L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'aménagement et des équipements

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'aménagement et des équipements

Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 2 octobre 1991 - Vol. 31 N° 110

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): La commission de l'aménagement et des équipements débute ses travaux. Je déclare la séance ouverte. Le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques, dans le cadre de la consultation générale sur l'étude de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement et sa portée, notamment en ce qui a trait aux grands projets Industriels et aux projets concernant la disposition des déchets solides domestiques, et cela, en tenant compte de la procédure québécoise actuelle, du rapport Lacoste, de la procédure ontarienne et de la procédure suggérée par le gouvernement fédéral.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le Secrétaire?

Le Secrétaire: Non, Mme la Présidente, il n'y a aucun remplacement.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, l'ordre du jour: 9 h 30, l'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie, pour 30 minutes; la Communauté urbaine de Québec, pour 30 minutes; l'Association des conseillers en environnement du Québec, pour 30 minutes; le Regroupement québécois des professionnels de l'environnement, pour 30 minutes; le Parti vert, pour 30 minutes. Et cet après-midi, à 14 heures, le Bureau d'audiences publiques sera suivi du ministère pour une heure et du ministre pour une heure, ce qui clôturera nos travaux.

Vous êtes M. Alain Sainte-Marie?

M. Sainte-Marie (Alain): Oui.

Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie

La Présidente (Mme Bélanger): L'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie, représentée par M. Alain Sainte-Marie. Si vous voulez présenter la personne qui vous accompagne; vous avez 15 minutes pour faire le résumé de votre mémoire et le reste du temps sera réparti entre le parti ministériel et l'Opposition. Si vous prenez moins de 15 minutes, bien vous aurez plus de temps pour vous faire questionner.

M. Sainte-Marie: Merci. Donc, bonjour, Mme la Présidente, Mmes, MM. les députés. Permettez-moi de me présenter, ainsi que celle qui m'accompagne: je suis Alain Sainte-Marie, un des membres fondateurs et l'actuel président de l'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie. À ma gauche, il y a Mme Danielle Tanguay, qui est consultante en planification, stratégie et marketing, et qui est membre du conseil d'administration de l'AQME et aussi membre du comité exécutif.

À l'aide de larges extraits de notre mémoire, nous essaierons, dans un premier temps, de vous présenter la nature de notre association et, par la suite, notre point de vue sur le sujet en débat.

L'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie existe depuis plus de cinq années. Fondée par des spécialistes en matière d'efficacité énergétique, représentant les secteurs privés, publics et parapublics, l'AQME regroupe maintenant plus de 600 membres et a atteint pleinement son objectif d'être un carrefour d'intervenants ayant un intérêt pour la maîtrise de l'énergie, ainsi qu'une plaque tournante entre ses intervenants et leur milieu respectif.

L'AQME est un organisme de solutions et non de revendications. Elle s'attache particulièrement aux transferts de technologie et d'information objective sur la maîtrise de l'énergie. Par maîtrise de l'énergie, il est bon de préciser que nous entendons le contrôle et la gestion efficace du développement, de la production, du transport, de la distribution, de l'utilisation et de la récupération de toutes les formes d'énergie dites traditionnelles ou nouvelles et ce, en harmonie bien sûr avec l'environnement.

Cette définition englobe, par exemple, les méthodes décentralisées de production d'énergie, telles que les mini-centrales hydroélectriques, la cogénération, la valorisation énergétique des déchets et l'ensemble des moyens regroupés sous l'intitulé "Efficacité énergétique".

Par son intervention, l'AQME souhaite attirer l'attention de la commission sur au moins quatre pistes de réflexion que nous jugeons prioritaires. Premièrement, il faudrait positionner l'environnement et le développement viable dans les priorités de développement du Québec. Deuxièmement, il faudrait, dans la mesure du possible, accélérer le processus pour l'examen des projets qui favorisent l'efficacité énergétique. Troisièmement, il serait opportun d'améliorer l'information au public, aux promoteurs, aux intervenants, pour assurer une plus grande crédibilité et efficacité au processus. Finalement, il serait opportun aussi d'inclure à même les projets, les mesures d'atténuation pour mieux préserver l'environnement.

La recherche d'un juste milieu. Pour arriver à développer une procédure efficace d'évaluation des impacts sur l'environnement des divers projets, il nous apparaît important de se prononcer

au préalable sur la question suivante: Comment peut-on intégrer la protection de l'environnement au développement économique du Québec? En effet, parmi les considérations politiques, économiques, environnementales, stratégiques, culturelles et autres, auxquelles une société comme la nôtre doit faire face, quelle est la place ou l'importance que l'on doit accorder à l'environnement? Est-ce que les considérations environnementales sont bien intégrées aux considérations économiques ou sociales? Finalement, quel est l'impact d'inclure l'environnement dans le développement au Québec?

À cet égard une remarque s'impose. L'environnement en soi ne veut rien dire. On pense que, dorénavant, il faut beaucoup plus parler de développement viable tel que défini dans le rapport Brundtland. Pour répondre à cette grande question, je pense qu'un débat public est nécessaire. Ce débat mettrait en évidence tous les éléments à considérer dans l'analyse des priorités et permettrait aux intervenants défendant des intérêts de différentes natures de faire des interventions éclairées. Nous croyons qu'un consensus est possible si un processus de consultation transparent, qui étale sur la place publique les vrais enjeux du développement viable, est mis en branle.

Autre préoccupation majeure, les critères de classification des projets. Une fois les questions de la place de l'environnement dans le développement du Québec élucidées, il reste donc à établir les critères de classification des projets en tenant compte évidemment de leurs conséquences sur l'environnement. À titre d'exemple, la relation de cause à effet extrêmement étroite qui existe entre l'efficacité énergétique et l'environnement - par exemple, l'énergie qui est la moins polluante est évidemment celle que l'on ne consomme pas - devrait permettre un processus plus rapide pour ces projets, afin d'encourager leur prolifération.

On en arrive à la procédure d'impact sur l'environnement. Par exemple, la production combinée d'électricité et de vapeur, ce qu'on appelle la cogénération, à partir du gaz naturel ou des ressources énergétiques québécoises, tels les résidus de bois, est une pratique qui est reconnue à travers le monde comme un des moyens les plus efficaces pour optimiser l'utilisation du contenu énergétique des combustibles. De plus, la cogénération à partir de ces combustibles permet aussi de réduire la pollution causée par l'utilisation soit du mazout lourd, la combustion qui est plus ou moins contrôlée des résidus de bois ou par, dans ce cas-là, la décomposition des millions de tonnes de ces résidus de bois actuellement accumulées dans nos forêts du Québec.

Les exigences gouvernementales actuelles, pour les projets de 10 MW et plus dans le domaine de la cogénération, sont non seulement très coûteuses peur les promoteurs, mais nécessitent des délais de l'ordre de deux ans pour réaliser les études et obtenir les autorisations. À cause de ces contraintes, plusieurs projets qui sont fort valables sur les plans de l'efficacité énergétique - et ça, on va y revenir tout au long de notre présentation, parce que c'est la nature même de notre association de promouvoir l'efficacité énergétique... Donc, ces projets sont fort valables autant au point de vue maîtrise de l'énergie qu'impact sur l'environnement et ils risquent d'être abandonnés au cours des prochains mois.

Bien sûr, il faut que les promoteurs apprennent à planifier avec les délais qui sont nécessités par les études d'Impact et on est très d'accord avec ce principe-là. Cependant, nous croyons que le gouvernement doit Implanter des assouplissements dans son processus d'évaluation pour les projets qui ont des efficacités énergétiques éprouvées. Le gouvernement pourrait alors modifier ses lois et règlements afin de faciliter la réalisation de ce type de projet au Québec.

Il y a toujours, par ailleurs, avantage à éviter d'être trop général lorsqu'on écrit des règlements ou des lois, à défaut de créer des zones grises importantes qui se soldent malheureusement par des débats d'Interprétation et qui mettent souvent en péril les projets et le processus même. Donc, une fois établis, ces critères pourraient être normalisés et appliqués quand même avec une certaine ouverture d'esprit, toujours dans l'Intention de pouvoir faire bénéficier l'ensemble de la province des effets bénéfiques sur l'environnement de ces projets, qui sont efficaces au point de vue de l'énergie.

Donc, nous vous proposons de simplifier le processus dans ces cas de projets, en trois étapes. Comme le ministère de l'Environnement demande souvent une étude d'impact après le dépôt de l'avis de projet, nous suggérons de remettre cette étude d'impact simultanément, ceci, évidemment, aux risques et périls, et en toute connaissance de cause des promoteurs.

Cette étude, qui est déposée en même temps que l'avis de projet, est alors examinée par le BAPE, en audiences publiques, donc, seulement si - et ça, évidemment, il faut utiliser un bon jugement, parce que ce n'est pas tous les projets qui nécessitent des audiences publiques - l'envergure et surtout les Impacts sur l'environnement de ce projet le justifient.

Finalement, le résultat de cet exercice simultané va conditionner l'autorisation ou le refus du projet.

Le rôle des audiences publiques: un rapport de force. Si on prend pour acquis que c'est une partie neutre qui réalise les études d'impact - et, évidemment, qu'on estime que le MENVIQ est responsable dans ses décisions - il faut, par contre, s'assurer que l'intérêt du public a été pris en considération. En effet, le public lui-même peut émettre des opinions très divergentes et pourrait, dans une certaine mesure, faire l'arbitrage entre ce qui risque d'être des

considérations plus politiques par rapport à des considérations qui sont plus de nature privée, ou corporative, ou d'entreprise. La tenue d'audiences publiques permettrait, entre autres, évidemment, une plus large représentativité des intervenants. Mais, pour y arriver, il faudrait que ces intervenants aient les moyens et le temps nécessaires pour leur permettre d'émettre des commentaires et suggestions solides.

On en est la preuve. On est une organisation à but non lucratif, avec des ressources très limitées. On aimerait pouvoir vous présenter un rapport impeccable, de grande qualité; malheureusement, avec des ressources et des bénévoles, on a fait le meilleur que l'on pouvait. Nous croyons qu'avec des ressources supplémentaires, évidemment, la qualité des interventions pourrait être nettement supérieure.

Les représentants d'un regroupement d'importance modeste ont aussi, malheureusement, des moyens tout aussi modestes et sont souvent démunis lorsqu'ils se retrouvent face à une série impressionnante d'études qui ont coûté des dizaines, sinon des centaines de milliers de dollars, avec des chiffres et des chiffres à l'appui. Malheureusement, avec toute la bonne volonté, il nous apparaît presque impossible, à ce moment-là, de pouvoir faire une intervention éclairée. Donc, l'objectif de notre proposition, c'est d'essayer d'équilibrer le rapport de force qui permettrait évidemment à cet équilibre-là de susciter un débat des plus constructifs, pour arriver à un projet qui ait le moins d'impact possible sur l'environnement.

Question de crédibilité. Il nous apparaît nécessaire et utile, pour tendre à rehausser la crédibilité du processus, que le MENVIQ intensifie sa stratégie d'information. Un effort en ce sens favoriserait évidemment un accroissement du degré d'information de tous les intervenants, et qui dit intervenants mieux informés dit, on l'espère, décision mieux éclairée. Donc, un milieu mieux informé tend, entre autres, vers une plus grande compréhension mutuelle de la part de tous les intervenants. Nous croyons que le Québec semble avoir l'un des meilleurs systèmes, mais, évidemment, il s'agit de l'utiliser comme il se doit.

En vue de toujours considérer un développement viable, le MENVIQ devrait évaluer l'intérêt de prévoir des mesures compensatoires ou d'atténuation dans le cas où les projets engendreraient des dommages à l'environnement, ce qui n'est pas nécessairement le cas, mais qui pourrait arriver. Il apparaît nécessaire, entre autres, de mettre sur pied un fonds de restauration pour les projets qui créent des déchets toxiques qui pourraient représenter un danger pour le public. Nous croyons aussi qu'il est nécessaire de pouvoir agir dans des cas majeurs, dans des cas importants, plutôt que d'essayer de trouver un coupable. Donc, l'instauration d'un fonds permettrait aux intervenants de réparer et, par la suite, évidemment, on pourrait trouver des moyens pour remettre ça en place.

Pour terminer, j'aimerais rappeler les principales pistes de réflexion retenues par l'AQME. Nous aimerions pouvoir définir, dans un débat public, la vraie place de l'environnement et du développement viable dans les priorités du gouvernement du Québec. Nous aimerions voir accorder aux projets favorisant l'efficacité énergétique un processus accéléré mais complet, parce que ces projets en soi ont un impact très favorable sur l'environnement. Nous aimerions pouvoir intensifier l'information du public, des promoteurs et de tous les intervenants concernés, encore une fois, par souci de transparence et pour s'assurer que les vrais enjeux sont bien débattus. Finalement, nous aimerions qu'à même les projets soient incluses des mesures d'atténuation, encore une fois, pour mieux préserver l'environnement. Merci de votre attention.

Le Président (M. Garon): M. le député de Deux-Montagnes.

M. Bergeron: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, M. Sainte-Marie et Mme Tan-guay. Permettez-moi, au nom du côté ministériel, de vous souhaiter la bienvenue ce matin. Comme on le discutait tout à l'heure, ça fait trois semaines qu'on est ici et on arrive à la fin. Je pense qu'à chacune des occasions, on doit vous féliciter d'avoir accepté de venir devant nous aujourd'hui afin d'exposer votre point de vue.

Lors de votre présentation, il y a quelque chose qui m'a frappé - et c'est arrivé souvent aussi - c'est le bénévolat de votre organisme. On va y revenir tout à l'heure. Je pense qu'il faut le faire. Si ce n'était pas du bénévolat qui existe un peu partout, dans tous les champs d'activité ici, au Québec, je pense que le gouvernement ne serait pas dans la position où il est dans le moment. Alors, je veux vous féliciter pour votre bénévolat et vous féliciter pour votre présence ici, aujourd'hui.

À la lecture de votre mémoire, à la page 3 - on a souvent entendu parler de ça - vous qualifiez les Québécois de "traditionnellement grands consommateurs et gaspilleurs". En fait, qu'est-ce qui vous fait dire ces qualificatifs-là? Je pense qu'on les entend souvent. Ce n'est peut-être pas tellement nécessaire d'insister sur les causes qui expliquent pourquoi on est surnommés des gaspilleurs. Mais ma question serait plutôt du côté positif: Qu'est-ce que vous suggéreriez pour enlever cette étiquette-là, qui fait qu'on est qualifiés ainsi?

M. Sainte-Marie: Merci. 'Traditionnellement gaspilleurs", je pense que c'est effectivement une image de style. Ce qu'on peut vous dire, c'est que, selon les recherches et les chiffres que l'Association dont on fait partie prône, il y a encore au Québec un potentiel d'efficacité

énergétique d'environ 30 %. On pourrait réduire, avec des mesures, environ 30 % de notre consommation d'énergie. Que ce soit au niveau du résidentiel, du commercial, de l'industriel et des transports, il y a une marge de manoeuvre, sans affecter notre confort, qui pourrait être réalisée. C'est ce qu'on dit lorsqu'on dit qu'on gaspille. C'est que, lorsqu'on se compare aux autres, peut-être qu'il y a encore une bonne marge à aller chercher, et c'est l'objectif de notre association de fournir les moyens. Je pourrais vous énumérer une liste d'à peu près 30 pages de tous les moyens qu'on pourrait mettre en oeuvre pour réduire notre consommation d'énergie, et ça va de soi qu'évidemment, toutes les réductions de consommation d'énergie impliquent une réduction des émissions dans l'atmosphère et l'amélioration de la qualité de l'environnement. Donc, ce qu'on dit, c'est qu'avec une bonne information, l'ensemble des Québécois et des Québécoises pourraient être conscientisés de leur impact sur l'environnement en utilisant trop d'énergie et, par la suite, en réduisant cette demande d'énergie, avoir un impact positif sur l'environnement.

M. Bergeron: Merci. Je vais prendre la perche que vous venez de nous tendre en disant que vous avez une liste déjà préparée. Est-ce que vous pourriez, dans un avenir rapproché, la faire parvenir au côté ministériel et à l'Opposition? Je pense que ça pourrait éclairer nos lanternes, à ce moment-là, et que ça pourrait nous donner une bonne orientation. Je pense que positivement, les deux côtés, ici, sauraient profiter de votre expérience et de vos suggestions.

M. Sainte-Marie: À titre d'information, Mme la ministre Use Bacon m'a demandé de siéger au groupe-conseil sur la mobilisation de la demande et de l'offre en énergie et nous sommes à travailler avec le ministère de l'Énergie à établir la stratégie d'efficacité énergétique du Québec. À l'intérieur de cette stragégie, toutes les suggestions de l'Association et des autres membres de ce comité vont être divulguées et peut-être que ce serait une bonne occasion d'en prendre connaissance. Ou si vous aimez avoir copie de ces moyens-là, ça nous ferait plaisir de vous les faire parvenir.

M. Bergeron: Enfin, peut-être au président de notre commission, ce matin, qui nous les distribuera.

Le Président (M. Garon): Au secrétaire. M. Bergeron: Au secrétaire, je m'excuse.

Le Président (M. Garon): Au secrétaire, qui fera parvenir les documents à tous les membres.

M. Bergeron: Très bien. Ma deuxième question. À la page 4, au paragraphe 5, vous souhaitez l'établissement de critères de classification de projets pour pouvoir par la suite les assujettir à la procédure d'évaluation. Et, à ce moment-là - c'est ça qui me chicote un peu - vous vous référez a des expériences de pays étrangers. (10 heures)

Durant les trois semaines qu'on a été Ici, plusieurs organismes ont dit que le Québec était pas mal avant-gardiste dans l'environnement. Alors, je me demande quel est le besoin d'aller chercher notre expérience ailleurs. Il y en a plusieurs qui nous ont dit ça, en tout cas.

M. Sainte-Marie: Oui. je suis d'accord avec vous, le Québec, on est très à lavant-garde. Par contre, il n'y a, je pense, aucun problème à regarder ce qui se fait ailleurs pour essayer de faire mieux. Les exemples auxquels on se référait: le Japon et l'Allemagne. Je peux prendre l'exemple du Japon qui est un pays qui n'a aucune ressource naturelle mais qui a su, si je prends l'exemple de l'Incinération des déchets, aller chercher le maximum au niveau technologique pour la préservation de l'environnement et aussi, aller chercher au maximum la récupération de l'énergie à partir de la biomasse ou des déchets urbains. Donc, je pense, en regardant sous quels critères ils ont pu accepter ce genre de projet, qu'on peut s'en inspirer pour aller chercher les bonnes choses qui se font ailleurs. Mais, effectivement, le Québec, nous sommes à l'avant-garde et, ça, on peut s'en féliciter.

M. Bergeron: Ça ne veut pas dire qu'on va rester où on en est. Il y a toujours moyen à amélioration, c'est bien entendu.

Une autre question, c'est que ça me surprend, ça, à la page 6. En tout cas, de la façon que je le lis, vous semblez simplifier assez rapidement le processus d'évaluation et je pense que je n'ai pas besoin de vous dire que le public, en général, demande d'être Impliqué davantage dans le processus. De quelle façon vous voyez que l'élaboration devrait se faire à ce moment-là? Il me semble que c'est couper les coins assez carrés vis-à-vis du public.

Une voix: ...ronds.

M. Sainte-Marie: Ce qu'on propose comme processus...

M. Bergeron: Les coins tout croches.

Une voix: Les coins ronds.

M. Sainte-Marie: Les coins ronds.

M. Bergeron: Je m'excuse. Je vous remercie de votre présence.

M. Sainte-Marie: si je peux répondre à votre question, le processus que nous proposons de simplifier, c'est pour, encore une fois, les projets qui ont démontré une efficacité énergétique. un des projets dont on tire exemple, c'est le projet de cogénération. pourquoi, lorsqu'un de ces projets-là, qui est déjà établi, qui a démontré que les effets sur les émissions polluantes sont beaucoup moindres que tout autre procédé de production combiné de vapeur et d'électricité, pourquoi, une fois que le projet a été déjà éprouvé, on ne pourrait pas, dans les cas de projets semblables, qui ont déjà été démontrés bénéfiques pour l'environnement, ne pas, justement, remettre à la fois l'étude d'impact et la demande d'avis de projet pour pouvoir, dans un temps, disons, relativement raisonnable de 12 mois, mettre en branle et implanter dès maintenant, dès après un an, ce procédé-là plutôt que de procéder par la mesure longue qui prend, comme vous l'avez mentionné dans les documents qui nous ont été remis, jusqu'à 33 mois, pour un projet qui, on le sait d'avance, va être bénéfique au niveau de l'environnement? c'est vraiment pour ce genre de projets-là qu'on insiste pour avoir une procédure simplifiée. pour les projets qui, après l'évaluation des critères et des impacts sur l'environnement, représenteraient des dangers ou des inconnus, on n'est pas pour un processus simplifié à ce moment-là. c'est vraiment pour des projets qui, une fois qu'on a analysé l'étude d'impact, procurent des bénéfices à l'environnement. essayons de les mettre en pratique le plus rapidement possible.

M. Bergeron: Ma dernière question...

Le Président (M. Garon): Nous voulons remercier le député de Deux-Montagnes, parce que le temps est écoulé, et j'appelle maintenant le député de La Prairie. C'est bien involontairement, M. le député.

M. Bergeron: Merci, M. le Président.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de l'Opposition, souhaiter la bienvenue à Mme Tanguay et à M. Sainte-Marie et les remercier de leur présentation. C'est un point de vue qui est bien défendu et on n'a pas eu beaucoup de groupes qui nous ont parlé d'efficacité énergétique. C'est rafraîchissant. Vous dites, dans votre mémoire, que le Québec est souvent cité comme étant plutôt à l'avant-garde. Je pense que c'est assez vrai pour la procédure d'évaluation, mais certainement pas en matière d'efficacité énergétique. Certainement pas. Je ne pense pas que ce soit ça que vous ayez voulu dire non plus, hein?

M. Sainte-Marie: Ce que j'ai dit, c'est qu'au Québec, traditionnellement, nous étions qualifiés, entre guillemets, de gaspilleurs.

Une voix: Voilà.

M. Sainte-Marie: Ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a place à amélioration. On pense qu'on peut aller chercher au moins 30 % d'amélioration. Et c'est la nature même de notre association de faire la promotion pour qu'on y arrive.

M. Lazure: Le financement de votre groupe, comment c'est fait? Avez-vous une subvention du ministère de l'Environnement?

M. Sainte-Marie: Non, nous n'avons aucune subvention du ministère de l'Environnement.

M. Lazure: Vous en avez demandé une?

M. Sainte-Marie: Dépendamment des résultats de la commission, si on veut pouvoir continuer à faire la promotion de l'efficacité énergétique comme élément essentiel d'une solution au niveau de l'environnement, définitivement, nous allons vouloir bénéficier d'un support financier pour pouvoir faire valoir notre point de vue.

M. Lazure: Comment êtes-vous financés actuellement?

M. Sainte-Marie: Actuellement, au-delà de 75 % de nos revenus sont générés par nos activités, que ce soient des colloques, des congrès ou le "membership", et l'autre 25 % est financé par des contributions des ministères fédéraux et provinciaux au niveau de l'énergie, du ministère de l'Énergie.

M. Lazure: Vous parlez d'un débat public. Est-ce que, dans votre esprit, ce débat public pourrait être animé par le BAPE? Et puis, deuxième question, un débat public seulement sur la cogénération, sur l'efficacité énergétique ou sur l'ensemble de l'avenir énergétique au Québec?

M. Sainte-Marie: Ce qu'on dit, c'est qu'on est ici ensemble pour essayer d'établir des critères et une procédure pour bien évaluer l'impact environnemental des projets. Nous, on aimerait pouvoir prendre un petit peu de recul. On dit: Allons plus loin que ça. Le débat, on devrait le poser en tant que débat de société, donc au-delà d'un organisme. En tant que société québécoise, quelle est la véritable place qu'en tant que Québécois et Québécoises on veut que l'environnement prenne vis-à-vis du développement économique du Québec? Si on n'a pas posé cette question-là, on va toujours être confrontés à un débat économique versus un débat social ou un débat environnemental. On n'a pas situé l'ensemble de l'environnement dans le débat public, et c'est ça qu'on veut faire.

Que ce soit le BAPE, si on reprend ça dans l'ensemble de la problématique telle que je viens

de la définir, je ne pense pas que ça soit l'organisme pour faire un débat public sur l'ensemble. Sur des projets précis, évidemment, c'est sa mission, mais, sur l'ensemble du projet, je pense que c'est au gouvernement de faire l'ensemble de la démonstration pour que tous les Intervenants puissent placer l'environnement dans l'ensemble de la société québécoise.

Au niveau d'un débat sur la politique énergétique, je pense qu'on ne peut pas s'en sortir au Québec: politique énergétique va évidemment avec développement économique, mais l'environnement va avec toutes les activités au Québec. Donc, je pense que c'est encore au-delà d'une politique énergétique. Il faut faire un débat sur: Où voulons-nous être au niveau de l'environnement par rapport à l'ensemble du développement économique du Québec?

M. Lazure: Vous avez des commentaires, à mon avis, judicieux sur la possibilité de permettre un traitement plus rapide de l'évaluation des impacts lorsqu'il s'agit - et c'est ça l'originalité de votre présentation - de projets qui sont en eux-mêmes bénéfiques à l'environnement. Et ça, ça me paraît bien évident, mais personne ne nous a parlé de ça, sauf Canards Illimités. Canards illimités, c'est un peu la même chose. Canards illimités, ils ont des projets qui, par définition, vont profiter à l'environnement. Et quand même, ils sont soumis, selon eux - et ils ont raison, je pense - à des procédures trop longues, trop fastidieuses, un peu comme s'ils étaient des pollueurs soupçonnés. Alors, je pense que c'est à retenir, cette hypothèse d'une voie plus rapide quand il s'agit de projets qui, par définition, vont aider à l'environnement.

Vous avez aussi des suggestions intéressantes. L'image du MENVIQ, du ministère, Dieu sait qu'elle est amochée ces années-ci. Moi, je pense que ça aussi, c'est original; il y a peu de groupes qui nous ont parlé de ça. Le ministère de l'Environnement, par de l'éducation populaire, comme vous le dites, pourrait redresser cette perception qui est plutôt négative dans le public. Et tellement négative que les bons coups que le ministère fait passent inaperçus et sont mal connus du public.

Une question sur le fonds de restauration. Vous en pariez un peu là, mais comment ça fonctionnerait, selon vous, ce fonds de restauration?

M. Sainte-Marie: Dans le cas, on parle d'accidents écologiques. Je pense que c'est trop important pour le patrimoine et pour la province, le pays, pour attendre et aller chercher de l'argent, trouver un coupable. L'objectif, dans ce cas-là, ce n'est pas de trouver un coupable, c'est de trouver une solution, de l'appliquer et de réparer le plus rapidement possible. La seule façon de faire ça: II faut qu'il y ait des fonds quelque part qui soient déjà prévus. La façon dont on devrait le financer, c'est une grande question et, malheureusement, Je n'ai pas la solution à ce profond problème. Mais je pense qu'il faut qu'il y ait quelque part un outil qui soit prêt à répondre aux pépins et aux désas très - ça, c'est exagéré, peut-être, les désastres - aux accidents écologiques, pour les réparer dès qu'ils arrivent. Et c'est pour ça qu'on dit, là: Une des suggestions, une des façons, c'est d'avoir un fonds de récupération.

M. Lazure: La seule chose qui me laisse réticent dans votre mémoire, c'est à la page 7, lorsque vous dites: "...la décision finale d'accorder ou non un permis pour la réalisation du projet devrait appartenir au gouvernement..." Jusque-là, ça va, mais là, vous ajoutez: "...en considération avec un groupe-conseil dont le rôle serait d'examiner les décisions du gouvernement, au besoin." Là, je vous avoue que je ne vous suis plus.

M. Sainte-Marie: Oui, c'était effectivement...

M. Lazure: J'aurais besoin d'être convaincu de la pertinence de ça.

M. Sainte-Marie: M. Lazure, vous avez raison et, si vous avez remarqué, je ne l'ai pas prononcé lorsque j'ai fait mon discours. Ce n'était pas clair dans le texte et j'aimerais peut-être clarifier. Ce qu'on dit, c'est que le MENVIQ doit scruter, c'est à lui qu'on donne la responsabilité des décisions, mais H pourrait référer au besoin, lorsque la cause est très technique ou tout ça, à l'avis d'un groupe d'experts externes avant d'établir sa décision. C'est ce qu'on a voulu dire; c'était mal exprimé, mais c'est vraiment ça qu'on veut dire.

M. Lazure: Oui. Bon, c'est mieux. Merci, M le Président.

M. Sainte-Marie: Merci.

Le Président (M. Garon): Je voudrais remercier les représentants de l'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie de leur contribution au travaux de cette commission et je suspends les travaux de la commission pour quelques instants, pour donner le temps aux représentants de la Communauté urbaine de Québec de s'avancer pour occuper les sièges des intervenants.

(Suspension de la séance à 10 h 12)

(Reprise à 10 h 13)

Le Président (M. Garon): Je vais demander au représentant de la Communauté urbaine de Québec, M. Michel RK/ard, de nous présenter les

gens qui l'accompagnent, et lui dire également qu'il a 30 minutes à sa demande - on était prêts, nous, à donner une heure à la Communauté urbaine, vu l'importance de l'organisme - ce qui veut dire, normalement, 10 minutes pour votre présentation, 10 minutes pour les gens du parti ministériel et 10 minutes pour le parti de l'Opposition.

Communauté urbaine de Québec

M. Rivard (Michel): M. le Président, notre mémoire est tellement clair, je croyais même que 20 minutes auraient pu être suffisantes, mais on pourra prendre tout le temps que vous voudrez bien.

Merci, M. le Président. Mmes les députées, MM. les députés, il me fait plaisir de présenter les gens qui m'accompagnent ce matin: à mon extrême gauche, M. Maurice Bergeron, le directeur général de la Communauté urbaine de Québec; .immédiatement à ma gauche, M. René Gélinas, qui est le directeur du service de l'environnement et, finalement, à ma droite, M. Yves Marcil, directeur adjoint à la planification et à la conservation des ressources.

La CUQ est un organisme régional qui regroupe et représente les 13 municipalités qui la composent. D'une superficie de 550 kilomètres carrés, près de 470 000 personnes habitent ce territoire au nord du fleuve Saint-Laurent. Je devrais dire en face de Lévis. La CUQ et ses municipalités constituantes sont notamment responsables d'assurer la gestion des déchets solides de leur territoire, tant au niveau de la récupération, du recyclage, que de la disposition des déchets. La CUQ et ses municipalités membres sont également responsables de la gestion de l'assainissement des eaux usées de leur territoire, incluant leur interception et leur épuration, ainsi que le traitement des boues résiduaires et le contrôle des rejets industriels.

Par ailleurs, les parcs industriels situés sur le territoire de la CUQ sont gérés et administrés par les municipalités membres ou des sociétés paramunicipales. A titre d'exemple, la Société de promotion économique du Québec métropolitain qui regroupe l'ancienne Inter-Port et qui inclut, bien sûr, le territoire de la Rive-Sud.

Compte tenu de la problématique actuelle à la CUQ, quant à la disposition des déchets solides domestiques, et du potentiel que représente la dimension industrielle, les municipalités membres tiennent à présenter leurs commentaires à l'égard de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement.

Je dois ici faire une petite mise au point. Ce mémoire est, bien sûr, le mémoire de la Communauté, ce n'est pas un mémoire de l'Union des municipalités du Québec, ni des autres communautés urbaines, de la CUM ou de la CUO.

Principes de base. Compte tenu des tendances qui s'accentuent quant aux responsabilités déléguées au monde municipal en matière d'environnement et des enjeux qui y sont reliés, tant au niveau local que régional, la CUQ ainsi que ses municipalités constituantes estiment qu'il est essentiel que l'évaluation d'un projet susceptible d'engendrer des répercussions sur l'environnement s'établisse en tenant compte des principes de base suivants: la CUQ et ses municipalités membres préconisent le respect intégral des juridictions municipales et du pouvoir politique démocratique des élus municipaux, en regard des dossiers de leur compétence; la CUQ et ses municipalités membres se rendent notamment responsables d'assurer la diffusion de l'information aux citoyens en regard des dossiers de leur compétence.

Quant au rapport Lacoste, en mai 1988, le ministre de l'Environnement instituait un comité chargé de réviser la procédure d'évaluation et d'examen des impacts environnementaux qui déposa son rapport en juin 1989.

À la lumière de ces recommandations, la CUQ et ses municipalités constituantes appuient généralement les orientations et recommandations visant un allégement de la procédure permettant une meilleure efficience; une meilleure information et une participation accrue des citoyens dans le processus d'étude et d'analyse d'un projet, permettant une rétroaction du public au projet; une amélioration du contenu des études d'impact et une meilleure synthèse permettant de rendre plus visibles les enjeux et ainsi de mieux clarifier les choix; un élargissement de l'assujettissement permettant de soumettre à la procédure tous les projets de nature privée et industrielle susceptibles de modifier l'environnement; une standardisation des règles du jeu permettant leur uniformisation à l'ensemble du Québec.

Toutefois, la Communauté et ses municipalités membres émettent des réserves quant à l'assujettissement éventuel des opérations reliées à l'aménagement du territoire. Le rapport Lacoste fait ici référence aux schémas régionaux d'aménagement, aux plans d'urbanisme, aux plans directeurs des parcs, etc.

La loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit actuellement des consultations publiques aux niveaux régional et municipal qui permettent aux citoyens d'émettre leur opinion sur la plupart de ces questions. Ainsi, compte tenu que ces opérations sont pour la plupart déjà assujetties à des procédures de consultation publique suffisamment élaborées, la Communauté et ses municipalités constituantes estiment qu'il est par conséquent inopportun d'assujettir les opérations reliées à l'aménagement du territoire. Toutefois, pour des raisons exceptionnelles et sur une base volontaire, certains projets ou politiques pourraient éventuellement être soumis aux procédures d'évaluation. Je pense, entre autres, à titre d'exemple, à un projet comme la récupération des berges, avec une piste cyclable d'est en ouest. C'est un exemple que je voudrais illustrer ici.

Les domaines de responsabilités municipales et régionales. La CUQ et ses municipalités constituantes sont responsables de divers dossiers à caractère environnemental dont, notamment, la gestion des déchets solides et l'assainissement des eaux usées. Pour les projets majeurs à incidence environnementale qu'elles ont initiés, la CUQ et ses municipalités membres se sont jusqu'ici fait un devoir de bien informer et consulter leurs citoyens sur les enjeux liés à ces projets dans le respect des règles de l'art en matière d'évaluation d'impact et entendent maintenir cette détermination dans les années à venir. À cet effet, elles adhèrent en outre et de façon particulière au principe de base visant la diffusion de l'information et aux orientations générales du rapport Lacoste concernant l'information et le droit à la participation des citoyens sur des sujets majeurs.

Ainsi, en regard notamment de la volonté ferme de voir respecter les champs de juridiction municipaux et régionaux, ainsi que le pouvoir politique et démocratique de leurs représentants, la CUQ et ses municipalités membres se réservent le privilège de décider de la tenue et de la nature des consultations publiques relatives aux projets de leur compétence. Et je pense ici aux sites d'enfouissement, aux stations d'épuration, etc.

Projets industriels. Le territoire de la CUQ compte plusieurs espaces industriels et les expériences antérieures démontrent un avantage à ce que les règles du jeu soient claires et uniformes dans l'ensemble du Québec. Entre autres, un élargissement de l'assujettissement des projets industriels de même qu'un allégement de la procédure représenteraient une amélioration indéniable et auraient pour effet de faciliter l'implantation industrielle.

Toutefois, l'expérience démontre également que le niveau municipal, qui demeure le premier concerné par l'implantation industrielle, subit le plus directement les pressions et les conséquences liées à ces projets sans pour autant détenir de marge de manoeuvre ou de levier d'intervention au chapitre des évaluations d'impact. Ainsi, la procédure d'évaluation d'impact relativement aux projets industriels devrait permettre la participation active des instances locales et régionales, notamment au chapitre des projets à être assujettis et des critères pour étude d'impact.

Par ailleurs, la Communauté et ses municipalités constituantes souscrivent aux recommandations ayant trait notamment à la mise à jour régulière de la liste des projets industriels à assujettir, de manière à ce que les critères d'assujettissement tiennent compte des impacts potentiels significatifs.

Nos recommandations. La CUQ et ses municipalités appuient généralement les orientations et recommandations du rapport Lacoste visant à diffuser l'information aux citoyens, alléger la procédure d'évaluation et améliorer le contenu des études d'Impact.

Par ailleurs, compte tenu notamment du principe visant le respect des juridictions municipales ainsi que du pouvoir politique et démocratique de leurs représentants, la Communauté et ses municipalités membres recommandent de réserver aux instances municipales et régionales le privilège de décider de la tenue et de la nature des consultations publiques pour les projets relevant de leur compétence et de mettre à leur disposition, selon le besoin, les instruments mis en place par le gouvernement relatifs à la tenue d'audiences publiques, et tout ça par le BAPE; d'élargir l'assujettissement à la procédure d'évaluation d'impact pour les projets industriels susceptibles de modifier l'environnement et de standardiser les règles du jeu; de permettre la participation active des Instances locales et régionales dans le cadre de la procédure d'évaluation d'impact, notamment au chapitre des projets à être assujettis et des directives pour étude d'Impact, et de ne pas assujettir les opérations reliées à l'aménagement du territoire.

Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. Rtvard.

M. le député de Saguenay.

M. Maltais: merci, m. le président. m. rtvard et les personnes qui l'accompagnent, au nom du gouvernement du québec, bienvenue à cette commission. j'ai lu et relu attentivement votre mémoire. vous apportez quand même des choses un petit peu nouvelles. malgré que votre mémoire soit restreint, ii est quand même bien fait. il indique des choses importantes. il en est une entre autres qui me chicote: "de ne pas assujettir les opérations reliées à l'aménagement du territoire". je pense que vous êtes peut-être les premiers, comme groupement de communautés urbaines ou de villes, à nous l'indiquer, parce que la majorité des groupes de citoyens qui sont venus ici ont demandé que ce soit assujetti. c'est quoi l'expérience qui vous fait dire que ça ne devrait pas être assujetti?

M. Rivard (Michel): Écoutez, je vous fais remarquer également que c'est la position de l'UMRCQ qui est venue la semaine dernière, qui pensait comme nous sur ça. Ça ne veut pas dire, parce que tout le monde municipal peut être d'accord, que c'est la bonne formule, mais, par contre, présentement, à cause de la loi 125, on est obligés de consulter les gens. On le fait déjà. Alors, si vous décidez que ce doit être assujetti à des études d'Impact et à des audiences par le BAPE, bien, II faudrait corriger la loi 125 qui nous oblige, en matière d'aménagement du territoire, à faire des consultations publiques. C'est le dédoublement. Alors, on dit que l'on est déjà soumis. Pourquoi on aurait un autre... Je

veux bien croire que trop fort ne casse pas, mais c'est le dédoublement.

M. Maltais: Prenons, par exemple, les sites d'enfouissement ou les incinérateurs qui doivent être assujettis, bien sûr. Mais il y a beaucoup de gens qui sont venus nous dire ici - pas des gens de la région de Québec, mais on en a eu hier de la région de Blainville, on en a eu de la région de Montréal - qu'ils n'ont pas été consultés, qu'ils n'ont pas été informés et qu'ils sont pris avec un problème: ils ne sont pas capables de se faire entendre. Ils sont venus lancer un cri d'alarme ici: Donnez-nous des réponses. Écoutez, la boîte de Pandore, on ne la secoue pas comme ça et les réponses sortent. Ce n'est pas possible.

Mais, dans le processus de consultation, est-ce que chez vous, par exemple, lors du choix d'un site d'enfouissement ou d'un incinérateur, tout le monde est consulté? Est-ce que tout le monde a l'opportunité de dire son opinion et est-ce que tout le monde concerné, bien sûr, a la possibilité de se faire entendre, contrairement à ce que ces gens-là sont venus nous dire hier?

M. Rivard (Michel): Je suis très heureux, parce que c'est un peu le but de notre mémoire de parler justement de nos projets environnementaux, entre autres l'incinérateur et les sites d'enfouissement sanitaire. Voici, lorsque l'incinérateur a été construit, il y a une quinzaine d'années aujourd'hui, il n'y a peut-être pas eu de consultation. Les élus du temps ont décidé que l'incinérateur était en plein milieu d'une ville parce qu'il y avait un avantage intéressant, c'était de vendre l'énergie de la combustion convertie en vapeur à la papeterie voisine. D'abord, il y avait un intérêt économique. Ça a été construit avec la technologie du temps, ce qui veut dire beaucoup de pollution dans le quartier Limoilou, et on a corrigé à grands frais, il y a quelques années. En fait, ça a coûté plus en corrections que le coût de l'incinérateur. On a investi 40 000 000 $ pour mettre les équipements pour dépolluer.

C'est bien sûr qu'à ce moment-là, il y avait des pressions des citoyens, et on n'a pas eu besoin de faire des audiences publiques parce qu'on sentait que les gens voulaient qu'on installe ce qu'il fallait pour régler le problème. Alors, il n'y a pas eu de consultation, on a fait les travaux. Ça, c'est pour l'incinérateur.

Les sites d'enfouissement sanitaire. Votre question est très pertinente, on en discutait justement hier soir au conseil de la CUQ. On a déposé un projet, hier, qui identifie, sur le territoire, après une recherche exhaustive... On a commencé avec 32 sites et on a réduit ça à 7. Et, finalement, hier, on a retenu 2 sites. Du même souffle, hier, j'annonçais qu'on allait sur une expertise additionnelle par une firme d'in- génieurs de l'extérieur de la région pour valider les choix qui ont été faits.

J'annonçais également qu'il y aurait étude d'impact et, en plus, j'annonçais, suite à une démarche personnelle que j'ai faite auprès du ministre de l'Environnement, M. Paradis, qu'on demanderait au gouvernement du Québec de mettre le BAPE à la disposition de la Communauté urbaine pour avoir des audiences publiques qui soient tout à fait crédibles. Parce qu'il y a quelques années, nous avions fait la même demande, lors de la construction de nos stations d'épuration, et le BAPE nous avait dit que ce n'était pas automatique, cette chose-là, et le ministre du temps avait refusé que ce soit des audiences tenues par le BAPE. Ce que nous avons fait, nous avons créé notre propre bureau d'évaluation environnementale; nous avons procédé à l'engagement des commissaires, qui étaient tous des anciens commissaires du BAPE, donc c'était très crédible. Ça n'a pas empêché certains médias de nous dire que ce n'était pas crédible parce que c'est nous qui avons à payer les honoraires de ces commissaires, tandis que si c'est le BAPE, c'est indépendant de nous. Ce n'est pas pour l'économie, mais c'est pour l'indépendance, dit-on, des commissaires.

Sur la consultation, la Communauté urbaine, je pense, n'a pas de leçon à recevoir de qui que ce soit, si on se compare à d'autres régions au Québec. Si des gens sont venus vous dire que certaines municipalités ne consultaient pas, pour la Communauté urbaine de Québec, je pense qu'on doit être cités en exemple pour la consultation sur nos projets environnementaux.

M. Maltais: D'accord. Dans un autre ordre d'idées, dans vos recommandations, vous indiquez dans la deuxième, "d'élargir l'assujettissement à la procédure d'évaluation d'impact pour les projets industriels susceptibles de modifier l'environnement et de standardiser les règles du jeu".

M. Rivard (Michel): Je suis obligé de vous donner un exemple. Vous vous souvenez, le projet qui a tourne en queue de poisson dans la région de Québec et puis, finalement, c'est Trois-Rivières qui l'a ramassé? Je suis bien content pour le député de la région, M. Richard. Mais il reste quand même que, si Lauralco avait été assujettie automatiquement à une étude d'impact suivie d'audiences, probablement que Lauralco - c'était son choix premier, la région de Québec - se serait établie ici. Ce qui est arrivé, c'est qu'un projet comme Lauralco n'est pas soumis automatiquement à des audiences publiques et à une étude d'impact. Alors, ils ont commencé par annoncer qu'ils choisissaient de s'établir à Sillery. Dans les heures qui ont suivi, il y a eu un tollé à Sillery. Après ça, ils se sont rabattus sur Québec, Québec a mis certaines conditions et, finalement, le projet s'est ramassé

ailleurs.

Et qui a été blâmé? En fait, ce sont peut-être ceux qu'on n'aurait jamais dû blâmer; ce sont les élus municipaux qui ont eu à subir des pressions des citoyens aux hôtels de ville en disant: Vous ne réagissez pas sur Lauralco, c'est inadmissible que ça vienne chez nous. Et sans qu'il y ait des données scientifiques pour démontrer qu'il y avait réellement des problèmes, le promoteur a décidé d'aller ailleurs. Si des projets comme Lauralco, qui était susceptible de modifier l'environnement des gens, étaient automatiquement assujettis, ça aurait été toute une autre "game". Alors, c'est l'exemple pour illustrer pourquoi les projets susceptibles de créer des impacts environnementaux devraient être automatiquement soumis à l'étude d'impact.

M. Maltais: On pourrait peut-être rajouter Glaverbec.

M. Rivard (Michel): Oui, Glaverbec, heureusement, est resté, et je pense que ça donne raison à ceux qui ont dit: Oui, on veut les accueillir. On se souvient même que certains élus exigeaient, avant que l'usine démarre, qu'il y ait des épurateurs des gaz. Le promoteur avait dit: Nous sommes partout dans le monde, nous respectons les réglementations. L'Environnement avait donné un permis conditionnel, bien sûr, et aujourd'hui, après quelques mois d'opération, on se rend compte que la pollution est bien en deçà des normes. Mais bien sûr, si un projet comme Lauralco avait été soumis à une étude d'impact, ça aurait évité possiblement toutes les discussions inutiles qui ont eu lieu.

M. Maltais: Est-ce que, sur le territoire de la Communauté urbaine, il y a eu des sites à être décontaminés dans différentes municipalités? (10 h 30)

M. Rivard (Michel): II y a, de mémoire, parce que ça ne relève pas nécessairement de la Communauté... Mais je sais que, dans le parc industriel de Saint-Malo, il y a un terrain qui a été contaminé par Hydro-Québec et ses anciennes compagnies, et c'est un problème majeur. On parle de plusieurs millions de dollars pour décontaminer ce soi. Mais, pour nous, on doit dire, si on compare à d'autres régions comme la région de Montréal ou ailleurs, qu'on n'a pas ce problème-là aussi aigu qu'ailleurs. Effectivement, de mémoire, il y en a un dans le parc industriel Saint-Malo.

M. Maltais: Est-ce qu'il y a des sites d'enfouissement qui ne fonctionnent plus et qui ont été soit remplis, soft transférés en parc industriel ou, je ne sais trop, en terrain vacant ou terrain à vendre? Lorsqu'un site d'enfouissement est terminé, est-ce que vous l'abandonnez? C'est quoi, la procédure chez vous?

M. Rivard (Michel): Le dernier, qui était le plus important, est dans le quartier de Beauport; son remplissement a été complété en 1984, si ma mémoire est fidèle. Aujourd'hui, vous avez un superbe parc. Bien sûr, les gens qui étaient alentour - c'est une ancienne sablière dont l'opération était terminée - critiquaient beaucoup lorsque nous allions porter nos cendres de l'incinérateur. On leur demandait d'être patients, qu'un jour, leur problème serait réglé et, effectivement, en 1984, ça a été terminé.

Naturellement, on a un problème présentement, c'est que personne ne veut, sur notre territoire, qu'on ait des sites. Alors, c'est le principe du "pas dans ma cour", mais c'est la responsabilité de la CUQ de rassurer les gens, avec des études d'impact et des audiences crédibles, qu'il n'y a pas ou peu de problèmes et, s'il y a des problèmes, qu'on peut amener des mesures de mitlgation pour rendre le projet acceptable. Alors, présentement, nous envoyons toutes nos cendres à l'extérieur du territoire, soft à Saint-TIte-des-Caps, à environ 50 km d'Ici, à l'est, et les gens là-bas, bien sûr, espèrent qu'on quitte ce secteur dans les plus brefs délais C'est pour ça qu'hier on rendait public le choix de deux sites potentiels sur le territoire.

M. Maltais: D'accord. Je ne sais pas s'il me reste du temps, mais j'ai encore une question. Lorsque vous parlez d'étapes, lorsque vous consultez, vous faites votre consultation chez vous, à quelle étape vous impliquez la population? Est-ce que c'est au tout début du projet ou si c'est en cours de route pour... Vous souhaitez, un moment donné, que la population puisse faire une rétroaction. Donc, ça présuppose que vous les mettez dans le bain, la première journée du projet.

M. Rivard (Michel): On est obligés de réagir en fonction d'expériences plus ou moins heureuses. Qui aurait pensé, à titre d'exemple, en 1984, que des gens auraient pu s'objecter à l'implantation de stations d'épuration dont le but, justement, est de dépolluer? Alors, s'il y a une activité qui n'aurait même pas dû faire l'objet d'une étude d'impact ou d'audiences, c'est l'équipement de dépollution. Alors, à partir de cette expérience malheureuse où on a dû accéder à la demande de peut-être un groupuscule d'une trentaine de personnes sur 500 000 qui demandaient l'étude d'Impact, on l'a fait. Bien sûr, il y a eu l'effet de retarder le projet d'un an et demi. Dans ce temps-là, avec des taux d'inflation de 5 % par année, sur un projet de 350 000 000, ça a coûté cher. Mais, on a pris cette expérience-là, maintenant, qu'on doit aujourd'hui composer avec des gens de plus en plus soucieux de l'environnement, qui pensent un peu comme nous.

Alors, aujourd'hui, lorsqu'on commence un projet, immédiatement, on informe les citoyens du projet. On les Invite à venir nous rencontrer

à notre commission permanente sur l'environnement, entre autres, et on les rassure en disant qu'il y aura l'étude d'impact. Dans le passé, on a eu l'expérience plus ou moins heureuse des stations d'épuration. Aujourd'hui, avec nos sites d'enfouissement, on annonce déjà aux gens qu'ils vont être mis dans le processus. On laisse à la CUQ et ses professionnels le choix d'évaluer, dans un premier temps, les sites les plus susceptibles de rencontrer nos objectifs. A partir de ça, on les rend publics et les gens sont invités à participer dès là.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition, je veux remercier M. Rivard et ses collègues d'être venus, ce matin, nous faire cette présentation et souligner le fait que c'est la seule communauté urbaine qui est venue. La Communauté urbaine de l'Outaouais nous a envoyé un mémoire qui est fort intéressant. Moi, je regrette que la Communauté urbaine de Montréal n'ait pas jugé bon de venir ou d'envoyer un mémoire parce que ce n'est pas l'absence de problèmes environnementaux dans la région de Montréal qu'on note. Au contraire, il y en a beaucoup. C'est un reflet de la préoccupation que vous avez, puis vous devez en être félicité, M. Rivard, puis vos collègues.

Je pense qu'il y a un point en particulier qui retient mon attention, c'est la demande que vous faites que le gouvernement mette à la disposition des municipalités, des communautés urbaines, le BAPE. Pour ça non plus, on n'a pas eu de mémoire. Je ne pense pas que quelqu'un nous en ait parlé. C'est assez original. Moi, j'y crois beaucoup à ça. Je pense que le BAPE pourrait très bien, à la demande du ministre... L'article 6.3 de la loi permet au ministre de demander au BAPE toute forme d'enquête et il n'y absolument rien qui empêche, de par 6.3, le ministre de l'Environnement de demander au BAPE de se mettre à la dispositon d'une communauté urbaine ou d'une ville. Je pense que ça devrait être fait beaucoup plus.

Il y a plusieurs projets qui touchent de très près les municipalités, les grands projets industriels notamment, mais aussi les projets - mais ça, ça vous touche moins, c'est plutôt vos collègues de Montréal - d'incinérateur, de centre de tri, etc. Alors, je pense qu'il va falloir que le gouvernement trouve une façon d'articuler le travail du BAPE avec les grandes municipalités et les communautés urbaines. Ce n'est pas l'un ou l'autre. Je pense qu'il faut se réjouir de votre ouverture à un travail conjoint avec le BAPE. d'autre part, j'ai un petit peu de réticences à accepter là... vous avez l'air de dire - je ne suis pas sûr, je vais vous demander de préciser -pour certaines juridictions, là, laissez-nous faire le schéma d'aménagement particulier. c'est vrai que la loi 125 a prévu ça, mais de ce que je sais de la loi 125, qui est une très bonne loi, elle n'empêcherait pas - une excellente loi, cette loi-là - une approche conjointe, si c'étaient les municipalités concernées qui demandaient aux autorités gouvernementales, encore là, de mettre le BAPE à leur disposition, par hypothèse. Dans cette hypothèse-là, c'est quoi votre réaction?

M. Rivard (Michel): Notre position part justement de l'expérience d'un projet. Lorsque nous avons décidé d'installer des équipements de dépollution à l'incinérateur - c'était grand, c'était 40 000 000 $, pour un incinérateur qui avait coûté peut-être 35 000 000 $ à construire, il y a une quinzaine d'années - on sentait, nous, qu'il n'y avait personne qui s'objectait. Au contraire, il y avait une pression. Il y a même un parti d'opposition, dans le temps, à Québec, qui avait été devant le juge pour ordonner la fermeture de l'incinérateur. Nous, au contraire, on a dit: On est capables d'investir pour le régler.

Alors, on dit: Si c'est un automatisme, des projets comme celui-là, laissez-nous la possibilité lorsque, nous, on sent qu'il y a unanimité, d'être exemptes de cette procédure. Là, cette fois-ci, on a investi les 40 000 000 $ sans consultation, parce qu'on savait que les gens étaient derrière nous. Si ça avait été un automatisme, on aurait perdu peut-être un an et plusieurs dizaines, pour ne pas dire des centaines de milliers de dollars en étude d'impact et en consultations alors qu'on avait le "feeling" que la population était derrière nous. Alors, c'est ça l'idée de dire: Laissez-nous juger, laissez-nous la possibilité de voir si un projet, qui peut affecter l'environnement en bien ou moins bien, doit être soumis à des audiences publiques ou si on doit demander le BAPE, et non pas un automatisme. C'est l'expérience de l'incinérateur qui nous amène à cette position.

M. Lazure: Je repose ma question autrement. Un cas précis, disons un grand centre récréo-touristique ou un grand projet domiciliaire dans votre communauté urbaine; je comprends que c'est d'abord et avant tout l'affaire de votre communauté, l'affaire des municipalités. Mais, est-ce que vous ne pensez pas que ça pourrait être utile de demander l'aide du BAPE dans la tenue des audiences pour bien évaluer les impacts environnementaux?

M. Rivard (Michel): Nous le ferons certainement. On n'abusera pas du BAPE, mais, encore une fois, votre clause 6.3... D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle j'ai rencontré le ministre Paradis, pour lui demander, pour nos sites d'enfouissement, qu'il applique, justement, la clause 6.3 qui est discrétionnaire. Remarquez bien que le gouvernement pourrait décider que tous les projets doivent passer par le BAPE - on

va vivre avec - sauf que la nuance que j'amenais, c'était sur les projets où on sentait que c'était unanime. Ça prend un grand consensus pour dire qu'on s'exempte. Alors, c'était l'exemple de l'incinérateur, mais, encore une fois, on a une conscience environnementale et soyez assurés que les demandes vont se faire régulièrement pour que le ministre mette le BAPE.

Encore une fois, pourquoi le BAPE? Parce que, quant à moi, c'est très crédible et ça fait une transparence pour nous. Comme je vous le dis, on vit encore avec des incertitudes sur l'objectivité des commissaires lorsque c'est nous qui les choisissons tandis que, quand c'est le gouvernement, c'est indépendant de nous, c'est plus crédible.

M. Lazure: Deux petites clarifications. Mon collègue de Jonquière voudrait prendre une minute ou deux. Le rapport Lacoste, vous dites: Nous appuyons les orientations, notamment diffuser de l'information, alléger la procédure, améliorer le contenu des études d'impact. Est-ce que vous appuyez le rapport Lacoste aussi, quand il demande d'assujettir les grands projets industriels?

M. Rivard (Michel): D'accord.

M. Lazure: Oui? Bon! Une dernière, les parcs industriels. Ça rejoint un peu ma question de tantôt. J'imagine que vous accepteriez volontiers que les parcs industriels, nouveaux ou agrandissements, soient assujettis à une procédure d'évaluation d'impact.

M. Rivard (Michel): Oui, on est d'accord avec ça, tous les collègues sont d'accord. Même s'il n'y a pas des parcs dans les 13 villes de la communauté, les maires qui ont des parcs chez eux ne s'objecteront sûrement pas, lorsqu'il y aura agrandissement ou création de parc industriel, à ce qu'H y ait étude d'impact.

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Comme vous dites que vous voulez garder une certaine liberté de soumettre ou de ne pas soumettre les projets à des études d'impact au BAPE, est-ce que vous accepteriez que les groupes environnementaux qui existent dans la région... Pour fonctionner, ils n'ont pas beaucoup de moyens à leur disposition. Comment ils peuvent fonctionner, ces groupes-là, et puis de quelle façon ils pourraient obtenir des sommes d'argent pour pouvoir fonctionner dans des cas précis? Ils ne sont pas à égalité, là. Si vous avez le contrôle de décider puis de soumettre, comment les gens vont réagir par rapport à différents projets?

M. Rivard (Michel): Je vais être obligé de vous répondre par un exemple. Encore une fols, je pense que c'est une première au Québec. Nos stations d'épuration qui ont été contestées au début, on a été en audiences publiques et on a offert aux commissaires... Parce qu'on savait que les gens qui s'objectaient n'avalent pas les ressources financières, nous avons créé un bureau de vigilance, un comité de vigilance. On a payé; ça nous coûtait environ 40 000 $ à 50 000 $ par année pour qu'ils aient recours à des experts pour faire des contre-expertises. On louait le local, les lignes téléphoniques, le prêt de photocopieuses. Ils ont participé avec nous, durant toute la construction, à des réunions hebdomadaires ou mensuelles, selon l'Importance. On ne peut pas subventionner directement, mais on a mis cela à la disposition des opposants entre guillemets, des gens qui s'Intéressaient de près, qui avaient des Inquiétudes lors des audiences. Alors, on l'a fait.

Maintenant, on ne peut pas recevoir tous les groupes et dire: On va vous subventionner pour que vous veniez nous dire qu'on est dans l'erreur ou non. Ils peuvent le faire sans qu'on les subventionne. Si je fais une comparaison, à l'Assemblée nationale, si je ne suis pas satisfait, moi, du rôle des députés, quand bien môme j'irais vous voir en haut, je ne peux pas intervenir. Mais, dans le domaine municipal et à la communauté urbaine, les gens peuvent venir nous poser des questions. Alors, les groupes environnementaux, les types de Saint-Tite-des-Caps, par exemple, Attention déchets, qui ne veulent plus nous voir là-bas, viennent régulièrement à nos assemblées nous poser des questions et nous presser de donner des échéanciers, à quel moment on va sortir de là.

Alors, pour des problèmes sérieux, Identifiés, comme les stations d'épuration des eaux, on a été bien au-delà de ce qui aurait pu être fait. On a payé environ 40 000 $ pour qu'ils viennent nous surveiller.

M. Dufour: En fait, si je comprends bien, vous demandez à peu près les mêmes pouvoirs que le gouvernement du Québec aurait, par exemple, au point de vue de la compétence, parce que vous demandez le pouvoir de décider de la tenue d'audiences selon la nature des projets, etc. Mettre à leur disposition...

Quand vous me répondez - je connais un peu l'histoire des municipalités - que vous me dites que vous avez mis des choses à la disposition du public en général, moi, je ne pense pas que ça rassure le public en général. Quand ils sont proches de nous autres, quand c'est nous autres qui tenons la "plug" là, c'est plus fort. Ça fait qu'à ce moment-là, moi, je dis: Est-ce que vous accepteriez de vous soumettre au même processus que partout ailleurs au Québec? SI vous avez ces pouvoirs-là, II faut que vous ayez les mêmes contraintes, sans ça on fausse un peu

les règles du jeu, à mon point de vue.

M. Rlvard (Michel): On peut vivre avec ça.

M. Dufour: Vous accepteriez ça? Ça va, merci.

Le Président (M. Garon): Merci. Alors, M. le président de la Communauté urbaine, tout le monde a été à môme de constater que vous êtes un exemple vivant, quand Boileau disait que ce qui se conçoit clairement...

Des voix: "Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément".

Le Président (M. Garon): Alors, vous avez mis en application la parole de Boileau. On voit que vos idées sont claires puisque les mots pour le dire venaient facilement. Je vous remercie. (10 h 45)

Alors, maintenant, nous appelons le représentant de l'Association des conseillers en environnement, M. Claude Lamothe, et l'invitons à s'approcher de la table des délibérations en lui disant qu'il a une demi-heure pour exposer son mémoire, c'est-à-dire, normalement, 10 minutes pour l'exposé, 10 minutes pour la partie ministérielle, 10 minutes pour la partie de l'Opposition pour poser des questions. Alors, M. Lamothe, à vous à parole.

Association des conseillers en environnement du Québec

M. Lamothe (Claude): M. le Président, messieurs, mesdames les membres de la commission, je voudrais ouvrir une petite parenthèse en disant que l'Association des conseillers en environnement du Québec, dans l'introduction, en avant-propos, on dit que nous sommes 50 membres. Je voudrais quand même préciser que nous regroupons la plupart des bureaux d'étude et des experts qui font les études d'Impact. Évidemment, dans chacun de nos bureaux, nous avons des professionnels; donc c'est 400 ou 500 professionnels et techniciens de l'environnement qui sont dans notre association. Évidemment, en tant que conseillers en environnement du Québec, nos membres réalisent à peu près 80 % ou 90 % des études d'impact. Alors, c'est avec cette expérience pratique que nous avons préparé le mémoire que nous venons vous soumettre ce matin.

En guise de préambule, disons que, nous, nos membres, on a une espèce d'insatisfaction et on part actuellement des constats suivants. On pense que la procédure actuelle - parce qu'on travaille avec des promoteurs, on travaille avec des gens qui réalisent des projets - est trop longue et trop coûteuse. On pense qu'elle n'est pas équitable parce qu'il y a des promoteurs et certains projets qui sont assujettis et d'autres qui ne le sont pas. On pense que, quand un promoteur a à réaliser un projet, il reçoit un guide et que le guide du MENVIQ est imprécis. Il y a une lacune dans l'encadrement.

La directive du ministre qui vient nous dire comment faire l'étude d'impact, on considère qu'elle est souvent trop théorique et pas assez pratique. Elle ne cible pas toujours les enjeux majeurs d'un projet. Il y a des demandes qui sont souvent irréalistes, qui ne relèvent pas de la compétence du promoteur. Je reviendrai là-dessus plus tard. Donc, le promoteur reçoit une directive qui est plus ou moins adaptée à la catégorie de projets qui te concerne.

Les études d'impact sont trop lourdes. Les descriptions biophysiques dépassent largement les besoins. Nous sommes les bureaux qui réalisent ces études-là et on déplore qu'on nous force souvent à faire - ce que nous appelons dans notre métier - de l'"inventorite" inutile, de la "compilite" inutile. On perd le public avec des données souvent inutiles.

Également, la participation tardive du public dans la procédure. Les audiences publiques. Quand on a certains projets et qu'on va aux audiences publiques, on considère que c'est un lieu d'expression des oppositions plutôt qu'un lieu d'échanges constructifs. On pense également - mais là-dessus, on n'insiste pas plus que ça -que, si on ne fait pas attention, notre procédure peut être peu concurrentielle par rapport à celle des autres provinces ou des autres États américains.

Autre lacune, c'est qu'une fois qu'un projet est réalisé, il n'y a vraiment pas de suivi adéquat. Il y aurait beaucoup de leçons à tirer avec un suivi adéquat, ce qui n'est pas fait présentement.

Autre constat, c'est que le rapport Lacoste constitue, pour nous, une première étape qui vise à dégraisser l'actuelle procédure. On épouse beaucoup de points de vue là-dessus. Nos membres ont déjà travaillé là-dessus et il y a beaucoup de choses à aller tirer du rapport Lacoste avec lequel on est d'accord.

Alors, je vais maintenant aller dans la deuxième partie de notre mémoire - vous m'accordez dix minutes - aux recommandations, page 3. Sans être gage de succès, l'introduction des préoccupations environnementales dès les premières phases de la planification d'un projet, constitue la meilleure approche afin d'éviter les problèmes lors des phases ultérieures. L'action écologique commence par une bonne planification.

Une des premières recommandations qu'on pense assez importante, c'est que toutes les politiques, stratégies, plans d'actions gouvernementales ou autres, qui ont une incidence sur l'environnement au sens large, fassent d'abord l'objet d'une évaluation environnementale. Citons, par exemple, la politique énergétique, l'assainissement des eaux, la politique des transports, la

gestion des déchets, les programmes d'aménagement faunique, etc. On pourrait en citer plusieurs. Ces choix de société ne relèvent pas de la compétence de promoteurs privés.

Je veux revenir là-dessus, c'est que les débats portent souvent sur la justification d'un projet. On pense que ce n'est pas aux promoteurs... Ce sont des choix de société. Le promoteur n'a pas à faire ces choix de société là. On se sert souvent, actuellement, de la procédure actuelle pour faire ces débats-là.

La justification générale des projets est un élément clé de la procédure actuelle. Faute de choix de société qui fixent le cadre des projets qui en découlent, c'est au promoteur qu'incombe cette responsabilité. Les audiences publiques deviennent alors un lieu d'expression pour ceux qui condamnent l'absence de choix de société.

Concrétiser cette recommandation équivaut à simplifier de beaucoup la partie de l'étude d'impact consacrée à la justification du projet et à épurer les audiences publiques des interventions à caractère socio-politique.

L'ACEQ recommande la tenue d'un forum pour débattre des aspects qui précèdent; subsé-quemment - s'il y a lieu, on pourrait voir - des modifications pourraient être apportées à la Loi sur la qualité de l'environnement et à ses règlements pour mieux départager les évaluations environnementales liées à la justification d'un projet de celles qui sont liées à sa réalisation même. Ainsi, la loi pourrait être davantage une loi en amont des projets qu'une loi en aval des projets.

L'ACEQ recommande que tous les projets soient assujettis à la procédure d'évaluation des impacts, d'abord par souci environnemental, ensuite par équité envers les promoteurs.

L'ACEQ reconnaît que ses membres sont souvent les auteurs - malgré eux - des études d'impact au caractère encyclopédique qui rebutent à la lecture et qui s'avèrent rébarbatifs au public. Le point de saturation est atteint, surtout lorsqu'on considère qu'une faible partie de la masse de données fournies est réellement utile à la prise de décision. Cette situation est largement attribuable à la portée et à l'étendue de la directive ministérielle.

L'ACEQ favorise et recommande donc d'alléger les études d'Impact. Ces dernières retrouveraient ainsi leur vocation première en constituant des dossiers de gestion environnementale plutôt que des dossiers qui s'apparentent davantage à de la recherche scientifique. Pour ce faire, il est urgent de modifier la procédure actuelle comme suit, préparer un avis de projet mieux documenté, un bon devis détaillé, ce qui n'est pas le cas actuel, l'avis de projet actuel étant trop général; harmoniser la directive avec l'ampleur du projet et ses principaux enjeux environnementaux appréhendés; élaborer une directive qui se concentre sur les enjeux majeurs uniquement. L'idée de soumettre la directive préliminaire à une consultation publique est intéressante. Le cas échéant, II faudrait prévoir un mécanisme qui permette d'atteindre les objectifs visés par cette consultation et éviter que cette dernière ne prolonge indûment les délais;

Enfin, éliminer de la directive les demandes irréalistes ou qui ne relèvent pas de la compétence de promoteurs privés. Par exempte, mentionnons les demandes relatives à l'effet de serre et aux risques additionnels pour la santé, découlant de l'exposition à des rejets divers. Non pas que ces aspects ne doivent pas être pris en compte, mais ils relèvent du domaine de la recherche et, conséquemment, ce sont les ministères concernés qui devraient en assumer la responsabilité.

Ce changement de cap est de nature, non seulement à alléger les études d'impact mais aussi, à réduire considérablement les délais de la procédure. Actuellement, les audiences publiques sont davantage un lieu d'opposition où le promoteur et souvent la firme de conseillers qui l'assiste sont au banc des accusés. Ce climat de confrontation est malsain et ne favorise pas la recherche de solutions acceptables.

L'ACEQ reconnaît que le public n'intervient que tardivement dans la procédure et voit d'un bon oeil toute modification à cette dernière qui permette au public de se prononcer plus tôt. Sa consultation à l'étape de l'élaboration de la directive est intéressante en ce sens.

L'ACEQ privilégie et recommande qu'un rôle de médiation soit dévolu au BAPE. Compte tenu des délais et des coûts liés à la tenue d'audiences publiques, le BAPE devrait encourager la médiation promoteur-public, sans toutefois aliéner le droit de ce dernier à des audiences.

Actuellement, l'obtention d'un certificat constitue une fin en soi, à en juger par le vide total d'efforts consentis au suivi postaménagement. L'ACEQ recommande prioritairement un suivi des projets autorisés, d'une part pour évaluer l'efficacité des mesures correcttves et de mise en valeur proposées dans les études d'Impact et, d'autre part, dans l'optique de constituer une banque de mesures efficaces qui seraient mises à la disposition des promoteurs à l'étape de la planification.

L'ACEQ recommande que toutes les modifications à la procédure qui ne requièrent aucun changement à la loi et au règlement doivent être privilégiées à court terme.

En terminant - J'en al pour deux minutes - il existe un point majeur qui a été soulevé dans le rapport Lacoste et qui concerne en particulier les conseillers en environnement. Il s'agit de la recommandation 19 qui se lit comme suit: Pour améliorer l'équité de la procédure, "les consultants devraient clarifier leurs responsabilités dans leur code de déontologie, pour mieux distinguer les affirmations strictement techniques qu'ils émettent, des opinions liées à la

décision du promoteur". L'ACEQ - qui regroupe donc la plupart des bureaux d'étude qui font les études pour les promoteurs - est particulièrement préoccupée par la perception publique, souvent négative, de la relation consultant-promoteur. Elle entend y faire suite prochainement.

En conclusion, l'ACEQ se réjouit des travaux de la commission de l'aménagement et des équipements de l'Assemblée nationale. Ils témoignent de la priorité accordée à la révision de la procédure actuelle.

Notre association souhaite la mise en place rapide d'une procédure plus flexible et plus efficace, par laquelle la réalisation d'études d'impact se fera dans un climat de véritable partenariat, où tous les intervenants - promoteurs, consultants, fonctionnaires et citoyens -travailleront de concert à la protection de l'environnement et non pas de façon isolée, dans une optique de formalités administratives à remplir et souvent, dans un climat où les frictions Institutionnelles sont réelles.

Le Président (M. Garon): Alors...

M. Lamothe: Ça termine, M. le Président et MM. les députés, notre exposé sur notre mémoire. Je ne sais pas si...

Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. Lamothe. Vous avez la précision des artilleurs: 10 minutes franches.

M. Lamothe: Oui, M. l'artilleur de Shilo. Je vous salue.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Châteauguay.

Mme Cardinal: Merci. Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom des membres ministériels et je vous remercie d'avoir participé à cette commission.

Maintenant, dans votre première page, vous mentionnez que la procédure d'évaluation est non concurrentielle par rapport à celle des autres provinces ou Etats américains. Pourtant, il y a plusieurs groupes - et on peut accepter les longueurs - et plusieurs... Malgré tout, plusieurs commentaires de groupes nous ont laissé croire que c'était peut-être une des meilleures approches environnementales actuellement. Alors, comment pouvez-vous concilier ces commentaires avec votre approche et votre affirmation?

M. Lamothe: Oui. Je voudrais faire remarquer que, dans notre mémoire, ce n'est pas un point majeur pour nous. On l'a mentionné. À l'heure actuelle, certains de nos membres vivent certains projets, surtout en cogénération. Je vous dis qu'on n'a pas la prétention d'une étude exhaustive de tout ce qui se passe dans les États limitrophes américains, mais nos membres qui sont dans la pratique privée, donc qui travaillent pour des promoteurs dans les autres provinces, certains de nos membres nous font part qu'à l'heure actuelle, dans certains cas... Ils nous ont fait part récemment de projets de cogénération où on se posait la question à savoir si notre procédure ne pouvait pas nous poser un problème. Mais, j'aimerais quand même dire au nom de la commission, qu'on n'a pas d'étude exhaustive là-dessus. C'est vraiment de nos membres qui nous ont fait ces commentaires-là suite à des projets récents.

Mme Cardinal: II y a toujours place à l'amélioration, de toute façon, je pense bien.

M. Lamothe: Oui, mais...

Mme Cardinal: Comme vous l'avez si bien mentionné, d'ailleurs.

M. Lamothe: On n'a pas de dossier à l'ACEQ, d'étude comparative vraiment qui dirait: Nous, le Québec, par rapport à l'Ontario, par rapport au Manitoba ou par rapport au Vermont, on se situe là. Nous n'avons pas ça présentement.

Mme Cardinal: En page 4 de votre mémoire, vous dites être "les auteurs - malgré vous - des études d'impact au caractère encyclopédique". Vous êtes quand même des spécialistes engagés par les promoteurs pour défendre en quelque sorte leurs intérêts. Est-ce que vous n'êtes pas bien placés pour convaincre le ministre de la pertinence de tel ou tel projet qui devrait ou non être retenu? Je pense que vous êtes bien placé pour le faire. Alors, pouvez-vous expliciter davantage votre vision?

M. Lamothe: Oui. Je ne sais pas si vous êtes un peu au courant de la procédure actuelle. Une fois que l'avis de projet d'un promoteur a été transmis, éventuellement, il y a une consultation dans les ministères et on émet un guide ou une directive, selon la nature du projet. Quelquefois, nous avons la chance de discuter avec les gens du ministère de l'Environnement avant qu'ils émettent la directive, les conseillers avec le promoteur.

Mais, un moment donné, malgré tout, la directive nous arrive et, excusez l'expression, si on nous demande d'aller compter les arbres dans la directive, même si, nous, on a fait notre devoir en tant que conseillers et qu'on a essayé de convaincre que ce n'était pas pertinent, à partir du moment où la directive dit: II faut que vous comptiez les arbres - je prends cette expression un peu caricaturale - nous, même si on pense que ce n'est pas pertinent, on nous force à le faire. Alors, on aimerait quand même

qu'à l'avenir on en arrive à des directives qui ciblent bien ce que sont vraiment les enjeux d'un projet. Malheureusement - vous avez peut-être déjà vu, madame, c'est quoi un rapport quand c'est une étude d'impact, surtout l'article 31 - c'est souvent des briques monumentales, c'est indigeste et on passe à côté, alors que, si on savait cibler vraiment la directive sur les préoccupations, on pense qu'on arriverait à l'objet qui est de faire un projet conforme à la qualité de l'environnement. (11 heures)

Mme Cardinal: Alors, comme spécialiste, ça vous serait intéressant de tracer de véritables guides d'évaluation en tant que... votre approche au niveau de différents projets.

M. Lamothe: On est peut-être 400 ou 500 professionnels et techniciens, je pense qu'il y a de la matière grise parmi nos membres et on aimerait ça, certainement, la faire valoir quand... La directive, excusez l'expression, c'est... Les règles du jeu sont là, ça définit la patinoire, ça définit les règles du jeu. Au hockey, je vous fais une passe à côté de la ligne rouge, bon, etc., les règles du jeu sont définies. Nous, les consultants, on joue au hockey selon les règles du jeu. Alors, si on a le droit de faire des "passes" de l'autre côté de la ligne rouge, on va les faire, vous savez. On joue les... Bon.

Alors, présentement, les directives, une fois que les promoteurs les ont, il faut les réaliser.

Mme Cardinal: Vous êtes obligés de les suivre, autant que faire se peut.

M. Lamothe: Bien, on pense qu'il y a beaucoup d'améliorations à faire là-dessus.

Mme Cardinal: Sur ça, nous sommes d'accord.

M. Lamothe: ça commence avec l'avis de projet, il faut qu'il soit bien fait. ensuite, notre directive ou le guide qui suit doit aussi être bien fait.

Mme Cardinal: Effectivement. En page 4, le rapport Lacoste nous indique la réalisation des études d'impact. Donc, par votre travail, on compte environ 65 % des délais d'application dans la procédure, une évaluation assez... Qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce que...

M. Lamothe: Ouais, nos membres, par expérience, oui.

Mme Cardinal: On pourrait... C'est assez juste?

M. Lamothe: Oui, oui. Ça couperait ça à quoi? Donc, 32, 33 mois, présentement? Alors, ça couperait ça... Oui.

Mme Cardinal: On pourrait... dans ce sens-là.

M. Lamothe: Oui, oui.

Mme Cardinal: Vous êtes d'accord avec... Je pense que vous êtes d'accord également avec l'ensemble des recommandations du rapport Lacoste. Vous mentionnez, en fait...

M. Lamothe: Oui, on est d'accord avec l'esprit. Notre association ne s'est jamais prononcée sur chacun de tous les points du rapport Lacoste...

Mme Cardinal: Mais, en général... M. Lamothe: En général, oui.

Mme Cardinal: ...le rapport a été bien perçu par votre organisme?

M. Lamothe: Oui, beaucoup, oui. Mme Cardinal: Merci, M. Lamothe. M. Lamothe: Merci, madame.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président et exartilleur. Je salue M. Lamothe, Claude Lamothe, et le félicite au nom de l'Opposition de sa présentation. C'est intéressant qu'un groupe qui a une expérience aussi précieuse et valable vienne la partager avec nous. Votre mémoire est très clair. Nous, de l'Opposition, on n'a pas de mal à accepter presque à 100 % les recommandations que vous faites dans ce mémoire-là.

Vous parlez d'Insatisfaction et, ensuite, vous expliquez pourquoi. Ma première question: Est-ce que cette insatisfaction assez importante, vous l'avez déjà exprimée au ministère ou au ministre avant aujourd'hui, avant cette commission-là?

M. Lamothe: Nos membres, Individuellement, à l'occasion de projets particuliers pour des promoteurs, l'ont fait. Mais, en tant qu'association, là... Je ne sais pas si vous vous rendez compte, on réunit donc... Il a fallu d'abord qu'on fasse le consensus entre nous, bien certain. Disons que ça a été fait par nos membres, individuellement, soit au ministre, soit à des... Mais, en tant qu'association, le faire formellement comme on le fait aujourd'hui, non, c'est la première fois.

M. Lazure: Est-ce que c'est la première fois que vous présentez un mémoire comme ça dans une commission parlementaire?

M. Lamothe: Oui. M. Lazure: Oui?

M. Lamothe: Oui. Notre association est jeune.

M. Lazure: C'est ça, cinq ans?

M. Lamothe: Cinq ans. Notre association est jeune et puis...

M. Lazure: Bon, écoutez, moi, je pense aussi que vos remarques concernant les choix de société qui ne doivent pas être justifiés par des entreprises individuelles... D'autres nous ont parlé de ça aussi et c'est vraiment une chose qu'il faut corriger. Vous donnez des exemples, que ce soit la politique énergétique, l'assainissement des eaux, etc. Comment, d'après vous, ça devrait se tenir, ces grands débats de société? Quelle sorte de forum, quelle sorte d'animateur?

M. Lamothe: Je vais vous avouer honnêtement que... Je n'ai pas de solution à vous dire, mais on s'est penchés sur les conséquences de le faire. Le message qu'on voudrait vous dire, c'est que la loi actuelle, nous, on appelle ça une loi en aval, c'est-à-dire que la loi dit: Tu peux faire un projet, mais prouve-moi que le coup de marteau que tu donnes, tu ne brises pas trop d'oeufs avec. Alors qu'à partir du moment où la préoccupation gouvernementale serait déjà véhiculée dans la planification, donc on serait plus en amont, c'est-à-dire que, dès qu'on pense, c'est en amont d'un projet. La loi actuelle, si vous la voyez, c'est une loi en aval, c'est-à-dire qu'on vous permet de faire toutes sortes de choses: Prouve-moi que tu ne fais pas de dommages.

Je vais vous donner un exemple concret. À partir du moment où la politique des Transports dit: On fait des autoroutes, bien c'est évident que - excusez l'expression - le "kit" autoroute amène nécessairement les impacts qu'on connaît. Donc, ce qui va arriver, c'est qu'on va travailler en aval pour que l'autouroute X soit la mieux faite possible. Mais, au préalable, en ayant choisi l'autoroute, je n'ai pas besoin de faire d'études savantes. C'est qu'au préalable, en amont, II y a un choix qui va être le "kit" autoroute. Là, présentement, ce qu'on dit, nous, c'est qu'il faudrait faire ce débat-là. Vous me demandez: Est-ce que c'est un forum, est-ce que c'est via...

M. Lazure: Le BAPE.

M. Lamothe: ...le BAPE ou une supercommission parlementaire? Je ne sais pas, mais on sent qu'il y a un malaise, là.

M. Lazure: Oui, le besoin a été exprimé par plusieurs depuis trois semaines. Sur le suivi, vous avez un diagnostic assez sévère aussi.

M. Lamothe: Oui.

M. Lazure: À la page 5, vous dites: "le vide total d'efforts consentis au suivi postaménagement". Ça aussi, ça a été déploré par plusieurs. Vous avez vraiment l'impression qu'il n'y en a quasiment pas de suivi?

M. Lamothe: Pas parce que la loi actuelle ne le permet pas. C'est vraiment une question d'application. Nous, on considère qu'à part les promoteurs qui ont les moyens... Je pourrais peut-être citer Hydro-Québec qui, présentement, dans ses projets, fait du suivi. Donc, il y a moyen de tirer des leçons de certains projets. Mais le promoteur, en général, il va faire un projet dans sa vie et ça s'arrête là. On pourrait tirer beaucoup de leçons de ça. Présentement, on dirait que - excusez l'expression, en bon québécois - la "game", c'est d'aller chercher une autorisation, un permis. Une fois que tu as ton permis, là, tu es rendu au ciel. Alors, à ce moment-là, il y a un suivi qui n'est pas fait. Donc, on le déplore, mais ça pourrait être... La loi actuelle, la procédure actuelle le permettrait. C'est parce que ce n'est pas appliqué, ce n'est pas systématisé.

M. Lazure: Vous demandez que la directive soit plus précise, plus pertinente. Vous y faites allusion, mais ce n'est pas clair. Pensez-vous que ce serait utile, pour la rendre plus claire, plus pertinente, qu'elle soit soumise au public pour une période bien déterminée, pas trop longue, qu'elle soit soumise à un examen public?

M. Lamothe: Oui, on le croit. M. Lazure: Vous le pensez.

M. Lamothe: On le croit et j'ai vu récemment, je ne sais pas, on a vu récemment, là, un projet du fédéral où ça a été mis de l'avant. On croit que oui.

M. Lazure: Un peu dans la même veine, le ciblage dans la formulation de la directive pour la rendre plus spécifique au projet, ça rappelle ce dont quelques groupes nous ont parlé: la méthode qui commence à être utilisée aux États-Unis, qu'ils appellent la "fast track", la voie rapide où le promoteur, au départ, a la charge, si vous voulez, la responsabilité de présenter, pas seulement un avis, mais, en même temps qu'il dépose son avis, déjà une étude d'impact, avec, évidemment, le risque qu'il court que ce soit complètement à côté de la "fast track". Mais, vous autres, qu'est-ce que vous en pensez de cette voie rapide comme méthode d'accélérer la procédure?

M. Lamothe: Oui, vous savez, je ne voudrais pas tomber dans la sémantique industrielle, mais c'est parce que le mot "impact", il faut toujours faire attention comment on le véhicule. Évidemment, quand on fait un projet, il n'est pas réalisé, donc c'est des impacts appréhendés. Il faut avoir une bonne connaissance. Mais, souvent, le "fast track", nous, on pense qu'il pourrait être, ce qu'on appelle par les enjeux, c'est-à-dire que, par les enjeux, vous savez... Je donne un exemple: quand vous faites une autoroute, le nombre de décibels que ça émet à 100 et à 200 pieds de l'emprise, c'est toutes des données de base qu'on connaît. C'est que rapidement, par ce qu'on appelle définir les principaux enjeux d'un projet - les enjeux, c'est ce qu'on peut gagner ou perdre d'un projet - on pourrait les sortir rapidement, ce qui n'est pas fait actuellement.

L'impact, vous tombez dans du précis, vous tombez dans de la comptabilité et vous tombez dans des données. Si je veux mesurer l'impact de quelque chose, il faut vraiment que j'aille un peu plus pousser. Alors, c'est une question de vocabulaire. Nous, on le verrait peut-être plus du côté des enjeux, des grands enjeux. Je vous donne l'exemple d'une autoroute. On connaît en gros ce qui découle d'une autoroute en termes d'impact. Je vais vous donner un exemple. Amenez-moi une autoroute. S'il y a une résidence actuelle qui est à telle emprise, nos experts vont vous dire: Ouais, lui, il va ramasser 69 décibels. On le sait, ça. Je veux dire, on le sait d'avance. Donc, ça, c'est ce que j'appelle les enjeux d'un projet. Ensuite, le mesurer, c'est l'impact, est-ce que c'est 68 qu'il va avoir ou 55? Là, on tombe vraiment dans l'impact.

M. Lazure: M. le Président, je remercie M. Lamothe.

Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. le député de La Prairie. Je suspends, pour quelques instants, les travaux de la commission, le temps que Le Regroupement québécois des professionnels de l'environnement s'approche de la table des délibérations puisque son tour est venu.

(Suspension de la séance à 11 h 11)

(Reprise à 11 h 12)

Le Président (M. Garon): Nous reprenons nos travaux, et j'inviterais M. Paul Benoît, président du Regroupement québécois des professionnels de l'environnement, à présenter le groupe qu'il représente et les gens qui l'accompagnent, en lui disant qu'il a une demi-heure, c'est-à-dire, normalement, 10 minutes pour son exposé, 10 minutes pour le parti ministériel et 10 minutes pour le parti de l'Opposition, pour faire valoir son point de vue. Alors, M. Benoît.

Le Regroupement québécois des professionnels de l'environnement

M. Ralnville (Marc): M. le Président, Mmes et MM. les commissaires, je me présente, Marc Ralnvllle, représentant du Regroupement québécois des professionnels de l'environnement. Je suis accompagné de Jean-François Bibeau, à ma droite, Jean-Pierre Joly, à ma gauche, vice-président du Regroupement, et M. Paul Benoît, président du Regroupement.

Nous vous remercions de nous accorder la parole dans le cadre de cette commission de l'aménagement et des équipements. L'exercice qui nous lie a pour but de dresser un profil du rôle des audiences publiques et de son principal gestionnaire, le BAPE. Vu que la commission a reçu une copie de notre mémoire, nous soulèverons Ici les points majeurs de notre document.

Quelques mots d'abord sur notre organisme et ses objectifs. Le RQPE est un organisme à but non lucratif regroupant des professionnels Issus de disciplines reliées à l'environnement. Il est présent sur la scène environnementale depuis maintenant près de cinq ans. De façon générale, le RQPE vise à faire reconnaître la formation universitaire professionnelle dans un domaine lié à l'environnement. De plus, il veut favoriser l'implication sociale des professionnels en environnement dans une perspective multidisciplinaire.

Dans le contexte de la présente commission, nous avons étudié la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. Nous avons abordé l'évaluation dans le cadre d'une approche globale découlant du concept de développement durable. Dans cette perspective, nous croyons qu'il est essentiel d'accentuer le rôle du BAPE au sein de la démarche environnementale québécoise. De plus, nous pensons qu'il est nécessaire d'ajouter à la procédure actuelle d'évaluation des outils complémentaires de gestion de l'environnement.

Les audiences publiques sont, à notre avis, un outil essentiel à la participation publique en matière de développement et d'environnement. Cet outil précise et souligne les enjeux sociaux liés aux divers projets de développement, tout en favorisant la recherche de solutions socialement acceptables.

Le BAPE est un organisme qui a développé une expertise dans le domaine des audiences à caractère environnemental depuis plus d'une décennie. C'est un organisme qui a eu et qui conserve un rôle consultatif de premier plan, et qui permet à tous, sans aucune discrimination, de s'exprimer face à des enjeux environnementaux. Il a, de façon générale, permis l'amélioration des études d'impact environnementales et éduqué à la fois les intervenants et les promoteurs de projets à l'importance de la conjonction entre le

développement et l'environnement.

C'est pourquoi nous croyons qu'il est nécessaire de rendre le BAPE plus autonome en le mettant directement sous la gouverne du Conseil des ministres. Le BAPE serait alors Indépendant de tous les ministères et conserverait une position de neutralité interministérielle essentielle à la réalisation de son mandat élargi d'évaluation environnementale. De plus, il serait utile de lui adjoindre l'aide d'un comité ad hoc, consultatif, composé d'intervenants des divers milieux liés aux enjeux des projets. Ce comité lui permettrait de mieux cerner les incidences des nouveaux projets, de définir des règles claires en matière de mitigation environnementale et d'estimer les délais de procédure en relation avec ('ampleur des projets et des programmes soumis.

Le BAPE doit aussi devenir plus autonome en ce qui a trait à la sélection des projets litigieux non assujettis aux règlements, des programmes de gestion des ressources et des plans de gestion intégrée des déchets. Notons que, dans le cas de ces derniers, leur soumission répond à une demande sociale de plus en plus criante. Pour sa part, l'efficacité du BAPE serait améliorée de façon générale par la réduction des délais préaudiences, sauf dans le cas de projets et programmes majeurs auxquels la procédure devra adapter des délais plus souples selon l'ampleur des enjeux pour des projets ou des programmes de niveaux national, régional ou local.

L'élargissement du rôle du BAPE passe aussi par la possibilité de réactiver des audiences pour des projets acceptés mais ayant subi des modifications majeures postérieures aux audiences. Par ailleurs, le suivi environnemental lors de la réalisation des projets, bien qu'effectué par le MENVIQ, devra être soumis au BAPE en vue de vérification finale. Le travail d'évaluation environnementale doit être intégré dès les premières phases de conception des projets et des opérations. En ce sens, il nous apparaît très prometteur d'inclure aux études d'impact un bilan des activités de production et/ou de transformation ayant des incidences environnementales et des mesures de contrôle. Cette prise en compte des aspects environnementaux à la source limiterait sans doute un certain nombre de conflits lors des audiences.

Par ailleurs, l'Instauration d'un programme de suivi des normes et directives environnementales lors de la réalisation des travaux compléterait la prise en compte des volets environnementaux au sein même des activités à caractère économique du promoteur. La mise sur pied de systèmes de gestion plus écologiques des entreprises à l'image de ce qui se développe en Europe, notamment à l'image du modèle des modules de Winter traitant des divers aspects de la gestion des opérations, de la formation des employés, de la santé et sécurité, etc., cons- tituera un apport majeur à une meilleure intégration du développement social et économique et de l'environnement.

Finalement, l'implantation d'incitatifs économiques dont la célèbre taxe verte pourra favoriser, dans un avenir prochain, la réduction des impacts environnementaux à la source. Soulignons que la taxe verte est actuellement à l'étude, notamment en ce qui concerne les secteurs de l'automobile et de l'agro-alimentaire.

Le BAPE est un organisme essentiel à la réalisation du développement durable, tel que défini par le rapport Brundtland. Les débats autour de projets tels Soligaz et Grande-Baleine ne doivent pas nous faire oublier l'importance des aspects environnementaux dans une perspective où on désire réellement prendre en compte les intérêts des générations futures. Cette vision du développement durable implique qu'un organisme comme le BAPE puisse croître de façon à répondre à une demande sociale, de plus en plus grande, d'intégration entre les considérations propres au développement et celles liées à l'environnement.

En terminant, nous voulons vous remercier de nous avoir écoutés. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Nicolet.

M. Richard: Merci, M. Rainville, au nom de votre groupe, de la présentation de votre mémoire. Je m'interroge, a la page 3, quand vous dites: "Notre organisme, dont les membres sont issus de disciplines diverses, oeuvre à la promotion de la multidisciplinarité" - multidisciplinaire, je présume? C'est quoi? C'est qui?

M. Rainville: Le RQPE regroupe des membres de formation universitaire de deuxième cycle, principalement. Quelques membres sont issus du premier cycle, avec de nombreuses années d'expérience. On n'a aucun technicien membre. Il n'y a aucune possibilité pour les techniciens d'être membres du RQPE. Ce sont vraiment des personnes ayant des diplômes de niveau supérieur.

M. Richard: Mais, ça veut dire quoi en nombre?

M. Rainville: En nombre, ça représente actuellement environ 75 à 100 personnes.

M. Richard: Ça va. Maintenant, je fais référence à la page 7 de votre mémoire où vous parlez en fonction... le BAPE, au niveau de la population. Est-ce qu'elle devrait intervenir? Quelle serait la meilleure mécanique? Est-ce qu'elle devrait intervenir dès l'élaboration de la directive gouvernementale?

M. Bibeault (Jean-François): La population. En fait, si on prend l'image du "scoping" qui est utilisé aux États-Unis, dès les premières étapes de l'évaluation environnementale, on va faire intervenir des gens de la population, de différents groupes, qui vont aider à délimiter, justement, les enjeux sociaux à partir desquels les promoteurs pourront mieux guider leur étude d'évaluation environnementale. Donc, c'est vraiment à ce niveau-là ou, en tout cas, de cette façon-là qu'on pense qu'on devrait intégrer la population dans un premier temps.

M. Richard: Qui va sélectionner les groupes?

M. Bibeautt: II est évident qu'il y a toute une mécanique. Il y a d'abord la considération du type de projet. Si on s'intéresse, par exemple, à un projet d'incinérateur, il y a des groupes environnementaux qui ont plutôt ciblé des problématiques, donc on ira nécessairement voir ces types de groupes là. On ira aussi dans le milieu universitaire. Il y a des gens qui font de la recherche sur des thématiques, dont celle-là. On ira chercher les gens qui ont des formations ou des préoccupations particulièrement ciblées sur les problématiques qui seront soumises.

M. Richard: Quand vous dites: On ira les chercher, qui ça, "on" ira les chercher?

M. Bibeautt: Ça, ça devrait être possiblement des personnes qui travaillent à l'intérieur du BAPE même.

M. Richard: Ça m'amène à faire une référence à la page 20 de votre mémoire où vous semblez d'accord avec la régionalisation.

M. Bibeautt: Oui.

M. Richard: La régionalisation du processus d'évaluation.

M. Bibeault: Oui.

M. Richard: Est-ce que vous dites, à ce moment-là, que les audiences publiques devraient être limitées aux dossiers régionaux et dans les régions spécifiques?

M. Bibeautt: Non. Parmi les dossiers que le BAPE doit traiter, il y a trois niveaux de dossiers. Il y a les dossiers locaux; on pourrait penser à un exemple comme un projet de marina. Il y a les dossiers à caractère régional, comme la gestion intégrée des déchets. On en parle un petit peu, un petit peu avant dans le mémoire. Il y a les dossiers à caractère provincial; on va parler de programmes, par exemple, d'aménagement des forêts ou d'un type de programme comme la gestion de déchets dangereux. Dans chaque cas, quand on parle des... Quand je parlais de la sélection du BAPE, c'est de façon générale. Le BAPE, à l'Intérieur des processus de sélection, va être présent à tous les niveaux sauf que, par exemple, au niveau régional, il est bien évident que les élus régionaux devraient avoir leur mot à dire sur les personnes à qui on devrait demander leur avis en ce qui a trait à l'étape du "scoping". Ça, c'est évident que le BAPE n'est pas tout seul. Il y a un travail d'Intégration graduelle du BAPE au milieu: plus le projet est petit, plus l'Intégration au milieu va être grande.

M. Richard: Vous semblez dire que le BAPE aurait comme rôle non seulement d'auditionner ou d'entendre les gens qui veulent se faire entendre, mais, en parallèle ou en complémentarité, qu'il aurait le mandat d'aller demander des expertises et de les solliciter, les expertises.

M. Bibeault: Oui. Encore là, c'est dans le cadre du "scoping". Donc, on est à l'étape avant les audiences où on délimite les enjeux pour le promoteur.

M. Richard: Je m'excuse. Quand tu parles de "scoping", tu veux dire quoi?

M. Bibeautt: O. K. Aux États-Unis, ce qu'on fait, en pratique, c'est qu'on invite les différents intervenants qu'on a ciblés. On les invite dans une salle comme ici puis on leur demande, d'après eux, à partir des avis d'avant-projets, quels seraient les enjeux majeurs qui vont les préoccuper. Dans le cas d'un Incinérateur, par exemple, les gens peuvent dire Immédiatement: Bien, nous, c'est les dioxines et les furannes qui sont émis par l'Incinérateur qui nous préoccupent en grande majorité. Donc, à partir de ça, le promoteur saura cibler son évaluation environnementale de façon à répondre beaucoup mieux à la demande sociale.

M. Richard: O. K. De quelle façon vous voyez l'aide qu'on pourrait apporter à des groupes qui voudraient se manifester ou donner leur opinion?

M. Benoit (Paul): II est évident que, selon l'ampleur des programmes ou des projets, l'aide apportée doit être différente. Nous, on a essayé de vérifier un certain nombre d'alternatives à l'interne. On n'a pas vraiment réussi à trouver la solution miracle, mais ce qu'on pense peut-être, c'est que ça pourrait être un genre de programme où...

Les intervenants se plaignent souvent du manque de ressources. Alors, ce qu'on pourrait peut-être faire à ce moment-là, c'est de déterminer une enveloppe budgétaire, si on peut appeler ça comme ça, pour un projet donné ou un programme donné, recueillir les Intentions de

participation et subvenir à un besoin minimal au départ. Nous, on disait que peut-être un quart ou un tiers d'un budget pourrait être aléatoirement donné au début, de façon à couvrir les frais inhérents à la rédaction du rapport pour les gens qui veulent participer; le reste, un montant qui serait les deux tiers ou les trois quarts, à la fin, lors du dépôt final, de façon à effectivement permettre aux gens ou à forcer les gens à soumettre les rapports finaux.

M. Richard: Au niveau des ressources, tout à l'heure - je ne sais pas si vous étiez là, à ce moment-là - la Communauté urbaine de Québec nous disait que, dans un dossier particulier, elle avait mis au service des gens du milieu des ressources techniques de base: locaux, téléphonie, photocopieurs et tout ça. C'est quand même l'élément de base dont tout le monde a besoin a priori. Est-ce que ça, ça vous plaît, cette idée-là que...

M. Benoit (Paul): Personnellement...

M. Richard: ...déjà, au départ, il y ait ce genre d'aide du promoteur? Dans ce cas-là, le promoteur, c'était effectivement le monde municipal, la Communauté urbaine.

M. Benoît (Paul): Ça peut peut-être être un petit peu limitatif si les enjeux sont plus importants. Au niveau d'un projet local, ça peut avoir un certain Intérêt de mettre des installations de cet ordre à la disponibilité des gens. Mais, si on parle de programmes ou de projets régionaux ou provinciaux, à ce moment-là, ça devient un petit peu plus sélectif, ce genre d'approche là. Les gens devraient se présenter à un endroit donné pour pouvoir avoir le support nécessaire. Si, dans leur localité ou près de chez eux, ils sont capables de l'avoir, s'ils ont les ressources financières, à ce moment-là ça faciliterait beaucoup plus la participation des gens, je pense.

M. Richard: Dépendamment de l'ampleur du projet.

M. Benoit (Paul): Dépendamment de l'ampleur du projet. Exactement.

M. Richard: Je terminerai, M. le Président, avec cette question-ci. En confiant la responsabilité au BAPE... Dans votre document, en référence à la page 14, vous dites et, en fait, assez clairement, que vous donneriez la responsabilité au BAPE de choisir les projets sur lesquels II aura à décider ou à porter un jugement. Vous ne pensez pas qu'à ce moment-là vous les mettez un peu juge et partie parce que, en fait, dès l'instant où le BAPE choisit un projet, ça sous-tend directement que le BAPE identifie le projet à caractère litigieux ou II a l'obligation, c'est donc qu'il a des doutes à l'effet que ce projet-là soit vraiment protecteur de l'environnement. Vous ne pensez pas qu'à un moment donné ça... Ce n'est pas le cas à date, c'est pas comme ça que ça fonctionne à date.

M. Bibeault: Non. O.K.

M. Richard: Est-ce que ma question est claire?

M. Bibeault: Oui, oui. Premier élément, c'est ça. Tout d'abord, il est évident qu'on est pour une liste d'assujettissement obligatoire. Dans ce cas-là, il n'y a pas de problème. Dans le cas des autres projets, il est évident qu'un avis, par exemple, du ministère de l'Environnement ou du ministre de l'Environnement au BAPE concernant un projet serait sûrement considéré comme avis prioritaire à considérer dans l'assujettissement d'un projet. Je pense que ce qui est important de noter, c'est de ne pas nécessairement avoir une liste de non-assujettissement. C'est qu'il y a des types de projets, justement, les projets-milieux ou les nouveaux types de développement qui peuvent être en cours - on pense à des projets à caractère de recherche biotechnologique qui pourraient avoir des incidences importantes pour le milieu - qui sont difficilement classifiables. Donc, on doit laisser une certaine latitude.

Nous pensons que le BAPE, qui pourrait être conseillé par le ministère de l'Environnement et qui pourrait aussi être conseillé par un comité ad hoc qu'on définit sommairement dans notre rapport, pourrait prendre une décision quant à l'assujettissement du projet.

M. Richard: Mais à cette recommandation 5, vous êtes beaucoup plus précis que ça. Toi, tu as fait un peu de politique, parce que, là, tu es moins précis. Dans le document, c'est: "Que le BAPE soit maître d'oeuvre dans le choix des projets à assujettir à la procédure d'audiences".

M. Bibeault: Oui, oui.

M. Richard: II n'y a aucune latitude là. C'est le BAPE qui déciderait les projets qui pourraient être assujettis à la procédure d'audiences publiques.

M. Bibeault: C'est qu'on reconnaît que le BAPE aurait le rôle, vraiment, de maître d'oeuvre. Mais, comme tout maître d'oeuvre, le maître d'oeuvre reçoit aussi des inputs d'autres instances, d'autres ministres ou d'autres ministères. Le BAPE n'est quand même pas en vase clos. Il faut bien comprendre qu'il y a un processus dynamique de relation entre le BAPE et l'extérieur.

M. Richard: Mon questionnement n'était pas qu'il soit maître d'oeuvre...

Le Président (M. Garon): Je vous remercie.

Le temps étant dévolu...

M. Richard:... c'est qu'il ait le choix.

Le Président (M. Garon): Le temps dévolu étant écoulé...

M. Richard: Merci, monsieur.

Le Président (M. Garon):... je donnerai la parole au député de La Prairie, en invitant les membres de la commission à éviter d'employer des formules familières et à plutôt utiliser le vouvoiement, selon les règles de notre règlement. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de l'Opposition, remercier M. Benoît et ses collègues pour leur présentation. C'est un groupe qui est jeune - cinq ans vous disiez? - formé surtout de jeunes. Vous êtes, pour certains d'entre vous, des consultants et d'autres, dans des ministères, je suppose?

M. Benoit (Paul): Les membres sont issus effectivement soit du ministère ou des ministères, de groupes de consultation, de groupes de recherche universitaire, de groupes d'enseignement. Môme, on peut se vanter d'avoir le mérite d'avoir un avocat parmi les membres, dont la spécialité est en environnement, évidemment. Pour nous, c'est quand même important de démontrer que la multidisciplinarité ou l'aspect multidisciplinaire est effectivement ancré dans nos moeurs en ayant la chance d'avoir des gens de tous les milieux qui sont axés sur l'environnement.

M. Lazure: Quelle est la discipline où il y a le plus de membres, biologistes ou...

M. Benoit (Paul): Je vous dirais que c'est la biologie et des programmes généraux. Surtout, il y a beaucoup de membres qui sont issus de la maîtrise en sciences de l'environnement de l'Université du Québec à Montréal. Donc, ça leur permet d'être axés sur différentes disciplines à ce moment-là, tout en étant assez généraux.

M. Lazure: Bon. Je veux m'arrêter un peu sur les réflexions que vous faites sur la nature du BAPE, son rôle, ses juridictions. Dans votre résumé, à la recommandation no 2, vous dites: "Que le BAPE ne dépende plus du ministère de l'Environnement du Québec, mais seulement du Conseil des ministres. " Il y a quelque chose qui sous-tend cette recommandation-là. Moi, ce qui m'intéresse, ce n'est pas la recommandation, c'est ce qui sous-tend la recommandation. D'abord, je pense que ce n'est pas tout à fait réaliste. Moi, je ne connais pas de précédent où un organisme gouvernemental ne répond pas à un ministre. Il faut que ça réponde à un ministre parce que lui doit répondre ensuite à l'Assemblée nationale. Je comprends ce que vous voulez dire, mais j'aimerais comprendre un peu mieux pourquoi vous arrivez à une telle recommandation.

M. Benoit (Paul): Nous, on croit que le fait d'être assujettis à un ministre, justement, peut parfois sembler aplanir l'aspect de neutralité du BAPE. À l'occasion où le ministère de l'Environnement pourrait être appelé à promouvoir des programmes - justement, parce que, nous, on veut inclure dans la procédure les programmes provinciaux; on pourrait penser, par exemple, au Programme d'assainissement des eaux qui a été présenté, qui a été accepté et qui a été déposé - ces programmes-là pourraient, à la limite, faire partie du secteur de juridiction du BAPE. Alors, si le ministère est maître d'oeuvre ou promeut ce genre de programme là, II y a comme une espèce de dilemme entre le fait qu'on veut promouvoir le programme et essayer de le faire passer sous audience publique.

M. Lazure: Oui, mais c'est le Conseil des ministres qui a approuvé le programme, donc ça devient le programme du Conseil des ministres aussi.

M. Benoit (Paul): Oui, effectivement, mais, à la limite, on peut se retrouver dans une espèce de cul-de-sac, c'est sûr.

M. Lazure: Oui. Mais vous la faites dans l'optique d'une plus grande neutralité, d'une plus grande objectivité.

M. Benoit (Paul): Exactement, exactement.

M. Lazure: bon. dans le moment, vous le savez, le fonctionnement quotidien, d'accord, c'est de la juridiction du ministre de l'environnement, mais la décision finale, quand le bape fait un rapport, c'est le conseil des ministres qui la prend.

M. Benoit (Paul): Exactement.

M. Lazure: Toujours dans l'optique d'une plus grande objectivité, crédibilité, on a eu des groupes qui nous ont proposé que le président ou la présidente du BAPE soit nommé par l'Assemblée nationale au vote des deux tiers des députés. Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion-là?

M. Bibeault: A priori, ça semble quand même assez intéressant parce qu'on aurait, justement, l'aval directement de l'Assemblée nationale. Je pense que c'est une mesure qu'il faudrait envisager, II y en a peut-être d'autres aussi, d'autres règles aussi qu'on devrait évaluer. Parce que le problème, c'est qu'il ne faut pas, non plus, que la nomination devienne à caractère

trop politique. Est-ce que, du point de vue de la population, une nomination qui viendrait de l'Assemblée nationale serait bien perçue? Je ne le sais pas. Je pense qu'il faut s'asseoir et regarder, II y a différentes formules.

M. Lazure: Dans l'hypothèse qui est émise, c'est que c'est supposé être bien perçu quand c'est nommé par les deux tiers des députés de tous les partis plutôt que d'être nommé seulement par le Conseil des ministres sur recommandation d'un ministre. Comprenez-vous?

M. Bibeault: C'est un compromis quand même intéressant, là, mais c'est ça, je pense qu'il faut regarder, II y a peut-être d'autres règles aussi.

M. Lazure: En avez-vous à...

M. Bibeault: Non, pas pour l'instant.

M. Lazure: Non. D'accord. Je note que vous parlez aussi des lacunes dans le suivi des projets, avec raison, d'autres groupes l'ont fait et je pense bien que c'est une piste qu'on va explorer dans le rapport final. Je pense qu'il y a beaucoup, beaucoup à faire pour non seulement améliorer le suivi, mais s'assurer que ce qui a été décidé dans l'autorisation soit vraiment mis en vigueur par le promoteur, par l'entreprise et s'assurer aussi qu'il n'y a pas eu des changements importants sans que ce soit rapporté au ministère.

Vous rejoignez aussi la CUQ qui a passé juste avant vous, la Communauté urbaine de Québec, qui propose à bon droit de faire des audiences conjointes, pour ainsi dire, entre les communautés urbaines et le BAPE. Bon, pour la gestion de déchets, c'en est une question qui pourrait très bien être faite conjointement. Est-ce que vous en voyez d'autres?

M. Benoit (Paul): Oui, il y aurait peut-être au niveau du... On pourrait plus parler, à ce moment-là, de programmes à tendance un peu plus régionale, par exemple. Tout à l'heure, la CUQ amenait le problème d'aménagement du territoire sur son secteur. À ce moment-là, il y aurait peut-être moyen, dans un contexte où l'aménagement du territoire est pris en compte de façon globale pour la province, de faire une audience conjointe pour le problème de la CUQ, par exemple.

M. Lazure: Merci.

M. Benoit (Paul): De rien.

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Je remercie les représentants du Regroupement québécois des professionnels de l'environnement de leur contribution, de leur apport aux travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants pour donner le temps au Parti vert de s'approcher et de se préparer pour son intervention.

(Suspension de la séance à 11 h 39)

(Reprise à 11 h 43)

Le Président (M. Garon): M. Jean Ouimet, représentant du Parti vert, en nous assurant que vos appareils n'émettent pas des champs magnétiques qui peuvent nuire à notre santé...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): ...parce qu'on sait que l'électricité développe des champs magnétiques et qu'il y a beaucoup de recherches qui se font aux Etats-Unis sur les effets de ces champs magnétiques.

Avez-vous remarqué que les gens de la commission, il y en a plusieurs qui ont un certain âge et que leur vue est peut-être moins forte que vous ne le supposez? Ça ne veut pas dire qu'ils ne voient pas clair, mais...

Une voix: Ils ont bien de la misère à lire.

Une voix: Bien non, à notre âge, on est presbyte et non pas myope.

Le Président (M. Garon): Là, je vois.

M. Ouimet (Jean): Est-ce que ça va? C'est lisible?

Une voix: Oui, oui, très bien. Parti vert

M. Ouimet: Bien. Merci d'avoir permis au Parti vert de venir présenter sa vision sur la procédure d'évaluation des impacts sur l'environnement. Je tiens à dire bonjour à M. le Président et aux membres de la commission.

D'abord, le Parti vert a voulu faire une présentation qui soit plutôt sur le thème "Penser globalement, agir localement", et essayer de remettre un peu, de regarder cette procédure-là de façon plus globale.

Le Président (M. Garon): Je veux seulement vous dire, M. Ouimet, j'ai oublié de vous le dire...

M. Ouimet: Oui.

Le Président (M. Garon): Vous avez une demi-heure, c'est-à-dire normalement 10 minutes

pour exposer votre mémoire, 10 minutes pour le Parti libéral et 10 minutes pour le Parti québécois.

M. Ouimet: D'accord, monsieur.

Le Président (M. Garon): Parce qu'on doit ajourner nos travaux...

M. Ouimet: M. le Président, on va respecter le temps. D'abord, c'est de constater...

Une voix: Dix minutes pour les trois partis. Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Dix minutes pour les trois partis, dix minutes pour nous et dix minutes par parti.

M. Ouimet: D'abord, c'est de constater...

Le Président (M. Garon): Je rappelle au sérieux les membres de la commission.

M. Ouimet: D'abord, c'est de constater l'appauvrissement social et écologique du Québec qui exige d'agir maintenant. Je pense qu'on constate quand même que, pendant trop longtemps, on a simplement évalué l'impact économique d'un projet de développement et qu'on a négligé les autres aspects. Alors, le projet était rentable si l'impact économique était positif. Maintenant, on peut se poser la question, à savoir: Cette croissance-là sans arrêt, ça a été possible, mais à quel prix? Alors, pour nous, ça a été fait au détriment des richesses humaines et des richesses naturelles, comme l'a constaté le Club de Rome il y a déjà près de 18 ans et encore récemment la commission Brundtland. D'ailleurs, la commission Charbonneau nous a permis de savoir l'état de la situation des déchets dangereux, qui est un peu une retombée également de notre développement économique. C'est le prix qu'on a dû payer. Alors, notre vision, c'est de faire en sorte que cette procédure-là s'inscrive dans le cadre du développement viable et sécuritaire.

Rapidement, je rappellerai la définition que la commission Brundtland nous donnait du développement viable, à savoir que c'est un processus de changement dans lequel l'exploitation des ressources, l'orientation des investissements et le changement des institutions sont déterminés en fonction des besoins tant actuels qu'à venir. Également, il faut voir que le développement viable, c'est lié à une amélioration de la qualité de vie, de faire en sorte que les générations présentes et les générations futures vont pouvoir avoir une qualité de vie qui repose sur une préservation du patrimoine. Il va falloir qu'on apprenne à faire plus avec moins.

Pour évaluer, justement, l'impact environnemental d'un projet, selon nous, il faut con- sidérer trois types de richesses d'une société, à savoir les richesses humaines, naturelles et artificielles. Alors, traditionnellement, on évaluait les richesses d'une société selon le PNB, c'est-à-dire selon le produit national brut, qui nous permettait d'évaluer s'il y avait une croissance ou non et on obtenait une croissance linéaire, bon an, mal an, à travers les années, depuis la Seconde Guerre. C'est ce qu'on a observé dans les pays industrialisés.

Maintenant, nous, on veut étendre cette notion-là de richesses de la société de façon à considérer les richesses artificielles, qu'on mesure avec le PNB, et également les richesses humaines et les richesses naturelles. Alors, pour les richesses artificielles, on va considérer l'ensemble des biens et des facteurs de production, donc l'aspect artificiel créé par l'être humain, alors qu'au niveau des richesses humaines, ça va être l'ensemble des êtres humains avec tout leur bagage culturel. Pour les richesses naturelles, alors, là, ça va être d'évaluer les différentes atmosphère, hydrosphère, lithosphère, biosphère, de même que l'énergie. Alors, c'est un peu une façon d'avoir des Indicateurs pour évaluer ces richesses-là, qui sont des éléments qu'il faut considérer quand on évalue l'Impact d'un projet pour le développement d'une société. Alors, c'est de faire en sorte que l'Impact économique d'un projet, ce soit une des dimensions à considérer, qui correspond à ce qu'on prend traditionnellement pour la croissance du PNB. Mais il y a également l'impact humain d'un projet qui, lui, doit aller dans le sens de l'augmentation de la qualité de vie, de même que l'impact écologique qui, lui, doit aller dans le sens d'une augmentation de la qualité de l'environnement. Alors, lorsqu'on parle de l'Impact global d'un projet, ça doit se faire selon ces trois axes-là, ces trois types de richesses là qui nous permettent d'assurer un développement viable.

Donc, un développement viable, c'est un développement qui va être harmonieux et qui va se faire selon ces trois axes-là, pour nous permettre d'avoir vraiment un enrichissement collectif, et c'est ce qui a souvent été négligé. Alors, ce qu'on a obtenu, malheureusement trop souvent, ça a été un développement non viable des richesses qui a fait qu'on s'est mis, à un moment donné, à se développer plus dans le sens des richesses artificielles de notre société. On a accru notre PNB, mais, comme on peut le voir, on a diminué nos richesses naturelles et nos richesses humaines. Alors, c'est ce constat-là d'appauvrissement social et écologique qui est l'état de la situation actuellement et qu'il faut questionner lorsqu'on parie de procédure d'évaluation, donc d'avoir une vision plus globale.

Alors, lorsqu'on va donc évaluer la viabilité d'un projet, ça devrait se faire selon les trois types de richesses que je viens de présenter et ça devrait aussi reposer sur un ensemble de

contraintes à respecter. Alors, on peut penser au fait de ne pas dépasser le seuil de renouvellement d'une richesse renouvelable. On volt le problème au niveau des pêcheries ou de l'industrie forestière: il y a des seuils qui n'ont pas été compris et qui ont été dépassés et on voit ce que ça donne pour les gens qui vivent en Gaspésie. On peut penser aussi à ne pas dépasser le seuil de recyclage naturel d'un déchet ou d'un rejet. Naturellement, la nature recycle des déchets, mais, quand on en rejette trop, bien, c'est là qu'on parie de pollution, lorsqu'il y a une accumulation dans la nature. Également, ne pas rejeter des produits qui sont non recyclables par la nature. Hier encore, on pariait au niveau des Grands Lacs; II faut parier, à ce moment-là, de ne pas rejeter des produits non biodégradables dans les Grands Lacs; c'est dans cette perspective-là qu'on peut évaluer la viabilité d'un développement. Également, ne pas rejeter des produits qui menacent la vie de l'être humain. On découvre que le problème des furannes, des différents produits qui sont dans notre environnement, menace la santé de l'être humain et on ne peut pas se permettre de continuer à rejeter ça. De la même façon, on ne peut pas aussi menacer de détruire une espèce vivante ou une culture. Hydro-Québec a compris ça et a modifié son projet de Grande-Baleine pour faire en sorte de ne pas toucher les phoques qui vivent en eau douce dans le Nord du Québec, donc elle réduit, augmente la viabilité, si on veut, de son projet, quoique ce soit toujours questionnable.

Alors, donc, on obtient un espace de viabilité d'un projet et, quand on parie de procédure d'évaluation des impacts sur l'environnement, il faut voir quelle est la viabilité du projet et ça doit être défini par un ensemble de contraintes qu'on doit nécessairement rencontrer. Alors, un projet sera non viable s'il ne rencontre pas ces contralntes-là et viable lorsqu'il les rencontre, c'est-à-dire qu'à l'intérieur de cet espace de viabilité on a des projets qui sont viables. Alors, ce qu'on propose, nous, c'est de considérer, donc, les impacts d'un projet sur ces trois types de richesses de façon à améliorer la qualité de vie des Québécois et à prévenir plutôt que guérir.

Alors, les organismes d'évaluation des impacts sur l'environnement, on en retrouve deux. On devrait avoir les conseils de l'environnement et le BAPE. Alors, les conseils de l'environnement, selon nous, auraient le mandat, tant au niveau québécois que régional, parce qu'il y a déjà des conseils régionaux de l'environnement, d'Informer et d'éduquer la population et les gouvernements sur la situation écologique présente, donc de faire un genre de suivi, entre autres, de ce que la commission Charbonneau a commencé à faire sur la situation des déchets dangereux, pour pouvoir mettre ça à jour et faire en sorte que la population soit au courant de l'état des déchets dangereux actuellement, en 1991, au québec, sinon ça va être dépassé, ça va dater de 5, 10 ans. ce serait important d'avoir un suivi là-dessus; d'évaluer les impacts des programmes et des politiques des gouvernements, comme le recommande le rapport lacoste, mais nous, on affecterait ça à des conseils régionaux ou au conseil québécois de l'environnement; d'assurer la médiation environnementale; de déterminer la directive pour les études d'impact d'un projet. selon nous, les conseils de l'environnement, commissions composées de représentants, d'intervenants dans le milieu, de la société, qui sont intéressés par la problématique environnementale, c'est eux qui sont le plus à même de pressentir quels seront (es indicateurs à surveiller dans l'évaluation pour s'assurer que leur préoccupation est prise en considération dans les études d'impact; d'assurer le suivi, comme ça a été mentionné par plusieurs autres groupes, de façon à améliorer la valeur des prévisions et surtout l'efficacité des mesures d'atténuation, parce que c'est dans ce sens-là aussi qu'il doit y avoir un suivi, et, évidemment, d'évaluer les impacts cumulatifs, ce qui ne se fait pas actuellement, malheureusement, et - on l'a vu dans le cas de saint-romuald - à un moment donné, ça pose un problème: est-ce qu'on dépasse des seuils de pollution de l'air qui deviennent inacceptables?

Quant au BAPE, il devrait continuer à avoir son rôle pédagogique auprès de la population et des décideurs qui participent aux audiences et à évaluer les impacts globaux de chaque projet qui a un impact significatif sur l'environnement social et naturel.

Alors, cette procédure-là, pour nous, repose d'abord sur un sens des responsabilités qui est trop souvent absent dans notre société. Au bon fonctionnement de toute procédure d'évaluation des Impacts sur l'environnement, il devrait y avoir une prise de conscience collective des droits, des libertés et des responsabilités qui sont nécessaires au bon fonctionnement de cette procédure-là. Je pense qu'on arrive, de cette façon-là, avec un nouvel environnement, un nouvel espace juridique, si on veut, et j'ai une courte animation qui permet de présenter ça. Et c'est parti!

Alors, donc, on a un espace juridique actuellement qui est défini seulement par les droits et les libertés en ce qui concerne la personne. Il y a déjà une certaine restriction au niveau des acteurs et selon seulement la dynamique politique, économique et sociale. Selon nous, c'est un espace juridique qui devrait être élargi de façon à ce qu'on puisse couvrir des ensembles qui sont non couverts actuellement. On peut penser au problème de l'avortement. Le problème des manipulations génétiques, lorsqu'on parie de viabilité aussi d'un projet, c'est un élément important. On pense à l'agriculture, à la circulation de l'information de même qu'au problème de la pollution qui nous intéresse, nous, particuliè-

rement, au Parti vert du Québec. Donc, on devrait élargir notre espace et faire en sorte qu'aux droits et aux libertés on puisse rajouter la dimension de responsabilités. C'est ce qui manque actuellement, c'est ce qui est le plus faible dans notre société actuelle. Distinguer la personne de l'entreprise et rajouter l'État - l'État a également des responsabilités qui devraient être un peu plus articulées - et, aux volets politique, économique et social, rajouter celui qui concerne la circulation de l'information de même que celui, évidemment, écologique. Donc, l'écart qu'il y a entre l'espace juridique actuel, qu'on peut voir par le petit cube, et un espace plus grand, à notre avis, si on élargissait notre espace juridique, on pourrait réduire les points d'interrogation sur lesquels les tribunaux doivent intervenir constamment et qui sont aussi un grand problème de préoccupation. Alors, dans une vision plus large où les responsabilités sont présentes, où l'espace juridique est plus riche, on va pouvoir réduire ces points-là et on va arriver avec un nouvel espace juridique plus clair, plus riche, où on pourra parler de responsabilité informationnelle des entreprises, d'informer la population sur les produits utilisés. On pourra parler également de responsabilité écologique de l'État à préserver la diversité.

Donc, pour nous, la population doit participer à toute évaluation des impacts d'un projet, et c'est cela, le partenariat entre la population, les entreprises et l'État. C'est ça, une gestion participative, qu'on est en train d'implanter dans les entreprises. Ce serait important qu'au niveau de l'État ou du gouvernement, ce soit aussi un partenariat qu'il y ait entre la population, les entreprises et les différents paliers gouvernementaux. Alors, une question qu'il faut peut-être se poser. Est-ce qu'il y a une réelle volonté du gouvernement actuel d'assurer un tel partenariat? Alors, c'est de ça qu'il faut s'assurer, que, dans la procédure d'évaluation, il va y avoir ce partenariat-là et non qu'on essaie de l'évacuer. C'est une question qu'on pose également.

Je terminerai ici ma présentation.

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Mégantic-Compton.

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Au nom des membres du gouvernement, bienvenue, M. Ouimet, à cette commission. Avec votre exposé, ça me rappelle un petit peu le programme électoral du Parti vert, lors de la dernière élection; ça y ressemble pas mal. Je pense que vous avez pris pas mal de solutions, pas de solutions, mais la problématique de votre programme électoral.

J'ai lu votre mémoire avec attention et j'en suis venue à la conclusion que votre mémoire se présente plutôt sous la forme d'un cours théorique sur la conscientisatlon environnementale que sur des solutions pratiques. Parce que c'est très beau, votre exposé, mais de là à mettre ça en pratique, je pense qu'il y a une petite différence. Vous mettez aussi l'accent sur la participation totale de la population à toutes les étapes du processus d'évaluation et vous dites que l'évaluation des impacts environnementaux doit se faire en considération de l'amélioration de la qualité de vie d'une personne. Ça, tout le monde en convient, la qualité de vie des personnes est très importante. Mais, à votre avis, le chômage est-il un impact social affectant la qualité de vie d'une personne? Est-ce qu'on devrait considérer cette considération foncièrement économique dans l'analyse des évaluations environnementales?

M. Ouimet: Lorsque, tantôt, je parlais de l'Impact humain d'un projet, en ce qui concerne les richesses humaines, c'est sûr que l'emploi est un élément à considérer, c'est un facteur qui est nécessairement pris en compte au niveau d'un projet, mais ça ne doit pas, non plus, se faire au détriment de l'environnement qui, lui, reflète aussi les générations futures. Alors, on peut créer des emplois aujourd'hui, mais si, demain... Comme les gens en Gaspésie, on a péché beaucoup de poissons, mais là, il n'y en a plus de poissons. Alors, à un moment donné, il faut aussi le voir dans une perspective, il faut essayer de penser aussi au niveau du long terme. Mais il y a moyen de créer des emplois et de protéger l'environnement, en autant qu'on ait une vision qui soit un peu plus globale. Nous, dans la présentation où on s'inspire des trois types de richesses, on retrouve ça même au niveau de l'OCDE qui dit que le développement viable ou durable doit s'Inscrire dans une perspective où on considère les trois volets, les trois types de richesses. Alors, je pense que c'est possible, effectivement, de créer des emplois.

En ce qui concerne l'aspect peut-être un peu théorique, on a voulu avoir une présentation qui soit plus globale, parce qu'on sait que, pour la plupart des intervenants, comme celui qui nous a précédés, c'est plus technique. Alors, je pense que vous avez entendu beaucoup d'Intervenants qui ont discuté des technicalltés de la procédure. Nous, on a voulu parier de l'esprit à l'Intérieur duquel on doit envisager la procédure d'évaluation des impacts environnementaux d'un projet, parce que c'est important de se rappeler ça dans une perspective de développement viable et comment on doit, justement, considérer l'aspect humain autant que l'aspect naturel. Alors, c'est pour ça qu'on a voulu limiter... C'est sûr qu'au niveau des technicalltés, si ma présentation avait été un peu plus longue, j'aurais pu faire ressortir un peu les points où on va dans le sens du rapport Lacoste au niveau du BAPE, qui pourrait être une façon d'améliorer l'efficacité. En même temps, nous, c'est qu'on Introduit un nouvel élément, un nouvel organisme, ce sont les conseils régionaux de l'environnement, qui pourraient

avoir ce suivi-là, qui pourraient avoir cette vision-là, globale et cumulative, au niveau d'une région, qui est absente actuellement.

Actuellement, on fait une gestion un peu trop à la petite semaine au niveau du BAPE où on évalue un projet, mais, à un moment donné, c'est d'avoir l'évaluation globale pour une région et de faire en sorte que les intervenants, dans une région, puissent être à même de suivre ça. Et les conseils régionaux de l'environnement, qui existent déjà dans une dizaine de régions au Québec, pourraient, justement, être mandatés pour assurer le suivi, informer la population sur l'impact des différents projets et voir les enjeux, un peu comme à Varennes, si on avait eu ça.

Mme Bélanger: Vos conseils régionaux, sous quelle tutelle agiraient-ils? Sous la tutelle du BAPE ou sous l'aile...

M. Ouirnet: Non, non.

Mme Bélanger:... de la responsabilité ministérielle?

M. Ouimet: Ce serait sous responsabilité ministérielle. Mais eux...

Mme Bélanger: Le BAPE, là, vous abolissez le BAPE complètement. (12 heures)

M. Ouimet: Non, non, non. Si vous vous souvenez, dans ma présentation, j'ai dit qu'il y avait deux types d'organismes: le Conseil régional de l'environnement, qui a une vision globale, qui permet d'avoir le suivi, et le BAPE, qui est procédure qui, elle, évalue un projet à la fois. Alors, comme ça se fait actuellement, le BAPE continue sa mission. Mais, maintenant, II y a un organisme intermédiaire qui s'appelle le Conseil de l'environnement, régional ou québécois, qui permet d'avoir un suivi, qui permet d'avoir une vision cumulative des différents projets et qui serait à même de pouvoir élaborer la directive, parce qu'à un moment donné il voit des niveaux de seuil qui commencent à être atteints. Je pense à Salnt-Romuald où, à un moment donné, les citoyens disent: Wo! là, on va avoir une autre entreprise, mais on va peut-être franchir un seuil en terme de pollution atmosphérique. Alors, le Conseil régional de l'environnement serait le mieux placé pour pouvoir dire que, selon des indicateurs environnementaux, il y a certains seuils qui se trouveraient à être franchis. Là, il faudrait donc considérer, de façon plus globale, ce projet-là sur une base régionale. C'est dans ce sens-là que les conseils de l'environnement auraient cette vision globale qui manque actuellement.

Mme Bélanger: O. K. Dans un autre ordre d'idées, vous souhaitez une prise de conscience collective des droits, des libertés et des respon- sabilités environnementales. M. Ouimet: Oui.

Mme Bélanger: Je vous ai dit tout à l'heure que votre mémoire était très théorique. Comment, dans le quotidien, arrive-t-on à appliquer un grand principe, qui est très louable en soi? Est-ce que vous ne pensez pas que c'est une démarche à long terme que vous suggérez? Et par où doit-on commencer? C'est des questions un peu plus pratiques.

M. Ouimet: Oui, d'accord. Alors, dans le cadre de l'élaboration d'une constitution québécoise qui, si ma mémoire est fidèle, est préconisée par le Parti libéral autant que par le Parti québécois, je me dis: Dans une constitution québécoise, on devrait bien y mettre une charte et, selon nous, cette charte devrait donc s'articuler, non seulement au niveau...

Mme Bélanger: La charte de la qualité de vie.

M. Ouimet: Non, une charte plus large, parce que, là, on va se ramasser avec cinq, six chartes. On aime ça que les choses soient quand même un peu plus cohérentes et que ça forme un tout. Parler d'une charte où on a des droits, des libertés et des responsabilités et qui inclut le volet écologique, le volet social, le volet économique, comme on a une charte québécoise, donc d'une charte où les responsabilités pourraient être articulées et présentées auprès de la population, pour avoir un effet préventif et incitatif auprès de la population. On ne parle pas de devoirs ou d'obligations, on parle de responsabilités. Ce sera au législateur à déterminer les obligations. Mais, dans le cadre d'une charte, ça permettrait de donner l'esprit de notre projet de société et de faire en sorte que les gens se responsabilisent - c'est un effet pervers de l'État-providence d'avoir déresponsabilisé des acteurs de notre société - et ça serait important qu'on puisse prendre collectivement conscience de la nécessité d'être responsable, autant économiquement, à l'égard du déficit, qu'écologiquement, à l'égard de la pollution.

Mme Bélanger: O. K. Quand vous parlez de l'utilisation d'une charge québécoise des droits et que vous faites une comparaison avec les points valables de la charte canadienne, comment voyez-vous l'harmonisation des deux approches environnementales dans une perspective de contrôle régional de développement?

M. Ouimet: Nous, personnellement, le Parti vert du Québec, on est un parti souverainiste. Alors, on croit que ce serait important que le Québec, dans le cadre de sa constitution, puisse...

Mme Bélanger: Mais vous voulez qu'elle soit harmonisée avec la charte canadienne, votre charte québécoise?

M. Ouimet: C'est-à-dire que, si on doit élaborer une charte québécoise, j'espère bien que les Québécois vont s'inspirer des chartes qui existent un peu partout dans le monde et qu'on pourra autant aller chercher la réflexion et la proposition de charte environnementale qui a été présentée à Bergen, en Norvège, qu'une charte canadienne, qu'une charte québécoise, que les différentes chartes qui sont articulées. Je pense que c'est une nécessité, lorsqu'on fait un tel exercice, d'essayer d'avoir la réflexion la plus riche possible. Ce n'est pas de dire que la charte canadienne va rentrer dans le domaine québécois, mais c'est simplement de dire qu'on va s'inspirer de ces différentes chartes pour avoir une charte québécoise qui soit la plus riche possible et la plus à la hauteur des défis qu'on a à relever.

Mme Bélanger: vous ne pensez pas que cette politique d'évaluation fédérale n'est pas susceptible de prolonger... et de nuire à notre propre développement environnemental?

M. Ouimet: Je ne parie pas du tout de procédure fédérale, je parie simplement d'articles qui pourraient être... On se dit qu'on devrait regarder...

Mme Bélanger: Compatibles.

M. Ouimet: On se dit: Pour élaborer une charte québécoise, il faudrait simplement regarder les différentes chartes qui existent pour s'en inspirer et avoir une charte québécoise la plus riche possible, parce qu'il y a des secteurs de la charte québécoise où il y a des lacunes, entre autres au niveau environnemental et informationnel. Mais ce n'est pas de dire que la procédure fédérale devrait être considérée dans la démarche québécoise. Là, c'est deux choses.

Mme Bélanger: Un autre point qui me semble très théorique. Vous introduisez le référendum comme outil de consultation normalisé. N'est-ce pas aller trop loin dans la démocratisation de la démarche en se donnant une structure et des outils de consultation ou de concertation trop lourds? Puis, qui financerait et dirigerait un tel processus?

M. Ouimet: Si on regarde un pays comme la Suisse qui utilise le processus de référendum d'initiative populaire, ils ont un taux de chômage, eux, de 2 %, 3 %. Alors, je pense qu'ils ont réussi, avec la procédure de référendum d'initiative populaire, à permettre à toute la population de participer à des débats spécifiques...

Mme Bélanger Oui, mais, quand on passe un référendum, c'est-à-dire municipal, par exemple... M. Ouimet: Oui.

Mme Bélanger: ...un petit référendum pour, justement, l'assainissement des eaux au niveau d'une municipalité, ça coûte 6000 $ minimum...

M. Ouimet: Oui.

Mme Bélanger: ...pour une population de 500, 600 habitants. Alors, comment, au niveau d'un projet régional... Avez-vous évalué les coûts de ce référendum? Qui le paierait, ce référendum-là?

M. Ouimet: On va prendre un autre exemple, celui de Grande-Baleine. On a un projet de plusieurs milliards de dollars. SI on Investissait quelques millions pour pouvoir faire, d'abord, comme on doit le faire, un débat sur l'Impact global de Grande-Baleine et, après ça, un débat plus collectif qui aboutit avec un référendum pour l'acceptation ou le rejet en fonction des conséquences que les gens devront assumer, je pense que c'est quelques millions de dollars en fonction de milliards de dollars. Il faut toujours voir combien ça coûte, mais combien ça coûte aussi, le projet, si on le réalise et, si ça nous coûte 6000 $ au niveau local pour dire non à un projet qui nous endetterait de 20 000 000 $, bien, je me dis que ça vaut la peine d'Investir les 6000 $ pour faire le référendum.

Je pense que si ça peut servir à faire de l'éducation populaire en même temps... Parce que le référendum, ce qu'il y a d'Intéressant, c'est que ça permet d'éduquer en même temps les gens et les intervenants sur la situation et de voir les enjeux et les risques de tous les différents projets.

Mme Bélanger: Ça va.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de l'Opposition, souhaiter la bienvenue au président du Parti vert, M. Ouimet, et à ses deux collègues et les remercier de venir nous faire cette présentation. Ce n'est pas mauvais, au terme de toutes ces rencontres que nous avons eues avec plus de 50 groupes, que nous ayons un exposé comme celui-là qui sort des aspects plus techniques et qui nous amène dans une ambiance un peu plus humaniste, un peu plus philosophique. Moi, je trouve que ce n'est pas mauvais.

Les remarques que vous faites sur les trois types de capital, je pense que c'est pertinent: capital humain, capital naturel et capital artificiel. Là où j'ai un peu de difficultés à vous suivre, M. Ouimet, c'est lorsque vous détaillez les attributs, les fonctions d'un Conseil régional

de l'environnement. Jusqu'ici, à tort ou à raison, un Conseil régional de l'environnement comme on le connaît, ça a un rôle plutôt d'éducation populaire, de surveillance de l'environnement au sens large, de coordination de différentes associations locales qui existent un peu partout dans la région. Je pense que tout le monde convient que c'est un rôle assez naturel. Ils sont, d'ailleurs, très peu aidés financièrement; ça leur serait difficile, de toute façon, de jouer d'autres rôles.

Mais là, même si, financièrement, on assurait la possibilité, moi, ça me paraît quasiment incompatible un rôle de porte-parole de la population, pour ainsi dire, de surveillant, puis, en même temps, leur donner un rôle décisionnel sur des études d'impact et sur des évaluations de politique gouvernementale. Ce n'est pas une objection de principe en soi, mais ça me paraît deux types de rôles quasiment incompatibles. Est-ce que vous pourriez réagir à ça?

M. Ouimet: Si on regarde, M. Lazure, le Conseil économique du Canada qui, justement, tient à Jour un peu un état de la situation économique et qui évalue les différents programmes ou politiques du gouvernement pour savoir quel sera l'Impact sur l'environnement économique, je pense que c'est un peu la même chose. Parce que, quand on volt que l'environnement, c'est une problématique importante, un aspect de notre développement qu'il est nécessaire de considérer dans tout projet, d'avoir l'équivalent de ce qu'on a au niveau du Canada, le Conseil économique du Canada, un conseil écologique québécois, des conseils régionaux également, pour avoir l'heure juste sur l'état de la situation... Quand le conseil social du Québec - parce qu'on a la même chose au niveau du conseil social du Québec - nous disait, l'année dernière, qu'on avait 28 % de sans-emploi, c'est important d'avoir cette représentation-là qui nous arrive d'une instance différente de celle du gouvernement et qui remet un peu les pendules à l'heure, alors que le gouvernement va toujours avoir une tendance à nous présenter un point de vue...

M. Lazure: Oui, mais il existe... Oui, je vous suis jusque-là, M. Ouimet, mais le parallèle, ce serait avec le conseil de l'environnement qui existe actuellement.

M. Ouimet: Ouf.

M. Lazure: II y a un Conseil consultatif de l'environnement.

M. Ouimet: Oui.

M. Lazure: Et je pense que ça, c'est tout à fait son rôle de prendre le pouls de l'environnement québécois de temps à autre et de le rendre public, un peu comme le Conseil économique le fait, de rendre public un tel rapport. M. Ouimet: C'est ça.

M. Lazure: Ça, ça va. Mais, régionalement, d'avoir un conseil régional qui, en plus de faire ça pour sa région, aurait aussi un rôle de médiation, un rôle de promoteur d'une audience publique sur des politiques générales, ça me paraît lui confier des rôles d'exécution qui viendraient quasiment en conflit, contre des rôles de porte-parole de la communauté.

M. Ouimet: Disons qu'on voit que les régions demandent de plus en plus de pouvoir prendre en main les décisions qui les concernent et on va même, nous, reconnaître la nécessité d'avoir des gouvernements régionaux. Alors, d'avoir des conseils régionaux, ça va permettre aux intervenants régionaux de pouvoir avoir un suivi des différents projets et de pouvoir, à un moment donné, dire: C'est nous autres qui allons déterminer aussi les paramètres ou les indicateurs qu'on va considérer dans l'évaluation de l'impact d'un projet. Qu'ils puissent prendre en main leur développement, c'est réclamé par toutes les régions et, dans ce sens-là, le Conseil régional de l'environnement est un outil qui leur permettrait de pouvoir mieux contrôler ce développement régional.

M. Lazure: Oui. Ça, moi, j'en suis. Mais le respect de la démocratie, à mon avis, ça ne nous amène pas à dire: Bien, c'est le Conseil régional qui va décider si tel ou tel projet va s'implanter dans la région. À mon avis, ce sont les élus de la région qui doivent le décider...

M. Ouimet: Mais c'est ça qu'on dit aussi.

M. Lazure: ...après avoir entendu, consulté les conseils régionaux.

M. Ouimet: C'est ça qu'on dit aussi, M. Lazure, dans notre mémoire. C'est-à-dire que nous, on dit que le Conseil va élaborer la directive qui va être, après ça, donnée au BAPE pour faire l'évaluation du projet et, après ça, ça va être soumis au Conseil des ministres ou au Conseil exécutif qui, lui, aura à décider du projet ou non. Et c'est pour ça qu'on parle de la procédure de référendum d'initiative populaire qui permettrait à la population, si elle n'est pas d'accord, parce que le Conseil des ministres a dit oui à Grande-Baleine et qu'on veut avoir un débat public, de dire: Bon, bien là, on va avoir, avec un référendum, l'occasion de parler de ce projet-là. Alors, ça reste le Conseil exécutif ou le Conseil des ministres qui prend la décision.

M. Lazure: C'est parce que je lisais à la page 3, M. Ouimet...

M. Ouimet: Oui.

M. Lazure: En bas, dans votre encadré, à la page 3, au milieu, vous dites: "Proposer la création de conseils de l'environnement au niveau régional [... ] pour jouer un rôle d'information, d'éducation... " Jusque-là, ça va très bien, mais vous ajoutez: "... et de décision auprès de la population et du Conseil des ministres". C'est là que je ne vous suis pas tout à fait.

M. Ouimet: Disons que la formulation... Il aurait été plus juste de dire: Participer au processus décisionnel dans le sens de faire une recommandation auprès du Conseil des ministres.

M. Lazure: Ah bon! Bien là, oui. M. Ouimet: Alors, ce serait... M. Lazure: Pour nous...

M. Ouimet: Disons que ce serait une nuance qui... C'est sûr qu'on est pris aussi pour faire ça un peu rapidement. Alors, ce serait une nuance qui... Dans notre esprit, c'était ça qu'on pensait.

M. Lazure: Ah bon! Bien, à ce moment-là, ça devient, en tout cas quant à moi, tout à fait, tout à fait acceptable.

M. Ouimet: Ce n'est pas le Conseil qui prend la décision finale. Pour nous, ça, c'est clair. Les gens sont élus pour prendre des décisions. Mais le Conseil peut faire une recommandation en fonction de l'étude et de l'évaluation, par le BAPE, qui auront été faites.

M. Lazure: juste une dernière question, pour revenir aux conseils régionaux. comment réagiriez-vous à une proposition où chaque conseil régional, le jour où il y en aura un dans chaque région - ça s'en vient rapidement...

M. Ouimet: Oui.

M. Lazure:... le jour où il y en aura un dans chaque région - déléguerait un représentant, un porte-parole ou une porte-parole et où ces porte-parole constitueraient le conseil national de l'environnement?

M. Ouimet: Tout à fait. Tout à fait. Ce serait une...

M. Lazure: C'est une formule qui vous plairait, oui?

M. Ouimet: Tout à fait. Je pense que le Conseil québécois de l'environnement, qui pourrait être une transformation du Conseil actuel de la conservation et de l'environnement, pourrait être constitué de cette façon-là.

M. Lazure: Merci beaucoup.

Le Président (M. Garon): Alors, je voudrais remercier les représentants du Parti vert et M. Ouimet d'avoir contribué aux travaux de la commission. Je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 13)

(Reprise à 14 h 7)

Le Président (M. Garon): Nous reprenons les travaux de la commission de l'aménagement et des équipements. Au début, j'aimerais aviser la commission que nous avons reçu, à date, 64 mémoires. Trois mémoires ont été présentés pour dépôt seulement, un mémoire a été retiré à la demande de l'auteur, la Régie Intermunicipale de gestion des déchets de I'île de Montréal, parce que je pense que le mémoire avait été expédié avant approbation et que, semble-t-iI... Le secrétaire pourra en faire état si vous avez des questions parce que c'est lui qui est en communication avec les gens de la Régie Intermunicipale de gestion des déchets de l'île de Montréal. 63 convocations ont été adressées, Incluant le BAPE et le ministère, 4 groupes ont décliné l'invitation et, au terme des travaux de cette séance, la commission aura tenu 59 auditions publiques totalisant 45 heures.

Mémoires déposés

La commission a reçu également des mémoires qui n'ont pas fait l'objet d'une audition publique. Certains de ces mémoires ont été reçus pour dépôt seulement, soit celui de la Communauté urbaine de l'Outaouais, 63 M, et je vais demander au secrétaire... Nous allons déposer officiellement ces mémoires-là: le Mouvement pour l'instauration de la réglementation de l'électricité au Québec, MIREQ, 61 M, et la municipalité régionale de comté de Rouyn-Noranda, 64 M.

Les organismes qui ont décliné l'invitation qui leur a été faite d'être entendus en audition publique sont l'Action pour la défense de la nature, mémoire 5 M, la Coalition démocratique de Montréal, mémoire 40 M, l'Ordre des ingénieurs forestiers, mémoire 1 M et la Société d'énergie Foster-Wheeler Itée, 56 M. Alors, afin de les rendre accessibles au public, je dépose officiellement ces mémoires.

Est-ce qu'il y a des questions?

Une voix: Non.

Le Président (M. Garon): Non. Alors nous allons procéder Immédiatement en entendant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. J'ai compris qu'il y aurait une courte entrée en

matière des représentants, c'est-à-dire du président, M. Bertrand Tétreault, qui va nous présenter l'équipe qui l'accompagne. Et ensuite nous allons répartir l'équivalent, à peu près deux heures, c'est-à-dire une heure au parti ministériel et une heure à l'Opposition officielle.

M. Maltais: On s'est entendus pour faire chacun 10 minutes en alternance, pour éviter qu'on s'essouffle.

Le Président (M. Garon): Vous voulez l'alternance à toutes les 10 minutes, c'est parce que c'est...

M. Maltais: Bien 15 peut-être; dépendam-ment du sujet, si on est embarqués...

Le Président (M. Garon): En tout cas, on va compter le temps.

M. Maltais: C'est ça.

Le Président (M. Garon): Moi, je ne vous arrêterai pas.

M. Maltais: De toute façon, à 16 heures il faut arrêter.

Le Président (M. Garon): Vous avez le droit de parler 20 minutes, alors je ne vous arrêterai pas au bout de 10 minutes. Vous vous limiterez vous-même, mais on va comptabiliser le temps de chacun pour qu'il soit réparti également entre les deux partis.

M. Maltais: Très bien.

Le Président (M. Garon): Alors, M. le Président, M. Tétreault, à vous la parole.

Bureau d'audiences publiques sur l'environnement

M. Tétreault (Bertrand): M. le Président, membres de la commission parlementaire, je commencerai d'abord par vous présenter les collègues qui m'accompagnent. À ma droite, M. André Dellsle, qui vient du secteur privé, qui est un ingénieur physicien et qui a une grande expérience du côté des communications. On lui attribue un rôle important au niveau de la commission Charbonneau et il est le pilote, commissaire en chef pour la stratégie de protection des forêts qui se déroule actuellement. À ma gauche, Mme Claudette Journault. Claudette est une biologiste de profession qui a oeuvré principalement dans le domaine des déchets dangereux, plus spécifiquement au niveau de la carac-térisation des sites, qui oeuvre au BAPE depuis maintenant près de 3 ans et qui a à son crédit près de 10 audiences, je dirais 4 ou 5 enquêtes préliminaires menant à des audiences et certains succès en médiation; alors, c'est un cheminement assez Imposant. À ma droite, M. Yvon Dubé, un commissaire chevronné, 3 ans derrière lui. Originaire lui aussi du secteur privé, ingénieur forestier de profession, lui aussi a pris la présidence de plusieurs commissions au cours des 3 dernières années et est un joueur important comme commissaire dans la stratégie de protection des forêts qui se déroule actuellement. À ma gauche, Me Pierre Quesnel; formation légale, maîtrise en communication et chargé de projet au BAPE. Deux membres sont absents cet après-midi; il s'agit de Mme Saint-Gelais, qui est au BAPE depuis près d'un an, qui a un background en administration et une expérience du côté de la santé. Également, Mme Gélinas, qui est une géographe avec une maîtrise en environnement. Essentiellement, c'est l'équipe des commissaires permanents qu'on a au BAPE.

À cela s'ajoutent, bien sûr, en fonction des besoins des mandats que nous recevons du ministre, des commissaires ad hoc qui s'ajoutent à l'équipe en fonction du type ou du nombre de mandats. C'est ce que nous appelons dans notre jargon "membres additionnels".

J'aimerais, M. le Président, situer notre contribution à l'effort que vous essayez de faire avec la commission. Nous avons apporté beaucoup d'attention en termes de réflexion sur une évolution que nous considérons nécessaire après 12 ans d'expérience. Nous avons considéré vous présenter un mémoire. Maintenant, étant donné que nous sommes un joueur important dans tout le processus et que certains milieux pouvaient interpréter nos recommandations à vous comme étant juge et partie, nous avons préféré plutôt vous livrer nos expériences et notre vécu.

Nous sommes parfaitement conscients qu'au-delà des opinions que nous pouvons exprimer, votre jugement va au-delà de ce que nous avons nous-mêmes vécu parce que vous avez eu devant vous 60 - ou quelque chose comme ça - intervenants. Nous ne prétendons pas nous substituer, par nos réponses, à une décision finale qui revient au gouvernement. Comme vous le savez, M. le Président, nous sommes un organisme consultatif visant à intégrer la participation du citoyen au processus de décision environnementale et c'est ça notre rôle, ni plus ni moins. Sur ce, M. le Président, nous demeurons ouverts à toutes vos questions.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. M. Tétreault, madame, messieurs les membres du Bureau d'audiences publiques, permettez-moi d'abord, dans un premier temps, au nom du gouvernement, de vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Nous avons, comme vous l'avez souligné, entendu près de 59 mémoires, 59 groupes qui sont venus témoigner. Mais il n'y en

a pas un... Et ça, je voudrais bien qu'on le clarifie au départ, le mandat de la commission, ce n'est pas de faire disparaître le BAPE du tout. Ce n'est pas là les intentions de la commission et ça a été confirmé par les 59 groupes qui sont venus ici. Au contraire, malgré qu'il y ait souvent eu des choses négatives à votre égard, ce n'est pas à cette commission-ci que vous les avez eues. C'est peut-être à l'extérieur, d'une certaine presse.

Ce qui a été surprenant, et mon collègue de l'Opposition en conviendra avec moi, c'est l'extrême nécessité du BAPE que tous les intervenants sont venus nous dire, à quelques exceptions près, très minimes. Donc, au départ, nous sommes fiers et heureux de vous avoir ici. Je pense que c'est la première fois que vous passez en commission parlementaire, qu'on vous convoque. D'abord, on vous remercie d'être venus. Ce n'est pas à tous les jours qu'un tribunal quasi judiciaire accepte de venir librement en commission parlementaire se faire interroger par les parlementaires. Je vais être bien franc avec vous, j'essaie avec la Commission des transports depuis des années, avec mon collègue de Lévis, et ils ne veulent pas nous voir, ils ne veulent pas venir nous voir. J'essaie de les avoir, mais je ne suis pas capable. Je vous félicite. Vous avez le courage de venir ici et, soyez sans crainte, on n'est pas ici pour vous mettre au pilori, au contraire, parce que nous croyons, comme parlementaires, à l'utilité du BAPE. Et nous croyons aussi que l'ensemble de la population, la très grande majorité de la population est satisfaite de la façon dont vous opérez, dans le cadre de la réglementation, bien sûr. Vous n'êtes pas les maîtres de la destinée au complet, mais vous êtes des acteurs fort Importants dans le portrait.

Moi, la première question que j'aimerais qu'on discute ensemble... Vous avez quand même beaucoup d'expérience. La somme d'expérience de tous les membres autour de la table et le nombre d'audiences publiques... Moi, j'aimerais qu'on regarde un petit peu ce qui se passe au Québec, ce que vous faites, versus, par exemple, nos voisins de l'Ontario. Si vous aviez à comparer les deux systèmes - bien sûr que vous êtes de parti pris, mais c'est votre opinion que je veux savoir, pas la mienne, ni celle de mon collègue, ni celle des gens - si vous aviez à comparer les deux procédures d'évaluation, quelle cote donneriez-vous à celle du Québec, malgré que vous en soyez membre et président, M. Tétreault?

M. Quesnel (Pierre): M. le Président, si vous le permettez, je vais répondre à cette question. Évidemment, c'est toujours un peu difficile de comparer un système qui est judiciarisé, comme celui de l'Ontario, à celui du Québec qui n'est pas judiciarisé et qui, à mon sens, offre de ce côté un attrait énorme. En Ontario, une commission qui siège là-bas peut prendre deux décisions dans un dossier. Tout d'abord, la commission va décider si l'analyse ou l'étude d'impact est recevable ou adéquate. C'est la première décision qu'une commission prend. Dans un deuxième temps, elle va décider si oui ou non le projet est acceptable. Au Québec, on sait que le système est différent. Il n'y a pas de décision qui est prise par le BAPE. C'est plutôt une recommandation qui est faite et, dans ce sens-là, ça entraîne nécessairement, au niveau de l'audience, des différences Importantes, notamment au point de vue du comportement et de la place plus grande qui est faite au public.

Quand on parle d'un cadre judiciarisé, on parle d'un débat qui, souvent, va être plus technique, qui, parfois, va être rempli d'objections de forme et qui, finalement, laisse moins de place aux gens qui viennent pour s'exprimer sur leur perception d'un projet quelconque.

La Loi sur les évaluations environnementales, toutefois, offre sous certains égards des choses qui pourraient être importées ici et qui seraient intéressantes. Par exemple, on parle, avec la Loi sur les jonctions d'audiences en Ontario, de commissions conjointes. Sous cet aspect, il serait possible d'utiliser un système semblable pour le Québec où le BAPE pourrait, conjointement avec d'autres commissions, entendre, dans une même audience, le public et, chacun gardant son indépendance, on pourrait arriver à harmoniser la procédure sur le plan provincial.

Évidemment, l'Ontario n'assujettit pas tous les grands projets industriels. En fait, les statistiques démontrent qu'environ 13 % des projets industriels privés sont passés par les audiences en Ontario. Ce dont on parte en Ontario, c'est plutôt des grands projets publics. Ici, au Québec, II semble que le temps soit venu d'assujettir tous les projets. Là-bas, il y a une réforme qui est à l'étude et on pense, dans l'avenir, assujettir peut-être les programmes. Pour les projets industriels privés, on voudrait éventuellement avoir une augmentation des audiences à ce niveau-là, mais on ne pense pas institutionnaliser cet aspect. Alors, en gros, ce serait le...

M. Maltais: Nonobstant la procédure qui est beaucoup plus judiciarisée en Ontario qu'Ici, croyez-vous que, dans le cadre actuel dans lequel vous opérez, dans le cadre où vous travaillez normalement, d'après vous - et, là, c'est une opinion personnelle que je vous demande - le Québec est moins compétitif au niveau d'attirer des Investissements étrangers à cause de la formule des audiences ou si on se compare à nos voisins, qui sont l'Ontario ou l'État de New York? Est-ce qu'on se situe dans le même barème ou si nos exigences sont plus fortes et que ces exigences-là, qui apparaissent plus fortes, peuvent être sujettes à décourager des gens qui viennent investir au Québec?

M. Quesnel: La question de la compétitivité est une question Importante. Je pense qu'elle a été souvent soulevée dans le passé mais elle soulève surtout le problème des délais. Ce n'est pas la complexité de la procédure qui est mise en cause, ce sont souvent les délais. Pour respecter cette compétitivité, c'est aux délais qu'il faut s'attaquer, et ça, c'est possible. Le BAPE, on l'a à juste titre mentionné, est à l'heure actuelle celui qui est circonscrit par des délais. On pourrait étendre cette pratique peut-être à d'autres parties de la loi. Si ça, c'est respecté, je pense que la compétitivité ne sera jamais un facteur qui pourrait faire en sorte qu'on laisse aller certains projets à un non-assujettissement.

M. Maltais: Ça confirme un peu ce que les grandes industries sont venues nous dire et je suis heureux de vous l'entendre dire parce qu'il y avait une espèce de hargne en disant que le Québec... Même, certains groupes l'ont affirmé, pas ici, en commission parlementaire, mais dans les articles de journaux, parce qu'on leur a posé la question Ici et, le lendemain, ils avaient changé d'idée en disant que le Québec, avec sa formule d'audiences et sa réglementation, devenait non concurrentiel au niveau des investissements.

On a posé la question aux grandes entreprises qui sont venues Ici. Je vais vous citer en particulier les alumineries qui représentent quand même des investissements fort importants au Québec et qui ont démenti les appréhensions de certains groupes. Et vous nous confirmez ce que les grandes industries nous ont dit. Et ça, je pense que c'est un point fort important pour l'avenir du Québec. C'est que la question environnementale doit se développer et on doit la respecter, mais on doit aussi chevaucher avec la question économique qui est vitale pour l'ensemble du Québec. Moi, je suis heureux de vous l'entendre dire parce que la grande industrie nous l'a dit. Et vous avez, je pense, bien suivi les débats.

Il y a un point de vue qui a été pas mal cité par plusieurs groupes et c'est la question de la crédibilité du BAPE et de sa transparence. Certains vous donnent beaucoup de crédibilité, d'autres trouvent que vous manquez de transparence, d'autres trouvent que votre crédibilité est mitigée. Bon, je vous répète ce qu'on a constaté. On a fait une synthèse des critiques. Moi, j'aimerais ça, M. le Président, qu'à partir du début, soit votre nomination comme président du BAPE... Des gens ont suggéré que ce soit à l'Assemblée nationale; mon collègue prêche ça depuis des années, plusieurs groupes sont venus ici et, finalement, ça a été, pas unanime, mais il y a beaucoup de monde qui en a parlé, que le président du BAPE soit nommé par les membres de l'Assemblée nationale, comme on fait avec le Vérificateur général ou les très hauts fonction- naires, ici, aux deux tiers des votes de l'Assemblée. Que même les membres du BAPE soient nommés par l'Assemblée nationale, avec un mandat beaucoup plus long, par exemple, parce qu'on sait que trois ans, bien, c'est juste le temps de changer ta gomme de bord, dans le langage courant, et souvent... Beaucoup d'entreprises, beaucoup de groupes représentant des entreprises ont demandé d'avoir beaucoup de gens spécialisés dans leur industrie. Et ce que je trouve, c'est que les gens qui sont ici, dans chacun de leur secteur, il n'y en a pas deux qui sont pareils; c'est très spécialisé.

Maintenant, on leur a posé la question: Est-ce que vous les voulez comme membres permanents? Ils ont dit: Non, ça pourrait être des membres ad hoc ou occasionnels pour la durée d'une audience. Je ne sais pas moi, pour un concentrateur de fer en plein coeur du boulevard Laurier, ici, quelque chose comme ça, j'irais chercher un spécialiste dans le fer. En fait, les gens ont demandé - et ça, ça vaut pour l'industrie du pétrole, ça vaut pour toutes les grandes industries, lorsqu'il y a des audiences publiques concernant ces grandes entreprises-là - d'avoir un spécialiste; même les avocats ont souligné ça aussi. Alors, qu'est-ce que vous pensez de ça? D'abord, la nomination, deuxièmement, la spécialisation des membres, et on reviendra avec la question de la transparence et de la crédibilité. Ça va?

M. Tétreault: D'accord. Bon, pour répondre, M. le député, à votre première question, moi, je vais vous avouer que, personnellement, je vis très bien avec une formule ou l'autre et que, si la population, à travers ses élus, décidait qu'il faut passer par le canal de la nomination approuvée par l'Assemblée nationale, moi, je pourrais très bien vivre avec ça. Cependant, ça, c'est l'expérience américaine qui nous livre ça. Il faudrait, si on embarquait dans le processus de la nomination un peu comme dans d'autres postes au Québec où l'Assemblée nationale a un rôle important à jouer, éviter les délais, les longs délais, les discussions longues qui s'éternisent. Pendant ce temps-là, on prive l'organisation, finalement, la société, d'un roulement normal. Alors, pour résumer ma pensée, je peux très bien vivre avec l'une ou l'autre et je pense qu'on devrait aller dans le sens des désirs de la population.

M. Maltais: Est-ce que pour les autres membres, c'est un peu la même...

M. Tétreautt: Je parle du président.

M. Maltais: Vous pariez du président. On parlait des autres membres aussi, que les autres membres soient nommés par l'Assemblée nationale.

M. Tétreault: Bon. Pour revenir à l'expérience américaine, je pense que ce ne serait pas praticable de passer à travers ce processus pour les autres membres. Ce serait très consommateur de vos énergies et je me demande si les résultats seraient nettement supérieurs, en ce sens que c'est un processus qui est assez lourd, lorsque vous passez à travers des nominations de commissaires, c'est très lourd. Il peut être très long aussi, s'il y a des accrochages, parce qu'il y a des vérifications qui sont faites. Moi, dans le cas des commissaires - et j'inclus le vice-président -je ne crois pas que ce soit nécessaire ou praticable pour les raisons que je vous ai mentionnées. (14 h 30)

En ce qui concerne les nominations en fonction de spécialisations, expertises, nous, nous avons d'abord une grille de sélection qui est assez serrée. Je fais abstraction des critères de base comme conflits d'intérêts, jugement, etc. Ce que nous recherchons pour siéger sur nos commissions, ce sont des gens... Nous n'allons pas chercher une personne pour son affiliation à une corporation ou à un groupe d'intérêt quelconque. Ce que nous recherchons, ce sont des gens qui ont une compréhension du développement en fonction des aspects économique, social, environnemental, des gens qui ont une compréhension des grands courants de société au Québec, au Canada et en Amérique, et je dirais ultra-Amérique. Comme critère de fondement de sélection, ça, c'est fondamental. Et je ne crois pas que, lorsqu'on va chercher quelqu'un, lorsqu'on a la recommandation d'aller chercher quelqu'un, on s'attache à une affiliation, à une entité ou à un groupe de pression quelconque. Je pense que ce serait une mauvaise base de sélection. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Maltais: Si on revenait à la crédibilité. Non. Il reste un facteur, celui des membres ad hoc, là, sur des dossiers spécifiques. Comment fonctionnez-vous? Comment allez-vous... Je ne sais pas moi, je vais vous donner un exemple: l'association des grands routiers, des entrepreneurs, demandait, lors des audiences, d'avoir quelqu'un qui connaît les routes sur votre comité ou sur votre comité ad hoc, je ne sais pas trop votre fonctionnement, là. Est-ce que c'est possible de satisfaire ces demandes-là sans en prendre un de chaque sorte, parce qu'on va se retrouver 300 au Bureau, là, ça ne marchera plus? Mais est-ce que vous le faites à l'heure actuelle? Lorsque vous avez, par exemple, à vous prononcer à une audience, je ne sais pas, pour une route, est-ce que vous avez quelqu'un qui est spécialisé, que vous mandatez pour la durée de l'audience ou pour préparer un rapport, un consultant? Vous le faites et, après, vous le payez, et bye-bye! vous n'êtes pas obligés de le garder. Est-ce que vous le faites à l'heure actuelle? Mais pourquoi ces gens-là nous ont-Ils demandé ça? Est-ce que c'est fait ou mal fait ou c'est quoi la raison de cette demande-là?

M. Tétreault: Le vice-président, monsieur.

M. Delisle (André): D'accord. Quand on constitue une commission, d'abord, nous avons dans l'esprit qu'une commission du BAPE n'est pas une commission d'experts. On n'a pas à discuter en experts sur les dossiers puisqu'on est là pour rencontrer les citoyens et recueillir leur opinion sur un projet. Maintenant, il a deux façons dont on peut tenir compte des aspects spécialisés qui peuvent apparaître dans certains projets. En recrutant des commissaires ad hoc, on regarde d'abord quels sont les grands enjeux prévisibles d'un projet et, en s'inspirant de ces enjeux-là, on va aller recruter souvent un commissaire qui a une connaissance un peu plus spécialisée, un peu plus fine de ce domaine-là. Je pense, par exemple, si on a un sujet où on prévoit que la pollution de l'air va se discuter, qu'on va essayer de recruter une personne, soit dans le milieu universitaire, soit dans le milieu des experts, qui a une bonne connaissance et une bonne capacité d'analyse de ça.

Maintenant, s'il arrive en cours d'audience d'autres questions qui sont des questions d'expertise, on peut aussi, sans les avoir comme commissaires, comme membres de la commission, recourir à certains experts pour éclairer le dossier, pour ajouter des éléments qui nous permettent de faire comprendre ou d'expliquer à la population ces dimensions-là et qui permettent aussi à la commission de faire son analyse et de se faire une idée sur le projet en ayant une très bonne compréhension des différents aspects techniques.

M. Maltais: D'accord, M. le Président. Je vais céder la parole à mon collègue parce qu'il brûle d'Impatience et d'envie. Alors, je ne voudrais pas le priver plus longtemps; je le sens malheureux depuis 15 minutes.

Le Président (M. Garon): Tout le monde sait que le député de La Prairie, c'est un feu ardent vivant.

Des voix: Ha, ha. ha!

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Merci à mon collègue de Saguenay. Il me fait plaisir, au nom de l'Opposition, de vous souhaiter la bienvenue, M. le président, M. le vice-président et les autres membres permanents du Bureau. Moi aussi, je pense que ce n'est pas superflu de rappeler que l'Opposition juge absolument essentiel le rôle que joue le BAPE actuellement, et est même sortie à plusieurs reprises, depuis un

an ou deux, et avant ça aussi, un peu à la défense, entre guillemets, du BAPE, lorsque le BAPE était malmené sur la place publique. Et c'est arrivé encore récemment dans le cas de Soligaz. Alors, nous pensons que votre rôle est absolument essentiel et, moi, je suis content de voir que ça a été confirmé par la très, très vaste majorité des 60 groupes qui sont venus ici. Non seulement ça doit être maintenu, mais ça doit être, à notre avis, élargi; votre rôle dort être élargi. On va en reparler tantôt, là, de façon plus spécifique.

Mais avant d'entrer dans des questions bien particulières, moi, j'aimerais que vous fassiez, M. le président, une espèce d'autocritique. Vous aviez, paraît-il - la rumeur circule dans les corridors du Parlement - préparé un mémoire avec le ministère de l'Environnement et, dans ce mémoire, il y avait une certaine autocritique. Je pense que c'est sain que tout le monde fasse son autocritique. Alors, mol, Je vous pose la question bien simplement: Qu'est-ce qui va bien chez vous, puis qu'est-ce qui ne va pas bien, M. le président?

M. Tétreault: M. le député, effectivement notre intention première était de présenter un mémoire. Et pour les raisons que je vous ai expliquées tout à l'heure, l'exercice a plutôt servi à polir notre réflexion en fonction des réponses que nous devions amener à vos questions. Vous me demandez, M. le député, qu'est-ce qui va bien ou qu'est-ce qui va mal?

M. Lazure: Les deux. Je vous demande qu'est-ce qui va bien et qu'est-ce qui ne va pas bien, le bilan en somme. Ça fait 12 ou 13 ans que le BAPE existe. Vous, je comprends que ça ne fait pas longtemps que vous êtes président, mais, dans le sens de la continuité, vous savez comment ça a fonctionné. Vous n'étiez pas loin du BAPE, vous étiez au Conseil de la conservation et de l'environnement. Donc, vous avez une Idée. Mais au moment où on se parle, sans même retourner en arrière, là, d'après vous, comme président, quels sont les côtés forts de votre organisation et puis quels sont les côtés faibles de votre organisation?

M. Tétreault: Bon, je pense qu'au Québec nous sommes privilégiés en ce sens que nous avons cette institution qui appartient aux Québécois, qui est unique. À ma connaissance c'est une plate-forme où le citoyen vient en toute spontanéité, avec beaucoup de générosité, exprimer sans encadrement juridique, sans expert légal, ses préoccupations au niveau de son milieu de vie. C'est également pour le promoteur une opportunité inégalée, dans le contexte actuel, de parfaire ou de raffiner son projet. Et je pense que ce mouvement-là, de compréhension de la part des promoteurs, commence de plus en plus à être présent.

Le BAPE, en 12 ans d'existence, a une fiche impressionnante. Et, M. le Président, je ferai, pour l'attention des membres de la commission, une distribution tout à l'heure des réalisations des commissions depuis 12 ans. On parle de 200 mandats donnés par les ministres depuis 12 ans, dont plus de 50 ou près de 50 ont fait l'objet d'audiences ou de médiation. Si vous regardez ce bilan-là, c'est impressionnant.

Également, nous avons fait une petite étude interne pour savoir dans quelle mesure les avis, les conclusions des commissions étaient suivis dans le déroulement futur des projets. En d'autres mots, jusqu'à quel point c'était traduit dans les décisions gouvernementales, et le bilan est très impressionnant, est très positif. On parte d'un suivi de l'ordre de plus de 75 %.

J'essaie, M. le Président, de trouver des points d'amélioration. Nous croyons que quel que soit l'angle sous lequel on le regarde, qu'on le regarde sous l'angle des intervenants, qu'on le regarde sous l'angle des promoteurs, qu'on le regarde sous l'angle des commissions, plus tôt dans le processus le citoyen peut faire part de ses préoccupations, moins de problèmes, moins d'irritants nous avons dans le futur déroulement du processus. Plus tôt le citoyen a l'opportunité d'intervenir pour faire part de ses préoccupations, moins de problèmes nous avons dans le futur déroulement du processus. Appelez comme vous voudrez - irritation - toutes les difficultés qui ont pu être rencontrées. Nous nous sommes aussi aperçus que les délais pour lesquels beaucoup de représentations ont été faites étaient aussi, pour nous du Bureau, pour les commissaires, une source de problèmes. C'est que les délais, les données des études, si vous les laissez dans le temps, peuvent devenir déphasées.

Dans un autre ordre d'idées, nous avons expérimenté avec succès la médiation, plus spécifiquement dans les dernières années, et je dois vous dire que c'est une avenue qu'il vaut la peine de pousser plus loin. Lacoste recommandait que notre société ait l'opportunité de se faire valoir, de faire valoir ses points de vue sur les grandes questions comme la question énergétique. Nous croyons que, comme société, nous devrions déboucher dans ce sens-là, comme Lacoste.

Moi, comme gestionnaire, sur le dernier point, j'ai un petit peu de difficultés au niveau de l'investissement des deniers publics, l'utilisation de nos ressources humaines et financières. Au cours de ma courte expérience comme président, j'ai un peu de... Je ne dirais pas d'hésitation, parce que mes mandats me sont donnés, on les exécute, mais j'ai un peu de questionnement sur l'endroit où on investit notre argent et nos énergies. Je pense que les projets qui ont le plus d'impact au niveau de l'environnement devraient être ceux dans lesquels on investit.

Antérieurement, je pense, vous avez eu des représentations sur les grands projets de développement, industriels, récréo-touristiques, etc.

Comme gestionnaire, parfois, dans les dossiers que j'ai vu passer devant moi et lorsque j'étais à l'extérieur, je me posais des questions, sérieusement, sur l'utilisation des deniers publics en fonction de l'importance ou de la grosseur du dossier. Je parle toujours en fonction des répercussions environnementales. Bon! Alors, pour répondre à votre question, M. le député, ce sont un peu les avenues qu'on pourrait améliorer.

M. Lazure: Merci. Dois-je comprendre que vous seriez d'accord... On y reviendra plus tard de façon spécifique, mais je veux avoir une vue globale avant d'aller aux questions particulières. Dois-je comprendre que vous êtes d'accord, en gros, sur la mise en application du rapport Lacoste, sur l'assujettissement des grands projets industriels, par exemple? Oui? Juste oui ou non, si c'est possible.

M. Tétreault: Disons qu'on pense que le mouvement...

M. Lazure: Bon!

M. Tétreault:... devrait aller dans ce sens-là. Oui.

M. Lazure: Oui? Alors, c'est oui. Bon! Mais je reviens à une question plus générale. Vous, comme chef d'équipe, comme président du Bureau, quelle est votre conception du rôle du BAPE? Il y a sûrement une philosophie qui préside à votre action comme leader de cette équipe. Nous, on fait l'éloge du BAPE. L'éloge du BAPE a été fait à plusieurs reprises ici. On va continuer à le faire, surtout s'il élargit son action, mais, vous, vous voyez ça comment, votre action? Vous êtes au service de qui, de quoi?

M. Tétreault: Merci. Nous, il n'y a pas d'erreur dans notre tête. Je vous l'ai mentionné tout à l'heure, M. le député, notre rôle, notre mandat principal, c'est de transporter les préoccupations des citoyens au niveau du processus décisionnel par nos conclusions, nos recommandations aux ministres et au gouvernement. C'est "loud and clear". On n'est pas une religion ou une secte avec une idéologie quelconque. On n'est pas un organisme décisionnel. On est là pour amener un éclairage au gouvernement, au ministre dans sa décision. (14 h 45)

M. Lazure: C'est très bien comme réponse, ça, en tout cas. J'aime bien cette philosophie-là. Le public, maintenant. Il ne s'y retrouve pas trop, trop. Avez-vous l'impression que le public connaît votre action, connaît votre rôle, vos fonctions? Est-ce qu'il sait comment ça fonctionne chez vous? Moi, je pense qu'il ne le sait pas assez. Est-ce que vous avez fait des efforts dans le passé ou avez-vous des plans pour en faire, pour vous faire mieux connaître du grand public?

M. Delisle: M. le député, tout à l'heure, quand vous avez posé votre question, si j'avais complété la réponse du président, dans nos faiblesses, j'aurais dit: On a une certaine faiblesse au niveau de la connaissance de notre processus et je pense que votre question le souligne très bien. On se rend compte que, dans plusieurs milieux de la société québécoise, actuellement, l'existence même du BAPE, et surtout son rôle et sa procédure sont peu connus. Il y a eu des efforts de faits dans le passé pour faire connaître cette procédure, des efforts qui ont été surtout adressés aux milieux qui s'occupent et se préoccupent d'environnement. On s'est rendu compte, évidemment, avec l'élargissement des mandats, qui est récent, qu'il y avait certains milieux qui connaissaient moins que d'autres la procédure. Les Intentions, à l'heure actuelle, sont de rejoindre ces milieux de l'Industrie ou ces milieux du développement qui ne sont pas nécessairement des milieux préoccupés d'environnement, pour leur faire connaître la procédure et surtout pour leur faire connaître le rôle d'aviseur que le BAPE a, et non pas son rôle comme décideur sur les projets. Souvent, les rapports du BAPE sont reçus comme des décisions sur les projets alors qu'en réalité ce sont des avis qui sont transmis au ministre.

M. Lazure: Alors, si j'ai bien compris le président - c'est ma dernière question, là, M. le Président - tantôt, en faisant le bilan, vous nous disiez que la plupart de vos avis avaient été entérinés par le Conseil des ministres, la grande majorité.

M. Tétreault: Dans une forte proportion. M. Lazure: Dans une très forte proportion.

M. Tétreault: Une très forte proportion. Nos études révèlent ça, nos relevés révèlent ça.

M. Lazure: Je vais m'arrêter Ici pour revenir un petit peu plus tard.

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais aussi souhaiter la bienvenue à tous les gens du BAPE, particulièrement à Mme Journault, seule femme membre de cette auguste commission.

Une voix: C'est du sexisme.

Mme Pelchat: Alors, ça me fait plaisir de le souligner. Vous avez entendu - et M. Quesnel a assisté à toutes nos délibérations depuis le début; jusqu'à ce matin, il était ici, bien présent -beaucoup de commentaires, parfois très favorables, parfois très élogieux, à l'égard du Bureau

d'audiences publiques et je peux vous dire que, pour la plupart, nous les partageons. Vous avez cependant aussi entendu certaines critiques quelquefois plus acerbes que d'autres, notamment par des entreprises, des promoteurs qui, nous ont-ils dit, se sentaient pris à partie par le Bureau des audiences publiques, particulièrement lors d'une audience publique. Plusieurs autres sont venus nous dire qu'ils trouvaient que l'atmosphère conflictuelle qui régnait lors des audiences publiques les incommodait beaucoup. Il y en a d'autres qui sont venus nous dire aussi que les commissaires du Bureau d'audiences publiques - et là, vous me répondrez, mais, moi, je me fais un peu l'avocat du diable; ces gens-là n'ont pas pu s'adresser à vous, alors c'est à nous de les représenter ici... Ils nous ont dit que, parfois, certains opposants à certains projets venaient dire des choses qui, souvent, n'avaient pas vraiment un rapport très relié au projet comme tel, étalent démagogues, démesurés et que, souvent, les commissaires ne sentaient pas que c'était leur rôle de corriger certains faits et certaines avancées des opposants. Alors, je vois que c'est M. Dubé qui va me répondre.

M. Dubé (Yvon): Oui, il me fait plaisir, après trois ans d'exercice comme commissaire, de répondre à cette question, M. le Président. Que certains promoteurs se sentent à l'occasion pris à partie, je crois qu'il y a là un certain fond de vérité qu'il faut expliquer. C'est que, dans bien des cas, lorsqu'un projet est soumis et mal compris par la population ou quand la population est nettement opposée, il se crée, avant même l'audience publique, un certain climat, et c'est tout à fait normal, qui se reflète au début de l'audience. Mais l'expérience prouve que, très rapidement, les présidents de commissions, les commissaires désamorcent les difficultés de voltage qui peuvent se présenter. Nous travaillons ensemble. Et le but des commissions, c'est...

Mme Pelchat: En autant que ce soit en bas deiOMG.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Vous avez bien compris.

M. Dubé: Alors, le travail de la commission est justement, d'abord, de créer un climat de compréhension mutuelle, de respect mutuel. Lorsque les questions ou les réponses ne respectent pas les personnes, immédiatement, les présidents interviennent et on rappelle les gens à l'ordre. Normalement, on n'a pas besoin de le faire très souvent ni très "drastiquement".

Alors, mon expérience, en tout cas, est à l'effet qu'au contraire les gens des parties arrivent parfois un peu nerveux de part et d'autre, ce qui peut créer certaines tensions, mais, assez rapidement on travaille ensemble et non seulement les requérants et les promoteurs participent activement, mais aussi toutes les personnes-ressources des différents ministères. Il arrive parfois qu'on a quatre ou cinq ministères représentés qui répondent aussi aux questions de la population. La richesse d'une commission est exactement d'aller chercher ainsi, dans un climat de confiance, dans un climat serein, la science des gens et la science des promoteurs, et je crois que ça se fait assez rapidement. Donc, l'atmosphère, il peut arriver à l'occasion que ce soit vrai, mais, en général, ce n'est pas du tout le cas.

Je ne voudrais pas passer sous silence les interventions démesurées ou démagogues des gens, ou encore les interventions qui apparaissent, de prime abord, non reliées au sujet. Et ça, il est très difficile de savoir d'avance quelles questions, bien sûr, vont être posées. Même si la personne en question appartient à un groupe connu, on ne peut pas deviner. Alors, il appartient au président de juger sur-le-champ de la pertinence des questions. Vous comprendrez facilement qu'il y a des gens qui sont assez habiles pour poser une première question sans trop savoir où est la deuxième, où on s'en va. Vous êtes familiers avec ce genre de choses.

Mme Pelchat: M. Dubé, vous n'avez pas l'impression que le BAPE, les gens qui procèdent à l'évaluation, les commissaires ont un parti pris en partant?

M. Dubé: II est impossible pour un commissaire d'avoir un parti pris parce que, selon notre code d'éthique, il faut avoir une écoute attentive, active des deux parties, ce que j'appelle, moi, une égale affection pour le promoteur et le requérant ou les requérants.

Mme Pelchat: Parlons-en du code d'éthique, parce que c'était une des recommandations du rapport Lacoste que le BAPE se donne un code de déontologie. Je vois que, depuis la publication du rapport Lacoste, selon ce que vous venez de dire, le BAPE s'en est donné un. Est-ce que vous pourriez le résumer et résumer les grandes lignes? Vous venez de parler de degré d'affection égal, et pour le promoteur et pour les opposants; il y a sûrement d'autres éléments qu'il serait intéressant de nous faire partager.

M. Tétreault: mme la députée, effectivement, nous nous sommes donné un code d'éthique qu'il me fera plaisir de vous livrer tout à l'heure.

Mme Pelchat: Vous pouvez même le déposer, si le président l'accepte.

Le Président (M. Garon): II n'y a pas d'objection? Les membres...

Mme Pelchat: O.K. Vous pouvez poursuivre, monsieur.

M. Delisle: Alors, essentiellement, notre code de déontologie définit les devoirs des commissaires permanents et des commissaires additionnels dans l'exercice de leurs fonctions. C'est certain qu'au début il y a certaines prescriptions au niveau de l'intégrité, de l'indépendance, des qualités professionnelles et personnelles des individus et, par la suite, dans l'exercice d'un mandat, le commissaire doit aussi s'engager à avoir certains comportements. On peut parler notamment des pratiques du Bureau ou des exigences du Bureau d'audiences: que les commissaires, évidemment, ne parlent pas publiquement du dossier sur lequel ils siègent et que tout ce qui se passe dans une commission reste secret; un commissaire doit assister à l'ensemble des séances publiques; il est signataire du rapport; les commissaires du BAPE ne commentent pas leurs positions après que ces positions-là sont déposées au ministre. Alors, c'est un ensemble de règles qui assurent la transparence, qui assurent l'indépendance, qui assurent l'équité par rapport à l'ensemble des participants et qui assurent aussi la discrétion au niveau du travail d'une commission. Je pense que, globalement, c'est le contenu de ce code dont vous pourrez prendre connaissance en détail.

Mme Pelchat: Je vous remercie, M. Delisle, vous nous donnez l'exemple qu'il y a au moins une des recommandations du rapport Lacoste qui a été mise en application. Je vous remercie. M. Tétreault, si je vous disais que notre commission, la commission de l'aménagement et des équipements, demain matin, avait une seule recommandation à faire pour améliorer le travail du BAPE, rien qu'une, là, je vous demanderais, moi: M. Tétreault, dites-moi donc laquelle vous aimeriez que la commission recommande au gouvernement de mettre en application, celle qui vous faciliterait la vie probablement le plus, celle qui améliorerait tout le processus de la consultation, mais aussi peut-être la procédure elle-même. Je vous donne trois minutes pour y penser.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Pelchat: Alors, on est suspendus à vos lèvres, allez-y.

M. Tétreault: Alors, Mme la députée, je pense que... Vous m'en demandez une. C'est difficile pour moi de me limiter à une parce que... Mais, O.K., vous m'en demandez une...

Mme Pelchat: Ne vous en faites pas, je vais vous en demander une deuxième.

M. Tétreault: Je vais y aller pour l'assujettissement des articles de règlement qui ne sont pas encore en force. Je pense qu'on devrait aller dans ce sens-là.

Mme Pelchat: On en prend bonne note.

M. Tétreault: Et ça peut se faire très vite. Ça ne prend pas des modifications législatives pour faire ça.

Mme Pelchat: O.K. Disons qu'on a adopté cette réglementation-là, que nous, la commission, en ferons mention dans notre rapport, que le ministre conseille au Conseil des ministres de mettre en vigueur la réglementation qui est suspendue, quelle autre recommandation faudrait-il mettre en application pour répondre à cette nouvelle demande là? Est-ce que là, effectivement, ce ne serait pas important d'avoir une évaluation des programmes ou des politiques, tout de suite, du gouvernement, sur à peu près toutes les facettes dont on parle?

M. Tétreault: Mme la députée, en fonction des grandes avenues que je vous al données tout à l'heure, je pense bien que notre société est assez avancée et assez mature pour entreprendre les grands débats de fond qui sont demandés un peu partout. J'essaie de jauger en termes d'importance. Si vous me demandez de jauger, alors je dirais que les grands débats de société sont la deuxième option à privilégier.

Mme Pelchat: Alors, on devrait tenir des évaluations sur les grandes politiques de l'État et probablement aussi sur ce qui s'ensuit, sur certains programmes?

M. Tétreault: Surtout sur les programmes, en tout cas.

Mme Pelchat: D'accord. Est-ce que vous pensez qu'il serait opportun d'identifier le BAPE comme...

M. Tétreault: D'ailleurs, II y a certaines initiatives prises dernièrement qui vont dans ce sens-là.

Mme Pelchat: Des études de cogénération.

M. Tétreault: La cogénération, par exemple; forêts est un autre exemple; déchets dangereux.

Mme Pelchat: Vous êtes bien à l'aise avec le fait que le BAPE pourrait être en mesure de faire l'évaluation de ces programmes-là?

M. Tétreault: Nous nous sentons en pleine confiance pour aborder ces sujets-là.

Mme Pelchat: Et que, par la suite, un projet soumis d'une façon locale soit aussi étudié et évalué par le Bureau d'audiences publiques?

M. Tétreault: J'aimerais que vous précisiez un petit peu votre question. Dans la deuxième partie, je vous ai perdue un petit peu.

Mme Pelchat: En fait, si le BAPE fait l'évaluation à large échelle des programmes et que, par la suite, un projet se présente dans une région donnée, est-ce que ce sera encore au BAPE qu'on demandera de faire les audiences publiques et, en bout de ligne, la recommandation au ministre? (15 heures)

M. Delisle: J'ai eu à participer à deux audiences jusqu'à maintenant, qui sont des audiences portant sur des programmes ou des politiques, soit celle des déchets dangereux et celle sur la protection des forêts, et il est évidemment clair dans notre esprit que ça n'enlève pas aux citoyens leur droit d'avoir une audience sur un projet particulier quand il y a eu une audience générique.

Je pense que votre question est un peu une question d'éthique, que des commissaires qui ont pris position sur un programme, par après, aient à tenir une audience sur un projet qui découle de ce programme-là, alors qu'une commission du BAPE a pris position sur le programme. On a déjà cette situation-là, maintenant, au niveau de la médiation par rapport à l'audience. On a actuellement une procédure qui s'installe tranquillement, qui consiste à obtenir une enquête préaudience et une médiation, et...

Mme Pelchat: Ne pensez pas à mes questions, M. Delisle, là.

M. Delisle: C'est parce que c'est la même situation. Le citoyen ne perd pas son droit d'audience. Donc, il peut arriver qu'un commissaire ait participé à une médiation et qu'il y ait quand même une audience. Notre éthique fait que ce commlssalre-là ne sera pas sur la commission qui va tenir l'audience. Comme toutes les commissions sont souveraines et indépendantes, il n'y a pas d'interaction ou de conflit de fond entre le commissaire qui a fait sa médiation et la commission. Si on a, éventuellement, des audiences génériques, je pense qu'on aura la même éthique, qu'un commissaire qui a déjà pris une position sur un programme serait mal placé pour aller siéger sur un projet par la suite, chacune des commissions siégeant là-dessus étant totalement indépendante.

Mme Pelchat: Donc, le BAPE pourrait très bien être le médium, si on peut l'appeler comme ça, d'évaluation des grands programmes et peut-être des politiques.

M. Delisle: Du fait aussi qu'on n'est pas décisionnel, ce sont des avis que l'on transmet au ministre et au gouvernement et, à ce moment-là, le risque de conflit est moindre.

Mme Pelchat: J'aimerais qu'on reparle de la médiation. Dans le rapport Lacoste, il est fortement suggéré qu'on ait une étape de médiation et qu'elle soit presque institutionnalisée. Moi, j'ai un peu de difficultés avec... pas la médiation. Au contraire, je trouve que ça devrait être dans le règlement d'une façon plus formelle, mais j'aimerais ça que vous me vendiez l'idée, pourquoi ça devrait être le BAPE et non pas un organisme ou des commissaires ad hoc vraiment indépendants du boss qui est le président, toujours.

M. Dubé: La médiation, normalement, suit à la suite de ce qu'on appelle une enquête préaudience ou une enquête préliminaire. Le ministre reçoit une demande d'un requérant qui veut une audience publique. Examinant le dossier, il n'est pas évident, à chaque fois, que ça demande quand même des dépenses et du temps de faire une audience publique pour un point qui apparaît mineur au ministre.

Alors, il demande au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, qui fait cette enquête-là, de faire rapport au ministre. Ça peut prendre un mois à peu près, ça peut prendre deux mois. Ça dépend. Le commissaire en question suggère au ministre certaines choses. Alors, s'il suggère et que le ministre dit oui pour une médiation, le dossier a déjà été soumis à la population via le BAPE dans une époque antérieure, il a été ensuite analysé et étudié avec les requérants, donc le BAPE est tout à fait prêt pour faire de la médiation à condition que le projet en question soit acceptable par les deux parties, par les requérants aussi. Ce n'est qu'un point de détail, mais détail, entendons-nous. C'est important pour la personne en question, mais la personne en question pour qui c'est important sait également que c'est un détail dans l'ensemble. À ce moment-là, lorsque les deux parties sont d'accord, on poursuit, on fait assez rapidement la médiation en question.

Je crois que les résultats obtenus ainsi peuvent être très bons. D'abord, pour éviter un certain laps de temps, pas toujours parce que ça peut être assez long quand même, mais surtout parce que la somme d'argent investie est complètement différente. Troisièmement, ça permet d'aborder un plus grand nombre de dossiers en l'espace d'un an. Monsieur parlait...

Mme Pelchat: Toujours en évitant que les mêmes commissaires soient appointés à l'une ou l'autre des étapes.

M. Delisle: Et pour finir, pour votre question précise, pourquoi le BAPE? Bien, c'est que, suite logique de ce que je viens de dire, le BAPE ayant manipulé le dossier presque jusqu'à la fin, je crois que c'est, à ce moment-là, assez facile de poursuivre.

Mme Pelchat: Mon collègue de La Prairie est encore brûlant. Alors, je lui repasse la parole.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Bon! Je veux juste bien comprendre. Là, vous êtes assez catégorique. Vous êtes d'avis que c'est urgent que le gouvernement, par un décret, mette en vigueur, au fond, les paragraphes qui ne sont pas en vigueur, assujettise les grands projets industriels à la procédure. Deuxièmement, vous êtes d'avis aussi que le BAPE devrait, par l'article 6. 3 de la loi, donc, encore là, sans changement législatif ou réglementaire, se voir confier un plus grand nombre de mandats pour entendre le public sur des politiques et des études génériques. C'est ça? Oui. Bon.

Je reviens à la question qu'on discutait tantôt. Vous disiez: Dans la très grande majorité des cas, nos avis ont été entérinés par le gouvernement. Bon. Il y a évidemment un cas, là - tout le monde l'a en tête; il s'appelle Soligaz - où, suite à vos avis, le gouvernement a jugé bon de créer deux comités. J'ai une couple de questions là-dessus. D'abord, comment avez-vous réagi à ça, vous autres? Humainement parlant, au plan subjectif, ça a dû arriver comme une surprise. Je n'ai pas l'Impression que c'est arrivé souvent dans le passé que, suite à des avis du BAPE, un gouvernement crée un ou deux comités pour avoir d'autres avis. Ça a été quoi votre réaction?

M. Tétreault: Si vous permettez, M. le député, je vais placer les choses dans un certain contexte. D'abord, notre code d'éthique fait strictement référence, en termes de déclarations publiques, par le président ou par un membre de commission, sur le contenu ou la substance d'un rapport ou, encore, sur une décision du Conseil des ministres... C'est très clair: respecter les décisions du Conseil des ministres; à la suite des rapports des commissions, éviter de commenter publiquement. Très clair.

Point 2: Écoutez, chaque commission est souveraine, indépendante - appelez ça comme vous le voudrez. Comme président, par exemple, du Bureau, je ne peux intervenir d'aucune façon pour donner un alignement au dossier ou pour commenter, vis-à-vis de la commission ou autre, une angulation quelconque qui est prise. Je peux difficilement le faire après aussi.

Vous vous référez plus particulièrement à un dossier qui a été qualifié de peut-être un peu plus pénible. J'ai le privilège, si on peut appeler ça le privilège, de ne pas avoir été présent, excepté dans les tous derniers millages de ce dossier-là. Vous comprendrez que toute déclaration de ma part sur ce qui aurait pu, ou aurait dû se passer, ou s'est passé tient de la spéculation ou peut tenir de la spéculation et de la fabulation. Pour ces raisons-là, M. le député, je crois approprié, comme président du Bureau, de ne pas faire de commentaires sur ce genre de situation.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Je m'en doutais bien, mais je m'essayais quand même!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Mais vous allez reconnaître sans difficulté que le commun des mortels ne fait pas cette distinction: commission autonome, souveraine et BAPE. Mol, président du Bureau, je n'ai rien à voir avec la commission souveraine. Le public ne fait pas ces distinctions-là et je dirais môme que beaucoup de politiciens et politiciennes ne font pas cette distinction-là.

Par conséquent, je vous pose une autre question: Comment pensez-vous que le public a réagi à ça dans sa perception de l'Image du BAPE? Autrement dit, est-ce que ça a aidé, là, à la crédibilité du BAPE, cette affaire-là, ou pas?

M. Tétreault: Ah! Pour être honnête - vous me demandez une opinion, je vais vous en donner une - à la lumière de ce que nous vivons, en termes de mandats qui nous incombent, qui nous ont été donnés dans les six derniers mois ou qu'on peut voir venir à l'horizon, à la lumière des demandes qui nous sont acheminées et que je réachemine, parce que le BAPE ne se donne pas de mandat, on reçoit nos mandats, on exécute - je signe, comme président du Bureau, au moins deux fois par semaine, et je suis très honnête quand je dis ça, deux fois, des demandes de groupes quelconques qui voudraient une implication - je n'ai pas l'impression que nous sommes en perte de vitesse ou que notre crédibilité aura pu être ébranlée. SI c'était le cas, on n'aurait pas cette situation.

M. Delisle: Peut-être une petite Information complémentaire puisque la commission sur la stratégie de protection des forêts se passait pendant le dossier Soligaz: nous avons eu 202 mémoires.

M. Lazure: Je m'en réjouis et je suis sûr que vous allez continuer à en avoir beaucoup, même plus, au fur et à mesure que votre champ d'action va être plus vaste.

L'autre question à laquelle vous n'avez pas répondu, est-ce que c'est arrivé, dans le passé, que, suite aux avis officiels du BAPE, II y ait eu création de comités comme ça? Puis dans quel cas c'est arrivé? De mémoire, je ne me rappelle pas. Ça a pu arriver, mais je ne me souviens pas qu'il y en ait eu.

M. Delisle: À ma connaissance, même si je n'étais pas au BAPE à cette époque, c'est arrivé dans le cas de la sixième ligne Radlsson-Nicolet-

Des Cantons où II y a eu un comité d'experts qui a siégé après que le BAPE eut transmis son avis au ministre.

M. Lazure: C'est juste. Oui. Ce serait le précédent antérieur. Bon. Compte tenu de votre disponibilité et de la motivation que vous avez à entrer dans des terrains nouveaux, des terrains d'action nouveaux, vous avez évalué sûrement combien de ressources additionnelles ça prendrait, financières ou en personnel, pour être capable de transiger avec les nouveaux projets industriels assujettis de même que les politiques gouvernementales qui affectent l'environnement? Avez-vous une idée, environ là, du nombre de personnel additionnel que ça prendrait?

M. Tétreault: Voyez-vous, un ajustement ou une adoption réglementaire, on me dit, peut prendre quelque chose comme l'espace de six mois dans le système.

M. Lazure: Quel ajustement réglementaire?

M. Tétreault: L'adoption de la réglementation. Un décret ou peut-être...

M. Lazure: Non. Il s'agit pour... Article 2g, j, n, p, il s'agit d'un décret du Conseil des ministres tout simplement, purement et simplement. Ça, il s'agit que le ministre de l'Environnement, la semaine prochaine, fasse inscrire à l'ordre du jour du Conseil des ministres: Mise en vigueur de, etc., puis de préparer un décret à cet effet que le sous-ministre, avec l'aide du BAPE, pourra rédiger de façon très compétente. Donc, à mon avis, il n'a pas besoin de réglementation nouvelle pour ça.

M. Tétreault: M. le député, je peux vous dire que, jusqu'à maintenant, nous avons eu du gouvernement les ressources nécessaires pour réaliser nos mandats, en tout cas jusqu'à aujourd'hui au moins. Je peux vous dire qu'il y a eu une augmentation assez substantielle au cours des deux derniers exercices financiers. Cependant, dans un contexte où nous ajouterions la dimension dont vous parlez, M. le député, je pense qu'il faudrait faire en fonction des projets qui sont mis de l'avant et dont on peut aller chercher l'information sur l'existence et le degré d'avancement, qu'il est possible pour nous de faire les évaluations de ce que peut nous coûter le fait qu'on s'embarque dans cette entreprise-là agrandie.

M. Lazure: Bon, je vois que vous êtes assez optimiste, mais sans parler de chiffres, là, combien d'autres personnes à peu près, et des personnes venant de quelles disciplines auriez-vous besoin? De combien de ces personnes vous auriez besoin pour faire face aux nouvelles demandes? À peu près, un ordre de grandeur: 5, 10,15? (15 h 15)

M. Tétreault: Disons qu'au meilleur de ma connaissance, actuellement, nous avons, au moment où on se parle, l'équivalent de 47 personnes/année. On prévoit, dans un contexte normal d'évolution, en fonction de ce qu'on peut voir venir pour les 4 prochaines années, une augmentation de l'ordre de 15 %.

M. Lazure: Et ça serait suffisant pour les nouveaux mandats?

M. Tétreault: On parle du nombre de personnes requis. C'était votre question.

Une voix: Oui, oui.

M. Tétreault: Nombre de personnes requis. On prévoit une augmentation de 15 % au moment où on se parie...

M. Lazure: Mais ces prévisions-là... M. Tétreault: ...par année.

M. Lazure: ...tiennent-elles compte que le BAPE, dorénavant, si le gouvernement accepte la recommandation de cette commission qui semble probable...

Une voix: Non.

M. Lazure: ...à l'effet d'assujettir les grands projets industriels...

M. Tétreault: C'est votre... Cette situation-là, cette projection-là n'en tient pas compte...

M. Lazure: Bon, d'accord.

M. Tétreault: ...n'en tient pas compte.

M. Lazure: C'est ça qui est ma question. En dehors des 15 % normaux, vous escomptez que ça prendrait environ combien de personnes, là?

M. Tétreault: Dans la situation actuelle, dans le contexte actuel, on prévoit une augmentation de l'ordre de 15 % par année.

M. Lazure: O.K.

M. Tétreault: dans le contexte de l'assujettissement, je... il faut regarder ça plus précisément. je ne peux pas vous répondre, honnêtement.

M. Lazure: Mais vous êtes vraiment prêts, par exemple.

M. Tétreault: Nous, on est prêts à fonctionner. Oui, monsieur.

M. Lazure: Je veux être sûr de ça. Bon.

La médiation tantôt dont on parlait là, vous l'avez utilisée assez souvent, vous disiez, surtout depuis quelques années. Là aussi, est-ce qu'on peut avoir un ordre de grandeur? Dans quel pourcentage? Combien de fois vous l'avez utilisée et puis...

M. Dubé: Au cours des trois dernières années, quatre ou cinq fois. Cinq fois.

M. Lazure: Ah bon! En tout et partout. M. Dubé: En trois ans. M. Lazure: En trois ans.

M. Dubé: Mais, auparavant, il y en a eu d'autres, quelques-unes aussi.

M. Lazure: Oui. Bien, sur ces quatre ou cinq fois en trois ans, là, le pourcentage des succès et des échecs, c'était quoi?

M. Dubé: Je suis très heureux de vous dire que c'est 100 %.

M. Lazure: 100 %.

M. Tétreault: Cette année, nous avons entrepris ou sommes en voie de réaliser, pour l'année présente, 1990-1991, cinq médiations.

M. Lazure: M. le Président, mon collègue de Jonquière.

Une voix: Oui.

M. Dufour: Comme on a tendance à vouloir aller plus en médiation...

Le Président (M. Garon): M. le député de Jonquière.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Merci, M. le Président. Comme on a tendance à vouloir aller plus souvent en médiation, moi, il y a quelque chose qui m'intrigue parce que la plupart des intervenants nous ont dit: II faudrait raccourcir les délais pour que ça aille le plus vite possible. Je prends pour acquis que, la médiation ayant eu lieu, ça échoue. Ça peut arriver. Là, vous avez une moyenne de 100 %, mais, si on y va plus souvent, vous pouvez manquer votre coup. Là, la médiation, ça veut dire que, là, il y a un autre processus qu'il faut qu'il s'engage. Là, c'est le BAPE qui vient... ce sont les audiences qui vont embarquer. À ce moment-là, ça rallonge.

Est-ce que vous pensez qu'il ne pourrait pas y avoir une formule plus intéressante ou plus directive dans le sens que quelqu'un pourrait choisir entre la médiation et le Bureau d'audiences? Comme ce qui se fait dans des bureaux de tribunal commercial, les gens s'astreignent à une procédure au départ. S'ils vont là, ils ne vont pas en cour. S'ils vont en cour, ils ne vont pas là. Mais là, pourquoi rallonger des délais indéfiniment? Je pense à la... Ça n'a pas changé grand-chose chez nous, remarquez bien. Il y a eu une médiation, II y a eu un accord puis on n'a pas encore eu le O. K. Je parle de l'autoroute Jonquière-Saint-Bruno ou La Baie, ça serait plus connu.

M. Tétreault: M. le député, je vais vous dire ceci. D'abord, pour qu'il y ait médiation, il faut que le promoteur et le requérant acceptent d'entrer dans le jeu. Point un. Point deux, nous, on fonctionne, comme vous le savez, dans des délais compartimentés, fermés et connus. Ça s'applique même à la relâche de nos documents ou de nos avis au ministre. Le ministre a 60 jours pour livrer au public les avis que nous lui soumettons. C'est clair. L'expérience des 2 dernières années nous indique que, normalement, dans la plupart des cas, les cas réussis, nous avons réglé, à l'intérieur de 60 jours, à la fois l'enquête préliminaire ou préaudience et la médiation. L'expérience nous livre ça. Il peut arriver - et dans certains cas c'est peut-être souhaitable - que des dossiers de médiation prennent 10 jours de plus ou 20 jours de plus, mais l'expérience qu'on a actuellement fait qu'on livre le produit à l'intérieur de 60 jours, et le requérant garde toujours la possibilité de maintenir sa demande d'audience, dans le cas où nous entrons dans une médiation. C'est l'état actuel de la situation.

M. Dufour: Oui, mais, M. le Président, lorsqu'on parle d'étude d'impact et du Bureau d'audiences, c'est parce qu'il y a des Impacts. Quand on les connaît, quand on va à la médiation, ça veut dire qu'il n'y a pas beaucoup d'Intervenants qui s'opposent. Donc, le public est protégé de ce côté-là, à mon point de vue. Il reste quoi? Il reste l'intervenant, et l'intervenant, c'est une question d'intérêt. Ce n'est pas compliqué. Donc, à ce moment-là, pourquoi on prend une chance de rallonger les délais Indéfiniment? À moins que vous soyez de connivence avec d'autres personnes pour dire: Bien, ça nous permet de retarder les projets, surtout quand c'est le gouvernement qui est impliqué. Moi, Je suis obligé de vous poser la question clairement, comme je la pense, parce que je l'ai vu, le processus, et ça a pris six mois avant qu'on décide que, et ça a pris deux mois avant qu'on fasse que, puis, après ça, on est rendus à trois mois avant qu'on prenne la décision, et il n'y a rien de pris encore. Ça fait que, là, je ne sais plus.

Mme Journault (Claudette): M. le député,

pour avoir fait deux médiations qui ont été reçues favorablement de la part des citoyens et de l'ensemble des intervenants du milieu également, je pense que ça a été un processus qui a été reçu avec grand intérêt parce que les règles du jeu sont claires. Le BAPE a un mandat d'un mois ou deux mois pour fermer le dossier et les gens savent qu'on a ce délai-là. Lorsqu'on procède par la médiation, c'est parce qu'on a déjà fait une enquête avant et qu'on s'est déjà assurés, dans la mesure du possible, que les gens sont prêts à avoir un règlement.

Cependant, cette médiation-là... Il peut arriver, en cours de médiation, que des problèmes sérieux apparaissent. Des fois, ce n'est pas juste un individu. Dans certains cas, j'ai vu plusieurs familles qui étalent impliquées dans une médiation et II fallait leur garantir qu'en bout de piste, si le promoteur n'apportait pas les solutions satisfaisantes, elles pourraient aussi avoir un recours. Je pense que c'est un processus qui est à l'écoute des citoyens, qui permet de répondre par des moyens simples, souvent, et non lourds à la demande des gens et de régler des cas quand on peut le faire.

M. Dufour: Mais le BAPE ajouterait quoi, à travers tout ça, après la médiation? Parce que, si c'est une question d'intérêt et qu'il y a des gens qui ne sont pas satisfaits, en supposant que le projet est obligatoire et qu'il est nécessaire, il va arriver quoi? Le même processus qu'on a toujours connu. À quelque part, vous avez un pouvoir de recommandation, mais pas décisionnel.

Mme Journaurt: Oui.

M. Dufour: C'est là-dessus que, moi, je fais mon argumentation à l'effet que oui, c'est connu d'avance, ce qu'on fait, mais on sait bien que, quand vous allez en médiation, c'est parce que vous avez des choses très précises sur lesquelles vous appuyer. Ce n'est plus une question d'analyser les impacts environnementaux pour l'ensemble de la population. C'est pour des individus très...

Mme Journaurt: Vous avez tout à fait raison. Lorsqu'on recommande au ministre d'aller en médiation, c'est que le fond du dossier, la justification même du dossier n'est pas remise en cause. C'est une question fondamentale pour nous. Jamais on ne propose une médiation si une question de fond est sur la table. Alors, on évalue la chance de succès dans notre rapport préalable.

Le Président (M. Garon): O.K. M. le député de Dubuc?

M. Morin: Oui, mais je voudrais quand même qu'on réponde un peu plus précisément à la question de mon collègue. C'est dans l'éven- tualité où... À partir du moment où on circonscrit le problème alentour d'un intérêt limité, non pas d'un groupe, mais peut-être d'un individu qui avait demandé des audiences, demande qu'on ne peut qualifier de frivole... D'accord?

Mais à partir du moment où vous recommandez une médiation et que le ministre l'accepte, est-ce qu'à ce moment-là, vu qu'il n'y a plus d'intérêt public mis en cause, le fait d'autoriser la médiation n'aurait pas pour effet d'éliminer l'audience? Puisque le fait d'accorder des audiences... Vous dites: Toute la dimension des impacts est contrôlée. Il y a une reconnaissance tacite de la justification du projet. Donc, ça élimine, presque à sa source, la nécessité d'audiences publiques en autant que l'intérêt public est concerné. Donc, à ce moment-là, si vous autorisez ça, il y aurait incohérence à... Alors, je voudrais avoir un peu plus de précisions là

Mme Journaurt: D'accord. Alors, je pense que la loi, déjà, donne la latitude au ministre de l'Environnement puisque c'est à lui à déterminer si la demande d'audience est frivole. Cette question-là est fondamentale. Nous, au Bureau d'audiences publiques, lorsqu'on reçoit un mandat, on ne revoit pas si la question était importante ou si elle était frivole. La décision est prise déjà au niveau de l'élu. Nous, on intervient, à ce moment-là, plus au niveau de comment on peut trouver une solution qui, à la fois, satisfait le promoteur et respecte l'environnement des citoyens.

Alors, il n'y a pas non plus de nombre de citoyens qui a une masse critique. Nous, on considère qu'un citoyen est important au niveau de la démocratie et on prend, je pense, le temps de l'écouter si on a un mandat dans ce sens-là. Évidemment, un individu, généralement, c'est plus... Il y a moins de demandes divergentes que plusieurs familles ou plusieurs groupes qui vont venir se présenter en audiences. Mais je pense que la question est au niveau de la frivolité.

M. Dubé: J'aimerais rajouter un point. C'est que, lors de l'étude de l'enquête préliminaire et aussi lors de la médiation, mais surtout en première partie, le commissaire qui est chargé de faire le travail ne conçoit pas seulement l'intérêt particulier. Il peut arriver que le requérant fasse une demande et que ce soit strictement privé, mais il peut arriver aussi que son intérêt soit public. Alors le commissaire doit juger, de part et d'autre, de quoi il s'agit. SI l'intérêt public dépasse vraiment la compétence d'un seul requérant ou la compétence - je dirais - d'un mandat de médiation, le commissaire va, à ce moment-là, recommander au ministre de faire enquête et audience publique parce que le commissaire n'a pas le droit de cacher des choses qu'il apprend par le requérant ou qu'il apprend de lui-même dans son enquête.

Le Président (M. Garon): Merci. M. le député de Saguenay.

M. Quesnel: M. le Président, si vous me permettez, je compléterais. Quand on parie d'augmentation des délais par la médiation, à tout événement, ça ne dépassera jamais quatre mois parce que la médiation, si elle a lieu, ne sera jamais plus longue que l'audience.

M. Dufour: Oui, mais si elle la manque?

M. Quesnel: Si elle la manque? Bien, il peut y avoir une augmentation entre zéro et quatre mois.

M. Dufour: Voilà! Je pense qu'il y a quelque chose, en tout cas.

Le Président (M. Garon): Merci. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. M. Tétreault, il y a beaucoup de membres, beaucoup de personnes, qui sont venues ici témoigner, qui ont fait le reproche suivant. Lors des audiences publiques sur le projet x, z, w, là - peu importe comment on l'appellera - c'est que les promoteurs ont trouvé que, souvent, finalement, on faisait un débat public sur bien d'autres choses que le projet concerné, qu'on mettait tout dans le même melting-pot puis, finalement, qu'on faisait le procès de la société, du gouvernement, de tout le monde. Et beaucoup... Je sais que madame n'est pas d'accord avec moi mais, malheureusement, si vous aviez été ici depuis trois semaines, vous en auriez entendu des mûres puis des pas mûres. Est-ce que vous trouvez ça, vous, madame, qu'on en profite pour faire un débat de société où, finalement, on s'occupe uniquement de nos oignons?

Mme Journault: Bien, à chaque fois qu'on reçoit des citoyens pour questionner un projet, évidemment, c'est un débat de société. Il n'y a pas un niveau où ça devient un grand débat de société, il n'y a plus de débat de société. C'est une question de... Les gens qui sont intéressés à connaître le pourquoi d'un projet vont questionner sa justification et nous les aidons à avoir l'information, de la part du citoyen, pourquoi ce projet-là est proposé dans un milieu. Alors, évidemment, si les grandes politiques étaient soumises à une consultation publique, si, par exemple, au niveau des questions énergétiques, on avait une consultation sur ces aspects-là, les aspects de la politique énergétique qui sont questionnés lors d'une audience publique, les citoyens en seraient informés et on ne viendrait plus questionner le promoteur sur ces aspects-là. (15 h 30)

M. Maltais: Mais lorsque vous parlez d'énergie... Je vais y aller là-dessus. Lorsque vous dites qu'il n'y a pas de...

M. Tétreault: Pardon, M. le député. On revient toujours à la question de base. Plus le citoyen peut intervenir en amont, moins de problèmes vous avez dans le déroulement. Tout est alentour de ça.

M. Maltais: Écoutez, M. le Président, on va essayer de bien se comprendre. Moi, les promoteurs qui sont venus ici, ils ont dit qu'ils faisaient des débats de société. Madame a dit: Bon, O. K., quand on parle d'énergie, c'est vrai qu'il n'y a pas eu un débat de fond. Il n'y a pas eu une commission parlementaire qui a duré six mois, qui a fait le tour de la province, mais il y en a eu une qui a duré quand môme 23 jours en 1990; 61 groupes sont venus en audition à cette commission parlementaire là. Si ce n'est pas un débat de société, cette affaire-là, c'est quoi? "C'est-u" une baliverne de la ministre de l'énergie? Qu'est-ce que ça vaut, ça?

Est-ce que vous considérez qu'une commission parlementaire de 23 jours, tenue dans l'Assemblée nationale du Québec, à laquelle tout le monde peut participer, c'est un débat de fond ou bien que c'est rien que de la frime, cette histoire-là? Comment est-ce que vous considérez ça?

M. Delisle: Vous parlez, j'imagine, de la commission parlementaire sur le plan de développement d'Hydro-Québec pour cinq ans? C'est bien ça?

M. Maltais: C'est ça. Oui.

M. Delisle: Je pense que, souvent, ce qui fait que les promoteurs disent que les débats débordent nos mandats, c'est justement qu'il y a cette discussion sur les justifications du projet. Dans toute audience que nous faisons, la justification du projet est quand môme en cause. Nous faisons très attention, quand nous analysons le projet, quand nous examinons l'étude d'Impact et quand nous questionnons, de rester dans le mandat tel que donné par le ministre.

Maintenant, il y a des différences de perception quant à la portée môme de mots de certains mandats. Si on accepte de questionner la justification du projet, pensons, par exemple, à une ligne hydroélectrique, si on siège sur la ligne, si on fait une audience publique sur la ligne comme telle, II y a évidemment des questions qui se posent sur d'où vient l'électricité qui arrive sur cette ligne-là.

Le promoteur qui est en audience, à répondre, considère que nous débordons notre mandat parce que nous allons au-delà de la limite de la ligne que nous allons analyser. Mais c'est quand môme difficile de refuser à un citoyen qu'on réponde aux questions: D'où vient l'énergie, où elle va, à quoi elle va servir et

ainsi de suite? C'est très difficile, je peux vous le dire, quand les citoyens posent des questions, de dire que des questions comme celles-là ne sont pas pertinentes au projet.

M. Maltais: Ça va. Vous avez raison là-dessus. Mais que des citoyens ne sachent pas qu'il y a eu une commission parlementaire de 23 jours, je le comprends. Qu'il y ait des groupes qui ne le sachent pas, je le comprends. Mais que, vous, vous ne le sachiez pas, je le comprends mal.

M. Delisle: M. le député, nous le savons. Maintenant, je crois que c'est de notoriété publique que le grand débat sur la politique de développement énergétique du Québec n'est pas encore fait et que les citoyens le demandent beaucoup. Nous avons trois audiences, à l'heure actuelle, où ce sont des questions énergétiques, et je puis vous assurer que les citoyens demandent beaucoup, posent énormément de questions sur quelles sont les orientations sur le plan énergétique qui sont en amont des projets que nous avons à analyser.

Nous, nous savons que nous n'avons pas le mandat de regarder les politiques et les orientations énergétiques, que nous regardons les projets, mais c'est quand même de dire aux citoyens: Le débat est fait et voici la réponse. Même les promoteurs de projets énergétiques ne peuvent pas et ne veulent pas répondre à ce type de questions.

M. Maltais: D'accord. Dans un autre ordre d'idées, les municipalités sont venues nous dire, finalement, que, oui, beaucoup de projets devaient être assujettis aux audiences. Mais là où je me mêle un petit peu, c'est que ce matin, les gens de la Communauté urbaine sont venus nous dire qu'eux autres ils informaient leur monde et que c'était à eux autres de prendre ça.

Là, si vous autres, vous informez le monde, la Communauté urbaine informe le monde, la ville dans laquelle le projet est concerné informe le monde, je conviens que ça va faire du monde bien informé. Mais le problème, c'est qu'il y en a 59 qui sont venus nous dire qu'ils étaient mal informés. Comment voyez-vous ça, vous, l'information?

M. Delisle: Bon.

M. Maltais: II y a eu une dame ici, hier, c'était épouvantable. Elle venait de Blainville, pour un incinérateur qu'il y a chez eux, là. Bon. C'était l'enfer. Finalement, personne ne l'a informée. On ne l'a pas plus informée, nous autres. On est des parlementaires, on n'est pas des ministres, on n'est pas le président du BAPE non plus, on n'est pas le maire de la ville de Blainville et on n'est pas l'échevin de son quartier, ni le promoteur non plus.

C'est le cas de Stablex. On va le tirer au clair pendant qu'on l'a. Il n'y a personne qui semble avoir été informé que c'est ça. Comment ça marche, cette histoire-là? Pourquoi tout le monde veut informer tout le monde et, au bout de la ligne, que tout le monde est mal informé ou pas informé? Qu'est-ce qui cloche? Qu'est-ce qui ne marche pas là-dedans?

M. Tétreault: M. le député, je sais qu'a circulé l'idée de la création des BAPE régionaux.

M. Maltais: Voilà! J'allais vous le faire dire.

M. Tétreault: J'ai lu ça. Je pense qu'au nombre de MRC qu'on a au Québec ce ne serait peut-être pas la voie souhaitable de créer 90 ou 95 BAPE régionaux. Ce serait, pour le moins, peut-être une de lapidation de nos ressources humaines et financières, jusqu'à un certain point. Cependant, écoutez, il peut y avoir des circonstances - on parle du niveau des municipalités, du niveau régional, des MRC - où, pour un sujet, avec l'accord de différents intervenants au niveau régional, d'importance, par exemple quelque chose qui sort outre-frontières de la MRC, dans lequel le ministère doit autoriser le projet ou la politique, éventuellement - on peut parler de déchets, par exemple - il est possible - non seulement il est possible, mais on a eu des revendications et je réponds toujours de la même façon, que ce n'est pas nous qui nous donnons les mandats - que le BAPE soit d'un secours pour aider à la solution, en termes d'avis, pour une circonstance, une situation comme ça. Maintenant, c'est finalement une décision qui revient au ministre.

Je suis sûr que le ministre qui répondrait à toutes les demandes dans ce sens-là, demandes, par exemple, d'implantation d'un site localement, pourrait se retrouver avec un BAPE débordé en fonction de ses propres mandats qu'il veut lui-même donner au BAPE. Je pense qu'en fonction de nos réalisations, dans certains cas, il pourrait arriver qu'on puisse être utile.

M. Maltais: D'accord. Je vais terminer ici parce que je veux laisser du temps à ma collègue, M. le Président.

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Vachon?

Mme Pelchat: Non, je n'ai pas...

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux juste revenir rapidement sur ce que le vice-président commentait tantôt, en réponse à des questions du député de Saguenay, à savoir les débats plus généraux, genre débat énergétique.

On nous informe à l'instant que le gouvernement vient d'annoncer qu'il y aura une seule évaluation globale sur Grande-Baleine. Alors, nous, de l'Opposition, on se réjouit de ça parce qu'on le demande depuis un an et demi, comme bien d'autres. On est très contents de ça. Il y a des chances que ça donne le temps de tenir un grand débat sur l'avenir énergétique. S'il y a une grande évaluation globale qui se fait dans le Grand-Nord, à ce moment-là, peut-être que ce serait intéressant que le gouvernement donne un mandat au BAPE de tenir un débat public sur l'avenir énergétique au Québec.

Les BAPE régionaux, moi, je ne suis pas particulièrement attiré par cette idée, sauf s'il s'avérait que des audiences conjointes, BAPE avec MRC, grandes municipalités ou communautés urbaines, ne pourraient pas être tenues, peu importent les raisons, là. À ce moment-là, il faudrait peut-être y penser. Mais, dans un premier temps, je pense qu'on devrait penser à utiliser beaucoup plus la formule d'audiences publiques conjointes.

Je veux revenir au mandat que vous recevez du ministre. Est-ce que, dans l'ensemble, vous trouvez que les mandats qui vous sont donnés par le ministre sont assez clairs, sont assez précis? Est-ce qu'ils sont assez élaborés ou pas? En gros, est-ce que vous êtes satisfaits du genre de mandat que vous recevez, dans la façon que le mandat est rédigé?

M. Tétreautt: Écoutez, je ne suis pas un expert légal parce qu'il y a toujours des dimensions légales, mais il y a deux façons de donner des mandats: l'article 31.3 et l'article 6.3. Alors, Pierre, si tu veux élaborer.

M. Quesnel: Je pense qu'à ce moment-ci ça ne pose pas de difficultés. Évidemment, dans certains cadres, les mandats qui sont donnés vont en élargissant les débats et il faudrait peut-être faire remarquer au promoteur ou au public que, lorsque la commission reçoit un mandat qui est large, elle doit l'exécuter parce que, en somme, elle ne décide pas de son mandat, elle le reçoit. Sous cet aspect-là, je pense que ça ne représente pas de problème davantage que celui-ci.

M. Lazure: Est-ce qu'il y a eu des cas d'audiences publiques où, donc, vous aviez reçu le mandat du ministre et où II s'est avéré que la demande était frivole dans le fond? Est-ce que c'est arrivé, ça, déjà?

M. Quesnel: Là, il n'y a jamais de demandes qui ont été déclarées frivoles comme telles, mais, dans quelques dossiers, les commissaires ont eu à examiner la notion de frivolité parce qu'à vrai dire personne actuellement ne sait ce que ça veut dire. Est-ce que c'est farfelu? Est-ce que c'est technique? Est-ce que... Mais ça n'a pas été le cas dans le passé.

M. Lazure: Est-ce que, d'après vous, M. le président, la notion de frivolité doit être maintenue?

M. Tétreautt: Bon, écoutez, sur ça, je présume que, lorsque le législateur a inclus cette dimension-là, il y a quelque 10 ans, il y avait un esprit derrière ça. Ça devait être une préoccupation pour le législateur. C'est une notion qu'on me dit très difficile à définir, très difficile à encadrer. On me dit qu'il n'y a pas eu de circonstances, d'exemples multiples où II y avait évidence de frivolité. Cependant, moi, personnellement, je crois que, si le législateur l'a pensé, au moment de la conception de la loi, il y avait un esprit, alors il faut que quelqu'un puisse être capable pratiquement de s'en servir. SI ce n'est pas utile, si on ne s'en sert pas, alors débarrassons-nous-en. D'un autre côté, si on n'est pas outillé pour l'utiliser, précisons-le. Mais, pour être honnête, M. le Président, ce n'est pas un problème majeur d'opération.

Une voix: M. le député de Dubuc.

Le Président (M. Garon): M. le député de Dubuc.

M. Morin: Bon, là-dessus, sur la frivolité, moi, j'ai déjà eu des discussions avec un ministre de l'environnement et je lui posais justement des questions là-dessus, comment il se sentait vis-à-vis de certaines demandes, puis, entre autres, dans un cas précis, évidemment, que je n'identifierai pas ici, II m'a avoué candidement qu'il soupçonnait vraiment de la frivolité, mais que, pour que le ministre en décide ainsi... C'est qu'il risquait fort que le requérant puisse, par des mesures juridiques, obtenir un jugement dans le sens contraire. Parce que, justement, le terme frivolité devait être interprété plus dans l'esprit du législateur que dans la lettre, puisque c'est un mot qui peut lier.

Alors, le ministre m'avouait qu'il soupçonnait que la demande, dans un cas précis, était frivole, mais qu'il reconnaîtrait quand même la demande par esprit d'ouverture et pour éviter toute poursuite qu'il pouvait soupçonner. Alors, j'aimerais avoir quelques remarques là-dessus. Ça veut dire que, quand le président dit: Si on ne s'en sert pas, aussi bien s'en débarrasser, ce qui ne serait pas totalement... Ou, à tout le moins, si on voulait en faire un usage un peu plus... il faudrait peut-être le baliser. Enfin, j'aimerais avoir vos...

M. Dubé: Je crois, M. le député, que la question de frivolité, qui présente des problèmes, semble-t-il, à beaucoup de gens, ne semble pas, dans la vie quotidienne, en présenter tellement parce que le ministre doit, bien sûr, juger à leur

valeur les demandes des requérants. Sans me mettre dans la peau du ministre, nous recevons quand même des mandats de sa part et, lorsque, par exemple - c'est peut-être la meilleure façon pour nous de juger - nous avons une demande d'enquête préliminaire ou d'enquête préaudience, on peut penser qu'il peut y avoir un doute quelque part, et c'est là que le commissaire, faisant son travail, peut découvrir qu'il y a quelque chose qui ressemble ou qui peut ressembler à de la frivolité. Ce n'est pas à nous de juger. Notre façon de faire notre rapport préliminaire au ministre va lui donner de bonnes indications si, je pense, il peut y avoir frivolité. (15 h 45)

M. Morin: Est-ce que le nombre de requérants modifie le sens de la frivolité, influence, ou si ça n'intervient d'aucune façon dans l'interprétation que vous vous faites de la frivolité de la demande? Le nombre de requérants... S'il s'agit seulement d'un individu qui fait une demande dont la substance semble très, très fragile, ça peut être plus près de la frivolité que s'il y a un plus grand nombre de requérants avec une nature de demandes à peu près pareille. Est-ce qu'à ce moment-là le nombre a une influence sur la nature potentielle de la frivolité?

M. Dubé: On serait porté à croire que le nombre est Important, mais, au cours des audiences publiques, on réalise souvent qu'une seule personne parmi 50 déniche un problème que les autres n'avaient pas vu. Alors, on ne peut juger sur le nombre parce que c'est assez difficile, mais vous avez raison que ça peut être une indication. Cependant, pour le commissaire qui reçoit la demande du ministre, cette notion de nombre ou de poids, si vous voulez, démographique, ou autrement, n'a pas vraiment d'influence sur l'analyse que nous devons faire en toute Impartialité et objectivité.

M. Lazure: M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci. Je vais revenir sur une de vos remarques préliminaires, M. le Président. Vous disiez: Plus le public interviendra tôt dans le processus de l'évaluation, mieux ça sera, moins ii y aura de frustration. Ça peut aller aussi tôt, ça, que lors du dépôt de l'avis de projet par le promoteur au ministère ou encore, lors de l'émission de la directive du ministère au promoteur?

Ma première question, c'est: À quel stade vous suggérez que ça intervienne? Et, deuxièmement, est-ce que c'est le BAPE qui serait l'animateur de cette consultation publique?

M. Tétreault: Je pense que ça pourrait se faire à deux moments particuliers: au niveau de l'avis de projet, par un affichage quelconque, et, définitivement, au niveau de la directive. Ça peut se faire à ces deux moments-là.

M. Lazure: Dans les cas où il y a eu audiences, où vous êtes intervenus avec le public, est-ce que vous avez constaté que, de façon générale, les études d'impact du promoteur étaient correctes, étaient bien montées? D'autre part, est-ce que vous avez constaté que les directives du ministère étaient pertinentes, complètes, adéquates? Pourriez-vous nous parler un peu de ces deux aspects-là?

Mme Journault: M. le député, je pense que l'expérience qu'on a vécue au BAPE, dans les cas où il y avait le plus de difficultés à arriver à une harmonisation dans un projet qui répondait aux attentes des citoyens et aussi aux attentes du promoteur, ces cas-là, c'était parce que le promoteur n'avait pas pu identifier au départ les attentes ou quelles étaient les préoccupations fondamentales des citoyens d'une région donnée et qu'on n'avait pas évalué des options qui auraient été très intéressantes pour les citoyens.

M. Lazure: À ce moment-là, est-ce que vous pensez que ça aurait dû être inclus dans la directive?

Mme Journault: C'est que, si les citoyens avaient été... si on avait demandé aux citoyens quelles étaient leurs préoccupations par rapport au devenir de cette région-là ou comment ils voyaient le projet ou les préoccupations particulières, le promoteur aurait certainement pu en tenir compte et élaborer un projet qui satisfasse plus les citoyens.

M. Morin: M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le député de Dubuc.

M. Morin: S'il y avait une consultation, une implication du milieu, au niveau de la procédure ou de l'avis de projet, comment verriez-vous, si vous en voyez un, le rôle du BAPE à ce moment-là? Parce qu'à ces deux premières étapes, là, le BAPE ne fait pas partie du jeu. Est-ce que vous pensez qu'il pourrait y avoir élargissement du rôle du BAPE, à partir de cette implication-là hâtive, cette préconsultation?

Une voix: Vas-y!

Mme Journault: le rôle du bape, au niveau de la consultation sur la directive, je pense qu'on aurait aussi là une possibilité d'un rôle consultatif pour aller chercher les préoccupations des gens et les analyser pour en faire une proposition au ministre de l'environnement qui pourrait les considérer.

M. Morin: Alors, ça constituerait un élargissement du rôle du BAPE. O.K. Oui.

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: Merci, M. le Président. J'aimerais corriger une petite chose de tout à l'heure quand on a parlé que, demain matin, le gouvernement acceptait de mettre en application les articles qui sont suspendus. Je pense que c'est important de spécifier qu'à l'article 19 du règlement on dit: Les paragraphes g, n, p et le deuxième alinéa du paragraphe j du premier alinéa de l'article 2 entreront en vigueur, en tout ou en partie, à une date déterminée par règlement du gouvernement, adopté en vertu de la loi.

M. Lazure: C'est par un décret du gouvernement.

Mme Pelchat: Mais c'est par règlement, par publication à la Gazette officielle.

M. Lazure: Oui, l'étape de prépublication, ce n'est pas...

Mme Pelchat: Cela étant dit... Une voix:...

Mme Pelchat: Non, c'est important de le préciser. Si on en revenait à l'étape de l'élaboration de la directive, vous semblez favoriser effectivement que le public soit consulté à cette étape-là. Je pense qu'à ce moment-là, vous répondez à une demande du rapport Lacoste, qui fait référence à la similarité avec la technique américaine appelée "scoping". Est-ce que Je vous saisis bien?

M. Tétreault: On se rapproche, oui, on se rapproche de ça, effectivement.

Mme Pelchat: Est-ce que cette étape-là, cette espèce de mécanisme d'information et de consultation publique sur la directive, plutôt que de dire "scoping" - ça choque beaucoup les oreilles de mon collègue de La Prairie - est-ce que cette étape-là devrait être indiquée dans le règlement, dans la procédure formalisée au même titre que l'étape des audiences publiques?

M. Tétreault: On me dit qu'il y a des précédents au Québec dans le cadre d'une entreprise de consultation fédérale-provinciale sur un projet particulier. On me dit que ça peut se faire sous l'article 6.3. Cependant, si le gouvernement décidait d'impliquer le BAPE dans une telle entreprise au niveau de la directive, il serait préférable que cette responsabilité soit précisée au niveau de la réglementation. Mais on peut actuellement opérer dans le contexte de l'article 6.3.

Mme Pelchat: Est-ce que la médiation devrait être aussi précisée dans la réglementation?

M. Tétreault: SI le gouvernement décidait de pousser plus loin l'implication du BAPE dans la médiation, on croit également que ça devrait être précisé dans la législation. Maintenant, on peut opérer - et on opère effectivement - sous l'article 6.3.

Mme Pelchat: C'est agréable pour moi de mentionner que, lorsqu'il y a médiation, c'est à la demande du ministre par l'article 6.3. C'est une des fols où il utilise l'article 6.3.

Je veux revenir au "scoping". Plusieurs personnes sont venues nous dire - et je pense que c'est la totalité des gens - qu'il faut associer le public dès l'élaboration de la directive, s'il vous plaît, non pas lorsque la décision est finale et que les pelles sont prêtes à venir sur le chantier et à creuser un incinérateur. Je ne veux faire allusion à aucun projet.

Est-ce que le public possède toutes les données et l'expertise technique pour participer effectivement à l'élaboration de la directive qui va être soumise au promoteur? Mol, je vous le dis, ça fait deux semaines, presque trois semaines que j'entends tous ces grands experts là. Je ne suis pas certaine que, demain matin, j'irais m'asseoir avec M. Tétreault pour parler de l'élaboration d'une directive. Je ne suis pas sûre que je serais capable de faire ça.

M. Dellsle: L'expérience actuelle où il y a une consultation publique sur la directive... Évidemment, on part d'un projet de directive qui est soumis au public par un processus quelconque, mais il y a un projet qui est déjà acheminé, par exemple, par le ministère de l'Environnement et c'est sur ce projet-là que le public est consulté. L'Intérêt d'introduire le public à cette étape-là, c'est de faire le balayage, l'exploration des enjeux du projet, des questions sur lesquelles les gens voudraient avoir des réponses. Ça répond en partie à la question du député de Saguenay, tout à l'heure, qui disait: Est-ce que les gens sont Informés, sont surinformés?

Une partie du problème, c'est que les gens sont très informés, mais pas sur les questions sur lesquelles ils veulent être informés. Alors, l'intérêt de la question sur la directive, c'est de poser au promoteur les bonnes questions, ce qui lui rend la tâche plus facile parce qu'il sait, au moins, en audiences, à quoi II va avoir à répondre et sur quoi H va être évalué en termes de qualité du travail. Dans ce sens-là, Je pense que c'est ça, l'intérêt de la consultation sur la directive. Maintenant, II ne faut pas Imaginer seulement la grande procédure lourde, longue de

consultation par grandes audiences. Il y a plusieurs formules possibles.

Mme Pelchat: Moi, je ne pensais pas à la grande, grande consultation. Je pensais à la grosse brique, l'encyclopédie, là.

M. Dellsle: Non, je pense que...

Mme Pelchat: C'est ça. Souvent, les personnes sont venues nous voir pour nous dire: Lire d'abord la directive puis, après ça, l'étude d'Impact, ça prend un cours universitaire de troisième cycle, puis...

M. Delisle: D'accord. Et ce sera l'avantage si on soumet la directive à la consultation publique; les directives vont se simplifier énormément et vont être compréhensibles par les citoyens et par les promoteurs, parce qu'à l'heure actuelle c'est certain qu'on a des directives qui sont devenues des documents très complexes et très difficiles à satisfaire, même par les promoteurs.

J'ai eu à travailler, au cours des années précédentes, sur des projets avec des promoteurs où on doit satisfaire à une directive. Je vous assure que c'est très difficile. Par contre, si c'est un document qui va au public, nous, on a aussi un mandat de vulgarisation, si on veut, de simplification des projets pour que les gens les comprennent. Les gens sont capables de comprendre des directives d'étude d'impact si elles sont bien écrites et claires et, à ce moment-là, ça va forcer cette tendance-là.

Mme Pelchat: Est-ce que - et, là encore, je me fais l'avocat du diable parce que, moi, je serais en faveur de cette étape-là - est-ce que ça... Je ne me fais pas l'avocat du ministre, monsieur, vous devriez savoir ça depuis le 17 septembre. Je pense qu'on l'a assez bien démontré. Est-ce que le ministre est dans la salle? Il n'est pas arrivé encore, hein? Mon Dieu, j'ai perdu le fil, là. Vous n'êtes pas bien fin, vous, là! Qu'est-ce que je disais, donc?

Est-ce qu'on ne devrait pas trouver une façon - vous allez me dire oui, je suis certaine - de financer les groupes ou les gens qui vont participer à l'élaboration de cette même directive là? Est-ce que vous autres, comme organisme qui avez toujours les deux côtés de la médaille en face de vous, vous seriez prêts à accepter que le promoteur finance dans une espèce de fonds global qu'on pourrait appeler fonds de recours à l'environnement ou fonds de recours à l'audience en l'environnement? Est-ce que vous seriez favorable à ce que le promoteur finance? Nous autres, on aimerait mieux ça, mais...

M. Tétreault: Mme la députée, il y a une chose qui est sûre, c'est qu'on ne veut pas administrer ce fonds-là. Ha, ha, ha! Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Elle est bonne. Eh bien! Comme on ne veut pas y toucher...

Le Président (M. Garon): Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: J'attends la réponse de M. Tétreault.

M. Tétreault: Si on veut aider le citoyen à faire des représentations, aider sa compréhension, je pense que, dans certains cas... Et on peut peut-être commencer par les programmes, quitte à ce qu'on passe aux projets par la suite, on peut peut-être expérimenter avec les programmes, l'analyse des programmes. Je pense qu'on devrait songer à une aide quelconque pour aider les citoyens, les groupes qui veulent faire des représentations. Ils sont généreux de leur temps et ils ne sont, parfois, pas toujours outillés, équipés. Ils le font avec beaucoup de spontanéité, mais, parfois, leur représentation pourrait être mieux traduite, mieux soutenue si quelqu'un les encadrait, si quelqu'un leur suggérait des approches ou les conseillait généralement. Je pense qu'on devrait peut-être penser à mettre sur pied ce genre d'aide là et en commençant d'abord, peut-être pas d'une façon grandiose, mais au niveau des programmes, par exemple, lorsqu'un programme gouvernemental... On peut commencer et voir ce que ça donne.

Mme Pelchat: Est-ce que vous seriez en faveur que les promoteurs contribuent à cette espèce de fonds? (16 heures)

M. Delisle: Certainement, à condition que le fonds soit géré de façon indépendante. Le Bureau d'audiences publiques s'est prononcé de façon répétée en faveur du financement des groupes qui participent aux audiences. Maintenant, évidemment, ce fonds-là doit être géré d'une façon indépendante. Il y a d'autres exemples de fonds qui sont des fonds disponibles pour des citoyens qui veulent participer à des processus publics ou faire des représentations devant les tribunaux ou quelque chose comme ça. On a l'expérience de ça; il n'y a rien qui empêche que les promoteurs mettent la main dans leur poche. Un petit montant dans ce fonds-là, ça aiderait tout simplement le gouvernement à financer la participation. Mais gestion indépendante, ça, c'est une condition.

Mme Pelchat: Tout à l'heure, je ne voulais pas me faire l'avocat du diable, je voulais vous parler des délais. Est-ce qu'on n'a pas peur que d'ajouter cette étape de consultation n'allonge de deux, ou trois, ou quatre mois la procédure

comme telle et que, là, on se fasse encore dire: Au Québec, c'est donc long, votre affaire? En tout cas, on va mettre ça sur le dos du BAPE, plutôt que sur celui des fonctionnaires du MENVIQ, ou du promoteur, ou...

Mme Journault: Mme la députée, ma réponse sur deux aspects: D'abord, je pense qu'on fait là un investissement de temps dans l'ensemble du processus, parce qu'on va chercher les préoccupations des gens et qu'on s'assure que l'étude d'impact répond le plus à ces gens-là. Ça peut même éviter des audiences publiques, parce que les gens vont avoir ce qu'ils demandaient dans les études.

Deuxièmement, en termes concrets, II pourrait arriver que la consultation sur la directive se fasse au moment où le ministère de l'Environnement fait sa consultation au niveau des autres ministères. Alors, c'est une opération qui pourrait se faire conjointement. À ce moment-là, en parallèle, les citoyens pourraient donner leur avis; ça n'allongerait pas le processus.

Mme Pelchat: O.K. J'aurais une dernière question et un court commentaire. Dans te code d'éthique, vous dites: Traiter toute ingérence dans leur travail comme irrecevable ou inadmissible. Comment traitez-vous vos relations avec le MENVIQ? Est-ce que vous considérez que c'est une ingérence dans votre travail?

M. Tétreault: On m'a dit que, dans le passé, il y avait eu des irritations, des irritants entre certaines personnes qui évoluaient au niveau de certaines unités du MENVIQ et peut-être certaines personnes au BAPE. Et parfois, on m'a dit que ça c'était déroulé sur la place publique. Je pense que, que ce soit le MENVIQ ou nous, de notre point de vue, on travaille ensemble pour arriver à un objectif qui est une meilleure qualité de vie du citoyen du Québec. Et nous avons développé, comme nous le faisons avec le gouvernement fédéral, pour le sud, un protocole de travail, un protocole de travail administratif dans les cas où il y a compétence fédérale, intérêts québécois et vice-versa, et toutes les combinaisons. Donc, avec le MENVIQ, nous tentons le plus possible de développer des relations harmonieuses, tout en étant conscients que leur travail et notre travail est complètement différent. On a un rôle et un mandat complètement différents.

Mme Pelchat: J'aimerais terminer mon questionnement ici, si vous me le permettez, parce que je pense que mon temps est presque... M. Delisle, vous pouvez poursuivre, brièvement.

M. Delisle: Oui, je pense que ce qu'il faut ajouter, c'est que la collaboration avec le ministère se fait au niveau de l'organisme, le

BAPE. Mais une fols une commission constituée, il n'y a plus d'interférence ou d'interaction, en dehors de l'audience, entre le ministère de l'Environnement et la commission. Alors, quand on parle d'ingérence, on ne parle vraiment pas de tentative d'un ministère pour essayer d'Influencer une commission, parce que la référence au ministère de l'Environnement, dans le cadre d'une commission, se fait lors de la période d'information et, en public, le ministère répond publiquement aux questions qui lui sont posées par les citoyens à la commission.

Mme Pelchat: Là aussi, je me faisais l'avocat du diable, M. Delisle. Je voudrais vous remercier et vous dire que j'ai beaucoup apprécié l'échange que j'ai eu avec vous, et j'Imagine que c'est la même chose pour mes autres collègues. Vous nous avez prouvé que le BAPE mérite d'exister et mérite d'être écouté, surtout. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Merci, Mme la vice-présidente. Je voudrais d'abord dire que je me réjouis des remarques de Mme Journault lorsqu'elle dit que la participation du public au moment de la formulation de la directive aiderait à rendre la directive et, par conséquent, l'étude d'impact qui viendra après, plus compréhensible à la population. Il y aurait une espèce d'amélioration. Le public viendrait améliorer la directive ministérielle, je suis convaincu de ça. J'en suis convaincu.

Le financement des groupes, je comprends votre réticence, M. le président, à ne pas vouloir administrer une telle caisse, mais, en Ontario, vous le savez sans doute, Hs ont une formule, pour le moment, qui consiste à créer un comité du financement qui est présidé par quelqu'un de délégué par '© président de l'équivalent du BAPE et par une personne designée par la commission des affaires municipales. Ces deux personnes-là forment un comité. C'est une formule un peu expérimentale qu'ils utilisent, mais je retiens, pour les besoins de la cause, que vous êtes d'avis, sans aucun doute, qu'il va falloir aider les groupes, les individus et que le BAPE est près à contribuer à la formation de ce fonds-là, en tout cas, H peut émettre des idées quant à la formation du fonds.

Une couple de questions. Je veux revenir sur la procédure. On a parlé tantôt du ciblage mais il y a aussi l'autre truc qui est à la mode un peu de ce temps-ci aux Etats-Unis, c'est la voie rapide, le "fast track". Qu'est-ce que vous pensez de cette hypothèse qui veut que le promoteur, au moment où H dépose son avis de projet, sait d'avance qu'H doit aussi déposer son étude d'impact? À ce moment-là, si le promoteur prend trop de temps à préparer son étude d'impact, c'est lui qui est responsable du délai.

C'est son problème et, s'il fait mal son étude, c'est son problème aussi. Il court un risque. Mais cette procédure accélérée semble vouloir retenir l'attention aux États-Unis et je me demandais si, vous autres, vous l'aviez regardée et qu'est-ce que vous en pensiez.

M. Tétreault: L'approche "fast track" américaine est certainement une approche intéressante. Nous n'avons pas, au niveau du Bureau, porté beaucoup d'énergie à développer ce concept-là au moment où on se parle. Cependant, par exemple, dans le cas où une générique aurait touché un programme, les projets qui pourraient survenir sous ce programme-là une fois que les grandes justifications et les grands débats auraient eu lieu, nous croyons que peut-être l'approche "fast track" serait intéressante dans ce contexte-là, pour l'avoir abordée.

M. Lazure: En cogénération, par exemple. M. Tétreault: Par exemple.

M. Lazure: Entre parenthèses, est-ce que vous avez eu le mandat pour la cogénération ou pas?

M. Tétreault: Non, on ne l'a pas eu comme signifié encore, mais on peut soupçonner qu'il va nous incomber dans peu de temps.

M. Lazure: D'accord. Les déchets solides... M. Tétreault: Peut-être...

M. Lazure: Ah pardon! Je vous laisse continuer votre réponse, M. le président.

Mme Joumault: M. le député, il y a un élément qu'on voudrait faire valoir ici. C'est qu'il est important que l'étude d'impact soit de qualité parce que, si l'audience publique, si le promoteur perd son temps, le citoyen peut perdre son temps à venir donner, livrer gratuitement sa façon de voir et ce qu'il entend, ce qu'il considère comme acceptable comme développement. Alors, il faut qu'il y ait une garantie de qualité au niveau de l'étude d'Impact et c'est dans ce sens-là qu'on préconise une consultation sur la directive. Alors, il y a aussi, là, un élément dont on doit tenir compte lorsqu'on préconise la voie rapide. C'est dans ce sens-là qu'on pense que la voie rapide peut être intéressante dans la mesure où déjà un débat s'est fait ou une consultation publique s'est faite sur un programme.

M. Lazure: Quand vous dites... Oui?

M. Tétreault: Et, bien sûr, le promoteur prend un certain risque à aller sur la vole rapide. Vous comprendrez également que, si la qualité n'est pas là, il y a des problèmes à l'horizon.

M. Lazure: Mais quand, Mme Joumault, vous dites: C'est pour ça qu'on préconise que le public intervienne au moment de la directive... Tantôt, on a vu, au début, que c'était votre première présence dans une commission parlementaire. Quand vous préconisez quelque chose pour améliorer la procédure d'évaluation, de quelle façon faites-vous ça et à qui faites-vous ça?

M. Tétreault: Normalement, je pense que ces points de vue devraient être transportés à mon ministre.

M. Lazure: Mais ça se fait?

M. Tétreault: Je pense que oui, normalement et couramment.

M. Lazure: Bon. Une dernière question que je veux soulever, qu'on veut soulever de ce côté-ci, ou l'avant-dernière, c'est touchant les déchets solides, les déchets domestiques. Plusieurs groupes nous ont dit, soit spontanément, soit à la suite de nos questions: Oui, ce serait utile qu'il y ait un débat public sur la gestion intégrée des déchets solides, des déchets domestiques. Et certains sont allés jusqu'à dire: Ça prendrait l'équivalent de la commission Charbon-neau, mais pour les déchets non dangereux, tout ce qui est déchet non dangereux, surtout les déchets domestiques. Qu'est-ce que vous pensez de cette hypothèse-là, vous autres?

M. Delisle: D'abord, je pense qu'en préambule à ma réponse, je vous dirais, M. le député, que ces questions de déchets sont loin d'être simples et ne seront pas réglées simplement et que ce n'est pas parce que le BAPE viendrait tenir une audience sur un programme de gestion intégrée que le problème deviendrait plus simple. On l'a vu avec la commission Charbonneau, c'est très complexe comme question, surtout quand il y a des attitudes de résistance des citoyens par crainte de déchets.

Maintenant, je pense que la difficulté, à l'heure actuelle, par rapport à ces projets, c'est qu'ils sont élaborés et décidés ponctuellement. Et les citoyens ne comprennent pas la rationalité, la logique géographique, la logique de gestion dans laquelle s'inscrivent les projets. Si on avait une audience plus générale ou plus globale par rapport à ce type de question de gestion de déchets, ça permettrait aux gens de mieux comprendre, de mieux voir quels sont les besoins, de mieux voir quelle est leur part dans le problème et à quel endroit ils doivent intervenir pour le solutionner. Et ça permettrait aussi de comprendre ce qu'est la logique d'intervention gouvernementale dans ces dossiers-là. Je pense qu'une audience comme celle-là vient en amont des recherches de solution des conflits locaux.

Le Président (M. Garon): M. le député de Dubuc.

M. Morin: Oui. Il y a plusieurs groupes qui ont fait mention de la couleur... enfin, conflictuelle que prenaient plusieurs audiences publiques. Je pense que ça a fait consensus, tout le monde était unanime que c'était dû en bonne partie à l'implication tardive des groupes ou des requérants du milieu et que le fait de les impliquer un peu plus tôt pourrait régler en partie.

Une autre observation qui est venue, je pense, de façon générale de la part de promoteurs ou, enfin, des gens qui avaient une préoccupation en ce qui concerne les promoteurs, était au niveau du droit de réplique. À partir du moment où les audiences sont évidemment diffusées massivement par les médias, étant publiques, elles sont questionnées sur l'aspect équité. Ils soutenaient, à ce moment-là, que la procédure des audiences ne garantissait pas ce droit de réplique de la part du promoteur. J'aimerais que vous nous indiquiez si la procédure actuelle reconnaît ou, enfin, accorde ce droit de réplique de façon équitable aux promoteurs. Sinon, est-ce qu'il y a des choses que vous avez déjà recommandées pour, finalement, atteindre cette équité-là?

Mme Journault: D'abord, en première partie d'audience, le promoteur est toujours présent pour répondre à toutes les questions. Alors, il a largement la place pour rétablir des faits si besoin est. En deuxième partie d'audience, la place aux mémoires, la place aux citoyens, déjà la loi et les règlements autorisent et permettent au promoteur ou à toute autre personne de venir rectifier des faits; ça s'appelle le droit de rectification et on l'accorde. On demande aux gens: Si vous avez des choses à venir rectifier... A la fin de chaque séance, ils doivent s'inscrire au registre et ça se fait couramment.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Malheureusement, notre temps est écoulé. Au nom de l'Opposition, je veux remercier M. le président et ses collègues. C'a été tout à fait éclairant, cet échange, et, moi, je suis très content de voir que vous avez le goût de voir vos mandats élargis, de voir vos ressources augmentées pour faire un travail encore supérieur. Et je pense qu'il vous reste énormément à faire aussi du côté du public pour mieux vous faire connaître par le public. Je souhaiterais voir, à un moment donné, peut-être un programme d'éducation populaire sur les mandats et sur l'action du Bureau. Merci.

Le Président (M. Garon): Alors, je remercie M. le président du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement et les gens qui l'accompagnent et je suspens les travaux de la commission jusqu'à 16 h 30 pour entendre le sous-ministre et le ministre du ministère de l'Environnement.

(Suspension de la séance à 16 h 16)

(Reprise à 16 h 34)

Le Président (M. Garon): Alors, nous avons une heure avec les sous-ministres, à ce que j'ai compris, et une heure avec le ministre. Alors, je vais commencer Immédiatement et je vais vous demander, M. Trudeau, si vous avez des commentaires à faire au début de l'heure. Je suis persuadé que les députés espèrent que vous en avez le moins possible, parce qu'ils veulent vous poser des questions.

Ministère de l'Environnement du Québec

M. Trudeau (André): J'Imagine, M. le Président, et ça me fera plaisir. Effectivement, on n'a pas d'Intervention de démarrage. On va être prêts; on est disponibles pour les questions.

Si vous me permettez peut-être de présenter les gens qui m'accompagnent. Il y a M. Harvey-L Mead, qui est sous-mlnistre adjoint au développement durable et à la conservation, ainsi que M. Robert Joly, qui est l'adjoint du sous-ministre adjoint; M. Yves Pagé, à ma droite, qui est le directeur responsable de la Direction des évaluations environnementales, et M. Luc Vali-quette qut est le responsable ou le coordinateur de révision de la procédure et qui suit... Et sans compter, évidemment, que j'ai cru remarquer qu'il y avait plusieurs personnes du ministère qui ont suivi très minutieusement et avec beaucoup d'intérêt vos débats et vos discussions.

La simple chose peut-être à vous dire pour démarrer, c'est que le mandat d'Initiative que vous avez pris est tout à fait à votre honneur. Je pense que ça permet de faire une étude d'impact des évaluations environnementales, de la loi des évaluations environnementales et je pense que ça permet effectivement de dégager peut-être pour l'avenir des pistes et d'essayer de bonifier et d'améliorer cette procédure.

Alors, nous sommes à votre disposition pour les questions que vous voudrez bien nous poser.

Le Président (M. Garon): Alors, Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: Oui, M. le Président, je vous remercie. Je serai relativement brève, parce que je devrai quitter avant la fin de nos travaux, malheureusement.

J'aimerais d'abord remercier M. Trudeau, M. Mead, le sous-mlnistre adjoint, et les gens de la Direction des évaluations environnementales qui ont été Ici toute la durée de notre commission.

Alors, Ils sont très bien préparés aux questions qu'on va leur poser puisqu'ils les ont sûrement entendues depuis deux semaines.

Le plus grand blâme aux fonctionnaires du ministère de l'Environnement, à la Direction comme telle, est certainement les délais, le délai que prend le ministère de l'Environnement, la Direction pour donner l'avis de recevabilité quant à un projet. Ça peut aller presque à 12 mois, et dans certains cas 2 ans, avant d'émettre l'avis de recevabilité. C'est certainement le blâme le plus grand.

Le deuxième blâme, c'est que les promoteurs et les groupes environnementaux ont souvent l'impression que le ministère de l'Environnement ne sait pas trop trop où il s'en va dans l'élaboration des directives et qu'il profite souvent d'un projet pour se faire une espèce de mémoire corporative - plusieurs ont énoncé cette idée - aux dépens d'un promoteur et à son coût à lui aussi.

J'aimerais, brièvement, M. Trudeau, que vous puissiez nous parler un peu des délais et m'expliquer comment les ingénieurs du ministère de l'Environnement... En fait, les représentants de l'Association des ingénieurs qui sont venus nous voir, dont quatre sur cinq étaient des Ingénieurs du ministère de l'Environnement, sont venus nous dire: II n'y a pas de problème, 12 mois. On est tombé en bas de nos chaises à peu près tout le monde, parce que ce sont les gens qui sont payés pour faire les directives, pour évaluer les études d'impact, etc. Alors, on a dit: Mon Dieu Seigneurl où est le bobo? Si les ingénieurs nous disent: En 12 mois, on est capables de faire ça, et que ça ne se fait pas dans le concret, où est le problème?

M. Trudeau: Merci. Mme la députée, effectivement, c'est une excellente question. Sur la question des délais, je pense que le rapport Lacoste a été clair. D'ailleurs, II avait fait une évaluation assez serrée de tout ça pour dire que les délais étalent plutôt longs et, effectivement, a fait des recommandations pour essayer de condenser ça. Je pense qu'il y a, effectivement, moyen de trouver des façons de resserrer un peu plus les délais. Une des difficultés qui persistait peut-être au ministère pendant un certain temps et qu'on a essayé de corriger au cours des deux dernières années, à tout le moins, c'est le nombre d'effectifs à la Direction du ministère. On avait une trentaine de personnes qui travaillaient à la Direction, il y a deux ans, on en a ajouté une vingtaine, ce qui nous permet, en tout cas, de demander, évidemment, une contribution de nos différents analystes, de réaliser le travail dans un temps plus rapide. En tout cas, le travail est mieux partagé et permet d'avoir de meilleurs résultats. Je pense que ça, c'est peut-être des facteurs qui pourraient nous permettre d'assurer qu'on est en meilleure posture pour améliorer les délais.

Le second problème qu'on rencontre souvent, lorsqu'on regarde aussi les directives, par exemple, ou même l'avis de recevabilité... La directive, effectivement, ça dépend du type de projet; il y a des projets qui demandent des analyses plus sérieuses ou qui mettent de l'avant des problématiques nouvelles ou peu connues qui obligent un peu nos responsables, nos professionnels à fouiller davantage ces dossiers-là. Forcément, on ne peut pas toujours arriver à des délais qui soient uniformes bien que je pense que l'exigence, en tout cas des derniers mois ou des dernières années, est d'essayer de compresser le plus possible les délais. Ce n'est pas un succès à tous les coups, mais je pense que, dans l'ensemble, on réussit à améliorer un peu plus notre performance.

Est-ce qu'on peut faire ça dans 12 mois? Je pense que 12 mois, c'est sans doute serré si on prend tout le processus global, si on tient compte qu'il peut aussi y avoir des audiences publiques, mais on peut sûrement se rapprocher entre 12 et 18 mois. Ça devrait être des délais raisonnables qui devraient nous permettre d'arriver à faire quelque chose. Là encore, ça va dépendre du type d'ajustements qu'on peut amener à cette procédure-là. Il y a eu toutes sortes de propositions soumises devant la commission. Si certaines d'entre elles étaient mises de l'avant, c'est sûr que ça pourrait alléger ou raccourcir les délais. Mais il n'y a pas de modèle, je dirais, uniforme sur ça.

Mme Pelchat: Merci.

M. Trudeau: Je pense que...

Mme Pelchat: Ça va. Mon collègue de Saguenay devrait poursuivre.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: On va vous demander, M. Trudeau, d'être plus court dans vos réponses parce que c'est nous autres qui posons les questions à ce voyage-là. C'est parce qu'on a beaucoup de questions à poser et, si vous avez pris cinq minutes et une seconde pour répondre à celle de Mme la députée de Vachon, à ce tarif-là, on n'en posera pas beaucoup. Moi, je vais être très direct. Ça ne marche pas pantoute chez vous. Il y a 59 groupes qui sont venus nous dire que c'était le bordel. Vous allez nous dire si c'est vrai ou si ce n'est pas vrai. Même vos propres professionnels nous ont dit que ça ne marchait pas. Ils sont venus ici, le syndicat des ingénieurs de l'Environnement, les surspécialistes. C'est tout croche, étude par-dessus étude. Je vais vous donner un exemple, je vais vous en déposer une de 2 000 000 $, une étude, ici. Ça fait trois ans. M. le Président, vous en ferez une copie pour tout le monde.

Le but de la commission, c'est de savoir si ça peut marcher mieux, si ça peut fonctionner mieux ou si les citoyens du Québec vont être obligés de faire disparaître le ministère de l'Environnement et de faire autre chose qui marche, qui réponde conformément aux gens. Il y a une étude de trois ans; il y a trois, quatre études d'impact; il y en a pour 2 000 000 $ de coûts dans Hydro-Pontiac, puis là, on est rendu que c'est les archéologues qui vont mener le ministère de l'Environnement. Pensez-vous que c'est sérieux, ça? Pensez-vous que les promoteurs, pensez-vous que les gens sérieux... Même les écologistes viennent dire ici: Ça ne marche pas pantoute.

M. Trudeau, honnêtement, vous allez être obligé de donner un coup de barre quelque part, puis pas rien qu'un petit coup de pied, un bon coup de pied. Ça n'a pas de bon sens. Tout le monde... Il n'y en a pas un qui est venu vous féliciter. On aurait pu en trouver un. C'est comme la parabole: Trouvez-moi un juste puis j'épargne la ville. Mais on n'en a pas trouvé encore. C'est peut-être vous qui allez le dire, peut-être vos collègues. Mais à venir à date, vos ingénieurs ont dit qu'il n'y avait pas de contrôle sur les surspécialistes qui pouvaient changer d'idée en cours de route trois fois, quatre fois. Ce n'est pas des fous, ça. Ils sont venus le dire ici, là. Il n'y a pas de porteur de dossier, puis il n'y en aura pas de porteur de dossier parce qu'on change d'idée. Nous autres, on est des spécialistes, puis on peut changer d'idée en cours de route. Comment voulez-vous qu'un promoteur, que les groupes écologistes se retrouvent à travers tout ça?

Puis ce n'est pas d'hier que ça dure, c'est depuis qu'il y a le ministère. Ce n'est pas plus vous qu'un autre, je ne vous blâme pas personnellement, mon blâme ne s'adresse à aucun individu. Il s'adresse à l'organisation, puis, dans le moment, la société québécoise ne peut plus se permettre de marcher de même. Vos propres pro-fessionnnels sont venus nous dire: Dans 12 mois, ça passerait comme une balle. Ça me fait penser aux ingénieurs qui sont venus dans le temps de la grève, qui ont dit qu'ils auraient pu faire sauver 16 000 000 000 $ à la province de Québec, dans les routes. Bien, des gens qui font des déclarations de même, ils mériteraient d'aller à la potence parce qu'ils étaient là puis qu'ils ne les ont pas sauvés, les 16 000 000 000 $. Ils ont dépensé 16 000 000 000 $ de trop dans la province de Québec, puis c'est des ingénieurs professionnels. Moi, si j'étais président de la Corporation des ingénieurs, je retirerais quelques diplômes. Des gens qui ont dépensé 16 000 000 000 $ de même, ça ne se peut pas.

Chez vous, les gens nous ont dit que, dans 12 mois, ça peut se faire. Vous, vous dites que ça peut s'améliorer, mais qu'est-ce qu'on attend? Quand est-ce que ça va être fait? La question est bien claire. Quand est-ce que ça va être fait? Quand est-ce que ça ne prendra pas trois ans à donner une réponse à Hydro-Pontiac? Quand est-ce que l'archéologie va s'installer dans les bouts de route? Alors qu'on parle d'étude d'impact, qu'est-ce qui se passe? Y "a-tu" quelqu'un qui mène la barre à quelque part? C'est tout ce que je veux savoir.

Le Président (M. Garon): M. Trudeau.

M. Trudeau: Je pense que c'est un cri du coeur, M. le député. J'imagine que ça reproduit ou que ça reflète ce qu'un certain nombre de mémoires ont présenté. Effectivement, on est un rouage clé dans toute cette procédure d'évaluation, puis il est clair qu'on a un rôle Important à jouer. Tout comme on peut être un facteur de freinage, perçu du moins par les promoteurs, en même temps, II y a notre responsabilité à assumer qui est de s'assurer que l'Information qui va être déposée, qui va être préparée, soit complète et soit la plus complète possible pour que la population puisse se faire un jugement ou que les décisions qui sont prises soient le mieux éclairées.

Alors, est-ce que, dans ces 10 ans, on a joué un rôle... SI on regarde au total, M. Maltais, ce n'est pas si négatif que ça. Je comprends que les gens ne sont pas venus ici pour venir nous dire qu'on est beaux, fins et gentils, mais il y a 300 projets qui ont passé dans la procédure et, sur les 300, on pourrait peut-être en comp ter, mais, sur les 300, la plupart ont été vus positivement. Il y a eu des cas, je dirais même, d'amélioration. Le barrage de la rivière des Prairies, à Montréal, au nord, de Montréal-Nord, ça a permis même de faire sauver de l'argent à Hydro-Québec. Ça a permis de prendre en compte des considérations sur le plan esthétique, comme les frayères à poissons qui ont été magnifiques. Évidemment, personne n'en a parlé, de ça; personne n'est venu vous dire ça. Mais ça, c'est correct, parce qu'on n'est pas là pour se vanter de ce qu'on a bien réussi ou de ce que la démarche a permis de bien faire, mais il faut assumer. Et j'accepte la responsabilité ou le blâme qu'on peut me faire. Vous avez mentionné le cas d'Hydro-Pontlac. Bon. Hydro-Pontiac, je pense que, là, je peux vous dire qu'effectivement nous allons transmettre, dans les prochaines heures ou dans les prochains jours, l'avis de recevabilité.

M. Maltais: Allez-vous demander une étude archéologique?

M. Trudeau: On ne me demandera pas d'étude archéologique.

M. Maltais: Merci beaucoup. On continue.

M. Trudeau: Maintenant, écoutez bien. Je pense que, là-dessus, II faut voir... Il y a deux,

trois cas... Les deux, trois cas où ça ne fonctionne pas, je me suis Interrogé, parce que, effectivement, on essaie d'améliorer notre procédure, même si ce n'est pas toujours visible. Mais les quelques cas qui ne fonctionnent pas toujours, II y a souvent un problème lié aux règles et au respect des règles, si vous voulez, plus ou moins suivies de part et d'autre. Il faut qu'il y ait de la bonne foi là-dedans. Il faut qu'entre le ministère et le promoteur il y ait de la bonne foi et de l'échange d'informations parce que ce n'est pas un processus très judiciarisé, ce n'est pas un processus très réglementé. Il y a beaucoup de marges de manoeuvre là-dedans, de discussions. C'est sûr que ça peut conduire à des abus, tantôt de notre part, tantôt de celle du promoteur; ça, je reconnais que, d'un côté... Quand les règles du jeu sont bien suivies dans l'ensemble, ça fonctionne bien et ç'a été la voie royale, celle qui a quand même donné lieu à des meilleurs résultats. Mais iI est arrivé des cas où, là, l'une ou l'autre des parties s'est braquée. Et quand ça arrive, ça, souvent on met les avocats là-dedans - je peux me permettre de le dire parce que j'ai aussi une formation en droit - et, là, ça tire; et, là, ça judiciarise sans le faire tout à fait et on s'en va vers une sorte d'affrontement, dans le fond. Ça ne peut pas être des modèles Idéaux et je pense que personne ne veut ça. Par contre, on peut avoir des fautes. Écoutez, c'est un processus qui, par définition, demande des analyses et demande de fouiller les différentes dimensions. Est-ce que poser 89 questions, c'est beaucoup? Peut-être.

M. Maltais: Moi, je vais vous en poser une autre; je vais vous arrêter, parce que vous êtes long; vous n'êtes pas accoutumé en commission parlementaire. Porteur de dossier: "C'est-u" possible, chez vous, qu'un gars entre par la porte d'en avant avec son dossier et qu'il y ait un haut fonctionnaire, un bas, n'importe quelle hauteur de fonctionnaire, qui prenne le dossier et aille le mener jusqu'à la fin? "C'est-u" possible, ça?

M. Trudeau: Mais c'est ça qu'on fait.

M. Maltais: Bon. Là, il y en a 59 qui sont venus nous conter des menteries ici, M. le Président; vous allez me rappeler tout ce monde-là. Il y a 59 groupes qui sont venus ici et qui ont dit: Ce n'est pas possible. Vos ingénieurs nous ont dit que ce n'était pas possible d'avoir un porteur de dossier chez vous et, là, vous me dites qu'il y en a un. Bien là, il a quelqu'un qui fait une menterie à quelque part.

M. Trudeau: Je veux juste vous souligner là, M. Maltais, que maintenant, on peut ajouter des ressources. Tant qu'on n'avait pas les ressources, peut-être qu'il était...

M. Maltais: Vous êtes combien au ministère de l'Environnement? 2700, à peu près?

M. Trudeau: Disons quelque 1900... M. Maltais: Quelque 1900... M. Trudeau:... postes...

M. Maltais: Bon. On en mettra comme il en faut, mais maudit!

M. Trudeau:... qui ne sont pas... Mais il y en a 50 qui travaillent aux évaluations environnementales. Ce sont eux qui sont les plus directement impliqués. Souvent, ils font appel à d'autres ressources dans le ministère, mais 1 y a 50 chargés de projets. Quelqu'un qui prend un projet au début, un chargé de projet le suit tout le long jusqu'au bout. Un chargé de projet peut avoir plus qu'un dossier, mais il y a toujours seulement une personne qui suit un dossier.

M. Maltais: Moi, je m'excuse, M. Trudeau, mais ce n'est pas ça qu'on nous a dit ici. Ce n'est pas ça qu'on nous dit et, là, si je suis tout seul à avoir mal compris, là, que mes collègues me corrigent.

M. Trudeau: Non, non. Vous avez peut-être sans doute bien compris...

M. Maltais: M. le député de Jonquière, suis-je dans l'erreur ou bien je ne suis pas dans l'erreur?

M. Dufour: C'est ça qu'ils ont dit.

M. Maltais: C'est ça qu'ils ont dit. Bon. Bien là, il y a quelque chose qui ne marche pas à quelque part.

M. Trudeau: Non, mais là, vous...

M. Maltais: Si on ne s'entend pas à partir des sous-ministres en descendant, bien comment voulez-vous qu'on s'entende dans le milieu? il y a des gens qui ont dit que ce n'était pas possible. Moi, je veux savoir si une société, n'importe quelle société - appelons la société W -présente un projet chez vous, s'il y a quelqu'un qui va s'occuper d'elle de la porte à aller à l'approbation de son dossier.

M. Trudeau: Oui.

M. Maltais: Vous me dites oui.

M. Trudeau: Oui. C'est court, ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Vas-y, Lazure, c'est à ton tour.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, je souhaite quand même la bienvenue au nom de l'Opposition à M. le sous-ministre, au sous-ministre adjoint, M. Mead, et à leurs trois collègues de la Direction des évaluations. Effectivement, vous êtes un peu beaucoup au courant des doléances qu'on a entendues durant ces trois semaines-là. Contrairement à la perception que le grand public peut avoir, à savoir que le responsable des délais, c'est le BAPE, les gens qui sont venus ici sont plus initiés que le grand public et personne n'a blâmé le BAPE, à peu près personne, pour les délais et à peu près tout le monde a blâmé le ministère pour les délais. Alors, je pense qu'il faut que vous vous attendiez à fournir des réponses à des questions bien pointues. Moi, ça ne m'impressionne pas quand vous dites: Bien, sur 300 projets en 10 ans, la plupart ont bien marché. C'est trop vague, ça. Ce n'est pas ça l'impression qu'on a. On a l'impression que la plupart ne marchent pas bien, que c'est l'exception qui marche bien parce que ce n'est pas un gros volume, ça, 300 en 10 ans, 30 par année. Ce n'est pas énorme, ça.

Mais, dans le rapport Lacoste, il est dit à la page 23 que... On a parlé de la durée moyenne, 33 mois, au rapport Lacoste, mais on dit aussi à la page 23: "...la réalisation de l'étude d'impact consomme 55 % de la durée totale" et le reste, 45 %, le ministère. Alors, le blâme, si on peut parler de blâme, il se répartit moitié-moitié, 45 %-55 %, et même dans la partie... Donc, vous devez expliquer aux parlementaires et au grand public pourquoi ça prend tant de temps. Ça n'a pas de bon sens. Le cas typique d'Hydro-Pontlac, vous pourrez donner toutes les explications que vous voudrez, ce n'est pas acceptable qu'un petit projet aussi valable que celui-là, aussi peu dangereux pour l'environnement prenne autant de temps et fasse dépenser autant d'argent au promoteur. Mais dites-moi donc pourquoi c'est arrivé comme ça? C'est la question que je vous pose, Hydro-Pontiac.

M. Trudeau: Pour Hydro-Pontiac, pourquoi c'est arrivé comme ça? Je dirais tout d'abord que c'est le premier projet qu'on peut appeler de petite centrale qui est entré au ministère. C'est vrai qu'il y a un nouveau programme qui s'en vient là. Bon! Mais c'est la première fois que ça entrait. Qu'est-ce qu'on a traité au ministère jusqu'à maintenant? C'est des projets hydroélectriques du type Hydro-Québec. Donc, je dirais qu'on s'est sans doute inspiré de ce type de directives, de ce type d'approches dans ce cas-là et que, par conséquent, on est peut-être allés plus loin que nécessaire. Mais, on s'est inspiré de ça pour construire ces directives-là. C'est peut-être un facteur qui a conduit, si vous voulez, à poser des questions.

Deuxièmement, pourquoi c'a créé tant de problèmes? Je reviens sur l'idée, M. le député, que, finalement, si l'étude d'Impact n'est pas tout à fait complète... Peut-être qu'on avait placé la barre trop haute, mais, si l'étude ne nous apparaît pas suffisante, là, on a un problème pour essayer de s'assurer que l'étude va être ajustée et complétée. Si vraiment le décalage est trop fort entre ce qu'on a demandé et ce qu'on reçoit, c'est là qu'on s'embarque dans des questions à n'en plus finir, ce qui peut conduire à du braquage, et, là, tout le monde est perdant. C'est vrai que, là, on prend du délai inutile. Ça, je ne pense pas que c'est le vrai délai ou que ça ne doit pas être le vrai délai. Le vrai délai...

M. Lazure: II est là ou II n'est pas là. S'il est là, c'est du vrai délai.

M. Trudeau: II est là, je dirais, dans...

M. Lazure: II n'y a pas deux sortes de délais.

M. Trudeau: Je veux dire qu'il y a des délais exceptionnels. Ce que je voulais dire, M. le député, c'est qu'il y a des cas où, effectivement, ça prend un peu plus de temps parce qu'on n'arrive pas à s'entendre comme » faut avec le promoteur.

M. Lazure: Mais la question suivante que je vais vous poser, vous dites: C'était le premier du genre. Bon, on peut comprendre que vous faisiez vos premières armes. À ce moment-là, est-ce que ça ne vous est pas venu à l'Idée de proposer à votre ministre de demander au Bureau d'audiences publiques, par exemple, de faire des audiences génériques d'emblée avant de commencer à traiter des petits projets un par un? Est-ce que vous avez proposé à votre ministre de faire une audience générique là-dessus?

M. Trudeau: Je pense que c'est une bonne Idée.

M. Lazure: C'est une bonne idée.

M. Trudeau: C'est une bonne Idée. C'est ça qu'éventuellement H faut envisager pour ce type de projet là, tout comme on le fait pour la cogénération. Mais à l'époque où le projet est arrivé, disons que ça ne se pariait pas beaucoup, les audiences publiques génériques. On n'avait pas encore, si vous voulez... Il en avait été question, mais on en était, disons, au début. Ce que je veux dire, c'est que je pense que ce serait une bonne Idée de faire ce type de chose là dans ce type de projet là; ça s'applique très bien. Mais pourquoi l'Idée n'est pas venue? C'est parce que c'était assez nouveau et peut-être

qu'on n'a pas pensé que ça pouvait être l'approche et parce que, depuis ce temps-ià, HydroQuébec a annoncé un programme qui n'était pas visible à cette époque-là. Donc, ce serait une bonne idée pour ce type de projet là, d'avancer dans ce sens-là.

M. Lazure: Mais l'étude générique qui va avoir lieu pour la cogénération, est-ce que c'est la première du genre?

M. Trudeau: À ma connaissance, oui.

M. Lazure: Parce que ce n'est pas nouveau, nouveau, ça; il y a des États, aux États-Unis, qui font ça depuis un bon bout de temps. L'Ontario le fait. Ils appellent ça des études sectorielles, en Ontario, depuis un bon bout de temps. Comment se fait-il que, pour vous autres, ça a l'air nouveau?

M. Trudeau: Je ne sais pas comment il se fait qu'on est arrivé à considérer ça comme nouveau, mais je pense qu'il faut s'avancer sur cette voie-là, c'est une voie intéressante. Et puis je pense que, là, maintenant, on le fait pour la cogénération et que c'est un élément positif.

M. Lazure: Qu'est-ce que vous pensez de l'idée de soumettre la directive au public, par le biais du BAPE, une consultation publique, dès le moment où la directive est élaborée par vous autres, avant d'aller au promoteur. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Trudeau: Ça m'apparaît une voie intéressante à explorer. Je pense que c'était dans le contenu du rapport Lacoste et ça m'apparaît une voie intéressante. Je pense que, sous l'aspect de la directive, parce que vous soulevez la question de la directive, dans le fond, il faut combiner à la fois des éléments techniques, mais aussi les enjeux ou les préoccupations de la population. Donc, je pense qu'une consultation à ce stade-là, cette étape-là, c'est-à-dire le plus tôt possible dans le processus, fait avancer le débat, permet de mieux cerner les vrais enjeux. Et ça, c'est un élément, je pense, qui serait un progrès.

M. Lazure: Vous êtes d'accord avec le BAPE quand il dit: Le plus tôt le public sera impliqué, le mieux ce sera. L'avez-vous déjà recommandé à votre ministre?

M. Trudeau: Si je l'ai déjà recommandé formellement, dans des documents...

M. Lazure: Oui, oui.

M. Trudeau: Non, parce que j'attends le rapport de la commission parlementaire pour le faire. Mais on a déjà soumis des documents qui évoquaient ces idées-là.

M. Lazure: Mais l'ensemble du rapport Lacoste, est-ce que vous êtes d'avis que ça devrait être mis en application? Vous me faites signe que oui.

M. Trudeau: II n'y a pas beaucoup de choses...

M. Lazure: Dites-le donc au micro pour que ce soit enregistré! Vous allez être en bonne compagnie si...

M. Dufour: C'est le langage...

M. Trudeau: C'est parce que, pour le moment, c'est vous qui devez...

M. Lazure: Si vous êtes d'accord, vous allez être en très bonne compagnie, M. le sous-ministre, parce que tout le monde, y compris le BAPE, y compris l'Association des manufacturiers, tout le monde qui, il y a 10 ans... Il y en avait plusieurs qui étaient contre, il y a 10 ans, mais la population a évolué, y compris les manufacturiers, depuis 10 ans. Mais il me semble que c'est le ministère qui n'a pas évolué tellement depuis 10 ans sur cette question-là.

M. Trudeau: Le rapport Lacoste est un excellent document. Nous travaillons effectivement sur le rapport et je pense qu'il y a beaucoup d'éléments, là-dedans, qui doivent être retenus qui, normalement, feraient progresser considérablement l'évolution et l'approche en matière d'évaluation environnementale.

M. Lazure: Bon. Là, vous avez parié de 300 dossiers. Je reviens au volume de travail. Vous avez une cinquantaine de personnes. Là, vous nous dites: Avec les effectifs récents... Ça, c'est assez récent, si je comprends bien, l'ajout d'effectifs?

M. Trudeau: On a ajouté, je pense, ça fait un an et demi, deux ans.

M. Lazure: Un an et demi, deux ans.

M. Trudeau: Depuis deux ans, mais, vous savez, le temps de recruter, on ne tombe pas...

M. Lazure: Oui. Est-ce que ça a raccourci les délais?

M. Trudeau: Je penserais qu'on a... M. Pagé.

M. Pagé (Yves): Si on veut bien évaluer les délais et donner un chiffre précis, comme le recrutement s'est fait dans le courant de l'année en cours et qu'on peut, en principe, analyser statistiquement après trois ans quels ont été les délais moyens, on n'est pas en mesure de vous donner une réponse, sauf que ça semble aller

plus vite et ça devrait normalement aller plus vite.

M. Lazure: Et, là, vous nous assurez qu'au moment où on se parle et à l'avenir il y aura toujours un chargé de projet qui va prendre le projet à partir de l'avis de projet et le transporter jusqu'à la fin?

M. Pagé (Yves): Oui.

M. Lazure: C'est solennel, ça? C'est catégorique?

M. Pagé (Yves): Oui.

M. Lazure: Votre "oui" n'est pas... (17 heures)

M. Pagé (Yves): Si je donnais un peu les indications de ce qui s'est passé dans les années antérieures, c'est qu'il y avait 12 chargés de projets en 1988; aujourd'hui, on a 50 personnes dont à peu près 40 sont des chargés de projets. Donc, maintenant, une personne prend un dossier et le mène jusqu'à la fin. Évidemment, c'est une équipe qui est relativement jeune; il y a des gens qui arrivent, il y a des gens qui partent. Quand une personne quitte son emploi, il faut nécessairement changer le chargé de projet. Mais, règle générale, on devrait maintenant avoir de plus en plus de chargés de projet qui seront en mesure de prendre un projet dès son avis et de le mener à l'autorisation.

M. Lazure: Au moment où on se parle, vous avez environ combien de projets qui sont en marche? 20, 30, 40? À peu près.

M. Pagé (Yves): Actuellement, nous avons 326 dossiers actifs à la Direction.

M. Lazure: 326 actifs dans le moment.

M. Pagé (Yves): Ça veut dire pour lesquels il y a eu un avis de projet et pour lesquels on n'a pas émis un certificat d'autorisation encore.

M. Lazure: Et les plus vieux dans le temps remonteraient à quand?

M. Pagé (Yves): II y a certains dossiers du ministère des Transports qui remontent à 1982 ou 1984. Ils ont fait des avis de projet, on a émis la directive et l'étude d'impact n'est jamais entrée, et ils ne nous ont pas signifié que le projet a été abandonné. Donc, c'est un dossier actif, mais non... Je ne sais pas le terme, là.

M. Lazure: une des plaintes qu'on entendait souvent, c'était que les directives demandaient trop de renseignements qui, souvent, n'étaient pas utiles ou pertinents, et ça nous a été confirmé de plusieurs sources. Êtes-vous sensibles à ce problème-là? Est-ce qu'ils ont raison de dire ça, les gens, que vous demandez des choses qui ne sont pas nécessaires?

M. Trudeau: Je pense qu'en principe, si on les demande, c'est parce qu'on pense qu'ils sont nécessaires. Maintenant, ce qu'on est en train de revoir, M. le député, c'est l'approche sur la directive pour voir si on ne peut pas structurer ça un peu sur une autre façon. Peut-être qu'une des façons, c'est de ne pas travailler directement sur la directive, mais de commencer aussi à l'avis de projet. Recevoir deux lettres, je veux dire, une lettre de deux, trois pages, peut-être que ce n'est pas suffisant pour comprendre le projet et peut-être que ça conduit à vouloir, dans les questions qu'on pose dans la directive, en mettre plus. Peut-être qu'il faudrait améliorer l'avis de projet pour avoir une étude déjà un peu plus étoffée ou un peu plus compréhensible de ce qu'on veut faire. À ce moment-là, ça permettrait peut-être de resserrer un peu mieux notre directive.

Deuxièmement, vous avez souligné la consultation. Ça aussi, ça pourrait ramener sur les principaux enjeux. Finalement, quand on cible un peu plus sur des éléments essentiels, sur des grands enjeux, on pourrait ramener à quelque chose qui a plus de bon sens.

M. Lazure: ii semble qu'il y a une firme, tecsult, qui a étudié ou qui est en train d'étudier, justement, vos directives et d'en faire une évaluation. est-ce que vous pouvez nous parler un peu des résultats de cette étude?

M. Pagé (Yves): On a effectivement donné un contrat à la firme Dryade, qui est une filiale de TECSULT, pour faire une analyse critique d'un certain nombre de directives. Le rapport est entré et nous sommes actuellement en train de l'analyser. Nous allons, dans le contexte de la révision de la procédure et aussi tenant compte des recommandations et des positions que vous allez prendre, voir comment, à la lumière de ce qui a été fait et qui est critiqué, on peut améliorer la directive.

M. Lazure: Est-ce que, pour les travaux de la commission, vous pourriez nous envoyer une copie de ce rapport-là pour que les membres puissent en prendre connaissance?

M. Pagé (Yves): Je pense qu'il a déjà été convenu que le rapport vous serait soumis.

M. Trudeau: Je pense qu'on va vous le transmettre, si ça n'a pas déjà été fait. On va vous le transmettre, oui.

M. Lazure: On ne l'a pas encore eu, en tout cas. Merci. Pour le moment, ça va.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Dans un autre ordre d'idées, M. Trudeau, souvent, lorsqu'on se rend compte, qu'on apprend par les journaux qu'il y a eu une petite catastrophe à quelque part, que ce soit... Je comprends que gérer l'environnement, ce n'est pas facile parce que c'est gérer le passé, on ne peut rien y faire, on n'était pas là personne. Le présent, c'est de l'ouvrage et préparer l'avenir, c'est de l'ouvrage aussi. Lorsque arrive une petite catastrophe quelconque à quelque part, ce qui est choquant pour le public, c'est qu'il y en a toujours un "smart" chez vous, à quelque part, qui s'en vient dire à un journaliste que, lui, il avait la solution pour ne pas que ça arrive. Pourquoi ne vous l'a-t-il pas dit avant?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Vous avez des fuites, c'est un panier percé. Y "aurait-u" moyen qu'il vous le dise avant que la catastrophe arrive? Le lendemain, il a la solution, lui. Mais pourquoi ne pas l'appliquer avant? S'il le dit là, il manque à son devoir, de ne pas vous l'avoir dit, M. le sous-minlstre: Si vous ne faites pas ça, ça va arriver, la catastrophe. Au lieu de faire son fin finaud le lendemain, dans le journal: Moi, je le savais et, si on avait fait ça, et patati! et patata! il n'y aurait pas eu de catastrophe. Mais pourquoi ne l'a-t-il pas dit avant? Il me semble qu'après 12 ans d'existence, au ministère, il y a quelqu'un qui aurait dû en tirer une leçon à quelque part et dire: Écoute, mon "smart", tu ne me l'as pas dit, dehors! la prochaine fois, il n'y en aura pas pour toi. Y "aurait-u" moyen d'essayer de corriger ça? Parce que, savez-vous, dans le public, ce que je dis aujourd'hui... Moi, je le représente, le public; j'en représente, en tout cas, une partie. Il y a 125 comtés au Québec et j'en représente un. C'est un blâme qu'on fait souvent: Comment se fait-Il que l'Environnement le savait et qu'ils ne l'ont pas fait? Comment ça se fait? Et vous-mêmes, vous devez avoir des surprises dans le journal, le lendemain matin, en prenant votre café. Vous dites: Regarde donc ça; il le savait et il ne me l'a pas dit, le petit mosus; y "a-t-u" moyen que je lui parle un peu? Mais y "aurait-u" une façon, dans l'avenir, à l'intérieur de votre ministère, lorsqu'il y a quelqu'un qui prévoit des catastrophes à quelque part, qu'il y a une espèce de prévoyant, une espèce d'ombudsman qui voit à travers les murs et qui dit: II va arriver une catastrophe la semaine prochaine à tel endroit... Et là, bien, vous, comme sous-ministre en titre, vous pourriez prendre les moyens nécessaires pour le corriger, pas après. Là, vous êtes obligé de vous défendre dans les journaux le lendemain, et patati! et patata! et le ministre est pris avec ça. Ce n'est pas une question de politique là, c'est une question de volonté de régler des problèmes au Québec. C'est choquant pour l'oreille du citoyen, ça.

M. Trudeau: Je pense qu'effectivement vous avez raison de dire que, souvent, on se demande si on est au ministère de l'Environnement ou au ministère des catastrophes, parce que, dans le ministère, effectivement, avec les dossiers qu'on traite, on est assez au fait des différents aspects ou des différentes problématiques qui se présentent un peu partout sur le territoire, les endroits qui sont les plus susceptibles d'occasionner des risques soit pour la santé des individus, soit sur le plan écologique. Même si ce n'est pas devenu une catastrophe, on peut appréhender des... Et on traite avec ce type de dossiers là très fréquemment, très souvent.

M. Maltais: voyez-vous, là, l'opinion que ça fait? c'est que, même si le ministère de l'environnement n'a absolument pas d'affaire à ça, le coupable dans la population, lorsque ça saute, c'est lui, le ministère de l'environnement, parce que l'information a coulé à gauche et à droite et qu'il y a eu de la désinformation dans bien des cas. le public pointe un coupable; ça en prend un, coupable. il vous pointe et ce n'est pas votre faute pantoute; ce n'est pas vous autres qui avez fait la catastrophe, vous n'avez même pas d'affaire à ça. en contrepartie, vous êtes au banc des accusés et, là, vous êtes sur la défensive, automatiquement. quand vous êtes accusé, vous vous défendez. c'est assez rare qu'un gars se laisse pendre sans se défendre. alors, le fait que l'information ait coulé, vous passez à la défensive; en contrepartie, c'est vous autres qui devrez accuser, "toc, toc, toc, toc, toc", et mettre les points sur les i. mais là, c'est l'inverse qui arrive. y "aurait-u" moyen de redonner un coup de vapeur et de remonter la roue d'une coche?

M. Trudeau: Mais vous n'avez pas senti une amélioration là?

M. Maltais: Oui. Honnêtement, je suis obligé de vous le dire. Mais il y en a...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: II y en a encore. Il y en a encore, il y en a encore. Non, non, je suis obligé de vous le dire: honnêtement, c'est vrai.

M. Trudeau: II y a eu une amélioration et je ne veux pas toujours revenir sur cet aspect-là, mais c'est sûr que c'est lié aussi... Ça demande des ressources. Il y a beaucoup d'attente - je veux dire, je dis des choses qui sont bien connues - dans le domaine environnemental, on a beaucoup de choses à faire en même temps et je pense qu'il faut avoir un certain nombre de

ressources humaines et financières pour arriver à rencontrer tout ça. Maintenant, on est loin d'être parfait, mais on a des gens consciencieux. C'est peut-être pour ça que, souvent, ça se retrouve plus vite dans les journaux. Mais, en général, c'est des gens qui sont consciencieux, qui font leur travail honnêtement et correctement. La difficulté, c'est l'énormité de la tâche, mais je pense qu'on est en progrès, dans la mesure où on a mis un peu plus de ressources dans ce domaine-là, et qu'on va y arriver tranquillement.

M. Maltais: II y a un autre point qui a chicoté bien des gens qui sont venus ici et, au fond, moi-même, j'ai des cas dans mon comté. On n'est pas ici pour les cas de comté, mais ces gens-là avaient totalement raison. Par exemple, lorsqu'un promoteur présente un projet, il va discuter avec quelqu'un chez vous. Le dossier, ça va relativement bien; correspondance, et patati! et patata! et ça va bien. À un moment donné, la décision; là, on est rendus à l'heure x pour prendre une décision. Souvent, la décision qui va être prise par votre spécialiste ou votre fonctionnaire en autorité, va être controversée par un autre qui se mêle au dossier, qui arrive comme un cheveu sur la soupe, lui, et qui vient démentir ça. Puis là, le promoteur commence à écarteler ses forces, puis, finalement, il referme le noeud puis il vire en rond. Puis là, il y a deux correspondances, il y en a trois, il y en a quatre, puis le premier qui a touché au dossier est changé de dossier, puis le troisième est en vacances, puis le deuxième est en congé de maladie. Bon. Le promoteur vire en rond et, là, les délais s'accumulent, et les dépenses. Ça fait comme dans Hydro-Pontiac, 2 000 000 $ d'études. Bon, bien, y a-tu moyen, à un moment donné, à quelque pan... Je parlais du porteur de dossier, vous m'avez dit que c'est réglé. Aux autres, je vais leur dire que c'est des "jouai vert" de menteurs, hein? Inquiète-toi pas, je vais leur écrire. Parce que c'est enregistré ce qu'ils nous ont dit, c'est enregistré ce que vous nous avez dit. Alors, il y a quelqu'un qui va avoir... S'ils nous ont conté des menteries, à moi puis au député de Jonquière, ils vont se le faire dire. Alors, à partir du moment...

Une voix:...

M. Maltais: Hein?

M. Dufour: Moi, je n'ai pas dit que j'allais écrire.

M. Maltais: Tu vas écrire aussi, Francis. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Y "aurait-u" moyen, lorsqu'un promoteur ou lorsqu'un professionnel traite un dossier du promoteur - des gens demandaient ça - si le même gars, si c'est lui qui prenait la décision... Au départ, s'il n'est pas dans l'autorité, ça peut arriver qu'il y ait débroussaillage du dossier à faire avec une sorte de professionnels, mais que celui qui va prendre la décision soit impliqué au début du processus.

M. Trudeau: Oui. Vous apportez une question générale pour le ministère. Vous savez qu'on a lancé une opération de régionalisation dans le ministère et d'idée de guichet unique dans les régions aussi. Ça, ce que ça veut dire simplement, c'est qu'on veut qu'au niveau de chacune des régions la responsabilité d'un dossier soit prise là, qu'il y ait un suivi en région, que les fonctionnaires de la région fassent appel, s'il le faut, au fonctionnaire central, mais la décision va se prendre en région. Donc, on retiendra l'avis technique, une opinion technique des expertises centrales, mais la décision va se prendre en région. Donc, c'est vers ça qu'on s'en va. Je ne peux pas vous dire que, demain matin, si vous vous en allez dans la région, vous allez trouver ça bien attaché encore, mais on est dans cette démarche-là et on vise, dans le domaine industriel, par exemple, à ce que, le 1er avril 1992, on soit en situation où ce sera les régions qui assumeront cette idée de guichet unique et de responsabilité, justement pour éviter un éparpillement à travers les différents services du ministère. Ça, c'est pour l'ensemble des projets de type industriel.

Pour ce qui est des évaluations environnementales, des études d'Impact, ça continue à demeurer une responsabilité qui va rester au niveau central, pour les évaluations environ nementales, parce que ça demande une grande expertise et qu'on a simplement une cinquantaine de ressources de préparées pour ça. Mais pour tous les autres dossiers d'application et de réglementation dans le secteur industriel, ça va être régionalisé tout à fait à compter du 1er avril 1992, qui est l'objectif qu'on a fixé.

M. Maltais: Vous me voyez ravi d'apprendre cette nouvelle parce que, automatiquement, ça va vous donner l'occasion de me nommer un directeur régional sur la Côte-Nord, qui reste, au lieu d'avoir une chaise roulante. Une chaise roulante, c'est-à-dire qu'il y en a un qui dure un mois, puis deux mois, puis trois mois, puis ça change continuellement. Alors, j'imagine que, pour prendre des décisions, vous allez en profiter pour nommer un directeur général qui, lui, va essayer de rester au moins un an chez nous.

Un autre petit problème qui a été soulevé - je pense que ça a été accrédité par bien des groupes, non pas seulement les groupes écologistes, mais les groupes aussi qui représentent certaines factions de l'Industrie - le financement des groupes écologiques lors des audiences du BAPE. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Corn-

ment vous voyez ça? Je sais qu'à un moment donné le ministre a bloqué tout ça, puis établi des nouvelles règles. Comment ça va fonctionner, ces règles-là? On "peut-u" le savoir? Y "est-u" trop de bonne heure pour qu'on le sache? Je ne veux pas vous obliger à dévoiler un secret d'État. Comment ça va fonctionner? Parce qu'il y en a beaucoup qui se sont plaints; il y en a même qui sont venus ici puis qui n'avaient pas d'argent pour payer leur dîner, bon, parce que, semble-t-il, on n'avait pas renouvelé leur subvention. "C'est-u" vrai? Et comment ça va fonctionner dans l'avenir avec ces nouvelles règles-là? Si vous pouvez nous le dire. Si vous ne pouvez pas nous le dire, vous dites: On n'est pas prêts, puis ce n'est pas plus grave que ça, on y reviendra plus tard.

M. Trudeau: Peut-être que M. Harvey Mead pourrait répondre, du moins à la partie du programme concernant les groupes environnementaux. Quant à la partie financement pour les évaluations environnementales, peut-être qu'on pourrait y revenir. Peut-être qu'Harvey pourrait répondre. (17 h 15)

M. Mead (Harvey): En effet, on vient d'annoncer publiquement la mise en vigueur du programme qui va fournir 1 000 000 $ en subventions à des organismes québécois. Le programme vise des projets. Ça peut être des projets d'éducation, de formation, de recherche. Dans le cadre de ce programme-là, il n'y a pas de volet spécifique pour soutenir des activités visant la préparation d'audiences publiques. Mais je crois que les organismes qui visent à intervenir à un niveau stratégique, donc au niveau des enjeux majeurs des audiences publiques, pourront se servir de ce programme-là s'ils développent des projets qui leur fournissent, qui leur donnent une expertise dans les domaines en question. Alors, c'est déclenché, enclenché...

M. Maltais: D'accord, M. le Président, je reviendrai un peu plus tard.

M. Trudeau: M. le député... M. Mettais: Oui, oui.

M. Trudeau: ...peut-être ajouter juste un point sur la question de la participation aux audiences ou la participation aux études d'impact. Il a été question de ça, je pense, pendant vos débats. Je pense que ça peut être une voie à explorer, ça, qui permettrait, effectivement, via une tarification aux entreprises, si je me souviens bien, ou au promoteur en quelque sorte, pas une tarification, mais de pouvoir ramasser des fonds qui seraient regroupés à l'intérieur d'un fonds indépendant qui permettrait de donner de l'argent à des groupes ou à des individus qui voudraient participer aux évaluations. Ça, c'est un volet qu'on n'a pas touché encore, mais qui est un volet intéressant.

M. Maltais: D'accord. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Pour enchaîner sur l'aide financière aux groupes ou individus qui veulent présenter au Bureau d'audiences publiques leur intervention - vous avez sans doute réfléchi à ça - est-ce que vous avez un plan à proposer au ministre ou au gouvernement à cet égard? C'est quoi la proposition que vous retenez pour le financement de ces groupes-là?

M. Trudeau: Pour ce cas-là, si vous voulez, on n'est pas encore prêts à faire une proposition au ministre, mais on regarde différents scénarios possibles et, effectivement, nous attendons les recommandations de la commission pour voir dans quelle direction ça peut s'orienter. Mais on a plusieurs scénarios sur la table, notamment avec un financement venant des promoteurs, de ceux qui soumettent des projets, uniques, ou exclusifs, ou avec la participation du gouvernement. Mais ces scénarios-là qui peuvent être des voies possibles, on les examine. Je pense qu'on pourrait être relativement prêts, si vous voulez, si c'étaient des recommandations de la commission, à soumettre dans les meilleurs délais des recommandations au ministre là-dessus.

M. Lazure: Puisqu'on parie de financement de groupes, les mêmes groupes qui pourraient peut-être un jour bénéficier d'une aide pour des interventions à des audiences, ces mêmes groupes là attendent depuis le mois d'avril leur subvention régulière qui, dans le moment... Souvent, c'est la seule source de revenus qu'ils ont pour se préparer et aller devant le BAPE. Comment expliquez-vous qu'ils n'ont pas encore de réponse, ces groupes-là? Deuxièmement, il semble que le projet que vous avez, c'est de les subventionner par projet. Nous, en tout cas, de l'Opposition, on pense que c'est abusif de demander aux groupes de préparer des projets pour une subvention qui va être maximale de 15 000 $, pour des groupes locaux, et de 25 000 $ ou 30 000 $...

Une voix: 25 000 $.

M. Lazure: ...25 000 $, pour des groupes régionaux ou même nationaux dans le sens québécois du terme. Est-ce que c'est une technique pour essouffler le monde, pour gagner du temps et faire en sorte qu'il n'y en aura pas d'argent de déboursé? Vous parlez de 1 000 000 $, mais, là, il y a zéro sou de dépensé à date, dans six mois d'année fiscale qui se sont écoulés. Il y a zéro sou de dépensé. Et vous devez bien savoir que ces gens-là vont être

obligés de passer des heures à préparer des projets de façon bénévole sans être sûrs si le projet va être accepté. En tout cas, nous, on trouve que ça n'a pas d'allure, le système que vous proposez.

M. Mead: Mais il y a quelques éléments de réponse, M. le député. Je ne peux pas vous répondre pour dire quelle est l'intention derrière le programme, mais, en ce qui concerne le programme, tel que c'est conçu, nous avons reconnu une directive du ConseH du trésor qui mettait un accent sur le financement de projets. À l'intérieur de cette reconnaissance-là, dans le programme, nous avons essayé quand même d'identifier des organismes de statut provincial ou régional et vous êtes au courant, donc, de ces volets-là, ce qui leur permet d'accéder jusqu'à 35 000 $ plutôt que 15 000 $ pour toute l'année, en fonction toujours de projets.

M. Lazure: Mais une question précise: Est-ce que c'est le Conseil du trésor qui vous empêche, par une directive écrite, de donner une subvention de 15 000 $ à un organisme qui est connu depuis des années, par exemple, sans présenter un projet?

M. Mead: Mais pour le...

M. Lazure: Répondez à ma question, s'il vous plaît!

M. Mead: Oui, oui. Le deuxième élément de réponse, c'est que nous avons reçu l'approbation de, justement, fournir un financement immédiat, je crois, à une quinzaine de groupes qui rencontrent les critères, qui, nous croyons, rencontrent les critères d'admissibilité comme groupe provincial ou régional; 15 000 $ immédiatement.

M. Lazure: Est-ce qu'ils auront à présenter un projet? Oui ou non?

M. Mead: Non. M. Lazure: Ah bon!

M. Mead: Ils vont recevoir un montant de 15 000 $ en fonction de demandes déjà reçues, que ce soit pour des projets ou autres, mais qui serait à soustraire du financement à venir.

M. Lazure: Je repose ma question. Une voix: M. le député...

M. Lazure: Je repose ma question. Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous empêche de fournir une subvention de 10 000 $, 15 000 $, 20 000 $, 25 000 $ à un organisme, qu'il soit local, régional ou national, sans exiger des projets? Oui ou non, M. le sous-ministre?

M. Trudeau: On ne peut pas, effectivement. Dans notre politique, on ne peut pas, il faut absolument soumettre un projet. O.K.?

M. Lazure: Bon, c'est votre politique à vous. Est-ce qu'elle vous est imposée par le Conseil du trésor? Oui ou non?

M. Trudeau: Bien, c'est-à-dire que la politique a été acceptée par le Conseil du trésor.

M. Lazure: Donc, c'est votre décision à vous autres.

M. Trudeau: C'est notre recommandation... M. Lazure: Bon. O.K. M. Trudeau: ...et la décision du Trésor... M. Lazure: Ça répond à ma question. M. Trudeau: ...va dans ce sens-là.

M. Lazure: Mais c'est quoi l'objectif de cette nouvelle décision que vous avez prise sur le mode de financement des groupes?

M. Trudeau: mais il n'y avait pas directement de mode de financement des groupes jusqu'à maintenant. il n'y avait pas de politique là-dessus.

M. Lazure: Mais c'est ça, c'est ce que je dis.

M. Trudeau: On vient de s'en doter d'une.

M. Lazure: Mais oui. Votre politique, ce n'est pas compliqué, vous imposez des projets... Alors, au lieu de financer de façon discrétionnaire ou par des normes, peu Importe, sans projet, comme ça s'est fait dans le passé, là, vous Imposez des projets à du monde qui n'a pas de personnel, très souvent, de permanent.

M. Trudeau: Oui.

M. Lazure: Est-ce que vous ne pensez pas que vous mettez une entrave à leur action en faisant ça?

M. Trudeau: Vous seriez favorable à ce qu'on finance le fonctionnement des groupes environnementaux?

M. Lazure: Bien oui, bien oui! Ça me paraît évident, ça. Comme les groupes de personnes handicapées sont financés pour leur fonctionnement, Ils n'ont pas besoin de présenter un projet. Bon, en tous cas, c'est la décision de

votre ministère. Je pense que c'est une décision, en tout cas, du point de vue de l'Opposition, qui n'est pas opportune du tout.

M. Trudeau: Entérinée par le Conseil du trésor.

M. Lazure: Bien oui, bien oui! C'est sûr qu'ils ne demandent pas mieux, eux autres. Tout ce qui va freiner la dépense, ça fait leur affaire, et ça, ça freine la dépense. Parce que le résultat, c'est que les groupes n'ont pas d'argent et ça fait six mois que l'année est commencée.

M. Trudeau: Maintenant, ce que disait M. Mead tout à l'heure, M. le député, c'est que, pour cette année, compte tenu qu'on est assez avancés dans l'année, nous avons obtenu une dérogation par rapport à cette dimension, à cette politique-là des projets et on va donner une subvention directement, sans projet, pour cette année, qui est l'année présentement en cours, pour accélérer et permettre aux groupes d'avoir un financement.

M. Lazure: Mais 15 000 $ à quelques groupes, vous avez dit. Enfin, je veux passer à un autre sujet. Le député de Saguenay a soulevé une autre question tantôt, les commentaires de certains fonctionnaires suite à des incidents tragiques. Mol, je pense que c'est dû en partie, ça, à un espèce de côté hermétique; il y en a qui ont qualifié ça de "culture du silence" dans le ministère de l'Environnement. Vous êtes au courant, vous avez lu ça dans les journaux, il y a une culture du silence, du secret. Et, nous, on vit avec ça. J'ai encore un exemple aujourd'hui. On voulait avoir, cet avant-midi, copie d'un document qui est public: l'entente de 1984, convention Bedford, sur l'assainissement des eaux de la ville de Bedford. C'est un document public. Mais la personne responsable de ce département-là a dit: Ah! ah! non. Il a fallu aller à Mme McKinnon, qui collabore très, très bien, qui est très efficace, et on l'a eu par elle. Mais, moi, je trouve que, dans votre ministère, c'est arrivé plusieurs fois, ça: on demande un document ordinaire, public, et le fonctionnaire ou la fonctionnaire qui nous répond nous renvoie à Mme McKinnon, ce qui n'est pas correct. La loi d'accès à la fonction publique, c'est là pour aider en cas de litige. Ce n'est pas, encore une fois, pour freiner la sortie de documents publics, et c'est ça qui se passe dans votre ministère actuellement. Alors, je me demandais si vous étiez conscient de ça.

M. Trudeau: On en est conscient et vous avez raison de dire que Mme McKinnon fait très bien son travail; c'est la responsable de toute la voie d'accès à l'information. Et je peux vous dire qu'on est un des ministères qui reçoit le plus de demandes et qu'on est celui qui en fournit le plus aussi.

M. Lazure: Mais, M. le sous-ministre...

M. Trudeau: On fournit plus de réponses aussi.

M. Lazure: ...est-ce que vous ne convenez pas que vos fonctionnaires, vos chefs de service, sont tout à fait habilités à fournir des documents publics sans avoir à référer le demandant à Mme McKinnon?

M. Trudeau: C'est-à-dire qu'il faut toujours s'assurer qu'il s'agit bien d'un document public. S'il y a un document public, il n'y a pas de problème pour fournir l'information. Vous savez, peut-être qu'on est un ministère du silence, mais on n'est pas un ministère si cachottier que ça. On me disait tout à l'heure qu'au contraire on était très transparent. Effectivement, en général, l'information, on la fournit, à moins qu'il n'y ait des contraintes vraiment majeures.

M. Lazure: En tout cas, ce n'est pas l'expérience qu'on a eue et ce n'est pas l'expérience que les gens ont. Vous lisez les journaux comme moi.

Un autre sujet, rapidement, le suivi environnemental. Il y a plusieurs groupes qui nous ont dit: C'est dommage, mais on ne sait jamais ce qui s'est passé, une fois l'autorisation fournie à l'entrepreneur, au promoteur, ce qui s'est passé un an après, deux ans après. D'abord, s'il y a un suivi, pouvez-vous nous expliquer comment ça fonctionne?

M. Trudeau: Vous dire qu'il y a un suivi, ce serait un grand mot. Il n'y a pas...

M. Lazure: Serait quoi?

M. Trudeau: Ce serait un grand mot, ce serait sans doute exagéré. On ne peut pas dire...

M. Lazure: Ah bon!

M. Trudeau: ...qu'actuellement il y a un suivi. On a des personnes qui ont une certaine responsabilité de faire ça. Je veux simplement ajouter qu'on a de plus en plus développé l'idée des contrôles et de la surveillance. On demande un programme de surveillance là-dedans, des études d'impact. Le contrôle de ça, ce n'est pas fait toujours de façon systématique et assidue. Mais, avec la régionalisation, on compte pouvoir peut-être, avec nos gens en région, assurer, par la suite, une fois un projet autorisé, un meilleur contrôle et surveillance de ce qui va se passer sur le territoire et si vraiment les industries ou les entreprises ou les projets suivent ce qu'ils nous avaient annoncé. Ça, je ne peux pas dire que, jusqu'à maintenant, on l'a fait beaucoup.

Par contre, en perspective, on essaie de s'organiser mieux pour faire face à ça. Je pense que c'est une dimension très importante, effectivement, et que c'est notre responsabilité de s'assurer de ça.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci. M. le Président. On va passer à la section des compliments. Moi, je voudrais vous féliciter sur deux points. Vous allez dire: II est donc bien bête, ce Maltais-là. Moi, je suis de même. Au niveau des ententes que vous avez avec le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et le ministère des Forêts moi, j'ai le quart des forêts du Québec chez nous et j'ai vécu, cet été, une époque assez difficile; il en a brûlé quelques acres, en incendies... Même si le ministère n'était pas directement impliqué sur-le-champ, il a travaillé beaucoup en collaboration. Là, on est à la préparation de certains plans de redressement et je pense qu'au lieu d'être en recul et d'être fermé il a ouvert le cercle et il est entré avec les autres ministères, particulièrement les fonctionnaires du ministère des Forêts et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Les résultats ont été rapides et exceptionnels dans bien des cas. Moi, j'ai trouvé ça formidable parce qu'il n'y a pas eu de demande officielle du ministère de l'Environnement de venir s'impliquer, ça s'est fait par la bande et les résultats sont probants.

Je sais que vous l'avez fait dans d'autres secteurs de la Côte-Nord, au niveau du MLCP et des Forêts. Ça "pourrait-u" se propager à d'autres ministères, par exemple les Transports, les ministères à développement économique, cette participation par la bande qu'on ne retrouve pas nécessairement dans le "front page" de La Presse ou du Devoir, encore moins dans Allo-police? Parce que l'efficacité de ces gens-là sur le terrain est exceptionnelle quand, on dirait, il n'y a pas de pression qui les commande. Ça s'est fait sans doute à partir d'une directive d'un des sous-ministres. Ça ne pourrait pas se faire dans d'autres ministères? Ça éviterait des délais. On parle toujours de délais, au niveau du gouvernement, pas plus chez vous qu'ailleurs... un peu plus chez vous qu'ailleurs. Mais y "aurait-u" moyen qu'il s'ingère un petit peu, au niveau des Transports, des ministères à développement économique, peut-être de la même façon, pas un affrontement mais une façon de collaborer, et d'en arriver à des résultats qui soient bons et rapides? (17 h 30)

M. Trudeau: Moi, je crois beaucoup à ça, effectivement, dans les régions, surtout que ça se présente bien. Il y a quelques régions où ils ont des conférences administratives régionales. On essaie de collaborer et d'apporter une contribution, sauf qu'on a souvent un rôle, comme ministère, d'application de règlements et de lois. On est souvent l'empêcheur de tourner en rond à l'égard d'un certain nombre de ministères, donc on n'est pas toujours perçu positivement. Mais je pense qu'on est en train de développer une autre approche, parce que je pense qu'en matière environnementale on peut le faire, de jouer un rôle peut-être aussi en relation avec d'autres ministères qui sont d'ailleurs préoccupés par des mêmes dimensions que les nôtres; je veux dire, des dimensions environnementales, Loisir, Chasse et Pêche avec la faune et le ministère des Forêts avec... Il y a bien des dimensions qui concernent l'Environnement, et on veut de plus en plus travailler en collaboration avec les autres ministères. Là-dessus, on va essayer de faire preuve de plus d'ouverture encore.

M. Maltais: Mais ce que je...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Ah!

La Présidente (Mme Bélanger): Malheureusement. Alors, M. le député de Jonquière?

M. Dufour: C'est ça. Il y a plusieurs analyses dans certains dossiers. Est-ce que vous pensez, de temps en temps, sortir des manuels pour expliquer ça? Par exemple, il y a des situations qui se présentent régulièrement, à peu près dans toute la grandeur du Québec. Par exemple, l'enfouissement sanitaire; mol, je pense que les élus municipaux, ils en ont soupe, ils sont éc?urés de ça. Comment règle-t-on ça, ce problème-là? SI vous ne donnez pas des directives suffisamment claires et que tout le monde a encore les mêmes solutions... Ça ne sert à rien de se le cacher, il y a 10 ans, ils disaient au monde de faire du compostage. On en a parlé avec tous les gens qui sont venus devant nous, ici. On leur a parlé de compostage. Moi, j'étais convaincu d'avance, mais ils nous l'ont confirmé: Le compostage, oublions ça, ce n'est pas la solution pour l'enfouissement sanitaire. Vous devez avoir un certain nombre de directives. Les marinas, par exemple, II y a eu des audiences publiques en masse là-dessus, beaucoup. Bon. Est-ce que vous pensez publier, des fois, des directives ou des manuels qui auraient pour objectif de soulager un peu le ministère de certaines choses?

M. Trudeau: Oui, M. le député, effectivement, c'est une excellente question. Je pense qu'il y a plusieurs voles possibles. Ça peut être une voie, celle-là, c'est-à-dire de faire ce qu'on peut appeler des directives par secteur ou même des audiences. L'idée d'audiences génériques, une fois qu'on a fait une audience générique sur la

cogénération ou qu'on en a fait une sur les marinas, par exemple, ça pourrait nous permettre, au sortir de là, par la suite, d'arriver à quelque chose de plus simple quand on arrivera avec chacun des petits projets par la suite, parce qu'on aura un cadre général qui nous aura permis de dire: Voici dans quelles conditions c'est acceptable, la cogénération ou, par exemple, les marinas. Ça, je pense que c'est des éléments qui peuvent nous aider à améliorer et à raccourcir des délais - d'ailleurs, je rejoins l'idée de raccourcir des délais aussi - et, en même temps, sur les directives, à arriver à des directives un peu plus, j'allais dire, courtes et mieux centrées. A ce moment-là, parce qu'on va avoir une balise, on va avoir mieux cerné la réalité. Il y a d'autres façons ou d'autres possibilités, mais on est en train d'examiner cette idée d'arriver, en tout cas, avec des directives. Par exemple, si jamais, éventuellement, le secteur industriel était soumis à la procédure d'évaluation, peut-être qu'il serait intéressant dans le domaine, je prends, des alumineries - il y en a eu quelques-unes, je ne sais pas s'il va y en avoir d'autres, mais il y en a eu quelques-unes... Il est peut-être possible d'arriver a mieux cerner une directive, compte tenu du fait qu'on a déjà vécu un projet comme ça. Donc, dans un secteur, on pourrait arriver à une perspective d'encadrement pour la directive.

M. Dufour: Mol, je pense que, pour les alumineries, on est définitivement trop tard quand on regarde la production mondiale. J'ai comme l'impression qu'on a une surproduction et qu'il y a des coûts écologiques, économiques à travers tout ça. Et ceci, je vous assure, c'est juste pour compléter ce que vous avez commencé. Moi, je vais vous poser la question: Quand toutes les procédures ont été suivies... Parce qu'il y en a qui parlent du suivi que vous pouvez avoir sur des dossiers. Moi, je prétends que vous ne pouvez pas avoir de suivi; vous n'êtes pas capables de répondre à la demande. On peut dire qu'il y a tellement de demandes que ça ne répond pas. Je ne sais pas combien ça prendrait de monde sur le terrain. Quand on parle de suivi, c'est un peu fort, parce que faire le suivi, c'est après. Quand toutes les procédures ont été suivies et que, là, il faut que ça monte dans la machine et que la machine, elle, ne marche pas, qu'est-ce qu'on fait?

Je vais vous parier de deux projets. Il y a eu la route Simoncouche dans le parc des Laurentides, juste avant la réserve faunique des Laurentides; là, il faut que ça monte en haut et c'est paralysé à quelque part, là, dans la machine. Il y a la route Alma-La Baie; il y a eu une médiation, tout est réglé, il faut que ça monte dans les décrets et tout est bloqué. Qu'est-ce qui empêche ça?

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Jonquière, si vous voulez avoir une réponse, il faut que vous écourtiez votre question.

M. Dufour: J'ai complété. Je n'abuse pas.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le sous-ministre.

M. Dufour: Qui bloque ça?

M. Trudeau: Dans les cas que vous mentionnez, je me demande si ce n'est pas...

Une voix: C'est déjà autorisé.

M. Trudeau: ...déjà autorisé. Dans le premier cas, je pense que c'est signé; dans le deuxième cas, je ne le sais pas.

M. Dufour: Ça fait au moins trois mois que le rapport est déposé.

M. Trudeau: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Jonquière.

M. Trudeau: Dans le système... Juste parce qu'il y avait une question générale en même temps que vous posiez. C'est parce que, souvent, c'est un décret gouvernemental que ça exige aussi et il faut qu'il y ait une procédure qui fasse que le dossier monte. Le ministre doit se dire satisfait et, ensuite, transmettre ça au gouvernement pour qu'il y ait une décision du Conseil des ministres. Bien, je veux dire, il y a souvent des jeux et des arbitrages qui doivent se faire à différents niveaux.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie, pour le mot de la fin.

M. Lazure: Oui, le mot de la fin. Je veux, au nom de l'Opposition, remercier le sous-ministre et ses collègues. Je suis sûr qu'ils comprennent la frustration de parlementaires qui, depuis trois semaines, entendent beaucoup de récriminations. Puis nous, on se fait les porte-parole, pour ainsi dire, des deux côtés de la table, on se fait les intermédiaires et on est conscients aussi qu'être ministre de l'Environnement ou être un fonctionnaire au ministère de l'Environnement, c'est très difficile ces années-ci, puis ça va continuer de l'être.

Alors, on vous remercie et on espère... On va voir votre ministre tantôt. On va exprimer une certaine partie de notre frustration à votre ministre aussi, évidemment. Merci.

M. Trudeau: Je veux également vous remercier. Je peux vous dire qu'on est conscients, parce que, comme je vous l'ai souligné au début, il y a beaucoup de fonctionnaires du ministère

qui ont été présents durant toute la commission, effectivement, que c'est un ministère qui demande, qui est exigeant actuellement pour toute personne qui y travaille, mais, en même temps, très stimulant. Je pense qu'on est capables de relever les défis qui sont devant nous et ceux que vous nous proposerez, j'imagine, dans vos recommandations, dans votre rapport qui sera soumis éventuellement à l'Assemblée nationale. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le sous-ministre. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Moi aussi, je voudrais vous remercier, M. Trudeau, M. Mead, ainsi que vos adjoints. L'exercice qu'on fait là, c'est la première fois que ça se fait au Québec. C'est peut-être il y a 12 ans que ça aurait dû être fait, ou 10 ans, ou 8 ans, ou 5 ans, ou 3 ans. Je ne sais pas depuis combien d'années. Mais l'objectif des parlementaires, si on a été unanimes sur un pareil mandat, c'est qu'on a le souci de vouloir, avec des gens concernés, améliorer le système pour qu'il y en ait un qui en profite, qui s'appelle le citoyen ou la citoyenne du Québec. Merci beaucoup de votre collaboration.

Le Président (M. Garon): Je vous remercie. Maintenant, nous allons suspendre quelques secondes pour permettre au ministre de venir remplacer le sous-ministre.

(Suspension de la séance à 17 h 38)

(Reprise à 17 h 39)

Le Président (M. Garon): La commission reprend ses travaux. À l'ordre! À l'ordre! Soyez un petit peu britanniques, puisque nous sommes dans le parlementarisme britannique. M. le ministre, les députés m'ont demandé de vous donner l'occasion de dire quelques mots au début et j'ai remarqué que ceux qui avaient dit plus que quelques mots se sont fait passer des savons. Comme il ne reste pas grand temps, ils aimeraient avoir l'occasion, de part et d'autre, de pouvoir vous poser quelques questions sur les orientations de votre ministère. Alors, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, M. le Président. Je tiens à vous assurer que je suis à la disposition de la commission et que nous verrons à prendre le temps nécessaire.

Chers collègues députés, mesdames et messieurs, d'abord, je tiens à vous remercier, particulièrement, vous le comprendrez, M. le Président, les députés ministériels, pour avoir apporté une contribution aussi active à l'occasion de cette commission parlementaire. Grâce au travail indispensable que vous avez effectué, nous aurons en main un rapport qui pourra guider le gouvernement dans le domaine des évaluations environnementales car, comme vous le savez, en plus de permettre la transmission et l'échange d'informations entre les parlementaires et les différents intervenants, promoteurs, groupes environnementaux, consultants et autres, vous aurez participé, par cet exercice démocratique, à un événement privilégié de consultation en matière d'évaluations environnementales.

Du côté ministériel, nous avons écouté avec beaucoup d'attention les opinions et les suggestions qui ont été exprimées par les divers intervenants. Je peux vous assurer qu'au ministère de l'Environnement du Québec nous avons bien hâte de prendre connaissance des recommandations que la commission parlementaire présentera cet automne à l'Assemblée nationale et de procéder à leur analyse.

Avant d'aborder les principaux thèmes qui peuvent se dégager des avis et propositions entendus en cette Chambre depuis le 17 septembre dernier, faut-Il le rappeler, j'aborderai rapidement le contexte historique dans lequel se situe la présente étude de la procédure dévaluation et d'examen des impacts sur l'environnement.

C'est en 1978 que la Loi sur la qualité de l'environnement créait le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, le BAPE, et permettait d'assujettir certains projets aux études d'impact sur l'environnement. Par la suite, en décembre 1980, le gouvernement adoptait une réglementation découlant de cette loi. Cependant, cette réglementation, adoptée sous le gouvernement du Parti québécois, comportait des lacunes majeures. Une de ces lacunes Importantes et dont nous subissons encore les conséquences, consiste à ne pas avoir mis en vigueur les paragraphes g, n, p et le deuxième alinéa du paragraphe j de l'article 2 de cette réglementation. Le gouvernement d'alors diminuait ainsi grandement la portée du règlement qu'il venait d'adopter, puisque plusieurs types de projets demeuraient exempts de la procédure d'évaluation environnementale.

Ces projets non assujettis concernent la construction d'une usine d'eau lourde ou de pâtes et papiers, d'une usine pétrochimique, d'une cimenterie, d'une raffinerie de pétrole, d'une aciérie, d'une aluminerle, d'une usine de boulet-tage, d'une usine de traitement du minerai, d'une usine de raffinage de métaux, d'une usine de ferro-alliage, d'une fonderie de première fusion de métaux non ferreux ou d'une usine d'équarris-sage-fonderie; la construction d'un gazoduc d'une longueur de plus de deux kilomètres; la construction, la reconstruction ou l'élargissement d'une route ou autre infrastructure routière publique sur 300 mètres ou plus à moins de 60 mètres d'un cours d'eau et, enfin, l'ouverture et l'exploitation subséquente d'une mine au sens de la Loi sur les mines.

Cette réglementation qui comportait d'im-

portantes faiblesses a donc été un symbole sous le règne du Parti québécois. Non seulement n'a-t-elle pas constitué, sous l'ancien gouvernement, une véritable prise en compte des impacts environnementaux dans les projets industriels d'importance, mais, en plus, elle était perçue par un grand nombre d'intervenants comme un processus gouvernemental utilisé de façon inhabituelle et même exceptionnelle. À cet égard, il faut savoir que seulement 18 projets ont fait l'objet d'audiences publiques en 7 ans, entre 1979 et 1985 Inclusivement, le réflexe étant alors de restreindre les cas d'application de la procédure. Comparativement, depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral du Québec, en décembre 1985, un total de 33 projets ont fait l'objet d'audiences publiques en 6 ans, entre 1986 et 1991 inclusivement.

De plus, on constate que les mandats confiés au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement au cours des dernières années, ont été à la fois plus substantiels et plus complexes de par la nature môme des sujets traités. À titre d'exemples, mentionnons la Commission d'enquête sur les déchets dangereux, le projet Soligaz ainsi que la stratégie de protection des forêts dont le BAPE a reçu les mandats en vertu de l'article 6.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement. En somme, les mandats plus récents confiés au BAPE nous indiquent une préoccupation plus marquée du gouvernement actuel envers l'environnement. Je préciserai également qu'en plus d'avoir une charge plus lourde de travail en matière d'audiences publiques le BAPE, dans les limites actuelles de la législation, se voit maintenant confier des mandats de médiation, cinq mandats au cours de la présente année. C'est d'ailleurs la première année que des mandats semblables sont donnés, répondant à l'une des recommandations du rapport Lacoste déposé en I988.

À la lumière d'une des propositions dudit rapport, le gouvernement actuel a étudié un projet de règlement afin de mettre en vigueur les paragraphes n et j de l'article 2 du Règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. Quoique favorable en principe à cette mise en vigueur, le gouvernement a recommandé une harmonisation préalable avec l'Ontario qui, elle aussi, est en révision de son processus d'évaluation environnementale.

Malgré le contexte économique actuel, les préoccupations environnementales représentent maintenant un enjeu majeur dans toute forme de développement. Afin de mieux concilier l'économie et l'environnement, il est nécessaire de revoir le processus d'évaluation environnementale, celui-ci n'étant plus adapté aux besoins actuels de la société. C'est justement le mandat d'initiative que s'est donné votre commission parlementaire.

Selon les quelque 62 mémoires en provenance d'associations ou d'ordres professionnels - il y en a quelques autres qui ont été ajoutés pour dépôt aujourd'hui - de regroupements industriels ou de gens d'affaires, d'entreprises privées ou de sociétés, de groupes environnementaux, de syndicats, de consultants en matière d'environnement et d'intervenants publics, notamment dans le domaine de la santé et de l'aménagement du territoire, mémoires qui ont été portés à l'attention des parlementaires au cours des trois dernières semaines, nous pouvons d'ores et déjà dégager, sans vouloir empiéter sur la juridiction de cette commission, un certain bilan quant aux suggestions qui nous ont été présentées. À la lumière des propositions reçues, les groupes environnementaux préconisent de façon unanime un élargissement du champ d'application des évaluations environnementales alors que les regroupements de gens d'affaires nous indiquent qu'ils sont d'accord avec le principe de ces évaluations.

Ainsi, comme l'indiquait Pierre Asselin dans son analyse publiée dans le quotidien Le Soleil et intitulée "Pour une procédure accélérée", "les grandes industries comme Lauralco, Gaz Métropolitain et jusqu'à l'Association des manufacturiers sont aujourd'hui d'accord pour se soumettre au processus d'évaluation environnementale public" fin de la citation. Cependant, comme M. Asselin le soulignait, et je recommence la citation, "une demande revient toutefois dans chacun des mémoires déposés par le monde industriel, pour raccourcir les délais exagérés de la procédure, en moyenne de 33 mois", fin de la citation.

En plus de demander que des balises soient fixées dans le temps, les regroupements d'affaires insistent également sur la nécessité de préserver la compétitivité des entreprises et de notre société. D'autre part, la grande majorité des intervenants se sont montrés d'accord afin de formaliser un processus de médiation environnementale.

Par ailleurs, plusieurs intervenants sont d'avis qu'il faut impliquer le public en amont de la procédure, notamment à l'étape de la directive. Plusieurs intervenants sont également favorables à une forme de financement des requérants dans le cadre des audiences publiques. Enfin, certains ont souligné l'importance d'effectuer des évaluations environnementales sur les politiques et programmes du gouvernement du Québec.

Conscients de l'ensemble des suggestions présentées qui reflètent les préoccupations de notre société à l'égard de l'environnement, conscients du consensus qui s'est dégagé de la part des promoteurs, des groupes écologiques ainsi que des divers consultants sur un grand nombre d'éléments, conscients, enfin, de l'urgence de bonifier la procédure, nous attendons vos recommandations qui doivent être déposées d'ici la fin de la présente année. Nous croyons que ces recommandations nous permettront de

proposer au gouvernement un processus à la fois mieux adapté et plus cohérent en matière d'évaluations environnementales, tout en préservant la viabilité environnementale des projets analysés et le maintien de la position concurrentielle du Québec et de ses entreprises.

En terminant, M. le Président, je vous remercie de nouveau, les parlementaires et les intervenants qui se sont fait entendre, pour avoir participé à cet exercice démocratique. La collaboration et la participation d'autant d'intervenants ne peuvent que nous inciter à analyser attentivement le rapport qui découlera de vos travaux. Merci de votre attention.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. M. le ministre, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à la commission au nom du parti ministériel. Je suis sûr que mon aimable collègue de La Prairie fera la même chose pour l'Opposition. Nous sommes heureux de vous avoir comme témoin, ici, à cette commission qui se termine avec vous. Nous vous avons gardé pour le dernier échelon de l'échelle. Depuis le 17 septembre, nous avons rencontré au-delà de 59 groupes, le ministère et le ministre, ce qui fait 61. Il me semble que vous êtes pâle un peu aujourd'hui, M. le ministre. Ce n'est pas votre digestion qui vous fait tort, non?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est l'absence de soleil à l'extérieur.

M. Maltais: Ah! Des fois, des brochets, c'est dur à digérer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: M. le ministre, il s'est dégagé...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Rappelez-vous qu'ils ne sont pas pires chez vous que ceux qu'ils nous servent ici, à l'Assemblée nationale.

De ces 59 groupes-là, il y a une tangente qui s'est dégagée, mais très directement. C'est une question à trois volets et j'aimerais bien avoir votre opinion sur ces trois volets. Le premier, il y a une unanimité quasi surprenante, à comparer à ce que c'était, il y a sept ou huit ans, sur le rapport Lacoste. Presque la totalité des groupes - s'il y a quelques exceptions, je les ai oubliées; elles sont tellement peu nombreuses - tout le monde était d'accord sur la majorité des recommandations du rapport Lacoste. Il y avait certaines réserves, pas la totalité, mais quand même les intervenants étaient d'accord. Ça, c'est la première partie de ma question. Je vais vous la poser parce que le temps est limité et je sais que mon collègue a très hâte de vous interviewer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Le BAPE, l'utilité du BAPE et la constance des gens qui ont aimé le travail du BAPE tout au long des groupes, de tous les groupes qui sont venus ici, parce que, eux autres, leurs délais sont encadrés. Ma troisième question, c'est les fameux délais. Le BAPE étant encadré dans 4 mois, Ils nous ont demandé de vous demander si vous ne pourriez pas encadrer en 4 mois aussi votre ministère. Finalement, dans 12 mois, on viendrait à bout d'avoir une réponse.

Alors, II y a trois lignes directrices qui sont sorties. Les recommandations du rapport Lacoste, qu'est-ce que vous en pensez? Le BAPE et l'amélioration que le BAPE a suggérée cet après-midi, je ne sais pas s) vous en avez pris connaissance, deuxièmement. Les délais chez vous sont insupportables pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises; qu'est-ce que vous entendez faire avec ça?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K. M. le député de Saguenay, si je réponds directement à vos questions, connaissant votre attachement à l'institution et à ses règles, vous allez être un des premiers à reprocher au ministre de l'Environnement d'avoir tiré des conclusions avant de connaître le rapport de la commission. Dans les circonstances, Je vous donnerai quand même une impression personnelle vu que vous avez eu l'amabilité de m'inviter à témoigner.

Tout comme vous, je suis un des 125 députés de l'Assemblée nationale; tout comme vous, je représente une population et, tout comme vous, j'ai eu à subir les nombreuses récriminations de tous les Intervenants au dossier, qui se sont plaints de la lenteur de l'appareil administratif et qui m'ont Incité et recommandé d'encadrer le processus du début à la fin. Maintenant, j'ai hâte de voir si le rapport de la commission va aller dans le même sens.

M. Maltais: D'accord. Je reviendrai plus tard, cher collègue.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition, je souhaite la bienvenue au ministre et à ses collègues.

Je suis un peu attristé du ton qu'a pris le discours du ministre. Ça fait trois semaines qu'on travaille de façon non partisane et le ministre nous arrive avec un discours écrit. Donc, ce n'est pas sous l'Impulsion du moment, parce qu'il m'a vu en arrivant...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: ...mais c'est écrit et c'est très négatif, c'est très partisan. Il juge bon de venir faire état du fait que son gouvernement a une bien plus grande préoccupation que l'ancien gouvernement. Il juge bon de dire: Ah! entre 1979 et 1985, vous avez eu seulement 18 projets et, nous autres, on en a eu 33. Il juge bon de dire: La loi et les règlements de 1978 étaient pleins de lacunes majeures, en particulier la non-application du paragraphe 2. Moi, M. le Président, je suis sincèrement déçu de cette approche parce que nous avions travaillé trois semaines sans partisanerie.

C'est évident que les gens aujourd'hui - j'espère que c'est vrai et je suis sûr que c'est vrai - que votre gouvernement est encore plus préoccupé que notre gouvernement ne l'était. Disons que c'est vrai, mais en cela vous ne feriez que refléter la société québécoise, vous ne feriez que refléter l'évolution de la société. Et de venir nous dire: On est meilleurs que vous ne l'étiez, c'est de votre faute si les grands projets industriels ne sont pas assujettis parce que vous avez fait une loi pleine de lacunes... Ça fait six ans que vous êtes au pouvoir, six ans, et vous n'avez pas eu le courage de mettre en vigueur ces paragraphes-là. Et là, vous vous retranchez derrière la fameuse harmonisation préalable avec l'Ontario. Bien, M. le ministre, même les manufacturiers nous ont dit - et vous le dites dans votre texte... Les manufacturiers n'ont pas dit: Attendons d'être harmonisés. C'est vous qui dites ça aujourd'hui. Vous êtes le seul à dire ça. Tout le monde, y compris vos fonctionnaires, le BAPE, les manufacturiers, les groupes environnementaux, tout le monde a dit: Rapport Lacoste au plus vite. Personne n'a parlé d'harmonisation. Vous êtes le seul à le faire.

Moi, je suis obligé de soupçonner que vous vous cachez derrière quelque chose et que vous n'avez pas le courage de gagner votre lutte au Conseil des ministres. Pouvez-vous prendre l'engagement ici de recommander au Conseil des ministres de faire en sorte que ces paragraphes-là soient mis en vigueur le plus tôt possible, Indépendamment de l'Ontario?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me permettrez de reprendre une certaine partie du préambule de mon honorable collègue de La Prairie. J'ai tenté, dans les notes que je vous ai livrées en guise d'introduction, de replacer des statistiques dans le temps et, oui, j'ai divisé les périodes entre l'ancien gouvernement et l'actuel gouvernement. Je ne pense pas que les chiffres que j'ai communiqués à cette commission soient contestés. Je partage l'avis du député de La Prairie qu'il y a eu une évolution dans la société qui a ajouté de la pression. Quant aux chiffres, je n'ai pas besoin de les répéter, je pense que le député les a mémorisés.

J'indique également que l'utilisation de l'article 6.3 a été beaucoup plus importante, et cette latitude-là appartient à n'importe quel ministre de l'Environnement, et je dis qu'il est toujours très, très, très difficile à utiliser. Il était, j'imagine, encore plus difficile quand la société était moins prête et qu'Adrien Ouellette était ministre de l'Environnement et j'imagine que cet article était encore plus difficile à utiliser par celui qui a précédé M. Ouellette, M. Léger. Si vous le prenez personnellement, je m'en excuse. J'ai tenté d'être le plus objectif possible dans la transmission des données, mais je tiens à souligner que vous avez raison de souligner qu'il y a eu une évolution de la société, une évolution heureuse, dans le bon sens, au cours des six dernières années. (18 heures)

En ce qui concerne la question de l'harmonisation avec l'Ontario, je ne sais pas si, parce que je ne relis pas son curriculum vitae à tous les jours, le député de La Prairie, alors qu'il était ministre au sein de l'ancien gouvernement, a eu l'occasion de siéger sur les comités à vocation économique. Je ne parle pas des comités de développement régional ou à vocation sociale. Je sais qu'il a siégé sur les comités à vocation sociale. Mais vous avez toujours à justifier, M. le député de La Prairie, lorsque vous arrivez devant un comité de développement économique, la situation du Québec par rapport à la situation qui prévaut, non pas seulement dans la province de l'Ontario, mais dans les autres sociétés modernes avec lesquelles nous nous devons de com-pétitionner. Et ça, ça peut, dans certains dossiers, vous desservir si vous êtes le ministre de l'Environnement, parce que vous iriez plus loin, sur le plan de la réglementation, que les sociétés avec lesquelles vous compétitionnez; dans d'autres dossiers, ça peut vous servir parce que vous pouvez plaider que le Québec est en retard sur d'autres sociétés modernes avec lesquelles il compétitionne. Mais, dans l'Opposition, l'avantage, c'est que vous pouvez ne retenir que la partie des éléments qui fait votre affaire. L'exercice du pouvoir a cet inconvénient qu'il faut à ta fois retenir les éléments du dossier qui vous avantagent et qui vous désavantagent, ce qui vous oblige à une meilleure préparation du dossier. Je crois que les travaux que vous avez effectués au cours des trois dernières semaines vont m'ap-porter de l'eau au moulin, de façon à pouvoir compter encore sur une meilleure préparation du dossier.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Est-ce que votre gouvernement va harmoniser sa pratique avec l'ontario sur toute la ligne et demander à hydro-québec, exiger qu'hydro-québec fournisse 22 000 000 $ aux groupes environnementaux et aux individus, et ordonner au bape de tenir des audiences publiques sur le plan de l'énergie, du développe-

ment énergétique au Québec des 20 prochaines années, comme l'Ontario le fait et va le faire pendant 2 ans?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous rejoignez exactement, M. le député de La Prairie, l'argumentation que je viens de vous soumettre. Vous avez raison de souligner qu'en ce qui concerne l'apport financier ou l'aide financière aux groupes environnementaux, le gouvernement de l'Ontario a une approche qui est plus généreuse que celle du gouvernement du Québec dans l'aide aux groupes environnementaux dans les projets énergétiques, bien que nous aurons à annoncer, au cours des prochaines semaines, quelle sera l'aide du gouvernement du Québec, mais, pour le moment, vous avez raison de souligner cet aspect. Ça, c'est l'avantage ontarien. De l'autre côté, mes informations du côté de l'Ontario m'indiquent qu'ils ne sont pas encore prêts à soumettre, dans cette province-là, les projets issus du secteur privé à des audiences publiques. Ça, c'est l'autre côté de la médaille, ce dont je vous parlais tantôt, les avantages et les inconvénients. Il faut retenir les deux. Il ne faut pas seulement non plus n'avoir qu'un seul phare et une seule balise. Il faut regarder l'ensemble des sociétés modernes avec lesquelles nous sommes en compétition et s'assurer que, si le Québec se distingue, est une société distincte en matière environnementale, il l'est positivement et non négativement.

M. Lazure: Dans le bilan comparatif que vous faites, vous avez oublié aussi de parler de l'initiative qu'a prise le gouvernement du Parti québécois de mettre en branle un programme d'assainissement des eaux où le gouvernement précédent... Si on veut remonter - parce que c'est ça qui me déçoit, parce que c'est un jeu futile - on va remonter de 1970 à 1976 où il y avait de l'argent, des milliards, à Ottawa, qui étaient disponibles pour l'assainissement des eaux et le gouvernement du Québec n'a rien touché de cet argent-là pendant six ans. Lorsqu'on est arrivé pour établir le programme d'assainissement des eaux, il ne restait plus d'argent. On a été obligé de le faire avec de l'argent québécois. Vous avez failli, d'ailleurs, l'arrêter, ce programme-là, il y a à peine un an.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là, je suis obligé de m'inscrire en faux. Je n'aime pas les débats lancés comme ça, mais je vais devenir excessivement partisan s'il le faut.

M. Lazure: Bien, vous avez donné le ton, M. le ministre. Je m'excuse, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais je vais le devenir s'il le faut. Je n'ai pas parié par économie de temps. Je reconnais que le programme d'assainissement des eaux a été créé en 1978.

Ce que je vous Indiquerai, c'est que nous avons eu l'occasion de discuter de ce programme à l'occasion des crédits du ministère à chaque année et que, sous le gouvernement du Parti libéral du Québec, ce programme a été reconduit à chaque année. J'ai annoncé l'inscription de 14 nouvelles municipalités encore récemment et j'ose croire que nous serons en mesure d'en annoncer d'autres au cours de la présente année...

M. Lazure: J'ai une question...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour respecter les crédits qui ont été mis à la disposition du ministère de l'Environnement par l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale dont vous êtes. Je profite de l'occasion pour vous remercier et pour vous Inviter, à l'occasion du budget de l'an prochain, à revoter des crédits à l'intérieur de ce programme. Ce n'est pas parce qu'il est né sous le régime du Parti québécois qu'il n'est pas bon. Nous l'avons amélioré, nous avons amélioré sa gestion de plus de 100 %. Je pense que nous avons raison d'être fiers de ce programme.

M. Lazure: M. le Président, j'ai une question précise concernant justement le programme d'assainissement des eaux. Tout le monde sait que ça a failli être discontinué. Vous pouvez dire ce que vous voulez, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, je ne peux pas laisser passer ça. Il y avait une réorientation. M. le député de La Prairie, il n'a jamais...

M. Lazure: Ma question...

Le Président (M. Garon): M. le ministre, vous aurez la parole. M. le député va poser sa question et vous pourrez répliquer à ce qu'il a dit au cours de son intervention.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Lazure: Je vous pose la question suivante. Vous avez annoncé hier soir dans votre comté ou hier après-midi, en tout cas, hier dans la journée...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Hier matin.

M. Lazure: Je l'ai entendu hier soir. C'est loin Bedford-Québec.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Vous avez annoncé une subvention de 1 700 000 $ pour aider l'entreprise

Snyder, la conserverie Snyder à cesser, à toutes fins pratiques, de polluer la rivière aux Brochets, les brochets dont pariait mon collègue de Saguenay tantôt. J'ai cru vous entendre dire aux nouvelles, que c'était en vertu d'une entente de 1984 que vous donniez cette subvention qui couvre 90 % des coûts. Première question: Dans la convention que j'ai devant moi, qu'est-ce qui vous permet de verser cette somme de 1 700 000 $ à la conserverie Snyder? Deuxième question: Est-ce qu'il y a d'autres conserveries au Québec qui ont eu des subventions semblables, à 90 %?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Premièrement, je n'ai pas annoncé 1 700 000 $, j'ai annoncé 8 000 000 $, quelque 7 900 000 $ pour la mise en opération de l'usine d'épuration qui découlait de la signature d'un protocole d'entente, en 1984, entre la SQAE et la ville de Bedford. Une chance, je vais vous le dire bien franchement, que ça avait été signé en 1984. C'est Adrien Ouellette, je pense, qui était ministre de l'Environnement à l'époque. J'avais commencé les travaux ou la pression populaire dans le milieu avec une soixantaine de jeunes, dans le cadre d'un projet Perspective jeunesse en 1971. En 1991, 20 ans après, le message c'est: Ne vous découragez pas quand vous entreprenez la dépollution. J'avais eu à intervenir à l'Assemblée nationale - vous allez retrouver ça au Journal des débats - aux crédits, à chaque année, du ministère de l'Environnement, demandant au ministre de l'époque, qui était Marcel Léger, de bien vouloir inscrire la municipalité de Bedford qui avait des cas d'urgence, qui avait deux industries qui étaient particulièrement polluantes, la ville, etc. En 1984, après les pressions répétées de l'humble député de l'Opposition de l'époque que j'étais, Adrien Ouellette a finalement signé cette convention. Cette convention prévoyait le traitement des eaux usées de ta municipalité, comme c'était le cas à l'époque, des industries qui étaient branchées, pour ne pas dire connectées sur le réseau. Les industries en question, de mémoire, étaient les suivantes: la compagnie Exeltor, la compagnie Torrington et la compagnie Snyder.

Entre 1984 et 1988, les divers niveaux d'intervention au ministère de l'Environnement du Québec ont bâti divers scénarios quant à la construction d'une usine d'épuration qui pourrait épurer l'ensemble des eaux des industries branchées au réseau, comme c'est le cas sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal, pour ne mentionner que ce cas, et de la population de la ville de Bedford. En 1988, les spécialistes en sont venus à la conclusion qu'il serait plus avantageux, économiquement et environ-nementalement pariant, de procéder en deux étapes: première étape, usine d'épuration pour la ville de Bedford avec les industries Torrington et Exeltor, ce qui correspondait à un facteur de pollution d'une population d'à peu près 3300. La conserverie Snyder, dans ses périodes de forte opération - et ça n'opère pas à l'année longue - correspond à une population de quelque 30 000. Donc, si on avait mis le tout ensemble en 1988, on aurait eu une période où l'usine aurait fonctionné en surdimension et une autre période en sous-dimension avec des problèmes techniques énormes. Il fut alors décidé de construire l'usine pour la ville et ces industries.

Dans le cas de Snyder, le ministère de l'Environnement a mis de l'avant un programme qui faisait en sorte que les eaux usées seraient épandues sur des terres agricoles dans une municipalité voisine, pour un coût d'à peu près 1 700 000 $. Donc, on n'avait pas dépensé les 8 000 000 $ du début. On avait dépensé les 8 000 000 $ moins les 1 700 000 $ et on conservait cette somme d'argent pour des procédés d'épandage. Il y a eu de fortes oppositions de la part de la municipalité du canton de Bedford qui n'était pas impliquée, qui n'était pas la municipalité où l'industrie était située. Il y a eu également des groupes écologiques qui se sont manifestés, qui ont exigé des garanties du ministère de l'Environnement et du ministre à l'effet que l'épandage ne serait pas fait en quantité trop importante, que la nappe d'eau phréatique en dessous ne serait pas contaminée, que les eaux rejetées ne contenaient pas telle matière ou telle matière et que ça fonctionnerait.

Pendant deux ans de temps, M. le député de La Prairie, j'ai tenté, au ministère de l'Environnement du Québec, d'obtenir ces garanties de façon à pouvoir les transmettre à la population que je représente, à cette Assemblée nationale, depuis 11 ans. Je n'ai jamais pu obtenir ces garanties du ministère de l'Environnement; même certaines questions de gros bon sens - et, là, je vais faire appel à l'expertise du Président qui a déjà été ministre de l'Agriculture - sont demeurées sans réponse. Dans le but d'avoir une culture qui absorbait beaucoup d'eau, on a dit: Plantez des roseaux. L'ancien ministre de l'Agriculture va vous dire qu'il n'y a pas beaucoup de cultivateurs qui plantent ça au Québec. Donc, ça suscitait, quant à la culture comme telle, beaucoup de questionnement.

Deuxièmement, l'ancien ministre de l'Agriculture va vous dire que, quand on cultive quelque chose, il faut faire de la rotation au bout de quatre ans, cinq ans, six ans ou sept ans. J'ai demandé aux spécialistes du ministère de l'Environnement: Quelle va être la culture en rotation? Je n'ai jamais pu obtenir de réponse. On m'a dit: On verra ça quand on sera rendu là.

Tout ça pour vous dire que j'ai demandé aux fonctionnaires s'il existait, dans un climat comparable, des solutions techniques qui pourraient faire le travail sans qu'on procède à l'épandage. Je tiens à vous dire que le ministère de l'Environnement n'a rien trouvé. On ne m'a

soumis aucun projet qui pourrait faire le travail de façon équivalente. J'avais passé la même commande à la compagnie Snyder. Il y a exactement cinq semaines, la compagnie Snyder m'a apporté un modèle qui était en exploitation dans les endroits que j'ai mentionnés en conférence de presse hier. J'ai fait valider, sur le pian technique, par les fonctionnaires du ministère, le procédé.

Le procédé ne coûtait pas plus cher que le procédé initial qui était prévu et, dans les circonstances, c'est ce qui a été annoncé hier. J'ajoute que la compagnie fait son prétraitement et son dégrillage. Ça se jettera, à compter du 1er juillet prochain, dans l'usine anaérobique qui se jettera, par la suite, dans les bassins aérobiques, ce qui fera en sorte que nous n'assisterons plus à ce type de phénomène écologique. Je tiens donc à remercier publiquement Adrien Ouellette d'avoir signé, en 1984, le protocole d'entente avec la ville de Bedford, sinon je n'aurais pas eu de solution à offrir à la population, car, comme vous le savez, la construction d'une usine d'épuration, le temps moyen, au Québec, pour la signature du protocole et la mise en opération, c'est sept ans.

Si, en 1984, ça n'avait pas été fait, je n'aurais pas eu de solution en 1991.

M. Lazure: M. le Président, je comprends qu'il s'agit de poissons, mais c'est un peu la technique du ministre de l'Environnement de noyer le poisson dans beaucoup, beaucoup de phrases. J'avais une question bien précise.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

M. Lazure: Est-ce qu'il y a d'autres conserveries ou usines de transformation semblables à des conserveries qui ont joui du même privilège? On sait que la minoterie Ogllvle, à Candlac dans le comté de La Prairie, n'a pas eu cette chance-là. Et le 1 700 000 $, je le cite de la Presse canadienne, dans Le Soleil de ce matin, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II fait partie des 8 000 000 $. Je veux juste le replacer dans son contexte. Je ne le nie pas. C'est que, si vous l'isolez, je vous ai expliqué qu'en 1988 ça avait été divisé en deux étapes. Là, vous me posez la question: Est-ce qu'il y en a d'autres - M. le député de La Prairie, je ne veux pas être obligé de répondre deux ou trois fois - qui en ont bénéficié? Moi, la réponse que j'ai eue, parce que j'ai vérifié pourquoi Adrien Ouellette a signé cela en 1984, ce qu'on m'a dit, c'est strictement ce qui suit: Lorsque vous avez des usines qui sont branchées sur le réseau lorsque vous mettez en application le programme d'assainissement des eaux, à ce moment-là, ces usines-là sont éllglbles au programme d'assainissement des eaux...

M. Lazure: Est-ce que l'usine Snyder est branchée sur le réseau?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elle l'était en 1984, quand Adrien Ouellette a signé, à la décharge de M. Ouellette.

M. Lazure: La minoterie Ogllvie est branchée sur...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me dit - écoutez, quitte à vérification - qu'au moment où le protocole d'entente a été signé avec Ogilvie, Ils n'étaient pas branchés sur le réseau, ce qui fait la différence dans la mise en application. Maintenant, si vous en avez une dans votre comté, M. le député de La Prairie, qui est branchée sur le réseau, je tiens à vous assurer qu'elle va être traitée de la même façon.

M. Lazure: II est trop tard maintenant, c'est fait.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'êtes plus intéressé à de nouveaux investissements? (18 h 15)

M. Lazure: Non, mais la compagnie l'a fait elle-même...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! mais si elle n'était pas...

M. Lazure:... parce que le ministère a refusé.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... branchée sur le réseau...

M. Lazure: Elle était branchée. Elle était branchée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au moment où elle l'a fait? Non, mais, excusez-moi, c'est important, M. le député de La Prairie. Est-ce qu'elle était branchée au moment où elle l'a fait? Parce que, moi, on m'a dit le contraire. Je suis prêt à prendre votre parole et à le vérifier. Non? Vous ne le savez pas?

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Lazure: Continuez votre monologue. Oui, je le sais.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi! M. le Président, est-ce qu'on peut avoir un échange honnête? S'il le sait, qu'il donne la réponse. Il m'Indique qu'il ne le sait pas et il le sait. Je veux juste avoir une réponse honnête.

Je vais vérifier, si vous me dites que vous le savez.

M. Lazure: Je sais que la compagnie Ogilvie était branchée sur le réseau municipal lorsqu'elle a fait la demande et que ça lui a été refusé.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En quelle année?

M. Lazure: II y a un an, deux ans, trois ans. Je ne sais pas exactement le...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K. Je vais faire la...

M. Lazure:... nombre d'années.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On m'a dit le contraire.

M. Lazure: Mais pourquoi avoir attendu six ans avant d'intervenir d'une façon si généreuse avec Snyder, comme vous l'avez fait hier? Pourquoi avez-vous attendu la pression du grand public?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'offre dont vous parlez, à la ville de Bedford, 8 000 000 $, est venue... Ce n'était pas 8 000 000 $ en 1984, mais ces programmes-là sont indexés à travers les années. L'offre était là depuis 1984. La solution technique a été retenue en 1988. Elle n'a pas été acceptée par la population de la municipalité voisine, ni par les groupes écologiques de la municipalité voisine. Et la solution, sur le plan technique - moi, j'ai eu à trancher et à prendre une décision - ne réapparaissait pas la plus appropriée. Celle que j'ai annoncée m'apparaissait la plus appropriée, sur le plan technique. Il fallait donner aux fonctionnaires le temps d'apporter les réponses. Je n'ai pas obtenu les réponses avant. Ce n'est qu'il y a exactement, M. le député de La Prairie, pour que vous répétiez des choses exactes dans le public, cinq semaines que la conserverie m'a fait part que cette technologie existait. Le ministère ne l'a jamais mise sur mon bureau. Je l'ai fait valider par le ministère et, une fois que j'ai obtenu la validation, je l'ai annoncée.

M. Lazure: Alors, le moins qu'on puisse dire, en tout cas, M. le Président, c'est que le ministre et député du comté en question a pris beaucoup de temps avant de recourir aux effets bénéfiques du geste de M. Adrien Ouellette.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez... M. Lazure: Dans un autre ordre d'idées...

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... je vais être obligé de vous répéter...

M. Lazure: Non, bien, écoutez...

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... que les conventions signées par Pierre Paradis, en assainissement des eaux, prennent, en moyenne 7 ans à se mettre en opération, à partir du moment où on signe, comme celles d'Adrien d'Adrien - non, c'est un peu amélioré, là, c'est 5 ans et demi, 6 ans - celles d'Adrien prenaient 7 ans. La ville de Bedford a pris 6 ans et 11 mois; c'est ça que ça prend, à partir du moment où vous signez le protocole d'entente et où c'est en opération. Si vous avez une formule qui peut m'indiquer comment on peut faire ça en 24 heures, je vous prie de me l'envoyer; moi, je vous promets quelque chose, je vais l'appliquer, je n'attendrai pas 5 ans et demi.

M. Lazure: C'est vous qui êtes ministre de l'Environnement et c'est à vous d'exercer votre leadership sur votre ministère.

Dans un autre ordre d'idées, les déchets domestiques, plusieurs groupes nous ont proposé qu'il y ait un débat public sur la gestion intégrée des déchets domestiques. Vous avez fait allusion au fait que vous avez utilisé 6, 3 assez souvent. Si je vous demande, comme tous ces groupes-là, d'utiliser 6, 3 pour mettre en branle une grande audience publique sur la gestion intégrée des déchets solides ou, si vous voulez, des déchets non dangereux, le pendant d'une commission Charbonneau mais pour les déchets qui ne sont pas toxiques, est-ce que vous pourriez prendre l'engagement de proposer une telle chose à votre gouvernement?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je peux prendre l'engagement très formel, devant cette commission, de ne pas laisser dormir sur les tablettes les recommandations de cette commission. Si cette commission m'adresse une recommandation dans le sens que vous indiquez, M. le député de La Prairie, si vous réussissez, comme vous réussissez tellement souvent, à convaincre votre bon ami, le député de Saguenay, et les autres députés ministériels de m'adresser ce type de recommandation, moi, a priori, je n'ai pas d'objection de principe à impliquer la population dans des solutions où elle se doit d'être impliquée de toute façon. Quand on ne l'implique pas au début, on l'implique au milieu ou on l'implique à la fin.

M. Lazure: Votre rapport a plus de chances d'être implanté que celui de Charbonneau ou de Lacoste?

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a déjà plusieurs recommandations du rapport Charbonneau qui ont été mises en application.

M. Maltais: J'ai de la misère à repoigner la parole.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant, sans dévoiler de secret au député de La Prairie, je lui dirai que le rapport est loin d'avoir été tabletté et que, s'il continue à suivre attentivement les travaux de l'Assemblée nationale du Québec, comme il se fait un devoir de le faire habituellement, il sera en mesure de continuer à féliciter le gouvernement quant aux suites qu'il va donner à ce rapport.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Bon!

Le Président (M. Garon): Le succès est toujours le fruit du dernier essai.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Tu prends des chances d'avoir la grappe. Ha, ha, ha! Voyez-vous, M. le ministre, comme je l'ai dit au début, tout est une question de digestion. Vous, c'est les brochets; lui, c'est les légumes Snyder. Les deux vous font pâlir.

Moi, il y une question qui a été posée et ça m'a impressionné, ça m'a intrigué. D'ailleurs, je ne l'ai pas cru, mais il n'y a plus rien qui me surprend, à un moment donné dans la vie, après neuf ans de politique. Au ministère, chez vous, vous n'aviez pas de banque de données de référence, en ce sens qu'on ne pouvait pas se référer, mettons, à un projet que vous aviez fait il y a six ans ou quatre ans ou huit ans, il fallait toujours recommencer à chaque fois. Ce sont vos ingénieurs à vous, pas les miens, pas les nôtres dans la rue - les nôtres dans la rue l'ont dit aussi - les spécialistes en environnement, vos propres ingénieurs, vos propres spécialistes qui ont dit que vous n'aviez pas une banque de référence. En fait, le fruit des études qui sont faites à gauche et à droite n'est pas emmagasiné ou n'est pas mis dans un tiroir où on peut se référer lorsque des projets similaires arrivent. Ça a deux impacts; on est dans les études d'impact. Le premier, c'est que c'est inquiétant: Qu'est-ce que vous faites avec tout ce papier-là? Deuxièmement...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais:... vous ne pourriez pas faire comme l'impôt, non? Eux autres, ils ont une référence dans chacun des dossiers des citoyens du Québec et, croyez-moi, ils y vont au fond de la référence. Vous ne pensez-pas qu'on aurait des leçons à tirer du ministère du Revenu? Et ne pensez-vous pas que ça serait beaucoup plus efficace et susceptible de raccourcir les délais de 33 mois que ça prend à votre ministère avant de donner une réponse?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le sous-ministre m'Informe que vous avez raison de mentionner que nous ne possédons pas ce que nous appelons une banque...

M. Maltais: Je le remercie, c'est la première fois qu'il me donne raison aujourd'hui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'admets que j'ai coloré ses propos. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous n'avons pas de banque Intégrée comme telle, mais on possède des banques individuelles. SI la question précise nous est adressée, nous sommes en mesure de fournir la réponse dans des délais qui, malheureusement, sont souvent trop longs, mais on est en mesure de la fournir.

Une voix: Délai raisonnable.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le sous-ministre m'indique: Délai raisonnable.

M. Maltais: Je m'excuse de revenir là-dessus, mais je trouve ça inquiétant, moi. Je trouve ça inquiétant parce que, chaque fois qu'on fait une étude quelque part, c'est des spécialistes, toujours des spécialistes. D'après moi, il n'y en a pas un qui travaille à 3 $ l'heure là-dedans. Ça coûte cher aux contribuables, ça coûte cher aux promoteurs. On pourrait se servir de l'expérience des autres souvent pour régler des problèmes dans la rue. Moi, je vais voir un entrepreneur - je vais prendre Hydro-Pontiac; eux autres, ils viennent d'être les premiers, j'imagine - je vous donne les études, vous allez les garder. J'espère que vous ne les jetterez pas. Je vous les donne. Moi, je vais en avoir une dans mon comté prochainement, même affaire qu'Hydro-Pontiac. Alors, vous pourriez sans doute vous servir des études et raccourcir de moitié. Au lieu que ça coûte 2 000 000 $ chez nous, ça pourrait coûter 1 000 000 $. On pourrait se servir des études, des références et des réponses qui ont été données, et même les archéologues pourraient s'en servir aussi. Est-ce qu'il n'y aurait pas une possibilité qu'on ait ce genre d'information là, mis à la disposition de nos promoteurs?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je prends pour acquis que vous êtes le promoteur d'Hydro-Pontlac et que vous les donnez. Habituellement, ces études-là appartiennent aux promoteurs et nous sommes liés, comme ministère de l'Environ-

nement, avec les dispositions de la loi d'accès à l'information pour les communiquer à un tiers, que ce soit un autre promoteur, un journaliste, un...

M. Maltais: M. le ministre, je vous ai tout évité ça, je les ai déposées en commission. Moi, je les al reçues, je les dépose en commission. À partir de ce moment-là, c'est des documents publics.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mais ce ne sont pas tous les promoteurs et, ça, je mets cette réserve-là. Le ministère est prêt à faire son bout de chemin, mais ce ne sont pas tous les promoteurs qui sont prêts à mettre à la disposition de leurs compétiteurs 1 000 000 $ d'études faites d'avance et payées, ou 2 000 000 $. Il y a des promoteurs plus ouverts que d'autres dans ce domaine-là.

M. Maltais: En tout cas, c'est une recommandation que je vous fais, M. le ministre: Que cette banque-là soit créée. Peut-être pas besoin d'engager du monde spécialement, mais qu'il y ait un service chez vous qui fasse cette banque-là parce que ça rendrait vraiment service aux entreprises québécoises et aux individus aussi et que ça serait susceptible de raccourcir bien des délais. Voilà, M. le Président, c'est terminé pour moi. Je n'ai plus de temps. Merci.

M. Trudeau: M. le Président, si je peux me permettre sur ce point-là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le sous-ministre de l'Environnement, André Trudeau.

Le Président (M. Garon): Vous pouvez y aller un petit peu si vous voulez, fl n'est pas 16 heures.

M. Trudeau: Oui, très rapidement. Il existe des banques de données au ministère. Je sais que, plusieurs fois, on a dit qu'il n'y en avait pas. Il existe des banques de données qui sont accessibles, évidemment qui servent à nos professionnels, mais qui sont accessibles également à des gens qui peuvent nous demander de l'information. Ce qu'on est en train de faire et qui prend quand même un certain temps, c'est de faire une information davantage intégrée. Mais on a des systèmes, tout comme on a simplement, dans le domaine des évaluations, des systèmes dits experts qui nous permettent de développer des directives plus rapidement. On a un système où on a des banques de données, d'informations. Ce qu'il va nous falloir faire, c'est les intégrer.

M. Maltais: Ah boni Merci beaucoup, M. le Président.

M. Lazure: Moi, je veux simplement dire, M. le Président, que l'Opposition va continuer à travailler très fort pour arriver à un rapport unanime des travaux de cette commission-là, indépendamment de la présentation du ministre aujourd'hui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, peut-être un mot, si vous me le permettez. Je tiens à vous assurer que tout le travail que vous avez fait au cours des trois dernières semaines sera le rapport qui constituera la clé de voûte des mémoires qui seront présentés par le ministère de l'Environnement, pour approbation par le gouvernement du Québec. Au nom de tous les intervenants, au nom de l'ensemble de la population, au nom du ministère de l'Environnement, de l'organisme qu'est le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement et en mon nom personnel, pour tout ce travail que vous avez effectué, je vous dis: Merci.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Alors, M. le Président, juste en terminant, je voudrais remercier le ministre, bien sûr, mais je voudrais remercier surtout les membres de la commission des deux côtés: mon collègue de La Prairie, les députés de Jonquière, La Baie et les autres collègues ici, de ce côté-ci, Mme la vice-présidente, vous, M. le Président, les gens qui ont travaillé au secrétariat, M. Comeau, M. Germain. Tout le monde a fait un effort formidable pour que les travaux de la commission portent fruit. Le rapport, M. le ministre, vous allez le recevoir. Il va représenter l'opinion des 60 groupes qui sont venus ici, mais surtout aussi, l'orientation que les parlementaires, indépendamment de leur parti, veulent: Que le ministère de l'Environnement desserve le citoyen québécois. C'est pour son grand bien qu'on fait ce travail-là, ce n'est pas pour s'amuser personnellement. Merci.

Le Président (M. Garon): Alors...

M. Lazure: Je fais miens les propos du député de Saguenay. Je fais miens ses propos très sages. J'ajoute aussi que la présidence, vice-présidente et président, nous a bien conduit dans nos discussions, dans nos échanges.

Le Président (M. Garon): Alors, avant que quelqu'un change d'idée, j'ajourne les travaux.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): J'ajourne les travaux à demain matin, 9 h 30, à la salle Papineau.

(Fin de la séance à 18 h 28)

Document(s) associé(s) à la séance