dans le cas des
chemins de fer, on dit: II peut y avoir expropriation à condition que le
ministre donne son autorisation.
M. Côté (Charlesbourg): Le Conseil des ministres, M.
le député. C'est le gouvernement.
M. Garon: Bien, ça dépend.
M. Côté (Charlesbourg): C'est la Loi sur
l'expropriation.
M. Garon: Mais il y a un pouvoir particulier dans la Loi sur les
chemins de fer. Il y en a une qui dit une chose et I y en a une autre qui dit
autre chose. La Loi sur les chemins de fer...
M. Côté (Charlesbourg): C'est l'article 36 de la Loi
sur l'expropriation.
M. Garon: Oui, mais il y a aussi une Loi sur les chemins de fer
qui est spécifique aux chemins de fer. Qu'est-ce qu'elle dit? Elle dit:
'Avant d'exercer les pouvoirs prévus aux paragraphes 4°, 5°,
6°. 8°. 12°, 14°, 22° et 23°, une compagnie doit
obtenir, dans chaque cas, l'autorisation du ministre des Transports. " Il faut
bien voir de quoi il est question. La Loi sur l'expropriation, c'est une
affaire; la Loi sur les chemins de fer, c'est une autre affaire.
À part la Loi sur les chemins de fer, est-ce qu'il y en a une qui
s'applique? Est-ce que c'est la loi en général sur
l'expropriation ou la Loi sur les chemins de fer qui s'applique? D'après
votre contentieux, laquelle s'applique: la Loi sur les chemins de fer ou la Loi
sur l'expropriation?
Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le ministre des
Transports.
M. Côté (Charlesbourg): Dans tous les cas, selon ce
que me dit M. Harel qui est un vétéran du domaine au
ministère, ça prend un décret gouvernemental. Donc, le
décret, ce n'est pas le ministre; le décret, c'est le
gouvernement.
M. Garon: M. Harel, qui est-ce?
M. Côté (Charlesbourg): C'est le directeur de
l'expropriation au ministère.
M. Garon: Non, non. Je veux un avis du contentieux.
M. Côté (Charlesbourg): Ah!
M. Garon: Moi, des avis juridiques d'ingénieurs, c'est une
affaire. Je recevais ça, des fois, des avis juridiques d'agronomes. Je
préfère des avis juridiques d'un contentieux.
M. Côté (Charlesbourg): De toute façon, je
peux vous dire juste une affaire...
M. Garon: Je n'ai pas une mauvaise opinion de M. Harel. Ce n'est
pas ça.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non.
M. Garon: Mais là, c'est une opinion juridique.
M. Côté (Charlesbourg): J'ose espérer, parce
que ça fait quand même quelques années qu'il est là
et il peut probablement en montrer à bien des avocats de votre
génération.
M. Garon: Je comprends, mais je ne lui demande pas du
génie. En génie, pour faire des ponts, je ne suis pas un
spécialiste là-dedans. Mais, en droit, il y a deux lois qui
disent deux choses différentes. On n'est pas dans le génie
juridique. On est dans le droit. Il y a une Loi sur les chemins de fer qui dit:
autorisation du ministre des Transports. La Loi sur l'expropriation parle d'un
décret. Qu'est-ce qui marche?
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, non. Je vais vous
régler ça tout de suite, parce que je viens de consulter le
contentieux. Vous allez avoir à la fois la réponse d'un
ingénieur et d'un spécialiste en expropriation, en plus du
contentieux qui nous réfère à l'article 35 de la Loi sur
l'expropriation qui se lit comme suit: "Le présent titre régit
toutes les expropriations permises par les lois du Québec et
prévaut sur les dispositions inconciliables de toute loi
générale ou spéciale. " Est-ce que ça va là?
Parfait. Donc, c'est gouvernemental. L'ingénieur avait raison.
Une voix: C'est un ingénieur recyclé. Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Garon: Vous devriez le demander à votre
collègue. Quand il était au ministère de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie, il
avait demandé un avis à l'équipe qui était
derrière lui, mais il a été obligé de revenir
à l'opinion du député de Lévis et de faire son
amendement dans les 48 heures à l'Assemblée nationale. Cela
étant dit...
M. Côté (Charlesbourg): Vous avez derrière
vous l'un des plus grands génies législatifs qui hantent le
Parlement depuis le début des années soixante-dix. Vous n'avez
qu'à lui demander conseil et je suis convaincu qu'il va vous donner un
conseil très judicieux.
M. Garon: C'est justement lui qui me dit que...
Des voix: Ha, ha, ha! Il n'est pas d'accord. M. Côté
(Charlesbourg): II vous dit quoi? M. Garon: Pardon? M. Côté
(Charlesbourg): II vous dit quoi?
M. Garon: II dit qu'il y avait deux dispositions
différentes dans chacune des lois.
M. Poulin: Quand il vous dit ça...
Le Président (M. Parent, Bertrand): M. le député de
Chauveau, s'il vous plaît! C'est déjà assez
compliqué de démêler tout cela. M. le député
de Lévis, allez-y de vos questions.
M. Garon: J'aimerais poser aux représentants que nous
avons devant nous la question suivante: Quels sont les points sur lesquels vous
ne vous entendez pas avec Alcan dans vos discussions? Elle a dit que vous en
avez été saisis en 1982, lors d'un dépôt à la
Commission de protection du territoire agricole, comme si tout le monde
était au courant en 1982. C'est ce qu'elle a affirmé devant la
commission. J'aimerais savoir à quel moment vous considérez en
avoir été saisis, par rapport à ce qui a été
dit et que vous avez entendu, puisque vous étiez présents
ici.
M. Tremblay (Jeannot): M. Garon...
Le Président (M. Parent, Bertrand): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Jeannot): M. le Président, excusez-moi, j'ai
fait une faute. En 1984, Alcan a annoncé ses couleurs,
c'est-à-dire qu'elle construirait... Elle a réuni les citoyens
à la municipalité. Je pense que tantôt vous avez fait
allusion à un processus qui est très vrai, c'est qu'on nous
convoque à une assemblée générale et là on
donne de l'information générale. À ce moment-là, il
peut arriver que des citoyens ne soient pas présents. Mais, enfin, moi,
j'y étais en 1984. Au sujet de l'installation de l'usine et de ses
projets, c'était très clair.
En ce qui concerne les tracés, tout de suite on nous avait
annoncé qu'éventuellement il y aurait un chemin de fer et qu'y y
aurait certainement des gens qui seraient touchés, dont nous.
Maintenant, comme vous le savez, il y a eu arrêt de ce processus à
cause de la conjoncture économique. Alcan a tout arrêté,
puis a repris ses démarches. Elle nous a convoqués en 1988 -
c'est très récent - pour nous montrer les maquettes et le
tracé final: le plus économique, le plus ci et le plus ça,
et c'est ça. Prenez ça comme ça. Je leur ai encore dit:
Vous vous mettez le doigt dans l'oeil. Nous ne sommes pas d'accord avec
ça. On vous le dit. Devant une situation comme celle-là, M. le
Président, il reste une chose. C'est de dire au promoteur:
Écoutez, il y a deux choses: soit que je suis fou ou bien c'est vous
autres qui êtes fous.
Moi, je vous dis que, quand quelqu'un veut passer quelque part, il
rencontre les gens et leur demande ceci... Vous avez fait allusion à
ça d'une façon très percutante tantôt, en disant:
Est-ce qu'ils sont venus nous voir avant de déposer quoi que ce soit?
Êtes-vous favorables à une démarche comme celle-là?
Seriez-vous d'accord pour qu'on examine la problématique de ce chemin de
fer? Cela n'a pas été fait, ce n'est pas vrai. Alors, la
situation est la suivante: à la première rencontre qu'on a eue
avec les représentants d'Alcan au bureau, on nous a fait part qu'on
avait fait l'évaluation de la verdure, des arbres, des "crans" qu'il y
avait là-dessus et c'était ça. Cela valait 3000 $. C'est
ça qu'ils ont dit.
M. Garon: Maintenant, par rapport au tracé qui est
proposé actuellement...
M. Tremblay (Jeannot): Oui.
M. Garon: ...quels sont les points que vous avez en
désaccord avec Alcan? (17 h 30)
M. Tremblay (Jeannot): Écoutez, nous sommes une ferme - ce
n'est pas une ferme laitière - à caractère
récréotouristique. C'est évident que le chemin de fer dans
notre environnement immédiat, dans notre fonctionnement, dans nos
activités va nous pénaliser d'une façon extraordinaire. On
l'a dit à Alcan. On lui a montré cet Impact. Ce n'est pas grave,
qu'elle nous a dit. Autrement dit, on coupe, à partir du pied de la
montagne, tout notre développement qui existe et qui sera. Vous avez vu,
dans l'article qu'on en parle un peu.
On est une entreprise comme tout le monde. On veut vivre, on veut
fonctionner, on veut évoluer et le chemin de fer, c'est un
problème énorme pour nous. On l'a souligné à Alcan.
On l'a dit à M. Chevalier. On a dit: Écoutez, M. Chevalier, on
sait que vous avez une usine, que vous rapportez des millions, que c'est
important pour la région, mais essayez donc de nous
comprendre aussi. Essayez donc de voir tout ce que ça peut
comporter pour nous. C'est là qu'est un des problèmes majeurs. La
problématique de l'entreprise que je représente, c'est la
question qu'on s'est posée fondamentalement: Est-ce qu'on peut envisager
dans l'avenir de continuer nos activités avec le chemin de fer? Comme M.
Desforges l'a mentionné, lorsqu'on fait l'acquisition d'un terrain,
après, c'est fini, mais le chemin de fer, ça n'a plus de fin. Je
ne veux pas tomber là-dedans, mais, finalement, le chemin de fer est une
béquille qui va rester là tout le temps. Je pense qu'il y a
beaucoup d'intervenants qui ont peut-être signé des options
d'achat et qui regrettent beaucoup cette décision et la
municipalité aussi.
Alors, M. Garon, ce que je veux dire, finalement, c'est que, si Alcan
avait compris la problématique de tous ces gens avec leur
développement, ce qu'ils ont fait comme démarche et ce qu'ils
sont comme personnes aussi, on ne serait probablement pas ici aujourd'hui.
C'est ce qu'on dit à nos députés. C'est impensable. Il
faut que vous disiez à Alcan de retourner faire ses devoirs et de
comprendre ce qui se passe.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Mme la
députée de Chicoutimi, vous aviez des questions, très
brièvement.
M. Garon: Mais, je n'avais pas fini.
Le Président (M. Parent, Bertrand): On va revenir à
vous. Madame.
Mme Blackburn: Très brièvement. Ce que je comprends
du débat, c'est que vous dites: On va profiter de l'occasion qui oblige
Alcan à demander une modification à la loi pour l'amener à
négocier de façon un peu plus civilisée comme elle l'a
fait dans le cas de l'expropriation pour l'usine. Si j'ai compris le ministre
tout à l'heure, et c'est du ministre que je voudrais avoir la
clarification, celui-ci a dit: Si vous êtes capables de me prouver qu'on
n'a pas négocié de la même manière dans votre cas
qu'on a négocié pour l'expropriation de l'usine, moi, j'attends.
Je n'étais pas sûre d'avoir compris. C'est du ministre que je
voudrais le savoir.
M. Côté (Charlesbourg): C'est davantage sur le plan
des étapes.
Mme Blackburn: Oui, allez-y.
M. Côté (Charlesbourg): De ce que je comprends de la
demande d'Alcan, il faut adopter la loi de façon qu'elle puisse à
la fois construire le chemin de fer sur les quatorze kilomètres
nécessaires et, à quatre points du réseau, avoir les
largeurs additionnelles que ne permet pas la loi actuelle et, au-delà de
tout ça, une négociation obligatoire. Je vais peut-être
déposer une lettre, que j'ai expédiée à Alcan et
que je viens de retrouver, qui l'assujettissait à la Loi sur
l'expropriation. Donc, c'est le processus régulier sur le plan de
l'expropriation qui oblige à une négociation très claire
et, au-delà de tout ça, ça prend un décret
gouvernemental. Donc, entre l'adoption de la loi et le décret, s'il n'y
avait pas éventuellement négociation de bonne foi et
démonstration faite à ce niveau, il resterait toujours au
gouvernement à prendre ou non la décision de ne pas passer le
décret. Donc, ce serait possible.
Mme Blackburn: Ce que je comprends des intervenants, c'est qu'ils
sont en train de nous dire: L'épée de Damoclès au-dessus
d'Alcan, c'est vraiment le fait qu'elle ne peut pas construire ça
à cause de la loi et des problèmes techniques. J'avais cru
comprendre, mais j'avais mal interprété que le ministre
était en train de dire: Oui, on pourrait peut-être envisager cette
épée de Damoclès. Je n'étais pas certaine.
M. Côté (Charlesbourg): Dans la situation, on verra
lorsqu'on aura entendu tout le monde. On va, à tout le moins, donner la
chance à Alcan de...
Mme Blackburn: Oui, de revenir.
M. Côté (Charlesbourg): ...revenir aussi. Les gens
expriment des points de vue. Je pense que ceux de M. Tremblay portent sur le
respect à la fois de la ferme et de la vocation de la ferme qui est une
vocation très environnementaliste, selon ce que j'ai compris ou pu lire
en diagonale dans l'article. Cela ne se marie pas très bien avec un
chemin de fer.
Mme Blackburn: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense que c'est...
Mme Blackburn: C'est évident.
M. Côté (Charlesbourg): ...pas mal plus fondamental
et pas mal plus philosophique en termes d'attitude des deux parties contre le
besoin pour Alcan de transporter par chemin de fer des matières
premières ou des lingots transformés. Je pense que c'est une
bataille de l'industrialisation vis-à-vis de l'environnement. Ce n'est
pas une bataille facile, mais il y a le Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement qui va trancher, lui, l'autre question. Il y a donc des
étapes à franchir. Ce que j'ai compris, c'est qu'aux mois de mai
et de juin, le BAPE a des audiences sur le plan de sa partie et que le
tracé ne sera reconnu que par le BAPE. Ce n'est pas le ministre des
Transports qui va reconnaître le tracé. C'est le Bureau
d'audiences publiques.
Mme Blackburn: Ce n'était pas ma question.
M. Côté (Charlesbourg): À partir de
ça, il y
a encore passablement de chemin à faire.
Mme Blackburn: Est-ce qu'il faut absolument adopter ce projet de
loi tout de suite?
M. Côté (Charlesbourg): Quant à nous, on doit
continuer d'entendre les parties et la commission prendra ultimement les
décisions qui s'imposent.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, Mme la
députée de Chicoutimi. En tout cas, les brefs...
M. Desbiens: M. le Président...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, ce ne sera pas
long. Les brefs commentaires que je peux faire sont les suivants. On se
retrouve, de part et d'autre, ici en commission, dans une situation
particulière. J'ai à présider une commission qui
étudie un projet de loi privé. La consultation n'a pas
été faite, elle se tient en même temps. Cela fait une
circonstance où on voudrait tout passer en même temps et on ne le
pourra pas. Il y a des étapes à franchir. Peut-être qu'on
est en avant de notre temps ou que quelqu'un est en retard.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Parent, Bertrand): Une chose est
sûre: ce n'est pas une situation normale que la commission se retrouve
ici à étudier un projet de loi privé et, en même
temps, qu'elle doive faire des consultations. On est en train de brimer tout le
monde. On se bouscule, étant donné l'horaire. Il y a des gens qui
ne passeront pas aujourd'hui, mais il faut prendre le temps d'entendre tout le
monde.
En ce sens, est-ce qu'il y en a qui ont des questions à poser
à M. Tremblay? Sinon, on va passer à d'autres groupes. Je
voudrais bien que tout le monde comprenne la situation très
particulière dans laquelle on se retrouve. Il ne s'agit pas de se mettre
des bâtons dans les roues, sauf qu'on se ramasse dans une situation
vraiment particulière. On a beau vouloir accélérer, mais
quand les faits nous sont rapportés comme ils le sont aujourd'hui dans
le cas de la Ferme Laterrière - et ce sera sûrement la même
chose pour les autres cas - ce sont des situations assez particulières.
Je pense que les audiences auraient dû être beaucoup plus longues
que le temps qui nous a été dévolu. Mais, on va composer
avec ce qui nous a été donné, du moins pour la convocation
d'aujourd'hui.
MM. les députés de Dubuc et de Lévis n'avaient pas
fini de poser des questions. On passera à d'autres groupes, si on a le
temps. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Le ministre a déposé une lettre...
M. Côté (Charlesbourg): Une lettre du 22
décembre 1988 à Alcan, qui parle de la Loi sur l'expropriation et
de la Loi sur les chemin de fer.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Cela va, M. le
député de Dubuc. M. le député de Lévis,
aviez-vous d'autres questions pour M. Tremblay ou Me Desforges?
M. Garon: Le ministre a dit que, selon lui, c'est un affrontement
entre deux conceptions des choses.
M. Côté (Charlesbourg): Dans le cas de la ferme.
M. Garon: Oui, dans le cas de la ferme. Si j'ai bien compris,
votre position n'est pas de discuter avec Alcan. Vous souhaitez qu'elle passe
ailleurs ou qu'elle achète au complet. Par rapport à la ferme, je
ne le sais pas, mais je veux comprendre. Je vous pose la question, parce que
j'ai cru comprendre que c'était cela, le choix. D'abord, j'aimerais
savoir si c'est cela. Deuxièmement, la ferme a quelle superficie?
Où passe le chemin de fer par rapport à la ferme? On m'a dit que
c'était une ferme pour l'équitation, mais j'aimerais en savoir
davantage pour comprendre.
M. Tremblay (Jeannot): La Ferme Laterrière, comme je l'ai
mentionné, a dix-sept ans d'existence. Elle a eu une évolution
assez lente.
Le Président (M. Parent, Bertrand): S'il vous plaît,
j'aimerais avoir la collaboration de tout le monde. On a de la
difficulté à entendre. Les mini-caucus, s'il vous plaît!
Excusez-moi, allez-y, M. Tremblay.
M. Tremblay (Jeannot): Donc, la vocation ultime de la Ferme
Laterrière, l'essence même de son existence, je le
répète, c'est d'être une entreprise à
caractère récréotouristique axée sur
l'équitation, pour situer M. Garon dans cette perspective. Actuellement,
elle a une superficie de 250 acres, à peu près. Elle a des
boisés. Elle cultive ses terres en partie. Il y a une partie
consacrée à l'hébergement, en fait, à tout ce qui
se passe comme activités.
Le tracé qui a été proposé, nous en avons
souligné toute la problématique pour nous à tous les
intervenants. Je pense que M. le ministre, tantôt, l'a très bien
précisé: II est évident que ce chemin de fer, pour nous,
c'est une calamité; c'est sûr et certain.
M. Côté (Charlesbourg): Je n'ai pas dit une
calamité.
M. Tremblay (Jeannot): Vous n'avez pas dit cela dans ces mots,
mais, pour nous, ce n'est vraiment pas réconfortant d'avoir ce chemin
de
fer. Donc, vous me posiez la question: Qu'est-ce qu'on a dit à
Aican? Écoutez, qu'est-ce qui nous reste comme alternative au fait
d'avoir ce chemin de fer? Sur le plan de l'éthique, on ne peut pas vous
empêcher de passer dans le sens de ce dont on pariait, sur le pian de
l'ensemble régional, sur le plan économique, si vous voulez. Tout
ce qu'on peut faire, c'est que les gens d'Alcan, en tant que promoteurs - c'est
Alcan, ie promoteur, ce n'est pas moi, ce n'est pas la Ferme Laterrière
- disent: Écoutez, nous sommes conscients de cette problématique
pour vous. On est prêts à regarder toutes les avenues possibles.
Ce n'est pas cela qui se passe.
M. Garon: Dans les discussions qu'il y a eu avec la compagnie,
est-ce qu'il a été question de plusieurs tracés
alternatifs ou d'un seul tracé? Est-ce que, selon vous, dans les
discussions qu'il y a eu, il y avait possibilité d'avoir d'autres
tracés ou si c'était le seul tracé possible?
M. Tremblay (Jeannot): Je le dis dans la résolution, c'est
que, quand Alcan a déposé son dossier...
M. Garon: Je ne l'ai pas eue.
M. Tremblay (Jeannot): ...elle a dit ceci: C'est le seul
tracé possible. La seule avenue possible, c'est ça, c'est ce
tracé-ià. Après ça, Alcan a apporté des
modifications, par exemple, dans certaines prairies pour le ministère de
l'Agriculture, pour le zonage agricole, afin de corriger certaines anomalies du
tracé qui prenait trop de terres arables, etc. Elle a corrigé
ça.
M. Garon: Vous, êtes-vous dans la zone agricole?
M. Tremblay (Jeannot): Oui.
M. Garon: Quand il a été question du tracé,
vous n'avez pas...
M. Tremblay (Jeannot): Je vous le répète, M. Garon:
Nous avons tout de suite manifesté clairement à la
municipalité et à Alcan - à ce moment-là,
c'était M. Jacques Fortin qui était représentant d'Alcan -
que nous étions contre ce tracé. À ce moment-là,
c'est évident qu'ils nous disaient: Écoutez, nous sommes en
prélimaires, vous allez voir, on vous tiendra au courant, il va y avoir
des commissions, etc. Alors, qu'est-ce qu'on fait durant ce temps-là? On
attend que les événements se produisent. Qu'est-ce qu'on pouvait
faire de plus? Comme pour le Bureau d'audiences publiques, I a fallu faire des
demandes au cours du mois de mars.
M. Garon: Quand vous dites qu'il va y avoir d'autres discussions
avec Alcan, puisque c'était préliminaire, d'après vous,
à quoi mèneraient ces discussions avec Alcan?
M. Tremblay (Jeannot): Ce que j'attends d'un promoteur, c'est de
vraiment considérer la problématique de notre dossier, en ce qui
nous concerne. Or, ce n'est pas le cas. M. Garon, je suis assez honnête
pour vous dire que, si c'était autrement, je ne serais pas ici
aujourd'hui. Finalement, qu'est-ce qu'on se dit? On se dit: Le chemin de fer,
il va passer. C'est ça qui va arriver, le chemin de fer va passer.
Alors, qu'est-ce qu'l nous reste? Il reste que le promoteur doit faire ses
devoirs et analyser en profondeur quelle est la problématique de ce
projet pour nous, parce que ce n'est pas moi qui suis le promoteur, c'est lui.
S'il n'a pas eu de difficultés avec certains intervenants dans le
dossier du chemin de fer, peut-être que ces gens-là n'avaient pas
tellement de projets ou peut-être qu'ils voulaient vendre leur terre.
Aussi, si vous regardez la carte, M. Garon - vous avez été
ministre de l'Agriculture - la problématique du chemin de fer, en ce qui
nous concerne, c'est que les terres sont très profondes de La Baie
jusqu'au rang Saint-Isidore, mais plus on monte vers Laterrière plus la
montagne se rétrécit. Les terres arables par rapport à la
montagne sont très rétrécies entre le chemin. Finalement,
pour nous - je dis ça sous toute réserve - c'est à peu
près à 2000 pieds des premiers bâtiments. C'est effrayant.
Je peux vous dire une chose: Un des membres du BAPE est venu et il ne pensait
pas que c'était si proche.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Vous pouvez
peut-être proposer aux membres de la commission d'aller faire un
tour...
M. Tremblay (Jeannot): Ah, ce serait merveilleux!
Le Président (M. Parent, Bertrand): ...à la Ferme
Laterrière...
M. Tremblay (Jeannot): Ce serait extraordinaire.
Le Président (M. Parent, Bertrand): ...pour tenir des
audiences sur place. Est-ce qu'il y a d'autres questions à poser
à M. Tremblay avant qu'on passe à l'autre groupe? M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: Juste une question, M. Tremblay.
M. Tremblay (Jeannot): Oui.
M. Saint-Roch: Quelle est la valeur des investissements que vous
avez faits, à l'heure actuelle, sur votre ferme?
M. Tremblay (Jeannot): Nous en avons, actuellement, pour à
peu près 1 800 000 $. C'est
vraiment le chiffre et je ne compte pas le travail qu'on y a mis et tout
ça. Alors, c'est quand même quelque chose. Ce n'est pas juste
ça et je termine là-dessus, M. le Président. C'est que la
Ferme Laterrière a un consensus très fort régionalement de
toutes les instances gouvernementales, socio-économiques et autres. On
soulignera ça d'une façon formelle au BAPE.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Tremblay et Me
Desforges. J'inviterais immédiatement le groupe qui représente la
succession Chouinard-Brisson à s'avancer et à nous faire une
présentation. Je vous rappelle qu'à moins d'entente unanime entre
les deux partis on ne pourra pas dépasser 18 heures. Sinon, je pense que
tout le monde s'entend, à cause des obligations de certains, pour
terminer à 18 heures. Alors, il nous reste quelque chose comme 16
minutes. Mme Françoise Chouinard-Drolet, c'est bien ça?
Mme Chouinard-Orolet (Françoise): C'est bien ça.
Bonjour, monsieur.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Est-ce que l'autre personne
pourrait se présenter? C'est monsieur Drolet?
M. Drolet (André): Oui, André Drolet, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors bienvenue. Allez-y,
madame.
Succession Chouinard-Brisson
Mme Chouinard-Drolet: Bonjour, M. le Président, M. le
ministre, MM. les membres de la commission. Mon époux André et
moi ne sommes pas des gens de loi. Nous sommes, tout simplement, des citoyens
propriétaires lésés dans nos droits. Voici qu'aujourd'hui
nous nous présentons devant vous afin de défendre un droit
légitime et absolu, notre droit de propriété. Nous sommes
propriétaires - on en a parlé passablement depuis tout à
l'heure - du domaine du lac Gravel depuis 42 ans.
Aujourd'hui, la commission de l'aménagement et des
équipements qui étudie le projet de loi privé 230 entend
les intervenants qui s'opposent. Alors, vous avez bien compris qu'on s'oppose
à accorder à Alcan un droit d'expropriation de nos terrains.
Voici pourquoi on s'oppose à ce qu'elle morcelle et viole notre domaine
privé. (17 h 45)
J'aimerais d'abord vous définir quelques termes. En feuilletant
mon petit Larousse, édition 1988 - il n'y a rien là d'original,
sauf que, des fois, c'est important de le rappeler - le mot "exproprier" se
définit comme suit: "Déposséder quelqu'un de sa
propriété dans un but d'utilité générale,
suivant des formes légales accompa- gnées d'indemnités."
Le mot "privé", du latin privatus: "Qui n'appartient pas à la
collectivité, mais à un particulier: propriété
privée. Qui est strictement personnel et n'intéresse pas les
autres" - je pense que Larousse a du cheminement à faire - et "où
le public n'a généralement pas accès." Le mot "public":
"Qui concerne tout un peuple, une collectivité."
Maintenant, passons à l'article 406 du Code civil qui
définit le droit de propriété comme étant "le droit
de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu
qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou
règlements." On peut donc faire ressortir les deux principaux aspects de
la définition du Code civil. Premièrement, les aspects positifs
du droit de propriété, c'est ce que nous avons le droit de faire.
Il y a d'abord l'usus, c'est-à-dire le droit de se servir de la chose,
il y a l'usufruc-tus, le droit de percevoir les fruits et revenus, et l'abusus,
le droit de disposer en principe de manière absolue de la chose. Le
deuxième aspect restrictif du droit de propriété
découlant de la deuxième partie de l'article 406 du Code civil,
c'est que le législateur, par voie de lois ou de règlements, est
le seul à pouvoir restreindre le droit de propriété. Dans
ce cas-ci, la restriction est caractérisée par le pouvoir
d'expropriation.
Alors, jusqu'où peut aller ce pouvoir d'expropriation? J'ai un
avis juridique que notre procureur m'a fourni et je le cite: "Le droit
d'exproprier la propriété privée doit être
basé sur un texte de loi qui l'accorde clairement Ce droit d'exproprier
n'est jamais présumé ni implicite. Ce principe vient d'une
règle d'interprétation à l'effet que, lorsqu'un texte de
loi porte atteinte aux droits du sujet, il doit être l'objet d'une
interprétation stricte. De plus, y existe un autre principe à
l'effet qu'en matière d'expropriation les procédures sont de
rigueur et doivent être suivies strictement à peine de
nullité. Alors, partant de ce principe, une expropriation doit toujours
être motivée pour des raisons d'intérêt public. Par
conséquent, ce pouvoir est accordé presque exclusivement aux
autorités publiques, de même qu'aux corps publics ou
parapublics".
Maintenant, je vais vous relater une lettre que j'ai fait parvenir
à différents ministères concernés par notre
problématique, qui était datée du 7 avril 1988 et qui
explique la problématique de notre territoire. Je situe, dans un premier
temps, notre propriété qui compte au-delà d'un mille
carré; je suis encore en milles, vous allez me pardonner. Ensuite,
ladite compagnie a déjà sans autorisation de notre part - on en a
parlé un peu tout à l'heure aussi - effectué un
tracé arpenté et abattu - c'est peut-être un
élément nouveau pour vous - des arbres sur toute la longueur du
terrain sur une largeur entre 10 à 30 pieds sans, pour autant, à
ce jour, avoir compensé de quelque façon que ce soit les
propriétaires. Depuis plusieurs années déjà, la
compagnie tente de nous intimider via
des rencontres, des lettres, des formules pro forma et j'en al une;
c'est un bel exemple sur la présumée bonne foi d'Alcan. En plus,
on nous laissait croire qu'un droit d'expropriation lui était acquis,
mais on n'en avait jamais eu de preuve. Vous pouvez comprendre par cela nos
vives Inquiétudes, d'autant plus que cette entreprise multinationale,
antérieurement, n'a pas toujours été reconnue pour ses
préoccupations écologiques. Dans le dernier tracé du
chemin de fer connu, la compagnie Alcan veut une fois de plus procéder
à du défrichage, à du coupage de bois dans le but
d'effectuer des analyses de sol par forage. Ayant déjà
été lésés dans le passé par la même
compagnie, je pense que vous allez comprendre qu'aujourd'hui on vient
défendre nos droits et, tant qu'Alcan n'aura pas versé de
compensations, nous gardons certaines positions. On veut s'assurer que le
projet qui va passer sur nos terrains va respecter l'environnement aquatique et
faunique, somme toute, l'environnement total du territoire, ainsi que nos
droits de propriété. il faut noter ici que, dans le dernier
tracé proposé par Alcan, qui traverse notre domaine, un ruisseau
qui fait possiblement résurgence et qui est la décharge naturelle
de notre lac sera directement affecté par les travaux afférents.
On nous Informe qu'un tel élément naturel est un
phénomène rare et à sauvegarder. On est très
inquiets aussi des grands désordres hydrogéologiques qui risquent
de survenir des travaux et subséquemment des déblais et des
terrassements. On a dit tout à l'heure qu'iIs voulaient prendre chez
nous à peu près 500 pieds de largeur dans un certain endroit.
Nous n'insisterons pas sur la préservation de la faune, de la flore et
des lacs poissonneux ensemencés de truites.
Alcan nous a avertis que les matériaux suivants vont être
transportes par son train, à raison de deux fois par jour, sept jours
par semaine. C'est, apparemment, un minimum. Il y a de l'alumine, de la
chlorite, du fluorure et des anodes. Il y a aussi des lingots,
évidemment, leur matière finale. Quelle Influence de tels
matériaux auront-Ils sur l'environnement? On ne parle même pas de
la qualité de vie qui est diminuée, ni des propriétaires
des deux résidences sises sur le domaine qui en souffriraient aussi.
Pour vous situer un petit peu, si vous prenez un carré, notre
domaine est situé là-dedans et Alcan trace... Le chemin de fer
passe environ... Il reste un tiers du territoire qui est une forôt
boisée. Les lacs sont ici. C'est à peu près de cette
façon qu'elle coupe notre territoire, donc, sur toute la diagonale en
coupant le terrain d'un tiers, deux tiers. Les deux lacs sont fermés.
Ces lacs ont été cadastrés comme terrains de ferme. C'est
un vieux contrat qui date environ de 1840. Lorsque notre père et M.
Brisson ont acheté le domaine, c'était à condition de
conserver ces contrats. Nous sommes donc propriétaires des deux lacs. Je
ne sais pas s'iI en existe d'autres dans la province de
Québec. En tout cas, chez nous, c'est comme ça. Le
phénomène spécial, c'est que ce sont deux lacs
fermés, alimentés par des sources d'eau souterraines, avec une
emprise d'eau située au deuxième lac.
La veine d'eau principale qui alimente le lac, parce qu'une partie ne
gèle pas l'hiver et on peut la voir, est située du
côté de l'usine de Laterrière et la décharge
naturelle est située du côté de la ville de La Baie. C'est
ça, la problématique. L'endroit où le chemin de fer va
monter dans la montagne, c'est vraiment là où est la
décharge naturelle du lac. Est-ce qu'ils vont enlever le bouchon et que
le lac va se vider? Est-ce qu'ils vont puiser de l'eau à la source
naturelle ou à l'alimentation principale, de sorte que la source va se
tarir et que le lac ne sera plus alimenté en eau? Voilà, en gros,
nos inquiétudes face à la propriété.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. Mme Drolet. Est-ce que
cela complète votre présentation?
Mme Chouinard-Drolet: M. le Président, j'aimerais prendre
les devants. Je suis pas mal certaine que M. Garon qui a posé la
même question aux autres va nous la poser aussi.
M. Garon: Oui, oui.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Vous présumez.
Mme Chouinard-Drolet: Je veux vous dire que j'ai, en ce moment,
un document daté du 3 juin 1982. C'est le permis de dézonage qui
avait été accordé par la CPTA.
Maintenant, 1 y a une liste de personnes citées. Tout à
l'heure, nous avons entendu M. Wells, le procureur d'Alcan, qui a dit: la
succession Chouinard et Brisson. Je vais corriger tout de suite quelque chose.
La ville de La Baie avait comme habitude, comme politique ces dernières
années d'envoyer un seul compte de taxes lorsqu'il y avait plusieurs
propriétaires. Donc, 1s fonctionnaient par ordre alphabétique.
Brisson vient avant Chouinard. Vous allez comprendre qu'à ce moment ce
n'est pas nous qui avions le compte de taxes. On le payait quand même,
mais ce n'est pas nous qui l'avions. Lorsque Alcan a sorti la liste des
propriétaires, notre nom ne figurait pas, c'est bien sûr, parce
que notre nom ne figure pas là-dedans. Cela ne fait pas longtemps
qu'Alcan parie des successions Chouinard et Brisson. En fait, c'est depuis que
je communique avec elle. Bien sûr, c'était un document qu'elle
avait retiré de la ville de La Baie. Alors, elle pariait de M. Brisson
et non pas de nous, ce qui veut dire que nous n'en avons pas été
informés.
Ceux qui me connaissent ici, parce qu'il y en a quelques-uns qui me
connaissent, savent que je me débats et que je travaille fort dans
les
dossiers. Donc, au moment où nous avons été
informés qu'il y avait un projet quelconque de la compagnie Alcan,
c'était en 1983. J'avais fait une petite recherche. On m'a
informée, à un moment donné, qu'il y aurait possiblement
quelque chose qui passerait sur nos terrains. Je n'étais pas du tout au
courant. J'ai été très intuitive, j'ai écrit un
petit document interne pour le bénéfice de nos deux familles et
qui est daté du 10 novembre 1983. J'aimerais vous en lire des passages.
On est en 1989 et vous allez voir la pertinence qu'a encore ce dossier.
J'avais fait plusieurs interventions. Alors, je fais une mise en
situation. "Dans une première démarche, les
copropriétaires Chouinard-Brisson examinent d'un commun accord la
possibilité de vendre le domaine dans sa totalité. Un courtier
américain de Boston, un courtier international, à la demande des
deux parties, se rend dans les limites de la paroisse de Bagotville où
se situe le domaine afin de l'évaluer et de décrocher le contrat
de vente." En passant, le monsieur ne prenait rien en bas de 500 000 $; il
prend seulement de gros contrats. À ce moment-là,
l'évaluation du courtier, se situe entre 700 000 $ et 800 000 $ en
argent américain.
Voici la problématique. Dans une seconde démarche, une
rencontre est demandée par les copropriétaires avec le directeur
du service immobilier Alcan. Quelle ne fut pas la surprise d'apprendre qu'Alcan
projette une ligne de chemin de fer qui traverse ledit domaine dans une ligne
diagonale! Je ne pensais même pas vous parler, aujourd'hui, de ce
document. Voici qu'il se trouve à être très pertinent.
Ensuite, nous avons fait différentes démarches pour
obtenir de l'information auprès de la ville de La Baie. Je vous cite un
autre paragraphe. La compagnie Alcan très avancée dans ce dossier
va comprendre qu'on n'était pas au courant et là, tout à
coup, on va pour s'informer parce que, enfin, on avait eu vent de quelque
chose. Alors, on se rend compte qu'Alcan est très informée de ce
dossier et que déjà, à notre insu, elle a fait une demande
de dézonage d'un corridor de 70 mètres de large devant passer
dans une ligne diagonale sur notre propriété. Son dossier est
très précis et bien étoffé.
La rencontre avec la compagnie Alcan. Michel Brisson, de la famille
Brisson, et moi avons rencontré M. Laurent Dubois, du service immobilier
d'Alcan. Notre but était de faire préciser les intentions de la
compagnie face au tracé de la ligne de chemin de fer. Nous avons aussi
essayé de connaître l'échéancier. Son rôle
s'est limité à tenter de nous sécuriser et de nous
expliquer qu'Alcan nous contacterait le temps venu afin de conclure un
marché d'expropriation, car les gens dans ce dossier sont des gens
pariables, nous a-t-il dit.
Il nous a trouvés bien informés. Il nous a confirmé
que le dossier en marche était avancé, bien qu'il parle toujours
de projet de tracé de chemin de fer. C'est ça qui nous
intéressait, évidemment. Mais, a-t-il dit, c'est à 90 %
définitif, ce tracé. Il a dit ne rien connaître de
l'échéancier, bien qu'il ait admis qu'il y en ait un. Alors, I
n'y avait pas moyen qu'on sache grand-chose. (18 heures)
Le Président (M. Parent, Bertrand): Mme Chouinard-Drolet,
est-ce que vous pouvez compléter? On a un problème, il est 18
heures.
Mme Chouinard-Drolet: Enfin, je cite M. Dubois qui nous dit que
c'est un domaine presque unique en Amérique du Nord, ce dont on
était conscients. Je lui ai laissé savoir qu'on avait... Je lui
ait fait connaître à ce moment-là tout de suite nos
préoccupations sur l'écologie, sur la valeur de la
propriété, sur la quiétude et le reste. Évidemment,
on aurait aimé qu'il nous explique la loi 125, mais il n'y a pas eu
suffisamment d'informations.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, Mme
Chouinard-Drolet. Il est 18 heures. Cela prendrait l'accord unanime des deux
côtés pour continuer, sinon nos règlements prévoient
qu'on doit ajourner. M. le député de Lévis,
rapidement.
M. Garon: M. le Président, je pense qu'on est d'accord
pour ne pas continuer. Mais vous avez fait une proposition tout à
l'heure et, si la commission était d'accord, je serais d'accord avec
ça. C'est que c'est difficile de visualiser cela sans voir les lieux. Si
la commission... Non, je dis que, quant à faire notre ouvrage,
faisons-le comme il faut.
Une voix:...
M. Garon: C'est une grosse affaire. Il y a des gens, des
individus, enfin, une grande entreprise et on me parle d'écologie, de
fermes importantes. C'est très difficile à visualiser pour nous.
Je pense que cela ne serait pas une mauvaise affaire, avant qu'on décide
de siéger une autre journée, que la commission aille voir les
lieux.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour: Cela nous sensibiliserait à l'autoroute
aussi.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, un dernier
commentaire. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président.
Je pense que, par délicatesse pour les gens qui, à tout le moins,
sont à la table et ont commencé leur témoignage, on
pourrait peut-être faire en sorte de passer une quinzaine de minutes pour
leur poser des questions, pour les libérer. Libre à eux s'ils
veulent venir lorsqu'on siégera de nouveau. Si cela devait se prolonger,
on recommencera à la prochaine séance. Le
témoignage étant déjà entamé, je
n'aurais pas d'objection à ce qu'on puisse prendre une quinzaine de
minutes additionnelles pour terminer cette audition-ci, laissant les autres
témoignages pour la reprise de nos travaux.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, il faudrait
s'entendre sur un laps de temps; sinon, il y a toujours possibilité de
poursuivre.
Une voix: Jusqu'à 18 h 15.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Pour 18 h 15, cela va
des deux côtés?
M. Garon: Je serais d'accord pour 18 h 15, mais pas plus
tard.
Le Président (M. Parent, Bertrand): D'accord.
M. Garon: J'ai d'autres rendez-vous.
Le Président (M. Parent, Bertrand): C'est 18 h 15.
M. Garon: Si on n'a pas fini, on continuera...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Voilà! Alors,
la période d'échange de vues ou de questions est ouverte. Je vous
avertis. On a jusqu'à 18 h 15 d'après l'entente des deux parties.
Malheureusement, on est obligés de... Est-ce qu'il y a des questions de
part et d'autre? M. le ministre, vous aviez des questions?
M. Côté (Charlesbourg): Je ne sais pas si... Il y
avait peut-être un témoignage additionnel. Libre à vous de
prendre le temps pour entendre un témoignage additionnel, M. le
Président.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Les quinze minutes
appartiennent à tout le monde. Si vous les prenez, on ne posera pas de
questions.
M. Drolet: M. le Président...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Oui, M.
Drolet.
M. Drolet:... M. le ministre, Mmes et MM. les
députés et membres de la commission parlementaire, j'ai eu chaud.
Je voyais l'horloge derrière vous et je me disais: Mon Dieu! J'ai
passé proche. Merci de m'avoir alloué ces quinze minutes. Je
serai très bref. Rassurez-vous, vous ne dormirez pas. Je ne vous
parlerai pas de lois, je ne vous parierai pas d'expropriation, mais je vais
répondre à plusieurs questions que vous vous posez. Ce que je
vous propose, c'est que je vais reprendre depuis l'audition de cet
après-midi chacun des intervenants, chacune des questions en y donnant
des réponses qui, j'espère, seront claires, nettes et
précises.
Dans un premier temps, je suis très heureux, M. le
Président, d'entendre le parrain de cette loi qui nous dit dans une
envolée qu'il ne faudrait pas non plus oublier l'apport
économique d'Alcan, mais aussi les droits et privilèges des
propriétaires. Merci. Cela nous rassure. D'un autre côté,
il y a un ministre qui nous dit que le pouvoir économique est important,
mais qu'aussi il ne faudrait pas mettre de côté les droits et
privilèges des propriétaires. Cela nous rassure des deux
côtés de la Chambre. Par la suite, on s'interroge et on
écoute le procureur de la compagnie qui nous dit qu'effectivement il y a
urgence au dossier. Mon épouse vous pariait tout à l'heure d'un
dossier qu'elle a entamé avec Alcan en novembre 1983. Mesdames et
messieurs, nous sommes le 3 mai 1989 et nous avons encore aujourd'hui à
attendre, et je pèse mes mots, une lettre écrite par Alcan ou
Roberval-Saguenay - je vous fais grâce des détails - faisant une
offre qu'on pourrait qualifier même d'écrite. Est-ce assez fort?
Si vous ne trouvez pas ça formidable, moi, cela me renverse. On nous
parie de bonne foi, on nous dit qu'Alcan a fait des efforts inouïs,
comment se fait-il que nous sommes ici? Nous n'avons pas encore eu une lettre
écrite de cette même compagnie. Le dernier document émanant
d'Alcan, adressé à ma belle-mère, demandait l'autorisation
d'aller sur les lieux, et j'enchaîne avec ca, mesdames et messieurs,
aller sur les lieux. A la suite d'une demande d'un député tout
à l'heure, on a dit: Oui, c'est vrai, Alcan est allée faire du
chaînage et a fait un petit corridor.
Vous comme mol, si je ne l'avais pas vu... Vous dites, écoutez,
quand même, ne charriez pas, M. Drolet, ils sont allés voir sur
les lieux, c'est normal. Saviez-vous que le corridor avait 30 pieds et qu'on a
abattu des arbres de 8 pouces de diamètre? Comment réagiriez-vous
si j'allais voir sur votre terrain à vous, supposément par droit
d'arpentage, et que je coupais, non pas des aulnes, mais des arbres debout sur
une largeur de 30 pieds? Je vous ferai remarquer que le terrain, avec deux
routes pour les deux propriétaires, n'a que onze pieds pour
préserver l'écologie du terrain, mais Alcan, sans autorisation,
va sur le terrain, fait du chaînage et coupe pour 30 pieds. M. le
ministre demandait tout à l'heure: Y a-t-il bonne foi? Je présume
qu'il comprendra la réponse.
M. le Président, vous me pardonnerez de regarder toujours
au-dessus de votre tête, ce n'est pas que je veuille vous snober, je
regarde tout simplement l'horloge et j'aurais beaucoup plus à dire, sauf
que l'on a convenu avec tous les membres ici de se restreindre. Je ne me
permettrai qu'une couple de remarques.
Un député, je ne sais pas lequel, a demandé tout
à l'heure: Y a-t-il possibilité d'ententes de gré à
gré? Il n'y a pas de bonne foi. Je suis dans le domaine des relations du
travail, je connais quelque chose dans la négociation et un
peu dans la bonne foi, mais je peux vous dire incontestablement qu'Alcan
ne peut pas être de bonne foi s'il n'y a pas négociation. En date
du 3 mai 1989 à 18 h 8, il n'y a pas encore de négociation
formelle d'entreprise. Il n'y a même pas de lettre écrite. Je ne
sais pas si cela vous rassure ou si cela répond aux questions
appréhendées ou à venir, mais cela nous semblait important
de vous dire ici ces réalités que l'on est capables de prouver
n'importe quel temps. Donc, quand on entend les procureurs, de part et d'autre,
vous dire qu'on fait pitié, qu'on est mal, il y a urgence... Le dossier,
messieurs, est entamé depuis 1983 et nous sommes en 1989. Nous serions
prêts à revenir devant cette digne Assemblée dans six ans
pour en redébattre. Donnez-nous le même temps que vous avez
donné à Aican. Merci.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci, M. Drolet. Pour
les sept minutes qui restent, je vais permettre une intervention de chaque
côté. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
cru comprendre, de l'analyse du dossier, qu'il y a eu des poursuites de ia part
de la succession, je pense. N'y a-t-il pas des causes pendantes devant les
tribunaux? Est-ce que c'est relatif au corridor, aux 30... Je vous le dis tout
de suite, en entendant une chose comme ça, je pense qu'Alcan n'a pas de
félicitations à recevoir de se servir d'une loi qui date de fort
longtemps, des années mil huit cent, de se servir de cette Loi sur les
chemins de fer pour en couper aussi large. Je n'ai pas de félicitations
à faire à la compagnie Alcan, dans une situation comme
celle-là, pour faire de l'arpentage; 30 pieds, je pense qu'il devait y
en avoir un épais et un très large pour ne pas être capable
de faire le tracé. Il n'y a certainement pas de félicitations
à leur faire sur le plan de la qualité de l'environnement.
Est-ce qu'il y a toujours des poursuites, parce que j'ai cru voir dans
les dossiers que c'était le cas?
Mme Chouinard-Drolet: M. le Président, je peux
répondre à M. le ministre? M. le ministre, je vous
réponds, le président est occupé.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Mme Chouinard-Drolet: Effectivement, nous avions un avocat dans
le dossier, M. le ministre, qui, en notre nom, avait fait une poursuite et nous
avons changé d'avocat depuis ce temps. Donc, nous avons
arrêté la poursuite, sauf que nous avons d'autres procureurs dans
le dossier. Pour l'instant, il n'y a pas de poursuite réentamée,
mais cela ne veut pas dire qu'il n'y en n'aura pas non plus. C'est que nous,
nous sommes de bonne foi, M. le ministre. Par contre, à un moment
donné, notre patience a des limites aussi.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. Une
dernière question parce que, évidemment, il y a toujours une
question de temps. Si, demain matin, Alcan se présentait chez vous en
disant: Oui, on s'assoit chez vous, on négocie avec vous et, en coupant
du tiers ou des deux tiers, on est prêt à faire l'acquisition de
la propriété, est-ce que vous seriez prêts à faire
ça?
Mme Chouinard-Drolet: M. le ministre, comme nous sommes de bonne
foi, on ne refuserait pas de négocier.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Alors, M. le
député de Lévis ou... Oui, M. Drolet.
M. Drolet: J'allais ajouter juste ceci...
Le Président (M. Parent, Bertrand): N'abusez pas,
vous!
M. Drolet: ...à la réponse de mon épouse au
ministre: Effectivement, il n'y a plus de poursuite, elle a été
retirée. Par contre, en contrepartie, nous avons refusé à
Alcan ou à Roberval-Saguenay, il y a quelque temps, d'accéder
à nos terrains. Et la réponse, en toute bonne foi, même en
retirant la poursuite, c'est qu'on s'est dit: S'ils vont faire des
études et qu'ils passent dans un autre 30 pieds de "trail" qui n'est pas
le même, bon Dieu, dans trois ans, messieurs, il n'y aura plus un arbre
debout là-dessus. Cela vous fait rire, mais ça s'adonne que c'est
ça.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci. M. le
député de...
M. Dufour: Je ne sais pas si mon collègue avait des
questions à poser. Moi, je n'en ai pas, sauf peut-être une
remarque-
Le Président (M. Parent, Bertrand): M. fe
député de Jonquière.
M. Dufour: ...concernant le dossier. En entendant les
témoignages des différents intervenants à la commission
parlementaire, c'est évident que dans ce dossier, en tout cas
jusqu'à maintenant, il semble manquer une certaine préparation ou
encore certaines mises en garde n'ont pas été faites au moment
où elles auraient dû se faire. C'est ce qui fait, à mon
point de vue, qu'il serait difficilement acceptable qu'on puisse
déterminer, hors de tout doute, que le projet de loi qu'on a devant nous
devrait être accepté immédiatement et sans aucun
changement. Il semblerait aussi - je pense que cela est clair - qu'il y a des
démarches qui n'ont pas été enclenchées ou
entreprises. On aurait tout intérêt, comme parlementaires, non
seulement d'aller voir sur le terrain ce qui se passe, comme
cela a été proposé par mon collègue de
Lévis, mais surtout de s'assurer qu'il y a un certain nombre
d'intervenants qui sont d'accord avec ce projet de loi. Ce qu'on a vu
jusqu'à maintenant, c'est qu'Alcan doit vivre, c'est une question
économique; par contre, il n'y a pas, comme on dit, de danger dans la
demeure, iI n'y a pas péril dans la demeure et iI y a peut-être
une couple de mois... Je comprends aussi qu'Alcan, si elle veut
accélérer le processus, possède ce qu'il faut pour le
faire.
En tout cas, pour ma part, je considère qu'il serait
peut-être bien de dire aux intervenants: Oui, c'est vrai que le projet de
loi ne sera pas adopté aujourd'hui. Ce serait peut-être donner un
message assez clair à Alcan, soit qu'il y a possibilité de
négocier, qu'elle se dépêche de négocier et qu'on en
arrive, comme parlementaires, à un mariage de raison, sinon d'amour.
Dans les projets de loi privés, savez-vous ce qui se produit?
À mon point de vue, on a toujours trouvé le moyen d'en arriver
à des consensus et d'amener les intervenants à se parler,
à s'accepter et, en même temps, à trouver une façon
de mieux-être et une façon de vivre. Nous...
Une voix: Un mariage arrangé.
M. Dufour: Bien, c'est vrai. Ce que je proposais tout à
l'heure...
La Président (M. Parent, Bertrand): M. le
député de Jonquière, je vous inviterais à
conclure.
M. Dufour:... c'est que le député...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Notre temps est
terminé.
M. Dufour: II n'est pas 18 h 15. Il est 18 h 14.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Notre temps est
terminé. Un dernier commentaire, madame.
M. Dufour: Ce que je proposais tout à l'heure...
Le Président (M. Parent, Bertrand): Non, je pense qu'il
faut s'arrêter quelque part. Je m'excuse, mais mon rôle de
président, c'est de faire en sorte qu'on respecte les ententes. Alors,
un dernier commentaire, madame.
Mme Chouinard-Drolet: Merci, M. le Président. Un dernier
commentaire sur la présumée bonne foi d'Alcan. Dans un document
qu'ils ont fait parvenir à ma mère dernièrement, iIs
demandaient la permission d'aller faire des forages, ce que nous avons toujours
refusé. Ils ont dit: On va répondre à vos
inquiétudes hydrogéologiques; on va faire faire l'analyse du
terrain pour les études hydrogéologiques; on va faire
évaluer votre boisé et tout. Il y a un sous-sol avec de la
gravière mais Is ne nous parlent pas de cela. On va vous faire
ça, on va répondre à vos inquiétudes, mais
donnez-nous la permission d'aller forer. Comme on ne leur a pas encore
donné la permission, les études ne sont pas faites. Alors, c'est
ça, la présumée bonne foi d'Alcan.
J'en profite et je suis fière aussi de vous inviter tous à
notre domaine du lac Grave). On va vous recevoir amicalement,
agréablement. Il y a une information qu'on ne vous a pas donnée,
et les gens d'Alcan l'apprennent peut-être en même temps que vous.
Dernièrement, nous avons constaté une baisse des eaux du lac de
plusieurs pieds. Alors, la problématique que l'on vit est réelle
et même visible en ce moment.
Le Président (M. Parent, Bertrand): Merci beaucoup, Mme
Chouinard-Drolet et M. Drolet.
En terminant, j'aimerais dire aux membres de cette commission ainsi
qu'aux représentants de la requérante de même qu'aux
intervenants que cette commission s'est déroulée aujourd'hui dans
un cadre assez spécial. Je remercie tout le monde de sa collaboration.
C'est bien sûr qu'l y aura une suite. On se doit d'ajourner les travaux
de cette commission sine die. On devra se réunir pour voir ce qu'i
adviendra, où, quand et comment. Si je peux faire une autre
proposition qui pourra être utile aux deux parties, on peut mettre des
salles à votre disposition pour que les intervenants et Alcan puissent
se rencontrer et négocier ce soir.
Là-dessus, la commission de l'aménagement et des
équipements ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 16)