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Question avec débat
(Dix heures 11 minutes)
Le Président (M. Richard): Je déclare ouverte cette
séance de la commision de l'Assemblée nationale qui est
réunie aux fins de procéder à ce qu'il est convenu
d'appeler la question avec débat qui, cette fois-ci, a été
soumise par le député de Laval et leader parlementaire de
l'Opposition officielle au ministre d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire sur le sujet suivant: la réforme
électorale et la réforme des districts électoraux.
Sont membres de la commission de l'Assemblée nationale: M.
Bellemare (Johnson), M. Bertrand (Vanier), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Blank (Saint-Louis), M. Burns (Maisonneuve), M. Charron (Saint-Jacques), Mme
Cuerrier (Vaudreuil-Soulanges), M. Dussault (Châteauguay), M. Fallu
(Terrebonne), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Grenier (Mégantic-Compton),
M. Lamontagne (Roberval), M. Lavoie (Laval), M. Proulx (Saint-Jean), M. Richard
(Montmorency) et M. Vaillancourt (Jonquière).
M. le député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Avec le consentement de la commission, je voudrais
demander de remplacer M. Bellemare.
Le Président (M. Richard): M. Fontaine (Nicolet-Yamaska)
remplace M. Bellemare (Johnson).
M. Burns: M. le Président, je vous demanderais
également de faire remplacer M. Bertrand par M. Vaillancourt... Non?
Vous êtes déjà membre?
M. Bertrand serait alors remplacé, M. le Président, par M.
Lefebvre (Viau). M. Dussault (Châteauguay) est déjà membre.
Cela va.
Le Président: M. Bertrand (Vanier) est remplacé par
M. Lefebvre (Viau). Est-ce exact?
M. Burns: Oui, pour la séance.
Le Président (M. Richard): Je vous rappelle qu'au cours
d'un pareil débat, celui qui a soumis la question, en l'occurrence le
leader parlementaire de l'Opposition officielle, disposera d'un droit de parole
privilégié de même que celui qui doit répondre, en
l'occurrence le ministre d'Etat à la réforme électorale et
parlementaire. Mais je vous signale, suivant les décisions qui avaient
été rendues antérieurement, qu'un droit de parole
privilégié ne signifie pas un droit de parole exclusif. M. le
leader parlementaire de l'Opposition officielle, je vous donne la parole.
M. Fontaine: M. le Président, juste avant de
débuter, est-ce que je dois comprendre de ce que vous venez de dire
qu'immédiatement après que le leader du Parti libéral et
le ministre délégué à la réforme
électorale et parlementaire se seront affrontés, je pourrai
prendre la parole immédiate- ment après, étant
donné que le droit de parole privilégié n'est pas un droit
de parole exclusif.
Le Président (M. Richard): Vous avez mal compris: ce n'est
pas nécessairement le cas, c'est le plus souvent le cas, toutefois.
M. Fontaine: Est-ce qu'il n'est pas de tradition, depuis le
début de ce genre de question avec débat, que le parti
d'Opposition qui n'est pas celui qui propose la question avec débat
parle immédiatement après les deux autres?
Le Président (M. Richard): M. le député de
Nicolet-Yamaska, je vous répète ce que je viens de dire: c'est le
plus souvent et généralement le cas; ce n'est pas
nécessairement le cas.
M. Fontaine: Est-ce que ce le sera ce matin, M. le
Président?
Le Président (M. Richard): Je ne le sais pas, cela
dépendra des circonstances. (10 h 15)
M. Lavoie: M. le Président, pour faciliter les travaux de
cette commission qui étudie une question avec débat, étant
donné qu'il y a deux volets à la question: la réforme
électorale telle quelle et la réforme des districts
électoraux, j'aurais une demande à faire à cette
commission. Est-ce qu'il y aurait possibilité que je prenne dix ou
quinze minutes sur la réforme électorale telle quelle et
qu'après on puisse passer la parole à mon collègue, le
député de Roberval, pour peut-être une dizaine de minutes,
également...
M. Burns: Je suis bien d'accord, M. le Président, je
n'ai...
M. Lavoie: ... pour parler des nouveaux districts
électoraux.
M. Burns: ... aucune objection, M. le Président.
M. Lavoie: Après, on pourra amorcer la discussion d'une
manière globale.
M. Burns: D'accord. Par rapport à la demande qui a
été faite par le député de Nicolet-Yamaska, je peux
vous dire d'avance que s'il veut intervenir avant que j'intervienne, je n'ai
aucune espèce d'objection. Il n'y a pas de problème.
M. Fontaine: Merci.
Le Président (M. Richard): Etant unanimes, M. le leader
parlementaire de l'Opposition officielle, sur le premier volet du sujet sur la
réforme électorale, vous avez la parole.
Exposé du sujet M. Jean-Noël
Lavoie
M. Lavoie: M. le Président, je voudrais, au nom du Parti
libéral, vous remercier de nous faire
l'honneur de présider cette commission. On sait que c'est
plutôt rare que le président de l'Assemblée daigne se
joindre à nous pour présider une commission parlementaire, ce
qui, en général, est réservé soit au
vice-président dans la hiérarchie et après à
quelqu'un de la banque des présidents. Je crois que c'est une bonne
initiative de votre part, étant donné que c'est une primeur, ce
matin, que cette question avec débat soit
télédiffusée. .
C'est une des réformes du parlementarisme au Québec que
cette interpellation; cela n'existe à peine que depuis un an. Nous
allons encore tenter de... Je vois le député de Maisonneuve qui
se pointe en entendant parler de réforme. Je suis bien prêt
à accepter une certaine participation de sa part, mais je me demande si
cela ne vient pas du député de Saint-Laurent, M. Forget, qui a
suggéré, lorsque la Chambre avait décidé de
modifier ses heures de travail de remplacer la séance de
l'Assemblée nationale par une autre formule. Tout le monde avait
concouru pour tenter cette expérience et c'est avec l'accord de
l'ex-leader parlementaire du gouvernement, le député de
Maisonneuve, que cela s'est fait. C'est une autre formule du contrôle du
Parlement du gouvernement et ensemble nous allons tenter de l'améliorer
et de s'en servir au meilleur escient possible.
Sur la réforme électorale, j'aborde immédiatement
la question. Dans les mois qui ont suivi la formation du cabinet des ministres,
en novembre 1976, j'ai exprimé mon désaccord à plusieurs
reprises sur la nomination d'un ministre d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire. Il est vrai que mon désaccord avait
trait surtout à la réforme parlementaire qui, selon moi, ne
devrait en aucune façon être confiée à un membre de
l'Exécutif. Tout ce que je dis actuellement, M. le Président, ce
n'est pas pour attaquer directement ou même indirectement notre
collègue, le député de Maisonneuve. Ce titre et ce poste
ne devraient pas exister à mon point de vue. Cela a peut-être
été une erreur du premier ministre dès décembre
1976. Le député de Maisonneuve aurait apporté sans doute
une meilleure contribution au gouvernement et au Québec si on l'avait
nommé au ministère de la Justice ou au ministère du
Travail. A la Justice, je sais que le député de Maisonneuve ne
permettrait pas ce qui se passe actuellement; l'infiltration qu'il y a un peu
partout de certaines forces policières, il n'aurait jamais permis
cela.
M. Burns: Ne mêlez pas les problèmes.
J'espère...
M. Lavoie: Au Travail, les relations dans le milieu du travail
seraient de beaucoup meilleures si c'était le député de
Maisonneuve qui était là. De toute façon, on l'a
casé à un ministère d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire. Bon. D'ailleurs, ce n'était
aucunement nécessaire. La création d'un tel poste, tout en
pouvant laisser croire que dans le passé il ne s'était à
peu près rien fait pour améliorer et démocratiser le
domaine électoral, laissait entrevoir des réformes nombreuses et
révolutionnaires dans les plus brefs délais.
Avant d'aborder les principaux points de la réforme
électorale, vous me permettrez de rappeler que la réforme
électorale au Québec n'a pas vu le jour avec l'arrivée du
Parti québécois au pouvoir. Dès 1960, le Parti
libéral du Québec a fait adopter plusieurs mesures qui ont
grandement amélioré les mécanismes et le fonctionnement de
nos droits électoraux. Je vais vous citer ici environ huit
réformes électorales qui ont été faites par le
Parti libéral depuis 1960 jusqu'à 1976. C'est le Parti
libéral du Québec qui, entre 1960 et 1966, a fait adopter une loi
modifiant la carte électorale aux fins d'ajouter treize districts
électoraux, ce qui apportait une première correction au
problème des disparités qui existaient entre les diverses
circonscriptions électorales. Celui qui vous parle en est un bon
témoin, parce que, candidat en 1956 dans le comté de Laval, au
moment où il y avait 135 000 électeurs, en 1960, alors qu'il y en
avait 115 000, en 1962, on comprend qu'on n'avait pas eu le temps de
procéder lors d'une élection assez rapide où, dans Laval
encore, il y avait 135 000 électeurs. Des comtés comme
Jacques-Cartier ou Jeanne-Mance en avaient près de 100 000, alors qu'il
y avait des comtés au Québec, on se le rappelle entre
autres, je pourrais vous en nommer une quinzaine: Bagot, Wolfe, Montmagny et
L'Islet, c'étaient deux comtés si je me rappelle bien de
5000, de 7000, de 8000 et de 10 000 électeurs.
La première réforme s'est faite dans les années
soixante pour enlever cette disparité criante qui existait à ce
moment. A des places, je pense que cela prenait quinze votes dans un
comté pour valoir un vote dans un comté de certaines
régions rurales. C'est également le Parti libéral du
Québec qui, au cours de cette même période, a fait voter
une loi pour limiter les dépenses électorales et autoriser l'Etat
à assumer lui-même une partie des dépenses
électorales. Ceux qui ont mon âge et un peu plus se rappellent les
orgies de dépenses électorales, avant 1960; il n'y avait aucune
limite. Il n'était pas rare qu'il se dépense $100 000, $150 000
et $200 000 dans certains comtés pour des campagnes électorales
et la grande réforme, une des premières, a été
faite par le Parti libéral en 1963 pour faire disparaître ces
orgies. On sait qu'aujourd'hui, en général, les
députés, lors des élections générales ou
partielles, sont limités à $15 000 ou $20 000.
Je fais le tour d'horizon; je crois qu'il faut faire l'historique quand
même de la réforme électorale au Québec. C'est tout
à fait dans la pertinence du débat.
M. Burns: C'est une question avec débat. Je
présumais que vous me poseriez une question...
M. Lavoie: Cela va arriver, je vais vous parler tout à
l'heure sur votre...
M. Burns: ... sur laquelle, éventuellement, nous aurions
un débat.
M. Lavoie: Je fais l'historique. On a atteint notre but, vous
voulez déjà amorcer le débat.
M. Burns: Oui, cela va.
M. Lavoie: Cela veut dire qu'on est rendu à 50% au moins
de succès.
M. Burns: Bon.
M. Lavoie: Je fais l'historique de la réforme
électorale, après cela je vous poserai les questions où en
est la vôtre.
C'est le Parti libéral du Québec qui, de retour au pouvoir
en 1970, a fait adopter une loi devenue le chapitre 7 des lois de 1970 qui
modifiait l'Acte de l'Amérique du Nord britannique pour enlever le
caractère privilégié de certains districts
électoraux, et ouvrir ainsi la porte à une réforme en
profondeur de la carte électorale du Québec. On se rappelle des
comtés privilégiés qu'il y avait. Cinquième
réforme. C'est le Parti libéral du Québec qui, à
l'été 1971, a fait adopter la loi créant une commission
permanente et indépendante de la réforme des districts
électoraux. C'est encore le Parti libéral qui, en 1972, donnait
suite au premier rapport de la commission de réforme en faisant adopter
une loi modifiant la Loi de la division territoriale qui dotait le
Québec d'une carte électorale garantissant l'équité
et la justice démocratique au Québec. Ce que nous avons
actuellement, avec un équilibre moyen de 32 000 électeurs par
comté, avec une variante de 25% en moins ou 25% en plus.
C'est également le gouvernement précédent qui, au
cours de cette période de 1970 à 1976, convoqua à
plusieurs reprises la commission parlementaire de l'Assemblée nationale
afin de discuter et d'entendre des experts sur le mode de scrutin, le
financement des partis politiques, les sondages en période
électorale et le recensement des électeurs.
L'établissement d'une liste électorale, la révision
annuelle ou le recensement annuel ont été faits et ont
été modifiés pour une amélioration. D'ailleurs,
lorsque le député de Maisonneuve a présenté sa loi
pour mettre en marche un mécanisme de liste permanente, sans recensement
annuel, nous, du Parti libéral, avons adopté allègrement,
nous avons voté pour cette amélioration.
Egalement, on sait, et le ministre peut en témoigner, qu'en 1976,
lors de l'élection du gouvernement actuel, il y avait un projet de loi
très avancé, qui était rendu à la 12e ou 13e
édition, qui a inspiré, du moins en partie, la loi 2
régissant le financement des partis politiques. Tout cela s'est fait,
dans le passé, sans ministre d'Etat à la réforme
électorale. Je me rappelle que dans les années soixante, c'est M.
Pierre Laporte qui s'occupait de cela, du côté ministériel;
il était ministre des Affaires municipales et, chemin faisant, il
apportait des amendements à la Loi des districts électoraux. Par
la suite, cela a été M. Denis Hardy, qui était ministre
des Affaires culturelles, qui avait le dossier de la réforme
électorale. Cela aurait pu fort bien continuer de cette
façon.
M. Burns: Est-ce que je pourrais vous poser une question?
M. Lavoie: Avec plaisir.
M. Burns: Etes-vous en train de demander au ministre d'Etat
à la réforme électorale s'il doit se faire hara-kiri ou
demander au premier ministre de lui faire faire hara-kiri?
M. Lavoie: Avec les qualités qu'on connaît au
député de Maisonneuve, avec sa polyvalence, il pourrait
être utile et apporter une contribution beaucoup plus positive à
l'administration de la chose publique dans d'autres ministères où
cela va plus ou moins bien. C'est tout. Au lieu d'avoir une superstructure de
ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire,
on pourrait se servir à meilleur escient des qualités et des
talents qu'on reconnaît à l'occasion au député de
Maisonneuve.
La loi 2 est l'oeuvre du député de Maisonneuve. Sans que
nous ayons été totalement d'accord avec toutes les dispositions
de la loi 2, le Parti libéral du Québec a voté pour cette
loi qui constitue une autre étape dans la lancée que nous
connaissons depuis une quinzaine d'années, une autre étape
importante dans la vie démocratique de notre régime politique qui
s'inscrit dans le prolongement des actions du précédent
gouvernement qui, comme je le mentionnais, avait préparé un
avant-projet de loi qui esquissait les grandes lignes de ce qui est maintenant
la loi 2.
Lors de l'étude de cette loi 2, régissant le financement
des partis politiques, il est exact que le ministre a mentionné que la
loi n'était pas parfaite et qu'il pouvait y avoir des trous. Nous
reconnaissons qu'une loi n'est jamais parfaite et qu'elle fait souvent l'objet
de modifications et d'améliorations; d'ailleurs, je pense qu'on
présentera un projet de loi assez prochainement pour corriger certaines
lacunes qui ont été soulignées en cette Chambre, entre
autres la publicité qu'il y a dans certaines publications du Parti
québécois par des personnes morales ou des compagnies, ce qui est
un détour plus ou moins élégant et assez facile pour
contourner la loi 2. J'espère qu'on apportera des corrections à
cette loi dans les meilleurs délais.
Même le premier ministre a reconnu que cette pratique
n'était pas conforme à l'esprit de la loi 2 et s'est finalement
engagé à ce que ces trous soient bouchés. Dans cette
réforme électorale, très brièvement, on pourrait
mentionner la loi 92, sur la consultation populaire. C'est un peu dans la
réforme du système démocratique, mais quand même, on
se rappelle, lorsqu'on a étudié la loi 92, et je lis ici, dans
l'introduction du livre bleu ou livre vert du ministre...
M. Burns: Le livre blanc.
M. Lavoie: ... du livre blanc, blanc-bleu sur la loi sur la
consultation populaire: "La future loi sur la consultation populaire correspond
à une conviction profonde du gouvernement en faveur d'un
élargissement progressif de la participation populaire dans les affaires
publiques. C'est pourquoi les mécanismes que le gouvernement se propose
de mettre en place n'ont pas été élaborés en
fonction
d'une consultation populaire spécifique, quelle que puisse
être son importance. Au contraire, ces mécanismes permettront de
consulter la population à chaque fois que cela sera nécessaire
pour éclairer le gouvernement dans l'accomplissement de son mandat." (10
h 30)
On se rappelle d'ailleurs le député de
Jonquière est ici que cela avait soulevé même une
question de règlement, lorsque nous étudiions les mémoires
sur la loi 92. Dans les limites du droit de parole, on disait: Parlez-nous le
moins possible de la consultation populaire sur l'avenir constitutionnel du
Québec, le référendum. La consultation populaire c'est une
loi-cadre. Parlez-nous... C'est de la démocratie directe. On veut
consulter la population à tout bout de champ,
régulièrement, progressivement, sur toutes les grandes
décisions, les grandes mesures, les grandes options sociales et
économiques du Québec.
D'ailleurs on a tenté de vous démasquer sur cela et
je pense qu'on a partiellement réussi votre "pétage de
bretelles" sur la démocratie directe. Vous avez eu depuis ce temps,
depuis que la loi 92 a été adoptée, au moins trois ou
quatre occasions où vous auriez pu la mettre en pratique sur de grandes
mesures qui affectent, entre autres, 90% du territoire du Québec, par
exemple le zonage agricole.
Vous avez une autre loi, actuellement, qui s'en vient sur
l'aménagement du territoire qui concerne tout le territoire du
Québec, toutes les municipalités, les Conseils de comté,
même la ville de Montréal et la ville de Québec. Est-ce
qu'il est question de consulter la population sur cela? On n'en parle plus de
la consultation populaire, de la démocratie directe. Quand même,
souvent, il y a des écrans de fumée qu'il faut essayer de faire
disparaître. Il y aurait d'autres lois, je crois, si je me
rappelle bien celle-ci sur l'aménagement du territoire, le zonage
agricole et d'autres mesures même, qui sont au feuilleton, actuellement,
qui pourraient fort bien faire l'objet d'une consultation directe de la
population.
Maintenant je voudrais rapidement soulever un autre point. Il y a un
comité Dussault je crois que le député est ici
un sous-comité qui a travaillé plusieurs mois
l'année dernière avec la participation des députés
libéraux, le député de Laurier, je crois, M. Marchand, et
le député de Montmagny-L'Islet, ainsi que le député
de Nicolet-Yamaska de l'Union Nationale. Ce qu'on trouve bizarre, c'est
qu'alors que ce comité avait pratiquement terminé ses travaux et
était prêt à faire un rapport, entre autres sur une de vos
prétendues réformes pour dépolitiser le poste de
président d'élections dans les comtés, au même
moment, le premier ministre a rejeté cette idée. Je ne sais pas
s'il était même au courant que ce comité siégeait.
Je me le demande. Au moment où allait paraître ce rapport, un des
premiers rapports positifs pour dépolitiser le rôle des
présidents d'élections, le premier ministre, du revers de la main
il s'en vantait lui-même en Chambre: Ce n'est pas fini, on va en
faire d'autres change je ne sais pas combien 30 ou 40 une
trentaine de présidents d'élections. C'est rire du monde un peu
et rire peut-être même du député de Maisonneuve dans
ses grands élans de réforme démocratique du système
électoral.
Qu'y avait-il de si urgent lorsqu'on sait et tout le monde sait
que, lorsqu'on étudie des districts électoraux et qu'on
fait de nouveaux comtés, surtout dans la région
métropolitaine de Montréal où les frontières de
presque tous les comtés vont changer quelque peu, c'est le moment
propice pour un gouvernement, s'il le veut, de changer des présidents
d'élections? Ces comtés, en les modifiant, sont comme abolis et
il est facile à ce moment-là de nommer de nouveaux
présidents d'élections. Je ne sais pas quelle urgence il y avait,
si c'est en vue de la campagne référendaire ou d'autre chose
qu'on a changé ces présidents d'élections. On sait qu'en
voulant dépolitiser, c'est assez bizarre que, dans certains
comtés comme dans Lafontaine, on a choisi l'ancien agent officiel du
député de Lafontaine, le ministre délégué
à l'environnement, pour nommer par hasard quelqu'un de
dépolitisé, justement son ancien agent officiel. Cela a
été d'une indécence inacceptable, pendant que ce
comité se fend pendant des mois et des semaines pour améliorer la
situation. C'était même dans votre programme
électoral...
M. Lamontagne: Une autre page déchirée.
M. Lavoie: ... l'idée de dépolitiser ces postes de
présidents d'élections. Le premier ministre, de la manière
la plus indécente, les change en nommant des créatures politiques
pour remplacer des gens qui avaient fait leur travail, qui avaient
été disponibles, qui avaient été honnêtes
dans l'accomplissement de leurs fonctions.
M. le Président, c'est la première partie de mon
intervention. Le ministre pourra peut-être nous faire le bilan tout
à l'heure de sa brochette d'engagements qui sont au programme du Parti
québécois à la page 9, édition 1968. Sous le titre,
le système électoral, il nous parle de la représentation
proportionnelle.
M. Burns: II y a une version plus récente.
M. Lavoie: D'après ce qu'on peut voir, qu'on retourne en
arrière ou en avant, votre programme, d'une édition à
l'autre...
M. Burns: Ce serait peut-être bon que vous vous
référiez au programme de 1975 qui est celui sur lequel...
M. Lavoie: J'ai celui de 1978.
M. Burns: Vous avez dit 1978? J'ai compris 1968.
M. Lavoie: Non, 1978. Je m'excuse, c'est celui de 1978...
M. Burns: Ah! bon, d'accord.
M. Lavoie: ... où on parle de la représentation
proportionnelle j'espère que vous allez nous faire un rapport sur
cela de la carte d'électeur, les sondages électoraux,
l'accessibilité égale aux journaux une déclaration
que vous avez faite et en évitant que l'opinion des citoyens soit
noyée sous un déluge de propagande orchestrée par ceux qui
détiennent les pouvoirs d'argent. C'est peut-être une allusion
à la dernière annonce qui a paru dans le comté de
Jean-Talon, deux jours avant le déclenchement des élections, pour
éviter que ce soit sous le contrôle des dépenses
électorales durant la campagne électorale. Vous nous parlerez de
cela.
M. Burns: ... le comté d'Argenteuil, en attendant.
M. Lavoie: Oui, vous nous en parlerez.
M. Burns: Voulez-vous que je vous demande comment il se fait que,
tout à fait par hasard, le chef du Parti libéral, M. Claude Ryan,
organisait des voyages, toutes dépenses payées, à
Québec, avant l'émission des brefs? Voulez-vous que je vous parle
de cela?
M. Lavoie: ... de quoi?
M. Burns: Des voyages d'électeurs du comté
d'Argenteuil, toutes dépenses payées. En période
électorale, ce serait ce qu'on appelle de la régalade; c'est tout
à fait illégal.
M. Lavoie: Ecoutez, des voyages à Québec... M.
Burns: Oui. Vous vérifierez cela.
Le Président (M. Richard): Vous pourrez revenir tout
à l'heure, M. le...
M. Lamontagne: II faut payer le monde pour venir à
Québec, maintenant?
Le Président (M. Richard): M. le leader
parlementaire...
M. Burns: Toutes dépenses payées, cela veut dire le
gin, la bière et aussi le repas.
M. Lavoie: J'espère que vous pourrez établir la
prétendue accusation que vous faites...
M. Burns: Je la fais parce que j'en ai eu parfaitement
connaissance.
M. Lavoie: Ce n'est pas de la régalade, ce que vous dites,
c'est de la rigolade.
M. Burns: C'est de la régalade.
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Opposition, puis-je vous inviter à tirer vos conclusions, puisqu'il y
a déjà au-delà de vingt minutes que vous avez la parole,
et M. le député de Roberval doit aussi...
M. Lavoie: D'accord. Si la commission est d'accord, j'aimerais
que le député de Roberval enchaîne.
Le Président (M. Richard): Comme il y a consentement
unanime et sans vouloir créer de précédent...
M. Burns: M. le Président, j'aimerais quand même,
sur ce point-ci parce que je ne suis pas pour prendre les trois ou
quatre points, et j'aimerais, éventuellement, avoir la réaction
du député de Nicolet-Yamaska dès le départ,
dire un certain nombre de choses à caractère
général. La question est posée par le député
de Laval et j'écouterai, par la suite, le député de
Roberval qui, sans doute, aura autre chose à ajouter.
M. Lamontagne: M. le Président, je porte à votre
attention que l'intervention du député de Laval est
divisée en deux parties, l'une par lui et l'autre par moi, et qu'il y a
consentement...
M. Burns: Je peux aussi peut-être diviser mon intervention
en deux parties. Vous me le permettez?
M. Lamontagne: Vous aviez accepté d'avance. C'est
ça le problème avec vous; vous acceptez et, après cela,
vous vous reniez publiquement.
M. Burns: Non, écoutez...
M. Lamontagne: Vous l'avez accepté auparavant:
consentement, ça me fait plaisir.
M. Burns: Oui, j'ai donné mon consentement pour que tout
le monde parle.
M. Lamontagne: Vous avez même accepté qu'on parle
avant vous, et regardez comment vous agissez.
M. Burns: Là, il y a des choses...
M. Lamontagne: Si vous ne voulez pas accepter, ne le dites pas
d'avance.
M. Burns: Aimez-vous mieux parler tout de suite?
M. Lamontagne: C'est ce qui a été convenu.
M. Burns: Cela ne me fait rien, mais je serai obligé de
parler pendant une heure et quart et ça va peut-être
empêcher les autres personnes de parler à la commission.
Le Président (M. Richard): Alors... M. Burns: C'est
seulement cela.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Roberval, quinze minutes tout au plus.
M. Lamontagne: Cela ne durera pas quinze minutes, mais seulement
sept ou huit minutes.
M. Burns: Je vais l'écouter.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Roberval.
M. Lamontagne: M. le Président, comme...
Le Président (M. Richard): Cela va, M. le
député de Roberval, ne perdons pas de temps puisque...
M. Lamontagne: Je ne perds pas de temps, je me
réfère immédiatement au problème soulevé par
le député de Laval. On a affaire à un ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire, c'est assez
compliqué, on va le voir par toutes les réponses qu'il ne nous a
pas encore données. On est ici, aujourd'hui, pour lui en poser
d'autres.
M. Burns: Je vais vous les donner. M. Robert
Lamontagne
M. Lamontagne: M. le Président, j'ai en main, pour le
bénéfice des téléspectateurs, ce qu'on appelle le
cinquième rapport de la commission permanente de la réforme des
districts électoraux qui a été rendu public par cette
commission formée de trois membres et qui apparaît au volume, le
juge François Drouin, qui a été remplacé depuis,
l'honorable juge Alphonse Barbeau et Me Jacques Prémont. Ces personnes,
en vertu d'une loi adoptée à l'Assemblée nationale, ont
produit ce rapport en février 1978. Nous sommes actuellement en mars
1979.
A la suite de plusieurs demandes que j'ai faites au ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire, il a finalement
consenti à tenir une commission parlementaire le 6 décembre
dernier. Lors de cette commission parlementaire, j'ai donné une analyse
très détaillée de la position du Parti libéral sur
ce cinquième rapport. Je voudrais brièvement, M. le
Président, vous rappeler la position que nous avions émise lors
de cette commission, le 6 décembre dernier.
Il est bon de rappeler en premier lieu que la proposition essentielle du
rapport c'est la création de onze nouveaux comtés. Pour ce faire,
la commission propose de modifier les délimitations de 74 des 110
comtés, ce qui implique le déplacement de parties de quartiers,
de quartiers entiers, de paroisses, de villages et même de villes d'un
district vers un autre.
M. le Président, s'il fallait que je vous donne la carte
proposée du Saguenay-Lac-Saint-Jean, vous comprendriez facilement et
rapidement le problème que peut causer ce cinquième rapport. Le
Parti libéral du Québec, l'Opposition officielle, souscrit
pleinement au grand principe qui sous-tend toute réforme de la carte
électorale, à savoir garantir l'égalité de vote de
chaque électeur. Nous croyons toutefois que ce grand principe peut
être respecté sans qu'il soit nécessaire d'augmenter de
onze districts par surcroît le nombre des districts électoraux.
Dans bien des domaines, nous comparons souvent le Québec et l'Ontario.
Or, pour ce qui est du nombre de districts électoraux, les chiffres
comparatifs, dont je vous fais grâce mais que j'ai déjà
mentionnés le 6 décembre dernier, démontrent clairement
que le Québec, qui compte actuellement 110 députés, ne
devrait pas en compter plus de 98, toute comparaison faite avec la province de
l'Ontario.
J'ajoute simplement que, lors de la dernière élection au
Québec, il y avait une moyenne de 36 500 électeurs par district
alors qu'en Ontario elle se situait à 40 990, avec un écart de
plus ou moins 25%. Il ne faudrait pas oublier non plus que l'augmentation du
nombre de districts électoraux et, par conséquent, celle du
nombre des députés ont une répercussion directe sur le
coût d'une élection, de même que sur celui des salaires et
autres indemnités attachés au poste de député.
Qu'il suffise de mentionner que l'addition de onze députés fera
augmenter de $1 650 000 approximativement les coûts d'une élection
générale. A ce montant, il faut ajouter un montant approximatif
de $3 800 000 représentant le coût de onze députés
pour une période de quatre ans et tout ce qui en comporte pour permettre
à un député d'exercer son mandat. Egalement, il en
coûterait à peu près $5 500 000 aux contribuables
québécois pour se payer le luxe de onze députés
additionnels alors que beaucoup prétendent, malheureusement, qu'il y a
déjà beaucoup trop de députés.
L'Opposition officielle, le Parti libéral du Québec,
recommande et cela depuis longtemps que la loi de la Commission
permanente de la réforme des districts électoraux soit
modifiée de façon que la révision de la carte
électorale ne se fasse qu'après chaque recensement
décennal, comme cela se fait au Manitoba. Cette recommandation aurait
pour conséquence de moins bousculer les habitudes des
Québécois, des électeurs qui, actuellement, d'une
élection à l'autre, risquent de se retrouver dans un nouveau
district électoral. L'Opposition officielle considère que le
maximum de sièges à l'Assemblée nationale doit être
de 110, soit le nombre que nous avons actuellement. Toutefois, pour des raisons
d'ordre géographique ou démographique, ce nombre pourrait
atteindre 112 ou être diminué à 108. Déjà
d'ailleurs, en 1976, une proposition quasi officielle avait été
faite en ce sens et un projet de loi était même en
préparation. (10 h 45)
La loi devrait donc être modifiée de façon que ces
chiffres y soient inscrits. Le nombre d'électeurs par district
électoral serait alors obtenu en divisant le nombre d'électeurs
inscrits sur les listes électorales de la dernière
élection par le chiffre 110; un écart de plus ou moins 25% serait
permis. La commission pourrait s'écarter de cette règle pour des
considérations exceptionnelles d'ordre démographique,
géographique, telle la très faible densité de la
population d'une région, son accessibilité, sa superficie ou sa
configura-
tion. On pense immédiatement aux Iles-de-la-Madeleine qui sont
à l'heure actuelle la seule exception que nous retrouvons dans les 110
comtés du Québec. Cette recommandation de déterminer au
préalable le nombre de députés devant siéger
à l'Assemblée nationale était d'ailleurs contenue, comme
je l'ai mentionné tout à l'heure, dans un rapport
présenté à l'Assemblée législative en
janvier 1962. Par la suite, ce rapport a été repris en 1976, et
même un de nos collègues de l'Assemblée nationale, M.
Fernand Grenier, avait été partie à ce rapport.
C'est ainsi que cette recommandation avait eu force de loi pour la
confection du cinquième rapport dont j'ai fait état tout à
l'heure. Nous aurions un projet de carte où le nombre moyen
d'électeurs par district se serait situé à 36 579, tandis
qu'avec l'écart de plus ou moins 25%, nous aurions pu avoir des
districts électoraux atteignant 45 723 électeurs, et le minimum
aurait alors été de 27 435. Selon les chiffres du dernier
recensement, cette moyenne se situerait à 37 449 électeurs,
tandis que les districts les plus populeux pourraient atteindre 46 811 et ceux
qui le sont moins, 28 087. Tous ces chiffres se retrouvent au journal des
Débats du 6 décembre à l'occasion de la première
commission parlementaire, et cela plus détaillé. En milieu
urbain, nous croyons, nous de l'Opposition officielle, qu'il serait possible
qu'un député représente plus d'électeurs qu'en
milieu rural, et cela sans qu'on modifie considérablement son travail et
son efficacité à représenter ces électeurs.
L'Opposition officielle, M. le Président, demande donc au
ministre responsable de la réforme électorale et parlementaire de
présenter dans les plus brefs délais un projet de loi amendant la
Loi constituant la commission de la réforme des districts
électoraux afin de modifier les normes mathématiques contenues
dans cette loi. Par la suite, la commission pourra refaire une nouvelle
proposition de la carte électorale, même si on sait, parce qu'elle
nous en a informés le 6 décembre dernier, qu'elle doit être
actuellement en train d'essayer d'améliorer la carte que la commission a
déposée au mois de février 1978. Même si la loi qui
constitue la commission n'a pas été modifiée, nous
présumons, à la suite de la séance de décembre
dernier, comme je viens de le mentionner, que les commissaires pourraient
être en mesure très rapidement de déposer au Parlement, par
l'entremise du président, une nouvelle carte peut-être mieux
appropriée, mais qui ne serait pas nécessairement en
conformité avec le mandat légal qui date de plusieurs
années.
M. le Président, vous savez que le 6 décembre dernier
le ministre s'en souviendra sans aucun doute il y avait beaucoup
de rumeurs qui circulaient à son sujet dans tout le parlement et
même à l'extérieur. On parlait de mutation; non pas qu'on
voulait le mettre de côté, mais on appelait cela des promotions.
Il reste que tous les parlementaires et la presse en général
avaient été extrêmement surpris et déçus de
voir que le ministre, alors qu'on lui demandait: Quelle est votre opinion, M.
le ministre, à la suite de la parution du cinquième rapport?
disait qu'il n'avait pas d'opinion et pas de commentaires à
émettre. C'était tout simplement impardonnable. Quelques mois
plus tard, c'est pour cela que le député de Laval, leader de
l'Opposition officielle, a inscrit à nouveau une telle requête
auprès du ministre.
Avant que le ministre parle, quelle a été la
réaction de la population à la suite des propos qu'il a tenus?
"Le PQ reporte au printemps la réforme du mode de scrutin". "Pas de
réforme électorale avant les prochaines élections
provinciales". "Le projet de réforme électorale est
reporté". "La réforme de la carte électorale est
retardée". "Québec reporte à la prochaine session
là réforme électorale". "Réforme électorale
reportée à 1979, dit le premier ministre". "La réforme
Burns est passée au crible par l'aile réaliste". Sans aucun
doute, M. le Président, le ministre voudra bien tout à l'heure
nous parler de l'aile réaliste de son parti.
Un ministre, un collègue de M. Burns M. Vaugeois pour que
les téléspectateurs comprennent bien "Vaugeois est d'avis
que Burns peut attendre". Ce n'est pas tout à fait gentil. "Le plus vite
possible, si le cabinet réussit à s'entendre". Sans doute que le
ministre pourra nous parler de l'attitude de ses collègues du cabinet.
Là, c'est plus grave. "Réforme électorale en panne". Une
autre: "Requiem pour une réforme défunte", le Soleil du 28
février. Là, c'est vraiment grave. "Réforme
électorale le Soleil du 24 novembre Burns se heurte au
cabinet". Vous nous ferez part des dommages qui ont pu être
causés. C'est le dernier, la parole est maintenant au ministre:
"Lévesque le premier ministre coupe les ailes à
Burns". C'est tiré de M. Gilles Lesage et vous voudrez bien nous faire
vos commentaires. Pour le bénéfice de tous les comtés que
le cinquième rapport touche, je pense qu'il est temps plus que jamais
que le ministre, concernant la carte électorale, nous fasse part cette
fois-ci de son opinion et également de l'échéancier qu'il
entend suivre pour amener devant la Chambre un nouveau rapport. Merci, M. le
Président.
Le Président: Merci, M. le député de
Roberval.
M. Burns: M. le Président, selon ce que j'avais
accepté tout à l'heure, je veux entendre les commentaires du
député de l'Union Nationale de Nicolet-Yamaska et, par la suite,
j'essaierai de répondre le mieux possible à l'ensemble des
questions qui sont soulevées par chacun des trois
députés.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
Autres remarques M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Tout à
l'heure, lors de l'allocution du leader du Parti libéral, le ministre
"délégué"...
M. Burns: D'Etat, c'est différent.
M. Fontaine: ... d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire se demandait quelle question le Parti
libéral voulait lui poser. Je commencerai mon intervention en lui posant
immédiatement une question et je pense que le ministre va devoir y
répondre. C'est la question suivante: Où est la logique du Parti
québécois depuis 1973?
Si on se réfère, M. le Président, à des
interventions de députés de l'Opposition d'alors, en 1973, qui
sont maintenant, pour certains, membres du cabinet je dirais même
tous on doit se poser cette question et on doit se demander: Comment se
fait-il que, maintenant que ces gens sont au pouvoir et membres d'un cabinet,
les opinions semblent être modifiées ou diverger? A ce sujet, je
voudrais simplement vous référer au journal des Débats de
l'Assemblée nationale du 7 mars 1973. C'était la commission
permanente de l'Assemblée nationale, sujet: réforme
électorale, et le président était nul autre que
l'honorable Jean-Noël Lavoie. On avait déposé une annexe
à cette commission qui disait ceci: "La prochaine étape de la
réforme électorale, le financement des partis politiques, texte
présenté par M. Camille Laurin, député de Bourget,
le Parti québécois, le 7 mars 1973. Le député de
Bourget d'alors, qui est maintenant l'actuel ministre...
M. Burns: Ministre d'Etat au développement culturel.
M. Fontaine: D'Etat au développement culturel...
M. Lavoie: Vous n'avez pas d'organigramme?
M. Burns: Cela fait deux ans et demi, vous devriez le
connaître l'organigramme.
M. Fontaine: C'est assez mêlant, votre affaire. C'est parce
qu'on en a beaucoup entendu parler de ce ministre il y a quelque temps, mais
maintenant, depuis presque un an, on ne l'entend presque plus.
M. Burns: Vous voudriez qu'il parle tous les jours en Chambre,
c'est cela que vous voulez?
M. Fontaine: Non, non.
M. Burns: Cela ne veut pas dire qu'un ministre ne travaille pas,
s'il ne parle pas tous les jours en Chambre.
M. Fontaine: Non, je ne parle pas de vous; je parle du ministre
"délégué" au développement culturel.
M. Burns: Je ne parle pas de moi, non plus; je parle de mon
collègue, le ministre d'Etat au développement culturel.
M. Fontaine: En tout cas, il disait ceci, le député
de Bourget, M. Camille Laurin, pour que tout le monde sache bien de qui on
parle: "Bien sûr, le Parti québécois juge et a toujours
jugé qu'il aurait été plus logique, plus honnête et
plus respectueux d'une authentique réforme que de commencer par refaire
notre mode de scrutin pour ensuite établir une carte électorale
conforme au mode de scrutin adopté. Dès octobre 1969,
c'est-à-dire avant l'élection d'avril 1970, et, donc, avant
même de connaître les distorsions scandaleuses survenues dans la
représentation des partis, le congrès national du Parti
québécois inscrivait au programme officiel du parti une
résolution réclamant que le tiers des députés soit
élu par la représentation proportionnelle et que la nouvelle
carte électorale soit constituée en conséquence. C'est
pourquoi, dès le 9 septembre 1970, le chef parlementaire du Parti
québécois a soumis à la commission de l'Assemblée
nationale un texte proposant les étapes à franchir dans la
réforme électorale. Ce texte établissait clairement
c'est là l'important la nécessité de
réformer le mode de scrutin et d'y adapter la carte électorale
ensuite. Actuellement, c'est exactement le contraire que le gouvernement du
Québec nous propose. On l'a fait en disant qu'en arrivant au pouvoir le
ministre verrait à proposer de telles modifications dans les meilleurs
délais. Ensuite, on voit, par les différents articles de journaux
dont on a parlé tantôt, que le Cabinet n'étant pas d'accord
sur cette réforme on la reporte à un peu plus tard.
Dernièrement, à la période des Fêtes, lorsqu'on a
formé le dernier Cabinet, avant le début de cette session, on a
fait une conférence de presse pour dire qu'on voulait retarder cela
à un peu plus tard, qu'on ferait un livre vert, ensuite un livre blanc
et puis peut-être une consultation. De toute façon, ce qu'on doit
en retirer, ce qu'on doit comprendre, c'est que le ministre, et le Cabinet
surtout, n'a pas l'intention de nous proposer de telles modifications avant la
prochaine élection. Où est la logique du Parti
québécois, si on tient compte de cette argumentation?
M. Burns: Je vais vous le dire, cela ne sera pas long.
M. Fontaine: Tantôt, le ministre a demandé au
député de Laval de se référer au programme du Parti
québécois de 1975. C'était un texte qui a
été modifié dans le programme de 1978 mais qui, quand
même, a une connotation assez semblable. On disait, au chapitre IV: "Le
système électoral. La démocratie existera au Québec
quand les députés et les partis politiques refléteront
vraiment la volonté populaire. Or, le système actuel conduit
à des écarts trop flagrants entre le pourcentage des suffrages
exprimés et la répartition des sièges à
l'Assemblée nationale."
Il y a eu, bien sûr, des distorsions, comme le disait le
député de Bourget dans le texte que j'ai cité tout
à l'heure, depuis 1970 et en 1973 également, mais il y en a eu
également en 1976, des distorsions, lorsqu'on voit que le Parti
québécois a obtenu 40% du suffrage universel et qu'il a
récolté 71
députés à l'Assemblée nationale, alors que
le Parti libéral du Québec a obtenu 33,4%, soit seulement 6% de
moins que le Parti québécois, tout en n'ayant que 26
députés à l'Assemblée nationale. L'Union Nationale
avait 18,3% et n'a eu que 11 députés à l'Assemblée
nationale. Ces distorsions, dont on parlait en 1970, en 1973 et en 1975 dans le
programme électoral, c'est encore la même chose, la même
situation. Le ministre nous dit toujours qu'il va arriver avec des livres vert,
blanc, une consultation, etc., pour, en fin de compte, nous faire comprendre
à nous, parlementaires, qui savons ce que veulent dire un livre vert et
un livre blanc, que purement et simplement il n'y aura aucune réforme
avant le prochain scrutin, la prochaine élection provinciale.
Le Parti québécois allait un peu plus loin dans ses
commentaires quant au mode de scrutin, le système électoral, et
disait: "En conséquence, un gouvernement du Parti
québécois s'engage à maintenir le mode de scrutin actuel,
mais à y ajouter un élément de représentation
proportionnel pour que le tiers des sièges de l'Assemblée
nationale soit pourvu par des députés élus suivant le vote
préférentiel accordé aux partis politiques reconnus,
c'est-à-dire à ceux qui auront fait élire au moins dix
députés ou à ceux qui auront recueilli au moins 10% des
votes. "Deuxièmement, instituer une commission permanente et
indépendante de révision de la carte électorale dont les
membres seront nommés avec l'accord des partis reconnus et dont le
rôle sera inscrit dans la Constitution; cette commission veillera
à assurer l'égalité fondamentale de la
représentation, l'écart entre les populations des comtés
ne devant jamais dépasser 25%. (11 heures)
Quatrièmement, uniformer les lois électorales
régissant les élections nationales et locales, de manière
à n'utiliser qu'un seul office électoral, une liste unique et
permanente des électeurs. Emettre une carte d'électeur et
établir les bureaux de scrutin dans les lieux publics. Je reviendrai sur
ce point tout à l'heure.
On voit bien qu'une fois qu'on a pris le pouvoir les
ministériels, les membres du cabinet modifient un peu leur opinion quant
aux modifications qu'on veut apporter au système électoral. Bien
sûr, quand on se fait élire avec un système, on a de la
difficulté à comprendre, par la suite, qu'il faut le changer. Ce
sont même, je pense, les paroles du ministre lorsqu'il a expliqué
pourquoi il y avait de telles divergences d'opinions au sein du cabinet.
Il y a également le comité Dussault qui a
siégé sur la réforme de la Loi électorale. J'ai
personnellement siégé à ce comité, avec les
députés du parti libéral et du gouvernement, l'automne
dernier, alors que tous les autres députés étaient en
vacances. Nous avons siégé à ce comité de
façon tout à fait gratuite parce que cela n'était pas une
commission de l'Assemblée nationale. Le ministre est venu nous
rencontrer à ce comité à plusieurs reprises. Nous
étions intéressés à siéger à ce
comité parce qu'on nous avait informés que la loi serait
modifiée, et on devait nous présenter un projet de loi, à
l'Assemblée nationale, pour être adopté avant Noël
1978. Il y avait également des fonctionnaires qui ont travaillé
à nous aider à l'étude de ce projet, et presque tous les
partis politiques, sur la majorité des points en discussion, en
étaient venus à une entente pour un projet de réforme.
Malheureusement, jamais cette loi n'a été présentée
à l'Assemblée nationale. Pendant ce temps, comme on l'a dit tout
à l'heure, le premier ministre, d'une façon tout à fait
arrogante, à mon avis, s'est permis de changer une trentaine de
présidents d'élection qui occupaient des postes à travers
la province de Québec, alors que le comité Dussault en
était venu à une entente quant à la façon dont on
devrait procéder pour la nomination de ces nouveaux présidents
d'élection.
Je trouve tout à fait cavalière la façon dont le
premier ministre a ignoré le travail du comité Dussault. Pour ma
part, le Parti québécois devra, à l'avenir, se dispenser
de demander nos services à de tels comités je parle
personnellement parce que je ne pense pas que cela donne des
résultats satisfaisants. On se voit comme on dit virer de
bord comme cela, alors que le comité avait proposé des
modifications qui, à mon avis, étaient essentielles et
urgentes.
Je voudrais revenir sur la question de la carte d'électeur. Comme
je le disais tout à l'heure, dans le programme du Parti
québécois on voulait proposer d'émettre une carte
d'électeur et d'établir les bureaux de scrutin dans les lieux
publics. Etablir les bureaux de scrutin dans les lieux publics, c'est une
question qui avait été discutée au comité Dussault
et qui avait été acceptée par tout le monde. Alors, il
reste la question de la carte d'électeur. Le Conseil des ministres a
adopté, le 3 mai 1978, une résolution; je vous ferai grâce
de la lecture de toute cette résolution, mais à la toute fin, au
paragraphe j, on disait que le Conseil des ministres acceptait la
création d'une liste unique et permanente des électeurs et
l'obligation pour tout électeur de s'identifier avant de voter, en
présentant sa carte d'assurance-maladie.
Or, à la suite du Conseil des ministres préparant
l'ouverture de la présente session, le ministre avait, avec le premier
ministre, donné une conférence de presse. A ce moment, entre
autres, Normand Girard avait titré dans le Journal de Québec du
27 février 1979: "La carte d'identité pour le
référendum: oubliez ça!" Et il disait ceci: "Aucune carte
d'identité, même pas la carte soleil (assurance-maladie), ne sera
exigée des citoyens lors du référendum sur l'avenir du
Québec. "Le ministre d'Etat à la réforme électorale
et parlementaire, Me Robert Burns, a confirmé à notre journal que
le Conseil des ministres avait accepté sa recommandation en ce sens". On
voit que le Conseil des ministres, qui avait déjà
décidé le contraire, revient sur sa décision. Qu'est-ce
qui a fait changer le Conseil des ministres d'idée aussi rapidement?
Il poursuivait: "Nous sommes arrivés à la conclusion,
dit-il, que quant à y aller dans cette voie quand on parlait de
carte d'assurance-maladie il vaudrait mieux y aller avec une
véritable carte d'électeur comportant toutes les
données pertinentes à l'identité du porteur, y compris sa
photographie, ou ne pas y aller du tout". Je pense qu'à ce
moment-là le ministre Burns voulait vraiment instaurer une
véritable carte d'identité. J'aimerais bien qu'il nous explique
si c'est réellement sa façon de vouloir présenter les
choses. "M. Burns a expliqué que la carte soleil (assurance-maladie)
n'offre pas une solution de rechange présentant toutes les garanties
désirées. "D'une part, le directeur général des
élections, Me Pierre-F. Côté, en l'occurrence, n'a aucun
moyen d'en surveiller l'émission (...) et, d'autre part, plusieurs
cartes peuvent avoir été émises au nom d'un même
individu. "En effet, il suffit de faire savoir à la Régie de
l'assurance-maladie que vous avez perdu votre carte pour qu'on vous en
émette une autre. "De plus, a rappelé le député de
Maisonneuve, les journaux nous ont récemment appris qu'un homme
décédé en 1967 venait de recevoir sa carte
d'assurance-maladie... "Le système n'est pas hermétique, dit-il".
Lorsqu'on a étudié le projet de loi 123 à
l'Assemblée nationale, j'avais personnellement, ainsi que d'autres
députés de mon parti, averti le ministre de cette situation et on
l'avait informé des faits. J'avais même fait une farce à ce
moment-là. J'avais dit: Le Parti québécois veut faire
voter les morts. On s'aperçoit que le ministre d'Etat à la
réforme...
M. Burns: II ne veut pas faire voter les morts, justement.
M. Fontaine: ... électorale et parlementaire a
décidé que... Il a compris.
M. Burns: Justement, il ne veut pas faire voter les morts.
M. Fontaine: II a réussi enfin à comprendre que ce
qu'on lui disait, on avait raison de le dire. Il a dit également au
journaliste: "La population ne semble pas prête à accepter une
carte d'identification..." Par contre, il dit que c'est véritablement ce
vers quoi il veut aller. S'il me fait signe que non, j'aimerais bien qu'il
m'explique pourquoi, parce qu'il dit, à la fin de l'article: "Toutefois,
si l'idée de doter les électeurs d'une pièce
d'identité quelconque est abandonnée à court et à
moyen terme, à plus long terme il en va autrement. "En effet, a
signalé M. Burns, en dépit de la décision du gouvernement,
j'ai l'intention de demander au directeur général des
élections de continuer à fouiller la question".
J'aimerais bien, aujourd'hui, lors de cette commission parlementaire,
que le ministre nous dise ce que c'est "à long terme" pour lui. Il
demande qu'on continue à "fouiller la question". Si on ne s'en sert pas
pour le référendum, est-ce qu'on va s'en servir pour la prochaine
élection? Est-ce cela, "à long terme"? J'aimerais bien que le
ministre réponde à toutes ces questions. J'aimerais bien surtout
que le ministre nous dise vérita- blement où est la logique du
Parti québécois lorsque, en 1970, en 1973, en 1975, dans les
discours des députés et dans le programme du Parti
québécois, on proposait d'abord et avant tout une réforme
électorale dans le sens de la représentation proportionnelle et
que maintenant qu'on a pris le pouvoir avec cette façon de
procéder, les distorsions que cela peut causer, on en tient plus ou
moins compte. On va plutôt proposer des livres verts, des livres blancs,
etc., pour essayer d'amortir le coup, laisser porter, en arriver à la
prochaine élection, alors qu'il n'y aura aucun changement
véritablement proposé pour que les partis politiques puissent
véritablement représenter la population, tel qu'on le proposait
et tel que l'Union Nationale le propose également.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Nicolet-Yamaska. M. le ministre d'Etat à la
réforme électorale et parlementaire, vous avez maintenant votre
droit de réplique. Avant que vous ne commenciez, je vous signale que
vous avez déjà 18 minutes d'écoulées, M. le
député de Nicolet-Yamaska, et que le règlement dit qu'un
député ne peut parler plus de 20 minutes, sauf celui qui a
formulé la question. Mais je pense que vous pourrez probablement obtenir
un consentement tout à l'heure.
M. Fontaine: Je peux m'en aller, dans ce cas.
M. Burns: Parlez vos deux minutes, vous pourrez vous en aller
après.
Le Président (M. Richard): M. le ministre.
Réponse du ministre
M. Robert Burns
M. Burns: M. le Président, je remercie le
député de Laval d'avoir posé cette question qui nous
permet vraiment de faire le tour de l'ensemble de la réforme
électorale. Je dois vous dire que, évidemment, je ne suis pas
d'accord avec tout ce qu'il a dit, non plus qu'avec ce que le
député de Roberval a dit, ni avec ce qu'a dit le
député de Nicolet-Yamaska. Cela me permet quand même de
faire le point à ce moment-ci et nous aurons, éventuellement,
sans aucun doute, dans les semaines et les mois qui vont venir, des
réponses très concrètes à des questions qui sont
posées par les députés ce matin.
Je veux, au départ, relever ce que le député de
Laval nous disait au début et qui, dans le fond, remettait même en
cause le poste de ministre d'Etat à la réforme électorale
et parlementaire et lui démontrer, par des gestes très concrets
que, effectivement, ce poste a eu des résultats dans la pratique. Je
m'excuse de le faire de façon chronologique; souvent, c'est quelque
chose d'embêtant et d'un peu fastidieux, mais, quand même, cela
vaut peut-être la peine qu'on rappelle un certain nombre de choses qui
ont été faites par le ministre d'Etat à la réforme
électoral et parlementaire.
Dans le fond, cela supporte la décision que le premier ministre
avait prise lorsqu'il a constitué son cabinet en nommant cinq ministres
d'Etat, dont l'un était particulièrement affecté à
la réforme électorale et parlementaire.
Je connais les divergences d'opinions qui peuvent exister entre le
député de Laval et moi-même relativement à la
réforme parlementaire. Je me souviens d'avoir entendu des discours, de
sa part, où il disait: Un ministre d'Etat à la réforme
électorale, cela se justifie, mais un ministre d'Etat à la
réforme parlementaire, cela ne se justifie pas; cela devrait relever de
la présidence de l'Assemblée nationale.
M. Lavoie: Je n'ai pas changé d'idée.
M. Burns: Je reconnais que vous n'avez pas changé
d'idée, mais je peux vous dire, par exemple, que, s'il n'y avait pas eu
de ministre d'Etat à la réforme parlementaire, vous n'auriez pas
actuellement de télédiffusion des débats à
l'Assemblée nationale. Cela a pris un certain nombre de discussions tant
à l'intérieur du cabinet qu'à l'intérieur du caucus
et avec les partis d'Opposition, mais celui qui les a menées à
bien je m'excuse de me vanter comme cela c'est le ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire parce que cela
devenait une de ses préoccupations. A un moment donné, il
décidait de mettre sur pied un comité qui s'appelait, à
l'époque, le comité Godin, du nom du député de
Mercier qui a dirigé ce comité et qui a fait rapport constamment
au ministre d'Etat. Eventuellement, cela a permis, avec la collaboration de la
présidence je vous le dis, M. le Président, et je vous en
remercie avec la collaboration des membres de l'Opposition soit
dit en passant, je n'ai aucune crainte à le dire de mettre sur
pied un instrument de communication avec la population qui est absolument
extraordinaire. En tout cas, de par tous les sondages que nous avons
actuellement, c'est un des moyens les plus extraordinaires que nous avons mis
en place pour permettre à la population d'avoir accès à
l'Assemblée nationale. Je vous donne cet exemple sur le
côté parlementaire; il y en aura d'autres,
éventuellement.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre reconnaît qu'il y a eu
quelques pannes en cours de route?
M. Burns: Oui, il y a eu des pannes.
M. Lavoie: Le programme était en panne après votre
caucus de Trois-Rivières et tout. Je ne veux pas mettre de
côté votre contribution à ce dossier de la
télédiffusion, loin de là, mais ce n'est pas vous qui
l'avez en fin de compte réalisé, terminé après
avoir obtenu le consentement de tous les partis. Cela a été
réalisé lorsque le dossier a été
transféré de vos mains aux mains du président de
l'Assemblée nationale. (11 h 15)
M. Burns: Non, je m'excuse là-dessus, mais je...
M. Lavoie: Je pense qu'on doit dire cela également.
M. Burns:... ne veux pas diminuer l'importance que le
président a pu avoir dans tout cela. Il y avait une décision
politique à prendre au départ. Cela, le président,
malheureusement pour lui, n'a pas de décision politique à
prendre. Il est dans cette situation où il doit être neutre; il
doit se garder de tous les débats politiques internes et externes, de
quelque parti que ce soit. Je pense que le président réussit
très bien dans ce rôle. Il fallait que cette décision
politique soit prise et elle a été prise à
l'intérieur du Parti québécois, avec des pannes, je
l'admets, avec une décision qui renversait d'ailleurs des travaux qui
avaient été faits sous mon autorité à
l'intérieur du cadre du ministre d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire. Mais par la suite, tout cela s'est
réglé, cela s'est placé. C'est là qu'effectivement,
une fois la décision prise, l'Assemble nationale s'est prononcée.
Vous vous souvenez, vous avez même voté en faveur d'une motion
donnant cette autorité au président et créant le
comité consultatif relativement à la télédiffusion
des débats. D'ailleurs, à ce moment-là, je remettais le
dossier. C'est le rôle d'un ministre d'Etat. Ce n'est pas quelqu'un qui
prend en charge un dossier et le suit jusqu'à la fin; il le met au
monde, c'est un peu j'utilise souvent l'expression comme
quelqu'un qui met un enfant au monde et qui le fait élever par la
voisine. Cela prend peut-être un peu d'humilité pour accepter cela
mais je pense avoir cette humilité. Dans ce sens, ma voisine
élève très bien l'enfant que j'ai mis au monde, je
pense.
Je voulais tout simplement, revenant aux premiers propos du
député de Laval, lui rappeler un certain nombre de choses qui ont
été faites par le ministre d'Etat à la réforme
électorale et parlementaire. Je vais le faire de façon
très succincte parce que, comme je le disais tout à l'heure,
c'est souvent fastidieux d'entendre cela. Mais je vais vous donner des dates.
Par exemple: le 26 août 1977, nous faisions sanctionner la Loi du
financement des partis politiques, le projet de loi no 2 auquel il a
été fait référence à de nombreuses reprises
dans la partie questions de cette question avec débat. Par la suite, on
mettait sur pied, immédiatement, dans les mois qui ont suivi le 26
août, le bureau du directeur général du financement des
partis politiques.
A l'automne 1977, il y avait une décision du Conseil des
ministres de procéder à la télédiffusion des
débats, je viens d'y faire référence, et cela a
été mis sur pied. Actuellement, nous avons la
télédiffusion des débats. Maintenant, c'est
administré par la présidence de l'Assemblée nationale et,
comme je le disais tout à l'heure, à mon avis, de façon
très efficace et très productive.
Le 3 mai 1978, une décision du Conseil des ministres de
procéder à la création d'un registre des électeurs,
c'est-à-dire une liste unique qui pourrait servir éventuellement
tant au niveau québécois qu'au niveau municipal et,
souhaitons-le, éventuellement, le jour où ce sera possible, au
ni-
veau scolaire. Ce n'est pas possible pour le moment pour une raison bien
simple, c'est-à-dire que nous avons le problème de la division
confessionnelle au niveau scolaire, donc, qui pose un certain nombre de
problèmes quant à la mise sur pied d'une liste électorale
qui pourrait être utilisée au niveau scolaire.
En mai 1978, nous avons déposé au Conseil des ministres un
mémoire sur la refonte de la loi électorale et ce mémoire,
je tiens à le dire tant à l'endroit du député de
Laval qu'à l'endroit du député de Nicolet-Yamaska qui y a
fait référence, contenait à 99,9% les recommandations du
comité Oussault, mon collègue qui est à ma droite et qui
présidait ce comité qui a été formé d'abord
des députés ministériels, dont mon collègue qui est
à ma gauche, également, faisait partie, le député
de Viau.
Dans un premier effort, nous avons travaillé la Loi
électorale si vous me passez l'expression et, par la
suite, nous avons élargi ce comité à l'Opposition. C'est,
je pense, une expérience assez unique, assez extraordinaire de
députés qui sont créateurs de lois plutôt que le
Conseil des ministres qui, normalement, est créateur de lois. Le
comité Dussault nous a présenté un premier rapport. Le
Conseil des ministres en a pris connaissance et a suggéré que
l'Opposition participe au comité Dussault. C'est là qu'est
arrivé une espèce de consensus, je dirais à 99,9%, de
toutes les recommandations du comité Dussault. Je suis en mesure de vous
dire aujourd'hui que dans les mois qui vont venir, je dirais même dans
moins d'un mois, ou peut-être dans moins de deux mois, une loi va
être déposée qui contiendra à toutes fins pratiques
les recommandations du comité Dussault élargi. Je me suis fait
fort, au Conseil des ministres, de vendre l'idée que c'était
normal que des députés, tant de l'Opposition que du
côté ministériel, qui ont travaillé sur cela, qui
connaissent le système électoral doivent avoir une opinion
privilégiée auprès du Conseil des ministres. Je pense que
ce sera vraiment une première qu'un projet de loi qui sera
déposé dans les mois qui viennent soit issu de
députés et non du Conseil des ministres ou d'un ministre en
particulier.
Sur ce point, je vous dis tout de suite que j'ai vraiment fait l'effort,
parce que je tenais tellement à cette réforme de la Loi
électorale. Je me suis forcé vraiment pour ne pas participer
comme individu aux travaux de la commission Dussault, pour une raison bien
simple, c'est que je voulais que ce soit et cela en est de la
réforme parlementaire des députés qui dans ce
domaine nous indiquent la voie à suivre. Vous allez voir, cette voie une
fois traduite en termes de projet de loi, que le comité Dussault a
passé son message. Je fais simplement une parenthèse ici, et en
même temps je réponds au député de Roberval qui a
soulevé cette question, quant à la nomination des
présidents d'élection. Je fais cette parenthèse de
façon vraiment délibérée parce que cela fatigue
bien des gens et on veut savoir ce qui se passe dans ce domaine. Bien
sûr, le premier ministre, selon l'autorité actuelle qu'il a sur
les présidents locaux d'élection, si on peut les appeler ainsi, a
fait un certain nombre de changements. Cela a été critiqué
parce qu'à un moment donné on n'a pas compris qu'il fallait
changer les présidents d'élection.
Il fallait en changer un certain nombre parce qu'ils étaient
décédés; au cas où vous ne le sauriez pas, il y en
avait des gens qui étaient décédés...
M. Lavoie: 30 de morts, ce n'est pas vrai, non?
M. Burns: Pardon?
M. Lavoie: II n'y en a pas eu 30 de morts. Il n'y en a pas 30 qui
sont décédés.
M. Burns: Non, il n'y en a pas eu 30 de morts. Je vais vous
donner la liste. Il y en avait qui étaient décédés.
Correct? Il fallait changer ceux-là, bien sûr. Il y en avait qui
étaient déménagés de comté, au cas où
vous ne le sauriez pas, et, en vertu de la loi actuelle, on ne peut pas
être président local d'élection si on n'habite pas le
comté. Il y en avaient d'autres, disons-le, qui étaient
carrément incompétents au dire même pas selon les
fantasmes du premier ministre ou du ministre d'Etat à la réforme
électorale du directeur général des
élections, tant l'actuel directeur général des
élections que son prédécesseur, le juge Drouin. Il fallait
les changer, que voulez-vous que je vous dise? Vous ne laissez pas des gens
carrément incompétents en place. Vous ne laissez pas des postes
vides parce que des gens sont décédés. Vous ne laissez pas
non plus des postes vides parce que les gens ont déménagé
de comté. C'est cela qui est arrivé.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre reconnaît que lorsqu'il y
a eu ces changements on me dit que c'est près d'une cinquantaine
les raisons que vous nous donnez n'ont pas été
invoquées par le premier ministre en Chambre? Il a dit: C'est le pouvoir
du premier ministre de le faire. J'ai décidé d'en changer et je
vais continuer à en changer sans passer par la suggestion du
comité Dussault. Il y en a peut-être un ou deux de
décédés, d'accord, un ou deux de
déménagés, mais vous en avez même nommé un
qui non seulement n'était pas du comté, soit Hull, mais qui
habitait l'Ontario. Ecoutez, ces raisons... C'est strictement un geste
politique que le premier ministre a posé et il ne s'en est pas
caché, il l'a dit en Chambre, d'ailleurs.
M. Fontaine: Est-ce que vous me permettriez une question
également?
M. Burns: Bon, je pense que je n'ai pas interrompu mes
collègues d'en face.
M. Lavoie: Oui, vous m'avez interrompu à l'occasion.
M. Burns: D'ailleurs, aussitôt que vous m'avez dit que vous
ne vouliez pas que je vous interrompe, je me suis fermé la
boîte.
M. Fontaine: Est-ce que vous me permettriez juste une courte
question concernant le même sujet?
M. Burns: Je vous permets une question.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Par exemple, dans mon comté de
Nicolet-Yamaska, on a nommé un infirmier auxiliaire comme
président d'élection. Est-ce que vous pourriez me dire quelle
compétence cette personne peut avoir dans le domaine?
M. Burns: II y a des gens qui sont présidents
d'élection actuellement, M. le député de Nicolet-Yamaska
au cas où vous ne le sauriez pas qui ont à peine
une cinquième année. Ce n'est pas une question d'avoir un cours
classique, selon les vieilles normes qui existaient, ou encore un cours
universitaire, qui fait qu'un président d'élection est un bon
président d'élection. C'est quelqu'un qui, d'une part, est
disponible et qui, d'autre part, est capable de comprendre comment fonctionne
le système électoral. C'est rien que cela qu'on demande aux gens.
On ne leur demande pas un diplôme universitaire.
M. Fontaine: Et qu'ils soient membres du Parti
québécois.
M. Burns: Je pourrais vous nommer des gens qui sont, si vous
voulez, moins préparés qu'un infirmier auxiliaire pour devenir
présidents d'élection et qui le sont. Je ne veux pas faire de
personnalité, mais je peux vous dire que, par exemple, dans le
comté de Maisonneuve, je n'ai jamais demandé que le
président d'élection soit déplacé c'est un
président d'élection qui a été
désigné par le Parti libéral parce que je trouve
qu'il fait vraiment son boulot.
M. Fontaine: Moi non plus je ne l'aurais pas demandé.
M. Burns: II fait un bon boulot. Je n'ai pas à me poser
des questions sur son origine politique ou quoi que ce soit, et non plus
à me poser des questions sur sa scolarité ni quoi que ce soit. Je
trouve que c'est un très bon président d'élection. Dans ce
sens, je me serais battu pour qu'il soit maintenu dans son poste, parce que je
trouve justement qu'il fait un bon travail.
M. Fontaine: J'aurais probablement fait la même chose avec
le mien, si j'avais été averti d'avance.
M. Burns: Concernant les présidents d'élection,
puisqu'on est sur ce sujet, peut-être que je devance un peu le projet de
loi qui va vous être soumis bientôt, mais il me paraît normal
de vous dire que, justement pour éviter ce genre de critiques que vous
êtes en train de tenter de soulever, le gouvernement a
décidé de s'enlever des mains la nomination des présidents
d'élection. Ce sera une réforme majeure qui va apparaître
dans le projet de loi.
M. Lavoie: Vous reconnaissez l'impair qu'a commis le premier
ministre?
M. Burns: Je ne reconnais pas l'impair, il n'est pas question
d'impair...
M. Lavoie: Vous le reconnaissez, le gouvernement veut se sortir
du dossier maintenant.
M. Burns: M. le Président, s'il vous plaît!
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
leader parlementaire de l'Opposition officielle, s'il vous plaît!
M. Burns: Bon, il n'est pas question d'impair là-dedans.
Le premier ministre a purement et simplement agi en vertu des dispositions de
la loi actuelle. Nous disons qu'il n'est pas normal que la loi soit maintenue
dans cette forme. Bien sûr, mais la loi dit cela actuellement, que c'est
le président général des élections qui nomme, selon
la suggestion du premier ministre. C'est cela la loi actuelle. Pour se
protéger contre cela cela va peut-être vous
déplaire, M. le député de Laval actuellement, le
Conseil des ministres je vous l'annonce a décidé
que le président général des élections tiendrait un
concours où il recueillerait trois personnes qu'il soumettrait au
Conseil des ministres. Aucune intervention du premier ministre, aucune
intervention de quelque ministre que ce soit. Le président
général des élections prend un bloc de trois personnes et
il dit: Voici les trois personnes que je verrais capables d'accéder
à la position de directeur local d'élection, nommez-en un des
trois. Notre choix ne sort pas des trois. Cela va être ce qu'on va vous
proposer dans un projet de loi.
M. Lavoie: Ce n'est pas tellement brillant.
M. Burns: Vous n'êtes pas content, vous auriez aimé
autre chose. D'accord, vous nous le direz lors du projet de loi. On ne
commencera pas le débat.
M. Lavoie: Voyons!
M. Burns: On ne commencera pas le débat actuellement. Je
vous dis que c'est le signe que justement le Conseil des ministres n'a pas
l'intention de se mêler de cela directement. Le choix des trois ne sera
pas fait par le premier ministre ou par quelque ministre que ce soit. Il va
être fait...
M. Lavoie: Juste une question.
M. Burns: Non, je n'entre pas là-dedans, je vous fais
cette annonce et on fera ce débat quand on arrivera au
dépôt du projet de loi lui-même. (11 h 30)
M. Lavoie: En tout cas, c'est loin d'être complet comme
réforme.
M. Burns: Bien, c'est loin d'être complet... Vous direz ce
que vous voudrez lors de l'étude du projet de loi.
M. Lavoie: II y a les trois candidats. Vous allez voir la
pression qu'il va y avoir sur les ministres et sur les
députés...
M. Burns: C'est cela!
M. Lavoie: ... pour choisir le bon qui est membre du Parti
québécois.
M. Burns: C'est cela!
Le Président (M. Richard): Messieurs! A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Burns: Déjà, vous cherchez des poux. Le
Président (M. Richard): A l'ordre!
M. Burns: C'est exactement cela. D'ailleurs, cela a
été votre attitude depuis le début, vous cherchez des poux
partout. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?
M. Fontaine: II y en a, on n'a pas besoin d'en chercher!
M. Burns: J'avais commencé à établir un
certain nombre de choses faites par le ministre d'Etat à la
réforme électorale et parlementaire. Je continue. J'avais fait
cette parenthèse relativement aux présidents d'élections.
Il faudra se rappeler que, le 23 juin 1978, nous avons fait adopter la Loi sur
la consultation populaire en mon absence; à cause d'une maladie à
cette époque, le ministre de la Justice m'avait remplacé. Mais le
bill 92 reste quand même quelque chose qui provenait, au point de vue de
la conception, au point de vue de la préparation, du ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire.
Le 23 juin 1978 également, nous faisions sanctionner la loi 44
transposant de fait les dispositions du bill 2 quant aux municipalités
de Montréal, Longueuil, Saint-Léonard, Pointe-aux-Trembles pour
l'élection de novembre 1978. C'est une dossier auquel le ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire a
participé intimement et de façon très
régulière, à un point tel qu'avec le ministre des Affaires
municipales il a participé à la consultation auprès de
toutes les municipalités, de tous les conseils de ville de 50 000
électeurs et plus. En août 1978, nous avions une première
étude, à Montebello, par le Conseil des ministres, du premier
mémoire qui avait été déposé, soit dit en
passant, le 5 juin sur la réforme du mode de scrutin et sur la carte
électorale. Le 25 octobre, deuxième étude au Conseil des
ministres du mémoire sur la refonte de la Loi électorale et une
décision d'en faire examiner les recommandations par un comité
interministériel formé, soit dit en passant, du ministre des
Transports, du ministre des Affaires municipales et du ministre
délégué à l'environnement. C'était le
comité interministériel qui s'était vu confier
l'étude de ce deuxième rapport.
Le 22 décembre, nous faisions sanctionner une loi modifiant la
Loi électorale donnant un cadre légal à la création
du registre des électeurs. Finalement, le 22 février, nous avons
présenté au Conseil des ministres, pour la troisième fois,
la refonte de la Loi électorale qui a été acceptée.
C'est ce que je vous disais tout à l'heure: Les recommandations du
comité Dussault, à peu près à 90%, vont faire
partie de l'essence du projet de loi que nous déposerons dans les mois
qui viennent.
Entre-temps, on nous a posé des questions sur ce qu'on ferait en
matière de registre des électeurs. Le projet de loi va passer au
comité de législation mercredi prochain. Il est prêt, il a
été travaillé, réexaminé et la loi du
registre des électeurs sera, je pense, très bientôt soumise
à l'Assemblée nationale en première lecture.
J'espère, avec la collaboration de l'Opposition, que cette loi
créant le registre pourra éventuellement être
adoptée dans cette période-ci de la session, c'est-à-dire
avant juin. Je le souhaite, en tout cas. Je présume qu'autant du
côté de l'Opposition que du côté du gouvernement on
n'a pas l'intention de retarder indéfiniment l'institution d'une liste
électorale unique et complète qui pourrait servir tant au niveau
de l'ensemble du Québec qu'au niveau municipal, épargnant des
millions de dollars par année. On estime actuellement à une
moyenne de $10 millions par année ce qui serait purement et simplement
dépensé par les municipalités et par le Québec.
C'est une moyenne basée sur à peu près quatre ans. On
espère que l'Opposition nous donnera sa collaboration là-dessus
et qu'on pourra faire adopter la loi du registre avant le mois de juin pour
qu'on en arrive enfin à avoir une liste électorale unique,
applicable au moins à deux niveaux, au Québec.
La refonte de la loi électorale: Nous aurons,
éventuellement, dans les mois qui viennent, comme je le mentionnais tout
à l'heure, à déposer le projet de loi. Là-dessus,
j'attendrai les réactions de l'Opposition, à savoir si on doit le
faire adopter dès le mois de juin ou avant le mois de juin, ou encore si
on doit le laisser traîner dans le décor jusqu'à l'automne
pour que les gens puissent avoir le temps de l'examiner. Finalement, nous
allons déposer, dans les mois qui viennent, une loi concernant la
commission de révision des districts électoraux. Je vous dis tout
de suite c'est une autre nouvelle que je vous donne tout de suite
que le Conseil des ministres a accepté que la commission,
l'éventuelle nouvelle commission de révision des districts
électoraux, aura le droit, en dernier ressort, de décider ce que
seront les dis-
tricts électoraux. Cela veut dire une modification très
importante, dans notre esprit, de la conception des districts
électoraux.
Comme vous le savez, actuellement, la commission se doit de
déposer un projet, d'abord nous dire que les districts électoraux
doivent être changés, dans les six mois suivant l'élection.
Par la suite, elle a un an pour déposer un projet, ce qu'elle a fait,
effectivement. Et par la suite, il y a une commission parlementaire qui
étudie cela et qui examine les diverses positions proposées par
la commission. Ce qui arrive, effectivement, selon la loi actuelle, c'est que
la majorité gouvernementale décide de ce que vont être les
bornes des différents districts électoraux. Le gouvernement
actuel est prêt à aller aussi loin que de dire: Ce n'est pas nous
qui allons décider cela. Ce sera, éventuellement, une commission
indépendante du gouvernement qui, après avoir reçu toutes
les représentations des parlementaires, après avoir reçu
toutes les représentations de la population, prendra la décision
finale. Cela ne demandera pas un projet de loi adopté à
l'Assemblée nationale, avec toutes les bâtardises que vous
connaissez, M. le député de Laval, que vous avez vécues
vous-même lorsque vous siégiez comme président de
l'Assemblée nationale.
Je me rappelle, par exemple, qu'en 1971-1972, on a eu ce genre de
discussion absolument aberrante où un parti politique je ne le
nomme pas en particulier, ne voulait pas qu'on touche à ces
bornes, à ces délimitations, et ce n'était pas le
vôtre, M. le député.
M. Lavoie: C'était le droit de l'Union Nationale...
M. Burns: Bon, c'est cela.
M. Lavoie: ... de s'opposer, d'ailleurs, elle a fait un
"filibuster" sur cela. C'est son droit démocratique.
M. Burns: Depuis ce temps, il n'y a rien qui s'est fait au point
de vue modification de la carte électorale, pour une raison bien simple,
c'est qu'on s'est dit: A chaque fois, il va y avoir un bordel, à
l'Assemblée nationale, dès qu'on va demander des modifications
aux délimitations des divers comtés. La solution est bien simple,
il faut remettre cela entre les mains d'une commission qui, elle, va trancher
le débat. Là, vous allez avoir des solutions et c'est ce qui va
apparaître, éventuellement, dans le projet de loi. Je vous
l'annonce d'avance, c'est ce qui va apparaître dans le projet de loi
qu'on va vous soumettre.
M. Lavoie: En somme, M. le Président, il s'agit de... Je
comprends et je trouve qu'il y a du bon à cette formule. Au lieu que ce
soit l'Assemblée nationale qui décide en dernier ressort la
limite des comtés, ce sera cette nouvelle commission que vous allez
former qui aura le dernier mot.
M. Burns: Et qui sera nommée, soit dit en pas- sant, cette
commission, aux deux tiers des votes de l'Assemblée nationale.
M. Lavoie: D'ailleurs, vous adoptez le système qui existe
à Ottawa actuellement.
M. Burns: Exactement.
M. Lavoie: C'est une commission indépendante qui
décide, en dernier ressort, des frontières des districts
électoraux.
M. Burns: Exactement. Alors, finalement, je voudrais
simplement... J'espère que cela répond un peu aux questions qui
ont été posées par les députés de Laval et
de Roberval. Si jamais cela ne répond pas complètement, je suis
prêt à essayer d'y ajouter quelque chose.
M. Lamontagne: M. le Président...
M. Burns: Vous me permettrez quand même de tenir compte des
remarques du député de Nicolet-Yamaska qui asoulevé un
certain nombre de choses. Il a laissé entendre que le cabinet
n'était pas d'accord avec la réforme; au contraire. Ce que je
suis en train de vous dire, c'est que depuis au moins un an et demi, je dirais
sans équivoque au moins un an et demi, mes fonctionnaires et mon cabinet
travaillent de façon très sérieuse à la
réforme du mode de scrutin. Nous en sommes arrivés à un
certain nombre de conclusions qui ne sont pas des conclusions dont moi, en
conscience, comme ministre d'Etat à la réforme électorale
qui doit conseiller le gouvernement dans le domaine électoral plus
particulièrement, je puisse dire: C'est cette formule qu'il faut
absolument adopter. Nous avons vraiment pris toutes les précautions
parce que, comme tout le monde le sait, le domaine électoral est un
domaine très délicat. Il ne faut pas qu'à un moment
donné un gouvernement ait l'air d'être en train de mettre en
place, même si ce n'est pas son intention, un système qui le
favorise. Il est important aussi que la crédibilité
gouvernementale et, autant, la crédibilité de l'Assemblée
nationale soient telles qu'on ne puisse pas douter de la justesse et de
l'aspect approprié d'une modification au système
électoral. C'est pourquoi, par prudence, le Conseil des ministres a
décidé de me mandater pour préparer un livre vert. Pour
ceux qui batifolaient autour de cela tout à l'heure, je peux vous dire:
II n'y aura pas de livre blanc après. Il n'y aura pas de livre
carreauté et il n'y aura pas de livre jaune orange et tout cela. Il y
aura un livre vert qui soumet la position actuelle, c'est-à-dire le
système uninominal à un tour, ses avantages et
désavantages, et peut-être trois positions dont je n'ai pas
l'intention pour aujourd'hui et vous me pardonnerez de parler.
Non pas que je veuille cacher quelque chose. C'est que j'aime mieux que, par
respect pour l'Assemblée nationale, le livre vert soit
déposé à l'Assemblée nationale. Je prétends
et je pense que le livre vert sera déposé vers les 24 avril
à l'Assemblée nationale dès notre retour...
M. Lavoie: Le 24 avril?
M. Burns: ... après les vacances de Pâques.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre...
M. Burns: Je tiens à ce que ce soit à ce
moment-là que les parlementaires prennent connaissance du livre vert
plutôt que je vous donne cela par petits morceaux.
M. Lavoie: M. le Président, je ne poserai pas une question
directe. Je comprends la position du ministre, qui veut peut-être garder
les trois formules qu'il mentionne les faire connaître à
l'occasion du dépôt du livre vert au lieu de lancer cela dans les
airs. Je suis parfaitement d'accord avec lui sur ce point. Mais ce qu'il nous
intéresserait de connaître et c'est relié aux deux
volets de la question d'aujourd'hui c'est d'abord le mode de scrutin, la
question de la fameuse proportionnelle qui est dans le programme du Parti
québécois, dans plusieurs éditions, où il est dit
qu'il y aurait possibilité qu'un tiers des députés qui
siégeraient à l'Assemblée nationale ne seraient pas
élus directement par la population sur un bulletin de vote comme cela se
fait actuellement, et que les deux tiers des députés seraient
élus comme nous le sommes lors des élections
générales. Les autres seraient nommés sur des listes par
les autorités ('"establishment" du parti, ou d'autres façons,
comme cela existe en Allemagne et dans pas tellement de pays, en Israël,
entre autres...
M. Burns: En Israël, c'est pire.
M. Lavoie: ... complètement proportionnel.
M. Burns: C'est une circonscription électorale qui
s'appelle Israël.
M. Lavoie: II y a l'harmonisation de deux problèmes. La
question du mode de scrutin, si la majorité gouvernementale
décide d'ajouter un tiers des députés en dehors des
députés actuels, c'est directement relié à l'autre
volet de la question à votre commission qui va décider d'une
manière finale des districts électoraux qui sont à
l'étude dans des rapports actuellement, où il est
suggéré, dans le dernier rapport, qu'on passe de 110
députés à 121 élus directement, comme nous, par les
électeurs lors des élections. Voyez-vous la connotation ou
l'interrelation entre les deux? C'est cela qu'on veut savoir. (11 h 45)
M. Burns: Cela va très bien, M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Je termine. D'abord, il y a l'échéancier
que j'aimerais que vous nous donniez sur la carte électorale et le mode
de scrutin. Est-ce que cela voudrait dire que, si vous acceptez le principe de
121 comtés, 121 députés élus directement par un
vote uninominal à un tour, il faut ajouter dans votre mode de scrutin 40
autres députés, le tiers de 120 à la proportionnelle, ce
qui fait 160 députés? C'est pour cela que j'aimerais que vous
nous parliez des deux échéanciers. Comment cela va-t-il
s'harmoniser ensemble?
M. Burns: Je pense que votre question est tout à fait
justifiée, M. le député de Laval. C'est évident
qu'il y a un lien intime entre le mode de scrutin et la carte
électorale. Je vous dirais le contraire que vous diriez: M. Burns, vous
êtes tombé sur la tête. Il est important de savoir que si
vous avez une carte électorale qui a un élément ou qui
doit tenir compte d'un élément de représentation
proportionnelle, à ce moment-là, ce n'est pas la même carte
que celle qui existe actuellement ou une carte qui pourrait fonctionner selon
le système actuel. C'est ce pourquoi nous avons retardé la
discussion fondamentale sur la refonte ou la réforme de la carte
électorale. On s'est dit: Si on s'en va dans telle direction, si
l'Assemblée nationale décide d'inscrire un élément
proportionnel ou encore d'y aller carrément avec un système
proportionnel, ce n'est plus le même problème au point de vue de
la commission.
Pour ne pas retarder indûment toute la situation, nous avons pris
la décision de faire adopter une loi, selon le mode actuel, qui ne
tiendrait pas compte de la proportionnelle, mais qui, éventuellement,
à la suite des consultations que nous allons entreprendre par
l'entremise du livre vert, pourrait être modifiée. Dans un premier
temps, je vous dis tout de suite que nous allons procéder tout comme si
on n'inscrivait pas de mode proportionnel, ceci pour permettre, justement,
qu'avant les prochaines élections, nous ayons une carte
électorale adaptée à la situation actuelle du
Québec.
Si, à ce moment-là, entre-temps, on a réussi
à sentir ce que la population du Québec veut, au point de vue de
la représentation proportionnelle; si on a également
réussi à convaincre les membres des différents partis
politiques relativement à l'inscription, dans notre système
électoral, d'une représentation proportionnelle, à ce
moment-là, on fera les ajustements qu'il faudra faire. On s'est dit que,
d'autre part, il ne fallait pas retarder indûment la révision des
districts électoraux, et c'est dans ce sens que nous allons
procéder. J'espère que cela répond à votre
question, M. le député de Laval.
M. Lamontagne: M. le Président...
Le Président (M. Richard): M. le député de
Roberval.
M. Lamontagne: Cela se clarifie avec le livre vert sur le mode de
scrutin contenant les propositions qui seront soumises au mois d'avril prochain
et, également, avec le projet de loi qui sera déposé
concernant la carte électorale relativement au cinquième rapport.
Nous sommes au mois de mars 1979, plus qu'à moitié chemin,
à la troisième année de votre mandat. Quelle est
l'intention claire du gouvernement... Est-ce que vous propo-
sez, à l'occasion du référendum ou des prochaines
élections, d'avoir 110 comtés, tel que proposé
actuellement? Le projet de loi est encore dans l'air. On ne sait pas où
il est.
M. Burns: D'une part, M. le député de Roberval, je
dois vous dire ceci, et c'est important que la population le sache: La carte
électorale n'a aucun impact sur l'éventuel
référendum. On se comprend? Cela veut dire tout simplement qu'au
niveau d'un référendum, que vous ayez telle délimitation
de comté ou telle autre, cela ne change strictement rien parce que c'est
le nombre de votes qui, éventuellement...
M. Lavoie: ... les citoyens.
M. Burns: C'est cela. Un citoyen, un vote...
M. Lavoie: On est d'accord avec cela.
M. Burns: Alors, quant au référendum, s'il avait
lieu à l'automne ou s'il avait lieu au printemps prochain, que la carte
électorale ne soit pas modifiée n'a aucune espèce
d'impact. Ce qu'il y a d'important et vous le mentionnez, on est en
principe passé le milieu de notre mandat c'est que d'ici les
prochaines élections générales, en principe qu'on peut
détecter aux environs de 1980...
M. Lavoie: A l'automne aussi.
M. Burns: Ce n'est pas moi qui ai décidé de la date
et ce n'est pas à moi de décider de la date non plus.
M. Lavoie: Peut-être cet automne.
M. Burns: En principe, sur une base de quatre ans, cela devrait
être aux environs de 1980. Dans ce sens, je vous dis qu'on est capable de
respecter l'échéancier qui, avec le nouveau système que je
vais éventuellement proposer, va nous donner une nouvelle carte
électorale avant les élections générales.
M. Lamontagne: M. le Président...
M. Burns: Je pense que c'est un engagement précis.
M. Lamontagne: ... ce n'est pas suffisant. M. Burns: Que
voulez-vous de plus?
M. Lamontagne: Je vais vous donner un exemple.
M. Burns: Voulez-vous ma chemise?
M. Lamontagne: Sans entrer dans les détails, prenez une
région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean et je prends à
témoin mon collègue, le député de Jonquière
tout est chambardé, complètement. Cela fait un an et un
mois qu'on a cela au-dessus de la tête, c'est le cinquième
rapport. Ce que la population de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean
veut savoir assez rapidement parce qu'il n'y a pas seulement la carte
électorale, cela joue dans d'autres planifications
régionales...
M. Burns: M. le député de Roberval, je pense que
j'ai été clair avec vous, avec le député de Laval
et avec le député de Nicolet-Yamaska. Nous allons proposer une
législation à l'Assemblée nationale qui va faire
qu'à un moment donné une nouvelle commission, complètement
nouvelle, une commission de révision des districts électoraux va
reprendre le travail. Peut-être qu'elle va trouver que le travail de la
commission Drouin est parfait, mais je vous dis qu'à partir du moment
où nous décidons de nous départir de cela on ne peut pas
tenir pour acquis que cette nouvelle commission va accepter verbatim ce qui est
dans le rapport de la commission Drouin que vous avez devant les yeux. Alors,
la logique pure et simple là-dessus, c'est de dire à la nouvelle
commission: Voici les pouvoirs que nous vous donnons. On va
peut-être que je devance un peu le projet de loi en vous disant cela
dans le projet de loi suggérer des critères, de sorte
qu'à un moment donné ce ne soit pas juste 32 000 qui soit
considéré. Vous vous souvenez qu'alors que j'étais dans
l'Opposition j'avais formulé ces critiques de façon assez
régulière; je trouvais que c'était un peu malheureux que
la Commission de révision des districts électoraux fasse purement
et simplement une opération mathématique, qu'elle ne tienne pas
compte, par exemple, des entités naturelles. On a trouvé des
villages qui étaient divisés en deux dans certains comtés.
Cela n'a pas de bon sens, cela n'a aucun sens.
Ces critères, on pense qu'il serait utile de les mettre dans le
projet de loi. Par la suite, une fois les critères établis par
l'Assemblée nationale, après discussion avec les membres tant du
côté ministériel que du côté de l'Opposition,
un certain nombre de critères seront mis dans la loi et on dira:
Maintenant, vous avez à préparer une carte, vous avez, avant de
l'adopter de façon définitive et de prendre votre décision
en dernier ressort, à consulter les parlementaires et la population. Je
pense, par exemple, à un comté qui est actuellement dans
l'actualité, le comté d'Argenteuil que je connais assez bien
où il y a une élection, pour les gens qui ne le sauraient pas
actuellement.
M. Lavoie: Où M. Ryan sera élu, très
prochainement.
M. Burns: Où M. Ryan sera défait. D'ailleurs, il
est bien nerveux de ce temps-ci, le pauvre Ryan.
M. Lavoie: Ce ne doit pas être vous qui l'énervez.
Ce n'est pas vous qui l'énervez.
M. Burns: II ne s'embellit pas de jour en jour, de ce
temps-ci.
M. Fontaine: II va l'être encore plus la semaine
prochaine.
M. Burns: Peu importe, M. le Président.
M. Lavoie: Ce n'est pas un concours de beauté, cette
affaire-là. Si c'était un concours de beauté, cette
affaire-là...
M. Burns: A part cet aparté tout à fait partisan
d'ailleurs, je suis content parce qu'à part cet aparté on
a tenu le débat à un niveau vraiment non partisan je pense
qu'éventuellement, dans des comtés comme ceux-là, les
gens... Par exemple, pour citer le cas d'Argenteuil, vous avez à peu
près toutes les commissions scolaires et toutes les municipalités
et tout ce qu'il y a de groupes, je dirais, importants au point de vue social
qui m'ont fait faire un certain nombre de représentations quant aux
délimitations du comté. Je leur réponds actuellement que
ce n'est pas à moi que reviendra de prendre la décision. Dans
l'objectif éventuel d'une certaine commission qui aurait la
décision finale, ces groupes, ces commissions scolaires, ces
municipalités pourraient faire leurs représentations directement
à la commission, qui en tiendra compte ou n'en tiendra pas compte, selon
l'effet que cela donnera par rapport à eux.
M. Lavoie: Est-ce qu'on pourrait vous demander...
M. Burns: Oui.
M. Lavoie:... quand prévoyez-vous déposer ce projet
de loi formant ou instituant cette nouvelle commission? Il y a quand même
une urgence.
M. Burns: II va être déposé au printemps.
Pour ne pas me geler dans le ciment au point de vue date, je vous dis qu'il va
être déposé ce printemps-ci et il pourra être
adopté selon, évidemment, les projets que le leader du
gouvernement peut avoir. Ayant occupé ce poste, je sais fort bien que ce
n'est pas toujours facile pour lui de me promettre l'adoption du projet de loi
pour telle ou telle date. Il a peut-être d'autres plans. Mais si jamais
ce projet de loi recevait un certain consensus de la part des membres de
l'Assemblée nationale, je pense qu'il pourrait être adopté
avant le mois de juin selon, évidemment, les disponibilités que
le leader du gouvernement peut prévoir relativement à ce projet
de loi. Sinon, je n'ai aucune espèce d'objection, je vous le dis tout le
suite, à le laisser suspendu dans le décor jusqu'à
l'automne et le faire adopter dans le cours de l'automne.
M. Lavoie: M. le Président...
M. Burns: Effectivement, il faudra qu'il soit adopté au
plus tard à l'automne.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Roberval.
M. Lamontagne: M. le Président, dans le cadre de ce projet
de loi à être déposé et à la suite de
nombreuses études qui ont été faites à ce sujet,
comme je l'ai signalé, le 6 décembre dernier, est-ce l'intention
du gouvernement, dans ce projet de loi, d'indiquer à cette
éventuelle commission le nombre de députés qui devront
former l'Assemblée nationale? Tous les rapports qui ont
été faits ont toujours indiqué qu'il fallait d'abord que
le nombre total de députés par rapport à la population
d'une province soit indiqué. Vous m'aviez dit, le 6 décembre, que
cela avait pas mal de bon sens.
M. Burns: Cela a bien du bon sens, c'est bien sûr.
Le Président: M. le ministre.
M. Burns: Est-ce que le député serait choqué
si je lui disais que je ne peux pas répondre immédiatement
à cette question pour une raison bien simple, c'est qu'il y a encore des
étapes qui doivent être franchies.
M. Lamontagne: Sérieusement.
M. Burns: Très sérieusement, je songe à
cette proposition qui m'a été faite par le député
de Roberval. Pour ceux d'entre vous qui êtes familiers avec la
façon dont on présente un projet de loi devant l'Assemblée
nationale, évidemment, il y a un premier mémoire qui vient du
ministre; ce qui est fait. Deuxièmement, il y a une décision qui
est prise par le Conseil des ministres. Il y a aussi le comité de
législation qui, par la suite, examine la cohérence juridique du
projet de loi et qui examine la cohérence du projet de loi par rapport
à la décision du Conseil des ministres. On n'est pas rendu
à ce stade; cette troisième étape n'est pas faite. Avant
de m'engager là-dessus, je demanderais la collaboration du
député de Roberval.
M. Lamontagne: D'accord.
M. Burns: En acceptant que je ne peux pas y répondre
immédiatement.
M. Lavoie: Vous comprendrez, notre position, nous, de
l'Opposition officielle, du Parti libéral, c'est que l'implication de
cela est importante. On ne voudrait pas que soit laissé à la
commission le choix de dire: maintenant, ce n'est plus 110, c'est 125 ou 130.
Je crois que vous devrez prendre cela en considération, dans la
rédaction de votre projet de loi.
M. Burns: C'est enregistré, M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Pouvez-vous nous assurer ou pou-vez-vous nous donner
une indication si le nombre de députés que vous pourrez
prévoir dans ce projet de loi se tiendra le plus près possible du
nombre actuel, qui est alentour de 110, et qu'on
ne s'en aille pas avec un Parlement de 125 ou de 130
députés?
M. Lamontagne: Le Président va avoir des
problèmes.
M. Lavoie: On a fait un débat sur cela. On a dit, je
pense, que rendu à 110 députés, à un ou deux de
plus, comme le rapport était fait, c'était amplement suffisant.
Notre position, je pense qu'on peut la donner ici, c'est l'endroit, c'est que
des députés, dans le milieu urbain, prévus actuellement
par la loi, cela peut aller à 40 000 âmes, 40 000 électeurs
pour un comté urbain. (12 heures)
Notre opinion, c'est qu'un député urbain a des moyens
personnels d'appoint, des facilités par l'Assemblée nationale. Je
pense qu'un député de milieu urbain peut facilement
représenter 45 000 et même jusqu'à près de 50 000
électeurs. Dans les comtés ruraux, du fait qu'il y a plusieurs
municipalités, plusieurs commissions scolaires et de grandes distances,
on pourrait garder peut-être la moyenne actuelle de 24 000 ou de 26 000.
Notre position a été déterminée, parce qu'il faut
considérer qu'un député coûte très cher
à l'Etat, un salaire de $30 000, plus $7000 non taxables, mais...
M. Burns: Tous les services.
M. Lavoie: Avec tous les services, c'est au moins $100 000 pour
un député, avec le personnel d'appoint et tout. Je pense qu'on en
a assez de 110.
M. Burns: Est-ce que vous seriez étonné de savoir
qu'un sénateur américain coûte $750 000 par
année?
M. Lavoie: Cela est aux Etats-Unis.
M. Burns: Je veux dire, il faut regarder aussi les
proportions.
M. Lavoie: Le budget des Etats-Unis est 100 fois le
nôtre.
M. Burns: Là-dessus, M. le député de Laval,
je vais vous dire purement et simplement ceci: Je suis d'accord sur la position
qui a toujours été maintenue dans le passé par la
Commission de révision des districts électoraux, utilisant les 32
000 comme barème avec une possibilité de diminuer de 25%, donc 24
000, ou d'augmenter de 25%, donc 40 000. J'ai toujours été
d'accord sur le fait que, dans un milieu urbain, c'est mieux de rester proche
des 40 000 et, dans un milieu rural, de rester proche des 24 000. C'est pour
une raison bien simple; un comté urbain, par exemple, à
Montréal ou à Québec se divise en quelques rues et il se
traverse en automobile en dix minutes; des comtés ruraux comme
Abitibi-Ouest ou Abitibi-Est ou Argenteuil ou Pontiac-Témiscamingue,
Laurentides-Labelle, Duplessis, ce sont des comtés qui peuvent prendre
une couple de jours à traverser. Je suis d'accord sur ce principe.
Maintenant, il y a deux positions possibles, je vous les signale; il y
en a une qui a été relevée tout à l'heure par le
député de Roberval. Ou bien on garde ce barème ou cette
norme de 32 000 plus ou moins 25%, ou bien encore, selon l'évolution de
la population du Québec, on rend ce barème mobile. Là, il
faut évaluer les conséquences de ce que cela peut comporter pour
les comtés ruraux surtout. Je partage entièrement l'avis du
député de Laval. Le comté de Maisonneuve, vous pourriez
mettre 50 000 électeurs et cela ne me dérangerait pas du tout. Ce
ne serait pas un comté plus difficile à représenter. Je
pense que, pour tous les comtés urbains, c'est un peu la même
réaction.
D'autre part, il ne faut jamais perdre de vue le but de la Loi
électorale actuelle et des modifications qui ont été
apportées dans les années qui ont précédé,
sous les gouvernements précédents, pour garder autant que
possible l'idée d'une personne un vote. C'est cela, à part
l'exception qui m'était mentionnée tout à l'heure,
c'est-à-dire les Iles-de-la-Madeleine. Effectivement, on a
considéré que les Iles-de-la-Madeleine, même avec 7000
électeurs, c'était un cas d'exception; il ne peut pas être
inclus dans un autre comté. A part cette exception, on essaie de viser
le fait c'est pour cela la norme de 32 000, plus ou moins 25% que
vous n'ayez pas un comté comme celui de Taillon, par exemple, qui a tout
près de 70 000 électeurs, et des comtés...
M. Lavoie: De 23 000 ou 24 000.
M. Burns: De 23 000 ou 24 000. Alors le but c'est de permettre
que le citoyen du comté de Laval ait un vote qui ait à peu
près autant de valeur que le citoyen du comté de Bellechasse, par
exemple.
M. Lavoie: Pour terminer cette question, je vous demande de
prendre en bonne considération la suggestion qui avait été
faite par le député de Roberval, au nom du Parti libéral.
Je pense que ce serait une formule très simple, qu'on peut expliquer en
peu de mots. Qu'on dise qu'il y a 110 comtés au Québec, qu'on
divise les 4 millions d'électeurs, cela fait un chiffre de base qui est
à peu près de 36 000 je pense qu'on en a
déjà discuté donnant à la commission un jeu
de peut-être 30% au lieu de 25%. De cette manière, cela
chambarderait très peu de comtés au Québec. On resterait
avec 110 comtés et il y aurait une représentation
équitable pour les milieux urbains et les milieux ruraux, avec une
disproportion qui ne serait exagérée d'aucune façon. Ce
serait très simple. Présentez-nous ce projet de loi le plus vite
possible, on va vous donner les pouvoirs. Donnez cela à la commission.
On voudrait que cela se fasse le plus rapidement possible, et si possible cette
année. Je vais vous dire pourquoi. Non seulement y a-t-il des
implications dans la région du Saguenay-Lac Saint-Jean, mais dans Laval,
il y a des implications. Il y a trois comtés actuellement, à
l'île Jésus, pour la ville de Laval. Dans le rapport d'il y a deux
ans on proposait, je crois, quatre comtés; dans le nouveau rapport, on
propose cinq
comtés. Je crois que cinq comtés, c'est
exagéré. On pourrait avoir quatre comtés dans la ville de
Laval et je pense qu'on serait très bien représenté,
surtout dans le comté de Laval.
M. Burns: M. le député de Laval, dès que
vous me dites que vous pourriez avoir quatre comtés, cela veut dire
qu'on ne parle plus en termes de 110 comtés.
M. Lavoie: Un ou deux de plus, ai-je dit. Nos calculs donneraient
au maximum 111 ou 112.
M. Burns: C'est à l'étude actuellement, c'est ce
sur quoi tout à l'heure je vous demandais votre compréhension. Je
ne suis pas en mesure d'arriver à vous dire complètement ce que
le projet de loi les grandes lignes, je vous les ai données, je
pense va contenir; je pense que ce serait un peu prématuré
de ma part de vous le dire actuellement.
M. Lamontagne: M. le Président...
M. Lavoie: Cela va bien, M. le Président.
Le Président: Oui, cela va bien, mais il y a le
député de Châteauguay qui a demandé la parole.
M. Burns: Je veux tout simplement terminer sur une chose.
Après cela, je demanderais peut-être au député de
Châteauguay ou aux autres députés ministériels qui
veulent intervenir de se sentir libres de le faire. Je m'excuse, M. le
député, si cela ne vous dérange pas, je vais juste
terminer sur un point qui a été soulevé également
par le député de Nicolet-Yamaska concernant la carte
d'identité.
M. Lamontagne: M. le Président, juste sur la carte
électorale... nous voudrions terminer en deux secondes sur la carte
électorale.
M. Burns: Oui.
M. Lamontagne: Dans mon rapport du 6 décembre et
aujourd'hui on recommande au gouvernement d'être raisonnable dans le
rapport, la proportion entre la population et le nombre de
députés. On l'invite, une fois de plus, à comparer le
système électoral, pour les districts électoraux, avec
celui de l'Ontario, compte tenu cependant des coutumes que nous avons au
Québec là-dessus. On ne demande pas d'enlever 14
députés. Si on se compare à l'Ontario, nous avons
déjà 12 députés de plus que dans un système
en vigueur en Ontario. Compte tenu de cela, on dit: Soyons raisonnables,
proposons 110 moins 2 plus 2.
M. Burns: Ce n'est pas aussi simple que cela, ce n'est pas une
règle de trois, cette histoire-là. On peut facilement dire que
tel pays, qui a six millions d'habitants, a tant de députés;
donc, qu'il ne faudrait pas dépasser cette norme. Ce qu'il y a d'im-
portant, c'est la densité de la population par rapport au territoire.
C'est la clé, dans le fond, de la carte électorale. Je disais,
tout à l'heure, en parlant de comtés comme Laurentides-Labelle,
Argenteuil, Abitibi-Ouest ou Duplessis, ou même Laviolette, que ce sont
des comtés immenses au point de vue du territoire et qu'il faut penser
au député qui va avoir éventuellement à couvrir ce
territoire. Il faut penser qu'autant les gens du nord de son comté que
du sud, de l'ouest que de l'est doivent pouvoir bénéficier de ses
services si ces citoyens veulent avoir recours à leur
député. Il faut aussi tenir compte du fait essentiel qu'autant
que possible un vote rural ne devrait pas être plus pesant ou pas
trop plus pesant, si vous me passez l'expression qu'un vote urbain.
M. Lamontagne: Au moins aussi pesant qu'un vote urbain.
M. Burns: C'est là la difficulté de bâtir une
carte électorale qui soit juste, qui réponde aux besoins de la
population et qui réponde aussi aux possibilités physiques qu'un
député peut mettre dans sa circonscription. Si vous demandez
à un député d'être constamment en automobile, de
faire 200 milles par jour, 400 milles aller-retour, à ce
moment-là, il ne rendra pas service au monde et une bonne journée
on va le retrouver accroché dans un poteau de
téléphone.
M. Fontaine: II serait chauffeur de taxi.
Le Président: M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Merci, M. le Président.
M. Burns: Si vous me le permettez, M. le député de
Châteauguay...
M. Dussault: Sûrement, M. le ministre.
M. Burns: ... je voudrais terminer sur cela. Après, je
n'interviendrai pas, je vais plutôt écouter les autres
interventions. Je voudrais simplement, parce que le député de
Nicolet-Yamaska a soulevé la question, revenir sur la carte
d'identité de l'électeur. L'article qu'il a cité de
Normand Girard est absolument exact. C'est une entrevue que j'ai donnée
à M. Girard à sa demande et je n'ai strictement rien à
changer à ce qu'il a dit, ce sont mes propos et c'est parfaitement
exact.
Je dois dire, cependant, ceci que peut-être M. Girard n'a
pas dit, mais ce n'était peut-être pas son rôle de le dire,
non plus qu'effectivement c'est moi qui ai demandé au Conseil des
ministres de mettre de côté, pour le moment, l'idée d'une
carte d'identité, même si cela se trouve dans le programme du
Parti québécois, comme vous l'avez cité tout à
l'heure. La raison en est bien simple et M. Girard là-dessus est
tout à fait fidèle aux propos que j'ai tenus c'est qu'il
est absolument impossible, actuellement, en toute sécurité
d'utiliser une carte d'identification qui soit autre qu'une carte
d'identification pour fins électorales
avec l'assurance que cette carte serait à l'épreuve de
toute manipulation volontaire ou involontaire.
Je vous cite le cas de la carte la plus
généralisée, actuellement, au Québec, la
carte-soleil, la carte d'assurance-maladie. Cette carte est entre les mains, en
principe, de toute la population adulte du Québec, moins à peu
près 1%. Il y a à peu près 1% de la population adulte qui
n'a pas cette carte. Donc, si on recherche la carte la plus
généralisée, c'est celle-là. Mais, comme le
directeur général des élections, qui, lui, a à
administrer les élections, n'a aucun contrôle sur
l'émission de cette carte, à ce moment, on s'est dit: Cela pose
un problème. Ce n'est peut-être pas la carte la plus
sécuritaire. Ce n'est pas parce qu'elle n'est pas bonne, mais pour fins
d'élections elle n'est peut-être pas sécuritaire.
Alors, il restait l'autre position, l'autre position étant de
faire une carte spécifique, avec photo, ou encore une carte
spécifique, sans photo, ou peu importe. Plutôt que de prendre une
décision hâtive là-dessus et c'est là que je
rejoins ce que vous disiez, tout à l'heure nous avons
donné mandat au directeur général des élections
d'essayer de nous faire des suggestions là-dessus. C'est lui qui,
actuellement, est en train de bâtir le registre; c'est lui qui va savoir
comment il va retrouver les électeurs au Québec; c'est lui qui va
voir les failles du système actuel et c'est lui qui,
éventuellement, sera peut-être le plus créateur quant
à des suggestions qui peuvent nous être faites. La carte
d'identité pour fins d'élections n'est pas mise de
côté; c'est temporairement écarté le fait d'utiliser
la carte-soleil, maison dit au directeur général des
élections: Si vous avez des suggestions à nous faire,
faites-nous-en. Vous êtes l'expert dans le domaine; allez-y et nous vous
écouterons à ce moment, plutôt que, nous, d'arriver de but
en blanc avec une solution qui peut-être ne tiendrait pas compte de
certaines réalités.
M. Fontaine: Est-ce que vous avez l'intention de la mettre en
application pour la prochaine élection?
M. Bums: Je le souhaiterais, personnellement. Si on a une
solution valable je souhaiterais que, pour les prochaines élections, on
ait une carte d'identification pour fins électorales seulement.
M. Lavoie: M. le Président, j'aimerais dire un mot
là-dessus. Je dis au député de Maisonneuve j'ai
déjà entendu de ses propos alors qu'il siégeait dans
l'Opposition qu'il faut faire bien attention avant d'établir ce
genre de carte d'identité. Cela est très délicat et,
même si on le fait uniquement pour des fins électorales on met le
pied dans l'étrier ou on met le pied dans la porte. Il y aura certains
gouvernements je ne dis pas le vôtre, certainement pas le
nôtre qui abuseront de ces papiers d'identité. Je ne
voudrais pas qu'on tombe dans certains abus qui existent dans certains pays
européens où, à tout bout de champ, les contribuables, les
citoyens peuvent se faire dire: Vos papiers, monsieur. Identifiez-vous. Je
pense qu'on a un régime de liberté en Amérique du Nord,
dont on n'a pas abusé et je crois qu'il ne faudrait pas... Le danger de
la carte d'électeur, j'ai peur que cela ouvre la porte à d'autres
abus pour des contrôles de citoyens, et des contrôles indus de
citoyens.
D'ailleurs, une autre chose. A cause de l'évolution des moeurs
électorales, au Québec, je dirais depuis 1960 et je
n'attaque pas mon voisin, le député de Nicolet-Yamaska, s'il y a
eu un parti, peut-être, à cette époque, avant 1960, qui a
fait des abus sur cela je dis qu'aujourd'hui, les partis étant
mieux structurés, avec plus de participation populaire, cela
amène une surveillance des accrocs qui peuvent se commettre lors des
élections. Personnellement, j'ai vécu cette période. J'ai
été candidat en 1956 et j'en ai vu de toutes les couleurs, des
moeurs électorales de ce temps-là, surtout dans les comtés
de 135 000 ou de 150 000 électeurs. Je vous garantis qu'il s'en passait
des belles. (12 h 15)
M. Fontaine: Est-ce que cela vous a profité?
M. Lavoie: Aujourd'hui, les comtés sont devenus à
une échelle, à une grandeur humaine acceptable. Les partis
politiques sont bien structurés, bien équipés. Il y a une
participation et un contrôle populaires. Les moeurs ont
évolué et je dis que la population du Québec est
honnête au point de vue électoral et s'il y a des accrocs
d'ailleurs, j'ai fait enquête moi-même auprès du directeur
général des élections c'est très rare.
Anciennement, on faisait voter les locataires de cimetières; je pense
que ces moeurs-là sont finies.
Pour revenir à ce contrôle, à la carte
d'électeur, il faudrait y aller très prudemment. Je ne connais
pas directement le système fédéral, mais il y a eu une
modification à la loi fédérale, je crois, qui permet, lors
de l'élection, au scrutateur ou au représentant du bureau de
scrutin, sans avoir cette carte obligatoire, de demander maintenant une
identification au votant qui est à Ottawa, à savoir la carte
d'assurance sociale. On pourrait peut-être aller dans ce sens-là.
Je vous garantis je vous donne mon opinion personnelle qu'avant
que vous n'imposiez une carte d'électeur, je vais regimber joliment sur
cet abus d'identité et de contrôle d'identité. Dans notre
lancée, dans notre foulée d'amélioration des moeurs
électorales je vous dis que des accrocs, des corruptions
électorales, il y en a très peu. Je dis que les élections
sont honnêtes. Vous avez été élus honnêtement
comme le Parti libéral, l'équipe libérale avait
été élue honnêtement en 1973 et en 1970. D'ailleurs,
pendant que vous étiez dans l'Opposition, vous n'avez jamais
contesté la légalité de l'élection de
l'équipe libérale en 1970 et en 1973. On ne vous a pas
portés sur les fameux télégraphes. C'est parti depuis un
certain temps de notre décor électoral, de notre scénario
électoral.
M. Burns: Je peux peut-être dire...
M. Lavoie: Pour terminer, je vous dis que je m'opposerai
je parle pour le moment person-
nellement à une carte d'électeur, mais qu'on donne
le pouvoir au scrutateur, au greffier ou au représentant, dans les
bureaux de scrutin, d'exiger une identification qui peut être la carte
soleil ou une autre, mais je serais contre l'institution d'une autre carte
d'identité.
M. Burns: Je peux dire, M. le Président, que je partage
les mêmes inquiétudes que le député de Laval.
D'ailleurs, c'est pour cela qu'on s'est dit: II ne faut pas se lancer à
corps perdu dans l'institution d'une carte d'identité sans savoir
quelles conséquences cela peut avoir. Il est absolument certain
et on peut tout de suite le dire d'une façon assez claire qu'en
milieu rural parce que la carte d'identité, au fond, c'est pour
éviter la supposition de personnes ce qu'on appelle
communément, en terme électoral, le télégraphe,
cela ne se passe à peu près pas. Cela peut peut-être se
passer dans des cas vraiment extraordinaires, mais les gens se connaissent
tellement, en milieu rural, qu'il y a peu de chances qu'il y ait de supposition
de personnes.
C'est dans le milieu urbain que cela peut encore se passer.
Actuellement, je pense qu'avec la vigilance des partis politiques, il y a moyen
de l'éviter, si vous avez un parti politique bien structuré. En
milieu urbain, vous avez habituellement des gens qui ont fait du pointage
avant, des gens qui ont rencontré les électeurs de leur district
et qui, souvent, le jour de l'élection, vont se retrouver au bureau de
vote. Ils savent fort bien que le Jean-Noël Lavoie qui se présente
n'est pas Jean-Noël Lavoie, parce qu'ils ont vu Jean-Noël Lavoie et
ils savent qui c'est. A ce moment-là, c'est la vigilance des partis qui
s'occupe de cela. Dans ce sens-là, je partage entièrement l'avis
du député de Laval. J'ai nettement l'impression que la
supposition de personnes ou le vol d'élections par
télégraphes, si on peut l'appeler comme tel, est vraiment
réduit à sa plus simple expression, si cela existe encore. Je
pense bien qu'il en existe. Il ne faut pas rêver en couleur. Il y a
encore des gens qui passent des télégraphes, mais ce n'est pas ce
que cela a déjà été dans l'histoire politique du
Québec, dans l'histoire électorale du Québec.
Dans ce sens, cela nous permet d'attendre que le directeur
général des élections nous arrive avec une solution qui,
en même temps, respecte le droit à l'individualité de
chaque personne, le droit à la vie privée des individus qui n'ont
pas constamment à présenter une carte d'identité pour
n'importe quoi et en même temps, pour voir à améliorer, si
on peut le faire, le système de l'identification des personnes au moment
d'une élection.
En ce qui me concerne, M. le Président, c'étaient les
grandes remarques que j'avais à faire. Maintenant, je suis toujours
prêt à répondre à des questions, si jamais il y en a
d'autres. Dans l'ensemble, j'ai passé à travers de tout ce que
j'avais à vous faire comme remarques. Je pense bien que d'autres
collègues aimeraient peut-être intervenir à ce
moment-ci.
Le Président (M. Richard): En effet, M. le ministre, M. le
député de Châteauguay a demandé la parole il y a
déjà un bon moment. M. le député de
Châteauguay.
Discussion générale
M. Dussault: M. le Président, comme membre du
comité Dussault auquel j'ai donné humblement nom nom, j'ai pris
l'habitude de travailler dans l'ombre; si le temps avait continuer de
s'écouler comme il a commencé à le faire, j'aurais
probablement continué à travailler dans l'ombre.
Le Président (M. Richard): Aujourd'hui, vous travaillez
sous les réflecteurs.
M. Dussault: C'est cela, et je m'en réjouis. Avant
d'aborder la question du comité Dussault comme tel sur lequel on
s'attend peut-être que j'aie quelque chose à dire à propos
des résultats que cela a donné, je voudrais revenir sur la carte
d'électeur. J'étais un de ceux qui ont dit à M. le
ministre que la carte d'électeur, telle qu'on l'avait retenue,
apparaissait être quelque chose qui n'était pas la garantie de
l'honnêteté, de la légitimité de l'élection
qu'on souhaitait. Je pense que la carte d'électeur avec photo nous
donnerait cette garantie. Justement, comme jusqu'à maintenant nos
études ne nous permettent pas d'avoir cette assurance, je dois dire que
je me réjouis de la décision que M. le ministre a prise et que le
Conseil des ministres a prise dans ce sens.
Pour revenir au comité Dussault, tout à l'heure, le
ministre parlait de cette expérience d'un comité de
députés comme étant une expérience de
réforme parlementaire vécue, et je voudrais en témoigner
aujourd'hui parce que c'est effectivement ce que nous avons vécu. Nous
l'avons vécu avant la lettre, à toutes fins utiles, parce que
cette matière qui est la démocratie pour les questions
électorales permet effectivement de faire un travail neutre, un travail
au-dessus des partis. Quand l'idée a été avancée
d'élargir le comité Dussault aux membres de l'Opposition, les
membres du comité se sont réjouis puisqu'il nous paraissait aller
de soi que, pour une question comme celle-là, on élargisse la
discussion et la réflexion jusqu'aux membres de l'Opposition.
La détermination que démontre le député de
Nicolet-Yamaska à voir se réaliser ces conclusions d'abord
tirées par le comité Dussault et, ensuite, par le comité
élargi, cette détermination me réjouit
énormément puisque cela prouve qu'il y tient et que nous aurons,
lors du travail qui sera effectué en commission parlementaire, un appui
sérieux. Je pense qu'il faut le faire remarquer parce que le travail qui
a été fait avec l'Opposition est extrêmement
sérieux. Evidemment, nous n'avons pas eu le plaisir d'avoir avec nous M.
le député de Laval ni M. le député de Roberval
puisqu'ils étaient représentés, à ce comité
élargi, par d'autres de leurs collègues, qui ont aussi fait du
travail sérieux.
Nous n'avons pas eu l'occasion de savoir, de leur part, jusqu'à
quel point nous aurons le plaisir de les voir travailler en pleine harmonie
avec nous à cette réforme à laquelle ils ont donné
leur accord lors des travaux de ce comité, mais je suis convaincu que
l'occasion ne manquera pas et que nous pourrons constater leur appui.
Sur le mode de scrutin, je voudrais seulement ajouter un point
très court. Je pense que je dois dire, une fois de plus, que je me
réjouis de la décision du Conseil des ministres de soumettre
cette question à la population par un livre vert. Après avoir
pris connaissance, un peu, du contenu de cette réflexion qu'on veut
soumettre à la population, je dois dire que ç'aurait
été probablement fort malhabile de la part d'un gouvernement
d'arriver avec des conclusions toutes tirées d'avance devant
l'Assemblée nationale et devant la population avec une question comme
celle-là qui est complexe, qui demande vraiment de la regarder de
très près puisque, au fond, le mode de scrutin est un peu la
colonne vertébrale de la démocratie, dans toute
société d'ailleurs.
Quand on parle de la proportionnelle, de distorsion par rapport aux
résultats obtenus et le pourcentage obtenu des voix et le nombre de
députés à l'Assemblée nationale, il faut regarder
de très près ce que tout cela veut dire et vraiment permettre
à la population de se pencher sur cette question tout le temps qu'il
faut. Je pense qu'il ne faut pas bousculer la population dans un tel champ. Je
le répète, je me réjouis que le ministre et le Conseil des
ministres aient décidé de soumettre cette question à la
population sous la forme d'un livre vert.
C'est ce que je voulais dire. Comme député ayant
participé très activement aux travaux du comité Dussault,
je voulais vous faire part de quelques réflexions. Je pourrais revenir
évidemment sur tout ce qui s'est dit aujourd'hui sur ces travaux parce
que j'ai vécu de ces questions au cours des derniers mois. Cela fait
au-delà d'un an que nous nous penchons sur les questions
électorales et sur la réforme.
Je vous assure que lors des travaux de la commission parlementaire qui
va sûrement avoir lieu sur la réforme électorale, je serai
un des membres actifs de cette commission parce que cela m'intéresse au
plus haut point. A mesure que nous avancions dans nos travaux, je me sentais de
plus en plus impliqué et ce n'est qu'un au revoir. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Laval.
M. Lavoie: Le travail du comité présidé par
le député de Châteauguay, nous l'avons suivi le
député de Roberval et moi avec une certaine distance.
D'ailleurs, vous nous aviez demandé de déléguer des
députés du caucus libéral et vous avez eu la participation
positive, je pense, du député de Montmagny-L'Islet et du
député de Laurier, un du milieu rural et un du milieu urbain. Je
pense que c'est une étude en profondeur qui était
nécessaire. Je ne pense pas que c'est vraiment une refonte en
profondeur, sauf pour ce qui est du registre des électeurs. C'est
plutôt un rajeunissement de la loi, qui est une brique, dans le
processus, le mode de scrutin, le scrutateur, les greffiers, les
représentants, la confection de la liste électorale, qui est le
registre. Il y a eu d'ailleurs certaines réformes qui ont
été faites il n'y a pas tellement longtemps. On se rappelle qu'il
y a une quinzaine d'années la campagne électorale durait deux
mois. Or, depuis les réformes qui ont été apportées
il y a sept, huit ou dix ans, la campagne électorale a été
raccourcie à peu près à un mois.
C'est sûr vous pouvez y compter que nous allons
apporter notre contribution sur cela. Quant au mode de scrutin, j'ai bien
l'impression que la fameuse proportionnelle... Cela cause d'énormes
difficultés d'avoir des disproportions comme nous en vivons une
actuellement avec le gouvernement actuel et comme celle dont l'ancien
gouvernement libéral avait profité possiblement dans les
années 1970 et 1973. Il faut reconnaître que le gouvernement
actuel, tout en ayant été élu avec une certaine
légitimité, n'a que 40% ou 41% du vote populaire. Si on fait la
proportion mathématique, la règle de trois, sur 110
députés, vous auriez droit uniquement à 45
députés alors que vous en avez 71 ou 72. Quel est le
correctif...
M. Burns: 73 après les partielles.
M. Lavoie: J'ai de petites nouvelles pour vous. Déclenchez
Prévost, Beauce-Sud...
M. Burns: On va commencer par régler Argenteuil et
Jean-Talon et ce sera parfait.
M. Lavoie: C'est pratiquement réglé à ce
jour, pour ce qui concerne Argenteuil et Jean-Talon.
M. Burns: D'après moi aussi.
La Présidente (Mme Cuerrier): S'il vous plaît!
M. Lavoie: Bon. Comment corriger ces disproportions injustes que
nous avons? Je pense bien que le ministre est au courant et le
député de Châteauguay aussi. Il n'y a pas de formule
magique. Ce n'est même pas la proportionnelle qui peut d'ailleurs,
on a tous les commentaires du professeur Meynauld régler cela. Il
y a d'autres possibilités. On va attendre le livre vert du gouvernement.
Le Parti libéral est à étudier, à considérer
cela, mais la proportionnelle, on sait qu'il peut y avoir 1000 sortes.
J'exagère peut-être, mais il peut facilement y avoir 100 sortes de
proportionnelles qui ne corrigent pas d'une manière mathématique
ces disproportions. Il y a d'autres inconvénients dans le système
proportionnel: des députés qui ne sont pas élus par la
population, qui sont choisis par l'establishment d'un parti ou quoi que ce
soit. Bon. Il n'y a pas de formule magique. Il y a d'autres formules
peut-être, je ne sais pas si vous allez le considérer dans votre
livre vert, l'uninominal à deux tours. Je ne sais pas si cela
corrige même ces disproportions. J'en cloute fort. Il n'y a pas de
formule magique. (12 h 30)
M. Burns: Pour répondre à votre question, on ne l'a
pas considérée. L'uninominal à deux tours est un
système qui a ses valeurs, il n'y a pas de doute, mais qui comporte
aussi un très grand désavantage, c'est la coalition du
deuxième tour. Souvent, un parti, par exemple, comme le vôtre qui
serait en train de gagner, après le premier tour, qui est majoritaire,
se voit face à une coalition de l'Opposition.
M. Lavoie: De l'Union Nationale et du Parti
québécois au deuxième tour.
M. Burns: J'ai pris votre parti parce que c'est le cas le moins
possible. Par exemple si je vous avais dit: Le Parti québécois
est en train de gagner parce qu'il a déjà, sur 110
députés, quelque chose comme 38 d'élus au premier tour, il
est possible qu'il y ait une coalition conclue au deuxième tour. Pour
répondre à votre question, on ne l'a pas mis.
M. Lavoie: Chaque système a des avantages et chaque
système a des désavantages et il n'y a pas de formule magique.
L'aile réaliste que vous avez mentionnée, qui est formée
du député de Lafontaine, M. Léger, du ministre des
Transports, M. Lessard, et de M. Tardif, je pense bien qu'elle a fait front
contre l'honorable député de Maisonneuve et qu'elle renvoie, j'en
ai bien l'impression, aux ca-lendres grecques pas mal la proportionnelle, et
que vous devrez déchirer une autre page de votre programme
électoral avant longtemps. C'est bien mon impression.
M. Burns: Je m'excuse. J'avais dit que j'avais terminé mes
interventions, mais ce n'est pas vrai. A un moment donné, il y a
quelqu'un qui a dit: C'est le temps que les réalistes se mettent
à mettre au pas les rêveurs.
M. Lavoie: Vous êtes le rêveur et les trois autres
sont réalistes?
M. Burns: Je tiens à vous dire que le comité
interministériel que je vous ai mentionné tout à l'heure,
formé de M. Guy Tardif, formé de M. Marcel Léger, de
Lucien Lessard et de moi-même, on n'a pas eu de désaccord à
l'intérieur de ce comité. Il n'y a pas est-ce assez clair?
de désaccord au Conseil des ministres. Je ne suis pas en
minorité sur cette réforme au Conseil des ministres. Bien au
contraire, il y a même des gens au Conseil des ministres qui m'ont
demandé si je n'étais pas un petit peu trop prudent, si je ne
devais pas aller un peu plus loin. Je tiens à le dire: Cette affaire est
claire. Si vous voulez vous promener dans le décor encore pendant je ne
sais pas combien de temps, vous le ferez, mais je vous dis carrément, et
vous devez prendre ma parole en Chambre, qu'il n'y a pas de désaccord au
Conseil des ministres sur cela.
M. Lavoie: M. le Président, je pense que notre commission
parlementaire va très bien. On fait un tour sur la démocratie au
Québec. Mais quand même, il y a un M. Paul Bennett du Soleil qui a
écrit, le 18 décembre: Léger voit des désavantages
aux députés de liste. On sait que M. Léger, c'est le grand
stratège péquiste dans les questions électorales. M.
Léger, on le cite et c'est entre guillemets: "Le principe qui guide ces
travaux, selon M. Léger, c'est qu'il ne faut pas bouleverser les
traditions. Il faut se coller à la réalité."
M. Burns: Depuis ce temps, M. Léger est devenu plus
réaliste.
M. Lavoie: II a évolué depuis ce temps.
M. Lamontagne: Un instant, M. le Président. De quel
comité faisait partie, M. Léger avant? Il faisait partie du
comité des réalistes.
M. Burns: Là, il est devenu plus réaliste
encore.
M. Lavoie: Ah! Lorsque le premier ministre dit: II serait
aléatoire que le mode de scrutin soit modifié avant les
prochaines élections, M. Burns, lui, se dit confiant qu'il en ira
autrement. On voit quand même un certain dualisme, une certaine
confrontation, encore une fois, entre le premier ministre, l'aile
réaliste, M. Burns; cela ne tourne pas rond dans le camp.
M. Burns: On est devenus tous plus réalistes depuis ce
temps. M. Léger et moi-même. D'accord?
M. Lavoie: Le premier ministre a-t-il évolué depuis
ce temps? Il est devenu quoi, plus ou moins réaliste, depuis cette
déclaration?
M. Burns: Le premier ministre n'a pas à changer sur cela.
Il n'y avait pas de problème, quant à lui.
M. Dussault: M. le Président, si vous le permettez...
Le Président (M. Richard): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: ... je voudrais reprendre une assertion qu'a faite
tout à l'heure M. le député de Laval, quand il a dit que
cela allait être une réforme de rajeunissement. Je pense que c'est
vraiment rapetisser la réforme que nous allons faire. Je pense qu'il
faut davantage parler d'une réforme en profondeur, qui est une
réforme au niveau des droits. Une loi qui s'appuyait davantage, dans le
passé, sur les droits des hommes politiques va devenir maintenant une
loi qui s'appuie sur les droits des électeurs. C'est fondamental dans
cette réforme.
M. Lavoie: ... de cette réforme en profondeur.
M. Dussault: Je le sais, M. le député de Laval, que
vous aimeriez qu'on aborde carrément la question de la loi, mais je
pense qu'on s'est entendu pour ne pas aller dans ce détail.
M. Lavoie: Je ne vous demande pas des choses secrètes.
Donnez-nous des exemples, dans votre rapport, où il y a une refonte en
profondeur, où on donne beaucoup plus de pouvoirs aux citoyens qu'on
enlève aux hommes politiques. Donnez-moi un exemple.
M. Dussault: Je vais vous donner un exemple, M. le
député de Laval.
M. Lavoie: Je sais qu'on va donner le droit de vote aux
détenus, je suis bien d'accord, mais ce n'est pas une réforme en
profondeur quand même.
M. Dussault: M. le député de Laval, vous savez
très bien que les détenus avaient le droit de vote, mais on ne
l'a jamais appliqué parce que, dans la pratique, on ne voyait vraiment
pas comment y arriver. Nous avons fait l'effort de clarifier cette question. Je
suis même un de ceux qui sont allés à la prison
d'Orsainville pour pouvoir évaluer, avec des détenus, comment ils
voyaient cette question et comment ils abordaient la question. Nous sommes
allés les consulter, ce que jamais personne n'avait fait auparavant,
parce que cela nous paraît fondamental que les détenus aient un
droit de vote réel et non pas un droit de vote déclaré
dans la loi, mais qui ne s'applique d'aucune façon, ce qu'on a connu
dans le passé. C'est un exemple qui va vous faire voir jusqu'à
quel point on tient vraiment à coeur que ce soit une réforme qui
s'appuie sur les droits des électeurs et non sur les droits des hommes
politiques.
Mais on pourrait vraiment regarder cette réforme au niveau de ses
principes. Toute la question de la simplification de la loi, c'était une
loi qui était vraiment...
M. Lavoie: ... On est d'accord, c'est ce que je vous ai dit tout
à l'heure.
M. Burns: Ce n'est pas un rajeunissement de la loi, c'est une
simplification de la loi.
M. Dussault: Une simplification, c'est plus qu'un rajeunissement,
M. le député de Laval.
M. Burns: Ce n'est plus une loi d'avocats là, ce n'est
plus une loi de députés, ce n'est plus une loi de politiciens,
qu'on veut présenter.
M. Lavoie: Connaissez-vous des lois qui ne sont pas des lois
d'avocats? Toutes les lois passent par le comité de législation,
voyons!
M. Burns: Oui, vous allez en connaître une, cela va
être celle-là.
C'est une loi qui est envisagée. Le comité
Dussault, depuis le début, et je pense que le
député de Nicolet-Yamaska va m'appuyer là-dessus,
même ceux qui y ont participé, du côté de
l'Opposition, ont manifesté constamment cela me fait de la peine
que le député de Laurier et le député de
Montmagny-L'Islet ne soient pas ici, parce qu'ils ont été parmi
les meilleurs avocats de cette affaire que ce ne soit pas une loi
difficile à comprendre, que ce ne soit pas une loi qui soit une brique
ça d'épais et que ce ne soit pas une loi qui soit faite
uniquement pour les avocats, même si le député...
M. Fontaine: Pourtant, on était appuyés par un
nombre considérable de fonctionnaires qui étaient presque tous
des avocats.
M. Burns: Parmi les fonctionnaires qui étaient à
cette commission, il y avait un seul avocat. D'accord. Il y en avait un seul,
c'est Me Carignan qui est là.
M. Fontaine: II y en avait un autre.
M. Burns: Parmi tous les autres, il n'y a aucun avocat, il y a un
politicologue.
M. Dussault: Ce n'est pas parce qu'on a toujours eu des lois
d'avocats qu'il va falloir en avoir encore. On peut se permettre d'en faire de
temps en temps, des lois qui ne sont pas des lois d'avocats. On peut au moins
faire l'effort et c'est ce qu'on a tenté de faire. Quand on dit:
simplifier la loi, on voudrait qu'elle soit accessible aux citoyens
ordinaires.
M. Lavoie: II n'y a rien de péjoratif à dire une
loi d'avocats. Je ne prêche pas pour les avocats, je suis notaire,
personnellement. De toute façon, vous savez bien que les lois doivent
être rédigées avec des virgules, des points et virgules,
des paragraphes, des alinéas. Il faut que ce soit très clair au
point de vue légal. Parce qu'on ne pourrait plus contester des
élections, quant à cela, si c'était
interprété. Les lois originent du milieu juridique, du
légalisme. Toutes les lois sont comme cela dans la lettre; l'esprit peut
être différent. Il peut y avoir plus d'humanisme, dans une loi.
C'est ce que vous voulez dire.
M. Dussault: Entre autres.
M. Lavoie: J'aurais un dernier point, M. le Président.
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle.
M. Lavoie: C'est sur une déclaration...
M. Burns: On n'est pas obligé de se rendre jusqu'à
13 heures.
M. Lavoie: Non, j'aurais un dernier point. Est-ce que cela
chauffe trop le ministre?
M. Burns: Non, mais j'ai d'autre chose à faire.
M. Lavoie: C'est quand même important, je pense. C'est la
base de la démocratie qu'on discute actuellement.
M. Burns: C'est bien important, je suis d'accord. Je vous ai
remercié, d'ailleurs, d'avoir posé votre question. Je ne suis pas
en désaccord avec cela, mais je vous dis que si on peut finir avant une
heure, je n'aurais rien contre cela non plus.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre se rappelle, lorsque nous avons
adopté la loi 2 sur le financement des partis politiques, pour laquelle
le Parti libéral a donné son accord, nous avons voté pour,
en deuxième lecture et en troisième lecture, nous avons
tenté d'apporter des améliorations au projet de loi; vous vous
rappelez qu'il y avait eu un débat que, personnellement, j'avais
entrepris sur la structurite, si on peut dire, ou sur l'organisation de cette
institution lorsque vous avez créé le poste de directeur
général du financement des partis politiques?
Le ministre se rappellera qu'il nous avait mis au courant de ses grands
projets alors qu'il voyait trois boîtes ou trois structures
reliées ou interreliées qui étaient le directeur
général des élections, Me Côté, qui est
responsable, qui est nommé par les deux tiers de la Chambre, qui
supervise, qui dirige, qui surveille, qui fait appliquer la Loi
électorale lors des élections.
Vous avez créé, lors de la loi 2, un autre organisme
dirigé par Me Olivier Boucher, directeur général du
financement des partis politiques. J'apprends, dans une déclaration du 3
mars 1979, que relié au registre permanent des électeurs, qui
pourrait servir pour les élections provinciales, municipales et
éventuellement scolaires, vous avez l'intention de nommer un autre
directeur général à la représentation. C'est dans
un article de M. Paul Bennett, qui semble un expert du journal Le Soleil sur
toutes les questions électorales. Donc, trois structures. Vous parlez de
l'Office des électeurs. Un peu plus loin le dernier que j'ai
mentionné, relié au registre des électeurs, à la
liste permanente on dit: "Ce dernier sera chargé exclusivement de
l'administration de la liste électorale permanente que le gouvernement a
l'intention d'instituer au cours de la prochaine session. Le directeur
général à la représentation prendrait aussi la
relève du directeur général des élections pour tout
ce qui concerne le recensement et l'enregistrement des électeurs". Je
pense bien qu'il n'y aurait plus de recensement annuel, si on a un registre
permanent.
Un peu plus loin, il est dit: "Le directeur de l'Office des
électeurs serait en quelque sorte ministre des élections, mais
répondrait directement à l'Assemblée nationale tout en
préservant sa complète indépendance vis-à-vis du
gouvernement comme c'est le cas actuellement pour le directeur
général des élections et celui du financement des partis
politiques. M. Burns croit que cette superstructure est nécessaire
même si elle entraîne une bureaucratisation encore plus grande de
tout l'appareil électoral".
Je trouve qu'il y a beaucoup trop de structurite et de bureaucratie dans
cela. Vous vous rappellerez le débat qu'on avait fait sur la loi 2. Ce
n'est pas sorcier, les élections générales se font tous
les quatre ans, les élections partielles se font à l'occasion et
le financement des partis politiques se fait d'une manière continue pour
les partis politiques durant des années; chaque année, les partis
doivent faire des rapports qui sont bisannuels actuellement et il est possible
que cela devienne annuel. Votre registre, lorsqu'il sera fait, aura une liste
dressée. A la Régie de l'assurance-maladie, vous aurez la liste
des gens et au Bureau des véhicules automobiles. Il n'y aura plus de
recensement, vous allez avoir une liste permanente. Avec les moyens techniques
et électroniques qu'on a aujourd'hui, j'imagine que ce ne sera pas la
fin du monde de la mettre à jour, d'enlever du registre ceux qui sont
décédés ou ceux qui sont sortis du Québec et
d'inscrire les nouveaux, ceux qui sont admissibles.
Pourquoi avoir trois grands directeurs généraux, avec des
traitements et du personnel, des bureaux à Montréal, à
Québec, pour toutes ces superstructures. Je ne suis pas d'accord, je
vous l'avais dit sur la loi 2, je crois que cela aurait été tout
à fait normal d'avoir un directeur général des
élections, un grand patron, qui ait deux assistants: un pour le
financement, un autre votre liste permanente, votre registre. Ce serait
beaucoup plus simple, cela coûterait joliment moins cher et ce serait
beaucoup plus efficace, parce que les trois sont obligés de travailler
ensemble.
Là, vous mettez trois grandes structures, vous allez nommer un
"boss" à cela, un ministre des élections, mais cela porte
à confusion, parce qu'un ministre, habituellement, c'est un
député qui fait partie du cabinet. Je ne sais pas. S'il y avait
un ministre des élections... En tout cas, vous pourrez me donner des
explications.
Je ne suis pas d'accord avec cette bureaucratisation accrue, surtout que
ces trois personnages vont être obligés de travailler constamment
ensemble. Dans les élections, vous avez deux patrons qui peuvent faire
deux enquêtes en même temps: soit sur la loi électorale, qui
origine d'un organisme quelconque, et un autre qui est complètement
indépendant, qui est le directeur du financement des partis politiques,
qui peut faire une enquête sur la question de l'honnêteté ou
de la légalité du financement. Là, vous allez en avoir un
troisième pour la liste. C'est beaucoup trop lourd. Ils sont
obligés de travailler ensemble pour le référendum,
également pour la question du financement et du vote.
Je vous fais une suggestion et je dirais au ministre que dans notre
période de contrainte fiscale et monétaire actuelles, ces trois
grosses boîtes chapeautées par une autre, je pense bien qu'il
pourrait réviser son tir et condenser cela ensemble avec un patron
directeur général des élections et deux assistants: un
pour le financement, l'autre pour le recensement. Ce qui existe, d'ail-
leurs, à Ottawa. C'est M. Hamel, le directeur
général des élections, qui supervise toutes les
élections, et il a des adjoints. Il a un adjoint, entre autres, pour le
financement, pour surveiller les dépenses des partis politiques en
campagne électorale. C'est beaucoup moins lourd, beaucoup plus efficace
et cela coûterait bien moins cher. C'est mon opinion.
M. Burns: Mon opinion, M. le député de Laval, c'est
que la démocratie n'a pas de prix. Si cela coûte cher de mettre en
application un certain nombre de mesures qui assurent comme le disait le
député de Châteauguay, tout à l'heure que le
droit électoral soit un droit de citoyen plutôt qu'un droit de
politicien, il n'y a pas de prix pour cela. Evidemment, il ne faut pas lancer
l'argent par les fenêtres, c'est bien sûr, je suis absolument
d'accord. Mais l'épine dorsale de la démocratie, c'est le
système électoral. Si le citoyen est capable de s'exprimer et se
sent bien dans son système électoral, tant mieux. Que cela
coûte ce que cela coûtera cette affaire, cela n'a aucune
espèce d'importance, à mes yeux, si on est assuré du
résultat que le citoyen soit en mesure d'exprimer son point de vue.
M. Lavoie: M. le Président, une question...
M. Burns: Non, non, écoutez je ne vous interromps pas,
moi...
M. Lavoie: On ne peut pas dire que cela coûte plus
cher...
M. Burns: Je ne vous interromps pas quand vous parlez. Comment se
fait-il que vous m'interrompiez tout le temps, vous?
M. Lavoie: Je veux de meilleures réponses.
M. Burns: Vous voulez des réponses que... Ecoutez,
écrivez-les-moi vos réponses, je vais vous les lire tout haut, si
c'est cela que vous voulez, mais vous n'avez pas le gars pour cela, je vous le
dis tout de suite.
M. Lavoie: Je pense qu'on serait mieux de terminer, le ministre
s'énerve, M. le Président.
M. Burns: Non, non. Je ne m'énerve pas. Au contraire, je
suis de bonne humeur, en bonne forme, et je trouve cela bien correct, c'est
bien le "fun", sauf que, bonguienne, laissez-moi le temps de dire ce que j'ai
à dire, c'est tout. Je vous dis tout simplement que c'est sûr
qu'à un moment donné cela a l'air énorme de
dépenser, par exemple... Je parlais avec le directeur
général des élections cette semaine, qui me disait que la
première partie du recensement, celle qui, en vertu du registre,
pourrait avoir lieu, risque de coûter entre $10 millions et $15 millions.
C'est énorme, il n'y a pas de doute. Mais que voulez-vous? Il faut le
faire. Ce n'est pas de l'argent jeté par les fenêtres. C'est de
l'argent qui est mis tout simplement en vue d'en arriver à
épargner éventuellement de l'argent. Que voulez-vous que je vous
dise, même si vous me dites: C'est bien trop cher? Si vous êtes
capables de trouver une façon pour que cela coûte moins cher que
cela, trouvez-la-moi et nous allons suggérer au directeur
général des élections d'adopter cette méthode. Il
reste quand même qu'on est rendu en 1979, bientôt 1980, et que les
coûts sont ceux-là. C'est tout.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voulais juste
avant de terminer revenir sur deux points et faire quelques commentaires sur
les discussions antérieures. Premièrement, la carte
d'électeur. Vous avez connu la position de l'Union Nationale lorsqu'on a
étudié le projet de loi 123. Nous avons donné notre
opinion là-dessus. Je peux vous dire que, pour notre part, nous
considérons qu'une telle carte serait une intrusion dans la vie
privée des citoyens et, en aucun moment, nous n'accepterons qu'une telle
carte soit incluse dans une loi électorale. Nous défendrons notre
position si jamais le ministre décidait d'apporter une telle solution
dans une loi. Nous serions peut-être prêts à accepter, comme
l'a dit tout à l'heure le député de Laval, le fait que les
officiers dans les bureaux de scrutin puissent demander peut-être
à une personne de s'identifier, peut-être au moyen de la carte
d'assurance-maladie ou d'autre chose, mais, si on parle d'instituer une carte
d'identification comme telle, nous serons contre une telle position.
M. Burns: Dans ma réponse tout à l'heure, je vous
ai dit que, dans l'immédiat, il n'est pas question d'imposer une carte
d'identité pour fins électorales. Le Conseil des ministres a
donné le mandat au directeur général des élections
d'essayer de trouver une carte qui serait souhaitable, utilisable et qui
tiendrait compte de ce que vous venez de dire, c'est-à-dire le respect
de la vie privée des individus. Mais, là-dessus, je puis vous
dire que je suis de ceux qui vont régulièrement être
favorables à la position que vous venez de soulever. Je me suis
opposé, alors que j'étais dans l'Opposition, à toute forme
de catégorisation des gens qui leur enlève cette espèce
d'intimité personnelle ou de leur vie privée. Je ne suis pas pour
commencer à faire cela du côté ministériel.
Là-dessus, je peux vous assurer d'avance que vous aurez un
allié.
On me signale simplement une chose. Je reviens à ce dont on
parlait tout à l'heure, les coûts. M. le député de
Laval parlait des coûts énormes et extraordinaires de
l'administration des élections, des structures ou des structurites,
comme il le dit. Au cas où vous ne le sauriez pas, seulement la
préparation des élections fédérales qui s'en
viennent va coûter $52 millions. Cela ne m'étonne pas. Je me dis
que c'est un coût qu'on doit mettre à la disposition des gens,
c'est tout.
M. Lavoie: M. le Président, il faut faire une
distinction.
M. Burns: Oui.
M. Lavoie: C'est dans la proportion. Une élection...
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle, je vais vous redonner la parole, mais je ne voudrais
pas interrompre le député de Nicolet-Yamaska qui n'a pas
terminé.
M. Lavoie: D'accord. Je croyais qu'il avait terminé.
Le Président (M. Richard): Je vais vous redonner la
parole.
M. Fontaine: J'avais deux points...
M. Lavoie: Je m'excuse, M. le Président.
M. Fontaine: J'avais dit que j'avais deux points à
souligner. Le deuxième, c'est la question de la nomination des
présidents d'élection. Je trouve tout à fait insidieux, de
la part d'un gouvernement qui se dit responsable, le fait d'avoir
procédé à des modifictions de la sorte, de remplacer de 30
à 40 présidents d'élection, peut-être même 50,
je ne les ai pas comptés, alors qu'on savait pertinemment qu'une loi
devait être adoptée par l'Assemblée nationale pour modifier
cette façon de nommer les présidents d'élection. Quand on
dit qu'un gouvernement responsable est celui qui...
M. Burns: Je m'excuse, M. le député...
M. Fontaine: M. le Président, est-ce que je peux
continuer?
M. Burns: Je vous demanderais simplement... Vous venez de dire
une fausseté. A l'époque où les changements ont
été faits, le projet de loi que je m'apprête à
déposer à l'Assemblée nationale n'était pas devant
le Conseil des ministres; donc, le premier ministre n'était pas au
courant que je préparais un projet de loi.
M. Fontaine: Je m'excuse, M. le Président...
M. Burns: Soyez quand même juste et ne dites pas de
faussetés.
M. Fontaine: II y a une limite à induire la Chambre et les
gens en erreur. J'ai moi-même siégé au comité
Dussault, et au moment où les présidents d'élection ont
été changés, le comité Dussault avait
terminé ses travaux et avait présenté son rapport. Le
premier ministre ne pouvait pas ignorer que le comité Dussault avait
préparé un rapport dans ce sens et la façon...
M. Burns: Le comité Dussault, M. le député,
faisait rapport au ministre d'Etat à la réforme
électorale, il ne faisait pas...
M. Fontaine: C'était public, tout le monde...
M. Burns: Voyons donc! Ce n'était pas public. Vraiment,
vous abusez de votre droit.
M. Fontaine: II y a eu des articles dans les journaux;
j'espère que le premier ministre lit les journaux comme tout le monde.
Je vous dis, M. le Président, que ce n'est pas sérieux de la part
d'un gouvernement d'agir ainsi, et ça manque de sincérité
lorsqu'on prétend être un gouvernement qui veut administrer de
façon responsable la province de Québec. C'est insidieux, ce
n'est pas sérieux et ça manque de sincérité.
M. Burns: Parfait!
M. Dussault: M. le Président, là-dessus, si vous me
permettez...
Le Président (M. Richard): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: II ne faut quand même pas oublier que le
comité Dussault, et même le comité élargi
était un groupe de personnes qui faisait des suggestions au ministre
d'Etat à la réforme électorale d'abord et avant tout. Le
ministre d'Etat à la réforme électorale était
encore libre, après le travail que nous avons fait comme comité,
de faire ou non les recommandations au Conseil des ministres. Ce n'est
qu'après coup, et après beaucoup de temps que cela s'est rendu au
Conseil des ministres. Je ne comprends vraiment pas l'intervention de M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Lavoie: M. le Président...
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire,
deux minutes pour tirer vos conclusions, je dois donner un dernier droit de
réplique...
M. Lavoie: Bon. Moi non plus, je ne comprends pas l'intervention
du député de Châteauguay et du ministre d'Etat à la
réforme électorale. Le comité siégeait, vous nous
avez dit et le ministre vient de dire que le comité, à ce
moment-là, faisait rapport au ministre qui est devant nous. Il
siège au Conseil des ministres. Le ministre connaissait les conclusions
du rapport pour dépolitiser la nomination des présidents
d'élection. Vous étiez au Conseil des ministres lorsque le
premier ministre a passé des arrêtés en conseil pour nommer
des présidents à deux reprises, une fois 25 ou 30 et, une autre
fois, une quinzaine. Vous auriez dû dire: M. le premier ministre, un
instant, on a un comité où les députés du
côté ministériel et de l'Opposition siègent, il nous
faut une recommandation, c'est dans le programme du Parti
québécois de dépolitiser cela. On vous demande d'ar-
rêter ces changements. Peut-être certains sont
décédés ou déménagés, mais
c'était très peu. Vous l'avez peut-être dit mais le premier
ministre nous a dit en Chambre: C'est moi le "boss", c'est moi qui
décide et je vais en changer.
M. Burns: ... à ce moment-là.
M. Dussault: C'est ce que la loi dit.
M. Burns: C'est ce qu'elle dit actuellement.
M. Dussault: La loi n'est pas changée.
M. Lavoie: On ne dit pas que les nominations sont
illégales.
M. Burns: Bon, bien!
M. Lavoie: On dit que c'est indécent.
M. Burns: Ce n'est pas indécent du tout. A un moment
donné, il y avait des gens qui devaient être changés et ils
ont été changés. Que voulez-vous que je vous dise? C'est
cela. Ils ont été changés selon les dispositions de la loi
actuelle. A un moment donné, on veut...
M. Fontaine: Juste avant de la modifier, on se
dépêche de les changer.
M. Burns: Je peux dire à la décharge du premier
ministre, soit dit en passant, que c'est vraiment depuis deux ans que beaucoup
de gens je ne parle pas de députés, je parle de gens de
l'administration des élections lui poussent dans le dos et
c'était vraiment quelque chose qui lui déplaisait à faire.
Je vous le dis...
M. Lamontagne: Cela a paru à l'Assemblée
nationale.
M. Burns: ... bien honnêtement, je le sais fort bien pour
avoir été très proche du premier ministre sur cette
affaire.
M. Fontaine: C'était intenable, il ne pouvait pas
s'empêcher.
M. Burns: Que voulez-vous que je vous dise, il fallait les
changer, il y avait des places où il fallait changer du monde. C'est
tout! Et là, pour vous assurer et pour ne pas que vous vous
énerviez à l'avenir, je vous ai dit ce qu'on ferait. Il me semble
qu'on va départisaner la nomination.
M. Fontaine: Le mauvais coup est fait, on modifie la...
M. Burns: Bien non, même ceux-là seront en lice
à un moment donné.
M. Lavoie: M. le Président...
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire.
M. Lavoie: ... une dernière remarque. Je suis très
heureux du travail de cette commission ce matin. Je pense qu'on a fait un tour
d'horizon assez complet sur la réforme électorale, le mode de
scrutin, le comité présidé par le député de
Châteauguay, les districts électoraux, la liste permanente, le
registre.
Nous invitons le ministre à respecter je pense qu'il va
peut-être faire les manchettes des journaux demain matin toutes
les déclarations qu'il nous a faites, tous les engagements qu'il a pris,
je lui souhaite mes meilleurs voeux dans ses engagements. J'espère qu'il
sera plus heureux cette fois-ci qu'il ne l'a été dans le
passé en ce qui concerne ses engagements. Je ne peux pas lui dire,
politiquement parlant, que nous l'appuyons d'un bout à l'autre, mais
disons qu'il a toute notre sympathie et tout notre encouragement. Nous
sympathiserons avec lui si cela ne fonctionne pas.
Nous lui demandons d'accélérer, entre autres, ce qui
concerne les districts électoraux parce que cela crée des
problèmes. Dans des régions comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean,
dans Laval, on veut savoir s'il y aura trois, quatre ou cinq comtés aux
prochaines élections. C'est important.
Un dernier mot sur le propos de tout à l'heure. Il dit: Cela
coûtera n'importe quel prix la démocratie. Je suis bien d'accord,
mais ce n'est pas parce qu'il va multiplier les structures, qu'il va
bâtir des grosses cabanes au directeur général des
élections, au directeur général du financement des partis
politiques et au représentant de la représentation, ce n'est pas
parce qu'on va dépenser au maximum avec des budgets énormes et du
personnel énorme que, si on ne contrôle pas les dépenses,
cela donnera une meilleure garantie à la démocratie.
Ce n'est pas directement relié aux dépenses d'argent.
C'est une question d'administration. C'est que ce soit plus fonctionnel.
Pourquoi y aurait-il des inspecteurs pour chacune des boîtes alors que ce
sont les mêmes inspecteurs qui pourraient agir sous l'autorité
d'un seul chef qui serait le directeur général? Je lui demande de
réviser peut-être cela parce que, s'il nous apporte dans sa loi
des registres, des électeurs, une autre direction
générale, je peux assurer le ministre qu'il n'aura pas notre
accord sur cela. On ne sera pas d'accord et on va lui demander qu'il condense
son affaire et qu'il arrête de faire de la structurite. Vous êtes
partis sur cela, avec les ministres d'Etat. On ne se comprend plus. Il y a
trois ministres, Léonard, Charron et Tardif. Les municipalités ne
savent plus à qui elles ont à faire.
Le Président (M. Richard): Très bien. M. le leader
parlementaire.
M. Lavoie: II y a deux ministres des Affaires sociales, il y a
deux ministres des Affaires culturelles. Vous êtes un gouvernement de
structurite et de bureaucrates.
Le Président (M. Richard): Le mot de la fin, M. le
ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire.
(13 heures)
M. Burns: M. le Président, le mot de la fin va être
bien court. Je veux simplement dire que, concernant la structurite que craint
le député de Laval, il n'y a pas comme telle de décision
définitive de prise. D'accord? Il y a actuellement un directeur
général des élections. Il y a actuellement un directeur
général du financement des partis politiques et je vous dis que
la conception que nous avions à l'origine était d'avoir un
troisième directeur général. Je m'excuse auprès de
M. Bennett, peut-être qu'il a mal compris ce que j'ai dit ou encore
peut-être me suis-je mal exprimé, je n'ai jamais dit que le
directeur général à la représentation, si jamais il
voyait le jour, serait le grand patron de toute cette histoire. Dans la
citation que vous faisiez, j'avais compris que c'était cela.
M. Lavoie: Je croyais qu'il y avait un quatrième grand
patron...
Le Président (M. Richard): A l'ordre, s'il vous
plaît. Quinze secondes.
M. Burns: Ce que j'avais laissé entendre à M.
Bennett, et là-dessus, il a été très fidèle
aux propos que j'ai émis, c'était que, comme à
l'intérieur de chacune de ces directions générales il y
avait un service de communication, un service juridique, un service
administratif, etc., il serait possible qu'à un moment donné,
autour d'une espèce de chapeautage de ces trois directions, il y ait une
unité ou, si vous voulez, une facilité de coordonner ces services
différents qui se répètent d'un directeur
général à l'autre. Loin de coûter plus cher, c'est
une économie, à mon avis, M. le Président.
Je tiens simplement, en terminant, d'abord, à remercier les
membres de l'Opposition qui ont gardé le débat à un niveau
très élevé et Dieu sait que ce n'est pas toujours facile
dans le domaine électoral, dès qu'on s'occupe de choses qui
peuvent amener des discussions un peu partisanes. Je tiens à les
remercier. Je remercie en particulier le député de Laval d'avoir
posé la question qui nous a permis de faire partiellement le tour de la
question.
Je tiens plus particulièrement, publiquement et vraiment de
façon claire, à remercier tous les députés qui ont
participé au comité Dussault et qui, vraiment, nous ont
orientés dans cette réforme. Je veux les nommer les uns
après les autres, entre autres, évidemment, M. Dussault
lui-même, le député de Châteauguay, M. Lefebvre, le
député de Viau, M. Fallu, le député de Terrebonne,
et M. Jolivet, le député de Laviolette. Du côté de
l'Opposition, le député de Laurier, M. Marchand, le
député de Montmagny-L'Islet, M. Giasson, et le
député de Nicolet-Yamaska qui nous ont été d'un
précieux apport également. Je tiens à dire, d'ailleurs,
qu'on a apprécié énormément du côté de
l'Opposition cette franchise avec laquelle les travaux se sont faits. Je pense
que le député de Châteauguay est en mesure d'en
témoigner. Moi, je voyais les procès-verbaux qui arrivaient
régulièrement à mon bureau, mais je me suis rendu compte
effectivement que c'était un travail très positif et, dans le
domaine électoral, cela me paraît que c'est comme cela que cela
doit se faire normalement.
M. le Président, j'ai déjà trop placoté, je
vous remercie.
Le Président (M. Richard): Je mets un terme à cette
séance de la commission de l'Assemblée nationale, en vous
remerciant, messieurs, de la sympathie toute empreinte de bonne humeur que vous
m'avez manifestée.
M. Lavoie: M. le Président, j'aurais une motion non
annoncée pour vous exprimer nos remerciements d'avoir
présidé d'une manière aussi digne cette commission.
Adopté?
Le Président (M. Richard): Adopté.
Fin de la séance à 13 h 4